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Full text of "Annales de la propriété industrielle, artistique et littéraire"

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ANNALES 

DE 

LA  PROPRIÉTÉ  INDUSTRIELLE 

ABTISTIQUE,ET  LITTÉRAIRE 


v-::»- 


IL 


••      ANNALES 


DS 


LA  PROPRIÉTÉ  INDUSTRIELLE 

ARTISTIQUE  &  LITTÉRAIRE 

DE   LÉGISLATION,   DOCTRINE  ET  JURISPRUDENCE 

WWLAM^fAMBWm  CT  ÉTRAM «ERES 

BN  UATIÈBE  DB 

Brevets   d*iinr«&tioii,  Xiittératiure,  Théâtre,  Llnsique,  Beaus-Arts 

DEMIHt,  ■00ÈLE8,  NOMS,  MARQUES  PE  FABRIQUE  ET  CONCURRENCE   OCLOVALK 

FONDtPAR 

J.  PATAILLE 

RÉDiat  PAR  MM. 

E.  POUnXET 

Ancien    bâtonnier 
Avocat  à  la  Cour  d*appel 


de  Paris. 


Conseiller  à  la  Gonr  d'appel 
de  Besançon. 


GH.  LTOH-GAEll 

Membre  de  l'Institut 

Professeur  à  la  Faculté  de  Droit 

de  Paris. 


P.  MARTIN  8t-LÉON 

Avocat   à  Chartres. 


Georges  MAILLARD 

Avocat  à  la  Cour  d'appel  de  Paris. 

AVBG  LA  COLLABOIUnON  DB  MM. 


H.  ICBSNIL» 

Avocat  Français 
à   Londres 


A.  MORET, 

Avocat  au  Conseil  d'État 
et  à  la  Cour  de  cassation. 


F.  METTETAL» 

Avocat-Défenseur 
à  Hanoi. 


André  TAILLEFER 
PRE8TAT,  VAUNOIS,  GOMBIER, 
Manrice  MAUHOURT»  GamiUe  DUCREUX 

Avocats  &  la  Cour  d'appel  de  Paris. 


QUARANTE-SIXIÈME  ANNÉE 

,     TOME  LXVI 


PARIS 

RÉDACTION,  ADMINISTRATION  ET  ABONNEMENTS 
CHEZ  M.  ARTHUR  ROUSSEAU,  ÉDITEUR 
14,  RUB  soumoT,  14 

1900 


i 


J 


V 


ANNALES 


X 


DE 


.LA  PROPRIETE  INDUSTRIELLE 


V. 


ARTISTIQUE  ET  LITTÉRAIRE 


Art.  4090. 

Vin«i   cle  Bordeaux.  —  Ilénoiiiiiiatloii.   —  CliAteaii- 
I^Ai-tete.  —  Cru  Salnt-Bmllloii.  —  Meanres  poor  éirï- 


Lorsque  deux  propriétés  ont^  au  mains  pour  pariie^  une 
origine  commune  et  que  le  propriétaire  originaire  a  mis  en 
valeur  le  vin  quHl  y  récoltait  en  le  liurant  au  commerce  sous 
un  nom  déterminé,  tel  que  Crû  Larcis,  les  détenteurs  actuels 
des  detix  propriétés  aujourd'hui  distinctes,  peuvent  égale- 
ment se  réclamer  de  la  propriété  et  de  la  jouissance  d'une 
dénomination  qui  constitue  Vêlement  prépondérant  de  leur 
étampe  ;  ils  ont  aussi,  à  titre  égal,  le  droit  d'employer  la 
dénomination  Château  Larcis,  le  mot  Château  ^/an<  devenu 
une  expression  banale  dans  les  exploitations  vinicoles  de  la 
Gironde ,^  et  de  la  faire  suivre  du  mot  crû  Saint -Emilion, 
parce  que  ces  expressions,  en  tant  qu'elles  désignent  exac* 
iement  le  lieu  de  production,  sont  vulgaires  et  nécessaires 
et  parce  que,  dans  l'usage,  la  faveur,  qui  s'attache  au  nom 
Saint-Emilion,  s'étend  à  d'autres  communes  limitrophes, 
notamment  à  celle  de  Saint-Laurent  des  Combes  (1). 

(1)  Les  deux  eontettants  ayant  une  même  origine  de  propriété,  avaient 
des  dndU  éganx  (Voir  pour  les  partages  des  domaines  viticoles,  Poail- 
let,  Marq.  fah.,  n«  410). 

La  Cour  de  Bordeaux  a  déjà  fréquemment  constaté  l'usage  constant  du 
mot  Château  dans  le  commerce  des  vins  de  Bordeaux  (Voir  notamment 
Cass.  req.,  18  mai  1802,  Larrieu,  Ann.,  98.1G^l). 

Quant  à  l'expression  crû  Saint-Emilion,  il  appartenait  à  la  Cour  d'en 
déterminer,  d'après  Fusage,  la  signification  géographique  (Cf.  pour  les 
eaux  minérales,  Orezza,  Paris,  10  août  1897,  infrà,  p.  21  et  la  note  ;  pour 
Cognac»  Cass.  rej.,  2  JaiUet  1888,  Ann.,  88.844). 


—  6  — 

Mais  les  tribunaux  ont  un  pouvoir  souverain  pour  ré*\ 
glementer  des  droits  rivaux  et  notamment  pour  individua-  ^ 
User  chaqxce  marque  ou  étampe  en  imposant  à  ces  marques 
ou  étampes  des  signes  distinctifs  de  nature  à  prévenir  toute 
confusion  (1). 

(G.  de  Bordeaux,  16  décembre  1897.  —  Raba  c.  Boaffard.) 

Ainsi  jugé  sur  appel  d'un  jugement  du  Tribunal  civil 
de  Libourne  du  17  avril  1896  : 

La.  Cour,  Attendu  que,  dans  son  assignation  introductiTe 
d'instance,  Raba  avait  contesté  à  Bouffard  le  droit  d'employer 
dans  sa  marque  ou  étampe  la  dénomination  Château  Larcis  qu'il 
revendiquait  comme  sa  propriété  exclusive  ;  que  plus  tard,  dans 
ses  conclusions  devant  le  tribunal)  le  dit  Raba,  tout  en  mainte- 
nant sa  demande  principale,  prit  des  conclusions  subsidiaires  qui 
impliquaient  la  reconnaissance  du  droit  de  BouiTard»  sur  la  dé- 
nomination Larcis  ;  il  demandait  seulement  que  cette  dénomina- 
tion fût  suivie  du  nom  patronymique  de  Bouffard,  ou  de  celui  de 
Bergey,  son  auteur,  ou  de  tout  autre  de  nature  à  différencier  les 
deux  étampes  ;  qu'à  ces  conclusions,  Bouffard  répondit  par  une 
demande  reconventionnelle  tenant  à  faire  interdire  à  Raba  Tu- 
sage  de  la  dénomination  de  Saint-Emilion  ;  que,  finalement,  Raba  | 
et  Bouffard  ont  reconnu  devant  le  tribunal  et  devant  la  Cour 
qu'ils  avaient  des  droits  égaux  à  la  dénomination  de  Larcis  ; 

Attendu,  d'ailleurs,  que  cette  reconnaissance  est  conforme  aux 
titres  respectifs  des  parties  ;  qu'en  effet,  ces  titres  établissent  que 
les  deux  propriétés  ont,  au  moins,  pour  partie,  une  origine  com- 
mune et  que  les  précédents  détenteurs  ont  mis  en  valeur  le  vin 
qu'ils  y  récoltaient  en  le  livrant  au  commerce  sous  le  nom  de  cru 
Larcis  ;  qu'ainsi  Bouffard  et  Raba  peuvent  également  se  réclamer 
de  la  propriété  et  de  la  jouissance  d'une  dénomination  qui  cons- 
titue l'élément  prépondérant  de  leur  étampe;  qu'ils  ont  aussi,  à 
titre  égal,  le  droit  de  faire  précéder  cette  dénomination  du  mot 
Château  devenu  une  expression  banale  dans  les  exploitations  vi- 
nicoles  de  la  Gironde  et  de  la  faire  suivre  du  mot  crû  Saint-Emi- 
lion,  parce  que  ces  expressions,  en  tant  qu'elles  désignent  exac- 
tement le  lieu  de  production,  sont  vulgaires  et  nécessaires,  et 
parce  que,  dans  l'usage,  la  faveur  qui  s'attache  au  nom  de  Saint- 
Emilion  s'étend  à  d'autres  communes  limitrophes,  notamment  à 
cellç  de  Saint-Laurent  des  Combes  où  Raba  fait  sa  récolte  ;  qu'au 
surplus,  l'auteur  dudit  Raba  a  fait  consacrer  la  réputation  de 


(1)  Cf.  Cass.  req.,  18  mai  1892,  Larrieu,  Ann.,  98.101. 


—  7  — 

'on  produit  en  participant  à  des  récompenses  pnbliques  accor- 
iées  aux  premiers  crus  de  Saint-Emilion  ; 

Attendo,  dès  Ion,  que  Raba  et  Booffard  peavent  exciper  des 

aémes  droits  poar  Texploitation  de  leur  marque,  mais  que  la 

aezistence  de  ces  droits  a  engendré  la  riTaiité  des  marques  et 

rartant  l'imminence  des  conflits,  ce  qui  exige  une  réglementation 

'D  justice  ; 

Or,  attendu  qn'en  vertu  d'une  jurisprudence  constante  de  la 
C  jur,  cette  réglementation  doit  avoir  pour  objectif  Tindividualité 
:e  cbaqoe  marque  ou  étampe,  afin  d'en  assurer  la  paisible  jouis- 
sance à  son  détenteur  ;  qne  cette  individualité  ne  peut  être  obte- 
nue qu'à  Taide  de  signes  distinctifs  de  nature  à  prévenir  toute 
confusion  ;  que  vainement  Booffard  excipe  de  Tintégrité  de  sa 
Diarqne  et  proteste  contre  Tadjonction  prescrite  par  le  tribunal  ; 
qo  en  droit,  l'article  544  du  Gode  civil  confère  aux  tribunaux  des 
poa?oirs  souverains  pour  imposer  à  des  droits  rivaux  les  restric- 
tions qne  comporte  la  nécessité  de  les  concilier  en  vue  d'une  libre 
et  loyale  concurrence  ;  qu'en  l'espèce,  la  mesure  imposée  par  les 
premiers  juges  est  conforme  à  l'usage  et  que  son  utilité  est  d'autant 
oioins  contestable  qu'elle  aura  pour  effet  d'introduire  dans  chaque 
éiampe  un  trait  de  dissemblance  caractéristique  de  son  individua- 
lité; 

Sur  les  dépens  : 

Attendu  que  les  premiers  juges  ont  violé  la  règle  de  l'article  130 
du  Code  de  procédure  civile  en  condamnant  BoufTard  à  tous  les 
•lépens;  qu'une  répartition  s'imposait,  soit  parce  que  la  régle- 
mentation des  marques  était  prescrite  dans  un  intérêt  commun, 
soit  parce  que  chaque  partie  succombait  dans  sa  première  préten- 
tion ;  que  l'appel  de  BoufTard  était  donc  légitime  sur  le  chef  relatif 
aux  dépens  ;  qu'il  convient,  dès  lors,  d'ordonner  que  ces  dépens, 
ainsi  que  ceux  de  l'instance  d'appel  seront  mis  en  masse  et  ré- 
partis dans  une  proportion  correspondante  aux  sanctions  du 
présent  arrêt  ; 

Par  CBS  motifs,  Et  ceux  non  contraires  exprimés  au  jugement 
altaqué  ;  la  Cour  infirme  ledit  jugement  dans  la  disposition  rela- 
tive aux  dépens  ;  le  confirme  dans  toutes  ses  dispositions  et  or- 
donne qu'il  sera  exécuté  en  sa  forme  et  teneur  ;  dit  que  tous  les 
dépens  de  l'instance  et  d'appel  seront  mis  en  masse  et  supportés 
un  tiers  par  Raba  et  deux  tiers  par  BoufTard  ;  fait  mainlevée  de 
l'amende.  ' 

!•*  chambre.  —  M.  Delcurrou,  premier  président.  — 
M.  RiBET,  avocat  général.— M"  de  Sêze  et  Roy  de  Glotte. 
avocats. 


—  8  — 


Art.  4091. 

rvom  de  localité.  »  Eau  de  Vicli:^.  »  C^Miearrenec 
licite.  —  Absence  de  conAuiion. 

iV'a  pas  commis  de  concurrence  illicite  le  débitant  grui, 
sur  une  demande  d'eau  de  Vichy,  a  livré  des  eaux  prove- 
nant non  de  Vichy  même,  mais  du  bassin  de  Vichy ^  s* il  a 
averti  Vacheteur  que  les  bouteilles  livrées  renfermaient  de 
Veau  des  sources  Larbaud  St-Yorre  et  Guerrier  et  si  Vache^ 
teur  a  eu  toutes  facilités  pour  distinguer  ces  sources  de 
celles  de  Vichy  (1). 

(C.  de  cass.,  req.,  12  décembre  1898.  —  Cîoinimgnie  fermière 

de  Vichy  e,  Varinard.) 

(1)  Le  tribunal  civil  de  la  Seine  a  jugé,  le  8  mai  1894  (Ann.,  95,5)  : 
que,  «  8*il  serait  excessif  de  faire  défense  à  la  Vve  Larbaud  (et  à  Guer- 
rier)» dont  la  source  jaillit  à  St-Yorre,  dans  le  canton  de  Vichy,  d'em- 
ployer d'une  manière  quelconque  le  nom  de  Vichy  sur  ses  étiquettes  et 
sur  ses  capsules,  toufefois  Tabus  qu*elle  fait  de  ce  nom,crée  dans  le  po- 
blic  une  confusion  regrettable,  de  nature  à  faire  croire  que  sa  source 
émerge  à  Vichy  môme  et  porte  ainsi  atteinte  aux  droits  incontestables 
que  TËtat  et  la  Compagnie  fermière  ont  acquis  par  la  célébrité  immômo- 
riale  de:;  sources  qui  jaillissent  à  Vicliy  ;  que,  dans  ces  circonstances, 
il  est  nécessaire  de  décider  que,  si  la  Vve  Larbaud  (ou  Guerrier)  veut 
continuer  à  se  servir  du  mot  de  Vichy  pour  donner  à  son  eau  un  nom 
générique,  elle  devra  adopter  la  formule  suivante  qui  ne  prêtera  plus  à 
l*équivoque  :  Eau  minérale  naturelle  du  bassin  de  Vichy,  source  Lat^ 
baud,  St'Yorre  près  Vichy  et  faire  suivre  sur  ses  capsules  le  nom  de 
St-Yorre  des  mots  près  Vichy.  » 

Il  semblait  résulter  clairement  de  cette  décision  que  les  eaux  de 
Vve  Larbaud  et  de  Guerrier  ne  pouvaient  être  vendues  comme  eaux  de 
Vichy,  donc  ne  pouvaient  être  livrées  à  qui  demandait  de  Teau  de  Vi- 
chy. C'est  ainsi  que  Pavait  interprétée  le  tribunal  de  commerce  de  Lyon 
dans  son  jugement  du  26  juin  1896  {Ann.,  96.340). 

La  Cour  de  Lyon  a  jugé,  en  fait,  que,  dans  l'espèce  Varinard,  il  ne 
pouvait  y  avoir  confusion  pour  Tacheteur  et  que  le  débitant  n*avait  pas 
commis  de  faute.  C'était  une  appréciation  souveraine  qui  échappait  au 
contrôle  de  la  Cour  de  cassation. 

De  même,  tandis  que  la  Cour  de  Lyon  jugeait  que  la  Société  Montrond 
ne  pouvait  se  servir,  pour  la  vente  et  fannonce  de  son  eau  de  Cristal- 
Montrond,  du  nom  de  St-Galmier  qu'en  sous-titre,  sous  la  forme  ean- 
Ion  de  St-Galmier^  ces  mots  étant  imprimés  ou  disposés  en  caractères 
de  même  grosseur,  de  même  couleur,  corps  et  nature,  les  caractères 
n'excédant  pas  le  dixième,  en  tout  sens,  des  dimensions,  grosseurs  ou 
corps  de  ceux  du  nom  de  Teau  mise  en  vente  (Lyon,  10  décembre  1895, 
Ann.y  95.328),  la  Cour  de  cassation  rejetait  le  pourvoi  formé  contre 
Farrêt  de  la  Cour  de  Paris,  du  29  juillet  1892,  qui  avait  décidé  qu'un 
débitant  qui  avait  livré,  à  qui  lui  demandait  de  l'eau  de  St-Galmier,  l'eau 
de  la  source  Cristal -Champagne,  canton  de  St-Galmier,  n'avait  provoqué 
aucune  confusion  et,  par  conséquent,  pas  commis  de  concurrence  dé- 


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-■  't' 


j  y.uMa  qu'il  est  coDStaté  par  l'arrêt  attaqué  que,  lors  de  la 

:  -a  qui  est  ToccasioD  du  litige,  il  a  été  dit  k  l'acheteur,  sur  la 

|i:::uideqa'il  faisait  d'eau  de  Vichy,  que  les  bouletllesqui  lui 

PrueoioDrertes  reafermaientde l'eau  dessources Larbaud,St-Yorre 

'juerrier  et  qu«  celui-ci  a  en,  au  moment  où  le  débitant  lui  s 

^^nléle3  boateiltes,  toutes  facilités  de  les  distinguer  de  celles 

'■'-  met  en  vente  la  Compagnie  fermière  de  Vichy  ;  que  la  Cour 
!  lUcon  ^pu,  sans  contrevenir  à  aucune  loi,  décider  à  raison 

-ibiludes  anciennes  de  langage  entre  détaillants  elconsomma- 
'  ■■-^,que  Varinard  ne  s'était  pas  fait  l'intermédiaire  d'une  con- 

'-ence  déloyale  et  préjudiciable  à  la  Compagnie  fermière  de 
p-ti7«D  livrant,  dans  les  circonstances  susrelevéea,  des  eaux 
1  -"^ïenaiit  de  sources  surpssant,  non  h  la  vérité  sur  ie  sol  même 
I  -:Ucommnne  de  Vichy,  mais  dans  une  commune  qui  fait  partie 

'-  ce  que  l'on  dénomme  coutumièrement  bassin  de  Vichy  ;  que 

i^emble  des  constatations  et  appréciations  de  la  Cour  d'appel 

I  --i<leaieQt,chez  le  Tendeur,une  intention  illicite  et,  pour  Tache- 

-^''iDne  confusion  entre  les  produits  dilTérents,  justifie  pleine- 
I  ^ift  II  décision,  qui  d'ailleurs  n'est  pas  contraire  aux  princi- 
I  ^  vi  régissent  la  choie  jugée  et  se  trouve  surasammeat  mo- 

I    P>»  os  MOTirs,  Riyette. 
Chambre  des  reqaètes.   —  M.  Takon,  président.  — 
''*!-  DiNis,  rapporteur;  Mkicot,  avocat  général  (concl. 
ml].  —  M»  SiBATiBB,  avocat. 

■■.'île  [Cm»,  civ.,  7  novembre  1896,  Ann.,  96.SH). 
"  it'j  a  évidemment  pas  U  de  contradiction  juridique  ;  maii,  en  tait, 
iççlieation  des  arrâta  qui  constatent  l'abus  du  nom  de  localité  sur  les 
'  WUa  et  le  prOBCriveot  se  trouve  paralysËe,  car  si  le  débitant  peut 
-iiiintier  à  vendra  sodb  le  nom  d'eau  de  Vichy  ou  d'eau  de  Sl-Galmier, 
''^oint  quelques  précaotioas  illusoires,  des  eaai  qai  n'ont  pas  le 
"'^'1  i  ces  dénominalions,  la  modiflcation  àea  éliquelles,  ordonnée  par 
^  iribuavii,  n'aura  rien  changé  à  ta  liluallon  et  lea  produits  litigieni 
f  olinaïroot  à  s'écouler  sous  des  noms  itiiaites. 
'^Iribaoaux  se  sont  montrés  plus  sévères,  Ajuste  titre,  lorsqu'ils  ont 
'■^t^rdil  de  vendre  sons  le  nom  de  Picon,  un  amer  qui  ne  provenait  pas 
'''-  '>  aulson  Picon  et  Cie,  bien  que  le  produit  versé  au  client,  qui  de- 
"■Jndsii  on  ^can,  lût  eonlena  dans  une  bouteille  revêtue  d'une  éliquelle 
'fjciiirisUque  qai  ne  ressemblai!  en  rien  à  celle  de  la  Société  Picon  cl 
'■>■  it.  de  pMis,  10  mus  188S,  An».,  96.278).  G.  M. 


—  10  — 


Art.  4092. 

rVoms  de  localités.  —  Confltarefl  de  Bar.  — 

Conenrrence  Illicite. 

La  ville  de  Bar-le-Duc,  s'étant  acquis  une  réputation 
méritée  par  la  façon  spéciale  dont  elle  fabrique  la  confia 
ture  de  groseille,  les  termes  confitures  de  Bar-le-Duc  dé- 
signent  non  pas  un  produit  fabriqué  au  moyen  de  tel  pro- 
cédé tombé  dans  le  domaine  public,  mais  bien  un  produit 
originaire  de  Bar-le-Duc  ;  il  ne  saurait  donc  être  permis 
que  des  confitures  pltAs  ou  moins  semblables,  mais  fabri^ 
quées  ailleurs,  puissent  être  vendues  sous  ce  nom  (1). 

Alors  même  qu*il  serait  établi  que  depuis  un  temps  plus 
ou  moins  long  les  confiseurs  de  Ligny  {localité  à  environ 
quatre  lieues  de  Bar-le-Duc)  ont  qualifié  leurs  produits 
de  confitures  de  Bar,  cette  habitude  constituerait,  de  leur 
part,  un  abus  contre  lequel  les  confiseurs  de  Bar-le-Duc 
n'ont  point,  par  leur  tolérance  plus  ou  moins  large,  renonce 
à  revendiquer  la  propriété  imprescriptible  de  cette  déno- 
mination et  un  abus  ne  saurait  justifier  un  autre  abus  (2). 

(1)  Cf.,  pour  les  vins  de  Champagne,   Ann.,  96. 154,  160  et  les  notes. 

(2)  On  admet  ordinairement  qu'un  nom  de  localité  peut  tomber  daas 
le  domaine  public  s'il  est  devenu  une  désignation  générique,  telle 
qu'eau  de  Cologne,  savon  de  Windsor  (Voir  Pouillet,Mar9 .  /aô.,  n»  411). 
Mais  ce  sont  des  exemples  pris  dans  le  passé,  qui  remontent  à  une  épo- 
que où  la  protection  des  noms  de  localités  n'était  pas  organisée  comme 
elle  l'est  aujourd'hui  et  dans  lesquels  il  y  a  eu,  dès  longtemps,  par  suite 
des  circonstances  spéciales,  une  véritable  incorporation  du  nom  an  pro- 
duit indépendamment  de  toute  idée  de  provenance.  L'abandon  des  noms 
de  localités  sera  désormais  beaucoup  plus  rare,  la  tendance  des  tribunaux 
à  les  protéger,  bien  que  les  intéressés  aient'  laissé  passer  de  nombreux 
abus,  s'accentue  manifestement.  L'Arrangement  de  Madrid,  dans  son 
article  4,  dit  que  les  appellations  régionales  de  provenance  des  produits 
vinicoles  ne  pourront  être  privées  de  protection,  à  raison  de  leur  carac* 
tère  générique  ;  sans  aucun  doute,  les  effets  de  cette  disposition  se 
feront  sentir  sur  la  jurisprudence  française  (Voir  pour  l'article  4  de 
l'Arrangement  de  Madrid,  Paris,  18  novembre  1892,  Syndicats  du  com- 
merce des  vins  de  Champagne  c,  Chapin  et  Cie,  Ann.,96.154  ;  pour  l'ar- 
ticle 3  dudit  Arrangement,  trib.  comm.Marseille,  4  février  1896,2e  Droit, 
11  avril). Déjà  l'arrêt  que  nous  rapportons,  qui  est  antérieur  à  TArran- 
gement  de  Madrid  déclare,  dans  une  espèce  où  il  s'agit  de  produits  fa- 
briqués avec  des  fruits,  les  groseilles,  qui  tiennent  leurs  qualités  du  ter- 
roir, que  le  nom  de  la  localité  pour  désigner  ces  produits  est  impres- 
criptible. 

On  retroave  aussi  dans  le  Jugement  confirmé  par  la  Coor,  cette  règle 
déjà  posée  dans  les  décisions  relatives  aux  vins  de  Champagne  qn'nn 


-12  — 

ce  nom  sur  leara  produits  constitue  de  leur  part  une  concurrence 
illicite; 

Attendu  que  pour  répondre  à  cette  demande,  Gellyet  Vîcherat 
prétendent  que  le  nom  d'une  localité,  simple  expression  géogra- 
phique, peut  être  employé  avec  un  droit  égal  par  tous  ceux  qui  ont 
intérêt  à  dénommer  ainsi,  dans  des  circonstances  identiques,  des 
productions  émanant  d'une  certaine  région  ;  qu'en  Tespèce  la 
dénomination  confitures  de  Bar-le-lhic,  désigne  une  préparation 
spéciale  des  fruits  percrus  dans  la  vallée  de  TOrnain  et  que  les 
fruits  employés  par  eux  sont  récoltés  aux  mêmes  lieux  d'origine 
que  ceux  employés  par  les  demandeurs,  fait  dont  ils  offrent  de 
faire  la  preuve  ;  que  suivant  eux,  le  secret  de  cette  fabrication  est 
de  temps  immémorial  dans  le  domaine  public,  et  que  depnîs 
nombre  d'années  des  confitures  ont  été  préparées  dans  les  com- 
munes avoisinantes  de  Bar-le-Duc,  sans  aucune  protestation  des 
habitants  de  cette  ville  ; 

Considérant  que  la  liberté  du  commerce,  invoquée  par  les  dé* 
fondeurs  doit  avoir  pour  limite,sans  parler  des  contrats,  la  loyauté 
et  le  respect  des  droits  d'autrui  ; 

Considérant  que  la  dénomination  d'un  produit  est  avant  tont 
la  garantie  du  consommateur,  et  qu^il  importe  que  celui-ci  ne 
puisse  être  trompé  sur  la  provenance  de  la  marchandise,  ni  sur 
son  lieu  d'origine  et  son  lieu  de  fabrication  : 

Attendu  que  la  ville  de  Bar-le-Duc  s'est  acquis  une  réputation 
méritée  de  la  façon  spéciale  dont  elle  fabrique  la  confiture  de 
groseille  ; 

Qu'un  tel  renom  est  pour  la  ville  une  véritable  propriété  ; 

Considérant  qu'il  ne  saurait  être  permis  que  des  confitures  plus 
ou  moins  semblables  mais  fabriquées  ailleurs  puissent  être  con- 
fondues avec  celles  de  Bar-le-Duc  de  manière  à  porter  préjudice 
aux  habitants  de  cette  ville  ; 

Considérant  que  la  qualité  des  confitures  de  Bar-le-Duc  ne  tient 
pas  seulement  àTart  plus  ou  moins  habile  avec  lequel  elles  sont 
fabriquées,  mais  surtout  à  la  nature  du  sol  qui  porte  les  fruits  qui 
en  sont  la  base  et  que  l'on  appelle  «  le  terroir  »  ; 

Attendu  qu'il  importe  peu  que  certains  confiseurs  de  Bar-le-Duc 
puissent  faire  entrer  dans  la  composition  de  leurs  produits  des 
groseilles  achetées  ailleurs  que  sur  le  territoire  de  cette  ville  ; 

Qu'un  abus  ne  saurait  en  justifier  un  autre  ; 

Attendu  que  les  termes  Confitures  de  Bar-le-Duc  ne  désignent 
donc  pas  un  produit  fabriqué  au  moyen  de  tel  procédé,  qui  doit 
être  tombé  dans  le  domaine  public,  mais  bien  un  art  originaire  de 
Bar-le-Duc  ; 

Attendu  dès  lors  que  la  dénomination  de  ConfituresdeBar-le-Duc 


us  9ar  le  marcbe  poDUc  de  ttar-ie-uac,  soit  aana  aes  locaiiMi 
(oùtaM  de  Bar,  et  qu'ils  offrent  d'en  faire  la  preuve  ; 

K*  w  fw  eoiuxme  cette  preuve  : 

Attendo  qu'en  admettant  qu'ils  la  fissent,  Gelly  et  Vicherat  n'é- 
Ubbnient  qu'ooe  chose  à  lafoir  que  dans  le  passé,  les  confitures 
ip'ils  ont  faites  ont  bien  été  fabriquées  en  partie  avec  des  ^ro- 
stilles  de  Bar-le-Doc  sans  que  rien  pronvAt  qa'h  l'avenir  ils  ne 
pDBsent  tirer  laurs  fruits  soit  de  Ligny  soit  d'ailleurs  ; 

Attendu  qne,  dès  lors,  la  dite  preuve  ne  saurait  avoir  raison 
d'être  qu'au  sqj^t  des  dommages  el  intérêts,  pour  rétablissement 
doqueb  le  tribunal  a  tous  les  éléments  nécessaires,  sa  religion 
étiot  soffisammeiit  éclaira  par  le  fait  de  la  cause  ; 

AttendB  qu'en  raison  de  leur  situation  géographique,  il  est 
pirTutement  admissible  que  les  habitants  de  Lîgny  puissant 
icbetcr  des  groseilles  de  Bar-le-Ouc  pour  en  faire  des  confitures, 
mais  que  cela  ne  peut  leur  donner  que  le  ^oit  d'appeler  ces 
unfitures  Confitures  de  groteiUet  de  Bar-le-Due  et  non  Con/Uum 
de  Bar-ie-Due  ; 

Attendu  que  la  tolérance  pins  on  moins  large  des  habitants  da 
Sv-le-Duc  ne  pent  leur  être  opposée  par  une  fin  de  non-recevoir, 
leur  revendication  portant  sur  nne  dénomination  qui  est  leur  pro- 
priété imprescriptible  : 

Que  Gelly  et  Vicherat  ne  sauraient  d'ailleurs  prétendre  que 
c'est  de  bonne  foi  qn'ils  font  usage  de  la  même  dénomination  ; 

Qe'en  effet  ils  ont  soin  de  supprimer  sur  leurs  bolteset  sur  leurs 
pots  de  confiture  leurs  noms  et  leurs  adresses  qai  cependant  llgu- 
nui  plus  oa  moins  exactement  sur  tous  les  antres  imprimés  ; 

Attendn  que  le  soin  même  et  la  configuratiou  de  leurs  vi^net* 
tn  ont  pour  but  de  faire  croire  à  celui  qai  reçoit  leurs  produits  en 
deraière  analjse,  c'est-à-dire  au  consommateur, qu'ils  proviennent 
it  Bar-le-Dac  ; 

S«  ee  gui  concerne  les  dommages-mtirtts  : 

Atteoda  que  Harlier  et  les  antres  demandeurs  ne  font  preuve 
d'iBcan  dommage  ; 

Qa'ils  ont  eux-mêmes  vendu  &  Getty  et  Vicherat  pour  les  re- 
'endre  sons  leur  couvert  des  confitures  venues  de  Bar-le-Duc  ; 

En  et  gui  concerne  l'enseigne  : 

Attendo  que  les  mots  eonflturti  de  groseilles  apposés  sur  l'en- 
leigae  de  la  maison  sise  k  Lagny  ne  sauraient  apporter  dans 
l'srçtitda  client  ancone  confusion  sur  le  lieu  de  fabrication. 
Pas  ces  voim,  Dit  qu'il  s'y  a  pas  lieu  pour  Gelly  et  Vieberat  d* 


—  14  — 

faire  a  preuve  offerte  par  eux  ;  dit  que  c'est  sans  droit  qu'ils  qua- 
lifient leurs  produits  de  confitures  de  Bar-le-Diic;  leur  fait  défense 
d'apposer  à  l'ayenir  les  mots  confitures  de  fiar-le-Duc  sur  les  enve- 
loppes, boîtes  ou  flacons  généralement  quelconques  contenant  ces 
produits  ; 

Les  autorise  à  se  servir  des  mots  confitures  de  groseilles  de  Bar- 
le-Duc  sur  les  enveloppes  à  la  condition  que  le  moi  confitures  sera 
écrit  ou  imprimé  d'une  certaine  façon  et  que  les  mots  groseilles 
de  Bar-le-Duc  seront  composés  en  caractères  différents  de  ceux  du 
mot  confitures  mais  identiques  entre  eux  ; 

Ordonne  que  sur  les  dites  enveloppes  ainsi  que  sur  leurs  fac- 
tures^ étiquettes^ vignettes,  en-têtes  de  lettres,annonces,prospectus 
et  généralement  sur  tous  leurs  imprimés  à  côté  et  à  la  suite  des 
mots  confitures  de  groseilles  de  Bar^le-Duc  devront  toujours  Qgurer 
soit  la  raison  de  commerce  de  Gelly-Aubriot  d'une  part  ou  de  Vi- 
cherat  de  l'autre  accompagnée  de  leur  adresse  à  Ligny-en-Barrois, 
soit  les  mots  fabriques  à  Ligny-en-Barrois,  le  tout  en  caractères  au 
moins  aussi  apparents  que  les  mots  groseilles  de  Bar-le-Duc  ; 

Autorise,  sur  l'enseigne  seulement,  la  non-juxtaposition  de  l'a- 
dresse de  Gelly  et  Vicherat  aux  mots  confitures  de  groseilles  de 
Bar-le-Duc  ; 

Dit  que  faute  par  les  défendeurs  de  se  conformer  aux  prescrip- 
tions susénoncées,  ils  auront  à  payer  pour  chaque  contravention 
^ui  serait  constatée,  50  francs  à  titre  de  dommages-intérêts,  etc. 

Arrêt  confirmatif  du  29  avril  1890  en  ces  termes  : 

La  Goub,  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges  : 
Attendu  que  les  faits  articulés  par  les  appelants  ne  sont  ni  per- 
tinents ni  admissibles  et  qu'ils  sont  dès  à  présent  démentis  par  les 
faits  de  la  cause  et  les  documents  du  procès  ; 

Attendu,  d'ailleurs,qu'alors  même  qu'il  serait  établi  que  depuis 
un  temps  plus  ou  moins  long,  les  confiseurs  de  Ligny  ont  quali- 
fié leurs  produits  de  confitures  de  Bar-le-Duc  cette  habitude  cons- 
tituerait de  leur  part  un  abus  contre  lequel  les  intimés  ont  le  droit 
de  protester  et  qu'ils  ont  intérêt  à  faire  disparaître  dans  l'avenir, 
tant  pour  protéger  leur  propre  fabrication  que  pour  prévenir  le 
public  qui  s'adresse  à  leurs  produits,  contre  les  dangers  de  cette 
qualification  erronée,  et  la  persistance  intéressée  qu'ils  mettent  à 
dissimuler  leliei^  de  fabrication  qui  est  la  ville  de  Ligny. 

Par  ces  motifs,  Rejette  les  appels  comme  mal  fondés. 

G.  de  Nancy.  —  M.  Angénodx,  président.  —M.  Obrin, 
avocat  général.—  M*'  Paul  Lombard  et  Larcher,  avocats. 


-15  — 


Art.  4093. 


Ban  WMÈÈËÈépmÈ&m.  —  Noms  de  loe»lltM»  —  CkMiewr^ 
reMM  déloyale.  ~  Vieliy  du  Midi. 

Ul  lai  du  i8  juillet  18i4  n'étant  pas  applicable  aux  pro- 
duit$  naturels  et,  par  suite,  aux  eaux  minérales,  l'usurpa- 
tion d^un  nom  de  localité  pour  une  eau  minérale  ne  peut 
faire  Fobjet  que  d'une  action  en  concurrence  déloyale  (1). 

Il  y  a  concurrence  déloyale,  pour  une  société  d'eaux  mi- 
nérales {la  Société  des  eaux  du  Boulou),  à  revêtir  ses  bou- 
teilles  d'étiquettes  portant  en  vedette  une  désignation  sus- 
ceptible de  tromper  l'acheteur  peu  éclairé  ou  peu  attentif 
{telle  que  Vichy  du  Midi)  et  à  exalter  dans  ses  réclames 
feau  dont  elle  est  propriétaire,  au  détriment  d'autres  eaux 
(les  eaux  de  Vichy)  ;  il  n'appartient  pas  au  tribunal  de 
prescrire  dans  quelle  mesure  et  sous  quelle  forme  il  serait 
licite  d'invoquer  sur  les  étiquettes  et  dans  les  réclames  Va- 
nalogie  que  présenterait  l'eau  mise  en  vente  avec  les  eatuc 
iimilaires  antérieurement  réputées  (2). 

(C.  d'Àix,  11  jaiiTier  1898.  —  Compagnie  fermière  de  rétablissement 
thermal  de  Vichy  c.  la  Société  des  eaux  du  Boalou  et  Frère.) 

Le  Tribunal  civil  de  Marseille,  sous  la  présidence  de 
M.  DuMON,  avait,  le  15  janvier  1897,  rendu  le  jugement  dont 
la  teneur  suit  : 

Lb  Tribunal,  Attendu  que  la  Compagnie  des  Eaux  de  Vichy 
impote  à  la  Société  des  Eaux  du  Boulou  une  imitation  frauduleuse 
àt  marque,  une  usurpation  de  nom  et  plus  généralement  une  con- 
cnrrence  déloyale  ; 

Sur  rimitation  frauduleuse  de  marque  : 

Attendu  qu'il  existe  entre  les  étiquettes  de  la  Compagnie  de 
Vichy  et  celles  de  la  Compagnie  défenderesse,  d'autres  ressem- 
blances que  celles  tirées  d*éléments  nécessairement  communs  à 
toutes  les  étiquettes  du  même  genre,  éléments  qui  étant  dans  le 

(1)  V.  Paris,  i9jain  1883,  Sazlehner, Ann.,  88.187,  pour  le  refus  d'ap- 
piiqaer  la  loi  du  38  juillet  1824  aux  eaux  minérales.  Voir  dans  le  même 
sens:  Maunonry,  Le  nom  eommereial,  p.  372.  M.  Pouillet,  dans  la 4«  édi- 
tion do  Traité  de$  marquei  de  fabrique,  semble  disposé  à  se  rallier  à 
cette  opinion. 

(2)  Quiconque  n'a  pas  droit  h  un  nom  commercial  on  à  un  nom  de 
localité  ne  peut  légitimer  l'usage  de  ce  nom  en  ajoutant  un  autre  nom 
oa  UM  autre  expression  (V.  PouiUet,  Marq,  fab.,  n«4i6  et  s.). 

G.  M. 


—  16  — 

domaine  public  n^offrent  aucun  des  traits  distinctifs  de  la  marque 
dont  la  Compagnie  de  Vichy  est  propriétaire  ; 

Attendu  qu'une  seule  particularité  des  étiquettes  de  la  Société 
du  Boulou  mérite  de  fixer  Tattention,  c'est  l'inscription  sur  une 
▼ignette  en  forme  de  banderolle  flottante  des  mots  a  Vichy  du 
Midi  »  figurant  comme  devise  en  demi-caractères,  au-dessus  du 
nom  très  apparent  du  Boulou  qui  occupe  le  centre  de  Tétiquette  ; 

Attendu  qu'avant  d'examiner  si  cette  inscription  constitue  une 
usurpation  de  nom  il  est  d'abord  certain  qu'elle  ne  peut  constituer 
une  imitation  de  marque  :  parce  que  le  nom  ne  peut  être  protégé 
comme  marque,  qu'en  tant  qu'il  revêt  une  forme  distinctive  sous 
laquelle  il  est  matérialisé,  et  qu'il  n'existe  aucune  similitude  entre 
le  mot  «  Vichy  »  imprimé  sur  les  étiquettes  de  l'une  des  parties  et 
le  même  mot  imprimé  sur  les  étiquettes  de  l'autre  ; 

Attendu  que  ni  dans  l'ensemble,  ni  dans  le  détail  des  étiquettes 
de  la  Société  du  Boulou,  il  n'est  possible  de  découvrir  une  imita- 
tion quelconque  de  la  marque  déposée  et  que  la  loi  de  1857  se 
trouve  dès  lors  sans  application  ; 

Sur  Cmurpation  de  nom  : 

Attendu  que  le  nom,  abstraction  faite  de  la  figure  sous  laquelle 
il  se  présente^  n'est  protégé  par  la  loi  de  1824  que  lorsqu'il  s'agit 
d'un  nom  de  fabricant  ou  de  lieu  de  fabrication  et  que  ce  nom  a 
été  usurpé  par  fausse  application  sur  un  objet  fabriqué  ; 

Attendu  que  cette  loi  étant  une  loi  pénale  puisqu'elle  érige  en 
délit  un  cas  spécial  de  concurrence  déloyale,  ne  peut  être  étendue 
au  delà  de  ses  termes  qui  excluent  les  produits  naturels  et  par 
suite  les  eaux  minérales,  produit  spontané  de  la  nature  livré  aux 
consommateurs  sans  préparation,  altération  ni  modification  quel- 
conque due  au  travail  de  l'homme  ; 

Attendu  que  le  délit  d'usurpation  de  nom  ne  pouvant  pas  sub- 
sister il  ne  peut  exister  qu'un  fait  dommageable  susceptible  d'en- 
gendrer une  action  en  dommages-intérêts  et  rentrant  dans  la  caté- 
gorie des  faits  variés,  embrassés  par  la  dénomination  commune  de 
concurrence  déloyale  ; 

Sur  les  faits  de  concurrence  déloyale  : 

Attendu  que  la  compagnie  demanderesse  prétend  découvrir 
une  concurrence  déloyale,  non  seulement  dans  l'emploi  delade- 
Tise  «  Vichy  du  Midi  »  adoptée  par  la  Compagnie  du  Boulou  sur 
ses  étiquettes,  mais  encore  dans  les  moyens  de  propagande  à  l'aide 
desquels  elle  a  cherché  à  vulgariser  l'usage  de  ses  eaux  en  les 
comparant  à  celles  de  Vichy,  moyens  ayant  consisté  en  prospectus, 
affiches,  notices,  annonces,  réclames  et  inscriptions  de  tout  genre 
dans  les  journaux,  brochures,  livrets  de  chemin  de  fer  et  autres 
publications  périodiques  ; 

Attendu  que  l'emploi  de  tous  ces  moyens  pour  solliciter  la  fa- 


—  17  — 

Teur  du  public  rentre  dans  Texercice  absolu  du  droit  de  toat  com- 
merçant et  plus  généralement  de  quiconque  pour  procurer  un  dé- 
bouché à.  ses  produits  s'efforce  de  les  faire  connaître  :  Téloge  même 
exagéré  du  produit  offert  ne  devient  une  faute  que  lorsque  la  li- 
mite séparant  la  vérité  du  mensonge  a  été  franchie  et  lorsqu'il  y 
a  eu  dénigrement  prémédité  d'un  produit  rival  ; 

Attendu  que  toutes  les  publications  faites  parla  Compagnie  du 
Boulon  ont  tendu,  non  à  rabaisser  le  mérite  des  eaux  de  Vichj, 
mais  au  contraire  à  l'exalter  pour  fonder  le  mérite  de  leurs  pro- 
pres eaux  sur  la  similitude  qu'elles  offrent  avec  ces  eaux  célèbres, 
soit  au  point  de  vue  de  l'analyse  chimique,  soit  au  point  de  vue 
deïi  applications  thérapeutiques  qui  en  peuvent  être  faites,analogie 
d'ailleurs  établie  par  des  autorités  médicales  incontestées  et 
concordantes  dont  les  citations  constituent  le  fond  môme  des 
publications  incriminées; 

Attendu  que  de  pareils  moyens  de  propagande  sont  parfaitement 
It^times  et  n'ont  été  critiqués  que  sous  prétexte  de  citations  in- 
complètes ;  mais  on  ne  peut  exiger  que  des  extraits  destinés  à  des 
annonces^réclames  entrent  dans  les  développements  des  revues 
médicales  ;  il  suffit  que  le  sens  des  auteurs  n'ait  pas  été  substan- 
tiellecnent  et  intentionnellement  faussé  ; 

Attendu  que  les  insertions  du  Boulou,  en  signalant  les  remar- 
quables analogies  de  composition  chimique  avec  Vichy,  ont  omis 
de  faire  remarquer  la  présence  de  l'oxyde  de  cuivre  parmi  les 
éléments  de  certaines  de  leurs  sources,  omission  dont  la  com- 
pagnie demanderesse  leur  fait  notamment  grief; 

Mais  cette  omision  ne  parait  offrir  rien  de  répréhensible,  les  an- 
nonces dans  leur  brièveté  nécessaire  ne  pouvaient  entrer  dans  tous 
les  détails  et  il  n'apparaît  pas,en  remontant  aux  auteurs  cités,que 
la  présence  dece  métal  à  dose  infinitésimale  ait  été  observée  comme 
un  danger  ni  même  comme  une  cause  de  faveur  ou  d'infériorité'; 

Attendu  qu'il  ne  reste  donc  comme  grief,  au  point,  de  vue  de  la 
concurrence  déloyale,  que  la  devise  Vichy  du  Midi  mise  en  ban- 
derolle  sur  les  étiquettes  ; 

Attendu  qu'il  est  à  observer  d'abord  que  la  devise  incriminée 
n'est  pas  le  fruit  de  l'imagination  des  défendeurs,  elle  a  été  em- 
pruntée à  une  étude  approfondie  du  docteur  Béchamp  qui,  après 
avoir  mis  en  relief  l'analogie  des  eaux  du  Boulou  avec  celles  de 
Vichy,  résume  son  opinion  sous  cette  formule  concise  que  Boulou 
est  le  Vichy  du  Midi  ; 

Attendu  qu'employée  comme  indication  de  la  nature  des  eauxet 
de  leurs  effets,  la  formule  adoptée  par  la  compagnie  défenderesse 
est  à  la  fois  exacte  et  parfaitement  innocente,  et  il  n'y  a  aucune 
raison  de  croire  que  l'administration  du  Boulou  Tait  choisie  dans 
no  but  différent,  celui  de  créer  à  son  profit  une  confusion  dans 

2 


—  18- 

Tespril  des  acheteurs  ;  les  mots  Boulou  en  gros  caractère  au  centre 
des  étiquettes  et  ceux-ci  <c  Pyrénées-Orientales  »  répétés  sur  les 
côtés,  démentent  cette  supposition  et  doivent  rendre  la  confusion 
sinon  absolument  impossible,  du  moins  tout  à  fait  rare  ; 

Attendu  qu'en  tout  cas  la  bonne  foi  des  défendeurs  parait  sauve, 
car  s'ils  ont  voulu  faire  valoir  les  qualités  intrinsèques  de  leurs 
eaux,  en  les  proclamant  d'autant  plus  précieuses  qu'elles  se  rap- 
prochent davantage  de  celles  de  Vichy  dont  la  réputation  est  de- 
puis si  longtemps  acquise,  ce  moyen  de  succès  n'est  pas  le  fait 
d'usurper  une  renommée  en  s'appropriant  injustement  la  noto- 
riété d'autrui  ; 

Attendu  qu'on  peut  concevoir  néanmoins  à  la  rigueur  que  la 
Compagnie  fermière  justement  jalouse  du  nom  de  Vichy  ait  vu, 
avec  ombrage  la  devise  Vichy  du  Midi  parce  que,  isolée  de  tout 
contexte,  cette  devise  n'offre  pas  aux  yeux  du  public,  spécialement 
au  point  de  vue  du  commerce  d'exportation  toute  la  clarté  qu'elle 
a  dans  l'écrit  du  docteur  Béchamp,et  comme  dans  les  questions  de 
ce  genre  la  justice  doit  pencher  toujours  vers  la  clarté  absolue 
pour  éloigner  toute  chance  d'erreur  quelque  légère  qu'elle  soit, 
il  peut  être  donné  satisfaction  à  la  compagnie  demanderesse  dans 
une  mesure  restreinte  en  ordonnant  de  substituer  à  la  devise  in- 
criminée une  formule  qui  en  exprimera  le  sens  d'une  manière  ex- 
plicite et  sans  équivoque  possible  ; 

Attendu  que  les  demandeurs  ne  justifient  pas  d'un  préjudice 
actuel  et  réalisé  ;  qu'il  s'agit  tout  au  plus  de  les  prémunir  contre 
un  préjudice  éventuel  et  hypothétique  pour  l'avenir  ; 

Qu'il  n'y  a  donc  pas  lieu  de  leur  allouer  des  dommages-inté- 
térêts  ; 

Attendu  que  les  motifs  qui  précèdent  exonèrent  suffisamment 
la  responsabilité  du  sieur  Frère,  entrepositaire  défendeur  au 
procès  qui  doit  être  mis  hors  de  cause  ; 

Sur  les  fins  reconventionnelles  de  la  Compagnie  du  Boulou  : 

Attendu  que  le  procès  s'e.st  engagé  à  la  suite  de  saisies  prati- 
quées en  vertu  d'ordonnance  sur  requête  visant  l'article  17  de  la 
loi  de  1857  ; 

Attendu  que  lorsqu'un  demandeur  en  contrefaçon  ou  imitation 
frauduleuse  démarque  croit  devoir  user  de  cette  voie  rigoureuse, 
il  le  fait  à  ses  risques  et  périls  ;  la  loi  permettant  même  au  prési- 
dent d'imposer  comme  condition  à  son  autorisation,  un  caution- 
nement préalable  ; 

Que  dans  l'espèce,  le  délit  prévu  par  la  loi  de  1857,  n'existant 
pas,  mais  que  de  plus,en  supposant  que  la  Compagnie  de  Vichy  se 
soit  fait  illusion  sur  son  droit,  il  est  une  circonstance  de  la  cause 
qu'elle  n'ignorait  pas  et  qui  lui  commandait  l'abstention  de  cette 
mesure  ;  c'est  que  depuis  1882,  c'est-à-dire  depuis  la  création 


—  19  — 

même  des  étiquettes  incriminées,  elle  n'a  pas  cessé  de  recevoir 
chez  ses  entrepositaires  et  de  débiter  au  public  concurremment 
avec  ses  propres  bouteilles,  celles  de  la  Compagnie  du  Boulou  et 
qa'ajant  sous  main  tous  les  écbantilons  nécessaires,  pour  les  be- 
soins de  sa  cause,  la  saisie  était  superflue  ; 

Attendo  que  néanmoins  l'importance  du  préjudice  souffert  par 
la  Société  du  Boulon  par  cette  procédure  vexatoire  n'est  pas  dé- 
montré et  qu'il  suffira  d'en  tenir  compte  dans  le  règlement  des 
dépens; 

Sw/ès  dépens  : 

Attenda  que  la  satisfaction  limitée  accordée  aux  demandeurs 
etledébontement  du  surplus  de  leurs  conclusions,  la  mise  hors 
decaase  de  Frère  et  le  fait  des  saisies  abusives  sont  les  trois  élé- 
ments à  mettre  en  balance  pour  l'équitable  répartition  des  dé- 
p«ns; 

Put  CES  MOTiFSy  Ayant  tel  égard  que  de  raison  à  la  demande  vis- 
Hs  de  la  Compagnie  du  fioulou; 

Ordonne  que  cette  société  sera  tenue  de  supprimer  la  devise 
\'kkidu  Iftdt  figarant  sur  ses  étiquettes  ;  sauf  à  substituer  si  elle 
>âJ3ge  àproposla  formule  suivante  :  «  L'analyse  chimique  a  dé- 
montré que  la  composition  de  cette  eau  offre  la  plus  grande  ana- 

:ieaTec  celle  des  eaux  de  Vichy  »  ou  toute  autre  formule  équi- 
■i*nte  ; 

Déboute  la  compagnie  demanderesse  de  toutes  autres  fins  et 
::>rtclasions,  tant  vis-à-vis  de  la  Compagnie  du  Boulou  que  vis-à- 
".:  de  Prére  ; 

^  les  lins  reconventionnelles  : 

Dit  n'y  avoir  lieu  d'accorder  d'autres  dommages-intérêts 
]j  Qoe  part  des  dépens  ; 

^  les  dépens  : 

Uisseà  la  charge  de  la  Compagnie  fermière  de  Vichy,  tous  les 

^19  occasionnés  par  la  saisie; 

^îit  masse  du  surplus  des  dépens  y  compris  ceux  occasionnés 
r^ia qualité  de  Frère,  pour  être  supportés  savoir:  deux  tiers 
^r  la  Compagnie  de  Vichy  et  un  tiers  par  la  Société  du  Boulou. 

Sur  appel  de  la  Compagnie  fermière  de  Vichy,  la  Cour 
'Ail,  sous  la  présidence  de  M.  le  premier  président  Mi- 
-"blJaffard,  après  plaidoiries  de  MMIolland  (du  barreau 
-£ Marseille)  aide  M®  Michel  Pelletier  (du  barreau  de  Paris) 
'  staUié  en  ces  termes  : 

^nsidérant  que  les  premiers  juges  ont  sainement  apprécié  en 
-^^taoce  les  faits  de  la  cause  et  leur  ont  fait  une  exacte  appli- 
^toa  des  principes  qui  régissent  la  matière  ; 


—  20  — 

* 

Qu'effectivement  en  se  donnant  la  dénomination  de  Vichy  du 
Midi  la  Société  des  Eaux  de  Bouloa  n'a  ni  contrefait  les  produits 
de  la  Compagnie  fermière  de  rétablissement  thermal  de  Vichy, 
ni  commis  le  délit  d'usurpation  de  nom  prévu  et  réprimé  par  la 
loi  du  28  juillet  1824,  laquelle  ne  concerne  point  les  produits  na- 
turels auxquels  la  main  de  l'homme  n'a  fait  subir  aucune  espèce 
de  transformation  ou  de  modification  ; 

Que  cette  société  a  purement  accompli,  an  sens  légal  du  mot, 
un  acte  de  concurrence  déloyale  par  ce  fait  qu'elle  a  apposé  en 
vedette  sur  les  étiquettes  dont  elle  revêt  ses  bouteilles  d'eau  mi- 
nérale, une  désignation  susceptible  de  tromper  l'acheteur  pea 
attentif,  et  exalté  dans  ses  réclames,  l'eau  dont  elle  est  proprié- 
taire, an  détriment  des  eaux  de  Vichy  ; 

Que  c'est  à  bon  droit  par  conséquent  qae  le  Tribunal  civil  de 
Marseille  a  ordonné  la  suppression  de  la  devise  sus-meation- 
née  ; 

Qu'au  surplus  cette  partie  du  jugement  dont  les  intimés  ne 
relèvent  pas  appel  incident  et  qui  profite  à  la  compagnie  appelante, 
a  acquis  l'autorité  de  la  chose  jugée  et  échapperait  dès  lors  à  la 
censure  de  la  Cour  ; 

Mais  que,  par  contre,  les  magistrats  du  premier  degré  sont 
sortis  de  leurs  attributions  et  ont  d'ailleurs  statué  sur  chose  non 
demandée  lorsqu'ils  ont  cru  devoir  autoriser  expressément  la 
Société  des  Eaux  du  Boulou  à  substituer  a  l'appellation  litigieuse, 
une  formule  déterminée  ayant  pour  but  d'apprendre  aux  con- 
sommateurs qu'il  existait  u  la  plus  grande  analogie  entre  la  com~ 
position  de  son  eau  et  celle  des  eaux  de  Yichy  »  ou  toute  autre  for- 
mule équivalente  ; 

Que  sans  nul  doute,  il  leur  était  permis  à  titre,  soit  de  con- 
sidération, soit  d'exemple,  d'observer  dans  leurs  motifs  que  si 
la  société  défenderesse  s'était  bornée  à  faire  discrètement  figu- 
rer sur  ses  étiquettes  et  prospectus  une  indication  de  cette  na- 
ture, écrite  en  caractères  peu  apparents,  où  le  nom  de  Vichy 
n'eut  pas  été  intentionnellement  mis  en  relief,  elle  n'aurait  ma- 
nifestement pas  commis  un  acte  répréhensibie  ; 

Mais  qu'ils  ne  pouvaient  s'approprier  eux-mêmes  une  semblable 
affirmation  et  lui  donner,  en  l'insérant  dans  le  dispositif  de  leur 
jugement  la  consécration  de  l'autorité  qui  s'attache  à  toute  dé- 
décision judiciaire  ; 

Qu'en  agissant  ainsi,  ils  ont  procédé  par  voie  de  règlement  et 
outrepassé  leurs  pouvoirs  ; 

Qu'il  y  a  lieu  de  supprimer  à  raison  de  son  illégalité,  cette  par- 
tie de  leur  sentence  ; 

Sur  les  dépens  : 

Considérant  que  chacune  des  deax  parties  en  cause  succom« 


—  22  - 

(C.  de  Paris,  40  août  1897.  —  Vve  Piatîer  et  Lui 
et  préfet  de  la  Corse  c.  Monplot.) 

Le  Tribunal  de  la  Seine  avait  rendu ,  le  18  décembre 
1895,  un  jugement  ainsi  conçu  : 

Le  Tribcnal,  Attendu  que  par  son  action  principale  en  dom- 
mages-intérêts pour  concurrence  déloyale,  Piatier  demandait 
notamment  que  les  dispositions  de  Tarrêt  de  la  Cour  d'Âix  du 
21  juillet  i880,  rendu  entre  Arger,  auteur  de  Piatier,  d'une  part,  et 

nom  d'Orezza,  qui  n'est  pi  as  une  désignation  géographique  en  usage 
(Ann.,  95.25). 

La  Cour  d'Âix,  dans  son  arrêt  du  21  juillet  1880,  permettait,  pour  d*aa- 
tres  sources  que  la  source  départementale  dont  les  produits  avaient  été 
connus  les  premiers  sous  le  nom  d'eaux  d'Orezza,  notamment  ponr  la 
source  dite  Tascovafa,  aujourd'hui  source  Colomba,  l'usage  du  nom  d*0* 
rezza,  mais  seulement  sous  la  forme  vallée  cTOrezza^  ces  roots  étant  en 
caractères  deux  fois  moindres  que  le  nom  de  la  source.  Il  est  intéres- 
sant de  rapporter  ici  le  texte  de  Tarrét  : 

«  La  Cour,  Attendu  que  sans  qu'il  soit  nécessaire  de  recourir  à  une 
enquête,  il  est  déjà  constant  pour  la  Cour  : 

i®  Qu'il  existe  en  Corse  une  vallée  qui  porte  le  nom  de  vallée  d*Orezza  • 

2*  Qu'il  coule  dans  cette  vallée  une  source  principale,  connue  sous  le 
nom  de  fontaine  d'Orezza,  sans  qu'on  puisse  dire  si  c'est  la  source  qai 
a  donné  son  nom  à  la  vallée,  ou  U  vallée  qui  a  donné  le  sien  à  la  source  - 

«  Attendu  que  tous  les  documents  du  procès  établissent  quecette  source 
d'Orezza  avec  son  eau  et  son  nom  a  été  de  tout  temps  la  propriété  priva* 
tive  du  département  de  la  Corse,  ou  de  ceux  qu'il  s'est  substitués  ; 

«  Que  cela  résulte  d'une  possession  jusqu'à  ce  jour  inctntestée,  de  la 
concession  faite  à  Valéry  en  1856,  du  décret  qui  déclare  la  source  d'u- 
tilité publique,  du  dépôt  que  les  concessionnaires  actuels  ont  fait  de  leur 
marque  de  fabrique  au  greffe  du  tribunal  de  commerce  compétent; 

«  Attendu  qu'en  cet  état  de  choses,  il  n'est  permis  à  personne  de  rien 
faire  qui  soit  de  nature  à  amoindrir  les  avantages  que  le  propriétaire  de 
la  source  d'Orezza  peut  retirer  de  son  eau  ou  du  nom  sous  lequel  elle 
est  connue; 

«  Attendu  cependant  que  dans  ces  derniers  temps,  Nicolaf  et  Amonld, 
propriétaires  de  deux  autres  sources  coulant  aussi  dans  la  vallée  d'0« 
rezza  et  portant  l'une  le  nom  de  source  Piane,  et  l'autre  celui  de  source 
Tascovata,  ont  mis  dans  le  commerce  l'eau  provenant  de  ces  sources 
à  l'aide  d'étiquettes  et  d'affiches  qui  pouvaient  la  faire  confondre  avec 
l'eau  de  la  fontaine  d'Orezza  ; 

«  Qu'ainsi  leurs  bouteilles  ressemblent  à  celles  des  propriétaires  de  la 
source  d'Orezza  par  leur  forme,  par  leur  couleur,  par  la  capsule  qui  les 
bouche,  par  le  nombre,  la  dimension,  la  division  de  leurs  étiquettes  : 
en  un  mot  par  un  ensemble  de  ressemblances  qui  sont  de  nature  à  trom- 
per tout  acheteur  illettré  ou  inattentif; 

«  Attendu  que  le  fait  d'Arnould  et  de  Nicolaï  a  nécessairement  caoaé 
un  préjudice  à  la  Société  des  eaux  d'Orezza  ;  qu'il  est  juste  de  réparer, 
et  qu'il  importe  surtout  de  prendre  des  mesures  pour  qu'il  ne  se  renou- 
velle pas  à  l'avenir  ; 

«  Attendu  que  c'est  dans  ce  but  quç  tout  en  autorisant  Amould  et  Ni- 
colaï à  indiquer  la  provenance  de  leur  eau  qui  natt  dans  la  vallée  d'O- 


I 


—  23  — 

.Nicolaî  et  ArDould  qai  réexpioitaient,  à  cette  époque,  la  source 
dite  Tascovata,  d'autre  part,  fassent  déclarées  opposables  à  Mon- 
plot,  comme  constituant  à  son  égard  la  chose  jugée  ; 

reiza,  il  couYient  de  préciser  eiactement  l'appellation  dont  ils  pourront 
se  serrir  afin  qnUI  n*y  ait  plus  à  Ta  venir  de  confusion  possible  entre 
cette  eao  et  celle  de  la  source  d'Orezza  proprement  dite  ; 

c  La  coor  ayant  tel  égard  que  de  raison  aux  conclusions  des  parties, 
metrappellation  et  ce  dont  est  appel  au  néant,  émendant  : 

c  Dît  que  la  source  connue  sous  le  nom  de  fontaine  d'Orezza,  et  qui  est 
uplmtée  par  la  Société  des  eaux  d'Orezz»,  est  avec  son  eau  et  avec  son 
Qom  la  propriété  privative  du  département  de  la  Corse  ou  de  ceux  qui 
le  représentent  ; 

■  Dit  qu'AmooId  et  Nicolaî  ont  commis  une  usurpation  sur  ce  droit  de 
propriété  en  vendant,  dans  les  conditions  où  ils  l'ont  vendue,  Teau  de 
leurs  sources  de  Piane  et  de  Tascovata  et  en  réparation  du  préjudice 
par  eux  causé  les  condamne  solidairement  à  payer  à  la  Société  d'Orezza 
one  somme  de  500  francs  à  titre  de  dommages-intérêts  ; 

I  Valide  les  saisies  faites  par  Camain  huissier,  suivant  les  procès-ver- 
baax  en  date  du  4  août  1879,  et  les  autres  en  date  du  17  septembre 
tairant,  enregistrés,  et  ordonne  la  remise  des  objets  saisis  aux  mains  de 
U  Société  d'Orezza  ; 

«  Dit  qu*à  Pavenir  les  bouteilles  dans  lesquelles  Nicola!  et  Ârnould  ven- 
àfont  les  eaux  de  leurs  sources,  ne  pourront  porter  qu'une  seule  éti- 
qoette  en  papier  entièrement  blanc,  ne  recouvrant  que  la  moitié  du 
toar  de  la  bouteille,  n'ayant  aucune  banderolle  rouge,  et  portant  en  ca- 
ractères saillants  le  nom  de  la  source  ou  des  sources  d'où  les  eaux  pro- 
neonent; 

6  Autorise  Arnould  et  Nicolaî  à  indiquer  sur  ces  étiquettes,  sur  leurs 
prospectus  et  sur  leurs  affiches,  la  situation  géographique  de  leurs  sour- 
ces par  ces  mots  VcUlée  (fOrezza  qui  seront  placés  entre  deux  paren- 
thèses, écrits  au-dessous  du  nom  des  sources,et  avec  des  caractères  deux 
fois  moindres  que  ceux  par  lesquels  le  nom  des  sources  sera  indiqué  ; 

c  Déboute  les  parties  de  toutes  autres  fins  et  conclusions.  » 

Le  Tribunal  civil  de  la  Seine,  dans  le  jugement  infirmé  par  la  Cour 
de  Paris  et  que  nous  publions  ci^dessus,  avait  adopté  cette  même  solu- 
fiiHifCf.  trib.  comm.  Rouen,  10  juin  1891,  à  propos  de  la  source  Piane, 
youveUiste  de  Rouen,  numéro  du  16  juin). 

II  y  a  bien  un  arrêt  de  la  Cour  de  Bastia,  du  30  janvier  1888  (pour- 
TOi  rejeté  par  la  Cour  de  cassation  le  21  mai  1889,  Ann.,  91.  163),  qui 
Keorde  à  une  autre  source  que  la  source  départementale  le  droit  au 
Bom  d'eau  d*Orezza,  mats  il  s'agissait  de  la  fontaine  supérieure,  située  à 
^i  mètres  de  la  source  départementale  et  l'arrêt  constatait  que  toutes 
àtn  avaient  été  simultanément  connues  des  voyageurs  et  des  médecins 
^tm  le  nom  de  sources  d'Orezza.  Voici  le  texte  de  Tarrét  : 

<  La  Cour,  Attendu  que  devant  les  premiers  juges  s'est  élevée  la  dou- 
ble question  de  savoir  : 

1*  Si  l'héritage,  dont  est  litige  et,  qui  renferme  une  source  d'eau  aci- 
dolée,  est  susceptible  de  partage  ou  si,  à  défaut  contraire,  il  y  a  lieu  de 
procéder  à  sa  licitation  ; 

^  Sous  quelle  dénomination  doit  être  désignée  la  source  sus-indi- 
qnie? 

<  Attendu  .que  :  c*est  a  bon  droit  que  sur  la  première  question^  il  a 
^  déddé  de  recourir  à  une  expertise,  pour  reconnaître  si  l'immeuble 
>oaédé  par  indivis  entre  les  parties  avec  la  source  qu'il  contient,  est  ou 


—  24  — 

Attendu  qae,  Monplot  ayant  justifié  que  Nicolal  et  Arnould 
n'étaient  point  ses  auteurs  et  qu'il  tenait  ses  droits  des  époux 
Paoli,  le  demandeur,  par  des  conclusions  additionnelles  et  rec- 

non  partageable  et  d'en  fixer  en  même  temps  la  valeur  et  la  mise  à  prix  ; 

«  Attendu  quant  à  la  seconde  question  que  Tenquôte  ordonnée,  en 
amenant  des  déclarations  contradictoires,  ne  permettrait  pas  d'atteindre 
le  but  que  s'est  proposé  le  tribunal  ; 

c  Attendu,  au  surplus,  que  d'après  Tétat  des  documents  versés  au  procès, 
il  peut  être  dès  à  présent  statué  sur  le  litige  sans  qull  soit  nécessaire 
d'autoriser  la  mesure  prescrite  ; 

c  Attendu  qu'il  en  serait  autrement,  si,  comme  le  porte  un  arrêt 
dont  il  a  été  donné  lecture  dans  le  cours  des  plaidoiries,  un  doute  pou- 
vait s*élever  sur  le  point  de  savoir,  si  c'est  la  vallée  d'Orezza  qui  a  pris  le 
nom  de  l'eau  acidulée  exploitée  par  Arger,  au  nom  du  département,  ou 
si  c'est,  au  contraire,  la  source  qui  a  emprunté  le  nom  de  la  vallée  ; 

c  Attendu  qu'il  suffit  à  cet  égard  d'interroger  l'histoire  du  pays,  poar 
apprendre  que  le  département  de  la  Corse  était,  sous  l'ancien  régime, 
divisé  en  pieves,  qui  correspondaient  à  p^u  près  exactement  aux  cir- 
conscriptions cantonales  actuelles,  que  l'une  de  ces  pieves  était,  de 
temps  immémorial,  connue  sans  le  nom  d'Orezza  ;  que  cette  désignation 
existait  bien  avant  que  les  eaux  acidulées  eussent  acquis  de  la  notoriété, 
non  seulement  sur  le  continent,  mais  même  dans  une  partie  de  Ttle  ; 

«  Attendu  que,  si  au  point  de  vue  officiel  et  administratif,  le  nom  de 
la  circonscription  a  été  modifié,  l'ancienne  désignation  a  été  maintenue 
dans  le  langage  usuel  et  que,  même  aujourd'hui,  quelques  communes 
ajoutent  à  leur  nom  celui  de  la  pieve,  notamment  Val  lé  ; 

«Attendu  qu'en  l'état,  ou  ne  saurait  admettre,  ainsi  que  le  soutenait 
Arger,  que  le  nom  d'Orezza  constitue  une  propriété  privative  ;  qu'il  y 
a  lieu  an  contraire  de  le  considérer,  à  l'instar  de  ce  qui  se  passe  à 
Vichy  et  à  Vais,  comme  une  désignation  générique,dont  peuvent  se  pré- 
valoir tous  ceux  qui  possèdent  des  eaux  minérales  sur  le  même  terri- 
toire ; 

«  Attendu  que  sous  ce  rapport,  le  droit  des  intimés  est  d'autant  moins 
contestable  que  la  i^ource,  qu'il  échet  de  partager  ou  de  liciter,  se  trouve 
à  cent  cinquante  mètres  à  peine  et  en  contre-haut  de  la  fontaine  dépar- 
tementale dont  Arger  est  le  concessionnaire  ;  qu'on  distingue  les  deux 
sources  sous  les  noms  de  fontaine  supérieure  et  fontaine  inférieure; 
qu'étant  situées  au  même  lieu,  il  est  naturel  que  les  propriétaires  res- 
pectifs 86  croient  autorisés  à  se  servir  du  même  nom  généiique  ; 

«c  Attendu  que,  pour  repousser  les  prétentions  de  ses  adversaires, 
Arger  invoque  vainement  les  titres  constitutifs  de  propriété  de  la 
source  supérieure  ;  que  s'il  n'est  pas  fait  mention  dans  ces  actes  du 
nom  d'Orezza,  soit  que  la  contractante  Tait  jugé  inutile,  soit  qu'il  y  ait 
eu  une  pure  omission  de  leur  part,  il  ne  s'en  suit  pas  qu'ils  n'aient  le 
droit  d'employer  ce  nom,  dans  les  mêmes  conditions  et  au  même  titre 
que  pour  la  fontaine  départementale  ; 

«  Qu'il  est  à  remarquer,  à  ce  sujet,  que  tous  ceux,  voyageurs  ou  mé- 
decins, qui,  depuis  trente  ou  quarante  ans,  se  sont  occupés  des  eaux 
d'Orezza,  ont  attribué  ce  nom  aussi  bien  à  l'une  qu'à  l'autre  source  ; 

c  Attendu  que  c'est  aussi  sans  raison,  qu'Arger  soutient  qu'il  y  a  lieu, 
en  l'état,  de  s'occuper  du  nom  sous  lequel  la  source,  dont  est  procès, 
doit  être  désignée  ; 

«c  Qu'il  est  en  effet  évident  que  le  nom  d'Orezza  est  de  nature  à  exer- 
cer une  certaine  influence  sur  le  prix  de  vente  alors  même  d'aillears 


—  26  — 

criptions  cantonales   actuelles;  que  rancienne  pieve  d'Orezza 
constitue  aujourd'hui  le  canton  de  Piédicroce  ; 

Attendu  qu'il  n'est  point  nécessaire  de  rechercher  si  c^est  la 
vallée  qui  a  donné  son  nom  à  la  source,  ou  si  c'est  la  source 
qui  a  donné  son  nom  à  la  vallée  ;  qu'il  suffit  de  constater  en 
fait  que  depuis  que  la  Corse  est  devenue  un  département  français, 
aucune  ville,  circonscription,  commune  ou  localité  n'est  désignée 
sous  le  nom  de  Orezza  ; 

Attendu  néanmoins  que  ce  nom  a  persisté  dans  Tusage  local 
pour  désigner  communément  la  vallée  où  coule  la  source  dépar- 
tementale ;  que  plusieurs  communes  de  la  région  notamment 
celle  de  Yallé  ajoutent  encore  aujourd'hui  à  leur  nom  celui  de 
l'ancienne  pieve  ; 

Attendu  qu'il  est  constant,  d'autre  part,  que,  depuis  un  temps 
immémorial  et  hien  avant  qu'elle  f(lt  exploitée  pour  ses  pro- 
priétés curatives,  la  source  départementale  Sorgente  Sottana 
était  connue  sous  le  nom  de  source  d'Orezza  ainsi  que  la  source 
supérieure  Sorgente  Soprana,  distante  de  150  mètres  seulement  ; 
que  c'est  sous  ce  nom  qu'elle  est  désignée  dans  la  concession 
faite  à  Valéry  en  1856  et  dans  le  décret  qui  a  déclaré  la  source 
d'utilité  publique  ;  que  c'est  sous  ce  nom  qu'elle  a  toujours  été 
désignée  par  les  voyageurs  et  les  médecins  ; 

Attendu,  d'autre  part,  que  les  sources  se  trouvant  dans  la 
même  région  et  à  une  distanee  plus  ou  moins  grande  de  la  source 
départementale  étaient  connues  sous  le  nom  de  source  Tascovata, 
source  Piana,  Angéli,  etc.,  servant  à  les  distinguer  de  la  double 
fontaine  d'Orezza  ;  que  c'est  la  source  Tascovata,  aujourd'hui 
dénommée  Colomba,  qui  est  exploitée  par  Monplot;  que  dans  le 
bail  qui  lui  a  été  consenti,  la  source  est  désignée  ainsi  :  <c  une 
source  d'eau  minérale  gazeuse,  acidulée  et  ferrugineuse,  qui 
jaillit  dans  la  propriété  dite  Tascovata,  située  sur  le  territoire 
de  Rappagio  »  ;  que  dans  cet  acte  le  nom  d'Orezza  n'est  môme 
pas  prononcé  ; 

Attendu  dans  ces  conditions  que  le  nom  d'Orezza,  n'étant  plus 
aujourd'hui  le  nom  d'une  localité  ou  circonscription,  ne  consti- 
tue pas  une  dénomination  générique  et  nécessaire,  comme  par 
exemple  le  nom  de  Vichy  ou  de  Vais  ;  que,  à  raison  de  la  posses- 
sion constante  dont  il  justifie,  Piatier  a  le  droit  exclusif,  à  l'égard 
de  Monplot,  de  vendre  les  eaux  de  la  source  sous  le  nom  d'Eau 
d'Orezza  ;  qu'il  appartient  à  Monplot  d'exploiter  lui-même  la 
source  sous  le  nom  où  elle  est  connue  et  le  nom  sous  lequel  elle 
a  été  désignée  dans  l'acte  de  bail  qui  lui  sert  de  titre,  ou  sous 
tel  autre  nom  de  nature  à  ne  porter  aucune  atteinte  aux  droits 
des  tiers  ; 
•  Attendu  toutefois  que,  en  présence  de  ce  fait  constant  que  le 


nom  d'Orezza  est  encore  employé  dans  le  langage  usuel  pour  dé- 
signer la  vallée  ou  l'ancienne  pieve  de  ce  nom,  la  possession  du 
demandeur  n'est  point  exclusive  au  point  de  faire  interdire  d'une 
façon  absolue  au  défendeur  tout  usage  de  ce  nom  ; 

Mais  que  l'usage  de  ce  nom  à  Teffet  de  désigner  la  vallée  ou 
Tancienne  pieve  d*Orezza  ne  peut  être  admis  que  dans  des  con- 
ditions de  nature  à  éviter  toute  confusion  avec  les  eaux  de  la 
source  départementale; 

Attendu  que  Monplot  a  mis  en  vente  Teau  de  sa  source  dans 
des  bouteilles  portant  des  étiquettes  ainsi  conçues  :  Eau  minérale 
naturelle  d^Orezza^  ce  dernier  mot  mis  en  vedette  et  écrit  en  gros 
caractères,  tandis  que  le  nom  de  la  source  était  écrit  en  petits 
caractères  peu  apparents  ;  que  ces  circulaires,  prospectus  et  an- 
nonces portent  également,  soit  en  tête,  soit  dans  le  texte,  ces 
mots  :  Eau  dOrezza  ; 

Qne  ces  faits,  bien  que  les  étiquettes  diffèrent  d*aspect,  sont 
de  Qatnre  à  créer  une  confusion  entre  les  eaux  de  la  source  Co- 
lomba et  celles  de  la  source  départementale  d'Orezza  et  portent 
atteinte  au  droit  exclusif  du  demandeur  de  vendre  son  eau  sous 
le  nom  à'EaudOrezza  ;  qu'ils  ont  causé  au  demandeur  un  pré- 
jodice  dont  il  lui  est  dû  réparation  ; 

Qne  le  tribunal  a  les  éléments  nécessaires  pour  fixer  les  dom- 
mages-intérêts ;  qu'il  convient  pour  l'avenir  de  déterminer  dans 
quelles  conditions  le  défendeur  pourra  faire  usage  du  nom 
d'Orezza  comme  désignation  de  la  vallée  communément  connue 
soQs  ce  nom  et  où  la  source  prend  naissance  ; 

Attendu  qu'il  résulte  de  ce  qui  précède  que  la  demande  recon- 
Tentionnelle  de  Monplot  n'est  point  fondée  ; 

Pai  cks  motifs,  Donne  acte  à  la  veuve  Piatier  de  sa  reprise 
d'instance,  reçoit  le  préfet  de  la  Corse  en  son  intervention,  donne 
acte  à  Maugarduque  es  qualités  de  sa  reprise  d'intervention,  dit 
qoe  le  nom  d'eau,  source  ou  fontaine  d'Orezza,  est  la  propriété 
privative  du  département  de  la  Corse  ou  de  ceux  qui  le  repré- 
sentent, sauf  bien  entendu  les  droits  des  propriétaires  de  la 
source  supérieure  Sorgente  Soprana  ; 

Dit  qu'à  l'avenir  Monplot  ne  pourra  employer  la  dénomination 
d'£au  d'Orezza  comme  désignation  de  l'eau  provenant  de  la 
^orce  Tascovata  ou  Colomba,  et  ce,  soit  sur  les  capsules,  bou- 
teilles et  étiquettes,  soit  dans  les  annonces,  circulaires,  factures 
et  imprimés  de  toute  sorte  ; 

Dit  que  Monplot  ne  pourra  faire  usage  du  nom  d'Or  zza  pour 
indiquer  la  situation  géographique  de  sa  source  qu'en  inscrivant 
ces  mots  :  <c  Vallée  d'Orezza  »,  entre  parenthèses  au-dessus  ou  à 
lasoiteda  nom  de  la  source  et  avec  des  caractères  deux  fois 


—  28  — 

moindres  que  ceux  par  Tesquels  le  nom  de  la  source  sera  indi- 
qué ; 

Condamne  dès  à  présent  Monplot  à  payer  à  ladite  yeuTê  Pia- 
tier,  10  francs  de  dommages-intérêts  par  chaque  contravention 
constatée  à  concurrence  de  trente,  après  lesquelles  il  sera  fait 
droit  ; 

Autorise  la  demanderesse  à  publier  le  présent  jugement  en 
totalité  seulement  et  non  par  extraits,  dans  trois  journaux  à  son 
choix  et  aux  frais  de  Monplot,  pour  tous  dommages-intérêts,  sans 
que  le  coût  de  chaque  insertion  puisse  dépasser  300  francs  ;  dé- 
clare Monplot  mal  fondé  en  sa  demande  reconventionnelle,  Ten 
déboute  ; 

Condamne  Monplot  en  tous  les  dépens. 

M.  Monplot  a  interjeté  appel  de  ce  jugement. 

La  Cour  après  avoir  entendu  les  plaidoiries  de  M*  Robin 
et  de  M®  Gouhin  a,  conformément  aux  conclusions  de 
M.  l'avocat  général  Bdlot,  rendu  l'arrêt  suivant  : 

La.  Cour,  Statuant  sur  Tappel  interjeté  par  Monplot  du  juge- 
ment rendu  par  le  Tribunal  civil  de  la  Seine  en  date  du  17  dé- 
cembre 1895,  donne  acte  à  la  veuve  Piater  et  à  Luiggi  de  leur  re- 
prise d'instance  ; 

Sur  la  double  exception  d'irrecevabilité  proposée  par  l'appe- 
lant contre  la  demande  principale  et  l'intervention  aux  débats 
du  préfet  de  la  Corse  : 

Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges  : 

Au  fond  ; 

Considérant  que  la  question  soumise  à  Tappréciation  de  la 
Cour  est  de  savoir  si  le  nom  d'Orezza  ne  fait  point  partie  du  do- 
maine public,  comme  étant  un  nom  générique  dont  l'usage  com- 
mercial appartient  à  tous  pour  indiquer  la  provenance  réelle  de 
tous  les  produits  provenant  de  cette  région  ; 

Considérant  qu'il  résulte  de  tous  les  documents  de  la  cause 
que  le  nom  d'Orezza  a  toujours  été,  depuis  un  temps  immémo- 
rial, employé  pour  désigner,  avant  comme  après  l'annexion  de  la 
Corse  à  la  France,  prononcée  par  l'édit  de  Louis  XV  en  date  du 
15  août  1768,  une  partie  du  territoire  de  cette  lie  ; 

Que  ce  nom  fut  d'abord  employé  pour  désigner  l'une  des  64  pie- 
ves  ou  paroisses  entre  lesquelles  le  territoire  ainsi  annexé  était 
divisé  ; 

Que  lorsque  la  Corse  fut  constituée  en  département  français  en 
1791,  la  pieve  d'Orezza  devint  alors  le  canton  d'Orezza  ;  que  c'est 
seulement  en  1828  qu'en  vertu  d'une  ordonnance  royale  le  canton 
d'Orezza  devient  officiellement  le  canton  de  Piedicroce,  sans  que 


.  —  30  — 

ondement  par  la  Cour  comme  elles  Favaient  été  par  le  tribu- 
nal ; 

Dit,  par  réformation  sur  ce  point  du  jugement  dont  est  appel, 
que  le  nom  d'  Orezza  est  nn  nom  générique,  appartenant  au  do- 
maine public,  dont  l'usage  peut  être  employé  par  chacun  pour 
désigner  tout  produit  naturel  provenant  de  ladite  région  ; 

Déclare  en  conséquence  les  intimés  mal  fondés  dans  leur  ac- 
tion, les  en  déboute  et  les  condamne  en  tous  les  dépens  de  pre- 
mière instance  et  d'appel  ; 

Sur  la  demande  reconventionnelle  en  dommages-intérêts  for- 
mée par  Monplot  : 

Déboute  celui-ci  de  ladite  demande  ;  ordonne  néanmoins  la 
restitution  de  l'amende  consignée. 


Art.   4095. 

Marqaes  cleftibriqiie.  —  Sources  cl'eaax  minérales. 
—  Nmiiérotoffc.  —  Pas  «le  contreftiçon. 

Lorsque  la  marque  revendiquée  consiste  en  une  série  d* éti- 
quettes destinées  à  être  apposées  sur  des  bouteilles  dCeaux 
minérales  etprésentant  une  disposition  caractéristique  dans 
laquelle  un  numéro  imprimé  en  grands  caractères  sert  à 
désigner  tout  à  la  fois  une  source  déterminée  et  la  garantie 
de  la  quantité  approximative  de  bicarbonate  de  soude  con» 
tenue  dans  l'eau  débitée  par  cette  source,il  n'y  a  pas  contre^ 
façon  à  inscrire^  sur  des  étiquettes  absolument  différentes^ 
des  chiffres  qui  ne  servent  pas  de  dénominations  aux  sour- 
ces et  qui,  accompagnant  le  nom  de  la  source,  indiquent 
seulement  son  degré  de  minéralisation  (l'«  espèce)  (1). 

Mais  lorsque  le  propriétaire  de  la  marque  a  par  des  con- 
clusions, invoqué  l'autorité  de  la  chose  jugée,  résultant  de 
ce  qu'un  arrêt pt*écédent,  entre  les  ayants  droit  des  mêmes 
parties,  a  déclaré  illicite  l'usage  des  n^*  1,  3,  5, 7  pour  dé- 

(1)  Le  Tribunal  civil  de  Lyon  n'en  a  pas  moins,  contrairement  à  sa  pre- 
mière décision,  confirmée  par  la  Cour  de  Lyon  et  maintenue  par  Tarrêt 
de  la  Cour  de  cassation  que  nous  reproduisons,  condamné  pour  imita- 
tion frauduleuse  de  marque,  un  concurrent  qui  se  servait,  pour  les  eaux 
de  Vais,  de  chiffres  placés  de  façon  apj.  rente  sur  les  étiquettes  et  in- 
diquant le  numéro  d'ordre  de  la  source,  bien  que  les  étiquettes  fussent, 
quant  au  reste,  différentes  (Trib.  civ.  Lyon,  19  juillet  1895,  Ann., 
96.250). 


—  34  ^ 

signer  le  dosage  des  sources  en  bicarbonate  de  soude  le  juge 
dufait  est  tenu  de  s'expliquer  sur  ce  moyen  (2«  espèce)  (1). 

(i)  La  décision  invoquée  comme  ayant  Tantorité  de  la  chose  jngée 
était  on  arrêt  de  la  Gonr  de  Lyon  da  8  août  1877,  confirmant  nn  juge- 
ment dn  Tnbonal  civil  de  Lyon  en  date  du  96  mars  1874. 

Le  jugement  était  ainsi  conçu  : 

c  àttendo  que  la  Société  anonyne  la  Grande  Compagnie  Hydro-miné- 
rale de  Vais  (soarces  vivaraises)  a  formé  contre  la  Société  des  eaux 
de  Tais  ^  da  Pestrin,  les  sieurs  Lauret,  Gilloa  et  Gie  et  le  sieur  M eis- 
sosaier  une  demande  en  paiement  de  20.000  francs  de  dommages-inté- 
rêts :  que  cette  action  est  fondée  sur  ce  que  la  société  défenderesse  se 
serait  livrée  à  des  actes  de  concurrence  déloyale  dont  les  sieurs  Gillon 
et  Ge  et  le  sieur  Meissonnier  se  seraient  rendus  complices  en  vendant 
OQ  exposant  en  Tente  ses  prodoits  ; 

c  Attendu  que  la  Grande  Compagnie  Hydro-minérale  a  fait  le  23  avril 
i^O  le  dépôt  de  sa  marque  au  greffe  du  tribunal  de  commerce  de  Lyon  ; 
qoe  celleK»  consiste  dans  des  étiquettes  ayant  pour  signe  caractéristi- 
que de  désigner  les  sources  de  la  Compagnie  non  par  des  dénominations 
aiosi  que  cela  se  pratique  habituellement  mais  par  des  numéros  com- 
pris dans  la  série  des  chiffres  1  à  10  et  correspondant  pour  chacune 
d'elles  à  la  quantité  de  bi-carbonnate  de  soude  que  ses  eaux  contien- 
i;ent  en  dissolution  ; 

<  Qae  toutefois  afin  de  ne  pas  multiplier  les  divisions  sans  une  se' 
riense  nécessité,  elle  s'est  bornée  dans  l'exercice  de  son  exploitation  à 
présenter  ses  sources  au  public  sous  la  série  des  numéros  impairs,  1, 
S.  5,7,  9; 

«  ittendo  que  la  Compagnie  des  eaux  de  Vais  et  du  Pestrin  fondée 
deui  ans  après  le  dépôt  de  la  marque  de  fabrique  ci-dessus  mentionnée,  a 
désigné,  il  est  vrai,  les  sources  sous  la  dénomination  générale  de  Déli- 
eieuses^  mais  a  adopté  sur  ses  étiquettes  et  dans  ses  prospectus  la  sé- 
rie des  numéros  impairs,  1,  3,  5,  7,  indiquant  leurs  richesses  respecti- 
T»  en  bi-carbonate  de  soude  ; 

<  Qae  le  bnt  qu'elle  s'est  proposée  a  été  évidemment  de  jeter  la  con- 
foâoii  dans  l'esprit  public  et  de  profiter  de  la  notoriété  qu'avait  acquise 
la  marque  de  la  Grande  Compagnie  Hydro-minérale  ; 

I  Qoe  cette  confusion  était  d'autant  plus  susceptible  de  se  produire 
qie  ce  qui  devait  frapper  les  consommateurs,  c'étaient  moins  les  men- 
U03S  générales  des  étiquettes  que  la  série  des  numéros  impairs  et  dans 
ksqoels  ils  trouvaient  l'indication  du  plus  ou  moins  d'activité  des  eaux  ;  i 

c  Attendu  que  les  sieurs  Lauret,  Gillon  et  le  sieur  Meissonnier  devaient 
K  charger  respectivement  d'un  entrepôt  à  Lyon  de  la  Compagnie  défen- 
àeresse,  mais  que  les  projets  de  traité  qui  avaient  existé  n'ont  pas  été 
laivis  d'exécution  ;  qu'ils  n'ont  reçu  qu'un  petit  nombre  de  caisses  re- 
tirées de  l'exposition  de  Lyon  et  dont  pour  la  plus  grande  partie  le  pla- 
cement n'a  pas  été  opéré  ;  qu'il  n'est  pas  établi  qu'ils  aient  eu  eonnais- 
unoe  de  la  fraude  ni  même  qu'ils  aient  causé  un  préjudice  apprécia- 


nte: 


(  Attendu  que  les  actions  en  dommages-intérêts,  pour  concurrence 
wéioyale  sont»  d'après  la  jurisprudence,  de  la  compétence  du  tribunal 
2e  commerce, mais  que  l'exception  n'a  pas  été  proposée  :  que  le  tribu- 
nal civil  possédant  la  plénitude  de  juridiction  il  n'y  pas  lieu  de  se  des- 
bisir  d'office  ; 

<  Par  ces  motifs,  Statuant  en  matière  ordinaire  ; 

f  Déclare  qa€  c'est  sans  droit  que  la  Compagnie  de  Vais  et  du  Pestrin 


—  32  — 

(C.  de  cass.,  ch.  civ.,  req.,  9  noYembre  1898,  Compagnie  générale  des 
eaux  minérales  et  bains  de  mer  c,  Henry  et  Cie  (!'•  espèce).  —  G.  de 
cass.,  ch.  cIt.,  cass.,  9  novembre  1898,  Compagnie  générale  des  eaux 
minérales  et  bains  de  merc.  BoalTé  et  Real  (2>  espèce). 

Dans  deux  espèces  analogues,  sur  la  demande  de  la 
même  société,  le  tribunal  civil  et  la  Cour  de  Lyon  avaient 
donné  la  solution  rapportée  dans  le  sommaire  ci-dessus. 


re 


espèce. 

Dans  Tune  des  deux  espèces  (1)  la  Cour  de  cassation  a 
rejeté  le  pourvoi  formé  contre  Tarrêt  de  la  Cour  de  Lyon 
du  27  mars  1895  en  ces  termes  : 

La  Cour,  (Le  premier  moyen  était  relatif  à  un  vice  de  forme). 

Sur  le  deuxième  moyen  : 

Attendu  qu'il  résulte  des  constatations  de  l'arrêt  attacfué  que 
la  marque  de  commerce  revendiquée  par  la  demanderesse  en 
cassation  consistait  en  une  série  d'étiquettes  destinées  à  être 
apposées  sur  des  bouteilles  d'eaux  minérales  et  présentant  une 
disposition  caractéristique  dans]aqueile,un  numéro  imprimé  en 
grands  caractères,seryait  à  désigner  tout  à  la  fois  une  source  dé- 
terminée et  la  garantie  approximative  de  bicarbonate  de  soude 
contenue  dans  Teau  débitée  par  cette  source  ;  qu'il  ressort  des 
mômes  constatations  que  les  étiquettes  employées  par  les  défen- 
deurs n'offraient  point  de  ressemblance  avec  celles  de  la  deman- 
deresse ;  que  les  sources  par  eux  exploitées  étaient  indiquées, 
sur  ces  étiquettes,  par  un  nom  spécial  et  que  si  un  nombre  était 

a  fait  usage  dans  ses  prospectas  et  sur  ses  étiquettes  de  la  série  des 
numéros  impairs  1,  B,  5,  7  pour  désigner  le  dosage  de  ces  sources  en 
bi-carbonate  de  soude  ; 

«  La  condamne  à  payer  à  la  (Compagnie  demanderesse  pour  réparation 
du  préjudice  qu'elle  lui  a  causé  la  somme  de  800  francs  :  etc.  i 

Arrêt  en  ces  termes  le  8  août  1877  : 

«  Sur  rappel  principal  : 

«  Adoptant  les  motifs  qui  ont  déterminé  les  premiers  juges  : 

c  Sur  les  conclusions  de  la  Compagnie  intimée  tendant  à  faire  déclarer 
que  les  défenses  sont  faites  à  la  Société  des  eaux  de  Vais  et  du  Pestrin 
d^employer  et  de  faire  usage  de  sa  marque , 

c  Considérant  que  le  dispositif  du  jagement  porte  ce  qui  suit  :  c  déclare 
que  c*est  sans  droit  que  la  Compagnie  de  Vais  et  du  Pestrin  a  fait  usage 
dans  ses  prospectus  et  sur  ses  étiquettes  de  la  série  des  numéros  im- 
pairs 1,  3,  5,  7  pour  désigner  le  dosage  de  ses  sources  en  bi -carbonate 
de  sonde  »  ;  que  dès  lors  il  a  été  satisfait  déjà  aux  conclusions  dont  il 
vient  d'être  parlé  ; 

«  Par  ces  moitfs,  Confirme.  » 

(1)  Il  y  avait  encore  une  3*  espèce  semblable  à  la  première.  La  dé- 
fenderesse était  la  Société  française  des  eaux  minérales. 


r.  - 


—  33  — 

joint  à  cette  4(ti^oix^>i^^tion  il  ne  serrait  qu'à  faire  connaître  au 
pablie  le  dosage  de  Teaii  de  cette  source  ;  qu'enfin  l'aspect  typo- 
graphique des  deux  genres  d*étiquettes  ne  permettait  entre  elles 
aucune  confusion  ; 

Attendu  qu'en  décidant  dans  ces  circonstances  que  les  défen- 
dears  en  cassation  n'avaient  pas  commis  la  contrefaçon  etTu- 
surpation  de  marque  qui  leur  était  imputée,  Tarrét  attaqué,  le- 
quel est  motivé,  n'a  violé  aucun  des  textes  de  loi  visés  dans  le 
deaxième  moyen  ; 
Stir  le  troisième  moyen  : 

Attendu  que  pour  repousser  Faction  introduite  par  la  Compa- 
gnie générale,  l'arrêt  attaqué  se  fonde  notamment  sur  ce  que  les 
nombres  employés  par  la  Société  Française  dans  sa  marque  de 
commerce  n'avaient  point  le  caractère  que  leur  prétait  la  deman- 
deresse en  cassation  ;  qu'ils  ne  tenaient  nullement  lieu  de  déno- 
mination pour  désigner  les  sources  exploitées  par  les  défendeurs 
en  cassation  et  servaient  uniquement  à  faire  connaître  le  degré 
déminéralisation  de  ces  sources  ;  que  l'arrêt  ajoute  qu'il  est  inad- 
missible que  la  compagnie  prétende  s'opposer  à  l'emploi  dans 
ce  bat  des  nombres  faisant  partie  de  la  série  i  à  10,  sous  le  pré- 
texte qu'elle  avait  adopté  dans  sa  propre  marque  des  numéros 
le  la  même  série  pour  désigner  les  sources  lui  appartenant  ; 

Attendu  que  ces  motifs  répondent  suffisamment  aux  conclu* 
HODspar  lesquelles  la  Compagnie  générale  soutient  que  le  seul 
£aitpar  les  défendeurs  d'avoir,  dans  leur  publicité,  joint  des 
chiffres  aux  noms  de  leurs  sources  constituait  une  contrefaçon 
o-j  une  usurpation  de  marque  et  demandait  qu'il  leur  fût  interdit 
d'oàer  des  numéros  i  à  10  dans  leurs  prospectus,  factures  ou  an- 
Lonces  ; 

D'où  il  suit  que  l'arrêt  attaqué  en  statuant  comme  il  l'a  fait 
n  a  contrevenu  à  aucune  des  dispositions  légales  visées  dans  le 
troisième  moyen  ; 

Par  css  hotips,  Rejette. 

Ch.  civ.  —  M.  Dareste,  faisant  fonction  de  président.  — 
UM.  Rau,  rapporteur  ;  —  Dssjardins,  avocat  général  (concl. 
conf.).  —  M*  Pérousb,  avocat. 

2«  espèce. 

Dans  une  autre  espèce,  la  demanderesse  avait  opposé 
devant  la  Cour  d'appel  Tautorité  de  la  chose  jugée.  Elle 
soulevait,  outre  les  moyens  invoqués,  dans  Tespèce  pré- 
"tdenle,  un  second  moyen  tiré  du  défaut  do  motifs  sur  la 
:^ose  jugée. 


l 

î 


—  34  - 
Sur  ce  moyen  la  Cour  a  statué  ainsi  : 

La  Cour,  Sur  le  2«  moyen  : 

Vu  l'article  7  de  la  loi  du  20  avril  1810  : 

Attendu  qu'en  j'"  instance  la  demanderesse  en  cassation  avait 
fondé  uniquement  son  action  sur  les  actes  de  contrefaçon  ou 
d'imitation  de  marque  de  commerce  qu'elle  imputait  aux  défen- 
deurs en  cassation  ;  que,  devant  la  Cour  d'appel  de  Lyon  elle  a 
invoqué  pour  la  première  fois  Tautorité  de  la  chose  jugée  résul- 
tant, suivant  elle,  d'un  arrêt  de  la  même  Cour,  rendu  le  8  avril 
1877  et  qu'elle  a  pris  des  conclusions  expresses  à  l'effet  de  faire 
décider  que  cet  arrêt  avait  l'autorité  de  la  chose  jugée  vis-à-vis 
des  sieurs  Bouffé  et  Real  et  devait  entraîner  leur  condamnation 
sans  nouvel  examen  du  fond  du  litige  ; 

Attendu  que,  sans  s'expliquer  sur  ce  moyen  les  juges  du  fond 
ont  débouté  la  demanderesse  en  cassation  de  son  action,  en  con- 
lirmant  avec  adoption  de  motifs  le  jugement  frappé  d'appel  ;  que 
cette  décision  qui  emportait  le  rejet  du  chef  de  conclusions  rela- 
tif à  la  chose  jugée  ne  contenait  aucun  motif  exprès  ou  impli- 
cite à  l'appui  de  ce  rejet  ;  d'où  il  suit  que  l'arrêt  attaqué  a  violé 
le  texte  de  loi  susénoncé  ; 

Par  CBS  motifs,  et  sans  qu'il  soit  besoin  de  statuer  sur  les  3" 
et  4«  moyens  ; 
Casse. 

Ch.  civ.  — M.  Dareste,  faisant  fonction  de  président.  — 
MM.  Rau,  rapporteur  ;  — Dssjardins,  avocat  général  (concl. 
conf.).  —  M*"  Pérouse  et  Nivard,  avocats. 


j  t 


Art.  4096. 

C^nevrrence  Illicite.  —  Titre  «l'ancien  administra- 
teur. —  Interdiction. 

Constitue  un  acte  de  concurrence  blâmable  qui  doit  être 
interdit  y  le  fait  par  un  ancien  administrateur  de  tournées, 
théâtrales  de  prendre  dans  ses  affiches  ^prospectus  et  circu\ 
laireSyle  titre  sous  lequel  il  a  exercé  pendant  un  cerlai 
temps  ces  fonctions  alors  qu'il  n'en  est  plus  investi;  et  n'ap 
partient  plus  à  la  même  troupe. 

(Trib.  de  com.  Seine,  35  nov.  1896.  —  Frédéric  Achard  c.  Germain. 

Le  ^  novembre  1896,  le  Tribunal  de  commerce  de  la 

♦1 


JwtrmAl.  —  Conteftt  d'édition.  —  Roomn  «nclen  ppé- 
•«bM  eomme  Inédit.  —  Iiésat«lpe  qui  ae  préaente 

La  qualité  de  légataire  des  ceuvrea  littéraires  d'un  écri- 
'■^in  ne  donnepas  au  bénéficiaire  le  droit  de  les  publier  sous 
J3n  propre  nom. 

l'écrivain  gui,  ayant  promis  à  un  journal  un  roman 


èdit,  composé  spécialement  povr  les  lecteurs  du  journal, 
re  audit  journal  un  roman  anciennement  publié,  dont  il 
oar  héritage  la  propriété  littéraire.mais  dont  il  n'estpas 
uteur  et  qu'il  s'est  contenté  de  modifier  légèrement  et 
msposer  maladroitement,  manque  aux  engagements  qu'il 
ans  ;  justifie,  de  la  part  du  journal,  une  demande  en  ré- 
talion  du  contrat  et  ne  saurait  te  plaindre  des  procédés 

peu  sévères  dont  le  journal  a  usé  envers  lui. 
le  journal  ayant,  sur  la  foi  de  l'écrivain  avec  lequel  il 
ail  contracté,  commencé  tapubUcation  du  roman  et  ayant 

rinterrompre  quand  il  a  connu  la  véritable  situation, 
■■ubi  un  préjudice  dont  il  lui  est  dû  réparation. 
Des  dommages-intérêts  doivent  être  alloués  au  journal, 
ur  le  préjudice  causé,  les  lecteurs  de  ce  journal,  se- 
its  et  attirés  par  Us  réclames  annonçant  ta  publication 
me  œuvre  nouvelle  et  inédite,  écrite  spécialement  pour 
V,  ayant  d&  être  singulièrement  désappointés  lorsqu'ils 
t  appris  que  le  roman  publié  était  de  vieille  date  et  tPun 
leur  profondément  oublié  et  que  la  clairvoyance  du  di- 
^teur  du  journal  avait  été  mise  en  défaut  sur  ce  point. 

ib.  civ.  Seine,  10  mtd  1890.—  Journal  L'Edairc.  Oscar  MAténier.) 

Linai  jugé  par  la  1"  chambre  sous  la  présidence  de  M.  le    | 
isidenl  Baudooin,  après  plaidoiries  de  M"  Camille  Bon 
;z  et  Ue  Barazeb  : 

G  Tribunal,  Attendu  que  daos  son  numéro  du  13  septembre     i 

nier,  le  journal  VEclair  annonçait  k  ses  lecteurs  dans  les  ter- 

I  suivants  la  publication  d'un  nouveau  roman-feuilleton  : 

Demain, nous  commencerons  la  publication  d'un  grand  roman 

lit,  écrit  spécialement  pour  VEclair  par  un  des  écrivains  les     i 

I  aimés  de  nos  lecteurs,  H.  Oscar  Héténier  »  ; 

ue  cet  avis  était  accompagné  suitant  l'asage  d'une  réclame 

ipeuse  sur  les  mérites  de  l'œuvre  nouvelle  intitulée  la  Pvtci- 

a  et  de  son  auteur  ; 

ae  le  lendemain  VEclair  insérait  de  nouveau  la  même  ré-      ' 

ne  et  commençait  immédiatement  la  publication  de  ce  Teuil- 

n  qui  portait  la  signature  d'Oscar  Héténier  ;  » 

ue  cette  publication  était  continuée  sans  interruption  jusqu'au 

lovembre  ;  I 

u'à  cette  date  r£d(u>  insérait  la  note  suivante  : 

Nous  annoncions  le  13  septembre  dernier  la  publication  d'un 


Attendu  que  si  les  conventions  intervenues  entre  les  parties 
n'ont  point  été  rédigées  par  écrit,  i)  est  facile  cependant  d'en 
rélahtir  exactement  le  sens  ; 

Qu'Oscar  Méténier  d'ailleurs  ne  conteste  pas  avoir  pris  l'enga- 
gement de  remettre  JLl'EcJair  le  manuscrit  d'un  roman  inédit  spé- 
ciilement  écrit  pour  ce  journal  ; 

Qu'il  devait  recevoir  une  rémunération  de  20  centimes  par  li- 
pe,  prii  qui  avait  déjà  été  adopté  pour  les  autres  romans  ioé- 
dJls  qu'il  avait  précédemment  publiés  dans  le  méma  jour- 
nal; 

Qu'en  présence  des  justifications  qui  sont  produites,  il  est 
obligé  de  reconnaître  aussi  que  pour  écrire  la  Puleinella,  il  s'est 
inspiré  de  l'oeuvre  d'Oscar  Honoré,  intitulé  le  Roman  d'une  jeuR« 
Kkpauvre,  roman  qui  a  été  publié  par  la  Patrie  en  1860  ;   - 

Mais  qu'il  fait  valoir  qu'il  est  létfitime  propriétaire  des  œuvres 
liUtraires  d'Oscar  Honoré,  son  parrain,  et  qu'il  avait  le  droit 
d'utiliser  ainsi  sa  propriété  ; 
Qoll  ajoute  qu'en  transformant  et  en  remaniant  dans  toules 

ta  parties,  et  d'une  façon  spéciale,  pour  les  lecteurs  de  l'Eclair, 


I  d'Oscar  Honoré,  il  a,  en  réalité  composé  une  œnvre 
,  originale  et  inédite  ; 

surplus,  dit-il,  VEctair  ne  lui  avait  point  interdit  de 
un  collaborateur  ; 
u  qu'il  faut  écarter,  tout  d'abord,  cette  dernière  ob- 

mot  collaboration,  par  son  étymologie  même,  suppose 
il  en  commun,  la  coopération  de  deux  ou  plusienrs  au- 
ine  <Buvre  collective  ; 

outre,  ce  mot  implique  la  volonté  commune  de  colla- 

:ar  Honoré  est  mort  en  48S5,  plusieurs  années  avant  la 
e  dajournal  VEclidr  ; 

'autre  pari,  le  Roman  d'une  jeune  fille  pauvre,  a  paru  dans 
,  en  I8B0,  c'est-à-dire  à  une  époque  très  voisine  de  la 
e  de  Héténier  ; 

:  roman  dont  il  s'agit  n'a  donc  pas  été  écrit  en  collabora- 
rue  des  lecteurs  de  l'Eclair  ; 

lu  d'un  autre  côté  que  si  Oscar  Méténier  est  légataire 
res  littéraires  d'Oscar  Honore,  ce  qui  n'est  pas  contesté, 
dite  ne  suTQt  pas  à  lui  donner  le  droit  de  publier  sons 

les  œuvres  de  son  parrain  ; 

ans  doute,  il  ne  saurait  être  question  ici  de  contrefaçon  ; 
effet  comme  héritier  d'Oscar  Honoré  et  chargé  à  ce  titre 
dre  sa  mémoire,  le  défendeur  aurait  seul  qualité  pour 
Ire  de  la  contrefaçon  ; 

aut  donc  examiner  uniquement  la  prétention  de  Uété- 
'oir  composé  une  œuvre  nouvelle,  originale  et  inédite,en 
mant  et  en  remaniant  le  roman  d'Oscar  Honoré  ; 
du  qu'il  suffit  de  rapprocher  le  feniHeton  la  Fulcitiella 
m  publié  en  1860  par  Oscar  Honoré  pour  constater  qu'il 
jne  seule  et  même  œuvre  ; 

i  plupart  des  chapitres  ont  été  reproduits  textuellement, 
!  seule  ligne  d'Oscar  Méténier,  qui  s'est  borné  &  faire 
s  suppressions  et  certains  changements  de  détail  absola- 
ngniflants  ; 
isi  te  mot  «  cajoler  »  a  élé  remplacé  par  celui  de  «  ca- 

V  œil  exercé  »  par  i<  œil  de  faucon  »,  <•  naissance  »  par 
lion  ",  «  démodé  »  par  «  fossile  »,  etc.,  etc.  ; 
/agissait  si  bien  d'une  même  œuvre  qu'après  la  décon- 
te par  VEclair,  au  mois  de  novembre,  ce  journal  a  pu 
ir  la  publication  du  roman,  d'après  le  texte  unique  d'Os- 
;iré,  sans  avoir  aucun  égard  au  manuscrit  qui  lui  avait 
s  par  le  défendeur  ; 

titre  même,  la  Putcittella,  n'appartient  pas  à  Oscar  Ué- 


nr--- -'^'■F.r'',       '9^     ,^    M^ 


-39  - 

ténier,  qu'il  était  le  nom  donné  par  Oscar  Honoré  à  Tan  de  ses 
principaux  personnages  ; 

Âttenda,  il  est  Trai^qu'Oscar  Méténier  a  fait  certains  remanie- 
ments 00,  pins  exactement,  certaines  transpositions,  qa*ainsi  le 
proiogne  de  la  Puleinella  a  été  composé  à  Taide  de  plusieurs 
chapitres  de  la  deoxième  partie  du  roman  de  la  Jeune  f,lie  pau^ 

Qn'Oscar  Méténier  y  a  ajouté  un  passage  de  dlO  lignes  em- 
pranté  au  chapitre  7  de  la  troisième  partie,  passage  auquel  il  a 
apporté  de  très  légères  modifications  ; 

Mais  que,  par  suite  d'un  oubli  singulier,  ce  même  passage  se 
retroure  une  seconde  fois  dans  son  manuscrit,  à  la  même  place 
quMl  occupait  dans  le  roman  d'Oscar  Honoré  et  cette  fois  sans 
aocune  modification  ; 

Qae  ce  fait  suffit  à  caractériser  le  genre  de  travail  auquel  s'est 
livré  le  défendeur,  ou  qu'il  a  fait  faire  par  un  subalterne  ; 

Que  les  quelques  lignes  qu'il  a  dû  écrire  pour  opérer  ces  re- 
maniements et  adapter  ces  transpositions  ne  sauraient  à  aucun 
degré  Tautoriser  à  dire,  comme  il  le  prétend,  qu'il  a  fait  une 
savre  noairelle  et  originale  ; 

Qa'en  réalité  après  avoir  promis  à  VEclair  un  roman  nouveau 
inédit,  écrit  par  lui  d'une  façon  spéciale  pour  les  lecteurs  de  ce 
joamal,  il  a  liirré  la  copie  très  légèrement  modifiée  et  très  mala- 
droitement transposée  d'un  vieux  roman  écrit  par  un  autre  et 
poMié  il  y  a  quarante  ans  ; 

Qu'il  ne  saurait  se  plaindre  dans  ces  conditions  des  procédés 
no  peu  sévères  dont  VEclair  a  usé  envers  lui  et  qu'il  ne  doit  s'en 
prendre  qu'à  lui-même  du  bruit  que  cet  incident  a  fait  dans  la 
presse  ; 

Qu'il  cherche  vainement  à  épiloguer  sous  le  sens  du  mot  «  iné- 
dit p,  prétendant  que  le  roman  d'Oscar  Honoré  n'a  jamais  été 
édité  en  librairie  ; 

Que  le  mot  «  inédit  »,  dans  le  sens  du  contrat  et  dans  le  lan- 
gage courant,  s'applique  à  un  ouvrage  qui  n'a  Jamais  été  pu- 
blié ; 

Qu'en  tous  cas,  Oscar  Méténier  a  livré  un  roman  qui  n'était 
pas  de  lui  et  qui  n'avait  pas  été  écrit  spécialement  pour  les  lec« 
teors  de  VEclair  ; 

Qu'il  a  donc  manqué  aux  engagements  qu'il  pris  ; 

Que  les  exemples  qu'il  invoque  d'auteurs  plus  ou  moins  célè- 
bres prenant  leur  bien  un  peu  partout  et  couvrant  sans  scrupule 
de  leur  signature  des  œuvres  écrites  par  d'autres,  ne  sauraient 
constituer  pour  lui  une  excuse  ;  que  des  abus  de  ce  genre  n'ont 
malheoreasement  rien  d'inédit  ; 


—  40  — 

Attendu,  dans  ces  conditions,  qae  VEclair  est  fondé  à  deman- 
der la  résiliation  du  contrat  ; 

Attendu,  d'autre  part,  que  si  l'incident  dont  il  s'agit  a  été 
surto.ut  fâcheux  ponr  Oscar  Méténier,  il  a  causé  cependant  à 
VEclair  un  réel  préjudice  ; 

Qu'en  effet,  les  lecteurs  de  ce  journal,  séduits  et  attirés  par  les 
réclames  pompeuses  par  lesquelles  on  leur  annonçait  la  pu- 
blication d'une  œuTre  nouvelle  et  inédite,  écrite  spécialement 
pour  eux,  ont  dû  être  singulièrement  désappointés  lorsqu'ils 
ont  appris  que  c'était  un  roman  vieux  de  quarante  ans,  d'an 
auteur  profondément  oublié,  et  que  la  clairvoyance  du  directeur 
du  journal  avait  été  mise  en  défaut  à  ce  point  ; 

Attendu  qu'il  résulte  de  ce  qui  précède  que  la  demande  recon- 
ventionnelle  d'Oscar  Méténier  est  à  tous  égards  mal  fondée  ; 

Par  ces  motifs,  Déclare  résiliées  les  conventions  verbales  in- 
tervenues entre  le  journal  VEclair  et  Oscar  Méténier  au  sujet  de 
la  publication  du  roman  feuilleton  la  Putcinella  ; 

Condamne  Oscar  Méténier  à  restituer  au  journal  VEclair  tou- 
tes les  sommes  qu'il  a  pu  toucher  sur  le  prix  dudit  feuilleton  et 
en  outre  à  la  s6mme  de  2,000  francs  à  titre  de  dommages-in- 
térêts ; 

Déclare  Oscar  Méténier  mal  fondé  en  sa  demande  reconven- 
tionnelle ; 

L'en  déboute  ; 

Et  attendu  que  l'exécution  provisoire  est  demandée  en  dehors 
des  cas  prévus  par  la  loi  ; 

Dit  qu'il  n'y  a  lieu  de  l'ordonner  ; 

Condamne  Oscar  Méténier  en  tous  les  dépens. 


Art.  4098. 

Brevet  d'Invention.  —  Compétenee.  —  IncllvtolMIICé 
de  Taetlon.  —  Bxceptlon.  — IVon-palement  de«  An- 
nuité*. —  Déebéanee  Irrémédiable. 

Si  la  compétenee  des  tribunaux  civils  s'étend  à  tous  les 
litiges  qui  mettent  en  cau^e  les  brevets  d'invention,  cette 
compétence  a  elle-même  pour  limite  le  principe  de  Vindivi- 
sibilité  de  V action  et  de  la  procédure  (1). 

Lorsque  l'action  porte  sur  des  chefs  complexes  se  raita- 

(1*2)  La  solation  contraire  parait  prévaloir  en  doctrine  et  en  jaris* 
prudence.  Y.  Riom,  27  mai  1862,  Barault»  Ann.^  63.  274  :  Bordeaux» 


I 

l 


-  42  -^ 

de  commerce  a  été  incidemment  saisi  de  difficaltés  que  rarticle  34 
de  la  loi  de  1844  réserve  expressément  aux  tribunaux  civils  ; 

Or  attendu  en  droit,  que  si  en  raison  des  termes  généraux  et 
impératifs  de  ce  texte,  il  est  certain  que  la  compétence  des  tribu- 
naux civils  s'étend  à  tous  les  litiges  qui  mettent  en  cause  la  Ta- 
lidité  des  brevets  d'invention,  il  faut  aussi  reconnaître  que  cette 
compétence  a  elle-même  pour  limite  le  principe  de  Tindivisibi- 
lité  de  l'action  et  de  la  procédure,  que  dès  lors  que  Taction  porte 
sur  des  chefs  complexes  se  rattachant  aux  effets  indivisibles 
d'un  même  contrat,  la  compétence  du  juge  saisi  de  Taction  s'étend 
nécessairement  à  l'exception  ; 

Et  attendu  en  fait,  que  les  moyens  invoqués  par  Guichard  à 
l'appui  de  sa  défense  n'ont  pas  le  caractère  d'une  demande  re- 
conventionnelle et  que  ces  moyens  sont  connexes  aux  autres  con- 
testations soumises  au  tribunal  de  commerce  par  le  demandeur, 
à  l'occasion  de  la  résiliation  d'un  contrat  commercial  ;  que,dans 
ces  conditions  spéciales,la  règle  de  droit  commun  que  le  juge  de 
Taction  est  juge  de  l'exception  doit  prévaloir;  que  dès  lors  le 
tribunal  de  commerce  était  compétent  ; 

Et  attendu  que  les  parties  ont  conclu  au  fond,  que  la  cause  est 
en  état,  qu'il  y  a  lieu  à  évocation  ; 

Au  fond  : 

Attendu  que  Guichard  excipe  de  la  déchéance  du  brevet  d'in- 
vention d'Obier  par  défaut  de  paiement  en  temps  utile  de  l'an- 
nuité de  i897  ; 

Or  attendu  que  l'article  32  de  la  loi  du  5  juillet  1844  édicté  la 
déchéance  du  brevet  dans  le  cas  où  le  breveté  n'a  pas  acquitté 
son  annuité  avant  le  commencement  de  chacune  des  années  de 
jouissance  du  brevet  ;  que  le  brevet  d'Obier  porte  la  date  du 
26  octobre  1883  ;  qu'il  appert  du  récépissé  produit  aux  débats,que 
la  cinquième  annuité  ne  fut  acquittée  que  le  7  novembre  1887, 
et  qu'à  cette  date  la  déchéance  était  encourue,  que  cette  dé' 
chéance  est  irrémédiable  et  que  le  paiement  des  annuités  ulté- 
rieures ne  peut  la  réparer  ; 

Attendu  en  outre  que  cette  déchéance  peut  être  invoquée  par 
Guichard  pour  établir  à  la  fois  le  défaut  de  cause  de  l'action  en 
dommages  ; 

Attendu  que  cette  solution  rend  inutile  l'examen  des  autres 
moyens  invoqués  par  Guichard  pour  justiÛer  le  chef  de  ses  con- 
clusions tendant  à  la  nullité  du  brevet  ; 

Par  crs  motifs,  La  Cour  disant  droit  de  l'appel,  infirme  le  ju- 
gement attaqué  dans  la  disposition  relative  à  l'incompétence  ; 
dit  que  les  premiers  juges  étaient  compétemment  saisis  du  moyen 
de  défense  invoqué  par  Guichard  et  tiré  de  la  déchéance  du  bre- 
vet par  défaut  de  paiement  d'une  annuité  en  temps  utile,  et  sta- 


'"FftF.^^^'^?^' 


—  43  — 

taant  à  noayean  par  voie  d'évocation  déclare  Obier  non  receTabie 
et  mal  fondé  dans  ses  demandes  ; 

L'en  déboate  et  Je  condamne  à  l^amende  et  aux  dépens  ;  con- 
ânne  en  tant  que  de  besoin  le  jugement  attaqué  sur  les  autres 
chefs,  et  en  ordonne  l'exécution. 


Art.  4099. 

Brevetai  «tlnventlon.  ^  Soelété.  —  JonlmMinee.  —  Eil- 
ceaee  eoneédée  pendant  Ia  durée  de  la  soelété  et 
devant  ne  pralon^ep  altérlearement. 


(Ine  société  étant  formée  pour  l'exploitation  des  brevets 
plis  ou  à  prendre  au  nom  du  gérant^  avec  stipulation  que  la 
libre  disposition  et  la  jouissance  de  ces  brevets  feront  retour 
audit  gérant  après  la  dissolution  de  la  société^  le  gérant  n'a 
pas  qualité  pour  passer  en  son  nom  personnel  les  contrats 
de  cession  de  licence  des  brevets^  même  si  ces  contrats  excè- 
dent le  terme  fixé  pour  la  durée  de  la  société,  le  prix  des 
cessions  consenties  pendant  l'existence  de  la  société  appar- 
tient tout  entier  à  celle-ci  (1). 

(G.  de  Riom,  15  mars  1894  et  Cast.  civ.,  1«'  février  1897.  — 

Faure  c,  Kessler.) 

(1)  S'il  est  manifeste  que  pendant  l'existence  de  la  société  à  laquelle  la 
joQÎssance  da  brevet  a  été  apportée^le  breveté  agissant  en  son  nom  per- 
soanel  est  sans  droit  pour  stipuler  relativement  à  la  période  de  jouissance 
sodale,  on  doit  admettre,  semble-t-il  également  que  le  gérant  de  la  so- 
ciété n'a  fias  qualité  pour  disposer  de  la  jouissance  du  brevet  pour  la  pé- 
riode postérieure  à  la  durée  statutaire  de  la  société,  et  que  par  suite  pour 
1«9  traités  avec  les  tiers  embrassant  une  période  de  temps  supérieure  à  la 
durée  normale  prévue  par  la  société.  le  concours  du  breveté  et  du  gérant 
est  indispensable.  Dans  l'espèce,  bien  que  les  personnalités  du  breveté  et 
da  gérant  soient  confondue8,racte  social  n'ayant  conféré  au  gérant  aucuns 
bcalté  d'agir  en  son  nom  personnel  dans  les  affaires  sociales,  on  doit 
admettre  comme  le  décide  le  Tribunal  de  commerce  de  Clermont-Fer- 
nnddoat  le  jugement  a  été  confirmé  simplement  par  la  Cour,  que  c'est 
«siqoement  en  qualité  de  gérant  de  la  société  que  Kessler  pouvait  traiter, 
aûs  il  semble  que  le  tribunal  va  trop  loin  lorsqu'il  attribue  i  la  société 
M  le  profit  des  licences  concédées  par  le  gérant. 

En  admettant  la  validité  d'un  contrat  de  cession  de  licences  s'étendant 
inné  période  supérieure  à  la  durée  sociale,  il  semble  que  si  le  prix  est 
a&e  somme  d'argent,  il  devra  être  réparti  entre  la  société  et  le  breveté 
proportionnellement  à  la  durée  de  la  société  ;  si  au  contraire  le  prix 


—  44  — 

M.  Kessler,  gérant  d'une  société  formée  pour  Texploita- 
tion  des  brevets  pris  ou  à  prendre  en  son  nom^  soutenait 
que  le  pacte  social  portant  que  la  jouissance  des  brevets 
devait  lui  revenir  après  la  dissolution  de  la  société,  il 
avait  droit  de  retenir  une  part  de  produit  des  cessions  et 
licences  proportionnelles  au  temps  pendant  lequel  les 
brevets  devaient  survivre  à  la  société. 

Le  Tribunal  de  commerce  de  Clermont-Ferrant  par  ju- 
gement en  date  du  4  août  1873,  confirmé  par  adoption  de 
motifs  par  la  Cour  de  Riom  le  18  mars  1894,  à  rejeté  sa  pré- 
tention en  ces  termes  : 

Le  TniBUNAL, 

En  ce  qui  concerne  le  produit  du  partage  des  cessions  de  licen- 
ces de  breret  et  d'appareil  brevetés,  et  par  voie  de  conséquence, 
le  pouvoir  par  le  sieur  Kessler  de  consentir  les  dites  cessions  en 
cours  de  société,  tant  en  son  nom  personnel  que  comme  gérant 
de  la  Société  Kessler  et  Gie  ;  --  attendu  que  l'acte  social  du 
14  août  4890  énonce  dans  son  article  3  que  :«  la  société  a  pour 
objet  l'exploitation  :  !<*  des  fabriques  à  provenir  de  la  Société 
Faure,  Kessler  et  Gie  et  des  brevets  ou  licences  lui  apparte- 
nant  ;  2«  des  brevets  qui  pourront  être  pris  ou  des  inventions 
qui  pourront  être  faites  par  le  gérant  de  la  société  nouvelle,  mais 
dont  la  libre  disposition  et  la  jouissance  feraient  retour  audit 
gérant  à  la  dissolution  de  la  société,  ainsi  que  la  clientèle  et  la 
propriété  de  la  fabrication  et  des  brevets  de  fluates  »  ; 

Attendu  qu'il  résulte  des  termes  très  précis  de  cet  acte,  que  le 
sieur  Kessler  a  apporté  à  la  Société  Kessler  et  Cie  la  libre  dispo- 
sition des  brevets  ou  licences,  sans  aucune  autre  condition  que 
le  retour  à  son  profit  à  la  dissolution  de  la  société,  de  la  libre 
disposition  desdits  brevets  ou  licences  ;  que  par  suite,  pendant 
Texistence  de  la  société,  le  sieur  Kessler  n'a  pas  qualité  pour  dis- 
poser personnellement  de  toutou  partie  de  ces  licences  exploitées 
par  la  Société  Kessler  et  Gie,  dentelle  a  seule  la  libre  disposition, 
et  que  c'est  en  sa  seule  qualité  de  gérant  de  ladite  société  que 
toutes  les  opérations,  onéreuses  ou  proûtables,  doivent  être  trai- 
tées, y  compris  la  vente  ou  cession  des  licences  ;  d'où  la  consé- 

consiste  en  redevances  payables  périodiquement,  alors  U  société  encais- 
sera les  redevances  pendant  sa  durée,  après  sa  dissolution  au  contraire 
elles  appartiendront  au  breveté. 

V.  Pouillet,  Brev,  d'int?.,  n«  915  etsaiv.  —  V.  aussi:  Bordeaux, 
32  juin  1862,  David,  Ann,,  62.  392  ;  Àîx,  7  avril  1j365,  Gharavel,  Ann,, 
(16. 246,  et  Bordeaux,  12  mars  1885,  Ann.,  86.69. 


-46  — 

Tactif  social,  et  ce,  aux  dates  des  factures  remises  aux  acquéreurs 
et  conformément  aux  dites  factures,  la  rectification  de  la  comp- 
tabilité sociale  devant  être  effectuée  sur  tous  les  points,  dans  la 
quinzaine  du  prononcé  du  présent  jugement,  sous  peine  de 
10  francs  par  chaque  jour  de  retard  ; 

Dit  qu'à  Tavenir,  dans  les  traités  qu'il  consentira  à  des  tiers, 
des  licences  de  brevets  et  appareils,  le  sieur  Kessier  n'agira 
qu'en  qualité  de  gérant  de  la  Société  Kessier  et  Gie. 

Sur  le  pourvoi  formé  contre  l'arrêt  de  la  Cour  de  Riom, 
la  Cour  de  cassation  a  rendu  Tarrèl  de  rejet  ci-après,  le 
!•'  février  1897  : 

La  Cour,  Sur  le  premier  moyen 

Sur  le  deuxième  moyen  : 

Attendu  que  Tarticle  3  des  statuts  de  la  société  en  commandite 
existant  entre  les  sieurs  Kessier  et  Faure  prêtait  à  interpréta- 
tion, que  par  suite,  l'appréciation  qu'en  ont  faite  les  juges  du 
fond  échappe  au  contrôle  de  la  Cour  de  cassation  ; 

Par  ces  motifs,  Rejette. 


Art.  4100. 

Brevet.  —  Apport  du   droit  d^explolCatlon    À  aoe 
société.  —  CJesslon  de  ce  droit  À  un  tlerii  p^r  Èmt 
—  OIsMolutlon  anticipée.  —  Validité» 


L'apport  fait  à  une  société  par  Vun  des  associés  de  son 
droit  à  l'exploitation  d'un  brevet  d'invention  dont  il  con- 
serve la  propriété^  fait  partie  de  V avoir  social  et  permet  à 
cette  société^  integri  status,  de  céder  ce  droit  à  un  tiers  (1)« 

Le  breveté  qui  ne  s'est  pas  réservé  la  reprise  de  l'exploi- 
tation en  cas  de  dissolution  anticipée  de  la  société  est  tenu 
de  respecter  cette  cession  faite  dans  la  limite  de  la  durée 
prévue  de  la  société  (2). 


(1-2)  V.  Pouillet,  Brev,  dHnv.,  n^SlSetsalT.  L'arrêt  a  soin  toutefois 
de  spécifier,  que  la  cession,  faite  par  la  société  de  Fezploitation  do  brevet 
dont  la  jouissance  lui  avait  été  apportée,  ne  peut  s'étendre  au  delà  du 
terme  de  son  existence  normale  prévue  au  pacte  social,  et,  qu'après 
cette  époque,  les  inventeurs  élant  restitués  dans  la  propriété  du  brevet, 
doivent  en  toucher  les  émoluments. 


—  47  — 

(a  de  Douai»  S9  jaUlet  1897.  —  Degrelle  et  Laualle 

e,  Lallooette  et  Parent) 

Ainsi  jugé  par  confirmation  d'un  jugement  du  Tribunal 
de  Lille,  le  29  juillet  1897,  sous  la  présidence  de  M.  Dis- 
TicKER,premier  président,  après  conclusions  de  M. Bourdon, 
aTocal  général,  et  les  plaidoiries  de  M*»  ds  Prat  et  Allakrt, 
aTocats . 

La  Cour,  Attendu  en  principe,  que  l'apport  fait  à  une  société 
par  l'un  des  associés  de  son  droit  à  rexploitation  d'un  brevet 
d'inTention  dont  il  conserve  la  propriété,fait  partie  de  Tavoir  SO' 
cial  et  permet  à  cette  société,  integri  status,  de  céder  ce  droit  à 
un  tiers,  le  breveté  qui  ne  s'est  pas  réservé  la  reprise  de  rex- 
ploitation en  cas  de  dissolution  anticipée  de  la  société,  étant  tenu 
ce  respecter  cette  cession  faite  dans  la  limite  de  la  durée  prévue 
de  la  société  ; 

Attendu,  en  fait,  que  le  3  février  1891,  une  société  pour  l'exploi- 
tation du  commerce  de  commissionnaire  expéditeur  a  été  formée 
à  Tourcoing  pour  une  durée  de  dix  années  devant  expirer  le 
5  février  1904  entre  Paul  Lassalle  et  Palmyre  Degrelle  associés  en 
nom  collectif  et  Delos  commanditaire  ;  attendu  que  le  15  avril 
1894  par  acte  sous  seing  privé  enregistré,  Delos  a  cédé  sa  part  de 
commanditaire  à  Lallouette  et  à  Parent  ;  que  d'après  l'article  5 
des  statuts,  Lassalle  et  Degrelle  ont  fait  à  cette  société  un  apport 
consistant  dans  leur  industrie  et  dans  leur  droit  à  Texploitation 
d'un  brevet  d'invention  pris  par  eux  le  3  novembre  1893,  pour  un 
système  de  wagons  capitonnés  ;  que  l'apport  du  commanditaire 
a  été  chiffré  à  50.000  fr.  en  espèces  ;  qu'il  a  été  de  plus  convenu 
,art.  16  des  statuts)  qu'au  cas  où  Lassalle  et  Degrelle  céderaient 
à  rétranger  le  brevet  par  eux  apporté  à  la  société,  ou  en  cas  de 
eoncession  de  licences  d'exploitation  en  France  le  produit  de  ces 
cessions  ou  exploitations  appartiendrait  à  la  société  ; 

Attendu  que  le  30  octobre  1895,  antérieurement  à  la  dissolu- 
tion en  date  du  3  novembre  suivant,  Lassalle  et  Degrelle,  agissant 
tant  en  leur  nom  personnel  que  comme  membres  de  l'ancienne 
société  P.  Lassalle  et  P.  Degrelle,  ont  cédé  à  la  Société  générale  des 
transports  dûment  représentée,  la  licence  d'exploitation  du  dit 
brevet  ;  attendu  que  cette  cession  consentie  par  la  Société  P.  Las- 
>aUe  et  P.  Degrelle  encore  existante  bien  qu'il  soit  indiqué  er- 
ronément  dans  les  qualités  prises  par  les  gérants  qu'elle  était 
alors  dissoute,  est  régulière  ;  qu'elle  a  été  faite  dans  la  limite  des 
droits  de  la  société  cédante,  qui  seule  avait  en  effet  pouvoir  à 
cette  époque,  pour  céder  ce  droit  d'exploitation,run  des  éléments 
It  «on  avoir  social  ; 


—  48  — 

Attendu  que  P.  Lassalle  et  P.  Degrelle  sont  mal  fondés  à  pré- 
tendre que  la  dissolution  anticipée  de  la  société  les  a  réintégrés 
dans  la  propriété  de  leur  brevet  et  leur  en  a  fait  recouvrer  la 
jouissance  ;  que  cette  proposition  ne  serait  vraie  que  si  la  société 
n'en  avait  pas  disposé,  suivant  son  droit  comme  d'une  chose 
lui  appartenant;  qu'on  ne  saurait  contester  que  cet  apport  contre- 
partie de  la  somme  de  50.000  fr.  versée  par  le  commanditaire  a 
été  faite  à  la  société  pour  toute  la  durée  de  son  existence,  c'est-à* 
dire  jusqu'au  5  février  1894;  qu'il  constitue  donc  pendant  ce  laps 
de  temps,  au  môme  titre  que  la  commandite  le  gage  commun  des 
créanciers  et  des  associés  ;  qu'il  ne  peut  être  permis  à  l'un  d^eux 
d'exercer  sur  cette  valeur  sociale  au  préjudice  de  la  masse,  une 
sorte  de  droit  de  reprise  privilégié  que  le  commanditaire 
n'exerce  pas  sur  le  commandité  ;  que  régalité  qui  préside  aux 
relations  des  associés  doit  faire  écarter  une  semblable  prétention  ; 
qu'il  importe  peu  que  dans  un  projet  de  liquidation  signé  par  les 
intimés  avant  la  clôture  définitive  des  comptes,  le  chiffre  des 
redevances  dues  par  la  Société  générale  des  transports  pour  l'exploi- 
tation dudit  brevet  n'ait  pas  été  porté  à  l'actif  ;  qu'en  cette  ma- 
tière les  parties  sont  toujours  en  droit  de  provoquer  la  révision 
des  comptes  pour  cause  d'omission  ou  d'irrégularité  matérielle  ; 
qu'on  ne  saurait  en  conséquence  retenir  cette  omission  comme 
preuve  de  la  renonciation  des  intimés  à  la  revendication  de  leur 
droit;  que  les  premiers  juges  ont  par  suite  décidé,  avec  raison, 
que  le  bénéfice  de  la  cession  d'exploitation  du  brevet  faisait 
partie  de  l'avoir  de  la  Société  Lassalle  et  Degrelle  ;  que  jusqu'à 
concurrence  du  recouvrement  des  parties  mises  à  la  charge  des 
commanditaires  par  application  de  l'article  13  des  statuts,  les  com- 
manditaires avaient  droit  aux  redevances  éventuelles  acquittées 
par  la  Société  générale  des  transports  ;  mais  qu'il  faut  toutefois 
ajouter  que  la  Société  Lassalle  et  Degrelle,  n'ayant  pu  céder  plus 
de  droits  qu^elle  n'en  avait  elle-même,  les  bénéfices  auxquels  elle 
pouvait  prétendre  ne  s'étendaient  pas  au  delà  de  la  durée  de  son 
existence  prévue  au  pacte  social  ;  que  le  droit  des  commanditai- 
res à  ces  bénéfices  ne  peut  excéder  ce  terme  fixé  au  5  février  1904  ; 

Par  CBS  motifs.  Et  en  adoptant  ceux  des  premiers  juges,  la 
Cour  confirme  ;  émendant,  dit  toutefois  que  le  droit  exclusif  con- 
féré aux  intimés  pour  le  recouvrement  de  leurs  pertes  sociales 
sur  les  dommages  dus  par  la  Société  générale  des  transports  con- 
cessionnaire de  l'exploitation  du  brevet  litigieux,  prendra  fin  le 
5  février  1904,  déclare  le  présent  arrêt  commun  à  la  Société  géné^ 
raie  des  transporta. 


*  aecemore  isus  a  aeciae  que  riaee  première  ae  i&  lermeiare 
ia  cuuea  d'emballage  au  moyen  d'une  agrafe  appartient  à  Bel- 
^;  que  les  neurs  Tascher  n'ont  tait  qu'apporter  des  améliora- 
tou  au  brevet  Belben,  améliorations  de  nature  à  leur  permettre 
d'oblniîr  un  breret  nouveau,  mais  qai  ne  sauraient  priver  les 
<im  de  profiter  à  leur  tour  de  l'idée  de  Belben  ;  qu'ainsi,  la  seule 
question  &  rësandre  est  celle  de  savoir  si  les  ëpoux  (iuibaud  se 
!y<l  emparés  des  améliorations  des  sieurs  Tascher,  ou  si  les  mo- 

ti  et  S)  Lorsque  les  perfeetionoemenU  apportés  i  un  procédé  de  do- 
uinepDUie,  sont  de  nature  à  bîra  l'objet  d'un  brevet,  11  est  de  prin- 
<>[«  certain,  que  le  brevet  ne  parla  qoe  sur  ces  perfectionnements  mé* 
■es  et,  p*r  snfte,  ne  saurait  faire  obstaele  i  ce  qa'an  aatre  tnventear, 
^ûanl  loi  aussi  dans  le  fonds  commun,  apporte  A  son  tour  au  procédé 
igdgmaiae  publie  des  amélloralions,  ponrvaqae  les  araétioratloos  soient 
'^liiséei  par  des  moyens  dilTérenta  de  ccax  dïjà  brevetés. 


—  50  — 

difications  qu'ils  ont  apportées  au  brevet  Belben  constituent  un 
produit  industriel  nouveau  n'empruntant  rien  à  ces  améliora- 
tions ; 

Attendu  que  les  innovations  de  Tascher  frères  consistent  : 

!•  Dans  le  fait  d'enfoncer  de  force  dans  le  bois  les  deux  coudes 
de  la  plaque,  qui  dans  le  système  Belben,  se  plaçaient  dans  des 
mortaises  préparées  ; 

2*  Dans  le  fait  de  la  suppression  des  trous  ronds  pratiqués  à 
l'avance  dans  les  deux  coudes  de  la  plaque,  pour  recevoir  la 
pointe  qui,  dans  le  systèmeTascher,  traverse  ces  coudes  avec  dé- 
chirement du  métal,  ce  qui  assure  l'inviolabilité  de  la  caisse  ; 

3»  Dans  le  fait  de  noyer  la  pointe  dans  le  bois,  de  façon  qu'elle 
ne  puisse  être  enlevée  sans  trace  d'effraction  ; 

Attendu  qu'il  résulte  tant  du  rapport  des  experts  que  de  Texa- 
men  même  des  appareils  placés  sous  les  yeux  du  tribunal,  que 
les  époux  Guibaud,  au  lieu  d'employer  une  pointé,  se  servent 
d'une  lance  plate  avec  crans  ;  que  cette  lance  n'est  pas  enfoncée 
avec  force  dans  les  coudes  de  la  plaque,  comme  dans  le  système 
Tascher,  mais  pénètre  sans  grands  efforts  dans  un  trou  ovale  pré- 
paré sur  chaque  aile  de  l'agrafe  ;  qu'une  fois  introduite,  elle  est 
déviée  de  façon  à  pénétrer  entre  Tune  de  ces  branches  ;  que  la 
lance  n'a  pas  besoin  d'être  noyée  dans  le  bois  pour  remplir  le  but 
que  se  sont  proposé  les  inventeurs  ; 

Attendu  que  les  sieurs  Tascher  ont  contesté  ce  dernier  point, 
soutenant  que  les  instruments  Guibaud  par  eux  saisis  noyaient 
les  lances  dans  le  bois  ;  mais  que  les  experts  ont  constaté  que  les 
outils  neufs  que  des  frappements  répétés  n'avaient  pas  écrases, 
comme  ceux  ayant  servi,  ne  produisaient  pas  cet  effet  ;  qu'au  sur- 
plus, on  ne  comprendrait  pas  que  les  époux  Guibaud  aient  cher- 
ché à  noyer  la  lance  ;  qu'en  effet,  l'examen  des  agrafes  posées  sur 
les  caisses  démontre  que  la  prise  de  la  lance,  qui  n'a  pas  de  tète, 
est  plus  difficile  et,  surtout,  laisserait  beaucoup  plus  de  traces, 
lorsque  la  lance  est  restée  à  Ûeur  de  bois  sans  y  pénétrer,  car 
alors  la  moindre  pesée  d'une  pince  ou  d'un  outil  quelconque 
apparaîtrait  sur  la  caisse  ;  au  contraire,le  travail  de  Toutil  se  dis- 
simulerait bien  mieux  dans  le  trou  produit  par  renfoncement  de 
la  lance,  et  qu'il  pourrait  avoir  pour  résultat  seulement  d'agrau* 
dir; 

Uu'il  convient,  en  outre,  de  remarquer,  avec  l'expertise,  que  le 
pose  de  l'agrafe  se  fait  avec  l'outil  breveté  de  Guibaud  en  uxxe 
seule  opération,  tandis  que  la  pose  des  scellés  de  Tascher  en 
nécessite  trois  ; 

Attendu  que,  de  ces  constatations  il  ressort  que  les  époux  Gui-. 
baud  n'ont  rien  emprunté  aux  améliocations  Tascher,  qui  consi^. 
taieat  principalement  dans  la  suppression  des  trous  destinés  à. 


ïtttaant  aor  la  demande  reconventionneUe,  prononce  la  main- 
iuie  des  saisies  des  28,  39  et  30  novembre  1S94,  9  et  10  décem- 
bre iB96  ;  condamne  Tascher  frères,  en  réparation  du  préjudice 
cAosi,  h  payer  aux  époux  Guibaud,  à  titre  de  dommages-inté- 
."éb,  one  somme  de  2,000  francs  ;  autorise  les  époux  Guibaud  à 
Ure  insérer  un  extrait  du  présent  jugement  dans  quatre  jour- 
UDx  à  leur  choix,  aux  frais  de  Tascher  frlres,  saus  qae  le  coAl 
lûtal  de  ces  insertions  puisse  dépasser  400  francs. 

CejugenieoL  ayant  été  frappé  d'appel  par  MM.  Taschxb, 
fal  confirmé  par  arrêt  de  la  Cour  de  Bordeaux  le  âS  juillet 
1897,  après  plaidoiries  de  M"  Laine  et  Allaht  (du  barreau 
Je  Paris)  : 

Li  Coira,  Sur  l'appel  principal  : 

Attendu  que  d'après  la  contre- expertise  à  laquelle  les  frères 
Tucher  ont  faitprocéder  pour  essayer  d'affaiblir  les  constatations 
ajtérielles  de  l'expertise  du  27  juillet  1896,  le  système  des  scel- 
-é  métalliques  des  ^poux  Guibaud  neserait  inviolable  qu'à  la 
addition  qae  la  lance  fnt  noyée  au-dessous  de  l'affleurement  du 
^udefagonàne  pouvoir  Ûre  facilement  saisissable  par  une 
PAce  quelconque  ; 

^^oe  HM.  Labroue  et  Georgel  prétendent,  en  effet,  qu'il  est  im- 
posible  que  les  déchirures  produites  sur  les  bords  des  trous  de 
^Oile,  te  referment  asseï,  après  le  passage  de  la  lance,  pour 
■  'ppoaer  i  son  retour  en  recouvrant  les  crans  de  ladite  lance  ; 

Oalb  reconnaissent,  il  est  vrai,  que  le  refoulement  ultérieur 
'■<  1  agrafe  peut  amener  naturellement  le  recouvrement  de  ces 
^'na,  mais,  comme  pour  eux,  rien  n'est  plus  facile  que  de  reti- 
'-^Tagrafe  en  arrière  pour  lui  rendre  la  position  primitive,  l'in- 
'^lïté  de  la  caisse  ne  se  trouve  pas  davanlage  assurée  ; 

*-t.  attendu  qu'il  importe  peu  de  rechercher,  comme  Tont  fuit 


—  52  — 

MM.  Labroue  elGeorgel  dans  leur  contre-expertise,  si  le  système 
des  scellés-métalliques  Guibaud  assure  plus  ou  moins  TinTiolabi- 
lité  des  caisses  mais  uniquement,  comme  Vont  dit  très  justement 
les  premiers  juges,  si  les  époux  Guibaud  se  sont  ou  non  emparés 
des  améliorations  des  frères  Tascher  ;  attendu  qu'il  résulte  très 
nettement  de  l'expertise  à  laquelle  il  a  été  procédé,  en  exécu- 
tion de  Tarrêt  du  14  décembre  1895,  que  les  époux  Guibaud 
n'ont  point  contrefait  le  scelié-métallique  à  goupille  noyée  des 
frères  Tascher,  mais  ont  fait  subir  au  système  Bellen,  aujour- 
d'hui tombé  dans  le  domaine  public,  des  modifications  oouTelles 
n'empruntant  rien  aux  améliorations  que  les  frères  Tascher  ont 
cru  également  devoir  apporter  à  ce  même  système  ; 

Que,  d'après  les  experts,  il  existerait  plus  de  différence  entre 
le  procédé  Guibaud  et  le  procédé  Tascher  qu'entre  le  système  Tas- 
cher et  le  système  Belben  ; 

Qu'en  effet,  l'invention  des  frères  Tascher  consiste  dans  un 
système  de  fermeture  des  caisses  d'emballage  à  l'aide  d'une 
pointe  à  tête  plate,  reliant,  dans  le  bois  de  la  caisse,  les  deux 
cêtés  d'une  plaque  recourbée  ; 

Attendu  que  les  deux  coudes  de  cette  plaque,  après  avoir  été 
enfoncés  de  force  dans  deux  planches  différentes  de  la  caisse,  de 
façon  à  les  agrafer,  sont  traversés  avec  déchirement  du  métal  par 
la  pointe  ou  goupille  dont  la  tête  va  se  noyer  ensuite  dans  le  bois, 
jusqu'à  affleurement  du  coude  supérieur  du  scellé.  Que,  dans  ce 
système,  l'inviolabilité  de  la  caisse  est  obtenue  uniquement  par 
la  juxtaposition  de  la  tête  de  la  pointe  et  de  la  branche  supérieure 
de  l'agrafe  opérée  dans  l'épaisseur  du  bois; 

Attendu  que  le  système  Guibaud  se  compose  aussi  d'une  agrafe 
coudée,  mais  munie  de  trous  ovales  sur  les  deux  branches,  cette 
agrafe  se  place  également  dans  deux  planches  différentes  de  la 
caisse  que  l'on  veut  agrafer  ;  une  lance  plate  et  pointue  à  son  ex- 
trémité, comportant  deux  crans  ou  épaulements,  tient  lieu  de 
goupille  et  s'enfonce  en  forçant  dans  les  trous  ovales  de  l'agrafe 
qu'elle  déchire  pour  se  frayer  un  passage  ;  l'agrafe  est  ensuite  refou- 
lée plus  profondément  de  façon  qu'elle  se  déplace  par  rapport  au 
plan  de  la  lance,  dont  les  crans  ou  épaulements  cessent  par  suite 
d'être  en  regard  des  déchirures  qu'ils  ont  déterminées  ; 

Que,  dès  lors,  l'inviolabilité  de  la  caisse,  au  lieu  d'être  obtenue 
par  les  époux  Guibaud,  à  l'aide  du  noiement  de  la  tête  de  la  lance 
dans  le  bois  comme  dans  le  procédé  Tascher,  est  assurée  par  les 
crans  ou  épaulements  de  la  lancç  qui,  par  suite  du  refoulement 
ultérieur  de  l'agrafe,  ne  se  trouve  plus  en  regard  des  déchirures 
des  parois  des  trous  de  cette  agrafe  ;  —  que  c'est  là  une  modifl- 
cation  sensible  et  nouvelle  du  procédé  Belben,  n'empruntant  rien 


—  53  — 

aux  améliorations  qae  les  frères  Tascher  ont  eux-mêmes  appor- 
tées à  ce  dernier  système  ; 

Qae  les  époux  Guibaud  n'ont,  par  suite,  nullement  contrefait 
leirefet  Tascher; 

Sur  l'appel  incident  : 

Attendu  que  plusieurs  saisies  ont  été  pratiquées  par  les  frères 
Tascher,  les  28,  29  et  30  novembre  1894,  l**  et  3  décembre  1894  ; 
qo  elles  ont  porté  sur  trois  machines  à  balancier  servant  à  fabri- 
quer les  scellés,  sur  des  outils  de  pose  et  sur  200,000  scellés  mé- 
talliques ; 

Qu'en  outre,  les  circulaires,  imprimés,  copies  de  lettres,  notes 
et  correspondances  des  clients  des  époux  Guibaud  ont  été  enle- 
Tés  et  remis  à  un  séquestre  ;  -^  que  les  frères  Tascher  en  ont 
des  copies  qui  leur  ont  permis  de  se  mettre  en  relation  avec  la 
clientèle  des  époux  Guibaud  : 

Qu'ils  ont  même  écrit  à  plusieurs  clients  des  époux  Guibaud 
des  lettres  dans  lesquelles  ils  les  menaçaient  de  les  impliquer 
dans  des  poursuites  en  contrefaçon  ; 

Attendu  enfin  que  les  9  et  10  décembre  1896,  ils  ont  fait  prati- 
qaer  de  nouvelles  saisies  chez  plusieurs  clients  des  époux  Gui- 
baud ; 

Que  tous  ces  agissements  ont  causé  à  ces  derniers  un  grave 
préjudice  dont  les  premiers  juges  n'ont  pas  suffisamment  tenu 
C4>mpte  dans  Tappréciation  des  dommages-intérêts  ;  —  que  la 
Cour  a  les  éléments  suffisants  pour  fixer  à  la  somme  de  4,000  fr. 
le  montant  des  dommages-intérêts  dus  par  les  frères  Tascher; 

Par  ces  motifs.  Et  ceux  non  contraires  des  premiers  juges,  la 
Cour,  sans  s'arrêter  à  l'appel  de  Tascher  frères  et  faisant  droit 
au  contraire  à  l'appel  incident  des  époux  Guibaud  envers  le  ju- 
gement du  Tribunal  civil  de  Bordeaux  du  13  janvier  1897,  tout  en 
confirmant  ledit  jugement  dans  toutes  ses  autres  dispositions 
pour  sortir  effet,  l'infirme  quant  au  quantum  des  dommages-in- 
térêts alloués  aux  époux  Guibaud  parles  premiers  juges  ;  etsta- 
taant  à  nouveau  condamne  les  frères  Tascher  à  payer  aux  époux 
Guibaud  la  somme  de  4,000  francs  à  titre  de  dommages-intérêts, 
prononce  en  tant  que  de  besoin  la  mainlevée  des  saisies  des  1«^, 
3  décembre  1894  du  ministère  de  M®  Vallade,  huissier  à  Bordeaux, 
pratiquées  chez  MM.  Delor  et  Gie,  Achambeaud  frères  et  Cie,  et 
Xomus-Breynat  et  Cie,  déboute  toutes  parties  de  toutes  plus  am- 
ples demandes,  fins  et  conclusions  comme  non  recevables  autant 
qoe  mal  fondées,  condamne  Tascher  frères  à  l'amende  et  en  tous 
l«s  dépens. 

Sur  pourvoi  des  frères  Tascher,  la  Cour  de  cassation 


—  64  — 

(Ch.  des  requêtes)  a,  sous  la  présidence  de  M.  Tanon,  pré- 
sident, après  avoir  entendu  M.  le  conseiller  Bernard,  en 
son  rapporl,M«  Sadvel  avocat,  en  ses  plaidoiries,el  M.Puech 
avocat  général  en  ses  conclusions,  rendu  Tarrét  de  rejet 
suivant: 

La  Cour,  Sur  le  moyen  unique  du  pourvoi  tiré  de  la  violation 
des  articles  19  et  40  de  la  loi  du  5  juillet  1844  et  7  de  la  loi  du 
20avrili810:  ^ 

Attendu  que  les  sieurs  Tascher  frères  soutiennent  que,  sans 
motiver  sa  décision,  Farrét  attaqué  a  rejeté  leurs  conclusions 
de  première  instance  et  d'appel  dans  la  partie  qui  tendait  à  éta- 
blir qu'il  résultait  tant  des  saisies  opérées  au  début  de  Tins- 
tance  que  de  celles  pratiquées  en  décembre  1896  et  des  docu- 
ments saisis  chez  Guibaud  lui-même,  que  Toutil  destiné  à  la  pose 
des  scellés  Guibaud  contenait  un  appareil  accessoire  destiné  à 
noyer  la  tête  de  la  lance,  même  au-dessous  de  TafQeurement  du 
bois  et  qui  ne  pouvait,  vu  la  saillie  du  poinçon,  être  employé 
sans  que  le  noiement  de  la  lance  se  produise  ; 

Mais  attendu  que  ce  moyen  manque  en  fait,  qu^au  chef  des 
conclusions  ci-dessus  prises  par  les  frères  Tascher  en  première  ins- 
tance et  en  appel  il  a  été  répondu  p^r  le  tribunal,  dont  le  juge- 
ment a  été  contirmé  au  principal  avec  adoption  de  motifs  par 
Tarrôt  attaqué  ;  que  le  jugement  constate  qu'on  ne  comprendrait 
pas  que  les  époux  Guibaud  eussent  cherché  à  noyer  la  lance  dont 
s'agit;  qu'en  effet  suivant  lui,  Texamen  des  agrafes  posées  sor 
les  caisses  démontre  que  la  prise  de  la  lance  qui  n'a  pas  de  tète 
est  plus  difficile  et  surtout  laisserait  beaucoup  plus  de  traces, 
lorsque  la  lance  est  restée  à  fleur  de  bois  sans  y  pénétrer,  car 
alors  la  moindre  pesée  d'une  pince  ou  d'un  outil  quelconque  ap> 
paraîtrait  sur  la  caisse  et  au  contraire,  le  travail  de  l'outil  se  dis- 
simulerait bien  mieux  dans  le  trou  produit  par  l'enfoncement  de 
la  lance  et  pourrait  avoir  pour  résultat  d'agrandir  ;  que  de  son 
côté,  l'arrêt  attaqué  a  non  seulement  adopté  le  motif  qui  pré- 
cède,  mais  qu'il  a  ajouté  que  l'inviolabilité  de  la  caisse  au  lieu 
d'être  obtenue  par  les  époux  Guibaud  à  l'aide  du  noiement  de  la 
tête  de  la  lance  dans  le  bois,  comme  dans  le  procédé  Tascher ^ 
est  assurée  par  les  crans  ou  épaulements  de  la  lance  qui,  par 
suite  du  refoulement  ultérieur  de  l'agrafe,  ne  se  trouve  plus  en 
regard  des  déchirures  des  parois  des  trous  de  cette  agrafe  ; 

Attendu  que  l'arrêt  attaqué,  après  ces  constatations  souverai- 
nes, en  conclut,  souverainement  aussi,  que  les  époux  Guibaud 
n'ont  rien  emprunté  ni  contrefait  du  brevet  des  sieurs  Tascher 
frères  ;  qu'en  statuant  ainsi,  l'arrêt  attaqué  n'a  point  violé  les 


-55  — 

articles  19  et  40  de  la  loi  da  5  juillet  1844  et  qu'il  s*ett  conformé 
aux  exigences  de  TarUcle  7  de  la  loi  du  20  avril  1810  ; 

Pab  CBS  MOTiTS,  Rejette,  etc» 


Akt.  4102. 

iitaie  lire'retée.  —  Reprodoeiioii  d«iMi  un 

ait  tiers.  —  Fallb  doiiimaire*Me.  --  Hom- 
et  intéréte. 


S'il  e$t  de  principe  que  la  mauvaise  foi  est  un  élément 
nécessaire  de  la  concurrence  déloyale^  certains  actes  d'un 
commerçant^  lorsqu'ils  sont  de  nature  à  nuire  à  un  autre 
commerçant  et  qu'ils  laissent  à  la  charge  de  leur  auteur  une 
faute  ou  une  imprudence^  peuvent^  en  dehors  de  toute  in- 
tention frauduleusCy  donner  ouverture  à  une  action  en 
dommages-intérêts  (1). 

Notamment^  la  reproduction^  dans  un  catalogue,  d'une 
machine  brevetéey  étant  de  nature  à  laisser  croire  à  des 
fabricants  spéciaux  et  à  indiquer  aux  tiers  que  le  droit  pri- 
vatif de  Vinventeur  est  contesté  ou  même  n'existe  pas,  cons- 
titue  un  fait  dommageable  dont  il  est  dû  réparation. 

ïTHb.  de  la  Seine,  5  JauTier  1809.—  Willame  et  Gie  c.  Bady  et  Kircheis.) 

Ainsi  jugé  par  jugement  en  date  du  5  janvier  1899 
par  la  troisième  chambre  du  tribunal  de  la  Seine»  sous  la 
présidence  de  M.  Lefsbvrk-Dbvaux,  après  conclusion  de 
M.  Rome  substitut  et  plaidoiries  de  M"*  Dbsiardin,  Justal 
et  WssBR,  avocats  : 

Lb  Tribunal,  Joint,  vu  la  connexité,  la  demande  reconvention- 
nelle à  la  demande  principale,  pour  être  statué  par  un  seul  et 
même  jugement  ; 

Attendu  que  la  Société  Willame  et  Gie  prétendant  que  Bady, 
représentant  à  Paris,  de  la  maison  Kircheis  de  Ane  en  Saxe, 
dessine,  reproduit  et  met  en  vente,  dans  un  catalogue  en  langue 
française,  une  machine  à  faire  les  joints  hermétiques  des  boites 
méUiHiqaes,  machine  qai  serait  la  contrefaçon  de  celle  pour  la- 
quelle elle  a  obtenu  le  brevet  172,366,  poursuit  Bady  et  Kircheis 
comme  contrefacteurs  solidaires  ;  que,  leur  reprochant  en  outre, 

(1)  V.  PouiUet,  Marques  dêfab.,  n»  675  et 678. 


—  56  — 

à  raison  de  ces  faits,  un  acte  de  concurrence  déloyale,  elle  con- 
clut à  une  condamnation  solidaire  en  dommages-intérêts  à  fixer 
par  état  ; 

Sur  la  contrefaçon  : 

Attendu  que  la  loi  a  précisé  les  actes  qui  constituent  la  con- 
trefaçon ainsi  que  ceux  qui  lui  peuvent  être  assimilés  ; 

Que  les  faits  reprochés  aux  défendeurs  ne  rentrent  dans  au- 
cun de  ces  cas  et  ne  sauraient  constituer  une  contrefaçon  ; 

En  ce  qui  touche  l'acte  de  concurrence  déloyale  : 

Attendu  que,  sMl  est  de  principe  que  la  mauvaise  foi  est  un 
élément  nécessaire  de  la  concurrence  déloyale,  certains  actes 
d'un  commerçant,  lorsqu'ils  sont  de  nature  à  nuire  à  un  autre 
commerçant  et  qu'ils  laissent  à  la  charge  de  leur  auteur  une 
faute  ou  imprudence,  peuvent,  en  dehors  de  toute  intention  frau- 
duleuse, donner  ouverture  à  une  action  en  dommages-inté- 
rêts; • 

Attendu  que  les  défendeurs,  en  reproduisant  dans  leur  catalo- 
gue destiné  à  la  clientèle  française,  la  machine  pour  laquelle  la 
société  demanderesse  a  pris  un  brevet  dont  ils  ne  contestent  pas 
la  valeur,  ont  commis  un  fait  indu,  une  légèreté,  une  impru- 
dence pouvant  porter  préjudice  à  cette  dernière  ; 

Que  la  reproduction  de  la  machine  brevetée  dans  ce  catalogue 
était  de  nature  à  laisser  croire  à  des  fabricants  spéciaux,  et  à  in- 
diquer aux  tiers,  que  le  droit  privatif  de  la  Société  Willame  et 
Gie  était  contesté  ou  même  n'existait  pas  ; 

Que  l'intention  frauduleuse  fût-eJle  écartée,  le  fait  domma- 
geable n'en  existe  pas  moins  et  ne  saurait  être  excusé  par  cette 
allégation  que,  depuis  1886,  Kircheis  a  vendu  à  Willame  et  Cie 
des  appareils  choisis  par  ces  derniers  dans  le  catalogue  où  figu- 
rait la  machine  brevetée  ; 

Qu'il  est  dû  à  la  société  demanderesse  des  dommages-intérêts 
pour  la  fixation  desquels  ]e  tribunal  possède,  dès  à  présent,  les 
éléments  nécessaires  ; 

Sur  la  demande  reconventionnelle  : 

Attendu  qu'il  ressort  de  ce  qui  précède  qu'elle  ne  saurait  être 
accueillie  ; 

Par  ces  motifs.  Dit  et  déclare  la  Société  Willame  et  Gie  non  re- 
cevable,  mal  fondée  en  sa  demandé  en  contrefaçon,  l'en  déboute 

Déclare  la  saisie  du  30  décembre  1897  de  nuleflet; 

Dit  et  déclare  que  la  condamnation  aux  dépens  sera  une  ré- 
paration suffisante  du  préjudice  causé  ; 

Dit  n'y  avoir  lieu  d'ordonner  les  insertions  demandées  ; 

Déclare  Bady  et  Kircheis  non  recevables,  mal  fondés  en  leur 
demande  reconventionnelle,  les  en  déboute  ; 

Les  condamne  solidairement  pour  les  causes  susénoncées,  au 


—  58  — 

7  décembre  1877,  Goupil  c.  Hermann,  Ann,,  78.141  (l'ar- 
tiste devait  livrer  6  tableaux  dont  les  titres  et  les  prix 
étaient  convenus).  —  V.  Trib.  Seiné,29 Juillet  1892,  Faure 
c.  Charlemont,  Ann.,  93.123  (le  peintre,  pour  éteindre  une 
dette  de  73.000  francs,promettait  de  remettre  chaque  année 
deux  tableaux  et  la  moitié  du  prix  devait  en  être  attribuée 
à  ses  créanciers)  (1). 

En  ce  qui  concerne  les  écrivains,  des  doutes  ont  été 
néanmoins  émis  sur  la  validité  du  contrat,  lorsque  Fau- 
teur, au  lieu  de  stipuler  avec  un  éditeur,  un  libraire  ou  un 
directeur  de  théâtre,a  traité  avec  un  tiers.  C'est,  par  exem- 
ple, à  un  tapissier,  à  un  bijoutier  ou  à  un  banquier  que  le 
littérateur  propose  de  céder  les  droits  à  venir  sur  un  on* 
vrage  qui  n'est  pas  encore  mis  au  jour. 

Laurent  dans  son  Traité  de  droit  civil  (t.  24,  n*  466)  re- 
marque que  s'il  y  a  eu  déjà  une  convention  de  l'auteur 
avec  un  éditeur,  l'auteur  a  un  droit  éventuel  pour  le  cas 
où  il  composera  l'œuvre  annoncée,  droit  susceptible  d'ê- 
tre, dès  à  présent,  transmis  à  un  tiers.  Mais,  prétend-il,  si 
rœuvre,  non  encore  composée,  n'a  fait  l'objet  d'aucun 
traité  avec  un  éditeur,  il  n'existe  aucun  débiteur,  même 
éventuel,  des  droits  d'auteur  et  il  n'y  a  rien  qu'on  puisse 
céder. 

Notons  que  Laurent,  aussi  bien  qu'un  arrêt  de  1854  ci  té 
plus  loin,  raisonne  ici  sur  la  cession  des  créances  qui  nais- 
sent au  sujet  de  l'œuvre  future,  tandis  qu'il  s'agit,  non  pas 
de  la  cession  d'une  créance,  mais  de  la  cession  de  l'œu- 
vre elle-même. 

Il  est  évident  que  si  l'écrivain  n'a  pas  trouvé  d'éditeur, 
s'il  n'a  pas  de  contrat  d'édition  signé  par  avance,  il  ne 
peut  pas  céder  le  bénéfice  de  ce  qui  n'existe  pas.  Mais 
nous  étudions  une  question  différente,  quand  le  littéra- 
teur n'a  pas  de  droits  à  transmettre,  il  peut  avoir  des  obli- 
gations à  exécuter.  Il  peut  en  avoir  vis-à-vis  de  tiers  qui 
ne  sont  ni  directeurs  de  théâtre  ni  libraires.  Et  c'est  ce 
dont  ni  Laurent,  ni  certains  autres  jurisconsultes  (2)  ne 

(1)  V.  dans  le  même  sens  :  Pouillet,  Prop7\  lUt»,  n*«  S^,  254  et  d05  ; 
Huard  fils,  Des  contrats  entre  les  aut,  et  les  édit.^  n*  38  ;  Pand,franç! 
Rép,,  V»  Propr,  litL,  n««  1740  et  suiv.  *  ' 

(2)  MM.  Aubry  et  Raa,  t.  4,  §  359,  p.  490  (4*  édit.)  et  GuiUoaard,  Traité 
de  la  vente f  t.  S,  n»  750,  reproduisent  parement  et  simplement,  comme 


k 


-  59  - 

se  sont  préoccupés.  Pour  ma  part  je  ne  vois  pas  pour- 
quoi un  écrivain  ne  pourrait  pas  dire  même  à  son  tapis- 
sier :  «  je  m'engage  à  écrire  et  à  vous  remettre  le  ma- 
nascrit  d'un  roman  ;  vous  aurez  la  faculté  d'en  disposer 
3t  d'en  garder  les  bénéfices  pécuniaires  >.  En  dépit  de 
cette  convention,  Técrivain  conservera  sans  doute  un  cer- 
tain droit  de  contrôle,  personnel  et  inaliénable,  sur  la  pu- 
blication de  son  œuvre.  Mais  un  semblable  traité  anticipé 
sur  des  droits  de  reproduction  à  venir  ne  me  semble  avoir 
rien  d'illicite.  La  distinction  suivant  laquelle  le  contrat  se- 
rait valable  si  un  éditeur  y  a  concouru,— et  Irrégulier  dans 
riivpothèse  contraire»  —  ne  se  justifie  pas.  Dans  l'un  et 
lautre  cas,  si  l'écrivain  manque  à  son  engagement,  son 
obligation,  qui  est  une  obligation  de  faire,  se  résout  en 
dommages-intérêts. 

Les  seules  conditions  pour  que  la  convention  soit  vala- 
ble sont  que  cette  convention  porte  sur  un  objet  précis  et 
déterminé  et  qu'en  outre,  les  tribunaux  n'y  puissent  trou- 
Ter  un  de  ces  engagements  indéfinis  et  perpétuels  qu'ils 
annulent  comme  destructifs  de  la  liberté  humaine  (1). 

Ces  considérations  me  paraissent  de  nature  à  concilier 
les  deux  décisions  de  la  Cour  de  Paris  rendues  en  1854  à 
l'occasion  d'Alexandre  Dumas  père.  Alex.  Dumas  avait 
transporté  au  sieur  Chéramy  une  somme  de  40.000  francs  à 
prendre  sur  celles  qui  pourraient  lui  être  dues  en  vertu 
des  traités  faits  avec  les  journaux  le  Constitutionnel^  le 
Siècle  et  la  Presse^  et  avec  le  Théâtre  historique.  Les  trai- 
tés avec  les  journaux  existaient  ;  ils  étaient  relatifs  à  des 
œuvres  non  encore  composées  :  la  convention  avec  Ché- 
^my  avait  un  objet  bien  déterminé.  La  Cour  décida  : 
«  que  cette  convention  ainsi  formulée  n'est  pas  contraire 
à  la  loi,  rien  ne  s'ôpposant  à  ce  que  les  gains  à  prove« 
nir  de  contrats  qui  confèrent  à  chacune  des  parties  des 
droits  et  devoirs  réciproques  soient  la  matière  d'une  ces- 
sion ..  (Paris,  27  nov.  1854,  D.  P.  56.2.253.) 

Quelques  mois  avant,  la  Cour  avait  donné  une  autre  so- 
lution dans  les  circonstances  suivantes  : 

Linrent  da  reste,  la  solation  de  l'arrêt  du  31  janvier  1854,  sans  discus- 
soa  et  poDr  ainsi  dire  sans  motifs  à  l'appni. 

\V}  Cfr.  snr  ce  dernier  point  les  questions  posées  dans  le  jugement 
Charlemoot  :  Trib.  Seine,  29  juiUet  1902,  Ann,,  93.123.  Le  tribunal  a 
nlidé  les  obligations. 


—  eo  — 

Dumas  avait  cédé  à  certains  de  ses  créanciers  «  le  pro- 
duit de  ses  œuvres  dramatiques  faites  et  à  faire  >.  Les 
créanciers  avaient  signifié  le  contrat  à  la  Société  des  au- 
teurs dramatiques.  Pour  les  œuvres  qui  existaient  avant 
le  traité,  pas  de  difficulté  ;  pour  les  autres,  la  Cour  dé- 
cida :  «  que  personne  ne  peut  être  débiteur  des  produits 
d'une  chose  qui  n'existe  pas  ;  que  le  produit  des  œuvres 
littéraires  qu'un  auteur  a  projetées  mais  qu'il  n'a  pas 
encore  composées  ne  saurail  donner  lieu  à  une  cession  ; 
d'où  il  suit,  que  le  cessionnaire  ne  peut  être  saisi  par  un 
acte  de  cette  nature,  à  l'égard  des  tiers,  des  deniers 
provenant  des  œuvres  composées  après  la  date  de  la 
signification.  »  (Paris,  31  janv.  1884,  Doyen  c.  Dumas, 
D.  P.  58.2.179.) 

Les  formalités  du  transport  des  créances  avaient,  dans 
celte  espèce,  été  employées  mal  à  propos  ;  mais  la  Cour 
statuait-elle  expressément  sur  le  point  de  savoir  si  Alexan- 
dre Dumas  aurait  pu  contracter  valablement  son  obliga- 
tion sous  une  autre  forme  ?Les  motifs  de  l'arrêt  présen- 
taient quelque  ambiguïté. 

La  question  s'est,  depuis,  représentée  nombre  de  fois 
pour  les  auteurs  dramatiques.  On  peut  apprécier  la  juris- 
prudence du  Tribunal  de  la  Seine,  d'après  les  deux  déci- 
sions suivantes  : 

!'•  Affaire  :  Léon  Vasseur.  -i  Trib.  Seine,  6  juin  1894. 

Attendu  que  si  ladite  cession  est  valable  quant  aux  produits 
des  œuvres  musicales  et  pièces  de  théâtre  déjà  créées  et  livrées, 
il  n'en  saurait  être  de  même  pour  les  droits  d'auteur  sur  celles 
qui  étaient  simplement  projetées  mais  non  composées,  qu'évi- 
demment il  dépendait  de  Vasseur  de  faire  ou  de  ne  pas  faire  ; 
et  que  par  suite  cette  convention  n'a  pu  engendrer  un  lien  de 
droit,  parce  qu'elle  était  contractée  sous  une  condition  pure- 
ment potestative  de  la  part  de  Tobligé,  qu'une  telle  convention 
est  donc  nulle  aux  termes  de  l'article  1174  du  Gode  civil. 

2*  Affaire  :  Belot.  —  Trib.  Seine,  25  mai  1897. 

Attendu  que  pour  assurer  à  Bloch  le  recouvrement  de  ce  qu'il 
devait,  Belot  par  acte  sous  seings  privés  en  date  du  13  novembre 
188.3,enregistré  le  9  du  même  mois,  lui  a  transporté  une  part  du 
revenu  de  ses  œuvres  dramatiques  savoir  :  1^  la  moitié  de  tous 
les  droits  résultant  à  son  profit  des  représentations  de  ses  pièces 


M 


i 


aoqniËaie  de  tons  les  droits  qui  pourraient  être  perçus  sur  ses 
EOTresi  venir  > 

Attenda  en  ce  qui  concerne  le  transport  des  droits  d'auteur  à 
potcToir  sur  les  œuvres  à  venir,  que  la  conveution  est  radicale- 
ment nulle  comme  entachée  d'une  condition  potestative  de  la  part 
da  cédant  ;  qu'elle  ne  peut  produire  aucun  effet  utile  (1). 

La  solulion  est  exacte  en  ce  sens  qu'il  est  certain  que 
le  contrat  :  <  je  cède  a  M.  X...  le  produit  des  œuvres  que 
je  pourrai  faire  »,  est  indéterminé  et  conclu  sous  une 
condition  prolestativede  la  part  du  débiteur.  Le  cédant, 
lié  par  des  termes  aussi  vagues  est  libre  de  ne  composer 
incaae  œuvre  ;  il  n'aura  pris,  en  réalité,  aucun  engage- 
méat 

Mais  on  voit  en  même  temps,  en  se  reportant  aux  déd- 
iions déjà  citées  dans  cet  article,  combien  il  sérail  facile 
lie  rendre  le  contrat  valable  en  y  ajoutant  un  peu  de  pré- 
cision. Il  suffirait  de  dire:  «  je  m'enfitage  envers  M.  X...  à 
eomposer  deux  (ou  trois  ou  dix)  œuvres  dramatiques 
cbaqne  année,  pendant  X  années,  à  les  faire  Jouer,  et  à 
loi  en  laisser  loucher  les  bénéSces  >  ou  <  :. . .  à  lui  en  re- 
aetlre  les  manuscrits  pour  les  faire  jouer  ou  éditer  et  en 
toncherles  bénéfices.  *  Un  tel  engagement  ne  comporte 
aucune  condition  potestalive  ;  il  serait  régulier.  11  y  a  là 
ODJqnement  une  question  de  forme  et  de  rédaction  dans 
le  libellé  du  contrat  ;  mais  cette  question  est  d'une  grande 
importance, puisqu'elle  entraîne  la  validité  ou  la  nullité  de 
l'acte. 

U  Cour  de  Paris,  dans  l'arrêt  du  31  janvier  1884,a  tran- 
thé  nne  autre  question,  à  propos  des  significations  faites 
i  l'a^nt  de  la  société  des  auteurs  dramatiques.  Elle  a  dé- 
cidé que  cet  agent  n'était  pas  le  débiteur  des  auteurs, 
nuis  leur  représentant  ou  mandataire.  Loi^qu'une  cession 
fedroila  d'auteur  lui  est  signifiée,  cette  signification  peut 
ivûir  effet  sur  les  deniers  dont  l'agent  est  détenteur  à  ce 
moment  ;  mais,  ajoute  la  jurisprudence,  elle  laisse  libres 
Iwsonimes  qui  seront  encaissées  postérieurement.  Cfr- 
dans  le  même  sens  :  Trib.  Seine,  12  juillet  1898  ,D.  c.  W,, 
jonmal  la  Loi,  1898.  p.  745.  —  Et  le  jugement  précité  du 

(1]  CIr.  observ.  de  H.  Dams,  dans  \e  Dr oU d'auteur,  1897,  p.  1Ï8. 


—  62  — 

6  juin  1894.  Sur  ce  jugement,  M.  Darras  (dans  le  Droit 
d^ auteur j  1895,  p.  48)  a  très  juslement  fait  remarquer  com- 
bien cette  solution  est  grave  pour  les  cessionnaires  des 
auteurs  dramatiques  ;  ils  auront  grand*peine  à  assurer 
pour  Tavenir  l'effet  des  cessions  qui  leur  ont  été  consen- 
ties. Il  peut  s'ensuivre  une  sérieuse  atteinte  au  crédit 
des  écrivains. 

Quoi  qu'il  en  soit,remarquons  que  la  jurisprudence  fran* 
çaise  sur  la  cession  des  œuvres  futures  s'est  presque 
complètement  formée  à  l'occasion  des  engagements  exces- 
sifs qu'Alexandre  Dumas  avait  dû  contracter  vis-à-vis  de 
ses  créanciers.  Cette  jurisprudence,  on  vient  de  le  voir, 
ne  s'est  pas  démentiejusqu'à  présent  quant  aux  questions 
concernant  les  auteurs  dramatiques.  Elle  a  été  inspirée 
par  cette  idée  fort  équitable  qu'il  faut  malaisément  tolérer 
que  l'écrivain  engage  l'avenir  par  des  contrats  vagues 
dont  il  n'aurait  pas  mûrement  précisé  les  détails  et  pesé 
les  conséquences. 

C'est  plutôt  à  propos  des  artistes  qu'une  théorie  plus 
large  s'est  fait  jour  (V.  surtout  le  jugement  de  1892,  aflf. 
Charlemont). 

La  liberté  des  conventions  est  absolue  ;  les  engagements 
que  prend  un  homme,  même  sous  la  contrainte  des  cir- 
constances et  poussé  par  les  besoins  d'argent,  doivent 
être  respectés,  s*ils  sont  clairs,  précis,  et  non  interdits 
par  un  texte  formel.  Tous  les  contrats  de  travail  reposent 
sur  l'avenir.  La  loi  doit  être  tulélaire,  mais  libérale,  aussi 
bien  pour  l'écrivain  aux  gages  des  libraires,  que  pour 
l'ouvrier  qui  loue  aux  capitalistes  la  force  de  ses  bras(l). 

Albert  Vaunois. 

Art.  4104- 

JoaniAltote».  —  X^ooa^e  fie  ser^lees*  — 

Congédiement. 

La  question  de  savoir  si  le  fait  de  congédier  un  rédacteur, 

(1)  Le  crédit  littéraire  peut  s'exercer  de  bien  des  façons,  par  exemple 
la  mise  en  gage  an  droit  d*autear  (V.  obs.  de  M.  Darras,  dans  le  Droit 
cf'att^eur,1899,  p.  55).  Les  voies  d'exécution  forcée  sur  le  droit  d'anteur 
donnent  également  lien  à  de  nombreuses  difficultés.  Toutes  ces  ques- 
tions étaient  en  dehors  du  cadre  de  cet  article,  limité  aux  œuvres  fu- 
tures. 


—  63  — 

toec  lequel  aucun  contrat  n'a  été  passé,  peut  donner  ouver- 
tvre  à  des  dommages-intérêts,  est  subordonnée  aux  circons- 
tances  de  fait  dans  lesquelles  le  congé  a  été  donné  (1). 

/{  n'y  a  lieu  à  dommages-intérêts  si  un  préavis  a  été 
donné  avec  un  délai  suffisant,  délai  que  les  tribunaux  ont 
^woir  d'apprécier,  et  siy  en  outre,  le  congé  n'apparaît 
pas  avoir  été  donné  dans  des  conditions  abusives  oudolosi- 
m  (2). 

La  preuve  de  Fabus,  du  dol  ou  de  V insuffisances  des  dé- 
lais incombe  à  celui  qui  les  invoque  (3). 

(C.  de  JPsiris,  7  décembre  1899.  ~  Glémencean  c.  joornal  le  Soir*) 

A  la  date  du  14  avril  1897,  le  Tribunal  civil  de  la  Seine 
avait  rendu  le  jugement  suivant  : 

b&  TuBONAL,  Attendu  que  la  lettre  de  Fernand  Xau  à  Glémen- 
ceaa  qui  constate  rengagement  de  celui-ci  comme  rédacteur  au 
journal  Le  Soir,  n'indique  pas  la  durée  de  cet  engagement  ; 

Attendu  qu'aux  termes  de  Farticle  1780  du  Gode  civil  le  louage 
de  service,  fait  sans  détermination  de  durée,  peut  toujours  cesser 
par  la  volonté  de  Tune  des  parties  contractantes  ; 

Attendu  que  le  contrat  qui  se  forme  entre  le  directeur  du  jour- 
ml  et  des  rédacteurs  est  d'autant  plus  soumis  à  cette  règle  du 
droit  commun,  qu'à  raison  de  sa  nature  toute  spéciale,  il  impli- 
que, pour  chacune  des  parties,  la  faculté  de  rompre  son  engage- 
ment quand  elle  le  juge  convenable  et  sans  avoir  à  rendre  compte 
des  motifs  de  sa  décision  ; 

Attendu  que  si  le  directeur  d'un  journal  ne  peut  user  de  son 
droit  de  congédier  un  rédacteur, qu'en  observant  les  usages  et  au- 
tres conditions  expresses  ou  tacites  de  l'engagement,  c'est  au 
rédacteur  congédié  qu'incombe  la  charge  de  prouver  à  la  fois  la 
faute  qu'il  impute  à  son  cocon  tractant  et  le  dommage  qu'il  a  subi 
par  suite  de  cette  faute  ; 

(i-3)  Cet  arrêt  est  intéressant  à  raprocher  de  celui  rendu  par  la  même 
chambre  de  la  Cour  de  Paris,  le  27  juillet  1897,  à  la  requête  de  Vonoven 
•tiotres  contre  Vlntransigeant  (An/i.,  98.30).  Le  jugement  avait  été 
renda  par  la  l**  chambre  du  tribunal  civil  de  la  Seine  le  même  jour  que 
ceux  ^  ont  été  infirmés  par  l'arrêt  du  27  juillet  1897  et  à  peu  près 
daas  les  mêmes  termes.  Biais  tandis  que  l'arrêt  du  27  juillet  1897  a  in- 
toé  en  constatant  qu'en  &it  les  rédacteurs  de  Vlntransigeant  avaient  été 
nofcfféi  abusivement,  par  un  pur  caprice,  Tarrêt  du  7  décembre  1899 
confirme  parce  qne,dan8  l'espèce,  le  congé  ne  parait  pas  avoir  été  donné 
^vement  et  qu'en  tous  cas  le  demandeur  ne  fait  pas  la  preuve  de 
l'abus,  du  dol  ou  de  Tinsuffisance  des  délais.  Les  principes  appliqués 
par  les  deux  arrêts  restent  les  mêmes  (V.  Ann,,  98.30,  la  note). 


--64- 

Attendu  que  Glëmenceaa  n'établit  pas  que  Xau,  en  faiMint  ees- 
«er  au  mois  de  janvier  1896  sa  collaboration  au  journal  Le  Sotr, 
ait  méconnu  les  usages  de  sa  profession  dont  la  preuve  n'est  pas 
rapportée,  ni  aucune  des  autres  conditions  môme  tacites  auxquel- 
les aurait  été  soumis  son  engagement  ; 

Attendu,  en  conséquence,  que  sa  demande  ne  peut  être  ad- 
mise; 

Par  ces  motifs,  Déclare  Clemenceau  mal  fondé  en  sa  demande  ; 

L'on  déboute  ; 

Et  le  condamne  aux  dépens, 

Sur  appel,  la  Cour  de  Paris  (1'''  ch.)»  sous  la  présidence 
de  M.  Lbpbbvi^e  de  Viefvillb  a  rendu  Tarrêt  confirmatif  qui 
suit: 

La.  Cour,  Considérant  que  la  question  de  savoir  si  le  fait  de 
congédier  un  rédacteur,  avec  lequel  aucun  contrat  n'a  été  passé» 
peut  donner  ouverture  à  des  dommages-intéréts,est  subordonnée 
aux  circonstances  de  fait  dans  lesquelles  le  congé  a  été  donné  ; 

Que,  si  un  préavis  a  été  donné  avec  un  délai  suffisant,  délai 
que,  a  défaut  d'usages  spéciaux,  dont  il  n'est  justifié,  les  tribu- 
naux ont  pouvoir  d'apprécier,  si,  en  outre,  le  congé  n'apparaît 
pas  avoir  été  donné  dans  des  conditions  abusives  ou  dolosives,  il 
n'y  a  lieu  à  dommages-intérêts  ;  que  la  preuve  de  l'abus,  du  dol 
ou  de  l'insuffisance  des  délais,  incombe  à  celui  qui  les  invoque  ; 
que  cette  preuve  n'est  point  rapportée  par  Clemenceau  à  Rencon- 
tre du  journal  Le  Soir  ; 

Par  css  motifs.  Et  adoptant  les  motifs  de  premiers  juges  ; 
Confirme  avec  amende  et  dépens. 

Plaidants  :  M**  Maurice  Bernard  et  Aubin,  avocats. 


Art,  4405. 

Brevet».  —  Aetlon  en  nnlUié,  en  déeliénnee,  pro- 
priété des  brev'etn.  — *  Proeédnre  •ootmalre.  —  Ae- 
Uon  en  eontreteçon.  ~  Proeédnre  ordlnnlre. 

Les  affaires  civiles  doivent  être  jugées  dans  la  forme  or- 
dinaire, à  moins  que  par  exception  elles  ne  soient  classées 
parmi  les  affaires  sommaires. 

Les  actions  en  nullité  ou  déchéance  de  brevets^les  contes^ 
UUions  relatives  à  la  propriété  des  brevets,  doivent  étreju- 


! 


—  65  — 

Sée$  par  les  tribunaux  civils  comme  matières  sommaires  ; 
mais  les  poursuites  civiles  en  contre  façon  doivent  être  jugées 
en  la  forme  ordinaire,  alors  même  qu'avant  de  les  intro- 
duire^ le  demandeur  aurait  fait  saisir  des  échantillons  des 
produits  qu'il  prétend  avoir  été  contrefaits . 

n  n'en  serait  autrement  que  si  le  défendeur  agissant  ra- 
conventionnellement  avait  soulevé  une  question  de  nullité, 
de  déchéance  ou  de  propriété  de  brevet  (1). 

(G.  de  Douai,  81  juillet  1809.  —  Boudreaux  c.  Damade  et  Cie.) 

Le  jugement  rendu  dans  celle  afTaire  par  le  tribunal  ci- 
vil de  Douai,  le  24  février  4899  (Awn.,  99.221)  a  été  infir- 
mé par  la  Cour  de  Douai,  le  21  juillet  1899,  en  ces  termes  : 

La  CouB,  Attendu  que  les  affaires  civiles  doivent  être  jugées 


il)  L'arrèi  décida  que  les  poarsoites  en  contrefaçoti,  n'étant  pae  oom* 

prises  dana  rénomération  de  l'article  34  de  la  loi  de  1844  qui  vise  spécia- 

luDent  les  demandes  en  nnliitë  ou  en  déchéance,  restent  soumises  aux 

réfies  ordinaires  de  la  procédure  et  que  par  suite  les  frais  doivent  être 

axés  suivant  le  tarif  des  frais  en  matière  ordinaire.  On  peut  se  de- 

ciander  si  cette  solution,  résultat  de  l'interprétation  stricte  des  textea 

oeâ  articles  $4  et36  de  la  loi  de  1844,  est  conforme  à  l'intenlion  du  législa- 

tenr,  car,  les  demandes  en  contrefaçon,  tenant  en  suspens  les  droits  in- 

dostriels  et   commerciaux  do  défendeur  et  mettant  en  suspicion  sa 

bonne  foi,  constituent  des  litiges  dont  la  solotion  est  urgente  et  dès 

lors  rentrent  dans  la  catégorie  des  demandes  requérant  célérité,  qui.  aux 

'iTmta  de  Tartide  404  du  Code  de  procédure,  doivent  être  considérées 

c^mme  matières  sonunaires  (Voir  Angers,27  février  l898,Grawitz,cité  par 

i'OQîtlet»  Brev,  ctinv.,  4«  éd.,  p.  559).  Mais  11  semble  bien,  en  admettant  la 

'séorie  derarrél,  que  la  solution  ne  serait  pae  changée,  ei  reconventlon- 

Kîlsnient  ce  déiendear  avait  soulevé  nne  qoeslion  de  nullité,  déchéance 

n  propriété  de  brevet,  car  l'application  des  prineipes  généraux  conduit  à 

■i  règle  que  c'est  la  nature  de  l'instance  principale  et  elle  seule  qui  doit 

déterminer  la  natnre  de  la  taxe  :  si  la  demande  prlncipsile  soulève  nne 

çuèstion  de  propriété  ou  de  validité  de  brevet,  l'affaire  est  sommaire  et 

K&bre  dans  las  prévîMona  de  l'article  3&  ;  dans  le  cas  contraire, elle  reste 

srdiaatre,  quelle  qae  soit  la  nature  de  la  demande  reconventionnelle 

*c«r  Bocérian,  Prop.  mcf.,  n«35l).  Or,  la  Cour  de  cassation  a  décidé 

*;3l1 7  avait  matière  sommaire,  dans  une  espèce  où  la  nullité  du  brevet 

Btvût  été  aoolevée  qtte  par  exception  snr  l'action  en  contrefaçon,  par 

et  notif  qa'il  a'agiaeail  bien  d'une  contestation  relative  à  la  propriété 

Sun  brevet,  qni  d'après  l'article  3  de  la  loi  du  5  juillet  1844,  devait  être 

^traite  et  jugée  dans  la  forme  prescrite  pour  les  matières  sommaires 

îî.  Paris,  13  février  1865,  Cornevin,  Ann.,iSS,  69).   Ne  serait-il  pas 

H«s  logique  de  dire  qne  tontes  les  actions  en  contrefaçon  doivent  être 

^^■■idéréee  eomme  natière  sommaire,  soit  au  point  de  vue  de  Tarti- 

<^  M  dn  Gode  de  procédure  civile,  soit  au  point  de  vue  de  la  loi  de  1844, 

ar  i]y  a  toujours  dans  l'action  en  contrefaçon  nne  contestation  sur  les 

^li  da  breveté,  donc  sur  la  propriété  du  brevet.  A.  T. 


—  66  — 

dans  la  forme  ordinaire  i  moins  qae  par  excepf  on  elles  ne  soient 
classées  parmi  les  affaires  sommaires  ; 

Attendu  que  les  articles  34  et  36  de  la  loi  da  b  juillet  1844  sar 
les  brevets  d'invention  disposent  que  les  actions  en  nullité  et 
en  déchéance,  ainsi  que  les  contestations  relatives  à  la  propriété 
des  brevets,  doivent  être  portées  devant  les  tribunaux  civils  et  être 
jugées  dans  la  forme  prescrite  pour  les  matières  sommaires  ; 

Attendu  que  les  poursuites  civiles  en  contrefaçon  n'étant  pas 
comprises  dans  Ténumération  de  Tarticle  34  restent  soumises  à  la 
règle  générale  et  sont  ordinaires  à  moins  que  le  défendeur  agis- 
sant reconventionnellement,  n'ait  soulevé  une  question  de  nullité , 
de  déchéance  ou  de  propriété  de  brevet,et  fait  ainsi  rentrer  l'affaire 
dans  la  classe  des  matières  sommaires  ; 

Attendu,  en  fait,  que  par  son  assignation  du  20  juillet  1897  ainsi 
quepar  ses  conclusions  de  première  instance  et  d^appel,Boudreaax 
a  demandé  que  Damade  et  Gie  fussent  déclarés  contrefacteurs  de 
son  brevet  d'invention  et  condamnés  à  lui  payer  des  dommages 
et  intérêts  à  libeller  ;  que  Damade  et  Cie,  de  leur  côté,  ont  pré* 
tendu  que  les  produits  de  leur  fabrication  ne  constituaient  pas 
une  contrefaçon  ;  qu'ils  étaient  l'objet  d'une  poursuite  vexatoire 
et,à  ce  titre,  ont  demandé  reconventionnellement  10.000  francs 
de  dommages  et  intérêts; 

Attendu  que  cette  double  instance  ne  soulève  aucune  question 
de  nullité  de  déchéance  ou  de  propriété  des  brevets  ou  certificats 
d'addition  invoqués  dans  la  cause  ;  qu'elle  a  donc  conservé  les 
caractères  d'une  affaire  ordinaire  ; 

Attendu  que  les  contestations  relatives  à  des  saisies  sont,  en  gé- 
néral, sommaires  aux  termes  de  l'article  404  §  4  du  Code  de  pro- 
cédure civile,parce  que  par  leur  nature  elles  requièrent  célérité  ; 
mais  qu'on  ne  peut  considérer  l'instance  en  contrefaçon  de  Bou- 
dreaux  comme  une  affaire  de  saisie,  bien  que,  avant  de  Tiotro* 
duire,  il  ait  fait  saisir  chez  les  défendeurs  quelques  échantillons 
de  leurs  produits. 

Attendu  d'ailleurs,  que  la  saisie  pratiquée  en  matière  de  con- 
trefaçon est  le  plus  souvent  seulement  descriptive,  ou  ne  porte 
que  sur  un  petit  nombre  d'objets  ;  qu'elle  n'a  pas  la  généralité  des 
saisies  ordinaires  et  n'imprime  pas  à  l'action  qui  en  est  la  suite 
le  caractère  d'urgence  qui  fait  considérer  comme  sommaires  les 
frais  des  saisies  ; 

Que,  par  suite,  l'affaire  Boudreaux  contre  Damade,  ne  rentrant 
pas  dans  les  cas  d'exception  prévus  par  les  articles  34  et  36  da 
la  loi  du  5  juillet  1844  et  404  du  Gode  de  procédure  civile,  est  or- 
dinaire et  a  été  régulièrement  taxée  comme  telle  ; 

Par  gbs  motifs,  Déclare  Damade  et  Gie  mal  fondés  dans  leurs 


—  67  — 

Eonelnsions  ;  les  débonte  de  leur  opposition  et  dit  que  la  taxe  en- 
treprise sortira  son  plein  et  entier  effet  ;  condamne  Damade  aux 
dépens. 

M.  Bosquet,  président  ;  M.  Scuulbr,  ministère  public.  — 
M«  Pomy,  avocat. 


Art.  4106. 

iwet,  —  Bmployé.  —  CTollaboration .  — 
Copropriété. 

Lorigu'une  machine  nouvelle  est  construitey  sous  la  dû 
rection  cTun  ingénieur ,  mais  aux  frais  et  dans  les  ateliers 
iune  sociéêéy  et  que,  d'autres  ingénieurs,  dessinateurs  ou 
ouvriers  de  la  société,  ont  coopéi*é  à  son  exécution,  chacun 
apportant  à  Vœuvre  sa  part  d'imagination,  de  travail  et  de 
sain,  rinvention  ainsi  réalisée  doit  élre  considérée  comme 
lu  propriété  commune  de  Vingénieur  et  de  la  société  (1). 


(i)  Li  <iiiestîon  de  savoir  à  qai  appartient  la  découverte  faite  par  une 
penonne  qui  est  au  service,  aux  gages  d'un  patron  est,  avant  tout,  une 
fsestioB  de  fait,  dont  la  solution  dépend  de  circonstances  on  de  con- 
veations  particulières.  Si  Touvrier  ou  l'employé  a  été  engagé  spéciale- 
ment en  vue  d'effectuer  des  recherches  déterminées,  on  doit  décider, 
même  en  l'absence  de  convention  formelle  que  Tinvention  qui  n'est  que 
k  résultat  da  travail  auquel  l'employé  était  préposé  appartient  au 
patron.  Y.  Ponillet,  Brev.  âfinv.,  n»  188  et  la  jurisprudence  citée  no- 
tuoment,  Lyon,  19  mai  1886,  Bobard,  Annales,  87,  181. 

S,  au  contraire,  l'invention  est  en  dehors  des  travaux  ordinaires  de 
remployé  on  en  dehors  de  ses  instructions,  il  garde  la  propriété  de  son 
invention,  alors  même  que  ce  serait  pendant  les  heures  consacrées  à 
son  travail,  et  grâce  aux  instruments,  outils  en  matière  première  appar- 
tenir au  patron  qu'il  aurait  pu  le  réaliser,  sauf  à  être  condamné,  au 
besoin,  dans  ce  cas,  à  des  dommages  et  intérêts  par  le  préjudice  causé 
an  patron.  V.  Ponillet,  n*  190  et  Bruxelles,  9  janvier  1893,   Chantrenne, 
umée  1803,  p.  282  et  plus  loin,  Trib.  civ.  Seine,  2  juin  1899,  Fleury. 
S  enfin  la  réalisation  de  la  découverte  est  le  résultat  des  efforts  com- 
binés de  l'employé  et  de  celui  qui  le  met  en  œuvre,  l'invention  devient 
b  propriété  oommnne,   sauf  à  évaluer  la  part  de  chacun  dans  cette 
copropriété,an prorata  du  résultat  de  leur  collaboration.Lyon,26  déc.1857, 
Coquerel,  S.  59.1.768  et  plus  loin,  Trib.  civ.  Bruxelles,  17  mars  1897, 
Bandiept.  La  jurisprudence  applique  les  mêmes  principes  ans  fonc- 
tionnaires publics  qui  sont  des  employés  comme  les  autres  et  restent 
propriétaires  des  inventions  qn'ils  peuvent  faire,  suivant  les  distinctions 
pr^emment  rappelées.  V.  Pouillet,  n«  193  et  jurisprudence  citée  et 
*uii  en  matière  de  propriété  artistique ,  Bruxelles,  28  nov.    1898, 
Oopoat,  Pasierisie,  99.2.177. 

A.  T- 


I 


,^'' 


-68- 


(Tribanal  de  la  Seioe^lO  mai  1808.—  Société  Clément,  Gltdiator^Hvnb 

c.  Pingaalt  et  Clerc.) 

Ainsi  jugé  par  le  tribunal  dé  la  Seine  (3«  ch.)  le  10  mai 
1898  sous  la  présidence  de  M.  Roollkau  après  conclusions 
de  M.  Drouart,  substitut  et  plaidoiries  de  MM^*  Pooujjrr  et 

Allart. 


Lb  Tribonal,  En  la  forme  :  Attenda  que  Clerc  et  Pingault  ont 
formé  contre  la  société  Clément,  Gladiator  et  Humber  uoe  de* 
mande  en  paiement  de  150.000  francs  de  dommages  et  intérêts 
pour  contrefaçon  d*un  brevet  dlavention  ;  que,  d*autre  part,  la 
société  Clément,  Gladiator  et  Humbert  a  introduit  contre  Clerc  et 
PingauU  une  demande  en  résiliation  de  convention  et  en  reven- 
dication du  brevet  argué  de  contrefaçon  ; 
Que  ces  instances  sont  connexes  et  doivent  être  jointes. 
Au  fond  :  Attendu  qu'aux  termes  d*une  convention  en  date  du 
8  décembre  1895  Clerc  et  Pingault  ont  consenti  à  la  Compagnie 
des  cycles  Gladiator,  le  monopole  pour  la  France  de  la  construc- 
tion et  de  la  vente  de  procédés  électriques  faisant  l'objet  d*uD 
brevet  déposé  le  4  décembre  1895  par  moteurs  électrlquaë  apê» 
cialement  applicables  à  la  propulsion  des  cycles  et  voitures  au- 
tomobiles; que  par  la  même  convention,  il  était  arrêté  que 
Pingault  entrerait  à  l'usine  de  la  Compagnie  aux  appointements 
de  300  francs  par  mois  pour  s'occuper  spécialement  de  la  fabrî* 
cation  des  appareils  brevetés  ; 

Attendu  que  dans  le  brevet  du  4  décembre  1895  Tappartil 
décrit  pour  la  propulsion  des  cycles,  se  compose  d'un  moteur 
électrique  actionné  par  des  accumulateurs  et  muni  sur  l'arbre  de 
rinduit  d'une  poulie  destinée  à  communiquer,  par  friction  sur 
le  bandage  du  pneumatique,  le  mouvement  à  la  roue  d'arrière 
au-dessus  de  laquelle  l'appareil  est  installé  ; 

Attendu  que  pour  des  causes  multiples  faciles  à  oomprendre, 
•et  appareil  ne  pouvait  fonctionner  que  d'une  manière  défec* 
tueuse  avec  une  perte  de  force  considérable  ;  qu'en  présence 
des  résultats  peu  satisfaisants  obtenus,  les  rechercbes  de  Pin- 
gault et  celles  des  ingénieurs  et  des  ouvriers  de  Tuslne  avec 
lesquels  il  travaillait  amenèrent  l'adoption  pour  l'appareil  d*ane 
position  différente  donnant  au  cycle  plus  de  stabilité  et  permet- 
tant d'utiliser  dans  des  conditions  meilleures  la  foroe  produite  ; 
qu'une  machine  fut  ainsi  construite  dans  les  ateliers  de  la  Com- 
pagnie Gladiator  d'après  un  système  nouveau  ;  que  le  moteur 
disposé  sur  le  cycle  à  la  hauteur  des  pédales  agissait  à  l'aide 
d'engrenages  et  d'one  dialne  saoa  fin  sur  la  rose  df  anièie  de  la 
machine  et  transmettant  d*une  manière  pkis  titile  le  meavemenl 


-  09  — 

que  lu  commaniquail  réieetrieité  «mmagatinéfl  dans  les  acou- 
■niatenrs  ; 

Attando  que  cette  machina  fut  expérimentée  avec  tnceèa  sur 
ui  Tëtodrome  le  S5  juin  III96  et  qaMl  fot  rendu  compte  de  cette 
épteave  dans  let  JoitrnauK  ipécianx  et  dan»  llUustratUm  qui 
deoaa  naa  deecripiion  et  un  deaein  complet  de  i*appareil  dans 
le  nnméro  dn  »  juillet  1696; 

Atteoda  qae,  le  24  juin  1896,  Clerc  et  Pingault  prirent  en  An- 
gleterre un  brevet  qn*ils  déposèrent  en  France  le  4  août  suivant  ; 
que  ce  brevet  se  réfère  à  un  appareil  identique  à  celui  qui  vient 
d'être  ci-dessus  décrit  ;  q^'en  effet  on  retrouve  dans  les  dessins 
qai  accompagnent  le  brevet  et  dans  la  description  du  cycle 
électrique  tout  lee  61émeiita  de  la  machine  construite  dans  les 
ateliers  de  la  Compagnie  des  eyoles  Gladiator  :  même  disposition 
da  moteur  électrique  actionné  par  des  accamulateurs  ;  même 
mode  de  transmission  de  la  force  k  Taide  d*engrena^cs  destinés 
à  réduire  la  vitesse^  et  d*une  chaîne  sans  fin  qui  communique  le 
moavement  ;  qu*il  est  constant  que  Pingault  et  (]lerc  ont  dans 
l'espèee  f«it  brereter  i*appareil  dont  le  modèle  avait  été  conçu 
et  exécuté  dans  les  ateliers  de  la  Compagnie  des  cycles  Gladiator  ; 

Attendu  qu'il  est  établi  par  les  documents  versés  aux  débats 
que  le  modèle  breveté  fut  construit  au  moment  où  Pingault  était 
remployé  de  la  Compagnie  des  cycles  Gladiator,  qu'il  fut  établi 
aux  frais  de  la  compagnie  dans  ses  ateliers,  que  non  seulement 
Piogault  uiais  d'autres  ingénieurs  et  ouvriers  de  la  Compagnie 
coopérèrent  à  son  exécution,  que  chacun  apporta  sa  part  d*ima^ 
giiiatioii,de  travail  et  de  soins,  que  Tinvention  doit  être  considérée 
comme  la  propriété  commune  de  Pingault  et  Clerc, et  de  la  Société 
Gladiator; 

Qu'en  faisant  breveter  à  Vétranger  et  en  France  Tinvention 
^mmane,  Pingault  et  Clerc  n'ont  pu  priver  la  Compagnie  des 
cycles  do  droit  qui  loi  appartenait,  qu'il  suit  de  là  que  ladite 
société  ne  saurait  être  considérée  comme  contrefacteur  à  Tégard 
de  Pingault  et  Clerc  et  qu'elle  est  également  mal  fondée  à  reven- 
diquer pour  elle  le  bénéfice  exclusif  d'une  invention  dont  elle 
n*estqae  copropriétaire  ;  qu'il  devient  sans  intérêt  de  rechercher 
si  la  machine  saisie  diffère  du  modèle  breveté  comme  le  prétend 
la  Compagnie  des  cycles  par  quelques  points  de  détail  dans  la 
ecQStroctton  du  moteur  et  dans  son  mode  de  fixation  sur  le  cadre  ; 
qae  ces  différences  légères  eussent  été  d'ailleurs  insuffisantes 
pour  faire  échec  au  droit  de  Clerc  et  Pingault  s'il  eût  existé  ; 

Attendu  que  par  suite  de  Tabé^ndon  du  brevet  do  3  décembre 
it9S  la  convention  concernant  la  fiabrication  et  la  vente  des  appa- 
reils qui  y  sont  décrits  est  devenue  sans  objet  ;  qu'il  y  a  lieu  d'en 
prononcer  la  résiliation  ; 


—  70  — 

Par  ces  motifs,  Joint  les  causes  et  statuant  sur  le  mot  par  un 
seul  et  même  jugement,  déclare  résiliée  la  convention  da  8  dé- 
cembre 1895,  déclare  les  parties  mal  fondées  dans  le  surplus  de 
leurs  conclusions,  les  en  déboute  et  attendu  que  les  parties  soc- 
combent  respectivement  dans  leurs  prétentions  fait  masse  des 
dépens  pour  être  supportés  moitié  par  la  Société  des  cycles  Gla- 
diator^  Clément  et  Humber,  et  moitié  par  Clerc  et  Pingault. 


Art.  4107. 

Brevet.  —  Inireiitlaii.  —  Ckrflal»or«tloii.  — 

CoppoprléAé. 

La  question  de  savoir  si  celui  qui  a  coopéré  à  la  décou- 
verte d'une  invetition  a  un  droit  de  propriété  sur  cette 
invention^  est  une  question  de  fait.  Pour  la  résoudre^  il  y  a 
lieu  d'examiner  quelle  a  été  la  nature  de  cette  coopération  ^ 
son  importance  et  de  voir  si  réellement  ^invention  est  le 
fruit  des  recherches  d*un  seul  ou  le  résultat  de  la  combinai- 
son des  efforts  communs  faits  pour  réaliser  et  rendre  pron 
tique  Vidée  de  Vinventeur  (1). 

Si  celui  dont  Vinventeur  réclame  les  services  n'a  fait 
qu  exécuter  matériellement  les  ordres  reçuSj  que  réaliser  un 
plan,  un  dessin  qui  lui  est  remis  avec  toutes  les  indications 
de  détail  nécessaires  et  ne  participe  pas  aux  recherches 
faites  et  aux  perfectionnements  successifs^  s'il  n'est  en  un 
mot  que  Vinslrument  passif  de  Vinventeur  ^  Vinvention,  née 
à  la  vie  pratique  par  une  semblable  collaboration,  n^en  est 
pas  moins  la  création  de  Vinventeur  seul  ;  il  en  serait  au-- 
trement  si  Vaide  choisi  par  celui-ci  à  raison  même  de  ses 
connaissances  pratiques,  de  son  intelligence ^avait  apporté  à 
Vinventeur  le  concours  de  ses  lumières  et  de  ses  observations 
personnelles. 

Lorsqu'il  est  constant,  en  fait,  qu'il  a  existé  entre  deux 
parties  une  véritable  association,  en  vue  d'une  découverte 
nouvelle,  Vune  apportant  Vidée  et  ses  connaissances  théori- 
ques techniques.  Vautre  faisant  tous  les  frais  des  recherches 
et  apportant  à  la  réalisation  du  but  commun  son  expé" 
rience  pratique,  il  y  a  lieu  de  décider  que  ces  deux  parties 

(1)  Y.  note  de  TarUcle  n«  4106, 


le  n  mars 
président, 

idiquent  la 

jeur  on  son 

tomisalevrs, 

l'Incandêt- 

ceiue  nun^rafa,  suivant  procès-verbat  de  l'assemblée  générale  de 

ladite  société  tenue  le  5  août  I89ô  devant  le  notaire  Deliëge  et 

rédament  :  1°  leur  part  dans  le  prix  de  cet  apport,   part  qu'ils 

éralneat  à  350.000  francs  ;  2°  des  dommages  et  intérêts  évalués  à 

lOO.OOO  francs  pour  violation  par  le  défendeur  d'une  convenLion 

verbale  leur  assurant  le  monopole  de  la  fabrication  des  appareils, 

objets  de  cette  invention  ; 

Qu'à  l'effet  d'obtenir  paiement  des  sommes  qui  leur  seraient 
ainsi  dnes,  les  demandeurs  ont  à  la  date  du  19  octobre  1895 
pratiqué  des  saisies-arrêts  entre  les  mains  de  la  Société  anonjroe 
l'htamdeseenee  minérale  et  du  sieur  Rosart,  saisies -arrâts  dont 
il]  demandent  anjoard'hui  la  validité  ; 
Attendu  que  les  causes  sont  connexes; 
Sur  la  compétence  : 

Attendu  qne  l'action  des  demandeurs  a  avant  tout  pour  objet 
Il  propriété  d'une  invention  que  le  défendeur  prétend  conserver 
pour  lai  seul,  et  dont  les  demandeurs  soatiennent  avoir  une  part, 
cetle  invention  étant  le  résultat  des  efforts  combinés,  des  recher- 
ches communes  des  parties  ;  qu'à  ce  titre  la  demande  est  bien 
de  'a  compétence  da  tribunal  civil,  l'exploitation  de  l'invention 
n'étant  pas  l'objet  de  la  demande; 
Au  fond  : 

Attenda  que  le  défendeur  dénie  aui  demandeurs  tout  droit 
quelconque  à  l'invention  dont  s'agit,  sontenant  qu'il  n'a  eu 
r«ccurs  à  eux  qu'en  qualité  d'ouvriers,  et  que  ceux-ci  n'ont  fait 
qoe  travailler  sous  ses  ordres  et  sous  sa  direction  ; 

Attendu  que  ta  question  de  savoir  si  celui  qui  a  coopéré  k  la 
décooTerte  d'une  invention  a  un  droit  de  copropriété  sur  cetle 
inceotion  est  une  question  de  fait  :  que  pour  la  résoudre,  il  y  a 
lien  d'examiner  quelle  a  été  la  nature  de  cette  coopÉration,  son 
importance,  et  de  voir  li  réellement  l'invention  est  le  fruit  des 
rechercbes  d'un  seul,  ou  le  résnltal  de  la  combinaison  des  efforts 
communs  bits  pour  réaliser,  rendre  pratique  l'idée  de  l'inven- 
l«ir; 


^- f';^-!".-. 


72 


Qu'il  se  conçoit  que  si  celui  dont  l'inventeur  réclame  les  servi* 
ces  ne  fait  qu'exécuter  matériellement  les  ordres  reçus,  que 
réaliser  un  plan,  un  dessin  qui  lui  est  remis  avec  toutes  les  indi- 
cations de  détail  nécessaires  et  ne  participe  pas,  à  proprement 
parler,  aux  recherches  faites,  aux  perfectionnements  successifs 
apportés,  s'il  n'est  en  un  mot  que  l'instrument  passif  que  rin— 
venteur  manie  à  son  gré  pour  arriver  au  résultat  désiré,  Tinven— 
lion  née  à  la  vie  pratique  par  une  semblable  collaboration,  fi'en 
est  pas  moins  la  création  de  l'inventeur»  seul  ;  qu'il  en  serait 
autrement,  si  l'aide  choisi  par  celui-ci  à  raison  môme  de  S6» 
connaissances  pratiques,  de  son  intelligence,  avait  apporté  à 
l'invention  le  concours  de  ses  lumières  et  de  ses  observations 
personnelles  ; 

Attendu  qu'il  ne  peut  être  dénié  dans  l'espèce,  que  l'idée  tbêo> 
rique  de  l'invention  dont  s'agit  appartienne  exclusivement  au 
défendeur,  soit  le  résultat  de  ses  études  et  de  sa  science  \  mais 
qu'il  échet  d'examiner  si  la  mise  en  pratique  de  cette  idée  et 
spécialement  son  application  industrielle,  la  construction  de 
l'appareil  breveté  le  29  juillet  1895,  est  l'œuvre  du  défendeur 
seul  ; 

Attendu  que  ce  point  doit  nécessairement  ressortir  des  faits  de 
la  cause,  des  rapports  des  parties  entre  elles,  de  l'importance  et 
de  la  nature  des  travaux  réalisés  par  chacune  d'elles,  et  de  la 
part  réelle  prise  par  elles  à  ces  travaux  ; 

Attendu  qu'il  résulte  des  documents  de  la  cause,  que  dès  le 
mois  de  septembre  1894  les  demandeurs  ont  fait  sous  la  direc- 
tion du  défendeur  toutes  les  recherches  nécessaires  aux  fias 
d'avoir  à  perfectionner  et  à  faire  entrer  dans  le  domaine  de  la 
pratique  l'invention  théoriquement  découverte  par  le  défendeur; 
le  but  poursuivi  étant  d'arriver  à  la  construction  de  brûleurs  dits 
automélangeurs,  c'est-à-dire  opérant  automatiquement  le  né- 
lange  de  l'air  et  du  gaz  et  terminés  par  un  atomisateur  destiné  à 
parachever  ce  mélange  et  qui  pussent  être  employés  industriel- 
lement ; 

Attendu  qu'il  n'est  pas  contesté  que  les  demandeurs  ont  p&yé 
de  leurs  deniers  tous  les  essais  faits,  toutes  les  dépenses  occasion- 
nés par  les  expériences  longues  et  minutieuses,  frais  de  voyages, 
main-d'œuvre,  matières  premières,  ont  mis  au  service  du  4é- 
fendeur  leur  usine,  leurs  machines  et  tous  les  matériaux  néces- 
saires aux  recherches  entreprises  ;  que  loin  d'exécuter  simple* 
ment  comme  l'eussent  fait  de  simples  ouvriers  les  appareils, 
d'après  les  données  et  les  calculs  du  défendeur,  les  demandeurs 
aidaient  de  leurs  avis,  faisaient  leurs  observations  sur  les  expé- 
riences faites,  contribuaient  en  un  m(^t  par  leur  intelligence  aux 
recherches,  et  mettaient  leurs  connaissances  pratiques  à  rent|ère 


—  73  — 

disposition  do  défendenr,et  qaeles  expériences  en  Tue  d'arrirer  aa 
mélange  parfait  de  i*airet  da  gaz  étaient  exclusivement  confiées 
sax  soins  des  demandeurs  ; 

ittendn  que  le  défendeur  a,  au  surplus,  reconnu  dans  ses  rap* 
ports  avec  les  demandeurs  leur  participation  intelligente  et  cons- 
tante ;  il  leur  parle  continuellement  de  «  notre  combinaison  )>, 
«  nos  essais  »,  reconnaissant  qne  «  ses  calculs  exigent  la  con- 
sécration pratique  dont  s'occupent  spécialement  les  deman- 
deurs »  ;  il  leur  fait  entrevoir  à  chaque  instant,  pour  stimuler 
leur  zèle,  la  réussite  commune,  leur  faisant  remarquer  que  si  les 
tâtonnements  ne  sont  pas  gais,  «  ils  ne  doivent  pas  perdre  de  vue 
qa*ils  ont  embrassé  une  si  grosse  cause  i»,  il  reconnaît  enfin  que 
leur  concours  aux  essais  a  été  gratuit  ; 

Attendu  qu'il  est  impossible  de  voir,dans  les  relations  de  l'es- 
pèce, les  rapports  qui  existeraient  entre  maîtres  et  ouvriers  ;  qne 
telle  n'a  pas  été  la  manière  de  voir  du  défendeur  lui-même,  puis- 
qu'il reconnaît  le  il  mars  1895  que  le  brûleur  litigieux  est  le 
résaltat  de  la  combinaison  des  efforts  communs  des  parties  ; 

Attendu  que  la  copropriété  des  demandeurs  sur  cet  objet  res- 
sort aussi  des  pourparlers  avenus  entre  les  parties' en  vue  d'une 
Association  ayant  pour  objet  la  découverte  d'un  organe  de  lu- 
mière nouveau,  pourparlers  dans  lesquels  les  demandeurs  décla- 
rent <  avoir  inventé  et  fabriqué  avec  le  défendeur  un  système  de 
brûleur  à  incandescence  qui  leur  appartient  en  commun  avec  ce 
dernier  )»,  sans  que  le  défendeur  appelé  à  se  prononcer  sur  le 
projet  dont  s'agit  proteste  contre  semblable  allégation  ; 

Attendu  qu'il  ressort  de  toutes  ces  considérations  qu'il  a  existé, 
en  fait,entre  les  parties  une  véritable  association  en  vue  d'arriver 
à  la  découverte  d'un  brûleur  nouveau,  le  défendeur  apportant 
ridée  et  ses  connaissances  théoriques  et  techniques  ;  les  deman- 
deors  faisant  tous  les  frais  des  recherches  et  apportant  à  la  réa- 
lisation du  but  commun  leur  expérience  pratique  ;  qu'en  consé- 
qaenee,  les  deux  parties  sont  copropriétaires  de  l'invention 
litigieuse,  qu'elles  ont  toutes  deux  contribué  à  créer  ; 
Quant  à  la  part  à  laquelle  les  demandeurs  peuvent  prétendre  : 
'  Attendu  que  le  défendeur  soutient  avec  raison  que  cette  part 
ne  peut  être  la  même  pour  chacun  des  intéressés,  la  somme  de 
travail,  d*études  et  d'efforts  fournis  par  lui,  l'apport  en  un  mot, 
Mt  par  lui,  étant  évidemment  supérieur  à  la  coopération  plus 
natérielle  des  demandeurs  ; 

Attendu  qu'il  n'existe  pas  dans  l'espèce  d'éléments  suffisants 
poor  évaluer  la  part  des  demandeurs  :  qu'il  y  a  lieu  à  cet  égard 
de  recourir  aux  lumières  de  personnes  compétentes,  capables 
<^  supputer  et  de  déterminer  exactement  la  coopération  de 
chacun  à  l'œuvre  commune,  et  notamment  de  dire  quelle  est  au 


c 


—  74  — 

point  de  vue  de  Tinvention  brevetée  le  29  juillet  1895,  Timpor- 

tance  des  brevets  antérieurs  dont  le  défendeur  est  sans  conteste 

propriétaire  ; 

Attendu  que  vainement  le  défendeur  soutient  qu'en  tout  état 

de  cause,  et  même  en  admettant  la  copropriété  des  demandeurs 

dans  le  brevet  litigieux,  il  avait  le  droit  d'exploiter  pour  son 

compte,  et  ce,  d'une  manière  absolue,  la  découverte  faite  ;  il  a, 

1^  en  effet,  fait  plus  qu'exploiter  l'invention,  il  Ta  aliénée  en  appor- 

^'  tant  en  société  le  brevet  ; 

î 

i  Attendu  que  les  demandeurs  réclament  en  cas  d'expertise,  à 

)  titre  provisionnel,  le  paiement  d*une  somme  de  100.000  francs  ; 

Attendu  qu'il  y  a  lieu  de  faire  droit  dans  une  certaine  mesure 
à  cette  demande,  en  considération  notamment  des  dépenses  que 
les  demandeurs  se  sont  imposées  pendant  tout  le  cours  des 
recherches  ;  qu'il  y  a  lien  de  leur  allouer  dès  à  présent  une 
somme  de  10.000  francs  sur  leur  part  éventuelle  ; 

Quant  à  la  somme  de  100.000  francs  réclamée  à  titre  de  dom- 
mages et  intérêts  pour  violation  par  le  défendeur  d'une  conven- 
tion verbale,  assurant  aux  demandeurs  «  le  monopole  de  la 
fabrication  des  appareils,  le  jour  où  l'invention  entrerait  dans 
le  domaine  de  l'exploitation  industrielle  »  : 

Attendu  que  Tallégation  produite  par  les  demandeurs  quant  & 
la  promesse  de  ce  monopole,  n'est  pas  suffisamment  démontrée 
par  les  documents  de  la  cause  ;  qu'en  tontcas,  si  les  parties  ont 
eu  des  pourparlers  à  cet  égard,  ces  pourparlers  n'ont  point 
abouti,  et  qu'il  n'a  existé  que  des  projets  non  réalisés  qui  ne  peu- 
vent former  la  base  d'une  action  de  la  part  des  demandeurs  ; 

Par  ces  motifs,  et  l'avis  en  la  plus  grande  partie  conforme  de 
M.  Dieudinné,  substitut  du  procureur  du  roi,  joint  les  causes 
et  déboutant  les  parties  de  toutes  fins  et  conclusions  autres  ou 
contraires,  dit  pour  droit  que  les  demandeurs  ont  acquis  par 
leur  collaboration  active  et  intelligente  un  droit  de  copropriété 
sur  l'invention  brevetée  le 29  juillet  1895  au  nom  du  défendeur; 
condamne  le  défendeur  à  leur  payer  dès  à  présent  la  somme  de 
10.000  francs  avec  les  intérêts  judiciaires  ;  et  avant  de  statuer  sur 
le  surplus  de  la  demande,  désigne  en  qualité  d'experts  MM.... 
lesquels...  :  i^  évalueront  la  part  de  copropriété  des  demandeurs 
dans  le  brevet  du  29  juillet  1895,  en  tenant  compte  de  l'impor- 
tance de  la  collaboration  de  ceux-ci  ;  2*  rechercheront  la  somme 
exacte  que  le  défendeur  a  retirée  de  l'aliénation  du  dit  brevet, 
l'importance  réelle  des  bénéfices  recueillis  par  lui  du  chef  du 
}>revet  du  29  juillet  1895.... 


IL 


—  75  — 
Art.   4108. 

Brevet.  —  Onirrler.  --  Invention.  —  Propriété. 

Le  fait  qu'un  ouvrier  ou  contremaître  a  découvert  une 
invention  pendant  qu'il  était  employé  chez  un  patron  ne 
suffit  pas  pour  permettre  à  ce  dernier  de  revendiquer  à  son 
profit  ladite  invention.  Pour  que  ce  résultat  puisse  être 
obtenu,  il  faut  que  les  découvertes  soient  le  résultat  de  tra- 
wiux  exécutés  par  l'ouvrier  dans  son  service  pour  des  ob- 
jets qui  s'y  rattachent^  d'après  les  ordres  ou  sous  la  direc- 
tion de  son  patron. 

(Trib.  dF.  Seine,  2  juin  1899.  —  Fleary  c.  Serramalera  y  Camps.) 

Ainsi  jugé  par  le  tribunal  de  la  Seine  (3*  ch.),  le  2  juin 
i899,sous  la  présidence  de  M.  Lefsbyre  DEVAUx,aprè3  con* 
elttsions  de  M.  Romb,  substitut,  et  plaidoiries  de  M'^  Ds  Las 

CaSIS  et  POUGBT. 

Le  TaiBONAL,  Attendu  qae  sur  la  demande  de  Fleary  en  reyen- 
dication  d'un  brevet  d'invention  déposé  par  Serramalera  y  Camps, 
le  i4  septembre  1895,  celui-ci  a  été  autorisé  à  faire  la  preuve 
des  faits  qu'il  articulait  pour  faire  rejeter  cette  demande  ; 

Qa'à  Faudience  de  cette  chambre  du  i2  mai  1899,  il  a  été  pro- 
cédé à  l'enquête  ordonnée  et  qu'il  s'agit  d'en  apprécier  les  résul- 
tats ; 

Attendu  qu'il  est  constant  et  non  méconnu  par  Fleury,  que 
Serramalera  y  Camps  était  dans  ses  ateliers  contremaître  traceur 
lorsqu'il  a  découvert  un  système  de  fermeture  pour  récipients  de 
tons  genres,  dite  «  Automatique  »  ; 

Attendu  que  la  propriété  de  toute  nouvelle  découverte  ou  in- 
vention appartient  à  son  auteur  ;  que  c'est  à  Fleury  au  proÛt  du- 
qari  le  défendeur  aurait  renoncé  à  son  droit  de  propriété  par  une 
prétendue  convention  tacite  qu'incombe  la  preuve  d'une  sembla- 
ble convention  ;  qu'à  ce  point  de  vue,  le  demandeur  ne  justifie 
p&s  de  la  renonciation  qu'il  invoque  ; 

Attendu,  d'autre  part,  que  si  les  ouvriers  ou  contremaîtres 
peuvent  être  privés  du  droit  de  faire  breveter  les  découvertes 
dont  ils  sont  les  auteurs,  ce  n'est  que  lorsque  ces  découvertes 
sont  le  résultat  de  travaux  exécutés  par  eux  dans  leur  service 
poor  des  objets  qui  s'y  rattachent  d'après  les  ordres  ou  sous  la 
direction  de  leurs  patrons  ;  que  ces  principes  ne  trouvent  pas 
lenr  application  dans  la  cause  ;  qu'il  ressort  nettement  des  té- 
moignages recueillis  que  c'est  presque  toujours  en  dehors  de  son 


"«■* 


—  76  — 

service  que  Serramalera  8^«it  livré,  en  créant  à  ses  frais  an  ou- 
tillage spécial,  à  des  essais  et  à  des  recherches  dont  le  résultat  a 
été  rinvention  du  système  du  brevet,  objet  du  litige  ;  que  là  dé- 
couverte n'a  certainement  point  été  faite  en  suivant  des  instruc- 
tions ou  en  vertu  de  la  mission  spéciale  qui  était  confiée  au  défen- 
deur par  Fleury  ; 

Que  si  un  témoin  dépose  que  le  défendeur  travaillait  aux  res- 
sorts du  bouchon  automatique  chez  Fleury,  pendant  les  heures 
de  son  travail,  il  i^oute  que  c'était  à  Tinsu  de  son  patron  ;  que, 
dès  que  ce  dernier  rentrait,  Serramalera  cachait  aussitôt  ces 
objets  dans  un  tiroir  et  les  dissimulait  sous  des  chiffons  ; 

Que  les  faits  allégués  par  le  demandeur  n'ont  donc  pu  conver- 
tir Tœuvre  de  Serramalera  en  un  acte  de  son  service  et  lui  6ter 
le  caractère  d'une  invention  breyetable  ; 

Par  crs  motifs,  Déclare  Fleury  non  recevable,  mal  fondé 
en  ses  demandes,  fins  et  conclusions  contre  Serramalera,  Teo 
déboute  ; 

Le  condamne  en  tous  les  dépens. 


Art.  4109. 

Brevet  d'Invention  en  eommun.  —  VIcAntlon  dis 
eontmt  lntei*vena  entre  lecdeax  coproprlétalren 
par  l*nn  d'eux.  —  IVon-eontrefttçon. 

Lorsque^  un  brevet  ayant  été  pris  en  commun^  une  con*' 
vention  est  intervenue  entre  les  deux  oopropriéiaireê^  auœ 
termes  de  laquelle  l'un  d'eux  a  droit  à  une  redevance  sur  fes 
bénéfices  que  réaliserait  l'autre  par  Vemploi  de  la  machine 
ou  des  procédés  brevetés,  celui  qui  fabrique  sans  payer  la 
redevance  pourra  être  actionné  en  paiement  des  redevanr- 
ces  mais  non  poursuivi  comm^  contrefacteur  (1). 

# 

(G.  de  Cams.,  rtq.y  5  mars  1900.  -^  Delacroix  e,  Duvetger.) 

Kejet  du  pourvoi  formé  contre  un  arrêt  de  la  Cour  de 
Rouen  en  date  du  H  août  1897  (Ann,,  97.332)  : 

La  Cour,  Sur  le  1"  moyen  ; 

Attendu  que  le  demandeur  en  cassation  Delacroix  et  le  défen- 
deur éventuel  Duverger  avaient  pris  en  commun  un  brevet  d*ln- 
vention  ;  qu^aux  termes  des  conventions  intervenues  entre  eux, 
Delacroix  avait  droit  à  une  redevance  de  50  0/0  sur  les  bénéfices 

(t)  Vdir  ÀfM^.p  91. m,  not«a  i-%,  wi»  IVrét  attagnA» 


—  77  — 

qae  Daverger  réaliserait  par  Femploi  de  la  machine  ou  des  pro- 
cédés brevetés;  que  Delaeroix,prétendant  que  Duverger  employait 
ies  dits  procédés  et  ne  lui  payait  point  de  redevançeti  Ta  attigné 
pour  se  Toir  déclarer  contrefacteur  et  condamner  en  conséquence 
à  des  dommages- intérêts  ; 

▲tltndo  que  Tarréi  attaqué  a  décidé  qu'en  admettant  que 
Durerger  eût  réellement  employé  les  proeédés  breiretés  et  quMl 
pût,  par  suite,  devoir  des  redevances  à  Delacroii,  il  ne  devait 
pas  néanmoins  être  déclaré  contrefacteur  et  condamné  à  ce  titre 
à  des  dommages-intérêts  ;  que  cette  décision  est  juridique  ;  qu'eu 
effet,  Tun  des  titulaires  d'un  brevet,  en  employant  les  procédés 
brevetés,  ne  fait  qu'user  de  la  faculté  qu'il  tient  du  brevet;  qu'on 
ne  saurait  admettra  qu'il  puisse  devenir  )e  contrefacteur  de  son 
propre  brevet;  que  s'il  ne  tient  pas  compte  à  ses  copropriétaires 
dss  redevances  par  lui  promises,  ce  fait,  susceptible  de  donner 
Usa  à  des  poursuites  pour  ineiécution  du  contrat,  ne  saurait 
eoiistitaer  un  délit  de  contrefaçon  ;  que  la  décision  attaquée, 
i^liérement  motivée»  ne  viole  aucun  des  articles  de  loi  visés 
u  pourvoi  ; 
Sor  le  %*  moyen  : 

Attendu  que  l'action  intentée  par  Delacroix  avait  uniquement 
pour  objet  de  faire  décider  que  Duverger  avait  porté  atteinte  à 
Ml  droits  de  breveté  et  de  le  faire  condamner  a  des  dommages- 
intérêts  comme  contrefacteur;  qu'en  décidant  qu*il  n'existait 
pas  de  contrefaçon,  la  Cour  d'appel  a  par  suite  et  à  bon  droit 
décidé  qu'il  n'y  avait  pas  lieu  de  prononcer  de  condamnation  à 
des  dommages-intérêts  contre  le  prétendu  contrefacteur,  que 
Pirrêt,  qui  réserve  d'ailleurs  les  actions  que  Delacroix  pourrait 
afoir  k  exercer  à  raison  de  l'exploitation  du  brevet  par  Duverger, 
n'a  pas  violé  les  articles  de  loi  invoqués  par  le  pourvoi  ; 
Sur  le  3«  moyen  : 

Attendu  que  la  fin  de  non-recevoir  soulevée  devant  la  Cour 
eontre  la  demande  reconventionnelle  était  la  même  que  celle 
qai  avait  été  proposée  en  1'*  instance  et  n'était  pas  modifiée  par 
Taddition  d'un  nouvel  argument  tiré  d'une  prétendue  compé- 
tence de  la  juridiction  commerciale  qui  ne  pouvait  pas  être  invo- 
quée pour  la  première  fois  en  appel  ;  que  les  motifs  du  jugement 
adoptés  par  l'arrêt  justifiaient  le  rejet  de  la  un  de  non-recevoir, 
rejet  que  le  pourvoi  ne  critique  d'ailleurs  ni  en  fait  ni  en  droit  ; 
Qu'ainsi  le  3*  moyen  n'est  pas  fondé  ; 

Pia  cBs  xotirs,  Rejette. 

Ch.  des  req.  —  MM.  Tanon,  président  ;  —  6xoroi-Le- 
xioa,  rapporteur  ;  •»  Mblgot,  avoeat  général  ;  —  H*  Boi- 
vut-CHAifPBAux,  avocat. 


-78- 
Art.  4110. 

Brevet  Plat.  —  Ueenee  die  tebrleatlon  pour  wu^mge 

personnel.  —  CJontreftiçon. 

Le  licencié  qui  n*a  licence  de  fabriquer  que  pour  son 
usage  personnel  peut  être  poursuivi  en  contrefaçon,  à  rai- 
son de  la  vente  d'appareils  brevetés  à  des  tiers  (1). 

Le  licencié  est  en  droit  de  munir  de  perfectionnements 
inventés  par  lui  les  appareils  brevetés  qu'il  fabrique  lici- 
tement (3). 

(C.  de  Paris,  17  mars  1900.  —  Piatet  fiU  c.  Houssean.) 

Sur  appel  d'un  jugement  du  Tribunal  civil  de  la  Seine 
en  date  du  22  décembre  1898  {Gaz.  Trib,,  !•'  février  1899), 
la  3*  chambre  de  la  Cour  de  Paris,  sous  la  présidence  de 
M.  Benoist,  après  plaidoiries  de  M~  Allart  pour  Rousseau 
et  Albert  Martin  pour  Piat  et  fils,  et  conformément  aux 
conclusions  de  M.  Tavocat  général  Bonnet,  a  rendu  l'arrêt 
suivant  : 

La.  Cour,  Considérant  que  par  la  décision  dont  est  appel,  les 
premiers  juges,  après  expertise,  ont  déclaré  Rousseau  contre- 
facteur d'un  brevet  relatif  à  un  four  servant  à  fondre  les  mé- 
taux pris  par  Piat  le  26  octobre  1888  et  de  ses  certi  Beats  d'ad- 
dition des  12  janvier  1889,  29  avril  1890  et  18  aoûtl892;  qu'ils 
ont  validé  la  saisie  opérée  le  16  mars  1897  par  Piat  chez  Rous- 
^  seau,  et  ordonné  la  confiscation  des  objets  saisis  ;  qu'ils  ont  en 
outre  condamné  Rousseau  à  S,000  francs  de  dommages-intérêts 
alors  que  Piat  réclamait  50,000  francs  ainsi  que  Taffichage  et 
rinsertion  ;  qu'ils  ont  en  même  temps  repoussé  comme  non  re- 
cevable  une  demande  additionnelle  de  Piat  en  nullité  du  brevet 
pris  à  son  tour  par  Rousseau  en  1894,  et  de  deux  certificats 
d'addition,  ainsi  qu'en  élévation  des  dommages-intérêts  à  la 
somme  de  95,000  francs  ;  qu'enfin  ils  ont  débouté  Rousseau  de 
la  demande  reconventionnelle  en  50,000  francs  de  dommages- 
intérêts  et  insertion  qu'il  avait  formée  de  son  côté  ; 

Considérant  que  Rousseau,  reprenant  sa  demande  reconven- 
tionnelle, persiste  à  soutenir  devant  la  Cour  que  la  combinaison 
que  Piat  prétend  avoir  inventée  n'était  pas  brevetable  et  se 
trouve  dans  un  brevet  Chiado  du  10  janvier  1865  et  dans  un 

(1)  Cf.  Pooillet,  Brev.  eTint;.,  n*  740  et  arrêts  cités  ;  Mainié,  Brev. 
éPinv.,  no  2507  et  t. 

(2)  Gela  ne  paraît  pas  souffrir  de  contralictioa. 


-79  — 

iroTet  Mantsd&y  du  25  décembre  18((8  ;  qa'anssi  bien  les  appa- 
reils qae  lui,  Rousseau,  a  construits,  ne  constitueraient  point 
une  contrefaçon  du  brevet  de  Piat  ;  qu*en  tous  cas,  il  y  aurait 
Heo  de  prononcer  la  nullité  de  la  saisie,  Rousseau  ayant  obtenu 
le  droit,  par  l'acquisition  de  la  licence  du  brevet  de  Piat,  de 
modifier  le  système  de  ce  brevet  et,  subsidiaire  ment,  qu'une 
BoaTelle  expertise  s'imposerait,  les  experts  s*étant  expliqués 
incomplètement  en  examinant  le  brevet  Gbiado  et  ne  s'étant 
pas  expliqués  da  tout  en  ce  qui  toucbe  le  brevet  Maolsday  ; 

Considérant  que  Piat,  à  son  tour,  a  repris  sa  première  de- 
mande en  50.000  francs  de  dommages-intérêts,  affichage  et  in- 
sertions, ne  persistant  pas  dans  sa  demande  additionnelle  ; 

Considérant,  en  premier  lieu,  que  les  experts  ont  établi  de 
façon  indiscutable ,  en  répondant  complètement  aux  moyens 
présentés  par  Rousseau,  que  Tinvention  de  Piat  constituée  par 
la  combinaison  d*un  four  fixe  ou  portatif,  à  creuset  unique 
oscillant,  et  d'un  second  creaset  perforé  dit  rehausse  qu'il  su- 
perpose an  premier  creuset  et  charge,  comme  le  premier  ainsi 
prolongé,  de  métal  avec  lequel  les  flammes  et  les  gazs  chauds  se 
troQTeot  en  contact  direct,  réalisait  les  conditions  exigées  par  la 
loi,  étant  une  application  nouvelle  de  moyens  connus  avec  ob- 
tention d'un  résultat  industriel  consistant  en  une  économie,  tout 
ensemble  de  temps  et  de  combustible,  et  aussi  dans  Taugmenta- 
tion  de  durée  des  creusets  ;  que  Rousseau  leur  reproche  en  vain 
aojoard'hoî  de  ne  s'être  pas  fait  représenter  les  appareils  et 
d'avoir  travaillé  sur  dessins  ;  qu'il  a  reconnu  expressément  que 
liiTue  des  dessins  était  plus  utile  et  plus  complète  que  celle  des 
appareils  eux-mêmes  ; 

Considérant  que  le  rapport  des  experts  s'explique  d'une  façon 
complète  sur  le  four  à  cheminée  Ghiado,  notamment  relative- 
mentaux  ouvertures  ménagées  sur  la  périphérie  du  récipient 
supérieur  destinée  par  Ghiado  à  faire  couler  le  métal  plus  ou 
moins  fondu  dans  l'appareil  soos-jacent  ;  que  si  Ghiado  énonce 
dans  son  brevet  que  par  elles,en  même  temps,la  combustion  est 
actÎTée,  il  n'insiste  pas  sur  cette  constatation  secondaire  pour 
loi;  que  le  rapport  s*explique  suffisamment,  d'autre  part,  sur  le 
four  Ifaulsday,  lequel  y  est  décrit  et  ne  parait,  ayant  un  but 
toat  spécial  et  absolument  différent  de  celui  des  fours  dont  il 
s'agit  au  procès  actuel,  avoir  été  retenu  par  Rousseau  que  parce 
qu'il  présente  une  disposition  forçant  les  flammes  du  foyer  à 
passer  sur  le  métal  à  fondre  avant  de  s'échapper  par  une  chemi- 
sée ;  que  si  les  experts  ont  omis  d'y  revenir  après  en  avoir  ma- 
nifesté l'intention,  ils  n'en  ont  pas  moins  déclaré  formellement, 
atec  leur  compétence  technique,  qu'il  ne  pouvait  mettre  en 
échec  l'invention  de  Piat  ; 


—  80  — 

Qu'il  y  a  d'autant  moins  lieu  de  s'arrêter  aux  reproches  faits 
aux  experts  par  Rousseau  de  n'avoir  pas  motive  leur  avis  qae 
ceux-ci  constatent  que  Rousseau  lui-même  leur  a  déclaré  qu^il 
n^opposait  pas  le  brevet  Maulsday  comme  antériorité  au  brevet 
Pait  et  ne  le  visait  en  fin  de  compte  que  pour  démontrer  que  son 
four  n'était  pas  une  contrefaçon  du  four  Piat  mais  seulement  une 
reproduction  du  four  Maulsday  ; 

Considérant  en  second  lieu  que  les  experts  ont  établi  de  façon 
également  indiscutable  que  l'appareil  saisi  chez  Rousseau  était 
la  contrefaçon  de  l'appareil  de  Piat  ;  qu'il  suffit  de  constater  ici 
que  la  pièce  réfractaire  cylindrique,  peut-être  préférable,  em- 
ployée par  Rousseau  avec  le  four  oscillant,  joue  exactement  le 
même  rôle  que  le  creuset  supérieur  de  Piat  et  qu'il  importe  peu 
qu'elle  présente  des  orifices   inclinés,  alors   que  le  creuset  de 
Piat  est  percé  d'orifices  horizontaux,  disposition  moins  satisfai- 
sante peut-être  ;  qu'il  s'agit  toujours  de  l'emploi  sur  ce  four  à 
creuset  unique  d'une  rehausse  perforée  dans  laquelle  on  charge 
le  matériel  à  fondre  pour  les  faire  traverser  par  les  flammes  et 
les  gazs  chauds,  ce  qui  constitue,  ainsi  qu'il  vient  d'être  dit, 
l'invention  de  Piat,  sans  que  Rousseau  puisse  sérieusement  pré- 
tendre qu'il  n'a  pas  pris  la  rehausse  de  Piat,  mais  qu'il  a  fourni 
simplement  dans  un  four  du  domaine  public  un  conduit  aux 
flammes,  à  l'exemple  de  Maulsday,  pour  les  mettre  en  contact 
avec  le  métal  ; 

Considérant  enfin  que  la  licence  conférée  par  Piat  à  Rousseau 
lui  permettait  d'obtenir  des  prii'  de  faveur  pour  les  rehausses 
qu'il  achetait  chez  Piat  et  de  se  servir  de  rehausses  fabriquées 
au  besoin  avec  ses  vieux  creusets  ;  que  c'est  uniquement  cela 
qu'il  a  payé  500  francs  ; 

Qu'on  ne  peut  toutefois  lui  reprocher  d'avoir  apporté  aux 
rehausses  qu'il  employait,  pour  son  usage  personnel,  les  modi- 
fications et  perfectionnements  que  son  expérienœ  et  ses  con- 
naissances lui  suggéraient  ;  qu'ainsi,  c'est  à  tort  que  les  premiers 
juges  ont  ordonné  la  confiscation  de  l'appareil  saisi  chez  lui,  que 
rien  ne  prouve  avoir  été  construit  pour  la  vente  ;  que  oet  appa- 
reil trouvé  dans  l'atelier  de  fonderie  lui  doit  donc  être  restitué, 
mais  que  la  saisie  doit  être  validée  parce  qu'elle  a  fait  découvrir 
la  rehausse  contrefaite  et  établir,  tant  par  les  aveux  de  Rousseau 
que  par  Texamen  de  ses  livres,  qu'il  avait  construit  et  vendu  un 
certain  nombre  de  fours  munis  de  cette  rehausse  ; 

Considérant,  en  ce  qui  touche  l'appel  incident,  que  les  pre- 
miers juges  n'ont  pas  fait  une  suffisante  appréciation  du  préju-*- 
dice  sérieux  éprouvé  par  Piat  ;  qu'il  y  a  lieu  d'élever  de  K<000  à 
10.000  francs  les  dommages^intérèts  qui  lui  ont  été  alloués; 


-  81  — 

ju'iinsi  il  obtiendra  la  réparation  qui  lui  est  due  sans  qu'il  soit 
iésoin  d'ordonner  Tafôchage  ou  Tinsertion  ; 

Adoptant  au  5uq)lus  les  motifs  des  premiers  juges  en  tant 
qj  ils  D*ont  rien  de  contraire  à  ceux  du  présent  arrêt  ; 

Pab  ces  motifs,  Met  les  appellations  tant  principale  qu'in- 
:idente,  à  néant;  confirme  le  jugement  rendu  par  le  tribunal 
citU  de  la  Seine,  le  22  décembre  1898  ;  dit  toutefois  qu'il  n'y  a 
iiea  à  la  confiscation  de  Fappareil  saisi  chez  Rousseau  le  16  mars 
^"iTi  ;  ordonne  que  ledit  appareil  sera  restitué  à  Rousseau  ; 
^■lère,  d'one  part,  de  5.000  francs  à  10.000  francs  les  dommages- 
iii^rèts  que  Rousseau  devra  payer  à  Piat  en  réparation  du  pré- 
judice qu^il  lui  a  causé  ;  condamne  Rousseau  à  payer  ladite 
lomme  à  Piat  ;  ordonne  que  ledit  jugement  ainsi  rectifié  et  com- 
plété sortira  son  plein  et  entier  effet. 


Art,  4111. 

^'«vet  Donsé.  —  Ueenee  iMiPtielle.  —  RedevAnee 
par  macliliie  eoostralte.  —  Défont  die  flxatlon  d'an 
mlaimam .  ~  Condition  potestatlve .  —  Non- 
exploltnttoa.  —  Demande  en  nnlllté  de  la  Uoenee. 

-imet. 

^  cession  d'une  licence  partielle  de  brevet  d'invention 
consentie  sous  la  condition  que  le  licencié  paiera  au  bre- 
Mte'  une  certaine  redevance  par  machine  construite  est  K- 
^^te,  alors  même  que  l'obligation  de  construire  un  nombre 
jninimum  de  machines  n'est  pas  stipulée  ;  on  ne  saurait 
soutenir  que  ce  contrat  soit  vicié  par  une  condition  po- 
^istalive  dépendant  de  la  seule  volonté  du  licencié,  une 
^lle  condition  n'affectant  pas  la  validité  d'une  obligation, 
lorsqu'elle  a  été  stipulée  au  profit  de  la  personne  envers  la- 
î»Wte  un  engagement  ferme  a  été  pris  (1). 

l)  Les  principes  posés  par  la  Cour  sont  en  accord  avec  la  doctrine 
^  l>  Cour  de  cassation  sur  la  condition  potestative  (Cass.,  11  mars 
'^,  0.  81.1.34),  le  contrat  était  donc  bien  valable.  Mais  on  peut  se 
ieounder  si  le  contrat  de  licence  moyennant  redevance  sur  les  appa- 
Kils  Teadas  ne  comporte  pas,  au  moins  dans  certains  cas,  l'obligation 
<^T«Qdreetri  le  défaat  de  vente,  lorsqu'il  résulterait  de  la  mauvaise 
vfiktnté  da  licencié,  ne  pourrait  pas  entraîner  la  résolution  du  contrat 
^^ec  donuBa^^eft-iatéréts,  par  exemple  dans  le  cas  où  la  licence  serait 
(xcIniiTe  et  où  le  licencié  aurait  pour  but  de  paralyser  la  concurrence 

loe  loi  ferait  l'invention  brevetée.  La  Cour  de  Nancy,  sans  annuler  le 

6 


(C.   de  Paris,  99  janvier  1900.  —  L'  ■  Indaslrielle  »  e.  Serve.) 

LeS:2  avril  1896,  le  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine  a 
endu  le  jugement  suivant  : 

Le  Tribumal,  Attendu  que  la  Société  1'  «  Industrielle  »  expose 
|ue  par  acte  sous-seings  privés  enregistré,  en  date  à  Paris  du 
!T  août  1894,  elle  a  cédé  au  sieur  Serve,  pour  la  France  et  ses 
colonies,  ainsi  que  pour  l'Angleterre,  les  États-Unis  d'Amérique 
il  la  Russie,  la  licence  partielle  d'un  brevet  pris  en  France  par 
jn  sieur  Donzé,  h  la  date  du  27  février  189s,  sous  le  numéro 
:3i48,  et  s'appliquant  &  un  moteur  rotatif  dit  ><  Epicycloidal  >•  ; 

Que  comme  conditions  de  cette  cession,  le  sieur  Serve  prenait 
'engagement  d'apposer  sur  chaque  machine  par  lui  construite, 
it  munie  dn  moteur  dont  s'agit,  une  plaque  de  redevance  ;  qu'il 
l'obligeait  en  outre  à  acquitter  le  montant  de  cette  redevance  sur 
es  bases  fixées  et  déterminées  à  l'acte  susmentionné  ; 

Attendu  que  la  Société  1'  ><  Industrielle  »  prétend  et  fait  plai- 
1er  qu'aucun  de  ces  engagements  n'aurait  été  tenu  par  le  sieur 
Serve  ;  que  dès  lors,  il  j  aurait  lieu  de  prononcer,  de  son  fait  et 
1  sa  charge,  la  résiliation  des  conventions  susindiquêes,  et  d'o- 
bliger le  défendeur,  tant  au  paiement  de  la  somme  de  30,000  fr., 
i  titre  de  dommages  et  intérêts,  qu'à  la  restitution  des  plans  et 
lessins  qui  lui  ont  été  contlés  ; 

Hais  attendu  que  la  Société  1'  ••  Industrielle  ><  n'apporte  point 
u  débat  la  preuve  que  le  sieur  Serve  ait  appliqué,  depuis  la  date 
le  la  convention,  à  aucune  machine  parlai  construite,  le  moteur 
ireveté  dont  la  licence  lui  avait  été  concédée  ;  que,  de  ce  chef, 
s  Société  r  M  Industrielle  »  ne  saurait  lui  faire  grief,  ni  de  n'a- 
oir  réclamé  aucune  plaque,  ni  de  ne  lui  avoir  pajé  aucune  rede  • 
ance,  les  obligations  dont  s'agit  n'existant  que  comme  consé- 
liience  de  la  construction  d'une  machine  pourvue  du  moteur  de 
a  société  demaoderesse,  ainsi  qu'il  a  été  dit  plus  haut  ;  que  la 
iociété  r  ic  Industrielle  »  ne  saurait,  d'un  autre  c6té,  faire  un 
eproche  au  sieur  Serve,  de  n'avoir  construit  aucune  machine, 
vec  application  du  susdit  moteur,  les  conventions  susanalysées 
le  mettant  nullement  à  sa  charge  l'obligation  de  construire  un 
lombre  quelconque  de  machines  dans  nn  temps  donné,  ni  de 
layer  un  minimum  de  redevance  ; 

entrât,  a  accordé  des  domroages-intéréla  an  breveté,  fonte  de  bénéS- 
es,  dans  un  cas  de  cession  avec  slipulslion  de  partage  dans  les  bén4- 
Icee  (Nancy,  S3  mai  1866,  Frison,  Ann.,  66.248).  On  peut  aussi  penser 
[ne  la  licence  snppose,  dans  une  certaine  mesure,  l'obligation  d'eiploi- 
er. puisque  faute  d'eiploitatioo  le  brevet  aérait  frappé  de  déchéance.  Le 
Iroit  du  licencié  n'a-t-il  pas  comme  corollaire,  tout  comme  le  droit  du 
ireveté,  l'exploitation  7  G.  M, 


-83  — 

Qu'il  ressort  au  contraire  des  termes  mêmes  des  susdites 
conreotions,  que  la  construction  des  appareils  dont  s'agit  était, 
pour  le  sieur  Serve,  non  une  obligation,  mais  bien  une  faculté 
dont  il  était  libre  d'user  quand  bon  lui  semblerait,  en  appliquant 
le  brefet  dont  s'agit  exclusivement  aux  machines  de  sa  propre 
iQTention  ; 

Qoe,  par  suite,  aucune  inexécution  des  conventions  intervenues 
enb^les  parties  n'étant  relevée  ni  établie  à  la  charge  du  sieur 
Serre,  la  résiliation  qui  en  est  requise  ne  saurait  être  prononcée  ; 
qae  par  voie  de  conséquence,  la  partie  de  la  demande  tendant 
au  dommages  et  intérêts  et  à  la  restitution  des  plans  et  dessins 
doit  également  être  rejetée  ; 

Par  CBS  motifs,  Déclare  la  Société  1'  c<  Industrielle  »  mal  fon- 
dée eo  toutes  ses  demandes,  fins  et  conclusions,  l'en  déboute,  et 
la  condamne  par  les  voies  de  droit  en  tous  les  dépens  et  même 
&a  coût  de  l'enregistrement  du  présent  jugement. 

Surappel,la  2«  Chambre  de  la  Cour,sous  la  présidence  de 
H.  Habil,  après  avoir  entendu  M"  Mathiot  et  Hassbnot,  a 
rendu  l'arrêt  confirmalif  suivant  : 

La  Cour,  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges  : 

Considérant,  en  outre,  que  devant  la  Cour,  la  société  appelante 
a  soutenu  que,  la  cession  d'une  licence  partielle  de  brevets  d'in- 
vention, consentie  par  elle  k  Serre,  intimé,  était  nulle  parce 
«în^elle  avait  été  faite  sous  tine  condition  potestative  ;  que  cela 
résulterait  de  la  faculté  accordée  à  Serve  de  ne  payer  de  rede- 
vance que  s'il  faisait  usage  du  procédé  breveté  pour  des  appareils 
<IQ'il  lui  semblersdt  bon  de  construire  et  de  ne  rien  devoir  s'il'  ne 
«en  servait  pas  ; 

Considérant  que  ce  moyen  n'est  pas  fondé  ;  qu'il  est  parfaite- 
ment licite  de  donner  à  un  cessionnaire  une  licence,  sans  lui 
imposer  l'obligation  d'en  faire  usage  ; 

Que,  dans  l'affaire  actuelle,  il  y  a  eu,  de  la  part  de  la  société 
appelante,  l'engagement  ferme,  contracté  envers  l'intimé,  de  lui 
p^mettre,  moyennant  une  redevance  déterminée,  d'employer  le 
moteur  rotatif  dit  «  Epicycloidal  »,  dont  le  brevet  d'invention 
^i  appartenait  ;  que  la  faculté  laissée  à  l'intimé  de  ne  pas  adap- 
^fce  moteur  à  ses  appareils,  s'il  le  juge  convenable,  ne  vicie 
pas  Fcbligation,  prise  envers  lui  par  l'appelante,  laquelle  est 
aossi  valable  que  le  serait  une  promesse  de  vente  qui  n'oblige 
<lQe  le  promettant  ;  que  la  condition  potestative  n'affecte  pas 
^  validité  d^ane  convention,  lorsqu'elle  a  été  stipulée  au  profit 
de  la  personne  envers  laquelle  un  engagement  ferme  a  été  con- 
tracté; 


—  84  — 

Par  ces  motifs,  Déclare  la  Société  anonyme  dite  V  «  Indus- 
trielle »  mal  fondée  dans  ses  demandes,  uns  et  conclusions  ;  l'en 
déboute  ;  confirme  le  jugement  attaqué  ;  ordonne  qu*il  sortira 
son  plein  et  entier  effet  ;  condamne  la  Société  anonyme  V  «  In- 
dustrielle »,  en  la  personne  de  son  adaûnistrateur  délégué,  à 
l'amende  et  aux  dépens  de  son  appel. 


Art.   4112. 

Brevet  Serve.  —  Liteence.  —  VmcnMté  de  réaillAtioa 
pour  non^exploliatlon.  —  Déflaat  de  mUie  en  de- 
meure e(  die  eonmtutwktâion  Jadielalre.  —  Violation 
da  contrat  par  le  cédant.  —  Dommaffea-lntérêta. 

Lorsque  l'inventeur  quia  concédé  une  licence  pour  Fex^ 
ploitation  de  son  invention  a  stipulé  que,  dans  le  cas  oie  se 
réaliserait  une  condition  déterminée,  il  reprendrait  la  libre 
disposition  de  tout  ou  partie  de  Vinvention  concédée,  il  ne 
saurait  lui  appartenir  de  se  faire  juge  de  la  réalisation  de 
la  condition  :  à  défaut  de  mise  en  demeure  et  tant  quHl  n'a 
point  fait  constater  judiciairement  l'arrivée  de  la  condi- 
tion, il  demeure  dans  les  liens  de  son  traité  et  ne  saurait 
être  considéré  comme  ayant  recouvré  son  droit  de  disposi^ 
tion  ;  par  suite,  sHl  concède  à  un  établissement  concurrent 
la  licence  primitivement  concédée  par  un  traité  toujours  en 
vigueur,  le  nouveau  traité  doit  être  rétracté  et  des  domma^ 
ges-intéréts  doivent  être  alloués  au  concessionnaire  primi- 
tif indûment  dépossédé  (1). 

(G.  de  Paris,  8  mai  1900.—  Compagnie  Française  des  Métaaxe.  Serve,) 

Le  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine  avait  à  la  date  du 
6  juillet  1898  rendu  le  jugement  suivant  : 

(1)  A  ces  considérations  du  jagement,  la  Ck>ar  a  i^onté  qu'en  fiit  le 
breveté  avait  concédé  licence  à  un  tiers  avant  d'avoir  mis  le  premier 
licencié  en  demeure  d*exécater  ses  engagements.  Si  exact  que  soit  le 
principe  qu'on  ne  peut  se  foire  justice  8oi-méme,il  ne  faudrait  pas  pous- 
ser la  thèsedu  jugement  jusqu'à  l'extrême  et  dire  que  le  breveté  devrait  des 
dommages-intérêts  pour  avoir  conféré  licence  à  un  tiers,  môme  s*il  avait 
auparavant  mis  le  licencié  en  demeure  d'exploiter  et  si  celui-ci  n'avait 
pas  exécuté  son  obligation  ;  le  tribunal  pourrait,  par  le  même  jugement, 
constater  que  le  droit  à  la  résolution  du  contrat  était  acquis,  que  le  bre<- 
veté  en  reprenant  sa  liberté  n'avait  donc  causé  aucun  préjudice  an  pre- 
mier licencié.  G.  M. 


-  85  — 

Le  TanuNAL,  Après    en   aToir  délibéré    conformément  à  la 
loi  ; 

Attendu  qne,  ayant  reçu  satisfaction  en  cours  d'instance.  Serve 
a  déclaré  mettre  néant  à  sa  demande  en  paiement  de  redevan- 
ces; 

Qa'il  n'ëchet,  parsoite,  de  donner  acte  à  la  Compagnie  Fran- 
çaise des  Métaax,de  sa  déclaration  relatiye  aux  dites  redevances, 
!e  tribunal  n'étant  plus  saisi  de  cette  partie  du  litige  ; 

Sur  le  surplus  de  la  demande  de  la  Compagnie  Française  des 
Métaux  : 

Attendu  que  des  documents  de  la  cause,  il  appert  que  par  acte 
soDS  seings  privés  qui  sera  enregistré  avec  le  présent  jugement. 
en  date  du  27  février  1886,  Serve  a  concédé  à  la  Société  des 
Xélaax,  aux  droits  et  obligations  de  laquelle  se  trouve  actuel- 
lement ia*Gompagnie  Française  des  Métaux,  la  licence  exclusive 
pour  )a  fabrication  et  la  vente  en  France  et  les  colonies  françai- 
ses, d*  un  brevet  pris  par  Selve,  le  20  septembre  1884,  sous  le 
noméro  164,412,  pour  un  système  de  tubes  à  ailerons,  dénommé 
•^Nouveau  système  de  tubes  métalliques  de  tous  genres»; 

Qae  ces  tubes  pouvaient  être  fabriqués  en  cuivre  rouge  ou  cui- 
vre jaune,  en  fer  ou  en  acier  : 

Qae,  notamment,  en  ce  qui  concerne  les  tubes  en  fer  et  en 
scier  le  dernier  paragraphe  de  l'article  5  desdites  conventions 
stipule  que,  dans  le  cas  où  la  Société  des  Métaux  n'en  pourrait 
réussir  la  fabrication  on  ne  voudrait  pas  l'entreprendre,  Serve 
reprendrait  son  entière  liberté  à  leur  égard  en  prévenant  la  société 
par  lettre  recommandée  trois  mois  à  l'avance  ; 

Attendu  que,  dans  ses  conclusions  motivées,  Serve  soutient  et 
t'iit  plaider  à  la  barre  que  les  éventualités  prévues  à  l'article  5  se 
seraient  réalisées  ; 

Qu'il  aurait  donc  usé  à  bon  droit  d'une  faculté  qui  lui  était 
'  rmellement  réservée,  en  prévenant  par  lettre  recommandée  en 
iate  du  28  juillet  1891,  la  Société  des  Métaux  qu'il  reprenait  sa 
iberté  en  ce  qui  touche  les  tubes  en  fer  et  en  acier  ; 
Qa'il  aurait  donc  pu  valablement  la  concédera  la  Société  d'Es- 
aat  et  Meuse  ; 

Qae,  par  suite,  la  demande  serait  mal  fondée  et  devrait  être 
'6 poussée  ; 

Mais  attendu  que  l'article  5  invoqué  par  Serve  ne  renferme  nul- 
lement on  droit  d'option  au  profit  de  ce  dernier  ; 

Qa'il  y  est  uniquement  stipulé  que  Serve  ne  prendra  sa  liberté 

^  ce  qui  concerne  les  tubes  à  ailerons  en  fer  et  en  acier,  que 

Uule  cas  où  la  compagnie  concussionnaire  ne  pourrait  réussir 

1  oe  voudrait  pas  entreprendre  la  fabrication  desdits  tubes  ; 

Qae  ces  conditions  sont  ainsi  soumises  non  à  un  droit  d'option 


—  86  — 

laissé  à  Tarbitraire  et  à  Tapprédation  de  Serve  seal,  mais  bien  à 
une  double  condition  résolatoire  alternative  ; 

Que,  s'il  est  vrai  que  Serve,  par  sa  lettre  du  28  juillet  1891, 
ait  prétendu  que  les  deax  conditions  prévues  se  seraient  réali- 
sées et  que,  par  suite,  il  serait  en  droit  d'user  de  la  faculté,  qui 
lui  avait  été  réservée,  de  reprendre  sa  liberté,  il  convient  de  re- 
marquer que  la  Compagnie  Française  des  Métaux  a  formellement 
contesté  la  matérialité  de  la  survenance  de  Tune  ou  de  l'autre 
des  conditions  prévues  ; 

Que  la  Compagnie  Française  des  Métaux  a  protesté,  à  plusieurs 
reprises,  contre  les  prétentions  de  Serve  et  qu'elle  a  expressé- 
ment manifesté  son  intention  de  considérer  lesdites  conventions 
comme  toujours  existantes  et,  par  suite,  de  s'en  prévaloir  ; 

Que,  dans  ces  conditions,  les  conventions  dont  s'agit,  qui  ne 
pouvaient,  contrairement  aux  allégations  de  Serve,  être  résolues 
que  par  le  commun  accord  des  parties  contractantes  ou  par  jus- 
tice, en  cas  de  contestations  entre  elles  sur  les  conditions  pou- 
vant entraîner  cette  résolution  et  ce  tribunal  n'ayant  point  été 
et  n'étant  point  saisi  d'un  pareil  litige,  subsistait  toujours  ; 

Que,  par  suite,  elles  doivent  être  observées  par  ceux  qui  les 
ont  formées  ; 

Qu'il  convient,  dès  lors,  faisant  droit  de  ce  cbef  aux  conclu- 
sions de  la  Compagnie  des  Métaux,  de  dire  que  c'est  en  violation 
du  droit  de  ladite  compagnie  que  Serve  a  concédé  à  la  Société 
d'Escaut  et  Meuse  une  licence  pour  la  fabrication  des  tubes  à 
ailerons  en  fer  et  en  acier  ; 

Qu'il  convient  également  de  dire  que  Serve  sera  tenu  sous  une 
astreinte  de  200  francs  par  jour  de  retard  pendant  un  mois, 
après  lequel  délai  il  sera  fait  droit,  de  rapporter  à  la  Compa- 
gnie Française  des  Métaux  la  rétractation  ou  la  résiliation  de  la 
cession  dont  s'agit; 

Et  attendu  qu'il  est  constant  pour  ce  tribunal  que  la  violation 
par  Serve  de  ses  engagements  a  causé  à  la  Compagnie  Française 
des  Métaux  un  préjudice  dont  le  défendeur  lui  doit  répara- 
tion ; 

Que,  toutefois,  il  y  a  lieu,  dans  la  fixation  des  dommages-inté- 
rêts à  accorder  à  la  compagnie  demanderesse,  de  tenir  compte 
du  peu  de  diligences  faites  par  cette  dernière  pour  arriver  aune 
exploitation  industrielle  et,  par  suite,  profitable  à  Serve,  de  la 
partie  du  brevet  dont  s'agit  ; 

Que  l'allocation  d'une  somme  (^e  5,000  francs  sera  la  juste 
réparation  à  laquelle  la  Compagnie  Française  des  Métaux  peut, 
en  l'état  des  faits  de  la  cause,  légitimement  prétendre  ; 

Que  c'est  donc  à  concurrence  de  cette  somme  que  cette  partie 
de  la  demande  doit  être  accueillie  ; 


—  87  — 

Par  CBS  motifs,  Vu  le  rapport  de  l'arbitre  ; 

iageant  en  premier  ressort  ; 

Dit  qa'il  n'y  a  lieu  de  donner  acte  à  la  Compagnie  Française 
d«s  Métaux  de  ses  déclarations  relatives  aux  commissions  qui 
étaient  dues  à  Serve  ; 

Dit  que  la  Compagnie  Française  des  Métaux  est  encore  conces- 
sionnaire du  droit  de  fabrication  des  tubes  à  ailerons  en  cuivre 
rooge  et  jaune,  en  fer  et  en  acier  ou  autres  métaux  ; 

Dit  en  conséquence^  que  c'est  en  violation  du  droit  de  ladite 
compagnie  que  Serve  a  concédé  à  la  Compagnie  d'Escaut  et 
Mease  une  licence  pour  la  fabrication  des  tuben  à  ailerons  en 
fer  et  eu  acier  ; 

Ditque  Serve  sera  tenu,  par  suite,  sous  une  astreinte  de  200  fr . 
par  jour  de  retard  à  partir  de  la  quinzaine  de  la  signification  du 
présent  jugement  pendant  un  mois,  passé  lequel  délai  il  sera 
fait  droit,  de  rapporter  à  la  Compagnie  Française  des  Métaux  la 
rétractation  ou  la  résiliation  de  la  cession  dont  s'agit  au   procès  ; 

Condamne  Serve,  par  les  voies  de  droit,  à  payer  à  la  Compa- 
gnie Française  des  Métaux  la  somme  de  5,000  francs  à  titre  de 
doaimâges-intérêts  ; 

Déclare  la  Compagnie  Française  des  Métaux  mal  fondée  en  le 
sarplos  de  sa  demande  ; 

L>n  déboute. 

M.  Serve  a  interjeté  appel  de  ce  jugement  ;  la  Compa- 
gnie Française  des  Métaux  a,  de  son  côté,  formé  un  appel 
incident. 

La  Cour  a  statué  sur  ces  appels  par  Tarrèt  suivant  : 

U  CouB,  Statuant  sur  les  appels  principal  et  incident  interje- 
t^  du  jugement  rendu  par  le  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine 
I«  6  juillet  1898; 

Et  adoptant  les  motifs  des  premiers  juges  ; 

Considérant  en  outre  que  Serve  inventeur  d*un  système  de  tu- 
bes à  ailerons  qui  a  été  breveté  le  20  septembre  1884,  a  cédé  à 
la  Société  des  Métaux,  aujourd'hui  représentée  par  la  Compa- 
8ji\e  Française  des  Métaux,  une  licence  exclusive  qui  lui  assurait 
le  monopole  de  la  fabrication  en  France  desdits  tubes,  soit  en 
caivre  ronge,  soit  en  laiton,  soit  en  fer  ou  en  acier  ;  qu'à  l'égard 
des  tubes  en  fer  ou  en  acier  il  avait  été  stipulé  que  dans  le  cas 
'À  la  société  ne  pourrait  pas  ou  ne  voudrait  pas  fabriquer.  Serve 
reprendrait  sa  liberté  en  la  prévenant  par  lettre  recommandée  i 

trois  mois  à  l'avance  ; 

Considérant  que  de  nouveaux  documents  produits  à  la  cour 
établissent  que  Serve  avait  manqué  à  ses  engagements  bien  avant 


—  88  — 

de  s'être  informé  si  la  Société  des  Métaux  voulait  renoncer  à  la 
fabrication  des  tubes  en  acier  ; 

Qu'en  effet,  c'est  le  26 juillet  1891  que  Serve  a  adressé  une  let- 
tre recommandée  aux  représentants  de  cette  société  dans  le  but 
de  recouvrer  sa  liberté  d'action  qui  lui  a  été  refusée  par  une  pro- 
testation formelle  et  que,  dès  le  22  janvier  précédent,  il  avait 
cédé  une  licence  à  la  Société  d'Escaut  et  Meuse  pour  la  fabrica- 
tion des  tubes  en  fer  et  en  acier  ; 

Sur  les  dommages-intérêts  : 

Considérant  que  les  premiers  juges  ont  condamné  Serve  à 
payer  à  la  compagnie  intimée  une  somme  de  5,000  francs  à  titre 
de  dommages-intérêts  pour  le  préjudice  déjà  subi  ;  qu'ils  l'ont 
obligé  en  outre  à.  rapporter  dans  la  quinzaine  de  la  signification 
du  jugement  la  résiliation  du  traité  qu'il  avait  conclu  avec  la 
Société  d'Escaut  et  Meuse  et  ce  sous  une  astreinte  de  200  francs 
par  chaque  jour  de  retard  pendant  un  mois,  passé  lequel  délai 
il  serait  fait  droit; 

Considérant  que  Serve  n'a  point  obtempéré  à  cette  injonction 
et  qu'au  cours  de  l'instance  d'appel,  la  durée  de  son  brevet  d'in- 
vention est  venue  à  expiration  le  20  septembre  1899  ; 

Que  l'astreinte  prononcée  par  les  premiers  juges  est  devenue 
sans  objet  et  qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  la  maintenir  ; 

Mais  considérant  qu'il  serait  injuste  de  faire  bénéficier  l'appe- 
lant de  la  résistance  qu'il  a  apportée  à  l'exécution  du  jugement 
confirmé  par  le  présent  arrêt  et  de  ne  pas  tenir  compte  du  pré- 
judice éprouvé  par  la  compagnie  intimée  depuis  l'appel  ; 

Que  la  Cour  possède  les  éléments  d'appréciation  qui  lui  per- 
mettent d'en  fixer  l'importance  ; 

Par  ces  motifs.  Déclare  Serve  mal  fondé  dans  les  demandes, 
fins  et  conclusions  de  son  appel  principal  ; 

L'en  déboute  ; 

Confirme  le  jugement  attaqué  ; 

Dit  toutefois  que,  par  suite  de  l'expiration  de  la  durée  du  bre- 
vet d'invention,  il  n'y  a  plus  lieu  d'obliger  Serve  à  rapporter  la 
résiliation  de  son  traité  de  licence  fait  avec  la  Société  d'Escaut  et 
Meuse  et  de  maintenir  l'astreinte  imposée  par  le  jugement  ; 

Déclare  la  Compagnie  Française  des  Métaux  bien  fondée  à  ré- 
clamer contre  Serve  le  paiement  de  dommages-intérêts  pour  le 
préjudice  qu'elle  a  subi  depuis  le  jugement  ; 

Fixe  à  12,000  francs  l'ensemble  des  condamnations  qui  doivent 
être  et  sont  prononcées  contre  Serve  au  profit  de  la  compagnie 
intimée  et  ce  à  titre  de  dommages-intérêts  comprenant  les 
5,000  francs  déjà  alloués  par  le  tribunal  ; 

Déclare  la  compagnie  intimée  mal  fondée  dans  le  surplus  de 
ses  demandes,  fins  et  conclusions  ; 


—  89  - 

L^en  déboute  ; 

Ordonne  la  restitation  de  Tamende  consignée  sur  l'appel  inci- 
dent ; 

Condamne  Serve  en  l'amende  de  son  appel  et  en  tous  les  dé- 
pens. 

2«  Ch.  de  la  Cour.  —  MM.  Harel,  président;  Bonnet, 
avocat  général.  —  M«*  Charles  Lente  et  Roger  Dufraisse, 
avocats. 


Art.  4113. 

Brev-ete.  —  Ueenee.  —  Compétence,  —  Caractères. 

•—  Droit  des  tiers. 

Les  tribunaux  de  commerce  sont  compétents  pour  statuer 
sur  une  cession  de  licence,  c'est-à-dire  sur  Vachat  et  la  ces- 
sion d^un  droit  dans  un  but  commercial  (1). 

L'acte  qui  ne  confère  à  son  bénéficiaire  qu'un  avantage 
personnel  et  limité  et  ne  lui  attribue  nullement  le  droit  de 
poursuivre  en  son  nom  les  contre  facteurs ,  constitue  non 
une  cession  de  brevet,  mais  seulement  une  licence  d'exploi- 
tation ;  pour  qu'un  tel  acte  devienne  opposable  aux  tiers,  il 
n'est  pas  nécessaire  qu'il  ait  été  préalablement  soumis  à 
la  formalité  de  la  transcription  spéciale  des  articles  20  et 
21  de  la  loi  du  8  juillet  1844  :  en  particulier  pour  qu'un 
tiers  devenu  régulièrement  propriétaire  du  brevet  soit  tenu 
de  le  respecter  y  il  suffit  qu'en  fait,  il  en  ait  eu  connais- 
sance  (i). 

(1)  Sur  la  compétence  en  matière  de  cession  et  de  licence, V.  Pouillet, 
Brev»  cTinv.,  n*  296  et  la  jarisprndence  citée.  V.  aussi  Besançon,  22  fé- 
Trier  1809,  Japy,  itnn.,  99.207  et  la  note. 

(2-3)  Le  caractère  le  plus  saillant  de  la  licence  est  de  ne  pas  donner 
&  son  bénéficiaire  le  droit  de  poursuivre  les  contrefacteurs.  La  conces- 
sion de  la  licence  n*est  assujettie  à  aucune  formalité.  C'est  un  droit  tout 
personnel,  et  en  général  non  exclusif,  accordé  par  le  breveté  à  un  tiers 
ifexploiter  son  brevet,  sans  que  ce  droit  entraîne  cession  d'une  part 
quelconque  de  la  propriété  du  brevet.  11  s'en  suit  que  le  porteur  de  11- 
ceitce  n'a  pas  à  faire  enregistrer  son  titre.  En  cas  de  cession  ultérieure 
dtt  brevet,  le  concessionnaire  est  tenu  de  respecter  les  licences  anté- 
rieurement concédées,  qu  il  les  ait  on  non  connues,  à  la  condition  qu'il 
soit  étabb  que  les  licences  sont  réellement  antérieures  à  la  cession.  Cette 
preuve  étant  à  la  charge  du  licencié  il  est  souvent  prudent  pour  le  licen- 
cié, quoique  rien  ne  Ty  oblige,  de  faire  enregistrer  son  titre  à  la  pré- 
fecture dés  qu'il  lui  est  concédé  afin  de  lui  donner  date  certaine.  Sur 


de  Paria,  37  janvier  18B9  et  i  janvier  ISOO.  —  Geliet  et  Forest 
Ge  interautionale  de  Chauffage  hygiénique, Vve  Ancelin  et  aatrei.) 

IM.  Gellet  et  Foreat,  se  prétendant  devenus  propriétaî- 
d'un  brevet  pris  pour  la  fabrication  de  Chauffreltesby- 
niques  en  vertu  d'une  cession  qui  leur  aurait  été  con- 
itie  par  Mme  Vve  Ancelin,  demandaient  au  tribunal  de 
amerce  de  déclarer  que  l'apport  fait  poslérieurement 
Mme  Ancelin  à  la  Compagnie  internationale  deCbauf- 
e  hygiénique  était  nul,  comme  consenti  el  accepté  en 
ide  de  leurs  droils,et  subsidiairement  que  l'apport  du- 
brevet  demeurait  grevé  d'un  droit  de  licence  en  leur 
îur.  Le  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine  a,par  juge- 
nt  du  21  octobre  1896  statué,sur  cette  prétention  en  ces 
nés  : 

eTribdnjvl,  Attendu  que  la.  demande  tend  à.  voir  dire  que 
port  fait  à  la  Compagnie  interna.tianale  de  ChauiTage  hy^é- 
le  du  brevet  français  n°  224.830  serait  nul  comme  consenti 
cceptë  en  fraude  des  droits  de  Gillet  et  de  la  Société  Gillet  et 
ist; 

le  subsidiairement  l'apport  du  dit  brevet  serait  grevtf  de  la 
ice  appartenant  à  ces  derniers  ; 

te  seuls  ils  auraient  le  droit  en  France  de  fabriquer.d'eiploi- 
itde  vendre  les  appareils  se  rapportant  au  dit  brevet; 
le  par  suite,  il  soit  fali  défense  à  la  Compagnie  internationale 
IhautTage  hygiénique  de  fabriquer,  exploiter  ou  vendre  ea 
ice  les  dits  appareils  à  peine  de  1000  francs  par  chaque  con- 
ention  constatée  ; 

iSn  qu'une  somme -de  50.000  francs  leur  soit  attribuée  àtitre 
loromages-intéréts  ; 
k  ce  qui  touche  tous  les  déFandeara  : 
ir  le  renvoi  : 

tendu  que  les  défendeurs  à  l'exception  de  la  Société  interna- 
ale  de  Chauffage  hygiénique  soutiennent  que  les  faits  sur 
lels  est  fondée  la  demande  constitueraient,  s'il  s  étaient  établis, 
une  faute  contractuelle  mais  un  délit  civil  tombant  soua 
)lication  de  l'article  13S2  du  Code  civil  ; 
le  pour  justifier  la  compétence  de  cette  Juridiction  en  ma- 
d'obligations  délictuelles  ou  mâme  quasL-délictuelles,  ii  y 
it  lieu  d'établir  que  les  faits  qui  servent  de  base  à  la  de> 


—  91  — 

mande  se  rattachent  à  Texercice  da  commerce  des  deux  par- 
ties; 

Qu'actionnaires  d^ane  société  commerciale  ils  n'auraient  pas 
pour  cela  la  qualité  de  commerçants  ; 

Que  de  son  c6té,  la  Société  prétend  qu'il  s'agirait  de  la  remise 
d'an  brevet,  litige  relevant  entièrement  des  tribunaux  civils  ; 

Que  dès  lors  et  à  tous  égards  il  y  aurait  lieu  d'accueillir  le  dë- 
ciinatoire  opposé  ; 

Mais  attendu  que  des  documents  au  procès,  il  appert  qu'à  la 
date  du  24  septembre  1895,  les  défendeurs  se  sont  présentés  de- 
vant M*  Estors,  notaire  à  Bruxelles,  et  l'ont  requis  de  dresser  les 
statuts  de  la  société  anonyme  dénommée  Compagnie  interna- 
tionale de  Chauffage  hygiénique  (système  Ancelin).que  les  com- 
parants ont  déclaré  fonder  avec  le  concours  d'autres  comparants 
comme  souseripteurs  d'actions  ; 

Que  8.000  actions  entièrement  libérées  ont  été  attribuées  à  Vve 
Anceiin,  Moigno,  Godefroy  et  Grayo  apporteurs  de  brevets,  et  les 
2.000  autres  à  tous  les  défendeurs  suivant  le  tableau  annexé  aux 
statuts  ; 

Que  fondateurs  de  la  société  ils  ont  ainsi  fait  acte  de  commerce 
les  rendant  justiciables  de  cette  juridiction  ; 

Qu'en  ce  qui  touche  les  allégations  de  la  société,  des  docu- 
ments au  procès,  il  ressort  qu'il  s'agit  non  de  la  connaissance 
d'un  brevet,  mais  de  la  cession  d'une  licence,  c'est-à-dire  de 
l'achat  et  de  la  cession  d'un  droit  dans  un  but  commercial  ; 

Qull  y  a  lieu  de  rejeter  le  déclinatoire  opposé  ; 

Par  css  motifs.  Rejette  l'exception  d'incompétence  opposée,  en 
conséquence,  retient  la  cause  ; 

Et  au  fond  : 

Attendu  que  les  demandeurs  déclarent  à  la  barre  réduire  leur 
demande  en  dommages-intérêts  quant  à  présent  à  2.000  francs; 

Qu'il  échet  de  leur  en  donner  acte  ; 

En  ce  qui  touche  Vve  Ancelin-Godefroy  et  la  Société  interna- 
tionale de  Chauffage  hygiénique  : 

Attendu  que  la  société  persistant  dans  son  système  soutient  que 
le  contrat  en  vertu  duquel  les  demandeurs  ont  introduit  la  pré- 
sente demande  constituerait  une  cession  de  brevet  ; 

Que  par  application  de  l'article  20  dé  la  loi  du  5  juillet  1844, 
aocane cession  totale  ou  partielle  ne  serait  valable  qu'après  avoir 
été  enregistrée  au  secrétariat  de  la  préfecture  du  département 
dans  lequel  l'acte  est  passé  ; 

Que  contrairement  aux  allégations  des  demandeurs,  il  ne 
s'agirait  pas  d'une  cession  de  licence  ; 

Qu'an  surplus  cette  cession  serait  postérieure  à  l'époque  à 
laquelle  dame  Anceiin  a  fait  son  apport  à  la  société  ; 


—  92  — 

Qu'elle  ne  lui  serait  donc  pas  opposable  ; 

Que  de  leur  côté  Vve  Ancelin  et  Godefroy  qui  eux  reconnais^ 
sent  que  Giiiet  et  consorts  sont  simplement  concessionnaires 
d^une  licence,  exposent  que  le  fait  même  de  cette  concession  éta* 
blit  que  Vve  Ancelin  est  encore  propriétaire  du  brevet  et  que  par 
suite,  elle  a  le  droit  d'en  faire  l'apport  à  quiconque  puisqu'elle 
en  a  la  propriété  ; 

Que  cela  serait  si  vrai  qu'elle  n'aurait  appoi^  ses  brevets  que 
grevés  des  droits  éventuels  et  conditionnels  qui  pourraient  être 
reconnus  au  proOt  de  Gillet  ; 

Qu'au  surplus,  cette  cession  n'aurait  même  été  consentie  que 
comme  garantie  des  avances  qu'elle  avait  reçues  ou  qu'elle  avait 
à  recevoir  des  demandeurs  ; 

Que  le  prêt  qui  lui  avait  été  consenti  devait  être  remboursé  par 
elle  sur  la  part  des  bénéfices  que  devait  lui  procurer  l'exploita- 
tion faite  pour  le  compte  commun  ; 

Que  cette  éventualité  de  la  remise  des  bénéfices  ne  s'étant 
pas  effectuée,  dame  Ancelin  restée  propriétaire  du  brevet  devrait 
également  rentrer  en  possession  de  la  licence  accordée  eondi- 
tionnellement  ; 

Que  par  suite  la  cession  serait  nulle  et  que,  par  voie  de  con- 
séquence, la  demande  Gillet  et  consorts  serait  mal  fondée  et  de- 
vrait être  rejetée  ; 

Mais  attendu  qu'ainsi  qu'il  a  été  dit  plus  haut  il  s'agit  simple- 
ment de  la  concession  d'une  licence  pour  une  partie  du  brevet, 
puisque  la  vente  et  la  fabrication  des  appareils  en  caoutchouc 
restaient  la  propriété  de  la  dame  Ancelin  ; 

Qu'en  effet,  aux  termes  de  l'acte  du  11  avril  1895,  Vve  Ancelin 
cédait  à  Gillet  qui  acceptait,  le  droit  exclusif  de  fabriquer,  d'ex- 
ploiter et  de  vendre  tous  les  appareils  se  rapportant  au  brevet 
pris  en  France  le  10  octobre  1892  sous  le  n^  24.830,  sans  aucune 
exception  ni  réserve  que  celle  concernant  la  vente  et  la  fabri- 
cation des  appareils  en  caoutchouc  dont  Gillet  n'entendait  pas 
s^'occuper  ; 

Que  rien  n'indiquait  que  cette  licence  (di  conditionnelle  et 
subordonnée  aux  bénéfices  qu'elle  comptait  partager  avec  lui  ; 

Qu'elle  ne  peut  donc  prétendre  aujourd'hui  que  cette  cession 
soit  nulle  par  suite  de  l'absence  des  bénéfices  qu'elle  espérait  ; 

Qu'une  licence  est  le  droit  accordé  par  le  propriétaire  du  bre- 
vet à  un  tiers,  d'exploiter  le  brevet  sans  que  ce  droit  entraîne 
cession  d'une  part  quelconque  de  la  propriété  du  dit  et  en  géné- 
ral sans  que  cette  cession  empêche  le  breveté  d'accorder  le  même 
droit  à.  d'autres  personnes  ; 

Que  par  suite,  si  Gillet  et  consorts  ne  peuvent  être  fondés  à 
demander  la  nullité  de  l'apport  fait  h  la  Compagnie  intematio- 


—  93  — 

nale  de  Chauffage  hygiénique  il  est  constant  néanmoins,  ainsi 
qa'ils  Fexposent  en  leurs  conclusions  suhsidiaires,qiie  cet  apport 
est  grevé  de  la  licence  à  eux  consentie  par  le  contrat  du  11  avril 
1893,  c^est-à-dire  avant  la  constitution  de  la  Société  ; 

Qu'en  conséquence,  aux  termes  mêmes  de  la  concession,  ils 
ont  seuls  le  droit  en  France  de  fabriquer,  d'exploiter  et  de  vendre 
les  dits  appareils  à  l'exception  de  ceux  en  caoutchouc; 

Qu'il  convient  de  faire  défense  à  la  société  susnommée  de 
falkTiquer,  exploiter  et  vendre  en  France  les  dits  appareils  à 
peine  de  50  francs  par  chaque  contravention  constatée,  sans  qu'il 
j  ait  lieu  toutefois  d*acGorder  aux  demandeurs  la  réparation 
d*uu  préjudice  dont  ils  ne  justiûent  pas  à  rencontre  de  dame 
Âncelin-Godefroy  et  de  la  Compagnie  internationale  de  Chauffage 
hygiénique  ; 

En  ce  qui  touche  Grayo,  Lemaître,  Etienne^  Maigno  et  Puviez 
de  Gronlart  : 

Attendu  que  ces  défendeurs  n'ont  pas  conclu  au  fond  ; 

Donne  contre  eux  &  Gillet  et  Forest,  ce  requérant,  défaut  et 
pour  le  profit  : 

Considérant  que  les  conclusions  de  la  demande  ne  sont  pas 
contestées  par  les  défendeurs  susnommés  ; 

Que  les  dites  conclusions  ont  été  vérifiées  et  qu'elles  paraissent 
justes, à  concurrence  des  dispositions  ci-après; 

Que  dès  lors  il  y  a  lieu  d'y  faire  droit  ; 

Pab  ces  motifs,  Jugeant  en  premier  ressort  ; 

Donne  acte  aax  demandeurs  de  ce  qu'ils  déclarent  réduire 
quant  à  présent  leur  demande  en  dommages-intérêts  à  2.000  fr. 
à  Fégard  de  tous  les  défendeurs  ; 

Dit  que  l'apport  fait  à  la  Société  internationale  de  Chauffage 
hygiénique  du  brevet  de  dame  Âncelin  est  grevé  de  la  licence 
accordée  à  Gillet  et  à  Gillet  et  Forest  ; 

En  conséquence,  fait  défense  à  la  dite  société  de  fabriquer, 
exploiter  et  vendre  en  France  les  dits  appareils  à  peine  de  bO  fr. 
par  chaque  contravention  constatée  à  l'exception  des  appareils 
en  caoutchouc  ; 

Et  condamne  Vve  Ancelin-Godefroy,  la  Société  de  Chauffage 
hyfdénique,  Grayo,  Lemaître,  Etienne,  Maigno  et  Puviez  de  Gron- 
lart par  les  Toies  de  droit  aux  dépens  de  cette  partie  de  l'ins- 
tance ; 

Condamne  Grayo,  Lemaître,  Etienne,  Maigno  et  Puviez  de 
Gronlart,  solidairement  par  les  voies  de  droit,  à  payer  à  Gillet  et 
à  Gillet  et  Forest  2.000  francs,  chiffre  auquel  ces  derniers  ont 
déclaré  rédnive  quant  à  présent  leur  demande  à  fin  de  dommages- 
intérêts  ; 

Et  les  condamne  eu  outre  aux  dépens  ; 


—  94  - 

D*offîce  avec  Grayo,  Lemaître,  Etienne,  Maigno  et  Paviez  de 
Gronlart  déclare  Gillet  et  Gillet  et  Forest  mal  fondés  en  tout  le 
surplus  de  leurs  demandes,  Uns  et  conclusions,  mais  quant  à 
présent  sur  les  dommages-intérêts  à  Tégard  de  Grayo,  Lemal- 
tre,  Etienne,  Maigno,  et  Puviez  de  Gronlart  les  en  déboule. 

La  Compagnie  internationale  de  Chauffage  hygiénique 
ayant  fait  appel  de  ce  jugement,  la  Cour  de  Paris  a,  le 
27  janvier  1899  sous  la  présidence  de  M.  Gillbt,  président, 
et  après  conclusions  de  M.  Laffon,  avocat  général,  rendu 
contradictoirement  sur  la  compétence,  et  par  défaut  sur 
le  fond,  Tarrèt  confirmatif  suivant: 

La  Cour,  Considérant  que  la  Compagnie  internationale  de 
Chauffage  hygiénique,  partie  de  Giot  avoué,  a  relevé  appel  du 
jugement  du  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine  du  21  octobre 
1896  qui  s*est  déclaré  compétent  pour  connaître  des  causes  de 
Tassignation  initiale,  s'agissant  dans  Tinstance  de  la  concession 
ou  de  la  délivrance  d'une  licence  et  non  de  la  cession  ou  vente 
d'un  brevet  d'invention  ; 

Et  statuant  au  fond  : 

A  fait  défense  h  la  dite  compagnie  de  fabriquer,  exploiter  et 
vendre  en  France  les  appareils  se  rapportant  au  brevet  pris  le 
10  octobre  1892,  no  224830,  à  Texception  de  ceux  en  caoutchouc, 
à  peine  de  50  francs  par  chaque  contravention  constatée  ; 

Mais,  considérant  que,  par  ses  conclusions  prises  devant  la 
Cour  et  dûment  signifiées,  la  compagnie  appelante  se  borne  à 
eiciper  de  l'incompétence  du  tribunal  de  commerce  à  raison  de 
la  matière  sans  demander  la  solution  du  fond  ; 

Sur  l'exception  d'incompétence  et  le  renvoi  : 

Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges. 

Sur  le  fond  : 

Donnant  défaut  contre  la  Compagnie  internationale  de  Chauf- 
fage hygiénique,  appelante,  et  contre  Giot  son  avoué,  faute  de 
conclure  ; 

Et  pour  le  profit  : 

Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges  ; 

Par  CBS  motifs,  Statuant  contradictoirement  entre  les  parties 
sur  l'exception  d'incompétence  et  le  renvoi  proposés  par  la  com- 
pagnie appelante,  et  par  défaut  faute  de  conclure  et  plaider  au 
fond  contre  la  dite  compagnie  et  contre  Giot  son  avoué  ; 

Met  l'appellation  à  néant  ; 

Confirme  le  jugement  susvisé  du  21  octobre  1896  dans  toutes 
ses  dispositions  et  condamnations  ; 

Dit  qu'il  sortira  son  plein  et  entier  effet  ; 


—  95  — 

Et  condamne  la  Compagnie  internationale  de  Chauffage  hygié- 
nique à  l'amende  et  aux  dépens  d*appel . 

Enfin,  sur  ropposition  de  la  Société  nlernalionale  de 
Chauffage  hygiénique,  la  Cour,  sous  la  présidence  de 
M.CAZE,présîdent,après  avoir  entendu  MM'^Gauthier  Rouge- 
viLLB  et  PouiLLET,  avocats,  en  leurs  plaidoiries  et  M.  Van 
Cassel,  avocalgénéral,  enses  conclusions  a,  par  arrêt  du 
13  janvier  1900,  débouté  la  Société  hygiénique  de  son  op- 
position en  ces  termes  : 

La  Cour,  Statuant  sur  l'opposition  formée  par  la  Compagnie 
internationale  de  chauffage  hygiénique  à  l'exécution  de  Tarrêt 
rendu  par  cette  chambre  de  la  cour  le  27  janvier  1899  ; 

En  la  forme  : 

Considérant  que  l'opposition  est  régulière  ; 

Au  fond  : 

Considérant  qu'il  est  établi  que  l'acte  sous  seings  privés  en  date 
du  14  avril  1895  concédant  à  Gillet  et  Forest  licence  d'exploiter 
en  France  pour  partie,  les  brevets  de  Vve  Ancelin  s'il  a  été  enre- 
gistré seulement  le  25  mars  1896  n'était  au  point  de  vue  de  l'ac- 
tion de  cette  concession,  que  la  confirmation  d'un  acte  antë- 
riear  remontant  au  24  août  1894,  c'est-à-dire  plus  d'une  année 
avant  la  constitution  de  la  société  opposante  ; 

Considérant  que  dans  l'intention  des  parties,  cet  acte  origi- 
naire da  24  août  1894  de  même  que  l'acte  de  1805,  ne  confé- 
rant à  Gillet  et  Forest  qu'un  avantage  personnel  et  limité  et  ne 
leur  attribuant  nullement  le  droit  de  poursuivre  en  leur  nom  les 
contrefacteurs  constituait,  non  une  cession  de  brevet,  mais  seu- 
lement une  licence  de  l'exploiter  pour  partie  ; 

Considérant  que,  pour  devenir  opposable  aux  tiers  et  spécia- 
lement à  la  société  opposante^ii  n'était  point  nécessaire  que  l'acte 
de  1894  et  celui  de  1895  eussent  été,  au  préalable,  soumis  à  la 
formalité  de  la  transcription  spéciale  des  articles  20  et  21  de  la 
loi  du  5  juillet  1844,  mais  qu'il  suffit  qu'en  fait  la  société  oppo- 
sante les  ait  connus  pour  être  tenue  de  les  respecter  ; 

Et  considérant  qu'il  est  établi  par  les  documents  de  la  cause 
qu'avant  la  constitution  de  la  société  et  alors  qu'elle  n'était  qu'en 
projet,  la  Vve  Ancelin  et  Godefroy  qui  en  devaient  faire  et  en  ont 
fait  partie,  ont  mis  au  courant  ses  fondateurs  des  conventions 
passées  antérieurement  par  eux,  tant  en  1895  qu'en  1894,  avec 
Gillet  et  Forest;  que  à  raison  même  de  l'existence  de  ces  conven- 
tions, des  pourparlers  ont  été  engagés  par  l'administrateur  dési- 
gné de  la  future  société  avec  Gillet  et  Forest  en  vue  d'un  arran- 
gement ; 


}  pourparlers  n'oat  poiat  abouti,  et  qu'il  apparaît  que 
lions  spéciales  dans  lesquelles  la  société  a  été  ulténea- 
instituée  à  Bruxelles  n'ont  été  combinées  et  adoptées 
le  but  d'en  dissimuler  à  Gillet  et  Forest  rexi5tenc«  et 
tions; 

lui  touche  les  conclusions  subsidiaires  : 
Srant  que,  en  l'état  des  conventions  de  180S  et  pour  les 
jà  déduits  dans  le  précédent  arrât  de  la  Cour,  il  écfaet 
ir  que  l'apport  fait  à  la  société  du  breret  de  dame  Ance- 
point  nul  mais  est  seulement  grevé  de  la  licence  accor- 
let  et  Forest  en  France  ; 

insidérant  qu'il  n'est  nallement  justifié  que  les  avances 
r  Gillet  et  Forest  aient  été  limitées  à  une  somme  de 
ancs  ;  que  d'autre  part,  des  dispositions  combinées  des 
1894  et  189Q,  il  résulte  expressément  que  les  droits  coq- 
lillet  et  Forest  étaient  définitifs  et  devaient  s'exercer 
toute  la  durée  du  brevet  ; 

;  MOTIFS,  Et  persistant  en  outre  dans  ceux  de  t'arrët  de 
1  27  janvier  1899  ; 

en  la  forme  la  Compacte  internationale  de  Chauffage 
ue  opposante  au  dit  arrêt  ; 
d: 

3  ta  dite  compagnie  mal  fondée  dans  tontes  fies  deman- 
et  conclusions  d'opposition  tant  principale  que  subsi- 
DD  déboute  ; 

e  l'arrêt  par  défaut  susdaté  continuera  à  être  exécuté 
forme  et  teneur  ; 

damne  la  Compagnie  internationale  de  Chauffage  bjrgié- 
a  dépens  de  son  opposition . 


Art.  4114. 

iea  A  In  pepsonimllté.  —  Œuvre  «lr*iiiatlf|iie. 
ftm  révélés  par  de*  délMit«  ^ndlelalrea.  — 
n  en  d<»mnmB«*-liitérëtM. 

7it,  pour  les  écrivains,  de  puiser  dans  des  faits  his- 
ou  dans  des  épisodes  révélés  par  des  débals  judi- 
le  sujet  d'un  roman  ou  d'une  pièce  de  théâtre  n'en 
as  moins  ounerte  VacHon  en  dommages-intérêts, 


—  97  — 

auprofU  des  tiers  à  qui préjudicierait  Cceuvre  et  à  rencontre 
de  Fauteur  qui  serait  en  faute  (1). 

Mais  ne  commet  aucune  faute  Fécrivain  qui  utilise  dans 
un  drame,  comme  sujet  d'observations  et  d'étude^  des  faits 
rendus  publics  par  un  procès  criminel  plus  de  20  ans  au- 
paravanty  sans  les  dénaturer  ni  altérer  en  rien  (2). 

(C.  de  Bordeaux,  24  janvier  1899.  —  Consorts  Gamier  c. 

Berthelot  et  Depay .) 

Le  Tribunal  civil  de  Bordeaux j  avait,  le  23  février  1898, 
rendu  le  jugement  suivant  : 

Lb  TaiBUNAL,  Attenda  qne  Paul  Berthelot  a  emprunte  à  un 
crime  commis  à  Lormont,  en  octobre  1875,  le  sujet  d*un  drame 
qa^  se  propose  de  faire  représenter  au  théâtre  des  Arts  que  De- 
pay dirige  à  Bordeaux  ; 

Attendu  que  la  dame  Cécile  Jean,  dite  Gamier,  épouse  Roche- 
ner,  et  la  demoiselle  Marie  Jean  dite  Gamier,  ont  assigné  les 
dits  sieurs  Berthelot  et  Depay  devant  le  tribunal  pour  obtenir 
contre  eux  l'interdiction  des  représentations  de  cette  pièce,  et 
une  condamnation  à  des  dommages-intérêts  ; 

Attendu  qu'elles  fondent  leur  action  sur  le  préjudice  que  sui- 
vant elles,  leur  causera  la  représentation  d'un  drame  évoquant 
le  souvenir  d'un  crime  auquel  a  été  mêlée  Juliette  Jean,  dite  Gar- 
nier,  leur  sceur  ; 

Attendu  que  Berthelot  et  Depay  opposent  à  leur  action  une 
fin  de  non-recevoir  tirée  de  ce  qu'elles  sont  sans  qualité  pour 
faire  valoir  des  droits  qui  appartiennent  à  leur  sœur  ; 

Attendu  que  cette  fin  de  non-recevoir  ne  saurait  être  admise  ; 
que  ce  n^est  pas  dans  Tintérêt  de  leur  sœur  qu'elles  ont  introduit 
leur  demande  ;  qu'elles  se  plaignent  d'un  préjudice  qui  leur  est 
causé  à.  elles-mêmes  par  la  publicité  de  nouveau  amenée  sur  un 
crime  dont  Juliette  Gamier,  leur  sœur,  s'était  rendue  coupable,  et 
qui  avait  ainsi  gravement  atteint  l'honorabilité  de  leur  famille  et 
de  leur  nom  ; 

Attendu  qu'on  ne  peut  leur  refuser  le  droit  d'exposer  leurs 
griefs  et  de  prouver  que  la  pièce  qui  a  été  composée  par  Berthe- 
lot, et  qull  veut  faire  jouer  avec  le  concours  de  Depay,  leur 
cause  un  préjudice  de  nature  à  justifier  leur  demande  ; 

Qu'il  importe  dès  lors  de  rechercher  si  cette  demande  est 
fondée  ; 


(1-3)  Voir,  pour  le  principe,  Gasf .,  39  avril  1897,  VempoUonneute 
d'Ain-Pezza,  Ann,,  96.19  et  la  note  ;  Paris,  3  décembre  1897,  Vaumône 
suprême,  Ânn,,  99.61. 


v 


Tt^ 


—  98  — 

Attendu  que  la  dame  Rochener  et  Marie  Jean  dite  Garnier, 
invoquent  les  dispositions  de  rarticle  1382  du  Gode  civil;  qu'elles 
ont  à  démontrer  que  Paul  Berthelot  à,  en  ce  qui  concerne  leurs 
droits  personnels,  commis  une  faute  qui  engage  enyers  elles  sa 
responsabilité  et  Toblige  à  en  arrêter  les  effets  et  à  en  réparer  les 
conséquences  dommageables  ; 

Attendu  que  le  fait  criminel  qui  est  le  sujet  de  la  pièce  compo- 
sée par  Berthelot  remonte  à  une  époque  déjà  lointaine'  et  a  été 
sous  des  formes  diverses,  livré  à  la  publicité  la  plus  étendue  ; 
qu'il  n'appartient  pas  au  tribunal,  dans  l'espèce  dont  il  est 
actuellement  saisi,  de  déterminer  les  droits  dont  peut  user  un 
auteur  dramatique  lorsque^  cessant  de  ne  consulter  que  sa  pro- 
pre imagination,  il  emprunte  à  la  réalité  et  notamment  aax 
annales  judiciaires  le  sujet  du  drame  qu'il  veut  faire  représen- 
ter; 

Qu'il  convient  seulement  de  rappeler  qu'il  doit  s'abstenir  de 
ioute  mention  susceptible  de  livrer  à  la  malignité  publique 
le  nom  d'une  famille  déjà  attristée  par  l'indignité  d'un  de  ses 
membres  et  soucieuse  de  voir  ce  pénible  souvenir  s'effacer  dans 
l'oubli  ; 

Or  attendu  que  Berthelot  n'a  dans  aucune  partie  de  sa  pièce 
désigné  sous  le  nom  de  Garnier  le  personnage  dont  le  rôle  est 
inspiré  de  la  participation  de  Juliette  Garnier  au  crime  commis 
à  Lormont  en  octobre  1875  ; 

Que  le  prénom  de.  Juliette  sous  lequel  il  Fa  désigné  ne  peut 
être  par  lui-même  une  indication  autorisant  la  dame  Rochener 
et  Marie  Garnier  à  prétendre  que  leur  nom  de  famille  est  ainsi 
révélé  à  la  curiosité  publique  ;  que,  sans  doute,  pour  bien  des 
gens  qui  ont  conservé  le  souvenir  du  crime  précité  et  des  débats 
judiciaires  dont  il  fut  suivi,  le  prénom  de  Juliette  se  rattache  au 
nom  patronymique  de  Garnier,  mais  qu'à  Tégard  des  demande- 
resses, Berthelot  ne  peut  être  en  faute  pour  avoir,  tout  en  sup- 
primant le  nom  de  Garnier,  laissé  subsister  le  prénom  vulgaire 
de  Juliette  ; 

Que  par  la  suppression  de  leur  nom  de  famille,  il  a  donné  à 
la  dame  Rochener  et  à  la  demoiselle  Marie  Garnier  la  satisfaction 
due  à  leur  honorable  susceptibilité,  et  ne  peut  être  responsable 
des  divulgations  par  lesquelles  se  révélerait  leur  parenté  avec 
Juliette  Garnier  ; 

Attendu  qu'ainsi  qu'il  est  ci-dessus  déclaré,  il  est  sans  utilité 
pour  le  procès  actuel  de  rechercher  si  Berthelot  pourrait  avoir, 
envers  d'autres  personnes,  encouru  quelque  responsabilité  en 
raison  de  la  composition  de  sa  pièce  du  Crime  de  Lormont  ; 

Qu'il  importe  toutefois  de  rappeler  que  d'après  certains  pas- 
sages portés  en  plaidoiries  à  la  connaissance  du  tribunal,  Ber- 


-^^mm^  ■"■•. 


-  99- 

theiol  piraît  aToir,  dans  cette  pièce,  présenté  sous  un  aspect 
moins  oëieaz  que  celai  qai  conTenait  à  la  réalité  des  faits  la  par- 
ticipation de  Juliette  Gamier  à  l'attentat  criminel  ayant  servi  de 
sojet  et  de  titre  à  la  pièce  sasyisée  ; 

Pak  CBS  MOTIFS,  Le  tribunal  après  en  avoir  délibéré  jugeant  en 
premier  ressort  ;  déclare  les  époux  Rochener  et  Marie  Jean,  dite 
Gamier,  recevables  dans  leur  demande,  les  déclare  mal  fondés 
dans  la  dite  demande,  les  en  déboute  et  les  condamne  aux  dé- 
pens. 

La  Cour  (2*cb.),  sous  la  présidence  de  M.  Saint-Aubin, 
après  plaidoiries  de  M«*  Jaubbbt,  Bertin  et  Chartrou,  sur 
les  conclusions  de  M.  Ribbt,  avocat  général,  a  confirmé  le 
jugement  en  ces  termes  : 

La  Godb,  Attendu  que  Taction  civile  en  réparation  du  pré- 
jadiee  caasé  par  un  mode  quelconque  de  publication  peut  être 
exercée  par  toute  personne  qui  justifie  avoir  souffert  de  ce  dom- 
mage; 

attendu  que  le  droit  d'an  auteur  de  puiser  dans  des  faits  bis- 
toriques  ou  dans  des  épisodes  révélés  par  des  débats  judiciaires 
le  sujet  d'un  roman  ou  d*une  pièce  de  théâtre,  loin  d'être  absolu 
•e  trouve  renfermé  dans  certaines  limites  et  ne  fait  pas  obstacle 
à  l'application  du  principe  général  de  la  loi  civile  en  matière  de 
responsabilité  ;  qu'il  suffit,  en  l'absence  de  toute  intention  de 
nuire  qui  constituerait  le  délit,  que  Ton  puisse  relever,  d'une 
part,  une  faute  commise^  et  de  l'autre,  un  préjudice  souffert, 
pour  justifier  une  demande  dédommages-intérêts; 

Attendu  que  les  intimés,  dans  le  drame  mis  à  la  scène  en 
1898,  n'ont  en  rien  altéré  la  vérité  des  faits  si  tristement  célè- 
bres; qu'ils  ont,  loyalement  et  sans  passion,  rappelé  des  cir- 
eoDstances,  connues  de  tous,  cherché,  dans  des  documents  que 
chacun  est.  libre  d'interroger>  des  sujets  d'observation  et  d'é- 
tude et  qu'ils  n'ont  rien  fait  pour  dénaturer  ou  rendre  plus  odieux 
le  rôle  joué  par  l'un  des  auteurs  du  crime  de  Lormont^  dont  les 
représentants  se  trouvent  au  procès  ; 

Attendu  qu'un  anteur  en  rappelant  un  fait  vrai,  depuis  long- 
temps notoire,  et  en  évitant  toute  appréciation  malveillante,  ne 
commet  ni  une  faute,  ni  une  imprudence,  ni  une  négligence 
Texposant  aux  conséquences  prévues  par  l'article  1382  du  Gode 
civil; 

Attendu  qu'en  l'absence  de  toute  faute,  il  deyient  inutile  de 
rechercher  si  un  préjudice  matériel  ou  moral  a  pu  être  causé 
uz  dames  appelantes,  dont  l'une  a  changé  de  nom  par  suite 
de  son  mariage,  et  qui  ont  peut-être  imprudemment  rappelé 


i  l'attention  publique  les  liens  de  parenté  qai  les  rattachent  li 
la  condamnée  de  1876,  puiiiqne  le  nom  patronymique  de  leur 
Camille  n'a  pas  été  âcrit  dans  t'œuvre  des  intimés  ; 

Par  ces  motifs,  Et  ceux  non  contraires  des  premiers  juges  ; 

Déclare  recevable,  en  la  forme,  l'appel  de  la  demoiselle  Jean, 
lite  Garnier,  et  des  époux  Rochener  envers  le  jugement  da  Tri- 
luual  civil  de  Bordeaux  ;  mais  le   dit  mat  fondé  et  les  en  dé-     i 
tioate  ;  | 

Con&rme  te  jugement  entrepris  ;  ordonne  qu'il  sortira  plein     | 
Bt  entier  effet  ;  j 

Les  condamne  &  l'amende  et  en  toos  les  dépens. 

Art.  4115. 

Nom  patronymique.  —  Propriété.  —  Atteintes  A 
la  peraonnallté.  —  Pabllentlon  daiut  nn  JonruAl. 
—  Dommasee  et  Intérfita. 

Toute  personne  a  le  droit  incontestable  de  se  î^aindre  de 
rabaa  qui,  malgré  elle,  a  été  fait,  de  son  nom  et  de  récla- 
mer la  réparation  du  préjudice  qu'elle  a  souffert  (1). 

Spécialement,  un  négociant  juif  peut  réclamer  des  dont- 
et  intérêts  à  un  journal  anti-sémitiqve,  qui  a  fait  figurer 
son  nom  sur  une  liste  de  personnes  appartenant  à  la  religion 
israélite,  et  prétend  ainsi  le  désigner  à  l'animadversion 
publique  (2).  , 

(Trib.civ.de  la  Seine,  18  janvier  1899.—  SchmoUe.  QnérinetBadigtdn.)    | 

Le  Tribunal  de  la  Seine,  présidé  par  M.  Baudoin  a,  le 
18  janvier  1899,  rendu  le  jugement  suivant  : 

Lb  Tribunal,  Attemln  qae  le  journal  VAntijuif,  se  disant 
l'organe  de  la  ligue  antiaémilique,  a,  dans  ses  cinq  premiers  nu- 
méros, publié,  sous  la  rubrique:  •>  Israël  chez  nous.'....  Les  juifs 
dans  l'armée...,  dans  le  commerce  et  l'industrie  »,  et  commença 
la  pubLcation  de  listes  contenant  les  noms,  adresses  et  profes- 
sions de  diversis  personnes  appartenant  à  la  religion  Israélite  ;        1 

Que,  dans  la  liste  publiée  dans  le  numéro  5  portant  la  date  du    i 
18  septembre  1898,  (îgnre  sous  le  sous-titre  :  «  Bronzes  et  objets 


(t-3)  V.  Trib.  civ.  Ljaa,  référé,  30  décembre  1S96,  Dreyfas,  Aim.,  97, 
i(B.  V.  encore  :  Trib.  Seine,25  février  1882,  Duverdr.S.  Si.S.SI  el  la  note 
de  M.  Labbé.  Sur  la  nature  du  droit  de  l'individu  sur  ion  nom  palro- 
nique,  voir  Ann.,  iM.343.  article  de  U.  Uaillard. 


—  101  — 

d'art  h  Paris,  le  nom  de  Schmoll,  80,  rue  de  furenne  »,  qae 
celui-ci  prétendant  qu'on  grave  préjudice  résulte  pour  lui  de 
cette  publication,  a  assigné  J.  Guérin,  directeur  du  journal,  et 
Badigoin,  son  imprimeur-gérant,  à  TefTet  de  s'entendre  condam- 
ner à  lai  payer  2,000  francs  de  dommages-intérêts,  et  interdire 
de  publier,  à  l'avenir,  ses  nom,  profession,  qualité  et  domicile, 
à  peine  de  100  francs  de  dommages-intérêts  par  chaque  contra- 
fention  constatée  ;  qu^il  réclame,  en  outre,  Tinsertion  du  juge- 
ment à  intervenir  : 

1*  Dans  le  plus  prochain  numéro  de  rAnti/ui/ sous  une  as- 
treinte de  25  francs  par  jour  de  retard  pendant  un  mois,  passé 
lequel  il  sera  fait  droit  de  nouveau  ; 
2*  Dans  dix  journaux  de  son  choix  et  aux  Frais  du  défendeur  ; 
Attendu  qu'il  suffit  de  lire  le  numéro  de  VAniijuif  du  18  sep- 
tembre 1898  pour  se  rendre  compte  du  but  de  la  publication  in- 
criminée ;  que  les  juifs  y  sont  dénoncés,  à  chaque  ligne,  comme 
oardissant  un  abominable  complot  contre  la  France  qu'ils  vou- 
draient pousser  à  la  guerre  dont  ils  auraient  besoin  pour  conso- 
lider définitivement  leur  situation  chez  nous  ; 

Qae  dans  son  premier  article,  Guérin  écrit  qu*  «  ils  appréhen- 
dent le  réveil  de  la  France  qui  leur  fera  payer  cher  les  infamies 
qu'ils  ont  commises,  les  vols  dont  ils  se  sont  rendus  coupa- 
bles... »  ;...  <(  que  les  juifs  Bleichrœder  et  Rothschild,  les  dévoués 
collaborateors  et  complices  de  Bismarck  en  1870-1871,  ont 
promis  à  l'empereur  allemand  leur  aide,  le  concours  de  tous 
leurs  coreligionnaires  résidant  en  France  pour  lui  faciliter  la  vic- 
toire »  ; 

Que  l'auteur  de  l'article  ajoute:  «  Il  nous  faut  déjouer  les 
complots  des  juifs  et  leur  montrer  une  France  unie  et  forte,  dé- 
terminée à  éviter  sagement  la  guen*e  tant  qu'il  sera  possible, 
comme  on  évite  une  aventure  inutile  dont  l'ennemi  espère  seul 
profiter,  mais  résolue,  si  la  guerre  devient  l'inévitable  consé- 
quence de  la  campagne  de  trahison,  à  châtier  immédiatement  et 
sans  pitié  les  juifs  et  leurs  complices,  avant  de  partir  à  la  fron- 
tière pour  défendre  la  patrie  menacée.  Que  tout  Israël  n'oublie 
pas  que  les  Français  tués  à  la  frontière  seraient  vengés  par  avance 
lar  les  juifs  dès  l'ouverture  des  hostilités  qui  n'auront  servi  qu'à 
rendre  leur  châtiment  plus  rapide  et  plus  complet  »  ; 

Qu'à  la  page  2  du  même  numéro,  est  insérée  une  chanson  où 
déngnant  les  juifs,  l'auteur  s'écrie  :  «  Mort  aux  bandits  t  »  ;  que 
plus  loin,  annonçant  sept  assignations  que  viennent  de  lui  faire 
notifier  diverses  personnes  comprises  dans  la  publication  de  lis- 
tes insérées  dans  les  numéros  précédents,  le  journal  déclare  qu'il 
entend  continuer  sa  polémique  de  combat  et  ce  qu'il  appelle  »  sa 
documentation  »,  û'odlà-direrénumération  des  situations  et  des 


—  102  — 

propriétés  appartenant  aux  juifs  chez  nous.  Nous  obligerons, 
ajoute-t'il,  les  juifs  qui  sollicitent  la  faveur  des  achats  des  ci- 
toyens français  pour  s'enrichir,  à  montrer  à  quel  point  ils  sont 
restés  juifs,  malgré  tout,  chez  nous...  Nous  accomplissons  ou- 
vertement, à  la  face  de  tous,  une  besogne  française  et  bien  fran- 
çaise, en  permettant  à  tous  nos  concitoyens  de  ne  traiter  des  af- 
faires avec  les  juifs  qu'en  connaissance  de  cause  et  s'ils  le  veu- 
lent, sachant  bien  à  quoi  s'en  tenir  sur  la  qualité  de  leurs  corres- 
pondants ; 

Que  ces  extraits  suffisent  à  caractériser  la  campagne  menée 
par  les  défendeurs  qui,  faisant  appel  aux  plus  détestables  violen- 
ces, cherchent  à  désigner  à  Tanimadversion  publique  et  à  la  pas- 
sion populaire  tous  ceux  dont  ils  inscrivent  les  noms  et  adresses 
sur  leurs  listes  de  proscription  ; 

Que  le  tribunal  ne  saurait  trop  énergiquement  condamner  de 
telles  polémiques  dont  les  récents  événements  ne  révèlent  que 
trop  le  péril  ; 

Que  SchmoU  a  le  droit  incontestable  de  se  plaindre  de  Tabus 
qui,  malgré  lui,  a  été  fait  de  son  nom,  et  de  réclamer  la  répara- 
tion du  préjudice  qu'il  a  souffert  ; 

Que  le  Tribunal  a  les  éléments  nécessaires  pour  en  apprécier 
l'étendue  ;  que  s'il  convient  d'obliger  les  défendeurs  à  publier  le 
présent  jugement  dans  le  journal  même  où  Tattaque  s*est  pro- 
duite, il  n'y  a  lieu  d'augmenter  le  mal  déjà  causé,  par  une  plut 
large  public  ité; 

Par  ces  motifs,  Donne  défaut  contre  Guérin  et  Radigoin  qui 
n'ont  pas  constitué  avoué  ; 

Et  pour  le  profit  : 

Dit  Schmoll  recevable  et  bien  fondé  dans  sa  demande  ; 

Condamne,  en  conséquence,  Guérin  et  Radigoin,  conjointement 
et  solidairement,  à  lui  payer  500  francs  de  dommages-intérêts 
pour  réparation  du  préjudice  qu'ils  lui  ont  causé  par  la  publica- 
tion ci-dessus  visée  ; 

Leur  fait  défense  de  publier,  à  l'avenir,  les  nom,  profession, 
qualité  et  domicile  de  Schmoll,  à  peine  de  20  francs  par  chacune 
des  dix  premières  contraventions  constatées»  passé  lesquelles  il 
sera  statué  de  nouveau  ; 

Ordonne  Tinsertion  intégrale  du  jugement  dans  le  plus  pro- 
chain numéro  du  journal  rAnti;ut^  qui  sera  publié  après  sa  signi- 
fication, et  ce  à  peine  d'une  astreinte  de  25  francs  par  jour  de 
retard  pendant  un  mois,  passé  lequel  il  sera  fait  droit  ; 

Rejette  le  surplus  de  la  demande  ; 

Condamne  GQ^rift  et  Radigoin  solidairement  en  tous  dépens 


—  103  — 


Art.  4116, 

Iffom  iMàtronymlqiie.  —  Atteintes  À  te  pep«oiuiallté« 
—  ^lUMil-flélit.  —  Intention  liUnrieuiie.  —  Absenee 
de  bnt  e^Mumerelnl.  —  Tribunal  de  eommepee.  — 


U  tribunal  de  commerce  est  incompétent  pour  connaître 
de  Faction  en  dommages-intérêts  intentée  contre  un  journal 
à  raison  de  la  publication  d'une  liste  de  commerçants  dési- 
gnés comme  israélites,  cette  publication  ne  constituant  pas 
un  agtssement  de  nature  commerciale  au  profit  du  journal 
et  visant  les  personnes  désignées,  à  raison  de  la  religion 
qu'elles  professent  et  non  du  métier  qu'elles  exercent  (1). 

(Trib.  comm.  Seine,  6  mars  1899.  —  Cahen  c.  Radigoin  et  Guérin 

et  llmprimerie  Paul  Dapont.) 

Le  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine,  sous  la  prési- 
dence de  M.  le  président  Victor  Lxgrand,  a  rendu  le  juge- 
ment suivant  : 

Le  Tribunal,  En  ce  qui  touche  Guérin  et  Radigoin,  surTin- 
compétencc  r<Uione  materise  opposée  par  ces  défendeurs  : 

Attendu  que  le  demandeur  se  plaint  de  la  publication  de  ses 
nom,  profession  et  domicile  dans  les  listes  insérées  dans  le  jour- 
nal Y  Antijuif  sons  la  rubrique  «  Israël  chez  nous  »  ;  qu'il  soutient 
qu'à  la  suite  des  imputations  et  injures  énoncées  dans  la  première 
partie  du  journal  une  pareille  publication  serait  illicite  ;  qu'elle 
nuirait  à  sa  considération  et  lui  causerait  un  dommage  sérieux  ; 

Qu'un  certain  nombre  de  demandes  identiques  ont  été  intro- 
duites par  des  commerçants  et  des  non-commerçants;  que  la 
plupart,  qui  sont  commerçants,  exposent  que  les  agissements 
des  défendeurs  porteraient  atteinte  à  Texercice  de  leur  négoce  ; 
qae  tous  prétendent  que  Guérin  et  Radigoin  par  la  publication 


(1)  On  peut  douter  de  l'exactitude  de  cette  solution,  si  Ton  considère 
k  joomal  comme  nneentreprise  commerciale  ;  cette  entreprise  causait  un 
préjudice  à  autrui,  l'article  631  du  Ck>de  de  commerce  était  applicable. 
Il  importait  peu  qu'il  y  eût  là  ane  diffamation  ;  l'action  en  réparation 
an  délit  de  contrefaçon  est  bien  de  la  compétence  du  tribunal  de  com- 
merce lorsque  le  défendeur  est  commerçant  (Voir  Rouen,  5  août  1896, 
Ann,,  98.306  et  la  note). 

Le  gérant  et  le  propriétaire  d'un  journal  politique  font-ils  acte  de 
commerce  ?  Le  Tribunal  de  la  Seine  incline  vers  l'affirmative  ;  le  Tri- 
imaal  de  Largentière,  4  avril  1900,répond  négativement  (La  Loi,  10  mai) . 

G.  M. 


—  104  — 

et  la  vente  du  journal  susnommé  auraient  assumé  une  obliga- 
tion quasi-délictuelle  dérivant  de  l'exploitation  de  leur  entreprise 
commerciale,  que  par  suite,  le  présent  litige  serait  de  la  com- 
pétence de  ce  siège  ; 

Mais  attendu  que  Guérin  se  révèle  comme  directeur  et  Radi> 
goin  comme  gérant  du  journal  VAnUjuif;  qu'en  admettant  qa^ils 
soient,  au  regard  des  tiers,  les  seuls  chefs  responsables  de  Ten- 
treprise  et,  comme  tels,  commerçants,  Tattribution  de  juridiction 
ne  saurait,  en  Tespèce,  dépendre  uniquement  de  la  qualité  des 
parties  en  cause,  mais,  avant  tout,  du  caractère  de  l'acte  qui 
donne  lieu  an  litige  ;      ' 

Attendu  qu'il  n'existe  entre  les  parties  au  procès  ni  relations 
commerciales  ni  similitude  d'entreprise  ;  qu'il  n*est  pas  justifié 
ni  même  allégué  que  les  imputations  dont  se  plaint  le  demandeur 
constituent  les  éléments  d'une  concurrence  déloyale  ou  de  tons 
autres  agissements  de  nature  commerciale,  pratiqués  au  profit 
du  journal  V Antijuif  ; 

Qu'il  n'apparaît  pas  que  les  articles  violents  incriminés  s'appli- 
quent plus  spécialemeut  au  négoce  d'un  ou  plusieurs  des  com- 
merçants et  visent  nécessairement  leur  crédit  ou  leur  honneur 
commercial  ; 

Qu'il  est  constant  que  les  insertions  et  articles  se  rattachent  à 
une  campagne  de  presse  menée  par  le  journal  VAntijuif  contre 
une  collectivité  dont  il  ne  prend  pas  à  partie  les  membres  qui 
la  composent  en  raison  des  métiers  ou  fonctions  qu'ils  exercent 
personnellement,  mais  en  raison  de  la  religion  qu'ils  professent 
et  qu'il  divise  pour  les  besoins  de  sa  polémique  en  diverses  ca- 
tégories,  au  point  de  vue  civil,  industriel  et  commercial  ; 

Qu'en  ne  saurait  considérer  comme  un  acte  de  commerce  ou 
comme  procédant  d'un  acte  de  cette  nature  la  rubrique  «  Israël 
chez  nous  »,  avec  l'énumération  des  noms,  juxtaposée  à  des  arti- 
cles passionnés  qui  révèlent  manifestement  un  caractère  politique 
et  social  ;  que  rapprocher  ces  faits  pour  y  trouver  la  preuve  d'un 
quasi-délit  commercial,  d'un  préjudice  éprouvé  et  d'un  droit  & 
une  réparation  pécuniaire  serait  méconnaître  le  caractère  ioju- 
rieux  qui  leur  a  été  donné  à  la  barre  par  le  demandeur  lui-même 
et  requérir  en  réalité  de  ce  tribunal,  qui  n'a  pas  à  en  connaître, 
Tapplication  des  articles  29  et  suivants  de  la  loi  du  29  juillet  1881 
sur  la  presse,  titre  du  délit  contre  les  personnes  ; 

Qu'en  tout  état  de  cause,  le  tribunal  estime  que  le  litige  n'a 
pas  le  caractère  commercial  essentiel  et  précis,  nécessaire  pour 
être  déféré  à  la  juridiction  exceptionnelle  des  tribunaux  consu- 
laires ; 

Qu'il  échet  donc  d'accueillir  les  conclusions  de  Guérin  et  Ra- 
digoin  concernant  la  compétence. 

Plaidants  :  M**  Caron,  Fleuret  et  Max  Girard,  agréés. 


—  105  — 


Art.  4117. 

Liberté  dii  eommeree  et  de  l'indosirle. — Mmréhmndm 
em  gr^tm  ^guÈ  ▼endenC  dlreetement  mu.  publie.  — 
Mise  <k  nndex  imu*  une  eliAmbre  ayndleale.  —  Syn- 
dimmtm  profeealoiuiels.  —  Dommft^eM-liitérête. 

Commet  un  abus,  passible  de  dommages-intérêts ^  la 
chambre  syndicale  qui^  conformément  à  ses  statuts,  par  une 
circulaire  à  d'autres  chambres  syndicales^  met  à  Vindex  un 
marchand  de  gros  pour  s'être  adressé  directement  à  la  clien- 
tèle de  détail  sans  verser  une  somme  de  20  0/0  à  la  cham* 
hre  syndicale  ;  en  effets  une  semblable  mesure  est  contraire 
à  la  liberté  du  commerce  et  de  f  industrie  (1). 

Les  syndicats  professionnels,  établis  dans  les  termes  de 
la  loi  du  21  mars  1884,  peuvent  se  concerter  pour  défendre 
leurs  intérêts j  mais  à  condition  de  se  conformer  aux  règles 
de  la  justice  et  sans  porter  atteinte  aux  droits  d' autrui  {2). 

Si  depuis  l'abrogation  de  Varticle  416  du  Code  pénal 
t atteinte  portée  à  la  liberté  du  travail  par  la  proscription 
et  Tinter  diction  ne  constitue  plus  un  délit  passible  de  peines 
correctionnelles  y  les  mêmes  faits  peuvent  constituer  une 
faute,  entraînant  responsabilité  civile  si  elle  cause  préju^ 
ike  à  autrui  (3). 

(G.  de  Riom,  7  février  1900.  —  Thioust  e.  Chambre  syndicale  de 
rameablement  de  Glermont-Ferrand.) 

Par  infirmation  d'un  jugement  du  Tribunal  civil  de  Cler- 
mooUFerrand  en  date  du  13  janvier  1898  (La  Loi,  21  mars 
1900),  la  1'*  chambre  de  la  Cour  de  Riom,  sous  la  pr  ési- 
dence  de  M.  Proal,  après  plaidoiries  de  M«»  Salvy  et  Mil- 
ut,  conformément  aux  conclusions  de  M.  l'avocat  général 
DiLPY,  a  rendu  Tarrèi  suivant  : 

U  GooR,  Considérant  qu'à  la  date  du  11  août  1897  la  chambre 
ijodicale  de  Tameublement  de  Clermont-Ferrand  a  adressé  à  onze 
lyndicats  similaires  de  Bordeaux,  Rouen,  Grenoble,  Tours,  Pa- 
ris, Lyon,  Nantes,  etc.  la  circulaire  suivante  : 

«Noos  avons  rhonneur  de  vous  informer,  qu'ayant  eu  les  preu» 
ves  certaines  que  le  voyageur  de  la  maison  veuve  Thioust,  rue 
Saint-Bernard,  Paris,  était  allé  solliciter  directement  des  mat- 

(1-8)  Cf.  Trib.  ciT.Seine,  4  juUlet  1895  (La  Loi,  6  juillet)  et  6  novembre 
W  (U  Loi,  8  novembre);  Lyon,  15  mai  1S95  (La  Loi,  28  mai). 


--  106  — 

très  d'hôtel  et  clients  bourgeois  dans  notre  station  thermale  de 
la  Bourbonle  at  leur  avait  livré  des  meubles,  sans  qa'il  puisse 
jstiller  d'un  intermédiaire  appartenant  à  notre  corporation,  no- 
-e  syndicat,  dans  sa  réunion  du  9  courant,  a  proposé  à  l'unani- 
ifté  la  mise  &  l'index  de  cette  maison.  <> 

Considérant  que,  d'une  autre  circulaire  de  la  même  chambre 
yndicale,  en  date  da  31   novembre  iS06,  il  résulte  que  la  mise 

l'index  est  prononcée  contre  les  maisons  de  gros  qui  traitent 
irectement  avec  la  clientèle  bourgeoise,  quand  ces  maisons  oe 
ersent  pas  »  une  provision  de  20  0/0  aux  chambres  syndicales  n 
ue  la  chambre  syndicale  ile  l'ameablement  de  Clermont  pré- 
end  légitimer  cette  perception  et  la  rendre  obligatoire  sous  peine 
e  mise  à  l'index,  en  disant  qu'elle  est  une  sanction  de  l'obli- 
ntion  imposée  par  un  usage  commercial  aux  maisons  de  gros 
e  ne  pas  traiter  directement  avec  la  clientèle  bourgeoise  ; 

Considérant  que  l'existence  de  cet  usage  commercial  n'est  point 
tablie,  avec  le  caractère  que  lui  attribue  la  chambre  syndicale, 
u  les  lettres  de  quelques  marchands  en  gros  ;  les  uns  disent 
ue,  ne  faisant  pas,  de  détail,  ils  renvoient  à  leurs  clients  ,mar- 
lands  de  détail,  les  demandes  de  clients  bourgeois  dont  ils 
int  saisis  ;  que  d'autres  transmettent  À  des  marchands  de  dé- 
lil  la  «  bonification  »,  la  <<  remise  »  qni  leur  reviennent  dans 
ille  ou  telle  affaire  ; 

Qu'on  ne  sait,  par  te  texte  des  lettres,  si  cette  remise  est  la 
imunération  d'un  service  rendu  par  l'intermédiaire  qui  a  donné 
i  commande,  ou  le  dédommagement  du  fait  que  le  marchand 
1  gros  a  traité  directement  avec  les  clients  bourgeois  ; 

Considérant,  en  outre,  que  les  lettres  de  quelques  commer- 
uits  en  gros,  se  soumettant  aux  exigences  du  syndicat  de  Cler- 
lont  ne  sauraient  suffire  pour  établir  an  usage  commercial, 
pplicable  &  la  généralité  des  commerçants  en  gros  de  toute  la 
rance; 

Qu'il  n'est  point  exact  de  prétendre  que  cet  usage  a  été  re- 
}nna  par  la  maison  Thioast  ; 

Qu'à  ta  date  du  17  août  1897,  cette  maison  a  reçu  du  syndicat 
i  Clermont  une  lettre  ainsi  conçue:  «  Nous  apprenons  que  vous 
rez  vendu  directement  à  H.  Donnaud,  mattred'hétel  àlaBour- 
inle,  une  certaine  quantité  de  meubles...  En  conséquence, 
ous  avons  l'honneur  de  vous  inTormer  qu'à  dater  de  ce  jour 
lus  les  tapissiers  et  marchands  de  meubles  syndiqués  cesseront 
lûtes  relations  d'aiïaires  avec  votre  maison  »  ; 

Que  le  lendemain  18,  la  maison  Thioust  répondit  qu'elle  trou- 
ait cette  lettre  vraiment  extraordinaire  et  que  le  syndical,  avant 
e  prendre  des  allures  de  dictateur,  devait  s'assurer  au  moins 

en  avoir  le  droit  ;  que  la  maison  Thioust  ajoutait  ensuite  qu'elle 


—  107  — 

n*avait  pas  traite  directement,  mais  par  intermédiaire,  poar  ne 
pas  s*exposer  à  la  mpture  de  ses  relations  avec  les  maisons  de 
détails,  mais  sans  leur  reconnaître  le  droit  de  percevoir  20  0/0 
on  de  jeter  Tinterdit  sar  les  maisons  de  gros  ; 

Considérant,  au  surplus,  que  l'usage  allégué  par  ]e  syndicat 
de  Clermont  est  contraire  à  la  liberté  du  commerce  et  de  Tin- 
dustrie,  qui  est  d'ordre  public  ;  qu'il  aurait  pour  effet  de  créer 
des  catégories  distinctes  de  commerçants,  qui  ne  pourraient 
▼endre  qu'à  des  catégories  distinctes  d'acheteurs  ;  que  ce  Serait 
faire  rerivre,  cent  ans  après  la  Révolution  française,  les  abus 
des  anciennes  corporations,  détruits  par  elle  ;  que  sans  doute, 
en  fait,  il  existe  plusieurs  genres  de  maisons  de  commerce,  s'a- 
dressant  à  telle  on  telle  clientèle,  mais  que  chaque  maison  de 
commerce  est  libre  de  faire,  à  sa  convenance,  une  ou  plusieurs 
sortes  de  clientèle  ;  que  chacun  a  le  droit  de  vendre  et  d'acheter 
à  qui  il  lui  plaît,  sans  être  obligé  d'employer  tel  ou  tel  intermé- 
diaire ;  qu'il  est  contraire  à  la  saine  raison  de  vouloir  imposer 
aux  marchands  de  gros  l'emploi  des  intermédiaires  en  exigeant 
d'eux  une  remise  de  20  0/0  aux  chambres  syndicales,  sans  que 
cette  perception  ait  pour  contre-partie  un  travail,  un  service, 
une  fourniture  quelconque  ; 

Considérant  que  la  chambre  syndicale  de  l'ameublement  de 
Clermont  prétend  vainement  qu'en  prononçant  la  mise  à  l'index 
de  la  maison  Thioust  elle  n'a  fait  que  défendre  ses  intérêts, 
ainsi  que  l'autorise  à  le  faire  l'article  5  de  la  loi  du  21  mars  1884 
sur  les  syndicats  professionnels  ;  que,  sans  doute,  les  syndicats 
professionnels  peuvent  se  concerter  pour  défendre  leurs  inté- 
rêts, mais  qu'ils  ne  doivent  défendre  leurs  intérêts,  comme  les 
simples  particuliers,  qu'en  se  conformant  aux  règles  de  la  jus- 
tice et  sans  porter  atteinte  aux  droits  d'autrui  ; 

Considérant  que,  si  depuis  l'abrogation  de  l'article  416  du  Code 
pénal,  l'atteinte  portée  à  la  liberté  du  travail  par  la  proscrip- 
tion et  l'interdiction  ne  constitue  plus  un  délit  passible  de  pei- 
nes correctionnelles,  elle  peut  constituer  une  faute  entraînant 
une  responsabilité  civile,  si  cette  faute  a  causé  un  préjudice  à 
autrui  ;  que  les  syndicats  restent  soumis  aux  règles  du  droit  com  - 
mon  et  notamment  à  l'article  1382  : 

Considérant  qu'il  n'est  point  exact  de  prétendre  que  l'exer- 
cice d'an  droit  ne  peut  jamais  donner  lieu  à  des  dommages-in- 
térêts, même  quand  il  cause  préjudice  à  autrui,  en  vertu  de 
cet  adage,  qui  jure  suo  utitur  neminem  lœdit  ;  que  l'exercice  d'un 
droit  peut  devenir  abusif;  qu'il  faut  distinguer  l'exercice  nor- 
mal d'un  droit  de  l'abus  auquel  il  peut  conduire  ;  que  le  droit 
qui  appartient  aux  syndicats  de  se  concerter  n'est  pas  absolu, 
xaais  limité  par  le  devoir  de  ne  pas  nuire  à  autrui  ;  qu'une  pu- 


—  108  — 

enlever  à  une  maison  sa  clienUla  com- 
dans  l'exercice  normal  du  droit  qu'ont 
re  leurs  intérêts;  que  cette  mise  &  l'in- 
e  naire  k  la  maison  Tbioust,  est  évidem- 
iftusâ  préjudice  &  cette  maisoD  ; 
chambre  syndicale  de  l'ameublement  de 
t  moins  foudée  à  mettre  la  maison  Thioast 
bes  qu'elle  loi  adresse  ne  sont  point  éta- 

ivé  que  cette  maison  ait  livré  directement 
;  que  pour  le  fait  Clavel,  la  cbambre  syn- 
pas  d'avoir  traita,  mais  d'avoir  sollicité 
iffert  des  meubles  à  un  simple  particulier 
ceux  fixés  pour  les  mâmes  objets  à  un 
,  client  de  la  maison  venderesse  :  que  les 
t  sont  libres  de  ne  plus  faire  d'opérations 
aaison  Tbioust,  si  elle  leur  vend  les  meu- 
l'ils  ne  peuvent  cbercher  à  nuire  à  cette 
cité  préjudiciable,  en  engageant  les  au* 
îs  de  France  à  cesser  leurs  relations  avec 

,  que  la  maison  Tbioust  est  bien  fondée 

on  du  préjudice  qui  lui  a  été  causé  et  que 

ufSsants  pour  l'apprécier  ; 

'il  a  été  mal  jugé,  bien  appelé  ; 

,  ce  que  les  premiers  juges  auraieot  dû 

lia  circulaire  mettant  la  maison  Tbioust 
yndicalede  l' ameublement  de  Gierm ont  a 
cette  faute  acansé  un  préjudice  àta  mai- 

1  de  ce  préjudice  : 

re  syndicale,  représentée  par  son  prési- 
Tbioust  la  somme  de  500  francs  &  titre 

e  l'arrAt  aux  frais  de  l'intimée,  dans  cinq 
la  maison  Tbioust  &  la  condition  toutefois 
insertion  ne  dépasse  pas  100  francs  ; 
'e  syndicale  aux  dépens  de  première  ins- 

n  de  l'amende. 


—  109  — 


Art.  4118. 

Fropriété  arttotlqae.  —  IVéstttlon  d'Authenticité.  •— 
fiisiiAtiipe  de  rartiflte.  ~~  Vérifloation  d*éeritiire. 

Le  fait  d'avoir ,  dans  une  lettre  confidentielle ,  dénié  Vau'^ 
thentidté  dun  tableau^  ne  saurait  donner  ouverture  à  une 
action  en  responsabilité  y  alors  surtout  que  la  réception  de 
cette  lettre  n'a  causé  aucun  préjudice  au  tiers  détenteur  du 
tableau. 

La  procédure  de  vérification  d'écriture  n'est  pas  appli'- 
cable  à  la  signature  dun  tableau^  puisque  Vauthenticité 
de  cette  signature  ne  suffit  pas  toujours  à  établir  l'authen- 
ticité de  V œuvre  et  que  Vartiste  quiy  en  produisant^  n^a 
contracté  aucun  engagement  tns-d-ms  de  personne  ne  sau- 
rait être  tenu  de  déférer  aux  réquisitions  indiscrètes  dun 
tiers  avec  lequel  il  n'a  aucun  lien  de  droit. 

(Trib.  ci?.  S«iiie,  8  février  1897.  —  Bernheim  jeune  c. 

Jacqaes  fils  et  Lannean.) 

M.  Bernheim  jeune,  ayant  acquis  de  M.  Lanneau  un  ta- 
bleau signé  Gh.  Jacques,  a  assigné  Jacques  fils,  qui  avait 
dans  une  lettre  mis  en  doute  l'authenticité  de  cette  œuvre, 
pour  obtenir  réparation  du  préjudice  qui  lui  aurait  été  ainsi 
causé  et  faire  déclarer  que  le  tableau  était  bien  l'œuvre 
de  Charles  Jacques.  Le  tribunal,  après  avoir  entendu  en 
leurs  plaidoiries  M*>  Labori  et  Loustaunau,  a  rendu,  le  8  fé- 
vrier 4897,  le  jugement  suivant  : 

Lb  Tribunal,  Attendu  que  Bernheim  demande  contre  Jacquet 
fils  des  dommages  et  intérêts  par  état,  pour  le  préjudice  que  ce- 
lui-ci lui  aurait  causé  en  déclarant  qu'un  tableau  mis  en  vente 
par  le  demandeur  sous  la  signature  de  Jacques  père  n'était  pas 
de  ce  peintre  ; 

Attendu  qu'à  Tappui  de  sa  demande  il  sollicite  subsidiairement 
ooe  expertise  pour  établir  Tauthentici té  du  tableau  ;  que  dans  ses 
conclusions  ultérieures  invoquant  comme  applicables  à  la  cause 
les  règles,  de  la  vérification  des  écritures,  il  demande  que  Jacques 
fils  soit  tenu  de  reconnaître  la  signature  de  son  père  ; 

Sur  la  demande  en  dommages  et  intérêts  : 

Attendu  que  si  Jacques  a  en  effet  déclaré  que  le  tableau  n*é- 
tait  pas  de  son  père,  il  ne  paraît  pas  avoir  formulé  cette  décla- 
ration ailleurs  que  dans  une  lettre  privée  adressée  à  Bernheim 


?»", 


—  110  — 

qu'il  n'a  dès  lors,  de  ce  chef,  commis  aucune  faute  et  que  la  récep- 
tion de  cette  lettre  conQdentielle  n'a  causé  à  Rernîieim  aucun 
préjudice  ;  que  les  conclusions  principales  aussi  bien  que  celles 
subsidiaires  à  fin  d'expertise  doivent  être  rejetées  ; 

Sur  les  conclusions  à  un  de  reconnaissance  de  signature  : 
.  Attendu  que  des  termes  et  de  l'esprit  de  la  loi,  il  résulte  que 
cette  procédure  n'est  applicable  que  lorsqu'il  s'agit  d'un  écrit  ;que 
c'est  pour  cela  seulement  que  l'œuvre  du  législateur  se  justifie 
par  le  résultat  pratique  et  efOcace  auquel  elle  aboutit,  et  par  la 
légitimité  d'une  charge  qui  doit  être  considérée  comme  n'étant 
pour  le  signataire  que  la  conséquence  équitable  de  Tobligation 
contractée  par  lui  ; 

Qu'en  effet  d'une  part,  la  reconnaissance  d*écriture  par  un  corol- 
laire nécessaire  astreint  le  signataire  à  Texécution  du  marché 
tracé  au-dessous  de  sa  signature  ; 

Que  d'autre  part,  on  conçoit  qu'on  puisse  en  bonne  justice  im- 
poser au  souscripteur  d*une  obligation  à  échéance  plus  ou  moins 
éloignée  une  formalité  peu  gênante  qui  soustraira  l'authenticité 
de  cette  pièce  à  dès  contestations  presque  fatales  avec  le  cours 
des  années  et  qui  doit  dès  lors  être  envisagée  comme  n'étant 
que  la  suite  naturelle  et  normale  de  l'engagement  pris  par  lui  ; 

Mais  que  par  contre  en  matière  de  tableau,  d'une  part,  l'au- 
thenticité de  la  signature  ne  suffira  pas  toujours  à  établir  l'au- 
thenticité de  l'œuvre  ;  que  d'un  autre  c6té,  on  ne  saurait  com- 
prendre au  point  de  vue  des  principes  juridiques  comment  un 
artiste,qui  en  produisant,  n'a  contracté  aucun  engagement  vis-à- 
vis  de  personne,se  verrait  tenu  de  déférer  aux  réquisitions  indis- 
crètes d'un  tiers  avec  lequel  il  n*a  aucun  lien  de  droit  ;  qu'on 
doit  conclure  de  ces  considérations  que  la  procédure  de  vérifica- 
tion d'écriture  n'est  pas  applicable  à  la  signature  d'un  tableau  ; 

Attendu  que  tout  en  assignant  Jacques,  Bernheim  a  par  le 
même  exploit  dirigé  l'instance  contre  Lanneau  son  vendeur  à 
l'effet  de  voir  dire  qu'il  serait  tenu  de  lui  rembourser  son  prix 
d'achat  au  cas  où  le  tableau  serait  reconnu  faux  ; 

Mais  attendu  que  c'est  mal  à  propos  que  Bernheim  a  aussi 
appelé  en  garantie  Lanneau  dans  une  instance  qui  en  tant  qu'elle 
était  dirigée  contre  Jacques  fils  ne  pouvait  aboutir  à  un  jugement 
de  l'authenticité  du  tableau  ; 

Qu'il  doit  donc  être  déclaré  mal  fondé  dans  sa  demande  ; 

Par  ces  motifs,  Déclare  Bernheim  mal  fondé  dans  ses  deman- 
des tant  principales  que  subsidiaires  et  plus  subsidiaires  contre 
les  deux  défendeurs  ; 

Le  condamne  en  tous  les  dépens. 


—  m  — 


Art.  4119. 

Propirlétéarttotlqiie.  —  Peintre.  —  Portrait.  —  Com- 
~~  Droits  et  obllstttloiMi  du  peintre  et  du 


La  convention  par  laquelle  un  peintre  $*engage  à  exécu- 
ter  un  portrait  moyennant  un  prix  déterminé  constitue  un 
contrai  <Fune  nature  spéciale^  en  vertu  duquel  la  propriété 
dit  tableau  n'est  définitivement  acquise  à  la  partie  qui  Va 
commandé  y  qtte  lorsque  V  artiste  a  mis  ce  tableau  à  sa  dis* 
position  et  qu'il  a  été  agréé  par  elle.;  jusqu'à  ce  moment  y  le 
peintre  reste  maitre  de  son  œuvre ,  sans  toutefois  qu'il  lui 
mi  loisible  de  la  retenir  pour  lui-même  ou  d'en  disposer 
au  profit  d'un  tiers  à  Fétat  de  portrait,  le  droit  de  repro- 
duire les  traits  du  modèle  ne  lui  ayant  été  concédé  que  con- 
diiionnellement  en  vue  de  l'exécution  complète  du  con- 
trai (1). 

LepeintrCy  faute  de  satisfaire  à  ses  engagements,  se  rend 
seulement  passible  de  dommages-intérêts  envers  l'auteur  de 
la  commande,  sans  que  ce  dernier ,  qui  n'est  pas  devenu 
propriétaire  du  tableau,  puisse  exiger  que  remise  luien 
^oit  faite  en  l'état  actuel  (2). 

(C.  de  Casa,  cit.,  14  mars  1900.  —  Sir  Eden  c.  Whistler.) 

Sir  Eden  s'est  pourvu  en  cassation  contre  l'arrêt  de  la 
Cour  de  Paris,  rendu  le  2  décembre  1897  {Ann.,  97.328). 

Il  a  formulé,  à  Tappui  de  son  pourvoi,  le  moyen  sui- 
vant ; 

Violation  des  articles  1136, 1138, 1583,  1584,  1603  et  suivants, 
l'îB?  et  1788  da  Gode  civil,  fausse  application  de  l'article  1442 
da  même  Gode,  manque  de  base  légale,  défaut  de  motifs  et  vio- 
lation de  Farticle  7  de  la  loi  du  20  avril  1810,  en  ce  que,  tout  en 
reconaaissant  que  Whistler  avait  contracté  vis-à-vis  de  sir 
^.  Eden  Tobligation  de  faire  le  portrait  de  ladj  Eden  et  qu'il 
avait  fait  et  parachevé  ce  portrait,  Tarrét  attaqué  a  refusé  d'en 
ordonner  la  remise  au  demandeur,  sous  le  prétexte  que  le  contrat 

(i-2)  La  Cour  de  cassation  a  sanctionné  la  thèse  de  la  Cour  de  Patis, 
qai  avait  déjà  été  soutenue  dans  nos  Annales  en  note  sous  le  jugement 
do  tribunal  civil  de  la  Seine  (voir  i4nn.,  97.119  et  328,  notes).  Contra  : 
^Tns,  dans  le  Droit  d'auteur,  98.44. 


—  112  — 

intervenu  entre  les  parties  n'avait  donné  naissance  qn^à  une 
simple  obligation  de  fa)re,ré8oluble  en  dommages-intérêts  en  cas 
d'inexécution,  alors  que  ce  contrat  constituait  une  vente  de  chose 
future  ou  un  louage  d'ouvrage  dans  lequel  l'ouvrier  devait  four- 
nir la  matière,  ou,  tout  au  moins,  une  obligation  de  donner  qui 
avait  pour  effet  de  transférer  de  plein  droit  la  propriété  du  por- 
trait sur  la  tête  du  demandeur,  dès  son  achèvement  ou  tout  au 
moins  dès  son  agrément  par  sirEden  et  ce,  avant  toute  livraison, 
et  que  Tobligation  de  M.  Whistler,  n'eût-elle  constitué  qu*une 
simple  obligation  de  faire,  les  juges  du  fond  auraient  encore  dû 
ordonner  rezéeution  directe,  l'obligation  étant  de  celles  qui  peu- 
vent être  exécutées  directement,  sans  exercer  aucune  contrainte 
sur  la  liberté  du  débiteur. 

• 

M.  ravocat  général  Desjardins  a  donné  ses  conclusions 
dans  les  termes  ci-après  : 

Messieurs,  c'est  peut-être  avec  trop  de  hête  que  l'avocat  de 
M.  Whistler  se  met  hors  du  droit  commun,  et  répudie  particu- 
lièrement la  jurisprudence  qui  s'est  établie  en  matière  de  cons- 
tructions navales.  11  n'y  a  pas  d'analogie,  je  le  reconnais,  entre 
le  métier  de  peintre  et  le  métier  de  constructeur.  Mais  le  défen- 
deur avait-il  un  si  grand  intérêt  à  bannir  du  débat  votre  arrêt 
du  29  mars  1872  (D.  72.1.140)  :  «  attendu,  disiez-vous  alors,  qu'aux 
termes  de  l'article  1788  du  Gode  civil,  l'ouvrier  qui  fournit  la 
matière  supporte  la  perte  de  la  chose  qui  a  été  commandée,  si 
cette  chose  vient  à  périr,  de  quelque  manière  que  ce  soit,  avant 
d'être  livrée  ;  qu'il  faut  nécessairement  induire  de  là  que  le  légis- 
lateur a  considéré  que  la  propriété  de  la  chose  commandée  rési- 
dait sur  la  tête  de  Touvrier  aussi  longtemps  que  son  œuvre  n'était 
pas  achevée  et  qu'il  n'avait  pu  la  remettre  aux  mains  de  celui 
auquel  il  s'était  engagé  à  la  livrer...  »  Au  demeurant,  n'est-ce 
pas  la  doctrine  qu'applique  au  contrat  litigieux  l'arrêt  de  la  Cour 
de  Paris  du  2  décembre  1897,  jugeant  que  la  propriété  du  tableau 
n'est  définitiirement  acquise  à  l'auteur  de  la  commande  qu'autant 
qu'il  en  a  pris  livraison  ? 

Néanmoins,  les  deux  parties  paraissent  bien  près  de  s'accorder 
à  reconnaître  que  la  convention,formée  entre  le  peintre  et  Fauteur 
de  la  commande,  est  une  convention  sui  generis  et  qu'il  faut  la 
classer  à  part.  C'est  la  thèse  que  l'avocat  de  M.  Whistler  a  déve* 
loppée  dans  l'instruction  écrite  et  dans  ses  observations  orales. 
Mais  déjà  l'un  des  plus  redoutables  adversaires  de  l'arrêt  attaqué, 
M.  le  professeur  PJaniol  avait  écrit  dans  le  recueil  périodique  de 
MM.  Datiez,  annotant  cet  arrêt  (D.  98.2.465)  :  ce  II  ne  s'agit  pas 
de  la  vente  d'une  marchandise  ordinaire,  et  la  nature  de  la  chose 


—  113  — 

vendne  inflne  nécessairement  sur  les  conditions  de  la  vente.  Les 
contrats  usuels  ne  sont  pas  des  formes  rigides,  dans  lesquelles 
les  parties  soient  obligées  de  mouler  leurs  conventions,  sans 
aucune  adaptation  aux  besoins  spéciaux  de  chaque  hypothèse. 
La  jarisprndence  doit  tenir  compte  de  ces  nuances. . .  »  Je  crois, 
en  effet,  qu'il  est  plus  raisonnable  et  plus  conforme  à  la  stricte 
Térité  de  se  placer  sur  ce  terrain. 

Mais  tandis  que  la  Cour  de  Paris  envisage  rengagement  du 
peintre  comme  une  simple  obligation  de  faire,  M.  Planiol  le  dé- 
compose en  deux  obligations  successsives  :  i<*  exécuter  l'œuvre 
demandée  ;  2<*  livrer  son  travail  une  fois  fini.  La  seconde  obliga- 
tion est,  à  ses  yeux,  une  obligation  de  donner  contractée  à  prix 
d'argent,  par  conséquent  une  vente.  «  En  appliquant,  dit-il, 
lldée  de  vente,  on  serait  arrivé  à  la  solution  suivante  :  l'artiste 
avait  rempli  son  obligation  de  faire,(il  le  reconnaissait  lui-même)  ; 
comme  producteur,  son  rôle  était  Uni.  Il  ne  restait  plus  tenu 
que  d'une  obligation  de  livrer  ;  celle-ci  devait  être  admise  avec 
tontes  ses  conséquences.  C'est  précisément  cette  obligation  que 
la  Cour  a  sacrifiée  en  déclarant  que  l'auteur  du  portrait  n*est  pas 
on  vendeur,  n  J'incline  à  penser  que  cette  analyse  juridique 
n*est  pas  conforme  à  la  nature  des  choses. 

Le  pourvoi,  invoquant  Tautorilé  de  M.  Pouillet  {Traité  de  la 
^opriété  littéraire  et  artistique^  n®»  173,  174,  180)  propose  la 
distinction  suivante  :  «  Une  œuvre  littéraire  n'entre  dans  le  com- 
merce que  par  la  publication  ;  avant  la  publication, l'œuvre  atta- 
chée à  la  personne  de  son  auteur  et  faisant  comme  partie  de 
loi-même,  est  insaisissable.  Les  créanciers  de  cet  auteur  ne  peu- 
vent mettre  la  main  sur  ses  manuscrits  et  profaner  ce  que 
M.  Renouard  appelle  si  justement  «  la  conversation  de  l'auteur 
avec  lai-même,  le  sanctuaire  de  sa  conscience  ».  L'œuvre  mu- 
sicale doit  être  de  tous  points  assimilée  à  Tœuvre  littéraire.  Il 
en  est  autrement  de  l'œuvre  du  peintre,  dès  qu'elle  est  achevée, 
on  peut  dire  qu'elle  est  éditée.  »  M.  Claude  Couhin  reproduit 
et  fortifie  par  un  nouvel  argument  (t.  II,  p.  374  et  375)  cette 
opinion  de  M.  Pouillet.  Mais  cette  distinction  ne  me  paraît  pas 
juridique  ;  en  tout  cas,  elle  est  beaucoup  trop  absolue. 

Virgile  a  des  droits  sacrés  sur  le  manuscrit  de  son  Enéide, 
tant  qu'il  ne  la  juge  pas  terminée.  Meyerbeer  a  des  droits 
inviolables  sur  la  partition  de  V Africaine,  tant  qu'il  ne  la  croit 
point  parfaite,  et  nul  directeur  de  théâtre  ne  pourra  le  contrain- 
dre à  loi  livrer  cette  partition  que  le  compositeur  juge,  même  par 
on  excès  de  sévérité,  devoir  être  complétée  on  remaniée.  Mais 
est-ce  que  le  peintre  n'entre  pas  de  la  même  manière  «  en  con- 
versation avec  lui-même  I  est-ce  que  le  tableau  n'est  pas,  au 
même  titre  que  la  symphonie  ou  l'opéra,  un  ouvrage  de  lapen- 


—  114  — 

sée?  »  M.  Pouiliet  Q*a-t-ii  pas  dit  lui-même  {op,  eit,^  n^  77): 
«  La  matière  employée  par  Tartiste  est  saos  influence  sur  son 
droit,  c'est  la  conception  de  l'auteur  qui  est  protégée.  Qu'importe 
qu'il  Tait  exprimée  sur  la  toile  ou  la  porcelaine,  taillée  dans  le 
marbre  ou  Tivoire,  façonnée  dans  une  pâte,  coulée  dans  un 
moule,  elle  garde  dans  tous  les  cas  son  individualité.  La  création 
reste  la  même.  C'est  ainsi  que  la  loi  protège  la  composition  litté- 
raire sans  regarder  à  l'idiome.  »  S*il  en  est  ainsi,  le  peintre  a, 
comme  le  compositeur,  le  droit  d'aller  jusqu'au  bout  de  sa  propre 
conception.  Sans  doute,  le  tableau  prend  une  individualité  ma- 
térielle; mais  le  manuscrit  d'un  livre  ou  d'une  partition  est,  de 
même,  un  objet  corporel  et  palpable.  Un  écrivain,  a-t-on  dit, 
peut  jusqu'à  la  dernière  minute  se  repentir  d'avoir  commis  une 
œuvre  indigne  de  son  génie  ;  le  même  regret  peut  assurément 
naître  dans  l'esprit  du  peintre. 

J'approuve  donc  l'arrêt  rendu  par  la  Cour  de  Paris  le  4  juillet 
1865,  sous  la  présidence  de  M.  Bonneville  de  Marsangy  et  sur 
les  conclusions  de  M.  Oscar  de  Vallée.  Rosa  Bonbeur  avait  pro- 
mis un  tableau  d'une  certaine  dimension  à  M.  Pourcbet  et  le 
prix  avait  été  fixé  ;  elle  commença,  mais  interrompit  bientôt  son 
travail  et  finit  par  écrire  à  l'amateur  qu'elle  ne  lui  donnerait 
pas  «  le  plus  petit  morceau  de  toile  peinte  ». 

Le  tribunal  de  Fontainebleau  avait  ordonné  que,  dans  un  délai 
de  six  mois,  Rosa  Bonheur  devrait  livrer  à  Pourcbet  un  tableau 
composé  et  peint  par  elle  ;  £y  ou  tant  que,  ce  délai  expiré,  elle 
paierait  à  Pourcbet  20  francs  par  chaque  jour  de  retard  pendant 
trois  mois,  «  temps  après  lequel  il  serait  fait  droit  »  (c'est  ainsi 
que  procéda,  dans  l'affaire  actuelle,  le  tribunal  de  la  Seine  ;  la 
Cour  de  Paris  infirma,  considérant  qu  il  s'agissait  d'une  obliga- 
tion de  faire,  que  cette  obligation  se  résolvait  en  dommages- 
intérêts,  qu'en  présence  du  refus  formellement  exprimé  par 
Rosa  Bonheur,  il  ne  restait  plus  qu'à  statuer  sur  ces  dommages 
et  crut  devoir  les  évaluer  à  4,000  francs. 

M.  Planiol,  à  vrai  dire,  ne  veut  pas  qu'on  mette  sans  discer- 
nement, à  un  moment  quelconque,  le  peintre  au  pied  du  mur. 
u  II  faut  reconnattre,lit-on  dans  sa  note,  que  le  tableau  n'est  à  la 
disposition  de  celui  qui  l'a  commandé,  qu'au  moment  où  il  est 
reconnu  par  l'artiste  comme  achevé.  »  D'accord  ;  mais  à  quelles 
difficultés  pratiques  ne  va-t-on  pas  se  heurter  ?  L'artiste  n'a-t-il 
pas  tocgours  le  droit  de  dire  :  «  Je  ne  livre  pas,  parce  que  je 
n'ai  point  achevé.  Cet  achèvement  dépend  de  mon  intelligence 
et  de  ma  volonté.  J'exerce,  comme  producteur,  un  droit  de  maî- 
trise sur  mon  œuvre  ;  nul  ne  peut  l'exercer  à  ma  place.  »  Vous 
vous  trompez,  répondra  l'auteur  de  la  commande,  qui  a  payé  ; 
vous  m'avez  vendu  celte  faculté  d'exercer  le  droit  de  maîtrise  h 


—  115  — 

rotre  place  ;  je  Texerce»  Or  je  juge,  moi,  votre  OBUvre  unie  et  j*en 
réclame  la  livraison. 

N  Hais  qne  la  réplique  du  peintre  est  facile  !  Il  n'a  (les  choses 
se  sont  ainsi  passées)  qu'à  modifier  son  œuvre  inachevée.  En  un 
coup  de  pinceau,  il  a  reconquis  toute  sa  liberté.  Un  œil  a  dis- 
paru, le  nez  n*existe  plus  au  milieu  du  visage.  Le  portrait  est  à 
parfaire,  j'allais  dire  à  refaire. 

Le  pourvoi  proposait  comme  nn'modèle  universellement  appli- 
cable votre  arrêt  du  29  mars  1886,  qui  pose  le  critérium  suivant  : 
«U  ne  sanrait  j  avoir  place  pour  une  transmission  de  propriété, 
tant  que  la  chose  qu'on  s'est  engagé  à  livrer  ne  sera  pas  effecti- 
vement en  mesure  d'être  livrée...  »  Le  défendeur  avait  tort  d'éli- 
mioer  cet  arrêt  avec  tant  d*ardeur.  Le  portrait,  dans  l'espèce, 
n'est  plus  même  en  mesure  d'être  livré. 

il  faut  se  méfier  des  solutions  juridiques  qui  aboutissent  à  des 
impossibilités  matérielles.  Qu'est-ce  qu'une  règle  inexécutable? 

Cependant,  le  demandeur  insiste  en  faisant  observer  que  le 
peintre  a  brûlé  ses  vaisseaux  en  envoyant  le  portrait  à  l'exposi- 
tion du  Ghamps-de-Mars.  En  l'exposant,  il  s'est  rendu  non  re- 
cevable  à  soutenir  qu'il  ne  l'a  pas  terminé.  Je  ne  le  crois  pas. 
Le  Palais  des  offices,  li  Florence,  contient  quelques  esquisses  de 
Raphaël,  auxquelles  on  pourrait  assigner  une  place  d'honneur 
dans  n'importe  quelle  exposition.  En  fait,  il  arrive  assez  souvent 
que  l'exposition  même  fasse  ressortir  certains  défauts  et  que  le 
peintre  corrige  après  avoir  exposé.  11  en  est  surtout  ainsi  quand 
il  s'agit  d'un  portrait  fait  par  un  coloriste-harmoniste  (c'est  ainsi 
que  l'avocat  de  lord  Eden  classe  et  qualifie  M.  Whistler).  Dans 
les  œuvres  de  cette  école,  nous  disait  le  pourvoi  tout  à  Theure, 
la  ressemblance  n'est  qu'une  chose  accessoire  ;  l'artiste  cherche 
ane  combinaison  d'ombres  et  de  lumières;  il  se  tient  pour  satis- 
fait s'il  obtient  une  sorte  d'harmonie  générale,  indépendante  des 
réalités  concrètes.  Gomment  dénier,  en  thèse,  aux  peintres  de 
cette  école,  le  droit  de  songer  à  ces  misérables  réalités  concrè- 
tes, au  moment  où,  n'ayant  plus  affaire  au  public,  ils  se  trouvent 
en  face  d'un  modèle  en  chair  et  en  os? 

Je  crois  donc,  avec  l'arrêt  attaqué,  que  l'artiste  reste  maître 
iB  son  œuvre,  quand  il  ne  l'a  pas  livrée  à  Fauteur  de  la  com- 
mande, ou,  si  Ton  veut,  quand  il  ne  Ta  pas  mise  à  sa  disposi- 
tion, sans  qu'il  soit  toutefois  loisible  au  peintre  d'en  disposer  au 
profit  d'un  tiers  ou  de  la  retenir  pour  peindre  pour  lui-même  à 
l'état  de  portrait,  le  droit  de  retenir  les  traits  du  modèle  ne  lu  i 
ayant  été  concédé  que  conditionnellement  en  vue  de  l'exécution 
complète  du  contrat  ; 

M.  Planiol  dît  à  ce  sujet  :  «  Mais  d'où  vient  donc  cette  limita- 
tion des  droits  de  quelqu'un  qu'on  proclame  propriétaire  de  son 


—  116  — 

œuvre?  Qu'est-ce  que  cette  propriété  qui  ne  comporte  aucun 
usage  ?  Cette  prétendue  propriété  n'est  plus  un  droit,  c'est  une 
obligation.  »  C'est  plus  qu'une  obligation,  répondons-nous,  puis- 
que le  droit  de  Tartiste  exclut  encore  tout  droit  réel  de  l'auteur 
de  la  commande.  Le  jm  utendi  et  abutendi  est  limité  par  les  en- 
gagements mêmes  de  l'artiste.  Sans  Tabdiquer,  il  Ta  yolontaire- 
ment  restreint  en  contractant  certaines  obligations  auxquelles 
il  a  manqué.  Quelque  absolu  que  soit  le  droit  de  propriété,  le 
propriétaire  peut  toujours  en  limiter  lui-même  l'exercice,  expli- 
citement ou  implicitement,  en  prenant  certains  engagements. 

Mais  quelle  sera  la  sanction  des  infractions?  Car  enfin  l'artiste 
ne  peut  pas  se  jouer  des  gens  avec  lesquels  il  a  traité  ;  l'artiste 
ne  peut  pas  impunément  renier  ses  promesses,  violer  sa  parole, 
manquer  aux  autres  et  à  lui-même.  Sans  aucun  doute,  on  ne 
peut  pas  le  contraindre  à  faire  ce  qu'il  refuse  de  faire  ;  mais  on 
peut  le  condamner  à  des  dommages-intérêts  ;  on  pourrait,  au 
besoin,  quand  il  fait  preuve  d'une  insigne  mauvaise  foi,  l'écra- 
ser sous  des  dommages-intérêts. 

M.  Planiol  reproche  à  la  Cour  de  Paris  de  ménager  à  Fexcès 
l'indépendance  des  artistes.  Il  y  a  deux  contractants;  elle  érige, 
dit-on  un  seul  d'entre  eux  en  juge  des  suites  qu'il  a  données  lui- 
même  au  contrat.  C'est  bon  tout  au  plus,  insinuait-on  tout  à 
l'heure,  pour  certains  hommes  de  génie  auxquels  il  faut  laisser, 
dans  un  intérêt  général,  une  grande  liberté  d'appréciation  et  sur 
la  valeur  vénale  de  leur  œuvre  et  sur  son  degré  d'achèvement. 

Sans  doute,  il  y  a  des  Titien  et  des  Van  Dyck  qui  ont  laissé 
des  portraits  merveilleux,  chefs-d'œuvre  de  l'esprit  humain  et 
cette  lignée  n'est  pas  éteinte  puisque  M.  Bonnat  fait  revivre  sur 
des  toiles  impérissables  les  figures  des  plus  éloquents,  des  plus 
saints,  des  plus  braves  parmi  les  Français  d'aujourd'hui.  Il  eût 
été  particulièrement  regrettable  d'empêcher  la  c  conversation 
de  ces  grands  artistes  avec  eux-mêmes  ». 

Mais  serait-il  juridique  d'introduire  dans  le  débat  cette  dis- 
tinction entre  les  artistes  de  génie  et  les  artistes  dépourvus  de 
génie  ? 

J'en  doute  fort.  M.  Feuillet  l'a  proscrite  op.  et/.,  n^  78  en  termes 
excellents  :  «  La  loi  protège  au  même  degré,  dit-il,  toute  compo- 
sition due  à  un  effort  de  l'esprit  humain  et  se  rapportant  aux 
beaux-arts.  Elle  ne  considère  ni  l'importance  ni  la  beauté  de 
l'œuvre  ;  elle  n'envisage  que  le  fait  de  la  création  ;  c'est  pour 
cela  qu'elle  protège  au  même  degré  le  tableau  de  Raphaël  et 
l'image  sortie  des  fabriques  d'Epinal.  Je  précise.  Au  point  de 
vue  qui  neus  occupe,  il  serait  absurde  et  véritablement  impos- 
sible de  conférer  aux  tribunaux  le  droit  de  se  prononcer  sur  le 
mérite  des  œuvres  et  d'opérer  la  classification  des  hommes. 


—  117  ~ 

Oai,  quand  il  s'agit  de  déterminer  si  la  peinture  est  ou  n*est 
pas  achetée  et  si,  par  suite,  elle  peut  ou  ne  peut  pas  être  mise  à 
la  disposition  de  celui  qui  Ta  commandée  ;  les  pires  barbouilleurs 
eax-mémes  dominent  le  jugement  du  public  et  je  ne  crois  pas 
qu'ils  doivent  être  assimilés  aux  simples  vendeurs  d'une  toile 
courante,  cotée  sur  un  marché  commercial  et  tarifée  selon  sa 
dimension. 

Ce  que  je  dis  des  barbouiileurs,  je  le  dis  à  plus  forte  raison  des 
impressionnistes,  des  coloristes-harmonistes.  S'ils  négligent  inten- 
tionnellement le  dessin,  s'ils  fuient  le  contour  précis,  s'ils  laissent 
flotter  leur  pensée  dans  un  nuage,  s'ils  cherchent  le  beau  dans 
certains  jeux,  j'allais  dire  dans  certaines  sonorités  de  la  lumière, 
comment  discerner  s'ils  ont  obtenu  la  combinaison  rêvée?  Qui 
saura  jamais,  sauf  eux-mêmes,  s'ils  ont  atteint  leur  but?  On  ne 
peut  donc  pas  les  contraindre  à  mettre  à  la  disposition  d'un  con- 
tractant qui  veut  en  finir  l'œuvre  achevée  à  ses  yeux,  inachevée 
aux  lears.  Ils  ne  seront  jamais  contraints  de  faire  ;  mais,  dès 
que  le  juge  aura  constaté  soit  leur  mauvaise  volonté,  soit  leur 
mauvaise  foi,  soit  même  leur  simple  nonchalance,  ils  seront 
contraints  de  payer. 

Je  conclus  au  rejet  du  pourvoi.  » 

La  Chambre  civile  a  rendu  rarrêt  suivant  : 

La  Coub,  Attendu  que  la  convention  par  laquelle  un  peintre 
s'engage  à  exécuter  un  portrait,  moyennant  un  prix  déterminé, 
constitue  un  contrat  d'une  nature  spéciale,  en  vertu  duquel 
la  propriété  du  tableau  n'est  définitivement  acquise  à  la  par- 
tie qui  l'a  commandé,  que  lorsque  l'artiste  a  mis  ce  tableau  à 
sa  disposition  et  qu'il  a  été  agréé  par  elle  ;  que,  jusqu'à  ce  mo- 
ment, le  peintre  reste  maître  de  son  œuvre,  sans  toutefois  qu'il 
lui  soit  loisible  de  la  retenir  pour  lui-même  ou  d'en  disposer  au 
profit  d'un  tiers,  à  Tétat  de  portrait,  le  droit  de  reproduire  les 
traits  du  modèle  ne  lui  ayant  été  concédé  que  conditionnelle- 
ment  en  vue  de  l'exécution  complète  du  contrat,  et  que,  faute 
par  l'artiste  de  satisfaire  à  ses  engagements,  il  se  rend  passible 
de  dommages-intérêts  ; 

Attendu  qu'il  résulte  des  constatations  de  l'arrêt  attaqué  que 
Whistler  s'est  engagé  à  faire  le  portrait  de  lady  Eden^  mais  qu'il 
s'est  toujours  refusé  à  mettre  ledit  portrait  à  la  disposition  du 
demandeur  en  cassation  qui  en  avait  fait  la  commande  ;  et  qu'a- 
près avoir  exposé  le  tableau  au  salon  du  Champ-de-Mars,  il  a 
fait  subir  à  la  peinture  des  modifications  radicales  remplaçant 
la  tête  de  lady  Eden  par  celle  d'une  autre  personne  ; 

Attendu,  en  cet  état  des  faits,  qu'en  décidant,  d'une  part,  que 


—  118  — 

oandenr  en  cassation  n'étant  pas  devenn  propriétaire  da 
u,  n'en  pouTait  exiger  la  remise  en  son  état  actuel  ;  d'au- 
rt,  que  Wiiistler  serait  tenu  de  restituer  avec  des  domma- 
[érëts  le  prix  perçu  d'avance,  et  en  interdisant,  en  outre, 
ernier  de  faire  un  usa^e  quelconque  de  la  toile  avant  d'en 
modifie  l'aspect,  de  manière  k  la  rendre  méconnaissable, 
attaqué,  lequel  est  motivé,  loin  de  violer  le  texte  de  loi 
^T  le  pourvoi,  en  a  fait,  au  contraire,  une  juste  application  ; 
CES  nonFs,  Rejette  le  pourvoi  formé  par  sir  Eden  contre 
.  de  la  Cour  de  Paris  du  2  décembre  1897. 
.  Mazbau,  premier  présideni;  —  Rau,  rapporleur  ; 
uARuiNs,  avocat  général.  —  H*'  Boitin-Chahpbaox  et 
TON,  avocat. 


Art.  4120. 

ii4été  llUérMlre.—  Œavro  di*niiuttltpio.— RoDmB. 
'lasiikC  sén^ral.  —  Snpppe«BloD  totete.  —  Dam- 
mvm-tatbrétm. 

fait  de  s'approprier  pour  en  composer  un  roman  un 
e  historique  dans  son  titre,  son  sujet,  son  plan,  ses 
ï,  leur  agencement,leur  marche, te» personnages,  leurs  ■ 
,  leurs  titres,  leurs  professions,  leurs  passions,  leur» 
leur  langage  et  leurs  impressions  particulières,  eons- 
un  plagiat  général  gui  ne  peut  être  réprimé  par  la 
•ession  de  certains  passages  servilement  reproduits  du 
e,  mais  par  une  mesure  de  suppression  totale,  avec 
ilion  de  dommages  etintérits  (1). 
auteurs  du  roman,  alors  même  qu'ils  se  sont  dessaisis 
propriété  de  leur  ouvrage,  restent  responsables  du 
dice  qu'ils  ont  causé  en  récrivant  et  en  le  livrant  au 

C(S). 

.  Pouillel,  Prop.  HU.,  n«540, 

,'auteur  de  la  contrefaçon  est  co-antear  du  délit  ivec  l'éditeur, 
il  livie  l'ouvrage  à  la  publicité.  Mênae  lorsqu'il  s'est  dessaisi  de 
■a  droits  de  progiriélé  il  reste  complice  du  délit  de  contrefaçou, 
joiT  fourni  i  l'éditeur  les  moyens  de  le  commettre  (art.  6I},C.  peu.); 
[les  ordinaires  de  la  complicité  sont  applicables  aux  délits  des 
s  i15  et  406  du  Code  pénal  [Pouillet,  Prop.  litt.,  n°  611).  Dans 
e,  le  tribunal  civil  ne  relient  que  la  reaponaabililé  de  l'article  ISffî 
'  '  l'aele  initial  de  la  remise  de  l'aavre  ne 


-  119  - 

V  éditeur  fCe$t  pas  fondé  à  demander  sa  mise  hors  de  cause 
sous  prétexte  qu'il  n'aurait  pas  édité  le  roman,  mais  se 
serait  borné  à  acheter  des  livraisons  imprimées  dans  la  fait- 
lite  <r«n  précédent  éditeur  et  aurait  continué  la  publica- 
tion  (1). 

La  prescription  triennale  ne  saurait  être  invoquée  lors- 
que^ au  jour  de  la  poursuite  y  la  publication  par  livraisons 
suivait  encore  son  cours  (2). 

f G,  de  Paris,  25  janvier  1900.  —  Fayard  frères  c,  héritiers 

A.  Damas  et  Gailardet.) 

Ainsi  jugé  par  la  l'*  Chambre  de  la  Cour  de  Paris,  sur 
rappel  d'un  jugement  rendu  par  le  Tribunal  de  la  Seine 
le  23  juin  1897 ^nn.,  98.294). 

La  Cour,  Considérant  que  Fayard  frères,  éditeurs,  ont  publié, 
en  i898,  à  la  suite  de  la  maison  Edinger,  sous  la  forme  de  li- 
iraisons  illustrées  à  0  fr.  05  Tune,  un  roman  intitulé  La  Tour 
deNesle  et  signé  de  G.  Le  Faure  et  de  Pierre  Delcourt  ; 

Que  les  consorts  Dumas  et  Gaillardet  ont  alors  assigné  Tédi- 
teur  et  les  deux  auteurs  en  dommages-intérêts  prétendant  que 
ToniTre  mise  en  vente  n*était  que  la  contrefaçon  du  drame  écrit 
en  collaboration  par  Alexandre  Dumas  père  et  Gaillardet,  et  re- 
présenté à  Paris,  sur  le  théâtre  de  la  Porte- Saint  Martin,  le 
29  mai  4832  ;  qu'ils  ont  réclamé  40,000  francs  et  conclu  à  des 
mesures  protectrices  pour  réparer  et  faire  cesser  le  préjudice  dont 
ils  se  plaignaient  ; 

Considérant  que  les  appelants  opposent  à  cette  action  l'ap- 
probation de  leur  publication  par  Alexandre  Dumas  fils  et  les 
héritiers  Gaillardet  ;  mais  que  leur  affirmation,  sauf  une  lettre 
peu  concluante  d'un  tiers,  reste  à  Tétat  de  simple  allégation  ; 

Qu'ils  invoquent  aussi  la  prescription  triennale  applicable  au 
délit  de  contrefaçon  ;  mais  que,  sans  examiner  le  moyen  plus 
complètement,  il  couTient  de  le  repousser,  par  le  motif  pris  de 


tarait  pas  lé  seul  acte  reprochable  à  l'auteur  de  la  contrefaçon  et,  étant 
délictoeuz,  ne  serait  pas  totalement  couvert  par  la  prescription. 

(1)  L'éditeur  qui  a  acheté  la  propriété  de  Fœuvre  et  continue  la  pu- 
blication est  le  principal  auteur  du  délit,  lequel  se  perpétue  par  les  li- 
vrusoDS  successives. 

(3)  Evidemment  rédîteur  ne  peut  invoquer  la  prescription  pour  les 
livraisons  qui  ont  moins  de  3  ans.  Mais  il  résolte,dn  fait,  de  Tarrét  qu'il 
ne  peut  Finvoquer  non  plus  pour  les  livraisons  antérieures  lorsque  Tou- 
Trage  forme  on  tout  qui  est  contredit  dans  son  ensemble.  En  tous  cas 
il  resterait  responsable  de  la  vente  (V.  Pouillet,  Prêp.  Utt.,  n«  733). 

G.  M. 


—  120  - 

ce  que  la  publication  critiquée  suivait  son  cours  lia  daU  même 
de  t' assignation  introductive  d'instance  ; 

Considérant  que  Le  Faure  et  Pierre  Delcoart,  en  ce  qui   les 
concerne,  opposent  qu'ils  se  sont  dessaisis  de  la  propriété  de 
lear  onvage  ;  mais  qu'ils  n'en  restent  pas  moins  responsables  du 
nnïiiiHjce  qn'ils  auraient  causé  aux  héritiers  Dumas  et  Gaillar- 
l'écrivant  et  en  le  vendant  pour  être  livré  au  public  ; 
lidérant,  qnant  k  Fayard  frères,  qu'ils  soutiennent  devoir 
is  hors  de  cause,    parce  qu'ils  n'ont  pas  édité  le  romaa 
de  contrefaçon  et  s'étaient  bornés  &  acbeter  les  brochnres 
lées  et  les  droits  d'Edingerà  sa  faillite,  et  k  continuer  la 
ition  ;  mais  qu'il  importe  peu,  puisqu'ils  ont  fait  eux- 
I  et  à  leur  profit  la  publication  préjudiciable  ; 
ond: 

sidérant  que  le  roman  de  La  Tour  de  SesU  s'est  approprié 
me  de  Dumas  et  Gaillardet  dans  son  titre,  devenu  célèbre 
X  seuls,  dans  sou  sujet,  son  plan,ses  scènes,  leur  agencement 
'  marche,  ses  personnages,  leurs  noms,  leurs  titres,  leurs 
sions,  leurs  passions,  leurs  actes,  leur  langage,  leurs  im- 
ins  particulières  ; 

I  n'est  que  sa  copie  avec  des  développements  sur  chacaa 
incidents,  et  a  employé  tous  ses  matériaux  en  leur  ordre 
es  additions  de  pure  amplification  ; 

I  est  donc  un  plagiat  général  qui  ne  peut  être  réprimé  par 
pression  de  certains  p&ssages  servilement  reproduits  du 
,  mais  par  une  mesure  de  suppression  totale,  avec  alloca- 
i  do  m  mages- intérêts  ; 

lidérant  que  les  auteurs  et  éditeurs  soutiennent  en  vaio 
e  sujet  étant  historique  ou  tout  au  moins  légendaire,  ils 
ivnient  traiter  sans  souci  des  publications  précédantes  ; 
|ue,  si  certains  personnages,  de  la  pièce  La  Tour  de  Nesle 
Jslé,  la  fiction  dramatique  de  Dumas  et  Gaillardet  leur 
ient  tout  entière  eu  propre,  et  que  c'est  bien  k  eux  seuls 
I  au  domaine  public  que  les  appelants  l'ont  prise  nbusi* 
it; 

lidérant  qu'ils  ont  ainsi  causé  aux  intimés  un  préjudice 
et  matériel  par  la  dépréciation  de  l'œuvre  originale,  la  pri- 
du  bénéfice  à  retirer  de  la  vente  du  drame  que  te  roman 
de  remplacer  en  librairie,  et  la  difficulté  de  céder  des 
d'adaptation  d'ores  et  déjà  usurpés; 
la  Cour  a  les  éléments  suffisants  pour  l'apprécier,  en  te- 
ompte  aussi  du  devoir  et  de  la  facilité  qu'avaient  Le  Faure, 
jrt  et  Fayard  de  demander  aux  béritiers  Ounias  et  Cail' 
l'autorisation  nécessaire  ; 
sidérant,  quant  aux  mesures  complémentaires  demandées. 


—  121  - 

quHl  j  a  lieu  de  modifier  les  astreintes  prononcées  par  les  pre* 
miers  juges,  et  aussi  de  ne  point  faire  passer  dans  les  biens  des 
consorts  Dumas-Gaillardet,  comme  ceux-ci  Tout  exclusivement 
demandé,  les  exemplaires  du  roman  qui  peuvent  se  trouver  aux 
mains  des  auteurs  et  éditeurs  ; 

Par  ces  motifs,  Rejette  toutes  les  fins  de  non-recevoir  opposées 
à  la  demande  ; 

Confirme  le  jugement  du  tribunal  civil  de  la  Seine,  en  date 
du  23  juin  1897,  en  ce  qu'il  a  condamné  les  consorts  Le  Faure, 
Delcourt  et  Fayard  à  cesser  la  publication  du  roman  intitulé  : 
ÎA  Tour  de  Nesle,  à  payer  solidairement  aux  héritiers  A.  Dumas 
et  Gaillardet  la  somme  de  5.000  francs  à  titre  de  dommages-in- 
térêts et  à  supporter  tous  les  dépens  de  première  instance  ; 

Infirmant  pour  le  surplus  et  statuant  à  nouveau  : 

Dit  que  les  auteurs  et  éditeurs  du  roman  La  Tour  de  Nesle 
devront  cesser  sa  publication  du  jour  même  de  la  signification 
du  présent  arrêt,  et,  faute  de  ce  faire,  les  condamne  à  25  francs 
de  dommages-intérêts  par  chaque  jour  à  partir  de  cette  significa- 
tion pendant  un  mois,  passé  lequel  délai  il  sera  fait  droit  ; 

Rejette  le  surplus  des  conclusions  des  intimés  et  toutes  con- 
clusions principales  on  subsidiaires  des  appelants  ; 

Condamne  les  appelants  solidairement,  au  besoin  à  titre  de 
supplément  de  dommages-intérêts,  en  tous  les  dépens  d'appel  ; 

Ordonne  la  restitution  de  Tamende . 

M.  PoRicHON,  premier  président.  —  M«*  de  Bioault  du 
Granrut  et  Cléry  avocats. 


Art.  4121. 

Propriété  artistique.  —  Théâtre.  —  Décors  et  mise 
ea  «e^ne.  —  Droit  dn  dlreetenr  de  théâtre  sur  le 
déeoi*  dont  fi  est  propriétaire.  —  Ineldent  sur 
exéevtlon  d'arrêt.  —  Reproduction  d*un  autre  dé- 
cor ftàlt  pour  la  même  pléee. 

L'arrêt  quiy  sur  la  demande  d'un  directeur  de  théâtre,  fait 
défense  à  un  journal  de  reproduire  les  décors  et  la  mise 
en  scène  d^une  pièce  représentée  sur  ce  théâtre  ne  s'appli- 
que pas  à  la  reproduction  des  décors  et  de  la  mise  en  scène 
de laméme pièce,  tels  qu'ils  sont  sur  un  autre  théâtre  (1). 

(1)  L'arrêt  du  30  décembre  1898  avait  posé  en  principe  :  que  «  les  dé- 
cors d*ane  pièce  constituent  une  œuvre  artistique  analogue  à  un  tableau, 
dont  la  propriété  appartient  à  Fauteur  ou  an  directeur  de  théâtre,  son 


—  122  — 

(G.  de  Paris,  2  février  1900.  —  Sodétë  du  ThéAtre  de  la  Porte-SNMàrliii 

c.  le  PhotO'ProgiXimme.) 

La  Société  du  Théâtre  de  la  Porte-Sain t-Martin  a  obtenu 

concesaionnaire»  dans  les  termes  de  la  loi  du  24  juillet  1798  et  des  ooa- 
ventions  intervenues  entre  les  auteurs,  les  décorateurs  et  directeurs  de 
théâtres  ;  qu^il  en  est  de  même  de  la  mise  en  scène,  comprenant  les  oos- 
tûmes  et  le  groupement  des  personnages,  dont  le  plan  général  et  la 
conception,  le  plus  souvent  réglés  par  un  livret  manuscrit  ou  imprimé, 
pont  une  œuvre  de  l'esprit  susceptible  d'être  protégée'  par  la  loi  ;  qu'il 
suit  de  là  que  la  reproduction,  soit  des  décors,  soit  de  la  mise  en  scène, 
ne  peut  être  faite  sans  le  consentement  du  propriétaire.  » 

Le  nouvel  arrêt  de  la  Cour  de  Paris,  qui  n'avait  à  statuer  que  sur 
l'exécution  du  premier  arrêt,  n'a  pas  porté  atteinte  à  ce  principe.  Il 
n'avait  qu'à  examiner  si  l'interdiction,  prononcée  par  le  premier  arrêt, 
de  reproduire  les  décors  et  la  mise  en  scène  de  Cyrano  de  Bergerac  à  la 
Porte-St-Martin  s'appliquait  à  la  reproduction  des  décors  et  de  la  mise 
en  scène  de  la  môme  pièce  sur  un  autre  théâtre.  C'était  une  simple 
question  de  procédure. 

Au  fond,  la  Cour  aurait  eu  A  examiner,  dans  l'état  des  conventions 
entre  la  Porte-St-Martin,d'une  part^l'auteur  de  Cyrano  de  Bergerac  et  le 
décorateur,  d'autre  pari,  quelle  était  l'étendue  des  droits  conférés  à  la 
Société  du  ThéAtre  de  la  Porie  St-Mariin  et  qu'elle  pouvait,  par  oonsé* 
quent,  opposer  aux  tiers  : 

1\  est  évident  que  l'auteur  de  Cyrano  ne  lui  avait  concédé  que  le  droit 
de  représenter  l'œuvre  et  qu'il  restait  mattre  d'autoriser  la  représenta* 
tion,  par  exemple,  sur  le  théâtre  de  Bruxelles,  avec  la  mise  en  scène 
établie  par  lui  et  des  décors  plantés  suivant  ses  indications.  Quant  au 
décorateur,  il  avait  exécuté  son  décor  sur  les  indications  de  l'auteur,  il 
n'était  donc  pas  maître  de  la  conception  et  n'avait  de  droit  que  sur 
l'exécution,  il  n'a  donc  pu  céder  à  la  Société  de  la  Porte-St-Martin  aa« 
tre  chose,  en  lui  cédant  l'œuvre  artistique  que  constituait  le  décor. 

En  conséquence,  un  autre  théâtre  a  pu,  avec  l'autorisation  de  M.  Ed- 
mond Rostand,  représenter  Cyrano  dans  des  décors  établis  d'après  les 
indications  scèniques  de  l'auteur  mais  différents,  dans  l'exécution,  4e 
ceux  de  la  Porte  St-Martin  et  suivant  une  mise  en  scène  conforme  A  celle 
de  l'auteur.  Décors  et  mise  en  scène  ressembleront  A  ceux  de  la  Porte- 
St-Martin  autant  que  se  ressemblent  deux  œuvres  exécutées  sur  un 
même  programme  ;  mais  s'il  n'y  a  pas  eu  copie  d'une  œuvre  par  l'autre 
la  distinction  sera  facile  A  faire. 

Le  second  théâtre  sera  propriétaire,  A  son  tour  et  sous  les  mêmes  ré- 
serves, de  son  décor  et  de  sa  mise  en  scène,  en  ce  qu'ils  auront  de  per- 
sonnel ;  il  peut  céder  A  un  tiers,  par  exemple  A  un  photographe,  le  droit 
de  les  reproduire. 

Une  question  délicate  pourrait  se  poser,  c'est  celle  de  savoir  si  l'an- 
teur  n'aurait  pas  le  droit  de  s'opposer  A  cette  reproduction  en  ailégnant 
qu'il  ne  cède  A  l'entrepreneur  de  spectacles  que  le  droit  de  représenter 
l'œuvre  dans  les  conditions  approuvées  par  lui,  rien  de  plus. 

Dans  l'espèce  que  nous  examinons  une  autre  objection  pouvait  surgir  : 
la  vente  du  photo-programme  avec  la  reproduction  de  Cyrano  A  B  ruxel- 
les  ne  causait-elle  pas  A  la  Société  de  la  Porte-St-Martin,  &ute  de  men- 
tions suffisamment  distinctives,  exactement  le  même  préjudice  qu'avait 
voulu  réparer  le  premier  arrêt  ?  La  Cour  a  estimé  que  cela  ne  rentrait 
pas  dans  les  termes  de  l'astreinte  dont  l'exécution  lui  était  seule  sou- 
mise. 6.  M. 


—  123  — 

de  la  1^  chambre  de  la  Cour  de  Paris  (arrêt  du  80  décembre 
1898,  Afin.,  99.184)  c  défense  au  directeur  du  Photo-Pro- 
gramme de  reproduire,  à  Tavenir,  les  décors  et  la  mise  en 
scène  de  la  pièce  Cyrano  de  ^er^erac,  représentée  sur  le 
théitre  de  la  Porte-Saint*Martin  >,  celte  défense  étant  sanc- 
tionnée par  une  astreinte  de  20  francs  pour  chaque  con- 
travention. Le  Photo-Programme  a  alors  publié  la  repro- 
daetion  des  décors  et  de  la  mise  en  scène  de  Cyrano  de 
Bergerac  à  Bruxelles.  La  Société  du  Théâtre  de  la  Porte- 
Saint-Harlin  a  fait  saisir  les  programmes  contenant  cette 
reproduction  et  a  réclamé  l'astreinte.  La  l**  chambre  de  la 
Cour  de  Paris,  saisie  de  l'incident,  a,  le  2  février  1900, 
statué  en  ces  termes  : 

La  Godk,  Statuant  sur  Fincident  de  rexëcution  de  Tarrôt  du 
30 décembre  1898,  élevé  par  la  Société  nouvelle  du  Théâtre  de 
la  Poiie-Saint-Martin  ; 

Considérant  que  les  conclusions  respectives  des  parties  por 
tent  le  débat  sur  rexëcution  de  Tarrét  du  30  décembre  1898,  le- 
quel a  statué  sur  le  droit  de  publication  des  décors  et  de  la  mise 
en  scène  de  la  pièce  de  Cyrano  de  Bergerac^  représentée  sur  le 
Théâtre  de  la  Porte-Saint-Martin  ; 

Que  s*aatorisant  du  dispositif  de  cet  arrêt,  lequel  a  fait  dé- 
fense au  directeur  du  Photo-Programme  de  reproduire  à  Tavenir 
les  décors  et  la  mise  en  scène  de  la  pièce  Cyrano  de  Bergerac^ 
représentée  sur  le  thé&tre  de  la  Porte-Saint-Martin,  sous  une 
astreinte  de  20  francs  par  chaque  contravention  constatée  à  par- 
tir du  jour  de  Tarrêt,  le  directeur  de  la  Porte-Saint-Martin  a 
fait  dresser,  à  rentrée  du  théâtre,  trente-deux  procès-verbaux 
d'haissier  constatant  contravention  à  Parrét  par  la  vente  de  nu- 
méros du  Photo-Programme  contenant  reproduction  des  décors 
st  de  la  mise  en  scène  de  la  pièce  dont  il  s'agit  ; 

Mais  considérant  que  la  prohibition  résultant  de  cette  décision 
doit  être  limitée  dans  ses  termes  mêmes  ;  qu'elle  consacre,  en 
le  protégeant,  le  droit  des  directeurs  de .  la  Porte-Saint-Martin 
sar  TœuTre  artistique  dont  ils  sont  propriétaires  ;  mais  que  sa 
protection  ne  peut  s^étendre  an  delà,  et  qu'en  conséquence,  dès 
lors  qu'il  résulte  de  Texamen  et  de  la  comparaison  d'un  certain 
nombre  de  programmes  saisis,  au  nombre  de  26  ;  que  ces  pro- 
grammes, loin  de  reproduire  exactement  la  mise  en  scène  de  la 
^orte-Saint-Martin,  sont  dressés  d'après  des  représentations  de 
Uméme  pièce  sur  un  théâtre  différent,  ce  qui  n'est  pas  nié  ;  que 
la  prohibition  de  l'arrêt  ne  s'applique  pas  à  ces  programmes  ; 
qne  c'est  par  suite  sans  droit  que  .des  procès-verbaux  ont  été 
dressés  au  sujet  de  leur  distribution  ; 


Qu'il  a  été  Tait  des  offres  réelles  da  monlaDt  des  contraven- 
ODs,  au  nombre  de  six,  régulièreineot  constatées  suivant  la 
roit  des  directeurs  ; 

Pah  ces  U0T1P9,  déclare  Tulables  les  offres  réelles  du  3  ]an- 
ér  1900  ; 

Les  déclare  libératoires  ; 

Déclare  Floury  frères,  directeurs  du  théfttre,  mal  fondés  dans 
I  surplus  de  leurs  uns  et  conclusions. 

Les  en  déboute. 

MM.  FoBicHOM,  premier  président.  —  Tbohabd-Riolli, 
ubstilut  du  procureur  général.  — H**  Cléhencbau  elHsNRi 
iiOFFRoy,  avocats. 


Art.  4122. 

I«are.  —  lA-wrem.  -~  Ertltoni*.  —  Aataar.  —  Contrat  d'é- 
dition. —  Redevatnee  «tlpalée  par  exemplaire 
venda.    —  Fret  contracté  par  I'édltonr.~  Bxem- 


B*g«.  —  OppowitlOD  de  l'auteur.  —  RoJet. 

L'auteur  qui  a  cédé  à  un  éditeur  le  droit  de  publier  un 
uvrage  moyennant,  par  chacun  des  exemplaires  tirés,  une 
idevance  stipulée  payable  lors  de  la  mise  en  vente  de 
haque  mille,  devient,  au  moment  des  tirages  succestifif 
réancier  de  la  redevance  convenue  et  n'a,  sur  les  volumes 
nprimés,  aucun  droit  opposable  aux  créanciers  de  l'édi- 
!«r  qui  ont  reçu  de  celui-ci  une  partie  de  ces  volumes  en 
antissement  d'un  prêt,  alors  qu'aucune  preuve  de  mau- 
aise  foi  ou  de  faute  n'est  rapportée  à  leur  encontre  (1). 

Les  créanciers  gagistes  sont  fondés  à  invoquer  for(,  2279 
u  Code  civil  contre  toute  action  de  fauteur  qui  tendrait  à 
tire  décider  que  les  exemplaires,  faisant  l'objet  du  nan- 
saement,  ne  pourraient  être  mis  en  vente  qu'à  la  charge  de 
ti  payer  une  redevance  convenue,  pour  chacun  des  exem- 
(aires  vendus  (2). 

(1-3).  La  tolatioa  de  la  Cour  de  Paria  aemble  à  première  Tne  rigon- 
nsement  juridiqae,  toulefoia,  on  ae  prend  i  douter  de  ion  euelilude 
rsque  l'on  tient  compte  du  caractère  particulier  du  droit  de  l'aDtenr, 
i  ce  droit  moral  qai  a  été  mia  en  Inmière  dans  lea  dernières  innées 
ir  les  Congrès  de  la  Propriété  littéraire. 
Il  est  vrai  que  l'écrivain  avait  cédé  i  l'éditeur  le  droit  d'éditer  l'œuvra 


^125  — 

(C  de  Paris,  7  mars  1899.  —  Dramont  c,  bebière  et  May, 
Savine  et  syndic  faillite  Savine.) 

M.  Savine,  éditeur  des  œuvres  de  M.  Drumont,  notam- 
ment de  la  Fin  (Pun  Monde  et  du  Secret  de  Fourmies^ 
ayant  eu  besoin  d*argent,  avait  remis  aux  Magasins  gêné- 
ranx,  dirigés  par  MM.  Debière  et  May,  29.000  volumes  en- 
viron, en  échange  d'un  prêt  que  ces  messieurs  lui  avaient 
consenti. 

Depuis,  M.  Savine  avait  été  déclaré  en  faillite,  sans 
avoir  remboursé  ce  prêt. 

MM.  Debière  et  May  voulurent  alors  réaliser  leur  gage 
et  procéder,  dans  les  formes  légales,  à  la  vente  publique 
de  rénorme  stock  de  volumes  resté  entre  leurs  mains. 

M.  Drumont  s'opposa  à  cette  vente,  revendiquant  les 
droits  qu'il  prétendait  faire  résulter  de  la  propriété  de 
ces  deux  ouvrages  et  s'appuyant  sur  un  traité  qui  lui  as- 
surait une  redevance  de  1  franc  par  exemplaire  vendu. 

Le  Tribunal  civil  de  la  Seine,  par  un  jugement  du  18  dé- 
cembre 1897,  débouta  M.  Drumont  de  sa  demande  dans 
les  termes  suivants  : 

Le  Tribunal,  Attendu  qu'à  la  date  du  M  juin  1888,  Drumont 
a  convenu  avec  Savine  que  celui-ci  éditerait  et  publierait  son 
ouvrage,  la  Fin  d^un  MondCy  moyennant  le  payement  d'une  cer- 
taine somme  par  chaque  exemplaire  tiré  ; 


et  qae  l'éditeur  aUait  se  trouver  propriétaire  des  exemplaires  édités. 
Mais,  l^écrivain  ne  se  dessaisissait  de  ses  droits  qu'à  condition  du  paie* 
Bseat  d'une  redevance  par  chaque  mille  mis  en  vente  ;  les  exemplaires 
tirés  mais  non  encore  mis  en  vente  et  sur  lesquels  les  droits  d'auteor 
n'avaient  pas  été  payés  n  étaient  donc  pas  la  pleine  propriété  de  Tédi- 
teor. 

En  tout  cas,  l'auteur  devrait  pouvoir  s'opposer  à  la  réalisation  du  stock 
d^ezemplaires  i  bas  prix,  dans  des  conditions  qui  sont  de  nature  à  lui 
eaoser  nn  préjudice  moral  ;  le  projet  de  réglementation  du  contrat  d'édi- 
tion présenté  au  Congrès  de  l'association  littéraire  et  artistique  interna- 
tionale à  Milan  en  liâ2  prévoyait  qu'en  cas  de  vente  en  solde  l'auteur 
anrait  nn  droit  de  préférence  pour  l'acquisition  des  volumes. 

D'antre  part,  l'art.  17  du  môme  projet  prévoyait,  qu  'en  cas  de  déclara- 
tion  de  faillite  de  l'éditeur,  l'auteur  pourrait  demander  la  résiliation  du 
contrat,  s'il  ne  recevait  pas  du  syndic  des  garanties  suffisantes  pour  l'eié- 
cation  du  contrat  dans  son  intégralité  à  charge  par  lui  d'offrir  le  rem- 
boarsement  des  dépenses  utiles  faites  pour  la  publication  de  l'œuvre. 

M.  Trêves,  éditeur  h  Milan,  ne  faisait  pas,  dans  sa  critique  du  projet, 
d^objecUon  à  ces  deux  dispositions.  —  Cf.  Bourges,  14  juin  1844,  S.  45. 

G.  M. 


—  120  — 

Qu'à  la  date  du  il  février  1892,  une  convention  semblable  est 
intervenae  entre  les  mêmes  parties  pour  Tédition  et  la  publica- 
tion de  l'ouvrage  le  Secret  de  Fourmies  ; 

Attendu  qu'il  a  étë  nettement  spécifie  que  Drumont  cédait 
exclusivement  à  Savine  Pédition  in-18  de  ces  deux  ouvrages  et 
que  ses  droits  d*auteur  lui  seraient  acquis  du  seul  fait  de  la  mise 
en  vente  de  chaque  mille  ; 

Attendu  que  de  ces  conventions  il  ressort  que,  si  Drumont 
s'est  réservé  d'une  manière  générale  la  propriété  de  ses  œuvres, 
il  a,  moyennant  une  redevance,  aliéné  sa  part  de  propriété  sur 
une  édition  déterminée  au  profit  de  Savine  et  est  devenu  le 
créancier  de  celui-ci  à  dater  du  tirage  de  chaque  millier  d'exem- 
plaires ;  qu'il  suit  de  là  que  l'éditeur  avait  le  pouvoir  de  donner 
en  gage  à  Debière  et  May,  sans  l'intervention  de  l'auteur,  les 
volumes  d'une  édition  dont  il  avait  la  propriété  exclusive  ; 

Attendu  que  plusieurs  années  se  sont  écoulées  entre  le  dépôt 
aux  Magasins  généraux  des  volumes  litigieux  et  la  déclaration 
de  faillite  de  Savine  ;  qu'il  n'est  fait  la  preuve,  à  la  charge  des 
créanciers  gagistes,  d'aucun  fait  dolosif  ; 

Attendu,  en  conséquence,  que  c'est  à  tort  que  Drumont  a 
formé  une  demande  en  nullité  des  warrants  consentis  par  De- 
bière  et  May  à  Savine  et  s'est  opposé  à  la  vente  des  volumes  en- 
gagés ; 

Attendu  que  Drumont  demande  subsidiairement  au  tribunal 
de  nommer  un  séquestre  qui  aurait  pour  mission  de  se  mettre 
en  possession  des  volumes  susvisés  et  d'en  opérer  la  vente  dans 
des  conditions  déterminées  ; 

Attendu  que  le  défendeur  s'oppose  à  cette  mesure  ; 

Attendu  que  le  gage  a  été  régulièrement  constitué  ;  que  la  loi 
du  28  mai  1858,  le  décret  du  12  mars  1859  et  la  loi  du  31  août 
1870  déterminent  les  conditions  dans  lesquelles  aura  lieu  la 
vente  des  marchandises  engagées  ;  que  dès  lors,  il  n'est  pas  loi- 
sible au  tribunal  de  dépouiller  un  créancier  gagiste  des  droits 
qu'il  tient  de  son  contrat  et  de  la  loi  ; 

Attendu,  en  ce  qui  concerne  la  demande  reconventionnelle, 
que  Drumont,  en  mettant  obstacle  à  la  réalisation  du  gage,  a 
rendu  nécessaires  de  nouveaux  frais  ;  qu^il  a,  de  plus,  empêché 
Debière  et  May  de  toucher  des  fonds  qui  leur  revenaient  ;  qu'il 
doit  être  tenu  de  payer  ces  nouveaux  frais  de  vente,  de  magasi- 
nage et  d'assurance  et  les  intérêts  de  la  créance  que  la  vente 
aurait  éteinte,  lesquels  frais  et  intérêts  seront  fixés  par  état  ; 

Attendu  qu'il  n'y  a  pas  lieu  d'allouer  d'autres  dommages  et 
intérêts  ; 

Attendu  que  Savine  a  été  déclaré  en  état  de  faillite  à  la  date 
du  15  janvier  1897  ;  que  le  syndic  de  la  faillite  déclare  interve- 


—  127  — 

nir  dans  rinstance  |poar  s'opposer  à  la  demande  de  Drumont  ; 
qa'il  échet  de  lui  donner  acte  de  son  intervention  qui  est  justi- 
fiée; 

Par  CB8  MOTIFS,  Donne  acte  à  G...,  ôs  qualités,  de  son  inter- 
f  ention  ; 

Déclare  Drnmont  mal  fondé  en  ses  moyens,  fins  et  conclusions, 
Ten  déboate  ; 

Dit  que  Debière  et  May  pourront  procéder  à  la  vente  des  volu- 
mes warrantés  dans  les  formes  prescrites  par  la  loi  ; 

Condamne  Drumont  à  leur  payer  les  nouyeaux  frais  de  vente, 
de  magasinage  et  d'assurance  qu'il  a  rendus  nécessaires^  ainsi 
que  les  intérêts  ci-dessus  spécifiés,  lesquels  frais  et  intérêts 
seront  fixés  par  état  ; 

Dit  qa*il  n'y  a  lieu  à  d'autres  dommages-intérêts  ; 

Rejette  le  surplus  des  conclusions  des  parties  ; 

Condamne  Drumont  en  tous  les  dépens. 

M.  Drmnonl  ayant  fait  appel  de  ce  jugement,  a  présenté 
lui-même  ses  observations  devant  la  Cour,  avec  Tassis- 
tance  de  M*  de  Saint-Auban,  avocat.  MM**  Louis  Binoche 
el  DuFBAisss  ont  plaidé  pour  MM.  Debière  et  May,  d'une 
part,  pour  le  syndic  de  la  faillite  Savine,  d'autre  part.  La 
Cour,  sur  les  conclusions  de  H.  Sbligman,  substitut  du 
procureur  général,  a,  par  arrêt  du  7  mars  18d9,  statué  en 
ces  termes  : 

La  Goub,  Sur  l'appel  : 

Considérant  que  suivant  conventions  des  il  juin  1888  et  H  fé- 
nier  1892,  Drumont  a  cédé  à  Savine,  éditeur,  le  droit  de  publier, 
dans  le  format  in-18,  deux  de  ses  ouvrages,  moyennant,  par 
ehacon  des  exemplaires  tirés,  une  redevance  stipulée  payable 
lors  de  la  mise  en  vente  de  chaque  mille  ; 

Qn^en  vertu  de  ces  conventions,  Drumont  est  devenu,  au  mo- 
ment des  tirages  successifs,  créancier  de  la  redevance  convenue, 
mais  qa^il  n^a  sur  les  volumes  imprimés  aucun  droit  opposable 
à  Debière  et  May  qui  ont  reçu  de  Savine,  dans  le  courant  de  juil- 
let 1894,  une  partie  de  ces  volumes  en  nantissement  d'un  prêt 
par  eux  consenti  à  ce  dernier  ; 

Que  Debière  et  May,  créanciers  gagistes  en  vertu  d^un  titre 
Hgulier  et  contre  lesquels  aucune  preuve  de  mauvaise  foi  ou  de 
faate  n*est  rapportée,  sont  bien  fondés  à  invoquer  la  disposition 
de  l'article  2279  du  Code  civil  pour  repousser  l'action  dirigée 
contre  eux,  laquelle,  dans  le  dernier  état  de  la  procédure,  tend 
4  faire  décider  que  les  exemplaires  aux  mains  des  intimés  ne 


—  128  — 

pourront  être  mis  en  vente  sans  que  la  redevance  de  1  franc  par 
chacun  d^eux  soit  payée  à  l'appelant  ; 

Que  Drumont  doit  donc  être  débouté  de  ses  conclusions  prîn* 
cipales,  et  que,  d*autre  part,  la  Cour  ne  saurait  ordonner  Jes 
mesures  réclamées  par  les  conclusions  subsidiaires  sans  porter 
atteinte  aux  droits  des  intimés  à  qui  il  appartient  de  réaliser 
leur  gage  dans  les  conditions  et  suivant  les  formes  déterminées 
par  la  loi,  pour  être  payés  sur  le  produit  de  cette  réalisation 
préférablement  aux  autres  créanciers  ; 

Sur  les  conclusions  additionnelles  des  intimés  : 

Considérant  que  Drumont,  en  retardant  par  son  appel  la 
vente  des  volumes  engagés,  a  nécessité  de  nouveaux  frais  de 
magasinage  et  d'assurance  ; 

Qu'il  doit  être  tenu  de  payer  ces  frais,  ainsi  que  les  intérêts,  à 
partir  du  jour  du  jugement  jusqu'à  la  date  du  présent  arrêt,  de 
la  créance  en  principal  de  Debière  et  May,  si  la  réalisation  du 
gAge  permet  de  réteindre  entièrement,  ou  seulement  de  la  par- 
tie de  cette  créance  qui  serait  remboursée,  dans  le  cas  où  les 
fonds  provenant  de  la  vente  ne  seraient  pas  suffisants  pour  un 
payement  intégral  ; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges,  en  ce  qu'ils 
ne  sont  pas  contraires  h  ceux  qui  précèdent  ; 

Donne  acte  à  G....  ès-qualités  de  ce  qu'il  s'en  rapporte  à  jus- 
tice ; 

Met  l'appellation  à  néant  : 

Déclare  l'appelant  mal  fondé  dans  ses  demandes,  fins  et  con- 
clusions, et  l'en  déboute  ; 

Ordonne,  en  conséquence,  que  ce  dont  est  appel  sortira  son 
plein  et  entier  effet  ; 

Faisant  droit  aux  conclusions  additionnelles  des  intimés  : 

Condamne  Drumont  à  payer  à  Debière  et  May,  à  titre  de  dom- 
mages-intérêts supplémentaires  :  i<^  les  frais  de  magasinage  et 
d'assurance,  faits  depuis  le  jugement  jusqu'à  ce  jour  ;  2«  les  in- 
térêts de  la  créance  en  principal  de  Debière  et  May,  courus  en- 
tre la  date  du  jugement  et  celle  du  présent  arrêt  ; 

Dit  toutefois  que,  dans  le  cas  où  la  réalisation  du  gage  ne 
permettrait  pas  le  remboursement  intégral  de  la  créance,  ces 
intérêts,  ainsi  que  ceux  auxquels  l'appelant  a  déjà  été  condamné 
par  le  jugement,  ne  seraient  dus  que  sur  la  partie  de  cette 
créance  qui  serait  éteinte  ; 

Dit,  en  outre,  que  les  frais  et  intérêts,  au  sujet  desquels  il 
vient  d'être  statué,  seront  compris  dans  l'état  à  fournir  en  exé- 
cution du  jugement  ; 

Condamne  l'appelant  à  l'amende  et  aux  dépens  de  son  appel. 


-Iâ9- 


Art.  4123. 

Propriété  ATilstiqiie.  —  ReprodveClon  photoirrAplil- 
q«e  de  INBwrre  irendae,  ««lui  l*aatorlstt(lon  de  l'«r  « 
tkiie.   —   Préjadlee  moral.—  DofniiiAfree-liitérête. 


En  matière  de  propriété  artistique  et  dans  le  silence  du 
contrat  y  V  amateur  qui  achète  une  œuvre  d'art  doit  être  pré- 
sumé n'avoir  acquis  que  Cobjet  même  ;  le  droit  de  le  re- 
produire  {spécialement  par  la  photographie)  demeure  la 
propriété  de  Tartiste  (1). 

Dès  lors  doit  être  condamné  à  des  dommages-intérêts  le 
photographe  quiy  sans  autorisation  du  peintre^  a  reproduit 
les  (Buvres  que  celui-ci  a  vendues  à  des  amateurs  et  a  mis  en 
tente  ces  reproductions,  sauf  à  tenir  compte^  dans  la  fixa- 
tion du  chiffre  des  dommages-intérêts  alloués,  de  cette  cir- 
eanstance  que  le  peintre  n'a  guère  subi  en  réalité  qu'un  pré^ 
judice  moral  (2). 

MaiSy  si  le  propriétaire  de  Fœuvre  ne  peut  la  reproduire 
ou  la  laisser  reproduire^  il  est  en  droit  d'empêcher  Fauteur 
de  faire  lui-même  des  reproductions-répétitionSyà  sa  guise^ 
car  à  moins  de  convention  contraire  il  a  acheté  l'objet  dans 
le  but  de  le  posséder  à  titre  exclusif  (3). 

(Trib.  mixte  da  Caire,  16  mai  1896.  —  Schifft  e.  Lekizian.) 

E.  Schiffiy  artiste  peintre  italien,  avait  assigné  en  2.000  fr. 
de  dommages-intérêts  Gabriel  Lekizian,  artiste  photogra- 
phe, sujet  indigène,  pour  avoir,  sans  autorisation,  repro- 

(1-2)  Sur  le  droit  de  l'acheteur  en  matière  de  reproduction  voir  Pouillet» 
Pnp.litt.,  n.  963.  Les  auteurs  qui  ont  écrit  sur  la  matière  sont  i  peu  près 
Bnanimes  pour  penser  que,  dans  le  silence  du  contrat,  celui  qui  achète 
u  objet  d'art  achète  Tobjet  matériel,  le  droit  de  posséder  la  composition 
qui  lui  a  plu  :  rien  de  plus.  G*est  en  ce  sens  que  la  difficulté  a  été  tou^ 
joan  résolue  par  les  divers  congrès  qui  se  sont  occupés  de  la  question. 
U  plupart  des  législations  étrangères  proclament  le  même  principe  et 
iûneot  subsister  en  faveur  de  l'artiste  qui  a  vendu  son  œuvre  le  droit 
d'en  aotorlser  la  reproduction  (V.  notamment  :  Allemagne,  loi  du 
31  mars  1864,  art.  5  ;  Autriche,  loi  do  S6  décembre  1895,  art.  18  ;  Belgi- 
n^e,  M  du  22  mars  1886,  art.  19  ;  Italie,  décret  du  18  septembre  1882, 
trt.  18,  etc.).  En  France,  où  la  loi  est  muette,  la  jurisprudence  est  à 
pea  près  Axée  en  sens  contraire  et  confère  le  droit  de  reproduction  à 
Viebetenr. 

(8)  Sur  le  droit  pour  l'artiste  de  se  répéter,  voir  Pouillet,  eocf.  Zoc, 
B*  306  et  la  jurisprudence  citée. 


—  130  — 

duil,  par  la  photographie,  un  tableau  qui  avait  été  venda 
par  le  peintre  à  un  amateur  et  dont  il  avait  fait,  en  outre, 
deux  répliques  également  vendues  à  deux  autres  ama- 
teurs. 

Le  tribunal,  siégeant  en  matière  commerciale,  a  accueilli 
la  demande  en  ces  termes  : 

Le  Tr[bunal,  Attendu  que  la  propriété  de  l'artiste  sur  son  œu- 
vre comprenant  un  double  élément,  présente  un  double  béné- 
fice à  exploiter,  savoir  :  le  prix  de  la  vente  originaire  et  le  prix 
des  reproductions  ; 

Que,  dans  le  silence  des  conventions,  il  y  lieu  d'admettre  que, 
lorsquun  amateur  achète  un  tableau,  il  achète  une  œuvre  qu'il 
prend  plaisir  à  voir  et  à  montrer,  qu'il  achète  un  objet  matériel, 
mais  que  le  droit  de  reproduction,  qui  est  distinct  de  l'objet  ma* 
tériel,  qui  dérive  non  de  la  propriété  mais  de  la  création  de  l'in- 
venteur, reste  la  propriété  de  l'auteur  ; 

Qu'on  ne  peut  admettre  qu'un  peintre,  parce  qu'il  aura  vendu 
nne  de  ses  œuvres,  la  voie  jetée  dans  le  public,  dénaturée  par 
la  photographie  ;  qu'il  a  donc  le  droit  de  s'opposer  à  toute  re- 
production ;  que,  par  conséquent,  c'est  abusivement  que  Lekizian 
a  reproduit  le  tableau  de  SchifH,  sans  en  avoir  reçu  Tautorisation 
du  peintre  et  qu'il  doit  être  condamné  au  paiement  d'une  in- 
demnité pour  réparation  du  préjudice  causé  par  cette  violation 
du  droit  de  l'artiste  ; 

Attendu  que,  pour  fixer  le  montant  de  cette  indemnité,  il  y  a 
lieu  de  retenir  que,  si  l'acheteur  d'un  tableau  n'a  pas  le  droit 
de  le  reproduire,  il  peut  toutefois  empêcher  l'auteur  de  faire  lui- 
même  des  reproductions  à  sa  guise,  qu'évidemment,  à  moins  de 
conventions  contraires,  il  a  acheté  un  objet  afin  de  le  posséder 
à  titre  exclusif  ;  qu'entre  le  vendeur  et  lui  est  intervenu  un  con- 
trat précis  et  que  le  peintre  le  violerait  s'il  était  au  tableau  son 
originalité  et  sa  valeur  en  le  banalisant,  en  répandant  sa  compo- 
sition ; 

Attendu  que,  dans  ces  conditions,  le  préjudice  occasionné  par 
les  reproductions  photographiques  de  Lekizian  l'a  été  surtout  au 
détriment  des  acheteurs  des  tableaux  de  Schiffl  qui  ne  sont  pas  en 
cause  ; 

Que,  si  ces  tableaux  ont  subi  une  diminution  de  leur  valeur 
vénale,  cette  perte  atteint  surtout  leurs  acheteurs  et  non  le  pein- 
tre qui  en  a  touché  le  prix  int  égral  avant  leur  dépréciation  et  qui 
a  subi  plutôt  un  préjudice  moral  : 

Que,  vu  le  nombre  minime  des  reproductions  photographi- 
ques vendues  par  Lekizian,  l'indemnité  à  arbitrer  au  profit  de 


-131  — 

Schifft  pour  Tiolation  de  ses  droits  doit  être  fixé  ex  xquo  et  bono 
à  la  somme  de  100  francs  pour  le  passe. 

MM.   HoHÉ,  président  ;  —  Alibey  Sadik,   substitut.    — 
M**  À.  RosKTTi  et  Grebn,  avocats. 


Art.  4124, 

Propriété  ttrttoticiae.—  Droit  de  reprodnetlon.—  C?eo« 
•loa.  ~  Preoire.  —  Modèleo  conOéo  fk  on  rondeur.  — 
BeiMPodoetlon  limitée  A  la  eommoiide. 

Uauteur  d'une  œuvre  cTart  en  devient  propriétaire  par  le 
seul  fait  de  sa  création  c'est  à  celui  qui  prétend  se  préva- 
loir Sun  droit  de  reproduction  de  prouver  que  ce  droit  lui 
a  été  cédé  (1). 

La  remise^parun  tiers,  de  modèles  de  fontaines  à  un  fan- 
deur  pour  les  reproduire  en  bronze  ne  saurait  lui  concéder 
le  droit  éCexécuter  d'autres  fontaines^  en  dehors  de  celles 
qui  lui  ont  été  commandées  (2). 

(a  de  Paris,  1*^  août  1899.  —  Le  Bourg  c.  Val  d'Osne.) 

Charles  Le  Bourg»  sculpteur,  créateur  du  modèle  des  fon- 
taines dites  «  fontaines  Wallace  »,  demandait  qu'il  fût  in- 
terdit à  la  Société  du  Val  d'Osne  de  continuer  à  reproduire 
et  à  vendre,  tant  à  la  Ville  de  Paris  qu*à  des  villes  de  pro- 
vince et  de  rétranger,des  exemplaires  des  fontaines  Wal- 
lace dont  les  modèles  avaient  été  autrefois  remis  à  la  Com- 
pafçnie  par  sir  Richard  Wallace,  en  vue  d'une  première 
commande  dont  il  faisait  don  à  la  ville  de  Paris.  Le  Bourg 
avait  touché  sur  celte  commande  undroitd'auteurdelOO/0. 
La  compagnie  avait  continué  la  construction  de  ces  fontai- 
nes, mais  s'était  ensuite  refusée  à  verser  à  Le  Bourg  aucun 
droit  d'auteur,  prétendant  qu'elle  était  propriétaire  des  mo- 
dèles. 

Le  Tribunal  de  la  Seine,  à  la  date  du  27  janvier  1897,  a 
rendu  le  jugement  suivant  : 

Lb  TaiBU?i4L,   Attendu  que  Le  Bourg  demande  des  dommages 

(1)  V.  Pouîllet,  PropAUt,,  n^  120. 

(2)  Sor  les  formes  de  la  cession  et  sa  preuve,  voir  Poulilct,  eod,  loc, 
s*  951  et  suiv. 


—  132  - 

intérêts  &  fixer  par  état  contre  la  Compagnie  le  Val  d'Osne,  en 
raison  de  ce  qu'elle  aurait  reprodait  sans  droit  depuis  1S7S,  boub 
arme  d'appareils  en  fonte,  le  dessin  de  fontaines  dites  «  fon- 
lines  Wallaee  »,  dessin  dont  il  est  l'aoteur  et  dont  il  serait  de- 
leuré  propriétaire  ; 

Attendu  que  la  compagnie  se  prétend,  elle,  propriétaire  de 
œuvre  comme  la  tenant  de  sir  Hichard  Wollace  Ini-méme,  ces- 
ionnaire  de  Le  Bourg,  à  qui  il  aurait  fait  la  commande  ; 

Mais  attendu  que  la  compagnie  ne  justlAe  pas  plus  de  la  ces- 
ion  à  elle  faite  par  sir  Richard  Wallaee,  cession  dont  le  carac- 
ire  gratuit  et  gracieux  s'expliquerait  difficilement,  qne  de  la  ces- 
ion  à  Wallaee  par  l'auteur  ; 

Attendu  que  c'est  en  vain  qu'elle  se  prévaut  de  la  possession 
u  dessin  comme  emportante  son  profit  preuve  de  propriété; 

Que  cette  cession  est  inopérante  en  raison  de  son  caractère 
quivoque,  Le  Bourg  ne  méconnaissant  pas  avoir,  pour  on  temps 
imité,  concédé  h  la  compagnie  le  droit  de  reproduction  et  ajant 
ù  nécessairement  lui  remettre,  pour  l'exercice  de  ce  droit,  le  dea- 
in  en  question  ; 

Attendu  que  c'est  d'après  des  présomptions  de  pur  fait  qae  doit 
tre  tranché  le  litige  ; 

Qu'à  ce  point  de  vue,  c'est  encore  en  vain  que  la  compagnift 
ivoque  le  silence  gardé  par  Le  Bonrg  pendant  une  durée  de  vingt- 
uatre  ans  suivant  elle  ; 

Qu'en  effet,  d'une  part,  les  documents  de  la  cause  semblent 
tablir  que,  pendant  cette  période,  Le  Bourg  a  formulé  à  différen- 
ts reprises  des  réclamations  ; 

Que,  d'autre  part,  il  a  pu  ne  pas  connaître  avant  un  certain  laps 
e  temps  les  atteintes  qui  auraient  été  portées  à  ses  droits  et  qu'il 
énonce  aujourd'hui  ; 

Attendu  qu'an  rebours  des  prétentions  de  la  compagnie  ainsi 
.énnées  defondement, celles  de  Le  Bourgse  produisent,  appuyées 
ur  les  présomptions  les  plus  sérieuses  ; 

Que,  tout  d'abord,  il  est  protégé  par  ce  principe,  qae,  sanf 
reave  formelle  du  contraire,  l'auteur  est  présumé  propriétaire 
e  son  œuvre  ; 

Qn'ensaite  il  invoque  ce  fait  capital  qne  la  compagnie  etle- 
léme  a  reconnu  le  bien  fondé  de  sa  demande  en  lui  payant 
isqu'en  IS^S  10  0/0  pour  ses  droits  d'auteur; 

Que  la  compagnie  équivoque  vainement  sur  les  termes  au 
loyen  desquels  ce  versement  est  qualifié  dans  sa  comptabilité  ; 

Que,  parce  qu'il  est  mentionné  sous  le  nom  de  remises  ou  com- 
tissions,  elle  essaye  de  le  représenter  comme  une  rémunéra- 
on  remise  à  LeBourtr,  non  pas  en  tant  qu'auteur,  mais  en  tant 


—  133  - 

qu'ayant»  en  qualité  d'intermédiaire,  apporté  an  Val  d'Osne  la 
commande  des  fontaines  ; 

Mais  attendu  que,  si  le  terme  employé  par  le  Val  d^Osne  n'est 
pas  le  terme  strictement  technique  et  juridique  pour  désigner  les 
droits  d'autear,  les  documents  de  la  cause  établissent  que  c'est 
bien  sous  cette  appellation  que  la  compagnie  a  mentionné  dans 
ses  livres  d'autres  paiements  qu'elle  a  faits  au  môme  Le  Bourg 
pour  d'autres  œuvres,  et  qui,  ceux-là,  représentaient  sans  con- 
teste des  droits  d'auteur  ; 

Que  Tobjection  grammaticale  de  la  compagnie  n'est  donc  pas 
fondée; 

Pab  CBS  MOTIFS,  Condamue  la  Société  le  Val  d'Osne  à  payer 
au  demandeur  des  dommages-intérêts  à  fixer  par  état  ; 

Fait  défense  à  ladite  société  de  reproduire  à  l'avenir  les  mo- 
dèles de  fontaines  dites  «  fontaines  Wallace  »,  dont  Le  Bourg  est 
l'auteur,  et  ce^  sous  une  astreinte  de  300  francs  par  chaque  repro- 
duction constatée  ; 

Déclare  la  Compagnie  le  Val  d'Osne  mal  fondée  en  toutes  ses 
conclusions,  l'en  déboute  et  la  condamne  aux  dépens. 

Sar  appel  formé  par  la  Société  du  Val  d'Osne,  la  Cour, 
sous  la  présidence  de  M.  Harel,  président,  après  avoir  en- 
tendu M.  Lombard,  avocat  général,  en  ses  conclusions  et 
M**  Lagoin  et  Charles  CoNSTANT,avocats,en  leurs  plaidoiries, 
a,  par  arrêt  du  l**' avril  1899,  confirmé  la  sentence  des  pre- 
miers juges  en  ces  termes  : 

La  Cour,  Considérant  que  Le  Bourg,  artiste  sculpteur,  de- 
mande qu'il  soit  interdit  à  la  Société  du  Val  d*Osne  de  reproduire 
les  modèles  des  fontaines  dites  u  fontaines  Wallace  »  ; 

Considérant  que  l'auteur  d'une  œuvre  d'art  en  devient  proprié- 
taire par  le  fait  seul  de  sa  création  ; 

Qu'il  est  constant  que  Le  Bourg  a  créé  les  modèles  de  ces  fon- 
taines ;  qu'il  en  a  donc  la  propriété  à  moins  qu'il  ne  Fait  trans- 
mise à  un  tiers  ; 

Considérant  que  c'est  à  la  Société  du  Val  d'Osne  à  faire  la 
preuve  du  droit  de  reproduction  dont  elle  entend  se  prévaloir  ; 

Qu'elle  prétend  l'avoir  acquis  de  Richard  Wallace  qui  lui  a 
remis  ces  modèles  pour  les  couler  en  bronze  ;  mais  qu'elle  n'é- 
tablit pas  qu'il  lui  ait  donné  le  droit  d'exécuter  des  fontaines 
pour  d'autres  personnes,  ni  même  que  Wallace  ait  acquis  la 
propriété  exclusive  desdits  modèles  ; 

Considérant  que  toute  l'argumentation  présentée  au  nom  de 
la  Société  du  Val  d'Osne  repose  sur  cette  idée  que,  la  générosité 


de  Richard  W&tlace  étant  bien  connae,  il  était  inadmlBsibls 
l'il  eût  profité,  sans  l'avoir  pajée,  da  l'œavre  de  l'artiste  qui 
rait  créé  le  type  des  fontaines  dont  il  avait  gratiAé  la  Ville  ds 
iris; 

Conaidérant  que  les  conventions  intervennes  entre  Wallace  et 
9  Bourg  sont  restées  ignorées  ;  qu'elles  ne  penveat  donner  lieu 
j'à  des  conjectures  ; 

Qu'il  est  fort  possible,  comme  on  le  soutient  dans  l'intérêt  de 
a  Boarg,  que  Richard  Wallaca  ait  largement  rémunéré  l'aatear 

une  œuvre  d'art  qu'il  avait  inspirée,  en  se  contentant  d'avoir  le 
roit  d'en  faire  un  certain  nombre  de  reproductions,  tout  en  laia- 
int  à  l'artiste  son  droit  de  propriété,  droit  dont  celui-ci  ponraît 
rer  parti  sans  lui  causer  de  préjudice  ; 

Qu'en  elTel  il  ne  s'agissait  pas  de  modèlsa  dont  une  reprodoc- 
on  augmentait  la  valeur; 

Que  Richard  Wallace  avait  fait  ériger  à  ses  frais,  dans  la  ca- 
Itale,  beaucoup  de  ces  fontaines  et  que  celles  qu'on  a  exécatëes 
Dur  d'autres  villes  ne  pouvaient  pas  diminuer  témérité  desfoo- 
linesqui  ornaient  Paris  et  ne  pouvaient  que  perpétuer  le  sonve 
ir  de  sa  bienfaisance  ; 

Par  css  votifs,  et  ceux  des  premiers  juges  que  la  Cour  s'appro- 
rie,  déclare  la  Société  du  Vald'Osne  mal  fondée  dans  toutes  ses 
amandes,  fins  et  conclusions,  l'en  déboute  ;  confirme  sur  tons 

s  points  le  jugement  frappé  d'appel,  oidonne  qu'il  sortira  son 
lein  et  entier  effet  et  condamne  la  Société  appelante  k  l'amende 
taux  dépens. 


Art.   4125. 

P>H>pi4«t«  MTtlMtlqne.  -  Méd^lUe.  -  PiM»prMM.  — 
OH^inMl.  —  Droit  cle  reppodnctlon. 

En  transportant  sur  une  médaille,  avec  rautorisation  de 
auleur,une  œuvre  de  sculpture, le  graveur  en  tnédaillet  fait 
icotitestablement  une  œuvre  artistique  nouvelle  dont  il 
evient  propriéla  ire  (\  ) . 

Il  est  de  principe  consacré  par  la  jurisprudence  que  le 

(I)  Ia  reproductloD,  aans  l'auto risation  de  l'Bateur,  d'une  csavre  ar- 
rtique  par  un  procéda  rafme  différant  conatitue  une  contreb(oii, 
.  Pouitlel,  Prop.  art.,  n*  574  et  s.  —  Mais  toute  reprodu^oa,  coaii- 
Irée  en  elle-mAme,  constitue  an  ouvrage  spécial,  tjuit  aaa  droit  de 
■opriété  particulier.  V.  Poaillet,  eod.  lac,  n«  89.  V.  par  exemple,  es 
atière  de  gravure,  Paris,  Si  mars  1865,  Siffre,  Ann.,  66.350. 


—  135  — 

droit  de  reproduction  esi  F  accessoire  du  droit  de  propriété 
de  r objet  matériel  dont  il  ne  peut  être  détaché  que  par  V ef- 
fet d'une  convention  spéciale  (1) . 

Si  Von  doit  admettre  en  principe  que  l'original  d'une 
médaille  consiste  dans  le  poinçon  ou  relief  exécuté  par 
rarlisie  d'après  son  modèle  en  plâtre^  en  glaise  ou  en  cire^ 
et  que  la  livraison  de  ce  poinçon  seule  entraine  présomp* 
lion  de  la  cession  de  Fœuvre,  pour  que  la  rétention  du  poin- 
çon implique  la  propriété  de  Vœuvre  il  faut  que  cette  réten- 
tion soit  non  équivoque  et  à  titre  de  propriétaire  (2). 

(Trib.  civ.  Seine,  16  jain  1899.  —  Union  des  Sociétés  de  Tir 

de  France  c,  Henri  Dobois.) 

(1)  la  plupart  des  antears  combattent  cette  jnrisprndence,  le  principe 
qu'elle  consacre  est  formellement  reponssé  par  nn  grand  nombre  de 
lois  étrangères.  V.  Trib.  mixte  dn  Caire,  16  mai  1896,  Schiffi  et  la  note, 
aupràf  p.  iS9. 

(S)  D*aprës  la  jurisprudence,  la  possession  de  Toriginal  de  l'œuvre 
entraînant,  dans  le  silence  du  contrat,  et  par  voie  d'accessoire,  le  droit 
de  reproduction,  Il  est  très  important,  en  pratique,  de  déterminer  ce  qui 
constitue  roriginal  de  rœnvre.  Si  Fartiate  consenre  par  devers  lui  l'ori- 
final  de  son  œuvre,  sans  avoir  besoin  de  rien  spécifier,  il  conserve,  par 
cela  niéme,  le  droit  de  reproduction  ;  si,  au  contraire,  il  a  cédé  à  son 
adietenr  roriginal  même,  il  s*en  trouve  dépouillé.  Les  peintres  et  les 
ieastoateuTs,  lorsqu'ils  vendent  leur  tableau  ou  leur  dessin,  cèdent 
IVBUTre  originale  par  eux  exécutée,  Ils  perdent  donc,  en  principe,  le 
droit  de  reproduction. Pour  les  sculpteurs,  Tœuvre  originale  est  Tœnvre 
en  plâtre,  en  glaise  on  en  cire,  achevée  et  définitive,  qu'ils  exécutent 
ensuite  en  marbre  ou  en  brome  et  Tacheteur  du  marbre  on  du  bronxe 
n'acquiert  qu'une  reproduction  qni  ne  peut  lui  donner,  i  son  tour,  le 
droit  de  reproduction  ;  il  est  dans  la  situation  de  l'acheteur  d'un  exem- 
plaire d'une  œuvre  littéraire.  Les  graveurs  sur  bois,  on  sur  métaux,  qni 
lirrent  la  planche,  c'est-à*dire  l'œuvre  elle-même,  tombent  sous  Tappli* 
cation  de  la  jurisprudence.  Les  photographes,  au  contraire,  y  échappent, 
car,  à  l'inverse  des  graveurs,  ils  ne  livrent  i  leurs  acheteurs  que  des 
épreuves  et,  sauf  conventions  spéciales,  conservent  entre  leurs  mains  les 
diehés  on  phototypes  qui  constituent  les  originaux.  En  ce  qui  concerne 
les  graveurs  en  médailles,  comme  le  constate  le  jugement  rapporté, 
Porfginal  est  le  poinçon  ;  l'artiste,  pour  exécuter  la  médaille,  commence, 
en  effet,  par  fixer  sa  composition  en  exécutant  nne  terre  ou  une  cire,  à 
grande  échelle,  puis  par  moulage  il  en  fait  une  fonte,  avec  cette  fonte 
U  crée  par  réduction  le  poinçon  en  relief  qui,  retouché  et  amené  par 
loi  i  sa  forme  définitive,  sert  à  produire  les  coinê  en  creux  qui,  eux, 
servent  directement  i  frapper  la  médaille.  Lorsque  les  coins  se  détério- 
rent, on  en  refait  d'autres  à  l'aide  du  poinçon.  C'est  donc  bien  le  poin- 
çon qoi  constitue  l'original.  C'est  en  s'appuyant  sur  des  circonstances 
de  fait  que  le  tribunal,  après  avoir  constaté  que  les  poinçons  étaient 
restés  dans  la  possession  de  Henri  Dubois,  a  été  amené  à  décider  que 
cette  possession  était  précaire  et  n'entraînait  pas  pour  lui  la  propriété 
Biénie  de  la  médaille, 

A.  T. 


-  136  — 


Jugé  en  ces  termes  : 


Li  Tribunal,  Attendu  qae  Henri  Dubois  a  été  chargé  enlB87 
par  l'Union  des  Sociétés  de  Tir  de  France  d'exécuter  pour  elle 
au  prix  de  2.000  francs,  une  médaille  de  59  millimètres  desti- 
née à  servir  de  prix  dans  les  concours  qu'elle  organise  et  re- 
produisant dans  sa  composition  le  Gloria  VieHs  de  Mercié  ; 

Qu'il  a  ultérieurement  gravé  pour  la  môme  société  deux  au* 
très  modèles  de  cette  même  médaille,  l'un  de  45  millimètres  en 
1889,  l'autre  de  2i  millimètres  en  1893; 

Que  la  société  ayant  appris  en  1898  qu'Henri  Dubois  livrait  aa 
commerce  des  médailles  et  des  boîtiers  de  montre  reproduisant 
le  Gloria  Victis  et  prétendant  avoir  la  propriété  exclusive  de  l'œu- 
vre artistique  qu'elle  avait  fait  graver  par  lui  avec  l'autorisation 
de  Mercié  et  de  la  maison  Barbedienne,  cessionnaire  du  droit 
d'édition,  a,  suivant  exploit  du  8  mars  1898,  fait  assigner  le  dit 
Dubois  devant  ce  tribunal,  pour  voir  dire  que  la  médaille  dont 
il  s'agit  ne  pourrait  être  reproduite  par  lui  pour  être  vendue 
commercialement,  et  pour  s'entendre,  en  conséquence,  faire  dé- 
fense d'en  faire  frapper  et  vendre  aucun  exemplaire  et  condam- 
ner à  lui  payer  200  francs  à  titre  de  dommages-intérêts  pour 
chaque  contravention  constatée  et  10.000  francs  pour  le  préju- 
dice causé  ; 

Attendu  qu'en  transportant  sur  médaille,  en  1887,  le  groupe 
Gloria  Victis  avec  rsutorisation  de  Mercié  et  de  la  maison  Bar- 
bedienne, Henri  Dubois  a  incontestablement  fait  une  œuvre  ar* 
tistique  nouvelle  dont  il  est  devenu  propriétaire  ; 

Qu'au  contraire  les  médailles  qu'il  a  faites  ultérieurement  sur 
le  môme  sujet  ne  sont  que  de  simples  reproductions  qui,  rap- 
pelant la  première  médaille  dans  son  ensemble  aussi  bien  que 
dans  presque  tous  ses  détails  et  même  dans  ses  défauts  ne  sont, 
à  vrai  dire,  malgré  quelques  différences  tout  à  fait  secondaires, 
qu'une  épreuve  nouvelle  de  l'œuvre  primitive  avec  laquelle  elles 
se  confondent  et  dont  elles  peuvent  tenir  lieu  ; 

Qu'il  est  de  principe  universellement  consacré  par  la  jurispru- 
dence française  que  le  droit  de  reproduction  est  l'accessoire  du 
droit  de  propriété  de  l'objet  matériel  dont  il  ne  peut  être  déta- 
ché que  par  l'effet  d'une  convention  spéciale  ; 

Qu'il  échet  donc  de  rechercher  dans  l'espèce  ce  qu'Henri  Du- 
bois a  cédé  en  1887  à  l'Union  des  Sociétés  de  Tir  de  France,  et  si 
en  lui  vendant  la  médaille  qu'il  a  faite  pour  elle,  il  a  entendu 
se  réserver  la  propriété  de  l'œuvre  artistique  qu'il  venait  de  créer 
et  le  droit  de  reproduction  de  cette  œuvre  ; 

Attendu  que  les  documents  versés  aux  débats  ne  sauraient 
laisser  aucun  doute  sur  ce  point; 


—  137  — 

Qa^ii  est  certain  qu'en  sollicitant  de  Mercié  et  de  la  maison 
Barbedienne  Tantorisation  de  faire  graTer  la  médaille»  dont  elle  a 
confié  Texécntion  à  Henri  Dubois,  rUnion  des  Sociétés  de  Tir  de 
France  entendait  s'assurer  la  propriété  d'une  médaille  qui  lui  fût 
propre,  et  qui,  n'étant  pas  dans  le  commerce,  et  ne  devant  être 
distribuée  que  comme  prix  de  tir  par  elle,conservât,  par  sa  rareté 
même,  un  caractère  de  distinction  enviable  ; 

Que  l'intention  de  Mercié  et  de  la  maison  Barbedienne  de  con- 
céder à  la  société  demanderesse  la  propriété  exclusive  de  la  mé« 
daille  à  frapper,  ne  saurait  davantage  être  douteuse  à  raison  des 
circonstances  mêmes  dans  lesquelles  Tautorisation  a  été  don- 
née ; 

Qu'enfin  il  est  manifeste  que  la  volonté  d'Henri  Dubois  s'est  h 
ce  moment  pleinement  accordée  avec  celle  de  la  société  ; 

Qn'il  n'a  reçu  d'autre  autorisation  que  celle  de  faire  pour  elle 
la  médaille  qu'il  a  exécutée  ; 

Qu'il  snfQt  de  lire  la  lettre  du  7  juillet  1898,  et  surtout  le  post- 
scriptnm  de  Leblanc  pour  se  convaincre  que  Mercié  et  la  maison 
Barbedienne,  en  autorisant  la  reproduction  en  petit  par  la  gra- 
vure du  Gloria  Victis,se  sont  référés  aux  autorisations  précéden- 
tes exclusivement  accordées  à  l'Union  des  Sociétés  de  Tir  de 
France  pour  des  modules  de  plus  grandes  tailles  et  qu'il  s'agis- 
sait à  ce  moment  de  l'établissement  du  module  de  21  millimè- 


Attendu,  en  outre,  que  les  prix  qu'Henri  Dubois  a  stipulés  pour 
l'exécution  des  divers  modules  de  la  médaille  de  l'Union  des  So- 
ciétés de  Tir  de  France  sont  identiquement  les  mêmes  que  ceux 
qu'il  a  stipulés  de  l'Etat,  lorsque  celui-ci  l'a  chargé,  en  1893, 
de  la  gravure  d'une  même  médaille  de  mêmes  dimensions  que 
celles  de  l'Union  des  Sociétés  de  Tir,  alors  qu'il  résulte  des  deux 
lettres  du  39  août  1893  et  du  24  mai  1897  qui  seront  enregistrées 
avec  le  présent  jugement  qu'il  cédait  par  son  contrat,  sans  ré- 
serve, à  FEtat  l'entière  propriété  de  son  œuvre  ;  que  cette  iden- 
tité des  prix  démontre  avec  évidence  l'identité  du  droit  cédé  dans 
les  deux  cas  ; 

Qu'Henri  Dubois  se  faisait  si  peu  d'illusion  sur  ce  point  qu'il 
qualifiait  toujours  dans  la  correspondance,  dans  ses  reçus  et 
dans  l'acte  de  dépôt  des  coins  à  la  Monnaie,  la  médaille  liti- 
gieuse, de  médaille  de  l'Union  des  Sociétés  de  Tir  de  France  ; 

Que  de  même,  s'adressent  à  cette  société  pour  s'excuser  du 
retard  par  lui  apporté  à  l'exécution  d'une  de  ses  commandes,  il 
disa  it 

«  J'ai  été  si  occupé  que  je  n'ai  pu  exécuter  le  changement  que 
TOUS  désirez  pour  le  modèle  de  votre  médaUle,  » 


—  138  — 

Que  de  telles  expressions  sont  inconciliables  avec  Tîdée  qo'il 
aurait  entendu  conserver  la  propriété  de  cette  médaille  ; 

Que,  sans  doute,  il  détient  encore  les  poinçons,  mais  que  si 
Ton  doit  admettre  en  principe,  que  Toriginai  d'une  gravure  con- 
siste dans  le  poinçon  ou  relief  exécuté  par  l'artiste  d'après  son 
modèle  en  plâtre,  en  glaise,  ou  en  cire,  et  que  la  livraison  de 
ce  poinçon  seule  entraîne  présomption  de  la  cession  de  Tœuvre, 
il  faut  tout  au  moins  que  cette  rétention  soit  non  équivoque,  et  à 
titre  de  propriétaire  ; 

Que  dans  Tespèce,  H.  Dubois  n'a  conservé  la  possession  maté- 
rielle des  poinçons  que  parce  qu'il  a  continué  à  être  chargé  de 
Texécution  du  marché  qui  n'a  pas  un  seul  instant  été  interrompu 
depuis  1887  soit  qu'il  se  soit  agi  des  coins  brisés  ou  détériorés, 
soit  qu'il  y  ait  eu  à  composer  de  nouveaux  modules  ; 

Que  toutes  les  circonstances  précédemment  analysées  démon- 
trent qu'il  n'a  pas  ^ardé  les  poinçons  animo  domini  et  que  dès 
lors  la  présomption  qu'il  tire  de  ce  fait  manque  de  toute  valeur 
juridique  ; 

Que  de  toutes  ces  considérations,  il  faut  conclure  qu'Henri  Du- 
bois a  cédé  à  l'Union  des  Sociétés  de  Tir  de  France  la  pleine  pro- 
priété de  Sjon  œuvre  artistique,  et  par  suite  le  droit  de  repro- 
duction qui  en  découle,  et  qu'en  livrant  au  commerce  ou  en 
mettant  en  vente  4es  médailles  et  les  bottiers  de  montre  litigieux, 
il  a  violé  le  contrat  qui  le  lie  à  la  société  demanderesse  ; 

Que  le  tribunal  a  les  éléments  nécessaires  pour  apprécier  le 
préjudice  ainsi  causé  ; 

Par  gis  motifs.  Dit  l'Union  des  Sociétés  de  Tir  de  France  re- 
cevable  et  bien  fondée  dans  ses  demandes,  fins  et  conclusions  ; 

Dit  que  la  médaille  faite  en  1887  par  Henri  Dubois  pour  cette 
société,  et  les  différents  modules  qui  en  ont  été  faits  ultérieure- 
ment sont  la  propriété  exclusive  de  la  dite  société  et  ne  sauraient 
être  reproduits  par  lui  pour  être  vendus  commercialement; 

Fait  en  conséf|iience  défense  à  Henri  Dubois  de  faire  frapper 
et  vendre  toute  reproduction  de  la  dite  médaille  et  notamment 
du  module  dont  le  coin  a  été  déposé  par  lui  à  la  Monnaie  en  son 
nom  personnel  ; 

Le  condamne  aux  dépens  pour  tous  dommages-intérêts  dont 
distraction,  etc. 

M.  Baudoin,  président.  —  M**  Michbl  Pillitibr  et  Poua- 
LiT,  avocats. 


—  139  — 


Art.  4126. 

Fropriété  littéraire.  —  Droit  de  réponiie.  —  JohtmaI. 
—  Oltlciae.  —  Compto-rendo  demandé.  —  Cour  de 

le  droit  de  réponse^  dans  les  termes  de  r article  iSdela 
loi  du  99  juillet  iSèl,  appartient  à  toute  personne  nommée 
ou  désignée  dans  un  journal^  même  à  qui  a  sollicité  de  ce 
journal  le  compte-rendu  dfun  ouvrage  (1). 

Mais  Finsertion  de  la  réponse  ne  saurait  être  'exigée 
quand  elle  est  conçue  en  des  termes  qui  sont  contraires  aux 
lois,  aux  bonnes  mœurs^  à  Vintérét  légitime  des  tiers^  à 
r  honneur  ou  à  la  considération  du  journaliste  (2). 

La  Cour  de  cassation  peut  ^  lorsque  Fauteur  de  la  réponse 
a  assimilé  son  œuvre  à  celle  d'un  tiers,  examiner  et  com" 
parer  elle-même  ces  deux  œuvres  et  dire  si  ce  tiers  avait  un 
intérêt  légitime  à  ce  que  son  cèuvre  ne  fût  pas  Vobjet  de 
cette  assimilatioi}  (3). 

(Gaflfl.  crim.,  20  jnin  1900.  —  Dlle  Forpomès  e.  Mainguat.) 

Ainsi  jugé  sous  la  présidence  de  M.  Lœw  : 

La  Cour,  Sar  le  premier  moyen  pris  de  la  ▼îolation  par  fausse 
application  de  l'article  13  de  la  loi  du  29  juillet  1881  et  de  Far- 
ticle  7  de  la  loi  du  20  avril  1810,  en  ce  que  Tarrét  attaqoé  aurait 
reconnu  à  tort  le  droit  de  réponse  à  un  écrivain  qui  avait  loi- 
même»  par  démarches  et  par  lettres,  sollicité  du  gérant  d'un 
journal  ou  écrit  périodique  la  critique  de  son  œuvre  : 

Attendu,  en  fait,  que  la  demoiselle  Forpomès,  auteur  d'un 
roman  intitalé  la  Paroisse  Saint-Magloire  dans  lequel  sont 
dépeints  divers  types  de  ministres  du  culte  catholique,  a  obtenu 
par  démarches  personnelles  auprès  du  gérant  de  la  Revue  heh~ 
âomadaxre  et  par  lettres  adressées  à  l'un  des  rédacteurs  de  cette 
revue,  à  ce  désigné  par  le  gérant,  l'analyse  et  le  compte-rendu 
de  son  roman  dans  ladite  revue  ;  que  ce  compte-rendu  lui  ayant 
été  défavorable  et  lui  paraissant  de  nature  à  porter  atteinte  à  sa 
sitoation  d'écrivain  et  à  lui  causer  un  préjudice  tout  à  la  fois  mo- 
ral et  matériel,  elle  a  adressé  au  gérant  avec  demande  d'inser- 
tion une  réponse  à  l'article  qui  la  concernait  ;  mais  que  ce  der- 
nier 8*est  refusé  à  faire  insérer  cette  réponse  dans  sa  revue  par 

(i)  Cf.  Can.  crim.f  17  juin  1899,  Dabout  cv  Bnmettère,  Ann.,  99.dS1 . 
(M)  Voir  Afm.,  90.881,  note  3. 


-  140  — 

le  motif  que  la  demoiselle  Forpomès,  en  sollicitant  et  en  provo- 
quant elle-même  le  compte-rendu  de  son  roman,  avait  implici- 
tement renoncé  à  tout  droit  de  réponse  : 

Attendu,  en  droit,  que  les  termes  de  l'article  13  de  la  loi  du 
29  juillet  1881,  qui  n'a  fait,  en  ce  point,  que  reproduire  une  dis- 
position en  vigueur  depuis  la  loi  du  25  mars  1822,  sont  généraux 
et  absolus  ;  qu'ils  donnent  à  toute  personne  nommée  ou  désignée 
dans  un  article  de  journal  le  droit  d*y  répondre  et  d'exiger  Tin- 
sertion  de  sa  réponse  ;  que  c'est  à  celui  qui  exerce  ce  droit  qu'il 
appartient  de  régler  la  forme  et  la  teneur  de  la  réponse,  et  qu'il 
n'appartient  aux  tribunaux  de  limiter  l'exercice  de  ce  droit 
qu'autant  que  les  termes  de  la  réponse  sont  contraires  aux  lois 
et  aux  bonnes  mœurs,  à  l'intérêt  légitime  des  tiers,  à  l'bonneur 
ou  à  la  considération  du  journaliste  ;  qu'en  présence  de  la  géné- 
ralité des  termes  de  la  loi,  il  n'y  a  pas  à  distinguer  si  l'auteur 
de  la  réponse  avait  on  non  provoqué  par  démarches  et  par  let- 
tres le  compte-rendu  de  son  œuvre,  alors  que  les  juges  du  fait, 
sous  le  contrôle  de  la  Cour  de  cassation  à  laquelle  il  apparte- 
nait d'apprécier  la  teneur  même  de  la  réponse,  aussi  bien  que 
celle  de  l'écrit  qui  l'a  provoquée,  ont  décidé  qu^il  n'y  avait  eu 
de  la  part  de  la  partie  civile  aucune  renonciation  à  son  droit  de 
réponse  ; 

D'où  il  suit  que  le  premier  moyen  du  pourvoi  n'est  pas  fondé; 

Mais,  sur  le  second  moyen  également  pris  de  la  violation  par 
fausse  application  de  l'article  13  de  la  loi  du  29  juillet  1881  et  de 
l'article  7  de  la  loi  du  20  avril  1810,  en  ce  que  l'arrêt  attaqué 
aurait  déclaré  obligatoire  l'insertion  d'une  réponse  dont  certains 
passages  portaient  atteinte  à  Tintérêt  légitime  d'un  tiers  : 

Attendu  que  la  demoiselle  Forpomès,  après  avoir,  dans  la  ré- 
ponse dont  elle  réclamait  l'insertion,  soutenu  qu'elle  avait  en- 
tendu faire  une  œuvre  d'analyse  loyale  et  protesté  contre  l'ap- 
préciation de  son  roman  par  l'auteur  du  compte-rendu,  ajoutait 
qu'au  surplus  son  œuvre  avait  «  de  fort  honorables  précédents 
et  citait  notamment  un  roman  de  M.  Jean  Biaise,  ayant  pour 
titre  le  Tribut  passionnel^  dans  lequel  il  est  question  d'un  prêtre 
qui,  suivant  elle,  allait  beaucoup  plus  loin  que  ceux  incriminés 
dans  son  livre,  puisqu'il  commettait  la  pire  erreur  que  condamne 
la  religion,  le  péché  contre  l'espérance,  le  suicide  »  ; 

Attendu  que  le  sieur  Jean  Biaise,  tiers  nommé  dans  la  réponse 
de  la  partie  civile,  appelé  en  témoignage,  a  soutenu  qu'il  avait 
un  intérêt  légitime  à  protester  contre  l'assimilation  que  la  de- 
moiselle Forpomès  prétendait  établir  entre  les  deux  romans  dont 
s'agit,  parce  que  ces  deux  livres  différaient  essentiellement  Tun 
de  l'autre,  tant  au  point  de  vue  des  idées  religieuses  qu'au  point 


«  »- 


—  144  — 

de  vue  du  caractère  des  ministres  du  culte  catholique  qni  sont 
mis  en  scène  ; 

Que  de  Texamen  et  de  la  comparaison  de  ces  deux  romans 
auxquels  il  a  été  procédé  par  la  Cour,  il  résulte  que  le  tiers 
nommé  dans  la  réponse  pouTait  avoir  un  intérêt  légitime  à  ce 
que  son  œuTre  ne  fût  point  assimilée  à  celle  de  la  partie  civile 
dont  les  tendances  sont  absolument  différentes  ; 

Que  dans  ces  conditions,  le  refus  d^insertion  du  demandeur 
était  légalement  justifié  et  que  c'est  à  tort  et  en  violation  de 
Tartide  13  susvisé  qu*il  lui  a  été  fait  application  de  la  pénalité 
édictée  par  cet  article  ; 

Pam  cis  kotifs,  Casse. 


Art.  4127. 

Titre  de  noMeMie.  —  M^forai.  —  Ccinti-ttt  reliiiir  A 
l'emploi  <iii  titre  de  noMeeee    pmtr  une  eoelété 
^relaie.  —  IVolUté. 


On  ne  saurait  confondre  avec  un  nom  patronymique, 
qui  a  pour  destination  de  désigner  une  personne  et  pasMc 
nécessairement  et  indéfiniment  à  tous  les  enfants  sans  dis- 
tinction^ un  titre  nobiliaire^  émané  de  la  puissance  souve^ 
raine,  destiné  non  à  désigner  mais  à  honorer  celui  à  qui 
U  a  été  conféré  ;  d'ailleurs,  si  les  titres  nobiliaires  n'entrai^ 
nent  plus  de  privilèges  d'aucune  sorte,  ils  n'en  doivent  pas 
moins  être  maintenus  dans  le  caractère  qui  leur  a  été  donné 
à  r origine,  en  tant  qu'il  est  compatible  avec  Fétat  social, 
et  dans  les  conditions  de  transmissibilité  qui  leur  ont  été 
imposées  par  F  acte  de  création  (1) . 

Dès  lors,  le  titulaire  actuel  cFun  titre  héréditaire  —  con- 
féré  dans  les  mêmes  conditions  que  ceux  créés  par  le  dé' 
cret  du  V  mars  1808»  et  dont  Tacte  de  collation  indique 
qu'à  chaque  transmission  le  bénéficiaire,  auquel  ce  titre 
échoit  non  à  raison  de  sa  qualité  d'héritier  mais  en  vertu 
dudit  acte  de  collation,  doit  le  recevoir  tel  qu'il  a  été  créé, 
c'est-à-dire  ayant  conservé  intact  son  caractère  honorifique, 
—  n'est  pas  lié  par  une  convention  par  laquelle  un  précé- 
dent  titulaire  du  titre  l'avait  engagé  dans  une  société  de 
eomfnerce,  dont,  avec  les  insignes  qui  lui  sont  attachés,  il 
constituerait  la  marque  (2). 

(1-8)  Voir  &  la  page  suivante,  les  conclusions  de  M.   TaTocat  général 
DcsiAimiNS,  à  la  Cour  de  cassation. 


—  142  — 

(G.  de  casi.  eW.,  95  octobre  1896.  —  Epoox  de  Jage  es  noms 
c.  Société  Alfred  de  Montebello  et  D«.) 

Les  époux  de  Juge,Mme  de  Juge  comme  tutrice  du  jeune 
duc  de  Montebello,  son  fils  mineur,  et  M.  de  Juge  comme 
eotuteur,  se  sont  pourvus  en  cassation  contre  Tarrét  de  la 
Cour  de  Paris  en  date  du  2  janvier  1896,  rendu  au  profit 
de  la  Société  Alfred  de  Montebello  et  C^*  et  rapporté  aux 
Ann.,  96, 334. 

Ils  ont  formulé  à  l'appui  de  leur  pourvoi,  les  deux 
moyens  suivants  : 

i^  «  Violation  des  articles  6, 544  et  1131  du  Gode  civil,  de 
Farticle  !«'  de  la  loi  du  22  juin  1857,  ainsi  que  des  décrets  du 
l«r  mars  1808  et  du  9  décembre  1817  et  de  l'article  7  de  la  loi  du 
20  avril  18iO,  en  ce  que  l'arrêt  attaqué  a  décidé  que  la  Société 
Alfred  de  Montebello  et  Gie  avait  droit  à  l'usage  industriel  et 
commercial  du  titre  de  duc  de  Montebello,  et  des  armoiries  y  at- 
tachées, sous  le  prétexte  que  les  mêmes  règles  étaient  applica- 
bles à  l'usage  d'un  titre  de  noblesse  et  d'un  nom  patronymique, 
alors  que  les  règles  particulières  aux  titres  de  noblesse  s'opposent 
à  ce  qu'ils  puissent  être  commercialisés,  ainsi  que  leurs  insignes 
et  incorporés  dans  une  marque  de  fabrique.  » 

2*  «  Violation  des  mêmes  articles  et,  en  outre,  de  l'article  896 
du  Gode  ciril  et  des  règles  relatives  aux  substitutions  permises 
tout  au  moins  en  ce  que  l'arrêt  a  déclaré  que  la  convention  par 
laquelle  le  duc  de  Montebello  avait  transformé  son  titre  et  les 
insignes  de  ce  titre  en  une  marque  de  fabrique  et  transféré  la 
propriété  de  cette  marque  à  une  société,  devait  recevoir  effet, 
même  après  sa  mort  et  malgré  la  volonté  contraire  dn  porteur 
actuel  du  titre,  alors  qu'en  admettant,  par  impossible,  que  le 
duc  de  Montebello  pût  valablement  consentir  une  convention  de 
ce  genre,  il  ne  pouvait  en  tout  cas,  la  faire  que  pour  la  durée  de 
sa  vie,  et  ne  pouvait,  en  aucune  hypothèse,  porter  atteinte  aux 
droits  de  celui  que  la  loi  elle-même  appelait  à  porter  ce  titre 
après  lui.  » 

M .  l'avocat  général  Dxsjârdins  a  conclu,  dans  les  termes 
ci-après,  à  la  cassation  de  l'arrêt  de  la  Cour  de  Paris  : 

«  Messieurs,  le  défendeur  avait  fait  allusion,  dans  son  mémoire 
à  l'arrêt  que  votre  Ghambre  des  requêtes  a  rendu  le  10  novem- 
bre 1897,  sur  rincompétence  du  pouvoir  judiciaire  en  ce  qui  tou- 
che au  contentieux  des  titres  nobiliaires.  Il  a  reparlé  de  cet  arrêt 
dans  sa  plaidoirie,  il  m'a  mis  par  là  même  en  demeure,  pour 
ainsi  dire,  de  m*expliquer  sur  une  question  de  compétence  qui 


me  semble  préalable.  En  effet  si  les  tribunaux  ordinaires  sont 
radicalement  incompétents  pour  statuer  sur  la  propriété  des  ti- 
tres nobiliaires,  vous  devez  tout  d*abord  et  d*office,sans  examiner 
le  fonds  dn  débat,  casser  l'arrêt  attaqué  pour  violation  des  rô* 
gles  de  la  compétence. 

J^ai  le  plus  profond  respect  pour  les  arrêts  de  la  Chambre  des 
requêtes.  Cependant  je  ne  dois  pas  oublier  que  le  dernier  mot 
appartient  pour  la  solution  des  problèmes  juridiques  à  la  Cham- 
Im  civile  et  si  j'ai  le  regret  de  découvrir  ou  de  croire  que  je  dé- 
couvre une  erreur  dans  la  jurisprudence  de  la  Chambre  des  re- 
quêtes, mon  devoir  est  de  vous  la  signaler  et  d'exposer  quels 
sont,  à  mon  avis,  les  véritables  principes  du  droit. 

Le  14  mars  1865,  il  s'agissait  de  savoir  si  les  tribunaux  ordi- 
naires étaient  compétents,  au  fond  (apr^s  que  toutes  les  ques- 
tions administratives  à  résoudre  auraient  été  résolues  par  le  Con- 
seil dn  sceau),  pour  trancher  cette  question  :  «  les  sieurs  de  Camé 
peavent*il8  ajouter  à  leur  nom  patronymique  le  titre  de  marquis 
de  Coetlogon  1 1>  La  Chambre  des  requêtes  statua  comme  il  suit 
(D.  66. 1.326)  :  «  Attendu  qu'il  n'appartient  nullement  à  l'autorité 
judiciaire  de  connaître  les  demandes  en  collation,  confirmation , 
reconnaissance  ou  vérification  des  titres  nobiliaires  ;  que  la  solu- 
tion de  pareilles  questions  appartient  tout  entière  au  souverain 
éclairé  par  la  délibération  du  Conseil  du  sceau  des  titres  ;  que,  de 
même  qu'elle  n'avait  pas  à  statuer,  elle  n'avait  pas  non  plus  à 
rorseoir  jusqu'à  la  décision  à  intervenir,  «c  puisque  c'était  par  rap- 
port an  fond  même  qu'elle  était  incompétente  »  ;  que  si  Coetlo- 
gonne  prenait  pas  de  conclusions  à  ce  sujet,  le  juge  du  fond,  du 
moment  qu'il  reconnaissait  son  incompétence  ratione  materix^ 
devait  la  déclarer  d'office;  Rejette...  »  Cette  jurisprudence  a 
été  critiquée  par  MM.  Dalloz  (Stipp.,  Vo  Noblesse,  Ti9  47)  :  «  Un 
arrêt  de  la  Chambre  des  requêtes  a,  il  est  vrai,  disent-ils,repoussé 
le  système  du  sursis  et  décidé  que,  dans  une  contestation  soule- 
vée entre  deuersonnes  sur  la  propriété  d'un  titre,  il  y  a  lieu 
non  à  un  sursis,  mais  à  une  déclaration  pure  et  simple  d'incom- 
pétence. Mais  il  est  difficile  d'expliquer  cette  décision,  qui  ren- 
drait impossible  au  légitime  détenteur  d'un  titre,  d'en  interdire 
jamais  l'osageà  un  tiers.  »  Néanmoins  la  Chambre  des  requêtes 
I  persisté  l'arrêt  du  10  novembre  1897,  affirmant  de  nouveau 
foe  le  pouvoir  judiciaire  «  est  incompétent  sur  le  fond  ratione  ma" 
terist  j»,  attribue  encore  au  conseil  d'administration  du  ministère 
de  la  justice  (qui  remplace  le  Conseil  du  sceau  depuis  le  10  jan-. 
vier  1872}  le  droit  de  statuer  sur  la  propriété  des  titres  nobiliai- 
res. 

Telle  n'est  pas.  Messieurs,  la  jurisprudence  de  la  Chambre 
civile.  Je  vous  rappelle  vos  arrêts  du  1*'  juin  et  du  IS  juin  1863 


(D.  63.1.216  et  317).  Le  premier  dit:  «  Lorsqu'il  8*agit  d*Qtt 
titre  nobiliaire,  la  propriété  doit  en  être  établie  par  an  titre  ré- 
gulier et,  s'il  manque  de  condition,  les  demandes  en  rectifica- 
tion des  actes  de  l'état  civil  qui  ne  le  relatent  pas,  n'ayant  en 
réalité  pour  objet  que  la  reconnaissance  ou  la  confirmation  de 
ce  titre  par  justice,  les  tribunaux  de  droit  commun  doivent 
s'abstenir  d'en  connaître  tant  qu'il  n'a  pas  été  statué  sur  cette 
reconnaissance  ou  cette  confirmation  conformément  aux  dispo- 
sitions du  décret  du  8  janvier  1859.  »  Si  Tarrét  de  Metz  est 
cassé,  c'est  parce  qu'il  n'a  pas  déclaré  la  demande  non  recevable 
en  l'état,  alors  que  de  Marguerite,  voulant  faire  insérer  le  titre 
de  marquis  entre  les  prénoms  et  le  nom  patronymique  de  son 
père,  ne  produisait  aucun  acte  de  collation  ou  de  confirmation 
de  ce  titre,  mais  uniquement  des  papiers  de  famille  et  une  arti* 
culation  de  faits  de  possession.  Le  dernier  arrêt  est  encore  plus 
décisif.  J'y  lis,  en  e£fet  :  «  Sur  le  deuxième  moyen  pris  de  la 
séparation  des  pouvoirs  et  de  la  règle  ^us  est  interpretari  cujus 
estcondere:  «  Attendu  qa^kVautorité  judiciaire  seule  il  appartient 
de  décider  si,  d'après  les  titres  produits  et  la  législation  tant 
espagnole  que  française,  les  demandeurs  en  cassation  ont  droit 
à  la  grandesse  d'Espagne  et  au  titre  de  duc  de  Brancas  et  de 
prescrire,  s'ils  n'ont  pas  ce  droit,  les  mesures  nécessaires  pour 
les  empêcher  de  s'en  prévaloir  en  France.  » 

En  thèse ,  pourquoi  les  propriétaires  de  titres  nobiliaires 
seraient-ils  dépouillés  de  la  suprême  garantie  que  la  loi  donne 
aux  propriétaires  ?  Pourquoi  l'accès  des  tribunaux  ordinaires, 
composés  de  juges  inamovibles,  leur  serait-il  fermé  ?  La  pro- 
priété d'un  titre  est  aussi  respectable  que  celle  d'un  nom  on 
d'une  terre. 

Est-ce  que,  d'aventure,  un  simple  décret,  le  décret  impérial 
du  8  janvier  1879,  les  aurait  dépouillés  de  cette  garantie  suprême, 
dessaisissant  les  tribunaux  de  droit  commun,  assignant  à  leur 
compétence  des  bornes  que  le  législateur  seul  aurait  pu  poser  ? 
Lisez  donc  les  articles  6  et  7  de  ce  décret,  qui  déterminent  les 
attributions  du  Conseil  du  sceau  :  «  Ce  Conseil,  y  lit-on,  déli- 
bère et  donne  son  avis  :  lo  sur  les  demandes  en  collation,  con-> 
firmation  et  reconnaissance  de  titres,  que  nous  aurons  renvoyées 
à  son  examen  ;  2^  sur  les  demandes  en  vérification  de  titres 
(art.  6).  —  Toute  personne  peut  se  pourvoir  auprès  de  notre 
garde  des  sceaux  pour  demander  la  vérification  de  son  titre  par 
le  Conseil  du  sceau  (art.  7).  »  Les  demandes  en  collation  ont 
pour  but  d'obtenir  un  titre  nouveau  ;  les  demandes  en  recon- 
naissance, de  lever  des  doutes  sur  l'existence  d'un  titre  déjà 
concédé  ;  les  demandes  en  confirmation,  de  réparer  ce  qui  peut 
être  incomplet  ou  insuffisant  dans  une  collation  antérieure   ; 


—  145  — 

les  demandes  en  vérification,  de  discerner  Tauthenticitë  de  cer- 
taines pièces  et  la  sincérité  de  certains  actes  :  c'est  une  besogne 
parement  administrative  qn  on  donne  à  ce  corps  administratif. 
Tontes  les  conséquences  légales  à  tirer  de  l'existence  des  titres 
nobiliaires  dûment  reconnus,  les  corps  judiciaires,  seuls,  peu* 
Tcnt  et  doivent  les  tirer.  Donc^  la  Cour  de  Paris  était  compé- 
tente et  vous  proclamerez  implicitement  cette  compétence  en 
statuant  sur  l'objet  direct  du  pourvoi,  sans  dessaisir  le  pouvoir 
jodici  aire  ; 
Je  rappelle  en  deux  mots  les  faits  : 

«  Le  deuxième  duc  de  Montebello  avait  formé,  le  6  avril  1836, 
arec  ses  frères  Alfred  et  Gustave,   une  société  en  commandite, 
dont  Alfred  avait  été  constitué  gérant,  laquelle  avait  pour  objet 
principal  Texploitation  du  domaine  de  Mareuil,  appartenant  au 
duc,  et  la  vente  des  vins  à  en  provenir.  Un  acte  additionnel  du 
même  jour  portait  :  «  Tous  les  vins  de  la  société  seront  mar- 
qués d^un  cachet  portant  le  nom,  le  titre  et  les  armes  de  M.  le 
duc  de  Montebello.  Cette  marque  sera  la  propriété  de  la  société.  » 
La  société  fut  successivement  prorogée  par  actes  du  12  décembre 
1849, des  22  janvier,  15 juin  1862,  du  10  mars  1886,  du  10  mars  1870, 
du  17  février  1880.  Je  lis  aux  qualités  du  jugement  de  première 
instance  :  «  Lors  du  renouvellement  de  1880,  le  duc  fondateur; 
fils  du  maréchal  Lannes,  et  son  fils  atné,  troisième  du  nom,  étant 
décédés,  leur  petit^fils,  le  jeune  duc  actuel,  reprit  la  place  de  son 
père:  il  était  mineur  et  avait  alors  pour  tuteur  datif  Louis- 
Gustave  Lannes,  comte  de  Montebello.  m  Or,  le  conseil  de  fa- 
mille prit,  le  23  janvier  1880,  la  délibération  suivante:  «  Il  de- 
meore  entendu  que  cette  autorisation  ne  porte  en  rien  atteinte 
aa  droit  inaltérable  qui  appartient  au  mineur  d'interdire  à  sa 
majorité  à  la  société  (quels  qu*en  seront  le  gérant  et  la  raison 
sociale)  de  prendre  comme  marque  de  commerce  son  titre  de  duc 
de  Montebello,  actuellement  employé  ;  que,  du  reste,  Tautorisa- 
tion  donnée  au  tuteur  de  signer  le  nouvel  acte  de  société  ne  com- 
prend que  la  durée  de  cette  80ciété,c*est-à-dire  une  période  de  dix 
ans,  après  laquelle  le  conseil  de  famille  reste  libre  de  la  conti- 
noer  ou  de  la  faire  cesser.   »  Or,  le  tuteur  Gustave  signa,  le 
17  février  1880,  au  mépris  de  cette  délibération,  un  acte  qui 
prorogeait  la  société  pour  une  durée  de  trente  ans,  avec  fayculté, 
pour  la  majorité  des  associés,  de  la  faire  cesser  à  Texpiration 
de  chaque  nouvelle  période  de  dix  ans.  Mais  les  divers  membres 
de  la  Société  Alfred  de  Montebello  et  Cie  reconnurent,  par  une 
déclaration  nouvelle,  que  le  conseil  de  famille  n'avait  autorisé 
la  prorogation  que  pour  dix  ans  et  que,  dès  lors,  en    dépit  de 
l'acte  du  17  février,   le  mineur  n'était  tenu  de  rester  dans  la 
société  à  Texpiration  de  la  période  décennale  que  s'il  y  était  au* 

10 


-  146  - 

torisë  par  une  nouvelle  délibération  de  son  con  seil  de  famille. 
Cette  délibération  n'a  pas  été  prise. 

Cependant  la  mère  du  jeune  duc  sMtant  remariée  et  fait  nom- 
mer tutrice,  a  cru  devoir  s'emparer,  au  profit  de  son  papille, 
de  la  décision  prise  à  Tunanimité,  le  23  janvier  i880,par  le  con- 
seil de  famille.  Se  heurtant  à  la  résistance  de  la  Société  Alfred  de 
Montebello  et  Cie,  elle  a  assigné  le  gérant  et  tous  les  membres 
de  cette  société  devant  le  tribunal  de  commerce  de  Reims  poar  : 
«  voir  dire  que  la  Société  Alfred  de  Montebello  et  Cie  n'a  pas  le 
droit  de  faire  usage  du  titre  de  duc  de  Montebello  et  des  armoi- 
ries qui  s*j  rattachent;  voir  déclarer  nulle  en  tant  que  de  besoin 
toute  clause  contraire  de.  Tacte  de  société,  j»  Cette  prétention 
fut  accueillie  par  le  tribunal  de  commerce  et  condamnée  par  la 
Cour  d'appel  de  Paris. 

Je  crois  que  Tarrét  de  la  Cour  de  Paris  doit  être  cassé.  Je  vais 
éliminer  les  considérations  accessoires  et  mettre  en  relief  les 
deux  motifs  principaux  qui  me  paraissent  dicter  la  cassation. 

D'abord  il  s'agit^  dans  la  cause,  d'un  majorât  de  propre  mou- 
vement, c'est-à-dire  d'un  majorât  établi  par  le  chef  de  l'Etat  au 
moyen  d*une  dotation,  en  conformité  de  l'acte  impérial  dn 
30  mars  1806,  du  sénatus-consulte  du  14  août  1806,  de  la  loi  du 
3  septembre  1807.  Il  faut  donc  appliquer  le  Code  des  migorats, 
c'est-à-dire  le  grand  décret  concernant  les  megorats,  en  76  arti- 
cles, qui  fut  rendu  le  l*''  mars  1808.  en  exécution  du  sénatus- 
cousulte  du  14  août  1806.  J'appelle  l'attention  particulière  de  la 
Cour  sur  les  articles  25,  26,  35,  36,  40,  41  de  ce  décret,  me  bor- 
nant à  en  citer  les  articles  35,  40,  §  1  et  41  ainsi  conçus  : 

Art.  35.  —  Le  titre  qu'il  nous  aura  plu  d'attacher  à  chaque 
majorât  sera  affecté  «  exclusivement  »  à  celui  en  faveur  duquel 
la  création  aura  eu  lieu  et  passera  à  sa  descendance  «  légitime  », 
naturelle  ou  adoptive,  de  mâle  en  m&le,  par  ordre  de  primogé- 
niture. 

Art.  40,  §  1.—  Les  biens  qui  forment  les  majorais  sont  inalié- 
nables, ils  ne  peuvent  être  engagés  ni  saisis. 

Art.  41.  —  Tout  acte  de  vente,  donation  ou  «  autre  aliénation  » 
de  ces  biens  par  le  titulaire,  tout  jugement  qui  validerait  ces 
actes,  hors  les  cas  ci-après  examinés,  sont  nuls  de  plein  droit. 
J'ai  à  peine  besoin  de  vous  rappeler  que  les  lois  de  1835  et 
1849  n'ont  pas  touché  aux  majorais  de  propre  mouvement.  D'a- 
près la  loi  du  12  mal  1835  (art.  4),  «  les  dotations  ou  parties  de 
dotations,  consistant  en  biens  soumis  au  droit  de  retour  en  fa- 
veur de  l'Etat,  continueront  à  être  possédées  et  transmises  «  con- 
formément aux  actes  d'investiture  »  et  sans  préjudice  des  droits 
d'expectative  ouverts  par  la  loi  du  5  décembre  1814.  Le  rapport 
de  M.  Joubertà  la  Chambre  des  députés  repousse  sur  ce  point 


-  147  — 

toate  transaction  qui  prendrait  «  un  caractère  aléatoire,  indigne 
da  gonyemement  »,  Une  considération  politique  du  pi  as  grand 
poids,  poursuit-il,  protège  les  dotations  contre  tout  empiéte- 
ment ;  elles  furent  originairement  destinées  à  récompenser  les 
grands  services  militaires  et  civils  d*une  époque  dont  le  gouver«* 
nement  actuel  revendique  à  juste  titre  toutes  les  gloires.  Lors 
qae  nous  votons  chaque  année  dans  notre  budget  une  allocation 
considérable  en  favenr  des  donataires  dépossédés  des  dotations 
qu'ils  avaient  reçues  en  pays  étranger,  nous  nuirons  certaine- 
ment pas  porter  la  moindre  atteinte  aux  droits  de  ceux  qui  unt 
conservé  les  leurs  en  France  ».  Vous  savez  enfin  que  la  loi  du 
7  mai  1849  s^occupe  à  la  fois  des  majorais  de  biens  particuliers 
et  des  substitutions  ;  quant  aux  majorats  établis  avec  des  dota- 
tions par  le  chef  de  l'Etat,  elle  les  laisse  par  son  silence  même, 
ainsi  que  le  remarque  Demolombe  (t.  XVIII,  n^  66),  sous  Tempire 
de  la  loi  du  12  mai  183S.  Il  résulte  des  deux  lois  de  1835  et 
de  1849,  dit  encore  M.  A.  Levesque  (Du  droit  nobiliaire  français, 
n*  147),  que  la  condition  imposée  par  le  décret  de  1808  à  la  con- 
servation des  titres  impériaux,à  savoir  Tinvestiture  d'un  majorât, 
manque  aujourd'hui  à  la  plupart  des  représentants  des  premiers 
gratifiés,  qu'elle  manquera  bientôt  à  tous  (sauf  le  cas  exception- 
nel où  il  existerait  un  majorât  de  propre  mouvement).  C'est  con- 
traire au  droit  commun?  d'accord  ;  mais  il  était  loisible  au  lé- 
gislateur moderne  de  sortir  du  droit  commun,'  en  se  référant, 
pour  un  cas  donné,  à  une  législation  antérieure.  M.  Levesque 
allait  jusqu'à  dire  en  1866  (op.  c^^,  n*  174)  :  <«  Si,  malgré  les 
révolutions  qui  ont  démocratisé  notre  société  et  frappé  d'une 
abrogation  générale  les  anciens  modes  de  transmission  fondés 
snr  le  privilège,  intervenait  aujourd'hui  un  acte  de  collation  qui 
se  référât  à  une  législation  antérieure,  il  faudrait  bien  en  exé- 
cuter les  clauses.  »  Or  les  lettres  patentes  du  15  juin  1808  ordon- 
nent «  que  le  titre  du  duc  de  Montebello  et  les  insignes  qui  s'y 
rattachent  seront  transmissibles  de  mâle  en  mâle  par  ordre  de 
primogénitare  ».  Il  s'agit  donc  d'appliquer  au  litige  actuel,  ce 
titulaire  étant  doté  d'un  majorât  par  l'empereur,  la  loi  des  ma- 
jorais de  propre  mouvement. 

D'abord  le  majorât  lui-même  est  inaliénable;  tout  acte  d'alié- 
nation, quel  Ique  soit  le  mode  d'aliénation,  est  «  nul  de  plein 
droit  »  diaprés  l'article  54  du  décret  de  1808  ;  nullité  radicale, 
d'ordre  public,  atteignant  même  les  jugements  qui  auraient  va- 
lidé les  actes  d'aliénation. 

Le  titre  incorporé  au  majorât  est  naturellement  inaliénable 
comme  le  majorât  lui-même.  C'est  ce  que  M.  Levesque  a  très 
bien  expliqué  dans  son  traité  Du  droilnobiliaire  français  (n»  169)  : 
«  Ainsi  indivisibilité  du  majorât,  dit-il,  et  par  suite  indivisibilité 


p-e      rit.-.- 


—  148  — 

da  titre,  telle  était  la  règle  du  système  impérial,  parfaitement 
analogae  à  celle  du  système  féodal.»  L'indivisibilité  du  titre  t 
dit-il  encore  un  peu  plus  loin,  est  le  corollaire  de  celle  du  fief 
ou  du  majorât. 

Donc  le  duc  investi  d'un  titre  de  duc  qui  est  attaché  à  un  ma- 
jorât de  propre  mouvement  ne  peut  pas  le  partager,  pas  même 
avec  ses  frères,  pas  même  avec  ses  enfants.  Le  titulaire  est  rivé 
au  titre,  le  titre  est  au  titulaire.  A  plus  forte  raison  ne  peut-il  pas 
faire  attribution  de  ce  titre  à  une  société  de  commerce. 

Je  ne  soutiens  pas,  remarquez-le,  que  le  duc  ne  puisse  pas 
faire  à  lui  seul  le  commerce  sous  son  nom  et  sous  son  titre  ;  son 
titre  devient  alors  une  enseigne,  «  le  signe  de  ralliement  de  la 
clientèle  »,  selon  Texpression  de  Cal  mettes,  «  Taccessoire  du 
fonds  de  commerce  et  le  pavillon  de  la  marchandise  »,  selon 
l'expression  de  M.  Pouillet.  Non  hos  quoisitum  munus  in  usus^ 
dira-t-bn  peut-être.  Cet  usage  échappait  peut-être,  en  effet,  aux 
prévisions  du  fondateur.  Mais  je  ne  vois  là,  pour  mon  compte, 
rien  dlUicite.  Ce  que  je  juge  illicite,  c'est  l'apport  dans  une  so- 
ciété. 

Qu'est-ce,  en  effet,  que  l'apport  ?  «  Tout  avantage,  ont  dit  très 
exactement  MM.  Lyon-Gaen  et  Renault,  susceptible  d'être  évalué 
en  argent,  fait  par  un  associé  en  échange  de  la  part  à  lui  attri- 
buée dans  les  bénéflces.  »  Eh  bien  I  reportez- vous  au  préambule 
du  décret  du  I*'  mars  1808  :  «  Nos  décrets  du  30  mars  1806  et  le 
sénatus-consulte  du  14  août  de  la  même  année,  y  lirez-vous,  ont 
établi  des  titres  héréditaires  avec  transmission  des  biens  aux- 
quels ils  sont  affectés.  L'objet  de  cette  institution  a  été  non  seu- 
lement d'entourer  notre  trône  de  la  splendeur  qui  convient  à 
sa  dignité,  mais  encore  de  nourrir  aux  cœurs  de  nos  sujets  une 
louable  émulation  en  perpétuant  d'illustres  souvenirs  et  en  con- 
servant aux  âges  futurs  Tirnage  toujours  présente  des  récompen- 
ses qui,  sous  un  gouvernement  juste,  suivent  les  grands  services 
rendus  à  l'Etat.  La  nécessité  de  conserver  dans  les  familles  les 
biens  affectés  an  maintien  des  titres,  impose  l'obligation  de  les 
«excepter  du  droit  commun»  et  de  les  assujettir  à  des  règles  par- 
ticulières, qui,  en  même  temps  qu'elles  en  empêcheront  l'alié* 
nation  «  ou  le  démembrement  »,  préviendront  les  abus,  en  don- 
nant connaissance  à  tous  nos  sujets  de  la  condition  dans  laquelle 
ces  biens  sont  placés.  En  conséquence,  nous  avons  résolu  de 
déterminer  les  principes  de  la  formation  des  majorats  des  biens 
régis  par  le  Gode  civil,  les  conditions  de  leur  institution  et  les 
devoirs  imposés  à  ceux  qui  en  jouissent.  »  Je  n'ajoute  rien. 

Je  crois  avoir  démontré,  à  un  premier  point  de  vue,  que  l'ar- 
rêt attaqué  doit  être  cassé  parce  que,  d'après  les  articles  40  et 
41  du  décret  du  !•'  mars  1808,  les  titres  incorporés  à  un  miyorat 


—  149  — 

de  propre  mouvement  ne  peuvent  pas  être  démembrés.  Second 
point  de  vue  :il  6*agit  non  plus  du  droit  que  le  jeune  duc  de  Mon- 
tebello  a  pa  trouver  dans  la  succession  paternelle,  mais  du  droit 
propre  qu'il  tient  des  lettres  patentes  du  i 5  juin  1808,  combinées 
aTecTarticle  35  da  décret  du  1*'  mars.  Il  esf  le  nouveau  titu- 
laire ;  il  a,  d*après  les  lettres  patentes  et  le  décret,  un  droit  exclu- 
sif an  titre. 

1*  Le  feu  duc  de  Hontebello  a-t-il  pu  entamer  le  droit  de  son 
fils  aîné  ?  Non.  En  admettant  qu'il  se  fût  lié  lui-même,  il  n'a  pu 
lier  le  duc  futur. 

2*  Celui-ci  avait-il  le  droit  de  recevoir  un  titre  non  partagé? 
Oai,  comme  un  majorât  non  démembré . 

(Test  féodal,  a-t-on  dit.  —  On  pourrait  dire  plus  exactement: 
c'est  impérial .  Telle  fut  la  volonté  de  l'empereur.  Peut-être 
avait-il  le  droit  de  tenir  ce  langage,  celui  qui  avait  écrit  avec  son 
épée  la  plus  grande  épopée  des  temps  modernes  et  longtemps 
enehainé  la  victoire. 

Mais  c'était  une  conception  fausse,  ai-je  souvent  entendu 
dire.  Cela  ne  me  regarde  pas.  Il  fallait,  dans  tous  les  cas,  ne 
laisser  subsister,  ni  en  183S  ni  en  184'9,  les  majorats  de  propre 
mouvement. 

3^  Est-ce  recevoir  un  titre  intact  que  de  recevoir  un  titre  par- 
tagé entre  l'héritier  direct  et  n'importe  qui,  personne  physique 
OQ  personne  morale  ?  Non. 

4*  Reçoit-on  un  titre  intact  en  recevant  un  titre  qui  repré- 
sente an  profit  de  Tun  la  gloire  militaire,  les  canons  et  les  dra- 
peaux enlevés  à  l'ennemi,  la  France  défendue,  honorée,  agran- 
die, Arcole,  Aboukir,  Hontebello,  léna,  Friedland,  Essling,  au 
profit  de  quelques  autres  nn  moyen  d'achalandage  ? 

Je  ne  le  pense  pas.  Je  répète  que  l'arrêt  doit  être  cassé. 

Conformément  à  ces  conclusions,  la  Chambre  civile  a 
rendu  l'arrôt  suivant  : 

La  Cour,  Sur  le  deuxième  moyen  du  pourvoi  et  sans  qu'il 
soit  besoin  d'examiner  le  premier  : 

Va  le  décret  du  {•''mars  1808,  relatif  à  la  création  de  titres 
héréditaires,  le  décret  du  19  mars  1808,  nommant  le  maréchal 
Lannes  duc  de  l'Empire,  sous  le  titre  de  duc  de  Hontebello,  les 
lettres  patentes  délivrées  pour  Texécution  de  ce  décret  ; 

Attendu  qu'on  ne  saurait  confondre  avec  un  nom  patronymi- 
que qui  a  pour  destination  de  désigner  une  personne,  passe 
nécessairement  et  indéflniment  à  tous  les  enfants  sans  distinc- 
tion, un  titre  émané  de  la  puissance  souveraine,  destiné,  non  à 
désigner,  mais  &  honorer  celui  auquel  il  a  été  conféré  ;   que  si 


—  150  — 

I  es  titres  nobiliaires  n'entratnent  plus  de  privilèges  d*aucQne 
sorte,  ils  n*en  doivent  pas  moins  être  maintenus  dans  le  caractère 
qui  leur  a  étë  donné  à  Torigine,  en  tant  qu'il  est  compatible  avec 
Tétat  social,  et  dans  les  conditions  de  transmissibilité  qui  leur 
ont  été  imposées  par  l'acte  de  création  ; 

Attendu  que  le  préambule  du  décret  du  !•'  mars  iB08,  relatif 
aux  titres  héréditaires  créés  dans  les  mêmes  conditions,  que  ce- 
lui conféré  au  maréchal  Lannes,  porte  :  «  Tobjet  de  cette  institu* 
tion  a  été,  non  seulement  d'entourer  notre  trône  de  la  splendeur 
qui  convient  à  sa  dignité,  mais  encore  de  nourrir  aux  cœurs  de 
nos  sujets  une  louable  émulation,  en  perpétuant  d'illustres  sou- 
venirs et  en  conservant  aux  âges  futurs  Timage  toujours  présente 
des  récompenses  qui,  sous  un  gouvernement  juste,  suivent  les 
grands  services  rendus  à  l'Etat  »  ;  qu'un  décret  du  19  mars  i808 
nomme  le  maréchal  Lannes  duc  de  FEmpire,  sous  le  titre  de  duc 
de  Montebello  ;  que  les  lettres  patentes  délivrées  au  maréchal 
en  exécution  de  ce  décret  ordonnent  que  le  titre  de  duc  de  Monte- 
bello et  les  insignes  qui  s'y  rattachent  seront  transmissible^  à 
la  descendance  directe,  légitime,  naturelle  ou  adoptive,  de  mâle 
en  mâle,  par  ordre  de  primogéniture  ; 

Attendu  qu'il  résulte  de  ces  actes,  émanés  de  la  puissance 
souveraine,  qu'à  chaque  transmission  le  bénéficiaire  du  titre 
auquel  il  échoit,  non  à  cause  de  sa  qualité  d'héritier,  mais  en 
vertu  de  l'acte  de  collation,  doit  le  recevoir  tel  qu'il  a  été  créé, 
c'est-à-dire  ayant  conservé  intact  son  caractère  honorifique  et, 
par  suite,  non  engagé,  comme  dans  l'espèce,  dans  une  société 
de  commerce  dont,  avec  les  insignes  qui  y  sont  attachés,  il  cons- 
tituerait la  marque  ;  qu'en  décidant  le  contraire,  l'arrêt  attaqué 
a  violé  les  lois  susvisées  ; 

Pa  r  CBS  MOTH^s,  Gasso  et  annule  l'arrêt  de  la  Cour  de  Paris  du 
2  janvier  1896  ; 
Renvoie  la  cause  et  les  parties  devant  la  Cour  de  Rouen. 

MM.  Mazeau,  premier  président.  —  Crépon,  rapporteur, 
—  Desjardins,  avocat  général.  —  M*^  Sabatisr  et  Divin, 
avocats. 

Depuis  cet  arrêt,  le  jeune  duc  de  Montebello  est  décédé. 


151  — 


Art.  4128. 

!f«HB   «le  Plnventenr.  —  Métiiode  d'enseignement. 
—  Uenrpntian.   —  Conenri'enee  déloynle.  —  Berlltn 


Le  faii^par  f  inventeur  d'une  méthode  pour  renseignement 
des  langtiei  vivantes,  de  donner  son  nom  à  cette  méthode 
(Berlitz  School)  constitue  non  une  dénomination  tirée  delà 
nature  de  la  chose^  mais  une  désignation  fantaisiste  qui  est 
la  propriété  privative  dudit  inventeur^  alors  qu'il  est  cons- 
tant qu'il  a  le  premier  fait  usage  en  France  de  ladite  déno- 
mination (i). 

En  conséquence^  commet  une  usurpation  de  nom  abusive 
et  se  rend  passible  de  dommages-intérêts,  tant  à  l'égard  de 
Vinvenieur  que  de  ceux  auxquels  il  a  concédé  le  droit  d^ ex- 
ploiter sa  méthode,  celui  qui,  après  s'être  initié  à  ladite 
méthode  et  être  resté  un  certain  temps  comme  professeur 
dans  les  écoles  fondées  par  r inventeur  ou  ses  cessionnaires, 
a  ouvert  une  école  similaire  et  a,  dans  ses  affiches^  pros' 
peetus,  enseignes,  rédigés  en  vue  de  créer  une  confusion 
préjudiciable  à  ces  derniers,  annoncé  que  l'enseignement 
des  langues  vivantes  était  donné  dans  son  école  suivant  la- 
dite méthode  (2). 

(Trib.  dT.  Seine  (S«ch.),  7  sTril  1898,  (l'«ch.)  6  novembre  1899.— Ber- 
litz et  Gollonge  et  Wellhoff  c.  di  Chiara  et  c,  Dumartheray.) 

i^  Espici. 

Le  7  avril  1898,  sous  la  présidence  de  M.  Pionard-Du- 
DszsRT,  la  3*  Chambre  du  Tribunal  civil  de  la  Seine  a  rendu 
le  Jugement  suivant,  a  la  requête  de  M.  Berlitz,  contre  di 
Chiara  : 

Li  Tbibunal,  Attendu  que  Berlitz,  inventeur  d*ane  méthode 

(i-1)  n  a  été  jagé  que  le  nom  de  l'anteor  d'une  invention  ne  tombe 
pas  nécessairement  dans  le  domaine  publie  avec  l'invention  elle-même 
Çfckr  Pooillet,  Marq.  fàbr.,  n«>  58  et  384  et  s.,  ajouter  Paris,  24  janvier 
1889,  Béions  agglomérés  système  Coignet,  Ann.,  98.211  ;  Trib.    civ. 
Semé,  83  mars  18U8,  Grilloirs  système  Gosteau,  Ann,^  98.215  ;  Trib. 
Lyon,  94  Janvier  1896,  Bec$  de  cane  Système  Gollot,  La  Loi,  24  juillet  : 
Trib.  civ.  Seine, 20  juin  et  90  juillet  1898;  Filtre  système  Pastevr,  Gaz. 
Trib»,  14  joUlât  et  Droit,  21  juillet.  A  plus  forte  raison  l'inventeur  d*une 
aéthode  d'enseignement  peut-il  se  réserver  l'usage  exclusif  de  son 


—  152  — 

poar  l'enseignement  des  langues  étrangères,  a  donné  son  nom  à 
ladite  méthode  qui,  sous  la  dénomination  de  Berlitz  Sehool,  pa- 
raît avoir  acquis  depuis  un  certain  nombre  d'années  une  cer- 
taine notoriété  tant  en  Amérique  qu'en  Europe  : 

Attendu  que  Berlitz  ayant  fondé  un  certain  nombre  d'écoles 
pour  l'application  de  sa  méthode  a  donné  également  son  nom  à 
ces  écoles  exploitées  tant  par  la  Société  Berlitz  et  Gie  que  par 
divers  individus  ou  sociétés  auxquels  il  a  concédé  le  droit  ex- 
clusif de  se  servir  du  nom  de  The  Berlilx  School  of  Languages 
pour  désigner  lesdites  écoles  déjà  fondées  ou  à  fonder  et  ce  dans 
les  villes  déterminées  et  pour  des  périodes  limitées  ;  que  ses 
concessionnaires  pour  la  France  sont  Gollonge  et  Wellhoff  qni 
exploitent  ou  font  exploiter  actuellement  cinq  écoles  dont  deux 
à  Paris,  27,  avenue  de  l'Opéra,  et  59,  rue  de  Rennes  ;  que  c'est 
dans  ces  conditions  qu'ils  ont  assigné  di  Ghiara  en  usurpation 
du  nom  de  Berlitz  et  usage  illicite,  en  suppression  dudit  nom, 
de  tous  tableaux,  enseignes,  affiches,  prospectus^  lettres,  inser- 
tions et  impressions  de  toute  nature,  en  5.000  francs  de  domnoa- 
ges-întéréts  avec  insertion  du  jugement  dans  dix  journaux  au 
choix  des  demandeurs  et  aux  frais  du  défendeur  ; 

Attendu  qu'il  est  constant  et  reconnu  que  di  Ghiara,  qn!  après 
s'être  initié  &  la  méthode  et  être  resté  un  certain  temps  comme 
professeur  dans  les  écoles  de  Gollonge  et  WellhofT,  concession- 
naires de  ladite  méthode,  a  ouvert  une  école  rue  Léopold-Robert 
et  a  dans  des  affiches,  prospectus,  enseignes,  annoncé  que  ren- 
seignement des  langues  vivantes  était  donné  dans  la  dite  école 
par  la  méthode  Berlitz  ;  que  les  affiches,  prospectus  et  enseignes 
étaient  même  rédigés  en  vue  d'amener  une  confusion  dans  Tes- 
prit  du  lecteur  et  de  lui  faire  croire  que  ladite  école  n'était  qu'une 
création  de  Berlitz  ; 

Attendu  que  le  nom  ainsi  usurpé  de  Berlitz  ne  constitue  pas 
une  dénomination  tirée  de  la  nature  de  la  chose,  mais  une  dési- 
gnation fantaisiste  adoptée  par  l'inventeur  :  qu'il  est  constant  et 
reconnu  que  Berlitz  a  le  premier  fait  usage  en  France  de  ladite 
désignation  ; 

Attendu  que  le  tribunal  a  des  éléments  d'appréciation  suffi- 
sants pour  fixer  à  200  francs  les  dommages -intérêts  dus  et  qu'il 
n'apparatt  pas  que  des  insertions  dans  des  journaux  soient  jus- 
tifiées ; 

Par  ces  motifs.  Dit  que  di  Ghiara  a  usurpé  le  nom  de  Ber- 
litz et  en  a  fuit  uu  usage  illicite  préjudiciable  aux  demandeurs  ; 

Dit  que  dans  les  huit  jours  de  la  signification  du  présent  juge- 
ment, di  Ghiara  devra  supprimer  le  nom  de  Berlitz  de  tous  ta- 
bleaux, enseignes,  affiches,  prospectus,  lettres,  insertions  et  im- 
pressions de  toute  nature  ; 


—  153  — 

Le  condamne  dès  à  présent  à  pa/er  aux  demandeurs  la  somme 
de  20  francs  par  chaque  contravention  constatée  après  ledit  dé- 
lai; 

Le  condamne  pour  le  préjudice  causé  en  200  francs  de  dom« 
nages-intéréts  ; 

Rejette  le  surplus  des  conclusions  des  demandeurs  ; 

Et  condamne  di  Chiara  aox  dépens. 

2«  Espèce. 

Jugement  de  même  date  au  profit  de  Collonge  et 
WeUhofT  : 

Lb  TaiBuiUL,  Attendu  que  Collonge  et  WeOhoff  seuls  conces* 
sionnaires  pour  la  France  de  la  méthode  connue  sous  la  déno- 
mination Tke  BerlUx  Sehoolj  dénomination  fantaisiste  tirée  du 
nom  de  celui  qui  parait  Tavoîr  appliquée  le  premier  en  Améri- 
que pour  renseignement  des  langues  étrangères,  ont  assigné  di 
Chiara  en  dommages-intérêts  pour  remploi  d'affiches  et  de  pros- 
pectus semblables  à  ceux  des  demandeurs  ; 

Attendu  qu'il  est  constant  et  non  méconnu  que  Berlitz  a  lé 
premier  fait  usage  en  France  de  la  dénomination  The  Berlitz 
Sehool  of  Languages  pour  signaler  des  écoles  ouTcrtes  par  lui  ou 
par  la  Société  Berlltx  et  Cie  ou  par  des  concessionnaires  de  la- 
dite dénomination  s'appliquant  à  une  méthode  spéciale  d'ensei- 
gnement des  langues  étrangères  ; 

Attendu  que  Collonge  et  Wellhoff  ont  acheté  de*  Berlitz  le  droit 
d'oser  de  ladite  dénomination  toute  de  fantaisie  et  susceptible 
d*nn  droit  prÎTatif  et  qu'ils  ont  ouvert  à  Paris  et  en  France  plu- 
sieurs écoles  toutes  désignées  sous  la  même  dénomination  ; 

Attendu  que  di  Chiara  après  avoir  été  employé  comme  pro- 
fesseur dans  une  de  ces  écoles,  en  a  ouvert  une  lui-même  à  Pa- 
ris, lOy  rue  Léopold-Robert  et  a  pour  la  faire  connaître,  adopté 
la  désignation  suivante  dans  ses  enseignes,  prospectus,  affiches 
et  ses  lettres  :  Sehool  of  languages  The  Berliii  Method  ; 

Attendu  que  c'est  sans  aucun  droit  que  di  Chiara  a  fait  ainsi 
usage  du  nom  de  Berlitz,  que  la  désignation  employée  par  lui 
présente  avec  celle  des  demandeurs  une  similitude  voulue  et 
calculée  pour  amener  une  confusion  préjudiciable  à  ceux-ci  ; 

Attendu  que  le  tribunal  a  des  éléments  suffisants  d'apprécia- 
tion pour  fixer  à  300  francs  les  dommages-intérêts  dus,  attendu 
que  la  demande  d'insertion  n'est  pas  justifiée  ; 

Pab  CBS  MOTIFS,  Dît  quc  dansUes  huit  jours  de  la  signification 
du  présent  jugement,  di  Chiara  sera  tenu  de  faire  cesser  la  con- 
fusion résultant  de  la  synonymie  et  de  la  similitude  de  son  en- 
seigne et  de  ses  affiches  et  prospectus  ; 


—  154  — 

qu'il  seni  tenu  de  payer  aux  demandeurs  une  somme  de 
incB  pour  chaque  coatravenlian  constatée  et  pour  le  préju- 
causé,  le  condamne  à  payer  aux  demandeurs  la  somme  de 
-an es  de  dommages-intérêts  ; 

qu'il  n'y  a  pas  lieu  à  insertion  ; 

elte  le  surplus  des  conclusions  des  demandeurs,  et  con- 
:e  di  Chiara  aux  dépens,  dont  distraction  est  faite  au  profit 
-on,  avoué,  qui  l'a  requise  sons  les  affirmations  voulues  par 

3*  Espfcci, 

6  novembre  1899,  la  1"  Chambre  du  Tribunal  civil 
I  Seine,  bous  la  présidence  de  H.  le  président  Bau- 
t,  a  rendu  un  jugemenl  dans  le  même  sens,  à  la 
ête  de  Berlitz  contre  Dumartheray  : 

TaiBDKAL,  Attendu  que  Berlitz  est  l'inventeur  et  l'initia- 
tant  en  Amérique  qu'en  Europe  d'une  méthode  nouvelle 
l'enseignement  des  langues  étrangères  k  laquelle  il  a  don- 
n  nom  et  pour  l'application  de  laquelle  il  a  créé  des  écoles 
le  titre  de  Tfae  Berliti  et  School  orLangnege  ;  qull  a  fondé 
Société  Berlitz  et  Cie  à  laquelle  if  a  apporté  le  bénéfice  de 
Sthode  et  qu'il  a  concédé  à  Collongeet  WellholT le  droit  es- 
'de  se  servir  du  nom  de  The  Berlitz  School  of  Languages 
les  écoles  de  langues  fondées  ou  à  fonder  en  France  et  de 
oncer  dans  ce  pays  comme  étant  les  seuls  coucesaionnai- 
es  écoles  ainsi  dénommées  ;  qu'ainsi  ces  demieis  exploitent 
it  eux-mêmes  cédé  à  des  tiers  le  droit  d'exploiter  en  France 
soles  dont  deux  &  Paris,  avenue  de  l'Opéra  n°  87  et  bou- 
d  Saint-Germain,  n'  180; 

s  c'est  dans  ces  conditions  que  prétendant  que  Unmarthfr- 
vait  usurpé  le  nom  de  Berlitz  et  qu'il  en  avait  failon  usage 
e,  Berliti  agissant  tant  en  son  nom  personnel  que  comme 
sentant  la  Société  Berliti  et  Cie  et  Col  longe  et  Wellholfen 
susdite  qualité  de  concessionnaires,  l'ont  fait  assiguer  par 
lit  de  Thiellement,  huissier  commis,  en  date  du  SI  février 

k  l'effet  de  voir  dire  qu'il  serait  tenu  de  cesser  cette  nsnr- 
n  de  supprimer  sous  une  astreinte  pénale  de  nom  de  Ber- 
e  ses  impressions  de  toute  nature,  et  qu'ils  lui  réclament 
le  préjudice  causé  500  Crânes  k  titre  de  dommages-intérêts 
isertion  du  présent  jugement  dans  quatre  journaux  et  &  ses 

;endn  qu'il  est  constant  que  Dumartheray,  aprts  avoir  été 
oyé  à  Paris  dans  une  des  écoles  de  Collouge  et  Wellboff, 
ouvert  lui-même  une  à  Paris  rue  Taitbout,  n*  14,  copiée 
ement  sur  celle  des  demandeurs  ; 


—  155  — 

Qoe  ponr  la  faire  connaître  il  a  adopté  la  désignation  The  Ber^ 
Ktz  School  of  Languages  ou  méthode  de  BerlitMy  dans  ses  enseignes, 
prospectas,  affiches  et  réclames  ;  qu*une  sommation  du  minis- 
tère de  Geibel,  huissier  à  Paris,  en  date  du  3  décembre  1898, 
d*aToir  à  cesser  cette  usurpation  est  demeurée  sans  effet,  quMl 
résulte  d^nn  procès-verbal  de  constat  de  Vallée,  huissier  à  Paris, 
6D  date  du  15  ami  1899  qu'il  a  fait  distribuer  publiquement  à 
Paris,  avenue  de  l'Opéra,  en  face  du  Cercle  militaire  des  prospec- 
tas imprimés  où  on  lit  au  recto  «  Langues  Tivantes  The  Gonver- 
sational  School  of  Languages,  14,  rue  Taitbout,  Paris,  Méthode 
Berlitz..,  directeur  M.  Dumartheray,  ex-professeur  à  l'école 
Beriitz  et  au  verso:  Modem  Languages,  The  Gonversational 
Sehool  of  Languages,  44,  me  Taitbout,  Berlitz  Method.  M.  Du- 
martheraj,  etc.  »  ; 

Attendu  que  le  nom  de  Berlitz  ne  constitue  pas  une  dénomi- 
nation tirée  de  la  nature  de  la  chose  mais  une  désignation  fan- 
taisiste adoptée  par  l'inTenteur  et  susceptible  d'un  droit  privatif 
à  son  profit  ; 

Que  c^est  abusivement  que  Dumartheray  en  a  fait  usage,  que 
la  désignation  employée  par  lui  présentement  avec  celle  des  de- 
mandeurs offre  une  similitude  voulue  et  calculée  pour  amener 
ooe  confusion  préjudiciable  à  ceux-ci  ;  que  le  tribunal  a  les  élé- 
ments suffisants  d'appréciation  pour  Ûxer  à  300  francs  le  chiffre 
des  dommages-intérêts  qui  lui  sont  dus  ; 

Parcss  motifs,  Dit  que  Dumartheray  a  usurpé  le  nom  de  Ber- 
litset  en  a  fait  un  usage  illicite,  lui  fait  défense  de  s'en  servir 
dans  l'avenir  ; 

Ordonne  que  dans  la  huitaine  de  la  signification  du  présent 
jugement  Dumartheray  devra  supprimer  le  nom  de  Berlitz  de 
tons  les  tableaux,  enseignes,  affiches,  prospectus,  lettres,  in- 
sertions et  impressions  de  toute  nature  ;  et  faute  par  lui  de  faire 
dans  ledit  délai  et  icelui  expiré,  autorise  les  demandeurs  à  faire 
tux  frais  de  Dumartheray  et  par  des  ouvriers  à  leur  choix,  lacé- 
rer toutes  affiches,  prospectus,  lettres,  enseignes  portant  le  nom 
de  berliU  : 

Condamne  dès  à  présent  Dumartheray  à  payer  aux  demandeurs 
la  somme  de  20  francs  par  chaque  contravention  nouvelle  qui  se- 
rtit ultérieurement  constatée  ; 

Le  condamne  pour  le  préjudice  causé  à  leur  payer  la  somme 
de  300  francs  à  titre  de  dommages-intérêts  ; 

Bit  qoe  le  présent  jugement  sera  inséré  dans  deux  journaux 
de  Paris  aux  choix  des  demandeurs  et  aux  frais  de  Dumarthe- 
ray» sans  toutefois  que  le  coût  desdites  insertions  puisse  excéder 
ia  somme  totale  de  100  francs  ; 
Condamne  Dumartheray  aux  dépens. 


—  156  — 

Dans  ces  diverses  affaires,  M*  Michbl  Pelletier  plaidait 
pour  les  demandeurs,  M*  Le  Chaplain  pour  di  Chiara. 


Art.  .4129. 

HNmh  commerelal.—  Inventeur.—  Domaine  publie. — 
Bonne  fol.  —  Dépens.  —  Publlentlon  du  Jugement. 

Le  nom  commercial  constitue  une  propriété  imprescrip- 
tible qui  survit  même  au  cas  oU,  le  brevet  de  finventeur 
étant  iombé  dans  le  domaine  public,  chacun  acquiert  la  fa- 
culté de  fabriquer  et  de  vendre  le  produit  ou  la  marchandise 
autrefois  brevetée  ;  remploi  du  nom  d'autrui  ne  peut  donc 
devenir  légitime  qu'à  la  condition  que  ce  nom  soit  tombé 
dans  le  domaine  public  par  le  fait  ou  la  tolérance  de  Fin- 
venteur,  ou  qu'il  soit  devenu  la  seule  désignation  usuelle 
de  Vobjet  fabriqué  ;  la  renonciation  ne  se  présume  pas  et 
ne  saurait  s'induire  de  quelques  actes  isolés,  non  réprimés 
par  le  propriétaire  et  résultant,  par  exemplCy  de  remploi 
de  son  nom  dans  quelques  catalogues  (1). 

Celui  qui  a  usé  de  bonne  foi  d'un  nom  quHl  pouvait 
croire  tombé  dans  le  domaine  public  ne  s'est  pas  rendu  cou- 
pable d'actes  de  concurrence  déloyale  par  usurpation  de 
nom,  mais  il  pourrait  être  condamné  à  des  dommages- 
intérêts  pour  faute  préjudiciable  au  demandeur  ;  dans  le 
cas  même  oii  le  demandeur  ne  justifierait  d'aucun  préju- 
dice pécuniaire,  les  frais  de  l'instance  doivent  cependant 
être  mis  à  la  charge  de  celui  qui  l'a  rendu  nécessaire  en 
usant  à  tort  du  nom  commercial  d' autrui  (%). 

(i)  Cf.  rarticle  qui  précède. 

Ici  noua  citons  les  deux  espèces  parce  qne  le  tribonal  de  Semar,  dans 
le  jugement  qne  la  Gonr  de  Dijon  a  confirmé  par  adoption  des  motifii, 
expose  les  principes  plus  complètement  que  le  jugement  de  Ghâlon-sor- 
Saône  et  Tarrêt  motivé  dans  1%  seconde  espèce.  Dans  la  seconde  espèce, 
la  Cour  semble  même  presque  légitimer  Tusage  de  l'expression  c  tulle  à 
côte,  dite  tuile  Maller  >  sur  les  papiers  de  commerce,  tout  en  recon- 
naissant que  Muller  est  en  droit  de  revendiquer  l'usage  exclusif  de  son 
nom  ;  mais  il  faut  observer  que  Tadversaire  s'était  engagé,  par  conclu- 
sions  formelles,  à  renoncer  à  tout  usage  de  ce  nom  et  à  le  faire  c  dispa- 
raître de  ses  catalogues  et  publications  >  et  la  Cour  constate  que  le  tri- 
bunal a  donné  acte  de  cette  déclaration. 

(3)  Dans  un  cas  anatogoe  de  tolérance  la  Cour  de  Paris  a  même  dé- 


—  157  — 

En  t absence  de  faute  et  de  préjudice  il  n*y  a  pas  lieu 
fantùriser  la  publicaiion  de  la  décision  aux  frais  de  la 
partie  intéressée  ;  il  lui  appartient  si  elle  juge  utile  de  faire 
connoUre  la  consécration  de  son  droit  par  les  tribunaux^  de 
u  conformer  aux  régies  du  droit  commun  en  évitant  toute 
indication  de  nature  à  nuire  à  des  tiers  (1  )  (2«  espèce). 

(CL  de  Dijon,  9  léfrier  1899.  —  Millier  c.  Clémencet  et  M  aller  c.  le 
Société  de  la  Grande  Toilerie  de  Bourgogne  •) 

ir«  Espfccs. 

La  Cour  a  confirmé,  le  9fémer  1899,  par  adoption  des 
molifs,  le  jugement  du  Tribunal  de  Semur  en  date  du  8  juin 
1898,  lequel  était  ainsi  conçu  : 

Considérant  que,  par  exploit  du  21  avril  1898,  Huiler  a  fait 
asûgner  Clémencet  pour  le  faire  condamner  à  lui  payer  la  somme 
de  40,000  francs  à  titre  de  dommages-intérêts  pour  faits  de  eon- 
carrence  déloyale  résultant  de  l'emploi  de  son  nom,  à  cesser  d'en 
faire  nsage  à  l'avenir  à  peine  d'une  astreinte  de  1,000  francs  par 
chaque  contravention  constatée  et  pour  faire  ordonner  la  publi- 
cation et  l'insertion  du  jugement  à  intervenir  ; 

Considérant  que  Clémencet,  tout  en  résistant  à  cette  demande 
qu'il  prétend  mal  fondée,  déclare  qu'il  supprime  à  partir  de  ce 
jour  et  s'engage  à  ne  jamais  employer  à  l'avenir  le  nom  de  MuUer 
poor  désigner  les  tuiles  de  sa  fabrication,  dans  ses  catalogaes, 

booté  de  se  demande  l'ayant  droit  au  nom,  tont  en  interdisant  impUd- 
tement  aux  défendeurs  remploi  du  nom  pour  l'avenir  (Paris,  l*'  mars 
1888,  chaussons  Gaillard,  iinn.,  94.108). 

(1)  La  Coor,  en  refusant  d'autoriser  le  demandeur  à  publier  le  joge- 
neot  à  ses  (irais,  n*entend  pas  interdire  cette  publication  d'une  façon 
abntne  (voir  Poaillet,  Marq,  fah,,  n*  299  et  arrêts  cités).  Toutefois 
elle  dit  que  tonte  indication  de  nature  à  nuire  des  tiers  devra  être  évitée  : 
a  eela  doit  signifier  que  la  publication  ne  mettra  pas  en  cause  des  per* 
lonaes  étrangères  au  procès  ce  n'était  pas  bien  utile  à  dire  et  le  tribunal 
en  n'aatorisant  que  l'insertion  du  Jugement  lui-même  et  dans  deux  jour- 
aasx  lenlemeut  empêchait  tout  abus  ;  si  cela  signifie  que  le  jugement 
M  pourra  pas  être  publié  avec  les  noms  des  adversaires  c'est  une  me- 
ttre on  peu  absolue,  car  le  jugement  appartient,  en  somme,  a  qui  l'a 
obtenu  et  la  partie  adverse  qui  a  été  condamnée  aux  dépens  n'est  pas, 
i  proprement  parler,  un  tiers  an  point  de  vue  de  la  publication  du  ju- 
femeat.  Ce  que  la  jarispradence  a  toujours  prohibé  ce  n'est  que  l'abus 
de  h  publication,  par  exemple  en  tronquant  le  jugement  d'une  manière 
pr^adiciablè  à  l'adversaire  (Trib.  comm.  Seine,  29  décembre  1898 
Hardy  e,  dame  de  St-Martin,  La  Loi,  16  février  1899),  en  le  répandant 
9008  forme  de  signification  par  huissier  i  des  tiers  (Trib.  dv.  Seine,  26 
mm  1809,  Compagnie  fermière  de  Vichy,  Ann.,  05.909),  en  le  publiant 
longtemps  après  sa  date  (Trib.  civ.  Seine,  3  mars  1876,  Jacquot  et  Gie, 
As».,  78.391).  G.  M. 


—  158  — 

prix-coarants  et  factares,  en  demandant  quMl  lai  soit  donné  acte 
de  cet  engagement  ;  que  Muller,  de  son  côté,  demande  acte  de 
ces  déclarations  ; 

Considérant  qu'il  est  de  doctrine  et  de  jurisprndence  constantes 
que  le  nom  commercial  constitue  une  propriété  imprescriptible 
et  qui  survit  même  au  cas  où,  le  brevet  de  Finventeur  étant 
tombé  dans  le  domaine  public,  chacun  acquiert  la  faculté  de 
fabriquer  et  de  vendre  le  prodait  ou  la  marchandise  brevetée  ; 
que,  par  suite,  l'emploi  du  nom  d*autrui  ne  peut  devenir  légitime 
qu*à  la  condition  que  ce  nom  soit  tombé  dans  le  domaine  pn- 
btic  par  le  fait  ou  la  tolérance  de  celui  auquel  il  appartient,  ou 
qu'il  soit  devenu  la  seule  désignation  usuelle  de  l'objet  fabri- 
que; 

Considérant  que  la  renonciation  ne  se  présume  pas  et  qu'on  ne 
saurait  dans  l'espèce  l'induire  de  quelques  actes  isolés  non  répri- 
més par  le  propriétaire  et  résultant  de  l'emploi  de  son  nom  dans 
quelques  catalogues;  qu'il  n'apparaît  pas  non  plus  que  le  nom 
de  Huiler  soit  devenu  indispensable  daasTusage  de  la  céramique 
pour  désigner  un  modèle  de  tuiles  qui  est  connu  couramment 
sous  divers  autres  noms,  tels  que  :  tuiles  à  double  recouvrement, 
à  côtes,  etc.,  ainsi  qu'il  résulte  des  documents  fournis  an  tribu- 
nal, et  notamment  de  plusieurs  catalogues  ou  séries  de  prix  ; 

Considérant  que  c'est  donc  à  tort  et  sans  droit  que  Clémencet 
s'est  servi  du  nom  de  MuUer  pour  désigner  ses  produits  dans  ses 
catalogues  ou  prospectus  en  les  dénommant  tuiles  à  double  te* 
couvrement  dites  tuiles  MuUer  ; 

Considérant  toutefois  qu'on  ne  saurait  induire  de  ce  simple 
usage  la  preuve  que  le  défendeur  ait  cherché  à  créer  une  confu- 
sion entre  ses  produits  et  ceux  du  demandeur  et  qu'il  ait  ainsi 
commis  des  actes  de  concurrence  déloyale  ;  qu*il  est  à|remarquer, 
en  effet,  que  le  nom  de  MuUer  n'a  jamais  été  apposé  par  lui  sur 
les  objets  provenant  de  sa  fabrication,  lesquels  étaient  au  contraire 
revêtus  en  général  de  la  marque  Clémencet  ;  que,  si  quelques  tui- 
les sortant  de  ses  usines  n'ont  pas  porté  cette  inscription,  il  ne 
semble  pas  douteux  que  cette  omission,  très  exceptionnelle,  ne 
peut  être  attribuée  à  un  fait  personnel  et  volontaire,  mais  est,  au 
contraire,  le  résultat  d'un  procédé  de  fabrication  défectueux  per- 
mettant aux  moules  de  s'obstruer  et  de  ne  plus  marquer  leur 
empreinte  sur  quelques  tuiles  passées  à  la  presse  ;  que,  d'autre 
part,  les  catalogues  émanant  de  la  maison  ne  s'adressaient  qu'à 
des  gens  expérimentés,  qui  ne  pouvaient  ignorer  que  les  tuiles 
fabriquées  aux  Laumes  ou  à  Pouilly  et  expédiées  de  ces  localités 
provenaient  de  la  fabrication  locale  et  non  pas  des  usines  MuUer, 
situées  àivry,  et  que  la  mention  auxdits  catalogues  tuiles  à  dou' 


-  159  — 

ble  recouvrement^  -dites  tuiles  UuUer^  indiquait  surabondamment 
lear  proyenance  ; 

Considérant,  enfin,  qne  la  différence  de  prix  entre  les  marchan- 
dises  vendnes  par  Clémencet  et  celles  de  Huiler  était  à  elle  senle 
suffisante  poor  éclairer  les  acheteurs  et  pour  démontrer  qu'il 
oe  cherchait  pas  à  créer  une  confusion  dans  le  but  d'assurer  plus 
facilement  Técouiement  de  ses  produits  à  un  prix  supérieur  à  celai 
de  sa  région  ; 

Considérant  quMl  convient  également  de  remarquer  que  la  déno- 
mination de  tuiles  dites  ifuiZ^  était  fréquemment  employée,  depuis 
plusieurs  années,  dans  le  langage  du  bâtiment  et  des  prospectus 
de  tuilerie,  pour  désigner  la  tuile  à  double  recouvrement,  sans 
que  Huiler,  qui  ne  pouvait  Tignorer,  ait  formulé  aucune  protes- 
tation ;  et  que  cet  usage,  s'il  n'est  pas  de  nature  à  faire  considé* 
rer  le  nom  de  Muller  comme  tombé  dans  le  domaine  public,  pou- 
vait, tout  au  moins,  faire  illusion  à  Clémencet  en  lui  permettant, 
jusqu'à  un  certain  point,  de  se  croire  autorisé  tacitement  à  se 
servir  de  ce  nom  pour  désigner  un  modèle  de  tuile  semblable, 
et  suffirait  au  besoin  à  établir  sa  bonne  foi  ; 

Considérant  que  le  demandeur  ne  justifie  d'aucune  démarche 
faite  par  Clémencet,  soit  pour  déprécier  les  tuiles  de  son  concur- 
rent, soit  pour  faire  naître  une  confusion  et  persuader  à  ses 
acheteurs  que  les  produits  qu*il  leur  livrait  émanaient  de  la  mai- 
son Muller,  et  pour  obtenir  d'eux  un  prix  supérieur  au  prix  de 
la  région  ;  qu'il  n'allègue  pas  non  plus  que  lesdits  acheteurs  aient 
revendu  ou  cherché  à  revendre  ces  produits  en  faisant  croire  au 
public  qu'ils  avaient  été  fabriqués  à  Ivry  ;  qu'on  ne  saurait  tirer 
aucun  argument  de  la  mention  dans  une  facture  de  Clémencet 
de  la  simple  dénomination  tuile  Muller,  alors  que  cette  facture 
était  adressée  à  un  commerçant  de  profession  et  comprenait 
toute  une  série  d'articles  de  céramique,  qui  étaient  indiqués 
comme  provenant  de  son  usine  des  Laumes,  et  que  cette  mention 
s'explique  suffisamment  par  l'abréviation  usuelle  du  commerce  ; 
qu'il  ne  s'agit,  d'ailleurs,  que  d'un  fait  isolé  et  incapable  d'éta- 
blir une  confusion  même  involontaire,  puisqu'il  se  référait  à  un 
marché  consommé,  et  qu'en  outre  ladite  facture,  qui  avait  un 
caractère  personnel  et  confidentiel,  ne  faisait  que  reproduire  les 
termes  employés  par  l'acheteur  dans  sa  lettre  de  commande  ; 

Considérant  que,  dans  ces  conditions  et  en  présence  de  la  bonne 
foi  indiscutable  de  Clémencet,  il  ne  saurait  être  question  de  con- 
currence déloyale  par  usurpation  de  nom  ; 

Considérant  qu'il  échet,  en  conséquence,  de  rechercher  si,  en 
employant  dans  ses  catalogues  la  |dénomination  de  tuiles  dites 
Jftciifr,  il  a  commis  une  faute  ou  une  imprudence,  et  a  causé  de 
cette  façon  au  demandeur  un  préjudice  qu'il  serait  tenu  de  ré- 


—  160  — 

«r,  conformément  aux  dispositions  de  l'artiole  1388  dn  Cod« 
il  ;  considérant  qae,  s'il  a  usé  sans  droit  du  nom  de  Huiler 
ir  désigner  nn  produit  fabriqué  par  lui,  il  a  pris  soin  d'accom- 
;ner  l'usage  de  ce  nom  de  précautions  qui  l'empêchaient  d'fitre 
instrument  de  concurrence  déloyale  et  rendaient  impossible 
ite  erreur  sur  sa  prOTenance  ;  et  qa'en  admettant  qu'il  ail,  ce 
lanE,  commis  une  imprudence,  elle  serait  singnliârement  atté- 
Se  par  les  agissements  semblables  de  plusieurs  maisons  simi- 
res  et  le  silence  prolongé  de  Huiler,  en  rertu  desquels  il  pou- 
t  se  croire  autorisé  dans  une  certaine  mesure  à  employer  la 
lomination  de  (uitedile  Jfut^  pour  désigner  un  produit  de 
me  modèle  ; 

ïonsidéraut  que,  daun  tous  les  cas,  il  n'apparatt  pas  qa'ancan 
judice  en  ait  été  la  conséquence  pour  le  demandeur,  puisqu'il 
rapporte  pas  la  preuve  qu'une  confusion  quelconque  soit  résul- 
de  l'emploi  de  cette  dénomination  et  qu'il  ait  été  ainsi  frus- 
d'ancune  fourniture  ou  commande  ;  qu'au  contraire,  et  pour 
motifs  ci-dessus  déduits,  il  est  hors  de  doute  que  les  divers 
leteuTS,  auxquels  Clémencet  a  rendu  ses  produits,  savaient 
'linemmenl,  tant  en  raison  de  leor  situation  et  de  leur  expé- 
Qce  professionnelles,  qu'en  raison  du  prix  et  du  lieu  d'ezpé> 
ion  comme  aussi  de  la  désignation  dans  les  catalogues  de  la 
rchandine  fabriquée,  qu'elle  provenait  des  usines  Clémeocet  et 
i  pas  de  celles  de  Huiler  ; 

ionsidérant  que,  dès  lors,  la  demande  de  dommages-Intérêts 
ce  dernier  doit  être  rejetée  comme  mal  fondée  ; 
tensidérant  que  l'offre  faite  par  Clémencet  et  dont  il  demande 
e,  ainsi  que  Holler,  de  ne  plus  se  servir  à  l'avenir  du  nom  de 
lier  sous  une  forme  quelconque,  notamment  dans  les  cataio' 
is,  priz-courants  ou  factnres,  est  de  nature  à  donner  pleine 
isfaction  an  demandeur,  sans  qu'il  soit  nécessaire  d'en  assurer 
lécution  par  une  astreinte  qui  devient  sans  objet  ; 
lonsidérant  qu'en  l'absence  de  tout  préjudice  causé  à  Huiler, 
l'écbet  pas  davantage  d'ordonner  la  publication  du  présent  Ju- 
aent  à  titre  de  supplément  de  dommages-intérêts,  ainsi  qui! 
demandé  ; 

lonsidérant,  toutefois,  que  l'abas  du  nom  de  Huiler  cooslaté 
«connu  à  la  charge  de  Clémencet,  a  nécessité  les  frais  de  l'in- 
nce  actuelle  et  que  t'olTre  par  lui  faite  de  ne  plus  l'employer 
avenir  dans  ses  prospectus  et  catalogues  est  tardive  ;  qne,  d* 
:bef,  il  7  a  lien  de  le  condamner  aux  dépens. 
'u  cas  VOTIFS,  etc. 

f  Bspkct. 
)'sutre  part  UuUer  avait  poursaivi  dtrant  le  Tribunalde 


] 


—  161  — 

commerce  de  Chalon-sur-Saône  la  Grande  Tuilerie  de 
Bourgogne  pour  avoir  désigné  un  modèle  dans  ses  pros- 
pectus et  prix-courants  «tuiles  à  côtes,  dites  Muller». 
Voyant  dans  ce  fait  une  concurrence  déloyale,  il  avait  : 
1*  revendiqué  l'usage  exclusif  des  mots  c  tuiles  Muller  »  ; 
f  réclamé  des  dommages-intérêts  pour  le  préjudice  passe, 
el  une  astreinte  de  1,000  francs  par  chaque  contravention 
nouvelle  constatée  ;  3*  demandé  la  publication  aux  frais  de 
la  défenderesse,  du  jugement  à  intervenir,  avec  (i^)  con- 
damnation aux  dépens. 

Sur  ces  conclusions,  le  Tribunal  de  commerce  de  Cha- 
loû-sup-Saône  rendait,  le  20  avril  1898,  le  jugement  sui- 
Taot: 

Li  TuBUiffÀL,  Sur  le  premier  point  : 

Attendu  qu'il  est  de  jurisprudence  constante  que  le  nom  d*un 
commerçant  constitue  pour  lui  une  propriété  imprescriptible  ; 
que  le  nom  de  Tinventeur  reste  sa  propriété  exclusive,  alors 
même  que  i*objet  breveté  est  tombé  dans  le  domaine  public  ; 

Attendu  que  ces  principes  ne  souffriraient  d'exception  que 
dans  le  cas  où  le  nom  du  propriétaire  serait  devenu,  par  son  con- 
sentement exprès  ou  tacite,  la  désignation  usuelle  du  produit  ; 
que  ce  produit  ne  saurait  facilement  être  désigné  par  un  autre 
nom  que  celui  de  son  inventeur,  nom  qui,  par  son  long  et  cons- 
tant nsage,  serait  devenu  substantif  commun,  de  nom  propre 
qu'il  était  primitivement  ; 

Attendu  que,  si  le  modèle  de  tuile  adopté  par  Muller  et  qui 
porte  son  nom  est  tombé  dans  le  domaine  public,  on  ne  saurait 
cependant  admettre  que  ce  nom  de  Muller  soit  indispensable 
pour  désigner  ce  modèle,  qui  est  connu  sous  d'autres  noms,  tels 
qve  toiles  à  cdtes,  tuiles  à  recouvrement,etc.  et  que  d'autres  tuile- 
ries fabriquant  un  modèle  identique  à  celui  de  Muller  n'ont  pas  eu 
l>esoiQ  de  se  servir  de  son  nom  pour  le  désigner  et  le  faire  figu- 
rer sar  leurs  catalogues  et  prix-courants  ; 

Attendu,  en  outre,  que  ce  nom  et  cette  désignation  n'ont  jamais 
^ré  sur  les  produits  fabriqués  par  la  Société  «  la  Tuilene  »  à 
Montchanin,  qui  portaient  la  marque  de  fabrique  la  Tuilerie 
àt  Bourgogne,  Montchanin,  mais  seulement  sur  ses  prospectus 
et  t&rifÎB  imprimés  ; 

Mais  attendu  que  la  renonciation  à  la  propriété  ne  se  présume 
P^  ;  p'on  ne  saurait  faire  résulter  cette  renonciation  de  quel- 
ques actes  isolés,  et  môme  répétés,  non  réprimés  par  le  véri- 
table propriétaire  ;  qu'il  est  évident  que  c^est  par  abus  que  la  dé- 
fenderesse s'est  permis  de  se  servir  du  nom  de  Muller.  en  qua- 

44 


—  162  — 

lifiant  ses  prodaits  de  tuiU  à  côte  dite  MulUr  sur  ses  papiers  de 
commerce  ;  mais  qu'on  ne  saurait  tirer  de  ce  fait  seul  la  con- 
clusion que  la  Tuilerie  de  Montckanin  ait  cherché  à  créer  une 
confusion  entre  ses  produits  et  ceux  de  MuUer  ;  qu'il  y  a  lien  de 
tenir  compte  que  cette  appellation  de  tuile  Muller  ou  dite  Muller 
était  déjà  en  usage  sur  les  tarifs  de  dififérentes  tuileries  depuis 
bien  des  années^  sans  que  Muller  ou  son  prédécesseur,  qui  ne 
pouvaient  l*ignorer,  y  aient  fait  la  moindre  objection  ;  que  dans 
ces  conditions,  le  défendeur  pouvait  presque  se  croire  autorisé, 
tout  au  moins  tacitement,  par  Muller  à  se  servir  de  son  nom  pour 
désigner  le  modèle  inventé  par  Muller,  mais  fabriqué  par  le  dé- 
fendeur ;  que,  loin  de  nuire  à  Muller,  cette  notoriété  donnée  k 
son  nom  ne  pourrait  qu'être  flatteuse  pour  son  amour-propre 
d'inventeur  et  de  fabricant  et  créer  à  lui,  à  ses  produits  et  à  ses 
modèles,  une  renommée  de  bon  aloi  qu'ils  avaient  méritée  d'ail- 
leurs et  qui  ne  pouvait  que  lui  être  profitable  ;  que  les  tuiliers 
de  Bourgogne,  loin  de  chercher  à  faire  passer  leurs  prodaits  sous 
une  étiquette  mensongère,  se  réclament  tous  énergiquement  du 
nom  de  Bourgogne,  dont  les  produits  céramiques  sont  avantageu- 
sement connus,  nom  qui,  presque  toujours,  sous  une  forme 
quelconque,  figure  dans  leur  marque  de  fabrique  et  que  le  dé- 
fendeur, étant  fabricant  lui-même,  indiquait  suffisamment  ex- 
plicitement qu*ii  vendait  ses  produits  et  non  ceux  de  Muller  ; 

Attendu  que  le  demandeur  n'apporte  pas  la  preuve  d'agisse- 
ments de  mauvaise  foi  à  la  charge  de  la  Société  la  Tuilerie  de 
Montckanin^  tels  que  des  démarches  déloyales  auprès  du  public 
spécial  auquel  ces  produits  s'adressent,  tendant  à  créer  une 
confusion  dans  l'esprit  des  acheteurs  ou  cherchant  à  leur  faire 
croire  qu'on  leur  livrait  des  tuiles  de  la  fabrication  de  Muller  ; 

Attendu  qu'eu  l'absence  de  toute  preuve  d'intention  fraudu- 
leuse, le  grief  tiré  de  la  concurrence  déloyale  n'est  pas  fondé  et 
doit  être  écarté  ;  que  le  tribunal  ne  saurait  retenir  que  le  fait 
d'une  imprudence  ou  d'une  faute  de  la  part  de  la  société  défen- 
deresse pour  s'être  servi  en  quelque  manière  que  ce  soit  du 
nom  de  Muller  sans  son  consentement,  et  qu'il  incombe  au  tri- 
bunal de  rechercher  si  cette  faute  a  causé  au  demandeur  un 
préjudice  dont  il  lui  est  dû  réparation  ; 

Attendu  que  le  demandeur  ne  fait  pas  la  preuve  du  préjudice 
matériel,  et  que  s'il  apparaît  bien  que  la  Tuilerie  de  Montckanin 
a  vendu  une  certaine  quantité  de  tuiles  du  modèle.  Muller,  le 
demandeur  n'établit  pas  que  ce  fût  à  son  détriment  et  préjudice  ; 
qu'il  n'y  a  donc  pas  lieu  d'admettre  les  conclusions  du  deman- 
deur tendant  à  obtenir  des  dommages-intérêts  pour  le  préjudice 
causé  ;  et  sur  la  prétention  de  Muller  de  faire  ordonner  au  dé- 
fendeur d'avoir  à  s'abstenir  de  se  servir  à  l'avenir  de  son  nom 


—  163  — 

sur  tons  ses  papiers  de  commerce,  il  conyient  de  remarquer  que 
ta  TuUerie  de  Montchanin,  par  ses  conclusions  et  en  cours  d'ins- 
tance, a  donné  sur  ce  point  satisfaction  à  Muller  ;  que  dès  lors, 
sous  le  mérite  de  la  réalisation  et  du  maintien  des  déclarations 
faites  quant  à  ce  à  la  barre,  il  convient  de  repousser  quant  à 
présent  ledit  chef  de  la  demande  Muller  ; 
Sur  le  deuxième  point  : 

Attendu  que  le  préjudice  futur  ne  peut  se  présumer  et  que  rien 
ne  permet  de  supposer  que  la  Tuilerie  de  Montchanin  ne  remplira 
pas  les  engagements  qu^elle  a  librement  consentis,  à  la  barre  et 
dans  ses  conclusions,  de  ne  plus  se  servir  du  nom  de  MuUer  ;  il 
n'y  a  donc  pas  lieu  à  statuer  sur  Tastreinte  demandée  par  Muller; 
Sur  le  troisième  point  : 

Attendu  que  la  publicité  demandée  par  Muller,  si  elle  était 
ordonnée  par  le  tribunal,  serait  une  peine  et  un  supplément  de 
dommages-intérêts  qui  s'appliqueraient  avec  juste  raison  si  le 
tribunal  avait  admis  la  concurrence  déloyale  ;  mais,  ce  chef 
étant  écarté,  il  paraît  cependant  équitable  et  utile  de  permettre 
à  Muller  de  faire  savoir  aux  personnes  intéressées  que  les  tuiles 
fabriquées  et  annoncées  jusqu'alors  par  la  Tuilerie  de  Montcha- 
nin sur  ses  tarifs,  comme  tuiles  dites  Muller,  n'avaient  que  le 
modèle  de  commun  avec  celles  qui  sortaient  de  son  usine,  et 
que  la  publicité  raisonnable  du  présent  jugement,  autorisée  aux 
frais  de  Muller,  parait  suffisante  pour  lui  donner  satisfaction  sur 
ce  pomt  ; 
Sur  le  quatrième  point  : 

Attendu  que,  si  le  préjudice  matériel  n*est  pas  prouvé,  il  n'en 
reste  pas  moins  à  la  charge  de  la  Tuilerie  de  Montchanin  un  abus 
du  nom  de  Muller  qui  a  occasionné  à  celui-ci  des  frais  pour  obte- 
nir judiciairement  la  satisfaction  par  lui  recherchée,  bien  que 
le  défendeur  déclare  qu'il  eût  accordé  cette  satisfaction  avant 
llnstance  si  elle  lui  eût  été  demandée,  et  qu'il  est  juste  que  les 
dépens  soient  supportés  par  la  Tuilerie  de  Montchanin,  dont  les 
agissements  tout  au  moins  imprudents  ont  été  la  cause  initiale 
de  la  présente  instance  ; 

Par  gks  hotifs,  Donne  acte  à  la  Grande  Tuilerie  de  Bourgogne 
à  Montchanin  de  sa  déclaration  de  renoncer  à  faire  usage  et  à 
faire  disparaître  de  ses  catalogues  et  publications  le  nom  de  Mul- 
ler, et  ce,  sous  le  mérite  de  la  réalisation  et  du  maintien  des 
mesures  qu'elles  comportent,  déclare  Muller  mal  fondé  et  non 
recevable  en  sa  demande  en  iO.OOO  francs  de  dommages-inté- 
rêts ;  le  déclare  mal  fondé  en  sa  demande  en  une  astreinte  de 
1.000  francs  pour  chaque  contravention  constatée  ;  autorise  Muller 
à  publier  le  présent  jugement  dans  deux  journaux  à  son  choix, 
et  une  fois  dans  chacun  d'eux,  le  tout  à  ses  frais  ;  et,  vu  les  cir- 


-  164  — 

constances  de  la  cause,  condamne  la  Tuilerie  de  Bourgogne  par 
tontes  les  voies  de  droit  en  tous  les  dépens. 

Appel  de  ce  jugement  a  été  interjeté  par  MuUer.  De  son 
côté,  la  Grande-Tuilerie  de  Bourgogne  a  formé  appel  in- 
cident au  sujet  de  la  condamnation  prononcée  contre  elle 
et  relative  à  la  publication  du  jugement. 

Le  9  février  1899,  le  même  jour  que  Tarrêt  qui  précède, 
la  deuxième  Chambre  de  la  Cour  de  Dijon  a  rendu  rarrèi 
suivant  : 

Là  Cour,  Attendu  que  Louis  Muller  reproche  à  la  Grande- 
Tuilerie  de  Bourgogne  d*avoir  désigné,  dans  ses  catalogues,  par 
les  mots  :  tuiles  à  côte,  dites  Muller,  certains  produits  qu'elle 
fabrique  suiv,  ntun  modèle  inventé  par  son  père  et  tombé  actuel- 
lement dans  le  domaine  public  ; 

Qu'en  conséquence  il  Fa  assignée  devant  le  tribunal  de  com- 
merce de  Chalon-sur-Saône,  d'une  part,  pour  obtenir  des  dom- 
mages-intérêts à  raison  du  préjudice  que  lui  avaient  occasionné, 
dans  le  passé,  des  agissements  auxquels  il  attribue  un  but  de 
concurrence  déloyale  ;  d'autre  part,  pour  faire  interdire  à.  Tiu- 
timée  de  se  servir,  à  l'avenir,  sous  quelque  forme  que  ce  soit, du 
nom  de  Muller,  dont  il  a  conservé  la  propriété  absolue,  et  ce, 
avec  la  garantie  d'une  astreinte  à  prononcer  d'avance  pour  cha- 
que nouvelle  contravention  et  la  publication  dans  les  journaux 
de  la  décision  à  intervenir  ; 

Mais,  attendu  que,  sur  le  premier  point,  la  prétention' de  l'ap- 
pelant n'est  en  rien  justifiée  ; 

Qu'en  effet,  la  Grande  Tuilerie  de  Bourgogne  ayant,  comme 
toutes  les  usines  du  même  genre,  le  droit  absolu  de  fabriqiier  et 
de  vendre  des  tuiles  conformes  an  modèle  pour  lequel  Muller 
père  avait  pris  autrefois  un  brevet,  actuellement  périmé,  il  n'y 
aurait  eu,  de  sa  part,  concurrence  déloyale  que  si,  en  employant 
dans  ses  catalogues  les  mots  de  tuiles  à  côte,  dites  Mullery  elle 
avait  eu  pour  but  de  faire  considérer  comme  fabriqués  à  L'usine 
d'ivry,  que  dirige  Muller,  ses  propres  produits. 

Qu'une  pareille  supposition  est  contredite  par  tous  les  éléments 
de  la  cause,  les  personnes  auxquelles  l'intimée  s'adresse.sachant 
pertinemment  qu'elle  est  fabricante  et  non  entrepositaire,ses  ca- 
talogues ne  contenant  autre  chose  que  Ténumération  des  pro- 
duits de  son  industrie  personnelle  et  enfin  les  tuiles  qu'elle  vend 
portant  ostensiblement  la  marque  de  la  maison,  ce  qui  rend  im- 
possible une  erreur  sur  leur  provenance  ; 

Attendu  que,  dans  ces  conditions,  la  confusion  alléguée  par 
Muller  ne  saurait  être  considérée  comme  ayant  été  cherchée  ou 


—  165  — 

produite  par  te  fait  dont  il  se  plaint  ;  qae,  dès  lors,  sa  demande 
en  dommages-intérêts  doit  être  rejetée  ; 

Attendu,  snr  le  second  point,  que  Muller  est  incontestablement 
dans  son  droit  en  revendiquant  Tusage  exclusif  du  nom  qui  est 
resté  sa  propriété,  alors  que  ce  nom  ne  saurait  être  considéré 
comme  la  seule  dénomination  possible  d'un  produit  spécial,  et 
que  l'emploi  qui  en  a  été  fait  pour  désigner  les  tuiles  à  recou- 
Trements  n*a  été  ni  assez  lon^,  ni  assez  général  pour  impliquer 
son  consentement  tacite  de  Tayant  droit  ; 

Mais  attendu  que  la  Grande  Tuilerie  de  Bourgogne  s'est  enga- 
gée, par  conclusions  formelles  prises  en  première  instance,  à  re- 
noncer à  tout  usage  de  ce  nom  et  à  le  faire  disparaître  de  ses 
catalogues  et  publications,  et  que  le  tribunal  lui  a  donné  acte  de 
cette  déclaration  ; 

Attendu  qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  sanctionner  Texécution  de  cette 
promesse  par  une  condamnation  éventuelle  à  payer  une  somme 
déterminée  au  cas  où  il  y  serait  contrevenu  ;  qu'en  effet,  une 
astreinte  n'est  justifiée  qu'après  constatation  d'un  fait  qui  im- 
plique la  mauvaise  foi  de  son  auteur,  et  que,  dans  l'espèce  ac- 
tuelle, on  ne  peut  considérer,  même  comme  une  faute  repro- 
chable  à  l'intimée,  l'emploi  du  nom  de  Muller  pour  désigner  une 
forme  spéciale  de  tuiles,  alors  que  cet  emploi,  effectué  antérieu- 
rement par  de  nombreuses  maisons  similaires  au  vu  et  sans  pro- 
testation des  intéressés,  pouvait  légitimement  l'amener  à  croire 
au  consentement  de  ces  derniers  ; 

Attendu  qu'en  l'absence  d'une  faute  commise  par  la  Grailde  Tui- 
lerie, d'un  préjudice  ayant  été  ou  ne  pouvant  être  subi  par 
Haller,  rien  ne  justifie  l'autorisation  donnée  à  ce  dernier  parles 
premiers  juges  de  publier  leur  décision  à  ses  frais  dans  deux  jour- 
naux ;  qu'il  lui  appartient  seulement,  s'il  juge  utile  de  faire  con- 
aaitre  sa  protestation  contre  l'usage  de  son  nom  et  la  consécra- 
tion qu'il  a  obtenue  de  son  droit  à  cet  égard,  de  se  conformer 
aax  règles  du  droit  commun,  en  évitant  toute  indication  de  na- 
ture à  nuire  à,  des  tiers  ; 

Que  l'appel  incident  qu'a  interjeté  sur  ce  point  la  Grande  Tui- 
lerie de  Bourgogne  doit  dont  être  accueilli  ; 

Sur  les  dépens  : 

Attendu  que  si  l'intimée  a  été  condamnée  à  bon  droit  à  sup- 
porter ceux  qui  ont  été  exposés  en  première  instance,  comme 
conséquence  de  son  retard  à  prendre  l'engagement  ci-dessus 
rappelé,  les  frais  auxquels  a  donné  lieu  l'appel  reconnu  mal 
fondé  de  Muller  doivent  être  mis  à  la  charge  de  ce  dernier  ; 

Par  ces  motifs.  Sans  s'arrêter  à  l'appel  interjeté  par  Muller  du 
jogement  qu'a  rendu  le  tribunal  de  commerce  de  Chalon-sur-Saô- 
ne, le  25  avril  1898,  et  faisant  droit,  au  contraire,  à  l'appel  inci- 


1 


—  166  — 

dent  de  la  Grande  Tuilerie  de  Boargogne»  dit  qu'il  n'y  a  pas  lieu 
d'autoriser  MuUer  à  publier,  même  à  ses  frais,  le  texte  intégral 
du  présent  arrêt,  infirme,  quant  à  ce,  le  jugement  entrepris,  le 
confirme  pour  le  surplus,  condamne  l'appelant  aux  dépens. 

« 

MM.  Bernard,  président.  — Abord,  avocat  général.  — 
M«*  AujAT  (du  barreau  de  Paris)  et  Nodrissat,  avocats. 


Art.  4230. 

rVom  comniereial.  —  IVom  cle  la  femme.  — 
CJoneurrenee  illicite. 

Si  la  pratique  du  commerce  autorise  dans  certains  cas 
un  commerçant  à  joindre  le  nom  de  sa  femme  au  sien  cet 
usage  ne  constitue  point  un  droite  mais  une  simple  talé- 
rancct  et  les  tribunaux  doivent  prévenir  ou  faire  cesser  les 
abus  qui  peuvent  en  résulter  (1). 

Si  cette  addition  de  nom  doit  être  notamment  la  cause 
d'une  confusion  préjudiciable  pour  un  autre  commerçant^ 
elle  constitue  un  acte  de  concurrence  illicite  qui  ne  peut  être 
toléré  (2). 

(C.  de  Lyon,  30  mai  1899  .—  Bargillat  c.  L.  Gauthier.) 

La  cour  après  en  avoir  délibéré  : 

Considérant  que  les  deux  frères  Bargillat  et  Laurent  Gauthier 
ont  été  associés  pendant  de  nombreuses  années  sons  la  raison 
sociale  «  Ch.  Méhier  et  Cie  »  pour  Texploitation  d'une  maison 
de  commerce  de  passementerie  à  laquelle  Charles  Méhier,  décédé 
en  1875,  avait  attaché  son  nom  par  la  prospérité,  et  surtout  par 
le  renom  d'honorabilité  qu'il  lui  avait  donné  ; 

Qu'en  1897,  les  trois  associés  ont  décidé  d'un  commun  accord 
de  dissoudre  leur  société  et  de  liciter  entre  eux  le  fonds  de  com- 
merce ;  qu'il  a  été  alors  expressément  convenu  que  celui  des 
trois  qui  deviendrait  adjudicataire,  aurait  seul  le  droit  de  s'inti- 
tuler <c  successeur  de  Charles  Méhier  et  Cie  »,  les  deux  autres 
reprenant  leur  liberté  d'action  pour  exercer  le  même  genre  de 
commerce  et  chacun  d'eux  ayant  droit  de  se  dire  «  ancien  asso- 
cié de  la  maison  Charles  Méhier  et  Cie  »  ; 

(1-2)  Cf.  Paris,  21  décembre  1855,  Ann.,  55.221  ;  Paris,  7  décembre 
1899,  Ann„  99.341  elles  arrêts  cités  par  Pouillet,  Marq.  fab.,  n*  500. 
Ajoater  Paris,  l'i*  mars  i900,Gharles  Protte  c.  Gigault  et  Cie,  Gaz.  PaL^ 
numéro  du  29  mai  1900. 


—  167  — 

Qa'ainsi  se  trouvait  limité  et  défini  pour  ch&can  des  trois  asso- 
ciés le  droit  de  se  servir  dans  son  commerce  da  nom  de  Charles 
Méhxer  après  la  dissolution  de  la  société  ; 

Considérant  qa'Usmar  Bargiilat  restant  adjudicataire,  devint 
par  conséquent  le  seul  successeur  de  Charles  Méhier  et  Cie,  et 
qull  est  incontestable  qu'en  achetant  le  fonds  de  commerce,  il 
a  surtout  payé  la  valeur  commerciale  résultant  de  la  notoriété 
da  nom  de  Méhier,  qui  devait  lui  conserver  la  clientèle  ; 

Considérant  que  Laurent  Gauthier  a  organisé,  peu  de  temps 
après,  une  maison  ayant  pour  objet  le  même  commerce  de  pas- 
sementerie sous  la  raison  sociale  Gauthier-Méhier,  ancien  associé 
de  Méhier  et  Cie  ;  que  Usmar  Bargiilat  a  vu  dans  Tu  sage  du  nom 
de  Méhier  ainsi  joint  à  celui  de  Gauthier,  une  atteinte  aux  droits 
qu^il  tenait  des  conventions  dont  il  a  été  ci-dessus  parlé  et  un 
acte  de  concurrence  déloyale  ; 

Que  de  son  côté  Gauthier  prétend  au  droit  d'ajouter  à  son  nom 
patronymique  celui  de  Méhier  parce  qu'il  a  épousé  une  fille  de 
Charles  Méhier,  laquelle  est  décédée  depuis  fort  longtemps  ; 

Considérant  que  si  la  pratique  du  commerce  autorise,  dans 
certains  cas,  un  commerçant  à  joindre  le  nom  de  sa  femme  au 
âeu,  cet  usage  ne  constitue  point  un  droit,  mais  une  simple  to- 
lérance et  les  tribunaux  doivent  prévenir  ou  faire  cesser  les  abus 
qui  peuvent  en  résulter  ; 

Que  notamment  si  cette  addition  de  nom  doit  être  la  cause 
d'une  confusion  préjudiciable  pour  un  autre  commerçant^  elle 
constitue  un  acte  de  concurrence  illicite  qui  ne  peut  être  toléré  ; 

Et  considérant  en  fait,  qu'il  est  bien  certain  que  c'est  unique- 
ment pour  attirer  à  sa  nouvelle  maison  la  clientèle  attachée  au 
nom  de  Méhier,  que  Gauthier  a,  le  jour  même  où  il  a  organisé 
cette  maison,  pour  la  première  fois  depuis  qu'il  avait  épousé  une 
fille  de  Gh.  Méhier,  joint  le  nom  de  sa  femme  au  sien  ; 

Que  cette  clientèle  avait  cependant  été  achetée  par  Usmar 
Bargiilat  avec  le  titre  de  «  successeur  de  Charles  Méhier  »  et  que 
Gauthier  ne  devait,  aux  termes  des  conventions,  prendre  que  le 
titre  «  d'ancien  associé  de  la  maison  Ch.  Méhier  »  ;  qu'il  s'était 
donc  interdit  à  lui-même  de  prendre,  en  dehors  de  la  qualité 
d'ancien  associé,  le  nom  de  Méhier,  pour  en  bénéficier  au  point 
de  vue  commercial  ;  et  que  sa  qualité  de  gendre  de  Méhier  ne 
pouvait  le  dispenser  d'exécuter  ces  conventions  ; 

Considérant  au  surplus  que  des  confusions  se  sont  produites 
entre  ces  deux  maisons  ;  qu'en  vain  les  premiers  juges  attribuent 
ces  confusions  au  droit  qu'a  Gauthier  de  se  dire  ancien  associé  de 
la  maison  Ch.  Méhier  et  affirment  que  la  suppression  de  Mé- 
hier à  côté  de  celui  de  Gauthier  n'empêcherait  pas  ces  confu- 
sions ; 


—  168  — 

Qu'en  admettant  même  que  la  confusion  ait  plusieurs  causes, 
il  ne  s'en  suivrait  pas  que  le  juge  ait  le  droit  de  se  refuser  à  sup- 
primer Tune  de  ces  causes  parce  qu'il  ne  peut  supprimer  l'au- 
tre ; 

Qu'il  est  indiscutable  d'ailleurs  que  l'adjonction,  par  [un  trait 
d'union  du  nom  de  Méhier  à  celui  de  Gauthier  a  par  elle-même 
nne  signification  de  nature  à  impressionner  la  clientèle,  à  la- 
quelle cette  adjonction  sera  nécessairement  expliquée,  et  qu'elle 
pensera  que  celui  qui  est  en  même  temps  le  gendre  de  Charles 
Méhier  et  l'ancien  associé  de  la  maison  doit  être  le  véritable 
successeur  de  Charles  Méhier,  malgré  toutes  les  licitations  et 
toutes  les  circulaires  de  l'adjudicataire  ; 

Que  c'est  donc  bien  là,  non  pas  seulement  l'une  des  causes, 
mais  la  cause  primordiale  de  la  confusion  qui  s'établirait  de 
plus  en  plus  avec  le  temps  dans  l'esprit  de  la  clientèle,  et  qa*il 
n'est  pas  douteux  que  le  fait  dont  se  plaint  Bargillat  constitue  un 
acte  de  concurrence  illicite,  en  même  temps  qull  est  contraire 
aux  conventions  des  parties  ; 

Que  la  cour  doit  par  conséquent  prendre  des  mesures  pour  y 
mettre  un  terme  ; 

Considérant  que  des  éléments  qui  lui  sont  fournis,  il  résulte 
que  l'allocation  des  dépens  à  titre  de  dommages-intérêts,  cons- 
tituera une  réparation  suftisante  du  préjudice  causé  jusqu'ici  à 
Bargillat; 

Par  ces  motifs,  Faisant  droit  à  l'appel  de  Usmar  Bargillat,  ré- 
forme le  jugement  rendu  entre  lui  et  Laurent  Gauthier  parle  tri- 
bunal de  commerce  de  Lyon  à  la  date  du  2  mai  1898  ; 

Statuant  à  nouveau  et  faisant  ce  que  les  premiers  juges  au- 
raient dû  faire  ; 

Fait  défenses  à  Laurent  Gauthier  de  continuer  à  user  de  la 
raison  commerciale  L.  Gauthier-Mébier  faite  de  son  nom  per- 
sonnel et  de  celui  de  feue  sa  femme  ;  dit  que  Laurent  Gauthier 
devra  faire  disparaître  l'adjonction  du  nom  de  Méhier  au  sien 
propre  par  un  trait  d'union  sur  tous  ses  titres,  papiers  et  docu- 
ments commerciaux  dans  les  deux  mois  de  la  signification  du  pré- 
sent arrêt  à  peine  de  10  francs  par  chaque  jour  de  retard  ; 

Alloue  à  Usmar  Bargillat  pour  tous  dommages-intérêts  les 
dépens  de  première  instance  et  d'appel  et  rejette  toutes  ses 
autres  demandes  et  conclusions  ;  ordonne  la  restitution  de  l'a- 
mende consignée. 

!'•  Chambre.  —  Présidence  de  M.  Maillard,  premier  pré- 
sident. —  M*"  Jacquieu  et  Pouillet  (ce  dernier  du  barreau 
de  Paris),  avocats. 


—  169  — 
Art.  4231. 

Marque*  «le  Aibrlque.  —Etiquette.  —  dnblème 
tional  «aiflM.  —  IVom  eominerctal.  —  IVom  cle  la 


Vemblème  national  suisse  peut  être  employé  par  tout 
citoyen  suisse  sur  des  étiquettes,  par  exemple  pour  le  com- 
merce^ des  absinthes  (1). 

On  ne  saurait  interdire  à  un  négociant  r adjonction  du 
nom  de  sa  femme^  même  si  cela  est  préjudiciable  à  un  con^ 
current^  lorsque  le  négociant  a  employé  ce  nom  dans  là 
commerce  non  avec  une  intention  frauduleuse,  mais  parce 
qu'il  avait  déjà  antérieurement,  même  dans  les  actes  de  la 
vie  dvilCf  pris  possession  de  ce  nom  en  adjonction  au  sien, 
conformément  à  Vusage  (2). 

(G.  de  Besftnçon,  13  décembre  1888.  —  Veil  Picard  et  Cie 

c.  Legler  Pernod.) 

La  Cour  d'appel  de  Besançon  (ch.  corr.)  a,  le  12  décem- 
bre 1888,  confirmé  par  adoption  de  motifs  un  jugement 
du  tribunal  de  Pontarlier,  en  date  du  10  août  1888,  ainsi 
conçu  : 

Lb  Tribunal,  Attendu  que  la  poursuite  dont  il  s'agit  a  pour 
bot  de  faire  décider  :  1®  que  le  sieur  Legler  a  frauduleusement 
^mité  fa  marque  de  fabrique  des  sieurs  Veil  Picard  ;  2*  que  le 
même  sieur  Legler  devra  supprimer  de  ses  étiquettes  le  nom 
Pernod  accolé  à  son  nom  patronymique,  et  composer  en  dessins 
et  couleurs  ces  mêmes  étiquettes  de  telle  sorte  qu'à  Tavenir  elles 
ne  puissent  être  confondues  avec  celles  des  demandeurs  ;  3*  et 
que  le  défendeur  doit  être  condamné  aux  dommages-intérêts  que 
ses  agissements  délictueux  ont  causés  au  sieur  Veil  Picard  ; 

Attendu  qu'il  j  a  lieu  de  rechercher  si  la  prévention  relevée 
contre  le  sieur  Legler  est  justiûée  par  les  circonstances  et  les 
fiaits  de  la  cause. 

Sur  le  premier  chef: 

Attendu  que  Tétiquette  Pernod  Ûls  déposée  comme  marque  de 

(1)  Voir  en  sens  contraire  Pouillet,  Marq,  fabr.,  n»  S3. 

(S)  Jogé  encore  que  si  le  commerçant  veut  simplement,  par  Tadj onc- 
tion du  nom  de  sa  femme,  individualiser  sa  raison  sociale,  se  distinguer 
des  commerçants  homonymes  et  éviter  des  erreurs,  sa  conduite  et  ses 
agissements  n'ont  rien  que  de  très  naturel  et  de  légitime  (Trib.  com. 
St^Etienne,  8  mars  1898,  Pays  c.  Vincent-Pays,  La  Loi,  SO  avril). 

Pour  les  cas.  oà  l'adjonction  du  nom  de  la  femme  a  été  jugée  illicite 
comme  ayant  en  pour  bat  une  confusion,  voir  Tarticle  précédent. 


—  170  — 

fabrique  appartenant  actuellement  aox  poursuivants  ses  cédants, 
est  entourée  d'un  liseré  gris  clair  argenté,  coupé  aux  quatre  an- 
gles ;  qu'elle  est  ornementée  de  pampres  et  grappes  de  raisins 
peints  en  gris  clair  sur  an  fond  blanc  ;  qu'à  la  partie  supérieure, 
elle  présente  sur  la  même  ligne,  deux  cartouches  de  teintes  gris 
foncé  et  argenté,séparés  par  la  croix  fédérale  suisse,  surmontée  du 
chapeau  à  plumes  de  Guillaume-Tell  ;  que  dans  le  cartouche  de 
gauche  on  Ut  le  mot  Extrait  imprimé  en  lettres  bleues  et 
dans  celui  de  droite,  lui  faisant  face,  le  mot  d'absinthe  aussi 
imprimé  en  lettres  bleues  ;  qu'au  bas  de  chacun  de  ces  cartouches 
et  de  chaque  côté  de  la  croix  fédérale  .on  trouve  un  ovale  à  fond 
blanc,  formé  d'un  trait  bleu  ;  qu'au  milieu  de  l'ovale  de  gauche 
on  lit  le  mot  qualité  imprimé  en  petites  lettres  bleues  et  qu'au 
milieu  de  l'ovale  de  droite,  on  lit  le  mot  supérieure  également 
imprimé  en  petites  lettres  bleues  ;  qu'au  centre  de  l'étiquette 
existe  un  cartouche  bleu  sur  lequel  se  détachent  en  gros  carac- 
tères blancs  les  mots  Pernod  fils  ;  que  ce  cartouche  principal 
est  entouré  d'un  liseré  gris  clair  argenté,  coupé  aux  angles  et 
marqué  d'un  pointillé  blanc  ;  qu'à  la  partie  inférieure  figure  en- 
core un  double  cartouche  en  ligne  courbe,  de  fond  gris  clair  ar- 
genté, orné  à  chaque  bout  de  deux  banderolles  et  dont  les  deux 
parties  sont  reliées  par  un  empâtement  de  même  nuance  coupé 
de  légers  traits  noirs  ;  que  la  partie  de  droite  du  cartouche  porte 
en  lettres  bleues  les  mots,  à  la  suite  l'un  de  l'autre,  Couvet 
Suisse,  l'empâtement  du  milieu,  la  conjonction  et  aussi  à  Tencre 
bleue,  et  la  partie  de  droite  les  mots,  également  à  la  suite  l'un 
de  l'autre  et  en  caractères  bleus,  Pontarliery  Doubs  ;  que  tout  au 
bas  de  l'étiquette,  au-dessous  de  l'empâtement  séparant  les  deux 
parties  du  cartouche  dont  on  vient  de  parler,  le  mot  déposé 
est  imprimé  en  petits  caractères  sur  fond  blanc,  et  qu'enfin 
au  bas,  à  l'angle  de  droite,  on  découvre  à  l'encre  bleue  la  signa- 
ture Pernod  fils  ; 

Attendu,  quant  à  l'étiquette  Legler-Pemod,  collée  sur  les  bou- 
teilles saisies,  qu'elle  est  encadrée  dans  une  simple  raie  bleue 
d'angles  droits  très  légèrement  arrondis  ;  que  sur  fond  blanc,  on 
n'y  voit  comme  ensemble  que  des  raies  concentriques  coupées 
par  ces  traits  bleus  ornés  de  petits  médaillons  de  nuance  indé- 
cise ;  que  les  deux  cartouches  supérieurs  affectent  une  forme 
également  courbée  et  sont  de  teinte  bleu  foncé  ;  que  les  mots 
Extrait  d'Absinthe  sont  en  lettres  blanches  ;  que  les  plumes  du 
chapeau  surmontant  la  croix  fédérale  sont  tournées  à  gauche 
tandis  que,  à  l'étiquette  Pernod  fils,  elles  inclinent  à  droite  ;  que 
la  raison  sociale  Legler-Pemod  écrite  en  lettres  blanches,  existe 
au  centre  dans  un  cartouche  bleu  qui  n'est  entouré  d'aucun  dé- 
cor ;  que  ce  cartouche  principal  est  précédé,  à  droite,  du  mot  gua- 


—  171  — 


Hté  et  suivi  à  gauche  du  qualificatif  supérieur^  ces  deux  expres- 
sioDs  imprimées  en  lettres  bleues,  non  dans  des  ovales,  mais 
dans  des  espèces  de  rectangles,  à  fond  blanc  formés  à  traits 
biens  ;  que  les  indications  Couvet  Suisse  et  Pontarlier,  Doubs 
sont  en  lettres  blanches  sur  fond  bleu  dans  deux  petits  cartouches 
ocenpanty  Tun  à  gauche  Tautre  à  droite,  la  partie  inférieure  de 
Tétiquette  ;  que  les  désignations  d*Etat  Suisse  etDoubs  imprimées 
sur  fond  blanc  en  lettres  bleues,  sont  placées  non  à  la  suite,  mais 
au-dessous  de  chaque  nom  de  ville  auxquelles  elles  se  réfèrent  ; 
que  dans  le  bas  de  l'étiquette  et  au  milieu  des  deux  cartouches 
Couoet  et  Pontarlier^  on  remarque  un  vase  d*on  s'échappent  des 
flammes  ;  qu^au-dessus  de  ce  vase  est  inscrite  en  petites  lettres 
bleues  sur  fond  blanc  cette  mention  marque  de  fabrique  dispo- 
sée en  demi-cercle,  et  au-dessous  du  vase,  le  mot  déposée  aussi 
en  petites  lettres  bleues  sur  fond  blanc  ;  qu'enfin  cette  étiquette 
n'est  revêtue  d'aucune,  signature  ; 

Attendu  que  cette  description  de  chacune  des  étiquettes  Per- 
nod fils  et  Legler-Pemod  démontre  que,  soit  dans  leur  ensem- 
ble et  au  premier  aspect,  soit  dans  leurs  détails  de  couleurs  et 
dessins,  comme  encore  dans  les  dispositions  de  leurs  indications 
de  noms,  lieux,  produits  et  qualités,  elles  ne  présentent  que 
des  ressemblances  superficielles,  incapables  de  suggérer  à  Toeil 
le  moins  exercé  ou  à  une  intelligence  moyenne  la  moindre  mé- 
prise ou  une  confusion  quelconque  ; 

Qu'à  la  vérité  les  deux  étiquettes  en  question  portent,  sur  fond 
rouge,  la  croix  fédérale  suisse  ;  mais  que  celle  de  la  marque 
Pernod  fils  est  encadrée  dans  un  ovale  entouré  d'une  ligne  bleu 
foncé,  tandis  que  celle  de  l'étiquette  Legler  est  enfermée  dans 
une  circonférence  parfaite,  bordée  d'un  large  trait  blanc  ;  qqe,  de 
pins,  les  chapeaux  dessinés  au-dessus  de  chacune  d'elles  sont  gar- 
nis de  plumes  touffues  d'une  façon  inégale  et  différemment  pen- 
chées et  nuancées  ; 

Attendu,  d'ailleurs,  que  les  poursuivants  ne  sauraient  soutenir 
qu'ils  ont  seuls  la  faculté  de  faire  figurer  sur  leurs  étiquettes 
iemblème  national  suisse  ;  que  ce  droit  compète  à  Legler  Pernod 
comme  à  eux,  d'autant  mieux  quHl  est  sujet  suisse,  aussi  bien  que  le 
i^ieur  Pernod  fils,  leur  cédant  ; 
Sur  le  second  chef  : 

Attendu  que  les  négociants,  ajuste  titre  soucieux  de  leurs  in- 
Urèts  et  jaloux  du  soin  d'étendre  leurs  relations  d'affaires,  ont 
tous  la  légitime  ambition  de  rehausser  leur  crédit  moral  et  de 
:»e  créer  une  notoriété  aussi  large  que  possible  ;  qu'à  cette  fin 
chacun  d'eux  ne  néglige  pas,  s'il  est  marié,  de  faire  connaître 
sa  situation  sociale  à  cet  égard,  en  ajoutant  le  nom  de  sa  femme 
à  son  propre  nom  patronymique  ;  que  ce  mode  de  procéder,  qui 


vn 


—  172  — 

a  pour  résultat  d'inspirer  plus  facilement  confiance  en  la  per- 
sonne du  commerçant  et  d'attirer  à  sa  clientèle  les  amis  et  les 
parents  de  sa  femme, est  pratiqué  ostensiblement  comme  n'ayant 
rien  d*illicite,  tant  en  France  qu'à  Tétranger,  par  la  généralité 
des  négociants  et  des  industriels  ; 

Attendu  qu'il  est  établi  par  les  documents  de  la  cause  que  le 
sieur  Legler  a,  de  la  sorte  et  depuis  1865,  pris  le  nom  de  sa  femme 
pour  le  joindre  au  sien  ;  qu'il  a  suivi  ce  système  de  réclame  per- 
mise, non  seulement  lorsqu'il  s'agit  d'actes  de  commerce,  mais 
encore  pour  la  préparation  et  l'accomplissement  des  actes  de  la 
vie  purement  civile  ;  qu'on  le  yoit,à  Gouvet,  figurer  sur  les  listes 
électorales  sous  le  nom  double  de  Legler-Pernod  ;  que,  con- 
seiller municipal  et  trésorier  de  la  commune,  il  prend  et  ses  con- 
citoyens lui  donnent  ce  même  nom  composé  ;  que  le  sieur  Per- 
nod fils,  dans  sa  correspondance  particulière,  l'appelle  lui-même 
Legler-Pemod  ; 

Qu'il  est  ainsi  constant,  qu'il  était  depuis  longtemps  déjà,  à 
tous  égards,  en  possession  légitime  du  nom  de  Legler  Pernod,  et 
que  ce  n'est  nullement  dans  un  but  frauduleux  et  pour  nuire  à 
la  maison  Pernod  fils,  qu'il  a  continué  en  France  à  accoler  à  son 
nom  celui  de  sa  femme  ; 

Attendu  qu'en  utilisant  ainsi  un  usage  commercial  constant, 
le  sieur  Legler  ne  s'est  pas  écarté  des  limites  de  son  droit  ;  qu'au 
surplus^  si  dans  ses  agissements  résidaient  des  faits  de  concur- 
rence déloyale,  il  n'appartient  d'en  connaître  qu'à  la  juridiction 
consulaire  ;  que  d'autre  part,  la  raison  sociale  Pernod  fils  diffère 
suffisamment  de  celle  Legler  Pernod^  pour  qu'aucune  confusion  ne 
vienne  à  se  produire  ; 

Attendu  enfin  que  la  loi  du  28  juillet  1824  prévoit  et  ne  réprime 
que  le  fait  par  quiconque  de  s'approprier  un  nom  appartenant  ex- 
clusivement à  autrui;  qu'il  n'en  est  pas  ainsi  dans  l'eiipèce,  puis- 
que le  s^ur  Legler  est  allié  par  mariage  à  une  personne  dont  le 
nom  patronymique  est  réellement  Pernod^  et  que  les  usages  com- 
merciaux l'autorisent  à  joindre  au  sien  le  nom  de  sa  femme  ; 

Attendu  que  de  ce  qui  précède,  il  résulte  que  les  différents  faits 
imputés  au  sieur  Legler  ne  présentent  aucun  caractère  délictueux 
et  sont  impuissants  à  motiver  une  condamnation  correction- 
nelle ; 

Sur  la  demande  reconventionnelle  : 

Attendu  que,  par  leurs  poursuites  injustes  et  vexatoires,  les 
sieurs  Veil  Picard  ont  causé  au  sieur  Legler  un  préjudice  dont 
ils  doivent  réparation,  et  pour  la  fixation  duquel  il  existe  dans  la 
cause  des  éléments  suffisants  d'appréciation  ; 

PàR  dt  MOTIFS,  le  tribunal,  jugeant  correctionnellement  et  ne 


'. 


—  175  —  < 

ner  d^aatant  pias  la  confusion  des  produits  qu'il  s'agissait  d'un 
article  d'exportation  ; 

Attendu  que  la  concurrence  déloyale  n'est  pas  moins  justifiée 
que  l'imitation  frauduleuse  ; 

Qu'elle  ne  résulte  point  du  fait  d'avoir  commercé  sous  le  nom 
de  leurs  prédécesseurs^approbation  autorisée  par  un  usage  cons- 
tant dès  lors  que  le  cédant  le  permet  expressément  ou  le  tolère, 
mais  de  ce  que  profitant  de  la  similitude  de  consonnance  entre 
L.  T.  Piver  et  Daver,  les  sieurs  Mayaudon  ont  inscrit  sur  leurs 
prodoits,  et  en  tête  de  leurs  prospectus  :  Daver-Paris,  bien  que 
celui-ci,  ni  eux-mêmes  n'eussent  à  Paris  ou  aux  environs  ni  une 
fabrique,  ni  une  maison  de  vente  ; 

Attendu  que  les  sieurs  Mayaudon  ne  peuvent  exciper  de  leur 
bonne  foi,  alors  qu'ils  ont  certainement  connu,  au  moment  de  la 
«ession  qui  leur  a  été  consentie  par  Daver,  que  ce  dernier  était 
1  objet  de  l'instance  qui  a  abouti  au  jugement  en  date  de  ce 
jour; 

Attendu,  en  ce  qui  concerne  Cohen,  qu'il  a  conservé  dans  la 
maison  Mayaudon  la  situation  qu'il  avait  dans  la  maison  Daver, 
c'est-à-dire  qu'il  est  demeuré  le  représentant  exclusif,  l'agent 
attitré  sinon  l'associé  des  frères  Mayaudon  ;  qu'il  a  donc  parti- 
cipé sciemment  à  l'usage  de  la  marque  frauduleusement  imitée, 
aux  actes  de  concurrence  déloyale  et  a  encouru  la  même  res- 
ponsabilité ;  * 

Attendu  que  les  agissements  des  défendeurs  ont  causé  à  L.  T. 
Piver  un  sérieux  préjudice  dont  réparation  est  due,  mais  dont  le 
tribunal  ne  peut  d'ores  et  déjà  déterminer  l'importance  ; 

Attendu  qu'il  est  juste  d'indemniser,  dès  à  présent,  le  deman- 
deur des  frais  et  dépenses  qui  ont  été  la  conséquence  de  la 
recherche  de  la  fraude  ; 

Par  css  motifs.  Condamne  solidairement  les  sieurs  Mayaudon 
frères  et  Cohen  à  payer  à  L.  T.  Piver  des  dommages-intérêts  à 
fixer  par  état  ; 

Prononce  la  confiscation  des  marchandises  revêtues  de  la  mar- 
que dont  s'agit,  notamment  de  celles  saisies  dans  les  magasins 
de  Worms  Josse  et  Cie  au  Havre,  suivant  procès-verbal  de  Vallot 
en  date  du  22  février  1895  ; 

Dit  que  lesdites  marchandises  seront  remises  à  L.  T.  Piver 
qui  en  pourra  faire  tel  usage  qu'il  lui  plaira  ; 

Ordonne  la  radiation  du  dépôt  de  marque  effectué  au  greffe 
du  tribunal  de  commerce  de  Bordeaux  le  26  mai  1889,  ainsi  que 
la  destruction  des  pierres  lithographiques  et  clichés  ayant  servi 
a  rimpression  de  ladite  marque,  des  étiquettes  et  prospectus  ; 
leur  fait  défense  à  s'en  servir  dans  l'avenir  ; 

Condamne  les  défendeurs  solidairement,  et  ce  au  besoin  à  titre 


-^j.  -.7*- T.'.-  --  -.s^-  •  -r-rr  ■■  ■  •:ji?7?s»fipi^spiwB«pp(pBpi 


—  176  — 

de  snpplément  de  dommages-intérêts^  à  payer  à  L.  T.  Pirer  la 
somme  de  177  francs  montant  des  marchandises  trouTées  aux 
mains  de  Worms,  Josse  et  remboursées  à  ces  derniers,  le  coût 
des  constats  dressés  à  cette  occasion,  les  frais  de  magasinage, 
régie,  transport,  perçus  tant  par  Worms  et  Gie  que  par  la  Com- 
pagnie des  Chemins  de  fer  de  TOuest  ; 

Autorise  L.  T.  Pi  ver  à  faire  publier  le  présent  jugement  aux 
frais  des  défendeurs  solidairement  dans  trois  journaux  au  choix 
de  L.  T.  Piver,  en  limitant  toutefois  le  montant  de  chaque  in- 
sertion à  la  somme  de  150  francs  ; 

Condamne  les  sieurs  Mayaudon  et  Cohen,  sous  la  même  soli- 
darité en  tous  les  dépens. 

Sur  appel  interjeté  par  MM.  Mayaudon  et  Cohenja  Cour 
de  Paris  a  confirmé  le  jugement  attaqué  dans  les  termes 
suivants  : 

La  Cour,  Considérant  que  si  les  flacons,  les  boites,  les  embal- 
lages et  les  prospectus  employés  par  la  maison  Mayaudon  pré- 
sentent certaines  dissemblances  avec  les  flacons,  les  boites,  les 
emballages  et  les  prospectus  de  la  maison  Piver.dissemblances 
sensibles  quand  on  rapproche  l'un  de  Tautre  les  objets  provenant 
des  deux  maisons,  ces  dissemblances  disparaissent  quand  on 
regarde  les  objets  isolément,  et  surtout  après  un  certain  inter- 
Talle  de  temps,  qui  ne  permet  guère  la  comparaison  ; 

Considérant  qu'il  ressort  de  l'examen  attentif  de  tous  ces  objets, 
que  la  maison  Daver,  puis  la  maison  Mayaudon  qui  lui  a  succédé , 
ont  eu  rintention  non  douteuse,  par  la  disposition  et  la  combi- 
naison de  leurs  dessins  de  créer  une  confusion  entre  leurs  arti- 
cles et  ceux  de  la  maison  Piyer  ; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges  tant  en  ce 
qui  concerne  les  frères  Mayaudon  qu'en  ce  qui  concerne  Cohen  ; 

Par  CBS  hotifs.  Sans  s'arrêter  ni  aroir  égard  aux  demandes, 
fins  et  conclusions  des  appelants,  dans  lesquelles  ils  sont  décla- 
rés mal  fondés,  et  dont  ils  sont  déboutés  ; 

Confirme  le  jugement  attaqué  ; 

Ordonne  qu'il  sortira  son  plein  et  entier  effet  ; 

Condamne  les  appelants  à  l'amende  et  aux  dépens. 

2«  Chambre.  —  Présidence  de  M.  Mbrsibr.  —  Plaidants  : 
M«  PooiLLBT  pour  L.  T.  Piver  et  Cieet  M»»ALLAaTet  Dupont 
pour  Mayaudon  et  Cohen. 


tée  et  fabriquée  dans  la  région  à  laquelle  ce  nom  s'appli- 
9ue  (2). 

Lei  appellations  régionales  de  provenance  de  produits 
vinicoles  ne  peuvent,  aux  termes  de  la  loi  du  13  avril  1892, 


(l]Ct,  Poaillet,  Marg.  fab.,  n»  181  et  a.  ;  Paria,  corr.,3  mars  1898, 
DamoDliD,  ^nn.,98.  13t. 

|9)  Cr.  pour  le  chainpagne.  Cas*.,  12  JDJUet  18i&,  J.  P.  45.  2.  055  ;  Ad- 
pn,  19  jaiUet  ltJ87,  Ann.,  88. 337  et  Ca«s.,  26  juillet  1889,  ^nn.,  89.  366  ; 
Angen,  15  décembre  1891  et  Cbbs.,  flaTril  1894,  Ann..  96.  IGO  ;  Paris, 
ISHovembre  1899,  Ann.,  96.  154. 


iw  w'  !.■•      .^  . « ^^ — : "^"^        ■        ^  '  ■    7-T^   -  T.':,   ^.- ■        '•    .   »  < •  ^ >p;Ty 75».'' 


-  182  - 

Gie,  et  ordonnant  au  défendeur  de  détruire  immédiatement  toutes 
les  étiquettes  contrefaites  ; 

,  Attendu  que  MM.  Marteli  et  Gie  pouvaient  espérer  que  le  sieur 
Levé-Diéyal,  ainsi  averti  par  cet  arrêt  de  la  justice  anglaise, 
renoncerait  à  ses  pratiqués  de  concurrence  illicite  ;  mais  qu'ils 
eurent  bientôt  la  preuve  que,  tout  en  prenant  d'infinies  précau- 
tions, Levé-Diéval  continuait  à  faire  vendre,  même  en  France, 
ses  eaux-de-vie  de  Gorbehem  sous  le  couvert  de  Tétiquette  frau- 
duleuse condamnée  à  Londres  ; 

Qu'il  osa  même  faire  déposer  cette  étiquette  Malinard  frères  à 
deux  reprises  différentes  :  i"  au  greffe  du  Tribunal  de  commerce 
d'Ârras,  le  3  novembre  1897;  2^  au  greffe  du  Tribunal  de  com- 
merce de  la  Seine,  le  18  février  1898,  en  indiquant  son  domicile 
à  Le vall ois-Perret  ; 

Que  MM.  Martell  et  Gie  firent  acheter  une  bouteille  d'eau-de- 
vie  à  ce  domicile  de  Levallois- Perret  et  qu'elle  fut  livrée  avec  une 
facture  ainsi  libellée  :  «•  Une  bouteille  Malinard,  5  fr.  50.  Vente 
comptant  »  ; 

Qu'enfin  une  saisie-contrefaçon,  régulièrement  pratiquée  sui- 
vant procès- verbal  de  fiaitry,  huissier  près  le  Tribunal  de  la  Seine 
ep  date  du  8  juillet  1899,  amena  la  découverte,  dans  ce  domicile 
de  Levallois-Perret,  de  550  étiquettes  contrefaites  ; 

Attendu  que  MM.  Martell  et  Gie  assignèrent  alors  le  sieur  Levé- 
Diéval  devant  le  Tribunal  civil  d'Arras,  son  véritable  domicile, 
par  exploit  de  Bras,  huissier  à  Arras,  du  19 juillet  1899,  pour: 

Voir  dire  que  le  sieur  Levé-Diéval  s'est  rendu  coupable  d'imi- 
tation frauduleuse  de  niarque  de  fabrique,  aux  termes 'de Farti- 
cle  8  de  la  loi  de  1857;  voir  dire  et  juger  qu'il  s'est  rendu  cou- 
pable d'usurpation  du  nom  de  lieu  de  Gognac,  aux  termes  de 
l'article  1**^  de  la  loi  de  1824;  voir  dire  et  juger  qu'il  a  commis 
de  nombreux  faits  de  concurrence  déloyale,  aux  termes  de  l'ar- 
ticle 1382  du  Gode  civil;  voir  ordonner  l'annulation  et  la  rsuiia- 
tion  des  deux  dépôts  faits,  l'un  au  greffe  du  Tribunal  de  com- 
merce d'Arras,  le  3  novembre  1897,  sous  le  n*  155  ;  le  second  au 
greffe  du  Tribunal  de  la  Seine,  le  18  février  1898,  sous  le 
n<»  56,992,  avec  mention  du  jugement  à  intervenir  en  marge  du  re- 
gistre de  ces  greffes  et  du  registre  du  Gonservatoire  des  Arts  et 
Métiers  ;  voir  ordonner  la  confiscation  au  profit  des  demandeurs 
de  toutes  les  étiquettes  contrefaites,  et  notamment  de  toutes  cel- 
les, qui  out  été  saisies  par  description  suivant  procès-verbal  de 
Baitry,  huissier,  le  8  juillet  1899,  enregistré  ;  et,  pour  le  préju- 
dice causé,  s'entendre  condamner  à  payer  aux  demandeurs  des 
dommages-intérêts  à  fixer  par  état,  et  d'ores  et  d^à  à  une  pro- 
vision de  3.000  francs  ;  voir  ordonner  l'insertion  du  j  ugement  à 
intervenir  dans  dix  journaux  au  choix  des  demandeurs  et  aux 


Irais  de  H.  LeTé-Uiéral  ;  s'entendra  condamner  «n  tous  les  dé- 
peDi,  7  compris  le  coût  de  la  requêle  à  fin  de  saisie  et  du  procès- 
terbal  à  Le  val  lois-Perret,  soua  toute»  réserrea  ; 

Attenda  que  par  le  Jugement  dont  est  appel,  en  date  du 
iS  DOTeiiibre  1tj99,  le  Tribunal  civil  d'Ârras  ne  fait  pas  une  ap- 
préûation  complètement  juridique  des  droits  des  parties  ; 

Qae  le  tribunal  coidamne  bien  Les  étiquettes  incriminées 
Eooime  étant  l'imitation  fraaduleuae  de  la  marque  de  HH.  Mar- 
lelletCie,  mais  qu'il  refuse  de  condamner  le  sieur  LeTé-Diêval 
à  ancuDs  dommages-intérêts  provisionnels,  aini^i  qu'aux  inser- 
tions demandées  ; 

Qae,  de  plus,  le  justement  entrepris  a  le  tort  de  décider  «  que 
h  mot  Cognac  est  an  mot  générique  et  qu'on  peut  par  suite  ad- 
metlre  que  l'intention  du  défendeur  a  été  de  dësiguer  ainsi  le 
produit  qu'il  offrait  et  non  pas  d'indiquer  le  lieu  de  sa  fabrica-. 
lion;  qu'il  y  avait  lieu  en  conséquence  de  dire  non  fondée  l'ac- 
tion de  nom  de  lieu»; 

Attendu  que  la  Cour  devra  rectifier  ce  jugement  dans  aes  par- 
tin  erronées  ; 

DiscussioD  : 

S I".  —  Sur  l'indication  de  fausse  provenance  et  l'usurpation  de 
wm: 

Basait: 

Attendu  que  les  premiers  jugea  ont  en  le  tort  de  dire  que  Leié- 
Diévat  n'avait  employé  le  mot  de  Cognac  que  pour  imiter  la 
marque  de  MM.  Hartelt  et  Oie,  et  qu'aucune  circonstance  de  la 
cause  ne  démontrait  qu'il  avait  voulu  en  même  temps  taire  croire 
qo'il  avait  an  établissement  à  Cognac  ; 

Qae  toutes  les  circonstances  de  fait  de  la  cause  démontrent  le 
contraire  ; 

Que  les  premiers  juges  ont  certainement  perdu  de  vue  tes 
circalaires  de  Levé-Diéval  dans  lesquelles,  il  ose  annoncer  au 
puUic  ■<  qu'il  venait  d'acquérir  la  marque  Halinard  frères  de 
Cognac  M  ; 

Qu'aucun  doute  n'est  permis  sur  le  sens  de  cette  allégation 
ioeiacte  qui  tendait  bien  à  persuader  an  public  que  Levé-Diéval 
venait  d'acquérir  la  marque  réputée  de  négociants  en  eaui-de- 
tie  nommés  Malinard  frères  et  établis  à  Cognac  ; 

Que  ces  circulaires  étaient  accompagnées  des  mentions  sui- 
*iDtes  '.  20  médailles  d'or  ;  11  diplémes  d'honneur  ;  8  grands  prix 
arec  l'indication  de  24  autres  récompenses  dans  des  concours 
divers  ; 

Attendu  en  outre  que  la  disposition  de  l'étiquette  : 


'VYT  '.yw 


—  184  — 

VERY  OLD  BRANDY 
MLF 

MALINARD   FRÈRES 
COGNAC 
ne  laisse  place  non  plus,  à  aucun  doute,  et  qu'elle  annonce  bien 
«  une  rraiment  vieille  eau-de-vie  des  frères  Malinard  de  Co- 
gnac »  ; 

Qu'il  est  donc  certain  qu'à  ce  premier  point  de  vue,  le  sieur 
Levé-Diéval  a  usurpé  le  nom  de  lieu  de  Cognac  où  il  ne  possède 
et  n'a  jamais  possédé  aucun  établissement  ; 

Attendu  au  surplus,  qu'il  est  tout  à  fait  inexact  de  prétendre 
soit  en  fait,  soit  en  droit,  que  le  mot  Cognac  est  un  terme  géné- 
rique pour  désigner  la  liqueur  elle-même,  sans  distinction  entre 
celle  qui  a  été  fabriquée  à  Cognac  et  celle  qui  a  été  fabriquée 
ailleurs  ; 

Que  si  on  a  vraiment  abusé  du  mot  Cognac^  il  est  de  principe 
qu'un  abus  ne  saurait  légitimer  un  droit  ; 

Qu'il  en  a  été  de  même  naguère  pour  le  mot  Champagne  qui 
était  usurpé  abusivement  depuis  de  longues  années  par  beau- 
coup de  fabricants  de  vins  mousseux  de  diverses  régions  ;  et  que 
des  arrêts  de  la  Cour  d'Angers,  de  la  Cour  de  Paris  et  de  la  Cour 
de  cassation  ont  enûn  fait  cesser  cet  abus  en  déclarant  souve- 
rainement, —  malgré  l'usage  presque  invétéré  et  malgré  le  dic- 
tionnaire de  Littré  —  «  que  le  nom  de  Champagne  ou  vin  de 
Champagne  n'est  pas  tombé  dans  le  domaine  public  et  ne 
peut  s'entendre  que  d'un  vin  mousseux  récolté  et  fabriqué  en 
Champagne,  ancienne  province  de  France,  géographiquement 
déterminée  et  dont  les  limites  ne  sauraient  être  étendues  ou  res- 
treiùtes  »  ; 

Attendu  que  la  raison  de  décider  ainsi,  c'est  que  les  vins  et 
eaux-de-vie,  sont  des  produits  naturels  qui  tirent  leur  valeur  di- 
rectement de  la  terre  où  ils  sont  nés  ;  qu*ils  lui  doivent  leurs  qua- 
lités et  leurs  propriétés  qui,  ailleurs,  ne  seraient  pas  les  mêmes  ; 
et  qu'il  n'est  pas  possible  de  comprendre  en  conséquence,  com- 
ment le  nom  de  la  localité  ou  de  la  région  qui  fournit  le  vin  et 
l'eau-de-vie  de  vin  peut  jamais  tomber  dans  le  domaine  public 
et  servir  à  désigner  des  produits  similaires  fournis  par  une  autre 
région  ; 

Attendu  que  ces  principes  étaient  déjà  enseignés  et  appliqués 
par  la  doctrine  et  la  jurisprudence  sous  l'empire  de  la  loi  de 
1824; 

Mais  qu'aucune  difficulté  ne  saurait  plus  s'élever  depuis  la  loi 
du  13  &vril  1892,  aux  termes  de  laquelle  (art.  4)  les  appellations 
régionales  de  provenance  des  produits  vinicoles  ne  pourront 
jamais  être  considérées  comme  génériques  ; 


—  186  — 

Dire  et  juger  par  suites  que  le  sieur  Levé-Diéval  a  usurpé  le 
nom  de  Cognac 

i^  Soit  en  essayant  de  persuader  au  public  qu'il  était  proprié- 
taire de  la  marque  de  MM.  Malinard  frères  établis  à  Cognac  ; 

2°  Soit  en  désignant  ainsi  un  produit  récolté  et  fabriqué  ail- 
leurs que  dans  la  région  de  Cognac  ; 

Dire  et  juger  que  le  sieur  Levé-Diéval  a  commis  par  tous  ses 
agissements  et  par  remploi  abusif  de  nombreuses  médailles  et 
diplômes  d'honneur,  des  faits  de  concurrence  déloyale  aux  ter- 
mes de  la  loi- du  30  avril  1886,  et  de  Tarticle  1882  du  Code  civil  ; 

Condamner  en  conséquence  le  sieur  Levé-Diéval  —  en  outre 
des  dommages-intérêts  à  fixer  par  état—  à  payer  aux  concluants 
une  provision  de  3.000  francs; 

Ordonner  Tinsertion  du  jugement  à  intervenir  dans  10  jour- 
naux au  choix  des  appelants,  et  aux  frais  de  M.  Levé-Diéval  ; 

Confirmer  pour  le  surplus  les  dispositions  du  jugement  dont 
est  appel  ; 

Condamner  le  sieur  Levé-Diéval  en  tous  les  dépens  de  première 
instance  et  d'appel  ; 

Ordonner  la  restitution  de  l'amende  consignée  ; 

Sous  toutes  réserves  de  fait  et  de  droit. 

Léon  Lavoix,  avoué.  —  F.  Desjardins,  avocat. 

La  Cour  de  Douai  a  statué  ainsi  qu'il  suit  : 

La  Cour,  Attendu  que  Martell  et  Cie,  négociants  à  Cognac, 
sont  propriétaires  d'une  marque  déposée  par  eux  en  1864  et  ser- 
vant à  désigner  leurs  eaux-de-vie  de  Cognac  ;  que  Levé,  négo- 
ciant à  Corbehem,  fait  usage  depuis  quelques  années  pour  la 
vente  lie  ses  eaux-de-vie  d'une  marque  dont  il  a  opéré  le  dépôt 
au  greffe  du  Tribunal  de  commerce  d'Arras  le  3  novembre  i897 
et  au  greffe  de  la  Seine  le  18  février  1898  ;  que  Martell  et  Cie 
prétendent  que  la  marque  de  Levé  est  une  imitation  frauduleuse 
de  la  leur,  et  que  Levé  leur  fait  une  concurrence  déloyale,  no- 
tamment en  inscrivant  sur  ses  étiquettes  le  mot  de  Cognac  ;  qu'il 
y  a  lieu  d'examiner  si  cette  double  prétention  est  fondée; 

I.  —  Sur  limitation  frauduleuse  de  marque  :  ' 
Adoptant  les  motifs  du  tribunal  qui  sont  ainsi  conçus  : 
(Voir  le  jugement  ci-dessus). 

Attendu  au  surplus,  que  la  comparaison  des  deux  étiquettes 
fait  ressortir  entre  elles  une  ressemblance  telle  que  la  confusion 
est  possible,  même  pour  une  personne  suffisamment  attentive  ; 

II.  —  Sur  Vusurpation  du  nom  de  Cognac  : 

Attendu  qu'en  1895,  Levé  a  publié  une  circulaire  annonçant 
qu'il  venait  d'acquérir  la  marque  Malinard  frères,  de  Cognac,  et 


I 

I 


—  187  — 

a  apposé  sur  les  bouteilles  renfermant  les  produits  de  sa  fabri- 
cation, rétiquette  incriminée  portant  :  Very  old  Brandy,  Mali- 
nord  frères  Cognac  ; 

Attendu  que  le  mot  Cognac  aune  double  signification,  pouvant 
serrir  à  désigner  soit  un  lieu  de  provenance,  soit  une  espèce 
de  produit  ;  que,  dans  la  marque  ci-dessus  relatée,  ce  mot,  ins- 
crit au-dessus  des  mots  Malinard  frères  est  une  désignation  de 
provenance  et  indique  Cognac  comme  lieu  d'origine  de  Teau-de- 
vie  offerte  aux  acheteurs  ; 

Attendu  que  la  marque  MaHnard  frères  est  de  pure  fantaisie 
qu'elle  n'existe  pas  et  n'a  jamais  existé  dans  la  région  de  Cognac; 
qae  Levé  a  son  usine  à  Corbehem,  dans  le  département  du  Pas- 
de-Calais  et  ne  possède  aucun  établissement  à  Cognac  ou  aux 
environs;  qu'il  a  donc  contrevenu  à  l'article  i"  de  la  loi  du 
28  jnillet  1824  qui  défend  d'apposer  sur  un  objet  fabriqué  le  nom 
d'un  lieu  autre  que  celui  de  sa  fabrication  ; 

Attendu  que,  même  en  admettant,  avec  les  premiers  juges,  que 
le  mot  Cognac  ait  été  employé  pour  désigner  non  pas  un  nom  de 
lieu,  mais  une  nature  de  produits,  on  n'en  devrait  pas  moins 
décider  que  Levé  en  a  fait  un  usage  illicite  ;  qu'en  effet  le  Cognac 
est  une  eau-de-vie  spéciale  dont  les  qualités  dérivent  du  sol  qui 
l'a  produit  ;  que  si  Ton  a  pu  dire,  plus  ou  moins  exactement  que 
la  région  d'où  proviennent  les  eaux-de-vie  de  Cognac  s'étend 
jusqu'à  Bordeaux,  il  est  certain  qu'elle  ne  s'étend  pas  jusque 
dans  le  Pas-de-Calais  ;  que  Levé,  fabriquant  ses  eaux-de-vie  à 
Corbehem,  avec  des  alcools  d'industrie  coupés  et  aromatisés,  n'a 
pas  le  droit  de  leur  donner  le  nom  de  Cognac  ; 

Attendu  que  les  produits  vinicoles  étant  redevables  de  leurs 
propriétés  au  sol  d'où  ils  proviennent  (même  lorsqu'ils  nécessi- 
tent l'emploi  de  certains  produits  de  fabrication),  ne  doivent  pas 
être  assimilés  aux  produits  purement  industriels  qui  peuvent 
présenter  les  mômes  qualités,  quel  que  soit  le  lieu  de  leur  fabri- 
cation ;  que  les  noms  de  région  d'où  viennent  les  vins  et  eaux- 
de-vie  jouissent  d'une  réputation  exceptionnelle  ne  pouvant 
jamais  devenir  générique,  contrairement  à  ce  qui  a  lieu  pour  les 
produits  fabriqués,  tels  que  les  savons  de  MarseUlCy  par  exemple  ; 
car  si  l'on  peut  faire  partout  les  savons  de  Marseille,  on  ne  peut 
faire  partout  des  vins  de  Champagne  ou  des  eaux-de-vie  de  Co- 
gnac; 

Attendu,  au  surplus,  que  les  articles  1  et  4  de  la  loi  du  i3  avril 
1892  promulguée,  le  15  juillet  suivant,  interdisent  les  fausses 
désignations  de  provenance,  à  moins  qu'elles  n'aient  un  carac- 
tère générique  (c'est-à-dire  à  moins  qu'elles  ne  servent  à  désigner 
Qo  genre  de  marchandise)  et  décident  que  les  noms  de  prove- 


—  188  - 

nance  de  produits  vinicoies  ne  pearent  jamais  derenir  généri- 
ques ; 

Attendu  que  les  eaux-de-vie  de  Cognac  sont  des  eauz-de-vîe 
de  vin  et  constituent  un  produit  vinicole  protégé  par  conséquent 
par  la  disposition  de  la  loi  ci-dessus  relatée  ; 

Attendu  que,  quelque  abus  qu*il  ait  été  fait  du  mot  Cognac,  il 
n*en  est  pas  moins  certain  qu'il  existe  des  eaux-de*vie  absolu- 
ment spéciales  à  la  région  des  Charentes  et  appelées  Cognacs  ; 
que  si  Ton  décidait  que  remploi  de  ce  mot  est  à  la  disposition  de 
tous  les  fabricants  d'alcool  industriel,  il  en  résulterait  que  Ton 
pourrait  produire  à  Tétranger  et  y  vendre  des  spiritueux  qui, 
bénéficiant  de  cette  désignation,  porteraient  au  commerce  fran- 
çais le  plus  grave  préjudice,  contrairement  à  la  convention  inter- 
nationale de  Madrid  devenue  la  loi  du  13  avril  1892; 

Attendu,  en  conséquence  que  Levé-Dîéval  a  usurpé  sur  ses  éti- 
quettes, le  mot  Cognac  ;  soit  qu'il  ait  voulu  faire  croire  que  la 
maison  fictive  Malinard  frères  était  établie  dans  la  ville  de  Co- 
gnac, soit  qu'il  ait  voulu  présenter  son  eau-de-vie  comme  étant 
du  Cognac,  c'est-à-dire  une  liqueur  récoltée  et  fabriquée  dans  la 
région  à  laquelle  ce  nom  s'applique  ; 

Attendu  que  les  demandeurs  n'ont  pas  établi  que  les  médailles 
et  diplômes  dont  se  prévaut  Levé  dans  sa  circulaire  du  14  juillet 
1895,  ne  lui  aient  pa^été  réellement  décernés  ;  que  ce  grief  doit 
être  écarté  ;  qu'au  contraire  Levé  a  eu.le  tort  d'imprimer  sur  les 
bouchons  de  ses  bouteilles  de  Cognac  les  mots  :  Malinard  frères^ 
21  médailles  ;  qu'il  est  certain  que  Malinard  frères  n'ont  obtenu 
aucune  médaille,  puisqu'ils  n'ont  jamais  existé  ; 

Attendu  que  le  Tribunal  d'Arras  a  condamné  Levé  a  des  dom- 
mages-intérêts à  libeller,  en  le  dispensant  de  fournir  une  provi- 
sion et  en  déboutant  Martell  et  Cie  de  leur  demande  d'insertion  ; 
qu'il  y  a  lieu  de  confirmer  cette  décision  ; 

Par  ces  hotips,  Et  adoptant,  au  besoin,  ceux  non  contraires 
des  premiers  juges  ; 

Réformant  ; 

Dit  que  le  nom  de  Cognac  s'appliquant  à  des  produits  vinîco- 
les  qui  tirent  du  sol  leurs  propriétés,  n'a  pu  légalement  devenir 
et  n'est  pas  devenu  générique  ;  que  Levé-Diéval  a  usurpé  le  nom 
de  Cognac^  en  essayant  de  persuader  au  public  qu'il  était  pro- 
priétaire de  la  marque  Malinard  frères  établis  à  Cognac  ;  qu'il 
aurait  commis  la  même  usurpation  en  désignant  sous  ce  nom  un 
produit  récolté  et  fabriqué  ailleurs  que  dans  la  région  de  Co- 
gnac ;  que  ces  faits  retenus  à  sa  cbarge  constituent  une  concur- 
rence déloyale  préjudiciable  à  Martell  et  Cie  ; 

Confirme  pour  le  surplus  le  jugement  attaqué  ; 


—  190  — 

sion  des  fausses  indications  de  provenance  sur  les  mar^ 
chandises,  ne  dispense  pas  de  la  caution  judicatum  solvi  les 
étrangers  qui  l'invoquant  (1). 

Le  cautionnement  exigé  par  le  président  du  tribunal^ 
soit  dans  ^ordonnance  autorisant  la  saisie  aux  termes  de 
V Arrangement  de  Madrid^  soit  en  référé  sur  opposition  du 
saisi,  ne  prive  pas  le  saisi  dti  droit  de  soulever  devant  le 
tribunal  Vexception  de  caution  judicatum  solvi,  car  le 
cautionnement  est  seulement  destiné  à  couvrir  le  préjudice 
pouvant  dériver  de  l'altération  ou  de  la  perte  des  marchan- 
dises saisies  ;  il  importe  peu  que  le  président  ait  employé 
dans  l'ordonnance  le  mot  c  caution  »,  mais  il  appartient 
au  tribunal,  dans  la  fixation  de  ^a  caution  judicalum  solvi, 
de  tenir  compte  du  cautionnement  déjà  exigé  (2). 

(Trib.civ.du  Havre,  24  décembre  1896.  —  Blandy  frères  et  Gie  c.  divers.) 

MM.  Blandy  frères  et  Gie,  négociants  en  vins  à  Funchal 
(lie  de  Madère),  ayant  fait  constater  que  le  navire  Cons- 
tantin,  venant  d'Espagne,  débarquait  au  Havre  des  fûts 
contenant  du  vin  de  provenance  espagnole  et  portant  les 
marques  Madeira  ou  Madère,  obtinrent,  le  13  mai  1896, 
une  ordonnance  de  M.  le  président  du  Tribunal  civil  du 
Havre  les  autorisant  à  c  faire  procéder  à  la  saisie  réelle 
desdits  fûts,  et  à  faire  parapher  et  saisir  les  livres,  regis- 
tres et  papiers  d'où  pourraient  résulter  les  preuves  de  la 


(1)  L'Arrangement  de  Madrid  [Ann,,  92.  296),  en  parlant  de  la  saisie, 
dit  qu'elle  aara  lieu  «  conformément  à  la  législation  intérieure  de  cha- 
que £tat  ».  Pour  la  validité  de  la  saisie  et  les  conséquences  qui  en  dé- 
coulent il  faut  donc  se  reporter  à  la  législation  intérieure  ;  or,  elle  édicté 
en  France  la  caution  judicatum  soltn. 

Pour  la  Convention  d'Union  de  Paris  (1883),  dont  TArrangeraent  de 
Madrid  peut  être  considéré  comme  le  complément,  il  a  été  jugé  que  la 
caution  judicatum  solvi  restait  applicable  (Trib.  civ.  Seine,  4  février 
1888,  Ann.,  88.301  ;  cf.:  Gass.  belge,  5  avril  1888  {Ann.,  88.  312)  et 
S9  novembre  1888  (S.  89.4.13)  ;Pouiliet,  Brev,  d'inu,,  no9d9  bis), 

(3)  Cf.,  en  matière  de  brevets  d'invention,  Pouillet,Breo.  (ftnv.,  n*  939  ; 
Allart,  Brev,d^inv,,  t.  8,  n»  518  ;  Trib.  corr.  Seine,  4  mai  1847,  le  Droit, 
11  mars  ;  Trib.  civ.  Seine,  14  novembre  1860,  Journ,  Prop.  ind., 
n'*  105  ;  Trib.  civ.  Seine,  21  décembre  1887,  Pandectes  françaises^ 
88.2.148.  Ce  qui  pouvait  faire  naître  le  doute  en  matière  de  brevets 
d'invention,  c'est  que  la  loi  de  1844  exige  un  cautionnement  de  Tétran- 
ger  qui  veut  saisir,  on  se  demandait  si  ce  cautionnement  ne  devait  pas 
être  considéré  comme  suffisant  (voir  Texposé  de  la  controverse  par  Mai> 
nié,  Brev,  rf'ini'.,  1.2,  n»  2945  et  s.). 


de  l'huissier  commis,  le  tout  moyennant  la  consignation 
préalable  d'une  somme  de  200  francs  à  titre  de  cautionne- 
ment. 

Au  cours  de  la  saisie  pratiquée  sous  la  tente  de  la  Com- 
pagnie Havraise  péninsulaire,  Grosos,  agent  principal  de 
la  compagnie,  et  quelques-uns  des  destinataires  se  pour- 
vurent en  référé.  Le  président  ordonna,  le  15  mai  1896,  la 
continuation  des  opérations  de  saisie,  mais  <  sous  l'obli- 
gation par  Blandy  frères  de  fournir  dans  les  48  heures 
une  caution  de  3.000  fr.  pour  Davioud  et  Cie,  3.000  fr.  pour 
Fribourg  frères,  1.000  fr.  pour  Fleury,  12.000  fr.  pour 
Tarpin  et  Rioult,  12.000  fr.  pour  Grosos  et  Cie,  20.000  fr. 
pour  Misa,  4.000  fr.  pour  Gonzalès  »  et  nomma  Grosos  et 
Cie  comme  séquestre  des  marcbandises  saisies. 

Une  autre  ordonnance,  en  date  du  16  mai,  autorisa  les 
demandeurs,  moyennant  un  cautionnement  de  500  fr.,  à 
effectuer  de  nouvelles  saisies  de  marchandises  et  de  do- 
cuments. On  saisit,  le  18  mai,  à  l'entrepôt  Misa  au  Havre, 
des  fûts  portant  imprimé  à  fen  Madeira-Miia  ou  Madère 
M.  B,  et  les  connaissements  y  afférents  le  17  juin  à  la 
Compagnie  Havraise  péninsulaire,  notamment  les  con- 
naissements du  Constantin. 

La  saisie  portail,  au  total,  sur  655  fûla,  contenant  58.171 
litres  et  provenant  de  31  expéditeurs  différents,  tous  Es- 
pagnols. 

Blandy  frères  et  Cie  assignèrent  chacun  des  expéditeurs, 
solidairement  avec  les  destinataires  de  la  marchandise, 
pour;  *  voir  dire  et  juger  que  les  défendeurs  ont,  à  tort  et 
sans  droit,  apposé,  sur  les  marchandises  saisies,  des  in- 
dications de  nature  k  attribuer  faussement  à  ces  marchan- 
dises la  provenance  de  i'ile  de  Madère,  alors  qu'elles  ne 
sortent  pas  de  ladite  Ile  ;  qu'ils  ont  ainsi  contrevenu  à  la 
loi  du  13  avril  1892  et  à  l'article  49  de  la  loi  du  23  juin  1857, 
âlaloidu28jmllet1824elà  l'article  433  du  Code  pénal;  se 
voir  faire  défense,  en  conséquence.d'employer,  à  l'avenir, 
lesdites  indications  ;  ordonner  la  conSscation,  au  proCt 
des  demandeurs,  des  marchandises  saisies  ;  se  voir  con- 
damner à  payer  des  dommages-intérêts  à  fixer  par  état. 


-  192  — 

voir  ordonner  la  publication  du  jugement  à  intervenir  dans 
30  journaux  de  France  ou  de  Tétranger,  au  choix  des  de- 
mandeurs et  aux  frais  des  défendeurs,  voir  ordonner  la 
restitution  aux  demandeurs  des  sommes  versées  à  titre  de 
garantie  ;  dire  que  les  cautions  fournies  en  exécution  de 
l'ordonnance  de  référé  du  15  mai  1896  seront  déchargées.  » 

Un  des  expéditeurs  fut  l'objet  de  deux  instances  dis- 
tinctes. 

Intervinrent  dans  ces  instances,  pour  prendre  les  mê- 
mes conclusions  que  les  demandeurs,  47  négociants  en 
vins  et  viticulteurs  de  Tile  de  Madère,  avec  le  comité  de 
vigilance  nommé  par  décret  royal  portugais  du  13  juillet 
1895  dans  le  but  de  surveiller  la  fabrication  et  la  vente 
des  vins  de  Madère. 

Les  destinataires  français  soulevèrent  tout  d'abord  Tex- 
ception  de  cautio  judicatum  solvi,  sur  laquelle  il  a  été  sta- 
tué par  jugement  du  24  décembre  1896  : 

Lk  Tribunal,  Sar  rexception  de  caution  judicatum  iolvi  : 

Attendu  que  l'article  1*'  du  traité  de  commerce  et  de  navigation 
conclu  le  9  mars  1853,  entre  la  France  et  le  Portugal  et  promul- 
gué le  24  janvier  1854,  dispose  :  «  que  les  sujets  et  citoyens  des 
deux  Etats  auront  un  libre  et  facile  accès  auprès  des  tribunaux 
de  justice  pour  la  poursuite  et  la  défense  de  leurs  droits  »  ; 

Attendu  qu'une  jurisprudence  constante,  quoique  discutable, 
ayant  décidé  qu'un  semblable  avantage  emportait  dispense  de 
Tobligation  de  fou'rnir  la  caution  judicatum  solvi,  Blandy  frères 
et  Gle  s'en  emparent  pour  prétendre  que  dès  lors  en  leur  qualité 
de  négociants  portugais,ils  ne  sont  pas  tenus  de  Tobligation  spé- 
ciale imposée  par  llirticle  46  du  Gode  civil  aux  étrangers  ; 

Attendu  que  Diez  Herjtnanos  et  divers  soutiennent  au  contraire  : 
1®  que  la  Société  Blandy  frères  est  de  nationalité  anglaise  et  non 
portugaise,  et  est  par  suite  mal  venue  à  se  prévaloir  du  traité 
de  1853  ;  2^  que  dans  tous  les  cas,  en  admettant  môme  que  cette 
société  soit  de  nationalité  portugaise,  c'est  à  tort  que  Blandy 
frères  et  Gie  invoquent  Tarticle  l^*'  du  traité  de*  4853,  ce  traité, 
disent  les  défendeurs,  ayant  été  dénoncé  et  abrogé  en  1892. 

Sur  le  premier  point:  <(  Nationalité  de  la  Société  Blandy 
frères  »: 

Attendu  qu'il  esfr  certain  que  la  nationalité  d'une  société  peut 
être  différente  de  celle  des  associés  ;  que  la  Société  Blandy  frères 
peut  donc  bien  être  de  nationalité  portugaise  quoique  les  frères 
Blandy  et  leurs  co-associés  soient  de  nationalité  anglaise  ; 


recoDDBltre  qo'uoe  société  qni  possède  tout  à  la  f^is  dans  nn 
pays  son  siège  social  et  le  siège  principal  de  son  exploitation 
n^ssairement  la  nalionatité  de  ce  pays; 

Attenda  que  la  Sociâté  Blandy  frères  et  Cie  a  son  siège  social 
i  Fanchai  ;  qu'elle  a  pour  objet  le  négoce  des  vins  de  Madère  ; 
qne  l'Ile  de  Madère  est  donc  aussi  le  siège  principal  de  son 
exploitation  ;  que  conséqaemment  elle  est  de  nationalité  porto- 
eais«; 

Ittendn  qu'il  importe  peu  qu'il  existe  aussi  à  Londres,  ainsi 
qo'anx  Iles  Canaries,  une  société  Bland;  frères  plus  ou  moins 
considérable  ;  qu'il  serait  faui,  &  ud  double  point  de  vue,  d'en 
coQcIure  que  la  société  Blandy  frères  de  Punchal  ne  serait 
aatre  qu'âne  succursale  de  la  Société  Blandy  frères  de  Londres 
et  devrait  avoir  forcément  la  même  nationalité  qu'elle  ; 

Attenda  tout  d'abord  que  ta  création  d'une  Société  Blandy 
trères  à  Puncbal,  par  acte  spécial  et  avec  une  autre  destination 
particulière,  parait  an  contraire  exclusive  de  tonte  assimilation 
et  confusion  avec  la  Société  Blandy  frères  de  Londres  ; 

Attendu  qu'en  second  lieu,  il  n'appartient  pas  &  une  société 
de  se  réserver  ainsi  à  son  gré  telle  ou  telle  nationalité,  et  de 
s'attribuer  par  là  une  sorte  de  privilège,  au  préjudice  des  natio- 
naux d'un  autre  pays,  si  bien  que,  lors  même  que  la  Société 
Blandy  frères  de  Funchal  aurait  dû  être,  dans  la  pensée  de  ses 
associés,  nne  société  anglaise,  elle  devrait  néanmoins  être  répu' 
téede  nationalité  portugaise  par  cela  seul  qu'elle  a  dans  l'Ile 
de  Madère  son  siège  social  et  le  siège  principal  de  son  exploita- 

Sar  le  deuxième  point  :  «  Abrogation  de  la  clause  2 iAre  et  facile 
icc^  conteuae  dans  l'article  I"  du  traité  de  commerce  et  de 
DavigatioQ  du  S  mars  1853  »  : 

Attenda  que  la  clause  de  libre  et  facile  accès  insérée  dans 
l'article  l^da  traité  de  1833,  n'a  pas  été  reproduite  dans  les 
traités  subséquents  de  iS6S  et  de  1S8I  ;  que  pourtant  les  tri- 
bunaux français  ont  tonjouri,  jusqu'en  1891  au  moins,  déclaré 
que,  le  traité  de  J8S3  n'ayant  jamais  été  abrogé  dans  son  ensem- 
ble, il  avait  continué  de  subsister  dans  celles  de  ses  dispositions 
qni  n'avaient  pas  été  modifiées  par  les  conventions  postérieures  ; 
qae  notamment  la  clause  de  libre  et  facile  accès  avait  été, malgré 
h  silence  des  traités  de  1866  et  de  ISSt ,  considérée  comme  main- 
l«aae  pour  ainsi  dire,  par  tacite  reconduction  ; 


1^ 


-  197  — 

Varticle  59,  §  %du  Code  de  procédure  civile,  qui  prévoit 
que  le  demandeur  peut  y  s'il  y  a  plusieurs  défendeurs^  les  as- 
signer tous  au  domicile  de  l'un  d'eux^doit  recevoir  son  appli- 
cation non  seulement  entre  Français^  mais  encore  lorsqu'un 
ou  plusieurs  défendeurs  sont  étrangers  ;  c'est  donc  à  bon 
droitque  des  Portugais  assignentdevantun  tribunal  français 
des  négociants  espagnols  en  même  temps  que  des  négociants 
français  domiciliés  dans  le  ressort  de  ce  tribunaly  lorsqu'il 
est  constant  que  les  négociants  français  étaient  des  défen- 
deurs sérieux  et  n'avaient  pas  été  introduits  dans  l'instance 
pour  distraire  les  étrangers  de  leurs  juges  naturels  (1). 

Les  mêmes  règles  s'appliquent  sous  l'empire  de  la  Con- 
vention de  Paris  de  1883  et  de  F  Arrangement  de  Madrid  de 
1891  qui  en  est  le  complément  (Résolu  par  la  Cour  de 
Rouen)  (2). 

(C.  de  Rouen,  34  novembre  1897  et  G.  de  cass.  req.,  26  décembre 
1899.  —  Blandy  frères  et  Cie  c.  divers.) 

Dans  les  instances  rapportées  à  l'article  précédent,  les 
expéditeurs  espagnols  soulevaient  l'exception  d'incompé- 
tence à  raison  de  leur  nationalité,  un  seul  avait  transigé. 

de  police  et  de  sûreté  obligent  et  protègent,  sans  distinction  de  natio- 
nalité, tons  ceox  qni  habitent  le  territoire  français  (cf.  Alger,  6  jain 
1870,  D.  70.2.214  ;  Nancy,  9  janvier  1886,  D.  87.2.31  ;  Grenoble,  26  oc- 
tobre 1897,  D.  98.2.456  et  doctrine  unanime).  Il  en  a  été  fait  particu- 
lièrement application  en  matière  de  brevets  d'invention  (Trib.  civ.  Seine, 
26  juillet  1879,  Ann.,  79.364  ;  Trib.  civ.  Seine,  26  décembre  1874,  Ann,, 
76.85;  Poaillet,  Brev,  d'inv.f  n^  882)  ;  en  matière  de  marques  (Paris, 
lor  août  1893,  ilnn., 94.301;  Poaillet,  Marq.fab.,  n«  245).  La  Gourde 
ricatistr  tfavait  pas  eu,  jnsqu^ici,  à  se  prononcer  sur  cette  question  ; 
elle  ne  l'a  pas  encore  fait  cette  fois,  la  décision  attaquée  se  trouvant 
suffisamment  justifiée  par  d*autres  motib,  mais  M.  le  conseiller  rap 
porteur  (voir  son  rapport,  p.  203),  concluait  formellement  dans  le  sens 
de  la  jurisprudence  et  de  la  doctrine  et  fidsait  observer  qu'il  y  avait  eu 
délit  en  France  car  le  délit  ne  faisait  que  commencer  quand  on  impri- 
mait la  Causse  indication  de  provenance  en  Espagne  et  se  continuait 
jusqu'à  ce  que  les  fûts  eussent  été  transportés,  importés  et  vendus. 

(i>  a.  Gaas.,  14  mars  1883,  D.  83.1.B77  ;  Paris,  20  mars  1879,  S. 
80.i.49  ;  Trib.  dv.  Seine,  26  mars  1887,  Gaz.  Pal.,  87.1.480  ;  Vincent 
et  Penaud,  Dictionnaire  du  droit  international  privé,  v^  Compétence 
en  matière  civile,  n«27  et,  au  texte,  les  observations  de  M.  le  conseil- 
ler rapporteur,  Georges  Lemaire. 

(2)  L'article  3  du  Protocole  de  clôture  de  la  Convention  d'Union  ne 
peut  laisser  place  à  aucun  doute,  il  dit  que  la  convention  ne  porte  au- 
eone  atteinte  à  la  législation  de  chacun  des  Etats  contractants  en  ce  qui 
oofioerae  la  procédure  suivie  devant  les  tribunaux  et  la  compétence  de 
tribunaux. 


■'ils  sont  tous  Français  ; 

Que  dès  l'instant  où  un  tribanal  est  compétent  an  regard  d« 
l'an  d'eax.  il  l'est  à  l'égard  de  tous  ; 

Qti*QBfl  seule  condition  est  requise;  qu'il  faut  et  il  suRIt  qae 
tous  les  défendeurs  soient  tenus  et  obligés  par  une  même  cause  ; 
qfl'eu  an  mot  la  demande  soit  unie  envers  tous  ; 

Attendn  qa'il  n'est  pas  douteux  que  les  négociants  françaii 
lont  appelés  en  la  canse  par  Blandy  frères  et  Cie  au  même  titre 
que  les  négociants  étrangers  et  en  vertu  de  faits  identiques  ; 

Qu'à  ce  premier  point  de  vue  donc,  le  tribunal  du  Havre  a  été 
compétemment  saisi  ; 

Altendn  qu'il  existe  un  second  motif  non  moins  sérieux,  tiré 
de  la  nature  même  de  l'action  intentée  par  Blandy  frères  et  Cie, 
poar  justi&er  la  compétence  du  tribunal  ; 

Attendu  que  la  demande  de  Blandy  frères  et  Cie  contre  les 
différents  défendeurs  tend  à  la  réparation  d'un  dommage  qui 
leur  a  été  causé  par  un  qiiasi-délit  commis  en  France  ; 

Attendu  qu'il  a  été  constamment  ju^é  que  l'étranger  qui  a  à 
répondre  d'une  semblable  demande  vis-à-vis  d'un  autre  étran- 
EW  est  justiciable  des  tribunaux  français  ; 

Que  par  conséquent,  même  en  dehors  et  abstraction  faite  de 
U  règle  de  l'article  59,  g  S,  du  Code  de  procédure  civile,  le  tribu- 
nal serait  encore  compétent  ; 

Qu'enfin  et  surabondamment,  il  serait  vraiment  étrange  que 
la  saisie  eût  pu  être  opérée  au  Bavre,  suivant  les  formes  de  la 
loi  française  et  que  la  validité  de  cette  saisie  dOt  être  appréciée 
par  les  tribunaux  espagnols  ; 

Attendu  que  dès  l'instant  où  il  est  reconnu  que  le  tribunal  est 
compétent,  il  n'y  a  pas  lien  de  s'arrêter  aux  conclusions  de 
Blandy  frères  et  Cie  tendant  k  la  mainlevée  du  cautionnement 
prescrit  par  l'ordonnance  de  référé  du  15  mai  1S90  ;  , 

Pli  CBS  MOTIFS,  Dit  que  le  tribunal  a  été  compétemment  saisi  ; 
renvoie  au  mois  ponr  statuer  au  fond  ;  condamne  les  défendeurs 
de  nationalité  étrangère  aux  dépens  de  l'incident. 

Les  défendeurs  espagnols  ayant  Inteijelé  appel,  la  i" 
chambre  de  la  Cour  de  Rouen,  aous  la  présidence  de  M.le 
premier  président  Bercbon,  après  plaidoiries  des  mêmes 
avocats  qu'en  première  instance  et  conformément  aux 
coBclusions  de  M.  l'avocat  général  GQiRAi.,a  statué,  par  un 
seul  el  même  arrêt  en  date  du  S4  novembre  1897  : 


-  200  — 

Lu  Cour,  Attendu  que  tes  2i  instances  dont  UGoarest  ac- 
lellement  saisie  tendent  au  même  but  ;  qu'elles  soDlâveiit  une 
iule  et  même  question  qui  n'est  pas  susceptible  de  recevoir  une 
dation  diiïérente  poirrles  ans  et  pourles  autres;  qu'elles  se  pré- 
intent  toutes  dans  des  conditions  âe  fait  absolument  tdentiqaes  ; 
l'elles  sont  ainsi  étroitement  unies  par  an  lien  de  dépendance 
;  de  subordination  ; 

Attendu  que  si  la  connezité  suppose  qu'au  moins  l'une  des 
irtiea  a  Qgnré  dans  les  différentes  instances  dont  la  jonction 
Dit  être  prononcée,  la  présence  de  toutes  d&ns  les  unes  et  dans 
m  autres  n'est  pas  absolument  nécessaire  ;  que,  d'ailleurs,  la  loi 
'ajout  pas  défini  la  connexité  a  laissé  par  cela  même  aux  jugea 
1  souveraine  appréciation  des  circonstances  qui  la  constituent  ; 

Que,  par  suite  et  bien  qu'aucune  demande  n'ait  été  formée 
uant  &  ce,  il  y  a  lieu  de  prononcer  d'office  la  jonction  dans  un 
itérât  supérieur  d'une  bonne  administration  de  la  justice,  pour 
tre  statué  sur  le  tout  par  an  seul  et  même  arrêt  ; 

Au  fond  : 

Attendu  que  les  premiers  juges  ont  justement  repoussé  le  dé- 
inatoire d'incompétence  par  ce  double  motif,  d'une  part  qull 
agit  de  contestations  entre  étrangers  ayant  pour  objet  la  répa- 
ition  d'un  qnasi-délit  et  d'autre  part,  qne  le  demandeur  qui  a 
,it  assigner  des  étrangers  et  des  Français  bien  qu'étranger  lui- 
lAme,  était  bien  fondé,  en  vertu  de  l'article  59,  §  3,  du  Code  de 
rocédnre  civile,  à  les  assigner  tous  indistinctement  devant  le 
ibunal  du  domicile  de  l'un  d'eux  ; 

Attendu,  en  effet,  sur  le  premier  point  que,  d'après  le  libellé 
iflme  de  l'assignation,  Blandy  et  Cie,  négociants  établis  &  Fud- 
lal  (Hadêre),  se  plaignent  de  ce  que  des  négociants  espagnols 
at  importé  an  Havre,  à  la  destination  de  négociants  français 
Dmiciliés  dans  cette  ville,  des  fûts  de  vin  portant  le  nom  et 
étiquette  de  Uadère,  alors  que  ces  produits  vinicoles  ont  une 
rovenance  étrangère  à  l'Ile  de  Madère  ;  qu'il  est  même  apéciBé 
ans  le  délatif  de  cet  exploit  que  ces  agissements  commerciaax 
)BStituent  des  faits  de  fraude  et  de  concurrence  déloyale  prévus 
t  réprimés  par  la  loi  des  2S  juillet  et  4  août  182(,  par  celle  des 
:3  et  77  juin  1857  et  par  l'article  423  du  Code  pénal  ; 

Qu'il  est  certain,  en  droit,  que  les  tribunaux  ft^nçais  sont 
OOtpétents  pour  statuer  sur  une  instance  engagée  entre  étran- 
ers,  qui  a  pour  but  la  réparation  d'un  délit  ou  d'un  quasi-dé- 
t  commis  en  France,  parce  qu'aux  termes  de  l'article  3  du  Code 
iril  les  lois  de  police  et  de  sûreté  obligent  et  protègent  saaa 
îstinction  de  nationalité  tous  ceux  qui  habitent  le  territoire 
'ançais  et  qu'incontestablement  les  lois  de  1824  et  de  1857  sur 


—  202  — 

fie  pleinement  Tapplication  de  l'article  50,  §  2,  du  Gode  de  pro  - 
cédure  cirile 

Attendu,  dans  ces  conditions,  qu'il  est  surabondant  de  recher- 
cher si  la  juridiction  française  serait,  en  outre,  compétente,  soit 
en  vertu  de  la  Convention  de  Madrid,  soit  à  raison  de  la  validité 
de  la  saisie  ; 

Qu'il  est,  d'ailleurs,  hors  de  toute  contestation  que  l'article  3 
du  protocole  de  la  Convention  de  1882,  dont  celle  de  Madrid 
n'est  que  le  développement,  ne  contredit  aucun  des  principes  ci- 
dessus  exposés  en  ce  qui  concerne  la  compétence  ; 

Attendu  que  les  appelants  qui  succombent  doivent  supporter  les 
dépens  ; 

Par  ces  motifs,  Et  ceux  des  premiers  juges  non  contraires  ; 

Joint  les  24  instances  vu  leur  connexité  et,  faisant  droit  à 
l'appel  par  un  seul  et  même  arrêt  ;  met  les  appellations  à  néant 
et  confirme  les  jugements  attaqués  qui  sortiront  leur  plein  et 
entier  effet  ;  condamne  les  appelants  aux  amendes  et  aux  dépens. 

M.  Misa  s*6st  pourvu  devant  la  Cour  de  cassation  contre 
Tarrét  de  la  Cour  de  Rouen  et  a  formulé  les  moyens  sui- 
vants : 

10  Violation  par  fausse  application  de  l'article  59,  §  2,  du  Code 
de  procédure  civile  et  de  l'article  14  du  Gode  civil  en  ce  que, 
s'agissant  d'un  débat  entre  étrangers,  l'arrêt  attaqué  a  repoussé 
l'exception  d'incompétence  tirée  de  l'extranéité  en  se  fondant  sur 
ce  que  le  demandeur  étranger  avait  assigné  devant  le  tribunal 
français  à  la  fois  des  étrangers  et  des  Français,  alors  que  l'arti- 
cle 50,  §  2,  invoqué  par  l'arrêt  attaqué  ne  s'applique  pas  au  cas 
d'incompétence  des  tribunaux  français  à  l'égard  des  étrangers, 
lesquels  ne  peuvent  être  attirés  devant  ces  tribunaux  malgré  eux, 
en  y  assignant  en  même  temps  des  Français  ; 

2®  Violation  et  fausse  application  de  l'article  3  du  Code  civil, 
des  lois  des  28  juillet  1824  et  23  juin  1857  et  de  l'article  423  du 
Gode  pénal  en  ce  que  l'arrêt  attaqué  a  repoussé  en  outre  l'ex- 
ception d'incompétence  et  a  déclaré  les  tribunaux  français  com- 
pétents, bien  que  le  débat  s'agite  entre  étrangers  ne  résidant  ni 
l'un  ni  l'autre  en  France,  à  propos  d'une  action  en  dommages* 
intérêts  pour  concurrence  déloyale  intentée  par  des  négociants 
en  vins  portugais  de  Madère  contre  des  négociants  espagnols  im- 
portateurs en  France  de  fûts  de  vins  prétendument  qualifiés  et 
marqués  Madère^  par  le  motif  qu'il  s'agirait  de  la  répression  d'un 
délit  ou  quasi-délit  commis  en  France,  alors  que  d'une  part  l'ar- 
ticle 3  du  Code  civil  n'est  relatif  d'après  son  texte  même  qu'aux 
étrangers  résidant  en  France  et  qu'au  surplus,  il  est  inapplicable 


—  204  — 

ragraphe  de  Tarticle  59  vient  se  heurter,  au  même  titre  que  celle 
deFarticle  181,  à  une  incompétence  absolue,  ayant  tous  les  ca- 
ractères de  rincompétence  ratione  materiaey  que  les  tribunaux 
devraient  même  déclarer  d'ofOce,  qu'il  n'est  pas  en  tous  cas  au 
pouvoir  du  demandeur  d'éluder  par  un  artifice  de  procédure  et 
qui  ne  permet  pas  au  tribunal  français  de  retenir,  malgré  lui,  le 
défendeur  étranger. 

«  Le  pourvoi  prévoit  qu'on  lui  objectera  un  arrêt  de  la  cham- 
bre civile  du  14  mars  1883  (D.  P.  83.  1.  378)  portant  que  la  dis- 
position de  Tarticle  59,  §  2,  est  générale  et  doit  recevoir  son  ap- 
plication non  seulement  entre  Français,  mais  encore  lorsqu'un 
ou  plusieurs  défendeurs  sont  étrangers. 

«  Mais  cet  arrêt  doit  être  entendu  secundum  subjectam  mate^ 
riam.  n 

«  Il  s'agissait  non  d'un  litige  entre  étrangers  introduit  par  un 
étranger,  mais,  ce  qui  est  tout  différeprt,^  d'une  demande  formée 
par  un  Français  (ou  par  un  étranger  autorisé  à  établir  son  domi- 
cile en  France,  et  jouissant  des  mêmes  droits  qu'un  Français, 
art.  13,  G.  civ.)  contre  des  défendeurs  dont  Tun  était  Français 
et  l'autre  étranger  ;  en  sorte  que  la  demande  était  en  soi  et  en 
principe  de  la  compétence  des  tribunaux  français,  même  à  Végard 
du  défendeur  étranger  par  application  de  l'article  14,  et  que  la 
seule  question  qui  se  posait  était  celle  de  savoir  si  étant  donné 
que  le  demandeur  français  avait  en  fait  énoncé  conventionnelle- 
ment,  à  Tégard  du  défendeur  étranger,  au  bénéfice  de  l'article  14, 
il  pouvait  invoquer  l'article  59,  §  2.  L'incompétence  des  tribu- 
naux français  pour  connaître  des  contestations  entre  étranger 
(demandeur  et  défendeur)  se  trouvait  ainsi  hors  de  cause  et  la 
chambre  civile  a  simplement  proclamé  le  droit  absolu  du  Fran- 
çais (ou  de  l'étranger  assimilé,  art.  13)  d'assigner  en  vertu  de 
l'article  59,  §  2,  les  étrangers  devant  les  tribunaux  français  con- 
ointement  avec  des  défendeurs  français,  alors  même  qu'il  aurait 
renoncé  conventionnellement  au  bénéfice  de  l'article  14,  la  re- 
nonciation à  cet  article  n'emportant  pas  renonciation  au  droit 
conféré  p»r  l'article  59,  §  2.  Gela  n'a  donc  rien  à  voir  avec  la 
questijn  que  soulève  le  pourvoi  qui  est  de  savoir  si  la  règle  ex- 
ceptionnelle de  l'article  59,  §  2,  de  même  que  celle  de  l'arti- 
cle 181  s'applique  en  cas  d'incompétence  absolue  tirée  de  la  na- 
tionalité des  parties.  Ge  qui  aété  jugé  pour  l'article  181  s'impose 
pour  l'article  59,  §  2. 

«  Le  premier  moyen  du  pourvoi  est  donc  justifié. 

<c  II  importe  peu  que  la  mise  en  cause  des  codéfendeurs  tian- 
çais  (consignataires  et  destinataires)  soit  ou  non  sérieuse  ;  car 
il  s'agit  d'une  incompétence  absolue. 

u  Enfin  la  convention  diplomatique  n'attribue  pas  elle-même 


Ltige  né  de  l&  saisie. 

«  Observations  :  —Toute  l'argumentation  da  mémoiro  repose 
sur  cette  idée  que  rincompétence  des  tribanaui  français  pour 
statuer  sur  les  différends  entre  étrangers  serait  une  incompi- 
tence  absolue,  aussi  absolue  qu'une  iBcompétence  ratiattt  ma- 
taix.  (Test  une  erreur. 

■  Si  l'incompitence  était  absolue,  les  tribunaux  Trançais  oe 
poorraient  jamais  statuer  même  du  consentement  de  l'étranger 
défendeur.  Or  il  est  admis  que  l'étranger  peut  couvrir  l'incom- 
pétence par  une  convention  formelle  ou  en  ne  l'invoquant  pas, 
dit  H.  Garsonnet,  op.  cit.,  i"  édit.,  t.  I,  §  141,  p.  845  et  suiT., 
!•  édit.,  t.  2,  g  401,  p.  23  ;  Jur.  gén.,  Svpplémtnl,  *"  Droits  ci- 
iite,n"l81;  Beq.,1  janv.  18S7,  D.  P.  B7.1 .142  ;  Req.,  S  mars 
1S79,  au  rapport  de  H.  Féraud-Giraud,  D.  P.  80.1.9.  «Attendu, 
dit  cet  arrât,  que  si  les  tribunaux  français  ne  sont  pas  obligés  de 
juger  les  contestations  civiles  entre  étrangers,  en  matière  per- 
sonnelle et  mobilière,  lia  peuvent  rester  saisis  lorsqu'aucune  des 
parties  ne  conteste  lenr  compétence  ;  que,  quel  que  soit  le  ca- 
ractère de  l'exception  d'eitranéité,  elle  ne  constitue  pas  dans  ce 
cas  une  incompétence  absolue  et  d'ordre  public,  puisqu'elle  peut 
être  couverte  par  le  silence  persévérant  des  parties  et  que  le 
droit  qu'ont  lea  tribunaux  de  se  dessaisir  n'est  point  pour  eux 
une  obligation,  mais  une  simple  faculté  ;  qae  dès  lors,  les  étran- 
gers pouvant  ne  pas  se  prévaloir  de  cette  exception,  peuvent 
aussi  j  renoncer  formellement,  et  dans  ce  ca»,  ils  ne  sont  pas 
recoTables  à  revenir  sur  cette  renonciation.  »  Dans  l'espèce  de 
cet  arrêt  on  n'avait  excipé  de  l'incompétence  des  tribunaux  fran- 
çais qu'en  appel. 

«  Ainsi  l'incompétence  des  tribnnaux  français  pour  statuer  sur 
les  différends  entre  étrangers  n'est  pas  absolue^  comme  te  pré- 
tend le  pourvoi.  Cette  prétendue  incompétence  absolue  était  la 
base  du  moyen  ;  cette  base  fïiit  défaut. 

••  Dans  l'aSaire  actuelle,  noua  voyons  un  étranger  assigner 
devant  on  tribunal  frangais,  &  raison  d'un  même  fait  (l'apposi- 
tion d'une  fonsse  marque  de  pro venan ce ),d es  défendeurs  français 
eoosignataires,  destinataires]  et  des  défendeurs  étraufiers  (les 
upéditenrs). 

■  Les  défendeurs  français  ont  été  régulièrement  assignés  de- 
vant le  tribunal  français  de  leur  domicile,  le  Havre  :  c'est  un 
point  certain,  incontesté. 

«  Pent-on  assigner  en  même  temps  devant  ce  tribunal  du  Havre 
les  défendeurs  étrangers,  les  expéditeurs,  en  vertu  de  l'article  S9) 
S  S,  du  Code  de  procédure  civile  ainsi  conçu  t  "  Art.  59.  —  En 
matière  personnelle  le  défendeur  sera  assigné  devant  le  tribunal 


"••ÎB*«»ir 


F  y 


—  206  — 

de  son  domicile.  »  §  2.  «  S'il  y  a  plusieurs  défendeurs  derant  le 
tribunal  du  domicile  de  Tun  d'eux,  an  choix  du  demandeur.  » 

«  Cet  article  est-il  applicable  à  notre  espèce  ? 

«  Oui,  d'après  la  doctrine  et  la  jurisprudence.  La  doctrine  est 
résumée  par  MM.  Vincent  et  Penaud,  Dictionnaire  de  droit  inter- 
national  privé,  y*  Compétence  en  matière  civile^  n<>  27.  «  Il  est  ad- 
mis, disent-ils,  que  les  dispositions  de  l'article  59,  §  2,  du  Code 
de  procédure  civile  sont  générales  et  doivent  recevoir  applica- 
tion non  seulement  entre  Français,  mais  encore  lorsqu'un  ou 
plusieurs  défendeurs  sont  étrangers.  »  Ils  citent  des  auteurs  que 
nous  avons  vérifiés  ;  nous  nous  dispensons  de  les  citer,  plusieurs 
ne  font  qu'indiquer  la  question.  Ils  citent  des  arrêts  de  cours 
d'appel,  un  arrêt  de  cassation  du  2  février  1832  (Jur.  gén.^  r* 
Campét,  civ,  des  trib,  d'arrond.,  n*  80),  qui  ne  décide  la  ques- 
tion qu'implicitement,  enfin  l'arrêt  du  14  mars  1883  (D.  P.  83. 
1.377),  dont  le  mémoire  a  bien  compris  l'importance  et  dont  il 
a  essayé  d'écarter  Tapplicatiion.  Le  mémoire  oppose  un  arrêt  an- 
térieur de  cassation,  du  15  Janvier  1878,  au  rapport  de  M.  Gou* 
jet,  D.  P.  78.1.170.  Mais  précisément  dans  cette  affaire  il  s'agit 
de  plusieurs  actions  distinctes,  et  notamment  d'une  action  en 
sous-garantie  contre  un  étranger.  C'est  dans  ces  conditions  que 
rarrêtde  1878  a  dit: 

Que  la  disposition  de  l'article  181,  portant  que  ceux  qui  sont  as- 
signés en  garantie  sont  tenus  de  procéder  devant  le  tribunal  où  In 
demande  originaire  est  pendante^  déroge  à  la  règle  de  compétence 
établie  par  le  premier  paragraphe  de  l'article  59  du  même  Code  ; 
mats  qu'elle  n'autorise  pas  un  tribunal  à  retenir,  sous  prétexte  quUl 
s'agit  d^une  action  en  garantie^  une  contestation  dont  la  connais- 
sance ne  lui  appartient  pae,  à  cause  de  la  nature  du  litige  ou  de 
la  nationalité  des  parties, 

La  chambre  civile,  qui  avait  rendu  cet  arrêt  en  1878  et  re* 
poussé  l'application  de  l'article  181  en  se  fondant  sur  la  plura- 
lité des  actions,  a,  en  1883,  déclaré  l'article  59,  §  2,  applicable 
parce  qu'il  n'y  avait  qu'une  seule  et  même  action  intentée  contre 
plusieurs  défendeurs. 

(c  Et  cette  action  unique^  il  importe  qu'elle  ne  soit  pas  expo- 
sée à  donner  lieu  à  des  décisions  contradictoires  devant  des  ju- 
ridictions différentes,  et  spécialement  devant  des  tribunaux  ap- 
partenant à  diverses  nationalités. 

«  Il  n'est  pas  douteux,  dans  notre  espèce,  qu'il  s'agit  réelle- 
ment d'une  action  unique,  que  les  défendeurs  espagnols  comme 
^es  défendeurs  français  sont  poursuivis  pour  la  même  cause,  à 
raison  de  faits  identiques,  ou  plutôt  d'un  seul  et  même  fait,  de  la 
fausse  marque  de  provenance  du  vin. 
t<  Les  destinataires  ou  consignataires  français  sont  des  défen- 


I,  poursuivre  devant  les  tribunaux  français  et  contre 
ranger  la  réparation  dn  dommage  qu'il  a  aubi  par 
élil  ou  qaaai-dëtit,  c!est  qu'il  rëside  en  France  ou  y 
biens  ;  c'est,  disent  UU.  Aubry  et  Rau,  u  que  le  délit 
lëlit  commis  en  France  l'ait  été  contre  sa  personne  on 
ens  qu'il  possède  »  (t.  S,  §  748  bis,  p.  146,  passage 
T  le  fait  dommageable  dont  Bland;  frères  poursni- 
ration  u'à'pas  été  commis  en  France  contre  learper- 
itre  des  biens  qu'ils  n'y  possèdent  pas. 
e  branche.  —  La  deuxième  branche  est  tirée  de  ce 
ou  quasi-délit  poursuivi  par  Blandy  frères  contre 
été  commis  en  France. 

it  dommageable,  objet  de  la  poursuite,  consiste  dans 
le  la  marque  Madère  ;  elle  a  eu  lieu  en  Espagne,  et 
Il  pour  but  d'empâcher  l'introduction  en  France  des 
la  fausse  indication.  Le  fait  délictueux  ayant  été 
n  Espagne,  où  Misa  l'expéditeur  a  son  domicile,  ne 
poursuivi  qu'en  Espagne. 

irétend  que  les  tribunaux  français  sont  compétents 
lélit  commis  hors  de  France,  c'est-à-dire  l'apposition 
marque  d'origine,  l'étranger  a  participé  au  délit  de 
ite  sur  le  sol  français,  s'il  a  introduit  en  France  la 
:  vendue  ou  destinée  à  être  vendue  sur  le  sol  français, 
1  fausse  marque  ; 

loire  répond  que  l'action  des  frères  Blandy  est 
fondée  sur  l'apposition  de  la  fausse  marque  et  non 
ction  en  France  des  fûts  qui  la  portent, ni  sur  la  par- 
directe  qui  en  résulterait  à  des  faits  de  vente  ou  de 
e  de  ces  fûts,  Gela  est  tellement  vrai  que  la  saisie 
1  débarquement  même,  avant  la  remise  anx  destina- 
lément,  ainsi  que  le  disent  les  frères  Blandy  dans 
;,  pour  empêcher  l'introduction  en  France  desdits 
onséquent  avant  toute  mise  en  vente.  Ce  n'est  pas,^, 
r  la  vente  ou  la  mise  en  vente  en  France  de  vins 
inalillés  Madère,  mais  exclusivement  sur  l'apposition 
tte  indication  d'origine  et  sur  la  concurrence  déloyale 
Ait,  que  l'action  en  dommages-intérêts  des  sieurs 
)  était  fondée.  Les  tribunaux  français  étaient  incom* 
en  connaître. 

IONS.  —  Première  branche.  —  Le  mémoire  prétend 
naux  français  ne  sont  pas  compétents  pour  statuer 
ndes  de  dommages-intérêts  formées  par  des  étran- 
les  étrangers  à  raison  de  délits  ou  de  quasi-délits 
France.  Du  moins  la  Cour  de  cassation  n'a  pas 
iccasion  de  statuer  sur  la  questiou  dans  les  termes 


—  208  — 

Code  civil,  poursuivre  devant  les  tribunaux  français  et  contre 
un  autre  étranger  la  réparation  du  dommage  qu'il  a  subi  par 
suite  d'un  délit  ou  quasi-délit,  c'est  qu'il  réside  en  France  ou  y 
possède  des  biens  ;  c'est,  disent  MM.  Aubry  et  Rau,  a  que  le  délit 
ou  le  quasi-délit  commis  en  France  l'ait  été  contre  sa  personne  ou 
contre  les  biens  qu'il  possède  »  (t.  8,  §  748  bis,  p.  146,  passage 
déjà  cité).  Or  le  fait  dommageable  dont  Blandy  frères  poursui- 
vent la  réparation  n'àpas  été  commis  en  France  contre  leur  per- 
sonne ni  contre  des  biens  qu'ils  n'y  possèdent  pas. 

«  Deuxième  branche,  —  La  deuxième  branche  est  tirée  de  ce 
que  le  délit  ou  quasi-délit  poursuivi  par  Blandy  frères  contre 
Misa  n'a  pas  été  commis  en  France. 

«  Car  le  fait  dommageable,  objet  de  la  poursuite,  consiste  dans 
l'apposition  de  la  marque  Madère  ;  elle  a  eu  lieu  en  Espagne,  et 
la  saisie  a  eu  pour  but  d'empêcher  l'introduction  en  France  des 
fdts  portant  la  fausse  indication.  Le  fait  délictueux  ayant  été 
consommé  en  Espagne,  où  Misa  l'expéditeur  a  son  domicile,  ne 
pouvait  être  poursuivi  qu'en  Espagne. 

u  L'arrôt  prétend  que  les  tribunaux  français  sont  compétents 
si,  outre  le  délit  commis  hors  de  France,  c'est-à-dire  l'apposition 
de  la  fausse  marque  d'origine,  l'étranger  a  participé  au  délit  de 
mise  en  vente  sur  le  sol  français,  s'il  a  introduit  en  France  la 
marchandise  vendue  ou  destinée  à  être  vendue  sur  le  sol  français, 
revêtue  de  la  fausse  marque  ; 

«  Le  mémoire  répond    que  l'action  des  frères   Blandy  est 
uniquement  fondée  sur  l'apposition  de  la  fausse  marque  et  non 
sur  l'introduction  en  France  des  fûts  qui  la  portent,ni  sur  la  par- 
ticipation indirecte  qui  en  résulterait  à  des  faits  de  vente  ou  de 
mise  en  vente  de  ces  fûts.  Cela  est  tellement  vrai  que  la  saisi 
a  été  faite  au  débarquement  même,  avant  la  remise  aux  destiî' 
taires,  précisément,  ainsi  que  le  disent  les  frères  Blandy 
leur  requête,  pour  empêcher  l'introduction  en  France  <i 
fûts  et  par  conséquent  avant  toute  mise  en  vente.  Ce  n 
d'ailleurs,  sur  la  vente  ou  la  mise  en  vente  en  Franr 
faussement  qualifiés  Madère,  mais  exclusivement  sur  ' 
illégale  de  cette  indication  d'origine  et  sur  laconcurr 
qui  en  résultait,  que  l'action  en  dora  m 
Blandy  frères  était  fondée.  Les  t**" 
pétents  pour  en  connaître. 

«  ÛBSBaVATIONS.  —  Pr^ 

que  les  tribunaux  fr^ 
sur  les  demande*^ 
gers  contre  do 
commis  en 
encore  eu  l 


—  •2m  — 

où  elle  le  pose.  Elle  a  décidé  qae  V^  tr.i<u:aa 
compétents  dans  hd  cas  où  l'acliMi  d>iK  ^u 
□  o  tribunal  correclionnel  en  même  ko.;*  ou: 
(Ch.  crim.,  15  avril  1842,  Jw.  gm.,  »•  £r-^ 
note). 

«  Hais  la  Cour  de  cassation  n'a  pâ<  o^,:^ 
français  seraient  incompétent)  si  l'actavL  -i  . 
était  intentée  devant  un  Iribunal  cîTi]  hl  »  ^ 
an  qaaai-délit.  A  cet  é{;ard  il  n'v  a  qo^  iî  b^ 
et  la  jurisprudence  des  Cours  d'at'ptrl. Mus  tx  ; 
lement  tout  le  monde  s'accorde  i  adm^Lr! 
tribunaux  français. 

«  Ils  sont,  disent  HH.  Aabr;  et  Ru.  Or^riK ^ 
nelle  et  mobilière,  compétents  pour  «Uiur-  si 
entre  étraD(;ers  dans  les  cas  suivantt:  t... 
a  ponr  objet  la  réparation  du  dommu!*  ^gu 


M.  Ta- 
de  M* 

avocat 


iolation 
Kédure 

int,  à  la 
9  négo- 
Is  fran- 
t  été  in- 
e  leurs 
t  régn- 
inal  du 

océdure 


T^'frTvî^'''^  '""s^  '^  "  '        " 'rf' >^.  •«fTTyji-'-irMr'f  .^jv'"'T'T^"fr^' ■•~'^^**r 


—  210  — 

par  MM.  Aubry  et  Rau.  «  Les  tribunaux  français,  disent  ces  au- 
teurs, sont  compétents  lorsque  l'action  a  pour  objet  la  répara- 
tion du  dommage  causé  par  un  délit  ou  par  un  quasi-délit  com- 
mis en  France  contre  la  personne  d'un  étranger  ou  contre  les 
biens  qu'il  y  possède.  »  Gomme  il  ne  s'agit  pas  ici  d'un  délit 
contre  la  personne,  dit  le  mémoire,  il  faudrait  quMl  s'agit  d'un 
délit  contre  les  biens.  Or,  les  sieurs  Blandy  n'en  possèdent  pas 
en  France.  Donc,  les  sieurs  Blandy  ne  peuvent  pas  poursuivre 
les  défendeurs  espagnols  devant  les  tribunaux  français. 

«  Cette  interprétation  étroite  est  inadmissible.  Car  on  peut 
être  victime  d'un  délit  sans  être  matériellement  atteint  dans  sa 
personne  ou  dans  des  choses  mobilières  ;  on  peut  être  par  exem- 
ple victime  d'un  délit  de  diffamation,  d'un  quasi-délit  de  con- 
currence déloyale.  C'est  ce  que  la  chambre  criminelle  a  décidé 
le  22  juin  1826  {Jur,  gèn.^  v»  Lois^  n°  451-3°),  au  sujet  d'une  dif- 
famation commise  contre  un  Anglais,  qui  n'habitait  pas  la  France 
mais  la  Belgique,  lieu  du  délit,  même  décision  dans  un  autre 
arrêt  de  la  chambre  criminelle  du  12  février  1885  (D.P.  85.4.432), 
où  on  lit  : 

i<  Sur  le  deuxième  moyen,  tiré  de  Vextranéité  de  la  demoiselle 
Stegmanrij  partie  civile  :  —  Attendu  que  par  la  généralité  de  leurs 
termes,  les  articles  3  et  63  du  Code  d'instruction  criminelle  autori^ 
sent  faction  des  étrangers  comme  des  Français  en  réparation  du 
dommage  camé  par  un  crime,  par  un  délit  ou  par  une  contraven^ 
tion,  » 

«  L'économie  de  la  loi  de  1844  sur  les  brevets  d'invention  sup- 
pose et  règle  Faction  des  brevetés  étrangers.  L'action  des  négo- 
ciants étrangers  contre  des  négociants  français  ou  étrangers  est 
la  conséquence  de  la  législation  internationale  établie  par  la  con- 
vention du  20  mars  1883  pour  la  protection  de  la  propriété  indus* 
trielle  et  de  la  convention  signée  à  Madrid  les  14  et  15  avril  1891. 
Nous  lisons  dans  la  convention  du  20  mars  1883  »  :  Art.  9.  —  Tout 
produit  portant  illicitement  une  marque  de  fabrique  et  de  com- 
merce ou  un  nom  commercial,  pourra  être  saisi  à  l'importation 
de  l'un  des  Etats  de  l'Union  dans  lesquels  cette  marque  ou  le 
nom  commercial  ont  droit  à  la  protection  légale.  La  saisie  aura 
lieu  à  la  requête  soit  du  ministère  public,  soit  de  la  partie  in- 
téressée, conformément  à  la  législation  intérieure  de  chaque 
pays.  Art.  10.  —  Est  réputé  partie  intéressée  tout  fabricant  ou 
commerçant  engagé  dans  la  fabrication  où  le  commerce  de  ce 
produit  est  établi  dans  la  localité  faussement  indiquée  comme 
provenance.  »  La  convention  de  Madrid  de  1883,  qu'il  s'agit  pré- 
cisément d'appliquer  dans  notre  espèce,  autorise  également  la 
partie  intéressée  à  requérir  la  saisie  de  tout  produit  portant  une 
fausse  indication  de  provenance.  Ainsi  le  négociant  ou  le  proprié- 


Atienau  que  les  siears  Uianay  ireres  et  (jie  poursuivaieDi,  a  la 
fois,  pour  les  m6mes  faits,  des  nët^ociants  français  cl  des  négo- 
ciants espagnols  ;  que  l'arrêt  constaleque  les  négociants  fran- 
çais étaient  des  défendeurs  sérieux  et  qu'ils  n'avaient  pas  été  in- 
Irodaits  dans  l'instance  pour  distraira  les  étrangers  de  leurs 
juges  naturels  ;  qu'il  est  constant  que  les  sieurs  ttlandy  ont  régu- 
liéremenl  assigné  les  négociants  Trançais  (levant  le  Tribunal  du 
Hayre,  tribunal  du  domicile  de  ces  négociants  ; 

Attendu  qu'aux  termes  de  l'article  59  du  Code  de   procédure 


—  212  — 

civile  «  en  matière  personnelle  le  défendeur  sera  assigné  devant 
le  tribunal  de  son  domicile  »  (§  4«»*)  et  «  s'il  y  a  plusieurs  défen- 
deurs, devant  le  tribunal  du  domicile  de  Tun  d'eux  au  choix  du 
demandeur  »  (§  2)  ;  que  cette  disposition  est  générale  et  doit  re- 
cevoir son  application  non  seulement  entre  Français,  mais  en- 
core lorsqu'un  ou  plusieurs  défendeurs  sont  étrangers  ;  que  c'est 
doue  à  bon  droit  que  les  sieurs  Blandy  frères  et  Gie,  en  intentant 
la  même  action,  fondée  sur  les  mêmes  faits,  à  la  fois  contre  des 
négociants  français  du  Havre  et  contre  le  sieur  Misa,  négociant 
espagnol,  ont  assigné  celui-ci  avec  les  antres  défendeurs  devant 
le  Tribunal  du  Havre  ;  que  ce  motif  suffit  pour  justifier  la  décision 
attaquée  et  qu'il  est  dès  lors  sans  intérêt  de  statuer  sur  le  second 
moyen  du  pourvoi  ; 

Par  CBS  motifs,  Rejette,  etc.. 


Art.  4236. 


Nom»  de  localités.  —  Fausses  IncUeatlons  de  prove- 
naiKse  sar  lem  marehandlses.  —  Arrangremeiit  de 
Madrid.  —  AppeUatlon  réi;ionale  de  pro'renance 
de  produits  vinicoles.  —  Vin  de  MadÀre.  —  Inter- 
prétation des  conventions  internationales.  — 
Bonne  foi  des  destinataires.  —  Saisie*  —  ConOsen- 
tion.  —Cautionnement et  caution Jndioatum  solvi. 
—  Intérêts  des  sommes  cautionnées. 

En  fait,  le  nom  de  Madère  nia  jamais  cessé  de  désigner 
la  provenance  d'un  vin  qui,  bien  que  soumis  à  un  mode  de 
préparation  spéciale,  emprunte  ses  qualités  essentielles  au 
terroir  et  au  climat  qui  le  produit,  l'exportation  du  vin  de 
File  de  Madère  n'a  jamais  été  interrompue  malgré  les  ra- 
vages de  Voîdium  et  du  phylloxéra,  les  négociants  madé^ 
rois  n'ont,  à  aucune  époque,  entendu  renoncer  à  se  préva- 
loir de  cette  appellation  commerciale  et  ils  ont  poursuivi 
leurs  concurrents  en  France  dès  que  F  Arrangement  de  Mor 
drid  de  1891  leur  en  a  fourni  les  moyens  ;  la  dénomination 
Madère  ou  vin  de  Madère  n*a  donc  pu,  à  aucun  moment, 
tomber  dans  le  domaine  public,  elle  est  indicative  non  d*uH 
genre  et  d'un  type,  mais  bien  d'un  lieu  de  production  et  de 
fabrication  de  certains  vins  naturels  spécialement  connus 
sous  cette  qualification  et  fait  partie,  à  ce  titre,  dupatri- 


—  216  — 

jurisprudence  constante  qu'un  jui^emeot  qui  refuse  d'accorder  le 
sursis  sollicité  par  une  des  parties  peut  être  considéré  comme 
constituant  une  simple  mesure  d'ordre  tenant  à  l'administration 
intérieure  de  la  justice,  non  susceptible  d'appel,  ou  en  tous  cas, 
un  jugement  préparatoire  dont  l'appel  ne  peut  être  relevé  qu'a- 
vec celui  du  fond  ;  qu'il  est  évident  que  le  jusemenl  du  37  mai 
dernier  ne  préjufie  absolument  rien  et  qu'il  se  borne  à  mettre  la 
""ise  en  état  d'Stre  vidée;  qu'il  y  a  lien  dans  ces  conditions  de 
eter  sur  ce  point  les  prétentions  des  défendeurs  ; 

■•ar  ces  xotiks.  Dit  n'y  avoir  lie»  d'accorder  le  nouveau  sursis 
licite  ; 

attendu  que  Blandy  frères  et  Cie  sont  propriétaires  à  Fanchal 
I  de  Madère)  d'une  maison  de  commerce  qui  a  pour  spécialité 
vente  des  vins  produits  par  l'Ile  de  Madère  même  ; 
attendu  quo  victimes  depuis  longtemps  de  nombreux  actes  de 
ncnrrence  déloyale  de  la  part  de  commerçants  vendant  et  li- 
int  à  la  consommation,  sous  le  nom  de  vins  de  Madère,  des 
is  ayant  une. antre  origine,  ils  ont  résolu  de  s'adresser  àlajus- 
e  pour  y  mettre  fin  ; 

[Ju'ayant  appris  l'arrivée  an  Havre  par  le  vapenr  Constantin  et 
débarquement  de  nombreai  fûts  de  vins  do  ce  genre,  eipé- 
is  par  des  maisons  espagnoles,  ils  ont  le  13  mai  1896  sollicité 
président  de  ce  siège  une  ordonnance  h  fin  d'être  autorisés  à 
sir  ces  fûts  iqoe  cette  saisie  eut  lieu  le  là  mai  1806  par  H*  Ca- 
iau,  huissier  ; 

attendu  que  Blandy  frères  et  Cie  ont  ensuite  assigné  les  divers 
éressés,  expéditeurs,  transitaires,  consignataires,  destinatai- 
I,  devant  ce  tribunal  en  validité  de  la  saisie  et  en  paiement 
dommages-intérêts  à  fixer  par  état  ; 

Utendu  que  la  demande  de  Blandy  Trères  et  Cie  est  basée  sur 
e  Convention  signée  à  Madrid  en  1891,  entre  différentes  pnis- 
ices,  parmi  lesquelles  le  Portugal,  la  France  et  l'Espagne,  et 
imutgnée  en  France  en  1892  par  la  publication  an  Journal 
teiel; 

attendu  que,  sur  cette  action  de  Slandy  frères  et  Cie,  les  dé- 
ideurs  ont  opposé  devant  ce  tribunal  deux  exceptions,  l'une 
ncoropétence,  l'autre  de  caution  judieatum  solvi  ;  qu'un  juge- 
int  rendu  par  ce  tribunal  le  34  décembre  1896  a  rejeté  l'eicep- 
n  d'incompétence  et  ordonné  qu'il  serait  plaidé  au  fond  ;  qu'un 
tre  jugement  du  même  jour  a  ordonné  qu'une  somme  de 
)  francs  par  chaque  défendeur  français  serait  versée  à  la  Caisse 
I  dépêts  et  consignations  &  titre  de  caution  judicalum  solvi; 
e  les  versements  ordonnés  ont  été  effectués  le  3i   décembre 


Il  ••mf*\- 


-  220  — 

Attendu  que,  dès  1824,  le  législateur  s*est,  à  juste  titre,  préoc- 
cupé de  la  protection  des  noms  de  lieux  ; 

Qu'ainsi  la  loi  du  28  juillet  1824  a  défendu  aux  fabricants 
d'indiquer  faussement  une  localité  comme  étant  le  lieu  de  fabri- 
cation de  leurs  produits  ;  que  les  vins  bénéficièrent  de  cette  dis- 
position nouvelle; 

Qu'il  fut  reconnu  que  les  vins  devaient  être  considérés  à  ce 
point  de  vue  comme  des  objets  fabriqués  puisqu'ils  étaient,  pour 
partie  du  moins,  le  résultat  de  manipulations,  de  préparations, 
de  soins,  de  procédés  qui  avaient  une  influence  sur  leur  valeur 
et  que  les  noms  des  localités  ou  des  régions  de  production 
avaient  droit  à  la  protection  de  la  loi  ; 

Que  la  jurisprudence  a  fait  depuis  lors,  à  maintes  reprises, 
Tapplication  de  ces  principes  aux  dénominations  des  principaux 
crûs  de  vins  français  ;  que  c'est  ainsi,  notamment,  qu*il  a  été 
décidé,  par  difTérents  arrêts,  que  le  mot  «  Champagne  »  ne  pou- 
vait être  employé  que  pour  désigner,  à  Texclusion  de  tout  autre, 
le  vin  mousseux  spécial  récolté  et  fabriqué  dans  Tancienne  pro- 
vince de  Champagne  ; 

Attendu  que,  dès  1873,  une  loi  en  date  du  26  novembre  accorda 
en  France  aux  étrangers  la  même  protection  qu'aux  Français, 
sous  la  seule  condition  de  Texistence  d'une  réciprocité,  soit  lé- 
gislative, seit  diplomatique,  au  profit  des  nationaux  français  à 
rétranger  ; 

Qu'en  1883  une  Convention  internationale,  signée  entre  autres 
par  les  représentants  de  la  France,  de  l'Angleterre,  de  l'Espagne, 
du  Portugal,  établit,  relativement  aux  brevets  d'invention,  au 
nom  commercial,  une  égalité  complète  de  droits  entre  les  res- 
sortissants de  chacun  des  Etats  compris  dans  l'Union  ; 

Que  l'article  9  de  ladite  Convention  stipule  que  : 

«  Tout  produit,  portant  illicitement  une  marque  de  fabrique 
ou  de  commerce  ou  un  nom  commercial,  pourra  être  saisi  è 
l'importation  dans  ceux  des  Etats  de  l'Union  dans  lesquels  cette 
marque  ou  ce  nom  commercial  ont  droit  à  la  protection  légale  ; 

Attendu  qu'aux  termes  de  l'article  10  : 

«  Les  dispositions  de  l'article  précédent  sont  applicables  à  tout 
produit  portant  faussement  comme  indication  de  provenance  le 
nom  d'une  localité  déterminée,  lorsque  cette  indication  sera 
jointe  à  un  nom  commercial  fictif,  emprunté  dans  une  intention 
frauduleuse  ;  » 

Attendu  que  la  Convention  de  1883  avait  pris  soin  de  réserver 
aux  Etats  signataires  la  faculté  de  conclure  ultérieurement  entre 
eux  des  arrangements  particuliers,  des  unions  restreintes^  pourvu 
qu'il  ne  fût  pas  contrevenu  à  ses  dispositions  générales  ; 

Attendu  qu'en  1891^  usant  de  cette  faculté,  la  France,  le  Brésil, 


■y^mfmmif'^mmmmi^mmmimmmmmmmmmm^m^mimK^immmmmmt^ffmmçmmiPwm 


—  222  — 

Attendu  que  le  nom  de  Madère  est  bien  une  appellation  régio* 
nale  de  provenance  de  produits  vinîcoles  ; 

Que  ce  nom  est  donc  la  propriété  exclusive  des  viticulteurs  de 
l'ile  de  Madère  et  ne  peut  être  apposé  que  sur  les  vins  provenant 
de  cette  lie  ;  que  c'est  donc  avec  raison  que  Blandy  frères  repro- 

».  chent  aux  défendeurs  d'avoir  placé  le  mot  Madère  ou  Madeira  sur 

des  fûts  remplis  de  vins  d'Espagne  ; 

Attendu  qu'en  réponse  à  cette  argumentation,  les  défendeurs 
objectent  tout  d'abord  que  le  mot  Afac^re  est  depuis  longtemps 
tombé  dans  le  domaine  public,  qu'il  n'est  plus  aujourd'hui  indi- 

î  catif  que  d'un  genre  de  vin  fabriqué  en  France  et  en  Espagne 

i  comme  à  Madère,  et  non  d'un  vin  d'origine  ; 

I  Attendu  que  cette  objection  est  sans  valeur  ; 

^  Attendu  qu'en  droit  le  mot  Madère  constituant  de  toute  évi- 

dence et  par  lui-même  une  appellation  régionale  de  produits  vi- 
nicoles,  ne  peut  plus,  aux  termes  de  l'article  4  de  l'Arrangement 

Y  de  Madrid,  être  considéré  comme  une  appellation  générique  ; 

[  Attendu  qu'en  fait  l'insistance  que  mettent  les  défendeurs  à 

f'  vouloir  se  servir  du  mot  Uadère  pour  qualifier  leurs  vins  prouve 

bien  que  ce  mot  a  pour  les  acheteurs  une  importance  particulière 
*        et  déterminée  ;  que,  si  les  défendeurs  sont  si  désireux  de  vou- 

.  loir  continuera  employer  le  mot  Madère,  c'est  qu'ils  savent  que 

I  le  mot  Madère  éveille  toujours  chez  l'acheteur  l'idée  d'un   vin 

\  d'une  provenance  spéciale,  c'est  qu'il  y  a  là  pour  eux  un  moyen 

-  commode  et  facile  d'écouler,  à  l'aide  de  ce  subterfuge,  leurs  vins 

et  d'exploiter  la  crédulité  du  public  ; 

Qu'il  n'y  a  pas  à  se  préoccuper  des  soi-disant  usages  du  com- 
merce et  de  l'habitude  qu'ont  pu  prendre,  sans  protestations  jus- 
qu'ici, les  négociants  espagnols  de  vendre  et  les  négociants  fran- 
çais d'acheter  sous  le  nom  de  Madère  pour  le  livrer  au  public 

^  avec  cette  dénomination,  une  sorte  de  vin  au  lieu  d'un  vin  d'ori- 

gine; 

Que  ce  seraient  là,  dans  tous  les  cas,  des  abus»  condamnés  par 
la  loi,  qui  n'ont  duré  que  trop  et  qu'il  convient  d'arrêter  et  de 
réprimer  ; 

Que  s'il  était  vrai,  du  reste,  que  le  public,  en  achetant  du  vin 
dénommé  Madère,  crût  acheter  seulement  un  genre  de  vin,  il 
devrait  être  indifférent  aux  Espagnols  de  le  vendre  sous  un  autre 

nom  ; 

Attendu  qu'il  importe  peu  encore  que  les  négociants  madérois 
aient  attendu  jusqu'à  ce  jour  pour  faire  valoir  leurs  droits  ;  que 
chacun  est  libre  d'exercer  le  droit  que  la  loi  lui  reconnaît  comme 
et  quand  bon  lui  semble  ; 

Qu'il  est  inexact  de  dire  que  les  Champenois  n'ont  obtenu  gain 
de  cause  devant  les  tribunaux  français  que  parce  qu'ils  avaient 


à 


I 


—  224  — 

raison  de  leur  degré  alcoolique  élevé  ;  que  les  règles  que  ces  deux 
textes  édictent  n'ont  aucun  rapport  avec  ce  qui  est  le  fond  du 
procès  actuel  ; 

Attendu  d'ailleurs  qu'inversement  il  serait  facile  de  citer  divers 
documents  qui  semblent,  de  leur  côté,  établir  une  assimilation 
entre  les  vins  de  liqueur  et  les  vins  de  Champagne  ;  que  Blandy 
frères  et  Gie  seraient  donc  fondés  à  en  conclure  que  les  vins  de 
liqueur  et  les  vins  de  Champagne  sont  soumis  au  même  traite- 
ment et  que,  la  dénomination  de  Vin  de  Champagne  étant,  de 
Tayeu  de  tous,  complètement  sauvegardée  par  les  articles  1*'  et  4 
de  TArrangement  de  Madrid,  il  doit  en  être  de  même  pour  la 
dénomination  des  vins  de  liqueur  et,  par  suite,  du  vin  de  Madère  ; 
Attendu  qu'en  réalité  tous  ces  documents  ont  une  destination 
spéciale  ;  que  ni  les  uns  ni  les  autres  ne  peuvent  servir  à  éclairer 
la  solution  de  ce  litige  ; 

Que  c'est  uniquement  à  la  lueur  des  lois  organiques,  c'est-à- 
dire  de  la  loi  du  28  juillet  1824  et  des  articles  1"  et  4  de  l'Arran- 
gement de  Madrid,  qu'il  faut  examiner  et  trancher  le  débat  porté 
devant  le  tribunal  ; 
Que  les  dispositions  de  ces  lois  sont  explicites  ; 
Qu'il  faut  s'y  conformer,  quelque  rigoureuses  que  puissent  en 
être  les  conséquences  pour  le  commerce  de  certains  pays  ; 

Attendu  que  l'Arrangement  de  Madrid  n'est  autre  chose  qu'une 
Convention  synallagmatique  ne  comportant  pas  seulement  des 
avantages,  mais  aussi  des  charges  pour  les  ressortissants  de 
chaque  pays  signataire  ;  que  cette  Convention  constitue,  comme 
on  l'a  dit  avec  raison,  une  ligne  de  probité  commerciale  dont 
seraient  mal  venus  à  se  plaindre  ceux  qui  pourraient  en  souffrir  ; 
Attendu  que  le  jugement  par  défaut  du  8  juillet  1898  avait  dé- 
cidé que  les  marchandises  saisies  seraient  confisquées  ; 

Attendu  que  MM.  Diez  hermanoz  et  joints  concluent  subsidiai- 
rement  à  ce  que  cette  décision  soit  rapportée  ; 

Que,  suivant  eux,  la  confiscation  est  une  peine  ;  que,  dès  lors, 

le  tribunal  correctionnel  est  seul  compétent  pour  la  prononcer  ; 

Attendu  que  la  confiscation  n'a  pas  toujours  et  forcément  le 

caractère  d'une  peine  ;  qu'elle  est  aussi  parfois  un  élément  de 

réparation  civile  ; 

Qu'ainsi  il  est  depuis  longtemps  admis  qu'en  matière  de  bre- 
vêts  d'invention  et  de  marques  de  fabrique,  les  tribunaux  civils 
ont  qualité  pour  prononcer,  au  profit  des  plaignants,  la  confisca- 
tion des  objets  contrefaits  ;  que  les  tribunaux  civils  ne  pronon- 
cent pourtant  pas  de  peines  ; 

Attendu  que  TArrangement  de  Madrid  n'autorise  pas,  il  est 
vrai,  en  termes  exprès,  la  confiscation  ; 


OD  Citoyens  de  cbacan  des  Etats  contractants  jouiront,  dans  tous 
1h  autres  Etats  de  l'Union,  en  ce  qui  coneerue  le  nom  commer- 
cial, des  avantages  que  les  lois  accordent  respectivement  actuel- 
lement ou  accorderont  par  la  suite  aux  nationaux  ; 

Qoe  si  les  articles  1",  2  et  3  de  l'Arrangement  de  Uadrid  ne 
parlent  que  de  la  saisie,  ce  n'est  là  évidemment  qu'un  minimum 
de  protection  qui  peut  se  trouver  considérablement  augmenté 
parles  lois  intérieures  de  chaque  Etat  ; 

Qn'en  réalité  l'Arrangement  de  Madrid  a  entendu  mettre  à  la 
disposi^on  des  étrangers  les  moyens  de  protection  réservés  ju>- 
que-tà  aux  oationaux  de  chacun  des  Etats  signataires  ; 

Attendu  que  la  législation  française  a,  précisément  en  1S44  et 
(857,  organisé  un  ensemble  de  mesures  destinées  à  protéger  la 
piopriélé  des  brevets  d'invention,  des  marques  de  fabrique  et  des 
noms  de  lieux  ; 

Qu'il  n'est  pas  douteux  qae  les  dispositions  de  l'article  19  de  la 
l'.'i  du  23  juin  18S7  puissent  être  actuellement  invoquées  avec 
profit  par  les  étrangers,  et  entre  autres  par  Bland;  frères  et  Cie  ; 

Qu'il  en  eet  de  même,  par  suite,  de  l'article  H  qui  prévoit  la 
confiscation,  auquel  renvois  expressément  l'article  19  ; 

Que  l'article  14,  obJecte-^OD,  est  compris  dans  le  titre  III  au 
titre  des  pénalités; 

Attenduqu'il  résulte  du  paragraphe3de  cet  article  14  lui-même 
qae  la  cooGscation,  malgré  la  place  qu'occupe  cet  article,  n'en 
Ml  pas  moins  envisagée  comme  an  élément  de  dommages-in- 
Wréts;  , 

Qae  les  tribunaux  civils  sont  donc  compétents  pour  l'ordon- 
Mt;  que  toutefois  cette  confiscation  demeure  pour  eux  facul- 
Utiie  ; 

Attendu  que  Blandy  frères  et  joints  avaient  par  leur  assignation 
iKkmé  des  dommages-intérêts  ;  qu'ils  ont  éprouvé  un  préjudice 
incontestable  ; 

Que  les  sieurs  Blandy  se  sont  vus  obligés,  sur  la  demande  des 
ilêfendeurs,  de  déposer  diverses  sommes  à  la  Caisse  des  dépôts 
et  consignations  ;  qu'ils  n'ont  touché  sur  ces  sommes  qu'un  in- 
térêt restreint,  d'où  un  préjudice  équivalent  à  la  dilTérence  entre 
»t  intérêt  et  l'intérêt  légal  à  S  0/0  et  que  les  défendeurs  doivent 
'fparer  ; 

Attendu  que,  de  plus,  les  agissements  des  négociants  espa- 
SQoU  ont  aussi  causé  aux  Hadêroîs  un  préjudice  ;  que  le  préju- 
dice matériel  ne  peut  être,  en  l'état,  exactement  évalud  par  le 
tribuDal  faute  de  renseignements  et  d'éléments  A  appréciation  ; 


—  226  — 

que  le  tribonal  ne  peut  actuellement  qa*en  consacrer  le  principe 
en  laissant  à  Blandy  frères  le  soin  de  le  libeller  par  état  ; 

Qu'il  est  encore  une  autre  cause  de  dommage  résultant  de  la 
publicité  donnée  à  la  vente  de  ces  Tins  de  Madère  ;  que  ce  dom 
mage  est  d'ores  et  déjà  suffisamment  connu  pour  que  le  tribunal 
puisse  en  arbitrer  Timportance  ;  que  le  préjudice  causé  de  ce 
chef  k  Blandy  et  joints  sera  réparé  par  Tinsertion  par  extrait  du 
présent  jugement  dans  un  certain  nombre  de  journaux  ; 

Attendu  que  les  défendeurs  devront  aussi  évidemment  suppor 
ter  tous  les  dépens  ; 

Attendu  que  ce  sont  là  autant  de  chefs  de  créance  de  Blandy  e 
joints  contre  les  défendeurs  ; 

Que  les  défendeurs  étant  de  nationalité  étrangère,  la  confisca- 
tion des  marchandises  est  le  seul  moyen  efficace  pour  Blandy  el 
joints  d'obtenir  paiement  de  ce  qui  pourra  leur  être  dû  ;  que 
c'est  dans  ces  limites  et  à  ce  titre  qu'il  échet  de  prononcer  ladite 
confiscation  ; 

Attendu  que,  quant  aux  destinataires  français,  ils  n'ont  pris 
aucune  part  effective  à  l'apposition  du  mot  Madère  sur  les  vin! 
d'Espagne  :  que  ces  vins  ont  été  saisis  dès  leur  arrivée  et  ne  se 
sont  jamais  trouvés  enti'e  leurs  mains;  qu'en  toute  équité  ces 
destinataires  doivent  donc  être  mis  hors  de  cause  ; 

Par  ces  motifs,  Reçoit  Diez  hermanoz  opposants  en  la  forme  au 
jugement  par  défaut  du  8  juillet  1898  ; 

Déclare  les  destinataires  français  bien  fondés  dans  leur  oppo- 
sition, les  met  hors  de  cause,  condamne  Blandy  aux  dépens  de 
cette  mise  en  cause  ; 

Déclare  Diez  hermanoz  mal  fondé  dans  son  opposition  ; 

Dit  que  le  jugement  frappé  d'opposition  sortira  son  plein  e 
entier  effet,  sous  les  seules  réserves  suivantes  :  | 

Autorise  Blandy  et  joints  à  faire  insérer  le  présent  par  extrait 
dans  cinq  journaux  de  France  ou  de  l'étranger,  à  leur  choix,  sans 
que  le  prix  total  des  insertions  puisse  dépasser  300  francs  ; 

Maintient  la  confiscation,  mais  seulement  à  titre  de  garantie 
du  paiement  des  frais,  dépens  et  dommages-intérêts  alloués  et  i 
allouer  ; 

Dit  en  conséquence  que  les  marchandises  saisies  et  confisquée! 
devront  être  restituées  à  Diez  hermanoz  contre  paiement  de  tou 
frais  et  de  tous  dommages-intérêts  ;  dit  cependant  que,  dans  tou 
les  cas,  il  sera  préalablement  procédé  à  la  remise  des  f&ts,  soit 
Blandy  et  joints  si  la  confiscation  tient  effet,  soit  dans  l'hypo 
thèse  contraire  à  Diez  hermanoz  lui-même,  et  par  les  soins  e 
sous  la  surveillance  du  séquestre  à  la  suppression  du  mot  Madèri 
apposé  sur  les  fûts  ; 


—  228  — 

patrimoine  commun  des  négociants  et  viticulteurs  de  Tile  de 
Madère  ;  qu'il  appartient  dès  lors  à  la  Société  Blandy  frères,  dont 
le  siège  social  est  à  Madère,  quelle  que  soit  la  nationalité  de  ses 
membres,  ainsi  qu'aux  intervenants  tous  habitant  Tilede  Madère, 
soit  qu'on  les  considère  isolément  ou  comme  faisant  partie  d*aii 
Comité  de  Vigilance,  d'en  revendiquer  l'usage  exclusif,  à  Fencon- 
tre  des  importateurs  espagnols  ; 

Qu'^n  droite  l'Arrangement  signé  à  Madrid  le  14  avril  1891, 
notamment  par  l'Espagne,  le  Portugal  et  la  France  a  été  sanc- 
tionné par  la  loi  française  du  13  avril  1892  ;  que  le  texte  môme 
de  ces  conventions,  éclairé  par  les  travaux  préparatoires  de  la 
conférence,  par  le  rapport  fait  an  Sénat  et  à  la  Chambre  des 
députés,  révèle  qu'il  s'applique  aux  noms  de  localités  ayant  ac- 
quis par  la  supériorité  de  leurs  produits  une  notoriété  et  dont 
l'usage  illicite  pourrait  avoir  été  fait  antérieurement  ;  que,  d'au- 
b  tre  part,  l'article  4  de  cet  Arrangement,  eu  «^dictant  que  les  tri- 

^  bunaux  ne  pourront  pas  considérer  comme  des  appellations  gé- 

nériques, exclues  de  l'Arrangement,  les  appellations  régionales 
de  provenance  de  produits  vinicoles  a  entendu  interdire  toute 
discussion  sur  le  caractère  des  appellations  de  ce  genre  ; 

Attendu  que  l'usage  illicite  du  nom  de  Madère  appliqué  à 
des  vins  qui  n'en  sont  pas',  non  plus  que  les  diverses  pratiques 
abusives  du  commerce  relevées  par  les  appelants,  ou  même  les 
tolérances  dont  ils  entendent  se  prévaloir,  n'ont  pu  créer  ua  droit 
légitimement  acquis  ; 

Attendu  d'autre  part  que  les  interprétations  divergentes  qui 
ont  pu  se  produire  depuis  l'Arrangement  de  Madrid  ou  même  la 
non-application  de  cet  Arrangement  dans  certains  Etats  et  l'ob- 
jection tirée  d'un  défaut  de  réciprocité,  si  grave  qu'elle  soit,  ne 
sauraient  prévaloir  contre  le  texte  si  précis  et  si  catégorique  d'une 
Convention  qui  fait  la  loi  des  parties  et  qui,  après  avoir  reçu  la 
sanction  du  Parlement  français,  s'impose  au  respect  de  tous  en 
France  et  doit  recevoir  son  exécution  tant  qu'elle  n'aura  pas  été 
l'objet  d'une  dénonciation  régulière  ou  d'une  révision  du  pacte 
international  ; 

Qu'il  faut  en  dire  autant  des  rapports  du  laboratoire  municî-  1 
pal,  des  circulaires  de  la  douane  et  de  l'administration  de  la 
Régie  et  même  des  lois  fiscales,  et  notamment  de  la  loi  du  13  avril 
1898  qui  a  réglementé  le  commerce  des  vins  de  liqueur  ou  d'imi- 
tation ;  que  manifestement  tous  ces  documents,  destinés  à  pré- 
venir la  fraude  et  à  assurer  le  recouvrement  de  l'impôt,  n'ont 
pu  avoir  pour  résultat  de  modifier  l'Arrangement  de  Madrid  et 
de  porter  atteinte  aux  droits  des  tiers  ; 

Qu'il  importe  peu  que  les  destinataires  aient  connu  la  fausse 
provenance,  dès  lors  que  la  Convention  internationale  de  1891  a 


—  230  — 

sans  préjudice  de  la  différence  d'intérêt  entre  le  taux  légal  et  le 
taux  du  cautionnement  déposé  à  la  Caisse  des  consif^nations  ou 
en  compte  courant  au  Crédit  Lyonnais  au  paiement  de  laquelle 
les  appelants  ont  été  justement  condamnés  par  le.  jugement  atta- 
qué; 

Sur  les  insertions  : 

Attendu  qu'il  y  a  lieu  de  les  ordonner  à  titre  de  supplémeift  de 
dommages  et  intérêts  à  raison  de  la  publicité  que  les  parties  ont, 
de  part  et  d'autre,  donné  à  cet  affaire  par  là  voie  de  la  presse  ; 

Sur  rappel  incident  de  Blandy  frères  et  consorts  ; 

Attendu  qu'il  n'y  a  pas  lieu,  ainsi  que  l'ont  décidé  les  premiers 
juges,  de  prononcer  la  confiscation  au  profit  des  saisissants  ;  que 
ce  mode  de  réparation  excéderait  l'importance  du  préjudice 
causé  et  que  la  saisie  tenant  état  jusqu'à  parfait  payement  des 
sommes  légitimement  dues,  est  de  nature  à  sauvegarder  tous  les 
droits  ; 

Attendu,  sur  les  insertions,  qu'une  seule  insertion  par  extrait 
du  jugement  et  de  l'arrêt  parait  suffisante  et  qu'en  ce  qui  con- 
cerne le  coût  de  l'insertion,  il  y  a  lieu  de  Télever  à  un  maximum 
de  400  francs  ; 

Sur  rappel  principal  de  Blandy  et  consorts  contre  les  destina- 
taires : 

Attendu  que  les  premiers  juges  ont  à  bon  droit  décidé  que  les 
destinataires  devaient  être  déclarés  indemnes  de  tous  dommages 
et  intérêts  ;  que  leur  bonne  foi  est  parfaite  et  qu'ils  n'ont  parti- 
cipé par  aucun  fait  illicite  aux  fausses  indications  de  provenance 
incriminées,  mais  qu'à  tort  et  mal  à  propos  ils  ont  été  mis  hors 
de  cause  et  de  procès  ; 

Que  la  validité  de  la  saisie  en  effet  ne  pouvait  être  prononcée 
hors  la  présence  des  destinataires,  seuls  propriétaires  de  la  mar- 
chandise aux  termes  du  connaissement  et  qui,  dès  lors,  ont  été 
régulièrement  introduits  dans  l'instance  ; 

Attendu  en  ce  qui  concerne  les  frais  de  cet  appel  en  cause,  quUl 
serait  peu  équitable  de  les  laisser  à  la  charge  des  saisissants  qui 
ont  bien  procédé  contradictoirement  avec  les  destinataires  et 
qu'il  y  a  lieu  de  les  faire  supporter  par  les  expéditeurs  qui  les 
ont  en  définitive  occasionnés  par  leur  fait  illicite,  au  besoin'  à 
titre  de  supplément  de  dommages  et  intérêts  ; 

Attendu  que  Diez  hermanos  qui  succombent  sur  leur  appel, 
doivent  supporter  les  dépens  en  ce  non  compris  les  frais  de  l'ap- 
pel incident  qui  doivent  rester  à  la  charge  de  Blandy  et  consorts 
qui  succombent  en  cette  pt^rt  ; 

Par  CBS  motifs.  Et  ceux  des  premiers  juges  en  tant  qu'ils  n'ont 
rien  de  contraire  au  présent  arrêt  ; 

La  Cour,  Parties  ouïes  en  leurs  conclusions,  M.  l'avocat  gêné- 


rai  enienaa,  âpres  en  avoir  aeiioi 

Jfflatles  appels forniAs  par  Diei  hermanos  et  par  Blaniiy  Trèrpa 
et  consorts  et  j  faisant  droit  par  un  seul  et  même  arrSt  ; 

Sur  rappel  principal  de  Diet  kermanos  et  sur  l'apiiel  incident  de 
Blmtdy  frères  : 

Sans  s'arrêter,  ni  avoir  égard  à  toutes  fins  et  conclusions  con- 
traires des  appelants  dont  ils  sont  déboutés', 

Conârme  le  jngement  attaqué  dans  toutes  sesdispoiitioDS,  sauf 
en  ce  qui  concerne  les  dispositions  relatives  k  la  confiscation,  aux 
insertions  et  aux  dommages  &  fournir  par  état  ; 

Infirme  ledit  jugement  snr  les  trois  chefs  susindiqués  et  sta- 
tuant à  nouveau  ; 

Sur  la  eonfitcation  : 

Dit  n'y  avoir  lieu  de  la  prononcer  et  rejeltu  les  conclusions  de 
Blandy  et  consorts  quant  &  ce  ; 

Sur  les  insertions  : 

Autorise  la  publication  par  extraits  du  jugement  et  du  présent 
arrêt  dans  ua  journal  de  France  au  choix  de  Blandy  et  consorts 
et  aux  frais  de  Diez  bermanos,  sans  que  le  coût  de  cet  extrait 
puisse  dépasser  400  francs  ; 

Sur  lei  dammages-intiréts  à  fournir  par  état  : 

Condamne  Diei  bermanos  ÎL  des  do  m  m  âges- in  té  rats  &  fixer  par 
état,  mais  dit  que  ces  dommages  ne  pourront  comprendre  que 
laréparation  du  préjudice  causé  par  l'introduction  des  marchan- 
dises saisies,  à  l'exclusion  de  toutes  autres  introductions; 

Rejette  toute  plus  ample  demande  de  Blandy  fràres  et  consorts 
SOT  ces  trois  chefs  de  leur  demande  ; 

Etions  ces  uniques  modifications,  ditquele  jugement  attaqua 
sortira  son  plein  et  entier  effet  ; 

Sur  fapptl  principal  de  Btandy  frères  contre  les  destinataires  i 

Conflrmele  jugement  attaqué  en  ce  qu'il  a  déclaré  les  desti- 
natairea  indemnes  ; 

L'infirme  en  ce  qu'il  les  a  mis  hors  de  cause  et  faisant  ce  que 
les  premiers  juges  auraient  dû  faire  ; 

Maintient  Tnrpin  frères  et  Hioult,  Nicole,  Ruffin,  Doublet,  Mu- 
tel  et  Bocage  dans  l'instance  et  condamne  Diei  hermanos  aux 
frais  de  première  instance  et  d'appel  nécessités  par  cette  mise 
ea  cause,  au  besoin  à  titre  de  supplément  de  dommages-inté- 
rils; 

Condamne  Diex  hermanos  aux  dépens  d'appel,  en  ;  compre- 
nant les  frais  de  séquestre,  jusqu'à  la-  mainlevée  de  la  saisie  ains 
que  les  frais  de  réalisation  des  objets  saisis  s'il  j  a  lieu,  mais  en 
ee  non  compris  les  frais  de  l'appel  incident  qui  restent  &  la  charge 
de  Blandy  frères  et  consorts  ; 


—  232  — 

Accorde  distraction  desdits  dépens  aux  avoués  de  la  cause,  sur 
Taffirmation  de  chacun  d*eux  d*en  avoir  fait  Tavance  ; 
Ordonne  la  restitution  des  amendes  consignées  ; 

Des  arrêts  semblables  ont  été  rendus  dans  20  autres 
affaires. 


Art.  4237. 

Fausses  IndleatioiM  de    provenance.  —   Arrange- 
ment de  Madrid.  —  Saisie. 

Les  articles i  etide  P Arrangement  de  Madrid,  autori- 
sant expressément  la  saisie  des  produits  revêtus  d*une  fausse 
indication  de  provenance  et  s^en  référant,  pour  la  for- 
me  de  cette  saisie,  à  la  législation  intérieure  de  chaque  Etat^ 
ont  étendu  à  tous  les  fabricants  ou  producteurs  appar- 
tenant aux  Etats  contractants  le  bénéfice  des  lois  gui  répri- 
ment les  fausses  indications  de  nom  ou  de  lieu  d'une  fa- 
brique française  ;  la  saisie  peut  donc  avoir  lieu  en  vertu  de 
Varticle  19  de  la  loi  du  23  juin  1857  (1). 

(C.  de  Paris,  13  mars  1899.  —  Gurlier  c.  Blandy  frères  et  Cie.) 

Pendant  que  s'effectuaient  au  Havre  les  saisies  rappor- 
tées dans  les  articles  précédents,  Blandy  frères  et  Cie  fai- 
saient également  procéder,  à  Paris,  chez  Curlier  frères, 
suivant  ordonnance  de  M.  le  président  du  Tribunal  civil 
de  la  Seine,  à  la  saisie  de  100  fûts  portant  la  marque  à  feu 
Jerez  Madeira  sur  la  bonde  et  assignaient  Curlier  frères, 
ainsi  que  Robertson  brothers,  de  Londres,  qui  avaient  ex- 
pédié la  marchandise  de  Cadix,  en  validité  de  la  saisie  et 
dommages-intérêts.  Mais  Curlier  frères,  de  leur  côté,  as- 
signaient Blandy  frères  et  Cie  en  référé  pour  entendre  rap- 
porter l'ordonnance  de  saisie  comme  ayant  fait  une  fausse 
application  de  Tarticle  19  de  la  loi  du  23  juin  1857. 

La  1'*  chambre  du  Tribunal  civil  de  la  Seine,  statuant  en 
état  de  référé,  sous  la  présidence  de  M.  le  président  Bau- 
douin, a,  le  17  juin  1896,  rejeté  la  prétention  de  Curlier 
frères  en  ces  termes  : 

Lb  TaiBOifAL,  Attendu    que   Blandy   frères,  propriétaires   de 
(1)  Cf. ,  plas  haut,  p.  21S„Roaen,  96  juin  1900. 


!.à-«".p^.^r.TT»'";T-'r''î"  *    "•  ;  ?'^/-"  ^  '.r  l^'v — i "r -'  "■ .  "" "/>«*■: .  ."'tt^  ■'^-'^r^*^ ''' *'*^^ *■- 


—  234  — 

.    Là  Cour,  Adoptant  les  motifs  da  tribunal  : 

Considérant  au  surplus  que  les  sieurs  Gurlier  frères  sont  ap~ 
pelants,  d-un  jugement  rendu  par  le  Tribunal  civil  de  la  Seine, 
statuant  en  état  de  référé,  qui  remonte  au  16  juin  1896,  et  qui 
a  autorisé  une  saisie-arrét  sur  des  vins  déposés  dans  leurs  maga- 
sins de  Bercy  ; 

Considérant  qa*il  semble  que  ce  soit  par  une  tactique  de  procé- 
dure, que  Curlier  frères  n'aient  pas  chercbé  à  obtenir  plus  tôt  le 
jugement  de  leur  appel  ;  qu*on  n'a  invoqué,  en  leur  nom,  aucun 
moyen  de  nature  à  faire  infirmer  la  sentence  attaquée  ;  qu*on 
s'est  attaché  principalement  à  démontrer  qu'elle  ne  devait  pas 
exercer  un  préjudice  défavorable  à  la  solution  du  procès  engagé 
entre  Blandy  et  Cie  et  divers  négociants  au  sujet  du  droit  de  se 
servir  des  expressions  vin  de  Madère  pour  désigner  du  vin  qui  ne 
proviendrait  pas  réellement  des  vignes  de  Tlle  de  Madère  ; 

Considérant  qu'il  est  de  règle  que  les  ordonnances  de  référé  ne 
préjudicient  pas  au  principal  ; 

Pàb  CBS  MOTIFS,  Déclare  les  appelants  mal  fondés  dans  leurs 
demandes,  fins  et  conclusions  ; 

L,es  en  déboute  ; 

Confirme  le  jugement  dont  est  appel  ; 

Statuant  en  état  de  référé,  ordonne  qu'il  sortira  sou  plein  et 
entier  effet  ; 

Condamne  les  appelants  à  l'amende  et  aux  dépens  de  leur 
appel,  y  compris  ceux  de  référé. 

Avocats  :  M®  Glunet,  pour  Curlier  frères  ;  M*  Georges 
Maillard,  pour  Blandy  frères  et  Cie. 


Art.  4238. 

Brevet  Gmson.  —  Aflûto  ealrasséw.  —  CertUleikt 
d^addlCIon.  —  Brevetabilité.—  Coiiibiiial«on  noa- 
veile  de  moyenfli  eoiinu«.—Diiréreiice«  e— entleJUei. 
—  rVon-contrefliçon.  —  Obliiratioii  d'exploiter.  — > 
Déebéa.nee. 

Lorsqu'un  brevet  {pris  pour  un  affût  cuirassé  à  embrasure 
minima)  porte  sur  deux  dispositifs  différents  :  1®  combinai-- 
son  d'un  affût  mobile  verticalement  au  moyen  d'un  contre^ 
poids  hydraulique  et  d'une  cuirasse,  mobile  horizontale" 
ment,  qu'on  élève,  pour  permettre  la  rotation^  au  moyen 
d'un  levier  équilibré  ;  2*  affût  porte-cuirasse  ^  mobile  verti- 


calement  et  horizontalement  sur  un  piston-pivot  ç«i  s'é- 
lève et  s'abaisse  au  moyen  d'un  contrepoids  hydraulique 
ou  d"  un  contrepoids  à  chaîne,  le  certificat  d'addition  qui 
décrit  un  affût  porte-cuirasse  sur  piston-pivot  mu  par  un 
levier  équilibré,  se  rattachant  tout  à  la  fois  au  premier  et 
au  deuxième  dispositif  du  brevet,  ne  sera  pas  frappé  de  nul- 
lité par  la  nullité  d'un  seul  des  dispositifs  du  brevet  {Juge- 
ment du  12  décembre  1894)  (1). 

Est  brevetable  ta  con^inaison,  dans  un  affût  cuirassé  à 
embrasure  minima,  d'éléments  qui  tous  étaient  isolément 
dans  le  domaine  public  mais  non  réunis  (Jugement  du 
IS  juin  1891  et  arrêt  conSnnaLif)  (2). 

Le  breveté  peut  exiger,  pour  fappréciation  de  la  contre- 
façon, qu'on  combine  un  certificat  d'addition  avec  le  dis- 
positif du  brevet  auquel  il  se  rattache  et  que  Pon  compara  à 
cette  combinaison  l'engin  argué  de  contrefaçon  (Jugement 
du  11  juin  1897  et  arrêt  conflnnatiO  (8). 

L'engin  revendiqué,  consistant  en  un  affût  pivotant  à 
éclipse,  porteur  d'une  coupole  cuirassée  dont  la  combinai- 
son avec  la  contre-cuirasse  assure  l'abri  de  la  tourelle,  la 
volée  du  canon  se  plaçant,  à  la  position  d'abri,  dans  un 
logement  à  ciel  ouvert  pratiqué  daTts  la  contre-cuirasse,  un 
piston  servant  de  pivot  à  l'affût  et  mu  d  volonté  au  moyen 
ifun  levier  équilibré,  le  recul  étant  neutralisé  par  la  masse 

(1)  Cf.  Lyon,  34  juillet  18U8.  Ann.,  68.343  ;  UaiDli,  Brev.  d^imt.,  1. 1, 
D>  969  et  ■.,  avec  arrMt  ciUa. 

M.  lesiibslUnt  Troturd-Rlolle  diuil  BpirituellemeDt  en  rappelant  uns 
comparaiioii  de  U.  Ponillat  : 

■  Le  brevet  dloTentioii  c'est  l'arbre,  le  certificat  d'addition  c'ett  la 
branche:  mart  l'arbre,  morte  la  branche.  Mail  quelquefois  l'arbre  as 
menrt  pai  tout  entier  et  il  noua  lufQt,  dani  lu  promenadea  d'été,  de 
porter  noi  pas  dans  les  foréta  det  environs  de  Paris  pour  non*  rendre 
compta  que  quelquefois  nue  partie  du  tronc  de  l'arbre  «st  inorre  et  que 
cependant  certaines  branches  sapérieures  ■'ëpano Distant  dans  une  laïu- 
riaate  verdure.  > 

Le  cerliScat  d'addition  ne  sera  pas  atteint  de  caducité  par  la  caducité 
d'nne  partie  du  bretet,  mais  encore  budra-t-il  qu'il  se  rattache  à  la 
partie  valable  du  brevet  (Paria,  7  janvier  1863,  .i4nH.,  63.318  ;  Paris, 
15  JDÎllet  1864.  Ann.,  64.293  ;  Paris,  38  février  1867.  ilnn.,it7.358j. 

(S)  Voir  Poultlel,  Brev.  d^inv.,  n'46;Allart.  t.  1,  n"  34  ;  Mainié. 
n*433  et  arrêts  cités. 

fS)  Cf.  Paris,  13  décembre  18S5,  Ann.,  86.105. 

II  est  4  remarqaer  que  le  jugement  du  15  juin  1897  n'a  voulu  ratta- 
cher le  S*  certiBcat  d'addition  qu'an  3*  dispositif  du  brevet  tandis  que 
le  jniement  du  15  décembre  UÔ4  l«  rattachait  an  l"  et  an  3*  diapMi- 
tifa. 


—  236  — 

de  Vappareil,  ne  constitue  pas  une  contrefaçon^  Vengin^ 
diffèrent  par  sa  nature  et  contenant  des  organes  nouveaux 
et  essentiels^  qui  consiste  en  une  chambre  de  tir  contenant 
un  canon  sur  son  affût,  Va/fût  étant  indépendant  de  la  cui- 
rasse  et  n'en  devenant  solidaire  qu'au  moment  du  tir,  la 
cuirasse  étant  eUe-même  immobilisée^  à  ce  moment,  dans 
Vétreinte  d'une  couronne  métallique  qui  fait  corps  avec  la 
maçonnerie,  le  canon  rentrant  complètement  dans  la  tou- 
relle, la  position  d'abri,  le  mouvement  de  montée  et  de 
descente  de  la  cuirasse  étant  obtenu  au  moyen  d'un  levier 
excentré  automoteur  (Jugement  du  12  juin  1897  et  arrêt 
conflrmatif)  (1). 

Ne  justifie  pas  suffisamment  des  causes  de  son  inaction, 
pour  être  relevé  de  la  déchéance  faute  d'exploitation,  le 
breveté  dont  le  centre  de  fabrication  est  en  Allemagne  et 
qui,  ayant  des  commandes  en  Roumanie  pour  les  engins 
cuirassés  faisant  l'objet  du  brevet,  n'a  pas  cru  devoir  orga- 
niser des  ateliers  de  construction  sur  le  territoire  français^ 
bien  qu'il  disposât  des  capitaux  et  ressources  nécessaires,  ni 
faire  fabriquer  par  des  licenciés  français  (Arrêt  du  18  mars 
1900)  (2). 

(1)  Le  breveté  faisait  observer  qu'on  retrouvait  dans  l'appareil  incri- 
miné les  3  éléments  d'une  des  combinaisons  comprises  dans  le  breret 
et  que  si  tel  de  ces  éléments,  le  levier  pour  élever  la  coupole,  était 
perfectionné  (levier  excentré  au  lieu  de  levier  équilibré)  la  contrefaçon 
n'en  subsistait  pas  moins,  car  le  perfectionnement  n'est  pas  exclusif  de 
contrefaçon  (voir  Pouillet,n<»  645  et  646,  S»)  et  qu'il  importait  peu  qull 
y.  eût,  en  dehors  de  la  combinaison  d'éléments  revendiqués,  des  dispo- 
sitifs différents,  par  exemple  pour  la  mise  en  place  du  canon  puisque 
le  défendeur  avait  pris,  en  tous  cas,  au  brevet  une  combinaison  d'élé- 
ments qui  était  nouvelle  et  brevetable. 

L'adversaire  répondait  qu'il  fallait  examiner  l'engin  revendiqué,  dans 
l'ensemble  de  ses  organes  essentiels  et  qu'il  ne  pouvait  y  avoir  contre- 
façon, dans  l'espèce,  parce  que  l'engin  incriminé  présentait,  dans  cer- 
tains de  ses  organes  essentiels,  des  différences  caractéristiques,  notam- 
ment pour  la  manœuvre  du  canon,  pour  la  neutralisation  du  recul  et 
pour  le  mode  élévatoire  de  la  coupole.  C'est  à  cette  solution  que  s'est 
rallié  le  jugement  confirmé. 

Voir,  pour  la  jurisprudence  relative  à  la  contrefaçon  de  combinaison 
nouvelle  de  moyens  connus,  Mainié,  n«  S385  et  s.,  et  particulièrement 
dans  le  sens  du  jugement,  le  rapport  de  M.  le  conseiller  Babinet  à  la 
Cour  de  cassation,  dans  l'affaire  de  la  Compagnie  des  moteurs  à  gaz 
contre  Mignon  et  Rouart  (Cass.,  22  avril  1890,  moteurs  Otto,  S.  93.1. 
412). 

(2)  Il  est  intéressant  de  rapporter,  sur  ce  point,  les  conclusions  de 
If.  l'avocat  général  Blondel,  dont  l'arrêt  est  un  fidèle  résumé  : 

c  Aux  termes  du  paragraphe  2  de  l'article  32  de  la  loi  de  1844,  le 


!i 


—  237  — 

(Trib.  civ.  Seine,  IS  décembre  1894  et  15  juin  1887;  G.  de  Paris 
15  mars  1900.  —  Héritiers  Gruson  c.  Schneider  et  Cie.) 

Het-mann6ruson(de  Magdebourg)  a  pris,  le  6  mars  1883, 
UD  brevet  en  France  pour  un  a£fut  cuirassé  à  embrasure 

breveté  est  déchu  des  droits  qae  Ini  confère  son  brevet,  s'il  n*a  pa^ 
exploité  son  invention  dans  les  deux  années  qui  suivent,  non  pas  la  de- 
mande, mais  la  délivrance  du  brevet,  ou  s'il  a  ensuite  interrompu  cette 
exploitation  pendant  deux  années  consécutives.  Or,  M.  Gruson  n*a  pas 
exploité  en  France  ;  c'est  absolument  certain,  et  il  ne  fait,  je  crois, 
aucune  difficulté  pour  le  reconnaître. 

«  Mais  le  paragraphe  2  de  l'article  32  contient  une  exception  au  prin- 
cipe qu'il  pose  :  c  Â  moins,  dit-il,  que  le  breveté  ne  justifie  des  causes 
de  son  inaction.  »  Et  M.  Gruson  soutient  qu'il  y  a  eu  à  son  inaction  des 
causes  dont  il  justifie,  des  causes  légitimes,  suffisantes  pour  l'expli- 
quer. 

c  Et  tout  d'abord,  il  vous  fait  remarquer  que  les  tourelles  cuiras- 
sées, ou  les  appareils  cuirassés  dont  nous  allons  bientôt  nous  occuper 
avec  plus  de  détail,  sont  des  appareils  très  coûteux»  qui  ne  sont  pas  de 
vente  courante  ni  d'un  débit  facile.  Goûteux,  ils  le  sont,  en  effet  ;  d'a- 
près un  chiffre  qui  a  été  donné  au  cours  des  débats,  je  me  suis  rendu 
compte  que  des  appareite  de  cette  nature  pourraient  coûter  au  moins 
150,000  francs,  peut-être  plus,  ce  qui  n'est  pas  à  la  portée  de  tontes  les 
bourses^  mais  ce  qui  n'est  pas  non  plus  pour  les  effrayer  toutes  :  dans 
ces  derniers  temps,  nous  avons  vu  des  amateurs  de  tableaux  payer  un 
Raphaël  on  même  un  Millet  500,000  francs  !  Il  est  vrai  que  bien  des 
gens,  et  je  suis  du  nombre,  aimeraient  mieux  un  seul  Raplûêl  que  deux 
on  même  trois  tourelles  cuirassées. 

c  D'un  antre  côté,  inutile  d'insister  sur  ce  fait  que  ce  n'est  pas  un 
article  de  débit  courant,  comme  les  cravates  ou  comme  les  chaussures 
dont  parlait,  à  Tune  de  vos  dernières  audiences,  l'honorable  M*  Mail- 
lard ;  ce  n'est  pas  surtout  d'un  débit  courant  en  France.  M.  Gruson 
TOUS  fait  observer,  en  quoi  il  n'a  peut-être  pas  tort,  qu'en  France  il  n'y 
avait  vraiment  qu'un  seul  acheteur  possible,  le  gouvernement  français  ; 
or,  par  Pintermédiaire  de  M.  Armengaud  aîné,  l'ingénieur  bien  connu, 
il  a  fait  offrir  ses  appareils  au  gouvernement  français  ;  il  lui  a  envoyé 
ses  dessins  et  ses  mémoires  descriptifs  ;  il  s'est  mis  à  sa  disposition 
pour  exécuter  toutes  les  commandes  qui  pourraient  lui  être  faites,  et  il 
a  renouvelé  cette  communication  à  peu  près  de  deux  ans  en  deux  ans, 
pour  se  rapprocher  des  termes  de  l'article  32  que  je  vous  indiquais  tout 
à  l'heure. 

«  Je  dis  :  à  peu  près  ;  il  y  a  en  effet,  dans  deux  circonstances  tout 
au  moins,  un  petit  écart  ;  une  lettre  est  du  15  juin  1885,  celle  qui  la 
suit  n'est  que  du  24  juin  1887  ;  en  1893,  Técart  est  plus  faible,  il  est  d'un 
jour  :  10  mars  1891, 11  mars  18^.  Je  n'insiste  pas  sur  ces  différences 
de  dates  ;  suivant  moi,  les  démarches  de  M.  Gruson  ne  peuvent  pas 
constituer  une  exploitation  :  elles  seraient  seulement  la  justification  des 
motifs  de  son  inaction,  et,  si  ces  motifs  sont  sérieux,  peu  importent  les 
dates  auxquelles  il  a  fait  la  communication. 

c  Est-ce   que  M.  Gruson,  en  adressant  ces  offres  au  gouvernement 
français,  se  faisait  beaucoup  d'illusions  sur  le  résultat  qu'il  pouvait  ob- 
tenir ?  Voici,   Messieurs,  ce  que  vous  disait  à   ce  sujet  son  honorable 
avocat  : 
«  Le  ministère  de  la  guerre  (ici  je  lis  la  sténographie)  a  estimé  qu'il 


! 


—  238  - 

minima  et  deux  certificats  d'addition,  dont  Tun  en  date  du 
3  août  1886.  Les  affûts  cuirassés  à  embrasure  minima  sont 
des  coupoles  mobiles  abritant  un  canon,  et  ne  lui  lais- 


n'en  avait  pas  besoin  ;  que,  Dieu  merci,  nous  avions  d'autres  engins  cui- 
rassés pour  nos  fortifications  qui  étaient  parfaitement  suffisants  et  qu*il 
était  inutile  de  faire  fabriquer  pour  la  France  les  tourelles  que  propo- 
sait M.  Hermann  Gruson.  » 

«  Si  telle  était  la  pensée  de  son  très  honorable  conseil,  je  ne  crois  pas 
être  téméraire  en  supposant  que  c'était  aussi  Topinion  de  M.  Gruson 
lui-même. 

«  Alors,  à  défaut  de  ce  client  improbable,  le  gouvernement  français, 
qu'a  fait  M  Gruson  ?  A-t-il  concédé  des  licences  à  des  industriels  fran- 
çais f  Ce  serait  un  moyen  d'exploiter,  sinon  par  lui-même,  au  moins  par  . 
des  licenciés  ;  non,  il  n'en  a  pas  concédé,  et  bien  plus,  il  n'en  a  même 
pas  offert.  Vqus  trouverez,  messieurs,  dans  le  dossier  de  MM.  Schneider 
et  die,  plusieurs  lettres  dont  on  vous  a  déjà  donné  connaissance,  éma- 
nant de  grands  industriels  métallurgiques  français  s'occupantde  la  cons- 
truction d'engins  de  guerre,  et  tous  répondent  avec  la  même  unanimité 
que  jamais,  au  grand  jamais,  M.  Gruson  ne  leur  a  offert  de  prendre  une 
licence. . .,  et  il  vous  en  donne  la  raison,  c'est  qu'il  ne  pouvait  pas  pro- 
voquer ses  concurrents  à  lui  faire  concurrence. 

c  Enfin,  est-ce  que  M.  Gruson  a  établi  une  usine  en  France  ?  Non,  et 
ici  encore  il  vous  en  explique  le  motif  :  il  a  fabriqué,et  je  prends  le  chif- 
fre dans  la  plaidoirie  de  son  avocat,  90  tourelles  en  18ëf7,  96  en  1888, 
18  en  1889, 10  en  1890,  soit  au  total  154  tourelles.  Or,  il  ne  pouvait  pas, 
vousa>t-on  dit,  confiera  autrui  une  commande  qui  lui  était  faite  à  lai- 
même  intuitu  personcBy  et  il  ne  pouvait  pas  d'avantage  installer  en 
France  nn  établissement  industriel. 

n  Outre  l'inconvénient  de  «  scinder  sa  Cabrication  »,\\  lui  était  impossi- 
ble, «  pour  un  aussi  petit  nombre  »  d'appareils,  de  créer  en  France  une 
usine. 

«  Donc,  impossibilité  matérielle,  impossibilité  morale,  résultant  des 
circonstances  et  de  la  nature  même  de  l'invention,  voilà  quels  sont, 
d'après  M.  Gruson,  les  motifs  qu'il  invoque  à  l'appui  de  son  inaction. 

«  Ces  motifs  sont-ils  bien  sérieux  ?  Ne  sont-ils  pas  plus  apparents  qne 
réels,  et  en  allant  au  fond  des  choses,  allons  nous  y  voir  une  véritable 
cause  d'inaction  ? 

«  Le  gouvernement  français,  vous  dit-on,  était  le  seul  acheteur  fran- 
çais en  France.  Soit  ;  je  remarque  cependant  que  des  industriels  fran- 
çais ont  trouvé  d'autres  acheteurs  :  sans  cela  le  procès  actuel  ne  serait 
pas  né  :  MM.  Schneider  et  de  ont  vu  venir  chez  eux,  en  France,  un 
antre  acheteur  que  le  gouvernement  français,  le  gouvernement  roumain, 
et  nous  savons  que  les  fabricants  de  matériel  de  guerre,  ceux  des  gran- 
des puissances  européennes,  fabriquent  des  engins  de  guerre  non  pas 
seulement  pour  leur  propre  gouvernement,  mais  aussi  pour  des  gouver- 
nements étrangers  ;  il  suffit  d'ouvrir  les  journaux  tous  les  jours,  en  ce 
moment,  pour  en  avoir  la  preuve. 

«  D'un  autre  côté,  en  admettant  que  M.  Gruson  ait  obtenu  une  com 
mande  du  gouvernement  français,  est-ce  qu'il  lui  eût  suffi  de  vendre  en 
France  un  certain  nombre  de  tourelles  cuirassées  pour  être  relevé  de  la 
déchéance  édictée  par  la  loi  ?  En  aucune  façon,  et,  à  défaut  de  la  dé- 
chéance prononcée  par  le  paragraphe  2  de  rarticle  di,  il  serait  toml>é 


.  .•"r-»#r'"«t' 


-  240  — 

cuirassées  qu^l  prétend  conformes,  dans  leurs  parties  es- 
sentielles, au  certificat  d*addition  du  3  août  1886. 
L'usine  du  Creuset  étant  entrée  en  concurrence  auprès 

question  d'au  moins  400  tourelles.  Voulez-vous  qu'elles  ne  soient  pas 
toutes  semblables  à  celles  dont  il  est  question  au  procès  ?  Je  retiens  en 
tous  cas  les  154  tourelles  fobriquéesdel888à1890.  Eh  bien,  Messieurs, 
c'est  là,  au  premier  chef,  de  l'exploitation,  c'est  une  grande  exploitation. 
Si  je  me  transporte  par  la  pensée  à  Magdebourg-Buckau,  j'entends  les 
marteaux,  les  pilons  de  la  Grusonwerk  ;  toutes  les  machines  sont  en 
mouvement  ;  les  hautes  cheminées  de  l'usine  jettent  des  torrents  de  fu- 
mée, et  je  vois  une  ruche  humaine  en  pleine  effervescence,  déployant 
une  prodigieuse  activité. 

«  Et  en  France  ?  Rien  ;  et  l'industrie  française,  et  les  ouvriers  fran- 
çais, quel  profit  retireront-ils  ?  Aucun,  absolument  aucun.  Pourquoi? 
Parce  qu'il  n'a  pas  plu  à  M.  Gruson  de  scinder  sa  fabrication  et  parce 
qu'il  a  voulu  éviter  la  dépense  et  l'embarras  de  rétablissement  d'une 
usine  en  France.  Cependant,  Messieurs,  M.  Gruson  a  des  ressources; 
n'allez  pas  croire  qu*il  ressemble  à  l'un  de  ces  inventeurs,  dont  on  par* 
lait  lors  de  la  discussion  de  la  loi  de  1844,  devant  la  Chambre  des  pairs, 
qui  mouraient  littéralement  de  faim  à  côté  d'une  invention  merveil- 
leuse; non,  non. 

«  J'ai  trouvé,  à  ce  sujet,  des  renseignements  intéressants  et  inatten- 
dus dans  le  dossier  de  M.  Gruson  sous  la  forme  de  deux  comptes  ren- 
dus adressés  par  la  direction  de  la  Grusonwerk  à  ses  actionnaires  réunis 
en  assemblée  générale.  La  Grusonwerk  est,  en  effet,  une  puissante  so- 
ciété montée  par  actions,  dont  le  capital  social  était,  au  moment  dont 
nous  nous  occupons,  de  9  millions  de  marks.  Or,  en  1888-1889,  quand 
on  fabrique  pour  le  gouvernement  roumain,  voulez-vous.  Messieurs, 
sayoir  ce  qu'a  gagné  la  Grusonwerk  ?. . .  Ce  sont  deux  chiffres>eule- 
ment. 

«  M.  Gruson,  rendant  compte,  à  ses  actionnaires,  de  la  marche,  da 
développement  de  son  usine,  en  vante  la  prospérité  et  il  leur  indique 
notamment  que  le  trafic  de  l'usine  a  été,  pour  le  matériel  de  guerre 
de  6,570,000  marks,  et  que  pour  l'industrie  civile,  elle  a  fabriqué  jus- 
qu'à concurrence  de  2,397,000  marks.  Et  cette  fabrication  avait  été  frac- 
tueuse  et  féconde,  car  les  actionnaire  de  la  Grusonwerk  recevaient  un 
dividende  de  10  0/0  ^  bienheureux  actionnaires  !  —  formant  un  chiffre 
de  900,000  marks,  c'est-à-dire  un  peu  moins  de  1,900,000  francs  :  et 
je  laisse  de  côté  des  gratifications  données  aux  employés  et  un  tant  pour 
cent  donné  au  conseil  d'administration  et  au  conseil  de  surveillance. 
L'année  suivante,  l'exploitation,  je  le  reconnais,  est  un  peu  moins  heu- 
reuse ;  mais  les  actionnaires  reçoivent  encore  600,000  marks  à  titre  de 
dividende. 

c  Eh  bien,  lorsque  M.  Gruson  nous  dit  qu'il  ne  pouvait  pas  élever  en 
France  une  usine  parce  que  des  usines  de  cette  nature  sont  des  étabUs- 
sements  importants  et  coûteux,  M.  Gruson  se  fait  trop  pauvre  pour  la 
circonstance  ;  lorsqu'on  distribue  plus  d'un  million  de  bénéfices  à  set 
actionnaires,  on  a  le  moyen  de  fabriquer  en  France  lorsqu'on  entend 
être  protégé  en  France. 

c  Donc,  il  ne  faut  pas  dire  que  M.  Gruson  n'a  pas  pu  fabriquer  en 
France,  par  suite  de  la  nature  de  son  invention  ;  mais,  il  faut  constater 
qu'il  n'a  pas  voulu  fabriquer  en  France,  parce  que  c'était  pour  lui  une 
gène,  une  dépense.  En  réalité,  M.  Gruson,  en  France,  n'a  fait   qu'un 


nuant  leur  fabricalion,  el  reconnaissant  que  les  tou- 
relle!)  fabriquées  étaient  semblables  à  celtes  décrites 
dans  l'Engineering,  demandèrent  reconventionnellement 


tîon  de  l'idée,  parc»  que  l'idée,  eu  réalité,  m[  prise  dans  le  lands  ceiQ- 
man  de  lltamaaité. 

■  Le  législateur  s'esl  demaDdé  à  cette  époque  s'il  ne  dirait  pas  k 
celoi,  éiBettaol  nne  idée,  la  perfeciionoaiit,  l'appropriant  à  une  deiti- 
natîoa  noQTelle  et  la  livrant  à  ses  coDcîlojeos,  *'il  ne  lui  dirait  pas 
simplement  :  cette  idée  Ta  devenir  ans  idée  commune,  vous  allez  en 
faire  an  don  forcé  ou  volontaire  à  vos  coneiloyenB  ;  voni  n'avei  pas 
troDvé  cette  idée  eicIusiTement  dans  votre  propre  fonda,  vous  l'nvex 
puisée  dans  les  travani  anlériears  des  générations  qui  sont  venues  avant 
lona  ;  vona  l'avez  puisée  dans  ce  fonds  comman  de  connaissances  hu- 
maine*, dans  celte  éducation  icientiflqne  qu'on  vous  a  donnée,  et,  par 
conséqnent,  vous  la  devez  à  la  collectivité. . ,  Le  législateur  n'est  pas  allé 
JQsqne-là  ;  il  a  voulu  que  l'inventeur  tût  récompensé  d'avoir  travaillé  et 
d'avoir  dégagé  de  l'obscurité  où  elle  était  renfermés  jusque-là,  l'idée 
qu'il  a  émise,  el  il  lui  a  donné  un  privilège,  un  droit  privatif  tempo- 
raire, pendant  nne  durée  détem-.inée,  pendant  quinte  ans. 

■  Haia,  s'il  lui  a  donné  ce  droit  privatif,  ce  privilège,  Il  a  voulu  que 
cette  id.^  na  restât  pas  morte,  que  l'inventeur  ne  11  conUsquàt  pas  à 
son  proSt,  qu'elle  proBtét  â  tout  le  pablic  par  l'eiploitation  qu'il  en  fe- 
rail. 

<  Ud  a  dit  à  ce  sujel,  Messieurs,  que  l'idée  était  tellement  dans  l'am- 
biance,  qu'il  arrivait  quelquefois  que  plusieurs  personnes,  sur  plusieurs 
points  du  territoire  et  â  une  même  époque,  avaient  la  même  idée,  qu'une 
inveation  surgissait,  à  la  fois,  de  plusieurs  cerveaux.  Alors,  le  légista- 
lenr,  prenant  en  considération  cette  pensée,  a  voulu  qu'il  y  eût  vérita- 
blement application  de  l'idée,  et  que,  pendant  les  quinze  années  qu'on 
donnait,  à  titre  de  privilège,  a  l'inventeur  pour  le  récompenser  des  ser- 
vices qu'il  rendait  à  la  société,  l'idée  ne  fût  pas  mise  sous  le  boisseau,  et 
qae  tout  au  moins  ses  concitoyens  pussent  en  profiter.  Il  faut  que  l'i- 
dée proBte  é  la  collectivité.  Il  a'j  a  pas.  comme  je  le  disais  tout  à  l'iieore, 
nnténtion  de  favoriser  le  travail  national.  Cela  a  exisié  dans  des  lois 
postérieurea,  mais  non  dans  l'article  32  que  nous  examinons  en  ce  mo- 

•  S'il  T  3  négligence  de  la  part  de  celui  auquel  le  gouvernement  con- 
cède an  privi%e,H'il  y  a  négligence  de  sa  part  k  exploiter  celle  idée,  alors 
on  le  déclare  déchu  de  cette  propriété  transitoire  ;  mais,  s'il  justifie  d'une 
cause  à  son  inaction,  il  reste  propriétaire  de  son  brevet.  Voilà,  tel  que 
je  l'ai  compris  tout  au  moins,  l'esprit  de  la  loi  de  1844. 

«  Or,  en  l'espèce,  U.  Gruson  a  en  l'idée.  A-l-il  désiré  conserver  la 
pn^riété  de  son  idée  ?  Oui.  il  a  pris  un  brevet  en  France,  il  a  donc  fait 
■a  acte  indiquant  qu'il  désirait  conserver  la  propriété  de  son  idée.  Il 
n'a  pas  fabriqué,  dit-on  ;  mais  jusiifle-t-il  d'une  cause  légitime  de  non- 
btirication  ?  On Tonsadil,  ensa  faveur, qu'il  n'y  avail,en  France,  qu'un 
s«ul  consommateur  en  tait  de  tourelles  cuirassées  :  l'Etal.  Il  a  offert 
••a  idée  à  l'Etat,  et  l'Etat,  par  scrupule  que  je  comprends  parfaitement. 
D'en  a  pas  voulu. 

«  Aurail-it  dû,  aBn  de  se  soumettre  anx  termes  exacts,  littérsui,  de 
b  lai,  installer  des  fabriques  en  France,  aân  de  fabriquer  des  tourelles 


V  'ȕ   .7"f^6^ 


—  244  — 

la  nullité  des  brevets  et  certificats  d'addition  de  Gruson. 
Gruson  conclut  alors  à  ce  que  Schneider  et  Cie  fussent  dé- 
clarés contrefacteurs  et  condamnés  à  des  dommages-in- 
térêts à  fixer  par  état. 

Schneider  et  Cie  soutenaient,  à  Taudience.que  si  le  cer- 
tificat d'addition  contenait  quelque  chose  de  nouveau,  en 
tous  cas  il  était  nul  comme  se  rattachant  à  une  partie  de 
brevet  nulle  pour  défaut  de  nouveauté . 

M""    Georges  Maillard    plaidait    pour    le    demandeur, 
M.  Clausel  de  Coussergues  pour  les  défendeurs. 

M.  le  substitut  Trouard-Riolle  a  conclu  à  la  validité  des 
brevets  et  certificats  d'addition  Gruson  ainsi  qu'à  la  con- 

cairassées,  alors  qu*il  n'en  aurait  vendu  à  personne  ?  Evidemment  non. 
Messieurs. 

On  a  dit  encore  :  mais  il  aurait  pu  installer  une  fabrique  de  tooreUes 
cuirassées  en  France,  non  pas  pour  les  vendre  au  gouvernement  fran- 
çais, puisque  celui-ci  n'en  voulait  pas,  mais  pour  les  vendre  à  l'étran- 
ger. . . . 

Les  établissements  Gruson,  qui  sont  maintenant  réunis  aux  établisse- 
ments Krupp,  sont,  vous  le  savez,  considérables  ;  il  y  a  un  intérêt  évi- 
dent, un  intérêt  notamment  pécuniaire,  à  ce  que  toute  la  fabrication 
soit  rassemblée  sous  une  môme  direction,  sous  âne  même  surveillance  ; 
il  y  a  ainsi  des  frais  de  main-d'œuvre,  de  direction,  d'exécution,  qui 
sont  beaucoup  moins  considérables.  11  y  aurait  donc  pour  le  breveté  un 
préjudice  évident  à  être  obligé  d'installer  une  fabrication  dans  un  pays 
où  il  n'y  a  pas  de  débouchés,  où  il  n'y  a  pas  de  consommateurs  et  à  Caire 
faire  le  voyage  des  appareils  qui  y  auraient  été  fabriqués,  pour  les  ra- 
mener dans  son  pays.  ^ 

«  n  est  évident,  Messieurs,  que,  si  ce  système  a  l'air  d'être  une  appli- 
cation littérale  de  la  loi,  il  ne  tient  pas  contre  une  objection  de  bon  sens. 
S'il  n'y  a  pas,  en  France,  de  consommateurs  pour  celui  qui  a  pris  le 
brevet,  il  est  évident  qu'on  ne  peut  le  forcer  à  construire  une  usine  qui 
fabriquerait  à  vide.  £n  résumé,  je  dis  que  Gruson  a  manifesté  l'intention 
de  conserver  ion  invention  ;  qu'il  a  fait  ce  qu'il  pouvait  pour  la  mettre 
à  la  disposition  du  public  français,  en  y  comprenant,  notamment,  le 
gouvernement.  Le  gouvernement  n'a  pas  voulu  de  son  invention,  il 
a  fait  la  sourde  oreille.  Mais  qu'importe  ?  Ce  n'est  pas  du  côté  du  gou- 
vernement qu'il  faut  nous  placer  pour  examiner  s'il  y  a  eu  possibilité 
d'exécution,  mais  du  côté  de  Gruson.  Gruson  a  fait  tout  ce  qu'il  pou- 
vait faire  ;  il  a  offert  son  invention,  et  on  ne  peut  raisonnaUement  exi- 
ger de  lui  qu'il  ait  fabriqué  alors  qu'il  n'y  avait  pas  de  consomma- 
teurs. » 

Pnur  la  jurisprudence  et  la  doctrine,  cf.  Pouillet,  p.  518  ;  Mainié» 
t.  2,  no2048;Allarl,  no  341. 

Nous  ajouterons  seulement  qu'en  fait,  l'installation  d'une  usine  en 
France,  tout  exprés  pour  la  livraison  des  tourelles  destinées  à  la  Rou- 
manie, aurait  entraîné  des  frais  hors  de  proportion  avec  les  bénéfices  et 
que  le  législateur  de  1848  en  permettant  au  breveté  de  justifier  des 
causes  de  son  inaction,  ne  prévoyait  pas  seulement  l'impossibilité  ma- 
érielle  de  fabriquer,  mais  toutes  les  raisons  sérieuses  de  ne  pas  exploiter. 


!nL"VM^t^HtlçW5W  HiHIJ  AJkUP  .  I  l.^s»PT^9'lP-^r  V* 


—  246  — 

Que  si  de  Texamen  des  documents  produits  il  résulte  qu'il  a  trait 
au  perfectionnement  du  mode  élévatoire  décrit  dans  la  deuxième 
partie,  Tidée  qu'il  applique  était  contenue  en  germe  dans  la  pre- 
mière partie  ; 

Qu'en  effet  cette  première  partie  tout  en  réglant  principale- 
ment le  mouvement  de  rotation  de  Taffût  organise  dans  ce  bat 
les  moyens  d'alléger  le  dit  affût  ; 

Que  pour  cela  on  soulève  la  calotte  cuirassée  qui  le  recouvre  ; 

Qu'il  s'agit  donc  accessoirement  dans  cette  première  partie  d'un 
mode  élévatoire  auquel  le  certificat  d'addition  donne  seulement 
plus  d'amplitude  ; 

Attendu,  dès  lors,  que  ce  certificat  ne  faisant  qu'un  avec  le  bre- 
vet, c'est  l'ensehible  des  deux  titres  qu'il  s'agit  d'examiner  pour 
statuer  sur  la  contrefaçon  ; 

Mais  que  le  tribunal  n'a  pas  quant  à  présent  les  éléments  pour 
se  prononcer  sur  la  validité  du  brevet  ; 

Qu'il  y  a  lieu  de  recourir  à  une  expertise  ; 

Par  ces  motifs,  Avant  faire  droit  ; 

Dit  que  par  Léauté,  Périsse  et  Schlemmer,  experts  que  le  tribu- 
nal commet  et  qui  prêteront  serment  s'ils  n'en  sont  dispensés  par 
les  parties,  le  brevet  Gruson  du  6  mars  i883,  ensemble  le  certi- 
ficat d'additioîi  du  2  septembre  1886  seront  examinés  à  TefTet  de 
dire  s'ils  constituent  l'invention  de  nouveaux  moyens  ou  l'ap- 
plication nouvelle  de  moyens  connus  pour  l'obtention  d'un  ré- 
sultat ou  d'un  produit  industriel  et  à  l'effet  de  s'expliquer  sur 
toutes  antériorités  qui  seraient  alléguées  ; 

Dit  qu'en  cas  d'empêchement  des  experts  commis  ils  seront 
remplacés  par  ordonnance  de  M.  le  président  de  cette  chambre 
rendue  sur  simple  requête. 

Au  cours  de  l'expertise,  Schneider  et  Cie  ayant  soutenu 
qu'en  tous  cas  ils  n'étaient  pas  contrefacteurs,  un  juge- 
ment, rendu  d'accord  entre  les  parties  le  10  juillet  1895, 
étendit  la  mission  des  experts  à  la  question  de  contrefaçon. 

Les  experts  conclurent  que  le  t^  dispositif  du  brevet 
Gruson  était  nouveau  et  brevetable,  qu'il  en  était  de  même 
du  3*  certificat  d'addition  et  qu'il  y  avait  lieu  de  comparer 
l'engin  de  Schneider  et  Cie  à  un  appareil  formé  delà  réu- 
nion du  2*  certificat  d'addition  et  du  2*  dispositif  du  brevet, 
mais  que  l'engin  de  Schneider  et  Cie  n'était  pas  la  con- 
trefaçon de  cet  appareil. 

Les  experts  ayant  déposé  leur  rapport,  M"  Georges 
Maillard  plaida  pour  les  héritiers  de  Gruson  (Hermann 


m&ndent  reconventionnetlement  que  le  brevet  de  Gruson  du 
6  mari  18B3  ensemble  les  certiScats  d'addition,  soient  déclarés 
tmli  pour  défaut  de  nouveauté,  et  subsidiaireraent  que  Gruson 
Boit  déclaré  déchu  des  droits  qu'il  tient  de  son  brevet,  faute  d'a- 
voir mis  son  invention  en  exploitation  en  France  daus  les  délais 
Qxés  par  la  loi  ; 

Attendu  que  par  jugements  avant  Taire  droit  des  12  décembre 
1894  et  10  juillet  1895,  le  tribuoal  a  commis  Léauté,  Schlemraer 
et  Périsse,  experts,  à  fin  de  : 


HLB     *  \ 


—  248  — 

Primo  :  examiner  si  le  brevet  Grason  du  6  mars  1883  et  le  cer- 
ti6cat  d'addition  du  2  septembre  1886,  constituent  Tinvention  de 
nouveaux  moyens  ou  l'application  nouvelle  de  moyens  ^connus 
pour  l'obtention  d'un  résultat  ou  d'un  produit  industriel,  et 
s'expliquer  sur  toutes  les  antériorités  qui  seraient  alléguées  ; 

Secundo  :  examiner  si,  et  dans  quelle  mesure,  Schneider  et 
Gie  ont  reproduit  l'affût  cuirassé  revendiqué  par  les  dits  brevets 
.et  certificats  d'addition  ; 

Attendu  que- le  dit  jugement  du  12  décembre  1894  décidait,  en 
outre,  que  le  certificat  d'addition  du  2  septembre  1886  se  ratta- 
chait à  la  première  comme  à  la  seconde  partie  du  brevet  et  ne 
devait  pas  être  examiné  isolément  ; 

Attendu  que,  Hermann  Gruson  étant  décédé,  ses  héritiers  ont 
repris  l'instance  par  conclusions  du  13  mars  189^  ; 

Attendu  que  les  experts  ont  déposé  leur  rapport  le  26  juin 
1896  ;  qu'ils  déclarent  le  brevet  de  Gruson  valable,  pour  ce  qui 
concerne  le  deuxième  dispositif; 

Qu'en  rapprochant  ce  deuxième  dispositif  du  certificat  d'addi- 
tion du  2  septembre  1886,  ils  reconnaissent  comme  appartenant 
à  Gruson  une  combinaison  d'éléments  connus  ainsi  définie  : 

Primo  :  un  affût  cuirassé  pivotant,  conjugué  avec  unecontre- 
cuirasse  fixe,  celle-ci  portant  un  appendice  à  l'arrière  pour  per- 
mettre l'éclipsé  ; 

Secundo  :  une  colonne  servant  de  support  au  pivot  et  pouvant, 
en  vue  de  produire  l'éclipsé,  être  levée  ou  abaissée  au  moyen 
d'un  levier-balancier  équilibré  par  un  contrepoids  avec  ou  sans 
l'aide  d'un  treuil  à  main  ; 

Tertio  :  solidarité  de  la  coupole  de  l'affût  et  du  canon  pour 
que  le  choc  du  recul  soit  d'abord  reçu  par  toute  la  masse  de  l'ap- 
pareil ; 

Qu'enfin  ils  estiment,  mais  seulement  à  la  majorité  des  voix, 
que  la  tourelle  cuirassée  du  Greusot  n'est  pas  la  contrefaçon  du 
brevet  Gruson  ; 

Attendu  que  Schneider  et  Gie  prétendent  que  les  dispositifs  du 
brevet  Gruson  et  ses  certificats  d'addition  présentent  tous  des 
combinaisons  nulles  pour  défaut  de  nouveauté; 

Sur  les  antériorités  : 

^  Attendu  que  Gruson  revendique  pour  son  premier  dispositif 

les  éléments  suivants  :  un  affût  cuirassé  tournant  à  coupole  et  à 
embrasure  minima,  avec  organe  de  soulèvement  sur  pivot  pour 
faciliter  la  rotation  de  la  coupole  ;  un  contrepoids  avec  trans- 
mission hydraulique  pour  équilibrer  le  canon  et  le  soulever  en 
vue  de  la  charge  et  du  pointage  en  hauteur  et  enfin  la  solidarité 
de  l'affût  et  de  la  coupole  pour  neutraliser  le  recul  ; 

Attendu  qu'un  affût  à  embrasure  minima  avec  cylindre  à  va- 


r*" 


--250  — 

vement  par  un  treuil  à  main,  au  moyen  duquel  on  produit  Té- 
clipse  ; 

Tertio  :  la  solidarité  du  canon  de  Taffât  et  de  la  cuirasse  en 
vue  de  neutraliser  autant  que  possible  le  choc  du  recul  ; 

Attendu  que,  sauf  Téclipse,  le  premier  élément  de  la  combi- 
naison se  retrouve  dans  les  dispositifs  du  brevet  de  Schumann 
ainsi  que  le  troisième  élément  ; 

Attendu  que  Téclipse  se  retrouve  notamment  dans  la  plate- 
forme de  Winans  de  1862,  dans  la  plate-forme  tournante  avec  toit 
blindé  de  Mathew  de  1864,  et  dans  la  coupole  tournante  de  Ra« 
dley  (patente  anglaise  de  1863)  ; 

Attendu  que  le  deuxième  élément  se  retrouverait  dans  la  cou- 
pole de  Hadley  si  elle  était  équilibrée,  mais  le  contrepoids  d'é- 
quilibre et  la  puissance  manuelle  pour  Téclipse  existent  dans 
Tantériorité  Winans  et  dans  l'antériorité  Mathew  ; 

Attendu,  en  conséquence,  que  Gruson  a  pris  dans  le  domaine 
public  tous  les  organes  qui  composent  son  deuxième  dispositif  ; 

Que  toutefois,  dans  aucun  ouvrage  antérieur  on  ne  trouve  tous 
ces  éléments  réunis  et  combinés,  et  qu'il  y  a  lieu'pour  le  tribu- 
nal de  déclarer  la  combinaison  valable,  conformément  à  Tavis 
des  experts  ; 

Attendu,  en  ce  qui  concerne  le  troisième  dispositif,  que  ses  élé- 
ments se  retrouvent  aussi  dans  les  antériorités  précitées,  mais 
que  la  combinaison  qu'il  réalise  est  nouvelle  ; 

Qu'en  effet  la  seule  antériorité  d'ensemble  qui  puisse  lui  être 
opposée  est  tirée  de  sa  similitude  avec  le  dessin  d'un  affût  revol- 
ver de  1868,  dont  Schumann  est  l'auteur,  mais  qui  n'a  été  publié 
qu'en  1890  par  le  général  Schrôder; 

Qu'il  y  a  donc  lieu  de  déclarer  ce  dispositif  valable,  contraire- 
ment à  l'avis  des  experts  ; 

Attendu,  en  ce  qui  concerne  le  premier  certificat  d'addition, 
qu'il  n'est  qu'un  perfectionnement  apporté  au  premier  dispositif 
et  qu'il  n'est  primé  dans  son  ensemble  par  aucune  antériorité  ; 

Que  le  dessin  de  Schumann  qui  lui  est  opposé  ne  contient  ni 
le  contrepoids  destiné  à  équilibrer  la  bouche  à  feu  ni  le  levier 
propre  à  soulever  la  coupole  pour  en  faciliter  le  roulement  ; 

Qu'il  y  a  lieu  en  conséquence  de  déclarer  valable  le  premier 
certificat  d'addition  ; 

Attendu  que  le  deuxième  certificat  d'addition  comprend  trois 
éléments  : 

Primo  :  l'affûit  cuirassé  du  premier  dispositif  avec  perfection- 
nement du  contrepoids  nécessaire  pour  élever  ou  abaisser  le  ca- 
non et  équilibrer  ; 

Secundo  :  le  mouvement  d'éclipsé  du  deuxième  dispositif; 

Tertio  :  un  levier  équilibré  pour  soulever  ou  abaisser  sur  son 


\ 


leviers,  c'est  qu'il  avait  eu  vue  l'éclipsé  d'une  pièce  de  canon  d'nn 
poids  uoDsidérable  ; 

Qu'il  se  TéserTBit  aussi  le  monopole  d'un  levier  unique  dont  le 
dessin  est  facile  à  établir  ; 

Que  cela  résulte  des  termes  de  son  brevet  précité  ; 

Attendu,  en  conséquence,  que  le  principe  du  levier  équilibré, 
employé  par  Gruson  au  mouvement  d'éclipsé  de  son  affût,  était 
dans  le  domaine  public  à  la  disposition  de  Schneider  comme  de 
tous  antres  ; 

Attendu  que  le  premier  dispositif  du  brevet  ne  comportant 
pas  l'éclipsé  ne  saurait  être  associé  an  levier  équilibré  destiné  à 
la  produire  ; 

Que  le  deuxième  dispositir  reconnu  valable  par  les  motifs  pré- 
cités, peut  seul  être  combiné  avec  le  deuiiëme  certiTicat  d'addi- 
tion ; 

Attendu  qu'aucune  antériorité  ne  peut  être  opposée  à  leur 
combinaison  ; 

Sur  te  eontre/dfon  :  Attendu  que  Gruson  prétend  que  la  tou- 
relle construite  par  Schneider  pour  la  Roumanie  est  la  contre- 
façon de  celte  seconde  combinaison  ; 


—  252  — 

Attendu  que  Tappareil  de  Gruson  est  un  affût  cuirassé  à  em- 
brasure miniina  où  les  flasques  du  canon  sont  indissolublement 
liées  à  la  cuirasse  d'où  sort  la  volée  delà  pièce,  ce  qui  empêche 
de  Tabriter  sufQsamment  après  le  tir  ; 

Attendu  que  Tappareil  de  Gruson  est  oscillant  contre  Tavant- 
cuirasse,  c'est-à-dire  que  pour  retrouver  Taplomb  nécessaire  au 
pointage  et  à  la  charge,  il  met  plus  de  temps  qu'une  tourelle 
où  l'effet  de  recul  est  complètement  annulé  ; 

Attendu  que  l'appareil  de  Gruson  s'éclipse  incomplètement  ; 

Qu'en  effet,  dans  la  contre-cuirasse  se  trouve  un  logement  à 
ciel  ouvert  pour  la  volée  du  canon  ; 

Que  pendant  le  tir  cette  ouverture  peut  donner  accès  dans  le 
cuirassement  lui-même  au  feu  plongeant  de  l'ennemi  ; 

Qu'après  le  tir  la  volée  du  canon  y  reste  exposée  au  même 
danger  ; 

Que  pour  loger  le  canon  dans  cette  ouverture,  l'affût  cuirassé 
doit  tourner  sur  lui-même  et  subir  ainsi  un  retard  avant  de  s'é- 
clipser ; 

Attendu  que  ces  défauts  de  l'appareil  de  Gruson  résultent  né- 
cessairement du  dessin  et  des  textes  de  son  2<>  dispositif; 

Que  vainement  il  prétend  être  en  droit  d'en  modifier  le  système 
en  y  introduisant  un  affût  mobile  ; 

Qu'une  des  revendications  essentielles  de  son  invention,  bien 
nommée  affût  cuirassé,  est  la  solidarité  persistante  entre  le  cui- 
rassement et  les  flasques  de  la  pièce  pour  neutraliser  le  recul 
par  la  masse  de  l'appareil  ; 

Que  si,  pour  dérober  la  volée  du  canon  au  danger  qui  le  me- 
nace, on  veut  le  laisser  tout  entier  sous  sa  coupole,  on  retombe 
dans  le  premier  dispositif,  qui  n'est  pas  à  éclipse,  ou  dans  le 
deuxième  certificat  d'addition  qui  n'existe  pas  isolément  et  dans 
lequel,  au  surplus,  la  pièce,  occupant  tout  le  diamètre  de  la 
coupole,  doit  basculer  au  moyen  d'un  contrepoids  pour  la  charge 
et  le  pointage  ; 

Attendu  que  tout  ce  qui  touche  à  la  rapidité  du  tir  et  ^e  l'é- 
clipse,  à  la  sécurité  du  canon  et  à  l'impénétrabilité  de  la  tourelle 
est  essentiel  dans  des  ouvrages  de  cette  nature  ; 

Que  l'appareil  de  Gruson  est  insuffisant  pour  le  résultat  qu'il 
s'est  proposé;  que  Ton  peut  même  se  demander  si  un  affût  con- 
forme, non  à  sa  tourelle  de  Roumanie  qui  n'a  rien  à  voir  au  procès, 
mais  aux  seuls  dessins  de  son  deuxième  dispositif  combiné  avec 
le  deuxième  certificat  d'addition,  pourrait  fonctionner  convena- 
blement ; 

Attendu,  au  contraire,  que  la  tourelle  brevetée  par  Schneider 
et  Gie  ne  présente  pas  les  lacunes  signalées  ; 

Que,  de  plus,  elle  diffère,  par  sa  nature  même,   de  l'affût  cui- 


1886,  constituent  l'application  nouvelle  de  moyens  connus  pour 
l'obtention  d'un  résultat  et  d'un  produit  industriels  ; 

Qu'il  en  est  de  même  du  certificat  d'addition  du  3  août  1S86, 
uni  an  deuxième  dispositif  du  brevet  ; 

Qu'aucune  antériorité  n'est  valablement  opposée  aux  combi- 
naisons résultant  de  ces  dilTérents  documents  ; 

Que  toutefois  Schneider  et  Cie  n'ont  pas  reproduit  l'affût 
cnirassé  à  embrasure  minima,  revendiqué  par  les  brevets  et  cer- 
tificats d'addition  de  Gruson  ; 

Sur  la  déchéance  du  brevet  :  Attendu  que  Schneider  et  Cie 
prétendent  subsidiairement  que  les  brevets  de  Gruson  sont 
tombés  danj  le  domaine  public  français,  faute  d'avoir  été  mis 
en  exploitation  en  France  dans  le  délai  imparti  par  l'article  32 
de  laloidD  5  juillet  1844; 

Attendu  que  le  tribunal  n'ayant  pas  admis  les  conclusions  re- 
conventionnelles  de  Schneider  sur  la  nullité  des  brevets  de  Gru- 


—  254  — 

son,  il  y  a  lieu  de  répondre  à  ses  conclusions  subsidiaires  sur  la 
déchéance  des  dits  brevets  ; 

Attendu  qu'au  nom  des  Etablissements  Grusonwerk  et  en  der- 
nier lieu  au  nom  des  Etablissements  Fried  Krupp  et  Grusonwerk 
de  Magdebourg,  Armengaud  aîné  a  écrit  tous  les  deux  ans  à 
M.  le  Ministre  de  la  guerre  une  lettre  ainsi  conçue  : 
«  Monsieur  le  Ministre, 

«  J'ai  rhonneur  de  vous  adresser  un  mémoire  descriptif  et  trois 
dessins  se  rapportant  à  un  affût  cuirassé  à  embrasure  mini  ma 
qui  a  fait  l'objet  d'une  demande  de  brevet  en  date  du  6  mars 
1883,  numéro  154,131. 

c<  Dans  le  cas  où  vous  jugeriez  que  cette  invention  serait  de 
nature  à  intéresser  votre  Département,  ces  établissements  se 
mettraient  à  votre  entière  disposition  pour  vous  fournir  tous  les 
renseignements  complémentaires  que  vous  jugeriez  utile  de  leur 
demander  »  ; 

Attendu  que  le  tribunal  ne  saurait  voir  à  un  degré  quelconque 
une  exécution  de  la  loi  dans  cette  proposition  périodique  tou- 
jours conçue  dans  les  mêmes  termes  ; 

Que  Gruson  ne  peut  prétendre  qu'il  a  suppléé  par  Taccomplis- 
sèment  de  cette  formalité  aux  obligations  résultant  de  la  loi  fran- 
çaise ; 

Que  si  la  fabrication  de  ses  produits  en  France  lui  paraissait 
impraticable  pour  lui-même,  rien  ne  Tempéchâit  de  concéder  des 
licences  à  des  constructeurs  français  ; 

Que  dans  tous  les  cas  le  tribunal  ne  saurait  admettre  le  prin- 
cipe d*une  dispense  d'exploitation  qui  n'aurait  d'autre  motif  que 
la  nature  même  du  produit  breveté  ; 

Sur  ks  dépens:  Attendu  que  si  Schneider  et  Gie  succombent 
sur  leur  demande  en  nullité  des  brevets  Gruson  pour  défaut  de 
nouveauté,  ils  obtiennent  gain  de  cause  sur  leur  demande  en 
nullité  des  mêmes  brevets  pour  défaut  d'exploitation  ; 

Qu'il  n'y  a  pas  lieu  en  conséquence  de  leur  faire  supporter  une 
partie  des  dépens. 

Par  CBS  motifs,  Donne  acte  aux  consorts  Gruson  de  leur  reprise 
d'instance  ; 

Entérine  pour  partie  le  rapport  des  experts  ; 

Déclare  Gruson  non  recevable  et  en  tous  cas  mal  fondé  en  ses 
Ans,  demandes  et  conclusions,  l'en  déboute  ; 

Déclare  Schneider  et  Cie  mal  fondés  en  leur  demande  recon- 
ventionnelle tendant  à  la  nullité  du  brevet  Gruson  du  6  mars 
1883  et  des  certiticats  d'addition  au  dit  brevet,  pour  défaut  de 
nouveauté,  les  en  déboute  ; 

Dit  toutefois  que  Gruson  était,  à  la  date  du  22jmars  1893,  dé- 
chu de  tous  les  droits  qu'auraient  pu  lui  conférer  le  dit  brevet 


ploité  son  inven- 
loi  du  5  juillet 


ibre  de  la  Cour 
iprès  avoir  en- 

D    et    OONTARn, 

lubstitulBLON- 
Î36),  rendu,  le 


li  répondent  suf- 
dusions  des  ap- 


OD,  inijénienr  al- 
)our  un  système 
.  que  des  certifl- 
gaptembre  188S  ; 
s  de  conlretaçon 
ie  en  1891  et  qu'à 
;  tombée  dans  le 
I  France  sa  dé- 

tionale,  la  loi  a 
le  droit  exclusif 

France,  Tût  obligé 
on  durant  deux 
,dité  de  ses  bre- 
*cu,  uiusuii  uB>uii,  uaiiB  113  uBiiLi  uB  uEui.  9113  <i  p&ttiT  de  la  dé- 
livrance, faire  confectionner  en  France  des  appareils  do  son  in- 
TentioD  et  qu'il  est  constant  qu'il  ne  l'a  jamais  fait  ; 

Qu'à  la  vérité,  l'inventeur  peut  être  relevé  de  cetle  déchéance 
en  justifiant  des  causes  légitimes  do  son  inaction  ;  mais  que  les 
appelants  n'ont  apporté  aucune  preuve  K  cet  égard  ;  qu'au  con- 
traire il  ressort  de  tous  les  documents  versés  au  débat  que  Gru- 
son  a  fait  construire  ditTérents  appareils  de  son  système  dans  son 
asine  de  Magdebourg-Buckau,  qui  s'est  fusionnée  plus  tard  avec 
la  célèbre  usine  Krupp  ;  que  l'inventeur  disposait  de  tous  les  ca- 
pitaux et  de  toutes  les  ressources  nécessaires  pour  organiser  sur 
notre  territoire  des  ateliers  de  construction  et  que  s'il  n'eu  a  pas 
créé,  c'est  parce  qa'il  a  cru  préférable  de  concentrer  toute  sa  fa- 
brication dans  un  senl  établissement  industriel  ; 


—  256  — 

Considérant  que  la  fabrication  en  Fraace  d'affi^ts  cuirassés  du 
système  Gruson  aurait  pu  se  faire,  non  seulement  par  Tinven- 
teur  lui-même,  mais  encore  par  ceux  à  qui  il  aurait  accordé  des 
licences,  mais  qu'il  n'en  a  concédé  aucune  ; 

Considérant  qu'on  ne  saurait  assimiler  à  une  exploitation  véri- 
table Toflre  adressée  par  les  représentants  de  Tinventeur  au  mi- 
nistère de  la  guerre  et  réitérée  tous  les  deux  ans,  de  faire  pro- 
fiter le  ^gouvernement  français  de  sa  découverte  ;  qu'on  objecte 
vainement  que  ce  serait  le  seul  consommateur  qu'on  pût  trouver 
en  France  pour  la  consommation  d'engins  de  guerre  ;  que  les 
canons,  les  appareils  cuirassés,  se  fabriquent  autant  dans  les  éta- 
blissements privés  que  dans  les  forges  de  l'Etat  ;  que  le  procès 
actuel,  qui  a  été  intenté  à  la  suite  d'une  vente  de  tourelles  à 
éclipse  faite  par  l'usine  du  Creusot  à  la  Roumanie,  fournit  un 
exemple  de  commandes  d'engins  de  guerre  adressées  par  des 
gouvernements  étrangers  à  l'industrie  française  ; 

Considérant  d'ailleurs  que,  lors  même  que  Gruson  aurait  vendu 
aux  autorités  militaires  de  notre  pays  des  appareils  de  son  sys- 
tème fabriqués  en  Allemagne,  il  n'aurait  pas  satisfait  aux  obli- 
gations qui  lui  imposaient  un  travail  exécuté  en  France  et  qui 
étaient  si  rigoureuses  que  l'article  32,  §  3,  de  la  loi  du  5  juillet 
1844  prononçait  la  déchéance  contre  le  breveté  qui  aurait  intro- 
duit sur  notre  territoire  des  objets  fabriqués  à  l'étranger  sembla- 
bles à  ceux  qui  étaient  garantis  par  son  brevet  ;  que  c'est  aûn  de 
tempérer  la  rigueur  de  cette  dernière  disposition  que  la  France 
a  conclu  le  20  mars  1883  un  traité  international  pour  la  protec- 
tion de  la  propriété  industrielle,  connu  sous  le  nom  de  Conven- 
tion de  Berne,  sanctionné  par  la  loi  du  26  janvier  1884  et  par  le 
décret  du  8  juillet  delà  même  année;  mais  que  l'Allemagne 
n'est  pas  au  nombre  des  Etats  qui  ont  adhéré  à  cette  conven- 
tion ; 

Que  Gruson  restait  donc  soumis  aux  prescriptions  delà  loi  du 
5  juillet  1844  et  que,  pour  ne  les  avoir  pas  observées,  il  a  été  dé- 
chu de  ^es  brevets  d'invention  ; 

Par  gbs  motifs.  Déclare  la  veuve  et  les  héritiers  Gruson  mal 
fondés  en  leurs  demandes,  uns  et  conclusions,  les  en  déboute  ; 
dit  que  les  brevets  d'Hermann  Gruson  étaient  frappés  de  déchéance 
et  que  ses  découvertes  étaient  tombées  dans  le  domaine  public 
lors  de  la  fabrication  des  tourelles  arguées  de  contrefaçon  ; 

Confirme  le  jugement  attaqué  ;  ordonne  qu'il  sortira  son  pleiji 
et  entier  effet  ; 

Condamne  les  appelants  à  l'amende  et  aux  dépens. 


—  257  — 


Akt.  4139. 

Brevet  Onnlop.  -^  CSinpIol  noave«a.  •— Combliitti- 
eon  dlllérente  des  mêmee  élémente.  —  Bjrplolta- 
tJem.  —  Erreur  de  deenln.  —  Réeultat  prAtlc|ae.  — 
RevendIefttlOD.  —  Breveté  étrangers.  ~  Article  90 
de  Im,  loi  de  1844.  —  Proeèe.  —  Publlelté  ezeeeelve. 
—  Domma^ee  et  Intérêt». 

Il  y  a  simple  emploi  nouveau^  non  brevelable  dans  le  fait 
éPemployer  en  vue  de  diminuer  les  chocs  ou  vibrations^  des 
garnitures  pneumatiques  pour  les  roues  de  vélocipèdes, 
alors  qu'antérieurement  on  a  fait  usage  du  même  procédé^ 
dans  le  même  hut^  pour  garnir  les  roues  d'autres  véhi- 
cules et  particulièrement  de  véhicules  légers  (Résolu  par  le 
tribunal  et  la  Cour)  (1). 

Il  ne  saurait  y  avoir  de  contrefaçon  dans  le  fait  de  puiser 
dans  le  domaine  public  les  éléments  qui  se  trouvent  réunis 
dans  un  autre  brevet  pour  les  combiner  en  vue  d'un  résultat 
identique^  mais  de  manière  à  leur  attribuer  une  fonction 
toute  différente  {Késolxji  par  le  tribunal  et  la  Cour)  (2). 

On  ne  saurait  considérer  comme  suffisant  à  éviter  la 
déchéance,  Vexploitation  réduite  à  la  fabrication  de  quel- 
ques spécimens  qui  n'ont  pas  eu  un  cours  commercial  (Ré- 
solu par  le  tribunal)  (3). 

Mais  est  régulière  et  valable  la  poursuite  exercée  en  vertu 
d'un  brevet  qui  n'a  jamais  été  exploité  si  elle  est  intentée 
moins  de  deux  ans  après  la  délivrance  du  brevet  ;  on  ne  sau- 
rait attacher  à  Vinaction  dans  laquelle  est  demeuré  posté- 

(i)  Sar  remploi  nouveau,  V.  Pouillet»  Brw.  dHnv.,  n^i  b7,  41  ;  Mai- 
nié,  n«*  345  et  saiv.  ;  AUart,  1. 1,  n»  25.  Comp.  Paris,  10  décembre  1857, 
GaT7,  Ann,,  58.  136  ;  Lyon,  23  juin  1860,  Yignet,  Dalloz,  61.263  ;  Paria, 
14  mai  1868,  Ganouil,  Ann,,  68.210;  Paris,  21  février  1900,  Laffitte, 
Gaz,  Trib.,  30  mars  1900,  etc. 

(2)  Sur  la  contrefaçon  lorsqu'il  y  a  combinaison  nouvelle  d'éléments 
connus^  V.  Pouillet,  eod.  loc,  n*  727  ;  Comp.  Paris,  6  avrU  1857,  Cavail- 
lon,  iinn.,  57.364;  Paris.  30  décembre  1864,  Giffard,  Ann.,  65.83; 
Montpellier,  17  juillet  1877,  Vergely,  Ann.,  78.100  ;  Rej.,  3  août  iSOT, 
Nicolas,  Ann.,  99.  66  ;  Paris,  22  juin  1898,  Leclercq,  6a^.  du  Pal, y 
4  février  1899. 

(3)  Sur  la  déchéance  par  défaut  d'exploitation,  V.  Pouillet,  eod,  loc., 
»«  506,509;  Allart,  t.  2,  n«340;  Mainié,  n^-ieôS  etsuiv.  Comp.  Douai, 
90  niilet  1^9,  Lister,  Ann.,  61.46  ;  Paris,  23  mai  1890,  Sirey,  70.148; 
Trib.  Seine,  6  mai  1897, /a  Loi,  15  février  1898;  Paris,  15  mars  1900, 
Gruson,  Ann.,  1900.  339. 

17 


—  258  — 

rieurement  le  breveté  un  effet  rétroactif  que  la  loi  n*a  pas 
édicté  {ii.){i). 

Une  invention  ne  peut  être  stérilisée  par  une  légère  erreur 
du  dessinateur  des  planches  du  brevet^  alors  que  le  construc' 
teur  est  nécessairement  appelé  à  la  rectifier  dans  l'exécution 
(id.)  (2). 

On  ne  saurait  considérer  comme  une  invention  positive 
et  pratique  réalisant  un  résultat  industriel^  celle  qui,  des- 
tinée  au  public  en  général^  exige  pour  sa  mise  en  œuvre  un 
outillage  spécial,  et  une  habileté  peu  commune  {id.)  (3). 

La  loi  française  n'exige  pas  que  la  description  du  brevet 
se  termine  par  des  revendications  ;  il  suffit  que  Finvention 
se  dégage  de  Vensemble  des  énonciations  du  mémoire  des- 
criptif (^ù.)  {k). 

Les  tribunaux  français  ont  la  faculté  de  se  prononcer 
sur  la  validité  d'un  brevet  étranger,  au  regard  de  la  loi  à 
laquelle  il  est  soumis,  mais  ils  ne  doivent  user  de  cette  fa* 
culte  que  lorsqu'il  s'agit  d'appliquer  un  texte  formel  ou 
un  principe  essentiel  dominant  la  législation  dont  s'agit 
(id.)(8).  •    / 

Lorsque  un  brevet  étranger  doit  être  considéré  comme 
nul,  en  vertu  de  l'article  ^  delà  loi  de  1844,  le  brevet  cor- 
respondant  doit  partager  le  même  sort  (id.)  (6). 


(1)  Sar  la  poursuite  intentée  dans  le  délai  de  deux  ans  :  jurisprudence 
constante  ;  V.  Pouillet,n«  508  et  Gass.  cr.,26  jailiet  1889,  Vacher  et  Perrin, 
Ann,y  89.235  et  Gass.,  10  janvier  1889,  Gombret,  Ann.,  89.168. 
^  (2)  Sur  les  inexactitudes  dans  les  descriptions  ou  dessins,  V.  Pouiilet, 
eod.  loe.,  n*  460.  Gomp.  Paris,  17  mars  1887,  Saulnier,  DaUoz,  82.2. 
86  ;  Trib.  dv.  Seine,  3  août  1888,  Farcot,  Ann.,  91.296. 

(3)  Sur  les  caractères  de  rinvention  brevetable,  V.  Pouiilet,  eod.  lœ., 
n^  6  et  s.  et  82  et  s. 

(4)  Sur  les  formes  delà  description,  V.  Pouiilet,  eod.  loc,,  n*  114; 
Allart,'  n«  88  ;  Mainié,  n*  808. 

(5)  Sur  le  pouvoir  d'appréciation  des  tribunaux,  V.  Pouiilet,  0m2.  loe., 
n*>  86  «t  s.  et  la  jurisprudence  citée. 

(6)  L'article  29  de  la  loi  du  4  juillet  1844  spécifie  que  la  durée  du  brevet 
firançaîs  ne  peut  excéder  celle  du  brevet  correspondant  étranger.  Il 
semble  bien,  que  d'après  les  termes  mêmes  de  rarticle,le  législateur  n'ait 
voulu  qu'une  chose,  mesurer  la  durée  normale  du  brevet  français,  sur 
la  durée  normale  du  brevet  antérieur  correspondant  pris  à  l'étranger 
sans  prétendre  en  aucune  façon  rendre  les  deux  brevets  solidaires,  et 
soumettre  le  brevet  français  à  toutes  les  vicissitudes  du  brevet  étranger* 
Gependant  une  jarisprudence  aujourd'hui  constante  décide  que  l'existence 
du  brevet  français  est,  d'une  façon  absolue,  soumise  à  ceUe  du  brevet 
étranger  et  que  par  suite  Textinction  du  second  pour  quelque  cause  que 


deuxième  brevet.si  court  que  soil  l'intervalle  de  temps  écou- 
lé l\d.}(i). 

Le  fait  par  un  industriel  de  donner  une  publicité  exces- 
sive à  un  procès  en  contrefaçon  intenté  à  une  maison  rivale 
dont  il  cherche  plus  particulièrement  à  combattre  la  concur- 
rence, notamment  par  des  annonces  réitérées  dans  les  jour- 
naux spéciaux  et  par  T  apposition  d'affiches  sur  les  murs 
d'une  ville  oà  la  maison  poursuivie  a  des  dépôts  de  ses  pro- 
duits, constitue  des  agissements  abusifs  dont  il  est  dâ  répa- 
ration (Résolu  par  la  Cour]  (2). 
{lïib.  Seine,  6   mai  t897.  -•  Compagnie  fraDfiise  des  pnenmatiqnei 

Diinlop  c.  Peugeot  frèrea,  Edeline,  Dalifol.VJUl-Bonhoare,  Michelin 

(C.  de  Paria,  1"  nui  1900.  —  Miciielin  e.  The  Dunlop 
pneomatic  lyre  O  lim.) 

Ainsi  jugé  SOUS  la  présidence  de  M.LÉVRiBH.par  jugement 
du  Tribunal  de  la  Seine  en  date  du  6  mai  1897,  après  plai- 
doiries de  M"  PonujtT,  âllaht,  Desiardin,  Miciiei,  Pil* 
uTizB,  elc. 

LzÎBiBnnAL,  Attends  que  sur  les  instances  intentées  parla 
Société  «The Pneomatic Tyre and Bootb'sCycIeAgency  Limited  » 
et  reprises  par  sa  cessiontiaire,la  Compagnie  Française  des  Pnen- 
mattqaes  Dunlop,  ainsi  que  sur  la  demande  en  nullité  de  bre- 
▼et  formée  par  Datifol,  Peugeot  frères,  la  Société  .i   La  Force  », 


ce  soit  fait  périr  le  premier.  V.  Poulllel,  n>  341  et  Can.,  14  jauTier 
1854,  Reboars,  Ann.,  64.81.  Encore  raudraîl-tl  ce  semble  admettre 
qne  le  brevet  étranger  ait  été  an  préalable  déclaré  nul  ou  déchu  par  une 
^cision  déflnilive  île  l'autorité  compétente  ;  dans  notre  espèce  le  tribu- 
nal de  la  Seine  a  été  plus  loin,  il  n'a  pas  craint  d'interpréter  la  loi 
étrangère  et,  crojant  voir  dans  les  documents  qui  lui  étaient  soumis  une 
cause  de  nnllité  frappant  le  brevet  étranger,  il  a  déclaré  déchu  le  brevet 
Iranfais  correspondant.  Aujourd'hui  la  doctrine  est  à  peu  près  unanime 
i  critiquer  cette  dépendance  des  breveta  ;  parmi  les  résolutions  de  In  Con- 
férence de  Bruxelles  non  encore  ratifiées  il  en  est  une  qui  proclame  dans 
le  domaine  de  la  Convenlion  d'Union  de  1888,  le  principe  de  l'indépen- 
dance des  brevets. 

(1)  La  jurisprudence  française  est  en  sens  contraire.  Voir  Casa.  civ. , 
W  janvier  1891,  Utfllle,  Ann.,  92.128. 

(S)  CT-  pour  l'abus  de  la  publicité  du  jugement,  Irib.  civ.  Seine, 
S6  man  1^  Cte  fermière  de  Vichy,  Ann.,  %.309et  note  3. 


—  260  — 

Vauzelle  et  Morel,  le  tribuual  a,  avant  faire  droit,  ordonné  ane 
expertise  ; 

Attendu  qa'auz  termes  de  la  mission  qui  leur  était  confiée, 
les  experts  Périsse,  de  Parville  et  Le  Roux  étaient  chargés  de 
rechercher  si  les  dispositions  décrites  dans  les  brevets  Dunlop, 
Scott,  Turner  et  Lindner  et  Robertson,  étaient  nouvelles  au  mo- 
ment de  la  prise  desdits  brevets,  d'apprécier  les  antériorités 
opposées  et  notamment  les  brevets  ou  patentes  pris  en  France  ou  & 
Té tranger  avant  les  brevets  dont  se  prévalait  la  société  demande- 
resse, d'indiquer  les  ressemblances  et  lés  différences  existant 
entre  ces  derniers  et  les  antériorités  invoquées,  de  vérifier  si  les 
brevets  servant  de  bases  aux  poursuites  avaient  été  exploités  en 
France  dans  les  deux  années  qui  avaient  suivi  leur  délivrance, 
de  signaler  les  similitudes  ou  différences  existant  entre  ces 
mêmes  brevets  et  les  appareils  saisis,  enfin  de  donner  leur  avis 
sur  la  contrefaçon  alléguée  ; 

Attendu  que  les  experts  ont  conclu  à  la  nullité  du  brevet  Dun- 
lop, pour  défaut  de  nouveauté,  à  la  déchéance  tant  du  brevet 
Turner  et  Lindner  que  du  brevet  ;  Scott,  pour  cause  de  non-ex- 
ploitation, mais  à  la  validité  du  brevet  Robertson,  comme  étant 
une  combinaison  brevetable,  sous  réserve  de  la  question  d'anté- 
riorité inhérente  à  l'existence  d'une  patente  étrangère  ayant  le 
même  objet,  question  abandonnée  par  eux  à  l'appréciation  du 
tribunal  ; 

Attendu  que  ces  conclusions  sont  combattues  par  toutes  les 
parties  ; 

Que  d'une  part  la  compagnie  demanderesse  persiste  à  reven- 
diquer le  principe  même  du  pneumatique  aux  termes  de  son 
brevet  Dunlop  de  1888  et,  de  ce  chef,  incrimine  tous  les  défen- 
deurs ; 

Que  d'autre  part,  en  ce  qui  concerne  le  mode  d'attache  du 
bandage  à  la  jante  métallique,  elle  continue  à  se  prévaloir» 
comme  les  ayant  réellement  exploités  par  elle-même  ou  par  ses 
cédants,  des  trois  autres  brevets  dont  elle  a  fait  l'acquisition  de- 
puis l'introduction  de  la  première  instance  ; 

Qu'en  fin  de  cause  elle  reproche  à  Michelin,  Terrent  et  Rea- 
los,  Bousquet,  Bapst  et  Hamet,  Merland  et  Mathieu  la  contrefa- 
çon des  brevets  Scott,  Turner  et  Lindner,  et  à  tous  les  autres 
défendeurs  la  contrefaçon  du  brevet  Robertson  ; 

Attendu  que  de  leur  côté  les  défendeurs  concluent  à  l'entéri- 
nement du  rapport  en  ce  qui  concerne  le  brevet  Dunlop,  et  à  la 
déchéance  des  brevets  Scott,  Turner  et  Lindner,  mais  repoussent 
les  autres  solutions  de  l'expertise  en  faisant  valoir  diverses  ex. 
ceptions  tirées  de  la  nullité  et  de  la  déchéance  du  brevet  Ro- 
bertson 


qaé,  se  distingue  absolument  du  Robertson  ; 

Atleodu  qa' il  convient  d'apprécier  sur  chacun  des  points  liti- 
gieux l'opinion  adoptée  par  lea  experts  et  les  critiques  formu- 
lées par  les  parties; 

En  ce  qui  touche  le  brevet  Dunlop  : 

Attendu  que  ledit  brevet,  pris  le  1"  octobre  1838  sous  le  a* 
I93,28i,a  pour  objet,  aux  termes  du  mémoire  de3criptir,une  gar- 
niture pneomatiqne  Cormée  par  la  réunion  de  quatre  éléments  : 

1*  Un  tnbe  creux,  en  caoutchouc,  extensible,  susceptible  d'être 
gonQé  avec  de  l'air  on  un  gaz  sons  forte  pression  obtenue  h 
l'aide  d'une  pompe  foulante  ou  autre  appareil  analogue  ; 

2"  Une  enveloppe  en  drap,  toile  ou  autre  tissu  capable  de  ré- 
sister à  la  pression  de  l'air  renfermé  dans  le  tabe  creux  qui  vient 
s'y  appliquer  par  le  gontlement  ; 

3*  Uq  revêtement  en  caoutchouc  ou  autre  matière  résistante 
de  nature  à  protéger  l'enveloppe  contre  l'usure  ; 

4*  Un  petit  conduit  ménagé  dans  le  rebord  de  la  roue  poor  y 
introduire  l'air  ou  le  gaz  et  muni  d'une  valve  disposée  pour 
l'empêcher  de  sortir,  le  tout  assujetti  sur  la  jante  de  la  roue  par 
an  mastic  on  tout  autre  moyen,  et  ayant  pour  but  d'augmenter 
la  hcilité  de  roulement  des  véhicules  à  roues,  surtout  des  véhi- 
cales  légers  tels  que  vélocipèdes,  chaises  roulantes,  ambulances, 
particulièrement  quand  le  sol  est  inégal  et  raboteux  ou  ramolli 
et  boaeux  ; 

Attendu  que  c'est  à  bon  droit  que  les  experts  ont  admis  qu'aux 
termes  de  l'article  2  de  ta  loi  du  S  juillet  1S44,  la  combinaison 
des  quatre  éléments  ci-dessus  spécifiés  constituait  une  applica- 
tion nouvelle,  susceptible  d'être  brevetée  à  raison  de  l'obtention 
d'on  résultat  industriel  consistant  principalement  dans  la  dimi- 
nution des  vibrations  de  toute  nature  et  des  cahots  dus  anx  as- 
pérités du  chemin,  ainsi  que  dans  l'augmentation  de  vitesse  ac- 
quise avec  le  même  travail  moteur; 

Attendu  que  c'est  également  avec  raison  que  les  experts  ont 
repoussé  les  objections  tirées  de  l'insuffisance  de  description  et 
de  la  cessation  d'exploitation  ; 

Qu'il  est  en  efTet  manifeste  que  les  hommes  du  métier  peuvent 
aisément  reproduire  la  garniture  dont  s'agit  an  vu  des  indica- 
tions snsrelatées,  fourmes  par  le  mémoire  descriptif  et  que, 
d'aob'e  part,  les  documents  versés  au  débat  démontrent  que  le 
ifstëme  Dunlop  a  été  exploité  d'une   manière  suivie  jusqn'en 


—  262  — 

1893^  tandis  que  les  demandeurs,  en  déchéance  auxquels  cette 
preuve  incombe  n'établissent  point  qu'elle  ait  été  abandonnée 
postérieurement  ; 

Attendu,  en  conséquence,  que  la  validité  du  brevet  de  1888  est 
exclusivement  subordonnée  à  l'existence  on  au  défaut  d'anté- 
riorités ; 

Attendu  que  les  défendeurs  opposent  à  ce  titre  le  brevet  Guil- 
met,  pri3  le  9  juillet  1864,  les  patentes  américaines  Thomas  dé- 
posées aux  Etats-Unis  le  30  juin  1888  et  le  brevet  Thomson  dé- 
livré le  27  juin  1846; 

Attendu  que  la  combinaison  du  principe  du  brevet  Gullmet 
est  toute  différente  de  celle  de  Dunlop  puisqu'elle  a  pour  base  la 
constitution  d'un  bourrelet  liquide,  alors  que  celle  de  Dunlop  a 
pour  base  la  constitution  d'un  bourrelet  d'air.; 

Attendu  qu'il  y  a  lieu  d'écarter  également  les  patentes  Thomas 
sans  qu'il  soit  nécessaire  d'en  rechercher  les  éléments,  par  ce 
motif  péremptoire  qu'elles  n'ont  été  rendues  publiques  qu'en 
l'année  1889  et  par  suite  ne  pouvaient  faire  échec  à  un  brevet 
antérieur  ; 

Attendu  que  l'appareil  de  Thomson,  tel  qu'il  le  décrit  dans  son 
mémoire  et  le  représente  par  diverses  figures,  se  compose  : 

1«  D'un  cordon  creux  élastique  formé  d'une  substance  imper- 
méable comme  le  caoutchouc  sulfurisé  et  la  gutta-percha  et  dans 
lequel  l'air  est  insufflé  à  haute  pression  ; 

2®  D'un  étui  en  canevas  renfermant  et  soutenant  le  cordon 
élastique  ; 

3<*  D'une  forte  enveloppe  extérieure  en  cuir  destinée  à  main- 
tenir le  cordon  et  son  étui  sur  la  jante  ; 

i^  D'un  tuyau  traversant  en  un  point  la  jante  et  le  bandage  de 
la  roue  et  muni  d'un  bouchon  à  vis  imperméable  à  l'air; 

Attendu  que  ces  éléments  malgré  des  formes  plus  massives  et 
un  agencement  plus  grossier  sont  évidemment  ceux  que  l'on 
retrouve  dans  le  brevet  Dunlop  de  1888  ; 

Attendu  que  la  demanderesse  soutient  que  des  procédés  indi- 
qués pour  construire  le  cordon,  il  résulterait  que  celui-ci  était 
en  réalité  formé  par  la  toile  elle-même,  matière  Inextensible  dans 
l'intérieur  de  laquelle  les  feuilles  de  caoutchouc  étaient  simple- 
ment disposées  en  plis  flottants,  ce  qui  constituerait  une  ditTé- 
rence  essentielle  entre  les  deux  systèmes  et  laisserait  à  Dunlop, 
dont  elle  est  le  cessionnaire,  le  bénéfice  de  la  découverte  de  la 
chambre  à  air; 

Qu'en  tous  cas,  de  l'obscurité  de  la  description  sur  ce  point 
naîtrait  un  doute  qui  doit  juridiquement  profiter  au  brevet  pos- 
térieur ; 

Que  d'autre  part  on  ne  saurait  assimiler  l'enveloppe  de  cuir 


de  constractioD,  que  d'an  tube  ferme  et  qne  cette  interprbtatton 
«st  flucore  corroborée  par  la  mention  de  l'insufflatioD,  à  haute 
preuion,  de  l'air,  opération  que  des  feuilles  non  soudées  de 
caoutchonc,  dans  an  étui  en  toile  perméable,  ne  pouvaient  com- 
porter ; 

Attendu  qu'il  n'j  a  pas  k  s'airSter  daranlaxe  &  la  différence 
existant  entre  le  cnir  et  le  caoutchouc,  les  deux  matières  offrant 
la  résistance  capable  de  protéger  la  chambre  à  air  contre  les  ac- 
âdents  et  contre  l'nsure  ;   . 

Attendu  an  surplus  qae  le  caoutchouc  valcanisé  qui  était  peu 
connu  en  1846,  n'a  pas  tardé  A  être  substitué  au  cuir,  dans  le 
même  emploi,  ainsi  qu'il  résulte  des  articles  publiés  en  1849  dans 
le  Meckanie  Magasine,  exposant  les  nouvelles  expériences  de 
Tbomson,  et  qu'en  conséquence,  aucune  innovation  ne  pouvait 
itre  revendiquée  de  ce  chef  au  profit  dn  brevet  Dunlop  ; 

Attendu,  il  est  vrai,  que  la  demanderesse  persiste  à  y  rattacher 
une  application  nouvelle  en  ce  sens  qu'avant  1888  la  garniture 
pneamatiqne  n'aurait  pas  été  utilisée  dans  la  fabrication  des  vé- 
locipèdes ; 

Hais  attendu  que  s'agissant  dans  le  brevet  Thomson  d'un  ap- 
pareil approprié  aux  roues  de  tous  véhicules,  même  des  véhicules 
légers,  son  adaptalion  aux  vélocipèdes  tend  au  même  but,  ré- 
pond à  la  mémo  fonction,  et  ne  constitue,  par  suite,  qu'unemploi 
nouveau  auquel  la  loi  refuse  le  bénéfice  de  la  brevetabilité; 

Attendu  qu'il  résulte  de  ce  qui  précède  que,  du  chef  du  bre- 
vet Dunlop,  la  compagnie  demanderesse  doit  succomber  au  re- 
gard de  tons  les  défendeurs  et  que,  dès  à  présent,  son  action  est 
dépourvue  de  tout  fondement  vis-à-vis  de  Déco  orde  m  anche  et  de 
la  Société  des  Constructions  vélocipédiqnes  auxquels  elle  repro- 
chait exclusivement,  dans  le  dernier  état  du  débat,  d'avoir  contre- 
fait la  garniture  pneumatique  ; 

Attendu  que,  pour  les  mêmes  motifs,  la  demande  formée  con- 
tre la  Compagnie  Française  des  Pneumatiques  Dunlop,  par  Da- 
tifol,  les  Fils  de  Peugeot  frères,  la  Société  La  Force,  Vauieile  et 
llorel,  est  bien  fondée  en  ce  qu'elle  tend  à  faire  prononcer  la  nul- 
lité du  brevet  Dunlop,  pour  défaut  de  nouveauté  ; 

fin  ce  qui  touche  le  brevet  Turner  et  Lindner  : 

Attendu  que  Turner  et  Lindner  ont  pris  leur  brevet  à  la  date 
du  8  anvier  1801  pour  «nouvelle  combinaison  pour  bandage  élas- 
tique et  frein  pour  roues  de  vélocipèdes  et  autres  »  ; 


"W-"^'!^'  -    .  .-    .    .  «•■■»■ -"nf^-ap- 


—  264  — 

Attendu  que  ce  système,  qui  ne  comporte  point  une  garniture 
pneumatique,  comporte  trois  éléments  ; 

i^  Une  jante  munie  de  deux  rainures  latérales  ; 

2*  Un  bandage  élastique  d'une  seule  pièce,  avec  deux  rebords 
latéraux  ; 

30  Deux  cordons  circulaires  qui  viennent  serrer  les  rebords  la- 
téraux du  bandage  dans  les  rainures  de  la  jante  pour  la  fixation 
du  bandage  sur  la  dite  jante  ; 

Attendu  que  Texamen  des  antériorités  a  conduit  les  experts  & 
retrouver  la  même  jante  dans  les  brevet  et  patente  Thomas  du 
19  mars  1889,  le  bandage  élastique,  avec  rebords  latéraux,  ainsi 
que  les  deux  cercles  de  fixation,  dans  les  patentes  Lake  et  Gon- 
nolj,  de  1887  et  1888,  le  bandage  pneumatique  sans  chambre  à 
air,  dans  la  patente  Thomas  de  1888,  mais  que  Turner  et  Lindner 
ont,  pour  la  première  fois,  combiné  ces  éléments  du  domaine 
public  dans  les  conditions  voulues  pour  permettre  de  mieux 
maintenir  sur  la  jante  ondulée  le  bandage  élastique  creux,  à 
forte  saillie,  avantage  qui  réalise  un  résultat  industriel  et  rend, 
en  principe,  la  combinaison  brevetable  comme  application  nou- 
velle de  moyens  connus  ; 

Mais  attendu  qu'il  ressort  des  documents  de  la  cause,  que 
ledit  brevet  n'a  jamais  été  fabriqué  ni  vendu  en  France,  où,  de 
Taveu  de  la  co mpagnie.de manderesse,  il  a  été  simplement  offert 
par  des  prospectus  au  public  qui  Ta  dédaigné  ; 

Qu'en  conséquence,  en  vertu  de  l'article  32  de  la  loi  de  1844, 
il  a  encouru  la  déchéance  édictée,  pour  cause  de  non-exploita- 
tion dans  le  délai  de  deux  ans  à  compter  du  jour  de  sa  déli- 
vrance ; 

Attendu  d'ailleurs  qu'en  comparant  au  système  Turner  et 
Lindner  les  appareils  incriminés,  les  experts  n'ont  reconnu  au- 
cune conformité  autorisant  à  admettre  la  contrefaçon  ; 

Qu'à  tous  égards,  le  brevet  dont  s'agit  ne  saurait  donc  être 
invoqué  comme  un  titre  valable  à  l'appui  des  poursuites  dont  le 
tribunal  est  saisi  ; 

En  ce  qui  concerne  le  brevet  Scott  : 

Attendu  que  si  l'on  se  reporte  au  mémoire  descriptif  et  aux 
dessins  qui  y  sont  joints,  l'on  constate  que  le  système  breveté 
consiste  essentiellement  : 

!•  Dans  un  bandage  de  roue  creux  et  gonflé  d'air  sous  la  for- 
me d'une  bande  de  caoutchouc  et  de  toile  combinés  munie  de 
renforcements  ou  arrêts  (figure  l'«)  et  fixé  sur  la  jante  de  la  roue 
par  des  cercles  ou  rivets  ;  ^ 

2*  Dans  la  combinaison  d'un  bandage  en  caoutchouc,  doublé 
de  toile,  destiné  à  être  gonflé  d'air,  avec  une  jante  métaUique 
pourvue  de  rainures  dans  lesquelles  viennent  se  fixer  les  bords 


triel,  la  fixation  d'un  bandage  en  fer  à  cheval  au  moyen  de 
cercles- ligature 9  indépendants  du  bandage  et  de  la  jaote  ; 

Attenda  qu'avant  de  rechercher  les  analogies  ou  dissemblances 
qui  existent  entre  le  brevet  Scott  ainsi  dëûni  et  le  système  Hi- 
chelio,  il  échet  d'examiner  les  antâriorités,  nullités  et  déchéan- 
ces opposées  par  ce  dernier; 

Attendu  que  les  brevets  français  Turner  et  Lindner  du  S  jan- 
vier 4891,  Roberlson  du  11  avril  1891,  les  patenUs  Harris  Lake, 
ConnoUy,  Howard  du  Bois,  les  brevets  et  patentes  Thomas,  à  les 
supposer  tous  valables,  ne  présentent  ni  les  nus  ni  les  autres  la 
combinaison  caractéristique  du  Scott,  pas  même  le  système 
Thomas  qui  s'en  rapproche  le  plus  en  ce  qu'il  comprend  un  ban- 
dage en  U  aux  bords  terminés  par  un  bourrelet,  mais  n'y  asso- 
cie pas  les  deux  cercles-ligatures  indépendants  ; 

Attendn  qne  Uichelin  soutient  encore  que  la  patente  Scott  est 
nulle  aux  yeux  de  la  loi  anglaise,  et  qu'en  vertu  de  l'article  29 
de  la  loi  du  6  juillet  1844,1e  brevet  A-ançais  doit  partager  le 
même  sort  ; 

Que  la  nullité  invoquée  résulterait  d'un  manque  de  conrormité 
entre  la  spécification  provisoire  déposée  le  22  octobre  1890  pour 
perfectionnements  apportés  au  bandage  Thomson  et  laspécidca- 
tion  définitive  du  10  mars  1691  où  Scott  décrit  poar  la  première 
fois,  les  cercles  et  rainures  constituant  les  élémeuts  de  son  mode 
d'attache  ; 

Attendu  qne  la  jurisprudence  ëlar^ssant  la  sphère  d'application 
de  la  disposition  précitée,  a  en  effet  admis  que,  dans  certains 
cas,  les  tribunaux  pouvaient  être  conduits  K  apprécier  la  validité 
d'un  brevet  étrauRer,  an  regard  de  la  loi  à  laquelle  il  est  soumis, 
mais  qu'ils  ne  doivent  évidemment,  pour  la  sécurité  et  l'autorité 
de  leurs  décisions,  nser  de  cette  faculté  que  lorsqu'il  s'agit  d'ap- 
pliquer on  texte  formel  ou  un  principe  essentiel  dominant  la 
législation  dont  s'agit  ; 

Qu'il  est  certain  que  la  loi  anglaise  prescrit  un  rapport  étroit 


—  266  — 

entre  les  deux  spécifications  qui  précèdent  la  délivrance  de  la 
patente,  mais  que  rien  n'autorise  le  tribunal  à  penser  quelle 
exige,  à  peine  de  nullité,  autre  ishose  que  la  relation  et  la  con- 
cordance que  présentent,  dans  Tespèce,.  les  spécifications  Scott, 
ayant,  Tune  et  Tautre,  trait  aux  bandages  pneumatiques  et  à 
leur  adaptation  aux  roues  de  toutes  sortes  de  véhicules  ; 

Attendu  que  la  déchéance  alléguée  pour  défaut  d'exploitation 
ne  peut  être  mieux  accueillie  par  le  tribunal  ; 

Qu'en  effet,  la  saisie  pratiquée  à  rencontre  de  Michelin,  étant 
du  30  juillet  1802,  le  délai  légal,  accordé  au  saisissant  pour 
commencer  Texploitation  de  son  brevet,  n'était  pas  expiré  et 
que,  dans  ces  circonstances,  on  ne  saurait  attacher  à  Tinaction 
dans  laquelle  il  est  demeuré  postérieurement,  un  effet  rétroactif 
que  la  loi  n'a  pas  édicté  ; 

Attendu  qu'il  reste  à  rechercher  quels  sont  les  éléments  da 
système  incriminé  et  s'il  apparaît  comme  la  contrefaçon  du  bre- 
vet Scott  ; 

Attendu  que  les  experts  retrouvant  dans  le  système  Michelin 
la  combinaison  caractéristique  du  brevet  Scott,  c'est-à-dire  deux 
cercles  métalliques,non  noyésiet  un  bandage  en  U  dont  les  bords 
se  terminent  par  un  bourrelet,  ont  admis  la  contrefaçon  ; 

Attendu  que  les  renseignements  et  documents  nouveaux  ap- 
portés au  débat  ne  permettent  pas  d'adopter  leur  opinion  ; 

Qu'il  y  a  lieu  en  effet  d'établir  une  distinction  essentielle  que 
les  éléments  de  la  cause  n'ont  pas  mis  tout  d'abord  en  lumière  ; 

Qu'en  ce  qui  concerne  la  forme  des  cercles-ligatures,  alors 
que  dans  le  Scott,  leurs  deux  extrémités  sont  rapprochées  on 
écartées  au  moyen  d'une  vis,  opération  qui  diminue  ou  augmente 
le  diamètre  de  la  circonférence,  dans  le  Michelin  les  deux  bouts 
portent  un  crochet  qui  entre  dans  une  encoche  de  la  jante, 
s'enlève  à  la  main  et  permet  de  sortir  de  la  rainure  de  la  jante 
le  cercle  élargi  par  un  léger  effort  ; 

Attendu  que  ces  dissemblances  de  détail  ne  font  pas  obstacle  à 
la  contrefaçon  ; 

Attendu  qu'il  en  est  autrement,  si  l'on  a  égard  à  la  fonction 
des  cercles-ligatures  ;  qu'à  ce  point  de  vue,  une  différence  impor- 
tante se  révèle  ; 

Attendu  que  dans  le  Scott,  les  dits  cercles  agissent  par  tension 
au  moment  du  montage  et  avant  gonflement  (fig.  6  de  la  planche 
jointe  au  brevet)  tandis  que  dans  le  Michelin,  ils  font  corps  avec 
la  jante  et  jouent  librement  par  rapport  aux  talons  jusqu'au 
moment  où  ceux-ci  viennent  s'y  appuyer  sous  l'action  de  la  pres- 
sion de  l'air  ; 

Qu'ainsi  les  cercles-ligatures  dans  le  Scott  servent  d'abord  à 
serrer  le  bandage  pour  assurer  la  fixation  et  l'étanchéité,  puis 


—  267  — 

ensnite^à  retenir  les  renforcements  ou  arrêts  tandis  que  dans  le 
Michelin,  ils  ne  servent  de  butée  aux  talons  qu*après  gonflement  ; 

Attendu  en  outre  que  le  Michelin  comporte  une  chambre  à  air 
tabulaire  étanche  par  elle-même,  laquelle  ne  se  retrouve  pas 
dans  le  Scott  où  Tétanchéité  ne  peut  être  obtenue  sans  le  secours 
des  cercles-ligatures  ; 

Attendu  en  résumé,  que  Michelin  a  puisé  dans  le  domaine 
public  les  mêmes  éléments  que  le  Scott,  mais  les  a  combinés  de 
manière  à  leur  attribuer  une  fonction  toute  différente,  ce  qui  est 
exclusif  de  la  contrefaçon  ; 

Attendu  que  l'expertise  justifie  la  même  solution  en  ce  qui 
concerne  Bousquet,  Bapst  et  Hamet,  Merland  et  Mathieu,  aucun 
des  susnommés  n'ayant  fait  emploi  des  cercles-ligatures  qui 
constituent  le  deuxième  élément  du  Scott,  tnais  bien  de  contre- 
jantes  ou  autres  organes  qui  ne  peuvent  être  assimilés  auxdits 
cercles  ; 

En  ce  qui  concerne  le  In^evet  Robertson  : 

Attendu  qn*anx  termes  du  brevet,  le  système  Robertson  com"^ 
prend  les  trois  éléments  suivants  : 

i«  Un  bandage  constitué  par  une  ou  deux  épaisseurs  de  caout- 
chouc doublé  de  toile  ayant  forme  d'U  ou  fer  à  cheval,  et  entou- 
rant une  chambre  à  air  dilatable  et  indépendante  ; 

29  Une  double  jante  métallique  à  deux  rainures  latérales  ; 

3*  Deux  cercles-ligatures  placés  à  droite  et  à  gauche  de  Taxe 
de  la  jante,  noyés  dans  le  bandage  et  dont  les  extrémités  sont 
réunies  par  accrochage,  torsion  ou  laçage,  faisant  de  chacun 
d'eux  une  pièce  continue  ; 

Attendu  que  ce  système  a  été  déclaré  brevetable  par  les  experts 
comme  application  nouvelle  du  bandage  en  U  combiné  avec  deux 
cercles  ligatures  noyés,  ladite  application  permettant  d'obtenir 
un  résultat  industriel  :  ladémontabilité  en  cours  de  route  ; 

Attendu  que  les  défendeurs  combattent  les  conclusions  de  leur 
rapport  en  soutenant  que  le  brevet  Robertson  est  nul  pour  insuffi- 
sance de  description,  pour  défaut  de  nouveauté  et  pour  défaut 
d'exploitation  ; 

Sur  le  premier  moyen  : 

Attendu  que  les  défendeurs  prétendent  qu'un  brevet  devant  se 
suffire,  c'est-à-dire  contenir  dans  le  mémoire  descriptif  et  les 
figures  qui  en  précisent  l'objet,  les  moyens  exacts  de  reproduire 
le  système  revendiqué,  le  brevet  Robertson  ne  répondrait  pas  à 
"bette  exigence  de  la  loi,  parce  qu'en  se  conformant  aux  indica- 
tions fournies,  il  serait  impossible  de  construire  un  bandage  sus- 
ceptible d'être  fixé  à  la  jante  dont  les  rainures  ne  seraient  pas 
assez  profondes  pour  l'envelopper  ; 

Qu'ils  ajoutent  que  le  modèle  produit  au  débat  comme  ayan 


Qu'il  n'est  pas  possible  de  coDsidérer  comme  une  inTcntion  po- 
sitive et  pratique,  nn  procédé  qui  exige  nn  outillage  spécial,  une 
habileté  peu  commune,  de  notables  efTorts  et  qui  surtout  prive  )e 
cycliste  d'une  ressource  iQdLspensB.ble  en  ne  lui  permettant  pas 
de  renouveler  plusieurs  fois,  en  cours  de  route,  l'opération  dont 
»'»git  ; 

Qa'es  tête  de  son  mémoire  il  déclare  que  son  invention  est  re- 
lative à  un  mode  de  construction  et  de  fliage  solide  des  ban- 
dages que  présente  sa  jante  ondulée  avec  rebord  extérieur  plus 
élevé  que  le  fond  de  la  gor^^e,  indique  brièvement  que  les  extré- 
mités des  cordes  en  flls  métalliques  doivent  être  recourbées,  tor- 
dues ou  lacées,  et  formule  enûn  ses  revendications  qu'il  importe 
de  reproduire  textuellement  : 
«  En  résumé,  je  revendique  : 

ai'  Hamétbodepour  fixer  un  bandage  élastique  à  ta  jante  d'une 
roue,  en  faisant  ledit  bandage  avec  bords  arrondis  ou  des  ner- 
vures, contenant  des  fils  métalliques  ou  des  cordes  non  exten- 
sibles et  s'appliquant  dans  les  creux  latéraux  d'une  jante  métal- 
lique convenablement  ondulée  ; 

«S»  Dans  la  roue  d'un  vélocipède  ou  d'un  autre  véhicule,  la 
combinaison  d'une  jante  métallique  ondulée  de  manière  à  pré- 
senter de  chaque  cété  un  creux  latéral  avec  un  bandage  élasti- 
que ayant  ses  bords  ou  nervures  continus  disposés  de  manière  à 
pouvoir  s'appliquer  dans  lesdits  creux  et  contenant  intérieure- 
ment des  âls  métalliques  ou  cordes  non  extensibles,  le  tout  com- 
me il  a  été  expliqué  en  substance  ci-dessus  et  représenté  sur  le 
dessin  annexé  ;  » 

Qu'ainsi  dans  le  brevet  frangais,  pas  plus  que  dans  la  patente 
anglaise  correspondante,  rien  ne  révèle  la  conception  de  la  dé- 
montabilité  en  cours  de  route,  invention  dont  Robertson  n'eût 
certainement  pas  dédaigné  de  se  prévaloir,  s'il  l'avait  vraiment 
imaginés  ; 
Qu'il  a  même  pris  le  soin  de  spécifier  que  la  torsion  doit,  de 


—  270  — 

préférence,   être  effectuée  pendant  la  fabrication  du  bandage  ; 

Attendu  que  sans  doute  notre  loi  n'exige  pas  de  revendications 
expresses,  et  qu'il  suffit  que  l'invention  se  dégage  de  Tensemble 
des énonciations  du  mémoire  descriptif; 

Que  c'est  au  résultat  acquis  qu'est  attaché  le  privilège  de 
Fappropriation  privative,  mais  que,  pour  les  motifs  qui  précèdent, 
il  est  permis  de  penser  qu'aux  yeux  de  Robertson  lui-môme,  la 
démontabilité  en  cours  de  route  étant  Incompatible  avec  son 
système,  il  ne  pouvait  avoir  la  prétention  de  s'attribuer  cette 
découverte  ; 

Sur  le  3«  point  : 

Attendu  qu'en  supposant  brevetable  l'invention  de  Robertson, 
telle  qu'elle  a  été  précisée  par  l'expertise,  il  serait  encore  néces- 
saire qu'elle  ne  fût  mise  en  échec  par  aucune  antériorité  ; 

Attendu  qu'on  ne  saurait  y  opposer,  à  ce  titre,  la  patente 
anglaise  Scott,  rendue  publique  le  2  mai  1891,  le  brevet  Turner 
et  Lindner,  auquel  Robertson  n'a  emprunté  que  la  jante  métal- 
lique, la  patente  Parfray,  le  brevet  Guilmet,  la  patente  Harris- 
Lake,  les  brevet  et  patente  Thomas,  la  patente  Howard  du  Bois, 
le  brevet  Barlett  et  la  patente  Marley,  aucun  d'eux  ne  présentant 
la  combinaison  du  bandage  en  U  et  des  cercles-ligatures  noyés 
à  laquelle  les  experts  ont  attribué  un  résultat  industriel  ; 

Attendu  qu'il  en  serait  autrement  de  la  patente  Trigwel  prise 
en  Angleterre  le  28  novembre  1890,  si  le  tribunal  admettait  que 
ladite  patente  entraine  la  nullité  de  la  patente  Robertson  prise 
le  lendemain,  et  que  cette  nullité  s'étend' au  brevet  français  du 
il  avril  1891,  comme  le  soutiennent  les  défendeurs  en  invoquant 
l'article  29  de  la  loi  du  5  juillet  1844  ; 

Attendu  que  cet  article  est  ainsi  conçu  : 

<c  L'auteur  d'une  invention  ou  découverte  déjà  brevetée  à  Tétran- 
ger,  pourra  obtenir  un  brevet  en  f  rance,  mais  la  durée  de  ce  bre- 
vet ne  pourra  excéder  celle  des  brevets  antérieurement  pris  à 
l'étranger.  » 

Attendu  qu'à  s'en  tenir  à  ce  texte,  le  tribunal  devrait  se  borner 
à  rechercher  si  la  patente  Robertson  a  pris  fin  en  Angleteri*e  par 
l'expiration  de  sa  durée  légale  et  qu'à  cet  égard,  sa  seule  date 
dicterait  une  solution  négative  ; 

Mais  attendu  que  la  jurisprudence  reconnaît  aux  tribunaux 
français  la  faculté  de  prononcer  sur  la  validité  d'un  brevet 
étranger  en  faisant  application  de  la  loi  à  laquelle  il  est  soumis  ; 

Que  cette  doctrine  est  conforme  à  l'esprit  de  la  disposition 
précitée,  laquelle  a  eu  manifestement  pour  objet  de  ne  pas 
placer  la  production  nationale  dans  une  situation  inférieure  à  la 
production  étrangère . 


nnllilé  de  celte  deraière,  celle  da  brevet  français  qtii  ne  saurait 
avoir  âne  existence  propre  et  indépendante  ; 

Attendu  que  la  question,  réduite  k  ces  termes,  ne  peut  offrir 
•ocane  difScalté  ; 

Altendo  qu'il  n'7  a  point  à  se  préoccuper  de  ce  fait  qne  la 
patente  Trigwel  n'a  été  déposée  que  S4  henres  avant  la  patente 
RobertsoD,  et  à  examiner  si  elle  avait  reçu  une  publicité  réelle  ; 

Qu'aux  jeux  de  la  loi  anglaise,  comme  da  la  loi  française,  un 
brevet  est  répnté  coddd  dès  l'instant  où  il  est  demandé  et  est 
eensé  avoir  été  publié  avant  le  dépét  de  la  demande  d'un 
deuxième  brevet,  si  court  que  soit  l'intervalle  de  temps  écoulé  ; 

Attendu  qne  la  patente  Trigwel  comprend  une  jante  &  deux 
gorges  demi-circulaires  disposées  le  long  des  bords  de  la  jaste, 
an  bandage  en  forme  d'arc  aux  bords  munis  de  renflements 
noTanl  ou  non  des  flis  d'attache  dont  les  extrémités  sont  rénnies 
par  on  écron  ou  un  moyen  quelconque,  d'une  longueur  circon- 
fërencielle  plus  petite  après  serrage  qne  celle  dea  rebords  exté- 
rieurs de  U  jante,  te  tout  démontable  en  cours  de  roule  par 
desserrante  de  l'écron  ; 

Attendu  que  les  experts  ont  reconnu  une  entière  conformité 
•ntre  ces  éléments  etceux  contenus  dans  la  patente  Robertaon  ; 

Sut  U  i*  pvint  : 

Attenda  que  dans  l'bypothèse  où  le  brevet  Robertson  eût  été 
valable,  lea  défendeurs  seraient  en  droit  de  se  prévaloir  du  défaut 
d'exploitation  commerciale  ; 

Qu'à  la  vérité  cette  preuve  négative  leur  incombe  en  tant  qne 
demandeurs  en  déchéance,  mais  qu'ils  la  font  dans  la  mesure  où 
ils  penvent  l'établir  par  les  éléments  qu'ils  apportent  an  débat, 
•t  notamment  en  démontrant  qu'il  n'en  a  pas  même  été  fait 


-272  — 

mention  dans  les  prospectas  et  annonces  de  la  compagnie  deman- 
deresse ; 

Attendu  que  cette  dernière  n*a,  de  son  côté,  nullement  fourni 
la  preuTe  contraire  qu'elle  a  tentée  ; 

Que  le  seul  modèle  présenté  au  tribunal  comme  ayant  figuré 
dans  la  course  de  Paris  à  Brest  du  6  septembre  1891,  n'offre  au- 
cun signe  d'authenticité  conforme  au  règlement  qui  a  présidé  à 
ladite  course  et  présente  au  contraire*  sur  le  bandage,  la  marque 
de  Manchester  comme  origine  de  fabrication  ; 

Que  d'autre  part,  les  livres  et  factures,  à  l'exception  de  trois 
bandages  désignés  par  les  initiales  P.  B.  (Paris-Brest)  ne  portent 
trace  que  de  la  commande  de  36  jantes,qui  par  le  dessin, reprodui- 
sent bien  le  type  décrit  et  figuré  au  brevet,  mais  ne  sont  pas  un 
des  éléments  caractéristiques  de  la  garniture  Robertson  ; 

Attendu  que  Ton  ne  saurait  considérer  comme  sérieuse  et  ef- 
fective Texploitation  ainsi  réduite  à  la  construction  de  quelques 
spécimens  qui  n'ont  point  eu  un  cours  commercial  ; 

Attendu  que  l'opinion  contraire  des  experts  ne  se  conçoit  que 
parce  qu'ils  ont,  à  tort,  envisagé  comme  un  perfectionnement  da 
Robertson,  le  système  Welch  qui  a  été  presque  exclusivement 
fabriqué  et  vendu  par  la  compagnie  demanderesse  ; 

Attendu  que  c'est  le  Welch  objet  d'un  brevet  sans  valeur  et 
abandonné  à  raison  de  la  divulgation  antérieure,  qui  a  doté  le 
cyclisme  du  résultat  industriel  dont  on  a  fait  indûment  honneur 
à  Robertson  ; 

Qu'il  s'en  distingue  et  par  la  forme  et  par  sa  fonction'  ; 

Qu'il  offre  en  effet  une  jante  nouvelle  munie  seulement  de  re- 
bords extérieurs  dans  laquelle  se  logent  des  cercles  sans  fin 
noyés  dans  le  bandage,  combinaison  d'éléments  connus,  mais  réa- 
lisant enfin  la  démontabilité  pratique  en  cours  de  route,  sans 
le  concours  d'un  outillage  spécial  et  par  le  seul  effort  de  la  main  ; 

Attendu,  au  surplus,  que  fût-il  considéré  comme  un  dérivé  du 
Robertson  les  défendeurs  qui  tous,  à  l  exception  de  six  d'entre 
eux,  s'en  voient  reprocher  la  fabrication,  ne  pourraient  être  de 
ce  chef  incriminés  pour  contrefaçon  puisque,n'ayant  pas  d'exis. 
tence  indépendante,  il  tomberait  sous  le  coup  des  mêmes  nullités 
que  Robertson. 

Sur  les  demandes  principales  et  reconveniionnelles  en  dommages- 
intérêts  : 

Attendu  que  les  demandeurs  en  nullité  du  brevet  Dnniop,  de 
même  que  les  défendeurs,  ne  justifient  d'aucun  préjudice  positif 
et  appréciable  de  nature  à  motiver  des  allocations  pécuniaires  ; 

Que  la  condamnation  de  la  compagnie  demanderesse  en  tous 
les  dépens  constituera  une  réparation  suffisante  ; 

Attendu  que  la  demande  principale  étant  jugée  mal  fondée,  il 


dn  H  &Tril  IS9I  ; 

Prononce  la  déchéance  de  ce  dernier  brevet  et  da  brevet  Tnr- 
Der  et  Lindner  pour  défaut  d'exploitation  ; 

Fait  mainlevée  entière  et  définitive  des  saisies  pratiquées  anz 
mains  des  défendenrs  &  la  requête  de  la  Compagnie  demande- 
resse; 

Rejette  le  surplus  des  conclusions  des  défendeurs. 

Condamne  ladite  Compagnie  demanderesse  en  tons  les  dépens 
j  compris  les  frais  de  l'expertise. 

Sar  l'appel  de  Michelin,  du  cbef  de  la  non-allocation  de 
dommages  et  intérêls,  et  appel  Incident  de  la  Compagnie 
Dunlop,devenue  dans  l'intervalle  The  Dunlop  pneumatic 
Tyre  Company  Umited,  la  cour  a,  sous  la  présidence  de 
H.  HuutL,  président,  après  plaidoiries  de  H**  Allart  et 
PooiLLiT  et  conclusions  de  M.  Bonnet,  avocat  général  (1  , 
renda  le  !•'  mai  1900  l'arrêt  suivant  : 

La  Cour,  Considérant  que,  depuis  l'introduction  de  l'instance 
d'appel,  la  Société  française  des  pneumatiques  Dunlop  s'est  trans- 
tormée  en  société  anglaise,  sous  la  dénomination  de  Tke  Dunlop 
pnevmatie  Tyre  Company  (A-ance)  timited;  et  que  le  sieur  Price 
aétéDommé  mandataire  et  représentant,  en  France,  de  ladite 
compagnie,  aux  termes  d'un  acte  passé  devant  un  notaire  de 
Londres,  le  3  septembre  1891,  et  déposé  au  rang  des  minutes  de 
Cotteoet,  notaire  à  Paris,  suivant  acte  authentique  du  16  du 
même  mois,  enregistré  ;  que  Price,  es  qualités  qu'il  agit,  de- 
mande à  reprendre  k  l'instance  pendante  devant  la  cour,  sur 
l'appel  du  jugement  rendu,  le  6  mai  1807,  par  le  Tribunal  civil 
de  la  Seine,et  sur  l'appel  incident  dudit  jugement  ;  qu'il  y  s  lieu 

de  M.  l'avocat  général  BoMNiT,  Gaz.  du  Pal., 


—  274  - 

d'accueillir  cette  demande  ;  doane  acte  &  Price,  es  qualités,  de 
sa  reprise  d'instance  ; 

Et,  statuant  sur  Tappel  interjeté  par  Michelin  et  Cie  du  juge- 
ment rendu  par  le  tribunal  civil  de  la  Seine  le  6  mai  1897,  et 
sur  rappel  incident  de  la  Compagnie  française  des  pneumatiques 
Dunlop  ; 

Considérant  que  le  jugement  attaqué  a  repoussé  Faction  en 
contrefaçon  intentée  par  la  Compagnie  des  pneumatiques  Dunlop 
contre  Michelin  et  Cie,  que  Tappel  incident  de  la  Compagnie 
Dunlop  remet  en  question  la  validité  des  brevets  qu*elle  oppose 
à  Michelin,  et  que  la  cour  doit  l'examiner  avant  de  statuer  sur 
les  dommages-intérêts  réclamés  par  Fappel  principal  Michelin  et 
Cie,  à  raison  de  l'abus  des  poursuites  excercées  contre  eux  ; 

Considérant  que  la  compagnie  anglaise  prétend  que  ses  adver- 
saires seraient  contrefacteurs  des  brevets  Scott  et  Dunlop,  dont 
elle  a  la  propriété  ; 

En  ce  qui  touche  le  brevet  Scott: 

Adoptant  les  motifs  du  tribunal  qui  a  jugé  avec  raison  que,  si 
Michelin  avait  puisé  dans  le  domaine  public  les  éléments  qui  s^é- 
taient  trouvés  réunis  dans  le  brevet  Scott,  il  les  avait  combinés 
de  manière  à  leur  attribuer  une  fonction  toute  différente,  ce  qui 
était  exclusif  de  la  contrefaçon  ; 

En  ce  qui  touche  le  brevet  Dunlop  : 

Adoptant  également  les  motifs  du  tribunal  ; 

Considérant,  en  outre,  que  le  pneumatique  pour  roues  de  vé- 
locipèdes, décrit  dans  le  brevet  pris  par  Dunlop  en  1888,  n'est 
qu'une  reproduction  des  procédés  inventés  par  Thomson  dès  Tan- 
née 1846,  pour  la  garniture  des  roues  de  tous  les  véhicules,môme 
des  véhicules  légers  ;  que  ces  procédés  employés  pour  les  roues 
des  vélocipèdes  n'ont  pas  donné  lieu  à  un  résultat  industriel 
nouveau,puisqu'ils  servent  au  même  but  que  lorsqu'ils  sont  adap- 
tés à  toute  espèce  de  roues  dont  ils  amortissent  les  chocs  ; 

Considérant  que  Michelin  et  Cie  sont  fondés  à  se  plaindre  de 
ces  agissements  abusifs  et  à  demander  la  réparation  du  préjudice 
qu'ils  ont  éprouvé  ;  qu  ;  la  cour  possède,  dès  maintenant,  des 
éléments  sufûsants  pour  en  apprécier  l'importance,  et  qu'il  échet 
de  fixer  à  10,000  francs  la  somme  que  la  compagnie  anglaise  de- 
vra payer  à  Michelin  et  Cie  à  titre  de  dommages-intérêts  ; 

Par  CES  motifs.  Déclare  Price,  es  qualités  qu'il  agit,  mal  fondé 
dans  les  demandes,  fins  et  conclusions  de  son  appel  incident, 
Ten  déboute  ; 

Confirme  le  jugement  entrepris  en  ce  qu'il  a  repoussé  les 
poursuites  en  contrefaçon  dirigées  contre  Michelin  et  Cie  : 

Ordonne  qu'à  cet  égard  il  sortira  son  plein  et  entier  effet  ; 

Et,  faisant  droit  sur  l'appel  principal,  dit  que  c'est  à  tort  que 


—  276- 

de  quelques  jantes^  V achat  de  chambres  à  air^  la  location 
d'un  petit  atelier  et  des  négociations  en  vue  d'arriver  à  un 
contrat  d'exploitation^  menées  avec  une  lenteur  calculée  et 
toujours  infru>ctueuses^  notamment  lorsque  les  prospectus 
distribués  en  France  ne  font  jamais  mention  que  de  fabri- 
ques à  V étranger  (1). 

Des  saisies  pratiquées  à  tort,  causent  un  dommage  dont 
il  est  dû  réparation. 

(Trib.  civ.  de  la  Seine,  30  juin  1897.  —  Bartiett  et  Gie  française  de 
caoatchoac  manufactorë  c,  Michelin,  Besse  et  Hamond,  Gomiot,  etc.) 

Ainsi  jugé  par  le  Tribunal  de  la  Seine,  sous  la  prési- 
dence de  M.  SÉRÉ  DE  RiviÈRBs,après  plaidoiries  de  M**  Pouil- 
LET,  Allart,  Poingaré,  Pelletisr,  Desjardin,  par  jugement 
du  30  juin  1897  devenu  définitif  après  transaction  entre 
les  parties  sur  les  dommages-intérêts. 

Le  Tribunal,  Attendu  qu'à  la  suite  de  vingt  et  un  procès-ver- 
baux de  saisie-contrefaçon  du  ministère  de  Brumeaux^  huissier 
à  Parisien  date  des  2i,  22,  23,  28,  29,  30  avril,  7,  9  et  12  mai  1896 
enregistrés  et  dénoncés,  William  Erskine  Bartiett  a,  par  minis- 
tère du  même  huissier  et  suivant  exploits  en  date  des  29  avril, 
5,  7,  16  et  18  mai  1896  enregistrés,  assigné  en  contrefaçon  de 
son  système  de  bandage  de  roues  breveté  le  7  novembre  1890, 
sous  le  n^  209^323,  et  en  dommages-intérêts  :  l^'  solidairement 

(1)  Sur  la  déchéance  faute  d'exploitation  V.  Ponillet,  eod.  loc,,  506  et 
s.  V.  plus  haut,  Trib.  Seine,  6  mai  1897,  Dunlop  et  la  note.  Comp. 
Trib.  Seine,  24  février  1896,  Bartiett  c.  Hochet,  Dr.  ind.  de  Bert, 
1896,  359  et  la  Loi,  7  mai  1896.  Dans  cette  première  affaire  le  tribunal 
avait,  à  propos  du  même  brevet,  décidé  que,  pour  répondre  au  vœu  de 
la  loi  en  ce  qui  concerne  Texploitation  d'un  brevet  en  France,  il  suffi- 
sait que  l'inventeur  eût  fait  des  efforts  sérieux  pour  en  tirer  parti  et 
que  la  conclusion  d'un  traité  de  licence,  même  résolu  ensuite,  et  la  lo- 
cation d'un  atelier  de  fabrication,  joints  à  Tachât  de  matières  premières 
et  à  des  commandes,  môr^e  restreintes,  suffisaient  pour  empêcher  la  dé- 
chéance faute  d'exploitation.  Depuis,  le  brevet  Bartiett  avait  été  cédé 
en  Angleterre  à  une  puissante  société  anglaise  de  fabrication  de  caout* 
chouc,  qui  certainement  n'avait  pas  fait  tous  les  efforts  possibles  pour 
organiser  en  France  une  fabrication  industrielle.  On  peut  se  demander, 
néanmoins,  si,  en  appréciant  aussi  sévèrement  les  tentatives  d'exploita- 
tion faites  en  France,  par  comparaison  avec  l'activité  industrielle  de  la 
société  en  Angleterre,  le  tribunal  n'a  pas  un  peu  trop  perdu  de  vue  qae 
dans  le  chiffre  des  affaires  de  la  société  anglaise,  la  fabrication  du  pneu- 
matique pour  vélocipèdes  si  elle  était  plus  importante  qu'en  France 
était  loin  de  tenir  la  première  place.  Il  y  a  lieu  de  signaler,  que  depuis 
quelques  années,  la  tendance  des  tribunaux  est  de  se  montrer  plus  ri* 
goureux  que  jadis,  en  matière  de  déchéance  pour  non-exploitatioa. 

A;  T. 


yw' ■  ■■  "r^^ff^^j^mivrw^ 


—  278  — 

conclusions,  Torrilhon  et  Gie  opposent  au  brevet  Bartlett  une 
antériorité  tirée  d'une  patente  Wilson  ; 

Attendu  que  Wilson  a  déposé  le  49  août  1890  une  spécification 
provisoire  qui  peut  se  résumer  dans  les  termes  suivants, un  ban- 
dage composé  d'une  enveloppe  en  caoutchouc  dur  «  courbé  en 
rond  »,  contenant,  «  un  cœur  »  en  éponge  de  caouthouc  qui  n'est 
pas  entouré  complètement  par  la  bnnde  mais  a  pour  base  le 
fond  de  la  jante  : 

Que  Wilson  déclare  aussi  pouvoir  introduire  dans  sa  combinai- 
son le  principe  pneumatique  consistant  en  un  tube  de  caoutchouc 
de  meilleure  qualité,  doublé,  au  besoin  d'une  couche  de  caout* 
chouc  spongieux  et  même  d'une  toile  métallique  destinée  à 
préserver  la  chambre  à  air  ; 

Attendu  que  dans  cette  spécification  se  trouvent  en  principe 
des  éléments  de  la  combinaison  Bartlett  ;  bande  cintrée  et  sup- 
port de  caoutchouc  ou  de  tube  pneumatique  ; 

Attendu  toutefois  que  Ton  n'y  trouve  rien  qui  concerne  Je 
mode  d'attache  du  bandage  à  la  jante  ; 

Attendu  que  le  14  octobre  1890,  Bartlett  a  pris  en  Angleterre 
une  patente  qui  contient  les  mêmes  descriptions  que  son  brevet 
français  ; 

Attendu  que,  le  16  mai  1891,  Wilson  a  déposé  sa  spécification 
complète  qui  a  été  approuvée  après  radiation  d'un  certain  nom- 
bre de  passages  ;  que  dans  les  passages  maintenus  oii  trouve  des 
dispositifs  qui  n'existaient  pas  même  en  germe,  dans  la  spéci- 
fication provisoire,  et  notamment  «  le  tube  interne  aplati  dans 
le  fond  des  parties  de  la  jante  en  queue  d'aronde  pour  que  la 
pression  de  Tair  dans  un  tel  tube,  tendant  à  lui  faire  prendre 
une  forme  circulaire,  presse  les  bords  inférieurs  du  bandage 
contre  l'intérieur  de  la  jante  et  le  serre  dans  Cette  jante  »  ; 

Attendu  que  Wilson  munit  son  bandage  détalons  destinés  aie 
retenir  dans  la  jante  ; 

Qu'il  parle,  en  eCTet,  d'une  bande  u  ayant  des  parties  élargies, 
des  pieds  se  projetant,  par  lesquels  la  partie  extérieure  est  main- 
tenue dans  la  jante  »  ;  . 

Que  ses  dessins  sont  conformes  &  sa  description  et  contien- 
nent les  bourrelets  indiqués  ; 

Qu'il  en  résulte  que  son  mode  d'attache  consiste  dans  la  pres- 
sion intérieure  de  l'air  comprimé  dans  un  pneumatique  pour 
maintenir  dans  sa  jante  en  queue  d'aronde  une  bande  à  talons  ; 

Que  cette  combinaison  ne  saurait  être  opposée  comme  une 
antériorité  au  système  de  Bartlett  qui  en  diffère  essentiellement, 
comme  il  va  être  démontré  ; 

Qu'ainsi  l'on  s'explique  que  le  môme  Office  qui  venait  d*ao6or^ 


—  279  — 

der  la  patente  de  BartleU  n'ait  pas  repoussé  la  spécification  dé- 
finitiYe  de  Wiison  ;  • 

Que,  dans  tous  les  cas,  il  résulte  des  termes  formels  de  cette 
spéciàcation  complète  que  Wiison  ne  revendique  point  ce  qui  a 
trait  au  mode  d'attache  du  bandage  ; 

Qu'il  s'exprime,  en  effet,  de  la  façon  suivante  : 
«  Il  est  bien  entendu  que  mon  intervention  n'a  trait  qu'aux 
bandages  ici  décrits,  les  modes  d'attache  (de  fixage)  employés 
étant  incidentels,  et  je  n'ai  aucune  prétention  aux  modes  d'atta- 
che ni  per  se  ni  comme  partie  de  mon  invention  h  ; 

Qu'aussi  bien  il  ne  pouvait  rien  revendiquer  à  cet  égard  puis- 
que sa  spécification  provisoire  ne  contenait  rien  sur  le  mode 
d^attache  des  bandages  ; 

Attendu  que  Torrilhon  et  Gie  soutiennent  encore  que  l'on  peut 
objecter  à  Bartlett,  comme  antériorité  à  son  brevet  du  7  novem- 
bre 1890,  un  premier  brevet  pris  par  lui  le  28  mars  de  la  même 
année  et  déclaré  nul,  faute  d'exploitation,  par  jugement  de  cette 
chambre  du  24  février  1896  ; 

Attendu  que  l'invention  résultant  du  premier  brevet  est  essen- 
tiellement différente  de  la  seconde  ;  qu'elle  consiste  en  un  cylin- 
dre de  caoutchouc  massif,forcé  dans  une  jante  étroite  ;  que  l'on 
peut  qualifier  ce  bandage  de  caoutchouc  plein  nonobstant  le  vide 
insignifiant  ménagé  en  son  milieu  pour  plus  d'élasticité  ; 

Attendu  que  le  second  brevet  n'est  point  un  perfectionnement 
dn  premier  dont  il  ne  contient  que  la  jante  en  queue  d'aronde  ; 
Attendu  que  toutes  les  antériorités  ont  été  examinées  et  repous- 
sées dans  une  précédente  instance  par  Binder,  Périsse  et 
Th.  Levy,  experts^  dont  le  rapporta  été  entériné  par  jugement  de 
cette  chambre  en  date  du  24  février  1896  ; 

Attendu  que  sans  commettre  de  nouveaux  experts,  le  tribunal, 
&isant  état  de  ce  document,  estime  que  la  combinaispn  Bartlett 
n'est  mise  en  échec  par  aucune  antériorité  ; 
En  ce  qui  touche  la  contrefaçon  : 

Attendu  qu'aux  termes  de  son  brevet  français  du  7  novembre 
1890  intitulé  :  Perfectionnements  dans  les  roues  à  bande  ou  re- 
bord élastique,  Bartlett  revendique  notamment  comme  son  in- 
vention :  <(  une  roue  dont  la  jante  est  en  forme  de  gouttière  avec 
les  bords  inclinés  Pun  vers  Tautre  et  dont  la  bande  consiste  en 
un  cylindre -de  caoutchouc  ou  autre  matière  élastique  de  plus 
grande  longueur  que  la  largeur  de  la  gouttière ,  de  façon 
qu^une  fois  en  place  elle  se  cintre,  les  deux  bouts  du  cylindre 
buttant  contre  le  fond  de  la  gouttière,  tandis  que  les  bouts  de 
côté  du  cylindre  buttent  contre  les  côtés  inclinés  de  la  gouttière, 
Tespace  entre  la  bande  et  la  jante  étant  occupé  soit  par  un  au- 
n«aii  en  éponge  de  caoutchouc  ou  autre  matière  analogue,  soit 


—  280  — 

par  un  tube  contenant  de  Tair  comprimé,  formé  de  préférence 
de  tissu  et  de  caoutchouc  »  ; 

Attendu  que  cette  description  et  les  dessins  à  l'appai  ont  été 
soumis  à  Tezamen  des  experts  susnommés  ; 

Attendu  qu'aux  termes  de  leur  rapport  Tinvention  de  Bartlett 
consiste  dans  remploi  d'  «  une  jante  métallique  à  bords  inclinés 
Tun  vers  l'autre ,  c'est-à-dire  à  queue  d'aronde,  un  bandage  de 
caoutchouc  formé  d'une  bande  circulaire  plate  plus  large  qne  la 
jante,  do  façon  qu'on  est  obligé  de  la  cintrer  pour  rentrer  dans 
celle-ci,  ledit  bandage  présentant  ainsi  avec  rintérieur  de  la 
jante  un  vide  occupé  soit  par  un  tube  pneumatique,  soit  par  une 
substance  élastique,  la  ligne  diamétrale  du  bandage  circulaire 
passant  en  dedans  du  diamètre  extérieur  de  la  jante. . .  »  ;  * 

Attendu  que  cette  définition  contient  une  lacune  :  qu'il  y  est 
question  d'un  tube  pneumatique  dont  on  ne  définit  pas  la  subs- 
tance ;  que,  de  son  côté,  tout  en  reconnaissant  dans  le  texte  de 
son  brevet  qu'il  se  sert  de  préférence  d'un  tube  entoilé,  Bartlett 
laisse  entendre  qu'il  pourrait  employer  une  chambre  à  air  ordi- 
naire, c'est-à-dire  à  dilatation  libre  ; 

Attendu  que  si  Bartlett  emploie  une  chambre  à  air  entoilée, 
ce  n'est  pas  de  préférence,  c'est  de  toute  nécessité  ;  qu'en  efTet 
l'expansion  d'un  pneumatique  ordinaire  chasserait  de  sa  jante 
le  bandage  plat  de  Bartlett  ;  que  les  expériences  faites  à  cet 
égard  sont  décisives  ; 

Attendu  que  ladite  définition  doit  être  précisée  aussi  en  ce  qui 
touche  la  forme  de  la  jante  ;  que  cette  forme  est  bien  celle  de 
la  cavité  constituant  la  mortaise  dans  un  assemblage  en  queue 
d'aronde  ;  que,  toutefois,  la  bande  plate  et  épaisse  qu'on  y  fait 
entrer  en  la  cintrant  ne  peut  l'épouser  exactement  ;  qu'en  réa- 
lité cette  bande  est  retenue  dans  la  jante,  non  par  assemblage, 
mais  par  le  ressort  de  sa  propre  élasticité  et  le  support  de  sa 
garniture  intérieure  ;  qu'elle  est  nécessairement  épaisse,  car  son 
élasticité,  condition  essentielle  de  son  adhérence,dépend  de  son 
épaisseur  ; 

Attendu  que  cette  jante  en  queue  d'aronde  ou  à  bords  incli- 
nés l'un  vers  l'autre  a  été  employée  bien  avant  Bartlett  ;  qu'on  la 
trouve  notamment  dans  les  patentes  Davis  du  5  juillet  1853, 
Isang  et  Bornez  du  1"  décembre  1868,  Stone  du  22  janvier  1889, 
et  dans  les  brevets  Garmons  du  !•'  mai  1883,  et  Ghalliner  du 
5  février  1889  (pages  22  et  28  dudit  rapport)  ; 

Attendu  qu'il  faut  enfin  retenir  de  la  définition  des  experts 
ce  point  essentiel  que  «  la  ligne  diamétrale  du  bandage  circu- 
laire passe  au  dedans  du  diamètre  extérieur  de  la  jante  »  ; 

Que,  dans  le  système  de  Bartlett,  il  ne  peut  en  être  autre- 
ment, sans  quoi  la  bande  s'échapperait  de  la  jante  ;  qu'ainsi, 


.i..iji^ijji|^^|xv-^  iji  jiiiKjjjj^j*w*iwj.,ji^w^iifJ.M«w  l'rfi'  ivpn  r'ia^^i^j 


—  282  — 

et  pourvue  de  talons  indispensables,  tandis  que  celle  de  Bartlett 
est  nécessairement  entoilée  et  restreinte  dans  sa  dilatation  ; 

Attendu  que  la  combinaison  elle-même  diffère  essentielle- 
ment de  celle  de  Bartlett  ; 

Que  chez  tous  les  défendeurs,  sauf  Gallus  et  La  Force,  le  lien 
de  la  combinaison  est  la  pression  intérieure  de  Tair  s'adaptant  à. 
des  organes  appropriés  pour  l'utiliser  complètement,  tandis 
que,  chez  Bartlett,  c^est  principalement  Télasticité  de  la  bande 
et  des  supports  jointe  à  la  pression  extérieure  de  la  charge  qui 
maintient  les  éléments  juxtaposés  dans  une  jante  en  queue  d'a- 
ronde ; 

Attendu  que  la  solution  trouvée  par  Bartlett  ne  Ta  pas  con- 
tenté lui-même  ;  qu'il  a  préféré  construire  et  faire  breveter  en 
Angleterre,  le  20  juillet  1891,  et  en  Amérique  le  26  septembre 
de  la  même  année,  la  combinaison  à  bourrelets  bloqués  par  un 
pneumatique  à  libre  dilatation  ; 

Attendu  que  l'exploitation  exigée  de  Tinventeur  pour  enrichir 
le  travail  national  est  aussi  le  critérium  de  Tinvention  ; 

Que  si  Bartlett  a  construit  et  exploité  à  Edimbourg  (ce  qui 
n*est  pas  démontré)  le  produit  dessiné  dans  son  brevet  français 
du  7  novembre  1890,  il  ne  paraît  pas  l'avoir  construit  ni  même 
importé  en  France  ; 

Que  le  seul  produit  pour  lequel  Bartlett  ait  cherché  à  se  don- 
ner Tapparence  d*une  exploitation  en  France  est  le  bandage  à 
talon  qu'il  appelle  pneumatique  Glincher  et  pour  lequel  il  n*a 
Jamais  eu  de  brevet  français  ; 

Que  c*est  pour  ce  pneumatique  qu'il  avait  traité  momentané- 
ment avec  Rochet  ; 

Que  c'est  toujours  du  Glincher  qu'il  est  question  dans  la 
correspondance  produite  en  preuve  de  la  prétendue  exploitation 
de  Bartlett  ;  que  cette  exploitation  alors  même  qu'elle  serait 
sérieuse  ne  serait  donc  pas  opérante  ; 

Attendu  au  surplus  que  cette  exploitation  n'a  jamais  été  sé- 
rieuse ; 

Que  même  en  faisant  état  de  la  correspondance  échangée  en- 
tre Bartlett  et  son  représentant,  le  tribunal  ne  peut  voir  dans 
l'envoi  en  France  d'un  ouvrier  anglais  pendant  un  mois,  dans 
le  cintrage  de  quelques  jdntes,et  l'achat  de  chambres  à  air,  dans 
la  location  d'un  petit  atelier,  bref  dans  la  lenteur  calculée  de  né- 
gociations toujours  infructueuses,  que  des  tentatives  plus  appa- 
rentes que  réelles,  sans  proportion  avec  les  ressources  de  la 
puissante  compagnie  anglaise  &  laquelle  Bartlett  a  cédé  ses  bre- 
vets; 

Qu'il  faut  en  conclure  que  le  Nord  British  Rubber  Compa- 


.Vf' 


-  284- 

Ordonne  toutefois  que  le  jugement  sera  inséré  aux  frais  des 
demandeurs  dans  six  journaux  au  choix  de  Michelin  et  Gie,  trois 
au  choix  de  la  Société  Gailus  etc..  le  coût  de  chaque  insertion 
ne  devant  pas  dépasser  200  francs  ; 

Déboute  respectivement  en  cas  de  besoin  les  parties  du  sur- 
plus de  leurs  fins  et  conclusions  ; 

Condamne  Bartlett  et  la  Société  française  de  caoutchouc  ma* 
nufaeturé  en  tous  les  dépens. 


Art.  4141. 

bibuographie  (1). 

Ouvrages  généraux 
sur  la  propriété  intellectuelle. 

La  propriété  industrielle^  artistique  et  liUérairey  par 
Claude  Couhin,  docteur  en  droit,  avocat  à  la  Cour  de  Paris, 
t.  2  et  3,  Larose,  in-8**,  1898,  Paris.  —  Le  premier  volume 
de  cet  ouvrage,  paru  il  y  a  quatre  ans,  contenait  la  partie 
théorique,  la  partie  historique  etles  textes  législatifs  avec 
citation  des  travaux  préparatoires.  Les  deux  volumes  qui 
viennent  de  paraître  contiennent  la  doctrine  et  la  juris- 
prudence sur  toute  la  matière  et  se  divisent  ainsi  :  prin- 
cipe fondamental  commun  à  toutes  les  branches  delà 
production  (principe  de  la  liberté  du  travail)  ;  propriété 
de  la  personne  et  du  nom;  propriété  des  conceptions 
nouvelles  (inventions  industrielles,  ouvrages  de  la  pensée 
considérés  au  point  de  vue  de  Tédition,  c'est-à-dire  de  la 
publication  par  la  voie  de  l'impression  ou  autres  moyens 
analogues,  œuvres  dramatiques  et  musicales  envisagées 
au  point  de  vue  de  la  représentation,  dessins  et  mo- 
dèles de  fabrique)  ;  propriété  des  signes  distinctifs  (mar- 
ques de  fabrique  et  de  commerce,  noms  servant  à  dé- 
signer soit  des  fabricants,  soit  des  fabriques,  soit  des 
lieux  de  fabrication)  ;  atteintes  à  la  propriété  industrielle, 
artistique  et  littéraire  qui  relèvent  plus  particulièrement 
des  articles  546  et  1382  du  Gode  civil  et  notamment  des 

(1)  Dans  chaque  catégorie  les  comptes  rendas  sont  classés  dans  i'or* 
dre  soirant  :  ouvrages  de  caractère  iateraatioaal,  ouvrages  français, 
ouvrages  étrangers  par  ordre  alphabétique  de  pays. 


onlrefaçon  en  matière  de  propriété  induatrielle,îittiraire 
irtistique  (Thèse  pour  l8  doctorat,  Paris,  1899),  par 

JABRY. 

ropriété  littéraire,  <a"tistiqite  et  industrielle  en  Egypte. 
irticle  très  précis  et  très  documenté  de  M,  Gaston  Phi- 
ancien  magislrat,  avocat  à  la  Courd'appel  intemalio- 
I  d'Alexandrie  {Journ.  dr.  int.  priv.,  97.  944). 

rRàOBS  BBLATIF8  A  LA   PROPRIÉTÉ   INDUSTRIELLE 

EN  GÉNÉRAL. 

Droit  comparé, 
ecueit  général  de  la  législation  et  det  traités  cancer- 
t  la  propriété  industrielle,  publié  par  le  Bureau  inler- 
onal  de  rOnion  pour  la  protection  de  la  propriété 
istrielle,  t.  III,  Berne,  1899.  —  Ce  volume,  qui  fait 
B  aux  deux  dont  nous  avons  déjà  rendu  compte,  Ann., 
133,  comprend  les  lois  des  Etats  de  l'Afrique,  de  l'A- 
ique  et  de  l'Océanie.  Lorsqu'on  ne  trouvera  pas  dans 
Annales  la  législation  de  tel  ou  tel  pays  secondaire 
t  au  £ecuet2  de  Berne  qu'il  faudra  se  reporter.  Nous 
as  cru  inutile  de  publier  les  quelques  documents  lé- 
atifs  qui,  de  date  ancienne,  n'ont  été  que  récemment 
lelllis  et,  par  suite,  n'onl  pas  trouvé  place  dans  les 
aies  mais  figurent  dans  l'ouvrage  publié  par  le  Bureau 
Berne,  ainsi  pour  la  République  dominicaine  et  le 
ique.  Le  4'  et  dernier  volume  renfermera  les  traités, 
mentions  et  déclarations  ainsi  qu'un  supplément  poar 
Lois  promulguées  depuis  l'apparition  du  premier  vo- 
e  et  un  index  alphabétique  général  des  matières. 

ableau  des  législations  en  matière  de  propriété  indut- 
Ue  et  tableau  des  taxes  de  brevets  (K  Prop.  ind,,  1900, 
\  tS2). 

ssociation  internationale  pour  la  protection  de  lapro- 
'téinduslrielte,i"  année  IS91,  Congrès  de  Vtenne,l  vol. 
»,  Paris,  1897,  Le  Soudier.  —  Le  premier  annuaire 
la  nouvelle  association  fondée  à  Bruxelles  en  1897 
tient  les  procès-verbaux  du  Congres  de  Vienne  et  des 
ports  quilui  ont  été  soumis.  Le  programme  contenait 
Lusivement  la  révision  de  la  Convention  d'Union  de 


—  288  — 

rapporteur;  2«  Création  dans  chaque  pays  d'un  service  de 
la  propriété  industrielle  et  d'un  dépôt  central  pour  la 
communication  au  public  des  brevets  d'invention,  des 
dessins  ou  modèles  industriels  et  des  marques  de  fabri- 
que ou  de  commerce,  André  Taillefer,  rapporteur.  V.  —  (A) 
Brevets  d'invention  :  1*»  Entente  pour  l'unification  des  for- 
malités dans  la  rédaction  des  demandes  de  brevets,  no- 
tamment pour  l'unification  des  formats  de  dessins,  Périsse 
et  Ch.  Thirion  fils,  rapporteurs,  Fehlert  (Allemagne)  ; 
S""  Mode  de  publication  officielle  des  brevets,  André  Taille- 
fer  rapporteur,  Fehlert  (Allemagne)  ;  3»  Entente  pour  une 
classification  uniforme  des  brevets,  Poinsard  rapporteur, 
D'  Martius  (Allemagne);  4""  Etudes  des  effets  produits 
dans  chaque  pays  par  le  système  en  vigueur  pour  la  dé- 
livrance des  brevets  :  Abel  rapporteur,  Von  Schùtz  (Alle- 
magne), Emile  Bert  (France),  Hardingham  (Grande-Breta- 
gne), Pilenco  (Russie),  ImeNSchneider  (Suisse)  ;  5**  Y  a-l- 
il  lieu  d'instituer  des  juridictions  spéciales  en  matière  de 
propriété  industrielle  ?  D'  Katz  (Allemagne),  Armengaud 
jeune  (France),  Edmunds  (Grande-Bretagne),  Jitta  (Pays- 
Bas)  ;  6^  De  la  répression  pénale  de  la  contrefaçon  :  P.Wau- 
wermans  (Belgique).  (B)  Dessins  et  modèles  industriels, 
D**  Katz,  Schmid  et  Osterrieth  (Allemagne),  de  Ro  (Belgi- 
que), Ducreux,  Soleau  (France),  Edmunds  (Grande-Breta- 
gne). (C)  Marques  de  fabrique  et  de  commerce  :  lo  Marques 
descriptives,  Loubier,  Osterrieth  (Allemagne)»  Georges 
Maillard  (France),  Cari  Lundh  et  Klaus  Hœl  (Norvège).  (D). 
Concurrence  déloyale  :  1<>  Etude  des  différentes  formes  de 
la  concurrence  déloyale  dans  le  commerce  international  : 
Mintz  (Allemagne),  rapporteur  ;  2*  Nom  commercial,  Mau- 
noury  (France),  D'  M.  Kerly  (Grande-Bretagne). 

Association  internationale  pour  la  protection  de  la  pro- 
prié té  industrielle  y  3*ann^cl899,  Congrès  de  Zurich^  1  vol. 
in-8*,  Paris,  1900,  Le  Soudier.  —  Sommaire  des  rapports 
présentés  et  discutés  au  Congrès  :  I.  —  De  la  revision  de  la 
convention  de  Paris,  Georges  Maillard.  IL  —  Dessins  et  mo- 
dèles industriels,  Frey-Godet.  III.  —  Classification  interna- 
tional des  brevets  d'invention,  des  marques  de  fabrique 
et  des  dessins  et  modèles  industriels.  Périsse  et  Mainié 
IV.  —  Des  juridictions  spéciales  en  matière  de  propriété  in-* 


lien  Hintz.  V[.  —  Des  moyens  pratiques  d'assurer  l'accès 
des  tribunaux  aux  étrangers,  notamment  en  matière  de 
propriété  industrielle,  J.  Jilta.  VU.  —  De  la  prolectinn 
temporaire  de  la  propriété  industrielle  aux  expositions 
internationales,  Henri  Mesnil.  —  Annexes  :  Observations 
de  M.  Poinsard  sur  le  projet  de  classification  ;  éludes  de 
U'Geoi^isurrunification  des  formalités,  nolede  M.  Lloyd 
Wise  sur  l'examen  préalable. 

Congrès  international  de  la  propriété  industrielle,  Paris, 
jMïfci  1900.—  Le  programme  est  dans  la  Propr.  ind.,  1899, 
?■  M4,  les  vœux  sont  reproduits  Propr.  ind. ,  1900,  p.  136, 
et  Qne  analyse  fort'bien  faîte  des  travaux  se  trouve  dans 
le  même  recueil,  1900,  p.  132  et  lie.  Les  rapports  et  pro- 
cès-verbaux forment  un  volume  qui  fera  suite  aux  travaux 
de  l'Association  internationale  pour  la  protection  de  la 
propriété  industrielle  et  contiendra  notamment  les  travaux 
de  HH.  Berl  (mode  de  délivrance  des  brevets),  LavoUée 
(durée  des  brevets).  Le  Tellier(déflnition  de  la  brevetabi- 
lité), Mack  (inventions  exclues  de  la  protection),  Fayollel 
(délai  de  grâce  pour  le  paiement  des  taxes  de  brevets), 
Huard  (obligation  d'exploiter  le  brevet)  (1),  Taillefer  (pu- 
blication des  brevets),  Georges  Maillard  (juridiction  en 
matière  de  brevets),  Armengaud  jeune  (moyens  de  facili- 
ter les  demandes  de  brevets  dans  les  pays  étrangers),Geor- 
ges  Maillard  (des  moyens  d'assurer  la  paternité  d'une  dé- 
couverte même  en  dehors  d'un  brevet),  Georges  Maillard, 
ioase,  Solean  et  Taillefer  (dessins  et  modèles  de  fabri- 
que), Maunoury  (définition  de  la  marque),  Victor  Fu- 
moaze  (marques  à  exclure  de  la  protection),  Allart  (du 
droit  a  la  marque),  Darras  (des  marques  au  point  de  vue 
international),  Gassand  (marques  collectives),  Mack  et 
Gariie  (des  raisons  de  commerce  ou  Ormes),  Fère  (de  la 
prolectioQ  des  noms  de  localités),  Garbe  (des  récompenses 
industrielles  ou  honorifiques),  Couhin  (des  moyens  de 
combattre  la  concurrence  illicite),  Seligman  (de  la  procé- 
dure et  des  sanctions  en  matière  de  marques). 

(1)  A  ciler  également  le  traTsil  do  M.  von  Schûli  sur  la  m^me  quos- 


—  290  — 

i 

Congrès  international  des  Associations  d'inventeurs, 
Paris,  septembre  1900.  Voir  programme,  vœux  el  compte- 
rendu  dans  la  Propr.  ind.,  1900,  30  et  167.  —  Les  tra- 
vaux ont  porté  tant  sur  Texamen  de  la  propriété  indus- 
trielle au  point  de  vue  économique  que  sur  les  principes 
de  législation  en  ce  qui  concerne  les  droits  des  ouvriers  et 
employés  sur  les  inventions  (rapport  de  M.  Duchesne),  la 
protection  des  œuvres  scientifiques,  les  projets  des  artistes 
industriels,  ingénieurs,  architectes,  etc.  (rapport  de  M.  La* 
voix),  les  créations  des  arts  industriels. 

Congrès  commercial  international  de  Philadelphie,  oc- 
tobre-novembre 1899,  compte-rendu  dans  la  Propr.  ind,^ 
1899,  p.  210.  —  A  signaler  les  rapports  de  W.  C*  Barker, 
sur  les  brevets  internationaux  ;  C.  H.  Duell,  sur  la  va-- 
leur  et  l'importance  des  marques  de  fabrique  pour  le  corn-- 
merce;  F.  E,  Stev^art,  sur  quelques  anomalies  dans 
la  législation  des  Etats-Unis  sur  les  marques  (1)  ;  For- 
bes,  SUT  les  exigences  actuelles  du  commerce  international 
en  matière  de  marques  de  fabrique  ;  M.  S.  Wise,  sur  quel- 
ques  conseils  concernant  le  choix  dune  marque  de  fabri- 
que ;  Greeley ,  sur  les  marquas  de  fabrique  dans  leurs  rap- 
ports avec  le  commerce  international,  —  Sur  le  rapport 
de  M.  Forbes  a  été  votée  la  proposition  suivante  : 

€  Le  Congrès  envisage  comme  nécessaire,  pour  assurer 
au  commerce  une  protection  complète^  que  les  lois  des  di- 
vers pays  en  matière  de  marques  de  fabrique  soient  éta- 
blies d'après  un  type  commun  ;  il  envisage  les  conféren- 
ces tenues  en  vertu  de  la  Convention  pour  la  protection 
de  la  propriété  industrielle  conclue  à  Paris  le  20  mars  1883 
comme  l'organe  le  mieux  approprié  pour  la  discussion  de 
ces  lois  et  pour  les  propositions  à  faire  aux  divers  pays. 
Il  envisage,  en  outre,  que  tous  les  pays  faisant  partie  de 
runion  créée  par  la  Convention  pour  la  protection  de  la 
propriété  industrielle  conclue  à  Paris  le  28  mars  1883  de* 
vraient  adhérer  à  l'Arrangement  concernant  Tenregistre- 
ment  international  des  marques  de  fabrique  ou  de  com- 
merce. » 

(1)  Aa  Congrès  de  T American  Bar  Association  à  Ba(ralo,a  été  présent^ 
un  j^pport  sar  la  révision  de  la  législation  américaine  en  matière 
marques  (la  Propr,  md.,  1899.193). 


''TTfirT'TrTf  ;■  V-  '*^u  '':f  »WL|^-«f\?FS'î'rws-r^J«5ir?^ 


—  292  - 

p.  79)  ;  les  œuwes  de  sculpture  industrielle  (voir  projet 
du  Gouvernement,  p.  80)  ;  les  inconvénients ^  au  point  de 
vue  de  la  propriété  industrielle^  de  la  proposition  de  loi 
de  M.  Cruppi,  votée  par  la  ChambrCy  sur  les  expertises  en 
matière  criminelle  et  correctionnelle  (voir  mémoire  à  la 
commission  sénatoriale,  p.  81),  les  indications  de  prove- 
nance (voir  rapport,  p,  84),  enfin  des  conférences  de  pro- 
pagande par  le  président  de  l'Association,  M.  Pouillet,  à 
Paris  (p.  93),  M.  Joseph  Lucien  Brun,  à  Lyon  (p.  HO), 
M.  Habasque,  à  Bordeaux  (p.  114),  analyses  d'autres  con- 
férences à  Paris,  à  Lyon  et  à  Reims  (p.  125, 133, 139). 

«  Cinquantenaire  de  r Association  des  inventeurs  et  artis* 
tes  industriels.  —  Conférence  par  le  président,  M.  Claude 
CouHiN,  le  23  novembre  1899,  sur  les  réformes  à  apporter 
dans  la  législation  française  en  matière  de  propriété  indus- 
trielle (Journal  la  Loi  du  29  novembre). 

Bulletin  du  Syndicat  des  ingénieurs-conseils  en  matière 
de  propriété  industrielle.  —  1899,  n®  36.  Sténographie  de 
la  discussion  d'une  proposition  de  MM.  Assi  et  Genès  pour 
la  protection  des  dessins  et  modèles  des  fabriques  étran- 
gères. —  1900,  n°  37.  Discussion  de  deux  questions  rela- 
tives à  l'interprétation  de  la  Convention  d'Union  de  1883. 
L'assemblée  générale  des  syndicats  a  émis  l'avis  :  1"  qu'un 
Français  peut  se  faire  breveter  d'abord  dans  un  des  pays 
de  l'Union  de  1883  et  invoquer  ensuite  le  droit  de  priorité 
prévu  par  la  Convention  d'Union  ;  2«  que  le  cessionnaire, 
ressortissant  à  l'Union,  d'un  brevet  pris  dans  rUnion^par 
un  inventeur  étranger  à  l'Union,  peut  invoquer  l'article  8 
de  la  Convention  pour  introduire  des  objets,  conformes 
au  brevet,  fabriquée  dans  un  autre  pays  de  l'Union. 

Réformes  urgentes  à  apporter  à  la  législation  française 
sur  la  propriété  industrielle^  par  A.  LAvoix,ingénieur-con- 
seil  (la  Revue  des  Revues^  IB  octobre  1899). 

Allbmâonb. 

Die  paientamtlichen  und  gerichtlichen  Enlspheidungen 
in  Patentuster  Mund  Markenschutz  sachen,  Cari  Heymaans 
Verlag,  Berlin.  —  Collection  de  jurisprudence,  autrefois 


cisions  en  matière  de  brevets,  marqaes,  etc.  (BerliD, 
■•«OO,  Cari  Heyinanna  Verlag). 

AUTRICOI . 

Die  Vorschriften,  betreffend  den  Schutz  der  Erflndungen, 
irken  und  Htister,  sowie  das  Patentgeselz  vom  11  jan- 
:r  1897  mit  Erlxuterungen  aus  der  Materialen  dièses 
letzes  068  prescriptions  relatives  à  la  protection  des  in- 
Dtions,  marques  et  modèles,  avec  la  loi  du  11  jaDvier 
97  et  un  commentaire  explicatif)>  par  Paul  Schiilz  (Manz' 
he  Gesetz-Ausgabe,  Wien,  1898). 

Gbande-Bbbtagnb. 
Digest  of  décisions  in  the  Paient-Office  and  Ihe  United 
jtes  Courts  in  palent$,  trade-marks,  copyrights  and  lo- 
fa, par  A.  W.  Hart  (1898,  Annual,  Supplément  au  Di- 
iste  de  Hart,  1888-1898,  Chicago,  Callaghan  andCo). 

Italis. 
Manuale  délia  Proprieta  industriale,  par  Hoïsb  Amab, 
ocal  et  professeur  agrégé  de  droit  industriel  à  l'Univer- 
.é  de  Turin  (Milan,  Sonzogno,  1900).  —  C'est  un  Impor- 
nt  traité  de  500  pages,  qui  a  pour  auteur  un  des  juristes 
i  plus  compétents  en  la  matière  et  sera  un  guide  exeel- 
nt  pour  qui  voudra  se  mettre  au  courant  de  la  législation 
ilisnne.  Les  questions  internationales  sont  également 
lilées  dans  l'ouvrage  avec  le  plus  grand  soin. 

ËDO.  PomiXBT. 

Sas-AuÉniQDB . 
Patentes  y  Marcas,  revista  sud  americana  de  la  proprie- 
1  intelectual  é  industrial,  revue  mensuelle  paraissant  à 
lenos-Ayres,  Piedad  343,  —  Cette  revue,  sous  la  direction 
M.T.  A.  Le  Breton,  est  destinée  à  fournir  tous  renseigne- 
mts  utiles  sur  le  mouvement  de  la  propriété  inleltec- 
elle  et  industrielle  dans  l'Amérique  du  Sud. 

Sdissb. 
Der  gewerbliche  Rechtsschutz  in  der  Schweiz  (la  protection 
i  droit  industriel  en  Suisse).  —  Recueil  des  lois  et  traités 


.  -       TTT-' 


-  .296  — 

Le  droit  de  IHmenieur  et  le  droit  de  la  société^  par  RsNi 
GoDNARD.  —  Article  dans  la  Revue  d'économie  politique 
du  5  mai  1899. 

Manuel  pratique  des  brevets  d'invention  et  de  la  contre, 
façon,  par  G.  du  Laurens  de  la  Barre,  avocat  à  la  Cour  de 
Paris,  1  vol.  in-12,  Paris,  1898,  Fontemoing.  —  C'est  un 
exposé  succinct  mais  complet,  qui  s'adresse  surtout  aux 
ingénieurs,  constructeurs,'industriels  et  commerçants  ;  il 
y  trouveront  des  modèles  pour  Ta^îcomplissement  des  for- 
malités légales  et  administratives,  relatives  à  la  demande 
et  à  la  cession  des  brevets,  ainsi  qu'un  tableau  compara- 
tif des  législations  étrangères  les  plus  récentes,  avecTin- 
dicaUon  du  coût  des  brevets  et  des  exigences  de  la  loi 
pour  le  paiement  des  annuités.  C'est  un  ouvrage  à  recom- 
mander à  tous  ceux  qui  s'intéressent  à  ces  matières  spé- 
ciales. EUG.  POUILLET. 

Les  brevets  de  perfectionnement  et  certificats  d'addition^ 
thèse  de  doctorat,  par  André  Gallard,  avocat  près  le  tri* 
bunal  civil  de  Bourg. 

Responsabilité  des  usagers  d'un  produit  contrefaU.  — 
Article  de  M.  Pooillet,  dans  la  Prop,  ind,,  1900.  80. 

Des  cessions  de  brevets  d'invention  et  des  concessions  de 
licence,  par  Jean  Saint-Quentin,  docteur  en  droit,  avocat  à 
Valen^iennes,  in-8'>  de  157  p.,  Paris,  1901,  Rousseau.  — 
Excellente  thé  .o  sur  une  difficile  question. 

Allemagne. 

Handbuch  des  deutschen  Patentrechtes  in  rechtsverglei- 
chender  Darstellung  (Manuel  du  droit  allemand  des  bre- 
vets, avec  droit  comparé),  par  le  professeur  Kohlbr  (les 
deux  premières  livraisons  en  1900,  Mannheim,  chez 
J.  Bensheimer). 

Bas  Wesen  des  Patentschutzes  und  sein  VerhasUniss  zum 
Urheberrecht  (L^  nature  de  la  protection  des  brevets  et  ses 
rapports  avec  le  droit  d'auteur),  par  le  conseiller  de  jus- 
lice  Reuling,  de  Berlin.  —  Article  dans  la  revue  Gerverbli- 
cher  RechtsschiUz  und  Urheberrecht^  1901,  p.  H. 


—  298  — 

trîchienne  sur  les  brevets  d'invention),  par  Sigmund  Gold- 
BERGER  (1899).  —  Commenlaipe  élogieusement  cité  dans 
la  revue  Gew.  B.  s.,  septembre  1900,  p.  292. 

Die  patentrechtliche  Lizenz  (La  licence  de  brevet),  par 
D»  Lbo  Munck,  avocat  à  Vienne  (Berlin,  1897,  Cari  Hey^ 
manns  Verlag). 

Belgique  . 

Traité  des  brevets  d'invention  et  de  la  contrefaçon  in- 
dustrielle. Commentaire  comparé  de  la  législation  belge» 
de  la  législation  française  et  de  la  convention  internatio- 
nale de  1883,  par  Louis  André,  avocat  à  la  Cour  d'appel 
de  Bruxelles,  2  forts  volumes  in-8o,  1899,  Bruxelles  chez 
Emile  Bruylant,  Paris  chez  A.  Ghevalier-Marescq  et  Cie. 
—  La  législation  française  et  la  législation  belge  sur  les 
brevets  sont  foncièrement  semblables  et  Ton  invoque 
souvent  la  jurisprudence  d'un  des  deux  pays  dans  l'autre. 
Il  y  a  pourtant  entre  les  deux  lois  quelques  différences, 
notamment  au  point  de  vue  de  la  nouveauté,  des  perfec- 
tionnements, des  brevets  'd'importation,  des  déchéances, 
de  la  contrefaçon,  de  la  confiscation.  L'originalité  de  l'ou- 
vrage de  M.  André  est  de  présenter  toute  la  matière  des 
brevets  d'invention  au  point  de  vue  franco-belge  en  indi- 
quant la  double  jurisprudence  qui  peut  être  invoquée  de 
part  et  d'autre  et  les  points  sur  lesquels  il  y  a  divergence 
de  législation  ;  il  est  également  tenu  compte,  dans  l'étude 
de  chaque  question,  des  articles  de  la  Convention  de  1883. 
La  disposition  de  l'ouvrage  est  claire  et  la  jurisprudence 
rapportée  très  complètement,  autant  que  nous  en  avons 
pu  juger  par  nous-mêmes.  Euq.  Pouillet. 

États-Unis. 

De  la  nouvelle  législation  des  Etat»Unis  en  matière  de 
brevets.  — Etude  dans  la  Prop.  ind.,  1899.  24,  sur  les 
demandes  déposées  aux  Etats-Unis  pour  des  inventions 
ayant  déjà  fait  V objet  d'un  dépôt  à  Vétranger, 

Grands-Brbtaonb. 

Journal  of  the  Society  of  Patent  Agents.  —  Bulletin 
mensuel  fondé  en  janvier  1900  pour  reproduire  les  travaux 


c 


•  J-T-     ,     ,    ,  .  .   -r.^^ 


—  302  — 

Allemagnb. 

Ueber  die  Neuheit  der  Geschmacksmuster  (Sur  la  nou- 
veauté des  modèles  de  goût),  par  Sghanzb  {G.  B.  s.,  août 
1898,  p.  231). 

États-Unis. 

La  protection  des  modèles  aux  Etats-Unis.  Article  en 
allemand  par  Max  Georoii,  agent  de  brevets  à  Washington 
{G.  R.  s.,  1898,  t.  97  ;  1899,  p.  266). 

GONQURRENGE  COMMERCIALE. 
DaOIT  INTERNATIONAL  BT  COMPARÉ. 

Premier  Congrès  international  de  rindustrie  et  du  commer- 
ce des  spécialistes  pharmaceutiques,  Paris,  septembre  1900 
(Compte  rendu  par  M.  Maurice  Leprince,  secrétaire  géné- 
ral, 1  broch.  gr.  in-8*  de  166p.,  comprenant  les  rapports 
et  les  procès-verbaux  détaillés)  (1).  ^  La  3*  section  était 
consacrée  à  la  garantie  des  marques  de  fabrique  et  de 
commerce  des  spécialistes  pharmaceutiques  dans  les  dif- 
férents pays  et  dans  les  rapports  internationaux.  Confor- 
mément au  rapport  de  M.  Comarles  résolutions  suivantes 
ont  été  adoptées  :  c  1»  les  marques  de  fabrique  devant 
être  protégées  indépendamment  des  produits  qu'elles  re- 
vêtent; il  en  résulte  que  la  marque  de  fabrique  d'un  médi- 
cament quelconque  doit  être  protégée  même  dans  le  pays 
où  ce  médicament  est  prohibé  ;  2<>  le  nom  d'un  fabricant 
ou  d*un  inventeur,  fût-il  inscrit  dans  un  Codex  ou  tout 
autre  recueil  officiel  de  médicaments,  constitue  une  pro- 
priété qui  doit  être  protégée  partout,  sans  distinction  de 
nationalité  et  sans  obligation  de  dépôt,  à  moins  que  ce 
fabricant  n'en  ait  fait  volontairement  abandon  au  domaine 
public;  3^  l'emploi  des  désignations  usuelles,  telles  .que 
le  nom  scientifique  d^un  médicament  ou  le  nom  de  la 
forme  qu'il  affecte,  comme  par  exemple  les  mots  capsufes, 
élixirSy  globules^  granules,  ovules^  pilules,  poudres,  sels, 
sirop,  solution,  suppositoires,  vins,  etc.,  étant  absolument 

(1)  Une  antre  brochure  de  16  pages  a  été  pnbliée  par  la  Direetioo 
général  de  Texploltation  à  l'Exposition  universelle. 


■>i'»--w^..,v  »^* jj;i T^w* , -wn ••■«i  ■•■i-'fif^'.   !. '"•'Wffl'-^T'u  t^wv;  l'srr 


—  304  — 

réciprocité  diplomatique  de  la  Convention  d'Union  de  188S 
avec  les  résultats  de  la  récente  Conférence  de  Bruxelles. 

Dos  Waarenzeichenrechtt  nebst  einem  Ueberblick  ûber 
die  Bestimmungen  wider  den  unlauteren  Wettbewerb  nach 
den  Gesetzgebungen  aller  lÂnder,  par  Paul  Schmid,  avocat 
à  Berlin  (gr.  in-8,  Hirschfeld,  Leipzig,  1899).  —  C'est  un 
traité  systématique  du  droit  des  marques  et  de  la  répres- 
sion de  la  concurrence  déloyale,  tels  qu'ils  résultent  dans 
les  principaux  pays  de  la  législation  et  de  la  jurispru- 
dence. 

Francs. 

Traité  des  marques  de  fabrique  et  de  la  concurrence 
déloyale  en  tous  genres  (notamment  en  matière  de  noms, 
dénominations  d'établissements  et  de  produits,  formes  de 
flacons  ou  d'enveloppes,  étiquettes,  annonces,  prospectus, 
enseignes,  titres  d'ouvrages,  louage,  secret  de  fabrique), 
4«  édition,  par  Eugène  Pouillet,  avocat  à  la  Cour  de  Paris, 
ancien  bâtonnier  (très  fort  vol.  in-8,  Paris,  1898,  Marchai 
et  Billard). 

Traité  pratique  des  marques  de  fabrique  et  dé  commerce, 
par  Abmengaud  aîné,  ingénieur-conseil  (1  vol.  in-8  de  319  p., 
Paris,  1898,  librairie  technologique  Armengaud  aîné).  — 
C'est  un  excellent  manuel  pratique,  clair  et  sobre,  pour 
les  négociants  qui  n'ont  pas  le  temps  de  compulser  des 
livres  de  droit  et  cherchent  vite  les  renseignements  essen- 
tiels. Us  trouveront,  outre  les  renseignements,  de  nature 
juridique,  sur  le  droit  à  la  marque  en  France  et  dans  les 
pays  étrangers,  d'intéressantes  statistiques  sur  le  mouve- 
ment commercial  entre  la  France  et  les  principaux  Etats. 

De  la  répression  en  France  de  la  contrefaçon  de  marques 
commise  à  ^étranger.  —  Etude  par  M.  le  marquis  de  HAUi- 
LARD  Lafayb,  Revue  internationale  de  propriété  industrielle^ 
mai  1899. 

Des  rapports  entre  la  concurrence  déloyale  et  la  diffa- 
mation.  —  Etude  par  Paul  Suuisn,  chargé  de  conférences  à 
la  Faculté  de  droit  de  Paris  (Ann.  dr.  comm.^  1898,  p.  33} • 


-"?• 


—  306  — 

et  des  tribunaux,  avec  la  liste  des  marques  libres  qui  ont 
été  publiées. 

Das  Geselz  zur  Bekàmpfung  des  unlauteren  Wellbetoer- 
beSfVom  27.  mai  1896  (La  loi  pour  combattre  la  concurrence 
déloyale).— Commentaire  par  J.  Bachem  et  Roerjbn  (3*  édi- 
tion, Dupcker  et  Humblot,  Leipzig,  1900)  (1). 

Dàs  Gesetz  zur  Bekàmpfung  des  unlanteren  Wettbewerbes 
(La  loi  pour  combattre  la  concurrence  déloyale),par  Stefan 
(2«  édition,  1899). 

Das  Verhàltniss  des  Namensrechts  zum  Firmenrecht  (Les 
rapports  du  droit  au  nom  avec  le  droit  à  la  firme),  par 
Olshauskn  (Franz  Vhalen,  Berlin,  1900). 

La  protection  des  titres  de  journaux  et  de  livres  {Rechts* 
schutzder  ZeUungs=  und  Bûcher  =^  7'i7ôf),étude  sur  les 
moyens  insuffisants  que  les  tribunaux  ont  à  leur  disposi- 
tion pour  combattre  la  concurrence  déloyale  en  cette  ma- 
tière, par  Dr.WERNER  Brandis,1  brochure  in-8o,en  allemand, 
Berlin,  1898,  jur.  Franz  Lipperheide.  —  L'auteur  démontre 
tout  d'abord  que  Tusurpation  du  titre  d'un  journal  ou  d'un 
livre  ne  peut  être  considéré  comme  la  contrefaçon  d'une 
œuvre  de  resprit,mémesice  titre  constitue  une  création  de 
l'intelligence,  parce  que  le  titre  a  pour  but  non  la  commu- 
nication d'une  pensée,  mais  simplement  la  désignation 
d'une  œuvre.  Un  titre  de  journal  peut  servir  de  marque  de 
fabrique  pour  la  désignation  de  certains  produits  (ex.  :  die 
Modenweltj  le  monde  de  la  mode,  décision  du  Patentamt, 
12  mars  1898),  mais  en  lui-même  il  n'est  pas  une  marque,  il 
est  le  nom  d'une  entreprise  (cf.,  pour  le  titre  «  ManufaklU' 
rist  »,  Reichsgericht,  20  mars  1896).—  La  jurisprudence  al- 
lemande, pour  tout  ce  qui  est  antérieur  à  la  loi  sur  la  con- 
currence déloyale,  n'accorde  aucune  protection  contre 
l'usurpation  d'un  titre  de  journal  ou  de  livre  (voir  Reichs- 
gericht, 27  octobre  1897,  Die  Modenwelt  contre  Kleine  Mo- 
denwelt  et  Grosse  Modenwelt).  Et  pourtant  le  D'  Werner 
Brandis  fait  observer  qu'on  aurait  pu  trouver  une  base  à 

(i)  Voir,  pour  la  criliqae  de  la  jurisprudence,  un  article  de  Hoeren, 
die  Wirkungen  des  Gesetzes  zur  Bek&mpfune;  des  unlauteren  Wett* 
bewerbes  ((?.  fl.  j.,  juin  1899,  p.  169). 


—  307  — 

racUon  en  concurreDce  déloyale,  sinon  dans  l'article  1382 
du  Code  civil  pour  les  pays  rhénans  ou  les  dispositions 
analogues  du  droit  prussien,  au  moins  dans  ce  principe 
fondamental  que  quiconque  commet  un  vol  doit  réparer  le 
préjudice  causé.  D'autre  part,  le  §  826  du  nouveau  Code 
civil  allemand  dit  que  c  quiconque  cause  volontairement 
préjudice  à  autrui,  d'une  manière  contraire  aux  usages 
loyaux(m  einer  gegen  die  guten  Sitten  verstossenden  Weise) 
est  tenu  de  réparer  le  dommage  >.  —  Le  §  3  de  la  loi  du 
27  mai  1896  pour  combattre  la  concurrence  déloyale  oblige 
à  la  réparation  du  dommage  c  quiconque  utilise  dans  le 
commerce  un  nom,  une  forme  ou  la  désignation  particu- 
lière d'une  maison  de  commerce  (Erwerbsgeschàft)^  d'une 
entreprise  industrielle  ou  d*un  imprimé  {Druckschrift)^ 
d'une  manière  qui  est  destinée  et  propre  à  faire  confusion 
avec  le  nom,  la  forme  ou  la  désignation  particulière  dont 
un  autre  se  sert  à  bon  droit  »  ;  une  action  en  cessation 
du  préjudice  peut  être  également  exercée.  —  Outre  ces 
indications  fondamentales  la  brochure  dont  nous  rendons 
compte  contient  de  nombreux  exemples  de  titres  usurpés 
et  le  compte  rendu  détaillé  du  procès  relatif  au  titre  du 
j  ournal  Modenwelt. 

AUTBICHB. 

Concurrence  déloyale  und  Unlauieren  Wettbewerb,  con- 
férence faite  à  la  Société  des  juristes  de  Vienne,  9  février 
1898,  par  D'  Jakob  Wechsler,  Hof  und  Gerichlsadvocatin 
Wien,  br.in-8%  Vienne,  1898,  Manz^sche  K.  u.  k.  Hof =Ver- 
lags  =  und  =  Universitàts  buchhandlung.  —  C'est  une 
étude,  plutôt  théorique  que  pratique,  où  l'auteur  passe  en 
revue  les  différents  systèmes  sur  lesquels  les  jurisconsul- 
tes ont  basé  la  répression  de  la  concurrence  déloyale  : 
système  français  d'après  lequel  tout  abus  de  la  liberté  de 
concurrence  par  atteinte  aux  droits  du  concurrent  donne 
lieu  aune  aclion  en  réparation  du  préjudice  causé;  système 
suisse,  d'après  lequel  on  considère  comme  concurrence 
déloyale  toute  infraction  aux  devoirs  envers  son  prochain, 
c'est-à-dire  toute  violation  des  coutumes  du  commerce  lé- 
gal (1)  ;  système  du  projet  du  Code  pénal  suisse,  d'après 

(1)  La  jurispradence  française  doit  dtre  interprétée  dans  le  même 
seni.  —  G.  M. 


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—  308  — 

lequel,  afin  d'assurer  la  loyauté  des  relations  commercia- 
les, les  manœuvre^  déloyales  pour  détourner  la  clientèle 
d'un  concurrent  seraient  punies  d'amende  ou  de  prison 
sur  la  demande  de  la  partie  lésée  ;  système  du  professeur 
allemand  Kohler,  qui  considère  la  concurrence  déloyale 
comme  la  violation  du  droit  individuel,  c'est-à-dire  du 
droit,  pour  chacun,  de  jouir  de  tous  les  avantages  de  son 
être  physique  et  intellectuel  et  accorde  une  action  en  ré- 
paration du  préjudice  causé  ;  système  de  Gierke,  qui  con- 
sidère le  droit  du  commerçant  troublé  parla  concurrence 
déloyale  comme  le  droit  de  la  personnalité  et  donne,  lui 
aussi,  comme  sanction  de  ce  droit,  une  action  en  dom- 
mages-intérêts ;  système  d'Otto  Mayer  qui  refuse  de  voir 
un  droit  lésé  par  la  concurrence  déloyale  et  ne  justifie 
les  restrictions  à  la  liberté  du  commerce  que  par  des  mo- 
tifs économiques  et  sociaux  et  quand  elles  sont  formelle- 
ment édictées  par  la  loi  ;  c'est  ce  dernier  système  qui  a 
été  implicitement  adopté  par  la  récente  législation  alle- 
mande gegen  den  unlauteren  Weltbewerb.  D^  Wechsler 
fait  alors  une  comparaison  très  minutieuse  de  la  concur- 
rence déloyale  telle  qu'elle  est  comprise  en  France  et  de 
la  concurrence  impure  {unlauteren  Weltbewerb)  réprimée 
par  la  loi  allemande  :  celle-ci  édicté  des  pénalités,  qui 
peuvent  être  applicables  même  quand  aucun  concurrent 
n'a  été  visé  ou  lésé  de  façon  spéciale,  par  exemple  en  ma- 
tière de  réclame  mensongère  (1)  (Reclameschwindel)^  le 
concurrent  pour  intervenir  n'a  pas  besoin  de  justifier 
d'un  préjudice,  le  dénigrement  n^est  punissable  que  si  le 
dénigré  fait  la  preuve  de  l'inexactitude  des  allégations  et 
même  au  civil  le  poursuivi  échappe  à  toute  condamnation 
s'il  prouve  l'exactitude  des  faits  allégués.  La  brochure  se 
termine  par  un  exposé  de  la  situation  en  Autriche  où  il 
n'y  a   que  quelques  dispositions   spéciales,  réprimant 
certains  faits,  qui  rentreraient  dans  la  concurrence  dé- 
loyale. D' Wechsler  souhaite  qu'une  disposition  du  Code 
civil  assure  à  la  partie  lésée  par  un  acte  de  concurrence 
déloyale  le  droit  à  la  réparation  du  préjudice  et  n'est  pas 

(1)  La  jarisprudence  française  interdit  aussi  la  réclame  mensongère 
et  considère  les  concurrents  directs  comme  suffisamment  intéressés  k 
8*en  plaindre.  —  6.  M. 


—  309  — 

partisan  de  sanctions  pénales  tant  que  Tintérét  général 
n'est  point  en  jeu.  Eug.  Podillet. 

Grande-Bretagne. 

Les  marques  de  commerce  enregistrées  en  Angleterre^  par 
C.  H.  P.  ÏNflDLSEN(6?.  R.s.yVadii  1898,  p.  137).  —  Article,  en 
allemand,  qui  contient  notamment  Thistorique  de  la  légis- 
lation anglaise  en  celte  matière  et  une  analyse  très  détail- 
lée du  critérium  de  regislrabillté. 

The  Lato  oftrade  marks  (La  loi  sur  les  marques)  by  J. 
E.  Evans  Jackson,  chez  l'auteur  :  Bristol  House,  19  et  20 
Holborn  Viaduct,  London.  —  Conférence  faite  à  la  Society 
of  Arts,  le  17  mai  1899.  Elle  contient  un  résumé  des  vœux 
adoptés  par  la  Chambre  de  commerce  de  Londres  pour  la 
révision  de  la  loi  anglaise  sur  les  marques,  notamment 
en  ce  qui  concerne  les  marques  composées  des  mots  et 
l'application  en  Angleterre  de  l'article  6  de  la  Convention 
d'Union  de  1883.  On  y  trouve  aussi  sur  la  jurispruence 
anglaise,  en  matière  de  marques,  dénominations,  un 
aperçu  qui  complétera  l'étude  publiée  dans  les  Ann.  98.80 
et  remaniée  dans  l'Annuaire  de  l'Association  internationale 
pour  la  protection  de  la  propriété  industrielle,  1898, 
p.  375. 

Projet  de  revision  de  la  législation  existante  sur  les  mar- 
ques de  fabriques  en  Grande-Bretagne.  —  Analyse  du  bill 
Moulton  dans  la  Prop.  ind.,  1900.78. 

Italie. 

La  ConcorrenzaSleale {Ldi  concurrence  déloyale), parTor- 
quato  Carlo  GiAWNiNi,avocat,l  vol.in-8°,Napoli,1898,Eugène 
Marghieri.  —  M.  Giannini  estime  qu'aucune  des  théories 
sur  lesquelles  on  a  fondé  jusqu'ici  la  répression  de  la  con- 
currence déloyale  ne  donne  satisfaction  à  l'esprit  et  qu'une 
théorie  est  nécessaire  ;  il  pense,  quant  à  lui,  que  ensei- 
gne, titre,  dénomination,  tout  ce  qui  sert  à  spécifier  une 
entreprise  ou  les  produits  d'une  entreprise,  constitue  une 
véritable  propriété  commerciale,  propriété  immatérielle, 
qui  a  les  mêmes  droits  que  la  propriété  matérielle  à  être 
qualifiée  de  proj!>rîe7(^,  bien  qu'elle  ail  quelques  caractères 


—  310  — 

spéciaux.  Ce  système  ne  permet  pas  d'atteindre  comme 
concurrence  déloyale  la  vente  au  rabais,  l'abus  de  la  ré- 
clame, le  dénigrement  ;  l'auteur  ne  méconnaît  pas  cette 
conséquence  de  son  système^  mais  il  la  trouve  justifiée. 
Outre  cette  théorie  tout  à  fait  neuve,  on  trouvera  dans  le 
livre  de  M.  Giannini  de  précieux  documents  de  jurispru- 
dence comparée. 

De  l'état  actuel  de  la  jurisprudence  en  matière  de  mar^ 
ques  en  Italie.  —  Article  de  M.  Hoîse  Amar  dans  la  Prop. 
ind.,1901.11.  Il  fait  ressortir  :  que  la  législation  italienne, 
en  punissant  la  tromperie  sur  Torigine  des  produits,  ac- 
corde, en  dehors  de  toute  réciprocité  légale  ou  diplomati- 
que, la  protection  contre  les  fausses  indications  de  pro- 
venance ;  que  d'après  la  jurisprudence  actuelle  de  la  Cour 
de  cassation,  en  opposition  avec  celle  du  Conseil  d'Etat, 
les  étrangers  comme  les  nationaux  peuvent  obtenir  con- 
damnation, civile  ou  pénale,  contre  les  contrefacteurs  ou 
imitateurs  de  leurs  marques  même  non  déposées  (voir 
aussi  l'article  de  M.  Bosio  dans  la  Prop.  ind.,  1900. 171). 

Suisse. 

Traité  des  marques  de  fabrique  et  de  commerce,  des  in- 
dications de  provenances  et  de  mentions  de  récompenses 
industrielles,  en  Suisse,  comprenant  l'étude  du  droit  com- 
paré et  du  droit  international,  par  Philippe  Ddnant, docteur 
en  droit,  avocat,  privat-docent  à  la  Faculté  de  droit  de  Ge- 
nève,l  vol.in-S'^javec  111  gravures,Paris,  1898,  Arthur  Rous- 
seau. —  L'étude  delà  législation  sur  les  marques  de  fabri- 
que prend  un  développement  considérable  non  seulement 
en  France,  mais  à  l'étranger.  Voici  un  livre  qui,  tout  nou- 
veau pour  la  Suisse,  peut  servir  de  type  aux  études  ulté- 
rieures à  exécuter  dans  les  différents  pays  ;  l'auteur,  tout 
en  se  plaçant  en  première  ligne  au  point  de  vue  de  la  lé- 
gislation suisse,  donne  en  même  temps  sur  chaque  ques- 
tion la  solution  des  jurisprudences  étrangères,  de  sorte 
qu'en  faisant  connaissance  avec  une  législation  spéciale 
et  encore  peu  connue,  on  embrasse  d'un  seul  coup  la  même 
matière  au  point  de  vue  universel  et  l'on  peut  se  rendre 
compte  combien,  en  matière  de  marques  de  fabrique,  les 


—  311  — 

besoins  des  commerçants  et  du  public  sont  partout  les  mê- 
mes et  Tunifîcation  des  législations  seraitfacile.  L'illustra- 
tioadu  chapitre  de  la  contrefaçon  parla  reproduction,  pour 
les  principales  espèces,  de  la  marque  invoquée  et  de  lamar- 
que  poursuivie  est  une  innovalionides  plus  heureuses  et  qui 
fera»  par  l'œil,  l'éducation  des  magistrats  et  des  avocats. 
Tout  en  ayant  pour  but  un  ouvrage  pratique,  M.  Dunant  a 
fait  la  place  nécessaire  à  l'histoire  et  à  la  théorie.  Des  do- 
cuments empruntés  à  des  travaux  archéologiques  et  à  des 
monographies  récentes  enrichissent  considérablement  le 
fond  auquel  puisaient,  à  l'ordinaire,  les  nouveaux  venus 
pour  écrire  l'historique  des  marques  de  fabrique  ou  de 
commerce  depuis  les  temps  les  plus  reculés  jusqu'à  nos 
jours.  Comme  théoricien,  M.  Dunant  se  range  aveuglé- 
ment sous  la  bannière  d'Edmond  Picard  ;  il  est  partisan 
de  la  théorie  des  droits  intellectuels  et  classe  dans  cette 
catégorie  de  droits  le  droit  du  fabricant  sur  sa  marque  ; 
il  ne  méconnaît  pas  toutefois  les  différences  profondes  qui 
séparent  le  droit  à  la  marque  et  le  droit  sur  les  œuvres 
intellectuelles  y  mais  il  pense  que  le  droit  à  la  marque  re- 
pose sur  la  valeur  commerciale  que  l'industriel  a  créée  par 
la  réputation  qu'il  a  su  donner  à  ses  produits  et  dont  la 
marque  n'est  que  le  symbole,  il  en  conclut  que  l'industriel 
a  droit  à  ce  fruit  de  son  travail  et  de  son  talent,  tout 
comme  l'artiste  a  droit  à  l'œuvre  de  son  esprit. 

EuG.  PouaLET. 

La  concurrence  déloyale^  sa  définition  et  les  dispositions 
qui  la  concernent  en  droit  civil  et  en  droit  pénal,  par 
Alfred  Simon,  docteur  en  droit  (travail  couronné  parla  So- 
ciété suisse  des  juristes),  traduction  française  par  Alfred 
Georg,  docteur  en  droit,  in-8«,  Genève,  1896,  Georg  et  Cie. 
—  Traité  bref  et  complet,  renvoyant  surtout  aux  décisions 
françaises  et  allemandes.  La  mort  récente  de  l'auteur  de  ce 
traité  est  une  perte  vive  pour  tous  ceux  qui  s'occupent  de 
propriété  industrielle  en  droit  comparé. 

Turquie. 

Du  droit  des  étrangers  en  Turquie^en  matière  de  marques 
de  fabrique  et  de  commerce,  par  César  Bonnet,  avocat  à 


—  312  — 

Constanlinople  {Journal  de  Clunei,  1899,  p.  283).  —  Arti- 
cle reproduisant  les  décisions  les  plus  récentes  rendues 
en  Turquie  sur  cette  matière. 

Nom  patronymique. 

Le  droit  au  nom  individuel  dans  le  Code  civil  pour  VEm^ 
pire  d'Allemagne,  par  R.  Saleillbs  (article  dans  la  Reryue 
critiquey  1900, t.  29,  p. 94).—  C'est  le  commentaire  de  l'arti- 
cle 12  du  Code  civil  allemand,  avec  indications  bibliogra- 
phiques. 

Propriété  littéraire  et  artistique. 

Droit  international  et  comparé. 

Association  litlér aire  et  artistique  internationale.  Con- 
grès de  BernCy  1896  (Paris,  Hôtel  des  Sociétés  savantes,rue 
Serpente). —  Les  fascicules  de  1896,  dont  nous  avions  omis 
l'analyse  dans  la  dernière  revue  de  bibliographie  contien- 
nent l'un  les  rapports  présentés  au  Congrès,  l'autre  les 
procès-verbaux.  Nous  nous  contenterons  de  donner  ici  le 
sommaire  des  rapports  : 

Examen  des  travaux  de  la  Conférence  de  Paris,par  Geor- 
ges Maillard  ;  Rapport  sur  les  moyens  d'assurer  l'applica- 
tion de  la  convention  de  Berne  dans  les  pays  adhérents» 
en  ce  qui  concerne  les  œuvres  littéraires,  par  Paul  OUen- 
dorf  ;  en  ce  qui  concerne  le  droit  de  représentation  des 
œuvres  dramatiques,  par  M.  A.  Beaume;  en  ce  qui  con- 
cerne les  œuvres  de  peinture,  sculpture  et  gravure,  par 
Georges  Fleury  ;  d'architecture,  par  Charles  Lucas  ;  les 
œuvres  photographiques»  par  André  Taillefer  ;  De  l'ac- 
complissement des  conditions  et  formalités  dans  les  Pays 
de  l'Union,  par  Ernest  Kœthlisberger  ;  Rapports  sur  le 
mouvement  législatif  dans  les  Pays  de  l'Union, Allemagne, 
par  le  D'  Osterrieht,  Monaco,  par  Léon  Poinsard  ;  De  la 
propriété  littéraire  en  matière  de  presse,  par  Paul  Gaye  ; 
Rapport  sur  les  moyens  d'obtenir  de  nouvelles  adhésions 
à  l'Union  de  Berne,  par  Maurice  Maunoury  ;  Rapport  sur 
le  mouvementlégislatif  en  matière  de  droits  intellectuels 
dans  les  trois  Amériques,  par  Ernest  Rœlhlisberger  ;  Etude 


—  314  — 

3«  série,  contient  les  rapports  présentés  à  ce  Congrès  ;  le 
bulletin  n*  8  contient  les  procès-verbaux  des  séances  et 
les  vœux. Ces  vœux  portent  sur  :  La  propriété  des  dessins 
et  modèles  d'art  appliqués  à  rinduslrie,rapporteur  Soleau  ; 
les  rapports  entre  auteurs  et  éditeurs,  rapporteur  Max 
Leclerc  ;  le  droit  moral,  rapporteur  Lermina  ;  la  durée 
du  droit,  rapporteur  Mack  ;  la  propriété  des  articles  de 
journaux,  rapporteur  Osterrieth;  la  caution  judicatum 
9olvh  rapporteur  de  Clermont  ;  la  propriété  littéraire  en 
Russie,  rapporteur  Harmand;  la  propriété  des  œuvres 
d'architecture,  rapporteurs  Harmand  et  Lucas  ;  un  projet 
d'unification  des  lois  sur  le  droit  d'auteur,  rapporteur 
Georges  Maillard  ;  la  législation  allemande  sur  le  droit 
d'auteur,  rapporteur  Osterrieth  ;  la  législation  en  Angle- 
terre, rapporteur  Iselin  ;  la  législation  en  Autriche-Hon- 
grie, rapporteur  Osterrieth;  la  protection  des  œuvres 
scientifiques,  rapporteur  Gastine.  —  (Voir  analyse  des 
travaux  et  vœux  dans  te  Z>roi7  d*  auteur  y  1898,  p.  118  et 
120.) 

Association  littéraire  et  artistique  internationale  ^Congrès 
d' Heidelber g, iS99. —  Le  bulletin  de  TAssociation.n'  8  de  la 
3*  série,  contient  les  rapports  de  MM.  Georges  Maillard  sur 
le  droit  moral  de  l'auteur,  sur  ses  créations,  Soleau  sur 
la  protection  des  œuvres  de  l'art  appliqué,  le  chevalier 
Pesce  sur  la  protection  des  œuvres  scientifiques.  Le  pro- 
gramme du  Congrès  se  complétait  par  l'examen  de  la  si- 
tuation dans  les  divers  pays.  (Voir  le  Bull,  de  l'Ass.,  n*  9, 
3«  série,  et  compte-rendu,  avec  reproduction  des  vœux, 
dans  le  Droit  d'auteur  y  1899,  p.  121  et  126).  L*AssociatioD 
a  publié  à  part  l'examen  ciritique  de  l'avant-projet  de  loi 
allemand  par  M.  Albert  Osterrieth  et  un  mémoire  alle- 
mand par  le  même  auteur,  qui  a  été  soumis  au  Gouver- 
nement allemand  {G.  B.  «.,  octobre  1899,  p.  281). 

Association  littéraire  et  artistique  internationale 4900.^ 
Le  bulletin  n*  11  (juillet  1900)  renferme,avecune  préface  de 
M.  Pouillet;  président  de  l'Association,  un  historique  de 
TAssocialion  de  1878  à  1900  par  le  secrétaire  perpétuel 
Jules  Lermina,  un  sommaire  des  travaux  publiés  dans  le 
Bulletin  depuis  Torigine  et  un  index  systématique. 


^316  — 

Circular^  n»  1719,  du  10  juin  1899,  contient  égalemenl,en 
anglais,le  compte  rendu  détaillé  des  travaux.  Dans  le  Droit 
d'auteur^  1899,  p.  83,  on  trouve  les  vœux  du  Congrès  et 
p.  79  une  analyse  sommaire  des  travaux.  A  signaler  :  la 
discussion  sur  les  mesures  à  prendre  pour  Tapplication 
et  Textension  de  la  Convention  de  Berne  (1);  l'opposition 
à  toutes  formalités  de  dépôt  légal  ;  une  proposition  d'en- 
registrement des  titres  ;  la  proclamation  du  principe  que 
l'aliénation  d'une  œuvre  d'art  n'entraîne  pas  aliénation 
du  droit  de  reproduction,  mais  qu'un  éditeur,  qui  com- 
mande un  dessin  à  un  artiste  est  présumé  acquérir  la 
propriété  du  dessin  ;  la  discussion  sur  le  droit  de  cita- 
tion. 

Congrès  international  des  éditeurs^  3*  session^  Londres, 
4899.  —  Les  vœux  sont  rapportés  dans  la  Bibliographie 
de  la  France^  17  juin  1899.  Voir  notamment  ceux  relatifs 
à  l'aliénation  des  œuvres  d'art  et  du  droit  de  reproduction 
à  la  propriété  des  dessins  commandés  pour  Tillustration, 
à  l'étude,  par  une  commission  internationale,  des  règles 
en  usage  dans  chaque  pays  entre  auteurs  et  éditeurs,  à 
la  protection  des  idées  originales  en  ce  qui  touche  les 
livres  d'éducation,  à  l'extension  de  l'Union  de  Berne,  à  la 
séparation  de  la  question  du  copyright  de  celle  du  dépôt 
légal. 

Adhésion  à  la  Convention  de  Berne,  —  Rapport  de 
M.  Otto  Mohlbrecht  au  Congrès  des  éditeurs  à  Londres 
en  juin  1899,publié,  conformément  à  un  vœu  du  Congrès, 
par  le  Cercle  de  la  Librairie  de  Paris,  comme  brochures  de 
propagande  pour  l'extension  de  l'Union  concernant  la 
protection  des  œuvres  littéraires  et  artistiques,  y  compris 
l'Acte  additionnel  et  la  déclaration  interprétative  de  1896 
(broch.  in-8»,  Cercle  de  la  Librairie,  Paris,  1900). 

Congrès  international  de  mtisiquey  Paris,  1900.  —  Le 
Congrès,  sur  le  rapport  de  M.  Combarieu,  a  émis  le  vœu 
que  les  administrations  des  Beaux-Arts  veillent  au  respect 


(1)  Soas  le  titre  Adhésion  à  la  Convention  de  Berne,  le  cercle  de  la 
Librairie  de  Paris  a  publié,  en  ane  brochure  française,  conformément 
a  un  vœu  du  Congrès,  le  rapport  de  M.  Otto  Mûhlbrecht. 


morts  et  qu'il  se  forme  des  comités  libres  dans  le  même 
but. 

Congrès  international  de  photographie,  Paris,  1900.  — 
A  signaler  un  rapport  de  MM.  Davanne  et  Taillefer  sur  la 
propriété  des  œuvres  photographiques  (1). 

Congrès  inlemational  des  Associations  de  presse  (1804- 
1900).  —  Nous  avons  à  signaler,  dans  les  publications 
auxquelles  a  donné  lieu  chaque  année  le  Congrès  de  la 
presse,  les  questions  qui  touchent  h  la  propriété  littéraire 
el  artistique. 

Au  Congrès  d'Anvers  (1894),  il  est  question  (p.  25  el75) 
de  la  propriété  des  informations  de  presse.  La  même 
[jaestion  revient,  eu  180S  au  Congrès  de  Bordeaux  (p.  38), 
en  1897  au  Conjîrès  de  Stockholm,  avec  (p.  34)  le  rapport 
de  HM.  A.  Osterrieth  et  Albert  Bataille  sur  la  protection 
de  la  propriété  littéraire  en  matière  de  presse  (p.  64),  en 
1896  au  Congrès  de  Lisbonne  (p.  47  et  s.),  où  on  vote  en- 
fin la  formule  suivante:  <  Les  articles  de  journaux,  qui 
soDtdes  œuvresde l'esprit,  doivent  être  protégés,  comme 
toutes  les  autres  œuvres  de  l'esprit,  par  les  lois  qui  assu- 
reatleur  propriété  à  l'auteur.  Toutefois,  en  ce  qui  con- 
cerne spécialement  les  articles  Iraitantde  questions  poli- 
tiques, religieuses,  économiques  ou  sociales  le  droit  de 
citation  partielle  est  reconnu  dans  l'intérêt  de  la  libre 
propagande  des  idées .  Le  droit  de  reproduction  intégrale 
est  reconnu  dans  les  mêmes  conditions,  sauf  le  cas  où 
l'article  reproduit  porterait  la  mention  t.  reproduction  in- 
terdite ».  Les  articles  ou  extraits  d'articles  reproduits  de- 
vront toujours  être  suivis  de  la  mention  du  nom  du  jour- 
nal et,  si  l'article  est  signé,  du  nom  de  l'auteur  (â).  Au 
Congrès  de  Rome  en  1899,  signalons  le  rapport  de  M.  Mo- 
rel-Retz  sur  la  propriété  artistique  en  matière  de  presse 
et  la  discussion  qui  a  suivi  (Bull.  off.  du  bureau  central 


(1)  Cf.  iiBiix  plai  modcitet  auxquels  eo  sont  rMulls  les  photogriphei 

^■i|En(C0Bgreede8  photographes  à  Montreur,  en  18d9,ff  Droit  d'au- 
''■>',  1890.75  ;  Congrès  de  la  loctélé   allemande  pour  la  protection  lé- 
VAt  des  pliotogTBi^iei,  en  1698,  le  Droit  d'auteur,  1806.145. 
1^1  Voir  le  Droit  d'auteur,  lb08.U2. 


. 'T" 


—  318  — 

des  Associations  de  presse^  n^  4,  p.  S2,  analysé  dans  le 
Droit  d'auteur,  1899,  p.  57),  le  rapport  de  M.  Halpérîne- 
Kaminsky  sur  le  droit  d*auteur  en  Russie  (publié  intégra- 
lement dans  le  Droit  d'auteur^  1899.40)  et  au  Congrès  de 
Paris  en  1900,  le  rapport  de  M.  Georges  Maillard  sur  les 
droits  des  journalistes-dessinateurs  sur  leurs  dessins  et 
légendes  (voir  Bull.  off.  Ass.  presse  ;  le  vœu  est  reproduit 
dans  le  Droit  d'auteur,  1900.  109). 

Congrès  international  de  la  presse  médicale^  Paris,  1900. 

—  On  trouvera  dans  ses  travaux  une  consultation  de  M.  le 
bâtonnier  Pouillet  sur  la  propriété  littéraire  et  artistique 
en  matière  de  presse  médicale  (voir  analyse  dans  le  Droit 
d'auteur,  1900.  110). 

De  la  protection  internationale  des  œuvres  littéraires  et 
artistiques  (thèse  de  doctorat),  par  Louis  Rivière,  avocat  à  la 
Cour  de  Paris  (gr.  in-8o  de  270  p.,  Paris,  Fontemoing,  1897). 

—  C'est  d'abord  une  étude  théorique  sur  le  droit  d'auteur, 
puis  l'examen  de  la  protection  légale  des  œuvres  étran- 
gères et  ensuite  de  la  protection  conventionnelle.  La  thèse 
s'achève  par  l'analyse  de  l'Union  de  Berne  et  des  travaux 
de  la  Conférence  de  Paris  ;  elle  est  d'une  parfaite  ordon- 
nance et  d'une  documentation  sûre. 

Conferenza  di  Parigi  per  la  revisione  délia  Convenzione 
de  Berna  del  1886,  par  Carlo  Camerano,  avocal  à  la  Cour 
de  Turin  (Extrait  de  la  Giurisprudenza  italiana,  vol.  4, 
Propriété  litteraria).  —  L'auteur  analyse  le  rapport  pré- 
senté au  Gouvernement  italien  par  M.  Luigi  Roux,  délégué 
de  ritalie  à  la  Conférence  de  Paris,  qui  a  fait  ressortir,  au 
point  de  vue  italien,  Tintérét  des  solutions  adoptées  par 
la  Conférence  et  la  nécessité  de  faire  subir  certaines  mo- 
difications à  la  loi  italienne  pour  la  mettre  en  accord  avec 
la  législation  des  autres  pays  de  l'Union,  sur  les  points  où 
l'unification  est  possible.  Tous  ceux  que  l'unification  des 
législations  sur  le  droit  des  auteurs  et  des  artistes  inté- 
resse applaudiront  à  l'effort  que  fait  M.  Luigi  Roux  en 
Italie  avec  une  persévérance  et  un  tact  remarquables,  ainsi 
qu'à  l'appui  que  M.  Camerano  lui  a  donné  en  vulgarisant 
clairement,  pour  le  public  italien,  les  résultats  de  la  révi- 
sion de  la  Convention  de  Berne. 


uruti  moral,  y  compris  i  aueinie  a  la  repumuoii  ae  i  ar- 
tiste. Les  délits  contre  un  tiers  comprennenl  les  agisse- 
ments illicites  de  l'artiste  à  l'égard  de  son  cessionnaire,  les 
Bsurpalions  de  signature,  les  diffamations,  etc.. .  Les  délits 
contre  la  chose  publique  comprennent  les  délits  résultant 


J 


—  320  — 

de  la  mise  au  jour  d'une  œuvre  illicite  el  ceux  résullanl 
de  la  destruction  totale  ou  partielle  d'une  œuvre  d'art.  Od 
lira  surtout,  avec  intérêt^  toute  la  partie  consacrée  au 
droit  moral,que  M.  Laporterie  assimile  au  droit  de  veiller 
à  l'honneur  de  son  enfant  et  d'en  châtier  les  insulteurs  ; 
il  s'est  inspiré  des  idées  développées  par  Jules  Lermina 
au  Congrès  de  l'Association  littéraire  et  artistique  inter- 
national à  Monaco,  Tan  dernier,  mais  il  s'est  efforcé  d'en 
indiquer  toutes  les  conséquences  pratiques,  avec  un  soin 
minutieux.  Eug.  Podillbt. 

De  la  contrefaçon  littéraire  et  artistique^  par  Roger  Col- 
lin,  avocat  à  la  Cour  de  Paris  (in-S®  de  336  pages,  Paris, 
Rousseau,  1899).  —  Thèse  de  doctorat  qui  mérite  d'être 
distinguée.  Elle  témoigne  d'un  goût  sûr  et  d'une  curiosité 
avertie  pour  les  questions  de  littérature  et  d'art  ainsi  que 
d'un  remarquable  don  de  clarté  dans  l'exposé. 

Etude  sur  le  projet  de  loi  relatif  à  la  protection  des 
œuvres  de  scuplturcy  par  Roger  Collin,  avocat  à  la  Cour 
d'appel  (broch.  in-8*  de  27  pages,  Paris,  Rousseau,  1900), 
—  C'est  comme  un  supplément  de  la  thèse  précitée.  Cette 
brochure  contient  une  bonne  analyse  critique  du  projet 
déposé  par  le  Gouvernement  à  la  Chambre  des  députés 
pour  assurer  la  protection  des  œuvres  d'art  appliqué. 

Les  œuvres  de  sculpture  et  la  loi  des  19-24  juillet  1793,  par 
Charles  Constant  {France  judiciaire^  1901,  p.  13  à  21). 
Article  sur  le  projet  de  loi  soumis  à  la  Chambre  des  dé- 
putés. 

Du  contrat  d'édition,  par  Gaston  Paitel,  Bordeaux,  Ca- 
doret,  1898, 163  pages.  —  Elude  des  rapports  entre  au- 
teurs el  éditeurs. 

Des  rapports  juridiques  entre  les  auteurs  et  les  éditeurs, 
par  Pierre  Rudelle,  docteur  en  droit,  avocat  à  Versailles. 

De  Vexploitation  des  œuvres  musicales  par  rexécution 
publique,  par  Louis  Gibaux  (in-8»  Rousseau,  Paris,  1900).  — 
L'auteur  de  cette  excellente  élude  ne  s'est  pas  contenté  de 
dégager  les  solutions  de  la  jurisprudence  française,  son 
livre  débute  par  un  essai  théorique,  bref  mais  fort  clair, 


—  322  — 

Hénon,  imp.  de  TAss.  publ.).  —  M.  Worms  est  partisan 
du  statu  quo  et  repousse  tout  à  la  fois  la  proposition  pré- 
sentée par  M.  Berry  à  la  Chambre  des  députés,  tendant 
à  ne  frapper  du  droit  que  les  bénéfices  nets  des  entrepri- 
ses de  spectacles,  et  la  proposition^  de  la  Commission  de 
la  Chambre  des  députés,  pour  la  répression  de  la  mendi- 
cité^ tendant  à  supprimer  les  contrats  d'abonnement  pour 
la  perception  du  droit  des  pauvres,  frapper  les  billets  de 
faveur  et  percevoir  le  droit  au  moyen  d'un  timbre  apposé 
sur  le  billet.  M.  Worms  ne  s'est  pas  contenté  de  faire  la 
critique  très  minutieuse  des  deux  projets,  il  a  fait  précé- 
der sa  discussion  d'un  historique,  fortement  documenté  et 
attrayant,  du  Droit  des  Pauvres  et  il  Ta  fait  suivre  d'une 
série  d'annexés  fort  curieuses  :  diagramme  des  recettes 
effectuées  parle  service  du  Droit  des  pauvres,  de  Tan  V  à 
1897  ;  produit  détaillé  de  l'impôt  pour  Tannée  1896,  feuille 
complète  d'une  journée  de  recettes  ;  liste  des  lois,  décrets, 
arrêtés  et  principaux  actes  interprétatifs  concernant  le 
droit  des  pauvres  ;  tableau  chronologique  des  circulaires 
et  décisions  ;  bibliographie  de  la  matière  ;  table  des  dé- 
libérations du  Conseil  général  des  hospices,  du  Conseil  de 
surveillance,  du  Comité  consultatif  (on  y  voit  comme  un 
reflet  de  l'histoire  des  spectacles  et  des  exhibitions  de 
1809  à  1898,  ce  sont  des  modérations  de  droit  pour  fêles 
ou  expositions  dans  des  buts  charitables.,  représentations 
à  bénéfice,  des  propositions  d'abonnement  pour  certaines 
entreprises,  des  questions  litigieuses  pour  certaines  au- 
tres, des  difficultés  de  recouvrement  pour  tel  ou  tel  éta- 
blissement, etc.).  EUG.  POUILLIT. 

Allemagne. 

Die  Immaterialgûter  im  intemationalen  Becht^  par 
J.  Kohler,  professeur  à  l'Université  de  Berlin  (Zeitschrift 
fur  internationales  Privât  und  Strafrecht,  Leipzig,  Duncker 
et  Humblot).  —  Etude,  fort  intéressante  comme  tout  ce 
que  publie  Téminent  professeur,  sur  les  biens  immatériels 
(c'est  l'étiquette  qu'il  attribue  à  la  propriété  intellectuelle) 
en  droit  international. 

Das  Urhebef^recht  an  archilektonischen^  gewerbetechnis- 


—  323  — 

chen  tind  œhnliehen  Zeichnungen  und  Abbildungen  (Le 
droit  d'auteur  sur  les  dessins  et  images  arcbilectonlques, 
de  technique  industrielle  et  autres  semblables),  par  Karl 
ScHABFKR  {G.  R.  s, y  aoùt  1899,  p.  228).  —  C'est  un  article 
où  il  est  expliqué  que  les  dessins  d'architecture  n'ont  d*au- 
Ire  protection  que  l'article  43  de  la  loi  du  H  juin  1870  sur 
les  écrits,  dessins,  etc.,  c'est-à-dire  qu'ils  ne  sont  proté- 
gés que  contre  la  reproduction  mécanique,  et  l'architecte 
qui  a  publié,  par  exemple  dans  un  journal,  les  dessins 
d'une  maison  ou  d'une  installation  d'appartement  ne  peut 
empêcher  qu'un  tiers  les  utilise  pour  une  construction  ou 
une  décoration,  en  effet  la  loi  du  9  janvier  1876  sur  les 
œuvres  des  arts  figuratifs  refuse,  par  son  article  3,  sa  pro- 
tection à  l'architecture  et  l'article  43  de  la  loi  de  1870  im- 
plique que  les  dessins  d'architecture  ne  sont  pas  à  consi- 
dérer, dans  leur  but  principal,  comme  des  œuvres  d'art.  Il 
en  est  de  même  des  dessins  et  illustrations  d'art  industriel 
et  scientifiques,  qui  servent  comme  modèles  et  comme 
enseignement  et  peuvent  être  utilisés  par  les  tiers  pour 
l'exécution  de  produits  industriels  ou  artistico-indus- 
Iriels  :  la  reproduction  n'en  est  interdite  que  par  la  repro- 
duction mécanique  de  la  forme  même  sous  laquelle  ils  ont 
paru.  L'auteur  de  l'article  critique  vivement  ces  consé- 
quences de  la  législation  allemande,  qui  sont  également 
constatées  dans  le  commentaire  du  droit  d'auteur  en  ma- 
tière d'art  «  Das  artisiiche  Urheberrechi  »  par  AUfeld,  et  il 
demande  la  réforme  de  la  loi. 

Die  Vtriràge  des  Bildhauers  "(Les  contrats  du  sculpteur), 
par  Hans  Kobbl  (Berlin,  1900,  Cari  Heymanns  Verlag).  — 
Manuel  juridique  et  pratique,  publié  sous  le  patronage  de 
l'Union  des  artistes  de  Berlin  et  de  l'association  générale 
allemande  d'art. 

Deutscker  Theaterrecht  {Le  droit  théâtral  en  Allemagne), 
par  0.  Opbt,  Berlin,  1897  (Calvary  et  Cie,  819  pages). 

Entwurf  eines  Gesetzes  betreffend  das  Urheberrechi  an 
Werken  der  Litleratur  und  TonAuns^  (Projet  de  loi  concer- 
nant le  droit  d'auteur  sur  les  œuvres  de  la  littérature  et 
de  l'art  musical),  édition  officielle  (J.  Gullentag,  Berlin, 


'-'-try'BTÇ?-^ 


—  324  — 

1899)  (1).  —  Cet  avant-projet,  que  le  Gouvernement  avait 
communiqué  officiellement  aux  intéressés  pour  attirer 
leurs  observations,  a  donné  lieu  à  de  nombreuses  publi- 
cations dont  nous  indiquerons  seulement  quelques-unes  : 
Denkschrift  der  Genossenschaft  deutscher  Komponisten 
(G.  R.  s.y  décembrel899,  p.  345),  die  Reform  des  Urheber- 
rechtesparle  prof.  Karl  Birkmayer  (Ackermann,  Munich, 
1899),  Krilische  Bemerkungen  du  prof,  von  Calcker  (Nie- 
meyer,  Halle),  Wider  die  Kommunislen  am  geisLigen 
eigenthum  (Deutscher  Autoren  Verlag,  Berlin,  1900),  Ob- 
servations de  MM.  Vichert  (G.  fl.  s.,  octobre  1900,  p.  286) 
et  Leander  (eod,  loc.^ç.  291).  Voir,  suprày  p.314  les  travaux 
de^l'Associalion  littéraire  et  artistique  internationale  ;  voir 
aussi  l'analyse  de  Tavant-projel  et  une  notice  bibliogra- 
phique dans  le  Droit  d'auteur^  1899,  p.  89  et  138,  et  le 
compte  rendu  de  la  25®  assemblée  des  jurisconsultes 
allemands,  à  Bamberg  en  1900  [eod.  loc,  1900,  p.  157). 
Le  Gouvernement  a  ensuite  présenté  un  projet  remanié 
{Gewerblicher  Bechtschutz  und  Urheberrecht,  1900,  p.  376) 
qui  a  été  discuté  au  Parlement  en  1"  lecture  {le  Droii 
d'auteur^  1901. 11).  Voir  encore  observations  d'Osterrieth 
(fi.  R.  s.,  1900.  371),  article  du  prof.Schusler  (de  Prague) 
et  réponse  de  M.  Kœsch  pour  la  Société  des  compositeurs 
allemands  {G.  R.  s.,  1901.14). 

Bemerkungen  zum  Entwurf  eines  Gesetzesûber  dos  Ver- 
lagsrecht^  par  Albert  Ostbrrieth  (2)  (Extrait  de  la  Revue 
Gewerblicher  Rechtschutz  und  Urheberrechty  octobre  1900, 
p.  298),  in-12  de  100  p.,  Berlin,  Cari  Heymanns  Verlag, 
1901.  —  Observations  sur  le  projet  de  loi  allemand,  con- 
cernant le  droit  d'édition,  présenté  au  Parlement  en  dé- 
cembre 1890  (y  compris  le  texte  du  projet  de  loi). 

Droii  d'édition.  —  Gutachlen  der  Herrn  D^  Albert  Oster- 
RiKTH,  in  Berlin,  ùberdie  Frage,  Soll  der  Verleger  hère- 
chtigt  sein  das  Verlagsrecht  ohne  Zustimmung  des  Autors 
uz  ubertragen  ?  (Consultation  de  A.  Osterrieth  sur  la  ques- 


(i)  Voir  le  texte  allemand  aassi  dans  G.  R.  s.,  juillet  1899,  p.    210^ 
(2)  Voir  aussi  observations  critiques  du  prof.  Birkmeyer,  Die  Kodifi- 

kation  des  Verlagsrechtes  (broch.  gr.  in-8,  Tli.  Ackermann,  Munich, 

1900. 


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^ 


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—  326  — 


les  instructions  complémentaires  (1).  Le  bulletin  3  cons- 
titue rhistorique  comlpet  de  la  législation  sur  le  copyright 
de  1783  à  1900.  Le  bulletin  4  comprend  la  Convention  de 
Berne  et  TActe  additionnel,  les  circulaires  relatives  à  Ten 
^  registrement  à  Londres,  la  législation  du  Canada  de  1886 

Grande-Bretagne. 

j  L'effet  rétroactif  et  la  Conven  lion  de  Berne  en  A  ngleterre. 

!  —  Article  par  M.  J .  F.  Iselin  dans  le  Droit  d'auteur^  1899.38. 

I  Seven  Lectures  on  the  Law  and  History  of  copyright  in 

Books  (Sept  lectures  sur  la  législation  et  Thistoire  du 
droit  d'auteur  en  matière  de  livres,  par  A.  Birell  (Cassel, 
London,  1899). 

The  law  of  copyright  in  designs  with  the  stututes  (La 
^  loi  sur  le  droit  d'auteur  des  dessins),  par  H.  Knox  et  J. 

W.  Hind  (Reeves  and  Turner,  London,  1899). 

Artistic  Copyright  with  spécial  Référence  to  ArchitectSyby 
Georges  Harmand,  avocat  à  la  Cour  d'appel  de  Paris.  — 
Conférence  à  The  Royal  Institute  of  Brilish  Architects,  le 
4  avril  1898  (broch.  in-4^  extrait  du  journal  de  Tlnstitut 
royal  des  architectes  britanniques,  vol.  V,  n.  11). 

Grèce.  . 

To  Aexacov  tvjç  IIvïupaTtxYJç  KtoxTYîo-taç  (Traité  de  la  propriété 
intellectuelle),  par  Teodoros  Apostolopoulos,  avocat  à 
Athènes  (petit  in-8,  Athènes,  1900). 

Italie. 

Il  Diritto  Morale  delVAutore  sulle  Opère  dellHngegno 
(Le  droit  moral  de  Fauteur  sur  les  œuvres  de  l'esprit)»  par 
Ferracio  FoA,avocat  à  la  Cour  de  Milan,  directeur  de  la  re- 
vue «  I  Diritti  d'autore  »,  broch.  in-8,  Milano,  1899  (Extrait 
de  la  revue  «  I  Diritti  d'autore  »,  n"9  et  10, septembre  et 
octobre  1899).  —  Etude. critique  des  travaux  du  Congrès 

(1)  Les  instructions  pour  l'obtention  du  Copyright  ont  été  tradaltas  en 
français  dans  le  Droit  d^autetir^  1899.114. 


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teressant  pour  déterminer  la  nature  de  ce  droit  moral. 
M,  Foa  estime  qu'il  faudrait  dire  plus  esaclement  droit  in- 
leilecluelei  que  cela  se  résume  dans  l'inlangibilité désœu- 
vrés de  l'esprit:  l'auteur  seul  est  maître  de  choisir  le  mo- 
ment de  faire  connaître  son  œuvre  au  public  et  nul  ne  peut 
fairesubiraucunemodiScation,  demauvaisefoi,  à  l'œuvre, 
même  s'il  est  cessionnaira  des  droits  pécuniaires  de  l'au- 
teur ;  le  droit  intellectuel  n'est  pas,  comme  le  droit  pécu- 
niaire, un  droit  civil  transmissible  aux  héritiers  ou  ayants 
cause,  il  rentre  dans  le  domaine  du  droit  public,,  11  doit 
avoir  sanction  pénale  el,  après  la  mort  de  l'auteur,  c'est  au 
ministère  public  qu'il  appartient  seul  d'interdire  les  modi- 
fications apportées  à  l'œuvre,  les  exécutions  qui  le  déna- 
tureraient. Eco.  POOILLBT. 

l  diritli  d'autore  degli  Arckitetti,  parJ.  Uell'Oro,  avocat 
à  Milan,  Giovanni  Gusson,  1898. 

L'archiletiurae  le  leggi  sullaproprietaartistica  et  lilteria, 
par  Fb.  Pahodi,  ingénieur  à  Turin  (article  du  Monilore  tec- 
nicOiMtlan,  10  décembre  1900).  —  L'auteur  est  un  des  vail- 
lants défenseurs  de  droit  de  l'architecte  el  de  ringénieur(t), 
il  se  plaint  que  les  lois  récentes,  telles  que  la  Brésilienne 
et  la  Japonaise  ne  fassent  pas  à  l'architecture  la  place 
qu'elle  mérite. 

NOBVÈGI. 

Der  Schutx  des  geistigen  Eigentums  in  Norvegen  (La  pro- 
tection de  la  propriété  intellectuelle  en  Norvège),  par  Pap- 
PAPAVA  (Article  dans  Jahrbuch  des  internationales  vereini' 
gung,  l.  5,  p.  260). 

RotmANIE. 

La  propriété  littéraire  et  artistique  en  Roumanie,  par 
j.  T.  Ghica.  —  1  vol.  in-8,  Paris,  Kousseau,  1900 

Conventions  de  ta  Roumanie  avec  les  Etats  étrangers  con- 
cernant le  commerce  el  les  marques  de  fabrique,  par  Const. 
Brailïand,  1  vol.  in-S",  Bucarest,  Carol  Gobi,  1899, 


1 

I 

-  328  - 

Suisse 

Bas  internationale  Urheberrecht  an  Photographient  mu- 
sikalischen  Auffïihrungen  und  Ueberseizungen  (Le  droit 
d'auteur  international  sur  les  photographies,  les  exécu- 
tions musicales  et  les  traductions),  par  0.  Wyss  (1  vol. 
in-8o,  Zurich,  Schullhess). 

Le  droit  d'auteur  dans  les  arts  plastiques  et  délinéatotres 
en  Suisse, p^vAhFiŒD  MELi(Genève,Kundig,l 900,104  pages.) 
—  Commentaire  de  la  loi  du  23  avril  1883. 

Du  droit  des  compositeurs  de  musique  quant  à  Vexécu- 
lion  de  leurs  œuvres  en  Suisse,  d* après  la  légisation  actuelle 
et  d'après  les  traités.  Examen  de  la  question  au  point  de 
vue  d'une  loi  à  faire  (rapport  présenté  par  M.  Philippe  Du- 
NANT,  docteur  en  droit,  avocat  à  Genève,  à  la  Société  des 
Juristes,  session  de  1898).  —  M.  Dunant  s'est  déjà  distin- 
gué, outre  son  livre  sur  les  marques  dont  nous  rendons 
compte  plus  haut,  par  un  Volume  fort  bien  fait,  intitulé  : 
Du  droit  des  compositeurs  de  musique  sur  leurs  œuvres  {Ge- 
nève, imp.  Romet,  1893).  Il  revient  cette  fois  sur  une  par- 
tie du  même  sujet,  le  droit  d'exécution,  en  se  plaçant  plus 
particulièrement  au  point  dé  vue  suisse,  droit  des  compo- 
siteurs nationaux  et  étrangers  en  Suisse,  droit  des  com- 
positeurs étrangers  en  Suisse,  et  il  étudie  les  projets  de 
réfoi-me  de  la  loi  suisse  de  1883.  Il  critique  le  système  qui 
consisterait  à  lier  le  droit  d'exécution  à  l'achat  d'un  ma- 
tériel licite  pour  cette  exécution.  Personnellement  il  serait 
partisan  de  la  reconnaissance  absolue  à  Fauteur  ou  à  ses 
ayants  cause  du  droit  d'exécution  ;  mais  il  reconnait 
qu'en  Suisse  l'introduction  du  droit  d'exécution  est  encore 
trop  récente,  la  production  musicale  trop  peu  importante 
pour  qu'on  puisse  obtenir  de  l'assentiment  populaire  la 
proclamation  de  ce  droit  sans  limites.  Il  conclut  qu'il  faut 
s'en  tenir  au  système  de  la  loi  en  vigueur,  c'est-à-dire  li- 
mitée à  2  p.  100  du  tantième  à  exiger  pour  le  droit  d'exécu-  • 
tion  et  liberté  des  exécutions  gratuites  et  de  bienfaisance, 
mais  remanier  le  texte  de  l'article  7,  qui  manque  de  clarté, 
et  accorder  une  action  civile  à  l'auteur,  même  quand  l'exé- 
cutant n'a  commis  qu'une  simple  faute,  négligence  ou  im- 
prudence. EUG.  POUILLBT. 


■♦iTfr^'  '» 


—  330  — 

Il  est  entendu  que  les  marques  de  fabrique  ou  de  commerce 
auxquelles  s'applique  le  présent  arrangement  sont  celles  qui, 
dans  les  deux  pays,  sont  légitimement  acquises  aux  industriels 
et  négociants  qui  en  usent,  c*est-à'dire  que  le  caractère  d^une 
marque  française  devra  en  être  apprécié  d'après  la  loi  française, 
de  même  que  celui  d'une  marque  costaricienne  devra  être  jugé 
d'après  la  loi  costaricienne. 

Art.  3.  —  Si  une  marque  de  fabrique  ou  de  commerce  appar- 
tient au  domaine  public  dans  le  pays  d'origine,  elle  ne  pourra 
être  l'objet,  d'un  droit  privatif  dans  l'autre  pays. 

Art.  4.  —  Le  présent  arrangement  sera  exécutoire  pendant 
cinq  ans,  qui  commenceront  à  courir  aussitôt  après  l'échange 
des  ratiOcations.  Néanmoins,  si,  un  an  avant  l'expiration  de  ce 
terme,  aucune  des  deux  parties  contractantes  n'annonce  à  l'au- 
tre, par  une  déclaration  ofQcielle,  son  intention  d'en  faire  cesser 
les  effets,  ledit  arrangement  restera  encore  obligatoire  pendant 
une  année  après  les  cinq  ans  et  ainsi  de  suite  d'année  en  année. 
Il  restera  en  vigueur  aussi  longtemps  que  la  notification  préalable 
n'aura  pas  été  faite. 

Art.  5.  —  Le  présent  arrangement  devra  être  ratifié  et  ré- 
change des  ratifications  aura  lieu  à  Paris,  dans  les  six  mois  qui 
suivront  la  signature  de  la  présente  Convention. 

Fait  &  Pans,  en  double  exemplaire,  le  8  juillet  1896. 


Art.  4143. 

Comrentlons  Intornatlonales.  —  Co«ta-IUca.  ~ 
Propriété  littéraire  et  artlstlcfue. 

Convention^  du  28  août  1896,  entre  la  France  et  le  Costa^ 
Rica  pour  la  garantie  réciproque  de  la  propriété  litté'^ 
raire  et  artistique  (1). 

Cette  Convention  a  été  promulguée  en  France  le  17 
août  1897  (Journ.  off.,  19  août).  Elle  est  ainsi  conçue  : 

Article  premier.  —  Les  auteurs  d'œuvres  littéraires,  scienti* 

(1)  Elle  a  été  approuvée  par  la  loi  française  du  30  jaillet  1897,  /.  o/^., 
10  août  (Chambre,  ezp.  mot.,  doe.  1896,  p.  1550;  rapport,  doc.  1897, 
p.  1416;  adoption,  25  juin  1897,  Sénat,  exp.  mot.,  doc.  1897,  p.  509  ; 
rap.,  p.  526;  adoption,  12  juillet  1897).  Elle  avait  été  approuvée  parle 
Congrès  de  Costa-Rica  le  17  octobre  1896  (Droit  d'auteur,  1896,  p.  137) 
et  ratifiée  par  décret  présidentiel  du  6  novembre,  pais  promalguée 


—  3;32  — 

4.  —  Sont  expressément  assimilées  aux  œuvres  originales 
idactions  des  teiirres  nationales  ou  étrangères  faites  par 
leur  appartenant  à  l'un  des  deux  Etats.  Ces  traductions 
tt,  à  ce  titre, de  la  protection  stipulée  par  la  présente  Con- 
n  pour  les  œuvres  originales  en  ce  qui  concenie  leur  re- 
ition  non  autorisée  dans  l'autre  Etat.  Il  demeure  bien 
lu,  toutefois,  que  le  présent  article  a  uniquement  pour 
I  protéger  le  traducteur  en  ce  qui  concerne  la  Tersion  qu'il 

de  l'œuvre  originale  et  non  de  conférer  un  droit  exclusif 
Inction  au  premier  traducteur  d'une  œuvre  quelconque 
en  langue  morte  ou  vivante. 

5.  —  Les  nationaux  des  deux  pays,  auteurs  d'œuvres  ori- 
s,  auront  le  droit  de  s'opposer  à  la  publication  dans  l'au- 
ja  de  toute  traduction  de  ces  œuvres  non  autorisée  par 
émes;  et  cela  pendant  toute  la  durée  de  la  période  de 
qui  leur  est  concédée  pour  la  jouissance  du  droit  de  pro- 
littéraire ou  scientifique  sur  l'œuvre  originale,  c'est-à-dire 

publication  d'une  traduction  non  autorisée  est  assimilée 
)us  les  rapports  à  la  réimpression  illicite  de  l'œuvre. 
auteurs  d'œnvres  dramatiques  jouiront  réciproquement 
âmes  droits  en  ce  qui  concerne  les  traducUons  on  les  re- 
tationsdes  traductions  de  leurs  œuvres. 

6.  —  Sont  également  interdites  les  appropriations  indî- 
non  autorisées,  telles  que  les  adaptations,  les  imitations 
e  bonne  foi,  les  emprunts,  les  transcriptions  d'œurres 
Lies  et  en  général  tout  usage  d'œuvres  qui  se  fait  par  la 
!  l'impression,  ou  sur  ta  scène,  sans  le  consentement  de 

7.  —  Sera  néanmoins  licite  réciproquement  la  publica- 
ns  chacun  des  deux  pays  d'extraits  ou  de  fragments  en- 
:compagné3  de  notes  explicatives  des  œuvres  d'un  auteur 
tre  pays,  soit  en  langue  originale,  soit  en  traduction, pourvu 
n  en  indique  la  provenance  et  qu'ils  soient  destinés  à 
jnement  ou  à  l'étude. 

8.  —  Les  articles  insérés  dans  les  publications  pérîodi- 
lontles  droits  n'auront  pas  été  expressément  réservé», 
ni  être  reproduits  par  toutes  autres  publications  du  mfime 
mais  à  condition  que  l'on  indique  l'original  sur  lequel  ils 
pies. 

9.  —  Les  mandataires  légaux  ou  représentants  des  au- 
iompositeurs  et  artistes,  jouiront,  réciproquement  et  sous 
i  rapports,  des  mêmes  droits  que  ceux  que  la  présente 
ition  concède  aux  auteurs,  compositeurs  et  artistes. 

10.  —  Les  droits  de  propriété  littéraire,  artistique  et  scîea- 
reconnus  par  la  présente  Convention,  sont  garantis  aux 


portatioD  sur  son  propre  territoire  de  livres  qni,  d'après  ses  lois 
inlérieureson  des  Btipalatioas  souscrites  avec  d'autres  puiss&o- 
CM,  sont  on  seraient  déclarés  Être  des  contrefaçons. 

Art.  14.^  —  It  est  entendu  que  les  ventes,  exécutions,  représen- 
talioDS  on  exhibitions  des  oeuTres  scientifiques,  littéraires  ou  ar- 
tistiquea  qni  sont  interdites  par  cette  Convention,  sont  celles 
qui  s'efTectueront  en  public  on  par  spéculation  et  non  pas  celles 
qai  seroDt  faites  par  des  particuliers,  sans  but  de  gain,  telles  que 
les  ventes  conclues  pmément  entre  des  personnes  qni  ne  font 
pas  le  commerce  des  ouvrages  dont  il  est  question,  ou  les  exé- 
cutions, représentations  et  eiliibitions  d'œnvres  littéraires  et  ar- 
tistiques faites  privëment  dans  des  maisons  particulières. 

Art.  15.  —  La  défense  de  réimprimer,  publier,  introduire, 
•endre,  représenter,  exhiber,  on  exécuter  dans  l'un  ou  l'autre 

(1)  Il  n'est  question  que  des  formalités  dans  le  pajs  d'origine  (voir  la 
tciteda  l'art.  9  et  llnlerprètution  de  l'eiposé  des  molUs  dn  gouverne- 
neal  français).  Voir  aasai  Droit  d'auteur,  1896,  p.  147,  et  1897,  p.  113. 


Ici, 


étc 


tage 
lite 
Iqa 


Miaistëre  de  rioslruction  publique  trois  exemplaires  de  l'œuvre 
doDl  ils  veaLent  gamntir  dans  les  deui  paya  la  propriété  contre 
toate  contrefaçon  ou  reprodaction  illicite  ;  le  Ministre  de  l'Ins- 
truction publique  derra  leur  délivrer  un  certificat  constatant  le 
dépât  des  auvres  y  indiquées,  lequel  permettra  k  l'intéressé  de 
ae  présenter  devant  l'autorité  publique  compétente,  pour  reven- 
diquer ses  droits  (1). 

Néanmoins,  en  ce  qai  concerne  les  œuvres  d'&rt,  telles  que 
statues,  vitraaï, médailles,  tableaux,  œuvres  d'arcbitecture,  etc., 
etc.,  il  suffira  que  l'auteur  ou  le  propriétaire  eFTeclue  le  dépAt 
d'une  reproduction  soua  forme  de  dessin,  de  gravure  ou  de  pho- 
tographie. 

Art,  3,  —  Les  stipulations  Se  l'article  premier  s'appliquent 
également  à  la  représentation  ou  à  rexécution,dans  l'un  des  deux 
Etats,  des  œuvres  dramatIqueR  ou  musicales  d'auteurs  ou  de  com- 
positeurs de  l'autre  pays. 

Art.  4.  — Sont  expressément  assimilées  ans  œuvres  originales 
les  traductions  des  œuvres  nationales  ou  ëtrangërea,  Taites  par 
un  auteur  appartenant  à  l'un  des  deux  Etats.  Ces  traductions 
jouiront,  h  ce  titre,  de  la  protection  stipulée  par  ta  présente  Con- 
vention pour  les  œuvres  originales,  en  ce  qui  concerne  leur  re- 
production non  autorisée  dans  l'autre  État.  Il  demeure  bien  en- 
tendu, toutefois,  que  le  présent  article  a  uniquement  pour  but 
de  protéger  le  traducteur  en  ce  qui  concerne  la  version  qu'il  a 
faite  de  l'œuvre  originale  et  non  de  conférer  un  droit  exclusif 
de  traduction  au  premier  traducteur  d'une  œuvre  quelconque, 
écrite  eu  langue  morte  ou  vivante. 

(I)  Le  Sjndieat  des  sociétés  littérairat  et  irtistiques  pour  la  protection 
de  la  propriété  Intel lectaelie  a  vivement  protesté  contre  cette  disposi- 
tion et  demandé  à  U  commission  de  la  Chambre  des  députés  qu'on  n'ap. 
prouvAt  ancune  Coavenlion  qui  ne  contiendrait  pas  le  principe,  posé 
par  la  Convention  d'Union  de  Berne,  de  l'accumpliaseraenl  des  formalités 
seulement  dans  le  pays  d'origine.  Le  gouvernement  répondit  qu'on 
n'avait  pu  obtenir  diplomatique  ment  davantage  du  Guatemala,  qu'il 
fallait  ae  contenter  momentanâmeol  de  la  protection  accordée  sous  ces 
conditions  et  qu'on  s'efforcerait  d'améliorer  la  situation,  notamment  en 
obtenant  que  le  dépât  put  s'effectuer  h  la  légation  du  Guatemala  i  Paris, 
(voir  rapport  de  H.  Vallé  à  la  Chambre  des  députés  et  rapfiort  de  H.  Ha- 
mel  aa  Sénat).  Cest  ce  qui  a  été  obtenu,  ainsi  qu'il  résulte  d'une  lettre 
adressa  le  16  mai  1899  par  le  Ministre  des  affaires  étrangËres  au  pré- 
BÏdeot  da  Syndicat  pour  la  protection  de  la  propriété  iatelleciDelle 
(Droit  d'aultur,  1889,  p.  S3). 


—  338  — 

Art.  5.  —  Les  nationaux  de  Tun  des  deux  pays,  auteurs  d'œa- 
très  originales,  auront  le  droit  de  s*opposer  à  ta  publication  dans 
Tautre  pays  de  toute  traduction  de  ces  œuvres  non  autorisée  par 
eux-mêmes,  et  cela,  pendant  toute  la  durée  Âe  la  période  de 
temps  qui  leur  est  concédée  pour  la  jouissance  du  droit  de  pro- 
priété littéraire  ou  scientifique  sur  l'œuvre  originale  ;  c'est-à-dire 
que  la  publication  d'une  traduction  non  autorisée  est  assimilée, 
sous  tous  les  rapports,  à  la  réimpression  illicite  de  l'œuvre. 

Les  auteurs  d'œuvres  dramatiques  jouiront  réciproquement 
des  mêmes  droits  en  ce  qui  concerne  la  traduction  ou  la  repré- 
sentation des  traductions  de  leurs  œuvres. 

Art.  6.  —  Sont  également  interdites  les  appropriations  indirec- 
tes non  autorisées,  telles  que  les  adaptations,  les  imitations  dites 
de  bonne  foi,  les  emprunts,  les  transcriptions  d'œuvres  musicales 
et  en  général  tout  usage  d'œuvres  qui  se  fait  par  la  voie  de  l'im- 
pression ou  sur  la  scène  sans  le  consentement  de  l'auteur. 

Art.  7.  —  Sera,  néanmoins,  licite,  réciproquement,  la  publi- 
cation dans  chacun  des  deux  pays  d'extraits  ou  de  fragments 
entiers  accompagnés  de  notes  explicatives  des  œuvres  d'un  auteur 
de  l'autre  pays,  soit  en  langue  originale,  soit  en  traduction, 
pourvu  que  l'on  indique  la  provenance  et  qu'ils  soient  destinés 
à  l'enseignement  ou  à  l'étude. 

Art.  8.  — Les  écrits  insérés  dans  les  publications  périodiques, 
dont  les  droits  n'auront  pas  été  expressément  réservés,  pourront 
être  reproduits  par  toutes  autres  publications  du  même  genre, 
mais  à  condition  que  Ton  indique  l'original  sur  lequel  ils  sont 
copiés. 

Art.  9.  —  Les  mandataires  légaux  ou  représentants  des  auteurs, 
compositeurs  et  artistes,  jouiront  réciproquement  et  sous  tous 
les  rapports  des  mêmes  droits  que  ceux  que  la  présente  Con- 
vention concède  aux  auteurs,  traducteurs,  compositeurs  et  ar- 
tistes. 

Art.  10.  —  Les  droits  de  propriété  littéraire,  artistique  et  scien- 
tifique reconnus  par  la  présente  Convention  sont  garantis  aux 
auteurs,  traducteurs,  compositeurs  et  artistes  dans  chacun  des 
deux  pays  pendant  toute  la  durée  de  la  protection  que  leur  ac- 
corde la  législation  de  leur  pays  d'origine. 

Art.  11 .  —  Après  l'accomplissement  des  formalités  nécessaires 
pour  assurer  dans  les  deux  États  le  droit  de  propriété  sur  une 
œuvre  littéraire,  scientifique  ou  artistique  déterminée,  il  sera 
interdit  de  l'introduire,  de  la  vendre  ou  de  l'exposer  dans  chaque 
pays  respectivement,  sans  la  permission  des  auteurs,  éditeurs  ou 
propriétaires. 

Art.  12.  —  Toute  édition  ou  reproduction  d'une  œuvre  scien- 
tifique, littéraire  ou  artistique,  faite  sans  qu'on  se  soit  conformé 


D,  et  que  le  négociant  français  ne  sera  pas  déchu  de 
loe  ses  produit*  auront  cessé  d'être  fondas  an  Meii> 
rëcîsêroeiit  par  suite  des  contrefaçons  dont  il  aura  ea 


lepât 

M  négociants  frant^ais,  Boucieui  de  faire  protiger  lenrs 
Eiique,  devront  avoir  le  soin  de  les  y  faire  promple- 
'j  expédier  leurs  articles  et  de  s'assarer  qne  ces  arti- 

en  vente  de  façon  continue. 

noter  que  la  marque  ne  pourra  être  déposée  an  Meii 
l'a  ét^  préalablement  e[  régulièrement  en  France, 
alinéa  de  l'article  3  prévoit  que  la  marque  ponrra,  en 
ilsrdite  si  elle  est,  par  sa  nature,  contraire  à  la  morale, 

ou  aui  bonnes  mœurs.  C'est  une  restriction  qui  s'im- 
I  saurait  critiquer  si  on  n'entend  par  contraires  i  l'or- 
les  marques  qui  porteraient  atteinte  à  l'Etat  ou  senienl 
ubier  la  paii  publique. 


s  de  c 
uellemcnt  aucune  législation  spéciale  sur  ces  malièrei. 

t  Dessins  al  modèles  de  fabrique. 
t  modèles  de  fabrique  auront  an  Meiiqne  nne  protec- 
>lemenl  large  et  facile,  plus  étendue  que  dans    aucun 

effet,  pai'  une  disposition  singulière,  c'est  la  loi  sut 
I  s'appliquera  aux  dessins  et  modèles.  Il   en  résullen 

français  pourra  déposer  au  Mexique  le  dessin  ou  mo- 
le premier  e]tploité  et  déposa  régulièrement  en  France. 
I  moilËle  sera  protégé  indéSniment  dan»  les  mêmes 
ae  marque. 

€  Noms  des  localités  tt  régions. 
vention,  par  les  articles  5  à  9,  assure  la  protection  ao 
ims  de  localités  et  de  régions  françaises  et,  d'nne  façon 
ncérité  des  indications  de  provenance  française.  Ce< 
)l  d'autant  plus  utiles  qu'un  décret  du  S  février  18% 
larerux  étrangère  donnée  à  des  produits  mexicains  el 
1  circulation  dans  le  rayon  des  douanes  et  sur  les  biti- 
age. 

de  l'Arrangement  de  Madrid  de  1891,  concernani  la 
fausses  indications  de  provenance  sur  les  marchandi- 
nt  auquel  ont  adhéré  le  Brésil,  l'Espagne,  la  France, 
agiie.  le  Portugal,  la  Suisse  el  la  Tunisie,  qui  a  été 
Convention  franco-meiicaine. ..  > 
ement  français,  par  l'intermédiaire  de  Bon  ministre  à 
é  aupris  du  gouvernement  meiicain  contre  une  dé- 
r  suprême  du  Mexique  qui,  dans  une  li  '  "'  ' 


344 


Art.  6.  —  Tout  produit  portant  une  fausse  indication  de  pro- 
tenance,  dans  laquelle  un  des  Etats  contractants  ou  un  lien  situé 
dans  Fun  d'entre  eux  serait  directement  ou  indirectement  indiqué 
comme  pays  ou  comme  lieu  d'origine,  sera  saisi  à  l'importation 
dans  chacun  desdits  Etats. 

La  saisie  pourra  aussi  s'effectuer  dans  l'Etat  où  la  fausse  indi- 
cation de  provenance  aura  été  apposée  ou  dans  celui  où  aura  été 
introduit  le  produit  muni  de  cette  fausse  indication. 

Si  la  législation  de  Tun  des  deux  Etats  n'admet  pas  la  saisie 
à  l'importation,  cette  saisie  sera  remplacée  par  la  prohibition 
d'importation.  Si  la  législation  de  l'un  des  deux  Etats  n*admet 
ni  la  prohibition  à  l'importation,  nila  saisie  à  Timportation  ou 
à  l'intérieur,  cette  prohibition  ou  cette  saisie  sera  remplacée  par 
les  actions  et  moyens  que  les  lois  de  cet  Etat  assurent  ou  assu- 
reront au  ministère  public  ou  aux  nationaux  en  pareil  cas. 

Art.  7.  —  L'application  des  dispositions  contenues  aux  articles 
3,  5  et  6  aura  lieu  à  la  requête  soit  du  ministère  public,  soit  d'une 
partie  intéressée,  individu  ou  société,  conformément  à  législation 
de  chaque  Etat. 

Sera  réputé  partie  intéressée  tout  fabricant,  commerçant  ou 
producteur,  engagé  dans  la  fabrication,  le  commerce  ou  la  pro- 
duction du  produit  et  établi  dans  la  ville,  la  localité,  la  région 
ou  le  pays  faussement  indiqué  comme  lieu  de  provenance  ; 

Les  autorités  ne  seront  pas  tenues  d'effectuer  la  saisie  en  cas  de 
transit. 

Art.  8.  —  Les  présentes  dispositions  ne  font  pas  obstacle  à  ce 
que  le  vendeur  indique  son  nom  et  son  adresse  sur  les  produits 
provenant  d'un  pays  différent  de  celui  de  la  vente  ;  mais,  dans 
ce  cas,  l'adresse  ou  le  nom  doit  être  accompagné  de  l'indication 
précise  et  en  caractères  apparents  du  pays  ou  du  lieu  de  fabri* 
cation  ou  de  production. 

Art.  9.  —  Les  tribunaux  de  chaque  pays  auront  à  décider 
quelles  sont  les  appellations  qui,  à  raison  de  leur  caractère  gé- 
nérique, échappent  aux  dispositions  de  la  présente  Convention. 
Les  appellations  régionales  de  provenance  des  produits  vinicoles 
ne  sont  pas,  cependant,  comprises  dans  la  réserve  édictée  par 
cet  article. 

Art.  10.  —  La  présente  convention  sera  ratifiée  et  les  ratifi- 
cations en  seront  échangées  aussitôt  après  l'accomplissement 
des  formalités  prescrites  par  les  lois  constitutionnelles  des  Etats 
contractants. 

Elle  sera  exécutoire  à  partir  du  jour  dudit  échange  (1)  et  elle 
demeurera  obligatoire  jusqu'à  ce  que  l'une  des  deux*parties  con- 

(1)  L'échange  des  ratifications  a  eu  lieu  à  Mexico  le  11  septembre  1900. 


se,  autorisépar  une  loi  du  30  juillet  1891  (J.o/f.AO  aoûl)(l), 
a  rendu,  le  17  août  1897  {Joum.  off:,  21  août  ;  le  Droit  d'au- 
teiir,  septembre  1897,  p.  97)  un  décret  déclarant  que  »  cette 
ion  produira  son  plein  et  entier  effet  dans  les 
t  de  la  France  et  de  la  République  Argentine  qui 
:te  de  l'adhésion  de  la  France  (2).  Le  gouverne- 
1  Paraguay  ayant  donné  son  acceptation  le  7  avril 
président  dé  la  République  française  a  rendu  le 
1900  (/.  off.,  27  mai)  un  décret  déclarant  en  vi- 
»  Convention  de  Uontévidéo  dans  les  rapports 
Paraguay  (3). 

le  texte  du  traité  de  Montevideo, 
premier,  —  T^es  États  signataires  s'engagent  à  recon- 
à  protéger  les  droits  de  la  propriété  littéraire  et  sriis- 
Q  formé  ment  aux  stipulations  du  présent  traité. 

—  L'auteur  de  toute  œuvre  littéraire  ou  artistique  et  ses 
roit  jouiront  dans  les  États  signataires,  des  droits  que 

rde  la  loi  du  pays  où  a  eu  lieu  ta  première  publication 
ction  de  l'œuvre. 

—  Le  droit  de  propriété  d'une  oeuvre  littéraire  ou  artia- 
iprend  la  facalté  pour  l'auteur  d'en  disposer,  de  la  pa- 
l'aliéner,  de  la  traduire  ou  d'autoriser  sa  traduction  et 
roduire  de  toutes  manières. 

—  Aucun  État  ne  sera  obligé  de  reconnaître  le  droit  de 
littéraire  ou  artistique  pendant  un  laps  de  temps  plus 
celui  qui  est  accordé  aux  auteurs  jouissant  de  ce  droit 
iropre  territoire.  Ce  laps  de  temps  pourra  être  limitée 
est  établi  dans  le  pays  d'origine,  si  ce  dernier  est  d'une 
lindre. 

abre,   eip.  mol.,  doc.  1897,  p.  1191  ;  rapport,  p.  1417  ;  adop- 

in  iWn.  Sénat,  eip.  mot.,  doc.  1897,  p.  509;  rapport,  p.  5SS, 
tSjDUIetl897. 

la  législatton  de  la  République  Argentine,  voir  dans  U 
tteur,  1897,  p.  100,  analyte  d'un  travaU  de  M.  Carloi  Baires 
application  pratique  de  la  Convention  de  Monléridéo  dans  ce 
-oit  d'auteur,  1901 .  3.  —  Un  jugement  argentin  du  10  seplem- 
ient  d'accorder  des  doramages-intérétt  contre  les  conlrefac- 
essionnaire  légitime  d'on  roman  de  Zola,  bien  qne  l'article  17 
ililution  argentine  pose  simplement  le  principe  qne  ■  tont  an- 
venteur  est  propriétaire  exclusif  de  son   (Boïre,  de  son  inven- 

sa  découverte  pendant  le  délai  qne  la  loi  lai  accorde  ■,  tait- 
loi  annoncée  n'est  pas  encore  faits  (Cf.  Irib.  féd.  argentio, 
9,  le  Droit  d'auteur,  1899.  p.  119). 

les  dispositions  en  vigueur  au  Paraguay  sur  le  droit  d'auteur, 
roU  d'auteur,  1300.  6  et  11.  Le  Paraguay  a  également  accepté 

de  l'Espagne  et  de  l'ilalie  iUroit  d'auteur,  1900, 113  et  149) 


—  349  — 

Art.  5.  ^  Par  Texpression  œuwre$  littéraires  et  artistiques,  on 
entend  les  livres,  les  brochures  et  toas  autres  écrits,  les  oBuvres 
dramatiques  ou  dramatico-mnsicales,  les  œuvres  chorégraphi- 
ques, les  compositions  musicales  avec  on  sans  paroles,  les  des- 
sins, les  peintures,  les  sculptures,  les  gravures,  les  œuvres  pho- 
tographiques, les  lithographies,  les  cartes  géographiques,  croquis 
et  travaux  plastiques  relatifs  à  la  géographie,  à  la  topographie, 
à  l'architecture  on  aux  sciences  en  général  ;  enfin  cette  expression 
s'applique  à  toute  production  du  domaine  littéraire  ou  artistique 
qui  peut  être  publiée  d'une  manière  quelconque  par  voie  d'im- 
pression ou  de  reproduction. 

Art.  6.  —  Les  traducteurs  d*œuvres  pour  lesquelles  n'existe 
pas  ou  est  éteint  le  droit  de  propriété  littéraire  garanti  jouiront, 
pour  leurs  traductions,  des  droits  établis  par  Tarticle  3,  mais  ils 
ne  pourront  empêcher  la  publication  d'autres  traductions  de  la 
même  œuvre. 

Art.  7.  —  Les  articles  de  journaux  pourront  être  reproduits, 
en  indiquant  la  source  où  on  les  prend,  à  l'exception  des  articles 
consacrés  aux  sciences  et  aux  arts  et  dont  la  reproduction  aura 
été  interdite  expressément  par  leurs  auteurs. 

Art.  8.  ^  Peuvent  être  publiés  dans  la  presse  périodique,  sans 
nécessité  d'autorisation  aucune,  les  discours  prononcés  ou  lus 
dans  les  assemblées  délibérantes,  devant  les  tribunaux  judiciai- 
res ou  dans  les  réunions  publiques. 

Art.  9.  —  Sont  considérées  comme  reproductions  illicites  les 
appropriations  indirectes  non  autorisées  d'une  œuvre  littéraire  ou 
artistique  désignées  sous  des  noms  divers  tels  que  <c  adaptations, 
arrangements,  etc.  »,  et  qui  ne  sont  en  réalité  que  des  reproduc- 
tions de  cette  œuvre  ne  présentant  pas  le  caractère  d'une  œuvre 
originale. 

Art.  10.  —  Les  droits  d'auteur  seront  reconnus,  jusqu'à  preuve 
contraire,  en  faveur  des  personnes  dont  les  noms  ou  les  pseudo- 
nymes seront  indiqués  sur  l'œuvre  littéraire  ou  artistique. 

Si  les  auteurs  ne  veulent  pas  faire  connaître  leur  nom,  ils  de- 
vront désigner  les  éditeurs  auxquels  les  droits  d'auteur  seront 
attribués. 

Art.  il.  —  Les  responsabilités  encourues  par  ceux  qui  usur- 
pent le  droit  de  propriété  littéraire  ou  artistique,  seront  établies 
devant  les  tribunaux  et  régies  par  les  lois  du  pays  où  la  fraude 
anra  été  commise. 

Art.  12.  —  La  reconnaissance  du  droit  de  propriété  des  œuvres 
littéraires  ou  artistiques  n'empêche  pas  les  États  signataires  d'in- 
terdire, conformément  à  leur  législation,  qu'on  reproduise,  pu- 
blie, fasse  circuler,  représente  ou  expose  les  œuvres  considérées 
comme  contraires  à  la  morale  et  aux  bonnes  mœurs. 


■  V  *  ».• 


-  350  — 

Art.  13.  —  Il  n'est  pas  indispensable,  pour  que  ce  traité  soit 
mis  en  vigueur,  qu'il  soit  ratifié  simultanément  par  ton?  les 
États  signataires.  Ceux  qui  Tapprouvent  le,  feront  savoir  aux 
gouvernements  des  Républiques  Argentine  et  Orientale  de  l'U- 
ruguay qui  en  informeront  les  autres  parties  contractantes.  Cette 
procédure  tiendra  lien  d'échange  de  ratification. 

Art.  14.  —  L'échange  une  fois  effectué  dans  la  forme  indiquée 
par  l'article  précédent,  le  présent  traité  demeurera  en  vigueur  à 
partir  de  l'accomplissement  de  cette  formalité  pendant  un  temps 
illimité. 

Art.  15.  —  Si  l'un  des  Etats  signataires  jugeait  à  propos  de 
dénoncer  le  traité  ou  d'y  introduire  des  modifications,  il  en  avi- 
serait les  autres;  mais  la  dénonciation  ne  produira  ses  effets 
que  deux  ans  après  l'acte  de  dénonciation,  délai  pendant  lequel 
on  pourra  conclure  un  nouvel  accord. 

Art.  16.  —  L'article  13  s'applique  aux  Etats  qui,  n'ayant  pas 
participé  à  ce  Congrès,  voudraient  adhérer  au  présent  traité. 


Art.  4150. 

CJonventions  internAttonalea.  —  C^n^ventlon  de 
Berne.  —  Prc^rlété  littéraire  et  arttetlcfne.  —  Con- 
férenee  de  révision  à  Parte  en  1806. 

Actes  de  la  Conférence  de  Paris,  du  4  maf  1896. 

L'accord  entre  les  plénipotentiaires  présents  s*étantfaiU 
sauf  avec  la  Norvège  pour  les  modifications  à  apporler 
au  texte  et  avec  la  Grande-Bretagne  pour  l'interprétation 
du  texte  en  vigueur,  il  a  fallu  signer  séparément  un  acte 
additionnel  et  une  déclaration  interprétative.  Ces  deux 
instruments  ont  été  promulgués  en  France  par  décret  du 
29  septembre  1897  (1)  {J,  off.,  20  octobre).  Ils  sont  ainsi 
conçus  (2) : 

(1)  Loi  approbative  du  15  avril  1897,  J.  o/f.,  18  avril  (Chambre,  exp. 
mot.,  doc.  1897,  p.  307  ;  rapport  de  M.  VaUé,  p.  921  ;  adoption»  8  awil 
1897.  Sénat,  rapport  de  M.  Thézard,  doc.  1897,  p.  415;  adoption 
9  avril  1897). 

L'acte  additionnel  et  la  déclaration  interprétative  ont  été  ratifiés  par 
tous  les  signataires.  L'échange  des  ratificaUons  a  eu  lieu  le  9  septembre 
1897  (le  Droit  d'auteur,  octobre  1897,  p.  109)  :  la  déclaration  interpré- 
tative est  entrée  en  vigueur,  de  même  que  Tacte  additionnel,  le  9  dé- 
cembre . 

On   trouvera  dans  le  Droit  (Tautnur^  année  1898,  les  mesures  prises 


ces  œuvrei,  de  la  protection  accordée  par  U 
!  présent  acte  additionnel  (1).  n 
Art.  a.  Le  premier  alinéa  de  l'arl 

auteurs  ressortiassant  à  l'uD  des  pa] 
cause,  jouissent,  dans  les  autres  p 
:  oa  d'autoriser  la  traduction  de! 
durée  du  droit  sur  l'œuvre  origini 
de  traduction  cessera  d^exister  lorsi 
usage  dans  un  délai  de  dix  ans  à  pai 
I  de  Cœuvre  originale,  en  publiant  ( 
des  pays  de  l'Union,  une  Iraducliû 
la  protection  sera  réclamée.  » 
■  Art.  7.  L'article  7  aura  la  teneur 
romans- feuilletons,  y  comprà  les  i 
naux  ou  recueils  périodiques  d'un  c 
t  être  reproduits,  en  original  ou  e 
ays,  sans  l'autotisation  des  auteurs  c 
sera  de  même  pour  les  autres  articles 
iriadiques,  lorsque  les  auteurs  ou  éd 
îclaré,  dans  le  journal  ou  le  recueil 
aitre,  qu'ils  en  interdisent  la  reprodu 
que  rinlerdiclion  soit  faite  d'une  m 
ue  numéro.» 

lèfaut  d'interdiction,  la  reproducti 
)n  d'indiquer  la  source.  » 
aucun  cas,  l'interdiction  ne  ponrr 
discussion  politique,  aui  nouvelle 

Art.  12.  L'article  12  aara  la  teneni 
ite  œuvre  contrefaite  peut  être  saisi 
'  des  pays  de  PVnion  où  l'œuvre  ori^ 

légale. 

saisie  a  lieu  conformément  à  la  lé 

pays.  » 

-  Art.  20.  Le  deuxième  alinéa  i 
suivante  : 

leune  mesure  transilojre  n'ayaul  été  ) 
;  traduction  des  œuvres  publiées  avan 
Iditionnel,  des  difflcullès  peuvent  le  { 
aent  examinées  par  M .  Amar  dans  le  1 
onr  les  droits  acquis  pir  les  publicate 
Qcien  régime  voir,  au  point  de  vue  ita 
udiciaire  de  U  Soeielà  ilaliana  degli 
c.  1900,  p.  106. 


produclion  de  cette  ceuvre  même,  et  dans  les  limites  des  conven- 
tions privées  entre  les  ayants  droit. 

II.  —  ffuméro  4.  Ce  numéro  aura  la  teneur  suivante  : 

»  i.  L'accord  comman  prévu  à  l'article  64  de  la  Convention  est 
déterminé  ainsi  qu'il  suit  : 

n  L'application  da  la  Convention  de  Berne  et  dn  prisent  Acte 
Additionnel  aux  œuvres  non  tombées  dans  le  domaine  public 
(fans  Uvr  pays  d'origine  au  moment  de  la  mise  en  vigueur  dt  cet 
Ktis,  aura  lieu  suivant  les  stipulations  j  relatives  contennes 
dans  les  Conventions  spéciales  existantes  on  à  conclure  h  cet 
effet. 

"  A  défaut  de  semblables  stipulations  entre  pays  de  l'Union, 
les  pays  respectifs  régleront,  chacun  pour  ce  qui  le  concerne, 
pîir  la  législation  intérieure,  les  modalités  relatives  h  l'applica- 
tion du  principe  contenu  dans  l'article  14. 

«  les  stipulations  de  l'article  14  de  fa  Convention  de  Berne  et  dv 
pTiient  numéro  du  Protocole  de  clôture  s'appliquent  également  au 
liroit  exclusif  de  traduction,  tel  qu'il  est  assuré  par  le  prisent  Acte 
aWiliomiei. 

let  dispositions  transitoires  menlionnée'  ei-dessus  sont  apptiea-  ' 
iiies  en  cas  de  nouvelles  accessions  à  l'Union.  » 

Art,  3.  —Les  pays  de  l'Union  ijui  n'ont  point  participé  au  pré- 
sent Acte  additionnel  seront  admis  k  y  accéder  en  tout  temps 


X 


*.î 


—  354  — 


'0  sur  leur  demande.  Il  en  sera  de  même  pour  les  pays  qui  accéde- 

ront ultérieurement  à  la  Convention  du  9  septembre  1886.  Il  suf- 
fira,  à  cet  effet,  d'une  notification  adressée  par  écrit  au  Conseil 
fédéral  suisse,  qui  notifiera  à  son  tour  cette  accession  aux  autres 
gouvernements. 

Art.  4.  —  Le  présent  Acte  additionnel  aura  même  valeur  et 
durée  que  la  Convention  du  9  septembre  1886.  ' 

Il  sera  ratifié  et  les  ratifications  en  seront  échangées  à  Paris 
dans  la  forme  adoptée  pour  cette  Convention,  aussitôt  que  faire 
se  pourra,  et  au  plus  tard  dans  le  délai  d'une  année. 

Il  entrera  en  vigueur,  trois  mois  après  cet  échange,  entre  les 
pays  qui  l'auront  ratifié.    ' 

DÉCLARATION 
du    4    mai    1896, 

Interprétant  certaines  propositions  de  la  Convention  de  Berne 
du  9  septembre  1886  et  de  l'acte  additionnel  signé  à  Paris  le  4 
mai  1896  : 

Les  plénipolentiaires  soussignés  de  l'Allemagne,  de  la 
Belgique,  de  l'Espagne,  de  la  France,  de  l'Italie,  da 
Luxembourg,  de  Monaco,  du  Monténégro,  de  la  Norvège, 
de  la  Suisse  et  de  la  Tunisie  (1),  dûment  autorisés  à  cet 
effet  par  leurs  gouvernements  respectifs,  sont  convenus 
de  ce  qui  suit,  en  ce  qui  concerne  l'interprétation  de  la 
Convention  de  Berne  du  9  septembre  1886  et  de  l'acte  ad- 
ditionnel de  ce  jour  : 

1*^  Aux  termes  de  l'article  2,  alinéa  2,  de  la  Convention, 
la  protection  assurée  par  les  actes  précités  dépend  unique- 
ment de  l'accomplissement,  dans  le  p^ays  d'origine  de 
l'œuvre,  des  conditions  et  formalités  qui  peuvent  être  pres- 
crites par  la  législation  de  ce  pays.  Il  en  sera  de  même  pour 
la  protection  des  œuvres  photographiques  mentionnées 
dans  le  n®  1,  lettre  B,  du  protocole  de  clôture  modifié. 

2*»  Par  œuvres  publiées^  il  faut  entendre  les  œuvres  idi- 
tées  dans  un  des  pays  de  l'Union.  En  conséquence,  la  re- 
présentation d'une  œuvre  dramatique  ou  dramatico-musi- 
cale,  l'exécution  d'une  œuvre  musicale,  l'exposition  d'une 
œuvre  d'art,  ne  constituent  pas  une  publication  dans  le 
sens  des  actes  précités. 

(1)  La  République  de  Haïti  a  adhéré  à  la  déclaration  comme  à  l'acte 
additionnel  (voir  suprà,  p.  851,  note  3). 


':  *  ■^'"»*e»>« 


—  356  - 

t 

privé  se  rapportant  à  la  procédure  civile  (1)  a  été  conclue 
à  La  Haye,  le  14  novembre  1896,  entre  la  France,  la  Bel- 
gique, TEspagne,  Tltalie,  le  Luxembourg,  les  Pays-Bas, 
le  Portugal,  la  Suisse.  A  cette  Convention  ont  adhéré  pos- 
térieurement TAllemagne,  TAutriche-Hongrie,  le  Dane- 
mark, la  Roumanie,  la  Russie,  la  Suède  et  la  Norvège. 
Un  protocole  additionnel  à  la  dite  Convention  a  été  signé 
à  La  Haye  le  23  mai  1897  {i). 

Nous  nous  bornerons  à  extraire  ce  qui  a  trait  à  la 
suppression  de  la  caution  judicatum  solviy  qui  jusqu'ici 
constituait  pour  le  demandeur  étranger  une  entrave  sé- 
rieuse à  Texercice  de  ses  droits  (3). 

Convention  du  14  novembre  1896. 

Caution  »  judicatum  solvi  » . 

Art.  11  —  Aucune  caution  ni  dépôt,  sons  quelque  dénomination 
que  ce  soit  (4),  ne  pent  être  imposé,  à  raison  soit  de  leur  qualité 

tious  nationales  afin  de  réprimer  rusurpation  des  noms,  signatures  oa 
signes  des  auteurs  en  matière  d'œavres  littéraires  et  artistiques . 

V.  —  Que  des  délibérations  de  la  prochaine  Conférence  sorte  un 
texte  unique  de  GonTention, 

(1)  Elle  traite  :  1*  de  la  communication  des  actes  judiciaires  et  eitra- 
judiciaires  ;  2*  des  commissions  rogatoires  ;  3<>  de  la  caution  judicatum 
solvi  ;  ifi  de  Tassistance  judiciaire  gratuite  ;  5*  de  la  contrainte  par  corpi 
(voir  le  texte  complet,  Ann.  lég,  française^  Soc.  lég,  contp.4900,p.l09). 

(2)  La  convention  et  le  protocole  ont  été  approuvés  par  une  loi  du 
4  février  1899  {Joum .  o/f.  du  7)  qu'a  modifiée  une  loi  du  31  mars  1889 
(Journ.  off,  du  9),  la  première  ayant  omis  de  mentionner  certaines  ad- 

•  hésions  (Chambre,  exp.  mot.,  doc.  1898,  p.  1355  ;  rapport,  doc.  1896, 
sess.  extraordinaire,  p.  ^9  ;  adoption,  8  décembre  1896.  Sénat  :  exp. 
mot.,  doc.  1898,  p.  625;  rapport,  doc.  1899,  p.  57;  adoption,  91  Janvier 
1899). 

L'échange  des  ratifications  a  eu  lieu  à  La  Haye  le  29  avril  1899.  La 
convention  a  été  promulguée  en  France  le  16  mai  1899  {^ioum.  off» 
du  19). 

(3)  Une  Convention  avait  été  signée  entre  la  France  et  la  Russie  les 
15-27  juillet  i896.aux  termes  de  laquelle  «  il  ne  sera  exigé  des  scgets  rus- 
ses, qui  auraient  à  poursuivre  une  action  en  France  ou  dans  les  colo- 
nies françaises  comme  demandeurs  principaux  ou  intervenants,  aucuns 
droit,  caution  ou  dépôt  auxquels  ne  seraient  pas  soumis  les  Français 
conformément  aux  lois  françaises,  et  réciproquement.»  Otte  conTention 
a  été  promulguée  en  France  le  12  avril  1899,  /.  off.  du  14.  (Loi  du 
31  mars  1899,  J.  o/f.  2  avril.  Chambre  :  exp.  mot.,  doc.  1898,  p.  1355; 
rap.,  doc.  1899,  p.  221  ;  adoption,  8  février  1899.  Sénat  :  exp,  mot.,doc. 
1899,  p.  82  ;  rap.,  p.  107  ;  adoption,  23  mars  1899).  Elle  n'est  pas  abro- 
gée par  la  Convention  de  La  Haye,  elle  se  concilie  avec  elle  (V.  Ann,  Ug. 
fr..  Soc.  lég,  comp.,  1900,  p.  97). 

(4)  Ces  termes  si  généraux  semblent  nécessairement  s'appliqaer  au 


aatlonntiiiADl  que  l'trticle  47  de  la  loi  du  5  joUlet  1SU  eifge  de  l'é- 
triDger  qai  requiert  le  eaiiie  poar  CDiiatater  la  MnlTefecoD.  Le  juge 
ponm  toDJODre,  en  intoriunt  li  aiisie,  imposer  un  cautlonuemeut, 
eoiDDie  il  peut  le  faire  même  quand  le  brerelA  est  [rtncais.  maie  il  ne 
>era  ploi  obligé,  i  peine  de  nullité, d'imposer  ce  cautionnement  aux  bé- 
DiScùîreede  la  Canveolion  de  la  Haye  comme  aux  autres  élransera. 

(t)  I4  question  de  la  caution  judicaliim  tolvi  était  restée  en  dehors 
des  disposiliont  de  la  Convention  d  Union  de  Pans  ,du  10  mars  ISHS.L'ar- 
■icle  %  de  cette  Convention,  tout  en  spëciBant  que  les  étrangère  unionis- 
tci  devaient  avoir  la  même  protection  que  les  nationaux,  ne  les  dispen- 
ttit  pas  de  fournir  caution;  cela  résullsit  formellement  du  n*  b  du  proto- 
coledeclâture  où  il  estapéciliéque  l'article  2  ne porteaucune  atleinieàla 
tégislation  de  chaque  Etat  contracIflDi  en  ce  qui  concerne  la  procédure 
iniTie  devant  lea  tribunani  et  la  compétence.  ;Voir  Pouillel,  Brev.  d'inv., 
ti'GBStùet  Unole.) 


—  358  — 


Art.  4152. 

Thé&tre.  —  Contrat  de  flri*lllé.  —  Contrat  de  clnQue. 
—  IndlirlelblUté.  —  Obllffrntlon  Ilelte.  —  Inex^eo- 
tlon.  —  Dommniree  et  Intérêtii. 

Est  licite  et  doit  produire  tous  ses  effets  le  traité  passé 
entre  un  directeur  de  théâtre  et  un  marchand  de  billets, 
chef  de  claque^  par  lequel  le  directeur  a,  moyennant  une 
somme  payée  d'avance^  mis  à  la  disposition  de  cet  individu 
un  certain  nombre  de  fauteuils  et  des  places  de  troisième 
galerie,  spécialement  affectées  au  service  de  claque  :  un  tel 
contrat  ne  saurait  être  divisé  en  un  contrat  de  griffe  pour 
les  fauteuils  et  un  contrat  de  claque  pour  les  places  de  troi- 
siéme  galerie^  mais  constitue  un  tout  indivisible  formant 
un  contât  de  claque  (1). 

Par  suite,  lorsque  ce  traité  a  été  signé  pour  un  nombre 
déterminé  de  représentations  et  que  le  directeur  de  théâtre 
vient  à  cesser  son  exploitation  avant  d'avoir  donné  le  nom- 
bre de  représentation  déterminés,  ce  directeur  doit  être  con- 
damné à  rembourser  au  marchand  de  billets,  chef  de  claque, 
à  titre  de  dommages-intérêts,  la  somme  représentant  la  ré- 
paration du  dommage  qu'il  a  éprouvé  par  la  privation  des 
places  qui  devaient  être  mises  à  sa  disposition  (2). 

(1)  La  jurisprudence  s'était  jusqu'ici  prononcée  en  sens  contraire  ;  elle 
considérait  comme  illicite  la  convention  intervenue  entre  un  directeur 
de  théâtre  et  un  entrepreneur  de  succès,  dans  le  but  d'assurer  au  théâ- 
tre le  service  de  la  claque.  Voir  notamment,  Paris,  8  août  1853.  Strey, 
53.2.499;  Lyon,  25  mars  1873,  Sirey,  73.2.179.  Comp.  Lacan  et  Paul- 
mier,  Législ.  des  théâtres^  t.  2,  p.  119  et  486. 

Un  ari^t  de  la  Cour  de  Paris  du  29  décembre  1866  {Droit  J  janvier  1867) 
avait  décidé  que  le  contrat  de  griffe,  ainsi  désigné  à  raison  de  la  griffe 
spéciale  appcsée  sur  les  billets  vendns  en  bloc,  était  distinct  do 
contrat  de  claque,  qui  seul  devait  être  considéré  comme  illicite. 

(2)  Le  jugement,  conforme  à  la  jurisprudence  HUtérieure,  avait,  en 
raison  du  caractère  illicite  qu'il  reconnaissait  au  contrat,  reChsé  au  mar- 
chand de  billetSfChef  de  claque,  son  droit  de  répéter  les  sommes  versées 
en  exécution  du  contrat.  Cette  question  du  droit  de  répétition  en  ma- 
tière d'obligation  illicite  a  divisé  profondément  la  jurisprudence  :  tandis 
que  la  chambre  des  requêtes  de  la  Cour  de  cassation  et  un  grand  nom- 
bre de  Cours  d'appel  repoussent  l'action  en  réparation,  la  chambre  civile 
et  d'autres  Cours  admettent  sa  recevabilité. 

Pour  la  non-recevabilité,  voir  :  Cass.  req.,  4  juillet  1892,  Sirey,  92. 
1.513;  Cass.  req.,  1"  avril  4895,  Sirey,  96.1.299  et  la.  note  ;  Nancy, 
2  janvier  1893.  Sirey,  94.2.206  ;  Riom,  30  nov.  1893,  Sirey,  94.2.302. 

Pour  la  recevabilité  :  Cass.  civ.,  11  fév.  1884,  Sirey,  84.1.265;  Cass. 
civ.,  13  juillet  1885,   Sirey,  86.1.205  ;  25  janv.  1887,  Sirey,  87.1.224  ; 


QD  bat  indivisible  et  qu'il  s'agit  d'un  contrat  de  claque  ; 

Considérant  qae  c'est  k  tort  que  les  premiers  jages  ont  déclaré 
que  te  service  des  claqueurs  est  essentiellement  basé  sur  le  men- 

Caen,  18  janv.  1883,   Sirey,  90,3.97;  BesaD;on,  6  mars  1895.  Siivy, 
95.a.l96,  elc. 


A.  T. 


Le  cessitmnaire  du  droit  de  reproduction  doit  donc  se 
antonner  dans  le  procédé  pour  lequel  il  a  traité  et  publier 
'œuvre  telle  qu'elle  lui  a  été  vendue  :  il  ne  peut  altère 
elle-ci,  la  modifier,  y  faire  des  changements,  sans  porter 
tteinle  aux  droits  de  l'artiste  (1). 

Ainsi  le  cessionnaire  porte  atteinte  aux  droits  de  l'artiite 
n  publiant  les  dessins,  sous  la  signature  de  l'artiste,  tuée 
'es  légendes  et  dialogues  différents  des  légendes  et  dialogvet 
riginaux  (2). 

En  revanche,  l'éditeur  petit  changer  les  dimensions  du 
essin,  si  ce  changement  ne  modifie  pas,  en  réalité,  lecarae- 
)re  de  Vœuvre  ;  il  a,  de  méme,le  choix  du  coloris,  s'il  n'est 
as  établi  que  le  coloris  le  plus  propre  à  faire  ressortir  Ib 
essin  fût  compris  dans  la  cession  (3). 
rrib.civ.S«ine,16  décembre  1899,—  Agnès,dît  A..Sorel  c.Faj«rd  frèrw.) 

Jugé  en  ces  termes  : 

Le  Tridun&l,  Attendu  qa'Agnès  collabore  &  lies  jonruanx 
lustrés,  notamioent  à  U  Caricature,  sous  le  pseudonyme  de 
L.  Sorel,  en  y  publiant  habituellement  des  silhouettes  en  noir 
iir  fond  de  couleur,  accompagnées  de  légendes  et  de  dialogues  ; 
ue  ces  œuvres,  dont  l'originalité  n'est  pas  contestée,  peuvent 


il)  a.  Pouillet,  Prop.liti.,  n"  323  et  s.  ;  Couhio.Prop.  ind.art.  »t  UU., 

2,  p.  535  et  s. 

Voir  :  pour  une  scalptare.trib.  dv. Seine,  29  octobre  i891,du  Passafre. 
nn.,  95.2.32  :  pour  une  série  de  dessins, irib.  civ.  Seine,  7  «vril  189t, 
oëa,  .4nn.,94,1fô.  Jugé  encore  que  l'éditeur  qui  a  acquis  le  droit  de 
iproduire  un  tableau  i  ne  saurait  modifler  la  composition  de  l'autear 
;  changer  les  propopllons  par  la  suppression  d'une  parlie  important» 
1  paysage,  formant  le  fond  dudit  tableau  >,  que  ces  ehangemenls  oo- 
rent  une  action,  au  profit  de  l'auteur  ;  qn'en  effet  il  saFlil  qu'une  i^a- 
re  d'art  soit  modifiée  et  altérée  sans  le  consentement  de  l'auteur  et 
ubliée  BOUS  son  do  m, pour  que  celui-ci  soU  fondé  à  réclamer  (Trib.ci*- 
eine,  1"  ch.,39  d<^cembre   1896,  Besséde,  cilé  par  Couhin,  op.  cit.,  t.S. 

532,  note  837,  chiff.  10), 

Pour  une  œuvre  littéraire  voir  :  trib.  cIv,  Seine,  19  décembre  189*. 
ontégut,,.lnn,, 98.34. 

(2)  Même  solution  a  été  donnée  au  Congrès  des  Associations  de  pn»^ 
Rome  en  189.1  (voir  rappe  rt  Morel-Relz  e1  discussion  dans  le  Bulte- 
n  officiel den  Aisedntinns  de  pre.4s«,n°  4, p.  52,  analysés  dans  le  Droit 
■auteur,  1899,  p.  57),  à  Paris  en  1900  (voir  rapport  Georges  Mailtirdi?/ 
eu  reproduit  dans  le  Droit  tfaufeur.  1900. 100). 

(3)  C'est  sons  prétexte  que  le  caractère  de  Tceuvre  n'était  paa  nodiflé 
ii'ona  même  autorisé  l'édileor  àajoDteràune  gravure  des  remarque' 
«vées  {Irib.  civ.  Seine,  19  juin  1897,  Chanet,  Ann.,  98.33). 


'   aa±  termes  ae la  loi  ao  i»jaiiiei  i  ivi  ; 

Attendu  qu'il  est  admis  par  lea  parties  qu'Agnès  a  Teu<lu,sanfi 
réserte,  les  dessios  faisant  l'objet  du  litige  à  l'éditeur  Stork, 
qui  en  a  Ini-même  transmis  plus  tard  la  propriété  entière  & 
Fayard  frères  ; 

Attendu  que  ceux-ci  ont  publié  dans  la  Jeunesse  amusante 
quelques-unes  des  sillionettes  du  demandeur,  en  modifiant  les 
légendes,  les  dialogues,  les  fonds  de  couleur  et  les  dimensions 
des  dessins  reproduits  dans  la  Caricature  ;  qu'Agnès  se  plaint  de 
ces  modifications,  soutient  qu'elles  portent  atteinte  à  ses  droits 
et  réclame  5.000  francs  de  dommage  s- intérêts  à  Fayard- frères  ; 
En  droit  : 

Attendu  qu'il  a  été  dit,  à  jnsLe  titre,  que  l'artiste  qui  Tend  son 
œuvre  et  reçoit  un  équivalent  du  proflt  qu'elle  eût  pu  lui  pro- 
curer s'il  l'eût  publiée  pour  son  nomple,  n'aliène  pas  l'espérance 
de  réputation  que  peut  lui  assurer  la  publicité,  parce  qu'il  s'agit 
lii  d'une  chose  inaliénable  ;  qu'il  a  donc  le  droit,  même  lorsqu'il 
est  dépouillé  de  sa  propriété  par  une  vente  sans  réserve,  de  se 
défendre  contre  un  fait  qui  consiste  à  lui  imputer  une  œuvre 
différente  delà  sienne  ;  qu'il  s'ensuit  que  le  cessionnaire  du  droit 
de  reproduction  doit  se  cantonner  dans  le  procédé  pour  lequel 
il  a  traité  et  publier  l'œuvre  telle  qu'elle  lui  a  été  vendue  ;  qu'il 
porte  dès  lora  atteinte  aux  droits  de  l'artiste  s'il  se  permet  d'al- 
térer cette  œuvre,  de  la  modifier,  d'y  faire  des  changements,  & 
l'iasu  et  sans  le  consentement  de  ce  dernier  ; 
Ed  fait  : 

Attendu  que  les  légendes  et  les  dialogues  qui  accompafinenl 
les  silhouettes  de  Sorel  s'accouplent  avec  le  dessin  pour  réaliser 
une  idée  comique,  se  complètent  et  forment  avec  lui  une  œuvre 
indivisible;  qu'il  est  manifeste,  en  effet,  que  le  dessin  de  Sorel, 
sans  sa  légende  ou  son  dialogue,  perd  singulièrement  son  in- 
térêt et  ne  répond  plus  au  but  poursuivi  ; 

Attendu,  en  conséquence  que  Fayard  frères,  en  changeant  les 
légendeset  les  dialogues  des  dessins  de  Sorel  et  en  les  publiant 
ainsi  modifiées,  avec  la  signature  de  celui-ci,  dans  la  Jeunesse 
amasanfe,  ont  placé  anus  les  yeui  du  public  des  matières  étran- 
Rères  à  Sorel  et  dénaturé  la  composition  de  son  œuvre  ;  que  c'est 
donc  à  bon  droit  qu'il  se  plaint  des  publications  dont  les  défen- 
deurs lui  font  encourir,  malgré  lui,  la  responsabilité  ; 

Attendu,  en  ce  qui  concerne  les  changements  apportés  dans 
les  dimensions  des  dessins,  qu'ils  ne  modifient  pas  en  réalité  le 
caractère  de  l'œuvre  ;  que,  d'autre  part,  il  n'est  pas  établi  que 
ït  cnJuris  le  plus  propre  k  faire  ressortir  les  silhouettes  de  Sorel 


—  364  — 

ait  été  également  compris  dans  la  vente  ;  que»  de  ces  deux  chefs, 
les  réclamations  de  Sorel  ne  sont  pas,  dès  lors,  justifiées; 

A  regard  des  dommages-intérêts  : 

Attendu  que  le  demandeur  n^apporte  pas  an  tribunal  la  preuve 
que  de  nombreuses  compositions  aient  été  modifiées  ;  que,  si 
elles  ont  paru  altérées  dans  un  journal  dont  le  tirage  est  impor- 
tant, il  est  constant  que  la  réputation  de  Sorel  n*a  pas  été  at- 
teinte au  point  de  lui  causer  un  très  grave  préjudice  ;  qu*en  ou- 
tre, il  est  équitable  de  retenir  que  Fayard  frères  ne  paraissent 
pas  avoir  agi  de  mauvaise  foi,  en  pensant  peut-être  que,  par 
suite  de  la  cession  des  dessins  en  toute  propriété,  ils  pouvaient 
modifier  à  leur  gré  les  légendes  et  les  dialogues  ;  que,  dans  ces 
conditions,  il  sera  suffisamment  indemnisé  par  rallocation  d'une 
somme  de  500  francs  ; 

Par  ces  motiitb,  Condamne  Fayard  frères  à  payer  à  Agnès^dit 
Sorel, une  somme  de  500  francs  à  titre  de  dommages-intérêts; 

Leur  fait  défense  de  publier  &  l'avenir  les  dessins  de  Sorel 
autrement  qu'avec  les  légendes  et  les  dialogues  originaires  et 
ce,  à  peine  de  10  francs  par  chaque  contravention  constatée  ; 

Déclare  Agnès  mal  fondé  dans  le  surplus  de  sa  demande  ; 

L*en  déboute  ; 

Condamne  Fayard  frères  aux  dépens. 

!'•  Chambre.  —  Présidence  de  M.  Plantkau.  —  M»»  Hon- 
teux et  DE  BiGAULT  pu  6RANRUT,avocats.—  Ministère  public  : 
H.  Drouart,  substitut. 


TABLE  ALPHiBÉTIODE  BES  MATIÈRES 

CONTENUES  DANS  LE  TOME  XLVI 

(Année  1900) 


A^OEUTT  BXCI^USIF.  Uagent 
exclusif  d*ane  maison  de  com- 
merce, qui  est  chargé  de  la  trans- 
mission des  commandes,  se  rend 
coupable,  si  les  produits  de  cette 
maison  constituent  une  imitation 
fraaduleuse  et  une  concurrence 
déloyale,  d*nsage  de  marque  frau- 
duleusement imitée  et  de  concur* 
rence  déloyale  et  sa  responsabi- 
lité se  trouve  engagée  yis-à-vis  du 
propriétaire  de  la  marque.  P.  173. 

ABOMWTWM      (RBPUBUI  - 

aUB).  Y.   Traité  de  Montevi- 
deo). 

ARRAIVGBIIIEIVT  DB  MA- 
DRID (V.  Assignation^  confis- 
cation,  saisie^  tribunaux  (pou- 
voir des),  —  L'arrangement  de 
Madrid  (1891),  concernant  la  ré- 
pression des  fausses  indications 
de  provenance  sur  les  marchan- 
dises, ne  dispense  pas  de  la  cau- 
tion judicatum  solvi  les  étran- 
fers  qui  l'invoquent.  P.  189.  — 
l'arrangement  signé  à  Madrid 
le  14  avril  1891,  notamment  par 
l'Espagne,  le  Portugal  et  la  France 
et  sanctionné  par  la  loi  française 
du  13  avril  18d2,  en  édictant,  dans 
son  article  4,  que  les  tribunaux  ne 
pourront  pas  considérer  comme 
des  appellations  génériques,  dé- 
pourvues de  protection,  les  appel- 
lations régionales  de  provenance 
des  produits  vinicoles,  a  entendu 
interdire  toute  discussion  sur  le 
caractère  des  noms  des  régions 
connues  pour  leurs  produits  vini- 
coles, quand  même  il  aurait  été 
Cait,  dans  la  pratique  commer- 
ciale, usage  illicite  du  nom  de  la 
région  pour  désigner  des  produits 
d'autre  provenance.  P.  %\% 


ASSIGIVATION.  L'article  59, 
§  3,  du  Code  de  procédure  civile, 
qui  prévoit  que    le    demandeur 

{>eut,  s'il  y  a  plusieurs  défendeurs, 
es  assigner  tous  au  domicile  de 
l'un  d'eux,  doit  recevoir  son  ap- 
plication non  seulement  entre 
Français,  mais  encore  lorsqu'un 
ou  plusieurs  défendeurs  sont 
étrangers  ;  c'est  donc  è  bon  droit 
que  des  Portugais  assif[nent  de- 
vant un  tribunal  français  des  né- 
gociants espagnols  en  même  temps 
que  des  négociants  français  domi- 
ciliés dans  le  ressort  de  ce  tribu- 
nal, lorsqu'il  est  constant  que  les 
négociants  français  étaient  des 
défendeurs  sérieux  et  n'avaient 
pas  été  introduits  dans  l'instance 
pour  distraire  les  étrangers  de 
leurs  juges  naturels.  —  Les  mê- 
mes règles  s'appliquent  sous  l'em- 
pire de  la  (Convention  de  Paris  de 
1883  et  de  l'arrangement  de  Ma- 
drid de  1891  qui  en  est  le  com- 
plément (Résolu  par  la  Cour  de 
Rouen).  P.  196. 

ATTBINTBS  ^  A  LiA  PBR- 
SOrVIVALiITE  (V.  Compétence, 
débats  judiciaires).  —  Le  droit, 
pour  les  écrivains,  de  puiser  dans 
des  faits  historiques  ou  dans  des 
épisodes  révélés  par  des  débats 
judiciaires  le  sujet  d'un  roman 
on  d'une  pièce  de  tbéAtre  n'en 
laisse  pas  moins  ouverte  l'action 
en  dommages-intérêts,  au  profit 
des  tiers  à  qui  préjudicierait  l'œu- 
vre et  à  l'encontre  de  l'auteur  qui 
serait  en  faute.  P.  96.  —  Toute 

Sersonne  a   le  droit  incontestable 
e  se  plaindre  de  l'abus  qui,mal- 
8 ré  elle,  a  été  fait  de  son  nom  et 
e  réclamer  la  réparation  du  pré- 
judice qu'elle  a  souffert.  —  Spé- 
cialement, un  négociant  juif  peut 
*    réclamer  des  dommages  et  inté- 
rêts à  un  journal  anti-sémitique, 


'«ï-"  »"?  ■ 


,  ■^*jl 


—  366  - 


qui  a  fait  figurer  son  nom  sur 
une  liste  de  personnes  appartenant 
à  la  religion  Israélite  et  prétend 
ainsi  le  désigner  à  ranimaoversion 
publique.  P.  100. 


BIBUOGHAPHIE.  P.  284  et  s. 

BREVBT  (V.  Certificat  d'addv- 
tion^  collaboratiùn,  combinaison 
nouvelle,  compétence,  condition 
potestative.  contrefaçon,  copro- 
priétéf  déchéance,  description, 
emploi  nouveau,  exploitation, 
Grande-Bretagne,  licence,  nullité, 
ouyrier,perfectionnemenl8,  potcr- 
suite,  produit  industriel  nouveau, 
résultat  industriel,  société,  ttHbu- 
naux  {pouvoir  des).  —  V.  aussi 
Bibliographie.  P.  295). 

BREVKT   ÉTRAIWGER    (V. 

Nullité^  tribunaux  {pouvoir  des), 

C 

CATALiOGUB  (V.  Dommaoes- 
intérêts). —  La  reproduction,  dans 
un  cataiogue,  d'une  machine  bre- 
vetée, étant  de  nature  à  laisser 
croire  à  des  fabricants  spéciaux  et 
à  indiquer  aux  tiers  que  le  droit 
privatif  de  Tinventeor  est  contesté 
on  même  n'existe  pas,  constitue 
un  fait  dommageable  dont  il  est 
dû  réparation.  P.  55. 

CAUnOIV         JUDIOATUM 

SOEiVI  {\,  Arrangement  de  Ma- 
drid, cautionnement,  dommages- 
intérêts,  Portugal),  —  Conven- 
tion de  la  Haye.  P.  855. 

CAUTIOlVlVBJliBIVT  (V.  Dom- 
mages-intérêts), —  Le  cautionne- 
ment exigé  pur  le  président  du 
tribunal,  soit  dans  rordonnance 
autorisant  la  saisie  aux  termes  de 
l'Arrangement  de  Madrid,  soit  en 
référé  sur  opposition  du  saisi,  ne 
prive  pas  le  saisi  du  droit  de  sou- 
lever devant  le  tribunal  l'exception 
de  caution  judicatum  solvi,  car  le 
cautionnement  est  seulement  des- 
tiné à  couvrir  le  préjudice  pou- 
vant dériver  de  raltération  ou  de 
la  perte  des  marchandises  saisies  ; 
il  importe  peu  que  le  président 
ait  employé  dans  Tordonnance  le 
mot  c  caution  »,  mais  il  appartient 
an  tribunal,  dans  la  fixation  de  la 
CàVLiïon  judicatum  solvi,  de  tenir 


compte    du   cautionnement  dëà 
exigé.  P.  189. 

CERTIFICAT  D'ADDITIOZV 

(V.  Contrefaçon).  —  Lorsqu'on 
brevet  (pris  pour  un  affût  cuirassé  à 
embrasure  minima)  porte  sur  deux 
dispositifs  différents  :  1*  combi- 
naison d*un  affût  mobile  verticale- 
ment au  moyen  d'un  contrepoids 
hydraulique  et  d'une  cnirasse, 
mobile  horizontalement,  qu'oo 
élève,  pour  permettre  la  rotation, 
au  moyen  d'un  levier  équilibré  ; 
2<»  affût  porte-cuirasse,  mobile  ver- 
ticalement et  horizontalement  sur 
un  piston-pivot  qui  s'élève  et  s'a- 
baisse au  moyen  d'un  contrepoids 
hydraulique  ou  d'un  contrepoids 
à  chaîne,  le  certificat  d'addition 
qui  décrit  un  affût  porte-cuirasse 
sur  piston-pivot  mû  par  un  levier 
équilibré,  se  rattachant  tout  à 
la  fois  au  premier  et  au  deuxiè- 
me dispositif  du  brevet,  ne  sera 
f>as  frappé  de  nullité  par  la  nol- 
ité  d'un  seul  des  dispositifs  do 
brevet.  P.  234. 

CHOSB  jruOBB.  Lorsque  le 
demandeur,  qui  concluait  à  inter- 
dire l'usage,  par  un  concurrent, 
des  chiffres  1  à  10  pour  la  dési- 

§  nation  de  ses  produits,  a,  par 
es  conclusions,  invoqué  l'autorité 
de  la  chose  jugée,  résultant,  de  oe 
qu'un  arrêt  précédent,  entre  les 
ayants  droit  des  mômes  parties,  a 
déclaré  illicite  l'usage  des  n«*  1, 
3,  5,  7  pour  désigner  le  dosage  des 
sources  d'eau  minérale  en  bicarbo- 
nate de  soude,  le  juge  du  fait  est 
tenu  de  s'expliquer  sur  ce  moyen. 

P.  0(>« 

COIXABORATIOIV    {V,   Co- 

propHété,  brevet).  —  La  question 
de  savoir  si  celui  qui  a  coopéré  à 
la  découverte  d'une  invention  a  un 
droit  de  propriété  sur  cette  inven* 
tion^  est  une  question  de  fait.  Pour 
la  résoudre,  il  y  a  lieu  d'examiner 
quelle  a  été  la  nature  de  cette 
coopération,  son  importance  et  de 
voir  si  réellement  l'invention  est 
le  fruit  des  recherches  d'un  seul 
ou  le  résultat  de  la  combinaison 
des  efforts  commnns  faits  poor 
réaliser  et  rendre  pratique  ridée 
de  l'inventeur.  P.  70.  —  Si  celui 
dont  l'inventeur  réclame  les  se^ 
vices  n'a  fait  qu'exécuter  matériel- 
lement les  ordres  reçus,  que  réa- 
liser un  plan,  un  dessin  qui  loi  est 
remis  avec  tontes  les  indications 


^»  i 


—  367 


de  détail  nécessaires  et  ne  parti- 
cipe pas  aux  rechercties  faites^  et 
aux  perfectionnements  successifs, 
sli  n'est  en  un  mot  que  Tinstra- 
ment  passif  de  l'inventeur,  l'inven- 
tion, née  à  la  vie  pratique  par  une 
semblable  collaboration,  n'en  est 
pas  moins  la  création  de  Tinven- 
teur  seul  ;  il  en  serait  autrement 
si  l'aide  choisi  par  celui-ci  à  rai- 
son même  de  ses  connaissances 
pratiques,  de  son  intelligence  avait 
apporté  à  Tinventenr  le  concours 
de  ses  lumières  et  de  ses  obser- 
vations personnelles.  P.  70. 

COMBUVAISOIV    IVOUVEL.- 

I4E  (V.  Contrefaçon).  —  Est  bre- 
vetable  la  combinaison,  dans  un 
affût  cuirassé  à  embrasare  minima, 
d'éléments  qui  tous  étaient  isolé- 
ment dans  le  domaine  public  mais 
non  réunis.  P.  235. 

CtOllf PÉTEIVCB  (V.  Tribunaux) 
{pouvoir  des).  —  Si  la  compé- 
tence des  tribunaux  civils  s'étend 
à  tous  les  litiges  gui  mettent  en 
cause  les  brevets  dlnvention,  cette 
compétence  a  elle-même  pour  li- 
mite le  principe  de  l'indivisibilité 
de  l'action  et  de  la  procédure. 
Lorsque  l'action  porte  sur  des 
chefs  complexes  se  rattachant  aux 
effets  indivisibles  d'un  même  con- 
trat de  vente,  la  compétence  du 
juge  saisi  de  l'action  s'étend  né- 
cessairement à  Texception.  P.  40. 

—  Les  tribunaux  de  commerce 
sont  compétents  pour  statuer  sur 
une  cession  de  licence,  c'est-à-dire 
sur  l'achat  et  la  cession  d'un  droit 
dans  un  bot  commercial.  P.  89. 

—  Le  tribunal  de  commerce  est 
incompétent  pour  connaître  de 
l'action  en  dommages-intérêts  in- 
tentée contre  un  journal  à  raison 
de  la  publication  d'une  liste  de 
commerçants  désignés  comme  Is- 
raélites, cette  publication  ne  cons- 
titoantpas  un  agissement  dénature 
commerciale  au  profit  du  journal 
et  visant  les  personnes  désignées, 
à  raison  de  la  religion  qu'elles  pro- 
fessent et  non  du  métier  qu'elles 
exercent.  P.  103.  —  Les  tribu- 
naux français  sont  compétents 
pour  statuer  sur  une  instance  en- 
tre étrangers  oui  a  pour  but  la 
réparation  d'un aélit  ou  d'un  quasi- 
délit  commis  en  France,  parexem- 
ple  sur  l^introdoclion  en  France 
d'une  marchandise  vendue  ou  des- 
tinée à  être  mise  en  vente  sous 


une  fausse    indication  de  prove- 
nance. P.  196. 

COIVCURREIWCB  DÉliOYA- 

I«B  (\.  Agent  exclusif, dommages- 
intérêts,  nom  patronymique,  tri- 
bunaux {pouvoir  des) .  —  V.  aussi 
Bibliographie,  p.   802).  —  Il   y  a 
concurrence  déloyale,   pour   une 
société  d'eaux  minérales  (la  société 
des  eaux  du  Boulou),  à  revêtir  ses 
bouteilles  d'éticjuettes  portant  en 
vedette  une  désignation  suscepti- 
ble  de    tromper    l'acheteur    peu 
éclairé  ou  peu  attentif  (telle  que 
Vichy  du  Midi)  et  à  exalter  dans 
ses  réclames  l'eau  dont   elle  est 
propriétaire,  au  détriment  d'autres 
eaux  (les  eaux  de  Vichy).  P.  15. — 
Constitue  un  acte  de  concurrence 
blâmable  qui  doit  être  interdit,  le 
fait  par  un  ancien  administrateur 
de  tournées  théâtrales  de  prendre 
dans  ses  aftiches,   prospectus  et 
circulaires,   le  titre  sous  lequel  il 
a  exercé  pendant  un  certain  temps 
ces  fonctions  alors  qu'il   n'en  est 
plus  investi,  et  n'appartient  plus 
a  la  même  troupe.  P.  34.  —  Com- 
met une  usurpation  de  nom  abu- 
sive et  se  rend  passible  de  dom- 
mages-intérêts, tant  à  l'égard  de 
l'inventeur  que  de  ceux  auxquels 
il  a  concédé  Je  droit  d'exploiter  sa 
méthode,   celui  qui,  après  s'être 
initié  à  ladite  méthode  et  être  resté 
un  certain  temps  comme  profes- 
seur dans  les  écoles  fondées   par 
l'inventeur  ou  ses  cessionnaires,  a 
ouvert  une  école  similaire  et  a, 
dans  ses  affiches,  prospectus,  en- 
seignes, rédigés  en  vue  de  créer 
une  confusion  préjudiciable  à  ces 
derniers,  annoncé  que  l'enseigne- 
ment   des  langues  vivantes  était 
donné  dans  son  école  suivant  ladite 
méthode,  P.  151.  —  Celui  qui  a  usé 
de  bonne  foi  d'un  nom  qu'il  pouvait 
croire  tombé  dansle  domaine  public 
ne  s*est  pas  rendu  coupable  d'actes 
de  concurrence  déloyale  par  usur- 
pation de  nom,  mais  il  pourrait 
être  condamné  à  des  dommages- 
intérêts  pour  faute  préjudiciable 
au  demandeur  ;  dans  le  cas  même 
où    le  demandeur  ne  justifierait 
d'aucun  préjudice  pécuniaire,  les 
frais    de    l'instance    doivent  ce- 
pendant être  mis  à  la  charge  de 
celui  qui  l'a  rendu  nécessaire  en 
usant  a  tort  du  nom  commercial 
d'autrui.  P.  156. 

COIVCURRBIVCB  UJLICITB 

{W. Dommages-intérêts,  nom  de  la 


—  368  — 


/jsmme.  —  Y.  auBsi  Bibliographie, 
P.  2)02).  —  N'a  pas  commis  de 
concurrence  illicite  )e  débitant 
orai,  sar  une  demande  d'eau  de 
Yichy,  a  livré  des  eaux  çroYenant 
non  de  Vichy  môme,  mais  du  bas- 
sin de  Vichy,  s'il  a  averti  i'ache- 
tear  que  les  liouteilles  livrées  ren- 
fermaient de  l'eau  des  sources 
Larbaud  St-Torre  et  Guerrier  et  si 
l'acheteur  a  en  toutes  facilités  pour 
distinguer  ces  sources  de  celles  de 
Vichy.  P.  a 

COIVDITIOIV     POTE8TATI- 

VES.  La  cession  d'une  licence  par- 
tielle de  brevet  d'invention  con- 
sentie sous  la  condition  que  le 
licencié  paiera  au  breveté  ane  cer~ 
taine  redevance  par  machine  cons- 
truite est  licite,  alors  même  que 
robligation  de  construire  un  nom- 
bre minimum  de  machines  n'est 
j>as  stipulée:  on  ne  saurait  soutenir 
que  ce  contrat  soit  vicié  par  une 
condition  potestative  dépendant 
de  la  seule  volonté  du  licencié, 
une  telle  condition  n'affectant  pas 
la  validité  d'une  obligation,  lors- 
qu'elle a  été  stipulée  au  profit  de 
la  personne  envers  laquelle  un 
engagement  ferme  a  été  pris.  P. 
81. 

COmnSCATIOlV.  L'arrange- 
ment de  Madrid  ayant  pour  sanc- 
tion la  législation  intérieure  de 
chaque  Etat,  la  confiscation  des 
objets  saisis  peut-être  prononcée 
aux  termes  de  l'article  14  de  la 
loi  du  23  juin  1857.  P.  212.  —  La 
confiscation,  étant,  en  cette  ma- 
tière, un  élément  de  dommages- 
intérêts,  peut  être,  prononcée  par 
le  tribunal  civil.  P.  212. 

COnnTRAT  D'BDinOIV.  L'é- 
crivain qui,  ayant  promis  i  un 
journal  un  roman  inédit,  composé 
spécialement  pour  les  lecteurs  du 
journal,  livre  audit  journal  un  ro- 
man anciennement  publié,  dont  la 
propriété  littéraire  lui  est  dévolue 
en  héritage,  mais  dont  il  n'est  pas 
l'auteur  et  ou'll  s'est  contenté  de 
modifier  légèrement  et  transposer 
maladroitement,  manque  aux  en- 
gagements qu'il  a  pris,  justifie,  de 
la  part  du  journal,  une  demande 
en  résiliation  du  contrat  et  ne  sau- 
rait se  plaindre  des  procédés  un 
peu  sévères  dont  le  journal  a  usé 
envers  lui.  P.  86. 


COIVTRBFAÇON     (BRB- 

VfiTS)  (V^  Licence iconwinaiMon 
nouvelle),  -—  Lorsque,  un  brevet 
ayant  été  pris  en  commun,  une 
convention  est  intervenue  entre 
les  deux  copropriétaires,  aux  ter- 
mes de  laquelle  un  d'eux  a  droit 
à  une  redevance  sur  les  bénéfices 
que  réaliserait  l'autre  par  l'emploi 
de  la  machine  ou  des  procédés 
brevetés,  celui  qui  fabrique  sans 
payer   la  redevance  pourra  être 
actionné  en  paiement  des  redevan- 
ces,   mais  non  poursuivi  comme 
contrefacteur.   P.  76.  —  Le  bre* 
veté  peut  exiger,  pour  l'appréda- 
tion  de  la  contrefaçon,  (^u'on  com- 
bine un  certificat  d'addition  avec 
le  dispositif  du  brevet  auquel  il  se 
rattache  et  que  l'on  compare  à 
cette  combinaison  l'engin  argué 
de  contrefaçon.  P.  234.  -*  L'en- 
gin revendiqué,  consistant  en  an 
affût  pivotant  à  éclipse,  porteur 
d'une  coupole  cuirassée  dont  la 
combinaison  avec  la  contre-cui- 
rasse assure  l'abri  de  la  tourelle, 
la  volée  du  canon  se  plaçant,  à  la 
position  d*abri,  dans  un  logement 
a  ciel  ouvert  pratiqué  dans  la  con- 
tre-cuirasse, un  piston  servant  de 
pivot  à  l'affût  et  mu  à  volonté  aa 
moyen  d'un  levier  équilibré,  le 
recul  étant  neutralisé  par  la  masse 
de  l'appareil,  ne  constitue  pas  une 
contrefaçon  l'engin,  différent  par 
sa  nature  et  contenant  des  orga- 
nes nouveaux  et  essentiels,  qui 
consiste  en  une  chambre  de  tir 
contenant  un  canon  sur  son  affût, 
l'affût  étant  indépendant  de  la  cui- 
rasse et  n'en  devenant  solidaire 
qu'au  moment  du  tir,  la  cuirasse 
étant  elle-même  immobilisée,  à  ce 
moment,   dans    l'étreinte    d'une 
couronne  métallique  qui  fait  corps 
avec  la  maçonnene,  le  canon  ren- 
trant complètement  dans  la  tou- 
relle à  la  position  d'abri,  le  mouve- 
ment de  montée  et   de   descente 
de  la   cuirasse   étant   obtenu  au 
moyen  d'un  levier  excentré  auto- 
moteur. P.  234.  —  Il  ne  saurait  y 
avoir  de  contrefaçon  dans  le  fait 
de  puiser  dans  le  domaine  public 
les  éléments  qui  se  trouvent  réu- 
nis dans  un  autre  brevet  pour  les 
combiner   en    vue  d'un  résultat 
identique,  mats  de  manière  à  leur 
attribuer  une  fonction  toute  dif- 
férente. P.   257.    —  Lorsqu'une 
invention  consiste  dans  l'emploi 
d'une  jante   métallique    à  bords 
inclinés  l'un  vers  l'antre  c'est-à- 


—  369  — 


dire,  à  quene  d'aronde,  avec  un 
bandage  de  caoutchoac  plat,  plus 
large  que  la  jante,  de  façon  qu*on 
est  obligé  de  la  cintrer  pour  l'en- 
trer dans  celle-ci,  le  dit  bandage 
présentant  ainsi  avec  l'intérieur 
de  la  jante  un  vide  occupé  soit  par 
on  tube  pneumatique  entoilé  soit 
par  une  substance  élastique,  de 
telle  façon  que  la  ligne  diamé- 
trale du  bandage  circulaire  passe 
en  dedans  du  diamètre  intérieur 
de  la  jante,  ne  peut  être  consi- 
déré comme  une  contrefaçon  un 
bandage  constitué  par  une  bande 
soople  pourvue  de  talons  ancrés 
dans  les  gorges  en  crochets  d'nne 
jante  presque  plate  où  ils  sont 
maintenus  par  leur  forme  et  par 
la  pression  intérieure  d'un  pneu- 
matique à  libre  dilatation.  P.  276. 

COIVTREFAÇOIV    (JHAR- 

CIUE8).  Lorsque  la  marque  re- 
vendiquée consiste  en  une  série 
d'étiquettes  destinées  à  être  appo- 
sées sur  des  bouteilles  d*eaux  mi- 
nérales et  présentant  une  disposi- 
tion caractéristique  dans  laquelle 
un  numéro  imprimé  en  grands 
caracléres  sert  a  désigner  tout  à 
la  fois  une  source  déterminée  et 
la  garantie  approximative  en  bi- 
carbonate de  soude  contenue  dans 
Teaa  débitée  par  cette  source,  il 
n'y  a  pas  contrefaçon  à  inscrire, 
sur  des  étiquettes  absolument  diffé- 
rentes, des  chiffres  qui  ne  servent 
pas  de  dénominations  aux  sour- 
ces et  qui,  accompagnant  le  nom 
de  la  source,  indiquent  seulement 
son  degré  de  minéralisation.  P. 
32. 

coivvEnnrioiv  db  berivb. 

Révision  de  la  conférence  à  Paris 
en  1896.  P.350. 

COIWEJVTIOIVS  EWTEHIVA- 
TIOIVALB»  t\.  Caution  judi- 
catum  solvifConvention  de  Berne). 
Cotta'Rica,  Guatemala,  Luxem- 
bourg, Mexique,  Pérou,  Traité  de 
Montevideo,  Paraguay,  Républi- 
que Argentine, 

COPROPRIÉTÉ        (BRE- 

VETS)  (V.  Collaboration,  con- 
trefaçon [brevets),  —  Lorsqu'une 
machine  nouvelle  est  construite, 
soQsla  direction  d'un  ingénieur, 
inais  aux  frais  et  dans  les  ateliers 
d'une  société,  et  que  d'autres  in- 
génieurs, dessinateurs  ou  ouvriers 


de  la  société  ont  coopéré  à  son 
exécution,  chacun  apportant  À 
l'œuvre  sa  part  d'imagination  de 
travail  et  de  soin,  l'invention 
ainsi  réalisée  doit  être  considérée 
comme  la  propriété  commune  de 
l'ingénieur  et  de  la  société.  P. 
67.  —  Lorsqu'il  est  constant,  en 
fait,  qu'il  a  existé  entre  deux  par- 
ties une  véritable  association,  en 
vue  d'une  découverte  nouvelle, 
l'une  apportant  l'idée  et  ses  con- 
naissances théoriques  techniques, 
l'autre  faisant  tous  les  frais  des 
recherches  et  apportant  à  la  réa- 
lisation du  but  commun  son  ex- 
périence pratique,  il  y  a  lieu  de 
décider  que  ces  deux  parties  sont 
copropriétaires  de  l'invention 
qu  elles  ont  Tune  et  l'autre  con- 
tribué à  créer.  P.  70. 

COSTA-RICA.  Convention  du 
8  juillet  1896  entre  la  France  et 
le  Costa-Rica  pour  la  protection 
réciproque  des  marques  de  fabri- 
que et  de  commerce.  P.  329.  — 
Convention  du  28  août  1896  entre 
la  France  et  le  Costa-Rica  pour  la 
garantie  réciproque  de  la  propriété 
littéraire  et  artistique.  P .  380. 

CRITIQUE  (V.  Droit  de  réponse). 


DÉBATS  JURICIAIRES   (V 

Atteintes  à  ta  personnalité),  — 
Ne  commet  aucune  faute  l'écri- 
vain qui  utilise  dans  un  drame, 
comme  sujet  d'observations  et 
d'étude,  des  faits  rendus  publics 
par  un  procès  criminel  plus  de 
20  ans  auparavant,  sans  les  déna- 
turer ni  altérer  en  rien.  P.  96. 

DÉCBÉAIVC^E  (V.  Poursuite  en 
contrefaçon),  —  La  déchéance  du 
brevet  encourue  pour  défaut  de 
paiement  d'une  annuité  avant  le 
commencement  des  années  de 
jouissance  est  irrémédiable  et  le 
paiement  des  annuités  ultérieures 
ne  peut  la  réparer.  P.  40. 

DÉCORS-  L'arrêt  qui,  sur  la  de- 
mande d'un  directeur  de  théâtre, 
fait  défense  à  un  journal  de  repro- 
duire les  décors  et  la  mise  en  scène 
d'une  pièce  représentée  sur  ce 
théâtre  ne  s'applique  pas  à  la  re- 
production des  décors  et  de  la  mise 
en  scène  de  la  même  pièce,  tels 
fu'ils  sont  sur  un  autre  théâtre. 
^  121. 


l\ 


U 


—  370  — 


DJBIVOIIIIIVATIOIWS  (V.  Con- 
currence illicite^  nom  palronymi" 
Eue,  TribUTiaux  {pouvoir  des).  — 
orsque  deux  propriétés  ont,  au 
moins  ponr  partie,  une  origine 
commune  et  que  le  propriétaire 
originaire  a  mis  en  valeur  le  vin 
qu'il  y  récollait  en  le  livrant  au 
commerce  sous  un  nom  déterminé, 
tel  que  Crû  Lards,  les  détenteurs 
actuels  des  deux  propriétés  au- 
jourd'hui distinctes  peuvent  égale- 
ment se  réclamer  de  la  propriété 
et  de  la  jouissance  d'une  dénomi- 
nation qui  constitue  l'élément  pré- 
pondérant de  leur  étampe  ;  ils  ont 
aussi,  à  titre  égal^  le  droit  d'em- 
ployer la  dénomination  Château 
Larcis,  le  mot  Château  étant  de- 
venu une  expression  banale  dans 
les  exploitations  vinicoles  de  la 
Gironde,  et  de  la  faire  suivre  du 
mot  crû  Saint'Emilion  parce^  une 
ces  expressions,  en  tant  qu'elles 
désignent  exactement  le  lieu  de 
production,  sont  vulgaires  et  né- 
cessaires et  parce  que,  dans  Tusage, 
la  faveur  qui  s'attache  au  nom 
Saini'Emitlon  s'étend  à  d'antres 
communes  limitrophes,  notamment 
à  celle  de  Saint-Laurent  des  Com- 
bes. P.  5. 

DESCKIPTIOIV.  Une  invention 
ne  peut  être  stérilisée  par  une 
légère  erreur  du  dessinateur  des 
planches  du  brevet,  alors  que  le 
constructeur  est  nécessairement 
appelé  à  la  rectifier  dans  l'exécu- 
tion. P.  257.  —  La  loi  française 
n'exige  pas  que  la  description  du 
brevet  se  termine  par  des  reven- 
dications ;  il  suffit  que  l'invention 
se  dégage  de  l'ensemble  des  énon- 
ciations  du  mémoire  descriptif. 
P.  257. 

OESSIIVS  ET JHODÈLiBS   (Y* 

Bibliographie,  P.  299). 

DOiMMAGES-lIVrÉRÊTS  (V. 

Atteintes  à  la  personnalité^catalo- 
gue, concurrence  déloyale, plagiat, 
publicité,  résiliation).  —  S'il  est 
de  principe  que  la  mauvaise  foi 
est  un  élément  nécessaire  de  la 
concurrence  déloyale,  certains  ac- 
tes d'un  commerçant,  lorsqu'ils 
sont  de  nature  i  nuire  à  un  autre 
commerçant  et  qu'ils  laissent  à  la 
charge  de  leur  auteur  une  faute 
ou  une  imprudence,  peuvent,  en 
dehors  de  toute  intention  fraudu- 
leuse, donner  ouverture  à  une  ac- 


tion en  dommages-intérêts.  P.  56. 
—  Lorsque  le  demandeur  a  dû  dé- 

Soser  des  sommes  i  la  Caisse  des 
épôts  et  consignations  on  en 
compte  courant  dans  une  banque, 
•soit  à  titre  de  cautionnement,  soit 
à  titre  de  CAuiïon  judicatum  solrn, 
le  défendeur,  si  la  demande  ^t 
ensuite  reconnue  bien  fondée,  doit, 
à  titre  de  supplément  de  domma- 
ges-intérêts, rembourser  an  de- 
mandeur la  diûérence  d'intérêts 
sur  les  sommes  déposées  entre  le 
taux  de  la  Caisse  ou  de  la  maison 
de  banque  et  le  taux  légal  de  b  0/0. 
P.  212.  —  Des  saisies  pratiquées 
à  tort  causent  un  dommage  dont 
il  est  dû  réparation.  P.  276. 

DROIT    DE    RBPOIVSE.   Le 

droit  de  réponse,  dans  les  termes 
de  l'arUde  13  de  la  loi  du  29  juil- 
let 1881,  appartient  à  tonte  per- 
sonne nommée  ou  désirée  dans 
un  journal,  même  à  qui  a  sollicité 
de  ce  journal  le  compte-renda 
d'un  ouvrage.  Mais  l'insertiop 
de  la  réponse  ne  saurait  être  exi- 
gée quand  elle  est  conçue  en  des 
termes  qui  sont  contraires  aux 
lois,  aux  bonnes  mœurs,  à  l'inté- 
rêt légitime  des  tiers,  à  Thonnear 
ou  à  la  considération  du  journa- 
liste. P.  139.  —  La  Cour  de  cas- 
sation peut,  lorsque  l'auteur  de  la 
réponse  a  assimilé  son  œuvre  a 
celle  d'un  tiers,  examiner  et  com- 
parer elle-même  ces  deux  œuvres 
et  dire  si  ce  tiers  avait  un  intérêt 
légitime  à  ce  que  son  œiiTTe  ne 
fût  pas  l'objet  de  cette  assimila- 
tion. P.  139. 


EAUX  MlJWERAJLiES  {V .Con- 
currence déloyale,  concurrence 
illicite,  débitant,  nom  de  localité). 

ÉDITEUR  (V.  Gage). 

EMBLiÈlIlB  "SATêOKAMj.  - 

L'emblème  national  suisse  peut 
être  employé  par  tout  citoyen 
suisse  sur  des  étiqttettes.par  exem- 
ple pour  le  commerce  des  absio- 
thés.  P.  169. 

EJIIPL.01  IVOUVEAU  (BBB: 

VETS).  U  y  a  simple  emploi 
nouveau,  non  brevetable,  dans  le 
fait  d'employer  en  vue  de  dimi- 
nuer les  chocs  on  vibrations,  des 
garnitures  pneumatiques  pour  les 


^  371  — 


rooes  de  vélocipèdes,  alors  qa'an- 
térieuremeDt  on  a  fait  usage  da 
même  procédé,  dans  le  môme  bat, 
pour  garnir  les  rooes  d'autres 
véhicules  et  particulièrement  de 
véhicules  légers.  P.  fô7. 

EMPIiOVé  (V.  Copropriété  (bre- 
vets). 

ÉTRAIVOERS  (V.  Compétence). 


^IX  {V  .Condition 
potestative^  licence^  nutUté,  rési- 
liation). —  Ne  justifie  pas  suffi- 
samment des  causes  de  son  inac- 
tion, pour  être  relevé  de  la  dé- 
chéance   faute    d'exploitation,   le 
breveté  dont  le  centre  de  fabrica- 
tion  est   en    Allemagne   et   qui, 
ayant  des  commandes  en  Rouma- 
nie pour  les  engins  cuirassés  fai- 
sant Tobjet  du  brevet,  n'a  pas  cru 
devoir  organiser   des  ateliers  de 
construction  sur  le  territoire  fran- 
çais, bien  quMl  disposât  des  capi- 
taux et  ressources  nécessaires,  ni 
faire  fabriquer  par    des  licenciés 
français.  P.   234.   —  On  ne  sau- 
rait considérer  comme  suffisant  à 
éviter  la  déchéance,  Texploitation 
réduite  k  la  fabrication  de  quel- 
ques spécimens  qui  n'ont  pas  eu 
un  cours  commercial.  P.  257.  — 
On  ne  peut  considérer  comme  une 
exploitation  suffisante  l'envoi  en 
France  d'un  ouvrier  pendant  un 
mois,    le    cintrage    de   quelques 
jantes.  Tachât  de  chambres  à  air, 
U  location  d'un  petit  atelier  et  des 
négociations  en  vue  d'arriver  à  on 
contrat     d'exploitation,     menées 
avec  une  lenteur  calculée  et  tou- 
jours infractuenses ,    notamment 
lorsque  les  prospectus   distribués 
en  France  ne  font  jamais  mention 
4]De  de  fabrique  à  l-étranger.  P. 


FAUSSES  IXDICATIOIVSDE 
PBOVEIVAIVCE:  (V.  Arranae- 
^ent  de  Madrid,  madère^.  —  Un 
fabricant  d'eau -de-vie  qui  appose 
^  mention  Very  Old  Brandy  Ma- 
linard  frères^  Cognac  sur  des 
prodaits  qu'il  fabrique  dans  le 
Pas-de-Calais  contrevient  à  la  loi 
<la  28  juillet  1824,  soit  qu'il  ait 
voulu  faire  croire  que  la  maison 
fictive  Malinard  frères  était  éta- 
blie dans  la  Tille  de  Cognac,  soit 
Tu'il  ait  voulu  présenter  son  eau- 
de-Tie  comme  étant  du  cognac, 


c'est-à-dire  une  liqueur  récoltée 
et  fabriquée  dans  la  région  à  la- 
quelle ce  nom  s'applique.  P.  177. 
—  Lorsque  les  destinataires  d'une 
marchandise  munie  d'une  fausse 
indication  de  provenance  sont  dé- 
clarés indemnes  de  tous  domma- 
ges-intérêts, à  raison  de  leur 
bonne  foi  et  parce  qu'ils  n'ont  par- 
ticipé par  aucun  fait  illicite  aux 
fausses  indications  de  provenance 
incriminées,  il  y  a  lieu  néanmoins 
de  les  maintenir  en  cause  pour 
prononcer  la  validité  de  la  saisie 
des  marchandises  dont  ils  étaient 
propriétaires  aux  termes  du  con- 
naissement et  de  condamner  les 
expéditeurs  aux  dépens  de  cette 
mise  en  cause.  P.  212. 


GAGS3.  L'auteur  qui  a  cédé  à  un 
éditeur  le  droit  de  publier  un  ou- 
vrage moyennant,  par  chacun  des 
exemplaires  tirés,  une  redevance 
stipulée  payable  lors  de  la  mise  en 
vente  de  chaque  mille,  devient,  au 
moment  des  tirages  successifs, 
créancier  de  la  redevance  conve- 
nue et  n'a,  sur  les  volumes  im- 
primés, aucun  droit  opposable  aux 
créanciers  de  l'éditeur  qui  ont 
reçu  de  celui-ci  une  partie  de  ces 
volumes  en  nantissement  d'un 
prêt,  alors  qu'aucune  preuve  de 
mauvaise  foi  ou  de  faute  n'est  rap- 
portée à  leur  encontre  ;  les  créan- 
ciers gagistes  sont  fondés  à  invo- 
quer l'article  2279  du  Code  civil 
contre  toute  action  de  l'auteur  qui 
tendrait  à  faire  décider  que  les 
exemplaires,  faisant  l'objet  du 
nantissement,  ne  pourraient  être 
mis  en  vente  qu'à  la  charge  de 
lui  payer  une  redevance  convenue, 
pour  chacun  des  exemplaires  ven- 
dus. P.  124. 

GRAIVDE-BRETAOIWB.   Aux 

yeux  de  la  loi  anglaise,  comme  de 
la  loi  française,un  brevet  est  réputé 
connu  dès  l'instant  où  il  est  de- 
mandé et  est  censé  avoir  été  pu- 
blié, avant  le  dépôt  de  la  demande 
d'un  deuxième  brevet,  si  court 
que  soit  l'intervalle  de  temps  écou- 
lé. P.  259. 

GUATESAIAIjA.  Convention  du 
12  novembre  1895  entre  la  France 
et  le  Guatemala  pour  la  protec- 
tion réciproque  des  marques  de 
fabriques  et  de  commerce.  P.  334. 


-  372  — 


—  Convention  du  21  août  1895 
entre  la  France  et  le  Guatemala 
pour  la  garantie  réciproque  de  la 
propriété  littéraire  et  artistique. 
P.  336. 


IMITATIOIV  FRAUDUliEU- 

SB  (V.  Agent  exclusif),  —  Lors- 
qu'il y  a  entre  deux  étiquettes  des 
ressemblances  voulues  et  calcu- 
lées de  manière  à  tromper  l'ache- 
teur (même  forme  rectangulaire, 
même  dimension,  même  couleur 
bleue  sur  gris  argent  rayé  et  avec 
arabesque,  aux  mêmes  places  un 
écusson  et  cinq  cartouches  se  dé- 
tachant d'une  manière  saisissante, 
avec  inscriptions  en  lettres  blan- 
ches, les  trois  cartouches  placés  à 
lu  partie  supérieure  se  reliant  de 
manière  à  former  une  banderoUe 
ondulée,  caractères  identiques, 
notamment  pour  le  mot  Cognac 
dans  le  cartouche  inférieur),  il 
y  a  imitation  frauduleuse  de  mar- 
que ,  bien  qu'une  comparaison 
attentive  des  deux  marques  rap- 
prochées et  placées  en  même 
temps  sous  les  yeux  fasse  ressortir 
chaînes  dissemblances  qui  se  per- 
dent dans  l'ensemble  sans  chan- 
ger le  caractère  général,  l'appa- 
rence et  la  physionomie  de  la  mar- 
que. P.  177. 

nVDEX  (MISE  AL.')  (Y.  Liberté 
commerciale  et  indu8trielle,syndi- 
cats), 

lIWEIirTEUR  (V.  Concurrence 
déloyale,  nom  patronymique). 


Peut  être  prononcée  d'office  par 
la  Cour  la  jonction  d'instances 
distinctes  introduites  par  les  mê- 
mes demandeurs  cortfre  des  défen- 
deurs divers  et  n'ayant  entre  eux 
aucun  lien  de  droit,  mais  dans 
lesquelles  est  soulevée  une  seule 
et  même  question  qui  n'est  pas 
susceptible  de  recevoir  une  solu- 
tion différente  pour  les  uns  et 
pour  les  autres.  P.  196. 

JOURI¥AIi  (  V.  Contrat  d'édi^ 
tion),  —  Le  journal  ayant,  sur  la 
foi  de  l'écrivain  aVec  lequel  il 
avait  contracté  ,  commencé  la 
publication  d'un  roman  présenté 
comme  inédit  et  ayant  dû  l'inter- 


rompre quand  il  a  connu  Ji^Véri- 
table  situation,  a  subi  uA  préju- 
dice dont  il  lui  est  dû  réparation, 
car  les  lecteurs  de  ce  jourfl»!,  sé- 
duits et  attirés  par  les  réclames 
annonçant  la  publication  d*une 
œuvre  nouvelle  et  inédite,  écrite 
spécialement  pour  eux,  ont  dû 
être  singulièrement  désappointés 
lorscp'ils  ont  appris  que  le  ronoan 
publié  était  de  vieille  date  et  d'an 
auteur   profondément  oublié    et 

Sue  la  clairvoyance  du  directeur 
u  journal  avait  été  mise  en  dé- 
faut sur  ce  point.  P.  36. 

JOURI¥ALilSTB.  La  question 
de  savoir  si  le  fait  de  congédier 
un  rédacteur,  avec  lequel  aucun 
contrat  n'a  été  passé,  peut  don- 
ner ouverture  à  des  dommages- 
intérêts,  est  subordonnée  aux  cir- 
constances de  fait  dans  lesquelles 
le  congé  a  été  donné.  Il  n^  a  lien 
à  dommages-intérêts  si  an  préavis 
a  été  donné  avec  un  délai  suffi- 
sant, délai  que  les  tribunaux  ont 
pouvoir  d'apprécier  et  si,  en  ou- 
tre, le  congé  n'apparaît  pas  avoir 
été  donné  dans  des  conditions  abu- 
sives ou  dolosives.  La  preuve  de 
l'abus,  du  dol  ou  de  l'insuffisance 
des  délais  incombe  à  celai  qui  les 
invoque.  P.  63. 


liETTRRS  MISSIVES  (V.fie5 
ponsabilité), 

LIBERTE  DU  COMMERCE 
ET  DE  L'ITVDUSTRIE  (V. 

Syndicats).  —  Si  depuis  Tabroga- 
tion  de  l'article  416  du  Code  pénal 
l'atteinte  portée  à  la  liberté  da 
travail  par  la  proscription  et  l'in- 
terdiction ne  constitue  plus  un 
délit  passible  de  peines  correc- 
tionnelles, les  mêmes  faits  peuvent 
constituer  une  faute,  entraînant 
responsabilité  civile  si  elle  cause 
préjudice  à  autrui.  P.  1(6.  — 
Commet  un  abus,  passible  de 
dommaffes-intérêts,  la  chambre 
syndicale  qui,  conformément  i 
ses  statuts  par  une  circulaire  â 
d'autres  chambres  syndicales,  met 
à  l'index  un  marchand   de  gros 

f>our  s'être  adressé  directement  à 
a  clientèle  de  détail  sans  verser 
une  somme  de  20  0/0  à  la  cham- 
bre syndicale  ;  en  effet,  une  sem- 
blable mesure  est  contraire  à  la 
liberté  du  commerce  et  de  l'in- 
dustrie. P.  105. 


/ 


—  373  — 


LICEIVCE  (V.  Résiliation,  société, 
tribunaua;  de  commerce).  —  Le 
licencié  est  en  droit  de  munir  de 
perfectionnements    inventés    par 
lui  les  appareils  brevetés  qu'il  fa- 
brique   licitement.  P.  78.   —  Le 
licencié  qui   n'a  licence  de  fabri- 
quer qne  pour  son  usage  person- 
nel peot  être  poursuivi  en  con- 
trefaçon,   à    raison   de   la   vente 
d'appareils   brevetés  à  des  tiers. 
P.  7o.  —  L'acte  qui  ne  confère  à 
son    bénéficiaire  qu'un   avantage 
personnel  et  limité  et  ne  lui  attri- 
bue nallement  le  droit  de  pour- 
suivre en  son  nom  les  contrefac- 
teurs constitue  non  une  cession  de 
brevet,  mais  seulement  une  licence 
d'exploitation  ;  pour  qu'un  tel  acte 
devienne   opposable  aux  tiers,   il 
n'est  pas  nécessaire  qu'il  ait  été 
préalablement  soumis  à  la  forma- 
lité de   la   transcription  spéciale 
des  articles  90  et  21  de  la  loi  du 
5  juillet  1844  :  en  particulier  pour 
qu'un  tiers  devenu  régulièrement 
propriétaire  du  brevet  soit   tenu 
de  le  respecter,  il    sufQt    qu'en 
tait,   il    en  ait  eu  connaissance. 
P.  89. 

liOl  de:  1894  (V.  Fausses  indi- 
cations de  provenance,  nom  de 
localité). 

LOUAGE     DE     HERVlCaBS 

(V,  Journaliste). 

tiUXBMBOURG.  Convention  de 
1856  et  de  1865  entre  la  France 
et  le  Luxembourg.  Dénonciation. 
P.  339. 


MAMimHE.(\, Produits  vinicoles}. 
—  Le  nom  de  Madère  n'a  jamais 
cessé  de  désigner  la  provenance 
d'an  vin  qui,  bien  que  soumis  à 
un  mode  de  préparation  spéciale, 
emprunte  se»  qualités  essentielles 
an  terroir  et  au  climat  qui  le  pro- 
duisent ;  l'exportation  du  vin  de  Vile 
de  Madère  n'a  jamais  été  inter- 
rompue malgré  les  ravages  de 
l'oïdium  et  du  phylloxéra  ;  les  né- 
gociants madérois  n'ont,  à  aucune 
époque,  entendu  renoncer  à  se 
prévaloir  de  cette  appellation 
commerciale  et  ils  ont  poursuivi 
leurs  concurrents  en  France  dès 
que  l'Arrangement  de  Madrid  de 
1891  leur  en  a  fourni  les  moyens. 
La  dénomination  Madère  ou  vin  de 
Hadere  n'a  donc  pu*,  à  aucun  mo- 


ment, tomber  dans  le  domaine  pa- 
blic  :  elle  est  indicative  non  d^un 
genre  et  d'un  type,  mais  bien 
d'un  lieu  de  production  et  de  fa- 
brication de  certains  vins  naturels 
spécialement  connus  sous  cette 
qualification  et  lait  partie,  à  ce  ti- 
tre, du  patrimoine  commun  des 
négociants  et  viticulteurs  de  l'Ile 
de  Madère  ;  il  appartient  à  un  ou 
plusieurs  d'entre  eux  de  faire  ré- 
primer l'usage  illicite  de  cette 
dénomination  pour  désigner  des 
vins  de  provenance  espagnole. 
P.  212. 

MAJORAT.  On  ne  saurait  con- 
fondre avec  un  nom  patronymique, 
qui  a  pour  destination  de  désigner 
une  personne  et  passe  nécessaire- 
ment et  indéfiniment  à  tous  les 
enfants  sans  distinction,  un  titre 
nobiliaire,  émané  de  la  puissance 
souveraine;  destiné  non  à  dési- 
gner mais  à  honorer  celui  à  qui 
il  a  été  conféré  ;  d'ailleurs,  si  les 
titres  nobiliaires  n'entraînent  plus 
de  privilèges  d'aucune  sorte,  ils 
n'en  doivent  pas  moins  être  main- 
tenus dans  le  caractère  qui  leur  a 
été  donné  à  Torigine,  en  tant  qu'il 
est  compatible  avec  l'état  social 
et  dans  les  conditions  de  trans- 
missibilitéqui  leuront  été  imposées 
par  l'acte  de  création.  Dès  lors, 
le  titulaire  actuel  d'un  titre  héré- 
ditaire conféré  dans  les  mêmes 
conditions  que  ceux  créés  par  le 
décret  du  \^*  ma;>s  1808  et  dont 
l'acte  de  collation  indique  qu'à 
chaque  transmission  le  bénéficiaire 
auquel  ce  titre  échoit,  non  &  raison 
de  sa  qualité  d'héritier  mais  en 
vertu  dudit  acte  de  collation,  doit 
le  recevoir  tel  qu'il  a  été  créé, 
c'est-à-dire  ayant  conservé  intact 
son  caractère  honorifique,n'est  pas 
lié  par  une  convention  par  laquelle 
un  précédent  titulaire  du  titre 
l'avait  engagé  dans  une  société  de 
commerce,  dont,  avec  les  insijgnnes 
qui  lui  sont  attachés,  il  constitue- 
rait la  marque.  P.  141. 


MARQUES      DE      FABRI- 

QUÎBS  (\., Agent  exclusif,  chose 
jugée,  concurrence  illicite,  con- 
trefaçon, Costa  Rica^  emblème 
national,  Guatemala,  majorât, 
prédécesseur,  tribunaux  {pouvoir 
des,  —  V.  aussi  Bibliographie, 
P.  302). 

MÉDAlIXiB  (V.   Œuvre  artUti- 
que,o^Hginal), 


--  374  — 


MESXiaÛE.  Cotivention  du  19 
avril  1899  entre  la  France  et  le 
Mexique  pour  la  protection  de  la 
propriété  industrielle.  P.  340^ 

MISE  EIV  6CEIVE  (V.  Décors). 

MODÈUB   (V.  Portrait). 


IV 


IVAIVTISSEIMEIVT    (V.  Gage). 

1VATIOIVAI.1TÉ.  One  société 
qui  a  son  siège  social  à  Funchal 
(île  de  Madère)  et  a  pour  objet  le 
négoce  des  vins  de  Madère  est  de 
nationalité  portugaise,  bien  que 
les  associés  soient  de  nationalité 
anglaise.  P.  189. 

N^OjH  (V.  Atteintes  d  la person- 
nalitéy  compétence^  concurrence 
déloyale,  majorât,  prédécesseur. 
~  V.  aussi  Bibliographie.?.  312). 
—  Le  fait,  par  Tinventeur  d'une 
méthode  cour  renseignement  des 
langues  vivantes,  de  donner  son 
nom  à  cette  méthode  (Berlitz 
Sckool)  constitue  non  une  déno- 
mination tirée  de  la  nature  de  la 
chose,  mais  une  désij^nation  fan- 
taisiste qui  est  la  propriété  privative 
dudit  inventeur,  alors  qu'il  est 
constant  qu'il  a  le  premier  fait 
usage  en  France  de  ladite  déno- 
mination. P.  151.  —  Le  nom  com- 
mercial constitue  une  propriété 
imprescriptible  qui  survit  même 
au  cas  où,  le  brevet  de  Tinventeur 
étant  tombé  dans  le  domaine  pu- 
blic, chacun  acquiert  la  faculté  de 
fabriquer  et  de  vendre  le  produit  ou 
la  marchandise  autrefois  brevetée  ; 
l'emploi  du  nom  d'autrui  ne  peut 
donc  devenir  légitime  qu'à  la  con- 
dition que  ce  nom  soit  tombé  dans 
le  domaine  public  par  le  fait  ou  la 
tolérance  de  l'inventeur  ou  qu'il 
.soit  devenu  la  seule  désignation 
usuelle  de  Tobjet  fabriqué  ;  la  re- 
nonciation ne  se  présume  pas  et 
ne  saurait  s'induire  de  quelques 
actes  isolés,  non  réprimés  par  le 
propriétaire  et  résultant,  par  ex- 
emple, de  l'emploi  de  son  nom 
dans  qfuelques  catalogues.  P.  156. 

IVOM  DB  L.A  FEMimS.  Si  la 

pratique  du  commerce  autorise 
dans  certains  cas  un  commerçant 
à  joindre  le  nom  de  sa  femme  au 


sien,  cet  usage  ne  constitoe  point 
un  droit  mais  une  simple  tolé> 
rance  et  les  tribunaux  doivent 
prévenir  ou  faire  cesser  les  abus 
qui  peuvent  en  résulter.  Si  celte 
addition  de  nom  doit  être  no- 
tamment la  cause  d'une  confu- 
sion préjudiciable  pour  un  antre 
commerçant,elle  constitue  un  acte 
de  concurrence  illicite  gui  ne  peat 
être  toléré.  P.  166.  —  On  ne  sau- 
rait interdire  à  un  négociant  l'ad- 
jonction du  nom  de  sa  femme, 
même  si  cela  est  préjudiciable  à 
un  concurrent,  lorsque  le  négo- 
ciant a  employé  ce  nom  dans  le 
commerce  non  avec  une  intention 
frauduleuse,  mais  parce  qu'il  avait 
déjà  antérieurement,  même  dans 
les  actes  de  la  vie  civile,  pris  (k>s- 
session  de  ce  nom  en  adjonction 
au  sein,  conformément  à  Tnsage. 
P.  169. 

l^OAl  DE  liOCAI^ITÉ  (V.  Ar- 
rangement de  Madrid,  fausse  in- 
dication de  provenance^  Madère, 
produits  vimcoles),  — -  La  ville  de 
fiar-le-Duc  s'étant  acquis  une  ré- 
putation méritée  par  la  façon  spé- 
ciale dont  elle  fabrique  la  confi- 
ture de  groseille,  les  termes  con- 
fitures de  Bar-le-Duc  désignent 
non  pas  un  produit  fabriqué  au 
moyen  de  tel  procédé  tombé  dans 
le  domaine  public,  mais  bien  an 
produit  oriç^inaire  de  Bar-le-Duc  ; 
il  ne  saurait  donc  être  permis  que 
des  confitures  plus  ou  moins  sem- 
blables, mais  fabriquées  ailleurs 
puissent  être  vendues  sous  ce  nom. 
Alors  même  qu'il  serait  établi  qae 
depuis  un  temps  plus  ou  moins 
long  les  confiseurs  de  Ligny  (loca- 
lité à  environ  quatre  lieues  de 
Bar-le-Duc)  ont  qualifié  leurs  pro- 
duits de  confitures  de  Bar,  cette 
habitude  constituerait  de  leor 
part,  un  abus  contre  lequel  les 
confiseurs  de  Bar- le- Duc  n'ont 
point,  par  leur  tolérance  plus  on 
moins  large,renoncé  à  revendiquer 
la  propriété  imprescriptible  de 
cette  dénomination  et  un  abus  ne 
saurait  justifier  un  autre  abus. 
Les  confiseurs  qui  fabriquent  des 
confitures  en  dehors  de  Bar  le-Duc 
avec  des  groseilles  provenant  de 
ce  territoire  ne  peoyent  se  servir 
du  nom  de  BaT-le-Duc  que  sons 
cette  forme  Confitures  dégrossi' 
les  de  Bar-le-Duc  et  à  la  condi- 
tion que  sur  les  étiquettes,  les 
mots    Groseilles  de    Bar  -le-Duc 


•^   «   ".M 


—  375  — 


soient  en  caractères  différents  du 
mot  Confitures^  mais  identiques 
entre  eux  et  que  sur  les  factures, 
en-têtes,  prospectus,  etc,  lexpres- 
sion  Confitures  de  groseilles  de 
Bar^le-Duc  soit  toujours  suivie  de 
la  raison  de  commerce  et  du  do- 
micile do  fabricant,  en  caractères 
au  moins  aussi  apparents.  P.  10. 
—  La  loi  du  28  juillet  1824  n'é- 
tant pas  applicable  aux  produits 
naturels  et,  par  suite,  aux  eaux 
minérales,  l'usurpation  d'un  nom 
de  localité  pour  une  eau  miné- 
rale ne  peut  faire  l'objet  que 
d'une  action  en  concurrence  dé- 
loyale. P.  15.  —  Le  nom  d'Orez- 
za  ayant  toujours  été,  depuis  un 
temps  immémorial,  employé  pour 
désigner  une  des  paroisses  de  l'ile 
de  Corse  et  ayant  continué  à  être 
employé  pour  désigner  usuelle- 
ment les  produits  naturels  qui 
sont  tirés  de  cette  contrée,  même 
depuis  que  l'expression  adminis- 
trative de  paroisse  a  été  remplacée 
par  celle  ae  canton  et  que  le  can- 
ton d'Orezza  est  devenu  officielle- 
ment le  canton  de  Piedicroce,  les 
propriétaires  d'eaux  minérales 
jaillissant  sur  ce  territoire  ont 
tous  le  droit  de  vendre  leurs  pro- 
duits sous  le  nom  d'eaux  d'Orezza 
et  sans  qu'il  y  ait  à  se  préoccuper 
de  savoir  si  ce  nom  figurait  ou  ne 
figurait  pas  dans  l'arrêté  ministé- 
riel autorisant  l'exploitation  de  la 
source.  P.  21. 

IVUIXilTÉ  (V.  Certificat  d'addi- 
tion, condition  potestative) ,  -- 
Lorsque  un  brevet  étranger  doit 
.être  considéré  comme  nul,  en 
Vertu  cle  l'article  29  de  la  loi  de 
1884  le  brevet  correspondant  doit 
partager  le  même  sort.  P.  257. 

O 

OSUVRES    ARTISTiaUES. 

En  transportant  sur  une  médaille, 
avec  l'autorisation  de  l'auteur,  une 
œuvre  de  sculpture,  le  graveur  en 
médailles  fait  incontestablement 
une  œuvre  artistique  nouvelle  dont 
il  devient  propriétaire.  P.  135. 

ŒUVRES     FUTURES.     Des 

conventions  relatives  au  droit 
d'auteur  sur  les  œuvres  futures, 
par  Albert  Vannois.  P.  57. 

CBUVRES    UnrrÉRAIRES. 

La  qualité  de  légataire  des  œuvres 


littéraires  d'un  écrivain  ne  donne 
pas  au  bénéficiaire  le  droit  de  les 
publier  sons  son  propre  nom. 
P.  35. 

ORIGlIVALi.  Si  l'on  doit  admet- 
tre en  principe  que  l'originai  d'une 
médaille  consiste  dans  le  poinçon 
ou  relief  exécuté  par  l'artiste  d'a- 
près son  modèle  en  pl&tre,  en 
glaise  ou  en  cire  et  que  la  livrai- 
son de  ce  poinçon  seule  entraîne 
Ï présomption  de  la  cession  de 
'œuvre,  pour  que  la  rétention  du 
poinçon  implique  la  propriété  de 
Pœuvre  il  faut  que  cette  rétention 
soit  non  équivoque  et  à  titre  de 
propriétaire.  P.  135. 

OUVRIER  (V.  Collaborateur, 
concurrence  déloyale,  copropri- 
été), —  Le  fait  qu'un  ouvrier  ou 
contremaître  a  découvert  une  in- 
vention pendant  qu'il  était  em- 
ployé chez  un  patron  ne  suffit  pas 
pour  permettre  à  ce  dernier  de 
revenoiquer  à  son  profit  ladite 
invention.  Pour  que  ce  résultat 
puisse  être  obtenu  il  faut  que  les 
découvertes  soient  le  résultat  de 
travaux  exécutés  par  l'ouvrier  dans 
son  service  pour  des  objets  qui 
s'y  rattachent,  d'après  les  ordres 
ou  sous  la  direction  de  son  pa- 
tron. P.  75. 


PARAGUAY    (V.    Traité     de 
Montevideo). 

PERFECTIOrVIVElMRIVTS    . 

Lorsque  des  améliorations  à  un 
système  tombé  dans  le  domaine 
public  ont  fait  l'objet  d'un  brevet, 
il  n'y  a  pas  contrefaçon  de  la  part 
d'un  concurrent  qui  sans  rien  em- 
prunter aux  améliorations  breve- 
tées, apporte,  de  son  côté,  des 
modifications  nouvelles  au  pro- 
cédé du  public.  Spécialement,  il 
n'y  a  pas  contrefaçon  lorsque  l'in- 
violabilité d'une  caisse  d'embal- 
lage est  obtenue,  non  parle  noie- 
ment  de  la  tête  de  la  lance  dans  le 
bois,  comme  dans  le  brevet,  mais 

f)ar  les  crans  ou  épaulements  de 
a  lance  qui,  par  suite  du  refou- 
lement ultérieur  de  l'agraphe,  ne 
se  retrouve  plus  en  regard  des 
déchirures  des  parois  des  trous  de 
cette  agraphe.  P.  49. 


—  376  — 


PEROU.  Convention  du  90  juillet 
4897  entre  la  France  et  le  Pérou 
ponr  la  protection  de  la  propriété 
industrielle.  P.  845. 

PERSOIVrVAI^ITJB  (V.  Attein- 
tes à  la), 

photographie:.  Doit  être 
condamné  à  des  dommages-inté- 
rêts le  photographe  qui,  sans  auto- 
risation du  peintre,  a  reproduit 
les  œuvres  que  celui-ci  a  vendues 
à  des  amateurs  et  a  mis  en  vente 
ces  reproductions ,  sauf  à  tenir 
compte,  dans  la  fixation  du  chilTre 
des  dommages-intérêts  alloués,  de 
cette  circonstance  qae  le  peintre 
n'a  guère  subi  en  réalité  qu'un 
préjudice  moral.  P.  129. 

PliAGIAT  (Y.  Responsabilité), 
— •  Le  fait  de  s'approprier,  pour  en 
composer  un  roman,  un  drame 
historique,  dans  son  titre,  son  su- 
jet, sen  plan,  ses  scènes,  leur  agen- 
cement, leur  marche,  ses  person- 
nages, leurs  noms,  leurs  titres, 
leurs  professions,  leurs  passions* 
leurs  actes,  leur  langage  et  leurs 
impressioi  s  particulières,  cons- 
titue un  plagiat  général  qui  doit 
être  réprimé  non  par  la  suppres- 
sion de  certains  passages  servile- 
ment reproduits  du  drame,  mais 
par  une  mesure  de  suppression 
totale,  avec  allocation  de  domma- 
ges  et  intérêts.  P.  118. 

PORTRAIT.  La  convention  par 
laquelle  un  peintre  s'engage  à 
exécuter  un  portrait  moyennant 
un  prix  déterminé  constitue  un 
contrat  d'une  nature  spéciale,  en 
vertu  duquel  la  propriété  du  ta- 
bleau n'est  définitivement  acquise 
à  la  partie  (jui  l'a  commandé,  quo 
lorsque  Tarliste  a  mis  ce  tableau 
à  sa  disposition  et  qu'il  a  été  agréé 
par  elle  ;  jusqu'à  ce  moment,  le 
peintre  reste  maître  de  son  œuvre 
sans  toutefois  qu'il  lui  soit  loisible 
de  la  retenir  pour  lui-même  ou 
d'en  disposer  au  profit  d'un  tiers 
à  Tétat  de  portrait,  le  droit  de 
reproduire  les  traits  du  modèle 
ne  lui  ayant  été  concédé  crue  con- 
ditionnellement,  en  vue  de  l'exé- 
cution complète  du  contrat.  Le 
peintre,  faute  de  satisfaire  à  ses 
engaigements,  se  rend  seulement 
passible  de  dommages-intérêts  en- 
vers l'auteur  de  la  commande, 
sans  que  ce  dernier,  qui  n'est  pas 


devenu  propriétaire  du  tableau, 
puisse  exiger  que  remise  lui  en 
soit  faite  en  l'état  actuel.  P.  111. 

PORTUGAIS.  La  clause  de  libre 
et  facile  accès  insérée  dans  le 
traité  de  commerce  franco-portugais 
de  1853  et  qui,  non  abrogée  par 
les  traités  de  1866  et  de  1881,  dis- 
pensait les  Portugais,  en  France, 
de  la  caution  judicatum  solvi,  a 
cessé  de  produire  efitet  après  la 
dénonciation,  en  1892,  du  traité  de 
commerce  alors  en  vigueur.  P. 
189. 

POURSUITE  finir  CONTRE- 
FAÇOIV.  Est  régulière  et  vala- 
ble la  poursuite  exercée  en  vertu 
d'un  brevet  qui  n'a  jamais  été 
exploité,  si  elle  est  intentée  moins 
de  deux  ans  après  la  délivrance 
du  brevet  ;  on  ne  saurait  attacher 
à  l'inaction  dans  laquelle  est  de- 
meuré postérieurement  le  breveté 
un  effet  rétroactif  que  la  loi  n'a 
pas  édicté.  P.  257. 

PRÉDÉCESSEUR.  Bien  qu'an 
industriel  puisse,  avec  l'assenti- 
ment de  son  prédécesseur,  laisser 
apparaître  seulement  le  nom  de 
ce  dernier  sur  ses  produits,  éti- 
quettes et  prospectus,  cet  indus- 
triel  se  rend  coupable  de  concur- 
rence déloyale  en  profitant  de 
l'identité  de  consonnance  du  nom 
de  son  prédécesseur  (Daver)  avec 
celui  d'un  antre  concurrent  (Piver) 
et  en  indiquant,  alors  que  1  indus- 
triel concurrent  habite  Paris,  sur 
ses  produits,  étiquettes  et  pros- 
pectus Paris,  tandis  que  le  dé- 
fendeur ou  son  prédécesseur  ont 
toujours  habité  la  province  et 
n'ont  jamais  en  à  Paris  ou  aux 
environs  leur  usine  ou  même  une 
maison  de  débit.  P.  173. 

PROCÉDURE  (V.  Assignations 
jonction  d'instances).  —  Les  ac- 
tions en  nullité  ou  déchéance  des 
brevets,  les  contestations  relatives 
à  la  propriété  des  brevets  doivent 
être  jugés  par  les  tribunaux  civils 
comme  matières  sommaires  ;  maù 
les  poursuites  civiles  en  contre- 
façon doivent  être  jugées  en  la 
forme  ordinaire,  alors  même  qu  a- 
vant  de  les  introduire,  le  deman- 
deur aurait  fait  saisir  des  échan- 
tillons des  produits  qu'il  prétenil 
avoir  été  contrefaits.  Il  n'en  serait 
autrement  que   si  le  défendeur, 


^■9"^ 


—  377  — 


agissant  reconventionnellement, 
avait  soulevé  une  question  de  nul- 
lité, de  déchéance  ou  de  propriété 
de  brevet.  P.  64. 

PRODUITS  VirVlCOUBS.  Les 

appellations  régionales  de  prove- 
nance de  produits  vinicoles  ne 
peuvent,  aux  termes  de  la  loi  du 
13  avril  1892,  portant  approbation 
de  l'Arrangement  de  Madrid,  être 
considérées  comme  devenues  gé- 
nériques. Il  en  est  ainsi  du  nom 
de  Cognac  pour  les  eauz-de-vie, 
car  les  eauz-de-vie  de  Cognac 
sont  des  eauz-de-vie  de  vin  et  par 
conséquent  des  produits  vinicoles. 
P.  177.  —  Les  vins  dits  de  liqueur, 
tels  que  les  vins  de  Madère,  sont 
compris  parmi  les  produits  vini- 
coles dont  les  appellations  régio- 
nales de  provenance  ne  peuvent 
être  considérées  comme  généri- 
ques, anz  termes  de  Tarficle  4  de 
TÂrrangement  de  Madrid.  P.  212. 

PROPRIÉTÉ  ARTlSTiaiIK 

(V.  Convention  de  Berne,  Costa- 
Rica,  décora,  GuatemcUa,  Luxem- 
bourg^  œuvres  artistiques,  photo- 
graphie,portrait,  propriétaire,  re- 
production, responsabilité,  traité 
de  Montevideo,  vérification  d'écri- 
ture.  —  V.  aussi  Bibliographie, 
P.  312). 

PROPRIÉTÉ  L.ITTÉRA1RB 

(V.  Plagiat,  responsabilité,  —  V- 
aussi  Bibliographie.  P.  312). 

PCBI^ICATIOIV  DE    JUGU- 

MifilVT.  En  rahsence  de  faute  et 
de  préjudice  il  n'y  a  pas  lieu  d'au- 
tonsër  la  {publication  d'une  déci- 
sion judiciaire  auz  frais  de  la  par- 
lie  intéressée  ;  il  lui  appartient,  si 
elle  juge  utile  de  faire  connaître 
la  consécration  de  son  droit  par 
les  tribunaux,  de  se  conformer 
aux  règles  do  droit  commun  en 
évitant  toute  indication  de  nature 
à  nuîie  à  des  tiers.  P.  157. 

PROPRIÉTÉ  UVDUSTRIEL.- 

I«B  {V ,  Pérou,  Mexique,^  V.anssi 
Bibliographie,  p.  286). 

PUBIjICITÉ.  Le  fait,  par  un  in- 
dustriel,dedonnerunepubiicitéex- 
cessive  à  un  procès  en  contrefaçon 
intenté  à  une  maison  rivale  dont 
il  cherche  plus  particulièrement  à 
combattre  la  concurrence,  notam- 
ment par  des  annonces  réitérées 
dans  les  journaux  spéciaux  et  par 


l'apposition  d*affiches  sur  les  murs 
d'une  ville  où  la  maison  poursui- 
vie a  des  dépôts  de  ses  produits 
constitue  des  agissements  abusifs» 
dont  il  est  dû  réparation.  P.  257. 


REPRODUCTIOIV     (DROIT 

DE)  (V.  Médailles, original,  pro- 
priétaire), —  En  matière  de  pro- 
priété artistique  et  dans  le  silence 
du  contrat,  l'amateur  qui  achète 
une  œuvre  d'art  doit  être  pré- 
sumé n'avoir  acquis  que  l'objet 
même  ;  le  droit  de  le  reproduire 
(spécialement  par  la  pnotogra- 
phie)  demeure  la  propriété  de 
l'artiste.  Mais  si  le  propriétaire 
d'une  œuvre  d'art  ne  peut  la  re- 
produire ou  la  laisser  reproduire, 
il  est  en  droit  d'empêcher  Tauteur 
de  faire  lui-même  des  reproduc- 
tions-répétitions, à  sa  guise,  car  à 
moins  de  convention  contraire  il  a 
acheté  l'objet  dans  le  but  de  le 
posséder  à  titre  exclusif.  P.  129. 

—  L'auteur  d'une  œuvre  d'art  en 
devient  propriétaire  par  le  seul 
fait  de  sa  création  ;  c'est  à  celui 

2ui   prétend    se     prévaloir    d'un 
roit  de  reproduction  de  prouver 
que  ce  droit  lui  a  été  cédé.  P.  131. 

—  La  remise,  par  un  tiers,  de 
modèles  de  fontaines  à  un  fondeur 
pour  les  reproduire  en  bronze 
ne  saurait  lui  concéder  le  droit 
d'exécuter  d'autres  fontaines,  en 
dehors  de  celles  qui  lui  ont  été 
commandées.  P.  131.  —  Jugé,  au 
contraire,  qu'il  est  de  principe 
consacré  par  la  jurisprudence  que 
le  droit  de  reproduction  est  l'ac- 
cessoire du  droit  de  propriété  de 
l'objet  matériel,  dont  il  ne  peut 
être  détaché  que  par  l'effet  d^une 
convention  spéciale.  P.  135.  — 
L'artiste  qui  vend  son  œuvre  sans 
réserve  n'aliène  pas  l'espérance  de 
réputation  que  peut  lui  assurer  la 
publicité,'  parce  qu'il  s'agit  là 
d'une  cliose  inaliénable  :  u  a  le 
droit  de  se  défendre  contre  un 
fait  qui  consiste  à  lui  imputer  une 
œuvre  différente  de  la  sienne.  Le 
cessionnaire  du  droit  de  repro- 
duction doit  donc  se  cantonner 
dans  le  procédé  pour  lequel  il  a 
traité  et  publier  l'œuvre  telle 
qu'elle  lui  a  été  vendue  :  il  ne 
peut  altérer  celle-ci,  la  modifier, 
y  flaire  des  changements,  sans 
porter  atteinte  aux  droits  de  l'ar- 
tiste. Ainsi,  le  cessionnaire  porte 


—  378 


atteinte  aux  droits  de  l'artiste  en 
publiant  des  dessins,  sous  la  si- 
gnature de  l'artiste,  avec  des  lé- 
gendes et  dialogues  différents  des 
légendes  et  dialogues  originaux. 
En  revanche,  l'éditeur  peut  chan- 
ger les  dimensions  du  dessin,  si 
ce  changement  ne  modifie  pas, 
en  réalité,  le  caractère  de  l'œuvre; 
il  a,  de  même,  le  choix  du  coloris, 
s'il  n*est  pas  établi  que  le  coloris 
le  plus  propre  à  faire  ressortir  le 
dessin  rût  compris  dans  la  ces- 
sion. P.  361. 

liÉSULlATIOIV.  Lorsque  Tinven- 
teur  oui  a   concédé  une   licence 

*  pour  1  exploitation  de  son  inven- 
tion a  stipulé  que,  dans  le  cas  où 
se  réaliserait  une  condition' déter- 
minée, il  reprendrait  la  libre  dis- 
position de  tout  ou  partie  de  Tin- 
vention  concédée,  il  ne  saurait  lui 
appartenir  de  se  faire  juge  de  la 
réalisation  de  la  condition  :  à  dé- 
faut de  mise  en  demeure  et  tant 
qu'il  n'a  point  fait  constater  judi- 
ciairement l'arrivée  de  la  condi- 
tion, il  demeure  dans  les  liens  de 
son  traité  et  ne  saurait  être  con- 
sidéré comme  ayant  recouvré  son 
droit  de  disposition  ;  par  suite, 
s'il  concède  à  un  établissement 
concurrent  la  licence  primitive- 
ment concédée  par  un  traité  tou- 
jours en  vigueur,  le  nouveau 
traité  doit  être  rétracté  et  des  dom- 
mages-intérêts doivent  êtrealloués 
au  concessionnaire  primitif,  indû- 
ment dépossédé.  P.  84. 

BESPOIWSABILITÉ  (V.  Agent 
général).  —  Le  fait  d'avoir,  dans 
une  lettre  confidentielle,  dénié 
l'authenticité  d'un  tableau ,  ne 
saurait  donner  ouverture  à  une 
action  en  responsabilité,  alors  sur- 
tout que  la  réception  de  cette  let- 
tre n'a  causé  aucun  préjudice 
au  tiers  détenteur  du  tableau. 
P.  109.  —  Les  auteurs  d'un  ro- 
man, alors  même  qu'ils  se  sont 
dessaisis  de  la  propriété  de  leur 
ouvrage,  restent  responsables  du 
préjudice  qu'ils  ont  causé  en  l'é- 
crivant et  en  le  livrant  au  public. 
P.  118. 

RRSUIiTAT  IIVOUSTRIEXi. 

On  ne  saurait  considérer  comme 
une  invention  positive  et  prati(|ne 
réalisant  un  résultat  industriel, 
celle  qui,  destinée  au  public  en 
général,  exige  par  sa  mise  en  œu- 


vre un   outillage  spécial    et  une 
hnbileté  peu  commune.  P.  2.^7. 


SAISIE      (Y.     Arrangement    de 
Madi^id,  caulionnemenfy  domma- 
ges-intérêts). —  L'Arrangement  de 
Madrid   ayant  expressément  pro- 
hibé l'introduction,   dans  on  des 
Etats   signataires,  de  produits  vi- 
nicoles  revêtus  d'une  fausse  indi- 
cation de  provenance,  il  j   a  Heu 
à  saisie,  même  si  les  destinataires 
connaissaient  la  provenance  réelle. 
P.  212.  —  La  saisie  dans  les  for- 
mes de  la   loi  régionale  (art.   19 
de  la  loi  du  28  juin  1857)  est  ex- 
pressément la  sanction  légale  des 
dispositions  prohibitives  de   l'Ar- 
rangement de  Madrid.  P.  212.  — 
Les  articles  1   et  2  de  PÀrrange- 
ment    de   Madrid,  autorisant  ex- 
pressément la  saisie  des  produits 
revêtus   d'une    fausse    indication 
de   provenance  et  s'en   référanf, 
pour  la  forme  de  cette  saisie,  à  la 
lé^'islation   intérieure    de  chaque 
Elat,  ont  étendu  à  tous  les  fabri- 
cants ou  producteurs  appartenant 
aux  Etats  contractants  le  bénéfice 
des  lois  qui  répriment  les  fausses 
indications  de  nom  ou  de  lien  d'une 
fabrique  française  ;  la  saisie  peut 
donc  avoir  lieu  en  vertu  de  l'article 
11)  de  la  loi  du  23  juin  1857.  P. 
2:)2. 

SOCIÉTÉS  (V.  NationalUé),  - 
Une  société  étant  formée  pour 
l'exploitation  des  brevets  pris  ou 
à  prendre  au  nom  du  gérant,  avec 
stipulation  que  la  libre  disposition 
et  la  jouissance  de  ces  brevets 
feront  retour  audit  gérant  après 
la  dissolution  de  la  société,  le 
gérant  n'a  pas  qualité  pour  passer 
en  son  nom  personnel  des  contrats 
de  cession  de  licence  des  brevets; 
même  si  ces  contrats  excèdent  le 
terme  fixé  pour  la  durée  de  U 
société,  le  prix  des  cessions  con- 
senties pendant  l'existence  de  la  so- 
ciété appartient  tout  entier  à  celle- 
ci.  P.  43.  —  L'apport  fait  à  une 
société  par  l'un  des  associés  de 
son  droit  à  l'exploitation  d'un  bre- 
vet d'invention  dont  il  conserve 
la  |)ropriété,  fait  partie  de  l'avoir 
social  et  permet  à  cette  société,  in- 
tegri  status ^  de  céder  ce  droit  i  un 
tiêrs.Le  breveté  qui  ne  s'est  ]^8  ré- 
servé la  reprise  de  l'exploitation  en 
cas  de  dissolution  anticipée  de  la 


-  379  — 


société  est  tenu  de  respecter  cette 
cession  faite  dans  la  limite  de  la 
dnrëe  prévue  de  la  société.  P.  46. 

SYNDICAT  (V.  Liberié  commer- 
ciale  et  industrielle).  —  Les  syn- 
dicats professionnels,  établis  dans 
les  termes  de  la  loi  do  21  mars 
1884y  peuvent  se  concerter  poar 
défendre  leurs  intérêts,  mais  à 
condition  de  se  conformer  anx  rè- 
gles de  la  justice  et  sans  porter 
atteinte  aux  droits  d*autrni.  P.  105. 


THOSATRE  (V.  Décors).  —  Est 
licite  et  doit  produire  tous  ses  ef- 
fets, le  traité  passé  entre  un  di- 
recteur de  théâtre  et  un  marchand 
de  billets,  chef  de  claque,  par  le- 
quel le  directeur  a,  moyennant 
ane  somme  payée  d'avance,  mis  à 
la  disposition  de  cet  individVun 
certain  nombre  de  fauteuils  et  des 
places  de  troisième  galerie,  spé- 
cialement affectées  an  service  de 
claque  :  un  tel  contrat  ne  saurait 
âtre  divisé  en  un  contrat  de  griffe 
pour  les  fauteuils  et  un  contrat  de 
claque  pour  les  places  de  troi- 
sième galerie,  mais  constitue  un 
tout  indivisible  formant  un  contrat 
de  claque.  Par  suite,  lorsque  ce 
traité  a  été  signé  pour  un  nombre 
déterminé  de  représentations  et 
qae  le  directeur  de  théâtre  vient  à 
cesser  son  exploitation  avant  d'a- 
voir donné  le  nombre  de  repré- 
sentations déterminé,  ce  directeur 
doit  être  condamné  à  rembourser 
au  marchand  de  billets,  chef  de 
clague,  à  titre  de  dommages-inté- 
rêts, la  somme  représentant  la  ré- 
paration du  dommage  qu'il  a 
éprouvé  par  la  privation  des  pla- 
ces qui  devaient  être  mises  à  sa 
disposition.  P,  358. 

TmUB   DB  UrOBI^SSB  (V. 

Majorai), 

TRAITB  DB  MOIVTÉ  VIDÉO. 

Adhésion  de  la  France,  accepta- 
tion de  la  République  Argentine 
et  du  Paraguay.  P.  347. 


TIUBUIVAUX        (POUVOIR 

DBSj.  Les  tribunaux  ont  un  pou- 
voir souverain  pour  réglementer 
des  droits  rivaux  et  notamment 
pour  individualiser  chaque  mar- 
que ou  étampe  en  imposant  à  ces 
marques  ou  étampes  des  signes 
distinctif^  de  nature  à  prévenir 
toute  confusion.  P.  6.  —  Il  n'ap- 
partient pas  aux  tribunaux  de  pres- 
crire dans  quelle  mesure  et  sous 
quelle  forme  il  serait  licite  pour  un 
industriel  d'invoquer  sur  des  éti- 
quettes et  dans  des  réclames  l'a- 
nalogie que  présenterait  une  eau 
mise  en  vente  avec  des  eaux  simi- 
laires antérieurement  réputées. 
P.  15.  —  11  appartient  aux  tribu- 
naux français  d'interpréter  une 
convention  internationale,  telle 
que  l'Arrangement  de  Madrid,  qui, 
par  la  volonté  du  Parlement,  est 
devenue  une  loi  française,  alors 
surtout  que  la  disposition  litigieu- 
se de  cette  convention  n'est  su- 
jette à  aucune  ambiguïté  et  a  uni- 
cruement  pour  obiet  des  intérêts 
d'ordre  privé.  P.  212.  —  Les  tri- 
bunaux minçais  ont  la  faculté  de 
se  prononcer  sur  la  validité  d'un 
brevet  étranger,  au  regard  de  la 
loi  à  laquelle  il  est  soumis  ;  mais 
ils  ne  doivent  user  de  cette  faculté 
que  lorsqu'il  s'agit  d'appliquer  un 
texte  formel  ou  un  principe  essen- 
tiel dominant  la  législation  dont 
s'agit.  P.  257. 


VBRIFICATIOIW  D'BCRrrU- 

RB.  La  procédure  de  vérification 
d'écriture  n'est  pas  applicable  à 
la  signature  d'un  tableau,  puisque 
l'authenticité  de  cette  signature  ne 
suffit  j^s  toujours  à  établir  l'au- 
thenticité de  l'œiivre  et  que  l'ar- 
tiste qui,  en  produisant,  n'a  con- 
tracté aucun  engagement  vis-à-vis 
de  personne  ne  saurait  être  tenu 
de  déférer  aux  réquisitions  indis- 
crètes d'un  tiers  avec  lequel  il  n'a 
aucun  lien  de  droit.  P.  109. 


/ 


p 


TABLE  CIR0N0L06IQDE 

DES  JUGEMENTS  ET  ARRÊTS 

CONTENUS  DANS  LE  TOME  XL VI 


18T7 

8  Août   G.  DE  Lton, 

1880 

21  Joill.  C.  D*Aix, 


âO  JanT.  C.  DE  Bastia, 

10  Aoàt  I'rib.  de  Besançon, 

12  Dec.   C.  DE  Besançon, 

1890 

29  Avril  G.  de  Nancy, 

1804 

15  Mars   G.  de  Riom, 
()  Juin    Trib.  Seine, 

12  Dec.    Trib.  Seine, 

1806 

19  Mars  Trib.  Seine, 

16  Mai     Trib.  mixte  du  Caire, 

17  Jain    Trib.  Seine, 

25  Nov.    Trib.  comm.  Seine, 
24  Dec.    Trib.  du  Havre, 


tsent 


1«rFévr. 

8  c 
17  Mars 

6  Mai 
25    « 

15  Jain 
30    « 
29J[nin. 
29     « 
10  Août 
17  Nov . 
24     c 

16  Dec. 


11  Janv.  C.  d'Aix, 


81 


15 


21 

169 
169 


9 


43 

60 

234 


173 
129 

232 

34 

190 


Cabs.  giv.,  43 

Trib.  Seine,  109 

Trib.  civ.  Bruxelles,    70 


Trib.  Seine, 

259 

Trie.  Seine, 

60 

Trib.  Seine,. 

234 

Trib.  Seine, 

275 

G.  DE  Bordeaux, 

49 

G.  DE  Douai, 

46 

C.  DE  Paris, 

21 

G.  DE  Bordeaux, 

40 

G.  DE  Rouen, 

197 

G.  DE  Bordeaux, 

5 

7  Avril 
10  Mai 

8  Jaill. 
25  0ct. 

9  Nov. 
9     c 

12  Dec. 


Trib. 
Trib. 
Trib. 
Gass. 
Cabs. 
Gass. 
Cabs. 


Seine, 

Seine, 

Havre, 

civ., 

civ., 

REQ., 
REQ., 

1899 


5  Janv. 
18     « 
24     « 
27      c 
27      « 

9  Févr. 

6  Mars 

7  « 
13     « 

2  Mai 
10  c 
30     « 

2  Juin 
16      « 
21      « 
21  Juin. 
l«'Août 

6  Nov. 
29     a 

7  Dec. 
16     « 
26     « 


Trib.  Seine, 
Trib.  Seine, 
G.  DE  Bordeaux, 
G.  de  Paris, 
Trib.  du  Havre, 
G.  DE  Dijon, 
Trib.  comm.  Seine, 
G.  DE  Paris, 
G.  DE  Paris, 
Gass.  rbq., 
Trib.  Seine, 
G.  DE  Lton, 
Trib.  Seine, 
Trie.  Seine, 
G.  DE  Paris, 
G.  DE  Douai, 
G.  DE  Paris, 
Trib.  Seine, 
Trir.  Arras, 
G.  DE  Paris, 
Tbib.  Seine, 
Cabs.  req., 


1900 


15 


2  Janv. 

25  c 
29     « 

2  Févr. 

7  « 
5  Mars 

14  «c' 

15  « 

17  € 
5  Avril 

1er  Mai 

8  « 

18  « 
20  Juin 

26  c 


G.  DE 
G.  DE 
G.  DE 
G.  DE 
G.   DE 

Gass. 
Gass. 

G.  DE 
G.  DE 
G.  DE 
G.  DE 
G.  DE 
G.    DE 

Gass. 

G.   DE 


Paris, 
Paris, 
Paris, 
Paris, 
Riom, 

REQ., 

civ., 

Paris, 

Paris, 

Paris, 

Paris, 

Paris, 

Douai, 

CRIM., 

Rouen, 


151 

67 

215 

141 

33 

32 

8 


55 

100 

96 

89 

218 

157 

103 

124 

232 

49 

35 

166 

75 

135 

17» 

64 

131 

151 

176 

62 

361 

196 


89 
119 

82 
121 
105 

76 
111 
234 

78 
358 
259 

84 
177 
139 
227 


TV^ 


TABLE  DES  NOMS  DES  PARTIES 


Achard  (Frédéric). 
Àncelin  (veuve). 
Arger. 
Amoald. 
Aubriot 

B 

Bady. 

Bandsept.  * 

Banillat. 

Bartlett. 

Belol. 

Bergère, 

Berlitz. 

fiemheim  jeune. 

Berthelot. 

Besflp 

Blandy.     189,  212 

Blot. 

Bondreaux. 

Bottffard. 

Bonffé. 

Bonhours. 


34 
89 
23 
22 
10 

55 

70 
166 
275 

60 
358 
151 
109 

96 

275 

et  232 

275 

64 
6 

32 
257 


103 


Cahen. 
CaOQtchoac    manu- 
facturé    (Gompa  - 
gnie  française  du)    275 
Chauffage     hygiéni- 
gue     (Compaffnie 
internationale).         89 
Clemenceau.  63 

Clémencet.  156 

Clément     Gtadiator    ' 

Humbert  (Société).    67 
Clerc.  64 

Clermont  -  Ferrand 
Chambre  (syndica- 
le de  Fameuble- 
ment  de).  105 

Cohen.  173 

Gollonge.  151 

Comiot.  275 

CarUer.  232 

D 


Dalifol. 

257 

Damaire. 

64 

Debiëre. 

124 

Decourdemanche.  275 

Oegrave.  275 

Degrelle.  47 

Delacroix.  76 

Depay.  96 

Di  Ghiara.  151 

Diez  hermanos.  212 

prumont.  124 

Dubois.  134 

Dumartheraj.  151 

Dumas  (héritiers).  119 
Dunlop  (The  Dunlop 
TyreCie  et  Compa- 
gnie française  des 
pneumatiqu  es 

(Dunlop).  257 

Du verger.  76 

B 

Eaux  du  Boulbu  (Société 

des).  15 

Eaux  minérales  et  Bains 
de     mer  (Société 

des).  32 

Eaux   d'Orezza     (Société 

des).  22 

Eaux  de  Vais  et  du  Pes- 

trin  (Société  des)  31 

Eclair  36 

Edeline.  257 

Eden.  111 

F 

Faure.  43 
Fayard  (frères).    119,361 

Fleury.  75 

Force  (Société  la).  275 

Forest.  89 

Forpomis.  139 

Fourmentin.  276 

François.  275 

Frère.  15 

G 

Gaillardet  (héritiers)  119 

Gally  10 
Gallus   (Société  des 

pneumatiques).  275 

Garnier  (consorts).  96 

Gauthier  (L.).  166 

Germain.  34 


Gillet.  89 

Gillou.  31 

Grellou.  275 
Gruson  (héritiers).      234 

Guérin.  100,108 

Guibaud.  49 

Guichard.  41 


n 

Hamond. 

275 

Hauzer  frères. 

275 

Henry  et  Oie. 

32 

Hetley. 

275 

Hydrominérale     de 

Vais  (Grande  Cie). 

I 

Industrielle  (1'). 

31 

81 

J 

Jacques  frères. 

109 

Job. 

10 

Juge  (de). 

142 

K 

Ressler. 

43 

Kircheiss. 

55 

L. 

Lageanèvre(de). 

358 

Lallouette. 

47 

Lanneau. 

109 

Lassalle. 

47 

Lauret. 

31 

Le  Bourg. 

131 

Legler  Pernod. 

169 

Lekizian. 

129 

Levé-Diéval. 

177 

Lcvy  (G.  et  M.) 

275 

Locomotion  universelle 

(la). 

275 

Luigi. 

22 

M 

Mainguet. 

139 

Marlier. 

10 

Marié  et  Cie. 

275 

Martell  et  Cie. 

277 

May. 

124 

Mayaudon. 

173 

—  384  — 


Meissonnier. 
Métaux  (Compagnie 

française  des). 
Metenier  (Oscar). 
Idichelin. 
Michelin. 
Monplot. 
Montebelio  (de). 
Moral. 
Muller. 

Nicolaï. 


O 


Obier. 
Oury. 


Parent. 

Paul    Dupont  (impri- 
meries). 
Peugeot  frères. 
Photo-programme . 
Piat  et  fils. 
Piatier  V'«. 


31 

84 
86 
257 
275 
22 
141 
275 
156 


Pingault.  64 

Pi  ver  et  Cie.  173 

Préfet  de  la  Corse.        22 


R 

Raba. 

Radigoin. 

Real. 

Rey  (F.  et  H.). 

Richard  (G.). 


6 

100,130 

32 

70 

275 


22 

Savine. 
Schiffi. 
41    Schmoll. 
275   Schneider  et  Cie. 
Serramalera  y  Com- 
pos. 
47    Serve. 
Serve. 
103    Soir  (le). 
259    Sorel  (Agnès  dit), 

121  fm 

78  * 

22    Tascher  frères. 


124 
129 
100 
234 

75 
81 
84 
63 
361 


49 


Théâtre  de  la  Porte  St- 

Martin  (Société  do).  121 
Thioust.  105 

Torilhon  et  Cie.  275 


Val  d'Osne.  131 

Varinard.  8 

Vasseor.  GO 

Veil  Picard.  169 

Vicherat  Norizot.  10 
Vichy    (Cie  fermière 

de).  8,15 

Vital.  259 

U 

Union  des  Sociétés  de 
tir  de  France.  13i 


i;v 


Wellhoff. 
Whistler. 
Willame. 


151 

111 
55 


Imp.  J.  Tbevenot,  Sainl-Dider  (Hte-Marae^. 


six  autres  semaines  moyennant  le  payement  d'une  sur- 
taxe. Le  nouveau  mode  de  compuLation  des  délais  pres- 
crit par  le  Code  civil  va  faire  rentrer  dans  ledélai  le  jour 

(1)  Nom  doanoni  cette  Conv«nlton  à  titre  de  renBe[gneineiil.  Uuw  on 
peut  se  deiDioder  »  ce  texte  aEiure  aux  regsortisBonls  la  protection  de 
la  propriétâ  indoehlelle  et  des  marques. 


—  12  — 

euvenl  èlre  vendus  commercialement  ou  mis  en  vente, 
a  détail,  que  dans  certaines  unités  de  poids  et  avec  in- 
icalion  du  poids  total,  les  fils  de  coton  jusqu'à  concur- 
înce  de  100  mètres  de  long,  aussi  dans  certaines  unités 
e  longueur  et  avec  indication  de  la  longueur.  Sont  ex- 
eplés  :  les  tîls  qui  sont  vendus  pour  l'achèvement  de  ma^ 
handises  préparées  et  en  combinaison  avec  elles,  les  âls 
e  colon  à  coudre  qui  sont  disposés  sur  des  bobines  de 
ois,  les  iils  qui  sont  mesurés  ou  pesés  à  l'acheteur.  Suit 
indication  des  poids  el  des  longueurs,  avec  prescrip- 
ons  détaillées.  Ces  dispositions  n'entreront  en  vigueur 
u'au  1"  janvier  1903. 

Désignations  et  réclames  médicales.  —  Un  arrêté  de  la 
ireclion  do  la  police  royale  à  Berlin,  en  date  du  là  fé- 
rier  1898,  prescrit  à  quelles  conditions  est  soumis  l'u- 
âge  des  litres  de  médecin  el  autres  désignalions  profes- 
ionnelles  reJRtives  à  l'art  de  guérir,  ainsi  que  des  quali- 
califs  honorifiques  (G.  S  s.,  juin  1898,  p.  190). 

Dispositions  relatives  à  la  protection  de  la  propriété  lit- 
iraire,  artistique  et  industrielle  dans  les  circonscriptions 
insulaires  et  les  pays  de  protectorat.  —  Les  dispositions 
es  lois  concernant  la  protection  des  œuvres  de  littéra- 
ire et  d'art,  des  photographies,  des  inventions,  des  des- 
ins  et  modèles,  des  modèles  d'utilité  el  des  marques  de 
larchandiseH  sont  applicables  dans  les  circonscriptions 
onsulaireset  dans  les  pays  de  protectorat.  Cela  résultait 
éjà  de  communications  faites  parle  patenlamt  au  Bu- 
ïau  de  Berne  (/e  Droit  d'auteur,  1897.  77  ;  la  Prop.  ind., 
1499.  91)  (l).C'eat  confirmé  définitivement  par  la  loi  du  7 
vril  1900  sur  la  juridiction  consulaire  etla  loi  du  25  juil- 
;t  1900  sur  les  protectorats  (le  Droit  d'auteur,  i9fiiAi). 

Antilles  ânql&isës 
{Trinidad  et  Tobago).  —  Ordonnance,»"  lO.de  1900.  por- 

(1)  Voir  un  article  iuliluld  Da$  Gellungtgetiet  det  tleuUchen  Pa- 
nt  und  toniligenAuÊichhutrechte  (le  domaine  de  la  légiilalîoD  alle- 
ande  ttir  Us  breveta  et  autres  droiU  eicluiifs),  par  P.  Damme  {Arekiv 
tr  ùffentlichet  Rechl,  anoée  IBOO,  1"  cahier).  C'est  une  étade  sur  l'ap- 
jcatilitë  de  la  iëgislalion  allemande  en  matière  da  propriété  indas- 
ielle  et  de  concurrence  déloyale  dans  les  coloniea  et  les  tribunaui  eon- 
ilaires  de  rAllenia^iDe. 


(  imponanon  et  la 
fabrication  tféliquettei  de  nature  à  induire  en  erreur  sur  la 
provenance  des  marchandises.  —  Cette  loi  (Prop.  ind.,  fév. 
1898,  p.  18)  interdit:  a  —  d'imporler  et  de  fabriquer  des 
étîqueltes  qui  se  prêtent  à  la  fabrication  de  boissons  ou  de 
tous  autres  produits  nationaux,  dans  le  but  de  les  vendre 
comme  s'ils  étaient  étrangers  ;  6  —  de  mettre  en  vente  des 
préparations  pharmaceutiques  sans  la  déclaration  du  nom 
du  fabricant,  du  produit  et  du  lieu  de  provenance  ;  c  —  de 
mettre  en  vente  des  marciiandises  ou  produits  manufactu- 
rés nationaux  sous  une  étiquette  en  langue  étrangère.  Ex- 
ception est  faite:  à  l'interdiction  a,  pour  les  succursales 
de  maisons  européennes,  sous  la  condition  de  faire  cer- 
taines preuves  ;  à  l'inlerdiction  c,pour  les  étiquettes,  sauf 
celles  de  produits  alimentaires,  qui,  sans  constituer  une 


Le  même  droit  apparlie 
invention  ou  de  sa  déco 
■  Les  lois  concernant 
luslrielle  désignent  tes  | 
:e  droit,  les  modes 'de 
Dans  les  cas  non  prévu: 
es,  seront  appliquées  le 
,e  présent  Code  en  mati 
L'ne  loi  sur  les  brevets, 
30.74),  dit  seulement  ( 
liront  d'un  monopole  \ 
:e  annuelle  de  5  à  10  pt 
r.  50]  et  l'accomplissem 
es  par  un  règlement  sf 
i  auront  obtenu  des  brev 

faire  enregistrer  dans 
:ionaux,  mais  en  pa^aii 
[iscription,  une  somme 
i  (le  peso  or  vaulBfr.). 
reau  des  brevets  dépen 
.'article  269  du  Code  p 

menor  à  son  degré  m( 
vaux  forcés]  la  falsidcat 
contre-marques  emplo 
jsements  d'industrie  ou 
re  passible  de  la  peine 
jrieur  (31  jours  à  un  ai 
a  mis  en  circulation  df 
çant  sur  ceux-ci  la  ma 
it  par  la  marque  ou  le 
;é. 

Jersey  e 

^rûleclion  international 
mances  du  14  juillet  18 
a  publication  des  lois  e 
irnationalc  des  droits  d< 
îure  soil  essentielle  p 
.,  mais  dans  le  but  de  fi 
;3  qui  y  résident  qu'ellt 
par  elle  {le  Droit  d'à 


pourra  encore  être  versée  dans  les  3  mois  qui  suivront 
l'éctiéance.  mais  moyennant  une  amende  égale  à  10  0/0 
de  la  taie,  le  l"mois,  à  15  0/0,  le  second  mois,  à  35  le 
3*,  toute  fraction  du  mois  étant  comptée  pour  un  mois 
(ta  Prop.  ind.,  1900.  184). 

SoÊDE 

Brevet»  d'invention.  —  Marques.  —  Ordonnances  roya- 
les et  instruction  royale  révisées  pour  le  Bureau  des  bre- 
vets et  de  l'enregislremenlelpourla  tenue  du  registre  des 
marques  de  fabrique  et  de  commerce,  du  18  novembre 
1898  (la  Prop.  ind.,  1899.  219)  (1). 

Brevets  étrangers.  —  Délai  de  priorité.  —  Obligation 
d'exploiter.  —  Loi  du  TI  mai  1898,  modiHanl  l'article  35 
de  l'ordonnance  du  16  mai  1884  (2)  et  d'après  laquelle  le 
Koi /courra,  par  décret,  fixer  le  délai  de  priorité  accordé 
aux  brevetés  étrangers, soit  à  7  mois  du  jour  de  la  demande 
dans  l'Etat  étranger,  soit  à  3  mois  de  l'annonce  de  la  dé- 
livrance du  brevet  étranger,  et  dispenser  de  l'exploitation 
de  son  brevet  en  Suède  le  sujet  d'un  Etat  étranger  ou 
toute  autre  personne  ayant  son  domicile  ou  son  principal 
établissement  dans  ledit  Etat,  qui  aura  obtenu  antérieu- 
rement  dans  l'Etal  étranger  un  brevet,  encore  valable, 
pour  la  même  invention  (la  Prop.  ind.,  1899.  34)  (3). 

ZOLOLAND 

Propriété  industrielle.  —  Il  résulte  d'une  communica- 
tion faite  au  Bureau  de  Berne  par  l'administration  britan- 
nique que  la  province  du  Zululand  a  été  incorporée  à  la 
colonie  de  Natal.  En  conséquence  les  brevets  délivrés  et 
les  marques  enregistrées  dans  cette  colonie  produisent 
effet  dans  le  Zululand  (la  Prop.  ind.,  1899.  «6). 


{])  Voir  lit»  indications  relatives  à  la  législalioD  >uédoi«e  snr  tu  breiete, 

Ann.,  97.  222. 

(2]  Les  anciennes  instrucliona  pour  la  tenue  des  registres  sont  an  lUc. 
Ug.  prop.  ind.,  Berne,  1807,  t.  a,  p.  472  el  493. 

(D)  Cette  loi  a  pour  but  de  permettre  bu  gouvernement  de  traiter  avec 
ïel  ou  tel  Etat  sur  des  bases  qui  af  niant  élé  proposées  dans  les  traTaai 
prâparaloirea  de  la  Conférence  de  Brnieltes. 


[■^■^#^,.TW 


—  21  — 
Art.   4155. 

Eféffislatlon.  ^  France.  —  Breveis  d'Invention. 

Circulaire  du  ministre  du  commerce,  du  18  janvier  1898, 
concernant  les  récépissés  à  délivrer  pour  les  versements  de 
première  annuité  de  brevets  d'invention. 

Monsieur  le  Préfet, 

Aux  termes  de  Tarticle  378  de  l'Instruction  générale,  les  rece- 
veurs des  ûnances  chargés  de  recouvrer  les  taxes  et  autres  droits 
se  rapportant  aux  brevets  d'invention  doivent  consigner  avec  soin 
dans  leurs  articles  de  recettes,  ainsi  que  dans  les  récépissés  qu'ils 
souscrivent,  la  désignation  sommaire,  mais  précise  de  l'invention 
qui  a  donné  lieu  à  la  demande  de  brevet. 

En  vue  de  diminuer  les  formalités  exigées  au  moment  même 
du  dépôt  des  brevets,  M.  le  ministre  des  finances  vient  de  déci- 
der, sur  ma  proposition,  que  les  parties  versantes  auront  à  l'avenir 
la  faculté  de  ne  plus  faire  porter  sur  les  récépissés  constatant 
des  versements  de  première  annuité  de  brevets  d'invention  re- 
nonciation du  titre  du  brevet  à  déposer. 

Les  récépissés  pourront  contenir  simplement  le  nom  de  la  par- 
tie versante,  le  montant  de  la  somme  encaissée  et  la  mention 
que  le  versement  est  fait  à  titre  de  première  annuité  pour  un 
brevet  à  déposer.  Dans  ce  cas,  c'est  au  préfet  qu'il  appartiendra, 
au  moment  où  le  récépissé  sera  remis  à  l'appui  d'une  demande 
de  brevet,  de  le  faire  compléter  par  le  déposant,  qui  souscrira 
au  verso  une  déclaration  indiquant  formellement  l'invention  à 
laquelle  il  est  affecté. 

Des  dispositions  analogues  seront  appliquées  aux  récépissés 
concernant  les  versements  effectués  pour  l'obtention  de  certificats 
d'addition  ou  de  copies  de  brevets. 

Toutefois,  afin  d'éviter  les  fraudes  auxquelles  pourrait  donner 
lieu  ce  nouveau  mode  de  procéder,  soit  par  la  présentation  de 
déclarations  de  versement  correspondant  à  des  récépissés  dont 
il  aurait  déjà  été  fait  emploi,  soit  par  Taffectation,  à  des  annuités 
subséquentes,  de  récépissés  afférents  en  réalité  à  des  versements 
de  première  annuité,  dans  le  but  d'éviter  la  déchéance,  il  a  été 
convenu  entre  nos  deux  départements  : 

1"^  Qne,  dans  aucun  cas,  les  receveurs  des  finances  ne  délivre- 
ront de  déclarations  de  versement  correspondant  aux^récépissés 
sans  affectation  déterminée  ; 

2<*  Qu'il  ne  sera  admis  aucune  rectification  au  libellé  de  ces  ré- 
cépissés sous  prétexte  d'erreurs  commises  par  la  partie  dans  les 
déclarations  faites  au  moment  du  versement  ; 


-  28  — 

ticle  S4  de  la  loi  du  3  juillet  1844  sur  les  brevets  d'in- 
linsi  conçu  :  «  Après  le  payement  de  la  deuiième  an- 
!  descriptions  et  dessins  seront  publiés  soit  textuetle- 
t  par  extrait»  ; 

rèté  ministériel  du  3  août  1873, qui  a  constitué  le  comité 
alion  des  brevets  d'invention  ; 


premier.  —  Les  descriptions  et  dessins  des  brevets d'in- 

lont  la  publication  aura  été  jugée  utile  par  application 

le  24  de  la  loi  du  5  juillet  <8i4,  seront  imprimés  m  or- 

lar  fascicule  séparé  pour  chaque  brevet, 

veau  mode  de  publication commenceraavecles  brevets 

199. 

—  Les  fascicules  seront  mis  en  vente  aux  prix  indiquât 

fascicules  isolés  seront  vendus  à  raison  de  lOcentimes 
e  d'impression  complète  ou  commencée,  et  de  10  centi- 
ilanche  de  dessin,  sans  que  le  prix  d'un  fascicule  puisse 
leur  à  50  centimes. 

:a  consenti  des  réductions  de  prix  d'après  le  tarif  suî- 
lle  que  soit  l'importance  de  chaque  fascicule  : 
>ourune  série  de         25  fascicules      10  francs 


—  50  — 

—  100  — 

—  500  — 

—  1,000  — 

—  2,000  — 

-  Le  conseiller  d'État,  Directeur  de  1' 
ition  du  présent  arrêté. 
e  30  décembre  1899. 


13    — 

as    — 


idustrie,  est  chargé 


Art.   4159. 

tlon«  éti^nsér^s.  —  Répnbllqne  Atw«ntlne. 
—  M«rt|ue*  de  fabrique. 

14  octobre  1900,  stir  les  marques  de  fabrique, 
de  commerce  et  d'agriculture. 

PEtËUIEn.  —  Des  uarqurs  dp.  fabrique,  de  covherck 
ET  d'agbicultube. 

S  PRBHIER .  —  Du  droit  de  propriété  des  marques. 
.  —  Pourront  être  employés  comme  marques  de  fabri- 


crile  parVarlicle  précédent,  il  ne  s'est  pi 
et  si  des  marques  indentiques  ou  ressen 
tioDS  prévues  aux  articles  6  et  8, n'ont  pi 
marque  sera  enregistrée  et  le  cerliQca 
sera  délivré. 

Art.  28,  —  Le  droit  de  priorité  pour 
que  sera  accordé  d'après  le  jour  et  l'he 
présentée  au  Bureau. 

Art.  23.  —  Le  certificat  de  marque, 
Bureau  des  brevets,  consistera  en  une 
qui  l'aura  concédée,  accompagnée  d'un 
tion  et  des  dessins.  Il  sera  délivré  au  no 
nera  l'autorisation  du  gouvernement,  et 
du  cher  et  du  secrétaire  du  Bureau  d( 
timbre  du  même  bureau. 
-  Art.  24,  —  Dans  les  provinces  et  les 
dépôt  prescrit  par  l'article  17  de  la  loi 
de  poste  que  détermineront  les  règleme 

Art.  23.  —  Le  chef  du  Bureau  des  h 
ministraleurs  des  postes  un  registre  où 
verbaux  relatifs  aux  demandes  préseii 
certificat  de  marque,  chaque  fois  que 
déposées  en  la  forme  et  dans  les  con 
loi. 

Art,  20.  —  Ces  registres  seront  folio 
nistre  compétent,  de  la  même  manière 
posé  au  Bureau  des  breveta, 

Art.  27.  —  Chaque  fois  que  les  ad 
auront  reçu  un  dépôt,  ih  devront  trai 
au  chef  du  Sureau  des  brevets  une  c 
verbal  y  relatif,  avec  la  description  et 
et  une  attestation  constatant  le  verseni 
la  loi,  faute  de  quoi  aucune  demande  i 

Art.  2S.  ~  Chaque  fois  que  le  che 
recevra  une  demande  par  l'entremise 
postes,  il  en  dressera  procès-verbal  dan: 
copié  le  procès^verbal  transmis  parle 
procédera  ensuite  eu  la  forme  prescri 

Les  intéressés  pourront  également  dé 
des  postes  le  cliché  typographique  reqi 

Art.  29.  —  L'opposition  à  la  conceasi 
tuera  en  la  forme  prescrite  par  les  arti 

Art.  30.  —  Si  la  chef  du  Bureau  a  ol 


-  34  — 


r 


En  cas  de  litige,  on  produira  devant  le  juge  compétent  le  des- 
sin de  la  marque  et  une  copie  certifiée  de  sa  description,  ou  de 
toute  autre  pièce  qui  s'y  rapporte. 

Art.  40.  —  Les  marques  et  leurs  descriptions  seront  tenues, 
au  Bureau  des  brevets,  à  la  disposition  de  toute  personne  qui 
désirerait  en  prendre  connaissance. 

Art.  41.  —  Pour  que  les  marques  étrangères  paissent  jouir  des 
garanties  accordées  par  la  présente  loi,  elles  devront  être  enre- 
gistrées conformément  aux  prescriptions  de  cette  dernière. 

Les  propriétaires  de  ces  marques,  ou  leurs  agents  dûment  au- 
torisés, sont  seuls  admis  à  en  solliciter  Tenregistrement. 

TITRE  IL  —  Dbs  noms  industriels,  commerciaux  et  agricoles. 

Art.  42.  —  Le  nom  de  Tagriculteur,  du  commerçant  ou  du  fa- 
bricant, la  raison  sociale,  renseigne  ou  la  désignation  d'une 
maison  ou  d'un  établissement  faisant  le  commerce  d'articles  ou 
de  produits  déterminés,  constituent  une  propriété  pour  les  efifets 
de  la  présente  loi. 

Art.  43.  -—  Toute  personne  qui  voudra  exercer  une  industrie, 
un  commerce  ou  une  branche  d'agriculture  déjà  exploitée  par 
une  autre  personne  sous  le  même  nom  ou  sous  la  même  dési- 
gnation conventionnelle,  devra  y  apporter  une  modiûcation  de 
telle  nature  que  ce  nom  ou  cette  désignation  soient  visiblement 
distincts  de  ceux  employés  par  la  maison  on  par  rétablissement 
de  date  plus  ancienne. 

Art.  44.  —  Toute  personne  se  prétendant  lésée  par  l'usage  d'un, 
nom  industriel,  commercial  ou  agricole  devra,  sous  peine  de 
prescription,  présenter  ses  réclamations  y  relatives  dans  le  délai 
d'un  an  à  partir  du  jour  où  ce  nom  aura  été  employé  par  une 
autre  personne. 

Art.  45.  *  Les  sociétés  anonymes  ont  droit  au  nom  qu'elles 
portent  comme  tout  particulier,  et  sont  soumises  aux  mêmes  res- 
trictions. 

Art.  46.  —  Le  droit  à  l'usage  exclusif  d'un  nom  comme  pro« 
priété  prend  fin  avec  la  maison  de  commerce  qui  le  porte  ou 
avec  l'exploitation  industrielle  ou  agricole  qu'il  sert  à  désigner. 

Art.  47.  —  Pour  exercer  les  droits  reconnus  par  la  présente 
loi,  l'enregistrement  du  nom  n'est  pas  nécessaire,  sauf  dans  le 
cas  où  ce  nom  ferait  partie  de  la  marque. 

TITRE  III.  —  Dispositions  pénales. 

Art.  48.  —  Sont  punis  d'une  amende  de  vingt  à  cinq  cents  pias- 
tres de  monnaie  nationale  et  d'un  emprisonnement  d'un  mois  à 
un  an,  sans  qu'une  peine  pécuniaire  puisse  être  substituée  à  la 
peine  corporelle  : 


destractii 
tant  des  I 
sente  loi, 
des  êcoli 
effectuée. 

Art.  54. 
les  marqu 
trompe  usf 
servi  à  co. 

Art.  5S 
intentée  p 
ou  la  r£ci 
taire  de  la 
du  dëlit. 

Les  acte 
dans  le  di 

Art.  56. 
du  présen 
ront  fait  u 
de  l'ensei^ 
d'une  fabr 
con  formel 


Art.  57. 
commerce 
capsules,  I 
sa  marque 
te,  dans  ui 
senter  dei 
desdits  obj 
lité  du  déni 


Le  juge  i 
caution,  si 

Art.  S8.  ' 
dises  ou  pr 
tre faite,  es 
priétaire  d< 
écrit  concei 
procuré  la 
la  vente.  E 
à  fournir  c 
complice  d 

Art.  S9. 


-51  - 

outre  passible  d'une  amende  de  20  à  3,000  mari»  ou  s'il  existe 
des  circonstances  particali  ère  ment  afigravantes,  d'un  emprison- 
nement ne  dépassant  pas  nn  an. 

Si,  dans  les  cas  ci-dessus,  la  marchandise  illtgalemenl  fabri- 
quée, employée,  vendue  ou  importée  se  trouTe  encore  dans  la 
possession  de  l'inc  jlpé,  elle  sera,  à  la  demande  da  la  partie  lésée 
et  sauf  entente  contraire  entre  les  intéressés,  réduite  à  une  forme 
qui  la  rende  impropre  à  l'usage,  sauf  les  cas  où  elle  pourrait  être 
conservée  sans  inconvénient  jusqu'à  l'expiration  du  privilège 
aous  les  scellés  du  pouvoir  exécutif,  dans  un  local  approprié  que 
f  ioculp^  aurait  à  fournir. 

La  présente  rè^le  s'applique  aussi  aux  appareils  qui  ont  servi 
à  U  contrefaçon  et  qui  y  sont  exclusivement  appropriés. 

A  la  demande  de  la  partie  lésée,  le  tribunal  peut  prononcer  la 
séquestralion  desdits  objets  jusqu'au  moment  où  l'arrêt  devien- 
dra déHnilif  ;  le  demandeur  doit  fournir,  si  cela  est  nécessaire, 
UD  local  approprié  pour  leurconservation  et  déposer  une  caution 
pour  les  dommages-intérêts. 

Les  délits  prévus  par  le  présent  arircle  ne  peuvent  être  pour- 
soim  par  le  représentant  du  Ministère  public  qu'à  la  demande 
de  la  partie  lésée. 

g  6.  —  Quiconque,  dans  le  but  d'induire  en  erreur,  appose  sur 
la  marchandise  ou  sur  son  emballage  une  inscription  ou  une  au- 
tre indication  aflirmanl  que  ladite  marchandise  est  protégée  dans 
le  pays  par  un  privilèi;e,  ou  quiconque  affirme  mensongèrement 
dans  une  annonce,  une  circulaire,  une  enseigne  ou  par  tout  autre 
moyen  de  publicité,  qu'une  marchandise  déterminée  jouit  d'un 
privilège  est  passible  d'une  amende  pouvant  s'élever  au  maximum 
à  oOO  marks. 

^7.  —Le  tribunal  de  Hclsinnsfors  est  compétent  pour  connaî- 
tre des  affaires  suivantes: 

a.  De  la  rémunération  à  accorder  pour  la  mise  à  la  libre  dispo- 
sition de  chacun  d'une  invention  privilégiée,  ou  pour  sa  prise  en 
exploitation  pour  le  compte  du  iisc. 

b.  De  l'obligation  incombant  au  propriétaire  d'un  privilège  d'ac- 
corder une  licence  d'exploitation  h  des  tierces  personnes,  dans  les 
cas  on  cette  question  doit  être  résolue  par  les  tribunaux  ; 

c.  Delà  nullité  ou  de  la  déchéance  d'un  privilège  ou  de  la 
déclaration  de  sa  dépendance  k  l'égard  d'un  privilège  antérieure- 
Tnent  octroyé,  ou,  enfin,  de  l'adjudication  d'un  privilège  aune 
autre  personne.en  vertu  d'un  droit  préférable  à  celui  du  déposant. 

Les  affaires  uonceroant  la  violation  d'un  privilège  d'autrui  ou 
toute  autre  lésion  du  droit  résultant  du  privilège,  sontjugées  par 
le  tribunal  du  lieu  où  les  actes  ont  été  commis. 

§  8. —  Si,  dansun  procès  en  violation  d'un  pririlège  d'invention 
on  soulève  l'exception  de  la  nullité  ou  de  la  déchéance  du  priW- 


—  52  — 

|e,  ou  celle  de  sa  dépendance  relativement  à  un  privilège  anté- 
ur,  et  s'il  y  &  doute,  le  tribunal  suspendra  la  décision  qu&nt  au 
td  et  invitera  les  intéressés,  sans  peine  d'une  responsabilité 
r  lai  indiquée.Jt  intenter  une  action  spéciale  devant  le  tribunal 
intionné  à  l'article  7,  et  cela  dans  un  délai  liié  par  le  tribunal, 
ce  délai  s'écoule  sans  avoir  été  utilisé,  le  procès  sera  jugé 
ant  au  fond  indépendamment  de  l'exception  soulevée. 
i  9.  —  Il  n'est  pas  admis  de  recours  spéciaux  contre  la»  juge- 
!n(s  des  tribunaux  de  première  instance  rejetant  les  exceptions 
compétence  ou  statuant  sur  la  mise  en  cwne  de  tierces  pér- 
onés. 

\  10.  ~  Dans  les  procès  jugés  par  les  tribunaux  en  vertu  des 
positions  du  présent  décret,  le  tribunal  peut,  s'il  le  juge  iiéces- 
re, exiger  l'avis  de  l'organe  chargé  de  délivrer  les  inventious  ; 
tribunal  est  de  plus  autorisé,  si  cela  est  nécessaire,  à  inviter  à 
séance,  pour  fournir  les  renseignements  dont  il  a  besoin,  on 
deux  experts,  qui  seront  tenus  de  prêter  serment  préolable- 
int  dans  uneforme  appropriée.  Nul  ne  peut,  sanF  empêche  ment 
clément  reconnu,  se  dérober  à  une  telle  invitation.  Les  experts 
doivent  pour  chaque  séance  une  rémunération  qui  sera  établie 
r  le  tribunal  et  payée  d'avance  sur  les  disponibilités  du  fisc  ; 
Lribunal  doit  indiquer  dans  les  jugemenls  les  sommes  que  les 
rties  doivent  restituer  au  fisc. 

j  H.—  Le  présent  décret  entrera  en  vigueur  le  I"  jonvier  1899, 
le  sera  cependant  appliqué  aux  violations  do  privilèfie  d'inven- 
n  que  dans  les  cas  où  il  statuera  sur  une  punition  moindre  que 
le  établie  par  la  loi  antérieure  ;  les  dispositions  du  présent  dé- 
)t  relativesà  la  compétence  en  matière  denullité,  dedéchéan- 
et  de  violations  de  privilèges,  de  même  que  celles  se  rappor- 
it  à  la  procédure  en  ces  matières,  ne  seront  pas  applicables 
I  actions  intentées  avant  la  susdite  date. 
Tout  ce  qui  précède  doit  être  observé  par  chacun  en  tant  que 
a  le  concerne. 
HelsiuRfors,  le  SI  janvier  I86S. 

(Suivent  les  signatures.) 

Déclaration  souveraine  de  Sa  Majetté  impériale,  du 
janvier  1898,  concernant  les  privilèges  d'invention  (i). 

Chapitre  I".  —  Des  objets  pour  lesquels  les  privilèges  sont 

délivrés,  tlu  droit  aux  privilèges  et  de  leur  durée. 
:  1.  —  Il  est  accordé  des  privilègei  pour  les  inventions  nou- 
les,  applicables  i  l'industrie. 

t  reneplace  le 


—  55  — 

Pour  toutes  les  irrégularités  autres  que  celles  qui 
d'étn  énumérées,  la  Direction  de  l'Industrie  assigne  au  deman- 
deur un  délai  raisonnable  pour  les  faire  disparaître.  Si  le  de* 
mandear  présente  les  recUDcations  exigées  dans  ce  délai,  la  de- 
mande est  considérée  comme  ayant  été  déposée  régulièrement 
dès  le  commencement.  En  cas  contraire,  il  n'est  pas  donné  suite 
à  la  demande. 

g  8.  —  S'il  n'existe  aucun  des  motifs  de  refus  énumérés  au  j  7, 
la  Direction  de  l'Industrie,  dans  les  deux  mois  à  partir  du  dépAt 
de  la  demande  ou  des  renseignements  supplémentaires,  publiera 
la  demande  dans  le  journal  ofllciel  du  pays,  en  indiquant  l'objet 
de  l'iavention  et  en  annonçant  que  l'invention  est  provisoirement 
protégée  ;  la  demande  et  les  documents  y  annexés  devront  être 
mis  i  la  disposition  de  quiconque  voudra  prendre  connaissance 
de  leur  contenu. 

§9.—  Si  le  déposant  le  demande  en  temps  utile,  la  publica- 
tion mentionnée  au  ^  8  peut  être  ajournée  jusqu'à  concurrence 
de  4  mois  en  sus  du  terme  indiqué  dans  ledit  paragraphe. 

Que  lapublication  soit  ajournée  ou  non,  le  déposant  a  le  droit, 
avant  la  publication,  d'apporter  des  modilicalions  à  sa  descrip- 
tion. 

g  10.  —  Avant  la  reprise  de  lu  procédure,  qui  doit  avoir  lieu 
à  l'expiration  de  deux  mois  k  partir  de  la  publication,  cbacun 
a  le  droit,  sauf  dans  les  cas  indiqués  dans  l'alinéa  suivant,  de 
combattre  la  demande  en  déposant  auprès  delà  Direction  de  l'In- 
dustrie une  opposition  par  écrit,  fondée  sur  les  articles  I,  2  et  3. 

Une  oppositioQ  affirmant  que  le  déposant  s'est  illégalement 
approprié  l'invention  d'autrui,  non  encore  publiée  ou  publique- 
ment exploitée,  ou  que  l'invention  n'appartient  pas  exclusive- 
ment au  déposant,  ne  peut  être  présentée  que  par  la  partie  lésée.    . 

En  pareil  cas,  la  partie  lésée  peut  exiger  qa'on  lui  accorde  le 
privilège  pour  l'invenliou  entière,  ou  pour  celles  de  ses  partie!! 
auxquelles  elle  a  droit. 

§  11.  —  Si,  avant  ou  après  la  publication,  il  est  reconnu  utile 
qae  le  déposant  fournisse  des  explications,  la  Direction  de  l'In- 
dustrie l'intitera,  en  lui  indiquant  ses  motifs,  à  fournir  les 
explications  dont  il  s'agit  ;  l'audition  orale  des  parties  est  admis- 
sible, si  le  déposant  ou  l'opposant  l'exigent.  Si  la  partie  intéres- 
sés veut  fournir  des  dépositions  de  témoins,  elle  est  tenue  de 
faire  déposer  le  témoin  devant  un  tribunal,  et  de  remettre  le 
procès-verbal  à  la  Direction  de  l'Industrie. 

S'il  y  a  lieu  de  procéder,  après  opposition,  à  une  audition 
orale,  la  partie  opposante,  si  elle  demeure  dans  le  pays  et  si  son 
adresse  est  indiquée  à  la  Direction  de  l'Industrie  ou  autrement 
connue  a'élle,  est  avisôé  en  temps  nlile  pour  pouvoir  assister  à 


""■"^«■P 


!.  L'qtis  concernnnt  la  déposition  de  lëmoins  incoiobe 
li  l'exige. 

ctîon  de  l'InduBlrie  peut,  si  elle  le  jufte  utile,  requérir 
lersonnes  compétentes. 

Si  l'invention  pour  laquelle  le  privilège  est  demandé 
rtie  identique  &  une  invention  déjà  pmiléi;iée  en  laveur 
tre  personne,  le  privilège  n'est  accordé  que  pour  les 
luveiles  de  l'invention. 

invention  dépend  d'une  autre  invention  déjà  privilégiée 
le  ne  pouvoir  être  exploitée  sans  l'autorisation  du  pro- 
du  privilège  antérieur,  la  Direction  de  l'induslrie  le 
era  sur  la  patente  ;  mais  cette  mention  n'empêchera 
ibunaux  de  prononcer  sur  la  question  de  dépendance. 
'  Si  la  demande  de  privilège  n'est  pas  admise  à  l'eia- 
si  elle  est  rejetée,  ou  si  le  privilège  n'est  pas  délivré 
le  l'étendue  demandée,  ou  s'il  est  donné  suite  à  une 
fondée  sur  le  §  10,  alinéa  3,  le  déposant  a  le  droit,  s'il 
satisfait  de  la  décision,  d'interjeter  appel  auprès  du 
lent  administratif  du  Sénat  dans  les  soiiante  jours  qui 
L  décision. 

lel  porte  sur  une  question  technique,  le  Sénat  le  soa- 
li  cela  est  nécessaire,  k  un  second  examen  de  personnes 
ites. 

pels  formés  contre  les  décisions  de  la  Direction  de  i'In- 
orlant  qu'il  ne  devait  pas  être  donne  suite  aux  opposi- 
lui  demandes  spécifiées  au  §  10  ne  sont  pas  admissibles, 
adice  du  droit  de  l'intéressé  d'intenter  une  des  actions 
lUx  g§  23  et  24. 

-  Si  le  privilège  est  accordé  par  un  arrêt  délinitifet  non 
ipel,  la  Direction  de  l'Industrie  délivrera  un  brevet  au 
t  et  ordonnera  la  publication  aussi  prompte  qne  possi- 
délivrance  dans  le  journal  officiel  du  pays,  avec  indi- 
igulière  des  parties  essentielles  de  la  description.  Si  le 
est  refusé  après  la  publication  faite  en  vertu  du  §8,  ce 
li  publié  dans  le  Journal  officiel. 

'  I]  est  institué  à  la  Directiou  de  l'Industrie  un  registre 
lèges  accordés  pour  inventions,  dans  lequel  seront  indi- 
[et  de  chaque  privilège,  sa  durée,  le  nom  et  l'adresse 
iétaire  du  privilège  et  de  son  fondé  de  pouvoir, 
consignés  dans  le  registre  et  publiés  dans  le  Journal 
'expiration  du  privilège  par  suite  de  renonciation,  d'un 
iciaire  ou  d'une  des  règles  établies  par  le  présent  réglc- 
:  même  que  le  transfert  du  privilège  k  une  personne 
1  droit  préférable  à  celui  du  premier  privilégié,  ou  la 
ion  d'un  fondé  de  pouvoir,  conformément  au  §  30. 


—  57  — 

L'enregistrement  de  la  cession  du  privilège  ou  des  droits  qui 
en  découlent  fait  l'objet  du  §  19.  Cet  enregistrement  doit  aussi 
être  publié  de  la  manière  indiquée  plus  haut. 

Le  registre,  les  description^  les  dessins  et  les  modèles  relatifs 
aux  privilèges  accordés  doivent  être  accessibles  à  quiconque 
voudrait  en  prendre  connaissance.  Des  extraits  du  registre  et 
des  copies  des  documents  sont  délivrés  par  la  Direction  contre 
le  payement  des  taxes  établies. 

Chapitre  IIL  —  Ikê  obligations  du  titulaire  d'un  privilège 

d'invention. 

§  16.  ^  Pour  chaque  privilège  d'invention,  sauf  les  privilèges 
additionnels,  le  titulaire  est  tenu  de  verser  annuellement,  à  par- 
tir de  la  deuxième  année  de  sa  durée,  une  taxe  de  vingt  marks 
pour  la  2«  et  la  3*  années  ;  pour  les  années  de  la  4"  à  la  6*  inclu- 
sivement, une  taxe  de  quarante  marks  ;  pour  les  années  de  la 
7«  à  la  9«  inclusivement,  cinquante  marks  ;  pour  les  années  de 
laiO«  à  la  12*  inclusivement,  soixante  marks,  et  pour  les  années 
de  la  13*  à  la  i5«  inclusivement,  soixante-dix  marks.  La  taxe 
doit  être  payée  à  la  Direction  de  rinduslrie  pour  chaque  année 
de  la  durée  du  privilège  avant  le  commencement  de  cette  année, 
sauf  à  payer  plus  tard  un«  taxe  augmentée  du  cinquième.  Si  la 
taxe  ainsi  augmentée  n^est  pas  payée  dans  les  trois  mois  à  par- 
tir du  commencement  de  Tannée  correspondante  du  privilège^ 
celui-ci  tombe  en  déchéance. 

Le  propriétaire  du  privilège  est  autorisé  à  payer  lesdites  taxes 
par  anticipation  pour  plusieurs  années  ;  mais  dans  ce  cas,  les 
sommes  ainsi  payées  ne  peuvent  être  restituées  si  le  brevet  cesse 
d'être  en  vigueur. 

§  17.  —  Si,  dans  les  trois  ans  à  partir  de  la  délivrance,  le  pro- 
priétaire du  privilège  ne  Ta  pas  mis  en  exploitation  dans  le  pays 
dans  une  mesure  considérable,  ou  si,  plus  tard,  Texploitation 
est  interrompue  pendant  un  an,  le  titulaire  du  privilège  est 
tenu  d'accorder  à  d'autres  personnes  une  licence  d'exploitation, 
conformément  à  l'article  4  du  décret  en  date  de  ce  jour,  relatif 
aux  privilèges  d'invention  et  à  la  procédure  judiciaire  dans  les 
affaires  relatives  à  ces  privilèges. 

§18. — Si  l'invention  n'est  pas  exploitée  dans  1  pays  dans 
une  mesure  considérable,  mais  qu'au  contraire,  elle  est  exploitée 
hors  du  pays,  le  titulaire  du  privilège  est  tenu,  en  tant  que  cela 
lui  est  possible,  de  rendre  accessible  dans  le  pays,  à  un  prix 
raisonnable,  la  marchandise  privilégiée  ou  fabriquée  d'après  le 
procédé  privilégié.  Faute  de  cela,  le  tribunal  peut  le  déclarer 
déchu  de  son  droit,  à  la  demande  des  personnes  qui  se  croiraient 
lésées. 


Tt^TTir" 


—  58  — 

§  19.  —  La  cessioa  des  privilèges  doit  être  notifiée  par  écrit, 
sous  envoi  des  documents  établissant  la  cession,  à  la  Direction 
de  riudustrie.  Si  la  Direction  de  l'Industrie  reconnaît  que  cet 
enregistrement  peut  être  effectué,  elle  y  procède  immédiatement. 
Si  les  documents  ne  sont  pas  complets,  un  terme  est  assigné  au 
requérant,  après  quoi  Taifaire  est  liquidée  d'après  les  règles 
établies. 

Si  la  cession  n'est  pas  notifiée  de  la  manière  susindiquée,  tou- 
tes les  mesures  qui,  sur  l'initiative  du  cédant,  seraient  prises,  en 
attendant,  par  la  Direction  de  Tlndustrie  au  sujet  du  privilège, 
resteraient  valables  ;  la  cession  demeurerait  aussi  sans  effet  à 
regard  des  tierces  personnes  qui  auraient  traité  de  bonne  foi 
avec  le  cédant. 

Si  un  privilège  a  été  cédé  à  deuK  personnes,  et  si  le  premier 
cessionnaire,  avant  le  second,  ou  simultanément  avec  lui,  fait 
la  déclaration  d'acquisition  pour  être  enregistrée,  cette  cession 
reste  valable  même  si  le  second  cessionnaire  avait  agi  de  bonne 

foi. 

Si  le  titulaire  du  privilège  cède  à  une  autre  personne  Tusage 
exclusif  d'un  droit  quelconque  fondé  sur  le  privilège,  une  telle 
transmission  et  les  cessions  ultérieures  de  ce  droit  doivent  être 
enregistrées  de  la  manière  susindiquée. 

§  20.  —  Si  le  titulaire  du  privilège  quitte  le  pays,  ou  s'il  cède 
le  privilège  à  une  personne  qui  ne  demeure  pas  dans  le  pays, 
le  titulaire  du  privilège  est  tenu  de  déposer  à  la  Direction  de 
rindustrie  un  pouvoir  délivré  à  une  personne  répondant  aux 
conditions  de  Tarticie  6.  Si  le  fondé  de  pouvoir  quitte  le  pays, 
ou  si,  pour  une  cause  quelconque,  son  mandat  prend  fin,  le  pro- 
priétaire doit  déposer  un  pouvoir  délivré  à  une  autre  personne. 
En  cas  d'inobservation  de  ces  règles,  la  Direction  de  l'Indus- 
trie, avisée  par  une  déclaration  appuyée  de  preuves  suffisantes, 
invite  le  titulaire  du  privilège,  par  une  publication  dans  le  Jour- 
nal officiel  et  par  une  lettre  à  lui  adressée,  si  son  adresse  postale 
est  déposée,  à  se  mettre  en  règle  avec  les  dispositions  susindi" 
quées,  dans  les  trois  mois  à  compter  de  la  publication.  Si  le  titu> 
laire  du  privilège  ne  s'exécute  pas,  le  privilège  tombe  en  dé- 
chéance. 

g  21 .  —  Une  renonciation  à  un  privilège  doit  être  faite  par  le 
titulaire  sous  la  forme  d'une  déclaration  écrite,  déposée  à  la  Di- 
rection de  l'Industrie.  Si  la  Direction  de  l'Industrie  considère  que 
cette  renonciation  lèse  les  droits  de  tierces  personnes,  elle  ne 
lui  donnera  aucune  suite. 

§  22.  —  Quiconque  n'est  pas  satisfait  d'une  décision  de  la  Di- 
rection de  l'Industrie  refusant  l'enregistrement  d'une  cession  dé 
privilège  on  d'un  droit  reposant  sur  le  privilège,  ou  se  rappbr- 


—  59  — 

tant  à  une  autre  question  du  ressort  de  la  Direction  de  l'Indus- 
trie et  relative  aux  mesures  postérieures  à  la  délivrance  du  pri- 
vilège, peut  interjeter  appel  dans  le  délai,  et  d'après  les  formes 
indiqués  au  §  13. 

Chapitre  IV.  — Des  actions  qui  peuvent  être  intentées  en  Justice 
au  sujet  (Tun  privilège  cfinvention  accordé. 

§  23.  —  Si  le  privilège  a  été  accordé  à  rencontre  des  disposi- 
tions des  §§  1,  2  et  3,  ou  si  la  description  de  l'invention,  en  vertu 
de  laquelle  le  privilège  est  délivré,  est  tellement  inexacte  ou  in- 
complète qu^une  personne  experte  ne  peut  pas  mettre  Tinven- 
tion  à  exécution  en  se  fondant  sur  cette  description,  celui  qui 
s'estime  lésé  (sauf  les  dispositions  de  l'article  24),  de  môme  que 
le  représentant  du  fisc  (ce  dernier  dans  Tintérôt  public),  pour- 
ront intenter  devant  le  tribunal  une  action  en  nullité. 

Si  cette  action  se  fonde  sur  le  fait  que  l'invention  privilégiée 
ressemble  en  partie  à  une  invention  protégée  au  nom  d'un  au- 
tre, ce  privilège  est  déclaré  nul  dans  les  parties  correspondantes^ 
et  demeure  en  vigueur  pour  celles  qui  sont  nouvelles. 

Une  action  en  reconnaissance  de  la  dépendance  qui  existe  en- 
tre un  privilège  postérieur  et  un  autre  qui  lui  est  antérieur,  peut 
être  intentée  parle  propriétaire  du  privilège  respectif. 

§  24.  —  Si  quelqu'un  s'approprie  illégalement  l'invention  d'un 
autre  qui  ne  Ta  pas  publiée  ni  exploitée  publiquement,  et  s'il  se 
fait  accorder  un  privilège,  ou  s'il  obtient  un  privilège  pour  une 
invention  dont  il  ne  peut  disposer  seul,  l'action  en  nullité  n'ap- 
partient qu'à  la  partie  lésée.  Dans  ces  cas,  la  partie  lésée  a  le 
droit  d'exiger  la  cession  du  privilège  en  entier  ou  en  tant  qu'il 
lui  appartient  ;  mais  ces  actions  ne  doivent  pas  léser  les  droits 
des  personnes  qui  ont  traité  de  bonne  foi  avec  le  titulaire  du 
privilège. 

§  25.  —  Si  le  tribunal  prononce  la  nullité  ou  la  déchéance  du 
privilège,  ou  s'il  l'adjuge  à  une  autre  personne  ayant  justifié  d'uu 
droit  préférable,  l'arrêt  est  communiqué  parles  soins  du  tribu- 
nal à  la  Direction  de  l'Industrie. 

Ghapitrb  V.  —  IHspositions  spéciales, 

§  26.  —  Dans  toutes  les  affaires  qui,  aux  termes  du  présent 
règlement,  relèvent  de  la  Direction  de  l'Industrie,  les  intéressés 
ont  le  droit  de  présenter  leurs  exploits,  avec  pièces  justificatives, 
par  lettre  affranchie  adressée  à  la  Direction  de  l'Industrie,  s'ils 
ne  veulent  pas  les  déposer  personnellement  ou  par  un  fondé  de 
pouvoir.  Les  versements  mentionnés  à  l'article  16  peuvent  éga- 
lement être  transmis  à  la  Direction  de  l'Industrie,  par  lettre  af- 
franchie ou  par  mandat  postal. 


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—  63  — 

noms  propres  et  sîf^nes  distiuctifs  qu'ils  jugeront  convenables; 
sont  seuls  exceptes  : 

1*  Les  armoiries  de  la  République  ou  celles  de  tout  autre  pays^ 
à  moins  qu*on  ne  présente  Tautonsation  du  gouvernement  res- 
pectif ; 

2"*  Le  portrait  de  toute  personne  autre  que  le  fabriquant  com- 
merçant ou  industriel,  sans  le  consentement  préalable  de  cette 
personne  ; 

3®  Les  signes  distinctifs  qui  pourraient  donner  lieu  à  confusion 
avec  d'autres  marques  enregistrées. 

Art.  i3.  —  Quiconque  désirera  obtenir  la  propriété  d'une 
marque  de  fabrique,  de  commerce  ou  d'industrie  devra  en  faire 
la  demande  auprès  de  la  Secrétairie  d'État  du  Département  du 
Fomento. 

Art.  14.  —  La  demande  tendant  à  l'obtention  d'une  marque 
devra  être  rédigée  sur  du  papier  timbré  de  la  valeur  correspon- 
dante, et  être  accompagnée  : 

i^  De  deux  exemplaires  de  la  marque  ou  signe  distinctif  dont 
on  veut  faire  usage  ; 

2^  D'une  description,  en  duplicata,  de  la  marque  ou  du  signe, 
s'il  s'agit  de  figures  ou  d'emblèmes,  description  qui  devra  en 
outre  indiquer  le  genre  d'objets  auxquels  ils  sont  destinés,  et 
dire  s'ils  seront  appliqués  aux  produits  d'une  fabrique  ou  aux 
objets  d'un  commerce  ; 

3*  D'un  reçu  constatant  le  dépôt,  à  la  Trésorerie  nationale, 
de  la  taxe  établie  par  l'article  22,  laquelle  sera  restituée  si  l'en- 
registrement de  la  marque  est  refusé  ; 

4^  D'un  pouvoir  en  forme,  si  l'intéressé  ne  se  présente  pas  en 
personne. 

Art.  15.  —  Si  la  marque  contient  un  contresigne,  et  si  les 
intéressés  désirent  en  faire  une  mention  secrète,  ils  pourront  le 
faire  sous  pli  fermé  et  cacheté  à  la  cire,  que  seul  le  juge  com- 
pétent pourra  ouvrir  en  cas  de  litige  ou  de  plainte  criminelle. 
Ce  pli  restera  déposé  au  Bureau  des  marques. 

Art.  16.  —  La  date  et  l'heure  du  dépôt  seront  constatés  au 
bas  de  la  demande,  au  moyen  d*une  mention  signée  et  timbrée 
par  le  sous-secrétaire  compétent  ;  l'intéressé  aura  le  droit  d'exiger 
qa^onlui  délivre  un  reçu  de  la  demande,  avec  mention  de  l'heure 
à  laquelle  il  Ta  présentée. 

Art.  17.  —  Le  droit  de  préférence  pour  la  propriété  d'une 
marque  sera  déterminé  d'après  le  jour  et  l'heure  où  la  demande 
a  été  déposée  au  Bureau,  et  si  \t»  demandes  coïncident  quanta 
l'heure,  on  prendra  en  considération,  pour  cet  effet,  la  date  du 
mémorial  (1)* 

(i)    Le  mot  mémorial  peut  désigner  soit  un  mémoire,  soit  un  livre 
Journal. 


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-  65- 

Art.  23.  —  Les  marques  et  leur  description  demeureront,  au 
Bureau,  à  la  disposition  de  quiconque  voudra  en  prendre  con- 
naissance, à  Texception  des  contresignes  secrets. 

Art.  24.  —  Les  fabriques  des  pays  avec  lesquels  la  République 
possède  des  conventions  en  vigueur  sur  la  matière  pourront  faire 
enregistrer  leurs  marques  ;  à  cet  effet,  les  propriétaires  desdites 
marques  se  présenteront,  par  eux-mêmes  ou  par  l'entremise  d'ua 
mandataire  muni  d'un  pouvoir  légal  et  d*une  pièce  constatant 
i^enregistrement  dç  la  marque  dans  Tautre  pays  ;  ces  deux  docu- 
ments devront  être  traduits,  le  cas  échéant,  et  devront  toujours 
être  légalisés. 

Art.  25.  —  Celui  qui  a  fait  enregistrer  sa  marque  en  a  la  pro- 
priété aussi  longtemps  que  les  tribunaux  n'auront  pas  ordonné 
la  radiation  de  Tinscriptiou  y  relative.  Il  peut,  en  conséquence, 
la  transmettre  ou  accorder  l'autorisation  d'en  faire  usage,  moyen- 
nant  un  avis  dans  le  journal  officiel  et  l'enregistrement,  au 
Bureau  des  marques,  de  l'acte  de  transfert  ou  de  Tautorisation 
accordée. 

Ceux  qui  ont  omis  ces  formalités  précédemment  auront  soin 
de  les  accomplir  pour  régulariser  leurs  droits. 

Art.  26.  —  Le  nom  du  commerçant  et  celui  de  la  raison  sociale, 
ainsi  que  celui  de  l'enseigne  ou  désignation  d'une  maison  qui 
fait  le  commerce  d'articles  déterminés,  constituent  une  propriété 
industrielle  pour  les  efTets  de  la  présente  loi. 

Art.  27.  —  Si  un  commerçant  veut  exercer  une  industrie  déjà 
exploitée  par  une  autre  personne  portant  le  même  nom  ou  ayant 
la  même  désignation  conventionnelle,  il  devra  adopter  une  modi- 
fication qui  différencie  visiblement  ce  nom  ou  cette  désignation 
de  ceux  employés  par  la  maison  préexistante. 

Art.  28.  —  Les  sociétés  anonymes  ont  droit  au  nom  qu'elles 
portent,  comme  un  particulier  quelconque,  et  elles  sont  soumises 
aux  mêmes  prescriptions. 

Art.  29.  —  Le  droit  à  l'usage  exclusif  du  nom,  comme  pro- 
priété industrielle,  prendra  fin  en  même  temps  que  la  maison 
de  commerce  qui  le  porte,  ou  que  l'exploitation  de  la  branche 
d'industrie  pour  laquelle  on  l'utilise. 

Art.  30.  —  L'enregistrement  du  nom  n'est  pas  nécessaire  pour 
Texercice  des  droits  accordés  parla  présente  loi,  sauf  dans  le 
cas  où  le  nom  ferait  partie  de  la  marque. 

Art.  31.  —  L'enregistrement  des  marques  est  entendu  accordé 
sans  aucune  responsabilité  du  gouvernement  ;  les  personnes  qui 
se  croiraient  lésées  par  un  tiers  n'ont  que  le  droit  de  recourir 
aux  tribunaux  pour  intenter  l'action  civile  ou  criminelle  cor- 
respondante. 

5 


4 


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-  67  — 

Art.  35.  —  Pour  quMl  y  ait  délit,  il  n'est  pas  nécessaire  que 
la  contrefaçon  comprenne  tous  les  objets  qui  devaient  être  mar- 
qués ;  Tapplication  à  un  seul  objet  suffît. 

Art.  36.  —  Les  personnes  qui  auront  vendu  ou  mis  en  vente 
des  marchandises  munies  d'une  marque  usurpée  ou  contrefaite 
seront  tenues  de  fournir,  sur  sa  demande,  au  commerçant  ou 
fabricant  qui  en  est  le  propriétaire,  des  renseignements  com- 
plets, par  écrit,  concernant  le  nom  et  l'adresse  de  celui  qui  leur 
a  vendu  ou  procuré  ces  marchandises  et  Tépoque  où  elles  ont 
commencé  à  les  débiter  ;  en  cas  de  résistance,  elles  pourront 
être  contraintes  judiciairement  à  répondre,  sous  peine  d'être 
considérées  comme  complices  du  délinquant. 

Art.  37.  —  Les  marchandises  munies  d*une  marque  contre- 
faite qui  seront  trouvées  en  possession  du  contrefacteur  ou  de  ses 
agents  seront  conOsquées  et  vendues,  et  leur  produit  sera  versé 
à  la  trésorerie  des  établissements  de  bienfaisance  de  la  localité, 
après  payement  des  frais  et  indemnités  établis  par  la  présente 
loi. 

Art.  38.  —  Les  marques  contrefaites  qui  se  trouveront  en 
possession  du  contrefacteur  ou  de  ses  agents  seront  rendues 
inutilisables,  de  même  que  les  instruments  qui  auront  servi  spé- 
cialement pour  la  contrefaçon. 

'  Art.  39.  —  Afin  que  le  Bureau  des  marques  soit  organisé 
d^une  manière  sérieuse,  les  industriels,  commerçants  ou  fabri- 
cants, possesseurs  d'une  marque  enregistrée  dans  la  République, 
devront  s'adresser  audit  Bureau  dans  le  délai  de  trois  mois, 
pour  qu'on  y  prenne  note  de  l'enregistrement  de  leur  marque. 

Art.  40.  —  Si,  antérieurement  à  la  promulgation  de  la  pré- 
sente loi,  plusieurs  industriels,  commerçants  ou  fabricants  ont 
fait  usage  de  la  même  marque,  le  droit  à  Tusage  exclusif  de  cette 
dernière  appartiendra  à  celui  qui  pourra  établir  qu'il  en  a  fait 
un  usage  légitime  avant  les  autres. 

Si  aucun  des  intéressés  ne  peut  justifier  de  la  priorité  dans 
l'usage  de  la  marque,  la  propriété  en  sera  attribuée  à  celui  qui 
possédera  les  éléments  de  production  les  plus  importants. 

Art.  41.  —  A  défaut  d'avoir  fait  enregistrer  la  marque  dans 
le  délai  iïxé  à  l'article  39,  nul  ne  pourra  se  prévaloir  de  l'usage 
qu'il  en  a  fait  avant  la  sanction  de  la  présente  loi,  pour  reven- 
diquer le  droit  de  priorité. 

Art.  42.  —  Pour  que  les  marques  étrangères  soient  admises  à 
jouir  des  garanties  accordées  par  la  présente  loi,  elles  devront 
être  enregistrées  conformément  aux  traités  respectifs. 

Leurs  propriétaires,  ou  les  agents  dûment  autorisés  de  ces 
derniers,  sont  les  seuls  qui  puissent  demander  Tenregistrement. 

Art.  43.  —  La  Direction  générale  de  la  Statistique  est  chargée 


—  69  — 

La  mise  en  inlerdU  de  leur  localy  ei  la  signiftcaéion  faite 
à  des  tiers  par  la  même  société  qu'elle  ne  laissera  exécuter 
chez  eux  aucune  œuvre  de  son  répertoire,  est  un  acte  abusif 
et  gui  ouvre  une  action  en  dommages-intérêts  (1). 

(C.  de  Paris,  12  mai  1899.  »  Fabre  et  Cie,  Association  des  anciens 
élèves  de  l'Ecole  Turgot  et  Union  des  anciens  élèves  des  Ecoles  sapé- 
Heures  de  commerce,  c.  Société  des  auteurs,  compositeurs  et  éditeurs 
de  musique,  Antreassian  et  autres.) 

Le  Tribunal  civil  de  la  Seine  avait  rendu,  le  25  mai  1897, 
le  jugement  suivant  : 

Le  Tribunal,  Attendu  que  Fabre  et  Gie  sont  propriétaires  ou 
principaux  locataires  d'un  immeuble  sis  à  Paris,  72,  avenue  des 
Champs-Elysées  et  rue  de  Ponthieu,  à  usage  de  réunions,  bals, 
concerts  et  banquets  ; 

Que  cette  salle  ayant  été  mise  en  interdit  par  la  Société  des 
auteurs,  compositeurs  et  éditeurs  de  musique  Fabre  et  Cie  ont 
assigné  cette  société  et  lui  réclament  100.000  francs  à  titre  de 
dommages-intérêts  ; 

Que,  de  leur  côté,  les  président  et  membres  du  syndicat  et 
quarante-cinq  membres  de  la  société  ont  assigné  : 

4«  Fabre  et  Cie  ; 

2<*  Copeau  et  Hirsch,  comme  présidents  de  l'Association  ami* 
cale  des  anciens  élèves  de  TEcole  municipale  Turgot  ; 

'S^  Siegfried,  comme  président  de  TUnion  des  anciens  élèves 
des  Ecoles  supérieures  du  commerce  ; 

Qu'ils  prétendent  qu'aux  dates  des  P'  et  8  février  1896,  les  dé- 
fendeurs auraient  organisé  et  dirigé  des  bals  publics  et  auraient 
exécuté  iliicitement  un  grand  nombre  de  leurs  œuvres  musicales 
malgré  la  défense  signifiée  à  Fabre  et  Cie  :  que  ces  faits  consti- 
tueraient, suivant  eux,  la  violation  de  la  propriété  artistique  et 
musicale  qui  leur  appartient  et  une  infraction  à  l'article  3  de  la 
loi  du  19  janvier  1791  et  à  l'article  428  du  Code  pénal  ;  qu'ils  ré- 
clament, en  conséquence,  des  dommages-intérêts  à  fixer  par  état 
et  une  provision  de  420  francs  ; 

Qu'ils  concluent  subsidiairement  à  une  enquête  et  à  une  ex- 
pertise ; 

Attendu  que  Copeau  et  Hirsch  demandent  purement  et  simple- 

(1)  La  mise  en  interdit  peut  entraîner  des  difficultés  très  délicates. 
Le  Tribunal  de  la  Seine  a  déclaré  abusif  pour  la  Société  des  auteurs  de 
mettre  une  salle  en  interdit  et  de  signifier  cette  interdiction  aux  tiers. 
Dans  des  circonstances  différentes,  il  est  vrai,  la  Cour  d'Amiens  a  dé- 
claré légitime  une  signification  adressée  par  la  même  société  aux  di- 
recteurs des  sociétés  invitées  à  an  festival  organisé  par  la  ville  d'Amiens 
(Amiens,  13  mars  1893,  ^nn.,  93.92). 


MitL. 


—  71  — 

leur  avait  signifié  une  défense  expresse  d*exécater  ou  laisser  exé-r 
enter  en  tout  ou  en  partie  et  de  quelque  manière  que  ce  soit,  au* 
cune  des  œuvres  littéraires  ou  musicales  composant  son  réper* 
toire  ; 

Mais  que  Fabre  n'étant  ni  directeur  ni  entrepreneur  de  spec- 
tacles n'avait  pas  à  tenir  compte  d'une  défense  de  cette  nature 
qui  ne  pouvait  s'adresser  à  lui  en  tant  que  propriétaire  ;  et  qu'a- 
près avoir  avisé  la  société  des  réunions  projetées,  il  n'avait  qu'à 
inviter  ses  locataires  de  leur  côté  à  se  mettre  en  règle  avec  la  so- 
ciété ; 

Attendu  que  cette  défense  n'avait  été  signifiée  à  Fabre  et  Gie 
qu*à  raison  de  leur  refus  de  souscrire  un  contrat  d'abonnement 
que  la  société  prétendait  leur  imposer  ; 

Qu'elle  ne  s'en  est  pas  tenue  là  et  qu'à  la  date  du  1*'  février  1896 
elle  a  signifié  au  président  de  l'Union  des  associations  des  anciens 
élèves  des  Ecoles  supérieures  du  commerce  que  la  salle  dite  «  Ga- 
lerie des  Champs-Elysées  »,étant  mise  par  la  société  en  état  d'in- 
terdiction, il  lui  était  fait  la  plus  expresse  défense  d'exécuter, 
faire  ou  laisser  exécuter  aucune  des  œuvres  littéraires  ou  musi- 
cales composant  son  répertoire  dans  ladite  salle  dite  :  «  Galerie 
des  Champs-Elysées  »  ; 

Attendu  qu'une  signification  de  cette  nature  est  un  acte  mani- 
festement abusif  ;  que  si  la  Société  des  auteurs  et  compositeurs  de 
musique  a  le  droit  d'accorder  ou  de  refuser  à  son  gré  l'autorisa- 
tion d'exécuter  les  œuvres  de  son  répertoire,  bien  qu'elle  ait  été 
fondée  dans  le  but  de  favoriser  l'exécution  de  ces  œuvres  et  de 
faciliter  la  perception  des  droits  d'auteurs,  elle  n'a  pas  le  droit 
cependant  de  mettre  une  salle  en  interdit  et  de  signifier  cette 
interdiction  aux  tiers  ; 

Qu'une  mesure  semblable  était  de  nature  à  causer  à  Fabre  et 
Cie  un  réel  préjudice  en  éloignant  la  clientèle  et  en  jetant  la  dé- 
faveur sur  leur  immeuble  ; 

Que  le  tribunal  a  les  éléments  nécessaires  pour  évaluer  le  pré- 
judice qui  leur  a  été  causé  et  pour  fixer  la  réparation  qui  leur 

est  due  ; 

En  ce  qui  concerne  l'Association  amicale  des  anciens  élèves  de 
l'Ecole  municipale  Turgot  ; 

Attendu  qu'il  est  justifié  en  fait  et  non  contesté  qu'à  la  date 
du  !•»  février  4896,  cette  association  a  donné  dans  la  v  Galerie 
des  Champs-Elysées  »  un  bal  comme  elle  le  fait  chaque  année. 
et  que  divers  morceaux  de  musique  ont  été  exécutés; 

Que  parmi  ces  œuvres  musicales,  quatorze  avaient  pour  auteurs 
Mêlé  et  Soyer  qui  remplissaient  à  ce  bal  les  fonctions  de  chef 
et  de  sous-chef  d'orchestre 

Que  Mêlé  et  Soyer  qui  figurent  parmi  les  demandeurs  nesau- 


■...inijl    .Jwm 


-  73- 

du  répertoire  de  la  Société  des  auteurs  et  compositeurs  de  musi- 
que est  dès  à  présent  justiÛée,  il  n'est  pas  établi,  quant  à  présent, 
si  le  bal  du  8  février  1896  avait  un  caractère  public  devant  don- 
ner lieu  à  la  perception  des  droits  ou  s'il  s'agissait  d'une  réu- 
nion purement  privée  ;  quMl  y  a  lieu,  dès  lors,  sur  ce  point,  de 
faire  droit  aux  conclusions  subsidiaires  de  la  société  demande- 
resse et  d'ordonner  une  enquête,  tous  droits  et  moyens  des  par- 
ties d'ailleurs  expressément  réservés  ; 

Par  ces  motifs.  Met  Copeau  et  Hirsch  purement  et  simplement 
hors  de  cause; 

Condamne  la  Société  des  auteurs,  compositeurs  et  éditeurs  de 
musique  à  payer  à  Fabre  et  Cie,  la  somme  de  H. 000  francs  à  titre 
de  dommages-intérêts  ; 

Déclare  Antreassiau  et  consorts  non  recevables,  en  tous  cas 
mal  fondés  dans  toutes  leurs  demandes,  fins  et  conclusions,  tant 
contre  Fabre  et  Cie  que  contre  Chédeville  ès-qualités  ; 

Les  en  déboute  ; 

Déclare  Chédeville  ès-qualités  mal  fondé  en  sa  demande  re- 
conventionnelle  en  dommages-intérêts  ; 

L'en  déboute  ; 

Dit  que  la  demande  en  garantie  de  Chédeville  ès-qualités  con- 
tre Fabre  et  Cie  se  trouve  sans  objet  ; 

Et  statuant  avant  faire  droit  en  ce  qui  concerne  Siegfried  ès- 
qualités  ; 

Autorise  Antreassiau  et  consorts  à  prouver  tant  par  titres  que 
par  témoins  en  la  forme  ordinaire  des  enquêtes  que  le  bal  du 
8  février  i896,donné  dans  la  «  Galerie  des  Champs-Elysées  »,avait 
un  caractère  public  ; 

Commet  M.  Turcas  pour  procéder  à  l'enquête  et  à  la  contre- 
enquête,  s'il  y  a  lieu  ; 

Dit  qu'en  cas  d'empêchement  du  juge,  il  sera  pourvu  à  son 
remplacement  par  ordonnance  de  M.  le  président  rendue  sur 
simple  requête  ; 

Fait  masse  des  dépens  ; 

Condamne  dès  à  présent  Antreassiau  et  consorts  ainsi  que  les 
présidents  et  membres  du  syndicat  de  la  Société  des  auteurs  et 
compositeurs  de  musique  aux  trois  quarts  desdits  dépens.. 

Sur  appel,  la  Cour  (!'«  ch.),  sous  la  présidence  de  M.Le- 
F£BVRE  DE  ViEFviLLE  sprès  Bvcir  entendu  les  plaidoiries  de 
M*^*  DouMERG,  Debagq  elE.  Crémieux,  a  rendu  Tarrêt  sui- 
vant, à  la  date  du  12  mai  1899  : 

La  Cour,  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges  ; 

Et  considérant  que  le  tribunal  a  ordonné  une  enquête  sur  le 


" """ —  I  ■■  -■"«IP 

—  74  — 

savoir  si  le  bal  du  8  février  1896  avait  ou  non  un  carac- 

ic,  seule  question  présentant  un  intérSt  au  point  de 
solution  du  litige  ;  qu'il  n'est  point  dénié  que  des  mor- 
musique  dont  les  auteurs  Tout  partie  de  la  Société  des 

^t  compositeurs  de  musique  aient  ét£  exécutés  au  cou- 

a  soirée  ; 

tilité  d'une  enquête  de  ce  cbef  n'est  point  démontrée  ; 

'.%  HOTiFs,  Confirme  dans  toutes  ses  parties  le  jugement 

appel  ; 

e  les  parties  de  toutes  autres  conclusions  principales  et 

:6S  ; 

nne  Antreassiau  et  consorts  en  tous  les  dépens  d'appel 

i  ceux  de  l'appel  éventuel  devenu  sans  objet  et  rendu 

e  par  l'appel  principal. 


Art.  4169. 

■  mualeale*.  —  Bnireprenenede  «pcctaeles. 
eatlon  llllelte.  —  Balle  de  eaneerta.  —  C«fffr. 
-  ComplIcKé . 

tt  élre  considéré  ni  comme  auteur  ni  comme  corn- 
délit  d' exécution  rmtsicale  illicite,  le  cafetier  qui 
atuitement  une  de  ses  salles  à  un  musicien  et  reste 
enl  étranger  à  l'organisation  du  bal  installé  chez 
participer  au  cboixdes  morceaux  exécutés,  et  tara 
même  prévoir  ceux  qui  seraient  exécutés  illicile- 


n,  Attendu  que  Fougeron  est  poursuivi  pour  avoir  fait 
publiquemeut,  au  cours  d'un  bal  donné  dans  son  éta- 
it, trois  morceaux  de  musique  :  Lototle,  polka  de  Bois- 
lâleau  d'If,  quadrille  de  Bléger,  PizMata,  polka  do 
ins  avoir  préalablement  obtenu  le  consentement  des 
:e  qui  constituerait  le  délit  prévu  par  l'article  4S8  du 
al  ; 
1  que  le  sieur  Blin,  employé  chez  Pavillon,  représentant 


"ipi'  '  i"  I  ■  ''ST^nmf'fnm^^ 


—  75  - 

de  la  Société  des  auteurs,  a  déclaré  devant  les  premiers  juges 
avoir  noté  le  11  mai  1899,  au  cours  du  balinstallé  parles  musi-' 
ciens  Maloiseau  et  Roufland,  dans  une  salie  appartenant  à  Fou- 
geron,  trois  morceaux  de  musique  qu'un  de  ses  amis,  auquel  les 
airs  ont  été  fredonnés,lui  a  dit  être  Estelle,  le  Château  (TlfeiPiZ' 
zicata  ;  mais  que  la  Cour  n'a  pas  sur  le  savoir  musical  de  cet  agent 
d'assurances  des  renseignements  lui  permettant  d'ajouter  une 
foi  absolue  à  sa  déposition  ;  que  celle-ci  est  contredite  par  celle 
du  musicien,  affirmant  n'a  voir  joué  que  des  morceaux  du  réper- 
toire Dupeyrat  ;  que  Blin  et  son  ami  ont  pu  commettre  une  er- 
reur en  confondant  entr'eux  des  airs  présentant  une  certaine 
analogie  ; 

Attendu  qu'une  expertise  ordonnée  aujourd'hui  ne  pourrait, 
à  raison  du  temps  écoulé  depuis  le  fait  incriminé»  donner  des  ré- 
sultats utiles  ; 

Attendu  qu'à  supposer  même,  ce  qui  n'est  nullement  établi, 
que  les  œuvres  musicales  susvisées  aient  été  exécutées  le  11  mai 
1899,  la  décision  des  premiers  juges  devrait  encore  être  mainte- 
nue ; 

Que  Fougeron,  tonnelier  et  cafetier^  a  prêté  à  des  musiciens 
ce  jour  là,  ce  qu'il  fait  deux  ou  trois  fois  l'an,  une  salle  qui  n'a 
aucune  communication  avec  le  café,  sans  exiger  aucune  rétribu- 
tion et  sans  augmenter  le  prix  des  consommations  :  qu'il  est 
resté  étranger  à  l'organisation  du  bal  installé  chez  lui  et  que 
c'est  avec  raison  que  dans  ces  circonstances  le  tribunal  a  décidé 
qu'il  ne  pouvait  être  considéré  comme  un  directeur  ou  un  entre- 
preneur de  bals  publics,  au  sens  de  l'article  428  du  Gode  pénal,  et 
par  suite  comme  étant  l'auteur  principal  de  l'infraction  préten- 
due; 

Attendu  qu'on  ne  saurait  voir  non  plus  en  lui  le  complice  d'un 
acte  dont  Maloizeau  et  Roufland  seraient  les  auteurs  principaux  ; 

Que  la  complicité  est  punissable,  il  est  vrai^  alors  même  que 
celui  à  qui  elleest  reprochée  n'a  tiré  aucun  profit  personnel 
de  son  concours,  mais  qu'aux  termes  de  l'article  60  du  Gode  pé- 
nal n'est  considéré  comme  complice  que  celui  qui  a  fourni  avec 
connaissance  le  moyen  devant  servir  à  l'action  ; 

Que  si  Fougeron  connaissait  par  les  démarches  faites  auprès  de 
lui  la  prétention  de  la  société  demanderesse  d'exiger  la  percep- 
tion des  droits  qui  pouvaient  lui  être  dus,  il  n'a  pas  participé  au 
choix  des  morceaux  joués  le  11  mai,  dans  une  salle  de  son  éta- 
blissement ;  qu'il  n'a  ni  pr  évuni  pu  prévoir  que,  parmi  ces  œu- 
vres musicales,  il  s'en  trouverait  trois  que  ces  messieurs  exécu- 
teraient, au  mépris  des  droits  que  protège  l'article  428  du  Gode 
pénal. 


Acquitte  Denys,  directeur  du  «  Jardin  Artistique  »,  et  le  ren- 
e  sans  dépens  ; 
'ondamne  LeRls  et  Leroy  aux  dépens. 

Sur  appel  de  M.  Jules  Barbier  et  autres,  est  intervenu 
rrèt  suivant  rendu  par  la  Cour  de  Douai,  le  SJuiUet  1899, 
113  la  présidence  de  M.  Vallir. 

ji  CouH,  Attendu  que  Denys,  locataire  de  l'immeuble,  sis  k 
le,  63,  rue  du  Long-Pont  et  dans  lequel  il  a  organisé  un 
é  et  une  salie  de  concert  contiguë,  ne  fait  preuve  ni  offre  de 
iuves  que,  par  bail  écrit  ou  verbal,  il  ait  fait,  à  Lellls  et  Le- 
r,  la  cession  d'aucun  de  ses  droits  sur  ladite  salle  ; 
}n'élant  demeuré  locataire  de  la  salle,  il  l'a  mise  à  la  dispo- 
ion  du  Cercle  dramatique  fivois  et  du  Groupe  Wodson  ;  qu'il  a 
isi  fourni  le  moyen  de  donner,  les  22  et  89  janvier  1899,  les 
icerts  publics,  dans  lesquels  ont  été  exécutés  les  morceaui 
;riminé3  ; 

iju'en  outre,  il  est  constant  que,  plusieurs  jours  a*ant  les 
acerts,  il  avait  été  expressément  infité  par  la  Société  des  an- 
1rs  et  compositeurs  de  musique  k  ne  pas  tolérer  que  de  pareil- 
exécutions  musicales  fussent  données  cbez  lui,  sans  autori- 
jon  préalable  ;  que  c'est  donc  sciemment  que  Denys  a  enfreint 
te  prohibition  ;  que  dans  ces  circonstances  en  tolérant  que  sa 
le  fut  ainsi  utilisée  par  LeBls  et  Leroy,  il  s'est  rendu  complice 
ta  contravention  commise  par  ceux-ci  ; 
ïtc..... 

Plaidants  :  M'  Douubrg,  du  barreau  de  Paris,  et  Bataille, 
barreau  de  Lille,  avocats.  —  Min.  publ.  :  M-  Scbolbr- 

Obskhvations.  —  Au  sujet  de  la  responsabilité  (pénale 
civile)  du  propriétaire  du  local  où  a  lieu  une  exécution 
isicale  illicite,  il  faut,  dans  chaque  espèce,  résener 
ppréciation  des  circonstances,  qui  peuvent  être  infini- 
int  variables. 

Il  convient  cependant  de  noter  des  divergences  réelles 
ns  les  trois  décisions  que  nous  publions  :  la  Cour  de 
ris  et  celle  d'Orléans  exigent  la  preuve  formelle  d'un 
t  de  complicité  intentionnelle  à  la  charge  du  propriétaire 
local,  pour  le  déclarer  responsable  des  indemnités 
ilamées.  tandis  que  la  Cour  de  Douai  le  condamne, 
ime  pénalement,  par  ce  seul  motif  qu'il  a  fourni  le  local 
que  la  Société  des  auleurs  l'avait  anlérîeurement  invite 


Pour  écMpper  à  celte  conséquence  on  a  généralement 
essayé  d'atteindre  les  cafetiers  et  les  autres  personnes  vi- 
mnie  auteurs  principaus  du  délit  et  en  tant  qu'en- 
iurs  de  spectacles.  En  effet,  l'article  426  du  Code 
it  ainsi  conçu  :  •  tout  directeur,  tout  entrepreneur 
tacles...  qui  aura  fait  représenter  sur  son  théâtre 
•âges  dramatiques  au  mépris  des  lois  et  règlements 
à  la  propriété  des  auteurs  sera  puni...  ■ 
ciété  des  auteurs  a  fait  plaider  qu'il  s'agissait  là 
)rle  de  contravention;  que  les  inculpés  sont  pu- 
is dès  que  la  propriété  des  auteurs  est  violée,  sans 
il  à  se  préoccuper  du  plus  ou  moins  de  bonne  foi 
ipables.  Cette  thèse  est  inadmissible  en  principe 
iUet,  Propriété  IW.  et  art.,  n"  803). 

vrai  néanmoins  que,  lorsqu'un  plaignant  établit 
latériel  de  la  violation  de  ses  droits,  on  n'exige  de 
aucune  autre  preuve  à  l'encontre  de  l'auteur  prin- 
u  délit  ;  cet  auteur  est  réputé  conscient  et  respon- 
on  ne  présume  pas  sa  bonne  foi  (V.  Pouiilet,  Propr. 
479)  tandis  que  la  bonne  foi  du  complice  est  pré- 
3U,  en  tout  cas,  beaucoup  plus  facilement  admise. 

par  conséquent  un  intérêt  manifeste  a  rechercher 
ropriétaire  de  salle  pour  réunions,  un  cafetier,  un 
ir  de  société  de  courses,  etc..  est  auteur  principal 
plice  du  délit  d'exécution  musicale  illicite  et,  pour 
se  demander  s'il  est  entrepreneur  de  spectacles 

sens  de  1  article  428  du  Code  pénal, 
lu'il  s'agisse  d'un  texte  pénal,  el  par  suite  d'inter- 
m  étroite,  l'expression  entrepreneurs  de  speelacles 

conipréhensive. 
our  de  cassation,  par  un  arrêt  du  22  janvier  1869 

1869,  p.  408),  a  déclaré  que  ces  mots  «  nedoivent 
e  limités  aux  industriels  qui  font  de  l'exploitation 
intreprise  théâtrale  leur  profession  spéciale,  mais 
'appliquent  également  à  tous  ceux  qui,  accidentel- 

ou  d'une  manière  plus  ou  moins  permanente,  en- 
inent  de  faire  jouir  le  public  de  la  vue  ou  de  l'audi- 
euvres  dramatiques  ou  musicales  >.  Le  cafetier  qui 
une  troupe  d'artistes  ambulants,  installe  donc  cliei 
î  entreprise  de  spectacles, 
est-il  le  véritable  entrepreneur,c'est-à-dire  l'auteur 


—  89  — 

ison.pour  la  Suisse,  les  décisions  suivantes,  indiquées 
le  remarquable  rapport  présenté  en  1898  à  la  Société 
se  des  juristes,  par  M.  Pliilippe  Dunant,  avocat  à  Ge- 
1(1): 

Il  y  a  faute  grave  entraînant  responsabililé  pénale  de 
irt  du  cantinier  qui,  averti  par  la  Société  des  auteurs 
le  avait  des  droits  â  prétendre  sur  rexécution  des 
«aux  joués  dans  son  établissement,  s'est  borné  à  don- 
;onnaissance  des  prétenlions  de  la  société  au  comité 
nanisation  de  la  fête  et  qui,  sur  le  vu  des  assurances 
lées  par  ce  dernier,  n'a  plus  rien  fait  pour  empêcher 
cution  des  œuvres  interdites  (Trib,  fédéral,  12  juin 
,  aff.  Huhn,  Droit  d'aut.,  1896.  p.  159);  2-  dans  le 
le  sens,  chambre  de  police  de  la  Cour  d'appel  et  de 
ation  du  canton  de  Berne,  18  avril  1896,  aflf.  Gesell- 
rtshaus  Muséum  de  Berne,  Droit  d'auteur,  1897,  p. 
ions.  2)  ;  3'  de  même,  Cour  d'appel  et  de  Cassa- 
du  canton  de  Berne,  26  mai  1894,  Soc.  des  auteurs 
der,  Droit  d'aut.,  1898,  p.  20  ;  4=  Trib.  de  Genève, 
i  1898,  Cour dejuslice, 30  novembre  189S,/>roi7rf"ati/., 
p.  44;  5°  jugé  plus  récemment  encore  que  le  ca- 
'  qui  consent  à  l'exécution  dans  son  établissement 
vres  musicales,  en  vue  de  l'achalander,  annonce  ou 
i  annoncer  ces  concerts  au  public  par  la  voie  des  jour- 
,  agil  dans  un  but  de  lucre  et,  averti  par  la  Société 
tuteurs,  compositeurs  et  éditeurs  de  musique  qu'elle 
id  faire  respecter  les  droits  de  ses  sociétaires,  il  en- 
une  responsabilité  pénale  pour  les  œuvres  musica- 
Lécutées  sans  le  consentement  del'auleur  (Trib.  pol. 
inne,  21  juillet  1899,  Torleschi,  le  Droit  d'auteur,\90\ . 
I.—  Contra  :  (action  pénale  rejelée  pour  absence  d'in- 
)n  dolosive,  tous  droits  réservés  au  civil)  Tribunal 
de  Bâie,  U  décembre  \891,  Droit  d'aut.,  1898,  p. 

pourra  consulter  encore  pour  la  Suisse  une  brochure, 
ée  à  Berne,  imprimerie  Bilchler  et  Cie,  1899  (29  pa- 
n-12)  et  contenant  un  rapport  des  experts  et  les  ar- 
lu  Tribunal  cantonal  du  canton  d'Argovie,  du  16  fé- 

«  npport,  dans  t» 


T^ 


-83  - 

vrier  1899  et  du  Tribunal  fédéral,  du  SO  juin  1899  (Société 
des  auteurs  c.  Société  du  casino  de  Baden  et  Moller  (1). 
Les  premiers  juges  avaient  condamné  pénalement  pour 
faute  grave,  conformément  au  texte  de  l'article  13  de  la 
loi  fédérale  suisse  sur  le  droit  d'auteur,  les  membres  de  la 
Société  du  casino  de  Baden,  à  raison  des  exécutions  illici- 
tes dirigées  par  le  chef  d'orcheslre  du  casino.  Le  Tribunal 
fédéral  n*a  pas  eu  à  se  prononcer  sur  le  recours  contre 
l'action  pénale  (recours  qui  n'a  pas  été  déclaré  receva- 
ble  dans  l'espèce),  mais  il  a  maintenu  les  condamnations 
civiles. 

Au  point  de  vue  spécial  delà  Belgique,  il  y  a  lieu  de 
consulter  la  brochure  intitulée  «  Le  droit  des  auteurs  en 
Belgique.  —  Des  exécutions  musicales  illicites,  —  Recueil 
des  principales  décisions  sur  la  matière,  réunies  et  coor- 
données par  Paul  Wauwermans,  avocat  à  la  Cour  d'appel 
de  Bruxelles,  vice-président  de  l'Association  artistique  et 
littéraire  internationale,  Bruxelles,  Société  belge  de  librai- 
rie, 1897,  in-8»,  76  p.  ».  On  a  condamné  pénalement,  sans 
admettre  la  bonne  foi,  le  directeur  de  théâtre  qui  orga- 
nise des  bals  où  l'orchestre  joue  illicilement  certains  mor- 
ceaux (Cour  d'appel  de  Bruxelles,  8  nov.  1890),  —  un  di- 
recteur de  cercle  musical,  qui  avait  du  reste  contesté  le 
droit  de  l'auteur  de  la  musique  (Trib.  de  Mons,  8  fév. 
1893),  —  un  directeur  de  cirque  qui  avait  refusé  antérieu- 
rement de  payer  aux  auteurs  des  redevances  qu'il  jugeait 
exagérées  (Cour  de  Bruxelles,  l«'mai  1896,  Wauwermans, 
op,  cit.,  p.  48  à  52).  D'autres  décisions,  applicables  aux 
cafetiers  et  propriétaires  de  salles,  ont  admis  leur  respon- 
sabilité civile  [Wilbid,  diverses  décisions  de  justices  de 
paix,  p.  20  et  suiv.).  Jugé  qu'il  y  a  faute  grave,  entraînant 
la  responsabilité  pénale  de  son  auteur,  de  la  part  d*un 
cafetier  possesseur  d'une  salle  de  danse  qui,  averti  à  plU' 
sieurs  reprises  par  la  Société  des  auteurs,  compositeurs 
et  éditeurs  de  musique  qu'elle  entendait  voir  respecter 
les  droits  de  ses  sociétaires,  a  passé  outre  à  cette  défense 
et  a  continué  à  faire  exécuter  les  œuvres  interdites  (Cass. 
belge,  16  déc.  1895,  Droit  d*auleur,  1896,  p.  28). 

(1)  L'arrêt  da  trib.  féd.  a  été  également  publié  dans  le  Droit  (Vauteuv^ 

1899,  p.  lae. 


—  84  — 

Enfin  nolons,  pour  terminer  celle  revue  étrangère  for- 
cément incomplète,  les  décisions  suivantes,  en  Allemagne  : 
—  Un  directeur  de  théâtre  est  responsable  des  exécutions 
illicites  de  son  orchestre  ;  mais  un  aubergiste,  qui  fait 
venir  une  musique  militaire  et  n'exige  du  public  qu'un 
supplément  léger  de  prix  quand  les  concerts  ont  lieu  à 
couvert,  n'est  pas  responsable  du  choix  des  morceaux 
(Cour  supérieure  de  Colmar,  2 décisions  citées  ;  Gew.R.^ 
l  1897,  n.  2,  p.  66).  —  L'hôtelier  qui  engage  une  musique 

I  militaire  pour  des  concerts  dans  son  restaurant  n'est  pas 

responsable  de  l'exécution  illicite  de  certaines  œuvres  si 
le  choix  des  morceaux  était  abandonné  au  chef  de  musi- 
que (Trib.  imp.,  2*  ch.  civ.,  10  juillet  1896,  le  Droit  d'au- 

leur,  1897.31). 

Albert  Vaunois. 


V 


Art.  4171. 

CBavre«  manicalos.  —  Exéeution  illicite.  —Entre- 
preneur  de  speetneles.—  Cafetier.—  Instrument  de 
musique  dit  c  Automate  y.  —  Publicité. 

Le  cafetier  qui  installe  chez  lui  dans  sa  salle  publique 
et  à  la  disposition  des  clients  un  instrument  de  musique 
dit  «  l* Automate  t,  dont  les  sons  peuvent  être  normalement 
perçus  par  plusieurs  personnes  placées  autour  de  Vinslru- 
ment,  est  un  entrepreneur  de  spectacles  (1). 

H  est  responsable  pénalemenl  de  Inexécution  musicale 
illicite  faite  au  moyen  de  cet  instrument  alors  même  qu'il 
n'en  serait  pas  propriétaire,  que  la  mise  en  marche  serait 
provoquée  par  une  des  personnes  composant  le  public  et 
qu'il  ne  profiterait  pas  de  V argent  versé  pour  chaque  audi- 
tion (2). 

(C.  de  Lyon,  14nov.  190).  —  Gillet  et  autres  c.  Vve  Dechavanne.) 

(1)  Y.  Tobservation  pi  as  haut,  p.  78.  Crr.  les  arrêts  de  Paris,  Doaai, 
Orléans  qui  précèdent,  sur  la  définition  de  l'entrepreneur  de  specta^ 
clés. 

(*2)  Le  fait  que  le  propriétaire  du  local  ne  tirerait  aucun  profit  de  Taa- 
dition  illicite  est  absolument  indifférent  (V.  Pouillet,  Propr,  litL, 
n*  810). 

La  question  de  publicité  est  une  question  de  fait,  qui  a  été  tranchée 
souverainement.  (Cfr.  Pouillet,  ibid,,  n*«  807  à  812,  sur  les  caractères 


—  86  — 

être  entendus  qu'à  une  courte  distance,  surtout  dans  un  café  au 
milieu  du  bruit  des  consommateurs  et  des  conversations  ; 

Que  d'ailleurs  chaque  personne  qui  met  dix  centimes  dans 
l'appareil  se  procure  une  audition  toute  personnelle  et  particu- 
lière des  morceaux  de  musique  sans  vouloir  en  aucune  façon  en 
faire  bénéficier  le  public  ; 

Par  CBS  motifs,  Le  tribunal  jugeant  correctionnellement  et  en 
premier  ressort; 

Déboute  les  demandeurs  de  leur  demande  ; 

En  conséquence,  relaxe  Mme  veuve  Dechavanne  des  Uns  de  la 
poursuite  sans  peine  ni  dépens  ; 

Condamne  les  demandeurs  aux  dépens. 

Sur  appel  des  compositeurs,  la  Cour  de  Lyon,  sous  la 
présidence  de  M.  Tallon,  a  rendu  Tarrèt  suivant  à  la  date 
du  14  novembre  1900  sur  les  plaidoiries  de  M*  Doumbrc, 
du  barreau  de  Paris,  pour  les  appelants  et  de  M®  Rivière, 
du  barreau  de  Lyon,  pour  la  veuve  Dechavanne  : 

La  Cour,  Considérant  que  Gillet,  les  héritiers  Gounod,  Lecocq, 
Guéteville  et  Mascagni  articulent  en  fait  que  la  dame  Decha- 
vanne a  fait  exécuter,  le  2  janvier  1900  notamment,  dans  son 
café  dit  des  Deux-Mondes,  à  Saint-Etienne,  par  un  instrument 
de  musique  dit  V Automate,  les  morceaux  suivants  qui  sont  leur 
propriété  : 

o  Adèle  t'es  belle  »,  Guéteville  ; 

c(  La  fille  de  Mme  Angot  »,  Lecocq  ; 

«  Loin  du  bal  »,  Gillet  ; 

c<  Pausi  »,  Gounod  ; 

«  Cavalleria  Rusticana  »,  Mascagni  ; 

Considérant  que,  sans  contester  dans  ses  déclarations  faites  à 
Taudience  de  la  Cour  l'exactitude  de  ces  allégations,  la  dame 
Dechavanne  s'est  bornée  à  soutenir  avec  le  jugement  dont  est 
appel  : 

jo  Que  les  sons  de  V Automate  sont  assez  faibles  pour  ne  pou- 
vo  iiélreperçus  dans  un  café  qu'à  une  courte  distance,  et  ne 
peuvent  constituer  une  exécution  publique  d'un  morceau  de 
musique  ; 

2o  Que  cet  instrument  de  musique  est  mis  en  mouvement  par 
la  dame  Dechavanne,  dans  le  but  d'offrir  l'audition  à  tous  ceux 
qui  fréquentent  son  établissement,  mais  par  le  versement  d'une 
somme  de  dix  centimes,  opéré  par  un  consommateur  agissant 
dans  son  intérêt  personnel  et  privé  ; 

Sur  le  premier  moyen  : 

Considérant  que  VAutomate  n'est  point  un  instrument  construit 


•V 


—  87  — 

de  telle  sorte  que  les  sons  n'en  puissent  être  entendus  que  par 
une  seule  personne  à  la  fois,  placée  dans  des  conditions  parti- 
culières et  nécessaires  pour  les  percevoir  ; 

Que  ces  sons  se  répandent  autour  de  Tappareil  et  sont  de 
nature  à  être  entendus  par  toutes  les  personnes  qui  Tentourent  ; 

Considérant  que  cette  qualité  suffit,  lorsque  cet  instrument 
est  placé  dans  un  lieu  public,  comme  un  café,  pour  constituera 
ce  point  de  vue  la  publicité  de  ses  auditions  ; 

Qu'il  importe  peu  que  la  perception  des  sons  puisse  être  gênée 
parles  conversations  particulières  et  le  bruit  qui  se  fait  parfois 
dans  un  café  ; 

Considérant  que,  s*il  en  était  autrement,  il  faudrait  ranger 
dans  la  même  catégorie  tous  les  instruments  dont  Les  sons, 
comme  ceux  du  piano  ou  du  violon,  peuvent  être  plus  ou  moins 
absorbés  et  confondus  dans  les  bruits  qui  se  font  dans  une  salle 
ouverte  à  un  public  non  astreint  au  silence  ; 

Qu'il  faudrait  alors  réserver  le  caractère  de  publicité  aux  exé- 
cutions faites  par  des  instruments  dont  le  fracas  serait  capable 
de  couvrir  tous  les  autres  bruits  ; 

Considérant  qu'une  telle  condition  n'est  nullement  nécessaire 
et  qu'il  suffit,  pour  constituer  le  caractère  d'exécution  publique, 
que  les  sons  de  l'instrument  placé  dans  un  lieu  public  puissent 
normalement,  comme  cela  se  produit  pour  un  Automate,  être 
perçus  avec  netteté  suffisante  par  les  personnes  placées  autour 
de  lui  ; 

Sur  le  second  moyen  : 

Considérant  que  V Automate  de  la  dame  Dechavanne  a  été  placé 
par  elle  dans  la  salle  de  café  à  la  disposition  du  public  qui  fré- 
quente son  établissement  et  pour  la  récréation  de  ce  public  ; 

Considérant,  dès  lors,  qu'il  importe  peu  que  sa  mise  en  jeu 
nécessite  l'intervention  d'une  des  personnes  composant  ce  public, 
et  le  versement  d'une  somme  de  dix  centimes  par  celle-ci  puis- 
que l'audition  qui  en  résulte  est  publique  par  suite  du  lieu  même 
où  la  dame  Dechavanne  a  installé  l'instrument  ; 

Considérant  qu'elle  allègue  vainement  que  cet  instrument  ne 
lui  appartient  pas  et  que  ce  n'est  pas  elle  qui  profite  des  10  cen- 
times versés  pour  chaque  audition  ; 

Considérant  en  effet  qu'en  tenant  ces  allégations  pour  exac- 
tes, il  n'en  reste  pas  moins  établi  que  VAutomate  a  été  installé 
par  elle  dans  la  salle  de  café  qu'elle  exploite  pour  la  récréation 
de  sa  clientèle  ; 

Considérant  qu'elle  doit  être  dès  lors  considérée  comme  un 
entrepreneur  de  spectacles  publics  dans  le  sens  de  l'article  428 
du  Code  pénal  ; 

Considérant  que  ces  faits  prévus  et  réprimés  par  les  articles  3 


la  loi  du  ISjativier  1791  et  428  du  Code  pénal  ont  causé  aux 
pelants  uu  préjudice  dont  il  leur  est  dû  réparation  et  que  la 
>ur  a  les  éléments  suHIsants  pour  évaluer  ce  préjudice  ; 
Par  cesmotiks,  Après  en  avoir  délibéré  ; 
Réformatitle  jugement  du  Tribunal  de  Saint- Etienne  du  9  jail- 
t  1900; 

Condamne  lesdits  appelants  aux  frais  envers  l'Etat,  sauf  leur 
cours  contre  la  veuve  Decba vanne  qu'elle  supportera  tant  en 
eraiëre  instance  qu'en  appel  ; 

Condamne  la  dame  Decbavanne  aux  frais  avancés  par  les  par- 
is civiles  tant  en  première  instance  qa'en  appel  ; 
Fixe  à  l'égard  de  la  dame  Decba  vu  noe,  la  durée  de  la  contrainte 
ir  corps  au  minimum  légal. 


Art.  4172. 

En^pea  mnalcale*.  —  Exécntloii  illicite.  —  8*l«le 
de*  pecettea.  —  l^ktelété  de«  nuteHr*  et  «oibikmkI- 
(etips  «tramatlqneB.  —  Action  «n  Jii«tloe. 

La  Société  des  auteurs  el  compositeurs  dramatiques  n'etl 
2sun  simple  agent  d'à/faire!  ou  mandataire,  chargé  de 
lire  respecter  les  droits  des  auteurs  et  compositeurs  et  de 
ercevoir  leurs  receltes  ;  elle  peut  passer  avec  les  tiers  des 
■ailés  valables,  et  les  membres  de  la  commission  de  la  so- 
'élê  ont  le  droit  d'ester  en  justice  pour  faire  exécuter  ces 
■aités,  dans  lesquels  ils  ont  d'ailleurs  un  intérêt  person- 

,1(1). 

Les  membres  de  la  commission  de  la  société  en  désaccord 
>ec  un  théâtre  sur  le  montant  des  droits  à  percevoir^  ne 

|1]  Sur  le  droit  d'agir  en  Justice  de  la  Société  des  tuteur*  et  compo- 
leurs  dramaliques,  M.  Pouillet  distingue  deui  ordres  de  tiits  :  j'ceni 
i  la  sociale,  élre  moral,  est  directement  intéressée  el  pour  lesquels 
le  peut  agir  ;  j°  ceux  qui  intéressent  les  auteurs  dont  elle  est  le  man- 
ilaire,  et  pour  lesquels  elle  ne  peut  se  substituer  à  eux.  V.  Pouillet, 
;*ii|ii'.  tiu.  et  arrêts  cités,  n<»  82»,  829.  Adde  :  note  dans  les  Ânti.,  98. 
),  sous  Trib.  Honlluçon,  7  février  139G  (décision  relalire  à  la  Société 
s  gens  de  lellres)  :  -  Trib.  Seine,  10  déc.  1890,  Droit  a'auleur,  1891, 
tt  (inleriention  de  la  Sociélé  des  artistes  français  dans  une  alT. 
ofTbauer).  —  V.  sur  la  jurisprudence  en  Belgique,  Droit  d'oui.,  1895, 
76. —  Voir  également  l'opinion  de  M .  Darras  crilïquaul  le  droit  d'aciton 
I  la  Sociélé  des  uuteuis  et  composlleuri  d  ramatiques,  et  les  renvois  de 
jctrine,  Dmit  d'aiileuy,  1895,  p.  9ti. 

Une  question  de  même  ordre  se  présente  pour  U  plupart  des  syndi- 
Is  ;  Cf.  jurisprudence  citée.  Vaunois,  Deia.  et  mod.,  n'  SU. 


■  ■!■         I  !.■  ■■    IRi. 


—  89  - 

peuvent^  en  vertu  d'une  ordonnance  du  président  du  tribu-' 
nal  civil,  faire  saisir  les  recettes  de  ce  théâtre  ;  cette  saisie 
n'est,  dans  ces  circonstances,  permise  ni  en  vertu  de  la  loi 
des  ii-iQ  janvier  1791,  ni  des  articles  4S8  etiid  du  Code 
pénal  ni  d'aucun  autre  texte  de  la  loi  (1). 

(1)  Pour  qu'il  y  ait  saisie  des  recettes  d'un  théâtre  en  vertu  des  arti- 
cles 425  et  suivants  du  Code  pénal,  la  première  condition  est  qu'il 
s'agisse  d'une  représentation  illicite.  Les  juges  déclarent  dans  notre  es- 
pèce que  cette  condition  n'était  pas  remplie.  L'un  des  trois  auteurs 
avait  donné  son  autorisation  ;  mais,  à  moins  que  cet  auteur  ne  fût  le 
mandataire  de  ses  deux  collaborateurs,  le  motif  donné  à  cet  égard  par 
le  jugement  nous  parait  inopérant.  Une  représentation  est  délictueuse 
du  moment  qu'elle  est  donnée  contre  la  volonté  d'un  seul  des  auteurs 
de  la  pièce.  Cfr.  Pouillet,  n»»  493-494. 

Reste  l'antre  motif  donné  par  le  jugement  :  la  représentation  n'était 
pas  illicite,  ayant  été  précédée  d'un  traité  passé  avec  la  Société  des  au- 
teurs ;  les  parties  étaient  seulement  en  désaccord  sur  le  montant  des 
redevances  à  payer. 

On  est  alors  amené  à  se  poser  cette  question  :  l'inexécution  partielle 
ou  le  désaccord  sur  l'interprétation  du  traité  passé  entre  l'auteur  et  le 
cessionnaire  suffit-il  pour  constituer  à  la  charge  du  cessionnaire  déclaré 
en  faute  un  fait  de  contrefaçon  ?  C'est  là  un  problème  sur  lequel  la  ju- 
risprudence n'est  pas  absolument  fixée.  V. Pouillet,  n^^  499  et  500.  —  Si 
Ton  estimait  que  la  violation  du  contrat  est  une  contrefaçon,  il  aurait 
pu  être  question  de  saisir  les  recettes  et  de  poursuivre  ensuite  pénale- 
ment. 

Le  tribunal  n'a  pas  abordé  cette  discussion  parce  qu'il  a  pensé  que 
les  défendeurs  étaient  de  bonne  foi,  —  décision  souveraine  —  que  la 
bonne  foi  était  exclusive  du  délit,  —  solution  presque  universellement 
admise,  —et  que /a  sainte  n'est  permise  qu'en  cas  de  délit.  Tel  est  au 
moins  le  sens  qu'on  peut  attribuer  a  cette  partie  du  jugement. 

La  Cour  de  cassation,  dans  une  hypothèse  voisine  de  celle  qui  nous 
occupe,  déclare  que  la  confiscation,  visée  par  l'article  427,  est  une  peine 
et  ne  peut  être  prononcée  qu'en  cas  de  condamnation  correctionnelle 
(Cass.,  29  déc.  1882,  Ann.,  84.359  et  23  juin  1893,  D.  P.  93.1.616).  Il  y 
a  pourtant  controverse  sur  ce  point  en  doctrine  et  dans  les  Cours 
d'appel. 

Mais  il  faut  distinguer  la  confiscation  (art.  427),  prononcée  en  vertu 
d'un  jugement,  et  la  saisie,  préalable  aux  poursuites  (art.  429),  dont  il 
s'agissait  dans  TafTaire  Paulus-Habans. 

Le  droit  que  s'attribuent  les  auteurs,  de  commencer  par  faire  saisir 
les  objets  argués  de  contrefaçon  ou  les  recettes  des  représentations  il- 
licites et  de  n'exercer  ensuite  leurs  poursuites  qu'au  civil  sans  deman- 
der aucune  condamnation  correctionnelle,  ce  droit  était  considéré  gé- 
néralement, en  principe,  comme  pouvant  toujours  s'exercer  (sauf  à  voir 
par  quel  moyen,  ce  que  nous  allons  examiner).  L'article  429  du  Gode 
pénal  suppose  en  effet  la  saisie  préalable  quand  il  fixe  comment  la 
condamnation  sera  réglée  «  s'il  n'y  :\  pas  eu  saisie  »  ■ 

Le  jugement  Paulus-Habans  tendrait  à  faire  admettre  que  cette  saisie 
doit  être  déclarée  nulle  quand  elle  n'aboutit  pas  A  une  condamnation 
pénale.  C'est  li  une  solution  que  nous  croyons  neuve  et  qui  en  tout 
cas  soulève  d'autres  problèmes. 

Il  fiiut  écarter  ici  les  souvenirs  de  la  loi  de  1844  sur  les  brevets  d1n- 


—  90  — 

(Trib.  civ.  de  la  Seine,  15  janvier  18%.  -^  Société  des  auteurs  et  com- 
positeurs dramatiques  c.  Paulus  Habans  et  Gie.) 

Ainsi  jugé  par  le  Tribunal  civil  de  la  Seine  (1"  chambre) 
sous  la  présidence  de  M.  Planteau  : 

vention  et  ne  trancher  la  difficulté  qu'avec  les  textes  spéciaux  à  notre 
matière. 

Pour  les  imprimés,  l'article  3  de  la  loi  des  19-24  juillet  1793  et  le 
décret  du  25  prairial  an  III  ne  paraissent  subordonner  le  droit  de  saisie 
des  auteurs  à  aucun  jugement,  soit  préalable,  soit  même  postérieur, 
et  à  aucune  poursuite  ni  pénale,  ni  civile. 

Ce  n'est  donc  qu'en  matière  de  représentation  théâtrale  et  pour  la 
saisie  des  recettes  que  la  question  se  pose. 

L'article  428  du  Code  pénal  —  si  l'on  est  partisan  de  la  thèse  consacrée 
par  la  Cour  de  cassation,  —  prévoit  bien  une  confiscation  consécutive  à 
un  jugement  correctionnel  ;  mais  cet  article  et  même  Tarticle  429  sont 
absolument  muets  sur  la  façon  d^effectner  une  saisie  préalable  aux  pour- 
suites. 

La  loi  de  1793  est  étrangère  au  droit  de  représentation  des  écrivains 
dramatiques.  On  ne  peut  l'invoquer  pour  saisir  des  recettes  (Trib.  Seine, 
3  avril  1878,  cité  ci-après.  Y.  pourtant,  en  sens  contraire,  Pouillet, 
Propr.  lut,,  n»  832  et  Trib.  Seine,  6déc.  1876,  cité  ci-après). 

La  loi  du  13  janvier  1791  (qui  est  rappelée  dans  la  loi  du  8  avril  1854 
et  la  loi  du  19  juillet  1791  (modifiée  le  30  août  1792,  puis  remise  en  vi- 
gueur le  1*'  septembre  1793)  n'ont  pas  été  abrogées  expressément  ;  ces 
deux  lois  consacrent  le  droit  exclusif  de  représentation  pour  les  auteurs 
dramatiques  «  sous  peine  de  confiscation  du  produit  total  des  représen- 
tations au  profit  des  auteurs  ».  Il  semble  bien  qu'il  s'agisse  là  d'une 
peine,  qui  ne  pourrait  être  prononcée  que  par  les  tribunaux.  C'est  la 
première  rédaction  de  ce  qui  est  devenu  l'article  428  du  Code  pénal  ;  on 
n'y  donne  en  tout  cas  aucun  pouvoir  de  réquisition  directe  aux  auteurs, 
aucune  mission  d'exécution  aux  officiers  de  paix  ou  commissaires  de 
police. 

Je  ne  connais  pas  d'autre  loi  spéciale  à  laquelle  on  puisse  recourir. 
Nous  ne  trouvons  donc  nulle  part,  en  matière  dramatique,  l'organisa- 
tion du  droit  de  saisie  des  recettes,  préalablement  aux  poursuites  (1). 

On  comprendrait  du  reste  que  la  loi  de  1793  ait  permis  d'empêcher 
la  circulation  d'un  objet  contrefait,  qui  porte  atteinte  peut-être  à  la  ré- 
putation de  l'auteur,  mais  que  l'écrivain  dramatique  ne  soit  pas  pro- 
tégé de  même.  Théoriquement,  à  propos  des  représentations  théâtrales, 
la  contrefaçon  a  un  autre  caractère  ;  elle  est  orale  et  immatérielle  ;  elle 
ne  donne  pas  facilement  matière  à  saisie  ;  l'argent  des  recettes  ne  porte 
pas  atteinte  à  la  réputation  de  l'auteur  ;  il  n'est  pas  délictueux  par  sa 
nature  ;  sa  possession  par  le  délinquant  est  seulement  vicieuse  ;  mais  il 
en  est  ainsi  de  tous  les  bénéfices  produi  ts  par  un  délit  quelconque,  par 
l'abus  de  confiance,  par  exemple  ;  le  plaignant  n'est  pas,  pour  cela,  au- 
torisé à  faire  saisir,  avant  toute  poursuite,  l'argent  qu'il  réclame,  à 
moins  d'un  texte  exorbitant  du  droit  commun. 

L'article  429  du  Code  pénal  peut  être  ce  texte,  mais  il  est  certaine- 
ment incomplet  et  difficile  à  appliquer. 

La  Société  des  auteurs  dramatiques  essaie  généralement  d'obtenir  la 
saisie  préalable  des  recettes  par  ministère  d'huissier  et  en  vertu  d'une 

(i)  Cf.  sur  oelta  question,  et  en  sens  divera  :  Trib.  Seine,  6  décembre  1876  ;  Trib» 
Seine,  3  avrU  ld78,  et  observaUons  de  M.  P.  M.  S.  L.,  Aii».,  99,  p.  129,  233,  236. 


I^^PW.  ■Hffi.^UPW 


—  91  — 

Lb  Tribunal»  Attendu  que»  par  acte  sous  signatures  privées, 
en  date  du  4  octobre  1892,  enregistré,  Roger  et  Peilerin,  agents 
généraux  de  la  Société  des  auteurs  et  compositeurs  dramatiques, 
ont  concédé  à  Paulus  Habans  et  Gie  la  faculté  de  se  servir  du 
répertoire  de  ladite  Société  moyennant  un  droit  proportionnel 
à  prélever  sur  les  recettes  brutes  des  réprésentations  ; 

Attendu  qu'aux  termes  de  Tarticle  premier  de  ce  traité  le  droit 
proportionnel  est  fixé  à  5  0/0  lorsque  la  pièce  est  jouée  en  deux 
actes,  et  à  2  0/0  quand  Touvrage  est  en  un  acte  ;  que  cet  article 
se  termine  par  une  clause  manuscrite  ainsi  conçue  :  «  En  ce  qui 
concerne  les  pièces  en  plusieurs  tableaux,  il  est  entendu  que  les 
tableaux  séparés  par  le  baisser  du  rideau,  ceux  pour  lesquels  le 
décor  aura  été  changé,  ou  enfin  ceux  dont  la  durée  excédera 
quarante  minutes,  seront  comptés  chacun  comme  un  acte,etque 
les  droits  seront  perçus  d'après  le  tarif  ci-dessus  comme  s'il  s'a- 
gissait d'actes  proprement  dits  »; 

ordonnance  du  président  da  tribunal  civil,  rendue  sur  requête. 

Le  jugement  Paalus-Habans  écarte  ce  moyen,  au  moins  en  matière 
civile. 

Le  tribunal  de  la  Seine  avait  précédemment  admis  le  contraire  dans 
un  jugement  du  3  avril  1878,  Oller,  A/in.,  92.  229.  Y.  Observations, 
ibid.f  p.  296,  en  faveur  de  la  validité  de  cette  procédure.  On  se  fonde, 
en  ce  cas  sur  l'interprétation  de  l'article  54  du  décret  du  80  mars  1808, 
relatif  aux  pouvoirs  du  président  concernant  les  mesures  d'urgence. 

L'interprétation  en  est  cependant  sujette  à  controverse.  Les  uns  sou- 
tiennent que  le  président  peut  statuer,  sur  requête,  dans  tous  les  cas 
possibles  qui  présentent  un  caractère  d'urgence  exceptionnelle,  —  mais 
à  condition  de  réserver  aux  parties  lésées  la  faculté  de  lui  en  référer  en 
cas  de  difficulté.  Les  autres  refusent  au  président  le  droit  de  statuer  en 
dehors  des  cas  formellement  prévus  par  la  loi  et  des  cas  analogues  où 
la  mesure  réclamée  ne  constitue  pas  une  véritable  demande  et  n'appelle 
pas  de  contradiction  (V.  Dalioz,  C.  proc,  annoté,  sur  l'appendice  à  la 
1"»  partie,  liv.  V,  titre  XVI,  G.  proc.j. 

La  question  serait  alors  de  savoir  si  l'article  429  du  Code  pénal  pose 
précisément  le  principe  que  le  président  serait  chargé  d'appliquer  en 
vertu  de  son  pouvoir  d'administration.  Mais  si  le  droit  de  saisie  ne  dérive 
que  de  l'article  429  du  Code  pénal,  ne  serait-ii  pas  en  effet  limité  aux  pro- 
cédures correctionnelles  ?  —  On  voit  en  somme  que  cette  question  de  la 
saisie  préalable  des  recettes  ne  va  pas  sans  difficulté. 

Outre  les  décisions  citées  dans  le  cours  de  cette  note,  on  pourra  con- 
sulter l'arrêt  de  cassation  du  6  janvier  1893,  reproduit  ci-après.  Cette 
fois,  la  Cour  de  cassation  a  refusé  de  prononcer  la  confiscation  des  recettes 
après  un  jugement,  par  ce  motif  que  le  plaignant  n'avait  pas  fait  procéder 
à  la  saisie  préalable.  Elle  admet  donc  cette  saisie,  il  est  vrai  qu'il  s'a- 
gissait de  poursuites  correctionnelles  ;  mais  elle  omet  de  dire  quels 
sont  les  textes  qui  la  légitiment  et  quelle  procédure  on  doit  employer. 
De  façon  que  les  décisions  de  la  jurisprudence  aboutissent  actuelle- 
ment au  chaos.  Aucun  texte  clair  et  formel  n'organise  la  saisie  préalable  ; 
quelque  procédure  qu'emploie  le  plaignant  pour  y  arriver,  on  en  dis- 
cute la  validité  :  et  quand  il  n'a  pas  opéré  cette  saisie,  si  contestable,  la 
Cour  de  cassation  lui  refaite  la  confiscation  !  A.  V. 


—  92  — 

Attendu  que,  pendant  la  saison  théâtrale  de  4892-1893,  la  So- 
ciété Paulus  Habans  et  Gie  a  fait  représenter  au  Café-Concert 
Ba-Ta-Clan  une  pièce  dudit  répertoire  désignée  sur  les  pro- 
grammes et  affiches  sous  le  titre  :  Paulussonneries  de  fannée, 
revue  en  deux  parties,  de  MM.  Nu  mes  et  Garnier,  musique  de 
M.  Gall; 

Attendu  que  cette  pièce  était  en  deux  tableaux  séparés  par  un 
baisser  de  rideau,  pendant  lequel  Tacteur  Paulus,  placé  sur  la 
scène  entre  la  rampe  et  le  rideau,  jouait  un  intermède  avec  trois 
autres  acteurs  disséminés  dans  la  salle  ;  que  malgré  cet  inter- 
mède la  séparation  des  deux  tableaux  par  le  baisser  de  rideau 
était  complète,  et  que  par  suite,  d'après  la  clause  ci-dessus  visée, 
chacun  de  ces  tableaux  devait  être  considéré  comme  un  acte 
pour  la  perception  du  droit  proportionnel  ;  que,  du  reste,  il  ré- 
sulte du  procès-verbal  dressé  par  l'huissier  Vigneron,  le  14  jan- 
vier 1893,  que  le  deuxième  tableau  durait  plus  de  quarante  mi- 
nutes ; 

Attendu,  en  conséquence,  que  le  droit  proportionnel  à  préle- 
ver, au  profit  de  la  Société  des  auteurs  et  compositeurs  dramati- 
ques à  Foccasion  des  représentations  des  Paulussonneries  de  Can- 
née était  de  5  0/0  de  la  recette  brute  ; 

Attendu  que,  la  Société  Paulus  Habans  et  Cie  ayant  refusé  de 
payer  sur  cette  base  les  droits  d'auteur  afférents  à  cette  pièce,  le 
président  et  les  membres  de  la  commission  de  la  Société  des 
auteurs  et  compositeurs  dramatiques  lui  firent  sommation,  sui- 
vant acte  dudit  Vigneron,  en  date  du  16  janvier  1893,  d'avoir  à 
payer  les  sommes  dont  elle  était  débitrice,  mais  que  cette  som- 
mation resta  infructueuse  ; 

Que  le  lendemain,  17  janvier,  Paulus  Habans  et  Cie  firent 
offrir  réellement  à  ces  mêmes  personnes,  suivant  acte  de  Noël, 
huissier  près  le  Tribunal  de  la  Seine,  la  somme  de  599  fr.  75, 
représentent  le  droit  proportionnel  de  2  0/0  sur  le  chiffre  des  re- 
cettes effectuées  du  16  au  31  décembre  1892  ;  que  le  président  el 
les  membres  de  ladite  commission  refusèrent  ces  offres,  et  ob- 
tinrent du  président  de  ce  siège  deux  ordonnances,  datées  des  19 
et  26  du  même  mois, les  autorisant  à  saisir  les  recettes  du  concert 
Ba-ta-clan  ;  qu'en  exécution  de  ces  ordonnances  les  recettes  des 
20,  24,  26  et  28  janvier  furent  saisies  jusqu'à  concurrence  des 
sommes  évaluées  par  le  président  ;  que  le  total  de  ces  sommes, 
s'élevant  à  3,150  francs,  fut  déposé  à  la  Caisse  des  dépôts  et 
consignations,  le  1*'  février  suivant  ; 

Attendu  que  c'est  dans  cet  état  du  litige  que,  le  4  du  même 
mois,  le  président  et  les  membres  de  la  commission  de  la  Société 
des  auteurs  et  compositeurs  dramatiques,  agissant  poursuites  et 
diligences  de  Aoger  et  Pellerin,  agents  généraux,  ont  assigné 


minmff 


Paulns  Habans  et  Cie  pour  les  faire  condamner  h  payer:  1"  1 
somme  de  ?  0/0  sur  les  recettes  effectuées  ;  2°  les  frais  de  s&isi 
et  de  dépôt  ;  que  par  cette  même  assi^^nation  ils  ont  aussi  d< 
mandé  l'attribution  à  leur  profit  des  sommes  consignées; 

Attendu  que,  le  même  joar,  Paulus  Habans  et  Cie  ont  égali 
ment  assigné  les  personnes  susnommées,  ainsi  que  Numé 
damier  et  Gall,  auteurs  de  la  pièce,  pour  faire  prononcer  la  nu 
lité  des  saisies,  obtenir  la  restitution  des  sommes  consignées  i 
faire  condamner  conjointement  et  solidairement  toutes  les  pe 
sonnes  assignées  à  leur  payer  des  dommages-intérêts  à  Qxer  pi 
état  et  à  leur  rerser,  dès  à  présent,  une  provision  de  S,000  fr. 
qu'ils  demandent,  en  outre  au  Tribunal  d'ordonner  la  publici 
tion  et  l'afficbage  du  jugement  â  intervenir  aux  trais  de  leai 
adversaires  ; 

Atlendn  que,  ces  deux  instances  étant  connexes,  il  y  a  lieu  c 
les  joindre  et  de  t<tatuer  sur  le  tout  par  no  seul  et  même  jugi 
ment; 

Sur  la  fin  de  non-recevoir  : 

Attendu  que  Paulus  Habans  et  Cie  prétendent  que  l'instanc 
engagée  par  la  Société  des  auteurs  dramatiques  ne  pouvait  êti 
valablement  introduite  qu'à  la  requête  de  Numès,  r.arnier  i 
<;aH,  auteurs  de  la  revue  dont  la  représentation  a  donné  lien  a 
procès  ;  qu'en  eiïet,  disent-ils,  celte  société  est  simplement  I 
mandataire  des  auteurs,  et  dés  lors  son  action  n'est  pas  pli 
recevable  que  ne  le  serait  celle  d'un  agent  d'affaires  qui,  charf 
d'un  recouvrement,  poursuivrait  le  débiteur  en  son  nom  persoi 
nel  au  lieu  de  l'assigner  au  nom  du  créancier;  que  cette  actio 
doit  donc  Stre  repoussée  en  vertu  de  la  règle  de  droit  :  "  Nul  e 
France  ne  plaide  par  procureur  »  ; 

Attendu  qu'il  y  a  lieu   d'examiner  si  ce  système  est  justifié  ; 

Attendu  que  la  Société  des  auteurs  et  compositeurs  dramat 
ques  a  pour  objet:  P  la  défense  mutuelle  des  droits  des  associi 
vis-à-vis  des  administrations  théâtrales  ou  de  tous  autres  en  ra| 
port  d'intérêts  avec  les  auteurs  ;  2°  la  perception  à  moindres  fra 
des  droits  des  auteurs  vis-à-vis  des  administrations  théâtrale 
et  ta  mise  en  commun  de  ces  droits;  S"  la  constitution  d'u 
fonds  de  secours  au  profit  des  associés,  de  leurs  veuves,  héritie 
ou  parents;  4°  la  constitution  d'un  fonds  commun  de  bénéflci 
partageables;  que  celte  société,  créée  surtout  dans  un  but  ci 
défense  et  d'assistance  mutuelles,  ne  saurait  à  aucun  lilre  êti 
considérée  comme  une  agence  d'affaires;  que,  pour  atteindre 
but  éminemment  utile  qu'elle  se  propose,  elle  peut,  conform' 
ment  à  ses  statuts,  qui  n'ont  rien  de  contraire  aux  lois  et  àl'oi 
dre  public,  passer  avec  les  tiers  des  traités  parfaitement  valabli 


mm^. 


■  95  — 


Attendu  que,  dans  l'espèce,  aucun  autre  texte  de  loi  m 
mettait  les  saisies  ;  que  dès  lors  ;  les  ordonnances  qui  le 
autorisées  ont  été  rendues  par  erreur  et  que  ces  saisies  so 
dicalement  nulles  ;  qu'il  s'ensuit  que  les  sommes  cooaij 
doivent  âtre  restituées  à  Paulus  Habans  et  Cie  ; 
Sur  tes  dommoffes'intéréls  réclamés  par  ces  derniers  : 
Attendu  qu'il  n'est  pas  démontré  que  la  Société  des  au 
dramatiques  ailaKÎ  de  mauiraise  Toi  en  présentant  ses  requ 
que,  d'autre  part,  les  saisies  ne  paraissent  pas  avoir  caui 
préjudice  sérieux  a  Paulus  Habans  et  Cie  ;  que,  dans  ces  cir 
lances,  et  eu  éj{ard  aux  autres  faits  de  la  cause,  ceuz-ci  si 
suffisamment  indemnisés  par  la  condamnation  de  la  Sociëtf 
auteurs  dramatiques  à  tous  les  frais  occasionnés  par  les  si 
et  à  une  partie  des  dépens  de  l'instance,  sans  qu'il  soit  n< 
saire  de  donner  au  jugement  la  publicité  demandée  ; 

Sur  l'exécution  provisoire  sollicitée  par  la  Société  des  au 
dramatiques  : 

Attendu  qu'elle  est  de  droit  aux  termes  du  §  l>r  de  l'art  ici 
du  Code  de  procédure  civile  ; 
Par  ces  udtifs,  Joint  les  causes  ; 

Déclare  recevable  l'action  introduite  par  la  Société  des  aut 
et  compositeurs  dramatiques  ; 

Dit  que  le  droit  proportionnel  dit  à  celte  dernière  pour  lei 
présentations  des  Paulussonneries  de  l'année  était  de  5  0/1 
recettes  brutes  ; 

En  conséquence,  déclare  nulles  et  de  nu!  effet  les  offres  ré 
du  17  janvier  1693,  et  condamne  la  Société  Paulus  Habai 
Cie  à  payer  à  la  Société  des  auteurs  et  compositeurs  drai 
ques,  avec  les  intérêts  de  droit,  les  sommes  représentai 
droits  proportionnels  de  fi  0/0  afférents  auxdiles  recettes  ; 

Commet  d'office  M*  Vandewalle,  avoué  le  plus  ancien,  àl 
de  déterminer  le  montant  de  ces  droits  et  de  régler  le  coi 
d'entre  les  parties  ', 

Dit  qu'à  défaut  par  celles-ci  d'accepter  ce  règlement,  il 
de  nouveau  statué  par  le  tribunal  ce  qu'il  appartiendra  s 
rapport  de  Me  Vandewalle  ; 

Ordonne  de  ces  quatre  derniers  chefs  l'exécution  provi: 
nonobstant  appel  et  sans  caution  ; 

Prononce  la  nullité  des  saisies  pratiquées  en  vertu  des  ai 
aations  susénoncées,  et  en  fait  mainlevée  pure  et  simple 
lîère  et  définitive  ; 

Autorise  la  Société  Paulus  Habans  et  Cie  à  retirer  delaC: 
des  dépôts  et  consignations  toutes  les  sommes  consignées 
suite  des  saisies,  et  dit  qu'en  leur  remettant  ces  sommes  s 


A^\   ii>»..r.  ."Il  M' 


—  96  — 

VU  du  présent  jugement,  le  directeur  de  ladite  caisse  sera  vala- 
blement déchargé; 

Déclare  les  parties  réciproquement  mal  fondées  dans  le  surplus 
de  leurs  demandes,  fins  et  conclusions,  les  en  déboute  ; 

Fait  masse  des  dépens  des  deux  instances,  y  compris  les  frais 
de  contrat,  pour  être  supportés  dans  la  proportion  des  trois 
quarts  par  la  Société  Paulus  Habans  et  Cie,  et  d'un  quart  par  la 
Société  des  auteurs  et  compositeurs  dramatiques. 


Art.  4173. 


Œa^resmoslcmles.  — Exécution  miclte.  •—  ConeerC. 
—  Recetiefli.  —  Confiscation.  ~ Oommapres-lntérêts. 

Lorsque  les  recettes  d'une  entreprise  de  spectacles  ont  été 
saisies,  puis  confisquées  en  vertu  des  articles  428  et  429  du 
Code  pénale  le  montant  total  de  ces  recettes  peut  et  doit  être 
attribué  aux  auteurs  lésés  ;  mais,  lorsque  la  saisie  n'a  pas 
été  opérée,  les  juges  du  fait  ont  un  pouvoir  souverain  pour 
apprécier  le  préjudice  éprouvé  par  le  plaignant  ;  ils  peu* 
vent  en  fixer  Viinportance  à  une  somme  même  inférieure 
au  produit  de  la  recette  ;  ils  ne  peuvent  en  tout  cas  pro- 
noncer une  confiscation  non  prévue  par  la  loi  (1). 

(1)  11  est  admis  que  les  jages  du  fait  ont  un  pouvoir  souverain  pour 
fixer  le  montant  des  dommages-intérêts. 

La  décision  ci-dessus  s'appuie  sur  la  lettre  de  l'article  429  du  Code 
pénal. 

V.  les  critiques  élevées  contre  l'arrêt  dans  les  notes  de  Dalloz,  D.  P. 
93. 1.407.  En  effet  la  Cour  admet  que  si  le  plaignant  avait  commencé 
par  faire  saisir  les  recettes,  le  juge  du  fait  aurait  dû  les  lui  attribuer 
intégralement.  Quand  le  plaignant  use  de  toutes  les  rigueurs  que  la 
Cour  de  cassation  déclare  être  k  sa  disposition,  il  obtient  un  dédom- 
magement raisonnable  i  quand  il  attend  sa  réparation  de  l'appréciation 
des  tribunaux,  il  court  le  risque  d'une  indemnité  dérisoire.  Cette  solu- 
tion est  loin  d'être  satisfaisante. 

On  éviterait  ces  objections  si  l'on  pouvait  une  bonne  fois  s'entendre 
sur  les  principes  à  poser  quant  à  la  fixation  des  dommages-intérêts  et 
si,  au  lieu  de  chercher  seulement  quel  est  le  préjudice  éprouvé  réelle- 
ment par  le  plaignant,on  admettait,  comme  base  d'appréciation  et  comme 
minimum,  que  le  prévenu  ne  doit  rien  conserver  des  bénéfices  illicites 
qu41  a  encaissés. 

Alors  on  n'entendrait  plus  parler  de  dommages-intérêts  Inférieurs  an 
montant  des  recettes  produites  par  le  délit.  Mais  la  jurisprudence  ne 
parait  pas  être  en  ce  sens.  Cf.  l'article  de  M.  A.Taillefer  sur  les  dom- 
mages -intérêlSfAnn.,  1806,  p.  350.  V.  au  surplus  sur  les  questions  de 
confiscation  et  de  saisie  des  recettes  ce  qui  est  dit  à  rarticte  précédent. 

A.  V. 


-  97  - 

(CaM.,cr.  rej.,  6  janv.  i898.  —  Boisson  et  autres  c.Rogter  et  Pionnier.) 

Ainsi  jugé  par  le  rejet  du  pourvoi  formé  contre  Tarrél  de 
la  Cour  de  Nancy  du  24  mars  1897  : 

La  Goub,  Sur  le  premier  moyen  pris  de  la  violation  des  arti- 
cles 428  et  429  du  Gode  pénal,  en  ce  que  l'arrêt  attaqué  a  fixé  l'in- 
demnité due  aux  auteurs  des  morceaux  exécutés  dans  un  concert 
public,  sans  Tautorisation  de  ces  auteurs,  à  un  chiffre  inférieur 
à  celui  de  la  recette  produite  par  ce  concert: 

Attendu  que  Rogier  et  Pionnier,  directeurs  de  la  fanfare  de  la 
commune  de  Robert-Espagne,  put  été  condamnés  à  un  franc  dV 
mende  et  à  huit  francs  «de  dommages-intérêts  envers  les  sieurs 
Boisson  et  autres  membres  de  la  Société  des  auteurs  et  éditeurs 
de  musique  dénommés  dans  le  pourvoi,  pour  avoir  le  21  avril 
1895  fait  exécuter  par  la  dite  fanfare,  dans  un  concert  public  et 
payant,  huit  morceaux  de  musique  sans  avoir  obtenu  préalable- 
ment le  consentement  des  auteurs  ou  éditeurs  de  ces  œuvres 
musicales  ; 

Attendu  que  le  pourvoi  soutient  que  l'arrêt  attaqué  a  violé  les 
articles  428  et  429  du  Gode  pénal,  en  n'attribuant  pas  aux  de- 
mandeurs le  produit  de  la  recette  perçue  par  les  organisateurs 
du  concert,  recette  qui  se  serait  élevée  à  50  francs  ; 

Attendu  qu'aux  termes  des  articles  précités  ce  n'est  que  dans 
le  cas  où  la  recette  a  été  saisie  que  le  juge  peut  et  doit  en  pronon* 
cer  la  conGscation  au  profit  des  auteurs  ;  que  lorsque  cette  sai' 
sie  n'a  pas  été  opérée,  l'article  429  dispose  que  l'indemnité  due 
aux  auteurs  sera  réglée  par  les  voies  ordinaires  ; 

Attendu  que,  dans  l'espèce^  les  sieurs  Boisson  et  les  autres  par- 
ties civiles  n*ont  pas  fait  saisir  le  montant  de  la  recette  effectuée 
lors  du  concert  dont  il  s'agit;  que  dans  ces  conditions  les  juges 
du  fait,  d'après  le  droit  commun,  avaient  un  pouvoir  souverain 
pour  apprécier  l'importance  du  préjudice  éprouvé  par  les  parties 
civiles  et  qu'ils  ne  pouvaient  en  tous  cas  prononcer  une  conûs- 
cation  non  prévue  par  la  loi  ;  que  dès  lors  loin  d'avoir  violé  les 
dispositions  de  Tarticle  429  du  Gode  pénal,  l'arrêt  attaqué  en  a 
fait  une  saine  application  ; 

Sur  le  second  moyen  pris  de  la  violation  de  l'article  7  de  la  loi 
du  20  avril  1810,  en  ce  que  l'arrêt  attaqué  aurait  omis  de  statuer 
5ur  les  conclusions  prises  par  les  demandeurs,  à  l'efTet  d'obtenir 
l'allocation  à  leur  proût  de  la  recette  opérée  par  les  organisateurs 
du  concert  dont  il  s'agit  et  en  ce  que  l'arrêt  n'aurait  pas  statué 
d'une  manière  spéciale  sur  chacun  des  éléments  du  préjudice  que 
les  parties  civiles  prétendaient  avoir  subi  : 

Attendu  que  si  la  loi  du  20  avril  1810  impose  aux  juges  Tobli- 

7 


mmmtmw^B^t 


\i 


—  99  — 

méconnaissable f  et  la  confusion  entre  les  deux  œuvres  {stan- 
ces et  couplets)  n'est  ni  possible  ni  admissible  (1). 

Sans  rechercher  si  une  simple  imitation  rythmique  peut 
être  considérée  comme  contrefaçon  d'une  œuvre  musicale^ 
le  juge  d'appel  n'a  pas  outrepassé  ses  pouvoirs  en  décla- 
rant que  le  fait  d'avoir  emprunté^  pour  3  morceaux  sur  53 
dont  se  compose  la  partition  d'une  féerie,  le  rythme  de  3 
airs  d'opérette^  était  insuffisant  pour  constituer  le  délit  de 
contrefaçon^  et  qu'il  pouvait  y  avoir  là  des  circonstances 
involontaires,  exemptes  de  toute  intention  délictueuse  (2) . 

(Cass.,  cr.  rej.,  7  décembre  1900.  —  Flëgier  et  aatres  c.  Potel.) 

La  Cour,  Sur  l*anique  moyen  pris  de  la  violation  des  arti- 
cles 428, 429  du  Code  pénal,  et  3  de  la  loi  des  13-19  janvier  1791, 
en  ce  que  les  motifs  exprimés  dans  Tarrét  ne  pourraient  léf;ale~ 
ment  justifler  son  dispositif  : 

En  ce  qui  touche  la  représentation  de  la  féerie  dite  La  Belle  aux 
cheveux  Wor  : 

Attendu  que  si,  après  avoir  déclaré  non  établie  Timitation  ou 
contrefaçon  de  la  musique  de  Flégier,  adaptée  aux  paroles  de 
Loviot  dans  Tœuvre  dite  les  Stances,  Tarrêt  entrepris  déclare  : 
«  que  pour  composer  les  couplets  incriminés  il  a  été  fait  des  em^ 
prunts  à  la  poésie  de  Loviot  et  que  certains  vers  ont  même  été  pres- 
que littéralement  copiés,  »  ledit  arrêt  visant  la  double  constatation 
qui  précède  ajoute,  qu'en  cet  état,  Tœuvre  susvisée  est  :  «  devenue 
méconnaissable  »,  et  encore  :  «  que  la  confusion  entre  les  stances  et 
les  couplets  de  la  féerie  n'est  ni  possible  ni  admissible  »  ; 

Attendu  que  cette  appréciation  de  fait  est,  k  elle  seule,  exclu- 
sive de  la  prévention  d'avoir  fait  représenter  Tœuvre  dite  les 
Stances  de  Flégier  et  qu'en  tout  état  de  cause  elle  justifle,  de  ce 
chef,  le  dispositif  de  l'arrêt,  sans  qu'il  y  ait  lieu  de  faire  état  des 
motifs  de  droit  qui,  surabondamment,  y  sont  déduits  ; 

En  ce  qui  touche  la  représentation  de  la  féerie  dite  :  L'oiseau 
bleu: 

Attendu  que  la  cour  d'appel  s'est  fondée,  en  premier  lieu,  pour 
écarter  l'action  des  demandeurs,  sur  ce  que  :  a  sans  rechercher  si 
une  simple  imitation  rythmique  peut  être  considérée  comme  la  con- 
trefaçon d'une  œuvre  musicale,  le  fait  d'avoir  emprunté,  pour  trois 
morceaux  sur  les  53  dont  se  compose  la  partition  de  l'Oiseau  bleu,  le 
rythme  de  trois  airs  d'opérette,  est  insuffisant  pour  constituer  le 
délit  relevé  contre  les  frères  Potel  ;  qu'il  peut  y  avoir  là  des  rémi* 

(1)  Cf.  Pouillet.  Prop,  liiê.  etarl.,  n^  508. 
(2^  Cf.  Pouillet,  op,  ci/.,  n«  556. 


—  100  — 

niscenees  involontaires  exemptes  de  toute  intention  délictueuse  »  ; 

Attendu  qu'il  appartenait  au  juge  du  fait  de  rechercher  dans 
la  prévention  Texistence  de  l'élémeRt  intentionnel,  et  s'il  ne  l'y 
rencontrait,  de  statuer  par  voie  de  relaxe  ;  qu'il  n'a  fait  qu'user 
de  ce  droit  en  déduisant  du  caractère  exceptionnel  des  simi- 
litudes rythmiques  relevées  entre  quelques  morceaux  de  la  féerie 
que  les  frères  Potel  ont  fait  représenter  et  certains  fragments  des 
opérettes  La  Mascotte  et  le  Jour  et  la  Nuit^  l'influence  possible  de 
réminiscences  involontaires  et,par  suite,  l'expression  d'un  doute 
sur  la  réunion,  en  l'espèce ,  des  éléments  constitutifs  du  délit; 
qu'en  fondant  sa  décision  sur  ce  motif,  l'arrêt  n'a  pu  violer  au- 
cun des  textes  visés  au  moyen  ; 

Attendu  que,le  dispositif  étant  ainsi  justifié  de  ce  chef,  il  n'ë- 
chet  de  faire  état  des  autres  motifs  surabondamment  énoncés 
dans  l'arrêt  ; 

Et  attendu  que  le  dit  arrêt  est  régulier  en  la  forme  ; 

Rejette  le  pourvoi  de  Flégier  et  consorts  contre  l'arrêt  de  la 
Cour  de  Poitiers,  du  17  mars  1899. 

MM.  LoEW,  président;  Laurent  Atthalin,  rapporteur; 
Pbuilloley,  avocat  général.  —  M*  Agdillon,  avocat. 

Un  second  arrêt  en  termes  presque  identiques  a  été  ren- 
du le  même  jour  dans  une  autre  affaire  de  Choudens  et 
Cie  et  Maquel  c.  Potel. 


Art.  4175. 

4Eavre«  iniuilcmles.— Exéeatlon.—  Témoin.—  ReiNro- 
ebe.  —  Affent  de  Im  Société  des  compositeurs  et 
Éditeare  de  mtuil<|ae. 

V agent  de  la  Société  des  auteurs^  compositeurs  et  éditeurs 
de  musique,  cité  comme  témoin^  ne  peut  être  reproché  et 
doit  être  entendu  dans  sa  déposition  ;  en  effets  bien  que  man- 
dataire  de  ladite  société,  cet  agent  n'est  pas  compris  au  nom- 
bre des  personnes  visées  dans  Varticle  156  du  Code  d'ins- 
truction criminelle  (1). 

(1)  La  Cour  de  Toulouse  considère  qu'un  témoin  ne  peut  être  reproché 
qu'en  vertu  d'une  disposition  formelle  de  la  loi  :  cette  disposition  n'existe 
pas  dans  l'espèce. 

Si  tes  agents  de  la  Société  des  compositeurs  ne  pouvaient  être  entendus 
comme  témoins,  la  preuve  des  exécutions  illicites  de  musique  d'orches» 
tre  deviendrait  très  difficile  à  faire,  car  on  ne  trouverait  pas  toajours  un 
huissier  ou  un  commissaire  de  police  pour  reconnaître  les  morceaaz* 


—  101  — 


(C.  de  Toulouse,  ch.  corr.,  27  février  1901.  —  Société  des  compoeiteors 

de  musiqae  c.  Rameau  et  LafTon.) 

Le  11  octobre  1900,  MM.  Capoul,  Armand  Sylvestre,  De- 
lormel,  Garnier  et  autres,  membres  de  la  Société  des  au- 
teurs, compositeurs  et  éditeurs  de  musique,  avaient  as- 
signé devant  le  Tribunal  correctionnel  de  Saint-Girons, 
MM.  Rumeau,  propriétaire,  et  Laffon,  directeur  du  Casino- 
Club  d'Aulus,en  dommages-intérêts  pour  avoir,  pendant  la 
saison  thermale  de  Tannée  1900,  exécuté  leurs  œuvres 
sans  leur  autorisation  et  ce  en  violation  de  Tarticle  3  de  la 
loi  du  19  janvier  1791  et  des  articles  428  et  429  du  Code 
pénal. 

Le  premier  témoin  cité  à  la  requête  des  demandeurs 
était  l'agent  de  la  société  à  Saint-Girons,  M.  Heuillet,  ar- 
tiste musicien,  qui  avait  assisté  aux  représentations  illici- 
tes du  Casino-Club  d'Aulus  et  noté  les  œuvres  qui  avaient 
été  exécutées,  après  avoir  lui-même,  par  une  lettre  recom- 
mandée, mis  en  demeure  les  propriétaire  et  directeur  du 
Casino-Club  d'Aulus  de  n'exécuter  les  œuvres  de  la  société 
que  muni  de  l'autorisation  expresse,  préalable  et  par  écrit» 
des  auteurs  et  compositeurs  de  ces  œuvres. 

M*  Buffelan,  avocat  des  prévenus  a  conclu  à  ce  qu'il  plût 
au  tribunal  ordonner  que  le  témoin  étant  agent  salarié  de 
la  société  dont  les  demandeurs  sont  membres,  ne  serait 
pas  entendu. 

Malgré  la  plaidoirie  de  M""  Doomkrc,  avocat  des  auteurs 
el  compositeurs  de  musique,  le  tribunal  a  fait  droit  à  ces 
conclusions  par  jugement  du  6  novembre  1900,  en  ces 
termes  : 

Li  Tribunal,  Attendu  que  Heuillet,  cité  comme  témoin  dans 
rinstance  en  dommages  introduite  contre  Rumeau  et  LafTon  par 
Capoul  et  consorts,  agissant  en  qualité  de  parties  civiles,  a  dé- 
claré à  Taudience  qu'il  était  le  mandataire  salarié  des  deman- 
deurs et  que  son  salaire  était  proportionné  aux  sommes  dont 
ceux-ci  poursuivent  le  recouvrement  contre  tes  défendeurs  ;  que 
Heuitlet  a  donc  un  intérêt  personnel  dans  Tinstance,  en  sorte  que 
le  reproche  qui  est  dirigé  contre  lui  de  ce  chef  est  fondé  ; 

Parcrs  motifs,  Jugeant  publiquement  en  séance  de  police  cor- 
rectionnelle et  en  premier  ressort  : 

Dit  que  HeuîDet  ne  sera  pas  entendu  comme  témoin  ; 


condamne  Capoul,  Armand  Sylvestre,  Delormel,  Garnierel 
irts,  demandeurs,  aux  dépens. 

rappel  des  demandeurs, la  Gourde  Toulouse  a  infirmé 
icision  des  premiersjuges.paran-ètdu  27  février  1901, 
î3  termes  : 

CoDR,  Attendu,  en  droit,  qu'il  n'y  a  que  les  seules  pér- 
is énumérées  dans  l'article  <56  du  Code  d'instruction  cri- 
Ile  qui  ne  peuvent  être  entendues  comme  témoins,  et  qu'il 
lartieul  pas  aux  cours  ou  tribunaux  d'ëtendre  les  dispositions 
ictives  dudit  article  à  d'autres  individus  ; 
«ndu,  en  fait,  qu'Heuillet,  s'il  est  l'agent  de  la  Société  des 
irs,  compositeurs  et  éditeurs  de  musique,  et  son  mandataire, 

pas  compris  au  nombre  des  personnes  misées  dans  l'article 
:i-dessns  invoqué;  d'où  il  suit  qu'alors  même  qu'il  eût  eu 
itérét  personnel  dans  les  poursuites  exercées  au  nom  de 

société,  ainsi  qu'il  l'a  reconnu,  il  y  avait  lieu,  nonobstant 

circonstance,  de  procédera  son  audition  ; 

endu  que  lorsqu'un  jugement  est   inSrmë  pour   d'autres 

■■S  que  celle  d'incompétence,  la  cour  doit  évoquer; 

!t  CES  HOTiPS,  La  Cour,  le  ministère  public  entendu,  après  en 

délibéré; 

qu'À  tort  tes  premiers  ju|;es  ont  accueilli  le  reproche  pro- 

par  Rumeaa  ; 

conséquence  : 

irme  le  jugement  rendu  par  le  Tribunal  correctionnel  de 

-Girons,  le  6  novembre  1600; 

tuant  à  nouveau,  évoquant  ; 

lonne  qu'il  sera  procédé  à  l'audience  de  ce  jour  à  l'audition 

lillet  devant  la  Cour; 

idamne  Humeau  aux  dépens  de  l'incident  exposés  tant  en 

ière  instance  qu'en  appel. 

,.  corr.  Présidence  de  M.  Sjuonet.  —  Plaidants: 
oriiBBc  (du  Barreau  de  Paris)  pour  la  Société  des  au- 
i,  compositeurs  et  éditeurs  de  musique;  M*  Ebelot, 
Rumeauet  LafTon. 


Art.  4176. 

ret   Ollbnrd-    —    >4o«lété   de  ;  flkit.  —    Invention 
r  ■■■■  nmaoclé.  —    Exploitation.  —  Propriété    dn 

)  découvertes  constituent  une  propriété  personnelle  gue 


^n^gmfwmuM^^ m,  III  i  «111  «UN^.4W«;4  Jf  j^w^f'HPt. 


—  103  — 


rinvenêeur  conserve  tant  qu'il  ne  Va  pas  formellement  alié- 
née  ;  dès  lors,  à  moins  de  convention  contraire,  Vassocié 
qui,  par  suite  des  travaux  que  lui  imposaient  ses  fonc- 
tions sociales^  fait  une  découverte  et  prend  un  brevet^  est 
présumé  faire  apport  à  la  société  du  droit  d'exploitation, 
mais  il  conserve  la  propriété  du  brevet^  alors  surtout  que 
depuis  la  dissolution  de  la  société,  l'inventeur  a  seul  payé 
les  annuités  et  conservé  sans  réclamations  entre  ses  mains 
le  titre  du  brevet  (1). 

(G.  de  Douai,  1«'  août  1900.  —   Société  Roabaisienne  de    construc- 
tions mécaniques  et  Gilbart  c.  Desfrennes.) 

Le  Tribunal  civil  de  Lille  avail,  le  28  janvier  1900,  rendu 
le  jugement  suivant  : 

Lb  Tribunal,  Attendu  que  Gilbart,  se  disant  propriétaire  du 
brevet  269.394  pour  la  construction  de  broches  ,de  cannetières 
coconneuses,  a  fait  saisir  des  appareils  qu*il  prétend  être  la  con" 
trefaçon  de  son  invention  dans  les  magasins  de  la  Société  Rou- 
baisienne  de  constructions  mécaniques  et  demande  la  répara- 
tion du  préjudice  à  lui  causé  ; 

Attendu  que  Desfrennes,  membre  de  cette  société,  intervient 
en  son  nom  personnel,  et  soutient  que  le  brevet  est  devenu  sa 
propriété,  que  par  suite  l'action  de  Gilbart  est  non  recevable  ; 

Attendu  qu'il  est  constant  que,  pendant  environ  dix-huit  mois, 
en  1896  et  1897,  une  société  de  fait  pour  la  construction  des 
machines,  et  notamment  des  cannetières,  a  existé  entre  Gilbart 
et  Desfrennes  ; 

Attendu  que  Gilbart,  qui  avait  été  choisi  par  Desfrennes 
comme  membre  de  cette  société,  à  raison  même  de  ses  connais- 
sances mécaniques,  devait  donner  tout  son  temps  et  son  intelli- 
gence à  la  direction  de  Tatelier  et  chercher  les  moyens  de  per- 
fectionner tout  à  la  fois  son  mode  de  fabrication  et  les  métiers  à 
livrer  au  public  ;  qu'il  fut  ainsi  amené  à  modifler  les  systèmes 
antérieurs  de  broches  et  à  prendre  le  brevet  litigieux  ; 

Attendu  que  si  cette  découverte  et  ce  brevet  sont  le  fruit  des 
ëtudes  imposées  à  Gilbart  par  ses  fonctions  sociales  et  la  consé- 
quence de  ses  travaux  sociaux,  il  n'en  résulte  pas  nécessaire- 
ment que  la  société   en  soit  propriétaire  ;  que  les  découvertes 


(1)  Voir,  dans  le  cas  où  le  brevet  existait  avant  la  constitution  de  la 
société  et  a  fait  Tobjet  d'un  apport,  Pouillet,  Breo.d'inv,,  no"315,  316. 

La  Cour  de  Douai  semble  avoir  statué  difTéremment  parce  que  le  bre- 
vet avait  été  pris  au  cours  de  rassociation. 


—  104  - 

propriété  perionnelle,  que  conserve  l'inventeur 
pas  formelletnenl  aliénée  ; 
>i  Gilbart,  au  sa  qualité  d'associé,  était  tenu, 
.  de  laisser  la  société  existant  entre  loi  et  Des- 
son  brevet,  il  ne  résulte  nullement  de  là  qu'il 
la  propriété  ;  qu'une  société  peut  avoir,  soit  la 
:evet,  soit  seulement  le  droit  de  l'exploiter; 
l'une  convention  réglant  la  question,  on  doit 
t  du  simple  droit  d'exploitation  lorsqu'il  s'agit, 
pèce,  d'une  découverte  faite  au  cours  de  la  so- 

lesfreDues  a  si  bien  compris  que  Gilbart  restait 
du  brevet  litigieux,  qu'il  n'en  a  pas  payé  les 

n'a  jamais  réclamé  avant  le  procès  la  remise 
it  le  brevet,  bien  qu'il  toit  propriétaire  de  tou- 
!  l'ancienne  société  Gilbart-Deifrennes  ; 
atraire,  que  Gilbart  a  tonjoura  conservé  son  Utr« 
tés; 

pour  justiRer  sa  revendication,  Desfrennes  ob- 
[ue  la  Société  Gilbart-DesfreuDes  a  payé  la  pre- 

brevet  ;  qu'en  effet,  ce  paiement,  qui  était  une 
lissance  qu'elle  en  avait,  ne  peut  Stre  dés  lors 
ireuve  de  sa  propriété  ; 

la  Société  Gilbart-Deafrennes  n'a  jamais  ea  la 
ivet,  la  revendication  de  Desfrennes,  qui  agit 
aux  droits  de  cette  société,  doit  être  rejetée  et 
t  déclarée  recevable. 

rél  confirmatif  en  ces  termes  : 

du  que  le  jugement  dont  est  appel  a,  dans  ses 
as  son  dispositif,  fait  une  juste  appréciation  des 
en  cause  ;  qu'à  la  vérité  Gilbart  devait  &  DesfreD- 
é  la  société  qui  les  réunissait,  tons  les  avantages 
du  brevet  litigieux;  que  Desfrennes  ne  saurait 

être  aujourd'hui  privé,  puisque  c'est  lui  qui  a 
r  la  communauté  d'intérêts  et  a  obtenu  la  dis- 
ciété  ; 
Confirme. . . 

1"  chambre  civile.  —  M .  Paul,  premier 
M.  DE  Lajonkairb,  substitut  du  procureur 
îcais  :  M"  Allaert  et  Plovvier. 


^■•■ 


^V  — I 


—  105  ^ 


Art.  4177. 

Brevet  Chatlllon.  —  Coiiiblnal«on  nouvelle  de 
moyens  eonnus.  —  Contrefaçon.  —  Produit  noa- 
venu.  ^  Poooeoolon  antérieure.  —  Oonenrrenee 
déloyale.  —  Compétenee. 

Lorsqu'un  brevet  porte  sur  une  combinaison  de  moyens 
conntÂS,  reconnue  nouvelle  en  vue  de  l'obtention  d'un  pro- 
duit industriel  nouveau,  il  y  a  contre  façon  dans  le  fait  de 
faire  usage  des  éléments  essentiels  de  cette  combinaison  pour 
obtenir  le  même  résultat  et  le  même  produit  ;  spécialement 
lorsqu'un  brevet  est  pris  pour  F  emploi  d'un  four  à  manche 
ou  cubilot, recevant  des  charges  alternées  de  combustible  et  de 
minerai,  et  de  ventilateurs  aspirant  les  vapeurs  ou  fumées 
métalliques,  avec  injection  d'eau  pulvérisée,  et  les  refou- 
lant dans  des  chambres  de  condensation,  il  y  a  contrefaçon 
dans  l'emploi,  même  à  sec,  de  la  combinaison  du  four  à 
manche  et  des  ventilateurs,  alors  que  cet  emploi  permet 
d'obtenir  des  produits  identiques  au  point  de  vue  chimie 
que{i). 

Constitue  un  produit  nouveau  brevetable,  r oxyde  d anti- 
moine presque  pur  et  soluble  répondant  à  la  formule  Sb^O^^ 
alors  que  ce  corps  n'avait  pas  été,  jusqu'à  la  prise  du  bre- 
vet,  obtenu  industriellement  ;  et  un  oxyde  d'antimoine  solu- 
ble, répondant  à  la  même  formule,  même  de  couleur  un  peu 
plus  foncée  et  contenant  plus  d'impureté  (arsenic),  en  est  la 
contre  façon  (i) . 

Jl  est  de  règle  que  lorsqu'une  demande  portée  devant  un 
tribunal  civil  contient  différents  chefs  dont  un  ouplusieurs 
sont  de  la  compétence  des  tribunaux  civils  et  un  autre  de 
celle  des  tribunaux  de  commerce,  mais  dérivant  de  chefs 
civils,  le  tribunal  civil  est  compétent  pour  le  tout  (3). 

(1)  V.Poaillet,  Brev,  (Tinv.^n*  727  ;  Allart,Brei;,  d'inv,,  l.lll,  n«443;  — 
Cass.,  5  janvier  1878,  Meunier,  Ann.JS,  33  ;  Rej.,  2  février  1881,  Boitel, 
i4nn. ,8t. 167  ;  Paris,  14  mars  1896,  Chaboche,  Ann.,99. 180.  Comp.  Rej., 
3  août  1897, Nicolas,  Ann. .99.66;  Rej.^  14  avril  1899,  Léon i, il nn., 99.246. 

(%)  Sur  les  caractères  du  produit  industriel  nouveau,  voir  Pooillet, 
n**  21  et  s.  et  721  et  la  jarisprodence  citée,  notamment  Rej . ,  10  février 
't893,Société  générale  de  dynamite,  Ann.,  98.53.  V.  encore  :  Paris,!*'  août 
1899,Brion  et  Pftté,  iinn.,  99.267.  Comp.  Cass.,1899,  Léoni,4nn..  99.246, 
et  Lyon,  19  juillet  1896,Dacoté  et  Coté,  Ann.,  99.281. 

(8)  V.  Pouîllet,  Marquesj  n'671  ;  Darras,  De  la  concurrence  déloyale ^ 


':i!-~7vS^»' 


—  106  — 

Uy  a  concunence  déloyale  dans  le  fait  de  s'assurer ,  en 
vue  de  s'emparer  des  procédés  de  fabrication  d'un  concur- 
rent^ le  concours  d'un  de  ses  ouvriers  par  l'offre  d'appoin- 
tements et  avantages  exceptionnels  et  dans  celui  d'annoncer 
son  produit  sous  la  même  dénomination  que  celui  de  son 
concurrent  {\). 

Une  possession  antéHéure  ne  peut  constituer  un  droit 
au  profit  de  celui  qui  s'en  prévaut ^  si  elle  a  un  caractère 
frauduleux^  notamment  si  elle  n*a  été  obtenue  qu'en  détour- 
nant  un  ancien  ouvrier  du  breveté j  au  courant  de  la  fabri- 
cation, au  moyen  d'appointements  et  avantages  exception- 
nels  (2). 

(C.  de  Riom,  5  avril  1900.  —  ChaUlIon  c.  Giraud.) 

Ainsi  jagé  par  arrêt  de  la  Cour  de  Riom,  en  date  du 
5  avril  1900,  sous  la  présidence  de  M.Vacher,  premier  pré- 
sident, après  plaidoiries  de  M**  Allart  (du  barreau  de 
Paris),SALVY  (du  barreau  de  Riom)  el  Rubbllin  (du  barreau 
de  Lyon),  et  conclusions  de  M.  Delp?,  avocat  général. 

La  Cour,  Gonsidërant  que  Ghatillon  a  prisa  la  date  du  16  avril 
i888  un  brevet  d'invention  pour  un  procédé  de  condensation 
des  vapeurs  métalliques,  notamment  de  Toxyde  d'antimoine  ; 

Considérant  que  ce  procédé  consiste  dans  1  emploi  d'un  four  à 
manche  ou  cubilot,  qui  reçoit  des  charges  alternées  de  combus- 
tible et  de  minerai,  et  dans  celui  de  ventilateurs  aspirant  les  va- 
peurs ou  fumées  métalliques  et  les  refoulant  dans  des  chambres 
de  condensation  ;  que  le  brevet  porte  en  outre  l'indication  d'une 
injection  d'eau  pulvérisée  dans  les  ventilateurs  ; 

Considérant  que  le  produit  obtenu  ainsi  est  de  l'oxyde  d'anti- 
moine pur  et  sotuble,  ayant  la  formule  Sb'O'  ; 

Considérant  que  Chatillon  ayant,  dès  le  début  de  la  fabrica- 
tion, constaté  que  l'injection  d'eau  pulvérisée  dans  les  ventila- 

n*  756.  V.  aussi  Montpellier,  24  février  1879,  Mialane,  Ann.,  82.135  ; 
Trib.  civ.  Gharleville,  7  mars  1879,  Chachoin,  Ann.,  82.S51  ;  Douai,  13 
avril  1885,  fichier,  Ann.,  85.277. 

(1)  Le  simple  embauchage  d'ouvriers  d'aulrui,  môme  en  leur  offrant 
un  salaire  plus  élevé,  ne  constituerait  pas  un  acte  de  concurrence  dé- 
loyale ;  il  en  est  autrement  lorsqu'il  est  fait  en  vue  de  surprendre  des  se- 
crets de  fabrication  ou  de  détourner  une  clientèle.  Douai,  15  jniliet  1887, 
Wallard,  ^/i»..91.306;  Trib.  comm.  Nantes,  14  avril  1897,  Rec.  de  San- 
r65,  98.1.27.  V.  cependant  Paris,  26  janvier  1856,  d*Âriincourt,  AHn,% 
56.125.  Comp.Cass.,  28  novembre  1898,  Lecomte,  Ann,^  99.241. 

(2)  V.  Pouillet,  Breo.  rf'm«.,  n»  432  et  la  jurisprudence  citée,  V.  aussi 
Pou,  14  janvier  1899,  Cornet,  Ann,r  99.259. 


rr^^^frm^'imimr 


—  107  — 

leurs  était  inutile,  surtout  pour  les  minerais  pauvres,  et  qu'on 
obtenait  en  opérant  à  sec  des  résultats  à  peu  près  identiques,  a, 
dans  une  addition  à  son  brevet,  en  date  du  21  février  1893,  sup- 
primé l'injection  d'eau  indiquée  dans  le  brevet  de  1888  ; 

Considérant  que  Giraud  a  acquis  en  1890,  du  sieur  Focqueray^ 
une  usine  sise  à  Brioude,  quartier  du  Reclus,  non  loin  de  celle 
de  Ghatillon,  qui  en  possède  en  outre  une  autre  à  Blesle  ;  qu'il 
a  pris  à  son  service  Martin  Hermet,  ancien  ouvrier  de  Ghatillon, 
et  qu'il  s'est  immédiatement  livré  à  la  fabrication  de  l'oxyde 
d'antimoine  ; 

Considérant  que  Ghatillon  prétend  que  Giraud  a,  dans  cette 
fabrication,  contrefait  le  procédé  de  son  brevet  d'invention  et  les 
produits  en  résultant,  qu'il  lui  reproche  en  outre  d'avoir  fait  à 
son  encontre  acte  de  concurrence  déloyale  ; 

Considérant  que,  par  jugement  interlocutoire  du  tribunal  de 
Brioude  en  date  du  4  mai  1897,  une  expertise  a  été  ordonnée, 
et  qu'il  y  a  été  procédé  par  MM.  Riche,  Schutzemberg  et  Périsse, 
experts  à  ces  fins  commis,  qui  se  sont  expliqués  dans  leur  rap- 
port à  la  fois  sur  la  contrefaçon  et  sur  la  concurrence  déloyale  ; 

I.  —  Sur  la  contrefaçon  : 

Considérant  qu'il  échet  tout  d'abord  de  rechercher  si  la  fabrica- 
tion de  Ghatillon,  telle  qu'elle  vient  d'être  décrite,  était  breveta- 
ble  ;  que  pour  cela  il  était  nécessaire  qu'elle  constituât  une  inven- 
tion nouvelle  ;  que  ce  point  est  contesté  par  Giraud  et  qu'il  a  été 
examiné  par  les  experts  ; 

Considérant  que  diverses  antériorités  ont  été  citées  par  ceux- 
ci,  mais  qu'elles  ne  paraissent  pas  s'appliquer  exactement  à  l'es- 
pèce; 

Considérant  en  effet  qu'on  ne  saurait  voir  une  antériorité  pro- 
prement dite  dans  le  brevet  Huet,  du  18  février  1875,  qui,  au  lieu 
de  ventilateurs,  indique  une  turbine  ou  un  appareil  tournant 
dans  une  cuve,  dont  la  partie  inférieure  contient  du  liquide  ; 
qu'en  outre  ledit  brevet  Huet  ne  mentionne  pas  l'emploi  d'un 
four  à  manche  ou  cubilot,  sans  lequel  il  est  impossible  d'obte- 
nir de  l'oxyde  d'antimoine  soluble  ; 

Considérant  qu'on  ne  saurait  voir  davantage  une  antériorité 
dans  le  brevet  Hembacker  (1883),  qui  indique  un  four  à  cuve, 
combiné  avec  un  injecteur  système  Karting  ; 

Considérant  qu'il  en  est  encore  de  même  du  brevet  Wetherill 
(1883),  indiqué  dans  le  cours  de  métallurgie  de  M.  Le  Verrier,  et 
comportant  l'emploi  d'un  four  à  soie,  différent  du  four  à  manche 
ou  cubilot  de  Ghatillon  et  ne  permettant  pas  de  fabriquer  de 
l'oxyde  d'antimoine  soluble  ; 

Considérant  que  par  conséquent  les  antériorités  susénoncées 
ne  sauraient  être  opposées  à  Ghatillon,  et  que  son  procédé  de 


;y^-'      "Wii— 


—  108  — 

fabrication  constitue  bien  une  invention  noiiYelle,  d'où  résultait 
un  produit  nouveau  ;  qu'il  était  dès  lors  brevetable  ; 

Considérant  que,  co  point  établi,  il  y  a  lieu  de  rechercher  si 
Giraud  a  réellement  contrefait,  le  procédé  inventé  par  Chatillon 
et  ses  produits  ; 

En  ce  qui  concerne  le  procédé  : 

Considérant  que  Giraud  prétend  et  que  les  experts  et  après  eux 
les  premiers  juges  ont  admis  qu'il  n*a  pas  contrefait  le  procédé 
de  Chatillon,  parce  qu'il  a  toujours  opéré  à  sec  depuis  son  ins- 
tallation, en  1890,  et  que  le  brevet  de  Chatillon,  de  1888,  com- 
porte la  marche  à  Teau  ;  que  la  marche  à  sec  n'a  été  prévue  que 
par  l'addition  de  1893,  laquelle  ne  serait  pas  opposable  à  Giraud, 
sa  fabrication  n'ayant  commencé  qu'en  1890  ; 

Mais  considérant,  d'une  part,  qu'à  son  usine  de  Blesle,  Chatil- 
lon a  toujours,  en  fait,  pratiqué  la  marche  à  sec^  ce  qui  est  re- 
connu par  les  experts  ;  qu'à  celle  de  Brioude,méme  avant  1893, 
il  a  marché  soit  à  sec,  soit  à  Teau,  selon  que  le  minerai  était 
plus  ou  moins  pauvre  ;  que  d'autre  part,  la  possession  antérieure 
dont  se  prévaut  Giraud  ne  saurait  constituer  un  droit  à  son  profit, 
parce  qu'elle  a  un  caractère  frauduleux  ;  qu'il  est  constant  en 
effet  que  Martin  Hermet,  ancien  ouvrier  de  Chatillon,  qui  con« 
naissait  parfaitement  la  fabrication  de  celui-ci,  est  entré  en  1890 
à  l'usine  de  Giraud,  avec  des  appointements  et  des  avantages  ex- 
ceptionnels, qui  ne  peuvent  s'expliquer  que  par  les  services  par- 
ticuliers qu'il  lui  a  rendus,  en  lui  révélant  les  procédés  de  son 
ancien  patron  ; 

Considérant  d'ailleurs  qu'en  fait,  il  importe  peu  que  Giraud 
ait  fait  uniquement  usage  de  la  marche  à  sec  ;  qu'il  est  constant 
que,  soit  que  l'on  opère  à  sec,  soit  que  l'on  opère  à  l'eau,  on  ob- 
tient un  produit  identique  au  point  de  vue  chimique  ; 

Considérant  d'autre  part  que  l'on  trouve  dans  l'outillage  de 
Giraud  des  similitudes  incontestables  avec  celui  décrit  dans  le 
brevet  de  1888,  spécialement  dans  la  combinaison  du  four  à 
manche  ou  cubilot,  avec  les  ventilateurs,  combinaison  qui  a  pour 
effet  d'obtenir  de  l'oxyde  d'antimoine  soluble  ;  que  par  consé- 
quent la  contrefaçon  du  procédé  parait  manifeste  ; 

En  ce  qui  concerne  les  produits  : 

Considérant  que  les  experts  et  les  premiers  juges  ont  estimé 
que  la  contrefaçon  des  produits  n'existait  pas  davantage  que  celle 
du  procédé,  tout  d'abord  parce  que  l'oxyde  d'antimoine  de  Giraud 
ne  titre  que  91.33  0/0  d'antimoine  soluble,  tandis  que  le  produit 
de  Chatillon  titre  au  minimum  96  0/0,  et  ensuite  parce  que  le 
produit  de  Giraud  contient  plus  d'arsenic  que  celui  de  Chatillon, 
et  qu'il  est  d'une  couleur  plus  foncée  ; 

Mais  considérant  que  ni  dans  le  brevet  de  1888,  ni  dans  le  cer-> 


FiW  f"  ^'Ti'l^i^^.giyv»   w.y*ri^  'K .  ■    %'  vim^myfvgmmmmf 


—  1U9  — 

tificat  d'addition  de  1893,  Ghatillon  n'a  précisé  ]e  titre  de  Toxyde 
d^antimoiné  fabriqué  par  lui,  ni  sa  contenance  d'arsedic,  ni  sa 
couleur;  que  dans  le  brevet  de  1888,  il  est  simplement  parlé 
d'oxyde  d'antimoine  pur,  et  dans  Taddition  de  1893,  d'ocyde  neu- 
tre d'antimoine  Sb'O',  dénommé  dans  le  commerce  oxyde  d'an- 
timoine soluble  ; 

Considérant  d'ailleurs  que  les  experts  n'ont  examiné  qu'un 
seul  échantillon  du  produit  de  Giraud  et  que  ce  qui  prouve  que 
le  titre  de  91.33  0/0  constaté  dans  cet  échantillon  ne  doit  pas 
être  considéré  comme  invariable,  c'est  que  Giraud  a  annoncé 
lui-même  son  oxyde  comme  étant  titré  à  98  0/0,  ce  qui  se  rap- 
proche singulièrement  du  titre  du  produit  de  Ghatillon  ; 

Considérant  au  surplus  que  le  produit  de  Giraud  est  livré  au 
commerce  sous  la  dénomination  d'oxyde  d'antimoine  soluble,  qui 
est  celle  indiquée  par  Ghatillon  dans  l'addition  de  1893  ;  et  qu'il 
peut,  dès  lors,  être  et  a  été,  en  réalité,  confondu  avec  le  produit 
de  l'appelant  ; 

II.  —  Sur  ta  concurrence  déloyale  : 

Considérant  que  c'est  à  tort  que  les  premiers  juges  se  sont  dé- 
clarés incompétents  de  ce  chef  ;  qu'il  est,  en  effet,  de  règle  cer- 
taine que  lorsqu'une  demande  portée  devant  un  tribunal  civil 
contient  différents  chefs,  dont  un  ou  plusieurs  sont  de  la  com- 
pétence des  tribunaux  civils,  et  un  autre  de  celle  des  tribunaux 
de  commerce,  mais  dérivant  des  chefs  civils,  le  tribunal  civil  est 
compétent  pour  le  tout  ;  qu'en  l'espèce  le  chef  de  concurrence 
déloyale  dérive  directement  de  celui  de  contrefaçon  ; 

Considérant  que  la  concurrence  déloyale  est  en  l'espèce  mani- 
feste ;  qu'elle  résulte  des  agissements  de  Giraud,  pour  s'empa- 
rer des  procédés  de  fabrication  de  Ghatillon,  et  de  l'annonce 
qu'il  a  faite  de  son  produit,  sous  la  même  dénomination  que 
celui  de  Ghatillon  ; 

Considérant  que  les  experts  eux-mêmes  ont,  du  reste,  reconnu 
formellement  dans  leur  rapport  l'existence  de  la  concurrence  dé* 
loyale  ; 

Considérant  que  Ghatillon  a  éprouvé  un  préjudice  important 
dont  il  lui  est  dû  réparation  ; 

Par  ces  motifs,  Dit  mal  jugé,  bien  appelé  ; 

Emendant  et  faisant  ce  que  les  premiers  juges  auraient  dû 

faire; 

Dit  que  Giraud  a  contrefait  le  procédé  inventé  par  Ghatillon, 
et  quia  fait  l'objet  de  son  brevet  d'invention  du  16  avril  1888  et 
du  certificat  d'addition  du  21  février  1893  ; 

Dit  qu'il  a  également  contrefait  les  produits  résultant  dudit 
procédé,  dénommé  oxyde  d'antimoine  soluble  et  ayant  la  for- 
mule Sb«0»  ; 


—  110  — 

Se  déclare  compétente  pour  connattre  du  chef  de  concurrence 
déloyale  ; 

Dit  que  Giraud  a  fait  acte  de  concurrence  déloyale  vis-à-vis  de 
Chatillon  ;  que  celui-ci  a  éprouvé  un  préjudice  pour  lequel  il  loi 
est  dû  réparation  ; 

Condamne  en  conséquence  Giraud  à  payer  à  Chatillon  des  dom- 
mages-intérêts à  Oxer  par  état,  par  les  soins  des  experts  déjà 
commis^  et  dès  à  présent  une  provision  de  10,000  francs  ; 

Ordonne  l'insertion  du  présent  arrêt  dans  six  journaux,  au 
choix  de  l'appelant,  et  ce  aux  frais  de  Tintimé,  sans  que  le  prix 
de  chaque  insertion  puisse  dépasser  100  francs  ; 

Validant  la  saisie  opérée  le  27  septemhre  1894,  dans  rûsine 
Giraud,  par  le  ministère  de  Pirayre,  huissier  à  Brioude,  pro» 
nonce  la  confiscation  des  appareils  et  produits  reconnus  contre- 
faits ; 

Déboute  les  parties  de  toutes  leurs  autres  demandes,  ÛAs  et 
conclusions  ; 

Ordonne  la  restitution  de  l'amende  ; 

Condamne  Tintimé  à  tous  les  dépens  de  première  instance  et 
d'appel. 


Art.  4178. 

MjégfimtwMonm  éttntntférem.  —  Hongrie.  —  Marqaefli. 

La  loi  hongroise  du  30  juillet  1896  (la  Prop.  ind.^  1899- 
199)  est  identique,  dans  ses  7  premiers  articles,  à  la  loi 
autrichienne  de  même  date  (il nn.,  95.262).  Les  suivants 
sont  ainsi  conçus  : 

§  8.  —  Le  §  23  de  l'article  législatif  de  1890  est  modifié  comme 
suit  (1)  : 

Quiconque,  sciemment,  introduit  dans  le  commerce  ou  met  en 
vente  des  produits  indûment  revêtus  d'une  marque  à  Tusage  de 
laquelle  un  tiers  possède  un  droit  exclusif^  et  quiconque  con- 
trefait sciemment  une  marque  à  cet  effet,  commet  une  contra- 
vention et  est  passible  d'une  amende  de  200  à  600  couronnes,  et 
en  cas  de  récidive,  —  quand  il  ne  s*est  pas  encore  écoulé  deux 
ans  depuis  le  moment  où  la  dernière  condamnation  est  derenue 
définitive,  —  d'une  détention  pouvant  durer  jusqu'à  deux  mois 
et  d'une  amende  pouvant  s'élever  jusqu'à  600  couronnes. 

Cela  n'exclut  pas  Tapplication  simultanée  des  dispositions  plus 

1)  La  loi  de  1890  est  aux  Ann.^  93,  26. 


— 111  — 

sévères  du  code  pénal,  et  en  particulier  de  celles  relatives  au 
crime  ou  au  délit  de  fraude. 

§  9.  —  Le  §  24  de  l'article  législatif  de  1890  est  modiOé  comme 
suit  : 

Les  dispositions  du  §  8  sont  également  applicables  à  ceux  qui, 
sciemment,  introduisent  dans  le  commerce  ou  mettent  en  vente 
des  produits  indûment  munis  du  nom,de  la  raison  de  commerce, 
des  armoiries  ou  de  la  dénomination  commerciale  de  rétablisse- 
ment d'un  producteur,  d'un  industriel  ou  d'un  commerçant  indi- 
gène ;  elles  s'appliquent  également  à  celui  qui,  sciemment,  con- 
fectionne à  cet  effet  les  désignations  susmentionnées. 

§  10.  —  Le  §26  de  Tancieune  loi  est  modifié  comme  suit  : 

La  répression  des  contraventions  mentionnées  aux  §§  8  et  9  est 
placée  dans  la  compétence  des  tribunaux  royaux  de  district. 

Les  dispositions  du  §  7  du  VI*  article  législatif  de  1883,  qui  ap- 
portent des  restrictions  à  l'appel  contre  les  arrêts  de  seconde  ins- 
tance, ne  sont  pas  applicables  à  de  telles  contraventionSé 

§  it.  —  Les  faits  mentionnés  comme  délitH  dans  les  alinéas  1 
et  5  du  §  27  du  II«  article  législatif  de  1890,  doivent  être  considé- 
rés comme  constituant  des  contraventions  (1). 

§  12.  -  L'alinéa  2  du  §  29  de  l'ancienne  loi  est  modifié  comme 
suit: 

Si,  au  cours  de  la  procédure  pénale  (§§  8  et  9  de  la  présente  loi), 
il  surgit  une  question  qui,d'après  l'alinéa  précédent,  rentre  dans 
la  compétence  du  Ministre  du  commerce,  le  tribunal  correction- 
nel devra  communiquer  les  pièces  nécessaires  à  ce  Ministre,  en 
le  priant  de  résoudre  cette  question,  et  attendre  la  décision  mi* 
nistérielle. 

§  13.  —  La  présente  loi  entrera  en  vigueur  à  partir  de  sa  pu- 
blication, à  l'exception  du  §  5,  lequel  ne  produira  ses  effets  que 
six  mois  plus  tard. 

Les  dispositions  du  g  4  ne  sont  applicables  qu'aux  marques  qui 
ont  été  enregistrées  postérieurement  à  la  date  de  la  susdite  pu- 
blication ;  de  même,  les  dispositions  du  §  6  ne  s'appliqueront 
qu'aux  affaires  pénales  entamées  après  cette  date. 

(i)  Dans  le  texte  de  la  loi  autrichienne  de  1890,  qui  a  été  donné  comme 
identiqae  sur  ce  point  avec  celui  de  la  loi  hongroise,  le  §  27  n'a  que  trois 
alinéas.  Dans  le  texte  hongrois,  les  deux  dernières  phrases  du  troisième 
alinéa  constituent  chacune  un  alinéa  indépendant.  Le  cinquième  alinéa, 
dans  la  loi  hongroise,  est  donc,  dans  la  loi  autrichienne,  la  dernière 
phrase  du  troisième  alinéa. 

Il  est  aussi  à  remarquer  que  le  §  27  de  la  loi  autrichienne  ne  qua- 
lifie pas  la  contrefaçon.  En  fait,  elle  était  bien  considérée  comme  un  dé- 
lit dans  les  deux  pays  jusqu'en  1895.  Depuis  la  loi  hongroise  reproduite 
ci- dessus,  elle  n'est  pins  traitée  en  Hongrie  que  comme  une  conlraveti' 
lion . 


, 


—  112  — 

§  14.  —  Le  Ministre  du  commerce  et  le  Ministre  de  la  jaslice 
—  en  ce  qui  concerne  la  Croatie  et  la  Slavonie,  le  Ministre  du 
commerce  agissant  d'un  commun  accprd  avec  le  Bande  Croatie, 
de  Slavonie  et  de  Dalmatie,— sont  chargés  de  Texécution  de  la  pré- 
sente loi. 


Art.  4179. 

Eié^Uitetlons  étrAnyères.  —  Japon.  ~ 
Brevete  d'Invention. 

Loi  sur  les  brevets  (f  invention  (l)  (N*  36,  du  2  mars  1899). 

(2)  Article  {",—  La  personne  qui,  en  ce  qui  concerne  un  pro- 
duit ou  procédé  de  production  industrielle  a,  la  première,  fait 
une  invention,  ou  ses  ayants  cause,  pourront,  conformément 
à  la  présente  loi,  obtenir  un  brevet  d'invention. 

Le  brevet  relatif  à  l'invention  d'un  produit  confère  à  son  ti- 
tulaire les  droits  exclusifs  de  fabriquer,  d'utiliser,  de  vendre  ou 
de  mettre  en  circulation  le  produit  de  l'invention. 

Le  brevet  relatif  à  Tinvention  d'un  procédé  confère  à  son  titu-> 
laire  le  droit  exclusif  d'utiliser  ou  de  mettre  en  circulation  ce 
procédé,  et  son  effet  s'étend  aux  produits  obtenus  par  ce  procédé. 

Art.  2.  —  Ne  sont  pas  brevetables  les  inventions  ci-dessous 
énumérées  : 

i«  Les  produits  alimentaires,  les  boissons  et  les  articles  de 
consommation  (shikéboutsu)  ; 

2*  Les  médicaments  et  les  procédés  pharmaceutiques  : 

3^  Les  produits  ou  procédés  pouvant  porter  atteinte  à  Tordre 
public  ou  aux  bonnes  mœurs  ; 

4^  Les  produits  ou  procédés  qui  sont  connus  ou  d'un  usage 
public  avant  le  dépôt  de  la  demande  de  brevet.  Cette  disposition 
ne  s'applique  pas  aux  produits  ou  procédés  qui  ont  été  connus 
depuis  deux  ans  au  plus,  par  suite  de  leur  mise  à  l'essai. 

Art.  3.  —  La  durée  du  brevet  est  de  quinze  ans,  à  dater  du 
Jour  de  l'enregistrement  au  rôle  des  brevets. 

Art.  4.<-  Tout  brevet  peut  être  cédé  avec  ou  sans  restrictions, 
mis  en  communauté  ou  déposé  en  gage. 

(t)  Pour  la  comparaison  entre  cette  loi  et  la  précédente  de  1888  voir 
la  Prop,  ind.,  1899,  64,  97  et  167.  Cette  nouvelle  loi  a  pour  principal 
objet  d'assurer  l'application  de  la  Convention  d'Union,  elle  est  con- 
forme dans  ses  grandes  lignes  à  la  législation  antérieure. 

(2)  Texte  communiqué  an  Bureau  de  Berne  par  le  Ministère  du  Com- 
merce du  Japon. 


—  113  — 

Dans  ces  cas,  poar  être  opposable  à  un  tiers,  l'acte  devra  être 
enregistré  au  Bureau  des  brevets  d'invention  sur  la  demande  de 
rintéressé. 

Art.  5.  —  Tout  agent  du  Bureau  des  brevets  d'invention,  tant 
qu'il  conservera  sa  fonction  ou  son  emploi,  n'aura  pas  le  droit 
de  posséder  des  brevets,  à  moins,  toutefois,  que  la  propriété  d'un 
brevet  ne  vienne  à  lui  échoir  par  voie  de  succession,  ou  lui  ait 
été  acquise  antérieurement  à  son  entrée  en  fonctions. 

Art.  6. —  Toute  personne  qui,  en  matière  de  brevets,  veut  faire 
une  demande  ou  une  réclamation,  ou  est  titulaire  d'un  brevet, 
est  tenue,  loriqu'elie  n'a  pas  de  domicile  dans  TEmpire,  de  cons- 
tituer un  représentant  parmi  des  personnes  qui  s'y  trouvent 
domiciliées. 

Conformément  à  la  présente  loi  et  aux  ordonnances  ultérieures 
qui  en  dériveront,  le  susdit  représentant  remplacera  l'intéressé, 
pour  ce  qui  concerne  soit  les  formalités  à  remplir  devant  le  Bu- 
reau des  brevets  d'invention,  soit  les  procès  civils  et  les  plaintes 
en  matière  de  brevets. 

Art.  7.  —  Le  chef  du  Bureau  des  brevets  pourra,  s'il  le  juge 
nécessaire,  prescrire  le  changement  d'un  représentant  en  matière 
de  brevets. 

Art.  8.  —  Quiconque  voudra  exercer  la  profession  de  représeu' 
tant  en  matière  de  brevets  devra  obtenir  son  inscription  par  une 
demande  adressée  au  chef  du  Bureau  des  brevets  d'invention. 

Une  ordonnance  établira  ultérieurement  les  prescriptions  rela- 
tives aux  conditions  de  cette  inscription. 

Art.  9.  —  Lorsqu'un  représentant  professionnel  se  sera  rendu 
coupable  d'une  infraction  à  la  loi  on  d'un  acte  malhonnête  con- 
cernant ses  propres  aiTaires,  le  chef  du  Bureau  des  brevets  d'in- 
vention pourra  le  suspendre  ou  lui  interdire  Texercice  de  sa 
profession. 

Art.  40.  —  Toute  demande  ou  réclamation  en  matière  de 
brevets  sera  déclarée  nulle  et  de  nul  effet,  si  les  formalités  ré- 
glementaires ou  éventuellement  prescrites  n'ont  pas  été  remplies 
soit  dans  le  délai  déterminé  par  la  présente  loi  ou  par  une  or- 
donnance ultérieure  qui  en  dérivera,  soit  dans  le  délai  fixé  par 
le  chef  du  Bureau  des  brevets  d'inventiou  ou  par  le  président  du 
Tribunal  du  Bureau  des  brevets,  conformément  à  la  présente  loi 
on  à  une  ordonnance  ultérieure  qui  en  dérivera. 

Art.  H.  —  Toute  personne  qui  voudra  obtenir  un  brevet  d'in- 
vention devra  adresser  au  chef  du  Bureau  des  brevets  d'invention 
une  demande  tendant  à  l'obtention  de  ce  brevet,  à  laquelle  de- 
vront être  joints  :  une  description  de  chaque  invention;  des  des- 
sins explicatifs. 


'"^•v»»'".T.  »*^^^.!r  ;<  T      - 


—  114  — 

Le  chef  da  Bureau  des  brevets  pourra,  s*il  le  juge  nécessaire, 
exiger  le  dépôt  de  modèles  ou  échantillons. 

Art.  12.  —  Toute  invention  formant  l'objet  d'une  demande 
de  brevet  devra  être  soumise  à  Texaminateur  du  Bureau  des  bre- 
vets d'invention. 

Art.  43.  —  Si,  après  examen,  l'examinateur  décide  qu'il  y  a 
lieu  de  délivrer  le  brevet  sollicité,  le  chef  du  Bureau  des  brevets 
enregistrera,  au  rôle  des  brevets,  celui  qui  sera  remis  au  dépo- 
sant. 

Le  certificat  sera  signé  par  le  chef  du  Bureau  des  brevets  d^in- 
vention.  On  y  joindra  la  description  de  Tinvention  et  les  dessins 
explicatifs. 

Art.  14.  —  Dans  le  cas  où  une  personne  ayant  déposé,  pour 
une  invention,  une  demande  de  brevet  dans  l'un  des  Etats  de 
l'Union  internationale  pour  la  protection  de  la  propriété  indus- 
trielle déposerait  dans  les  sept  mois  à  dater  du  jour  du  premier 
dépôt  une  demande  tendant  à  Tobtention  d'un  brevet  relatif  à 
la  même  invention,  ce  dépôt  ultérieur  aurait  le  même  effet  que 
s'il  avait  été  fait  au  même  moment  que  le  premier  dépôt. 

Art.  15.  —  Quiconque  veut  prendre  part  à  une  exposition  ou 
à  un  concours  organisé  soit  par  le  Gouvernement,  soit  par  une 
administration  départementale  de  Fu  ou  de  Ken  (préfecture) 
et  a  rintention  de  déposer  ultérieurement  une  demande  de  bre- 
vet pour  un  article  qu'il  y  aura  exposé  et  qui  est  le  produit  de 
son  invention,  est  tenu  de  déclarer  cette  intention  au  Bureau  des 
brevets  avant  l'admission  de  cet  article  à  l'exposition  ou  au  con- 
cours. 

Dans  le  cas  prévu  par  l'alinéa  précédent,  si  la  demande  de  bre- 
vet a  été  déposée  dans  les  six  mois  à  dater  de  l'admission  de  Fob- 
jetde  l'invention  à  l'exposition  ou  au  concours,Ie  dépôt  aura  le  mê- 
me effet  que  s'il  avait  été  fait  au  moment  même  de  la  déclaration 
de  ladite  intention. 

Sera  également  valable  dans  l'Empire,  le  délai  que  l'un  des 
Etats  de  l'Union  internationale  pour  la  protection  de  la  propriété 
industrielle  accordera  pour  le  dépôt  de  la  demande  de  brevet 
relative  aux  objets  admis  à  une  exposition  internationale  qui  a 
lieu  sur  son  territoire. 

Art.  16.  —  S11  s'agit  d'une  invention  dont  l'intérêt  public 
réclame  la  vulgarisation  ou  dont  l'utilisation  au  point  de  vue 
militaire  est  nécessaire  ou  doit  être  gardée  secrète,  le  chef  du 
Bureau  des  brevets  d'invention  pourra  n'accorder  le  brevet  que 
sous  conditions,  ou  même  le  refuser  ou  imposer  des  conditions 
relatives  à  la  jouissance  d'un  brevet  déjà  accordé,  ouïe  révoquer 
suivant  qu'il  jugera  lui-même  nécessaire  l'une  ou  l'autre  de  ces 


f^V 


—  115  — 

mesures  ou  qu'elle  lui  aura  été  demandée  par  l'autorité  compé* 
tente. 

Dans  ces  cas»  le  Gouvernement  devra  accorder  une  compen- 
sation à  rinventeur  ou  au  titulaire  du  brevet. 

Art.  17.  —  Quiconque  aura  demandé  un  brevet  pour  une  in- 
vention ayant  pour  objet  des  perfectionnements  apportés  à  une 
autre  invention  antérieurement  brevetée  au  profit  d'un  tiers  devra, 
quand  Tobjet  de  sa  demande  aura  été  jugé  brevetable,  s'entendre 
avec  le  porteur  du  brevet  original  et  obtenir  son  consentement 
pour  exploiter  l'invention  principale. 

Au  cas  où  ce  consentement  n'aura  pu  être  obtenu,  l'inventeur 
devra  rapporter  le  fait  au  chef  du  Bureau  des  brevets  et  lui  ex- 
poser la  situation.  Si  le  chef  du  Bureau  des  brevets  d'invention 
trouve  la  plainte  justifiée,  il  pourra  délivrer  le  brevet  de* 
mandé.  Toutefois,  le  titulaire  du  brevet  ainsi  obtenu  ne  pourra 
pas  en  bénéficier  avant  d'avoir  payé  au  porteur  du  brevet  ori- 
ginal une  indemnité  que  le  chef  du  Bureau  des  brevets  fixera. 
ART.  18.  —  Quiconque  n'acceptera  pas  les  indemnités  mention- 
nées dans  les  deux  articles  précédents  pourra  en  appeler  aux  tri- 
bunaux sans  que,  toutefois,  l'exécution  des  mesures  prescrites 
par  l'article  16  puisse  être  suspendue. 

Art.  19.—  Tout  titulaire  de  brevet  pourra  obtenir  un  brevet 
additionnel  pour  une  invention  obtenue  par  l'utilisation  d'une 
précédente  invention  à  lui  appartenant. 

Le  brevet  additionnel  se  transmet  et  s'éteint  conjointement 
avec  le  brevet  principal. 

Art.  20.  —  Seront  nuls  et  de  nul  effet  les  brevets  délivrés 
dans  l'un  des  cas  prévus  ci-après  : 

lo  S'il  y  a  eu  violation  des  dispositions  des  articles  1*'  et  2  ; 
20  Si,  dans  la  description,  les  détails  nécessaires  à  l'exécution 
de  l'invention  ont  été  intentionnellement  omis  ; 

3»  Si  des  détails  non  nécessaires  à  Texécution  de  l'invention 
ont  été  intentionnellement  insérés  dans  la  description. 

Art.  21.  —  Lorsque  l'examinateur  aura  décidé  qu'il  n'y  a  pas 
lieu  de  délivrer  le  brevet  demandé, le  chef  du  Bureau  des  brevets 
d^nvention  devra  envoyer  au  requérant  copie  de  cette  décision. 
Art.  22.  —  Lorsquo  l'examinateur  aura  décidé  qu'une  inven-^ 
tion  pour  laquelle  un  brevet  est  demandé  se  trouve  en  collision 
avec  une  autre  demande  de  brevet  déposée  par  un  tiers,  ou  avec 
an  brevet  déjà  délivré  au  profit  d'un  tiers,  le  chef  du  Bureau  des 
brevets  d'invention  devra  envoyer  copie  de  cette  décision  aux 
intéressés. 

Art.  23.  -*-  Quiconque  ne  sera  pas  satisfait  de  la  décision  prévue 
par  les  deux  articles  précédents  pourra»  dans  un  délai  de 
soixante  jours  à  dater  du  jour  où  la  décision  lui  aura  été  notifiée» 


-  il6- 

raloir,  auprès  du  chef  du  Bureau  des  brevets  d'iiiTention 
Dtifs  de  son  refus  et  réclamer  un  nouvel  examen. 
s  le  cas  où  un  nouvel  examen  aurait  été  ainsi  réclamé,  le 
u  Bureau  des  brevets  d'invention  soumettra  l'alTaire  à  on 
nateur  qai  n'aura  pas  pris  part  au  premier  examen, 
et  examinateur  rejette  les  motifs  sur  lesquels  s'appuie  la 
ide  de  revision,  le  cher  du  Bureau  des  brevets  d'invention 
netlra  cette  décision  au  requérant. 

24.  —  Lorsqu'il  aura  été  reconnu,  après  examen,  qu'une 
ion  se  trouve  en  collision  avec  une  autre  invention,  le 
1  Bureau  des  brevets  d'invention  invitera  les  intéressés  à 
r  des  renseignements  circonstanciés  sur  leur  invention.  II 
aluer  par  Texaminateur  sur  la  question  de  la  propriété 

diverses  inventions,  et  sa  décision  sera  portée  par  écrit 
nnaissance  des  intéressés. 

25.  —  Lorsque,  dans  le  cas  de  l'article  précédent,  un  bre- 
|à  délivré  aura  été  annulé,  et  qu'un  nouveau  brevet  aura 
sordé  à  l'invenleur,  ce  brevet  ultérieurement  délivré  sera 
comptera  partir  dn  jour  de  l'enregistrement  du  premier 

26.  —  Lorsqu'un  breveté  s'apercevra  que  les  descriptions 
ins  relatifs  h  son  invention  sont  insuffisants,  il  pourra 
er  l'amendement  de  son  brevet  et,  dans  ce  but,  il  renou- 

la  description  ou  les  dessins  qu'il  joindra  à  sa  demande. 

ra  de  même,  s'il  reconnaît  la  nécessité  de  diviser  un  bre- 

plusieurs  brevets  distincts.  Toulefois,  les  dispositions  de 

cle  ne  s'appliquei'ojit  pas  au  cas  où  il  s'agirait  d'introduire 

ingements  essentiels  dans  l'invention. 

37.  —  Les  réclamations  visées  par  l'article  précédent  se- 

u mises  à  L'examinateur, 

^nque,  dans  ce  cas,  ne  sera  pas  satisfait  de  la  décision  de 

nateur  pourra  en  réclamer  un  nouvel  examen,  en  se  con- 

t  aux  dispositions  de  l'article  23. 

28.  —  Quiconque  ne  sera  pas  satisfait  du  résultat  de  la 

I  visée  par  les  articles  23  et  27  pourra,  dans  tes  soixante 

dater  du  Jour  de  la  réception  de  cette  décision,  réclamer 

meut  du  Bureau  des  brevets  d'invention. 

sera  de  même  pour  le  refus  d'admettre  la  décision  spé- 

l'artideai. 
Î9.  —  Lorsqu'il  aura  été  reconnu  que  plusieurs  inventions 
ivetées  ae  trouvent  en  collision  entre  elles,  ou  qu'une  in- 

brevetée  est  en  collision  avec  un  produit  ou  procédé  non 
,  les  intéressés  pourront  réclamer  lejugementdu  Bureau 
vêts  d'invention,  afin  de  faire  préciser  leurs  droits  res- 


W^fT^HpilfUiHlliHii   «î*^ 


—  117  — 

Art.  30.  —  Quiconqae  aura  reconna  qu'âne  invention  brevetée 
se  trouve  dans  l'un  des  cas  prévus  par  Tarticle  20,  pourra  inteu: 
ter  uue  action  en  nullité  du  brevet  délivré,  et  réclamer  à  cet 
effet  le  jugement  du  Bureau  des  brevets  d'invention. 

Art.  31.  —  Toutes  les  fois  que  le  Bureau  des  brevets  d'inven- 
tion le  jugera  nécessaire  en  vue  de  prononcer  sur  un  examen  ou 
un  jugement  ou  de  Qxer  le  montant  d'une  compensation,  il 
pourra,  sur  la  demande  des  parties,  procéder  lui-même  à  la 
recberche  des  preuves  ou  de  requérir  le  tribunal  de  Ku  (justice 
de  paix)  du  lieu  où  Taffaire  en  question  doit  être  traitée,  de 
procéder  à. cette  opération. 

En  ce  qui  concerne  cette  recherche  des  preuves^  on  appliquera 
par  analogie  les  dispositions  du  Code  de  procédure  civile,  sec- 
tions 5  à  11,  chapitre  i«%  livre  II. 

Art.  32.  —  Toutes  les  affaires  soumises  au  jugement  du  Bureau 
des  brevets  d'invention  seront  examinées  par  trois  ou  cinq  juges, 
sous  la  présidence  de  l'un  d'entre  eux. 

La  décision  des  juges  devra  être  accompagnée  d'un  exposé 
des  motifs. 

Art.  33.  —  La  demande  de  jugement  devra  être  dûment  mo- 
tivée et  rédigée  en  double  expédition. 

Le  Bureau  des  brevets  d'invention,  au  reçu  de  cette  demande» 
en  fera  parvenir  le  duplicata  à  la  partie  défenderesse  et  l'invitera 
à  produire  une  réplique  en  double  expédition  dans  un  délai 
convenable  qu'il  lui  fixera. 

Le  Bureau  des  brevets  d'invention,  dans  les  cas  où  il  le  jugera 
nécessaire,  pourra  inviter  le  demandeur  et  le  défendeur  à  pré- 
senter respectivement  une  réfutation  et  une  nouvelle  réplique 
dans  un  délai  fixé. 

'  Le  président  des  juges  pourra,  d'office  ou  sur  la  demande 
commune  des  parties,  rendre  un  jugement  oral. 

Tout  jugement  oral  sera  public. 

Aat.  34.  —  Lorsque  le  demandeur  ou  le  défendeur  n'aura  pas 
présenté,  dans  le  délai  réglementaire  ou  dans  un  délai  spéciale- 
ment fixé,  la  réponse  ou  réfutation  nécessaire,  ou  lorsqu'il  n'aura 
pas  comparu  aux  débats,  le  président  des  juges  pourra,  après 
audition  de  la  partie  adverse^  prononcer  le  jugement. 

Art.  35.  —  Quiconque  ne  sera  pas  satisfait  des  décisions  ren- 
dues en  vertu  des  dispositions  de  l'alinéa  2  de  l'article  28,  de  l'ar- 
ticle 29  et  de  l'article  30,  pourra  se  pourvoir  à  la  Cour  suprême 
dans  les  soixante  jours  à  datep  du  jour  de  la  notification  de 
ces  décisions,  mais  seulement  s'il  peut  baser  sa  plainte  sur 
une  violation  ou  une  fausse  application  de  la  loi. 

En  ce  qui  concerne  les  pourvois  et  jugements  mentionnés  à 
l'alinéa  précédent,  les  dispositions  du  Code  de  procédure  civile 


—  118  — 

relatives  aux  pourvois  et  à  leur  jugement  seront  applicables 
par  analogie. 

Art.  36.  —  Si  la  Coup  suprême  admet  le  bien-fondé  du  pourvoi, 
elle  cassera  la  décision  primitive  et  renverra  Taffaire  au  Bureau 
des  brevets  pour  qu'elle  y  soit  re visée. 

Les  opinions  exprimées  par  la  Cour  suprême  sur  un  point  de 
droit,  en  rendant  une  décision,  sont  obligatoires  pour  le  Bureau 
des  brevets  d*invention  dans  Taffaire  en  question. 

Art.  37.  —  Le  président  des  juges  déterminera,  selon  son  ap- 
préciation, l'imputation  et  le  montant  des  frais  du  jugement  re- 
quis dans  le  cas  de  l'alinéa  2  de  l'article  28,  de  Tarticle  29  et  de 
Particle  30. 

Dans  les  cas  où  la  Cour  suprême  aura  statué  sur  la  répartition 
des  frais  de  procédure  entre  les  intéressés,  le  président  des  juges 
en  déterminera  aussi  le  montant  selon  son  appréciation. 

En  ce  qui  concerne  les  frais  mentionnés  aux  deux  alinéas  pré- 
cédents, seront  applicables  par  analogie  les  dispositions  du  Code 
de  procédure  civile,  articles  72  à  82  et  86,  et  celles  de  la  loi 
sur  les  frais  des  procès  civils. 

Art.  38.  —  Lorsqu'une  invention  déjà  brevetée  se  trouvera 
dans  l'un  des  cas  ci-après  .énumérés,  le  chef  du  Bureau  des  bre- 
vets d'invention  pourra  révoquer  le  brevet  relatif  à  cette  inven- 
tion : 

i^  Si  le  breveté,  n'ayant  pas  publiquement  mis  en  exploitation 
son  invention  dans  l'Empire  trois  ans  après  la  date  du  brevet  on 
ayant  cessé  depuis  au  moins  trois  ans  d'exploiter  publiquement 
son  invention  dans  l'Empire  a  refusé  néanmoins,  sans  motif  va- 
lable, la  cession  ou  la  licence  de  ladite  invention  à  une  tierce 
personne  qui  offrait  des  conditions  convenables  ; 

20  Si  le  breveté,  soixante  jours  après  l'échéance,  n'a  pas  en- 
core acquitté  le  payement  de  la  taxe  ; 

3^  Si  le  breveté,  sans  un  motif  valable,  est  resté  six  mois  on 
plus  sans  constituer  le  représentant  mentionné  k  l'article  6. 

Art.  39.  —  Le  breveté  aura  k  payer  une  taxe  annuelle  de  dix 
yens  par  brevet. 

Cette  taxe  annuelle  sera  augmentée  d'une  surtaxe  de  5  yens 
tous  les  trois  ans  (i). 


(1)  Le  yen  vaut  environ  5  fr.  23.  La  taxe  ressort  ainsi  à  : 

3  ans  fr.  156.90 
3  »  »  S85.3d 
3  »  »  313.80 
3  »  »  392.25 
3    »       »     470,70 

Total  fr.  1,569.  »,  valeur  en  or. 


—  119  — 

Lorsque  le  breveté  aura  obtenu  un  brevet  additionnel,  il  ver- 
sera la  somme  de  vingt  yens  une  fois  payée. 

Art.  40.  —  Les  taxes  annuelles  seront  payables  d'avance  pour 
une  année  entière,  au  jour  anniversaire  de  la  délivrance  du  bre- 
vet. Cependant,  la  taxe  de  la  première  annuité  et  la  taxe  du  bre- 
vet additionnel  seront  payables  dans  un  délai  de  soixante  jours 
à  partir  du  jour  où  la  décision  relative  au  brevet  aura  été  no- 
tifiée à  rintéressé. 

Les  taxes  versées  d'avance  ne  seront  pas  restituées  ;  toutefois, 
peuvent  être  restituées  les  annuités  qui  ne  sont  pas  encore  exigi- 
bles, si  elles  ont  été  payées  par  anticipation. 

Art.  41.  —  Le  breveté  est  tenu  de  revêtir  les  articles  de  son 
invention  d'une  indication  propre  à  faire  connaître  qu'ils  sont 
brevetés. 

Art.  42.  —  Le  Bureau  des  brevets  d'invention  publiera,  dans 
un  bulletin  ofOciel,  les  descriptions  et  dessins  des  brevets  dé- 
livrés, les  modifications  apportées  aux  brevets,  les  mutations  de 
propriété  des  brevets  et  tous  les  autres  faits  relatifs  aux  brevets 
délivrés  et  dont  la  publication  est  nécessaire,  sans  toutefois  que 
ces  publications  puissent  porter  préjudice  à  ce  qui  doit  rester 
secret. 

Art.  43.  —  Quiconque  en  fera  la  demande  pourra  obtenir,  du 
Bureau  des  brevets  d'invention,  des  copies  de  dossiers,  des  repro- 
ductions de  dessins  et  Tautorisation  de  consulter  le  rôle  des  bre- 
vets, sauf  pour  ces  qui  doit  être  tenu  secret. 

Art.  44.  —  Les  témoins  et  les  experts  qui  auront  porté  un 
faux  témoignage  ou  fait  une  expertise  frauduleuse  devant  le  Bu- 
reau des  Brevets  d'invention  ou  devant  le  tribunal  désigné  seront 
punis  d'emprisonnement  majeur  d'un  mois  à  un  an  et  d'une 
amende  de  cinq  à  cinquante  yens. 

Quiconque  aura^  par  corruption  ou  par  tous  autres  moyens, 
amené  une  tierce  personne  à  porter  un  faux  témoignage  ou  à 
faire  une  expertise  frauduleuse  encourra  la  peine  édictée  à  l'ali- 
néa précédent. 

Les  auteurs  des  infractions  prévues  dans  les  deux  alinéas  pré- 
cédents, qui  se  seront  dénoncés  au  Bureau  des  brevets  d'inven- 
tion ou  au  tribunal  désigné,  antérieurement  à  la  décision  de 
Texaminateur  ou  des  juges  ou  encore  à  la  décision  du  chef  du 
Bureau  des  brevets  d'invention  relative  aux  indemnités,  seront 
exemptés  des  peines  encourues. 

Art.  45.  —  Quiconque  aura  contrefait  ou  imité  l'objet  d'une 
invention  brevetée,  ou  aura  employé  ou  vendu  sciemment  un 
article  contrefait  ou  imité  ou  aura  usurpé  sciemment  un  procédé 
breveté  par  autrui,  ou  aura  employé  ou  vendu  sciemment  un 
produit  obtenu  par  une  tierce  personne  d'après  un  procédé  bre- 


—  Ivîl  — 

année  deMeiji  (i 888)  concernant  les  brevets  d'invention  se  trou- 
vera abrogée  à  dater  du  jour  où  la  présente  loi  deviendra  exé- 
cutoire. 

Les  brevets  délivrés  conformément  aux  lois  antérieures  à  la 
présente  loi  auront,  durant  le  temps  qui  leur  a  été  assigné,  la 
même  valeur  que  ceux  obtenus  d'après  la  présente  loi. 

Toutes  demandes  ou  réclamations  relatives  aux  brevets,  qui 
n'auront  pas  été  expédiées  avant  le  jour  de  la  mise  en  vigueur  de 
la  présente  loi,  seront  traitées  comme  les  demandes  ou  réclama- 
tions formulées  conformément  à  la  présente  loi. 


Art.  4180. 

IéëgîmUk.tîonm  étrangère».  —  Japon.  — 
De««ins  et  miMlèle». 

Loi  sur  les  dessins  et  modèles  industriels  (1) 
(n*»  3'7du2  mars  1899). 

(2)  Art.  i*'.  —  L'auteur  d'un  dessin  ou  modèle  nouveau,  ap- 
plicable à  un  article  industriel  et  relatif  à  sa  forme,  à  son  des- 
sin, à  ses  couleurs  ou  à  la  combinaison  de  sa  forme,  de  son 

(1)  Comme  la  nouvelle  loi  japonaise  sur  les  brevets  d'invention,  celle 
sur  les  dessina  et  modèles  industriels  repose  sur  les  mêmes  principes 
généraux  que  celle  dont  elle  vient  prendre  la  place  (voir  Rec.  lég. 
prop.  ind.  Berne,  1897,  t.  2,  p.  746). 

Le  changement  capital  qu'on  y  constate  est  qu'elles  prévoient  la  pro- 
tection des  étrangers,  dont  il  n'était  pas  parlé  dans  les  lois  précédentes, 
et  qu'elle  contient  des  dispositions  spéciales  destinées  à  appliquer 
aux  ressortissants  de  l'Union  internationale  les  délais  de  priorité  et  la 
protection  temporaire  en  cas  d'exposition,  conformément  aux  stipula- 
tions de  la  Convention  du  20  mars  18b3.  En  outre,  les  principes  et  la 
procédure  établis  par  la  loi  sur  les  brevets  pour  le  dépôt,  l'examen  préa- 
lable, les  actions  en  nullité  et  les  recours  contre  les  décisions  adminis- 
tratives, ont  été  rendus  applicables  en  matière  de  dessins  et  de  modèles» 
par  un  simple  renvoi  aux  divers  articles  de  la  susdite  loi,  en  sorte 
qu'il  y  a  unification  complète  sur  tous  ces  points  dans  les  diverses  bran- 
ches de  la  propriété  industrielle. 

Les  taxes  ont  été  notablement  augmentées  ;  elles  s'élèvent  à  15  yens 
(78  francs),  au  lieu  de  10. 

Les  peines  qui  frappent  la  contrefaçon  ont  été  aggravées  ;  au  lieu  d'un 
emprisonnement  de  15  jours  à  6  mois  ou  d'une  amende  de  10  à  100 
yens,  le  contrefacteur  est  passible,  en  matière  de  dessins  et  modèles,  de 
15  jours  à  un  an  de  prison  ou  de  10  à  200  yens  d'amende.  La  loi  prononce 

(2)  Texte  français  communiqué  au  Bureau  de  Berne  par  le  Ministère 
du  commerce  du  Japon. 


'Tf^'Zr 


122 


dessin  et  de  ses  couleurs,  ou  les  ayants  cause  d'un  tel  auteur, 
pourront,  conformément  à  la  présente  loi,  obtenir  l'enregistre- 
ment de  ce  dessin  ou  modèle,  et  s*en  assurer  Tusage  exclusif. 

Art.  2.  —  Ne  seront  pas  admis  à  Tenregistremenl  : 

1°  Les  dessins  et  modèles  reproduisant  le  chrysanthème  des 
armes  impériales  ou  une  représentation  analogue  ; 

20  Ceux  qui  peuvent  porter  atteinte  à  Tordre  public  ou  aux 
bonnes  mœurs  ; 

3°  Ceux  qui,  avant  le  dépôt  de  la  demande  dVnregistremenf, 
étaient  déjà  connus  du  public  ou  entrés  dans  Tusage  public,  ou 
qui  ressemblent  à  de  tels  dessins  et  modèles,  à  moins,  toutefois, 
qu'ils  ne  rappellent  des  dessins  ou  modèles  originaux  du  même 
auteur. 

Art.  3.  —  La  durée  de  l'usage  exclusif  d'un  dessin  ou  modèle 
est  de  dix  ans,  à  dater  du  jour  de  son  enregistrement  au  rôle 
des  dessins  et  modèles  industriels.  La  durée  de  l'usage  exclusif 
d*un  dessin  ou  modèle  qui  en  rappellera  un  autre,  sera  celle  de 
Toriginal. 

Art.  4.  —  L'usage  exclusif  d'un  dessin  ou  modèle  sera  limité 
aux  articles  désignés  par  le  déposant  d'après  la  classification 
établie  par  le  Ministre  de  l'Agriculture  et  du  Commerce. 

Art.  5.  —  En  ce  qui  concerne  un  dessin  ou  modèle  exécuté 
pour  le  compte  d'autrui  ou  aux  frais  d*un  patron,  le  droit  à  l'en- 
registrement appartiendra,  sauf  stipulation  contraire,  à  celui  qui 
a  fait  la  commande  ou  audit  patron. 

Art.  (i.  —  Le  droit  à  l'usage  exclusif  d'un  dessin  ou  modèle 
pourra,  avec  ou  sans  restriction,  être  cédé,  mis  en  communauté 
ou  donné  en  gage.  En  pareil  cas.  Pacte  devra,  pour  être  opposa- 
ble aux  tiers^  être  enregistré  en  suite  d'une  demande  adressée 
à  cet  effet  au  Bureau  des  brevets  d'invention. 

Le  propriétaire  d'un  dessin  ou  modèle  qui  en  possédera  un  ou 
plusieurs  autres  similaires,  ne  pourra  obtenir  l'enregistrement 
mentionné  à  l'alinéa  précédent  que  s'il  cède,  met  en  communauté 
ou  donne  en  gage  ensemble  ces  divers  dessins  ou  modèles. 

Art.  7.  —  Aucun  agent  du  Bureau  des  brevets  d'invention, 
tant  qu'il  conservera  sa  fonction  ou   son  emploi,  ne  pourra  ob- 


eii  outre,  des  peines  sévères  contre  ceux  qui  ont  obtenu  un  enregistre- 
ment par  la  fraude  ou  qui  font  passer  pour  enregistré  un  objet  qui  ne 
Test  pas  et  contre  ceux  qui  se  sont  rendus  coupables  de  faux  témoignages 
ou  d'expertises  frauduleuses  ou  s'en  sont  faits  les  instigateurs.  L'an- 
cienne disposition  privant  de  toute  action  en  dommages-intérêts  celai 
qui  avait  omis  d*apposer  sur  ses  produits  la  mention  relative  à  leur 
enregistrement,  a  été  atténuée  en  ce  sens  qu'en  pareil  cas  Tintéressé 
ne  pourra  actionner  que  celui  qui  a  sciemment  usurpé  ses  droits.  (Cette 
note  est  empruntée,  en  partie,  à  la  Prop,  ind,ii9&9f  181.) 


—  123  — 

tenir  le  droit  à  Tusage  exclusif  d*un  dessin  ou  modèle,  à  moins 
qu'il  ne  I*ait  acquis  par  voie  de  succession,  ou  que  ce  droit  ne 
soit  antérieur  à  son  entrée  en  fonctions. 

ART.  8.  —  Quiconque  voudra  obtenir  l'enregistrement  d*un 
dessin  ou  modèle  devra  adresser  au  chef  du  Bureau  des  brevets 
une  demande  accompagnée,  pour  chaque  dessin  ou  modèle,  de 
la  désignation  des  articles  auxquels  il  doit  s'appliquer  et  d'une 
reprod action,  d'un  échantillon  ou  d'une  figuration  dudit  dessin 
ou  modèle. 

Le  chef  du  Bureau  des  brevets  pourra  exiger  du  déposant  des 
reproductions,  échantillons  ou  figurations  supplémentaires,  ainsi 
que  des  notes  explicatives. 

Art.  9.  —  Si  deux  ou  plusieurs  personnes  demandent  l'enre- 
gistrement de  dessins  ou  modèles,  identiques  ou  similaires,  c'est 
la  première  demande  qui  sera  enregistrée.  Au  cas  où  les  deman- 
des auraient  été  déposées  simultanément,  aucune  d'elles  ne  sera 
enregistrée.  Néanmoins,  si  les  déposants  demandent,  d'un  com- 
mun accord,  l'enregistrement  en  leur  nom  collectif,  ou  s'il  ne 
subsiste  qu'un  seul- déposant,  ou  procédera  à  l'enregistrement. 

Art.  10.  —  Lorsque  la  demande  d'enregistrement  d'un  des- 
sin ou  modèle  sera  présentée  dans  l'Empire  dans  le  délai  de 
quatre  mois  à  dater  de  son  dépôt  dans  l'un  des  États  de  l'Union 
internationale  pour  la  protection  de  la  propriété  industrielle, 
cette  demande  aura  le  môme  effet  que  si  elle  avait  été  faite  à  la 
date  dudit  dépôt. 

Art.  11.  —  L'enregistrement  d'un  dessin  ou  modèle  sera 
nul  et  de  nul  effet  s'il  contrevient  aux  dispositions  des  articles 
1««",  2,  5  ou  9. 

Art.  12.  —  Le  chef  du  Bureau  des  brevets  pourra  radier  l'en- 
registrement d'un  dessin  ou  modèle  dans  l'un  des  cas  suivants  : 

io  Lorsque  le  propriétaire  du  certificat  d'enregistrement  d'un 
dessin  ou  modèle  n'aura  pas  acquitté  la  taxe  d'enregistrement 
dans  un  délai  de  soixante  jours  à  compter  de  la  date  fixée  pour 
ce  payement  ; 

2^  Lorsque,  sans  motifs  plausibles^  il  n'a  pas  constitué  dans  les 
six  mois,  conformément  à  l'article  22,  le  représentant  mentionné 
à  l'article  6  de  la  loi  sur  les  brevets  d'invention. 

Art.  13.  —  Le  propriétaire  du  certificat  d'enregistrement  des 
dessins  ou  modèles  aura  à  acquitter,  pour  chaque  dessin  ou  mo- 
dèle, une  taxe  annuelle  fixée  à  trois  yens  pour  les  trois  premiè- 
res années,  cinq  yens  pour  les  trois  années  suivantes  et  sept 
yens  pour  les  quatre  dernières  années  (1). 

Pour  l'enregistrement  d'un  dessin  ou  modèle  similaire,  la  taxe 
par  dessin  ou  modèle  sera  de  trois  yens  une  fois  payés. 

(i)  Le  yen  or  vaut  5  fr.  23  environ. 


9^9^    J'  ^".^t 


—  124  — 


Art.  14.  —  Les  taxes  annuelles  seront  payables  d'avance  pour 
une  année  entière,  à  la  date  que  porte  le  certificat  d'enregistré* 
ment.  Cependant,  celle  pour  la  première  année  et  celle  visée 
par  Talinéa  2  de  l'article  précédent  seront  payables  dans  un  délai 
de  soixante  jours  à  partir  de  la  date  où  la  décision  accordant  Ten- 
registrement  aura  été  signifiée  au  déposant. 

Les  taxes  versées  d'avance  ne  seront  pas  restituées  ;  les  annui- 
tés non  encore  exigibles  peuvent,  toutefois,  être  restituées,  si 
elles  ont  été  payées  par  anticipation. 

Art.  45.  — Le  propriétaire  du  certificat  d'enregistrement  d'an 
dessin  ou  modèle  est  tenu  d'apposer,  sur  les  articles  auxquels 
est  appliqué  le  dessin  ou  modèle,  une  indication  constatant  l'en* 
registrement. 

Art.  16.  —  Les  témoins  et  experts  qui  auront  porté  un  faux 
témoignage  ou  fait  une  expertise  frauduleuse  devant  le  Bureau 
des  brevets  ou  devant  le  tribunal  désigné,  seront  punis  d'empri- 
sonnement majeur  d'un  mois  à  un  an  et  d'une  amende  de  cinq 
à  cinquante  yens. 

Quiconque  aura,  par  corrjaption  ou  par  tous  autres  moyens, 
amené  un  tiers  à  porter  un  faux  témoignage  ou  à  faire  une 
expertise  frauduleuse,  encourra  les  peines  édictées  à  Falinéa 
précédent. 

Les  auteurs  des  infractions  prévues  par  les  deux  alinéas  pré- 
cédents, qui  se  seront  dénoncés  au  Bureau  des  brevets  d'inven- 
tion ou  au  tribunal  désigné,  antérieurement  à  la  décision  de 
l'examinateur  ou  du  juge  de  Taffaire  en  question,  seront  exemp- 
tés des  peines  susmentionnées. 

Art.  47.  —  Sera  puni  d'emprisonnement  majeur,  de  quinze 
jours  à  un  an  ou  d'une  amende  de  dix  à  deux  cents  yens,  qui- 
conque aura  contrefait  ou  imité  le  dessin  ou  modèle  d'autrui,  ou 
vendu  sciemment  des  articles  fabriqués  d'après  un  dessin  ou 
modèle  contrefait  ou  imité. 

Sera  puni  des  mêmes  peines  quiconque  aura  importé  de  l'é- 
tranger un  article  qu'il  savait  pouvoir  nuire  à  un  dessin  ou  mo- 
dèle déjà  enregistré  en  faveur  d'un  tiers,  ou  qui  aura  vendu  sciem- 
ment cet  article. 

Art.  18.  —  Les  objets  conflsqués  dans  les  cas  de  l'article  pré- 
cédent seront  remis  au  propriétaire  du  dessin  ou  modèle  enre- 
gistré. 

Art.  19.  —  Sera  puni  d'emprisonnement  majeur  de  quins^ 
jours  à  six  mois  ou  d'une  amende  de  dix  à  cent  yens  quiconque 
aura  frauduleusement  obtenu  l'enregistrement  d'un  dessin  ou 
modèle  qu  apposé  une  indication  d'enregistrement  ou  une  men- 
tion similaire  sur  un  article  muni  d'un  dessin  ou  modèle  non 


|l^ii^,Bi|W»nip}iPUiiJi   «.■^ni.i|4pi.i««,\PI^Jippi3nppa|pV^ 


:ar' 


—  125  — 

enregistré,  oa  qui  aura  sciemmeut  vendu  un  article  ainsi  mar-< 
que. 

Sera  puni  des  mêmes  peines  quiconque,  pour  faire  valoir 
des  articles  munis  d'un  dessin  ou  modèle  non  enregistré,  aura 
inséré  dans  une  annonce,  enseigne  ou  un  prospectus,  une 
mention  pouvant  faire  croire  que  ledit  dessin  ou  modèle  a  été 
enregistré. 

Art.  20.  —  Les  infractions  prévues  par  Tarticle  i7  ne  seront 
poursuivies  que  sur  la  plainte  de  la  partie  lésée. 

Art.  21.  —  Le  propriétaire  du  certificat  d'enregistrement  d^un 
dessin  ou  modèle,  qui  aura  négligé  de  revêtir  ses  articles  d'une 
indication  d'enregistrement,  ne  pourra  réclamer  d'indemnité  que 
de  ceux  qui  auront  sciemment  préjudicié  à  son  droit  de  pro- 
priété. 

Art.  22.  —  Les  dispositions  des  articles  6  à  10,  12, 13,  1^,21, 
23,  28  à  37,  43  et  51  de  la  loi  sur  les  brevets  d'invention  seront 
applicables,  par  analogie,  en  matière  de  dessins  et  modèles. 

Dispositions  additionnelles  (I). 

Art.  23.  —  La  présente  loi  entrera  en  vigueur  à  dater  du 
premier  jour  du  septième  mois  delà  trente-deuxième  année  de 
Mei.ii(i«  juillet  1899). 

Art.  24.  —  L'ordonnance  impériale  n**  85  de  la  vingt-unième 
année  de  Meiji  (1888)  sera  abrogée  à  dater  du  jour  de  la  mise  en 
vigueur  de  la  présente  loi. 

Les  enregistrements  obtenus  en  vertu  de  la  susdite  ordonnance 
auront,  pendant  tout  le  temps  qui  leur  aura  été  assigné,  la  même 
valeur  que  ceux  obtenus  conformément  à  la  présente  loi. 

Toutes  les  demandes  et  réclamations  sur  lesquelles  il  n'aura 
pas  été  statué  avant  la  mise  en  vigueur  de  la  présente  loi  seront 
examinées  d'après  les  dispositions  de  cette  loi. 


Art.  4181. 

liéffUilatlon»  étrangères.  —Japon.  —  ]IIari|ae«. 

Loi  sur  les  marques  de  fabrique  ou  de  commerce  (2) 

(No  38  du  2  mars  1899). 

(3)  Art.  l»».  —  Quiconque  veut  se  réserver  l'usage  exclusif 

(1)  Voir  le  règlement  dans  la  notice  citée  p.  120,  note  1. 

(2)  Môme  observation  générale  que  pour  la  loi  sur  les  dessins  et  mo- 



(3)  Texte  français  communiqué  au  bareau  de  Berne  par  le  Ministère 
du  Commerce  du  Jupon. 


'"ï^^    r^  T  "r»"*i- 


—  126  — 

d'une  marque  servant  à  distinguer  ses  marchandises,  est  tena 
de  demander  Tenregistrement  de  cette  marque  conformément  à 
la  présente  loi. 

Art.  2.  —  Ne  pourront  être  enregistrés  comme  marques  de 
fabrique  et  de  commerce  les  lettres,  figures  et  signes  suivants  : 

1^  Ceux  qui  représentent  le  chrysanthème  des  armes  impé- 
riales ou  qui  lui  ressemblent  ; 

2«  Ceux  qui  représentent  le  drapeau  national,  le  drapeau  mili- 
taire, les  insignes  des  ordres  impériaux  et  les  drapeaux  étran- 
gers,  ou  qui  leur  ressemblent; 

3o  Ceux  qui  pourraient  porter  atteinte  à  Tordre  public  ou  aux 
bonnes  mœurs,  ou  qui  pourraient  tromper  le  public; 

4<*  Ceux  qui,  destinés  à  être  apposés  sur  des  marchandises  de 
même  nature  que  celles  d'un  tiers,  sont  identiques  ou  sembla- 
blés  à  une  marque  de  fabrique  ou  de  commerce  déjà  enregistrée 
en  faveur  de  ce  tiers,  ou  à  une  marque  antérieurement  employée 
par  un  tiers  et  tombée  en  déchéance  depuis  moins  d'une  année  ; 

5^  Ceux  qui  sont  identiques  ou  similaires  à  une  marque  de 
fabrique  ou  de  commerce  déjà  en  usage  avant  la  mise  en  vigueur 
de  la  présente  loi  ; 

6<*  Ceux  qui  consistent,  soit  en  une  désignation  communément 
employée  pour  désigner  une  marchandise  en  général,  soit  dans 
rindication  de  la  provenance  d'une  marchandise,  soit  dans  l'in- 
dication de  la  nature,  de  la  qualité  ou  de  la  forme  d'une  mar- 
chandise, au  moyen  de  lettres,  de  figures  ou  de  signes  commu- 
nément usités  dans  le  commerce,  soit  dans  la  reproduction,  en 
lettres  ou  caractères  usuels,  des  nom  et  prénoms  d'un  individu, 
d'un  nom  commercial  ou  d'une  raison  sociale  particulière  aune 
compagnie  ou  association,  si  ces  nom,  prénoms  et  raisons  so- 
ciales sont  d'un  usage  courant  ; 

7°  Ceux  qui  consistent  en  un  encadrement,  en  nu  dessin  de 
fond  ou  en  autre  élément  dépourvu  de  toute  apparence  distînc- 
tive. 

Art.  3.  —  Le  droit  à  l'usage  exclusif  d'une  marque  de  fabri* 


dèles  (voir  loi  du  18  déc.  1888,  Rec.  lég.  prop.  md.,  Berne,  1897,  L^, 
p.  757).  Seulement  la  taxe  est  de  30  yens  (157  fr«),  la  pénalité  en  ma- 
tière de  contrefaçon  est  de  1  mois  à  2  ans  de  prison  ou  de  100  à  200  yens 
d'amende.  Est  supprimée  la  défînition  restrictive  qui  se  trouvait  dans 
la  loi  précédente  et  qui  aurait  empêché  Tapplication  intégrale  de  l'ar- 
ticle 6  de  la  Convention  d'Union. 

Jusqu'ici,  les  entreprises  commerciales  ou  industrielles  étaient  seules 
admises  à  faire  enregistrer  leurs  marques^  La  nouvelle  loi  étend  cette 
faculté  aux  syndicats  professionnels  autorisés  par  Tadministration « 
(Cette  note  est  empruntée,  en  partie,  à  la  Prop,  ind.^  1899.  181.) 


—  127  — 

que  ou  de  commerce  est  limité  à  vingt  ans.  Ce  délai  court  à 
partir  de  la  date  de  l'enref^iatrement  des  marques  [i). 

Une  marque  de  fabrique  ou  de  commerce  déjà  enregistrée  à 
l'étranger,  et  qu'on  aura  fait  enregistrer  dans  l'Empire,  jouira 
de  la  durée  de  protection  obtenue  en  vertu  du  premier  enregis- 
trement,  sans  cependant  que  cette  durée  puisse  dépasser  vingt 
ans. 

Art.  ^.  —  Si  le  propriétaire  de  la  marque  de  fabrique  ou  de 
commerce  désire  continuer  à  jouir  de  sou  droit  exclusif  après 
l'expiration  du  terme  de  protection,  il  pourra  renouveler  l'eu- 
regislremeut. 

Akt.  5.  —  L'usa(;e  exclusif  d'une  marque  sera  limité  aux  mar- 
chandises désignées  par  le  déposant  d'aprës  la  classification  éta- 
blie par  le  Ministre  de  l'Agriculture  et  du  Commerce. 

Aht.  6.  —  Le  propriétaire  de  la  marque  de  fabrique  ou  de 
commerce  ne  pourra  la  céder  ou  la  mettre  en  communauté  que 
s'il  cède  ou  met  en  communauté  éi^alement  son  établissement. 
Dans  ce  cas,  l'acte  devia,  pour  être  opposable  aux  tiers,  être 
enregistré  en  suite  d'une  demande  adressée  à  cet  elTet  au  Bureau 
des  brevets  d'inveution. 

Si  le  propriétaire  d'une  marque  de  fabrique  ou  de  commerce 
enregistrée  possède  une  ou  plusieurs  autres  marques  de  fabrique 
ou  de  commerce  similaires  et  applicables  à  des  articles  identi- 
ques, il  ne  pourra  obtenir  l'enregistrement  susmentionné  que  s'il 
cède  ou  met  en  communauté  ensemble  ces  deux  marques  de  fa- 
brique ou  de  commerce,  ou  s'il  renonce  à  l'usage  de  la  seconde. 

Abt.  7.  —  Quiconque  voudra  obtenir  l'enregistrement  d'une 
marque  de  fabrique  ou  de  commerce,  sera  tenu  d'en  adresser  la 
demande  écrite  au  chef  du  Bureau  des  brevets,  en  y  joignant  un 
exemplaire  de  cette  marque  et  eu  spécitlant  les  marchandises 
auxquelles  elle  est  destinée. 

Aht.  8.  —  Si  deux  ou  plusieurs  personnes  demandent  l'enre- 
gistrement d'une  même  marque  ou  de  marques  qui  se  ressem- 
blent, dans  le  but  de  les  apposer  sur  les  mêmes  marchandises, 
la  demande  qui  aura  été  reçue  la  première  sera  seule  enregistrée. 
Si  les  demaudes  sont  simultanées,  l'enregistrement  ne  sera  fait 
que  s'il  ne  subsiste  qu'une  seule  demande. 

Art.  9.  — Lorsque  la  demande  sera  présentée  dans  l'Empire 
dans  le  délai  de  quatre  jnois  à  dater  de  son  dépAt  dans  l'un  des 
Etals  de  l'Union  internationale  pour  la  protection  de  la  propriété 

(I)  Le  bureau  dts  Patenies  a  décidé  le  25 juin  1899  que  le  négociant 
japonais  qui  a  le  premier  déposé  une  murque  au  Japon  ne  peut  en 
être  dépossédé  par  l'étranger,  même  si  celui-ci  justifie  qu'il  a  le  pre- 
mier créé  la  marque  et  qu'elle  a  été  usurpée  par  le  négociant  japonais 
{La  Prop.  ind.,i%m.  158). 


—  123  — 

industrielle,  cetle  demande  aura  te  même  effet  que  si  elle  avait 

été  faite  à  la  date  dudit  dépât. 
Aht.  10.  —  L'enregistrement  d'une  marque  de  fabrique  ou  de 
nerce  sera  nul  et  de  nul  eiïet  s'il  contrevient  aux  dispositions 
trticles  S  ou  8.  Exception  est  faite  cependant  en  faveur  des 
lues  enregistrées  tombant  sous  les  prescriptions  des  alinéas 
5  de  l'article  2,  ou  enregistrées  contrairement  aux  disposi- 
ide  l'article  8,  lorsqu'il  se  seru  écoulé  trois  ans  depuis  leur 
gislrement. 

T.  il,  —  Le  chef  du  Bureau  des  brevets  d^nvenlion  pourra 
»r  du  rôle  des  marques  toute  marque  enregistrée  qui  se 
'era  dans  l'un  des  cas  suivants  : 

lorsque  le  propriétaire  d'une  marque  enregistrée  aura, 
s  l'enregistrement,  joint  à  sa  marque  apposée  sur  un  arlicle 
fausse  indication  relative  à  l'origine  ou  à  la  qualité  de  cet 
le; 

Lorsque,  sans  motif  valable,  le  propriétaire  d'une  marque 
gislrée  sera  resté  plus  de  six  mois  sans  constituer,  confor- 
lent  k  l'article  28,  le  représentant  mentionné  k  l'article  Ode 
li  sur  tes  brevets  d'invention. 

iT.  12.  --  Le  droit  à  l'usage  exclusif  d'une  marque  s'éteiut 
la  cessation  de  l'entreprise  à  laquelle  le  propriétaire  de  la 
lue  l'avait  destinée. 

T.  13.  —  Tout  déposant  de  marque  de  fabrique  ou  de  corn- 
;e  payera  une  taxe  de  trente  yens  par  marque  et  par  calé- 
1  de  produits  (I).  La  taxe  sera  la  même  pour  le  réenregis- 
ent  d'une  marque  à  l'expiration  du  terme  de  protection. 
T.  14.  —  Le  Bureau  des  breveta  d'invention  publiera,  dans 
ulletiu  ofliciel  des  marques  de  Fabrique  et  de  commerce, 
les  renseignements  nécessaires  concernant  l'enregistrement 
marques  de  fabrique  el  de  commerce. 

iT.  15.  —  Les  témoins  et  experts  qui  auroul  porté  un  faux 
lignage  ou  fait  une  expertise  frauduleuse  devant  le  Bureau 
jrevels  d'invention  ou  devant  le  tribunal  désigné,  seront  pu- 
. 'emprisonnement  majeur  d'un  mois  à  un  an  et  d'une  amende 
nq  à  cinquante  yens. 

liconque  aura,  par  corruption  ou  par  tous  autres  moyens, 
16  un  tiers  à  porter  un  faux  témoignage  ou  à  faire  une  ex- 
se  frauduleuse,  encourra  les  peines  édictées  à  l'alinéa  pré- 
nt. 

s  auteurs  des  infractions  prévues  par  les  deux  alinéas  pré- 
nts,  qui  se  seront  dénoncés  an  Bureau  des  brevets  d'invention 
u  tribunal  désigné,  antérieurement  à  la  décision  de  l'exami- 


■■  •nwv^ 


—  129  — 

nateur  oa  du  juge  de  raffaire  en  question»  seront  exemptés  des 
peines  mentionnées  plus  haut, 

Art.  16.  ~~  Sera  puni  d'emprisonnement  majeur  d'un  mois  à 
deux  ans  ou  d'une  amende  de  vingt  à  cinq  cents  yens,  celui  qui, 
sciemment  et  sans  le  consentement  du  propriétaire,  aura  contre- 
fait une  marque  de  fabrique  ou  de  commerce  enregistrée,  ou 
aura  fabriqué  une  marque  identique  ou  similaire  à  cette  dernière 
et  l'aura  donnée  ou  vendue,  ou  qui  aura  revêtu  une  marchandise 
de  même  nature  d'une  marque  appartenant  à  autrui  ou  d'une 
marque  identique  ou  similaire,  ou  qui  aura  sciemment  vendu 
ou  conservé  pour  la  vente  un  article  ainsi  marqué. 

Sera  puni  des  mêmes  peines,  celui  qui  aura  sciemment  em- 
ployé, pour  une  marchandise  de  même  nature,  un  récipient  ou 
un  emballage,  etc.,  revêtus  d'une  marque  enregistrée  par  autrui, 
ou  qui  aura,  sciemment,  vendu  ou  conservé  pour  la  vente  un 
article  ainsi  marqué,  ou  qui,  pour  faire  valoir  ses  propres  mar- 
chandises, aura  introduit  dans  une  annonce,  une  enseigne  ou  un 
prospectus,  etc.,  une  marque  identique  ou  similaire  à  une  mar- 
que déjà  enregistrée  en  faveur  d'autrui. 

Art.  17.  —  Sera  puni  d'emprisonnement  majeur  de  quinze 
jours  à  un  an  ou  d'une  amende  de  dix  à  trois  cents  yens,  celui 
qui  aura  obtenu  frauduleusement  un  enregistrement  ou  qui  aura 
indiqué  qu'une  marque  était  enregistrée,  quand  elle  ne  Tétait 
pas,  ou  qui  l'aura  munie  d'une  indication  pouvant  la  faire  pren- 
dre pour  une  marque  enregistrée  par  suite  d'une  confusion,  ou 
qui  aura  sciemment,  vendu  ou  conservé  pour  la  vente  un  article 
de  commerce  revêtu  d'une  de  ces  marques  illégales. 

Sera  puni  des  mêmes  peines  celui  qui,  pour  faire  valoir  ses 
propres  marchandises,  aura  introduit  dans  une  annonce,  une 
enseigne  ou  un  prospectus,  etc.,  une  marque  non  enregistrée, 
avec  une  mention  disant  qu'elle  Test  ou  pouvant  la  faire  prendre 
pour  une  marque  enregistrée,  par  suite  d'une  confusion. 

Art.  18.  —  Dans  les  cas  prévus  par  les  articles  16  et  17,  les 
marques  illégales  et  les  instruments  servant  à  les  reproduire 
seront  confisqués,  et  si  les  marchandises,  leurs  récipients  ou 
leurs  emballages,  etc.,  sont  inséparables  de  la  marque,  ils  seront 
détruits  avec  elle. 

Art.  19.  —  Les  infractions  prévues  par  l'article  16  ne  seront 
poursuivies  que  sur  la  plainte  de  la  partie  lésée. 

Art.  20.  —  Les  dispositions  des  articles  6  à  10,  i2,  13,  15,  21, 
23,  28  à  37,  43  et  51  de  la  loi  sur  les  brevets  d'invention  seront 
applicables,  par  analogie,  en  matière  de  marques  de  fabrique  ou 
de  commerce. 

Art.  21.  —  Un  syndicat  professionnel,  approuvé  par  l'adminis- 
tration compétente,  qui  voudra  réserver  pour  son  usage  exclusif 

0 


-  130  -- 

une  marque  distinctîve  à  Tlustar  des  marques  de  fabrique  ou  de 
commerce, pourra  en  obtenir  l'enregistrement  conformément  à  la 
présente  loi. 

Une  marque  ainsi  enregistrée  sera  assimilée  à  une  marque  de 
fabrique  ou  de  commerce. 

Dispositions  additionnelles  (1), 

Art.  22.  —  La  présente  loi  entrera  en  vigueur  à  dater  du  pre- 
mier jour  du  septième  mois  de  la  trente-deuxième  année  de 
Meiji  (i»  juillet  1899). 

Art.  23.  —  L'ordonnance  impériale  N<*  86  de  la  vingt-unième 
année  de  Meiji  (1888),  réglementant  les  marques  de  fabrique  ou 
de  commerce,  se  trouvera  abrogée  à  dater  du  jour  de  la  mise  en 
vigueur  de  la  présente  loi. 

Les  enregistrements  obtenus  en  vertu  de  ladite  ordonnance 
auront  les  mêmes  effets  que  les  enregistrements  obtenus  coafor* 
mément  à  la  présente  loi. 

Toutes  les  demandes  et  réclamations  relatives  aux  marques  de 
fabrique  ou  de  commerce,  sur  lesquelles  il  n'aura  pas  été  statué 
avant  le  jour  de  la  mise  en  vigueur  de  la  présente  loi,  seront 
examinées  d'après  les  dispositions  de  la  présente  loi. 

Art.  24.  —  En  ce  qui  concerne  les  marques  enregistrées  con- 
trairement aux  dispositions  de  Tarticle  8  et  de  Talinéa  3  de  l'ar- 
ticle 2  de  Tordonnance  impériale  de  la  vingt-unième  année  de 
Meiji,  marques  dont  la  nullité  est  prévue  par  Tarticle  10  de  la 
môme  ordonnance,  Taction  en  nullité  s'éteindra  quand  deux  ans 
se  seront  écoulés  après  la  mise  en  vigueur  de  la  présente  loi. 


Art.  4182. 

EiéffUilffttioas  étrmngérem.  —  Japoa.  —  DiH»lt  <l*auie«ir. 

Loi  sur  le  droit  d'auteur  (3  mars  1899)  (2). 

CHAPITRE  I" 
Du  droit  de  Vauteur. 

Art.  l«r.  —  L'auteur  d'écrits,  de  conférences,  peintures  eldes-* 
sins,  sculptures,  ouvrages  plastiques,  photographies  et    autres 

(1)  Voir  règlement  et  formalaire^  p.  57  de  la  notice  citée  plus  haut 

(2)  Voir  étude  sur  le  Japon  et  la  protection  des  auteurs,  le  Droit 
(Tautetir,  1899,  126  et  le  rapport  de  M .  Sabouro  Yamada  aa  Congrès  de 


^      >   '.iT    "■,     'V-  "JF 


•     > 


—  131  — 

œuvres  da  domaioe  de  la  littérature,  des  sciences  ou  des  arts  a 
le  droit  exclusif  de  les  reproduire. 

Le  droit  d'auteur  sur  une  œuvre  littéraire  ou  scientifique  com- 
prend celui  de  la  traduire,  et  le  droit  d'auteur  sur  une  œuvre 
dramatique  ou  musicale  celui  de  l'exécuter  et  de  la  représenter 
publiquement. 

Art.  2.  —  Le  droit  d^auteur  est  transmissible. 

Art.  3.  —  Le  droit  d'auteur  sur  une  œuvre  qui  a  été  publiée, 
représentée  ou  exécutée,  durera  la  vie  de  Fauteur  et  trente  ans 
après  sa  mort. 

Pour  un  ouvrage  composé  en  collaboration  par  plusieurs  au- 
teurs, le  droit  d'auteur  durera  trente  ans  après  la  mort  du  dernier 
survivant  des  collaborateurs. 

Art.  4.  —  Le  droit  d'auteur  sur  une  œuvre  posthume  publiée, 
représentée  ou  exécutée  après  le  décès  de  Tante ur,  durera  trente 
ans  à  partir  de  sa  première  publication,  représentation  ou  exé- 
cution. 

Art.  5.—-  Le  droit  d'auteur  sur  une  œuvre  anonyme  ou  pseu- 
donyme durera  trente  ans  à  partir  de  sa  première  publication, 
représentation  ou  exécution. 

Si,  toutefois,  dans  le  cours  de  ce  délai,  Tauteurfait  enref^istrer 
son  vrai  nom,  les  dispositions  de  l'article  3  seront  applicables. 

Art.  6.  —  Pour  une  œuvre  publiée,  représentée  ou  exécutée 
par  les  autorités  publiques,  les  établissements  d'instruction,  les 
temples  shintoistes  ou  bouddhiques,  les  associations,  sociétés 
ou  autres  corporations  quelconques,  se  déclarant  comme  auteur 
de  cette  œuvre,  le  droit  d'auteur  durera  trente  ans  à  partir  de 
sa  première  publication,  représentation  ou  exécution. 

Art.  7.  —  Lorsque  l'auteur  ou  son  ayant  cause  n'aura  pas 
publié  la  traduction  de  ses  œuvres  dans  un  délai  de  dix  ans  à 
partir  de  la  première  publication  de  l'œuvre  originale,  le  droit 
de  traduction  cessera  d'exister. 

Si,  dans  le  cours  de  ce  délai,  il  publie  la  traduction  de  cette 
œuvre  dans  une  langue  pour  laquelle  la  protection  sera  réclamée, 
son  droit  de  traduction  ne  s'éteindra  pas  eu  ce  qui  concerne  cette 
langue. 

Art.  8.  —  Pour  les  œ.uvres  paraissant  en  une  série  de  volumes 
ou  fascicules,  les  délais  mentionnés  dans  les  quatre  articles  pré- 
cédents courront  à  partir  de  la  date  de  chaque  volume  ou  fasci- 
cule. 

Pour  une  œuvre  publiée  par  livraisons  et  complétée  seulement 
quand  celles-ci  sont  terminées,  lesdits  délais  ne  comptent  qu'à 

la  Propriété  littéraire  et  artistique,  Paris  1900,  analyse  dans  le  Droit 
et  auteur,  1900.103. 


t   ■  "^  '  *^  "TV'TyTi  "  »  '  "^T 


—  132  — 

dater  de  la  publication  de  la  dernière  livraison.  Si,  toutefois  il 
s'est  écoulé  trois  ans  sans  que  les  livraisons  qui  devaient  former 
la  suite  paraissent,  celle  qui  a  déjà  paru  sera  considérée  comme 
étant  la  dernière. 

Art.  9.  —  Pour  calculer  les  délais  indiqués  dans  les  six  articles 
précédents,  on  ne  tient  pas  compte  du  reste  de  Tannée  où  est 
mort  Tauteur,  ni  de  celui  de  Tannée  où  Touvrage  a  été  publié, 
représenté  ou  exécuté.* 
Art.  10.  —  Le  droit  d'auteur  s'éteint  à  défaut  d'héritiers. 
Art.  11.  —  Ne  peuvent  pas  faire  Tobjet  du  droit  d'auteur  : 
i^  Les  lois,  ordonnances  et  les  actes  officiels  des  autorités  pu- 
bliques ; 

2^  Les  faits  divers^  les  nouvelles  du  jour  et  les  articles  de  dis- 
cussion politique  insérés  dans  les  journaux  et  recueils  périodi- 
ques ; 

3*  Les  discours  et  plaidoiries  prononcés  en  public  devant  les 
cours  et  tribunaux,  ainsi  que  dans  les  assemblées  délibéralives 
et  réunions  politiques. 

Art.  12. —  Quiconque  édite,  exécute  ou  fait  exécuter  une  œuvre 
anonyme  ou  pseudonyme  est  fondé  à  sauvegarder  les  droits 
appartenant  à  l'auteur  et  son  ayant  cause,  excepté  le  cas  où  l'au- 
teur aura  fait  enregistrer  son  vrai  nom. 

Art.  13.  —  Le  droit  d'auteur  sur  une  œuvre  faite  eu  collabo- 
ration par  plusieurs  auteurs  appartient  en  commun  à  tous  les 
collaborateurs. 

Dans  le  cas  où,  les  parts  des  collaborateurs  dans  une  œuvre 
n'étant  pas  distinctes,  l'un  deux  s'opposerait  à  la  publication  ou 
à  la  représentation  ou  exécution  de  cette  œuvre,  les  autres  pour- 
ront acquérir,  moyennant  une  indemnité,  la  part  de  l'opposant, 
à  moins  de  convention  contraire. 

Mais  si,  la  part  de  chacun  étant  distincte,  Tun  des  collabora- 
teurs s'oppose  à  la  publication  ou  à  la  représentation  ou  exécution 
de  Tœuvre  commune,  les  autres  pourront  en  détacher  chacun  sa 
part  et  la  publier  ou  la  représenter,  ou  Texécuter  séparément, 
sauf  convention  contraire. 

Dans  le  cas  de  l'alinéa  2  du  présent  article,  le  nom  du  co-auteur 
opposant  ne  pourra  pas  être^  contre  sa  volonté,  mis  sur  l'œuvre 
dont  il  s'agit. 

Art.  i4.  —  Quiconque  aura  compilé  licitement  plusieurs  tra- 
vaux appartenant  à  différents  auteurs,  sera  considéré  comme 
auteur  de  la  compilation  et  aura  le  droit  d'auteur  sur  l'ensemble 
de  Tœuvre  ainsi  composée,ce  droit  appartenant,ence  qui  concerne 
les  parties  distinctes  de  Touvrage,  à  leurs  auteurs  respectifs. 

Art.  15.  -^  L'auteur  ou  son  ayant  cause  peut  faire  enregistrer 
son  droit. 


I 


—  133  — 

L'auteur  oa  son  ayant  cause  ne  pourra,  sans  avoir  fait  enregis- 
trer son  droit,  intenter  aucune  action  civile  en  contrefaçon  à 
regard  d'une  œavre  publiée,  représentée  ou  exécutée. 

A  moins  d'avoir  été  légalement  enregistrés,  la  cession  et  ren- 
gagement du  droit  d'auteur  ne  seront  pas  opposables  aux  tiers. 

L'auteur  d'une  œuvre  anonyme  ou  pseudonyme  pourra  obtenir 
Tenregistrement  de  son  vrai  nom. 

Art.  i6.  —  Les  enregistrements  s'opéreront  par  les  soins  des 
autorités  administratives. 

Les  dispositions  relatives  aux  enregistrements  seront  ultérieur 
rement  fixées  par  une  ordonnance. 

Art.  17.  —  L'exemplaire  original  d'une  œuvre  qui  n'a  pas  été 
publiée,  représentée  ou  exécutée,  ainsi  que  le  droit  d'auteur  sur 
cette  œuvre  ne  seront  pas  saisissables  par  les  crëanciers,à  moins 
que  l'auteur  ou  son  ayant  cause  n'y  ait  consenti. 

Art.  d8.— Le  cessionnaire  du  droit  d'auteur  ne  pourra,  sans 
le  consentement  de  l'auteur,  changer  le  nom  ou  prénom  de  ce- 
lui-ci ou  une  appellation  quelconque  par  lui  adoptée,  ou  modi- 
fier le  titre  de  l'ouvrage  cédé  ou  corriger  cet  ouvrage  même. 

Art.  19.  —  L'addition  des  signes  dits  «  Kun-ten  »  (1),  des  tra- 
ductions interlinéaires,  des  ponctuations,  des  notes  critiques, 
des  annotations  ou  commentaires,  des  appendices,  des  plans  et 
dessins  et  d'autres  corrections,  additions,  suppressions  faites  à 
l'œuvre  originale  ainsi  que  le  remaniement  du  plan  original 
(adaptation)  de  l'œuvre  ne  créeront  pas  le  droit  d'auteur  spécia- 
lement pour  ces  modifications,  sauf  les  travaux  de  ce  genre  qui 
pourraient  être  considérés  comme  œuvres  nouvelles. 

Art.  20.  —  A  l'exception  des  romans  et  nouvelles,  les  articles 
des  journaux  et  de  recueils  périodiques,  non  pourvus  d'une 
mention  expresse  insérée  par  l'auteur  ou  son  ayant  cause  pour 
en  interdire  la  reproduction,  pourront  être  reproduits  avec  l'in- 
dication de  la  source. 

Art.  21.  —  Quiconque  aura  fait  licitement  une  traduction  sera 
considéré  comme  auteur  et  jouira  de  la  protection  de  la  présente 
loi. 

S'il  s'agit  d'une  œuvre  pour  laquelle  le  droit  de  traduction  est 
entré  dans  le  domaine  public,  le  traducteur  ne  peut  pas  s'opposer 
à  ce  que  d'autres  personnes  traduisent  la  même  œuvre. 

Art.  22.  —  Quiconque  aura  reproduit  licitement  une  œuvre 
artistique  par  un  art  différent  de  celui  employé  dans  la  produc- 


(1)  On  appelle  «  Kun-ten  »  les  signes  auxiliaires  facilitant  chez  les 
Japonais  la  lecture  des  textes  chinois.  De  même  les  traductions  interli- 
néaires et  les  ponctuations  ne  s'appliquent  exclusivement  qu'aux  textes 
chinois. 


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—  134  — 

tion  de  Toriginal  sera  considéré  comme  auteur  et  jouira  de  la 
protection  de  la  présente  loi. 

Art.  2^.  —  Le  droit  d'auteur  sur  une  œuvre  photographique 
durera  dix  ans. 

Ce  délai  se  compte  à  partir  de  Tannée  qui  suit  celle  de  la  pre- 
mière publication  de  Tœuvre  dont  il  s'agit  ou  celle  où  a  été  ob- 
tenue répreuve  négative  de  l'édition  photographique  en  cas  de  sa 
non-publication. 

Quiconque  aura  licitement  reproduit  une  œuvre  d'art  au  moyen 
de  l'art  photographique,  jouira  de  la  protection  de  la  présente 
loi  aussi  longtemps  que  durera  le  droit  de  reproduction  de  l'œu- 
vre originale  dans  les  limites  des  conventions  privées  entre  les 
ayants  droit. 

Art.  24.  —  Le  droit  d'auteur  sur  les  œuvres  photographiques 
insérées  dans  une  œuvre  littéraire  ou  scientifique  appartiendra 
à  l'auteur  de  cette  dernière  et  durera  tant  que  le  droit  d'auteur 
sur  celle-ci  sera  protégé,  si  l'auteur  les  a  exécutées  ou  fait  exé- 
cuter spécialement  pour  cette  destination. 

Art.  25.  —  Le  droit  de  reproduction  de  portraits  obtenus  par 
la  photographie  appartient  à  celui  qui  en  a  fait  la  commande. 

Art.  26.  ~  Les  dispositions  relatives  aux  photographies  seront 
applicables  aux  œuvres  obtenues  par  un  procédé  analogue  à  l'art 
photographique. 

Art.  27.  —  Les  œuvres  dont  Tauteur  et  son  ayant  cause  sont 
restés  inconnus  et  qui  n'ont  pas  été  publiées,  représentées  on 
exécutées  pourront  être  publiées,  représentées  ou  exécutées,  con- 
formément aux  prescriptions  d'une  ordonnance  ultérieure. 

Art.  28.  —Les  dispositions  de  la  présente  loi  seront  appliquées 
aux  étrangers,  pour  ce  qui  concerne  la  protection  de  leur  droit 
d'auteur,  sous  réserve  des  stipulations  spéciales,  s'il  y  en  a,  con- 
tenues dans  les  traités  et  conventions  ;  à  défaut  de  semblables 
stipulations,  la  protection  de  la  présente  loi  sera  accordée  à 
ceux-là  seuls  qui  auront  opéré  dans  l'Empire  la  première  publi- 
cation de  leurs  œuvres. 

CHAPITRE  II.  —  De  la  contrefaçon. 

Art.  29. —  Quiconque  aura  porté  atteinte  au  droit  d'auteur 
sera  considéré  comme  contrefacteur  et  sera  responsable  des  torts 
ainsi  causés,  qu'il  aura  à  réparer  en  conformité  avec  les  disposi- 
tions y  relatives  de  la  présente  loi  et  aussi  avec  celles  du  Gode 
civil,  livre  III,  chapitre  V. 

Art.  30. —  Ne  seront  pas  considérés  comme  une  atteinte  au 
droit  d'auteur  par  rapport  à  une  œuvre  déjà  publiée  : 

1*  le  fait  de  la  reproduire  autrement  que  par  un  procédé  mé- 
canique ou  chimique  et  sans  intention  de  la  livrer  à  la  publicité; 


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J  VH'riC"-' 


—  135  — 

2o  le  fait  d^en  faire  des  extraits  et  d*en  citer  des  passages, 
pourvu  que  ces  citations  se  renferment  dans  des  limites  légitimes; 

3<^  le  fait  de  choisir  et  de  recueillir  des  morceaux  dans  les  li- 
mites légitimes,en  vue  de  les  destiner  à  l'usage  des  écoles  pour 
un  livre  de  lecture  ou  un  cours  de  morale  ; 

4^  le  fait  d'introduire  des  phrases  extraites  d'une  œuvre  lit- 
téraire ou  scientiûque  dans  une  œuvre  dramatique,  ou  de  s'en 
servir  comme  texte  d'une  œuvre  musicale  ; 

5^  le  fait  d'insérer  dans  une  œuvre  littéraire'ou  scientifique  des 
productions  artistiques  à  titre  de  documents  explicatifs  ou  vice 
versa  : 

6°  le  fait  de  reproduire  par  Fart  plastique  une  œuvre  des  arts 
du  dessin  ou  de  la  peinture  et  réciproquement. 

Dans  les  divers  cas  précités,  il  est  nécessaire  que  la  source  des 
emprunts  soit  clairement  indiquée. 

Art.  31.  —  Quiconque,  dans  le  but  d'en  mettre  en  vente  les 
exemplaires  et  de  les  répandre  dans  TEmpire,  y  importera  une 
œuvre  contrefaite  sera  assimilé  au  contrefacteur. 

Art.  32.  —  Quiconque  éditera  un  recueil  des  solutions  répon- 
dante des  problèmes  destinés  à  des  exercices  classiques  sera  as- 
similé au  contrefacteur. 

Art.  33.  —  Quiconque,  de  bonne  foi  et  sans  faute  de  sa  part 
aura  commis  une  contrefaçon  et  en  aura  retiré  des  bénéfices  au 
détriment  d'une  tierce  personne,  est  tenu  à  la  restitution  de  ces 
bénéfices. 

Art.  34.  —  L'un  des  copropriétaires  du  droit  d'auteur  à  l'égard 
d'une  œuvre  faite  en  collaboration  par  plusieurs  personnes, 
pourra,  sans  le  consentement  des  autres  copropriétaires,  pour- 
suivre le  contrefacteur  et  réclamer  des  dommages-intérêts  pour 
sa  part,  ou  réclamer  dans  la  même  proportion  la  restitution  des 
bénéfices  mentionnés  à  l'article  précédent. 

Art.  35.  —  Dans  les  cas  où  il  s'agit  d'intenter  une  action  civile 
en  contrefaçon,  quiconque  aura  mis  ses  nom  et  prénom  comme 
auteur  sur  l'œuvre  déjà  éditée,  sera  considéré  comme  tel  jus-  i 

qu'à  preuve  contraire. 

Pour  une  œuvre  anonyme  ou  pseudonyme,  sera  considéré 
comme  éditeur,  jusqu'à  preuve  contraire,  celui  qui  aura  été  dé- 
signé comme  tel  sur  l'œuvre. 

S'il  s'agit  de  la  représentation  ou  exécution  d'une  œuvre  dra- 
matique ou  musicale  non  encore  éditée,  sera  considéré  comme 
auteur,  jusqu'à  preuve  contraire,  celui  qui  aura  été  désigné  com- 
me tel  dans  l'annonce  de  la  représentation.  Et  si,  dans  ce  cas, 
les  nom  et  prénom  de  l'auteur  de  l'œuvre  représentée  ou  exécutée 
n'ont  pas  été  indiqués,  l'organisateur  de  la  représentation  ou 


f 


^ 


—  136  — 

exécution  sera  considéré  comme  auteur  jusqa*à  preuve  con- 
traire. 

Art. 36.—  Lorsqu'il  sera  saisi  d'une  action  civile  ou  criminelle  en 
contrefaçon,  le  tribunal,  sur  la  requête  du  demandeur  ou  dn 
plaignant,  pourra,  moyennant  ou  Bans  dépôt  de  cautionnement  et 
à  titre  provisoire,  suspendre  la  mise  en  vente  et  en  circulation 
d'une  œuvre  soupçonnée  d'être  contrefaite,  ou  la  saisir  on  en 
suspendre  la  représentation  ou  exécution. 

Dans  ces  cas,  quand  la  décision  portant  que  Tœuvre  suspectée 
n'a  pas  été  une  contrefaçon  sera  devenue  irrévocable,  le  requé- 
rant sera  civilement  responsable  des  préjudices  résultant  de  la 
mesure  judiciaire  qu'il  aura  occasionnée. 

CHAPITRE  III.  —  Des  peines. 

Art.  37.  —  Sera  passible  d'une  amende  de  50  à  500  yens  qui- 
conque aura  commis  une  contrefaçon  ou  l'aura,  sciemment,  mise 
en  vente  et  répandue. 

Art.  38.  —  Sera  passible  d'une  amende  de  30  à  300  yens  qui- 
conque aura  contrevenu  à  la  disposition  de  l'article  18. 

Art.  39.  —  Sera  passible  d'une  amende  de  10  à  100  yens  qui- 
conque aura,  contrairement  aux  dispositions  de  l'article  20  et  de 
l'alinéa  2  de  l'article  30,  reproduit  une  œuvre  sans  mention 
exacte  de  Ja  source  de  son  emprunt,  ou  aura  contrevenu  à  la  dis- 
position de  l'alinéa  4  de  l'article  13. 

Art.  40.  —  Sera  passible  d'une  amende  de  30  à  500  yens  qui- 
conque aura  édité  une  œuvre  en  y  mettant  les  nom  et  prénom 
ou  appellation  usuelle  [nom  de  plume)  d'une  personne  autre  que 
l'auteur. 

Art.  41.—  Sera  passible  d'une  amende  de  29  à 200  yens  qui- 
conque aura  édité  une  œuvre,  bien  que  tombée  déjà  dans  le  do- 
maine public,  soit  en  la  corrigeant  contrairement  aux  intentions 
de  l'auteur  soit  en  changeant  le  titre,  soit  en  déguisant  les  nom 
et  prénom  ou  appellation  usuelle  de  l'auteur,  soit  enfin  en  l'at- 
tribuant à  un  autre  qu'à  l'auteur. 

Art.  42.  —  Sera  passible  d'une  amende  de  10  à  100  yens  qui- 
conque aura  frauduleusement  obtenu  l'enregistrement. 

Art.  43.  —  Les  exemplaires  contrefaits,ainsi  que  les  instruments 
et  outils  destinés  exclusivement  à  la  contrefaçon,  seront  confis- 
qués  seulement  dans  le  cas  où  ils  appartiendront  en  propre  au 
contrefacteur,  à  l'imprimeur  ou  k  la  personne  qui  l'aura  mise 
en  vente  ou  en  circulation. 

Art.  44.  —  Les  délits  prévus  au  présent  chapitre  ne  donneront 
lieu  aux  poursuites  que  sur  la  plainte  de  la  partie  lésée,  sauf 
toutefois,  le  cas  de  l'article  38,  quand  l'auteur  sera  décédé,  et 
ceux  des  articles  40  à  42. 


'C/  «'■^  •••  ■  *  r^-^f-f^T-       ^Ti- 


—  137  — 

Art.  45.  ~  L'action  civile  et  pénale  résultant  des  délits  prévus 
au  présent  chapitre  se  prescrira  par  deux  ans. 

CHAPITRE  IV.  —  Dispositions  additionnelles. 

Art.  46.  —  La  date  de  la  mise  en  vigueur  de  la  présente  lot 
sera  altérieurement  fixée  par  une  ordonnance  impériale. 

La  loi  no  16  de  la  26*  année  de  Meiji  (1893)  sur  la  propriété, 
littéraire  et  les  ordonnances  impériales  n*"  78  et  79  de  la  20«  an- 
née de  Meiji  (1887),  la  première  relative  aux  œuvres  dramatiques 
et  musicales  et  la  deuxième  aux  œuvres  photographiques,  se 
trouveront  abrogées  le  jour  où  la  présente  loi  sera  entrée  en 
vigueur. 

Art.  47.  —  Les  œuvres,  dont  le  droit  d'auteur  ne  sera  pas  éteint 
avant  la  mise  en  vigueur  de  la  présente  loi,  jouiront  de  la  pro- 
tection de  celle-ci  à  partir  du  jour  de  son  entrée  en  vigueur. 

Art.  48.  — Toutes  reproductions  qui,  n'étant  pas  considérées 
avant  la  mise  en  vigueur  de  la  présente  loi,  comme  contrefaçons, 
se  trouveront,  lors  de  son  entrée  eu  vigueur,  déjà  faites  ou 
commencées,  pourront  être  achevées  et  mises  en  vente  et  ré- 
pandues. 

Les  instruments  et  outils  qui  auront  servi  à  ces  reproductions 
pourront,  s'ils  existent  encore,  être  utilisés  encore  pendant  cinq 
ans,  à  partir  de  la  mise  en  vigueur  de  la  présente  loi. 

Art.  49.  —  Les  traductions  qui,  avant  la  mise  en  vigueur  de  la 
présente  loi,  auront  été  faites  ou  commencées,  n'étant  pas  jus- 
qu'alors considérées  comme  contrefaçons,  pourront  être  achevées 
et  mises  en  vente  et  répandues,  à  condition  cependant  qu'elles 
seront  éditées  dans  un  délai  de  sept  ans  après  l'entrée  en  vigueur 
de  la  présente  loi. 

Lesdites  traductions  pourront  être  reproduites  pendant  cinq 
ans  à  compter  de  leur  première  publication. 

Art.  50.  —  Les  œuvres  qui,  avant  la  mise  en  vigueur  de  la 
présente  loi,  auront  été  déjà  représentées  ou  exécutées,  ou  dont 
la  représentation  ou  Texécution  aura  été  préparée  à  cette  date, 
sans  ôtre,  jusqu'alors,  considérées  comme  contrefaçons,  pourront 
être  représentées  ou  exécutées  encore  pendant  cinq  ans  après 
l'entrée  en  vigueur  de  la  présente  loi. 

Art.  51.  —  Dans  les  cas  des  articles  48  à  50,  les  reproductions 
qui  y  sont  mentionnées  ne  pourront  être  mises  en  vente  ou  ré- 
pandues ni  représentées  ou  exécutées  sans  que  les  formalités  qui 
seront  ultérieurement  prescrites  par  une  ordonnance,  aient  été 
remplies. 

Art.  52.  —  La  présente  loi  ne  sera  pas  applicable  aux  œuvres 
d'architecture. 


138  — 


Art.  4183. 

liéffltilAtloiui  étr^m^ére».  —  Eiuxembour^.  ^  Oroli 

d'auteur. 

Loi  sur  le  droit  d'auteur  (1)  (Du  10  mai  1898.) 

Nous,Adolphb,  par  la  grâce  de  Dieu,Grand-Dac  de  Luxembourg, 
Duc  de  Nassau,  etc.,  etc.,  etc.  ; 

Notre  Conseil  d'Etat  entendu  ; 

De  l'assentiment  de  la  Chambre  des  députés  ; 

Vu  la  décision  de  la  Chambre  des  députés  du  28  avril  1898  et 
celle  du  Conseil  d'État  du  29  du  môme  mois,  portant  qu'il  n*y  a 
pas  lieu  à  second  vote  ; 

Avons  ordonné  et  ordonnons  : 

»  Section  I.  —  Du  droit  d'auteur  en  général. 

Art.  1*'.  —  L'auteur  d'une  œuvre  littéraire  ou  artistique  a 
seul  le  droit  de  la  reproduire  ou  d'en  autoriser  la  reproduction, 
de  quelque  manière  et  sous  quelque  forme  que  ce  soit. 

L'expression  «  œuvres  littéraires  et  artistiques  »  comprend  les 
livres,  brochures  ou  tous  autres  écrits  ;  les  œuvres  dramatiques 
ou  dramatico-musicales,  les  compositions  musicales  avec  ou  sans 
paroles,  les  œuvres  de  dessin,  de  peinture,  de  sculpture,  de  gra- 
vure ;  les  lithographies,  les  illustrations,  les  cartes  géographi- 
ques ;  les  plans,  croquis  et  ouvrages  plastiques,  relatifs  à  la  géo- 
graphie, à  la  topographie,  à  l'architecture  ou  aux  sciences  en 
général  ;  les  œuvres  d'architecture,  les  œuvres  photographiques 
et  celles  obtenues  par  un  procédé  analogue  ;  enfin  toute  produc- 
tion quelconque  du  domaine  littéraire,  scientiûque  ou  artistique 
qui  pourrait  être  publiée  de  quelque  manière  et  sous  quelque 
forme  que  ce  soit. 

Art.  2.  —  Le  droit  d'auteur  se  prolonge  pendant  cinquante 
ans  après  le  décès  de  l'auteur,  au  proût  de  ses  héritiers  ou  ayants 

droit. 

Art.  3.  —  Le  droit  d'auteur  est  mobilier,  cessible  et  transmis- 
sible,  en  tout  ou  en  partie,  conformément  aux  règles  du  Code 

civil. 

Art.  4.  —  Les  propriétaires  d'un  ouvrage  posthume  jouissent 
du  droit  d'auteur  pendant  cinquante  ans  à  partir  du  jour  où  il 
est  publié,  représenté,  exécuté  ou  exposé. 

(1)  Voir  sur  cette  loi  une  étude  complète  dans  le  Droit  d'auteur,  1898, 
57  et  69.  Elle  a  été  faite  sur  le  modèle  de  la  loi  belge.  —  Voir  une  étude 
pins  sommaire  de  6.  Rôthusberger  dans  le  Journal  de  Clunet^  1899, 
p.  502. 


■  ■•■■f'.^ 


—  139  — 

Un  arrêté  grand-dacal  déterminera  la  manière  dont  sera  cons- 
tatée, sons  peine  de  déchéance,  la  date  à  partir  de  laquelle  le 
terme  de  cinquante  ans  prendra  cours. 

Art.  5.  —  Lorsque  Fœuvre  est  le  produit  d'une  collaboration, 
le  droit  d'auteur  existe  au  profit  de  tous  les  ayants  droit  jusque 
cinquante  ans  après  la  mort  du  survivant  des  collaborateurs. 

Art.  6.  —  Lorsque  le  droit  d*auteur  est  indivis,  Texercice  de 
ce  droit  est  réglé  par  les  conventions.  A  défaut  de  conventions, 
aucun  des  copropriétaires  ne  peut  Texercer  isolément,  sauf  aux 
tribunaux  à  prononcer  en  cas  de  désaccord. 

Toutefois,  chacun  des  propriétaires  reste  libre  de  poursuivre, 
en  son  nom  et  sans  Tintervention  des  autres,  l'atteinte  qui  serait 
portée  au  droit  d*auteur  et  de  réclamer  des  dommages-intérêts 
pour  sa  part. 

Les  tribunaux  pourront  toujours  subordonner  Tautorisation 
de  publier  Tœuvre  à  telles  mesures  qu'ils  jugeront  utile  de  pres- 
crire ;  ils  pourront  décider,  à  la  demande  du  copropriétaire  op- 
posant, que  celui-ci  ne  participera  ni  aux  frais,  ni  aux  bénéfices 
de  la  publication  ou  que  le  nom  du  collaborateur  ne  figurera  pas 
sur  Tœuvre. 

Art.  7.  —  L'éditeur  d'un  ouvrage  anonyme  ou  pseudonyme  est 

réputé,  à  l'égard  des  tiers,  en  être  l'auteur. 

Dès  que  celui-ci  se  fait  connaître,  il  reprend  l'exercice  de  son 

droit. 
Si  le  vrai  nom  de  l'auteur  est  révélé,  soit  par  l'auteur,  soit  par 

ses  ayants  cause  à  ce  autorisés,  la  durée  de  la  protection  se  cal- 
cule sur  la  vie  de  l'auteur. 

j^nT.  8.  —  Le  cessionnaire  du  droit  d'auteur  ou  de  l'objet  qui 
matérialise  une  œuvre  littéraire  ou  artistique  ne  peut  modifier 
l'œuvre  pour  la  vendre  ou  l'exploiter,  ni  exposer  publiquement 
l'œuvre  modifiée,  sans  le  consentement  de  l'auteur  ou   de  ses 

ayants  cause. 

Art.  9.  —  Sont  toujours  insaisissables  les  œuvres  littéraires 
ou  musicales,  tant  qu'elles  sont  inédites,  et,  du  vivant  de  l'auteur, 
les  autres  œuvres  d'art,  tant  qu'elles  ne  sont  pas  prêtes  pour  la 
vente  ou  la  publication. 

Section  II.  —  Du  droit  d'auteur  sur  les  œuvres  littéraires. 

Art.  10.  —  Le  droit  d'auteur  s'applique  non  seulement  aux 
écrits  de  tout  genre,  mais  aux  leçons,  sermons,  conférences, 
discours,  ou  à  toute  autre  manifestation  orale  de  la  pensée. 

Toutefois,  les  discours  prononcés  dans  les  assemblées  délibé- 
rantes, dans  les  audiences  publiques  des  tribunaux,  ou  dans  les 
réunions  politiques,  peuvent  être  librement  publiés;  mais  à 
l'auteur  seul  appartient  le  droit  de  les  tirer  à  part. 


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—  140  — 

Art.  11.  —  Les  actes  officiels  de  Fautorité  ne  donnent  pas  lien 
au  droit  d'auteur. 

Toutes  autres  publications  faites  par  TEtat,  les  communes  ou 
les  établissements  publics  donnent  lieu  au  droit  d'auteur,  soit  au 
profit  de  ces  administrations  pendant  une  durée  de  cinquante 
ans,  à  partir  de  leur  date,  soit  au  profit  de  l'auteur,  s'il  ne  i*a  pas 
aliéné  en  faveur  de  ces  administrations. 

Un  arrêté  grand-ducal  déterminera  la  manière  dont  sera  cons- 
tatée, sous  peine  de  déchéance,  la  date  de  la  publication. 

Art.  12.  —  Les  auteurs  ou  leurs  ayants  cause  jouissent  du 
droit  exclusif  de  faire  ou  d'autoriser  la  traduction  de  lears  œuvres 
pendant  la  durée  du  droit  sur  Toeuvre  originale.  Toutefois,  le  droit 
exclusif  de  traduction  cessera  d'exister  lorsque  l'auteur  n'en 
aura  pas  fait  usage  dans  un  délai  de  dix  ans  à  partir  de  la  pre- 
mière publication  de  l'œuvre  originale,  en  publiant  ou  en  faisant 
publier  une  traduction  dans  la  langue  pour  laquelle  la  protection 
sera  réclamée. 

Pour  les  ouvrages  publiés  par  livraisons  le  délai  de  dix  années 
ne  compte  qu'à  dater  de  la  publication  de  la  dernière  livraison 
de  l'œuvre  originale. 

Pour  les  œuvres  composées  de  plusieurs  volumes  publiés  par 
intervalles,  ainsi  que  pour  les  bulletins  ou  cahiers  publiés  par 
des  sociétés  littéraires  ou  savantes  ou  par  des  particuliers,  cha- 
que volume,  bulletin  ou  cahier  est,  en  ce  qui  concerne  le  délai 
de  dix  années,  considéré  comme  ouvrage  séparé. 

Dans  les  cas  prévus  au  présent  article,  est  admis  comme  date 
de  publication,  pour  le  calcul  des  délais  de  protection,  le  31  dé- 
cembre de  l'année  dans  laquelle  l'ouvrage  a  été  publié. 

Art.  13.  —  Le  droit  de  l'auteur  n'exclut  pas  le  droit  de  faire 
des  citations  lorsqu'elles  ont  lieu  dans  un  but  de  critique,  de  po- 
lémique ou  d'enseignement. 

Art.  U.  —  Les  romans-feuilletons,  y  compris  les  nouvelles, 
publiés  dans  les  journaux  ou  recueils  périodiques,  ne  pourront 
être  reproduits,  en  original  ou  en  traduction,  sans  l'autorisation 
des  auteurs  ou  de  leurs  ayants  cause. 

Il  en  sera  de  même  pour  les  autres  articles  de  journaux  on 
de  recueils  périodiques,  lorsque  les  auteurs  ou  éditeurs  auront 
expressément  déclaré,  dans  le  journal  ou  le  recueil  même  où  ils 
les  auront  fait  paraître,  qu'ils  en  interdisent  la  reproduction. 
Pour  les  recueils,  il  suffit  que  l'interdiction  soit  faite  d'une  ma- 
nière générale  en  tête  de  chaque  numéro. 

A  défaut  d'interdiction,  la  reproduction  sera  permise  à  la  coq* 
dition  d'indiquer  la  source. 

Les  aHicles  de  discussions  politiques,  les  nouvelles  du  jour, 
les  faits  divers  et  les  emprunts  à  des  œuvres  littéraires  ou  ar- 


li,  uni  .■  "J 


—  141  — 

tistiques  pour  des  publications  destinées  àrenseignement  ou  ayant 
un  caractère  scientifique,  ou  pour  des  chrestomatbies,  pourront 
être  librement  publiés. 

Art.  15.  —  Le  droit  de  représentation  d'une  œuvre  littéraire 
est  réglé  conformément  aux  dispositions  relatives  aux  œuvres 
musicales. 

Section  III.  —  Dm  droit  d^ auteur  sur  les  œuvres  musicales. 

Art.  16.  —  Aucune  œuvre  musicale  ne  peut  être  publiquement 
exécutée  ou  représentée,  en  tout  ou  en  partie,  sans  le  consente- 
ment de  l'auteur. 

Le  droit  de  Fauteur  ou  de  ses  ayants  droit  s'applique  même  à 
l'exécution  publique  des  œuvres  musicales  non  publiées,  ou  de 
celles  qui  ont  été  publiées,  mais  dont  l'auteur  a  expressément 
déclaré  sur  le  titre  ou  en  tête  de  l'ouvrage  qu'il  en  interdit  l'exé- 
cution'publique. 

Art.  il.  —  Le  droit  d'auteur  sur  les  compositions  musicales 
comprend  le  droit  exclusif  de  faire  des  arrangements  sur  des 
motifs  de  l'œuvre  originale. 

Art.  48.  —  Lorsqu'il  s'agit  d'ouvrages  qui  se  composent  de 
paroles  ou  de  livrets  et  de  musique,  le  compositeur  et  l'auteur 
ne  pourront  traiter  de  leur  œuvre  avec  un  collaborateur  nouveau. 
Néanmoins,  ils  auront  le  droit  de  l'exploiter  isolément  par  des 
publications,  des  traductions  ou  des  exécutions  publiques. 

Section  IV.  —  Du  droit  d^auteur  sur  les  œuvres  plastiques. 

Art.  19.  —  La  cession  d'un  objet  d'art  n'entraine  pas  cession 
du  droit  de  reproduction  au  profit  de  l'acquéreur. 

Art.  20.  —  Ni  l'auteur,  ni  le  propriétaire  d'un  portrait  n'a  le 
droit  de  le  reproduire  ou  de  l'exposer  publiquement  sans  l'as- 
sentiment de  la  personne  représentée  ou  celui  de  ses  ayants 
droite  pendant  vingt  ans  à  partir  de  son  décès. 

Moyennant  ledit  assentiment,  le  propriétaire  a  le  droit  de  re- 
production, sans  toutefois  que  la  copie  puisse  porter  l'indication 
d'un  nom  d'auteur. 

Art.  21.  —  L'œuvre  d'art  reproduite  par  des  procédés  indus- 
triels ou  appliquée  à  l'industrie  reste  néanmoins  soumise  aux 
dispositions  de  la  présente  loi. 

Sbction  V.  —  De  la  contrefaçon  et  de  sa  répression. 

Art.  22.  —  Toute  atteinte  méchante  ou  frauduleuse  portée  au 
droit  de  l'auteur  constitue  le  délit  de  contrefaçon. 

Ceux  qui,  avec  connaissance,  vendent,  exposent  en  vente,  tien- 
nent dans  leurs  magasins  pour  être  vendus,  ou  mettent  en  cir« 


—  142  — 

culation  sur  le  territoire  luxembourgeois  dans  un  but  commer- 
cial, les  objets  contrefaits,  sont  coupables  du  même  délit. 

Art.  23.  —  Les  délits  prévis  à  l'article  précédent  seront  punis 
d'une  amende  de  vingt-six  francs  à  deux  mille  francs. 

La  confiscation  des  ouvrages  ou  objets  contrefaits,  de  même  que 
celle  des  planches,  moules  ou  matrices  et  autres  ustensiles  ayant 
directement  servi  à  commettre  ces  délits,  sera  prononcée  contre 
les  condamnés. 

Art.  24.  —  En  cas  d'exécution  ou  de  représentation  faite  en 
fraude  des  droits  de  l'auteur,  les  recettes  pourront  être  saisies 
par  la  police  judiciaire  comme  objets  provenant  du  délit,et  seront 
allouées  au  réclamant,  à  valoir  sur  les  réparations  lui  revenant, 
mais  seulement  en  proportion  de  la  part  que  son  œuvre  aura 
eue  dans  la  représentation  ou  l'exécution. 

Art.  2b.  —  L'application  méchante  ou  frauduleuse  sur  an  objet 
d'art,  un  ouvrage  de  littérature  ou  de  musique,  du  nom  d^un 
auteur,  ou  de  tout  signe  distinctif  adopté  par  lui  pour  désigner 
son  œuvre,  sera  punie  d*un  emprisonnement  de  trois  mois  à  deux 
ans  et  d'une  amende  de  cent  francs  à  deux  mille  francs  ou  de 
Tune  de  ces  peines  seulement. 

La  confiscation  des  objets  contrefaits  sera  prononcée  dans  tous 
les  cas. 

Ceux  qui,  avec  connaissance,  vendent,  exposent  en  vente,  tien- 
nent dans  leurs  magasins  pour  être  vendus,  ou  mettent  en  circu- 
lation sur  le  territoire  luxembourgeois,  dans  un  but  commercial, 
les  objets  désignés  dans  le  §  f ,  seront  punis  des  mômes  peines 
Art.  26.  —  L'article  191  du  Gode  pénal  est  remplacé  par  les  dis- 
positions suivantes  ; 

((  Quiconque  aura,  soit  apposé,  soit  fait  apposer  par  addition, 
retranchement  ou  par  une  altération  quelconque,  sur  des  objets 
fabriqués,  le  nom  d'un  fabricant  autre  queceluiquien  est  l'auteur, 
ou  la  raison  commerciale  d'une  fabrique  autre  que  celle  de  la 
fabrication,  sera  puni  d'un  emprisonnement  d'un  mois  à  six 
mois. 

«  La  même  peine  sera  prononcée  contre  tout  marchand,  com- 
missionnaire ou  débitant  quelconque,  qui  aura  sciemment  ex- 
posé en  vente  ou  mis  en  circulation  des  objets  marqués  de  noms 
supposés  ou  altérés.  » 

Art.  27.  —  Les  infractions  à  la  présente  loi,  sauf  celles  prévues 
par  l'article  25,  ne  peuvent  être  poursuivies  que  sur  la  plainte  de 
la  personne  qui  se  prétend  lésée. 

Art.  28.  —  Le  livre  l«r  du  Code  pénal,  l'article  566  du  même 
Gode,  ainsi  que  la  loi  du  18  juin  1879,  portant  attribution  aux 
cours  et  tribunaux  de  l'appréciation  des  circonstances  atténuan- 
tes^ sont  applicables  aux  infractions  prévues  par  la  présente  loi. 


—  143  — 

Art.  29.  —  La  disposition  suivante  est  ajoutée  au  n^  23  de 
l'article  1*'  de  la  loi  du  13  mars  1870,sar  les  extraditions  : 

«  .  •  .  .  Ainsi  que  pour  le  délit  prévu  par  Tarticle  25  de  la 
loi  sur  le  droit  d'auteur.  » 

Section  VI.  —  Action  civile  résultant  du  droit  d^auteur. 

Art.  30.  —  Les  titulaires  du  droit  d'auteur]  pourront,  avec 
l'autorisation  du  président  du  tribunal  de  première  instance  du 
lieu  de  la  contrefaçon,  obtenue  sur  requête^  faire  procéder  par  un 
ou  plusieurs  experts,  que  désignera  ce  magistrat,  à  la  description 
des  objets  prétendus  contrefaits  ou  des  faits  de  la  contrefaçon 
et  des  ustensiles  qui  ont  directement  servi  à  les  accomplir. 

Le  président  pourra,  par  la  même  ordonnance,  faire  défense 
aux  détenteurs  des  objets  contrefaits  de  s'en  dessaisir,  permettre 
de  constituer  gardien  ou  même  de  mettre  les  objets  sous  scellés. 
Cette  ordonnance  sera  signifiée  par  un  huissier  à  ce  commis. 

S'il  s'agit  de  faits  qui  donnent  lieu  à  recette,  le  président  pourra 
autoriser  la  saisie  conservatoire  des  deniers  par  un  huissier  qu'il 
commettra. 

Art.  31 .  —  La  requête  contiendra  élection  de  domicile  dans 
les  communes  où  doit  avoir  lieu  la  description. 

Les  experts  prêteront  serment  entre  les  mains  du  président 
avant  de  commencer  leurs  opérations. 

Art.  32.  —  Le  président  pourra  imposer  au  requérant  l'obli- 
gation de  consigner  un  cautionnement.  Dans  ce  cas,  l'ordonnance 
ne  sera  délivrée  que  sur  la  preuve  de  la  consignation  faite. 

Art.  33.  —  Les  parties  pourront  être  présentes  à  la  description 
si  elles  y  sont  spécialement  autorisées  par  le  président. 

Art.  34.  —  Si  les  portes  sont  fermées  ou  si  l'ouverture  en  est 
refusée,  il  est  opéré  conformément  à  l'article  587  du  Gode  de 
procédure  civile. 

Art.  35.  —  Copie  du  procès-verbal  de  description  sera  envoyée 
par  les  experts,  sous  pli  recommandé,  dans  le  plus  bref  délai  au 
saisi  et  au  saisissant. 

Art.  36.  —  Si,  dans  la  huitaine  de  la  date  de  cet  envoi,  cons- 
tatée par  le  timbre  de  la  poste,  ou  de  la  saisie  conservatoire 
des  recettes^  il  n'y  a  pas  eu  assignation  devant  le  tribunal  dans 
le  ressort  duquel  la  description  a  été  faite,  l'ordonnance  cessera 
de  plein  droit  ses  efTets  et  le  détenteur  des  objets  décrits  ou  des 
deniers  saisis  pourra  réclamer  la  remise  de  l'original  du  procès- 
verbal  avec  défense  au  requérant  de  faire  usage  de  son  contexte 
et  de  le  rendre  public,  le  tout  sans  préjudice  de  dommages-in- 
térêts. 

Art.  ^7.  —  La  juridiction  consulaire  ne  connaît  point  des  ac- 
tions dérivant  de  la  présente  loi . 


—  144  — 

La  cause  sera  jugée  comme  affaire  sommaire  et  urgente. 

Art.  38.  —  Les  recettes  et  les  objets  conQsqués  pourront  être 
alloués  à  la  partie  civile,  à  compte  ou  à  concurrence  du  préjudice 
souffert. 

Section  VII.  —  Droits  des  étrangers. 

Art.  39.  —  Les  étrangers  jouissent  dans  le  Grand-Duché  des 
droits  garantis  par  la  présente  loi,  sans  que  la  durée  de  ceux-ci 
puisse,  en  ce  qui  les  concerne,  excéder  la  durée  fixée  par  la  loi 
luxembourgeoise. 

Section  Vlll.  —  Disposition  transitoire. 

Art.  40.  —  Il  n'est  porté  aucune  atteinte  aux  contrats  sur  la 
matière  légalement  formés  sous  Tempire  des  lois  antérieures. 
Les  auteurs  ou  leurs  héritiers  dont  les  droits  exclusifs,  résultant 
de  ces  lois,  ne  seront  pas  épuisés  au  moment  de  la  publication 
de  ta  présente  loi,  seront  pour  Tavenir  régis  par  celle-ci.  Si  avant 
cette  publication  ils  ont  cédé  la  totalité  de  leurs  droits,  ceux-ci 
resteront  soumis  aux  lois  en  vigueur  au   moment  de  la  cession 

Section  IX.  —  Abrogation  de  la  législation  existante. 

Art.  41.  —  Sont  abrogées  toutes  dispositions  antérieures  rela- 
tives au  droit  d'auteur  régié,par  la  présente  loi. 

Mandons  et  ordonnons  que  la  présente  loi   soit  insérée  au 

Mémorialy  pour  être  exécutée  et  observée  par  tous  ceux  que  la 

chose  concerne  (1). 

Abbazia,  le  10  mai  1898. 

Adolphk. 
Le  ministre  d^État,  Président  du  Gouvernement, 

Eyschbn. 


Art,  4184, 

•latioiui  étranirèreti.  —  IVorvè^e.  —  lllarc|ve«. 

Loi  apportant  des  modifications  et  des  adjonctions  à  la  loi 

sur  les  marques  de  fabrique  et  de  commerce  du  26  mai 

1884  (2). 

(Du  31  mai  1900) 

Nous,  Oscar,  par  la  grâce  de  Dieu,  Roi  de  Suède  et  de  Norvège, 
des  Goths  et  des  Vendes, 

(1)  Les  arrêtés  d'ezécation  sont  an  Droit  d^auteur,  1898.67. 

(2)  Voir  la  loi  de  1884,  Ann,  85«  169. 


—  145  — 

Faisons  savoir  qu^on  Nous  a  présenté  la  décision  rendue  le  25 
mai  de  cette  année  par  le  Storting,  actuellement  réuni  en  session 
ordinaire,  laquelle  décision  est  conçue  en  ces  termes  : 

Les  articles  4,  n<^"  1,  7  et  15,  no"  5  et  7  de  la  loi  sur  la  protec- 
tion des  marques  de  fabrique  et  de  commerce,  doivent  être  mo- 
difiés comme  suit  : 

Art.  4.  —  Ne  peuvent  être  enregistrées  : 

i^  Les  marques  qui  consistent  exclusivement  en  chiffres,  let- 
tres ou  mots,  ne  revêtant  pas  une  forme  assez  distinctive  pour 
pouvoir  les  faire  considérer  comme  marques  figuratives  ;  toute- 
fois, Tenregistrement  ne  doit  pas  être  refusé  si  la  marque  con- 
siste en  mots  pouvant  être  considérés  comme  constituant  une 
dénomination  inventée  spécialement  pour  certaines  espèces  de 
marchandises  indiquées  dans  la  demande  conformément  aux 
dispositions  de  Tarticle  3,  et  ne  visant  pas  à  en  indiquer  Torigine, 
la  composition,  la  destination,  la  quantité  ou  le  prix« 

Art.  7.  —  Si  une  marque  enregistrée  contient  des  chiffres, 
lettres  ou  mots  qui  ne  peuvent  pas  être  enregistrés  séparément, 
aux  termes  de  Tarticle  4,  ou  si  elle  se  compose  entièrement  ou 
en  partie  de  signes  ou  de  marques  communément  employés  dans 
certaines  branches  de  commerce,  leur  enregistrement  ne  peut 
empêcher  les  tiers  de  faire  usage  des  mêmes  signes  comme  mar- 
ques ou  parties  de  marques. 

Art.  15.  —  ^^  Si  pendant  un  certain  délai,  qui  peut  être  fixé 
soit  à  4  mois  au  plus  après  le  dépôt  de  Ja  marque  dans  un  pays 
étranger,  soit  à  trois  mois  au  plus  après  que  Tautorité  étrangère 
compétente  aura  publié  que  Tenregisirement  a  été  accordé,  quel* 
qu'un  dépose  une  marque  à  l'enregistrement  dans  le  royaume, 
cette  demande  sera  considérée,par  rapport  à  d'autres  demandes, 
comme  ayant  eu  lieu  en  même  temps  que  celle  effectuée  dans 
le  pays  étranger. 

1^  Toute  marque  qui  aura  été  légalement  enregistrée  dans  un 
pays  étranger  avant  l'entrée  en  vigueur  de  la  protection  récipro- 
que, et  qui  consistera  exclusivement  ou  principalement  en  chif- 
fres, lettres  ou  mots  non  susceptibles  d'enregistrement  spécial, 
aux  termes  de  l'article  4,  jouira  après  enregistrement  dans  le 
royaume,  si  elle  est  protégée  dans  le  pays  étranger,  de  cette 
faveur  que  personne  ne  pourra  faire  usage  des  mêmes  chiffres, 
lettres  ou  mots  comme  marques  pour  la  même  espèce  de  mar- 
chandises, à  moins  de  s'en  être  déjà  servi  au  moment  où  la  pro- 
tection réciproque  est  entrée  en  vigueur  ;  cependant,  l'enregis- 
trement d'une  telle  marque  n'empêchera  personne  d'employer 
comme  marque  les  initiales  de  son  nom  ou  de  sa  raison  de  com* 
merce,  sauf  en  ce  qui  concerne  les  marques  pour  les  fers  et  les 
bois. 

10 


—  146  — 

&  présente  loi  entrera  en  vigneur  le  1"  juillet  1900. 
i  dans  les  trois  mois  après  l'entrée  eu  TÎ^uenr  de  la  présente 
un  industriel  ou  un  comiaerçanl  dépose,  de  la  manière  près- 
i  h  l'article  3,  une  marque  originale,  légalement  employée 
lui  au  moment  de  la  publication  de  cette  loi  dans  le  Lovti- 
U,  et  consistant  exclusiTement  ou  principalement  en  mots 
ectant  pas  une  forme  distinctive,  mais  pouvant  être  consi- 
:s  comme  une  dénomination  inventée  spécialement  pour 
ilnes  espèces  de  marchandises  auxquelles  la  marque  estap- 
uée,  nul  autre  ne  pourra,  en  vertu  d'un  dépdt  ou  d'un  en- 
itrement  de  date  antérieure,  acquérir  un  droit  sur  cette 
que  ou  sur  une  marque  assez  ressemblaute  pour  pouvoir 
confondue  avec  elle. 

I  conséquence,  Nous  avons  adopté  et  conGrmé  ladite  décision 
me  Nous  l'adoptons  et  la  confirmons  par  les  présentes  en 
ité  de  toi,  par  l'apposition  du  sceau  du  Royaume. 
>nné  au  Cblteau  de  Stockholm,  le  31  mai  1900. 
1  l'absence  de  Sa  Majesté,  mon  gracieux  Roi  et  Maître. 
Gustave  (L.  S.) 
0.  Blbuh.  Lebxakn. 


Art.  4185. 


concernant  la  protection  de  certains  dessins  et  modèles. 
(Du  10  juillet  1899)  (t). 

us,  OsCAH,  par  la  grîce  de  Dieu,  Roi  de  Suède,  de  Norvège, 
loths  et  des  Vendes,  faisons  savoir  que,  sur  la  proposition 
.  Diète,  Nous  avons  trouvé  bon  de  décréter  ce  qui  suit  : 
T.  1".  —  Au  moyen  d'un  enregistrement  effectué  confor- 
lent  aux  dispositions  de  la  présente  loi,  l'auteur  d'un  dessin 
m  ayant  cause  peut  acquérir,  si  le  dessin  est  nouveau,  le 
exclusif  de  l'exploiter  dans  la  fabrication,  faite  en  vue  de 
Qte,  de  produits  appartenant  à  l'industrie  des  métaux. 

La  loi  se  complète  par  deux  décrets  concernant  les  piAcM  à  déposer 
e  de  renregiatrement  et  le  terme  du  registre  {laProp.  ind.,  1900, 

r  commentaire  de  la  loi  et  comparaison  avec  un  projet  de  )ol 
i  (Prop.  ind.,  tUOO.  35)  et  le  projet  de  loi  lulrictiien  iGnc.  R.  «., 
900,  p.  S35). 

>  loi  spéciale,  également  du  10  juillet  1809  (fa /Vop.  ind.,  1000.33). 
la  manière  de  calculer  les  délais  visés  par  la  loi. 


pwT*i».  r*^v 


u-7;*  "T:,"^  ■  "T-^y  •"  -.  ^ 


—  147 


J 


Sous  le  terme  de  «  dessins  »,  la  présente  loi  comprend  aussi 
les  modèles  qui  sont  assimilables  aux  dessins  quant  à  leur  des- 
tination. 

Art.  2.  — Ne  pourra  être  enregistré  un  dessin  contenant  des 
reproductions  de  nature  scandaleuse  ou  dont  remploi  serait  con- 
traire aux  lois  ou  aux  bonnes  mœurs. 

Art.  3.  —  Un  dessin  ne  pourra  être  considéré  comme  nouveau 
si,  avant  le  dépôt  de  la  demande  d'enregistrement  auprès  de 
l'autorité  à  ce  préposée,  il  a  déjà  été  reproduit  dans  un  imprimé 
rendu  public  ou  sur  des  produits  publiquement  mis  en  vente, 
ou  s'il  ne  se  distingue  pas  essentiellement  d'un  dessin  déjà  di- 
vulgué de  Tune  ou  de  l'autre  des  manières  indiquées  ci-dessus. 
Quand  un  dessin  aura  figuré  à  une  exposition  internationale, 
le  fait  qu'à  l'occasion  de  cette  exposition,  ou  à  une  date  ulté- 
rieure, ce  dessin  aura  été  divulgué  par  un  imprimé  ou  par  la 
mise  en  vente  d'un  produit,  ne  portera  pas  obstacle  à  son  enre- 
gistrement, si  la  demande  d'enregistrement  est  déposée  dans  le 
délai  de  six  mois  après  l'exposition  du  dessin. 

Art.  4.  —  Le  registre  des  dessins  sera  tenu,  pour  l'ensemble 
du  royaume,  par  telle  administration  publique  de  Stockholm 
que  le  Roi  désignera  à  cet  effet. 

Art.  5.  —  1«  Quiconque  voudra  faire  enregistrer  un  dessin, 
remettra  ou  enverra  par  lettre  affranchie  à  l'autorité  préposée  à 
l'enregistrement  une  demande  écrite  indiquant  la  nature  générale 
du  dessin  et  à  laquelle  sera  jointe  une  reproduction  claire  et 
complète  du  dessin  en  trois  exemplaires. 

La  demande  contiendra  l'indication  du  nom,  de  la  profession 
et  de  l'adresse  postale  du  déposant. 

Si  le  déposant  n'est  pas  domicilié  dans  le  royaume,  il  joindra 
à  la  demande  un  pouvoir  autorisant  un  mandataire  y  domicilié 
à  répondre  en  son  nom  pour  tout  ce  qui  conc(!rne  les  droits  ré* 
sultant  du  dépôt  (1). 

Quand  l'enregistrement  sera  demandé  pour  plusieurs  dessins, 
il  sera  déposé  une  demande  par  dessin . 

2»  Si  le  déposant  désigne  une  autre  personne  comme  étant 
l'auteur  du  dessin,  il  devra  produire  un  acte  établissant  qu'il  est 
l'ayant  cause  de  l'auteur. 

3°  Le  déposant  joindra  en  outre  à  sa  demande  la  taxe  de  dix 
couronnes. 

Art.  6.  —  Dans  le  cas  où  l'autorité  préposée  à  l'enregistre- 
ment constaterait  que  le  déposant  n'a  pas  rempli  les  prescriptions 
énumérées  sous  le  numéro  1  de  l'article  5,  elle  tiendra  à  sa 


(1)  SkyddsrdU  ;  littéralement  :  droit  de  protection.  Ce  terme  désigne, 
dans  cette  loi,  les  droits  qui  résultent  du  dépôt. 


—  148  — 

disposition  un  avis  écrit  lui  donnant  connaissance  de  ce  fait,  ou, 
si  elle  possède  l'adresse  complète  du  'déposant,  elle  lui  trans- 
mettra cet  avis  par  la  poste.  Si  le  déposant  ne  complète  pas  sa 
demande  dans  an  certain  délai  fixé  par  l'autorité  compétente, 
celle-ci  déclarera  la  demande  déchue. 

Art.  7.  —  La  demande  sera  rejetée  :  si  le  dessin  n*est  pas  de 
nature  à  pouvoir  être  enregistré  ;  s*il  n'est  évidemment  pas  nou- 
veau ;  si  le  déposant  qui  a  désigné  une  autre  personne  comme 
étant  Pauteur  du  dessin  n'établit  pas  qu'il  est  l'ayant  cause  de 
l'auteur;  enfin,  si  le  déposant  a  négligé  de  payer  la  taxe  men- 
tionnée sous  le  numéro  3  de  Tarticle  5. 

Art.  8.  —  Si  la  demande  a  été  déclarée  déchue  ou  si  elle  a  été 
rejetée,  la  décision  y  relative,  avec  motifs  à  Tappui,  sera  com- 
muniquée par  écrit  au  déposant  de  la  manière  prescrite  par 
l'article  6  pour  les  cas  qui  y  sont  prévus. 

Le  déposant  qui  se  jugera  lésé  par  une  telle  décision  devra, 
sons  peine  de  forclusion,  se  pourvoir  en  appel  auprès  du  Roi 
dans  un  délai  de  soixante  jours  à  partir  de  celui  du  refus,  ce 
délai  prenant  fln  à  l'heure  de  midi  du  dernier  jour. 

Art.  9.  —  Si  les  pièces  remises  sont  complètes,  et  s'il  n^y  a 
pas  lieu  de  rejeter  la  demande,  le  dessin  sera  enregistré,  et  un 
certificat  constatant  le  fait  de  l'enregistrement  ainsi  que  la  date 
du  dépôt  sera  remis  au  déposant.  Un  des  exemplaires  déposés 
du  dessin  sera  de  plus  fixé  au  certificat. 

Par  les  soins  de  l'autorité  préposée  à  l'enregistrement,  un  avis 
de  l'inscription  sera  inséré  dans  le  journal  des  annonces  offi- 
cielles. 

Art.  10.  —  Si  plusieurs  personnes  demandent  l'enregistre- 
ment d'un  même  dessin  ou  de  dessins  dont  les  éléments  essen- 
tiels se  ressemblent,  la  priorité  sera  accordée  à  la  personne  qui, 
la  première,  aura  déposé  une  demande  complète. 

Art.  11.  —  Le  dessin  enregistré  est  protégé  pour  un  terme  de 
cinq  ans  à  partir  du  jour  du  dépôt  de  la  demande  d'enregistre- 
ment. 

Art.  12.  —  Si  le  droit  résultant  du  dépôt  passe  à  un  tiers,  il 
en  sera  fait  déclaration  à  l'autorité  préposée  à  Tenregistrement, 
sous  production  de  l'acte  qui  constate  la  mutation.  Aussi  long- 
temps que  cette  formalité  n'aura  pas  été  remplie,  sera  considéré 
au  point  de  vue  de  la  protection  légale,  comme  détenteur  des 
droits  résultant  du  dépôt,  celui  qui  se  trouvera  avoir  été  inscrit  le 
dernier  en  cette  qualité  par  l'autorité  compétente. 

Art.  13.  —  Si  l'ayant  droit  transfère  son  domicile  à  l'étranger, 
ou  si  le  droit  passe  à  une  personne  non  domiciliée  dans  le 
royaume,  le  détenteur  du  droit  enverra  à  l'autorité  compétente 
une  procuration  constituant  le  mandataire  prévu  à  l'article  S, 


ip    ■  *  .   •     '*^       "T     1  •••••'  ^ 


—  149  — 

alinéa  1.  Si  ce  mandataire  transfère  son  domicile  hors  du 
royaume,  ou  sMl  cesse  pour  une  autre  cause  de  fonctionner  en 
cette  qualité,  Tayant  droit  devra  déposer  une  procuration  en  fa- 
veur d'un  autre  mandataire.  Dans  le  cas  où  ces  prescriptions 
ne  seraient  pas  suivies,  le  juge  pourra,  s'il  y  a  lieu,  constituer 
d*offlce  un  mandataire  légal  pour  l'ayant  droit. 

Art.  i4.  —  Les  droits  résultant  du  dépôt  sont  sans  effet  contre 
celui  qui,  à  Tépoque  où  la  demande  d*enregistrement  a  été  dépo- 
sée, exploitait  déjà  dans  le  royaume  le  dessin  enregistré  ou  avait 
pris  des  mesures  sérieuses  en  vue  de  cette  exploitation. 

Art.  15.  — Si  un  dessin  a  été  enregistré  contrairement  aux 
dispositions  des  articles  i,  2et  3,  toute  personne  estimant  que 
son  droit  a  été  lésé  par  l'enregistrement  de  môme  que  le  minis- 
tère public,  s'il  y  a  lieu,  pourront  requérir  auprès  des  tribunaux 
l'annulation  de  l'enregistrement. 

Pour  les  cas  prévus  ci-dessus,  Tinstance  compétente  est  le  tri- 
bunal de  première  instance  de  Stockholm. 

L'arrêt  annulatif  de  Tenregistrement  sera  transmis  par  les  soins 
du  tribunal  à  l'autorité  compétente. 

Art.  i6.  —  Quiconque,  sans  l'autorisation  de  l'ayant  droit,  ap- 
pliquera un  dessin  qu'il  saura  avoir  été  enregistré  en  Suède  à 
la  fabrication,  faite  en  vue  de  la  vente,  de  produits  appartenant 
à  rindustrie  des  métaux;  ou  quiconque  tiendra  en  vente  dans  le 
royaume,  ou  y  importera  en  vue  de  la  vente,  des  produits  appar- 
tenant à  cette  même  industrie  et  fabriqués  sans  l'autorisation  de 
rayant  droit.  ~  sauf  le  cas  prévu  à  l'article  14,  —>  sera  puni 
d'une  amende  de  vingt  à  mille  couronnes,  et  condamné  à  réparer 
le  dommage  causé.  La  poursuite  n'aura  lieu  que  sur  la  plainte 
de  l'ayant  droit. 

Si  le  plaignant  le  demande,  tout  produit  indûment  fabriqué  ou 
importé  dans  le  royaume  lui  sera  délivré  contre  payement  de  la 
valeur,  ou  à  valoir  sur  le  montant  des  dommages-intérêts  qui  lui 
auront  été  attribués.  Quant  à  l'outillage  exclusivement  destiné  à 
la  fabrication  déclarée  illicite,  on  procédera,  si  le  plaignant  le 
demande,  de  manière  à  rendre  impossible  tout  abus.  Toute  per- 
sonne qui,  pendant  qu'elle  est  sous  le  coup  de  poursuites  rela- 
tives à  l'infraction  mentionnée  dans  le  présent  article,  continuera 
à  se  livrer  aux  mêmes  actes  illicites,  sera  frappée,  si  la  preuve 
légale  est  faite  contre  elle,  d'une  peine  spéciale  pour  chaque 
fois  qu'une  assignation  lui  aura  été  adressée  et  signifiée. 

Les  amendes  qui  auront  été  prononcées  en  vertu  du  présent 
article  seront  acquises  au  trésor.  En  cas  de  non-payement,  elles 
seront  converties  en  prison,  conformément  au}^  dispositions  du 
code  pénal. 

Art.  17.  —  Les  dispositions  de  l'article  16  seront  également 


-  150  — 

icabtes  aux  dessins  reproduits  snr  une  autre  échelle  ou  en 
[res  couleurs,  on  n'offrant  à  tous  autres  égards  que  des 
gements  sans  importance. 

T.  48.—  En  cas  de  poursuite  pour  violation  du  droit  résul- 
dud^pdt,  s'il  résulte  de  l'instruction  que  l'enregistrement  a 
ITectuë  contrairement  aux  dispositions  des  articles  !•',  2  et  3 

présente  loi,  l'action  intentée  sera  abandonnée. 
T.  19.  —Quand  l'enregistrement  aura  été  annulé,  que  le 
e  de  protection  du  dessin  enregistré  sera  expiré,  ou  quand 
nt  droit  en  aura  fait  la  demande,  le  dessin  sera  radié  do 
itre,  et  l'avis  de  la  radiation  sera  publié  dans  le  journal  des 
nces  orflcielles, 

T.  20,  —  En  ce  qui  concerne  les  dessins  protégés  dans  un 
accordant  la  réciprocité  pour  les  dessins  enregistrés  dans  le 
urne,  le  Roi   pourra  décréter  que  :  si  quelqu'un  a  demandé 

le  royaume  l'eurfifiiistrement  d'un  dessin  avant  l'expiration 

certain  délai,  —  délai  qui  peut  être  fixé  par  le  décret  soit 
Ure  mois  au  plus  à  partir  de  la  date  où  la  protection  a  été 
indée  pour  le  même  dessin  dans  l'Etat  étranf^er,  soit  k  trois 

au  plus  à  partir  de  la  date  où  l'autorité  compétente  de  cet 
a  annoncé  que  cette  protection  était  accordée,  —  la  demande 
ée  en  Suède  sera,  par  rapport  à  d'autres  demandes  ou  aux 
icles  qui,  aux  termes  de  l'article  3,  peuvent  s'opposera  l'en- 
tremenl,  considérée  comme  si  elle  avait  été  déposée  simul- 
nent  avec  la  demande  effectuée  dans  le  pays  étranger  (I). 
T.  2i,  —  l.e  Roi  édictera  des  prescriptions  spéciales  tant  en 
li  concerne  la  nature  des  pièces  devant  être  déposées  avec  la 
inde  d'enregistrement,  qu'en  ce  qui  concerne  le  registre  des 
nset  les  publications  mentionnées  dans  la  présente  loi. 

présente  loi  entrera  en  vigueur  le  I"  janvier  1900. 

Un  décret  du  34  novembre  1899 (Ca  Prop.  îtuf.,1900.  !5) applique 
'ticle  à  tout  dessin  dont  la  prateclion  aura  été  iccordée  dans  an 
étranger  appartenant  à  l'Union  pourla  proteclion  de  la  propriété 
trielle,  avec  cette  observslion  que  le  délai  courra  de  la  dile  â  U- 
i  la  protection  aura  été  demandée  dans  l'Ëlut  étranger  et  loaa  les 
9  si  cet  Ëtat  est  situé  en  Europe  et  de  i  mois  s'il  esl  situé  hors  d'En- 

■t.  30  laissail  l'option  entre  deux  points  de  départ  do  délai  parce 
ivait  été  question  dans  les  projel»  de  revision  de  la  Convention  de 
à  Umxelles  de  moJifler,  au  moin^  pour  lei  brevets  et  à  la  Tticullê 
svelè,  le  point  de  départ  adnel  du  délai  de  priorité  (voir  Ann.  au. 
ii'op.  ind.,  iWn,  p.  170).  La  loi  Euëdoisc  da  5  mars  iflVl,  sur  lei 
jes  {Ann.,  97-321)  et  l'ordonnanue  royale  du  26  mara  1897  [Ann., 
!)  contiennent  des  dispositions  analogues  à  cellei  de  l'art.  30  de  la 
r  les  dessins  et  modèles. 


-ï^-    -.-.'^    -i    pri      ■:fr-    .-'»-       -    '  -mr-WF-     -» --^^nn.»^    t^ -'^T^    X"'  >     Wt  •"        ^  »         "  -        | 


—  151  — 

Donné  pour  semr  de  gouverne  à  tous  ceux  à  qui  il  appartien- 
dra. En  foi  de  quoi.  Nous  avons  signé  cette  loi  de  Notre  propre 
main,  et  Tavons  fait  conOrmer  par  l'apposition  de  Notre  sceau 
Royal. 
Au  cMteau  de  Stockholm,  le  40  juillet  1899. 

OSCAR  (L.  S.) 
L.  Annrrstedt. 

Dans  les  cas  où  les  délais  visés  par  la  loi  sur  la  protection  de 
certains  dessins  et  modèles  sont  indiqués  en  mois,  sera  considéré 
comme  jour  tinal  du  délai  celui  qui,  par  le  quantième  du  mois, 
correspond  à  celui  où  le  délai  a  commencé  à  courir.  Si  le  dernier 
mois  du  délai  ne  contient  pas  de  jour  correspondant,  le  dernier 
jour  de  ce  mois  sera  considéré  comme  jour  final  du  délai  (1). 


Art.  4186. 

LiéfflvlAtlôas  étran||ère«.  —  Snliiiie.  —  Demvlnis 

eC  UMKlèles  lii«la*Crleki . 

Loi  fédérale  sur  les  dessins  et  modèles  industrielSy 

30  mars  1900  (2). 

L'Assemblée  fédérale  de  la  Confédération  suisse,  en  applica- 
tion de  Tarticle  64  de  la  Constitution  fédérale,  vu  le  message  du 
Conseil  fédéral  du  2^  novembre  i899,  décrète  : 

I.  —  Dispositions  générales. 

Article  1*^.  —  La  Confédération  accorde  aux  auteurs  de  des- 
sins et  modèles  industriels  et  à  leurs  ayants  cause  les  droits  spé- 
cifiés dans  la  présente  loi. 

Art.  2.  —  Constitue  un  dessin  ou  modèle  au  sens  de  la  pré- 
sente loi  toute  disposition  de  lignes  ou  toute  forme  plastique^ 
combinées  ou  non  avec  des  couleurs,  devant  servir  de  type  pour 
la  production  industrielle  d'un  objet. 

Art.  3. —  La  protection  accordée  parla  présente  loi  ne  s'appli- 
que pas  aux  procédés  de  fabrication,  à  Tutilisation  ou  à  Teffet 

(1)  Loi  du  10  juillet  1899. 

(2)  Voir  analyse  du  projet  [la  Prop.  ind.^  février  1900,  p. 26)  et  modi- 
fications apportées  au  projet  {la  Prop.  ind.,  mars  1901,  p.  47). Voir  en- 
core une  étude  de  M.  Fray-Godet,  secrétaire  du  bureau  international 
de  la  Propriété  industrielle  de  Berne,  au  Congrès  international  de  la 
Propriété  industrielle  à  Paris  en  1900. 


—  152  — 

que  de  l'objet  fabriqué  sur  le  type  du  dessin  ou  modèle 
!é. 

.  4.  —  Le  droit  de  l'auteur  passe  à  tes  héritiers.  Il  est 
naissible,  en  tout  ou  en  partie,  par  toutes  voies  de  droit, 
iitear  peut  autoriser  d'autres  personnes  à  exploiter  son 
I  ou  modèle  en  leur  accordant  une  licence. 
ir  être  opposables  aux  tiers  de  bonne  Toi,  lee  actes  transla- 
1  droit  de  l'auteur  et  les  licences  doivent  être  inscrits  an 
re  des  dessins  et  modèles. 

.  5.  —  Les  dessins  et  modèles  ne  jouissent  delaprotection 
I  que  s'ils  sont  déposés  conformément  k  la  présente  loi. 
ne  pourra,  avant  l'expiration  de  la  protection  légale,  faire 
,  dans  un  but  industriel  ou  commercial,  d'un  dessin  on 
le  régulièrement  déposé,  s'il  n'y  est  autorisé  par  l'auteur 
n  ayant  cause. 

'.  6.  —Le  fait  du  dépAt  crée  la  présomption  que  l'objet 
é  était  nouveau  au  moment  du  dépôt,  et  que  le  déposant 
t  l'auteur. 

r.  7.  —  Les  dessins  et  modèles  peuvent  être  déposés  isolé- 
ou  réunis  en  paquets. 

nombre  des  dessins  ou  modèles  renfermés  dans  un  paquet 
ra  limité  que  par  les  dimensions  et  le  poids  prescrits  pour 
rnier.  Ce  mode  de  dépôt  sera  réglé  en  détail  paruneordon- 
idu  Conseil  fédéral,  qui  déterminera  en  même  temps  le 
mum  des  dimensions  et  du  poids  des  dessins  et  modèles 
lés  isolément. 

r.  8.  —  La  protection  légale  des  dessins  et  modèles  a  une 
I  de  IS  ans  au  plus  ;  elle  est  accordée  par  périodes  conséca- 
de  SS  ans,  dont  la  première  commence  à  la  date  du  dép6t. 
r.  9.  —  Les  dessins  et  modèles  peuvent  être  déposés,  pen- 
la  première  période  de  protection  de  cinq  ans,  soit  à  dëcou- 
soil  sous  pli  cacheté. 

Conseil  fédéral  pourra  établir  par  voie  de  règlement,  que 
!ssins  et  modèles  de  certaines  industries  ou  de  certaines 
ories  de  produits  industriels  pourront  rester  déposés  sous 
icheté  mémo  pendant  la  deuxième  et  la  troisième  période 
olertion  ;  il  peut  décider,  de  même,  que  les  dessins  et 
lies  de  certaines  industries  ou  de  certaines  catégories  de 
lits  industriels  ne  pourront  être  déposés  qu'à  découvert,  et 
en  sera  publié  une  représentation  graphique. 
T.  10.  —  Le  déposant  paye  une  taxe  pour  chaque  période 
'oteclion  et  pour  chaque  dessin  ou  modèle,  ou  pour  chaque 
et  de  dessins  ou  modèles  déposé  ;  le  Conseil  fédéral  fixe 
taxe  par  voie  d'ordonnance.  Les  taxes  doivent  présenter 
>rogresston  importante  d'une  période  à  l'autre 


TV»!    «T"    ^T<r*» — T.  —  •-- t-\îvi^^**'- 


—  153  — 

Le  montant  des  taxes  pour  la  première  période  doit  être  payé 
au  moment  du  dépôt  (article  15  chiffre  2)  ;  les  taxes  de  la  deu- 
xième et  de  la  troisième  période  sont  échues  le  premier  jour 
de  chacune  de  ces  périodes. 

Art.  11.  —  Sera  déchu  des  droits  résultant  du  dépôt: 

i*  Le  déposant  qui  n'aura  pas  payé  dans  les  deux  mois  de 
leur  échéance  les  taxes  dues  pour  la  prolongation  de  la  protection. 

L'office  où  s*es(  fait  le  dépôt  avisera  le  déposant  en  temps  utile 
que  la  taxe  est  échue,  sans  toutefois  encourir  de  ce  chef  aucune 
responsabilité  en  cas  d'omission. 

2<*  Le  déposant  qui  n'exploitera  pas  en  Suisse  le  dessin  ou  le 
modèle  dans  une  mesure  convenable  et  qui,  en  même  temps, 
importera,  fera  ou  laissera  importer,  par  d'autres,  des  objets 
fabriqués  à  l'étranger  d'après  le  même  dessin  ou  modèle. 

Cette  disposition  ne  s'applique  pas  aux  objets  en  question 
importés  en  Suisse  sous  le  régime  du  trafic  de  perfectionnement  ; 

Le  Conseil  fédéral  peut  déclarer  la  disposition  du  chifTre  2 
non  applicable  aux  Etats  qui  accordent  la  réciprocité  à  la  Suisse. 

Art.  i2.  —  Le  dépôt  d'un  dessin  ou  modèle  sera  déclaré  nul 
et  de  nul  effet  : 

!•  Si  le  dessin  ou  le  modèle  n'était  pas  nouveau  au  moment 
du  dépôt  ;  un  dessin  ou  modèle  est  nouveau,  au  sens  de  la  pré- 
sente loi,  aussi  longtemps  qu'il  n'est  connu  ni  du  public  ni  des 
milieux  industriels  et  commerciaux  intéressés  ; 

2°  Si  le  déposant  n'est  ni  l'auteur  du  dessin  ou  modèle,  ni 
son  ayant  droit  ; 

3<^  Si,  en  cas  de  dépôt  sous  pli  cacheté,  le  déposant  est  con-* 
vaincu  d'avoir  fait,  dans  une  intention  frauduleuse,  une  décla- 
ration inexacte  du  contenu  ; 

4**  Si  l'objet  déposé  n'a  pas  les  caractères  d'un  dessin  ou  modèle 
au  sens  de  la  présente  loi  ; 

5<»  Si  le  contenu  du  dépôt  est  contraire  aux  dispositions  d'une 
loi  fédérale  ou  d'une  convention  internationale,  ou  s'il  porte 
atteinte  aux  bonnes  mœurs. 

Art.  13.  —  L'action  en  déchéance  pour  exploitation  insuffi- 
sante en  Suisse  et  l'action  en  nullité  peuvent  être  intentées  par 
toute  personne  qui  justifie  d'un  intérêt. 

Art.  14.  —  Celui  qui  n*a  pas  de  domicile  fixe  en  Suisse  ne 
peut  opérer  le  dépôt  d'un  dessin  ou  modèle  et  exercer  les  droits 
résultant  de  ce  dépôt  que  par  un  mandataire  domicilié  en  Suisse. 

Le  mandataire  est  autorisé  à  représenter  le  déposant  dans 
les  démarches  à  faire  à  teneur  de  la  présente  loi  et  dans  les  con- 
testations en  justice  relatives  au  dessin  ou  au  modèle.  Demeurent 
réservées  les  dispositions  cantonales  sur  l'exercice  de  la  profes 
sion  d'avocat. 


—  154  — 

l.«  tribunal  dans  le  ressort  duquel  le  représentant  est  dorai- 
ou,  à  défaut  d'un  mandataire,  celui  dans  le  ressort  duquel 
■ouve  le  siège  du  bureau  de  dépôt  est  compétent  pour  con- 
7e  des  actions  intentées  au  déposant. 

n.  -  Dépôt. 

T.  15.  —  Le  dépôt  d'un  dessin  ou  modèle  industriel  s'opère 
loyen  d'une  demande  adressée  au  bureau  de  dépôt  et  rédi- 
tuivant  formulaire  dans  une  des  trois  langues  nationales, 
la  demande  devront  être  joints  ; 

Un  exemplaire  numéroté  de  chaque  dessin  ou  modèle  dont 
!pAt  est  demandé  soit  sous  la  forme  du  produit  industriel 
lel  il  est  destiné,  soit  sous  celle  d'une  autre  représentation 
ïBnte  dudit  dessin  ou  modèle  ; 

Le  montant  de  la  taie  pour  la  première  période  de  proteC' 

Conseil  fédéral  peut  prescrire  d'autres  formalités  pour  le 
t  des  dessins  ou  modèles  dont  la  représentation  graphique 
publiée. 

T.  16.  — Les  dessins  et  modèles  sont  déposés  au    Bureau 
:al  de  la  propriété  intellectuelle  à  Berne, 
le  besoin  s'en  fait  sentir,  le  Conseil  fédéral  pourra  créer 
re  d'autres  bareaus  de  dépôt. 

T.  17.  —  Tout  dépôt  fait  contrairement  aux  prescriptions 
,  loi  ou  du  règlement  et  non  régularisé  par  le  demandeur 
;ré  l'avertissement  du  bureau  de  dépôt,  sera  rejeté  par  ce 

bureau  refusera  tous  objets  ou  représentations  graphiques 
ses  h  découvert,  qui  n'auraient  pas  les  caractères  d'un  dessin 
lodèle  au  sens  de  la  présente  loi,  dont  Texécntion  serait 
'aire  aux  dispositions  d'une  loi  fédérale  on  d'une  convention 
nationale,  ou  qui  porteraient  atteinte  aux  bonnes  mœurs. 
s  mêmes  dispositions  s'appliquent  d'une  façon  analogue 
is  où  un  dépôt  secret  serait  transformé  en  dépôt  ouvert. 
le  dépôt  est  rejeté  par  le  bureau,  le  demandeur  pourra 
irtr  contre  cette  décision,  dans  le  délai  d'un  mois  h,  partir  de 
tificatiori  y  relative,  auprès  du  département  duquel  relève 
ireau  ;  la  décision  du  département  sera  déllnitive. 
r.  Itl.  '—  Tout  dessin  ou  modèle  régulièrement  déposé  sera 
it  par  le  bureau  au  registre  des  dessins  et  modèles,  sans 
len  préalable  des  droits  du  déposant,  ni  de  la  nouveauté 
)bjet  déposé  ;  un  certiticat  de  dépôt  sera  remis  au  déposant. 
T.  19.  —  Le  registre  des  dessins  et  modèles  contiendra  les 
ations  suivantes  :  l'objet  et  le  mode  de  dépôt  (à  découvert 
lUs  pli  cacheté),  le  nom  et  le  domicile  du  déposant  et,  le 


TT"  ^^  •  -«^^  •"   ^  '""•"    •' .  *  *       .^-TT- 


—  155  — 

cas  échéant,  de  son  mandataire,  la  date  du  dépôt,  le  payement  des 
taxes  et  leur  montant,  ainsi  que  les  changements  survenus  dans 
la  personne  ou  dans  les  droits  da  titulaire  ;  ces  changements 
ne  seront  inscrits  au  registre  que  s'ils  sont  établis  par  un  titre 
authentique  ou  par  un  acte  sous  seing  privé  dûment  légalisé. 

Art.  20.  —  Le  bureau  publie,  conformément  aux  inscriptions 
faites  dans  le  registre,  le  titre  des  dessins  et  modèles  déposés, 
le  mode  de  dépôt,  le  nom  et  le  domicile  du  déposant  et,  le  cas 
échéant,  de  son  mandataire,  la  date  et  le  numéro  d*ordre  de 
chaque  dépôt,  ainsi  que  les  changements  survenant  dans  la  per- 
sonne ou  dans  les  droits  du  titulaire. 

Le  Conseil  fédéral  déterminera  par  un  règlement  le  mode 
de  publication  graphique  qui  pourra  être  adopté  pour  les  dessins 
et  modèles  de  certaines  industries  ou  de  certaines  catégories  de 
produits  (art.  9). 

Art.  21.  —  L'ayant  droit  pourra  demander  en  tout  temps 
que  ses  dépôts  sous  pli  cacheté  soient  convertis  en  dépôts  ouverts. 

Dans  tous  les  autres  cas,  les  plis  cachetés  ne  seront  ouverts 
qu*à  la  demande  de  Tayant  droit  ou  sur  la  réquisition  d'une 
autorité  judiciaire,  et  ils  seront  refermés  après  usage. 

Art.  22.  —  Toute  personne  pourra  obtenir  du  bureau  de  dépôt 
des  renseignements  oraux  ou  écrits  sur  le  contenu  du  registre 
des  dessins  et  modèles,  et  prendre  connaissance,  en  présence 
d'un  fonctionnaire  de  ce  bureau,  des  dessins  et  modèles  déposés 
à  découvert. 

Le  Conseil  fédéral  fixera,  d'après  un  tarif  modéré,  les  émolu- 
ments à  payer  de  ce  fait. 

Art.  23.  —  Le  déposant  peut  en  tout  temps  renoncer  à  la 
protection  légale  en  retirant  les  dessins  et  modèles  déposés. 

A  Texpiration  de  la  troisième  année,  le  bureau  les  renverra 
à  l'ayant  droit  ou  à  son  mandataire,  ou  il  les  détruira;  dans  des 
circonstances  spéciales,  il  pourra  aussi  en  disposer  autrement. 

III.  ~  Sanction  civile  et  pénale. 

Art.  24.  —  Est  passible  de  poursuites  civiles  ou  pénales,  con- 
formément aux  dispositions  ci-après  : 

1*  Quiconque  aura  contrefait  un  dessin  ou  modèle  déposé,  ou 
l'aura  imité  sans  droit  de  telle  manière  que  le  produit  véritable 
ne  puisse  être  distingué  du  produit  contrefait  qu'après  un  exa- 
men attentif  ;  la  seule  modification  des  couleurs  n'est  pas  con- 
sidérée comme  constituant  une  différence  ; 

2"  Quiconque  aura  vendu,  mis  en  vente  ou  en  circulation,  ou 
importé  en  Suisse  des  objets  contrefaits  ou   imités  sans  droit  ; 

3^*  Quiconque  aura  coopéré  aux  infractions  ci-dessus,  ou  en 
aura  favorisé  ou  facilité  l'exécution  ; 


'TrrjfMm- 


—  156  — 

4^  Quiconque  refuse  de  déclarer  à  l'autorité  compétente  la 
provenance  d'objets  contrefaits  ou  imités  se  trouvant  en  sa  pos» 
session. 

Art.  2^.  —  Quiconque  commet  intentionnellement  Tune  des 
infractions  mentionnées  à  l'article  24,  est  tenu  de  réparer  le 
dommage  causé  à  la  partie  lésée  et  sera  puni  d'une  amende 
de  20  à  2,000  francs,  ou  d'un  emprisonnement  de  1  jour  à  1  an, 
ou  des  deux  peines  réunies,  dans  les  limites  indiquées  ci-dessus. 

En  cas  de  récidive,  ces  peines  pourront  être  élevées  jusqu'au 
double. 

Art.  26.  —  Si  les  infractions  mentionnées  à  l'article  24  sont 
commises  par  négligence,  l'auteur  n'est  passible  d'aucune  peine 
mais  il  demeure  civilement  responsable  du  dommage  causé. 

Art.  27.  —  Les  poursuites  pénales  ont  lieu  sur  plainte  de  la 
partie  lésée  et  conformément  à  la  procédure  pénale  cantonale, 
soit  au  domicile  du  délinquant,  soit  au  lieu  où  le  délit  a  été 
commis. 

En  aucun  cas,  il  ne  pourra  y  avoir  cumulation  de  poursuites 
pénales  pour  le  même  délit.  L'autorité  nantie  la  première  de 
la  plainte  est  seule  compétente. 

L'action  pénale  sera  prescrite  par  deux  ans  à  compter  de  la 
dernière  contravention. 

Art.  28.  —  Le  tribunal  nanti  d'une  demande  civile  ou  d'une 
plainte  pénale  ordonnera  les  mesures  conservatoires  nécessaires. 
Il  pourra  notamment  faire  procéder  à  une  description  précise 
des  objets  prétendus  contrefaits,  des  instruments  et  ustensiles 
servant  exclusivement  à  la  contrefaçon  et,  le  cas  échéant,  à  la 
saisie  desdits  objets. 

Dans  ce  dernier  cas,  le  tribunal  pourra  imposer  au  requérant 
un  cautionnement  qu'il  sera  tenu  de  déposer  au  préalable. 

Art.  29.  —  Le  tribunal  pourra  ordonner  la  conûscation  et  la 
vente  des  objets  saisis. 

Il  pourra  ordonner,  même  en  cas  d'acquittement,  la  destruc- 
tion des  instruments  et  des  ustensiles  exclusivement  destinés  à 
la  contrefaçon.  Le  produit  de  la  vente  des  objets  confisqués  sera 
appliqué  au  payement  de  l'amende,  des  frais  judiciaires  et  de 
l'indemnité  due  à  la  partie  lésée  ;  l'excédent  reviendra  au  pro- 
priétaire desdits  objets. 

Art.  30.  —  Le  tribunal  peut  ordonner  la  publication  du  juge- 
ment pénal  dans  la  Feuille  officielle  suisse  du  commerce  et  dans 
un  ou  plusieurs  autres  journaux,  aux  frais  du  condamné. 

Art.  31*  —  Quiconque  aura  indûment  muni  ses  papiers  de 
commerce,  annonces  ou  produits  d'une  mention  endant  à  faire 
croire  qu'un  dessin  ou  modèle  a  été  déposé  en  vertu  de  la  pré- 


—  157  — 

sente  loi  sera  puni,  d'office  ou  sur  plainte  d^in  particulier,  d^une 
amende  âe  20 à  500  franco. 

En  cas  de  récidive,  la  peine  pourra  être  élevée  jusqu'au  dou- 
ble. 

Art.  32.  —  Le  produit  des  amendes  revient  aux  cantons.  Le 
jugement  portant  condamnation  à  une  amende  statuera  que, 
faute  de  payement  pour  cause  d'insolvabilité,  Tamende  sera 
convertie  de  plein  droit  en  emprisonnement  (art.  151  de  la  loi 
fédérale  sur  Torganisation  judiciaire  fédérale,  du  22  mars  1893). 

Art.  33.  —  Les  cantons  désigneront  un  tribunal  compétent 
pour  juger  les  contestations  civiles  relatives  à  la  protection  des 
dessins  et  modèles,  lequel  statuera  comme  instance  cantonale 
unique. 

Le  recours  au  tribunal  fédéral  est  recevable  sans  égard  à  la 
valeur  de  l'objet  du  litige  (art.  62  de  Torganisation  judiciaire 
fédérale). 

IV.  —  Dispositions  finales. 

Art.  34.  —  Les  ressortissants  d'États  qui  auront  conclu  avec 
la  Suisse  des  conventions  sur  ces  matières  pourront,dans  le  délai 
fixé  à  partir  de  la  date  de  leur  premier  dépôt,  à  condition  que 
ce  dépôt  ait  eu  lieu  dans  Tun  des  Etats  visés  par  la  convention, 
et  sous  réserve  des  droits  des  tiers,  déposer  leurs  dessins  et  mo- 
dèles industriels  en  Suisse  sans  que  des  faits  survenus  dans  l'in- 
tervalle, tels  qu'un  autre  dépôt  ou  un  acte  de  publicité,  puissent 
être  opposés  à  la  validité  du  dépôt  opéré  par  eux. 

Les  citoyens  suisses  qui  aurontopéré  le  premier  dépôt  de  leurs 
dessins  et  modèles  dans  l'un  des  Etats  désignés  à  l'alinéa  précé- 
dent jouiront  en  Suisse  des  mômes  avantages  que  les  ressortis- 
sants de  cet  Etat. 

Art.  35.  —  Il  sera  accordé  à  tout  auteur  d'un  dessin  ou  modèle 
industriel  figurant  dans  une  exposition  nationale  ou  internationale 
en  Suisse,  moyennant  l'accomplissement  des  formalités  à  déter- 
miner par  le  Conseil  fédéral,  un  délai  de  6  mois  h,  partir  du  jour 
de  l'admission  du  produit  à  l'exposition,  délai  pendant  lequel  il 
pourra  déposer  valablement  son  dessin  ou  modèle,  nonobstant 
tout  dépôt  opéré  par  un  tiers  ou  tout  fait  de  publicité  survenu 
dans  l'intervalle. 

De  même,  lorsqu'une  exposition  internationale  aura  lieu  dans 
un  état  qui  aura  conclu  avec  la  Suisse  une  convention  sur  cet 
objet,  le  délai  de  priorité  que  le  pays  étranger  accordera  aux 
dessins  et  modèles  exposés  leur  sera  accordé  aussi  en  Suisse.  Ce 
délai,  toutefois,  ne  dépassera  pas  6  mois  dès  le  jour  de  l'admis- 
sion du  produit  à  l'exposition. 

Art.  36.  —  Aussi  longtemps  qu'un  arrêté  fédéral  spécial  n'aura 


-■V 


-  158  — 

pas  été  édicté,  les  dispositions  de  la  présente  loi  ne  s'appliquent 
pas  à  l'impression  sur  cotonnades,  ni  aux  tissas  de  soie  ou  de 
i-soie  autres  que  les  tissus  Jacquard. 

Aht.  37.  —  Le  Conseil  fédéral  est  chargé  d'édicter  les  règle- 
ents  nécessaires  pour  l'exécution  de  la  présente  loi. 
Art.  38.  —  La  loi  fédérale  du  21  décembre  1S88  sur  les  dessins 
modèles  eet  abrogée. 

Les  dessins  el  modèles  qui  ne  seront  pas  déposés  depuis  pluâ 
!  deux  ans  au  moment  de  l'eutrée  en  vigueur  de  cette  loi  jooi- 
nt  de  plein  droit  de  la  protection  léfjale  pendant  la  période  de 
nq  ans,  établie  par  la  présente  loi,  à  compter  depuis  le  moment 
1  dépat. 

Art.  39.  —  Le  Conseil  fédéral  est  chargé,  conformément  aux 
spositions  de  la  loi  du  17  juin  IS74  concernant  les   volations 
)pulaires  sur  les  lois  et  arrêtés  fédéraux,  de  publier  la  présente 
i  et  de  Hxer  l'époque  où  elle  entrera  en  vigueur. 
Ainsi  décrété  par  le  Conseil  des  Etats. 
Berne,  le  30  mars  1900. 


Art.   4187. 

èBl*lKttOD«  étrangère*.   —  Vénémnéin.  —  Frandea 
mur  l'orlclne  et  I»  qiutlllïé  de«  old«ts> 

Code  prinai  de  1897  [entré en  vigueur  le  ZO  février  1898), 

Art,  301 .  —  Celui  qui,  dans  un  but  commercial,  aura  introduit 
ins  le  pays,  mis  en  vente  ou  mis  en  circulation  de  toute  antre 
anière,  des  œuvres  de  l'esprit  ou  des  produits  manufacturés 
irtaiit  des  noms,  des  marques  ou  des  sifçnes  distinctifs  oontre- 
its  ou  altérés,  ou  des  noms,  des  marques  ou  des  signes  distinc- 
's  susceptibles  d'induire  l'acbeteur  en  erreur  quant  à  l'origine 
I  à  la  qualité  de  ces  objets,  sera  passible,  si  la  propriété  des 
uvres,  des  noms,  des  marques  uu  des  signes  dont  il  s'agit  a  été 
gaiement  enregistrée  dans  le  Venezuela,  d'un  emprisonnement 
i  un  k  douze  mois  et  d'une  amende  de  50  à  2,000  bolivars. 


>  déloyale. 
—  Sappr«««ioit  du  non 
in  ve«-lntérét« . 

Commet  un  acte  de  concurrence  déloyale  ou  au  moim 


^  V-.."^^~»    -  -,-   -,  --„^-,,^,— -.->-^y-^  -y-, 


—  159  - 

un  acte  dommageable  tombant  sous  Vapplication  de  Varti- 
cle  1382  du  Code  civil  y  le  commerçant  qui  distribue  gratui- 
tement à  sa  clientèle  un  almanach  que  les  négociants  d'une 
ville  ont  fait  éditer  au  moyen  d'une  subvention  versée  par 
ux  et  indiquant  à  titre  de  réclame  leur  adresse^  leur  genre 
de  commerce  et  leur  spécialité,  après  avoir  pris  soin  de 
coller  ensemble  les  feuillets  oii  figure  l'annonce  de  son  con- 
current^ de  manière  à  ne  laisser  que  celle  qui  lui  est  per- 
sonnelle (1). 

(C.  de  Riom,  28  mars  1900.  ~  fioagerolle  c  Guillot.) 

Ainsi  jugé  par  arrêt  du  28  mars  1900,  sous  la  présidence 
de  M.  Vacher,  premier  président,  après  plaidoiries  de 
M**"  MoNANOEs  (du  barreau  de  Monlluçon)  et  Lacarrièrb,  avo- 
cats, et  conclusions  de  M.  Delpy,  avocat  général, sur  appel 
d'un  jugement  du  7  février  1899  : 

La  Cour,  Considérant  qu'au  moyen  d'une  subvention  versée 
par  eux,  les  négociants  de  Commentry  ont  fait  éditer  pour  Tannée 
i899,  par  Laurent,  libraire  dans  la  même  ville,  un  almanach  dit 
Almanach  de  Commentry  indiquant  à  titre  de  réclame  leur 
adresse,  leur  genre  de  commerce  et  leurs  spécialités  ;  que  le  nom 
de  Bougerolle  épicier  à  Commentry  figure  dans  cet  almanach  à 
la  page  40,  avec  toutes  les  indications  se  référant  à  son  com- 
merce; qu'il  en  est  de  même  à  la  page  29  de  Guillot  également, 
épicier  dans  la  même  localité  ; 

Considérant  que  Guillot,  ayant  acheté,  aux  environs  du  jour  de 
l'an  1895,  200  exemplaires  dudit  almanach,  lésa  distribués  gra- 
tuitement à  un  certain  nombre  de  ses  clients,  après  avoir  fait 
disparaître  Tinsertion  concernant  Bougerolle,  en  collant  Tune  à 
Tautre  les  pages  40  et  41  de  cette  brochure  ;  qu6  le  fait  a  été 
régulièrement  constaté  par  acte  de  Pobeaud  huissier  en  date  du 
30  décembre  1899; 

Considérant  que  c'est  à  tort  que  les  premiers  juges  ont  consi- 
déré cet  acte  de  Guillot  comme  sinon  correct,  du  moins  parfaite- 
ment licite  et  accompli  dans  la  plénitude  de  son  droit; 

Considérant  qu'en  effet,  cette  manœuvre  contraire  à.  la  loyauté 
commerciale  avait  pour  eiïet  de  supprimer,  dans  les  exemplaires 
achetés  et  distribués  par  Guillot,  la  publicité  payée  par  Bougerolle 
et  était  de  nature  par  cela  même  à  porter  à  autrui  un  certain  pré- 
judice. 

(1)  Sur  la  concurrence  déloyale  au  moyen  d'annonces  et  prospectas  v. 
PouUlet,  Conc.  déL,  n«  614.—  Gomp.  Orléans,  3  décembre  1898,  Boursy, 
Ann.  1899.182. 


-  ^  r"^  "^n^y^  1 1    ' 


^  ■ 


—  160  — 

Considérant  qu'elle  peut  dès  lors  être  considérée  comme  un 
acte  de  concurrence  déloyale,  et  qu'au  dit  cas  elle  constitue,  sans 
doute  possible,  un  fait  dommageable  tombant  sous  Tapplication 
de  l'article  1382  du  Gode  civil  ;  que,  dès  lors,  il  y  a  lieu,  aa  regard 
de  la  cause  et  aux  deux  points  de  vue  qui  précèdent,  d'accorder  à 
Bougerolle  une  réparation  du  préjudice  par  lui  éprouvé  ; 

Mais  considérant  que  le  préjudice  a  été  peu  considérable,  la 
distribution  de  Talmanach  ainsi  altéré  par  les  soins  de  Guillot 
ayant  été  peu  étendue  ;  que  la  somme  de  2000  francs  demandée 
par  rappelant  à  titre  de  dommages-intérêts  est  notoirement  exa- 
gérée ;  que  la  Cour  possède  les  éléments  d*apprécialion  néces- 
saires pour  Hxer  à  200  francs  le  montant  de  ladite  réparation  ; 

Par  ces  motifs,  Dit  mal  jugé,  bien  appelé,  émendant,  condamne 
Guillot  à  payer  et  porter  à  Bougerolle  la  somme  de  200  francs 
à  titre  de  dommages-intéréts,tantpour  le  fait  de  concurrence  dé- 
loyale que  pour  application  de  l'article  1382  du  Gode  civil;  lai 
fait  défense  de  distribuer  à  l'avenir  Falmanach  de  Commentry 
tronqué  ou  altéré  par  collage  des  feuilles  ou  autrement,  sous 
peine  de  100  francs  de  dommages-intérêts  par  chaque  fait  nouveau 
dûment  constaté. 


Art.  4189. 

Concurrence  licite.  —  AlCKléle»  du  domnlne 
public,  —  DénomlnnClonis  différente*. 

On  ne  saurait  voir  une  similitude  dommageable  dans  rem- 
ploi des  termes  /'Inusable  et  /'Indéchirable  pour  désigner 
des  serviettes  d'écolier  ou  d'homme  d'affaires^  ces  deux  ex- 
pressions  indiquant  des  qualités  différentes  et  se  présentant 
chacune  à  Vesprit  avec  un  sens  particulier  (1), 

Le  fait  de  vendre^  comme  un  concurrent,  des  serviettes 
caractérisées  par  l'arrêt  des  coutures  au  moyen  d^ œillets  mé^ 
talliquesypar  douzaines  dans  un  casier  formant  plan  incliné 
et  en  les  présentant  par  rang  de  tailles^  ne  constitue  pas  un 
acte  de  concurrence  déloyale, alors  quilest  constaté  que  les 
serviettes  ne  sont  pas  nouvelles  en  soi,  que  ces  disposi- 
lions  sont  généralement  usitées  dans  le  commerce  des  mêmes 
articles  et  que  le  nom  donné  à  ces  serviettes,  de  fabrication 
connue,  est  différent  (2). 

(1)  Sur  la  concurrence  déloyale  pur  usurpation  de  dénomination ,  v, 
Pouillet,  Marques^  n^  460  et  s.  et  la  jurisprudence  allée. 

(2)  Sur  l'imitation  de  l'aspect  d'ensemble  d'une  marchandise,  Pouiliet 


—  161  — 

(C.  de  Paris,  12  juillet  1900.  —  Herment  c,  Koppenhague.) 

A  la  date  du  5  janvier  1898,  le  Tribunal  de  commerce  de 
la  Seine,  sous  la  présidence  de  M.  Legrand,  a  rendu  le  ju- 
gement suivant  : 

Le  Tribunal,  Attendu  que  la  demande  originairement  portée 
devant  ce  Tribunal,  tendait  :  1<>  A  voir  dire  que  Herment  était 
propriétaire  exclusif  des  modèles  de  fabrication  pour  serviettes 
d'écoliers  par  lui  déposés  au  conseil  des  prud'hommes  de  la  Seine 
le  5  décembre  1893  ;  2<»  A  voir  défendre  à  Koppenhague  de  fabri- 
quer à  l'avenir  des  serviettes  dont  les  coutures  seraient  arrêtées 
aux  huit  coins  par  des  œillets  en  métal  ;  3°  A  voir  défendre  éga- 
lement à  ce  dernier  de  mettre  en  vente  des  serviettes  ainsi 
fabriquées,  antres  que  celles  du  demandeur,  le  tout  à  peine  de 
100  francs  par  chaque  contravention  constatée  ;  4*  A  voir  or- 
donner que  dans  le  jour  du  jugement  à  intervenir,  Koppenhague 
serait  tenu  de  détruire  toutes  les  serviettes  fabriquées  d'après 
le  modèle  du  demandeur  à  peine  de  5.000  francs  de  dommages- 
intérêts  ;  5«  Enfin  à  s'entendre  condamner  Koppenhague  à  5.000 
francs  de  dommages-intérêts  pour  le  préjudice  causé  tant  par 
cette  fabrication  que  par  l'usage  qui  en  avait  été  fait  : 

Sur  l'ensemble  des  demandes  : 

Attendu  que  Herment  appuie  ses  prétentions  sur  un  dépôt  de 
son  modèle  de  serviette  par  lui  fait  au  Conseil  des  Prud'hommes 
Je  5  décembre  1893,au  triple  point  de  vue  de  leur  confection  avec 
œillets  métalliques,  des  noms  de  «'  l'indéchirable  »  qu'il  leur  a 
donné  et  de  la  marque  A.  H.  dont  il  les  a  revêtues  ;  qu'il  prétend 
que  ce  dépôt  fait  par  application  de  la  loi  du  18  mars  1806  au- 
rait pour  effet  de  lui  conférer  un  droit  privatif  à  l'exploitation 
des  serviettes  à  coutures  protégées  paç  des  œillets  ;  que  dès  lors 
Koppenhague,  en  en  mettant  de  semblables  en  vente  sous  la  dé- 
nomination «  l'Inusable  »  avec  les  initiales  A.  K.  se  serait  livré 
à  une  concurrence  déloyale  à  son  encontre  ;  que  ce  fait  ressorti- 
rait d'ailleurs  avec  plus  d'évidence  encore  de  cette  circonstance 
que  le  défendeur  vendrait  comme  lui  ses  serviettes  par  douzai- 
nes et  en  boites  presque  semblables  aux  siennes  ;  qu'en  consé- 
quence il  y  aurait  lieu  de  prendre  à  son  égard  les  diverses  me- 
sures ci-dessus  énumérées  et  de  le  contraindre  à  la  réparation 
du  préjudice  qu'il  lui  aurait  causé  ; 

Mais  attendu  que  le  dépôt  d'un  modèle  au  conseil  des  pru.- 
d'hommes  ne  saurait  assurer  un  droit  de  priorité  à  un  fabricant 
qu'à  la  condition  essentielle  que  son  modèle  soit  nouveau  ; 

èod    loc,  no473.  —  Comp.  Paris,  10  décembre  1856,  Guillout,  Ann,i 
57.123;  Caen,  il  janvier  1871,  Carpentier,  Ann.,  72.333.  ^^ 


•V    ■    %-,\ 


■:  ^:^ 


TT 


—  162  — 

Qu'il  appert  des  débats  et  de  Tinstruction  ordonnée  par  ce 
tribunal  que  tel  n'a  pas  été  le  cas  en  Tespèce,  des  serviettes  gar- 
nies d'œillets  métalliques  émanant  d'autres  maisons  que  celle 
du  demandeur  étant  d'une  vente  courante  dans  le  commerce  de 
la  place  de  Paris  depuis  4  889  c'est-à-dire  depuis  quatre  années 
avant  le  dépôt  dont  excipe  Herment; 

Et  attendu  qu'en  ce  qui  touche  la  marque  ce  l'Indéchirable  k 
et  les  initiales  A.  H.^  le  dépôt  fait  au  greffe  du  conseil  des  prud'- 
hommes est  inopérant,  leur  propriété  ne  pouvant  s'affirmer 
que  par  un  dépôt  au  grefTe  du  tribunal  de  commerce  efîectué 
d'après  les  dispositions  de  la  loi  du  23  juin  1857  ; 

Qu'au  reste,  il  n'apparaît  pas  qu'une  similitude  dommageable 
puisse  être  relevée  entre  les  termes  «  l'Inusable  >*  et  «  l'Indéchi- 
rable »  employés  par  les  parties,  ces  deux  expressions  indiquant 
des  qualités  différentes  et  se  présentant  chacune  à  l'esprit  avec 
un  sens  particulier  ; 

Attendu  que  le  tribunal  estime  en  outre  qu'on  ne  saurait  faire 
reproche  àKoppenhague  d'avoir  fait  usage  de  ses  initiales  A.  E. 
qui  ne  sont  pas  celles  du  demandeur,  ni  v.oir  l'indice  d'une  con- 
currence déloyale  dans  le  fait  d'avoir  vendu  par  douzaines  et 
dans  des  boites,  en  fait  dissemblables  de  celles  de  Herment,  des 
serviettes  qui  avaient  cours  dans  le  commerce,  longtemps  avant 
que  celui-ci  en  ait  entrepris  la  fabrication  : 

Que  la  demande  de  ce  dernier  doit  donc  être  repoussée  à  tou- 
tes Qns  qu'elle  est  introduite. 

Par  ces  motiks,  Déclare  Herment  mal  fondé  en  toutes  ses  de- 
mandes, fins  et  conclusions,  l'en  déboute,  et  le  condamne  par  les 
voies  de  droit  en  tous  les  dépens. 

M.  Herment  ayant  interjeté  appel  de  ce  jugement,  la 
Cour  de  Paris,  sous  la  présidence  de  M.  Hauel,  président, 
après  plaidoiries  de  M"  Claro  et  Deroste,  avocats  et 
conclusions  de  M.  Fourniek,  substitut  du  procureur  géné- 
ral, a,  le  12  juillet  1900,  rendu  l'arrêt  confirmalif  suivant. 

La  Cour,  Adoptant  les  motifs  du  jugement  ; 

Considérant,  en  outre,  que  Herment  reproche  à  Koppenhague 

(l'avoir  commis  des  actes  de  concurrence  illicite  en  copiant  les 

dispositions  nouvelles  qu'il  aurait  imaginées  pour  la  vente  des 

serviettes  d'écoliers  ou  hommes  d'affaires  lesquelles  consistaient 

dans  l'arrêt  des  coulures  par  des  œillets  métalliques,  dans  la  dé- 

signatinn  de  ses  produits  par  le  nom  particulier  VIndéchirabie 

et  dans  leur  mise  en  vente  dans  un  casier  formant  plan  incliné» 

et  pre'sentant  les  serviettes  par  rang  de  tailles; 


—  163  — 

Considérant  que  Tensemble  de  ces  dispositions  n'offre  aucun 
caractère  de  nouveauté  et  d'originalité,qu'elles  sont  généralement 
usitées  dans  le  commerce  des  mêmes  articles  et  qu'il  n'est  nul- 
lement établi,  que  Koppenhague  qui  a  donné  un  nom  différent 
à  ses  serviettes  ait  causé  un  préjudice  à  l'appelant. 

Par  ces  motifs,  Déclare  Herment  mal  fondé  dans  ses  deman- 
des, fins  et  conclusions,  Ten  déboute,  confirme. 


Art.  4190. 

Brevet  'Wlllame.  —  Combina  tison  nonveUe.  —  Contre- 
façon. —  Antériorité.  —  Divulgation,  ~  Témolflrna- 
ge.  —  Correispondanee.  —  Liettre-nil»islve.  —  Usa^e 
dana  une  usine  étrangrére. 

Esi  brevelable  U7ie  machine  destinée  à  la  pose  des  filins  de 
matière  plastique  dans  les  couvercles  des  boîtes  de  conserves^ 
comprenant  deux  organes  principaux  ;  un  organe  mâle  for- 
mé par  un  manchon  chauffé  directement  par  le  gaz  d'éclai- 
rage^ et  un  organe  femelle^  adapté  sur  une  glissière j  formé 
de  deux  tubes  concentriques  coulissant  Vun  dans  Vautre  au 
moyen  d'un  ressort  à  boudin,  alors  qu'antérieurement  au 
brevet^  il  existait  déjà  une  machine  destinée  au  même  usa- 
ge^ comprenant  également  deux  organes,  un  organe  mâle, 
formé  d'un  tampon  plein  non  chauffé,  et  un  organe  femelle 
semblable  à  celui  de  la  machine  brevetée  mais  non  monté 
sur  glissière  (1). 

Doit  être  considérée  comme  une  contrefaçon  une  machine 
permettant  l'emploi  simultané  de  la  chaleur  et  de  la  pres- 
sion, gui  malgré  l'absence  de  glissière  et  l'adoption  d'un 
mode  de  chauffage  différent,  pour  l'organe  mâle,  repro- 
duit néanmoins  dans  leurs  particularités  ou  éléments  carac- 
téristiques la  combinaison  de  ces  deux  organes  princi- 
paux (2). 

Lorsque  une  antériorité  invoquée  contre  un  brevet  se  pré- 

(1-2)  Sur  la  brevetabilité  et  la  contrefaçon  des  combinaisons  nouvelles 
d'éléments  connus,  V.  Pouillet  {Brev,  ifinv.)^  n*  46  et  suiv.^n»  727  et 
suiv.et  la  jurisprudence  citée.  —  Comp.  Gass.req.,8  août  1897,  iNicolas, 
i4nn.,  99.65  ;  Cass.»  26oct.  96,  Guillaumin,  Ann.,  99.66  ;  Cass.,  14  avril 
1899,  Leoni,  Ann,,  99.246:  Paris,  15  mars  19U(),  Gruson,  Ann.,  1900. 
234  ;  Hiom,  5  avril  1900,  Chàtillon,  Ann.,  1900. 


—  164  — 

sente  entourée  de  circonstances  suspectes,  elle  doit  être  écar^ 
tée  (Résoin  par  le  tribunal)  (1). 

Des  attestations  et  des  témoignages^par  eux-mêmes  pro- 
bants, ne  peuvent  permettre  de  prononcer  la  nullité  cTun 
brevety  quand  ils  trouvent  leur  contradiction  dans  une  cor- 
respondance antérieure  (2). 

Ne  constitue  pas  antériorité  Findication  d'un  appareil 
dans  une  lettre-missive  si  la  description  n'étml  pas  suffisam- 
ment claire^  dans  l'état  des  connaissances  à  cette  époque^ 
pour  permettre  la  fabrication  de  V appareil  sans  un  effort 
considérable  d'invention  de  la  part  du  lecteur  (3) . 

Une  lettre  missive  ne  crée  pas  d'ailleurs  la  publicité,  étant 
de  sa  nature  toute  secrète;  mais  la  publicité  peut  résulter  des 
faits  qui  y  sont  rapportés  pour  lesquels  elle  constitue  un 
témoignage  irrécusable  (4). 

Le  mot  publicité  ne  saurait  avoir  un  autre  sens  dans  la 
loi  particulière  des  brevets,  que  celui  qui  lui  appartient 
par  sa  signification  même  qui  est  de  signifier  «  fait,  répan- 
du ou  livré  au  public  ».  La  loi  de  1844,  loin  de  restreindre 
le  sens  du  mot  publicité,  y  ajoute,  pour  pouvoir  rejeter  la 
prétention  du  breveté,  la  condition  que  la  publicité  ait  été  de 
nature  telle  qu'elle  ait  suffi  pour  l'exécution  de  l'invention; 
ne  répond  pas  à  cette  condition  la  seule  existence  dans  une 
usine  étrangère,  d'une  machine  similaire  à  la  machine  bre- 
vetée, résultat  du  perfectionnement  par  les  ingénieurs  ou 
ouvriers  de  l'usine  d'une  machine  antérieure,  alors  que  fu- 
sine  ne  se  livre  pas  à  la  fabrication  de  ces  machines^  mais 
se  borne  à  les  utiliser  dans  la  fabrication  de  ses  produits  ; 
qu'il  n'est  pas  produit  un  seul  document  pour  établir  qu^en 
fait  la  machine  a  été  connue  d'un  ingénieur,  d'un  construc- 
teur ou  d'un  homme  du  métier,  et,  que  l'existence  de  cette 
machine  ainsi  perfectionnée,  publiquement  connue  au  dire 
du  constructeur  de  la  machine  sus-énoncée,  a  été  découvertey 

(1  à  4)  Les  Tribunaux  ont  nn  pouvoir  souverain  d'appréciation  sur  les 
antériorités  qui  sont  invoquées  devant  eux  ;  si  elles  sont  obscures  ou  se 
présentent  entourées  de  circonstances  suspectes  ils  doivent  les  écarter. 
Sur  le  caractère  que  doivent  présenter  les  antériorités,  V.  Pouillet,  eod, 
loc.y  no  376  et  suiv.  Comp.  Paris,  7  janv.  1897,  Soc.  Âuer^  Ann.,  97. 
162  ;  et  ce  qui  concerne  les  lettres  missives  :  n«  884  et  Metz,  14  août  1850; 
Âlcan,  Sir.  50.2.604  ;  Paris,  17  fév.  1883,  Lecolnte,  Ann.,  84.109. 


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—  165  — 

en  fait^  non  par  ce  constructeur  lui-même^  mais  par  V ac- 
quéreur de  la  dite  machine  (1). 

Doit  être  déclaré  contrefacteur,  celui  qui  a  acheté  pour 
un  usage  commercial  une  machine  contrefaite  si  à  raison 
des  circonstances,  et  notamment  de  poursuites  intentées 
antérieurement  contre  le  constructeur  de  la  machine  in- 
criminée, il  est  établi  quil  a  agi  sciemment  :  il  ne  peut 
dans  ce  cas  invoquer  sa  bonne  foi  (2). 

(Trib.  civ.  Versailles,  18  mars  1896  et  2  février  1898.  —  C.  de  Paris, 
20  juin  1900.  —  Leroy  et  Cie,  et  Lecourt  c.  Wiilame.) 

Le  Tribunal,  Attendu  que  dans  son  brevet  du  18  novembre 
1885,  Wiilame  revendique  la  propriété  exclusive  d'un  outillage 
décrit  et  son  application  dans  le  but  de  placer  automatiquement 
au  point  voulu  du  couvercle  ou  du  fond  la  quantité  de  substance 
jointoyante  nécessaire  et  de  l'y  rendre  adhérente  de  manière  à 
obtenir  des  joints  homogènes  et  hermétiques  pouvant  remplacer 
les  joints  soudés  à  chaud  des  boites  métalliques. 

Attendu  que  cet  outillage  se  compose  de  deux  organes  princi- 
paux, Torgane  mâle  formé  d'un  manchon  creux  dans  lequel  le 
gaz  d'éclairage  est  introduit  et  porte  l'ensemble  à  la  température 
voulue,  et  l'organe  femelle  composé  de  deux  tubes  concentriques 

(1)  D'après  l'article  IM  de  la  loi  du  5  juillet  1844,  pour  que  l'invention 
cesse  d'être  nouvelle,  il  faut  qu'elle  ait  reçu  avant  la  prise  du  brevet  en 
France  et  à  l'étranger  une  publicité  suffisante  pour  pouvoir  être  exé- 
cutée. Or,  dans  respcce,  il  était  certain  que  la  machine,  des  plus  simples 
à  comprendre  à  première  inspection,  avait  été  exécutée,  qu'elle  avait 
fonctionné  dans  une  importante  usine,  ouverte  à  un  grand  nombre  de 
personnes,  même  en  dehors  des  ouvriers  et  employés  ;  le  public,  en  ad- 
mettant même  qu'on  ne  rapportât  pas  la  preuve  qu'il  eût  connu  Tin- 
vention,  était  à  même  de  la  connaître,  cela  aurait  dû  suffire  à  notre  avis, 
pour  faire  admettre  qu'il  y  avait  eu  publicité,  antérieurement  à  la  prise 
du  brevet.  Quant  aux  circonstances,  relevées  par  le  jugement,  que  la 
machine  opposée  comme  antériorité  était  le  résultat  de  perfectionnements 
par  les  ingénieurs  même  de  l'usine,  d'une  machine  antéiieure  ;  que  l'u- 
sine ne  livrait  pas  au  commerce  des  machines  semblables  mais  se  bor- 
nait à  les  employer  ;  qu'enfin,  la  prétendue  antériorité  avait  été  décou- 
verte non  parle  constructeur  lui-même  delà  machine  incriminée  mais 
par  un  de  ses  clients,  elles  sont  manifestement  sans  intérêt  au  point 
de  vue  de  la  publicité.  Sur  retendue  de  la  publicité,  V.  Bédarride, 
no  370. 

(2)  La  jurisprudence  va  plus  loin  et  décide  que  celui  qui  a  acheté  pour 
un  usage  commercial  une  machine  contrefaite  doit  être  déclaré  contre- 
facteur aux  termes  de  l'article  40  de  la  loi  du  5  juillet  1844,  sans  qu'il 
puisse  invoquer  sa  bonne  foi.  V.  Pouillet,  n»  673  et  suiv.,  la  jurispru- 
dence  citée   et  surtout,   Cass.,    ch.  réunies,  30  oct.  1899,  Soc.   Auer, 

Ann.,  99.285. 

A.  T. 


—  166  — 

coulissant  l'un  dans  l'autre,  le  second  tube  reposant  sur  un  res- 
sort à  boudin,  qui,  l'opération  faite,  le  ramène  dans  sa  position 
primitive,  avec  cette  circonstance  que  le  dit  organe  femelle  se 
déplace  sur  une  glissière  qui  en  permet  la  manœuvre  et  facilite 
pour  l'ouvrier  la  pose  du  joint  qui  est  fixé  ultérieurement  par 
la  pression  de  l'organe  supérieur  chauffé  ; 

Attendu  que  quelle  que  soit  la  nomenclature  déjà  donnée 
par  diverses  décisions  judiciaires  ou  sollicitée  par  M.  Willame 
lui-même  des  organes  indispensables  de  cette  invention,  l'ensem- 
ble qu'elle  forme  paraît  au  Tribunal  susceptible  d'être  ramené 
aux  éléments  essentiels  suivants  pour  obtenir  le  résultat  indus- 
triel cherché  ;  savoir  :  un  organe  mâle  chauffé,  un  organe  fe- 
melle cédant  sous  la  pression  de  Torgane  supérieur,  et  revenan 
à  sa  position  primitive  par  TelTet  d'un  ressort  à  boudin  ; 

Attendu  que  la  glissière  qui  facilite  le  travail  et  en  assure  la 
promptitude  et  la  régularité,  n'est  pas  à  la  rigueur,  malgré  toute 
son  importance  tellement  indispensable  à  l'obtention  du  produit 
désiré  que  sa  réunion  seule  aux  antres  éléments  ait  pu  rendre 
l'invention  de  Willame  brevelable,  bien  qu'il  ait  été  jugé  que 
son  emploi  dans  l'appareil  saisi  ait  donné  la  preuve  d'une  con- 
trefaçon ; 

Attendu  que  Ch.  Leroy  et  Cie  reconnaissent  qu'ils  ont  fourni  à 
Lecourt  l'appareil  saisi  dans  son  usine,  mais  qu'ils  soutiennent 
d'abord  que  l'appareil  argué  de  contrefaçon  est  de  tous  points 
semblable  à  celui  qui  avait  été  breveté  en  4866  par  un  sieur  Bour- 
gine  et  qui  est  aujourd'hui  tombé  dans  le  domaine  public; 

Attendu  que  cet  appareil  Bôurgine  a  déjà  été  produit  comme 
antériorité  dans  une  précédente  instance  en  contrefaçon  suivie 
devant  le  Tribunal  civil  de  Bordeaux,  que  devant  cette  juridiction 
il  est  vrai,  l'appareil  saisi  différait  beaucoup  plus  du  4ype  imaginé 
par  Bonrgine  que  celui  qui  a  fait  l'objet  du  procès  actuel,  que 
notamment  le  cylindre  ou  organe  supérieur  formait  un  récipient 
à  gaz,  au  lieu  d'être  un  bloc  massif,  agissant  sur  le  filin  par  le 
seul  effet  de  la  pression,  comme  dans  le  véritable  appareil  Bôur- 
gine ; 

Attendu  que  la  machine  Bôurgine  véritable,  diffère  essentielle- 
ment de  l'appareil  saisi  chez  Lecourt  en  ce  qu'il  ne  présente  pas 
le  réflecteur  ni  la  couronne  à  gaz  percée  de  trous  capillaires  qui 
ne  sont  que  le  déplacement  d'une  des  particularités  de  l'invention 
de  Willame,  du  dedans  d'un  manchon  creux  au  dehors  d'un  cy- 
lindre plein  ; 

Attendu  que  Ch.  Leroy  contrefacteur  habituel  en  quelque  sorte 
de  Willame  comprend  d'autant  mieux  l'importance  du  chauffage 
de  l'organe  supérieur  pour  l'obtention  du  jointoyage  hermétique, 
qu'il   avoue  que  c'est  de  parti  pris  que  ne  pouvant  continuer  la 


■J|^"1P*  *"   •  TP  ^^.'-rf^--  .  S-^^^S^ •  ,  ^ ;      r,.-w-.™-.,rw-T ,— ,-- 


■■T 


—  167  — 

fabrication  des  appareils  Willame,  que  le  Tribunal  et  la  Cour 
de  Bordeaux  avaient  jugés  contrefait,  il  s'est  décidé  à  copier  le 
modèle  de  Bour^ine  ; 

Attendu  qu'il  soutient  il  est  vrai,  que  le  fait  d'user  de  la  cha- 
leur pour  faciliter  l'adhérence  du  filin  n'est  point  susceptible  d'un 
brevet  mais  qu'il  ne  peut  expliquer  comment  au  lieu  de  s'en  te- 
nir au  type  Bourginc,  agissant  parle  seul  effet  de  la  pression,  il 
a  imité  c'est-à-dire  contrefait  Willame  en  cherchant  comme  Leroy 
à  accumuler  l'emploi  de  la  chaleur  et  de  la  pression  et  à  dissimu- 
ler son  imitation  en  apportant  le  gaz  à  la  périphérie  du  cylindre 
au  lieu  de  le  maintenir  à  Tintérieur  ; 

Sur  les  conclusions  subsidiaires  des  défendeurs  : 

Attendu  que  par  des  conclusions  subsidiaires,  Leroy  a  produit 
un  articulât  contenant  quatre  faits;  que  Lecourt  s'est  joint  à  cette 
deniande  d'enquête  en  ajoutant  divers  chefs  et  qu'ils  demandent 
d'être  admis  à  prouver  particulièrement  par  la  voie  d'une  exper- 
tise ; 

Attendu  que  ces  faits  tendent  à  démontrer  que  l'invention  de 
Willame  était  dans  le  domaine  public  avant  la  prise  du  brevet  ; 
r*  Parce  que  la  maison  Kircheis  de  Aue  en  Saxe  aurait  vendu 
depuis  1880  et  même  avant  cette  époque  des  appareils  réalisant 
le  collage  des  joints  par  les  moyens  précisés  dans  la  description 
du  brevet  Willame  (faits  un,  deux  et  trois  de  l'articulât  Lecourt 
et  trois  de  l'articulât  Leroy)  ;  2°  parce  que  la  maison  Kargès  de 
Brunswick  a  livré  à  la  maison  Ign.  Eislerà  Inzersdorf  (Autriche) 
des  mêmes  appareils  (articles  un  et  deux  de  l'articulât  Leroy, 
quatre  et  cinq  de  l'articulât  Lecourt)  ;  3°  parce  que  en  1885,  avant 
la  prise  du  brevet,  la  même  machine  a  élé  offerte  à  un  négociant 
de  la  ville  de  Carentan  (numéro  six  de  l'articulât  Lecourt)  ;  4°  par 
ce  que  Kircheis  en  novembre  1885,  a  signé  avec  Willame  un 
contrat  par  lequel  il  s'engageait  à  ne  pas  fournir  en  France  ses 
appareils  de  jointoyage  ; 

Attendu,  qu'en  admettant  que  la  pertinence  et  la  précision  de 
ces  faits  ne  soient  pas  suffisantes,  le  demandeur  en  conteste 
l'admissibilité  ; 

Attendu  que  suivant  lui  les  défendeurs  devraient  produiront 
des  catalogues  des  maisons  Kargès  et  Erdmann  Kircheis,  anté- 
rieurs à  l'année  1885,  sur  lesquels  figurerait  l'annonce  de  l'ap- 
pareil breveté  par  Willame,  que  lui  demandeur  produit  la  75^ 
édition  du  mois  de  mars  de  l'année  1887  de  la  maison  de  cons- 
truction de  Kircheis  sur  laquelle  aucune  mention  n'est  faite 
d'un  semblable  appareil  ; 

Attendu  que  sur  ce  sujet,  une  lettre  datée  du  4  février  1896  et 
émanée  du  représentant  de  la  dite  maison  Kircheis  porte  seule- 
ment que  cette  maison  n'a  eu  aucune  occasion  de  vendre  en 


—  168  — 

France  des  machines  et  appareils  à  poser  les  joints,  parce  que 
par  un  traité  spécial  elle  en  avait  abandonné  la  fabrication 
à  la  maison  Willame,  que  cette  expression  un  peu  vague  ne 
permet  pas  de  considérer  comme  prouvé  que  Kircheis  n'a  pas 
vendu  ces  appareils  avant    1885  ailleurs  qu'en  France  ; 

Attendu  que  dans  la  même  lettre,  il  est  fait  allusion  à  un 
traité  dont  Willame  produit  la  copie,  mais  que  cette  copie  ne 
coïncide  pas  avec  les  termes  de  la  lettre  précitée,  le  traité  pré- 
sente au  Tribunal  ne  paraissant  porter  que  sur  la  cession  d'une 
machine  à  fermer  hermétiquement  les  boites  en  fer  blanc  aa 
moyen  d'une  double  agrafe; 

Qu'il  serait  nécessaire  de  préciser  par  une  enquête  les  conven- 
tions passées  entre  les  deux  maisons  au  sujet  de  la  machine  liti- 
gieuse ou  d'un  appareil  similaire,  que  si  Kircheis  a  abandonné 
le  droit  de  fabriquer  l'appareil  àjointoyer  à  Willame,  il  ne  s'en 
suit  pas  nécessairement  qu'il  n'en  ait  pas  lui-même  fabriqué  ou 
vendu  avant  les  25,  31  mars  1885,  ou  qu'il  lui  ait  fait  la  cession 
d^un  brevet  ou  du  droit  à  un  brevet  sur  cette  machine  ; 

Attendu  que  par  la  même  lettre  du  4  février  1896,  Kircheis  dit 
bien  que  le  sieur  Asche  alors  son  représentant  à  Paris,  avait  été 
autorisé  à  vendre  de  ces  appareils  à  la  condition  de  les  prendre 
là  bas,  ce  qui  semble  indiquer  à  la  maison  Willame,  et  que  ce 
sieur  Asche  l'avait  invité  à  diverses  reprises  à  les  fabriquer  lui- 
même,  ce  qu'il  avait  refusé  par  suite  des  engagements  pris,mais 
que  sur  ce  point  encore  une  enquête  seule  pourra  faire  connaître 
dans  quelles  conditions  précises  s'étaient  présentées  les  propo- 
sitions de  Asche  et  les  refus  de  la  maison  qu'il  représentait  ; 

Attendu  qu'il  est  allégué  que  Asche  avait  en  septembre  1885, 
dans  une  lettre  dont  la  reproduction  photographique  est  pro- 
duite, proposé  l'appareil  breveté  à  un  de  ses  correspondants,  le 
sieur  Naux,  négociant  à  Garentan; 

Qu'en  admettant  que  les  termes  de  la  lettre  ne  suffisent  pas, 
par  la  description  qu'elle  contient,  à  constituera  publication  de 
l'invention,  il  est  possible  que  l'enquête  produise  des  éléments 
importants  pour  établir  la  publicité  ; 

Attendu  que  de  ces  considérations,  il  ressort  que  Willame  n'a 
pas  établi  que  les  faits  allégués  soient  inadmissibles  ; 

Attendu  que  l'expertise  sollicitée  de  préférence  par  Lecourt, 
I  n'est  qu'un  moyen  détourné  de  faire  procéder  à  une  enquête,  sans 

!  l'entourer  des  garanties  nécessaires  propres  à  ce  moyen  d'ins- 

I  tr   uction 


Par  crs  motifs,  Le  tribunal  joint  les  instances,  maintient  en 
cause  Lecourt  dont  la  bonne  foi  n'est  pas  établie  ; 

Dit  et  ordonne  avant  faire  droit,  qu'à  l'audience  du  mercredi 


•Kl  I KWf'J  .'W>ÇT"«    '-'^  ■•' — Z-^'^T^r — ^^^■^■  w^wy.  i»n.,inr 


—   169  — 

i3  mai  prochain  les  défendeurs  seront  admis  à  faire  la  preuve 
des  faits  articulés  ;  savoir  : 

Premièrement,  Leroy  et  Cie  :  1°  Dès  i 880,  Kargèsde  Bruns- 
wick fabriquait  l'appareil  à  poser  le  joint  avec  tampon  supérieur 
chauffé,  le  tout  sur  un  chariot  ;  2»  II  en  a  livré  dès  cette  époque 
à  la  maison  Ign.  Eisler  à  Inzersdorf  (Autriche)  ;  3®  Kircheis 
d'Aue,  en  Saxe,  en  fabriquait  à  la  même  époque,  et  son  re- 
présentant en  France,  Otto  Asche,  en  offrait  aux  fabricants,  no- 
tamment à  un  sieur  Naux  en  septembre  1885  ;  4<>  Kircheis,  en 
novembre  4885,  s*est  mis  d'accord  avec  Willame  pour  n'en  pas 
livrer  en  France  ;  un  contrat  fut  signé  entre  eux  à  cette  époque, 
à  la  suite  duquel  Willame  prit  son  brevet  du  18  novembre  1885, 
qu'il  savait  être  sans  nulle  valeur  ; 

Deuxièmement,  Lecourt  :  i^  Dès  avant  1880,  la  maison  Kircheis 
de  Aue  en  Saxe,  fabriquait  et  vendait  couramment  en  Allema- 
gne, dans  les  pays  d'Europe  et  en  France^  une  machine  à  coller 
par  chauffage  et  pression,  les  joints  destinés  h  fermer  herméti- 
quement les  bottes  de  produits  alimentaires  ;  2<^Les  machines  à 
coller  les  joints,  fabriquées  et  vendues  par  la  maison  Kircheis 
comportent  exactement  les  trois  éléments  de  composition  re- 
vendiquées depuis  dans  le  brevet  Willame  et  Cie,  soit  un  cy- 
lindre supérieur  chauffé  par  le  gaz,  un  cylindre  inférieur  com- 
posé de  deux  anneaux  concentriques,  une  glissière  formant 
chariot;  3»  Les  machines  fabriquées  et  vendues  avant  1880  réa- 
lisaient le  collage  des  joints  par  les  moyens  précisés  depuis  la 
description  du  brevet  Willame,  soit  par  le  chauffage  du  cylin- 
dre supérieur,  soit  par  l'affaissement  d'un  des  anneaux  du  cy- 
lindre inférieur,  soit  par  la  pression  avec  chaleur  sur  le  joint 
à  fixer)  4<»  Dès  la  même  époque  de  1880,  la  maison  Kargès  de 
Brunswick  fabriquait  également  la  machine  à  coller  les  joints 
par  pression  et  chauffage  avec  cylilidre  supérieur,  cylindre  in- 
férieur et  mouvement  de  pression  avec  chauffage,  et  elle  offrait 
cette  machine  à  la  vente  par  des  représentants,  et  elle  la  li- 
vrait aux  fabriques  de  produits  alimentaires  ;  5o  La  maison 
Eisler  et  Cie  d'Inzersdorf,  près  Vienne,  se  servait  dès  une  épo- 
que rapprochée  de  4880,  de  la  machine  à  coller  les  joints  pour 
adapter  sur  les  couvercles  des  boîtes  à  conserves,  des  rondelles 
de  caoutchouc  par  le  triple  moyen  des  cylindres,  du  chauffage  et 
de  la  pression  ;  6®  Depuis  1880,  les  représentants  de  fabriques  ont 
constamment  offert  en  France  la  livraison  de  machines  à  coller 
les  joints,  provenant  de  divers  fabricants.  En  septembre  1885, 
notamment  avant  le  brevet  Willame,  la  machine  à  coller  les 
joints  a  été  offerte  et  vendue  à  un  fabricant  de  produits  alimen- 
taires de  Garentan  ; 

Réserve  aux  demandeurs  la  preuve  contraire. 


I  ■  ■ .  *m\  m^fffH^ttÊ 


Sur  l'enquête,  le  Tribunal  de  Versailles,  après  conclu- 
01)  de  M.  Mattrb,  substilul,  a  statué  en  ces  termes  le 

février  1898: 

Lb  Tribunal,    En  ce  qui  concerne  les  conclusions  reconTen- 

onnelles  lie  Lecourt  tendant  à  faire  dire  par  le  tribunal  qne  la 
achine  à  coller  les  joints,  revendiquée  par  Willame  et  Ci* 
i[  composée  d'éléments  appartenant  au  domaine  public; 

Attendu  que  tes  considérants  des  jugements  de  ce  siège  dn 
)  mars  1896  ont  déjà  écarté  cette  conclusion,  et  qu'il  en  résulte 
ne  l'appareil  de  Willame  dans  son  ensemble,  et  tel  qu'il  a  été 
îcrit  et  dessiné  pour  l'obtention  du  brevet,  est  ea  lui-même  nne 
ivention  brevetable  ; 

En  ce  qui  concerne  les  antériorités  invoquées  avant  la  précé- 
eiite  instance  : 

Attendu  qu'il  a  été  ordonné  par  le  même  jugement  qne  Lerov 
.  Cie  et  Lecourt  seraient  admis  k  faire  la  preuve  des  faits  par  eui 
-ticulés,  que  ces  faits  étaient  relatifs  à  des  faits  de  fabrication  et 
)  mise  en  vente  de  machines  similaires  à  coller  les  joints,  par 
s  maisons  Kargès  de  Brunswick,  Kircheis  d'Aue,  en  Saxe,  Eisler 
Inzersdorf,  près  Vienne  (Autriche),  qui  aurait  fait  usage  depuis 
IHO  d'une  machine  à  poser  les  joints,  identique  dans  son  fonc- 
«nnemenl  à  la  machine  brevetée  par  Willame  et  Cie, 
1»  En  ce  qui  touche  l'anlénorité  de  Kargis  ; 
Attendu  que  su['  l'antériorité  de  Kargès  de  Brunswick,  il  n'a 
ê  fait  aucune  preuve,  qu'il  y  a  lieu   seulement  de   retenir  sur 

point  qu'il  avait  été  allégué  dans  l'articulât  que  c'est  Kàtfii 
I  Brunswick  qui  avait  dèi>  1S80  vendu  l'appareil  à  la  maison 
sler  d'lnïer?dorf. 

2"  En  ce  qui  touche  rantériorité  de  Kircheis  : 
Attendu  que  les  preuves  de  l'antériorité  alléguée  ont  porté  sur 
ïis  faits  qu'il  convient  d'examiner  successivement  ; 
1»  Proposition  d'Otto  Asefte,  représentant  de  la  maison  Kircheis. 
Naux  fabricant  de  conserves  à  C;irantan  : 
Attendu  qu'à  l'enquête  faite  le  13  mai  1896  à  l'audience  du  Tri- 
nal   de  Versailles,  Otto  Asche  a  déclaré  que,  représentant  de 
rcheis  depuis  tSSS,  il  avait  su  qu'un  constructeur  avait  ven- 

à  Eialer  (sans  doute  d'Iii«rsdorf)  le  brevet  d'un  appareil  Mar- 
et  destiné  à  la  fermature  des  boites  de  conserves  moyennant 
D.OOO  francs,  que  cette  alTaire  avait  attiré  son  attention  ;  qu'il 
ait  été  avisé  en  1S81  que  Kircheis  avait  construit  de  nouvelles 
icliines  k  fermer  lus  boites  à  conserves,  qu'il  s'était  alors  rendu 
e\poditioii  d'Amsterdam  pour  y  voir  les  machines  exposées  de 
Jonghe,  représentant  en  Hollande,  de  cette  maison,  qu'il  avait 


—  171  — 

alors  écrit  à  cette  maison  et  s'était  mis  en  mesure  de  fournir  à 
la  clientèle  française  ; 

QuMl  ne  s'agissait  alors  que  des  machines  à  agrafer  et  qu'il 
avait  facilité  la  conclusion  d'un  traité  entre  la  maison  qu'il  re- 
présentait et  Willame  pour  ces  sortes  de  machines  ; 

Que  Naux,  ayant  eu  besoin  d'une  fermeture  plus  hermétique 
lui  avait  manifesté  le  désir  de  posséder  un  système  plus  parfait 
sous  ce  rapport,  et  qu'il  n'avait  éprouvé  aucune  difficulté  à  ima- 
giner l'appareil  dont  la  description  se  trouve  dans  sa  lettre  du 
29  septembre  1885  à  ce  même  Naux  ; 

Que  vers  la  fin  de  1885,  ayant  vu  justement  chez  Willame  un 
appareil  se  composant  d'un  tampon  chauffé  au  gaz  sous  lequel 
on  plaçait  le  couvercle  à  garnir  avec  le  joint,  et  encore  qu'une 
légère  pression  du  levier  suffisait  pour  coller  le  joint  au  couver- 
cle, cette  vue  l'avait  fait  sourire,  car  il  avait  remarqué  que  leurs 
idées  s'étaient  justement  rencontrées,  qu'il  ne  connaissait  pas 
la  maison  Eisler  d'ïnzersdorf  (Vienne),  laquelle  n'avait  point  à  ven- 
dre ces  appareils,  puisqu'elle  fabriquait  elle-même  des  conserves 
pour  l'armée; 

Attendu  que  le  témoin  Naux  entendu  à  la  même  audience,  a 
précisé  qu'il  avait  bien  reçu,  à  la  date,  la  lettre  du  29  septem- 
bre 1885  relative  à  la  machine  à  coller  le  joint,  mais  que  ce  n'est 
qu'à  la  date  du  12  mars  1886  (le  brevet  Willame  est  du  18  no- 
vembre 1885),  qu'il  avait  reçu  ce  nouvel  appareil; 

Attendu  que  de  ces  témoignages  et  de  leur  comparaison,  il 
ressort  que  Asche  ne  considère  pas  les  machines  à  coller  les 
joints  comme  inventées  par  la  maison  Kircheis,  qu'il  s'en  pré- 
tend l'inventeur  lui-même  et  soutient  qu'il  y  avait  eu  simple 
coïncidence  d'invention  entre  Willame  et  lui  ; 

Attendu  qu'il  est  possible,  pour  ne  pas  dire  probable,  que  Otto 
Asche  ait  vu  plus  ou  moins  complètement  dans  les  ateliers  de 
Willame,  la  machine  brevetée  parce  dernier,  en  cours  de  cons- 
truction, qu'il  en  a  fait  une  description  plus  ou  moins  exacte  dans 
la  lettre  du  29  septembre,  mais  qu'il  est  loin  de  prouver  qu'il  en 
ait  été  l'inventeur  lui-même  ; 

Attendu  d'autre  part  que  si  avec  la  connaissance  aujourd'hui 
acquise  grâce  aux  modèles  présentés  ou  aux  descriptions  du  bre- 
vet, la  lettre  du  29  septembre  peut  donner  une  idée  du  système, 
il  est  difficile  d'admettre  que  la  description  qu'elle  contient  et 
particulièrement  la  désignation  d'une  double  bague,  dont  une  à 
ressort  sur  laquelle  repose  la  corde  en  cuir  feutré,  en  ait  permis 
la  fabrication  sans  un  effort  considérable  d'invention  de  la  part 
du  lecteur  ; 

Attendu  en  tous  cas  que  l'invention  d'Asche  se  présente  entou- 


-r^- 

'> 


\* 


—  172  — 

rée  de  circonstances  suspectes  qui  doivent  la  faire  écarter  da 
débat. 

3°  De  l'antériorité  dite  de  Kircheis  ;  l'exposition  d^ Amsterdam 
et  l'achat  de  f^umann  : 

Attendu  que  le  témoin  Numann,  d'Amsterdam,  a  déclaré  à 
Tenquête  le  29  août  1896,  qu'en  Tannée  1883,  àTexposition  inter- 
nationale, une  machine  servant  à  fermer  des  boites  de  fer  blanc 
et  routillage  s'y  rapportant  pour,à  Taide  d'une  pression  au  moyen 
d'un  tampon  creux  chauffé  au  gaz,  fermer  avec  du  caoutchouc 
Temboitement  des  fonds  et  des  couvercles  de  boites,  avaient  été 
exposés  ; 

Qu'il  ajoute  que  cette  machine  a  été  exposée  par  de  Jooghe  à 
l'exposition  agricole  de  1884; 

Attendu  que  le  sieur  Hillebrand,  concessionnaire,  se  souvient 
d'avoir  autrefois  demandé  des  renseignements  à  de  Jonghe  sur 
les  machines  servant  à  la  fermeture  des  boites  à  conserves  ali- 
mentaires, et  qu'alors  celui-ci  lui  aurait  dit  qu'il  les  tenait  de 
Kircheis  d'Aue  en  Saxe,que  de  plus  de  Jonghe  lui  aurait  avoué  les 
avoir  mises  aux  expositions  de  4883  et  1884,  et  qu'enfin  il  aurait 
vu  l'appareil  acheté  par  Numann,  qui  se  rapportait  bien  à  celui 
décrit  ; 

Attendu  que  ces  témoignages  seraient  décisifs  si  Willame  ne 
faisait  à  l'aide  d'éléments  sérieux,  la  preuve  de  l'inexactitude  des 
faits  qu'ils  contiennent  ; 

Que  d'abord  il  est  à  remarquer  que  Numann  ne  fournit  pas  la 
facture  acquittée  de  de  Jonghe,  que  de  plus  une  carte  postale 
d'un  représentant  de  la  maison  de  Jonghe  à  Amsterdam,  datée 
du  2  septembre  i88Ô,démontre  qu'à  cette  dernière  date, Willame 
fournissait  les  appareils  à  poser  les  joints  à  la  maison  de  Jonghe, 
que  les  employés  de  cette  maison  n'en  connaissaient  pas  le  fonc- 
tionnement ; 

Attendu  que  par  lettre  du  15  mai  1890,  le  même  de  Jonghe 
demandait  à  Willame  une  machine  à  poser  les  joints, que  le  5  juil- 
let 1886,  la  maison  Willame  faisait  l'envoi  demandé  et  donnait 
les  instructions  pour  son  fonctionnement,  que  cette  lettre  rappe- 
lait la  visite  faite  par  de  Jonghe  lui-même  dans  les  ateliers  de 
Glichy  et  que  c'est  vraisemblablement  à  la  suite  de  cette  affaire 
que  la  carte  postale  du  2  septembre  fait  allusion  ; 

Attendu  que  Otto  Asche  n'a  pas  vu  en  1885  chez  de  Jonghe  les 
machines  en  question  ; 

Attendu  qu'il  est  à  peine  utile  de  faire  remarquer  que  si  de 
Jonghe  avait  vendu  en  1883,  comme  représentant  de  la  maison 
Kircheis,  des  machines  à  poser  les  joints,  il  n'en  aurait  pas 
fait  la  commande  en  1886  à  Willame,  qu'encore  moins,  lui  ou  ses 


Mf:-r-  T^wr-T^^-^v; 


,. -j —  .---■•— ,T  '  -7—-  f  -ttr 


—  173  — 

employés  n'auraient  point  été  en  état  d'en  comprendre  le  fonc- 
tionnement ; 

Attendu  qu'au  cours  du  délibéré,  une  attestation  du  contre- 
maître de  Wolff  de  la  maison  Numann  d'Amsterdam,  en  1884  et 
années  suivantes,porte  que  Toutil  servant  au  moyen  d'un  tampon 
creux  à  fixer,  par  le  chauffage  au  gaz  et  la  pression,  les  anneaux 
de  caoutchouc  au  couvercle  des  boites  de  conserves;  a  été  em- 
ployé sous  sa  surveillance  dès  i884; 

Attendu  que  cette  attestation  trouve  sa  contradiction  dans  la 
correspondance  de  la  maison  de  Jonghe,  avec  Willame  exami- 
née ci-dessus,  en  face  du  témoignage  de  Numann,  et  ne  saurait 
davantage  déterminer  la  conviction  des  juges  ; 

30  Existence  d'un  traité  secret  entre  Kircheis  Willame  : 

Attendu  que  Otto  Âsche  dans  sa  déposition  ci-dessus,  rappelle 
les  circonstances  du- traité  fait  entre  Kircheis  et  Willame  pour  les 
machines  à  agrafer,  traité  qui  se  passait  au  printemps  4885  ; 

Attendu  que  d'après  Asche,  de  Jonghe  avait  assisté  à  la  négo- 
ciation, que  les  termes  du  traité  sont  maintenant  connus  dans 
leur  entier,  et  qu'ils  ne  se  rapportent  pas  à  la  machine  liti- 
gieuse ; 

Attendu  qu'il  convient  même  de  remarquer  à  cette  occasion, 
que  le  fait  Numann,  Hillebrand,  de  Jonghe,  et  l'échange  des  cor- 
respondances produites  au  tribunal  est  de  nature  à  dissiper  les 
accusations  de  concert  entre  Kircheis  et  Willame  ; 

Qu'en  effet,  il  aurait  fallu  qu'en  prévision  du  procès  actuel,  et 
dès  1886,  de  Jonghe  représentant  de  Kircheis  et  Willame,  cession- 
naire  d'une  des  inventions  de  cette  maison,  s'entendissent  pour 
fournir  a  priori,  les  preuves  que  Kircheis  n'avait  pas  traité  en 
1885,  de  la  cession  de  l'invention  de  la  machine  à  fermer  les 
joints  ; 

4«  Antériorité  Eisler  d'Inzerdorf  : 

Attendu  qu'à  la  date  du  3  novembre  1896,  devant  le  représen- 
tant du  Tribunal  impérial  et  royal  de  Vienne,  Emile  Schulz,  direc- 
teur actuel  de  la  fabrique  de  conserves  Eisler  et  Cie,  a  déclaré 
que  depuis  1878,  la  fabrique  employait  des  machines  pour  établir 
la  fermeture  à  double  agrafe  pour  les  boites  à  conserves,  système 
dans  lequel  des  anneaux  en  caoutchouc  sont  employés  comme 
moyen  d'obturation  ; 

Qu'il  résulte  de  sa  déposition  que  la  maison  Eisler  avait  reçu  en 
1881  une  machine  Marquet,  dans  laquelle  le  disque  compresseur 
devait  être  chauffé  par  le  gaz,  que  les  propres  mécaniciens  de  la 
maison  avaient  en  1878,  disposé  dans  la  partie  intérieure,  un  res- 
sort à  spirales,  que  pendant  un  certain  temps  après  la  réception 
de  la  machine  Marquet,  on  avait  chauffé  les  anneaux  obturateurs 
au  moyen  de  la  vapeur,  mais  qu'à  partir  de  1887,  l'usine  ayant 


r»    l>  s'f»«V^.MV, 


—  174  — 

été  dotée  du  gaz  d'éclairage,  on  avait  utilisé  ce  gaz  pour  le  chauf- 
fage de  Tappareil  ; 

Attendu  que  le  témoin  Schulz  annonçait  qu'il  possédait  une 
photographie  de  la  machine  employée  par  sa  maison,  antérieu- 
rement à  1885  et  qu'il  la  ferait  parvenir  ; 

Attendu  que  cette  photographie  a  été  représentée  au  tribunal, 
qu'elle  a  été  accompagnée  depuis  de  dessins,  et  qu'en  outre  à  la 
date  des  10  et  14  janvier,  des  lettres  dont  les  originaux  et  traduc- 
tion ont  été  mis  sous  les  yeux  du  tribunal  après  communication, 
commentent  cette  déclaration  ; 

Attendu  que  la  comparaison  de  l'appareil  avec  celui  qui  a  été 
l'objet  du  brevet  Willame,  démontre  une  grande  analogie,  que  les 
différences  paraissent  consister  surtout  dans  l'absence  de  trous 
à  la  périphérie,  au  manchon  ou  organe  mâle;  dans  l'existence 
d'une  charnière  à  l'organe  femelle  et  dans  l'absence  de  glis- 
sières, et  quelques  menus  détails  même  moins  importants; 

Attendu  que  si  l'appareil  ainsi  transformé  et  perfectionné  par 
Ig.  Eisler  n'est  plus  l'appareil  Marquet  proprement  dit,  mais  cons- 
titue une  machine  propre  à  la  maison  qui  Ta  construit,  ce  qu'il 
n'est  pas  utile  d'examiner  pour  le  moment,  il  ne  pourrait,  en 
tous  cas,  être  opposé  comme  antériorité  à  la  maison  Willame 
et  Cie,  que  s'il  avait  été  rendu  public  ; 

Attendu  que  sur  ce  point,  les  parties  en  cause  proposent  des 
interprétations  différentes  de  l'article  31  de  la  loi  de  1844,  lequel 
avant  toute  discussion  doit  être  rappelé  dans  ses  termes  : 

«  Ne  sera  pas  réputée  nouvelle,  toute  invention,  découverte  ou 
application  qui,  en  France  ou  à  l'étranger  et  antérieurement  à  la 
date  du  dépôt  de  la  demande  aura  reçu  une  publicité  suffisante 
pour  pouvoir  être  exécutée.  »> 

Que  chaque  espèce  renferme  en  elle-même,  les  éléments  de  l'ap- 
plication de  cette  publicité  ; 

Qu'en  définitive  le  niot«  publicité  »  ne  peut  avoir  d'autre  sens 
dans  une  loi  spéciale  que  celui  qui  lui  appartient  par  sa  signifi- 
cation même,  qui  est  de  signifier,  i<  fait  répandu  ou  livré  au  pu- 
blic »  ;  que  la  loi  de  1884,  loin  de  restreindre  le  sens  du  mol  de 
publicité,  y  a  ajouté  une  condition  pour  rejeter  la  prétention 
du  breveté,  à  savoir,  que  cette  publicité  soit  de  nature  telle  qu'elle 
ait  suffi  pour  l'exécution  de  l'invention; 

Attendu  que,  sans  doute,  on  ne  peut  exiger  des  défendeurs  la 
preuve  d'un  fait  de  publicité  précis  pour  en  suivre  la  marche  et 
les  progrès  dans  le  monde  industriel,  mais  qu'encore  ne  faut-il 
pas  comme  dans  l'espèce,  que  leur  ignorance  même  du  perfec- 
tionnement apporté  par  Eisler  à  la  machine  Marquet,  n'éclate 
dans  tous  les  antécédents  de  la  cause,  que  s'il  s'agissait  de  juger 
en  dehors  de  tout  texte  l'imitation  par  Leroy  et  Cie  de  la  ma- 


—  175  — 

chine  Willame,  on  en  pourrait  parcourir  les  phases  nécessaires 
dans  les  procès  antérieurs  ; 

Qu'il  ressort  de  tous  les  faits  révélés  par  les  procédures  que 
rinvention  d'£isler  était  restée  confinée  dans  les  ateliers  de  son 
usine  ; 

Attendu  que  dans  les  procès  divers  où  les  tribunaux  ont  fixé 
les  principes  de  la  publicité  au  point  de  vue  de  la  loi  du  5  juillet 
1844,  à  côté  des  définitions  on  retrouve  des  faits  qui  établissent 
non  pas  uniquement  la  possibilité  de  la  connaissance  de  l'inven- 
tion, mais  de  la  divulgation  manifeste  ;  que  l'exemple  invoqué, 
notamment,  de  la  publicité  au  moyen  d'une  seule  lettre  missive, 
est  contraire  au  fond  à  Tinterprétation  des  défendeurs,  puisque  ce 
n'est  pas  la  lettre  missive  qui  avait  créé  la  publicité,  étant  de  sa 
nature  toute  secrète,  mais  les  faits  de  publicité  attestés  par  cette 
lettre,  laquelle  n'avait  au  fond  que  la  valeur  d'un  témoignage 
irrécusable,  puisqu'elle  émanait  d'un  ingénieur  ou  d'un  spécia- 
liste ; 

Attendu  que  Leroy  et  Gie  sont  particulièrement  en  mauvaise 
posture  pour  soutenir  que  le  perfectionnement  pratiqué  dans  cette 
localité  d'inzersdorf  par  des  ingénieurs  ou  des  ouvriers  intelli- 
gents, d'une  machine  défectueuse,  était  répandue  dans  le  public 
ou  livré  à  la  publicité,  alors  qu'ils  n'ont  pu  découvrir  le  village 
industriel  ou  la  maison  où  s'abritait  cette  même  invention,  qu'il 
est  même  très  significatif,  que  ce  perfectionnement  «  publique- 
ment »  connu  ait  été  découvert  par  Lecourt,  simple  acquéreur  de 
la  machine  arguée  de  contrefaçon,  alors  que  les  fabricants  eux- 
mêmes  en  ignoraient  l'existence  jusqu'aux  débats  de  l'instance 
actuelle  ; 

Attendu  que  l'invention  de  la  maison  Eisler  est  si  peu  publi- 
que, que  Otto  Asche  supposait  que  leur  appareil  leur  avait  été 
fourni  par  la  maison  Kargès  ; 

Que  la  maison  Eisler  ne  se  livre  pas  à  la  fabrication  des  ma- 
chines, mais  procède  elle-même  à  la  fabrication  de  ses  boîtes  de 
conserves  pour  l'armée,  dont  elle  est  le  fournisseur,  et  que  pas 
un  seul  document  n'est  produit  pour  établir  qu'en  fait  la  machine 
d'inzersdorf  a  été  connue  d'un  ingénieur,  d'un  constructeur, 
d'un  homme  du  métier  ; 

Attendu  que  des  faits  de  publicité  ne  satisferaient  pas  encore 
au  vœu  de  la  loi,  s'il  n'était  établi  en  mémo  temps  qu'ils  ont  été 
suffisants  pour  faire  exécuter  la  machine,  que  ce  double  élément 
manque  dans  la  cause  : 

Par  ces  motifs,  Déclare  les  défendeurs  mal  fondés  dans  leurs 
uns,  moyens  et  conclusions  et  demandes  reconventionnelles,  et 
les  en  déboute  ; 

Condamne  les  sieurs  Leroy  et  Cie  et  Lecourt,  conjointement 


^^i  — ^- 


—  176  — 

et  solidairement  comme  contrefacteurs  des  machines  à  poser 
les  joints,  brevetées  par  Willame  et  Gie  ; 

Valide  les  saisies  des  contrefaçons  pratiquées  le  12  mai  4894  et 
le  27  janvier  1896,  suivant  procès-verbal  de  Boulland  haissier  à 
Versailles  ; 

Ordonne  la  conQscation  et  la  remise  aux  mains  des  deman- 
deurs des  machines  contrefaites  et  notamment  de  celles  saisies 
ou  décrites  ; 

Condamne  les  sieurs  Leroy  et  Cie  et  Lecourt  sous  la  même 
solidarité  à  payer  aux  demandeurs  des  dommages-intérêts  à 
fixer  par  état  ; 

Les  condamne  dès  à  présent,  et  à  titre  de  provision,  à  payer 
aux  dits  sieurs  Willame  et  Cie  la  somme  de  3.000  francs  ; 

Ordonne  l'insertion  du  présent  jugement  dans  trois  journaux 
in-extenso,  et  par  extrait  dans  sept  journaux  aux  choix  des 
demandeurs  ; 

Dit  toutefois  que  le  coût  de  chaque  insertion  ne  dépassera  pas 
100  francs  par  extrait  ; 

Condamne  conjointement  et  solidairement  les  défendeurs  en 
tous  les  dépens  qui  comprendront  les  frais  de  saisies,  tous  droits 
d'enregistrement  qui  ont  été  perçus  ou  qui  seront  perças  sur 
tous  titres  et  actes  produits,  ainsi  qu'amendes  et  doubles  droits 
à  titre  de  suppléments  de  dommages'intérêts,  etc. 

MM.  Leroy  et  Lecourl  ayant  interjeté  appel  de  ces  deux 
jugements,  la  Cour  de  Paris,  sous  la  présidence  de  M.  Gaze, 
président,  après  avoir  entendu  M'"  Taillefer,  BoyercI  Des- 
jardin, avocats  des  parties,  en  leurs  plaidoiries  a,  le  20  juin 
1900,  rendu  Tacrôt  confirmatif  suivant  : 

La  Cour,  Au  fond  :  Sur  le  chef  des  conclusions  principales  ten- 
dant à  faire  décider  que  les  machines  saisies  sur  Lecourt  ne  cons- 
titueraient pas  des  contrefaçons  de  la  machine  brevetée  par  Wil- 
lame et  Cie  ; 

Considérant  que  Willame  et  Gie,  revendiquent  dans  leur  brevet, 
en  vue  de  produire  le  résultat  industriel  qui  s'y  trouve  spécifié, 
un  outillage  composé  de  deux  organes  principaux,  le  premier 
ou  organe  mâle  formé  d'un  manchon  chauffé  directement  par  du 
gaz  d'éclairage,  le  second  ou  organe  femelle,  adapté  sur  une 
glissière  et  formé  de  deux  tubes  concentriques,  coulissant  l'un 
dans  l'autre  au  moyen  d'un  ressort  à  boudin  :  qu'il  résulte  d'au- 
tre part,  des  documents  soumis  à  la  Cour,  spécialement  de  la  des- 
cription des  appareils  saisis  sur  Lecourt,  que  ces  appareils,  s'ils 
ne  sont  pas  une  copie  servile  de  la  macbine  brevetée,  reprodui- 


—  177  — 

sent  cependant  dans  leurs  particalarités  ou  éléments  caractéris- 
tiques, la  combinaison  de  ces  deux  organes  principaux  ; 

Que  si  la  glissière  a  été  supprimée  dans  l'organe  femelle  et  si 
Fapplication  àTorgane  mâle  du  chauffage  au  gaz  a  été  modifiée, 
ces  changements  n'altèrent  pas  dans  son  essence  leur  combi- 
naison ; 

Qu'ils  ne  donnent  à  aucun  égard  un  caractère  de  nouveauté 
aux  machines  saisies  ;  qu'ils  n'apparaissent  en  réalité  dans  les 
circonstances  de  la  cause  à  bon  droit  relevées  dans  le  jugement, 
que  comme  un  moyen  de  masquer  la  contrefaçon  ; 

En  ce  qui  touche  les  autres  chefs  des  conclusions  principales  ; 

Adoptant  les  motifs  du  jugement  ; 

Sur  les  conclusions  subsidiaires  : 

i^  En  ce  qui  concerne  la  solidarité  : 

Considérant  qu'il  est  constant  que  Leroy  et  Gie  ont  fabriqué  les 
machines  saisies  et  contrefaites  : 

Considérant,  d'autre  part,  que  ces  machines  ont  été  saisies 
dans  les  ateliers  de  Lecourt  qui  s'en  servait  pour  son  industrie  ; 
qu'à  raison  des  poursuites  intentées  dès  1893,  notamment  à  Bor- 
deaux par  Willame  et  Cie,  contre  Leroy  etCie  pour  contrefaçon, 
Lecourt  ne  saurait  invoquer  sa  bonne  foi,  et  qu'il  résulte  en 
réalité  des  documents  et  des  faits  de  la  cause,  qu'en  acquérant 
ces  machines  en  vue  d'un  usage  commercial,  il  a  participé 
sciemment  et  par  un  concert  formé  avec  Leroy  et  Cie,  aux  actes 
de  contrefaçon  imputables  à  ces  derniers. 

2^  En  ce  qui  touche  les  dommages-intérêts  : 

Considérant  que  les  mesures  d'instruction  prescrites  par  les 
premiers  juges,  de  même  que  les  condamnations  qu'ils  ont  pro- 
noncées dès  à  présent,  par  provision,  sont  justifiées  ; 

Par  ces  motifs,  En  la  forme,  reçoit  Leroy  et  Cie  et  Lecourt  en 
leurs  appels  respectifs  ; 

Au  fond,  met  les  appellations  à  néant  ; 

Ordonne  que  ce  dont  est  appel  sortira  son  plein  et  entier  effet 
pour  être  exécuté  selon  sa  forme  et  teneur  ; 

Déclare  les  appelants  respectivement  mal  fondés  dans  leurs  de- 
mandes, fins  et  conclusions  contraires,  les  en  déboute  ;  et  con- 
damne les  dits  appelants  Leroy  et  Cie  et  Lecourt,  à  l'amende  et 
aux  frais  de  leurs  appels,  desquels  frais,  distraction,  etc. 


li 


,«j>ijr««r 


—  178  — 
Art.  4191. 

Brevet  Taverdou.  —  DIvul^Atloa.  —  Essai.  —  IKîvto. 

On  ne  saurait  trouver  les  éléments  d'une  divulgation  de 
nature  à  entraîner  la  déchéance  d'un  brevet  d'invention  ^ 
dans  V expérimentation  d'une  machine  par  le  fabricant 
devant  un  amateur ^  tenu  en  vertu  d^une  règle  élémentaire 
de  loyauté  d  la  discrétion  absolue,  alors  surtout  que  ce 
fjonctionnement  n'était  pas  de  nature  à  en  révéler  le  méca- 
nisme des  rouages  intérieurs,  et  ce  qui  constituait  Vàme 
même  de  Vinvention  ;  non  plus  que  dans  la  remise  à  titre 
confidentiel  de  devis  et  avant-projets  de  construction  dans 
lesquels  des  parties  notables  de  f  appareil  ne  figuraient  pas 
et  trop  incomplets  pour  permettre  la  réalisation  de  Vinven» 
tion, 

m 

(C.  de  Paris,  10  jaillet  1900.  —  Fromholt  c.  dEspine  et  Aehard.) 

Le  Tribunal  civil  de  la  Seine,  3"^  chambre  avait,  le  2  mai 
1894,  rendu  le  jugement  suivant  : 

Le  Tribunal,  Attendu  que  Fromholt,  cessionnaire  d'an  brevet 
Taverdon,  du  30  juin  i884,  ayant  pour  objet  un  mode  perfectionné 
d'application  de  Toutillage  diamanté  à  des  machines-outils  pour 
le  travail  des  roches  et  métaux,demande  que  les  sieurs  d^Espi ne  et 
Aehard  soient  déclarés  contrefacteurs  et  condamnés  &  150.000  fr. 
de  dommages-intérêts  ; 

Attendu  que  ledit  Fromholt  intente  également  contre  les  dé- 
fendeurs, en  vertu  de  Tarticle  34  de  la  loi  de  4844,  une  action  en 
nullité  d'un  brevet  par  eux  pris  le  18  novembre  1890  pour  des 
perfectionnements  dans  les  machines  à  scier  les  pierres  ; 

Qu'il  prétend  que  la  nullité  résulterait  de  l'existence  de  brevets 
antérieurs  et  aussi  de  ce  que  l'invention  prétendue  nouvelle  au- 
rait été  divulguée  par  ses  auteurs  avant  la  prise  du  brevet  ; 

Sur  la  demande  en  contrefaçon  : 


(1)  Sur  les  essais,  V.  Pouillet,  Bt*êv,  <Vinv,,ik*'  S9i  et  s.  et  li  jaris- 
prudence  citée.  Spécialement  dans  Tespèce  rapportée,  la  constatation, 
faite  par  la  Cour,  que  l'examen  du  mode  de  fonctionnement  de  la  ma- 
chine ne  permettait  pas  d'en  apercevoir  le  mécanisme  intérieur  était  de 
nature  à  faire  écarter  la  divulgation  :  Gorop.  rej.,  25  mai  1868,  Imba, 
Dali.  63.1.442;  Douai,  30  juin  1885,  Oudit,  Ann.,  86.65  ;  Grenoble, 
{•^  août  1  887,  Bonjour,  iinn.,  90.38  et.en  matière  de  produit  industriel 
nouveau  :  Pau,  14  janvier  1899,  Cornet,  Ann.,  99.S50  et  la  note. 

A.T. 


s-j  -i 


—  179  — 

Attendu  qu'il  y  a  lieu  de  recourir  à  une  expertise  à  laquelle 
les  parties  s'accordent  à  conclure  subsidiairement; 

Sur  la  demande  en  nullité  de  brevet  ; 

En  ce  qui  touche  le  grief  tiré  de  la  divulgation  : 

Attendu  qu'à  l'appui  de  sa  prétention,  Fromholt  invoque  la 
remise  faite  dans  le  mois  d'octobre  1890  par  d'Espine  et  Achard 
à  la  maison  Civet,  Crouet,  Gautier  etCie,  de  descriptions  à  titre 
d'avànt-projet,  et  le  fonctionnement  public  à  Glarens  (Suisse) 
d'une  machine  identique  dans  la  maison  Chaudet  ; 

Mais  attendu  que  les  faits  par  lui  allégués  n'ont,  en  fait  ni  en 
droit,  la  portée  qu'il  leur  attribue  ; 

En  ce  qui  touche  le  fonctionnement  public  à  Glarens  : 

Attendu  que  devant  le  Tribunal  de  Bâle  déjà  saisi  par  le  sieur 
Fromholt  de  la  même  demande  en  nullité  de  brevet  pour  divul- 
gation et  ayant  déjà  fait  justice  du  grief,  le  sieur  Ghaudet,  as^- 
socié  de  la  société  Ghaudet  frères,  à  Glarens^  chez  lesquels 
d'Ëspine  et  Achard  avaient  installé  en  1890  leur  machine  achetée 
par  la  dite  société,  a  déclaré  :  qu'elle  se  trouvait  dans  un  local 
fermé,que  l'entrée  de  ce  local  était  absolument  interdite  au  public; 
que  la  société  H.  et  G.  Ghaudet  frères  avait  pris  l'engagement  de 
ne  laisser  voir  la  machine  à  personne  sans  une  autorisation 
écrite  des  défendeurs  ; 

Attendu  que  la  seule  personne  dont  Fromholt  puisse  prouver 
ainsi  l'admission  est  le  sieur  Jacquin,  ingénieur  mandataire  de 
la  maison  Civet,  Crouet,  Gautier  et  Cie,  avec  laquelle  d'Espine 
et  Achard  étaient  en  pourparlers  pour  l'achat  d'une  de  leurs 
machines  ; 

Que  d'une  part,  l'expérimentation  de  cette  machine  par  le 
fabricant  devant  l'amateur^  tenu,  en  vertu  d'une  règle  élémentaire 
de  loyauté,  à  la  discrétion  absolue^  ne  constitue  pas  un  fait  de 
publicité  au  sens  de  la  loi  ; 

Que  Fromholt  essaie  bien  de  prétendre  4ue  Jacquin  ou  ^es 
mandants  auraient  trahi  le  secret,  mais  qu'il  ne  rapporte  pas  de 
preuves  sur  ce  point  ; 

Attendu  d'autre  part  et  en  tous  cas,  que  la  loi  ne  décrète  de 
déchéance  qu'autant  que  Tinvention  a  reçu  une  publicité  suffi- 
sante pour  pouvoir  être  exécutée  ; 

Que  si  Jacquin  a  vu  fonctionner  la  machine,  ce  fonctionne- 
ment n'était  pas  de  nature  à  en  révéler  le  mécanisme  des  rouagçs 
intérieurs,  soit  ce  qui  constituait  l'àme  même  de  l'invention  ; 
Que  les  documents  de  la  cause  montrent  qu'il  n'a  pas  en  effet 
été  suffisamment  éclairé  sur  ce  point  ; 

Que  dans  une  lettre  du  12  décembre  1890,  postérieure  à  la 
prise  du  bretet,  mais  antérieure  à  l'instance  actuelle,  d'Espine  et 
Achard  écrivaient  à  Civet,  Crouet,  Gautier  et  Cie  i 


•à 


—  180  - 

Comme  Monsieur  Jacquin  n'a  pu  »oir  l'été  dernier  qu'im- 
Ekitement  le  fonctionnement  de  la  grande  scie  de  Clarens, 
:  les  courroies  avaient  besoin  d'être  raccourcies  te  jour  de  sa 
e,  il  nous  serait  très  agréable  que  Monsieur  Jacquin   veuille 

renouveler  sa  visite  entre  le  21  elle  24  de  ce  mois.  » 
1  ce  qui  touche  la  remise  d'avant-projets  k  la  maison  Civet, 
let,  (iautier  et  Ci  e  : 

.tendu  d'unepart  qu'il  convient  de  rappeler  encore  ici  le 
ctère  confidentiel  qui  s'attachait  à  cette  remise,  caractère 
exclut  la  publicité; 

tendu  d'autre  part,  que  les  documents  de  la  cause  établissent 
issi  qu'en  tous  cas,  les  projets  n'étaient  pas  assez  complets 
-  permettre  l'exécution  de  l'invention  qui  a  été  brevetée; 
le  le  sieur  Jacquin  lui-même,  dans  une  lettre  du  10  janvier 
,  signalait  l'état  incomplet  de  ces  projets  dont  le  dernier 
t  été  expédié  à  sa  maison  le  13  novembre  précédent  ; 
Quant  au  principe  même  de  la  machine  que  nous  projetons, 
rait-il,  c'est  bien  un  plateau  circulaire  à  diamants  avec  trucs 
.anis  portant  la  pierre  ;  mais  nous  ne  supposons  pas  que  ce 

]h  l'objet  de  votre  brevet,  car  le  sciage  par  plateau  circu- 

avec  truc  glissant  existe  partout. 
Renseignez- nous  donc  sur  tout  ce  qui  est  spécial  k  votre 
et  en  dehors  du  principe  du  sciage  par  plateau  circulaire  dia- 
té,  par  an  système  autre  que  le  vétre  avec  truc  «lissant  in- 
ur  portant  la  pierre,  car  ce  principe  est  forcément  aussi  ce- 
[ue  nous  projetons  »  ; 

tendu  qu'à  cette  lettre  d'Ëspine  et  Achard  répondaient  le 
emain  : 

]e  principe  d'une  machine  circulaire  (etc.)  fait  partie  impli- 
de  notre  brevet  combiné  »  avec  une  série  de  dispositifs  di- 
de  nature  à  eu  préciser  l'emploi  en  vue  du  résultat  k  obte- 

foas  n'êtes  pas  sans  savoir  qu'en  mécanique  les  matières  à 

:t  sont  assez  délicates,  et  que  le  principal  but  d'une  étude 

[■evet  est  d'en  combiner  les  éléments  de  façon  qu'il  soit  aussi 

lile  que  possible  à  tourner  le  breret  sans  en  adopter  certai- 

jarties  suffisantes  pour  établir  la  contrefaçon. 

}'est  pour  cette  étude  que  nous  avons  eu  soin  de  recourir 

collaboration  d'un  spécialiste,  etc. 

>our  le  reste,  nous  ne  pouvons  que  vous   renvoyer  k  notre 

st.  .. 

tendu  que  cette  correspondance  établit  bien  que  cartainea 

es  essentielles  du  brevet  ne  égaraient  pas  dans  le  projet  et 

nt  ignorées  de  la  maison  Civet,  Crouet,  Gsutieret  Cia,  comme 

m  mandataire  Jacquin  ; 


r^  -^~. 


—  181  — 

Qae  la  constatation  à  cet  égard  fournit  encore  un  argument 
pour  démontrer,  comme  il  a  été  déjà  dit  plus  haut,  que  la  vue 
de  la  machine  n'avait  pas  suffi  au*  dit  sieur  Jacquin  pour  lui 
permettre  d'exécuter  l'invention  de  d'Espine  et  de  Achard  ; 

Attendu  que  de  tout  ce  qui  précède  il  résulte  que  la  divulga- 
tion alléguée  n'existe  pas  ; 

En  ce  qui  touche  l'existence  d'antériorités  : 

Attendu  que  le  tribunal  n'a  pas  les  éléments  suffisants  pour 
se  prononcer  quant  à  présent  ; 

Qu'il  convient  de  recourir  sur  ce  point  à  l'expertise  demandée 
subsidiairement  de  part  et  d'autre  ; 

Par  ces  motifs,  Sur  la  demande  de  contrefaçon  : 

Dit,  avant  faire  droit,  quepar  Hignette  Grimer  et  Planche  que 
le  tribunal  commet  à  cet  effets  qui  prêteront  serment  préala- 
blement devant  le  président  de  cette  chambre  s'ils  n'en  sont  dis- 
pensés par  les  parties,  le  brevet  Taverdon  de  1884  sera  examiné  ; 

Dit  que  les  experts  devront  déclarer  si  le  brevet  contient  une 
description  suffisante  et  s'il  constitue  ou  non  une  invention  nou- 
velle ; 

Sur  la  demande  en  nullité  de  brevet  : 

Dit,  dès  à  présent,  que  le  brevet  de  d'Espine  etÂchard  de  1890 
ne  tombe  pas  sous  le  coup  de  l'article  31  de  la  loi  de  1844  ; 

Donne  mission  aux  experts  d'évaluer,  s'il  y  a  lieu,  tous  dom- 
mages-intérêt 

Pour  le  surplus, 

Avant  faire  droit, 

Dit  que  le  brevet  dont  s'agit  sera  examiné  par  les  experts  réu- 
nis, à  l'effet  par  ceux-ci  de  déclarer  s'il  y  a  là  une  invention  nou- 
velle ou  s'il  existait  des  antériorités  ; 

Dit  qu'en  cas  d'empêchement,  les  experts  commis  seront  rem- 
placés par  ordonnance  de  M.  le  président  de  celte  chambre  ren- 
due sur  simple  requête. 

M.  Fromholt  ayant  interjeté  appel  de  celte  décision,  la 
Cour  de  Paris  (2'  ch.),  sous  la  présidence  de  M.  Harel,  pré- 
sident, après  plaidoiries  de  M"""  Lamare  et  Pouillet,  avocats, 
conclusions  de  M.Bonnbt,  avocat  général,  a  rendu,  le  10  juil- 
let 1900,  l'arrêt  suivant  : 

La  Cour,  Considérant  que  d'Espine  et  Achard,  ingénieurs  cons- 
tructeursjse  sont  livrés  à  des  études  pour  perfectionner  l'outillage 
servant  au  travail  des  pierres  dures  ; 

Qu'après  une  série  d'essais  et  de  tâtonnements  ils  ont,à  la  date 
du  18  novembre  1890,  demandé  la  délivrance  d'un  brevet  d'inven- 


TT7T 


—  182  — 

tion  pour  une  nouvelle  machine  destinée  à  scier  les  roches  avec 
une  lame  circulaire  diamantée,  et  que  le  20  juin  suivant  ils  ont 
pris  un  certificat  d'addition  ; 

Considérant  que  le  20  février  1893,  Fromholt  qui  exploite  une 
industrie  similaire  à  celle  de  d'Espine  et  Achard,  a  fait  procéder 
dans  les  magasins  de  ces  derniers  à  la  saisie  des  machines  qu^ils 
avaient  fait  breveter  : 

Qu'il  les  a  assignés  devant  le  Tribunal  civil  de  la  Seine  pour 
voir  dire  que  ces  machines  étaient  une  contrefaçon  d*un  brevet 
d'invention  délivré  à  un  sieur  Taverdon  dès  Tannée  1884,  et  que 
la  prétendue  découverte  de  ses  adversaires  ne  serait  pas  breve- 
table,  parce  que  leur  procédé  avait  été  antérieurement  breveté  et 
parce  qu'ils  l'avaient  rendu  public  avant  l'obtention  deleurbrevet  ; 

Considérant  que  les  premiers  juges  ont  ordonné  une  expertise 
à  l'effet  de  rechercher  s'il  y  avait  contrefaçon  du  brevet  Taverdon 
çt  s'ily  avait  nullité  du  brevet  de  d'Espine  et  Achard  à  cause  d'an- 
tériorités, mais  qu'ils  ont  rejeté  le  moyen  de  nullité  de  la  divul- 
gation ;     ■ 

Considérant  que  Fromholt  a  interjeté  appel  de  cette  sentence  ; 

Qu'il  prétend  qu'après  avoir  songé  à  la  faire  breveter,  d'Espine 
et  Achard  avaient  fait  connaître  leur  machine-outil  : 

10  en  en  communiquant  tous  les  plans  à  la  société  Civet,  Crouet 
et  Gauthier; 

2"*  en  installant  une  de  ces  machines  à  Glarens  dans  l'usine 
de  Chaudet  frères  ; 

3*  en  exécutant  deux  autres  machines  pour  la  société  des 
carrières  de  Villette  et  Vinimes,  et  en  les  exposant  dans  leurs 
ateliers  ; 

En  ce  qui  concer^ie  la  divulgation  résultant  des  communicatiom 
faites  à  la  société  Civet  et  Cie  : 

Considérant  que  pendant  la  période  d'essai,  d'Espine  et  Achard 
ont  été  en  relations  avec  cette  société  pour  la  construction  d'une 
machine  à  scier  les  pierres  ; 

Que  Civet  et  Cie  signalèrent  aux  constructeurs  les  inconvé- 
nients des  machines  qu'ils  avaient  précédemment  établies  ;  ' 

Qu'une  correspondance  assez  suivie  s'engagea  entre  eux  au 
sujet  d'importantes  modifications  à  faire  &  l'outillage  proposé 
par  d'Espine  et  Achard  qui  envoyèrent  divers  plans  et  rensei- 
gnements au  sieur  Jacquin,  ingénieur  de  la  Société  Civet  ; 

Considérant  qu'après  les  avoir  complétés  d'une  manière  qui 
semblait  répondre  aux  exigences  de  leurs  clients,  les  intimés 
furent  surpris  de  ne  pas  recevoir  leur  commande  et  qu'ils  fu- 
rent plus  surpris  encore  d'apprendre  qu'elle  avait  été  donnée  à 
un  concurrent  le  sieur  Fromholt,  et  que,  pour  exécuter  cette 
commande,  on  lui  avait  livré  tous  les  plans  qu'ils  avaient  com- 


.ïïi^^-T'r'»  V*  V'  -  ♦!(  -   nr»^"* -*■■»»■,-- 


—  183  - 

muniqués  à  Civet  et  Gie,  ainsi  que  toute  la  correspondance 
échangée  entre  eux  ; 

Considérant  que  les  premiers  juges,  par  des  motifs  que  la 
cour  s'approprie,  ont  estimé  avec  raison,  que  les  intimés  n'avaient 
remis  des  documents  qu'à  un  titre  conûdentiel  qui  excluait  la 
publicité  et  qui  imposait  à  Civet,  Crouet  et  Gauthier  une  discrétion 
absolue  ; 

Considérant  que  les  pièces  versées  au  débat  par  Froinholt  n'ont 
pu  parvenir  en  sa  possession  qu'à  la  suite  d'actes  répréhensibles 
qui  ne  lui  permettent  pas  de  s'en  prévaloir  ; 

Considérant  que  d*Espine  et  Achard  avaient  confié  des  plans 
à  Civet  et  Cie  à  un  moment  où,  loin  de  vouloir  divulguer  leur 
découverte,ils  se  disposaient  à  s*en  assurer  l'exploitation  exclusive 
par  un  brevet  d'invention  ; 

Qu'ils  n'ont  tardé  à  réaliser  leur  intention, hautement  manifes- 
tée à  cet  égard  que  parce  qu'ils  espéraient  atteindre  des  résultats 
encore  meilleurs  ; 

QuMls  en  ont  obtenu  même  après  la  délivrance  de  leur  brevet 
auquel  ils  ont  fait  ajouter  un  certificat  d'addition; 

Considérant  d'ailleurs  que  des  parties  notables  de  l'appareil 
breveté  ne  figuraient  pas  dans  le  projet  soumis  à  Civet  et  Cie,  et 
étaient  ignorées  de  cette  société  ainsi  que  de  Jacquin  son  ingé- 
nieur ; 

Qu'on  ne  saurait  trouver  dans  ces  circonstances  la  preuve  d'une 
publicité  suffisante  pour  pouvoir  exécuter  l'invention  ; 
En  ce  qui  touche  VinstaHation  d'une  machine  à  Clarens  : 
Considérant  qu'il  n'j  a  point  à  s'arrêter  à  l'erreur  signalée  par 
l'appelant  dans  l'un  des  motifs  du  jugement  qui  indique  que  le 
Tribunal  de  Bàle  aurait  été  déjà  saisi  par  Fromhoit  lui-même, 
d'une  demande  de  nullité  du  brevet  dont  il  s'agit,  fondée  sur  cette 
prétendue  divulgation  ; 

Qu'il  appert  des  documents  delà  cause,  que  si  Fromhoit  n'était 
pas  partie  au  procès  jugé  à  Bâie  il  avait  été  le  conseil  d'un  sieur 
Girauc),  poursuivi  en  contrefaçon  par  d'Espine  et  Achard,  et  qu'il 
avait  fourni  à  Giraud  toutes  les  pièces  et  tous  les  moyens  de  dé- 
fense pour  lesquels  l'appelant  s'appuie  aujourd'hui  devant  la  Cour 
pour  soutenir  que  les  faits  qui  se  rattachent  à  l'installation  d'une 
machine  à  Clarens  constituaient  la  divulgation  de  la  découverte 
breyetée  ; 

Considérant  que  si  la  décision  des  magistrats  de  Bâie  ne  peut 

pas  avoir  l'autorité  de  la  chose  jugée,  elle  fournit  néanmoins  des 

éléments  d'appréciation  dont  il  convient  de  tenir  compte  pour 

écarter  le  moyen  de  nullité  invoqué  par  Fromhoit  ; 

Qu'il  a  vainement  allégué  que  la  législation  Suisse  ne  serait 


—  184  ~ 

pas  conforme  à  la  loi  française  quant  à  la  divulgation  des  décou- 
vertes ; 

QuMl  suffit  de  comparer  les  textes  poar  constater  leur  concor- 
dance sur  ce  point  ; 

Adoptant  au  surplus  sur  ce  second  moyen  les  motifs  du  juge- 
ment en  tant  qu'ils  n'ont  rien  de  contraire  à  ceux  du  présent 
arrêt  ; 

En  ce  qui  concerne  la  commande  faite  par  la  Société  des  carrière$ 
de  VUlette  et  Vinimes  : 

Considérant  que  les  deux  machines  exécutées  par  les  intimés 
pour  la  Société  des  carrières  de  Villette  et  Vinimes,  différaient 
de  celles  qui  ont  été  brevetées  ; 

Que  la  commande  a  été  donnée  au  mois  d'avril  1890  à  l'épo- 
que des  essais  préliminaires  encore  inachevés,  avant  que  d'Es- 
pine  et  Âchard  aient  pu  compléter  les  perfectionnements  néces- 
saires pour  donner  à  leur  découverte  toute  sa  valeur  ; 

Que  du  reste  ces  machines  n'ont  jamais  été.  livrées  à  l'ache- 
teur; 

Qu'elles  ne  sont  point  sorties  des  ateliers  des  intimés,  et  qu'il 
est  constant  que  lorsque  ceux-ci  les  ont  fait  voir  à  quelques  per- 
sonnes» ils  ne  leur  ont  montré  que  le  résultat  qu'on  pouvait  obte- 
nir, sans  leur  faire  connaître  les  détails  compliqués  du  méca- 
nisme  intérieur  ; 

Qu'on  ne  saurait  pas  davantage  trouver  dans  ces  faits  la  preuve 
d'une  divulgation  susceptible  d'entraîner  la  nullité  du  brevet 
délivré  à  d'Espine  et  Achard  ; 

En  ce  qui  concerne  la  demande  subsidiaire  à  fin  d'enquête  et 
d'expertise  : 

Considérant  que  les  faits  ci-dessus  rappelés  rendraient  inopé- 
rantes soit  une  expertise,  soit  une  enquête  afin  d'établir  les  faits 
articulés  par  Fromholt,  lesquels  sont  d'ores  et  déjà  démentis  par 
les  éléments  du  débat  ; 
<^  Qu'il  n'échet  de  les  ordonner  ; 

Par  cbs  motifs,  Déclare  l'appelant  mal  fondé  dans  ses  deman-» 
des,  fins  et  concFusions  tant  principales  que  subsidiaires  ; 
L'en  déboute  ; 

Dit  qu'il  n'échet  d'ordonner  l'enquête  sollicitée  ; 
Confirme  le  jugement  attaqué. 


«-* 


—  185  — 


Art.  4192. 

Brevet  Michel  Perret.  —  Application  nouvelle.  ~ 
Résultat.  —  Divulgation.  —  Usine  fermée  an  public. 
—  Organes  essentiels  non  apparents. 

La  loi  du  8  juillet  1844  considère  comme  invention  nou" 
velleet  dès  lors  brevetable  V application  nouvelle  de  moyens 
connus  pour  l'obtention  d'un  résultat  industriel. 

La  nouveauté  de  V application  peut  résulter  de  ce  que  Vin- 
venteur  applique  autrement  les  mêmes  moyens  ou  en  chan- 
ge les  combinaisons  ou  les  simplifie  par  des  suppressions  ou 
les  complète  par  Vadjonction  d'autres  moyens  également 
connus  et  arrive  ainsi  à  un  résultat  industriel  :  ce  résultat 
ne  doit  pas  nécessairement  être  d^ autre  nature  que  celui  qui 
était  obtenu  auparavant^  il  n'a  besoin  que  d'être  plus 
rapide  y  plus  économique  ou  plus  complet  pour  pouvoir  être 
considéré  comme  digèrent  (1). 

Spécialement,  bien  que  le  principe  de  la  construction  du 
foyers  à  plusieurs  étages  de  combustion  superposés  ^  aum  oyen 
de  dalles  perforées,  soit  connu,et  qu'il  ait  même  existé  U7i  ap* 
pareil  s' allumant  au  moyen  de  deux  foyers  latéraux  séparés^ 
caractérisé  par  la  présence  de  dalles  rapprochées,  creusées 
d'une  série  d'orifices  en  entonnoirs  se  rejoignant  par  leurs 
bordSy  de  telle  façon  que  le  combustible  pulvérulent  versé 
par  le  haut  de  l'appareil  descende  par  son  propre  poids  d'é- 
tage en  étage  en  remplissant  les  parties  creuses  des  dalles,  et 
se  disposant  en  cônes  dans  les  intervalles  des  étages,  de  ma- 
nière à  constituer  autant  de  colonnes  verticales  qu'il  y  a 
d'entonnoirs  et  de  trous  percés  dans  les  dalles,  et  qu'il 

(1)  Lorsqu'il  s'agit^comme  dnns  l'espèce,  de  cette  variété  d'application 
nouvelle  de  moyens  connus qae  Ton  désigne  généralement  sous  le  nom 
de  combinaison  nouvelle  de  moyens  connus,  il  faut  aller  plus  loin  et 
dire  qoe  la  combinaison  est  brevetable  alors  môme  que  le  résultat  ne 
différerait  pas  de  celui  obtenu  précédemment  ;  comme  le  dit  M.  Pouillet, 
Brev,  dHnv»,  no  46,  c'est  alors  l'objet  lui-môme  consistant  dans  le  rap- 
prochement d'éléments  auparavant  épars  qui  est  nouveau,  et  sa  nou- 
Teauté  vient  de  ce  que  les  éléments  qui  le  composent  n'avaient  pas  en- 
core été  réunis.  Si  la  combinaison  produit  un  résultat  non  encore  obtenu 
auparavant,  on  au  moins  obtenu  moins  rapidement,  moins  économi- 
quement, la  nouveauté  et  par  suite  la  brevetabilité  est  par  là  môme  éta- 
blie ;  mais  le  résultat  f&t-il  le  môme,  identiquement,  que  la  combinaison 
pourrait  être  brevetable  si,  prise  en  soi,  elle  était  nouvelle.  Y.  Pouillet, 
Brev,  d'inv,,  no  46  et  s. 


—  186  — 

suffise  d'agir  sur  des  tiroirs  métalliques  placés  à  la  base  des 
colonnes  pour  faire  descendre  la  masse  entière  de  chaqueco- 
lonne  de  haut  en  bas^doit  être  considéré  comme  constittiant 
.une  application  nouvelle  brevetable  un  foyer  s'allumant 
par  Cétage  inférieur  sans  adjonction  d^aucun  accessoire 
latéralyConstitué  par  des  dalles  plus  espacées, percées  de  trous 
cylindriques  disposés  de  façon  que  chacun  des  orifices  cor- 
responde à  une  surface  plane  de  la  dalle  inférieure^  et  que 
par  suite,  le  combustible  en  tombant  d'une  dalle  sur  F  autre 
s'y  forme  bien  automatiquement  en  tas  coniques,  mais  que 
sa  chute  doive  être  provoquée  par  rintervention  du  chauf- 
feur détruisant  à  intervalles  réglés  à  Paide  d'un  râteau,  les 
cônes  d'un  étage  pour  les  faire  se  reformer  sur  l'autre,  la 
suppression  des  tiroirs  métalliques  et  des  foyers  latéraux 
constituant  une  simplification  etTadjonclion  dubrassageau 
moyen  du  râteau  pour  régulariser  la  chute  et  renouveler 
les  surfaces  étant  un  complément  essentiel  du  foyer  pour 
combustible  pulvérulent  (1). 

La  connaissance  qu'ont  eue  d'une  invention  ou  d'une  ap- 
plication ceux  qui  l'ont  conçue  ou  ceux  qui  en  petit  nombre 
ont  été  les  agents  nécessaires  des  essais  auxquels  elle  adonné 
lieu,  ne  saurait  constituer  une  divulgation,  alors  surtout  que 
ces  agents,  même  en  l'absence  de  toute  injonction  expresse 
étaient  tenus  à  la  discrétion  ;  qu'il  est  constaté  que  bien 
qu'aucune  précaution  spéciale  ne  paraisse  avoir  été  prise  en 
ce  qui  concerne  l'appareil  expérimenté,  le  régime  habituel 
de  l'usine  oii  ont  eu  lieu  les  essais  s'opposait  à  ce  qu'il  fût 
connu  du  public,  et  qu'en  outre  la  disposition  même  de 
l'appareil  dont  les  organes  essentiels  étaient  enfermés  dans 
une  enveloppe  en  maçonnerie  ne  permettait  pas  aux  ou* 
vriers  de  l'usine  ni  aux  personnes  qui  y  pénétraient  acci-' 
dentellement,  d'en  deviner  le  fonctionnement  et  la  destina- 
tion (2). 

La  présence  des  dessins  ayant  servi  à  la  construction 
d'un  appareil  dans  les  archives  du  cabinet  d'un  ingénieur 

» 

(1)  Le  tribunal,  dans  le  jugement  infirmé,  avait,  au  contraire  admis 
conformément  au  rapport  des  experts  que  le  four  construit  à  titre  d'essai 
à  l'usine  Huiler  à  Ivry  constituait  une  antériorité  pour  le  brevet  de 
M.  Michel  Perret. 

(2)  Gomp.  trib.  Versailles,  18  mars  1896  et  Paris,  90jaia  1900,  Wtl- 
lame,  Ann,,  1901,  p.  163. 


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—  187  - 

ne  peut  élre  considérée  comme  les  mettani  à  la  disposition 
du  public,  alors  qu'il  n'est  pas  juslifté  qu'aucune  commu- 
nication en  ait  été  donnée  ou  demandée  avant  la  prise  du 
brevet  auquel  l'appareil  est  opposé  comme  antériorité  (1  ). 
(C.  de  Paris,  10  }anTîer  1901.—  Hériliera  Uicbel  Perret  c.Vva  Robin.) 

Le  28  décembre  1897,  la  3*  chambre  du  Tribunal  de  la 
Seine  avait,  aous  la  présidence  de  M.  RotLLSAu,  président 
de  seclîon,  rendu  le  jugement  suivant: 

Lb  Tribomal,  Attendu  qu'un  jugement  de  cette  chambre  en 
date  du  S  mars  1895  a  joint  les  demandeadirigées  par  Miche) 
Perret  contre  Robin  et  ordonné  qu'il  serait  procédé  à  une  ex- 
pertise à  l'effet  de  rechercher  si  le  foyer  breveté  le  7  juillet  1887 
par  Michel  Perret  constituait  une  invention  breTelable  et  noo- 
velle  et  si  les  appareils  fabriqués  par  Robin  constituent  une  con- 
trefaçon du  brevet  Perret  ; 

Attendu  qu'il  résulte  du  rapport  des  experts  que  le  foyer  bre- 
veté par  Michel  Perret  en  1887  réalisait  un  progrès  sur  les  an- 
ciens foyers  du  môme  constructeur  en  augmentant  considérable- 
ment la  surface  de  combustion  par  la  mise  en  contact  de  l'air 
avec  du  combustible  pulvérulent  disposé  en  petits  tas  coniques 
qui  pouvaient  passer  successivement  de  la  dalle  la  plus  élevée  à 
la  dalle  inférieure  par  des  ouvertures  multiples  ménagées  à  cet 
effet,  en  renouvelant  à  chaque  opération  la  surface  de  combui- 
tion  ; 

Attendu  que  la  descente  automatique  du  combustible  et  la 
disposition  en  petits  tas  séparés  et  indépendants  soumis  tous  à 
l'action  de  l'air  d'où  résulte  une  combustion  intense,  constituent 
un  résultat  industriel  déterminé  mais  qui  ne  peut  assurer  au 
brevet  sa  validité  qu'à  la  condition  d'être 


(1)  Il  semble  que  l'eiistence,  antérieure  ment  à  la  prise  du  brevet  Perret, 

dam  lei  archives  du  cabinet  Muller  et  Ficliet,  des  plans  qoi  avaient  servi 
i  établir  le  tour  de  l'usine  d'Ivr;,  alors  qu'ils  n'étaient  nullement  gardés 
secrets,  mais  étaient  à  la  disposition  du  personnel  de  la  maison  et  par 
suite  de  la  clientèle,  aurait  dû  conduire  la  Cour  à  décider,  comme  l'avait 
fait  le  tribunal,  que  ai  l'appareil  Muller  était  opposable  comme  antériorité 
nu  four  Perret,  le  brevet  manquait  de  nouveauté  sans  qu'il  fût  nécessaire 
d'établir  si,  en  fait,  des  tiers  en  avaient  pris  connaissance.  Les  Iribu- 
naui  hésitent  souvent  à  prononcer  la  déchéance  dei  brevets  par  défani 
de  nouveauté  et  ont  tendance  à  atténuer  la  rigueur  de  la  loi  ;  celte  to- 
lérance paraît  peu  conforme  à  la  lettre  et  à  l'esprit  des  textes  qui  exigent 
pour  qu'une  inieniion  soit  brevetabie,  qu'elle  sait  nouvelle,  pour  tout 
le  monde  ;  qu'elle  n'ait  re^u  nulle  part,  pas  plus  en  France  qu'à  l'Etran- 
ger, une  publicité  sufBsanta  pour  pouvoir  être  exécutée. 

A.  T. 


■^'  -sr^vap.-'-T*^ 


—  188  — 

Attendu  que  deux  antériorités  ont  été  opposées  par  Robin, 
la  première  provenant  d'un  certificat  d'addition  pris  par  Michel 
Perret  le  20  mars  1878,  qui  est  écarté  avec  raison  parles  experts, 
les  éléments  distinctifs  du  foyer  breveté  ne  s'y  trouvant  pas 
réunis  ;  la  deuxième  tirée  de  la  construction  à  Ivry  en  1878  dans 
Tusine  Mulier,  d'un  foyer  dont  les  plans  auraient  été  fournis  par 
Muller  et  Fichet  et  dont  les  dispositions  analogues  à  celles  do 
foyer  Perret  auraient  donné  des  résultats  industriels  identiques  ; 

Attendu  que  les  experts  constatent  dans  leur  rapport  que  le 
four  Muller  se  rapproche  suffisamment  du  four  breveté  par  Michel 
Perret  pour  constituer  une  antériorité  qui  serait  opposable  à  ce- 
lui-ci au  cas  où  la  divulgation  aurait  été  suffisante  pour  entraîner 
la  nullité  du  brevet  ; 

Qu^en  effet,  dans  l'un  comme  dans  l'autre  foyer,  le  combastible 
est  bien  disposé  en  petits  tas  indépendants  sur  chaque  plaque  et 
à  chaque  étage  ; 

Qu'il  importe  peu  que  ces  tas  occupent  une  position  correspon- 
dante dans  le  prolongement  les  uns  des  autres  ou  qu*ils  soient  dis- 
posés en  quinconces,  puisque  les  deux  dispositions  permettent 
de  fragmenter  le  combustible  sur  l'étage,  afin  d'en  activer  la 
combustion,  ce  qui  est  le  fond  môme  de  l'invention  dont  Michel 
Perret  se  prétend  propriétaire  ; 

Qu'il  est  également  sans  intérêt  de  rechercher  si  la  descente  du 
combustible  d'étage  en  étage  s'opère  à  l'aide  d'un  crochet  ou  sim- 
plement en  tirant  pendant  un  instant  un  registre  placé  sous  l'é- 
tage le  moins  élevé,  puisque  les  résultats  fournis  sont  identiques 
et  que  la  différence  dans  la  disposition  des  trous  et  dans  la 
manœuvre  pour  arrivera  la  descente  du  combustible  ne  modifie 
pas  le  résultat  industriel  obtenu  ; 

Qu'il  ressort  avec  évidence  des  constatations  des  experts  que 
le  foyer  de  Muller  et  Fichet  donne  les  mômes  résultats  indus- 
triels que  le  foyer  breveté  par  Perret  et  cela  par  les  mêmes 
moyens,  qu'il  constitue  donc  une  antériorité  devant  entraîner  la 
nullité  du  brevet  pris  par  Perret  le  7  juillet  1887  ; 

Attendu  que  le  demandeur  soutient  que  cette  invention  de 
Muller  et  Fichet  n'aurait  pas,  dans  tous  les  cas,  été  l'objet  d'une 
publicité  suffisante  pour  qu'il  soit  possible  de  lui  opposer  la 
déchéance  édictée  par  l'article  31  de  la  loi  du  5  juillet  1844  ; 

Attendu  qu'il  est  établi  par  les  documents  versés  aux  débats 
et  notamment  parles  déclarations  de  Gaudron,  Fichet^  Sellerin  et 
Mittau,  recueillies  par  les  experts  du  consentement  des  parties, 
que  le  foyer  dont  Millier  et  Fichet  ont  dressé  les  plans  a  été  exé- 
cuté à  Ivry  dans  l'usine  de  céramique  exploitée  par  Muller  ; 
qu'il  a  fonctionné  dans  cette  usine  pendant  plusieurs  mois  au 
poussier  de  coke  et  au  poussier  de  charbon  maigre,  et  que  tous 


•^^      '^  1  •'   ^  »  TVT^»  _    -^mi  f.~ 


—  189  — 

ceux  qae  cette  installation  intéressait,  pouvaient  le  voir  fonc- 
tionner ; 

Que  Muiler  et  Fichet,  n'ayant  pas  l'intention  dt  prendre  de  bre- 
vet, n'avaient  pas  recommandé  le  secret  au  personnel  de  Tusine 
et  n'avaient  d'ailleurs  aucun  intérêt  à  ce  que  le  système  de  com- 
bustion appliqué  par  eux  ne  fut  pas  divulgué  ; 

Attendu  qu'il  est  établi  que  les  plans  qui  ont  servi  à  la  cons- 
truction de  ce  four  ont  été  catalogués,  classés  et  datés  ;  qu'ils 
ont  été  représentés  aux  experts  et  qu'ils  figurent  dans  les  ar- 
chives du  cabinet  des  ingénieurs  Muiler  et  Fichet  où  ils  peuvent 
être  consultés; 

Qu'il  appert  de  tout  ce  qui  précède  que  le  foyer  de  Muiler  et 
Fichet  avait  été, dès  l'année  1878,robjet  d'une  publicité  suffisante 
pour  constituer  une  antériorité  opposable  au  brevet  pris  par 
Michel  Perret  en  1887  ; 

Par  ces  motifs,  Déclare  Michel  Perret  mal  fondé  en  ses  deman- 
des, fins  et  conclusions,  l'en  déboute  ; 
Et  le  condamne  aux  dépens. 

Sur  appel  des  hérîliers  de  M.  Michel  Perret  décédé,  la 
Cour  de  Paris,  sous  la  présidence  de  M.  Cazs,  présidenf , 
après  plaidoiries  de  M«"Allard  et  Pouillbt,  avocats,  et  con- 
clusions de  M.  Jambois,  avocat  général,  a,  le  10  janvier, 
rendu  l'arrêt  infirmatif  suivant. 

La  Goub,  Statuant  sur  Fappel  interjeté  par  M.  Michel  Perret 
d'un  jugement  du  Tribunal  civil  de  la  Seine,  en  date  du  28  dé- 
cembre 1897; 

En  la  forme  : 

Considérant  que  l'appel  est  régulier  et  qu'aucun  moyen  de  nul- 
lité n'est  relevé  contre  lui  ; 

En  ce  qui  concerne  la  reprise  d'instance  : 

Considérant  que  Michel  Perret  est  décédé  le  4  janvier  1900, 
sans  laisser  ni  ascendants  ni  descendants  ; 

Que  par  divers  testaments,  il  a  institué  pour  exécuteurs  tes- 
tamentaires Le  Tellier  et  Armengaud  et  pour  légataires  univer- 
sels conjoints,  les  autres  parties  figurant  aux  conclusions  de  re- 
prise d'instance  de  Labey  avoué  ;  qu'il  est  justifié  de  ces  qualités  ; 
qu'il  y  a  donc  lieu  de  lui  donner  acte  de  la  reprise  d'instance  ; 

Au  fond  : 

Considérant  que  Michel  Perret  a  pris,  à  la  date  du  17  février 
1887,  sous  le  numéro  183.623,  un  brevet  pour  foyer  destiné  à  brû- 
ler les  combustibles  pulvérulents  ; 

Que  Robin  qui,  après  avoir  été  son  employé,  avait  fondé  une 


—  190  — 

maison  de  construction,  a  sollicité  de  lai  une  licence  et  lai  a  payé 
pendant  plusieurs  années  des  redevances  pour  les  foyers  qu'il 
construisait  lui-même  en  conformité  du  sus  dit  brevet  ; 

Qu'en  1894  il  a  cessé  de  payer  cette  redevance  et  a  fabriqué  et 
posé  divers  calorifères  ou  foyers,  qui  d'après  Michel  Perret  au- 
raient constitué  de$  contrefaçons  du  système  breveté  ; 

Que  diverses  saisies-contrefaçons  ont  été  pratiquées  à  la  re- 
quête de  ce  dernier,  aux  dates  des  21  et  30  maps,  4  et  17  avril 
1^94; 

Qu'assigné  devant  le  Tribunal  de  la  Seine  pour  ^'entendre  dé- 
clarer contrefacteur  et  condamner  à  dès  dommages-intérêts,  Ro- 
bin a  argué  de  nullité  le  brevet  de  Michel  Perret  ; 

Qu'un  jugement  du  5  mars  1895  a  nommé  trois  experts  qui 
ont  déposé  leur  rapport  et  que  sur  le  vu  de  ce  document,  un  se- 
cond jugement,  en  date  du  28  décembre  1897,  a  débouté  Michel 
Perret  de  sa  demande  ;  qu^il  a  été  appelé  de  ce  jugement  ; 

En  ce  qui  concerne  les  objets  argués  de  contrefaçon  : 

Considérant  que  les  calorifères  et  foyers  construits  par  Robin 
et  saisis  à  la  requête  de  Michel  Perret  reproduisent  les  disposi- 
tions essentielles  de  l'appareil  décrit  au  brevet; 

Que  cette  similitude,  constatée  par  les  experts  et  reconnue 
par  le  jugement  dont  est  appel,  n'est  pas  sérieusement  contes- 
tée ;  qu'en  conséquence,  si  le  brevet  Michel  Perret  est  valable, 
Robin,  ou  ses  représentants  actuels,  doivent  être  déclarés  con* 
trefacteurs  ; 

Mais  que  devant  la  Cour,  comme  devant  le  tribunal,  ils  arguent 
ledit  brevet  de  nullité,  à  raison  d'une  double  antériorité  qui 
résulterait:  lo  d'un  certificat  d'addition  pris  par  Michel  Perret, 
le  20  mars  1878  et  se  référant  à  un  brevet  antérieur  pris  en  1874, 
brevet  et  certificat  aujourd'hui  tombés  dans  le  domaine  public  ; 
2»  de  la  construction  d'un  foyer  établi  sur  les  dessins  de  Mal- 
1er  et  Fichet  et  qui  aurait  fonctionné  dans  les  ateliers  de  MuUer 
àivry  en  1878. 

En  ce  qui  concerne  le  certificat  d'addition  : 

Considérant  que  les  premiers  juges  ont,  ajuste  titre,  écarté 
cette  prétendue  antériorité;  qu'il  résulte  en  effet  du  rapport  des 
experts,  confirmé  par  les  documents  de  la  cause  que  le  certificat 
d'addition  ne  donnait  pas  la  combustion  intense  obtenue  par  le 
foyer  breveté  en  1887  ;  qu'aucun  appel  incident  n'a  d^  illeurs  été 
fofmé  et  que  ce  point  doit  être  considéré  comme  bien  et  défini- 
tivement jugé  ; 

En  ce  qui  concerne  le  foyer  construit  par  Mulleret  Fichet: 

Considérant,  en  fait,  qu'en  1878,  dans  les  ateliers  de  cérami* 
que  de  Muller,  à  Ivry,  il  a  été  construit  un  appareil  commandé 
par  le  dit  Muller  et  dont  les  dessins  ont  été  fournis  par  Fichet  ; 


'T'^r- 


—  191  — 

Que  cet  appareil  qualifié  par  ce  dernier,  dans  sa  déposition 
devant  les  experts,  de  four  calorifère,  a  fonctionné  pendant  plu- 
sieurs mois  à  titre  d'essai,  puis  a  été  démoli  ; 

Que  les  plans  et  dessins  sont  restés  dans  les  archives  du  cabi- 
net d'ingénieur  de  Fichet,  doù  ils  sont  'sortis  pour  être  produits 
dans  le  litige  actuel  ; 

Considérant  que  les  experts  ont  admis  comme  conclusion  de 
leur  rapport  que  ce  four  calorifère,  antérieur  au  foyer  pour  le- 
quel Michel  Perret  a  demandé  un  brevet  en  1887,  donnait  les 
mêmes  résultats  et  par  les  mêmes  moyens  ; 

Que  le  jugement  entrepris,  après  s'être  approprié  cette  con- 
clusion,a  déclaré,  en  outre,  que  Fessai  fait  par  MuUer  et  Fichet 
avait  été  Tobjet  d'une  publicité  suffisante  pour  constituer  une 
antériorité  opposable  au  susdit  brevet  ;  qu'il  a  ainsi  prétendu 
faire  application  de  l'article  31  de  la  loi  du  5  juillet  1844,  aux 
termes  duquel  une  découverte,  invention,  ou  application,ne  peut 
être  réputée  nouvelle  et,  comme  telle  brevetable,  si  antérieure-^ 
ment  à  la  date  du  dépêt  de  la  demande  de  brevet,  elle  a  reçu 
une  publicité  suffisante  pour  être  exécutée  ; 

Mais  considérant  que  la  connaissance  qu'ont  eue  d'une  inven* 
tien  ou  d'une  application,  ceux  qui  Tout  conçue,  ou  ceux  qui,  en 
petit  nombre  ont  été  les  agents  nécessaires  des  essais  auxquels 
elle  a  donné  lieu,  ne  saurait  constituer  une  divulgation,  alors 
surtout  que  ces  agents,  même  en  l'absence  de  toute  injonction 
expresse,  étaient  tenus  à  la  discrétion; 

Qu*il  a  été  constaté  par  les'experts  que  l'usine  d'Ivry  a  toujours 
été  fermée  au  public  et  qu'il  était  difficile  de  se  procurer  des 
renseignements  précis  sur  les  appareils  qui  y  étaient  employés; 
•  Qu'ainsi,  bien  qu'aucune  précaution  spéciale  ne  paraisse  avoir 
été  prise  en  ce  qui  concerne  le  four  édifié  en  1878,  sur  les  des- 
sins de  Fichet,  le  régime  habituel  de  Tusine  s'opposait  à  ce  qu'il 
fût  connu  du  public  ; 

Que  la  disposition  même  de  l'appareil,  dont  les  organes  essen- 
tiels étaient  enfermés  dans  une  enveloppe  en  maçonnerie,  ne 
permettant  point  ni  aux  ouvriers  de  l'usine  ni  aux  personnes  qui 
y  pénétraient  accidentellement,  d'en  deviner  le  fonctionnement 
et  la  destination  ; 

Qu'après  sa  destruction,  la  présence  des  dessins  dans  le  cabi- 
pet  de  Fichet,  ne  les  mettait  nullement  à  la  disposition  du  pu- 
blic et  qu'il  n'est  pas  justifié  qu'aucune  communication  en  ait  été 
donnée  ou  demandée,  avant  leur  production  dans  le  débat  actuel, 
ç'est-à-dire  bien  postérieurement  au  dépôt  de  la  demande  de 
brevet  par  Michel  Perret  ; 

^  Qu'ainsi,  ni  le  projet  préparé  par  Fichet,  ni  les  essais  faits 
par  Muller,n'avaient  reçu  une  publicité  suffisante  pour  être  exé* 


-5192- 

outée,  c'est-à-dire  pour  qu'une  personne  quelconque  antre  quê 
les  inventeurs  eux-mêmes  fût  en  mesure  de  reproduire  leur  in- 
yention  sans  leurs  concours  ; 

Que  la  décision  des  premiers  juges  doit  donc  être  réformée  en 
ce  qu'elle  a  reconnu,  dans  les  circonstances  ci-dessus  analysées, 
les  éléments  juridiques  de  la  publicité  ; 

Considérant,  au  surplus,  que  même  au  cas  où  Tappareil  de 
Muller  et  Fichet  aurait  été  connu,  cette  circonstance  ne  suffirait 
pas  pour  enlever  à  l'invention  de  Michel  Perret  son  caractère  de 
nouveauté  et  entraîner  la  nullité  de  son  brevet; 

Qu'en  effet  la  loi  du  5  juillet  1844,  considère  comme  invention 
nouvelle  et  dès  lors  brevetable,  Tapplication  nouvelle  de  moyens 
connus  pour  Tobtention  d'un  résultat  industriel  ; 

Que  la  nouveauté  de  l'application  peut  résulter  de  ce  que  l'in- 
venteur  applique' autrement  les  mêmes  moyens  on  en  change  les 
combinaisons,  ou  les  simplifie  par  des  suppressions,  ou  les  com- 
plète  par  Tadjonction  d'autres  moyens  également  connus  et  arrive 
ainsi  à  un  résultat  industriel  ; 

Que  celui-ci  ne  doit  pas  nécessairement  être  d'autre  nature  que 
celui  qui  était  obtenu  auparavant  ;  qu'il  n'a  besoin  que  d'être  plus 
rapide,  plus  économique  ou  plus  complet  pour  pouvoir  être  con- 
sidéré comme  différent  ; 

Considérant  que  pour  faire  une  saine  application  de  ces  prioci- 
pes  aux  faits  de  la  cause,  il  importe  tout  d'abord  de  distinguer  : 
1<^  quels  sont  les  moyens  employés  tant  par  Muller  et  Fichet  que 
par  Michel  Perret  ;  2^  quels  sont  les  résultats  obtenus  soit  par 
les  uns,  soit  par  l'autre  ; 

Qu'il  est  constant  que  le  foyer  de  Muller  et  Fichet  et  celui  de 
Michel  Perret  ont  pour  principe  commun  l'établissement  de  plu- 
sieurs étages  superposés  de  combustion,  système  emprunté  à  un 
premier  brevet  de  Michel  Perret,  pris  par  lui  en  1874  et  aujour- 
d'hui tombé  dans  le  domaine  public  ; 

Qu'un  premier  perfectionnement  y  a  été  apporté  par  rinven- 
teur  lui-même  dans  son  certificat  d'addition  précité  du  20  mars 
1878  ; 

Qu'à  l'aide  d'oriûces  longitudinaux  percés  dans  les  dalles  su- 
perposées, il  facilitait  la  descente  successive  du  combustible  d'une 
dalle  sur  l'autre,  en  même  temps  que  sa  combustion  plus  com-* 
plète  grâce  à  la  forme  prismatique  qu'il  prenait  dans  sa  chute  ; 

Que  Muller  et  Fichet,  à  cette  même  date  de  1878,  ont  conçu  l'i- 
dée et  tenté  la  réalisation  d'un  nouveau  progrès  en  substituant  aux 
orifices  longitudinaux,  peu  nombreux,  du  certificat  d*addition, 
une  quantité  plus  considérable  de  trous  ronds  dont  la  forme  et 
la  disposition  devaient,  dans  leur  pensée,  produire  automatique- 
ment la  descente  du  combustible,  et  le  diviser,  sur  chaque  ëtagSi 


•  »l 


—  193  — 

en  nombreux  tas  coniques,  présentant  à  la  combustion  des  sur- 
faces multiples  ; 

Considérant  que  dans  son  brevet  de  1887,  Michel  Perret  pro- 
cède également  par  yoie  de  perforations  multiples  dans  chaque 
dalle  ; 

Qu'il  revendique  comme  éléments  de  son  invention  la  descente 
automatique  et  le  fonctionnement  du  combustible,  sur  chaque 
étage,  en  tas  coniques  indépendants  ; 

Mais  que  si  les  procédés  paraissent,  au  premier  abord  identi* 
qaes,  le  mode  d'application  est  sensiblement  différent  ; 

Qu'ainsi,  d'après  le  dessin  qui  reproduit  le  foyer  Muller,  tel 
qu'il  a  été  exécuté  à  Ivry,  les  dalles,  très  rapprochées,  sont 
creusées  d'une  série  d'entonnoirs  au  fond  desquels  est  un  orifice 
rond  de  petit  diamètre  ;  que  ces  entonnoirs  se  rejoignent  parleurs 
bords,  sans  laisser  sur  la  dalle  aucune  surface  plane  et  se  corres- 
pondent d'étage  en  étage  ; 

Qu'il  en  résulte  que  le  combustible  pulvérulent,  versé  par  le 
haut  de  l'appareil,  descend  immédiatement  par  son  propre  poids 
d'étage  en  étage,  remplissant  les  parties  creuses  des  dalles/se 
disposant  en  cènes  dans  les  intervalles  des  étages^  mais  sans 
interruptions  entre  ces  diverses  couches  qui  forment  ainsi  autant 
de  colonnes  verticales  qu'il  y  a  d'entonnoirs  et  de  trous  se  cor-» 
respondant  dans  toute  la  hauteur  de  l'appareil  ; 

Que  chacune  de  ces  colonnes,  repose  à  sa  base  sur  un  tiroir 
métallique  dont  le  jeu  Caît  immédiatement  descendre  la  masse 
entière  d'un  mouvement  i^niforme  de  haut  en  bas  ; 

Qu'enfin,  pour  provoquer  ou  activer  la  combustion,  les  con8<» 
tructeurs  ont  jugé  nécessaire  de  flanquer  l'appareil,  à  droite  et 
à  gauche,  de  deux  foyers  séparés,  se  chargeant  par  des  orifices 
en  forme  de  cheminée  ; 

Considérant  que  les  dalles  du  foyer  de  Michel  Perret  breveté 
en  1887,  sont  plus  espacées  et  forées  de  distance  en  distance,  de 
trous  ronds  d'un  diamètre  plus  grand  et  à  section  droite  ; 

Que  chacun  de  ces  orifices  correspond  dans  la  dalle  inférieure 
à  une  surface  plane  ;  que  le  combustible,  en  tombant  d'une  dalle 
sur  Tautre  s'y  forme  bien  automatiquement  en  tas  coniques,  mais 
que  sa  chute  doit  être  provoquée  par  l'intervention  du  chatiffeur, 
qui,  à  intervalles  réglés  et  à  l'aide  d'un  râteau,  détruit  les  cônes 
d'un  étage  pour  les  faire  se  reformer  sur  l'autre  ; 

Que  chacun  de  ces  cônes  constitue  un  foyer  indépendant  dont 
les  surfaces  de  combustion  sont  renouvelées  à  chaque  brassagei 
sans  que,  dans  les  mouvements  successifs  ainsi  provoqués,  aucune 
parcelle  puisse  échapper  au  contact  de  l'agent  comburant  qui 
circule  d'étage  en  étage,  avec  des  chocs  répétés  grâce  A  la  dispo- 
sition des  cônes  en  quinconce  ; 

13 


"7^ 


—  194  — 

.  Qu*enûa  le  fo;^er  décrit  au  brevet  se  suffit  à  lui-même  ets'al* 
lume  par  Tétage  inférieur  sans  Tadjonction  d'aacun  accessoire 
latéral  ; 

Considérant  que  les  différences  ainsi  constatées  ne  sont  point 
accidentelles,  ni  sans  importance,  comme  L*ont,  à  tort,  prétenda 
les  experts  et  les  premiers  juges  ; 

Que  les  organes  des  deux  appareils,  s'ils  procèdent  d'idées 
communes,  et  antérieurement  connues  ne  sont  identiques  ni 
dans  leur  forme,  ni  dans  leur  combinaison,  ni  dans  leurs  effets  ; 

Que  la  suppression  des  tiroirs  métalliques  et -des  foyers  laté- 
raux est  une  sinipUûcation; 

Que  l'adjonction  du  brassage  au  râteau  pour  régulariser  la 
chute  et  renouveler  les  surfaces,  est  an  complément  essentiel  du 
foyer  pour  combustible  pulvérulent; 

Que  cet  ensemble  de  modifications  constitue  véritablement  une 
application  nouvelle  et  méritant  d'autant  mieux  cette  qualifi- 
cation qu'elle  produit  dans  le  foyer  Michel  Perret  le  résultat 
industriel  cherché,  la  combustion  intense  et  complète  avec  puis* 
santé  production  de  calorique  que  n*a  pu  obtenir  le  four  cons- 
truit à  Ivry  ; 

Qu'en  effet,  sans  vérifier  si  cet  essai,  dans  la  pensée  de  ses 
auteurs  n'était  pas  destiné  à  un  séchoir  plutôt  qu'à  un  foyer,  et 
même  en  admettant  qu'ils  cherchassent  à  brûler  une  grande 
quantité  de  combustible,  comme  FichetTa  déclaré  aux  experts, 
il  résulte  des  termes  mêmes  de  cette  déclaration,  que  le  but  pour- 
suivi n'a  pas  été  atteint  et  que  c'est  pour  ce  motif  que  la  cons- 
truction de  ce  four  a  été  abandonnée  ; 

Que  l'essai  a  donc  été  reconnu  infructueux  par  ses  propres» 
auteurs  ; 

Considérant  qu'aussitôt  après  la  prise  du  brevet  du  17  février 
1887,  le  nouveau  foyer  de  Michel  Perret  a  été  accueilli  comme 
un  progrès  des  plus  utiles  et  a  reçu  de  nombreuses  applications 
industrielles  qui  ont  consacré  la  réalité  du  résultat  obtenu  ; 

Que  Muller,  en  présence  de  ce  succès,  n'a  pas  songé  à  reprendre 
sa  tentative  avortée,  ni  à  revendiquer  pour  lui-même  l'honneur  et 
le  profit  de  l'invention  ; 

Que  Robin,  quoique  ami  intime  de  Fichet,  ainsi  qu'il  résulte 
d'une  lettre  de  ce  dernier,  en  date  du  o  août  1877,  qui  sera 
enregistrée,  connaissait  si  mai  l'essai  fait  par  celui-ci  en  1878, 
ou  le  considérait  comme  ayant  produit  dés  effets  si  peu  utiles, 
qu'il  a  sollicité  de  Michel  Perret  en  1889,  la  licence  dont  il  a  été 
ci-dessus  fait  mention  ; 

Qu'enfin,lorsqu'après  avoir  payé  pendant  plusieurs  années  des 
redevances,  il  a  voulu  s'en  affranchir  en  invoquant  les  plans  de 
l'es  8  ai  de  1878  que  Fichet  mettait  à  sa  disposition,  il  s'est  bien 


T^^^im^rj^^- r,    i^.^  ..^^-r-^^^^ 


—  195  — 

gardé  de  copier  cette  prétendue  antériorité,  mais  a  conservé  dans- 
les  appareils  contrefaits  les  organes  et  les  dispositions  qui  cons- 
tituaient la  nouveauté  de  l'application  faite  par  Michel  Perret,et 
la  supériorité  pratique  du  système  pour  lequel  il  avait  demandé 
on  brevet  ; 

Qu'ainsi,  par  toute  sa  conduite  antérieure  au  procès,Robin  avait 
reconnu  le  caractère  brevetable  de  l'invention,  son  efficacité  in- 
dustrielle et  rinanité  de  l'essai  qu'il  fait  apparaître  aujourd'hui 
comme  une  anté  riorité  ; 

Considérant,  dès  lors,  qu'il  y  a  Heu  de  réformer  le  jugement 
et  de  déclarer  contrefacteur  Tintimée  en  les  qualités  qu'elle  agit  ; 
Considérant  que  les  faits  de  contrefaçon  constatés  à  sa  charge 
par  les  procès-verbaux  précités  ^t  ceux  qui  pourront  être  établis 
par  les  documents  qui  y  sont  visés,  ont  causé  à  Michel  Perret  un 
préjudice  dont  ses  représentants  réclament  à  juste  titre  la  répa- 
ration ; 

Que  la  Cour  n'a  point  les  éléments  nécessaires  pour  en  fixer 
définitivement  l'importance  ; 

Mais  qu'une  somme  de  2.000  francs  doit  être  accordée  à  titre 
de  provision  comme  dès  à  présent  justifiée; 

Considérant  que  la  confiscation  demandée  doit  être  prononcée 
au  profit  des  demandeurs  en  vertu  de  l'article  49  de  la  loi  du 
5  juillet  1844,  mais  qu'il  y  a  lieu  de  la  limiter  aux  appareils  sai-' 
sis,à  défaut  de  justification  suffisante  quant  au  surplus  de  la  de- 
mande ; 

Considérant  que  le  préjudice  dont  se  plaignent  les  représen- 
tants de  Michel  Perret  ne  résulte  point  d'une  publication  faite  par 
la  voie  de  la  presse  ; 

Qu'aucune  insertion  du  présent  arrêt  ne  saurait  donc  être  or- 
donnée comme  supplément  de  dommages-intérêts  ; 

Par  ces  motifs,  Donne  acte  aux  représentants  de  Michel  Perret» 
partie  de  Labey  avoué,  de  leur  reprise  d'instance  ; 

En  la  forme,  les  reçoit  appelants  du  jugement  rendu  par  le 
Tribunal  civil  de  la  Seine  le  28  décembre  1897  ; 

Au  fond,  met  l'appellation  et  ce  dont  est  appel  à  néant  ; 

Infirme  le  dit  jugement  en  ce  qu'il  a  déclaré  Michel  Perret  mal 
fondé  dans  ses  demandes,  fins  et  conclusions,l'en  a  débouté  et  l'a 
condamné  anx  dépens  ; 

Emendant,  décharge  les  appelants  des  condamnations  pro- 
noncées ; 

Statuant  â  nouveau,  dit  que  le  certificat  d'addition  pris  par 
Michel  Perret  le  20  mars  1878^  et  la  construction  faite  à  Ivry,  en 
1S78,  dans  l'usine  de  MuUer,  d'un  foyer  dont  les  plans  avaient 
été  fournis  par  MuUer  et  Pichet,ne  constituent  pas  des  antériori* 


—  196  — 

tés  opposables  au  brevet  pris  par  Michel  Perret,le  17  février  1887, 
sous  le  numéro  183.623  ; 

Dit  que  les  objets  saisis  suivant  procès-verbaux  des  21  mars 
1894  ;  à  Sens,  30  mars  1894,  à  Chartres,  4  avril  1894,  à  Limoges, 
et  17  avril  1894  à  Paris,  sont  la  contrefaçon  de  Tappareil  décrit 
au  susdit  brevet  ; 

Déclare,  en  conséquence,  contrefacteur  la  veuve  Robin,  tant 
en  son  nom  personnel,  que  comme  tutrice  de  son  fils  mineur,  et 
étant,  en  les  susdites  qualités,  l'ayant  cause  de  son  mari  décédé  ; 

La  condamne,  en  ces  mêmes  qualités,  à  payer  aux  demandeurs 
comme  représentant  la  succession  de  Michel  Perret,des  domma- 
ges-intérêts à  fixer  pur  état,  et,  dès  à  présent,  à  titre  de  provi- 
sion, la  somme  de  2.000  francs  ; 

Prononce  la  confiscation  des  objets  contrefaits,  visés  aux 
procès-verbaux,  précités,  au  profit  desdits  demandeurs  ; 

Autorise  ceux-ci  à  se  faire,  si  besoin  est,  assister  du  commis- 
saire de  police  et  de  la  force  armée, 

Déclare  lesdits  demandeurs  mal  fondés  dans  le  surplus  de 
leurs  demandes,  fins  et  conclusions,  les  en  déboute  ; 

Ordonne  la  restitution  de  l'amende  et  condamne  la  dame  veuve 
Robin,  tant  en  son  nom  personnel  que  comme  tutrice  de  son 
fils  mineur,  en  tous  les  dépens  de  première  instance,  y  compris 
les  frais  d'expertise,  et  en  tous  les  dépens  d*appel  ; 


Art.  4193. 

ttreiret  Boadreaux.  —  PerfectionnemenA.  ^  €}oatre- 
teçon.  ^  Possession  personnelle.  —  Essais  sans 
résultat  industriel.  —  Consultation  demandée  A  la 

>  Cour.  —  Rejet.  ~  Intervention  foreée.  —  Irreeeva- 
Milté. 

V auteur  d'un  perfectionnement  à  une  invention  breveléct 
ne  peut  en  tirer  parti  sans  violer  le  droit  du  breveté  et  com- 
mettre une  contrefaçon  (1). 

L'exception  de  possession  personnelle  invoquée  par  un 
prévenu  de  contrefaçon  doit  être  rejetée  dès  lors  qu'il  est 
établi  que  celui  qui  en  excipe  ne  s'est  livré  qu'à  des  essais 
avec  lesquels  il  n'est  arrivé  à  aucun  résultat  industriel  et 

(1)  Sar  l'exploitation ,  par  un  tiers^  du  perfectionnement  à  nne  înTen- 
tion  bevetée,  v.  PoolUet,  Brev.  d'inv.,  n«  645;  Âllart,  id.,  n«  437  ;  Mai- 
nié,  îd.,  no  2367. 


—  197  — 

qu'il  n^a  pas  appliqués^  même  pour  les  besoins  de  soninr 
dusirie;  qu'il  n'est  pas  sorti  de  la  période  des  tâtonnements 
et  n'a  entrevu  que  de  loin  la  découverte  que  le  brevet  a  fait 
entrer  plus  tard  dans  le  domaine  de  la  pratique  (1). 

Il  n'y  a  pas  lieu  de  tenir  compte  de  certiftcals  versés  aux 
débats,  conçus  en  termes  vagues,  et  n'indiquant  pas  d'une 
façon  formelle  la  similitude  entre  les  objets  employés  anté- 
rieurement au  brevet  et  ceux  du  brevet,  alors  surtout  que 
ces  certificats  émanent  de  rivaux  en  industrie  du  breveté  et 
qu'il  est  constant  que  postérieurement  au  brevet  leurs  signa- 
taires ont  fait  au  breveté  de  nombreuses  commandes  de  ces 
objets  (2). 

Hy  a  lieu  d'écarter  les  conclusions  d'un  défendeur  pour- 
suivi  en  contrefaçony  tendant  à  faire  déclarer  dans  quelles 
conditions  il  pourrait  continuer,  sans  commettre  de  con- 
tre façon^  la  fabrication  du  produit  incriminé  car  il  n^ ap- 
partient pas  aux  tribunaux  de  donner  aux  parties  une 
sorte  de  consultation  sur  l'étendue  de  leurs  droits  et  de  pré- 
juger ainsi  des  difficultés  qui  pourront  naître  dans  l'ave- 
nir  (3). 

L'intervention  forcée  n'est  recevable  en  cause  d'appel  qu'à 
rencontre  de  la  partie  qui  aurait  le  droit  de  former  tierce- 
opposition  à  Varrét  à  intervenir,  et  la  tierce-opposition 
n'est  admissible  que  de  la  part  d'un  tiers  à  qui  V arrêt  pour- 


(1)  Sur  les  caractères  de  la  possession  personnelle,  Y.  Pouillet,  n*  431  ; 
Mainié,  no  177(5  et  s.  11  ne  faudrait  pas  croire,  comme  semble  l'indiquer 
l'arrêt,  que  la  possession  antérieure  ne  puisse  être  opposée  que  par  ce- 
lui qui  antérieurement  à  la  demande  de  brevet  avait  déjà,  dans  une 
mesure  plus  ou  moins  large,  soit  fabriqué  le  produit,  soit  employé  le 
moyen  objet  de  ce  brevet  ;  cette  possession  peut  être  certaine,  alors  même 
qull  n*y  aurait  eu  ni  fabrication  ni  emploi,  et  à  fortiori  de  simples  essais 
devraient  être,  s'ils  étaient  non  équivoques,  réputés  suffisants.  Dans 
l'espèce,  il  paraissait  bien  prouvé  que  Henrion  avait  dès  avant  le  brevet 
Boudreaux  essayé  l'emploi  de  balais  en  métal  extrêmement  mince,  et 
que  s'il  n'avait  pas  donné  une  suite  à  cet  essai,  au  point  de  vue  indus- 
triel, c'est  que  à  cette  époque  les  machines  électriques  telles  qu'elles 
étaient  construites  ne  pouvaient  comporter  ce  genre  de  balais.  11  sem- 
ble que,  dans  ces  conditions,  l'exception  de  possession  personnelle  pro- 
posée par  Henrion  aurait  dû  être  accueillie.  Comp.,  Paris,  6  mars  1896, 
Rondepierrre,  Ann.,  96.73  ;  Pau,  14  janvier  1899  ;  Cornet,  Ann.,  99. 
260. 
•    (2)  Sur  les  preuves  de  la  publicité,  V.  Pouillet,  n»  485. 

(3)  Sur  les  demandes  indirectes  d'interprétation  de  brevets,  V.  Mai- 
nié, no  2168  ;  Àllart,  t.  3,  n«  378. 


}■ 


—  198  - 

ratt  préjudicter,  ou  à  rencontre  de  qui  Varrét  à  intervenir 
serait  de  nature  à  constituer  un  préjugé  (1). 

(Trib.  de  Nancy,  27  Juin  1898  ;  Goar  de  Nancy,  22  juillet  1899.  — 

Boudreaux  c.  Fabius-Henrion.) 

M.  BoudreauXy  propriétaire  d'un  brevet  d'invention  en 
date  du  2  juillet  1892,  avec  certificat  d'addition  du  18  mars 
1893  s'appliquant  à  la  fabrication  d'un  balai  électri- 
que constitué  par  une,  ou  plusieurs  feuilles  superposées  de 
métal  laminé  excessivement  mince,  entama,  en  189S,  des 
poursuites  en  contrefaçon  contre  divers  fabricants,  et  les 
âl  condamner  comme  contrefacteurs  par  arrêt  de  la  Cour 
de  Paris  du  8  juin  1896.  M.  Henrion,  ayant  au  cours  de 
l'instance  précédente  donné  aux  défendeurs  un  certificat 
tendant  à  prouver  que  lui-même  avait  fabriqué  des  balais 
semblables  avant  la  date  du  brevet  de  Boudreaux  fut  pour- 
suivi à  son  tour  en  contrefaçon  devant  le  Tribunal  de 
Nancy,  qui,  après  avoir,  par  un  premier  jugement  ordonné 
une  expertise,  rendit  à  la  date  du  27  juin  1898  le  jugement 
suivant: 

Le  Tribunal,  Attendu  que  Boudreatix,  propriétaire  d'un  brevet 
d'invention  délivré  en  France,  le  18  octobre  1892  avec  certificat 
d'addition  du  18  mars  1893,  pour  un  balai  électrique,  a  fait  assi- 
gner Fabius  Henrion,  électricien,  devant  le  tribunal  en  contrefa- 
çon dadit  brevet  ; 

«  Attendu  que  le  tribunal,  par  jugement  du  27  novembre  1895 
a  nommé  des  experts,  à  l'effet  d'examiner  les  brevets  et  autres 
documents  produits,  les  balais  saisis  chez  Henrion,  les  balais 
délivrés  par  Boudreaux  et  de  donner  leur  avis  sur  diverses  ques- 
tions; que  les  experts  ont  procédé  à  leur  mission  et  ont  consigné 
leurs  opérations  dansunprocès-verbaloomplet  et  documenté  qa^ils 
ont  déposé  au  greffe  de  ce  siège,  le  3  août  1897,  duquel  ii  résulte  : 

(I)  Le  Gode  de  procédure  civile  ne  mentionne  pas  rintervention  forcée  ; 
elle  a  lieu  lorsque  une  partie  en  cause  craignant  de  voir  an  tiers  noo 
intervenant,  attaquer  plut  tard  la  décision  rendue  en  dehors  de  lai  psr 
la  voie  de  la  tierce  opposition,  prend  les  devants  et  l'assigne  endéda- 
ralion  déjugeaient  commun  :  ne  peuvent  être  ainsi  assignés  que  les  tiers 
à  qui  la  chose  jugée  serait,  en  foit,  opposable  ou  qui  auraient  le  droit 
de  faire  tierce  opposition.  V.  Garsonnet,  Proc,  ctv.,  t.%  p.  686  et  722  : 
Boitard  et  Glasson,  ief.,  n«  580.  la  note  ;  Dalloz,  Rép.,  V»  Inierveniian^ 
n*  142  et  .Supp.  rép,,  eod,  verb,  n»  63  ;  Bourges,  il  août  1871,  DalL  73» 
2.34;  Pau,  24  janvier  1887,  Dali.  87.3.278;  Bordeani,  81  juillet  18B3» 
Dali.  91.2.5U  ;  Cass.,  21  octobre  1895,  Dali.  96.1.417. 

A.  T. 


iT-'^'V  1'- 


—  199  — 

i<»  que  Boudreauz  est  le  premier  qui  ait  employé  les  lames  en  clin^ 
quant  dans  Tiadustne  des  ixalais  électriques  ;  2°  que  rien,  dans 
les  lames  précédemment  employées,  notamment  par  Gafriôrei 
Siemen  et  Gravier,  ne  pouvait  infirmer  le  brevet  Boudreaux  ;  Z^ 
que  rinvention  Boudreaux  était  encore  brëvetâbie  en  18^2  ^-V^ 
que  les  balais  saisis  chez  Henrion  malgré  la  plômbagînetet' léF 
toiles  métalliques  qui  s'y  trouvent,  malgré  la  douille  dont  Ils  sdnti 
munis,  présentent  avec  ceux  de  Boudreaux  une  simjlitade  suffi- 
sante pour  constituer  une  contrefaçon  ;  5^  qu*avant  le  brevet 
Boudreaux,  Henrion  a  fait  l'essai  pour  ses  balais  de  lames  min^ 
ces  de  moins  d'un  dixième  de  millimètre  d'épaisseur,  mais  sur 
one  très  petHe  échelle  et  que  ces  balais  n'ont  pas  été  employés 
dans  la  construction  des  machines  vendues  ;  v 

-  Attendu  que  cette  expertise  est  absolument  concluante  «t  dé-^ 
montre  le  bien  fondé  des  prétentions  de  Boudreaux  ; 

Attendu  que,  malgré  cette  expertise,  Fabius  Henrion  prétend 
que,  dès  1887,  la  maison  Allioth  de  Bâle  (Suisse),  fabriquait  dee 
balais  en  lames  de  métal  de  moins  d'un  dixième  de  millimètre 
et  semblables  à  ceux  de  Boudreaux  : 

Mais  attendu  que  cette  allégation  qui  ne  repose  que  sur  des 
offres  de  service  peu  explicatives,  lesquelles  n'établissent  point 
que  ces  balais  avaient  les  mêmes  particularités  que  ceux  brevetés 
de  Boudreaux  sont  en  outre  contredites  par  les  faits,  Boudreaux 
ayant,  depuis  1893,  fourni  des  balais  brevetés  à  Allioth  lui-même 
qui  ne  les  considérait  aucunement  comme  ressemblant  aux  siens 
et  se  bornait  aies  trouver  d'un  prix  trop  élevé  pour  sa  clientèle; 

Attendu  que  Henrion  invoque  également  comme  antérieur  le 
brevet  Ydoux,  du  7  novembre  1891,  qui  emploie  pour  la  confec- 
tion des  balais  du  laiton  alternativement  entaillé  et  pris  dans  des 
plaques  aussi  minces  que  possible  ;  mais  que  cette  dernière  ex- 
pression n'indique  pas ,  comme  pour  les  balais  Boudreaux, 
l'emploi  de  clinquant  de  3/100*  de  millimètre  seulement,  offrant 
l'avantage  de  se  replier  quantité  de  fois  sur  lui-même  ; 

Attendu  que  le  simple  essai  auquel  se  serait  livré  Henripn  en 
1887,  de  construction  d'un  balai  ayant  quelque  analogie  ayec  le 
balai  Boudreaux,  ne  peut  lui  conférer  aucun  droit  à  l'encontre 
de  ce  dernier,  puisque  cet  essai  n'a  pas  été  suivi d'opéra^pn  in- 
dustrielle; 

Attendu  que,  malgré  l'avis  des  experts,  Henrion  persiste  à  sou- 
tenir que  les  balais  saisis  chez  lui  ne  sont  point  fabriqués  ea 
contrefaçon  du  brevet  Boudreaux  ;  que  celte  prétention  est  inad-. 
niissible  ;  qu'en  effet,  l'emploi  d'une  douille,  l'interposition,  dans 
le  clinquant,  de  toiles  métalliques  et  de  plombagine  pulvérisée, 
dont  l'efâcacité  est  d'ailleurs  niée  par  les  experts  et  les  cons- 
tructeurs les    plus  connus,  constituassent-ils  un  perfectionne» 


Zi- 


—  200  ~ 

ment»  n'en  laissent  pas  moins  subsister  le  caraotère  essentiel  et 
original  de  Tobjet  perfectionné,  le  balai  Boudreaux,  à  savoir  : 
l'emploi  du  métal  extrêmement  mince,  dit  clinquant,  se  repliant 
comme  du  papier  :  et  que,  suivant  les  dispositions  générales  de 
l'article  19  de  la  loi  du  5  juillet  1884,  Tauteur  du  perfectionne- 
ment ne  peut  en  tirer  parti  sans  violer  le  droit  de  Tauteur  de 
Tobjet  perfectionné,  s'il  est  breveté  ; 

Attendu  que,  par  ces  considérations,  la  contrefaçon  commise 
par  Henrion  parait  bien  et  dûment  établie  et  qu'une  seconde  ex- 
pertise, subsidiairement  sollicitée  par  lui,  est  inutile  ; 

Attendu  que  cette  contrefaçon  a  causé  à  Boudreaux,  un  pré- 
judice dont  il  lui  est  dû  réparation  et  qui  consiste  :  1*  dans  ses 
voyages,  dépenses  et  faux  frais  ;  2»  dans  le  bénéfice  illégitime 
réalisé  par  Henrion  ;  que,  pour  fixer  ce  dernier,  il  est  indispensa- 
ble de  recourir  à  une  expertise  ; 

Par  ces  'motifs.  Homologue  le  rapport  des  experts  ;  déclare 
Henrion  contrefacteur  du  brevet  n^  222,567  du  18  octobre,  de 
Boudreaux  ; 

Ordonne  la  confiscation  des  balais  contrefaits,  fabriqués  par 
Henrion  et  qui  se  trouvent  dans  ses  fabriques  et  ceux  décrits  aa 
procès-verbal  du  5  mai  1894,  ainsi  que  des  feuilles  laminées,  pré- 
parées ou  non,  et  ce  suivant  Tartlcle  9  de  la  loi  du  5  juillet  1844, 
avec  remise  à  Boudreaux  aux  frais  de  Henrion  ;  ordonne,  confor- 
mément aux  articles  1036  du  Gode  procédure  civile  et  49  de  la 
loi  du  5  Juillet  1844,  Tinsertion  du  présent  jugement  dans  quinze 
journaux  de  France  et  de  Tétranger,  au  choix  de  Boudreaux,  aux 
frais  de  Henrion,  mais  limitée  à  100  francs  par  insertion  ; 

Autorise  de  plus  Boudreaux  à  faire  à  ses  frais  la  publicité  de 
ce  jugement  dans  toutes  revues  et  journaux  spéciaux  et  ordinai- 
res qu^il  jugera  convenables  aux  initiales  seulement  des  parties; 
dit  et  ordonne  que  par  experts  convenus  par  les  parties  dans  les 
trois  jours  de  la  signification  du  présent  jugement,  sinon  par 
MM.  Perreau,  professeur  de  physique  industrielle  à  Nancy  ;  Colin, 
ancien  notaire,  rue  Kléber,  à  Nancy  ;  GoUombier,  ingénieur  à 
Nancy,  experts  nommés  d'office,  serment  préalablement  prêté 
devant  le  président  de  ce  siège,  il  sera  établi  et  déterminé  par 
état,  au  vu  de  la  comptabilité  de  Henrion,  lesbénéfices  illégiti- 
mes qu'il  a  réalisés  par  sa  contrefaçon  et  dont  il  doit  indemniser 
Boudreaux. 

'(  Condamne  néanmoins,  dès  à  présent,  Henrion,  par  provision 
à  payer  à  Boudreaux  une  somme  de  2,000  francs  à  titre  de  dom- 
mages-intérêts pour  l'indemniser  de  ses  voyages,  dépenses  et 
faux  frais  ;  le  condamne  en  outre  en  tous  les  dépens.  » 

M.  Henrion  ayant  interjeté  appel  de  cette  décision,  el 


—  201  — 

produit  des  certificats  et  attestations  d'électriciens,  pour 
établir  qu'antérieurement  à  la  prise  du  brevet  de  Bou* 
dreaux,  on  construisait  déjà  des  balais  électriques  sem- 
blables aux  siens,  M.  Boudreaux  forma  devant  la  Cour 
de  Nancy  une  demande  en  intervention  forcée  contre  les 
signataires  des  certificats  pour  les  contraindre  à  les  re- 
connaître et  à  les  désavouer.  La  Cour,  après  plaidoiries 
de  M*"  PouiLLET  et  Desjardin  (tous  deux  du  barreau  de  Pa* 
ris)  et  de  M**  Mbngin,  Moreau  et  Lbvy,  et  conclusions  de 
M.  Obrin,  avocat  général,  rendit  le  22  juillet  1899,  sous  la 
présidence  de  M.  Sadoul,  premier  président,  Tarrèt  sui« 
vant: 

La  Goub,  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges  ; 

Attendu  que  la  possession  personnelle  quUnvoque  rappelant 
pour  obtenir,  en  ce  qui  le  concerne,  la  nullité  du  brevet  Bou- 
dreaux, ne  saurait  être  admise  ;  que  s*il  semble  établi,  en  effet, 
que  Fabius  Henrion  s'est  livré  &  des  essais,  vers  Tannée  1887, 
pour  arriver  à  la  fabrication  de  balais  électriques,  à  Taide  de 
feuilles  de  laiton  très  minces  alternant  avec  des  toiles  métalli- 
ques enduites^de  plombagine,  le  tout  maintenu  par  une  feuille  de 
clinquant  formant  gaine,il  est  certain  néanmoins  qu'il  n'est  arrivé 
à  aucun  résultat  industriel,  et  qu'il  n'a  jamais  appliqué  même 
pour  les  besoins  de  son  industrie,  le  procédé  qui  a  fait  l'objet  du 
brevet  pris  en  1892  par  l'intimé  ;  qu'il  n'est  point  sorti  de  la  pé* 
riode  des  tâtonnements  et  n'a  entrevu  que  de  loin  la  découverte 
que  Boudreaux  a  fait  entrer  plus  tard  dans  le  domaine  de  la  pra- 
tique ;  qu'on  peut  donc  affirmer,  d'après  les  éléments  du  procès 
que  jamais  il  n'a  fait  usage,  môme  pour  son  compte  personnel, 
d'un  balai  électrique  constitué  de  la  même  façon  que  le  balai 
Boudreaux  et  pouvant  être  confondu  avec  lui  ;  qu'il  s'ensuit  qu'il 
ne  justifie  d'aucune  possession  personnelle  qui  soit  susceptible 
de  faire  écarter  la  demande  ; 

Sur  les  afûdavit  ou  certificats  qui  ont  motivé  la  réouverture 
des  débats  : 

Attendu  que  les  diverses  attestations  produites  par  Fabius  Hen- 
rion, au  cours  du  premier  délibéré,  ne  sont  nullement  proban- 
tes par  elles-mêmes,  qu'elles  sont  conçues  en  termes  trop  vagues 
pour  qu'on  puisse  en  induire  que  les  industriels  qui  les  ont  dé- 
livrées ont  été  réellement,  avant  1892,  en  possession  de  l'inven- 
tion revendiquée  par  Boudreaux  ;  qu'elles  n'indiquent  pas  d'une 
manière  formelle,  qu'il  y  a  similitude  entre  les  balais  employés 
antérieurement  au  brevet,  soit  par  la  maison  Elmore,  soit  par  la 
maison  Alliôth,  et  les  balais  électriques  fabriqués  par  l'intimé  ;' 


—  202  — 

qa*aucune  certitude  n'existe  à  cet  égard  en  présence  de  la  des* 
cription  incomplète,  faite  de  mémoire,  qu*en  donnent  les  certifi- 
cats présentés  à  la  dernière  heure  et  qui  proviennent  tous  de  ri- 
vaux en  industrie  de  la  maison  Boudreaux  ou  de  quelques-uns  de 
leurs  préposés  ;  qu'il  y  a  d'autant  moins  lieu  d'en  tenir  compte, 
qu'ils  se  trouvent  infirmés  par  les  réticences  qu'ils  semblent  con- 
tenir et  le  peu  de  sûreté  des  affirmations  qui  y  sont  produites  ; 
—  que  ces  diverses  constatations  suffiraient  à  elles  seules  pour 
les  faire  rejeter,  même  si  Boudreaux  ne  fournissait  pas  un  élé- 
ment de  conviction  qui  leur  enlève  toute  portée  ; 

Attendu,  en  effet,  qu'il  est  incontestable  que  dans  les  années 
qui  ont  suivi  1892,  la  compagnie  française  El  more,  comme  la 
compagnie  anglaise  du  même  nom  et  la  maison  Allioth,  ont  fait 
à  Boudreaux  de  nombreuses  commandes  de  balais  brevetés, 
qu'elles  en  ont  discuté  tout  d'abord  le  prix,  qu'elles  trouvaient 
trop  élevé,  puis,  qu'elles  ont  fini  par  accepter  les  conditions  qui 
leur  étaient  faites  ;  qu'on  ne  s'expliquerait  pas,  comment  se  trou- 
vant en  possession  du  procédé  de  Boudreaux  et  fabriquant  de- 
puis plusieurs  années  des  balais  électriques  semblables  aux  siens, 
ces  industriels  se  seraient  adressés  &  lui  malgré  les  exigences  de 
prix,  qu'ils  déclaraient  excessives,  pour  obtenir  les  appareils  né- 
cessaires (à  leurs  machines  électriques  ;  que  la  justification  que 
Boudreaux  a  faite  de  ces  achats  est  pleinement  démonstrative  et 
ne  saurait  laisser  subsister  aucun  doute  sur  l'inanité  des  produc- 
tions tardives  de  l'appelant  ; 

Attendu  qu'il  est  ainsi  établi  que  Fabius  Henrion  ne  saurait 
s'appuyer  sur  aucune  antériorité  pour  contester  la  validité  du  bre- 
vet qui  lui  est  opposé  ;  qu'il  s'est  bien  rendu  contrefacteur  de  ce 
brevet,  ainsi  que  l'ont  déclaré  avec  juste  raison  les  premiers 
Juges  ;  que  c'est  du  reste  là  la  seule  question  qui  soit  déférée  à  la 
Gour,  après  avoir  été  soumise  à  l'appréciation  du  tribunal;  que, 
dans  cette  situation,  les  conclusions  prises  par  Henrion,  dans  le 
but  de  faire  déclarer  dans  quelles  conditions  il  pourrait  continuer, 
sans  commettre  une  contrefaçon,  la  fabrication  des  balais  élec- 
triques, doivent  être  nécessairement  écartées,  puisqu'elles  sont 
absolument  eu  dehors  du  débat  ;  qu'il  n'y  a  évidemment  pas 
Heu  de  donner  à  l'appelant  une  sorte  de  consultation  sur  l'éten- 
due de  ses  droits  et  de  préjuger  ainsi  les  difficultés  qui  pourront 
naître  dans  l'avenir  : 

Attendu,  enOn,  que  le  travail  des  experts  présente  les  plus 
sérieuses  garanties;  qu'il  a  été  établi  avec  le  soin  le  plus  cons- 
ciencieux et  avec  une  indiscutable  compétence  ;  qu'il  est  complet 
et  répond  catégoriquement  à  toutes  les  questions  qui  ont  été 
posées  dans  rintérêt  de  la  manifestation  de  la  vérité  ;  qu'il  n*y  a 


Mpa^it-cr^t^#  -•-■^r» -T«i<»»'^r  «""^ v^' 


—  203  — 

pas  lieu,  dès  lors,  d^ordonner  une  nouvelle  expertise  comme  le 
sollicite  l'appelant  dans  ses  conclusions  subsidiaires  ; 

Sur  la  demande  en  intervention  forcée  introduite,  par  Boa- 
dreaux  contre  Elmore  et  consorts  : 

Attendu  que  Boudreaux  a  appelé  en  cause  devant  la  Cour  Elmore 
et  autres,  dans  le  seul  but,  d'après  ses  dernières  conclusions,, de 
faire  déclarer  par  la  Cour  que  l'arrêt  rendu  contre  Fabius  Hen- 
rion  leur  serait  commun  ;  qu'il  convient  d'examiner,  tout  d'à-" 
bord,  si  cette  demande  en  intervention  forcée  est  recevable  ; 

Attendu  qu'il  est  de  principe  que  Tintervention  forcée  n'est 
recevable,  en  cause  d'appel,  qu'à  rencontre  de  la  partie  qui  au- 
rait le  droit  de  former  tierce  opposition  à  Tarrét  à  intervenir  ; 
que,  d'un  autre  côté,  la  tierce  opposition  n'est  admissible  que 
de  la  part  d'un  tiers  à  qui  l'arrêt  pourrait  préjudicier  ou  à  ren- 
contre de  qui  l'arrêta  intervenir  serait  de  nature  à  constituer  un 
préjugé  ; 

Attendu  que  la  décision  de  la  Cour,  rendue  dans  le  procès 
pendant  entre  Fabius  Henrion  et  Boudreaux,  ne  pourrait,  en  au- 
cun cas,  causer  un  préjudice  à  Elmore  et  autres,  qu'il  soit  con- 
firmatif  ou  qu'il  soit  inûrmatif  ;  que  ces  derniers  n'ont  d'intérêt 
ni  de  près,  ni  de  loin,  dans  le  litige  engagé  entre  les  parties  en 
cause  ;  qu'ils  n'émettent  aucune  prétention  contraire  aux  pré- 
tentions de  Boudreaux,  n'étant  pas  même  menacés  par  lui  d'un 
procès  en  contrefaçon  ;  qu'ils  se  sont  bornés  à  affirmer  un  fait 
qui,  ^elon  Fabius  Henrion,  pouvait  avoir  une  influence  sur  la 
solution  du  procès,  les  intérêts  de  Boudreaux  et  ceux  de  Fabius 
Henrion.  étant  seuls  en  présence  ;  qu'il  n'existe  aucun  lien  entre 
l'appelant  et  Elmore  et  consorts,  et  qu'il  importe  peu  aux  intérêts 
de  ceux-ci  que  Fabius  Henrion  soit  déclaré  contrefacteur  ou  que 
l'intimé  soit  débouté  de  sa  demande  ;  que  l'arrêt  restera  pour  eux 
res  inter  alios  judicata  ;  qu'il  ne  pourrait  leur  préjudicier  en  rien, 
ni  constituer  un  préjugé  à  leur  encontre  puisque  Boudreaux  ne 
réclame  rien  aux  appelés  en  cause  qui,  de  leur  côté,  ne  formu- 
lent aucune  prétention  contre  lui  ;  qu'il  est  donc  certain  que 
ceux-ci  ne  pourraient,  à  aucun  titre,  attaquer  l'arrêt  par  la  voie  de 
la  tierce-opposition  ;  que  la  demande  en  intervention  forcée  dont 
ils  sont  l'objet  de  la  part  de  Boudreaux  doit,  en  conséquence, 
être  déclarée  non  recevable  ; 

Attendu,  toutefois,qu'il  n'est  nullement  démontré  qu'en  appe- 
lant Elmore  et  autres  devant  la  Cour,  Boudreaux  ait  agi  dans  iin 
esprit  de  vexation  et  avec  mauvaise  foi  ;  que  la  condamnation 
aux  dépens  constitue  seule  la  peine  du  plaideur  téméraire,  aux 
termes  de  l'article  130  du  Gode  de  procédure  civile;  qu'il  échet» 
en  conséquence,  de  décider  que  la  demande  de  dommages-intét 
têts,  intentée  par  Elmore  et  autres  contre  Boudreaux,  manque 


—  204  — 

de  base  et  doit  être  rejetée,  les  frais  nécessités  par  la  demande 
en  intervention  forcée  devant  rester  à  la  charge  de  ce  dernier  ; 

Par  ces  motifs,  Sans  s*arrêter  aux  conclusions  snbsidiaires  de 
rappelant,  une  nouvelle  expertise  étant  inutile  et  ne  pouvant 
occasionner  que  des  retards  et  des  frais  fru stratoires,  met  l^ap- 
pel  au  néant  ;  rejette  toutes  les  conclusions  prises  devant  la  Gonr 
par  Fabius  Henrion  ;  confirme,  en  conséquence,  dans  toutes  ses 
parties,  le  jugement  attaqué  ;  dit  qu'il  sortira  son  plein  et  entier 
effet; 

Déclare  non  recevable  la  demande  en  intervention  forcée,for- 
mée  par  Boudreaux  contre  Elmore  et  autres  ; 

Rejette  comme  non  fondée  la  demande  de  dommages-intérêts 
intentée  par  Elmore  et  autres  contre  Boudreaux  ; 

Condamne  Fabius  Henrion  à  l'amende  et  aux  entiers  dépens 
d'appel,  dans  lesquels  seront  compris  les  frais  d'autographie 
nécessités  par  l'instruction  de  la  cause  ; 

Met  néanmoins  les  frais  occasionnés  par  les  demandes  en  in- 
tervention forcée  intentées  contre  Elmore  et  autres  à  la  charge 
de  Boudreaux. 


Art.   4194, 

Brevet  Boadreanx.  —  OMitpeAiçoii  partieUe. 

Lorsqu'une  invention  porte  sur  un  balai  électrique  cons- 
titué par  une  ou  plusieurs  feuilles  de  laiton  laminé  exces- 
sivement mincCy  repliées,  plissées  ou  enroulées  sur  elles- 
mémeSy  il  y  a  contrefaçon  dissimulée  ou  tout  au  moins 
partielle  dans  le  fait  de  constituer  un  balai  par  deux  pa- 
quets de  lamelles  de  clinquant  découpées  et  superposées^ 
séparés  par  une  toile  métallique^  le  tout  formant  un  fais- 
ceau consolidé  par  des  rivets  et  enveloppé  de  deux  feuilles 
de  clinquant  formant  une  surface  continue  et  plusieurs  fois 
enroulées  sur  elles-mêmes  (1). 

(C.  de  Douai,8  décembre  1898.—  Boudreaux  c.  Damade.)  (2). 

« 

(1)  Sur  la  contrefaçon  partielle,  voir  Pouillet,  Brw,dHnv,,  n*  639  ;  Al- 
lart,  id,,i.  3,  no435.—  V.  Ga8s..l7  septembre  1858,Perin,  i4nn.,  58.312; 
Aiz,  6  avril  1867,  Coq,  Xnn.,  68.37  ;  Amiens,19  ]uin  1884,  Dapont,i4nn., 
87.118  ;  Paris,  27  février  1889,  Charageat,  Ann„  90.281. 
'  (2)  C'est  sur  le  règlement  des  frais  de  cette  décision  qu'a  été  rendu 
Tarrôt  de  la  Cour  de  Douai  du  21  juillet  1899,  que  nous  avons  d^  rap- 
porté aax  Annatet,  1900.64. 


^f^9imF^^M$^m  tii^^v  -^ ''fvr=?'«Tr"M».v'-*î^'^-v^ 


—  205  — 

Pendant  que  se  poursuivait  l*instànce  dirigée  contre 
Henrion  (v.  article  précédent)  M.  Boudreaux  avait  intenté 
une  action  en  contrefaçon  contre  M.  Damade  devant  le 
Tribunal  de  Douai,  qui  rendit  le  23  décembre  1897  un 
jugement  condamnant  Damade  comme  contrefacteur. 
Sur  appel  de  Damade,  la  Cour  de  Douai  après  avoir  en- 
tendu M*'  Allârt  et  Desjardin,  en  leurs  plaidoiries  a,  sous 
la  présidence  de  M.  Mauflastrs,  président,  rendu,  le  8  dé- 
cembre 1898,  l'arrêt  confirmatif  suivant  : 

La  Goor,  Attendu  que  Boudreaux  est  titulaire  d'un  brevet  d'in- 
vention en  date  du  2  juillet  1892  et  d'un  certificat  d'addition  du 
18  mars  1893  s'appliquant  à  la  fabrication  d'un  balai  feuilleté 
pour  machines  électriques  ;  qu'il  a  fait  saisir  chez  Damade  et 
Gie,  fabricants  à  Sin-le-Noble,  des  balais  qu'il  prétend  être  l'imi- 
tation frauduleuse  de  ceux  dont  il  s'est  réservé  la  propriété  et 
poursuit  les  défendeurs  en  contrefaçon  ; 

Attendu  que  le  balai  Boudreaux  est  constitué  par  une  ou  plu- 
sieurs feuilles  de  laiton,  dit  clinquant,  laminé  excessivement 
mince  (de  quelques  centièmes  de  millimètres  seulement  d'épais- 
seur) et  susceptibles  de  se  plisser  aussi  facilement  que  du  papier  ; 
ces  feuilles  sont  repliées  sur  elles-mêmes  ou  plissées  en  accor« 
déon  sans  solution  de  continuité  et  serrées  le  plus  possible  les 
unes  contre  les  autres  ;  le  plissage  peut  être  obtenu  par  l'enrou-* 
iement  des  feuilles  métalliques  sur  un  gabarit  ou  mandrin  et 
leur  aplatissement,  après  extraction  du  mandrin  qui  a  servi  à 
former  le  rouleau  ;  aux  feuilles  continues  peuvent  être  subs- 
tituées des  lamelles  isolées,  réunies  ensuite  entre  elles  par  tout 
moyen  convenable  ; 

Attendu  que  les  balais  ainsi  constitués  donnent  des  résultats 
industriels  importants,  à  raison  de  la  parfaite  conductibilité  pro- 
duite par  la  continuité  des  feuilles  métalliques  et  à  cause  de  leur 
faible  usure,  de  leur  élasticité  et  de  la  douceur  de  leurs  frotte- 
ments ;  que  la  brevetabilité  du  procédé  Boudreaux  n'est  d'ailleurs 
pas  contestée  ; 

Attendu  que  le  balai  construit  et  vendu  par  Damade  et  Gie 
se  compose  de  deux  paquets  de  lamelles  de  clinquant,  décou- 
pées et  superposées,  que  sépare  une  toile  métallique  en  laiton^ 
le  tout  formant  un  faisceau  consolidé  par  des  rivets  et  enve- 
loppé de  deux  feuilles  de  clinquant  formant  une  surface  conti- 
nue et  plusieurs  fois  enroulées  sur  elles-mêmes. 

Attendu  que  ce  balai  est  la  contrefaçon  dissimulée  ou  tout  au 
moins  partielle  de  celui  de  Boudreaux  ;  que  si  la  partie  intérieure 
formée  de  lamelles   isolées,  diffère  du  balai  Boudreaux,  il  n'en 


—  206  — 

est  pas  de  même  de  la  partie  extérieure  qui  est  constitaée  par 
Tenroulement  de  feuilles  métalliques  continues  et  présenté  une 
identité  absolue  avec  le  balai  breveté  par  le  demandeur  ; 

Attendu  que  vainement  Damade  et  Gie  à  Fappui  du  droit  qu'ils 
revendiquent  de  fabriquer  librement  leurs  produits,  invoquent 
le  brevet  Ydoux  du  7  novembre  1891  et  le  brevet  Lhuîllier  etCa* 
ron  du  7  décembre  1879,  lesquels  sont  tombés  dans  le  domaine 
public  ; 

Attendu  que  le  balai  Ydoux  est  formé  de  lamelles  de  laiton 
entaillées  et  non  de  feuilles  métalliques  continues  plissées  ou 
enroulées  sur  elles-mêmes  ;  qu'il  diffère  donc  de  ce  qui  fait  Tun 
des  éléments  du  brevet  Boudreaux  ; 

Attendu  que  le  balai  Lbuillier  et  Garon  est  formé  d'une  toile 
métallique  enroulée  sur  elle-même  et  n'emploie  pas  des  feuilles 
de  métal  offrant  une  surface  continue  comme  le  balai  du  deman- 
deur qu'il  n'existe  entre  ces  deux  produits  qu'une  lointaine  ana- 
logie ; 

Attendu  que  Boudreaux  s'étant  réservé,  pour  la  fabrication  de 
son  balai,  l'emploi  de  feuilles  de  clinquant  (ou  de  tout  autre  mé- 
tal convenable)  plusieurs  fois  pliées,  plissées  ou  enroulées  sur 
elles-mêmes  et  offrant  une  surface  continue,  Damade  n'avait  pas 
le  droit  d'envelopper  son  faisceau  intérieur  de  feuilles  métalliques 
présentant  la  même  disposition  ;  que  Ton  doit  voir  dans  cette 
enveloppe  non  pas  une  simple  gaine  destinée  à  protéger  les  la- 
melles intérieures,  mais  bien  Tun  des  organes  principaux  du 
balai,  organe  à  l'aide  duquel  Damade  obtient  les  résultats  indus- 
triels que  Boudreaux  a  réalisés  par  son  invention  ;  que  c'est  donc 
à  bon  droit  que  les  premiers  juges  ont  déclaré  Damade  et  Cie  con- 
trefacteurs des  brevet  et  certificat  d'addition  du  demandeur  ; 

Attendu  que  l'expertise  subsidiairement  demandée  serait  inu- 
tile et  frustratoire  ;  que  notamment,  alors  même  qu'il  serait  prou- 
vé que  Tenveloppe  extérieure  du  brevet  Damade  joue  au  point  de 
vue  de  la  conductibilité,  le  môme  rôle  proportionnellement  à  son 
poids,  que  les  lamelles  intérieures,  il  n'en  serait  pas  moins  éta- 
bli que  par  l'emploi  de  cette  enveloppe  extérieure,  Damade  a 
contrefait  le  produit  de  Boudreaux  ; 

Par  ces  motifs.  Et  adoptant  au  besoin  [ceux  non  contraires 
des  autres  juges  ; 

Met  Tappellation  à  néant  ; 

Dit  que  si  Damade  et  Gie  ont  le  droit,  au  regard  de  Bou- 
dreaux, de  fabriquer  des  balais  en  feuilles  de  laiton  aussi  minces 
que  possible,  superposées  sans  pliage  ni  plissage,  suivant  le  pro- 
cédé Ydoux,  ils  n'en  ont  pas  moins  commis  une  contrefaçon  en 
entourant  ces  feuilles  isolées  d'une  enveloppe  formée  en  feuilles 
métalliques  continues  et  enroulées  sur  elles-mêmes  ; 


—  207  — 

En  conséquence,  confirme  le  jugement  attaqué  ; 

Dit  qu'il  sortira  effet; 

Déclare  Damade  et  Gie  mal  fondés  en  leurs  demandes,  fins  et 
conclusions  tant  principales  que  subsidiaires,  les  déboute  de  leur 
demande  reconventionnelie  ;  les  condamne  à  l'amende  et  aux 
dépens  de  la  cause  d'appel. 


Art.  4195, 

Brevet  Roux.  ^  Emploi  nonirean.  —  Brevet  «le  per- 
feetlonnemeiit.  —  GertlAeat  d'addUion.  —  JWuUité. 
—  Bonne  foi.  «  Dommagreo-intérêto. 

Est  nul  le  brevet  qui  ne  contient  que  r application  sans 
combinaison  nouvelle  d'un  moyen  déjà  connu^pour  tobten- 
tion  d'un  résultat  industriel  que  ce  moyen  avait  pu  procu- 
rer y&t  est  par  suite  dépourvu  de  l'idée  créatrice  qui  caracté- 
rise Vinvention  (1). 

Ne  fait  pas  une  invention  brevetable  celui  qui  sans  indi- 
quer de  modifications  particulières  se  borne  à  appliquer 
un  procédé  connu  en  faisant  appel  à  V habileté  de  V ouvrier 
en  vue  de  sa  bonne  exécution  ;  spécialement^  étant  connu 
pour  empêcher  les  fentes  des  plafonds  l'usage  d'une  toile 
interposée  entre  la  couche  de  dégrossissage  et  celle  de  fini, 
ne  saurait  constituer  une  invention  brevetable  l'indication 
qu'il  convient  de  procéder  au  fini  du  plafond  à  l'aide  d'une 
couche  de  plâtre  très  mince  ne  couvrant  que  superficielle^ 
ment  la  toile,  sans  indication  des  moyens  de  réaliser  ce  ré- 
suUat. 

Ne  peut  être  considéré^  subsidiairement,  comme  un  brevet 
de  perfectionnement  d'un  brevet  antérieur, un  brevet  portant 
sur  un  procédé  connu  et  par  suite  nu/,  alors  que  l'inven- 
teur n'a  décrit  les  perfectionnements  qu'il  entendait  appor- 
ter à  ce  procédé  connu  que  dans  des  certificats  d'addition 
à  ce  brevet,  et  que  ces  perfectionnements  n'étaient  même 
pas  en  germe  dans  le  brevet  principal  (3). 

(i)V.  Pouillet,  Brev.  dHno,,  n«S7et  suiv.et371. 

(2)  Gorop.  rej.,  30  mars  1854,  Auzet,  Sir.,  55.1.226;  Rej.,  3  août 
1858  Buisson,  Z)a/^,  58.1.369;  Paris,  28  novembre  1862,  Favre,  Ann,, 
64.90,  Paris,  23  mai  1863,  Rasreil,  Ann.,  64.276  ;  Y.  Pouillet,  eod. 
toc^,  n*  41* 

(3)  Jurisprudence  coDstante.  Peu  importe  que  le  certificat  d'addition 


—  208  — 

Il  fCy  a  pas  lieu  de  condamner  à  des  dommages  et  intérêts 
le  demandeur  en  contrefaçon  lorsqu'il  a  agi  de  bonne  foi^ 
et  qu'il  n'est  pas  établi  que  sa  demande  ait  causé  un  préju- 
dice à  celui  contre  qui  elle  était  dirigée  (4). 

(C.  de  Dijon,  5  juin  1899.  —  Roux  c.  Denier.) 

Le  29  novembre  1898,  le  Tribunal  civil  de  Chalon-sur- 
Saône  a  rendu  le  jugement  suivant  : 

Li  Tribunal,  Attendu  que  Roux,  sculpteur  ornemaniste  demeu- 
rant à  Ghâlons-sur-Marne,  est  titulaire  d'un  brevet  demandé  le 
li  mai  1895  et  complété  par  des  certificats  d'addition  en  date 
des  26  mai  1896,  22  mars  et  i\  mat  1897,  ayant  pour  objet  un 
procédé  destiné  à  rendre  les  plafonds  en  plâtres  souples  et  incas- 
sables ;  que  Tinvention  revendiquée  consisterait  d'après  le  mé- 
moire descriptif  :  «  à  appliquer,après  Tavoir  trempé  au  préala- 
ble dans  du  plâtre  gâché  convenablement  et  surtout  de  toute  pre- 
mière qualité,de  la  toile  grossière  ou  de  Tétoupe...»  sur  la  «  cou- 
che dite  de  dégrossissage  bien  dressée  mais  laissée  grossière  pour 
donner  de  l'adhérence  »....  «en  tamponnant  fortement  au  pla- 
fond avec  une  brosse  trempée  elle-même  dans  le  plâtre  »  puis  «  i 
procéder  au  fini  du  plafond  par  une  couche  de  plâtre  très  mince 
de  façon  à  ne  couvrir  que  superficiellement  la  toile  ou  Tétoupe  » 
étant,  en  outre,  observé  que  «  ce  genre  de  travail  étant  appliqué 
aux  plafonds  neufs  ou  anciens  ne  change  presque  rien  à  la  façon 
de  faire  actuelle,  le  changement  très  important  réside  dans  l'ap^ 
plication  de  la  toile,  ou  Tétoupe  enfermée  entre  deux  couches  de 
plâtre,  la  couche  de  dégrossissage  et  la  couche  de  fini  du  pla- 
fond,cette  dernière  étant  mince  de  façon  qu'elle  se  marie  avec  la 
toile  ou  rétoupe  dans  des  conditions  très  favorables  »  ;  que  les 
perfectionnements  consignés  dans  les  certificats  d'addition  ont 
pour  objet  de  fixer  tout  d'abord  la  toile  avec  des clous,puis delà 
coller  avec  une  colle  spéciale  dont  la  composition  est  donnée 
ainsi  que  celle  de  divers  plâtres  à  employer  ; 

Attendu  que  Roux,  en  vertu  d'autorisations  obtenues  confor- 
mément à  l'article  47  de  la  loi  du  5  juin  1844  a  fait  procéder, 
par  ministère  de  l'huissier  Ragot,  assisté  d'un  homme  de  Fart, 
dans  une  maison  en  construction  appartenant  au  sieur  Jannin- 
Naltet,  à  diverses  constatations  qui  tendent  à  établir  qu'an 
deuxième  étage  des  plafonds  du  vestibule,  de  Tévier  et  do  la 

Considéré  en  lui-même  présente  toutes  les  conditions  de  brevetabilité  ; 
si  le  brevet  est  atteint  d*an  vice,  ce  vice  frappe  du  même  coup  le  cer- 
tificat d'addition.  V.  Pouillet,  eod,  loc,^  n«  154  et  jarisp.  citée. 

(i)  V.  Pouillet,  eod,  loc,  1006,  la  jurisprudence  citée,  et  aussi,  Rej.i 
8  mai  1896  ;  Zipemowski,  Ann.,  95.176. 


■I  ,1  p.p^r  ■■^  «-^'^  ff-rvm, ,■■  %i-  '-^-i.-^^ 


—  209  — 

salle  à  manger,  du  grand  et  du  petit  salon,  de  la  chambre  à  cou- 
cher, sont  munis  en  tout  ou  en  partie  d'entoilages  appliqués  à 
Taide  de  clous  entre  deux  couches  de  plâtre  blanc,  Tune  liée  puis 
piquée,  l'autre  ayant  environ  deux  millimètres  et  demi  d'épais- 
seur ;  qu'en  suite  des  procès-verbaux  ainsi  dressés,  il  a,  par  ex- 
ploit en  date  du  4  juillet  i898,enregistré,  assigné  le  sieur  Denier 
qui  avait  été  chargé  de  la  façon  des  plafonds  examinés,  pour 
s'entendre  déclarer  contrefacteur  des  brevets  et  certificats  d'ad- 
dition sus-relatês,  et  s'ouïr  condamner  à  10.000  francs  de  dom- 
mages-intérêts : 

Attendu  que  le  défendeur  ne  discute  pas  la  matérialité  des 
faits  reconnus  par  les  constats,  mais  dénie  le  caractère  de  nou- 
veauté de  l'invention  revendiquée  et  oppose  comme  antériorité 
un  brevet  délivré  le  23  décembre  1891  à  un  sieur  Vaché  de  Gre- 
noble ; 

Attendu  que  la  description  annexée  à  ce  brevet  porte  que  le 
procédé  consiste  à  appliquer  pendant  la  construction  du  plafond 
entre  le  grossissage  et  le  dernier  enduit,  une  toile  assez  forte,  à 
mailles  suffisamment  larges  qui,  le  plâtre  pris  dans  les  mailles 
ne  pouvant  plus  faire  de  retrait,  éviterait  les  fentes  qui  se  pro- 
duisent fatalement  avec  l'usage  ordinaire  dans  les  plafonds  neufs 
et  supprimerait  celles  existant  dans  les  plafonds  vieux  ;  ...  que 
l'idée  revendiquée  est  un  entoilage  sur  place  et  dans  l'intérieur 
du  plafond  ayant  pour  but  de  supprimer  les  fentes  et  d'augmen- 
ter la  solidité  et  la  beauté  dudit  »  ; 

Attendu  que  sans  avoir  à  chercher  si  la  prétendue  découverte  de 
Roux  présente  un  résultat  industriel  et  à  ce  titre  peut  être  bre- 
veté, il  y  a  lieu  de  reconnaître  que  le  procédé  par  lui  revendiqué 
à  la  date  du  11  mai  1895  est  identique  â  celui  que  Vaché  a  fait 
breveter  quatre  ans  auparavant  ;  qu'en  effet  l'idée  fondamentale 
des  deux  systèmes,  déclarés  applicables  aussi  bien  aux  plafonds 
neufs  qu'aux  plafonds  vieux,  est  Tincorporation  entre  deux  cou- 
ches de  plâtre  d'une  toile  qui,  pour  Roux,  est  une  toile  «  gros- 
sière »  et  pour  Denier,  une  toile  «  assez  forte, à  mailles  suffisam- 
ment larges  »  ;  que  pour  les  deux  inventeurs  qui  arrivent  au 
même  but  par  le  même  moyen,  mais  sans  s'expliquer  ni  l'un  ni 
l'autre  sur  un  procédé  spécial  permettant  de  la  fixer,  la  toile  est 
placée  d'après  le  brevet  de  1895  «  entre  la  couche  de  dégrossissage 
et  la  couche  de  fini  »  ;  d'après  le  brevet  de  1891  :  «  entre  le  dégros- 
sissage et  le  dernier  enduit  »  ;  que  la  similitude  des  deux  préten- 
dues inventions  est  absolue  ;  qu'à  la  vérité  Roux  signale  comme 
l'indication  d'un  procédé  primitif, partant  brevetable,  cette  énon- 
ciation  du  mémoire  descriptif  :  «<  procéder  au  fini  du  plafond  par 
une  couche  de  plâtre  très  mince,de  façon  à  ne  couvrir  que  super- 
ficiellement la  toile  »  ;  que  peut-être  le  demandeur  aurait  fait 

i4 


1 


—  210  — 

une  découverte  susceptible  d'être  brevetée  s'il  avait  trouvé  le 
inoyen  de  régulariser  l'épaisseur  de  la  couche,  mais  qu*il  n'in- 
ventait rien  alors  qu'il  faisait  simplement  appel  à  rtiàbileté  de 
TouvrieV  pour  garder  des  proportions  convenables  et  non  déter- 
minées a  priori  ;  qu'il  y  a  même  lieu  d'observer  en  fait  que  d'a- 
près les  constats,  la  couche  de  uni  des  plafonds  établis  par  Denier 
avait  une  épaisseur  d'environ  deux  millimètres  et  demi  qui  ne 
diffère  pas  de  'celle  habituellement  donnée  dans  la  région,  au 
dernier  enduit  des  plafonds  ordinaires,  enduit  désigné  par  les 
gens  du  métier  sous  le  nom  caractéristique  de  feuille  de  plâtre  ; 

Qu'en  tous  cas,  une  modification  de  détail  dans  l'application 
d'un  procédé  connu,  alors  même  qu'elle  permet  d'obtenir  un  ré- 
sultat meilleur,  ne  constitue  qu'une  habileté  de  mise  en  pratique 
et  non  une  invention  brevetable  ;  qu'en  réalité  le  brevet  de  Roux 
ne  contenait  que  l'application  sans  combinaison  nouvelle,  d'un 
moyen  déjà  connu  pour  l'obtention  d'un  résultat  industriel  que 
ce  moyen  avait  pu  antérieurement  procurer;  qu'il  était  donc 
dépourvu  de  l'idée  créatrice  qui  caractérise  l'invention  et  se  trou- 
vant par  suite  frappé  de  caducité,  ne  peut  être  opposé  à  Denier  ; 

Attendu  que  Roux  soutient  à  titre  subsidiaire  que  le  brevet  à 
lui  délivré  est  tout  au  moins  valable  comme  brevet  de  perfec- 
tionnement du  brevet  Vaché  ;  qu'à  l'appui  de  sa  prétention,  il 
pourrait  peut-être  invoquer,  comme  des  découvertes  utiles  à  Tin- 
dustrie,  l'idée  avant  de  coller  la  toile,  de  la  fixer  au  moyen  de 
clous  ainsi  que  la  composition  spéciale  de  la  colle  à  employer 
et  du  plâtre  destiné  au  dernier  enduit  ;  mais  que,  sans  rechercher 
Al  en  fait  le  clouage  de  la  toile  qui  seul  est  établi  à  la  chargé 
de  Denier  par  les  procès- verbaux  de  constat  a  quelque  valeur 
brevetable,  il  y  a  lieu  de  constater  qu'en  tout  cas  et  en  droit,  le 
breveté  ne  s'est  point  régulièrement  placé  sous  la  protection 
légale  ;  qu^en  effet,  le  procédé  revendiqué  qui  n'était  point  en 
germe  dans  le  brevet  n'a  été  décrit,  ou  plus  exactement  n*a  été 
indiqué  que  dans  les  mémoires  joints  aux  certificats  d'addition 
successivement  demandés  et  qu'il  est  de  principe  en  doctrine 
(Jur.  gén.  Supplément^  Vo  Brevet  d^invention,  n**  123, 124  ;  Poail^ 
let.  Traité  des  brevets  d'invention,  n^*  154,  155),  et  en  jurispm- 
dence  (Civ.  cass.,  i*' juin  1865,  D.  P.  06.1.457;  14  déc.  1868, 
D.  P.  69.1.81  ;  20  déc.  1886,  D.  P.  87.1.352)  que  les  certificats  de 
cette  nature  prennent  fin  avec  le  brevet  quelle  que  soit  la  cause 
qui  en  interrompt  l'effet;  que  le  brevet  Roux  étant  nul  comme 
s'appliquant  à  une  invention  déjà  connue  et  dans  le  domaine 
public,  les  certificats  d'addition  ne  valant  qu^accessoirement 
au  brevet,  tombent  avec  ce  brevet  lui-même  et  ne  peuvent  dès 
lors  ni  conférer  un  droit  au  demandeur  ni  servir  de  base  à  une 
poursuite  ;  que,  dans  ces  circonstances,  l'action  en  contrefaçon 


^ffti 


—  ail  — 

introdoile  par  Roux  e  t  dénuée  de  fondement  et  doit  être  reje-^ 
tée; 

•  Attendu  que  Denier  a  formé  une  demande  reconventipnnelle 
en  dommages-intérêts; 

Attendu  que  Roux  en  invoquant  à  l'appui  de  sa  demande  un 
brevet  frappé  de  caducité  a  commis  une  faute  et  une  impru-< 
dence  qui  engagent  sa  responsabilité  ; 

Qu'en  dehors  des  frais  de  l'instance  qui  sont  la  peine  du  plai-^ 
deur  téméraire,  il  doit  être  tenu  de  réparer  le  préjudice  qni  est 
résulté  pour  Denier  de  Timputation  de  contrefacteur  dirigé^ 
contre  lui,  ainsi  que  des  saisies  et  constatations  à  tort  pratiquées 
chez  le  propriétaire  qui  Favait  occupé  ; 

Attendu  que  le  tribunal  a  les  éléments  d'appréciation  néces- 
saires pour  évaluer  l'importance  de  ce  préjudice  ; 

Attendu  que  les  dépens  sont  à  la  charge  de  la  partie  qui  suc- 
combe ; 

Par  ces  motifs,  Déclare  Roux  mc^  fondé  dans  sa  demande,  l'en 
déboute  ; 

Déclare  au  contraire,  Denier  bien  fondé  dans  sa  demande 
reconventionnelle  ;  en  conséquence  condamne  Roux  à  lui  payer 
à  titre  de  dommages-intérêts  et  en  réparation  du  préjudice  à  lui 
causé,  la  somme  de  200  francs  ; 

Ck>ndamne  Roux  en  tous  les  dépens  de  Tinslance,  dans  les- 
quels  seront  compris  au  besoin  à  titre  de  supplément  de  dom- 
mages-intérêts tous  droits  d'enregistrement  et  d'amende  qui 
pourraient  être  perçus  à  l'occasion  du  présent  litige  ; 

Le  sieur  Roux  ayant  interjeté  appel  de  ce  jugement,  la 
Cour  de  Dijon  a,  sous  la  présidence  de  M.  Gilbert,  prési- 
dent, après  plaidoiries  de  W^  Durotaume  (du  barreau  de 
Paris)  et  Godjbt,  rendu  le  3  juin  1891  Tarrèt  suivant  : 

La  Cour,  En  ce  qui  touche  les  conclusions  du  demandeur  prin* 
cipal  Roux  :  —  Adoptant  les  motifs  des  premie^'s  juges  ; 

En  ce  qui  touche  la  demande  reconventionnellè  de  Denier  : 

Attendu  que  Denier  ne  justifie  pas  qu'il  était  résulté  pour  lui 
un  préjudice  de  l'imputation  de  contrefaçon  dirigée  contre  lui 
de  bonne  foi,  d'ailleurs,  par  Roux,  ainsi  que  des  saisies  et  des 
constatations  faites  chez  le  propriétaire  qui  Tavait  occupé,  que 
toutefois,  si  la  défense  de  l'intimé  ou  l'action  de  rappelant  a 
entraîné  Tapplication  de  droits  ou  d'amendes  d'enregistrement, 
il  est  juste  que  Roux,  comme  l'ayant  déterminé,ren  dédommage  ; 
Que  sous  cette  réserve  il  y  a  lieu  d'infirmer  le  jugement  au 
chef  contenant  l'allocation  de  dommages-intérêts  à  Denier  ; 

Attendu  que  nonobstant  cette  inûrmation  sur  un  chef  d'im- 


»  1^ 


—  212  — 

portance  secondaire,  il  convient  de  condamner  Roax  aux  dépens 
de  l'appel  ; 

Par  CBS  hotips,  Statuant  sur  Tappel  du  jugement  du  Tribunal 
civil  de  Chalon-sur-Saône  du  29  novembre  1898  ; 

Confirme  ce  jugement  quant  aux  dispositions  relatives,  soit  à 
la  demande  et  aux  conclusions  du  demandeur  principal  Roux,  soit 
à  sa  condamnation  aux  dépens  et  à  titre  de  dommages-intérêts 
aux  droits  ou  amendes  d'enregistrement  qui  seraient  perçus  à 
Foccasion  du  litige  et  dit  qu'en  cette  partie,  le  jugement  sortira 
son  plein  et  entier  effet  ; 

Infirme  cette  décisision  quant  à  la  condamnation  à  la  somme 
de  200  francs  de  dommages-intérêts  prononcée  en  faveur  de 
Denier,  et  repousse  comme  mal  fondée  la  demande  en  dom* 
mages-intéréts. 


Art.  4196. 

Médaille*.  —  U«urp»tJoii. 

Contrevient  aux  dispositions  de  la  loi  du  30  avril  1886, 
le  négociant  qui  fait  figurer  sur  des  étiquettes  apposées 
sur  un  produit  un  certain  nombre  de  médailles,  sans  qu'il 
soit  fait  mention  de  leur  date,  de  leur  nature  et  de  l'expo- 
sition  ou  du  concours  où  elles  ont  été  obtenues,  alors  sur- 
tout  qu'en  fait,  ce  négociant  n'a  jamais  obtenu  de  récom- 
penses  dans  les  concours  pour  le  produit  sur  lequel  étaient 
apposées  lesdites  étiquettes  (1). 

(Trib.  corr.  de  Nevers,  32  mars  1900.  —  Merland.) 

Ainsi  jugé,  sur  poursuite  du  ministère  public  par  le 
Tribunal  correctionnel  de  Nevers  le  22  mars  1900. 

Li  Tribunal,  Attendu  qu'au  cours  d*un  procès  civil  pendant 
entre  le  prévenu  et  autres,  trois  bouteilles  de  liqueur  ont  été 
saisies  par  procès-verbal  régulier  du  7  octobre  1899,  au  domicile 
de  Merland  et  produites  à  Taudience  du  16  janvier  dernier  ; 

Qu'au  cours  des  débats,  M.  le  procureur  de  la  République  a 
constaté,  par  procès-verbal  régulier  du  même  jour,  que  ces  trois 
bouteilles  étaient  revêtues  d'une  étiquette  en  papier  blanc  sur 
laquelle  figuraient  un  certain  nombre  de  médailles  imprimées 

(1)  Bar  rapplication  de  la  loi  de  1886  et  sa  portée,  V.  Poaillet,afarçi<e«, 
584  et  8.  —  L'espèce  rapportée  est  an  des  rares  exemples  de  poursuites 
engagées  directement  par  le  ministère  public. 


■  •■;■■,■  I" 


—  213  — 

en  or  et  sans  qa*il  soit  fait  mention  de  leur  date,  de  leur  nature 
et  de  l'exposition  ou  du  concours  où  elles  ont  été  obtenues  ; 

Attendu  qu*à  l'audience  da  22  février  1900,  le  prévenu  tout  en 
reconnaissant  Fezactitude  des  faits  matériels  relevés  ci-dessus, 
a  demandé  à  être  relaxé  purement  et  simplement  des  poursui- 
tes exercées  contre  lui  et  alléguant  qu'il  ne  croyait  avoir  commis 
aucun  délit  ; 

Mais  attendu  que  les  termes  de  la  loi  du  30  avril  1886  sont  for- 
mels ;  que  cette  loi,  a  été  promulguée  en  vue  de  protéger  les  vé- 
ritables attributaires  de  récompenses  dans  les  différents  concours 
où  leurs  produits  ont  été  exposés,  contre  les  fabricants  de  mau- 
vaise foi  qui  tentent,  par  ce  procédé,  de  laisser  croire  que  leurs 
produits  ont  été  primés  ou  récompensés  en  raison  de  leur  qua- 
lité ; 

Qu'en  fait,  Merland  n*a  jamais  obtenu  de  récompenses  dans 
les  concours  pour  le  produit  contenu  dans  les  trois  bouteilles 
saisies  ; 

Que,  dans  ces  conditions,  les  faits  ci-dessus  relevés  contre 
Merland  tombent  dans  l'application  des  articles  1,2  et  4  de  la  loi 
du  30  avril  1886  ; 

Attendu  toutefois  qu'il  apparaît  au  tribunal  que,  dans  l'espèce, 
le  prévenu  a  plutôt  suivi  un  usage  trop  répandu  ;  qu'il  y  a  lieu 
de  le  faire  bénéficier,  dans  une  large  mesure,  des  circonstances 
atténuantes,  et  de  lui  faire  application  des  articles  463  du  Gode 
pénal  et  6  de  la  loi  du  30  avril  1886  ; 

Par  CBS  motifs,  Déclare  Merland  coupable  du  délit  ci-deisus 
spécifié  ; 

Et  le  condamne  à  une  amende  de  16  francs  ; 

Mais  attendu  que,  jusqu'à  ce  jour,  le  prévenu  n'a  jamais  été 
condamné  ;  qu'il  y  a  lieu,  en  raison  de  ses  bons  antécédents,  de 
lui  faire  application  des  articles  1, 2,  3  et  4  de  la  loi  du  26  mars 
1891; 

Dit  et  ordonne  qu'il  sera  sursis  pendant  cinq  ans  à  l'exécution 
de  la  peine,  etc.  ; 

Condamne  en  outre  Merland  au  remboursement  des  frais  liqui- 
dés,  etc.  ; 

Fixe  la  durée  de  la  contrainte  par  corps  à  deux  jours. 


—  214  — 
Art.  4197. 

Conearrenee  déloyale.  —  Maa^atoe  fbl.  — >  Paate.  — 
IKMiiinaffes-liitérêto.  —  Ck^neliisloiMi  nomrelle*;  — • 
M<»tlAi  munmm.ntm. 

Lorsque  les  circonstances  de  la  cause  excluent  toute  idée 
de  mauvaise  foi,  les  allégations  et  les  procédés  de  réclame 
dont  une  partie  a  usé  vis-à-vis  d*une  autre,  et  qui  lui  ont 
porté  préjudice  constituent  à  V égard  de  cette  partie^  non 
pas  les  éléments  d'une  concurrence  déloyale  mais  les  élé- 
ments d*une  simple  faute  passible  de  dommages-intérêts  (1). 

Est  suffisamment  motivé  Varrét  qui  ayant  à  statuer  tur 
des  conclusions  d'appel  contenant  une  demande  d allocation 
supérieure  de  dommages-intérêts,  et  d'insertion  de  la  dé^ 
cision  à  intervenir  dans  plusieurs  journaux  aux  frais  de 
l'intimé  et  à  titre  de  supplément  de  dommages-intérêts^ 
s'est  borné  à  déclarer  que  les  premiers  juges  avaient  fait 
une  saine  appréciation  du  préjudice  causé  à  la  partie  de* 
manderesse  et  à  débouter  celle-ci  de  ses  fins,  moyens  et 
conclusions  prises  de  ce  chef. 

(G.  de  Gasi.,  ReJ.,  9  avril  190a  —  Doffoil  c.  Camille.) 

Ainsi  jugé  par  la  chambre  des  requêtes  le  9  avril  1900» 
sous  la  présidence  de  M.  Tanon,  président,  sur  le  rapport 
de  M.  Alphandért,  conseiller,  après  plaidoiries  de  M*  Db- 
FERT,avocat,  et  conclusions  de  M.MÉRiLLON,avocat  général. 

La  Goua,  Sar  le  premier  moyen,  pris  de  la  violation  des  arti- 
cles 1382  et  suivants  da  Gode  civil  et  des  principes  généraux  en 
matière  de  quasi-délit: 

Attendu  que  Tarrôt  attaqué  déclare  que  si  certaines  aUëgations 
du  défendeur  éventuel  et  les  procédés  de  réclame  dont  il  a  usé 
vis-à-vis  du  sieur  DofToil,  ont  occasionné  un  préjudice  &  ce  der- 


(1)  En  l'absence  de  mauvaiie  foi,  la  concurrence  déloyale  n^existe  pas, 
mais  il  peut  y  avoir  néanmoins  préjudice  et  faute  donnant  lien,  par  ap- 
plication des  principes  de  Tarticle  1382  à  des  dommage-intérêts.  Y. 
Feuillet,  Mat'ques,  n*  678  ;  V.  aussi,  Douai,  20  juillet  1866,  Leblondel, 
DalL,  67.5.^39  ;  Paris,  28  mars  1878,  Leroux,  Dali.,  79.2.10  ;  Trib. 
Nantes,  6  mars  1880,  Pellier,  Ann.,  83.133  ;  Req.^  28  juin  1889,  Oalt.^ 
90.1.88. 

(2)  Sur  les  motifs  des  jugements,  V.  Dali.,  Jur,  gén,,  V«  Jugement» 
no  774  et  s. 


!■  * »fcVW"Jh*'»-  "-.^W-'t"****'  ■'■\>T?»»T-^'^'V^»7 


—  215  — 

nier,  on  ut  troufe  pas  dans  les  faits  de  la  cause  les  éléments 
constitutifs  d'une  concurrence  déloyale  nettement  définie  ; 

Qu'une  telle  appréciation  implique  dans  les  circonstances  de 
la  cause  relevées  par  les  juges  du  fond,  l'absence  de  mauvaise 
foi  de  la  part  du  défendeur  ; 

Que  par  suite,  en  ne  voyant  dans  les  actes  retenus  contre  le 
sieur  Camille  qu'une  simple  faute  passible  de  dommages-intérêts, 
la  Cour  de  Paris,  loin  de  violer  les  textes  de  loi  et  les  principes 
sus-visés,  au  moyen,  en  a  fait  au  contraire  une  juste  application  ; 

S^r  le  deuxième  moyen  tiré  de  la  violation  de  Tarticle  7  de  la 
loi  du  20  avril  1810  : 

Attendu  que  dans  ses  conclusions  d'appel,  le  sieur  DofToil  de- 
mandait une  allocation  supérieure  de  dommages-intérêts  ainsi 
que  l'autorisation  de  publier  la  décision  à  intervenir  dans 
quarante  journaux  à  son  choix,  et  ce  «  aux  frais  du  défendeur 
éventuel, et  à  titre  de  supplément  et  dommages  et  intérêts  >i  ; 

Attendu  que  l'arrêt  attaqué  a  confirmé  la  décision  de  pre- 
mière instance,  en  ce  qui  concerne  les  dommages-intérêts,  en 
déclarant  que  les  premiers  juges  avaient  sainement  apprécié  le 
préjudice  causé  à  DofToil,  et  en  déboutant  ce  dernier  de  ces 
moyens,  fins  et  conclusions  prises  de  ce  chef; 

Qu*en  statuant  ainsi,  la  Cour  de  Paris  a  virtuellement  répondu 
aux  nouvelles  conclusions  prises  par  l'appelant  ; 

Pae  CBS  MOTiFSj  Rejette. 


Art.  4198. 

Appel  Ineldent.  — •  Intimé.  —  IVon-reee^ablllié.^  Bre- 
wet.  —  Contrefaçon.  —  Recel.  —  Bonne  fol.  —  Action 
en  Juetlce.  —  Garnctére  ▼exntolre.—  Faute.—  Doni- 
maffea-lntéréte. 

L'appel  incident  n'est  pas  recevable  de  la  part  d'un  in- 
limé  (1). 

Varmateurj  qui  a  gardé  provisoirement  dans  ses  ma- 
gasins des  marchandises  reçues  pour  être  expédiées  à 
Vétranger^  ne  peut  dans  le  cas  où  ces  marchandises  ont  été 
saisies,  sans  opposition  de  sa  part,  par  un  tiers  préfendant 
qu'elles  étaient  la  contrefaçon  de  produits  pour  lesquels  il 

(1)  V.  Garsonnet,  Traité  de  procédure,  t.  V,  p.  294,  Dali.,  Jur,  yen. 
suppl.f  y'*  Appel  incident,  n»  18.  Comp.  Rej.,  29 avril  1895,  Dali,, 9^, 
1.454  ;  Dijon,  25  février  1898,  Dali.,  99.2.127,    . 


—  216  — 

était  breveté^  être  considéré  comme  receleur  et  condamné 
comme  tel^  alors  que  les  juges  du  fond,  par  une  apprécia- 
tion souveraine  des  faits  de  la  cause  et  de  la  correspondance 
des  parties,  ont  constaté  sa  bonne  foi  (1). 

Le  fait  par  un  tiers  d'avoir  demandé  à  ces  armateurs^sans 
V accomplissement  d* aucune  formalité  judiciaire  de  lui  U- 
wer  des  marchandises  appartenant  à  leurs  commeUants  ; 
d*avoir  traduit  ces  armateurs  en  justice  pour  avoir  résisté 
à  cette  prétention  ;  d'avoir  porté  contre  eux  une  aecnsaiion 
de  recel  déclarée  téméraire  et  dénuée  de  fondement,  et  de 
leur  avoir  suscité  un  procès  purement  vexatoire,  peut  être 
à  bon  droit  considéré  par  les  juges  du  fond  comme  une 
faute  lourde  donnant  lieu  à  des  réparations  pécuniaires  en 
outre  des  dépens  légaux  (2). 

(G.  de  cass.,  24  octobre  1898.  —  Agostini  c.  Caillot  et  Saint-Pierre.) 

Ainsi  jugé  par  la  chambre  des  requêtes  sous  la  prési- 
dence de  M.  Tanon,  président,  au  rapport  de  M.  le  conseil- 
ler Gborgk  LEMAiRE,après  plaidoiries  de  HL^  André  Morillot, 
avocat  et  conclusions  conformes  de  M.  Puboh,  avocat  gé- 
néral, sur  le  pourvoi  de  Agostini  contre  un  arrêt  de  la 
Courd'Aix  du  22  juin  1897. 

La  Codr,  Sur  le  moyen  unique  tiré  des  articles  47,  49  de  la  loi 
du  b  juillet  1844,  14,  17,  19  de  la  loi  du  23  juin  1857,  1882,  1883 
du  Gode  civil  et  7  de  la  loi  du  20  avril  1810. 

Sur  la  première  branche  : 

Attendu  qu'Antoine  Roger  et  Gie  avaient  adressé  à  Caillot  et 
Saint-Pierre,  armateurs  à  Marseille,  quatre  caisses  de  marchan- 
dises pour  être  expédiées  à  Odessa  ;  que  les  armateurs  se  bor- 
nèrent i  les  retirer  du  chemin  de  fer  pour  éviter  des  frais  de 
magasinement,  et  à  les  garder  provisoirement  dans  leurs  maga- 
sins ; 

Qa'Agostini  prétendant  que  les  marchandises  contenues  dans 
les  dites  caisses  étaient  la  contrefaçon  de  produits  pour  lesquels 
il  était  breveté,  demanda  aux  armateurs  de  les  lui  expédier  i 

(1)  Les  seules  conditions  oonstitotives  du  recel  sont  :  la  détention  ma-- 
térielU  et  la  connaissance  que  l'objet  est  délictoeox  ;  si  donc  la  bonne 
foi  du  détenteur  est  reconnue  il  ne  peut  y  avoir  recel.  V.  Pouillet,  Brev* 
dHnv.,  no«7i7  et  696;  Allart,  id.,  no  464  ;  Mainié,  id,,  n»  3508  et  soir.  ; 
GoulûB,  Prop.  ind.,  art,  et  liU,,  t.  Il,  p.  266  et  aussi  Ann.,  88. 1S3, 
article  de  Plé. 

(2)  L*action  en  jostioe  intentée  témérairement  donne  oavertim  â  des 
dommages  et  intérêts.  V.  Poailtek,  eod  /oc.,n«  1006. 


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—  217  — 

lui-mèm6,  et  sur  leur  refus,  les  fit  saisir  danâ  leurs  magasins, 
sans  d'ailleurs  opposition  de  leur  part  ;  qu'il  assigna  ensuite  de- 
vant le  Tribunal  civil  de  Marseille,  Antoine  Roger  et  Gie  comme 
contrefacteurs,  et  Caillot  et  Saint-Pierre  comme  receleurs  ; 

Que  le  tribunal  donna  défaut  contre  Antoine  Roger  et  Gie,  et 
en  conséquence  déclara  contrefaites  les  marchandises  saisies,  et 
en  ordonna  la  confiscation  au  profit  d'Âgostini  ;  qu'en  outre  il 
condamna  solidairement  Antoine  Roger  et  Gie  ainsi  que  Caillot  et 
Saint-Pierre  à  100  francs  de  dommages-intérêts  envers  Agostini  ; 

Attendu  qu'Antoine  Roger  et  Cie  n'ont  pas  appelé  de  cette  dé- 
cision ;  que  Caillot  et  Saint-Pierre  ont  seuls  interjeté  appel  contre 
Agostini  ;  que  s'ils  ont  mis  en  cause  Antoine  Roger  et  Cie,  ceux- 
ci  n'ont  pas  comparu  ;  qu'intimés,  ils  n'auraient  pu  d'ailleurs 
former  appel  incident  contre  Agostini  également  intimé  ; 

Que  la  décision  rendue  à  son  profit  contre  eux,  décision  qui 
déclare  leurs  marchandises  contrefaites  et  en  ordonne  la  confis- 
cation ne  pouvait  donc  être  et  n'a  pas  été  réformée  par  la  Cour 
d'appel  ;  que  la  Cour  n'avait  à  statuer  que  sur  Tappel  de  Caillot 
et  Saint-Pierre  et  à  décider  s'ils  devaient  être  considérés  comme 
ayant  recelé  sciemment  les  marchandises  contrefaites,  et  si  par 
suite  il  y  avait  lieu  de  maintenir  leur  condamnation  aux  dom- 
mages-intérêts et  aux  dépens  ; 

Que  la  Cour  d'Aix,  par  une  appréciation  souveraine  des  faits 
de  la  cause,  et  de  la  correspondance  des  parties  a  constaté  la 
bonne  foi  de  Caillot  et  Saint-Pierre  ;  que  par  suite  elle  a  été 
fondée  à  refuser  de  les  considérer  comme  receleurs  et  de  les 
condamner  à  ce  titre. 

Sur  la  deuxième  branche  : 

Attendu  que  le  fait  par  Agostini  d'avoir  demandé  aux  arma- 
teurs Caillot  et  Saint-Pierre  sans  l'accomplissement  d'aucune  for- 
malité judiciaire,  de  lui  livrer  à  lui-même  des  marchandises 
appartenant  à  leurs  commettants  ;  d'avoir  traduit  les  armateurs 
en  justice  pour  avoir,  dit  l'arrêt,  résisté  à  cette  étrange  demande  ; 
d'avoir  porté  contre  eux  une  accusation  de  recel  que  l'arrêt  dé- 
clare aussi  téméraire  que  dénuée  de  fondement,  et  de  leur  avoir 
suscité  un  procès  qualifié  par  la  Cour  d'appel  de  purement  vexa- 
toire,  a  pu  être  considéré  par  les  juges  du  fond  comme  une  faute 
lourde  donnant  lieu  à  des  réparations  pécuniaires  en  outre  des 
dépens  légaux  ; 

D*o\ï  il  suit  que  la  décision  attaquée,  d'ailleurs  régulièrement 
motivée,  ne  viole  aucun  des  articles  de  loi  visés  au  pourvoi  ; 

Par  cif  MOTIFS,  Rejette. 


—  218  — 


Art.  4199- 

Brevet.  -*  Compétence.  —  SoMle.  —  In^énlear 
de  breveté.  —  CkHniiierçAnt.  —  CUurauitle. 

Lorsqu'au  cours  d'une  instance  principale  portée  régu- 
lièrement devant  le  tribunal  de  commerce,  il  s*élève  une 
question  relative  à  lapropriété  d'un  brevet  d'invention  dont 
la  connaissance,  en  vertu  de  Fart.  31  de  la  loi  du  iO  juillet 
1844  est  réservée  aux  tribunaux  cimls,  ce  tribunal  ne  doit 
pas  se  dessaisir  du  litige,  mais  surseoir  à  statuer  sur  le 
fond  et  renvoie  Fincident  devant  la  juridiction  compéten- 
te (1). 

Les  ingénieurs  civils  qui  exploitent  une  agence  de  brevets 
sont  commerçants  et  par  suite  justiciables  de  la  juridiction 
consulaire. 

Vappelé  en  garantie  est  tenu  de  procéder  devant  le  tri-- 
bunal  ou  est  pendante  la  demande  originaire  et  principale 
dont  la  demande  en  garantie  est  F  accessoire  (2). 

(Paris,  3  jain  1900.  —  Gomp,  françuBe  des  métaux  c.  Société  meUI- 
largica  italiana,  société  de  métallargie  du  coivra  et  Freydier,Oabreuil 
et  Janicot.) 

Ainsi  jugé  par  la  Cour  de  Paris  sur  l'appel  d*ua  jugement 
du  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine  en  date  du  SO  jan- 
vier 1899  (3). 

La.  Goor,  Gonsiëérant  que  la  Compagnie  française  des  métaux 
étant  aux  droits  de  la  Société  de  métallurgie  du  cuivre  de  Lyon^ 

(1)  Sur  la  compétence  du  trib.  de  commerce  en  matière  de  propriété 
industrieUe,  V.  Pouilletf  Brev.  d*tnt;.,  n«*601  et  593  ;  Gomp.  Douai, 
10  novembre  1897,  Delattre,  Joum.  dr,  ind,t  99.  121  ;  Besançon,  %i  fé- 
vrier 1899,  Japy,  Ann,,  99.206  et  la  note  ;  Bordeaux,  17  novembre  1897, 
Obier,  Ann.,  1900-41. 

(2)  Ce  principe  (art.  59,  G.  proc.  civ.),80uflHrait  exception  si  letriba- 
nal  oii  est  pendante  la  demande  originale  était  incompétent  rtuione 
materia  pour  l'excepUon  de  garantie  ;  si,  par  exemple,  les  appelés  en  gm- 
rantie  n'étaient  pas  commerçants  et  n*avaient  pas  fait  acte  de  commerce  ; 
Paris,  28  mai  1877,  Mercier,  6V., 79.2.86;  si  Tappel  de  garantie  ten- 
dait à  soumettre  au  tribunal  français  une  contestation  entre  étrangers^ 
relative  à  un  contrat  formé  et  exécutoire  en  pays  étranger  :  ciss., 
15  janvier  1878,  Gharlier,  ÀV.  ,78. 1.300  ;  si  l'action  en  garantie  était  re- 
lative à  un  contrat  de  travaux  publics  dont  la  connaissance  est  réservée 
aux  tribunaux  administratife  ;  Gaen,  22  juillet  1886,  Rec.  de  Rouen  «1 
Caen,  87.2.86  et  s. 

3)  V.  ce  jugement  dans  La  Loi  du  12  juillet  1900. 

A.  T. 


'*v.-f.J y i'.' y.*/ ■'!' "vy •  ''--■yw-^"-"'yT^-^^"-TTyr?^ *^- "v^v^-r "^  • 


—  219  — 

a  assigné  ia  Société  la  metallurgica  italiana  devant  le  Tribunal 
de  commerce  de  la  Seine  àia  suite  de  difficultés  survenues  entre 
elle  et  cette  dernière  sur  Texécution  de  la  cession  d'une  licence 
pour  la  fabrication  du  cuivre  en  Italie,  d'après  les  procédés  ayant 
fait  Tobjet  du  brevet  Manbès  ; 

Que,  de  son  côté,  la  Société  la  metallurgica  italiana  a  formulé 
contre  la  Société  française  des  métaux  une  demande  reconven- 
tionnelle prétendant  que  les  brevets  étaient  tombés  dans  le  do- 
maine public  ;  qu'alors  celle-ci  a  appelé  en  garantie  Freydier, 
Dubreuil  et  Janicot  ; 

Que  ces  derniers  ont  décliné  la  compétence  du  tribunal  de  com- 
merce, d'abord  parce  qu'ils  étaient  domiciliés  à  Lyon,  puis  parce 
qu'ils  n'étaient  pas  commerçants,  enfin  parce  que  les  contesta- 
tions relatives  à  la  déchéance  d'un  brevet  ne  pouvaient  être  sou- 
mises qu'aux  tribunaux  civils  ; 

Que  le  tribunal  n'a  pas  statué  sur  les  deux  premiers  moyens  ; 
mais  qu'il  a  accueilli  le  troisième  et  s'est  déclaré  incompétent 
ratione  materiaf  et  a  renvoyé  la  cause  et  les  parties  devant  les  ju- 
ges qui  devaient  en  conn^tre  et  condamné  les  trois  sociétés  cha- 
cune aux  dépens  de  sa  demande,  ainsi  qu'au  tiers  du  coût  du  ju- 
gement, les  dépens  du  chef  de  Freydier,  Dubreuil  et  Janicot  étant 
taxés  en  marge  de  la  minute  ; 

Qu'il  a  basé  sa  décision  sur  ce  qu'il  serait  nécessairement  amené 
pour  apprécier  le  litige  qui  lui  était  soumis,  à  se  faire  juge  d'une 
question  de  déchéance  de  brevet,  dé  la  compétence  exclusive  des 
tribunaux  civils,  aux  termes  de  l'article  34  de  la  loi  du  20  juillet 
1884; 

Que  la  Compagnie  française  des  métaux  a  interjeté  appel  prin- 
cipal de  ce  jugement  ;  que  la  Société  de  métallurgie  du  cuivre 
de  Lyon  en  a  relevé  appel  éventuel  ; 

Que  la  Compagnie  française  des  métaux  prétend  en  premier 
lieu  que  le  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine  ne  devait  pas  se 
dessaisir,  ayant,  non  à  se  faire  juge  d'une  question  de  déchéance 
de  brevets,  mais  à  rechercher  seulement  si  une  taxe  avait  été 
ou  non  régulièrement  payée,  simple  constatation  de  fait^  et  qu'il 
s^agissait,  au  surplus,  d'une  licence  concédée  pour  Tltalie,  d'une 
taxe  devant  être  payée  en  Italie  par  application  d'une  loi  italienne 
qui  ne  parait  pas  contenir  de  dispositions  analogues  à  l'article  34 
de  la  loi  française  de  1844  ; 

Que  cette  prétention  ne  saurait  être  admise  ; 

Que  rechercher  et  décider  si  une  taxe  a  été  ou  non  régulière- 
ment payée,  c'est  rechercher  et  décider  si  le  breveté  est  ou  non 
déchu  de  ses  droits  et  qu'il  s'agisse  de  la  taxe,  au  paiement  de 
laquelle  chaque  brevet  donne  lieu  en  France,  ou  d'une  taxe  édic- 
tée par  une  loi  italienne,  pour  1&  conservation  d'un  brevet  en 


—  220  — 

Italie,  l68  mômes  motifs  d*ordre  public  existent  qui  ont  fait  rè- 
server  aux  seuls  tribunaux  civils  la  connaissance  des  questions 
de  déchéance  de  brevets  ; 

Mais  considérant  qu'au  contraire  la  Compagnie  française  des 
métaux  est  bien  fondée  à  soutenir,  comme  elle  lofait  subsidiai- 
rement,  que  le  tribunal  de  commerce  devait  se  borner  à  sur- 
seoir, jusqu'à  ce  que  l'exception  soulevée  à  Rencontre  de  la  de- 
mande originaire  et  principale  eftt  été  jugée  par  le  tribunal  civil 
et  retenir  la  connaissance  du  surplus  du  litige  ; 

Qu'en  effet,  la  constatation  de  l'impossibilité  dans  laquelle  il 
était  de  se  prononcer  sur  ladite  exception,  ne  pouvait  avoir  pour 
conséquence  d'entraîner  son  dessaisissement  total,  alors  qu'il 
était  régulièrement  saisi,  aux  termes  de  l'attribution  de  jaridi&- 
tion  faite  par  les  parties,  d'une  demande  prenant  sa  source  dans 
une  convention  et  dans  des  opérations  commerciales  naissant 
entre  sociétés  commerciales  à  raison  d'actes  de  commerce  ;  qu'il 
doit  donc  rester  saisi  de  tout  le  surplus  du  litige  ; 

Considérant  que  Cunit  et  Platon  es  qualités  qui  s'en  rapportent 
en  fin  de  compte  à  justice  sur  l'incompétence  ratione  materÙB  ad- 
mise par  les  premiers  juges  demandent  à  la  Cour,  pour  le  cas 
où  le  jugement  serait  infirmé,  de  déclarer  que  l'action  en  garan- 
tie formée  par  la  Société  de  métallurgie  du  cuivre  contre  Freydier, 
Dubreuii  et  Janicot  a]ëté  formée  entre  des  commerçants  qui  peu- 
vent, de  ce  chef,  être  appelés  devant  la  juridiction  consulaire  de 
la  Seine,  saisie  de  la  demande  originaire  et  principale  ; 

Que  ces  conclusions  sont  fondées  ; 

Que  d'une  part,  Freydier,  Dubreuii  et  Janicot  ne  sauraient  sé- 
rieusement soutenir  qu'ils  ne  sont  pas  commerçants  ;  qu'ils  pren- 
nent le  titre  d'ingénieurs  civils,  mais  qu'ils  tiennent  une  maison 
intitulée  par  eux-mêmes  «  Ancien  office  Louis  Bachelet  ^>,  dans 
laquelle  ils  s'occupent  de  toutes  sortes  d'opérations,  obtention 
de  brevets,  consultations,rédactions  d'actes,  directions  de  procès, 
mémoires,  rapports,  expertises,  préparations  mécaniques  des 
minerais,  analyses  chimiques,  installations  d'usines,  vérifications 
de  comptes,  etc.,  etc.  ; 

Qu'ils  sont  en  réalité  des  agents  louant  moyennant  salaire  leur 
entremise  et  leurs  services  à  autrui,  c'est-à-dire  faisant  actes  de 
commerce  ; 

Que,  d'autre  part,  l'appelé  en  garantie  est  tenu  de  procéder 
devant  le  tribunal  où  la  demande  originaire  et  principale  dont 
elle  est  l'accessoire  est  pendante  ; 

Par  ces  motifs,  Reçoit  la  Compagnie  ft^ançaise  des  métaux  ap- 
pelante principale  et  la  Société  de  métallurgie  du  cuivre  appelante 
éventuelle  du  jugement  rendu  par  le  Tribunal  de  commerce  de 
la  Seine,  le  9' janvier  1699  ; 


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—  221  — 

Donne  acte  à  Ganit  et  Platon^  es  qualités  qu'ils  agissent,  de 
leur  reprise  d'instance  ; 

Met  les  appellations  tant  principales  qu'éventuelles  et  ce  dont 
est  appel  à  néant  ; 

Infirme  ledit  jugement  ; 

Ëmendant  ; 

Décharge  les  appelants  des  dispositions  et  condamnations  leur 
faisant  grief  ; 

Statuant  à  nouveau  ; 

Dit  que  c'est  à  tort  que  le  tribunal  s'est  dessaisi  de  l'ensemble 
du  litige  porté  devant  lui  ; 

Dit  qu'il  devait  simplement  surseoir  à  statuer  jusqu'à  ce  que  la 
question  de  déchéance  des  brevets  Manhès  ait  été  tranchée  de* 
Tant  la  juridiction  compétente  ; 

Dit  que  cette  question  devra  être  portée  devant  ladite  juridic- 
tion à  la  requête  de  la  partie  la  plus  diligente  et  ce,  dans  un  mois 
à  partir  de  ce  jour  ; 

Dit  que  le  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine  devra  rester  saisi 
de  tout  litige  ; 

Dit  que  Faction  en  garantie  formée  par  la  Société  de  métallur- 
gie du  cuivre  contre  Freydier,  Dubreuil  et  Janicot  a  été  formée 
contre  des  commerçants  qui  peuvent  de  ce  chef  être  appelés  en 
garantie  devant  le  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine,  saisi  de  la 
demande  originaire  et  principale  ; 

Renvoie  la  cause  et  les  parties  devant  ledit  tribunal  composé 
d'autres  juges  ; 

Déclare  les  parties  respectivement  mal  fondées  dans  tous  leurs 
autres  moyens,  fins  et  conclusions  ;  les  en  déboute  ; 

Ordonne  la  restitution  des  amendes  consignées  tant  sur  l'appel 
principal  que  sur  l'appel  éventuel,  réserve  les  dépens. 

M.  Benoit,  président  ;  M*"  Dufraissk,  Henry  Bonnet,  Du- 
CREux  et  Allart,  avocats. 


Art.  4200. 

Brevet  d^lnventlon.  —  Déeliéanee.   —  d 
—  Ck^n^entlon.   —  Erreur  «or    les  «lUAlltés  «uImi- 
tanUcUe».  —  NaUité. 

Cest  à  bon  droit  que  le  tribunal  de  commerce  saisi  d*une 
instance  soulevant  une  question  de  déchéance  de  brevet, 
surseoit  à  statuer  jusquà  ce  que  cette  déchéance  ait  été  tran* 
chée  par  le  juge  compétent. 


."ï 


—  222  — 

Mais  le  principe  du  double  degré  de  juridiction  n'étant 
établi  que  dans  l'intérêt  des  parties^  bien  que  le  premier 
degré  de  juridiction  ne  soit  pas  épuisé^  la  Cour  saisie  de 
rappel  de  la  décision  de  sursis,  peut  sur  les  conclusions 
conformes  des  parties  statuer  sur  le  fond  (1). 

La  croyance  à  la  validité  d'un  brevety  en  réalité  frappé 
de  déchéance  peut  constituer  une  erreur  sur  les  qualités 
substantielles,  si,  lors  de  la  convention  dont  ce  brevet  est 
Pobjetyles  parties  ont  eu  spécialement  en  vue  sa  validité  :  si 
Von  doit  admettre  que,  un  brevet  même  frappé  de  déchéan» 
ce,  tant  que  celle-<^i  n'est  pas  judiciairement  prononcée  peut 
permettre  au  breveté  de  concéder  des  licences  valables,  et 
que,  le  licencié  n'est  pas  recevable  à  proposer  en  justice  la 
nullité  ou  la  déchéance  d'un  brevet,  tant  qu'il  en  retire  des 
avantages  matériels  appréciables,  parce  qu'il  est  en  quelque 
sorte  associé  à  l'exploitation  de  l'invention  et  que  les  béné- 
fices qu'il  en  retire  font  que  n'ayant  pas  d'intérêt,  il  n'a 
pas  d'action,  il  en  est  autrement  lorsqu'il  s'agit  d'une  con- 
vention d'une  nature  spéciale  ne  pouvant  avoir  d'objet,  et 
ne  pouvant  procurer  d'avantages,  qu'autant  que  le  brevet 
considéré  avait  non  seulement  une  existence  de  fait^  mais 
une  valeur  légale.  Dans  ces  conditions,  même  en  Vabsence 
de  dol  ou  de  faute  lourde  équipollente,  Verreur  sur  la  vor 
lidité  du  brevet,  vicie  le  consentement  des  parties  et  entrai^ 
ne  la  nullité  de  la  convention  (2). 

(G.  de  Besançon,  18  jaillet1900.  ^  Frossard  c.  Perrin  Mres.) 

M.  Frossard  ayant  assigné  MM.  Perrin  frères  devant  le 
Tribunal  de  St-Claude  jugeant  commercialement^  en  exér 
culion  d'une  convention  aux  termes  de  laquelle  celui-cit 
possesseur  d*un  brevet  antérieur  en  date  au  leur»  s'enga- 
geait moyennant  redevance  à  ne  pas  faire  obstacle  à  Tex- 

(1)  Sur  la  compétence,  V .  l'article  précédent,  n»  4199,  p.  218  et  la  note. 
Le  tribanal  d'appel  saisi  comme  tel  d'une  contestation  déjà  portée  de- 
vant un  premier  juge,  ne  peut  statuer  sur  le  fond,  même  en  snppo* 
sant  TalTaire  en  état,  qu*au  cas  d'infirmation  de  la  première  décision  ; 
Gass.,  29  juillet  1884,  S.  87.1.22.  Des  conclusions  formelles  des  parties 
étaient  donc  ici  indispensables  pour  donner  à  la  Cour  le  droit  de  statuer 
sur  le  fond. 

(2)  Sur  le  caractère  de  la  licence,  V.  Pouillet,  Brev»  cTinv,,  n*  388  et 
la  Jurisprudence  citée.  Àdd.  Cass.  civ.,  29  Juillet  1891,  Do/t., 92.1. 
150  ;  Trib.  d'Angouléme,  S9  mars  1900,  Peyrusson,  La  Loi,  25  mai; 
Trib.  de  Limoges,  18  mai  1900,  Peyrusson,  La  Loi,  14  novembre. 


—  223  — 

ploitation  de  leur  brevet,  les  défendeurs  opposèrent  à  la 
demande,  la  déchéance  du  brevet  de  Frossard.  Le  Tribu- 
nal de  St-Claudese  déclara  incompétent  pour  apprécier  la 
question  de  déchéance  et  par  jugement  en  date  du  14  mars 
1900  décida  de  surseoir  à  statuer  jusqu'à  ce  qu'il  ait  été 
statué  par  le  Tribunal  compétent  sur  la  question  de  dé- 
chéance. 

Sur  appel  de  M.  Frossard,  la  Cour  de  Besançon  a,  le  18 
juillet  1900,  rendu  Tarrêt  suivant  : 

La  Cour,  Attenda  que  les  premiers  juges  ont  décidé  avec  rai- 
son que  le  procès  qui  leur  était  soumis  donnait  à  apprécier  des 
questions  de  déchéance  du  brevet  Frossard,. dont  le  tribunal  de 
commerce  ne  pouvait  connaître,  aux  termes  de  l'article  34  de  la 
loi  de  1844  ;  que  c'est  donc  à  bon  droit  qu'ils  ont  sursis  à  statuer 
jusqu'à  ce  que  la  juridiction  civile,  exclusivement  compétente, 
se  soit  prononcée  sur  ce  chef  ;  que  par  suite,  leur  décision  doit 
être  conûrmée,  mais  qu'il  y  a  lieu  cependant  de  dire  qu'elle  ne 
sortira  pas  effet,  parce  que  les  parties  de  cause,  tant  celle  qui 
sur  ses  conclusions  subsidiaires  a  obtenu  le  sursis  que  celle  à  la- 
quelle cette  décision  est  opposable,  demandent  que  le  juge  d'ap- 
pel statue  au  fond  et  y  concluent  formellement  ; 

Attendu  qu'il  résulte  de  cet  état  de  la  procédure  que  le  juge 
d'appel  est  à  bon  droit  saisi  de  l'ensemble  des  questions  à  dé- 
battre, encore  bien  que  le  premier  degré  de  juridiction  ne  soit 
pas  épuisé,  parce  que  le  principe  du  double  degré  de  juridiction 
n'étant  établi  que  dans  l'intérêt  des  parties,  celles-ci  peuvent  y 
renoncer  expressément  ou  tacitement  et  que  les  conclusions 
prises  en  appel  sur  le  fond  impliquent  de  part  et  d'autre  cette 
renonciation  (Gass.,  29  avril  1885)  et  parce  que  encore,  à  raison 
de  l'effet  dévolutif  de  l'appel,  toutes  les  difficultés  soumises  au 
premier  juge  sur  lesquelles  l'appel  a  été  interjeté,  relèvent  de 
la  juridiction  du  juge  supérieur,  lorsque  comme  dans  l'espèce, 
soit  l'appel  principal,  soit  l'appel  incident,  soumettent  au  juge 
d'appel  les  chefs  donnés  à  juger  en  première  instance  ; 

Attendu  que  la  cause  est  en  outre  en  état  de  recevoir  une  solu- 
tion définitive  ;  qu'aucune  exception  de  litispendance  n'est  soule- 
vée et  qu'il  ne  peut  y  être  suppléé  d'office  ;  que  c'est  donc  le  cas 
de  retenir  le  débat  au  fond  ; 

Au  fond  : 

Attendu  que  les  frères  Perrin,  brevetés  en  1895  pour  l'inven- 
tion d'une  pipe  à  double  perçage,  sachant  que  Frossard  avait, 
depuis  1885,  obtenu  un  brevet  de  quinze  années,  pour  une  pipe 
présentant  des  avantages  analogues  ont,  dans  le  but  d'éviter  les 


/  '^-^ 


—  224  — 

difficultés  judiciaires  pouvant  résulter  pour  eux  de  la  concur* 
rence  des  deux  brevets,  conclu  avec  Frossard,  le  10  juillet  1896, 
une  convention  aux  termes  de  laquelle  ce  dernier  renonçait  à 
les  inquiéter  dans  Texploitation  de  leur  brevet  de  1895  à  la  con- 
dition notamment  qu'il  lui  serait  payé  des  redevances  détermi- 
nées par  le  contrat,  que  ce  contrat  a  reçu  un  commencement 
d'exécution,  mais  que  peu  de  temps  après,  les  frères  Perrln  ont, 
non  seulement  refusé  de  payer  les  redevances  qu'ils  avaient  con- 
senties, mais  en  outre,  exigé  de  Frossard  la  restitution  de  celles 
par  eux  payées,  en  se  fondant  sur  ce  que  le  brevet  de  ce  dernier 
était  frappé  de  déchéance  depuis  1892,  par  suite  d*an  retard 
apporté  par  Frossard  dans  le  paiement  de  l'annuité  afférente  à 
cette  même  année  ; 

Attendu  que  la  matérialité  du  fait  étant  reconnue  par  Frossard, 
il  en  résulte  cette  double  conséquence,  d*abord,  que  la  déchéance 
de  son  brevet  était  encourue  de  plein  droit  depuis  1892,  avant  la 
convention  de  1896  par  conséquent  (article  32  de  la  loi  de  1844} 
et  ensuite  que  cette  convention  était  annulable  par  suite  d*erreur, 
article  lilO  du  Code  civil  ;  que  sur  ce  premier  point  aucune  dif- 
ficulté ne  peut  s'élever  ;  que  sur  le  second,  Tannulation  de  la 
convention  devra  être  prononcée,  s'il  est  reconnu  que  Terreur 
portait  sur  la  substance  de  la  chose  ou  sur  ses  qualités  substan- 
tielles et  s'il  est  établi  en  outre  que  Terreur  qui  a  vicié  le  con- 
sentement de  Tune  des  parties  procédait  du  dol  ou  d'une  faute 
équi  pollen  te  au  dol  de  Tautre  partie,  ou  que  cette  erreur  a  été 
commune  à  chacune  d'elles  ; 

Attendu  que  les  frères  Perrin  ne  peuvent  prétendre  que  leur 
erreur  portait  sur  la  substance  même  de  la  chose  ayant  fait  l'ob- 
jet de  leur  accord,  parce  que  cette  substance,  c'était  le  brevet 
Frossard  ;  que  la  déchéance  de  ce  brevet,  si  elle  avait  été  encou- 
rue, n'avait  pas  été  prononcée  ;  qu'il  avait  donc  sinon  une  exis- 
tence de  droite  tout  au  moins  une  existence  de  fait,  et  que  cette 
existence  de  fait  permettait  à  Frossard  d'en  tirer  certains  avan- 
tages ;  mais  que  ce  n'est  pas  sur  la  substance  même  de  la  chose 
qu'a  porté  l'erreur  des  frères  Perrin  ;  que  c'est  sur  ses  qualités 
substantielles  et  que  l'erreur  sur  les  qualités  substantielles  de  la 
chose  qui  fait  l'objet  d'une  convention,  la  rend  annulable  aussi 
bien  que  l'erreur  sur  la  substance,  lorsque  ce  sont  ces  qualités 
que  les  parties  ont  eu  seulement  en  vue  lorsqu'elles  ont  contracté, 
et  lorsqu'il  est  hors  de  doute  qu'elles  n'auraient  pas  traité  si 
elles  n'avaient  pas  été  induites  à  cet  égard  dans  une  erreur  qui 
a  vicié  leur  consentement,  soit  que  ce  vice  de  consentement  pro-* 
cède  d'une  erreur  de  fait,  soit  qu'il  procède  d'une  erreur  de 
droit  ; 

Attendu  dans  l'espèce  que  la  qualité  substantielle  sur  laquelle 


—  225  — 

a  porté  Terreur  des  frères  Perrin,  c'était  la  validité,  en  droit,  du 
brevet  de  Frossard  et  que  ce  point  ne  peut  être  dénié  ;  qu'il  est 
certain  que  les  frères  Perrin  ne  se  seraient  pas  obligés  à  payer 
des  redevances  à  Frossard,  aux  seules  fins  de  pouvoir  exploiter 
librement  et  sans  inquiétude,  non  pas  le  brevet  de  ce  dernier, 
mais  leur  propre  brevet,  s'ils  n'avaient  été  convaincus  que  le  bre- 
vet Frossard  constituait  entre  ses  mains. un  obstacle  sérieux  à  leur 
entreprise  et  qu'il  n'en  était  rien,  puisque  ce  dernier  ne  pouvait 
le  leur  opposer  en  justice,  sans  que  sa  déchéance  fût  aussitôt  pro- 
noncée  ;  que  c'est  donc,  non  l'existence  matérielle  du  brevet, 
mais  sa  validité  qui  était  la  cause  unique  de  l'engagement  ;  que 
l'erreur  des  frères  Perrin  sur  cette  validité  a  été  par  suite  une 
erreur  relativement  à  la  qualité  substantielle  de  la  chose  sur  la- 
quelle portait  la  convention  ;  qu'elle  la  rend  annulable  si  les  au- 
tres conditions  exigées  par  la  loi  se  rencontrent  dans  l'espèce  ; 

Attendu  que,  dans  les  contrats  synallagmatiques,  l'erreur  de 
l'une  des  parties  ne  peut  entraîner  la  nullité  de  la  convention,  à. 
moins  que  cette  erreur  ne  procède  du  dol  do  l'autre  partie  ou 
qu'elle  n'ait  été  commune  à  chacune  d'elles  (Larombière,  t.  1«% 
art.  1110,  n»  3)  ;  que,  dans  l'espèce,  le  dol,  qui  ne  se  présume  pas, 
ou  la  faute  lourde  équipoUente  au  dol  qui  doit  être  démontré  avec 
certitude,  ne  sont  pas  établis  à  la  charge  de  Frossard  ;  qu'il  ré- 
sulte, en  effet,  de  tous  les  documents  du  procès,  que  ce  dernier, 
qui  avait  payé  toutes  les  annuités  postérieures  à  1892  et  cela  jus- 
qu'à l'expiration  de  son  brevet  qui  ne  tombait  dans  le  domaine 
public  qu'en  1900,  avait,  de  bonne  foi,  considéré  que  Texistence 
de  fait  de  ce  même  brevet  lui  permettait,  tant  que  la  déchéance 
n'était  pas  judiciairement  prononcée,  d'être  la  base  de  conven* 
tions  d'une  valeur  légale  certaine,  mais  qu'il  a  confondu  en  cela 
la  délivrance  des  licences  avec  la  convention,  fort  différente,  par 
lui  passée  avec  les  frères  Perrin  ; 

Attendu  que,  sans  doute,  un  brevet  frappé  de  déchéance  peut, 
tant  que  celle-ci  n'est  pas  judiciairement  prononcée,  permettre 
au  breveté  de  concéder  des  licences  valables  ;  que,  sans  doute, 
encore,  le  licencié  n'est  pas  recevable  à  proposer  en  justice  la 
nullité  ou  la  déchéance  d'un  brevet,  tant  qu'il  en  retire  des  avan- 
tages matériels  appréciables,  parce  qu'il  est,  en  quelque  sorte, 
associé  à  l'exploitation  de  l'invention  et  que  les  bénéfices  qu'il 
en  retire  font  que,  n'ayant  pas  d'intérêt,  il  n'a  pas  d'action,  mais 
que  la  convention  du  10  juin  1896  ne  présentait  aucune  ana- 
logie avec  la  concession  d'une  licence,  puisqu'il  ne  s'agissait  pas 
de  l'exploitation  du  brevet  Frossard  6t  que,  d'autre  part,  c'était 
une  convention  suigeneriSy  d'une  nature  spéciale,  qui  ne  pouvait 
avoir  d'objet  et  ne  pouvait  procurer  d'avantages  aux  frères  Pér- 
is 


—  226  - 

rin,  qu'autant  que  le  brevet  Frossard  avait,  non  pas  seulement 
une  existence  de  fait,  mais  une  valeur  légale  ; 

Attendu  que,  si  le  dol  ou  la  faute  lourde  équipollente  ne  se 
rencontrent  pas  dans  Tespèce,  l'erreur  de  droit  est  admissible 
de  la  part  de  Frossard  comme  de  la  part  de  Perrin,  et  Terreur 
commune  suffisamment  établie  ;  qu'elle  a  de  part  et  d*autre 
vicié  le  consentement  des  parties  ;  qu'elle  entraîne  la  nullité  de 
leur  convention  ;  que,  par  suite,  Frossard  doit  être  tenu  à  resti- 
tution des  redevances  à  lui  payées  ;  mais  que,  cette  restitution 
couvrant  les  frères  Perrin  de  la  totalité  du  préjudice  qu'ils  ont 
éprouvé,  il  n'y  a  lieu  à  dommages-intérêts  ; 
Sur  les  dépens  : 

-  Attendu,  tant  à  raison  de  l'erreur  commune  que  de  ce  que  les 
parties  succombent  dans  divers  cbefs  de  leur  demande,  qu'il  y  a 
lieu  de  les  partager  ; 

Par  ces  motifs^  Statuant  sur  l'appel  principal  de  Frossard  d^un 
jugement  du  Tribunal  de  commerce  de  Saint-Claude  du  14  mars 
i900  et  sur  l'appel  incident  des  frères  Perrin  ; 

Reçoit,  en  la  forme,  ces  appels  contre  lesquels  aucune  un  de 
non-recevoir  n'est  élevée  ; 

Au  fond  : 

Confirme  le  jugement  entrepris,  mais  faisant  droit  aux  con- 
clusions prises  de  part  et  d'autre  sur  le  fond,  dit  que  ce  juge- 
ment ne  sortira  pas  effet  ; 

Et  statuant  à  nouveau  en  vidant  le  débat,  au  fond  : 

Dit  nulle  et  de  nul  effet  la  convention  des  10  et  29  juin  1896, 
comme  entacbée  d'erreur  commune  ; 

Donne  acte  à  Frossard  de  ce  qu'il  reconnaît  devoir  aux  frères 
Perrin,  la  somme  de  507  fr.  90,  montant  du  reliquat  des  fourni- 
tures qui  lui  ont  été  faites  par  les  frères  Perrin  ;  le  condamne, 
mais  en  tant  que  de  besoin  seulement,  à  réaliseï:  cette  obéis- 
sance ; 

Le  condamne  à  rembourser  aux  frères  Perrin  la  somme  de 
847  fr»  25,  montant  des  redevances  à  lui  payées  par  ces  derniers 
en  exécution  de  la  convention  annulée  ; 

Hejette  la  demande  en  dommages -intérêts  formée  par  les  frè- 
res Perrin  ; 

Condamne  Frossard  à  Tamende  de  fol  appel  ; 

Dit  qu'il  sera  fait  masse  des  dépens  pour  être  supportés  cinq 
sixièmes  par  Frossard  et  un  sixième  par  les  frères  Perrin  ; 

Et  dit  que  ce  faisant,  etc. 


-I~ 


—  227  — 
Art.  4201. 

Brevet.  -^  Poai«vol  en  cassation.  —  Partie  civile.  -^ 
Ministère  public.  —  Procédure. 

//  ne  peut  être  fait  état  par  la  Cour  de  cassation  d'un  mé- 
moire non  timbré  déposé  par  la  partie  civile  demanderesse 
en  même  temps  que  son  pourvoi,  toutes  les  pièces  pro' 
duites  à  l'appui  de  la  requête  en  cassation  devant  aux 
termes  de  Part.  24  de  la  loi  du  13  brumaire  an  Vif  être 
écrites  sur  papier  timbré  (1). 

Aux  termes  de  l'article  iii  du  Code  d'instruction  crimi- 
nelle la  partie  civile  ne  peut  soumettre  à  la  Cour  aucun 
document^  même  sur  timbre,  sans  la  garantie  du  ministère 
d'un  avocat  à  la  Cour  de  cassation  (2). 

Lorsque  la  décision  attaquée  concerne  exclusivement  les 
intérêts  de  la  partie  civile  et  ne  touche  en  rien  à  l'ordre 
public,  le  ministère  public  est  sans  qualité  pour  proposer 
contre  elle,  et  d'office,  des  moyens  de  cassation  (3). 

(G.  de  cass.crim.,  12  janvier  1901.  —  Piret  c.  Mildé  et  autres.) 

La  Goor,  Vu  les  mémoires  déposes  par  Piret,  partie  civile, 
ensemble  les  lois  du  13  brumaire  an  VII,  les  articles  422.  423^ 
424  du  Gode  d'instruction  criminelle  ; 

Attendu  que  Piret  s'est,  en  qualité  de  partie  civile,  seul  pourvu 
lë  22  mars  1899  contre  Tarrêt  rendu  le  21  du  même  mois  par  la 

(1-2)  Les  parties,  condamné,  ou  partie  civile,  peuvent  user  de  deux 
voies  pour  faire  parvenir  leurs  pièces  à  la  Cour  de  cassation  :  ou  déposer 
ces  pièces  au  greffe  de  la  Gour  d'appel  où  elles  ont  fait  leur  déclaration 
de  pourvoi  dans  les  dix  jours  au  plus  de  cette  déclaration  ;  ces  pièces 
sront  alors  transmises  par  le  parquet  au  ministre  de  la  justice  qui  les  fait 
parvenir  à  la  Cour  de  cassation,  sans  que  dans  ce  cas  aussi  bien  par 
la  partie  civile  que  par  le  condamné,  le  ministère  d'un  avocat  à  la  Gour 
de  cassation  soit  nécessaire  (V.  Gass.,  29  mars  1856,  Sir.  56.1.753  ;  Cass., 
13  juin  183i,  Sir.  87.1.341)  ;  on  bien  transmettre  elles-mêmes  leur  re^ 
quête  et  les  pièces  jointes  à  la  Cour  de  cassation  en  les  déposant  au 
greffe,  mais  dans  ce  cas,  en  ce  qui  concerne  la  partie  civile,  le  minis- 
tère d'un  avocat  à  la  Cour  de  cassation  devient  indispensable  (art.  424, 
G.  inst.  crim.,  in  fine.  V.  Gass.,  22  janv.  1887,  Sir.  88.1.96).  Quant  à 
Tobligation  d'écrire  sur  timbre  les  pièces  produites,  elle  résulte,  comme 
rîndique  l'arrêt,  de  l'art.  24  de  la  loi  du  13  brumaire  an  Vif. 

(3)  Le  pourvoi  de  la  partie  civile  n'est  recevable  que  dans  la  mesure 
où  elle  a  intérêt,  c'est-à-dire  qu'en  ce  qui  concerne  les  réparations 
civiles  ;  par  suite,  dans  Tespèce,  en  présence  du  seul  pourvoi  de  la  partie 
civile,rintérét  public  n'étant  pas  en  jeu,  le  ministère  public  représentant 
de  la  société  était  sans  qualité  pour  proposer  d'office  des  moyens  de  cas- 
sation. A.  T* 


»•  -  -  -1^.'  ;  -  »-^— ^--  T-ï^a-^ 


—  228  - 

Cour  d*appel  de  Paris  chambre  correctionnelle,  qui  a  relaxé 
Mildé,  Kœnig  et  Vuitton  de  la  poursuite  en  contrefaçon  qu'il 
leur  avait  intentée,  en  vertu  d'un  brevet  que  ladite  Cour  a  dé- 
claré non  valable  par  le  motif  que  la  prétendue  invention  du  de- 
mandeur n'était  pas  brevetable  ; 

Attendu  que  le  demandeur  a  joint  à  son  pourvoi,  qui  u*énonce 
d'ailleurs  aucun  moyen,  un  mémoire  contenant  ses  moyens  de 
cassation,  mais  que  ce  document  est  sur  papier  libre  et  qu'aux 
termes  de  l'article  24  de  la  loi  du  13  brumaire  an  VII  qui  exige 
que  toutes  les  pièces  produites  à  Tappui  de  la  requête  en  cassa- 
tion soient  timbrées,  la  Cour  n'en  saurait  faire  état; 

Attendu  que  si,  au  cours  du  mois  de  décembre  1900,  et  après 
le  rapport  déposé,  Piret  a  produit  un  mémoire  sur  timbre,  il  n'y 
a  lieu  de  tenir  compte  de  ce  document  qui  n'aurait  pu  être  ré- 
gulièrement présenté  à  la  Cour  conformément  à  l'article  424  du 
Gode  d'instruction  criminelle,  que  sous  la  garantie  du  ministère 
d'un  avocat  à  la  Cour  de  cassation  ; 

Dit  qu'il  n'y  a  lieu  de  statuer  sur  les  moyens  produits  irrégu- 
lièrement par  Piret  devant  la  Cour  de  cassation  ; 

Sur  les  moyens  proposés  d'office  par  le  ministère  public  et 
tirés  :  !<>  de  la  violation  de  l'article  2  de  la  loi  du  5  juillet  1844, 
en  ce  que  le  jugement,  dont  l'arrêt  entrepris  a  adopté  les  motifs, 
aurait  subordonné  la  brevetabilité  de  l'invention  de  Piret  à  la 
nouveauté  du  résultat  industriel  obtenu  ;  2o  de  la  violation  de  l'ar- 
ticle 7  de  la  loi  du  20  avril  1810,  en  ce  que  l'arrêt  attaqué  n'au- 
rait pas  répondu  aux  conclusions  d'appel  du  demandeur,  ni  jus- 
tifié suffisamment  d'une  antériorité  opposée  au  brevet  de  Piret; 

Attendu  que  la  décision  attaquée  concerne  exclusivement  les 
intérêts  de  la  partie  civile  et  ne  touche  en  rien  à  l'ordre  public, 
que  le  ministère  public  est  par  suite  sans  qualité  pour  proposer 
contre  elle  et  d'office  des  moyens  de  cassation  ; 

Par  oks  motifs,  Rejette  le  pourvoi  contre  l'arrêt  de  la  Cour 
d'appel  de  Paris,  chambre  correctionnelle, -du  21  mars  1899  ; 

Condamne  le  demandeur,  partie  civile,  à  l'amende  et  aux 
dépens,  ainsi  qu'à  l'indemnité  fixée  par  l'article  436  du  Code 
d'instruction  criminelle. 


Art.   4202. 

Contrai  d'édition  ~  Exemplalreu  édité*.  -- 

IVantUisenient . 

Ne  constituent  pas  un  contrat  de  société  pour  rexploiia- 
(ion  d'un  ouvrage  les  conventions  d'après  lesquelles  Cédi* 


iimiptipimjic-^-.  -  -  f  -w%-'  ■    ".  -..•.  —  .  -- 


.  ■» 


—  229  — 

teur  est  autorisé  à  faire  une  édition  moyennant  une  rede^ 
vance  par  exemplaire  mis  en  vente  (i). 

Il  appartient  au  juge  du  fond  d'apprécier  si  le  créancier 
gagiste  qui  a  reçu  en  gage  des  objets  mobiliers  {des  exem- 
plaires tirés  par  l'éditeur  en  vertu  d'un  contrat  qui  pré- 
voyait  une  certaine  redevance  par  exemplaire  mis  en  vente) 
est  de  bonne  foi  {2). 

(C.  de  Cass.,  req.,25  mars  1901.  ^  Dru  mont  c.  faillUe  Savina.) 

Rejet  du  pourvoi  formé  contre  l'arrêt  de  la  Cour  de  Pa- 
ris du  7  mars  1899,  publié  aux  Ann.  1900,124. 

La  Godr,  Sur  le  premier  moyen: 

Atteodu  que  Tarrét  déclare  que  suivant  conventions  des  il  juin 
1888  et  11  février  1892  Edouard  Drumont  a  cédé  à  Savine  éditeur 
le  droit  de  publier  dans  le  format  in-18,  deux  de  ses  ouvrages 
moyennant  par  chacun  des  exemplaire  tirés  une  redevance  sti- 
pulée payable  lors  de  la  mise  en  vente  de  chaque  mille  ; 

Attendu  que,  pour  prétendre  que  Drumont  aurait  sur  ces 
exemplaires  des  droits  qui  n^auraient  pas  permis  à  Savine  d'en 
disposer  librement,  le  pourvoi  se  fonde  sur  ce  qu'il  y  aurait  eu 
entre  eux  une  société  pour  exploiter  les  deux  ouvrages  en  les 
éditant  de  compte  à  demi  ; 

Attendu  qu'il  résulte  de  ces  conventions  constatées  par  Tar- 
rét  que  Drumont  a  cédé  à  Savine  le  droit  de  faire  une  édition 
in-18  des  deux  ouvrages  moyennant  un  prix  déterminé  ;  qu'au- 
cune des  clauses  relatées  ne  contient  une  stipulation  de  société 
et  qu'on  n'y  trouve  pas  davantage  les  éléments  essentiels  de  ce 
contrat;  que,dèslors,et  sans  qu'il  soit  besoin  d'examiner  les  con- 
séquences que  le  pourvoi  entend  tirer  de  la  prétendue  société,  il 
suffit  de  constater  qu'elle  n'a  pas  existé  et  qu'ainsi  le  moyen 
manque  en  fait  ; 
Sur  le  2«  moyen  : 

Attendu  que  l'article  2279  du  Code  civil  portant  qu'en  «  fait  de 
meubles  la  possession  vaut  titre  »  peut  être  invoqué  par  le  créan- 
cier gagiste  qui  a  reçu  en  gage,  de  bonne  foi,  des  objets  mobi- 
liers ;  qu'il  appartient  au  juge  du  fond  d'apprécier  cette  bonne 
foi  qui  est  toujours  présumée;  que  l'arrêt  déclare  qu'aucune 

(1)  Il  n'y  avait  pas  société  puisque  Tauteur  devait  toucher  sa  redevance 
à  la  mise  en  vente  sans  courir  aucun  risque.  II  y  avait  là  le  contrat 
d'édition  proprement  dit  (cf.  Gustave  Huard,  Des  contrats  entre  les 
auteurs  et  les  éditeurs,  p.  17  et  120). 

(2)  La  Cour  de  cassation  n'a  pas  eu  à  examiner  le  caractère  particulier 
du  contrat  d'édition  et  de  l'œuvre  littéraire  en  elle-même  (  voir  i4nn.  ,1900. 
124,  note  1-2).  G.  M. 


T.-  -  r^Ff    gi— y  wwiUV"!" 


—  230  — 

preuve  de  mauvaise  foi  ou  de  fraude  n'a  été  rapportée  contre  les 
défendeurs  éventuels  ; 

Attendu  qu'eu  les  admettant  par  suite  à  invoquer  la  dispo- 
sition de  l'article  2279  précité,  l'arrêt  n'a  violé  ni  cet  article,  ni 
l'article  1315  également  visé  au  pourvoi  ; 

Par  ces  motifs,  Rejette. 

MM.  Tanon,  président;  M.  George-Lemairjb,  rapporteur; 
MÊRiLLON,  avocat  général.  —  M®  de  Râmel,  avocat. 


Art.  4203. 

Œuvres  umstcales.  ^  Kntrepreiiear  de  spc^etacle.— 

m 

Kxécntioii  illicite.  —  8alles  de  réunions  et  de  con- 
certs. —  Propriétoire.  —  Responsubllité.  —  Société 
des  auteurs  compositeurs  et  éditeurs  de  musUiae. 
—  Mise  en  Interdit  pur  la  S€M!tlété. 

Cest  à  bon  droit  que  la  Cour  d'appel  a  considéré  comme 
constituant  une  faute  et  un  abus,  de  la  part  de  la  Société 
des  auteurs^  compositeurs  et  éditeurs  de  musique,  du  droit 
d'accorder  ou  de  refuser  l'autorisation  d'exécuter  les  œu- 
vres qui  leur  appartiennent,  le  fait  d'avoir  cherché  à  im- 
poser au  propriétaire  d'une  salie,  qui  la  loue  pour  des  réu- 
nions  publiques,  un  contrat  d'abonnement, sur  la  menace  de 
mettre  la  salle  en  interdit,  et  d'avoir,  sur  son  refus  de  su- 
bir l'abonnement,  exécuté  cette  menace  en  signifiant  aux 
tiers  Finterdit  mis  sur  la  salle^  et  qu'elle  a  condamné  les 
auteurs  de  ce  fait  à  des  dommages  et  intérêts  envers  lepro^ 
prié  faire  de  la  salle  (1). 

A'e  viole  aucune  loi  l'arrêt  qui,après  avoir  constaté  que  les 
entrepreneurs  de  spectacles  loin  d'avoir  voulu  se  passer  de 
Vautorisaiion  de  la  Société  des  auteurs,  compositeurs  et 
éditeurs  de  musique,se  sont  conformés  au  mode  habituelle- 
ment  usité  pour  la  demander^  l'ont  informée  de  la  réunion 
projetée  et  lui  ont  offert  après  contrôle  de  la  recette  effec- 
tuée, les  droits  fixés  par  son  tarif,  et  que  par  suite  la  so- 
ciété ne  pouvait  établir  à  leur  charge  aucune  faute  ni  au- 
cun préjudice  résultant  d'une  faute,  rejette  la  demande  de 
dommages  et  intérêts  formée  par  elle  (2). 

(1-2)  V.  Gourde  Paris,  12  mai  1899,  et  la  note,  Ann.,  1901,  p.  68. 


»•   -, 


—  231  — 

(G.  de  cass. ,  req.,  4  mars  1901 .—  Société  des  auteurs, compositeurs  et 
éditeurs  de  musique,  Ândreassiou  et  autres  c.  Fabre  et  Gie,  Association 
des  anciens  élèves  de  TEcole  Turgot  et  autres.) 

La  Société  des  auteurs,  compositeurs  et  éditeurs  de  mu- 
sique,s*étant  pourvue  en  cassation  contre  l'arrêt  rendu  par 
la  Cour  de  Paris,  le  12  mai  1899  (v.  suprà,  art.  4168,  p.  68), 
la  Cour  de  cassation  a,  le  4  mars  1901,  rendu  Tarrél  de  re- 
jet suivant: 

La  Cour,  Sur  le  !•'  moyen  : 

Attendu  que  Tarrêt  attaqué  n'a  pas  contesté  à  la  Société  des 
auteurs  et  compositeurs  et  éditeurs  de  musique  le  droit  d'accor- 
der ou  de  refuser  l'autorisation  d'exécuter  les  œuvres  qui  leur 
appartiennent,  mais  qu'il  a  simplement  considéré  comme  uii 
abus  de  ce  droit  le  fait  d*avoir  cherché  à  imposer  au  proprié- 
taire d'une  salie  ou  d'une  galerie,  qui  la  loue  au  jour  pour  des 
réunions  publiques  ou  privées,  un  contrat  d'abonnement  sous  (a 
menace  de  mettre  la  salle  en  interdit  et  d'avoir,  sur  son  refus 
de  subir  l'abonnement,  exécuté  cette  menace,  en  signifiant  aux 
tiers  l'interdit  mis  sur  la  salle  ;  que  la  Cour  d'appel  a  consi- 
déré, à  bon  droit,  ce  fait  comme  constituant  une  faute  ;  qu'elle  a 
constaté,  en  outre,  qu'elle  avait  causé  à  Fabre  et  Cie  un  réel 
préjudice,  en  éloignant  leur  clientèle  et  en  jetant  la  défaveur 
sur  leur  immeuble  et  que  dès  lors,  elle  a  pu  légalement  con- 
damner les  auteurs  de  ce  fait  à  des  dommages-intérêts; 

Que  le  l«r  moyen  n'est  donc  pas  fondé  ; 

Sur  le  2«  moyen  : 

Attendu  que  l'action  en  dommages-intérêts  des  demandeuri 
en  cassation  contre  l'Association  des  anciens  élèves  de  l'Ecole 
Turgot  n'aurait  été  fondée  que  s'ils  avaient  établi  tout  à  la  fois 
une  faute  à  la  charge  de  cette  association  et  un  préjudice  ré- 
sultant de  cette  faute  ; 

Attendu,  sur  le  premier  point,  que  l'arrêt  constate  que  l'Asso- 
ciation, loin  de  vouloir  se  passer  de  l'autorisation  de  la  Société 
des  auteurs  de  musique,  n'a  fait  que  se  conformer  au  mode  usité 
entre  elles  pour  la  demander  et  la  donner;  que  «  suivant  un  usage 
constant,  remontante  plusieurs  années,  la  Société  des  composi- 
teurs de  musique,  prévenue  à  l'avance,  faisait  percevoir  au  cours 
même  de  la  soirée,  un  droit  proportionnel  à  la  recette  et  donnait 
à  ce  moment  son  autorisation  sous  forme  de  reçu  ;  que,  pour 
ce  bal  de  février  1896,  la  Société  des  compositeurs  avait  été  infor- 
mée de  la  réunion  et  qu'elle  pouvait  d'autant  moins  l'ignorer 
que  les  chefs  d'orchestre  étaient  deux  de  ses  membres,  lesquels, 
après  avoir  inscrit  au  programme  14  morceaux  de  leur  compo- 
sition et  en  avoir  dirigé  l'exécution,  figurent  néanmoins  parmi 


—  232  — 

les  demandeurs  et  réclament  des  dommages-intérêts  sons  pré* 
texte  quMls  n'auraient  pas  autorisé  ladite  exécution  ;  que  la  So- 
ciété  des  compositeurs  n'a  signifié  aucune  défense  déjouer  son 
répertoire  à  l'Association  des  élèves  de  TEcole  Turgot,  comme 
elle  Ta  fait  pour  une  autre,  et  que  l'association  Turgot  devait  éri- 
demment  supposer  que  les  choses  se  passeraient  comme  précé* 
demment;  que  l'arrêt  déclare  que  sa  bonne  foi  est  certaine  ; 
qu'il  appartenait  à  la  Cour  d'appel  de  constater  ces  faits  et  de 
reconnaître  la  bonne  foi  de  l'Association  ;  qu'elle  a  pu  en  induire 
que  celle-ci  n'était  pas  en  faute  ; 

Attendu  d'ailleurs,  sur  le  second  point,  que  la  Société  des  com- 
positeurs, avertie  du  bal  annuel  de  l'Ecole  Turgot,  ne  lui  ayant 
pas  défendu  d'exécuter  son  répertoire  et  ne  lui  ayant  pas  plus 
imposé  que  les  années  précédentes  des  conditions  spéciales,  ne 
pouvait  prétendre  qu'à  percevoir  les  droits  d'auteur  fixés  par  son 
tarif;  que  l'arrêt  constate  que  la  recette  ayant  été  contrôlée  dans 
le  but  précisément  de  déterminer  ces  droits,  ils  lui  ont  été  im- 
médiatement offerts  et  mis  à  sa  disposition  et  qu'elle  ne  justifie 
d'aucun  préjudice  ; 

Attendu  qu'en  rejetant  dans  ces  conditions  la  demande  en 
dommages-intérêts  formée  par  elle,  l'arrêt  attaqué  n'a  pas  violé 
les  articles  de  loi  invoqués  par  le  pourvoi  ; 

Par  ces  motifs,  Rejette  etc... 

MM.TANON,présidenl  ;  Gborgk-Lemairb,  rapporteur  ;  Feuil- 
lOLEY,  avocat  général.  —  M*  Aguillon,  avocat. 


Art.  4204. 

CBSuvreM  musicales.  —  Entrepreneur  de  speetacles. 
—  Exécution  sans  le  consentement  des  auteurs.  — 
Publicité.  —  Contrôle  de  la  Cour  de  cassation. 


L article  428  du  Code  pénal  punissant  d'une  amende  et^ 
sHl  y  a  lieu,  de  la  confiscation  des  recettes , tout  directeur ^ 
tout  entrepreneur  de  spectacles,  toute  association  d* artistes^ 
qui  aura  fait  représenter  sur  son  théâtre  des  ouwrages 
dramatiques  au  mépris  des  lois  et  règlements  sur  la  pro- 
priété des  auteurs^  il  importe  peu,  pour  l'application  de 
cet  article,  que  la  représentation  ait  eu  lieu  ou  non  sur  un 
théâtre  public  proprement  dit  ou  qu'elle  ait  été  gratuite,  il 
suffit  qu'il  y  ait  eu,  même  accidentellement,  exécution  pu- 
bflique,  sans  le  consentement  des  auteurs  ou  de  leurs  ayants 


—  233  — 

droite  d'œuvres  littéraires  ou  musicales  non  tombées  dans 
le  domaine  public  (1). 

Il  appartient  à  la  Cour  de  cassation  de  vériflery  au  vu  des 
faits  constatés  par  les  juges  du  fond,  si  la  représentation  a 
eu  un  caractère  public  ou  privé  ;  dès  lorSy  qiuind^  en  pré- 
sence de  conclusions  demandant  à  prouver  des  faits  d'oU 
résulterait  la  publicité  d'un  bal  où  des  morceaux  de  musi- 
que appartenant  à  des  œuvres  du  domaine  privé  ont  été 
joués  le  juge  du  fait  se  borne  à  déclarer  que  le  dit  bal  n'était 
pas  publiCy  la  Cour  de  cassation  se  trouvant  dans  Vim* 
possibilité  d'exercer  sur  la  légalité  de  la  décision  attaquée 
le  contrôle  qui  lui  appartient,  cette  décision  doit  être  cassée. 

(C.  de  cass.  crim.,  15  mars  1901.  —  Veuve  Desormes  et  autres 

c.  Polette  et  Houdy.) 

Mme  Vve  Desormes  s'étanl  pourvue  contre  un  arrêt 
rendu  par  la  Cour  de  Lyon  le  14  novembre  1900,  la  Cour 
de  cassation  a  le  15  mars  1901  rendu  Tarrêl  suivant  : 

r  La  Cour,  Sur  le  moyen  unique  du  pourvoi,  pris  de  la  yiola- 
tion  de  Tarticle  428  du  Gode  pénal  et  de  Tarticle  7  de  la  loi 
du  20  avril  1810^  en  ce  que  Tarrôt  attaqué  n'aurait  pas  suffisam- 
ment répondu  aux  conclusions  prises  par  les  parties  civiles,  de- 
manderesses, en  vue  défaire  déclarer  la  publicité  d'une  réunion 
dans  laquelle  avaient  été  exécutées  des  œuvres  musicales  ; 

Attendu  qu'aux  termes  de  la  loi  des  13-19  janvier  1791,  les  ou- 
vrages des  auteurs  vivants  ne  peuvent  être  représentés  sur  aucun 
théâtre  public  sans  le  consentement  formel  et  par  écrit  de  ces 
auteurs  ;  que,  d'autre  part,  l'article  428  du  Gode  pénal  punit 
d^une  amende  et,  s'il  y  a  lieu,  de  la  confiscation  des  recettes, 
tout  directeur,  tout  entrepreneur  de  spectacles,  toute  association 
d'artistes  qui  aura  fait  représenter  sur  son  thé&tre  des  ouvrages 

(1)  Sur  le  caractère  de  publicité  des  représentations  :  v.  Pouillet,  Prop, 
liU„  n<»  800  etsaiv.  et  jurisprudence  citée.  Sur  la  nécessité  de  l'auto- 
risation préalable  en  matière  d'exécution  d'œuvres  musicales,  jurispru- 
dence constante,  v.  notamment:  Gass.,  11  mai  1860,  Soc.Philharmonique 
du  Mans,  Ann.,  62.382  ;  Rej.,  28  janvier  1831,  Gambier,  Ann.y  81.228  ; 
Rennes,  9  février  1892,  Mullot  et  Hemmerlé,  Sir.,  93.2.179;  Besançon, 
18  juin  1*)9I,  Amourdediea,  Sir.,  95.2.12.  Quant  aux  mots,  entre- 
preneurs  de  spectacle,  ils  doivent  être  interprétés  dans  le  sens  le  plus 
large,  V.  Lyon,  4  janvier  1834,  Balloux,  il nn.,  85.110.  Il  n'est  pas  néces- 
saire que  Texécution  musicale  ait  été  pour  son  organisateur  une  source  de 
gain  :  Cass.,  22  janvier  1869,  Champagne,  Ann.,  69.408  et  Cass.,  28  jan- 
vier 1881  précité. —  En  ce  qui  concerne  les  exécutions  musicales  d'airs  de 
danse  dans  des  bals  publics  :  v.  Cass.,  22  janvier  1869,  précité,  et  Cass., 
9  mai  1891,  Dalt.,  91.1.4^.  A.  T. 


—  234  — 

dramatiques  au  mépris  des  lois  et  règlements  relatifs  à  la  pro- 
priété des  auteurs  ;  qu'il  importe  peu,  du  reste,  que  la  représen- 
tation ait  eu  lieu  ou  non  sur  un  théâtre  public  proprement  dit 
ou  qu'elle  ait  été  gratuite  ;  qu'il  suffit,  pour  donner  lieu  à  Tappli- 
cation  de  l'article  428  précité,  qu'il  y  ait  eu,  môme  accidentelle* 
ment,  exécution  publique,  sans  le  consentement  des  auteurs  ou 
de  leurs  ayants  droit,  d'œuvres  littéraires  ou  musicales  non 
tombées  dans  le  domaine  public  ; 

Attendu  qu'il  appartient  à  la  Cour  de  cassation  de  vérifier,  au 
▼u  des  faits  constatés  par  la  Cour  d'appel,  si  la  représentation  a 
eu  un  caractère  public  ou  privé  ; 

Attendu  qu'il  résulte  du  jugement  du  Tribunal  correctionnel 
de  Saint-Etienne,  dont  les  motifs  sont  adoptés  par  l'arrêt  attaqué, 
que  Polette,  en  qualité  de  président  du  comité  des  ouvriers  plâ- 
triers-peintres syndiqués,  a  organisé,  dans  les  aalles  du  restau- 
rant tenu  par  Roudy,  un  banquet  par  souscription  suivi  d'un 
bal  ;  que,  pendant  ce  bal,  des  membres  de  la  société  ont  exécuté, 
sans  autorisation  préalable,  des  morceaux  de  musique  emprun- 
tés à  des  œuvres  qui  sont  la  propriété  des  parties  civiles  deman- 
deresses ;  que  le  jugement  ajoute  que  ledit  bal  n'était  pas  pu- 
blic ; 

Attendu  que,  devant  la  Cour  d'appel,  les  parties  civiles  ont 
déposé  des  conclusions  dans  lesquelles  elles  prétendaient  :  no- 
tamment, que  des  hommes  et  des  femmes,  n'ayant  entre  eux 
aucunes  relations,  avaient  pris  part  à  ce  bal  ;  qu'on  y  avait  admis 
des  tiers  étrangers  à  l'association  qui  Pavait  organisé  ;  que,  par 
des  annonces  insérées  dans  des  journaux,  on  y  avait  enfin  con- 
vié le  public;  que,  par  conséquent,  ledit  bal  avait  un  caractère 
incontestable  de  publicité  ;  que,  subsidiairement  et  par  les 
mêmes  conclusions,  les  parties  civiles  ont  demandé  à  la  Cour 
d'appel  d'ordonner  une  enquête  et  une  expertise  destinées  à 
établir  la  réalité  des  faits  par  elles  allégués  ; 

Attendu  qu'en  réponse  à  ces  conclusions,  l'arrêt  attaqué  se 
borne  à  déclarer,  comme  l'avait  déjà  fait  le  jugement  de  pre- 
mière instance,  que  le  bal  n'était  pas  public  ; 

Attendu  que  cette  affirmation  laconique  ne  suffit  pas  pour 
répondre  juridiquement  à  une  articulation  de  faits  précis  et  con- 
cordants, et  que  la  Cour  de  cassation  se  trouve  ainsi  dans  l'im-' 
possibilité  absolue  d'exercer,  sur  la  légalité  de  la  décision  atta- 
quée, le  contrôle  qui  lui  appartient  ; 

Par  ces  motifs.  Casse  et  annule  l'arrêt  rendu  par  la  Cour  d'ap- 
pel de  Lyon,  le  14  novembre  1900  ; 

Et,  pour  être  statué  conformément  à  la  loi, 

Renvoie  la  cause  et  les  parties,  en  l'état,  devant  la  Courd^ap- 
pel  de  Chambéry,  '    * 


*^-»i^»«  "■■■yarrw '----,-—■-.-— r-'i ^'    ^^ — -w^-—  -^-   ^ — • —yi     --r-»v*-j 


'7^ 


—  235  — 

MM.  LoEw,  président  ;  Roulier,  rapporteur  ;  Duboin, 
avocat  général.  —  M*  Agdillon,  avocat. 


Art.  4205. 

IV«m  comiiBerelal.  — -  Foncls  de  eommeree.— CU^mulaii 
partielle.—  Usa^e  dii  nom.  — •  Meanre*  ordonnées 
pour  éviter  In  conftislon.—  Adresse  iélégrraplilqae. 

Le  propriétaire  dCun  fonds  de  commerce  de  chapellerie, 
comprenant  d  la  fois  le  commerce  de  détail  et  le  commerce 
de  groSjde  chapeaux  français  et  de  chapeaux  de  provenance 
étrangère.qui  cède  à  un  acquéreur, avec  le  nom  et  la  marque 
de  sa  maisonyune  partie  de  son  commerce,  en  s'en  réservant 
spécialement  Vautre  partie  {importation  et  vente  en  gros  de 
ious  les  articles  extra-européens, fabrication  des  feutres  et 
fournitures  de  ehupeUerie),conÈerve  le  droit  d'exercer  sous 
son  nom  le  commerce  qu'il  s'est  réservé,  à  condition  de  ne 
pas  créer  une  concurrence  à  son  acquéreur  dans  la  branche 
faisant  l'objet  de  la  cession  (1). 

Mais  il  appartient  aux  tribunaux  d'ordonner  les  mesu- 
res nécessaires  pour  éviter  toute  confusion  et  distinguer 
les  deux  maisons  d'une  façon  non  équivoque,  notamment 
de  décider  que  le  cédant  devra,  dans  son  commerce,  faire 
précéder  son  nom  patronymique  de  son  prénom  écrit  en  ca- 
ractères semblables  et  égaux  à  ceux  de  son  nom,le  faire  sui- 
vre du  nom  de  ses  associés  et  ajouter  enfin  la  mention  de 
la  branche  de  commerce  spéciale  qu'il  s'est  réservée,  telle 
qu'elle  figure  dans  le  contrat  de  vente  :  par  contre,  on  ne 
saurait  obliger  le  cédant  à  faire  suivre  son  nom  du  mot 
c  maison  fondée  en  1895  «,  date  du  contrat,  du  moment 
qu'il  est  constant  que  le  commerce  qu'il  s'est  réservé  re- 
monte à  une  date  bien  antérieure  (2). 

(l-2j  En  principe,  on  doit  admettre  que  toat  commerçant,  exerçant 
réellement  et  personnellement  un  commerce,  a  le  droit  de  Tezercer  sous 
son  nom.  Mais  les  tribunaux  peuvent  imposer  des  conditions  spéciales  à 
Tusage  du  nom  et  même  Tinterdire  lorsqu'il  leur  apparaît  que  ce  nom 
est  fourni  par  son  titulaire,  non  directement  intéressé  à  Texploitation 
commerciale,  à  des  tiers  pour  créer  une  confusion  frauduleuse  avec 
une  maison  de  commerce  existante  portant  le  même  nom.  Toutefois, 
Tinterdiction  ne  porte  jamais  que  sur  le  genre  de  commerce  pour  lequel 
la  fraude  se  révèle  et  n'est  pas  absolue  et  générale. V.  Pooillet,  Mar- 


—  236  — 

A  défaut  de  convention  spéciale,  la  vente  du  fonds  de 
commerce  ne  comprend  pas  l'adresse  télégraphique  cons* 
tituée  par  le  nom  même  du  cédant^  alors  surtout  que  le  cé- 
dant s'est  réservé  le  droit  de  continuer  pour  son  compte  une 
partie  des  affaires,  notamment  les  affaires  d'importation 
pour  lesquels  son  emploi  devait  lui  faciliter  ses  relations 
avec  les  pays  extra-européens  (Résolu  par  le  tribunal  de 
commerce)  (3). 

(C.  de  Paris,  22  novembre  1899.  —  Albert  Ledac  c,  les  fils 

de  Pinay  jeune.) 

ues  de  fab,,  n»  496  etsuiv.  etjurisp.  citée  ;  Dalloz,  Jurisp.  générale^ 
Vo  Industrie  et  commerce,  n^  425  et  suiv.  et  Suppl.^  n»  430,  V®  Nom^ 
no  134  et  Supp.,  n«»138  et  139. Y.  aussi  Paris,  29déc.  1893,  Pommerf. 
Ann.,  94.90;  ^Rej.,  4  déc.  1893,  Piron,  Ann.,  94.80  ;  Aix,  22  avril  1894, 
V»  Buffard,  Ann.,  96.292;  Rej.  18  mars  1895,  Pommery,  Ann.  ^.270, 
Paris,  16  mai  1895,  Rœderer,  Ann.,  96.293. 

Lorsqu'un  commerçant  vend  son  fonds,  il  ne  perd  pas  le  droit  de  se 
rétablir  sous  son  nom,  à  moins  d'une  clause  spéciale  dans  Tacte,  à  la 
condition  de  ne  pas  faire  sous  ce  nom,dans  le  même  commerce,  une  con- 
currence  préjudiciable  à  son  acheteur.  Il  en  est  a  fortiori  ainsi  lorsque 
le  propriétaire  du  fonds  vendu  se  réserve  une  ou  plusieurs  branches  de 
son  ancien  commerce,  mais  les  tribunaux  peuvent  toujours,en  cas  de 
difficultés,  ordonner  les  mesures  nécessaires  pour  rendre  entre  les  deux 
maisons  la  confusion  impossible.  V.  notamment,  Rej.,  4  déc.1893,  déjà 
cité,  et  la  note. 

Parmi  les  mesures  souvent  prescrites  par  les  tribunaux,  la  mention 
de  la  date  de  fondation  de  la  maison  qui  cherche  à  faire  naître  la  confu- 
sion est  une  des  plus  fréquentes.  On  peut  se  demander  si  elle  a  ioote 
l'efficacité  qu'on  lui  prête,  car,  si  an  début,  lorsque  les  faits  sont  ré* 
cents,elle  permet  de  distinguer  la  nouvelle  maison  de  rancienne,il  ar- 
rive trop  souvent  qu'au  bout  de  quelques  années  c'est  la  maison  dont 
les  papiers  commerciaux  ne  portent  aucune  date,  l^ncienne,  qui  ap- 
paraît au  consommateur  peu  renseigné,  comme  nouvelle  par  rapport 
à  la  maison  concurrente  dont  la  fondation  lui  semble  déjà  relativement 
éloignée.  Quoi  qu'il  en  soit,le  tribunal  n'avait  évidemment  pas  le  droit, 
dans  respèce,  d'obliger  Leduc  à  indiquer  comme  date  de  fondation  de  la 
branche  de  commerce  conservée  par  lui  i'année  1895,  puisque,en  fait,  i| 
était  constant  que  ce  commerce,  créé  par  lui-même,  remontait  à  une  date 
bien  antérieure  ;  une  telle  mention  eut  été  contraire  à  la  réalité  des 
faits. 

(3)  L'adresse  télégraphique  d'un  commerçant  ne  fait  pas  partie  a  priori 
de  la  marque  du  commerçant.  Tout  au  plus  pourrait-on  soutenir  que 
lorsqu'elle  est  de  pure  fantaisie,eile  constitue  un  accessoire  du  fonds  de 
commerce;  mais  quand,  comme  dans  l'espèce,  c'est  le  nom  patronymi- 
que lui-môme  du  commerçant, quand  le  fonds  n'est  pas  cédé  tout  entier, 
et  que  ce  commerçant  conserve,  malgré  la  vente  de  son  fonds,  le  droit 
de  continuer  sous  son  nom,  certaines  branches  de  son  ancien  commerce 
et  en  particulier  le  commerce  d'importation  de  produits  étrangers.  Il 
semble  que  c'est  avec  raison  que,  dans  le  silence  du  contrat,  le  tribunal 
de  commerce  lui  en  a  réservé  l'emploi.  D'ailleurs  la  question  n'a  pas  été 
soumise  au  juge  d'appel •  A.  T. 


•il-  r"%^^*" 


—  237  — 

Le  tribunal  de  commerce  de  la  Seine  a  rendu,  le  10  sep- 
tembre 1896,  le  jugement  suivant  : 

Le  Tribunal,  Âttenda  que  les  fils  de  Pinay  jeune,  acquéreurs 
moyennant  50,000  francs  du  nom  et  de  la  marque  de  la  maison 
Leduc,  des  affaires  en  chapeaux  de  paille  et  tous  articles  de 
commission  exploités  par  elle  à  Paris,  faubourg  Poissonnière, 
n<»  5  et?  et  de  l'achalandage  attaché  à  cette  branche  de  com- 
merce, reprochent  à  Albert  Leduc  de  se  li  vrer  à  leur  égard,  au 
mépris  de  l'interdiction  qu'il  avait  acceptée,  à  des  actes  de  con- 
currence déloyale  et  de  se  servir  de  la  faculté  réservée  de  conti- 
nuer Texploitation  et  la  vente  en  gros  des  articles  extra-euro- 
péens, la  fabrication  des  feutres  el  la  vente  des  fournitures  de 
chapellerie, pour  créer  une  confusion  entre  la  maison  qu'il  dirige 
el  la  marque  Leduc  qu'il  a  vendue  ; 

Qu'ils  demandent  au  tribunal  :  de  faire  défendre  à  Albert  Leduc 
d'employer  à  l'avenir,  soit  sur  son  papier  à  lettres,  soit  sur  ses 
circulaires, soit  dans  la  publicité,  le  nom  de  Leduc,  même  précédé 
du  nom  d'Albert,  et  ce,  sous  une  astreinte  à  impartir;  de  dire 
que  l'adresse  télégraphique  «  Leduc  »  est  comprise  dans  la  mar- 
que de  la  maison  Leduc  qu'ils  ont  achetée,  que  l'administration 
des  postes  et  télégraphes  sera  tenue  de  leur  distribuer  faubourg 
Poissonnière  n^"5  et  7  les  lettres  portant  lasuscription  «Leduc» 
rue  Saint-Georges,  n*  28,  nouvelle  adresse  d'Albert  Leduc,  et 
révélant  par  leur  aspect  extérieur  qu'elles  se  rapportent  au 
commerce  des  chapeaux  de  paille,  ainsi  que  les  télégrammes 
adressés  «  Leduc  Paris  »  ;  de  dire  que  Leduc  devra  obliger  la 
maison  Macdonnat  et  Cie  à  supprimer  de  ses  papiers  et  annon- 
ces toute  mention  indiquant  que  son  exploitation  s'exerce  dans 
les  locaux  et  avec  le  matériel  de  l'ancienne  maison  Leduc;  de 
dire  qu'Albert  Leduc  s'est  rendu  coupable  de  concurrence  dé- 
loyale en  vendant  des  chapeaux  de  paille  autrement  qu'en  gros 
et  en  faisant  visiter  par  son  représentant  la  clientèle  de  détail 
qu'il  a  vendue  et  la  clientèle  de  gros  pour  laquelle  il  s'était 
interdit  de  se  servir  de  son  nom  ;  d'obliger  Albert  Leduc  à  re- 
mettre les  fiches  de  renseignements  des  clients  de  son  ancienne 
maison  ;  de  le  condamner  en  100,000  francs  de  dommages-inté- 
rêts et  d'autoriser  l'insertion  du  jugement  à  intervenir,  à  ses 
frais,  dans  vingt  journaux  de  Paris  et  des  départements; 

En  ce  qui  touche  l'adresse  télégraphique  «  Leduc  »  : 

Attendu  que  cette  adresse  n'a  pas  été  cédée  avec  le  nom  et  la 
marque  de  Leduc  ; 

Que  le  contrat  de  vente  est  muet  sur  ce  point  ; 

Que  les  fils  de  Pinay  jeune  avaient  toujours  considéré,  avant 
et  après  la  vente,que  ce  nom  restait  la  propriété  d'Albert  Leduc  ; 


—  238  — 

qu'ils  avaient  eux-mômes  adopté  un  vocable  télégraphique  par- 
ticulier;  qu'il  était,  d'ailleurs,  naturel  que  le  vendeur,  en  se  ré- 
servant les  afTaires  d'importation,gardât  la  désignation  qui  lui  fa- 
cilitait ses  relations  avec  les  pays  extra-européens;  que  la  pré- 
tention des  fils  de  Pinay  jeune  à  l'attribution  de  cette  désignation 
avec  toutes  les  conséquences  qu'elle  comporte  est  donc  mal  fondée 
et  doit  être  rejetée  ; 

En  ce  qui  touche  l'usage  du  nom  de  Leduc  et  tout  le  surplus  de 
la  demande: 

Attendu  que  les  différents  griefs  des  (ils  de  Pinay  jeune  basés 
sur  les  anciennes  entêtes  de  Leduc,  ses  cartes  de  visite,  son 
adresse  conservée  faubourg  Poissonnière,  ses  insertions  dans  le 
Bottin  et  ses  publications  spéciales,la  souscription  d'un  colis  en- 
voyé de  Marseille  avec  son  ancienne  adresse,  etc., procèdent  d'un 
désir  tardif  de  récriminer  et  sont  de  minime  importance  ; 

Que  le  tribunal  doit  cependant  examiner  dans  quelle  condition 
Leduc  a  le  droit  de  faire  usage  commercial  d'un  nom  qu  il  a 
livré  moyennant  payement  d'une  somme  de  50.000  francs  ; 

Attendu  qu'aux  termes  de  l'acte  intervenu  entre  les  parties  le 
d  octobre  1894  enregistré,  Leduc  a  cédé  la  marque  et  le  nom  de 
sa  maison,  la  vente  des  afTaires  eu  chapeaux  de  paille  et  tons  arti- 
cles de  commission,  qu'il  exploitait  à  Paris  faubourg  Poissonnière, 
n<>'  5  et  7,  l'achalandage  attaché  à  cette  partie  de  son  commerce , 

Qu'il  s'est  interdit  toutes  opérations  qui  pourraient  faire  con- 
currence aux  fils  de  Pinay  jeune  dans  la  branche  du  commerce 
cédée,  mais  qu'il  s'est  réservé  l'importation  et  la  vente  en  gros 
de  chapeaux  grèges  et  de  tous  articles  extra- européen.s  (rotins, 
manilles,  etc.),  à  la  condition  de  ne  point  se  servir  du  nom  et 
de  la  marque  Leduc  cédée  ; 

Que  c^est  dans  ces  conditions  qu'une  circulaire  contradictoi- 
rement  rédigée  a  été  envoyée  à  la  clientèle;  qu'il  apparaît  donc 
bien  que  Leduc  ne  peut  faire  un  usage  commercial  de  son  nom 
que  dans  des  cas  restrictifs  et  limités  ; 

Que  l'aliénation  de  sa  maison  faubourg  Poissonnière,  de  son 
nom  et  de  sa  marque  moyennant  une  somme  que  justifiait  leur 
notoriété,  comporte,  en  fait,  un  changement  complet  dans  sa  si- 
tuation commerciale  et  l'oblige,  pour  la  mise  en  œuvre  du  négoce 
qu'il  s'est  réservé,  à  l'organisation  d'une  maison  nouvelle  et  dis- 
tincte qu'il  a  le  devoir  de  nettement  différencier  de  celle  cédée . 

Que  c'est  vainement  que  Leduc  prétendrait  qu'il  ne  fait  point 
d'affaires  sous  son  nom,  mais  comme  représentant  d'une  maison 
Maintz  et  Gie  ; 

Qu'il  est  établi  que  Maintz  et  Gie,  sont  ses  anciens  agents 
aux  Indes  ; 

Que  son  nom  est  apposé  sur  leur  papier  à  lettre  ; 


—  239  — 

Qu'il  signe  leurs  lettres  en  son  nom  personnel  ; 

Que,  bien  que  traitant  en  apparence  les  affaires  sous  leur  cou- 
vert, dans  un  local  spécial,  Leduc  se  révèle  personnellement  aux 
clients  sous  son  nom  de  A.  Leduc  ou  Albert  Leduc  ; 

Qu'il  est  en  réalité,  sous  sa  propre  responsabilité,  le  véritable 
metteur  en  œuvre,  le  bénéficiaire  direct  desdites  affaires  ou  tout 
au  moins  le  participant  de  Maintz  et  Cie  dans  la  plus  large 
mesure  ; 

Qu'il  importe  de  réglementer  cette  situation  pour  l'avenir  et, 
afin  d'éviter  tonte  confusion  entre  la  maison  cédée  et  celle  que 
Leduc  gère  actuellement,  d'obliger  dorénavant  celui-ci  à  rappeler 
sur  ses  en-tôtes,  lettres,  factures,  cartes,  adresses,  dans  la  pu- 
blicité touchant  son  négoce,  y  compris  les  affaires  faites  en  com- 
mun avec  Maintz  et  Gie,  la  réalité  des  faits,  c'est-à-dire  le  nom 
d'Albert  Leduc,  la  date  de  sa  création  et  le  genre  d'affaires  qu'il 
traite  :  «  Albert  Leduc,  rue  Saint-Georges,n«  28  »  et  au-dessous  en 
caractères  égaux  et  de  même  nature  que  les  précédents  «  Mai- 
son fondée  en  1895^  chapeaux  grèges  en  gros,  importation  d'ar^ 
ticles  extra-européens  »  :  que  c'est  dans  ces  limites  étroites 
qu'il  doit  être  fait  droit  à  l'ensemble  des  demandes  des  fils  de 
Pinay  jeune,  en  rejetant  le  surplus  de  leurs  fins  et  conclusions, 
notamment  leur  demande  en  dommages-intérêts  basée  sur  des 
faits  de  concurrence  déloyale  non  établis  et  leur  demande  en 
insertion  dans  divers  journaux  du  présent  jugement. 

Par  ces  motifs,  etc. 

Sur  appel  principal  par  Leduc  et  appel  incident  par  les 
fils  de  Pinay  jeune,mais  seulement  sur  la  question  d'emploi 
de  nom  commercial,  la  Cour,  sous  la  présidence  de  M, 
Mersier,  conseiller,  après  plaidoiries  de  M®"  Mennesson  et 
Jules  Fabrb,  et  conclusions  de  M.  Laffon,  avocat  général, 
a,  le  22  novembre  1899,  rendu  Tarrêl  suivant  : 

Considérant  que  Leduc,  propriétaire  d^un  fonds  de  commerce 
de  chapellerie,  comprenant  à  la  fois  le  commerce  de  détail  et  le 
commerce  de  gros  de  chapeaux  français  et  de  chapeaux  de  pro- 
venance étrangère,  a  cédé  aux  sieurs  Pinay,  avec  le  nom  et  la 
marque  de  la  maison  Leduc  une  partie  de  son  commerce  en  s'en 
réservant  expressément  l'autre  partie  :  l'importation  et  la  venté 
en  gros  de  tous  articles  extra-européens,  la  fabrication  des  feu- 
tres, les  fournitures  de  chapellerie  ; 

Considérant  que  Leduc,  qui  avait  acquis  une  notoriété  commer- 
ciale et  conservait  une  des  branches  importantes  de  son  commerce 
na  jamais  pu  avoir  l'idée  d'abdiquer,  d'une  manière  absolue,  son 
nom  de  Leduc  et  de  n'exercer  que  sous  un  nom  inconnu  le 


—  240  — 

commerce  quMl  s'était  réservé  ;  que  si, d'après  l'article  7  da  traité 
le  vendeur  ne  doit  pas  se  servir  du  nom  de  la  maison  Leduc,  le 
môme  article  spécifie  que  les  actes  interdits  au  vendeur  sont 
ceux  qui  seraient  de  nature  à  créer  une  concurrence  aux  fils  de 
Pinay  jeune,  mais  seulement  dans  la  branche  faisant  Tobjet  de 
la  cession  ; 

Considérant  que  les  fils  de  Pinay  n'essaient  même  pas  d'éta- 
blir cette  concurrence  ; 

Considérant  qu'il  est,au  contraire,démontré  que  Leduc  a  envoyé 
chez  ses  successeurs  les  personnes  qui  s'étaient  adressées  acci- 
dentellement à  lui  pour  des  opérations  concernant  le  commerce 
des  premiers  ; 

Considérant  que  c'est  à  bon  droit,  toutefois,  que  les  premiers 
juges  ont  reconnu  que  les  annonces  et  factures  de  Leduc  pour- 
raient encore  créer  une  certaine  confusion  et  décidé  de  distinguer 
d'une  façon  non  équivoque  sa  maison  de  celle  des  llls  Pioay  ; 

Considérant  que  le  moyen  indiqué  par  eux  doit  être  modifié  ; 
qu'en  effet,  eu  obligeant  Leduc  à  faire  suivre  son  nom  des  mots 
«  maison  fondée  en  1895  »,  le  tribunal  lui  a  imposé  l'indication 
d'un  fait  inexact,  puisque  le  commerce  réservé  par  Leduc  est  bien 
antérieur  à  1895  et  que  par  suite  une  telle  indication  peut  lui  être 
nuisible  dans  une  certaine  mesure  ; 

Considérant  que,pour  faire  la  distinction  entre  les  deux  maisons 
il  suffit  d'ordonner  que  Leduc  fera  précéder  son  nom  du  prénom 
((  d'Albert  »,  en  caractères  semblables  et  de  même  dimension  que 
ceux  de  Leduc  ;  qu'en  outre,  il  ajoutera  les  mots  suivants,  qui 
figurent  dans  son  traité  :  «  importation  et  vente  en  gros  d'articles 
extra-européens  »  et  qu'enfin  son  nom  sera  accompagné  de  celui 
de  «  Haintz  et  comp.  »,  mentions  et  indications  offertes  d'ailleurs 
par  Leduc  dans  ses  conclusions  ; 

Par  CBS  motifs,  Infirme  le  jugement  attaqué,  et  statuant  à  nou- 
veau, dit  que  sur  ses  lettres,  en-têtes,  factures,  cartes  et  dans 
sa  publicité,  Leduc  devra  faire  précéder  son  nom  du  prénom 
«  d'Albert  »  en  caractères  semblables  et  de  même  dimension 
que  ceux  du  nom  ; 

Qu'il  devra  y  ajouter  en  caractères  très  apparents  les  mots 
«  Maison  d'importation  et  de  vente  en  gros  d'articles  extra-euro- 
péens »  et  enfin  y  faire  figurer  en  caractères  aussi  apparents  que 
ceuxd'«  Albert  Leduc  »  le  nom  de«  Maintz  et  comp.  »  ;  déclare 
les  fils  de  Pinay  mal  fondés  dans  le  surplus  de  leurs  demandes, 
fins  et  conclusions,  les  en  déboute  ;  ordonne  la  restitution  de 
l'amende  consignée  par  Leduc  sur  son  appel  ;  condamne  les 
fils  de  Pinay  à  l'amende  de  leur  appel  et  en  tous  les  dépens. 


^-r-^^.Tiji 


—  241  - 


Art.  4206. 

Dénomination.  —  Pâte  aamande.  —  Produit  breveté . 

—  Déchéance  du  brevet. 

Une  dénomination  arbitraire  et  de  fantaisie,  appliquée  à 
un  produit  breveté  {dans  Vespèce^  la  dénomination  Pâte 
flamande,  jE>our  une  pâte  à  noircir  les  fourneaux),  ne  tombe 
pas  dans  le  domaine  public  par  le  fait  de  la  chute  du  bre^ 
vet  dans  le  domaine  public  (1). 

Le  dépôt  de  marques  étant  simplement  déclaratif  de  pro- 
priété, il  importe  peu  que  le  dépôt  de  la  dénomination  ait 
été  fait  postérieurement  à  la  déchéance  du  brevet,  du  mo- 
ment qu'il  est  constant  que  le  créateur  de  cette  dénomina- 
tion en  continuant  à  en  faire  usage,  depuis  Vépoque  de  la 
déchéance  du  brevet  jusqu'à  l'époque  du  procès,  a  entendu 
en  conserver  la  propriété  (2j. 

(C.  de  Paris,  23  mai  1901.  —  Lemoine  c,  Damoalin.) 

Nous  avons  rapporté  {Ann.,  1899,  p.  272)  les  décisions 
rendues  par  la  Cour  de  Paris  et  la  Cour  de  cassation  sur 
les  poursuites  correctionnelles  en  contrefaçon  intentées 
par  M.  Dumoulin  contre  M.  Lemoine  pour  l'emploi  de  la  dé- 
nomination Pâle  flamande.  Peu  après  l'arrêt  de  la  Cour 
de  cassation.  M.  Lemoine  assigna  M.  Dumoulin  devant  le 
Tribunal  civil  de  la  Seine  pour  ouïr  dire  que  la  dénomi- 
nation Pâte  flamande  appliquée  à  une  pâte  à  noircir  les 
fourneaux  était  tombée  dans  le  domaine  public  et  s'enten- 
dre condamner  à  des  dommages-intérêts.  Le  tribunal  re- 
poussa cette  demande  le  4  décembre  1900  par  le  jugement 
suivant  : 

Lb  Tribunal,  Attendu  que  Lemoine  demande  contre  Damou- 
lin  5000  francs  de  dommages-intérêts  pour  le  préjudice  que  ce 
dernier,  lui  aurait  causé  en  se  prétendant  propriétaire  exclusif 
de  la  dénomination  Pâte  Flamande  qui  serait  tombée  dans  le  do« 
maine  public  et  que  lui,  demandeur  exploite  ; 

Attendu  que  Dumoulin  a  fait  deux  dépôts  réguliers  de  cette 
dénomination  qui  étant  nouvelle  et  étant  arbitraire  et  de  fantaisie 
présentait  le  caractère  de  validité  requis  pour  une  marque  ; 

(1>2)  Gonf.  Casa,  req.,  il  mars  1899,    Lemoine,  Ann.,  99.272  et  la 

note* 

i6 


—  242  — 

Attendu  qu'il  importe  peu  que  le  premier  dépôt  ait  porté  sur 
la  dénomination  toute  seule,  tandis  que  le  second  aurait  été  ef- 
fectué pour  celle-ci  accompagnée  d'un  emblème,  soit  d'un  fer  à 
cheval  ;  qu'aucune  loi  n'empêche  un  commerçant  de  se  ménager 
ainsi  une  double  marque  ; 

Attendu  que  la  marque  étant  ainsi  valable  à  l'origine  n^a  pas 
perdu  son  efficacité  pour  avoir  été  incorporée  dans  le  brevet  du 
produit  qu'elle  désignait  et  qui  en  raison  du  défaut  de  paiement 
des  annuités  est  devenu  caduc  après  3  ans  ;  que  la  marque,  qu'elle 
figure  ou  non  dans  le  brevet,  en  constitue  un  élément  bien  dis- 
tinct ;  qu'en  effet  le  brevet  a  pour  but  de  garantir  le  monopole  de 
fabrication  ;  qu'au  contraire  la  marque  qui  n'a  d'autre  but  que 
d'attester  l'authenticité  du  produit  demeure  la  propriété  du  com- 
merçant tant  qu'il  en  fait  usage  ;  que  dès  lors  ladite  marque  doit 
survivre  au  brevet  à  moins  qu'elle  n'y  soit  demeurée  si  longtemps 
attachée  qu'elle  se  serait  en  quelque  sorte  incorporée  avec  le  pro* 
duit  et  que  la  confisquer  au  profit  de  l'ancien  breveté  ce  soit 
alors  laisser  en  fait  à  celui-ci  le  monopole  du  brevet  dont  il  est 
cependant  déchu  et  paralyser  en  fait  la  vente  d'un  produit  dont 
juridiquement  la  fabrication  et  le  débit  seraient  libres  ;  mais  que 
dans  l'espèce,  en  présence  de  la  très  courte  durée  du  brevet,  H- 
dentification  de  la  dénomination  avec  le  produit  ne  s'est  pas 
opérée  et  que  Dumoulin  est  donc  bien  demeuré  propriétaire  de 
sa  marque;  que  la  demande  de  Lemoine  est  donc  mal  fondée; 

Sur  la  demande  reconventionnelle  : 

Attendu  que  Lemoine,  déjà  débouté  de  ses  prétentions  par  un 
arrêt  de  la  chambre  criminelle  de  la  Cour  de  cassation,  a,  en 
renouvelant  ses  prétentions  devant  la  juridiction  civile  à  l'occa- 
sion d'un  débat  épuisé,  intenté  une  action  empreinte  d'un  carac- 
tère vexatoire  ;  que  le  Tribunal  a  les  éléments  nécessaires  pour 
fixer  à  1000  francs  le  montant  des  dommages-intérêts  qui  sont 
dus  de  ce  chef  à  Dumoulin. 

Par  ces  motifs,  Déclare  Lemoine  mal  fondé  en  ses  demande, 
fins  et  conclusions,  l'en  déboute  et  recevant  Dumoulin  reconven- 
tionnellement  demandeur,  condamne  Lemoine  à  lui  payer  la 
somme  de  iOOO  francs  à  titre  de  dommages-intérêts  pour  répa- 
ration du  préjudice  à  lui  causé  par  sa  poursuite  téméraire  et 
vexatoire  ;  dit  qu'il  n'y  a  lieu  d'ordonner  les  insertions  demandées; 
condamne  Lemoine  en  tous  les  dépens. 

Sur  l'appel  de  Lemoine,  la  Cour,  sous  la  présidence  de 
M.  Potier,  président,  après  plaidoiries  de  M"  Werthbimsr 
et  PociLLET  et  conclusions  de  M.  l'avocat  général  Selioman, 
a,  le  23  mai  1901,  rendu  l'arrêt  confîrmalif  suivant  : 


■."^'.■.•^■'Wfl? 


■V  ; 


—  243  — 

■ 

La  Cour,  Considérant  que,  le  6  juillet  1897,  Dumoulin  a  pris 
un  brevet  pour  une  composition  propre  à  Tentretien  de  tous . 
ustensiles,  tels  que  poêles,  fourneaux,  etc.,  dite  Pâte  Flamande  ; 

Considérant  que  cette  invention  est  tombée  dans  le  domaine 
public,  la  4'  annuité  du  brevet  n'ayant  été  payée  que  tardivement; 

Considérant  que  la  dénomination  Pâte  Flamande^  arbitraire  et 
de  fantaisie,  n'était  nullement  nécessaire  pour  désigner  le  pro- 
duit breveté  ;  qu'elle  n'est  donc  pas  tombée  avec  ce  produit  dans 
le  domaine  public;  que  cette  dénomination  constitue  une  marque 
de  fabrique  demeurée  la  propriété  exclusive  de  Dumoulin,  qui 
en  avait  le  premier  fait  usage  en  1887,  et  dont  il  n'a  cessé  de  se 
servir  depuis  cette  époque  pour  désigner  les  produits  de  sa  fabri- 
cation ; 

Considérant  que  le  19  septembre  1894,  Dumoulin  a  déposé  une 
marque  de  fabrique  consistant  dans  une  étiquette  sur  laquelle 
était  figuré  un  fer  à  cheval  traversé  par  les  mots  «  marque  de 
fabrique  »  et  comportant  la  revendication  de  la  dénomination 
Pâte  flamande^  ^lui  y  était  inscrite  en  lettres  majuscules  ; 

Considérant,  que  le  28  mai  1895,  Dumoulin  a  déposé  une  mar- 
que de  fabrique  consistant  dans  la  dénomination  Pâte  Flamande 
avec  ou  sans  adjonction  de  nom  ou  de  qualificatif; 

Considérant  qu'il  n'importe  pas  que  les  dépôts  fussent  posté- 
rieurs à  la  déchéance  du  brevet  puisque  opérés  dans  les  condi- 
tions prévues  par  la  loi  du  23  juin  1857,  ils  étaient  simplement 
déclaratifs  et  non  attributifs  de  la  propriété  de  la  marque  que  Du- 
moulin avait  toujours  conservée  en  continuant  à  en  faire  usage 
entre  l'époque  de  la  déchéance  de  son  brevet  et  celle  des  dé- 
pôts effectués  au  greffe  du  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine  ; 

Sur  la  demande  reconventionnelle  : 

Considérant  que  si  la  condamnation  correctionnelle  déjà  in- 
tervenue contre  Lemoine  pour  contrefaçon  de  la  dénomination 
Pâte  Flamande  comme  constituant  la  marque  de  fabrique  de  Du- 
moulin n'a  pas  entre  les  parties  l'autorité  de  la  chose  jugée  sur 
la  propriété  de  cette  marque,  la  demande  aux  fins  civiles  intro- 
duite par  Lemoine  apparaît  dans  les  circonstances  de  la  cause 
comme  téméraire  et  vexatoire  ;  qu'elle  a  causé  à  Dumoulin  un 
préjudice  dont  les  premiers  juges  ont  H'n^  l'exacte  réparation  ; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges,  en  ce  qu'ils 
n'ont  pas  de  contraire  à  ceux  du  présent  arrêt  ; 

Par  ces  motifs.  Reçoit  Lemoine,  dit  Martin,  appelant  du  juge- 
ment du  tribunal  civil  de  la  Seine  du  4  décembre  1900  ; 

Le  déclare  mal  fondé  en  ses  demandes,  fins  et  conclusions,ren 
déboute  ; 

Confirme  en  conséquence  le  jugement  dont  est  appel. 


■^v'-'K  i.i  II  §a9wmw,lWtP 


—  244  — 
Art.  4207. 

Propriété  artistique.  —  Dessin.  ~  Citation.  —  Biil- 
teur.  —  <  Li'AflnAlre  et  l'Image  ». 

Le  droit  de  citation  ne  s'applique  pas  en  matière  de  des- 
sins ;  un  dessin,  en  effet,  constitue  une  œuvre  indivisible, 
qui  conserve  son  individualité,  quoique  réunie  ou  associée 
avec  d'autres  œuvres,  et  ne  peut  être  publiée  sous  quelque 
forme  que  ce  soit  sans  être  entièrement  reproduite  et  ainsi 
complètement  portée  à  la  connaissance  des  tiers  (i). 

Il  est  donc  dû  réparation  du  préjudice  causé  à  l'artiste 
par  la  reproduction,  sans  son  consentement,  de  quelques-uns 
de  ses  dessins  même  dans  une  collection  spéciale  où  ils  ont  été 
groupés  avec  des  dessins  d* autres  artistes  en  vue  d'une  syn- 
thèse historique  et  pour  constituer  un  recueil  ou  document 
d'enseràble  (2). 

L'éditeur  de  l'album  encourt  la  même  responsabilité  que 
l'auteur  de  la  composition  (3). 

(Trib.  civ.  Seine,  90  novembre  1900.  —  Ibels  c.  Grand-Carteret.) 


(1-2)  L'écrivain  ou  i*artiste  qui  a  conçu  et  réalisé  une  création  doit 
rester,  en  principe,  le  seul  maître  de  la  reproduire  et  d'en  retirer  tous 
les  bénéfices  qu'elle  comporte.  Ce  droit  reste  intégral  tant  que  l'auteur  a 
maintenu  son  œuvre  inédite  ;  mais  lorsqu'il  l'a  livrée  à  la  publicité, 
il  Ta  livrée  à  la  discussion  publique  et  à  l'histoire,  il  en  a  fait  an  do- 
cument que  les  tiers  peuvent  utiliser  à  titre  de  document  historique  ; 
il  conserve,  il  est  vrai,  le  droit  de  propriété  littéraire,  mais  sous  réserve 
des  conséquences  naturelles  qu'entraîne  la  publicité  voulue  par  lui- 
même  et  il  ne  peut  empêcher  les  reproductions  qui  correspondent  aux 
nécessités  de  la  critique  et  de  la  documentation  historique.  C'est  du 
moins  par  ces  considérations  que  dans  la  plupart  des  pays  on  a,  en  Cace 
du  droit  de  l'auteur  sur  son  œuvre,  reconnu,  pour  le  public,  le  droit  de 
faire  des  citations  de  Tœuvre  littéraire  dans  un  but  de  critique  ou  de 
polémique.  Logiquement  cela  s'applique  à  Tinformation  et  à  l'histoire. 
Pourquoi  ce  qui  est  vrai  des  œuvres  littéraires  ne  le  serait-il  pas  éga- 
lement des  œuvres  artistiques  ?  Les  conséquences  de  la  publicité  telle 
qu'elle  a  été  voulue  par  l'auteur  sont  les  mêmes,  les  nécessités  de  la  ci- 
tation sont  identiques. 

Le  jugement  que  nous  rapportons  exclut  toute  citation  en  matière  gra- 
phique parce  que  reproduire  un  dessin  pour  le  citer  dans  un  ouvrage 
c'est  le  reproduire  tout  entier.  11  ne  nous  parait  pas  exact  de  dire  que 
la  reproduction  partielle  est  de  l'essence  même  de  la  citation  :  si  le 
droit  de  citation  n'avait  pas  d'autre  base  que  le  caractère  fragmentaire 
de  l'emprunt  il  ne  serait  pas  légitime,  car  la  jurispradence  panit  la 
reproduction  partielle  comme  la  reproduction  totale,  et  la  citation  d'une 
œuvre  en  entier  est  parfaitement  permise  en  matière  littéraire  quand  il 


■^T^-r- —r  T-    -^   î«  -^  -- -»,^.r^-  m-<^im~^-rj^-i .   .  "i — n-  -- T^»-    ■     ■■«wijip^ 


—  245  — 


Lb  Tribunal,  Sur  ]a  demande  principale  : 

Attendu  que  Grand-Garteret  a  publié  sous  le  titre  V Affaire  et 
ritnage,  un  album  dans  lequel  il  a  reproduit  sept  dessins  du  de- 
mandeur sans  son  autorisation  ; 

Qu'il  a  ainsi  porté  atteinte  au  droit  exclusif  d'Ibels,  auteur  de 
ces  dessins  ; 

Qu'il  importe  peu  qu'il  ait  compris  ces  mêmes  dessins  dans 
une  collection  spéciale  où  il  les  a  groupés  avec  des  dessins  d'au- 
tres artistes,  en  vue  d'une  synthèse  historique  et  pour  constituer 
un  recueil  ou  document  d'ensemble  ; 

Qu'il  ne  s'est  pas,  pour  cela,  maintenu  dans  les  limites  du 
droit  de  citation  ; 

Que  ce  droit  ne  s'applique  pas  en  matière  de  dessins  ; 

Qu'un  dessin,  en  effet,  constitue  une  œuvre  indivisible,  qui 
conserve  son  individualité,  quoique  réunie  ou  associée  avec 
d'autres  œuvres,  et  qu'il  ne  peut  être  publié,  sous  quelque  forme 
ce  soit,  sans  être  entièrement  reproduit  et  ainsi  complètement 
porté  à  la  connaissance  des  tiers  et  mis  en  possession  des  ache 
teurs  ; 

Attendu,  en  conséquence,  que  Grand-Garteret  doit  à  Ibels  ré- 
paration du  préjudice  qu'il  lui  a  causé  par  la  reproduction  illi- 
cite de  ses  dessins  ; 

Que  ce  préjudice  n'a,  d'ailleurs,  pas  l'importance  que  lui  attri- 
bue Ibels,  ses  dessins  n'ayant  plus  leur  valeur  d'actualité,  ni  le 
prix  d'œuvres  inédites,  et  leur  reproduction  ayant  affirmé,  sinon 
augmenté  sa  notoriété  ; 

Que  le  tribunal  a  les  éléments  d'appréciation  suffisants  pour 
fixer  l'indemnité  due  ; 

Attendu  que  la  Société  du  journal  le  Siècle,  qui  a  édité  l'album 
de  Grand-Garteret,  a,  de  concert  avec  lui,  méconnu  le  droit  d'I- 
bels, dont  elle  n'a  ni  obtenu  ni  même  demandé  l'autorisation  ; 

Qu'elle  est  donc  tenue,  au  même  titre  que  Grand-Garteret,  d'in- 
demniser Ibels  ; 

Qu'elle  prétend  vainement  avoir  acheté  et  publié  dans  son  jour- 
nal l'un  des  dessins  litigieux  ; 


s'agit    d^une  courte  pièce,   telle   qu'une    lettre    (v.  trib.   civ.   Seine, 
11  mars  1897,  à  propos  de  lettres  de  George  Sand,  Ann.,  98.  312). 

Il  serait  donc  logique  de  permettre  la  citation  d'un  dessin  lorsqu'elle 
est  réellement  faite  dans  un  but  de  critique  ou  de  polémique  ou  lorsqu'il 
s'agit  d'an  document  historique.  Ou  alors  il  faudrait  interdire  toutes 
citations  littéraires  ou  artistiques. 

II  est  à  remarquer  que  le  tribunal,  en  disant  que  le  droit  de  citation 
ne  s'applique  pas  en  matière  de  dessin,  semble  interdire  même  la  re- 
production, dans  un  but  de  critique,  d'un  fragment  de  dessin. 

G.  M. 


t.  ■»■■  'f^'mw^tn^ 


—  246  — 

Que  le  droit  de  reproduction  de  ce  dessin  ne  lui  a  pas  été  for- 
mellement cédé,  mais  seulement  celui  de  le  publier  nne  fois; 

Qu'elle  r^a  donc  pu  légitimement  le  reproduire  sans  autorisa- 
tion expresse  ; 

Par  ces  motifs,  Condamne  Grand-Garteret  et  la  Société  du  jour- 
nal le  SièciSj  solidairement,  à  payer  à  Ibels,  à  titre  dédommages 
et  intérêts,  la  somme  de  100  francs  ; 

Les  condamne,  sous  la  même  solidarité,  aux  dépens  ; 

Condamne  Grand-Carteret  à  garantir  et  indemniser  la  Société 
du  journal  le  Siècle  des  condamnations  prononcées  contre  elle  et 
aux  dépens  de  la  demande  en  garantie. 

1'*  Ch.  —  Présidence  de  M.  Lanbyrie.  —  Avocats  :  M«*  La- 
BORi  et  Georges  Maillard. 


Art.  4208. 

Propriété  littéraire  et  artistique.  —  Droit  de 
réponse.  ~  Reproduction  llllelte. 

L'exercice  du  droit  de  réponse,  dans  les  termes  de  far- 
ticle  13  de  la  loi  de  1881,  n'entraîne  point  V aliénation  du 
droit  de  proprié  té  y  en  ce  sens  que,  s*il  consacre,  au  profit 
de  l'intéressé,  le  droit  d'être  publié  et  imprimé  malgré  son 
contradicteur,  il  n'implique  point,  la  polémique  une  fois 
close,  V obligation, pour  Vune  ou  Vautre  des  parties,  d'être, 
contre  son  gré,  imprimée  et  publiée  à  nouveau  (1). 

Par  suite,  les  lettres  missives  publiées  par  un  journal,  en 
réponse  à  des  articles  parus  dans  ce  même  journal,  ne  per- 
dent point,  par  cette  publication,  leur  caractère  d'œuvre 
littéraire  personnelle,  susceptible  de  propriété  privée,  et  le 
directeur  de  ce  journal  qui  les  reproduit  ensuite  dans  une 
brochure,  sans  nécessité  démontrée  ni  autorisation  préala- 
ble, porte  atteinte  à  cette  propriété  et  peut  être  condamné, 
de  ce  chef,  à  des  dommages-intérêts  envers  leur  auteur  (2). 

On  ne  saurait  arguer  du  droit  de  citation  pour  justifier 

(1-2)  Le  jugement  fait  observer  que  le  droit  de  publication  n*est 
transmis  au  destinataire  de  la  lettre  que  dans  la  mesure  fixée  par  la 
volonté  de  Fauteur  et  que  l'auteur,  qui  use  du  droit  de  réponse  pour 
faire  insérer  sa  lettre  dans  un  journal,  n*est  présumé  demander  et 
autoriser  que  la  publication  dans  le  journal. 


—  247  — 

la  reproduction,  dans  ces  conditions,  de  lettres  entières  (1). 
La  confiscation  conserve,  en  matière  de  contrefaçon  lit- 
téraire  et  artistique,  le  caractère  de  peine  ;  le  tribunal 
civil  est  incompétent  pour  connaître  des  conclusions  prises 
devant  lui^  de  ce  chef{i)  (Résolu  par  le  jugement). 

(G.  de  Paris,  SI  février  1901 .  —  Bmnetière  c,  Yves  Gayot  et 

journal /e  Siècle.) 

La  l'«  Chambre  du  Tribunal  civil  de  la  Seine,  sous  la 
présidence  de  M.  Baudoin,  conformément  aux  conclusions 
de  M.  le  substitut  Servin,  avait,  le  14  décembre  1899, 
rendu  le  jugement  suivant  : 

Le  Tribunal,  Attendu  que,  le  journal  le  Siècle  ayant  publié, 


(1)  Pour  le  droit  de  citation  voir  suprà,  p.  244,  le  jagement  Ibels  c. 
Grand-Carteret  et  la  note. 

(2)  Cf.  Cass.  cr.,  29  décembre  1882,  Ann.,  84.359  et  23  juin  1893, 
i4nn.,  98.229,  arrêts  qui  ne  donnent  du  reste,  aucun  motif,  et  Paris, 
12  juillet  1862,  Ann,,  62.314  ;  Paris,  corr.,  27  mars  1868,  Ann,,  68.325  ; 
Paris,  25  juin  1870.  Ann,,  70.264;  Paris,  29  juin  1878,  Ann.,  79.85; 
Trib.  civ.  Lyon,  18  mars  1890,  Ann.,  95.135  ;  Paris,  24 décembre  1896, 
Ann.,  98.37  {on  cite  aussi  Tarrét  de  la  Cour  de  cassation  du  5  juin  1847, 
mais  il  ne  tranche  nullement  la  question,  il  dit  seulement  que  la  con- 
fiscation peut  être  prononcée  à  la  requête  du  ministère  public,  même 
en  Tabsence  d'un  partie  civile  pour  en  profiter).  —En  sens  contraire  : 
Pouillet,Prop.  liU,,  n«  699  ;  Pataille,  ^nn.,1868,  p.305  ;  Trib.  civ.  Niort, 
17  février  1891,  Ann,,  92.205  ;  Angers,  26  janvier  1880,  Ann..  80.204  ; 
Paris,  corr.,  31  janvier  1868,  Ann.,  68.56;  Paris,  corr.,  21  novembre 
1867,  Ann.,  67.359  ;  Trib.  corr.  Seine,  13  novembre  1867,  Ann.,  68.31  ; 
Paris,  12  juillet  1867,  Ann.,  67.407  ;  Douai,  8  août  1865,  Ann.,  69.248; 
Trib.  corr.  Seine,  22  novembre  1831,  Oaz.  Trib,,  25  novembre  ;  Paris, 
1«r  mars  1830,  Ann,,  68.320. 

Les  objets  contrefaits  peuvent,  d'après  l'article  3  de  la  loi  du  19  juillet 
1798  et  l'article  429  du  Code  pénal,  être  saisis  à  la  requête  de  la  partie 
lésée  et  lui  être  remis  pour  l'indemniser  d'autant  du  préjudice  souf- 
fert. Il  y  a  bien  là  une  réparation  civile,  un  supplément  de  domma- 
ges-intérêts. Il  est  difficile  de  comprendre  comment  la  partie  saisie 
pourrait,  après  la  condamnation,  réclamer  les  produits  contrefaits.  Le 
tribunal  saisi  de  l'action,  au  civil  comme  au  correctionnel,  doit  donc 
pouvoir  ordonner  la  remise  des  objets  au  demandeur.  C'est  l'objet  qui 
est  illicite,  il  doit  être  remis  à  la  partie  lésée.  Il  serait  à  désirer  que 
la  Cour  de  cassation  fût  appelée  à  s'expliquer  à  nouveau  sur  cette 
question  et  la  résolût  enfin  en  ce  sens. 

La  même  question  se  pose  en  matière  de  dessins  et  modèles  de  fabri- 
que,par  application  des  articles  427  et  429  du  Code  pénal.La  Cour  de  Douai 
n'admet  pas  la  confiscation  au  civil.  Douai,  29  juin  1867,  Anfi,^  68.77. 
—  En  sens  contraire  :  Paris,  corr.,  25  juillet  1895,  Ann.,  96.24  ;  Lyon, 
27  mai  1879,  Ann.,  81.42;  Aix,  23  janvier  1867,  Ann.,  68.107  ;  Paris, 
27  janvier  1846,  Ann.,  68.321  ;  Paris,  21  août  1837,  Journ.  trib.  comm., 
57.229.  G.  M.      . 


—  248  — 

le  12  avril  1898,  sous  la  signature  «  Michel  Colline  >»  el  sous  le 
titre  Billets  de  province,  un  article  dans  lequel  Brunetière,  nette- 
ment désigné  sous  le  nom  de  «  Basile  »,  était  violemment  pris 
à  partie  à  raison  d*un  article  intitulé  Après  le  procès  et  publié  par 
lui  au  sujet  de  l'affaire  Dreyfus,  Brunetière,  agissant  en  vertu 
de  Farticie  13  de  la  loi  du  29  juillet  1881,  a  sommé  le  Siècle  d'in- 
sérer sa  réponse  ;  qu'Yves  Guyot,  directeur  de  ce  journal,  a  fait 
droit  à  cette  réquisition,maisafait  suivre  dans  son  journal  cette 
réponse  de  ses  commentaires  ;  que  Brunetière  y  a  répliqué  et  que 
les  choses  ont  ainsi  continué  à  dix  reprises  différentes  jusqu'au 
5  septembre  suivant  ; 

Que  dès,  le  29  août,  Stock  a  prévenu  Brunetière  qu'il  avait  Tin- 
tention  de  publier  une  brochure  contenant  to  ute  cette  polémique  ; 
que  Brunetière  lui  a  fait  savoir  qu'il  s'opposait  absolument,  pour 
sa  part,  à  la  reproduction,  sous  forme  de  brochure,  des  lettres 
qu'il  avait  écrites  : 

Qu'Yves  Guyot,  lui  ayant,  suivant  exploit  d'Ârnoux,  huissier  à 
Paris,  en  date  du  12  septembre  suivant,  fait  sommation  d'avoir  à 
donner  son  autorisation  et  ne  l'ayant  pas  obtenue,  a  passé  outre 
et  que  le  Siècle  a  annoncé,  dans  son  numéro  du  24  novembre,  la 
publication  à  la  librairie  Stock,  sous  le  titre  les  Raisons  de  Basile 
d'une  brochure  contenant  in  extenso  toute  la  polémique  échangée 
entre  Brunetière  et  Yves  Guyot  et  reproduisant  par  suite  en  entier 
les  lettres  de  Brunetière  ; 

Que  ce  dernier  a  fait  aussitôt  saisir  chez  Stock  252  exemplaires 
de  la  brochure,  reliquat  du  tirage  des  1,600  qui  en  avait  été  fait 
et  que,  par  acte  du  16  décembre  suivant,  il  a  fait  assigner  Hlf . 
Yves  Guyot  et  Stock  devant  ce  tribunal  pour  s'entendre  déclarer 
contrefacteurs,  vT>ir  ordonner  la  confiscation  et  la  destruction  des 
exemplaires  saisis,  l'insertion  du  jugement  à  intervenir,  aux  frais 
des  défendeurs,  dans  dix  journaux  à  son  choix  et  s'entendre  con- 
damner solidairement,  pour  le  préjudice  causé,  à  3,000  francs  de 
dommages-intérêts  et  aux  dépens  ; 

Qu'Yves  Guyot  et  Stock  concluent  à  ce  que  Brunetière  soit 
déclaré  irrecevable  et  mal  fondé  dans  sa  demande  ;  qu'ils  soutien- 
nent que  les  lettres  de  Brunetière,  ayant  été  insérées  dans  les  ar- 
ticles d'Yves  Guyot,  en  font  partie  intégrale,  qu'elles  n'étaient  pas 
de  nature  confidentielle  puisque  la  publication  en  avait  été  re- 
quise,qu'en  les  reproduisant  ils  n'ont  fait  qu'user  du  droit  de  cita- 
tion, que  Brunetière  pouvait  tout  au  plus,  à  titre  de  collaborateur 
d'Yves  Guyot,  réclamer  une  part  du  bénéfice  qu'aurait  donné  la 
brochure  et  que,  de  ce  chef,  il  lui  était  fait  offre  de  la  moitié  des 
droits  d'auteur,  montant  à  10  0/0,  alloués  à  Yves  Guyot  par  son 
contrat  avec  Stock  ;  que  reconventionnellement  ils  demandent 
que  Brunetière,  ayant  fait  saisir  sans  droit  252  exemplaires  de 


—  249  — 

la  brochure,  soit  condamné  à  1  franc  de  dommages-intérêts  et  aux 
frais  de  l'insertion  dans  dix  journaux  à  leur  choix  ; 

Attendu  que,  si  Brunetière  n'a  invoqué  l'article  13  de  la  loi  du 
29  juillet  1881  qu'en  ce  qui  concerne  sa  réponse  à  l'article  de 
«  Michel  Colline  »,  il  a  adressé  toutes  ses  autres  lettres  à  Yves 
Guyot  avec  l'intention  de  les  voir  publier  par  le  Siècle  ;  mais  que 
cette  circonstance  n*altère  en  rien  leur  caractère  propre,  qu'elles 
n'en  restent  pas  moins  des  lettres  missives,  complètes  par  elles* 
mêmes,  et  qu'il  est  inexact  de  prétendre  qu'elles  soient  devenues 
partie  intégrante  des  réponses  qui  leur  ont  été  faites  et  qu'elles 
aient  ainsi  perdu  leur  individualité  ; 

Qu'une  telle  correspondance,  n'ayant  point  trait  à  des  relations 
d'affaires  mais  constituant  une  de  ces  communications  qui,  par 
lour  mérite,  ont  la  valeur  d'une  œuvre  littéraire,  reste  soumise  au 
dr  oitde  propriété  littéraire  comme  tous  autres  écrits  ;  que  cette 
propriété  n'est  pas  entrée  d'elle-même  dans  le  domaine  du  des- 
tinataire, qui  n'a  acquis  de  droit  que  sur  l'objet  matériel  lui-même 
qu'il  a  reçu  ;  qu'elle  est  restée  aux  mains  de  l'auteur  ;  que,  tout 
particulièrement,  le  droit  de  publication,  qui  en  est  le  principal 
attribut,  n'a  été  transmis  au  destinataire  que  dans  la  mesure  que 
Brunetière  a  lui-même  fixée  et  s'est  épuisé  par  l'exercice  qui  en  a 
été  fait;  que,  si  Brunetière  a  requis  l'insertion  dans  le  Siècle  de 
sa  réponse  à  l'article  de  «  Michel  Colline  »  et  s'il  a  laissé  publier 
les  lettres  suivantes  dans  le  même  journal,  l'autorisation  qu'il  a 
ainsi  donnée  était  limitée  nécessairement  à  cette  publication, 
éphémère  comme  la  feuille  où  elle  a  eu  lieu,  et  n'a  pas  créé,  au 
profit  d'Yves  Guyot,  le  droit  de  réunir  le^  mêmes  lettres  en  un 
volume  destiné  à  être  conservé  ; 

Qu*Yves  Guyot  et  Stock  prétendent,  à  la  vérité,  justifier  la  pu- 
blication qu'ils  ont  faite,  par  l'usage  du  droit  de  citation  qui, 
de  tout  temps,  a  été  reconnu  au  critique  littéraire  ;  mais  que  s'il 
est  légitime  et  légal  de  citer  un  ou  plusieurs  passages  d'un  ou- 
vrage, soit  pour  le  discuter,  soit  pour  en  tirer  argument  au  pro6t 
d'une  doctrine,  il  n'en  peut  être  ainsi  lorsque  les  emprunts  faits 
àTœuvre  d'autrui  sont  assez  étendus  pour  tenir  lieu  de  cette  œu- 
vre, à  plus  forte  raison  lorsqu'ils  constituent,  comme  dans  l'es- 
pèce, la  reproduction  totale  et  absolue  de  l'ouvrage  lui-même  ; 
qu'une  telle  reproduction  ne  peut  être  faite  qu'avec  l'assentiment 
de  l'auteur  ; 

Qu'Yves  Guyot  n'est  pas  plus  fondé  à  prétendre  que  ses  propres 
réponses  seraient  inintelligibles  sans  les  lettres  de  Brunetière  ; 
qu'il  lui  appartient  de  les  rendre  claires  par  un  tel  procédé  qui 
lui  conviendra,  mais  que  l'utilité  qu'il  invoque  ne  lui  donne  pas 
le  droit  de  s'emparer  à  sa  fantaisie  de  l'œuvre  d'autrui  ; 

Qu'il  n'est  pas  plus  sérieux  de  soutenir  qu'en  écrivant  ses  let- 


—  250  — 

très  Branelière  s'est  fait  le  collaboratear  d'Yves  Gujot  et  qu'il  a 
par  là  conféré  à  celui-ci  un  droit  de  propriété  sur  Tensemble  de 
Tœavre  commune  ;  que  toute  collaboration  suppose  à  rorigine 
un  contrat  passé  entre  deux  ou  plusieurs  personnes  associant 
leurs  efforts  pour  faire  ensemble  une  œuvre  littéraire  ou  artis- 
tique, chacun  s'étant,  suivant  la  tournure  de  son  esprit  et  la 
nature  de  son  talent,  chargé  d'une  partie  de  la  tâche  à  faire  et 
les  avantages  que  comporte  l'œuvre  commune  devant  être  égale- 
ment acquis  à  tous  ;  qu'aucun  accord  de  ce  genre  n'est  intervenu 
entre  Brunetière  et  Yves  Guyot,  qui  se  sont  bornés  à  mener  l'un 
contre  l'autre  une  polémique  sans  que  chacun  d'eux  ait  entendu 
conférer  à  l'autre  aucun  droit  sur  son  œuvre  personnelle; 

Que  la  demande  de  Brunetière  est  donc  recevable  et  fondée  et 
qu'il  convient  d'y  faire  droit  ; 

Que  le  tribunal  ne  saurait  toutefois  accueillir  le  chef  de  ses  con- 
clusions relatif  à  la  confiscation  ; 

Que  si  la  confiscation  prononcée  d'abord  par  le  décret  du  i9  juil- 
let 1793  et  plus  tard  par  les  articles  427  et  suivants  du  Gode  pé- 
nal est  de  nature  complexe  en  ce  que,  d'une  part,  elle  apourbul 
de  réprimer  l'infraction  et,  d'autre  part,  d'attribuer  aux  auteurs 
lésés  les  objets  contrefaits,  elle  n'en  perd  pas  pour  cela  son  ca- 
ractère dominant  de  disposition  de  répression  ; 

Qu'un  arrêté  interprétatif  du  29  messidor  an  VII,  rendu  au  rap- 
port de  Gambacérès,  a,  sur  ce  point,  dissipé  toute  incertitude  ; 
que  le  Gode  pénal  de  1810  n'a  rien  innové  à  cet  égard  ;  que  son  ar- 
ticle 11  range  la  confiscation  parmi  les  peines;  qu'il  en  est  de 
même  de  l'article  427  au  chapitre  delà  contrefaçon  ;  que  la  des- 
tination ultérieure  des  choses  qui  sont  le  produit  de  la  confiscation 
ne  change  pas  la  nature  de  celle-ci  et  ne  saurait,  alors  surtout 
que  l'article  429  la  distingue  expressément  de  la  confiscation  en 
tant  que  mesure  de  répression,  dépouiller  celle-ci,  en  l'absence 
d'une  dérogation  expresse  au  principe  susmentionné,  du  caractère 
essentiellement  répressif  qui  lui  est  propre  ; 

Qu'à  la  vérité,  l'article  49  de  la  loi  du  5  juillet  1844  porte  que 
la  confiscation  des  objets  contrefaits  doit  être  prononcée  même 
en  cas  d'acquittement  contre  le  contrefacteur,  le  receleur,  l'in- 
troducteur ou  le  débitant;  mais  que  c'est  là  une  disposition 
exceptionnelle  qui  ne  s'applique  qu'en  matière  de  brevets  d'in- 
vention et  qui  doit  être  restreinte  aux  cas  expressément  prévus 
par  cette  loi  ;  que  la  contrefaçon  littéraire  et  artistique  réprimée 
par  le  décret  du  49  juillet  1793  et  par  les  articles  427  et  suivants 
du  Gode  pénal  reste  régie  par  les  règles  du  droit  commun  ;  que 
dès  lors  la  confiscation  ne  peut  en  cette  matière,  où  elle  a  con- 
servé le  caractère  de  peine,  être  prononcée  que  par  le  tribunal 
de   police   correctionnelle  et  que  le  tribunal  est  incompétent 


-^  251  — 

pour  statuer  sur  les  conclusions  prises  de  ce  chef  devant  lui  ; 
Attendu  qu'il  a,  par  ailleurs,  les  éléments  nécessaires  pour  ap- 
précier le  préjudice  causé  ; 

Par  ces  motifs,  Dit  Brunetière  recevable  et  bien  fondé  dans 
ses  conclusions  tendant  à  le  faire  indemniser  du  préjudice  qull 
a  subi  du  fait  de  la  reproduction  illicite,  en  forme  de  brochures, 
des  lettres  par  lui  adressées  à  Yves  Guyot  pour  être  publiées 
dans  le  journal  le  Siècle  ; 

Condamne,  en  conséquence,  solidairement  Yves  Guyot  et  Stock 
à  lui  payer  la  somme  de  500  francs  à  titre  de  dommages-inté- 
rêts ; 

Ordonne  sous  la  même  solidarité  l'insertion  du  présent  juge- 
ment dans  cinq  journaux  au  choix  de  Brunetière  et  aux  frais  des 
défendeurs,  sans  que  le  coût  de  chaque  insertion  puisse  dépasser 
200  francs  : 

Se  dit  incompétent  pour  statuer  sur  la  confiscation  des  exem- 
plaires saisis  ; 

Dit  Yves  Guyot  et  Stock  mal  fondés  dans  leurs  conclusions 
reconventionnelles  :  et  les  condamne  solidairement  en  tous  les 
dépens. 

Arrêt  conflrmatif  en  ces  termes  : 

La  Cour,  Considérant  que  Yves  Guyot  a  fait  publier  par  la 
librairie  Stock  une  brochure,  intitulée  Les  Raisons  de  Basile,  con- 
tenant toute  la  polémique  échangée  entre  Brunetière  et  lui,  et 
reproduisant  in  extenso  des  lettres  de  Brunetière  ; 

Considérant  que  Texercice  du  droit  de  réponse,  dans  les  ter- 
mes de  Tarticle  13  de  la  loi  de  1881,  n'entraîne  point  Taliénation 
du  droit  de  propriété  ;  que,  s'il  consacre  au  profit  de  l'intéressé 
le  droit  d'être  publié  et  imprimé  malgré  son  contradicteur,  il 
n'implique  point,  la  polémique  une  fois  close,  l'obligation,  pour 
Tune  ou  l'autre  des  parties,  d'être  contre  son  gré  imprimée  et 
publiée  à  nouveau  ; 

Considérant  que  les  lettres  de  Brunetière  n'ont  point  perdu, 
par  la  première  publication  dans  le  journal  de  Guyot,  leur  ca- 
ractère propre  ;  qu'elles  constituent  une  œuvre  littéraire  person- 
nelle, susceptible  de  propriété  privée,  dont,  par  suite,  il  n'était 
pas  licite  de  faire  usage  sans  le  consentement  de  Tauteur  ;  que 
Guyot  ne  peut  arguer  du  droit  de  citation,  reconnu  de  tout  temps 
aux  auteurs  d'ouvrages  de  critique  ou  de  polémique  ;  que  le 
droit  de  citation  et  celui  de  reproduction  intégrale  ne  sauraient 
être  confondus,  sans  donner  lieu  aux  plus  graves  abus  ; 

Considérant  que  Guyot  ne  s'est  point  borné  à  citer  les  passages 
indispensables  pour  éclairer  la  discussion  ;  qu'il  reproduit  l'œu- 


IT 


•f-r- 


—  252  — 

vre  complète  de  Brunetière  sans  nécessité  démontrée  et  sans  au- 
torisation préalable,  faisant  ainsi  de  Brunetière  un  collaborateur 
malgré  lui; 

Par  crs  motifs,  Et  adoptant  ceux  des  premiers  juges  en  ce  qui 
touche  la  confiscation,  les  dommages-intérêts  et  les  insertions; 
Confirme  le  jugement  dont  est  appel  ; 
Condamne  les  appelants  à  l'amende  et  aux  dépens  nouYeaux. 

1'*  Ch.  —  M.  Lefedvrb  de  Viefvillb,  président.  —  M«  Lbvy- 
Salle,  avocat,  pour  les  appelants  ;  M.  Brunetière  pour  lui- 
même.  

Art.  4209. 

Nonikm  de  loealltés.  —  Arran^emeiit  de  madrld. 
Prodalto  irlnlcoles.  —  Madère. 

Peuvent  être  valablement  saisis^  dans  les  termes  de  f  arti- 
cle 19  de  la  loi  du  23  juin  1887,  des  vins  qui,  ne  provenant 
pas  des  îles  de  Madère,  sont  contenus  dans  des  fûts  qui 
portent  V indication  Madère  ou  Madeira,  V Arrangement  de 
Madrid  de  1891  étant  applicable  à  Vespèce  (1). 

(G.  de  cass.,  req.,  22  juillet  1901.  —  Sancho  Hermanoa  c.  Blandy  frères.) 

La  Chambre  des  requêtes,  sous  la  présidence  de 
M.  Tanon,  au  rapport  de  M.  le  conseiller  Denis  et  confor- 
mément aux  conclusions  de  M.  Tavocat  général  Mérillon, 
après  plaidoiries  de  M*""  Trêzel  et  Sabatier,  a  rejeté  les 
pourvois  formés  par  Sancho  Hermanos  et  par  Diez  frères 
contre  les  arrêts  de  la  Cour  de  Rouen,  du  26  juin  1900, 
rapportés  aux  Ann.,  1900.  212  : 

(1)  La  Cour  de  cassation  a  pleinement  confirmé  la  doctrine  de  la  Cour 
de  Rouen.  Mais  il  s'est  glissé  dans  la  rédaction  de  l'arrêt  deux  erreors 
qu'il  faut  rectifier. 

Les  articles  19  et  20  de  la  loi  de  1B57  ne  s'appliquaient  pas  originaire- 
ment aux  fausses  indications  de  provenance  étrangère,  c'est  la  loi  du 
18  avril  1892,  approuvant  1* Arrangement  de  Madrid  de  1891,  qui  les  rend 
applicables  aux  fausses  indications  de  provenance  dans  lesquelles  un  des 
Etats  contractants  ou  un  lieu  situé  dans  l'un  d'entre  eux  serait,  direc- 
tement ou  indirectement|indiqué  comme  pays  ou  comme  lieu  d*origine* 

Pour  apprécier  si  l'Arrangement  de  Madrid  est  applicable  à  Tespèce, 
il  n'y  a  pas  lieu  de  tenir  compte  de  la  nationalité  du  défendeur,  il  suf- 
fit d'examiner  si  TEtat  dont  le  nom  a  été  usurpé  ou  dans  lequel  est  si- 
tué le  lieu  dont  le  nom  a  été  usurpé  a  adhéré,  comme  la  France,  à  l'Ar- 
rangement de  Madrid,  c'est  donc  par  un  lapsus  que  l'arrêt  se  contente 
de  citer  parmi  les  pays  adhérents  la  France  et  l'Espagne  :  au  lieu  de 
«  Espagne  »  il  faut  lire  «  Portugal  ».  G«  M. 


—  253  — 

La  Goub,  Sur  le  moyen  aaique  pris  de  la  violation  par  fausse 
application,  des  articles  1  et  4  de  TArrangement  international  de 
Madrid  du  14  avril  1891  concernant  la  répression  des  fausses  in- 
dications de  provenance  sur  les  marchandises^  de  la  loi  du 
13  avril  1892  portant  approbation  de  cet  Arrangement  et  du  dé- 
cret du  15  juillet  1892  en  portant  promulgation,  fausse  applica- 
tion de  Tarticle  !•'  de  la  loi  du  28  juillet  1824  et  violation  de  Tar- 
ticle  7  de  la  loi  du  20  avril  1810  : 

Attendu  que  la  loi  du  28  juillet  1824,  dans  le  but  de  maintenir 
et  de  protéger  la  loyauté  du  commerce,  interdit  d'apposer  sur 
un  objet  fabriqué  le  nom  d'un  lieu  autre  que  celui  de  sa  fabri- 
cation ;  que  les  articles  19  et  20  de  la  loi  du  23  juin  1857  étendent 
cette  garantie  aux  vins  français,  étrangers  et  autres  boissons  ; 
qu'enfin  l'Arrangement  concernant  la  répression  des  fausses  in- 
dications de  provenance  sur  les  marchandises  conclu  le  15  avril 
1891  à  Madrid  entre  divers  Etats  au  nombre  desquels  se  trouvent 
la  France  et  l'Espagne  et  approuvé  par  la  loi  française  du 
13  avril  1892,  interdit  dans  ses  articles  1  et  4  toute  fausse  appel- 
lation régionale  de  provenance  sur  les  produits  vinicoles  ; 

Qxxe,  par  suite,  en  décidant  que  les  marchandises  litigieuses 
portant  l'indication  «  Madère  »  ou  «  Madeira  »,  alors  qu'elles 
ne  provenaient  pas  de  l'Ile  de  ce  nom,  avaient  été  valablement 
saisies  à  la  poursuite  des  négociants  Madérois  intéressés  et  que 
les  auteurs  de  ces  fausses  indications  étaient  responsables  du 
préjudice  causé  aux  poursuivants  par  l'usage  illicite  du  nom  de 
«  Madère  »,  la  Cour  de  Rouen,  qui  n'a  été  saisie  d'aucune  autre 
question,  a  suffisamment  justiQé  sa  décision  et,  loin  de  violer 
les  lois  visées  par  le  pourvoi,  en  a  fait  au  contraire  une  juste 
application  ; 

Par  ces  motifs,  Rejette. 

Art.   4210. 

Marques  de  tebrlque.  —  Dépôt  péi*liné.  —  Saisie.  -» 
Coneurrenee  déloyale.  —  Convention  de  Paris  de 
1883.  —  Dépôt  International  des  marques. 

Le  fait  que  le  dépôt  d'une  marque  de  fabrique  n'a  pas 
été  renouvelé  et  est  périmé  ne  fait  pas  obstacle  à  ce  que  le 
propriétaire  de  la  marque  poursuive  par  la  voie  de  la  con- 
currence déloyale  celui  qui  imite  frauduleusement  cette 
marque  (1). 

(1)  Le  dépôt  est  purement  déclaratif  de  propriété  (Pouillet,  Marq^ 
fab,,  no  102  et  suiv.)  en  vertu  de  l'article  1382.  D'autre  part,  rabseUce 


—  254  — 

Il  y  a  imitation  frauduleuse  d'une  marque  consistant 
dans  la  dénomination  Robert  inscrite  en  gros  caractères 
sur  le  couvercle  de  boîtes  de  forme  oblongue,  et  portant  à 
leur  face  latérale  deux  cartouches  avec  les  mots  en  langue 
française  et  anglaise  Sardines  à  Thuile  et  Sardines  in  oil, 
et  sur  chaque  coin  la  lettre  R,  dans  le  fait  d'employer  des 
boîtes  de  même  forme,  portant  le  nom  de  Norbert  en  ca- 
ractères identiques  et  présentant  les  mêmes  mentions  Sar- 
dines à  rhuile  et  Sardines  in  oil,  à  la  même place^  et  dam 
les  coins  les  lettres  FetJ  rapprochées  de  façon  à  offrir  par 
leur  réunion  V aspect  d'une  lettre  unique  rappelant  VinitiaU 

La  Convention  de  1883  est  absolument  étrangère  à  la 
force  exécutoire  des  jugements  rendus  à  r étranger,  et  l'en- 
registrement d'une  marque  au  Bureau  international  de 
Berne  ne  saurait  porter  atteinte  aux  droits  de  propriété 
antérieurement  acquis  sur  la  même  marque  (2). 

(G.  d'Aiz,  %  avril  1901.  —  Etablissements  F.  Delory  c,  JuUien.) 

Le  jugement  dont  appel  était  ainsi  conçu  : 

Le  Tribunal,  Attendu  que  la  Société  «    Les  Etablissements  F. 
Delory»,  de  Lorient,  fabricants  de  sardines  à  l'huile,  exploitent 
une  marque  de  fabrique  qu'ils  ont  déposée  au  greffe  da  tribunal 

de  renouvellement  du  dépôt  ne  fait  pas,  d'elle-même,  tomber  la  mar- 
que dans  le  domaine  public  (Pouillet,  Marq,  fab,^  n»  131  6û;  Bor- 
deaux, 6  juillet  1891.  Pector  et  Ducout,  Ann,,  98.202;  Trib.  Marseille. 
12  juin  1884,  Plagniol  et  James,  Revue  d'Aix,  1885,  p.  37).  Le  pro- 
priétaire de  la  marque,  s*il  en  a  effectué  le  dépôt  mais  n*a  pas  renou- 
velé le  dépôt  au  bout  de  15  ans,  peut  donc  poursuivre  au  civil  les 
imitateurs,  et  le  négociant  qui  s'est  licitement  approprié  une  mar- 
que en  remployant  lorsqu'elle  n'était  employée  par  aucun  concurrent 
a,  s'il  ne  la  dépose  pas,  l'action  en  concurrence  déloyale  contre  ceux 
qui  lui  causeraient  préjudice  en  employant  ou  imitant  la  môme  mar- 
que ;  le  dépôt  permet  simplement  d'invoquer,  pour  les  faits  ultérieurs, 
les  sanctions  prévues  par  la  loi  du  23  juin  1857. 

(1)  Sur  les  conditions  de  Timitation  frauduleuse,  v.  Pouillet,  Marques 
de  fab.,  n»  181  et  suiv.  Comp.  rej.,  18  juillet  1891,  Sicre,  Ann,^  9B. 
171  ;  Trib.  Seine.  3  février  1898,  Léonard  et  Ellis,  Ann.,  99.334  ;  Pa- 
ris, 21  févr.  1899,  Manuf.  royale  de  Saxe,  Ann.^  99.846;  Trib.  Seine, 
26  avril  1898,  Vilcocq,  Ann.,  99.355  ;  Douai,  18  mai  1900,  Martell,  Ann.^ 
1900.178. 

(2)  L'enregistrement  international  des  marques  est  réglé  par  le  second 
protocole  de  la  Conférence  de  revision  de  la  Convention  d^  Paris  tenue 
à  Madrid,  en  1892.  Sur  les  caractères  de  l'enregistrement  international 
des  marques  et  son  fonctionnement,  v.  Pouillet  et  Plé,  Commentaire 
de  la  Convention  d'union  internationale  de  1883,  no  119  et  suivants. 


i-^-~^^—-T ^ r-—-    — ^ 


—  255  — 

de  commerce  de  ladite  ville  le  10  novembre  fSRl  ;  que  cette  mar- 
que consiste  dans  Timpression,  sur  les  tranches  d'une  boîte, 
ainsi  qu'il  en  est  employé  pour  les  conserves  de  sardines,  du 
nom  de  Robert,  des  mots  Sardines  à  Vhuik,  Sardines  in  oil  et, 
dans  le  coin,  de  l'initiale  R.  ; 

Attendu  qu'il  résulte  d'un  procès-verbal  de  saisie  opérée  à 
Marseille  le  6  décembre  1898  aux  mains  des  sieurs  Pleury,  négo- 
ciante, et  de  Maillard,  représentant  de  commerce,  agissant  à 
Marseille  pour  le  sieur  JuUien,  fabricant  de  S6urdines  à  l'huile  à 
Sétubal  (Portugal),  que  ce  dernier  apposait  sur  des  boîtes  de 
même  forme  sur  les  tranches  le  nom  de  Norbert,  ainsi  que  les 
mots  :  Sardines  à  V huile,  Sardines  in  oil,  avec  les  mêmes  carac- 
tères, et,  dans  les  coins,  les  initiales  PJ.,  disposées  de  façon 
à  être  confondues  avec  l'initiale  R.  ; 

Attendu  qu'il  y  a  lieu  de  conclure  de  ces  constatations  que  Jul- 
lien  s'est,  dans  le  but  de  tromper  les  acheteurs,  rendu  auteur  de 
rimitation  frauduleuse  d'une  marque  des  établissements  F.  De- 
lory,  auxquels  il  fait  concurrence  ;  que  ces  faits  sont  prévus  et 
réprimés  par  les  articles  8  et  19  de  la  loi  du  23  juin  1857  ; 

Que  JuUien  a  causé  par  ses  agissements  à  la  société  deman- 
deresse un  certain  préjudice  dont  il  lui  doit  réparation  et  que  le 
tribunal  peut  évaluer  ; 

Attendu  que  les  sieurs  Fleury  et  de  Maillard  ne  sauraient  être 
considérés  comme  ayant  coopéré  sciemment  aux  actes  reprochés 
à  JuUien  ;  qu'ils  y  sont  par  suite  étrangers  et  qu'il  y  a  lieu  en 
l'état  de  les  mettre  hors  de  cause  ; 

Par  CBS  motifs.  Dit  que  JuUien  a,  par  l'emploi  des  indications 
ci-dessus  visées,  frauduleusement  imité  la  marque  de  la  société 
demanderesse  ; 

Lui  fait,  en  conséquence,  inhibition  et  défense  d'en  faire  usage 
à  l'avenir  ; 

Ety  en  réparation  du  préjudice  ainsi  causé  jusqu'à  ce  jour, 
le  condamne  à  payer  à  la  société  demanderesse,  à  titre  de 
dommages-intérêts,  la  somme  de  1,000  francs,  avec  intérêts  de 
droit  du  jour  de  la  demande  ; 

Ordonne  que  le  présent  jugement  sera  inséré  par  extrait  dans 
cinq  journaux  au  choix  de  la  société  demanderesse,  aux  frais  de 
JuUien  et  sans  que  chaque  insertion  puisse  dépasser  la  somme 
de  100  francs  ; 

Met  hors  de  cause  Fleury  et  de  Maillard  sans  dépens  ; 

Condamne  JuUien  à  tous  les  dépens  de  l'instance  ; 

Prononce  la  confiscation  de  tous  les  produits  contrefaits,  au 
profit  de  la  société  demanderesse  ; 

Et  déboute  cette  dernière  de  toutes  autres  ôus  et  conclusions 


«r— j-^^.-zfjr-^i-:^ ^-- — T- S  ".■.V'^«  ■  '-■  »     VV'inP^^^WPB^BViMP 


—  256  — 

La  Cour  d'Aix,  sous  la  présidence  de  M.  Mallbt,  prési- 
dent, a  le  28  avril  1901  rendu  l'arrêt  suivant  : 

La.  Goqr,  Attendu  que  la  Société  dite  des  Etablissements  De- 
lory  n'ayant  pas  renouvelé  le  dépôt  qu'elle  a  fait  le  10  novembre 
1881  d'une  marque  de  fabrique,  dépôt  périmé  depuis  quatre 
anS;  n'avait  pas  le  droit  d'agir  par  voie  de  saisie  à  Tégard  da 
sieur  Jullien,  pour  contrefaçon  de  cette  marque  ; 

Que,  dès  lors,  la  saisie  qu'elle  a  fait  pratiquer  le  il  novembre 
i898,  dans  les  docks  et  entrepôts  de  Marseille,  de  boites  de  sardi- 
nes provenant  de  la  fabrication  de  ce  négociant  est  illégale  et 
frappée  d'une  nullité  absolue  ; 

Qu'il  en  est  de  même  de  l'action  qu'elle  a  introduite  devant 
le  tribunal  contre  le  sieur  Jullien  en  se  fondant  sur  les  disposi- 
tions des  articles  7,  8  et  19  de  la  loi  de  1857  ; 

Mais  attendu  que  la  Société  des  Etablissements  Delory  avait  pris 
soin  d'énoncer,  dans  son  exploit  d'assignation,  qu'elle  poursui- 
vait, en  outre,  l'appelant,  pour  concurrence  déloyale  et  qu'à  ce 
point  de  vue  la  recevabilité  de  sa  demande  ne  saurait  être  con- 
testée ; 

Attendu,  au  fond,  que  la  société  intimée  qui  se  livre  au  même 
commerce  que  le  sieur  Firmin  Jullien,  enferme  depuis  de  longues 
années  ses  produits  dans  des  boites  oblongaes  snr  le  couvercle 
desquelles  est  écrit  en  gros  caractères  le  nom  de  Robert  et  qui 
portent  sur  leur  face  latérale  deux  cartouches  avec  ces  mots  en 
langue  française  et  anglaise  :  Sardines  à  Chuile  et  Sardines  in  oil 
et  sur  chaque  coin  la  lettre  A.  ; 

Qu'elle  a  fait  de  cette  marque  un  usage  continu  et  en  a,  dès 
lors,  conservé  la  propriété  nonobstant  la  péremption,  faute  de 
renouvellement  du  dépôt  qu'elle  en  a  fait  en  1881  ; 

Que  les  boftes  de  sardines  de  la  maison  Jullien  sont  de  la  même 
forme,  avec  le  nom  de  Norbert,  imprimé  en  caractères  identiques 
à  celui  de  Robert,  présentant  les  mêmes  mentions  Sardines  à 
Vhuile  et  Sardines  in  ail  à  la  même  place,  et,  dans  les  coins,  les 
lettres  F.  et  /.  rapprochées  de  façon  à  offrir  par  leur  réunion  l'as- 
pect d'une  lettre  unique  rappelant  l'initiale  A.  ; 

Que  si  les  boites  Delory  et  les  boîtes  de  F.  Jullien  sont  faciles 
à  distinguer,  placées  les  unes  à  côté  des  autres,  elles  offrent 
néanmoins  dans  leurs  éléments  essentiels  et  caractéristiques  une 
ressemblance  propre  à  tromper  l'acheteur  qui  n'a  sous  les  yeux 
que  celles  du  sieur  Jullien,  surtout  à  l'étranger  ; 

Qu'on  ne  saurait  admettre  qu'un  simple  hasard  ait  présidé, dans 
la  conception  de  la  marque  du  sieur  Jullien,  à  l'adoption  de  noms 
et  de  signes  à  peu  près  identiques  à  ceux  dont  les  Etablissements 
Delory  faisaient  usage  :  le  nom  de  Norbert,  de  même  consonnance 


iT-m^ 


—  257  — 

que  celui  de  Robert  et  les  deux  initiales  F.  et  J.  imprimées  dans 
les  coins  de  la  boite  et  conjuguées  de  façon  à  former  la  lettre  H. 
des  boites  de  cette  société  ; 

Qu'il  y  a  donc  preuve  sufûsante  que  l'appelant  a  frauduleuse- 
ment imité  la  marque  d'un  fabricant,  son  concurrent  ; 

Que  si  ce  fait  ne  constitue  pas  le  délit  prévu  et  puni  par  la  loi 
de  1857,  il  a  tous  les  caractères  d'un  acte  illicite  de  nature  è^ 
porter  préjudice  à  autrui  et  à  ouvrir  à  celui  qui  en  a  souffert  une 
action  en  dommages-intérêts  ; 

Attendu  que  le  sieur  Jullien  invoque  pour  sa  défense  des  juge- 
ments rendus  en  sa  faveur  par  le  Tribunal  portugais  de  Sétubai 
et  qui  seraient,  dit-il,  exécutoires  en  France,  en  vertu  de  la  Con- 
vention de  Paris,  et,  en  outre,  Tenregistrement  qu'il  aurait  fait 
effectuer  de  sa  marque  au  bureau  international  de  Berne  le 
12  juin  1899; 

Attendu  que  la  Convention  de  Paris  est  absolument  étrangère 
à  la  force  exécutoire  en  France  des  jugements  rendus  à  l'étranger 
et  que  l'enregistrement,  dont  se  prévaut  le  sieur  Jullien,  du  dépôt 
de  la  marque  à  Berne,  ne  saurait  porter  atteinte  aux  droits  de 
propriété  antérieurement  acquis  par  les  Etablissements  Delory  ; 
Sur  l'appel  incident  de  la  Société  des  Etablissement  Delory  \ 
Attendu  que  la  réparation  qui  leur  est  allouée  par  les  premiers 
juges  est  suffisante  et  qu'il  n'y  a  pas  lieu  d'en  augmenter  l'impor- 
tance; 

Par  ces  motifs.  Réformant  pour  partie  le  jugement  dont  est 
appel  ; 

'  Dit  et  déclare  nulle  la  saisie,  pratiquée  dans  les  docks  et  entre* 
pots  de  Marseille,  de  boites  de  sardines  appartenant  au  sieur  Jul- 
lien, à  la  requête  de  la  Société  des  Etablissements  Delory  ; 

Dit  et  déclare  en  môme  temps  irrecevable  l'action  de  ladite  com* 
pagnie  contre  le  sieur  Jullien  pour  délit  d'imitation  frauduleuse 
de  marque  en  vertu  de  la  loi  de  1857  ; 

Mais  dit,  en  même  temps,  que  la  Société  des  Etablissements 
Delory,  ayant  conservé  la  propriété  de  sa  marque  pour  avoir  con- 
tinué à  en  user  après  la  péremption  du  dépôt  qu'elle  en  avait  fait' 
estrecevable  et  fondée  dans  la  demande  qu'elle  a  formée  contre 
le  sieur  Jullien  en  réparation  du  préjudice  que  celui-ci  lui  a 
causé  par  l'adoption,  frauduleusement  calculée,  d'une  marque 
qui  présente  avec  la  sienne  des  similitudes  propres  à  amener  la 
confusion  de  ses  produits  avec  ceux  de  l'intimé  ; 

Confirme,  en  conséquence,  le  jugement  entrepris,  au  point  d& 
vue  des  dommages-intérêts  et  insertions  prononcées  par  les  pre- 
miers juges  ; 

Mais  dit  que  cette  réparation  est  suffisante  et  qu'il  n'y  a  pas 
lieu  d'en  augmenter  l'étendue  ; 


—  258  - 

Déboute,  en  conséquenceja  Société  des  Etablissements  Delory 
de  son  appel  incident  ; 

Condamne  ]a  Société  des  Etablissements  Delorj  pour  toas  dom- 
mages-intérêts aux  frais  de  sa  requête  au  président  du  Tribunal 
de  Marseille  ainsi  que  de  l'ordonnance  de  ce  magistrat  et  de  la 
saisie  qui  en  a  été  la  suite,  cette  procédure  étant  déclarée  nulle  ; 

Déboute  les  parties  du  surplus  de  leurs  demandes,  fins  et  con- 
clusions ; 

Condamne  la  société  intimée  aux  dépens  de  son  appel  inci- 
dent ; 

Condamne  le  sieur  JuUien  au  surplus  des  dépens  ; 

Ordonne  la  restitution  de  Tamende. 


Art.  4211. 

Noms  de  loewMtém,  —  Eaux  minérale*,  —  Orexxa. 

Les  noms  de  lieux  sont  dans  le  domaine  public  en  ce  sens 
que  Vusage  commercial  en  est  permis  à  tous  pour  indiquer 
la  provenance  des  produits  qui  en  sont  réellement  tirés  (1). 

Il  importe  peu  qu'un  nom  ait  cessé  de  constituer  la  qua^ 
lificalion  officielle  d'une  circonscription  administrative, 
s'il  a  continué  à  servir,  dans  le  langage  usuel,  à  désigner 
la  région  (2). 

Spécialement  le  nom  (f'Orezza,  bien  qu'il  ait  été  remplacé 
dans  l'usage  officiel  par  celui  de  Piedicroce,  continue  à 
constituer  une  indication  de  provenance  dépendant  du  do- 
maine  public  et  non  susceptible  d'appropriation  (3). 

(G.  de  cass.  req.,  4  juillet  1899.  —  Piatier  c.  Monplot.) 

La  Chambre  de  requêtes,  sous  la  présidence  de 
M.  Tanon,  au  rapport  de  M.  le  conseiller  George-Lkmairb, 
conformément  aux  conclusions  de  M.  l'avocat  général 
PuEGH  et  malgré  la  plaidoirie  de  M*  Sabatier,  a  rejelé  le 
pourvoi  formé  contre  l'arrêt  de  la  Cour  de  Paris  du  10  août 
1897  (ilnn.,  97.21): 

Sur  le  premier  moyen,  tiré  de  la  violation  des  articles  1*  delà 
loi  du  28  juillet  1824,  l^r  et  suivants  de  la  loi  du  23  juin  1857  et 
7  de  la  loi  du  20  avril  1810: 

(1-3)  Cf.  Cass.,  i*r  mai  1889,  Ann„  91.168. 


-  259  — 

Attendu  que  les  noms  de  lieux  sont  dans  le  domaine  public,  en 
de  sens  que  l'usage  commercial  en  est  permis  à  tous,  pour  indi- 
quer la  provenance  des  produits  réellement  tirés  des  lieux  indi*. 
qués; 

Attendu  que  Tarrèt  attaqué  constate  que  le  nom  d'Orezza  a. 
toujours  été,  depuis  un  temps  immémorial,  employé  pour  dési- 
gner, avant  comme  après  Tannexion  de  la  Corse  à  la  France,  une 
partie  du  territoire  de  cette  île  ;  que  ce  nom  désigna  d'abord 
î*une  des  soixante-quatre  pieves  ou  paroisses  entre  lesquelles  le 
territoire  annexé  était  divisé  ;  qu'ensuite,  lorsque  la  Corse  fut 
constituée  en  département  français  en  1790,  la  pieve  d*Orezza 
devint  le  canton  d*Orezza  ;  que  ce  fut  seulement  en  1828,  en  vertu 
d'une  ordonnance  royale,  que  le  canton  d'Orezza,  fut  appelé 
canton  de  Piedicroce  ; 

'^  Attendu  qu'il  importe  peu  que  le  nom  d'Orezza  ait  cessé  alors 
d*être  le  nom  officiel  de  la  circonscription  administrative,  sMl  a 
continué  à  servir  dans  le  langage  usuel  à  indiquer  la  région  ; 
que  l'arrêt  constate  qu'il  a  toujours  été  employé  pour  dési- 
gner les  produits  naturels  qui  en  sont  tirés;  qu'ainsi  Ton  dési- 
gne les  marbres,  les  vins,  les  bois,  les  châtaignes  qui  en  provien- 
nent, sous  les  noms  de  marbres,  de  vins,  de  bois,  de  châtaignes 
d'Orezza  ;  que  Tarrét  ajoute  qu'il  en  a  été  constamment  de  même 
pour  les  eaux  minérales  acidulées,  naissant  du  sol  dépendant  de 
l'ancien  canton  d'Orezza,  ainsi  dit  l'arrêt,  qu'il  est  établi  par  les 
diverses  publications  scientifiques,  géographiques  et  médicales, 
versées  aux  débats  par  les  intimés  eux-mêmes  ; 

Attendu  qu'en  tirant  de  ces  faits  la  conséquence  que  le  nom 
d'Orezza  appliqué  aux  eaux  minérales  exploitées  par  les  parties, 
était  un  nom  de  lieu  de  provenance  et  d'origine,  dépendant  du 
domaine  public,  non  susceptible  d'appropriation  privée  et  pou- 
vant être,  dès  lors,  employé  par  Monplot  comme  par  les  deman- 
deurs en  cassation  pour  désigner  les  eaux  minérales  qu'ils  offrent 
au  public,  à  la  condition  d'éviter  réciproquement  toute  confusion 
entre  l'eau  provenant  de  la  source  qu'ils  exploitent  et  celle  de 
la  source  exploitée  par  leur  concurrent,  l'arrêt  n'a  nullement 
violé  les  dispositions  légales  invoquées  par  le  pourvoi  ; 

Sur  le  deuxième  moyen  pris  de  la  violation  des  articles  1382  et 
J383  du  Code  civil,  1"  et  suivants  de  la  loi  du  23  juin  4857,  7  de 
la  loi  du  20  avril  1810: 

Attendu  que  le  pourvoi  reproche  à  l'arrêt  d'avoir  refusé  d'or- 
donner les  prescriptions  nécessaires  pour  éviter  toute  confusion 
entre  les  deux  sources  ; 

Attendu  que  la  confusion  dont  se  plaignaient  les  demandeurs 
en  cassation  serait  résultée  de  ce  que  Monplot  mettait  l'eau  de  sa 
source  en  vente  sous  le  nom  d'Orezza  ;  que  leur  prétention-était 


~r^^ 


-  260  — 

d'être  propriétaires  exclusifs  de  ce  nom  ;  que  cette  question  de 
propriété  était  Tobjet  du  débat  et  qu'elle  a  été  tranchée  par  Tar- 
rét  attaqué,  contrairement  à  leurs  conclusions  ; 

Attendu  que  le  jugement  de  première  instance  constatait  que 
les  étiquettes  de  Mônplot  différaient  de  celles  des  demandeurs 
en  cassation  ;  que  ceux-ci  ont  conclu  à  la  confirmation  du  juge- 
ment par  adoption  de  motifs  et  qu'ils  n'ont  pas  pris  en  appel  de 
conclusions  tendant  à  d'autres  modifications  que  celles  relatives 
au  nom  d^Orezza  ;  que  la  Cour  d'appel  constate  d'ailleurs  que  Mod* 
plot  indique  expressément  que  l'eau  d'Orezza  qu'il  offre  au  pu* 
blic  provient  de  la  source  Colomba,  de  même  que  celle  exploitée 
pa  les  intimés  est  indiquée  par  eux  comme  provenant  de  la 
source  départementale,  noms  spéciaux  sous  lesquels  l'une  et 
l'autre  sont  connues  dans  le  pays  ;  qu'en  l'état  des  conclusions 
prises  devant  elle  et  en  raison'  des  constatations  ci-dessus  énon- 
cées, la  Cour  d'appel  n'était  pas  tenue,  dans  le  but  d'éviter  une 
confusion  qui  n'était  même  pas  alléguée,  d'ordonner  les  mesu- 
res qui  ne  lui  étaient  même  pas  demandées  ;  que  le  moyen  n'est 
donc  pas  fondé  ; 
'  Reett  . 


Art.  4212. 

{MarcfucM  de  fabrlcfue.  —  Remède*  «ecrete.  -^  €e«* 
«Ion  de  fonds  de  commerce  comprenaiit  des  remè- 
des »ecre(«.  —  Pharmacie  trantunlse  par  IMlntei»- 
médlalre  d'un  non-pliarmacleii.  —  Action  en  nvl- 

\  llté  de  contrat.  —  Ce««lon  de  remédea  «eeret*.  — 
Moyen  nouveau.  —  Clioae  Ju^ée. 

Le  droit  à  la  marque  est  indépendant  de  l'usage  qu*on  en 
peut  faire  ;  ainsi^  celui  qui  a  acquis  la  propriété  dune 
fnarque  peut  en  poursuivre  les  contrefacteurs^  alors  même 
que  les  produits  auxquels  elle  s'applique  seraient  desremè- 
îles  secrets  (i)  (Résolu  par  la  Cour  d'appel). 
.  En  conséquence,  une  cession  de  marque  de  fabrique  ne 
peut  être  déclarée  nulle  comme  s' appliquant  à  des  remèdes 
secrets  et  il  n'y  a  pas  lieu  de  rechercher  si  tel  est  le  carac- 
tère du  produit  sur  lequel  repose  la  marque  (2)  (Id,). 

(1)  Cf.  Cass.  crim,,27  mai  1898,  Choffé  d.  Panchèvre,  Ann.,  98.Î88; 
Paris,  !23  avi:il  1895,  Brigonnet-Naville,  An»:,  98.251  ;  Paris,  23  décem- 
bre 1802,  Luper-Mouchet,  le  Droit,  il  février  1893  et  nombreux  arrêts 
«ités  par  Pouillet,  Afarg.  fab,,  n.  128  6i«. 

(2-3)  Ce  que  soatenait  l'appelant  c'était  que  la  cession  de  lamarqae  était 


-^  261  — 

La  nullité^  pour  cause  illicite  d  un  objet  cédé  dans  un 
contrat  (exploitation  de  remèdes  secrets)  n'entraîne  pas  la 
nullité  des  autres  éléments  de  la  cession  du  fonds  de  corn* 
merce  qui  comprend  notamment  les  marques  de  fabri- 
que (3)  (Id.). 

IV*est  pas  nulle  la  cession  d'une  officine  à  un  non-phar- 
macienySi  elle  est  rétrocédée  à  un  pharmacien  (1)  (Id.). 

(C.  de  Paris,  il  avril  1899  ;  C.  de  cass.,  13  février  1900.  — 
Guinet  et  Cie  c.  Rocher  et  antres.) 

Jugement  rendu  par  le  Tribunal  civil  de  la  Seine  (3»  ch.) 
le  16  juin  1898,  en  ces  termes  : 

Lb Tribunal,  Attendu  que  les  sieurs  Guinet  et  Gie  revendi- 
quant la  propriété  exclusive  des  marques  de  fabrique  ayant  pour 
titre  :  «  Poudre  Rocher  ou  laxatif  Rocher  »  ;  «  Quina  anti-dia- 
bétique Rocher  à  base  de  glycérine  v  ;  «  Pilules  benzoïques 
Rocher  »,  régulièrement  déposées  à  la  date  du  28  février  i896,ont 
fait  procéder,  par  exploits  en  date  des  26,  27,  30  juin  et  !•' juillet 
1896,  sur  les  sieurs  Duquesne,  Rocher,  Michaud  et  Monnier,  à  des' 
saisies-contrefaçons  de  marques, dont  ils  demandent  de  prononcer 
la  validité  avec  confiscation,  dommages  et  intérêts  à  fixer  par 
état,  insertions  et  afHches  ; 

Sur  la  fin  de  non-recevoir  basée  sur  ce  que  les  produits  pha  r- 
maceutiques  dont  s'agit  doivent  être  considérés  comme  des  remèdes 
secrets  qui^  à  ce  titre  y  ne  sauraient  faire  tobjet  d'une  action  en  jus- 
tice : 


intimement  liée  à  la  cession  du  produit  illicite  qu'elle  servait  à  désigner 
et  que  la  nullité  de  la  cession  du  produit  entraînait  la  nullité  de  la  ces- 
sion de  la  marc[ue.  Cf.  Paris,  3  février  1898,  Tartenson  c.  Duflot,  Ann., 
1901.268.  De  nombreux  arrêts  ont  décidé  que  l'exploitation  d'un  remède 
secret  ne   pouvait  donner  ouverture  à  aucune  action  en  justice  (  V .  Paris, 
30  novembre  1876,  pilules  Morisson,  Journ.  Irib,  comm,^  XXVII,  p.  C8  ; 
Trib.  comm.  Seine^  11  juin  1890,  Bricemoret  c.  Gœtz,  la  Loi^  30  juin  ; 
Trib.  comm.  Seine,  20  mai  1889,  Duriez  c.  Delouche,  la  Loi,  6  juin).  En 
tons  cas  les  conventions  relatives  à  un  remède  secret  sont  nulles  (Cass., 
30  décembre  1863,  D.  64.1.61  ;  Cass.,  17  août  1867,  D.  68.1.44  ;  Cass., 
8  mai  1868,  Journ.  Mb.  comm.,  XIX,  n.  6.290;  Paris,  5  février  1889, 
Mercier  c.  Foulon,  la  Loi,  11  mars  ;  Trib.  comm.  Seine,  10  novembre 
1897,  Démarquez  c.  Baboiand  et  Géraudel,  la  Loi,  15  décembre),  d'une 
nullité  d'ordre  public,  qu'il  appartient  au  juge  de  soulever  d'office  (V. 
notamment  Paris,  28  novembre  1868,  La  ville,  Journ.  trib.  comm.,  XVIII, 
p.  465;  Paris,  3  mai  1888,  Dame  de  Rochefort  de  Luçay  c.  Déclat  et 
Lemettais,  la  Loi,  1*'  juin). 

(1)  On  objectait  que  la  cession  d'une  officine  i  un  non-pharmacien,étant 
radicalement  nulle,  n'avait  pu  servir  de  base  à  la  rétrocession  à  un 
pharmacien. 


—  262  — 

Attendu  qu'il  est  admis  en  doctrine  et  en  jurispradence  que  la 
propriété  d*une  marque  de  fabrique  est  indépendante  de  l'usage 
auquel  elle  est  appliquée  et  qu'elle  peut  faire  Tobjet  d*une  re- 
vendication alors  même  qu'elle  s'appliquerait  à  un  remède  se- 
cret ; 

Attendu  que  si  les  produits  sur  lesquels  soiit  appliquées  les 
marques  revendiquées  par  les  sieurs  Guinet  et  Gie  doivent  être 
considérés  comme  des  remèdes  secrets,  comme  n^étant  inscrit 
ni  au  Codex,  ni  au  Bulletin  de  l* Académie  demédecine,  il  ne  sen- 
suit  pas  que  l'action  des  sieurs  Guinet  et  Gie,  ayant  pour  but  la 
revendication  exclusive  d'une  marque  déposée,  doive  être  décla* 
rée  non  recevable  ; 

Sur  la  fin  de  non-recevoir  tirée  de  ce  que  les  sieurs  Guinet  et 
Cie  ne  seraient  pas  propriétaires  de  la  marque  revendiquée^  par  suite 
de  la  nullité  de  la  cession  à  eux  consentie^  la  dite  cession  s'appli- 
quant  à  des  remèdes  secrets^  et,  d'un  autre  côtéy  le  syndicat  de 
créanciers  de  qui  les  sieurs  Guinet  et  Cie  tiennent  leurs  droits 
n'ayant  pu  [^acquérir  valablement  du  sieur  Rocher,  puisque  aucun 
des  membres  de  ce  syndicat  n'était  pourvu  dun  diplôme  de  pharma* 
cieni. 

Attendu  qu'un  arrêt  de  la  Gour  de  Paris,  en  date  du  i*'  avril 
1398,  confirmant  un  Jugement  du  Tribunal  de  commerce  de  la 
Seine  et  passé  en  force  de  chose  jugée,  a  souverainement  recon- 
nu le  droit  de  propriété  des  sieurs  Guinet  et  Gie  ; 

Sur  la  fin  de  non-recevoir  tirée  de  ce  \ique  la  cession  consentie 
aux  sieurs  Guinet  et  Cie  n'aurait  pu  valablement  porter  sur  le  nom 
patronymique  de  Rocher,  les  noms  patronymiques  étant  de  leur  na- 
ture incessibles  : 

Attendu  qu'en  dehors  de  toute  question  d'état,  aucune  dis- 
position de  loi  n'empêche  la  cession  d'un  nom  patronymique  au 
point  de  vue  de  l'usage  industriel  et  commercial  et  comme  élé- 
ment constitutif  d'une  marque  de  fabrique  ; 

Qu'après  avoir  profité  de  la  cession  consentie  par  lui,  le  sieur 
Rocher  est  mal  fondé  à  invoquer  une  prétendue  nullité  résultant 
de  rincessibilité  du  nom  patronymique  comme  élément  consti- 
tutif de  la  marque  déposée  ; 

Au  fond  : 

Attendu  que  l'imitation  de  la  marque  ayant  fait  l'objet  du  dé- 
pôt du  28  février  1896  est  justifiée  ; 

Qu'elle  n'est  pas  d'ailleurs  contestée  ; 

Qu'il  convient  donc  de  faire  droit  aux  conclusions  desdeman 
deurs,  en  restreignant  toutefois  à  cinq  insertions  la  publicité  de- 
mandée par  le  présent  jugement. 

Par  ces  motifs.  Valide  les  saisies-contrefaçons   suséncncées  , 


mM]}m.i\^}iWiV'^mi^ 


—  263  — 

Déclare  Duquesne,  Rocher,  Michaud  et  Monnier,  contrefacteurs 
des  marques  dont  s*agit  ; 

Les  condamne  conjointement  et  solidairement  à  des  domma- 
ges et  intérêts  à  fixer  par  état  et  à  l'insertion  du  présent  juge- 
ment dans  cinq  journaux,  au  choix  de  Guinet  et  Gie  et  aux  frais 
des  défendeurs  ; 

Fixe  à  la  somme  de  100  francs  le  coût  maximum  de  chaque 
insertion  ; 

Ordonne  la  confiscation,au  profit  des  demandeurs,des  produits 
et  marques  saisis  et  déposés  au  greffe  du  tribunal  ; 

Condamne,  sous  la  même  solidarité,  les  défendeurs  aux  dé- 
pens. 

Arrêt  confirma tif  de  la  2*  chambre  de  la  Cour  de  Paris, 
présidée  par  M.  Harel,  sur  les  plaidoiries  de  M«s  Georges 
Maillard  et  Bliegk  pour  les  appelants,  DALLONOEyu.LE  pour 
rintervenant,  Desjardin  pour  rintimée  : 

La  Cour,  Vu  la  connexité,  joint  les  causes  et  statuant  par  un 
seul  et  même  arrêt  sur  l'appel  interjeté  par  Rocher,  Monnier  et 
Michaud  du  jugement  rendu  par  le  Tribunal  civil  delà  Seine  du 
16  juin  1898,  sur  Tappel  interjeté  par  Rocher  des  deux  jugements 
rendus  par  ledit  tribunal  le  28  juillet  1898  et  sur  les  interventions 
de  Delaire  ; 

En  ce  qui  touche  Tappel,  formé  par  Rocher,  des  jugements  des 
16  juin  et  28  juillet  1898  qui  ont  accueilli  la  demande  en  contre- 
façon intentée  parla  Société  Guinet  et  Cie  : 

Considérant  que  la  Société  Guinet  et  Cie  cessionnaire  de  trois 
marques  de  fabrique  Hgiirées  sous  forme  d'étiquettes  portant  les 
mentions  :  «  Poudre  Rocher  ou  Laxatif  Rocher  »,  «Quina  anti-dia- 
bétique Rocher  »,  ^  Pilules  benzolques  Rocher  »,  a  fait  procéder  à 
la  saisie  de  marques  identiques  au  domicile  de  Rocher  ;  que  celte 
Société  Ta  assigné  devant  le  Tribunal  civil  de  la  Seine  pour  le 
faire  déclarer  contrefacteur  et  passible  de  dommages-intérêts  et 
qu'elle  a  obtenu  gain  de  cause  par  deux  jugements  dont  Tappel 
est  soumis  à  la  Cour  ; 

Considérant  qu'avant  d'examiner  les  moyens  invoqués  par  l'ap- 
pelant, il  est  utile  de  rappeler  les  faits  à  la  suite  desquels  la  pro- 
priété de  ces  trois  marques  de  fabrique  a  été  cédée  à  Guinet  et 
Gie; 

Considérant  qu'au  mois  de  février  1889,  Rocher,  pharmacien, 
qui  avait  fait  une  grande  publicité  pour  la  vente  de  ses  spéciali- 
tés se  trouvait  dans  Timpuissance  d'acquitter  un  passif  considé- 
rable ;  que  pour  éviter  sa  faillite  il  sollicita  l'intervention  de  ses 
trois  plus  forts  créanciers,le  comptoir  Lyon-Allemand,  lademoi- 


—  264  — 

selle  Renaudière  et  le  sieur  Piatier  ;  qae  ceux-ci  furent  les  pro 
moteurs  d'un  arrangement  conclu  entr^  Rocher  et  ses  créanciers 
syndiqués,  aux  termes  duquel  il  était  affranchi  de  ses  dettes 
moyennant  Tabandon  de  son  actif,  qui  comprenait  notamment  la 
cession  de  ses  marques  de  fabrique  ; 

Considérant  que,  par  acte  sous  seings  privés  du  29  mai  1896 
enregistré,  le  syndicat  des  créanciers  de  Rocl^er  a  rétrocédé  au 
pharmacien  Guinet  la  propriété  de  ces  marques  et  que  Guinet  en 
a  fait  apport  à  la  société  qu'il  a  constituée  sous  la  raison  sociale 
Guinet  et  Gie  ; 

Considérant  que  la  validité  de  ces  transmissions  successives  a 
été  contestée  par  Rocher  ;  qu'après  la  saisie  pratiquée  à  son  do- 
micile, le  26  juin  1896»  il  a,dès  le  27  août  suivant,  introduit  devant 
le  tribunal  de  commerce  une  instance  en  nullité  de  son  abandon 
d*«ctif,  dirigée  contre  le  comptoir  Lyon- Allemand,  Piatier,  la  de- 
moiselle Renaudière  et  la  Société  Guinet  et  Gie;  qu*il  a  prétenda 
que  Tabandon  de  son  droit  de  propriété  sur  des  marques  de  fa- 
brique avait  été  subordonné  à  des  conditions  qui  ne  s'étaient 
point  réalisées  et  que  ce  droit  n'avait  pas  pu  être  valablement 
transmis  à  Guinet  ; 

Mais  considérant  qu'un  jugement  rendu  parles  juges  consu- 
laires le  19  décembre  1896,  confirmé  le  i*'  avril  1898  par  la 
3*  chambre  de  la  Cour,  a  décidé  que  les  créanciers  de  Rocher 
avaient  agi  dans  la  plénitude  de  leurs  pouvoirs  en  vendant  à  Gui- 
net à  la  date  du  29  mai  1896,  un  actif  comprenant  la  propriété 
.des  dites  marques  ;  qu'il  y  a  chose  jugée  sur  ce  point  ; 

Considérant  que  Rocher  oppose  à  Guinet  et  Gie  que  leur  action 
en  contrefaçon  de  marques  de  fabrique  ne  serait  pas  recevable 
soit  parce  que  ces  marques  s'appliqueraient  à  des  remèdes  secrets 
.et  que  le  caractère  illicite  du  produit  vicierait  la  cession  de  la 
marque  qui  en  serait  inséparable,  soit  parce  que  cette  cession 
avait  été  faite  par  une  convention  traitant  également  de  l'exploi- 
tation de  remèdes  secrets  ou  tout  au  moins  de  l'exploitation  de 
produits  pharmaceutiques  par  des  personnes  non  pourvues  du 
diplôme  exigé  par  la  loi  ; 

Considérant  que  ces  diverses  fins  de  non-recevoir  reposent  sur 
un  moyen  unique  consistant  à  soutenir  que  la  propriété  d'une 
marque  de  fabrique  subit  le  sort  de  l'objet  qu'elle  sert  à  désigner 
et  qu'elle  participe  à  tous  ses  vices  de  nullité  ; 

Considérant  que  cette  thèse  est  erronée  ;  qu'il  est  de  principe 
que  la  marque  constitue  une  propriété  distincte  de  l'objet  sur 
lequel  elle  peut  être  apposée  et  susceptible  d'être  cédée  séparé- 
ment ;  que  le  droit  à  la  marque  est  indépendant  de  l'usage  qu'on 
en  peut  faire  et  des  produits  auxquels  elle  s'applique  ;  qu'ainsi, 
celui  qui  a  acquis  la  propriété  d'une  marque  peut  en  poursuivre 


.'••Pfc!»*:^*»' 


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—  265  — 


les  contrefacteurs,  alors  même  que  ces  produits  seraient  des  re- 
mèdes secrets  ;  qu'il  suit  de  là  que  la  cession  des  marques  de  fa- 
brique faite  à  l'intimée  ne  serait  pas  nulle  parce  qu'elle  s'appli- 
querait à  des  remèdes  secrets  et  qu'il  n'y  a  point  à  rechercher  si 
tel  est  le  caractère  de  la  Poudre  laxative,  des  Pilules  benzoîques 
et  du  Quina  anti-diabétique  ;  que  pour  justifier  la  poursuite  en 
contrefaçon  de  marques,  il  suffît  de  constater  l'existence  du  droit 
de  propriété  de  la  Société  Guinet.et  Gie  sur  ces  marques  et  leur 
imitation  sur  les  étiquettes  saisies,  laquelle  est  certaine  et  non 
déniée  ; 

Considérant  que  l'actif  abandonné  par  Rocher  au  profit  de  ses 
créanciers  ne  se  réduisait  pas  seulement  à  Texploitation  de  pro- 
duits pharmaceutiques  ;  qu'il  s'étendait  à  tous  ses  biens,  son  mo- 
bilier, son  matériel,  ses  marchandises,  ses  créances,  un  immeu- 
ble sis  au  Parc  Saint-Maur,  le  droit  aux  baux  des  magasins  où  il 
exerçait  son  industrie  ainsi  qu'à  ses  marques  de  fabrique  ; 

Considérant  que  la  nullité  pour  .cause  illicite  d'un  des  objets 
cédés  n'entraîne  pas  la  nullité  de  la  cession  des  marques  de  fabri- 
que qui  est  licite  et  qu'il  est  inadmissible  que  Rocher  puisse  se 
pré?aloir  du  caractère  illicite  d'un  des  objets  compris  dans  l'aban- 
don de  son  actif  pour  le  reprendre  tout  entier  sans  restituer  le 
prix  qu'il  en  a  reçu  sous  forme  de  paiement  de  ses  dettes  ; 

Considérant  que  les  mêmes  raisons  conduisent  à  écarter  la  fin 
de  non-recevoir  tirée  de  ce  que  l'acte  d'abandon  d'actif  implique- 
rait la  cession,  par  Rocher  à  ses  créanciers  non  pharmaciens,  du 
droit  d'exploiter  des  produits  pharmaceutiques  ; 

Considérant,  en  outre,  que  si  la  loi  interdit  la  préparation  des 
médicaments  à  toute  personne  qui  n'est  pas  munie  d'un  diplôme 
de  pharmacien,  elle  n'empêche  pas  qu'un  non-diplômé  de?ienne 
propriétaire  d'une  officine  soit  par  héritage,  soit  autrement  ; 

Que  sans  doute  il  ne  peut  pas  utiliser  par  lui-môme  son  droit 
de  propriété,  mais  qu'il  peut  le  transmettre  à  un  tiers  diplômé, 
sans  que  l'inaptitude  professionnelle  du  cédant  ait  pour  effet 
d'entraîner  la  nullité  de  la  cession  ; 

Considérant  enfin  que  Guinet  et  Cie  ne  revendiquent  pas  l'usage 
du  nom  patronymique  de  Rocher,  mais  seulement  la  propriété 
des  trois  marques  de  fabrique  sur  lesquelles  le  nom  commercial 
de  Rocher  est  ajouté  à  certaines  inscriptions  et  écrit  d'une  façon 
particulière  ; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  jugements  des  16  juin  et 
28  juillet  1898  en  tant  qu'ils  ont  trait  à  Rocher  ; 

En  ce  qui  touche  au  contraire  l'appel  interjeté  par  Michaud  et 
Monnier  du  premier  de  ces  jugements  : 

Considérant  que  la  demandé  formée  contre  eux  par  Guinet 
et  Cie  est  basée  sur  un  procès-verbal  de  saisie-description  de 


—  266  — 

marques  contrefaites  opérée  en  leur  domicile  à  la  date    da 
i*' juillet  1896  par  l'huissier  Thiellement  ; 

Considérant  que  cet  officier  ministériel  a  constaté  sarleslifres 
de  Michaud  et  Monnier  des  mentions  établissant  que  ces  impri- 
meurs avaient  accepté,  les  25  janvier  et  30  mai  1896^  d^exécuter 
des  commandes  d'étiquettes  reproduisant  les  marques  litigieu* 
ses  ; 

Sur  la  première  commande  : 

Considérant  quUl  n*est  point  prouvé  que  les  appelants  aient 
fabriqué  et  livré  de  ces  étiquettes  antérieurement  au  dépdt  des 
marques  qui  n*a  eu  lieu  que  le  28  février  1896  ;  que  d'ailleurs 
les  faits  de  la  cause  établissent  la  bonne  foi  de  Michaud  et  Mon- 
nier qui  ont  légitimement  imprimé  des  étiquettes  semblables 
pendant  plusieurs  années,  sur  Tordre  de  Rocher  et  qui  ignoraient 
au  moment  où  ils  ont  reçu  la  commande  du  25  janvier,  que 
Rocher  n'avait  plus  le  droit  de  se  servir  de  ses  marques  ; 

Sur  la  seconde  commande  : 

Considérant  qu'il  ressort  des  documents  versés  au  débat  qu'au 
jour  de  la  saisie-description  du  1*'  juillet,  les  étiquettes  ayant 
fait  l'objet  de  la  commande  du  30  mai  1896  n'avaient  point  en- 
core été  tirées  ;  que  le  travail  a  été  interrompu  et  que  le  tirage 
n'a  pas  eu  lieu  ;  qu'il  n'y  a  donc  eu  qu'un  simple  commencement 
d'exécution  insuffisant  pour  caractériser  la  contrefaçon  ; 

En  ce  qui  touche  l'appel  de  Rocher  contre  le  jugement  du 
28  juillet  1898  qui  a  repoussé  l'action  en  contrefaçon  qu'il  avait 
engagée  contre  Guinet  et  Gie  et  la  Société  Adrian  et  Cie  : 

Considérant  que,  le  26  octobre  1895,  Rocher  a  fait  procéder  au 
siège  de  ces  deux  sociétés  à  la  saisie-contrefaçon  d'étiquettes 
portant  la  marque  de  fabrique  Poudre  Rocher  ou  Laxatif  Rocher  ; 
qu'il  a  formé  contre  elles  une  demande  en  contrefaçon  de  cette 
marque  dont  il  revendique  la  propriété  ;  mais  considérant  qu'il 
vient  d'être  établi  que  cette  propriété  appartenait  à  Guînet  et 
Gie  ;  que  c'est  donc  à  bon  droit  que  le  jugement  attaqué  a  dé- 
bouté Rocher  de  sa  demande  ; 

En  ce  qui  touche  les  interventions  de  Delaire  : 
onsidérant  que,  depuis  que  les  trois  jugements  frappés  d'appel 
ont  été  rendus,  Delaire  a  acheté  une  créance  due  par  Rocher  à 
un  sieur  Badei,  dans  le  but  manifeste  de  former  devant  la  Cour 
une  intervention  concertée  avec  l'appelant  dont  Delaire  est  l'em- 
ployé  ; 

Considérant  que  les  conclusions  de  l'intervenant  tendent  à  faire 
juger  que  des  avantages  particuliers  interdits  par  les  articles  597 
et  598  du  Code  de  commerce  auraient  été  consentis  par  Rocher 
à  quelques-uns  de  ses  créanciers,  au  détriment  de  la  masse  de 
ceux  qui  avaient  souscrit  à  un  concordat  amiable  ; 


ttffnmp^^m  1 ,1,  9-  W.WM ;  "  MJM  MW  *) 


—  267  - 

Considérant  qa*il  n'est  point  permis  à  an  intervenant  de  modi* 
tier  Le  débat  et  de  demander  à  la  Cour  'ie  juger  qae  oertains 
créanciers  ont  reça  des  avantages  prohibés  alors  que  ces  créan- 
ciers ne  sont  point  en  cause  ;  que  T intervention  de  Delaire  n'est 
pas  recevable  ; 

Par  ces  motifs,  Reçoit  Michaud  et  Monnier  appelants  du  juge- 
ment du  16  juin  1898,  et  faisant  droit  sur  leur  appel,  les  décharge 
des  dispositions  et  condamnations  qui  leur  font  grief;  infirme  h 
leur  égard  ledit  jugement  ; 

Et  statuant  à  nouveau,  déclare  la  Société  Guinet  et  Gie  mal 
fondés  dans  leurs  demandes,  fins  et  conclusions  contre  Michaud 
et  Monnier  ; 

Les  en  déboute  ; 

Ordonne  à  leur  profit  la  restitution  de  Tamen  depar  eux  con- 
signée ; 

Et  statuant  sur  les  appels  de  Rocher  contre  le  jugement  du 
16  juin  et  contre  les  deux  jugements  du  28  juillet  1898  ; 

Déclare  Rocher  mal  fondédans  ses  moyens,  fins  et  conclusions 
relativement  à  ses  trois  appels  ; 

L*en  déboute  ; 

Confirme  à  son  égard  lesdits  jugements; 

Ordonne  qu'ils  sortiront  leur  plein  et  entier  effet  ; 

Condamne  Rocher  à  l'amende  de  ses  appels  ; 

Lui  donne  acte  de  ce  qu'il  s'en  rapporte  à  justice  sur  le  mérite 
de  l'intervention  de  Delaire  ; 

Déclare  cette  intervention  non  recevable  ; 

Condamne  Delaire  aux  dépens  de  son  intervention  ; 

Dit  que  les  dépens,  exposés  tant  en  première  instance  qu'en 
appel  du  jugement  du  16  juin  1898,  seront  supportés  3/4  par 
Rocher,  i/i  par  la  Société  Guinet  et  Gie  qui  succombe  au  regard 
de  Michaud  et  Monnier  ; 

Condamne  Rocher  aux  dépens  d'appel  des  deux  autres  affaires 
jointes  et  au  coût  du  présent  arrêt. 

Le  pourvoi  formé  contre  cet  arrêt  a  été  rejeté  par  la  Cour 
de  cassation  (ch.  des  Requêtes),  le  13  février  1900,  en  ces 
termes  : 

La  Cour,  Sur  les  trois  moyens  réunis  et  tirés  de  la  violation  et 
fausse  application  des  articles  7  de  la  loi  du  20  avril  1810,  597  et 
598  du  Code  de  commerce  et.l6  de  la  loi  du  4  mars  1889, 1351  du 
Code  civil,  et  de  l'autorité  de  la  chose  jugée,  466  du  Gode  de  pro- 
cédure civile,  et  des  principes  de  l'intervention  en  cause  d'appel  ; 

Attendu  qu'il  n'est  pas  exact  de  prétendre  que  l'arrêt  attaqué 
a  repoussé  sans  donner  aucune  espèce  de  motifs  à  l'appui  de  sa 


—  268  — 

décision  les  conclusions  des  demandeurs  tendant  à  la  nullité  d'un 
abandon  amiable  d'actif  consenti  par  Tun  d'eux  à  ses  créancie  rs 
dans  des  conditions  illégales  ;  que  le  dit  arrêt  s*est  attaché  au 
contraire  à  rappeler  avec  soin  toutes  les  circonstances  dans  les- 
quelles ce  dernier,  le  sieur  Rocher,  pour  éviter  sa  faillite,  solli- 
cita l'intervention  de  ses  trois  plus  forts  créanciers  et  comment, 
à  la  suite  de  conventions  intervenues  à  cet  effet  entre  ces  der- 
niers et  leur  débiteur,  celui-ci  avait  vainement  tenté  de  faire  an- 
nuler par  justice  les  dites  conventions  ; 

Attendu  qu'en  décidant  qu'il  y  avait,  à  cet  égard,  chose  jugée, 
le  dit  arrêt  a  pleinement  motivé  le  rejet  des  conclusions  du  sieur 
Rocher  ; 

Attendu,  d'autre  part,  qu'en  repoussant  ces  mômes  conclusions 
par  l'exception  de  chose  jugée,  Tarrêt  attaqué  n'a  ni  méconnu, 
ni  faussement  appliqué  les  dispositions  de  l'article  1351  du  Gode 
civil,  ni  les  principes  qu'il  consacre,  Tobjet  de  la  demande  étant 
resté  le  même  encore  que  se  fondant  sur  de  nouveaux  moyens  ; 

Attendu,  en  ce  qui  concerne  les  conclusions  du  sieur  Delaire, 
intervenant  en  appel,  qu'il  résulte  des  déclarations  dudit  arrêt 
que  depuis  que  les  trois  jugements  frappés  d'appel  ont  été  ren- 
dus, ce  demandeur  a  acheté  une  créance  dont  le  montant  était 
dû  par  le  sieur  Rocher  à  un  sieur  Badel,  dans  le  but  manifeste 
de  former  devant  la  Cour  une  intervention  concertée  avec  le  dit 
Rocher  dont  le  sieur  Delaire  est  l'employé,  qu'il  n'était  pas  d'ail- 
leurs permis  à  cet  intervenant  de  modifier  le  débat  en  l'absence 
des  créanciers  intéressés  ; 

Qu'en  statuant  ainsi,  ledit  arrêt  a  satisfait  aux  prescriptions  de 
l'article  7  de  la  loi  du  20  avril  1820  et  n*a  point  violé  l'article  466 
du  Code  de  procédure  civile  ; 

Par  CBS  motifs.  Rejette. 

Ch.  des  req.  —  M.  Tanon,  président.  —  M.  Loubers,  con- 
seiller-rapporteur. —  M.  MÉRiLLON,  avocat  général.  — 
M*  Bernier,  avocat. 


Art,  4213. 

IVom  patronymique.  —  Ck^ntrat.—  Retnedea  seerete. 
-^  Marciae  de  tebplc|ue.  —  Vin  Duflot. 

Ne  peut  revendiquer  à  titre  de  marque  de  fabrique  une 
dénomination  comprenant  un  nom  patronymique^  telle  que 
Vin  Duflot,  le  tiers  qui  fonde  son  droit  sur  une  convention 


iiiimii  p.,..  i.iim  v[L«^}-f  Vf  w. 


—  269  — 

par  laquelle  Pusage  de  ce  nom  lui  a  été  cédé,  si  la  conveth 
lion  a  trait  à  un  remède  secret^  car  une  telle  convention  est 
nulle  (1). 

Est  un  remède  secret  toute  préparation  ayant  un  carac» 
(ère  médicinal^  à  moins  qu'elle  ne  figure  au  Codex  ou  qu'elle 
n'ait  été  acquise  ou  publiée  par  le  Gouvernement,  ou  qu'elle 
n*ait  été  insérée  dans  le  Bulletin  de  l'Académie  de  méde- 
cine (2). 

(C.  de  Paris,  3  février  1896.  —  Tartenson  c.  Daflot  et  Vieillard.) 

La  3"  chambre  du  Tribunal  civil  de  la  Seine  a,  le  28  dé- 
ceipbre  1895,  rendu  le  jugement  suivant: 

Le  Tribunal,  Âttenda  que  Tartenson,  qui  justifie  avoir  déposé 
régulièrement  le  16  juillet  1881,  à  titre  de  marque  de  fabrique,  la 
dénomination  Vin  Duflot  pour  un  vin  antirhumatismal  dont  il 
se  dit  l'inventeur,  revendique  le  droit  exclusif  d'exploitation  et 
reproche  à  Duflot  d*y  avoir  porté  atteinte  en  déposant  lui-même, 
postérieurement,  une  marque  identique; 

Qu'il  impute  à  Vieillard,  successeur  de  Duflot,  la  même  usur- 
pation frauduleuse  et  réclame,  à  l'encontre  des  deux  défendeurs, 
outre  Taunulation  du  dépôt  effectué  par  eux,  le  17  février  1894, 
des  dommages-intérêts  et  la  publication  du  jugement  ; 

Attendu  que,  de  leur  côté.  Vieillard  et  Duflot  ont  assigné  aux 
mêmes  fins  Tartenson  et  Grand,  en  demandant  tant  l'annula- 
tion du  dépôt  du  i 6  juillet  188i,  avec  ses  conséquences  de  droite 
que  celle  des  conventions  intervenues  entre  Tartenson  et  Duflot 
le  25  novembre  1880  ; 

Attendu  que  Tartenson  se  prétend  en  droit  de  conserver  le 
bénéfice  de  la  marque  dont  s'agit,  en  soutenant  que  toute  mar- 
que est  indépendante  du  produit  auquel  elle  s'applique  et  que 
la  loi  de  1857  en  garantit  la  propriété  sous  la  seule  condition  du 

(1)  Pour  la  nullité  des  conventions  relatives  à  des  remèdes  secrets, 
V.  Taffaire  Guinet  c.  Rocher,  suprà^  p.  2C0. 

Ici  le  déposant  de  la  marque  faisait  le  même  raisonnement  qai  a 
réussi  au  demandeur  dans  l'affaire  Guinet  :  il  soutenait  que  la  marque 
était  indépendante  du  remède  secret  et  que  le  contrat,  nul  au  point  de 
vue  du  remède  secret,  était  valable  pour  la  transmission  de  la  marque. 
La  4«  chambre  de  la  Cour  n*a  pas  voulu  faire  cette  distinction  et  a  con- 
sidéré le  contrat  comme  nul  pour  le  tout. 

'  (2)  Cela  résulte  formellement  de  l'article  B2  de  la  loi  du  2*1  germinal 
an  XI,  de  la  loi  du  25  prairial  an  XIII,  des  décrets  des  18  août  1810  et 
3  mai  1850 (voir  Dalloz,  Jur.gén.y  V*  Médecine,  n.  198  et  s.  ;  Trib.corr. 
Charleville,  0  mai  1888,  D.  90.3.24;  Trib.  comra.  Seine,  20  mai  1889, 
Duriez,  la  Loi,  6  juin;  Trib.  comm.  Seine,  11  juin  1890,  Bricemoret,  la 
Loi,  80  juin). 


7r™"r  ~   ■   •^' «JPiivvj  ifni^v«F 


—  270  - 

dépôt,  sans  distinguer  si  le  déposant  est  ou  non  autorisé  à  met- 
tre  en  vente  les  objets  auxquels  elle  se  réfère; 

Mais  attendu  que  la  dénomination  Vin  Du/lot  n*est  point 
une  appellation  de  fantaisie  ;  que^d'autre  pari,8on  emploi  récent 
ne  permet  pas  de  la  considérer  comme  une  désignation  néces- 
saire et  consacrée  par  Tusage  ;  • 

Attendu  que  Duflot  est  donc  en  principe  fondé  à  s'opposer  à  ce 
que  son  nom  figure  sur  les  produits  mis  en  vente  par  Tartenson, 
même  après  en  avoir  voulu  ou  toléré  Tusage  pendant  de  longues 
années,  le. nom  constituant  une  propriété  absolue  qui  ne  p^at 
être  prescrite  par  autrui  ; 

"'  Attendu,  il  est  vrai,  que  le  demandeur  se  prétend  autorisé  à 
l'appropriation  qu'il  en  a  faite  par  le  traité  antérieur  entre  lui 
et  Duflot  à  la  date  du  25  novembre  1880  ; 

Mais  attendu  que  la  dite  convention,  sans  qu'il  y  ait  lieu  de 
distinguer  entre  ses  stipulations  principales  et  ses  clauses  acces- 
soires, a  pour  objet  la  fabrication  et  la  vente  d'un  produit  phar- 
maceutique dont  la  composition  ne  figure  pas  au  Codex,  c'esl-à^ 
dire  d'un  remède  secret  prohibé  par  la  loi  du  21  germinal  an  XI  ; 

Que  par  suite,  eUe  est  nulle  comme  ayant  une  cause  illicite 
et  que  les  parties  sont  irrecevables  à  en  poursuivre  l'exécution  en 
justice; 

Attendu  que  Tartenson  a  paru  s'incliner  devant  cet  obstacle 
juridique  en  déclarant,  dans  ses  conclusions  signifiées  le  4  dé- 
cembre 1894,  qu'en  présence  de  Texception  de  droit  soulevée  par 
Duflot  pour  se  soustraire  à  l'exécution  d'engagements  librement 
consentis,  il  lui  laissait  présentement  toute  liberté  de  fabriquer 
un  vin  médical  et  de  l'annoncer  comme  fabriqué  par  lui  Duflot; 
qu'enfin  il  a  conformé  sa  conduite  à  cette  déclaration  en  dépo- 
sant comme  marque  nouvelle  la  dénomination  Vin  Tartenson^ 
encore  appliquée  à  une  préparation  de  même  nature  ; 

Attendu  que  pour  les  motifs  qui  militent  contre  la  prétention 
de  Tartenson,  il  y  a  lieu  d'admettre  au  contraire  celle  de  Duflot 
et  Vieillard  sauf  en  ce  qui  concerne  les  dommages-intérêts  ;  que 
ceux-ci  ne  justifiant  d'aucun  préjudice  appréciable,  la  condam- 
nation aux  dépens  constituera  une  réparation  suffisante  ; 

Par  gbs  motifs,  Déclare  nuls  tous  dépôts  de  marque  de  fabri- 
que elTectués  par  Tartenson,  sur  lesquels  le  nom  de  Duflot  se 
trouverait  apposé  ;  fait  défense  à  Tartenson  et  à  Grand  de  faire 
usage  à  l'avenir  de  la  dénomination  Vin  Duflot  sur  leurs  étiquet- 
tes et  prospectus. 

Ce  jugement  a  été  confirmé  par  la  4*  chambre  de  la  Cour 
de  Paris,  le  3  février  1898,  en  ces  termes  : 


—  271  — 

La  GooRyGonsidérant  qu'aux  termes  d'une  convention  du  25  no- 
vembre 4880,  qui  sera  enregistrée  en  même  temps  que  le  présent 
arrêt,  Duflot  devait  s'occuper  de  la  vente  d'un  produit  pharma- 
ceutique dont  Tartenson  se  disait  l'inventeur  et  que  celui-ci 
croyait  propre  à  la  guérison  des  afTections  arthritiques  ;  que, 
dans  la  commune  intention  des  parties,  cette  préparation  avait 
un  caractère  médicinal  ;  qu^elle  ne  figure  pas  au  Godex  ;  qn^elle 
n^a  été  ni  acquise  ni  publiée  par  le  gouvernement  ;  qu'elle  n'a 
pas  été  non  plus  insérée  au  Bulletin  de  P Académie  de  médecine^ 
en  conformité  du  décret  du  3  mai  1850  ;  qu'elle  constitue  donc 
un  remède  secret  ; 

Gonsidérant  que  la  convention  susvisée  stipule  formellement 
que  la  formule  dénommée  «  restera  secrète  entre  les  parties  et  que 
Duflot  ne  pourra  la  divulguer  sans  Tautorisation  écrite  de  Tar- 
tenson »  ;  qu'il  importe  peu  que  les  parties  aient  inséré  dans  diffé- 
rents journaux,  à  titre  de  réclames,  des  articles  qui  contenaient 
une  formule  prétendue  de  cette  préparation,  formule  différente, 
du  reste,  de  celle  indiquée  dans  la  convention  ;  que  celle-ci  n'en 
conserve  pas  moins  son  caractère  de  remède  secret  ;  que  la  con- 
vention du  25  novembre  1880,  qui  est  relative  à  l'exploitation 
dudit  remède,  est,  par  suite,  nulle  comme  ayant  une  cause  illi- 
cite; 

Que  Duflot,  antérieurement  à  ladite  convention,  n'a  jamais 
donné  à  Tartenson  le  droit  d'incorporer  son  nom  dans  une  mar« 
que  de  fabrique  ;  que  c'est  dans  cette  convention  seulement  que 
se  trouve  pour  Tartenson  la  source  du  droit  de  faire  usage  du 
Aom  de  Duflot  ;  mais  que  ladite  convention  étant  nulle  ne  peut 
produire  aucun  effet  ;  que  la  demande  de  Tartenson  manqué  donc 
de  base  légale  ; 

Adoptant,  au  surplus,  les  motifs  des  premiers  juges  en  ce  qu'ils 
ne  sont  pas  contraires  &  ceux  qui  précèdent  ; 

Par  ces  motifs,  Gonflrme.., 

4«  eh.  de  la  Cour.  —  M.  Dupont,  président.  —  M.  Mé- 
RiLLON,  avocat  général.  —  M«»  Cadsel  et  Flogny,  avocats. 


Art.   4214. 

Marcfiies  de  ftibriqae.  ->  Dénomliiatloiifi.  —  Produits 
pharmaeeutlques.—  Antlpyrlne.—  Marque»  étran- 
Sèree. 

Si  nul  produit  pharmaceutique  ne  peut  être  breveté,  la 


—  272  - 

fabrication  d'un  produit  de  même  nature  peut  faire^  au 
contraire f  l'objet  d'un  droit  privatif  et  son  titre  seul  être 
déposé  utilement  (1). 

Mais  la  dénomination  choisie  pour  désigner  le  produit 
pharmaceutique  y  à  la  différence  de  tout  autre  produit^  doit 
être  une  dénomination  de  fantaisie  et  non  pas  une  marque 
usuelle  et  nécessaire^  capable  de  révéler,  par  son  seul 
énoncé,  soit  la  nature  particulière,  soit  la  vertu  propre  et 
médicale  du  produit  déposé  (2). 

La  dénomination  Antipyrine  ne  peut  constituer  une  mar- 
que de  fabrique  parce  qu'elle  est  un  simple  dérivé  de  Vadr 
yec/f/"  €  antipyrétique  »,  usité  depuis  près  d'un  siècle  pour 
désigner  le  caractère  des  substances  fébrifuges,  qu'elle  a  été 
choisie  par  l'inventeur  du  produit  pour  remplacer,  dans 
les  besoins  de  la  pratique,  le  nom  purement  scientifique  de 
€  ditnéthyloxyquinizine  *,qu'elle  est  entrée, d'emblée,dans  le 
vocabulaire  des  médecins  et  des  pharmaciens  et  a  été  uni- 
versellement adoptée  par  les  malades  même  les  moins  in- 
tellectuels  (S). 

Une  société  française,  cessionnaire  du  droit  de  fabriquer 
un  produit  inventé  par  un  Allemand,  a  le  droit,  de  par  la 
loi  du  a  juin  1887,  de  faire  protéger  en  France  la  marque 
affectée  à  ce  produit,  sans  qu'il  y  ait  à  examiner  si  cette 
marque  est  protégée  ou  non  en  Allemagne  (Résolu  par  le 
jugement  infirmé)  (4). 

(i)  Ce  que .  vent  dire  la  Cour  c'est  qoe  Tinventear  d'un  prodmt,  «Til 
ne  peut  s'en  réserver  le  monopole  par  un  brevet,  peut,  tout  an  moins, 
s'assurer  une  marque  pour  désigner  le  produit  préparé  par  loi-même  ou 
par  ses  ayants  droit  ;  cette  marque  peut  être  une  dénomination,  mais  à 
la  condition  que  cette  dénomination  né  soit  pas  la  désignation  usuelle 
et  nécessaire  du  produit. 

(2-3)  Cf.  Paris,  8  février  1898,  Chloralose,  Ann.,  08.216  ;  Paris,  10  mars 
1898,  Salol,  Ann,,  98.221.  En  revanche  ont  été  protégées  pour  des  pro- 
duits pharmaceutiques  les  dénominations  Exalgine  (Paris,  28  avril  1895, 
Ann,,  98.2M),  Giycero-Kola  (Grenoble,  31  janvier  1897,  A nn.,  99.341)  et 
toutes  celles  citées  par  Pouillet,  Marq,  fab.^  n»  68  6û. 

(4)  Le  jugement  a  été  infirmé,  au  fond,  par  la  Cour,  mais  la  Cour  n'a 
pas  eu  à  statuer  sur  ce  point  :  la  décision  des  premiers  juges  conserve 
donc,  dans  cette  partie,  sa  valeur  théorique. 

L'étranger  qui  a  son  établissement  en  France  jouit  pour  les  prodoits 
de  cet  établissement  de  la  pleine  protection,  aux  termes  de  Partide  5 
de  la  loi  du  23  juin  1857,  sans  aucune  condition  de  réciprocité  ;  la  so- 
ciété française  qui  exploite,  dans  un  établissement  français,  une  marque, 
même  en  vertu  d'un  contrat  avec  un  étranger,  ne  semble  pas  avoir 
moins  de  droits. 

Le  jugement  parait,  du  reste,   considérer  que  même  l'étranger,  aux 


—  273  — 

(Trib.  ciY.  Seine,  26  juillet  18d8  ;  G.  de  Paris,  4  mai  1900.  —  Chambre 
syndicale  des  pharmaciens  da  département  de  la  Seine  c.  Cie  pari- 
sienne des  couleurs  d'Aniline.) 

La  3*  chambre  du  Tribunal  de  la  Seine,  sous  la  prés>- 
dence  de  M.  LEFEBVRE-DEyAnx,avait,le  26  juillet  1898;rendu 
le  jugement  suivant  : 

Le  Tribdnal,  Attendu  que  RiethS)  agissant  tant  en  son  nom 
personnel  qu'en  qualité  de  président  de  la  Chambre  syndicale 
des  pharmaciens  du  département  de  la  Seine,  a  introduit  contre 
la  Compagnie  parisienne  de  couleurs  d'Aniline,  le  26  janvier 
1897,  une  action  ayant  pour  but  de  faire  décider  par  le  tribunal 
que  la  Compagnie  de  couleurs  d'Aniline  est  sans  droit  pour  reven- 
diquer la  propriété  exclusive  de  la  dénomination  Antipyrine  et 
de  faire  prononcer  la  nullité  de  la  marque  déposée  par  elle  le 
iS  février  1888; 

Attendu  que  la  dénomination  donnée  à  un  produit  pharma- 
ceutique par  Tinventeur  ou  premier  préparateur  est  susceptible 
d  appropriation  lorsque  cette  dénomination  n'est  pas  devenue  le 
moyen  usuel  et  nécessaire  pour  faire  comprendre  la  nature  du 
produit  et  n'est  pas  tombée  ainsi  dans  le  domaine  public  ; 

Que  les  dispositions  de  la  loi  des  23-27  juin  1857  protègent 
aussi  bien  les  produits  pharmaceutiques  que  les  autres  produits 
fabriqués  : 

Attendu  que  la  dénomination  Antipyrine  adoptée  par  le  doc- 
teur Knorr  en  1884  pour  désigner  un  produit  appelé  d'abord  par 
lui  Dimethyiozyquinizine,  au  cours  de  travaux  ayant  pour  but 
de  faire  artificiellement  de  la  quinine,  est  un  nom  arbitrairement 
choisi  par  l'inventeur  en  vue  de  s'en  assurer  l'usage  exclusif  ; 
qu'il  présente  le  caractère  d'originalité  exigé  par  la  loi  de  1857  ; 

Que  si  i'étymologie  du  nom  rappelle  une  des  propriétés  thé- 
rapeutiques attribuées,  à  l'origine,  au  produit,  il  n'est  pas  pos- 
sible de  dire  que  ce  soit  un  nom  empruntée  la  substance  faisant 
1  élément  principal  et  actif  du  remède  ; 

Que  la  dénomination  Antipyrine  est  si  peu  un  terme  générique 
nécessaire  à  la  désignation  du  produit  la  Diméthyioxiquinizine, 
qu'il  en  existe  une  autre  «  Analgésîne  »  donnée  en  1897  pour  indi- 
quer le  même  produit  et  que  ce  sont  précisément  les  propriétés 
analgésiques  du  médicament  qui  en  font  le  succès  ; 

termes  de  Tarticle  6,  c'est-à-dire  sous  condition  de  réciprocité  pour  les 
produits  de  ses  établissements  situés  à  l'étranger,  a  droit  à  la  protec- 
tion sans  avoir  à  justifier  que  la  marque  est  protégée  dans  le  pays  d'ori- 
gine (V.  en  sens  contraire,  Pouillet,  îdarq,  fab,^  n.  333  bis^  et  s.,  avec 
jurisp.  citée  et  Trib.  civ.  Seine,  20  mars  1897,  Hugo  Schneider  c.  Bois. 

son,  Ann,j  98.5).  G.  M. 

18 


^r^^^- 


—  274  — 

Que  la  dénomination  Antipyrine  doit  être  rangée  dans  la  catë* 
gorie  des  noms  de  fantaisie  pouvant  constituer  des  marques  de 
fabrique  ; 

Qu'à  l'appui  de  sa  demande  Riethe  soutient  ensuite  que  la 
marque  revendiquée  serait  dans  le  domaine  public  ; 

Mais  attendu  que  rien  ne  prouve  que  le  docteur  Knorr  ou  ses 
cessionnaires  aient  renoncé  à  leurs  droits,  qu'ils  aient  abandonné 
au  domaine  public  une  désignation  prise  par  eux  dans  leur  ex- 
clusif intérêt  ; 

Que  les  documents  du  procès  établissent,  au  contraire,  que, 
dès  le  H  février  1887,  la  Compagnie  parisienne  de  couleurs 
d'Aniline  a,  avec  Tassentiment  de  Knorr  lui-même,  qui  l'atteste 
pris  un  brevet  pour  le  procédé  de  production  des  Oxypirazols 
connus  dans  le  commerce  sous  le  nom  (T Antipyrine  ; 

Que  Tannée  suivante,  le  18  février^  elle  en  a  pris  un  nouveau 
complétant  et  perfectionnant  le  premier,  et  que,  le  même  jour, 
elle  a  déposé  comme  marque  de  fabrique  la  dénomination  Anti- 
pyrine ; 

Que  le  certificat  de  dépôt  énonce  :  «  la  marque  consiste  dans 
la  dénomination  Antipyrine  et  constitue  la  marque  de  fabrique 
de  la  société  »  ; 

Attendu  que,  cette  dénomination  étant  bien  l'élément  essen- 
tiel de  la  marque  déposée,  ainsi  que  l'explique  la  description 
ainsi  conçue  :  «  La  marque  est  caractérisée  par  la  dénomination 
Antipyrine  que  nous  donnons  à  un  produit  fébrifuge,  antisep- 
tique et  pouvant  avoir  encore  d'autres  applications  thérapeuti- 
ques, de  notre  fabrication  »,  on  doit  en  déduire  que  le  dépdt  fait 
en  1885,  suffisamment  précis  dans  ses  termes,  protégeait  à  cette 
date  la  dénomination  Antipyrine  ; 

Qu'il  est  donc  à  tort  allégué  que  le  mot  Antipyrine  serait  de- 
venu une  dénomination  du  domaine  public,  par  suite  de  Tinac- 
tion  prolongée  de  la  compagnie  défenderesse  ; 

Attendu,  quant  à  la  régularité  du  dépôt,  que  le  demandeur 
prétend  que  la  compagnie  défenderesse,  cessionnaire  du  droit 
d'exploiter  le  produitinventé  parle  docteur  Knorr,ne pouvait  avoir 
plus  de  droits  en  France  que  celui-ci  et  la  maison  d'Hoescbst- 
sur-le-Mcin  n'en  avaient  dans  leur  propre  pays,  ne  saurait  vala- 
blement revendiquer  la  dénomination  Antipynne  comme  marque 
de  fabrique  ;  qu'il  expose  qu'au  moment  où  cette  dénomination 
a  été  employée  pour  la  première  fois^  née  sous  le  régime  de  la 
loi  d'Empire  du  30  novembre  1874,  elle  a  suivi  le  sort  de  toute 
marque  composée  exclusivement  de  lettres,  chiffres  ou  mots, 
qui,  aux  termes  de  la  loi,  n'était  pas  protégée  ; 

Mais  attendu  que,  si  l'interprétation  de  la  loi  de  1857  permet 
à  un  négociant  allemand  de  [faire  protéger  en  France  la  marque 


!'^M"^W1^!" 


—  275  ~ 

qu'il  y  dépose,  sans  qu'il  soit  besoin  d'examiner  la  possibilité 
pour  lui  de  faire  respecter  cette  marque  en  Allemagne,  à  plus 
forte  raison  une  société  française,  cessionnaire  da  droit  de  fa- 
briquer un  produit  inventé  par  un  allemand,  a-t-elle  le  droit, 
usant  des  facultés  que  lui  accorde  la  loi  précitée,  de  déposer 
sa  marque  de  fabrique  et  de  la  faire  protéger  en  France  ; 
El  Qu'à  ce  point  de  vue  encore  la  marque  déposée  en  1888  n'est 
pas  nulle  ; 

Qu'il  ressort  de  ce  qui  précède  que  la  dénomination  Antipyritie 
créée  par  le  docteur  Knorr  et  régulièrement  déposée  en  France^ 
le  18  février  1888,  par  la  Compagnie  parisienne  de  couleurs 
d'Aniline,  constitue  la  propriété  exclusive  de  cette  dernière  ; 

Que  la  demande  de  Riethe  ne  doit  pas  être  acceptée  ; 

Par  ciEs  motifs,  Déclare  le  demandeur  mal  fondé  en  ses  actions 
et  conclusions,  l'en  déboute  et  le  condamne  aux  dépens. 

Le  Syndicat  des  pharmaciens  de  Paris  el  de  la  Seine  a 
relevé  appel  de  cette  décision. 

La  1"  chambre  de  la  Cour  de  Paris,  sous  la  présidence 
de  M.  Ricard,  après  plaidoiries  de  M®  Allart  pour  les  appe- 
lants el  de  M®  Pouillet  pour  la  Société  des  couleurs  d'Ani- 
line, a  statué  dans  les  termes  suivants  : 

La  Cour,  Considérant  que,  le  26  janvier  1897,  le  président  de 
la  Chambre  syndicale  des  pharmaciens  de  Paris  et  de  la  Seine  a 
introduit  contre  la  Société  parisienne  des  couleurs  d'Aniline  une 
action  ayant  pour  objet  de  faire  décider  que  ladite  compagnie  est 
sans  droit  pour  revendiquer  la  propriété  exclusive  de  la  déno- 
mination Antipyrine  appliquée  à  un  produit  pharmaceutique  fa* 
briqué  par  elle,  et  de  faire,  en  conséquence,  prononcer  la  nullité 
de  la  marque  de  fabrique  déposée  par  elle  sous  cette  dénomina- 
tion, au  greffe  du  Tribunal  de  la  Seine,  le  18  février  1888  ; 

Considérant  que  cette  demande  a  été  déclarée  mal  fondée  ; 
que,  pour  ainsi  statuer,  les  premiers  ju^es  se  sont  fondés  sur  ce 
principe  que  l'inventeur  ou  premier  préparateur  d'un  produit 
pharmaceutique  est  autorisé  à  s'approprier  d'une  manière  exclu- 
sive la  dénomination  de  ce  produit,  à  la  condition  seulement 
qu'elle  ne  soit  pas  usuelle  et  nécessaire,  qu'elle  ne  révèle  ni  la 
nature^  ni  la  vertu  substantielle  du  produit  ;  qu'en  fait,  les  pre- 
miers juges  ont  vu  dans  le  mot  «  Antipyrine  »  une  appellation  de 
pure  fantaisie»  choisie  arbitrairement  par  l'inventeur  du  produit, 
le  docteur  Knorr,  et  de  nature  à  satisfaire  par  le  simple  dépôt 
de  ce  mot  aux  prescriptions  de  la  loi  des  23-27  juin  1857  qui  pro- 
tège la  fabrication  du  produit  pharmaceutique  au  môme  titre 
que  tous  autres  produits  fabriqués  ; 


—  276  — 

Considérant  qae  le  jugement  entrepris  ajoute,  à  titre  d'exem- 
ple, que  le  mot  Antipyrine  est  si  peu  générique  et  nécessaire 
que  le  produit  ainsi  désigné  par  le  docteur  Enorr  aurait  pu  Têtre 
indifféremment  par  tout  autre  mot,  et  entre  autres  par  celai 
d'  (c  analgésine  >»  exprimant  la  vertu  dolorifuge  du  remède; 
qu^enfin  il  est  fait  observer  par  la  décision  dont  est  appel  que  la 
Société  parisienne  des  couleurs  d'Aniline  n'a  cessé  de  revendi- 
quer à  aucun  moment  le  monopole  de  la  fabrication  du  produit 
déposé  sous  le  nom  Antipyrine  ;  qu'ainsi  ce  mot  n'est  pas  tombé 
dans  le  domaine  public  et  a  été  à  bon  droit  approprié  par  ladite 

société  ; 

Considérant  qu'il  convient  d'examiner  la  portée  juridique  de 
la  décision  dont  est  appel  et  les  moyens  de  fait  relevés  à  Tap- 
pui  de  cette  décision  ; 

Considérant  que  des  dispositions  rapprochées  de  la  loi  du 
5  juillet  1844  sur  les  brevets  d'invention  et  de  la  loi  des  23-27 
juin  1857,  sur  les  marques  de  fabrique.  Il  résulte  bien  que  si 
nul  produit  pharmaceutique  ne  peut  être  breveté,  la  fabrication 
d'un  produit  de  même  nature  peut  faire,  au  contraire,  Tobjet 
d*un  droit  privatif  et  son  titre  seul  être  déposé  utilement  ;  qa*il 
est  par  ce  moyen  protégé  par  la  loi  à  l'égal  de  tout  autre  produit 
fabriqué  ;  que,  cependant,  pour  qu'il  en  puisse  être  ainsi  et  qu'il 
soit  à  la  fois  satisfait  aux  dispositions  spéciales  des  lois  de  1844 
et  de  1857,  il  est  indispensable  que  la  dénomination  choisie  pour 
désigner  le  produit  pharmaceutique,  à  la  différence  de  tout  autre 
produit,  soit  une  dénomination  de  fantaisie  et  non  pas  une 
marque  usuelle  et  nécessaire,  capable  de  révéler  par  son  seul 
énoncé  soit  la  nature  particulière,  soit  la  vertu  propre  et  médicale 
du  produit  déposé  ;  que  s'il  en  était  autrement,  tout  fabricant 
de  produit  pharmaceutique  s'assurerait  aisément  le  monopole 
de  la  vente  du  produit  en  même  temps  que  celui  de  sa  fabrica- 
tion et  ferait  échec  aux  dispositions  susvisées  des  lois  de  1844 
et  1857  ; 

Gonsidérant,dès  lors,que  le  seul  point  à  examiner  dans  l'espèce 
soumise  à  l'appréciation  de  la  Cour,  est  de  savoir  si  le  mot  An- 
tipyrine, en  le  supposant  régulièrement  déposé  par  la  Société 
parisienne  des  couleurs  d'Aniline,  est  un  mot  banal  et  de  fantaî- 
sie,  arbitrairement  choisi  en  vue  d'un  dépôt  légal  comme  l'ont 
pensé  les  premiers  juges,  ou  si,  au  contraire,  il  a  été  intention- 
nellement adopté  par  son  auteur  le  docteur  Knorr  pour  le  faire 
accepter  dans  le  monde  médical  et  pour  répondre  aux  besoins 
de  la  thérapeutique  ; 

Considérant  qu'à  ce  point  de  vue  tout  concourt  à  établir  que 
le  mot  adopté  par  Knorr,  loin  de  relever  du  capHce  ou  de  la 
fantaisie,  a  été  par  lui  emprunté  au  vocabulaire  médical  ;  que, 


UMF  IL  MM  l|l  .Ul"ll"if  |JPm.llJM»W  \y^  WflVffi 


—  277  — 

par  son  origine,  son  objet,  et  l'asage  qui  en  a  été  fait  par  ce 
savant,  ce  mot  révèle  tout  ensemble  une  découverte  scientiûque 
et  une  application  de  cette  découverte  à  Part  de  guérir  ; 

Considérant,  en  effet  qu'il  n'est  pas  contesté  que  le  docteur 
Knorr  a  simplement  substitué  le  mot  Antipyrine  à  une  formule 
chimique  primitivement  donnée  au  produit  par  lui  découvert  ; 
qu'en  .effet,  appliqué  à  la  recherche  d'un  procédé  chimique  de 
fabrication  artiûcielle  de  la  quinine  et  de  la  quinizine,  deux  subs- 
tances essentiellement  fébrifuges  ou  antipyrétiques,  il  a,au  cours 
de  ses  recherches,  découvert  un  produit  nouveau,  considéré  par 
lui  comme  un  fébrifuge  plus  actif  que  les  deux  autres  ;  qu'il  a 
d'abord  donné  à  ce  produit  le  nom  purement  scientifique  de 
«  diméthyloxyquinizine  *»,  mais  que  bientôt  pour  les  besoins  de  la 
pratique,  il  a  substitué  à  ce  nom  celui  d"* Antipyrine ,  simple  dé- 
rivé de  Tadjectif  «  antipyrétique  »,  usité  depuis  près  d'un  siècle 
pour  désigner  le  caractère  particulier  des  substances  fébrifuges  ; 
ainsi, à  vrai  dire,le  mot  à*Antipyrine  désigne  clairement  unremède 
spécifique  contre  le  feu  de  la  fièvre  comme  son  étymologie  l'in- 
diqne  ; 

Considérant,  d'autre  part,  que  ce  même  mot  a  été  employé 
par  Knorr  lui-même  et  par  d'autres  savants  dans  un  grand  nom- 
bre de  publications  scientifiques,  excluant  toute  banalité  ei 
toute  fantaisie  ;  qu'en  outre,  le  mot  Antipyrine  est  entré,  pour 
ainsi  dire,  d'emblée  dans  le  vocabulaire  des  médecins  et  des  phar- 
maciens ;  qu'il  a  été  universellement  adopté  par  les  malades, 
môme  les  moins  intellectuels  ;  qu'ainsi  il  est  tombé  dans  le  dOf 
maine  public  avantjméme  que  la  Société  parisienne  des  couleurs 
d'Aniline  ait  tenté  de  se  l'approprier  ; 

Considérant  qu'à  la  vérité,  et  postérieurement  au  dépôt  faif 
de  ce  mot  par  la  Société  parisienne,  VAntipyrine  a  été  reconnue 
non  seulement  comme  un  fébrifuge  actif  tel  que  l'avait  jugé  le 
docteur  Knorr,  mais  aussi  comme  un  dolorifuge  énergique  ; 
qu'il  est  exact  que  c'est  surtout  sous  cet  aspect  médical  que  son 
importance  thérapeutique  ne  cesse  d'être  proclamée  ;  que  les 
premiers  juges  en  infèrent  que  ce  remède  aurait  pu  être  appel^ 
aussi  bien  (c  analgésine  »  que  dénommé  Antipyrine  ;  mais  que  ce 
mot  même  eût  révélé  nécessairement  Tunedés  vertus  scientifiques 
du  produit  ;  que,  d'ailleurs,  c'est  comme  fébrifuge  sûr  que  Knorr 
a  considéré  VAntipyrine  et  que  la  Société  parisienne  des  couleurs 
d'Aniline  s'en  est  approprié  le  nom  ;  que  de  tout  ce  qui  précède 
il  résulte  que  le  mot  Antipyrine  est  un  nom  générique,  qu'il  n'a 
pu. à  aucune  époque  être  à  bon  droit  revendiqué  comme  une 
jnarque  de  fabrique  ;  que  ce  mot  relève  de  la  science  médicale 
et  non  delà  fantaisie  individuelle;  qu'au  lendemain  de  sa  créa- 
tion par  Knorr  ou  plus  exactement  de  son  emprunt  au  vocabii- 


—  278  - 

laire  des  médecins,  il  est  en  réalité  tombé  dans  le  domaine 
public  et  n'a  pu,  dès  lors,  être  utilement  approprié  par  la  So- 
ciété parisienne  des  couleurs  d'Aniline  ; 

Par  ces  motifs,  Infirme  le  jugement  dont  est  appel  ;  et  sta- 
tuant à  nouveau,  dit  et  juge  que  la  Compagnie  parisienne  des 
couleurs  d*Aniline  est  sans  droit  pour  revendiquer  la  propriété 
exclusive  de  la  dénomination  pure  et  simple  à^Antipyrine  ;  pro- 
nonce la  nullité  des  marques  déposées  par  elle  sous  ce  seul  et 
unique  titre  ;  ordonne  la  restitution  de  Famende  ;  condamne  la 
compagnie  intimée  en  tous  les  dépens  de  première  instance  et 
d'appel. 


Art.  4215. 

Marques  de  iabrlqae.  —  Dénointiiatloiis.   —  Pagiler 

Cyano-Fcr. 

L'emploi  des  dénominations^  à  titre  de  marques^  est  au- 
torisé par  la  toi  du  23  juin  1857,  alors  que,  n'étant  pas  la 
désignation  nécessaire  du  produity  ces  dénominations  ne 
tendent  pas  à  attribuer  indirectement  au  déposant^  sous  le 
prétexte  de  marque,  le  monopole  du  produit  lui-même  (1). 

Les  mots  Papier  Cyano-Fer,  employés  pour  désigner  des 
papiers  photographiques  industriels,  constituent  une  déno- 
mination susceptible  d'être  possédée  privativement  à  titre 
de  marque  de  fabrique  (2). 

(C.  de  Paris,  28  décembre  1900.  —  Dlle  Cl.  Joltrain  c.  Société  GéDénde 
pour  la  fabrication  des  papiers  photographiques  industriels.) 

Ainsi  jugé  par  Tinfirmalion  d'un  jugement  du  Tribunal 
civil  de  Versailles,  du  6  janvier  1897  (tfas.'/nô.,  16  janvier 
1897),  par  la  4«  chambre  de  la  Gourde  Paris,  sous  la  prési- 
dence de  M.  Gaze,  président  : 

La  Cour,  Au  fond  : 

Considérant  que  la  demoiselle  Cl.  Joltrain,  en  vue  de  distinguer 

(1)  V.  Ann,^  98.98,  une  série  de  décisions  variées  eu  matière  de  dé- 
nominations. On  trouvera  cité  en  note  le  jugement  infirmé  par  le  présent 
arrêt. 

On  comparera  avec  intérêt  le  jugement  du  Tribunal  correctionnel  de 
la  Seine,  4  mars  1898,  qui  refusait  de  voir  une  marque  dans  la  déno- 
-mination  Chlorol,  Voir  aussi  suprà^  p.  271,  Tarrêt  relatif  Â  Pantipyiine 
jet  les  arrêts  cités  en  note* 


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—  279  — 

des  papiers  industriels  fabriqués  par  elle,  a  fait  régalièrement^  le 
15  février  1884,  le  dépôt  de  la  marque  litigieuse  dont  il  est  justi- 
flé  qu'elle  avait  antérieurement  l'usage  exclusif; 

Qu'il  est  établi  d'autre  part,  que  la  société  intimée  a  mis  en 
vente  sous  la  même  marque  des  produits  similaires  provenant  de 
sa  fabrication  ; 

Considérant  que  cette  marque  consistant  dans  la  dénomination 
de  Papier  Cyano-Perj  si  elle  paraît  se  rattacher  au  [procédé  en 
usage  pour  utiliser  le  produit,  ne  contient  nullement  la  formule 
scientifique  de  sa  fabrication  ; 

Et  considérant  que  de  l'esprit  de  la  loi  du  23  juin  1857,  comme 
du  texte  même  de  son  article  i*%  il  résulte  que  cette  loi  a  auto- 
risé remploi  des  dénominations  à  titre  de  marques,  alors  que, 
n'étant  pas  la  désignation  nécessaire  du  produit,  ces  dénomina- 
tions ne  tendent  pas  à  attribuer  indirectement  au  déposant  sous 
le  prétexte  de  marque,  le  monopole  du  produit  lui-même  ; 

En  ce  qui  touche  la  réparation  du  préjudice  : 

Considérant  qu*en  l'état  des  documents  soumis  à  la  Cour  et  eu 
égard  au  dommage  réellement  éprouvé  par  l'appelante,  la 
demande  des  insertions  dansles  journaux  n^est  point  justifiée  ; 

Que  la  somme  de  5,000  francs  doit  être  réduite  dans  une  forte 
proportion  ; 

Qu'il  échet^  d'autre  part,  de  réduire  le  chiffre  de  l'astreinte  et 
d  augmenter  le  délai  après  lequel  elle  sera  encourue  ; 

Par  ces  motifs,  En  la  forme  : 

Reçoit  la  demoiselle  Cl.  Joltrain  appelante  du  jugement  du  Tri- 
bunal civil  de  Versailles,  en  date  du  6  janvier  18S7  ; 

Au  fond  : 

Met  à  néant  l'appellation  et  ce  dont  est  appel  ; 

Emendant,  décharge  la  demoiselle  Cl.  Joltrain  des  condam- 
nations contre  elle  prononcées  et  des  dispositions  du  jugement 
lui  faisant  grief  : 

Statuant  à  nouveau  ; 

Dit  que  les  mots  Papier  Cyano-Fer  constituent  une  dénomina- 
tion susceptible  d'être  possédée  privativement  à  titre  de  marque 
de  fabrique  ; 

Dit  que  cette  marque  est  la  propriété  exclusive  de  la  demoiselle 
Cl.  Joltrain  ; 

Fait  défense  à  la  Société  générale  pour  la  fabrication  des  pa- 
piers photographiques  industriels  de  s'en  servir  à  l'avenir  pour 
la  désignation  de  ses  produits,  de  quelque  manière  et  sous  quel- 
que forme  que  ce  soit  ; 

Dit  que  ladite  société  sera  tenue  de  la  faire  disparaître  dans  le 
mois  du  présent  arrêt  de  tous  prospectus,  prix  courants,  catalo- 
gues, étiquettes,  en-tétes  de  lettres  et  généralement  de  tous  im- 


—  280  — 

primés  et  écrits  quelconques  et  cela  à  peine  de  iO  francs  par  jour 
de  retard  pendant  un  mois,  passé  lequel  délai  il  sera  fait  droit; 

Et  pour  réparation  du  préjudice  causé  déjà  à  l'appelante  ; 

Condamne  la  Société  générale  pour  la  fabrication  des  papiers 
photographiques  industriels  à  payer  à  la  demoiselle  CI.  Joltrain 
la  somme  de  200  francs  à  titre  de  dommages-intérêts  ; 

Pour  le  surplus  de  ses  demandes,  déclare  la  demoiselle  Cl.  Jol- 
train mal  fondée  dans  ses  demandes,  fins  et  conclusions  d^appel  ; 

L'en  déboute  ; 

Déclare  la  Société  générale  pour  la  fabrication  des  papiers 
photographiques  mal  fondée  dans  ses  demandes,  fins  et  conclu- 
rions contraires  au  présent  arrêt  ; 
'  L'en  déboute  ; 

Ordonne  la  restitution  de  Tamende  ; 

Et  condamne  ladite  société  en  tous  les  dépens  de  première  ins- 
tance et  d'appel  et  ce,  au  besoin,  à  titre  de  supplément  de  dom- 
mages-intérêts. ' 


Art.  4216. 

Marques  de  tebrlque.—  Dénoinliiatloiis.— Produite 
pharmaceutiques.  —  CcMiltar  aaponlné.  —  Tei 


L'expression  Coaltar  saponihé  ne  constitue  point  une 
marque  de  fabrique^  parce  qu'elle  désigne  un  médicament 
antiseptique  obtenu  par  la  combinaison  du  coaltar  et  de 
la  saponine,  que  ces  tei'mes  sont  entrés  depuis  longtemps 
dans  la  langue  usuelle  et  que  le  produit  figure  notamment 
dans  le  Manuel  de  Pharmacie  de  Dorvault  sous  le  titre  de 
c  Coallar  saponiné  ou  saponifié  »  (1). 

(G.  de  P«ris,  13  mars  1900.  —  Le  Bœuf  c.  Gamaud.) 

Ainsi  décidé  par  infirmation  d'un  Jugement  du  Tribunal 
civil  de  la  Seine  en  date  du  16  décembre  1897  : 

Considérant  que  Le  Bœuf,  pharmacien  à  Bayonne,  a  intenté 
il  Garn^ud,  pharmacien  à  Paris,  une  demande  tendant  à  faire 
déclarer  que  la  dénomination  de  coaltar  saponiné  employé  par 

(i)  Le  demandeur  soutenait  :  qu'il  n'y  avait  pas.en  réalité,  saponifica- 
tion ;  que,  par  suite,  l'expression  revendiquée  n'avait  rien  de  nécessaire 
et  qu'elle  servait  à  désigner  depuis  longtemps,  en  fait,  le  produit  de 
Le  Boeuf,  à  rexclusion  de  tout  autre. 


—  281  — 

lui  comme  marque  de  fabrique  était  sa  propriété  exclusive  ;  que 
Garnaud  ne  pouvant  pas  s'en  servir  pour  désigner  le  même 
médicament,  non.  plus  que  des  mots  a  coaltar  saponifié  »  qui 
n'étaient  qu'une  imitation  frauduleuse  de  la  marque  dç  Le  Bœuf; 

Considérant  que  cette  demande  a  été  admise  par  un  jugement 
dont  Garnaud  a  relevé  appel  et  que  Ta  question  au  procès  est  de 
savoir  si  la  dénomination  de  coaltar  itaponiné  a  pu  être  adoptée 
comme  marque  de  fabrique  parce  qu'elle  serait  arbitraire  et  de 
pure  fantaisie  ; 

Considérant  qu'il  est  incontestable  que  le  coaltar  saponiné  déi> 
couvert  par  Ferdinand  Le  Bœuf,  père  de  Tintéressé,  est  un 
médicament  antiseptique  obtenu  par  la  combinaison  du  coaltar 
et  de  la  saponifie  ; 

Que  cette  découverte  a  été  signalée  à  l'Académie  des  sciences 
dans  sa  séance  du  25  juin  1860  et  qu'on  remarque  dans  le  compte 
rendu  officiel,  page  1178,  les  passages  suivants  : 

ce  M.  Le  Bœuf,  pharmacien  à  Bayonne,  a  reconnu  dés  1850  que 
toutes  les  substances  insolubles  dans  l'eau  et  solubles  dans  Fal- 
cool  forment  avec  Teau  des  émulsions  stables  lorsqu'on  ajoute 
de  la  saponine  à  leur  soivité  alcoolique.  C'est  cette  propriété  de  la 
saponine  qui  a  été  appliquée  par  cet  habile  pharmacien  au  gou- 
dron minéral  pour  en  faciliter  l'emploi.  » 

Et  plus  loin  : 

Dans  le  pansement  des  plaies  on  obtient  «  avec  Témulsion  des 
effets  bien  remarquables  où  la  saponine  et  le  coaltar  manifestent 
leurs  propriétés  m. 

Considérant  que  les  termes  de  coaltar  saponine  sont  entrés 
depuis  longtemps  dans  la  langue  usuelle  ; 

Que  le  manuel  de  pharmacie  publié  par  Dervaultenl8ô7  indi- 
que le  mode  de  préparation  de  cet  antiseptique  sous  le  titre  de 
coaltar  saponine  ou  saponifié  ; 

Considérant  que  le  10  novembre  1880  l'intimé  Ferdinand  Le 
Bœuf  a  déposé  comme  marque  de  fabrique  non  pas  les  trois 
mots  coaltar  saponine  Le  Bœuf  soas  lesquels  le  médicament  avait 
acquis  une  grande  notoriété,  mais  seulement  les  deux  mots  coal- 
tar saponine  ; 

Considérant  que  ces  expressions  ne  pouvaient  pas  être  prises 
comme  marque  de  fabrique  ni  devenir  une  propriété  privative, 
parce  qu'elles  ne  constituent  pas  une  dénomination  fantaisiste 
et  qu'elles  désignent  en  termes  vulgaires  les  éléments  qui  com- 
posent un  produit  pharmaceutique  ; 

Qu'il  suit  de  là  que  la  demande  de  Le  Bœuf  était  mal  fondée 
et  qu'il  échet  d'inûrmer  le  jugement  qui  l'avait  acueillie  ; 

Sur  les  dommages-intérêtslréclamés  par  Vappelant. 

Considérant  que  si  l'action  dirigée  par  Le  Bœuf  contre  Garnaud 


—  282  — 

a'étail  pas  justifiée,  elie  n^avait  pas  le  caractère  d'une  actioik 
abusive»  vexatoire,  pouvant  donner  lieu  à  Tailocation  de  dom- 
magae-intéréts  et  à  ineertioas  dans  les  journaux  du  présent 
jugement  ; 

Par  CBS  motifs,  Infirme.., 

Décharge  Garuaud  des  dispositions  et  condamnations  qui  lai 
font  grief. 

2*Ch.  —  M.  Harel,  président.  —  M*»  Lton-Gaxn  elPoca- 
LKT,  avocats. 


Art.  4217. 


Marqué  de  tebiHkiae.  —  DénomlMsUlaii  4le  Auitetale. 

—  Créollne.  -i-  Imitetloii  frawiitileiMie.  —  Ci*étillltt#« 

—  PiHMlait  hysléalqtae.  —  Remède  «eerei.  -^  Falirir 
cation. 

Toute  désignation  pouvant  servir  à  individualiser  te 
produit  d'une  industrie,  est  protégée  par  la  loi  de  1857,  à 
la  condition  que  cette  dénomination  soit  susceptible  d'une 
appropriation  privative  et  ne  soit  pas  tombée  dans  le  do- 
maine public  avant  le  dépôt  légal  (1). 

Constitue  une  marque  valable  la  dénominaliarkde  aréo^ 
Une,  qui  est  une  dénomination  arbitraire  et  de  pure  fan- 
taisie, sans  aucun  rapport  soit  avec  la  composition  du 
produit^  soit  avec  Vusage  auquel  il  est  destiné  (2). 

La  propriété  d'une  marque  légalement  étctblie  confère  un 
droit  absolu^  indépendamment  de  Vusage  qui  peut  en  être 
fait,  et  donne  au  déposant  le  droit  de  poursuivre  tout  con- 
trefacteur ;  il  en  est  ainsi  alors  même  que  le  produit 
auquel  est  appliqué  la  marque  pourrait  être  considéré 
comme  un  remède  secret,  cette  circonstance  n'étant  pas  de 

(1-2)  Déjà  par  jugement  en  date  da  19  juin  1897  le  Tribunal  de  la  Seine 
avait  reconnu  le  droit  de  Pearson  à  la  marque  Créoline  et  décidé  que  li 
dénomination  Crésiline  en  constituait  une  imitation  frauduleuse  (Trib. 
Seine,  19  juin  1897,  Pearson,  La  Loi^  12nov.).  V.  article  sur  les  déno- 
minations, par  Georges  Maillard,  ilnn.  98.2  et  s. 

En  Belgique,  Pearson  a  également  fait  condamner  quelqu'un  qui  se 
servait  de  la  dénomination  créoline  en  prétendant  l'appliquer  à  des 
produits  de  Pearson,dont  il  disait  avoir  modifié  le  mode  de  présentation. 
Lo  tribunal  civil  d'Anvers,  20  mars  1897, Pa«.  Belge,  97.3.349,  a  jugéqne 
la  dénomination  Créoline  ne  pouvait  être  employée  dans  ces  conditions 
sans  le  consentement  de  Pearson  (cf.  Pouillet,  n.  165). 


—  283  - 

nature  à  légitimer  les  cas  d'usurpation  vis-à'Vis  duproprié' 
iairede  la  marque  (1). 

(G.  de  Roaen,  29  mars  1899.   --  William  Pearson  c.  Crié.) 

A  la  date  du  29  janvier  1898,  le  Tribunal  civil  de  Rouen 
avait  rendu  le  jugement  suivant: 

Le  Tribunal,  Attendu  que  par  exploit  du  10  juillet  1897, 
Pearson  a  fait  assigner  Crié  pour  voir  dire  ;  que  Pearson  est  pro« 
priétaire  exclusif  d'une  marque  de  fabrique  constituée  par  la 
dénomination  Créoline  ;  que  Crié  a  contrefait  cette  marque  et 
sciemment  vendu  et  mis  en  vente  un  produit  revêtu  de  cette  con* 
trefaçon  ;  qu'il  a  fait  une  imitation  frauduleuse  ou  illicite  de 
cette  marque  et  a  sciemment  vendu  un  produit  revêtu  de  cette 
imitation  frauduleuse  ou  illicite  ;  qu'en  livrant,  sur  une  demande 
de  Créoline,  un  produit  étranger  au  demandeur,  il  a  commis  à 
regard  de  celui-ci  des  actes  de  concurrence  déloyale  ;  qu'à  la 
suite  d'un  procès-verbal  de  saisie  à  l'asile  Saint- Yon,  en  date  du 
25  novembre  1897,  Pearson  a,  par  exploit  du  7  décembre  1897, 
fait  assigner  Crié  aux  mêmes  lins  que  précédemment,  et  ce,  à 
raison  de  nouvelles  constatations,  et  l'a,  de  plus,  par  le  même 
exploit,  fait  assigner  en  validité  de  saisie  ; 

Attendu  que  la  jonction  des  deux  instances  est  demandée  par 
Pearson  et  par  Crié  ;  que  d'ailleurs  il  y  a  lieu  de  la  prononcer 
puisque  les  deux  demandes  soulèvent  les  mêmes  questions  et  ont 
trait  au  même  litige  entre  les  mêmes  parties  ; 

Attendu  que  Crié  oppose  à  Pearson  une  exception  fondée  sur 
ce  que  le  produit  mis  en  vente  parle  demandeur  sons  la  marque 
revendiquée  serait  un  remède  secret  ; 

Sur  l'exception  : 

Attendu  que  le  produit  vendu  par  Crié  sous  le  nom  de  créo- 
line est  plutôt  un  antiseptique,  un  désinfectant,  qu'un  remède 
proprement  dit;  que  d'ailleurs,  ce  produit  fut-il  un  remède, 
Pearson  n'en  pourrait  pas  moins  être  propriétaire  exclusif  de  la 
marque  sous  laquelle  il  le  vend  ;  que,  même  dans  ce  cas,  il  aurait 
intérêt  à  conserver  et  à  défendre  son  droit  de  propriété  pour  le 
faire  valoir  après  en  avoir  régularisé  l'usage  au  point  de  vue  de 
l'application  des  lois  sur  la  police  de  la  pharmacie  ; 

Sur  la  propriété  de  la  marque  : 

Attendu  qu'il  résulte  d'un  certificat  délivré  par  le  greffier  du 
Tribunal  de  commerce  de  la  Seine,  qu'à  la  date  du  6  décembre 
1888,  Pearson  a  déposé  une  marque  de  fabrique  consistant  en  une 
étiquette,  sans  autre  signe  distinctif  que  le  mot  Créoline  qui  y 

(1)  Cf. Paris,  11  avril  1899,  Gainet,  il nn., 1901.  260  et  les  notes  1-8. 


-7T^*^B,w--irM.  -  '•tmj^w  ^9Wf^wvmmmv 


—  284  — 

figare  ;  qa'à  cette  époque  le  mot  Créoline  n*était  pas  dans  le  do- 
maine public^  quMl  n'avait  pas  par  lui-môme  une  signification 
déterminée  ;  qu'il  devait,  pour  être  compris,  être  accompagne 
d'un  autre  terme  ou  d'une  explication  faisant  connaître  ce  qu*il 
désignait  ;  qu'il  résulte  des  documents  versés  aux  débats,  notam- 
ment d'un  numéro  de  VExpress  de  Mulhouse,  en  date  du  19  juiu 
1888,  qu'à  cette  époque  le  produit  appelé  Créoline  était  signalé 
au  public  par  des  réclames  comme  une  découverte  récente  de  la 
maison  Pearson  :  que  des  publications  médicales  en  ont  parlé 
en  France,  en  septembre  et  novembre  1888,  comme  d^nne  subs- 
tance nouvelle,  mal  connue  encore,  produite  et  expérimentée  en 
Allemagne  ;  que  cette  dénomination  parait  avoir  été  inventée 
par  la  maison  Pearson  qui  s'en  est  servie  pour  désigner  un  de 
ses  produits  et  en  a  fait  une  marque  de  fabrique  ;  qu'en  tout  cas 
le  dépôt  de  cette  marque  a  suivi  de  près  la  première  apparition 
du  mot  Créoline  ;  que,  dès  lors,  le  dépôt  de  cette  dénomination 
inusitée  suffit  à  établir  en  faveur  de  celui  qui  a  le  plus  contribué 
à  la  répandre  une  présomption  de  priorité  ;  que  c'est  à  Crié  qu'in- 
combe la  charge  de  prouver  que  le  mot  Creoh'ne,  entre  son  appa- 
rition et  le  dépôt  de  la  marque  était  tombé  dans  le  domaine 
public  et  y  avait  un  sens  par  lui-môme  et  à  lui  seul  ;  que  Crié  ne 
fait  pas  cette  preuve  ;< 

Sur  la  contrefaçon  et  la  mise  en  vente  d'un  produit  revêtu  de 
la  marque  contrefaite  : 

Attendu  que  Crié  ne  nie  pas  avoir  vendu  en  1897  un  produit 
autre  que  celui  de'  Pearson,  dans  des  flacons  revêtus  d'une  éti- 
quette portant  le  mot  Créoline  ;  que  ce  fait  est  d'ailleurs  établi, 
notamment  par  un  procès  verbal  de  constat  de  Lieugard,huîssier, 
en  date  du  9  avril  1897  et  an  procès-verbal  de  saisie  de  Wagner, 
huissier,  en  date  du  25  novembre  1897;  que^Grié  prétend  que, 
sur  ces  étiquettes  où  se  trouve  son  nom,  le  mot  Créoline  écrit  à 
la  main  ne  peut  être  une  contrefaçon  de  la  marque  de  Pearson  ; 
mais  que  cette  marque  consistant  uniquement  en  une  déno- 
mination, est  contrefaite  dès  que  la  dénomination  est  repro- 
duite ; 

Sur  l'imitation  de  la  marque  et  la  mise  en  vente  d'un  produit 
revêtu  de  la  marque  imitée  : 

Attendu  qu'il  résulte  encore  du  procès-verbal  de  saisie  ci-des- 
sus indiqué  que  sur  une  demande  de  créoline  faite  par  Tadmi- 
nistration  de  l'asile  Saint- Yon,  Crié  a  livré  le  17  avril  un  pro- 
duit revêtu  d'une  marque  consistant  dans  la  dénomination  de 
Crésiline  ; 

Attendu  que  l'emploi  du  mot  Crésiline,  qui  n'a  pas  plus  que  le 
mot  de  Créoline  un  sens  déterminé  par  lui-même,  a  été  fait  pour 
imiter  la  marque  de  Pearson,  que  cela  ne  saurait  être  mis  en 


7»r.   ^K-'-T  ,-  *.    s  •»   r,- 


285 


doute,  puisque  Crié  s'en  est  servi  pour  un  produit  différent  de 
celui  de  Pearson,  produit  qu'il  a  livré  sur  une  demande  de  Gréo- 
line,  puisqu^il  a  légèrement  modifié  la  marque  CréoHne,  parce 
qu'antérieurement  au  17  avril  Pearson,  avait  par  des  recherches 
et  des  actes  préparé  la  revendication  de  ses  droits,  que  l'imita- 
tion dont  s'agit  était  destinée  à  amener  et  pouvait  amener  une 
confusion  entre  la  marque  de  Pearson  et  celle  qui  imitait  cette 
marque  ; 

Sur  la  concurrence  déloyale  : 

Attendu  que  livrer  sciemment  un  produit  dans  des  conditions 
et  avec  des  procédés  propres  à  tromper  sur  Torigine  de  ce  pro- 
duit, notamment  livrerses  produits  revêtus  de  la  marque  d'autrui, 
c'est  faire  acte  de  concurrence  déloyale  ;  que  Crié,  notamment 
après  être  devenu  adjudicataire  de  fourniture  de  Gréoline  pour 
l'asile  de  Saint- Yon,  a  fait  à  cet  établissement  des  livraisons  d'une 
substance  autre  que  la  Gréoline  Pearson  sous  la  marque  con- 
trefaite Créoline  et  sous  la  marque  imitée  Crésiline  ; 

Sur  la  mauvaise  foi  : 

Attendu  que  la  contrefaçon,  Timitation,  les  ventes  et  mises  en 
vente,  les  actes  de  concurrence  qui  viennent  d'être  relevés  ont 
un  caractère  essentiellement  frauduleux  ;  que  Grié,  qui  était  dépo- 
sitaire à  Rouen  de  la  Gréoline  Pearson,  n'a  pu  par  inadvertance 
commettre  la  contrefaçon  de  la  marque  de  ce  produit  ;  qu'après 
avoir  contrefait  cette  marque,  craignant  les  poursuites  de  Pear- 
son, il  a  substitué  l'imitation  à  la  contrefaçon  ;  que  cet  ensemble 
de  faits  révèle  une  mauvaise  foi  manifeste  ; 

Sur  les  dommages-intérêts  et  autres  réparations  : 
Attendu  que  le  tribunal  a  des  éléments  suffisants  d'apprécia- 
tion pour  fixer  les  réparations  auxquelles  Pearson  a  droit  à  rai- 
son du  préjudice  que  lui  a  causé  Grié  ;  qu'il  y  a  lieu  d'abord  d'al- 
louer à  Pearson  à  titre  d'indemnité  une  somme  de  i,000  fr.,  en 
sus  de  tous  les  frais  qui  vont  être  mis  à  la  charge  de  Grié,  au 
besoin  à  titre  de  supplément  de  dommages-intérêts  ;  qu'il  con- 
vient en  outre  d'accorder  à  Pearson  la  publication  du  présent 
jugement  par  la  voie  de  la  presse  dans  les  conditions  qui  vont 
être  déterminées  ci-après  ; 

Sur  la  saisie  : 

Attendu  qu'elle  est  régulière  ;  qu'il  y  a  lieu  d'ordonner  la  des- 
truction des  marques  saisies  et  contrefaites  ou  imitées  et  de  dé- 
cider que  les  produits  revêtus  des  marques,  produits  dont  la  con- 
fiscation n'est  pas  demandée  et  dont  la  destruction  ne  doit  pas 
être  prononcée  en  l'espèce,  resteront  ensuite  libres  entre  les 
mains  du  tiers  saisi  ; 

Par  ces  motifs,   Prononce  la  jonction  des  deux  demandes 


'"V^ 


--  286  — 

formées  par  Pearson  suivant  exploits  (la'40  juillet  et  du  7  dé^ 
cembre  1897  ; 

Et  statuant  par  un  seul  et  méoie  jugement,  sans  s'arrêtera 
Texception  tirée  de  ce  que  la  Créoline  serait  un  remède  secret, 
exception  qui  est  rejetée  comme  mal  fondée  ; 

Dit  que  la  dénomination  Créoline  constitue  la  propriété  ezclor 
sive  de  Pearson  à  titre  de  marque  de  fabrique  ; 

Dit  que  Crié  a  depuis  moins  de  trois  ans,  à  Rouen,  fait  une 
contrefaçon  de  ladite  marque  appartenant  à  Pearson  et  qu'il  a 
sciemment  vendu  et  mis  en  vente  un  produit  revêtu  de  cette  con- 
trefaçon ; 

Dit  qu'il  a  fait  depuis  moins  de  trois  ans,  à  Rouen,  une  imi- 
tation frauduleuse  de  ladite  marque  appartenant  à  Pearson  et 
qu'il  a  sciemment  vendu  et  mis  en  vente  un  prodoit  revêtu  de 
cette  imitation  ; 

Dit  que  Crié  a  commis  à  Tégard  de  Pearson  des  actes  de  con- 
currence déloyale  en  livrant,  sur  des  demandes  de  Créoli$ie,  un 
produit  autre  que  celui  de  Pearson  ; 

Fait  défense  à  Crié  de  renouveler  ces  actes  à  l'avenir  ; 

Déclare  valable  et  régulière  la  saisie  du  25  novembre  1897  ; 

Ordonne  la  destruction  des  marques  saisies  et  contrefaites  oo 
imitées  et  dit,  qu'après  la  destruction  de  ces  marques,  les  pro- 
duits qui  en  sont  revêtus  seront  remis  ou  resteront  aux  mains 
du  tiers  saisi  qui  pourra  en  disposer  à  son  gré  ; 

Et,  en  réparation  du  préjudice  causé,  condamne  Crié  à  payer 
à  Pearson  une  somme  de  1,000  francs  à  titre  de  dommages-inté- 
rêts ; 

Ordonne  Tinsertion,  aux  frais  de  Crié,  du  présent  jugement 
dans  deux  journaux  de  Paris  ou  des  départements,  au  choix  de 
Pearson,  sans  que  le  coût  de  chaque  insertion  puisse  dépasser 
150  francs; 

Condamne  Crié  en  tous  les  dépens  qui  comprendront  le  «coût 
du  procès-verbal  de  constat,  du  9  avril  1897,  dont  distraction  an 
profit  de  M.  Macqueron,  avoué,  qui  affirme  les  avoir  avancés  ; 

Rejette  au  besoin  comme  mal  fondées  pour  le  surplus  les  au- 
tres demandes  et  conclusions  des  parties. 

Sur  appel,  la  Cour  de  Rouen,  sous  la  présidence  de 
M.  Bbrghon,  premier  président,  et  sur  les  conclusions  con- 
formes de  M.  ANDRÉ,  avocat  général,  a  rendu  Tarrèt  con- 
ârmalif  qui  suit  : 

La  Cour,  Attendu  que  les  premiers  juges  ont  a  bon  droit, 
repoussé  la  fin  de  non-recevoir  proposée  par  Crié  et  tirée  de  ce 


—  287  — 

que  la  Créoline  constituerait  un  remède  secret  insusceptible  à  ce 
titre  de  faire  l'objet  d'une  action  en  justice  ; 

Attendu,  en  effet,  qu'il  résulte  des  attestations  des  prospectus 
produits  et  du  but  même  des  commandes  faites,  que  la  Créoline 
est  principalement  une  composition  hygiénique  et  que  si  néan- 
moins elle  est  aussi  employée  dans  des  proportions  infinitési- 
males à  des  usages  thérapeutiques,  cette  destination  purement 
accidentelle  ne  saurait  avoir  pour  résultat  de  lui  attribuer  le  ca- 
ractère d'un  médicament; 

Attendu,  d'autre  part,  que  lors  même  que  la  Créoline  pourrait 
être  considérée  comme  constituant  un  remède,  cette  circons- 
tance ne  serait  pas  de  nature  à  légitimer  les  cas  d'usurpation  qui 
sont  reprochés  à  Crié  ; 

Que  la  propriété  d'une  marque  légalement  établie  comme  dans 
l'espèce,  confère  un  droit  absolu,  indépendamment  de  l'usage 
qui  peut  en  être  fait  et  que  l'article  2  de  la  loi  de  1857  différant  sur 
ce  point  de  la  loi  de  1844  sur  les  brevets  d'invention,  donne  au 
déposant  le  droit  de  poursuivre  le  contrefacteur  d'une  marque 
qui  est  sa  propriété  personnelle  et  dont  nul  n'a  le  droit  de  se 
servir  sans  son  autorisation  ; 

Au  fond  : 

Attendu  en  premier  lieu,  que  chacun  des  signes  distinctifs 
d'une  marque  pris  isolément  constitue  dans  le  sens  delà  loi  une 
marque  de  fabrique  ;  que  par  suite  la  propriété  de  Pearson,  qui 
a  déposé  régulièrement  la  marque  de  son  produit  sous  la  déno- 
mination de  Créoline,  s'applique  aussi  bien  à  cette  dénomination 
qu'aux  emblèmes  et  signes  distinctifs  dont  il  l'a  accompagnée 
par  la  suite,  et  que,  manifestement,  son  droit  n'a  pu  être  altéré 
par  l'apposition  de  son  propre  nom  ajouté  à  la  dénomination 
Créoline  ; 

Attendu,  en  second  lieu,  que  toute  désignation  pouvant  servir 
à  désigner  le  produit  d'une  industrie  est  protégée  par  la  loi  de 
1857  à  la  condition  que  la  dénomination  soit  susceptible  d'une 
appropriation  privative  et  qu'elle  ne  soit  pas  tombée  dans  le  do- 
maine public  avant  le  dép6t  légal  ; 

Que  cette  double  condition  se  rencontre  dans  les  faits  de  la 
cause  ; 

Qu'ainsi,  la  dénomination  de  Créoline  sous  laquelle  Pearson  a 
désigné  son  produit,  est  une  dénomination  arbitraire  et  de  pure 
fantaisie  sans  aucun  rapport,  soit  avec  sa  composition,  soit  avec 
l'usage  auquel  elle  est  destinée  ; 

Que,  d'autre  part,  il  n'est  justifié  par  Crié  à  qui  incombe  la 
charge  de  la  preuve,  d'aucune  antériorité  ;  que  le  dép6t  de  la 
marque  qui  a  été  régulièrement  fait  le  20  août  1887  est  une  ré- 
ponse péremptoire  à  la  production  des  divers  documents  invo- 


—  288  — 

qués  par  Crié  qui  ne  remontent  pas  à  une  époque  antérieure  à 
4888  et  que,  surabondamment,  Crié  lai-môme  a  fait  Taveu  for- 
mel de  la  propriété  de  Pearson  par  la  lettre  qu'il  lut  écriTait  le 
9  avril  1897  ; 

Que  vainement  il  est  soutenu  que  les  produits  pbarmaceoti- 
ques  ne  peuvent  faire  Tobjet  d'une  appropriation  privative  ;  qoHl 
importe  de  distinguer,  à  cet  égard,  la  marque  du  produit  dont  elle 
est  indépendante  ;  qu'une  marque  ou  dénomination  constitue 
Tindication  d'un  mode  de  fabrication  ou  de  préparation  d^un 
produit  sans  le  caractériser  intrinsèquement  et  que  s'il  appar- 
tient à  un  pharmacien  de  fabriquer  le  produit  il  ne  saurait  lui 
appartenir  d'apposer  la  marque  d'autrui  sur  les  produits  de  sa 
fabrication  ; 

Attendu  que,  par  les  motifs  des  premiers  juges  que  la  Goar 
entend  s'approprier,  il  y  a  lieu  de  déclarer  Crié  atteint  et  con- 
vaincu des  faits  de  contrefaçon  ou  d'imitation  frauduleuse  et  de 
concurrence  déloyale  accomplis  de  mauvaise  foi  qui  lui  sont  re- 
prochés ; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges  ; 

Sans  s'arrêter  ni  avoir  égard  à  toutes  fins  et  conclusions  con- 
traires de  Crié  dont  il  est  débouté  ; 

Met  son  appellation  à  néant  ; 

Et  confirme  le  jugement  attaqué  qui  sortira  son  pleio  et  entier 
effet 


Art.  4218. 

Marciaes  de  tebrlqae.—  Dénomination  de  tentnlsle. 
—  Penineular.—  Imitation  Arandulenae.  —  Priorité 
d'emploi. 

Peut  être  valablement  prise  comme  marque  de  fabrique 
la  dénomination  «  Peninsular  »  pour  désigner, indépendam" 
ment  de  tous  autres  signes  distinctifs,  une  attache  métal- 
lique (1). 

Est  passible  de  dommages-intérêts,  envers  le  propriétaire 
de  la  dénomination  <  Peninsular  *,  le  concurrent  qui  im- 
prime sur  des  factures  et  sur  des  cartes  «  Attache-boutons 
dits  péninsulaires  >  (i). 

C'est  à  la  date  d'emploi  et  npn  à  la  date  du  dépôt  qu'il 

(1)  Sur  les  conditions  requises  pour  qu'âne  dénomination  puiate  eons* 
tituer  une  marque,  voïr  Ann, y  98.80. 
(V)  Jugé,  au  contraire,  que  Tindustriel  qui  9,  appliqué  le  mot  anii-fer' 


V.  «rv  «ir^TT^%^ 


—  289  — 

faul  se  reporter  pour  déterminer  V appropriation  de  la  mar^ 
que  (1). 

(C.  de  Paris,  90  janvier  1900.  —  Riekmann  et  Société  Haeton 

Peninsular  c.  Pautre.) 

Le  25  juin  1897,  la  3"  chambre  du  tribunal  civil  de  la 
Seine  avait  rendu  le  jugement  suivant  : 

Le  Tribunal,  Attendu  que  par  exploit  en  date  du  4  juin  1895, 
Riekmann  a  intenté  contre  Pautre  une  poursuite  en  contrefa-' 
çon; 

Que  par  autre  exploit  du  4  mai  1896  le  même  demandeur  et 
la  société  «  Heaton  Peninsular  Busson  Pastener  Go  »  dont  il  est 
ragent  général,  ont  formé  contre  Pautre  une  demande  en  dom- 
mages-intérêts pour  imitation  frauduleuse  de  marque  de  fabri- 
que; 

Sur  la  contrefaçon  : 

Attendu  que  Riekmann  justifie  qu'il  est  titulaire  d*un  brevet 
i  lui  délivré  le  25  août  1892,  portant  à  la  fois  sur  une  machine  à 
poser  des  boutons  de  chaussures,  laquelle  n'est  pas  en  cause, 
et  sur  des  crampons  ou  attache- boutons  de  forme  particulière  ; 

Attendu  que  l'attache  métallique  dont  s*agit  se  caratérise  par 
2  pointes  se  terminant  par  une  partie  élargie  et  taillée  en  biseau 
tranchant  ; 

Qu'elle  est  décrite,  d'une  façon  précise,  dans  le  mémoire  des- 
criptif, fidèlement  représentée  dans  les  dessins  qui  y  sont  an- 
nexés, et  revendiquée  en  termes  formels  ; 

Que  le  tribunal  doit  donc  la  considérer  comme  une  invention 
brevetable  de  nature  à  assurer  à  son  auteur  un  droit  exclusif 
d'exploitation,  si  elle  n'est  mise  en  échec  par  aucune  antériorité  ; 

Attendu  que  telle  est  précisément  Tobjection  de  Pautre,  lequel 
sans  nier  la  fabrication  et  l'emploi  d'attaches  identiques,  sou- 
tient qu'elles  sont  tombées  depuis  longtemps  dans  lé  domaine 
public  et  qu'en  conséquence  on  ne  saurait  lui  imputer  une  con- 
trefaçon ; 

Mais  attendu  qu'il  n'apporte  à  l'appui  de  son  assertion  aucunes 
justifications  telles  que  factures,  prospectus  ou  autres  documents 

ment  à  des  produits  pour  la  conservation  des  denrées  alimentaires,  ne 
peut  interdire  à  un  négociant  en  sels  d'assaisonnement  et  conserves  de 
produits  alimentaires,ru8age  de  la  dénomination  a  authentique  anti-fer- 
ment d'origine  », parce  que  le  mot  «  anli-ferraent  >»  est  employé  techno- 
logiquement pour  désigner  des  produits  spéciaux  combattant  la  fermen- 
tation des  matières  organiques  et  ne  peut  donc  être,  à  lui  seul,  une  mar- 
que (Trib.  comm.,  Seine,  29  décembre  1898,  Hardy  c,  Vve  de  Si-Martin, 
La  Loi,  15  février  1899). 
(1)  Jurisprudence  constante  :  Pouillet,  Mai^q,  fabr.,  n*  104  ; 


--290  — 

analogues,  et  lïe  Conclut  même  pas  à  une  expertise,  tandis  que 
le  demandeur  produit  comme  ayant  cours  dans  le  commerce 
de  la  cordonnerie  des  types  de  crampons  avec  lesquels  rattache 
brevetée,  par  sa  pointe  élargie  et  son  double  biseau  tranchant, 
présente  des  difTérences  essentielles  ; 
Que  la  contrefaçon  reprochée  à  Pautre  est  donc  établie  : 

Sur  l'imitation  fraqduleuse  de  marque  : 

Attendu  qu'il  ressort  du  dép6t  efTectué  dans  les  formes  ré^a- 
Aères,  le  28  février  1896,  que  la  société  susnommée  a  pris 
comme  marque  de  fabrique  la  dénomination  Peniruular  poar 
désigner  indépendamment  de  tous  signes  distinctifs  rattaché 
métallique  brevetée  par  Riekmann  et  cédée  par  lui  à  la  deman- 
deresse ; 

.  Attendu  que  cette  appellation  de  fantaisie  est,  au  sens  de  la 
loi,  susceptible  d*appropriation  privative  et  que  les  déposants 
sont  en  droit  d'en  interdire  toute  usurpatio;i  ; 
•  Attendu  que  Pautre  ne  conteste  pas  avoir  fait  imprimer  sur 
des  factures  et  sur  des  cartes  les  mots  Attacke-boutons  ditx  pe« 
nimulaires  ; 

Qu'il  allègue  pour  tout  système  de  défense  qu*il  y  a  entre  les 
deux  dénominations  une  notable  dissemblance  s'opposanl  â  la 
confusion  ; 

Mais  qu'il  n'est  pas  besoin  de  faire  ressortir,  au  contraire^ 
1  étroite  analogie  qui  existe  entre  les  deux  marques  et  ne  peut 
manquer  d'induire  le  public  en  erreur  ; 

Attendu  que  de  ce  second  chef  la  demande  est  donc  égalëmenf 
justifiée  ; 

Attendu  que  par  ses  agissements  illicites  Pautre  a  causé  aax 
demandeurs  un  préjudice  dont  réparation  est  due; 

'  Par  ces  motifs,  Du  chef  de  la  contrefaçon  du  brevet  d'inven- 
tion ; 

Déclare  Pautre  contrefacteur  du  brevet  susénoncé  ; 

Déclare  valable  la  saisie  pratiquée  au  domicile  du  sieur  Pan» 
tre,  suivant  procès-verbal  de  Doré,  huissier,  à  Paris,  en  date  du 
20  mai  1895  ; 

Prononce  la  confiscation  et  ordonne  la  remise  aux  deman* 
deurs  des  objets  reconnus  contrefaits  ; 

Du  chef  de  la  contrefaçon  de  marque  : 

Dit  que  la  dénomination  Peninsular  appliquée  aux  outils  ser 
vanta  fixer  les  boutons  aux  chaussures,  gants,  etc.,  constitue  la 
propriété  exe  usive  des  demandeurs  à  litre   de  marque  de  fa- 
brique ; 

'   Dit  que  la  dénomination    Peninsular    employée    par  Paatref 
pour  les  produits  similaires  en  est  une  contrefaçon  ; 


-  291  — 

Prononce  la  confiscation  des  appareils  destinés  à  appliquer  la 
marque  contrefaite  avec  leurs  accessoires  ; 

Condamne  Pautre  pour  toutes  causes  de  préjudice  à  payer  aux 
demandeurs,  la  somme  de  200  francs  à  titre  de  dommages-inté- 
rêts  

Sur  appel,  arrêt  confirmatif  en  ces  termes  : 

La  Cour,  Adoptant  les  motifs  des  premiers  juges, 
Considérant,  en  outre,  en  ce  qui  concerne  l'imitation  fraudu- 
leuse de  la  marque,  que  l'appelant  a  soutenu  qu'il  avait  pu  dé- 
signer ses  agrafes  servant  à  fixer  les  boutons  de  chaussures  par 
le  nom  de  Peninsular  qui  aurait  été  employé  longtemps  avant 
les  intimés  ;  que  ceux-ci  n'auraient  fait  le  dépôt  de  la  marque 
Peninsular  que  le  28  février  1896  et  que,  dès  le  1er  avril  1889,  le 
Moniteur  de  la  Cordonnei^ie  annonçait  la  mise  en  vente  chez  le  I 

sieur  Pocock,  11,  rue  de  Flandre  à  Paris,  d'un  outil  dit:  Penin- 
sular, employé  pour  attacher  les  boutons  de  chaussures  ;  mais 
considérant  qu'il  appert  d*une  lettre  de  Pocock,  que  cet  outil 
provenait  précisément  de  la  maison  Adolphe  Riekmann  ;  que 
c'est  cette  maison  qui  a  la  première  fait  usage  de  ce  nom  de 
fantaisie  dont  la  propriété  lui  était  acquise,  indépendamment  du 
dépôt  de  la  marque  de  fabrique  qui  ne  crée  pas  la  propriété  du 
nom  mais  ne  fait  que  la  garantir  par  une  sanction  pénale  ; 

Pjol  ces  motifs.  Confirme 

2«  eh.  —  M.  Harel,  président.  —  Plaidants  :  M*  Cladd* 
CouHiN  pour  Riekmann  et  la  Société  Heaton  Peninsular, 
et  M*  Vxl-Durand  pour  Pautre . 


Art.  4219. 

Aforciaes  de  tebriqae.  —   Dénomlnatloii.  —  I«eÉi0ive 

Pliénlx.  —  UMiffe  illieiCe. 

Im  dénomination  c  Lessive  Phénix  >,  nom  de  fantaisie 
régulièrement  déposé^  constitue  une  marque  de  fabrique  (1). 

(i)  n  a  été  jugé,  d'autre  part,  et  cela  n'a  rien  de  contradictoire,  que 
la  ùisive  Phénix  ne  se  diiférenciant  pas  des  produits  similaires,  n'était 
pas  brevetable  (Trib.  corr.  Bordeaux,  2  juillet  1888,  le  Droit  induitrielf 
1888.543).  La  Cour  de  Paris  avait  le  8  juillet  1885  {Ann,,  88.56)  jugé  en 
sens  contraire. 

La  dénomination  Phénix  constitue,  d'autre  part,  une  marque  dans 
l'industrie  des  cravates  (voir  trib.  corr.,  29  octobre  1864,  Hayem,  Ann.y 
64.  188). 


—  292- 

Le  seul. fait  par  un  fabricant^  autre  que  le  propriétaire 
de  cette  marque^  d*avoir  proposé^  vendu  et  facturé  ses  pro- 
pres produits  sous  le  nom  de  <  Lessive  Phénix  »  ou*  Les- 
sive genre  Phénix  >  constitue  une  usurpation  de  marque 
de  fabrique  (1). 

(G.  cl'Aix,  28  juin  1899.  —  Picot  c.  Gouston.) 

A  la  date  du  7  décembre  1898,  le  Tribunal  civil  d*Aix, 
sur  les  plaidoiries  de  M*  E.  Plum  (du  barreau  de  Paris) 
pour  M.  Picot  et  de  M«  Marids  Arnaud  pour  M.  Couston, 
avait  rendu  le  jugement  suivant  : 

Le  Tribunal,  Attendu  qae  Picot  est  cessionnaire  d'an  produit 
industriel  qui  a  reçu  la  dénomination  de  lessive  Phénix,  nom  abso- 
lument de  fantatsijs  ;  que  ce  nom  a  fait  l'objet  d'un  dépôt  aa 
greffe  du  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine  en  date  du  27  janvier 
1897  ;  qu*il  constitue  une  marque  de  fabrique  dont  la  propriété 
n'est  pas  contestée  à  Picot  ; 

Attendu  qu'au  mois  de  février  1898,  Gouston  a  vendu  iOO  kilos 
de  lessive  qu'il  a  facturés  lessive  Phénix,  bien  que  ce  produit  fAt 
fabriqué  par  lui-môme  ;  que,  de  plus,  il  résulte  des  pièces  pro- 
duites que  Gouston  a  vendu,  le  6  avril  1898,  100  kilos  de  lessive 
fabriquée  par  lui,  qu'il  a  facturés  lessive  genre  Phénix;  que  le 
fait  seul  d'avoir  proposé,  vendu  et  facturé  ses  produits  sous  le 
nom  de  lessive  Phénix  ou  genre  Phénix,  constitue  une  usurpation 
de  marque  de  fabrique  ; 

Attendu  que  la  mauvaise  foi  de  Gouston  est  certaine  ;  que  les 
faits  de  manœuvres  établis  contre  lui  constituent  des  infractions 
aux  articles  1",  7  et  8  de  la  loi  des  23-27  juin  1857  sur  les  mar- 
ques de  fabrique  et  de  commerce,  et  que  Gouston  a  commis  un 
délit  qui  crée  contre  lui  l'action  intentée  par  Picot  en  dom- 
mages et  intérêts  ; 

Attendu  que  le  tribunal  a  les  éléments  pour  en  déterminer  le 
chijQPre  ;  qu'il  y  a  lieu  d'accueillir  la  demande  de  Picot  en  inser- 
tion de  la  décision  qu'il  sollicite,  dans  un  certain  nombre  de 
journaux  ; 

(i)  Le  foit  d'ajouter  «  genre  »  «  ou  façon  de  w  ne  supprime  p«8  plus 
la  contrefaçon  de  marque  que  rusurpatton  du  nom  (voir  pour  TuBiirpi- 
tien  de  nom,  Pouillet,  Marq,  fab.,  n«  416;. 

Egalement  pour  une  lessive,  le  Tribunal  civil  de  Poitiers  a  considéré 
comme  portant  atteinte  à  la  marque  c  la  Violette  »  des  paquets  susoep-» 
tibles  de  faire  confusion  avec  ceux  du  demandeur  et  portant  la  mention 
«  parfumés  i  la  Violette  i>,ces  deux  derniers  mots  étant  en  évidence,  et  le 
tribunal  adn^el  pourtant  qu'il  serait  licite  de  vendre  une  lessive  «dite 
parfumée  à  la  Violette  »,  à  condition  d'éviter  toute  confusion  (Trib.  dv. 
Foitièrè,  2  juillet  1900,  Jatowski  et  Loiseau  c.  Lefort,  la  Loi,  11  déoesB^ 
bre  1900). 


'^.i«^uii;«|  vv  v^snp^wfiHmpfVP 


—  294  — 

-  La  désignation  d'un  produit  demeure  la  propriété  de 
celui  qui  le  premier  en  a  fait  usage,  alors  surtout  que^par 
un  dépôt  régulier j  il  a  ultérieurement  manifesté  sa  volonté 
de  s'assurer  la  propriété  de  ladite  dénomination  (1). 

V^xpression  Idéal  pour  désigner  des  rasoirs^  étant  de 
pure  fantaisie^  constitue  une  marque  valable  sHl  n*est  pas 
établi  en  fait  qu*elle  était  tombée  dans  le  domaine  public 
de  cette  industrie  (2). 

(G.  de  Paris,  24  janvier  1900.  —  Longy  c.  Bain.) 

A  la  date  du  8  juillet  1899,  le  Tribunal  de  la  Seine  (11' 
ch.)  a  rendu  le  jugement  suivant  : 

Le  TRiBUNAL,Attendu  que  Longy  a,  le  7  août  1895,  pour  se  con- 
former à  la  loi  du  23  juin  i857,  déposé  au  greffe  du  Tribanal  de 
commerce  de  la  Seine  une  marque  dite  Rasoir  Idéal  destinée  à 
désigner  les  rasoirs  de  sa  fabrication,  indépendamment  de  jtootes 
formes  distinctiTes  ; 

Attendu  qu*il  résulte  du  constat  dressé  par  Leprince,  haissieri 
le  10  décembre  1898,  à  la  requête  de  Longy,  que  le  sieur  Bain 
fabrique  et  met  en  vente  une  espèce  de  rasoirs  qu*il  dénomme 
Vldéal  et  portant  cette  dénominatioa  inscrite  comme  marque  de 
fabrique  ; 

Attendu  que  Bain  ne  conteste  pas  ce  fait,  mais  qa*ii  prétend 
que  c*est  à  tort  et  sans  droit  que  Longy  le  poursuit  en  vertu  de 
l'article  8  de  la  loi  du  23  juin  1857  ;  qu'à  Tappui  de  sa  préten- 
tion, il  soutient  qne  Tadjectif  banal  et  usuel  Idéal  ne  saurait  cons- 
tituer une  propriété  exclusive,  étant  un  simple  qualificatif  du 
domaine  public  et  qu*en  tout  cas  aucune  confusion  ne  saurait  naî- 
tre de  remploi  simultané  de  ces  deux  dénominations  différentes 
Le  Rasoir  Idéal  d*une  part,  et  V Idéal  d'autre  part  ;  qu'eu  outre  les 
deux  rasoirs  ne  se  ressemblent  pas  :  Tun  étant  à  monture  de 
inétal  et  l'autre  à  monture  de  corne  ou  de  celluloïd  ; 
.    Mais  attendu  que  pour  déterminer  si  une  dénomination  est 
susceptible  ou  non  de  constituer  une  marque,  de  fabrique,il  faut 
8*attacher  au  point  de  savoir  si  elle'est  motivée  par  un  .élément 
usuel  et  nécessaire  du  produit  désigné,  ou  si,  au  contraire,  elle 
est  arbitraire  çt  de  pure  fantaisie  ;  que  c^est  dans  ce  dernier  cas 
seulement  qu*elle  peut  devenir  l'objet  d*une  propriété  exclusi- 
ve ;  qu'il  en  est  ainsi  certainement  dans  Tespèce  actuelle,radjec- 

(1)  Rappel  d'une  jurisprudence  constante  (voir  Pouillet,  Marq,  fàb., 
n.  104). 

'  (2)  La  dénomination  Idéale  a  été  protégée  comme  marque  pour  les 
bougies  (Trib.  corr.  Seine,  17.  novembre  1894). 


4  >  • 


—  295  — 

lif  Idéal  étant  de  pure  fantaisie  et  ne  se  rapportant  à  aucun  élé- 
ment du  rasoir  en  question  ;  qu*il  est  sans  intérêt  de  rechercher 
si  cette  ëpithète  a  pu  devenir  banale  par  suite  de  Tabus  qu'en  ont 
fait  les  exagérations  du  langage  industriel  ;  qu'il  suffit  de  cous* 
tater  que  le  défendeur  ne  démontre  pas  qu'elle  soit  tombée  dans 
le  domaine  public,  notamment  en  ce  qui  concerne  les  rasoirs  ; 
■    Attendu  d'autre  part  que,  s*il  est  vrai  que  la  confusion  ne  peut 
guère  se  concevoir  pour  la  personne  à  qui  les  deux  rasoirs  sont 
présentés  en  même  temps  et  qui  peut  en  constater  les  différeo* 
ces,  il  en  est  autrement  de  l'acheteur  non  averti  qui  veut  se  pro- 
curer un  rasoir  Idéal  parce  que  cette  marque  lui  aura  été  recom- 
mandée :  que  la  seule  chose  qui  frappe  et  qu'on  retienne  sera 
répithète  Idéal  sans  considérer  si  le  nom  nécessaire  et  usuel  du 
produit  y  est  ou  non  ajouté  ;  que  dé  même  lea  différences  de  forme 
ou  de  montures  de:  rasoirs  sont  sans  intérêt,  alors  surtout  que  le 
dépôt  n'est  limité  h  aucune  forme  particulière  et  qu'il  y  est  ex- 
pressément déclaré  au  contraire  que  la  marque  s'appliquera  aux 
rasoirs  fabriqués  par  Longy,  indépendamment  de  leur  forme  ; 

Attendu  qu'en  second  lieu  le  défendeur  invoque  ce  fait  qu'an- 
térieurement au  dépôt  de  Longy,  qui  est  du  7  août  1895,  il  avait 
lui-même  déposé  le  26  décembre  1894  une  marque  dénommée 
Idéal  machine  Bain^  destinée  à  des  rasoirs  ; 

Mais  attendu  que,  malgré  la  confusion  que  pourrait  faire  naî- 
tre ce  dernier  membre  de  phrase  des  conclusions  de  Bain,  ce  dé* 
pôt  s^appliquait,  non  à  des  rasoirs,  mais  à  une  machine,  destinée 
à  affiler  les  rasoirs  et  autres  instruments  tranchants  ;  qu'il  s'a- 
gissait donc  d'un  produit  diiïérent  et  que,  par  suite,  ce  dépôt  né 
saurait  constituer  une  antériorité  à  rencontre  de  celui  de 
Longy; 

-  Attendu  enfin  que  Bain  rappelle  que,  le  14  février  1894,  Longy 
a  pris  un  brevet  pour  un  rasoir  de  monture  métallique  qu'il  a 
dénommé  Rasoir  Idéale  mais  que,  n'ayant  pas  payé  les  annuités 
de  son  brevet,  il  en  a  été  déchu  le  14  février  1895  ;  qu'il  en  con- 
clut que  la  dénomination  désignant  le  produit  breveté  a  subi  le 
sort  du  brevet  et  qu'elle  est,  par  suite,  tombée  dans  le  domaine 
public  ; 

Mais  attendu  qu'ainsi  qu'il  a  été  ci-dessus  établi,  la  dénomina- 
tion Rasoir  Idéal  n'est  pas  une  dénomination  générique  et  né- 
cessaire du  produit  ;  qu'elle  est  au  contraire  tout  arbitraire  et 
de  fantaisie,  et  que  par  suite  elle  ne  saurait  être  considérée 
comme  étant  incorporée  au  produit  lui-même  pour  former  avec 
celui-ci  un  ensemble  indivisible  et  qu'elle  est  restée,  après  la 
péremption  du  brevet,  la  propriété  de  Longy,  lequel  a  manifesté 
•ou  intention  formelle  à  cet  égard  au  moyen  du  dépôt  sosdi^l^ 


—  296  — 

tlu  7  août  1895,  postérieur  par  conséquent  à  la  péremption  du 
"brevet  ; 

Attendu  qu'il  résulte  des  inscriptions  mômes  gravées  sur  les 
tasoir^  mis  en  vente  par  Bain  avec  la  mention  «  Idéal  »  qu'il  en 
'est  le  fabricant  ;  qu'en  outre  c*esten  pleine  connaissance  de  cause 
qu'il  a 'commis  Timitation  frauduleuse  de  marque  et  la  vente  de 
produits  frauduleusement  imités,  puisqu'il  avait  été  formelle- 
ment invité  h  y  mettre  fin,  suivant  sommation  à  lui  signifiée  le 
^  octobre  1898  ; 

Par  ces  motifs,  Gondatnne  Bain  à  50  francs  d'amende  et  à 
payera  Langy  500  francs  à  titre  de  dommages-intérêts,  ainsi 
qu'aux  dépens. 

Sur  appel  formé  par  Bain,  la  Cour  a  confirmé  la  sen- 
tence des  premiers  juges  en  ces  termes  : 

P  Sur  le  droit  de  Longy  à  la  marque  Rasoir  Idéal  : 

Considérant  que  Longy  a  pris,  à  la  date  du  14  février  1894, 
un  brevet  d'invention  ayant  pour  objet  un  rasoir  auquel  il  don- 
nait le  nom  de  Rasoir  Idéal  ; 

Considérant  que,  ce  brevet  ayant  été  frappé  de  déchéance  le 
14  février  1895,  par  sqite  du  non-paiemeni  de  l'annuité  échue  & 
cette  date,  la  désignation  Rasoir  Idéal  donnée  au  produit  breveté 
n'est  point,  à  raison  de  cette  seule  circonstance,  tombée  dans  le 
domaine  public  ;  qu'en  effet  cette  dénomination  n'était  point 
l'élément  générique  et  nécessaire  de  la  désignation  du  pro- 
duit.; 

Qu'elle  était,  au  contraire,  arbitraire  et  de  fantaisie  et  qu'elle 
était  nouvelle  quand  J^ongy  l'a  employée  pour  la  première  fois 
dans  9a  demande  de  brevet  ; 

Considérant  que  Longy  a  continué  à  désigner  les  rasoirs  fabri- 
<}ués  par  lui  depuis  février  1895  par  ladite  dénomination  de 
Rasoir  Idéal,  et  qu'il  est  établi  par  un  certificat  émanant  de  la 
imaison  Gelle,  et  par  une  facture  de  prospectus  émanant  de  l'im- 
primerie Durand,  de  Melun,  lesquelles  pièces  seront  enregistrées 
avec  le  présent  arrêt,  que  Longy  a  fait  usage  de  ladite  dénomi- 
nation pour  désigner  des  rasoirs  vendus  par  lui  depuis  lé  19  fé< 
Vrier  1894  jusqu'au  11  octobre  1898  ; 

*  Considérant  enfin  que  Longy  a  manifesté,  par  un  dépôt  régu- 
lier du  7  août  1895,  la  volonté  de  s'assurer  la  propriété  de  ladite 
dénomination  dont  il  est  établi  qu'il  faisait  usage  habituellement 
depuis  le  19  février  1894  ; 

^  Considérant  qu'il  résulte  de  ce  qui  précède  que  Longy  était 
seul  propriétaire  de  la  dénomination  Rasoir  Idéal,  lorsque  Schwob 
à  déposé,  le  3  décembre  1894,  la  marque  VIdéal  pour  être  ap« 


'^,- ..•* i'*.'***'  '^^ *i^ ^ 


» ,' 


—  297  — 

posée  sur  des  articles  de  coutellerie,  rasoirs,  ciseaux,  etc.,  et 
lorsque  Bain  a  déposé,  le  26  décembre  1894  la  marque  Vldéal^ 
machine  Bain,  destinée  à  être  appliquée  sur  des  rasoirs  ; 

Considérant  en  conséquence  que  ces  dépôts  de  marque  n^ont 
pu  porter  aucune  atteinte  au  droit  de  propriété  de  Longy  sur  la 
dénomination  Rasoir  Idéal  et  qu*ils  ne  constituent  point  au  re- 
gard du  plaignant  des  antériorités  de  nature  à  faire  tomber  dans 
le  domaine  public  la  dénomination  le  Rasoir  Idéal  antérieure- 
ment adoptée  et  employée  par  lai  et  lui  appartenant  ainsi  qu'il 
est  dit  plus  haut  ; 

-  Considérant  d'ailleurs  que  cette  dénomination  est  susceptible 
de  constituer  une  marque  de  fabrique,  ainsi  que  Font  établi 
les  premiers  juges  dont  la  Cour  adopte  expressément  les  motifs 
sur  ladite  question  ; 

Sur  la  prévention  : 

Considérant  qu'il  est  établi  par  un  procès-verbal  de  constat  de 
Leprince,  huissier  à  Paris,  du  10  décembre  1898,  que  Bain  a  mis 
en  vente  et  vendu,  à  ladite  date,  un  rasoir  en  métal  argenté  por- 
tant sur  Tun  des  côtés  du  fourreau  les  mots  déposé,  V Idéal,  bre<» 
▼été  S.  G.  D.  G,  et  sur  la  lame  elle-môme  la  suscription  sui- 
vante :  ce  VIdéal,  brevetés.  G.  D.  G.  »  ; 

Considérant  que  ces  indications  et  suscriptions  constituent 
une  imitation  de  la  marque  le  Rasoir  Idéal  appartenant  à  Longy 
et  que  cette  imitation  est  de  nature  à  établir  une  confusion  en- 
tre les  deux  produits  ; 

Considérant  de  plus  que  cette  imitation  a  été,  de  la  part  de 
Bain,  cherchée  et  voulue,  et  qu'elle  a  eu  pour  but  d'établir,  en- 
tre les  deux  produits,  la  confusion  obtenue  et  préjudiciable  aux 
intérêts  de  Longy  ; 

Considérant  en  effet  que  Bain  n'ignorait  pas  les  droits  de  Longy 
à  la  marque  dont  il  s'agit  ainsi  qu'il  résulte  d'une  lettre  de  lui  à 
Longy  en  date  du  27  octobre  1898,  laquelle  sera  enregistrée  avec 
le  présent  arrêt  ;  que  Longy  les  lui  avait,  au  surplus,  expressé- 
ment notifiés  et  rappelés  en  tant  que  de  besoin  par  une  somma- 
tion de  Guérin,  huissier  à  Paris,  du  26  octobre  1898  et  par  une 
lettre  chargée  en  date  du  30  octobre,  môme  année,  laquelle  sera 
enregistrée  ; 

Considérant  en  conséquence  que  Bain  s'est  rendu  coupable  du 
délit  d'imitation  frauduleuse  de  la  marque  de  fabrique  Longy  et 
qu'il  a  été  justement  condamné  de  ce  chef  par  les  premiers  juges, 
dont  la  Cour  adopte  les  motifs  en  ce  qu'ils  n'ont  rien  de  contraire 
à  ce  qui  précède  ; 

Par  ces  motifs.  Confirme.... 

,  M.  DiTTE,  président.  —  M*"  Charles  Constant  et  Decori^ 
avocats. 


—  298  — 
Art.  4221. 

Marciues  de  fabrique.  —  Dénomliiation  de  AuitaMe. 
—  Corieide.  —  Imitation  frauduleuse.  —  Abseace 
de  eonfVialoo.  —  Pouranite  imprudente.  —  Doumia- 

'  ffea-intéréta. 

Le  mot  Coricidê,  bien  qu'il  soie  tiré  des  qualités  niéme$ 
du  produit  fabriquée  bien  qu'il  éveille  Vidée  de  son  empUn^ 
ne  constitue  pas  la  dénomination  nécessaire  de  tout  topique 
contre  les  cors,  il  pourrait  donc  servir  de  marque  si  le  dé- 
posant justifiait  de  la  priorité  d'usage  (1). 

En  tout  cas  il  ne  saurait  y  avoir  condamnation  correc- 
tionnelle pour  imitation  frauduleuse  de  marque  lorsqu'au- 
çune  confusion  n'est  possible  entre  les  produits  (3). 

Une  poursuite  non  justifiée  devant  le  tribunal  correction" 
nel.bien  qu'elle  ne  soit  pas  à  qualifier  de  téméraire  et  vexa- 
toire^  peut  donner  lieu  à  des  dommages-intérêts  si  ellea  été, 
au  moins Mgèrement  et  imprudemment  engagée  et  il  y. a  lieu 
de  tenir  compte  du  préjudice  particulier  que  le  poursuivi  a 
subi,  à  raison  de  la  nature  de  sa  profession  (3). 

(Trib.  corr.  Cognac,  1*'  février  1899.  -*  Lebrun  c.  Pharmaciens 

de  Cognac.) 

Le  sieur  Lebrun,  pharmacien  à  Paris,  a  acquis,  en  1887, 
âe  la  Compagnie  générale  des  anliseptiques  la  marque 
Coricide  russe,  déposée  le  16  décembre  1882.  Il  poursui- 
vit d'abord  en  concurrence  déloyale  quelqu'un  qui  em- 
ployait la  marque  Coricide  français^  il  fui  débouté  de  sa 
demandé  (Paris^  24  octobre  189i,  Esménard,  Gaz.  Pal.t 
93.1.2,  2*  partie).  Puis  en  1893  il  renouvela  le  dépôt  en 
déclarant  revendiquer  aussi  la  dénomination  Coricide 
prise  isolément  et  fit  condamner  pour  imitation  fraudu- 
leuse de  marque  un  concurrent  qui  se  servait  de  l'expres- 
sion Vrai  coricide  (Paris,  4  février  1897,  Garùaud,  Gaz. 
PaL.,  13  mars  1897).  Il  introduisit  alors  toute  une  série 
de  poursuites    correctionnelles   contre  divers   pharma* 

(i)  Cf.  Pouillet,  Marq,  fab,,  n.  46. 

(2)  Cf.  Pouillel,  Marq,  fab,,  n.  iS\  ei  B,  I 

(3)  Pour  les  poursuites,  de  bonne  foi  mais  imprudentes,  cf.  en  ma- 
tière de  brevets,  Douai,  16  février  1852.*  Jiém.  comm.  et  tiuf.,  1858,  11, 
506  :  Dijon,  2  décembre  1886,  Ann.,  87.24  ;  Paris,  29  octobre  1888,  Ânn,, 
90.277. 


■jUMjiji. .w,.l^[t>JWiaiiPjnw wpv  }^mmsm\fffm^v 


—  299  — 

ciens  de  France  ;  il  obtint  gain  de  cause  devant  les  Tribu* 
•naux  d'Orléans  et  de  Poitiers  ;  il  fut  débouté  par  les 
Tribunaux  de  Toulouse  (11  novembre  1898,  Gaz.  Pal.^ 
28  décembre),  de  Sarlat  (3  décembre  1898]  et  de  Bagnères- 
de-Bigorre. 

Devant  le  tribunal  de  Cognac,  les  pharmaciens  pour- 
suivis arguaient  d'un  usage  du  mot  Coricide,  antérieur  au 
dépôt  initial  de  1882.  En  présence  de  cette  démonstration, 
M.  Lebrun  se  désista,  mais  les  prévenus,  repoussant  ce 
désistement^  ont  réclamé  reconventionnellement  des  dom- 
mages-intérêts. 

Jugement  en  ces  termes  : 

Le  Tribunal,  Sur  Faction  principale  : 

Attendu  qae  Lebrun,ces8ionnaire  de  la  compagnie  générale  des 
Produits  antiseptiques  et  excipant  du  dépôt  légalement  effectué 
d'une  marque  de  fabrique  consistant  en  la  dénomination  d'un  to« 
pique  pour  les  cors  désigné  et  connu  sous  le  nom  de  Coricide 
russe  ou  simplement  Coricide^  a  assigné  les  sieurs  Gorvaizier,  Har* 
mand,  Saint-Mëzard  et  Manseau  pour  s'entendre  condamner  aux 
peines  édictées  par  la  loi  sur  la  contrefaçon  et  Timitation  fraudu-* 
leuse  et  chacun' en  1,500  francs  de  dommages-intérêts; 

Attendu  que  les  défendeurs  reconnaissent  la  matérialité- des 
faits  relevés  à  leur  charge,  mais  dénient  à  Lebrun  tout  4roit  pri* 
vatif  à  i*usage  de  ladite  marque  ; 

Attendu  qu'il  est  de  principe  qu'une  dénomination  suflRt  à  cons- 
tituer une  marque  indépendamment  de  tout  signe  ou  emblème, 
de  toute  disposition  extérieure  si  elle  est  considérée  comme  suf- 
fisamment arbitraire  et  fantaisiste  ;  qu'en  l'état,  bien  que  le  mot 
Coricide  soit  tiré  des  qualités  mômes  du  produit  fabriqué,  bien 
qa'il  éveille  l'idée  de  son  emploi,  on  ne  saurait  soutenir  qa'il 
constitue  la  dénomination  nécessaire  de  toat  topique  contre  les 
cors  ;  que  ce  mot  donnant  au  produit  une  sprte  d'individualisation 
apparaît,  au  contraire,  comme  suffisamment  arbitraire  et  fantai- 
siste et  susceptible,  en  conséquence,  d'appropriation  privative  ; 

Mais,  attendu  que  fùt-il  établi  que  les  prévenus  avaient  con- 
naissance du  dépôt  Lebrun,  rien  dans  leurs  procédés  n'implique 
une  intention  frauduleuse  ;  qu'au  contraire  leur  effort  pour 
différencier  leur  spécifique  de  celui  de  Lebrun  et  éviter  toute  con- 
fusion résulterait  manifestement  tant  des  qualificatifs  Saint^Mar" 
iiriy  et  Charentais  dont  ils  font  suivre  le  mot  Coricide,  que  de  la 
forme  des  flacons,  que  de  la  coloration  des  liquides  et  de  la  na- 
ture des  enveloppes  ou  étuis  ; 

Attendu,  en  outre,  qu'au  cours  de  ses  explications,  Lebrun 


—  300  - 

Analysant  en  quelque  sorte  son  acte  de  dépôt  s'est  efforcé  de  dé- 
montrer que  l'adjonction  du  qualificatif  ru^se  était  sans  intérêt, 
le  mot  coricide  étant  la  partie  prédominante,  Télément  caracté* 
ristique  et  substantiel  de  sa  marque  ;  il  convient  poar  Texamen 
de  l'argument  d'antériorité  de  retenir  cette  reconnaissance  ; 

Attendu  qae  la  doctrine  et  la  jurisprudence  enseignent  que  les 
caractères  essentiels  de  toute  marque  sont  la  spécialité  et  la  nou- 
veauté ;  que  la  propriété  d'une  marque  résulte  de  la  priorité  et 
de  la  continuité  de  son  usage  exclusif  et  que  le  dépôt,  simple- 
ment déclaratif,  ne  crée  qu'une  présomption  de  propriété  qui 
tombe  devant  la  preuve  d'un  usage  antérieur; 

Attendu  qu'il  est  constant,  en  fait,  que  dès  1880,  c'est-à-dire 
deux  ans  avant  le  dépôt,  effectué  le  16  décembre  1882  par  la  So- 
ciété des  Antiseptiques,  auteur  Lebrun,  le  mot  Coricide  était  en 
usage  ; 

Attendu,  en  effet,  qu'au  résultat  d'un  interlocutoire  rendu  par 
le  Tribunal  de  Cognac,  à  la  date  du  14  décembre  dernier,  les  sieurs 
Coulouma,  pharmacien,  Viguier  et  Sévère,  docteurs- médecins, 
ont  été  rogatoirement  entendus  à  Béziers  ;que  Coulouma  a  déclaré 
que,  dès  1878,  il  fabriquait  un  spécifique  contre  les  cors  qu'il  dé- 
nommait Corricide  Coulouma  ;  qu'à  Tappui  de  son  dire  il  a  montré 
et  remis  deux  ordonnances,  l'une  du  21  août  1880,  du  D'  Vi- 
guier, prescrivant  tin  flacon  du  Corricide  Coulouma;  l'autre  da 
21  mars  1881,  du  D'  Sévère,  où  on  lit  :  Corricide  de  votre  eom' 
position; 

Attendu  que  ces  deux  ordonnances  dont  le  papier  maculé  at- 
teste l'ancienneté  ont  été  présentées  à  leurs  signataires,  les  D** 
Viguier  et  Sévère  susnommés,  qui,  sous  la  foi  du  sermenl.en  ont 
proclamé  l'absolue  sincérité  et  la  parfaite  authenticité  ;  que  ces 
deux  documents,  produits  pour  la  première  fois  en  justice,ont  été 
timbrés  et  enregistrés  à  Cognac,  le  lendemain  de  leur  dépôt  au 
greffe  et  communiqués  à  Lebrun  avec  indication  d'une  audience 
ultérieure  pour  les  discuter; 

Sur  le  désistement  : 
'  Attendu  qu'en  présence  de  cette  antériorité  démontrée,  Lebrun 
par  des  combinaisons  où  se  voient  des  réserves,  des  restrictions 
et  môme  la  méconnaissance  formelle  de  la  sincérité  des  docu- 
ments devant  lesquels,  par  une  étrange  contradiction,  il  croit 
cependant  devoir  s'incliner  a  offert-de  se  désister,  mais  en  per- 
sistant à  requérir  la  condamnation  des  prévenus  en  tous  les 
dépens  ; 

Attendu  qu'un  pareil  système  ne  mérite  pas  examen  et  qu'il 
y  a  lieu,  faisant  droit  au  refus  d'acceptation  des  prévenus,  de 
repousser  un  désistement  présenté  dans  ces  termes,  d'autant  que 
le  tribunal  est  saisi  d'une  demande  reconventionnelle  pour  abus 


m.:Hi^,«f^^lM'*W' 


-r^- 


-sol- 
de citation  directe,  demande  dont  il  convient  d'examiner  la 
portée  ; 

Sur  la  demande  reconventionnelle  : 

Attendu  que,  si  l'action  de  Lebrun  ne  peut  être  considérée 
comme  téméraire  et  vexatoire,  on  ne  saurait  contester  qu'elle  a 
été  légèrement,  imprudemment  engagée  ;  que  le  seul  fait  de  Tan- 
tériorité  démontrée  suffit  à  établir  la  négligence  de  Lebrun  qui, 
avant  de  traîner  les  prévenus  devant  une  juridiction  pénale,  avait 
le  devoir  de  s'assurer  par  tous  les  moyens  d'investigation  de  la 
réalité  de  son  droit  exclusif,  notamment  par  une  recherche  mi- 
nutieuse des  antériorités  possibles  ;  que  ce  défaut  de  contrôle 
préalable  constitue  une  faute  aggravée  par  cette  considération 
que  Lebrun,  ayant,  aux  termes  de  la  loi  de  1857,  l'option  entre  la 
juridiction  civile  et  la  juridiction  correctionnelle,  n'a  pas  hésité 
à  saisir  celle  dernière,  sans  avoir  égarcl  à  la  bonne  foi  de  ses 
adversaires  ; 

Attendu  que  de  toutes  les  professions  libérales,  nulle  autant 
que  celle  de  pharmacien  n'est  subordonnée  à  la  confiance  que  le 
titulaire  inspire  au  public,  la  clientèle,  hors  d'état  de  contrôler 
la  qualité  des  produits  et  la  fidèle  exécution  des  ordonnances^ 
recherchant  l'homme  capable  et  surtout  l'homme  scrupuleux  ; 
qu'en  conséquence,  la  moindre  suspicion  est  de  nature  à  jeter  un 
discrédit  sur  un  pharmacien  et  à  porter  une  grave  atteinte  à  ses 
intérêts  matériels  ;  que  s'il  est  impossible,  en  fait,  d'apprécier 
sous  ce  rapport  l'étendue  du  dommage,  on  ne  saurait  méconnaître 
que  dans  le  procès  retentissant  intenté  par  Lebrun  aux  pharma- 
ciens de  Cognac,  l'obligation  de  répondre  en  personne  à  l'inculpa- 
tion dirigée  contre  eux  constitue  un  indéniable  préjudice  moral  ; 
qu'ainsi  les  deux  éléments  susceptibles  de  donner  ouverture  à  des 
dommages-intérêts  se  rencontrent  en  l'espèce:  la  faute  et  le 
préjudice  ; 

Par  CES  motifs. 

Le  tribunal,  après  délibéré,  jugeant  en  matière  correctionnelle 
et  en  premier  ressort,  dit  n'y  avoir  lieu  d'accueillir  le  désistement 
offert  par  Lebrun  ;  renvoie  les  sieurs  Gorvaizier,  Harmand,  Saint-» 
Mézard  et  Mauseau  des  fins  de  la  plainte  ; 

Condamne  Lebrun  en  tous  les  dépens  ; 

Et,  statuant  sur  la  demande  reconventionnelle,  condamne 
Lebrun  à  payer  à  chacun  des  prévenus  acquittés  la  somme  de 
50  francs,  à  titre  de  réparation  civile. 

Présidence  de  M.  Saioe.  — Avocats  :  M**  Emile  Foucault 
(du  barreau  de  Paris)  et  Pinaud-Martinr. 


—  302  — 


Art.   4222. 

Marqaea  de  Aibrltiae.  '—  Dénomlnatloii  de  tentalste. 

—  4c  Bloe  >►  pour  im  «Avon. 

L'industriel  qui  a  déposé  la  dénomination  Bloc  Hyalin 
pour  un  produit  solide  à  Vacide  borique  et  à  la  glycérine, 
destiné  à  calmer  l'irritation  produite  à  la  peau  parkrasoir, 
peut  faire  interdire  Vusage  des  expressions*  Bloc  Kremlin», 
c  Crislal  Bloc  »,  c  Bloc  antiseptique  »,  lesquelles  sont  des 
contrefaçons,  car  le  mot  t  Bloc  »  doit  être  considéré  comme 
un  des  éléments  essentiels,  caractéristiques  et  appropria- 
bles^  de  la  marque  déposée  (1). 

(Trib.  civ.  Seine,  10  novembre  1899.  —  Dalbis  a.  Juste,  Perrier  et  Wolf.) 

La  3*"  chambre  du  Tribunal  civil  de  la  Seine,  sous  la  pré- 
sidence de  M.Lefebvrb-Devaux,  a  rendu,  sur  plaidoiries  de 
M«  H.  Allart  pour  le  demandeur,  de  M«*  Félicibn  Paris  el 
Cabn  pour  les  défendeurs,  à  la  date  du  10  novembre  1899, 
le  jugement  suivant  : 

Le  Tribunal,  Adjugeant  le  proQt  du  défaut  prononcé  le  24  ami 
1899,  etc.,  donne  de  nouveau  défaut  contre  Juste  qai,  quoique 
régulièrement  réassigné,  n^a  pas  constitué  avoué,  et  statuant 
à  regard  de  toutes  les  parties  contradictoirement  : 

Attendu  que,  pour  désigner  un  produit  spécial  de  sa  fabrica- 
tion, Dalbis  a  adopté  la  dénomination  :  Bloch  Hyalin  et  en  a  fait, 
le  21  février  1896,  au  greffe  du  Tribunal  de  commerce  de  la 
Seine,  le  dépôt  régulier  ;  qu'il  prétend  s'être  approprié  cette 
expression  pour  distinguer,  dans  le  commerce  de  la  parfumerie, 
une  sorte  de  savon  qu'il  produit  à  Taide  de  glycérine  et  d'acide 
borique  ; 

Attendu  que  la  dénomination  fi/oc  donnée  par  Dalbis  à  un 
objet  de  sa  fabrication  est  susceptible  de  constituer  une  pro- 
priété, puisqu'elle  n'est  pas  un  terme  générique  naturel  et  né- 
cessaire pour  la  désignation  d'un  produit  ;  qu'elle  est  nouvelle 
dans  l'industrie  de  la  parfumerie  où  l'on  en  fait  usage  pour  la 
première  fois  ;  que  le  mot  Bloc,  pris  isolément,  constitae,  dans 
le  sens  de  la  loi  du  23  juin  1857,  l'élément  essentiel  et  caracté- 
ristique de  la  marque  du  demandeur;  que  c'est  sous  ce  nom 
que  le  produit  est  connu,  qu'il  est  demandé  ; 

|i)  Voir  les  articles  qui  précèdent. 


'\ 


—  303  — 

Atlendu  que  les  défendeurs,  Juste,  Perrier  et  Wolf^  en  livrant 
au  commerce  un  produit  de  leur  fabrication  sous  le  nom  de  Bloc, 
Kremlin  f  Cristal  Bloc  y  Bloc  antiseptique  se  sont  appropries  une 
marque  qui  n^était  pas,  comme  ils  le  soutiennent,  dans  le  com- 
merce, ont  contrevenu  aux  dispositions  de  la  loi  précitée,  ont 
causé  à  Dalbis  un  préjudice  dont  ils  lui. doivent  réparation  ;  \ 

Attendu,  en  ce  qui  touche  les  dommages-intérêts  réclamés  à 
Perrier,  qu'il  convient  de  retenir  que  le  défendeur  a  pris  une 
dénomination  qui,  par  sa  signification,  présente  avec  celle  dont 
le  demandeur  est  propriétaire,  de  grande  analogie  :  Hyalin  étant 
synonyme  de  Cristal;  qu'en  outre,  pour  préconiser  son  produit, 
il  s'est  prévalu  de  «  médailles  auxquelles  il  n'a  aucun  droit, 
puisqu'elles  auraient  été  obtenues  avant  la  création  même  du 
produit  »  ;  qu'il  a  ainsi  commis  une  infraction  à  la  loi  de  1886  ; 

Attendu  que  le  tribunal  aies  renseignements  nécessaires  pour 
fixer  le  montant  du  préjudice  causé  par  chacun  des  défendeurs 
à  Dalbis  ; 

'  Par  ces  motifs,  Déclare  Juste,  Perrier  et  Wolf  contrefacteurs 
de  la  marque  de  fabrique  du  21  février  1896  ; 

Leur  fait  défense  d'employer  le  mot  Bloc  pour  désigner  des 
produits  analogues  à  ceux  du  demandeur  ; 

Fait  défense  à  Perrier  de  mentionner  sur  lesdits  produits  des 
médailles  dont  la  nature  n'est  pas  indiquée  ; 

Condamne,  pour  le  préjudice  causé  au  demandeur,  savoir: 
Perrier  à  1,000  francs,  Wolf  et  Juste  chacun  à  500  francs  de 
dommages-intérêts  ; 

^  Ordonne  l'insertion  du  présent  jugement  dans  deux  journaux 
aux  frais  des  défendeurs,  sans  que  le  coût  de  chaque  insertion 
puisse  excéder  iOO  francs  ; 

Condamne  les  défendeurs  conjointement  et  solidairement  aux 
dépens.  i 


Art.  4223. 

Marques  do  Ikbriqué.  —  Dénomination  do  fantal^ 
aie.  —  Cordon  rouiro.  —  Bmplol  llolte  d'un  rnban- 
rougo. 

Lorsque  l'emploi  d'un  ruban  rouge  pour  rhabillage  des 
bouteilles  de  liqueur  est  tombé  dans  le  domaine  public^ 
si  la  dénomination  Cordon  rouge  peut  encore  constituer 
une  marque  de  fabrique^'  en  tous  cas  V emploi  d'un  ruban 


—  304  — 

rouge  y  pour  V  habillage  de  la  bouteille  ^  ne  constitue  pat  la 
contrefaçon  de  cette  marque  (1). 

(Trib.  civ.  Ramboaillet,  28  mai  1897.  —  Marnier-Laposkolle  c. 

Kerckhoven  et  Lebard.) 

Jugé  en  ces  termes  : 

Lb  Tribunal, Attendu  que^par  exploit da  3i  juillet  1896,  Marnier* 
Lapostoile  a  assigné  devant  ce  tribunal  KerckhoTen  et  Lebard, 
distillateurs  à  Neauphle-le  Château,  pour  voir  dire  que  ceux-ci 
s'étaient  rendus  coupables  d'asnrpation  de  marque,  ainsi  que 
d'usurpation  de  médailles  et  de  concurrence  déloyale  et  qa'il 
leur  serait  défendu  à  Tavenir  d'employer  la  dénomination  de 
Ruban  rouge  et  rhabillage  spécial  à  Maroier-Lapostolle  des  bou- 
teilles de  curaçao,  comme  aussi  d'annoncer  sous  quelque  forme 
que  ce  soit  la  médaille  de  TExposition  de  Bordeaux  qu^ils  pré- 
tendent faussement  avoir  obtenue  ; 

Attendu  que,  pour  réparation  du  préjudice  que  lui  auraient 
causé  ces  usurpations  et  cette  concurrence  déloyale,  le  deman- 
deur conclut  à  Tallocation  de  150,000  francs  de  dommages-inté- 
rêts et  à  rinsertion  du  jugement  ; 

Attendu  que  Kerckhoven  et  Lebard  opposent  une  6n  de  non- 
recevoir  à  la  demande  de  Marnier  :  qu'ils  prétendent  qu'à  la 
date  du  31  juillet  précité,  la  société  en  nom  collectif  «  Kerckho- 
ven et  Lebard  »  n'existait  plus  ;  que  Kerckhoven  ayant  cédé  ses 
droits  à  un  sieur  Gauret,  il  s'était  formé  une  nouvelle  société 
sous  la  raison  sociale  Lebard  et  Gauret  »  ;  qu'à  l'appui  de  leur 
prétention  ils  produisent  le  Journal  VIndépendant  de  Rambouillet 
contenant  publication  de  l'extrait  de  l'acte  constitutif  de  la  nou- 
velle société  ; 

Mais  attendu  que  le  numéro  dudit  journal  porte  la  date  du 
7  août  1896,  que  la  publicité  est  postérieure  à  l'assignation  déli- 
vrée à  la  requête  de  Marnier,  que  par  suite  la  fin  de  non-rece- 
voir  doit  être  rejetée  ; 

Sur  la  demande  principale  en  murpation  de  marque  : 

Attendu  que  Marnier  a  déposé  au  greffe  du  Tribunal  de  Ram- 
bouillet le  20  août  1894,  comme  marque  de  fabrique  destinée  & 
distinguer  un  curaçao  de  sa  fabrication,  la  dénomination  At<6an 
rouge  indépendamment  de  toute  forme  distinctive  ; 

Attendu  qu'il  n'est  pas  douteux  qu'une  dénomination  constitue 
une  marque  et  que  Marnier  a  un  droit  privatif  sur  cette  marque  ; 

Attendu  que  Marnier  prétend  que  Kerckhoven  et  Lebard  pré- 


(1)  Ce  jugement  a  été  cité  aux  Ann.^  98.155,  note  3,  comme  frappa 
d'appel.  Il  est  devenu  définitif,  nous  le  pubUons. 


^"•vV 


—  305  — 

sentent  et  vendent  au  public  sous  cette  dénomination  Ruban 
rouge  un  curaçao  de  leur  fabrication  ;  qu'il  se  prévaut  à  Tappui 
de  sa  prétention  de  quatre  procès-verbaux  de  constat  et  d'un  pro- 
cès-verbal de  saisie  opérée  chez  les  défendeurs  :  qu'il  a  fait  cons- 
tater le  iO  juillet  1896  que  Edmond  Néel  avait  à  Paris  vendu  à 
un  de  ses  mandataires,  qui  avait  demandé  du  curaçao  Ruban 
rouge  un  flacon  de  curaçao  Eerckhoven  orné  d'un  ruban  rouge  ; 
que  le  même  jour  il  a  fait  faire  la  même  constatation  à  Paris 
chez  M.  Pênes  ; 

Que  Je  20  juillet,  il  a  fait  faire  une  autre  constatation  du  même 
genre  à  Neauphle-le-Chàteau  au  domicile  de  la  veuve  Laine  ; 

Attendu  qu'aucun  de  ces  flacons  ne  porte  la  dénomination  de 
Ruban  rouge,  qu'en  admettant  que  ces  constatations  puissent 
faire  preuve  contre  Néel,  Pênes  et  veuve  Laine  qui  ne  sont  pas 
en  cause,  il  ne  saurait  en  être  de  même  vis-à-vis  de  Kerckhoven 
et  Lebard  alors  qu'il  n'est  pas  établi  par  ces  constats  qu'ils 
aient  personnellement  vendu  leur  produit  sous  cette  dénoroina- 
tion,ni  que  les  différentes  personnes  susnommées  aient  agi  comme 
mandataires  ou  dépositaires  de  la  société  Kerckhoven  et  Lebard  ; 
qu'il  s'agit  d'un  fait  personnel  qui  ne  peut  être  mis  à  la  charge 
des  défendeurs  comme  s'il  s'agissait  d'une  imitation  frauduleuse 
qui  serait  leur  œuvre  et  qui  serait  trouvée  chez  un  tiers  ; 

Attendu  que  Marnier-LapostoUe  a  en  outre  fait  constater,  le 
20  juillet  1896  que  l'un  des  associés  de  la  société  Kerckhoven  et 
Lebard  avait,  dans  un  magasin  de  ladite  société  à  Neauphle- 
le-Ch&teau,  vendu  à  l'un  de  ses  mandataires  qui  avait  demandé 
du  curaçao  Cordon  rouge,  3  flacons  de  curaçao  Kerckhoven  ornés 
d'un  ruban  rouge  ; 

Attendu  que  Kerckhoven  et  Lebard  n'ont  pas  été  assignés  pour 
usurpation  de  marque  Cordon  rouge,  mais  pour  usurpation  de 
marque  Ruban  rouge  ; 

Attendu,  au  surplus,  que  Marnier  n'a  fait  aucun  dépôt  comme 
marque  de  fabrique  destinée  à  distinguer  un  curaçao  de  sa  fa- 
brication, de  la  dénomination  Cordon  rouge  ;  qu'il  oppose,  il 
e%i  vrai,  un  jugement  du  Tribunal  de  la  Seine,  du  19  novem- 
bre 1896  qui  a  admis  que  la  dénomination  Cordon  rouge  appli- 
quée à  un  curaçao  appartenait  à  Marnier  exclusivement,  comme 
ayant  le  premier  employé  cette  dénomination  ; 

Mais  attendu  qu'il  n'est  pas  établi  que  le  jugement  soit  devenu 
déûnitif  et  que,  le  fut-il,  l'assignation  délivrée  à  Kerckhoven  et 
Lebard  et  les  conclusions  ne  visent  pas  Tusurpationde  la  déno- 
mination Cordon  rouge  ; 

Attendu  que,  par  ordonnance  du  président  du  tribunal  civil, 
en  date  du  23  juillet  1896,  Marnier  a  été  autorisé  à  procéder  à 
la  saisie  de  tous  les  récipients  ou  flacons  de  curaçao  portant 


—  306  — 

la  marque  Ruban  rouge  au  domicile  et  dans  les  magasins  de 
Kerckhoven  et  Lebard  ; 

Attendu  que  le  procès-verbal  de  saisie  ne  constate  pas  qa'il 
ait  été  trouvé  des  récipients  ou  flacons  portant  la  dénomination 
Ruban  rouge  qu'il  constate  seulement  que  l'huissier  a  saisi  pour 
en  faire  la  description  un  flacon  portant  la  dénomination  CuTa- 
çao  Kerckhoven  et  orné  d*un  ruban  rouge  ; 

Que  de  cette  saisie  ne  résulte  donc  pas  la  preuve  de  Tusorpa- 
tion  par  Kerckhoven  et  Lebard  de  la  dénomination  Ruban  rouge  ; 
Que  cette  preuve  ne  résulte  pas  davantage  des  termes  da  pro- 
cès-verbal comme  le  prétend  Marnier;  qu*en  effet  si  sur  la  som- 
mation de  Thuissier  de  lui  remettre  du  curaçao  Ruban  rougeh 
dame  Lebard  lui  a  remis  un  flacon,  parce  qu*il  était  orné  d'un 
ruban  rouge,  il  n'eu  ressort  nullement  qu'elle  ait  entendu  par 
là  reconnaître  que  le  curaçao  de  la  société  était  vendu  sous  celte 
dénomination  ; 

Qu'il  a  été  justifié  que  Kerckhoven  et  Lebard  avaient  dans  de 
nombreux  documents  présenté  et  vendu  leur  produit  ainsi  dé- 
nommé Curaçao  Kerko  rouge  ou  Curaçao  Kerko  6/anc,  suivant 
rhabillage,  qu'aucuns  documents  contraires  n'ont  été  produits 
soit  au  point  de  vue  de  la  publicité,  soit  au  point  de  vue  de  la 
vente  ; 

Attendu  que  la  similitude  dans  l'habillage  particulier  des  fia* 
cons  par  l'emploi  des  rubans,  faveurs  ou  liserés  rouges,  sans  que 
Kerckhoven  et  Lebard  désignent  cet  habillage  par  une  déno- 
mination spéciale  à  Mamier,  ne  saurait  non  plus  être  retenu  con- 
tre eux  ; 

Qu'en  effet  Kerckhoven  et  Lebard  soutiennent  que  rhabillage 
par  l'emploi  d'un  ruban  rouge  est  tombé  dans  le  domaine  public 
et  qu'ils  se  prévalent  à  l'appui  de  leurs  dires  des  antériorités 
Guilot  et  Cointrot  qui  n'ont  pas  été  contredits  par  Marnier; 
qu'au  surplus  l'habillage  du  flacon  Marnier  a  lieu  par  l'emploi 
d'un  ruban  rouge  moiré  tandis  que  celui  du  flacon  Kerko  a  lieu 
par  l'emploi  d'un  liseré  de  faveur  rouge^  moins  large,  moins 
épais  et  uni  ; 

Sur  la  concurrence  déloyale  : 

Attendu  que  Marnier  prétend  que  la  vue  seule  des  bouteilles 
suffit  à  établir  la  recherche  de  la  confusion  ; 

Attendu  que  de  l'examen  des  flacons  concurrents  il  résulte  que 
des  ressemblances  existent  assurément; 

Qu'ainsi  ils  sont  surmontés  l'un  et  l'autre  d'un  cachet  de  cire 
rouge,  qu'ils  ont  une  capsule  de  parchemin  et  que  la  disposition 
du  ruban  rouge  qui  les  orne  est  à  peu  près  la  même  ;  que  ce 
ruban  part  du  goulot,  entoure  le  col  du  flacon,  passe  sous  un  ca- 
chet rouge  pour  se  perdre  sous  l'étiquette  placée  en  dessous; 


—  307  — 

mais  qae  ie  col  de  la  bouteille  Kerko  est  droit,  tandis  que  celui 
de  la  bouteille  Marnier  offre  des  renflements  et  quil  se  forme 
un  renforcement  dans  lequel  est  passé  et  retenu  le  ruban  autour 
de  la  bouteille  ; 

Attendu  que  si  ces.  ressemblances  dans  quelques  détails  ont 
été  voulues  et  rechercbées  comme  le  prétend  Marnier,  encore 
faut-il  qu'elles  puissent  amener  la  confusion  ;  qu'il  n'apparatt 
pas  pour  le  tribunal  qu'elles  puissent  tromper  un  acheteur 
même  inattentif  et  faire  confondre  les  deux  produits  ; 

Attendu  en  effet  qu'il  existe  des  dissemblances  capitales  qui 
sont  de  nature  à  empêcher  la  confusion  en  donnant  aux  flacons 
un  aspect  d'ensemble  absolument  différent  ;  que  c'est  ainsi  que 
la  différence  de  forme  des  deux  flacons  présentés  même  séparé- 
ment doit  frapper  aussitôt  la  vue  ;  que  le  flacon  Kerko  porte 
dans  le  commerce  le  nom  de  forme  droite  tandis  que  ie  flacon 
Marnier  porte  le  nom  de  forme  marteau  ; 

Attendu  d'autre  part  qu'il  n'existe  entre  les  étiquettes  aucune 
analogie  de  forme,  de  dimensions,  de  dispositions  générales  ou 
de  détail  et  de  coloration,  que  sur  le  flacon  Marnier  l'étiquette 
est  apposée  au  bas  du  flacon,  que  les  mots  Grand  Marnier  se  dé- 
tachent en  blanc  sur  le  fond  sombre  de  l'étiquette  et  parallèle- 
ment à  la  base  du  flacon  ;  que  sur  le  flacon  Kerko  au  contraire 
l'étiquette,  de  dimensions  beaucoup  plus  grandes  et  placée  en 
haut,  est  de  couleur  blanche  sur  laquelle  se  détachent,  différents 
des  premiers  et  de  couleur  rouge  avec  initiales  noires,  les  mots 
Curaçao  Kerko  ; 

Que  les  contre-étiquettes  sont  comme  les  étiquettes  absolu- 
ment différentes  de  forme,  de  dimensions  et  de  dispositions  ; 

Qu'il  n'apparaît  donc  pas  pour  le  Tribunal  qu'une  confusion 
puisse  se  produire  ; 

Sur  l'usurpation  de  médailles  : 

Attendu  que  Kerkhoven  et  Lebard  justifient  être  légitimement 
propriétaires  des  récompenses  dont  ils  se  prévalent  et  qui  leur 
ont  été  décernées  au  concours  de  Bordeaux  1895  ; 

Sur  la  demande  reconventionnelle  : 

Attendu  que  l'action  dirigée  par  Marnier  contre  Kerkhoven  et 
Lebard  n*a  pas  été  introduite  de  mauvaise  foi  comme  le  préten* 
dent  ces  derniers,  qu'au  surplus  les  demandeurs  reconveution- 
Bellement  ne  justifient  d'aucun  dommage,  qu'il  y  a  donc  lieu  de 
les  débouter  de  leur  demande  ; 

Par  ces  motifs,  Déclare  Marnier  mal  fondé  dans  ses  différen- 
tes demandes  ;  l'en  déboute. 

M.  JoLioT,  président.— Plaidants  :  M"  Maunodry,  avocat 
du  barreau  de  Paris,  et  Lambert,  avoué. 


-»--_;i% '-•»-•  ^w 


308  — 


Art,  4224. 

MMHiaes  de  Aibrlqae«.  —  Dénominatioiis.  —  <7aeao 

Cboava.  —  Domaine  publie. 

Apprécie  souverainement  les  faits  V arrêt  qui  constate  que, 
avant  le  dépôt  de  la  dénomination  Cacao  Chouva,  prise  iso- 
lément comme  marque,  cette  dénomination  était  exploitée 
par  divers  fabricants  de  liqueurs,  qui  tous  s'en  servaient 
librement  selon  leur  fantaisie  et  leurs  besoins^et  que  Pinven- 
teur  de  la  dénomination  a,  jusqu'à  sa  mort,  gardé,  à  Végard 
de  ces  fabricants,  un  silence  qui  implique  la  reconnaissance 
des  droits  du  domaine  public  (1). 

(C.  de  cass.,  req.,  29  janvier  1900.  —  Gros»  e.  Toussai nl-Cosnard  et  O.) 

(1)  La  véritable  difficulté  n*apparait  pas  dans  Tarrét  de  la  Cour  de 
cassation  ;  mais  elle  résultait  de  Texposé  même  des  faits  dans  Tarrèt  de 
la  Cour  de  Bordeaux.  Elle  consiste  en  ce  que  la  dénomination  Cacao- 
Chouva  avait  bien  été  employée  pour  la  première  fois  par  Dro7,  aux 
droits  de  qui  était  le  demandeur,  qu'il  n*avait  cessé  de  l'exploiter  et 
avait  disposé,  dès  1862,  puis  à  diverses  reprises,  une  étiquette  dans 
laquelle  figurait  cette  dénomination,  qu'il  avait,  dès  1867,  poursuivi  des 
contrefacteurs  de  son  étiquette,  mais  qu'il  n'avait  déposé  la  dénomina- 
tion, prise  isolément,  qu'en  1896.  La  Cour  de  cassation  ne  semble  pas 
tenir  compte  de  l'appropriation,  antérieure  au  dépôt,de  la  dénomination 
isolée  ni  de  ce  fait  qu'une  dénomination  peut  être  considérée  comme  un 
des  éléments  essentiels  d'une  étiquette  déposée.Or  il  est  admis  couram- 
ment par  la  doctrine  et  la  jurisprudence  que  l'emploi  d'une  marque, 
donc  d'une  dénomination,  pour  un  produit,  est  une  appropriation  qui 
confère  un  droit  sanctionné  par  l'article  1382  du  Code  civil  (Pouillet, 
Marq.  fab.y  n*  102  et  s.).  Le  propriétaire  de  cette  marque-dénomination 
n'entendait  évidemment  pas  l'abandonner  quand  il  déposait  des  éti- 
quettes où  elle  figurait  et  poursuivait  les  concurrents  qui  imitaient  ces 
étiquettes.  11  a  même  été  jugé  que  le  dépôt  d'une  étiquette  comprenant 
une  dénomination  parmi  ses  éléments  essentiels,  équivalait  à  nne  re- 
vendication de'  cette  dénomination,  et  que  celui  qui  empruntait  la  dé- 
nomination sans  les  autres  éléments  de  l'étiquette,  commettait  une 
contrefaçon  ^Amiens,  8  novemjare  1898,  Châtelain,  i4nn.,  98.269  ;  cf.  Be- 
sançon, 6  août  1879,  Serve^  Anti,,  79.214  et  décisions  citées  par  Pouillet, 
Marq.  fab.^  n9  140;  voir  encore  la  revendication  implicite  du  mot  Bloc 
tout  seul,  dans  la  dénomination  Bloc-Hyalin,  iuprà^  p.  802).  Les  dépôts 
des  étiquettes  auraient  donc  dCi  à  eux  seuls,  suffire  à  conserver,  dans 
Tespèce,  la  dénomination  comme  marque  au  profit  du  déposant  et  le 
fait  de  n'avoir  pas  poursuivi  les  concurrents  qui  usurpaient  la  dénomi- 
nation sans  imiter  l'étiquette  aurait  pu  être  considéré  dans  ces  condi- 
tions comme  insuffisant,  à  lui  seul,  pour  constituer  l'abandon  (voir, 
pour  les  faits  constitutifs  de  l'abandon,  Pouillet,  jlfar^.  fab.,  n«  81). 

On  comprend  donc  aisément  que  la  Cour  de  Lyon  ait  pu  donner  une 
solution  contraire  à  celle  de  la  Cour  de  Bordeaux  et  reconnaître  un 
droit  privatif  sur  la  dénomination  «  Cacao  Chouva  •  (C.  de  Lyon,  fô  fé- 
vrier 1892,  Mon.jvd,  Lyon,  22  avril  ;  cf.  Trib.  cit.  Lyon,  14  décembre 


•■'■^  T  m^'^^     "i^  -  VT 


f  •  • 


-  309  — 

La  Cour  d'appel  de  Bordeaux,  à  la  date  du  21  mai  1898, 
a  rendu  l'arrêt  suivant  : 

La  Cour,  Attendu  que,  par  l'effet  de  Tappel  incident  formé 
par  les  parties  de  M^  Blay,  la  Cour  est  saisie  de  tout  litige  ; 

Que  la  cause  est  eu  état  de  recevoir  une  solution  définitive 
sans  attendre  les  résultats  de  Tenquète  ordonnée  par  les  pre- 
miers juges  ; 

Qu'il  y  a  lieu  de  statuer  au  fond  sur  tous  les  chefs  de  la  de- 
mande ; 

l. —  En  ce  qui  concej'tie  la  dénomination  de  la  marque  »  Cacao 
Chouva  »  : 

Attendu  qne  sans  contredit  cette  dénomination,  quelle  qu'en 
soit  Torigine,  était  susceptible,  par  son  originalité,  de  constituer 
une  marque  ;  mais  qu*il  faut  retenir  que  la  maison  Gross-Droz 
ne  l'a  revendiquée  comme  signe  distinctif  qu'à  partir  du  8  avril 
1895,  date  du  dépôt  spécial  qui  en  a  été  fait  ; 

Que  jusque  là,  la  dénomination  dont  il  s'agit  n'a  été  exploitée 
et  revendiquée  qu'en  tant  qu'elle  était  incorporée  dans  les  éti- 
quettes et  marques  qui  ont  fait  l'objet  de  la  part  de  Ja  maison 
Gross-Droz  des  dépôts  successifs  de  1862, 1878,  1888  et  1894  ; 

Qu'à  J a  vérité  la  dénomination  «  Cacao  Chouva  »  constitue  l'un 
des  éléments  essentiels  de  ces  étiquettes  et  qu'à  ce  titre  il  y  a 
lieu  de  rechercher  si  elle  est  entrée  dans  le  patrimoine  du  re- 
vendiquant à  titre  privatif  ou  si  elle  n'a  été  par  lui  possédée 
qu'en  concours  et  partage  avec  le  domaine  public; 

Or  attendu  que  de  l'ensemble  des  nombreux  documents,  d'ail- 
leurs contradictoires,  versés  au  débat,  il  ressort  qu'antérieure- 
ment à  toute  revendication  et  avant  le  dépôt  du  9  avril  1862  la 
dénomination  litigieuse  était  exploitée  sur  la  place  de  Bordeaux 
par  divers  fabricants  de  liqueurs  ; 

Que  les  uns  l'employaient  avec  la  petite  étiquette  blanche  si 
répandue  dans  le  commerce  des  liqueurs  dites  u  des  Iles  »  et 
rappelant  les  marques  de  la  vieille  maison  Amphoux  ;  d'autres 
l'incorporaient  dans  des  éliquettes  de  couleurs  variées  ;  tous  en- 
fin s'en  servaient  librement  selon  leur  fantaisie  ou  leurs  besoins  ; 

Qu'il  n'est  pas  douteux  que  cet  usage  commun  s'est  largement 
.répandu  à  mesure  que  le  commerce  des  liqueurs  prospérait  ; 

1894,  Mon.  jud.  Lyon^  10  avril). 

Il  est  certain  que  la  Chambre  des  requétos  se  montre  actuellement 
très  favorable  à  la  tendance  qu'ont  certaines  Cours,  lorsqu'une  étiquette 
a  été  déposée,  à  ne  réprimer  que  les  imitations  de  l'étiquette  dans  son 
ensemble  et  à  exiger,  pour  la  revendication  de  la  dénomination  prise 
isolément,  un  dépôt  spécial  (cf.  Cass.  req.,  3  février  1898,  Thierry 
frères,  marque  Le  Cronstadt,  Ann.,  98.271). 

Les  propriétaires  de  marques-dénominatipns  feront  sagement  de  les 
déposer  isolément.  G.  M. 


—  310  - 

Qu*aiD8i  généralisé,  cet  usage  est  devena  le  signe  caractériiti- 
que  de  l'absorption  du  mot  «  Chouva  >)  par  le  domaine  public; 

Attendu  que  parmi  les  preuves  irrécusables  de  Tautorité  de 
cet  usage  il  convient  dé  retenir  : 

i^  Les  nombreuses  commandes  faites  par  plusieurs  distilla- 
teurs à  divers  lithographes,  antérieurement  à  1862,  d'étiquettes 
portant  les  mots  «  Cacao-Gbouva  »  ; 

2®  L'attitude  passive  de  la  maison  Droz  dans  la  période  com- 
prise entre  Tannée  1856  à  laquelle  elle  fait  remonter  la  création 
de  sa  marque  et  l'année  1867,  époque  de  ses  premières  revendi- 
cations en  justice  ;  quMl  est  constant  que  durant  cet  intervalle 
de  17  ans  la  maison  d'Alexandre  Droz  n*a  inquiété  aucun  de  ses 
concurrents  ; 

3®  La  procédure  suivie  à  Marseille  en  1867,  qui  révèle  que  la 
maison  Droz  n'entendait  protéger  que  l'étiquette,  sans  viser  spé- 
cialement la  dénomination  ; 

4*  Bnûn  et  surtout  les  tableaux-réclame  répandus  par  cette 
maison  à  l'époque  contemporaine  du  dépôt  de  1862,  qui  témoi- 
gnent de  l'indivisibilité  intentionnelle  établie  par  Alexandre 
Droz  entre  les  divers  éléments  de  sa  marque  :  l'étiquette,  la  dé- 
nomination et  la  signature  ; 

Que  sa  préoccupation  de  donner  la  prépondérance  à  la  signa- 
ture a  été  constante  chez  le  dit  Alexandre  Droz  ;  qu'elle  s'affirme, 
dès  l'origine,  dans  l'étiquette  déposée  par  Tanet  à  la  Préfecture 
de  la  Gironde  le  31  mars  1858  ; 

Que  cette  particularité  jointe  au  silence  gardé  par  Alexandre 
Droz  jusqu'à  sa  mort  vis-à-vis  de  ses  co-usagers  a  une  portée 
décisive  ; 

Qu'elle  implique  la  reconnaissance  des  droits  du  domaine  pu- 
blic ; 

Que  dans  ce  domaine,  qui  est  celui  de  la  libre  concurrence,  la 
loi  ne  reconnaît  pas  des  usurpateurs  ;  il  n'y  a  que  des  rivaux; 

Attendu  il  est  vrai  qu'on  ne  peut  méconnaître  au  vu  de  ses 
anciens  livres  et  des  références  qu'elle  produit,  que  la  maison 
Gross-Droz  a,  par  de  constants  efTorts  et  de  longs  sacriûces,  tra- 
vaillé à  accréditer  sa  liqueur  de  «  Crème  de  Cacao  Chouva» 
comme  une  spécialité  ;  mais  qu'alors  qu'elle  n'a  prétendu  con- 
quérir la  faveur  publique  que  par  la  supériorité  des  produits  et 
par  la  valeur  de  sa  signature,  elle  a  renoncé  aux  privilèges  at- 
tachés par  la  loi  de  1857  aux  marques  régulièrement  déposées; 

Que  le  dépôt  de  1862  et  les  dépôts  subséquents  ayant  été  tar- 
difs les  droits  acquis  du  domaine  public  restaient  indivisibles  ; 

Qu'il  y  a  lieu  dès  lors  de  déclarer  l'appelant  mal  fondé  dans 
sa  demande  sans  recourir  à  une  enquête  devenue  sans  objet  ; 


—  314  — 

II.  —  En  ce  qui  eaneeme  l'étiquette  vert  et  or  : 

Attendu  que  cette  étiquette  n*a  fait  Tobjet  d'un  dëpôt  qu*à  la 
date  du  5  février  1894  ;  qu'elle  ne  porte  pas  le  nom  de  la  maison* 
Droz  et  qu'elle  ne  comprend  dans  l'ensemble  et  dans  les  détails 
que  des  éléments  d'une  banalité  courante; 

Qu'en  définitive  cette  étiquette  est  depuis  longtemps  dans 
le  commerce  ; 

Que  sur  ce  point  les  intimés  ont  rapporté  la  preuve  complète 
des  articulations  admises  par  l'interlocutoire  ; 

III.  —  En  ce  qui  concerne  l'étiquette  à  cartouche  rouge  : 
Attendu  que  les  premiers  juges  en  ont  fait  une  exacte  appré-* 

ciation  ; 

Qu'il  est  certain  que  des  dissemblances  existent  entre  l'éti- 
quette revendiquée  par  Gross  et  les  étiquettes  incriminées  ; 

Qu'elles  sont  caractéristiques  particulièrement  dans  la  distri- 
bution des  couleurs  et  dans  la  forme  du  cartouche  et  de  la  cap«- 
sule; 

Qu'encore  de  ce  chef  l'appel  doit  être  rejeté  ; 

Par  ces  motifs,  La  Cour,  statuant  sur  l'appel  incident  des 
parties  de  M*  Biay,  infirme  le  jugement  attaqué  dans  la  dispo- 
sition qui  a  ordonné  Tenquéte  ; 

Statuant  sur  le  fond  et  par  nouveau  jugé,  dit  que  la  dénomi- 
nation u  Cacao  Chou  va  »  appartient  au  domaine  public  antérieu- 
rement à  ce  dépôt  ; 

En  conséquence  déclare  l'appelant  mal  fondé  dans  sa  demande, 
l'en  déboute  ; 

Confirme  le  jugement  attaqué  dans  le  chef  relatif  à  l'étiquette 
à  cartouche  rouge  et  condamne  Gross  à  tous  les  dépens  de  pre- 
mière instance  et  d'appel  envers  toutes  parties  en  cause» 

Le  pourvoi  formé  contre  cet  arrèl  a  élé  rejeté  par  la 
Chambre  des  requêtes,  le  29  janvier  1900,  en  ces  termes  : 

0 

La  Coor,  Attendu  que  le  demandeur  en  cassation  Gross  reven- 
diquait le  droit  exclusif  d'employer  la  dénomination  Cacao  Chouva 
pour  désigner  les  produits  de  sa  distillation; 

Que  l'arrêt  attaqué  constate  en  fait  que  longtemps  avant  l'é- 
poque où  son  prédécesseur  Droz  avait  déposé  une  marque  de 
fabrique  comprenant  entre  autres  éléments  la  dénomination  Ca- 
cao Chouva^  cette  dénomination  était  exploitée  sur  la  place  de 
Bordeaux  par  divers  fabricants  de  liqueurs  qui  tous  s'en  servaient 
librement  selon  leur  fantaisie  et  leurs  besoins  et  que  Droz  jusqu'à 
sa  mort  avait  gardé  vis-à-vis  de  ses  co-usagers  un  silence  qui 
implique  aux  yeux  de  la  Cour  la  reconnaissance  des  droits  du 
domaine  public  ; 


l' 


—  312  — 

Attendu  que  cette  appréciation  des  faits,  qui  rentraient  dans 
le  pouvoir  de  la  Cour  d^appel,  justifie  la  décision  par  laquelle 
elle  a  repoussé  la  prétention  de  Gross  à  la  propriété  exclusive 
de  la  dénomination  Cacao  Chouva  à  titre  de  marque  de  fabrique  ; 
que  cette  décision  ne  yiole  aucun  des  articles  de  loi  visés  an 
pourvoi  ; 

Par  gbs  motifs,  Rejette. . . 

M.  Tanon,  président.  —  MM.  Gborgb-Lemairb,  conseiller 
rapporteur;  Mérillon,  avocat  général.  — M*  Bouchib  db 
Bbllb,  avocat. 


Art.  4225. 

Procédure  correctionnelle.  —  AmBl^niatlcMi.  —  So- 
ciété commerciale.  —  SaUiie.  —  Nfolilté.  —  Marques 
de  fabrique.  —  Dénomination.  —  DcMuaine  publie. 
—  CbantIUsr. 

Une  société  commerciale  est  un  être  moral  qui  ne  saurait 
répondre  pénalement  d'un  délit  et  ne  peut^  par  conséquent, 
être  valablement  assigné  au  correctionnel  comme  pénale- 
ment responsable  (Résolu  par  le  tribunal)  (1). 

La  saisie  qui  n*est  suivie,  dans  le  délai  de  Varticle  18  de 
la  loi  du  iSjuin  1857,  que  d'une  assignation  devant  le  tri- 
bunal correctionnel  adressée  à  une  société  commerciale, 
par  conséquent  nulle,  est  nulle  elle-même  et  le  tribunal  ne 
peut  attacher  aucune  importance  aux  faits  et  constatations 
qu'elle  a  relatés  (Résolu  par  le  tribunal)  (2). 

Une  dénomination  qui  constitue  antérieurement  au  dépôt 
une  désignation  usuelle  et  nécessaire  du  produit  auquel  elle 
s'applique,  ne  saurait,  si  on  la  considère  en  elle-même  et  en 
dehors  de  l'aspect  extérieur  qu'elle  peut  offrir,  être  valable- 
ment déposée  et  faire  l'objet  d'une  appropriation  exclusive  à 
titre  de  marque  de  fabrique  (3). 

La  dénomination  Chantilly  étant,  depuis  de  longues 
années,  usitée  pour  désigner  un  parfum  qui  est  dans  le  do- 

(1)  Cf.  Gass.,  10  mars  1877,  Meunier,  Ann.,  77.205. 

(2)  Le  tribanal  a  considéré  comme  inexistante,  donc  ne  donnant  pas 
salisfaction  à  l'article  18  de  la  loi  de  1857,  Tassignation  donnée  devant  le 
tribunal  correctionnel  à  une  société  commerciale. 

(8)  Cf.  Tarrêt  relatif  au  Cacao  Ghoava,  9uprà,  p.  308. 


Tr^zrr,^^^^  -■^*ii'.-/-r»'ï«i.-is-"  r.ijv^un'i^ 


—  313  — 

maine  public,  ne  peut  servir  de  marque  pour  certains  pro- 
duits de  parfumerie^  tels  que  savons,  etc..  (4). 

(G.  de  Paris,  25  novembre  1900.  ^  Epoax  Salabert  c.  Viirain  et  Cie.) 

Le  Tribunal  correctionnel  de  la  Seine,  à  la  date  du  11  mai 
1900,  a  rendu  le  jugement  suivant  : 

Le  Tribunal,  Attendu  que  les  époux  Sa]abert  Kien  ont  assigné 
deTant  le  tribunal  correctionnel:  l^à  la  date  du  28  février  4900, 
MM.Villain  et  Cie,  directeurs  et  administrateurs  des  magasins  du 
Petit  St-Thomas;  2''  à  la  date  du  iO  mars  i900,MM.les  directeurs  et 
administrateurs  de  la  même  maison  ;  3^  à  la  date  du  {9  avril  sui- 
vant, M.^Jules  Villain  seul  gérant  responsable,  pour,suivant  dis- 
positif commun  à  tous  ces  exploits,s'en tendre  déclarer  contrefac- 
teurs de  la  marque  de  fabrique  des  requérants,dite  marque  Chan- 
tilly ;  s'entendre  condamné  à  10.000  de  dommages-intérêts  ainsi 
qu'à  la  confiscation  des  objets  contrefaits  ; 

Attendu  que  préalablement  à  l'examen  du  fond,  il  convient 
tout  d'abord  de  faire  droit  à  l'exception  de  nullité  invoquée  par 
le  défendeur  contre  les  deux  premières  assignations,  délivrées 
en  la  forme  rappelée  ci-dessus,c'est-à*dire  à  une  société  commer- 
ciale ; 

Attendu  en  effet  que  Ton  ne  peut  poursuivre  devant  les  tribu- 
naux de  répression  que  des  êtres  réels  sur  lesquels  peut  porter 
une  peine  ;  qu'une  société  commerciale  est  un  être  moral,  et  ne 
saurait  répondre  pénalement  d'un  délit  ;  que  l'assignation  qui 
lui  est  délivrée  se  trouve  donc  viciée  d'une  nullité  qui  entache 
toute  la  procédure  qui  en  a  découlé  ; 

Attendu  que  les  deux  assignations  des  28  février  et  19  mars  1900 
se  trouvant  ainsi  dépourvues  d'effet,  il  s'en  suit  comme  consé- 
quence et  par  application  de  l'article  18  de  la  loi  de  18o7  que  la 
saisie-contrefaçon  en  date  du  16  février  1900  perd  toute  sa  valeur 
et  doit  être  annulée,  sans  que  le  tribunal  puisse  attacher  aucune 
importance  aux  faits  et  constatations  qu'elle  a  relatés  ; 

Attendu  que  la  troisième  assignation  du  19  avril  1900  a  été  dé- 
livrée à  Villain  personnellement  ;  qu'elle  s'appuie  sur  un  pro- 
cès-verbal de  description  régulier  des  objets  revêtus  de  la  préten- 

(4)  n  est  constant  qu*il  exi&te  depuis  de  longues  années,  dans  le  com- 
merce de  la  parfumerie,  un  parfum  de  composition  déterminée,  toujours 
identique  à  lui-môme,  connu  sous  le  nom  de  parfum  Chantilly.  Maison 
peut  se  demander  si  ce  fait  était  de  nature  à  faire  obstacle  à  l'adoption 
de  la  dénomination  ChanliUy  pour  désigner  tout  Tensemble  des  produits 
sortant  d'une  maison  de  parfumerie  déterminée,  cette  dénomination  de 
vaut  être  jointe  aux  différents  produits  (eau  de  Cologne  Chantilly,  crème 
d*iris  Chantilly, etc. ..)  dans  le  but  d*en  préciser  l'origine  et  de  servir  en 
quelque  sorte  d'enseigne  à  la  maison. 


—  314  — 

due  marque  contrefaite  ;  qu'elle  répond  à  tontes  les  exigences  de 
la  loi  et  doit  être  déclarée  valable  ; 

Au  fond  :  Attendu  qa'à  la  date  da  5  mars  1890,  la  demoiselle 
Marie -Joséphine  Kien,  négociante  à  Paris,  aujoard*hni  épouse  dn 
requérant  Salabert,  a  fait  le  dépôt  an  greffe  du  tribunal  de  com- 
merce de  la  Seine  d'ane  marque  destinée  à  des  produits  de  par- 
fumerie et  savonnerie,  ladite  marque  consistant  dans  la  dénomi- 
nation Chantilly  et  constituant  sa  marque  de  fabrique  ; 

Attendu  que  depuis  1890  elle  a  revêtu  de  cette  marque  toutes 
les  marchandises  de  parfumerie  vendues  dans  sa  maison  et  Ta 
appliquée  notamment  à  toute  une  série  de  produits  tels  que  sa- 
vons, blanc  de  crôme,  poudre,  eaux  et  vinaigres  de  toilette,hui- 
les,  etc.  ;  qu'elle  prétend  avoir  acquis  la  propriété  exclusive  de 
cette  marque  en  sorte  qu'elle  demande  au  tribunal  de  déclarer 
objets  de  contrefaçon  les  boites  de  savon  livrées  en  vente  dans  les 
magasins  du  Petit  St-Thomas,lesquelles  au  moyen  d'une  étiquette 
collée  sur  le  couvercle,  annoncent  à  la  clientèle  cette  marchan- 
dise sous  le  nom  de  savon  aux  violettes  de  Chantilly; 

Mais  attendu  qu'il  est  démontré  par  tous  les  documents  sou- 
mis au  tribunal  tant  par  les  demandeurs  que  par  le  défendeur, 
que  la  dénomination  de  Chantilly  a,  depuis  une  époque  très  an- 
cienne, en  tous  cas  depuis  184t,  été  employée  dans  la  parfumerie 
pour  désigner  un  parfum,  classé  constamment  sur  les  catalogues 
des  principales  maisons  au  nombre  des  parfums  ou  odeurs  cou- 
rantes dont  on  se  sert  pour  parfumer  les  différentes  huiles,savon8 
ou  crèmes  de  toilette  ;  que  le  nom  de  Chantilly  appliqué  à  des 
articles  de  parfumerie  figure  dans  le  catalogue  de  la  maison  Guer- 
lain en  date  de  1841  ;  que  le  Manuel  des  parfumeurs  de  l'ency- 
clopédie Roret,  édition  i870  p.  93,  relate,  au  nombre  des  for- 
mules des  produits  de  parfumerie  courants,  celle  de  l'extrait  de 
bouquet  Chantilly ,  que  la  parfumerie  Saint-James  vendait  en 
1876  une  pommade  désignée  dans  son  tarif  sous  le  nom  de  pom- 
made  Chantilly  et  spécialement  un  savon  désigné  sous  le  nom  de 
savon  Chantilly  ;  que  la  maison  Gottance  Dagot  et  Gie,  devenue 
propriétaire  de  la  parfumerie  Saint- James^  n'a  cessé  de  livrer 
les  mêmes  produits  à  sa  clientèle  jusqu'en  1890  et  à  continué  de- 
puis lors  à  faire  figurer  dans  son  catalogue  général  notamment 
un  savon  Chantilly  ; 

Que  les  propriétaires  ou  directeurs  des  principales  maisons  de 
parfumerie,  entre  autres  MM.  Houbigant,  Roger  et  Gallet,  Violet 
et  Guerlain,  sont  unamines  à  déclarer  que,  de  tout  temps,  leurs 
maisons  ont  fabriqué  et  livré  au  commerce  un  extrait  dénommé 
bouquet  Chantilly  qui  se  trouve  du  reste  communément  classé 
dans  tous  les  catalogues  sous  cette  désignation  pour  spéciJer  une 
odeur  déterminée,  destinée  soit  à  être  mise  en  usage  isolément 


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1  ♦    « 


—  315  — 

soit  à  entrer  dans  la  composition  à  une  série  de  produits  tels 
que  crèmes,  huiles,  et  sarons,  ainsi  que  le  démontre  Tezamen 
des  documents  ci-dessus  analysés  ; 

Attendu  qu'il  ressort  de  toutes  ces  constatations  et  considéra- 
tions que  la  dénomination  Chantilly  était,  au  moment  du  dépôt 
qui  a  été  fait  comme  marque  de  fabrique  par  la  Demoiselle  Kien 
en  1890,  et  a?ait  été  depuis  de  nombreuses  années,  antérieure- 
ment au  dépôt  employée  pour  dénommer  dans  la  classification 
usuelle  des  parfums,  Tun  de  ces  parfums  dont  l'emploi,  sous  ce 
nom  qu'un  long  usage  a  rendu  nécessaire, était  habituel  dans  Tin- 
du strie  et  le  commerce  de  la  parfumerie  ; 

Attendu  qu'il  est  de  doctrine  et  de  jurisprudence  qu'une  déno- 
mination qui  constitue,  antérieurement  au  dépôt,une  désignation 
usuelle  et  nécessaire  du  produit  auquel  elle  s'applique,  ne  sau- 
rait si  on  la  considère  en  elle-même,  et  en  dehors  de  l'aspect  ex- 
térieur qu'elle  peut  offrir,être  valablement  déposée,  et  faire  l'ob- 
jet d'une  appropriation  exclusive  à  titre  de  marque  de  fabrique 
ou  de  commerce  au  profit  de  l'occupant,  sans  porter  atteinte  & 
la  possession  antérieure  du  domaine  public,  ou  au  principe  fon- 
damental de  la  liberté  du.  commerce  et  de  l'industrie  ; 

Qu'il  résulte  de  l'application  de  ce  principe  à  l'espèce,  que  la 
dénomination  de  Chantilly  appliquée  à  des  produits  de  parfume- 
rie n'a  pu  devenir,  en  1890  ni  depuis  lors,  la  propriété  d'aucun 
disposant  et  que  la  revendication  présentement  émise  par  les 
époux  Salabert  ne  saurait  être  accueillie  ; 

Sur  la  demande  reconventionnelle  de  Villain,  concluant  à  l'al- 
location d'une  somme  de  2000  francs  de  dommages-intérêts  et  & 
la  publicité  du  présent  jugement  dans  10  journaux  aux  frais  des 
requérants  ; 

Attendu  qu'il  importe  de  faire  remarquer  que  les  époux  Sala- 
bert ont  agi  avec  une  entière  bonne  foi,  et  sans  arrière-pensée 
de  vexation  à  l'égard  de  leur  concurrent,  mais  avec  la  confiance 
que  les  droits  invoqués  par  eux  et  dont  ils  avaient  joui  sans  con- 
teste depuis  1890  étaient  susceptibles  d'être  proclamés  et  sanc- 
tionnés par  la  justice;  que  cette  croyance  de  leur  part  n'avait 
rien  de  téméraire, et  qu*en  introduisant  l'instance  actuelle, ils  ont, 
sans  mauvaise  foi,  usé  d'une  faculté  réservée  à  tout  justiciable 
qui  se  croit  lésé  ; 

Attendu  cependant  que  cet  appel  à  la  justice  n'en  a  pas  moins 
été  préjudiciable  à  Villain  qui  a  dû  subir  une  saisie  faite  publi- 
quement dans  sa  maison  qu'il  dirige,  qu'il  s'est  vu  obligé  par 
cette  saisie  de  retirer  de  la  vente  le  genre  de  savon  fabriqué,faire 
toutes  démarches  et  enfin  tous  frais  nécessaires  pour  assurer  le 
succès  de  8a  défense  contre  l'action  reconnue  sans  fondement 
dirigée  contre  lui  ; 


—  316  — 

Que  tous  ces  chefs  de  lésion,  lai  ont  causé  un  dommage,  que 
le  tribunal,  en  présence  de  tous  les  éléments  d^appi'éciation  qui 
Be  rencontrent  dans  les  dossiers  ou  les  faits  de  la  caase,croit  de- 
voir fixer  à  500  francs,  sans  qu'apparaisse  comme  sufBsamment 
justifiée  la  demande  de  publicité  ;qui  fait  Tobjet  du  second  chef 
de  la  demande  reconventionnelle  ; 

Par  ces  motifs,  Relaie  Villain 

Et  statuant  sur  la  demande  reconventionnelle  de  Villain,7  fai- 
sant droit  : 

Condamne  les  époux  Salabert  à  payer  solidairement  au  susdit 
Villain  une  somme  de  500  francs  à  titre  d'indemnité 

Sur  appel  des  époux  Salabert,  la  Cour  de  Paris  a  le 
SB  novembre  1900,  confirmé  par  adoption  de  motifs  la  dé- 
cision des  premiers  juges. 

Avocats  :  M"  Pouillet  et  Couhin. 


Art.  4226. 

Cyoncarreneo  illicite.  —  9ynMeak,tm  professlonnelfl. 
—  Dénomlnatloii.  —  Titre  de  «  cbambre  myndUk- 
eaio  )►. 

Les  syndicats  professionnels  ont,  comme  toutes  les  sodé' 
tést  le  droit  de  se  distinguer  les  uns  des  autres  au  moyen 
d'une  dénomination  qui  appartient  en  propre  à  celui  quia 
été  te  premier  à  V adopter  (1). 

Les  mots  <  Chambre  syndicale  »  ne  sont  pas  génériques 
et  indispensables  pour  la  désignation  d*un  syndicat  profes- 
sionnel ;  en  conséquence,  le  syndicat  professionnel  qui  les 
a  le  premier  adoptés  dans  son  titre  est  fondé  à  en  faire  in- 
terdire Vusage  pgcr  un  autre  syndicat ,  même  avec  L'addition 
d'un  qualificatif  ou  d*un  sous-titre,  s'il  en  doit  résulter  une 
confusion  dans  l'esprit  des  tiers  (2). 

(C.  de  Paris,  26  juillet  1898.  ^  Chambre  syndicale  des  mailres  Uiliears 
de  Paris  c.  Union  fraternelle  des  maîtres  taillears.) 

Le  28  avril  1897,  le  tribunal  de  la  Seine  a  rendu  le  ju- 
gement suivant: 

(!)  V.  sur  les  dénominations:  Pouillet,  Marques  de  fah,,  n^  4()0  et 
suiv. 

(2)  Cr.Paris,!*''  mars  1888, Chambre  syndicale  d'éclairante  etdecheaf* 
fage  par  le  gai,  Ann.,  89.194. 


'•   -« 


F    jpT'ni  .  <  t  ti  ■■  ^  n^'k"  ^ 


—  317  — 

Lb  Tribunal,  Attendu  qu'en  1867,ane  association  de  maîtres  toi/- 
/«urs  s'est  constituée  à  Paris  pour  défendre  les  intérêts  généraux 
de  la  profession  ; 

Attendu  que,  dès  cette  époque,  cette  association  a  pris  le  nom 
de  Chambre  syndicale  des  maîtres  tailleurs  de  Paris  ;  que  depuis 
lors,  elle  n'a  jamais  cessé  de  se  présenter  sous  ce  nom,  tant  au 
public  qu'aux  autorités  ; 

Que,  toujours  sous  le  même  nom,  elle  a  publié,  dès  1889,  un 
bulletin  mensuel  des  procès-verbaux  de  ses  assemblées,  et  rédigé 
en  1892  des  statuts  qu'elle  a  déposés  à  la  préfecture  de  la  Seine 
pour  se  constituer  en  syndicat  professionnel  ; 

Attendu  que  la  société  fondée,  en  1888,  sous  le  nom  d'Union 
fraternelle  des  maîtres  tailleurs,  a  pris,  en  1865,  le  nom  de  Cham- 
bre syndicale  des  maîtres  tailleurs  de  Paris  que  la  société  deman- 
deresse s'était  attribué  dès  son  origine  et  qu'elle  n'avait  cessé  de 
porter  ; 

Attendu  que  cette  usurpation  de  nom  n'a  eu   d'autre  but  que 

de  faire  naître  dans  l'esprit  du   public  une  confusion   entre  les 

'deux  sociétés,  dans  l'intérêt  de  l'Union  fraternelle,    aûn  d'amë» 

liorer  son  apparence,  selon  les  expressions  d'un  article  publié  par 

le  secrétaire  lui-même  dans  )e  bulletin  du  mois  d'octobre  1895  ; 

Attendu  qu'à  supposer  que  la  dénomination  de  Chambre  Syn- 
dicale soit  habituellement  appliquée  dans  le  langage  du  com- 
merce aux  associations  formées  pour  la  défense  des  intérêts 
généraux  d'une  certaine  catégorie  d'industriels  ou  de  commer- 
çants, elle  n'en  constitue  pas  moins  un  nom  propre,  quand  il  ré- 
sulte des  circonstances  qu'un  groupe  déterminé  d'individus  en 
a  fait  le  premier,  publiquement  et  de  façon  continue,  un  usage 
exclusif  ; 

Qu'en  pareil  cas,  cette  dénomination  appartient  à  ce  groupe  et 
ne  peut  être  adoptée  par  une  société  du  même  genre  même  avec 
addition  d'un  qualificatif  ou  d'un  sous-titre,  s'il  en  résulte  néces- 
sairement une  confusion  dans  l'esprit  des  tiers  ; 

Que  nul  ne  peut,  sans  motif  légitime,  s'emparer  de  ce  qui,  par 
occupation  ou  autrement,  est  devenu  la  propriété  d'autrui  ; 

Attendu  que  l'Union  fraternelle  des  maîtres  tailleurs,  d'abord 
priée  à  plusieurs  reprises  par  le  syndicat  demandeur,  puis  som- 
mée de  renoncer  à  son  appellation  nouvelle,  a  répondu  par  un 
refus  formel  ; 

Attendu  que,  dans  ces  circonstances,  la  Chambre  syndicale  des 
maîtres  tailleurs  de  Paris  demande  à  bon  droit  que  l'usage  de 
son  nom  soit  interdit  au  syndicat  défendeur  ; 

Par  ces  motifs.  Dit  que  dans  la  quinzaine  de  la  notification  du 


—  318  — 

présent  jugement  la  société  défenderesse,  connue  sons  le  nom 
d'Union  fraternelle  des  maîtres  tailleurs  de  Paris,  cessera  de  pren- 
dre dans  les  imprimés,  annonce8,papiers  à  lettres  et  autres  écrits 
publiés  par  elle  ou  pour  son  compte,  le  nom  de  Chambre  syn- 
dicale des  maîtres  tailleurs  de  Paris. 

Sur  appel  du  syndicat,  la  Cour  a,  par  arrêt  du  26  juillet 
1898,  confirmé  en  ces  termes  le  jugement  attaqué: 

La  Cour,  Au  fond  : 

Considérant  que  les  associations  syndicales  ont,  comme  toutes 
les  sociétés,  le  droit  de  se  distinguer  les  unes  des  autres  aa 
moyen  d'une  dénomination  qui  appartient  en  propre  à  celle  qui 
a  été  la  première  à  Tadopter  ; 

Que  si  les  mots  Chambre  syndicale  sont  employés  dans  Tnsage 

comme  synonymes  de  syndicat,  d'association  syndicale  oa  d*unton 

syndicale,  la  variété  de  ces  expressions  démontre  que  les  termes 

de  Chambre  syndicale  ne  sont  pas  génériques  et  indispensables; 

Adoptant  au  surplus  les  motifs  des  premiers  juges  qui  ont  dé- 
cidé arec  raison  que  les  intimés  avaient  droit  et  intérêtà  empê- 
cher les  appelants  de  s'en  emparer; 

Sur  les  conclusions  subsidiaires  : 

Considérant  que  la  société  appelante  demande  qu'il  lui  soit 
donné  acte  de  ce  qu'elle  consent  à  ajouter  à  son  titre  primitif 
d' Union  fraternelle  des  maîtres  tailleurs  de  Paris,  celui  de  Chambre 
syndicale  fondée  en  1888  ; 

Considérant  qu'en  raison  des  circonstances  particulières  de  la 
cause  et  du  temps  depuis  lequel  la  société  intimée  estexclusive- 
Tement  connue  dans  le  commerce  de  Thabillement  sous  le  nom 
de  Chambre  syndicale,  les  modifications  proposées  n'empêche- 
raient point  la  confusion  qu'il  importe  de  faire  cesser; 

Par  ces  motifs,  Déclare  le  syndicat  dit  V Union  fraternelle  des 
maîtres  tailleurs  de  Paris  mal  fondé  dans  ses  conclusions  princi- 
pales et  subsidiaires,  Ten  déboute  ; 

Confirme  le  jugement  attaqué. 


Art.  4227. 

BxperUi.  —  BxpUeadon  À  raudienoe.  —  Serment. 

Les  experts  appelés  aux  débals  pour  rendre  compte  de 
leurs  opérations  ou  pour  donner  des  explications  doivent^ 
à  peine  de  nullité^  prêter  le  serment  de  l'article  1S5  du  Code 


I    ll.|iMii,i-    •,■■«    ^FÎ'P    »JV!ir 


—  319  - 

d'instruction  criminelle^  sauf  à  prêter  de  nouveau  leserment 
de  ^article  44  du  même  code  si  le  tribunal  correctionnel  ou 
la  cour  d'appel  les  chargent  de  procéder  à  une  nouvelle  ex- 
pertise (1). 

(C.  de  cas8.  crim.,  23  février  1901.  —  de  Sichen  c. 
Compagnie  universelle  du  gaz  acétylène.) 

La  Cour,  Sur  le  moyen  pris  de  la  yiolation  de  l'article  1S^5  du 
Gode  d'instruction  criminelle  : 

Vu  ledit  article; 

Attendu  que  les  experts  appelés  aux  débats  pour  rendre  compte 
de  leurs  opérations  ou  pour  donner  des  explications  doivent,  à 
peine  de  nullité  prêter  le  serment  de  rarticle  155,  sauf  à  prêter 
de  nouveau  le  serment  de  l'article  44  du  même  Code,  si  le  tri- 
bunal correctionnel  ou  la  cour  d'appel  les  chargent  de  procéder 
à  une  nouvelle  expertise  ; 

Attendu  en  fait  que  l'expert  Pelegry  a  été  entendu  par  la  Cour 
d'appel  de  Toulouse  en  ses  explications  orales  relatives  à  son 
expertise  sans  qu'il  ait  prêté  le  serment  de  Farticle  155  du  Gode 
d'instruction  criminelle  ; 

Attendu  que  le  pouvoir  discrétionnaire  du  président  n'existe 
pas  en  matière  correctionnelle  ;  qu'ainsi,  il  y  a  eu  violation  de 
l'article  155  susvisé  ; 

Sans  qu'il  soit  nécessaire  de  statuer  sur  les  autres  moyens  du 
pourvoi  ; 

Gasse  et  annule  l'arrêt  de  la  Gour  d'appel  de  Toulouse,  en  date 
du  i  i  avril  dernier,  renvoie  devant  la  Cour  d'appel  d'Agen. 

MM.  LoBW,  président  ;  —  CuAynARAUD,  rapporteur;  —  Du- 
BoiN,  avocal  général.  —  M*  Bressoles.  avocat. 


Art.  4228. 

Ck^nearrence  Aéloymâe.^  Hdtol  Temalniis.—  Cbemlii* 
de  flsr.  —  Autorisation  de*  poavolns  publie*. 

Ne  constitue  pas,  au  regard  de  l'industrie  privée,  un  acte 

(i)  La  Cour  de  cassation  a  déjà  jugé  (Cass.,  26  août  1875,  Dalloz, 
Supp.  au  Répertoire^  Y*  Expertise^  no  188,  note)  que  les  experts  appe- 
lés à  donner  des  explications  comme  témoins  devant  la  Cour  d'assises 
sont  astreints  au  serment,  il  en  est  a  fortiori  ainsi  en  matière  correc- 
tionnelle, où  le  pouvoir  discrétionnaire  du  Président  n*existe  pas  (art.  155, 
C.  instr.  erim.). 


—  320  — 

de  concurrence  déloyale  le  fait,  par  une  Compagnie  de  che- 
mins  de  fer,  de  construire  un  hôtel  terminus  dans  une  de 
ses  gares  {en  l'espèce  l'édification  d'un  hôtel  à  voyageurs, 
par  la  Compagnie  d' Orléans, dans  sa  gare  du  quai  d* Or say)^ 
alors  que  la  création  de  cet  hô tel , autorisé  par  les  pouvoirs 
publics  et  d'ailleurs  non  exploité  directement  par  la  compa- 
gnie, a  pour  but  et  doit  avoir  pour  effets  tout  comme  les 
buffets,  restaurants, librairies  y  installés  dans  V  intérieur  des 
gares  et  stations,  une  amélioration  dans  les  conditions  gé- 
nérales de  transport  des  voyageurs  (1). 

(€•  de  Paris,  2  août  1900.  —  Chambre  syndicale  des  grands  hôtels  et 
maisons  meublées  c.  Compagnie  des  chemins  de  fer  d*Orléans.) 

La  Chambre  syndicale  des  grands  hôtels  et  maisons 
meublées  de  Paris,  émue  de  la  concurrence  qu'allait  faire 
à  ses  adhérenls  la  construction  d'un  hôtel  Terminus  par 
la  Compagnie  des  chemins  de  fer  d'Orléans  actionna  cette 


(1)  V.  sur  la  question  des  hôtels  terminus  :  à  propos  de  l'hôtel  de  la 
gare  de  Marseille,  Àix,  15  février  188*2,  Compagnie  des  chemins  de  fer 
P.-L.-Iil.,  Ann.^  82.33  avec  la  note,  et  Gass.,rej.,  19  décembre  i882,i4nn., 
83. 139  et  StVey, 84. 1.433  avec  le  rapport  de  M.le  conseiller  Féraud-Giraad 
et  la  note  de  M.  Lyon-Caen  ;  à  propos  de  l'hôtel  de  la  gare  de  Bordeaux- 
St-Jean«  Trib.  comm.  Bordeaux,  12  janvier  1898, Compagnie  des  chemins 
de  fer  du  Midi,  DaZ^oz,  99.2.44.  —  V.  encore,  Dalloz,  Rép., Supplément, 
V*  Voirie  par  chemins  de  fer,  n«  23.  et  Bulletin  annoté  des  chemins  de 
ftr,  1898.95  et  105,  article  de  M.  Lamé-Fleury. 

La  Cour  de  Paris  a  soin  de  constater,  dans  l'espèce,  que  la  création 
de  rhôtel  était  autorisée  par  les  pouvoirs  publics  et  avait  pour  but 
l'amélioration  des  conditions  générales  de  transport  des  voyageurs.  Il 
s'ensuit  que  cette  création  se  rattache  intimement  à  l'œuvre  pour  laquelle 
le  monopole  a  été  accordé  et  la  complète.  Dans  le  même  ordre  d'idées 
il  a  été  jugé  qu'une  Compagnie  de  chemins  de  fer  est  en  droit  de  faire 
le  camionnage  pour  le  service  de  la  gare  et  d'exploiter  un  buffet  (Caas. 
crim.,  29  décembre  1860,  D.  61.5.71).  Mais  une  Compagnie  de  chemins 
de  fer  abuse  de  son  monopole  et  fait  concurrence  illicite  lorsqu'elle 
exerce  le  commerce  des  charbons  (Cass.  rej.,  5  juillet  1865,  D.  65.1. 
348). 

Depuis  l'arrêt  de  la  Cour,  que  nous  rapportons,  sur  une  nouvelle  poar- 
suite  le  tribunal  de  commerce  a  décidé,  par  jugement  du  20  mai  1901, 
que  si  la  Compagnie  d'Orléans  avait  le  droit  d'exploiter  l'hôtel  Terminus 
construit  par  elle  pour  le  bien-être  de  ses  voyageurs  et  qui  était  pour  eux 
comme  un  accessoire  du  transport,  elle  outrepassait  ses  droits  en 
convertissant,  chaque  soir,  son  hôtel  en  salles  de  banquet,  repas  de 
noces,  bals,  etc.,  et  qu'elle  devrait  désormais  le  consacrer  exclusivement 
à  ses  voyageurs.  Le  jugement  condamne  la  Compagnie  i  payer  au  Grand 
Hôtel  et  à  l'Hôtel  Continental  des  dommages-intérêts  à  fixer  par  état  ; 
il  a  été  frappé  d'appel  par  la  Compagnie  d'Orléans. 


—  321  — 

compagnie  devant  le  Tribunal  de  commerce  de  la  Seine 
pour  se  voir  faire  défense  de  construire  cet  hôteL 

Le  Tribunal  de  commerce  a,  le  80  mars  1899,  repoussé 
cette  demande  par  un  jugement  ainsi  conçu  : 

Lb  TRiBur^ÂL,  Attendu  que  la  Chambre  syndicale  des  grands 
hôtels  et  maisons  meublées  de  Paris  prétend  et  fait  plaider,  que 
ce  serait  sans  droit  que  la  Compagnie  d^Orléans  procède  à  Tédi- 
fication  d'un  hôtel  à  voyageurs  sur  remplacement  des  terrains 
de  la  Cour  des  Comptes  et  de  la  caserne  du  quai  d'Orsay  qui  de- 
vraient être  exclusivement  consacrés  à  l'installation  de  sa  nou- 
velle gare  sur  ledit  emplacement;  qu'en  effet  la  dite  Compagnie; 
régie  par  les  statuts  qui  lui  ont  cédé  l'exploitation  de  certaines 
lignes  de  chemins  de  fer,  ne  peut  exercer  une  industrie  autre 
que  celle'  qui  a  fait  Tobjet  de  sa  concession  ; 

Qu'on  ne  saurait  admettre  qn'une  compagnie,  qui  jouit  d'un 
monopole  qu'elle  tient  de  l'Etat,  pût  proûter  de  cette  situation 
privilégiée  pour  créer  une  concurrence  directe  ou  indirecte  à 
une  industrie  quelconque  ; 

Que  cette  faculté  de  commerce  et  d'industrie  en  faveur  des 
compagnies  de  chemins  de  fer  serait  contraire  aux  considérations 
qui  leur  ont  fait  accorder  le  monopole  dont  elles  jouissent,  puis- 
que l'Etat  avait  eu  seulement  en  vue  de  faciliter  et  développer 
les  moyens  de  transport  dans  un  intérêt  public  et  général  et  non 
de  créer  des  concurrences  nuisibles  aux  industries  constituant 
la  fortune  nationale,  qu'il  a  pour  mission  de  protéger  et  de  dé- 
fendre ; 

Que  c'est  ainsi  que  les  statuts  imposés  aux  compagnies  de 
chemins  de  fer  ont  établi  à  l'égard  de  tous  une  égalité  de  traite- 
ment dans  l'application  des  tarifs  ; 

Que  ces  principes  généraux  ont  été  consacrés  par  les  auteurs  et 
la  jurisprudence  ; 

Qu'on  ne  saurait  tirer  argument  des  décisions  judiciaires 
rendues  relativement  à  l'hôtel  Terminus  de  la  gare  Saint-Charles 
à  Marseille  alors  que  les  trois  juridictions  qui  avaient  eu  à  se 
prononcer  sur  le  différend  survenu  entre  les  hôteliers  de  Mar- 
seille et  la  Compagnie  de  Paris-Lyon-Méditerranée  avaient  consi- 
déré la  création  dudit  hôtel  comme  une  nécessité  de  l'exploita- 
tion du  service  en  raison  de  l'éloignement  de  la  gare  et  la  facilité 
donnée  ainsi  aux  voyageurs  de  s'arrêter  en  cours  de  route  sans 
être  astreints  à  un  déplacement  fatigant  ; 

Que  ces  considérations  de  fait  qui  auraient  motivé  ces  déci- 
sions judiciaires  ne  se  rencontreraient  pas  en  l'espèce  alors  que 
la  nouvelle  gare  d'Orsay  serait  en  fin  de  parcours  et  au  centre 
de  Paris  ; 

Qu'on  ne  saurait  non  plus  se  prévaloir  de  l'existence  de  Thôtel 

21 


I. 


—  322  - 

Terminus  de  la  gare  Saint-Lazare  tous  droits  ayant  été  réserTés 
sur  ce  point  en  vertu  d'une  protestation  par  acte  extrajudiciaire 
signifiée  par  les  intéressés  ; 

Que  la  création  des  hôtels  dans  les  gares,  &  Texemple  de  ceux 
existant  à  l'étranger,  ne  saurait  non  plus  être  invoquée,  l'exploi- 
tation des  lignes  de  chemins  de  fer  à  Tétranger  étant  libre  et  les 
compagnies  ne  jouissant  d'aucun  monopole  ; 

Que  la  Compagnie  d'Orléans,  société  anonyme  constituée  avant 
la  loi  du  24  juillet  1867  et  n'ayant  pas  usé  du  bénéfice  de  Tarti- 
cle  46  de  ladite  loi  lui  permettant  de  se  transformer  se  trouve 
tbujours  sous  Tempire  des  dispositions  de  l'article  37  du  Gode 
de  commerce  ; 

Qu'aux  termes  dudit  article  sa  formation  en  société  anonyme 
et  ses  statuts  ayant  dil  être  approuvés  par  l'Etat  elle  ne  pouvait 
les  modifier  sans  son  assentiment  ; 

Que  le  Parlement  n'avait  été  saisi  que  d'un  projet  de  loi  con- 
cernant l'aliénation  des  terrains  domaniaux  de  la  Cour  des  Comp- 
tes et  de  la  caserne  du  quai  d'Orsay  pour  l'établissement  de  la 
nouvelle  gare  de  la  Compagnie  d'Orléans  sur  ledit  emplacement; 

Que  la  construction  de  l'hôtel  ayant  donné  naissance  au  pré- 
sent litige  aurait  été  entièrement  réservé»  ; 

Qu'on  ne  saurait  donc  voir  dans  le  vote  de  cette  loi  une  auto- 
risation même  tacite  de  l'établissement  d'un  hôtel  ;  que  ce  serait 
donc  contrairement  à  ses  statuts  et  sans  l'autorisation  préalable 
qui  lui  eût  été  nécessaire  que  la  Compagnie  d'Orléans  aurait 
décidé  la  construction  d'un  hôtel  sur  l'emplacement  des  terrains 
aliénés  avec  affectation  spéciale  ; 

Qu'en  admettant  l'autorisation  administrative  pour  la  construc- 
tion dudit  hôtel  elle  ne  saurait  être  considérée  que  comme 
réglant  les  rapports  financiers  de  l'Etat  avec  la  Compagnie  d'Or- 
léans relativement  à  la  garantie  d'intérêts  sans  pouvoir  préjudi- 
cier  en  rien  aux  droits  des  tiers  ; 

Que  l'industrie  que  le  syndicat  représente,  imposée  pour  des 
sommes  considérables,  concourt  à  la  garantie  d'intérêts  de 
l'Etat  vis-à-vis  des  compagnies  de  chemins  de  fer  ; 

Qu'à  ce  titre  cette  industrie  ne  saurait  être  l'objet  d'une  con- 
currence de  la  part  desdites  compagnies,  laquelle  serait  désas- 
treuse en  raison  des  privilèges  dont  ces  dernières  jouissent  et 
notamment  de  la  sécurité  du  loyer  de  l'argent  de  leur  capital  ; 

Que  l'importance  de  l'hôtel  en  construction  suffirait  pour  per- 
mettre d'apprécier  l'étendue  de  la  concurrence  et  du  préjudice 
qu'aura  à  supporter  l'industrie  dont  la  chambre  syndicale  a 
charge  de  défendre  les  intérêts. 

Qu'ainsi  la  Compagnie  d'Orléans,  en  construisant  sur  rempla- 
cement de  la  gare  projetée  un  hôtel  pour  l'exploiter  sans  qae 


*    .  ' 


—  323  — 

cTette  construction  puisse  être  considérée  comme   étant  nécessi- 
tée pour  les  besoins  ou  améliorations  de  son  service  d'entreprise 
des  lignes  concédées  agirait  en  violation  de  ses  statuts  et  crée- 
rait à  Tindustrie  des  hôteliers  une  concurrence  déloyale  ou  tout 
au  moins  illégale  ; 

Qu'il  conviendrait  de  la  déclarer  telle  en  faisant  défense  à 
la  Compagnie  d'Orléans  de  construire  l'hôtel  dont  s'agit  et  ce 
en  donnant  acte  à  la  demanderesse  de  ses  plus  expresses  réser- 
ves de  réclamer  ultérieurement  tous  dommages  et  intérêts  ; 

Mais  attendu  que  la  demande  dont  le  tribunal  est  saisi  tend  à 
voir  dire  que  la  compagnie  se  rend  coupable  de  concurrence 
déloyale  et  à  lui  faire  défense  de  construire  un  hôtel  à  voyageurs 
sur  l'emplacement  destiné  au  prolongement  de  sa  ligne  ; 

Attendu  que  si  les  compagnies  ne  peuvent  se  livrer  aux  opé- 
rations commerciales  et  à  Texercice  d'industries  que  la  nature 
de  leur  concession  leur  interdit  et  qui  ne  sauraient  être  consi- 
dérées comme  un  accessoire  de  leur  exploitation  destiné  à  amé- 
liorer le  service  des  transports  de  marchandises  ou  voyageurs 
faisant  l'objet  de  leur  concession,  il  convient  d'observer  tout 
d'abord  que  la  Compagnie  d'Orléans  n'a  pu  se  rendre  coupable 
d'actes  effectifs  et  caractérisés  de  concurrence  déloyale  en  raison 
de  l'exploitation  directe  ou  indirecte  d'un  hôtel  qui  n'existe  pas 
actuellement  et  qui  reste  à  construire  ; 

Qu'il  résulte  des  documents  versés  au  débat  que  les  projets 
présentés  par  la  Compagnie  d'Orléans  pour  la  création  d'une 
gare  quai  d'Orsay  ont  été  soumis  à  une  commission  spéciale 
nommée  par  le  ministre  des  travaux  publics  ; 

Que  cette  commission  qui  avait  reçu  mandat  d'indiquer  le 
projet  qu'elle  croirait  devoir  être  adopté  a  fixé  son  choix  sur  le 
projet  de  gare  comportant  un  hôtel  à  voyageurs  ; 

Que  ce  choix  a  été  ratifié  par  le  ministre  des  travaux  publics 
qui  Ta  notifié  à  la  Compagnie  d'Orléans  avec  certaines  modifica- 
tions de  détail  dans  les  dispositions  architecturales  pour  donner 
satisfaction  au  vœu  exprimé  par  ladite  commission  ; 

Que  la  dépense  de  la  gare  avec  hôtel  a  été  comprise  dans  les 
frais  d'établissement  de  prolongement  de  la  ligne  sur  lesquels 
joue  la  garantie  d'intérêts  de  l'Etat  ; 

Qu'on  ne  saurait  donc  contester  l'autorisation  des  pouvoirs 
publics  pour  la  construction  d'un  hôtel  sur  remplacement  de  la 
gare  à  édifier  par  la  Compagnie  d'Orléans  ; 

Attendu  que  ce  tribunal  n'a  pas  qualité  pour  interdire  l'édifi- 
cation d'une  construction  autorisée  par  l'Etat  et  de  ce  chef  infir- 
mer une  décision  prise  par  les  pouvoirs  publics  ; 

Qu'on  ne  saurait  admettre  d'une  façon  générale  que  les  voya- 
geurs arrivant  à  Paris,soient  à  fin  de  parcours  puisqu'ils  peuvent 


—  324  — 

avoir  à  emprunter  le  réseau  d'autres  compagaies  poar  se  rendre 
i  leur  destination  définitive  ; 

Que  lesdits  voyageurs  sont  même  dans  bien  des  cas  munis  de 
billets  pour  la  totalité  de  leur  trajet  sur  les  réseaux  des  diffé- 
rentes compagnies  ; 

Que  les  voies  des  diverses  compagnies  sont  toutes  en  commu- 
nication par  la  ligne  du  chemin  de  fer  de  ceinture  ;  qu'ainsi  les 
mêmes  considérations  de  repos  eu  cours  de  route  pour  les  voya- 
geurs qui  ont  été  utilement  invoquées  dans  d'autres  procès  pour 
la  construction  d'hôtels  par  les  compagnies  trouveraient  place 
dans  le  présent  débat  ; 

Qu'en  fait  ce  sont  ces  facilités  offertes  aux  voyageurs  c'est-à- 
dire  au  public  en  général  et  qui  constituent  une  amélioration 
dans  le  service  du  transport  des  voyageurs  qui  créent  une  con- 
currence nécessaire  dans  l'intérêt  du  plus  grand  nombre  et  non 
le  monopole  dont  jouissent  les  compagnies  de  chemins  de  fer  ; 
Qu'on  ne  saurait  interdire  aux  compagnies,qui  font  des  acqui- 
sitions d'emplacements  dans  Paris  en  vue  des  besoins  toujours 
croissants  de  leur  exploita tion,de  tirer  parti  dans  les  meilleures 
conditions  possibles  en  tant  que  propriétaires  desdits  emplace- 
ments qui  n'ont  pu  trouver  une  utilisation  immédiate;  quetce 
faisant,  elles  ne  font  que  gérer  leur  patrimoine  ;  qu'elles  ne 
sauraient  être  recherchées  de  ce  chef  ; 

Qu'il  convient  d'observer  que  la  Compagnie  de  l'Ouest  a  donné 
à  bail  son  hôtel  de  la  gare  Saint-Lazare  ainsi  que  la  Compagnie 
d'Orléans  l'hôtel  projeté  à  la  gare  du  quai  d'Orsay  qui  fait  l'objet 
du  présent  litige  ; 

Qu'il  n'y  a  point  là  d'exploitation  directe  avec  risques  person- 
nels ; 

Que  d'ailleurs  la  considération  de  garantie  d'intérêts  ne  sau- 
rait être  utilement  alléguée  ; 

Qu'il  ressort  en  effet  des  débats  parlementaires  lorsque  la 
question  fut  posée  devinU  les  Chambres,  que  la  création  des 
hôtels  dont  s'agit  fut  considérée  comme  de  nature  à  diminuer 
dans  l'avenir  le  jeu  de  ladite  garantie  et  que  c'est  même  pour 
ce  motif  que  l'Etat  a  exigé  que  les  dépenses  des  hôtels  en  ques- 
tion fussent  comprises  dans  les  frais  d'établissement  des  lignes 
concédées  ; 

Qu'ainsi  il  convient  à  tous  égard  de  rejeter  la  demande  de  la 
Chambre  syndicale  des  grands  hôtels  et  maisons  meublées  de 
Paris  à  toutes  fins  qu'elle  comporte,  en  lui  donnant  acte  de  ses 
réserves  ; 

Par  ces  uotifs,  Donne  acte  à  la  Chambre  syndicale  des  grands 
hôtels  et  maisons  meublées  de  Paris  de  ses  plus  expresses  réser 
ves  de  demander  ultérieurement  tous  dommages  et  intérêts  ; 


,,  irr^" 


—  325  — 

La  déclare  mal  fondée  en  sa  demande  à  toutes  fins  qu'elle 
comporte  ; 
L'en  déboute  ; 
Et  la  condamne  aux  dépens. 

Sur  rappel  de  la  Chambre  syndicale  des  grands  hôtels 
la  Cour  de  Paris  (!'•  ch.),sous  la  présidence  de  M.  de  Vief- 
viLLE  président,  après  avoir  entendu  M*»  Ferré  et  R.  Rous- 
SBT  en  leurs  plaidoiries  a,  le  2  août  1900,  conQrmé  en  ces 
termes  la  sentence  des  premiers  juges  : 

La  Cour,  Considérant  qu'il  est  de  principe  que  les  Compa- 
gnies qui  jouissent  d'un  monopole  ne  peufent  exercer  d'autre 
industrie  que  celle  pour  laquelle  elles  ont  été  créées  ; 

Qu'il  importe  peu,  au  regard  des  tiers,  dont  les  droits  prifés 
sont  placés  sous  la  sauvegarde  des  tribunaux  de  droit  commun, 
que  des  autorisations  administratives  aient  été  accordées  impli- 
citement ou  explicitement,  régulièrement  ou  irrégulièrement  ; 

Qu'il  y  a  lieu  seulement  de  rechercher,  en  fait,  si  certaines 
opérations  commerciales  peuvent  être,  en  certains  cas,  l'acces- 
soire licite  de  l'exploitation  principale  et  si  l'établissement  par 
la  Compagnie  d'Orléans  dans  la  gare  du  quai  d'Orsay  d'un  hôtel 
Terminus  peut,  ou  non,  rentrer  dans  cette  catégorie  ; 

Considérant  qu'il  résulte  des  plans,  documents  et  explications 
présentés  à  la  Cour,  que  la  création  de  cet  hôtel,  non  exploité 
directement  par  la  Compagnie,  a  pour  but  et  doit  avoir  pour 
effet  une  amélioration  dans  les  conditions  générales  des  trans- 
ports, par  suite  des  facilités  qu'elle  offre  aux  voyageurs  auxquels 
soit  en  cours  de  route,  soit  aux  points  de  départ  et  d'arrivée, 
s'impose,  par  des  causes  diverses,  la  nécessité  d'un  arrêt  qui  ne 
doit  point  être  un  séjour; 

Que  cette  amélioration,  dont  le  public  est  appelé  à  profiter 
dans  les  mêmes  conditions  que  la  création  plus  ancienne,  et  non 
critiquée,  de  buffets,  restaurants,  librairies,  etc.,  installés  dans 
rintérieur  des  gares  et  stations,  n'apparatt  point,  dans  les  cir- 
constances spéciales  où  elle  intervient,  comme  un  abus  de  son 
monopole  commis  par  la  Compagnie  dans  son  intérêt  exclusif  ; 
Qu'elle  ne  constitue  point,  au  regard  de  l'industrie  privée,  un 
acte  de  concurrence  déloyale  pouvant  servir  de  base  à  une  ac- 
tion en  justice  ; 

Par  CBS  motifs.  Et  adoptant,  en  tant  qu'ils  n'ont  rie  n  de  con- 
traire au  présent  arrêt,  ceux  des  premiers  juges; 

Met  l'appellation  à  néant,  ordonne  que  ce  dont  est  appel  sor- 
tira effet  ; 

Condamne  l'appelant  à  l'amende  et  aux  dépens  de  l'appel. 


—  -m  — 

Art.  4229. 

Brevet  Bailler.  —  Produit  nouveau.  — <'  Procédé.  — 
Antérloritéfli.  —  Comuiuiilcation  à  un  coriMi  cu- 
vant d'un  ftelt  «eientUlque. 

Constitue  un  produit  industriel  nouveau  le  carbure  de 
calcium  CaC^  caractérisé  par  sa  fluidité  à  la  température  à 
laquelle  il  se  forme,  cristallisé  après  fusion,  se  présentant 
alors  sous  l'aspect  d'une  masse  compacte^  solide,  homogène 
et  presque  exclusivement  constituée  par  du  carbure  de  cal- 
cium CaC^^  alors  qu'antérieurement  on  connaissait  seule- 
ment sous  le  nom  de  carbure  de  calcium,  un  produit  fria- 
ble, amorphe,  non  cristallisé,  contenant  non  seulement  du 
carbure  de  calcium,  mais  du  carbone  et  d'autres  corps  (1). 

Est  brevetable  le  procédé  de  préparation  industrielle  des 
carbures  des  métaux  alcalino-terreux  consistant  à  chauffer 
à  V aide  d^un  four  électrique  jusqu'à  la  fusion  un  mélange 
des  corps  composants  dans  des  proportions  déterminées  (2). 

Pour  apprécier  une  antériorité,  il  importe  d'en  préciser 
les  termes  sans  y  rien  ajouter,  sans  en  rien  retrancher  et 
d'examiner  les  documents  d'après  les  connaissances  exis- 
tant au  moment  de  son  apparition,  et  antérieurement  à  la 
date  du  brevet  auquel  on  veut  opposer  l'antériorité  (3). 

(1)  Sur  les  caractères  du  produit  industriel  nouveau  v.Pouillet  Brev. 
d*inv.,  n°  20.  Pour  être  nouveau  aux  yeux  de  la  loi,  il  n'est  pas  néces- 
saire que  le  produit  n'ait  jamais  eu  de  similaire,  il  faut  et  il.ouffit  qu'il 
se  distingue  par  des  caractères  nouveaux, certains,  et  essentiel&  des  pro- 
duits existant  antérieurement.  Les  corps  chimiques  peuvent  constituer 
des  produits  nouveaux  brevetables,  lorsque  leur  formation  est  le  résultat 
du  travail  et  de  l'intelligeace  de  Thomme;  il  en  serait  différemment  s*il 
s'agissait  de  corps  existant  tout  formés  dans  la  nature,  et  n'ayant  à  subir 
en  vue  de  leur  obtention  aucune  transformation  industrielie.y.PoDillet, 
n»  24. 

(2)  Le  fait  d'employer  le  four  électrique  pour  en  tirer  un  résultat  non 
encore  obtenu  constitue  Tapplication  nouvelle  de  moyens  connus,  bre- 
vetable aux  termes  de  Tarticle  2  de  la  loi  de  184i.II  y  a  d'ailleurs 
invention  dans  le  fait  d'avoir  reconnu  l'utilité  d'amener  à  la  fusion 
les  corps  composant3,et  d'avoir  réussi  à  déterminer  les  proportions  dans 
lesquelles  ils  devaient  être  employés. 

(3-4-5)  La  règle  formulée  parle  tribunal,  est  d'une  importance  capi- 
tale. Il  faut  avoir  grand  soin,  sous  peine  de  s'exposer  aux  erreurs  les 
plus  graves,  quand  on  examine  une  antériorité,  de  faire  abstraction  des 
connaissances  acquises  par  la  suite,  et  de  se  replacer  par  lu  pensée,  pour 
l'interpréter,  à  Tépoque  de  la  prise  du  brevet.  V.  sur  le  caractère  que 
doit  présenter  une  antériorité,  Pouillet,  n»  376,  et  sur  raVitérioritéJ 
scientifique,  n*  413  et  suiv. 


<|.-^i|^p.>lili|«^     I  iflp^ljf^inp^lH 

—  327  - 

Ne  saurait  conslittier  une  antériorité  une  patente  dan$ 
laquelle,  si  le  produit  est  mentionné,  on  ne  retrouve  du 
moins  aucune  description,  ni  du  produit,  ni  des  procédés 
à  l'aide  desquels  il  await  été  obtenu  et  alors  que  d'autre 
part,  il  résulte  du  rapprochement  de  cette  patente  avec 
d'autres  brevets  postérieurs  du  même  inventeur  que  ce  n'est 
qu'à  une  date  postérieure  à  celle  du  brevet  attaqué  que  cet 
inventeur  a  revendiqué  un  corps  de  la  nature  du  produit 
breveté  (4). 

Une  communication  faite  à  un  corps  savant^  dans  la- 
quelle est  relaté  un  phénomène  scientifique,  donnant  nais- 
"  sance,par  un  simple  incident  survenu  au  cours  d'une  opéra- 
tion de  laboratoire,  à  un  corps  resté  indéterminé,  qui  n'a  pas 
été  analysé,  dont  on  n'a  indiqué  ni  l'aspect  ni  les  pro' 
priétés  et  ne  conduisant  par  suite  à  aucun  résultat  in-- 
dustriel,  ne  peut  constituer  une  antériorité  (5). 

(€.  de  Paris,  22  février  1901.  —  Société  des  carbures  de  calciam  et  So- 
ciété des  forces  motrices  du  Haut-Grésifaudan  c.  Buliier  et  Société 
des  carbures  métalliques  [1J.) 

A  la  date  du  13  juillet  1900,  la  3'  chambre  du  Tribunal 
civil  de  la  Seine,  sous  la  présidence  de  M.  Lbfbbvre-Ds- 
VAUX,  a  rendu  le  jugement  suivant  : 

Le  Tribunal,  Attendu  que,  sur  la  demande  de  la  Société  des 
forces  motrices  du  Haut-Grësivaudan  et  de  la  Compagnie  des 
carbures  de  calcium  en  nullité  des  brevets  d'invention  pris  par 
Buliier  les  9  février  1894,  28  décembre  1895,  ainsi  que  des  cer- 
tificats d'addition  à  ces  brevets  des  6  février  1895,  27  juin  1896, 
le  tribunal  par  jugement  de  cette  chambre  du  12  décembre  1898, 
a  nommé  de  Parville,  Lhoste  et  Street,  experts,  à  TefTet  de  re- 
*  chercher  et  dire  si  le  produit  détini  carbure  de  calcium  cristallisé 
revendiqué  par  Buliier  dans  son  brevet  du  9  février  1894  et  les 
l^rocédés  de  fabrication  décrits  dans  ce  brevet  ainsi  que  dans' 
ceux  du  28  décembre  1895  étaient  nouveaux  et  brevetables  à  la' 
date  du  dépôt  de  la  demande  de  ces  brevets  ;  rechercher  si,  à 
Taide  des  indications  contenues  tant  dans  les  diverses  antério- 
rités invoquées  que  dans  la  communication  de  Moissan  à  TAcadé-' 


(1)  Depuis  Tarrét  de  la  Cour  de  Paris,  la  troisième  chambre  du  tribu- 
nal civil  a,  le  17  mai  1901  (la  Loi,  19  mai),  sur  les  poursuites  de  la  so- 
ciété des  carbures,  condamné  pour  contrefaçon  du  carbure  de  calcium 
considéré  comme  produit  nouveau,  la  société  électro-métallargiqae  de , 
Ffoges  et  divers  vendeurs.  ^ 


—  328  — 

mie  des  sciences,  on  trouve  des  éléments  suffisants  pour  fabriquer 
le  produit  décrit  au  brevet  Bullier  ; 

Attendu  que  les  experts  ont  procédé  à  leur  mission  et  consi- 
gné leurs  opérations  avec  les  résultats  de  leurs  recherches  daDS 
un  procès-verbal  complet  et  documenté  qu'ils  ont  déposé  aa 
greffe  de  ce  tribunal  ;  qu'il  en  résulte  que  les  brevets  et  certifi- 
cats d'addition  dont  s'agit  pris  par  Bullier  sont  valables  ; 

Attendu  que,  malgré  Tavis  des  experts,  les  sociétés  demande- 
resses persistent  à  soutenir  que  ces  brevets  seraient  nuls  pour 
défaut  de  nouveauté  et  leur  opposent  diverses  antériorités,  no- 
tamment les  antériorités  Wahler,  Beilstein,  Maquenne,  Borchers, 
Âckinson,  Havé,  Moissan,  Wilson  ; 

Attendu  que  le  brevet  de  Bullier,  du  9  février  1894,1e  seul  qui 
ait  fait  Tobjet  d'une  discussion  en  plaidoiries,  a  été  pris  pour  un 
procédé  de  préparation  des  carbures  des  métaux  alcalino-terreux, 
procédé  consistant  à  cbauffer  dans  un  four  électrique,  par  exem- 
ple celui  de  Moissan,  un  mélange  de  charbon  avec  l'oxyde  du 
métal  alcalino-terreux  que  l'on  veut  transformer  en  carbure  ; 
que  le  brevet  indique  que  le  produit  obtenu  dans  le  four  est 
fluide  à  la  température  à  laquelle  il  se  forme,  et  donne  par  re- 
froidissement, une  masse  compacte,  solide,  homogène  et  cris- 
talline ;  qu'en  employant  cinquante-six  parties  de  chaux  vive  et 
trente-six  parties  de  charbon,  on  obtient  un  [carbure  défini  ré- 
pondant à  la  formule  GaC  ; 

Attendu  que  les  carbures  ainsi  obtenus  peuvent,  sous  la  simple 
action  de  l'eau,  donner  immédiatement  naissance  à  racétyléne 
pur  et  que,  fabriqués  industriellement,  ils  sont  susceptibles  de 
fournir  de  l'acétylène  à  un  prix  abordable  ; 

Attendu  que,  dans  le  résumé  de  son  brevet,  Bullier  ne  reven- 
dique il  est  vrai  que  le  procédé,  mais  qu'il  n'en  a  pas  moins  le 
droit  de  revendiquer  le  produit  qu'il  décrit  et  dont  il  précise 
ainsi  les  caractères  :  fluidité  à  la  température  à  laquelle  il  se 
forme,  cristallisation,  formule  CaC,  si  ce  produit  est  nouveau  ; 
que  la  validité  du  brevet  est  exclusivement  subordonnée  à  l'exis- 
tence ou  an  défaut  d'antériorité  ; 

Attendu  que  pour  apprécier  une  antériorité,  il  importe  d'en 
préciser  les  termes,  sans  y  rien  ajouter,  sans  en  rien  retran- 
cher, et  d'examiner  le  document  d'après  les  connaissances  exis- 
tant au  moment  de  son  apparition  et  antérieurement  à  la  date 
du  brevet  auquel  on  veut  opposer  l'antériorité  ; 

Attendu  que  c*est  en  s'inspirant  de  cette  règle  pratique  que 
les  experts  déclarèrent  que,  dans  les  expériences  de  Wahler,  on 
ne  retrouve  ni  la  réduction  au  four  électrique  de  la  chaux  par 
le  charbon,  ni  le  produit  carbure  de  calcium  coulé  et  cristallisé 


—  329  — 

après  refroidissement,  les  températures  mises  en  jeu  étant  in* 
suffisantes  pour  obtenir  un  produit  défini  industriel  ; 

Attendu  que,  dans  les  travaux  de  Beilstein,  il  ne  s*agit  pas 
d''ane  antériorité  proprement  dite,  puisque,  si  Beilstein  donne  la 
formule  théorique,  il  n'indique  pas  qu'il  ait  obtenu  ce  carbure 
et  ne  fournit  pas  les  moyens  de  le  préparer  ;  quMl  en  est  de  même 
des  expériences  de  Maquenne  où,  comme  pour  celles  de  Wah- 
1er,  on  ne  retrouve  pas  la  réduction  de  la  chaux  par  le  carbone 
dans  le  four  électrique  conduisant  à  la  production  du  carbure 
déûui  et  cristallisé,  et  du  passade  du  traité  d'électro-métallurgie 
de  Borchers  qui  se  borne  à  faire  observer  que  tous  les  oxydes 
sont  réduits  par  le  carbone  chauffé  électriquement  ; 

Attendu  que,  dans  le  brevet  Ackinson,  il  s^agit  de  la  prépara* 
lion  d'un  corps  spécial,  le  earborandum,  qui  est  un  carbure  de 
silicium  impur  caractérisé  par  sa  dureté,  ses  qualités  réfractai- 
r«s  et  son  insolubilité  dans  tous  les  dissolvants  ordinaires  ;  que 
le  corps  cristallisé  obtenu  par  chauffage  au  four  électrique  ne 
présente  aucun  des  caractères  du  carbure  de  calcium,  dont  Tin- 
venteur  ne  parle  même  pas  ;  que  Havé,  en  indiquant  que  le  pro- 
duit obtenu  par  lui  et  désigné  sous  le  nom  de  carbure  de  cal- 
cium n'est  attaqué  ni  par  Tacide  chlorhydrique  ni  par  l'acide 
sulfurique,  démontre,  par  là  môme,  que  ce  produit  n'était  pas 
du  carbure  de  calcium  ;  qu'il  ressort  de  l'examen  de  ces  anté- 
riorités qu'aucun  des  savants  ayant  signalé  le  carbure  de  calcium 
n'a  décrit  soit  un  procédé,  soit  un  produit  qui  puisse  mettre  eu 
échec  le  brève!  Bullier. 

En  ce  qui  concerne  l'antériorité  tirée  de  la  communication 
faite  par  Moissan,  le  12  décembre  1862,  à  l'Académie  des  sciences 
et  où  il  signale,  dans  un  cas  particulier,  la  formation,  sur  les 
électrodes  du  four  électrique,  d'un  carbure  de  calcium  : 

Attendu  que  si  Moissan,  en  étudiant  la  marche  de  son  four 
électrique,  a  remarqué  que,  vers  3,000  degrés,  la  chaux  consti- 
tuant le  four  entrait  en  fusion  et  qu'au  dehors  coulait  une  ma- 
tière fondue,  résultant,  selon  lui,  de  l'union  du  calcium  avec  le 
carbone  des  électrodes,  il  est  constant  que  ce  savant  n'a  fait  que 
noter  un  phénomène  scientifique  sans  analyser  ce  qu'il  a  supposé 
être  un  carbure  de  calciumj  sans  en  indiquer  ni  l'aspect  ni  les 
propriétés;  qu'à  la  place  d'un  simple  incident  survenu  au  cours 
d'une  opération  de  laboratoire  et  d'une  note  constatant  un  fait 
scientifique,  il  y  a  eu  de  la  part  de  Bullier,  obtention  du  carbure 
de  calcium  cristallisé  et  d'un  procédé  de  fabrication,  par  le  trai- 
tement, au  four  électrique,  d'un  mélange  de  chaux  et  de  carbone 
en  proportions  convenables  (56  de  chaux  et  36  de  charbon)  ; 

Attendu  que  la  communication  de  Moissan,  qui  ne  conduisait 
pas  à  un  résultat  industriel,  ne  peut  constituer  une  antériorité 


»  t" 


—  330  — 

^u  brevet  de  1894,  ni  pour  le  produit  ni  pour  le  procédé  ; 
En  ce  qui- concerne  la  patente  Wilson  du  21  février  1893,  ayant 
pour  titre  :  la  réduction  électrique  de  composés  métalliques  réfrac- 
taires  : 

Attendu  que  la  découverte  revendiquée  dans  cette  patente 
consiste  à  produire  l'aluminium  en  évitant  la  formation  du  bain 
de  fusion  et  en  employant  un  excès  de  carbone  dans  les  mélan- 
ges, ce  qui  est  le  contraire  du  but  poursuivi  et  atteint  par  Bul- 
lier  ;  que  l'inventeur  ne  parle  qu'incidemment  de  Tapplication 
qu*il  aurait  faite  de  son  procédé  à  la  production  du  carbure  de 
calcium  en  disant  :  «  Par  exemple,  je  Tai  déjà  employé  pour  la 
réduction  de  la  chaux  et  la  production  du  carbure  de  calcium  » 
et  ne  parle  d'aucune  analyse  de  carbure,  comme  il  n'en  indique 
aucune  propriété,  pas  même  celle  que  le  carbure  pouvait  avoir 
de  dégager  de  l'acétylène  au  contact  de  Peau  ;  qu'il  suffirait  en- 
core, pour  écarter  cette  antériorité,  de  constater  que,  d'après 
Wiison,  les  matières  en  réaction  dans  le  four  électrique  doivent 
rester  poreuses,  en  évitant  la  formation  du  bain  liquide,alorsqae 
le  bain  de  fusion  est  précisément  la  condition  essentielle  de  la 
formation  du  carbure  de  calcium  industriel  ;  que  le  carbure  po- 
reux, amorphe,  fritte,  obtenu  par  Wiison  n'a  rien  de  commun 
avec  le  produit  industriel  déQni  par  BuUier,  produit  qui  est  fluide 
à  la  température  à  laquelle  il  se  forme,  se  présente  sous  Faspect 
d'une  masse  compacte,  solide,   homogène  et  cristallisée  après 
fusion  ; 

Attendu  que  c'est  donc  à  bon  droit  que  les  experts,  avec  leur 
indiscutable' compétence,  concluent  que  le  produit  industriel 
défini  carbure  de  calcium  cristallisé  et  son  procédé  de  fabrica- 
tion décrits  dans  les  brevets  dont  la  nullité  est  demandée  étaient 
nouveaux  et  brevetables  à  la  date  du  dépôt  des  demandes  et  que 
les  indications  contenues  tant  dans  les  diverses  antériorités  in- 
voquées que  dans  la  communication  de  Moissan  à  l'Académie 
des  sciences  ne  constituent  pas  des  éléments  suffisants  pour  fa- 
briquer le  produit  décrit  au  brevet  BuUier  ;  qu'il  convient  d'en- 
tériner le  rapport  des  experts  et  de  déclarer  bons  et  valables  les 
brevets  et  certificats  d'addition  prérappelés; 
Sur  la  demande  de  30,000  francs  de  dommages-intérêts  : 
Attendu  qu'une  condamnation  à  des   dommages-intérêts  ne 
peut  être  justifiée  que  par  la  constatation  d'une  fraude  ;  que  la 
bonne  foi  des  compagnies  demanderesses  n'est  point  en  question 
dans  le  procès  et  qu'il  s'agit  d'un  litige  ordinaire  au  cours  du- 
quel elles  n'ont  pas  dépassé  les  limites  permises  à  ceux  qui  plai- 
dent; que  BuUier  et  la  Société  des  Garbures  métalliques  nejas- 
Ufient  d'ailleurs  d'aucun  préjudice  ; 


—  331  — 

Par  ces  motifs,  Entérinant  purement  et  simplement  le  rap- 
port des  experts  ; 

Dit  et  déclare  que  le  produit  industriel  «  le  carbure  de  cal- 
cium défini  cristallisé  Ga  G2  »  a  été  valablement  breveté  par 
BuUier  ;  qu'il  en  est  de  même  des  procédés  indiqués  pour  sa 
préparation  ; 

Déclare  les  brevets  et  certifîcats  d'addition  susvisés  bons  et 
valables  ; 

Déclare  en  conséquence  la  Société  des  forces  motrices  du  Haut-f 
Grésivaudan  et  laGompagnie  des  Garbures  de  calcium  mal  fon- 
dées en  leurs  demandes,  fins  et  conclusions; 

Les  en  déboute  ; 

Dit  n'y  avoir  lieu  d'accorder  des  dommages-intérêts  aux  par- 
ties défenderesses,  ni  d'ordonner  Tinsertion  du  présent  jugement 
ainsi  qu'il  est  demandé  ; 

Les  déboute  de  ce    chef  de  leurs  conclusions  ; 

Condamne  les  sociétés  demanderesses  en  tous  les  dépens  qui 
comprendront  les  frais  d'expertise,  etc. 

Sur  appel  interjeté  par  la  Compagnie  des  Garbures  de 
calciun),  la  Cour  sous  la  présidence  de  M.  Gaze,  président, 
a,  le  22  février  1901,  rendu  Tarrêl  confirmatif  suivant  : 

La  Cour,  —  Au  fond  : 

En  ce  qui  concerne  le  brevet  pris  par  Ballier  le  9  février  1894 
sous  le  numéro  236.160  : 

Sur  le  moyen  de  nullité  tiré  du  défaut  de  nouveauté  tant  du 
procédé  que  du  produit  qui  forment  l'objet  de  ce  brevet,  relative- 
ment aux  antériorités  tirées  des  travaux  et  découvertesde  Wahler, 
Beilstein,  Maquenne,  Borchers,  Ackinson,  Havé,  Moissan  et 
Wilson  : 

Adoptant  les  motifs  du  jugement  ; 

Et,  en  outre,  sur  l'antériorité  invoquée  par  les  sociétés  appe- 
lantes devant  la  Cour  et  résultant,  d'après  elle,  des  travaux  de 
Travers: 

Considérant  que  des  documents  soumis  à  la  Cour  et  discutés 
contradictoirement  par  les  parties,  il  ressort  que  Travers,  en  1893, 
a  seulement  opéré  la  réduction  du  chlorure  de  calcium  par  le 
sodium  en  présence  du  charbon,  et  obtenu  par  ce  procédé  un 
produit  friable  qui  contenait  non  seulement  du  carbure  de  cal- 
cium mais  du  chlorure  de  calcium  et  du  cyanure  de  sodium  ; 

En  ce  qui  touche  les  nouveaux  documents  produits  à  l'appui- 
de  l'antériorité  qui  résulterait  de  la  patente  américaine  de  Wilson  ,j 
des  9  août  1792  et  21  février  1893,  n»  492.377  ; 


—  332  — 

Gonsidéraut  que  ces  documents  ne  sont  pas  suffisamment  précis 
ou  concordants  pour  établir  la  preuve  qu'ayant  le  9  férrier  1894 
Wllson  avait  réussi  à  isoler  un  carbure  de  calcium  identique  à 
celui  de  BuUier  ; 

Mais  qu'en  fût-il  ainsi,  au  surplus,  d'une  part,  il  résulte  de 
Tezpertise  que  la  patente  de  1892-93  susyisée  n'avait  eu  nulle- 
ment pour  objet  de  décrire  et,  en  fait,  n'avait  nullement  décrit, 
ni  ce  produit,  ni  le  procédé  à  l'aide  duquel  il  aurait  été  obtenu 
et  il  ressort,  d'autre  part,  du  rapprochement  des  brevets,  ou  rec- 
tificatifs ou  complémentaires,  pris  par  Wilson  en  divers  paysaax 
dates  des  24  août  1894,  24  novembre  1894  et  4  février  1895  que  ce 
n'est  que  dans  ces  brevets,  postérieurs  à  celui  de  BuUier,  qu'il  a 
revendiqué  pour  la  première  fois  un  carbure  de  calcium  pur  et 
cristallisé  ; 

En  ce  qui  touche  les  décisions  de  juridictions  qui  auraient  re- 
jeté la  demande  de  brevet  faite  par  BuUier  en  pays  étranger  : 

Considérant  que  ces  décisions,  intervenues  sous  Tempire  de 
législations  spéciales,  dans  des  conditions  qui  échappent  à  l'exa- 
men de  la  Cour,  ne  sauraient  être  de  nature  à  infirmer  la  valeur 
des  éléments  de  solution  résultant  des  débats  contradictoires  qui 
ont  eu  lieu  devant  elle  ; 

Considérant  que,  de  ces  débats,  il  ressort  que  BuUier,  en  uti- 
lisant les  travaux  et  découvertes  qui  avaient  été  réalisés  avant 
lui,  a,  le  premier,par  la  combinaison  d'éléments  qui  pouvaient  être 
connus,  réalisé  et  appliqué  pour  la  préparation  industrielle  des 
carbures  de  métaux  alcalino-terreux  le  procédé  par  lui  décrit 
consistant  dans  le  chauffage  jusqu'à  la  fusion,  à  l'aide  d'un  four 
électrique  d'un  mélange  des  corps  composants  dans  des  proposi- 
tions déterminées  ; 

Qu'en  outre,  il  a  le  premier,  dans  les  conditions  déterminées 
par  ce  procédé  même,  et  au  moyen  d'un  mélange  de  chaux  et 
de  carbone  dans  des  proportions  correspondant  à  la  formule 
théorique  CaC*,  obtenu  spécialement  un  produit  industriel  noQ- 
veau  caractérisé  par  sa  fluidité  à  la  température  à  laquelle  il  se 
forme,  cristallisé  après  fusion,  se  présentant  alors  sous  l'aspect 
d'une  masse  compacte,  solide,  homogène  et  presque  exclosive- 
ment  constituée  par  du  carbure  de  calcium  CaC,  et  que  son 
invention,  limitée  d'ailleurs  dans  les  termes  mêmes  de  son  brevet,  | 
lui  donne  le  droit  de  revendiquer  et  le  procédé  et  le  prodoit 
spécial  par  lui  décrits  ; 

Sur  le  moyen  de  nullité  fondé  sur  les  paragraphes  2  à  7  de 
l'article  30  et  les  autres  articles  de  la  loi  du  5  juillet  1844  visés 
sous  cette  formule  dans  les  conclusions  d'appel  : 

Considérant,  d'une  part,  que  les  travaux  des  experts  établissent 
la  preuve  que  la  description  jointe  au  brevet  est    suffisante 


—  333  — 

pour  Texécation  de  l'inyention  ;  que  la  demande  en  indique  bien 
le  véritable  objet  et  que  cette  invention  est  légalement  bre- 
▼etable  ; 

Considérant,  d'autre  part,  qa^à  Tappui  des  autres  moyens  de 
nallité  visés  d'une  manière  générale  dans  leurs  conclusions,  les 
sociétés  appelantes  ne  produisent  aucune  justification  ni  aucun 
élément  de  preuve  ; 

En  ce  qui  touche  les  deux  brevets  pris  par  BuUier  le  28  dé- 
cembre 1895  sous  le  n*  252.805  et  sous  le  n*  252.808  et  les  certi- 
ficats d'addition  du  6  février  1895  et  du  27  janvier  1896  : 

Considérant  que  les  sociétés  appelantes  n'invoquent  aucune 
cause  de  nullité  et  ne  produisent  aucun  élément  de  preuve  qui 
soient  spéciaux  auxdits  brevets  et  certificats  d'addition  ;  que  les 
motifs  du  présent  arrêt  leur  sont  également  applicables  ; 

Pab  ces  votifs,  Et  adoptant  ceux  des  premiers  juges  qui  ne 
sont  point  contraires  à  ceux  qui  précèdent  ; 

Au  fond: 

Met  l'appellation  à  néant  ; 

Ordonne  que  ce  dont  est  appel  sortira  son  plein  et  entier  effet  ; 

Précisant  toutefois  les  dispositions  du  jugement  ; 

Dit  que  le  produit  industriel  nouveau  valablement  breveté  par 
Bullierest  un  carbure  de  calcium  défini,  cristallisé,  obtenu  dans 
les  conditions  du  procédé  décrit  et  également  breveté  par  lui  ; 

Déclare  les  sociétés  appelantes  mal  fondées  dans  leurs  deman- 
des, fins  et  conclusions  contraires  au  présent  arrêt  ; 

Les  en  déboute  ; 

Les  condamne  à  l'amende  et  aux  dépens  de  leur  appel. 

Plaidants:  M"  Cruppi,  Pouillbt  et  Allart,  avocats. — 
Min.  pub.  :  M.  Jaubois,  avocat  général. 


Art.  4230. 

Brevet  Combret.  ^  Objets  eontreftlit*.  —  ConflseA- 
tion.  —  Disparition  des  oltfets  mentionnés  dans  la 
saisie  deseriptive.  —  Ooniniaffes  et  Intérêts. 

La  confiscation  prescrite  par  Varticle  49  de  la  loi  du 
^juillet  1844  est  obligatoire  et  les  objets  contrefaits  qu'ils 
aient  été  saisis  ou  non  lors  de  la  constatation  du  délit  de 
contrefaçon  doivent  être  remis  au  propriétaire  du  brevet 
(Résolu  par  la  Cour  de  cassation)  (1). 

(1)  La  confiscation  est  obligatoire  pour  le  juge,  quelle  que  soit  la  valeur 


—  334  — 

^'  Mais  cette  remise  ne  pouvant  s*effectuer  que  $i  les  objets 
contrefaits  sont  encore  en  la  possession  du  contrefacteur 
tu  moment  où  la  condamnation  est  prononcée,  dans  le  cas 
contraire  la  réparation  civile  due  au  breveté  se  réduit  à  des 
dommages  et  intérêts  (Résolu  par  la  Cour  de  cassation)  {i\ 

Cette  circonstance  pouvant  seule  justifier  le  défaut  de 
confiscation,  est  insuffisamment  motivé,  V arrêt  qui  ne  pro- 
nonçant pa^  la  confiscation  des  objets  contrefaits  omet  de 
mentionner  la  disparition  et  n'indique  pas  qu'il  en  a  e-<^ 
tenu  compte  dans  l'allocation  des  dommages  et  intérêts  (Ré- 
solu par  la  Cour  de  cassation). 

Lorsque  la  partie  pou7*suivie  ne  peut  plus  remettre  en  na- 
ture les  objets  décrits  soit  qu'elle  ait  usé  de  son  droit  d'alié- 
nation^ soit  même  quHis  aient  été  perdus,  le  breveté  n'étant 
pas  lié  par  la  vente  faite  en  dehors  de  lui,  et  qu'il  n'a  pu 
contrôler,  est  fondé  à  réclamer  comme  représentation  des 
objets  une  valeur  fixe  qui  ne  peut  être  que  celle  quih 
avaient  au  moment  de  l'introduction  de  l'instance  (Résolu 
par  la  Cour  de  Douai,  après  cassation)  (3). 

//  n'y  a  pas  lieu  de  prononcer  la  confiscation  des  ma- 
chines ayant  servi  à  fabriquer  les  objets  contrefaits,  lors- 
qu'elles n'ont  rien  d^  spécial,  il  suffit  d'attribuer  au  breveté 
les  organes  modifiés  en  vue  de  la  contrefaçon  (Résolu  parla 
Cour  d'Amiens)  (4). 

des  objets  contrefaits,  qu'ils  aient  été  saisis  ou  non.  L'article  49,  alinéa 
1*'  de  la  loi  du  5  juillet  1844  dispose  en  effet  non  que  la  confiscation 
pourra  être,  mais  sera  prononcée  toutes  les  fois  que  la  contrefaçon  sera 
reconnue.  11  en  est  de  même  de  la  remise  au  breveté  des  objets  confis- 
qués. —  V.  Pouillet,  Brev.  d'inv.,  n»  967,9(39,  979  ;  AUart.  lll,  h"689. 
696,  Mainié,  II,  3i56,  8170;  Couhin,  Prop,  ind.,  Il,  188  et  s.;  Cass., 
20  août  1851,  Alcan,  Ann,  70.886  ;  Cass.,  14  août  1871,  Ghamponnois, 
Ann.  72.131  ;  Nancy,  11  janvier  1875,  Frezon,  Ann,  75.20  ;  Paris,  l«'jail- 
let  1861,  Brunon,  Ann.  93.73. 

(2-3)  Si  la  contrefaçon  a  pour  fondement  ce  principe  qu'an  objet  con- 
trefait et  par  suite  illicite,  ne  doit  pas  rester  entre  les  mains  de  son  fa- 
bricant ou  détenteur,  de  telle  sorte  qu'elle  doive,  d'après  les  termes  de 
Tarticle  49,  être  prononcée  même  en  cas  d'acquittement,  elle  cons- 
titue également  un  mode  de  réparation  du  préjudice  causé  an  bre- 
veté, sans  préjudice  de  plus  amples  dommages  et  intérêts  s'i/yalteu,' 
ajoute  le  législateur  dans  le  second  paragraphe  de  Tarticle  49.  La 
conséquence  en  est  que,  si  les  objets  contrefaits,  existant  au  moment 
de  rassignation,  ont  disparu,  le  juge  doit  évaluer  le  préjudice  ainsi 
causé  au  breveté,  et  lui  allouer  des  dommages  et  intérêts  correspon- 
dants, mais,  comme  c'est  la  date  de  Tassignation  qui  fixe  les  droilJ 
respectifs  des  parties,  c'est  à  cette  époque  qu'il  faut  se  placer  pour 
apprécier  la  valeur  des  objets  contrefaits. 

(4)  C'est  avec  raison  que  la  Cour  s'est  refusé  à  prononcer  la  confiscation 


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—  335  — 

(C.  d'Orléans,  21  juillet  1896  ;  a  de  Cass.,  14  janvier  1B98  et  G.  d^Âraîens^ 
2  déceiAbre  1898  ;  C.  de  cass.,  9  juin  1899;  G.  de  Doaai,  9  avril  1900. 
—  Gombret  c.  Bondonneau .  ) 

Le  sieur  Gombrel,  en  vertu  d*un  brevet  pris  par  lui  à  la 
date  du  30  novembre  4885  pour  un  système  de  briquettes 
de  charbon  perfectionnées,  avait,  le  21  novembre  1887,  fait 
saisir,  comme  contrefaçon  de  son  système,  des  briquettes 
de  charbon  chez  les  sieurs  Bondonneau  marchand  de  bois 
et  Masson  et  Renard  directeurs  de  la  Société  des  allume- 
feux  écossais  et  les  avait  poursuivis  comme  contrefacteurs 
devant  le  Tribunal  correctionnel  de  la  Seine. 

Le  tribunal  renvoya  les  défenseurs  des  fins  de  la  plainte 
en  se  fondant  sur  ce  que  le  brevet  n'ayant  pas  été  exploi- 
té pendant  le  délai  imparti  par  la  loi,  le  demandeur  devait 
être  considéré  comme  déchu  de  ses  droits  et  non  recevable 
dans  son  action.  La  Cour  de  Paris  sur  Tappel  de  Gom- 
bret par  arrêt  du  9  juillet  1888  {Ann.,  89.  168)  reconnut  au 
contraire  que  Taction  de  Gombret  était  recevable  nonobs- 
tant le  défaut  d'exploitation  du  brevet,  Taction  ayant  été 
intentée  avant  l'expiration  des  deux  années  imparties  par 
la  loi  pourTexploitalion  du  brevet  à  partir  de  sa  délivran- 
ce ;  mais  constatant  en  fait,  que  Gombrel  n'ayant  pas  ex- 
ploité, ni  tenté  d'exploiter  industriellement  sa  prétendue 
invention,  aucun  préjudice  n'a  pu  lui  être  causé,  elle  ren- 
voya les  intimés  des  fins  de  la  poursuite  sans  dépens. 

Pourvoi  de  Gombret  devant  la  Gourde  cassation  qui,  par 
arrêt  du  10  janvier  1889  (V.  Anw.,  89. 168),  casse  l'arrêt  de 
la  Cour  de  Paris,  comme  ayant  violé  l'article  32  et  Tarti- 
cle  40  de  la  loi  du  8  juillet  1844  en  faisant  résulter  l'ab- 
sence du  préjudice  pour  le  breveté  uniquement  de  ce  que 
au  moment  où  il  a  exercé  son  action  il  n'avait  pas  encore 
exploité  sa  découverte  et  de  ce  qu'il  se  serait  ensuite  trouvé 


des  machines  qui  ne  présentaient  en  elle-même  rien  de  caractéristique 
et  s'est  bornée  à  attribuer  au  breveté  la  valeur  des  seuls  organes  parti- 
culiers employés  à  la  confection  des  objets  contrefaits.  —  V.  Pouillet, 
n»978;  Allart,  III,  698;  Paris,  23  août  1866,  Gourant,  Ann.  67.aS7  ; 
Paris,  5  juillet  1884,  Fournier,  Ann.  85.259;  et  aussi,  Amiens,  2  juin 
1883,  Barreau-Pinchon,  Ann.  85.259;  Paris,  19  juin  1890,  Sourbé, 
Ann.  90.252;  Con//YÏ,  Nancy,  10  déc.  1894,  Dervaux,  Rec.  Nanci/,9b. 
143.  A.  T. 


■r-\i-t^w-      '-  •  -       --  ■-   -r  T-  T^»-.-. «-^^^-  '^-— -^-«.•■,—  V|'J|'r=^ 


-  336  — 

déchu  de  ses  droits  faute  d'exploitation,  méconnaissant 
ainsi  Feffet  du  droit  exclusif  accordé  au  brevet  à  partir 
de  la  signature  du  brevet,  et  faussement  attribué  à  la  dé* 
chéance  un  effet  rétroactif  (1). 

La  Cour  d'Orléans  statuant  comme  Gourde  renvoi,  mit 
par  arrêt  du  28  mai  1888  Masson  et  Renard  hors  de  cause 
et  ordonna  une  expertise  ;  enfin  par  arrêt  du  21  juillet  1896, 
sans  tenir  compte  du  rapport  des  experts  (2)  qu'elle  dé- 
clara dépourvu  de  tout  caractère  probant,  elle  repoussa 
dans  les  termes  suivants  les  prétentions  de  Combret  : 

La  Cour,  Statuant  comme  Cour  de  renvoi  en  vertu  de  Tarrét 
de  la  Cour  de  cassation  du  10  janvier  1889  : 

Attendu  que,  par  procès-verbal  du  21  novembre  1887,  Com- 
bret a  fait  saisir  chez  Bondonneau  des  briquettes  qui  diaprés  le 
poursuivant  auraient  été  la  contrefaçon  de  briquettes  faisant 
l'objet  d'un  brevet  pris  par  Combret  le  25  août  1885  ; 

Attendu  qu'à  la  suite  de  cette  saisie  Combret  a,  suivant  deax 
procès- verbaux  en  date  du  23  novembre  1887,  déposé  au  greffe 
correctionnel  de  la  Seine  deux  briquettes  saisies,  au  travers  des- 
quelles était  passé  un  ruban  portant  les  inscriptions  suivantes  : 
«  Procès-verbal  du  21  novembre  1887  ;  briquette  arfçuée  de  con- 
trefaçon ;  allume-feux  écossais  Maifon  et  Renaud,  28,  avenue  de 
rOpéra.  L'buissier  :  Langlet  ;  le  commissaire  de  police  :  Dufour- 
mantelle  »  ; 

Attendu  qu'à  la  suite  d'un  arrêt  rendu  par  la  Cour  de  cassation, 
le  10  janvier  1889,  la  Cour  d'Orléans  a  nommé  un  expert  chargé 
notamment  de  dire  quelle  est  la  nature  des  différents  produits 
fabriqués  par  Bondonneau  (briquettes  L.  B.  sans  trous,  briquettes 
L.  B.  avec  trous,  briquettes  L.B.  avec  trous  et  rainures),  dédire 
si  l'un  ou  l'autre  de  ces  modèles  constitue  la  contrefaçon  des 
briquettes  faisant  l'objet  du  brevet  de  Combret; 

Attendu  que  le  sieur  Combret,  ayant  abandonné  les  poursui- 
tes pendant  plusieurs  années,  les  a  reprises  en  1895  ;  qu'au  mois 
de  mai  1895  il  s'est  présenté  devant  l'expert,  lui  demandant  de 
procéder  aux  opérations  qui  lui  avaient  été  confiées  ; 

(1)  Sur  la  non-rétroactivité  de  la  déchéance  faute  d'exploitation  et  sur 
le  fait  que  l'absence  totale  de  préjudice  ne  suffit  pas  à  faire  disparaître 
la  contrefaçon,  v.  Feuillet,  n<»  363  à  866  ;  Allart,  Prop.des  brev.  cTtue., 
no*  295 et  434  et  Cass.,  26  juillet  1889,  Vacher,  Ann.  89.234. 

(2)  L'expertise  est  une  mesure  d'instruction  que  le  juge  ordonne  afin 
de  s'éclairer,  mais  dont  les  résultats  ne  s'imposent  à  lai  en  aucune  fa- 
çon, n  peut,  après  la  nullité  d'une  expertise  ordonnée,  juger  sans  en 
ordonner  une  autre.  —  Y.  Ponillet,  n»  U28  et  Paris,  22  mars  1863  ; 
Masse,  Ann.  62.388;  Rej.,  30  janv.  1869  ;  Langlois,  Ann.  69.128. 


—  337  — 

Attendu  que,  pour  apprécier  la  valeur  de  Tinvention  prétendue, 
l*ezpert  a  effectué,  sur  le  même  foyer,  la  combustion  de  bri- 
quettes «  ordinaires  »  à  trous  et  de  briquettes  à  trous  «  avec 
rainures  »;  que  les  briquettes  qui  ont  servi  à  cette  expérience 
ont  été,  aux  termes  du  rapport,  «  apportées  par  M.  Gombret  »  ; 
que  l'expert  constate  qu'il  n'a  pu  opérer  sur  les  briquettes  pré- 
sentées à  la  Cour  d'Orléans  ; 

Attendu  que  l'expert  s'est  borné  à  faire  brûler  simultanément 
des  briquettes  sans  rainures  et  des  briquettes  avec  rainures  (sys- 
tème Gombret,  8  trous)  et  qu'il  a  constaté  que  les  briquettes  à 
rainures  et  trous  présentent  sur  les  autres  une  supériorité  in- 
contestable au  point  de  vue  de  la  combustion  ; 

Attendu  que  ce  second  rapport,  qui  porle  la  date  du  2  novem- 
bre 1895,  ne  s'explique  pas  sur  les  points  essentiels  à  vérifier, 
o'est-à-dire  sur  la  nature  des  produits  fabriqués  et  sur  la  ques- 
tion de  savoir  si  les  divers  modèles  de  Bondonneau  constituent 
la  contrefaçon  des  briquettes  brevetées  ; 

Attendu  qu'à  la  date  du  31  mai  1896  Texpert  a  rédigé  un  sup- 
plément de  rapport  ;  qu'il  constate  que  le  sieur  Gombret  lui  a 
remis  un  procès-verbal  de  dépôt  du  23  mars  1887,  en  l'informant 
que  les  pièces  à  conviction  étaient  restées  au  greffe  de  la  Gour  de 
Paris  ; 

Attendu  que  l'expert,  en  examinant  extérieurement  les  deux 
briquettes  saisies,  déclare  qu'elles  présentent  sur  Tune  et  l'au- 
tre face  une  rainure  qui  établit  une  communication  entre  les 
deux  trous  du  milieu  et  les  bords  libres  de  la  briquette  ;  que 
cette  disposition  est  celle  des  briquettes  faisant  l'objet  du  bre- 
vet Gombret  ; 

Attendu  que  le  rapport  principal  n'est  pas  régulier  et  n'offre 
aucun  caractère  probant  ;  que  Texpert  s'est  borné  à  comparer 
des  briquettes  qu'il  nomme  ordinaires  à  trous  avec  des  briquet- 
tes à  trous  et  rainures  ;  que  ces  objets  lui  ont  été  apportés  par 
Gombret  ;  qu'il  eût  dû  comparer  des  briquettes  brevetées  de 
Gombret  avec  celles  de  Bondonneau,  ce  qui  eût  dû  être  constaté 
préalablement  par  les  deux  parties  ;  qu'il  est  impossible  de  sa- 
voir où  Gombret  s'est  procuré  les  deux  espèces  de  briquettes 
qu'il  a  remises  à  l'expert  ;  qu'enfin  celui-ci  n'indique,  ni  par  une 
analyse,  ni  même  par  une  simple  affirmation,  quelle  était  la  na- 
ture des  matières  composant  les  objets  expertisés,  ce  qui,  indé- 
pendamment des  trous  et  des  rainures,  devait  avoir  une  influence 
notable  sur  leur  combustibilité  ; 

Attendu  que  le  rapport  supplémentaire  se  borne  à  mentionner 
la  forme  extérieure  (trous  et  rainures)  des  briquettes  saisies, 
mais  que  ces  briquettes  n'ont  été  l'objet  d'aucune  expérience  de 
vérification  ou  d'analyse  ;  qu'il  est  impossible  dès  lors  d'affir- 

22 


—  338  — 

mer  avec  certitude  quelle  est  la  contrefaçon  des  briquettes  Gom- 
bret  ; 

Attendu,  en  conséquence,  qu'il  n'y  a  lieu  d'homologuer  le 
double  rapport  dont  il  s'agit,  quelle  que  soit  la  compétence  de 
l'expert  qui  Ta  rédigé  ; 

Attendu  que  l'interlocutoire  ne  lie  pas  le  juge  ; 

Attendu  qu'en  annulant  un  rapport  d'expert  les  juges  peuvent, 
sans  recourir  à  un  nouyel  examen,  statuer  au  fond  sur  les  pré- 
tentions des  parties  ; 

Attendu  qu'il  résulte  des  documents  de  la  cause  qu'avant  l'ob- 
tention du  brevet  Combret,  et  notamment  en  1883  et  1884,  Bon- 
donneau  avait  fabriqué  et  vendu  des  modèles  de  briquettes  avec 
trous  et  rainures  et  que  celles-ci  étaient  produites  par  les  ini- 
tiales L.  B.  en  creux,  correspondant  aux  trous;  que  si  ces  rai- 
nures n'atteignaient  pas  complètement  le  bord  des  briquettes, 
l'espace  de  moins  d'un  centimètre  existant  entre  la  lin  de  la  rai- 
nure et  le  bord  de  la  briquette  était  insignifiant  au  point  de  vue 
de  la  combustion  ; 

Attendu  que  Combret  ne  justifie  ni  d*une  contrefaçon  ni  d'an 
préjudice  par  lui  éprouvé  ;  que,  soit  avant,  soit  depuis  la  pour- 
suite, il  ne  s'est  livré  à  aucune  fabrication  ni  à  aucun  commerce 
de  ses  prétendus  produits  industriels  ;  d'où  il  suit  que  la  de- 
mande doit  être  rejetée  ; 

Par  ors  motifs,  Et  adoptant  ceux  des  premiers  juges  non  con- 
traires au  présent  arrêt, 

Déclare  nulle  et  non  probante  la  double  expertise  ; 

Et  sans  qu'il  y  ait  lieu  de  recourir  à  une  nouvelle  expertise 
qui  serait  inutile, 

Rejette  les  diverses  demandes  de  Combret  ; 

Réforme  le  jugement  du  Tribunal  correctionnel  de  la  Seine 
du  28  avril  1888  dont  est  appel  ; 

Et  condamne  Combret  aux  dépens  de  première  instance  et  d'ap- 
pel tant  ceux  faits  devant  la  Cour  de  Paris  que  devant  la  Cour  de 
renvoi,  moins  toutefois  ceux  de  l'arrêt  cassé  de  la  Cour  de  Pa- 
ris du  9  juillet  1888. 

Nouveau  pourvoi  de  la  part  de  Combret  et  arrêt  de  la 
Cour  de  cassation  du  4 janvier  1897  cassant  l'arrêt  delà 
Cour  d'Orléans  par  insufSsance  de  motifs. 

La  Coor,  Vu  l'article  7  de  la  loi  du  20  avril  1810  : 
Attendu  que  Combret  a  obtenu  le  30  novembre  1883  un  brevet 
d'invention  par  un  système  de  briquettes  de  charbon  perfection- 
nées dites  fumivores  ;  que  l'arrêt  attaqué  a  déclaré  ce  brevet  nul 
par  ce  motif  qu'antérieurement  à  la  date  dudit  brevet  Bondonneau 


■'"''^-^-'•.■•Tïf— 


—  339  — 

poursuivi  par  Gombret  comme  contrefacteur  avait  fabriqué  et 
vendu  des  briquettes  avec  trous  et  rainures  ; 

Attendu  que  si  le  juge  du  fait  a  un  pouvoir  souverain  pour  ap- 
précier soit  la  nouveauté,  ou  la  non-nouveauté  d'une  invention, 
soit  la  valeur  des  ressemblances  ou  des  dissemblances  existant 
entre  Tobjet  breveté  et  Tobjet  argué  de  contrefaçon,  c'est  à  la 
condition  qu'il  ressorte  nettement  de  sa  décision  qu'il  a  examiné 
les  éléments  essentiels  de  l'invention  et  qu'il  a  bien  compris  le 
sens  et  la  portée  du  brevet  formant  le  titre  de  l'action  ; 

Attendu  que  Tarrét  attaqué  se  borne  à  constater  que  Gombret 
a  pris  un  brevet  d'invention  en  1885  sans  dire  quel  est  l'objet  de 
ce  brevet,  et  sans  indiquer  quel  est  le  résultat  ou  le  produit  in- 
dustriel que  l'inventeur  s'est  proposé  d'obtenir  ;  que  l'arrêt  ne 
contient  môme  pas  la  description  des  modèles  de  briquettes  que 
Gombret  prétend  avoir  inventées  et  qu'il  déclare  seulement  «  qu'a- 
yant l'obtention  du  brevet  en  litige  et  notamment  en  1883  et  1884 
Bondonneau  avait  fabriqué  et  vendu  des  modèles  de  briquettes 
avec  trous  et  rainures,  celles-ci  étant  produites  par  les  initiales 
L.  B.  en  creux  correspondant  aux  trous  »  ; 

Attendu  que  ces  constatations  sont  insufûsantes  pour  permettre 
à  la  Gour  de  cassation  d'exercer  son  droit  de  contrôle  ;  que  l'arrêt 
attaqué  ne  fournit  aucuns  termes  de  comparaison  à  l'aide  des- 
quels il  soit  possible  de  reconndtre  si  les  briquettes  brevetées 
au  profit  de  Gombret  sont  ou  non  semblables  à  celles  qui  avaient 
été  mises  en  vente  par  Bondonneau,  antérieurement  au  brevet, 
et  si  la  loi  du  brevet  a  été  exactement  comprise  par  le  juge  du 
fait. 

D'où  il  suit  que  l'arrêt  attaqué  a  violé  l'article  7  susvisé  de  la 
loi  du  20  avril  1810  ; 

Par  CBS  motifs,  Gasse... 

L'affaire  ayant  été  renvoyée  devant  la  Cour  de  Rouen 
celle-ci  déclara  M.  Bondonneau  coupable  de  contrefaçon, 
le  condamna  à  50  francs  d'amende  et  à  SOO  francs  de  dom. 
mages-intérêts,  mais  ne  prononça^  au  profit  de  Gombret,  la 
confiscation  que  pour  les  deux  briquettes  saisies  réelle- 
ment comme  échantillons  au  début  de  la  procédure. 

H.  Gombret  s'étant  pour  la  troisième  fois  pourvu  devant 
la  Gour  de  cassation,  la  chambre  criminelle  sous  la  prési- 
dence de  M.  LoEv^  président,  après  avoir  entendu  M.  le  con- 
seiller Sallantin  en  son  rapport,  M.  l'avocat  général  Puech 
en  ses  conclusions  et  M""  Morbt  en  ses  plaidoiries,  a,  le  14 
janvier  1898,  rendu  le  nouvel  arrêt  de  cassation  suivant  : 


—  340  — 

La  Gour,  VidaQt  son  délibéré  ordonné  en  la  chambre  du  con- 
seil ; 

Sur  le  premier  moyen  du  pourvoi  pris  de  la  violation  de  l*ar- 
ticle  49  de  la  loi  du  5  juillet  1844  et  de  l'article  7  de  la  loi  du 
20  avril  1810  : 

Vu  lesdits  articles  ; 

Attendu^  en  droit,  que  Tarticle  49  de  la  loi  du  5  juillet  1844  dis- 
pose que  les  objets  reconnus  contrefaits  seront  confisqués  ;  que  la 
confiscation  prescrite  par  cet  article  est  obligatoire  et  que  les  ob- 
jets contrefaits,  qu'ils  aient  été  ou  non  saisis  lors  de  la  consta- 
tation du  délit,  doivent  être  remis  au  propriétaire  du  brevet  ; 

Attendu  toutefois  que  cette  remise  ne  peut  s'effectuer  qu'au- 
tant que  les  objets  contrefaits  sont  encore  en  la  possession  du 
contrefacteur  au  moment  où  la  condamnation  est  prononcée  ; 
que  dans  le  cas  contraire  la  réparation  civile  due  au  breveté  se 
réduit  à  des  dommages-intérêts  dont  l'évaluation  reste  soumise 
aux  règles  du  droit  commun  ; 

Attendu,  en  fait,  que  Tarrét  attaqué  constate  :  1**  que  deux 
lots  de  briquettes  arguées  de  contrefaçon  et  dont  le  nombre  s'é- 
levait à  185,180  ont  été  trouvés  le  21  novembre  1887  dans  le  chan- 
tier de  Bondonneau  et  décrites  par  un  procès-verbal  régulier; 
2*  que  l'huissier  n'aprocédé  à  la  saisie  réelle  que  de  deux  briquet- 
tes à  titre  d'échantillons  ;  que  statuant  sur  la  confiscation,  l'arrêt 
déclare  a  qu'il  n'y  a  lieu  d'appliquer  cette  mesure  qu'à  l'égard  des 
deux  briquettes  qui  avaient  été  saisies  réellement,  les  domma- 
ges-intérêts alloués  à  la  partie  civile  constituant  une  réparation 
suffisante  »  ; 

Attendu  que  si,  par  suite  du  long  temps  écoulé  depuis  le  com- 
mencement de  l'instance,  les  briquettes  décrites  par  l'huissier  ne 
se  trouvaient  plus  en  la  possession  de  Bondonneau  et  si,  dès  lors, 
la  réparation  civile  due  à  Gombret,  à  raison  de  ces  briquettes 
devait  être  convertie  en  dommages-intérêts,rarrôt  attaqué  aurait 
dû  faire  mention  de  cette  circonstance  qui  pouvait  seule  justifier 
le  défaut  de  confiscation  ;  que  l'arrêt  attaqué  ne  contient  aucune 
constatation  sur  ce  point  et  qu'il  n'indique  même  pas  d'une  ma- 
nière précise  si,dans  l'évaluation  du  préjudice  causé  au  breveté, 
il  a  tenu  compte  des  briquettes  décrites  au  procès-verbal  du  21 
novembre  1887  ;  que,  dans  ces  conditions,  la  Gour  de  cassation  est 
dans  l'impossibilité  d'exercer  son  droit  de  contrôle  et  de  s'assu- 
rer que  les  prescriptions  de  l'article  49  de  la  loi  du  5  juillet  1844 
ont  été  observées  ; 

Par  CBS  motifs,  Et  sans  qu*il  y  ait  lieu  de  statuer  sur  les  autres 
moyens  du  pourvoi  ; 
Gasse,  etc. 


—  341  — 

La  Cour  d'Amiens,  saisie  du  renvoi,  après  avoir  entendu 
M**  Allart  et  Poucet  du  barreau  de  Paris,  a,le  2  décembre 
1898,  statué  en  ces  termes  : 

La  Cour,  Statuant  par  suite  du  renvoi  que  lui  a  fait  la  Cour  de 
cassation  par  arrêt  du  14  janvier  1898  : 

Considérant  que  la  Cour  de  Rouen  saisie  également  par  suite 
d'un  renvoi  a  par  arrêt  du  25  juin  1897  déclaré  que  les  briquettes 
saisies  le  21  novembre  1887  et  fabriquées  par  Bondonneau 
étaient  la  contrefaçon  de  celles  brevetées  en  1885  par  le  docteur 
Combret,et  Ta  condamné  sur  les  réquisitions  du  minîsière  public 
en  50  francs  d*amende,  a  prononcé  la  saisie  et  la  confiscation  de 
deux  briquettes,  disant  qu'il  n'y  avait  lieu  d'étendre  au  delà 
les  saisie  et  confiscation  et  enfin  Ta  encore  condamné  à  payer 
au  docteur  Combret  500  francs  à  titre  d^  dommages-intérêts  ; 

Considérant  que  cet  arrêt  causait  à  Bondonneau  un  grief  con- 
sidérable puisqu'il  le  déclarait  contrefacteur,  alors  que  devant 
les  autres  juridictions,  Tribunal  de  Seine,  Cours  de  Paris  et  d'Or- 
léans, il  avait  été  renvoyé  des  fins  des  poursuites  dirigées  contre 
lui  par  la  partie  civile  et  le  ministère  public  ;  que  cependant  il 
ne  s'est  pas  pourvu  devant  la  Cour  régulatrice  pour  en  obtenir  le 
redressement;  que  seul  le  docteur  Combret  s'est  pourvu  contre 
cette  décision  se  fondant  sur  deux  moyens  :  le  premier  tiré  de 
la  violation  de  Tarticle  49  de  la  loi  du  5  juillet  1844  en  ce  que 
l'arrêt  avait  limité  la  confiscation  aux  seuls  objets  réellement 
saisis  :  le  deuxième,  de  la  violation  du  même  article  et  en  outre 
de  l'article  7  de  la  loi  du  20  avril  1810,puisque  la  Cour  de  Rouen 
se  refusant  à  prononcer  la  confiscation  des  machines  ayant 
servi  à  la  fabrication  des  choses  contrefaites  par  le  seul  motif 
que  ces  machines  n'avaient  pas  été  réellement  saisies,  mais  sim- 
plement décrites,  avait  manifestement  enfreint  les  dispositions 
de  ces  articles  et  rendu  un  arrêt  manquant  de  base  légale  ; 

Considérant  que  la  Cour  de  cassation  sur  Tunique  pourvoi  de 
la  partie  civile  n'avait  à  s'occuper  et  ne  s'est  en  effet  occupée  que 
des  point?  dont  elle  était  touchée  ;  que  pour  s'en  convaincre  il 
suffit  de  rapprocher  les  motifs  du  dispositif  qui  ne  statue  que  sur 
les  deux  points  formant  Tobjet  du  pourvoi  ; 

Considérant  qu'en  l'état  la  Cour  d'Amiens,  se  renfermant  dans 
l'objet  du  renvoi,  ne  peut  plus  élargir  le  débat  et  rechercher  si 
Bondonneau  était  réellement  un  contrefacteur  et  si  dans  cette 
hypothèse  des  peines  correctionnelles  pouvaient  encore  être  pro- 
noncées contre  lui  ; 

Considérant  qu'elle  a  les  éléments  nécessaires  pour  apprécier 
la  valeur  des  185.180  briquettes  saisies  par  description  en  te- 
nant  compte  de  leur  valeur  réelle  au  jour  de  la  saisie  et  de  la 


—  342  — 

dépréciation  qu'elles  aaraient  subie  par  suite  des  avaries  et 
intempéries  résultant  d*un  séjour  prolongé  dans  un  chantier 
ouvert  exposé  aux  injures  du  temps  et  des  saisons,qu'il  convient 
de  fixer  à  20  fr.  le  mille  le  prix  de  ces  briquettes  soit  pour  le 
lout3,70:H  fr.60; 

En  ce  qui  concerne  la  confiscation  des  machines  : 

Considérant  qu'il  n'a  été  construit  par  Bondonneau  aucnne 
machine  spéciale  ;  qu'il  s'est  borné  à  placer  dans  les  machines 
servant  à  la  fabrication  de  toutes  les  briquettes  bien  antérieures 
au  brevet  Gombret,  des  matrices  qui  ont  modifié  les  dispositions 
des  anciennes  briquettes,  afin  de  les  transformer  en  produits 
prétendus  contrefaits  ;  qu'il  a,  le  21  novembre  1887,  c'est-à-dire 
le  jour  môme  où  l'huissier  Langlet  avait  procédé  à  la  saisie  de 
deux  briquettes  et  à  la  description  des  autres,  ainsi  que  des  ou- 
tils de  fabrication,  fait  modifier  ses  moules  de  façon  à  ne  plus 
fabriquer  qu'une  briquette  avec  trous,  mais  sans  rayures  ou  ca- 
nalicules  ;  que  ceci  résulte  d'un  procès-verbal  de  constat  du 
22  novembre  1887  enregistré  ;  que  la  valeur  des  matrices  modi- 
fiées peut  être  évaluée  à  10  francs  ; 

Considérant  que  le  docteur  Combret  réclame  la  confiscation 
des  matières  ayant  servi  à  la  fabrication  des  objets  contrefaits  ; 

Considérant  qu'il  n'apporte  aucune  preuve  à  l'appui  de  cette 
prétention  ;  qu'il  n'est  nullement  justifié  que  Bondonneau  ait 
employé  une  matière  spéciale  pour  fabriquer  les  briquettes  dont 
s'agit  ;  que  tout  prouve  au  contraire  qu'il  n'a  employé  que  le 
mélange  ordinaire  et  en  usage  depuis  de  longues  années  pour 
fabriquer  les  charbons  agglomérés  ; 

Considérant  encore  que  le  docteur  Combret  prétend  que  Bon- 
donneau, en  dehors  des  briquettes  saisies  et  décrites,  a  fabriqué 
et  vendu  un  nombre  considérable  de  briquettes  semblables  ;  que 
de  ce  chef  il  demande  la  condamnation  en  dommages-intérêts  à 
fixer  par  état,  après  expertise  et  prise  de  connaissance  des  livres 
de  commerce  de  Bondonneau  ;  que  sur  ce  point  encore  il  se  borue 
à  de  pures  allégations  ;  qu'il  établit  tout  au  plus  qu'une  briquette 
paraissant  semblable  à  celles  contrefaites  aurait  été  exposée 
chez  un  client  de  Bondonneau  ;  que  cela  n'établirait  pas  qu'il  y 
ait  eu  vente  ;  que  ce  procès  remontant  à  onze  ans,  cette  exper- 
tise serait  inopérante  et  n'amènerait  aucun  résultat  sérieux,  sur 
lequel  une  décision  pourrait  intervenir;  qu'il  n'y  a  pas  lieu  da- 
vantage, sur  des  présomptions  absolument  dénuées  de  précision, 
de  faire  compulser  les  registres  d'un  négociant  d*une  honora- 
bilité reconnue  jusqu'ici  ; 

Considérant  enfin  qu'il  demande  la  réparation  du  préjudice 
que  lui  a  causé  une  contrefaçon  qui  a  mis  longtemps  en  cause  la 
validité  de  son  brevet  ;  que  l'allocation  de  500  fr.  de  dommages- 


—  343  — 

intérêts  par  l'arrSt  de  Rouen  constitue  une  réparation  largement 
safflsante  puisqu'il  est  avéré  que  pour  une  raison  quelconque, 
le  docteur  Gombret  n'a  jamais  sérieusement  cherché  ni  par 
lui-même,  ni  par  d'autres  d'exploiter  pratiquement  son  brevet  ; 

Par  cks  motifs,  Prononce  la  confiscation  des  185.180  briquettes 
trouvées  chez  Bondonneau  et  à  défaut  de  pouvoir  remettre  à 
Gombret  les  briquettes  ^AÎsies  ainsi  que  les  matrices  qui  n'exis- 
tent plus  et  pour  tons  dommages-intérêts  sur  ces  deux  chefs  les 
seuls  soumis  àlaGour,  alloue  à  Gombret  la  somme  globale  de 
3.703  fr.60  ; 

Gondamne  Bondonneau  à  payer  cette  somme  ; 

Dit  qu'il  n'y  a  lieu  à  la  confiscation  des  matrices  ayant  servi  à 
la  fabrication  des  briquettes  contrefaites,  ni  à  condammation  à 
des  dommages-intérêts  à  fixer  par  état  ou  autrement  ;  qu'il  n'y  a 
lieu  en  conséquence  de  nommer  des  experts  afin  de  rechercher 
la  quantité  de  briquettes  contrefaites,  fabriquées  et  vendues  par 
Bondonneau,  ni  de  faire  prendre  connaissance  des  livres  de  com- 
merce cotés  et  paraphés  le  21  novembre  1887  ; 

Gondamne  Bondonneau  en  tous  les  dépens  de  première  ins- 
tance et  d'appel,  qui  comprendront  tant  ceux  faits  devant  la 
Gour  de  Paris  que  devant  les  Gours  de  renvoi  comme  ayant  été 
nécessités  par  la  défense  de  Gombret. 

La  Cour  d'Amiens  ayant  apprécié  la  valeur  des  briquet- 
tes non  d'après  leur  valeur  réelle  au  moment  de  la  saisie, 
mais  en  tenant  compte  de  la  dépréciation  qu'elles  auraient 
subies  par  suite  des  avaries  et  intempéries  résultant  du 
séjour  prolongé  dans  un  chantier  ouvert  exposé  aux  in- 
jures du  temps  et  des  saisons,  jusqu'au  jour  de  Tarrèt  dé- 
finitif les  lui  attribuant,  M.  Gombret  déféra  l'arrêt  de  la 
Cour  d'Amiens  à  la  Cour  de  cassation  qui,  sur  les  conclu- 
sions de  M.  l'avocal  général  Melgot,  rendit  le  9  juin  1899 
l'arrêt  suivant  : 

La  Goor,  Vidant  son  délibéré  en  la  chambre  du  conseil  ; 

Sur  l'unique  moyen  du  pourvoi  pris  de  la  violation  des  arti- 
cles 47  et  49  de  la  loi  du  5  juillet  1844  et  de  l'article  7  de  la  loi 
du  20  avril  1810,  en  ce  que  l'arrêt  attaqué  aurait  déterminé  d'une 
manière  hypothétique  la  valeur  des  briquettes  contrefaites  par 
Bondonneau  au  lieu  d'en  fixer  le  prix  à  la  date  du  procès-verba ^ 
de  description  des  dites  briquettes  et  de  l'assignation  qui  en  a 
été  la  suite  ; 

Vu  les  articles  47  et  49  de  la  loi  du  5  juillet  1844  ; 

Attendu  en  fait  que  Gombret  a  pris  le  30  novembre  1885  un 


—  344  — 

brevet  d'invention  pour  an  modèle  de  briquettes  de  chauffage, 
que  prétendant  que  son  invention  avait  été  contrefaite  par  Bon- 
donneau,  ii  a  fait  citer  ce  dernier  devant  le  Tribunal  correction- 
nel de  la  Seine  après  avoir  fait  constater  par  un  procès-verbal 
régulier,  en  date  du  21  novembre  1887,  que  185.180  briquettes 
arguées  de  contrefaçon  se  trouvaient  dans  le  chantier  de  Bondon- 
neau  ; 

Attendu  que  Taction  en  contrefaçon  formée  par  Combret  a  été 
successivement  rejetée  par  deux  arrêts  des  Cours  d'appel  de  Pa- 
ris et  d'Orléans,  qui  ont  été  cassés  et  qu'en  dernier  lien,  sa  de- 
mande a  été  déclarée  fondée  par  un  arrêt  de  la  Cour  d'appel  de 
Rouen  du  25  juin  1897, lequel  a  condamné  Bondonneau  à  50  francs 
d'amende  et  500  francs  de  dommages-intérêts  envers  la  partie 
civile  ; 

Attendu  que  sur  le  pourvoi  de  Combret,  ce  dernier  arrêt  a  été 
cassé  partiellement  pour  avoir  omis  de  statuer  sur  la  confiscation 
des  briquettes  faisant  l'objet  du  procès-verbal  de  description  ci- 
dessus  visé  ;  que  la  Cour  d'appel  d'Amiens  saisie  comme  Cour 
de  renvoi  a  prononcé  la  confiscation  desdites  briquettes  en  dé- 
clarant toutefois  que,  faute  par  Bondonneau  de  remettre  ces 
briquettes  ainsi  que  les  matières  ayant  servi  à  leur  fabrication, 
dans  le  cas  où  elles  n'existeraient  plu8,le  prévenu  serait  tenu  de 
payer  à  la  partie  civile  pour  tous  dommages- intérêts  la  somme 
globale  de  3.703  fr.  60  ; 

Attendu  que  pour  déterminer  le  montant  des  réparations  ci- 
viles dues  à  Combret  l'arrêt  attaqué  déclare  «  qu'il  a  tenu  compte 
de  la  valeur  des  briquettes  en  question  au  jour  de  leur  saisie  et 
de  la  dépréciation  qu'elles  auraient  subies  par  suite  des  avaries 
et  intempéries  résultant  d'un  séjour  prolongé  dans  un  chantier 
ouvert,  exposé  aux  injures  du  temps  et  des  saisons  *>  ; 

Attendu,  en  droit  que  l'article  49  de  la  loi  du  5  juillet  1844 
dispose  que  les  objets  reconnus  contrefaits  seront  confisqués  ; 
que  la  confiscation  prévue  par  cet  article  est  obligatoire  et  que 
les  objets  contrefaits  doivent  être  remis  au  propriétaire  du  bre- 
vet ;  que  si  cette  remise  ne  peut  plus  s'effectuer  matériellement 
lorsquèles  objets  contrefaits  ne  sont  plus  en  la  possession  du  con- 
trefacteur, les  réparations  civiles  dues  au  breveté  doivent  être 
évaluées  d'après  les  règles  du  droit  commun  ; 

Attendu  que  pour  cette  évaluation,  l'arrêt  attaqué  s'est  placé 
à  tort  au  moment  où  il  prononçait  la  condamnation  ;  que  c'est  à 
la  date  de  l'assignation  donnée  à  la  requête  de  Combret  qu'il 
aurait  dû  se  reporter  pour  fixer  les  droits  des  parties  ;  que  c  est 
en  eiïet  à  cette  date  que  la  confiscation  ordonnée  en  vertu  de 
Tarticle  49  de  la  loi  du  5  juillet  1844  produisait  rétroactivement 
son  efTet  ;  que  dès  lors,  eu  tenant  compte  de  la  dépréciation  que 


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—  345  — 

ces  briquettes  contrefaites  ont  pu  subir  postërieu rement,  Tarrét 
attaqué  a  méconna  ces  principes  et  il  a  violé  les  articles  47  et  49 
de  la  loi  du  5  juillet  1844  ; 

Paa  CBS  MOTIFS,  Gasse ,  mais  uniquement  dans  ses  dispo- 
sitions relatives  à  l'évaluation  des  briquettes  contrefaites  dé- 
crites dans  le  procès- verbal  du  2i  novembre  1887  et  dont  l'arrêt 
prononce  la  confiscation  au  profit  de  Gombret. . .  etc. 

Sur  le  renvoi,  la  Cour  de  Douai,  sous  la  présidence  de 
M.  Bosquet,  président  et  sur  les  plaidoiries  de  M®»  Allabt  et 
Poucet,  du  barreau  de  Paris,  après  conclusions  de  M.  Ber- 
trand, avocat  général,  a  statué  en  ces  termes. 

La  Gour,  Statuant  par  suite  du  renvoi  que  lui  a  fait  la  Gour  de 
cassation  par  arrôt  du  9  juin  1899  ; 

Attendu  que  Gombret  a  fait  procéder  à  Paris,  le  21  novembre 
1887,  à  la  saisie  réelle  de  deux  échantillons  et  à  la  désignation 
et  à  la  description  sans  saisie,  de  185.480  briquettes  (agglomérées 
de  houille),  conformément  à  une  ordonnance  du  président  du 
Tribunal  civil  de  la  Seine  du  15  novembre  1887  ;  qu'il  a  intenté, 
le  27  du  même  mois,  contre  Bondonneau  une  action  en  contre- 
façon ; 

Attendu  que  tous  les  points  qui  font  l'objet  du  litige  ont  été 
tranchés  par  Tarrêt  rendu  le  2  décembre  1898  par  la  Cour  d'appel 
d'Amiens  saisie  elle-même  par  suite  d'un  renvoi  ; 

Que  cet  arrêt  a  été  cassé  par  la  Gour  de  cassation  le  9  juin  1899, 
dans  une  seule  de  ses  dispositions,  celle  qui,  en  prononçant  la 
confiscation  des  185.180  briquettes  décrites,  en  fixait  l'évaluation 
pour  le  cas  où  Bondonneau  ne  pourrait  les  remettre  en  nature  à 
Gombret  ; 

Attendu  qu'aux  termes  de  l'article  44  de  la  loi  du  5  juillet  1844, 
la  confiscation  est  obligatoire  non  seulement  pour  les  objets  con- 
trefaits qui  ont  été  saisis,  mais  encore  pour  ceux  qui  ont  été  sim- 
plement décrits  dans  le  procès-verbal,  sauf  aux  tribunaux  à  fixer 
une  somme  pour  représenter  la  valeur  des  objets  que  les  saisis 
ont  pu  aliéner,  n'étant  pas  tenus  de  les  représenter  en  nature  ; 

Attendu,  en  efTet,  que  la  description  a  pour  but  unique  de  cons- 
tater la  contrefaçon  et  laisse  pendant  l'instance  litigieuse,  l'objet 
prétendument  contrefait  à  la  libre  disposition  du  détenteur,  sans 
le  frapper  d'indisponibilité  ;  que  telle  a  été  l'intention  du  légis- 
lateur qui  a  voulu  éviter  les  graves  inconvénients  que  présenterait 
une  complète  immobilisation,  pour  une  durée  souvent  fort  longue, 
opérée  sur  la  simple  allégation  du  breveté  ;  que,  d'ailleurs,  les 
termes  qu'il  a  employés  dans  l'article  47  «  avec  ou  sans  saisie  » 


-  846  — 

ndiqaant  nettement  que  la  description  «  sans  laisie  »  n'emporte 
pas  inaliénabilité  même  provisoire  des  objets  décrits  ; 

Attendu  que  si  la  partie  poursuivie  ne  peut  plus  remettre  en 
nature  les  objets  décrits,  soit  qu'elle  ait  usé  de  son  droit  d*alié- 
nation,  soit  même  qu'ils  aient  été  perdus,  le  breveté  n'étant  pas 
lié  par  la  vente  faite  en  dehors  de  lui,  et  qu'il  n'a  pu  contrôler, 
est  fondé  à.  réclamer,  comme  représentation  des  objets,  une  valear 
fixe,  qui  ne  peut  être  que  celle  qu'ils  avaient  au  moment  derin- 
troduction  de  l'instance  ; 

Attendu  que  cette  évaluation  est,  en  l'espèce,  beaucoup  plos 
favorable  que  toute  autre  à  la  partie  civile  qui  ne  subira  pas  les 
conséquences  de  la  dépréciation  qui  aurait  frappé  les  objets  dé- 
crits par  suite  du  long  temps  écoulé,  s'ils  lui  étaient  remis  en 
nature  ; 

Attendu  que  des  éléments  de  la  cause  il  résulte  que  les  briquet' 
tes  décrites  avaient,  en  novembre  1887,  une  valeur  de  32  francs 
le  mille,  ce  qui  assigne  aux  185.180  briquettes  décrites  une  valeur 
totale  de  4.925  fr.  76  ;  qu'il  y  a  donc  lieu  de  dire  que  Bondon- 
neau  doit,  ou  remettre  en  nature  les  185.180  briquettes  ou  payer 
cette  somme  représentative  de  leur  valeur  ; 

Attendu  que  Gombret  réclame,  de  plus,  les  intérêts  de  la  som- 
me représentant  la  valeur  des  185.180  briquettes  depuis  le  jour 
de  Tassignation  et  même  de  la  description  ; 

Attendu,  sur  ce  point,  que  la  Cour  de  renvoi  n'a  compétence 
pour  statuer  que  sur  ce  qui  lui  a  été  dévolu  par  l'arrêt  de  la  Cour 
suprême  qui  la  saisit  ; 

Attendu  que  cet  arrêt  est  ainsi  conçu  : 

«  Casse  et  annule  l'arrêt  rendu  par  la  Cour  d*appel  d'Amiens 
«  le  2  décembre  1898,  mais  uniquement  dans  ses  dispositions 
tf  relatives  à  l'évaluation  des  briquettes  contrefaites,  décrites  dans 
«  le  procès-verbal  du  21  novembre  1887  et  dont  l'arrêt  prononce 
«  la  confiscation  au  profit  de  Gombret  ; 

«  Et  pour  être  statué  à  nouveau  sur  les  conclusions  prises  sur 
u  ce  point  par  Gombret,  renvoie  la  cause  et  les  parties  devant  la 
('  Gour  d*appel  de  Douai  »  ; 

Qu'il  suit  de  là  que  la  Gour  de  Douai  ne  peut  statuer  que  comme 
eût  dû  le  faire  la  Gour  d'Amiens,  et  sur  les  conclusions  dont  celle- 
ci  était  saisie  sur  ce  point  précis  ; 

Attendu  que  les  conclusions  prises  par  Gombret  demandaient 
à  la  Gour  de  prononcer  la  confiscation  des  185.180  briquettes  et 
de  condamner  Bondonneau  à  lui  payer  la  valeur  qu'elles  avaient 
en  1887,  mais  ne  demandaient  nullement,  en  outre,  les  intérêts  de 
la  somme  représentative  de  leur  valeur,  calculés  rétroactivement 
à  partir  de  1887  ;  qu'il  suit  de  là  que  la  Gour  d'Amiens  n'avait  pas 
à  allouer  ces  intérêts  non  demandés  ;  et  que  la  Gour  de  Douai 


—  347  — 

devant  statuer  comme  eût  dû  le  faire  la  Cour  d'Amiens  et  sur 
les  conclusions  dont  celle-ci  était  saisie,  doit  déclarer  cette  de- 
mande non  recevable,  en  l'état  du  débat,  en  tant  que  Gombret 
entend  la  différencier  de  sa  demande  générale  en  dommages-in- 
térêts présentée  par  lui  à  la  Cour  d'A^niens  et  sur  laquelle  celle-ci 
a  statué  par  décision  ayant  force  de  chose  jugée  ; 

Attendu,  d'ailleurs,  que  fût-elle  recevabie,  cette  demande  nou- 
velle n'est,  en  tout  cas,  nullement  fondée  ; 

Attendu  que  Gombret  soutient  qu'en  la  matière,  il  entre  dans 
Tappréciation  souveraine  de  la  Cour  de  régler  l'indemnité  due  à 
Gombret,  soit  au  moyen  d'une  somme  déterminée  unique,  soit  au 
moyen  d'une  somme  principale  et  d'une  allocation  d'intérôts, 
qui  formeraient  ensemble  l'indemnité  dont  il  lui  appartient  de 
fixer  le  chiffre  ; 

Attendu  que  la  Cour  estime  que  la  somme  de  4.925  fr.  76  al- 
louée  à  Gombret,  Tindemnisera  complètement  de  la  plus  haute 
valeur  des  objets  reconnus  contrefaits  ;  qu'elle  représente  donc 
pour  lui  l'indemnité  intégrale  à  laquelle  il  a  droit,  et  qu'il  n'y  a 
lieu  de  la  majorer  par  une  allocation  supplémentaire  d'inté- 
rêts; 

Attendu  que  cette  allocation  serait  encore  d'autant  moins  jus- 
tifiée en  l'espèce,  que,  si  l'instance  s'est  prolongée  aussi  long- 
temps, c'est  par  suite  de  la  négligence  de  Gombret  qui,  notam- 
ment, après  avoir  obtenu  le  28  mai  1889  un  arrêt  de  la  Cour 
d'Orléans,  est  resté  pendant  trois  ans,  jusqu'au  14  mai  1892, 
avant  d'agir  et  même  de  signifier. cet  arrêt,  a  laissé  s'écouler  trois 
nouvelles  années  jusqu'au  il  mai  1895,  avant  de  faire  délivrer 
une  nouvelle  assignation  au  prévenu  ; 

Attendu  que  Gombret  n'est  pas  davantage  fondé  à  prétendre 
que  les  intérêts  doivent  lui  être  alloués  d'une  manière  obliga- 
toire ; 

Attendu  qu'en  matière  de  contrefaçon,  la  confiscation  a  pour 
effet  de  transférer  la  propriété  des  objets  reconnus  contrefaits 
de  la  partie  poursuivie  au  propriétaire  du  brevet  ;  qu'elle  a  prin- 
cipalement le  caractère  de  réparation  civile,  dont  elle  se  diffé- 
rencie cependant  par  ce  fait  qu'elle  doit  être  nécessairement 
prononcée,  et  alors  même  que  la  valeur  des  produits  contrefaits 
dépasserait  de  beaucoup,  comme  dans  l'espèce  actuelle,  le  pré- 
judice réellement  causé  au  breveté  ; 

Attendu  que,  sans  qu'il  soit  nécessaire  d'examiner  si  la  trans- 
mission de  propriété  résultant  de  la  confiscation  peut  s'opérer 
antérieurement  à  la  décision  de  justice  qui  la  prononce,  il  suffit 
de  constater  que  le  législateur  a  réglé  les  effets  de  la  confiscation 
dans  l'article  49,  §  2,  ainsi  conçu  :  «  Les  objets  confisqués  seront 


I .  »«i<«p«<4if  niwv.M 


—  348  — 

«  remis  au  propriétaire  du  brevet,  sans  préjudice  de  plas  amples 
«  dommages-intérêts  s'il  y  a  lieu  »  ; 

Qu*ii  résulte  de  là  qu'au  point  de  vue  de  la  confiscation,  la 
partie  poursuivie  remplit,  au  vœu  de  la  loi,  son  obligation  en 
remettant  intégralement  les  objets  contrefaits  au  breveté,  après 
la  décision  rendue,  et  qu'en  ajoutant  «  sans  préjudice  de  plus 
amples  dommages-intérêts,  s'il  y  a  lieu  »,  le  législateur  indiqae 
nettement  que  la  confiscation  ne  doit  pas  être  assortie,  d'une 
manière  nécessaire,  d'une  condamnation  supplémentaire  quel- 
conque, mais  que  c*est  seulement  s'il  y  a  lieu  de  le  faire  que  Ton 
y  ajoutera  des  dommages-intérêts  plus  amples  ;  que  loin  d'être 
obligatoire,  toute  condamnation  s'ajoutant  à  la  confiscation  pure 
et  simple  est  donc  abandonnée  à  Tappréciation  souveraine  des 
tribunaux; 

Attendu  qu'aux  termes  de  l'article  41,  §  3  du  Gode  civil,  les  in- 
térêts non  stipulés  sont  à  proprement  parler  des  dommages-in- 
térêts ; 

Attendu,  en  fait,  que  Gombret  n'a  jamais  pu  exploiter  son 
brevet,  soit  par  lui-môme,  soit  par  d'autres,  et  qu'il  l'a  même 
laissé  frapper  de  déchéance  ;  que  le  préjudice  réel  qui  lui  a  été 
causé  par  la  contrefaçon  de  Bondonneau  sera  plus  que  réparé 
parla  remise  des  185. i80  briquettes  contrefaites  ou  de  la  somme 
représentative  de  la  valeur  et  des  500  francs  qui  lui  ont  été  alloués 
à  titre  de  dommages-intérêts  supplémentaires  ; 

Qu'il  n'y  a  donc  lieu  d'allouer  encore,  en  outre,  les  intérêts  de 
la  somme  représentative  des  objets  confisqués  ; 

Attendu,  enfin,  qu'il  y  a  lieu  de  compléter  l'arrêt  de  la  Con- 
d'Amiens,  en  fixant  un  délai  très  bref,  passé  lequel,  faute  par 
Bondonneau  d'avoir  remis  les  objets  contrefaits,  il  devra  payer 
la  valeur  qui  les  représente,  ainsi  que  Tavait  demandé  Gombret 
dans  ses  conclusions  ; 

Par  CBS  motifs,  f^a  Gour,  reprenant  le  dispositif  de  l'arrêt  ren- 
du par  la  Gour  d'Amiens,  le  complète  ainsi  qu'il  suit,  en  la 
partie  qui  a  été  cassée  : 

Prononce  la  confiscation  des  185.180  briquettes  décrites  au 
procès-verbal  du  21  novembre  1887,  et  déclare  Bondonneau 
tenu  de  les  remettre  à  Gombret,  conformément  à  l'article  49,  §  2 
de  la  loi  du  5  juillet  1844,  dans  la  huitaine  du  présent  arrêt; 

Et  faute  par  lui  d'avoir  effectué  cette  remise  dans  ce  délai, 
le  condamne  à  payer  à  Gombret  la  somme  représentative  de  la 
valeur  de  ces  185.180  briquettes  Vixée  à  4.925  fr.  76  ; 

Oit  n'y  avoir  lieu  d'allouer  à  Gombret,  supplémentalrement 
aux  500  francs  de  dommages-intérêts  par  lui  obtenus,  les  inté- 
rêts à  6  0/0  de  la  dite  somme  à  partir  du  21  novembre  1887  ; 


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'WKTW-' 


—  349  — 

Déboute  Gombret  du  surplus  de  ses  conclusions  ; 

Sur  les  dépens  : 

Attendu  qu'il  a  été  statué  définitivement,  par  la  Cour  d'Amiens, 
sur  tous  les  dépens  exposés  depuis  le  début  de  Tinstance  jusqu*à 
son  arrêt  ; 

Condamne  Bondonneau  aux  dépens  exposés  depuis  l'arrêt  de 
a  Cour  d'Amiens  et  notamment  à  ceux  faits  devant  la  Cour  de 
Douai,  etc. 

A  la  suite  de  cet  arrêt,  qui  lui  refusait  les  intérêts  ré- 
clamés par  lui,  Combret  forma  encore  un  pourvoi  en  cas- 
sation, mais  il  se  désista  du  pourvoi  à  la  date  du  S2  mai 
1900,  et  l'arrêt  de  la  Cour  de  Douai  est  aujourd'hui  définitif. 


Art.  4231. 

Brevet  d^lnventlon.  —  Convention.  —  Exploitation. 
— Défeniie  du  brevet.—  Réslllntlon.—  RedevAnce«b 
Dommnffea-lal^rêiif . 

Quand  un  propriétaire  d'un  brevet  a  traité  avec  un  tiers 
de  Vexploitation  de  son  brevet^  et  que,  seul  qualifié  pour  en 
défendre  la  validité^  il  se  refuse,  lorsque  des  contrefaçons  lui 
sont  signalées,  à  en  poursuivre  les  auteurs  et  n'obtempère 
pas  aux  sommations  qui  lui  sont  faites  à  cet  effet,  il  y  a 
lieu  de  prononcer  la  résiliation  de  la  convention  à  ses  torts 
et  griefs,  à  dater  du  jour  oii  il  a  été  mis  en  demeure  de  faire 
respecter  son  brevet,  de  décider  qu'il  ne  peut  prétendre  au 
paiement  des  redevances  postérieures  à  cette  date,  et  de  le 
condamnera  des  dommages-intérêts  pour  le  préjudice  quHl 
a  par  son  attitude  causé  à  celui  qui  avait  traité  avec  lui  (1  ) . 

(G.  de  Paris,  14  mars  1901.  —  Walch  c.  consorts  Lemaire.) 

Le  28  janvier  1900  le  Tribunal  d'Epernay  a  rendu  le  ju- 
gement suivant  : 

•" 

(1)  Sur  les  droits  du  licencié  exclusif  ou  non  :  v.Pouillet,  Brev,  d'inv., 
n^  286.  Le  contrat  de  licence  assure,  moyennant  un  prix  déterminé,  au 
licencié  la  jouissance  paisible  de  Tinvention.  Le  porteur  de  licence  ne 
peat  prétendre  à  antre  chose  qa'à  la  garantie  de  cette  jouissance  paisible; 
mais  lorsqu'une  contrefaçon  surgit,  il  est  en  droit  d'exiger  la  cessation 
du  trouble  qui  lui  est  ainsi  causé,  et  si  le  contrefacteur  triomphe,  ou  si 
le  breveté  refuse  de  le  poursuivre,  il  peut  demander  la  résiliation  à  son 
profit  du  contrat  avec  dommages-intérêts. 


—  350  — 

Le  Tribunal,  Après  en  avoir  délibéré  conformément  à  U  loi. 

Jugeant  en  premier  ressort  ; 

Attendu  que  par  exploit  de  Olivier,  en  date  du  8  juillet  1898, 
enregistré,  Ottmar  Waich,  ingénieur,  demeurant  43,  rue  d*Hau- 
teville,  à  Paris,  a  assigné  les  consorts  Lemaire,  propriétaires  et 
gérants  de  la  fabrique  de  construction  de  machines^connue  à  Eper- 
nay  sous  le  nom  de  Victor  Lemaire,  en  paiement  de  redevances 
à  lui  dues,  en  vertu  de  la  convention  passée  entre  eux  à  la  date 
du  23  février  1893  et  aux  intérêts  de  droit  ; 

Qu'il  demande  qu'il  plaise  au  tribunal  de  dire  qae  le  montant 
de  ces  redevances  sera  fixé  par  état  d*aprés  le  relevé  fait  par  tel 
expert  qu'il  lui  plaira  de  nommer  ; 

De  condamner  solidairement  les  consorts  Lemaire  à  la  somme 
de  4.000  francs  à  titre  de  provision  ; 

De  prononcer  &  leur  charge  la  résiliation  de  la  convention  da 
23  février  1896,  sous  réserve  de  tous  dommages-intérêts  à  cet 
égard,  de  condamner  en  outre,  sous  la  dite  solidarité,  les  con- 
sorts Lemaire  en  100  francs  de  dommages-intérêts  judiciaires  et 
aux  dépens  ; 

Attendu  que  de  leur  côté  les  consorts  Lemaire  prétendent  que 
Tinexécution  du  contrat  provient  du  fait  de  Walch,  qu'il  est  non 
recevable  et  mal  fondé  dans  les  divers  chefs  de  sa  demande  ; 

Que  par  ses  agissements  Walch  leur  a  causé  un  préjudice  et 
que,  se  portant  reconventionnellement  demandeurs  et  se  basant 
sur  les  éléments  actuellement  connus,  ils  demandent  qu'il  plaise 
au  tribunal  de  condamner  au  paiement  de  10.000  francs  à  titre 
de  dommages-intérêts  avec  intérêts  tels  que  de  droit  et  aux  dom- 
mages-intérêts judiciaires  et  aux  dépens  ; 

Attendu  que  sans  s'attacher  à  la  valeur  du  brevet  pris  par 
Walch,  le  tribunal  doit  se  borner  à  statuer  sur  l'exécution  ou  sur 
l'inexécution  du  contrat  sjnallagmatique  conclu  par  les  parties; 

Qu'il  résulte  des  documents  produits  à  la  barre,  qu'une  conven- 
tion en  date  du  23  février  1893  a  été  rédigée  et  signée  par  les  par- 
ties en  vertu  de  laquelle  le  sieur  Victor  Lemaire  avait  seul  le  droit 
de  vendre  et  fabriquer  les  muselets  du  système  Walch  moyennant 
une  redevance; 

Attendu  que  dans  cette  convention,  il  est  notamment  spécifié 
que: 

Dans  le  cas  où  une  contrefaçon  se  produirait,  les  deux  parties 
s'entendraient  pour  prendre  telles  mesures  qu'exigerait  la  dé- 
fense de  leurs  droits  ; 

Attendu  que  les  conventions  doivent  être  exécutées  de  bonne 
foi  et  que  les  parties  s'obligent  non  seulement  à  ce  qui  y  était  ex- 
primé, mais  à  toutes  les  suites  que  l'équité,  l'usage  oo  la  loi  don- 
naient à  la  convention  intervenue  entre  elles  ; 


—  351  — 

Attenda  que  Texécution  effective  du  contrat  nepouvait  être  rem- 
plie qu*avec  Taide  matérielle  et  morale  de  Waich,  propriétaire  da 
brevet  et  seul  qualifié  pour  en  défendre  la  validité,  qu*il  convient 
d'examiner  si  ces  conditions  ont  été  remplies  ; 

Attendu  qu'il  résulte  des  pièces  versées  au  débat  que  Lemaire 
signalait  à  Walcb  les  différentes  contrefaçons  qui  se  faisaient  à 
Epernay  de  son  système  de  muselet,  qu'il  l'engageait  dès  le  mois 
de  mai  1893  à  en  poursuivre  les  auteurs  ; 

Qu'il  renouvelait  cette  demande  par  une  lettre  du  9  juin,  con- 
tenant cette  phrase  : 

«  Il  faudrait  en  Qnir  avec  H.  et  L.  »  ; 

Que  Walcb  répondait  à  ladale  du  15  du  même  mois: 

«  Je  suis  bien  de  votre  avis,  il  faut  en  finir  avec  H.  et  L.  et  je 
me  propose  de  leur  écrire  en  nom  collectif  une  lettre  bien  rédi- 
gée pour  leur  éclairer  leurs  erreurs  »  ; 

Qu'il  était  évident  pour  Lemaire  que  Walcb  prenait  l'affaire  en 
mains  et  qu'il  allait  agir  en  son  nom  comme  au  sien  ; 

Qu'il  reconnaissait  les  muselets  de  H.  et  L,  comme  une  con- 
trefaçon patente  à  son  système  ; 

Attendu  que  trois  ans  après,  Lemaire  n'ayant  reçu  aucune 
satisfaction  faisait  à  la  date  du  10  novembre  1896  par  le  minis- 
tère de  Moreau,  huissier  près  le  Tribunal  civil  de  la  Seine,  une 
sommation  à  Walcb  d'avoir  à  prendre  sans  délai  les  mesures 
nécessaires  à  la  poursuite  des  contrefacteurs,  lui  déclarant  que 
faute  par  lui  de  ce  faire,  il  cesserait  de  lui  payer  la  redevance 
convenue  et  l'actionnerait  en  dommages-intérêts  ; 

Attendu  qu'en  réponse  Walcb  soutint  qu'il  considérait  que 
le  contrefacteur  ne  pourrait  aller  loin  à  cause  du  bas  prix  auquel 
les  muselets  étaient  vendus  ; 

Que  Lemaire  insiste  à  nouveau  pour  une  poursuite  rendue  in- 
dispensable par  l'élargissement  du  cercle  de  l'industrie  des  mu- 
selets provoqué  par  l'impunité  du  contrefacteur  signalé  en  1893, 
mais  que  Walcb  n'en  tint  aucun  compte  ; 

Attendu  que  ces  non-poursuites  mettaient  Walcb  en  contradic- 
tion flagrante  avec  les  termes  de  son  con tract  ; 

Que  c'était  à  bon  droit  que  Lemaire  par  la  sommation  en  date 
du  10  novembre  rappelait  à  Walcb  les  termes  de  leur  conven- 
tion, ses  avertissements  et  le  défaut  de  diligences  qu'il  mettait  à 
faire  cesser  un  état  de  choses  préjudiciable  à  ses  intérêts  ; 

Attendu  que,  si  Walcb  peut  à  juste  titre  se  plaindre  de  la  né- 
gligence de  Lemaire,  à  cause  du  temps  écoulé  entre  la  découverte 
de  la  contrefaçon  et  la  sommation,  il  résulte  des  documents 
Tersés  aux  débats  que  ce  retard  peut  s'expliquer  par  la  maladie 
de  Lemaire  et  par  l'incertitude  dans  laquelle  Walcb  laissait 
Lemaire  au  sujet  de  l'opportunité  des  poursuites,  ainâi  que  par 


r^  "'  ^^^  ^ — ■  Jfv-unLn"'." 


—  352  -- 

l'hésitation  que  Walch  lui-même  apportait  à  défendre  ses  droits 
sachant  que  Lemaire  ne  pouvait  le  contraindre  matériellement 
à  remplir  cette  obligation  ; 

Attendu  que  Walch  qui  n'a  pas  exécuté  les  engagements  pris 
par  lui  ne  peut  faire  un  grief  à  Lemaire  de  ne  pas  s'être  conformé 
aux  termes  de  son  contrat,  qu'il  n'est  donc  pas  fondé  à  se  baser 
sur  Tarticle  1184  du  Gode  civil  pour  demander  la  résolution  du 
contrat  ; 

Attendu  qu'il  y  a  Heu  néanmoins  en  présence  des  circonstances 
de  la  cause  de  décider  que  Lemaire  doit  à  Walch  la  redevance 
stipulée  dans  le  contrat  du  23  février  d893,  jusqu'au  jour  de  la 
mise  en  demeure,  c'est-à-dire  jusqu'au  10  novembre  1896,  date 
de  la  sommation  ; 

Attendu  d'autre  part  que  Walch  par  l'inexécution  des  con- 
ventions a  causé  un  préjudice  à  Lemaire,  dont  il  lui  doit  répara- 
tion, et  que  le  tribunal  possède  tous  les  éléments  d'appréciation 
pour  en  déterminer  l'importance  ; 

Par  gks  hotifs,  Déclare  Walch  non  recevable,  en  tous  cas  mal 
fondé  en  sa  demande  en  résiliation  des  conventions  du  23  février 
1893,  l'en  déboute  ; 

Dit  qu'il  aura  droit  seulement  aux  redevances  stipulées  dans 
le  contrat  du  23  février  1893,  jusqu'à  la  date  de  la  sommation  à 
lui  faite,  c'est-à-dire  le  10  novembre  1896  ; 

Et  recevant  les  consorts  Lemaire,  reconventionnellement  de- 
mandeurs, 

Condamne  Walch  à  leur  payer  la  somme  de  1.200  francs  pour 
préjudice  causé  avec  les  intérêts  de  droit  ; 

Et  le  condamne  en  outre  en  tous  les  dépens  ; 

Dit  que  par  le  sieur  Roger,comptable  à  Ëpernay,  expert  que  le 
tribunal  désigne  à  cet  effet,  le  compte  des  redevances  dues  i 
Walch  par  les  consorts  Lemaire  sera  établi  et  définitivement 
arrêté. 

Sur  appel  de  Walch,  la  Gourde  Paris  sous  la  présidence 
de  M.  Gaze,  président,  après  plaidoiries  de  M~  Highil  Lb 
Tellier  et  Allart  et  conclusions  de  M.  l'avocat  général  Jam- 
Bois,  a  le  14  mars  1901  rendu  Tarrél  confirmatif  suivant  : 

La  Gour,  Considérant  que  l'appel  est  régulier  en  la  forme  ; 

Que  la  reprise  par  Auguste  Walch  de  l'instance,  engagée  par 

Ottomar  Walch  est  régulière  et  fondée; 

Que  les  consorts  Lemaire  demandent  acte  de  ce  que,  sur  cette 

reprise  d'instance,  ils  déclarent  s'en  rapportera  justice  ; 
Au  fond  : 


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—  353  - 


Sur  la  résiliation  du  traité  intervena  entre  les  parties  le  23  fé- 
vrier <  893; 

Considérant  qu'en  l'état  des  dernières  conclusions  devant  la 
Cour,  ia  résiliation  est  demandée  par  toutes  les  parties  ; 

Qu'il  échet  de  la  prononcer  ; 

Sur  la  demande  de  Walch  : 

Considérant  que  la  réalité  et  le  caractère  des  faits  dénoncés 
de  1893  à  1896  par  Lemairecomme  constituant  des  contrefaçons 
du  brevet  de  Walch  ne  sont  point  sérieusement  contestés  par  ce 
dernier  ; 

Que  Lemaire  se  trouvant  par  suite  de  ces  faits, menacé, ou  trou- 
blé dans  la  jouissance  du  brevet,  dont  l'exploitation  lui  avait  été 
concédée  pour  le  département  de  la  Marne,  était  en  droit  de  de- 
mander à  Waich  de  faire  cesser  ce  trouble,  en  poursuivant  les 
contrefacteurs  ; 

Considérant  que  si  le  traité  du  23  février  1893  susvisé  stipule 
pour  ce  cas  que  les  deux  parties  devraient  s'entendre  en  vue  des 
mesures  à  prendre  pour  la  défense  de  leurs  droits,  il  résulte  des 
circonstances  et  documents  visés  et  appréciés  exactement  dans 
les  motifs  du  jugement  que  Lemaire  a  fait,  tout  au  moins  à  la  fin 
de  l'année  1896,  ce  qui  était  en  son  pouvoir  pour  que  l'entente 
prévue  par  la  convention  se  réalisât,  qu'il  a  avisé,  à  diverses  re. 
prises,  Walch  de  l'existence  des  contrefaçons, des  conditions  dans 
lesquelles  elles  s'étaient  produites  et  de  la  nécessité  de  les  ré* 
primer  ; 

Que  s'il  a,  à  certains  égards,  à  s'imputer  d'avoir  laissé  les  pour- 
parlers se  prolonger  sans  résultat  jusqu'au  10  novembre  i896,il 
a,  à  cette  dernière  date,  par  une  sommation  régulière,  suivant 
exploit  de  Moreau,  huissier  àParis,mis  Walch  en  demeure  d'exé- 
cuter le  contrat,  lui  notifiant  expressément  que  faute  par  lui 
d'accomplir  son  obligation  dans  un  délai  déterminé,  il  cesserait 
de  lui  payer  les  redevances  ; 

Que  Walch,malgré  cette  mise  en  demeure  n'a  fait  aucune  dili- 
gence et  n'a  pris  aucune  disposition  dont  il  puisse  justiûer  en  vue 
de  se  concerter  sérieusement  avec  Lemaire  pour  la  poursuite  des 
contrefacteurs  ; 

Qu'il  lui  a  répondu  dans  des  termes  que  ce  dernier  était  auto- 
risé à  considérer  comme  évasifs  et  dilatoires  ; 

£t  qu'ainsi,  par  l'unique  faute  de  Walch,  la  sommation  du 
10  novembre  1896  susviséeest  demeurée  sans  résultat  ; 

Que  si  Walch  allègue  que  la  contrefaçon  aurait  été  sans  gra- 
vité et  la  fabrication  des  contrefacteurs  sans  importance  il  ne 
produit  aucune  preuve  à  l'appui  de  son  allégation,que  la  corres- 
pondance antérieure  est,  au  contraire,  de  nature  à  démentir  ; 


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'  r^jT^.^  •.-.-•  ^.Y  ".•'■^•'  « 


—  354  — 

Considérant  qu'en  cet  état  des  faits,  il  ne  saurait  obtenir  à  son 
prottt  la  résiliation  du  traité  ; 

Qu'il  a  seul  rendu  cette  résiliation  nécessaire  par  sa  faute,  et 
qu'elle  doit  être  prononcée  à  sa  charge  exclusiye,  à  dater  du 
10  novembre  1896; 

Considérant  par  suite,  en  ce  qui  touche  les  redevances,  que  si 
Walch  a  droit  comme  Ta  reconnu  le  jugement  au  paiement  de 
celles  qui  lui  seraient  encore  dues  pour  la  période  antérieure 
au  10  novembre  1896,  il  n'est  pas  fondé  à  en  réclamer  pour  la 
période  écoulée  depuis  cette  date,  sauf  son  recours  s'il  y  échet, 
contre  Lemaire  au  cas,  où  ainsi  qu'il  Pallègue,  ce  dernier  aurait 
indûment  continué,  à  partir  de  cette  date,  l'exploitation  du  bre- 
vet; 

Sur  la  demande  de  la  dame  veuve  Lemaire  et  consorts  : 

Considérant  que  des  motifs  qui  précèdent,  il  résulte  que  les 
consorts  Lemaire  sont  fondés  à  demander  à  leur  profit,  la  rési- 
liation du  traité  du  23  février  1893,  à  compter  du  10  novembre 
1896; 

Considérant,  d'autre  part,  que  Tallocation  qui  leur  a  été  faite 
d'une  somme  de  1200  francs,  à  titre  de  dommages-intérêts  est 
justifiée  ; 

Par  ces  motifs^  et  ceux  du  jugement  que  la  Cour  adopte  en  ce 
qu'ils  n'ont  rien  de  contraire  au  présent  arrêt  ; 

En  la  forme   : 

Reçoit  Walch  appelant  du  jugement  du  Tribunal  de  commerce 
d'Epernay  en  date  du  26  janvier  1899; 

Donne  acte  aux  parties  qui  le  requièrent  de  leurs  conclusions 
relatives  à  la  reprise  de  l'instance  par  Auguste  Walch  ; 

Déclare  l'instance  reprise  ; 

Au  fond  : 

Met  l'appellation  à  néant  ; 

Ordonne  que  ce  dont  est  appel  sortira  effet; 

Faisant  droit  aux  conclusions  dernières  des  consorts  Lemaire 
et  y  ajoutant  au  jugement; 

Déclare  résilié  à  compter  du  10  novembre  1896,  le  traité  do 
23  février  1893,  aux  torts  et  griefs  de  Walch  ; 

Déclare  Walch  mal  fondé  dans  toutes  ses  demandes,  fins  et 
conclusions  contraires  au  présent  arrêt,  l'en  déboute  ; 

Et  condamne  Auguste  Walch  à  l'amende  et  aux  dépens  d'ap- 
pel. 


Art.  4232. 

De««ln  de  fabrique.  —  AiMMDee  de  nouveauté.  — 
Inefflcaiolté  du  dépôt.  —  Brevet  dinvention.  — 
Forme  nouvelle.  —  Ré«ultat  Industriel.  —  Produit 
InduMtrlel  nonveuu. 

Un  dessin  bien  que  comportant  les  caractères  de  dessin 
de  fabrique,  doit,  s'il  est  d'une  forme  essentiellement  ba- 
nale, élre  considéré  comme  étant  dans  le  domaine  public  et 
dans  ces  conditions  le  dépôt  régulièrement  effectué  est  ûio- 
pérant  pour  en  assurer  la  propriété  au  déposant  (1  ). 

La  production  d'un  résultat  industriel  nouveau  est  bre- 
vetable,  alors  même  qu'elle  ne  serait  due  qu'à  une  combinai- 
ion  nouvelle  dans  les  formes  et  proportions  d'objets  déjà 
connus. 

Par  suite  ne  peut  être  déclaré  nul  le  brevet  pris  pour  la 
fabrication  de  briques  creuses  en  porcelaine  ou  matières  si- 
milaires, sous  le  prétexte  que  la  fabrication  par  coulage 
d'objets  creux  en  porcelaine  est  pratiquée  depuis  longtemps, 
si  tout  en  employant  un  procédé  tombé  dans  le  domaine 
public  l'inventeur  prétendu  est  parvenu  à  l'aide  de  combi- 
naisons nouvelles  dans  les  formes  el  proportions ,  à  créer 
un  produit  industriel  nouveau  et  la  décision  judiciaire  qui, 
sans  faire  cette  recherche,  déclare  nul  un  tel  brevet  comme 
portant  sur  une  invention  tombée  dans  le  domaine  public 
manque  de  base  légale  (2). 

Est  brevetable  l'invention  consistant  dans  la  fabrication 
d'une  brique  èvidée  en  porcelaine, ou  toute  autre  matière  si- 
milaire bien  que  cette  fabrication  ait  été  obtenue  par  le  pro- 
cédé déjà  connu  du  coulage,  si  elle  constitue  une  applica- 
tion nouvelle  de  ce  procédé  etune  combinaison  nouvelle  dans 
les  formes  et  proportions  de  cette  brique  (3). 

(1)  L»  loi  de  1808  ne  permet  derevendiquerla  propriélè  d'un  dessin  de 
fabrique  qu'autant  que  ce  dessin  est  nonveau.  Celle  nouveauté  est  appré- 
ciée souverainement  par  les  tribunaux,  et  sa  décision  échappe  an  contrôle 
de  la  Cour  de  cassation .  Dans  l'espèce,  il  s'agissait  d'un  mode  d'emboî- 
tement pour  bordures  à  moulures,  el  tout  en  déclarant  que  le  dessin  aiiiil 
bien  UD  caractère  ornemental  comportant  la  qualiflcatian  légale  de 
dessin  de  fabrique,  les  juges  du  fond  avaient  décidé  qu'il  était  banal.  V. 
Ponillet,  Deuim  et  modèle*,  a'  40  ;  Vaunols,  id.,  n"  105,  el  les  arrêts 
dtés  de  ces  auteurs. 

(tl-3)  Le  changemeot  de  formes  ou  ds  dimensions  lorsqu'il  conduit  i 


—  356  — 

Lorsqu'une  intention  est  le  fait  de  la  collaboration  de 
deux  personnes ^r une  d'elles  n'est  pas  fondée  à  prendre  seule 
un  brevet  et  en  tout  cas  ce  brevet  n'est  pas  opposable  à  son 
collaborateur  (4) . 

Constitue  la  publicité  destructrice  de  la  nouveauté  de 
l'invention,  le  fait  par  l'inventeur  avant  la  prise  de  son  bre- 
vet d'avoir  passé  et  exécuté  des  marchés  importants  pour  la 
fourniture  du  produit  inventé.  De  telles  opérations  ne  peu- 
vent être  considérées  comme  un  simple  essai  fait  dam  Fin- 
térêt  de  l'inventeur  (5). 

(C.  de  Cass.,  16 janvier  1899.  —  G.  d*Amiens,  14  décembre  1899.  — 

Moaret  c.  Pillivuyt  et  Cie.) 

M.  Mourel  avait  pris  le  10  mars  1894  un  brevet  pour 
un  nouveau  système  d'éléments  de  construction  en  porce- 
laine ou  en  matières  similaires  et  avait  le  2  juin  1894 
effectué  le  dépôt  d'un  modèle. 

un  résultat  industriel  est  essentiellement  brevetable.  Cette  modification 
doit  être  considérée  comme  un  moyen  nouveau  au  sens  de  l'article  S  de 
la  loi  du  5  juillet  1844.  Ici  le  résultat  était  d'utiliser  dans  les  construc- 
tions la  porcelaine,  matière  dure  et  inaltérable,  à  la  place  des  briques  en 
terre,  de  qualité  médiocre,  et  de  poids  supérieur.  —  V.  Pouillet,  Brevelt 
d*inv.^  no  46  ;  Mainié,  n«  51  ;  Allart,  n^"  12  et  13.  De  nombreux  arrêts  ont 
consacré  celte  doctrine.  V.  notamment,  Cass.,  9  févr.  1853,  Sax,  S.  53. 
1.198;   Cass.  req.,  26  janv.  1866,  Chapellier,  Ann.,  66.88  etc. 

Le  produit  industriel  nouveau  doit  être  considéré  en  lui-même,  abstrac- 
tion faite  des  moyens  mis  en  œuvre  pour  le  fabriquer  ;  il  doit  se  présenter 
avec  une  forme  et  des  caractères  spéciaux.  l\  ne  s'en  suit  pas  que  le  pro- 
duit industriel,  pour  être  nouveau  aux  yeux  de  la  loi,  ne  doive  jamais 
avoir  eu  de  similaires,  il  suffit  qu'il  ait  des  qualités  spéciales  le  diffé- 
renciant des  produits  antérieurs.  C'est  pour  avoir  omis  d'examiner  ces 
différences  que  la  Cour  de  Paris  est  tombée  dans  l'erreur  relevée  par  la 
Cour  de  cassation.  —  V.  Pouillet,  n«  20  ;  Mainié,  n*  96  et  s. 

Lorsque  les  juges  du  fait  apprécient  la  nouveauté  d'une  invention  ils 
doivent  motiver  leur  décision  de  telle  façon  que  la  Cour  de  cassation 
puissent  vérifier  si  les  procédés  décrits  au  brevet  ont  été  bien  compris 
par  eux  dans  leur  portée,  leur  but,  et  leurs  moyens  d'action.  V.  Pouillet, 
no  436  et  s.  ;  Mainié,  no  707  et-e.  ;  Couhin,  Prop,  ind.  et  nrl.,  t.  2. 
p.  134  et  s.,  etc.  iStc,Cass.,  11  juin  1898,  Lcclerc,  S. 98. 1.329  et  la  note. 

(4)  Pour  la  collaboration  en  matière  d'invention,  V.  Trib.  Bruxelles, 
7  mars  1897,  Baudsept,  ^nn.,1900.70  :  Trib.  Seine,  10  mai  1898,  Société 
Clément,  Gladiator,  Humber,  Ann.,  1900.67  et  la  note. 

(5)  En  matière  de  produit  nouveau  pour  que  la  vente  du  produit  avant 
la  prise  du  brevet  soit  destructive  de  la  nouveauté,  il  faut,  comme  dans 
le  cas  de  Tarrôl,  que  l'inspection  du  produit  ou  son  analyse  permette  de 
se  rendre  compte  du  procédé  de  fabrication.  Dans  le  cas  contraire,  It 
mise  dans  le  commerce  du  produit  ne  ferait  pas  obstacle  à  la  prise  d'on 
brevet  valable.  Comp.  Pau,  14  janv.  1899,  Cornet,  Ann.,  99.259  et  It 
note.  A.  T. 


?rn!»?i??'«v"'"^  "^  ^^.  •??^ 


—  357  — 

Il  assigna  M.  Pillivuyt  et  Cie  devant  le  Tribunal  de  la 
Seine  pour  s'entendre  déclarer  contrefacteurs  tant  de  son 
brevet  que  de  son  modèle.  Le  tribunal  repoussa  cette 
double  demande  en  déclarant  que  le  dessin  était  banal  et 
appartenait  au  domaine  public,  que  le  brevet  ne  portait 
que  sur  la  forme  d'un  produit  tombé  dans  le  domaine 
public  et  que  la  forme  n'étant  pas  brevetable  en  elle-même, 
sa  nouveauté  était  inopérante  pour  imprimer  au  produit 
un  caractère  nouveau.  Le  jugement  fut  confirmé  par  adop* 
lion  de  motifs  par  la  Cour  de  Paris  le  26  février  1897  (Voir 
Ann.y  97,158).  Un  pourvoi  fut  formé  par  M.  Mouret  ;  il  fut 
admis  par  la  chambre  des  requêtes  à  la  date  du  19  jan- 
vier 1898,  et  le  16  janvier  1899,  la  chambre  civile  de  la 
Cour  de  cassation,  après  avoir  entendu  M.  le  conseiller 
Grépon  en  son  rapport,  sur  les  plaidoiries  de  M«*  Desmonts 
et  MoRKT,  conformément  aux  conclusions  de. M.  Tavocat 
général  Desjardins,  a  rendu  l'arrêt  suivant  : 

Là  Cour,  Sur  le  deuxième  moyen  da  pourvoi  : 

Attendu  que,  si  Tarrêt  attaqué  constate  que  le  dessin  déposé 
avait  un  caractère  ornemental  et  comportait  bien  la  qualification 
légale  de  dessin  de  fabrique,  il  déclare  que  ce  dessin,  étant  d'une 
forme  essentiellement  banale,  se  trouvait,  par  cela  môme,  être 
dans  le  domaine  public  ;  que,  dans  ces  conditions,  il  n'a  violé 
aucune  loi  en  déclarant  inopérant,  pour  assurer  la  propriété  de 
Mouret,  le  dépôt  effectué  par  lui  ; 

Rejette  ce  moyen  : 

Mais,  sur  le  premier  moyen  : 

Vu  l'article  30  de  la  loi  du  5  juillet  1844  ; 

Attendu  que,  dans  un  mémoire  descriptif  joint  à  sa  demande 
de  brevet,  Mouret  explique  que  son  invention  a  pour  objet  un 
nouvel  élément  de  construction  architecturale  obtenu  par  le 
dépôt,  dans  des  moules  de  forme  appropriée,  de  pâte  à  porce- 
laine ou  de  matières  analogues  ;  que  son  système  permet  d'ob- 
tenir des  pièces  creuses  imperméables,  légères  et  résistantes, 
remplaçant  avec  de  grands  avantages  les  briques,  panneaux  et 
tuiles  de  tous  genres,  employés  jusqu'à  ce  jour  ;  qu'il  a  voulu 
substituer  à  ces  produits  une  matière  inaltérable,  dure,  qui.  sous 
des  formes  et  dans  des  conditions  déterminées  tout  en  étant 
d'un  poids  moindre  que  les  matériaux  jusqu'alors  employés, 
aurait  une  résistance  à  Técrasement  au  moins  égale,  sinon  su- 
périeure ; 

Attendu  que,  pour  déclarer  nul  le  brevet  pris  par  Mouret, 
l'arrêt  attaqué  s'est  borné  à  dire  :  que  la  fabrication  par  coulage 


—  358  — 

d'objets  creux  en  porcelaine  était  pratiquée  depuis  longtemps  et, 
par  suite,  était  tombée  dans  le  domaine  public,  ce  que  personne 
ne  contestait  ;  que  le  brevet  de  Mouret,  ne  portant  dès  lors  que 
sur  la  forme  du  produit,  ne  pouvait  être  valable,  la  forme  à  elle 
seule  n'étant  point  brevetable  et  ne  pouvant  suffire  pour  impri- 
mer au  produit  un  caractère  nouveau  ; 

Mais  attendu  que  la  production  d'un  résultat  industriel  noa- 
veau  est  une  invention  brevetable,  alors  môme  qu'elle  ne  serait 
due  qu'à  une  combinaison  nouvelle  dans  les  formes  et  les  pro- 
portions d'objets  déjà  connus  ;  que  Tarrêt  attaqué  devait  recher- 
cher si,  tout  en  employant  le  procédé,  depuis  longtemps  conna, 
du  coulage  dans  la  fabrication  de  la  porcelaine,  Mouret,  à  Taide 
de  combinaisons  nouvelles,  n'était  pas  parvenu  à  réaliser  les 
promesses  de  son  mémoire  descriptif  et  à  créer  ainsi  un  produit 
industriel  nouveau,  pouvant  se  substituer  aux  éléments  de  cons- 
truction employés  jusque-là  ; 

Attendu  qu'en  ne  faisant  pas  cette  recherche,  l'arrêt  attaqué 
n'a  pas  donné  de  base  légale  à  sa  décision  et  a  ainsi  violé  l'arti- 
cle de  loi  susvisé  ; 

Par  ces  motifs.  Casse. ..  mais  seulement  en  ce  qui  concerne 
la  validité  du  brevet  pris  par  Mouret....  renvoie  devant  la 
Cour  d'Amiens. 

La  Cour  d'Amiens,  statuant  comme  Cour  de  renvoi, 
sous  la  présidence  de  M.  Marquet, premier  présidenl,après 
plaidoiries  de  M®»  Honoré  et  Allart  (du  barreau  de  Paris)  et 
conclusions  de  M.  Laf avérais,  avocat  général,  a  rendu  à  la 
date  du  14  décembre  1899  l'arrêt  suivant  : 

La  Cour,  Considérant  que  la  Cour  suprême,  par  son  arrêt  du 
16  janvier  1899,  a  cassé  l'arrêt  de  la  Cour  de  Paris,  du  26  février 
1897,  en  ce  qui  concerne  seulement  la  validité  du  brevet  pris 
par  Mouret  et,quant  à  ce,a  remis  la  cause  et  les  parties  en  même 
et  semblable  état  qu'avant  l'arrêt  cassé  ; 

Qu'il  ressort  manifestement  de  cette  décision  que  la  Cour  de 
renvoi  est  appelée  à  se  prononcer  sur  la  validité  du  brevet  dans 
les  mêmes  conditions  que  la  Cour  de  Paris  ;  que  Pillivuyt  et  Oie 
sont  dès  lors  recevables  à  invoquer  devant  elle  tous  les  moyens 
susceptibles  de  faire  échec  à  la  validité  du  brevet  ; 

Considérant  que  Pillivuyt  et  Cie  soutiennent  en  premier  lien 
que  l'invention  pour  laquelle  Mouret  a  pris  un  brevet  à  la  date 
du  10  mars  1894  n'était  pas  brevetable  parce  qu'elle  ne  rentrait 
pas  dans  les  termes  de  l'article  30  de  la  loi  du  5  Juillet  1844; 
qu'ils  prétendent  en  second  lieu  que  cette  invention  en  la  sup- 
posant brevetable  n'était  pas  la  propriété  de  Mouret  et  que  seuls 


—  359  - 

i]s  auraient  éié  fondés  à  en  revendiquer  le  bénéfice  ;  qu'ils  se  pré- 
valent  enfin  de  ce  que  la  prétendue  invention  aurait  été  divul- 
guée et  serait  devenue  publique  avant  la  prise  du  brevet  ; 

Qu'il  échet  d'examiner  successivement  les  trois  questions  sou- 
mises à  la  Cour  ; 

Sur  la  première  question  : 

Considérant  que  la  production  d'un  résultat  industriel  nouveau 
est  une  invention  brevetafile,  alors  même  qu*elle  ne  serait  due 
qu'à  une  combinaison  nouvelle  dans  les  formes  et  les  proportions 
d'objets  déjà  connus  ; 

Considérant  que  si  la  brique  évidée  en  porcelaine  ou  toute  au- 
tre matière  similaire,  pour  laquelle  a  été  pris  le  brevet  du  10  mars 
1894,  a  été  obtenue  par  le  procédé  déjà  connu  du  coulage,  il 
n'est  pas  douteux  que  ce  soit  par  une  application  nouvelle  de  ce 
procédé  et  par  une  combinaison  nouvelle  dans  les  formes  et  pro- 
portions de  ladite  brique  ;  que  cette  brique,  différente  de  toutes 
celles  qui  avaient  été  fabriquées  antérieurement,  présente  la 
forme  d'une  boite  à  paroi  continue  complètement  creuse  et  sans 
cloison  intérieure,  qu'elle  est  d*un  poids  moindre  et  offre  une 
résistance  à  l'écrasement  au  moins  égale,  sinon  supérieure  ; 

Que  l'inventeur  de  cette  brique  a  certainement  créé  un  produit 
industriel  nouveau,  pouvant  se  substituer  aux  éléments  de  cons- 
truction employés  jusque-là  ; 

Que  dans  ces  conditions,  il  convient  de  décider  que  l'invention 
dont  s'agit  était  brevetable. 

Sur  la  deuxième  question  : 

Considérant  que  si  Mouret  réclame  la  paternité  de  cette  in- 
vention, Pillivuyt  etCie  soutiennent,  au  contraire,  qu'elle  leur 
appartient  et  qu'eux  seuls  auraient  eu  le  droit  de  prendre  un  bre- 
vet; 

Considérant  que  tous  les  documents  de  la  cause  démontrent  que 
ni  Tune  ni  l'autre  de  ces  prétentions  ne  saurait  être  admise  ; 

Qu'il  résulte  d'une  façon  certaine  de  la  correspondance  échan- 
gée entre  les  parties,  que  la  brique  évidée  en  porcelaine  a  été  le 
résultat  de  la  collaboration  pendant  plusieurs  mois  de  Mouret  et 
de  Pillivuyt  et  Cie  ; 

Que  Mouret  parait,  à  la  suite  d'une  convention  avec  M.  de  la 
Brosse,  ingénieur  en  chef  de  la  Compagnie  d'Orléans,  avoir  eu 
le  premier  l'idée  d'employer  des  briques  creuses  pour  la  construc- 
tion ; 

Qu'il  a  communiqué  cette  idée  à  Pillivuyt  et  Cie  en  les  char- 
geant d'étudier  les  moyens  de  la  réaliser  ; 

Que  c'est  Pillivuyt  et  Cie  qui  ont  songé  à  recourir  au  procédé 
du  coulage,  et  qui,  après  des  essais  multiples,  ont  réussi  à  obtenir 
an  résultat  qui  a  donné  satisfaction  à  M.  de  la  Brosse  ; 


« 


«'■»  ■  •  -  "^ 


—  360  — 

Considérant  que  dans  ces  circonstances,  Mouret  n'était  pas 
fondé  à  prendre  seul  un  brevet  ;  que  ce  brevet  est  sans  valeur 
au  regard  de  Pillivuyt  et  Gie  ; 

Sur  la  troisième  question  :    ' 

Considérant  qu'à  la  date  à  laquelle  le  brevet  a  été  pris 
(10  mars  1894)  Tinvention  était  déjà  divulguée; 

Que  la  fabrication  n'avait  pas  eu  lieu  dans  des  conditions  sus- 
ceptibles d'assurer  le  secret  de  cette  invention  ;  qu'aucune  re- 
commandation ne  parait  avoir  été  faite  par  Mouret  et  aucune 
précaution  prise  par  Pillivuyt  dans  ce  but  ;  que  tous  les  ouvriers 
de  la  fabrique  de  Joêcy  ont  pu  voir  librement  et  examiner  les 
briques  ; 

Considérant  qu'au  mois  d'août  1893,  Mouret  et  Pillivuyt  et  Gie 
ont  passé  avec  la  Compagnie  d'Orléans  un  marché  par  lequel  Us 
s'engageaient  à  lui  fournir  soixante  mille  briques  ; 

Que  des  livraisons  importantes  ont  été  faites  en  novembre  et 
décembre  ; 

Que  les  trente-six  mille  briques  qui  ont  fait  l'objet  de  ces  ex- 
péditions ont  été  employées,  tout  au  moins  en  grande  partie,  dès 
le  mois  de  janvier  1894  à  la  construction  des  voûtes  de  la  gare 
de  Sceaux  à  Paris  ; 

Considérant  qu'on  ne  saurait  sérieusement  soutenir  que  l'em- 
ploi de  ces  briques  par  la  Compagnie  d'Orléans  fût  un  essai  fait 
dans  l'intérêt  de  l'inventeur  ; 

Que  cette  Compagnie  n'eût  certainement  pas  conclu  un  mar- 
ché aussi  important,  si  la  qualité  des  briques  n'eût  été  déjà  cons- 
tatée et  reconnue  ; 

Considérant  qu'il  ressort,  en  outre,  des  documents  de  la  cause 
qu'au  commencement  du  mois  de  décembre  1893,  Pillivayt  et 
Cie  avaient  envoyé  à  titre  d'échantillons  des  briques  creuses  à 
un  certain  nombre  d'Ingénieurs  qui  leur  avaient  été  indiqués  par 
Mouret  ; 

Considérant  qu'il  y  a  lieu,  par  suite  de  tout  ce  qui  précède,  de 
déclarer  que  l'invention,  pour  laquelle  a  été  pris  le  brevet  du 
10  mars,  était  à  cette  date  devenue  publique  et  que  cette  publi- 
cité rend  ledit  brevet  radicalement  nul  ; 

En  ce  qui  concerne  les  conclusions  de  Mouret  tendant  à  faire  écar- 
ter diverses  pièces  communiquées  par  Pillivuyt  et  Cie  après  Tau* 
dience  du  23  novembre  dernier  : 

Considérant  qu'à  l'audience  du  30  novembre  dernier,  avant 
que  le  ministère  public  prit  la  parole,  les  avoués  des  parties  ont 
été  invités  à  présenter  toutes  observations  qu'ils  jugeraient  uti- 
les ; 

Que  l'avoué  de  Mouret  avait  eu  antérieurement  et  a  eu  posté- 


—  361  — 

rieurement  à  cette  audience  toute  latitude  pour  critiquer  les  do- 
cuments produits  ; 

Qu'au  surplus  ces  documents  nouveaux  n'étaient  pas  nécessai- 
res et  que  la  Cour  n'en  a  pas  fait  état  ; 

Par  CBS  motifs,  Statuant  par  suite  du  renvoi  ordonné  par  la 
Cour  de  cassation  par  arrêt  du  16  janvier  1899  ; 
Proclame  nul  et  de  nul  effet  le  brevet  du  10  mars  1894. 


Art.  4233. 

Jugrements  et  Arrêts  |»a.r  défaut.  —  Slgrniacatloii  À 
domicile.  —  Délai  d'opposition.  —  Partie  civile.  — 
Doinmagres  -  Int  érê  ts . 

La  disposition  de  l'article  187  du  Code  d'instruction  cri- 
minelle, aux  termes  de  laquelle,  si  la  signification  n'a  pas 
été  faite  à  personne  ou  s'il  ne  résulte  pas  d'actes  d'exécu- 
tion du  jugement  que  le  prévenu  en  a  eu  connaissance,  Vop- 
position  est  recevable  jusqu'à  l'expiration  des  délais  de 
prescription  de  la  peine,  n'a  trait  qu'à  l'exécution  de  la 
peine.  En  dehors  de  ce  cas,  la  signification  à  domicile  con- 
serve tous  ses  effets  légaux  ;  elle  continue  donc  de  faire 
courir  le  délai  de  l'opposition  en  ce  qui  concerne  la  con^ 
damnation  aux  dommages-intérêts  prononcés  au  profit  de 
la  partie  civile  (1). 

(Cass.  crim.,  18  janvier  1901.  —  £lie,  Valen,  Robin,  et  autres.) 

Ainsi  jugé  par  la  Cour  de  cassation  (Ch.  crim.),  le  18  jan- 
vier 1901,  sous  la  présidence  de  M.  Lcew,  président; 

La  Goor,  Après  délibéré  en  chambre  du  conseil  ; 

Sur  le  moyen  unique  du  pourvoi,  pris  de  la  violation  de  Tar- 
ticle  187,  §  3,  du  Gode  d'instruction  criminelle,  en  ce  que  l'arrêt 
attaqué  a  considéré  la  signification  à  domicile  d'un  jugement  par 


(1)  On  peut  se  demander  si  la  distinction  établie  par  la  Cour,  qui  peut 
être  si  grave  dans  ses  conséquences,  repose  sur  une  base  bien  solide.  Le 
texte  de  Tarticle  187  §  3  parait  applicable  aussi  bien  à  la  peine  qu'aux 
dommages-intérêts.  Il  semble  difticile  d'admettre  que  le  droit  du  prévenu 
de  faire  opposition,  jusqu'à  la  prescription  de  la  peine,  puisse  être  réduit, 
en  ce  qui  concerne  la  condamnation  aux  dommages-intérêts,  accessoire 
de  la  peine,  au  simple  délai  de  5  jours,  prévu  à  Tarticle  187,  môme 
lorsque  la  signification  n'a  pas  été  faite  à  personne. 


I 


? 


—  362  — 

défaut  comme  faisant  courir  le  délai  de  1  ^opposition  en  ce  qai 
concerne  la  condamnation  à  des  dommages-intérêts  prononcés 
au  profit  de  la  partie  civile  : 

Attendu,  en  ce  qui  touche  Elie,  que  l'arrêt  attaqué  constate 
que  la  signification  du  jugement  par  défaut  a  été  faite  k  la  per- 
sonne du  condamné  ;  qu'ainsi,  le  moyen  manque  en  fait  ; 

Attendu  en  ce  qui  touche  les  autres  demandeurs  en  cassation, 
que  le  jugement  qui  a  condamné  par  défaut  Valen,  Robin,  De- 
bouche  et  Arnaud,  à  1  mois  de  prison  et  à  2.500  francs  de  dom- 
mages-intérêts, envers  Maulmont,  partie  civile,  a  été,  à  la  re- 
quête de  ce  dernier,  signifié  au  domicile  de  chacun  d'eux,  sans 
que  ceux-ci  aient  formé  opposition  dans  le  délai  de  cinq  jours 
imparti  par  l'article  187  du  Gode  d'instruction  criminelle;  que 
le  Tribunal  de  Blida  et,  après  lui,  la  Cour  d'Alger,  dans  l'arrêt 
attaqué,  ont  décidé  que  l'opposition  ultérieurement  formée  par 
les  prévenus  était  recevable  quant  à  l'action  publique  et  à  la 
peine,  mais  irrecevable  quant  aux  dommages-intérêts  obtenus 
par  la  partie  civile  ; 

Attendu,  sur  ce  dernier  point,  que  la  loi  du  27  juin  1896,  sur 
les  crimes,  délits  et  contraventions  commis  à  l'étranger,  a  ajouté 
à  l'article  187  du  Gode  d'instruction  criminelle  la  disposition 
suivante,  relative  aux  condamnations  par  défaut  :  «  Toutefois, 
si  la  signification  n'a  pas  été  faite  à  personne,  ou  s'il  ne  résulte 
pas  d'actes  d'exécution  du  jugement  que  le  prévenu  en  a  eu  con- 
naissance, l'opposition  sera  recevable  jusqu'à  l'expiration  des 
délais  de  prescription  de  la  peine  »  ; 

Attendu  que  ce  texte,  ainsi  que  l'indiquent  ses  derniers  mots, 
se  rapporte  seulement  à  l'exécution  de  la  peine  ;  que  les  travaux 
préparatoires  de  la  loi  montrent  que  telle  a  été  la  seule  préoc- 
cupation du  législateur  ;  que,  en  dehors  du  cas  expressément 
prévu,  la  signification  à  domicile  conserve  tous  ses  effets  lé- 
gaux ;  que,  d'après  le  principe  maintenu  dans  le  paragraphe  1*' 
de  Farticle  187,  elle  continue  donc  de  faire  courir  le  délai  de 
l'opposition  en  ce  qui  concerne  la  condamnation  aux  dommages- 
intérêts  prononcée  au  profit.de  la  partie  civile  ;  qu'en  le  décidant 
ainsi,  l'arrêt  attaqué,  loin  de  violer  l'article  précité,  en  a  fait 
une  saine  application  ; 

Attendu,  d'autre  part,  que  cet  arrêt  est  régulier  en  la  forme  ; 

Rejette. 

Rapporteur:  M.  Bard,  conseiller.  —  Ministère  public  : 
M.  Fruilloley,  avocat  général. —  Plaidants:  M'^SabatibroI 
GossET,  avocats. 


TABLE   ALPHAB 

CONTENUES 
(A 


A1.UEUIA6NB.  Calcul  dei 
lais  pour  te  paiement  des  U 
P.  9.  —  Brevets  d'invetii 
P.  11.  —Modèles d'utilité.  P 
—  Marque  de  marchandises 
11 .  —  Concurrence  déloyale 
11.  —  Désiiinations  et  réel 
médicales.  P.  13.  —  Prole< 
de  la  propriété  lilléraire,  e 
tique  et  industrielle  daoa  lei 
conscriptions  consulaires  et 
de  prolecloral.  P.  IS. 
(V.  France.) 

AIjHAIVACH.  Commet  un 
de  concurrence  déloyale  oi 
moins  un  acte  dommageable 
bant  sous  l'application   de   1 

mer^ant  qui  distribue  gratultei 
â  sa  clientèle  un  almanael) 
les  négociants  d'une  ville  on 
édiler  au  moyen  d'une  subvei 
venée  par  eux  et  indiqaa 
litre  de  réclame  leur  adresse, 
genre  de  commerce  et  leur 
cialité,  après  avoir  pris  soi 
coller  ensemble  les  feuilleb 
figure  J'annonce  de  son  coi 
reni,  de  manière  à  ne  laisser 
celle  qui  lui  est  personn 
P.  158 

iUVTÈRIORITÉ  .  Loraqi 
aniériorilé  invoquée  conirt 
brevet  se  présente  enlourëi 
circonstances  suspectes,  elle 
être  écartée.  P.  16*.  —  Pour 

Îrécier  nae  antériorité,  ilimi 
'en  préciser  les  termes  sa 
n  ajoo 


cher  et  d'ei 

làminei 

r  les  docun 

d'après  les 

t  de  ao 

n  apparitioi 
la  date  du 

TCt  auquel  i 

on  veut 

opposer  I'( 

riorilé.    P. 

328, 

-    Ne    sa 

une  antériorité  un< 

lente  dans 

laquelle,  si   le  prt 

est  mentionné,  on 

moins  auoi 

lae  dei 

.criptlon,  r 

—  364  — 


I- 

ç. 


que  l'inventeur   applique   autre- 
ment les  mêmes  moyens  ou  en 
change  les  combinaisons  ou  les 
simplifie  par  des  suppressions  ou 
les  complète  par  Tadjonction  d'au- 
tres moyens  également  connus  et 
arrive  amsi  à  un  résultat  indus- 
triel: ce  résultat  ne  doit  pas  né- 
cessairement être  d'autre   nature 
que  celui  qui  était  obtenu  aupara- 
vant, il  n'a  besoin  que  d'être  plus 
rapide,  plus  économique  ou   plus 
complet  pour  pouvoir  être  consi- 
déré comme  différent.  —  Spécia- 
lement, bien  aue  le  principe  de  la 
construction  au  foyer  à  plusieurs 
étages  de  combustion  superposés, 
au    moyen    de   dalles   perforées, 
soit   connu,    et  qu'il    ait   môme 
existé  un   appareil  s'allumant  au 
moyen  de  deux  foyers  latéraux  sé- 
parés, caractérisé  par  la  présence 
de   dalles  rapprochées,    creusées 
d'une  série  d'orifices  en  entonnoirs 
se  rejoignant  par  leurs  bords,  de 
telle  façon  que  le  combustible  pul- 
vérulent versé  par  le  haut  de  l'ap- 
pareil descende  par  son   propre 
poids  d'étage  en  étage  en  remplis- 
sant les  parties  creuses  des  dalles, 
et  se  disposant  en  cônes  dans  les 
intervalles  des  étages,  de  manière 
a  constituer   autant  de   colonnes 
verticales  qu'il  y  a  d'entonnoirs  et 
de  trous  percés  dans  les  dalles,  et 
qu'il  suffise  d'agir  sur  des  tiroirs 
métalliques  placés  à  la  base  des 
colonnes  pour  faire  descendre  la 
masse  entière  de  chaque  colonne 
de  haut  en  bas,  doit  être  considéré 
comme  constituant  une  application 
nouvelle  brevetable  un  loyer  s'al- 
lumant par   l'étage  inférieur  sans 
adjonction  d'aucun  accessoire  la- 
téral constitué  par  des  dalles  plus 
espacées  percées  de  trous  cylindri- 
ques disposés  de  façon  que  chacun 
des  orifices  corresponde  à  une  sur- 
face plane  de  la  dalle  inférieure, 
et  que    par  suite,  le  combustible 
en  tombant  d'une  dalle  sur  l'autre 
s'y  forme  bien  automatiquement 
en  tas  coniques,  mais  que  sa  chute 
doive  être  provoquée  par  l'inter- 
vention du  chauffeur  détruisant  à 
intervalles  réglés  à  1  aide  d'un  râ- 
teau, les  cônes  d'un  étage  pour  les 
faire  se  reformer  sur  l'autre,   la 
suppression  des  tiroirs  métalliques 
et  des  foyers  latéraux  constituant 
une  simplification  et  l'adjonction 
du  brassage  au  râteau  pour  régu- 
lariser la  chute  et  renouveler  lés 
surfaces  étant  un  complément  es- 


sentiel du  foyer  pour  combustible 
pulvérulent.  P.  185.  —  Est  breve- 
table l'invention  consistant  dans 
la  fabrication  d'une  brique  évidée 
en  porcelaine,  ou  toute  autre  ma- 
tière similaire  bien  que  cette  b- 
brjcation  ait  été  obtenue  par  le 
procédé  déjà  connu  du  coulage,  si 
elle  constitue  une  application  nou- 
velle de  ce  procédé  et  une  combi- 
naison nouvelle  dans  les  formes 
et  proportions  de    cette  brique. 

(V.  Combinaison  de  moyens  connus. 
Emploi  nouveau.  Formes  et  pro- 

portions.) 

ARGEnmunBB    (  républi  - 

aUE).  Brevets  d'invention.  P.  13. 
—  Loi  du  14  octobre  194.0  sur  les 
marques  de  fabrique,  de  com- 
merce, d'agriculture.  P.  ^. 


DB  MA- 

OHID  Peuvent  être  valablement 
saisis,  dans  les  termes  de  l'arti- 
cle 19  de  la  loi  du  23  juin  1857, 
des  vins  qui,  ne  provenant  pas  des 
lies  de  Madère,  sont  contenus  dans 
des  fûts  qui  portent  l'indication 
Madère  ou  Madeira,  l'Arrange- 
ment de  Madrid  de  1891  étant  ap- 
plicable à  l'espèce.  P.  252. 

AUTEUR    DU    DÉLilT.    (V. 

Exécution  musicale  illicite,) 

AUTRICHE.  Ordonnance  rela- 
tive aux  bureaux  des  brevets,coar 
des  brevets,  agent*  des  brevets. 
P.  18. 

AUTRICHE-HOIVGRIB.    Or- 
donnance concernant  les  relations 
économiques  entre  les  deux  par- 
ties  de  la  monarchie.  P.  18. 
(V.  France,) 


BBIiGiaUE.  (V.  France,) 

BLiOC  HYAI^UV.    (V.  Dénomi- 
nation*) 

BOIVrVE  FOI.  Il  appartient  au 
juge  du  fond  d'apprécier  si  le 
créancier  gagiste  qui  a  reçu  en 
gage  des  objets  mobiliers  (des 
exemplaires  tirés  par  l'éditeur  en 
vertu  d'un  contrat  qui  prévoyait 
une  certaine  redevance  par  exem- 
plaire mis  en  vente)  est  de  bonne 
foi.  P.  228. 
(V.  Dommages-intérêts^  Recel) 


J 


^T 


■5^T 


^ 


—  365  — 


BRESII^.  Loi  do  8  novembre  4897 
interdisant  Timportation  et  la  fa- 
brication d'étiquettes  de  nature  à 
induire  en  erreur  sur  la  prove- 
nance des  marchandises.  P.  13. 
—  Loi  du  !•'  août  1898  concer- 
nant la  définition  et  la  protection 
des  droits  des  auteurs.  P.  39. 

BREVETS.  (V.  Antériorité,  Ap* 
plication  nouvelle,  Brevet  de  per- 
fectionnement y  Certificats,  Colla- 
boration ^  Combinaison  nouvelle. 
Confiscation,  Contrefaçon,  Em- 
ploi nouveau.  Erreur  sur  les 
qualités  substantielles,  Formes  et 
proportions,  Af arques.  Procédé, 
Propriété,  Possession  antérieure, 
Publicité.) 

BREVET  BE  PERFEC- 
TIOIVIVEMEIVT.  Ne  peut  être 
considéré,subsidiairement,comme 
un  brevet  de  perfectionnement 
d'un  brevet  antérieur,  un  brevet 
portant  sur  un  procédé  connu  et 
par  suite  nul,a]ors  que  l'inventeur 
n'a  décrit  les  perfectionnements 
qu'il  entendait  apporter  à  ce  pro- 
cédé cohnu  que  dans  des  certifi- 
cats d'addition  à  ce  brevet,  et  que 
ces  perfectionnements  n'étaient 
même  pas  en  germe  dans  le  bre- 
vet principal.  P.  207. 

BUIiOARlE.  Loi  des  21  décem- 
bre 1893,  2  janvier  4894  complé- 
tant l'article  1  de  la  loi  sur  les 
marques  de  fabrique  et  de  com- 
merce. P.  4i. 


CAPETIER.  (V.  Exécution  mu- 
sicale illicite.) 

CAJVABA.  Acte  du  18  juillet  1900 
modifiant  l'acte  concernant  les 
droits  d'auteur.  P.  45. 


1L.IJC1TE.  (V.  Cession 
de  fonds  de  commerce.) 

CERTIFICATS.  Il  n'f  a  pas 
lieu  de  tenir  compte  pour  iiiGrmer 
la  valeur  d'un  brevet  de  certificats 
versés  aux  débats,  conçus  en  ter- 
mes vagues,  et  n'indiquant  pas  de 
façon  formelle  la  similitude  entre 
les  objets  employés  antérieurement 
au  brevet  et  ceux  du  brevet,  alors 
surtout  que  ces  certificats  émanent 
de  rivaux  en  industrie  du  breveté 


et  qu'il  est  constant  que  postérieu- 
rement au  brevet  leurs  signataires 
ont  fait  au  breveté  de  nombreuses 
commandes  de  ces  objets. 

CESSIOIV  BE  FOIVB8  BE 
COJlOIERCE.La  nullité,pour 
cause  illicite  d'un  objet  cédé  dans 
un  contrat  (exploitation  de  remè- 
des secrets)  n'entraîne  pas  la  nul- 
lité des  autres  éléments  de  la  ces- 
sion du  fonds  de  commerce  qui 
comprend  notamment  les  marques 
de  fabrique.  P.  260. 

CHiL.1.  Loi  du  24  octobre  1898 
concernant  la  répression  de  la 
contrefaçon  en  matière  de  mar- 
ques. 

CHOTE.  (V.  France.) 

CITATIOIV  (BROIT  BE).  Le 

droit  de  citation  ne  s'applique  pas 
en  matière  de  dessins  ;  un  dessin, 
en  effet,  constitue  une  œuvre  in- 
divisible, qui  conserve  son  indi- 
vidualité, quoique  réunie  ou  asso- 
ciée avec  d'autres  œuvres,  et  ne 
peut  être  publiée  sous  quelque 
forme  que  ce  soit  sans  être  entiè- 
rement reproduite  et  ainsi  complè- 
tement portée  à  la  connaissance  des 
tiers.  P.  244. 

COAI^TAR  SAPOIVIIVE.  (V. 

Dénomination.) 

CACAO  CHOUVA.  (V.  Déno- 
mination.) 

CHAMBRE     SYIVBICAI.E. 

V.  Dénomination.) 

COULABORATIOIV.  Lorsqu'u- 
ne invention  est  le  fait  de  la  col- 
laboration de  deux  personnes,rune 
d'elles  n'est  pas  fondée  à  prendre 
seule  un  brevet  et  en  tout  cas  ce 
brevet  n'est  pas  opposable  à  son 
collaborateur.  P.  cëo. 

COLiOMBIE.  Usurpation  de  nom 
et  contrefaçon.  Code  pénal  (édi- 
tion de  1900).  P.  47. 

COiHBlIVAISOIV  BE  MOY- 
EI¥S  COrVIVUS.  Est  brevetable 
une  machine  destinée  à  la  pose 
des  filins  de  matières  plastiques 
dans  les  couvercles  des  boites  de 
conserve  comprenant  deux  orga- 
nes principaux;  un  organe  mâle 
formé  par  un   manchon  chauffé 


—  366  — 


directement  par  le  gaz  d^éclairage, 
et  an  organe  femelle,  adapté  sur 
une  glissière,  formé  de  deux  tubes 
concentriques  coulissant  l'un  dans 
l'autre  au  moyen  d'un  ressort  à 
boudin,  alors  qu'antérieurement 
au  brevet,  il  existait  déjà  une  ma- 
chine destinée  au  même  usage, 
comprenant  également  deux  orga- 
nes, un  organe  mâle,  formé  d'un 
tampon  plein  non  chauffé,  et  un 
organe  femelle  semblable  à  celui 
de  la  machine  brevetée  mais  non 
monté  sur  glissière.  —  Doit  être 
considérée  comme  une  contrefa- 
çon une  machine  permettant  Tem- 
f)loi  simultané  de  la  chaleur  et  de 
a  pression,  qui  malgré  l'absence 
de  glissière  et  l'adoption  d'un 
mode  de  chauffage  différent,  pour 
l'organe  mâle,  reproduit  néan- 
moins dans  leurs  particularités  ou 
éléments  caractéristiques  la  com- 
binaison de  ces  deux  organes 
principaux.  P.  163. 
(V.  Applicatio?i  nouvelle^  Contre' 
façon  (brevets).) 

COMPÉTEIVCE.  Il   est  de  règle 

Sue  lorsqu'une  demande  portée 
evant  un  tribunal  civil  contient 
différents  chefs  dont  un  ou  plu- 
sieurs sont  de  la  compétence  des 
tribunaux  civils  et  un  autre  de 
celle  des  tribunaux  de  commerce, 
mais  dérivant  de  chefs  civils,  le 
tribunal  civil  est  compétent  pour 
le  tout.  P.  105.  —  C'est  à  bon 
droit  que  le  tribunal  de  commerce 
saisi  d'une  instance  soulevant  une 
question  de  déchéance  de  brevet, 
surseoit  à  statuer  jusqu'à  ce  que 
cette  déchéance  ait  été  tranchée 
par  le  juge  compétent.  —  Mais  le 
principe  du  double  degré  de  juri- 
diction n'étant  établi  que  dans  l'in- 
térêt des  parties,  bien  que  le  pre- 
mier degré  de  juridiction  ne  soit 
pas  épuisé,  la  Cour  saisie  de  l'ap- 
pel de  la  décision  de  sursis,  peut 
sur  les  conclusions  conformes  des 
parties  statuer  sur  le  fond.  P. 
221. 

C01I1PL.ICITÉ.     (V.  Exécution 
musicale  illicite.) 

coivcurreivce:  déloya- 

L£    ou  1L.L.ICITE.    Il    y  a 

concurrence  déloyale  dans  le  fait 
de  s'assurer,  en  vue  de  s'emparer 
des  procédés  de  fabrication  d'un 
concurrent,  le  concours  d'un  de 
ses  ouvriers  par  l'offre  d'appointe- 


ments et  avantages  exceptionnels 
et  dans  celui  d'annoncer  son  pro- 
duit sous  la  même  dénomination 
Îue  celui  de  son  concurrent.  P. 
05.  —  Le  fait  de  vendre,  comme 
un  concurrent,  des  serviettes  ca- 
ractérisées par  l'arrêt  des  coutures 
au  moyen  d  œillets  métal li(raes,par 
douzaines,  dans  un  casier  formant 
plan  incliné  et  en  les  présentant 
par  rang  de  tailles,  ne  constitue 
pas  un  acte  de  concurrence  dé- 
loyale alors  qu'il  est  constaté  que 
les  serviettes  ne  sont  pas  nouvelles 
en  soi  et  que  ces  dispositions  sont 
généralement  usitées  dans  le  com- 
merce des  mêmes  articles,  et  qoe 
le  nom  donné  à  ces  serviettes  de 
fabrication  connue  est  différente. 
P.  160.  —  Lorsque  les  circonstan- 
ces de  la  clause  excluent  toute 
idée  de  mauvaise  foi,  les  al  lo- 
tions et  les  procédés  de  réclame 
dont  une  partie  a  usé  vis-à-vis 
d'une  autre,  et  qui  lui  ont  porté 
préjudice  constituent  à  l'égard  de 
cette  partie,  non  pas  les  éléments 
d'une  concurrence  déloyale  mais 
les  éléments  d'une  simple  faute 
passible  de  '  dommages- intérêts. 
P.  114.  —  Ne  constitue  pas,  ao 
regard  de  l'industrie  privée,  un 
acte  de  concurrence  déloyale,  le 
fait,  par  une  compagnie  de  che- 
mins de  fer,  de  construire  on 
hôtel  terminus  dans  une  de  ses 
gares  (^en  l'espèce  l'édification  d'un 
hôtel  a  voyageurs,  par  la  compa- 
gnie d'Orléans  dans  sa  gare  do 
quai  d'Orsay},  alors  que  la  créa- 
tion de  cet  hôtel,  autorisé  par  les 
pouvoirs  publics  et  d'ailleurs  non 
exploité  directement  par  la  com- 
pagnie, a  pour  but  et  doit  avoir 
pour  effet,  tout  comme  les  buffets, 
restaurants,  librairies,  installés 
dans  l'intérieur  des  gares  et  sta- 
tions, une  amélioration  dans  les 
conditions  générales  de  transport 
des  voyageurs.  P.  319. 
(V.  Almanach^  Dénomination,) 

€H>IVF1SCAT10IV.  La  confisca- 
tion conserve,  en  matière  de  con- 
trefaçon littéraire  et  artistique,  le 
caractère  de  peine  ;  le  tribunal 
civil  est  incompétent  pour  con- 
naître des  conclusions  prises  de- 
vant lui,  de  ce  chef.  P.  2A6.  — 
La  confiscation  prescrite  par  l'ar- 
ticle 49  de  la  loi  du  5  juillet  1844 
est  obligatoire  et  les  objets  con- 
trefaits qu'ils  aient  été  saisis  oa 
non  lors   de   la  constatation  du 


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pffnr-t  •  «PA^ 


TTivr  r^-F--^ 


—  367  — 


délit  de  contrefaçon  doivent  être 
remis  au  propriétaire  du  brevet. 
P.  383.  —  Cette  remise  ne  pouvant 
s'effectuer  que  si  les  objets  con- 
trefaits sont  encore  en  la  posses- 
sion du  contrefacteur  au  moment 
où  la  condamnation  est  prononcée, 
dans  le  cas  contraire  ta  réparation 
civile  due  au  breveté  se  réduit  à 
des  dommages  et  intérêts.  P. 333. 
—  Lorsque  la  partie  poursuivie  ne 
peut  plus  remettre  en  nature  les 
objets  décrits  soit  qu'il  ait  usé  de 
son  droit  d'aliénation,  soit  même 
qu'ils  aient  été  perdus,  le  breveté 
n'étant  pas  lié  par  la  vente  même 
faite  en  dehors  de  lui,  et  qu'il  n'a 
pu  contrôler,  est  fondé  à  réclamer 
comme  représentation  des  objets 
une  valeur  fixe  qui  ne  peut  être 
que  celle  qu'ils  avaient  au  moment 
de  l'introduction  de  l'instance. 
P.  333.  —  11  n'y  a  pas  lieu  de 
prononcer  la  confiscation  des  ma- 
chines ayant  servi  à  fabriquer  les 
objets  contrefaits ,  lorsqu'elles 
n'ont  rien  de  spécial,  il  suffit 
d'attribuer  au  breveté  les  organes 
modifiés  en  vue  de  la  contrefaçon. 
P  333. 
(V.  Motifs  desan-éts.  Théâtre,) 

COIVSULiTATlOIV.  (V.  Pouvoir 
des  tribunaux.) 

COIVTRAT     DE    SOCIÉTÉ. 

Ne  constitue  pas  un  contrat  de 
société  pour  l'exploitation  d'un 
ouvrage  les  conventions  d'après 
lesquelles  l'éditeur  est  autorisé  à 
faire  une  édition  moyennant  une 
redevance  par  exemplaire  mis  en 
vente.  P.  228. 

COIVTREFAÇOIV  (BRE- 
VETS) .  Lorsqu  un  brevet  porte 
sur  une  combinaison  de  moyens 
connus,  reconnue  nouvelle  en  vue 
de  l'obtention  d'un  produit  indus- 
triel nouveau  il  y  a  contrefaçon  dans 
le  fait  de  faire  usage  des  éléments 
essentiels   de    cette   combinaison 

Î>our  obtenir  le  même  résultat  et 
e  même  produit  ;  spécialement 
lorsqu'un  brevet  est  pris  pour 
l'emploi  d'un  four  à  manche  ou 
cubilot,  recevant  des  charges  al- 
ternées de  combustible  et  de  mi- 
nerai, et  de  ventilateurs  aspirant 
les  vapeurs  ou  fumées  métalli- 
ques, avec  injection  d'eau  pulvé- 
risée,  et  les  refoulant  dans  des 
chambres  de  condensation,  il  y  a 
contrefaçon  dans  l'emploi,  même 


à  sec,  de  la  combinaison  du  four 
à  manche  et  des  ventilateurs, 
alors  que  cet  emploi  permet  d'ob- 
tenir des  produits  identiques  au 
point  de  vue  chimique.  P.  105. 
—  Doit  être  déclaré  contrefac- 
teur, celui  qui  a  acheté  par  un 
moyen  commercial  une  machine 
contrefaite,  si  à  raison  de  circons- 
tances, et  notamment  de  pour- 
suites intentées  antérieurement 
contre  le  constructeur  de  la 
machine  sus-énoncée,  il  est  établi 

3u'il  a  agi  sciemment,  il  ne  peut 
ans  ce  cas  invoquer  sa  bonne 
foi.  P.  165.  —  Lorsqu'une  inven- 
tion porte  sur  un  balai  électrique 
constitué  par  une  ou  plusieurs 
feuilles  de  laiton  laminé  excessi- 
vement mince,  repliées,  plissées 
ou  enroulées  sur  elles-mêmes,  il 
y  a  contrefaçon  dissimulée  ou  tout 
au  moins  partielle  dans  le  fait  de 
constituer  un  balai  par  deux  pa- 

3uets  de  lamelles  de  clinquant 
écoupées  et  superposées,  sépa- 
rés par  une  toile  métallique,  le 
tout  formant  un  faisceau  conso- 
lidé par  des  rivets  et  enveloppé 
de  deux  feuilles  de  clinquant  for- 
mant une  surface  continue  et 
plusieurs  fois  enroulées  sur  elle- 
mômes.  P.  204. 

(V.  Combinaison  nouvelle  de 
moyens  connus,  Perfectionne- 
7nent.) 

COIVTREFAÇOIV  (MAR- 
QUES). Lorsque  l'emploi  d'un  ru- 
ban rouge  pour  rhabillage  des  bou- 
teilles de  liqueurs  est  tombé  dans 
le  domaine  public,  si  la  dénomi- 
nation Cordon  rouge  peut  encore 
constituer  une  marque  de  fabri- 
que, en  tous  cas  l'emploi  d'un  ru- 
ban rouge,  pour  l'habillage  de  la 
bouteille,  ne  constitue  pas  la  con- 
trefaçon de  cette  marque.  P.  303. 
(V.  Dénomination.) 

COIVrREFACOIV      (  PRO 

PRIÉTÉ     ARTISTIQUE  ) . 

Sans  rechercher  si  une  simple 
imitation  rythmique  peut  être 
considérée  comme  contrefaçon 
d'une  œuvre  musicale,  le  juge 
d'appel  n'a  pas  outrepassé  ses 
pouvoirs  en  déclarant  que  le  fait 
d'avoir  emprunté,  pour  3  mor- 
ceaux sur  58  dont  se  compose  la 
partition  d'une  féerie,  le  rythme 
de  3  airs  d'opérette,  était  insuffi- 
sant pour  constituer  le  délit  de 
contrefaçon,  il  pouvait  y  avoir  là 


^  W^-i^ 


—  368  — 


des  circonstances  involontaires, 
exemptes  de  toute  intention  dé~ 
lictueuse.  P.  98. 

<?0IWEIVT10IVS.  (V.  France.) 

COirVENTlOIV  DE  4883. 
Adhésion  du  Japon  à  la  conven- 
tion. P.  5.  —  Calcul  du  délai  de 
priorité.  P.  5.  —  La  convention 
de  1883  est  absolument  étrangère 
a  la  force  exécutoire  des  jugements 
rendus  à  l'étranger,  et  Tenregis- 
trement  d'une  marque  au  bureau 
international  de  Berne,  ne  saurait 
porter  atteinte  aux  droits  de  pro- 

{)riété  antérieurement  acquis  sur 
a  même  marque.  P.  253. 

COirVEIVTION       D' UIVIOIV 

DB  i88e.  Adhésion  du  Japon  à 
la  convention.  P.  5.  —  Dénon- 
ciation de  la  convention  par  te 
Monténégro.  P.  5. 

CORÉE.  (V.  France.) 

(X>IUCIDE.  (V.    Dénomination.) 

COUR   RE  CASSATIO^W.  11 

appartient  à  la  Cour  de  cassation 
de  vérifler  au  vu  des  faits  consta- 
tés par  les  juges  du  fait,  si  la  re- 
présentation a  eu  un  caractère 
public  ou  privé  ;  dès  lors,  lorsque 
en  présence  de  conclusions  de- 
mandant à  prouver  des  faits  d'où 
résulterait  la  publicité  d'un  bal 
où  des  morceaux  de  musique  ap- 
partenant à  des  œuvresdtt  domaine 
privé  ont  été  joués,  le  juge  du 
fait  se  borne  à  déclarer  que  le  dit 
bal  n'était  pas  public,  la  Cour  de 
cassation  se  trouvant  dans  Tim- 
possibilité  d'exercer  sur  la  léga- 
lité de  la  décision  attaquée  le 
contrôle  qui  lui  appartient,  cette 
décision  doit  être  cassée.  P.  232. 
(V.  Publicité.) 

CRÉAIVCIER  GAGISTE.  (V. 

Bonne  foi.) 

CRÉOI^UVE.  (V.  Dénomination,) 

CUBA.  PORTO-RICO  ET 
JLES  PHIUPPIIVES.  Trait> 
de  paix  du  10  décembre  1898  en- 
tre l'Espagne  et  les  Etats-Unis. 
P.  14. 

D 

DANEMARK.  Protection  de  la 
propriété  industrielle  dans  les 
possessions  danoises.  P.  15.    " 


Marques  composées  exclusivement 
de  chiffres,  lettres  on  mots.  P. 
15. 

DÉlVOlIllIVATlOIir  .       On    ne 

saurait  voir  une  similitude  dom- 
mageable dans  l'emploi  des  termes 
l'Inusable  et   l'Indéchirable  poar 
désigner    des  serviettes  d'écolier 
ou  d'homme  d'affaires,  ces   deux 
expressions  indiquant  des  qualités 
différentes  et  se  présentant  chacan 
à  l'esprit  avec  un  sens  particulier. 
P.  160.  —  Une  dénomination  ar- 
bitraire et  de  fantaisie,  appliauée 
à  un  produit   breveté  (dans  l'es- 
pèce, la  dénomination  Pâle    /fa- 
mande^  pour  une  pâte  à  noircir  les 
fourneaux),  ne  tombe  pas  dans  le 
domaine  public  par  le  fait  de  la 
chute  du  orevet  dans  le  domaine 
public.  P.   241.   —   L'emploi   des 
aénominations,à  titre  de  marques, 
est  autorisé  par  la  loi  du  23  juin 
1857,   alors  que,    n'étant   pas   la 
désignation  nécessaire  du  produit, 
ces  dénominations  ne  tendent  pas 
h  attribuer  indirectement  au  dépo- 
sant, sous  le  prétexte  de  marque, 
le  monopole  du  produit  lui-méine. 
—  Les  mots  Papier  Cyano-Fer, 
employés  pour  désigner  des  pa- 
piers photographiques  industriels, 
constituent  une  dénomination  sus- 
ceptible d'être  possédée  privative- 
ment  à  titre  de  marque  de  Cabri 
quel.    P.    278.    —    L'expression 
Coaltar  saponiné    ne    constitue 
point   une    marque    de   fabrique 
parce  qu'elle  désigne  un  médica- 
ment antiseptique  obtenu  par  la 
combinaison  du  coaltar  et  de  la 
saponiné,  que  ces  termes  sont  en- 
trés depuis  longtemps  dans  la  lan- 
gue   usuelle   et    que   le    produit 
figure  notamment  dans  le  alanuel 
de  Pharmacie  de  Dorvault  sous  le 
titre  de  Coaltar  saponiné  ou  sapo- 
nifié.   P.  280.  —   Constitue  une 
marque  valable  la  dénomination 
de  créoline,  qui  est  nne  dénomi- 
nation arbitraire  et  de  pare  fan- 
taisie,   sans   aucun   rapport   soit 
avec  la  composition   du   produit, 
soit  avec  l'usage  auquel  il  est  des- 
tiné. P.  282.  —  Peut  être  valable- 
ment prise  comme  marque  de  fa- 
brique la  dénomination  Peninsu- 
lar  pour  désigner,   indépendam- 
ment de  tous  autres  signes  dis- 
tinctifs,   une   attache  métalliaae. 
P.  288.  —  La  dénomination  Les- 
sive Phénix,  nom  de  fantaisie  ré- 
gulièrement déposé,  constitue  une 


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■.  IV'-  «V^*^*  'rTî' 


—  369 


' 


marque  de  fabrique.  P.  291.  — 
La  désignation  d'un  produit  de- 
meure la  propriété  de  celui  qui  le 
premier  en  a  fait  usage,  alors  sur- 
tout que,  par  un  dépôt  régulier, 
il  a  ultérieurement  manifesté  sa 
volonté  de  s'assurer  la  propriété 
de  ladite  dénomination.  —  L'ex- 
pression ldéa(  pour  désigner  des 
rasoirs,  étant  de  pure  fantaisie, 
constitue  une  marque  valable  s'il 
n'est  pas  établi  en  fait  qu'elle  était 
tombée  dans  le  domaine  public  de 
cette  industrie.  P.  293.  —  Le  mot 
Coricide,  bien  qu'il  soit  tiré  des 
qualités  mômes  du  produit  fabri- 
qué, bien  qu'il  éveille  l'idée  de 
son  emploi,  ne  constitue  pas  la 
dénomination  nécessaire  de  tout 
topique  contre  les  cors  ;  il  pour- 
rait donc  servir  de  marque  si  le 
déposant  justifiait  de  la  priorité 
d'usage.    P.  298.    —  L'industriel 

Îui  a  déposé  la  dénomination  Bloc 
Jyalin  pour  un  produit  solide  à 
l'acide  borique  et  à  la  glycérine, 
destiné  à  calmer  l'irritation  pro- 
duite à  la  peau  par  le  rasoir,  peut 
faire  interdire  l'usage  des  expres- 
sions Bloc  Kremlin^  Cristal  BloCj 
Bloc  antiseptique^  lesquelles  sont 
des  contrefaçons,  car  le  mot  Bloc 
doit  être  considéré  comme  un  des 
éléments  essentiels,  caractéristi- 
quesetappropriables,de  la  marque 
cléposée.  P.  302.  —  Apprécie 
souverainement  les  faits  l'arrêt  qui 
constate  que,  avant  le  dépôt  de  la 
dénomination  Cacao  -  Chouva  , 
prise  isolément  comme  marc[ue, 
cette  dénomination  était  exploitée 
par  divers  fabricants  de  liqueurs, 
qui  tous  s'en  servaient  librement 
selon  leur  fantaisie  et  leurs  be- 
soins, et  que  l'inventeur  de  la 
dénomination  a,  jusqu'à  sa  mort, 
^ardé,  à  l'égard  de  ces  fabricants, 
un  silence  qui  implique  la  recon- 
naissance des  droits  du  domaine 
public.  P.  306.  —  Une  dénomina- 
tion qui  constitue  antérieurement 
au  dépôt  une  désignation  usuelle  et 
nécessaire  du  produit  auquel  elle 
s'applique,  ne  saurait,  si  on  la 
considère  en  elle-m^me  et  en 
dehors  de  l'aspect  extérieur  qu'elle 
peut  offrir,  être  valablement  dépo- 
sée et  faire  l'objet  d'une  appro- 
priation exclusive  a  titre  de  mar- 
que de  fabrique.  —  La  dénomina- 
tion Chantilly^  étant,  depuis  de 
longues  années,  usitée  pour  dési- 
gner un  parfum  qui  est  dans  le 
domaine  public,  ne  peut  servir  de 


marque  pour  certains  produits  de 
parfumerie,  tels  que  savons,  etc. 4. 
P.  308.  —  Les  mots  Chambre 
syndicale  ne  sont  pas  génériques 
et  indispensables  pour  la  désigna- 
tion d'un  syndicat  professionnel  ; 
en  conséquence,  le  syndicat  pro- 
fessionnel qui  les  a  le  premier 
adoptés  dans  son  titre  est  fondé  à 
en  faire  interdire  l'usage  par  un 
autre  syndicat,  même  avec  l'addi- 
tion d'un  qualificatif  ou  d'un  sons- 
titre,  s'il  en  doit  résulter  une 
confusion  dans  l'esprit  des  tiers. 
P.  816. 

(  V .  Dépôt  {maraues).  Produit  phar- 
maceutique, usurpation  de  mar- 
que.) 

DÉPÔT  (MARaUES).  Le  dépôt 
de  marques  étant  simplement  aé-^ 
claratif  de  propriété,  il  importe 
peu  que  le  dépôt  d'une  dénomi- 
nation ait  été  fait  postérieurement 
à  la  déchéance  a' un  brevet  pris 
pour  le  môme  produit,  du  moment 
qu'il  est  constant  que  le  créateur 
de  cette  dénomination  en  conti- 
nuant i  en  faire  usage,  depuis 
l'époque  de  la  déchéance  du  bre- 
vet jusqu'à  l'époque  du  procès,  a 
entendu  en  conserver  la  propriété. 
P.  241.  '  Le  fait  que  le  dépôt 
d'une  marque  de  fabrique  n'a  pas 
été  renouvelé  et  est  périmé  ne 
fait  pas  obstacle  à  ce  que  le  pro- 
priétaire de  la  marque  poursuive 
f>ar  la  voie  de  la  concurrence  dé- 
oyale  celui  qui  imite  frauduleu- 
sement cette  marque.  P.  253.  — 
C'est  à  la  date  d'emploi  et  non  à 
la  date  du  dépôt  qu  il  faut  se  re- 
porter pour  déterminer  l'appro- 
priation de  la  marque.  P.  2w. 

DESSUlfS     BT    1I10D1BL.BH. 

Un  dessin  bien  que  comportant  les 
caractères  de  dessin  de  fabrique, 
doit,  s'il  est  d'une  forme  essentiel- 
lement banale ,  être  considéré 
comme  étant  dans  le  domaine  pu- 
blic et  dans  ces  conditions  le  dé- 
pôt régulièrement  effectué  est  ino- 
pérant pour  en  assurer  la  propriété 
au  déposant.  P.  356. 

DIVUIiOATIOIV.  On  ne  sau- 
rait trouver  les  éléments  d'une 
divulgation  de  nature  à  entraîner 
la  déchéance  d'un  brevet  d'inven- 
tion :  dans  l'expérimentation  d'une 
machine  par  le  fabricant  devant 
un  amateur,  tenu  en  vertu  d'une 
règle  élémentaire  de  loyauté  à 
la  discrétion  absolue,  alors  surtout 

S4 


t  - 


—  370  — 


que  ce  fonctionnement  n'était  pas 
de  nature  à  en  révéler  le  méca- 
nisme des  rouages  intérieurs,  et 
ce  qui  constituait  l'âme  même  de 
l'invention  ;  non  plus  cfue  dans  la 
remise  à  titre  confidentiel  de  devis 
et  avant-projets  de  construction 
dans  le(^uei  des  parties  notables  de 
Tappareil  ne  figuraient  pas  et  trop 
incomplet  pour  permettre  la  réa- 
lisation de  l'invention.  P.  178.  — 
La  connaissance  qu'ont  eue  d'une 
invention  ou  d'une  application  ceux 
qui  l'ont  conçue  ou  ceux  qui,  en 
petit  nombre,  ont  été  les  agents 
nécessaires  des  essais  auxquels 
elle  a  donné  lieu,  ne  saurait  cons- 
tituer une  divulgation,  alors  sur- 
tout que  ces  agents,  même  en 
l'absence  de  toute  injonction  ex- 
presse, étaient  tenus  a  la  discré- 
tion, qu'il  est  constaté  que  bien 
qu'aucune  précaution  spéciale  ne 
paraisse  avoir  été  prise  en  ce  qui 
concerne  l'appareil  expérimenté, 
le  régime  habituel  de  l'usine  où 
ont  eu  lieu  les  essais  s'opposait  à 
ce  qu'il  fût  connu  du  public,  et 

3u'en  outre  la  disposition  même 
e  l'appareil  dont  les  organes  es- 
sentiels étaient  enfermés  dans  une 
enveloppe  en  maçonnerie  ne  per- 
mettait pas  aux  ouvriers  de  l'u- 
sine ni  aux  personnes  qui  y  pé- 
nétraient accidentellement,  den 
deviner  le  fonctionnement  et  la 
destination.  P.  185.  —  La  pré- 
sence des  dessins  ayant  servi  à  la 
construction  d'un  appareil  dans 
les  archives  du  cabinet  d'un  ingé- 
nieur ne  peut  être  considérée 
comme  les  mettant  à  la  disposi- 
tion du  oublie,  alors  qu'il  n'est 
pas  Justine  qu'aucune  communi- 
cation en  ait  été  donnée  ou  de- 
mandée avant  la  prise  du  brevet 
auquel  l'appareil  est  opposé  com- 
me antériorité.  P.  185. 
(V.  Antériorité,  Publicité.) 

DOMMAGKS-IIVTÉRÊTS.  Il 

n'y  a  pas  lieu  de  condamner  à  des 
dommages-intérêts  le  demandeur 
en  contrefaçon   lorsqu'il  a  agi  de 
bonne  foi,  et  qu'il  n'est  pas  éta- 
bli que  sa  demande  ait  causé  un 
préjudice  à  celui   contre  qui  elle 
était  dirigée.   P.   207.  —  Le  fait 
par  un  tiers  d'avoir  demandé  à 
des  armateurs,  sans  l'accomplis- 
sement d'aucune   formalité  judi- 
ciaire, de  lui  livrer  des  marchan- 
dises appartenant  à  leurs  commet- 
tants ;  d'avoir  traduit  ces  arma- 


teurs en  justice  pour  avoir  résisté 
à  cette  prétention  ;  d'avoir  porté 
contre  eux  une  accusation  de  recel 
déclarée  téméraire  et  dénuée  de 
fondement,  et  de  leur  avoir  sus- 
cité un  procès  purement  vexa- 
toire,  peut  être  à  bon  droit  consi- 
déré par  les  juges  du  fond  comme 
une  faute  lourde  donnant  lien  à 
des  réparations  pécuuiairesen  plus 
des  dépens  légaux.  P.  215. —  Il  est 
dû  réparation  du  préjudice  causé 
à  l'artiste  par  la  reproduction, 
sans  son  consentement,  de  quel- 
aues-uns  de  ses  dessins  même 
dans  une  collection  spéciale  où 
ils  ont  été  groupés  avec  des  des- 
sins d'autres  artistes  en  vue  d*nne 
synthèse  historique  et  pour  cons- 
tituer un  recueil  ou  document 
d'ensemble.  —  L'éditeur  de  l'al- 
bum encourt  la  même  responsa- 
bilité que  l'auteur  de  la  composi- 
tion. P.  244.  —  Est  passible  de 
dommages -intérêts  envers  le  pro- 
priétaire de  la  dénomination 
«  Peninsulcu*  »,  le  concurrent  qui 
imprime  sur  des  factures  et  sur 
des  cartes  c  Attache-boutons  dits 
.péninsulaires  ».  P.  288.  —  Quand 
un  propriétaire  d'un  brevet  a 
traite  avec  un  tiers  de  l'exploita- 
tion de  son  brevet,  et  que  seul 
âualifté  pour  en  défendre  la  vali- 
ité  il  se  refuse  lorsque  des  con- 
trefaçons lui  sont  signalées  à  en 
poursuivre  les  auteurs  et  n'obtem- 
père pas  aux  sommations  qui  lui 
sont  faites  à  cet  effet,  il  y  a  lieu 
de  prononcer  la  résiliation  de  la 
convention  à  ses  torts  et  griefs,  à 
dater  du  jour  on  il  a  été  mis  en 
demeure  de  faire  respecter  son 
brevet,  de  décider  qu'il  ne  peut 
prétendre  au  paiement  des  rede- 
vances postérieures  à  cette  dale,et 
de  le  condamner  à  des  dommages- 
intérêts  pour  le  préjudice  qu  il  a 
par  son  attitude  causé  à  celui 
qui  avait  traité  avec  lui.  P.  349. 
(V.  Confiscation^  Motifs  des  «r- 
rêtSi  Société  des  auteurs,compo- 
siteurs  et  éditeurs  de  fnusique^ 
Théâtre,  Tribunal  correctionnel,) 


E 


EDITEUR.    (V.  Dommages-inié' 

rets,) 

EMPLOI     NOUVEAU.       Est 

nul  le  brevet  qui  ne  contient  que 
l'application     sans    combinaisoii 


r'^rr^^'^' 


—  371  — 


nouvelle  d'un  moyen  déjà  connu, 
pour  l'obtention  d'un  pésollal  in- 
dustriel que  ce  moyen  avait  pu 
procurer,  et  est  par  suite  dépourvu 
de  ridée  créatrice  qui  caractérise 
l'invention.  —  Ne  fait  pas  une 
invention  brevetable  celui  qui  sans 
indiquer  de  modifications  parti- 
culières se  borne  à  appliquer  un 
procédé  connu  en  faisant  appel  à 
l'habileté  de  l'ouvrier  en  vue  de 
sa  bonne  exécution  ;  spéciale- 
ment, étant  connu  pour  empêcher 
les  fentes  des  plafonds  rusage 
d'une  toile  interposée  entre  la 
couche  de  dégrossissage  et  celle 
de  fini,  ne  saurait  constituer  une 
invention  brevetable,  l'indication 
qu'il  convient  de  procéder  au  fini 
du  plafond  à  l'aide  d'une  couche 
de  plâtre  très  mince  ne  couvrant 
que  superficiellement  la  toile, 
sans  indication  des  moyens  de 
réaliser  ce  résultat.  P.  '207. 

SPECTACEiES.  (W. Exécution 
rmisicale  illicite^  Publicité,  So- 
ciété des  auteurs,  compositeurs  et 
éditeurs  de  musique.) 

£RR£UR   SUR  LiE:8    QUA. 
IMITÉS       SUBSTAI¥TIE:Li. 

MJES,  La  croyance  h  la   validité 
d'un  brevetp  en  réalité   frappé  de 
déchéance,  peut  constituer  une  er- 
reur sur  les  qualités  substantiel- 
les, si,  lors  de  la  convention  dont 
ce  brevet  est  l'objet,  les  parties  ont 
eo  spécialement   en  vue  sa  vali- 
dité ;  si   Ton    doit  admettre  que, 
un   brevet  même    frappé  de  dé- 
chéance, tant  que  celle-ci  n'est  pas 
judiciairement    prononcée,    peut 
permettre  au  breveté  de  concéder 
des   licences  valables,  et   que   le, 
licencié  n'est  pas  recevable  à  pro- 
poser  en  justice  la  nullité  ou  la 
déchéance  d-an  brevet,  tant  qu'il 
en  relire  des  avantages  matériels 
appréciables,   parce   qu'il   est  en 
c^uelque  sorte  associé  à  l'exploita- 
tion de  l'invention  et  que  les  bé- 
néfices qu'il  en    retire  font  que, 
n'ayant  pas   d'intérêt,  il    n'a   pas 
d'action,  il  en  est  autrement  lors- 
qu'il s'agit  d'une  convention  d'une 
nature  spéciale  ne   pouvant  avoir 
d'objet,  et  ne    pouvant   procurer 
d'avantages,  qu'autant  que  le  bre- 
vet considéré  avait  non  seulement 
une  existence  de   fait,  mais   une 
Taleur   légale.    Dans   ces   condi- 
tions, même  en  l'absence  de  dol 


ou  de  faute  lourde  équipollente, 
l'erreur  sur  la  validité  du  brevet 
vicie  le  consentement  des  parties 
et  entraîne  la  nullité  de  la  con- 
vention. P.  221. 

ESP  ACTIVE.  Ordonnance  du  7  no- 
vembre 1899  relative  aux  marques 
consistant  dans  les  attributs  de 
l'association  de  la  croix  rouge.  P. 
16.  —  Marques  obligatoires  pour 
certaines  marchandises.  P.  16. 
(V.  France.) 

ESSAIS.  (V.  Divulgation^  Posses- 
sion personnelle.  Publicité  (bre- 
vet).) 

ÉTATS-UIVIS.  Brevets  d'in- 
vention. P.  16.—  Loi  de  l'Etat  de 
New- York  concernant  les  annon- 
ces frauduleuses.  P.  17.  —  Loi 
du  ^  février  1899  modifiant  la 
section  4896  des  statuts  revisés  en 
ce  c(ui  concerne  la  demande  et  la 
délivrance  des  brevets  en  faveur 
des  inventeurs  Frappés  de  démence. 
P.  47.  —  Loi  du  22  mai  1899  de 
l'Etat  de  New- York  amendant  le 
Code  pénal  en  matière  de  droit 
d'auteur.  P.  48. 
(V.  Cuba.) 

EXÊCUTIOIV       MUSICAI^E 
ILXilClTE.     Les    propriétaires 
ou  principaux  locataires  d'un  im- 
meuble qui  le  louent  à  la  journée 
pour  des  réunions  publiques  ou 
privées,  ne  sont  ni  directeurs  ni 
entrepreneurs  de  spectacles  :   ils 
ne  peuvent  être,  devant  les  tribu- 
naux civils,    responsables    d'une 
exécution  musicale  illicite  qui  au- 
rait eu  lieu  dans  leur  local  que  si 
on  peut  établir  à  leur  charge  une 
faute    dans   les   termes  de  l'arti- 
cle 1382  du  Code  civil.  —  La  dé- 
fense à  eux  adressée  par  la  Société 
des  auteurs   et   compositeurs    de 
musique,    défense   d'exécuter    ou 
de  laisser  exécuter  chez  eux   au- 
cune des  œuvres  composant  son 
répertoire,   est  sans  valeur  et  sans 
effet,   les  dits  propriétaires  ou  lo- 
cataires   n'étant  ni    directeurs  ni 
entrepreneurs   de   spectacles  ;  au- 
cune  faute  ne  peut  leur  être   re- 
prochée s'ils  ont  avisé  la  société 
des  réunions  projetées  chez   eux 
et  invité  leurs  sous-locataires  h  se 
mettre  en  règle  avec  ladite  so- 
ciété. —   La  mise  en  interdit  de 
leur  local,  et  la  signification  faite 
à  des  tiers  par   la   même  société 


—  372  — 


qu*elle  ne  laisse  exécuter  chez  eux 
aucune  œuvre  de  son  répertoire, 
est  un  acte  abusif  et  qui  ouvre 
une  action  en  dommages-intérêts. 
P.  68.  —  Ne  peut  être  considéré 
ni  comme  auteur  ni  comme  com- 
plice du  délit  d'exécution  musicale 
illicite,  le  cafetier  qui  prête  gra- 
tuitement une  de  ses  salles  à  un 
musicien  et  reste  absolument 
étranger  a  ror|[anisation  du  bal 
installé  chez  lui,  sans  participer 
au  choix  des  morceaux  exécutés, 
et  sans  |X)uvoir  même  prévoir  ceux 

Îui  seraient  exécutés  illicitement. 
.  74.  —  Le  cafetier  qui  met  une 
partie  de  ses  locaux  à  la  disposi- 
tion d'amateurs,  en  vue  de  réu- 
nions publiques  et  sans  aliéner 
aucun  de  ses  droits  sur  les  locaux 
en  question,  fournit  à  ces  ama- 
teurs le  moyen  de  donner  des 
concerts  publics  et  se  rend  com- 
plice du  délit  d'exécution  musicale 
illicite  qui  peut  être  ainsi  commis 
chez  lui.  P.  76. 

{W, Instruments  de  musique  méca- 
niques.) 

EXPERT.  Les  experts  appe- 
lés aux  débats  pour  rendre  compte 
de  leurs  opérations  ou  pour  don- 
ner des  explications  doivent,  à 
peine  de  nullité,  prêter  le  serment 
de  l'article  155  du  Code  d'instruc- 
tion criminelle,  sauf  à  prêter  de 
nouveau  le  serment  de  Tarticle  44 
du  môme  Code  si  le  tribunal  cor- 
rectionnel ou  la  cour  d'appel  les 
chargent  de  procéder  à  une  nou- 
velle expertise.  P.  318. 

EXPLiOlTATlOIV.  (V.  Domma- 
ges-in  lérêts ,  Prop  riél é.  ) 


FlNLiAIVDE.  Décret  du  21  jan- 
vier 1898  de  Sa  Majesté  impériale 
concernant  les  privilèges  d'inven- 
tion et  la  procédure  juciiciaire  dans 
les  affaires  relatives  à  ces  privi- 
lèges. P.  49.  —  Déclaration  sou- 
veraine de  Sa  Majesté  Impériale  du 
21  janvier  1898  concernant  les  pri- 
vilèges d'invention.  P.  52. 

FONDS  DE  COMMERCE.  A 

défaut  de  convention  spéciale,  la 
vente  du  fonds  de  commerce  ne 
comprend   pas  l'adresse   télégra- 

Shique  constituée  par  le  nom  même 
u  cédant,  alors  surtout  que  le  cé- 


dant s'est  réservé  le  droit  de  con- 
tinuer pour  son  compte  une  partiV 
des  affaires,notamment  les  affaires 
d'importation  pour  lesquelles  son 
emploi  devait  lui  faciliter  ses  re- 
lations avec  les  pays  extra-euro- 
péens. P.  235. 

FORMES       ET      PROPOR- 

TIOIVS.  La  production  d'un  ré- 
sultat industriel  nouveau  est  bre- 
vetable,  alors  même  qu'elle  ne«ie- 
rait  due  qu'à  une  combinaison 
nouvelle  dans  les  formes  et  pro- 
portions d'objets  déjà  connus.  ~ 
Par  suite  ne  peut  être  déclaré  nul 
le  brevet  pris  pour  la  fabrication 
de  briques  creuses  en  porcelaine  oa 
matières  similaires,  sous  le  pré- 
texte que  la  fabrication  par  oonlage 
d'objets  creux  en  porcelaine  est 
pratiquée  depuis  longtemps,si  tout 
en  employant  un  procédé  tombé 
dans  le  domaine  public  nnveniear 
prétendu  est  parvenu,  à  l'aide  de 
combinaisons  nouvelles  dans  les 
formes  et  proportions,  à  créer  an 
produit  industriel  nouveau  et  la 
décision  judiciaire  qui,  sans  faire 
cette  recherche,  déclare  nul  un  tel 
brevet  portant  sur  une  inven- 
tion tombée  dans  le  domaine  pu- 
.  blic  manque  de  base  légale.  P. 
356. 
(V.  Application  nouvelle.) 

FRAIVCE.  Convention  avec  la 
Belgique  sur  la  compétence  judi- 
ciaire, l'autorité  et  l'exécution  des 
décisions  judiciaires.  P.  6.  —  Con- 
vention avec  l'Allemagne,  la  Bel- 
gique et  les  Pays-Bas,  pour  la  pro* 
tection  réciproque  des  marques  en 
Chine.  P.  6.  —  Convention  avec 
la  Grande-Bretagne  pour  la  protec- 
tion réciproque  des  marques  en 
Corée.  P.  7.  —  Convention  avec 
l'Equateur  pour  la  garantie  de  la 
propriété  littéraire  et  artistiqoe. 
P.  7.  —  Convention  avec  T Autri- 
che-Hongrie pour  la  protection  ré- 
ciproque des  marques  an  Maroc. 
p.  8.  —  Convention  avec  la  Répu- 
blique d'Uruguay.  P.  8.  —  Circu- 
laire du  ministre  du  commerce 
du  18  janvier  1898  concernant  les 
récépissés  de  versement  des  pre- 
mières annuités  des  brevets.  P.  SI. 
—  Loi  du  1"'  février  1899,  indica- 
tion obligatoire  d'origine  des  vins 
étrangers.  P.  23.  —  Circulaire  de 
la  Direction  générale  des  douanes 
du  6  février  1899.  P.  23.  —  Loi  do 
30  décembre  1899  relative  à  la  pro- 


«?»!Wr™»'WJ^p^!WT?«?^!*!=T'ffTBPr''!*^!^ 


tection  de  la  propriélé  inJuslrlelle 
pour  [esobJeUaiImiȈ  l'exposition 
nniverselle  de  1900.  P.  2ô.  —  Ar- 
rêta da  30  décembre  ISgOrelatirà 
la  publicatJOD  des  d«<sins  et  des- 
uriplïons  des  brevets  d'inventioD. 
P.  27. 


GRAnmE-BRBrrAONE.  bi^ 

rets  d'Invention.  P.  17.  —  Mar- 
ques de  m  archaadj  ses.  P.  17.  — 
Eiposilion  de  Paris.  P.  17. 

(V.  France.) 

GUATEMALA.    Loi  do  12  mai 

iSHS  concerna  Dt  l'en  registre  ment 
des  marques  de  fabrique,  de  com- 
merce el  d'indnstrie,  P.  61. 


salle  publique   el  à  la  di 

musique  dit  a  l'Automali 
les  sons  peuvent  être  i 
mant.per; us  par  plusieun 

iBclea.  —  It  est  responsat 
lemenl  de  l'exécullon  i 
illicite  Taile  au  moyen  de 
trament  nior»  même  qii 
serait    pas    propriétaire, 


n  marche 
par  une  des  personnes 
le  public  et  qu'il  n 
pas  de  l'argent  vers 
que  audition.  P.  84. 
(V.  Exéculion  music 


it  pr 


lie  I 


RVTERVEIVTIOIV  FOI 

L'intervention  forcée  n'e 
vabte  en  cause  d'appel  q< 
contre  de  la  partie  qui  a 
droit  de   former  tierce-op 

opposition  n'est  admis^iblf 
la  part  d'un  tiers  à  qui 
pourrait  prëjudicier,  ou  ï 
tre  de  qui  1  arrêt  à  intervi 
rait  de  nature  à  constit 
préjugé.  P.  196. 


I 

lIMITATIOnr  FRAUDU- 
LEUSE. It  yaiiniialion  d'une 
marque  i:onsiatant  dans  la  déno- 
mination Robert  inscrite  en  gros 
caractËres  sur  le  couvercle  de 
bottes  de  forme  oblongue,  et  por- 
t:int  à  leur  face  latérale  deux  car- 
touches  avec  les  mots  en  langue 
française  et  anglaise  Sardines  à 
Vhuite  et  Sardinm  in  nil.  et  sur 
chaque  coin  la  lettre  R,  dans  le 
fait  d'employer  des  boites  de 
même  forme,  portant  le  nom  de 
Norbert  en  caractères  identiques 
el  présentant  les  mêmes  mentions 
Sardines  à  rhuile  el  Sardines 
tn  oil,  à  la  même  place,  et  dans 
les  coins  les  lettres  K  et  S  rap- 
prochées de  façon  k  offrir  par 
leur  réunion  l'aspect  d'une  lettre 
unique  rappelant  l'initiale  R.  P. 
253. 
(V.  Tribunai  correclioJtnel.) 

■NSTRUIHBIVT    DE     IHUSl- 

aUE  MÉCANIttUE.    Le  ca- 
fetier qui  installe  chez  lui  dans  sa 


JAPON.  Loi  sur  les  brève 

venlion  dn  2  mars  1899. 

—  Loi  sur  les  dessins  el   i 
industriels  du  2  man  18'IQ. 

—  Loi  sur  les  marques  de  ti 
et  de  commerce  du  2   mar 


P.   125.  -  Loi  SI 


I.  P.  13 


Priiteclion   inti 

nale   des   droits   des   aute 
18.  —  Protection  des  marqi 


LEGISLATIONS  II 

ttlEVUES.  {\  .Allemagi. 
tilles  anglaises,  Argentine 
blique),  Aulriche-llonqrie, 
Bulgarie,  Canada,  Chili,  i 
bie,  Cuba,  Danemark,  Ei 
Elals-Vnis,    Finlande,    1 


T^' 


—  374  — 


Grande  Bretagne  ,  Guatemala  , 
Guernetey,  Honduras^  Hongrie, 
Japon  ,  Jersey  ,  Luxembourg  , 
Norwège,  Orange,  Portugal,  Sud 
africaine  (Hépublique),  Bussie, 
Suède,  Suisse,  Venezuela,  Zulu- 
land.) 

L.BTTRB  MI881VB.  Ne  cons- 
titue pas  antériorité  Tindication 
d'un  appareil  dans  une  lettre  mis- 
sive si  la  description  n'était  pas 
suffisamment  claire,  dans  l'état 
des  connaissances  à  cette  époque 

f»our  permettre  la  fabrication  de 
'appareil  sans  un  effort  considé- 
rable d'invention  de  la  part  du 
lecteur.  —  Une  lettre  missive  ne 
crée  pas  d'ailleurs  la  publicité, 
étant  de  sa  nature  toute  secrète, 
mais  la  publicité  peut  résulter  des 
faits  qui  y  sont  rapportés  par  les- 
quels elle  constitue  un  témoignage 
irrécusable.  P.  164. 
(V.  Reproduction  (droit  rfe),  Ré- 
ponse {droit  de),) 

LiICEIVCB  .  (V.  Erreur  sur  les 
qualités  substantielles.  Dommages- 
intérêts,) 

LiI^LBIMBOURG  .     Loi   sur    le 

droit  d'auteur  du  10  mai  1898.  P. 
138. 

M 

MADÈRB.  (V.  Ai^angement  de 
Madrid.) 

MAROC.  (V.  France,) 

MARaUBS  DBFABRiaUB. 

Une  société  française,  cessionnaire 
du  droit  de  fabriquer  un  produit 
inventé  par  un  Allemand,  a  le 
droit  de  par  la  loi  du  23  juin  1857, 
de  faire  protéger  en  France  la 
marque  affectée  à  ce  produit,  sans 
qu'il  y  ait  à  examiner  si  cette 
marque  est  protégée  ou  non  en 
Allemagne.  P.  271.  —Toute dési- 
gnation pouvant  servir  à  indivi- 
dualiser le  produit  d'une  industrie, 
est  protégée  par  la  loi  de  1857,  à 
la  condition  que  cette  dénomina- 
tion soit  susceptible  d'une  appro- 
priation privative  et  ne  soit  pas 
tombée  dans  le  domaine  public 
avant  le  dépôt  légal.  P.  282.  — 
La  désignation  d'un  produit  bre- 
veté ne  tombe  pas  dans  le  domaine 
public  par  le  fait  seul  de  la  dé- 
chéance du  brevet,   lorsque  cette 


dénomination  n'est  point  l'élément 
générique  et  nécessaire  de  la  dé- 
signation du  produit  et  quelle  est 
au  contraire  arbitraire  et  de  fan- 
taisie. P.  293. 

(V.  Dépôt,  Dommages-intérêts, 
Imitation  frauduleuse.  Nom  pa- 
tronymique, Produit  pharmaceu- 
tique. Remède  secret^  Usurpa- 
tion.) 

MBDAILJLfBS.  Contrevient  aux 
dispositions  de  la  loi  du  30  avril 
188i6,  le  négociant  qui  fait  figurer 
sur  des  étiquettes  apposées  sur  un 
produit  un  certain  nombre  de 
médailles,  sans  qu'il  soit  fait  men- 
tion de  leur  date,  de  leur  nature 
et  de  rexposition  ou  du  concours 
où  elles  ont  été  obtenues,  alors 
surtout  qu'en  fait,  ce  négociant 
n'a  jamais  obtenu  de  récompenses 
dans  les  concours  pour  le  prodoit 
sur  lequel  étaient  apposées  lesJites 
étiquettes.  P.  212. 

MIIV18TÈRE  PUBUC.  Lors- 
que la  décision  attaquée  concerne 
exclusivement  les  intérêts  de  la 
partie  civile  et  ne  touche  en  rien 
à  l'ordre  public,  le  ministère  pu- 
blic est  sans  qualité  pour  proposer 
contre  elle,  et  d'office,  des  moyens 
de  cassation.  P.  228. 

MISB    BJNf    UVTERDIT.    (V. 

Exécution  ynusicale  illicite.  So- 
ciété des  auteurs,  compositeurs. et 
éditeurs  de  musique.) 

MOIVTEIVBGRO.(V.  Convention 
d'union  de  1886.) 

MOTIFS  DBS  ARRÊTS.  Est 

suffisamment  motivé  l'arrêt  qni 
ayant  à  statuer  sur  des  conclusions 
d'appel  contenant  une  demande 
d'allocation  supérieure  de  dom- 
maRes-intéréts,  et  d'insertion  de 
la  décision  à  intervenir  dans  |>lc- 
sieurs  journaux  aux  frais  de  Tio- 
timé  et  à  titre  de  supplément  de 
dommages-intérêts,  s>st  borné  à 
déclarer  que  les  premiers  juges 
avaient  fait  une  saine  appréciation 
du  préjudice  causé  à  la  partie  de- 
manderesse et  à  débouter  celle-c; 
de  ses  fins,  moyens  et  conclusions 
prises  de  ce  chef.  P.  114.  —  La 
non-existence  entre  les  main?  de 
contrefacteur  des  objets  jugés  con- 
trefaits pouvant  seule  justifier  > 
défaut  de  confiscation,  est  insufli- 
samment   motivé  l'arrêt   qui   ce 


—  375  — 


prononçant  pas  la  confiscation  des 
objets  contrefaits  omet  de  mention- 
ner la  disparition  et  n'indique  pas 
qa'il  en  a  été  tenu  compte  dans 
l'allocation  des  dommages  et  inté- 
rêts. P.  333. 


nr 


IVOM      COMMERClALi.      Le 

propriétaire  d'un  fonds  de  com- 
merce de  chapellerie,  comprenant 
à  la  fois  le  commerce  de  détail,  et 
le  commerce  de  gros,  de  chapeaux 
français  et  de  chapeaux  de  pro- 
venance étrangère  qui  cède  a  un 
acquéreur  avec  le  nom  et  la  mar- 
que de  sa  maison,  une  partie  de 
son  commerce  en  s'en  réservant 
spécialement  l'autre  partie  (impor- 
tation et  vente  en  gros  de  tous 
les  articles  extra-européens,  fabri- 
cation des  feutres  et  fournitures 
de  chapellerie),  conserve  le  droit 
d'exercer  sous  son  nom  le  com- 
merce qu'il  s'est  réservé  à  condi- 
tion de  ne  pas  créer  une  concur- 
rence à  son  acquéreur  dans  la 
branche  faisant  l'objet  de  la  ces- 
sion. —  Mais  il  appartient  aux 
tribunaux  d'ordonner  les  mesures 
nécessaires  pour  éviter  toute  con- 
fusion et  distinguer  les  deux  mai< 
sons  d'une  façon  non  équivoque  ; 
notamment  de  décider  que  le  cé- 
dant devra,  dans  son  commerce, 
faire  précéder  son  nom  patrony- 
mique de  son  prénom  écrit  en 
caractères  semblables  et  égaux  à 
ceux  de  son  nom,  le  faire  suivre 
du  nom  de  ses  associés  et  ajouter 
enfin  la  mention  de  la  branche 
de  commerce  spéciale  qu'il  s'est 
réservée,  telle  qu'elle  figure  dans 
le  contrat  de  vente  :  par  contre, 
on  ne  saurait  obliger  le  cédant  à 
faire  suivre  son  nom  du  mot  a  mai-. 
son  fondée  en  1895  »  date  du  con- 
trat, du  moment  qu'il  est  cons- 
tant que  le  commerce  qu'il  s'est 
r^ervé  remonte  à  une  date  bien 
antérieure.  P.  236. 

nrOMS    DE  L.OCAL.1TÉ.    Les 

noms  de  lieux  sont  dans  le  do- 
maine public  en  ce  sens  que  l'u- 
sage commercial  en  est  permis 
à  tous  pour  indiGjuer  la  provenance 
des  produits  qui  en  sont  réelle- 
ment tirés. —  il  importe  peu  qu*un 
nom  ait  cessé  de  constituer  la  qua- 
lification officielle  d'une  circons- 
cription administrative,  s'il  a  con- 


tinué à  servir,  dans  le  langage 
usuel,  à  désigner  la  région. —  Spé- 
cialement le  nom  d'Orezza,  bien 
qu'il  ait  été  remplacé  dans  l'usage 
officiel  par  celui  de  Piedicroce, 
continue  à  constituer  une  indica- 
tion de  provenance  dépendant  du 
domaine  public  et  non  susceptible 
d'appropriation.  P.  258. 
(V.    Arrangements  de  Madrid), 

IVOM        PATKOIVYMiaUB. 

Ne  peut  revendiquer  à  titre  de 
marque  de  fabrique  une  dénomi- 
nation comprenant  un  nom  patro- 
nymique, telle  que  Vin  Duflot, 
le  tiers  qui  fonde  son  droit  sur 
une  convention  par  laquelle  Tu- 
sage  de  ce  nom  lui  a  été  cédé,  si 
la  convention  a  trait  à  un  remède 
secret,  car  une  telle  convention 
est  nulle.  P.  268. 

NORVÈGE.  Loi  apportant  des 
modifications  ou  adjonctions  à  la 
loi  sur  les  marques  de  fabrique 
et  de  commerce  du  26  mai  188i 
(du  31  mai  1900) .  P.  144. 


O 


OKAIVGE.  Propriété  industrielle. 
P.  19. 

OUVRIERS.     (V.    Concurrence 
déloyale^  Possession  antérieure,) 


PAPIER     CYANO  FER.   (V. 

Dénominalion.) 

PAYS-BAS.  (V.  France.) 

PERFECTi;OIirnrEIMEIVT. 

L'auteur  d'un  perfectionnement  à 
une  invention  brevetée,  ne  peut 
en  tirer  parti  sans  violer  le  droit 
du  breveté  et  commettre  une  con- 
trefaçon. P.  196. 

PHARMACIE.  N'est  pas  nulle 
la  cession  d'une  officine'à  un  non- 
pharmacien,  si  elle  est  rétrocédée 
à  un  pharmacien.  P.  261. 

PLAGIAT.  Âpprécie]^sooverai- 
nemeiit  les  faits  de  la  cause,  l'ar- 
rêt de  la  Cour  d'appel  quî,tcons- 
tate  que  si  pour  composer  les 
couplets  d'une  féerie,  des  em- 
prunts ont  été  faits  à  des  stances 


r. 


î 


À 


»^ 


—  376  — 


antérieures  et  des  vers  ont  été 
littéralement  copiés,  il  n*y  a  pas 
contrefaçon  parce  que  l'œuvre  an- 
térieure est  devenue  méconnais- 
sable, et  la  confusion  entre  les 
deux  œuvres  (stances  etcoui>let8) 
n'est  ni  possible  ni  admissible. 
P.  9o» 
(V.  Contrefaçon.) 

PORTUGAIS.   Loi  concernant  la 

Jaranlie  des  titres  de  propriété  in- 
ustrielle  et  commerciale.  P.  19. 

POURSUITB   IVOÏV    JUSTI- 

FIBB.  (V.  Tribunal  correction' 
nel,) 

POURVOI  EN  CASSATlOrV 

11  ne  peut  être  fait  état  par  la 
Cour  de  cassation  d'un  mémoire 
non  timbré  déposé  par  la  partie 
civile  demanaeresse  en  même 
temps  que  son  pourvoi,  toutes  les 
pièces  produites  à  l'appui  de  la 
requête  en  cassation  devant  aux 
termes  de  l'article  24  de  la  loi  du 
13  brumaire  an  VU  être  écrites 
sur  papier  timbré.  —  Aux  termes 
de  l'article  424  du  Gode  d'instruc- 
tion criminelle  la  partie  civile  ne 
S  eut  soumettre  à  la  Cour  aucun 
ocumeut,  même  sur  timbre,  sans 
la  garantie  du  ministère  d'un  avo- 
cat à  la  Cour  de  cassation.  P. 
228. 

POUVOIR      DBS       TRIBU- 

IVAUX.  Il  Y  a  lieu  d'écarter  les 
conclusions  d  un  défendeur  pour- 
suivi en  contrefaçon,  tendant  à 
faire  déclarer  dans  quelles  condi- 
tions il  pourrait  continuer,  sans 
commettre  de  contrefaçon,  la  fa- 
brication du  produit  incriminé 
car  il  n'appartient  pas  aux  tribu- 
naux de  donner  aux  parties  une 
sorte  de  consultation  sur  l'éten- 
due de  leurs  droits  et  de  préjuger 
ainsi  des  difficultés  qui  pourront 
naître  dans  l'avenir.  P.  196. 
(V.  Bonne  foi.  Nom  commercial.) 

P08SB88I0IV    ANTBRIBU- 

RB.  Une  possession  antérieure 
ne  peut  constituer  un  droit  au  pro- 
fit oe  celui  qui  s'en  prévaut  si  elle 
a  un  caractère  frauduleux,  notam- 
ment si  elle  n'a  été  obtenue  qu'en 
détournant  un  ancien  ouvrier  bre- 
veté au  courant  de  la  fabrication 
au  moyenM'appointementset  avan- 
tages exceptionnels.  P.  10^.  — 
L'exception  de  possession  person 


nelle  invoquée  par  un  préTenu  de 
contrefaçon  doit  être  rejetée  dès 
lors  qu'il  est  établi  que  celai  qui 
en  excipe  ne  s'est  livré  qii*â  des 
essais  avec  lesquels  il  n'est  arrivé 
à  aucun  résultat  industriel  et  qnll 
n'a  pas  appliqués,  même  pour  les 
besoins  de  son  industrie  ;  qu'il 
n'est  pas  sorti  de  la  période  des 
tâtonnements  et  n'a  entrevu  que 
de  loin  la  découverte  que  le  brevet 
a  fait  entrer  plus  tard  dans  le  do- 
maine de  la  pratique. 

PROCBDÉ.  Est  brevetable  le 
procédé  de  préparation  industrielle 
des  carbures  aes  métaux  alcaline- 
terreux  consistant  à  chauffer  à 
l'aide  d'un  four  électrique  jusqu'à 
la  fusion  un  mélange  des  corps 
composants  dans  des  proportions 
déterminéeH.  P.  326. 

PROCBDURB.  (V.  Pouvoirg  de 
tribunaux,  significalion  des  Juge- 
ments). 

PRODUIT  NOUVEAU.  Cons- 
titue un  produit  nouveau  breveta- 
ble,  l'oxvde  d'antimoine  presaue 
pur  et  soluble  répondant  a  la  tat- 
mule  Sb*0',  alors  que  ce  corps 
n'avait  pas  été,  jusqu'à  la  prise  au 
brevet,  obtenu  industriellement  et 
un  oxyde  d'antimoine  soluble,  ré- 
pondant à  la  même  formule,  même 
de  couleur  un  peu  plus  foncée  et 
contenant  plus  d'impureté  (arse- 
nic) en  est  la  contrefaçon.  P.  106. 
—  Constitue  un  produit  industriel 
nouveau  le  carbure  de  calcium 
CaC*  caractérisé  par  sa  fluidité  à 
la  température  à  laquelle  il  se 
forme  ;  cristallisé  après  fusion  se 
présentant  alors  sous  l'aspect  d'une 
masse  compacte,  solide,  homogène 
et  presque  exclusivement  consti- 
tuée par  du  carbure  de  calcium, 
CaC,  alors  qu'antérieurement  on 
connaissait  seulement  sous  le  nom 
de  carbure  de  calcium,  un  produit 
fîriable,  amorphe,  non  cristallisé 
contenant  non  seulement  du  car- 
bure de  calcium,  mais  du  carbone 
et  d'autres  corps.  P.  326. 
(V.  Dénomination.) 

PRODUITS  PHARMACEU- 
TiaUBS.  Si  nul  produit  phar- 
maceutique ne  peut  être  breveté, 
la  fabrication  d'un  prodoit  de 
même  nature  peut  faire,  au  con- 
traire, l'objet  d'un  droit  privatif 
et  son  titre  seul  être  déposé  uti- 


r«— ^-' 


^         «s      , 


-  377  — 


lement.  P.  271.  — La  dénomina- 
tion choisie  pour  désigner  le  pro- 
duit pharmaceutique,  à  la  diffé- 
rence de  tout  autre  produit,  doit 
être  une  dénomination  de  fantaisie 
et  non  pas  une  marque  usuelle  et 
nécessaire,  capable  de  révéler,  par 
son  seul  énoncé,  soit  la  nature 
particulière,  soit  la  vertu  propre 
et  médicale  du  produit  déposé.  — 
La  dénomination  antipy^rine  ne 
peut  constituer  une  marque  de  fa* 
Dric|i]e  parce  qu'elle  est  un  simple 
dérivé  de  Tadjectif  anti^rétique^ 
usité  depuis  près  d*un  siècle  pour 
désigner  le  caractère  ^es  substan- 
ces fébrifuges,  qu'elle  a  été  choi- 
sie par  l'inventeur  du  prodoit  pour 
remplacer,  dans  les  besoins  de  la 
pratique,  le  nom  purement  scien- 
tifique de  diméthyloxyquinizine^ 
qu'elle  est  entrée,  d'emblée,  dans 
le  Yocabulalre  des  médecins  et  des 
pharmaciens  et  a  été  universelle- 
ment adoptée  par  les  malades  même 
les   moins    intellectuels.   P.  271. 

PmiVClPAL.   L.OCATA1RB. 

(V.  Exécution  musicale  illicile), 

PROPRlÉTAllUE.    {W.  Exécu- 
tion musicale  illicite.) 

PROPRIÉTB  ARTISTiaUK. 

(V.  Citation^  Contrefaçon,  Dom- 
mages-inléréls.  Editeur P^lagiat) . 

PROPRIÉTÉ  UTTÉRAIRB. 

(V.  Confiscation,  Lettre  missive, 
Beproduction  (droit  de).  Réponse 
(droit  de.) 

|>ROPRlÉTE      (BRETVBT  )  . 

.  Les  découvertes  constituent  une 
propriété  personnelle  que  Ttnven- 
tear  conserve  tant  qu'il  ne  Ta  pas 
formellement  aliénée  ;  dès  lors,  à 
moins  de  convention  contraire, 
l'associé  c|ai,  par  suite  des  travaux 
que  lui  imposaient  ces  fonctions 
sociales,  fait  une  découverte  et 
prend  un  brevet,  est  présumé  faire 
apport  à  la  société  du  droit  d'ex- 
ploitation, mais  il  conserve  la  pro- 
priété du  brevet,  alors  surtout  que 
depuis  la  dissolution  de  la  société, 
l'inventeur  a  seul  payé  les  annui- 
tés et  conservé  sans  réclamations 
entre  ses  mains  le  titre  du  brevet. 
P.  102. 

P17BL.IC1TB  (BXBCUTIOIV 
MUSIC AL.B) .  L'article  428  du 
Gode  pénal  punissant  d'une  amen- 
de et  s'il  y  a  lieu  de  la  confisca- 
tion des  recettes,  tout  directeur, 
tout  entrepreneur  de  spectacles, 


toute  association  d'artistes  qui  au- 
ra fait  représenter  sur  son  théâtre 
des  ouvrages  dramatiques  au  mé- 
pris des  lois  et  règlements  sur  la 
propriété  des  auteurs,  il  importe 
peu,  pour  l'application  de  cet  ar- 
ticle, que  la  représentation  ait  eu 
lieu  ou  non  sur  un  théâtre  public 
proprement  dit  ou  qu'elle  ait  été 
gratuite,  il  suffit  qu'il  y  ait  eu 
même  accidentellement  exécution 
publique  sans  le  consentement  des 
auteurs  ou^  de  leurs  ayants  droit 
d'œuvres  littéraires  ou  musicale, 
non  tombées  dans  le  domaine  pu- 
blic. P.  232. 
(V.  Cour  de  cassation.) 

PUBL.IC1TÉ    (BRBVBT).    Le 

mot  publicité  ne  saurait  avoir  un 
autre  sens  dans  la  loi  particulière 
des  brevets,  que  celui  qui  lui  ap- 
partient par  sa  signification  même 
qui  est  de  signifier  «  fait,  répandu 
ou  livré  au  public  ».  La  loi  de 
1844,  loin  de  restreindre  le  sens 
du   mot  publicité,  y  ajoute,  pour 

Eouvoir  rejeter  la  prétention  du 
reveté,  la  condition  que  la  publi- 
cité'ait  été  de  nature  telle  qu'elle 
ait  suffi  pour  l'exécution  de  l'in- 
vention ;  ne  répond  pas  à  cette 
condition  la  seule  existence  dans 
une  usine  étrangère,  d'une  ma- 
chine similaire  à  la  machine  bre- 
vetée, résultat  du  perfectionne- 
ment par  les  ingénieurs  ou  ou- 
vriers de  l'usine  d'une  machine 
antérieure,  alors  que  l'usine  ne  se 
livre  pas  à  la  fabrication  de  ces  ma- 
chines, mais  se  borne  à  les  utiliser 
dans  la  fabrication  de  ses  pro- 
doits :  qu'il  n'est  pas  produit  un 
seul  document  pour  établir  qu'en 
fîEiit  la  machine  a  été  connue  d'un 
ingénieur,  d'un  constructeur  ou 
d'un  homme  du  métier,  et,  ^ue 
l'eiistence  de  cette  machine  amsi 
perfectionnée,  publiquement  con- 
nue au  dire  du  constructeur  de  la 
machine  sus-énoncée,  a  été  décou- 
verte, en  fait,  non  par  ce  construc- 
teur lui-même,  mais  par  l'acqué- 
reur de  ladite  machine.  P.  164.  — 
Constitue  la  publicité  destructive 
de  la  nouveauté  de  l'invention  le 
feit  par  l'inventeur,  avant  la  prise 
de  son  brevet  d'avoir  passé  et  exé- 
cuté des  marchés  importants  pour 
la  fourniture  du  produit  inventé, 
de  telles  opérations  ne  peuvent 
être  considérées  comme  un  simple 
essai  fait  dans  l'intérêt  de  l'inven- 
teur. P.  366. 


•Mil  '■wM""itip.%^^;'k.9 m.' MA^tilUlUp 


—  378  — 


ReCELi.  L*armateur,  qui  a  gardé 

Srovisoirement  dans  ses  magasins 
es  marchandises  reçues  pour  être 
expédiées  à  Tétrangcr,  ne  peut 
dans  le  cas  où  ces  marchandises 
ont  été  saisies,  sans  opposition  de 
sa  part,  par  un  tiers  prétendant 
qu'elles  étaient  la  contrefaçon  de 
produits  pour  lesquels  il  était  bre- 
veté, être  considéré  comme  rece- 
leur et  condamné  comme  tel,  alors 
que  les  juges  du  fond,  par  une 
appréciation  souveraine  des  faits 
de  la  cause  et  de  la  correspondance 
des  parties,  ont  constaté  sa  bonne 
foi.  P.  246. 

KEMÈDES    SBCKBTS  .     Le 

droit  à  la  marque  est  indépendant 
de  Tusage  qu'on  en  peut  faire  : 
ainsi,  celui  qui  a  acquis  la  pro- 
priété d'une  marque  peut  en  pour- 
suivre les  contrefacteurs,  alors 
même  que  les  produits  auxquels 
elle  s'applique  seraient  des  remè- 
des secrets.  —  En  conséquence, 
une  cession  de  marque  de  fabrique 
ne  peut  être  déclarée  nulle  comme 
s'appliquant  à  des  remèdes  secrets 
et  il  n'y  a  pas  lieu  de  rechercher 
si  tel  est  le  caractère  du  produit 
sur  lequel  repose  la  marque.  P. 
260.  —  Est  un  remède  secret  toute 
préparation  ayant  un  caractère 
médicinal  à  moins  qu'elle  ne  figure 
au  Codex  ou  qu'elle  n'ait  été  ac- 
quise ou  publiée  par  le  Gouverne- 
ment,  ou  qu'elle  n'ait  été  insérée 
dans  le  Bulletin  de  l'Académie  de 
médecine.  P.  268.  —  La  propriété 
d'une  marque  légalement  établie 
confère  un  droit  absolu,  indépen- 
damment de  l'usage  qui  peut  en 
être  fait,  et  donne  au  déposant  le 
droit  de  poursuivre  tout  contre* 
facteur  ;  il  en  est  ainsi  alors  même 
que  le  produit  auquel  est  appliqué 
la  marque  pourrait  être  considéré 
comme  un  remède  secret,  cette 
circonstance  n'étant  pas  de  nature 
à.  légitimer  les  cas  d'usurpation 
vis-à-vis  du  propriétaire  de  la 
marque.  P.  282. 

KÉMIIVlSCBIirCB.  (V.  Confre- 
façon,) 


REPOIVSE     (DROIT      DE). 

L'exercice  du  droit  de  réponse, 
dans  les  termes  de  l'article  18  de 
la  loi  de  1881,  n'entraîne  point 
l'aliénation  du  droit  de  propriété 


en  ce  sens  que,  s'il  consacre,  au 
proHt  de  rintéreasé,  le  droit  d'être 
publié  et  imprimé  malgré  son  con- 
tradicteur, il  n'implique  poini,  la 
polémique  une  fois  close,  l'obliga- 
tion, pour  l'une  ou  l'autre  des  par- 
ties, d'être,  contre  son  gré,  im- 
primée et  publiée  à  nouveau. 

REPRODC7CTIOIV     (DROIT 

DE).  Les  lettres  missives  publiées 
par  un  journal,  en  réponse  à  des 
articles  parus  dans  ce  même  jour- 
nal, ne  perdent  point,  par  cette 
publication,  leur  caractère  d'œo- 
vre  littéraire  personnelle,  suscep- 
tible de  propriété  privée,  et  le  di- 
recteur de  ce  journal  qui  les 
reproduit  ensuite  dans  une  bro- 
chure, sans  nécessité  dér:  entrée, 
ni  autorisation  préalable,  porte 
atteinte  à  cotte  propriété  et  peut 
être  condamné,  de  ce  chef,  à  des 
dommages-intérêts  envers  leur  au- 
teur. —  On  ne  saurait  arguer  do 
droit  de  citation  pour  justiGer  la 
reproduction,  dans  ces  conditions, 
de  lettres  entières.  P.  246. 
(V.  Réponse  {droit  de),) 

RESPOIVSABIL.ITÉ.  (V.  Exé- 
cution musicale  ilticite,  Inslru- 
menls  de  musique  mécanique.) 

RUSSIE.  Brevets  d'invention. 
P.  19. 


SAISlfe  DES  RECETTES 
D'UIVE       REPRÉSEIVTA- 

TIOIV    THÉATRAIf.    (V. 

Thédt7^e.) 

SAISIE  (MARaUBS).  U  sai- 
sie qui  n'est  suivie,  dans  le  délai 
de  l'article  18  de  la  loi  du  t23  juin 
1857,  que  d'une  assignation  devant 
le  tribunal  correctionnel  adressée 
à  une  société  commerciale,  par 
conséquent  nulle,  est  nulle  elle- 
même  et  le  tribunal  ne  peut  atta- 
cher aucune  importance  aux  faits 
et  constatations  qu'elle  a  relatés. 
P.  312. 

SBRMBIVT.  (V.  Expert,) 

SIGIVIFICATIOIV  DES  JV- 
GEMEIVTS.  La  disposition  de 
l'art.  187  C.  d'inst.  crim.  aux  ter- 
mes de  laquelle,  si  la  signification 
n'a  pas  été  faite  à  personne,  et  s'il 
ne  résulte  pas  d'acte  d'exécution 


•tTfsan 


—  379  — 


da  jagement  qne  le  prévenu  en  a 
eu  connaissance,  l'opposition  est 
recevabie  jusqu'à  l'expiration  des 
délais  de  prescription  de  la  peine, 
n'a  trait  qu'à  l'exécution  de  la 
peine.  En  dehors  de  ce  cas,  la  si- 
gnification k  domicile  conserve 
tons  ses  effets  légaux  ;  elle  conti- 
nue donc  de  faire  courir  le  délai 
de  ropposilinn^  en  ce  qui  concerne 
la  condamnation  aux  dommages- 
intérêts  prononcés  au  profit  de  la 
partie  civile.  P.  861. 

80CI  ÉTÉ        COMMBRCI  /k- 

LE.  Une  société  commerciale  est 
un  être  moral  qui  ne  saurait  ré- 
pondre pénalement  d'un  délit  et 
ne  peut,  par  conséquent,  être  va- 
lablement assigné  au  correctionnel 
comme  pénalement  responsable. 
P.  312. 

SOCIÉTÉ    DBS  AUTEURS, 
COMPOSITEURS      ET 

ÉDITEURS  DE  MUSI- 
QUE. La  Société  des  auteurs  et 
compositeurs  dramatiques  n'est 
pas  un  simple  agent  d'affaires  ou 
mandataire,  chargé  de  faire  res- 
pecter les  droits  des  auteurs  et 
de  percevoir  leurs  recettes  ;  elle 
peut  passer  avec  les  tiers  des  trai- 
tés valables,  et  les  membres  de  la 
commission  de  la  société  ont  le 
droit  d'ester  en  justice  pour  faire 
exécuter  ces  traités,  dans  lesquels 
ils  ont  d'ailleurs  un  intérêt  per- 
sonnel. P.  88.  —  C'est  à  non 
droit  que  la  Cour  d'appel  a  con- 
sidéré comme  constituant  une 
faute  et  un  abus  de  la  part  de  la 
Société  des  auteurs,  compositeurs 
et  éditeurs  de  muslaue,  du  droit 
d'accorder  ou  de  reiuser  l'autori- 
sation d'exécuter  les  œuvres  qui 
leur  appartiennent,  le  fait  d'avoir 
cherché  à  imposer  au  propriétaire 
d'une  salle  qui  la  loue  pour  des 
réunions  publiques  un  contrat 
d'abonnement,  sur  la  menace  de 
mettre  la  salle  en  interdit,  et 
d'avoir,  sur  son  refus  de  subir 
l'abonnement,  exécuté  cette  me- 
nace en  signifiant  aux  tiers  l'in- 
terdit mis  sur  la  salle,  et  qu'elle  a 
condamné  les  auteurs  de  ce  fait  à 
des  domma^^es  et  intérêts  envers 
le  propriétaire  de  la  salle.  P.  230. 
—  Ne  viole  aucune  loi  l'arrêt 
qui,  après  avoir  constaté  que  les 
entrepreneurs  de  spectacles,  loin 
d'avoir  voulu  se  passer  de  l'auto- 
risation   de    la    Société   des  au- 


teurs, compositeurs  et  éditeurs  de 
musique,  se  sont  conformés  au 
mode  habituellement  usité  pour 
la  demander,  l'ont  informée  de  la 
réunion  projetée  et  lui  ont  offert 
après  contrôle  de  la  recette  effec- 
tuée, les  droits  fixés  par  son  ta- 
rif, et  que  par  suite  la  société  ne 
pouvait  établir  à  leur  charge  au- 
cune faute  ni  aucun  préjudice  ré- 
sultant d'une  faute,  rejette  la  de- 
mande de  dommages  et  intérêts 
formée  par  elle.  P.  230. 
ry.  Ba-écution  musicaie  illicite ^ 
Publicité^  Témoignage,) 

SUD     AFRICAIIVE  (RÉPU- 

BLflIlUE). Propriété  industrielle. 
P.  19. 

SUÈDE .  Brevets  d'invention . 
Brevets  étrangers,  délai  de  prio- 
rité, exploitation.  P.  20.  —  Loi 
concernant  la  protection  de  cer- 
tains desHins  et  modèles  (du 
10  juillet  1899).  P.  146. 

SUISSE.  Loi  fédérale  sur  les  des- 
sins et  modèles  industriels  (du 
30  mars  lUOO).  P.  151. 

SYIVDICATS     PROFES- 

SlOIVrVELfS.  Les  syndicats 
professionnels  ont,  comme  toutes 
les  sociétés,  le  droit  de  se   distin- 

Suer  les  uns  des  autres  au  moyen 
'une  dénomination  qui  appartient 
en  propre  à  celui  qui  a  été  le  pre- 
mier à  l'adopter.  P.  316. 
(V.  Dénomination,) 


TEMOIGIVAGE.  L'agent  de  la 
Société  des  auteurs,  compositeurs 
éditeurs  de  musique,  cité  comme 
témoin  ne  peut  être  reproché  et 
doit  être  entendu  dans  sa  déposi- 
tion ;  en  effet,  bien  que  manda- 
taire de  ladite  société  cet  agent 
n'est  pas  compris  au  nombre  des 
personnes  visées  dans  l'article  156 
du  Code  d'instruction  criminelle. 
P.  100.  —  Des  attestations  et  des 
témoignages,  par  eux-mêmes  pro- 
bants, ne  peuvent  permettre  de 
prononcer  la  nullité  d'un  brevet, 
quand  ils  trouvent  leur  contradic- 
tion dans  une  correspondance  an- 
térieure. P.  160. 

THEATRE.  Les  membres  de  la 
commission  de  la  société  des  au- 


—  880 


leurs  et  compositeurs  de  musique 
en  désaccord  avec  un  théâtre  sur 
le  montant  des  droits  à  percevoir, 
ne  peuvent,  en  vertu  d*une  ordon- 
nance du  président  du  tribunal 
civil,  faire  saisir  les  recettes  de  ce 
théâtre  ;  cette  saisie  n'est,  dansces 
circonstances,  permise  ni  en  vertu 
de  la  loi  des  1iM9  janvier  1791,  ni 
des  articles  428  et  429  du  Code  de 
procédure  ni  d'aucun  autre  texte 
de  la  loi.  P.  90.  —  Lorsque  les 
recettes  d'une  entreprise  de  spec- 
tacjes  ont  été  saisies,  puis  eontis- 

2uées  en  vertu  des  articles  428  et 
29  du  Code  pénal,  le  montant  to- 
tal de  ces  recettes  peut  et  doit  être 
attribué  aux  auteurs  lésés  ;  mais, 
lorsque  la  saisie  n'a  pas  été  opé- 
ré<>,  les  juges  du  fait  ont  un  pou- 
voir  souverain  pour  apprécier  le 
préjudice  éprouvé  par  le  plaignant; 
lis  peuvent  en  fixer  l'importance 
à  une  somme  même  inférieure  au 
produit  de  la  recette  ;  ils  ne  peu- 
vent en  tout  cas  prononcer  une 
confiscation  non  prévue  par  la  loi. 
P.  96. 

(V.  tiociété  des  auteurs^  éditeurs 
et  compositeurs  de  musique,) 


CIV1L.9.     (V. 

Compétence,   Pouvoir  des  tribU' 
naux,) 

TRIBUNAUX  DB  COMMER- 
CE. (V.  Compétence.) 

TRIBUIVAUX  CORRBC  - 
TlOIVIVELS.  Il  ne  saurait  y 
avoir  condamnation  correction- 
nelle pour  imitation  frauduleuse 
de  marque  lorsqu'aucune  confu- 


sion n'est  possible  entre  les  pro- 
duits. P.  298.  —  Une  poursuite 
non  justifiée  devant  le  tribunal 
correctionnel,  bien  qu'elle  ne  soit 
pas  â  qualifier  de  téméraire  et 
vexatoire,  peut  donner  lieu  à  des 
dommages-intérêts  si  elle  a  été, 
au  moins,  légèrement  et  impru- 
demment engagée  et  s'il  y  a  lieu 
de  tenir  compte  du  préjudice  par- 
ticulier que  le  poursuivi  a  subi,  i 
raison  de  la  nature  de  sa  profes- 
sion. P.  298. 
(V.  Société  commerciale,  Saisie,) 


U 


UfSfJRPATIOIV  DE  MAR- 
4iCJE8.  Le  seul  fait  par  un  fa- 
bricant, autre  qHe  le  propriétaire 
de  c(>tte  marque,  d'avoir  proposé, 
vendu  et  facturé  ses  produits  sous 
le  nom  de  Lessive  Phénix  ou 
Lessive  genre  Phénix  constitue 
une  usurpation  de  marque  de  fa- 
brique. P.  291. 

URUGUAY.  (V.  France.) 


VEIVEZUELA.  Fraudes  suri  0- 
rigine  et  la  qualité  des  objets.  — 
Code  pénal  de  1897,  entré  en  vi- 
gueur le  20  février  1898.  P.  158. 


ZUliULiAIVD.    Propriété   indus- 
trielle. P.  20. 


^'^ëfrr?  ' V-Wf  •• 


TABLE  CHRONOLOGIQUE 

DES  JUGEMENTS  ET  ARRÊTS 

CONÏENDS  DA.NS  LE  TOME  XLVII 


r>  • 


1804 

22  Mai.      T.  civ.  Seinb.  178 

1895 

T.  CIV.  Sbinb,  88 

T.  CIV.  Sbine,  268 

T.  CI  V.Versailles,  163 

C.  Orléans,  233 

T.  COMM.  Seine,  235 

189T 

T.  av.  Seine,  68 

T.CIV.RAMBOUILLET,d03 

T.  CIV.  Srinb,  288 

T.  CIV.  Seinb,  185 

4898 


14  Janv. 

28  Dec. 

18  Mars. 

21  Juillet. 

10  Sept, 

25  Mai. 

2S      p 

25  Juin. 

28  Dec. 

6  Janv. 

14      » 

2  Fév. 

8      » 

21  Mai. 

16  Juin. 

27      » 

26  Juillet. 

26      » 

24  Oct. 

2  Dec. 

7      » 

8     » 

16  Janv. 

20      » 

30      » 

1"  Fév. 

20  Mars. 

29      » 

11  ivril. 

2  Mai. 

3      ]» 

5  Juin. 

9      » 

28      » 

4  Juillet. 

8      » 

8      » 

22  juillet.  G.  Nancy. 

10  Nov.  T.  CIV.  Seine, 

22      »  C.  Paris, 

14  Dec.  T.  CIV.  Seine, 

14      »  C.  Amiens^ 


196 
302 
235 
246 
355 


Cass.  cr.  rej., 

97 

Cass.  civ. 

333 

T.  Veksaillks, 

103 

C.  Paris, 

268 

C.  Bordeaux, 

308 

T.  CIV.  Seine, 

260 

T.  CIV.  Nancy, 

196 

T.  CIV.  Sbinb, 

272 

C.  Paris, 

315 

Cass.  rbj., 

215 

C.  Amiens, 

333 

T.  CIV.  Aix, 

292 

C.  Douai. 

204 

1899 

Cass.  civ.,  355 

T.  COMM.  Seine,  218 

C.  Orléans,  74 

T.  coRR .  Cognac,  208 

T.  COMM.  SeiNB,  319 

C.  Rouen,  282 

C.  Paris,  260 

C.      »  68 

T.  CORR.  Lillk,  76 

C.  DuoN,  207 

Cass.  civ.,  H3S 

C.  Aix,  291 

Cass.  req.,  258 

T.  CIV.  Seine,  293 

G.  Douai,  76 


22  Janv. 
25      )» 
25      » 

29  » 

30  » 
18  Fév. 
13  Mars. 
22      » 
28      » 

9  Avril. 

9     » 

2  Juin. 
20     » 

9  Juillet. 
10      » 

12  » 

13  » 
18  » 
1«'  Août. 

2      « 

6  Nov. 

14  » 
25  » 
30      » 

7  Dec. 
28      » 


10  Janv. 
12      » 
18      » 

21  Fév. 

22  » 

23  » 
27      » 

4  Mars. 

14  » 

15  » 
25      » 
25  Avril. 
23  Mai. 
22  Juillet. 


293 
849 
102 
308 

288 
260 
280 


1900 

C.  Paris, 
T.  Epernat, 
T.  Lille, 
Cass.  req., 
G.  Paris, 
Cass., 
C.  Paris. 
T.  coRR.  Nevbrs,  212 

C.  RiOM,  158 

Cass.  rej.,  214 

C.  Douai,  333 

C.  Paris  218 

C.      »  163 

T.  St-Etibnnb  85 

C.  Paris,  178 

G.      »  160 

T.  CIV.  Seine,  326 
C.  Besançon,      •   221 

C.  Douai,  102 

C.  Paris,  319 
T.cor.St-Girons,  101 

G.  Lyon,  84 

C.  Paris,  312 

T.  CIV.  Seine,  244 

Cass.  cr.  rej.,  98 

C.  Paris,  278 

i901 

C.  Paris,  185 

Cass.  ck.,  227 

Cass.  cr.,  Hiji 

G.  Paris,  246 

G.     »  m 

Cass.  cr.,  318 

G.  Toulouse,  100 

Cass.  req.,  230 

G.  Paris,  349 

Cass.  req.,  232 

Cass.      »  229 

C.  Aix,  253 

G.  Paris,  24^ 

Cass.  kbq.,  25q 


'»«   «Wi 


TABLE  DES 


Achard.  178    Dalbi 

Agosiioi..  215   Dam. 

Andreassion.  68    Deoli 


AQieura    et  composi-  0^^^ 

(Société  des).              90  Drun 

àuleurs  composileura  ny^r, 

et  éditeurs  de  musi-  n.ifln 

que  (Société  de.),      œ  ^IJ™ 

-  KO 

Auieore  lyriques  (Soc. 

des).      '   ^      '        74  Elle. 

_  Eepin 


Barbier  (Jules). 

76 

Fabn 

Blandy  frères. 

252 

BoUson. 

96 

Fiégli 
Force 
hau 
(Soi 
Foup 
Freyd 
From 

Bcugerolle. 
Brooeiière. 
Huilier. 

1S6 

204 
158 
246 
826 

C 

Froas 

ciiiot. 

215 

Camille. 

214 

Carbure    de    calcium 

(Société  du). 

Gaz  s 

Châlillon. 

105 

Chemina   de  fer  d'Or- 

léans (Comp.  des). 

819 

Gillet 

Chedeville. 

UB 

Girau 

ChoudeDs. 

99 

Grantl 

Corabret. 

Composileur  de  mus 

i- 

que  (Soc.  aes). 

100 

ciel 

Coustructiona  mécani- 

Gross 

ques  (Soc.    Touliai 

Guillc 

sienne  des). 

'  102 

Corvabier.                  29B 
Couleursd'aDiline(Cie 

Gu;ol 

parisienne  des), 

272 

Couston. 

291 

Crié. 

Haclo) 

Cuivres   (Société    mé- 

ciéli 

tatliqne  drt). 

218 

Harm 

Paulre.  288 

Peawon.  282  Rendï. 

Perret  (Michel).  185  Riekmanii. 

Perriei'.  302  Robin. 

Perrin.  3!t  Robin  Vve. 

pharmacie  m  du    d*-  Rocher. 

partement      de      la  Rogier. 

Seine  iChambre  sjn-  Boax. 

J"-|-des).  272  Bumean. 

258 

355  , 

Is  l^ 

^  S^iabeViV 

jlS  Sancho  fr. 

^  Savine  (faillite). 

^  Sichen  Ide). 

**  Siècle  (le). 


!    Union  des  anciens  élè- 
!       ves  des  écoles  supé- 
rieures    du      com- 


i   Valen. 
S   Vieillard. 
l   Villain. 


Walch. 
;    Willame. 
'   Wolt. 


nsofl. 


1    j«K?f^ 

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