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ANNALES
DE
LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE
ABTISTIQUE,ET LITTÉRAIRE
v-::»-
IL
•• ANNALES
DS
LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE
ARTISTIQUE & LITTÉRAIRE
DE LÉGISLATION, DOCTRINE ET JURISPRUDENCE
WWLAM^fAMBWm CT ÉTRAM «ERES
BN UATIÈBE DB
Brevets d*iinr«&tioii, Xiittératiure, Théâtre, Llnsique, Beaus-Arts
DEMIHt, ■00ÈLE8, NOMS, MARQUES PE FABRIQUE ET CONCURRENCE OCLOVALK
FONDtPAR
J. PATAILLE
RÉDiat PAR MM.
E. POUnXET
Ancien bâtonnier
Avocat à la Cour d*appel
de Paris.
Conseiller à la Gonr d'appel
de Besançon.
GH. LTOH-GAEll
Membre de l'Institut
Professeur à la Faculté de Droit
de Paris.
P. MARTIN 8t-LÉON
Avocat à Chartres.
Georges MAILLARD
Avocat à la Cour d'appel de Paris.
AVBG LA COLLABOIUnON DB MM.
H. ICBSNIL»
Avocat Français
à Londres
A. MORET,
Avocat au Conseil d'État
et à la Cour de cassation.
F. METTETAL»
Avocat-Défenseur
à Hanoi.
André TAILLEFER
PRE8TAT, VAUNOIS, GOMBIER,
Manrice MAUHOURT» GamiUe DUCREUX
Avocats & la Cour d'appel de Paris.
QUARANTE-SIXIÈME ANNÉE
, TOME LXVI
PARIS
RÉDACTION, ADMINISTRATION ET ABONNEMENTS
CHEZ M. ARTHUR ROUSSEAU, ÉDITEUR
14, RUB soumoT, 14
1900
i
J
V
ANNALES
X
DE
.LA PROPRIETE INDUSTRIELLE
V.
ARTISTIQUE ET LITTÉRAIRE
Art. 4090.
Vin«i cle Bordeaux. — Ilénoiiiiiiatloii. — CliAteaii-
I^Ai-tete. — Cru Salnt-Bmllloii. — Meanres poor éirï-
Lorsque deux propriétés ont^ au mains pour pariie^ une
origine commune et que le propriétaire originaire a mis en
valeur le vin quHl y récoltait en le liurant au commerce sous
un nom déterminé, tel que Crû Larcis, les détenteurs actuels
des detix propriétés aujourd'hui distinctes, peuvent égale-
ment se réclamer de la propriété et de la jouissance d'une
dénomination qui constitue Vêlement prépondérant de leur
étampe ; ils ont aussi, à titre égal, le droit d'employer la
dénomination Château Larcis, le mot Château ^/an< devenu
une expression banale dans les exploitations vinicoles de la
Gironde ,^ et de la faire suivre du mot crû Saint -Emilion,
parce que ces expressions, en tant qu'elles désignent exac*
iement le lieu de production, sont vulgaires et nécessaires
et parce que, dans l'usage, la faveur, qui s'attache au nom
Saint-Emilion, s'étend à d'autres communes limitrophes,
notamment à celle de Saint-Laurent des Combes (1).
(1) Les deux eontettants ayant une même origine de propriété, avaient
des dndU éganx (Voir pour les partages des domaines viticoles, Poail-
let, Marq. fah., n« 410).
La Cour de Bordeaux a déjà fréquemment constaté l'usage constant du
mot Château dans le commerce des vins de Bordeaux (Voir notamment
Cass. req., 18 mai 1802, Larrieu, Ann., 98.1G^l).
Quant à l'expression crû Saint-Emilion, il appartenait à la Cour d'en
déterminer, d'après Fusage, la signification géographique (Cf. pour les
eaux minérales, Orezza, Paris, 10 août 1897, infrà, p. 21 et la note ; pour
Cognac» Cass. rej., 2 JaiUet 1888, Ann., 88.844).
— 6 —
Mais les tribunaux ont un pouvoir souverain pour ré*\
glementer des droits rivaux et notamment pour individua- ^
User chaqxce marque ou étampe en imposant à ces marques
ou étampes des signes distinctifs de nature à prévenir toute
confusion (1).
(G. de Bordeaux, 16 décembre 1897. — Raba c. Boaffard.)
Ainsi jugé sur appel d'un jugement du Tribunal civil
de Libourne du 17 avril 1896 :
La. Cour, Attendu que, dans son assignation introductiTe
d'instance, Raba avait contesté à Bouffard le droit d'employer
dans sa marque ou étampe la dénomination Château Larcis qu'il
revendiquait comme sa propriété exclusive ; que plus tard, dans
ses conclusions devant le tribunal) le dit Raba, tout en mainte-
nant sa demande principale, prit des conclusions subsidiaires qui
impliquaient la reconnaissance du droit de BouiTard» sur la dé-
nomination Larcis ; il demandait seulement que cette dénomina-
tion fût suivie du nom patronymique de Bouffard, ou de celui de
Bergey, son auteur, ou de tout autre de nature à différencier les
deux étampes ; qu'à ces conclusions, Bouffard répondit par une
demande reconventionnelle tenant à faire interdire à Raba Tu-
sage de la dénomination de Saint-Emilion ; que, finalement, Raba |
et Bouffard ont reconnu devant le tribunal et devant la Cour
qu'ils avaient des droits égaux à la dénomination de Larcis ;
Attendu, d'ailleurs, que cette reconnaissance est conforme aux
titres respectifs des parties ; qu'en effet, ces titres établissent que
les deux propriétés ont, au moins, pour partie, une origine com-
mune et que les précédents détenteurs ont mis en valeur le vin
qu'ils y récoltaient en le livrant au commerce sous le nom de cru
Larcis ; qu'ainsi Bouffard et Raba peuvent également se réclamer
de la propriété et de la jouissance d'une dénomination qui cons-
titue l'élément prépondérant de leur étampe; qu'ils ont aussi, à
titre égal, le droit de faire précéder cette dénomination du mot
Château devenu une expression banale dans les exploitations vi-
nicoles de la Gironde et de la faire suivre du mot crû Saint-Emi-
lion, parce que ces expressions, en tant qu'elles désignent exac-
tement le lieu de production, sont vulgaires et nécessaires, et
parce que, dans l'usage, la faveur qui s'attache au nom de Saint-
Emilion s'étend à d'autres communes limitrophes, notamment à
cellç de Saint-Laurent des Combes où Raba fait sa récolte ; qu'au
surplus, l'auteur dudit Raba a fait consacrer la réputation de
(1) Cf. Cass. req., 18 mai 1892, Larrieu, Ann., 98.101.
— 7 —
'on produit en participant à des récompenses pnbliques accor-
iées aux premiers crus de Saint-Emilion ;
Attendo, dès Ion, que Raba et Booffard peavent exciper des
aémes droits poar Texploitation de leur marque, mais que la
aezistence de ces droits a engendré la riTaiité des marques et
rartant l'imminence des conflits, ce qui exige une réglementation
'D justice ;
Or, attendu qn'en vertu d'une jurisprudence constante de la
C jur, cette réglementation doit avoir pour objectif Tindividualité
:e cbaqoe marque ou étampe, afin d'en assurer la paisible jouis-
sance à son détenteur ; qne cette individualité ne peut être obte-
nue qu'à Taide de signes distinctifs de nature à prévenir toute
confusion ; que vainement Booffard excipe de Tintégrité de sa
Diarqne et proteste contre Tadjonction prescrite par le tribunal ;
qo en droit, l'article 544 du Gode civil confère aux tribunaux des
poa?oirs souverains pour imposer à des droits rivaux les restric-
tions qne comporte la nécessité de les concilier en vue d'une libre
et loyale concurrence ; qu'en l'espèce, la mesure imposée par les
premiers juges est conforme à l'usage et que son utilité est d'autant
oioins contestable qu'elle aura pour effet d'introduire dans chaque
éiampe un trait de dissemblance caractéristique de son individua-
lité;
Sur les dépens :
Attendu que les premiers juges ont violé la règle de l'article 130
du Code de procédure civile en condamnant BoufTard à tous les
•lépens; qu'une répartition s'imposait, soit parce que la régle-
mentation des marques était prescrite dans un intérêt commun,
soit parce que chaque partie succombait dans sa première préten-
tion ; que l'appel de BoufTard était donc légitime sur le chef relatif
aux dépens ; qu'il convient, dès lors, d'ordonner que ces dépens,
ainsi que ceux de l'instance d'appel seront mis en masse et ré-
partis dans une proportion correspondante aux sanctions du
présent arrêt ;
Par CBS motifs, Et ceux non contraires exprimés au jugement
altaqué ; la Cour infirme ledit jugement dans la disposition rela-
tive aux dépens ; le confirme dans toutes ses dispositions et or-
donne qu'il sera exécuté en sa forme et teneur ; dit que tous les
dépens de l'instance et d'appel seront mis en masse et supportés
un tiers par Raba et deux tiers par BoufTard ; fait mainlevée de
l'amende. '
!•* chambre. — M. Delcurrou, premier président. —
M. RiBET, avocat général.— M" de Sêze et Roy de Glotte.
avocats.
— 8 —
Art. 4091.
rvom de localité. » Eau de Vicli:^. » C^Miearrenec
licite. — Absence de conAuiion.
iV'a pas commis de concurrence illicite le débitant grui,
sur une demande d'eau de Vichy, a livré des eaux prove-
nant non de Vichy même, mais du bassin de Vichy ^ s* il a
averti Vacheteur que les bouteilles livrées renfermaient de
Veau des sources Larbaud St-Yorre et Guerrier et si Vache^
teur a eu toutes facilités pour distinguer ces sources de
celles de Vichy (1).
(C. de cass., req., 12 décembre 1898. — Cîoinimgnie fermière
de Vichy e, Varinard.)
(1) Le tribunal civil de la Seine a jugé, le 8 mai 1894 (Ann., 95,5) :
que, « 8*il serait excessif de faire défense à la Vve Larbaud (et à Guer-
rier)» dont la source jaillit à St-Yorre, dans le canton de Vichy, d'em-
ployer d'une manière quelconque le nom de Vichy sur ses étiquettes et
sur ses capsules, toufefois Tabus qu*elle fait de ce nom,crée dans le po-
blic une confusion regrettable, de nature à faire croire que sa source
émerge à Vichy môme et porte ainsi atteinte aux droits incontestables
que TËtat et la Compagnie fermière ont acquis par la célébrité immômo-
riale de:; sources qui jaillissent à Vicliy ; que, dans ces circonstances,
il est nécessaire de décider que, si la Vve Larbaud (ou Guerrier) veut
continuer à se servir du mot de Vichy pour donner à son eau un nom
générique, elle devra adopter la formule suivante qui ne prêtera plus à
l*équivoque : Eau minérale naturelle du bassin de Vichy, source Lat^
baud, St'Yorre près Vichy et faire suivre sur ses capsules le nom de
St-Yorre des mots près Vichy. »
Il semblait résulter clairement de cette décision que les eaux de
Vve Larbaud et de Guerrier ne pouvaient être vendues comme eaux de
Vichy, donc ne pouvaient être livrées à qui demandait de Teau de Vi-
chy. C'est ainsi que Pavait interprétée le tribunal de commerce de Lyon
dans son jugement du 26 juin 1896 {Ann., 96.340).
La Cour de Lyon a jugé, en fait, que, dans l'espèce Varinard, il ne
pouvait y avoir confusion pour Tacheteur et que le débitant n*avait pas
commis de faute. C'était une appréciation souveraine qui échappait au
contrôle de la Cour de cassation.
De même, tandis que la Cour de Lyon jugeait que la Société Montrond
ne pouvait se servir, pour la vente et fannonce de son eau de Cristal-
Montrond, du nom de St-Galmier qu'en sous-titre, sous la forme ean-
Ion de St-Galmier^ ces mots étant imprimés ou disposés en caractères
de même grosseur, de même couleur, corps et nature, les caractères
n'excédant pas le dixième, en tout sens, des dimensions, grosseurs ou
corps de ceux du nom de Teau mise en vente (Lyon, 10 décembre 1895,
Ann.y 95.328), la Cour de cassation rejetait le pourvoi formé contre
Farrêt de la Cour de Paris, du 29 juillet 1892, qui avait décidé qu'un
débitant qui avait livré, à qui lui demandait de l'eau de St-Galmier, l'eau
de la source Cristal -Champagne, canton de St-Galmier, n'avait provoqué
aucune confusion et, par conséquent, pas commis de concurrence dé-
t'i
-■ 't'
j y.uMa qu'il est coDStaté par l'arrêt attaqué que, lors de la
: -a qui est ToccasioD du litige, il a été dit k l'acheteur, sur la
|i:::uideqa'il faisait d'eau de Vichy, que les bouletllesqui lui
PrueoioDrertes reafermaientde l'eau dessources Larbaud,St-Yorre
'juerrier et qu« celui-ci a en, au moment où le débitant lui s
^^nléle3 boateiltes, toutes facilités de les distinguer de celles
'■'- met en vente la Compagnie fermière de Vichy ; que la Cour
! lUcon ^pu, sans contrevenir à aucune loi, décider à raison
-ibiludes anciennes de langage entre détaillants elconsomma-
' ■■-^,que Varinard ne s'était pas fait l'intermédiaire d'une con-
'-ence déloyale et préjudiciable à la Compagnie fermière de
p-ti7«D livrant, dans les circonstances susrelevéea, des eaux
1 -"^ïenaiit de sources surpssant, non h la vérité sur ie sol même
I -:Ucommnne de Vichy, mais dans une commune qui fait partie
'- ce que l'on dénomme coutumièrement bassin de Vichy ; que
i^emble des constatations et appréciations de la Cour d'appel
I --i<leaieQt,chez le Tendeur,une intention illicite et, pour Tache-
-^''iDne confusion entre les produits dilTérents, justifie pleine-
I ^ift II décision, qui d'ailleurs n'est pas contraire aux princi-
I ^ vi régissent la choie jugée et se trouve surasammeat mo-
I P>» os MOTirs, Riyette.
Chambre des reqaètes. — M. Takon, président. —
''*!- DiNis, rapporteur; Mkicot, avocat général (concl.
ml]. — M» SiBATiBB, avocat.
■■.'île [Cm», civ., 7 novembre 1896, Ann., 96.SH).
" it'j a évidemment pas U de contradiction juridique ; maii, en tait,
iççlieation des arrâta qui constatent l'abus du nom de localité sur les
' WUa et le prOBCriveot se trouve paralysËe, car si le débitant peut
-iiiintier à vendra sodb le nom d'eau de Vichy ou d'eau de Sl-Galmier,
''^oint quelques précaotioas illusoires, des eaai qai n'ont pas le
"'^'1 i ces dénominalions, la modiflcation àea éliquelles, ordonnée par
^ iribuavii, n'aura rien changé à ta liluallon et lea produits litigieni
f olinaïroot à s'écouler sous des noms itiiaites.
'^Iribaoaux se sont montrés plus sévères, Ajuste titre, lorsqu'ils ont
'■^t^rdil de vendre sons le nom de Picon, un amer qui ne provenait pas
'''- '> aulson Picon et Cie, bien que le produit versé au client, qui de-
"■Jndsii on ^can, lût eonlena dans une bouteille revêtue d'une éliquelle
'fjciiirisUque qai ne ressemblai! en rien à celle de la Société Picon cl
'■>■ it. de pMis, 10 mus 188S, An»., 96.278). G. M.
— 10 —
Art. 4092.
rVoms de localités. — Confltarefl de Bar. —
Conenrrence Illicite.
La ville de Bar-le-Duc, s'étant acquis une réputation
méritée par la façon spéciale dont elle fabrique la confia
ture de groseille, les termes confitures de Bar-le-Duc dé-
signent non pas un produit fabriqué au moyen de tel pro-
cédé tombé dans le domaine public, mais bien un produit
originaire de Bar-le-Duc ; il ne saurait donc être permis
que des confitures pltAs ou moins semblables, mais fabri^
quées ailleurs, puissent être vendues sous ce nom (1).
Alors même qu*il serait établi que depuis un temps plus
ou moins long les confiseurs de Ligny {localité à environ
quatre lieues de Bar-le-Duc) ont qualifié leurs produits
de confitures de Bar, cette habitude constituerait, de leur
part, un abus contre lequel les confiseurs de Bar-le-Duc
n'ont point, par leur tolérance plus ou moins large, renonce
à revendiquer la propriété imprescriptible de cette déno-
mination et un abus ne saurait justifier un autre abus (2).
(1) Cf., pour les vins de Champagne, Ann., 96. 154, 160 et les notes.
(2) On admet ordinairement qu'un nom de localité peut tomber daas
le domaine public s'il est devenu une désignation générique, telle
qu'eau de Cologne, savon de Windsor (Voir Pouillet,Mar9 . /aô., n» 411).
Mais ce sont des exemples pris dans le passé, qui remontent à une épo-
que où la protection des noms de localités n'était pas organisée comme
elle l'est aujourd'hui et dans lesquels il y a eu, dès longtemps, par suite
des circonstances spéciales, une véritable incorporation du nom an pro-
duit indépendamment de toute idée de provenance. L'abandon des noms
de localités sera désormais beaucoup plus rare, la tendance des tribunaux
à les protéger, bien que les intéressés aient' laissé passer de nombreux
abus, s'accentue manifestement. L'Arrangement de Madrid, dans son
article 4, dit que les appellations régionales de provenance des produits
vinicoles ne pourront être privées de protection, à raison de leur carac*
tère générique ; sans aucun doute, les effets de cette disposition se
feront sentir sur la jurisprudence française (Voir pour l'article 4 de
l'Arrangement de Madrid, Paris, 18 novembre 1892, Syndicats du com-
merce des vins de Champagne c, Chapin et Cie, Ann.,96.154 ; pour l'ar-
ticle 3 dudit Arrangement, trib. comm.Marseille, 4 février 1896,2e Droit,
11 avril). Déjà l'arrêt que nous rapportons, qui est antérieur à TArran-
gement de Madrid déclare, dans une espèce où il s'agit de produits fa-
briqués avec des fruits, les groseilles, qui tiennent leurs qualités du ter-
roir, que le nom de la localité pour désigner ces produits est impres-
criptible.
On retroave aussi dans le Jugement confirmé par la Coor, cette règle
déjà posée dans les décisions relatives aux vins de Champagne qn'nn
-12 —
ce nom sur leara produits constitue de leur part une concurrence
illicite;
Attendu que pour répondre à cette demande, Gellyet Vîcherat
prétendent que le nom d'une localité, simple expression géogra-
phique, peut être employé avec un droit égal par tous ceux qui ont
intérêt à dénommer ainsi, dans des circonstances identiques, des
productions émanant d'une certaine région ; qu'en Tespèce la
dénomination confitures de Bar-le-lhic, désigne une préparation
spéciale des fruits percrus dans la vallée de TOrnain et que les
fruits employés par eux sont récoltés aux mêmes lieux d'origine
que ceux employés par les demandeurs, fait dont ils offrent de
faire la preuve ; que suivant eux, le secret de cette fabrication est
de temps immémorial dans le domaine public, et que depnîs
nombre d'années des confitures ont été préparées dans les com-
munes avoisinantes de Bar-le-Duc, sans aucune protestation des
habitants de cette ville ;
Considérant que la liberté du commerce, invoquée par les dé*
fondeurs doit avoir pour limite,sans parler des contrats, la loyauté
et le respect des droits d'autrui ;
Considérant que la dénomination d'un produit est avant tont
la garantie du consommateur, et qu^il importe que celui-ci ne
puisse être trompé sur la provenance de la marchandise, ni sur
son lieu d'origine et son lieu de fabrication :
Attendu que la ville de Bar-le-Duc s'est acquis une réputation
méritée de la façon spéciale dont elle fabrique la confiture de
groseille ;
Qu'un tel renom est pour la ville une véritable propriété ;
Considérant qu'il ne saurait être permis que des confitures plus
ou moins semblables mais fabriquées ailleurs puissent être con-
fondues avec celles de Bar-le-Duc de manière à porter préjudice
aux habitants de cette ville ;
Considérant que la qualité des confitures de Bar-le-Duc ne tient
pas seulement àTart plus ou moins habile avec lequel elles sont
fabriquées, mais surtout à la nature du sol qui porte les fruits qui
en sont la base et que l'on appelle « le terroir » ;
Attendu qu'il importe peu que certains confiseurs de Bar-le-Duc
puissent faire entrer dans la composition de leurs produits des
groseilles achetées ailleurs que sur le territoire de cette ville ;
Qu'un abus ne saurait en justifier un autre ;
Attendu que les termes Confitures de Bar-le-Duc ne désignent
donc pas un produit fabriqué au moyen de tel procédé, qui doit
être tombé dans le domaine public, mais bien un art originaire de
Bar-le-Duc ;
Attendu dès lors que la dénomination de ConfituresdeBar-le-Duc
us 9ar le marcbe poDUc de ttar-ie-uac, soit aana aes locaiiMi
(oùtaM de Bar, et qu'ils offrent d'en faire la preuve ;
K* w fw eoiuxme cette preuve :
Attendo qu'en admettant qu'ils la fissent, Gelly et Vicherat n'é-
Ubbnient qu'ooe chose à lafoir que dans le passé, les confitures
ip'ils ont faites ont bien été fabriquées en partie avec des ^ro-
stilles de Bar-le-Doc sans que rien pronvAt qa'h l'avenir ils ne
pDBsent tirer laurs fruits soit de Ligny soit d'ailleurs ;
Attendu qne, dès lors, la dite preuve ne saurait avoir raison
d'être qu'au sqj^t des dommages el intérêts, pour rétablissement
doqueb le tribunal a tous les éléments nécessaires, sa religion
étiot soffisammeiit éclaira par le fait de la cause ;
AttendB qu'en raison de leur situation géographique, il est
pirTutement admissible que les habitants de Lîgny puissant
icbetcr des groseilles de Bar-le-Ouc pour en faire des confitures,
mais que cela ne peut leur donner que le ^oit d'appeler ces
unfitures Confitures de groteiUet de Bar-le-Due et non Con/Uum
de Bar-ie-Due ;
Attendu que la tolérance pins on moins large des habitants da
Sv-le-Duc ne pent leur être opposée par une fin de non-recevoir,
leur revendication portant sur nne dénomination qui est leur pro-
priété imprescriptible :
Que Gelly et Vicherat ne sauraient d'ailleurs prétendre que
c'est de bonne foi qn'ils font usage de la même dénomination ;
Qe'en effet ils ont soin de supprimer sur leurs bolteset sur leurs
pots de confiture leurs noms et leurs adresses qai cependant llgu-
nui plus oa moins exactement sur tous les antres imprimés ;
Attendn que le soin même et la configuratiou de leurs vi^net*
tn ont pour but de faire croire à celui qai reçoit leurs produits en
deraière analjse, c'est-à-dire au consommateur, qu'ils proviennent
it Bar-le-Dac ;
S« ee gui concerne les dommages-mtirtts :
Atteoda que Harlier et les antres demandeurs ne font preuve
d'iBcan dommage ;
Qa'ils ont eux-mêmes vendu & Getty et Vicherat pour les re-
'endre sons leur couvert des confitures venues de Bar-le-Duc ;
En et gui concerne l'enseigne :
Attendo que les mots eonflturti de groseilles apposés sur l'en-
leigae de la maison sise k Lagny ne sauraient apporter dans
l'srçtitda client ancone confusion sur le lieu de fabrication.
Pas ces voim, Dit qu'il s'y a pas lieu pour Gelly et Vieberat d*
— 14 —
faire a preuve offerte par eux ; dit que c'est sans droit qu'ils qua-
lifient leurs produits de confitures de Bar-le-Diic; leur fait défense
d'apposer à l'ayenir les mots confitures de fiar-le-Duc sur les enve-
loppes, boîtes ou flacons généralement quelconques contenant ces
produits ;
Les autorise à se servir des mots confitures de groseilles de Bar-
le-Duc sur les enveloppes à la condition que le moi confitures sera
écrit ou imprimé d'une certaine façon et que les mots groseilles
de Bar-le-Duc seront composés en caractères différents de ceux du
mot confitures mais identiques entre eux ;
Ordonne que sur les dites enveloppes ainsi que sur leurs fac-
tures^ étiquettes^ vignettes, en-têtes de lettres,annonces,prospectus
et généralement sur tous leurs imprimés à côté et à la suite des
mots confitures de groseilles de Bar^le-Duc devront toujours Qgurer
soit la raison de commerce de Gelly-Aubriot d'une part ou de Vi-
cherat de l'autre accompagnée de leur adresse à Ligny-en-Barrois,
soit les mots fabriques à Ligny-en-Barrois, le tout en caractères au
moins aussi apparents que les mots groseilles de Bar-le-Duc ;
Autorise, sur l'enseigne seulement, la non-juxtaposition de l'a-
dresse de Gelly et Vicherat aux mots confitures de groseilles de
Bar-le-Duc ;
Dit que faute par les défendeurs de se conformer aux prescrip-
tions susénoncées, ils auront à payer pour chaque contravention
^ui serait constatée, 50 francs à titre de dommages-intérêts, etc.
Arrêt confirmatif du 29 avril 1890 en ces termes :
La Goub, Adoptant les motifs des premiers juges :
Attendu que les faits articulés par les appelants ne sont ni per-
tinents ni admissibles et qu'ils sont dès à présent démentis par les
faits de la cause et les documents du procès ;
Attendu, d'ailleurs,qu'alors même qu'il serait établi que depuis
un temps plus ou moins long, les confiseurs de Ligny ont quali-
fié leurs produits de confitures de Bar-le-Duc cette habitude cons-
tituerait de leur part un abus contre lequel les intimés ont le droit
de protester et qu'ils ont intérêt à faire disparaître dans l'avenir,
tant pour protéger leur propre fabrication que pour prévenir le
public qui s'adresse à leurs produits, contre les dangers de cette
qualification erronée, et la persistance intéressée qu'ils mettent à
dissimuler leliei^ de fabrication qui est la ville de Ligny.
Par ces motifs, Rejette les appels comme mal fondés.
G. de Nancy. — M. Angénodx, président. —M. Obrin,
avocat général.— M*' Paul Lombard et Larcher, avocats.
-15 —
Art. 4093.
Ban WMÈÈËÈépmÈ&m. — Noms de loe»lltM» — CkMiewr^
reMM déloyale. ~ Vieliy du Midi.
Ul lai du i8 juillet 18i4 n'étant pas applicable aux pro-
duit$ naturels et, par suite, aux eaux minérales, l'usurpa-
tion d^un nom de localité pour une eau minérale ne peut
faire Fobjet que d'une action en concurrence déloyale (1).
Il y a concurrence déloyale, pour une société d'eaux mi-
nérales {la Société des eaux du Boulou), à revêtir ses bou-
teilles d'étiquettes portant en vedette une désignation sus-
ceptible de tromper l'acheteur peu éclairé ou peu attentif
{telle que Vichy du Midi) et à exalter dans ses réclames
feau dont elle est propriétaire, au détriment d'autres eaux
(les eaux de Vichy) ; il n'appartient pas au tribunal de
prescrire dans quelle mesure et sous quelle forme il serait
licite d'invoquer sur les étiquettes et dans les réclames Va-
nalogie que présenterait l'eau mise en vente avec les eatuc
iimilaires antérieurement réputées (2).
(C. d'Àix, 11 jaiiTier 1898. — Compagnie fermière de rétablissement
thermal de Vichy c. la Société des eaux du Boalou et Frère.)
Le Tribunal civil de Marseille, sous la présidence de
M. DuMON, avait, le 15 janvier 1897, rendu le jugement dont
la teneur suit :
Lb Tribunal, Attendu que la Compagnie des Eaux de Vichy
impote à la Société des Eaux du Boulou une imitation frauduleuse
àt marque, une usurpation de nom et plus généralement une con-
cnrrence déloyale ;
Sur rimitation frauduleuse de marque :
Attendu qu'il existe entre les étiquettes de la Compagnie de
Vichy et celles de la Compagnie défenderesse, d'autres ressem-
blances que celles tirées d*éléments nécessairement communs à
toutes les étiquettes du même genre, éléments qui étant dans le
(1) V. Paris, i9jain 1883, Sazlehner, Ann., 88.187, pour le refus d'ap-
piiqaer la loi du 38 juillet 1824 aux eaux minérales. Voir dans le même
sens: Maunonry, Le nom eommereial, p. 372. M. Pouillet, dans la 4« édi-
tion do Traité de$ marquei de fabrique, semble disposé à se rallier à
cette opinion.
(2) Quiconque n'a pas droit h un nom commercial on à un nom de
localité ne peut légitimer l'usage de ce nom en ajoutant un autre nom
oa UM autre expression (V. PouiUet, Marq, fab., n«4i6 et s.).
G. M.
— 16 —
domaine public n^offrent aucun des traits distinctifs de la marque
dont la Compagnie de Vichy est propriétaire ;
Attendu qu'une seule particularité des étiquettes de la Société
du Boulou mérite de fixer Tattention, c'est l'inscription sur une
▼ignette en forme de banderolle flottante des mots a Vichy du
Midi » figurant comme devise en demi-caractères, au-dessus du
nom très apparent du Boulou qui occupe le centre de Tétiquette ;
Attendu qu'avant d'examiner si cette inscription constitue une
usurpation de nom il est d'abord certain qu'elle ne peut constituer
une imitation de marque : parce que le nom ne peut être protégé
comme marque, qu'en tant qu'il revêt une forme distinctive sous
laquelle il est matérialisé, et qu'il n'existe aucune similitude entre
le mot « Vichy » imprimé sur les étiquettes de l'une des parties et
le même mot imprimé sur les étiquettes de l'autre ;
Attendu que ni dans l'ensemble, ni dans le détail des étiquettes
de la Société du Boulou, il n'est possible de découvrir une imita-
tion quelconque de la marque déposée et que la loi de 1857 se
trouve dès lors sans application ;
Sur Cmurpation de nom :
Attendu que le nom, abstraction faite de la figure sous laquelle
il se présente^ n'est protégé par la loi de 1824 que lorsqu'il s'agit
d'un nom de fabricant ou de lieu de fabrication et que ce nom a
été usurpé par fausse application sur un objet fabriqué ;
Attendu que cette loi étant une loi pénale puisqu'elle érige en
délit un cas spécial de concurrence déloyale, ne peut être étendue
au delà de ses termes qui excluent les produits naturels et par
suite les eaux minérales, produit spontané de la nature livré aux
consommateurs sans préparation, altération ni modification quel-
conque due au travail de l'homme ;
Attendu que le délit d'usurpation de nom ne pouvant pas sub-
sister il ne peut exister qu'un fait dommageable susceptible d'en-
gendrer une action en dommages-intérêts et rentrant dans la caté-
gorie des faits variés, embrassés par la dénomination commune de
concurrence déloyale ;
Sur les faits de concurrence déloyale :
Attendu que la compagnie demanderesse prétend découvrir
une concurrence déloyale, non seulement dans l'emploi delade-
Tise « Vichy du Midi » adoptée par la Compagnie du Boulou sur
ses étiquettes, mais encore dans les moyens de propagande à l'aide
desquels elle a cherché à vulgariser l'usage de ses eaux en les
comparant à celles de Vichy, moyens ayant consisté en prospectus,
affiches, notices, annonces, réclames et inscriptions de tout genre
dans les journaux, brochures, livrets de chemin de fer et autres
publications périodiques ;
Attendu que l'emploi de tous ces moyens pour solliciter la fa-
— 17 —
Teur du public rentre dans Texercice absolu du droit de toat com-
merçant et plus généralement de quiconque pour procurer un dé-
bouché à. ses produits s'efforce de les faire connaître : Téloge même
exagéré du produit offert ne devient une faute que lorsque la li-
mite séparant la vérité du mensonge a été franchie et lorsqu'il y
a eu dénigrement prémédité d'un produit rival ;
Attendu que toutes les publications faites parla Compagnie du
Boulon ont tendu, non à rabaisser le mérite des eaux de Vichj,
mais au contraire à l'exalter pour fonder le mérite de leurs pro-
pres eaux sur la similitude qu'elles offrent avec ces eaux célèbres,
soit au point de vue de l'analyse chimique, soit au point de vue
deïi applications thérapeutiques qui en peuvent être faites,analogie
d'ailleurs établie par des autorités médicales incontestées et
concordantes dont les citations constituent le fond môme des
publications incriminées;
Attendu que de pareils moyens de propagande sont parfaitement
It^times et n'ont été critiqués que sous prétexte de citations in-
complètes ; mais on ne peut exiger que des extraits destinés à des
annonces^réclames entrent dans les développements des revues
médicales ; il suffit que le sens des auteurs n'ait pas été substan-
tiellecnent et intentionnellement faussé ;
Attendu que les insertions du Boulou, en signalant les remar-
quables analogies de composition chimique avec Vichy, ont omis
de faire remarquer la présence de l'oxyde de cuivre parmi les
éléments de certaines de leurs sources, omission dont la com-
pagnie demanderesse leur fait notamment grief;
Mais cette omision ne parait offrir rien de répréhensible, les an-
nonces dans leur brièveté nécessaire ne pouvaient entrer dans tous
les détails et il n'apparaît pas,en remontant aux auteurs cités,que
la présence dece métal à dose infinitésimale ait été observée comme
un danger ni même comme une cause de faveur ou d'infériorité';
Attendu qu'il ne reste donc comme grief, au point, de vue de la
concurrence déloyale, que la devise Vichy du Midi mise en ban-
derolle sur les étiquettes ;
Attendu qu'il est à observer d'abord que la devise incriminée
n'est pas le fruit de l'imagination des défendeurs, elle a été em-
pruntée à une étude approfondie du docteur Béchamp qui, après
avoir mis en relief l'analogie des eaux du Boulou avec celles de
Vichy, résume son opinion sous cette formule concise que Boulou
est le Vichy du Midi ;
Attendu qu'employée comme indication de la nature des eauxet
de leurs effets, la formule adoptée par la compagnie défenderesse
est à la fois exacte et parfaitement innocente, et il n'y a aucune
raison de croire que l'administration du Boulou Tait choisie dans
no but différent, celui de créer à son profit une confusion dans
2
— 18-
Tespril des acheteurs ; les mots Boulou en gros caractère au centre
des étiquettes et ceux-ci <c Pyrénées-Orientales » répétés sur les
côtés, démentent cette supposition et doivent rendre la confusion
sinon absolument impossible, du moins tout à fait rare ;
Attendu qu'en tout cas la bonne foi des défendeurs parait sauve,
car s'ils ont voulu faire valoir les qualités intrinsèques de leurs
eaux, en les proclamant d'autant plus précieuses qu'elles se rap-
prochent davantage de celles de Vichy dont la réputation est de-
puis si longtemps acquise, ce moyen de succès n'est pas le fait
d'usurper une renommée en s'appropriant injustement la noto-
riété d'autrui ;
Attendu qu'on peut concevoir néanmoins à la rigueur que la
Compagnie fermière justement jalouse du nom de Vichy ait vu,
avec ombrage la devise Vichy du Midi parce que, isolée de tout
contexte, cette devise n'offre pas aux yeux du public, spécialement
au point de vue du commerce d'exportation toute la clarté qu'elle
a dans l'écrit du docteur Béchamp,et comme dans les questions de
ce genre la justice doit pencher toujours vers la clarté absolue
pour éloigner toute chance d'erreur quelque légère qu'elle soit,
il peut être donné satisfaction à la compagnie demanderesse dans
une mesure restreinte en ordonnant de substituer à la devise in-
criminée une formule qui en exprimera le sens d'une manière ex-
plicite et sans équivoque possible ;
Attendu que les demandeurs ne justifient pas d'un préjudice
actuel et réalisé ; qu'il s'agit tout au plus de les prémunir contre
un préjudice éventuel et hypothétique pour l'avenir ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de leur allouer des dommages-inté-
térêts ;
Attendu que les motifs qui précèdent exonèrent suffisamment
la responsabilité du sieur Frère, entrepositaire défendeur au
procès qui doit être mis hors de cause ;
Sur les fins reconventionnelles de la Compagnie du Boulou :
Attendu que le procès s'e.st engagé à la suite de saisies prati-
quées en vertu d'ordonnance sur requête visant l'article 17 de la
loi de 1857 ;
Attendu que lorsqu'un demandeur en contrefaçon ou imitation
frauduleuse démarque croit devoir user de cette voie rigoureuse,
il le fait à ses risques et périls ; la loi permettant même au prési-
dent d'imposer comme condition à son autorisation, un caution-
nement préalable ;
Que dans l'espèce, le délit prévu par la loi de 1857, n'existant
pas, mais que de plus,en supposant que la Compagnie de Vichy se
soit fait illusion sur son droit, il est une circonstance de la cause
qu'elle n'ignorait pas et qui lui commandait l'abstention de cette
mesure ; c'est que depuis 1882, c'est-à-dire depuis la création
— 19 —
même des étiquettes incriminées, elle n'a pas cessé de recevoir
chez ses entrepositaires et de débiter au public concurremment
avec ses propres bouteilles, celles de la Compagnie du Boulou et
qa'ajant sous main tous les écbantilons nécessaires, pour les be-
soins de sa cause, la saisie était superflue ;
Attendo que néanmoins l'importance du préjudice souffert par
la Société du Boulon par cette procédure vexatoire n'est pas dé-
montré et qu'il suffira d'en tenir compte dans le règlement des
dépens;
Sw/ès dépens :
Attenda que la satisfaction limitée accordée aux demandeurs
etledébontement du surplus de leurs conclusions, la mise hors
decaase de Frère et le fait des saisies abusives sont les trois élé-
ments à mettre en balance pour l'équitable répartition des dé-
p«ns;
Put CES MOTiFSy Ayant tel égard que de raison à la demande vis-
Hs de la Compagnie du fioulou;
Ordonne que cette société sera tenue de supprimer la devise
\'kkidu Iftdt figarant sur ses étiquettes ; sauf à substituer si elle
>âJ3ge àproposla formule suivante : « L'analyse chimique a dé-
montré que la composition de cette eau offre la plus grande ana-
:ieaTec celle des eaux de Vichy » ou toute autre formule équi-
■i*nte ;
Déboute la compagnie demanderesse de toutes autres fins et
::>rtclasions, tant vis-à-vis de la Compagnie du Boulou que vis-à-
".: de Prére ;
^ les lins reconventionnelles :
Dit n'y avoir lieu d'accorder d'autres dommages-intérêts
]j Qoe part des dépens ;
^ les dépens :
Uisseà la charge de la Compagnie fermière de Vichy, tous les
^19 occasionnés par la saisie;
^îit masse du surplus des dépens y compris ceux occasionnés
r^ia qualité de Frère, pour être supportés savoir: deux tiers
^r la Compagnie de Vichy et un tiers par la Société du Boulou.
Sur appel de la Compagnie fermière de Vichy, la Cour
'Ail, sous la présidence de M. le premier président Mi-
-"blJaffard, après plaidoiries de MMIolland (du barreau
-£ Marseille) aide M® Michel Pelletier (du barreau de Paris)
' staUié en ces termes :
^nsidérant que les premiers juges ont sainement apprécié en
-^^taoce les faits de la cause et leur ont fait une exacte appli-
^toa des principes qui régissent la matière ;
— 20 —
*
Qu'effectivement en se donnant la dénomination de Vichy du
Midi la Société des Eaux de Bouloa n'a ni contrefait les produits
de la Compagnie fermière de rétablissement thermal de Vichy,
ni commis le délit d'usurpation de nom prévu et réprimé par la
loi du 28 juillet 1824, laquelle ne concerne point les produits na-
turels auxquels la main de l'homme n'a fait subir aucune espèce
de transformation ou de modification ;
Que cette société a purement accompli, an sens légal du mot,
un acte de concurrence déloyale par ce fait qu'elle a apposé en
vedette sur les étiquettes dont elle revêt ses bouteilles d'eau mi-
nérale, une désignation susceptible de tromper l'acheteur pea
attentif, et exalté dans ses réclames, l'eau dont elle est proprié-
taire, an détriment des eaux de Vichy ;
Que c'est à bon droit par conséquent qae le Tribunal civil de
Marseille a ordonné la suppression de la devise sus-meation-
née ;
Qu'au surplus cette partie du jugement dont les intimés ne
relèvent pas appel incident et qui profite à la compagnie appelante,
a acquis l'autorité de la chose jugée et échapperait dès lors à la
censure de la Cour ;
Mais que, par contre, les magistrats du premier degré sont
sortis de leurs attributions et ont d'ailleurs statué sur chose non
demandée lorsqu'ils ont cru devoir autoriser expressément la
Société des Eaux du Boulou à substituer a l'appellation litigieuse,
une formule déterminée ayant pour but d'apprendre aux con-
sommateurs qu'il existait u la plus grande analogie entre la com~
position de son eau et celle des eaux de Yichy » ou toute autre for-
mule équivalente ;
Que sans nul doute, il leur était permis à titre, soit de con-
sidération, soit d'exemple, d'observer dans leurs motifs que si
la société défenderesse s'était bornée à faire discrètement figu-
rer sur ses étiquettes et prospectus une indication de cette na-
ture, écrite en caractères peu apparents, où le nom de Vichy
n'eut pas été intentionnellement mis en relief, elle n'aurait ma-
nifestement pas commis un acte répréhensibie ;
Mais qu'ils ne pouvaient s'approprier eux-mêmes une semblable
affirmation et lui donner, en l'insérant dans le dispositif de leur
jugement la consécration de l'autorité qui s'attache à toute dé-
décision judiciaire ;
Qu'en agissant ainsi, ils ont procédé par voie de règlement et
outrepassé leurs pouvoirs ;
Qu'il y a lieu de supprimer à raison de son illégalité, cette par-
tie de leur sentence ;
Sur les dépens :
Considérant que chacune des deax parties en cause succom«
— 22 -
(C. de Paris, 40 août 1897. — Vve Piatîer et Lui
et préfet de la Corse c. Monplot.)
Le Tribunal de la Seine avait rendu , le 18 décembre
1895, un jugement ainsi conçu :
Le Tribcnal, Attendu que par son action principale en dom-
mages-intérêts pour concurrence déloyale, Piatier demandait
notamment que les dispositions de Tarrêt de la Cour d'Âix du
21 juillet i880, rendu entre Arger, auteur de Piatier, d'une part, et
nom d'Orezza, qui n'est pi as une désignation géographique en usage
(Ann., 95.25).
La Cour d'Âix, dans son arrêt du 21 juillet 1880, permettait, pour d*aa-
tres sources que la source départementale dont les produits avaient été
connus les premiers sous le nom d'eaux d'Orezza, notamment ponr la
source dite Tascovafa, aujourd'hui source Colomba, l'usage du nom d*0*
rezza, mais seulement sous la forme vallée cTOrezza^ ces roots étant en
caractères deux fois moindres que le nom de la source. Il est intéres-
sant de rapporter ici le texte de Tarrét :
« La Cour, Attendu que sans qu'il soit nécessaire de recourir à une
enquête, il est déjà constant pour la Cour :
i® Qu'il existe en Corse une vallée qui porte le nom de vallée d*Orezza •
2* Qu'il coule dans cette vallée une source principale, connue sous le
nom de fontaine d'Orezza, sans qu'on puisse dire si c'est la source qai
a donné son nom à la vallée, ou U vallée qui a donné le sien à la source -
« Attendu que tous les documents du procès établissent quecette source
d'Orezza avec son eau et son nom a été de tout temps la propriété priva*
tive du département de la Corse, ou de ceux qu'il s'est substitués ;
« Que cela résulte d'une possession jusqu'à ce jour inctntestée, de la
concession faite à Valéry en 1856, du décret qui déclare la source d'u-
tilité publique, du dépôt que les concessionnaires actuels ont fait de leur
marque de fabrique au greffe du tribunal de commerce compétent;
« Attendu qu'en cet état de choses, il n'est permis à personne de rien
faire qui soit de nature à amoindrir les avantages que le propriétaire de
la source d'Orezza peut retirer de son eau ou du nom sous lequel elle
est connue;
« Attendu cependant que dans ces derniers temps, Nicolaf et Amonld,
propriétaires de deux autres sources coulant aussi dans la vallée d'0«
rezza et portant l'une le nom de source Piane, et l'autre celui de source
Tascovata, ont mis dans le commerce l'eau provenant de ces sources
à l'aide d'étiquettes et d'affiches qui pouvaient la faire confondre avec
l'eau de la fontaine d'Orezza ;
« Qu'ainsi leurs bouteilles ressemblent à celles des propriétaires de la
source d'Orezza par leur forme, par leur couleur, par la capsule qui les
bouche, par le nombre, la dimension, la division de leurs étiquettes :
en un mot par un ensemble de ressemblances qui sont de nature à trom-
per tout acheteur illettré ou inattentif;
« Attendu que le fait d'Arnould et de Nicolaï a nécessairement caoaé
un préjudice à la Société des eaux d'Orezza ; qu'il est juste de réparer,
et qu'il importe surtout de prendre des mesures pour qu'il ne se renou-
velle pas à l'avenir ;
« Attendu que c'est dans ce but quç tout en autorisant Amould et Ni-
colaï à indiquer la provenance de leur eau qui natt dans la vallée d'O-
I
— 23 —
.Nicolaî et ArDould qai réexpioitaient, à cette époque, la source
dite Tascovata, d'autre part, fassent déclarées opposables à Mon-
plot, comme constituant à son égard la chose jugée ;
reiza, il couYient de préciser eiactement l'appellation dont ils pourront
se serrir afin qnUI n*y ait plus à Ta venir de confusion possible entre
cette eao et celle de la source d'Orezza proprement dite ;
c La coor ayant tel égard que de raison aux conclusions des parties,
metrappellation et ce dont est appel au néant, émendant :
c Dît que la source connue sous le nom de fontaine d'Orezza, et qui est
uplmtée par la Société des eaux d'Orezz», est avec son eau et avec son
Qom la propriété privative du département de la Corse ou de ceux qui
le représentent ;
■ Dit qu'AmooId et Nicolaî ont commis une usurpation sur ce droit de
propriété en vendant, dans les conditions où ils l'ont vendue, Teau de
leurs sources de Piane et de Tascovata et en réparation du préjudice
par eux causé les condamne solidairement à payer à la Société d'Orezza
one somme de 500 francs à titre de dommages-intérêts ;
I Valide les saisies faites par Camain huissier, suivant les procès-ver-
baax en date du 4 août 1879, et les autres en date du 17 septembre
tairant, enregistrés, et ordonne la remise des objets saisis aux mains de
U Société d'Orezza ;
« Dit qu*à Pavenir les bouteilles dans lesquelles Nicola! et Ârnould ven-
àfont les eaux de leurs sources, ne pourront porter qu'une seule éti-
qoette en papier entièrement blanc, ne recouvrant que la moitié du
toar de la bouteille, n'ayant aucune banderolle rouge, et portant en ca-
ractères saillants le nom de la source ou des sources d'où les eaux pro-
neonent;
6 Autorise Arnould et Nicolaî à indiquer sur ces étiquettes, sur leurs
prospectus et sur leurs affiches, la situation géographique de leurs sour-
ces par ces mots VcUlée (fOrezza qui seront placés entre deux paren-
thèses, écrits au-dessous du nom des sources,et avec des caractères deux
fois moindres que ceux par lesquels le nom des sources sera indiqué ;
c Déboute les parties de toutes autres fins et conclusions. »
Le Tribunal civil de la Seine, dans le jugement infirmé par la Cour
de Paris et que nous publions ci^dessus, avait adopté cette même solu-
fiiHifCf. trib. comm. Rouen, 10 juin 1891, à propos de la source Piane,
youveUiste de Rouen, numéro du 16 juin).
II y a bien un arrêt de la Cour de Bastia, du 30 janvier 1888 (pour-
TOi rejeté par la Cour de cassation le 21 mai 1889, Ann., 91. 163), qui
Keorde à une autre source que la source départementale le droit au
Bom d'eau d*Orezza, mats il s'agissait de la fontaine supérieure, située à
^i mètres de la source départementale et l'arrêt constatait que toutes
àtn avaient été simultanément connues des voyageurs et des médecins
^tm le nom de sources d'Orezza. Voici le texte de Tarrét :
< La Cour, Attendu que devant les premiers juges s'est élevée la dou-
ble question de savoir :
1* Si l'héritage, dont est litige et, qui renferme une source d'eau aci-
dolée, est susceptible de partage ou si, à défaut contraire, il y a lieu de
procéder à sa licitation ;
^ Sous quelle dénomination doit être désignée la source sus-indi-
qnie?
< Attendu .que : c*est a bon droit que sur la première question^ il a
^ déddé de recourir à une expertise, pour reconnaître si l'immeuble
>oaédé par indivis entre les parties avec la source qu'il contient, est ou
— 24 —
Attendu qae, Monplot ayant justifié que Nicolal et Arnould
n'étaient point ses auteurs et qu'il tenait ses droits des époux
Paoli, le demandeur, par des conclusions additionnelles et rec-
non partageable et d'en fixer en même temps la valeur et la mise à prix ;
« Attendu quant à la seconde question que Tenquôte ordonnée, en
amenant des déclarations contradictoires, ne permettrait pas d'atteindre
le but que s'est proposé le tribunal ;
c Attendu, au surplus, que d'après Tétat des documents versés au procès,
il peut être dès à présent statué sur le litige sans qull soit nécessaire
d'autoriser la mesure prescrite ;
c Attendu qu'il en serait autrement, si, comme le porte un arrêt
dont il a été donné lecture dans le cours des plaidoiries, un doute pou-
vait s*élever sur le point de savoir, si c'est la vallée d'Orezza qui a pris le
nom de l'eau acidulée exploitée par Arger, au nom du département, ou
si c'est, au contraire, la source qui a emprunté le nom de la vallée ;
c Attendu qu'il suffit à cet égard d'interroger l'histoire du pays, poar
apprendre que le département de la Corse était, sous l'ancien régime,
divisé en pieves, qui correspondaient à p^u près exactement aux cir-
conscriptions cantonales actuelles, que l'une de ces pieves était, de
temps immémorial, connue sans le nom d'Orezza ; que cette désignation
existait bien avant que les eaux acidulées eussent acquis de la notoriété,
non seulement sur le continent, mais même dans une partie de Ttle ;
« Attendu que, si au point de vue officiel et administratif, le nom de
la circonscription a été modifié, l'ancienne désignation a été maintenue
dans le langage usuel et que, même aujourd'hui, quelques communes
ajoutent à leur nom celui de la pieve, notamment Val lé ;
«Attendu qu'en l'état, ou ne saurait admettre, ainsi que le soutenait
Arger, que le nom d'Orezza constitue une propriété privative ; qu'il y
a lieu an contraire de le considérer, à l'instar de ce qui se passe à
Vichy et à Vais, comme une désignation générique,dont peuvent se pré-
valoir tous ceux qui possèdent des eaux minérales sur le même terri-
toire ;
« Attendu que sous ce rapport, le droit des intimés est d'autant moins
contestable que la i^ource, qu'il échet de partager ou de liciter, se trouve
à cent cinquante mètres à peine et en contre-haut de la fontaine dépar-
tementale dont Arger est le concessionnaire ; qu'on distingue les deux
sources sous les noms de fontaine supérieure et fontaine inférieure;
qu'étant situées au même lieu, il est naturel que les propriétaires res-
pectifs 86 croient autorisés à se servir du même nom généiique ;
«c Attendu que, pour repousser les prétentions de ses adversaires,
Arger invoque vainement les titres constitutifs de propriété de la
source supérieure ; que s'il n'est pas fait mention dans ces actes du
nom d'Orezza, soit que la contractante Tait jugé inutile, soit qu'il y ait
eu une pure omission de leur part, il ne s'en suit pas qu'ils n'aient le
droit d'employer ce nom, dans les mêmes conditions et au même titre
que pour la fontaine départementale ;
« Qu'il est à remarquer, à ce sujet, que tous ceux, voyageurs ou mé-
decins, qui, depuis trente ou quarante ans, se sont occupés des eaux
d'Orezza, ont attribué ce nom aussi bien à l'une qu'à l'autre source ;
c Attendu que c'est aussi sans raison, qu'Arger soutient qu'il y a lieu,
en l'état, de s'occuper du nom sous lequel la source, dont est procès,
doit être désignée ;
«c Qu'il est en effet évident que le nom d'Orezza est de nature à exer-
cer une certaine influence sur le prix de vente alors même d'aillears
— 26 —
criptions cantonales actuelles; que rancienne pieve d'Orezza
constitue aujourd'hui le canton de Piédicroce ;
Attendu qu'il n'est point nécessaire de rechercher si c^est la
vallée qui a donné son nom à la source, ou si c'est la source
qui a donné son nom à la vallée ; qu'il suffit de constater en
fait que depuis que la Corse est devenue un département français,
aucune ville, circonscription, commune ou localité n'est désignée
sous le nom de Orezza ;
Attendu néanmoins que ce nom a persisté dans Tusage local
pour désigner communément la vallée où coule la source dépar-
tementale ; que plusieurs communes de la région notamment
celle de Yallé ajoutent encore aujourd'hui à leur nom celui de
l'ancienne pieve ;
Attendu qu'il est constant, d'autre part, que, depuis un temps
immémorial et hien avant qu'elle f(lt exploitée pour ses pro-
priétés curatives, la source départementale Sorgente Sottana
était connue sous le nom de source d'Orezza ainsi que la source
supérieure Sorgente Soprana, distante de 150 mètres seulement ;
que c'est sous ce nom qu'elle est désignée dans la concession
faite à Valéry en 1856 et dans le décret qui a déclaré la source
d'utilité publique ; que c'est sous ce nom qu'elle a toujours été
désignée par les voyageurs et les médecins ;
Attendu, d'autre part, que les sources se trouvant dans la
même région et à une distanee plus ou moins grande de la source
départementale étaient connues sous le nom de source Tascovata,
source Piana, Angéli, etc., servant à les distinguer de la double
fontaine d'Orezza ; que c'est la source Tascovata, aujourd'hui
dénommée Colomba, qui est exploitée par Monplot; que dans le
bail qui lui a été consenti, la source est désignée ainsi : <c une
source d'eau minérale gazeuse, acidulée et ferrugineuse, qui
jaillit dans la propriété dite Tascovata, située sur le territoire
de Rappagio » ; que dans cet acte le nom d'Orezza n'est môme
pas prononcé ;
Attendu dans ces conditions que le nom d'Orezza, n'étant plus
aujourd'hui le nom d'une localité ou circonscription, ne consti-
tue pas une dénomination générique et nécessaire, comme par
exemple le nom de Vichy ou de Vais ; que, à raison de la posses-
sion constante dont il justifie, Piatier a le droit exclusif, à l'égard
de Monplot, de vendre les eaux de la source sous le nom d'Eau
d'Orezza ; qu'il appartient à Monplot d'exploiter lui-même la
source sous le nom où elle est connue et le nom sous lequel elle
a été désignée dans l'acte de bail qui lui sert de titre, ou sous
tel autre nom de nature à ne porter aucune atteinte aux droits
des tiers ;
• Attendu toutefois que, en présence de ce fait constant que le
nom d'Orezza est encore employé dans le langage usuel pour dé-
signer la vallée ou l'ancienne pieve de ce nom, la possession du
demandeur n'est point exclusive au point de faire interdire d'une
façon absolue au défendeur tout usage de ce nom ;
Mais que l'usage de ce nom à Teffet de désigner la vallée ou
Tancienne pieve d*Orezza ne peut être admis que dans des con-
ditions de nature à éviter toute confusion avec les eaux de la
source départementale;
Attendu que Monplot a mis en vente Teau de sa source dans
des bouteilles portant des étiquettes ainsi conçues : Eau minérale
naturelle d^Orezza^ ce dernier mot mis en vedette et écrit en gros
caractères, tandis que le nom de la source était écrit en petits
caractères peu apparents ; que ces circulaires, prospectus et an-
nonces portent également, soit en tête, soit dans le texte, ces
mots : Eau dOrezza ;
Qne ces faits, bien que les étiquettes diffèrent d*aspect, sont
de Qatnre à créer une confusion entre les eaux de la source Co-
lomba et celles de la source départementale d'Orezza et portent
atteinte au droit exclusif du demandeur de vendre son eau sous
le nom à'EaudOrezza ; qu'ils ont causé au demandeur un pré-
jodice dont il lui est dû réparation ;
Qne le tribunal a les éléments nécessaires pour fixer les dom-
mages-intérêts ; qu'il convient pour l'avenir de déterminer dans
quelles conditions le défendeur pourra faire usage du nom
d'Orezza comme désignation de la vallée communément connue
soQs ce nom et où la source prend naissance ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède que la demande recon-
Tentionnelle de Monplot n'est point fondée ;
Pai cks motifs, Donne acte à la veuve Piatier de sa reprise
d'instance, reçoit le préfet de la Corse en son intervention, donne
acte à Maugarduque es qualités de sa reprise d'intervention, dit
qoe le nom d'eau, source ou fontaine d'Orezza, est la propriété
privative du département de la Corse ou de ceux qui le repré-
sentent, sauf bien entendu les droits des propriétaires de la
source supérieure Sorgente Soprana ;
Dit qu'à l'avenir Monplot ne pourra employer la dénomination
d'£au d'Orezza comme désignation de l'eau provenant de la
^orce Tascovata ou Colomba, et ce, soit sur les capsules, bou-
teilles et étiquettes, soit dans les annonces, circulaires, factures
et imprimés de toute sorte ;
Dit que Monplot ne pourra faire usage du nom d'Or zza pour
indiquer la situation géographique de sa source qu'en inscrivant
ces mots : <c Vallée d'Orezza », entre parenthèses au-dessus ou à
lasoiteda nom de la source et avec des caractères deux fois
— 28 —
moindres que ceux par Tesquels le nom de la source sera indi-
qué ;
Condamne dès à présent Monplot à payer à ladite yeuTê Pia-
tier, 10 francs de dommages-intérêts par chaque contravention
constatée à concurrence de trente, après lesquelles il sera fait
droit ;
Autorise la demanderesse à publier le présent jugement en
totalité seulement et non par extraits, dans trois journaux à son
choix et aux frais de Monplot, pour tous dommages-intérêts, sans
que le coût de chaque insertion puisse dépasser 300 francs ; dé-
clare Monplot mal fondé en sa demande reconventionnelle, Ten
déboute ;
Condamne Monplot en tous les dépens.
M. Monplot a interjeté appel de ce jugement.
La Cour après avoir entendu les plaidoiries de M* Robin
et de M® Gouhin a, conformément aux conclusions de
M. l'avocat général Bdlot, rendu l'arrêt suivant :
La. Cour, Statuant sur Tappel interjeté par Monplot du juge-
ment rendu par le Tribunal civil de la Seine en date du 17 dé-
cembre 1895, donne acte à la veuve Piater et à Luiggi de leur re-
prise d'instance ;
Sur la double exception d'irrecevabilité proposée par l'appe-
lant contre la demande principale et l'intervention aux débats
du préfet de la Corse :
Adoptant les motifs des premiers juges :
Au fond ;
Considérant que la question soumise à Tappréciation de la
Cour est de savoir si le nom d'Orezza ne fait point partie du do-
maine public, comme étant un nom générique dont l'usage com-
mercial appartient à tous pour indiquer la provenance réelle de
tous les produits provenant de cette région ;
Considérant qu'il résulte de tous les documents de la cause
que le nom d'Orezza a toujours été, depuis un temps immémo-
rial, employé pour désigner, avant comme après l'annexion de la
Corse à la France, prononcée par l'édit de Louis XV en date du
15 août 1768, une partie du territoire de cette lie ;
Que ce nom fut d'abord employé pour désigner l'une des 64 pie-
ves ou paroisses entre lesquelles le territoire ainsi annexé était
divisé ;
Que lorsque la Corse fut constituée en département français en
1791, la pieve d'Orezza devint alors le canton d'Orezza ; que c'est
seulement en 1828 qu'en vertu d'une ordonnance royale le canton
d'Orezza devient officiellement le canton de Piedicroce, sans que
. — 30 —
ondement par la Cour comme elles Favaient été par le tribu-
nal ;
Dit, par réformation sur ce point du jugement dont est appel,
que le nom d' Orezza est nn nom générique, appartenant au do-
maine public, dont l'usage peut être employé par chacun pour
désigner tout produit naturel provenant de ladite région ;
Déclare en conséquence les intimés mal fondés dans leur ac-
tion, les en déboute et les condamne en tous les dépens de pre-
mière instance et d'appel ;
Sur la demande reconventionnelle en dommages-intérêts for-
mée par Monplot :
Déboute celui-ci de ladite demande ; ordonne néanmoins la
restitution de l'amende consignée.
Art. 4095.
Marqaes cleftibriqiie. — Sources cl'eaax minérales.
— Nmiiérotoffc. — Pas «le contreftiçon.
Lorsque la marque revendiquée consiste en une série d* éti-
quettes destinées à être apposées sur des bouteilles dCeaux
minérales etprésentant une disposition caractéristique dans
laquelle un numéro imprimé en grands caractères sert à
désigner tout à la fois une source déterminée et la garantie
de la quantité approximative de bicarbonate de soude con»
tenue dans l'eau débitée par cette source,il n'y a pas contre^
façon à inscrire^ sur des étiquettes absolument différentes^
des chiffres qui ne servent pas de dénominations aux sour-
ces et qui, accompagnant le nom de la source, indiquent
seulement son degré de minéralisation (l'« espèce) (1).
Mais lorsque le propriétaire de la marque a par des con-
clusions, invoqué l'autorité de la chose jugée, résultant de
ce qu'un arrêt pt*écédent, entre les ayants droit des mêmes
parties, a déclaré illicite l'usage des n^* 1, 3, 5, 7 pour dé-
(1) Le Tribunal civil de Lyon n'en a pas moins, contrairement à sa pre-
mière décision, confirmée par la Cour de Lyon et maintenue par Tarrêt
de la Cour de cassation que nous reproduisons, condamné pour imita-
tion frauduleuse de marque, un concurrent qui se servait, pour les eaux
de Vais, de chiffres placés de façon apj. rente sur les étiquettes et in-
diquant le numéro d'ordre de la source, bien que les étiquettes fussent,
quant au reste, différentes (Trib. civ. Lyon, 19 juillet 1895, Ann.,
96.250).
— 34 ^
signer le dosage des sources en bicarbonate de soude le juge
dufait est tenu de s'expliquer sur ce moyen (2« espèce) (1).
(i) La décision invoquée comme ayant Tantorité de la chose jngée
était on arrêt de la Gonr de Lyon da 8 août 1877, confirmant nn juge-
ment dn Tnbonal civil de Lyon en date du 96 mars 1874.
Le jugement était ainsi conçu :
c àttendo que la Société anonyne la Grande Compagnie Hydro-miné-
rale de Vais (soarces vivaraises) a formé contre la Société des eaux
de Tais ^ da Pestrin, les sieurs Lauret, Gilloa et Gie et le sieur M eis-
sosaier une demande en paiement de 20.000 francs de dommages-inté-
rêts : que cette action est fondée sur ce que la société défenderesse se
serait livrée à des actes de concurrence déloyale dont les sieurs Gillon
et Ge et le sieur Meissonnier se seraient rendus complices en vendant
OQ exposant en Tente ses prodoits ;
c Attendu que la Grande Compagnie Hydro-minérale a fait le 23 avril
i^O le dépôt de sa marque au greffe du tribunal de commerce de Lyon ;
qoe celleK» consiste dans des étiquettes ayant pour signe caractéristi-
que de désigner les sources de la Compagnie non par des dénominations
aiosi que cela se pratique habituellement mais par des numéros com-
pris dans la série des chiffres 1 à 10 et correspondant pour chacune
d'elles à la quantité de bi-carbonnate de soude que ses eaux contien-
i;ent en dissolution ;
< Qae toutefois afin de ne pas multiplier les divisions sans une se'
riense nécessité, elle s'est bornée dans l'exercice de son exploitation à
présenter ses sources au public sous la série des numéros impairs, 1,
S. 5,7, 9;
« ittendo que la Compagnie des eaux de Vais et du Pestrin fondée
deui ans après le dépôt de la marque de fabrique ci-dessus mentionnée, a
désigné, il est vrai, les sources sous la dénomination générale de Déli-
eieuses^ mais a adopté sur ses étiquettes et dans ses prospectus la sé-
rie des numéros impairs, 1, 3, 5, 7, indiquant leurs richesses respecti-
T» en bi-carbonate de soude ;
< Qae le bnt qu'elle s'est proposée a été évidemment de jeter la con-
foâoii dans l'esprit public et de profiter de la notoriété qu'avait acquise
la marque de la Grande Compagnie Hydro-minérale ;
I Qoe cette confusion était d'autant plus susceptible de se produire
qie ce qui devait frapper les consommateurs, c'étaient moins les men-
U03S générales des étiquettes que la série des numéros impairs et dans
ksqoels ils trouvaient l'indication du plus ou moins d'activité des eaux ; i
c Attendu que les sieurs Lauret, Gillon et le sieur Meissonnier devaient
K charger respectivement d'un entrepôt à Lyon de la Compagnie défen-
àeresse, mais que les projets de traité qui avaient existé n'ont pas été
laivis d'exécution ; qu'ils n'ont reçu qu'un petit nombre de caisses re-
tirées de l'exposition de Lyon et dont pour la plus grande partie le pla-
cement n'a pas été opéré ; qu'il n'est pas établi qu'ils aient eu eonnais-
unoe de la fraude ni même qu'ils aient causé un préjudice apprécia-
nte:
( Attendu que les actions en dommages-intérêts, pour concurrence
wéioyale sont» d'après la jurisprudence, de la compétence du tribunal
2e commerce, mais que l'exception n'a pas été proposée : que le tribu-
nal civil possédant la plénitude de juridiction il n'y pas lieu de se des-
bisir d'office ;
< Par ces motifs, Statuant en matière ordinaire ;
f Déclare qa€ c'est sans droit que la Compagnie de Vais et du Pestrin
— 32 —
(C. de cass., ch. civ., req., 9 noYembre 1898, Compagnie générale des
eaux minérales et bains de mer c, Henry et Cie (!'• espèce). — G. de
cass., ch. cIt., cass., 9 novembre 1898, Compagnie générale des eaux
minérales et bains de merc. BoalTé et Real (2> espèce).
Dans deux espèces analogues, sur la demande de la
même société, le tribunal civil et la Cour de Lyon avaient
donné la solution rapportée dans le sommaire ci-dessus.
re
espèce.
Dans Tune des deux espèces (1) la Cour de cassation a
rejeté le pourvoi formé contre Tarrêt de la Cour de Lyon
du 27 mars 1895 en ces termes :
La Cour, (Le premier moyen était relatif à un vice de forme).
Sur le deuxième moyen :
Attendu qu'il résulte des constatations de l'arrêt attacfué que
la marque de commerce revendiquée par la demanderesse en
cassation consistait en une série d'étiquettes destinées à être
apposées sur des bouteilles d'eaux minérales et présentant une
disposition caractéristique dans]aqueile,un numéro imprimé en
grands caractères,seryait à désigner tout à la fois une source dé-
terminée et la garantie approximative de bicarbonate de soude
contenue dans Teau débitée par cette source ; qu'il ressort des
mômes constatations que les étiquettes employées par les défen-
deurs n'offraient point de ressemblance avec celles de la deman-
deresse ; que les sources par eux exploitées étaient indiquées,
sur ces étiquettes, par un nom spécial et que si un nombre était
a fait usage dans ses prospectas et sur ses étiquettes de la série des
numéros impairs 1, B, 5, 7 pour désigner le dosage de ces sources en
bi-carbonate de soude ;
« La condamne à payer à la (Compagnie demanderesse pour réparation
du préjudice qu'elle lui a causé la somme de 800 francs : etc. i
Arrêt en ces termes le 8 août 1877 :
« Sur rappel principal :
« Adoptant les motifs qui ont déterminé les premiers juges :
c Sur les conclusions de la Compagnie intimée tendant à faire déclarer
que les défenses sont faites à la Société des eaux de Vais et du Pestrin
d^employer et de faire usage de sa marque ,
c Considérant que le dispositif du jagement porte ce qui suit : c déclare
que c*est sans droit que la Compagnie de Vais et du Pestrin a fait usage
dans ses prospectus et sur ses étiquettes de la série des numéros im-
pairs 1, 3, 5, 7 pour désigner le dosage de ses sources en bi -carbonate
de sonde » ; que dès lors il a été satisfait déjà aux conclusions dont il
vient d'être parlé ;
« Par ces moitfs, Confirme. »
(1) Il y avait encore une 3* espèce semblable à la première. La dé-
fenderesse était la Société française des eaux minérales.
r. -
— 33 —
joint à cette 4(ti^oix^>i^^tion il ne serrait qu'à faire connaître au
pablie le dosage de Teaii de cette source ; qu'enfin l'aspect typo-
graphique des deux genres d*étiquettes ne permettait entre elles
aucune confusion ;
Attendu qu'en décidant dans ces circonstances que les défen-
dears en cassation n'avaient pas commis la contrefaçon etTu-
surpation de marque qui leur était imputée, Tarrét attaqué, le-
quel est motivé, n'a violé aucun des textes de loi visés dans le
deaxième moyen ;
Stir le troisième moyen :
Attendu que pour repousser Faction introduite par la Compa-
gnie générale, l'arrêt attaqué se fonde notamment sur ce que les
nombres employés par la Société Française dans sa marque de
commerce n'avaient point le caractère que leur prétait la deman-
deresse en cassation ; qu'ils ne tenaient nullement lieu de déno-
mination pour désigner les sources exploitées par les défendeurs
en cassation et servaient uniquement à faire connaître le degré
déminéralisation de ces sources ; que l'arrêt ajoute qu'il est inad-
missible que la compagnie prétende s'opposer à l'emploi dans
ce bat des nombres faisant partie de la série i à 10, sous le pré-
texte qu'elle avait adopté dans sa propre marque des numéros
le la même série pour désigner les sources lui appartenant ;
Attendu que ces motifs répondent suffisamment aux conclu*
HODspar lesquelles la Compagnie générale soutient que le seul
£aitpar les défendeurs d'avoir, dans leur publicité, joint des
chiffres aux noms de leurs sources constituait une contrefaçon
o-j une usurpation de marque et demandait qu'il leur fût interdit
d'oàer des numéros i à 10 dans leurs prospectus, factures ou an-
Lonces ;
D'où il suit que l'arrêt attaqué en statuant comme il l'a fait
n a contrevenu à aucune des dispositions légales visées dans le
troisième moyen ;
Par css hotips, Rejette.
Ch. civ. — M. Dareste, faisant fonction de président. —
UM. Rau, rapporteur ; — Dssjardins, avocat général (concl.
conf.). — M* Pérousb, avocat.
2« espèce.
Dans une autre espèce, la demanderesse avait opposé
devant la Cour d'appel Tautorité de la chose jugée. Elle
soulevait, outre les moyens invoqués, dans Tespèce pré-
"tdenle, un second moyen tiré du défaut do motifs sur la
:^ose jugée.
l
î
— 34 -
Sur ce moyen la Cour a statué ainsi :
La Cour, Sur le 2« moyen :
Vu l'article 7 de la loi du 20 avril 1810 :
Attendu qu'en j'" instance la demanderesse en cassation avait
fondé uniquement son action sur les actes de contrefaçon ou
d'imitation de marque de commerce qu'elle imputait aux défen-
deurs en cassation ; que, devant la Cour d'appel de Lyon elle a
invoqué pour la première fois Tautorité de la chose jugée résul-
tant, suivant elle, d'un arrêt de la même Cour, rendu le 8 avril
1877 et qu'elle a pris des conclusions expresses à l'effet de faire
décider que cet arrêt avait l'autorité de la chose jugée vis-à-vis
des sieurs Bouffé et Real et devait entraîner leur condamnation
sans nouvel examen du fond du litige ;
Attendu que, sans s'expliquer sur ce moyen les juges du fond
ont débouté la demanderesse en cassation de son action, en con-
lirmant avec adoption de motifs le jugement frappé d'appel ; que
cette décision qui emportait le rejet du chef de conclusions rela-
tif à la chose jugée ne contenait aucun motif exprès ou impli-
cite à l'appui de ce rejet ; d'où il suit que l'arrêt attaqué a violé
le texte de loi susénoncé ;
Par CBS motifs, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les 3"
et 4« moyens ;
Casse.
Ch. civ. — M. Dareste, faisant fonction de président. —
MM. Rau, rapporteur ; — Dssjardins, avocat général (concl.
conf.). — M*" Pérouse et Nivard, avocats.
j t
Art. 4096.
C^nevrrence Illicite. — Titre «l'ancien administra-
teur. — Interdiction.
Constitue un acte de concurrence blâmable qui doit être
interdit y le fait par un ancien administrateur de tournées,
théâtrales de prendre dans ses affiches ^prospectus et circu\
laireSyle titre sous lequel il a exercé pendant un cerlai
temps ces fonctions alors qu'il n'en est plus investi; et n'ap
partient plus à la même troupe.
(Trib. de com. Seine, 35 nov. 1896. — Frédéric Achard c. Germain.
Le ^ novembre 1896, le Tribunal de commerce de la
♦1
JwtrmAl. — Conteftt d'édition. — Roomn «nclen ppé-
•«bM eomme Inédit. — Iiésat«lpe qui ae préaente
La qualité de légataire des ceuvrea littéraires d'un écri-
'■^in ne donnepas au bénéficiaire le droit de les publier sous
J3n propre nom.
l'écrivain gui, ayant promis à un journal un roman
èdit, composé spécialement povr les lecteurs du journal,
re audit journal un roman anciennement publié, dont il
oar héritage la propriété littéraire.mais dont il n'estpas
uteur et qu'il s'est contenté de modifier légèrement et
msposer maladroitement, manque aux engagements qu'il
ans ; justifie, de la part du journal, une demande en ré-
talion du contrat et ne saurait te plaindre des procédés
peu sévères dont le journal a usé envers lui.
le journal ayant, sur la foi de l'écrivain avec lequel il
ail contracté, commencé tapubUcation du roman et ayant
rinterrompre quand il a connu la véritable situation,
■■ubi un préjudice dont il lui est dû réparation.
Des dommages-intérêts doivent être alloués au journal,
ur le préjudice causé, les lecteurs de ce journal, se-
its et attirés par Us réclames annonçant ta publication
me œuvre nouvelle et inédite, écrite spécialement pour
V, ayant d& être singulièrement désappointés lorsqu'ils
t appris que le roman publié était de vieille date et tPun
leur profondément oublié et que la clairvoyance du di-
^teur du journal avait été mise en défaut sur ce point.
ib. civ. Seine, 10 mtd 1890.— Journal L'Edairc. Oscar MAténier.)
Linai jugé par la 1" chambre sous la présidence de M. le |
isidenl Baudooin, après plaidoiries de M" Camille Bon
;z et Ue Barazeb :
G Tribunal, Attendu que daos son numéro du 13 septembre i
nier, le journal VEclair annonçait k ses lecteurs dans les ter-
I suivants la publication d'un nouveau roman-feuilleton :
Demain, nous commencerons la publication d'un grand roman
lit, écrit spécialement pour VEclair par un des écrivains les i
I aimés de nos lecteurs, H. Oscar Héténier » ;
ue cet avis était accompagné suitant l'asage d'une réclame
ipeuse sur les mérites de l'œuvre nouvelle intitulée la Pvtci-
a et de son auteur ;
ae le lendemain VEclair insérait de nouveau la même ré- '
ne et commençait immédiatement la publication de ce Teuil-
n qui portait la signature d'Oscar Héténier ; »
ue cette publication était continuée sans interruption jusqu'au
lovembre ; I
u'à cette date r£d(u> insérait la note suivante :
Nous annoncions le 13 septembre dernier la publication d'un
Attendu que si les conventions intervenues entre les parties
n'ont point été rédigées par écrit, i) est facile cependant d'en
rélahtir exactement le sens ;
Qu'Oscar Méténier d'ailleurs ne conteste pas avoir pris l'enga-
gement de remettre JLl'EcJair le manuscrit d'un roman inédit spé-
ciilement écrit pour ce journal ;
Qu'il devait recevoir une rémunération de 20 centimes par li-
pe, prii qui avait déjà été adopté pour les autres romans ioé-
dJls qu'il avait précédemment publiés dans le méma jour-
nal;
Qu'en présence des justifications qui sont produites, il est
obligé de reconnaître aussi que pour écrire la Puleinella, il s'est
inspiré de l'oeuvre d'Oscar Honoré, intitulé le Roman d'une jeuR«
Kkpauvre, roman qui a été publié par la Patrie en 1860 ; -
Mais qu'il fait valoir qu'il est létfitime propriétaire des œuvres
liUtraires d'Oscar Honoré, son parrain, et qu'il avait le droit
d'utiliser ainsi sa propriété ;
Qoll ajoute qu'en transformant et en remaniant dans toules
ta parties, et d'une façon spéciale, pour les lecteurs de l'Eclair,
I d'Oscar Honoré, il a, en réalité composé une œnvre
, originale et inédite ;
surplus, dit-il, VEctair ne lui avait point interdit de
un collaborateur ;
u qu'il faut écarter, tout d'abord, cette dernière ob-
mot collaboration, par son étymologie même, suppose
il en commun, la coopération de deux ou plusienrs au-
ine <Buvre collective ;
outre, ce mot implique la volonté commune de colla-
:ar Honoré est mort en 48S5, plusieurs années avant la
e dajournal VEclidr ;
'autre pari, le Roman d'une jeune fille pauvre, a paru dans
, en I8B0, c'est-à-dire à une époque très voisine de la
e de Héténier ;
: roman dont il s'agit n'a donc pas été écrit en collabora-
rue des lecteurs de l'Eclair ;
lu d'un autre côté que si Oscar Méténier est légataire
res littéraires d'Oscar Honore, ce qui n'est pas contesté,
dite ne suTQt pas à lui donner le droit de publier sons
les œuvres de son parrain ;
ans doute, il ne saurait être question ici de contrefaçon ;
effet comme héritier d'Oscar Honoré et chargé à ce titre
dre sa mémoire, le défendeur aurait seul qualité pour
Ire de la contrefaçon ;
aut donc examiner uniquement la prétention de Uété-
'oir composé une œuvre nouvelle, originale et inédite,en
mant et en remaniant le roman d'Oscar Honoré ;
du qu'il suffit de rapprocher le feniHeton la Fulcitiella
m publié en 1860 par Oscar Honoré pour constater qu'il
jne seule et même œuvre ;
i plupart des chapitres ont été reproduits textuellement,
! seule ligne d'Oscar Méténier, qui s'est borné & faire
s suppressions et certains changements de détail absola-
ngniflants ;
isi te mot « cajoler » a élé remplacé par celui de « ca-
V œil exercé » par i< œil de faucon », <• naissance » par
lion ", « démodé » par « fossile », etc., etc. ;
/agissait si bien d'une même œuvre qu'après la décon-
te par VEclair, au mois de novembre, ce journal a pu
ir la publication du roman, d'après le texte unique d'Os-
;iré, sans avoir aucun égard au manuscrit qui lui avait
s par le défendeur ;
titre même, la Putcittella, n'appartient pas à Oscar Ué-
nr--- -'^'■F.r'', '9^ ,^ M^
-39 -
ténier, qu'il était le nom donné par Oscar Honoré à Tan de ses
principaux personnages ;
Âttenda, il est Trai^qu'Oscar Méténier a fait certains remanie-
ments 00, pins exactement, certaines transpositions, qa*ainsi le
proiogne de la Puleinella a été composé à Taide de plusieurs
chapitres de la deoxième partie du roman de la Jeune f,lie pau^
Qn'Oscar Méténier y a ajouté un passage de dlO lignes em-
pranté au chapitre 7 de la troisième partie, passage auquel il a
apporté de très légères modifications ;
Mais que, par suite d'un oubli singulier, ce même passage se
retroure une seconde fois dans son manuscrit, à la même place
quMl occupait dans le roman d'Oscar Honoré et cette fois sans
aocune modification ;
Qae ce fait suffit à caractériser le genre de travail auquel s'est
livré le défendeur, ou qu'il a fait faire par un subalterne ;
Que les quelques lignes qu'il a dû écrire pour opérer ces re-
maniements et adapter ces transpositions ne sauraient à aucun
degré Tautoriser à dire, comme il le prétend, qu'il a fait une
savre noairelle et originale ;
Qa'en réalité après avoir promis à VEclair un roman nouveau
inédit, écrit par lui d'une façon spéciale pour les lecteurs de ce
joamal, il a liirré la copie très légèrement modifiée et très mala-
droitement transposée d'un vieux roman écrit par un autre et
poMié il y a quarante ans ;
Qu'il ne saurait se plaindre dans ces conditions des procédés
no peu sévères dont VEclair a usé envers lui et qu'il ne doit s'en
prendre qu'à lui-même du bruit que cet incident a fait dans la
presse ;
Qu'il cherche vainement à épiloguer sous le sens du mot « iné-
dit p, prétendant que le roman d'Oscar Honoré n'a jamais été
édité en librairie ;
Que le mot « inédit », dans le sens du contrat et dans le lan-
gage courant, s'applique à un ouvrage qui n'a Jamais été pu-
blié ;
Qu'en tous cas, Oscar Méténier a livré un roman qui n'était
pas de lui et qui n'avait pas été écrit spécialement pour les lec«
teors de VEclair ;
Qu'il a donc manqué aux engagements qu'il pris ;
Que les exemples qu'il invoque d'auteurs plus ou moins célè-
bres prenant leur bien un peu partout et couvrant sans scrupule
de leur signature des œuvres écrites par d'autres, ne sauraient
constituer pour lui une excuse ; que des abus de ce genre n'ont
malheoreasement rien d'inédit ;
— 40 —
Attendu, dans ces conditions, qae VEclair est fondé à deman-
der la résiliation du contrat ;
Attendu, d'autre part, que si l'incident dont il s'agit a été
surto.ut fâcheux ponr Oscar Méténier, il a causé cependant à
VEclair un réel préjudice ;
Qu'en effet, les lecteurs de ce journal, séduits et attirés par les
réclames pompeuses par lesquelles on leur annonçait la pu-
blication d'une œuTre nouvelle et inédite, écrite spécialement
pour eux, ont dû être singulièrement désappointés lorsqu'ils
ont appris que c'était un roman vieux de quarante ans, d'an
auteur profondément oublié, et que la clairvoyance du directeur
du journal avait été mise en défaut à ce point ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède que la demande recon-
ventionnelle d'Oscar Méténier est à tous égards mal fondée ;
Par ces motifs, Déclare résiliées les conventions verbales in-
tervenues entre le journal VEclair et Oscar Méténier au sujet de
la publication du roman feuilleton la Putcinella ;
Condamne Oscar Méténier à restituer au journal VEclair tou-
tes les sommes qu'il a pu toucher sur le prix dudit feuilleton et
en outre à la s6mme de 2,000 francs à titre de dommages-in-
térêts ;
Déclare Oscar Méténier mal fondé en sa demande reconven-
tionnelle ;
L'en déboute ;
Et attendu que l'exécution provisoire est demandée en dehors
des cas prévus par la loi ;
Dit qu'il n'y a lieu de l'ordonner ;
Condamne Oscar Méténier en tous les dépens.
Art. 4098.
Brevet d'Invention. — Compétenee. — IncllvtolMIICé
de Taetlon. — Bxceptlon. — IVon-palement de« An-
nuité*. — Déebéanee Irrémédiable.
Si la compétenee des tribunaux civils s'étend à tous les
litiges qui mettent en cau^e les brevets d'invention, cette
compétence a elle-même pour limite le principe de Vindivi-
sibilité de V action et de la procédure (1).
Lorsque l'action porte sur des chefs complexes se raita-
(1*2) La solation contraire parait prévaloir en doctrine et en jaris*
prudence. Y. Riom, 27 mai 1862, Barault» Ann.^ 63. 274 : Bordeaux»
I
l
- 42 -^
de commerce a été incidemment saisi de difficaltés que rarticle 34
de la loi de 1844 réserve expressément aux tribunaux civils ;
Or attendu en droit, que si en raison des termes généraux et
impératifs de ce texte, il est certain que la compétence des tribu-
naux civils s'étend à tous les litiges qui mettent en cause la Ta-
lidité des brevets d'invention, il faut aussi reconnaître que cette
compétence a elle-même pour limite le principe de Tindivisibi-
lité de l'action et de la procédure, que dès lors que Taction porte
sur des chefs complexes se rattachant aux effets indivisibles
d'un même contrat, la compétence du juge saisi de Taction s'étend
nécessairement à l'exception ;
Et attendu en fait, que les moyens invoqués par Guichard à
l'appui de sa défense n'ont pas le caractère d'une demande re-
conventionnelle et que ces moyens sont connexes aux autres con-
testations soumises au tribunal de commerce par le demandeur,
à l'occasion de la résiliation d'un contrat commercial ; que,dans
ces conditions spéciales,la règle de droit commun que le juge de
Taction est juge de l'exception doit prévaloir; que dès lors le
tribunal de commerce était compétent ;
Et attendu que les parties ont conclu au fond, que la cause est
en état, qu'il y a lieu à évocation ;
Au fond :
Attendu que Guichard excipe de la déchéance du brevet d'in-
vention d'Obier par défaut de paiement en temps utile de l'an-
nuité de i897 ;
Or attendu que l'article 32 de la loi du 5 juillet 1844 édicté la
déchéance du brevet dans le cas où le breveté n'a pas acquitté
son annuité avant le commencement de chacune des années de
jouissance du brevet ; que le brevet d'Obier porte la date du
26 octobre 1883 ; qu'il appert du récépissé produit aux débats,que
la cinquième annuité ne fut acquittée que le 7 novembre 1887,
et qu'à cette date la déchéance était encourue, que cette dé'
chéance est irrémédiable et que le paiement des annuités ulté-
rieures ne peut la réparer ;
Attendu en outre que cette déchéance peut être invoquée par
Guichard pour établir à la fois le défaut de cause de l'action en
dommages ;
Attendu que cette solution rend inutile l'examen des autres
moyens invoqués par Guichard pour justiÛer le chef de ses con-
clusions tendant à la nullité du brevet ;
Par crs motifs, La Cour disant droit de l'appel, infirme le ju-
gement attaqué dans la disposition relative à l'incompétence ;
dit que les premiers juges étaient compétemment saisis du moyen
de défense invoqué par Guichard et tiré de la déchéance du bre-
vet par défaut de paiement d'une annuité en temps utile, et sta-
'"FftF.^^^'^?^'
— 43 —
taant à noayean par voie d'évocation déclare Obier non receTabie
et mal fondé dans ses demandes ;
L'en déboate et Je condamne à l^amende et aux dépens ; con-
ânne en tant que de besoin le jugement attaqué sur les autres
chefs, et en ordonne l'exécution.
Art. 4099.
Brevetai «tlnventlon. ^ Soelété. — JonlmMinee. — Eil-
ceaee eoneédée pendant Ia durée de la soelété et
devant ne pralon^ep altérlearement.
(Ine société étant formée pour l'exploitation des brevets
plis ou à prendre au nom du gérant^ avec stipulation que la
libre disposition et la jouissance de ces brevets feront retour
audit gérant après la dissolution de la société^ le gérant n'a
pas qualité pour passer en son nom personnel les contrats
de cession de licence des brevets^ même si ces contrats excè-
dent le terme fixé pour la durée de la société, le prix des
cessions consenties pendant l'existence de la société appar-
tient tout entier à celle-ci (1).
(G. de Riom, 15 mars 1894 et Cast. civ., 1«' février 1897. —
Faure c, Kessler.)
(1) S'il est manifeste que pendant l'existence de la société à laquelle la
joQÎssance da brevet a été apportée^le breveté agissant en son nom per-
soanel est sans droit pour stipuler relativement à la période de jouissance
sodale, on doit admettre, semble-t-il également que le gérant de la so-
ciété n'a fias qualité pour disposer de la jouissance du brevet pour la pé-
riode postérieure à la durée statutaire de la société, et que par suite pour
1«9 traités avec les tiers embrassant une période de temps supérieure à la
durée normale prévue par la société. le concours du breveté et du gérant
est indispensable. Dans l'espèce, bien que les personnalités du breveté et
da gérant soient confondue8,racte social n'ayant conféré au gérant aucuns
bcalté d'agir en son nom personnel dans les affaires sociales, on doit
admettre comme le décide le Tribunal de commerce de Clermont-Fer-
nnddoat le jugement a été confirmé simplement par la Cour, que c'est
«siqoement en qualité de gérant de la société que Kessler pouvait traiter,
aûs il semble que le tribunal va trop loin lorsqu'il attribue i la société
M le profit des licences concédées par le gérant.
En admettant la validité d'un contrat de cession de licences s'étendant
inné période supérieure à la durée sociale, il semble que si le prix est
a&e somme d'argent, il devra être réparti entre la société et le breveté
proportionnellement à la durée de la société ; si au contraire le prix
— 44 —
M. Kessler, gérant d'une société formée pour Texploita-
tion des brevets pris ou à prendre en son nom^ soutenait
que le pacte social portant que la jouissance des brevets
devait lui revenir après la dissolution de la société, il
avait droit de retenir une part de produit des cessions et
licences proportionnelles au temps pendant lequel les
brevets devaient survivre à la société.
Le Tribunal de commerce de Clermont-Ferrant par ju-
gement en date du 4 août 1873, confirmé par adoption de
motifs par la Cour de Riom le 18 mars 1894, à rejeté sa pré-
tention en ces termes :
Le TniBUNAL,
En ce qui concerne le produit du partage des cessions de licen-
ces de breret et d'appareil brevetés, et par voie de conséquence,
le pouvoir par le sieur Kessler de consentir les dites cessions en
cours de société, tant en son nom personnel que comme gérant
de la Société Kessler et Gie ; -- attendu que l'acte social du
14 août 4890 énonce dans son article 3 que :« la société a pour
objet l'exploitation : !<* des fabriques à provenir de la Société
Faure, Kessler et Gie et des brevets ou licences lui apparte-
nant ; 2« des brevets qui pourront être pris ou des inventions
qui pourront être faites par le gérant de la société nouvelle, mais
dont la libre disposition et la jouissance feraient retour audit
gérant à la dissolution de la société, ainsi que la clientèle et la
propriété de la fabrication et des brevets de fluates » ;
Attendu qu'il résulte des termes très précis de cet acte, que le
sieur Kessler a apporté à la Société Kessler et Cie la libre dispo-
sition des brevets ou licences, sans aucune autre condition que
le retour à son profit à la dissolution de la société, de la libre
disposition desdits brevets ou licences ; que par suite, pendant
Texistence de la société, le sieur Kessler n'a pas qualité pour dis-
poser personnellement de toutou partie de ces licences exploitées
par la Société Kessler et Gie, dentelle a seule la libre disposition,
et que c'est en sa seule qualité de gérant de ladite société que
toutes les opérations, onéreuses ou proûtables, doivent être trai-
tées, y compris la vente ou cession des licences ; d'où la consé-
consiste en redevances payables périodiquement, alors U société encais-
sera les redevances pendant sa durée, après sa dissolution au contraire
elles appartiendront au breveté.
V. Pouillet, Brev, d'int?., n« 915 etsaiv. — V. aussi: Bordeaux,
32 juin 1862, David, Ann,, 62. 392 ; Àîx, 7 avril 1j365, Gharavel, Ann,,
(16. 246, et Bordeaux, 12 mars 1885, Ann., 86.69.
-46 —
Tactif social, et ce, aux dates des factures remises aux acquéreurs
et conformément aux dites factures, la rectification de la comp-
tabilité sociale devant être effectuée sur tous les points, dans la
quinzaine du prononcé du présent jugement, sous peine de
10 francs par chaque jour de retard ;
Dit qu'à Tavenir, dans les traités qu'il consentira à des tiers,
des licences de brevets et appareils, le sieur Kessier n'agira
qu'en qualité de gérant de la Société Kessier et Gie.
Sur le pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour de Riom,
la Cour de cassation a rendu Tarrèl de rejet ci-après, le
!•' février 1897 :
La Cour, Sur le premier moyen
Sur le deuxième moyen :
Attendu que Tarticle 3 des statuts de la société en commandite
existant entre les sieurs Kessier et Faure prêtait à interpréta-
tion, que par suite, l'appréciation qu'en ont faite les juges du
fond échappe au contrôle de la Cour de cassation ;
Par ces motifs, Rejette.
Art. 4100.
Brevet. — Apport du droit d^explolCatlon À aoe
société. — CJesslon de ce droit À un tlerii p^r Èmt
— OIsMolutlon anticipée. — Validité»
L'apport fait à une société par Vun des associés de son
droit à l'exploitation d'un brevet d'invention dont il con-
serve la propriété^ fait partie de V avoir social et permet à
cette société^ integri status, de céder ce droit à un tiers (1)«
Le breveté qui ne s'est pas réservé la reprise de l'exploi-
tation en cas de dissolution anticipée de la société est tenu
de respecter cette cession faite dans la limite de la durée
prévue de la société (2).
(1-2) V. Pouillet, Brev, dHnv., n^SlSetsalT. L'arrêt a soin toutefois
de spécifier, que la cession, faite par la société de Fezploitation do brevet
dont la jouissance lui avait été apportée, ne peut s'étendre au delà du
terme de son existence normale prévue au pacte social, et, qu'après
cette époque, les inventeurs élant restitués dans la propriété du brevet,
doivent en toucher les émoluments.
— 47 —
(a de Douai» S9 jaUlet 1897. — Degrelle et Laualle
e, Lallooette et Parent)
Ainsi jugé par confirmation d'un jugement du Tribunal
de Lille, le 29 juillet 1897, sous la présidence de M. Dis-
TicKER,premier président, après conclusions de M. Bourdon,
aTocal général, et les plaidoiries de M*» ds Prat et Allakrt,
aTocats .
La Cour, Attendu en principe, que l'apport fait à une société
par l'un des associés de son droit à rexploitation d'un brevet
d'inTention dont il conserve la propriété,fait partie de Tavoir SO'
cial et permet à cette société, integri status, de céder ce droit à
un tiers, le breveté qui ne s'est pas réservé la reprise de rex-
ploitation en cas de dissolution anticipée de la société, étant tenu
ce respecter cette cession faite dans la limite de la durée prévue
de la société ;
Attendu, en fait, que le 3 février 1891, une société pour l'exploi-
tation du commerce de commissionnaire expéditeur a été formée
à Tourcoing pour une durée de dix années devant expirer le
5 février 1904 entre Paul Lassalle et Palmyre Degrelle associés en
nom collectif et Delos commanditaire ; attendu que le 15 avril
1894 par acte sous seing privé enregistré, Delos a cédé sa part de
commanditaire à Lallouette et à Parent ; que d'après l'article 5
des statuts, Lassalle et Degrelle ont fait à cette société un apport
consistant dans leur industrie et dans leur droit à Texploitation
d'un brevet d'invention pris par eux le 3 novembre 1893, pour un
système de wagons capitonnés ; que l'apport du commanditaire
a été chiffré à 50.000 fr. en espèces ; qu'il a été de plus convenu
,art. 16 des statuts) qu'au cas où Lassalle et Degrelle céderaient
à rétranger le brevet par eux apporté à la société, ou en cas de
eoncession de licences d'exploitation en France le produit de ces
cessions ou exploitations appartiendrait à la société ;
Attendu que le 30 octobre 1895, antérieurement à la dissolu-
tion en date du 3 novembre suivant, Lassalle et Degrelle, agissant
tant en leur nom personnel que comme membres de l'ancienne
société P. Lassalle et P. Degrelle, ont cédé à la Société générale des
transports dûment représentée, la licence d'exploitation du dit
brevet ; attendu que cette cession consentie par la Société P. Las-
>aUe et P. Degrelle encore existante bien qu'il soit indiqué er-
ronément dans les qualités prises par les gérants qu'elle était
alors dissoute, est régulière ; qu'elle a été faite dans la limite des
droits de la société cédante, qui seule avait en effet pouvoir à
cette époque, pour céder ce droit d'exploitation,run des éléments
It «on avoir social ;
— 48 —
Attendu que P. Lassalle et P. Degrelle sont mal fondés à pré-
tendre que la dissolution anticipée de la société les a réintégrés
dans la propriété de leur brevet et leur en a fait recouvrer la
jouissance ; que cette proposition ne serait vraie que si la société
n'en avait pas disposé, suivant son droit comme d'une chose
lui appartenant; qu'on ne saurait contester que cet apport contre-
partie de la somme de 50.000 fr. versée par le commanditaire a
été faite à la société pour toute la durée de son existence, c'est-à*
dire jusqu'au 5 février 1894; qu'il constitue donc pendant ce laps
de temps, au môme titre que la commandite le gage commun des
créanciers et des associés ; qu'il ne peut être permis à l'un d^eux
d'exercer sur cette valeur sociale au préjudice de la masse, une
sorte de droit de reprise privilégié que le commanditaire
n'exerce pas sur le commandité ; que régalité qui préside aux
relations des associés doit faire écarter une semblable prétention ;
qu'il importe peu que dans un projet de liquidation signé par les
intimés avant la clôture définitive des comptes, le chiffre des
redevances dues par la Société générale des transports pour l'exploi-
tation dudit brevet n'ait pas été porté à l'actif ; qu'en cette ma-
tière les parties sont toujours en droit de provoquer la révision
des comptes pour cause d'omission ou d'irrégularité matérielle ;
qu'on ne saurait en conséquence retenir cette omission comme
preuve de la renonciation des intimés à la revendication de leur
droit; que les premiers juges ont par suite décidé, avec raison,
que le bénéfice de la cession d'exploitation du brevet faisait
partie de l'avoir de la Société Lassalle et Degrelle ; que jusqu'à
concurrence du recouvrement des parties mises à la charge des
commanditaires par application de l'article 13 des statuts, les com-
manditaires avaient droit aux redevances éventuelles acquittées
par la Société générale des transports ; mais qu'il faut toutefois
ajouter que la Société Lassalle et Degrelle, n'ayant pu céder plus
de droits qu^elle n'en avait elle-même, les bénéfices auxquels elle
pouvait prétendre ne s'étendaient pas au delà de la durée de son
existence prévue au pacte social ; que le droit des commanditai-
res à ces bénéfices ne peut excéder ce terme fixé au 5 février 1904 ;
Par CBS motifs. Et en adoptant ceux des premiers juges, la
Cour confirme ; émendant, dit toutefois que le droit exclusif con-
féré aux intimés pour le recouvrement de leurs pertes sociales
sur les dommages dus par la Société générale des transports con-
cessionnaire de l'exploitation du brevet litigieux, prendra fin le
5 février 1904, déclare le présent arrêt commun à la Société géné^
raie des transporta.
* aecemore isus a aeciae que riaee première ae i& lermeiare
ia cuuea d'emballage au moyen d'une agrafe appartient à Bel-
^; que les neurs Tascher n'ont tait qu'apporter des améliora-
tou au brevet Belben, améliorations de nature à leur permettre
d'oblniîr un breret nouveau, mais qai ne sauraient priver les
<im de profiter à leur tour de l'idée de Belben ; qu'ainsi, la seule
question & rësandre est celle de savoir si les ëpoux (iuibaud se
!y<l emparés des améliorations des sieurs Tascher, ou si les mo-
ti et S) Lorsque les perfeetionoemenU apportés i un procédé de do-
uinepDUie, sont de nature à bîra l'objet d'un brevet, 11 est de prin-
<>[« certain, que le brevet ne parla qoe sur ces perfectionnements mé*
■es et, p*r snfte, ne saurait faire obstaele i ce qa'an aatre tnventear,
^ûanl loi aussi dans le fonds commun, apporte A son tour au procédé
igdgmaiae publie des amélloralions, ponrvaqae les araétioratloos soient
'^liiséei par des moyens dilTérenta de ccax dïjà brevetés.
— 50 —
difications qu'ils ont apportées au brevet Belben constituent un
produit industriel nouveau n'empruntant rien à ces améliora-
tions ;
Attendu que les innovations de Tascher frères consistent :
!• Dans le fait d'enfoncer de force dans le bois les deux coudes
de la plaque, qui dans le système Belben, se plaçaient dans des
mortaises préparées ;
2* Dans le fait de la suppression des trous ronds pratiqués à
l'avance dans les deux coudes de la plaque, pour recevoir la
pointe qui, dans le systèmeTascher, traverse ces coudes avec dé-
chirement du métal, ce qui assure l'inviolabilité de la caisse ;
3» Dans le fait de noyer la pointe dans le bois, de façon qu'elle
ne puisse être enlevée sans trace d'effraction ;
Attendu qu'il résulte tant du rapport des experts que de Texa-
men même des appareils placés sous les yeux du tribunal, que
les époux Guibaud, au lieu d'employer une pointé, se servent
d'une lance plate avec crans ; que cette lance n'est pas enfoncée
avec force dans les coudes de la plaque, comme dans le système
Tascher, mais pénètre sans grands efforts dans un trou ovale pré-
paré sur chaque aile de l'agrafe ; qu'une fois introduite, elle est
déviée de façon à pénétrer entre Tune de ces branches ; que la
lance n'a pas besoin d'être noyée dans le bois pour remplir le but
que se sont proposé les inventeurs ;
Attendu que les sieurs Tascher ont contesté ce dernier point,
soutenant que les instruments Guibaud par eux saisis noyaient
les lances dans le bois ; mais que les experts ont constaté que les
outils neufs que des frappements répétés n'avaient pas écrases,
comme ceux ayant servi, ne produisaient pas cet effet ; qu'au sur-
plus, on ne comprendrait pas que les époux Guibaud aient cher-
ché à noyer la lance ; qu'en effet, l'examen des agrafes posées sur
les caisses démontre que la prise de la lance, qui n'a pas de tète,
est plus difficile et, surtout, laisserait beaucoup plus de traces,
lorsque la lance est restée à Ûeur de bois sans y pénétrer, car
alors la moindre pesée d'une pince ou d'un outil quelconque
apparaîtrait sur la caisse ; au contraire,le travail de Toutil se dis-
simulerait bien mieux dans le trou produit par renfoncement de
la lance, et qu'il pourrait avoir pour résultat seulement d'agrau*
dir;
Uu'il convient, en outre, de remarquer, avec l'expertise, que le
pose de l'agrafe se fait avec l'outil breveté de Guibaud en uxxe
seule opération, tandis que la pose des scellés de Tascher en
nécessite trois ;
Attendu que, de ces constatations il ressort que les époux Gui-.
baud n'ont rien emprunté aux améliocations Tascher, qui consi^.
taieat principalement dans la suppression des trous destinés à.
ïtttaant aor la demande reconventionneUe, prononce la main-
iuie des saisies des 28, 39 et 30 novembre 1S94, 9 et 10 décem-
bre iB96 ; condamne Tascher frères, en réparation du préjudice
cAosi, h payer aux époux Guibaud, à titre de dommages-inté-
."éb, one somme de 2,000 francs ; autorise les époux Guibaud à
Ure insérer un extrait du présent jugement dans quatre jour-
UDx à leur choix, aux frais de Tascher frlres, saus qae le coAl
lûtal de ces insertions puisse dépasser 400 francs.
CejugenieoL ayant été frappé d'appel par MM. Taschxb,
fal confirmé par arrêt de la Cour de Bordeaux le âS juillet
1897, après plaidoiries de M" Laine et Allaht (du barreau
Je Paris) :
Li Coira, Sur l'appel principal :
Attendu que d'après la contre- expertise à laquelle les frères
Tucher ont faitprocéder pour essayer d'affaiblir les constatations
ajtérielles de l'expertise du 27 juillet 1896, le système des scel-
-é métalliques des ^poux Guibaud neserait inviolable qu'à la
addition qae la lance fnt noyée au-dessous de l'affleurement du
^udefagonàne pouvoir Ûre facilement saisissable par une
PAce quelconque ;
^^oe HM. Labroue et Georgel prétendent, en effet, qu'il est im-
posible que les déchirures produites sur les bords des trous de
^Oile, te referment asseï, après le passage de la lance, pour
■ 'ppoaer i son retour en recouvrant les crans de ladite lance ;
Oalb reconnaissent, il est vrai, que le refoulement ultérieur
'■< 1 agrafe peut amener naturellement le recouvrement de ces
^'na, mais, comme pour eux, rien n'est plus facile que de reti-
'-^Tagrafe en arrière pour lui rendre la position primitive, l'in-
'^lïté de la caisse ne se trouve pas davanlage assurée ;
*-t. attendu qu'il importe peu de rechercher, comme Tont fuit
— 52 —
MM. Labroue elGeorgel dans leur contre-expertise, si le système
des scellés-métalliques Guibaud assure plus ou moins TinTiolabi-
lité des caisses mais uniquement, comme Vont dit très justement
les premiers juges, si les époux Guibaud se sont ou non emparés
des améliorations des frères Tascher ; attendu qu'il résulte très
nettement de l'expertise à laquelle il a été procédé, en exécu-
tion de Tarrêt du 14 décembre 1895, que les époux Guibaud
n'ont point contrefait le scelié-métallique à goupille noyée des
frères Tascher, mais ont fait subir au système Bellen, aujour-
d'hui tombé dans le domaine public, des modifications oouTelles
n'empruntant rien aux améliorations que les frères Tascher ont
cru également devoir apporter à ce même système ;
Que, d'après les experts, il existerait plus de différence entre
le procédé Guibaud et le procédé Tascher qu'entre le système Tas-
cher et le système Belben ;
Qu'en effet, l'invention des frères Tascher consiste dans un
système de fermeture des caisses d'emballage à l'aide d'une
pointe à tête plate, reliant, dans le bois de la caisse, les deux
cêtés d'une plaque recourbée ;
Attendu que les deux coudes de cette plaque, après avoir été
enfoncés de force dans deux planches différentes de la caisse, de
façon à les agrafer, sont traversés avec déchirement du métal par
la pointe ou goupille dont la tête va se noyer ensuite dans le bois,
jusqu'à affleurement du coude supérieur du scellé. Que, dans ce
système, l'inviolabilité de la caisse est obtenue uniquement par
la juxtaposition de la tête de la pointe et de la branche supérieure
de l'agrafe opérée dans l'épaisseur du bois;
Attendu que le système Guibaud se compose aussi d'une agrafe
coudée, mais munie de trous ovales sur les deux branches, cette
agrafe se place également dans deux planches différentes de la
caisse que l'on veut agrafer ; une lance plate et pointue à son ex-
trémité, comportant deux crans ou épaulements, tient lieu de
goupille et s'enfonce en forçant dans les trous ovales de l'agrafe
qu'elle déchire pour se frayer un passage ; l'agrafe est ensuite refou-
lée plus profondément de façon qu'elle se déplace par rapport au
plan de la lance, dont les crans ou épaulements cessent par suite
d'être en regard des déchirures qu'ils ont déterminées ;
Que, dès lors, l'inviolabilité de la caisse, au lieu d'être obtenue
par les époux Guibaud, à l'aide du noiement de la tête de la lance
dans le bois comme dans le procédé Tascher, est assurée par les
crans ou épaulements de la lancç qui, par suite du refoulement
ultérieur de l'agrafe, ne se trouve plus en regard des déchirures
des parois des trous de cette agrafe ; — que c'est là une modifl-
cation sensible et nouvelle du procédé Belben, n'empruntant rien
— 53 —
aux améliorations qae les frères Tascher ont eux-mêmes appor-
tées à ce dernier système ;
Qae les époux Guibaud n'ont, par suite, nullement contrefait
leirefet Tascher;
Sur l'appel incident :
Attendu que plusieurs saisies ont été pratiquées par les frères
Tascher, les 28, 29 et 30 novembre 1894, l** et 3 décembre 1894 ;
qo elles ont porté sur trois machines à balancier servant à fabri-
quer les scellés, sur des outils de pose et sur 200,000 scellés mé-
talliques ;
Qu'en outre, les circulaires, imprimés, copies de lettres, notes
et correspondances des clients des époux Guibaud ont été enle-
Tés et remis à un séquestre ; -^ que les frères Tascher en ont
des copies qui leur ont permis de se mettre en relation avec la
clientèle des époux Guibaud :
Qu'ils ont même écrit à plusieurs clients des époux Guibaud
des lettres dans lesquelles ils les menaçaient de les impliquer
dans des poursuites en contrefaçon ;
Attendu enfin que les 9 et 10 décembre 1896, ils ont fait prati-
qaer de nouvelles saisies chez plusieurs clients des époux Gui-
baud ;
Que tous ces agissements ont causé à ces derniers un grave
préjudice dont les premiers juges n'ont pas suffisamment tenu
C4>mpte dans Tappréciation des dommages-intérêts ; — que la
Cour a les éléments suffisants pour fixer à la somme de 4,000 fr.
le montant des dommages-intérêts dus par les frères Tascher;
Par ces motifs. Et ceux non contraires des premiers juges, la
Cour, sans s'arrêter à l'appel de Tascher frères et faisant droit
au contraire à l'appel incident des époux Guibaud envers le ju-
gement du Tribunal civil de Bordeaux du 13 janvier 1897, tout en
confirmant ledit jugement dans toutes ses autres dispositions
pour sortir effet, l'infirme quant au quantum des dommages-in-
térêts alloués aux époux Guibaud parles premiers juges ; etsta-
taant à nouveau condamne les frères Tascher à payer aux époux
Guibaud la somme de 4,000 francs à titre de dommages-intérêts,
prononce en tant que de besoin la mainlevée des saisies des 1«^,
3 décembre 1894 du ministère de M® Vallade, huissier à Bordeaux,
pratiquées chez MM. Delor et Gie, Achambeaud frères et Cie, et
Xomus-Breynat et Cie, déboute toutes parties de toutes plus am-
ples demandes, fins et conclusions comme non recevables autant
qoe mal fondées, condamne Tascher frères à l'amende et en tous
l«s dépens.
Sur pourvoi des frères Tascher, la Cour de cassation
— 64 —
(Ch. des requêtes) a, sous la présidence de M. Tanon, pré-
sident, après avoir entendu M. le conseiller Bernard, en
son rapporl,M« Sadvel avocat, en ses plaidoiries,el M.Puech
avocat général en ses conclusions, rendu Tarrét de rejet
suivant:
La Cour, Sur le moyen unique du pourvoi tiré de la violation
des articles 19 et 40 de la loi du 5 juillet 1844 et 7 de la loi du
20avrili810: ^
Attendu que les sieurs Tascher frères soutiennent que, sans
motiver sa décision, Farrét attaqué a rejeté leurs conclusions
de première instance et d'appel dans la partie qui tendait à éta-
blir qu'il résultait tant des saisies opérées au début de Tins-
tance que de celles pratiquées en décembre 1896 et des docu-
ments saisis chez Guibaud lui-même, que Toutil destiné à la pose
des scellés Guibaud contenait un appareil accessoire destiné à
noyer la tête de la lance, même au-dessous de TafQeurement du
bois et qui ne pouvait, vu la saillie du poinçon, être employé
sans que le noiement de la lance se produise ;
Mais attendu que ce moyen manque en fait, qu^au chef des
conclusions ci-dessus prises par les frères Tascher en première ins-
tance et en appel il a été répondu p^r le tribunal, dont le juge-
ment a été contirmé au principal avec adoption de motifs par
Tarrôt attaqué ; que le jugement constate qu'on ne comprendrait
pas que les époux Guibaud eussent cherché à noyer la lance dont
s'agit; qu'en effet suivant lui, Texamen des agrafes posées sor
les caisses démontre que la prise de la lance qui n'a pas de tète
est plus difficile et surtout laisserait beaucoup plus de traces,
lorsque la lance est restée à fleur de bois sans y pénétrer, car
alors la moindre pesée d'une pince ou d'un outil quelconque ap>
paraîtrait sur la caisse et au contraire, le travail de l'outil se dis-
simulerait bien mieux dans le trou produit par l'enfoncement de
la lance et pourrait avoir pour résultat d'agrandir ; que de son
côté, l'arrêt attaqué a non seulement adopté le motif qui pré-
cède, mais qu'il a ajouté que l'inviolabilité de la caisse au lieu
d'être obtenue par les époux Guibaud à l'aide du noiement de la
tête de la lance dans le bois, comme dans le procédé Tascher ^
est assurée par les crans ou épaulements de la lance qui, par
suite du refoulement ultérieur de l'agrafe, ne se trouve plus en
regard des déchirures des parois des trous de cette agrafe ;
Attendu que l'arrêt attaqué, après ces constatations souverai-
nes, en conclut, souverainement aussi, que les époux Guibaud
n'ont rien emprunté ni contrefait du brevet des sieurs Tascher
frères ; qu'en statuant ainsi, l'arrêt attaqué n'a point violé les
-55 —
articles 19 et 40 de la loi da 5 juillet 1844 et qu'il s*ett conformé
aux exigences de TarUcle 7 de la loi du 20 avril 1810 ;
Pab CBS MOTiTS, Rejette, etc»
Akt. 4102.
iitaie lire'retée. — Reprodoeiioii d«iMi un
ait tiers. — Fallb doiiimaire*Me. -- Hom-
et intéréte.
S'il e$t de principe que la mauvaise foi est un élément
nécessaire de la concurrence déloyale^ certains actes d'un
commerçant^ lorsqu'ils sont de nature à nuire à un autre
commerçant et qu'ils laissent à la charge de leur auteur une
faute ou une imprudence^ peuvent^ en dehors de toute in-
tention frauduleusCy donner ouverture à une action en
dommages-intérêts (1).
Notamment^ la reproduction^ dans un catalogue, d'une
machine brevetéey étant de nature à laisser croire à des
fabricants spéciaux et à indiquer aux tiers que le droit pri-
vatif de Vinventeur est contesté ou même n'existe pas, cons-
titue un fait dommageable dont il est dû réparation.
ïTHb. de la Seine, 5 JauTier 1809.— Willame et Gie c. Bady et Kircheis.)
Ainsi jugé par jugement en date du 5 janvier 1899
par la troisième chambre du tribunal de la Seine» sous la
présidence de M. Lefsbvrk-Dbvaux, après conclusion de
M. Rome substitut et plaidoiries de M"* Dbsiardin, Justal
et WssBR, avocats :
Lb Tribunal, Joint, vu la connexité, la demande reconvention-
nelle à la demande principale, pour être statué par un seul et
même jugement ;
Attendu que la Société Willame et Gie prétendant que Bady,
représentant à Paris, de la maison Kircheis de Ane en Saxe,
dessine, reproduit et met en vente, dans un catalogue en langue
française, une machine à faire les joints hermétiques des boites
méUiHiqaes, machine qai serait la contrefaçon de celle pour la-
quelle elle a obtenu le brevet 172,366, poursuit Bady et Kircheis
comme contrefacteurs solidaires ; que, leur reprochant en outre,
(1) V. PouiUet, Marques dêfab., n» 675 et 678.
— 56 —
à raison de ces faits, un acte de concurrence déloyale, elle con-
clut à une condamnation solidaire en dommages-intérêts à fixer
par état ;
Sur la contrefaçon :
Attendu que la loi a précisé les actes qui constituent la con-
trefaçon ainsi que ceux qui lui peuvent être assimilés ;
Que les faits reprochés aux défendeurs ne rentrent dans au-
cun de ces cas et ne sauraient constituer une contrefaçon ;
En ce qui touche l'acte de concurrence déloyale :
Attendu que, sMl est de principe que la mauvaise foi est un
élément nécessaire de la concurrence déloyale, certains actes
d'un commerçant, lorsqu'ils sont de nature à nuire à un autre
commerçant et qu'ils laissent à la charge de leur auteur une
faute ou imprudence, peuvent, en dehors de toute intention frau-
duleuse, donner ouverture à une action en dommages-inté-
rêts; •
Attendu que les défendeurs, en reproduisant dans leur catalo-
gue destiné à la clientèle française, la machine pour laquelle la
société demanderesse a pris un brevet dont ils ne contestent pas
la valeur, ont commis un fait indu, une légèreté, une impru-
dence pouvant porter préjudice à cette dernière ;
Que la reproduction de la machine brevetée dans ce catalogue
était de nature à laisser croire à des fabricants spéciaux, et à in-
diquer aux tiers, que le droit privatif de la Société Willame et
Gie était contesté ou même n'existait pas ;
Que l'intention frauduleuse fût-eJle écartée, le fait domma-
geable n'en existe pas moins et ne saurait être excusé par cette
allégation que, depuis 1886, Kircheis a vendu à Willame et Cie
des appareils choisis par ces derniers dans le catalogue où figu-
rait la machine brevetée ;
Qu'il est dû à la société demanderesse des dommages-intérêts
pour la fixation desquels ]e tribunal possède, dès à présent, les
éléments nécessaires ;
Sur la demande reconventionnelle :
Attendu qu'il ressort de ce qui précède qu'elle ne saurait être
accueillie ;
Par ces motifs. Dit et déclare la Société Willame et Gie non re-
cevable, mal fondée en sa demandé en contrefaçon, l'en déboute
Déclare la saisie du 30 décembre 1897 de nuleflet;
Dit et déclare que la condamnation aux dépens sera une ré-
paration suffisante du préjudice causé ;
Dit n'y avoir lieu d'ordonner les insertions demandées ;
Déclare Bady et Kircheis non recevables, mal fondés en leur
demande reconventionnelle, les en déboute ;
Les condamne solidairement pour les causes susénoncées, au
— 58 —
7 décembre 1877, Goupil c. Hermann, Ann,, 78.141 (l'ar-
tiste devait livrer 6 tableaux dont les titres et les prix
étaient convenus). — V. Trib. Seiné,29 Juillet 1892, Faure
c. Charlemont, Ann., 93.123 (le peintre, pour éteindre une
dette de 73.000 francs,promettait de remettre chaque année
deux tableaux et la moitié du prix devait en être attribuée
à ses créanciers) (1).
En ce qui concerne les écrivains, des doutes ont été
néanmoins émis sur la validité du contrat, lorsque Fau-
teur, au lieu de stipuler avec un éditeur, un libraire ou un
directeur de théâtre,a traité avec un tiers. C'est, par exem-
ple, à un tapissier, à un bijoutier ou à un banquier que le
littérateur propose de céder les droits à venir sur un on*
vrage qui n'est pas encore mis au jour.
Laurent dans son Traité de droit civil (t. 24, n* 466) re-
marque que s'il y a eu déjà une convention de l'auteur
avec un éditeur, l'auteur a un droit éventuel pour le cas
où il composera l'œuvre annoncée, droit susceptible d'ê-
tre, dès à présent, transmis à un tiers. Mais, prétend-il, si
rœuvre, non encore composée, n'a fait l'objet d'aucun
traité avec un éditeur, il n'existe aucun débiteur, même
éventuel, des droits d'auteur et il n'y a rien qu'on puisse
céder.
Notons que Laurent, aussi bien qu'un arrêt de 1854 ci té
plus loin, raisonne ici sur la cession des créances qui nais-
sent au sujet de l'œuvre future, tandis qu'il s'agit, non pas
de la cession d'une créance, mais de la cession de l'œu-
vre elle-même.
Il est évident que si l'écrivain n'a pas trouvé d'éditeur,
s'il n'a pas de contrat d'édition signé par avance, il ne
peut pas céder le bénéfice de ce qui n'existe pas. Mais
nous étudions une question différente, quand le littéra-
teur n'a pas de droits à transmettre, il peut avoir des obli-
gations à exécuter. Il peut en avoir vis-à-vis de tiers qui
ne sont ni directeurs de théâtre ni libraires. Et c'est ce
dont ni Laurent, ni certains autres jurisconsultes (2) ne
(1) V. dans le même sens : Pouillet, Prop7\ lUt», n*« S^, 254 et d05 ;
Huard fils, Des contrats entre les aut, et les édit.^ n* 38 ; Pand,franç!
Rép,, V» Propr, litL, n«« 1740 et suiv. * '
(2) MM. Aubry et Raa, t. 4, § 359, p. 490 (4* édit.) et GuiUoaard, Traité
de la vente f t. S, n» 750, reproduisent parement et simplement, comme
k
- 59 -
se sont préoccupés. Pour ma part je ne vois pas pour-
quoi un écrivain ne pourrait pas dire même à son tapis-
sier : « je m'engage à écrire et à vous remettre le ma-
nascrit d'un roman ; vous aurez la faculté d'en disposer
3t d'en garder les bénéfices pécuniaires >. En dépit de
cette convention, Técrivain conservera sans doute un cer-
tain droit de contrôle, personnel et inaliénable, sur la pu-
blication de son œuvre. Mais un semblable traité anticipé
sur des droits de reproduction à venir ne me semble avoir
rien d'illicite. La distinction suivant laquelle le contrat se-
rait valable si un éditeur y a concouru,— et Irrégulier dans
riivpothèse contraire» — ne se justifie pas. Dans l'un et
lautre cas, si l'écrivain manque à son engagement, son
obligation, qui est une obligation de faire, se résout en
dommages-intérêts.
Les seules conditions pour que la convention soit vala-
ble sont que cette convention porte sur un objet précis et
déterminé et qu'en outre, les tribunaux n'y puissent trou-
Ter un de ces engagements indéfinis et perpétuels qu'ils
annulent comme destructifs de la liberté humaine (1).
Ces considérations me paraissent de nature à concilier
les deux décisions de la Cour de Paris rendues en 1854 à
l'occasion d'Alexandre Dumas père. Alex. Dumas avait
transporté au sieur Chéramy une somme de 40.000 francs à
prendre sur celles qui pourraient lui être dues en vertu
des traités faits avec les journaux le Constitutionnel^ le
Siècle et la Presse^ et avec le Théâtre historique. Les trai-
tés avec les journaux existaient ; ils étaient relatifs à des
œuvres non encore composées : la convention avec Ché-
^my avait un objet bien déterminé. La Cour décida :
« que cette convention ainsi formulée n'est pas contraire
à la loi, rien ne s'ôpposant à ce que les gains à prove«
nir de contrats qui confèrent à chacune des parties des
droits et devoirs réciproques soient la matière d'une ces-
sion .. (Paris, 27 nov. 1854, D. P. 56.2.253.)
Quelques mois avant, la Cour avait donné une autre so-
lution dans les circonstances suivantes :
Linrent da reste, la solation de l'arrêt du 31 janvier 1854, sans discus-
soa et poDr ainsi dire sans motifs à l'appni.
\V} Cfr. snr ce dernier point les questions posées dans le jugement
Charlemoot : Trib. Seine, 29 juiUet 1902, Ann,, 93.123. Le tribunal a
nlidé les obligations.
— eo —
Dumas avait cédé à certains de ses créanciers « le pro-
duit de ses œuvres dramatiques faites et à faire >. Les
créanciers avaient signifié le contrat à la Société des au-
teurs dramatiques. Pour les œuvres qui existaient avant
le traité, pas de difficulté ; pour les autres, la Cour dé-
cida : « que personne ne peut être débiteur des produits
d'une chose qui n'existe pas ; que le produit des œuvres
littéraires qu'un auteur a projetées mais qu'il n'a pas
encore composées ne saurail donner lieu à une cession ;
d'où il suit, que le cessionnaire ne peut être saisi par un
acte de cette nature, à l'égard des tiers, des deniers
provenant des œuvres composées après la date de la
signification. » (Paris, 31 janv. 1884, Doyen c. Dumas,
D. P. 58.2.179.)
Les formalités du transport des créances avaient, dans
celte espèce, été employées mal à propos ; mais la Cour
statuait-elle expressément sur le point de savoir si Alexan-
dre Dumas aurait pu contracter valablement son obliga-
tion sous une autre forme ?Les motifs de l'arrêt présen-
taient quelque ambiguïté.
La question s'est, depuis, représentée nombre de fois
pour les auteurs dramatiques. On peut apprécier la juris-
prudence du Tribunal de la Seine, d'après les deux déci-
sions suivantes :
!'• Affaire : Léon Vasseur. -i Trib. Seine, 6 juin 1894.
Attendu que si ladite cession est valable quant aux produits
des œuvres musicales et pièces de théâtre déjà créées et livrées,
il n'en saurait être de même pour les droits d'auteur sur celles
qui étaient simplement projetées mais non composées, qu'évi-
demment il dépendait de Vasseur de faire ou de ne pas faire ;
et que par suite cette convention n'a pu engendrer un lien de
droit, parce qu'elle était contractée sous une condition pure-
ment potestative de la part de Tobligé, qu'une telle convention
est donc nulle aux termes de l'article 1174 du Gode civil.
2* Affaire : Belot. — Trib. Seine, 25 mai 1897.
Attendu que pour assurer à Bloch le recouvrement de ce qu'il
devait, Belot par acte sous seings privés en date du 13 novembre
188.3,enregistré le 9 du même mois, lui a transporté une part du
revenu de ses œuvres dramatiques savoir : 1^ la moitié de tous
les droits résultant à son profit des représentations de ses pièces
M
i
aoqniËaie de tons les droits qui pourraient être perçus sur ses
EOTresi venir >
Attenda en ce qui concerne le transport des droits d'auteur à
potcToir sur les œuvres à venir, que la conveution est radicale-
ment nulle comme entachée d'une condition potestative de la part
da cédant ; qu'elle ne peut produire aucun effet utile (1).
La solulion est exacte en ce sens qu'il est certain que
le contrat : < je cède a M. X... le produit des œuvres que
je pourrai faire », est indéterminé et conclu sous une
condition prolestativede la part du débiteur. Le cédant,
lié par des termes aussi vagues est libre de ne composer
incaae œuvre ; il n'aura pris, en réalité, aucun engage-
méat
Mais on voit en même temps, en se reportant aux déd-
iions déjà citées dans cet article, combien il sérail facile
lie rendre le contrat valable en y ajoutant un peu de pré-
cision. Il suffirait de dire: « je m'enfitage envers M. X... à
eomposer deux (ou trois ou dix) œuvres dramatiques
cbaqne année, pendant X années, à les faire Jouer, et à
loi en laisser loucher les bénéSces > ou < :. . . à lui en re-
aetlre les manuscrits pour les faire jouer ou éditer et en
toncherles bénéfices. * Un tel engagement ne comporte
aucune condition potestalive ; il serait régulier. 11 y a là
ODJqnement une question de forme et de rédaction dans
le libellé du contrat ; mais cette question est d'une grande
importance, puisqu'elle entraîne la validité ou la nullité de
l'acte.
U Cour de Paris, dans l'arrêt du 31 janvier 1884,a tran-
thé nne autre question, à propos des significations faites
i l'a^nt de la société des auteurs dramatiques. Elle a dé-
cidé que cet agent n'était pas le débiteur des auteurs,
nuis leur représentant ou mandataire. Loi^qu'une cession
fedroila d'auteur lui est signifiée, cette signification peut
ivûir effet sur les deniers dont l'agent est détenteur à ce
moment ; mais, ajoute la jurisprudence, elle laisse libres
Iwsonimes qui seront encaissées postérieurement. Cfr-
dans le même sens : Trib. Seine, 12 juillet 1898 ,D. c. W,,
jonmal la Loi, 1898. p. 745. — Et le jugement précité du
(1] CIr. observ. de H. Dams, dans \e Dr oU d'auteur, 1897, p. 1Ï8.
— 62 —
6 juin 1894. Sur ce jugement, M. Darras (dans le Droit
d^ auteur j 1895, p. 48) a très juslement fait remarquer com-
bien cette solution est grave pour les cessionnaires des
auteurs dramatiques ; ils auront grand*peine à assurer
pour Tavenir l'effet des cessions qui leur ont été consen-
ties. Il peut s'ensuivre une sérieuse atteinte au crédit
des écrivains.
Quoi qu'il en soit,remarquons que la jurisprudence fran*
çaise sur la cession des œuvres futures s'est presque
complètement formée à l'occasion des engagements exces-
sifs qu'Alexandre Dumas avait dû contracter vis-à-vis de
ses créanciers. Cette jurisprudence, on vient de le voir,
ne s'est pas démentiejusqu'à présent quant aux questions
concernant les auteurs dramatiques. Elle a été inspirée
par cette idée fort équitable qu'il faut malaisément tolérer
que l'écrivain engage l'avenir par des contrats vagues
dont il n'aurait pas mûrement précisé les détails et pesé
les conséquences.
C'est plutôt à propos des artistes qu'une théorie plus
large s'est fait jour (V. surtout le jugement de 1892, aflf.
Charlemont).
La liberté des conventions est absolue ; les engagements
que prend un homme, même sous la contrainte des cir-
constances et poussé par les besoins d'argent, doivent
être respectés, s*ils sont clairs, précis, et non interdits
par un texte formel. Tous les contrats de travail reposent
sur l'avenir. La loi doit être tulélaire, mais libérale, aussi
bien pour l'écrivain aux gages des libraires, que pour
l'ouvrier qui loue aux capitalistes la force de ses bras(l).
Albert Vaunois.
Art. 4104-
JoaniAltote». — X^ooa^e fie ser^lees* —
Congédiement.
La question de savoir si le fait de congédier un rédacteur,
(1) Le crédit littéraire peut s'exercer de bien des façons, par exemple
la mise en gage an droit d*autear (V. obs. de M. Darras, dans le Droit
cf'att^eur,1899, p. 55). Les voies d'exécution forcée sur le droit d'anteur
donnent également lien à de nombreuses difficultés. Toutes ces ques-
tions étaient en dehors du cadre de cet article, limité aux œuvres fu-
tures.
— 63 —
toec lequel aucun contrat n'a été passé, peut donner ouver-
tvre à des dommages-intérêts, est subordonnée aux circons-
tances de fait dans lesquelles le congé a été donné (1).
/{ n'y a lieu à dommages-intérêts si un préavis a été
donné avec un délai suffisant, délai que les tribunaux ont
^woir d'apprécier, et siy en outre, le congé n'apparaît
pas avoir été donné dans des conditions abusives oudolosi-
m (2).
La preuve de Fabus, du dol ou de V insuffisances des dé-
lais incombe à celui qui les invoque (3).
(C. de JPsiris, 7 décembre 1899. ~ Glémencean c. joornal le Soir*)
A la date du 14 avril 1897, le Tribunal civil de la Seine
avait rendu le jugement suivant :
b& TuBONAL, Attendu que la lettre de Fernand Xau à Glémen-
ceaa qui constate rengagement de celui-ci comme rédacteur au
journal Le Soir, n'indique pas la durée de cet engagement ;
Attendu qu'aux termes de Farticle 1780 du Gode civil le louage
de service, fait sans détermination de durée, peut toujours cesser
par la volonté de Tune des parties contractantes ;
Attendu que le contrat qui se forme entre le directeur du jour-
ml et des rédacteurs est d'autant plus soumis à cette règle du
droit commun, qu'à raison de sa nature toute spéciale, il impli-
que, pour chacune des parties, la faculté de rompre son engage-
ment quand elle le juge convenable et sans avoir à rendre compte
des motifs de sa décision ;
Attendu que si le directeur d'un journal ne peut user de son
droit de congédier un rédacteur, qu'en observant les usages et au-
tres conditions expresses ou tacites de l'engagement, c'est au
rédacteur congédié qu'incombe la charge de prouver à la fois la
faute qu'il impute à son cocon tractant et le dommage qu'il a subi
par suite de cette faute ;
(i-3) Cet arrêt est intéressant à raprocher de celui rendu par la même
chambre de la Cour de Paris, le 27 juillet 1897, à la requête de Vonoven
•tiotres contre Vlntransigeant (An/i., 98.30). Le jugement avait été
renda par la l** chambre du tribunal civil de la Seine le même jour que
ceux ^ ont été infirmés par l'arrêt du 27 juillet 1897 et à peu près
daas les mêmes termes. Biais tandis que l'arrêt du 27 juillet 1897 a in-
toé en constatant qu'en &it les rédacteurs de Vlntransigeant avaient été
nofcfféi abusivement, par un pur caprice, Tarrêt du 7 décembre 1899
confirme parce qne,dan8 l'espèce, le congé ne parait pas avoir été donné
^vement et qu'en tous cas le demandeur ne fait pas la preuve de
l'abus, du dol ou de Tinsuffisance des délais. Les principes appliqués
par les deux arrêts restent les mêmes (V. Ann,, 98.30, la note).
--64-
Attendu que Glëmenceaa n'établit pas que Xau, en faiMint ees-
«er au mois de janvier 1896 sa collaboration au journal Le Sotr,
ait méconnu les usages de sa profession dont la preuve n'est pas
rapportée, ni aucune des autres conditions môme tacites auxquel-
les aurait été soumis son engagement ;
Attendu, en conséquence, que sa demande ne peut être ad-
mise;
Par ces motifs, Déclare Clemenceau mal fondé en sa demande ;
L'on déboute ;
Et le condamne aux dépens,
Sur appel, la Cour de Paris (1''' ch.)» sous la présidence
de M. Lbpbbvi^e de Viefvillb a rendu Tarrêt confirmatif qui
suit:
La. Cour, Considérant que la question de savoir si le fait de
congédier un rédacteur, avec lequel aucun contrat n'a été passé»
peut donner ouverture à des dommages-intéréts,est subordonnée
aux circonstances de fait dans lesquelles le congé a été donné ;
Que, si un préavis a été donné avec un délai suffisant, délai
que, a défaut d'usages spéciaux, dont il n'est justifié, les tribu-
naux ont pouvoir d'apprécier, si, en outre, le congé n'apparaît
pas avoir été donné dans des conditions abusives ou dolosives, il
n'y a lieu à dommages-intérêts ; que la preuve de l'abus, du dol
ou de l'insuffisance des délais, incombe à celui qui les invoque ;
que cette preuve n'est point rapportée par Clemenceau à Rencon-
tre du journal Le Soir ;
Par css motifs. Et adoptant les motifs de premiers juges ;
Confirme avec amende et dépens.
Plaidants : M** Maurice Bernard et Aubin, avocats.
Art, 4405.
Brevet». — Aetlon en nnlUié, en déeliénnee, pro-
priété des brev'etn. — * Proeédnre •ootmalre. — Ae-
Uon en eontreteçon. ~ Proeédnre ordlnnlre.
Les affaires civiles doivent être jugées dans la forme or-
dinaire, à moins que par exception elles ne soient classées
parmi les affaires sommaires.
Les actions en nullité ou déchéance de brevets^les contes^
UUions relatives à la propriété des brevets, doivent étreju-
!
— 65 —
Sée$ par les tribunaux civils comme matières sommaires ;
mais les poursuites civiles en contre façon doivent être jugées
en la forme ordinaire, alors même qu'avant de les intro-
duire^ le demandeur aurait fait saisir des échantillons des
produits qu'il prétend avoir été contrefaits .
n n'en serait autrement que si le défendeur agissant ra-
conventionnellement avait soulevé une question de nullité,
de déchéance ou de propriété de brevet (1).
(G. de Douai, 81 juillet 1809. — Boudreaux c. Damade et Cie.)
Le jugement rendu dans celle afTaire par le tribunal ci-
vil de Douai, le 24 février 4899 (Awn., 99.221) a été infir-
mé par la Cour de Douai, le 21 juillet 1899, en ces termes :
La CouB, Attendu que les affaires civiles doivent être jugées
il) L'arrèi décida que les poarsoites en contrefaçoti, n'étant pae oom*
prises dana rénomération de l'article 34 de la loi de 1844 qui vise spécia-
luDent les demandes en nnliitë ou en déchéance, restent soumises aux
réfies ordinaires de la procédure et que par suite les frais doivent être
axés suivant le tarif des frais en matière ordinaire. On peut se de-
ciander si cette solution, résultat de l'interprétation stricte des textea
oeâ articles $4 et36 de la loi de 1844, est conforme à l'intenlion du législa-
tenr, car, les demandes en contrefaçon, tenant en suspens les droits in-
dostriels et commerciaux do défendeur et mettant en suspicion sa
bonne foi, constituent des litiges dont la solotion est urgente et dès
lors rentrent dans la catégorie des demandes requérant célérité, qui. aux
'iTmta de Tartide 404 du Code de procédure, doivent être considérées
c^mme matières sonunaires (Voir Angers,27 février l898,Grawitz,cité par
i'OQîtlet» Brev, ctinv., 4« éd., p. 559). Mais 11 semble bien, en admettant la
'séorie derarrél, que la solution ne serait pae changée, ei reconventlon-
Kîlsnient ce déiendear avait soulevé nne qoeslion de nullité, déchéance
n propriété de brevet, car l'application des prineipes généraux conduit à
■i règle que c'est la nature de l'instance principale et elle seule qui doit
déterminer la natnre de la taxe : si la demande prlncipsile soulève nne
çuèstion de propriété ou de validité de brevet, l'affaire est sommaire et
K&bre dans las prévîMona de l'article 3& ; dans le cas contraire, elle reste
srdiaatre, quelle qae soit la nature de la demande reconventionnelle
*c«r Bocérian, Prop. mcf., n«35l). Or, la Cour de cassation a décidé
*;3l1 7 avait matière sommaire, dans une espèce où la nullité du brevet
Btvût été aoolevée qtte par exception snr l'action en contrefaçon, par
et notif qa'il a'agiaeail bien d'une contestation relative à la propriété
Sun brevet, qni d'après l'article 3 de la loi du 5 juillet 1844, devait être
^traite et jugée dans la forme prescrite pour les matières sommaires
îî. Paris, 13 février 1865, Cornevin, Ann.,iSS, 69). Ne serait-il pas
H«s logique de dire qne tontes les actions en contrefaçon doivent être
^^■■idéréee eomme natière sommaire, soit au point de vue de Tarti-
<^ M dn Gode de procédure civile, soit au point de vue de la loi de 1844,
ar i]y a toujours dans l'action en contrefaçon nne contestation sur les
^li da breveté, donc sur la propriété du brevet. A. T.
— 66 —
dans la forme ordinaire i moins qae par excepf on elles ne soient
classées parmi les affaires sommaires ;
Attendu que les articles 34 et 36 de la loi da b juillet 1844 sar
les brevets d'invention disposent que les actions en nullité et
en déchéance, ainsi que les contestations relatives à la propriété
des brevets, doivent être portées devant les tribunaux civils et être
jugées dans la forme prescrite pour les matières sommaires ;
Attendu que les poursuites civiles en contrefaçon n'étant pas
comprises dans Ténumération de Tarticle 34 restent soumises à la
règle générale et sont ordinaires à moins que le défendeur agis-
sant reconventionnellement, n'ait soulevé une question de nullité ,
de déchéance ou de propriété de brevet,et fait ainsi rentrer l'affaire
dans la classe des matières sommaires ;
Attendu, en fait, que par son assignation du 20 juillet 1897 ainsi
quepar ses conclusions de première instance et d^appel,Boudreaax
a demandé que Damade et Gie fussent déclarés contrefacteurs de
son brevet d'invention et condamnés à lui payer des dommages
et intérêts à libeller ; que Damade et Cie, de leur côté, ont pré*
tendu que les produits de leur fabrication ne constituaient pas
une contrefaçon ; qu'ils étaient l'objet d'une poursuite vexatoire
et,à ce titre, ont demandé reconventionnellement 10.000 francs
de dommages et intérêts;
Attendu que cette double instance ne soulève aucune question
de nullité de déchéance ou de propriété des brevets ou certificats
d'addition invoqués dans la cause ; qu'elle a donc conservé les
caractères d'une affaire ordinaire ;
Attendu que les contestations relatives à des saisies sont, en gé-
néral, sommaires aux termes de l'article 404 § 4 du Code de pro-
cédure civile,parce que par leur nature elles requièrent célérité ;
mais qu'on ne peut considérer l'instance en contrefaçon de Bou-
dreaux comme une affaire de saisie, bien que, avant de Tiotro*
duire, il ait fait saisir chez les défendeurs quelques échantillons
de leurs produits.
Attendu d'ailleurs, que la saisie pratiquée en matière de con-
trefaçon est le plus souvent seulement descriptive, ou ne porte
que sur un petit nombre d'objets ; qu'elle n'a pas la généralité des
saisies ordinaires et n'imprime pas à l'action qui en est la suite
le caractère d'urgence qui fait considérer comme sommaires les
frais des saisies ;
Que, par suite, l'affaire Boudreaux contre Damade, ne rentrant
pas dans les cas d'exception prévus par les articles 34 et 36 da
la loi du 5 juillet 1844 et 404 du Gode de procédure civile, est or-
dinaire et a été régulièrement taxée comme telle ;
Par gbs motifs, Déclare Damade et Gie mal fondés dans leurs
— 67 —
Eonelnsions ; les débonte de leur opposition et dit que la taxe en-
treprise sortira son plein et entier effet ; condamne Damade aux
dépens.
M. Bosquet, président ; M. Scuulbr, ministère public. —
M« Pomy, avocat.
Art. 4106.
iwet, — Bmployé. — CTollaboration . —
Copropriété.
Lorigu'une machine nouvelle est construitey sous la dû
rection cTun ingénieur , mais aux frais et dans les ateliers
iune sociéêéy et que, d'autres ingénieurs, dessinateurs ou
ouvriers de la société, ont coopéi*é à son exécution, chacun
apportant à Vœuvre sa part d'imagination, de travail et de
sain, rinvention ainsi réalisée doit élre considérée comme
lu propriété commune de Vingénieur et de la société (1).
(i) Li <iiiestîon de savoir à qai appartient la découverte faite par une
penonne qui est au service, aux gages d'un patron est, avant tout, une
fsestioB de fait, dont la solution dépend de circonstances on de con-
veations particulières. Si Touvrier ou l'employé a été engagé spéciale-
ment en vue d'effectuer des recherches déterminées, on doit décider,
même en l'absence de convention formelle que Tinvention qui n'est que
k résultat da travail auquel l'employé était préposé appartient au
patron. Y. Ponillet, Brev. âfinv., n» 188 et la jurisprudence citée no-
tuoment, Lyon, 19 mai 1886, Bobard, Annales, 87, 181.
S, au contraire, l'invention est en dehors des travaux ordinaires de
remployé on en dehors de ses instructions, il garde la propriété de son
invention, alors même que ce serait pendant les heures consacrées à
son travail, et grâce aux instruments, outils en matière première appar-
tenir au patron qu'il aurait pu le réaliser, sauf à être condamné, au
besoin, dans ce cas, à des dommages et intérêts par le préjudice causé
an patron. V. Ponillet, n* 190 et Bruxelles, 9 janvier 1893, Chantrenne,
umée 1803, p. 282 et plus loin, Trib. civ. Seine, 2 juin 1899, Fleury.
S enfin la réalisation de la découverte est le résultat des efforts com-
binés de l'employé et de celui qui le met en œuvre, l'invention devient
b propriété oommnne, sauf à évaluer la part de chacun dans cette
copropriété,an prorata du résultat de leur collaboration.Lyon,26 déc.1857,
Coquerel, S. 59.1.768 et plus loin, Trib. civ. Bruxelles, 17 mars 1897,
Bandiept. La jurisprudence applique les mêmes principes ans fonc-
tionnaires publics qui sont des employés comme les autres et restent
propriétaires des inventions qn'ils peuvent faire, suivant les distinctions
pr^emment rappelées. V. Pouillet, n« 193 et jurisprudence citée et
*uii en matière de propriété artistique , Bruxelles, 28 nov. 1898,
Oopoat, Pasierisie, 99.2.177.
A. T-
I
,^''
-68-
(Tribanal de la Seioe^lO mai 1808.— Société Clément, Gltdiator^Hvnb
c. Pingaalt et Clerc.)
Ainsi jugé par le tribunal dé la Seine (3« ch.) le 10 mai
1898 sous la présidence de M. Roollkau après conclusions
de M. Drouart, substitut et plaidoiries de MM^* Pooujjrr et
Allart.
Lb Tribonal, En la forme : Attenda que Clerc et Pingault ont
formé contre la société Clément, Gladiator et Humber uoe de*
mande en paiement de 150.000 francs de dommages et intérêts
pour contrefaçon d*un brevet dlavention ; que, d*autre part, la
société Clément, Gladiator et Humbert a introduit contre Clerc et
PingauU une demande en résiliation de convention et en reven-
dication du brevet argué de contrefaçon ;
Que ces instances sont connexes et doivent être jointes.
Au fond : Attendu qu'aux termes d*une convention en date du
8 décembre 1895 Clerc et Pingault ont consenti à la Compagnie
des cycles Gladiator, le monopole pour la France de la construc-
tion et de la vente de procédés électriques faisant l'objet d*uD
brevet déposé le 4 décembre 1895 par moteurs électrlquaë apê»
cialement applicables à la propulsion des cycles et voitures au-
tomobiles; que par la même convention, il était arrêté que
Pingault entrerait à l'usine de la Compagnie aux appointements
de 300 francs par mois pour s'occuper spécialement de la fabrî*
cation des appareils brevetés ;
Attendu que dans le brevet du 4 décembre 1895 Tappartil
décrit pour la propulsion des cycles, se compose d'un moteur
électrique actionné par des accumulateurs et muni sur l'arbre de
rinduit d'une poulie destinée à communiquer, par friction sur
le bandage du pneumatique, le mouvement à la roue d'arrière
au-dessus de laquelle l'appareil est installé ;
Attendu que pour des causes multiples faciles à oomprendre,
•et appareil ne pouvait fonctionner que d'une manière défec*
tueuse avec une perte de force considérable ; qu'en présence
des résultats peu satisfaisants obtenus, les rechercbes de Pin-
gault et celles des ingénieurs et des ouvriers de Tuslne avec
lesquels il travaillait amenèrent l'adoption pour l'appareil d*ane
position différente donnant au cycle plus de stabilité et permet-
tant d'utiliser dans des conditions meilleures la foroe produite ;
qu'une machine fut ainsi construite dans les ateliers de la Com-
pagnie Gladiator d'après un système nouveau ; que le moteur
disposé sur le cycle à la hauteur des pédales agissait à l'aide
d'engrenages et d'one dialne saoa fin sur la rose df anièie de la
machine et transmettant d*une manière pkis titile le meavemenl
- 09 —
que lu commaniquail réieetrieité «mmagatinéfl dans les acou-
■niatenrs ;
Attando que cette machina fut expérimentée avec tnceèa sur
ui Tëtodrome le S5 juin III96 et qaMl fot rendu compte de cette
épteave dans let JoitrnauK ipécianx et dan» llUustratUm qui
deoaa naa deecripiion et un deaein complet de i*appareil dans
le nnméro dn » juillet 1696;
Atteoda qae, le 24 juin 1896, Clerc et Pingault prirent en An-
gleterre un brevet qn*ils déposèrent en France le 4 août suivant ;
que ce brevet se réfère à un appareil identique à celui qui vient
d'être ci-dessus décrit ; q^'en effet on retrouve dans les dessins
qai accompagnent le brevet et dans la description du cycle
électrique tout lee 61émeiita de la machine construite dans les
ateliers de la Compagnie des eyoles Gladiator : même disposition
da moteur électrique actionné par des accamulateurs ; même
mode de transmission de la force k Taide d*engrena^cs destinés
à réduire la vitesse^ et d*une chaîne sans fin qui communique le
moavement ; qu*il est constant que Pingault et (]lerc ont dans
l'espèee f«it brereter i*appareil dont le modèle avait été conçu
et exécuté dans les ateliers de la Compagnie des cycles Gladiator ;
Attendu qu'il est établi par les documents versés aux débats
que le modèle breveté fut construit au moment où Pingault était
remployé de la Compagnie des cycles Gladiator, qu'il fut établi
aux frais de la compagnie dans ses ateliers, que non seulement
Piogault uiais d'autres ingénieurs et ouvriers de la Compagnie
coopérèrent à son exécution, que chacun apporta sa part d*ima^
giiiatioii,de travail et de soins, que Tinvention doit être considérée
comme la propriété commune de Pingault et Clerc, et de la Société
Gladiator;
Qu'en faisant breveter à Vétranger et en France Tinvention
^mmane, Pingault et Clerc n'ont pu priver la Compagnie des
cycles do droit qui loi appartenait, qu'il suit de là que ladite
société ne saurait être considérée comme contrefacteur à Tégard
de Pingault et Clerc et qu'elle est également mal fondée à reven-
diquer pour elle le bénéfice exclusif d'une invention dont elle
n*estqae copropriétaire ; qu'il devient sans intérêt de rechercher
si la machine saisie diffère du modèle breveté comme le prétend
la Compagnie des cycles par quelques points de détail dans la
ecQStroctton du moteur et dans son mode de fixation sur le cadre ;
qae ces différences légères eussent été d'ailleurs insuffisantes
pour faire échec au droit de Clerc et Pingault s'il eût existé ;
Attendu que par suite de Tabé^ndon du brevet do 3 décembre
it9S la convention concernant la fiabrication et la vente des appa-
reils qui y sont décrits est devenue sans objet ; qu'il y a lieu d'en
prononcer la résiliation ;
— 70 —
Par ces motifs, Joint les causes et statuant sur le mot par un
seul et même jugement, déclare résiliée la convention da 8 dé-
cembre 1895, déclare les parties mal fondées dans le surplus de
leurs conclusions, les en déboute et attendu que les parties soc-
combent respectivement dans leurs prétentions fait masse des
dépens pour être supportés moitié par la Société des cycles Gla-
diator^ Clément et Humber, et moitié par Clerc et Pingault.
Art. 4107.
Brevet. — Inireiitlaii. — Ckrflal»or«tloii. —
CoppoprléAé.
La question de savoir si celui qui a coopéré à la décou-
verte d'une invetition a un droit de propriété sur cette
invention^ est une question de fait. Pour la résoudre^ il y a
lieu d'examiner quelle a été la nature de cette coopération ^
son importance et de voir si réellement ^invention est le
fruit des recherches d*un seul ou le résultat de la combinai-
son des efforts communs faits pour réaliser et rendre pron
tique Vidée de Vinventeur (1).
Si celui dont Vinventeur réclame les services n'a fait
qu exécuter matériellement les ordres reçuSj que réaliser un
plan, un dessin qui lui est remis avec toutes les indications
de détail nécessaires et ne participe pas aux recherches
faites et aux perfectionnements successifs^ s'il n'est en un
mot que Vinslrument passif de Vinventeur ^ Vinvention, née
à la vie pratique par une semblable collaboration, n^en est
pas moins la création de Vinventeur seul ; il en serait au--
trement si Vaide choisi par celui-ci à raison même de ses
connaissances pratiques, de son intelligence ^avait apporté à
Vinventeur le concours de ses lumières et de ses observations
personnelles.
Lorsqu'il est constant, en fait, qu'il a existé entre deux
parties une véritable association, en vue d'une découverte
nouvelle, Vune apportant Vidée et ses connaissances théori-
ques techniques. Vautre faisant tous les frais des recherches
et apportant à la réalisation du but commun son expé"
rience pratique, il y a lieu de décider que ces deux parties
(1) Y. note de TarUcle n« 4106,
le n mars
président,
idiquent la
jeur on son
tomisalevrs,
l'Incandêt-
ceiue nun^rafa, suivant procès-verbat de l'assemblée générale de
ladite société tenue le 5 août I89ô devant le notaire Deliëge et
rédament : 1° leur part dans le prix de cet apport, part qu'ils
éralneat à 350.000 francs ; 2° des dommages et intérêts évalués à
lOO.OOO francs pour violation par le défendeur d'une convenLion
verbale leur assurant le monopole de la fabrication des appareils,
objets de cette invention ;
Qu'à l'effet d'obtenir paiement des sommes qui leur seraient
ainsi dnes, les demandeurs ont à la date du 19 octobre 1895
pratiqué des saisies-arrêts entre les mains de la Société anonjroe
l'htamdeseenee minérale et du sieur Rosart, saisies -arrâts dont
il] demandent anjoard'hui la validité ;
Attendu que les causes sont connexes;
Sur la compétence :
Attendu qne l'action des demandeurs a avant tout pour objet
Il propriété d'une invention que le défendeur prétend conserver
pour lai seul, et dont les demandeurs soatiennent avoir une part,
cetle invention étant le résultat des efforts combinés, des recher-
ches communes des parties ; qu'à ce titre la demande est bien
de 'a compétence da tribunal civil, l'exploitation de l'invention
n'étant pas l'objet de la demande;
Au fond :
Attenda que le défendeur dénie aui demandeurs tout droit
quelconque à l'invention dont s'agit, sontenant qu'il n'a eu
r«ccurs à eux qu'en qualité d'ouvriers, et que ceux-ci n'ont fait
qoe travailler sous ses ordres et sous sa direction ;
Attendu que ta question de savoir si celui qui a coopéré k la
décooTerte d'une invention a un droit de copropriété sur cetle
inceotion est une question de fait : que pour la résoudre, il y a
lien d'examiner quelle a été la nature de cette coopÉration, son
importance, et de voir li réellement l'invention est le fruit des
rechercbes d'un seul, ou le résnltal de la combinaison des efforts
communs bits pour réaliser, rendre pratique l'idée de l'inven-
l«ir;
^- f';^-!".-.
72
Qu'il se conçoit que si celui dont l'inventeur réclame les servi*
ces ne fait qu'exécuter matériellement les ordres reçus, que
réaliser un plan, un dessin qui lui est remis avec toutes les indi-
cations de détail nécessaires et ne participe pas, à proprement
parler, aux recherches faites, aux perfectionnements successifs
apportés, s'il n'est en un mot que l'instrument passif que rin—
venteur manie à son gré pour arriver au résultat désiré, Tinven—
lion née à la vie pratique par une semblable collaboration, fi'en
est pas moins la création de l'inventeur» seul ; qu'il en serait
autrement, si l'aide choisi par celui-ci à raison môme de S6»
connaissances pratiques, de son intelligence, avait apporté à
l'invention le concours de ses lumières et de ses observations
personnelles ;
Attendu qu'il ne peut être dénié dans l'espèce, que l'idée tbêo>
rique de l'invention dont s'agit appartienne exclusivement au
défendeur, soit le résultat de ses études et de sa science \ mais
qu'il échet d'examiner si la mise en pratique de cette idée et
spécialement son application industrielle, la construction de
l'appareil breveté le 29 juillet 1895, est l'œuvre du défendeur
seul ;
Attendu que ce point doit nécessairement ressortir des faits de
la cause, des rapports des parties entre elles, de l'importance et
de la nature des travaux réalisés par chacune d'elles, et de la
part réelle prise par elles à ces travaux ;
Attendu qu'il résulte des documents de la cause, que dès le
mois de septembre 1894 les demandeurs ont fait sous la direc-
tion du défendeur toutes les recherches nécessaires aux fias
d'avoir à perfectionner et à faire entrer dans le domaine de la
pratique l'invention théoriquement découverte par le défendeur;
le but poursuivi étant d'arriver à la construction de brûleurs dits
automélangeurs, c'est-à-dire opérant automatiquement le né-
lange de l'air et du gaz et terminés par un atomisateur destiné à
parachever ce mélange et qui pussent être employés industriel-
lement ;
Attendu qu'il n'est pas contesté que les demandeurs ont p&yé
de leurs deniers tous les essais faits, toutes les dépenses occasion-
nés par les expériences longues et minutieuses, frais de voyages,
main-d'œuvre, matières premières, ont mis au service du 4é-
fendeur leur usine, leurs machines et tous les matériaux néces-
saires aux recherches entreprises ; que loin d'exécuter simple*
ment comme l'eussent fait de simples ouvriers les appareils,
d'après les données et les calculs du défendeur, les demandeurs
aidaient de leurs avis, faisaient leurs observations sur les expé-
riences faites, contribuaient en un m(^t par leur intelligence aux
recherches, et mettaient leurs connaissances pratiques à rent|ère
— 73 —
disposition do défendenr,et qaeles expériences en Tue d'arrirer aa
mélange parfait de i*airet da gaz étaient exclusivement confiées
sax soins des demandeurs ;
ittendn que le défendeur a, au surplus, reconnu dans ses rap*
ports avec les demandeurs leur participation intelligente et cons-
tante ; il leur parle continuellement de « notre combinaison )>,
« nos essais », reconnaissant qne « ses calculs exigent la con-
sécration pratique dont s'occupent spécialement les deman-
deurs » ; il leur fait entrevoir à chaque instant, pour stimuler
leur zèle, la réussite commune, leur faisant remarquer que si les
tâtonnements ne sont pas gais, « ils ne doivent pas perdre de vue
qa*ils ont embrassé une si grosse cause i», il reconnaît enfin que
leur concours aux essais a été gratuit ;
Attendu qu'il est impossible de voir,dans les relations de l'es-
pèce, les rapports qui existeraient entre maîtres et ouvriers ; qne
telle n'a pas été la manière de voir du défendeur lui-même, puis-
qu'il reconnaît le il mars 1895 que le brûleur litigieux est le
résaltat de la combinaison des efforts communs des parties ;
Attendu que la copropriété des demandeurs sur cet objet res-
sort aussi des pourparlers avenus entre les parties' en vue d'une
Association ayant pour objet la découverte d'un organe de lu-
mière nouveau, pourparlers dans lesquels les demandeurs décla-
rent < avoir inventé et fabriqué avec le défendeur un système de
brûleur à incandescence qui leur appartient en commun avec ce
dernier )», sans que le défendeur appelé à se prononcer sur le
projet dont s'agit proteste contre semblable allégation ;
Attendu qu'il ressort de toutes ces considérations qu'il a existé,
en fait,entre les parties une véritable association en vue d'arriver
à la découverte d'un brûleur nouveau, le défendeur apportant
ridée et ses connaissances théoriques et techniques ; les deman-
deors faisant tous les frais des recherches et apportant à la réa-
lisation du but commun leur expérience pratique ; qu'en consé-
qaenee, les deux parties sont copropriétaires de l'invention
litigieuse, qu'elles ont toutes deux contribué à créer ;
Quant à la part à laquelle les demandeurs peuvent prétendre :
' Attendu que le défendeur soutient avec raison que cette part
ne peut être la même pour chacun des intéressés, la somme de
travail, d*études et d'efforts fournis par lui, l'apport en un mot,
Mt par lui, étant évidemment supérieur à la coopération plus
natérielle des demandeurs ;
Attendu qu'il n'existe pas dans l'espèce d'éléments suffisants
poor évaluer la part des demandeurs : qu'il y a lieu à cet égard
de recourir aux lumières de personnes compétentes, capables
<^ supputer et de déterminer exactement la coopération de
chacun à l'œuvre commune, et notamment de dire quelle est au
c
— 74 —
point de vue de Tinvention brevetée le 29 juillet 1895, Timpor-
tance des brevets antérieurs dont le défendeur est sans conteste
propriétaire ;
Attendu que vainement le défendeur soutient qu'en tout état
de cause, et même en admettant la copropriété des demandeurs
dans le brevet litigieux, il avait le droit d'exploiter pour son
compte, et ce, d'une manière absolue, la découverte faite ; il a,
1^ en effet, fait plus qu'exploiter l'invention, il Ta aliénée en appor-
^' tant en société le brevet ;
î
i Attendu que les demandeurs réclament en cas d'expertise, à
) titre provisionnel, le paiement d*une somme de 100.000 francs ;
Attendu qu'il y a lieu de faire droit dans une certaine mesure
à cette demande, en considération notamment des dépenses que
les demandeurs se sont imposées pendant tout le cours des
recherches ; qu'il y a lien de leur allouer dès à présent une
somme de 10.000 francs sur leur part éventuelle ;
Quant à la somme de 100.000 francs réclamée à titre de dom-
mages et intérêts pour violation par le défendeur d'une conven-
tion verbale, assurant aux demandeurs « le monopole de la
fabrication des appareils, le jour où l'invention entrerait dans
le domaine de l'exploitation industrielle » :
Attendu que Tallégation produite par les demandeurs quant &
la promesse de ce monopole, n'est pas suffisamment démontrée
par les documents de la cause ; qu'en tontcas, si les parties ont
eu des pourparlers à cet égard, ces pourparlers n'ont point
abouti, et qu'il n'a existé que des projets non réalisés qui ne peu-
vent former la base d'une action de la part des demandeurs ;
Par ces motifs, et l'avis en la plus grande partie conforme de
M. Dieudinné, substitut du procureur du roi, joint les causes
et déboutant les parties de toutes fins et conclusions autres ou
contraires, dit pour droit que les demandeurs ont acquis par
leur collaboration active et intelligente un droit de copropriété
sur l'invention brevetée le 29 juillet 1895 au nom du défendeur;
condamne le défendeur à leur payer dès à présent la somme de
10.000 francs avec les intérêts judiciaires ; et avant de statuer sur
le surplus de la demande, désigne en qualité d'experts MM....
lesquels... : i^ évalueront la part de copropriété des demandeurs
dans le brevet du 29 juillet 1895, en tenant compte de l'impor-
tance de la collaboration de ceux-ci ; 2* rechercheront la somme
exacte que le défendeur a retirée de l'aliénation du dit brevet,
l'importance réelle des bénéfices recueillis par lui du chef du
}>revet du 29 juillet 1895....
IL
— 75 —
Art. 4108.
Brevet. — Onirrler. -- Invention. — Propriété.
Le fait qu'un ouvrier ou contremaître a découvert une
invention pendant qu'il était employé chez un patron ne
suffit pas pour permettre à ce dernier de revendiquer à son
profit ladite invention. Pour que ce résultat puisse être
obtenu, il faut que les découvertes soient le résultat de tra-
wiux exécutés par l'ouvrier dans son service pour des ob-
jets qui s'y rattachent^ d'après les ordres ou sous la direc-
tion de son patron.
(Trib. dF. Seine, 2 juin 1899. — Fleary c. Serramalera y Camps.)
Ainsi jugé par le tribunal de la Seine (3* ch.), le 2 juin
i899,sous la présidence de M. Lefsbyre DEVAUx,aprè3 con*
elttsions de M. Romb, substitut, et plaidoiries de M'^ Ds Las
CaSIS et POUGBT.
Le TaiBONAL, Attendu qae sur la demande de Fleary en reyen-
dication d'un brevet d'invention déposé par Serramalera y Camps,
le i4 septembre 1895, celui-ci a été autorisé à faire la preuve
des faits qu'il articulait pour faire rejeter cette demande ;
Qa'à Faudience de cette chambre du i2 mai 1899, il a été pro-
cédé à l'enquête ordonnée et qu'il s'agit d'en apprécier les résul-
tats ;
Attendu qu'il est constant et non méconnu par Fleury, que
Serramalera y Camps était dans ses ateliers contremaître traceur
lorsqu'il a découvert un système de fermeture pour récipients de
tons genres, dite « Automatique » ;
Attendu que la propriété de toute nouvelle découverte ou in-
vention appartient à son auteur ; que c'est à Fleury au proÛt du-
qari le défendeur aurait renoncé à son droit de propriété par une
prétendue convention tacite qu'incombe la preuve d'une sembla-
ble convention ; qu'à ce point de vue, le demandeur ne justifie
p&s de la renonciation qu'il invoque ;
Attendu, d'autre part, que si les ouvriers ou contremaîtres
peuvent être privés du droit de faire breveter les découvertes
dont ils sont les auteurs, ce n'est que lorsque ces découvertes
sont le résultat de travaux exécutés par eux dans leur service
poor des objets qui s'y rattachent d'après les ordres ou sous la
direction de leurs patrons ; que ces principes ne trouvent pas
lenr application dans la cause ; qu'il ressort nettement des té-
moignages recueillis que c'est presque toujours en dehors de son
"«■*
— 76 —
service que Serramalera 8^«it livré, en créant à ses frais an ou-
tillage spécial, à des essais et à des recherches dont le résultat a
été rinvention du système du brevet, objet du litige ; que là dé-
couverte n'a certainement point été faite en suivant des instruc-
tions ou en vertu de la mission spéciale qui était confiée au défen-
deur par Fleury ;
Que si un témoin dépose que le défendeur travaillait aux res-
sorts du bouchon automatique chez Fleury, pendant les heures
de son travail, il i^oute que c'était à Tinsu de son patron ; que,
dès que ce dernier rentrait, Serramalera cachait aussitôt ces
objets dans un tiroir et les dissimulait sous des chiffons ;
Que les faits allégués par le demandeur n'ont donc pu conver-
tir Tœuvre de Serramalera en un acte de son service et lui 6ter
le caractère d'une invention breyetable ;
Par crs motifs, Déclare Fleury non recevable, mal fondé
en ses demandes, fins et conclusions contre Serramalera, Teo
déboute ;
Le condamne en tous les dépens.
Art. 4109.
Brevet d'Invention en eommun. — VIcAntlon dis
eontmt lntei*vena entre lecdeax coproprlétalren
par l*nn d'eux. — IVon-eontrefttçon.
Lorsque^ un brevet ayant été pris en commun^ une con*'
vention est intervenue entre les deux oopropriéiaireê^ auœ
termes de laquelle l'un d'eux a droit à une redevance sur fes
bénéfices que réaliserait l'autre par Vemploi de la machine
ou des procédés brevetés, celui qui fabrique sans payer la
redevance pourra être actionné en paiement des redevanr-
ces mais non poursuivi comm^ contrefacteur (1).
#
(G. de Cams., rtq.y 5 mars 1900. -^ Delacroix e, Duvetger.)
Kejet du pourvoi formé contre un arrêt de la Cour de
Rouen en date du H août 1897 (Ann,, 97.332) :
La Cour, Sur le 1" moyen ;
Attendu que le demandeur en cassation Delacroix et le défen-
deur éventuel Duverger avaient pris en commun un brevet d*ln-
vention ; qu^aux termes des conventions intervenues entre eux,
Delacroix avait droit à une redevance de 50 0/0 sur les bénéfices
(t) Vdir ÀfM^.p 91. m, not«a i-%, wi» IVrét attagnA»
— 77 —
qae Daverger réaliserait par Femploi de la machine ou des pro-
cédés brevetés; que Delaeroix,prétendant que Duverger employait
ies dits procédés et ne lui payait point de redevançeti Ta attigné
pour se Toir déclarer contrefacteur et condamner en conséquence
à des dommages- intérêts ;
▲tltndo que Tarréi attaqué a décidé qu'en admettant que
Durerger eût réellement employé les proeédés breiretés et quMl
pût, par suite, devoir des redevances à Delacroii, il ne devait
pas néanmoins être déclaré contrefacteur et condamné à ce titre
à des dommages-intérêts ; que cette décision est juridique ; qu'eu
effet, Tun des titulaires d'un brevet, en employant les procédés
brevetés, ne fait qu'user de la faculté qu'il tient du brevet; qu'on
ne saurait admettra qu'il puisse devenir )e contrefacteur de son
propre brevet; que s'il ne tient pas compte à ses copropriétaires
dss redevances par lui promises, ce fait, susceptible de donner
Usa à des poursuites pour ineiécution du contrat, ne saurait
eoiistitaer un délit de contrefaçon ; que la décision attaquée,
i^liérement motivée» ne viole aucun des articles de loi visés
u pourvoi ;
Sor le %* moyen :
Attendu que l'action intentée par Delacroix avait uniquement
pour objet de faire décider que Duverger avait porté atteinte à
Ml droits de breveté et de le faire condamner a des dommages-
intérêts comme contrefacteur; qu'en décidant qu*il n'existait
pas de contrefaçon, la Cour d'appel a par suite et à bon droit
décidé qu'il n'y avait pas lieu de prononcer de condamnation à
des dommages-intérêts contre le prétendu contrefacteur, que
Pirrêt, qui réserve d'ailleurs les actions que Delacroix pourrait
afoir k exercer à raison de l'exploitation du brevet par Duverger,
n'a pas violé les articles de loi invoqués par le pourvoi ;
Sur le 3« moyen :
Attendu que la fin de non-recevoir soulevée devant la Cour
eontre la demande reconventionnelle était la même que celle
qai avait été proposée en 1'* instance et n'était pas modifiée par
Taddition d'un nouvel argument tiré d'une prétendue compé-
tence de la juridiction commerciale qui ne pouvait pas être invo-
quée pour la première fois en appel ; que les motifs du jugement
adoptés par l'arrêt justifiaient le rejet de la un de non-recevoir,
rejet que le pourvoi ne critique d'ailleurs ni en fait ni en droit ;
Qu'ainsi le 3* moyen n'est pas fondé ;
Pia cBs xotirs, Rejette.
Ch. des req. — MM. Tanon, président ; — 6xoroi-Le-
xioa, rapporteur ; •» Mblgot, avoeat général ; — H* Boi-
vut-CHAifPBAux, avocat.
-78-
Art. 4110.
Brevet Plat. — Ueenee die tebrleatlon pour wu^mge
personnel. — CJontreftiçon.
Le licencié qui n*a licence de fabriquer que pour son
usage personnel peut être poursuivi en contrefaçon, à rai-
son de la vente d'appareils brevetés à des tiers (1).
Le licencié est en droit de munir de perfectionnements
inventés par lui les appareils brevetés qu'il fabrique lici-
tement (3).
(C. de Paris, 17 mars 1900. — Piatet fiU c. Houssean.)
Sur appel d'un jugement du Tribunal civil de la Seine
en date du 22 décembre 1898 {Gaz. Trib,, !•' février 1899),
la 3* chambre de la Cour de Paris, sous la présidence de
M. Benoist, après plaidoiries de M~ Allart pour Rousseau
et Albert Martin pour Piat et fils, et conformément aux
conclusions de M. Tavocat général Bonnet, a rendu l'arrêt
suivant :
La. Cour, Considérant que par la décision dont est appel, les
premiers juges, après expertise, ont déclaré Rousseau contre-
facteur d'un brevet relatif à un four servant à fondre les mé-
taux pris par Piat le 26 octobre 1888 et de ses certi Beats d'ad-
dition des 12 janvier 1889, 29 avril 1890 et 18 aoûtl892; qu'ils
ont validé la saisie opérée le 16 mars 1897 par Piat chez Rous-
^ seau, et ordonné la confiscation des objets saisis ; qu'ils ont en
outre condamné Rousseau à S,000 francs de dommages-intérêts
alors que Piat réclamait 50,000 francs ainsi que Taffichage et
rinsertion ; qu'ils ont en même temps repoussé comme non re-
cevable une demande additionnelle de Piat en nullité du brevet
pris à son tour par Rousseau en 1894, et de deux certificats
d'addition, ainsi qu'en élévation des dommages-intérêts à la
somme de 95,000 francs ; qu'enfin ils ont débouté Rousseau de
la demande reconventionnelle en 50,000 francs de dommages-
intérêts et insertion qu'il avait formée de son côté ;
Considérant que Rousseau, reprenant sa demande reconven-
tionnelle, persiste à soutenir devant la Cour que la combinaison
que Piat prétend avoir inventée n'était pas brevetable et se
trouve dans un brevet Chiado du 10 janvier 1865 et dans un
(1) Cf. Pooillet, Brev. eTint;., n* 740 et arrêts cités ; Mainié, Brev.
éPinv., no 2507 et t.
(2) Gela ne paraît pas souffrir de contralictioa.
-79 —
iroTet Mantsd&y du 25 décembre 18((8 ; qa'anssi bien les appa-
reils qae lui, Rousseau, a construits, ne constitueraient point
une contrefaçon du brevet de Piat ; qu*en tous cas, il y aurait
Heo de prononcer la nullité de la saisie, Rousseau ayant obtenu
le droit, par l'acquisition de la licence du brevet de Piat, de
modifier le système de ce brevet et, subsidiaire ment, qu'une
BoaTelle expertise s'imposerait, les experts s*étant expliqués
incomplètement en examinant le brevet Gbiado et ne s'étant
pas expliqués da tout en ce qui toucbe le brevet Maolsday ;
Considérant que Piat, à son tour, a repris sa première de-
mande en 50.000 francs de dommages-intérêts, affichage et in-
sertions, ne persistant pas dans sa demande additionnelle ;
Considérant, en premier lieu, que les experts ont établi de
façon indiscutable , en répondant complètement aux moyens
présentés par Rousseau, que Tinvention de Piat constituée par
la combinaison d*un four fixe ou portatif, à creuset unique
oscillant, et d'un second creaset perforé dit rehausse qu'il su-
perpose an premier creuset et charge, comme le premier ainsi
prolongé, de métal avec lequel les flammes et les gazs chauds se
troQTeot en contact direct, réalisait les conditions exigées par la
loi, étant une application nouvelle de moyens connus avec ob-
tention d'un résultat industriel consistant en une économie, tout
ensemble de temps et de combustible, et aussi dans Taugmenta-
tion de durée des creusets ; que Rousseau leur reproche en vain
aojoard'hoî de ne s'être pas fait représenter les appareils et
d'avoir travaillé sur dessins ; qu'il a reconnu expressément que
liiTue des dessins était plus utile et plus complète que celle des
appareils eux-mêmes ;
Considérant que le rapport des experts s'explique d'une façon
complète sur le four à cheminée Ghiado, notamment relative-
mentaux ouvertures ménagées sur la périphérie du récipient
supérieur destinée par Ghiado à faire couler le métal plus ou
moins fondu dans l'appareil soos-jacent ; que si Ghiado énonce
dans son brevet que par elles,en même temps,la combustion est
actÎTée, il n'insiste pas sur cette constatation secondaire pour
loi; que le rapport s*explique suffisamment, d'autre part, sur le
four Ifaulsday, lequel y est décrit et ne parait, ayant un but
toat spécial et absolument différent de celui des fours dont il
s'agit au procès actuel, avoir été retenu par Rousseau que parce
qu'il présente une disposition forçant les flammes du foyer à
passer sur le métal à fondre avant de s'échapper par une chemi-
sée ; que si les experts ont omis d'y revenir après en avoir ma-
nifesté l'intention, ils n'en ont pas moins déclaré formellement,
atec leur compétence technique, qu'il ne pouvait mettre en
échec l'invention de Piat ;
— 80 —
Qu'il y a d'autant moins lieu de s'arrêter aux reproches faits
aux experts par Rousseau de n'avoir pas motive leur avis qae
ceux-ci constatent que Rousseau lui-même leur a déclaré qu^il
n^opposait pas le brevet Maulsday comme antériorité au brevet
Pait et ne le visait en fin de compte que pour démontrer que son
four n'était pas une contrefaçon du four Piat mais seulement une
reproduction du four Maulsday ;
Considérant en second lieu que les experts ont établi de façon
également indiscutable que l'appareil saisi chez Rousseau était
la contrefaçon de l'appareil de Piat ; qu'il suffit de constater ici
que la pièce réfractaire cylindrique, peut-être préférable, em-
ployée par Rousseau avec le four oscillant, joue exactement le
même rôle que le creuset supérieur de Piat et qu'il importe peu
qu'elle présente des orifices inclinés, alors que le creuset de
Piat est percé d'orifices horizontaux, disposition moins satisfai-
sante peut-être ; qu'il s'agit toujours de l'emploi sur ce four à
creuset unique d'une rehausse perforée dans laquelle on charge
le matériel à fondre pour les faire traverser par les flammes et
les gazs chauds, ce qui constitue, ainsi qu'il vient d'être dit,
l'invention de Piat, sans que Rousseau puisse sérieusement pré-
tendre qu'il n'a pas pris la rehausse de Piat, mais qu'il a fourni
simplement dans un four du domaine public un conduit aux
flammes, à l'exemple de Maulsday, pour les mettre en contact
avec le métal ;
Considérant enfin que la licence conférée par Piat à Rousseau
lui permettait d'obtenir des prii' de faveur pour les rehausses
qu'il achetait chez Piat et de se servir de rehausses fabriquées
au besoin avec ses vieux creusets ; que c'est uniquement cela
qu'il a payé 500 francs ;
Qu'on ne peut toutefois lui reprocher d'avoir apporté aux
rehausses qu'il employait, pour son usage personnel, les modi-
fications et perfectionnements que son expérienœ et ses con-
naissances lui suggéraient ; qu'ainsi, c'est à tort que les premiers
juges ont ordonné la confiscation de l'appareil saisi chez lui, que
rien ne prouve avoir été construit pour la vente ; que oet appa-
reil trouvé dans l'atelier de fonderie lui doit donc être restitué,
mais que la saisie doit être validée parce qu'elle a fait découvrir
la rehausse contrefaite et établir, tant par les aveux de Rousseau
que par Texamen de ses livres, qu'il avait construit et vendu un
certain nombre de fours munis de cette rehausse ;
Considérant, en ce qui touche l'appel incident, que les pre-
miers juges n'ont pas fait une suffisante appréciation du préju-*-
dice sérieux éprouvé par Piat ; qu'il y a lieu d'élever de K<000 à
10.000 francs les dommages^intérèts qui lui ont été alloués;
- 81 —
ju'iinsi il obtiendra la réparation qui lui est due sans qu'il soit
iésoin d'ordonner Tafôchage ou Tinsertion ;
Adoptant au 5uq)lus les motifs des premiers juges en tant
qj ils D*ont rien de contraire à ceux du présent arrêt ;
Pab ces motifs, Met les appellations tant principale qu'in-
:idente, à néant; confirme le jugement rendu par le tribunal
citU de la Seine, le 22 décembre 1898 ; dit toutefois qu'il n'y a
iiea à la confiscation de Fappareil saisi chez Rousseau le 16 mars
^"iTi ; ordonne que ledit appareil sera restitué à Rousseau ;
^■lère, d'one part, de 5.000 francs à 10.000 francs les dommages-
iii^rèts que Rousseau devra payer à Piat en réparation du pré-
judice qu^il lui a causé ; condamne Rousseau à payer ladite
lomme à Piat ; ordonne que ledit jugement ainsi rectifié et com-
plété sortira son plein et entier effet.
Art, 4111.
^'«vet Donsé. — Ueenee iMiPtielle. — RedevAnee
par macliliie eoostralte. — Défont die flxatlon d'an
mlaimam . ~ Condition potestatlve . — Non-
exploltnttoa. — Demande en nnlllté de la Uoenee.
-imet.
^ cession d'une licence partielle de brevet d'invention
consentie sous la condition que le licencié paiera au bre-
Mte' une certaine redevance par machine construite est K-
^^te, alors même que l'obligation de construire un nombre
jninimum de machines n'est pas stipulée ; on ne saurait
soutenir que ce contrat soit vicié par une condition po-
^istalive dépendant de la seule volonté du licencié, une
^lle condition n'affectant pas la validité d'une obligation,
lorsqu'elle a été stipulée au profit de la personne envers la-
î»Wte un engagement ferme a été pris (1).
l) Les principes posés par la Cour sont en accord avec la doctrine
^ l> Cour de cassation sur la condition potestative (Cass., 11 mars
'^, 0. 81.1.34), le contrat était donc bien valable. Mais on peut se
ieounder si le contrat de licence moyennant redevance sur les appa-
Kils Teadas ne comporte pas, au moins dans certains cas, l'obligation
<^T«Qdreetri le défaat de vente, lorsqu'il résulterait de la mauvaise
vfiktnté da licencié, ne pourrait pas entraîner la résolution du contrat
^^ec donuBa^^eft-iatéréts, par exemple dans le cas où la licence serait
(xcIniiTe et où le licencié aurait pour but de paralyser la concurrence
loe loi ferait l'invention brevetée. La Cour de Nancy, sans annuler le
6
(C. de Paris, 99 janvier 1900. — L' ■ Indaslrielle » e. Serve.)
LeS:2 avril 1896, le Tribunal de commerce de la Seine a
endu le jugement suivant :
Le Tribumal, Attendu que la Société 1' « Industrielle » expose
|ue par acte sous-seings privés enregistré, en date à Paris du
!T août 1894, elle a cédé au sieur Serve, pour la France et ses
colonies, ainsi que pour l'Angleterre, les États-Unis d'Amérique
il la Russie, la licence partielle d'un brevet pris en France par
jn sieur Donzé, h la date du 27 février 189s, sous le numéro
:3i48, et s'appliquant & un moteur rotatif dit >< Epicycloidal >• ;
Que comme conditions de cette cession, le sieur Serve prenait
'engagement d'apposer sur chaque machine par lui construite,
it munie dn moteur dont s'agit, une plaque de redevance ; qu'il
l'obligeait en outre à acquitter le montant de cette redevance sur
es bases fixées et déterminées à l'acte susmentionné ;
Attendu que la Société 1' >< Industrielle » prétend et fait plai-
1er qu'aucun de ces engagements n'aurait été tenu par le sieur
Serve ; que dès lors, il j aurait lieu de prononcer, de son fait et
1 sa charge, la résiliation des conventions susindiquêes, et d'o-
bliger le défendeur, tant au paiement de la somme de 30,000 fr.,
i titre de dommages et intérêts, qu'à la restitution des plans et
lessins qui lui ont été contlés ;
Hais attendu que la Société 1' •• Industrielle >< n'apporte point
u débat la preuve que le sieur Serve ait appliqué, depuis la date
le la convention, à aucune machine parlai construite, le moteur
ireveté dont la licence lui avait été concédée ; que, de ce chef,
s Société r M Industrielle » ne saurait lui faire grief, ni de n'a-
oir réclamé aucune plaque, ni de ne lui avoir pajé aucune rede •
ance, les obligations dont s'agit n'existant que comme consé-
liience de la construction d'une machine pourvue du moteur de
a société demaoderesse, ainsi qu'il a été dit plus haut ; que la
iociété r ic Industrielle » ne saurait, d'un autre c6té, faire un
eproche au sieur Serve, de n'avoir construit aucune machine,
vec application du susdit moteur, les conventions susanalysées
le mettant nullement à sa charge l'obligation de construire un
lombre quelconque de machines dans nn temps donné, ni de
layer un minimum de redevance ;
entrât, a accordé des domroages-intéréla an breveté, fonte de bénéS-
es, dans un cas de cession avec slipulslion de partage dans les bén4-
Icee (Nancy, S3 mai 1866, Frison, Ann., 66.248). On peut aussi penser
[ne la licence snppose, dans une certaine mesure, l'obligation d'eiploi-
er. puisque faute d'eiploitatioo le brevet aérait frappé de déchéance. Le
Iroit du licencié n'a-t-il pas comme corollaire, tout comme le droit du
ireveté, l'exploitation 7 G. M,
-83 —
Qu'il ressort au contraire des termes mêmes des susdites
conreotions, que la construction des appareils dont s'agit était,
pour le sieur Serve, non une obligation, mais bien une faculté
dont il était libre d'user quand bon lui semblerait, en appliquant
le brefet dont s'agit exclusivement aux machines de sa propre
iQTention ;
Qoe, par suite, aucune inexécution des conventions intervenues
enb^les parties n'étant relevée ni établie à la charge du sieur
Serre, la résiliation qui en est requise ne saurait être prononcée ;
qae par voie de conséquence, la partie de la demande tendant
au dommages et intérêts et à la restitution des plans et dessins
doit également être rejetée ;
Par CBS motifs, Déclare la Société 1' c< Industrielle » mal fon-
dée eo toutes ses demandes, fins et conclusions, l'en déboute, et
la condamne par les voies de droit en tous les dépens et même
&a coût de l'enregistrement du présent jugement.
Surappel,la 2« Chambre de la Cour,sous la présidence de
H. Habil, après avoir entendu M" Mathiot et Hassbnot, a
rendu l'arrêt confirmalif suivant :
La Cour, Adoptant les motifs des premiers juges :
Considérant, en outre, que devant la Cour, la société appelante
a soutenu que, la cession d'une licence partielle de brevets d'in-
vention, consentie par elle k Serre, intimé, était nulle parce
«în^elle avait été faite sous tine condition potestative ; que cela
résulterait de la faculté accordée à Serve de ne payer de rede-
vance que s'il faisait usage du procédé breveté pour des appareils
<IQ'il lui semblersdt bon de construire et de ne rien devoir s'il' ne
«en servait pas ;
Considérant que ce moyen n'est pas fondé ; qu'il est parfaite-
ment licite de donner à un cessionnaire une licence, sans lui
imposer l'obligation d'en faire usage ;
Que, dans l'affaire actuelle, il y a eu, de la part de la société
appelante, l'engagement ferme, contracté envers l'intimé, de lui
p^mettre, moyennant une redevance déterminée, d'employer le
moteur rotatif dit « Epicycloidal », dont le brevet d'invention
^i appartenait ; que la faculté laissée à l'intimé de ne pas adap-
^fce moteur à ses appareils, s'il le juge convenable, ne vicie
pas Fcbligation, prise envers lui par l'appelante, laquelle est
aossi valable que le serait une promesse de vente qui n'oblige
<lQe le promettant ; que la condition potestative n'affecte pas
^ validité d^ane convention, lorsqu'elle a été stipulée au profit
de la personne envers laquelle un engagement ferme a été con-
tracté;
— 84 —
Par ces motifs, Déclare la Société anonyme dite V « Indus-
trielle » mal fondée dans ses demandes, uns et conclusions ; l'en
déboute ; confirme le jugement attaqué ; ordonne qu*il sortira
son plein et entier effet ; condamne la Société anonyme V « In-
dustrielle », en la personne de son adaûnistrateur délégué, à
l'amende et aux dépens de son appel.
Art. 4112.
Brevet Serve. — Liteence. — VmcnMté de réaillAtioa
pour non^exploliatlon. — Déflaat de mUie en de-
meure e( die eonmtutwktâion Jadielalre. — Violation
da contrat par le cédant. — Dommaffea-lntérêta.
Lorsque l'inventeur quia concédé une licence pour Fex^
ploitation de son invention a stipulé que, dans le cas oie se
réaliserait une condition déterminée, il reprendrait la libre
disposition de tout ou partie de Vinvention concédée, il ne
saurait lui appartenir de se faire juge de la réalisation de
la condition : à défaut de mise en demeure et tant quHl n'a
point fait constater judiciairement l'arrivée de la condi-
tion, il demeure dans les liens de son traité et ne saurait
être considéré comme ayant recouvré son droit de disposi^
tion ; par suite, sHl concède à un établissement concurrent
la licence primitivement concédée par un traité toujours en
vigueur, le nouveau traité doit être rétracté et des domma^
ges-intéréts doivent être alloués au concessionnaire primi-
tif indûment dépossédé (1).
(G. de Paris, 8 mai 1900.— Compagnie Française des Métaaxe. Serve,)
Le Tribunal de commerce de la Seine avait à la date du
6 juillet 1898 rendu le jugement suivant :
(1) A ces considérations du jagement, la Ck>ar a i^onté qu'en fiit le
breveté avait concédé licence à un tiers avant d'avoir mis le premier
licencié en demeure d*exécater ses engagements. Si exact que soit le
principe qu'on ne peut se foire justice 8oi-méme,il ne faudrait pas pous-
ser la thèsedu jugement jusqu'à l'extrême et dire que le breveté devrait des
dommages-intérêts pour avoir conféré licence à un tiers, môme s*il avait
auparavant mis le licencié en demeure d'exploiter et si celui-ci n'avait
pas exécuté son obligation ; le tribunal pourrait, par le même jugement,
constater que le droit à la résolution du contrat était acquis, que le bre<-
veté en reprenant sa liberté n'avait donc causé aucun préjudice an pre-
mier licencié. G. M.
- 85 —
Le TanuNAL, Après en aToir délibéré conformément à la
loi ;
Attendu qne, ayant reçu satisfaction en cours d'instance. Serve
a déclaré mettre néant à sa demande en paiement de redevan-
ces;
Qa'il n'ëchet, parsoite, de donner acte à la Compagnie Fran-
çaise des Métaax,de sa déclaration relatiye aux dites redevances,
!e tribunal n'étant plus saisi de cette partie du litige ;
Sur le surplus de la demande de la Compagnie Française des
Métaux :
Attendu que des documents de la cause, il appert que par acte
soDS seings privés qui sera enregistré avec le présent jugement.
en date du 27 février 1886, Serve a concédé à la Société des
Xélaax, aux droits et obligations de laquelle se trouve actuel-
lement ia*Gompagnie Française des Métaux, la licence exclusive
pour )a fabrication et la vente en France et les colonies françai-
ses, d* un brevet pris par Selve, le 20 septembre 1884, sous le
noméro 164,412, pour un système de tubes à ailerons, dénommé
•^Nouveau système de tubes métalliques de tous genres»;
Qae ces tubes pouvaient être fabriqués en cuivre rouge ou cui-
vre jaune, en fer ou en acier :
Qae, notamment, en ce qui concerne les tubes en fer et en
scier le dernier paragraphe de l'article 5 desdites conventions
stipule que, dans le cas où la Société des Métaux n'en pourrait
réussir la fabrication on ne voudrait pas l'entreprendre, Serve
reprendrait son entière liberté à leur égard en prévenant la société
par lettre recommandée trois mois à l'avance ;
Attendu que, dans ses conclusions motivées, Serve soutient et
t'iit plaider à la barre que les éventualités prévues à l'article 5 se
seraient réalisées ;
Qu'il aurait donc usé à bon droit d'une faculté qui lui était
' rmellement réservée, en prévenant par lettre recommandée en
iate du 28 juillet 1891, la Société des Métaux qu'il reprenait sa
iberté en ce qui touche les tubes en fer et en acier ;
Qa'il aurait donc pu valablement la concédera la Société d'Es-
aat et Meuse ;
Qae, par suite, la demande serait mal fondée et devrait être
'6 poussée ;
Mais attendu que l'article 5 invoqué par Serve ne renferme nul-
lement on droit d'option au profit de ce dernier ;
Qa'il y est uniquement stipulé que Serve ne prendra sa liberté
^ ce qui concerne les tubes à ailerons en fer et en acier, que
Uule cas où la compagnie concussionnaire ne pourrait réussir
1 oe voudrait pas entreprendre la fabrication desdits tubes ;
Qae ces conditions sont ainsi soumises non à un droit d'option
— 86 —
laissé à Tarbitraire et à Tapprédation de Serve seal, mais bien à
une double condition résolatoire alternative ;
Que, s'il est vrai que Serve, par sa lettre du 28 juillet 1891,
ait prétendu que les deax conditions prévues se seraient réali-
sées et que, par suite, il serait en droit d'user de la faculté, qui
lui avait été réservée, de reprendre sa liberté, il convient de re-
marquer que la Compagnie Française des Métaux a formellement
contesté la matérialité de la survenance de Tune ou de l'autre
des conditions prévues ;
Que la Compagnie Française des Métaux a protesté, à plusieurs
reprises, contre les prétentions de Serve et qu'elle a expressé-
ment manifesté son intention de considérer lesdites conventions
comme toujours existantes et, par suite, de s'en prévaloir ;
Que, dans ces conditions, les conventions dont s'agit, qui ne
pouvaient, contrairement aux allégations de Serve, être résolues
que par le commun accord des parties contractantes ou par jus-
tice, en cas de contestations entre elles sur les conditions pou-
vant entraîner cette résolution et ce tribunal n'ayant point été
et n'étant point saisi d'un pareil litige, subsistait toujours ;
Que, par suite, elles doivent être observées par ceux qui les
ont formées ;
Qu'il convient, dès lors, faisant droit de ce cbef aux conclu-
sions de la Compagnie des Métaux, de dire que c'est en violation
du droit de ladite compagnie que Serve a concédé à la Société
d'Escaut et Meuse une licence pour la fabrication des tubes à
ailerons en fer et en acier ;
Qu'il convient également de dire que Serve sera tenu sous une
astreinte de 200 francs par jour de retard pendant un mois,
après lequel délai il sera fait droit, de rapporter à la Compa-
gnie Française des Métaux la rétractation ou la résiliation de la
cession dont s'agit;
Et attendu qu'il est constant pour ce tribunal que la violation
par Serve de ses engagements a causé à la Compagnie Française
des Métaux un préjudice dont le défendeur lui doit répara-
tion ;
Que, toutefois, il y a lieu, dans la fixation des dommages-inté-
rêts à accorder à la compagnie demanderesse, de tenir compte
du peu de diligences faites par cette dernière pour arriver aune
exploitation industrielle et, par suite, profitable à Serve, de la
partie du brevet dont s'agit ;
Que l'allocation d'une somme (^e 5,000 francs sera la juste
réparation à laquelle la Compagnie Française des Métaux peut,
en l'état des faits de la cause, légitimement prétendre ;
Que c'est donc à concurrence de cette somme que cette partie
de la demande doit être accueillie ;
— 87 —
Par CBS motifs, Vu le rapport de l'arbitre ;
iageant en premier ressort ;
Dit qa'il n'y a lieu de donner acte à la Compagnie Française
d«s Métaux de ses déclarations relatives aux commissions qui
étaient dues à Serve ;
Dit que la Compagnie Française des Métaux est encore conces-
sionnaire du droit de fabrication des tubes à ailerons en cuivre
rooge et jaune, en fer et en acier ou autres métaux ;
Dit en conséquence^ que c'est en violation du droit de ladite
compagnie que Serve a concédé à la Compagnie d'Escaut et
Mease une licence pour la fabrication des tuben à ailerons en
fer et eu acier ;
Ditque Serve sera tenu, par suite, sous une astreinte de 200 fr .
par jour de retard à partir de la quinzaine de la signification du
présent jugement pendant un mois, passé lequel délai il sera
fait droit, de rapporter à la Compagnie Française des Métaux la
rétractation ou la résiliation de la cession dont s'agit au procès ;
Condamne Serve, par les voies de droit, à payer à la Compa-
gnie Française des Métaux la somme de 5,000 francs à titre de
doaimâges-intérêts ;
Déclare la Compagnie Française des Métaux mal fondée en le
sarplos de sa demande ;
L>n déboute.
M. Serve a interjeté appel de ce jugement ; la Compa-
gnie Française des Métaux a, de son côté, formé un appel
incident.
La Cour a statué sur ces appels par Tarrèt suivant :
U CouB, Statuant sur les appels principal et incident interje-
t^ du jugement rendu par le Tribunal de commerce de la Seine
I« 6 juillet 1898;
Et adoptant les motifs des premiers juges ;
Considérant en outre que Serve inventeur d*un système de tu-
bes à ailerons qui a été breveté le 20 septembre 1884, a cédé à
la Société des Métaux, aujourd'hui représentée par la Compa-
8ji\e Française des Métaux, une licence exclusive qui lui assurait
le monopole de la fabrication en France desdits tubes, soit en
caivre ronge, soit en laiton, soit en fer ou en acier ; qu'à l'égard
des tubes en fer ou en acier il avait été stipulé que dans le cas
'À la société ne pourrait pas ou ne voudrait pas fabriquer. Serve
reprendrait sa liberté en la prévenant par lettre recommandée i
trois mois à l'avance ;
Considérant que de nouveaux documents produits à la cour
établissent que Serve avait manqué à ses engagements bien avant
— 88 —
de s'être informé si la Société des Métaux voulait renoncer à la
fabrication des tubes en acier ;
Qu'en effet, c'est le 26 juillet 1891 que Serve a adressé une let-
tre recommandée aux représentants de cette société dans le but
de recouvrer sa liberté d'action qui lui a été refusée par une pro-
testation formelle et que, dès le 22 janvier précédent, il avait
cédé une licence à la Société d'Escaut et Meuse pour la fabrica-
tion des tubes en fer et en acier ;
Sur les dommages-intérêts :
Considérant que les premiers juges ont condamné Serve à
payer à la compagnie intimée une somme de 5,000 francs à titre
de dommages-intérêts pour le préjudice déjà subi ; qu'ils l'ont
obligé en outre à. rapporter dans la quinzaine de la signification
du jugement la résiliation du traité qu'il avait conclu avec la
Société d'Escaut et Meuse et ce sous une astreinte de 200 francs
par chaque jour de retard pendant un mois, passé lequel délai
il serait fait droit;
Considérant que Serve n'a point obtempéré à cette injonction
et qu'au cours de l'instance d'appel, la durée de son brevet d'in-
vention est venue à expiration le 20 septembre 1899 ;
Que l'astreinte prononcée par les premiers juges est devenue
sans objet et qu'il n'y a pas lieu de la maintenir ;
Mais considérant qu'il serait injuste de faire bénéficier l'appe-
lant de la résistance qu'il a apportée à l'exécution du jugement
confirmé par le présent arrêt et de ne pas tenir compte du pré-
judice éprouvé par la compagnie intimée depuis l'appel ;
Que la Cour possède les éléments d'appréciation qui lui per-
mettent d'en fixer l'importance ;
Par ces motifs. Déclare Serve mal fondé dans les demandes,
fins et conclusions de son appel principal ;
L'en déboute ;
Confirme le jugement attaqué ;
Dit toutefois que, par suite de l'expiration de la durée du bre-
vet d'invention, il n'y a plus lieu d'obliger Serve à rapporter la
résiliation de son traité de licence fait avec la Société d'Escaut et
Meuse et de maintenir l'astreinte imposée par le jugement ;
Déclare la Compagnie Française des Métaux bien fondée à ré-
clamer contre Serve le paiement de dommages-intérêts pour le
préjudice qu'elle a subi depuis le jugement ;
Fixe à 12,000 francs l'ensemble des condamnations qui doivent
être et sont prononcées contre Serve au profit de la compagnie
intimée et ce à titre de dommages-intérêts comprenant les
5,000 francs déjà alloués par le tribunal ;
Déclare la compagnie intimée mal fondée dans le surplus de
ses demandes, fins et conclusions ;
— 89 -
L^en déboute ;
Ordonne la restitation de Tamende consignée sur l'appel inci-
dent ;
Condamne Serve en l'amende de son appel et en tous les dé-
pens.
2« Ch. de la Cour. — MM. Harel, président; Bonnet,
avocat général. — M«* Charles Lente et Roger Dufraisse,
avocats.
Art. 4113.
Brev-ete. — Ueenee. — Compétence, — Caractères.
•— Droit des tiers.
Les tribunaux de commerce sont compétents pour statuer
sur une cession de licence, c'est-à-dire sur Vachat et la ces-
sion d^un droit dans un but commercial (1).
L'acte qui ne confère à son bénéficiaire qu'un avantage
personnel et limité et ne lui attribue nullement le droit de
poursuivre en son nom les contre facteurs , constitue non
une cession de brevet, mais seulement une licence d'exploi-
tation ; pour qu'un tel acte devienne opposable aux tiers, il
n'est pas nécessaire qu'il ait été préalablement soumis à
la formalité de la transcription spéciale des articles 20 et
21 de la loi du 8 juillet 1844 : en particulier pour qu'un
tiers devenu régulièrement propriétaire du brevet soit tenu
de le respecter y il suffit qu'en fait, il en ait eu connais-
sance (i).
(1) Sur la compétence en matière de cession et de licence, V. Pouillet,
Brev» cTinv., n* 296 et la jarisprndence citée. V. aussi Besançon, 22 fé-
Trier 1809, Japy, itnn., 99.207 et la note.
(2-3) Le caractère le plus saillant de la licence est de ne pas donner
& son bénéficiaire le droit de poursuivre les contrefacteurs. La conces-
sion de la licence n*est assujettie à aucune formalité. C'est un droit tout
personnel, et en général non exclusif, accordé par le breveté à un tiers
ifexploiter son brevet, sans que ce droit entraîne cession d'une part
quelconque de la propriété du brevet. 11 s'en suit que le porteur de 11-
ceitce n'a pas à faire enregistrer son titre. En cas de cession ultérieure
dtt brevet, le concessionnaire est tenu de respecter les licences anté-
rieurement concédées, qu il les ait on non connues, à la condition qu'il
soit étabb que les licences sont réellement antérieures à la cession. Cette
preuve étant à la charge du licencié il est souvent prudent pour le licen-
cié, quoique rien ne Ty oblige, de faire enregistrer son titre à la pré-
fecture dés qu'il lui est concédé afin de lui donner date certaine. Sur
de Paria, 37 janvier 18B9 et i janvier ISOO. — Geliet et Forest
Ge interautionale de Chauffage hygiénique, Vve Ancelin et aatrei.)
IM. Gellet et Foreat, se prétendant devenus propriétaî-
d'un brevet pris pour la fabrication de Chauffreltesby-
niques en vertu d'une cession qui leur aurait été con-
itie par Mme Vve Ancelin, demandaient au tribunal de
amerce de déclarer que l'apport fait poslérieurement
Mme Ancelin à la Compagnie internationale deCbauf-
e hygiénique était nul, comme consenti el accepté en
ide de leurs droils,et subsidiairement que l'apport du-
brevet demeurait grevé d'un droit de licence en leur
îur. Le Tribunal de commerce de la Seine a,par juge-
nt du 21 octobre 1896 statué,sur cette prétention en ces
nés :
eTribdnjvl, Attendu que la. demande tend à. voir dire que
port fait à la Compagnie interna.tianale de ChauiTage hy^é-
le du brevet français n° 224.830 serait nul comme consenti
cceptë en fraude des droits de Gillet et de la Société Gillet et
ist;
le subsidiairement l'apport du dit brevet serait grevtf de la
ice appartenant à ces derniers ;
te seuls ils auraient le droit en France de fabriquer.d'eiploi-
itde vendre les appareils se rapportant au dit brevet;
le par suite, il soit fali défense à la Compagnie internationale
IhautTage hygiénique de fabriquer, exploiter ou vendre ea
ice les dits appareils à peine de 1000 francs par chaque con-
ention constatée ;
iSn qu'une somme -de 50.000 francs leur soit attribuée àtitre
loromages-intéréts ;
k ce qui touche tous les déFandeara :
ir le renvoi :
tendu que les défendeurs à l'exception de la Société interna-
ale de Chauffage hygiénique soutiennent que les faits sur
lels est fondée la demande constitueraient, s'il s étaient établis,
une faute contractuelle mais un délit civil tombant soua
)lication de l'article 13S2 du Code civil ;
le pour justifier la compétence de cette Juridiction en ma-
d'obligations délictuelles ou mâme quasL-délictuelles, ii y
it lieu d'établir que les faits qui servent de base à la de>
— 91 —
mande se rattachent à Texercice da commerce des deux par-
ties;
Qu'actionnaires d^ane société commerciale ils n'auraient pas
pour cela la qualité de commerçants ;
Que de son c6té, la Société prétend qu'il s'agirait de la remise
d'an brevet, litige relevant entièrement des tribunaux civils ;
Que dès lors et à tous égards il y aurait lieu d'accueillir le dë-
ciinatoire opposé ;
Mais attendu que des documents au procès, il appert qu'à la
date du 24 septembre 1895, les défendeurs se sont présentés de-
vant M* Estors, notaire à Bruxelles, et l'ont requis de dresser les
statuts de la société anonyme dénommée Compagnie interna-
tionale de Chauffage hygiénique (système Ancelin).que les com-
parants ont déclaré fonder avec le concours d'autres comparants
comme souseripteurs d'actions ;
Que 8.000 actions entièrement libérées ont été attribuées à Vve
Anceiin, Moigno, Godefroy et Grayo apporteurs de brevets, et les
2.000 autres à tous les défendeurs suivant le tableau annexé aux
statuts ;
Que fondateurs de la société ils ont ainsi fait acte de commerce
les rendant justiciables de cette juridiction ;
Qu'en ce qui touche les allégations de la société, des docu-
ments au procès, il ressort qu'il s'agit non de la connaissance
d'un brevet, mais de la cession d'une licence, c'est-à-dire de
l'achat et de la cession d'un droit dans un but commercial ;
Qull y a lieu de rejeter le déclinatoire opposé ;
Par css motifs. Rejette l'exception d'incompétence opposée, en
conséquence, retient la cause ;
Et au fond :
Attendu que les demandeurs déclarent à la barre réduire leur
demande en dommages-intérêts quant à présent à 2.000 francs;
Qu'il échet de leur en donner acte ;
En ce qui touche Vve Ancelin-Godefroy et la Société interna-
tionale de Chauffage hygiénique :
Attendu que la société persistant dans son système soutient que
le contrat en vertu duquel les demandeurs ont introduit la pré-
sente demande constituerait une cession de brevet ;
Que par application de l'article 20 dé la loi du 5 juillet 1844,
aocane cession totale ou partielle ne serait valable qu'après avoir
été enregistrée au secrétariat de la préfecture du département
dans lequel l'acte est passé ;
Que contrairement aux allégations des demandeurs, il ne
s'agirait pas d'une cession de licence ;
Qu'an surplus cette cession serait postérieure à l'époque à
laquelle dame Anceiin a fait son apport à la société ;
— 92 —
Qu'elle ne lui serait donc pas opposable ;
Que de leur côté Vve Ancelin et Godefroy qui eux reconnais^
sent que Giiiet et consorts sont simplement concessionnaires
d^une licence, exposent que le fait même de cette concession éta*
blit que Vve Ancelin est encore propriétaire du brevet et que par
suite, elle a le droit d'en faire l'apport à quiconque puisqu'elle
en a la propriété ;
Que cela serait si vrai qu'elle n'aurait appoi^ ses brevets que
grevés des droits éventuels et conditionnels qui pourraient être
reconnus au proOt de Gillet ;
Qu'au surplus, cette cession n'aurait même été consentie que
comme garantie des avances qu'elle avait reçues ou qu'elle avait
à recevoir des demandeurs ;
Que le prêt qui lui avait été consenti devait être remboursé par
elle sur la part des bénéfices que devait lui procurer l'exploita-
tion faite pour le compte commun ;
Que cette éventualité de la remise des bénéfices ne s'étant
pas effectuée, dame Ancelin restée propriétaire du brevet devrait
également rentrer en possession de la licence accordée eondi-
tionnellement ;
Que par suite la cession serait nulle et que, par voie de con-
séquence, la demande Gillet et consorts serait mal fondée et de-
vrait être rejetée ;
Mais attendu qu'ainsi qu'il a été dit plus haut il s'agit simple-
ment de la concession d'une licence pour une partie du brevet,
puisque la vente et la fabrication des appareils en caoutchouc
restaient la propriété de la dame Ancelin ;
Qu'en effet, aux termes de l'acte du 11 avril 1895, Vve Ancelin
cédait à Gillet qui acceptait, le droit exclusif de fabriquer, d'ex-
ploiter et de vendre tous les appareils se rapportant au brevet
pris en France le 10 octobre 1892 sous le n^ 24.830, sans aucune
exception ni réserve que celle concernant la vente et la fabri-
cation des appareils en caoutchouc dont Gillet n'entendait pas
s^'occuper ;
Que rien n'indiquait que cette licence (di conditionnelle et
subordonnée aux bénéfices qu'elle comptait partager avec lui ;
Qu'elle ne peut donc prétendre aujourd'hui que cette cession
soit nulle par suite de l'absence des bénéfices qu'elle espérait ;
Qu'une licence est le droit accordé par le propriétaire du bre-
vet à un tiers, d'exploiter le brevet sans que ce droit entraîne
cession d'une part quelconque de la propriété du dit et en géné-
ral sans que cette cession empêche le breveté d'accorder le même
droit à. d'autres personnes ;
Que par suite, si Gillet et consorts ne peuvent être fondés à
demander la nullité de l'apport fait h la Compagnie intematio-
— 93 —
nale de Chauffage hygiénique il est constant néanmoins, ainsi
qa'ils Fexposent en leurs conclusions suhsidiaires,qiie cet apport
est grevé de la licence à eux consentie par le contrat du 11 avril
1893, c^est-à-dire avant la constitution de la Société ;
Qu'en conséquence, aux termes mêmes de la concession, ils
ont seuls le droit en France de fabriquer, d'exploiter et de vendre
les dits appareils à l'exception de ceux en caoutchouc;
Qu'il convient de faire défense à la société susnommée de
falkTiquer, exploiter et vendre en France les dits appareils à
peine de 50 francs par chaque contravention constatée, sans qu'il
j ait lieu toutefois d*acGorder aux demandeurs la réparation
d*uu préjudice dont ils ne justiûent pas à rencontre de dame
Âncelin-Godefroy et de la Compagnie internationale de Chauffage
hygiénique ;
En ce qui touche Grayo, Lemaître, Etienne^ Maigno et Puviez
de Gronlart :
Attendu que ces défendeurs n'ont pas conclu au fond ;
Donne contre eux & Gillet et Forest, ce requérant, défaut et
pour le profit :
Considérant que les conclusions de la demande ne sont pas
contestées par les défendeurs susnommés ;
Que les dites conclusions ont été vérifiées et qu'elles paraissent
justes, à concurrence des dispositions ci-après;
Que dès lors il y a lieu d'y faire droit ;
Pab ces motifs, Jugeant en premier ressort ;
Donne acte aax demandeurs de ce qu'ils déclarent réduire
quant à présent leur demande en dommages-intérêts à 2.000 fr.
à Fégard de tous les défendeurs ;
Dit que l'apport fait à la Société internationale de Chauffage
hygiénique du brevet de dame Âncelin est grevé de la licence
accordée à Gillet et à Gillet et Forest ;
En conséquence, fait défense à la dite société de fabriquer,
exploiter et vendre en France les dits appareils à peine de bO fr.
par chaque contravention constatée à l'exception des appareils
en caoutchouc ;
Et condamne Vve Ancelin-Godefroy, la Société de Chauffage
hyfdénique, Grayo, Lemaître, Etienne, Maigno et Puviez de Gron-
lart par les Toies de droit aux dépens de cette partie de l'ins-
tance ;
Condamne Grayo, Lemaître, Etienne, Maigno et Puviez de
Gronlart, solidairement par les voies de droit, à payer à Gillet et
à Gillet et Forest 2.000 francs, chiffre auquel ces derniers ont
déclaré rédnive quant à présent leur demande à fin de dommages-
intérêts ;
Et les condamne eu outre aux dépens ;
— 94 -
D*offîce avec Grayo, Lemaître, Etienne, Maigno et Paviez de
Gronlart déclare Gillet et Gillet et Forest mal fondés en tout le
surplus de leurs demandes, Uns et conclusions, mais quant à
présent sur les dommages-intérêts à Tégard de Grayo, Lemal-
tre, Etienne, Maigno, et Puviez de Gronlart les en déboule.
La Compagnie internationale de Chauffage hygiénique
ayant fait appel de ce jugement, la Cour de Paris a, le
27 janvier 1899 sous la présidence de M. Gillbt, président,
et après conclusions de M. Laffon, avocat général, rendu
contradictoirement sur la compétence, et par défaut sur
le fond, Tarrèt confirmatif suivant:
La Cour, Considérant que la Compagnie internationale de
Chauffage hygiénique, partie de Giot avoué, a relevé appel du
jugement du Tribunal de commerce de la Seine du 21 octobre
1896 qui s*est déclaré compétent pour connaître des causes de
Tassignation initiale, s'agissant dans Tinstance de la concession
ou de la délivrance d'une licence et non de la cession ou vente
d'un brevet d'invention ;
Et statuant au fond :
A fait défense h la dite compagnie de fabriquer, exploiter et
vendre en France les appareils se rapportant au brevet pris le
10 octobre 1892, no 224830, à Texception de ceux en caoutchouc,
à peine de 50 francs par chaque contravention constatée ;
Mais, considérant que, par ses conclusions prises devant la
Cour et dûment signifiées, la compagnie appelante se borne à
eiciper de l'incompétence du tribunal de commerce à raison de
la matière sans demander la solution du fond ;
Sur l'exception d'incompétence et le renvoi :
Adoptant les motifs des premiers juges.
Sur le fond :
Donnant défaut contre la Compagnie internationale de Chauf-
fage hygiénique, appelante, et contre Giot son avoué, faute de
conclure ;
Et pour le profit :
Adoptant les motifs des premiers juges ;
Par CBS motifs, Statuant contradictoirement entre les parties
sur l'exception d'incompétence et le renvoi proposés par la com-
pagnie appelante, et par défaut faute de conclure et plaider au
fond contre la dite compagnie et contre Giot son avoué ;
Met l'appellation à néant ;
Confirme le jugement susvisé du 21 octobre 1896 dans toutes
ses dispositions et condamnations ;
Dit qu'il sortira son plein et entier effet ;
— 95 —
Et condamne la Compagnie internationale de Chauffage hygié-
nique à l'amende et aux dépens d*appel .
Enfin, sur ropposition de la Société nlernalionale de
Chauffage hygiénique, la Cour, sous la présidence de
M.CAZE,présîdent,après avoir entendu MM'^Gauthier Rouge-
viLLB et PouiLLET, avocats, en leurs plaidoiries et M. Van
Cassel, avocalgénéral, enses conclusions a, par arrêt du
13 janvier 1900, débouté la Société hygiénique de son op-
position en ces termes :
La Cour, Statuant sur l'opposition formée par la Compagnie
internationale de chauffage hygiénique à l'exécution de Tarrêt
rendu par cette chambre de la cour le 27 janvier 1899 ;
En la forme :
Considérant que l'opposition est régulière ;
Au fond :
Considérant qu'il est établi que l'acte sous seings privés en date
du 14 avril 1895 concédant à Gillet et Forest licence d'exploiter
en France pour partie, les brevets de Vve Ancelin s'il a été enre-
gistré seulement le 25 mars 1896 n'était au point de vue de l'ac-
tion de cette concession, que la confirmation d'un acte antë-
riear remontant au 24 août 1894, c'est-à-dire plus d'une année
avant la constitution de la société opposante ;
Considérant que dans l'intention des parties, cet acte origi-
naire da 24 août 1894 de même que l'acte de 1805, ne confé-
rant à Gillet et Forest qu'un avantage personnel et limité et ne
leur attribuant nullement le droit de poursuivre en leur nom les
contrefacteurs constituait, non une cession de brevet, mais seu-
lement une licence de l'exploiter pour partie ;
Considérant que, pour devenir opposable aux tiers et spécia-
lement à la société opposante^ii n'était point nécessaire que l'acte
de 1894 et celui de 1895 eussent été, au préalable, soumis à la
formalité de la transcription spéciale des articles 20 et 21 de la
loi du 5 juillet 1844, mais qu'il suffit qu'en fait la société oppo-
sante les ait connus pour être tenue de les respecter ;
Et considérant qu'il est établi par les documents de la cause
qu'avant la constitution de la société et alors qu'elle n'était qu'en
projet, la Vve Ancelin et Godefroy qui en devaient faire et en ont
fait partie, ont mis au courant ses fondateurs des conventions
passées antérieurement par eux, tant en 1895 qu'en 1894, avec
Gillet et Forest; que à raison même de l'existence de ces conven-
tions, des pourparlers ont été engagés par l'administrateur dési-
gné de la future société avec Gillet et Forest en vue d'un arran-
gement ;
} pourparlers n'oat poiat abouti, et qu'il apparaît que
lions spéciales dans lesquelles la société a été ulténea-
instituée à Bruxelles n'ont été combinées et adoptées
le but d'en dissimuler à Gillet et Forest rexi5tenc« et
tions;
lui touche les conclusions subsidiaires :
Srant que, en l'état des conventions de 180S et pour les
jà déduits dans le précédent arrât de la Cour, il écfaet
ir que l'apport fait à la société du breret de dame Ance-
point nul mais est seulement grevé de la licence accor-
let et Forest en France ;
insidérant qu'il n'est nallement justifié que les avances
r Gillet et Forest aient été limitées à une somme de
ancs ; que d'autre part, des dispositions combinées des
1894 et 189Q, il résulte expressément que les droits coq-
lillet et Forest étaient définitifs et devaient s'exercer
toute la durée du brevet ;
; MOTIFS, Et persistant en outre dans ceux de t'arrët de
1 27 janvier 1899 ;
en la forme la Compacte internationale de Chauffage
ue opposante au dit arrêt ;
d:
3 ta dite compagnie mal fondée dans tontes fies deman-
et conclusions d'opposition tant principale que subsi-
DD déboute ;
e l'arrêt par défaut susdaté continuera à être exécuté
forme et teneur ;
damne la Compagnie internationale de Chauffage bjrgié-
a dépens de son opposition .
Art. 4114.
iea A In pepsonimllté. — Œuvre «lr*iiiatlf|iie.
ftm révélés par de* délMit« ^ndlelalrea. —
n en d<»mnmB«*-liitérëtM.
7it, pour les écrivains, de puiser dans des faits his-
ou dans des épisodes révélés par des débals judi-
le sujet d'un roman ou d'une pièce de théâtre n'en
as moins ounerte VacHon en dommages-intérêts,
— 97 —
auprofU des tiers à qui préjudicierait Cceuvre et à rencontre
de Fauteur qui serait en faute (1).
Mais ne commet aucune faute Fécrivain qui utilise dans
un drame, comme sujet d'observations et d'étude^ des faits
rendus publics par un procès criminel plus de 20 ans au-
paravanty sans les dénaturer ni altérer en rien (2).
(C. de Bordeaux, 24 janvier 1899. — Consorts Gamier c.
Berthelot et Depay .)
Le Tribunal civil de Bordeaux j avait, le 23 février 1898,
rendu le jugement suivant :
Lb TaiBUNAL, Attenda qne Paul Berthelot a emprunte à un
crime commis à Lormont, en octobre 1875, le sujet d*un drame
qa^ se propose de faire représenter au théâtre des Arts que De-
pay dirige à Bordeaux ;
Attendu que la dame Cécile Jean, dite Gamier, épouse Roche-
ner, et la demoiselle Marie Jean dite Gamier, ont assigné les
dits sieurs Berthelot et Depay devant le tribunal pour obtenir
contre eux l'interdiction des représentations de cette pièce, et
une condamnation à des dommages-intérêts ;
Attendu qu'elles fondent leur action sur le préjudice que sui-
vant elles, leur causera la représentation d'un drame évoquant
le souvenir d'un crime auquel a été mêlée Juliette Jean, dite Gar-
nier, leur sceur ;
Attendu que Berthelot et Depay opposent à leur action une
fin de non-recevoir tirée de ce qu'elles sont sans qualité pour
faire valoir des droits qui appartiennent à leur sœur ;
Attendu que cette fin de non-recevoir ne saurait être admise ;
que ce n^est pas dans Tintérêt de leur sœur qu'elles ont introduit
leur demande ; qu'elles se plaignent d'un préjudice qui leur est
causé à. elles-mêmes par la publicité de nouveau amenée sur un
crime dont Juliette Gamier, leur sœur, s'était rendue coupable, et
qui avait ainsi gravement atteint l'honorabilité de leur famille et
de leur nom ;
Attendu qu'on ne peut leur refuser le droit d'exposer leurs
griefs et de prouver que la pièce qui a été composée par Berthe-
lot, et qull veut faire jouer avec le concours de Depay, leur
cause un préjudice de nature à justifier leur demande ;
Qu'il importe dès lors de rechercher si cette demande est
fondée ;
(1-3) Voir, pour le principe, Gasf ., 39 avril 1897, VempoUonneute
d'Ain-Pezza, Ann,, 96.19 et la note ; Paris, 3 décembre 1897, Vaumône
suprême, Ânn,, 99.61.
v
Tt^
— 98 —
Attendu que la dame Rochener et Marie Jean dite Garnier,
invoquent les dispositions de rarticle 1382 du Gode civil; qu'elles
ont à démontrer que Paul Berthelot à, en ce qui concerne leurs
droits personnels, commis une faute qui engage enyers elles sa
responsabilité et Toblige à en arrêter les effets et à en réparer les
conséquences dommageables ;
Attendu que le fait criminel qui est le sujet de la pièce compo-
sée par Berthelot remonte à une époque déjà lointaine' et a été
sous des formes diverses, livré à la publicité la plus étendue ;
qu'il n'appartient pas au tribunal, dans l'espèce dont il est
actuellement saisi, de déterminer les droits dont peut user un
auteur dramatique lorsque^ cessant de ne consulter que sa pro-
pre imagination, il emprunte à la réalité et notamment aax
annales judiciaires le sujet du drame qu'il veut faire représen-
ter;
Qu'il convient seulement de rappeler qu'il doit s'abstenir de
ioute mention susceptible de livrer à la malignité publique
le nom d'une famille déjà attristée par l'indignité d'un de ses
membres et soucieuse de voir ce pénible souvenir s'effacer dans
l'oubli ;
Or attendu que Berthelot n'a dans aucune partie de sa pièce
désigné sous le nom de Garnier le personnage dont le rôle est
inspiré de la participation de Juliette Garnier au crime commis
à Lormont en octobre 1875 ;
Que le prénom de. Juliette sous lequel il Fa désigné ne peut
être par lui-même une indication autorisant la dame Rochener
et Marie Garnier à prétendre que leur nom de famille est ainsi
révélé à la curiosité publique ; que, sans doute, pour bien des
gens qui ont conservé le souvenir du crime précité et des débats
judiciaires dont il fut suivi, le prénom de Juliette se rattache au
nom patronymique de Garnier, mais qu'à Tégard des demande-
resses, Berthelot ne peut être en faute pour avoir, tout en sup-
primant le nom de Garnier, laissé subsister le prénom vulgaire
de Juliette ;
Que par la suppression de leur nom de famille, il a donné à
la dame Rochener et à la demoiselle Marie Garnier la satisfaction
due à leur honorable susceptibilité, et ne peut être responsable
des divulgations par lesquelles se révélerait leur parenté avec
Juliette Garnier ;
Attendu qu'ainsi qu'il est ci-dessus déclaré, il est sans utilité
pour le procès actuel de rechercher si Berthelot pourrait avoir,
envers d'autres personnes, encouru quelque responsabilité en
raison de la composition de sa pièce du Crime de Lormont ;
Qu'il importe toutefois de rappeler que d'après certains pas-
sages portés en plaidoiries à la connaissance du tribunal, Ber-
-^^mm^ ■"■•.
- 99-
theiol piraît aToir, dans cette pièce, présenté sous un aspect
moins oëieaz que celai qai conTenait à la réalité des faits la par-
ticipation de Juliette Gamier à l'attentat criminel ayant servi de
sojet et de titre à la pièce sasyisée ;
Pak CBS MOTIFS, Le tribunal après en avoir délibéré jugeant en
premier ressort ; déclare les époux Rochener et Marie Jean, dite
Gamier, recevables dans leur demande, les déclare mal fondés
dans la dite demande, les en déboute et les condamne aux dé-
pens.
La Cour (2*cb.), sous la présidence de M. Saint-Aubin,
après plaidoiries de M«* Jaubbbt, Bertin et Chartrou, sur
les conclusions de M. Ribbt, avocat général, a confirmé le
jugement en ces termes :
La Godb, Attendu que Taction civile en réparation du pré-
jadiee caasé par un mode quelconque de publication peut être
exercée par toute personne qui justifie avoir souffert de ce dom-
mage;
attendu que le droit d'an auteur de puiser dans des faits bis-
toriques ou dans des épisodes révélés par des débats judiciaires
le sujet d'un roman ou d*une pièce de théâtre, loin d'être absolu
•e trouve renfermé dans certaines limites et ne fait pas obstacle
à l'application du principe général de la loi civile en matière de
responsabilité ; qu'il suffit, en l'absence de toute intention de
nuire qui constituerait le délit, que Ton puisse relever, d'une
part, une faute commise^ et de l'autre, un préjudice souffert,
pour justifier une demande dédommages-intérêts;
Attendu que les intimés, dans le drame mis à la scène en
1898, n'ont en rien altéré la vérité des faits si tristement célè-
bres; qu'ils ont, loyalement et sans passion, rappelé des cir-
eoDstances, connues de tous, cherché, dans des documents que
chacun est. libre d'interroger> des sujets d'observation et d'é-
tude et qu'ils n'ont rien fait pour dénaturer ou rendre plus odieux
le rôle joué par l'un des auteurs du crime de Lormont^ dont les
représentants se trouvent au procès ;
Attendu qu'un anteur en rappelant un fait vrai, depuis long-
temps notoire, et en évitant toute appréciation malveillante, ne
commet ni une faute, ni une imprudence, ni une négligence
Texposant aux conséquences prévues par l'article 1382 du Gode
civil;
Attendu qu'en l'absence de toute faute, il deyient inutile de
rechercher si un préjudice matériel ou moral a pu être causé
uz dames appelantes, dont l'une a changé de nom par suite
de son mariage, et qui ont peut-être imprudemment rappelé
i l'attention publique les liens de parenté qai les rattachent li
la condamnée de 1876, puiiiqne le nom patronymique de leur
Camille n'a pas été âcrit dans t'œuvre des intimés ;
Par ces motifs, Et ceux non contraires des premiers juges ;
Déclare recevable, en la forme, l'appel de la demoiselle Jean,
lite Garnier, et des époux Rochener envers le jugement da Tri-
luual civil de Bordeaux ; mais le dit mat fondé et les en dé- i
tioate ; |
Con&rme te jugement entrepris ; ordonne qu'il sortira plein |
Bt entier effet ; j
Les condamne & l'amende et en toos les dépens.
Art. 4115.
Nom patronymique. — Propriété. — Atteintes A
la peraonnallté. — Pabllentlon daiut nn JonruAl.
— Dommasee et Intérfita.
Toute personne a le droit incontestable de se î^aindre de
rabaa qui, malgré elle, a été fait, de son nom et de récla-
mer la réparation du préjudice qu'elle a souffert (1).
Spécialement, un négociant juif peut réclamer des dont-
et intérêts à un journal anti-sémitiqve, qui a fait figurer
son nom sur une liste de personnes appartenant à la religion
israélite, et prétend ainsi le désigner à l'animadversion
publique (2). ,
(Trib.civ.de la Seine, 18 janvier 1899.— SchmoUe. QnérinetBadigtdn.) |
Le Tribunal de la Seine, présidé par M. Baudoin a, le
18 janvier 1899, rendu le jugement suivant :
Lb Tribunal, Attemln qae le journal VAntijuif, se disant
l'organe de la ligue antiaémilique, a, dans ses cinq premiers nu-
méros, publié, sous la rubrique: •> Israël chez nous.'.... Les juifs
dans l'armée..., dans le commerce et l'industrie », et commença
la pubLcation de listes contenant les noms, adresses et profes-
sions de diversis personnes appartenant à la religion Israélite ; 1
Que, dans la liste publiée dans le numéro 5 portant la date du i
18 septembre 1898, (îgnre sous le sous-titre : « Bronzes et objets
(t-3) V. Trib. civ. Ljaa, référé, 30 décembre 1S96, Dreyfas, Aim., 97,
i(B. V. encore : Trib. Seine,25 février 1882, Duverdr.S. Si.S.SI el la note
de M. Labbé. Sur la nature du droit de l'individu sur ion nom palro-
nique, voir Ann., iM.343. article de U. Uaillard.
— 101 —
d'art h Paris, le nom de Schmoll, 80, rue de furenne », qae
celui-ci prétendant qu'on grave préjudice résulte pour lui de
cette publication, a assigné J. Guérin, directeur du journal, et
Badigoin, son imprimeur-gérant, à TefTet de s'entendre condam-
ner à lai payer 2,000 francs de dommages-intérêts, et interdire
de publier, à l'avenir, ses nom, profession, qualité et domicile,
à peine de 100 francs de dommages-intérêts par chaque contra-
fention constatée ; qu^il réclame, en outre, Tinsertion du juge-
ment à intervenir :
1* Dans le plus prochain numéro de rAnti/ui/ sous une as-
treinte de 25 francs par jour de retard pendant un mois, passé
lequel il sera fait droit de nouveau ;
2* Dans dix journaux de son choix et aux Frais du défendeur ;
Attendu qu'il suffit de lire le numéro de VAniijuif du 18 sep-
tembre 1898 pour se rendre compte du but de la publication in-
criminée ; que les juifs y sont dénoncés, à chaque ligne, comme
oardissant un abominable complot contre la France qu'ils vou-
draient pousser à la guerre dont ils auraient besoin pour conso-
lider définitivement leur situation chez nous ;
Qae dans son premier article, Guérin écrit qu* « ils appréhen-
dent le réveil de la France qui leur fera payer cher les infamies
qu'ils ont commises, les vols dont ils se sont rendus coupa-
bles... » ;... <( que les juifs Bleichrœder et Rothschild, les dévoués
collaborateors et complices de Bismarck en 1870-1871, ont
promis à l'empereur allemand leur aide, le concours de tous
leurs coreligionnaires résidant en France pour lui faciliter la vic-
toire » ;
Que l'auteur de l'article ajoute: « Il nous faut déjouer les
complots des juifs et leur montrer une France unie et forte, dé-
terminée à éviter sagement la guen*e tant qu'il sera possible,
comme on évite une aventure inutile dont l'ennemi espère seul
profiter, mais résolue, si la guerre devient l'inévitable consé-
quence de la campagne de trahison, à châtier immédiatement et
sans pitié les juifs et leurs complices, avant de partir à la fron-
tière pour défendre la patrie menacée. Que tout Israël n'oublie
pas que les Français tués à la frontière seraient vengés par avance
lar les juifs dès l'ouverture des hostilités qui n'auront servi qu'à
rendre leur châtiment plus rapide et plus complet » ;
Qu'à la page 2 du même numéro, est insérée une chanson où
déngnant les juifs, l'auteur s'écrie : « Mort aux bandits t » ; que
plus loin, annonçant sept assignations que viennent de lui faire
notifier diverses personnes comprises dans la publication de lis-
tes insérées dans les numéros précédents, le journal déclare qu'il
entend continuer sa polémique de combat et ce qu'il appelle » sa
documentation », û'odlà-direrénumération des situations et des
— 102 —
propriétés appartenant aux juifs chez nous. Nous obligerons,
ajoute-t'il, les juifs qui sollicitent la faveur des achats des ci-
toyens français pour s'enrichir, à montrer à quel point ils sont
restés juifs, malgré tout, chez nous... Nous accomplissons ou-
vertement, à la face de tous, une besogne française et bien fran-
çaise, en permettant à tous nos concitoyens de ne traiter des af-
faires avec les juifs qu'en connaissance de cause et s'ils le veu-
lent, sachant bien à quoi s'en tenir sur la qualité de leurs corres-
pondants ;
Que ces extraits suffisent à caractériser la campagne menée
par les défendeurs qui, faisant appel aux plus détestables violen-
ces, cherchent à désigner à Tanimadversion publique et à la pas-
sion populaire tous ceux dont ils inscrivent les noms et adresses
sur leurs listes de proscription ;
Que le tribunal ne saurait trop énergiquement condamner de
telles polémiques dont les récents événements ne révèlent que
trop le péril ;
Que SchmoU a le droit incontestable de se plaindre de Tabus
qui, malgré lui, a été fait de son nom, et de réclamer la répara-
tion du préjudice qu'il a souffert ;
Que le Tribunal a les éléments nécessaires pour en apprécier
l'étendue ; que s'il convient d'obliger les défendeurs à publier le
présent jugement dans le journal même où Tattaque s*est pro-
duite, il n'y a lieu d'augmenter le mal déjà causé, par une plut
large public ité;
Par ces motifs, Donne défaut contre Guérin et Radigoin qui
n'ont pas constitué avoué ;
Et pour le profit :
Dit Schmoll recevable et bien fondé dans sa demande ;
Condamne, en conséquence, Guérin et Radigoin, conjointement
et solidairement, à lui payer 500 francs de dommages-intérêts
pour réparation du préjudice qu'ils lui ont causé par la publica-
tion ci-dessus visée ;
Leur fait défense de publier, à l'avenir, les nom, profession,
qualité et domicile de Schmoll, à peine de 20 francs par chacune
des dix premières contraventions constatées» passé lesquelles il
sera statué de nouveau ;
Ordonne Tinsertion intégrale du jugement dans le plus pro-
chain numéro du journal rAnti;ut^ qui sera publié après sa signi-
fication, et ce à peine d'une astreinte de 25 francs par jour de
retard pendant un mois, passé lequel il sera fait droit ;
Rejette le surplus de la demande ;
Condamne GQ^rift et Radigoin solidairement en tous dépens
— 103 —
Art. 4116,
Iffom iMàtronymlqiie. — Atteintes À te pep«oiuiallté«
— ^lUMil-flélit. — Intention liUnrieuiie. — Absenee
de bnt e^Mumerelnl. — Tribunal de eommepee. —
U tribunal de commerce est incompétent pour connaître
de Faction en dommages-intérêts intentée contre un journal
à raison de la publication d'une liste de commerçants dési-
gnés comme israélites, cette publication ne constituant pas
un agtssement de nature commerciale au profit du journal
et visant les personnes désignées, à raison de la religion
qu'elles professent et non du métier qu'elles exercent (1).
(Trib. comm. Seine, 6 mars 1899. — Cahen c. Radigoin et Guérin
et llmprimerie Paul Dapont.)
Le Tribunal de commerce de la Seine, sous la prési-
dence de M. le président Victor Lxgrand, a rendu le juge-
ment suivant :
Le Tribunal, En ce qui touche Guérin et Radigoin, surTin-
compétencc r<Uione materise opposée par ces défendeurs :
Attendu que le demandeur se plaint de la publication de ses
nom, profession et domicile dans les listes insérées dans le jour-
nal Y Antijuif sons la rubrique « Israël chez nous » ; qu'il soutient
qu'à la suite des imputations et injures énoncées dans la première
partie du journal une pareille publication serait illicite ; qu'elle
nuirait à sa considération et lui causerait un dommage sérieux ;
Qu'un certain nombre de demandes identiques ont été intro-
duites par des commerçants et des non-commerçants; que la
plupart, qui sont commerçants, exposent que les agissements
des défendeurs porteraient atteinte à Texercice de leur négoce ;
qae tous prétendent que Guérin et Radigoin par la publication
(1) On peut douter de l'exactitude de cette solution, si Ton considère
k joomal comme nneentreprise commerciale ; cette entreprise causait un
préjudice à autrui, l'article 631 du Ck>de de commerce était applicable.
Il importait peu qu'il y eût là ane diffamation ; l'action en réparation
an délit de contrefaçon est bien de la compétence du tribunal de com-
merce lorsque le défendeur est commerçant (Voir Rouen, 5 août 1896,
Ann,, 98.306 et la note).
Le gérant et le propriétaire d'un journal politique font-ils acte de
commerce ? Le Tribunal de la Seine incline vers l'affirmative ; le Tri-
imaal de Largentière, 4 avril 1900,répond négativement (La Loi, 10 mai) .
G. M.
— 104 —
et la vente du journal susnommé auraient assumé une obliga-
tion quasi-délictuelle dérivant de l'exploitation de leur entreprise
commerciale, que par suite, le présent litige serait de la com-
pétence de ce siège ;
Mais attendu que Guérin se révèle comme directeur et Radi>
goin comme gérant du journal VAnUjuif; qu'en admettant qa^ils
soient, au regard des tiers, les seuls chefs responsables de Ten-
treprise et, comme tels, commerçants, Tattribution de juridiction
ne saurait, en Tespèce, dépendre uniquement de la qualité des
parties en cause, mais, avant tout, du caractère de l'acte qui
donne lieu an litige ; '
Attendu qu'il n'existe entre les parties au procès ni relations
commerciales ni similitude d'entreprise ; qu'il n*est pas justifié
ni même allégué que les imputations dont se plaint le demandeur
constituent les éléments d'une concurrence déloyale ou de tons
autres agissements de nature commerciale, pratiqués au profit
du journal V Antijuif ;
Qu'il n'apparaît pas que les articles violents incriminés s'appli-
quent plus spécialemeut au négoce d'un ou plusieurs des com-
merçants et visent nécessairement leur crédit ou leur honneur
commercial ;
Qu'il est constant que les insertions et articles se rattachent à
une campagne de presse menée par le journal VAntijuif contre
une collectivité dont il ne prend pas à partie les membres qui
la composent en raison des métiers ou fonctions qu'ils exercent
personnellement, mais en raison de la religion qu'ils professent
et qu'il divise pour les besoins de sa polémique en diverses ca-
tégories, au point de vue civil, industriel et commercial ;
Qu'en ne saurait considérer comme un acte de commerce ou
comme procédant d'un acte de cette nature la rubrique « Israël
chez nous », avec l'énumération des noms, juxtaposée à des arti-
cles passionnés qui révèlent manifestement un caractère politique
et social ; que rapprocher ces faits pour y trouver la preuve d'un
quasi-délit commercial, d'un préjudice éprouvé et d'un droit &
une réparation pécuniaire serait méconnaître le caractère ioju-
rieux qui leur a été donné à la barre par le demandeur lui-même
et requérir en réalité de ce tribunal, qui n'a pas à en connaître,
Tapplication des articles 29 et suivants de la loi du 29 juillet 1881
sur la presse, titre du délit contre les personnes ;
Qu'en tout état de cause, le tribunal estime que le litige n'a
pas le caractère commercial essentiel et précis, nécessaire pour
être déféré à la juridiction exceptionnelle des tribunaux consu-
laires ;
Qu'il échet donc d'accueillir les conclusions de Guérin et Ra-
digoin concernant la compétence.
Plaidants : M** Caron, Fleuret et Max Girard, agréés.
— 105 —
Art. 4117.
Liberté dii eommeree et de l'indosirle. — Mmréhmndm
em gr^tm ^guÈ ▼endenC dlreetement mu. publie. —
Mise <k nndex imu* une eliAmbre ayndleale. — Syn-
dimmtm profeealoiuiels. — Dommft^eM-liitérête.
Commet un abus, passible de dommages-intérêts ^ la
chambre syndicale qui^ conformément à ses statuts, par une
circulaire à d'autres chambres syndicales^ met à Vindex un
marchand de gros pour s'être adressé directement à la clien-
tèle de détail sans verser une somme de 20 0/0 à la cham*
hre syndicale ; en effets une semblable mesure est contraire
à la liberté du commerce et de f industrie (1).
Les syndicats professionnels, établis dans les termes de
la loi du 21 mars 1884, peuvent se concerter pour défendre
leurs intérêts j mais à condition de se conformer aux règles
de la justice et sans porter atteinte aux droits d' autrui {2).
Si depuis l'abrogation de Varticle 416 du Code pénal
t atteinte portée à la liberté du travail par la proscription
et Tinter diction ne constitue plus un délit passible de peines
correctionnelles y les mêmes faits peuvent constituer une
faute, entraînant responsabilité civile si elle cause préju^
ike à autrui (3).
(G. de Riom, 7 février 1900. — Thioust e. Chambre syndicale de
rameablement de Glermont-Ferrand.)
Par infirmation d'un jugement du Tribunal civil de Cler-
mooUFerrand en date du 13 janvier 1898 (La Loi, 21 mars
1900), la 1'* chambre de la Cour de Riom, sous la pr ési-
dence de M. Proal, après plaidoiries de M«» Salvy et Mil-
ut, conformément aux conclusions de M. l'avocat général
DiLPY, a rendu Tarrèi suivant :
U GooR, Considérant qu'à la date du 11 août 1897 la chambre
ijodicale de Tameublement de Clermont-Ferrand a adressé à onze
lyndicats similaires de Bordeaux, Rouen, Grenoble, Tours, Pa-
ris, Lyon, Nantes, etc. la circulaire suivante :
«Noos avons rhonneur de vous informer, qu'ayant eu les preu»
ves certaines que le voyageur de la maison veuve Thioust, rue
Saint-Bernard, Paris, était allé solliciter directement des mat-
(1-8) Cf. Trib. ciT.Seine, 4 juUlet 1895 (La Loi, 6 juillet) et 6 novembre
W (U Loi, 8 novembre); Lyon, 15 mai 1S95 (La Loi, 28 mai).
-- 106 —
très d'hôtel et clients bourgeois dans notre station thermale de
la Bourbonle at leur avait livré des meubles, sans qa'il puisse
jstiller d'un intermédiaire appartenant à notre corporation, no-
-e syndicat, dans sa réunion du 9 courant, a proposé à l'unani-
ifté la mise & l'index de cette maison. <>
Considérant que, d'une autre circulaire de la même chambre
yndicale, en date da 31 novembre iS06, il résulte que la mise
l'index est prononcée contre les maisons de gros qui traitent
irectement avec la clientèle bourgeoise, quand ces maisons oe
ersent pas » une provision de 20 0/0 aux chambres syndicales n
ue la chambre syndicale ile l'ameablement de Clermont pré-
end légitimer cette perception et la rendre obligatoire sous peine
e mise à l'index, en disant qu'elle est une sanction de l'obli-
ntion imposée par un usage commercial aux maisons de gros
e ne pas traiter directement avec la clientèle bourgeoise ;
Considérant que l'existence de cet usage commercial n'est point
tablie, avec le caractère que lui attribue la chambre syndicale,
u les lettres de quelques marchands en gros ; les uns disent
ue, ne faisant pas, de détail, ils renvoient à leurs clients ,mar-
lands de détail, les demandes de clients bourgeois dont ils
int saisis ; que d'autres transmettent À des marchands de dé-
lil la « bonification », la << remise » qni leur reviennent dans
ille ou telle affaire ;
Qu'on ne sait, par te texte des lettres, si cette remise est la
imunération d'un service rendu par l'intermédiaire qui a donné
i commande, ou le dédommagement du fait que le marchand
1 gros a traité directement avec les clients bourgeois ;
Considérant, en outre, que les lettres de quelques commer-
uits en gros, se soumettant aux exigences du syndicat de Cler-
lont ne sauraient suffire pour établir an usage commercial,
pplicable & la généralité des commerçants en gros de toute la
rance;
Qu'il n'est point exact de prétendre que cet usage a été re-
}nna par la maison Thioast ;
Qu'à ta date du 17 août 1897, cette maison a reçu du syndicat
i Clermont une lettre ainsi conçue: « Nous apprenons que vous
rez vendu directement à H. Donnaud, mattred'hétel àlaBour-
inle, une certaine quantité de meubles... En conséquence,
ous avons l'honneur de vous inTormer qu'à dater de ce jour
lus les tapissiers et marchands de meubles syndiqués cesseront
lûtes relations d'aiïaires avec votre maison » ;
Que le lendemain 18, la maison Thioust répondit qu'elle trou-
ait cette lettre vraiment extraordinaire et que le syndical, avant
e prendre des allures de dictateur, devait s'assurer au moins
en avoir le droit ; que la maison Thioust ajoutait ensuite qu'elle
— 107 —
n*avait pas traite directement, mais par intermédiaire, poar ne
pas s*exposer à la mpture de ses relations avec les maisons de
détails, mais sans leur reconnaître le droit de percevoir 20 0/0
on de jeter Tinterdit sar les maisons de gros ;
Considérant, au surplus, que l'usage allégué par ]e syndicat
de Clermont est contraire à la liberté du commerce et de Tin-
dustrie, qui est d'ordre public ; qu'il aurait pour effet de créer
des catégories distinctes de commerçants, qui ne pourraient
▼endre qu'à des catégories distinctes d'acheteurs ; que ce Serait
faire rerivre, cent ans après la Révolution française, les abus
des anciennes corporations, détruits par elle ; que sans doute,
en fait, il existe plusieurs genres de maisons de commerce, s'a-
dressant à telle on telle clientèle, mais que chaque maison de
commerce est libre de faire, à sa convenance, une ou plusieurs
sortes de clientèle ; que chacun a le droit de vendre et d'acheter
à qui il lui plaît, sans être obligé d'employer tel ou tel intermé-
diaire ; qu'il est contraire à la saine raison de vouloir imposer
aux marchands de gros l'emploi des intermédiaires en exigeant
d'eux une remise de 20 0/0 aux chambres syndicales, sans que
cette perception ait pour contre-partie un travail, un service,
une fourniture quelconque ;
Considérant que la chambre syndicale de l'ameublement de
Clermont prétend vainement qu'en prononçant la mise à l'index
de la maison Thioust elle n'a fait que défendre ses intérêts,
ainsi que l'autorise à le faire l'article 5 de la loi du 21 mars 1884
sur les syndicats professionnels ; que, sans doute, les syndicats
professionnels peuvent se concerter pour défendre leurs inté-
rêts, mais qu'ils ne doivent défendre leurs intérêts, comme les
simples particuliers, qu'en se conformant aux règles de la jus-
tice et sans porter atteinte aux droits d'autrui ;
Considérant que, si depuis l'abrogation de l'article 416 du Code
pénal, l'atteinte portée à la liberté du travail par la proscrip-
tion et l'interdiction ne constitue plus un délit passible de pei-
nes correctionnelles, elle peut constituer une faute entraînant
une responsabilité civile, si cette faute a causé un préjudice à
autrui ; que les syndicats restent soumis aux règles du droit com -
mon et notamment à l'article 1382 :
Considérant qu'il n'est point exact de prétendre que l'exer-
cice d'an droit ne peut jamais donner lieu à des dommages-in-
térêts, même quand il cause préjudice à autrui, en vertu de
cet adage, qui jure suo utitur neminem lœdit ; que l'exercice d'un
droit peut devenir abusif; qu'il faut distinguer l'exercice nor-
mal d'un droit de l'abus auquel il peut conduire ; que le droit
qui appartient aux syndicats de se concerter n'est pas absolu,
xaais limité par le devoir de ne pas nuire à autrui ; qu'une pu-
— 108 —
enlever à une maison sa clienUla com-
dans l'exercice normal du droit qu'ont
re leurs intérêts; que cette mise & l'in-
e naire k la maison Tbioust, est évidem-
iftusâ préjudice & cette maisoD ;
chambre syndicale de l'ameublement de
t moins foudée à mettre la maison Thioast
bes qu'elle loi adresse ne sont point éta-
ivé que cette maison ait livré directement
; que pour le fait Clavel, la cbambre syn-
pas d'avoir traita, mais d'avoir sollicité
iffert des meubles à un simple particulier
ceux fixés pour les mâmes objets à un
, client de la maison venderesse : que les
t sont libres de ne plus faire d'opérations
aaison Tbioust, si elle leur vend les meu-
l'ils ne peuvent cbercher à nuire à cette
cité préjudiciable, en engageant les au*
îs de France à cesser leurs relations avec
, que la maison Tbioust est bien fondée
on du préjudice qui lui a été causé et que
ufSsants pour l'apprécier ;
'il a été mal jugé, bien appelé ;
, ce que les premiers juges auraieot dû
lia circulaire mettant la maison Tbioust
yndicalede l' ameublement de Gierm ont a
cette faute acansé un préjudice àta mai-
1 de ce préjudice :
re syndicale, représentée par son prési-
Tbioust la somme de 500 francs & titre
e l'arrAt aux frais de l'intimée, dans cinq
la maison Tbioust & la condition toutefois
insertion ne dépasse pas 100 francs ;
'e syndicale aux dépens de première ins-
n de l'amende.
— 109 —
Art. 4118.
Fropriété arttotlqae. — IVéstttlon d'Authenticité. •—
fiisiiAtiipe de rartiflte. ~~ Vérifloation d*éeritiire.
Le fait d'avoir , dans une lettre confidentielle , dénié Vau'^
thentidté dun tableau^ ne saurait donner ouverture à une
action en responsabilité y alors surtout que la réception de
cette lettre n'a causé aucun préjudice au tiers détenteur du
tableau.
La procédure de vérification d'écriture n'est pas appli'-
cable à la signature dun tableau^ puisque Vauthenticité
de cette signature ne suffit pas toujours à établir l'authen-
ticité de V œuvre et que Vartiste quiy en produisant^ n^a
contracté aucun engagement tns-d-ms de personne ne sau-
rait être tenu de déférer aux réquisitions indiscrètes dun
tiers avec lequel il n'a aucun lien de droit.
(Trib. ci?. S«iiie, 8 février 1897. — Bernheim jeune c.
Jacqaes fils et Lannean.)
M. Bernheim jeune, ayant acquis de M. Lanneau un ta-
bleau signé Gh. Jacques, a assigné Jacques fils, qui avait
dans une lettre mis en doute l'authenticité de cette œuvre,
pour obtenir réparation du préjudice qui lui aurait été ainsi
causé et faire déclarer que le tableau était bien l'œuvre
de Charles Jacques. Le tribunal, après avoir entendu en
leurs plaidoiries M*> Labori et Loustaunau, a rendu, le 8 fé-
vrier 4897, le jugement suivant :
Lb Tribunal, Attendu que Bernheim demande contre Jacquet
fils des dommages et intérêts par état, pour le préjudice que ce-
lui-ci lui aurait causé en déclarant qu'un tableau mis en vente
par le demandeur sous la signature de Jacques père n'était pas
de ce peintre ;
Attendu qu'à Tappui de sa demande il sollicite subsidiairement
ooe expertise pour établir Tauthentici té du tableau ; que dans ses
conclusions ultérieures invoquant comme applicables à la cause
les règles, de la vérification des écritures, il demande que Jacques
fils soit tenu de reconnaître la signature de son père ;
Sur la demande en dommages et intérêts :
Attendu que si Jacques a en effet déclaré que le tableau n*é-
tait pas de son père, il ne paraît pas avoir formulé cette décla-
ration ailleurs que dans une lettre privée adressée à Bernheim
?»",
— 110 —
qu'il n'a dès lors, de ce chef, commis aucune faute et que la récep-
tion de cette lettre conQdentielle n'a causé à Rernîieim aucun
préjudice ; que les conclusions principales aussi bien que celles
subsidiaires à fin d'expertise doivent être rejetées ;
Sur les conclusions à un de reconnaissance de signature :
. Attendu que des termes et de l'esprit de la loi, il résulte que
cette procédure n'est applicable que lorsqu'il s'agit d'un écrit ;que
c'est pour cela seulement que l'œuvre du législateur se justifie
par le résultat pratique et efOcace auquel elle aboutit, et par la
légitimité d'une charge qui doit être considérée comme n'étant
pour le signataire que la conséquence équitable de Tobligation
contractée par lui ;
Qu'en effet d'une part, la reconnaissance d*écriture par un corol-
laire nécessaire astreint le signataire à Texécution du marché
tracé au-dessous de sa signature ;
Que d'autre part, on conçoit qu'on puisse en bonne justice im-
poser au souscripteur d*une obligation à échéance plus ou moins
éloignée une formalité peu gênante qui soustraira l'authenticité
de cette pièce à dès contestations presque fatales avec le cours
des années et qui doit dès lors être envisagée comme n'étant
que la suite naturelle et normale de l'engagement pris par lui ;
Mais que par contre en matière de tableau, d'une part, l'au-
thenticité de la signature ne suffira pas toujours à établir l'au-
thenticité de l'œuvre ; que d'un autre c6té, on ne saurait com-
prendre au point de vue des principes juridiques comment un
artiste,qui en produisant, n'a contracté aucun engagement vis-à-
vis de personne,se verrait tenu de déférer aux réquisitions indis-
crètes d'un tiers avec lequel il n*a aucun lien de droit ; qu'on
doit conclure de ces considérations que la procédure de vérifica-
tion d'écriture n'est pas applicable à la signature d'un tableau ;
Attendu que tout en assignant Jacques, Bernheim a par le
même exploit dirigé l'instance contre Lanneau son vendeur à
l'effet de voir dire qu'il serait tenu de lui rembourser son prix
d'achat au cas où le tableau serait reconnu faux ;
Mais attendu que c'est mal à propos que Bernheim a aussi
appelé en garantie Lanneau dans une instance qui en tant qu'elle
était dirigée contre Jacques fils ne pouvait aboutir à un jugement
de l'authenticité du tableau ;
Qu'il doit donc être déclaré mal fondé dans sa demande ;
Par ces motifs, Déclare Bernheim mal fondé dans ses deman-
des tant principales que subsidiaires et plus subsidiaires contre
les deux défendeurs ;
Le condamne en tous les dépens.
— m —
Art. 4119.
Propirlétéarttotlqiie. — Peintre. — Portrait. — Com-
~~ Droits et obllstttloiMi du peintre et du
La convention par laquelle un peintre $*engage à exécu-
ter un portrait moyennant un prix déterminé constitue un
contrai <Fune nature spéciale^ en vertu duquel la propriété
dit tableau n'est définitivement acquise à la partie qui Va
commandé y qtte lorsque V artiste a mis ce tableau à sa dis*
position et qu'il a été agréé par elle.; jusqu'à ce moment y le
peintre reste maitre de son œuvre , sans toutefois qu'il lui
mi loisible de la retenir pour lui-même ou d'en disposer
au profit d'un tiers à Fétat de portrait, le droit de repro-
duire les traits du modèle ne lui ayant été concédé que con-
diiionnellement en vue de l'exécution complète du con-
trai (1).
LepeintrCy faute de satisfaire à ses engagements, se rend
seulement passible de dommages-intérêts envers l'auteur de
la commande, sans que ce dernier , qui n'est pas devenu
propriétaire du tableau, puisse exiger que remise luien
^oit faite en l'état actuel (2).
(C. de Casa, cit., 14 mars 1900. — Sir Eden c. Whistler.)
Sir Eden s'est pourvu en cassation contre l'arrêt de la
Cour de Paris, rendu le 2 décembre 1897 {Ann., 97.328).
Il a formulé, à Tappui de son pourvoi, le moyen sui-
vant ;
Violation des articles 1136, 1138, 1583, 1584, 1603 et suivants,
l'îB? et 1788 da Gode civil, fausse application de l'article 1442
da même Gode, manque de base légale, défaut de motifs et vio-
lation de Farticle 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que, tout en
reconaaissant que Whistler avait contracté vis-à-vis de sir
^. Eden Tobligation de faire le portrait de ladj Eden et qu'il
avait fait et parachevé ce portrait, Tarrét attaqué a refusé d'en
ordonner la remise au demandeur, sous le prétexte que le contrat
(i-2) La Cour de cassation a sanctionné la thèse de la Cour de Patis,
qai avait déjà été soutenue dans nos Annales en note sous le jugement
do tribunal civil de la Seine (voir i4nn., 97.119 et 328, notes). Contra :
^Tns, dans le Droit d'auteur, 98.44.
— 112 —
intervenu entre les parties n'avait donné naissance qn^à une
simple obligation de fa)re,ré8oluble en dommages-intérêts en cas
d'inexécution, alors que ce contrat constituait une vente de chose
future ou un louage d'ouvrage dans lequel l'ouvrier devait four-
nir la matière, ou, tout au moins, une obligation de donner qui
avait pour effet de transférer de plein droit la propriété du por-
trait sur la tête du demandeur, dès son achèvement ou tout au
moins dès son agrément par sirEden et ce, avant toute livraison,
et que Tobligation de M. Whistler, n'eût-elle constitué qu*une
simple obligation de faire, les juges du fond auraient encore dû
ordonner rezéeution directe, l'obligation étant de celles qui peu-
vent être exécutées directement, sans exercer aucune contrainte
sur la liberté du débiteur.
•
M. ravocat général Desjardins a donné ses conclusions
dans les termes ci-après :
Messieurs, c'est peut-être avec trop de hête que l'avocat de
M. Whistler se met hors du droit commun, et répudie particu-
lièrement la jurisprudence qui s'est établie en matière de cons-
tructions navales. 11 n'y a pas d'analogie, je le reconnais, entre
le métier de peintre et le métier de constructeur. Mais le défen-
deur avait-il un si grand intérêt à bannir du débat votre arrêt
du 29 mars 1872 (D. 72.1.140) : « attendu, disiez-vous alors, qu'aux
termes de l'article 1788 du Gode civil, l'ouvrier qui fournit la
matière supporte la perte de la chose qui a été commandée, si
cette chose vient à périr, de quelque manière que ce soit, avant
d'être livrée ; qu'il faut nécessairement induire de là que le légis-
lateur a considéré que la propriété de la chose commandée rési-
dait sur la tête de Touvrier aussi longtemps que son œuvre n'était
pas achevée et qu'il n'avait pu la remettre aux mains de celui
auquel il s'était engagé à la livrer... » Au demeurant, n'est-ce
pas la doctrine qu'applique au contrat litigieux l'arrêt de la Cour
de Paris du 2 décembre 1897, jugeant que la propriété du tableau
n'est définitiirement acquise à l'auteur de la commande qu'autant
qu'il en a pris livraison ?
Néanmoins, les deux parties paraissent bien près de s'accorder
à reconnaître que la convention,formée entre le peintre et Fauteur
de la commande, est une convention sui generis et qu'il faut la
classer à part. C'est la thèse que l'avocat de M. Whistler a déve*
loppée dans l'instruction écrite et dans ses observations orales.
Mais déjà l'un des plus redoutables adversaires de l'arrêt attaqué,
M. le professeur PJaniol avait écrit dans le recueil périodique de
MM. Datiez, annotant cet arrêt (D. 98.2.465) : ce II ne s'agit pas
de la vente d'une marchandise ordinaire, et la nature de la chose
— 113 —
vendne inflne nécessairement sur les conditions de la vente. Les
contrats usuels ne sont pas des formes rigides, dans lesquelles
les parties soient obligées de mouler leurs conventions, sans
aucune adaptation aux besoins spéciaux de chaque hypothèse.
La jarisprndence doit tenir compte de ces nuances. . . » Je crois,
en effet, qu'il est plus raisonnable et plus conforme à la stricte
Térité de se placer sur ce terrain.
Mais tandis que la Cour de Paris envisage rengagement du
peintre comme une simple obligation de faire, M. Planiol le dé-
compose en deux obligations successsives : i<* exécuter l'œuvre
demandée ; 2<* livrer son travail une fois fini. La seconde obliga-
tion est, à ses yeux, une obligation de donner contractée à prix
d'argent, par conséquent une vente. « En appliquant, dit-il,
lldée de vente, on serait arrivé à la solution suivante : l'artiste
avait rempli son obligation de faire,(il le reconnaissait lui-même) ;
comme producteur, son rôle était Uni. Il ne restait plus tenu
que d'une obligation de livrer ; celle-ci devait être admise avec
tontes ses conséquences. C'est précisément cette obligation que
la Cour a sacrifiée en déclarant que l'auteur du portrait n*est pas
on vendeur, n J'incline à penser que cette analyse juridique
n*est pas conforme à la nature des choses.
Le pourvoi, invoquant Tautorilé de M. Pouillet {Traité de la
^opriété littéraire et artistique^ n®» 173, 174, 180) propose la
distinction suivante : « Une œuvre littéraire n'entre dans le com-
merce que par la publication ; avant la publication, l'œuvre atta-
chée à la personne de son auteur et faisant comme partie de
loi-même, est insaisissable. Les créanciers de cet auteur ne peu-
vent mettre la main sur ses manuscrits et profaner ce que
M. Renouard appelle si justement « la conversation de l'auteur
avec lai-même, le sanctuaire de sa conscience ». L'œuvre mu-
sicale doit être de tous points assimilée à Tœuvre littéraire. Il
en est autrement de l'œuvre du peintre, dès qu'elle est achevée,
on peut dire qu'elle est éditée. » M. Claude Couhin reproduit
et fortifie par un nouvel argument (t. II, p. 374 et 375) cette
opinion de M. Pouillet. Mais cette distinction ne me paraît pas
juridique ; en tout cas, elle est beaucoup trop absolue.
Virgile a des droits sacrés sur le manuscrit de son Enéide,
tant qu'il ne la juge pas terminée. Meyerbeer a des droits
inviolables sur la partition de V Africaine, tant qu'il ne la croit
point parfaite, et nul directeur de théâtre ne pourra le contrain-
dre à loi livrer cette partition que le compositeur juge, même par
on excès de sévérité, devoir être complétée on remaniée. Mais
est-ce que le peintre n'entre pas de la même manière « en con-
versation avec lui-même I est-ce que le tableau n'est pas, au
même titre que la symphonie ou l'opéra, un ouvrage de lapen-
— 114 —
sée? » M. Pouiliet Q*a-t-ii pas dit lui-même {op, eit,^ n^ 77):
« La matière employée par Tartiste est saos influence sur son
droit, c'est la conception de l'auteur qui est protégée. Qu'importe
qu'il Tait exprimée sur la toile ou la porcelaine, taillée dans le
marbre ou Tivoire, façonnée dans une pâte, coulée dans un
moule, elle garde dans tous les cas son individualité. La création
reste la même. C'est ainsi que la loi protège la composition litté-
raire sans regarder à l'idiome. » S*il en est ainsi, le peintre a,
comme le compositeur, le droit d'aller jusqu'au bout de sa propre
conception. Sans doute, le tableau prend une individualité ma-
térielle; mais le manuscrit d'un livre ou d'une partition est, de
même, un objet corporel et palpable. Un écrivain, a-t-on dit,
peut jusqu'à la dernière minute se repentir d'avoir commis une
œuvre indigne de son génie ; le même regret peut assurément
naître dans l'esprit du peintre.
J'approuve donc l'arrêt rendu par la Cour de Paris le 4 juillet
1865, sous la présidence de M. Bonneville de Marsangy et sur
les conclusions de M. Oscar de Vallée. Rosa Bonbeur avait pro-
mis un tableau d'une certaine dimension à M. Pourcbet et le
prix avait été fixé ; elle commença, mais interrompit bientôt son
travail et finit par écrire à l'amateur qu'elle ne lui donnerait
pas « le plus petit morceau de toile peinte ».
Le tribunal de Fontainebleau avait ordonné que, dans un délai
de six mois, Rosa Bonheur devrait livrer à Pourcbet un tableau
composé et peint par elle ; £y ou tant que, ce délai expiré, elle
paierait à Pourcbet 20 francs par chaque jour de retard pendant
trois mois, « temps après lequel il serait fait droit » (c'est ainsi
que procéda, dans l'affaire actuelle, le tribunal de la Seine ; la
Cour de Paris infirma, considérant qu il s'agissait d'une obliga-
tion de faire, que cette obligation se résolvait en dommages-
intérêts, qu'en présence du refus formellement exprimé par
Rosa Bonheur, il ne restait plus qu'à statuer sur ces dommages
et crut devoir les évaluer à 4,000 francs.
M. Planiol, à vrai dire, ne veut pas qu'on mette sans discer-
nement, à un moment quelconque, le peintre au pied du mur.
u II faut reconnattre,lit-on dans sa note, que le tableau n'est à la
disposition de celui qui l'a commandé, qu'au moment où il est
reconnu par l'artiste comme achevé. » D'accord ; mais à quelles
difficultés pratiques ne va-t-on pas se heurter ? L'artiste n'a-t-il
pas tocgours le droit de dire : « Je ne livre pas, parce que je
n'ai point achevé. Cet achèvement dépend de mon intelligence
et de ma volonté. J'exerce, comme producteur, un droit de maî-
trise sur mon œuvre ; nul ne peut l'exercer à ma place. » Vous
vous trompez, répondra l'auteur de la commande, qui a payé ;
vous m'avez vendu celte faculté d'exercer le droit de maîtrise h
— 115 —
rotre place ; je Texerce» Or je juge, moi, votre OBUvre unie et j*en
réclame la livraison.
N Hais qne la réplique du peintre est facile ! Il n'a (les choses
se sont ainsi passées) qu'à modifier son œuvre inachevée. En un
coup de pinceau, il a reconquis toute sa liberté. Un œil a dis-
paru, le nez n*existe plus au milieu du visage. Le portrait est à
parfaire, j'allais dire à refaire.
Le pourvoi proposait comme nn'modèle universellement appli-
cable votre arrêt du 29 mars 1886, qui pose le critérium suivant :
«U ne sanrait j avoir place pour une transmission de propriété,
tant que la chose qu'on s'est engagé à livrer ne sera pas effecti-
vement en mesure d'être livrée... » Le défendeur avait tort d'éli-
mioer cet arrêt avec tant d*ardeur. Le portrait, dans l'espèce,
n'est plus même en mesure d'être livré.
il faut se méfier des solutions juridiques qui aboutissent à des
impossibilités matérielles. Qu'est-ce qu'une règle inexécutable?
Cependant, le demandeur insiste en faisant observer que le
peintre a brûlé ses vaisseaux en envoyant le portrait à l'exposi-
tion du Ghamps-de-Mars. En l'exposant, il s'est rendu non re-
cevable à soutenir qu'il ne l'a pas terminé. Je ne le crois pas.
Le Palais des offices, li Florence, contient quelques esquisses de
Raphaël, auxquelles on pourrait assigner une place d'honneur
dans n'importe quelle exposition. En fait, il arrive assez souvent
que l'exposition même fasse ressortir certains défauts et que le
peintre corrige après avoir exposé. 11 en est surtout ainsi quand
il s'agit d'un portrait fait par un coloriste-harmoniste (c'est ainsi
que l'avocat de lord Eden classe et qualifie M. Whistler). Dans
les œuvres de cette école, nous disait le pourvoi tout à Theure,
la ressemblance n'est qu'une chose accessoire ; l'artiste cherche
ane combinaison d'ombres et de lumières; il se tient pour satis-
fait s'il obtient une sorte d'harmonie générale, indépendante des
réalités concrètes. Gomment dénier, en thèse, aux peintres de
cette école, le droit de songer à ces misérables réalités concrè-
tes, au moment où, n'ayant plus affaire au public, ils se trouvent
en face d'un modèle en chair et en os?
Je crois donc, avec l'arrêt attaqué, que l'artiste reste maître
iB son œuvre, quand il ne l'a pas livrée à Fauteur de la com-
mande, ou, si Ton veut, quand il ne Ta pas mise à sa disposi-
tion, sans qu'il soit toutefois loisible au peintre d'en disposer au
profit d'un tiers ou de la retenir pour peindre pour lui-même à
l'état de portrait, le droit de retenir les traits du modèle ne lu i
ayant été concédé que conditionnellement en vue de l'exécution
complète du contrat ;
M. Planiol dît à ce sujet : « Mais d'où vient donc cette limita-
tion des droits de quelqu'un qu'on proclame propriétaire de son
— 116 —
œuvre? Qu'est-ce que cette propriété qui ne comporte aucun
usage ? Cette prétendue propriété n'est plus un droit, c'est une
obligation. » C'est plus qu'une obligation, répondons-nous, puis-
que le droit de Tartiste exclut encore tout droit réel de l'auteur
de la commande. Le jm utendi et abutendi est limité par les en-
gagements mêmes de l'artiste. Sans Tabdiquer, il Ta yolontaire-
ment restreint en contractant certaines obligations auxquelles
il a manqué. Quelque absolu que soit le droit de propriété, le
propriétaire peut toujours en limiter lui-même l'exercice, expli-
citement ou implicitement, en prenant certains engagements.
Mais quelle sera la sanction des infractions? Car enfin l'artiste
ne peut pas se jouer des gens avec lesquels il a traité ; l'artiste
ne peut pas impunément renier ses promesses, violer sa parole,
manquer aux autres et à lui-même. Sans aucun doute, on ne
peut pas le contraindre à faire ce qu'il refuse de faire ; mais on
peut le condamner à des dommages-intérêts ; on pourrait, au
besoin, quand il fait preuve d'une insigne mauvaise foi, l'écra-
ser sous des dommages-intérêts.
M. Planiol reproche à la Cour de Paris de ménager à Fexcès
l'indépendance des artistes. Il y a deux contractants; elle érige,
dit-on un seul d'entre eux en juge des suites qu'il a données lui-
même au contrat. C'est bon tout au plus, insinuait-on tout à
l'heure, pour certains hommes de génie auxquels il faut laisser,
dans un intérêt général, une grande liberté d'appréciation et sur
la valeur vénale de leur œuvre et sur son degré d'achèvement.
Sans doute, il y a des Titien et des Van Dyck qui ont laissé
des portraits merveilleux, chefs-d'œuvre de l'esprit humain et
cette lignée n'est pas éteinte puisque M. Bonnat fait revivre sur
des toiles impérissables les figures des plus éloquents, des plus
saints, des plus braves parmi les Français d'aujourd'hui. Il eût
été particulièrement regrettable d'empêcher la c conversation
de ces grands artistes avec eux-mêmes ».
Mais serait-il juridique d'introduire dans le débat cette dis-
tinction entre les artistes de génie et les artistes dépourvus de
génie ?
J'en doute fort. M. Feuillet l'a proscrite op. et/., n^ 78 en termes
excellents : « La loi protège au même degré, dit-il, toute compo-
sition due à un effort de l'esprit humain et se rapportant aux
beaux-arts. Elle ne considère ni l'importance ni la beauté de
l'œuvre ; elle n'envisage que le fait de la création ; c'est pour
cela qu'elle protège au même degré le tableau de Raphaël et
l'image sortie des fabriques d'Epinal. Je précise. Au point de
vue qui neus occupe, il serait absurde et véritablement impos-
sible de conférer aux tribunaux le droit de se prononcer sur le
mérite des œuvres et d'opérer la classification des hommes.
— 117 ~
Oai, quand il s'agit de déterminer si la peinture est ou n*est
pas achetée et si, par suite, elle peut ou ne peut pas être mise à
la disposition de celui qui Ta commandée ; les pires barbouilleurs
eax-mémes dominent le jugement du public et je ne crois pas
qu'ils doivent être assimilés aux simples vendeurs d'une toile
courante, cotée sur un marché commercial et tarifée selon sa
dimension.
Ce que je dis des barbouiileurs, je le dis à plus forte raison des
impressionnistes, des coloristes-harmonistes. S'ils négligent inten-
tionnellement le dessin, s'ils fuient le contour précis, s'ils laissent
flotter leur pensée dans un nuage, s'ils cherchent le beau dans
certains jeux, j'allais dire dans certaines sonorités de la lumière,
comment discerner s'ils ont obtenu la combinaison rêvée? Qui
saura jamais, sauf eux-mêmes, s'ils ont atteint leur but? On ne
peut donc pas les contraindre à mettre à la disposition d'un con-
tractant qui veut en finir l'œuvre achevée à ses yeux, inachevée
aux lears. Ils ne seront jamais contraints de faire ; mais, dès
que le juge aura constaté soit leur mauvaise volonté, soit leur
mauvaise foi, soit même leur simple nonchalance, ils seront
contraints de payer.
Je conclus au rejet du pourvoi. »
La Chambre civile a rendu rarrêt suivant :
La Coub, Attendu que la convention par laquelle un peintre
s'engage à exécuter un portrait, moyennant un prix déterminé,
constitue un contrat d'une nature spéciale, en vertu duquel
la propriété du tableau n'est définitivement acquise à la par-
tie qui l'a commandé, que lorsque l'artiste a mis ce tableau à
sa disposition et qu'il a été agréé par elle ; que, jusqu'à ce mo-
ment, le peintre reste maître de son œuvre, sans toutefois qu'il
lui soit loisible de la retenir pour lui-même ou d'en disposer au
profit d'un tiers, à Tétat de portrait, le droit de reproduire les
traits du modèle ne lui ayant été concédé que conditionnelle-
ment en vue de l'exécution complète du contrat, et que, faute
par l'artiste de satisfaire à ses engagements, il se rend passible
de dommages-intérêts ;
Attendu qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que
Whistler s'est engagé à faire le portrait de lady Eden^ mais qu'il
s'est toujours refusé à mettre ledit portrait à la disposition du
demandeur en cassation qui en avait fait la commande ; et qu'a-
près avoir exposé le tableau au salon du Champ-de-Mars, il a
fait subir à la peinture des modifications radicales remplaçant
la tête de lady Eden par celle d'une autre personne ;
Attendu, en cet état des faits, qu'en décidant, d'une part, que
— 118 —
oandenr en cassation n'étant pas devenn propriétaire da
u, n'en pouTait exiger la remise en son état actuel ; d'au-
rt, que Wiiistler serait tenu de restituer avec des domma-
[érëts le prix perçu d'avance, et en interdisant, en outre,
ernier de faire un usa^e quelconque de la toile avant d'en
modifie l'aspect, de manière k la rendre méconnaissable,
attaqué, lequel est motivé, loin de violer le texte de loi
^T le pourvoi, en a fait, au contraire, une juste application ;
CES nonFs, Rejette le pourvoi formé par sir Eden contre
. de la Cour de Paris du 2 décembre 1897.
. Mazbau, premier présideni; — Rau, rapporleur ;
uARuiNs, avocat général. — H*' Boitin-Chahpbaox et
TON, avocat.
Art. 4120.
ii4été llUérMlre.— Œavro di*niiuttltpio.— RoDmB.
'lasiikC sén^ral. — Snpppe«BloD totete. — Dam-
mvm-tatbrétm.
fait de s'approprier pour en composer un roman un
e historique dans son titre, son sujet, son plan, ses
ï, leur agencement,leur marche, te» personnages, leurs ■
, leurs titres, leurs professions, leurs passions, leur»
leur langage et leurs impressions particulières, eons-
un plagiat général gui ne peut être réprimé par la
•ession de certains passages servilement reproduits du
e, mais par une mesure de suppression totale, avec
ilion de dommages etintérits (1).
auteurs du roman, alors même qu'ils se sont dessaisis
propriété de leur ouvrage, restent responsables du
dice qu'ils ont causé en récrivant et en le livrant au
C(S).
. Pouillel, Prop. HU., n«540,
,'auteur de la contrefaçon est co-antear du délit ivec l'éditeur,
il livie l'ouvrage à la publicité. Mênae lorsqu'il s'est dessaisi de
■a droits de progiriélé il reste complice du délit de contrefaçou,
joiT fourni i l'éditeur les moyens de le commettre (art. 6I},C. peu.);
[les ordinaires de la complicité sont applicables aux délits des
s i15 et 406 du Code pénal [Pouillet, Prop. litt., n° 611). Dans
e, le tribunal civil ne relient que la reaponaabililé de l'article ISffî
' ' l'aele initial de la remise de l'aavre ne
- 119 -
V éditeur fCe$t pas fondé à demander sa mise hors de cause
sous prétexte qu'il n'aurait pas édité le roman, mais se
serait borné à acheter des livraisons imprimées dans la fait-
lite <r«n précédent éditeur et aurait continué la publica-
tion (1).
La prescription triennale ne saurait être invoquée lors-
que^ au jour de la poursuite y la publication par livraisons
suivait encore son cours (2).
f G, de Paris, 25 janvier 1900. — Fayard frères c, héritiers
A. Damas et Gailardet.)
Ainsi jugé par la l'* Chambre de la Cour de Paris, sur
rappel d'un jugement rendu par le Tribunal de la Seine
le 23 juin 1897 ^nn., 98.294).
La Cour, Considérant que Fayard frères, éditeurs, ont publié,
en i898, à la suite de la maison Edinger, sous la forme de li-
iraisons illustrées à 0 fr. 05 Tune, un roman intitulé La Tour
deNesle et signé de G. Le Faure et de Pierre Delcourt ;
Que les consorts Dumas et Gaillardet ont alors assigné Tédi-
teur et les deux auteurs en dommages-intérêts prétendant que
ToniTre mise en vente n*était que la contrefaçon du drame écrit
en collaboration par Alexandre Dumas père et Gaillardet, et re-
présenté à Paris, sur le théâtre de la Porte- Saint Martin, le
29 mai 4832 ; qu'ils ont réclamé 40,000 francs et conclu à des
mesures protectrices pour réparer et faire cesser le préjudice dont
ils se plaignaient ;
Considérant que les appelants opposent à cette action l'ap-
probation de leur publication par Alexandre Dumas fils et les
héritiers Gaillardet ; mais que leur affirmation, sauf une lettre
peu concluante d'un tiers, reste à Tétat de simple allégation ;
Qu'ils invoquent aussi la prescription triennale applicable au
délit de contrefaçon ; mais que, sans examiner le moyen plus
complètement, il couTient de le repousser, par le motif pris de
tarait pas lé seul acte reprochable à l'auteur de la contrefaçon et, étant
délictoeuz, ne serait pas totalement couvert par la prescription.
(1) L'éditeur qui a acheté la propriété de Fœuvre et continue la pu-
blication est le principal auteur du délit, lequel se perpétue par les li-
vrusoDS successives.
(3) Evidemment rédîteur ne peut invoquer la prescription pour les
livraisons qui ont moins de 3 ans. Mais il résolte,dn fait, de Tarrét qu'il
ne peut Finvoquer non plus pour les livraisons antérieures lorsque Tou-
Trage forme on tout qui est contredit dans son ensemble. En tous cas
il resterait responsable de la vente (V. Pouillet, Prêp. Utt., n« 733).
G. M.
— 120 -
ce que la publication critiquée suivait son cours lia daU même
de t' assignation introductive d'instance ;
Considérant que Le Faure et Pierre Delcoart, en ce qui les
concerne, opposent qu'ils se sont dessaisis de la propriété de
lear onvage ; mais qu'ils n'en restent pas moins responsables du
nnïiiiHjce qn'ils auraient causé aux héritiers Dumas et Gaillar-
l'écrivant et en le vendant pour être livré au public ;
lidérant, qnant k Fayard frères, qu'ils soutiennent devoir
is hors de cause, parce qu'ils n'ont pas édité le romaa
de contrefaçon et s'étaient bornés & acbeter les brochnres
lées et les droits d'Edingerà sa faillite, et k continuer la
ition ; mais qu'il importe peu, puisqu'ils ont fait eux-
I et à leur profit la publication préjudiciable ;
ond:
sidérant que le roman de La Tour de SesU s'est approprié
me de Dumas et Gaillardet dans son titre, devenu célèbre
X seuls, dans sou sujet, son plan,ses scènes, leur agencement
' marche, ses personnages, leurs noms, leurs titres, leurs
sions, leurs passions, leurs actes, leur langage, leurs im-
ins particulières ;
I n'est que sa copie avec des développements sur chacaa
incidents, et a employé tous ses matériaux en leur ordre
es additions de pure amplification ;
I est donc un plagiat général qui ne peut être réprimé par
pression de certains p&ssages servilement reproduits du
, mais par une mesure de suppression totale, avec alloca-
i do m mages- intérêts ;
lidérant que les auteurs et éditeurs soutiennent en vaio
e sujet étant historique ou tout au moins légendaire, ils
ivnient traiter sans souci des publications précédantes ;
|ue, si certains personnages, de la pièce La Tour de Nesle
Jslé, la fiction dramatique de Dumas et Gaillardet leur
ient tout entière eu propre, et que c'est bien k eux seuls
I au domaine public que les appelants l'ont prise nbusi*
it;
lidérant qu'ils ont ainsi causé aux intimés un préjudice
et matériel par la dépréciation de l'œuvre originale, la pri-
du bénéfice à retirer de la vente du drame que te roman
de remplacer en librairie, et la difficulté de céder des
d'adaptation d'ores et déjà usurpés;
la Cour a les éléments suffisants pour l'apprécier, en te-
ompte aussi du devoir et de la facilité qu'avaient Le Faure,
jrt et Fayard de demander aux béritiers Ounias et Cail'
l'autorisation nécessaire ;
sidérant, quant aux mesures complémentaires demandées.
— 121 -
quHl j a lieu de modifier les astreintes prononcées par les pre*
miers juges, et aussi de ne point faire passer dans les biens des
consorts Dumas-Gaillardet, comme ceux-ci Tout exclusivement
demandé, les exemplaires du roman qui peuvent se trouver aux
mains des auteurs et éditeurs ;
Par ces motifs, Rejette toutes les fins de non-recevoir opposées
à la demande ;
Confirme le jugement du tribunal civil de la Seine, en date
du 23 juin 1897, en ce qu'il a condamné les consorts Le Faure,
Delcourt et Fayard à cesser la publication du roman intitulé :
ÎA Tour de Nesle, à payer solidairement aux héritiers A. Dumas
et Gaillardet la somme de 5.000 francs à titre de dommages-in-
térêts et à supporter tous les dépens de première instance ;
Infirmant pour le surplus et statuant à nouveau :
Dit que les auteurs et éditeurs du roman La Tour de Nesle
devront cesser sa publication du jour même de la signification
du présent arrêt, et, faute de ce faire, les condamne à 25 francs
de dommages-intérêts par chaque jour à partir de cette significa-
tion pendant un mois, passé lequel délai il sera fait droit ;
Rejette le surplus des conclusions des intimés et toutes con-
clusions principales on subsidiaires des appelants ;
Condamne les appelants solidairement, au besoin à titre de
supplément de dommages-intérêts, en tous les dépens d'appel ;
Ordonne la restitution de Tamende .
M. PoRicHON, premier président. — M«* de Bioault du
Granrut et Cléry avocats.
Art. 4121.
Propriété artistique. — Théâtre. — Décors et mise
ea «e^ne. — Droit dn dlreetenr de théâtre sur le
déeoi* dont fi est propriétaire. — Ineldent sur
exéevtlon d'arrêt. — Reproduction d*un autre dé-
cor ftàlt pour la même pléee.
L'arrêt quiy sur la demande d'un directeur de théâtre, fait
défense à un journal de reproduire les décors et la mise
en scène d^une pièce représentée sur ce théâtre ne s'appli-
que pas à la reproduction des décors et de la mise en scène
de laméme pièce, tels qu'ils sont sur un autre théâtre (1).
(1) L'arrêt du 30 décembre 1898 avait posé en principe : que « les dé-
cors d*ane pièce constituent une œuvre artistique analogue à un tableau,
dont la propriété appartient à Fauteur ou an directeur de théâtre, son
— 122 —
(G. de Paris, 2 février 1900. — Sodétë du ThéAtre de la Porte-SNMàrliii
c. le PhotO'ProgiXimme.)
La Société du Théâtre de la Porte-Sain t-Martin a obtenu
concesaionnaire» dans les termes de la loi du 24 juillet 1798 et des ooa-
ventions intervenues entre les auteurs, les décorateurs et directeurs de
théâtres ; qu^il en est de même de la mise en scène, comprenant les oos-
tûmes et le groupement des personnages, dont le plan général et la
conception, le plus souvent réglés par un livret manuscrit ou imprimé,
pont une œuvre de l'esprit susceptible d'être protégée' par la loi ; qu'il
suit de là que la reproduction, soit des décors, soit de la mise en scène,
ne peut être faite sans le consentement du propriétaire. »
Le nouvel arrêt de la Cour de Paris, qui n'avait à statuer que sur
l'exécution du premier arrêt, n'a pas porté atteinte à ce principe. Il
n'avait qu'à examiner si l'interdiction, prononcée par le premier arrêt,
de reproduire les décors et la mise en scène de Cyrano de Bergerac à la
Porte-St-Martin s'appliquait à la reproduction des décors et de la mise
en scène de la môme pièce sur un autre théâtre. C'était une simple
question de procédure.
Au fond, la Cour aurait eu A examiner, dans l'état des conventions
entre la Porte-St-Martin,d'une part^l'auteur de Cyrano de Bergerac et le
décorateur, d'autre pari, quelle était l'étendue des droits conférés à la
Société du ThéAtre de la Porie St-Mariin et qu'elle pouvait, par oonsé*
quent, opposer aux tiers :
1\ est évident que l'auteur de Cyrano ne lui avait concédé que le droit
de représenter l'œuvre et qu'il restait mattre d'autoriser la représenta*
tion, par exemple, sur le théâtre de Bruxelles, avec la mise en scène
établie par lui et des décors plantés suivant ses indications. Quant au
décorateur, il avait exécuté son décor sur les indications de l'auteur, il
n'était donc pas maître de la conception et n'avait de droit que sur
l'exécution, il n'a donc pu céder à la Société de la Porte-St-Martin aa«
tre chose, en lui cédant l'œuvre artistique que constituait le décor.
En conséquence, un autre théâtre a pu, avec l'autorisation de M. Ed-
mond Rostand, représenter Cyrano dans des décors établis d'après les
indications scèniques de l'auteur mais différents, dans l'exécution, 4e
ceux de la Porte St-Martin et suivant une mise en scène conforme A celle
de l'auteur. Décors et mise en scène ressembleront A ceux de la Porte-
St-Martin autant que se ressemblent deux œuvres exécutées sur un
même programme ; mais s'il n'y a pas eu copie d'une œuvre par l'autre
la distinction sera facile A faire.
Le second théâtre sera propriétaire, A son tour et sous les mêmes ré-
serves, de son décor et de sa mise en scène, en ce qu'ils auront de per-
sonnel ; il peut céder A un tiers, par exemple A un photographe, le droit
de les reproduire.
Une question délicate pourrait se poser, c'est celle de savoir si l'an-
teur n'aurait pas le droit de s'opposer A cette reproduction en ailégnant
qu'il ne cède A l'entrepreneur de spectacles que le droit de représenter
l'œuvre dans les conditions approuvées par lui, rien de plus.
Dans l'espèce que nous examinons une autre objection pouvait surgir :
la vente du photo-programme avec la reproduction de Cyrano A B ruxel-
les ne causait-elle pas A la Société de la Porte-St-Martin, &ute de men-
tions suffisamment distinctives, exactement le même préjudice qu'avait
voulu réparer le premier arrêt ? La Cour a estimé que cela ne rentrait
pas dans les termes de l'astreinte dont l'exécution lui était seule sou-
mise. 6. M.
— 123 —
de la 1^ chambre de la Cour de Paris (arrêt du 80 décembre
1898, Afin., 99.184) c défense au directeur du Photo-Pro-
gramme de reproduire, à Tavenir, les décors et la mise en
scène de la pièce Cyrano de ^er^erac, représentée sur le
théitre de la Porte-Saint*Martin >, celte défense étant sanc-
tionnée par une astreinte de 20 francs pour chaque con-
travention. Le Photo-Programme a alors publié la repro-
daetion des décors et de la mise en scène de Cyrano de
Bergerac à Bruxelles. La Société du Théâtre de la Porte-
Saint-Harlin a fait saisir les programmes contenant cette
reproduction et a réclamé l'astreinte. La l** chambre de la
Cour de Paris, saisie de l'incident, a, le 2 février 1900,
statué en ces termes :
La Godk, Statuant sur Fincident de rexëcution de Tarrôt du
30 décembre 1898, élevé par la Société nouvelle du Théâtre de
la Poiie-Saint-Martin ;
Considérant que les conclusions respectives des parties por
tent le débat sur rexëcution de Tarrét du 30 décembre 1898, le-
quel a statué sur le droit de publication des décors et de la mise
en scène de la pièce de Cyrano de Bergerac^ représentée sur le
Théâtre de la Porte-Saint-Martin ;
Que s*aatorisant du dispositif de cet arrêt, lequel a fait dé-
fense au directeur du Photo-Programme de reproduire à Tavenir
les décors et la mise en scène de la pièce Cyrano de Bergerac^
représentée sur le thé&tre de la Porte-Saint-Martin, sous une
astreinte de 20 francs par chaque contravention constatée à par-
tir du jour de Tarrêt, le directeur de la Porte-Saint-Martin a
fait dresser, à rentrée du théâtre, trente-deux procès-verbaux
d'haissier constatant contravention à Parrét par la vente de nu-
méros du Photo-Programme contenant reproduction des décors
st de la mise en scène de la pièce dont il s'agit ;
Mais considérant que la prohibition résultant de cette décision
doit être limitée dans ses termes mêmes ; qu'elle consacre, en
le protégeant, le droit des directeurs de . la Porte-Saint-Martin
sar TœuTre artistique dont ils sont propriétaires ; mais que sa
protection ne peut s^étendre an delà, et qu'en conséquence, dès
lors qu'il résulte de Texamen et de la comparaison d'un certain
nombre de programmes saisis, au nombre de 26 ; que ces pro-
grammes, loin de reproduire exactement la mise en scène de la
^orte-Saint-Martin, sont dressés d'après des représentations de
Uméme pièce sur un théâtre différent, ce qui n'est pas nié ; que
la prohibition de l'arrêt ne s'applique pas à ces programmes ;
qne c'est par suite sans droit que .des procès-verbaux ont été
dressés au sujet de leur distribution ;
Qu'il a été Tait des offres réelles da monlaDt des contraven-
ODs, au nombre de six, régulièreineot constatées suivant la
roit des directeurs ;
Pah ces U0T1P9, déclare Tulables les offres réelles du 3 ]an-
ér 1900 ;
Les déclare libératoires ;
Déclare Floury frères, directeurs du théfttre, mal fondés dans
I surplus de leurs uns et conclusions.
Les en déboute.
MM. FoBicHOM, premier président. — Tbohabd-Riolli,
ubstilut du procureur général. — H** Cléhencbau elHsNRi
iiOFFRoy, avocats.
Art. 4122.
I«are. — lA-wrem. -~ Ertltoni*. — Aataar. — Contrat d'é-
dition. — Redevatnee «tlpalée par exemplaire
venda. — Fret contracté par I'édltonr.~ Bxem-
B*g«. — OppowitlOD de l'auteur. — RoJet.
L'auteur qui a cédé à un éditeur le droit de publier un
uvrage moyennant, par chacun des exemplaires tirés, une
idevance stipulée payable lors de la mise en vente de
haque mille, devient, au moment des tirages succestifif
réancier de la redevance convenue et n'a, sur les volumes
nprimés, aucun droit opposable aux créanciers de l'édi-
!«r qui ont reçu de celui-ci une partie de ces volumes en
antissement d'un prêt, alors qu'aucune preuve de mau-
aise foi ou de faute n'est rapportée à leur encontre (1).
Les créanciers gagistes sont fondés à invoquer for(, 2279
u Code civil contre toute action de fauteur qui tendrait à
tire décider que les exemplaires, faisant l'objet du nan-
saement, ne pourraient être mis en vente qu'à la charge de
ti payer une redevance convenue, pour chacun des exem-
(aires vendus (2).
(1-3). La tolatioa de la Cour de Paria aemble à première Tne rigon-
nsement juridiqae, toulefoia, on ae prend i douter de ion euelilude
rsque l'on tient compte du caractère particulier du droit de l'aDtenr,
i ce droit moral qai a été mia en Inmière dans lea dernières innées
ir les Congrès de la Propriété littéraire.
Il est vrai que l'écrivain avait cédé i l'éditeur le droit d'éditer l'œuvra
^125 —
(C de Paris, 7 mars 1899. — Dramont c, bebière et May,
Savine et syndic faillite Savine.)
M. Savine, éditeur des œuvres de M. Drumont, notam-
ment de la Fin (Pun Monde et du Secret de Fourmies^
ayant eu besoin d*argent, avait remis aux Magasins gêné-
ranx, dirigés par MM. Debière et May, 29.000 volumes en-
viron, en échange d'un prêt que ces messieurs lui avaient
consenti.
Depuis, M. Savine avait été déclaré en faillite, sans
avoir remboursé ce prêt.
MM. Debière et May voulurent alors réaliser leur gage
et procéder, dans les formes légales, à la vente publique
de rénorme stock de volumes resté entre leurs mains.
M. Drumont s'opposa à cette vente, revendiquant les
droits qu'il prétendait faire résulter de la propriété de
ces deux ouvrages et s'appuyant sur un traité qui lui as-
surait une redevance de 1 franc par exemplaire vendu.
Le Tribunal civil de la Seine, par un jugement du 18 dé-
cembre 1897, débouta M. Drumont de sa demande dans
les termes suivants :
Le Tribunal, Attendu qu'à la date du M juin 1888, Drumont
a convenu avec Savine que celui-ci éditerait et publierait son
ouvrage, la Fin d^un MondCy moyennant le payement d'une cer-
taine somme par chaque exemplaire tiré ;
et qae l'éditeur aUait se trouver propriétaire des exemplaires édités.
Mais, l^écrivain ne se dessaisissait de ses droits qu'à condition du paie*
Bseat d'une redevance par chaque mille mis en vente ; les exemplaires
tirés mais non encore mis en vente et sur lesquels les droits d'auteor
n'avaient pas été payés n étaient donc pas la pleine propriété de Tédi-
teor.
En tout cas, l'auteur devrait pouvoir s'opposer à la réalisation du stock
d^ezemplaires i bas prix, dans des conditions qui sont de nature à lui
eaoser nn préjudice moral ; le projet de réglementation du contrat d'édi-
tion présenté au Congrès de l'association littéraire et artistique interna-
tionale à Milan en liâ2 prévoyait qu'en cas de vente en solde l'auteur
anrait nn droit de préférence pour l'acquisition des volumes.
D'antre part, l'art. 17 du môme projet prévoyait, qu 'en cas de déclara-
tion de faillite de l'éditeur, l'auteur pourrait demander la résiliation du
contrat, s'il ne recevait pas du syndic des garanties suffisantes pour l'eié-
cation du contrat dans son intégralité à charge par lui d'offrir le rem-
boarsement des dépenses utiles faites pour la publication de l'œuvre.
M. Trêves, éditeur h Milan, ne faisait pas, dans sa critique du projet,
d^objecUon à ces deux dispositions. — Cf. Bourges, 14 juin 1844, S. 45.
G. M.
— 120 —
Qu'à la date du il février 1892, une convention semblable est
intervenae entre les mêmes parties pour Tédition et la publica-
tion de l'ouvrage le Secret de Fourmies ;
Attendu qu'il a étë nettement spécifie que Drumont cédait
exclusivement à Savine Pédition in-18 de ces deux ouvrages et
que ses droits d*auteur lui seraient acquis du seul fait de la mise
en vente de chaque mille ;
Attendu que de ces conventions il ressort que, si Drumont
s'est réservé d'une manière générale la propriété de ses œuvres,
il a, moyennant une redevance, aliéné sa part de propriété sur
une édition déterminée au profit de Savine et est devenu le
créancier de celui-ci à dater du tirage de chaque millier d'exem-
plaires ; qu'il suit de là que l'éditeur avait le pouvoir de donner
en gage à Debière et May, sans l'intervention de l'auteur, les
volumes d'une édition dont il avait la propriété exclusive ;
Attendu que plusieurs années se sont écoulées entre le dépôt
aux Magasins généraux des volumes litigieux et la déclaration
de faillite de Savine ; qu'il n'est fait la preuve, à la charge des
créanciers gagistes, d'aucun fait dolosif ;
Attendu, en conséquence, que c'est à tort que Drumont a
formé une demande en nullité des warrants consentis par De-
bière et May à Savine et s'est opposé à la vente des volumes en-
gagés ;
Attendu que Drumont demande subsidiairement au tribunal
de nommer un séquestre qui aurait pour mission de se mettre
en possession des volumes susvisés et d'en opérer la vente dans
des conditions déterminées ;
Attendu que le défendeur s'oppose à cette mesure ;
Attendu que le gage a été régulièrement constitué ; que la loi
du 28 mai 1858, le décret du 12 mars 1859 et la loi du 31 août
1870 déterminent les conditions dans lesquelles aura lieu la
vente des marchandises engagées ; que dès lors, il n'est pas loi-
sible au tribunal de dépouiller un créancier gagiste des droits
qu'il tient de son contrat et de la loi ;
Attendu, en ce qui concerne la demande reconventionnelle,
que Drumont, en mettant obstacle à la réalisation du gage, a
rendu nécessaires de nouveaux frais ; qu^il a, de plus, empêché
Debière et May de toucher des fonds qui leur revenaient ; qu'il
doit être tenu de payer ces nouveaux frais de vente, de magasi-
nage et d'assurance et les intérêts de la créance que la vente
aurait éteinte, lesquels frais et intérêts seront fixés par état ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu d'allouer d'autres dommages et
intérêts ;
Attendu que Savine a été déclaré en état de faillite à la date
du 15 janvier 1897 ; que le syndic de la faillite déclare interve-
— 127 —
nir dans rinstance |poar s'opposer à la demande de Drumont ;
qa'il échet de lui donner acte de son intervention qui est justi-
fiée;
Par CB8 MOTIFS, Donne acte à G..., ôs qualités, de son inter-
f ention ;
Déclare Drnmont mal fondé en ses moyens, fins et conclusions,
Ten déboate ;
Dit que Debière et May pourront procéder à la vente des volu-
mes warrantés dans les formes prescrites par la loi ;
Condamne Drumont à leur payer les nouyeaux frais de vente,
de magasinage et d'assurance qu'il a rendus nécessaires^ ainsi
que les intérêts ci-dessus spécifiés, lesquels frais et intérêts
seront fixés par état ;
Dit qa*il n'y a lieu à d'autres dommages-intérêts ;
Rejette le surplus des conclusions des parties ;
Condamne Drumont en tous les dépens.
M. Drmnonl ayant fait appel de ce jugement, a présenté
lui-même ses observations devant la Cour, avec Tassis-
tance de M* de Saint-Auban, avocat. MM** Louis Binoche
el DuFBAisss ont plaidé pour MM. Debière et May, d'une
part, pour le syndic de la faillite Savine, d'autre part. La
Cour, sur les conclusions de H. Sbligman, substitut du
procureur général, a, par arrêt du 7 mars 18d9, statué en
ces termes :
La Goub, Sur l'appel :
Considérant que suivant conventions des il juin 1888 et H fé-
nier 1892, Drumont a cédé à Savine, éditeur, le droit de publier,
dans le format in-18, deux de ses ouvrages, moyennant, par
ehacon des exemplaires tirés, une redevance stipulée payable
lors de la mise en vente de chaque mille ;
Qn^en vertu de ces conventions, Drumont est devenu, au mo-
ment des tirages successifs, créancier de la redevance convenue,
mais qa^il n^a sur les volumes imprimés aucun droit opposable
à Debière et May qui ont reçu de Savine, dans le courant de juil-
let 1894, une partie de ces volumes en nantissement d'un prêt
par eux consenti à ce dernier ;
Que Debière et May, créanciers gagistes en vertu d^un titre
Hgulier et contre lesquels aucune preuve de mauvaise foi ou de
faate n*est rapportée, sont bien fondés à invoquer la disposition
de l'article 2279 du Code civil pour repousser l'action dirigée
contre eux, laquelle, dans le dernier état de la procédure, tend
4 faire décider que les exemplaires aux mains des intimés ne
— 128 —
pourront être mis en vente sans que la redevance de 1 franc par
chacun d^eux soit payée à l'appelant ;
Que Drumont doit donc être débouté de ses conclusions prîn*
cipales, et que, d*autre part, la Cour ne saurait ordonner Jes
mesures réclamées par les conclusions subsidiaires sans porter
atteinte aux droits des intimés à qui il appartient de réaliser
leur gage dans les conditions et suivant les formes déterminées
par la loi, pour être payés sur le produit de cette réalisation
préférablement aux autres créanciers ;
Sur les conclusions additionnelles des intimés :
Considérant que Drumont, en retardant par son appel la
vente des volumes engagés, a nécessité de nouveaux frais de
magasinage et d'assurance ;
Qu'il doit être tenu de payer ces frais, ainsi que les intérêts, à
partir du jour du jugement jusqu'à la date du présent arrêt, de
la créance en principal de Debière et May, si la réalisation du
gAge permet de réteindre entièrement, ou seulement de la par-
tie de cette créance qui serait remboursée, dans le cas où les
fonds provenant de la vente ne seraient pas suffisants pour un
payement intégral ;
Adoptant au surplus les motifs des premiers juges, en ce qu'ils
ne sont pas contraires h ceux qui précèdent ;
Donne acte à G.... ès-qualités de ce qu'il s'en rapporte à jus-
tice ;
Met l'appellation à néant :
Déclare l'appelant mal fondé dans ses demandes, fins et con-
clusions, et l'en déboute ;
Ordonne, en conséquence, que ce dont est appel sortira son
plein et entier effet ;
Faisant droit aux conclusions additionnelles des intimés :
Condamne Drumont à payer à Debière et May, à titre de dom-
mages-intérêts supplémentaires : i<^ les frais de magasinage et
d'assurance, faits depuis le jugement jusqu'à ce jour ; 2« les in-
térêts de la créance en principal de Debière et May, courus en-
tre la date du jugement et celle du présent arrêt ;
Dit toutefois que, dans le cas où la réalisation du gage ne
permettrait pas le remboursement intégral de la créance, ces
intérêts, ainsi que ceux auxquels l'appelant a déjà été condamné
par le jugement, ne seraient dus que sur la partie de cette
créance qui serait éteinte ;
Dit, en outre, que les frais et intérêts, au sujet desquels il
vient d'être statué, seront compris dans l'état à fournir en exé-
cution du jugement ;
Condamne l'appelant à l'amende et aux dépens de son appel.
-Iâ9-
Art. 4123.
Propriété ATilstiqiie. — ReprodveClon photoirrAplil-
q«e de INBwrre irendae, ««lui l*aatorlstt(lon de l'«r «
tkiie. — Préjadlee moral.— DofniiiAfree-liitérête.
En matière de propriété artistique et dans le silence du
contrat y V amateur qui achète une œuvre d'art doit être pré-
sumé n'avoir acquis que Cobjet même ; le droit de le re-
produire {spécialement par la photographie) demeure la
propriété de Tartiste (1).
Dès lors doit être condamné à des dommages-intérêts le
photographe quiy sans autorisation du peintre^ a reproduit
les (Buvres que celui-ci a vendues à des amateurs et a mis en
tente ces reproductions, sauf à tenir compte^ dans la fixa-
tion du chiffre des dommages-intérêts alloués, de cette cir-
eanstance que le peintre n'a guère subi en réalité qu'un pré^
judice moral (2).
MaiSy si le propriétaire de Fœuvre ne peut la reproduire
ou la laisser reproduire^ il est en droit d'empêcher Fauteur
de faire lui-même des reproductions-répétitionSyà sa guise^
car à moins de convention contraire il a acheté l'objet dans
le but de le posséder à titre exclusif (3).
(Trib. mixte da Caire, 16 mai 1896. — Schifft e. Lekizian.)
E. Schiffiy artiste peintre italien, avait assigné en 2.000 fr.
de dommages-intérêts Gabriel Lekizian, artiste photogra-
phe, sujet indigène, pour avoir, sans autorisation, repro-
(1-2) Sur le droit de l'acheteur en matière de reproduction voir Pouillet»
Pnp.litt., n. 963. Les auteurs qui ont écrit sur la matière sont i peu près
Bnanimes pour penser que, dans le silence du contrat, celui qui achète
u objet d'art achète Tobjet matériel, le droit de posséder la composition
qui lui a plu : rien de plus. G*est en ce sens que la difficulté a été tou^
joan résolue par les divers congrès qui se sont occupés de la question.
U plupart des législations étrangères proclament le même principe et
iûneot subsister en faveur de l'artiste qui a vendu son œuvre le droit
d'en aotorlser la reproduction (V. notamment : Allemagne, loi du
31 mars 1864, art. 5 ; Autriche, loi do S6 décembre 1895, art. 18 ; Belgi-
n^e, M du 22 mars 1886, art. 19 ; Italie, décret du 18 septembre 1882,
trt. 18, etc.). En France, où la loi est muette, la jurisprudence est à
pea près Axée en sens contraire et confère le droit de reproduction à
Viebetenr.
(8) Sur le droit pour l'artiste de se répéter, voir Pouillet, eocf. Zoc,
B* 306 et la jurisprudence citée.
— 130 —
duil, par la photographie, un tableau qui avait été venda
par le peintre à un amateur et dont il avait fait, en outre,
deux répliques également vendues à deux autres ama-
teurs.
Le tribunal, siégeant en matière commerciale, a accueilli
la demande en ces termes :
Le Tr[bunal, Attendu que la propriété de l'artiste sur son œu-
vre comprenant un double élément, présente un double béné-
fice à exploiter, savoir : le prix de la vente originaire et le prix
des reproductions ;
Que, dans le silence des conventions, il y lieu d'admettre que,
lorsquun amateur achète un tableau, il achète une œuvre qu'il
prend plaisir à voir et à montrer, qu'il achète un objet matériel,
mais que le droit de reproduction, qui est distinct de l'objet ma*
tériel, qui dérive non de la propriété mais de la création de l'in-
venteur, reste la propriété de l'auteur ;
Qu'on ne peut admettre qu'un peintre, parce qu'il aura vendu
nne de ses œuvres, la voie jetée dans le public, dénaturée par
la photographie ; qu'il a donc le droit de s'opposer à toute re-
production ; que, par conséquent, c'est abusivement que Lekizian
a reproduit le tableau de SchifH, sans en avoir reçu Tautorisation
du peintre et qu'il doit être condamné au paiement d'une in-
demnité pour réparation du préjudice causé par cette violation
du droit de l'artiste ;
Attendu que, pour fixer le montant de cette indemnité, il y a
lieu de retenir que, si l'acheteur d'un tableau n'a pas le droit
de le reproduire, il peut toutefois empêcher l'auteur de faire lui-
même des reproductions à sa guise, qu'évidemment, à moins de
conventions contraires, il a acheté un objet afin de le posséder
à titre exclusif ; qu'entre le vendeur et lui est intervenu un con-
trat précis et que le peintre le violerait s'il était au tableau son
originalité et sa valeur en le banalisant, en répandant sa compo-
sition ;
Attendu que, dans ces conditions, le préjudice occasionné par
les reproductions photographiques de Lekizian l'a été surtout au
détriment des acheteurs des tableaux de Schiffl qui ne sont pas en
cause ;
Que, si ces tableaux ont subi une diminution de leur valeur
vénale, cette perte atteint surtout leurs acheteurs et non le pein-
tre qui en a touché le prix int égral avant leur dépréciation et qui
a subi plutôt un préjudice moral :
Que, vu le nombre minime des reproductions photographi-
ques vendues par Lekizian, l'indemnité à arbitrer au profit de
-131 —
Schifft pour Tiolation de ses droits doit être fixé ex xquo et bono
à la somme de 100 francs pour le passe.
MM. HoHÉ, président ; — Alibey Sadik, substitut. —
M** À. RosKTTi et Grebn, avocats.
Art. 4124,
Propriété ttrttoticiae.— Droit de reprodnetlon.— C?eo«
•loa. ~ Preoire. — Modèleo conOéo fk on rondeur. —
BeiMPodoetlon limitée A la eommoiide.
Uauteur d'une œuvre cTart en devient propriétaire par le
seul fait de sa création c'est à celui qui prétend se préva-
loir Sun droit de reproduction de prouver que ce droit lui
a été cédé (1).
La remise^parun tiers, de modèles de fontaines à un fan-
deur pour les reproduire en bronze ne saurait lui concéder
le droit éCexécuter d'autres fontaines^ en dehors de celles
qui lui ont été commandées (2).
(a de Paris, 1*^ août 1899. — Le Bourg c. Val d'Osne.)
Charles Le Bourg» sculpteur, créateur du modèle des fon-
taines dites « fontaines Wallace », demandait qu'il fût in-
terdit à la Société du Val d'Osne de continuer à reproduire
et à vendre, tant à la Ville de Paris qu*à des villes de pro-
vince et de rétranger,des exemplaires des fontaines Wal-
lace dont les modèles avaient été autrefois remis à la Com-
pafçnie par sir Richard Wallace, en vue d'une première
commande dont il faisait don à la ville de Paris. Le Bourg
avait touché sur celte commande undroitd'auteurdelOO/0.
La compagnie avait continué la construction de ces fontai-
nes, mais s'était ensuite refusée à verser à Le Bourg aucun
droit d'auteur, prétendant qu'elle était propriétaire des mo-
dèles.
Le Tribunal de la Seine, à la date du 27 janvier 1897, a
rendu le jugement suivant :
Lb TaiBU?i4L, Attendu que Le Bourg demande des dommages
(1) V. Pouîllet, PropAUt,, n^ 120.
(2) Sor les formes de la cession et sa preuve, voir Poulilct, eod, loc,
s* 951 et suiv.
— 132 -
intérêts & fixer par état contre la Compagnie le Val d'Osne, en
raison de ce qu'elle aurait reprodait sans droit depuis 1S7S, boub
arme d'appareils en fonte, le dessin de fontaines dites « fon-
lines Wallaee », dessin dont il est l'aoteur et dont il serait de-
leuré propriétaire ;
Attendu que la compagnie se prétend, elle, propriétaire de
œuvre comme la tenant de sir Hichard Wollace Ini-méme, ces-
ionnaire de Le Bourg, à qui il aurait fait la commande ;
Mais attendu que la compagnie ne justlAe pas plus de la ces-
ion à elle faite par sir Richard Wallaee, cession dont le carac-
ire gratuit et gracieux s'expliquerait difficilement, qne de la ces-
ion à Wallaee par l'auteur ;
Attendu que c'est en vain qu'elle se prévaut de la possession
u dessin comme emportante son profit preuve de propriété;
Que cette cession est inopérante en raison de son caractère
quivoque, Le Bourg ne méconnaissant pas avoir, pour on temps
imité, concédé h la compagnie le droit de reproduction et ajant
ù nécessairement lui remettre, pour l'exercice de ce droit, le dea-
in en question ;
Attendu que c'est d'après des présomptions de pur fait qae doit
tre tranché le litige ;
Qu'à ce point de vue, c'est encore en vain que la compagnift
ivoque le silence gardé par Le Bonrg pendant une durée de vingt-
uatre ans suivant elle ;
Qu'en effet, d'une part, les documents de la cause semblent
tablir que, pendant cette période, Le Bourg a formulé à différen-
ts reprises des réclamations ;
Que, d'autre part, il a pu ne pas connaître avant un certain laps
e temps les atteintes qui auraient été portées à ses droits et qu'il
énonce aujourd'hui ;
Attendu qu'an rebours des prétentions de la compagnie ainsi
.énnées defondement, celles de Le Bourgse produisent, appuyées
ur les présomptions les plus sérieuses ;
Que, tout d'abord, il est protégé par ce principe, qae, sanf
reave formelle du contraire, l'auteur est présumé propriétaire
e son œuvre ;
Qn'ensaite il invoque ce fait capital qne la compagnie etle-
léme a reconnu le bien fondé de sa demande en lui payant
isqu'en IS^S 10 0/0 pour ses droits d'auteur;
Que la compagnie équivoque vainement sur les termes au
loyen desquels ce versement est qualifié dans sa comptabilité ;
Que, parce qu'il est mentionné sous le nom de remises ou com-
tissions, elle essaye de le représenter comme une rémunéra-
on remise à LeBourtr, non pas en tant qu'auteur, mais en tant
— 133 -
qu'ayant» en qualité d'intermédiaire, apporté an Val d'Osne la
commande des fontaines ;
Mais attendu que, si le terme employé par le Val d^Osne n'est
pas le terme strictement technique et juridique pour désigner les
droits d'autear, les documents de la cause établissent que c'est
bien sous cette appellation que la compagnie a mentionné dans
ses livres d'autres paiements qu'elle a faits au môme Le Bourg
pour d'autres œuvres, et qui, ceux-là, représentaient sans con-
teste des droits d'auteur ;
Que Tobjection grammaticale de la compagnie n'est donc pas
fondée;
Pab CBS MOTIFS, Condamue la Société le Val d'Osne à payer
au demandeur des dommages-intérêts à fixer par état ;
Fait défense à ladite société de reproduire à l'avenir les mo-
dèles de fontaines dites « fontaines Wallace », dont Le Bourg est
l'auteur, et ce^ sous une astreinte de 300 francs par chaque repro-
duction constatée ;
Déclare la Compagnie le Val d'Osne mal fondée en toutes ses
conclusions, l'en déboute et la condamne aux dépens.
Sar appel formé par la Société du Val d'Osne, la Cour,
sous la présidence de M. Harel, président, après avoir en-
tendu M. Lombard, avocat général, en ses conclusions et
M** Lagoin et Charles CoNSTANT,avocats,en leurs plaidoiries,
a, par arrêt du l**' avril 1899, confirmé la sentence des pre-
miers juges en ces termes :
La Cour, Considérant que Le Bourg, artiste sculpteur, de-
mande qu'il soit interdit à la Société du Val d*Osne de reproduire
les modèles des fontaines dites u fontaines Wallace » ;
Considérant que l'auteur d'une œuvre d'art en devient proprié-
taire par le fait seul de sa création ;
Qu'il est constant que Le Bourg a créé les modèles de ces fon-
taines ; qu'il en a donc la propriété à moins qu'il ne Fait trans-
mise à un tiers ;
Considérant que c'est à la Société du Val d'Osne à faire la
preuve du droit de reproduction dont elle entend se prévaloir ;
Qu'elle prétend l'avoir acquis de Richard Wallace qui lui a
remis ces modèles pour les couler en bronze ; mais qu'elle n'é-
tablit pas qu'il lui ait donné le droit d'exécuter des fontaines
pour d'autres personnes, ni même que Wallace ait acquis la
propriété exclusive desdits modèles ;
Considérant que toute l'argumentation présentée au nom de
la Société du Val d'Osne repose sur cette idée que, la générosité
de Richard W&tlace étant bien connae, il était inadmlBsibls
l'il eût profité, sans l'avoir pajée, da l'œavre de l'artiste qui
rait créé le type des fontaines dont il avait gratiAé la Ville ds
iris;
Conaidérant que les conventions intervennes entre Wallace et
9 Bourg sont restées ignorées ; qu'elles ne penveat donner lieu
j'à des conjectures ;
Qu'il est fort possible, comme on le soutient dans l'intérêt de
a Boarg, que Richard Wallaca ait largement rémunéré l'aatear
une œuvre d'art qu'il avait inspirée, en se contentant d'avoir le
roit d'en faire un certain nombre de reproductions, tout en laia-
int à l'artiste son droit de propriété, droit dont celui-ci ponraît
rer parti sans lui causer de préjudice ;
Qu'en elTel il ne s'agissait pas de modèlsa dont une reprodoc-
on augmentait la valeur;
Que Richard Wallace avait fait ériger à ses frais, dans la ca-
Itale, beaucoup de ces fontaines et que celles qu'on a exécatëes
Dur d'autres villes ne pouvaient pas diminuer témérité desfoo-
linesqui ornaient Paris et ne pouvaient que perpétuer le sonve
ir de sa bienfaisance ;
Par css votifs, et ceux des premiers juges que la Cour s'appro-
rie, déclare la Société du Vald'Osne mal fondée dans toutes ses
amandes, fins et conclusions, l'en déboute ; confirme sur tons
s points le jugement frappé d'appel, oidonne qu'il sortira son
lein et entier effet et condamne la Société appelante k l'amende
taux dépens.
Art. 4125.
P>H>pi4«t« MTtlMtlqne. - Méd^lUe. - PiM»prMM. —
OH^inMl. — Droit cle reppodnctlon.
En transportant sur une médaille, avec rautorisation de
auleur,une œuvre de sculpture, le graveur en tnédaillet fait
icotitestablement une œuvre artistique nouvelle dont il
evient propriéla ire (\ ) .
Il est de principe consacré par la jurisprudence que le
(I) Ia reproductloD, aans l'auto risation de l'Bateur, d'une csavre ar-
rtique par un procéda rafme différant conatitue une contreb(oii,
. Pouitlel, Prop. art., n* 574 et s. — Mais toute reprodu^oa, coaii-
Irée en elle-mAme, constitue an ouvrage spécial, tjuit aaa droit de
■opriété particulier. V. Poaillet, eod. lac, n« 89. V. par exemple, es
atière de gravure, Paris, Si mars 1865, Siffre, Ann., 66.350.
— 135 —
droit de reproduction esi F accessoire du droit de propriété
de r objet matériel dont il ne peut être détaché que par V ef-
fet d'une convention spéciale (1) .
Si Von doit admettre en principe que l'original d'une
médaille consiste dans le poinçon ou relief exécuté par
rarlisie d'après son modèle en plâtre^ en glaise ou en cire^
et que la livraison de ce poinçon seule entraine présomp*
lion de la cession de Fœuvre, pour que la rétention du poin-
çon implique la propriété de Vœuvre il faut que cette réten-
tion soit non équivoque et à titre de propriétaire (2).
(Trib. civ. Seine, 16 jain 1899. — Union des Sociétés de Tir
de France c, Henri Dobois.)
(1) la plupart des antears combattent cette jnrisprndence, le principe
qu'elle consacre est formellement reponssé par nn grand nombre de
lois étrangères. V. Trib. mixte dn Caire, 16 mai 1896, Schiffi et la note,
aupràf p. iS9.
(S) D*aprës la jurisprudence, la possession de Toriginal de l'œuvre
entraînant, dans le silence du contrat, et par voie d'accessoire, le droit
de reproduction, Il est très important, en pratique, de déterminer ce qui
constitue roriginal de rœnvre. Si Fartiate consenre par devers lui l'ori-
final de son œuvre, sans avoir besoin de rien spécifier, il conserve, par
cela niéme, le droit de reproduction ; si, au contraire, il a cédé à son
adietenr roriginal même, il s*en trouve dépouillé. Les peintres et les
ieastoateuTs, lorsqu'ils vendent leur tableau ou leur dessin, cèdent
IVBUTre originale par eux exécutée, Ils perdent donc, en principe, le
droit de reproduction. Pour les sculpteurs, Tœuvre originale est Tœnvre
en plâtre, en glaise on en cire, achevée et définitive, qu'ils exécutent
ensuite en marbre ou en brome et Tacheteur du marbre on du bronxe
n'acquiert qu'une reproduction qni ne peut lui donner, i son tour, le
droit de reproduction ; il est dans la situation de l'acheteur d'un exem-
plaire d'une œuvre littéraire. Les graveurs sur bois, on sur métaux, qni
lirrent la planche, c'est-à*dire l'œuvre elle-même, tombent sous Tappli*
cation de la jurisprudence. Les photographes, au contraire, y échappent,
car, à l'inverse des graveurs, ils ne livrent i leurs acheteurs que des
épreuves et, sauf conventions spéciales, conservent entre leurs mains les
diehés on phototypes qui constituent les originaux. En ce qui concerne
les graveurs en médailles, comme le constate le jugement rapporté,
Porfginal est le poinçon ; l'artiste, pour exécuter la médaille, commence,
en effet, par fixer sa composition en exécutant nne terre ou une cire, à
grande échelle, puis par moulage il en fait une fonte, avec cette fonte
U crée par réduction le poinçon en relief qui, retouché et amené par
loi i sa forme définitive, sert à produire les coinê en creux qui, eux,
servent directement i frapper la médaille. Lorsque les coins se détério-
rent, on en refait d'autres à l'aide du poinçon. C'est donc bien le poin-
çon qoi constitue l'original. C'est en s'appuyant sur des circonstances
de fait que le tribunal, après avoir constaté que les poinçons étaient
restés dans la possession de Henri Dubois, a été amené à décider que
cette possession était précaire et n'entraînait pas pour lui la propriété
Biénie de la médaille,
A. T.
- 136 —
Jugé en ces termes :
Li Tribunal, Attendu qae Henri Dubois a été chargé enlB87
par l'Union des Sociétés de Tir de France d'exécuter pour elle
au prix de 2.000 francs, une médaille de 59 millimètres desti-
née à servir de prix dans les concours qu'elle organise et re-
produisant dans sa composition le Gloria VieHs de Mercié ;
Qu'il a ultérieurement gravé pour la môme société deux au*
très modèles de cette même médaille, l'un de 45 millimètres en
1889, l'autre de 2i millimètres en 1893;
Que la société ayant appris en 1898 qu'Henri Dubois livrait aa
commerce des médailles et des boîtiers de montre reproduisant
le Gloria Victis et prétendant avoir la propriété exclusive de l'œu-
vre artistique qu'elle avait fait graver par lui avec l'autorisation
de Mercié et de la maison Barbedienne, cessionnaire du droit
d'édition, a, suivant exploit du 8 mars 1898, fait assigner le dit
Dubois devant ce tribunal, pour voir dire que la médaille dont
il s'agit ne pourrait être reproduite par lui pour être vendue
commercialement, et pour s'entendre, en conséquence, faire dé-
fense d'en faire frapper et vendre aucun exemplaire et condam-
ner à lui payer 200 francs à titre de dommages-intérêts pour
chaque contravention constatée et 10.000 francs pour le préju-
dice causé ;
Attendu qu'en transportant sur médaille, en 1887, le groupe
Gloria Victis avec rsutorisation de Mercié et de la maison Bar-
bedienne, Henri Dubois a incontestablement fait une œuvre ar*
tistique nouvelle dont il est devenu propriétaire ;
Qu'au contraire les médailles qu'il a faites ultérieurement sur
le môme sujet ne sont que de simples reproductions qui, rap-
pelant la première médaille dans son ensemble aussi bien que
dans presque tous ses détails et même dans ses défauts ne sont,
à vrai dire, malgré quelques différences tout à fait secondaires,
qu'une épreuve nouvelle de l'œuvre primitive avec laquelle elles
se confondent et dont elles peuvent tenir lieu ;
Qu'il est de principe universellement consacré par la jurispru-
dence française que le droit de reproduction est l'accessoire du
droit de propriété de l'objet matériel dont il ne peut être déta-
ché que par l'effet d'une convention spéciale ;
Qu'il échet donc de rechercher dans l'espèce ce qu'Henri Du-
bois a cédé en 1887 à l'Union des Sociétés de Tir de France, et si
en lui vendant la médaille qu'il a faite pour elle, il a entendu
se réserver la propriété de l'œuvre artistique qu'il venait de créer
et le droit de reproduction de cette œuvre ;
Attendu que les documents versés aux débats ne sauraient
laisser aucun doute sur ce point;
— 137 —
Qa^ii est certain qu'en sollicitant de Mercié et de la maison
Barbedienne Tantorisation de faire graTer la médaille» dont elle a
confié Texécntion à Henri Dubois, rUnion des Sociétés de Tir de
France entendait s'assurer la propriété d'une médaille qui lui fût
propre, et qui, n'étant pas dans le commerce, et ne devant être
distribuée que comme prix de tir par elle,conservât, par sa rareté
même, un caractère de distinction enviable ;
Que l'intention de Mercié et de la maison Barbedienne de con-
céder à la société demanderesse la propriété exclusive de la mé«
daille à frapper, ne saurait davantage être douteuse à raison des
circonstances mêmes dans lesquelles Tautorisation a été don-
née ;
Qu'enfin il est manifeste que la volonté d'Henri Dubois s'est h
ce moment pleinement accordée avec celle de la société ;
Qn'il n'a reçu d'autre autorisation que celle de faire pour elle
la médaille qu'il a exécutée ;
Qu'il snfQt de lire la lettre du 7 juillet 1898, et surtout le post-
scriptnm de Leblanc pour se convaincre que Mercié et la maison
Barbedienne, en autorisant la reproduction en petit par la gra-
vure du Gloria Victis,se sont référés aux autorisations précéden-
tes exclusivement accordées à l'Union des Sociétés de Tir de
France pour des modules de plus grandes tailles et qu'il s'agis-
sait à ce moment de l'établissement du module de 21 millimè-
Attendu, en outre, que les prix qu'Henri Dubois a stipulés pour
l'exécution des divers modules de la médaille de l'Union des So-
ciétés de Tir de France sont identiquement les mêmes que ceux
qu'il a stipulés de l'Etat, lorsque celui-ci l'a chargé, en 1893,
de la gravure d'une même médaille de mêmes dimensions que
celles de l'Union des Sociétés de Tir, alors qu'il résulte des deux
lettres du 39 août 1893 et du 24 mai 1897 qui seront enregistrées
avec le présent jugement qu'il cédait par son contrat, sans ré-
serve, à FEtat l'entière propriété de son œuvre ; que cette iden-
tité des prix démontre avec évidence l'identité du droit cédé dans
les deux cas ;
Qu'Henri Dubois se faisait si peu d'illusion sur ce point qu'il
qualifiait toujours dans la correspondance, dans ses reçus et
dans l'acte de dépôt des coins à la Monnaie, la médaille liti-
gieuse, de médaille de l'Union des Sociétés de Tir de France ;
Que de même, s'adressent à cette société pour s'excuser du
retard par lui apporté à l'exécution d'une de ses commandes, il
disa it
« J'ai été si occupé que je n'ai pu exécuter le changement que
TOUS désirez pour le modèle de votre médaUle, »
— 138 —
Que de telles expressions sont inconciliables avec Tîdée qo'il
aurait entendu conserver la propriété de cette médaille ;
Que, sans doute, il détient encore les poinçons, mais que si
Ton doit admettre en principe, que Toriginai d'une gravure con-
siste dans le poinçon ou relief exécuté par l'artiste d'après son
modèle en plâtre, en glaise, ou en cire, et que la livraison de
ce poinçon seule entraîne présomption de la cession de Tœuvre,
il faut tout au moins que cette rétention soit non équivoque, et à
titre de propriétaire ;
Que dans Tespèce, H. Dubois n'a conservé la possession maté-
rielle des poinçons que parce qu'il a continué à être chargé de
Texécution du marché qui n'a pas un seul instant été interrompu
depuis 1887 soit qu'il se soit agi des coins brisés ou détériorés,
soit qu'il y ait eu à composer de nouveaux modules ;
Que toutes les circonstances précédemment analysées démon-
trent qu'il n'a pas ^ardé les poinçons animo domini et que dès
lors la présomption qu'il tire de ce fait manque de toute valeur
juridique ;
Que de toutes ces considérations, il faut conclure qu'Henri Du-
bois a cédé à l'Union des Sociétés de Tir de France la pleine pro-
priété de Sjon œuvre artistique, et par suite le droit de repro-
duction qui en découle, et qu'en livrant au commerce ou en
mettant en vente 4es médailles et les bottiers de montre litigieux,
il a violé le contrat qui le lie à la société demanderesse ;
Que le tribunal a les éléments nécessaires pour apprécier le
préjudice ainsi causé ;
Par gis motifs. Dit l'Union des Sociétés de Tir de France re-
cevable et bien fondée dans ses demandes, fins et conclusions ;
Dit que la médaille faite en 1887 par Henri Dubois pour cette
société, et les différents modules qui en ont été faits ultérieure-
ment sont la propriété exclusive de la dite société et ne sauraient
être reproduits par lui pour être vendus commercialement;
Fait en conséf|iience défense à Henri Dubois de faire frapper
et vendre toute reproduction de la dite médaille et notamment
du module dont le coin a été déposé par lui à la Monnaie en son
nom personnel ;
Le condamne aux dépens pour tous dommages-intérêts dont
distraction, etc.
M. Baudoin, président. — M** Michbl Pillitibr et Poua-
LiT, avocats.
— 139 —
Art. 4126.
Fropriété littéraire. — Droit de réponiie. — JohtmaI.
— Oltlciae. — Compto-rendo demandé. — Cour de
le droit de réponse^ dans les termes de r article iSdela
loi du 99 juillet iSèl, appartient à toute personne nommée
ou désignée dans un journal^ même à qui a sollicité de ce
journal le compte-rendu dfun ouvrage (1).
Mais Finsertion de la réponse ne saurait être 'exigée
quand elle est conçue en des termes qui sont contraires aux
lois, aux bonnes mœurs^ à Vintérét légitime des tiers^ à
r honneur ou à la considération du journaliste (2).
La Cour de cassation peut ^ lorsque Fauteur de la réponse
a assimilé son œuvre à celle d'un tiers, examiner et com"
parer elle-même ces deux œuvres et dire si ce tiers avait un
intérêt légitime à ce que son cèuvre ne fût pas Vobjet de
cette assimilatioi} (3).
(Gaflfl. crim., 20 jnin 1900. — Dlle Forpomès e. Mainguat.)
Ainsi jugé sous la présidence de M. Lœw :
La Cour, Sar le premier moyen pris de la ▼îolation par fausse
application de l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881 et de Far-
ticle 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que Tarrét attaqoé aurait
reconnu à tort le droit de réponse à un écrivain qui avait loi-
même» par démarches et par lettres, sollicité du gérant d'un
journal ou écrit périodique la critique de son œuvre :
Attendu, en fait, que la demoiselle Forpomès, auteur d'un
roman intitalé la Paroisse Saint-Magloire dans lequel sont
dépeints divers types de ministres du culte catholique, a obtenu
par démarches personnelles auprès du gérant de la Revue heh~
âomadaxre et par lettres adressées à l'un des rédacteurs de cette
revue, à ce désigné par le gérant, l'analyse et le compte-rendu
de son roman dans ladite revue ; que ce compte-rendu lui ayant
été défavorable et lui paraissant de nature à porter atteinte à sa
sitoation d'écrivain et à lui causer un préjudice tout à la fois mo-
ral et matériel, elle a adressé au gérant avec demande d'inser-
tion une réponse à l'article qui la concernait ; mais que ce der-
nier 8*est refusé à faire insérer cette réponse dans sa revue par
(i) Cf. Can. crim.f 17 juin 1899, Dabout cv Bnmettère, Ann., 99.dS1 .
(M) Voir Afm., 90.881, note 3.
- 140 —
le motif que la demoiselle Forpomès, en sollicitant et en provo-
quant elle-même le compte-rendu de son roman, avait implici-
tement renoncé à tout droit de réponse :
Attendu, en droit, que les termes de l'article 13 de la loi du
29 juillet 1881, qui n'a fait, en ce point, que reproduire une dis-
position en vigueur depuis la loi du 25 mars 1822, sont généraux
et absolus ; qu'ils donnent à toute personne nommée ou désignée
dans un article de journal le droit d*y répondre et d'exiger Tin-
sertion de sa réponse ; que c'est à celui qui exerce ce droit qu'il
appartient de régler la forme et la teneur de la réponse, et qu'il
n'appartient aux tribunaux de limiter l'exercice de ce droit
qu'autant que les termes de la réponse sont contraires aux lois
et aux bonnes mœurs, à l'intérêt légitime des tiers, à l'bonneur
ou à la considération du journaliste ; qu'en présence de la géné-
ralité des termes de la loi, il n'y a pas à distinguer si l'auteur
de la réponse avait on non provoqué par démarches et par let-
tres le compte-rendu de son œuvre, alors que les juges du fait,
sous le contrôle de la Cour de cassation à laquelle il apparte-
nait d'apprécier la teneur même de la réponse, aussi bien que
celle de l'écrit qui l'a provoquée, ont décidé qu^il n'y avait eu
de la part de la partie civile aucune renonciation à son droit de
réponse ;
D'où il suit que le premier moyen du pourvoi n'est pas fondé;
Mais, sur le second moyen également pris de la violation par
fausse application de l'article 13 de la loi du 29 juillet 1881 et de
l'article 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué
aurait déclaré obligatoire l'insertion d'une réponse dont certains
passages portaient atteinte à Tintérêt légitime d'un tiers :
Attendu que la demoiselle Forpomès, après avoir, dans la ré-
ponse dont elle réclamait l'insertion, soutenu qu'elle avait en-
tendu faire une œuvre d'analyse loyale et protesté contre l'ap-
préciation de son roman par l'auteur du compte-rendu, ajoutait
qu'au surplus son œuvre avait « de fort honorables précédents
et citait notamment un roman de M. Jean Biaise, ayant pour
titre le Tribut passionnel^ dans lequel il est question d'un prêtre
qui, suivant elle, allait beaucoup plus loin que ceux incriminés
dans son livre, puisqu'il commettait la pire erreur que condamne
la religion, le péché contre l'espérance, le suicide » ;
Attendu que le sieur Jean Biaise, tiers nommé dans la réponse
de la partie civile, appelé en témoignage, a soutenu qu'il avait
un intérêt légitime à protester contre l'assimilation que la de-
moiselle Forpomès prétendait établir entre les deux romans dont
s'agit, parce que ces deux livres différaient essentiellement Tun
de l'autre, tant au point de vue des idées religieuses qu'au point
« »-
— 144 —
de vue du caractère des ministres du culte catholique qni sont
mis en scène ;
Que de Texamen et de la comparaison de ces deux romans
auxquels il a été procédé par la Cour, il résulte que le tiers
nommé dans la réponse pouTait avoir un intérêt légitime à ce
que son œuTre ne fût point assimilée à celle de la partie civile
dont les tendances sont absolument différentes ;
Que dans ces conditions, le refus d^insertion du demandeur
était légalement justifié et que c'est à tort et en violation de
Tartide 13 susvisé qu*il lui a été fait application de la pénalité
édictée par cet article ;
Pam cis kotifs, Casse.
Art. 4127.
Titre de noMeMie. — M^forai. — Ccinti-ttt reliiiir A
l'emploi <iii titre de noMeeee pmtr une eoelété
^relaie. — IVolUté.
On ne saurait confondre avec un nom patronymique,
qui a pour destination de désigner une personne et pasMc
nécessairement et indéfiniment à tous les enfants sans dis-
tinction^ un titre nobiliaire^ émané de la puissance souve^
raine, destiné non à désigner mais à honorer celui à qui
U a été conféré ; d'ailleurs, si les titres nobiliaires n'entrai^
nent plus de privilèges d'aucune sorte, ils n'en doivent pas
moins être maintenus dans le caractère qui leur a été donné
à r origine, en tant qu'il est compatible avec Fétat social,
et dans les conditions de transmissibilité qui leur ont été
imposées par F acte de création (1) .
Dès lors, le titulaire actuel cFun titre héréditaire — con-
féré dans les mêmes conditions que ceux créés par le dé'
cret du V mars 1808» et dont Tacte de collation indique
qu'à chaque transmission le bénéficiaire, auquel ce titre
échoit non à raison de sa qualité d'héritier mais en vertu
dudit acte de collation, doit le recevoir tel qu'il a été créé,
c'est-à-dire ayant conservé intact son caractère honorifique,
— n'est pas lié par une convention par laquelle un précé-
dent titulaire du titre l'avait engagé dans une société de
eomfnerce, dont, avec les insignes qui lui sont attachés, il
constituerait la marque (2).
(1-8) Voir & la page suivante, les conclusions de M. TaTocat général
DcsiAimiNS, à la Cour de cassation.
— 142 —
(G. de casi. eW., 95 octobre 1896. — Epoox de Jage es noms
c. Société Alfred de Montebello et D«.)
Les époux de Juge,Mme de Juge comme tutrice du jeune
duc de Montebello, son fils mineur, et M. de Juge comme
eotuteur, se sont pourvus en cassation contre Tarrét de la
Cour de Paris en date du 2 janvier 1896, rendu au profit
de la Société Alfred de Montebello et C^* et rapporté aux
Ann., 96, 334.
Ils ont formulé à l'appui de leur pourvoi, les deux
moyens suivants :
i^ « Violation des articles 6, 544 et 1131 du Gode civil, de
Farticle !«' de la loi du 22 juin 1857, ainsi que des décrets du
l«r mars 1808 et du 9 décembre 1817 et de l'article 7 de la loi du
20 avril 18iO, en ce que l'arrêt attaqué a décidé que la Société
Alfred de Montebello et Gie avait droit à l'usage industriel et
commercial du titre de duc de Montebello, et des armoiries y at-
tachées, sous le prétexte que les mêmes règles étaient applica-
bles à l'usage d'un titre de noblesse et d'un nom patronymique,
alors que les règles particulières aux titres de noblesse s'opposent
à ce qu'ils puissent être commercialisés, ainsi que leurs insignes
et incorporés dans une marque de fabrique. »
2* « Violation des mêmes articles et, en outre, de l'article 896
du Gode ciril et des règles relatives aux substitutions permises
tout au moins en ce que l'arrêt a déclaré que la convention par
laquelle le duc de Montebello avait transformé son titre et les
insignes de ce titre en une marque de fabrique et transféré la
propriété de cette marque à une société, devait recevoir effet,
même après sa mort et malgré la volonté contraire dn porteur
actuel du titre, alors qu'en admettant, par impossible, que le
duc de Montebello pût valablement consentir une convention de
ce genre, il ne pouvait en tout cas, la faire que pour la durée de
sa vie, et ne pouvait, en aucune hypothèse, porter atteinte aux
droits de celui que la loi elle-même appelait à porter ce titre
après lui. »
M . l'avocat général Dxsjârdins a conclu, dans les termes
ci-après, à la cassation de l'arrêt de la Cour de Paris :
« Messieurs, le défendeur avait fait allusion, dans son mémoire
à l'arrêt que votre Ghambre des requêtes a rendu le 10 novem-
bre 1897, sur rincompétence du pouvoir judiciaire en ce qui tou-
che au contentieux des titres nobiliaires. Il a reparlé de cet arrêt
dans sa plaidoirie, il m'a mis par là même en demeure, pour
ainsi dire, de m*expliquer sur une question de compétence qui
me semble préalable. En effet si les tribunaux ordinaires sont
radicalement incompétents pour statuer sur la propriété des ti-
tres nobiliaires, vous devez tout d*abord et d*office,sans examiner
le fonds dn débat, casser l'arrêt attaqué pour violation des rô*
gles de la compétence.
J^ai le plus profond respect pour les arrêts de la Chambre des
requêtes. Cependant je ne dois pas oublier que le dernier mot
appartient pour la solution des problèmes juridiques à la Cham-
Im civile et si j'ai le regret de découvrir ou de croire que je dé-
couvre une erreur dans la jurisprudence de la Chambre des re-
quêtes, mon devoir est de vous la signaler et d'exposer quels
sont, à mon avis, les véritables principes du droit.
Le 14 mars 1865, il s'agissait de savoir si les tribunaux ordi-
naires étaient compétents, au fond (apr^s que toutes les ques-
tions administratives à résoudre auraient été résolues par le Con-
seil dn sceau), pour trancher cette question : « les sieurs de Camé
peavent*il8 ajouter à leur nom patronymique le titre de marquis
de Coetlogon 1 1> La Chambre des requêtes statua comme il suit
(D. 66. 1.326) : « Attendu qu'il n'appartient nullement à l'autorité
judiciaire de connaître les demandes en collation, confirmation ,
reconnaissance ou vérification des titres nobiliaires ; que la solu-
tion de pareilles questions appartient tout entière au souverain
éclairé par la délibération du Conseil du sceau des titres ; que, de
même qu'elle n'avait pas à statuer, elle n'avait pas non plus à
rorseoir jusqu'à la décision à intervenir, «c puisque c'était par rap-
port an fond même qu'elle était incompétente » ; que si Coetlo-
gonne prenait pas de conclusions à ce sujet, le juge du fond, du
moment qu'il reconnaissait son incompétence ratione materix^
devait la déclarer d'office; Rejette... » Cette jurisprudence a
été critiquée par MM. Dalloz (Stipp., Vo Noblesse, Ti9 47) : « Un
arrêt de la Chambre des requêtes a, il est vrai, disent-ils,repoussé
le système du sursis et décidé que, dans une contestation soule-
vée entre deuersonnes sur la propriété d'un titre, il y a lieu
non à un sursis, mais à une déclaration pure et simple d'incom-
pétence. Mais il est difficile d'expliquer cette décision, qui ren-
drait impossible au légitime détenteur d'un titre, d'en interdire
jamais l'osageà un tiers. » Néanmoins la Chambre des requêtes
I persisté l'arrêt du 10 novembre 1897, affirmant de nouveau
foe le pouvoir judiciaire « est incompétent sur le fond ratione ma"
terist j», attribue encore au conseil d'administration du ministère
de la justice (qui remplace le Conseil du sceau depuis le 10 jan-.
vier 1872} le droit de statuer sur la propriété des titres nobiliai-
res.
Telle n'est pas. Messieurs, la jurisprudence de la Chambre
civile. Je vous rappelle vos arrêts du 1*' juin et du IS juin 1863
(D. 63.1.216 et 317). Le premier dit: « Lorsqu'il 8*agit d*Qtt
titre nobiliaire, la propriété doit en être établie par an titre ré-
gulier et, s'il manque de condition, les demandes en rectifica-
tion des actes de l'état civil qui ne le relatent pas, n'ayant en
réalité pour objet que la reconnaissance ou la confirmation de
ce titre par justice, les tribunaux de droit commun doivent
s'abstenir d'en connaître tant qu'il n'a pas été statué sur cette
reconnaissance ou cette confirmation conformément aux dispo-
sitions du décret du 8 janvier 1859. » Si Tarrét de Metz est
cassé, c'est parce qu'il n'a pas déclaré la demande non recevable
en l'état, alors que de Marguerite, voulant faire insérer le titre
de marquis entre les prénoms et le nom patronymique de son
père, ne produisait aucun acte de collation ou de confirmation
de ce titre, mais uniquement des papiers de famille et une arti*
culation de faits de possession. Le dernier arrêt est encore plus
décisif. J'y lis, en e£fet : « Sur le deuxième moyen pris de la
séparation des pouvoirs et de la règle ^us est interpretari cujus
estcondere: « Attendu qa^kVautorité judiciaire seule il appartient
de décider si, d'après les titres produits et la législation tant
espagnole que française, les demandeurs en cassation ont droit
à la grandesse d'Espagne et au titre de duc de Brancas et de
prescrire, s'ils n'ont pas ce droit, les mesures nécessaires pour
les empêcher de s'en prévaloir en France. »
En thèse , pourquoi les propriétaires de titres nobiliaires
seraient-ils dépouillés de la suprême garantie que la loi donne
aux propriétaires ? Pourquoi l'accès des tribunaux ordinaires,
composés de juges inamovibles, leur serait-il fermé ? La pro-
priété d'un titre est aussi respectable que celle d'un nom on
d'une terre.
Est-ce que, d'aventure, un simple décret, le décret impérial
du 8 janvier 1879, les aurait dépouillés de cette garantie suprême,
dessaisissant les tribunaux de droit commun, assignant à leur
compétence des bornes que le législateur seul aurait pu poser ?
Lisez donc les articles 6 et 7 de ce décret, qui déterminent les
attributions du Conseil du sceau : « Ce Conseil, y lit-on, déli-
bère et donne son avis : lo sur les demandes en collation, con->
firmation et reconnaissance de titres, que nous aurons renvoyées
à son examen ; 2^ sur les demandes en vérification de titres
(art. 6). — Toute personne peut se pourvoir auprès de notre
garde des sceaux pour demander la vérification de son titre par
le Conseil du sceau (art. 7). » Les demandes en collation ont
pour but d'obtenir un titre nouveau ; les demandes en recon-
naissance, de lever des doutes sur l'existence d'un titre déjà
concédé ; les demandes en confirmation, de réparer ce qui peut
être incomplet ou insuffisant dans une collation antérieure ;
— 145 —
les demandes en vérification, de discerner Tauthenticitë de cer-
taines pièces et la sincérité de certains actes : c'est une besogne
parement administrative qn on donne à ce corps administratif.
Tontes les conséquences légales à tirer de l'existence des titres
nobiliaires dûment reconnus, les corps judiciaires, seuls, peu*
Tcnt et doivent les tirer. Donc^ la Cour de Paris était compé-
tente et vous proclamerez implicitement cette compétence en
statuant sur l'objet direct du pourvoi, sans dessaisir le pouvoir
jodici aire ;
Je rappelle en deux mots les faits :
« Le deuxième duc de Montebello avait formé, le 6 avril 1836,
arec ses frères Alfred et Gustave, une société en commandite,
dont Alfred avait été constitué gérant, laquelle avait pour objet
principal Texploitation du domaine de Mareuil, appartenant au
duc, et la vente des vins à en provenir. Un acte additionnel du
même jour portait : « Tous les vins de la société seront mar-
qués d^un cachet portant le nom, le titre et les armes de M. le
duc de Montebello. Cette marque sera la propriété de la société. »
La société fut successivement prorogée par actes du 12 décembre
1849, des 22 janvier, 15 juin 1862, du 10 mars 1886, du 10 mars 1870,
du 17 février 1880. Je lis aux qualités du jugement de première
instance : « Lors du renouvellement de 1880, le duc fondateur;
fils du maréchal Lannes, et son fils atné, troisième du nom, étant
décédés, leur petit^fils, le jeune duc actuel, reprit la place de son
père: il était mineur et avait alors pour tuteur datif Louis-
Gustave Lannes, comte de Montebello. m Or, le conseil de fa-
mille prit, le 23 janvier 1880, la délibération suivante: « Il de-
meore entendu que cette autorisation ne porte en rien atteinte
aa droit inaltérable qui appartient au mineur d'interdire à sa
majorité à la société (quels qu*en seront le gérant et la raison
sociale) de prendre comme marque de commerce son titre de duc
de Montebello, actuellement employé ; que, du reste, Tautorisa-
tion donnée au tuteur de signer le nouvel acte de société ne com-
prend que la durée de cette 80ciété,c*est-à-dire une période de dix
ans, après laquelle le conseil de famille reste libre de la conti-
noer ou de la faire cesser. » Or, le tuteur Gustave signa, le
17 février 1880, au mépris de cette délibération, un acte qui
prorogeait la société pour une durée de trente ans, avec fayculté,
pour la majorité des associés, de la faire cesser à Texpiration
de chaque nouvelle période de dix ans. Mais les divers membres
de la Société Alfred de Montebello et Cie reconnurent, par une
déclaration nouvelle, que le conseil de famille n'avait autorisé
la prorogation que pour dix ans et que, dès lors, en dépit de
l'acte du 17 février, le mineur n'était tenu de rester dans la
société à Texpiration de la période décennale que s'il y était au*
10
- 146 -
torisë par une nouvelle délibération de son con seil de famille.
Cette délibération n'a pas été prise.
Cependant la mère du jeune duc sMtant remariée et fait nom-
mer tutrice, a cru devoir s'emparer, au profit de son papille,
de la décision prise à Tunanimité, le 23 janvier i880,par le con-
seil de famille. Se heurtant à la résistance de la Société Alfred de
Montebello et Cie, elle a assigné le gérant et tous les membres
de cette société devant le tribunal de commerce de Reims poar :
« voir dire que la Société Alfred de Montebello et Cie n'a pas le
droit de faire usage du titre de duc de Montebello et des armoi-
ries qui s*j rattachent; voir déclarer nulle en tant que de besoin
toute clause contraire de. Tacte de société, j» Cette prétention
fut accueillie par le tribunal de commerce et condamnée par la
Cour d'appel de Paris.
Je crois que Tarrét de la Cour de Paris doit être cassé. Je vais
éliminer les considérations accessoires et mettre en relief les
deux motifs principaux qui me paraissent dicter la cassation.
D'abord il s'agit^ dans la cause, d'un majorât de propre mou-
vement, c'est-à-dire d'un majorât établi par le chef de l'Etat au
moyen d*une dotation, en conformité de l'acte impérial dn
30 mars 1806, du sénatus-consulte du 14 août 1806, de la loi du
3 septembre 1807. Il faut donc appliquer le Code des migorats,
c'est-à-dire le grand décret concernant les megorats, en 76 arti-
cles, qui fut rendu le l*'' mars 1808. en exécution du sénatus-
cousulte du 14 août 1806. J'appelle l'attention particulière de la
Cour sur les articles 25, 26, 35, 36, 40, 41 de ce décret, me bor-
nant à en citer les articles 35, 40, § 1 et 41 ainsi conçus :
Art. 35. — Le titre qu'il nous aura plu d'attacher à chaque
majorât sera affecté « exclusivement » à celui en faveur duquel
la création aura eu lieu et passera à sa descendance « légitime »,
naturelle ou adoptive, de mâle en m&le, par ordre de primogé-
niture.
Art. 40, § 1.— Les biens qui forment les majorais sont inalié-
nables, ils ne peuvent être engagés ni saisis.
Art. 41. — Tout acte de vente, donation ou « autre aliénation »
de ces biens par le titulaire, tout jugement qui validerait ces
actes, hors les cas ci-après examinés, sont nuls de plein droit.
J'ai à peine besoin de vous rappeler que les lois de 1835 et
1849 n'ont pas touché aux majorais de propre mouvement. D'a-
près la loi du 12 mal 1835 (art. 4), « les dotations ou parties de
dotations, consistant en biens soumis au droit de retour en fa-
veur de l'Etat, continueront à être possédées et transmises « con-
formément aux actes d'investiture » et sans préjudice des droits
d'expectative ouverts par la loi du 5 décembre 1814. Le rapport
de M. Joubertà la Chambre des députés repousse sur ce point
- 147 —
toate transaction qui prendrait « un caractère aléatoire, indigne
da gonyemement », Une considération politique du pi as grand
poids, poursuit-il, protège les dotations contre tout empiéte-
ment ; elles furent originairement destinées à récompenser les
grands services militaires et civils d*une époque dont le gouver«*
nement actuel revendique à juste titre toutes les gloires. Lors
qae nous votons chaque année dans notre budget une allocation
considérable en favenr des donataires dépossédés des dotations
qu'ils avaient reçues en pays étranger, nous nuirons certaine-
ment pas porter la moindre atteinte aux droits de ceux qui unt
conservé les leurs en France ». Vous savez enfin que la loi du
7 mai 1849 s^occupe à la fois des majorais de biens particuliers
et des substitutions ; quant aux majorats établis avec des dota-
tions par le chef de l'Etat, elle les laisse par son silence même,
ainsi que le remarque Demolombe (t. XVIII, n^ 66), sous Tempire
de la loi du 12 mai 183S. Il résulte des deux lois de 1835 et
de 1849, dit encore M. A. Levesque (Du droit nobiliaire français,
n* 147), que la condition imposée par le décret de 1808 à la con-
servation des titres impériaux,à savoir Tinvestiture d'un majorât,
manque aujourd'hui à la plupart des représentants des premiers
gratifiés, qu'elle manquera bientôt à tous (sauf le cas exception-
nel où il existerait un majorât de propre mouvement). C'est con-
traire au droit commun? d'accord ; mais il était loisible au lé-
gislateur moderne de sortir du droit commun,' en se référant,
pour un cas donné, à une législation antérieure. M. Levesque
allait jusqu'à dire en 1866 (op. c^^, n* 174) : <« Si, malgré les
révolutions qui ont démocratisé notre société et frappé d'une
abrogation générale les anciens modes de transmission fondés
snr le privilège, intervenait aujourd'hui un acte de collation qui
se référât à une législation antérieure, il faudrait bien en exé-
cuter les clauses. » Or les lettres patentes du 15 juin 1808 ordon-
nent « que le titre du duc de Montebello et les insignes qui s'y
rattachent seront transmissibles de mâle en mâle par ordre de
primogénitare ». Il s'agit donc d'appliquer au litige actuel, ce
titulaire étant doté d'un majorât par l'empereur, la loi des ma-
jorais de propre mouvement.
D'abord le majorât lui-même est inaliénable; tout acte d'alié-
nation, quel Ique soit le mode d'aliénation, est « nul de plein
droit » diaprés l'article 54 du décret de 1808 ; nullité radicale,
d'ordre public, atteignant même les jugements qui auraient va-
lidé les actes d'aliénation.
Le titre incorporé au majorât est naturellement inaliénable
comme le majorât lui-même. C'est ce que M. Levesque a très
bien expliqué dans son traité Du droilnobiliaire français (n» 169) :
« Ainsi indivisibilité du majorât, dit-il, et par suite indivisibilité
p-e rit.-.-
— 148 —
da titre, telle était la règle du système impérial, parfaitement
analogae à celle du système féodal.» L'indivisibilité du titre t
dit-il encore un peu plus loin, est le corollaire de celle du fief
ou du majorât.
Donc le duc investi d'un titre de duc qui est attaché à un ma-
jorât de propre mouvement ne peut pas le partager, pas même
avec ses frères, pas même avec ses enfants. Le titulaire est rivé
au titre, le titre est au titulaire. A plus forte raison ne peut-il pas
faire attribution de ce titre à une société de commerce.
Je ne soutiens pas, remarquez-le, que le duc ne puisse pas
faire à lui seul le commerce sous son nom et sous son titre ; son
titre devient alors une enseigne, « le signe de ralliement de la
clientèle », selon Texpression de Cal mettes, « Taccessoire du
fonds de commerce et le pavillon de la marchandise », selon
l'expression de M. Pouillet. Non hos quoisitum munus in usus^
dira-t-bn peut-être. Cet usage échappait peut-être, en effet, aux
prévisions du fondateur. Mais je ne vois là, pour mon compte,
rien dlUicite. Ce que je juge illicite, c'est l'apport dans une so-
ciété.
Qu'est-ce, en effet, que l'apport ? « Tout avantage, ont dit très
exactement MM. Lyon-Gaen et Renault, susceptible d'être évalué
en argent, fait par un associé en échange de la part à lui attri-
buée dans les bénéflces. » Eh bien I reportez- vous au préambule
du décret du I*' mars 1808 : « Nos décrets du 30 mars 1806 et le
sénatus-consulte du 14 août de la même année, y lirez-vous, ont
établi des titres héréditaires avec transmission des biens aux-
quels ils sont affectés. L'objet de cette institution a été non seu-
lement d'entourer notre trône de la splendeur qui convient à
sa dignité, mais encore de nourrir aux cœurs de nos sujets une
louable émulation en perpétuant d'illustres souvenirs et en con-
servant aux âges futurs Tirnage toujours présente des récompen-
ses qui, sous un gouvernement juste, suivent les grands services
rendus à l'Etat. La nécessité de conserver dans les familles les
biens affectés an maintien des titres, impose l'obligation de les
«excepter du droit commun» et de les assujettir à des règles par-
ticulières, qui, en même temps qu'elles en empêcheront l'alié*
nation « ou le démembrement », préviendront les abus, en don-
nant connaissance à tous nos sujets de la condition dans laquelle
ces biens sont placés. En conséquence, nous avons résolu de
déterminer les principes de la formation des majorats des biens
régis par le Gode civil, les conditions de leur institution et les
devoirs imposés à ceux qui en jouissent. » Je n'ajoute rien.
Je crois avoir démontré, à un premier point de vue, que l'ar-
rêt attaqué doit être cassé parce que, d'après les articles 40 et
41 du décret du !•' mars 1808, les titres incorporés à un miyorat
— 149 —
de propre mouvement ne peuvent pas être démembrés. Second
point de vue :il 6*agit non plus du droit que le jeune duc de Mon-
tebello a pa trouver dans la succession paternelle, mais du droit
propre qu'il tient des lettres patentes du i 5 juin 1808, combinées
aTecTarticle 35 da décret du 1*' mars. Il esf le nouveau titu-
laire ; il a, d*après les lettres patentes et le décret, un droit exclu-
sif an titre.
1* Le feu duc de Hontebello a-t-il pu entamer le droit de son
fils aîné ? Non. En admettant qu'il se fût lié lui-même, il n'a pu
lier le duc futur.
2* Celui-ci avait-il le droit de recevoir un titre non partagé?
Oai, comme un majorât non démembré .
(Test féodal, a-t-on dit. — On pourrait dire plus exactement:
c'est impérial . Telle fut la volonté de l'empereur. Peut-être
avait-il le droit de tenir ce langage, celui qui avait écrit avec son
épée la plus grande épopée des temps modernes et longtemps
enehainé la victoire.
Mais c'était une conception fausse, ai-je souvent entendu
dire. Cela ne me regarde pas. Il fallait, dans tous les cas, ne
laisser subsister, ni en 183S ni en 184'9, les majorats de propre
mouvement.
3^ Est-ce recevoir un titre intact que de recevoir un titre par-
tagé entre l'héritier direct et n'importe qui, personne physique
OQ personne morale ? Non.
4* Reçoit-on un titre intact en recevant un titre qui repré-
sente an profit de Tun la gloire militaire, les canons et les dra-
peaux enlevés à l'ennemi, la France défendue, honorée, agran-
die, Arcole, Aboukir, Hontebello, léna, Friedland, Essling, au
profit de quelques autres nn moyen d'achalandage ?
Je ne le pense pas. Je répète que l'arrêt doit être cassé.
Conformément à ces conclusions, la Chambre civile a
rendu l'arrôt suivant :
La Cour, Sur le deuxième moyen du pourvoi et sans qu'il
soit besoin d'examiner le premier :
Va le décret du {•''mars 1808, relatif à la création de titres
héréditaires, le décret du 19 mars 1808, nommant le maréchal
Lannes duc de l'Empire, sous le titre de duc de Hontebello, les
lettres patentes délivrées pour Texécution de ce décret ;
Attendu qu'on ne saurait confondre avec un nom patronymi-
que qui a pour destination de désigner une personne, passe
nécessairement et indéflniment à tous les enfants sans distinc-
tion, un titre émané de la puissance souveraine, destiné, non à
désigner, mais & honorer celui auquel il a été conféré ; que si
— 150 —
I es titres nobiliaires n'entratnent plus de privilèges d*aucQne
sorte, ils n*en doivent pas moins être maintenus dans le caractère
qui leur a étë donné à Torigine, en tant qu'il est compatible avec
Tétat social, et dans les conditions de transmissibilité qui leur
ont été imposées par l'acte de création ;
Attendu que le préambule du décret du !•' mars iB08, relatif
aux titres héréditaires créés dans les mêmes conditions, que ce-
lui conféré au maréchal Lannes, porte : « Tobjet de cette institu*
tion a été, non seulement d'entourer notre trône de la splendeur
qui convient à sa dignité, mais encore de nourrir aux cœurs de
nos sujets une louable émulation, en perpétuant d'illustres sou-
venirs et en conservant aux âges futurs Timage toujours présente
des récompenses qui, sous un gouvernement juste, suivent les
grands services rendus à l'Etat » ; qu'un décret du 19 mars i808
nomme le maréchal Lannes duc de FEmpire, sous le titre de duc
de Montebello ; que les lettres patentes délivrées au maréchal
en exécution de ce décret ordonnent que le titre de duc de Monte-
bello et les insignes qui s'y rattachent seront transmissible^ à
la descendance directe, légitime, naturelle ou adoptive, de mâle
en mâle, par ordre de primogéniture ;
Attendu qu'il résulte de ces actes, émanés de la puissance
souveraine, qu'à chaque transmission le bénéficiaire du titre
auquel il échoit, non à cause de sa qualité d'héritier, mais en
vertu de l'acte de collation, doit le recevoir tel qu'il a été créé,
c'est-à-dire ayant conservé intact son caractère honorifique et,
par suite, non engagé, comme dans l'espèce, dans une société
de commerce dont, avec les insignes qui y sont attachés, il cons-
tituerait la marque ; qu'en décidant le contraire, l'arrêt attaqué
a violé les lois susvisées ;
Pa r CBS MOTH^s, Gasso et annule l'arrêt de la Cour de Paris du
2 janvier 1896 ;
Renvoie la cause et les parties devant la Cour de Rouen.
MM. Mazeau, premier président. — Crépon, rapporteur,
— Desjardins, avocat général. — M*^ Sabatisr et Divin,
avocats.
Depuis cet arrêt, le jeune duc de Montebello est décédé.
151 —
Art. 4128.
!f«HB «le Plnventenr. — Métiiode d'enseignement.
— Uenrpntian. — Conenri'enee déloynle. — Berlltn
Le faii^par f inventeur d'une méthode pour renseignement
des langtiei vivantes, de donner son nom à cette méthode
(Berlitz School) constitue non une dénomination tirée delà
nature de la chose^ mais une désignation fantaisiste qui est
la propriété privative dudit inventeur^ alors qu'il est cons-
tant qu'il a le premier fait usage en France de ladite déno-
mination (i).
En conséquence^ commet une usurpation de nom abusive
et se rend passible de dommages-intérêts, tant à l'égard de
Vinvenieur que de ceux auxquels il a concédé le droit d^ ex-
ploiter sa méthode, celui qui, après s'être initié à ladite
méthode et être resté un certain temps comme professeur
dans les écoles fondées par r inventeur ou ses cessionnaires,
a ouvert une école similaire et a, dans ses affiches^ pros'
peetus, enseignes, rédigés en vue de créer une confusion
préjudiciable à ces derniers, annoncé que l'enseignement
des langues vivantes était donné dans son école suivant la-
dite méthode (2).
(Trib. dT. Seine (S«ch.), 7 sTril 1898, (l'«ch.) 6 novembre 1899.— Ber-
litz et Gollonge et Wellhoff c. di Chiara et c, Dumartheray.)
i^ Espici.
Le 7 avril 1898, sous la présidence de M. Pionard-Du-
DszsRT, la 3* Chambre du Tribunal civil de la Seine a rendu
le Jugement suivant, a la requête de M. Berlitz, contre di
Chiara :
Li Tbibunal, Attendu que Berlitz, inventeur d*ane méthode
(i-1) n a été jagé que le nom de l'anteor d'une invention ne tombe
pas nécessairement dans le domaine publie avec l'invention elle-même
Çfckr Pooillet, Marq. fàbr., n«> 58 et 384 et s., ajouter Paris, 24 janvier
1889, Béions agglomérés système Coignet, Ann., 98.211 ; Trib. civ.
Semé, 83 mars 18U8, Grilloirs système Gosteau, Ann,^ 98.215 ; Trib.
Lyon, 94 Janvier 1896, Bec$ de cane Système Gollot, La Loi, 24 juillet :
Trib. civ. Seine, 20 juin et 90 juillet 1898; Filtre système Pastevr, Gaz.
Trib», 14 joUlât et Droit, 21 juillet. A plus forte raison l'inventeur d*une
aéthode d'enseignement peut-il se réserver l'usage exclusif de son
— 152 —
poar l'enseignement des langues étrangères, a donné son nom à
ladite méthode qui, sous la dénomination de Berlitz Sehool, pa-
raît avoir acquis depuis un certain nombre d'années une cer-
taine notoriété tant en Amérique qu'en Europe :
Attendu que Berlitz ayant fondé un certain nombre d'écoles
pour l'application de sa méthode a donné également son nom à
ces écoles exploitées tant par la Société Berlitz et Gie que par
divers individus ou sociétés auxquels il a concédé le droit ex-
clusif de se servir du nom de The Berlilx School of Languages
pour désigner lesdites écoles déjà fondées ou à fonder et ce dans
les villes déterminées et pour des périodes limitées ; que ses
concessionnaires pour la France sont Gollonge et Wellhoff qni
exploitent ou font exploiter actuellement cinq écoles dont deux
à Paris, 27, avenue de l'Opéra, et 59, rue de Rennes ; que c'est
dans ces conditions qu'ils ont assigné di Ghiara en usurpation
du nom de Berlitz et usage illicite, en suppression dudit nom,
de tous tableaux, enseignes, affiches, prospectus^ lettres, inser-
tions et impressions de toute nature, en 5.000 francs de domnoa-
ges-întéréts avec insertion du jugement dans dix journaux au
choix des demandeurs et aux frais du défendeur ;
Attendu qu'il est constant et reconnu que di Ghiara, qn! après
s'être initié & la méthode et être resté un certain temps comme
professeur dans les écoles de Gollonge et WellhofT, concession-
naires de ladite méthode, a ouvert une école rue Léopold-Robert
et a dans des affiches, prospectus, enseignes, annoncé que ren-
seignement des langues vivantes était donné dans la dite école
par la méthode Berlitz ; que les affiches, prospectus et enseignes
étaient même rédigés en vue d'amener une confusion dans Tes-
prit du lecteur et de lui faire croire que ladite école n'était qu'une
création de Berlitz ;
Attendu que le nom ainsi usurpé de Berlitz ne constitue pas
une dénomination tirée de la nature de la chose, mais une dési-
gnation fantaisiste adoptée par l'inventeur : qu'il est constant et
reconnu que Berlitz a le premier fait usage en France de ladite
désignation ;
Attendu que le tribunal a des éléments d'appréciation suffi-
sants pour fixer à 200 francs les dommages -intérêts dus et qu'il
n'apparatt pas que des insertions dans des journaux soient jus-
tifiées ;
Par ces motifs. Dit que di Ghiara a usurpé le nom de Ber-
litz et en a fuit uu usage illicite préjudiciable aux demandeurs ;
Dit que dans les huit jours de la signification du présent juge-
ment, di Ghiara devra supprimer le nom de Berlitz de tous ta-
bleaux, enseignes, affiches, prospectus, lettres, insertions et im-
pressions de toute nature ;
— 153 —
Le condamne dès à présent à pa/er aux demandeurs la somme
de 20 francs par chaque contravention constatée après ledit dé-
lai;
Le condamne pour le préjudice causé en 200 francs de dom«
nages-intéréts ;
Rejette le surplus des conclusions des demandeurs ;
Et condamne di Chiara aox dépens.
2« Espèce.
Jugement de même date au profit de Collonge et
WeUhofT :
Lb TaiBuiUL, Attendu que Collonge et WeOhoff seuls conces*
sionnaires pour la France de la méthode connue sous la déno-
mination Tke BerlUx Sehoolj dénomination fantaisiste tirée du
nom de celui qui parait Tavoîr appliquée le premier en Améri-
que pour renseignement des langues étrangères, ont assigné di
Chiara en dommages-intérêts pour remploi d'affiches et de pros-
pectus semblables à ceux des demandeurs ;
Attendu qu'il est constant et non méconnu que Berlitz a lé
premier fait usage en France de la dénomination The Berlitz
Sehool of Languages pour signaler des écoles ouTcrtes par lui ou
par la Société Berlltx et Cie ou par des concessionnaires de la-
dite dénomination s'appliquant à une méthode spéciale d'ensei-
gnement des langues étrangères ;
Attendu que Collonge et Wellhoff ont acheté de* Berlitz le droit
d'oser de ladite dénomination toute de fantaisie et susceptible
d*nn droit prÎTatif et qu'ils ont ouvert à Paris et en France plu-
sieurs écoles toutes désignées sous la même dénomination ;
Attendu que di Chiara après avoir été employé comme pro-
fesseur dans une de ces écoles, en a ouvert une lui-même à Pa-
ris, lOy rue Léopold-Robert et a pour la faire connaître, adopté
la désignation suivante dans ses enseignes, prospectus, affiches
et ses lettres : Sehool of languages The Berliii Method ;
Attendu que c'est sans aucun droit que di Chiara a fait ainsi
usage du nom de Berlitz, que la désignation employée par lui
présente avec celle des demandeurs une similitude voulue et
calculée pour amener une confusion préjudiciable à ceux-ci ;
Attendu que le tribunal a des éléments suffisants d'apprécia-
tion pour fixer à 300 francs les dommages-intérêts dus, attendu
que la demande d'insertion n'est pas justifiée ;
Pab CBS MOTIFS, Dît quc dansUes huit jours de la signification
du présent jugement, di Chiara sera tenu de faire cesser la con-
fusion résultant de la synonymie et de la similitude de son en-
seigne et de ses affiches et prospectus ;
— 154 —
qu'il seni tenu de payer aux demandeurs une somme de
incB pour chaque coatravenlian constatée et pour le préju-
causé, le condamne à payer aux demandeurs la somme de
-an es de dommages-intérêts ;
qu'il n'y a pas lieu à insertion ;
elte le surplus des conclusions des demandeurs, et con-
:e di Chiara aux dépens, dont distraction est faite au profit
-on, avoué, qui l'a requise sons les affirmations voulues par
3* Espfcci,
6 novembre 1899, la 1" Chambre du Tribunal civil
I Seine, bous la présidence de H. le président Bau-
t, a rendu un jugemenl dans le même sens, à la
ête de Berlitz contre Dumartheray :
TaiBDKAL, Attendu que Berlitz est l'inventeur et l'initia-
tant en Amérique qu'en Europe d'une méthode nouvelle
l'enseignement des langues étrangères k laquelle il a don-
n nom et pour l'application de laquelle il a créé des écoles
le titre de Tfae Berliti et School orLangnege ; qull a fondé
Société Berlitz et Cie à laquelle if a apporté le bénéfice de
Sthode et qu'il a concédé à Collongeet WellholT le droit es-
'de se servir du nom de The Berlitz School of Languages
les écoles de langues fondées ou à fonder en France et de
oncer dans ce pays comme étant les seuls coucesaionnai-
es écoles ainsi dénommées ; qu'ainsi ces demieis exploitent
it eux-mêmes cédé à des tiers le droit d'exploiter en France
soles dont deux & Paris, avenue de l'Opéra n° 87 et bou-
d Saint-Germain, n' 180;
s c'est dans ces conditions que prétendant que Unmarthfr-
vait usurpé le nom de Berlitz et qu'il en avait failon usage
e, Berliti agissant tant en son nom personnel que comme
sentant la Société Berliti et Cie et Col longe et Wellholfen
susdite qualité de concessionnaires, l'ont fait assiguer par
lit de Thiellement, huissier commis, en date du SI février
k l'effet de voir dire qu'il serait tenu de cesser cette nsnr-
n de supprimer sous une astreinte pénale de nom de Ber-
e ses impressions de toute nature, et qu'ils lui réclament
le préjudice causé 500 Crânes k titre de dommages-intérêts
isertion du présent jugement dans quatre journaux et & ses
;endn qu'il est constant que Dumartheray, aprts avoir été
oyé à Paris dans une des écoles de Collouge et Wellboff,
ouvert lui-même une à Paris rue Taitbout, n* 14, copiée
ement sur celle des demandeurs ;
— 155 —
Qoe ponr la faire connaître il a adopté la désignation The Ber^
Ktz School of Languages ou méthode de BerlitMy dans ses enseignes,
prospectas, affiches et réclames ; qu*une sommation du minis-
tère de Geibel, huissier à Paris, en date du 3 décembre 1898,
d*aToir à cesser cette usurpation est demeurée sans effet, quMl
résulte d^nn procès-verbal de constat de Vallée, huissier à Paris,
6D date du 15 ami 1899 qu'il a fait distribuer publiquement à
Paris, avenue de l'Opéra, en face du Cercle militaire des prospec-
tas imprimés où on lit au recto « Langues Tivantes The Gonver-
sational School of Languages, 14, rue Taitbout, Paris, Méthode
Berlitz.., directeur M. Dumartheray, ex-professeur à l'école
Beriitz et au verso: Modem Languages, The Gonversational
Sehool of Languages, 44, me Taitbout, Berlitz Method. M. Du-
martheraj, etc. » ;
Attendu que le nom de Berlitz ne constitue pas une dénomi-
nation tirée de la nature de la chose mais une désignation fan-
taisiste adoptée par l'inTenteur et susceptible d'un droit privatif
à son profit ;
Que c^est abusivement que Dumartheray en a fait usage, que
la désignation employée par lui présentement avec celle des de-
mandeurs offre une similitude voulue et calculée pour amener
ooe confusion préjudiciable à ceux-ci ; que le tribunal a les élé-
ments suffisants d'appréciation pour Ûxer à 300 francs le chiffre
des dommages-intérêts qui lui sont dus ;
Parcss motifs, Dit que Dumartheray a usurpé le nom de Ber-
litset en a fait un usage illicite, lui fait défense de s'en servir
dans l'avenir ;
Ordonne que dans la huitaine de la signification du présent
jugement Dumartheray devra supprimer le nom de Berlitz de
tons les tableaux, enseignes, affiches, prospectus, lettres, in-
sertions et impressions de toute nature ; et faute par lui de faire
dans ledit délai et icelui expiré, autorise les demandeurs à faire
tux frais de Dumartheray et par des ouvriers à leur choix, lacé-
rer toutes affiches, prospectus, lettres, enseignes portant le nom
de berliU :
Condamne dès à présent Dumartheray à payer aux demandeurs
la somme de 20 francs par chaque contravention nouvelle qui se-
rtit ultérieurement constatée ;
Le condamne pour le préjudice causé à leur payer la somme
de 300 francs à titre de dommages-intérêts ;
Bit qoe le présent jugement sera inséré dans deux journaux
de Paris aux choix des demandeurs et aux frais de Dumarthe-
ray» sans toutefois que le coût desdites insertions puisse excéder
ia somme totale de 100 francs ;
Condamne Dumartheray aux dépens.
— 156 —
Dans ces diverses affaires, M* Michbl Pelletier plaidait
pour les demandeurs, M* Le Chaplain pour di Chiara.
Art. .4129.
HNmh commerelal.— Inventeur.— Domaine publie. —
Bonne fol. — Dépens. — Publlentlon du Jugement.
Le nom commercial constitue une propriété imprescrip-
tible qui survit même au cas oU, le brevet de finventeur
étant iombé dans le domaine public, chacun acquiert la fa-
culté de fabriquer et de vendre le produit ou la marchandise
autrefois brevetée ; remploi du nom d'autrui ne peut donc
devenir légitime qu'à la condition que ce nom soit tombé
dans le domaine public par le fait ou la tolérance de Fin-
venteur, ou qu'il soit devenu la seule désignation usuelle
de Vobjet fabriqué ; la renonciation ne se présume pas et
ne saurait s'induire de quelques actes isolés, non réprimés
par le propriétaire et résultant, par exemplCy de remploi
de son nom dans quelques catalogues (1).
Celui qui a usé de bonne foi d'un nom quHl pouvait
croire tombé dans le domaine public ne s'est pas rendu cou-
pable d'actes de concurrence déloyale par usurpation de
nom, mais il pourrait être condamné à des dommages-
intérêts pour faute préjudiciable au demandeur ; dans le
cas même oii le demandeur ne justifierait d'aucun préju-
dice pécuniaire, les frais de l'instance doivent cependant
être mis à la charge de celui qui l'a rendu nécessaire en
usant à tort du nom commercial d' autrui (%).
(i) Cf. rarticle qui précède.
Ici noua citons les deux espèces parce qne le tribonal de Semar, dans
le jugement qne la Gonr de Dijon a confirmé par adoption des motifii,
expose les principes plus complètement que le jugement de Ghâlon-sor-
Saône et Tarrêt motivé dans 1% seconde espèce. Dans la seconde espèce,
la Cour semble même presque légitimer Tusage de l'expression c tulle à
côte, dite tuile Maller > sur les papiers de commerce, tout en recon-
naissant que Muller est en droit de revendiquer l'usage exclusif de son
nom ; mais il faut observer que Tadversaire s'était engagé, par conclu-
sions formelles, à renoncer à tout usage de ce nom et à le faire c dispa-
raître de ses catalogues et publications > et la Cour constate que le tri-
bunal a donné acte de cette déclaration.
(3) Dans un cas anatogoe de tolérance la Cour de Paris a même dé-
— 157 —
En t absence de faute et de préjudice il n*y a pas lieu
fantùriser la publicaiion de la décision aux frais de la
partie intéressée ; il lui appartient si elle juge utile de faire
connoUre la consécration de son droit par les tribunaux^ de
u conformer aux régies du droit commun en évitant toute
indication de nature à nuire à des tiers (1 ) (2« espèce).
(CL de Dijon, 9 léfrier 1899. — Millier c. Clémencet et M aller c. le
Société de la Grande Toilerie de Bourgogne •)
ir« Espfccs.
La Cour a confirmé, le 9fémer 1899, par adoption des
molifs, le jugement du Tribunal de Semur en date du 8 juin
1898, lequel était ainsi conçu :
Considérant que, par exploit du 21 avril 1898, Huiler a fait
asûgner Clémencet pour le faire condamner à lui payer la somme
de 40,000 francs à titre de dommages-intérêts pour faits de eon-
carrence déloyale résultant de l'emploi de son nom, à cesser d'en
faire nsage à l'avenir à peine d'une astreinte de 1,000 francs par
chaque contravention constatée et pour faire ordonner la publi-
cation et l'insertion du jugement à intervenir ;
Considérant que Clémencet, tout en résistant à cette demande
qu'il prétend mal fondée, déclare qu'il supprime à partir de ce
jour et s'engage à ne jamais employer à l'avenir le nom de MuUer
poor désigner les tuiles de sa fabrication, dans ses catalogaes,
booté de se demande l'ayant droit au nom, tont en interdisant impUd-
tement aux défendeurs remploi du nom pour l'avenir (Paris, l*' mars
1888, chaussons Gaillard, iinn., 94.108).
(1) La Coor, en refusant d'autoriser le demandeur à publier le joge-
neot à ses (irais, n*entend pas interdire cette publication d'une façon
abntne (voir Poaillet, Marq, fah,, n* 299 et arrêts cités). Toutefois
elle dit que tonte indication de nature à nuire des tiers devra être évitée :
a eela doit signifier que la publication ne mettra pas en cause des per*
lonaes étrangères au procès ce n'était pas bien utile à dire et le tribunal
en n'aatorisant que l'insertion du Jugement lui-même et dans deux jour-
aasx lenlemeut empêchait tout abus ; si cela signifie que le jugement
M pourra pas être publié avec les noms des adversaires c'est une me-
ttre on peu absolue, car le jugement appartient, en somme, a qui l'a
obtenu et la partie adverse qui a été condamnée aux dépens n'est pas,
i proprement parler, un tiers an point de vue de la publication du ju-
femeat. Ce que la jarispradence a toujours prohibé ce n'est que l'abus
de h publication, par exemple en tronquant le jugement d'une manière
pr^adiciablè à l'adversaire (Trib. comm. Seine, 29 décembre 1898
Hardy e, dame de St-Martin, La Loi, 16 février 1899), en le répandant
9008 forme de signification par huissier i des tiers (Trib. dv. Seine, 26
mm 1809, Compagnie fermière de Vichy, Ann., 05.909), en le publiant
longtemps après sa date (Trib. civ. Seine, 3 mars 1876, Jacquot et Gie,
As»., 78.391). G. M.
— 158 —
prix-coarants et factares, en demandant quMl lai soit donné acte
de cet engagement ; que Muller, de son côté, demande acte de
ces déclarations ;
Considérant qu'il est de doctrine et de jurisprndence constantes
que le nom commercial constitue une propriété imprescriptible
et qui survit même au cas où, le brevet de Finventeur étant
tombé dans le domaine public, chacun acquiert la faculté de
fabriquer et de vendre le prodait ou la marchandise brevetée ;
que, par suite, l'emploi du nom d*autrui ne peut devenir légitime
qu*à la condition que ce nom soit tombé dans le domaine pn-
btic par le fait ou la tolérance de celui auquel il appartient, ou
qu'il soit devenu la seule désignation usuelle de l'objet fabri-
que;
Considérant que la renonciation ne se présume pas et qu'on ne
saurait dans l'espèce l'induire de quelques actes isolés non répri-
més par le propriétaire et résultant de l'emploi de son nom dans
quelques catalogues; qu'il n'apparaît pas non plus que le nom
de Huiler soit devenu indispensable daasTusage de la céramique
pour désigner un modèle de tuiles qui est connu couramment
sous divers autres noms, tels que : tuiles à double recouvrement,
à côtes, etc., ainsi qu'il résulte des documents fournis an tribu-
nal, et notamment de plusieurs catalogues ou séries de prix ;
Considérant que c'est donc à tort et sans droit que Clémencet
s'est servi du nom de MuUer pour désigner ses produits dans ses
catalogues ou prospectus en les dénommant tuiles à double te*
couvrement dites tuiles MuUer ;
Considérant toutefois qu'on ne saurait induire de ce simple
usage la preuve que le défendeur ait cherché à créer une confu-
sion entre ses produits et ceux du demandeur et qu'il ait ainsi
commis des actes de concurrence déloyale ; qu*il est à|remarquer,
en effet, que le nom de MuUer n'a jamais été apposé par lui sur
les objets provenant de sa fabrication, lesquels étaient au contraire
revêtus en général de la marque Clémencet ; que, si quelques tui-
les sortant de ses usines n'ont pas porté cette inscription, il ne
semble pas douteux que cette omission, très exceptionnelle, ne
peut être attribuée à un fait personnel et volontaire, mais est, au
contraire, le résultat d'un procédé de fabrication défectueux per-
mettant aux moules de s'obstruer et de ne plus marquer leur
empreinte sur quelques tuiles passées à la presse ; que, d'autre
part, les catalogues émanant de la maison ne s'adressaient qu'à
des gens expérimentés, qui ne pouvaient ignorer que les tuiles
fabriquées aux Laumes ou à Pouilly et expédiées de ces localités
provenaient de la fabrication locale et non pas des usines MuUer,
situées àivry, et que la mention auxdits catalogues tuiles à dou'
- 159 —
ble recouvrement^ -dites tuiles UuUer^ indiquait surabondamment
lear proyenance ;
Considérant, enfin, qne la différence de prix entre les marchan-
dises vendnes par Clémencet et celles de Huiler était à elle senle
suffisante poor éclairer les acheteurs et pour démontrer qu'il
oe cherchait pas à créer une confusion dans le but d'assurer plus
facilement Técouiement de ses produits à un prix supérieur à celai
de sa région ;
Considérant quMl convient également de remarquer que la déno-
mination de tuiles dites ifuiZ^ était fréquemment employée, depuis
plusieurs années, dans le langage du bâtiment et des prospectus
de tuilerie, pour désigner la tuile à double recouvrement, sans
que Huiler, qui ne pouvait Tignorer, ait formulé aucune protes-
tation ; et que cet usage, s'il n'est pas de nature à faire considé*
rer le nom de Muller comme tombé dans le domaine public, pou-
vait, tout au moins, faire illusion à Clémencet en lui permettant,
jusqu'à un certain point, de se croire autorisé tacitement à se
servir de ce nom pour désigner un modèle de tuile semblable,
et suffirait au besoin à établir sa bonne foi ;
Considérant que le demandeur ne justifie d'aucune démarche
faite par Clémencet, soit pour déprécier les tuiles de son concur-
rent, soit pour faire naître une confusion et persuader à ses
acheteurs que les produits qu*il leur livrait émanaient de la mai-
son Muller, et pour obtenir d'eux un prix supérieur au prix de
la région ; qu'il n'allègue pas non plus que lesdits acheteurs aient
revendu ou cherché à revendre ces produits en faisant croire au
public qu'ils avaient été fabriqués à Ivry ; qu'on ne saurait tirer
aucun argument de la mention dans une facture de Clémencet
de la simple dénomination tuile Muller, alors que cette facture
était adressée à un commerçant de profession et comprenait
toute une série d'articles de céramique, qui étaient indiqués
comme provenant de son usine des Laumes, et que cette mention
s'explique suffisamment par l'abréviation usuelle du commerce ;
qu'il ne s'agit, d'ailleurs, que d'un fait isolé et incapable d'éta-
blir une confusion même involontaire, puisqu'il se référait à un
marché consommé, et qu'en outre ladite facture, qui avait un
caractère personnel et confidentiel, ne faisait que reproduire les
termes employés par l'acheteur dans sa lettre de commande ;
Considérant que, dans ces conditions et en présence de la bonne
foi indiscutable de Clémencet, il ne saurait être question de con-
currence déloyale par usurpation de nom ;
Considérant qu'il échet, en conséquence, de rechercher si, en
employant dans ses catalogues la |dénomination de tuiles dites
Jftciifr, il a commis une faute ou une imprudence, et a causé de
cette façon au demandeur un préjudice qu'il serait tenu de ré-
— 160 —
«r, conformément aux dispositions de l'artiole 1388 dn Cod«
il ; considérant qae, s'il a usé sans droit du nom de Huiler
ir désigner nn produit fabriqué par lui, il a pris soin d'accom-
;ner l'usage de ce nom de précautions qui l'empêchaient d'fitre
instrument de concurrence déloyale et rendaient impossible
ite erreur sur sa prOTenance ; et qa'en admettant qu'il ail, ce
lanE, commis une imprudence, elle serait singnliârement atté-
Se par les agissements semblables de plusieurs maisons simi-
res et le silence prolongé de Huiler, en rertu desquels il pou-
t se croire autorisé dans une certaine mesure à employer la
lomination de (uitedile Jfut^ pour désigner un produit de
me modèle ;
ïonsidéraut que, daun tous les cas, il n'apparatt pas qa'ancan
judice en ait été la conséquence pour le demandeur, puisqu'il
rapporte pas la preuve qu'une confusion quelconque soit résul-
de l'emploi de cette dénomination et qu'il ait été ainsi frus-
d'ancune fourniture ou commande ; qu'au contraire, et pour
motifs ci-dessus déduits, il est hors de doute que les divers
leteuTS, auxquels Clémencet a rendu ses produits, savaient
'linemmenl, tant en raison de leor situation et de leur expé-
Qce professionnelles, qu'en raison du prix et du lieu d'ezpé>
ion comme aussi de la désignation dans les catalogues de la
rchandine fabriquée, qu'elle provenait des usines Clémeocet et
i pas de celles de Huiler ;
ionsidérant que, dès lors, la demande de dommages-Intérêts
ce dernier doit être rejetée comme mal fondée ;
tensidérant que l'offre faite par Clémencet et dont il demande
e, ainsi que Holler, de ne plus se servir à l'avenir du nom de
lier sous une forme quelconque, notamment dans les cataio'
is, priz-courants ou factnres, est de nature à donner pleine
isfaction an demandeur, sans qu'il soit nécessaire d'en assurer
lécution par une astreinte qui devient sans objet ;
lonsidérant qu'en l'absence de tout préjudice causé à Huiler,
l'écbet pas davantage d'ordonner la publication du présent Ju-
aent à titre de supplément de dommages-intérêts, ainsi qui!
demandé ;
lonsidérant, toutefois, que l'abas du nom de Huiler cooslaté
«connu à la charge de Clémencet, a nécessité les frais de l'in-
nce actuelle et que t'olTre par lui faite de ne plus l'employer
avenir dans ses prospectus et catalogues est tardive ; qne, d*
:bef, il 7 a lien de le condamner aux dépens.
'u cas VOTIFS, etc.
f Bspkct.
)'sutre part UuUer avait poursaivi dtrant le Tribunalde
]
— 161 —
commerce de Chalon-sur-Saône la Grande Tuilerie de
Bourgogne pour avoir désigné un modèle dans ses pros-
pectus et prix-courants «tuiles à côtes, dites Muller».
Voyant dans ce fait une concurrence déloyale, il avait :
1* revendiqué l'usage exclusif des mots c tuiles Muller » ;
f réclamé des dommages-intérêts pour le préjudice passe,
el une astreinte de 1,000 francs par chaque contravention
nouvelle constatée ; 3* demandé la publication aux frais de
la défenderesse, du jugement à intervenir, avec (i^) con-
damnation aux dépens.
Sur ces conclusions, le Tribunal de commerce de Cha-
loû-sup-Saône rendait, le 20 avril 1898, le jugement sui-
Taot:
Li TuBUiffÀL, Sur le premier point :
Attendu qu'il est de jurisprudence constante que le nom d*un
commerçant constitue pour lui une propriété imprescriptible ;
que le nom de Tinventeur reste sa propriété exclusive, alors
même que i*objet breveté est tombé dans le domaine public ;
Attendu que ces principes ne souffriraient d'exception que
dans le cas où le nom du propriétaire serait devenu, par son con-
sentement exprès ou tacite, la désignation usuelle du produit ;
que ce produit ne saurait facilement être désigné par un autre
nom que celui de son inventeur, nom qui, par son long et cons-
tant nsage, serait devenu substantif commun, de nom propre
qu'il était primitivement ;
Attendu que, si le modèle de tuile adopté par Muller et qui
porte son nom est tombé dans le domaine public, on ne saurait
cependant admettre que ce nom de Muller soit indispensable
pour désigner ce modèle, qui est connu sous d'autres noms, tels
qve toiles à cdtes, tuiles à recouvrement,etc. et que d'autres tuile-
ries fabriquant un modèle identique à celui de Muller n'ont pas eu
l>esoiQ de se servir de son nom pour le désigner et le faire figu-
rer sar leurs catalogues et prix-courants ;
Attendu, en outre, que ce nom et cette désignation n'ont jamais
^ré sur les produits fabriqués par la Société « la Tuilene » à
Montchanin, qui portaient la marque de fabrique la Tuilerie
àt Bourgogne, Montchanin, mais seulement sur ses prospectus
et t&rifÎB imprimés ;
Mais attendu que la renonciation à la propriété ne se présume
P^ ; p'on ne saurait faire résulter cette renonciation de quel-
ques actes isolés, et môme répétés, non réprimés par le véri-
table propriétaire ; qu'il est évident que c^est par abus que la dé-
fenderesse s'est permis de se servir du nom de Muller. en qua-
44
— 162 —
lifiant ses prodaits de tuiU à côte dite MulUr sur ses papiers de
commerce ; mais qu'on ne saurait tirer de ce fait seul la con-
clusion que la Tuilerie de Montckanin ait cherché à créer une
confusion entre ses produits et ceux de MuUer ; qu'il y a lien de
tenir compte que cette appellation de tuile Muller ou dite Muller
était déjà en usage sur les tarifs de dififérentes tuileries depuis
bien des années^ sans que Muller ou son prédécesseur, qui ne
pouvaient l*ignorer, y aient fait la moindre objection ; que dans
ces conditions, le défendeur pouvait presque se croire autorisé,
tout au moins tacitement, par Muller à se servir de son nom pour
désigner le modèle inventé par Muller, mais fabriqué par le dé-
fendeur ; que, loin de nuire à Muller, cette notoriété donnée k
son nom ne pourrait qu'être flatteuse pour son amour-propre
d'inventeur et de fabricant et créer à lui, à ses produits et à ses
modèles, une renommée de bon aloi qu'ils avaient méritée d'ail-
leurs et qui ne pouvait que lui être profitable ; que les tuiliers
de Bourgogne, loin de chercher à faire passer leurs prodaits sous
une étiquette mensongère, se réclament tous énergiquement du
nom de Bourgogne, dont les produits céramiques sont avantageu-
sement connus, nom qui, presque toujours, sous une forme
quelconque, figure dans leur marque de fabrique et que le dé-
fendeur, étant fabricant lui-même, indiquait suffisamment ex-
plicitement qu*ii vendait ses produits et non ceux de Muller ;
Attendu que le demandeur n'apporte pas la preuve d'agisse-
ments de mauvaise foi à la charge de la Société la Tuilerie de
Montckanin^ tels que des démarches déloyales auprès du public
spécial auquel ces produits s'adressent, tendant à créer une
confusion dans l'esprit des acheteurs ou cherchant à leur faire
croire qu'on leur livrait des tuiles de la fabrication de Muller ;
Attendu qu'eu l'absence de toute preuve d'intention fraudu-
leuse, le grief tiré de la concurrence déloyale n'est pas fondé et
doit être écarté ; que le tribunal ne saurait retenir que le fait
d'une imprudence ou d'une faute de la part de la société défen-
deresse pour s'être servi en quelque manière que ce soit du
nom de Muller sans son consentement, et qu'il incombe au tri-
bunal de rechercher si cette faute a causé au demandeur un
préjudice dont il lui est dû réparation ;
Attendu que le demandeur ne fait pas la preuve du préjudice
matériel, et que s'il apparaît bien que la Tuilerie de Montckanin
a vendu une certaine quantité de tuiles du modèle. Muller, le
demandeur n'établit pas que ce fût à son détriment et préjudice ;
qu'il n'y a donc pas lieu d'admettre les conclusions du deman-
deur tendant à obtenir des dommages-intérêts pour le préjudice
causé ; et sur la prétention de Muller de faire ordonner au dé-
fendeur d'avoir à s'abstenir de se servir à l'avenir de son nom
— 163 —
sur tons ses papiers de commerce, il conyient de remarquer que
ta TuUerie de Montchanin, par ses conclusions et en cours d'ins-
tance, a donné sur ce point satisfaction à Muller ; que dès lors,
sous le mérite de la réalisation et du maintien des déclarations
faites quant à ce à la barre, il convient de repousser quant à
présent ledit chef de la demande Muller ;
Sur le deuxième point :
Attendu que le préjudice futur ne peut se présumer et que rien
ne permet de supposer que la Tuilerie de Montchanin ne remplira
pas les engagements qu^elle a librement consentis, à la barre et
dans ses conclusions, de ne plus se servir du nom de MuUer ; il
n'y a donc pas lieu à statuer sur Tastreinte demandée par Muller;
Sur le troisième point :
Attendu que la publicité demandée par Muller, si elle était
ordonnée par le tribunal, serait une peine et un supplément de
dommages-intérêts qui s'appliqueraient avec juste raison si le
tribunal avait admis la concurrence déloyale ; mais, ce chef
étant écarté, il paraît cependant équitable et utile de permettre
à Muller de faire savoir aux personnes intéressées que les tuiles
fabriquées et annoncées jusqu'alors par la Tuilerie de Montcha-
nin sur ses tarifs, comme tuiles dites Muller, n'avaient que le
modèle de commun avec celles qui sortaient de son usine, et
que la publicité raisonnable du présent jugement, autorisée aux
frais de Muller, parait suffisante pour lui donner satisfaction sur
ce pomt ;
Sur le quatrième point :
Attendu que, si le préjudice matériel n*est pas prouvé, il n'en
reste pas moins à la charge de la Tuilerie de Montchanin un abus
du nom de Muller qui a occasionné à celui-ci des frais pour obte-
nir judiciairement la satisfaction par lui recherchée, bien que
le défendeur déclare qu'il eût accordé cette satisfaction avant
llnstance si elle lui eût été demandée, et qu'il est juste que les
dépens soient supportés par la Tuilerie de Montchanin, dont les
agissements tout au moins imprudents ont été la cause initiale
de la présente instance ;
Par gks hotifs, Donne acte à la Grande Tuilerie de Bourgogne
à Montchanin de sa déclaration de renoncer à faire usage et à
faire disparaître de ses catalogues et publications le nom de Mul-
ler, et ce, sous le mérite de la réalisation et du maintien des
mesures qu'elles comportent, déclare Muller mal fondé et non
recevable en sa demande en iO.OOO francs de dommages-inté-
rêts ; le déclare mal fondé en sa demande en une astreinte de
1.000 francs pour chaque contravention constatée ; autorise Muller
à publier le présent jugement dans deux journaux à son choix,
et une fois dans chacun d'eux, le tout à ses frais ; et, vu les cir-
- 164 —
constances de la cause, condamne la Tuilerie de Bourgogne par
tontes les voies de droit en tous les dépens.
Appel de ce jugement a été interjeté par MuUer. De son
côté, la Grande-Tuilerie de Bourgogne a formé appel in-
cident au sujet de la condamnation prononcée contre elle
et relative à la publication du jugement.
Le 9 février 1899, le même jour que Tarrêt qui précède,
la deuxième Chambre de la Cour de Dijon a rendu rarrèi
suivant :
Là Cour, Attendu que Louis Muller reproche à la Grande-
Tuilerie de Bourgogne d*avoir désigné, dans ses catalogues, par
les mots : tuiles à côte, dites Muller, certains produits qu'elle
fabrique suiv, ntun modèle inventé par son père et tombé actuel-
lement dans le domaine public ;
Qu'en conséquence il Fa assignée devant le tribunal de com-
merce de Chalon-sur-Saône, d'une part, pour obtenir des dom-
mages-intérêts à raison du préjudice que lui avaient occasionné,
dans le passé, des agissements auxquels il attribue un but de
concurrence déloyale ; d'autre part, pour faire interdire à. Tiu-
timée de se servir, à l'avenir, sous quelque forme que ce soit, du
nom de Muller, dont il a conservé la propriété absolue, et ce,
avec la garantie d'une astreinte à prononcer d'avance pour cha-
que nouvelle contravention et la publication dans les journaux
de la décision à intervenir ;
Mais, attendu que, sur le premier point, la prétention' de l'ap-
pelant n'est en rien justifiée ;
Qu'en effet, la Grande Tuilerie de Bourgogne ayant, comme
toutes les usines du même genre, le droit absolu de fabriqiier et
de vendre des tuiles conformes an modèle pour lequel Muller
père avait pris autrefois un brevet, actuellement périmé, il n'y
aurait eu, de sa part, concurrence déloyale que si, en employant
dans ses catalogues les mots de tuiles à côte, dites Mullery elle
avait eu pour but de faire considérer comme fabriqués à L'usine
d'ivry, que dirige Muller, ses propres produits.
Qu'une pareille supposition est contredite par tous les éléments
de la cause, les personnes auxquelles l'intimée s'adresse.sachant
pertinemment qu'elle est fabricante et non entrepositaire,ses ca-
talogues ne contenant autre chose que Ténumération des pro-
duits de son industrie personnelle et enfin les tuiles qu'elle vend
portant ostensiblement la marque de la maison, ce qui rend im-
possible une erreur sur leur provenance ;
Attendu que, dans ces conditions, la confusion alléguée par
Muller ne saurait être considérée comme ayant été cherchée ou
— 165 —
produite par te fait dont il se plaint ; qae, dès lors, sa demande
en dommages-intérêts doit être rejetée ;
Attendu, snr le second point, que Muller est incontestablement
dans son droit en revendiquant Tusage exclusif du nom qui est
resté sa propriété, alors que ce nom ne saurait être considéré
comme la seule dénomination possible d'un produit spécial, et
que l'emploi qui en a été fait pour désigner les tuiles à recou-
Trements n*a été ni assez lon^, ni assez général pour impliquer
son consentement tacite de Tayant droit ;
Mais attendu que la Grande Tuilerie de Bourgogne s'est enga-
gée, par conclusions formelles prises en première instance, à re-
noncer à tout usage de ce nom et à le faire disparaître de ses
catalogues et publications, et que le tribunal lui a donné acte de
cette déclaration ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu de sanctionner Texécution de cette
promesse par une condamnation éventuelle à payer une somme
déterminée au cas où il y serait contrevenu ; qu'en effet, une
astreinte n'est justifiée qu'après constatation d'un fait qui im-
plique la mauvaise foi de son auteur, et que, dans l'espèce ac-
tuelle, on ne peut considérer, même comme une faute repro-
chable à l'intimée, l'emploi du nom de Muller pour désigner une
forme spéciale de tuiles, alors que cet emploi, effectué antérieu-
rement par de nombreuses maisons similaires au vu et sans pro-
testation des intéressés, pouvait légitimement l'amener à croire
au consentement de ces derniers ;
Attendu qu'en l'absence d'une faute commise par la Grailde Tui-
lerie, d'un préjudice ayant été ou ne pouvant être subi par
Haller, rien ne justifie l'autorisation donnée à ce dernier parles
premiers juges de publier leur décision à ses frais dans deux jour-
naux ; qu'il lui appartient seulement, s'il juge utile de faire con-
aaitre sa protestation contre l'usage de son nom et la consécra-
tion qu'il a obtenue de son droit à cet égard, de se conformer
aax règles du droit commun, en évitant toute indication de na-
ture à nuire à, des tiers ;
Que l'appel incident qu'a interjeté sur ce point la Grande Tui-
lerie de Bourgogne doit dont être accueilli ;
Sur les dépens :
Attendu que si l'intimée a été condamnée à bon droit à sup-
porter ceux qui ont été exposés en première instance, comme
conséquence de son retard à prendre l'engagement ci-dessus
rappelé, les frais auxquels a donné lieu l'appel reconnu mal
fondé de Muller doivent être mis à la charge de ce dernier ;
Par ces motifs. Sans s'arrêter à l'appel interjeté par Muller du
jogement qu'a rendu le tribunal de commerce de Chalon-sur-Saô-
ne, le 25 avril 1898, et faisant droit, au contraire, à l'appel inci-
1
— 166 —
dent de la Grande Tuilerie de Boargogne» dit qu'il n'y a pas lieu
d'autoriser MuUer à publier, même à ses frais, le texte intégral
du présent arrêt, infirme, quant à ce, le jugement entrepris, le
confirme pour le surplus, condamne l'appelant aux dépens.
«
MM. Bernard, président. — Abord, avocat général. —
M«* AujAT (du barreau de Paris) et Nodrissat, avocats.
Art. 4230.
rVom comniereial. — IVom cle la femme. —
CJoneurrenee illicite.
Si la pratique du commerce autorise dans certains cas
un commerçant à joindre le nom de sa femme au sien cet
usage ne constitue point un droite mais une simple talé-
rancct et les tribunaux doivent prévenir ou faire cesser les
abus qui peuvent en résulter (1).
Si cette addition de nom doit être notamment la cause
d'une confusion préjudiciable pour un autre commerçant^
elle constitue un acte de concurrence illicite qui ne peut être
toléré (2).
(C. de Lyon, 30 mai 1899 .— Bargillat c. L. Gauthier.)
La cour après en avoir délibéré :
Considérant que les deux frères Bargillat et Laurent Gauthier
ont été associés pendant de nombreuses années sons la raison
sociale « Ch. Méhier et Cie » pour Texploitation d'une maison
de commerce de passementerie à laquelle Charles Méhier, décédé
en 1875, avait attaché son nom par la prospérité, et surtout par
le renom d'honorabilité qu'il lui avait donné ;
Qu'en 1897, les trois associés ont décidé d'un commun accord
de dissoudre leur société et de liciter entre eux le fonds de com-
merce ; qu'il a été alors expressément convenu que celui des
trois qui deviendrait adjudicataire, aurait seul le droit de s'inti-
tuler <c successeur de Charles Méhier et Cie », les deux autres
reprenant leur liberté d'action pour exercer le même genre de
commerce et chacun d'eux ayant droit de se dire « ancien asso-
cié de la maison Charles Méhier et Cie » ;
(1-2) Cf. Paris, 21 décembre 1855, Ann., 55.221 ; Paris, 7 décembre
1899, Ann„ 99.341 elles arrêts cités par Pouillet, Marq. fab., n* 500.
Ajoater Paris, l'i* mars i900,Gharles Protte c. Gigault et Cie, Gaz. PaL^
numéro du 29 mai 1900.
— 167 —
Qa'ainsi se trouvait limité et défini pour ch&can des trois asso-
ciés le droit de se servir dans son commerce da nom de Charles
Méhxer après la dissolution de la société ;
Considérant qa'Usmar Bargiilat restant adjudicataire, devint
par conséquent le seul successeur de Charles Méhier et Cie, et
qull est incontestable qu'en achetant le fonds de commerce, il
a surtout payé la valeur commerciale résultant de la notoriété
da nom de Méhier, qui devait lui conserver la clientèle ;
Considérant que Laurent Gauthier a organisé, peu de temps
après, une maison ayant pour objet le même commerce de pas-
sementerie sous la raison sociale Gauthier-Méhier, ancien associé
de Méhier et Cie ; que Usmar Bargiilat a vu dans Tu sage du nom
de Méhier ainsi joint à celui de Gauthier, une atteinte aux droits
qu^il tenait des conventions dont il a été ci-dessus parlé et un
acte de concurrence déloyale ;
Que de son côté Gauthier prétend au droit d'ajouter à son nom
patronymique celui de Méhier parce qu'il a épousé une fille de
Charles Méhier, laquelle est décédée depuis fort longtemps ;
Considérant que si la pratique du commerce autorise, dans
certains cas, un commerçant à joindre le nom de sa femme au
âeu, cet usage ne constitue point un droit, mais une simple to-
lérance et les tribunaux doivent prévenir ou faire cesser les abus
qui peuvent en résulter ;
Que notamment si cette addition de nom doit être la cause
d'une confusion préjudiciable pour un autre commerçant^ elle
constitue un acte de concurrence illicite qui ne peut être toléré ;
Et considérant en fait, qu'il est bien certain que c'est unique-
ment pour attirer à sa nouvelle maison la clientèle attachée au
nom de Méhier, que Gauthier a, le jour même où il a organisé
cette maison, pour la première fois depuis qu'il avait épousé une
fille de Gh. Méhier, joint le nom de sa femme au sien ;
Que cette clientèle avait cependant été achetée par Usmar
Bargiilat avec le titre de « successeur de Charles Méhier » et que
Gauthier ne devait, aux termes des conventions, prendre que le
titre « d'ancien associé de la maison Ch. Méhier » ; qu'il s'était
donc interdit à lui-même de prendre, en dehors de la qualité
d'ancien associé, le nom de Méhier, pour en bénéficier au point
de vue commercial ; et que sa qualité de gendre de Méhier ne
pouvait le dispenser d'exécuter ces conventions ;
Considérant au surplus que des confusions se sont produites
entre ces deux maisons ; qu'en vain les premiers juges attribuent
ces confusions au droit qu'a Gauthier de se dire ancien associé de
la maison Ch. Méhier et affirment que la suppression de Mé-
hier à côté de celui de Gauthier n'empêcherait pas ces confu-
sions ;
— 168 —
Qu'en admettant même que la confusion ait plusieurs causes,
il ne s'en suivrait pas que le juge ait le droit de se refuser à sup-
primer Tune de ces causes parce qu'il ne peut supprimer l'au-
tre ;
Qu'il est indiscutable d'ailleurs que l'adjonction, par [un trait
d'union du nom de Méhier à celui de Gauthier a par elle-même
nne signification de nature à impressionner la clientèle, à la-
quelle cette adjonction sera nécessairement expliquée, et qu'elle
pensera que celui qui est en même temps le gendre de Charles
Méhier et l'ancien associé de la maison doit être le véritable
successeur de Charles Méhier, malgré toutes les licitations et
toutes les circulaires de l'adjudicataire ;
Que c'est donc bien là, non pas seulement l'une des causes,
mais la cause primordiale de la confusion qui s'établirait de
plus en plus avec le temps dans l'esprit de la clientèle, et qa*il
n'est pas douteux que le fait dont se plaint Bargillat constitue un
acte de concurrence illicite, en même temps qull est contraire
aux conventions des parties ;
Que la cour doit par conséquent prendre des mesures pour y
mettre un terme ;
Considérant que des éléments qui lui sont fournis, il résulte
que l'allocation des dépens à titre de dommages-intérêts, cons-
tituera une réparation suftisante du préjudice causé jusqu'ici à
Bargillat;
Par ces motifs, Faisant droit à l'appel de Usmar Bargillat, ré-
forme le jugement rendu entre lui et Laurent Gauthier parle tri-
bunal de commerce de Lyon à la date du 2 mai 1898 ;
Statuant à nouveau et faisant ce que les premiers juges au-
raient dû faire ;
Fait défenses à Laurent Gauthier de continuer à user de la
raison commerciale L. Gauthier-Mébier faite de son nom per-
sonnel et de celui de feue sa femme ; dit que Laurent Gauthier
devra faire disparaître l'adjonction du nom de Méhier au sien
propre par un trait d'union sur tous ses titres, papiers et docu-
ments commerciaux dans les deux mois de la signification du pré-
sent arrêt à peine de 10 francs par chaque jour de retard ;
Alloue à Usmar Bargillat pour tous dommages-intérêts les
dépens de première instance et d'appel et rejette toutes ses
autres demandes et conclusions ; ordonne la restitution de l'a-
mende consignée.
!'• Chambre. — Présidence de M. Maillard, premier pré-
sident. — M*" Jacquieu et Pouillet (ce dernier du barreau
de Paris), avocats.
— 169 —
Art. 4231.
Marque* «le Aibrlque. —Etiquette. — dnblème
tional «aiflM. — IVom eominerctal. — IVom cle la
Vemblème national suisse peut être employé par tout
citoyen suisse sur des étiquettes, par exemple pour le com-
merce^ des absinthes (1).
On ne saurait interdire à un négociant r adjonction du
nom de sa femme^ même si cela est préjudiciable à un con^
current^ lorsque le négociant a employé ce nom dans là
commerce non avec une intention frauduleuse, mais parce
qu'il avait déjà antérieurement, même dans les actes de la
vie dvilCf pris possession de ce nom en adjonction au sien,
conformément à Vusage (2).
(G. de Besftnçon, 13 décembre 1888. — Veil Picard et Cie
c. Legler Pernod.)
La Cour d'appel de Besançon (ch. corr.) a, le 12 décem-
bre 1888, confirmé par adoption de motifs un jugement
du tribunal de Pontarlier, en date du 10 août 1888, ainsi
conçu :
Lb Tribunal, Attendu que la poursuite dont il s'agit a pour
bot de faire décider : 1® que le sieur Legler a frauduleusement
^mité fa marque de fabrique des sieurs Veil Picard ; 2* que le
même sieur Legler devra supprimer de ses étiquettes le nom
Pernod accolé à son nom patronymique, et composer en dessins
et couleurs ces mêmes étiquettes de telle sorte qu'à Tavenir elles
ne puissent être confondues avec celles des demandeurs ; 3* et
que le défendeur doit être condamné aux dommages-intérêts que
ses agissements délictueux ont causés au sieur Veil Picard ;
Attendu qu'il j a lieu de rechercher si la prévention relevée
contre le sieur Legler est justiûée par les circonstances et les
fiaits de la cause.
Sur le premier chef:
Attendu que Tétiquette Pernod Ûls déposée comme marque de
(1) Voir en sens contraire Pouillet, Marq, fabr., n» S3.
(S) Jogé encore que si le commerçant veut simplement, par Tadj onc-
tion du nom de sa femme, individualiser sa raison sociale, se distinguer
des commerçants homonymes et éviter des erreurs, sa conduite et ses
agissements n'ont rien que de très naturel et de légitime (Trib. com.
St^Etienne, 8 mars 1898, Pays c. Vincent-Pays, La Loi, SO avril).
Pour les cas. oà l'adjonction du nom de la femme a été jugée illicite
comme ayant en pour bat une confusion, voir Tarticle précédent.
— 170 —
fabrique appartenant actuellement aox poursuivants ses cédants,
est entourée d'un liseré gris clair argenté, coupé aux quatre an-
gles ; qu'elle est ornementée de pampres et grappes de raisins
peints en gris clair sur an fond blanc ; qu'à la partie supérieure,
elle présente sur la même ligne, deux cartouches de teintes gris
foncé et argenté,séparés par la croix fédérale suisse, surmontée du
chapeau à plumes de Guillaume-Tell ; que dans le cartouche de
gauche on Ut le mot Extrait imprimé en lettres bleues et
dans celui de droite, lui faisant face, le mot d'absinthe aussi
imprimé en lettres bleues ; qu'au bas de chacun de ces cartouches
et de chaque côté de la croix fédérale .on trouve un ovale à fond
blanc, formé d'un trait bleu ; qu'au milieu de l'ovale de gauche
on lit le mot qualité imprimé en petites lettres bleues et qu'au
milieu de l'ovale de droite, on lit le mot supérieure également
imprimé en petites lettres bleues ; qu'au centre de l'étiquette
existe un cartouche bleu sur lequel se détachent en gros carac-
tères blancs les mots Pernod fils ; que ce cartouche principal
est entouré d'un liseré gris clair argenté, coupé aux angles et
marqué d'un pointillé blanc ; qu'à la partie inférieure figure en-
core un double cartouche en ligne courbe, de fond gris clair ar-
genté, orné à chaque bout de deux banderolles et dont les deux
parties sont reliées par un empâtement de même nuance coupé
de légers traits noirs ; que la partie de droite du cartouche porte
en lettres bleues les mots, à la suite l'un de l'autre, Couvet
Suisse, l'empâtement du milieu, la conjonction et aussi à Tencre
bleue, et la partie de droite les mots, également à la suite l'un
de l'autre et en caractères bleus, Pontarliery Doubs ; que tout au
bas de l'étiquette, au-dessous de l'empâtement séparant les deux
parties du cartouche dont on vient de parler, le mot déposé
est imprimé en petits caractères sur fond blanc, et qu'enfin
au bas, à l'angle de droite, on découvre à l'encre bleue la signa-
ture Pernod fils ;
Attendu, quant à l'étiquette Legler-Pemod, collée sur les bou-
teilles saisies, qu'elle est encadrée dans une simple raie bleue
d'angles droits très légèrement arrondis ; que sur fond blanc, on
n'y voit comme ensemble que des raies concentriques coupées
par ces traits bleus ornés de petits médaillons de nuance indé-
cise ; que les deux cartouches supérieurs affectent une forme
également courbée et sont de teinte bleu foncé ; que les mots
Extrait d'Absinthe sont en lettres blanches ; que les plumes du
chapeau surmontant la croix fédérale sont tournées à gauche
tandis que, à l'étiquette Pernod fils, elles inclinent à droite ; que
la raison sociale Legler-Pemod écrite en lettres blanches, existe
au centre dans un cartouche bleu qui n'est entouré d'aucun dé-
cor ; que ce cartouche principal est précédé, à droite, du mot gua-
— 171 —
Hté et suivi à gauche du qualificatif supérieur^ ces deux expres-
sioDs imprimées en lettres bleues, non dans des ovales, mais
dans des espèces de rectangles, à fond blanc formés à traits
biens ; que les indications Couvet Suisse et Pontarlier, Doubs
sont en lettres blanches sur fond bleu dans deux petits cartouches
ocenpanty Tun à gauche Tautre à droite, la partie inférieure de
Tétiquette ; que les désignations d*Etat Suisse etDoubs imprimées
sur fond blanc en lettres bleues, sont placées non à la suite, mais
au-dessous de chaque nom de ville auxquelles elles se réfèrent ;
que dans le bas de l'étiquette et au milieu des deux cartouches
Couoet et Pontarlier^ on remarque un vase d*on s'échappent des
flammes ; qu^au-dessus de ce vase est inscrite en petites lettres
bleues sur fond blanc cette mention marque de fabrique dispo-
sée en demi-cercle, et au-dessous du vase, le mot déposée aussi
en petites lettres bleues sur fond blanc ; qu'enfin cette étiquette
n'est revêtue d'aucune, signature ;
Attendu que cette description de chacune des étiquettes Per-
nod fils et Legler-Pemod démontre que, soit dans leur ensem-
ble et au premier aspect, soit dans leurs détails de couleurs et
dessins, comme encore dans les dispositions de leurs indications
de noms, lieux, produits et qualités, elles ne présentent que
des ressemblances superficielles, incapables de suggérer à Toeil
le moins exercé ou à une intelligence moyenne la moindre mé-
prise ou une confusion quelconque ;
Qu'à la vérité les deux étiquettes en question portent, sur fond
rouge, la croix fédérale suisse ; mais que celle de la marque
Pernod fils est encadrée dans un ovale entouré d'une ligne bleu
foncé, tandis que celle de l'étiquette Legler est enfermée dans
une circonférence parfaite, bordée d'un large trait blanc ; qqe, de
pins, les chapeaux dessinés au-dessus de chacune d'elles sont gar-
nis de plumes touffues d'une façon inégale et différemment pen-
chées et nuancées ;
Attendu, d'ailleurs, que les poursuivants ne sauraient soutenir
qu'ils ont seuls la faculté de faire figurer sur leurs étiquettes
iemblème national suisse ; que ce droit compète à Legler Pernod
comme à eux, d'autant mieux quHl est sujet suisse, aussi bien que le
i^ieur Pernod fils, leur cédant ;
Sur le second chef :
Attendu que les négociants, ajuste titre soucieux de leurs in-
Urèts et jaloux du soin d'étendre leurs relations d'affaires, ont
tous la légitime ambition de rehausser leur crédit moral et de
:»e créer une notoriété aussi large que possible ; qu'à cette fin
chacun d'eux ne néglige pas, s'il est marié, de faire connaître
sa situation sociale à cet égard, en ajoutant le nom de sa femme
à son propre nom patronymique ; que ce mode de procéder, qui
vn
— 172 —
a pour résultat d'inspirer plus facilement confiance en la per-
sonne du commerçant et d'attirer à sa clientèle les amis et les
parents de sa femme, est pratiqué ostensiblement comme n'ayant
rien d*illicite, tant en France qu'à Tétranger, par la généralité
des négociants et des industriels ;
Attendu qu'il est établi par les documents de la cause que le
sieur Legler a, de la sorte et depuis 1865, pris le nom de sa femme
pour le joindre au sien ; qu'il a suivi ce système de réclame per-
mise, non seulement lorsqu'il s'agit d'actes de commerce, mais
encore pour la préparation et l'accomplissement des actes de la
vie purement civile ; qu'on le yoit,à Gouvet, figurer sur les listes
électorales sous le nom double de Legler-Pernod ; que, con-
seiller municipal et trésorier de la commune, il prend et ses con-
citoyens lui donnent ce même nom composé ; que le sieur Per-
nod fils, dans sa correspondance particulière, l'appelle lui-même
Legler-Pemod ;
Qu'il est ainsi constant, qu'il était depuis longtemps déjà, à
tous égards, en possession légitime du nom de Legler Pernod, et
que ce n'est nullement dans un but frauduleux et pour nuire à
la maison Pernod fils, qu'il a continué en France à accoler à son
nom celui de sa femme ;
Attendu qu'en utilisant ainsi un usage commercial constant,
le sieur Legler ne s'est pas écarté des limites de son droit ; qu'au
surplus^ si dans ses agissements résidaient des faits de concur-
rence déloyale, il n'appartient d'en connaître qu'à la juridiction
consulaire ; que d'autre part, la raison sociale Pernod fils diffère
suffisamment de celle Legler Pernod^ pour qu'aucune confusion ne
vienne à se produire ;
Attendu enfin que la loi du 28 juillet 1824 prévoit et ne réprime
que le fait par quiconque de s'approprier un nom appartenant ex-
clusivement à autrui; qu'il n'en est pas ainsi dans l'eiipèce, puis-
que le s^ur Legler est allié par mariage à une personne dont le
nom patronymique est réellement Pernod^ et que les usages com-
merciaux l'autorisent à joindre au sien le nom de sa femme ;
Attendu que de ce qui précède, il résulte que les différents faits
imputés au sieur Legler ne présentent aucun caractère délictueux
et sont impuissants à motiver une condamnation correction-
nelle ;
Sur la demande reconventionnelle :
Attendu que, par leurs poursuites injustes et vexatoires, les
sieurs Veil Picard ont causé au sieur Legler un préjudice dont
ils doivent réparation, et pour la fixation duquel il existe dans la
cause des éléments suffisants d'appréciation ;
PàR dt MOTIFS, le tribunal, jugeant correctionnellement et ne
'.
— 175 — <
ner d^aatant pias la confusion des produits qu'il s'agissait d'un
article d'exportation ;
Attendu que la concurrence déloyale n'est pas moins justifiée
que l'imitation frauduleuse ;
Qu'elle ne résulte point du fait d'avoir commercé sous le nom
de leurs prédécesseurs^approbation autorisée par un usage cons-
tant dès lors que le cédant le permet expressément ou le tolère,
mais de ce que profitant de la similitude de consonnance entre
L. T. Piver et Daver, les sieurs Mayaudon ont inscrit sur leurs
prodoits, et en tête de leurs prospectus : Daver-Paris, bien que
celui-ci, ni eux-mêmes n'eussent à Paris ou aux environs ni une
fabrique, ni une maison de vente ;
Attendu que les sieurs Mayaudon ne peuvent exciper de leur
bonne foi, alors qu'ils ont certainement connu, au moment de la
«ession qui leur a été consentie par Daver, que ce dernier était
1 objet de l'instance qui a abouti au jugement en date de ce
jour;
Attendu, en ce qui concerne Cohen, qu'il a conservé dans la
maison Mayaudon la situation qu'il avait dans la maison Daver,
c'est-à-dire qu'il est demeuré le représentant exclusif, l'agent
attitré sinon l'associé des frères Mayaudon ; qu'il a donc parti-
cipé sciemment à l'usage de la marque frauduleusement imitée,
aux actes de concurrence déloyale et a encouru la même res-
ponsabilité ; *
Attendu que les agissements des défendeurs ont causé à L. T.
Piver un sérieux préjudice dont réparation est due, mais dont le
tribunal ne peut d'ores et déjà déterminer l'importance ;
Attendu qu'il est juste d'indemniser, dès à présent, le deman-
deur des frais et dépenses qui ont été la conséquence de la
recherche de la fraude ;
Par css motifs. Condamne solidairement les sieurs Mayaudon
frères et Cohen à payer à L. T. Piver des dommages-intérêts à
fixer par état ;
Prononce la confiscation des marchandises revêtues de la mar-
que dont s'agit, notamment de celles saisies dans les magasins
de Worms Josse et Cie au Havre, suivant procès-verbal de Vallot
en date du 22 février 1895 ;
Dit que lesdites marchandises seront remises à L. T. Piver
qui en pourra faire tel usage qu'il lui plaira ;
Ordonne la radiation du dépôt de marque effectué au greffe
du tribunal de commerce de Bordeaux le 26 mai 1889, ainsi que
la destruction des pierres lithographiques et clichés ayant servi
a rimpression de ladite marque, des étiquettes et prospectus ;
leur fait défense à s'en servir dans l'avenir ;
Condamne les défendeurs solidairement, et ce au besoin à titre
-^j. -.7*- T.'.- -- -.s^- • -r-rr ■■ ■ •:ji?7?s»fipi^spiwB«pp(pBpi
— 176 —
de snpplément de dommages-intérêts^ à payer à L. T. Pirer la
somme de 177 francs montant des marchandises trouTées aux
mains de Worms, Josse et remboursées à ces derniers, le coût
des constats dressés à cette occasion, les frais de magasinage,
régie, transport, perçus tant par Worms et Gie que par la Com-
pagnie des Chemins de fer de TOuest ;
Autorise L. T. Pi ver à faire publier le présent jugement aux
frais des défendeurs solidairement dans trois journaux au choix
de L. T. Piver, en limitant toutefois le montant de chaque in-
sertion à la somme de 150 francs ;
Condamne les sieurs Mayaudon et Cohen, sous la même soli-
darité en tous les dépens.
Sur appel interjeté par MM. Mayaudon et Cohenja Cour
de Paris a confirmé le jugement attaqué dans les termes
suivants :
La Cour, Considérant que si les flacons, les boites, les embal-
lages et les prospectus employés par la maison Mayaudon pré-
sentent certaines dissemblances avec les flacons, les boites, les
emballages et les prospectus de la maison Piver.dissemblances
sensibles quand on rapproche l'un de Tautre les objets provenant
des deux maisons, ces dissemblances disparaissent quand on
regarde les objets isolément, et surtout après un certain inter-
Talle de temps, qui ne permet guère la comparaison ;
Considérant qu'il ressort de l'examen attentif de tous ces objets,
que la maison Daver, puis la maison Mayaudon qui lui a succédé ,
ont eu rintention non douteuse, par la disposition et la combi-
naison de leurs dessins de créer une confusion entre leurs arti-
cles et ceux de la maison Piyer ;
Adoptant au surplus les motifs des premiers juges tant en ce
qui concerne les frères Mayaudon qu'en ce qui concerne Cohen ;
Par CBS hotifs. Sans s'arrêter ni aroir égard aux demandes,
fins et conclusions des appelants, dans lesquelles ils sont décla-
rés mal fondés, et dont ils sont déboutés ;
Confirme le jugement attaqué ;
Ordonne qu'il sortira son plein et entier effet ;
Condamne les appelants à l'amende et aux dépens.
2« Chambre. — Présidence de M. Mbrsibr. — Plaidants :
M« PooiLLBT pour L. T. Piver et Cieet M»»ALLAaTet Dupont
pour Mayaudon et Cohen.
tée et fabriquée dans la région à laquelle ce nom s'appli-
9ue (2).
Lei appellations régionales de provenance de produits
vinicoles ne peuvent, aux termes de la loi du 13 avril 1892,
(l]Ct, Poaillet, Marg. fab., n» 181 et a. ; Paria, corr.,3 mars 1898,
DamoDliD, ^nn.,98. 13t.
|9) Cr. pour le chainpagne. Cas*., 12 JDJUet 18i&, J. P. 45. 2. 055 ; Ad-
pn, 19 jaiUet ltJ87, Ann., 88. 337 et Ca«s., 26 juillet 1889, ^nn., 89. 366 ;
Angen, 15 décembre 1891 et Cbbs., flaTril 1894, Ann.. 96. IGO ; Paris,
ISHovembre 1899, Ann., 96. 154.
iw w' !.■• .^ . « ^^ — : "^"^ ■ ^ ' ■ 7-T^ - T.':, ^.- ■ '• . » < • ^ >p;Ty 75».''
- 182 -
Gie, et ordonnant au défendeur de détruire immédiatement toutes
les étiquettes contrefaites ;
, Attendu que MM. Marteli et Gie pouvaient espérer que le sieur
Levé-Diéyal, ainsi averti par cet arrêt de la justice anglaise,
renoncerait à ses pratiqués de concurrence illicite ; mais qu'ils
eurent bientôt la preuve que, tout en prenant d'infinies précau-
tions, Levé-Diéval continuait à faire vendre, même en France,
ses eaux-de-vie de Gorbehem sous le couvert de Tétiquette frau-
duleuse condamnée à Londres ;
Qu'il osa même faire déposer cette étiquette Malinard frères à
deux reprises différentes : i" au greffe du Tribunal de commerce
d'Ârras, le 3 novembre 1897; 2^ au greffe du Tribunal de com-
merce de la Seine, le 18 février 1898, en indiquant son domicile
à Le vall ois-Perret ;
Que MM. Martell et Gie firent acheter une bouteille d'eau-de-
vie à ce domicile de Levallois- Perret et qu'elle fut livrée avec une
facture ainsi libellée : «• Une bouteille Malinard, 5 fr. 50. Vente
comptant » ;
Qu'enfin une saisie-contrefaçon, régulièrement pratiquée sui-
vant procès- verbal de fiaitry, huissier près le Tribunal de la Seine
ep date du 8 juillet 1899, amena la découverte, dans ce domicile
de Levallois-Perret, de 550 étiquettes contrefaites ;
Attendu que MM. Martell et Gie assignèrent alors le sieur Levé-
Diéval devant le Tribunal civil d'Arras, son véritable domicile,
par exploit de Bras, huissier à Arras, du 19 juillet 1899, pour:
Voir dire que le sieur Levé-Diéval s'est rendu coupable d'imi-
tation frauduleuse de niarque de fabrique, aux termes 'de Farti-
cle 8 de la loi de 1857; voir dire et juger qu'il s'est rendu cou-
pable d'usurpation du nom de lieu de Gognac, aux termes de
l'article 1**^ de la loi de 1824; voir dire et juger qu'il a commis
de nombreux faits de concurrence déloyale, aux termes de l'ar-
ticle 1382 du Gode civil; voir ordonner l'annulation et la rsuiia-
tion des deux dépôts faits, l'un au greffe du Tribunal de com-
merce d'Arras, le 3 novembre 1897, sous le n* 155 ; le second au
greffe du Tribunal de la Seine, le 18 février 1898, sous le
n<» 56,992, avec mention du jugement à intervenir en marge du re-
gistre de ces greffes et du registre du Gonservatoire des Arts et
Métiers ; voir ordonner la confiscation au profit des demandeurs
de toutes les étiquettes contrefaites, et notamment de toutes cel-
les, qui out été saisies par description suivant procès-verbal de
Baitry, huissier, le 8 juillet 1899, enregistré ; et, pour le préju-
dice causé, s'entendre condamner à payer aux demandeurs des
dommages-intérêts à fixer par état, et d'ores et d^à à une pro-
vision de 3.000 francs ; voir ordonner l'insertion du j ugement à
intervenir dans dix journaux au choix des demandeurs et aux
Irais de H. LeTé-Uiéral ; s'entendra condamner «n tous les dé-
peDi, 7 compris le coût de la requêle à fin de saisie et du procès-
terbal à Le val lois-Perret, soua toute» réserrea ;
Attenda que par le Jugement dont est appel, en date du
iS DOTeiiibre 1tj99, le Tribunal civil d'Ârras ne fait pas une ap-
préûation complètement juridique des droits des parties ;
Qae le tribunal coidamne bien Les étiquettes incriminées
Eooime étant l'imitation fraaduleuae de la marque de HH. Mar-
lelletCie, mais qu'il refuse de condamner le sieur LeTé-Diêval
à ancuDs dommages-intérêts provisionnels, aini^i qu'aux inser-
tions demandées ;
Qae, de plus, le justement entrepris a le tort de décider « que
h mot Cognac est an mot générique et qu'on peut par suite ad-
metlre que l'intention du défendeur a été de dësiguer ainsi le
produit qu'il offrait et non pas d'indiquer le lieu de sa fabrica-.
lion; qu'il y avait lieu en conséquence de dire non fondée l'ac-
tion de nom de lieu»;
Attendu que la Cour devra rectifier ce jugement dans aes par-
tin erronées ;
DiscussioD :
S I". — Sur l'indication de fausse provenance et l'usurpation de
wm:
Basait:
Attendu que les premiers jugea ont en le tort de dire que Leié-
Diévat n'avait employé le mot de Cognac que pour imiter la
marque de MM. Hartelt et Oie, et qu'aucune circonstance de la
cause ne démontrait qu'il avait voulu en même temps taire croire
qo'il avait an établissement à Cognac ;
Qae toutes les circonstances de fait de la cause démontrent le
contraire ;
Que les premiers juges ont certainement perdu de vue tes
circalaires de Levé-Diéval dans lesquelles, il ose annoncer au
puUic ■< qu'il venait d'acquérir la marque Halinard frères de
Cognac M ;
Qu'aucun doute n'est permis sur le sens de cette allégation
ioeiacte qui tendait bien à persuader an public que Levé-Diéval
venait d'acquérir la marque réputée de négociants en eaui-de-
tie nommés Malinard frères et établis à Cognac ;
Que ces circulaires étaient accompagnées des mentions sui-
*iDtes '. 20 médailles d'or ; 11 diplémes d'honneur ; 8 grands prix
arec l'indication de 24 autres récompenses dans des concours
divers ;
Attendu en outre que la disposition de l'étiquette :
'VYT '.yw
— 184 —
VERY OLD BRANDY
MLF
MALINARD FRÈRES
COGNAC
ne laisse place non plus, à aucun doute, et qu'elle annonce bien
« une rraiment vieille eau-de-vie des frères Malinard de Co-
gnac » ;
Qu'il est donc certain qu'à ce premier point de vue, le sieur
Levé-Diéval a usurpé le nom de lieu de Cognac où il ne possède
et n'a jamais possédé aucun établissement ;
Attendu au surplus, qu'il est tout à fait inexact de prétendre
soit en fait, soit en droit, que le mot Cognac est un terme géné-
rique pour désigner la liqueur elle-même, sans distinction entre
celle qui a été fabriquée à Cognac et celle qui a été fabriquée
ailleurs ;
Que si on a vraiment abusé du mot Cognac^ il est de principe
qu'un abus ne saurait légitimer un droit ;
Qu'il en a été de même naguère pour le mot Champagne qui
était usurpé abusivement depuis de longues années par beau-
coup de fabricants de vins mousseux de diverses régions ; et que
des arrêts de la Cour d'Angers, de la Cour de Paris et de la Cour
de cassation ont enûn fait cesser cet abus en déclarant souve-
rainement, — malgré l'usage presque invétéré et malgré le dic-
tionnaire de Littré — « que le nom de Champagne ou vin de
Champagne n'est pas tombé dans le domaine public et ne
peut s'entendre que d'un vin mousseux récolté et fabriqué en
Champagne, ancienne province de France, géographiquement
déterminée et dont les limites ne sauraient être étendues ou res-
treiùtes » ;
Attendu que la raison de décider ainsi, c'est que les vins et
eaux-de-vie, sont des produits naturels qui tirent leur valeur di-
rectement de la terre où ils sont nés ; qu*ils lui doivent leurs qua-
lités et leurs propriétés qui, ailleurs, ne seraient pas les mêmes ;
et qu'il n'est pas possible de comprendre en conséquence, com-
ment le nom de la localité ou de la région qui fournit le vin et
l'eau-de-vie de vin peut jamais tomber dans le domaine public
et servir à désigner des produits similaires fournis par une autre
région ;
Attendu que ces principes étaient déjà enseignés et appliqués
par la doctrine et la jurisprudence sous l'empire de la loi de
1824;
Mais qu'aucune difficulté ne saurait plus s'élever depuis la loi
du 13 &vril 1892, aux termes de laquelle (art. 4) les appellations
régionales de provenance des produits vinicoles ne pourront
jamais être considérées comme génériques ;
— 186 —
Dire et juger par suites que le sieur Levé-Diéval a usurpé le
nom de Cognac
i^ Soit en essayant de persuader au public qu'il était proprié-
taire de la marque de MM. Malinard frères établis à Cognac ;
2° Soit en désignant ainsi un produit récolté et fabriqué ail-
leurs que dans la région de Cognac ;
Dire et juger que le sieur Levé-Diéval a commis par tous ses
agissements et par remploi abusif de nombreuses médailles et
diplômes d'honneur, des faits de concurrence déloyale aux ter-
mes de la loi- du 30 avril 1886, et de Tarticle 1882 du Code civil ;
Condamner en conséquence le sieur Levé-Diéval — en outre
des dommages-intérêts à fixer par état— à payer aux concluants
une provision de 3.000 francs;
Ordonner Tinsertion du jugement à intervenir dans 10 jour-
naux au choix des appelants, et aux frais de M. Levé-Diéval ;
Confirmer pour le surplus les dispositions du jugement dont
est appel ;
Condamner le sieur Levé-Diéval en tous les dépens de première
instance et d'appel ;
Ordonner la restitution de l'amende consignée ;
Sous toutes réserves de fait et de droit.
Léon Lavoix, avoué. — F. Desjardins, avocat.
La Cour de Douai a statué ainsi qu'il suit :
La Cour, Attendu que Martell et Cie, négociants à Cognac,
sont propriétaires d'une marque déposée par eux en 1864 et ser-
vant à désigner leurs eaux-de-vie de Cognac ; que Levé, négo-
ciant à Corbehem, fait usage depuis quelques années pour la
vente lie ses eaux-de-vie d'une marque dont il a opéré le dépôt
au greffe du Tribunal de commerce d'Arras le 3 novembre i897
et au greffe de la Seine le 18 février 1898 ; que Martell et Cie
prétendent que la marque de Levé est une imitation frauduleuse
de la leur, et que Levé leur fait une concurrence déloyale, no-
tamment en inscrivant sur ses étiquettes le mot de Cognac ; qu'il
y a lieu d'examiner si cette double prétention est fondée;
I. — Sur limitation frauduleuse de marque : '
Adoptant les motifs du tribunal qui sont ainsi conçus :
(Voir le jugement ci-dessus).
Attendu au surplus, que la comparaison des deux étiquettes
fait ressortir entre elles une ressemblance telle que la confusion
est possible, même pour une personne suffisamment attentive ;
II. — Sur Vusurpation du nom de Cognac :
Attendu qu'en 1895, Levé a publié une circulaire annonçant
qu'il venait d'acquérir la marque Malinard frères, de Cognac, et
I
I
— 187 —
a apposé sur les bouteilles renfermant les produits de sa fabri-
cation, rétiquette incriminée portant : Very old Brandy, Mali-
nord frères Cognac ;
Attendu que le mot Cognac aune double signification, pouvant
serrir à désigner soit un lieu de provenance, soit une espèce
de produit ; que, dans la marque ci-dessus relatée, ce mot, ins-
crit au-dessus des mots Malinard frères est une désignation de
provenance et indique Cognac comme lieu d'origine de Teau-de-
vie offerte aux acheteurs ;
Attendu que la marque MaHnard frères est de pure fantaisie
qu'elle n'existe pas et n'a jamais existé dans la région de Cognac;
qae Levé a son usine à Corbehem, dans le département du Pas-
de-Calais et ne possède aucun établissement à Cognac ou aux
environs; qu'il a donc contrevenu à l'article i" de la loi du
28 jnillet 1824 qui défend d'apposer sur un objet fabriqué le nom
d'un lieu autre que celui de sa fabrication ;
Attendu que, même en admettant, avec les premiers juges, que
le mot Cognac ait été employé pour désigner non pas un nom de
lieu, mais une nature de produits, on n'en devrait pas moins
décider que Levé en a fait un usage illicite ; qu'en effet le Cognac
est une eau-de-vie spéciale dont les qualités dérivent du sol qui
l'a produit ; que si Ton a pu dire, plus ou moins exactement que
la région d'où proviennent les eaux-de-vie de Cognac s'étend
jusqu'à Bordeaux, il est certain qu'elle ne s'étend pas jusque
dans le Pas-de-Calais ; que Levé, fabriquant ses eaux-de-vie à
Corbehem, avec des alcools d'industrie coupés et aromatisés, n'a
pas le droit de leur donner le nom de Cognac ;
Attendu que les produits vinicoles étant redevables de leurs
propriétés au sol d'où ils proviennent (même lorsqu'ils nécessi-
tent l'emploi de certains produits de fabrication), ne doivent pas
être assimilés aux produits purement industriels qui peuvent
présenter les mômes qualités, quel que soit le lieu de leur fabri-
cation ; que les noms de région d'où viennent les vins et eaux-
de-vie jouissent d'une réputation exceptionnelle ne pouvant
jamais devenir générique, contrairement à ce qui a lieu pour les
produits fabriqués, tels que les savons de MarseUlCy par exemple ;
car si l'on peut faire partout les savons de Marseille, on ne peut
faire partout des vins de Champagne ou des eaux-de-vie de Co-
gnac;
Attendu, au surplus, que les articles 1 et 4 de la loi du i3 avril
1892 promulguée, le 15 juillet suivant, interdisent les fausses
désignations de provenance, à moins qu'elles n'aient un carac-
tère générique (c'est-à-dire à moins qu'elles ne servent à désigner
Qo genre de marchandise) et décident que les noms de prove-
— 188 -
nance de produits vinicoies ne pearent jamais derenir généri-
ques ;
Attendu que les eaux-de-vie de Cognac sont des eauz-de-vîe
de vin et constituent un produit vinicole protégé par conséquent
par la disposition de la loi ci-dessus relatée ;
Attendu que, quelque abus qu*il ait été fait du mot Cognac, il
n*en est pas moins certain qu'il existe des eaux-de*vie absolu-
ment spéciales à la région des Charentes et appelées Cognacs ;
que si Ton décidait que remploi de ce mot est à la disposition de
tous les fabricants d'alcool industriel, il en résulterait que Ton
pourrait produire à Tétranger et y vendre des spiritueux qui,
bénéficiant de cette désignation, porteraient au commerce fran-
çais le plus grave préjudice, contrairement à la convention inter-
nationale de Madrid devenue la loi du 13 avril 1892;
Attendu, en conséquence que Levé-Dîéval a usurpé sur ses éti-
quettes, le mot Cognac ; soit qu'il ait voulu faire croire que la
maison fictive Malinard frères était établie dans la ville de Co-
gnac, soit qu'il ait voulu présenter son eau-de-vie comme étant
du Cognac, c'est-à-dire une liqueur récoltée et fabriquée dans la
région à laquelle ce nom s'applique ;
Attendu que les demandeurs n'ont pas établi que les médailles
et diplômes dont se prévaut Levé dans sa circulaire du 14 juillet
1895, ne lui aient pa^été réellement décernés ; que ce grief doit
être écarté ; qu'au contraire Levé a eu.le tort d'imprimer sur les
bouchons de ses bouteilles de Cognac les mots : Malinard frères^
21 médailles ; qu'il est certain que Malinard frères n'ont obtenu
aucune médaille, puisqu'ils n'ont jamais existé ;
Attendu que le Tribunal d'Arras a condamné Levé a des dom-
mages-intérêts à libeller, en le dispensant de fournir une provi-
sion et en déboutant Martell et Cie de leur demande d'insertion ;
qu'il y a lieu de confirmer cette décision ;
Par ces hotips, Et adoptant, au besoin, ceux non contraires
des premiers juges ;
Réformant ;
Dit que le nom de Cognac s'appliquant à des produits vinîco-
les qui tirent du sol leurs propriétés, n'a pu légalement devenir
et n'est pas devenu générique ; que Levé-Diéval a usurpé le nom
de Cognac^ en essayant de persuader au public qu'il était pro-
priétaire de la marque Malinard frères établis à Cognac ; qu'il
aurait commis la même usurpation en désignant sous ce nom un
produit récolté et fabriqué ailleurs que dans la région de Co-
gnac ; que ces faits retenus à sa cbarge constituent une concur-
rence déloyale préjudiciable à Martell et Cie ;
Confirme pour le surplus le jugement attaqué ;
— 190 —
sion des fausses indications de provenance sur les mar^
chandises, ne dispense pas de la caution judicatum solvi les
étrangers qui l'invoquant (1).
Le cautionnement exigé par le président du tribunal^
soit dans ^ordonnance autorisant la saisie aux termes de
V Arrangement de Madrid^ soit en référé sur opposition du
saisi, ne prive pas le saisi dti droit de soulever devant le
tribunal Vexception de caution judicatum solvi, car le
cautionnement est seulement destiné à couvrir le préjudice
pouvant dériver de l'altération ou de la perte des marchan-
dises saisies ; il importe peu que le président ait employé
dans l'ordonnance le mot c caution », mais il appartient
au tribunal, dans la fixation de ^a caution judicalum solvi,
de tenir compte du cautionnement déjà exigé (2).
(Trib.civ.du Havre, 24 décembre 1896. — Blandy frères et Gie c. divers.)
MM. Blandy frères et Gie, négociants en vins à Funchal
(lie de Madère), ayant fait constater que le navire Cons-
tantin, venant d'Espagne, débarquait au Havre des fûts
contenant du vin de provenance espagnole et portant les
marques Madeira ou Madère, obtinrent, le 13 mai 1896,
une ordonnance de M. le président du Tribunal civil du
Havre les autorisant à c faire procéder à la saisie réelle
desdits fûts, et à faire parapher et saisir les livres, regis-
tres et papiers d'où pourraient résulter les preuves de la
(1) L'Arrangement de Madrid [Ann,, 92. 296), en parlant de la saisie,
dit qu'elle aara lieu « conformément à la législation intérieure de cha-
que £tat ». Pour la validité de la saisie et les conséquences qui en dé-
coulent il faut donc se reporter à la législation intérieure ; or, elle édicté
en France la caution judicatum soltn.
Pour la Convention d'Union de Paris (1883), dont TArrangeraent de
Madrid peut être considéré comme le complément, il a été jugé que la
caution judicatum solvi restait applicable (Trib. civ. Seine, 4 février
1888, Ann., 88.301 ; cf.: Gass. belge, 5 avril 1888 {Ann., 88. 312) et
S9 novembre 1888 (S. 89.4.13) ;Pouiliet, Brev, d'inu,, no9d9 bis),
(3) Cf., en matière de brevets d'invention, Pouillet,Breo. (ftnv., n* 939 ;
Allart, Brev,d^inv,, t. 8, n» 518 ; Trib. corr. Seine, 4 mai 1847, le Droit,
11 mars ; Trib. civ. Seine, 14 novembre 1860, Journ, Prop. ind.,
n'* 105 ; Trib. civ. Seine, 21 décembre 1887, Pandectes françaises^
88.2.148. Ce qui pouvait faire naître le doute en matière de brevets
d'invention, c'est que la loi de 1844 exige un cautionnement de Tétran-
ger qui veut saisir, on se demandait si ce cautionnement ne devait pas
être considéré comme suffisant (voir Texposé de la controverse par Mai>
nié, Brev, rf'ini'., 1.2, n» 2945 et s.).
de l'huissier commis, le tout moyennant la consignation
préalable d'une somme de 200 francs à titre de cautionne-
ment.
Au cours de la saisie pratiquée sous la tente de la Com-
pagnie Havraise péninsulaire, Grosos, agent principal de
la compagnie, et quelques-uns des destinataires se pour-
vurent en référé. Le président ordonna, le 15 mai 1896, la
continuation des opérations de saisie, mais < sous l'obli-
gation par Blandy frères de fournir dans les 48 heures
une caution de 3.000 fr. pour Davioud et Cie, 3.000 fr. pour
Fribourg frères, 1.000 fr. pour Fleury, 12.000 fr. pour
Tarpin et Rioult, 12.000 fr. pour Grosos et Cie, 20.000 fr.
pour Misa, 4.000 fr. pour Gonzalès » et nomma Grosos et
Cie comme séquestre des marcbandises saisies.
Une autre ordonnance, en date du 16 mai, autorisa les
demandeurs, moyennant un cautionnement de 500 fr., à
effectuer de nouvelles saisies de marchandises et de do-
cuments. On saisit, le 18 mai, à l'entrepôt Misa au Havre,
des fûts portant imprimé à fen Madeira-Miia ou Madère
M. B, et les connaissements y afférents le 17 juin à la
Compagnie Havraise péninsulaire, notamment les con-
naissements du Constantin.
La saisie portail, au total, sur 655 fûla, contenant 58.171
litres et provenant de 31 expéditeurs différents, tous Es-
pagnols.
Blandy frères et Cie assignèrent chacun des expéditeurs,
solidairement avec les destinataires de la marchandise,
pour; * voir dire et juger que les défendeurs ont, à tort et
sans droit, apposé, sur les marchandises saisies, des in-
dications de nature k attribuer faussement à ces marchan-
dises la provenance de i'ile de Madère, alors qu'elles ne
sortent pas de ladite Ile ; qu'ils ont ainsi contrevenu à la
loi du 13 avril 1892 et à l'article 49 de la loi du 23 juin 1857,
âlaloidu28jmllet1824elà l'article 433 du Code pénal; se
voir faire défense, en conséquence.d'employer, à l'avenir,
lesdites indications ; ordonner la conSscation, au proCt
des demandeurs, des marchandises saisies ; se voir con-
damner à payer des dommages-intérêts à fixer par état.
- 192 —
voir ordonner la publication du jugement à intervenir dans
30 journaux de France ou de Tétranger, au choix des de-
mandeurs et aux frais des défendeurs, voir ordonner la
restitution aux demandeurs des sommes versées à titre de
garantie ; dire que les cautions fournies en exécution de
l'ordonnance de référé du 15 mai 1896 seront déchargées. »
Un des expéditeurs fut l'objet de deux instances dis-
tinctes.
Intervinrent dans ces instances, pour prendre les mê-
mes conclusions que les demandeurs, 47 négociants en
vins et viticulteurs de Tile de Madère, avec le comité de
vigilance nommé par décret royal portugais du 13 juillet
1895 dans le but de surveiller la fabrication et la vente
des vins de Madère.
Les destinataires français soulevèrent tout d'abord Tex-
ception de cautio judicatum solvi, sur laquelle il a été sta-
tué par jugement du 24 décembre 1896 :
Lk Tribunal, Sar rexception de caution judicatum iolvi :
Attendu que l'article 1*' du traité de commerce et de navigation
conclu le 9 mars 1853, entre la France et le Portugal et promul-
gué le 24 janvier 1854, dispose : « que les sujets et citoyens des
deux Etats auront un libre et facile accès auprès des tribunaux
de justice pour la poursuite et la défense de leurs droits » ;
Attendu qu'une jurisprudence constante, quoique discutable,
ayant décidé qu'un semblable avantage emportait dispense de
Tobligation de fou'rnir la caution judicatum solvi, Blandy frères
et Gle s'en emparent pour prétendre que dès lors en leur qualité
de négociants portugais,ils ne sont pas tenus de Tobligation spé-
ciale imposée par llirticle 46 du Gode civil aux étrangers ;
Attendu que Diez Herjtnanos et divers soutiennent au contraire :
1® que la Société Blandy frères est de nationalité anglaise et non
portugaise, et est par suite mal venue à se prévaloir du traité
de 1853 ; 2^ que dans tous les cas, en admettant môme que cette
société soit de nationalité portugaise, c'est à tort que Blandy
frères et Gie invoquent Tarticle l^*' du traité de* 4853, ce traité,
disent les défendeurs, ayant été dénoncé et abrogé en 1892.
Sur le premier point: <( Nationalité de la Société Blandy
frères »:
Attendu qu'il esfr certain que la nationalité d'une société peut
être différente de celle des associés ; que la Société Blandy frères
peut donc bien être de nationalité portugaise quoique les frères
Blandy et leurs co-associés soient de nationalité anglaise ;
recoDDBltre qo'uoe société qni possède tout à la f^is dans nn
pays son siège social et le siège principal de son exploitation
n^ssairement la nalionatité de ce pays;
Attenda que la Sociâté Blandy frères et Cie a son siège social
i Fanchai ; qu'elle a pour objet le négoce des vins de Madère ;
qne l'Ile de Madère est donc aussi le siège principal de son
exploitation ; que conséqaemment elle est de nationalité porto-
eais«;
Ittendn qu'il importe peu qu'il existe aussi à Londres, ainsi
qo'anx Iles Canaries, une société Bland; frères plus ou moins
considérable ; qu'il serait faui, & ud double point de vue, d'en
coQcIure que la société Blandy frères de Punchal ne serait
aatre qu'âne succursale de la Société Blandy frères de Londres
et devrait avoir forcément la même nationalité qu'elle ;
Attenda tout d'abord que ta création d'une Société Blandy
trères à Puncbal, par acte spécial et avec une autre destination
particulière, parait an contraire exclusive de tonte assimilation
et confusion avec la Société Blandy frères de Londres ;
Attendu qu'en second lieu, il n'appartient pas & une société
de se réserver ainsi à son gré telle ou telle nationalité, et de
s'attribuer par là une sorte de privilège, au préjudice des natio-
naux d'un autre pays, si bien que, lors même que la Société
Blandy frères de Funchal aurait dû être, dans la pensée de ses
associés, nne société anglaise, elle devrait néanmoins être répu'
téede nationalité portugaise par cela seul qu'elle a dans l'Ile
de Madère son siège social et le siège principal de son exploita-
Sar le deuxième point : « Abrogation de la clause 2 iAre et facile
icc^ conteuae dans l'article I" du traité de commerce et de
DavigatioQ du S mars 1853 » :
Attenda que la clause de libre et facile accès insérée dans
l'article l^da traité de 1833, n'a pas été reproduite dans les
traités subséquents de iS6S et de 1S8I ; que pourtant les tri-
bunaux français ont tonjouri, jusqu'en 1891 au moins, déclaré
que, le traité de J8S3 n'ayant jamais été abrogé dans son ensem-
ble, il avait continué de subsister dans celles de ses dispositions
qni n'avaient pas été modifiées par les conventions postérieures ;
qae notamment la clause de libre et facile accès avait été, malgré
h silence des traités de 1866 et de ISSt , considérée comme main-
l«aae pour ainsi dire, par tacite reconduction ;
1^
- 197 —
Varticle 59, § %du Code de procédure civile, qui prévoit
que le demandeur peut y s'il y a plusieurs défendeurs^ les as-
signer tous au domicile de l'un d'eux^doit recevoir son appli-
cation non seulement entre Français^ mais encore lorsqu'un
ou plusieurs défendeurs sont étrangers ; c'est donc à bon
droitque des Portugais assignentdevantun tribunal français
des négociants espagnols en même temps que des négociants
français domiciliés dans le ressort de ce tribunaly lorsqu'il
est constant que les négociants français étaient des défen-
deurs sérieux et n'avaient pas été introduits dans l'instance
pour distraire les étrangers de leurs juges naturels (1).
Les mêmes règles s'appliquent sous l'empire de la Con-
vention de Paris de 1883 et de F Arrangement de Madrid de
1891 qui en est le complément (Résolu par la Cour de
Rouen) (2).
(C. de Rouen, 34 novembre 1897 et G. de cass. req., 26 décembre
1899. — Blandy frères et Cie c. divers.)
Dans les instances rapportées à l'article précédent, les
expéditeurs espagnols soulevaient l'exception d'incompé-
tence à raison de leur nationalité, un seul avait transigé.
de police et de sûreté obligent et protègent, sans distinction de natio-
nalité, tons ceox qni habitent le territoire français (cf. Alger, 6 jain
1870, D. 70.2.214 ; Nancy, 9 janvier 1886, D. 87.2.31 ; Grenoble, 26 oc-
tobre 1897, D. 98.2.456 et doctrine unanime). Il en a été fait particu-
lièrement application en matière de brevets d'invention (Trib. civ. Seine,
26 juillet 1879, Ann., 79.364 ; Trib. civ. Seine, 26 décembre 1874, Ann,,
76.85; Poaillet, Brev, d'inv.f n^ 882) ; en matière de marques (Paris,
lor août 1893, ilnn., 94.301; Poaillet, Marq.fab., n« 245). La Gourde
ricatistr tfavait pas eu, jnsqu^ici, à se prononcer sur cette question ;
elle ne l'a pas encore fait cette fois, la décision attaquée se trouvant
suffisamment justifiée par d*autres motib, mais M. le conseiller rap
porteur (voir son rapport, p. 203), concluait formellement dans le sens
de la jurisprudence et de la doctrine et fidsait observer qu'il y avait eu
délit en France car le délit ne faisait que commencer quand on impri-
mait la Causse indication de provenance en Espagne et se continuait
jusqu'à ce que les fûts eussent été transportés, importés et vendus.
(i> a. Gaas., 14 mars 1883, D. 83.1.B77 ; Paris, 20 mars 1879, S.
80.i.49 ; Trib. dv. Seine, 26 mars 1887, Gaz. Pal., 87.1.480 ; Vincent
et Penaud, Dictionnaire du droit international privé, v^ Compétence
en matière civile, n«27 et, au texte, les observations de M. le conseil-
ler rapporteur, Georges Lemaire.
(2) L'article 3 du Protocole de clôture de la Convention d'Union ne
peut laisser place à aucun doute, il dit que la convention ne porte au-
eone atteinte à la législation de chacun des Etats contractants en ce qui
oofioerae la procédure suivie devant les tribunaux et la compétence de
tribunaux.
■'ils sont tous Français ;
Que dès l'instant où un tribanal est compétent an regard d«
l'an d'eax. il l'est à l'égard de tous ;
Qti*QBfl seule condition est requise; qu'il faut et il suRIt qae
tous les défendeurs soient tenus et obligés par une même cause ;
qfl'eu an mot la demande soit unie envers tous ;
Attendn qa'il n'est pas douteux que les négociants françaii
lont appelés en la canse par Blandy frères et Cie au même titre
que les négociants étrangers et en vertu de faits identiques ;
Qu'à ce premier point de vue donc, le tribunal du Havre a été
compétemment saisi ;
Altendn qu'il existe un second motif non moins sérieux, tiré
de la nature même de l'action intentée par Blandy frères et Cie,
poar justi&er la compétence du tribunal ;
Attendu que la demande de Blandy frères et Cie contre les
différents défendeurs tend à la réparation d'un dommage qui
leur a été causé par un qiiasi-délit commis en France ;
Attendu qu'il a été constamment ju^é que l'étranger qui a à
répondre d'une semblable demande vis-à-vis d'un autre étran-
EW est justiciable des tribunaux français ;
Que par conséquent, même en dehors et abstraction faite de
U règle de l'article 59, g S, du Code de procédure civile, le tribu-
nal serait encore compétent ;
Qu'enfin et surabondamment, il serait vraiment étrange que
la saisie eût pu être opérée au Bavre, suivant les formes de la
loi française et que la validité de cette saisie dOt être appréciée
par les tribunaux espagnols ;
Attendu que dès l'instant où il est reconnu que le tribunal est
compétent, il n'y a pas lien de s'arrêter aux conclusions de
Blandy frères et Cie tendant k la mainlevée du cautionnement
prescrit par l'ordonnance de référé du 15 mai 1S90 ; ,
Pli CBS MOTIFS, Dit que le tribunal a été compétemment saisi ;
renvoie au mois ponr statuer au fond ; condamne les défendeurs
de nationalité étrangère aux dépens de l'incident.
Les défendeurs espagnols ayant Inteijelé appel, la i"
chambre de la Cour de Rouen, aous la présidence de M.le
premier président Bercbon, après plaidoiries des mêmes
avocats qu'en première instance et conformément aux
coBclusions de M. l'avocat général GQiRAi.,a statué, par un
seul el même arrêt en date du S4 novembre 1897 :
- 200 —
Lu Cour, Attendu que tes 2i instances dont UGoarest ac-
lellement saisie tendent au même but ; qu'elles soDlâveiit une
iule et même question qui n'est pas susceptible de recevoir une
dation diiïérente poirrles ans et pourles autres; qu'elles se pré-
intent toutes dans des conditions âe fait absolument tdentiqaes ;
l'elles sont ainsi étroitement unies par an lien de dépendance
; de subordination ;
Attendu que si la connezité suppose qu'au moins l'une des
irtiea a Qgnré dans les différentes instances dont la jonction
Dit être prononcée, la présence de toutes d&ns les unes et dans
m autres n'est pas absolument nécessaire ; que, d'ailleurs, la loi
'ajout pas défini la connexité a laissé par cela même aux jugea
1 souveraine appréciation des circonstances qui la constituent ;
Que, par suite et bien qu'aucune demande n'ait été formée
uant & ce, il y a lieu de prononcer d'office la jonction dans un
itérât supérieur d'une bonne administration de la justice, pour
tre statué sur le tout par an seul et même arrêt ;
Au fond :
Attendu que les premiers juges ont justement repoussé le dé-
inatoire d'incompétence par ce double motif, d'une part qull
agit de contestations entre étrangers ayant pour objet la répa-
ition d'un qnasi-délit et d'autre part, qne le demandeur qui a
,it assigner des étrangers et des Français bien qu'étranger lui-
lAme, était bien fondé, en vertu de l'article 59, § 3, du Code de
rocédnre civile, à les assigner tous indistinctement devant le
ibunal du domicile de l'un d'eux ;
Attendu, en effet, sur le premier point que, d'après le libellé
iflme de l'assignation, Blandy et Cie, négociants établis & Fud-
lal (Hadêre), se plaignent de ce que des négociants espagnols
at importé an Havre, à la destination de négociants français
Dmiciliés dans cette ville, des fûts de vin portant le nom et
étiquette de Uadère, alors que ces produits vinicoles ont une
rovenance étrangère à l'Ile de Madère ; qu'il est même apéciBé
ans le délatif de cet exploit que ces agissements commerciaax
)BStituent des faits de fraude et de concurrence déloyale prévus
t réprimés par la loi des 2S juillet et 4 août 182(, par celle des
:3 et 77 juin 1857 et par l'article 423 du Code pénal ;
Qu'il est certain, en droit, que les tribunaux ft^nçais sont
OOtpétents pour statuer sur une instance engagée entre étran-
ers, qui a pour but la réparation d'un délit ou d'un quasi-dé-
t commis en France, parce qu'aux termes de l'article 3 du Code
iril les lois de police et de sûreté obligent et protègent saaa
îstinction de nationalité tous ceux qui habitent le territoire
'ançais et qu'incontestablement les lois de 1824 et de 1857 sur
— 202 —
fie pleinement Tapplication de l'article 50, § 2, du Gode de pro -
cédure cirile
Attendu, dans ces conditions, qu'il est surabondant de recher-
cher si la juridiction française serait, en outre, compétente, soit
en vertu de la Convention de Madrid, soit à raison de la validité
de la saisie ;
Qu'il est, d'ailleurs, hors de toute contestation que l'article 3
du protocole de la Convention de 1882, dont celle de Madrid
n'est que le développement, ne contredit aucun des principes ci-
dessus exposés en ce qui concerne la compétence ;
Attendu que les appelants qui succombent doivent supporter les
dépens ;
Par ces motifs, Et ceux des premiers juges non contraires ;
Joint les 24 instances vu leur connexité et, faisant droit à
l'appel par un seul et même arrêt ; met les appellations à néant
et confirme les jugements attaqués qui sortiront leur plein et
entier effet ; condamne les appelants aux amendes et aux dépens.
M. Misa s*6st pourvu devant la Cour de cassation contre
Tarrét de la Cour de Rouen et a formulé les moyens sui-
vants :
10 Violation par fausse application de l'article 59, § 2, du Code
de procédure civile et de l'article 14 du Gode civil en ce que,
s'agissant d'un débat entre étrangers, l'arrêt attaqué a repoussé
l'exception d'incompétence tirée de l'extranéité en se fondant sur
ce que le demandeur étranger avait assigné devant le tribunal
français à la fois des étrangers et des Français, alors que l'arti-
cle 50, § 2, invoqué par l'arrêt attaqué ne s'applique pas au cas
d'incompétence des tribunaux français à l'égard des étrangers,
lesquels ne peuvent être attirés devant ces tribunaux malgré eux,
en y assignant en même temps des Français ;
2® Violation et fausse application de l'article 3 du Code civil,
des lois des 28 juillet 1824 et 23 juin 1857 et de l'article 423 du
Gode pénal en ce que l'arrêt attaqué a repoussé en outre l'ex-
ception d'incompétence et a déclaré les tribunaux français com-
pétents, bien que le débat s'agite entre étrangers ne résidant ni
l'un ni l'autre en France, à propos d'une action en dommages*
intérêts pour concurrence déloyale intentée par des négociants
en vins portugais de Madère contre des négociants espagnols im-
portateurs en France de fûts de vins prétendument qualifiés et
marqués Madère^ par le motif qu'il s'agirait de la répression d'un
délit ou quasi-délit commis en France, alors que d'une part l'ar-
ticle 3 du Code civil n'est relatif d'après son texte même qu'aux
étrangers résidant en France et qu'au surplus, il est inapplicable
— 204 —
ragraphe de Tarticle 59 vient se heurter, au même titre que celle
deFarticle 181, à une incompétence absolue, ayant tous les ca-
ractères de rincompétence ratione materiaey que les tribunaux
devraient même déclarer d'ofOce, qu'il n'est pas en tous cas au
pouvoir du demandeur d'éluder par un artifice de procédure et
qui ne permet pas au tribunal français de retenir, malgré lui, le
défendeur étranger.
« Le pourvoi prévoit qu'on lui objectera un arrêt de la cham-
bre civile du 14 mars 1883 (D. P. 83. 1. 378) portant que la dis-
position de Tarticle 59, § 2, est générale et doit recevoir son ap-
plication non seulement entre Français, mais encore lorsqu'un
ou plusieurs défendeurs sont étrangers.
« Mais cet arrêt doit être entendu secundum subjectam mate^
riam. n
« Il s'agissait non d'un litige entre étrangers introduit par un
étranger, mais, ce qui est tout différeprt,^ d'une demande formée
par un Français (ou par un étranger autorisé à établir son domi-
cile en France, et jouissant des mêmes droits qu'un Français,
art. 13, G. civ.) contre des défendeurs dont Tun était Français
et l'autre étranger ; en sorte que la demande était en soi et en
principe de la compétence des tribunaux français, même à Végard
du défendeur étranger par application de l'article 14, et que la
seule question qui se posait était celle de savoir si étant donné
que le demandeur français avait en fait énoncé conventionnelle-
ment, à Tégard du défendeur étranger, au bénéfice de l'article 14,
il pouvait invoquer l'article 59, § 2. L'incompétence des tribu-
naux français pour connaître des contestations entre étranger
(demandeur et défendeur) se trouvait ainsi hors de cause et la
chambre civile a simplement proclamé le droit absolu du Fran-
çais (ou de l'étranger assimilé, art. 13) d'assigner en vertu de
l'article 59, § 2, les étrangers devant les tribunaux français con-
ointement avec des défendeurs français, alors même qu'il aurait
renoncé conventionnellement au bénéfice de l'article 14, la re-
nonciation à cet article n'emportant pas renonciation au droit
conféré p»r l'article 59, § 2. Gela n'a donc rien à voir avec la
questijn que soulève le pourvoi qui est de savoir si la règle ex-
ceptionnelle de l'article 59, § 2, de même que celle de l'arti-
cle 181 s'applique en cas d'incompétence absolue tirée de la na-
tionalité des parties. Ge qui aété jugé pour l'article 181 s'impose
pour l'article 59, § 2.
« Le premier moyen du pourvoi est donc justifié.
<c II importe peu que la mise en cause des codéfendeurs tian-
çais (consignataires et destinataires) soit ou non sérieuse ; car
il s'agit d'une incompétence absolue.
u Enfin la convention diplomatique n'attribue pas elle-même
Ltige né de l& saisie.
« Observations : —Toute l'argumentation da mémoiro repose
sur cette idée que rincompétence des tribanaui français pour
statuer sur les différends entre étrangers serait une incompi-
tence absolue, aussi absolue qu'une iBcompétence ratiattt ma-
taix. (Test une erreur.
■ Si l'incompitence était absolue, les tribunaux Trançais oe
poorraient jamais statuer même du consentement de l'étranger
défendeur. Or il est admis que l'étranger peut couvrir l'incom-
pétence par une convention formelle ou en ne l'invoquant pas,
dit H. Garsonnet, op. cit., i" édit., t. I, § 141, p. 845 et suiT.,
!• édit., t. 2, g 401, p. 23 ; Jur. gén., Svpplémtnl, *" Droits ci-
iite,n"l81; Beq.,1 janv. 18S7, D. P. B7.1 .142 ; Req., S mars
1S79, au rapport de H. Féraud-Giraud, D. P. 80.1.9. «Attendu,
dit cet arrât, que si les tribunaux français ne sont pas obligés de
juger les contestations civiles entre étrangers, en matière per-
sonnelle et mobilière, lia peuvent rester saisis lorsqu'aucune des
parties ne conteste lenr compétence ; que, quel que soit le ca-
ractère de l'exception d'eitranéité, elle ne constitue pas dans ce
cas une incompétence absolue et d'ordre public, puisqu'elle peut
être couverte par le silence persévérant des parties et que le
droit qu'ont lea tribunaux de se dessaisir n'est point pour eux
une obligation, mais une simple faculté ; qae dès lors, les étran-
gers pouvant ne pas se prévaloir de cette exception, peuvent
aussi j renoncer formellement, et dans ce ca», ils ne sont pas
recoTables à revenir sur cette renonciation. » Dans l'espèce de
cet arrêt on n'avait excipé de l'incompétence des tribunaux fran-
çais qu'en appel.
« Ainsi l'incompétence des tribnnaux français pour statuer sur
les différends entre étrangers n'est pas absolue^ comme te pré-
tend le pourvoi. Cette prétendue incompétence absolue était la
base du moyen ; cette base fïiit défaut.
•• Dans l'aSaire actuelle, noua voyons un étranger assigner
devant on tribunal frangais, & raison d'un même fait (l'apposi-
tion d'une fonsse marque de pro venan ce ),d es défendeurs français
eoosignataires, destinataires] et des défendeurs étraufiers (les
upéditenrs).
■ Les défendeurs français ont été régulièrement assignés de-
vant le tribunal français de leur domicile, le Havre : c'est un
point certain, incontesté.
« Pent-on assigner en même temps devant ce tribunal du Havre
les défendeurs étrangers, les expéditeurs, en vertu de l'article S9)
S S, du Code de procédure civile ainsi conçu t " Art. 59. — En
matière personnelle le défendeur sera assigné devant le tribunal
"••ÎB*«»ir
F y
— 206 —
de son domicile. » § 2. « S'il y a plusieurs défendeurs derant le
tribunal du domicile de Tun d'eux, an choix du demandeur. »
« Cet article est-il applicable à notre espèce ?
« Oui, d'après la doctrine et la jurisprudence. La doctrine est
résumée par MM. Vincent et Penaud, Dictionnaire de droit inter-
national privé, y* Compétence en matière civile^ n<> 27. « Il est ad-
mis, disent-ils, que les dispositions de l'article 59, § 2, du Code
de procédure civile sont générales et doivent recevoir applica-
tion non seulement entre Français, mais encore lorsqu'un ou
plusieurs défendeurs sont étrangers. » Ils citent des auteurs que
nous avons vérifiés ; nous nous dispensons de les citer, plusieurs
ne font qu'indiquer la question. Ils citent des arrêts de cours
d'appel, un arrêt de cassation du 2 février 1832 (Jur. gén.^ r*
Campét, civ, des trib, d'arrond., n* 80), qui ne décide la ques-
tion qu'implicitement, enfin l'arrêt du 14 mars 1883 (D. P. 83.
1.377), dont le mémoire a bien compris l'importance et dont il
a essayé d'écarter Tapplicatiion. Le mémoire oppose un arrêt an-
térieur de cassation, du 15 Janvier 1878, au rapport de M. Gou*
jet, D. P. 78.1.170. Mais précisément dans cette affaire il s'agit
de plusieurs actions distinctes, et notamment d'une action en
sous-garantie contre un étranger. C'est dans ces conditions que
rarrêtde 1878 a dit:
Que la disposition de l'article 181, portant que ceux qui sont as-
signés en garantie sont tenus de procéder devant le tribunal où In
demande originaire est pendante^ déroge à la règle de compétence
établie par le premier paragraphe de l'article 59 du même Code ;
mats qu'elle n'autorise pas un tribunal à retenir, sous prétexte quUl
s'agit d^une action en garantie^ une contestation dont la connais-
sance ne lui appartient pae, à cause de la nature du litige ou de
la nationalité des parties,
La chambre civile, qui avait rendu cet arrêt en 1878 et re*
poussé l'application de l'article 181 en se fondant sur la plura-
lité des actions, a, en 1883, déclaré l'article 59, § 2, applicable
parce qu'il n'y avait qu'une seule et même action intentée contre
plusieurs défendeurs.
(c Et cette action unique^ il importe qu'elle ne soit pas expo-
sée à donner lieu à des décisions contradictoires devant des ju-
ridictions différentes, et spécialement devant des tribunaux ap-
partenant à diverses nationalités.
« Il n'est pas douteux, dans notre espèce, qu'il s'agit réelle-
ment d'une action unique, que les défendeurs espagnols comme
^es défendeurs français sont poursuivis pour la même cause, à
raison de faits identiques, ou plutôt d'un seul et même fait, de la
fausse marque de provenance du vin.
t< Les destinataires ou consignataires français sont des défen-
I, poursuivre devant les tribunaux français et contre
ranger la réparation dn dommage qu'il a aubi par
élil ou qaaai-dëtit, c!est qu'il rëside en France ou y
biens ; c'est, disent UU. Aubry et Rau, u que le délit
lëlit commis en France l'ait été contre sa personne on
ens qu'il possède » (t. S, § 748 bis, p. 146, passage
T le fait dommageable dont Bland; frères poursni-
ration u'à'pas été commis en France contre learper-
itre des biens qu'ils n'y possèdent pas.
e branche. — La deuxième branche est tirée de ce
ou quasi-délit poursuivi par Blandy frères contre
été commis en France.
it dommageable, objet de la poursuite, consiste dans
le la marque Madère ; elle a eu lieu en Espagne, et
Il pour but d'empâcher l'introduction en France des
la fausse indication. Le fait délictueux ayant été
n Espagne, où Misa l'expéditeur a son domicile, ne
poursuivi qu'en Espagne.
irétend que les tribunaux français sont compétents
lélit commis hors de France, c'est-à-dire l'apposition
marque d'origine, l'étranger a participé au délit de
ite sur le sol français, s'il a introduit en France la
: vendue ou destinée à être vendue sur le sol français,
1 fausse marque ;
loire répond que l'action des frères Blandy est
fondée sur l'apposition de la fausse marque et non
ction en France des fûts qui la portent, ni sur la par-
directe qui en résulterait à des faits de vente ou de
e de ces fûts, Gela est tellement vrai que la saisie
1 débarquement même, avant la remise anx destina-
lément, ainsi que le disent les frères Blandy dans
;, pour empêcher l'introduction en France desdits
onséquent avant toute mise en vente. Ce n'est pas,^,
r la vente ou la mise en vente en France de vins
inalillés Madère, mais exclusivement sur l'apposition
tte indication d'origine et sur la concurrence déloyale
Ait, que l'action en dommages-intérêts des sieurs
) était fondée. Les tribunaux français étaient incom*
en connaître.
IONS. — Première branche. — Le mémoire prétend
naux français ne sont pas compétents pour statuer
ndes de dommages-intérêts formées par des étran-
les étrangers à raison de délits ou de quasi-délits
France. Du moins la Cour de cassation n'a pas
iccasion de statuer sur la questiou dans les termes
— 208 —
Code civil, poursuivre devant les tribunaux français et contre
un autre étranger la réparation du dommage qu'il a subi par
suite d'un délit ou quasi-délit, c'est qu'il réside en France ou y
possède des biens ; c'est, disent MM. Aubry et Rau, a que le délit
ou le quasi-délit commis en France l'ait été contre sa personne ou
contre les biens qu'il possède » (t. 8, § 748 bis, p. 146, passage
déjà cité). Or le fait dommageable dont Blandy frères poursui-
vent la réparation n'àpas été commis en France contre leur per-
sonne ni contre des biens qu'ils n'y possèdent pas.
« Deuxième branche, — La deuxième branche est tirée de ce
que le délit ou quasi-délit poursuivi par Blandy frères contre
Misa n'a pas été commis en France.
« Car le fait dommageable, objet de la poursuite, consiste dans
l'apposition de la marque Madère ; elle a eu lieu en Espagne, et
la saisie a eu pour but d'empêcher l'introduction en France des
fdts portant la fausse indication. Le fait délictueux ayant été
consommé en Espagne, où Misa l'expéditeur a son domicile, ne
pouvait être poursuivi qu'en Espagne.
u L'arrôt prétend que les tribunaux français sont compétents
si, outre le délit commis hors de France, c'est-à-dire l'apposition
de la fausse marque d'origine, l'étranger a participé au délit de
mise en vente sur le sol français, s'il a introduit en France la
marchandise vendue ou destinée à être vendue sur le sol français,
revêtue de la fausse marque ;
« Le mémoire répond que l'action des frères Blandy est
uniquement fondée sur l'apposition de la fausse marque et non
sur l'introduction en France des fûts qui la portent,ni sur la par-
ticipation indirecte qui en résulterait à des faits de vente ou de
mise en vente de ces fûts. Cela est tellement vrai que la saisi
a été faite au débarquement même, avant la remise aux destiî'
taires, précisément, ainsi que le disent les frères Blandy
leur requête, pour empêcher l'introduction en France <i
fûts et par conséquent avant toute mise en vente. Ce n
d'ailleurs, sur la vente ou la mise en vente en Franr
faussement qualifiés Madère, mais exclusivement sur '
illégale de cette indication d'origine et sur laconcurr
qui en résultait, que l'action en dora m
Blandy frères était fondée. Les t**"
pétents pour en connaître.
« ÛBSBaVATIONS. — Pr^
que les tribunaux fr^
sur les demande*^
gers contre do
commis en
encore eu l
— •2m —
où elle le pose. Elle a décidé qae V^ tr.i<u:aa
compétents dans hd cas où l'acliMi d>iK ^u
□ o tribunal correclionnel en même ko.;* ou:
(Ch. crim., 15 avril 1842, Jw. gm., »• £r-^
note).
« Hais la Cour de cassation n'a pâ< o^,:^
français seraient incompétent) si l'actavL -i .
était intentée devant un Iribunal cîTi] hl » ^
an qaaai-délit. A cet é{;ard il n'v a qo^ iî b^
et la jurisprudence des Cours d'at'ptrl. Mus tx ;
lement tout le monde s'accorde i adm^Lr!
tribunaux français.
« Ils sont, disent HH. Aabr; et Ru. Or^riK ^
nelle et mobilière, compétents pour «Uiur- si
entre étraD(;ers dans les cas suivantt: t...
a ponr objet la réparation du dommu!* ^gu
M. Ta-
de M*
avocat
iolation
Kédure
int, à la
9 négo-
Is fran-
t été in-
e leurs
t régn-
inal du
océdure
T^'frTvî^'''^ '""s^ '^ " ' " 'rf' >^. •«fTTyji-'-irMr'f .^jv'"'T'T^"fr^' ■•~'^^**r
— 210 —
par MM. Aubry et Rau. « Les tribunaux français, disent ces au-
teurs, sont compétents lorsque l'action a pour objet la répara-
tion du dommage causé par un délit ou par un quasi-délit com-
mis en France contre la personne d'un étranger ou contre les
biens qu'il y possède. » Gomme il ne s'agit pas ici d'un délit
contre la personne, dit le mémoire, il faudrait quMl s'agit d'un
délit contre les biens. Or, les sieurs Blandy n'en possèdent pas
en France. Donc, les sieurs Blandy ne peuvent pas poursuivre
les défendeurs espagnols devant les tribunaux français.
« Cette interprétation étroite est inadmissible. Car on peut
être victime d'un délit sans être matériellement atteint dans sa
personne ou dans des choses mobilières ; on peut être par exem-
ple victime d'un délit de diffamation, d'un quasi-délit de con-
currence déloyale. C'est ce que la chambre criminelle a décidé
le 22 juin 1826 {Jur, gèn.^ v» Lois^ n° 451-3°), au sujet d'une dif-
famation commise contre un Anglais, qui n'habitait pas la France
mais la Belgique, lieu du délit, même décision dans un autre
arrêt de la chambre criminelle du 12 février 1885 (D.P. 85.4.432),
où on lit :
i< Sur le deuxième moyen, tiré de Vextranéité de la demoiselle
Stegmanrij partie civile : — Attendu que par la généralité de leurs
termes, les articles 3 et 63 du Code d'instruction criminelle autori^
sent faction des étrangers comme des Français en réparation du
dommage camé par un crime, par un délit ou par une contraven^
tion, »
« L'économie de la loi de 1844 sur les brevets d'invention sup-
pose et règle Faction des brevetés étrangers. L'action des négo-
ciants étrangers contre des négociants français ou étrangers est
la conséquence de la législation internationale établie par la con-
vention du 20 mars 1883 pour la protection de la propriété indus*
trielle et de la convention signée à Madrid les 14 et 15 avril 1891.
Nous lisons dans la convention du 20 mars 1883 » : Art. 9. — Tout
produit portant illicitement une marque de fabrique et de com-
merce ou un nom commercial, pourra être saisi à l'importation
de l'un des Etats de l'Union dans lesquels cette marque ou le
nom commercial ont droit à la protection légale. La saisie aura
lieu à la requête soit du ministère public, soit de la partie in-
téressée, conformément à la législation intérieure de chaque
pays. Art. 10. — Est réputé partie intéressée tout fabricant ou
commerçant engagé dans la fabrication où le commerce de ce
produit est établi dans la localité faussement indiquée comme
provenance. » La convention de Madrid de 1883, qu'il s'agit pré-
cisément d'appliquer dans notre espèce, autorise également la
partie intéressée à requérir la saisie de tout produit portant une
fausse indication de provenance. Ainsi le négociant ou le proprié-
Atienau que les siears Uianay ireres et (jie poursuivaieDi, a la
fois, pour les m6mes faits, des nët^ociants français cl des négo-
ciants espagnols ; que l'arrêt constaleque les négociants fran-
çais étaient des défendeurs sérieux et qu'ils n'avaient pas été in-
Irodaits dans l'instance pour distraira les étrangers de leurs
juges naturels ; qu'il est constant que les sieurs ttlandy ont régu-
liéremenl assigné les négociants Trançais (levant le Tribunal du
Hayre, tribunal du domicile de ces négociants ;
Attendu qu'aux termes de l'article 59 du Code de procédure
— 212 —
civile « en matière personnelle le défendeur sera assigné devant
le tribunal de son domicile » (§ 4«»*) et « s'il y a plusieurs défen-
deurs, devant le tribunal du domicile de Tun d'eux au choix du
demandeur » (§ 2) ; que cette disposition est générale et doit re-
cevoir son application non seulement entre Français, mais en-
core lorsqu'un ou plusieurs défendeurs sont étrangers ; que c'est
doue à bon droit que les sieurs Blandy frères et Gie, en intentant
la même action, fondée sur les mêmes faits, à la fois contre des
négociants français du Havre et contre le sieur Misa, négociant
espagnol, ont assigné celui-ci avec les antres défendeurs devant
le Tribunal du Havre ; que ce motif suffit pour justifier la décision
attaquée et qu'il est dès lors sans intérêt de statuer sur le second
moyen du pourvoi ;
Par CBS motifs, Rejette, etc..
Art. 4236.
Nom» de localités. — Fausses IncUeatlons de prove-
naiKse sar lem marehandlses. — Arrangremeiit de
Madrid. — AppeUatlon réi;ionale de pro'renance
de produits vinicoles. — Vin de MadÀre. — Inter-
prétation des conventions internationales. —
Bonne foi des destinataires. — Saisie* — ConOsen-
tion. —Cautionnement et caution Jndioatum solvi.
— Intérêts des sommes cautionnées.
En fait, le nom de Madère nia jamais cessé de désigner
la provenance d'un vin qui, bien que soumis à un mode de
préparation spéciale, emprunte ses qualités essentielles au
terroir et au climat qui le produit, l'exportation du vin de
File de Madère n'a jamais été interrompue malgré les ra-
vages de Voîdium et du phylloxéra, les négociants madé^
rois n'ont, à aucune époque, entendu renoncer à se préva-
loir de cette appellation commerciale et ils ont poursuivi
leurs concurrents en France dès que F Arrangement de Mor
drid de 1891 leur en a fourni les moyens ; la dénomination
Madère ou vin de Madère n*a donc pu, à aucun moment,
tomber dans le domaine public, elle est indicative non d*uH
genre et d'un type, mais bien d'un lieu de production et de
fabrication de certains vins naturels spécialement connus
sous cette qualification et fait partie, à ce titre, dupatri-
— 216 —
jurisprudence constante qu'un jui^emeot qui refuse d'accorder le
sursis sollicité par une des parties peut être considéré comme
constituant une simple mesure d'ordre tenant à l'administration
intérieure de la justice, non susceptible d'appel, ou en tous cas,
un jugement préparatoire dont l'appel ne peut être relevé qu'a-
vec celui du fond ; qu'il est évident que le jusemenl du 37 mai
dernier ne préjufie absolument rien et qu'il se borne à mettre la
""ise en état d'Stre vidée; qu'il y a lien dans ces conditions de
eter sur ce point les prétentions des défendeurs ;
■•ar ces xotiks. Dit n'y avoir lie» d'accorder le nouveau sursis
licite ;
attendu que Blandy frères et Cie sont propriétaires à Fanchal
I de Madère) d'une maison de commerce qui a pour spécialité
vente des vins produits par l'Ile de Madère même ;
attendu quo victimes depuis longtemps de nombreux actes de
ncnrrence déloyale de la part de commerçants vendant et li-
int à la consommation, sous le nom de vins de Madère, des
is ayant une. antre origine, ils ont résolu de s'adresser àlajus-
e pour y mettre fin ;
[Ju'ayant appris l'arrivée an Havre par le vapenr Constantin et
débarquement de nombreai fûts de vins do ce genre, eipé-
is par des maisons espagnoles, ils ont le 13 mai 1896 sollicité
président de ce siège une ordonnance h fin d'être autorisés à
sir ces fûts iqoe cette saisie eut lieu le là mai 1806 par H* Ca-
iau, huissier ;
attendu que Blandy frères et Cie ont ensuite assigné les divers
éressés, expéditeurs, transitaires, consignataires, destinatai-
I, devant ce tribunal en validité de la saisie et en paiement
dommages-intérêts à fixer par état ;
Utendu que la demande de Blandy Trères et Cie est basée sur
e Convention signée à Madrid en 1891, entre différentes pnis-
ices, parmi lesquelles le Portugal, la France et l'Espagne, et
imutgnée en France en 1892 par la publication an Journal
teiel;
attendu que, sur cette action de Slandy frères et Cie, les dé-
ideurs ont opposé devant ce tribunal deux exceptions, l'une
ncoropétence, l'autre de caution judieatum solvi ; qu'un juge-
int rendu par ce tribunal le 34 décembre 1896 a rejeté l'eicep-
n d'incompétence et ordonné qu'il serait plaidé au fond ; qu'un
tre jugement du même jour a ordonné qu'une somme de
) francs par chaque défendeur français serait versée à la Caisse
I dépêts et consignations & titre de caution judicalum solvi;
e les versements ordonnés ont été effectués le 3i décembre
Il ••mf*\-
- 220 —
Attendu que, dès 1824, le législateur s*est, à juste titre, préoc-
cupé de la protection des noms de lieux ;
Qu'ainsi la loi du 28 juillet 1824 a défendu aux fabricants
d'indiquer faussement une localité comme étant le lieu de fabri-
cation de leurs produits ; que les vins bénéficièrent de cette dis-
position nouvelle;
Qu'il fut reconnu que les vins devaient être considérés à ce
point de vue comme des objets fabriqués puisqu'ils étaient, pour
partie du moins, le résultat de manipulations, de préparations,
de soins, de procédés qui avaient une influence sur leur valeur
et que les noms des localités ou des régions de production
avaient droit à la protection de la loi ;
Que la jurisprudence a fait depuis lors, à maintes reprises,
Tapplication de ces principes aux dénominations des principaux
crûs de vins français ; que c'est ainsi, notamment, qu*il a été
décidé, par difTérents arrêts, que le mot « Champagne » ne pou-
vait être employé que pour désigner, à Texclusion de tout autre,
le vin mousseux spécial récolté et fabriqué dans Tancienne pro-
vince de Champagne ;
Attendu que, dès 1873, une loi en date du 26 novembre accorda
en France aux étrangers la même protection qu'aux Français,
sous la seule condition de Texistence d'une réciprocité, soit lé-
gislative, seit diplomatique, au profit des nationaux français à
rétranger ;
Qu'en 1883 une Convention internationale, signée entre autres
par les représentants de la France, de l'Angleterre, de l'Espagne,
du Portugal, établit, relativement aux brevets d'invention, au
nom commercial, une égalité complète de droits entre les res-
sortissants de chacun des Etats compris dans l'Union ;
Que l'article 9 de ladite Convention stipule que :
« Tout produit, portant illicitement une marque de fabrique
ou de commerce ou un nom commercial, pourra être saisi è
l'importation dans ceux des Etats de l'Union dans lesquels cette
marque ou ce nom commercial ont droit à la protection légale ;
Attendu qu'aux termes de l'article 10 :
« Les dispositions de l'article précédent sont applicables à tout
produit portant faussement comme indication de provenance le
nom d'une localité déterminée, lorsque cette indication sera
jointe à un nom commercial fictif, emprunté dans une intention
frauduleuse ; »
Attendu que la Convention de 1883 avait pris soin de réserver
aux Etats signataires la faculté de conclure ultérieurement entre
eux des arrangements particuliers, des unions restreintes^ pourvu
qu'il ne fût pas contrevenu à ses dispositions générales ;
Attendu qu'en 1891^ usant de cette faculté, la France, le Brésil,
■y^mfmmif'^mmmmi^mmmimmmmmmmmmm^m^mimK^immmmmmt^ffmmçmmiPwm
— 222 —
Attendu que le nom de Madère est bien une appellation régio*
nale de provenance de produits vinîcoles ;
Que ce nom est donc la propriété exclusive des viticulteurs de
l'ile de Madère et ne peut être apposé que sur les vins provenant
de cette lie ; que c'est donc avec raison que Blandy frères repro-
». chent aux défendeurs d'avoir placé le mot Madère ou Madeira sur
des fûts remplis de vins d'Espagne ;
Attendu qu'en réponse à cette argumentation, les défendeurs
objectent tout d'abord que le mot Afac^re est depuis longtemps
tombé dans le domaine public, qu'il n'est plus aujourd'hui indi-
î catif que d'un genre de vin fabriqué en France et en Espagne
i comme à Madère, et non d'un vin d'origine ;
I Attendu que cette objection est sans valeur ;
^ Attendu qu'en droit le mot Madère constituant de toute évi-
dence et par lui-même une appellation régionale de produits vi-
nicoles, ne peut plus, aux termes de l'article 4 de l'Arrangement
Y de Madrid, être considéré comme une appellation générique ;
[ Attendu qu'en fait l'insistance que mettent les défendeurs à
f' vouloir se servir du mot Uadère pour qualifier leurs vins prouve
bien que ce mot a pour les acheteurs une importance particulière
* et déterminée ; que, si les défendeurs sont si désireux de vou-
. loir continuera employer le mot Madère, c'est qu'ils savent que
I le mot Madère éveille toujours chez l'acheteur l'idée d'un vin
\ d'une provenance spéciale, c'est qu'il y a là pour eux un moyen
- commode et facile d'écouler, à l'aide de ce subterfuge, leurs vins
et d'exploiter la crédulité du public ;
Qu'il n'y a pas à se préoccuper des soi-disant usages du com-
merce et de l'habitude qu'ont pu prendre, sans protestations jus-
qu'ici, les négociants espagnols de vendre et les négociants fran-
çais d'acheter sous le nom de Madère pour le livrer au public
^ avec cette dénomination, une sorte de vin au lieu d'un vin d'ori-
gine;
Que ce seraient là, dans tous les cas, des abus» condamnés par
la loi, qui n'ont duré que trop et qu'il convient d'arrêter et de
réprimer ;
Que s'il était vrai, du reste, que le public, en achetant du vin
dénommé Madère, crût acheter seulement un genre de vin, il
devrait être indifférent aux Espagnols de le vendre sous un autre
nom ;
Attendu qu'il importe peu encore que les négociants madérois
aient attendu jusqu'à ce jour pour faire valoir leurs droits ; que
chacun est libre d'exercer le droit que la loi lui reconnaît comme
et quand bon lui semble ;
Qu'il est inexact de dire que les Champenois n'ont obtenu gain
de cause devant les tribunaux français que parce qu'ils avaient
à
I
— 224 —
raison de leur degré alcoolique élevé ; que les règles que ces deux
textes édictent n'ont aucun rapport avec ce qui est le fond du
procès actuel ;
Attendu d'ailleurs qu'inversement il serait facile de citer divers
documents qui semblent, de leur côté, établir une assimilation
entre les vins de liqueur et les vins de Champagne ; que Blandy
frères et Gie seraient donc fondés à en conclure que les vins de
liqueur et les vins de Champagne sont soumis au même traite-
ment et que, la dénomination de Vin de Champagne étant, de
Tayeu de tous, complètement sauvegardée par les articles 1*' et 4
de TArrangement de Madrid, il doit en être de même pour la
dénomination des vins de liqueur et, par suite, du vin de Madère ;
Attendu qu'en réalité tous ces documents ont une destination
spéciale ; que ni les uns ni les autres ne peuvent servir à éclairer
la solution de ce litige ;
Que c'est uniquement à la lueur des lois organiques, c'est-à-
dire de la loi du 28 juillet 1824 et des articles 1" et 4 de l'Arran-
gement de Madrid, qu'il faut examiner et trancher le débat porté
devant le tribunal ;
Que les dispositions de ces lois sont explicites ;
Qu'il faut s'y conformer, quelque rigoureuses que puissent en
être les conséquences pour le commerce de certains pays ;
Attendu que l'Arrangement de Madrid n'est autre chose qu'une
Convention synallagmatique ne comportant pas seulement des
avantages, mais aussi des charges pour les ressortissants de
chaque pays signataire ; que cette Convention constitue, comme
on l'a dit avec raison, une ligne de probité commerciale dont
seraient mal venus à se plaindre ceux qui pourraient en souffrir ;
Attendu que le jugement par défaut du 8 juillet 1898 avait dé-
cidé que les marchandises saisies seraient confisquées ;
Attendu que MM. Diez hermanoz et joints concluent subsidiai-
rement à ce que cette décision soit rapportée ;
Que, suivant eux, la confiscation est une peine ; que, dès lors,
le tribunal correctionnel est seul compétent pour la prononcer ;
Attendu que la confiscation n'a pas toujours et forcément le
caractère d'une peine ; qu'elle est aussi parfois un élément de
réparation civile ;
Qu'ainsi il est depuis longtemps admis qu'en matière de bre-
vêts d'invention et de marques de fabrique, les tribunaux civils
ont qualité pour prononcer, au profit des plaignants, la confisca-
tion des objets contrefaits ; que les tribunaux civils ne pronon-
cent pourtant pas de peines ;
Attendu que TArrangement de Madrid n'autorise pas, il est
vrai, en termes exprès, la confiscation ;
OD Citoyens de cbacan des Etats contractants jouiront, dans tous
1h autres Etats de l'Union, en ce qui coneerue le nom commer-
cial, des avantages que les lois accordent respectivement actuel-
lement ou accorderont par la suite aux nationaux ;
Qoe si les articles 1", 2 et 3 de l'Arrangement de Uadrid ne
parlent que de la saisie, ce n'est là évidemment qu'un minimum
de protection qui peut se trouver considérablement augmenté
parles lois intérieures de chaque Etat ;
Qn'en réalité l'Arrangement de Madrid a entendu mettre à la
disposi^on des étrangers les moyens de protection réservés ju>-
que-tà aux oationaux de chacun des Etats signataires ;
Attendu que la législation française a, précisément en 1S44 et
(857, organisé un ensemble de mesures destinées à protéger la
piopriélé des brevets d'invention, des marques de fabrique et des
noms de lieux ;
Qu'il n'est pas douteux qae les dispositions de l'article 19 de la
l'.'i du 23 juin 18S7 puissent être actuellement invoquées avec
profit par les étrangers, et entre autres par Bland; frères et Cie ;
Qu'il en eet de même, par suite, de l'article H qui prévoit la
confiscation, auquel renvois expressément l'article 19 ;
Que l'article 14, obJecte-^OD, est compris dans le titre III au
titre des pénalités;
Attenduqu'il résulte du paragraphe3de cet article 14 lui-même
qae la cooGscation, malgré la place qu'occupe cet article, n'en
Ml pas moins envisagée comme an élément de dommages-in-
Wréts; ,
Qae les tribunaux civils sont donc compétents pour l'ordon-
Mt; que toutefois cette confiscation demeure pour eux facul-
Utiie ;
Attendu que Blandy frères et joints avaient par leur assignation
iKkmé des dommages-intérêts ; qu'ils ont éprouvé un préjudice
incontestable ;
Que les sieurs Blandy se sont vus obligés, sur la demande des
ilêfendeurs, de déposer diverses sommes à la Caisse des dépôts
et consignations ; qu'ils n'ont touché sur ces sommes qu'un in-
térêt restreint, d'où un préjudice équivalent à la dilTérence entre
»t intérêt et l'intérêt légal à S 0/0 et que les défendeurs doivent
'fparer ;
Attendu que, de plus, les agissements des négociants espa-
SQoU ont aussi causé aux Hadêroîs un préjudice ; que le préju-
dice matériel ne peut être, en l'état, exactement évalud par le
tribuDal faute de renseignements et d'éléments A appréciation ;
— 226 —
que le tribonal ne peut actuellement qa*en consacrer le principe
en laissant à Blandy frères le soin de le libeller par état ;
Qu'il est encore une autre cause de dommage résultant de la
publicité donnée à la vente de ces Tins de Madère ; que ce dom
mage est d'ores et déjà suffisamment connu pour que le tribunal
puisse en arbitrer Timportance ; que le préjudice causé de ce
chef k Blandy et joints sera réparé par Tinsertion par extrait du
présent jugement dans un certain nombre de journaux ;
Attendu que les défendeurs devront aussi évidemment suppor
ter tous les dépens ;
Attendu que ce sont là autant de chefs de créance de Blandy e
joints contre les défendeurs ;
Que les défendeurs étant de nationalité étrangère, la confisca-
tion des marchandises est le seul moyen efficace pour Blandy el
joints d'obtenir paiement de ce qui pourra leur être dû ; que
c'est dans ces limites et à ce titre qu'il échet de prononcer ladite
confiscation ;
Attendu que, quant aux destinataires français, ils n'ont pris
aucune part effective à l'apposition du mot Madère sur les vin!
d'Espagne : que ces vins ont été saisis dès leur arrivée et ne se
sont jamais trouvés enti'e leurs mains; qu'en toute équité ces
destinataires doivent donc être mis hors de cause ;
Par ces motifs, Reçoit Diez hermanoz opposants en la forme au
jugement par défaut du 8 juillet 1898 ;
Déclare les destinataires français bien fondés dans leur oppo-
sition, les met hors de cause, condamne Blandy aux dépens de
cette mise en cause ;
Déclare Diez hermanoz mal fondé dans son opposition ;
Dit que le jugement frappé d'opposition sortira son plein e
entier effet, sous les seules réserves suivantes : |
Autorise Blandy et joints à faire insérer le présent par extrait
dans cinq journaux de France ou de l'étranger, à leur choix, sans
que le prix total des insertions puisse dépasser 300 francs ;
Maintient la confiscation, mais seulement à titre de garantie
du paiement des frais, dépens et dommages-intérêts alloués et i
allouer ;
Dit en conséquence que les marchandises saisies et confisquée!
devront être restituées à Diez hermanoz contre paiement de tou
frais et de tous dommages-intérêts ; dit cependant que, dans tou
les cas, il sera préalablement procédé à la remise des f&ts, soit
Blandy et joints si la confiscation tient effet, soit dans l'hypo
thèse contraire à Diez hermanoz lui-même, et par les soins e
sous la surveillance du séquestre à la suppression du mot Madèri
apposé sur les fûts ;
— 228 —
patrimoine commun des négociants et viticulteurs de Tile de
Madère ; qu'il appartient dès lors à la Société Blandy frères, dont
le siège social est à Madère, quelle que soit la nationalité de ses
membres, ainsi qu'aux intervenants tous habitant Tilede Madère,
soit qu'on les considère isolément ou comme faisant partie d*aii
Comité de Vigilance, d'en revendiquer l'usage exclusif, à Fencon-
tre des importateurs espagnols ;
Qu'^n droite l'Arrangement signé à Madrid le 14 avril 1891,
notamment par l'Espagne, le Portugal et la France a été sanc-
tionné par la loi française du 13 avril 1892 ; que le texte môme
de ces conventions, éclairé par les travaux préparatoires de la
conférence, par le rapport fait an Sénat et à la Chambre des
députés, révèle qu'il s'applique aux noms de localités ayant ac-
quis par la supériorité de leurs produits une notoriété et dont
l'usage illicite pourrait avoir été fait antérieurement ; que, d'au-
b tre part, l'article 4 de cet Arrangement, eu «^dictant que les tri-
^ bunaux ne pourront pas considérer comme des appellations gé-
nériques, exclues de l'Arrangement, les appellations régionales
de provenance de produits vinicoles a entendu interdire toute
discussion sur le caractère des appellations de ce genre ;
Attendu que l'usage illicite du nom de Madère appliqué à
des vins qui n'en sont pas', non plus que les diverses pratiques
abusives du commerce relevées par les appelants, ou même les
tolérances dont ils entendent se prévaloir, n'ont pu créer ua droit
légitimement acquis ;
Attendu d'autre part que les interprétations divergentes qui
ont pu se produire depuis l'Arrangement de Madrid ou même la
non-application de cet Arrangement dans certains Etats et l'ob-
jection tirée d'un défaut de réciprocité, si grave qu'elle soit, ne
sauraient prévaloir contre le texte si précis et si catégorique d'une
Convention qui fait la loi des parties et qui, après avoir reçu la
sanction du Parlement français, s'impose au respect de tous en
France et doit recevoir son exécution tant qu'elle n'aura pas été
l'objet d'une dénonciation régulière ou d'une révision du pacte
international ;
Qu'il faut en dire autant des rapports du laboratoire municî- 1
pal, des circulaires de la douane et de l'administration de la
Régie et même des lois fiscales, et notamment de la loi du 13 avril
1898 qui a réglementé le commerce des vins de liqueur ou d'imi-
tation ; que manifestement tous ces documents, destinés à pré-
venir la fraude et à assurer le recouvrement de l'impôt, n'ont
pu avoir pour résultat de modifier l'Arrangement de Madrid et
de porter atteinte aux droits des tiers ;
Qu'il importe peu que les destinataires aient connu la fausse
provenance, dès lors que la Convention internationale de 1891 a
— 230 —
sans préjudice de la différence d'intérêt entre le taux légal et le
taux du cautionnement déposé à la Caisse des consif^nations ou
en compte courant au Crédit Lyonnais au paiement de laquelle
les appelants ont été justement condamnés par le. jugement atta-
qué;
Sur les insertions :
Attendu qu'il y a lieu de les ordonner à titre de supplémeift de
dommages et intérêts à raison de la publicité que les parties ont,
de part et d'autre, donné à cet affaire par là voie de la presse ;
Sur rappel incident de Blandy frères et consorts ;
Attendu qu'il n'y a pas lieu, ainsi que l'ont décidé les premiers
juges, de prononcer la confiscation au profit des saisissants ; que
ce mode de réparation excéderait l'importance du préjudice
causé et que la saisie tenant état jusqu'à parfait payement des
sommes légitimement dues, est de nature à sauvegarder tous les
droits ;
Attendu, sur les insertions, qu'une seule insertion par extrait
du jugement et de l'arrêt parait suffisante et qu'en ce qui con-
cerne le coût de l'insertion, il y a lieu de Télever à un maximum
de 400 francs ;
Sur rappel principal de Blandy et consorts contre les destina-
taires :
Attendu que les premiers juges ont à bon droit décidé que les
destinataires devaient être déclarés indemnes de tous dommages
et intérêts ; que leur bonne foi est parfaite et qu'ils n'ont parti-
cipé par aucun fait illicite aux fausses indications de provenance
incriminées, mais qu'à tort et mal à propos ils ont été mis hors
de cause et de procès ;
Que la validité de la saisie en effet ne pouvait être prononcée
hors la présence des destinataires, seuls propriétaires de la mar-
chandise aux termes du connaissement et qui, dès lors, ont été
régulièrement introduits dans l'instance ;
Attendu en ce qui concerne les frais de cet appel en cause, quUl
serait peu équitable de les laisser à la charge des saisissants qui
ont bien procédé contradictoirement avec les destinataires et
qu'il y a lieu de les faire supporter par les expéditeurs qui les
ont en définitive occasionnés par leur fait illicite, au besoin' à
titre de supplément de dommages et intérêts ;
Attendu que Diez hermanos qui succombent sur leur appel,
doivent supporter les dépens en ce non compris les frais de l'ap-
pel incident qui doivent rester à la charge de Blandy et consorts
qui succombent en cette pt^rt ;
Par CBS motifs. Et ceux des premiers juges en tant qu'ils n'ont
rien de contraire au présent arrêt ;
La Cour, Parties ouïes en leurs conclusions, M. l'avocat gêné-
rai enienaa, âpres en avoir aeiioi
Jfflatles appels forniAs par Diei hermanos et par Blaniiy Trèrpa
et consorts et j faisant droit par un seul et même arrSt ;
Sur rappel principal de Diet kermanos et sur l'apiiel incident de
Blmtdy frères :
Sans s'arrêter, ni avoir égard à toutes fins et conclusions con-
traires des appelants dont ils sont déboutés',
Conârme le jngement attaqué dans toutes sesdispoiitioDS, sauf
en ce qui concerne les dispositions relatives k la confiscation, aux
insertions et aux dommages & fournir par état ;
Infirme ledit jugement snr les trois chefs susindiqués et sta-
tuant à nouveau ;
Sur la eonfitcation :
Dit n'y avoir lieu de la prononcer et rejeltu les conclusions de
Blandy et consorts quant & ce ;
Sur les insertions :
Autorise la publication par extraits du jugement et du présent
arrêt dans ua journal de France au choix de Blandy et consorts
et aux frais de Diez bermanos, sans que le coût de cet extrait
puisse dépasser 400 francs ;
Sur lei dammages-intiréts à fournir par état :
Condamne Diei bermanos ÎL des do m m âges- in té rats & fixer par
état, mais dit que ces dommages ne pourront comprendre que
laréparation du préjudice causé par l'introduction des marchan-
dises saisies, à l'exclusion de toutes autres introductions;
Rejette toute plus ample demande de Blandy fràres et consorts
SOT ces trois chefs de leur demande ;
Etions ces uniques modifications, ditquele jugement attaqua
sortira son plein et entier effet ;
Sur fapptl principal de Btandy frères contre les destinataires i
Conflrmele jugement attaqué en ce qu'il a déclaré les desti-
natairea indemnes ;
L'infirme en ce qu'il les a mis hors de cause et faisant ce que
les premiers juges auraient dû faire ;
Maintient Tnrpin frères et Hioult, Nicole, Ruffin, Doublet, Mu-
tel et Bocage dans l'instance et condamne Diei hermanos aux
frais de première instance et d'appel nécessités par cette mise
ea cause, au besoin à titre de supplément de dommages-inté-
rils;
Condamne Diex hermanos aux dépens d'appel, en ; compre-
nant les frais de séquestre, jusqu'à la- mainlevée de la saisie ains
que les frais de réalisation des objets saisis s'il j a lieu, mais en
ee non compris les frais de l'appel incident qui restent & la charge
de Blandy frères et consorts ;
— 232 —
Accorde distraction desdits dépens aux avoués de la cause, sur
Taffirmation de chacun d*eux d*en avoir fait Tavance ;
Ordonne la restitution des amendes consignées ;
Des arrêts semblables ont été rendus dans 20 autres
affaires.
Art. 4237.
Fausses IndleatioiM de provenance. — Arrange-
ment de Madrid. — Saisie.
Les articles i etide P Arrangement de Madrid, autori-
sant expressément la saisie des produits revêtus d*une fausse
indication de provenance et s^en référant, pour la for-
me de cette saisie, à la législation intérieure de chaque Etat^
ont étendu à tous les fabricants ou producteurs appar-
tenant aux Etats contractants le bénéfice des lois gui répri-
ment les fausses indications de nom ou de lieu d'une fa-
brique française ; la saisie peut donc avoir lieu en vertu de
Varticle 19 de la loi du 23 juin 1857 (1).
(C. de Paris, 13 mars 1899. — Gurlier c. Blandy frères et Cie.)
Pendant que s'effectuaient au Havre les saisies rappor-
tées dans les articles précédents, Blandy frères et Cie fai-
saient également procéder, à Paris, chez Curlier frères,
suivant ordonnance de M. le président du Tribunal civil
de la Seine, à la saisie de 100 fûts portant la marque à feu
Jerez Madeira sur la bonde et assignaient Curlier frères,
ainsi que Robertson brothers, de Londres, qui avaient ex-
pédié la marchandise de Cadix, en validité de la saisie et
dommages-intérêts. Mais Curlier frères, de leur côté, as-
signaient Blandy frères et Cie en référé pour entendre rap-
porter l'ordonnance de saisie comme ayant fait une fausse
application de Tarticle 19 de la loi du 23 juin 1857.
La 1'* chambre du Tribunal civil de la Seine, statuant en
état de référé, sous la présidence de M. le président Bau-
douin, a, le 17 juin 1896, rejeté la prétention de Curlier
frères en ces termes :
Lb TaiBOifAL, Attendu que Blandy frères, propriétaires de
(1) Cf. , plas haut, p. 21S„Roaen, 96 juin 1900.
!.à-«".p^.^r.TT»'";T-'r''î" * "• ; ?'^/-" ^ '.r l^'v — i "r -' "■ . "" "/>«*■: . ."'tt^ ■'^-'^r^*^ ''' *'*^^ *■-
— 234 —
. Là Cour, Adoptant les motifs da tribunal :
Considérant au surplus que les sieurs Gurlier frères sont ap~
pelants, d-un jugement rendu par le Tribunal civil de la Seine,
statuant en état de référé, qui remonte au 16 juin 1896, et qui
a autorisé une saisie-arrét sur des vins déposés dans leurs maga-
sins de Bercy ;
Considérant qa*il semble que ce soit par une tactique de procé-
dure, que Curlier frères n'aient pas chercbé à obtenir plus tôt le
jugement de leur appel ; qu*on n'a invoqué, en leur nom, aucun
moyen de nature à faire infirmer la sentence attaquée ; qu*on
s'est attaché principalement à démontrer qu'elle ne devait pas
exercer un préjudice défavorable à la solution du procès engagé
entre Blandy et Cie et divers négociants au sujet du droit de se
servir des expressions vin de Madère pour désigner du vin qui ne
proviendrait pas réellement des vignes de Tlle de Madère ;
Considérant qu'il est de règle que les ordonnances de référé ne
préjudicient pas au principal ;
Pàb CBS MOTIFS, Déclare les appelants mal fondés dans leurs
demandes, fins et conclusions ;
L,es en déboute ;
Confirme le jugement dont est appel ;
Statuant en état de référé, ordonne qu'il sortira sou plein et
entier effet ;
Condamne les appelants à l'amende et aux dépens de leur
appel, y compris ceux de référé.
Avocats : M® Glunet, pour Curlier frères ; M* Georges
Maillard, pour Blandy frères et Cie.
Art. 4238.
Brevet Gmson. — Aflûto ealrasséw. — CertUleikt
d^addlCIon. — Brevetabilité.— Coiiibiiial«on noa-
veile de moyenfli eoiinu«.—Diiréreiice« e— entleJUei.
— rVon-contrefliçon. — Obliiratioii d'exploiter. — >
Déebéa.nee.
Lorsqu'un brevet {pris pour un affût cuirassé à embrasure
minima) porte sur deux dispositifs différents : 1® combinai--
son d'un affût mobile verticalement au moyen d'un contre^
poids hydraulique et d'une cuirasse, mobile horizontale"
ment, qu'on élève, pour permettre la rotation^ au moyen
d'un levier équilibré ; 2* affût porte-cuirasse ^ mobile verti-
calement et horizontalement sur un piston-pivot ç«i s'é-
lève et s'abaisse au moyen d'un contrepoids hydraulique
ou d" un contrepoids à chaîne, le certificat d'addition qui
décrit un affût porte-cuirasse sur piston-pivot mu par un
levier équilibré, se rattachant tout à la fois au premier et
au deuxième dispositif du brevet, ne sera pas frappé de nul-
lité par la nullité d'un seul des dispositifs du brevet {Juge-
ment du 12 décembre 1894) (1).
Est brevetable ta con^inaison, dans un affût cuirassé à
embrasure minima, d'éléments qui tous étaient isolément
dans le domaine public mais non réunis (Jugement du
IS juin 1891 et arrêt conSnnaLif) (2).
Le breveté peut exiger, pour fappréciation de la contre-
façon, qu'on combine un certificat d'addition avec le dis-
positif du brevet auquel il se rattache et que Pon compara à
cette combinaison l'engin argué de contrefaçon (Jugement
du 11 juin 1897 et arrêt conflnnatiO (8).
L'engin revendiqué, consistant en un affût pivotant à
éclipse, porteur d'une coupole cuirassée dont la combinai-
son avec la contre-cuirasse assure l'abri de la tourelle, la
volée du canon se plaçant, à la position d'abri, dans un
logement à ciel ouvert pratiqué daTts la contre-cuirasse, un
piston servant de pivot à l'affût et mu d volonté au moyen
ifun levier équilibré, le recul étant neutralisé par la masse
(1) Cf. Lyon, 34 juillet 18U8. Ann., 68.343 ; UaiDli, Brev. d^imt., 1. 1,
D> 969 et ■., avec arrMt ciUa.
M. lesiibslUnt Troturd-Rlolle diuil BpirituellemeDt en rappelant uns
comparaiioii de U. Ponillat :
■ Le brevet dloTentioii c'est l'arbre, le certificat d'addition c'ett la
branche: mart l'arbre, morte la branche. Mail quelquefois l'arbre as
menrt pai tout entier et il noua lufQt, dani lu promenadea d'été, de
porter noi pas dans les foréta det environs de Paris pour non* rendre
compta que quelquefois nue partie du tronc de l'arbre «st inorre et que
cependant certaines branches sapérieures ■'ëpano Distant dans une laïu-
riaate verdure. >
Le cerliScat d'addition ne sera pas atteint de caducité par la caducité
d'nne partie du bretet, mais encore budra-t-il qu'il se rattache à la
partie valable du brevet (Paria, 7 janvier 1863, .i4nH., 63.318 ; Paris,
15 JDÎllet 1864. Ann., 64.293 ; Paris, 38 février 1867. ilnn.,it7.358j.
(S) Voir Poultlel, Brev. d^inv., n'46;Allart. t. 1, n" 34 ; Mainié.
n*433 et arrêts cités.
fS) Cf. Paris, 13 décembre 18S5, Ann., 86.105.
II est 4 remarqaer que le jugement du 15 juin 1897 n'a voulu ratta-
cher le S* certiBcat d'addition qu'an 3* dispositif du brevet tandis que
le jniement du 15 décembre UÔ4 l« rattachait an l" et an 3* diapMi-
tifa.
— 236 —
de Vappareil, ne constitue pas une contrefaçon^ Vengin^
diffèrent par sa nature et contenant des organes nouveaux
et essentiels^ qui consiste en une chambre de tir contenant
un canon sur son affût, Va/fût étant indépendant de la cui-
rasse et n'en devenant solidaire qu'au moment du tir, la
cuirasse étant eUe-même immobilisée^ à ce moment, dans
Vétreinte d'une couronne métallique qui fait corps avec la
maçonnerie, le canon rentrant complètement dans la tou-
relle, la position d'abri, le mouvement de montée et de
descente de la cuirasse étant obtenu au moyen d'un levier
excentré automoteur (Jugement du 12 juin 1897 et arrêt
conflrmatif) (1).
Ne justifie pas suffisamment des causes de son inaction,
pour être relevé de la déchéance faute d'exploitation, le
breveté dont le centre de fabrication est en Allemagne et
qui, ayant des commandes en Roumanie pour les engins
cuirassés faisant l'objet du brevet, n'a pas cru devoir orga-
niser des ateliers de construction sur le territoire français^
bien qu'il disposât des capitaux et ressources nécessaires, ni
faire fabriquer par des licenciés français (Arrêt du 18 mars
1900) (2).
(1) Le breveté faisait observer qu'on retrouvait dans l'appareil incri-
miné les 3 éléments d'une des combinaisons comprises dans le breret
et que si tel de ces éléments, le levier pour élever la coupole, était
perfectionné (levier excentré au lieu de levier équilibré) la contrefaçon
n'en subsistait pas moins, car le perfectionnement n'est pas exclusif de
contrefaçon (voir Pouillet,n<» 645 et 646, S») et qu'il importait peu qull
y. eût, en dehors de la combinaison d'éléments revendiqués, des dispo-
sitifs différents, par exemple pour la mise en place du canon puisque
le défendeur avait pris, en tous cas, au brevet une combinaison d'élé-
ments qui était nouvelle et brevetable.
L'adversaire répondait qu'il fallait examiner l'engin revendiqué, dans
l'ensemble de ses organes essentiels et qu'il ne pouvait y avoir contre-
façon, dans l'espèce, parce que l'engin incriminé présentait, dans cer-
tains de ses organes essentiels, des différences caractéristiques, notam-
ment pour la manœuvre du canon, pour la neutralisation du recul et
pour le mode élévatoire de la coupole. C'est à cette solution que s'est
rallié le jugement confirmé.
Voir, pour la jurisprudence relative à la contrefaçon de combinaison
nouvelle de moyens connus, Mainié, n« S385 et s., et particulièrement
dans le sens du jugement, le rapport de M. le conseiller Babinet à la
Cour de cassation, dans l'affaire de la Compagnie des moteurs à gaz
contre Mignon et Rouart (Cass., 22 avril 1890, moteurs Otto, S. 93.1.
412).
(2) Il est intéressant de rapporter, sur ce point, les conclusions de
If. l'avocat général Blondel, dont l'arrêt est un fidèle résumé :
c Aux termes du paragraphe 2 de l'article 32 de la loi de 1844, le
!i
— 237 —
(Trib. civ. Seine, IS décembre 1894 et 15 juin 1887; G. de Paris
15 mars 1900. — Héritiers Gruson c. Schneider et Cie.)
Het-mann6ruson(de Magdebourg) a pris, le 6 mars 1883,
UD brevet en France pour un a£fut cuirassé à embrasure
breveté est déchu des droits qae Ini confère son brevet, s'il n*a pa^
exploité son invention dans les deux années qui suivent, non pas la de-
mande, mais la délivrance du brevet, ou s'il a ensuite interrompu cette
exploitation pendant deux années consécutives. Or, M. Gruson n*a pas
exploité en France ; c'est absolument certain, et il ne fait, je crois,
aucune difficulté pour le reconnaître.
« Mais le paragraphe 2 de l'article 32 contient une exception au prin-
cipe qu'il pose : c  moins, dit-il, que le breveté ne justifie des causes
de son inaction. » Et M. Gruson soutient qu'il y a eu à son inaction des
causes dont il justifie, des causes légitimes, suffisantes pour l'expli-
quer.
c Et tout d'abord, il vous fait remarquer que les tourelles cuiras-
sées, ou les appareils cuirassés dont nous allons bientôt nous occuper
avec plus de détail, sont des appareils très coûteux» qui ne sont pas de
vente courante ni d'un débit facile. Goûteux, ils le sont, en effet ; d'a-
près un chiffre qui a été donné au cours des débats, je me suis rendu
compte que des appareite de cette nature pourraient coûter au moins
150,000 francs, peut-être plus, ce qui n'est pas à la portée de tontes les
bourses^ mais ce qui n'est pas non plus pour les effrayer toutes : dans
ces derniers temps, nous avons vu des amateurs de tableaux payer un
Raphaël on même un Millet 500,000 francs ! Il est vrai que bien des
gens, et je suis du nombre, aimeraient mieux un seul Raplûêl que deux
on même trois tourelles cuirassées.
c D'un antre côté, inutile d'insister sur ce fait que ce n'est pas un
article de débit courant, comme les cravates ou comme les chaussures
dont parlait, à Tune de vos dernières audiences, l'honorable M* Mail-
lard ; ce n'est pas surtout d'un débit courant en France. M. Gruson
TOUS fait observer, en quoi il n'a peut-être pas tort, qu'en France il n'y
avait vraiment qu'un seul acheteur possible, le gouvernement français ;
or, par Pintermédiaire de M. Armengaud aîné, l'ingénieur bien connu,
il a fait offrir ses appareils au gouvernement français ; il lui a envoyé
ses dessins et ses mémoires descriptifs ; il s'est mis à sa disposition
pour exécuter toutes les commandes qui pourraient lui être faites, et il
a renouvelé cette communication à peu près de deux ans en deux ans,
pour se rapprocher des termes de l'article 32 que je vous indiquais tout
à l'heure.
« Je dis : à peu près ; il y a en effet, dans deux circonstances tout
au moins, un petit écart ; une lettre est du 15 juin 1885, celle qui la
suit n'est que du 24 juin 1887 ; en 1893, Técart est plus faible, il est d'un
jour : 10 mars 1891, 11 mars 18^. Je n'insiste pas sur ces différences
de dates ; suivant moi, les démarches de M. Gruson ne peuvent pas
constituer une exploitation : elles seraient seulement la justification des
motifs de son inaction, et, si ces motifs sont sérieux, peu importent les
dates auxquelles il a fait la communication.
c Est-ce que M. Gruson, en adressant ces offres au gouvernement
français, se faisait beaucoup d'illusions sur le résultat qu'il pouvait ob-
tenir ? Voici, Messieurs, ce que vous disait à ce sujet son honorable
avocat :
« Le ministère de la guerre (ici je lis la sténographie) a estimé qu'il
!
— 238 -
minima et deux certificats d'addition, dont Tun en date du
3 août 1886. Les affûts cuirassés à embrasure minima sont
des coupoles mobiles abritant un canon, et ne lui lais-
n'en avait pas besoin ; que, Dieu merci, nous avions d'autres engins cui-
rassés pour nos fortifications qui étaient parfaitement suffisants et qu*il
était inutile de faire fabriquer pour la France les tourelles que propo-
sait M. Hermann Gruson. »
« Si telle était la pensée de son très honorable conseil, je ne crois pas
être téméraire en supposant que c'était aussi Topinion de M. Gruson
lui-même.
« Alors, à défaut de ce client improbable, le gouvernement français,
qu'a fait M Gruson ? A-t-il concédé des licences à des industriels fran-
çais f Ce serait un moyen d'exploiter, sinon par lui-même, au moins par .
des licenciés ; non, il n'en a pas concédé, et bien plus, il n'en a même
pas offert. Vqus trouverez, messieurs, dans le dossier de MM. Schneider
et die, plusieurs lettres dont on vous a déjà donné connaissance, éma-
nant de grands industriels métallurgiques français s'occupantde la cons-
truction d'engins de guerre, et tous répondent avec la même unanimité
que jamais, au grand jamais, M. Gruson ne leur a offert de prendre une
licence. . ., et il vous en donne la raison, c'est qu'il ne pouvait pas pro-
voquer ses concurrents à lui faire concurrence.
c Enfin, est-ce que M. Gruson a établi une usine en France ? Non, et
ici encore il vous en explique le motif : il a fabriqué,et je prends le chif-
fre dans la plaidoirie de son avocat, 90 tourelles en 18ëf7, 96 en 1888,
18 en 1889, 10 en 1890, soit au total 154 tourelles. Or, il ne pouvait pas,
vousa>t-on dit, confiera autrui une commande qui lui était faite à lai-
même intuitu personcBy et il ne pouvait pas d'avantage installer en
France nn établissement industriel.
n Outre l'inconvénient de « scinder sa Cabrication »,\\ lui était impossi-
ble, « pour un aussi petit nombre » d'appareils, de créer en France une
usine.
« Donc, impossibilité matérielle, impossibilité morale, résultant des
circonstances et de la nature même de l'invention, voilà quels sont,
d'après M. Gruson, les motifs qu'il invoque à l'appui de son inaction.
« Ces motifs sont-ils bien sérieux ? Ne sont-ils pas plus apparents qne
réels, et en allant au fond des choses, allons nous y voir une véritable
cause d'inaction ?
« Le gouvernement français, vous dit-on, était le seul acheteur fran-
çais en France. Soit ; je remarque cependant que des industriels fran-
çais ont trouvé d'autres acheteurs : sans cela le procès actuel ne serait
pas né : MM. Schneider et de ont vu venir chez eux, en France, un
antre acheteur que le gouvernement français, le gouvernement roumain,
et nous savons que les fabricants de matériel de guerre, ceux des gran-
des puissances européennes, fabriquent des engins de guerre non pas
seulement pour leur propre gouvernement, mais aussi pour des gouver-
nements étrangers ; il suffit d'ouvrir les journaux tous les jours, en ce
moment, pour en avoir la preuve.
« D'un autre côté, en admettant que M. Gruson ait obtenu une com
mande du gouvernement français, est-ce qu'il lui eût suffi de vendre en
France un certain nombre de tourelles cuirassées pour être relevé de la
déchéance édictée par la loi ? En aucune façon, et, à défaut de la dé-
chéance prononcée par le paragraphe 2 de rarticle di, il serait toml>é
. .•"r-»#r'"«t'
- 240 —
cuirassées qu^l prétend conformes, dans leurs parties es-
sentielles, au certificat d*addition du 3 août 1886.
L'usine du Creuset étant entrée en concurrence auprès
question d'au moins 400 tourelles. Voulez-vous qu'elles ne soient pas
toutes semblables à celles dont il est question au procès ? Je retiens en
tous cas les 154 tourelles fobriquéesdel888à1890. Eh bien, Messieurs,
c'est là, au premier chef, de l'exploitation, c'est une grande exploitation.
Si je me transporte par la pensée à Magdebourg-Buckau, j'entends les
marteaux, les pilons de la Grusonwerk ; toutes les machines sont en
mouvement ; les hautes cheminées de l'usine jettent des torrents de fu-
mée, et je vois une ruche humaine en pleine effervescence, déployant
une prodigieuse activité.
« Et en France ? Rien ; et l'industrie française, et les ouvriers fran-
çais, quel profit retireront-ils ? Aucun, absolument aucun. Pourquoi?
Parce qu'il n'a pas plu à M. Gruson de scinder sa fabrication et parce
qu'il a voulu éviter la dépense et l'embarras de rétablissement d'une
usine en France. Cependant, Messieurs, M. Gruson a des ressources;
n'allez pas croire qu*il ressemble à l'un de ces inventeurs, dont on par*
lait lors de la discussion de la loi de 1844, devant la Chambre des pairs,
qui mouraient littéralement de faim à côté d'une invention merveil-
leuse; non, non.
« J'ai trouvé, à ce sujet, des renseignements intéressants et inatten-
dus dans le dossier de M. Gruson sous la forme de deux comptes ren-
dus adressés par la direction de la Grusonwerk à ses actionnaires réunis
en assemblée générale. La Grusonwerk est, en effet, une puissante so-
ciété montée par actions, dont le capital social était, au moment dont
nous nous occupons, de 9 millions de marks. Or, en 1888-1889, quand
on fabrique pour le gouvernement roumain, voulez-vous. Messieurs,
sayoir ce qu'a gagné la Grusonwerk ?. . . Ce sont deux chiffres>eule-
ment.
« M. Gruson, rendant compte, à ses actionnaires, de la marche, da
développement de son usine, en vante la prospérité et il leur indique
notamment que le trafic de l'usine a été, pour le matériel de guerre
de 6,570,000 marks, et que pour l'industrie civile, elle a fabriqué jus-
qu'à concurrence de 2,397,000 marks. Et cette fabrication avait été frac-
tueuse et féconde, car les actionnaire de la Grusonwerk recevaient un
dividende de 10 0/0 ^ bienheureux actionnaires ! — formant un chiffre
de 900,000 marks, c'est-à-dire un peu moins de 1,900,000 francs : et
je laisse de côté des gratifications données aux employés et un tant pour
cent donné au conseil d'administration et au conseil de surveillance.
L'année suivante, l'exploitation, je le reconnais, est un peu moins heu-
reuse ; mais les actionnaires reçoivent encore 600,000 marks à titre de
dividende.
c Eh bien, lorsque M. Gruson nous dit qu'il ne pouvait pas élever en
France une usine parce que des usines de cette nature sont des étabUs-
sements importants et coûteux, M. Gruson se fait trop pauvre pour la
circonstance ; lorsqu'on distribue plus d'un million de bénéfices à set
actionnaires, on a le moyen de fabriquer en France lorsqu'on entend
être protégé en France.
c Donc, il ne faut pas dire que M. Gruson n'a pas pu fabriquer en
France, par suite de la nature de son invention ; mais, il faut constater
qu'il n'a pas voulu fabriquer en France, parce que c'était pour lui une
gène, une dépense. En réalité, M. Gruson, en France, n'a fait qu'un
nuant leur fabricalion, el reconnaissant que les tou-
relle!) fabriquées étaient semblables à celtes décrites
dans l'Engineering, demandèrent reconventionnellement
tîon de l'idée, parc» que l'idée, eu réalité, m[ prise dans le lands ceiQ-
man de lltamaaité.
■ Le législateur s'esl demaDdé à cette époque s'il ne dirait pas k
celoi, éiBettaol nne idée, la perfeciionoaiit, l'appropriant à une deiti-
natîoa noQTelle et la livrant à ses coDcîlojeos, *'il ne lui dirait pas
simplement : cette idée Ta devenir ans idée commune, vous allez en
faire an don forcé ou volontaire à vos coneiloyenB ; voni n'avei pas
troDvé cette idée eicIusiTement dans votre propre fonda, vous l'nvex
puisée dans les travani anlériears des générations qui sont venues avant
lona ; vona l'avez puisée dans ce fonds comman de connaissances hu-
maine*, dans celte éducation icientiflqne qu'on vous a donnée, et, par
conséqnent, vous la devez à la collectivité. . , Le législateur n'est pas allé
JQsqne-là ; il a voulu que l'inventeur tût récompensé d'avoir travaillé et
d'avoir dégagé de l'obscurité où elle était renfermés jusque-là, l'idée
qu'il a émise, el il lui a donné un privilège, un droit privatif tempo-
raire, pendant nne durée détem-.inée, pendant quinte ans.
■ Haia, s'il lui a donné ce droit privatif, ce privilège, Il a voulu que
cette id.^ na restât pas morte, que l'inventeur ne 11 conUsquàt pas à
son proSt, qu'elle proBtét â tout le pablic par l'eiploitation qu'il en fe-
rail.
< Ud a dit à ce sujel, Messieurs, que l'idée était tellement dans l'am-
biance, qu'il arrivait quelquefois que plusieurs personnes, sur plusieurs
points du territoire et â une même époque, avaient la même idée, qu'une
inveation surgissait, à la fois, de plusieurs cerveaux. Alors, le légista-
lenr, prenant en considération cette pensée, a voulu qu'il y eût vérita-
blement application de l'idée, et que, pendant les quinze années qu'on
donnait, à titre de privilège, a l'inventeur pour le récompenser des ser-
vices qu'il rendait à la société, l'idée ne fût pas mise sous le boisseau, et
qae tout au moins ses concitoyens pussent en profiter. Il faut que l'i-
dée proBte é la collectivité. Il a'j a pas. comme je le disais tout à l'iieore,
nnténtion de favoriser le travail national. Cela a exisié dans des lois
postérieurea, mais non dans l'article 32 que nous examinons en ce mo-
• S'il T 3 négligence de la part de celui auquel le gouvernement con-
cède an privi%e,H'il y a négligence de sa part k exploiter celle idée, alors
on le déclare déchu de cette propriété transitoire ; mais, s'il justifie d'une
cause à son inaction, il reste propriétaire de son brevet. Voilà, tel que
je l'ai compris tout au moins, l'esprit de la loi de 1844.
« Or, en l'espèce, U. Gruson a en l'idée. A-l-il désiré conserver la
pn^riété de son idée ? Oui. il a pris un brevet en France, il a donc fait
■a acte indiquant qu'il désirait conserver la propriété de son idée. Il
n'a pas fabriqué, dit-on ; mais jusiifle-t-il d'une cause légitime de non-
btirication ? On Tonsadil, ensa faveur, qu'il n'y avail,en France, qu'un
s«ul consommateur en tait de tourelles cuirassées : l'Etal. Il a offert
••a idée à l'Etat, et l'Etat, par scrupule que je comprends parfaitement.
D'en a pas voulu.
« Aurail-it dû, aBn de se soumettre anx termes exacts, littérsui, de
b lai, installer des fabriques en France, aân de fabriquer des tourelles
V 'ȕ .7"f^6^
— 244 —
la nullité des brevets et certificats d'addition de Gruson.
Gruson conclut alors à ce que Schneider et Cie fussent dé-
clarés contrefacteurs et condamnés à des dommages-in-
térêts à fixer par état.
Schneider et Cie soutenaient, à Taudience.que si le cer-
tificat d'addition contenait quelque chose de nouveau, en
tous cas il était nul comme se rattachant à une partie de
brevet nulle pour défaut de nouveauté .
M"" Georges Maillard plaidait pour le demandeur,
M. Clausel de Coussergues pour les défendeurs.
M. le substitut Trouard-Riolle a conclu à la validité des
brevets et certificats d'addition Gruson ainsi qu'à la con-
cairassées, alors qu*il n'en aurait vendu à personne ? Evidemment non.
Messieurs.
On a dit encore : mais il aurait pu installer une fabrique de tooreUes
cuirassées en France, non pas pour les vendre au gouvernement fran-
çais, puisque celui-ci n'en voulait pas, mais pour les vendre à l'étran-
ger. . . .
Les établissements Gruson, qui sont maintenant réunis aux établisse-
ments Krupp, sont, vous le savez, considérables ; il y a un intérêt évi-
dent, un intérêt notamment pécuniaire, à ce que toute la fabrication
soit rassemblée sous une môme direction, sous âne même surveillance ;
il y a ainsi des frais de main-d'œuvre, de direction, d'exécution, qui
sont beaucoup moins considérables. 11 y aurait donc pour le breveté un
préjudice évident à être obligé d'installer une fabrication dans un pays
où il n'y a pas de débouchés, où il n'y a pas de consommateurs et à Caire
faire le voyage des appareils qui y auraient été fabriqués, pour les ra-
mener dans son pays. ^
« n est évident, Messieurs, que, si ce système a l'air d'être une appli-
cation littérale de la loi, il ne tient pas contre une objection de bon sens.
S'il n'y a pas, en France, de consommateurs pour celui qui a pris le
brevet, il est évident qu'on ne peut le forcer à construire une usine qui
fabriquerait à vide. £n résumé, je dis que Gruson a manifesté l'intention
de conserver ion invention ; qu'il a fait ce qu'il pouvait pour la mettre
à la disposition du public français, en y comprenant, notamment, le
gouvernement. Le gouvernement n'a pas voulu de son invention, il
a fait la sourde oreille. Mais qu'importe ? Ce n'est pas du côté du gou-
vernement qu'il faut nous placer pour examiner s'il y a eu possibilité
d'exécution, mais du côté de Gruson. Gruson a fait tout ce qu'il pou-
vait faire ; il a offert son invention, et on ne peut raisonnaUement exi-
ger de lui qu'il ait fabriqué alors qu'il n'y avait pas de consomma-
teurs. »
Pnur la jurisprudence et la doctrine, cf. Pouillet, p. 518 ; Mainié»
t. 2, no2048;Allarl, no 341.
Nous ajouterons seulement qu'en fait, l'installation d'une usine en
France, tout exprés pour la livraison des tourelles destinées à la Rou-
manie, aurait entraîné des frais hors de proportion avec les bénéfices et
que le législateur de 1848 en permettant au breveté de justifier des
causes de son inaction, ne prévoyait pas seulement l'impossibilité ma-
érielle de fabriquer, mais toutes les raisons sérieuses de ne pas exploiter.
!nL"VM^t^HtlçW5W HiHIJ AJkUP . I l.^s»PT^9'lP-^r V*
— 246 —
Que si de Texamen des documents produits il résulte qu'il a trait
au perfectionnement du mode élévatoire décrit dans la deuxième
partie, Tidée qu'il applique était contenue en germe dans la pre-
mière partie ;
Qu'en effet cette première partie tout en réglant principale-
ment le mouvement de rotation de Taffût organise dans ce bat
les moyens d'alléger le dit affût ;
Que pour cela on soulève la calotte cuirassée qui le recouvre ;
Qu'il s'agit donc accessoirement dans cette première partie d'un
mode élévatoire auquel le certificat d'addition donne seulement
plus d'amplitude ;
Attendu, dès lors, que ce certificat ne faisant qu'un avec le bre-
vet, c'est l'ensehible des deux titres qu'il s'agit d'examiner pour
statuer sur la contrefaçon ;
Mais que le tribunal n'a pas quant à présent les éléments pour
se prononcer sur la validité du brevet ;
Qu'il y a lieu de recourir à une expertise ;
Par ces motifs, Avant faire droit ;
Dit que par Léauté, Périsse et Schlemmer, experts que le tribu-
nal commet et qui prêteront serment s'ils n'en sont dispensés par
les parties, le brevet Gruson du 6 mars i883, ensemble le certi-
ficat d'additioîi du 2 septembre 1886 seront examinés à TefTet de
dire s'ils constituent l'invention de nouveaux moyens ou l'ap-
plication nouvelle de moyens connus pour l'obtention d'un ré-
sultat ou d'un produit industriel et à l'effet de s'expliquer sur
toutes antériorités qui seraient alléguées ;
Dit qu'en cas d'empêchement des experts commis ils seront
remplacés par ordonnance de M. le président de cette chambre
rendue sur simple requête.
Au cours de l'expertise, Schneider et Cie ayant soutenu
qu'en tous cas ils n'étaient pas contrefacteurs, un juge-
ment, rendu d'accord entre les parties le 10 juillet 1895,
étendit la mission des experts à la question de contrefaçon.
Les experts conclurent que le t^ dispositif du brevet
Gruson était nouveau et brevetable, qu'il en était de même
du 3* certificat d'addition et qu'il y avait lieu de comparer
l'engin de Schneider et Cie à un appareil formé delà réu-
nion du 2* certificat d'addition et du 2* dispositif du brevet,
mais que l'engin de Schneider et Cie n'était pas la con-
trefaçon de cet appareil.
Les experts ayant déposé leur rapport, M" Georges
Maillard plaida pour les héritiers de Gruson (Hermann
m&ndent reconventionnetlement que le brevet de Gruson du
6 mari 18B3 ensemble les certiScats d'addition, soient déclarés
tmli pour défaut de nouveauté, et subsidiaireraent que Gruson
Boit déclaré déchu des droits qu'il tient de son brevet, faute d'a-
voir mis son invention en exploitation en France daus les délais
Qxés par la loi ;
Attendu que par jugements avant Taire droit des 12 décembre
1894 et 10 juillet 1895, le tribuoal a commis Léauté, Schlemraer
et Périsse, experts, à fin de :
HLB * \
— 248 —
Primo : examiner si le brevet Grason du 6 mars 1883 et le cer-
ti6cat d'addition du 2 septembre 1886, constituent Tinvention de
nouveaux moyens ou l'application nouvelle de moyens ^connus
pour l'obtention d'un résultat ou d'un produit industriel, et
s'expliquer sur toutes les antériorités qui seraient alléguées ;
Secundo : examiner si, et dans quelle mesure, Schneider et
Gie ont reproduit l'affût cuirassé revendiqué par les dits brevets
.et certificats d'addition ;
Attendu que- le dit jugement du 12 décembre 1894 décidait, en
outre, que le certificat d'addition du 2 septembre 1886 se ratta-
chait à la première comme à la seconde partie du brevet et ne
devait pas être examiné isolément ;
Attendu que, Hermann Gruson étant décédé, ses héritiers ont
repris l'instance par conclusions du 13 mars 189^ ;
Attendu que les experts ont déposé leur rapport le 26 juin
1896 ; qu'ils déclarent le brevet de Gruson valable, pour ce qui
concerne le deuxième dispositif;
Qu'en rapprochant ce deuxième dispositif du certificat d'addi-
tion du 2 septembre 1886, ils reconnaissent comme appartenant
à Gruson une combinaison d'éléments connus ainsi définie :
Primo : un affût cuirassé pivotant, conjugué avec unecontre-
cuirasse fixe, celle-ci portant un appendice à l'arrière pour per-
mettre l'éclipsé ;
Secundo : une colonne servant de support au pivot et pouvant,
en vue de produire l'éclipsé, être levée ou abaissée au moyen
d'un levier-balancier équilibré par un contrepoids avec ou sans
l'aide d'un treuil à main ;
Tertio : solidarité de la coupole de l'affût et du canon pour
que le choc du recul soit d'abord reçu par toute la masse de l'ap-
pareil ;
Qu'enfin ils estiment, mais seulement à la majorité des voix,
que la tourelle cuirassée du Greusot n'est pas la contrefaçon du
brevet Gruson ;
Attendu que Schneider et Gie prétendent que les dispositifs du
brevet Gruson et ses certificats d'addition présentent tous des
combinaisons nulles pour défaut de nouveauté;
Sur les antériorités :
^ Attendu que Gruson revendique pour son premier dispositif
les éléments suivants : un affût cuirassé tournant à coupole et à
embrasure minima, avec organe de soulèvement sur pivot pour
faciliter la rotation de la coupole ; un contrepoids avec trans-
mission hydraulique pour équilibrer le canon et le soulever en
vue de la charge et du pointage en hauteur et enfin la solidarité
de l'affût et de la coupole pour neutraliser le recul ;
Attendu qu'un affût à embrasure minima avec cylindre à va-
r*"
--250 —
vement par un treuil à main, au moyen duquel on produit Té-
clipse ;
Tertio : la solidarité du canon de Taffât et de la cuirasse en
vue de neutraliser autant que possible le choc du recul ;
Attendu que, sauf Téclipse, le premier élément de la combi-
naison se retrouve dans les dispositifs du brevet de Schumann
ainsi que le troisième élément ;
Attendu que Téclipse se retrouve notamment dans la plate-
forme de Winans de 1862, dans la plate-forme tournante avec toit
blindé de Mathew de 1864, et dans la coupole tournante de Ra«
dley (patente anglaise de 1863) ;
Attendu que le deuxième élément se retrouverait dans la cou-
pole de Hadley si elle était équilibrée, mais le contrepoids d'é-
quilibre et la puissance manuelle pour Téclipse existent dans
Tantériorité Winans et dans l'antériorité Mathew ;
Attendu, en conséquence, que Gruson a pris dans le domaine
public tous les organes qui composent son deuxième dispositif ;
Que toutefois, dans aucun ouvrage antérieur on ne trouve tous
ces éléments réunis et combinés, et qu'il y a lieu'pour le tribu-
nal de déclarer la combinaison valable, conformément à Tavis
des experts ;
Attendu, en ce qui concerne le troisième dispositif, que ses élé-
ments se retrouvent aussi dans les antériorités précitées, mais
que la combinaison qu'il réalise est nouvelle ;
Qu'en effet la seule antériorité d'ensemble qui puisse lui être
opposée est tirée de sa similitude avec le dessin d'un affût revol-
ver de 1868, dont Schumann est l'auteur, mais qui n'a été publié
qu'en 1890 par le général Schrôder;
Qu'il y a donc lieu de déclarer ce dispositif valable, contraire-
ment à l'avis des experts ;
Attendu, en ce qui concerne le premier certificat d'addition,
qu'il n'est qu'un perfectionnement apporté au premier dispositif
et qu'il n'est primé dans son ensemble par aucune antériorité ;
Que le dessin de Schumann qui lui est opposé ne contient ni
le contrepoids destiné à équilibrer la bouche à feu ni le levier
propre à soulever la coupole pour en faciliter le roulement ;
Qu'il y a lieu en conséquence de déclarer valable le premier
certificat d'addition ;
Attendu que le deuxième certificat d'addition comprend trois
éléments :
Primo : l'affûit cuirassé du premier dispositif avec perfection-
nement du contrepoids nécessaire pour élever ou abaisser le ca-
non et équilibrer ;
Secundo : le mouvement d'éclipsé du deuxième dispositif;
Tertio : un levier équilibré pour soulever ou abaisser sur son
\
leviers, c'est qu'il avait eu vue l'éclipsé d'une pièce de canon d'nn
poids uoDsidérable ;
Qu'il se TéserTBit aussi le monopole d'un levier unique dont le
dessin est facile à établir ;
Que cela résulte des termes de son brevet précité ;
Attendu, en conséquence, que le principe du levier équilibré,
employé par Gruson au mouvement d'éclipsé de son affût, était
dans le domaine public à la disposition de Schneider comme de
tous antres ;
Attendu que le premier dispositif du brevet ne comportant
pas l'éclipsé ne saurait être associé an levier équilibré destiné à
la produire ;
Que le deuxième dispositir reconnu valable par les motifs pré-
cités, peut seul être combiné avec le deuiiëme certiTicat d'addi-
tion ;
Attendu qu'aucune antériorité ne peut être opposée à leur
combinaison ;
Sur te eontre/dfon : Attendu que Gruson prétend que la tou-
relle construite par Schneider pour la Roumanie est la contre-
façon de celte seconde combinaison ;
— 252 —
Attendu que Tappareil de Gruson est un affût cuirassé à em-
brasure miniina où les flasques du canon sont indissolublement
liées à la cuirasse d'où sort la volée delà pièce, ce qui empêche
de Tabriter sufQsamment après le tir ;
Attendu que Tappareil de Gruson est oscillant contre Tavant-
cuirasse, c'est-à-dire que pour retrouver Taplomb nécessaire au
pointage et à la charge, il met plus de temps qu'une tourelle
où l'effet de recul est complètement annulé ;
Attendu que l'appareil de Gruson s'éclipse incomplètement ;
Qu'en effet, dans la contre-cuirasse se trouve un logement à
ciel ouvert pour la volée du canon ;
Que pendant le tir cette ouverture peut donner accès dans le
cuirassement lui-même au feu plongeant de l'ennemi ;
Qu'après le tir la volée du canon y reste exposée au même
danger ;
Que pour loger le canon dans cette ouverture, l'affût cuirassé
doit tourner sur lui-même et subir ainsi un retard avant de s'é-
clipser ;
Attendu que ces défauts de l'appareil de Gruson résultent né-
cessairement du dessin et des textes de son 2<> dispositif;
Que vainement il prétend être en droit d'en modifier le système
en y introduisant un affût mobile ;
Qu'une des revendications essentielles de son invention, bien
nommée affût cuirassé, est la solidarité persistante entre le cui-
rassement et les flasques de la pièce pour neutraliser le recul
par la masse de l'appareil ;
Que si, pour dérober la volée du canon au danger qui le me-
nace, on veut le laisser tout entier sous sa coupole, on retombe
dans le premier dispositif, qui n'est pas à éclipse, ou dans le
deuxième certificat d'addition qui n'existe pas isolément et dans
lequel, au surplus, la pièce, occupant tout le diamètre de la
coupole, doit basculer au moyen d'un contrepoids pour la charge
et le pointage ;
Attendu que tout ce qui touche à la rapidité du tir et ^e l'é-
clipse, à la sécurité du canon et à l'impénétrabilité de la tourelle
est essentiel dans des ouvrages de cette nature ;
Que l'appareil de Gruson est insuffisant pour le résultat qu'il
s'est proposé; que Ton peut même se demander si un affût con-
forme, non à sa tourelle de Roumanie qui n'a rien à voir au procès,
mais aux seuls dessins de son deuxième dispositif combiné avec
le deuxième certificat d'addition, pourrait fonctionner convena-
blement ;
Attendu, au contraire, que la tourelle brevetée par Schneider
et Gie ne présente pas les lacunes signalées ;
Que, de plus, elle diffère, par sa nature même, de l'affût cui-
1886, constituent l'application nouvelle de moyens connus pour
l'obtention d'un résultat et d'un produit industriels ;
Qu'il en est de même du certificat d'addition du 3 août 1S86,
uni an deuxième dispositif du brevet ;
Qu'aucune antériorité n'est valablement opposée aux combi-
naisons résultant de ces dilTérents documents ;
Que toutefois Schneider et Cie n'ont pas reproduit l'affût
cnirassé à embrasure minima, revendiqué par les brevets et cer-
tificats d'addition de Gruson ;
Sur la déchéance du brevet : Attendu que Schneider et Cie
prétendent subsidiairement que les brevets de Gruson sont
tombés danj le domaine public français, faute d'avoir été mis
en exploitation en France dans le délai imparti par l'article 32
de laloidD 5 juillet 1844;
Attendu que le tribunal n'ayant pas admis les conclusions re-
conventionnelles de Schneider sur la nullité des brevets de Gru-
— 254 —
son, il y a lieu de répondre à ses conclusions subsidiaires sur la
déchéance des dits brevets ;
Attendu qu'au nom des Etablissements Grusonwerk et en der-
nier lieu au nom des Etablissements Fried Krupp et Grusonwerk
de Magdebourg, Armengaud aîné a écrit tous les deux ans à
M. le Ministre de la guerre une lettre ainsi conçue :
« Monsieur le Ministre,
« J'ai rhonneur de vous adresser un mémoire descriptif et trois
dessins se rapportant à un affût cuirassé à embrasure mini ma
qui a fait l'objet d'une demande de brevet en date du 6 mars
1883, numéro 154,131.
c< Dans le cas où vous jugeriez que cette invention serait de
nature à intéresser votre Département, ces établissements se
mettraient à votre entière disposition pour vous fournir tous les
renseignements complémentaires que vous jugeriez utile de leur
demander » ;
Attendu que le tribunal ne saurait voir à un degré quelconque
une exécution de la loi dans cette proposition périodique tou-
jours conçue dans les mêmes termes ;
Que Gruson ne peut prétendre qu'il a suppléé par Taccomplis-
sèment de cette formalité aux obligations résultant de la loi fran-
çaise ;
Que si la fabrication de ses produits en France lui paraissait
impraticable pour lui-même, rien ne Tempéchâit de concéder des
licences à des constructeurs français ;
Que dans tous les cas le tribunal ne saurait admettre le prin-
cipe d*une dispense d'exploitation qui n'aurait d'autre motif que
la nature même du produit breveté ;
Sur ks dépens: Attendu que si Schneider et Gie succombent
sur leur demande en nullité des brevets Gruson pour défaut de
nouveauté, ils obtiennent gain de cause sur leur demande en
nullité des mêmes brevets pour défaut d'exploitation ;
Qu'il n'y a pas lieu en conséquence de leur faire supporter une
partie des dépens.
Par CBS motifs, Donne acte aux consorts Gruson de leur reprise
d'instance ;
Entérine pour partie le rapport des experts ;
Déclare Gruson non recevable et en tous cas mal fondé en ses
Ans, demandes et conclusions, l'en déboute ;
Déclare Schneider et Cie mal fondés en leur demande recon-
ventionnelle tendant à la nullité du brevet Gruson du 6 mars
1883 et des certiticats d'addition au dit brevet, pour défaut de
nouveauté, les en déboute ;
Dit toutefois que Gruson était, à la date du 22jmars 1893, dé-
chu de tous les droits qu'auraient pu lui conférer le dit brevet
ploité son inven-
loi du 5 juillet
ibre de la Cour
iprès avoir en-
D et OONTARn,
lubstitulBLON-
Î36), rendu, le
li répondent suf-
dusions des ap-
OD, inijénienr al-
)our un système
. que des certifl-
gaptembre 188S ;
s de conlretaçon
ie en 1891 et qu'à
; tombée dans le
I France sa dé-
tionale, la loi a
le droit exclusif
France, Tût obligé
on durant deux
,dité de ses bre-
*cu, uiusuii uB>uii, uaiiB 113 uBiiLi uB uEui. 9113 <i p&ttiT de la dé-
livrance, faire confectionner en France des appareils do son in-
TentioD et qu'il est constant qu'il ne l'a jamais fait ;
Qu'à la vérité, l'inventeur peut être relevé de cetle déchéance
en justifiant des causes légitimes do son inaction ; mais que les
appelants n'ont apporté aucune preuve K cet égard ; qu'au con-
traire il ressort de tous les documents versés au débat que Gru-
son a fait construire ditTérents appareils de son système dans son
asine de Magdebourg-Buckau, qui s'est fusionnée plus tard avec
la célèbre usine Krupp ; que l'inventeur disposait de tous les ca-
pitaux et de toutes les ressources nécessaires pour organiser sur
notre territoire des ateliers de construction et que s'il n'eu a pas
créé, c'est parce qa'il a cru préférable de concentrer toute sa fa-
brication dans un senl établissement industriel ;
— 256 —
Considérant que la fabrication en Fraace d'affi^ts cuirassés du
système Gruson aurait pu se faire, non seulement par Tinven-
teur lui-même, mais encore par ceux à qui il aurait accordé des
licences, mais qu'il n'en a concédé aucune ;
Considérant qu'on ne saurait assimiler à une exploitation véri-
table Toflre adressée par les représentants de Tinventeur au mi-
nistère de la guerre et réitérée tous les deux ans, de faire pro-
fiter le ^gouvernement français de sa découverte ; qu'on objecte
vainement que ce serait le seul consommateur qu'on pût trouver
en France pour la consommation d'engins de guerre ; que les
canons, les appareils cuirassés, se fabriquent autant dans les éta-
blissements privés que dans les forges de l'Etat ; que le procès
actuel, qui a été intenté à la suite d'une vente de tourelles à
éclipse faite par l'usine du Creusot à la Roumanie, fournit un
exemple de commandes d'engins de guerre adressées par des
gouvernements étrangers à l'industrie française ;
Considérant d'ailleurs que, lors même que Gruson aurait vendu
aux autorités militaires de notre pays des appareils de son sys-
tème fabriqués en Allemagne, il n'aurait pas satisfait aux obli-
gations qui lui imposaient un travail exécuté en France et qui
étaient si rigoureuses que l'article 32, § 3, de la loi du 5 juillet
1844 prononçait la déchéance contre le breveté qui aurait intro-
duit sur notre territoire des objets fabriqués à l'étranger sembla-
bles à ceux qui étaient garantis par son brevet ; que c'est aûn de
tempérer la rigueur de cette dernière disposition que la France
a conclu le 20 mars 1883 un traité international pour la protec-
tion de la propriété industrielle, connu sous le nom de Conven-
tion de Berne, sanctionné par la loi du 26 janvier 1884 et par le
décret du 8 juillet delà même année; mais que l'Allemagne
n'est pas au nombre des Etats qui ont adhéré à cette conven-
tion ;
Que Gruson restait donc soumis aux prescriptions delà loi du
5 juillet 1844 et que, pour ne les avoir pas observées, il a été dé-
chu de ^es brevets d'invention ;
Par gbs motifs. Déclare la veuve et les héritiers Gruson mal
fondés en leurs demandes, uns et conclusions, les en déboute ;
dit que les brevets d'Hermann Gruson étaient frappés de déchéance
et que ses découvertes étaient tombées dans le domaine public
lors de la fabrication des tourelles arguées de contrefaçon ;
Confirme le jugement attaqué ; ordonne qu'il sortira son pleiji
et entier effet ;
Condamne les appelants à l'amende et aux dépens.
— 257 —
Akt. 4139.
Brevet Onnlop. -^ CSinpIol noave«a. •— Combliitti-
eon dlllérente des mêmee élémente. — Bjrplolta-
tJem. — Erreur de deenln. — Réeultat prAtlc|ae. —
RevendIefttlOD. — Breveté étrangers. ~ Article 90
de Im, loi de 1844. — Proeèe. — Publlelté ezeeeelve.
— Domma^ee et Intérêt».
Il y a simple emploi nouveau^ non brevelable dans le fait
éPemployer en vue de diminuer les chocs ou vibrations^ des
garnitures pneumatiques pour les roues de vélocipèdes,
alors qu'antérieurement on a fait usage du même procédé^
dans le même hut^ pour garnir les roues d'autres véhi-
cules et particulièrement de véhicules légers (Résolu par le
tribunal et la Cour) (1).
Il ne saurait y avoir de contrefaçon dans le fait de puiser
dans le domaine public les éléments qui se trouvent réunis
dans un autre brevet pour les combiner en vue d'un résultat
identique^ mais de manière à leur attribuer une fonction
toute différente {Késolxji par le tribunal et la Cour) (2).
On ne saurait considérer comme suffisant à éviter la
déchéance, Vexploitation réduite à la fabrication de quel-
ques spécimens qui n'ont pas eu un cours commercial (Ré-
solu par le tribunal) (3).
Mais est régulière et valable la poursuite exercée en vertu
d'un brevet qui n'a jamais été exploité si elle est intentée
moins de deux ans après la délivrance du brevet ; on ne sau-
rait attacher à Vinaction dans laquelle est demeuré posté-
(i) Sar remploi nouveau, V. Pouillet» Brw. dHnv., n^i b7, 41 ; Mai-
nié, n«* 345 et saiv. ; AUart, 1. 1, n» 25. Comp. Paris, 10 décembre 1857,
GaT7, Ann,, 58. 136 ; Lyon, 23 juin 1860, Yignet, Dalloz, 61.263 ; Paria,
14 mai 1868, Ganouil, Ann,, 68.210; Paris, 21 février 1900, Laffitte,
Gaz, Trib., 30 mars 1900, etc.
(2) Sur la contrefaçon lorsqu'il y a combinaison nouvelle d'éléments
connus^ V. Pouillet, eod. loc, n* 727 ; Comp. Paris, 6 avrU 1857, Cavail-
lon, iinn., 57.364; Paris. 30 décembre 1864, Giffard, Ann., 65.83;
Montpellier, 17 juillet 1877, Vergely, Ann., 78.100 ; Rej., 3 août iSOT,
Nicolas, Ann., 99. 66 ; Paris, 22 juin 1898, Leclercq, 6a^. du Pal, y
4 février 1899.
(3) Sur la déchéance par défaut d'exploitation, V. Pouillet, eod, loc.,
»« 506,509; Allart, t. 2, n«340; Mainié, n^-ieôS etsuiv. Comp. Douai,
90 niilet 1^9, Lister, Ann., 61.46 ; Paris, 23 mai 1890, Sirey, 70.148;
Trib. Seine, 6 mai 1897, /a Loi, 15 février 1898; Paris, 15 mars 1900,
Gruson, Ann., 1900. 339.
17
— 258 —
rieurement le breveté un effet rétroactif que la loi n*a pas
édicté {ii.){i).
Une invention ne peut être stérilisée par une légère erreur
du dessinateur des planches du brevet^ alors que le construc'
teur est nécessairement appelé à la rectifier dans l'exécution
(id.) (2).
On ne saurait considérer comme une invention positive
et pratique réalisant un résultat industriel^ celle qui, des-
tinée au public en général^ exige pour sa mise en œuvre un
outillage spécial, et une habileté peu commune {id.) (3).
La loi française n'exige pas que la description du brevet
se termine par des revendications ; il suffit que Finvention
se dégage de Vensemble des énonciations du mémoire des-
criptif (^ù.) {k).
Les tribunaux français ont la faculté de se prononcer
sur la validité d'un brevet étranger, au regard de la loi à
laquelle il est soumis, mais ils ne doivent user de cette fa*
culte que lorsqu'il s'agit d'appliquer un texte formel ou
un principe essentiel dominant la législation dont s'agit
(id.)(8). • /
Lorsque un brevet étranger doit être considéré comme
nul, en vertu de l'article ^ delà loi de 1844, le brevet cor-
respondant doit partager le même sort (id.) (6).
(1) Sar la poursuite intentée dans le délai de deux ans : jurisprudence
constante ; V. Pouillet,n« 508 et Gass. cr.,26 jailiet 1889, Vacher et Perrin,
Ann,y 89.235 et Gass., 10 janvier 1889, Gombret, Ann., 89.168.
^ (2) Sur les inexactitudes dans les descriptions ou dessins, V. Pouiilet,
eod. loe., n* 460. Gomp. Paris, 17 mars 1887, Saulnier, DaUoz, 82.2.
86 ; Trib. dv. Seine, 3 août 1888, Farcot, Ann., 91.296.
(3) Sur les caractères de rinvention brevetable, V. Pouiilet, eod. lœ.,
n^ 6 et s. et 82 et s.
(4) Sur les formes delà description, V. Pouiilet, eod. loc,, n* 114;
Allart,' n« 88 ; Mainié, n* 808.
(5) Sur le pouvoir d'appréciation des tribunaux, V. Pouiilet, 0m2. loe.,
n*> 86 «t s. et la jurisprudence citée.
(6) L'article 29 de la loi du 4 juillet 1844 spécifie que la durée du brevet
firançaîs ne peut excéder celle du brevet correspondant étranger. Il
semble bien, que d'après les termes mêmes de rarticle,le législateur n'ait
voulu qu'une chose, mesurer la durée normale du brevet français, sur
la durée normale du brevet antérieur correspondant pris à l'étranger
sans prétendre en aucune façon rendre les deux brevets solidaires, et
soumettre le brevet français à toutes les vicissitudes du brevet étranger*
Gependant une jarisprudence aujourd'hui constante décide que l'existence
du brevet français est, d'une façon absolue, soumise à ceUe du brevet
étranger et que par suite Textinction du second pour quelque cause que
deuxième brevet.si court que soil l'intervalle de temps écou-
lé l\d.}(i).
Le fait par un industriel de donner une publicité exces-
sive à un procès en contrefaçon intenté à une maison rivale
dont il cherche plus particulièrement à combattre la concur-
rence, notamment par des annonces réitérées dans les jour-
naux spéciaux et par T apposition d'affiches sur les murs
d'une ville oà la maison poursuivie a des dépôts de ses pro-
duits, constitue des agissements abusifs dont il est dâ répa-
ration (Résolu par la Cour] (2).
{lïib. Seine, 6 mai t897. -• Compagnie fraDfiise des pnenmatiqnei
Diinlop c. Peugeot frèrea, Edeline, Dalifol.VJUl-Bonhoare, Michelin
(C. de Paria, 1" nui 1900. — Miciielin e. The Dunlop
pneomatic lyre O lim.)
Ainsi jugé SOUS la présidence de M.LÉVRiBH.par jugement
du Tribunal de la Seine en date du 6 mai 1897, après plai-
doiries de M" PonujtT, âllaht, Desiardin, Miciiei, Pil*
uTizB, elc.
LzÎBiBnnAL, Attends que sur les instances intentées parla
Société «The Pneomatic Tyre and Bootb'sCycIeAgency Limited »
et reprises par sa cessiontiaire,la Compagnie Française des Pnen-
mattqaes Dunlop, ainsi que sur la demande en nullité de bre-
▼et formée par Datifol, Peugeot frères, la Société .i La Force »,
ce soit fait périr le premier. V. Poulllel, n> 341 et Can., 14 jauTier
1854, Reboars, Ann., 64.81. Encore raudraîl-tl ce semble admettre
qne le brevet étranger ait été an préalable déclaré nul ou déchu par une
^cision déflnilive île l'autorité compétente ; dans notre espèce le tribu-
nal de la Seine a été plus loin, il n'a pas craint d'interpréter la loi
étrangère et, crojant voir dans les documents qui lui étaient soumis une
cause de nnllité frappant le brevet étranger, il a déclaré déchu le brevet
Iranfais correspondant. Aujourd'hui la doctrine est à peu près unanime
i critiquer cette dépendance des breveta ; parmi les résolutions de In Con-
férence de Bruxelles non encore ratifiées il en est une qui proclame dans
le domaine de la Convenlion d'Union de 1888, le principe de l'indépen-
dance des brevets.
(1) La jurisprudence française est en sens contraire. Voir Casa. civ. ,
W janvier 1891, Utfllle, Ann., 92.128.
(S) CT- pour l'abus de la publicité du jugement, Irib. civ. Seine,
S6 man 1^ Cte fermière de Vichy, Ann., %.309et note 3.
— 260 —
Vauzelle et Morel, le tribuual a, avant faire droit, ordonné ane
expertise ;
Attendu qa'auz termes de la mission qui leur était confiée,
les experts Périsse, de Parville et Le Roux étaient chargés de
rechercher si les dispositions décrites dans les brevets Dunlop,
Scott, Turner et Lindner et Robertson, étaient nouvelles au mo-
ment de la prise desdits brevets, d'apprécier les antériorités
opposées et notamment les brevets ou patentes pris en France ou &
Té tranger avant les brevets dont se prévalait la société demande-
resse, d'indiquer les ressemblances et lés différences existant
entre ces derniers et les antériorités invoquées, de vérifier si les
brevets servant de bases aux poursuites avaient été exploités en
France dans les deux années qui avaient suivi leur délivrance,
de signaler les similitudes ou différences existant entre ces
mêmes brevets et les appareils saisis, enfin de donner leur avis
sur la contrefaçon alléguée ;
Attendu que les experts ont conclu à la nullité du brevet Dun-
lop, pour défaut de nouveauté, à la déchéance tant du brevet
Turner et Lindner que du brevet ; Scott, pour cause de non-ex-
ploitation, mais à la validité du brevet Robertson, comme étant
une combinaison brevetable, sous réserve de la question d'anté-
riorité inhérente à l'existence d'une patente étrangère ayant le
même objet, question abandonnée par eux à l'appréciation du
tribunal ;
Attendu que ces conclusions sont combattues par toutes les
parties ;
Que d'une part la compagnie demanderesse persiste à reven-
diquer le principe même du pneumatique aux termes de son
brevet Dunlop de 1888 et, de ce chef, incrimine tous les défen-
deurs ;
Que d'autre part, en ce qui concerne le mode d'attache du
bandage à la jante métallique, elle continue à se prévaloir»
comme les ayant réellement exploités par elle-même ou par ses
cédants, des trois autres brevets dont elle a fait l'acquisition de-
puis l'introduction de la première instance ;
Qu'en fin de cause elle reproche à Michelin, Terrent et Rea-
los, Bousquet, Bapst et Hamet, Merland et Mathieu la contrefa-
çon des brevets Scott, Turner et Lindner, et à tous les autres
défendeurs la contrefaçon du brevet Robertson ;
Attendu que de leur côté les défendeurs concluent à l'entéri-
nement du rapport en ce qui concerne le brevet Dunlop, et à la
déchéance des brevets Scott, Turner et Lindner, mais repoussent
les autres solutions de l'expertise en faisant valoir diverses ex.
ceptions tirées de la nullité et de la déchéance du brevet Ro-
bertson
qaé, se distingue absolument du Robertson ;
Atleodu qa' il convient d'apprécier sur chacun des points liti-
gieux l'opinion adoptée par lea experts et les critiques formu-
lées par les parties;
En ce qui touche le brevet Dunlop :
Attendu que ledit brevet, pris le 1" octobre 1838 sous le a*
I93,28i,a pour objet, aux termes du mémoire de3criptir,une gar-
niture pneomatiqne Cormée par la réunion de quatre éléments :
1* Un tnbe creux, en caoutchouc, extensible, susceptible d'être
gonQé avec de l'air on un gaz sons forte pression obtenue h
l'aide d'une pompe foulante ou autre appareil analogue ;
2" Une enveloppe en drap, toile ou autre tissu capable de ré-
sister à la pression de l'air renfermé dans le tabe creux qui vient
s'y appliquer par le gontlement ;
3* Uq revêtement en caoutchouc ou autre matière résistante
de nature à protéger l'enveloppe contre l'usure ;
4* Un petit conduit ménagé dans le rebord de la roue poor y
introduire l'air ou le gaz et muni d'une valve disposée pour
l'empêcher de sortir, le tout assujetti sur la jante de la roue par
an mastic on tout autre moyen, et ayant pour but d'augmenter
la hcilité de roulement des véhicules à roues, surtout des véhi-
cales légers tels que vélocipèdes, chaises roulantes, ambulances,
particulièrement quand le sol est inégal et raboteux ou ramolli
et boaeux ;
Attendu que c'est à bon droit que les experts ont admis qu'aux
termes de l'article 2 de ta loi du S juillet 1S44, la combinaison
des quatre éléments ci-dessus spécifiés constituait une applica-
tion nouvelle, susceptible d'être brevetée à raison de l'obtention
d'on résultat industriel consistant principalement dans la dimi-
nution des vibrations de toute nature et des cahots dus anx as-
pérités du chemin, ainsi que dans l'augmentation de vitesse ac-
quise avec le même travail moteur;
Attendu que c'est également avec raison que les experts ont
repoussé les objections tirées de l'insuffisance de description et
de la cessation d'exploitation ;
Qu'il est en efTet manifeste que les hommes du métier peuvent
aisément reproduire la garniture dont s'agit an vu des indica-
tions snsrelatées, fourmes par le mémoire descriptif et que,
d'aob'e part, les documents versés au débat démontrent que le
ifstëme Dunlop a été exploité d'une manière suivie jusqn'en
— 262 —
1893^ tandis que les demandeurs, en déchéance auxquels cette
preuve incombe n'établissent point qu'elle ait été abandonnée
postérieurement ;
Attendu, en conséquence, que la validité du brevet de 1888 est
exclusivement subordonnée à l'existence on au défaut d'anté-
riorités ;
Attendu que les défendeurs opposent à ce titre le brevet Guil-
met, pri3 le 9 juillet 1864, les patentes américaines Thomas dé-
posées aux Etats-Unis le 30 juin 1888 et le brevet Thomson dé-
livré le 27 juin 1846;
Attendu que la combinaison du principe du brevet Gullmet
est toute différente de celle de Dunlop puisqu'elle a pour base la
constitution d'un bourrelet liquide, alors que celle de Dunlop a
pour base la constitution d'un bourrelet d'air.;
Attendu qu'il y a lieu d'écarter également les patentes Thomas
sans qu'il soit nécessaire d'en rechercher les éléments, par ce
motif péremptoire qu'elles n'ont été rendues publiques qu'en
l'année 1889 et par suite ne pouvaient faire échec à un brevet
antérieur ;
Attendu que l'appareil de Thomson, tel qu'il le décrit dans son
mémoire et le représente par diverses figures, se compose :
1« D'un cordon creux élastique formé d'une substance imper-
méable comme le caoutchouc sulfurisé et la gutta-percha et dans
lequel l'air est insufflé à haute pression ;
2® D'un étui en canevas renfermant et soutenant le cordon
élastique ;
3<* D'une forte enveloppe extérieure en cuir destinée à main-
tenir le cordon et son étui sur la jante ;
i^ D'un tuyau traversant en un point la jante et le bandage de
la roue et muni d'un bouchon à vis imperméable à l'air;
Attendu que ces éléments malgré des formes plus massives et
un agencement plus grossier sont évidemment ceux que l'on
retrouve dans le brevet Dunlop de 1888 ;
Attendu que la demanderesse soutient que des procédés indi-
qués pour construire le cordon, il résulterait que celui-ci était
en réalité formé par la toile elle-même, matière Inextensible dans
l'intérieur de laquelle les feuilles de caoutchouc étaient simple-
ment disposées en plis flottants, ce qui constituerait une ditTé-
rence essentielle entre les deux systèmes et laisserait à Dunlop,
dont elle est le cessionnaire, le bénéfice de la découverte de la
chambre à air;
Qu'en tous cas, de l'obscurité de la description sur ce point
naîtrait un doute qui doit juridiquement profiter au brevet pos-
térieur ;
Que d'autre part on ne saurait assimiler l'enveloppe de cuir
de constractioD, que d'an tube ferme et qne cette interprbtatton
«st flucore corroborée par la mention de l'insufflatioD, à haute
preuion, de l'air, opération que des feuilles non soudées de
caoutchonc, dans an étui en toile perméable, ne pouvaient com-
porter ;
Attendu qu'il n'j a pas k s'airSter daranlaxe & la différence
existant entre le cnir et le caoutchouc, les deux matières offrant
la résistance capable de protéger la chambre à air contre les ac-
âdents et contre l'nsure ; .
Attendu an surplus qae le caoutchouc valcanisé qui était peu
connu en 1846, n'a pas tardé A être substitué au cuir, dans le
même emploi, ainsi qu'il résulte des articles publiés en 1849 dans
le Meckanie Magasine, exposant les nouvelles expériences de
Tbomson, et qu'en conséquence, aucune innovation ne pouvait
itre revendiquée de ce chef au profit dn brevet Dunlop ;
Attendu, il est vrai, que la demanderesse persiste à y rattacher
une application nouvelle en ce sens qu'avant 1888 la garniture
pneamatiqne n'aurait pas été utilisée dans la fabrication des vé-
locipèdes ;
Hais attendu que s'agissant dans le brevet Thomson d'un ap-
pareil approprié aux roues de tous véhicules, même des véhicules
légers, son adaptalion aux vélocipèdes tend au même but, ré-
pond à la mémo fonction, et ne constitue, par suite, qu'unemploi
nouveau auquel la loi refuse le bénéfice de la brevetabilité;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède que, du chef du bre-
vet Dunlop, la compagnie demanderesse doit succomber au re-
gard de tons les défendeurs et que, dès à présent, son action est
dépourvue de tout fondement vis-à-vis de Déco orde m anche et de
la Société des Constructions vélocipédiqnes auxquels elle repro-
chait exclusivement, dans le dernier état du débat, d'avoir contre-
fait la garniture pneumatique ;
Attendu que, pour les mêmes motifs, la demande formée con-
tre la Compagnie Française des Pneumatiques Dunlop, par Da-
tifol, les Fils de Peugeot frères, la Société La Force, Vauieile et
llorel, est bien fondée en ce qu'elle tend à faire prononcer la nul-
lité du brevet Dunlop, pour défaut de nouveauté ;
fin ce qui touche le brevet Turner et Lindner :
Attendu que Turner et Lindner ont pris leur brevet à la date
du 8 anvier 1801 pour «nouvelle combinaison pour bandage élas-
tique et frein pour roues de vélocipèdes et autres » ;
"W-"^'!^' - . .- . . «•■■»■ -"nf^-ap-
— 264 —
Attendu que ce système, qui ne comporte point une garniture
pneumatique, comporte trois éléments ;
i^ Une jante munie de deux rainures latérales ;
2* Un bandage élastique d'une seule pièce, avec deux rebords
latéraux ;
30 Deux cordons circulaires qui viennent serrer les rebords la-
téraux du bandage dans les rainures de la jante pour la fixation
du bandage sur la dite jante ;
Attendu que Texamen des antériorités a conduit les experts &
retrouver la même jante dans les brevet et patente Thomas du
19 mars 1889, le bandage élastique, avec rebords latéraux, ainsi
que les deux cercles de fixation, dans les patentes Lake et Gon-
nolj, de 1887 et 1888, le bandage pneumatique sans chambre à
air, dans la patente Thomas de 1888, mais que Turner et Lindner
ont, pour la première fois, combiné ces éléments du domaine
public dans les conditions voulues pour permettre de mieux
maintenir sur la jante ondulée le bandage élastique creux, à
forte saillie, avantage qui réalise un résultat industriel et rend,
en principe, la combinaison brevetable comme application nou-
velle de moyens connus ;
Mais attendu qu'il ressort des documents de la cause, que
ledit brevet n'a jamais été fabriqué ni vendu en France, où, de
Taveu de la co mpagnie.de manderesse, il a été simplement offert
par des prospectus au public qui Ta dédaigné ;
Qu'en conséquence, en vertu de l'article 32 de la loi de 1844,
il a encouru la déchéance édictée, pour cause de non-exploita-
tion dans le délai de deux ans à compter du jour de sa déli-
vrance ;
Attendu d'ailleurs qu'en comparant au système Turner et
Lindner les appareils incriminés, les experts n'ont reconnu au-
cune conformité autorisant à admettre la contrefaçon ;
Qu'à tous égards, le brevet dont s'agit ne saurait donc être
invoqué comme un titre valable à l'appui des poursuites dont le
tribunal est saisi ;
En ce qui concerne le brevet Scott :
Attendu que si l'on se reporte au mémoire descriptif et aux
dessins qui y sont joints, l'on constate que le système breveté
consiste essentiellement :
!• Dans un bandage de roue creux et gonflé d'air sous la for-
me d'une bande de caoutchouc et de toile combinés munie de
renforcements ou arrêts (figure l'«) et fixé sur la jante de la roue
par des cercles ou rivets ; ^
2* Dans la combinaison d'un bandage en caoutchouc, doublé
de toile, destiné à être gonflé d'air, avec une jante métaUique
pourvue de rainures dans lesquelles viennent se fixer les bords
triel, la fixation d'un bandage en fer à cheval au moyen de
cercles- ligature 9 indépendants du bandage et de la jaote ;
Attenda qu'avant de rechercher les analogies ou dissemblances
qui existent entre le brevet Scott ainsi dëûni et le système Hi-
chelio, il échet d'examiner les antâriorités, nullités et déchéan-
ces opposées par ce dernier;
Attendu que les brevets français Turner et Lindner du S jan-
vier 4891, Roberlson du 11 avril 1891, les patenUs Harris Lake,
ConnoUy, Howard du Bois, les brevets et patentes Thomas, à les
supposer tous valables, ne présentent ni les nus ni les autres la
combinaison caractéristique du Scott, pas même le système
Thomas qui s'en rapproche le plus en ce qu'il comprend un ban-
dage en U aux bords terminés par un bourrelet, mais n'y asso-
cie pas les deux cercles-ligatures indépendants ;
Attendn qne Uichelin soutient encore que la patente Scott est
nulle aux yeux de la loi anglaise, et qu'en vertu de l'article 29
de la loi du 6 juillet 1844,1e brevet A-ançais doit partager le
même sort ;
Que la nullité invoquée résulterait d'un manque de conrormité
entre la spécification provisoire déposée le 22 octobre 1890 pour
perfectionnements apportés au bandage Thomson et laspécidca-
tion définitive du 10 mars 1691 où Scott décrit poar la première
fois, les cercles et rainures constituant les élémeuts de son mode
d'attache ;
Attendu qne la jurisprudence ëlar^ssant la sphère d'application
de la disposition précitée, a en effet admis que, dans certains
cas, les tribunaux pouvaient être conduits K apprécier la validité
d'un brevet étrauRer, an regard de la loi à laquelle il est soumis,
mais qu'ils ne doivent évidemment, pour la sécurité et l'autorité
de leurs décisions, nser de cette faculté que lorsqu'il s'agit d'ap-
pliquer on texte formel ou un principe essentiel dominant la
législation dont s'agit ;
Qu'il est certain que la loi anglaise prescrit un rapport étroit
— 266 —
entre les deux spécifications qui précèdent la délivrance de la
patente, mais que rien n'autorise le tribunal à penser quelle
exige, à peine de nullité, autre ishose que la relation et la con-
cordance que présentent, dans Tespèce,. les spécifications Scott,
ayant, Tune et Tautre, trait aux bandages pneumatiques et à
leur adaptation aux roues de toutes sortes de véhicules ;
Attendu que la déchéance alléguée pour défaut d'exploitation
ne peut être mieux accueillie par le tribunal ;
Qu'en effet, la saisie pratiquée à rencontre de Michelin, étant
du 30 juillet 1802, le délai légal, accordé au saisissant pour
commencer Texploitation de son brevet, n'était pas expiré et
que, dans ces circonstances, on ne saurait attacher à Tinaction
dans laquelle il est demeuré postérieurement, un effet rétroactif
que la loi n'a pas édicté ;
Attendu qu'il reste à rechercher quels sont les éléments da
système incriminé et s'il apparaît comme la contrefaçon du bre-
vet Scott ;
Attendu que les experts retrouvant dans le système Michelin
la combinaison caractéristique du brevet Scott, c'est-à-dire deux
cercles métalliques,non noyésiet un bandage en U dont les bords
se terminent par un bourrelet, ont admis la contrefaçon ;
Attendu que les renseignements et documents nouveaux ap-
portés au débat ne permettent pas d'adopter leur opinion ;
Qu'il y a lieu en effet d'établir une distinction essentielle que
les éléments de la cause n'ont pas mis tout d'abord en lumière ;
Qu'en ce qui concerne la forme des cercles-ligatures, alors
que dans le Scott, leurs deux extrémités sont rapprochées on
écartées au moyen d'une vis, opération qui diminue ou augmente
le diamètre de la circonférence, dans le Michelin les deux bouts
portent un crochet qui entre dans une encoche de la jante,
s'enlève à la main et permet de sortir de la rainure de la jante
le cercle élargi par un léger effort ;
Attendu que ces dissemblances de détail ne font pas obstacle à
la contrefaçon ;
Attendu qu'il en est autrement, si l'on a égard à la fonction
des cercles-ligatures ; qu'à ce point de vue, une différence impor-
tante se révèle ;
Attendu que dans le Scott, les dits cercles agissent par tension
au moment du montage et avant gonflement (fig. 6 de la planche
jointe au brevet) tandis que dans le Michelin, ils font corps avec
la jante et jouent librement par rapport aux talons jusqu'au
moment où ceux-ci viennent s'y appuyer sous l'action de la pres-
sion de l'air ;
Qu'ainsi les cercles-ligatures dans le Scott servent d'abord à
serrer le bandage pour assurer la fixation et l'étanchéité, puis
— 267 —
ensnite^à retenir les renforcements ou arrêts tandis que dans le
Michelin, ils ne servent de butée aux talons qu*après gonflement ;
Attendu en outre que le Michelin comporte une chambre à air
tabulaire étanche par elle-même, laquelle ne se retrouve pas
dans le Scott où Tétanchéité ne peut être obtenue sans le secours
des cercles-ligatures ;
Attendu en résumé, que Michelin a puisé dans le domaine
public les mêmes éléments que le Scott, mais les a combinés de
manière à leur attribuer une fonction toute différente, ce qui est
exclusif de la contrefaçon ;
Attendu que l'expertise justifie la même solution en ce qui
concerne Bousquet, Bapst et Hamet, Merland et Mathieu, aucun
des susnommés n'ayant fait emploi des cercles-ligatures qui
constituent le deuxième élément du Scott, tnais bien de contre-
jantes ou autres organes qui ne peuvent être assimilés auxdits
cercles ;
En ce qui concerne le In^evet Robertson :
Attendu qn*anx termes du brevet, le système Robertson com"^
prend les trois éléments suivants :
i« Un bandage constitué par une ou deux épaisseurs de caout-
chouc doublé de toile ayant forme d'U ou fer à cheval, et entou-
rant une chambre à air dilatable et indépendante ;
29 Une double jante métallique à deux rainures latérales ;
3* Deux cercles-ligatures placés à droite et à gauche de Taxe
de la jante, noyés dans le bandage et dont les extrémités sont
réunies par accrochage, torsion ou laçage, faisant de chacun
d'eux une pièce continue ;
Attendu que ce système a été déclaré brevetable par les experts
comme application nouvelle du bandage en U combiné avec deux
cercles ligatures noyés, ladite application permettant d'obtenir
un résultat industriel : ladémontabilité en cours de route ;
Attendu que les défendeurs combattent les conclusions de leur
rapport en soutenant que le brevet Robertson est nul pour insuffi-
sance de description, pour défaut de nouveauté et pour défaut
d'exploitation ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les défendeurs prétendent qu'un brevet devant se
suffire, c'est-à-dire contenir dans le mémoire descriptif et les
figures qui en précisent l'objet, les moyens exacts de reproduire
le système revendiqué, le brevet Robertson ne répondrait pas à
"bette exigence de la loi, parce qu'en se conformant aux indica-
tions fournies, il serait impossible de construire un bandage sus-
ceptible d'être fixé à la jante dont les rainures ne seraient pas
assez profondes pour l'envelopper ;
Qu'ils ajoutent que le modèle produit au débat comme ayan
Qu'il n'est pas possible de coDsidérer comme une inTcntion po-
sitive et pratique, nn procédé qui exige nn outillage spécial, une
habileté peu commune, de notables efTorts et qui surtout prive )e
cycliste d'une ressource iQdLspensB.ble en ne lui permettant pas
de renouveler plusieurs fois, en cours de route, l'opération dont
»'»git ;
Qa'es tête de son mémoire il déclare que son invention est re-
lative à un mode de construction et de fliage solide des ban-
dages que présente sa jante ondulée avec rebord extérieur plus
élevé que le fond de la gor^^e, indique brièvement que les extré-
mités des cordes en flls métalliques doivent être recourbées, tor-
dues ou lacées, et formule enûn ses revendications qu'il importe
de reproduire textuellement :
« En résumé, je revendique :
ai' Hamétbodepour fixer un bandage élastique à ta jante d'une
roue, en faisant ledit bandage avec bords arrondis ou des ner-
vures, contenant des fils métalliques ou des cordes non exten-
sibles et s'appliquant dans les creux latéraux d'une jante métal-
lique convenablement ondulée ;
«S» Dans la roue d'un vélocipède ou d'un autre véhicule, la
combinaison d'une jante métallique ondulée de manière à pré-
senter de chaque cété un creux latéral avec un bandage élasti-
que ayant ses bords ou nervures continus disposés de manière à
pouvoir s'appliquer dans lesdits creux et contenant intérieure-
ment des âls métalliques ou cordes non extensibles, le tout com-
me il a été expliqué en substance ci-dessus et représenté sur le
dessin annexé ; »
Qu'ainsi dans le brevet frangais, pas plus que dans la patente
anglaise correspondante, rien ne révèle la conception de la dé-
montabilité en cours de route, invention dont Robertson n'eût
certainement pas dédaigné de se prévaloir, s'il l'avait vraiment
imaginés ;
Qu'il a même pris le soin de spécifier que la torsion doit, de
— 270 —
préférence, être effectuée pendant la fabrication du bandage ;
Attendu que sans doute notre loi n'exige pas de revendications
expresses, et qu'il suffit que l'invention se dégage de Tensemble
des énonciations du mémoire descriptif;
Que c'est au résultat acquis qu'est attaché le privilège de
Fappropriation privative, mais que, pour les motifs qui précèdent,
il est permis de penser qu'aux yeux de Robertson lui-môme, la
démontabilité en cours de route étant Incompatible avec son
système, il ne pouvait avoir la prétention de s'attribuer cette
découverte ;
Sur le 3« point :
Attendu qu'en supposant brevetable l'invention de Robertson,
telle qu'elle a été précisée par l'expertise, il serait encore néces-
saire qu'elle ne fût mise en échec par aucune antériorité ;
Attendu qu'on ne saurait y opposer, à ce titre, la patente
anglaise Scott, rendue publique le 2 mai 1891, le brevet Turner
et Lindner, auquel Robertson n'a emprunté que la jante métal-
lique, la patente Parfray, le brevet Guilmet, la patente Harris-
Lake, les brevet et patente Thomas, la patente Howard du Bois,
le brevet Barlett et la patente Marley, aucun d'eux ne présentant
la combinaison du bandage en U et des cercles-ligatures noyés
à laquelle les experts ont attribué un résultat industriel ;
Attendu qu'il en serait autrement de la patente Trigwel prise
en Angleterre le 28 novembre 1890, si le tribunal admettait que
ladite patente entraine la nullité de la patente Robertson prise
le lendemain, et que cette nullité s'étend' au brevet français du
il avril 1891, comme le soutiennent les défendeurs en invoquant
l'article 29 de la loi du 5 juillet 1844 ;
Attendu que cet article est ainsi conçu :
<c L'auteur d'une invention ou découverte déjà brevetée à Tétran-
ger, pourra obtenir un brevet en f rance, mais la durée de ce bre-
vet ne pourra excéder celle des brevets antérieurement pris à
l'étranger. »
Attendu qu'à s'en tenir à ce texte, le tribunal devrait se borner
à rechercher si la patente Robertson a pris fin en Angleteri*e par
l'expiration de sa durée légale et qu'à cet égard, sa seule date
dicterait une solution négative ;
Mais attendu que la jurisprudence reconnaît aux tribunaux
français la faculté de prononcer sur la validité d'un brevet
étranger en faisant application de la loi à laquelle il est soumis ;
Que cette doctrine est conforme à l'esprit de la disposition
précitée, laquelle a eu manifestement pour objet de ne pas
placer la production nationale dans une situation inférieure à la
production étrangère .
nnllilé de celte deraière, celle da brevet français qtii ne saurait
avoir âne existence propre et indépendante ;
Attendu que la question, réduite k ces termes, ne peut offrir
•ocane difScalté ;
Altendo qu'il n'7 a point à se préoccuper de ce fait qne la
patente Trigwel n'a été déposée que S4 henres avant la patente
RobertsoD, et à examiner si elle avait reçu une publicité réelle ;
Qu'aux jeux de la loi anglaise, comme da la loi française, un
brevet est répnté coddd dès l'instant où il est demandé et est
eensé avoir été publié avant le dépét de la demande d'un
deuxième brevet, si court que soit l'intervalle de temps écoulé ;
Attendu qne la patente Trigwel comprend une jante & deux
gorges demi-circulaires disposées le long des bords de la jaste,
an bandage en forme d'arc aux bords munis de renflements
noTanl ou non des flis d'attache dont les extrémités sont rénnies
par on écron ou un moyen quelconque, d'une longueur circon-
fërencielle plus petite après serrage qne celle dea rebords exté-
rieurs de U jante, te tout démontable en cours de roule par
desserrante de l'écron ;
Attendu que les experts ont reconnu une entière conformité
•ntre ces éléments etceux contenus dans la patente Robertaon ;
Sut U i* pvint :
Attenda que dans l'bypothèse où le brevet Robertson eût été
valable, lea défendeurs seraient en droit de se prévaloir du défaut
d'exploitation commerciale ;
Qu'à la vérité cette preuve négative leur incombe en tant qne
demandeurs en déchéance, mais qu'ils la font dans la mesure où
ils penvent l'établir par les éléments qu'ils apportent an débat,
•t notamment en démontrant qu'il n'en a pas même été fait
-272 —
mention dans les prospectas et annonces de la compagnie deman-
deresse ;
Attendu que cette dernière n*a, de son côté, nullement fourni
la preuTe contraire qu'elle a tentée ;
Que le seul modèle présenté au tribunal comme ayant figuré
dans la course de Paris à Brest du 6 septembre 1891, n'offre au-
cun signe d'authenticité conforme au règlement qui a présidé à
ladite course et présente au contraire* sur le bandage, la marque
de Manchester comme origine de fabrication ;
Que d'autre part, les livres et factures, à l'exception de trois
bandages désignés par les initiales P. B. (Paris-Brest) ne portent
trace que de la commande de 36 jantes,qui par le dessin, reprodui-
sent bien le type décrit et figuré au brevet, mais ne sont pas un
des éléments caractéristiques de la garniture Robertson ;
Attendu que Ton ne saurait considérer comme sérieuse et ef-
fective Texploitation ainsi réduite à la construction de quelques
spécimens qui n'ont point eu un cours commercial ;
Attendu que l'opinion contraire des experts ne se conçoit que
parce qu'ils ont, à tort, envisagé comme un perfectionnement da
Robertson, le système Welch qui a été presque exclusivement
fabriqué et vendu par la compagnie demanderesse ;
Attendu que c'est le Welch objet d'un brevet sans valeur et
abandonné à raison de la divulgation antérieure, qui a doté le
cyclisme du résultat industriel dont on a fait indûment honneur
à Robertson ;
Qu'il s'en distingue et par la forme et par sa fonction' ;
Qu'il offre en effet une jante nouvelle munie seulement de re-
bords extérieurs dans laquelle se logent des cercles sans fin
noyés dans le bandage, combinaison d'éléments connus, mais réa-
lisant enfin la démontabilité pratique en cours de route, sans
le concours d'un outillage spécial et par le seul effort de la main ;
Attendu, au surplus, que fût-il considéré comme un dérivé du
Robertson les défendeurs qui tous, à l exception de six d'entre
eux, s'en voient reprocher la fabrication, ne pourraient être de
ce chef incriminés pour contrefaçon puisque,n'ayant pas d'exis.
tence indépendante, il tomberait sous le coup des mêmes nullités
que Robertson.
Sur les demandes principales et reconveniionnelles en dommages-
intérêts :
Attendu que les demandeurs en nullité du brevet Dnniop, de
même que les défendeurs, ne justifient d'aucun préjudice positif
et appréciable de nature à motiver des allocations pécuniaires ;
Que la condamnation de la compagnie demanderesse en tous
les dépens constituera une réparation suffisante ;
Attendu que la demande principale étant jugée mal fondée, il
dn H &Tril IS9I ;
Prononce la déchéance de ce dernier brevet et da brevet Tnr-
Der et Lindner pour défaut d'exploitation ;
Fait mainlevée entière et définitive des saisies pratiquées anz
mains des défendenrs & la requête de la Compagnie demande-
resse;
Rejette le surplus des conclusions des défendeurs.
Condamne ladite Compagnie demanderesse en tons les dépens
j compris les frais de l'expertise.
Sar l'appel de Michelin, du cbef de la non-allocation de
dommages et intérêls, et appel Incident de la Compagnie
Dunlop,devenue dans l'intervalle The Dunlop pneumatic
Tyre Company Umited, la cour a, sous la présidence de
H. HuutL, président, après plaidoiries de H** Allart et
PooiLLiT et conclusions de M. Bonnet, avocat général (1 ,
renda le !•' mai 1900 l'arrêt suivant :
La Cour, Considérant que, depuis l'introduction de l'instance
d'appel, la Société française des pneumatiques Dunlop s'est trans-
tormée en société anglaise, sous la dénomination de Tke Dunlop
pnevmatie Tyre Company (A-ance) timited; et que le sieur Price
aétéDommé mandataire et représentant, en France, de ladite
compagnie, aux termes d'un acte passé devant un notaire de
Londres, le 3 septembre 1891, et déposé au rang des minutes de
Cotteoet, notaire à Paris, suivant acte authentique du 16 du
même mois, enregistré ; que Price, es qualités qu'il agit, de-
mande à reprendre k l'instance pendante devant la cour, sur
l'appel du jugement rendu, le 6 mai 1807, par le Tribunal civil
de la Seine,et sur l'appel incident dudit jugement ; qu'il y s lieu
de M. l'avocat général BoMNiT, Gaz. du Pal.,
— 274 -
d'accueillir cette demande ; doane acte & Price, es qualités, de
sa reprise d'instance ;
Et, statuant sur Tappel interjeté par Michelin et Cie du juge-
ment rendu par le tribunal civil de la Seine le 6 mai 1897, et
sur rappel incident de la Compagnie française des pneumatiques
Dunlop ;
Considérant que le jugement attaqué a repoussé Faction en
contrefaçon intentée par la Compagnie des pneumatiques Dunlop
contre Michelin et Cie, que Tappel incident de la Compagnie
Dunlop remet en question la validité des brevets qu*elle oppose
à Michelin, et que la cour doit l'examiner avant de statuer sur
les dommages-intérêts réclamés par Fappel principal Michelin et
Cie, à raison de l'abus des poursuites excercées contre eux ;
Considérant que la compagnie anglaise prétend que ses adver-
saires seraient contrefacteurs des brevets Scott et Dunlop, dont
elle a la propriété ;
En ce qui touche le brevet Scott:
Adoptant les motifs du tribunal qui a jugé avec raison que, si
Michelin avait puisé dans le domaine public les éléments qui s^é-
taient trouvés réunis dans le brevet Scott, il les avait combinés
de manière à leur attribuer une fonction toute différente, ce qui
était exclusif de la contrefaçon ;
En ce qui touche le brevet Dunlop :
Adoptant également les motifs du tribunal ;
Considérant, en outre, que le pneumatique pour roues de vé-
locipèdes, décrit dans le brevet pris par Dunlop en 1888, n'est
qu'une reproduction des procédés inventés par Thomson dès Tan-
née 1846, pour la garniture des roues de tous les véhicules,môme
des véhicules légers ; que ces procédés employés pour les roues
des vélocipèdes n'ont pas donné lieu à un résultat industriel
nouveau,puisqu'ils servent au même but que lorsqu'ils sont adap-
tés à toute espèce de roues dont ils amortissent les chocs ;
Considérant que Michelin et Cie sont fondés à se plaindre de
ces agissements abusifs et à demander la réparation du préjudice
qu'ils ont éprouvé ; qu ; la cour possède, dès maintenant, des
éléments sufûsants pour en apprécier l'importance, et qu'il échet
de fixer à 10,000 francs la somme que la compagnie anglaise de-
vra payer à Michelin et Cie à titre de dommages-intérêts ;
Par CES motifs. Déclare Price, es qualités qu'il agit, mal fondé
dans les demandes, fins et conclusions de son appel incident,
Ten déboute ;
Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a repoussé les
poursuites en contrefaçon dirigées contre Michelin et Cie :
Ordonne qu'à cet égard il sortira son plein et entier effet ;
Et, faisant droit sur l'appel principal, dit que c'est à tort que
— 276-
de quelques jantes^ V achat de chambres à air^ la location
d'un petit atelier et des négociations en vue d'arriver à un
contrat d'exploitation^ menées avec une lenteur calculée et
toujours infru>ctueuses^ notamment lorsque les prospectus
distribués en France ne font jamais mention que de fabri-
ques à V étranger (1).
Des saisies pratiquées à tort, causent un dommage dont
il est dû réparation.
(Trib. civ. de la Seine, 30 juin 1897. — Bartiett et Gie française de
caoatchoac manufactorë c, Michelin, Besse et Hamond, Gomiot, etc.)
Ainsi jugé par le Tribunal de la Seine, sous la prési-
dence de M. SÉRÉ DE RiviÈRBs,après plaidoiries de M** Pouil-
LET, Allart, Poingaré, Pelletisr, Desjardin, par jugement
du 30 juin 1897 devenu définitif après transaction entre
les parties sur les dommages-intérêts.
Le Tribunal, Attendu qu'à la suite de vingt et un procès-ver-
baux de saisie-contrefaçon du ministère de Brumeaux^ huissier
à Parisien date des 2i, 22, 23, 28, 29, 30 avril, 7, 9 et 12 mai 1896
enregistrés et dénoncés, William Erskine Bartiett a, par minis-
tère du même huissier et suivant exploits en date des 29 avril,
5, 7, 16 et 18 mai 1896 enregistrés, assigné en contrefaçon de
son système de bandage de roues breveté le 7 novembre 1890,
sous le n^ 209^323, et en dommages-intérêts : l^' solidairement
(1) Sur la déchéance faute d'exploitation V. Ponillet, eod. loc,, 506 et
s. V. plus haut, Trib. Seine, 6 mai 1897, Dunlop et la note. Comp.
Trib. Seine, 24 février 1896, Bartiett c. Hochet, Dr. ind. de Bert,
1896, 359 et la Loi, 7 mai 1896. Dans cette première affaire le tribunal
avait, à propos du même brevet, décidé que, pour répondre au vœu de
la loi en ce qui concerne Texploitation d'un brevet en France, il suffi-
sait que l'inventeur eût fait des efforts sérieux pour en tirer parti et
que la conclusion d'un traité de licence, même résolu ensuite, et la lo-
cation d'un atelier de fabrication, joints à Tachât de matières premières
et à des commandes, môr^e restreintes, suffisaient pour empêcher la dé-
chéance faute d'exploitation. Depuis, le brevet Bartiett avait été cédé
en Angleterre à une puissante société anglaise de fabrication de caout*
chouc, qui certainement n'avait pas fait tous les efforts possibles pour
organiser en France une fabrication industrielle. On peut se demander,
néanmoins, si, en appréciant aussi sévèrement les tentatives d'exploita-
tion faites en France, par comparaison avec l'activité industrielle de la
société en Angleterre, le tribunal n'a pas un peu trop perdu de vue qae
dans le chiffre des affaires de la société anglaise, la fabrication du pneu-
matique pour vélocipèdes si elle était plus importante qu'en France
était loin de tenir la première place. Il y a lieu de signaler, que depuis
quelques années, la tendance des tribunaux est de se montrer plus ri*
goureux que jadis, en matière de déchéance pour non-exploitatioa.
A; T.
yw' ■ ■■ "r^^ff^^j^mivrw^
— 278 —
conclusions, Torrilhon et Gie opposent au brevet Bartlett une
antériorité tirée d'une patente Wilson ;
Attendu que Wilson a déposé le 49 août 1890 une spécification
provisoire qui peut se résumer dans les termes suivants, un ban-
dage composé d'une enveloppe en caoutchouc dur « courbé en
rond », contenant, « un cœur » en éponge de caouthouc qui n'est
pas entouré complètement par la bnnde mais a pour base le
fond de la jante :
Que Wilson déclare aussi pouvoir introduire dans sa combinai-
son le principe pneumatique consistant en un tube de caoutchouc
de meilleure qualité, doublé, au besoin d'une couche de caout*
chouc spongieux et même d'une toile métallique destinée à
préserver la chambre à air ;
Attendu que dans cette spécification se trouvent en principe
des éléments de la combinaison Bartlett ; bande cintrée et sup-
port de caoutchouc ou de tube pneumatique ;
Attendu toutefois que Ton n'y trouve rien qui concerne Je
mode d'attache du bandage à la jante ;
Attendu que le 14 octobre 1890, Bartlett a pris en Angleterre
une patente qui contient les mêmes descriptions que son brevet
français ;
Attendu que, le 16 mai 1891, Wilson a déposé sa spécification
complète qui a été approuvée après radiation d'un certain nom-
bre de passages ; que dans les passages maintenus oii trouve des
dispositifs qui n'existaient pas même en germe, dans la spéci-
fication provisoire, et notamment « le tube interne aplati dans
le fond des parties de la jante en queue d'aronde pour que la
pression de Tair dans un tel tube, tendant à lui faire prendre
une forme circulaire, presse les bords inférieurs du bandage
contre l'intérieur de la jante et le serre dans Cette jante » ;
Attendu que Wilson munit son bandage détalons destinés aie
retenir dans la jante ;
Qu'il parle, en eCTet, d'une bande u ayant des parties élargies,
des pieds se projetant, par lesquels la partie extérieure est main-
tenue dans la jante » ; .
Que ses dessins sont conformes & sa description et contien-
nent les bourrelets indiqués ;
Qu'il en résulte que son mode d'attache consiste dans la pres-
sion intérieure de l'air comprimé dans un pneumatique pour
maintenir dans sa jante en queue d'aronde une bande à talons ;
Que cette combinaison ne saurait être opposée comme une
antériorité au système de Bartlett qui en diffère essentiellement,
comme il va être démontré ;
Qu'ainsi l'on s'explique que le môme Office qui venait d*ao6or^
— 279 —
der la patente de BartleU n'ait pas repoussé la spécification dé-
finitiYe de Wiison ; •
Que, dans tous les cas, il résulte des termes formels de cette
spéciàcation complète que Wiison ne revendique point ce qui a
trait au mode d'attache du bandage ;
Qu'il s'exprime, en effet, de la façon suivante :
« Il est bien entendu que mon intervention n'a trait qu'aux
bandages ici décrits, les modes d'attache (de fixage) employés
étant incidentels, et je n'ai aucune prétention aux modes d'atta-
che ni per se ni comme partie de mon invention h ;
Qu'aussi bien il ne pouvait rien revendiquer à cet égard puis-
que sa spécification provisoire ne contenait rien sur le mode
d^attache des bandages ;
Attendu que Torrilhon et Gie soutiennent encore que l'on peut
objecter à Bartlett, comme antériorité à son brevet du 7 novem-
bre 1890, un premier brevet pris par lui le 28 mars de la même
année et déclaré nul, faute d'exploitation, par jugement de cette
chambre du 24 février 1896 ;
Attendu que l'invention résultant du premier brevet est essen-
tiellement différente de la seconde ; qu'elle consiste en un cylin-
dre de caoutchouc massif,forcé dans une jante étroite ; que l'on
peut qualifier ce bandage de caoutchouc plein nonobstant le vide
insignifiant ménagé en son milieu pour plus d'élasticité ;
Attendu que le second brevet n'est point un perfectionnement
dn premier dont il ne contient que la jante en queue d'aronde ;
Attendu que toutes les antériorités ont été examinées et repous-
sées dans une précédente instance par Binder, Périsse et
Th. Levy, experts^ dont le rapporta été entériné par jugement de
cette chambre en date du 24 février 1896 ;
Attendu que sans commettre de nouveaux experts, le tribunal,
&isant état de ce document, estime que la combinaispn Bartlett
n'est mise en échec par aucune antériorité ;
En ce qui touche la contrefaçon :
Attendu qu'aux termes de son brevet français du 7 novembre
1890 intitulé : Perfectionnements dans les roues à bande ou re-
bord élastique, Bartlett revendique notamment comme son in-
vention : <( une roue dont la jante est en forme de gouttière avec
les bords inclinés Pun vers Tautre et dont la bande consiste en
un cylindre -de caoutchouc ou autre matière élastique de plus
grande longueur que la largeur de la gouttière , de façon
qu^une fois en place elle se cintre, les deux bouts du cylindre
buttant contre le fond de la gouttière, tandis que les bouts de
côté du cylindre buttent contre les côtés inclinés de la gouttière,
Tespace entre la bande et la jante étant occupé soit par un au-
n«aii en éponge de caoutchouc ou autre matière analogue, soit
— 280 —
par un tube contenant de Tair comprimé, formé de préférence
de tissu et de caoutchouc » ;
Attendu que cette description et les dessins à l'appai ont été
soumis à Tezamen des experts susnommés ;
Attendu qu'aux termes de leur rapport Tinvention de Bartlett
consiste dans remploi d' « une jante métallique à bords inclinés
Tun vers l'autre , c'est-à-dire à queue d'aronde, un bandage de
caoutchouc formé d'une bande circulaire plate plus large qne la
jante, do façon qu'on est obligé de la cintrer pour rentrer dans
celle-ci, ledit bandage présentant ainsi avec rintérieur de la
jante un vide occupé soit par un tube pneumatique, soit par une
substance élastique, la ligne diamétrale du bandage circulaire
passant en dedans du diamètre extérieur de la jante. . . » ; *
Attendu que cette définition contient une lacune : qu'il y est
question d'un tube pneumatique dont on ne définit pas la subs-
tance ; que, de son côté, tout en reconnaissant dans le texte de
son brevet qu'il se sert de préférence d'un tube entoilé, Bartlett
laisse entendre qu'il pourrait employer une chambre à air ordi-
naire, c'est-à-dire à dilatation libre ;
Attendu que si Bartlett emploie une chambre à air entoilée,
ce n'est pas de préférence, c'est de toute nécessité ; qu'en efTet
l'expansion d'un pneumatique ordinaire chasserait de sa jante
le bandage plat de Bartlett ; que les expériences faites à cet
égard sont décisives ;
Attendu que ladite définition doit être précisée aussi en ce qui
touche la forme de la jante ; que cette forme est bien celle de
la cavité constituant la mortaise dans un assemblage en queue
d'aronde ; que, toutefois, la bande plate et épaisse qu'on y fait
entrer en la cintrant ne peut l'épouser exactement ; qu'en réa-
lité cette bande est retenue dans la jante, non par assemblage,
mais par le ressort de sa propre élasticité et le support de sa
garniture intérieure ; qu'elle est nécessairement épaisse, car son
élasticité, condition essentielle de son adhérence,dépend de son
épaisseur ;
Attendu que cette jante en queue d'aronde ou à bords incli-
nés l'un vers l'autre a été employée bien avant Bartlett ; qu'on la
trouve notamment dans les patentes Davis du 5 juillet 1853,
Isang et Bornez du 1" décembre 1868, Stone du 22 janvier 1889,
et dans les brevets Garmons du !•' mai 1883, et Ghalliner du
5 février 1889 (pages 22 et 28 dudit rapport) ;
Attendu qu'il faut enfin retenir de la définition des experts
ce point essentiel que « la ligne diamétrale du bandage circu-
laire passe au dedans du diamètre extérieur de la jante » ;
Que, dans le système de Bartlett, il ne peut en être autre-
ment, sans quoi la bande s'échapperait de la jante ; qu'ainsi,
.i..iji^ijji|^^|xv-^ iji jiiiKjjjj^j*w*iwj.,ji^w^iifJ.M«w l'rfi' ivpn r'ia^^i^j
— 282 —
et pourvue de talons indispensables, tandis que celle de Bartlett
est nécessairement entoilée et restreinte dans sa dilatation ;
Attendu que la combinaison elle-même diffère essentielle-
ment de celle de Bartlett ;
Que chez tous les défendeurs, sauf Gallus et La Force, le lien
de la combinaison est la pression intérieure de Tair s'adaptant à.
des organes appropriés pour l'utiliser complètement, tandis
que, chez Bartlett, c^est principalement Télasticité de la bande
et des supports jointe à la pression extérieure de la charge qui
maintient les éléments juxtaposés dans une jante en queue d'a-
ronde ;
Attendu que la solution trouvée par Bartlett ne Ta pas con-
tenté lui-même ; qu'il a préféré construire et faire breveter en
Angleterre, le 20 juillet 1891, et en Amérique le 26 septembre
de la même année, la combinaison à bourrelets bloqués par un
pneumatique à libre dilatation ;
Attendu que l'exploitation exigée de Tinventeur pour enrichir
le travail national est aussi le critérium de Tinvention ;
Que si Bartlett a construit et exploité à Edimbourg (ce qui
n*est pas démontré) le produit dessiné dans son brevet français
du 7 novembre 1890, il ne paraît pas l'avoir construit ni même
importé en France ;
Que le seul produit pour lequel Bartlett ait cherché à se don-
ner Tapparence d*une exploitation en France est le bandage à
talon qu'il appelle pneumatique Glincher et pour lequel il n*a
Jamais eu de brevet français ;
Que c*est pour ce pneumatique qu'il avait traité momentané-
ment avec Rochet ;
Que c'est toujours du Glincher qu'il est question dans la
correspondance produite en preuve de la prétendue exploitation
de Bartlett ; que cette exploitation alors même qu'elle serait
sérieuse ne serait donc pas opérante ;
Attendu au surplus que cette exploitation n'a jamais été sé-
rieuse ;
Que même en faisant état de la correspondance échangée en-
tre Bartlett et son représentant, le tribunal ne peut voir dans
l'envoi en France d'un ouvrier anglais pendant un mois, dans
le cintrage de quelques jdntes,et l'achat de chambres à air, dans
la location d'un petit atelier, bref dans la lenteur calculée de né-
gociations toujours infructueuses, que des tentatives plus appa-
rentes que réelles, sans proportion avec les ressources de la
puissante compagnie anglaise & laquelle Bartlett a cédé ses bre-
vets;
Qu'il faut en conclure que le Nord British Rubber Compa-
.Vf'
- 284-
Ordonne toutefois que le jugement sera inséré aux frais des
demandeurs dans six journaux au choix de Michelin et Gie, trois
au choix de la Société Gailus etc.. le coût de chaque insertion
ne devant pas dépasser 200 francs ;
Déboute respectivement en cas de besoin les parties du sur-
plus de leurs fins et conclusions ;
Condamne Bartlett et la Société française de caoutchouc ma*
nufaeturé en tous les dépens.
Art. 4141.
bibuographie (1).
Ouvrages généraux
sur la propriété intellectuelle.
La propriété industrielle^ artistique et liUérairey par
Claude Couhin, docteur en droit, avocat à la Cour de Paris,
t. 2 et 3, Larose, in-8**, 1898, Paris. — Le premier volume
de cet ouvrage, paru il y a quatre ans, contenait la partie
théorique, la partie historique etles textes législatifs avec
citation des travaux préparatoires. Les deux volumes qui
viennent de paraître contiennent la doctrine et la juris-
prudence sur toute la matière et se divisent ainsi : prin-
cipe fondamental commun à toutes les branches delà
production (principe de la liberté du travail) ; propriété
de la personne et du nom; propriété des conceptions
nouvelles (inventions industrielles, ouvrages de la pensée
considérés au point de vue de Tédition, c'est-à-dire de la
publication par la voie de l'impression ou autres moyens
analogues, œuvres dramatiques et musicales envisagées
au point de vue de la représentation, dessins et mo-
dèles de fabrique) ; propriété des signes distinctifs (mar-
ques de fabrique et de commerce, noms servant à dé-
signer soit des fabricants, soit des fabriques, soit des
lieux de fabrication) ; atteintes à la propriété industrielle,
artistique et littéraire qui relèvent plus particulièrement
des articles 546 et 1382 du Gode civil et notamment des
(1) Dans chaque catégorie les comptes rendas sont classés dans i'or*
dre soirant : ouvrages de caractère iateraatioaal, ouvrages français,
ouvrages étrangers par ordre alphabétique de pays.
onlrefaçon en matière de propriété induatrielle,îittiraire
irtistique (Thèse pour l8 doctorat, Paris, 1899), par
JABRY.
ropriété littéraire, <a"tistiqite et industrielle en Egypte.
irticle très précis et très documenté de M, Gaston Phi-
ancien magislrat, avocat à la Courd'appel intemalio-
I d'Alexandrie {Journ. dr. int. priv., 97. 944).
rRàOBS BBLATIF8 A LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE
EN GÉNÉRAL.
Droit comparé,
ecueit général de la législation et det traités cancer-
t la propriété industrielle, publié par le Bureau inler-
onal de rOnion pour la protection de la propriété
istrielle, t. III, Berne, 1899. — Ce volume, qui fait
B aux deux dont nous avons déjà rendu compte, Ann.,
133, comprend les lois des Etats de l'Afrique, de l'A-
ique et de l'Océanie. Lorsqu'on ne trouvera pas dans
Annales la législation de tel ou tel pays secondaire
t au £ecuet2 de Berne qu'il faudra se reporter. Nous
as cru inutile de publier les quelques documents lé-
atifs qui, de date ancienne, n'ont été que récemment
lelllis et, par suite, n'onl pas trouvé place dans les
aies mais figurent dans l'ouvrage publié par le Bureau
Berne, ainsi pour la République dominicaine et le
ique. Le 4' et dernier volume renfermera les traités,
mentions et déclarations ainsi qu'un supplément poar
Lois promulguées depuis l'apparition du premier vo-
e et un index alphabétique général des matières.
ableau des législations en matière de propriété indut-
Ue et tableau des taxes de brevets (K Prop. ind,, 1900,
\ tS2).
ssociation internationale pour la protection de lapro-
'téinduslrielte,i" année IS91, Congrès de Vtenne,l vol.
», Paris, 1897, Le Soudier. — Le premier annuaire
la nouvelle association fondée à Bruxelles en 1897
tient les procès-verbaux du Congres de Vienne et des
ports quilui ont été soumis. Le programme contenait
Lusivement la révision de la Convention d'Union de
— 288 —
rapporteur; 2« Création dans chaque pays d'un service de
la propriété industrielle et d'un dépôt central pour la
communication au public des brevets d'invention, des
dessins ou modèles industriels et des marques de fabri-
que ou de commerce, André Taillefer, rapporteur. V. — (A)
Brevets d'invention : 1*» Entente pour l'unification des for-
malités dans la rédaction des demandes de brevets, no-
tamment pour l'unification des formats de dessins, Périsse
et Ch. Thirion fils, rapporteurs, Fehlert (Allemagne) ;
S"" Mode de publication officielle des brevets, André Taille-
fer rapporteur, Fehlert (Allemagne) ; 3» Entente pour une
classification uniforme des brevets, Poinsard rapporteur,
D' Martius (Allemagne); 4"" Etudes des effets produits
dans chaque pays par le système en vigueur pour la dé-
livrance des brevets : Abel rapporteur, Von Schùtz (Alle-
magne), Emile Bert (France), Hardingham (Grande-Breta-
gne), Pilenco (Russie), ImeNSchneider (Suisse) ; 5** Y a-l-
il lieu d'instituer des juridictions spéciales en matière de
propriété industrielle ? D' Katz (Allemagne), Armengaud
jeune (France), Edmunds (Grande-Bretagne), Jitta (Pays-
Bas) ; 6^ De la répression pénale de la contrefaçon : P.Wau-
wermans (Belgique). (B) Dessins et modèles industriels,
D** Katz, Schmid et Osterrieth (Allemagne), de Ro (Belgi-
que), Ducreux, Soleau (France), Edmunds (Grande-Breta-
gne). (C) Marques de fabrique et de commerce : lo Marques
descriptives, Loubier, Osterrieth (Allemagne)» Georges
Maillard (France), Cari Lundh et Klaus Hœl (Norvège). (D).
Concurrence déloyale : 1<> Etude des différentes formes de
la concurrence déloyale dans le commerce international :
Mintz (Allemagne), rapporteur ; 2* Nom commercial, Mau-
noury (France), D' M. Kerly (Grande-Bretagne).
Association internationale pour la protection de la pro-
prié té industrielle y 3*ann^cl899, Congrès de Zurich^ 1 vol.
in-8*, Paris, 1900, Le Soudier. — Sommaire des rapports
présentés et discutés au Congrès : I. — De la revision de la
convention de Paris, Georges Maillard. IL — Dessins et mo-
dèles industriels, Frey-Godet. III. — Classification interna-
tional des brevets d'invention, des marques de fabrique
et des dessins et modèles industriels. Périsse et Mainié
IV. — Des juridictions spéciales en matière de propriété in-*
lien Hintz. V[. — Des moyens pratiques d'assurer l'accès
des tribunaux aux étrangers, notamment en matière de
propriété industrielle, J. Jilta. VU. — De la prolectinn
temporaire de la propriété industrielle aux expositions
internationales, Henri Mesnil. — Annexes : Observations
de M. Poinsard sur le projet de classification ; éludes de
U'Geoi^isurrunification des formalités, nolede M. Lloyd
Wise sur l'examen préalable.
Congrès international de la propriété industrielle, Paris,
jMïfci 1900.— Le programme est dans la Propr. ind., 1899,
?■ M4, les vœux sont reproduits Propr. ind. , 1900, p. 136,
et Qne analyse fort'bien faîte des travaux se trouve dans
le même recueil, 1900, p. 132 et lie. Les rapports et pro-
cès-verbaux forment un volume qui fera suite aux travaux
de l'Association internationale pour la protection de la
propriété industrielle et contiendra notamment les travaux
de HH. Berl (mode de délivrance des brevets), LavoUée
(durée des brevets). Le Tellier(déflnition de la brevetabi-
lité), Mack (inventions exclues de la protection), Fayollel
(délai de grâce pour le paiement des taxes de brevets),
Huard (obligation d'exploiter le brevet) (1), Taillefer (pu-
blication des brevets), Georges Maillard (juridiction en
matière de brevets), Armengaud jeune (moyens de facili-
ter les demandes de brevets dans les pays étrangers),Geor-
ges Maillard (des moyens d'assurer la paternité d'une dé-
couverte même en dehors d'un brevet), Georges Maillard,
ioase, Solean et Taillefer (dessins et modèles de fabri-
que), Maunoury (définition de la marque), Victor Fu-
moaze (marques à exclure de la protection), Allart (du
droit a la marque), Darras (des marques au point de vue
international), Gassand (marques collectives), Mack et
Gariie (des raisons de commerce ou Ormes), Fère (de la
prolectioQ des noms de localités), Garbe (des récompenses
industrielles ou honorifiques), Couhin (des moyens de
combattre la concurrence illicite), Seligman (de la procé-
dure et des sanctions en matière de marques).
(1) A ciler également le traTsil do M. von Schûli sur la m^me quos-
— 290 —
i
Congrès international des Associations d'inventeurs,
Paris, septembre 1900. Voir programme, vœux el compte-
rendu dans la Propr. ind., 1900, 30 et 167. — Les tra-
vaux ont porté tant sur Texamen de la propriété indus-
trielle au point de vue économique que sur les principes
de législation en ce qui concerne les droits des ouvriers et
employés sur les inventions (rapport de M. Duchesne), la
protection des œuvres scientifiques, les projets des artistes
industriels, ingénieurs, architectes, etc. (rapport de M. La*
voix), les créations des arts industriels.
Congrès commercial international de Philadelphie, oc-
tobre-novembre 1899, compte-rendu dans la Propr. ind,^
1899, p. 210. — A signaler les rapports de W. C* Barker,
sur les brevets internationaux ; C. H. Duell, sur la va--
leur et l'importance des marques de fabrique pour le corn--
merce; F. E, Stev^art, sur quelques anomalies dans
la législation des Etats-Unis sur les marques (1) ; For-
bes, SUT les exigences actuelles du commerce international
en matière de marques de fabrique ; M. S. Wise, sur quel-
ques conseils concernant le choix dune marque de fabri-
que ; Greeley , sur les marquas de fabrique dans leurs rap-
ports avec le commerce international, — Sur le rapport
de M. Forbes a été votée la proposition suivante :
€ Le Congrès envisage comme nécessaire, pour assurer
au commerce une protection complète^ que les lois des di-
vers pays en matière de marques de fabrique soient éta-
blies d'après un type commun ; il envisage les conféren-
ces tenues en vertu de la Convention pour la protection
de la propriété industrielle conclue à Paris le 20 mars 1883
comme l'organe le mieux approprié pour la discussion de
ces lois et pour les propositions à faire aux divers pays.
Il envisage, en outre, que tous les pays faisant partie de
runion créée par la Convention pour la protection de la
propriété industrielle conclue à Paris le 28 mars 1883 de*
vraient adhérer à l'Arrangement concernant Tenregistre-
ment international des marques de fabrique ou de com-
merce. »
(1) Aa Congrès de T American Bar Association à Ba(ralo,a été présent^
un j^pport sar la révision de la législation américaine en matière
marques (la Propr, md., 1899.193).
''TTfirT'TrTf ;■ V- '*^u '':f »WL|^-«f\?FS'î'rws-r^J«5ir?^
— 292 -
p. 79) ; les œuwes de sculpture industrielle (voir projet
du Gouvernement, p. 80) ; les inconvénients ^ au point de
vue de la propriété industrielle^ de la proposition de loi
de M. Cruppi, votée par la ChambrCy sur les expertises en
matière criminelle et correctionnelle (voir mémoire à la
commission sénatoriale, p. 81), les indications de prove-
nance (voir rapport, p, 84), enfin des conférences de pro-
pagande par le président de l'Association, M. Pouillet, à
Paris (p. 93), M. Joseph Lucien Brun, à Lyon (p. HO),
M. Habasque, à Bordeaux (p. 114), analyses d'autres con-
férences à Paris, à Lyon et à Reims (p. 125, 133, 139).
« Cinquantenaire de r Association des inventeurs et artis*
tes industriels. — Conférence par le président, M. Claude
CouHiN, le 23 novembre 1899, sur les réformes à apporter
dans la législation française en matière de propriété indus-
trielle (Journal la Loi du 29 novembre).
Bulletin du Syndicat des ingénieurs-conseils en matière
de propriété industrielle. — 1899, n® 36. Sténographie de
la discussion d'une proposition de MM. Assi et Genès pour
la protection des dessins et modèles des fabriques étran-
gères. — 1900, n° 37. Discussion de deux questions rela-
tives à l'interprétation de la Convention d'Union de 1883.
L'assemblée générale des syndicats a émis l'avis : 1" qu'un
Français peut se faire breveter d'abord dans un des pays
de l'Union de 1883 et invoquer ensuite le droit de priorité
prévu par la Convention d'Union ; 2« que le cessionnaire,
ressortissant à l'Union, d'un brevet pris dans rUnion^par
un inventeur étranger à l'Union, peut invoquer l'article 8
de la Convention pour introduire des objets, conformes
au brevet, fabriquée dans un autre pays de l'Union.
Réformes urgentes à apporter à la législation française
sur la propriété industrielle^ par A. LAvoix,ingénieur-con-
seil (la Revue des Revues^ IB octobre 1899).
Allbmâonb.
Die paientamtlichen und gerichtlichen Enlspheidungen
in Patentuster Mund Markenschutz sachen, Cari Heymaans
Verlag, Berlin. — Collection de jurisprudence, autrefois
cisions en matière de brevets, marqaes, etc. (BerliD,
■•«OO, Cari Heyinanna Verlag).
AUTRICOI .
Die Vorschriften, betreffend den Schutz der Erflndungen,
irken und Htister, sowie das Patentgeselz vom 11 jan-
:r 1897 mit Erlxuterungen aus der Materialen dièses
letzes 068 prescriptions relatives à la protection des in-
Dtions, marques et modèles, avec la loi du 11 jaDvier
97 et un commentaire explicatif)> par Paul Schiilz (Manz'
he Gesetz-Ausgabe, Wien, 1898).
Gbande-Bbbtagnb.
Digest of décisions in the Paient-Office and Ihe United
jtes Courts in palent$, trade-marks, copyrights and lo-
fa, par A. W. Hart (1898, Annual, Supplément au Di-
iste de Hart, 1888-1898, Chicago, Callaghan andCo).
Italis.
Manuale délia Proprieta industriale, par Hoïsb Amab,
ocal et professeur agrégé de droit industriel à l'Univer-
.é de Turin (Milan, Sonzogno, 1900). — C'est un Impor-
nt traité de 500 pages, qui a pour auteur un des juristes
i plus compétents en la matière et sera un guide exeel-
nt pour qui voudra se mettre au courant de la législation
ilisnne. Les questions internationales sont également
lilées dans l'ouvrage avec le plus grand soin.
ËDO. PomiXBT.
Sas-AuÉniQDB .
Patentes y Marcas, revista sud americana de la proprie-
1 intelectual é industrial, revue mensuelle paraissant à
lenos-Ayres, Piedad 343, — Cette revue, sous la direction
M.T. A. Le Breton, est destinée à fournir tous renseigne-
mts utiles sur le mouvement de la propriété inleltec-
elle et industrielle dans l'Amérique du Sud.
Sdissb.
Der gewerbliche Rechtsschutz in der Schweiz (la protection
i droit industriel en Suisse). — Recueil des lois et traités
. - TTT-'
- .296 —
Le droit de IHmenieur et le droit de la société^ par RsNi
GoDNARD. — Article dans la Revue d'économie politique
du 5 mai 1899.
Manuel pratique des brevets d'invention et de la contre,
façon, par G. du Laurens de la Barre, avocat à la Cour de
Paris, 1 vol. in-12, Paris, 1898, Fontemoing. — C'est un
exposé succinct mais complet, qui s'adresse surtout aux
ingénieurs, constructeurs,'industriels et commerçants ; il
y trouveront des modèles pour Ta^îcomplissement des for-
malités légales et administratives, relatives à la demande
et à la cession des brevets, ainsi qu'un tableau compara-
tif des législations étrangères les plus récentes, avecTin-
dicaUon du coût des brevets et des exigences de la loi
pour le paiement des annuités. C'est un ouvrage à recom-
mander à tous ceux qui s'intéressent à ces matières spé-
ciales. EUG. POUILLET.
Les brevets de perfectionnement et certificats d'addition^
thèse de doctorat, par André Gallard, avocat près le tri*
bunal civil de Bourg.
Responsabilité des usagers d'un produit contrefaU. —
Article de M. Pooillet, dans la Prop, ind,, 1900. 80.
Des cessions de brevets d'invention et des concessions de
licence, par Jean Saint-Quentin, docteur en droit, avocat à
Valen^iennes, in-8'> de 157 p., Paris, 1901, Rousseau. —
Excellente thé .o sur une difficile question.
Allemagne.
Handbuch des deutschen Patentrechtes in rechtsverglei-
chender Darstellung (Manuel du droit allemand des bre-
vets, avec droit comparé), par le professeur Kohlbr (les
deux premières livraisons en 1900, Mannheim, chez
J. Bensheimer).
Bas Wesen des Patentschutzes und sein VerhasUniss zum
Urheberrecht (L^ nature de la protection des brevets et ses
rapports avec le droit d'auteur), par le conseiller de jus-
lice Reuling, de Berlin. — Article dans la revue Gerverbli-
cher RechtsschiUz und Urheberrecht^ 1901, p. H.
— 298 —
trîchienne sur les brevets d'invention), par Sigmund Gold-
BERGER (1899). — Commenlaipe élogieusement cité dans
la revue Gew. B. s., septembre 1900, p. 292.
Die patentrechtliche Lizenz (La licence de brevet), par
D» Lbo Munck, avocat à Vienne (Berlin, 1897, Cari Hey^
manns Verlag).
Belgique .
Traité des brevets d'invention et de la contrefaçon in-
dustrielle. Commentaire comparé de la législation belge»
de la législation française et de la convention internatio-
nale de 1883, par Louis André, avocat à la Cour d'appel
de Bruxelles, 2 forts volumes in-8o, 1899, Bruxelles chez
Emile Bruylant, Paris chez A. Ghevalier-Marescq et Cie.
— La législation française et la législation belge sur les
brevets sont foncièrement semblables et Ton invoque
souvent la jurisprudence d'un des deux pays dans l'autre.
Il y a pourtant entre les deux lois quelques différences,
notamment au point de vue de la nouveauté, des perfec-
tionnements, des brevets 'd'importation, des déchéances,
de la contrefaçon, de la confiscation. L'originalité de l'ou-
vrage de M. André est de présenter toute la matière des
brevets d'invention au point de vue franco-belge en indi-
quant la double jurisprudence qui peut être invoquée de
part et d'autre et les points sur lesquels il y a divergence
de législation ; il est également tenu compte, dans l'étude
de chaque question, des articles de la Convention de 1883.
La disposition de l'ouvrage est claire et la jurisprudence
rapportée très complètement, autant que nous en avons
pu juger par nous-mêmes. Euq. Pouillet.
États-Unis.
De la nouvelle législation des Etat»Unis en matière de
brevets. — Etude dans la Prop. ind., 1899. 24, sur les
demandes déposées aux Etats-Unis pour des inventions
ayant déjà fait V objet d'un dépôt à Vétranger,
Grands-Brbtaonb.
Journal of the Society of Patent Agents. — Bulletin
mensuel fondé en janvier 1900 pour reproduire les travaux
c
• J-T- , , , . . -r.^^
— 302 —
Allemagnb.
Ueber die Neuheit der Geschmacksmuster (Sur la nou-
veauté des modèles de goût), par Sghanzb {G. B. s., août
1898, p. 231).
États-Unis.
La protection des modèles aux Etats-Unis. Article en
allemand par Max Georoii, agent de brevets à Washington
{G. R. s., 1898, t. 97 ; 1899, p. 266).
GONQURRENGE COMMERCIALE.
DaOIT INTERNATIONAL BT COMPARÉ.
Premier Congrès international de rindustrie et du commer-
ce des spécialistes pharmaceutiques, Paris, septembre 1900
(Compte rendu par M. Maurice Leprince, secrétaire géné-
ral, 1 broch. gr. in-8* de 166p., comprenant les rapports
et les procès-verbaux détaillés) (1). ^ La 3* section était
consacrée à la garantie des marques de fabrique et de
commerce des spécialistes pharmaceutiques dans les dif-
férents pays et dans les rapports internationaux. Confor-
mément au rapport de M. Comarles résolutions suivantes
ont été adoptées : c 1» les marques de fabrique devant
être protégées indépendamment des produits qu'elles re-
vêtent; il en résulte que la marque de fabrique d'un médi-
cament quelconque doit être protégée même dans le pays
où ce médicament est prohibé ; 2<> le nom d'un fabricant
ou d*un inventeur, fût-il inscrit dans un Codex ou tout
autre recueil officiel de médicaments, constitue une pro-
priété qui doit être protégée partout, sans distinction de
nationalité et sans obligation de dépôt, à moins que ce
fabricant n'en ait fait volontairement abandon au domaine
public; 3^ l'emploi des désignations usuelles, telles .que
le nom scientifique d^un médicament ou le nom de la
forme qu'il affecte, comme par exemple les mots capsufes,
élixirSy globules^ granules, ovules^ pilules, poudres, sels,
sirop, solution, suppositoires, vins, etc., étant absolument
(1) Une antre brochure de 16 pages a été pnbliée par la Direetioo
général de Texploltation à l'Exposition universelle.
■>i'»--w^..,v »^* jj;i T^w* , -wn ••■«i ■•■i-'fif^'. !. '"•'Wffl'-^T'u t^wv; l'srr
— 304 —
réciprocité diplomatique de la Convention d'Union de 188S
avec les résultats de la récente Conférence de Bruxelles.
Dos Waarenzeichenrechtt nebst einem Ueberblick ûber
die Bestimmungen wider den unlauteren Wettbewerb nach
den Gesetzgebungen aller lÂnder, par Paul Schmid, avocat
à Berlin (gr. in-8, Hirschfeld, Leipzig, 1899). — C'est un
traité systématique du droit des marques et de la répres-
sion de la concurrence déloyale, tels qu'ils résultent dans
les principaux pays de la législation et de la jurispru-
dence.
Francs.
Traité des marques de fabrique et de la concurrence
déloyale en tous genres (notamment en matière de noms,
dénominations d'établissements et de produits, formes de
flacons ou d'enveloppes, étiquettes, annonces, prospectus,
enseignes, titres d'ouvrages, louage, secret de fabrique),
4« édition, par Eugène Pouillet, avocat à la Cour de Paris,
ancien bâtonnier (très fort vol. in-8, Paris, 1898, Marchai
et Billard).
Traité pratique des marques de fabrique et dé commerce,
par Abmengaud aîné, ingénieur-conseil (1 vol. in-8 de 319 p.,
Paris, 1898, librairie technologique Armengaud aîné). —
C'est un excellent manuel pratique, clair et sobre, pour
les négociants qui n'ont pas le temps de compulser des
livres de droit et cherchent vite les renseignements essen-
tiels. Us trouveront, outre les renseignements, de nature
juridique, sur le droit à la marque en France et dans les
pays étrangers, d'intéressantes statistiques sur le mouve-
ment commercial entre la France et les principaux Etats.
De la répression en France de la contrefaçon de marques
commise à ^étranger. — Etude par M. le marquis de HAUi-
LARD Lafayb, Revue internationale de propriété industrielle^
mai 1899.
Des rapports entre la concurrence déloyale et la diffa-
mation. — Etude par Paul Suuisn, chargé de conférences à
la Faculté de droit de Paris (Ann. dr. comm.^ 1898, p. 33} •
-"?•
— 306 —
et des tribunaux, avec la liste des marques libres qui ont
été publiées.
Das Geselz zur Bekàmpfung des unlauteren Wellbetoer-
beSfVom 27. mai 1896 (La loi pour combattre la concurrence
déloyale).— Commentaire par J. Bachem et Roerjbn (3* édi-
tion, Dupcker et Humblot, Leipzig, 1900) (1).
Dàs Gesetz zur Bekàmpfung des unlanteren Wettbewerbes
(La loi pour combattre la concurrence déloyale),par Stefan
(2« édition, 1899).
Das Verhàltniss des Namensrechts zum Firmenrecht (Les
rapports du droit au nom avec le droit à la firme), par
Olshauskn (Franz Vhalen, Berlin, 1900).
La protection des titres de journaux et de livres {Rechts*
schutzder ZeUungs= und Bûcher =^ 7'i7ôf),étude sur les
moyens insuffisants que les tribunaux ont à leur disposi-
tion pour combattre la concurrence déloyale en cette ma-
tière, par Dr.WERNER Brandis,1 brochure in-8o,en allemand,
Berlin, 1898, jur. Franz Lipperheide. — L'auteur démontre
tout d'abord que Tusurpation du titre d'un journal ou d'un
livre ne peut être considéré comme la contrefaçon d'une
œuvre de resprit,mémesice titre constitue une création de
l'intelligence, parce que le titre a pour but non la commu-
nication d'une pensée, mais simplement la désignation
d'une œuvre. Un titre de journal peut servir de marque de
fabrique pour la désignation de certains produits (ex. : die
Modenweltj le monde de la mode, décision du Patentamt,
12 mars 1898), mais en lui-même il n'est pas une marque, il
est le nom d'une entreprise (cf., pour le titre « ManufaklU'
rist », Reichsgericht, 20 mars 1896).— La jurisprudence al-
lemande, pour tout ce qui est antérieur à la loi sur la con-
currence déloyale, n'accorde aucune protection contre
l'usurpation d'un titre de journal ou de livre (voir Reichs-
gericht, 27 octobre 1897, Die Modenwelt contre Kleine Mo-
denwelt et Grosse Modenwelt). Et pourtant le D' Werner
Brandis fait observer qu'on aurait pu trouver une base à
(i) Voir, pour la criliqae de la jurisprudence, un article de Hoeren,
die Wirkungen des Gesetzes zur Bek&mpfune; des unlauteren Wett*
bewerbes ((?. fl. j., juin 1899, p. 169).
— 307 —
racUon en concurreDce déloyale, sinon dans l'article 1382
du Code civil pour les pays rhénans ou les dispositions
analogues du droit prussien, au moins dans ce principe
fondamental que quiconque commet un vol doit réparer le
préjudice causé. D'autre part, le § 826 du nouveau Code
civil allemand dit que c quiconque cause volontairement
préjudice à autrui, d'une manière contraire aux usages
loyaux(m einer gegen die guten Sitten verstossenden Weise)
est tenu de réparer le dommage >. — Le § 3 de la loi du
27 mai 1896 pour combattre la concurrence déloyale oblige
à la réparation du dommage c quiconque utilise dans le
commerce un nom, une forme ou la désignation particu-
lière d'une maison de commerce (Erwerbsgeschàft)^ d'une
entreprise industrielle ou d*un imprimé {Druckschrift)^
d'une manière qui est destinée et propre à faire confusion
avec le nom, la forme ou la désignation particulière dont
un autre se sert à bon droit » ; une action en cessation
du préjudice peut être également exercée. — Outre ces
indications fondamentales la brochure dont nous rendons
compte contient de nombreux exemples de titres usurpés
et le compte rendu détaillé du procès relatif au titre du
j ournal Modenwelt.
AUTBICHB.
Concurrence déloyale und Unlauieren Wettbewerb, con-
férence faite à la Société des juristes de Vienne, 9 février
1898, par D' Jakob Wechsler, Hof und Gerichlsadvocatin
Wien, br.in-8% Vienne, 1898, Manz^sche K. u. k. Hof =Ver-
lags = und = Universitàts buchhandlung. — C'est une
étude, plutôt théorique que pratique, où l'auteur passe en
revue les différents systèmes sur lesquels les jurisconsul-
tes ont basé la répression de la concurrence déloyale :
système français d'après lequel tout abus de la liberté de
concurrence par atteinte aux droits du concurrent donne
lieu aune aclion en réparation du préjudice causé; système
suisse, d'après lequel on considère comme concurrence
déloyale toute infraction aux devoirs envers son prochain,
c'est-à-dire toute violation des coutumes du commerce lé-
gal (1) ; système du projet du Code pénal suisse, d'après
(1) La jurispradence française doit dtre interprétée dans le même
seni. — G. M.
'^ ■ I- •'■",':■''■;:■» '- - -1 ^^ • j^^^TT
— 308 —
lequel, afin d'assurer la loyauté des relations commercia-
les, les manœuvre^ déloyales pour détourner la clientèle
d'un concurrent seraient punies d'amende ou de prison
sur la demande de la partie lésée ; système du professeur
allemand Kohler, qui considère la concurrence déloyale
comme la violation du droit individuel, c'est-à-dire du
droit, pour chacun, de jouir de tous les avantages de son
être physique et intellectuel et accorde une action en ré-
paration du préjudice causé ; système de Gierke, qui con-
sidère le droit du commerçant troublé parla concurrence
déloyale comme le droit de la personnalité et donne, lui
aussi, comme sanction de ce droit, une action en dom-
mages-intérêts ; système d'Otto Mayer qui refuse de voir
un droit lésé par la concurrence déloyale et ne justifie
les restrictions à la liberté du commerce que par des mo-
tifs économiques et sociaux et quand elles sont formelle-
ment édictées par la loi ; c'est ce dernier système qui a
été implicitement adopté par la récente législation alle-
mande gegen den unlauteren Weltbewerb. D^ Wechsler
fait alors une comparaison très minutieuse de la concur-
rence déloyale telle qu'elle est comprise en France et de
la concurrence impure {unlauteren Weltbewerb) réprimée
par la loi allemande : celle-ci édicté des pénalités, qui
peuvent être applicables même quand aucun concurrent
n'a été visé ou lésé de façon spéciale, par exemple en ma-
tière de réclame mensongère (1) (Reclameschwindel)^ le
concurrent pour intervenir n'a pas besoin de justifier
d'un préjudice, le dénigrement n^est punissable que si le
dénigré fait la preuve de l'inexactitude des allégations et
même au civil le poursuivi échappe à toute condamnation
s'il prouve l'exactitude des faits allégués. La brochure se
termine par un exposé de la situation en Autriche où il
n'y a que quelques dispositions spéciales, réprimant
certains faits, qui rentreraient dans la concurrence dé-
loyale. D' Wechsler souhaite qu'une disposition du Code
civil assure à la partie lésée par un acte de concurrence
déloyale le droit à la réparation du préjudice et n'est pas
(1) La jarisprudence française interdit aussi la réclame mensongère
et considère les concurrents directs comme suffisamment intéressés k
8*en plaindre. — 6. M.
— 309 —
partisan de sanctions pénales tant que Tintérét général
n'est point en jeu. Eug. Podillet.
Grande-Bretagne.
Les marques de commerce enregistrées en Angleterre^ par
C. H. P. ÏNflDLSEN(6?. R.s.yVadii 1898, p. 137). — Article, en
allemand, qui contient notamment Thistorique de la légis-
lation anglaise en celte matière et une analyse très détail-
lée du critérium de regislrabillté.
The Lato oftrade marks (La loi sur les marques) by J.
E. Evans Jackson, chez l'auteur : Bristol House, 19 et 20
Holborn Viaduct, London. — Conférence faite à la Society
of Arts, le 17 mai 1899. Elle contient un résumé des vœux
adoptés par la Chambre de commerce de Londres pour la
révision de la loi anglaise sur les marques, notamment
en ce qui concerne les marques composées des mots et
l'application en Angleterre de l'article 6 de la Convention
d'Union de 1883. On y trouve aussi sur la jurispruence
anglaise, en matière de marques, dénominations, un
aperçu qui complétera l'étude publiée dans les Ann. 98.80
et remaniée dans l'Annuaire de l'Association internationale
pour la protection de la propriété industrielle, 1898,
p. 375.
Projet de revision de la législation existante sur les mar-
ques de fabriques en Grande-Bretagne. — Analyse du bill
Moulton dans la Prop. ind., 1900.78.
Italie.
La ConcorrenzaSleale {Ldi concurrence déloyale), parTor-
quato Carlo GiAWNiNi,avocat,l vol.in-8°,Napoli,1898,Eugène
Marghieri. — M. Giannini estime qu'aucune des théories
sur lesquelles on a fondé jusqu'ici la répression de la con-
currence déloyale ne donne satisfaction à l'esprit et qu'une
théorie est nécessaire ; il pense, quant à lui, que ensei-
gne, titre, dénomination, tout ce qui sert à spécifier une
entreprise ou les produits d'une entreprise, constitue une
véritable propriété commerciale, propriété immatérielle,
qui a les mêmes droits que la propriété matérielle à être
qualifiée de proj!>rîe7(^, bien qu'elle ail quelques caractères
— 310 —
spéciaux. Ce système ne permet pas d'atteindre comme
concurrence déloyale la vente au rabais, l'abus de la ré-
clame, le dénigrement ; l'auteur ne méconnaît pas cette
conséquence de son système^ mais il la trouve justifiée.
Outre cette théorie tout à fait neuve, on trouvera dans le
livre de M. Giannini de précieux documents de jurispru-
dence comparée.
De l'état actuel de la jurisprudence en matière de mar^
ques en Italie. — Article de M. Hoîse Amar dans la Prop.
ind.,1901.11. Il fait ressortir : que la législation italienne,
en punissant la tromperie sur Torigine des produits, ac-
corde, en dehors de toute réciprocité légale ou diplomati-
que, la protection contre les fausses indications de pro-
venance ; que d'après la jurisprudence actuelle de la Cour
de cassation, en opposition avec celle du Conseil d'Etat,
les étrangers comme les nationaux peuvent obtenir con-
damnation, civile ou pénale, contre les contrefacteurs ou
imitateurs de leurs marques même non déposées (voir
aussi l'article de M. Bosio dans la Prop. ind., 1900. 171).
Suisse.
Traité des marques de fabrique et de commerce, des in-
dications de provenances et de mentions de récompenses
industrielles, en Suisse, comprenant l'étude du droit com-
paré et du droit international, par Philippe Ddnant, docteur
en droit, avocat, privat-docent à la Faculté de droit de Ge-
nève,l vol.in-S'^javec 111 gravures,Paris, 1898, Arthur Rous-
seau. — L'étude delà législation sur les marques de fabri-
que prend un développement considérable non seulement
en France, mais à l'étranger. Voici un livre qui, tout nou-
veau pour la Suisse, peut servir de type aux études ulté-
rieures à exécuter dans les différents pays ; l'auteur, tout
en se plaçant en première ligne au point de vue de la lé-
gislation suisse, donne en même temps sur chaque ques-
tion la solution des jurisprudences étrangères, de sorte
qu'en faisant connaissance avec une législation spéciale
et encore peu connue, on embrasse d'un seul coup la même
matière au point de vue universel et l'on peut se rendre
compte combien, en matière de marques de fabrique, les
— 311 —
besoins des commerçants et du public sont partout les mê-
mes et Tunifîcation des législations seraitfacile. L'illustra-
tioadu chapitre de la contrefaçon parla reproduction, pour
les principales espèces, de la marque invoquée et de lamar-
que poursuivie est une innovalionides plus heureuses et qui
fera» par l'œil, l'éducation des magistrats et des avocats.
Tout en ayant pour but un ouvrage pratique, M. Dunant a
fait la place nécessaire à l'histoire et à la théorie. Des do-
cuments empruntés à des travaux archéologiques et à des
monographies récentes enrichissent considérablement le
fond auquel puisaient, à l'ordinaire, les nouveaux venus
pour écrire l'historique des marques de fabrique ou de
commerce depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos
jours. Comme théoricien, M. Dunant se range aveuglé-
ment sous la bannière d'Edmond Picard ; il est partisan
de la théorie des droits intellectuels et classe dans cette
catégorie de droits le droit du fabricant sur sa marque ;
il ne méconnaît pas toutefois les différences profondes qui
séparent le droit à la marque et le droit sur les œuvres
intellectuelles y mais il pense que le droit à la marque re-
pose sur la valeur commerciale que l'industriel a créée par
la réputation qu'il a su donner à ses produits et dont la
marque n'est que le symbole, il en conclut que l'industriel
a droit à ce fruit de son travail et de son talent, tout
comme l'artiste a droit à l'œuvre de son esprit.
EuG. PouaLET.
La concurrence déloyale^ sa définition et les dispositions
qui la concernent en droit civil et en droit pénal, par
Alfred Simon, docteur en droit (travail couronné parla So-
ciété suisse des juristes), traduction française par Alfred
Georg, docteur en droit, in-8«, Genève, 1896, Georg et Cie.
— Traité bref et complet, renvoyant surtout aux décisions
françaises et allemandes. La mort récente de l'auteur de ce
traité est une perte vive pour tous ceux qui s'occupent de
propriété industrielle en droit comparé.
Turquie.
Du droit des étrangers en Turquie^en matière de marques
de fabrique et de commerce, par César Bonnet, avocat à
— 312 —
Constanlinople {Journal de Clunei, 1899, p. 283). — Arti-
cle reproduisant les décisions les plus récentes rendues
en Turquie sur cette matière.
Nom patronymique.
Le droit au nom individuel dans le Code civil pour VEm^
pire d'Allemagne, par R. Saleillbs (article dans la Reryue
critiquey 1900, t. 29, p. 94).— C'est le commentaire de l'arti-
cle 12 du Code civil allemand, avec indications bibliogra-
phiques.
Propriété littéraire et artistique.
Droit international et comparé.
Association litlér aire et artistique internationale. Con-
grès de BernCy 1896 (Paris, Hôtel des Sociétés savantes,rue
Serpente). — Les fascicules de 1896, dont nous avions omis
l'analyse dans la dernière revue de bibliographie contien-
nent l'un les rapports présentés au Congrès, l'autre les
procès-verbaux. Nous nous contenterons de donner ici le
sommaire des rapports :
Examen des travaux de la Conférence de Paris,par Geor-
ges Maillard ; Rapport sur les moyens d'assurer l'applica-
tion de la convention de Berne dans les pays adhérents»
en ce qui concerne les œuvres littéraires, par Paul OUen-
dorf ; en ce qui concerne le droit de représentation des
œuvres dramatiques, par M. A. Beaume; en ce qui con-
cerne les œuvres de peinture, sculpture et gravure, par
Georges Fleury ; d'architecture, par Charles Lucas ; les
œuvres photographiques» par André Taillefer ; De l'ac-
complissement des conditions et formalités dans les Pays
de l'Union, par Ernest Kœthlisberger ; Rapports sur le
mouvement législatif dans les Pays de l'Union, Allemagne,
par le D' Osterrieht, Monaco, par Léon Poinsard ; De la
propriété littéraire en matière de presse, par Paul Gaye ;
Rapport sur les moyens d'obtenir de nouvelles adhésions
à l'Union de Berne, par Maurice Maunoury ; Rapport sur
le mouvementlégislatif en matière de droits intellectuels
dans les trois Amériques, par Ernest Rœlhlisberger ; Etude
— 314 —
3« série, contient les rapports présentés à ce Congrès ; le
bulletin n* 8 contient les procès-verbaux des séances et
les vœux. Ces vœux portent sur : La propriété des dessins
et modèles d'art appliqués à rinduslrie,rapporteur Soleau ;
les rapports entre auteurs et éditeurs, rapporteur Max
Leclerc ; le droit moral, rapporteur Lermina ; la durée
du droit, rapporteur Mack ; la propriété des articles de
journaux, rapporteur Osterrieth; la caution judicatum
9olvh rapporteur de Clermont ; la propriété littéraire en
Russie, rapporteur Harmand; la propriété des œuvres
d'architecture, rapporteurs Harmand et Lucas ; un projet
d'unification des lois sur le droit d'auteur, rapporteur
Georges Maillard ; la législation allemande sur le droit
d'auteur, rapporteur Osterrieth ; la législation en Angle-
terre, rapporteur Iselin ; la législation en Autriche-Hon-
grie, rapporteur Osterrieth; la protection des œuvres
scientifiques, rapporteur Gastine. — (Voir analyse des
travaux et vœux dans te Z>roi7 d* auteur y 1898, p. 118 et
120.)
Association littéraire et artistique internationale ^Congrès
d' Heidelber g, iS99. — Le bulletin de TAssociation.n' 8 de la
3* série, contient les rapports de MM. Georges Maillard sur
le droit moral de l'auteur, sur ses créations, Soleau sur
la protection des œuvres de l'art appliqué, le chevalier
Pesce sur la protection des œuvres scientifiques. Le pro-
gramme du Congrès se complétait par l'examen de la si-
tuation dans les divers pays. (Voir le Bull, de l'Ass., n* 9,
3« série, et compte-rendu, avec reproduction des vœux,
dans le Droit d'auteur y 1899, p. 121 et 126). L*AssociatioD
a publié à part l'examen ciritique de l'avant-projet de loi
allemand par M. Albert Osterrieth et un mémoire alle-
mand par le même auteur, qui a été soumis au Gouver-
nement allemand {G. B. «., octobre 1899, p. 281).
Association littéraire et artistique internationale 4900.^
Le bulletin n* 11 (juillet 1900) renferme,avecune préface de
M. Pouillet; président de l'Association, un historique de
TAssocialion de 1878 à 1900 par le secrétaire perpétuel
Jules Lermina, un sommaire des travaux publiés dans le
Bulletin depuis Torigine et un index systématique.
^316 —
Circular^ n» 1719, du 10 juin 1899, contient égalemenl,en
anglais,le compte rendu détaillé des travaux. Dans le Droit
d'auteur^ 1899, p. 83, on trouve les vœux du Congrès et
p. 79 une analyse sommaire des travaux. A signaler : la
discussion sur les mesures à prendre pour Tapplication
et Textension de la Convention de Berne (1); l'opposition
à toutes formalités de dépôt légal ; une proposition d'en-
registrement des titres ; la proclamation du principe que
l'aliénation d'une œuvre d'art n'entraîne pas aliénation
du droit de reproduction, mais qu'un éditeur, qui com-
mande un dessin à un artiste est présumé acquérir la
propriété du dessin ; la discussion sur le droit de cita-
tion.
Congrès international des éditeurs^ 3* session^ Londres,
4899. — Les vœux sont rapportés dans la Bibliographie
de la France^ 17 juin 1899. Voir notamment ceux relatifs
à l'aliénation des œuvres d'art et du droit de reproduction
à la propriété des dessins commandés pour Tillustration,
à l'étude, par une commission internationale, des règles
en usage dans chaque pays entre auteurs et éditeurs, à
la protection des idées originales en ce qui touche les
livres d'éducation, à l'extension de l'Union de Berne, à la
séparation de la question du copyright de celle du dépôt
légal.
Adhésion à la Convention de Berne, — Rapport de
M. Otto Mohlbrecht au Congrès des éditeurs à Londres
en juin 1899,publié, conformément à un vœu du Congrès,
par le Cercle de la Librairie de Paris, comme brochures de
propagande pour l'extension de l'Union concernant la
protection des œuvres littéraires et artistiques, y compris
l'Acte additionnel et la déclaration interprétative de 1896
(broch. in-8», Cercle de la Librairie, Paris, 1900).
Congrès international de mtisiquey Paris, 1900. — Le
Congrès, sur le rapport de M. Combarieu, a émis le vœu
que les administrations des Beaux-Arts veillent au respect
(1) Soas le titre Adhésion à la Convention de Berne, le cercle de la
Librairie de Paris a publié, en ane brochure française, conformément
a un vœu du Congrès, le rapport de M. Otto Mûhlbrecht.
morts et qu'il se forme des comités libres dans le même
but.
Congrès international de photographie, Paris, 1900. —
A signaler un rapport de MM. Davanne et Taillefer sur la
propriété des œuvres photographiques (1).
Congrès inlemational des Associations de presse (1804-
1900). — Nous avons à signaler, dans les publications
auxquelles a donné lieu chaque année le Congrès de la
presse, les questions qui touchent h la propriété littéraire
el artistique.
Au Congrès d'Anvers (1894), il est question (p. 25 el75)
de la propriété des informations de presse. La même
[jaestion revient, eu 180S au Congrès de Bordeaux (p. 38),
en 1897 au Conjîrès de Stockholm, avec (p. 34) le rapport
de HM. A. Osterrieth et Albert Bataille sur la protection
de la propriété littéraire en matière de presse (p. 64), en
1896 au Congrès de Lisbonne (p. 47 et s.), où on vote en-
fin la formule suivante: < Les articles de journaux, qui
soDtdes œuvresde l'esprit, doivent être protégés, comme
toutes les autres œuvres de l'esprit, par les lois qui assu-
reatleur propriété à l'auteur. Toutefois, en ce qui con-
cerne spécialement les articles Iraitantde questions poli-
tiques, religieuses, économiques ou sociales le droit de
citation partielle est reconnu dans l'intérêt de la libre
propagande des idées . Le droit de reproduction intégrale
est reconnu dans les mêmes conditions, sauf le cas où
l'article reproduit porterait la mention t. reproduction in-
terdite ». Les articles ou extraits d'articles reproduits de-
vront toujours être suivis de la mention du nom du jour-
nal et, si l'article est signé, du nom de l'auteur (â). Au
Congrès de Rome en 1899, signalons le rapport de M. Mo-
rel-Retz sur la propriété artistique en matière de presse
et la discussion qui a suivi (Bull. off. du bureau central
(1) Cf. iiBiix plai modcitet auxquels eo sont rMulls les photogriphei
^■i|En(C0Bgreede8 photographes à Montreur, en 18d9,ff Droit d'au-
''■>', 1890.75 ; Congrès de la loctélé allemande pour la protection lé-
VAt des pliotogTBi^iei, en 1698, le Droit d'auteur, 1806.145.
1^1 Voir le Droit d'auteur, lb08.U2.
. 'T"
— 318 —
des Associations de presse^ n^ 4, p. S2, analysé dans le
Droit d'auteur, 1899, p. 57), le rapport de M. Halpérîne-
Kaminsky sur le droit d*auteur en Russie (publié intégra-
lement dans le Droit d'auteur^ 1899.40) et au Congrès de
Paris en 1900, le rapport de M. Georges Maillard sur les
droits des journalistes-dessinateurs sur leurs dessins et
légendes (voir Bull. off. Ass. presse ; le vœu est reproduit
dans le Droit d'auteur, 1900. 109).
Congrès international de la presse médicale^ Paris, 1900.
— On trouvera dans ses travaux une consultation de M. le
bâtonnier Pouillet sur la propriété littéraire et artistique
en matière de presse médicale (voir analyse dans le Droit
d'auteur, 1900. 110).
De la protection internationale des œuvres littéraires et
artistiques (thèse de doctorat), par Louis Rivière, avocat à la
Cour de Paris (gr. in-8o de 270 p., Paris, Fontemoing, 1897).
— C'est d'abord une étude théorique sur le droit d'auteur,
puis l'examen de la protection légale des œuvres étran-
gères et ensuite de la protection conventionnelle. La thèse
s'achève par l'analyse de l'Union de Berne et des travaux
de la Conférence de Paris ; elle est d'une parfaite ordon-
nance et d'une documentation sûre.
Conferenza di Parigi per la revisione délia Convenzione
de Berna del 1886, par Carlo Camerano, avocal à la Cour
de Turin (Extrait de la Giurisprudenza italiana, vol. 4,
Propriété litteraria). — L'auteur analyse le rapport pré-
senté au Gouvernement italien par M. Luigi Roux, délégué
de ritalie à la Conférence de Paris, qui a fait ressortir, au
point de vue italien, Tintérét des solutions adoptées par
la Conférence et la nécessité de faire subir certaines mo-
difications à la loi italienne pour la mettre en accord avec
la législation des autres pays de l'Union, sur les points où
l'unification est possible. Tous ceux que l'unification des
législations sur le droit des auteurs et des artistes inté-
resse applaudiront à l'effort que fait M. Luigi Roux en
Italie avec une persévérance et un tact remarquables, ainsi
qu'à l'appui que M. Camerano lui a donné en vulgarisant
clairement, pour le public italien, les résultats de la révi-
sion de la Convention de Berne.
uruti moral, y compris i aueinie a la repumuoii ae i ar-
tiste. Les délits contre un tiers comprennenl les agisse-
ments illicites de l'artiste à l'égard de son cessionnaire, les
Bsurpalions de signature, les diffamations, etc.. . Les délits
contre la chose publique comprennent les délits résultant
J
— 320 —
de la mise au jour d'une œuvre illicite el ceux résullanl
de la destruction totale ou partielle d'une œuvre d'art. Od
lira surtout, avec intérêt^ toute la partie consacrée au
droit moral,que M. Laporterie assimile au droit de veiller
à l'honneur de son enfant et d'en châtier les insulteurs ;
il s'est inspiré des idées développées par Jules Lermina
au Congrès de l'Association littéraire et artistique inter-
national à Monaco, Tan dernier, mais il s'est efforcé d'en
indiquer toutes les conséquences pratiques, avec un soin
minutieux. Eug. Podillbt.
De la contrefaçon littéraire et artistique^ par Roger Col-
lin, avocat à la Cour de Paris (in-S® de 336 pages, Paris,
Rousseau, 1899). — Thèse de doctorat qui mérite d'être
distinguée. Elle témoigne d'un goût sûr et d'une curiosité
avertie pour les questions de littérature et d'art ainsi que
d'un remarquable don de clarté dans l'exposé.
Etude sur le projet de loi relatif à la protection des
œuvres de scuplturcy par Roger Collin, avocat à la Cour
d'appel (broch. in-8* de 27 pages, Paris, Rousseau, 1900),
— C'est comme un supplément de la thèse précitée. Cette
brochure contient une bonne analyse critique du projet
déposé par le Gouvernement à la Chambre des députés
pour assurer la protection des œuvres d'art appliqué.
Les œuvres de sculpture et la loi des 19-24 juillet 1793, par
Charles Constant {France judiciaire^ 1901, p. 13 à 21).
Article sur le projet de loi soumis à la Chambre des dé-
putés.
Du contrat d'édition, par Gaston Paitel, Bordeaux, Ca-
doret, 1898, 163 pages. — Elude des rapports entre au-
teurs el éditeurs.
Des rapports juridiques entre les auteurs et les éditeurs,
par Pierre Rudelle, docteur en droit, avocat à Versailles.
De Vexploitation des œuvres musicales par rexécution
publique, par Louis Gibaux (in-8» Rousseau, Paris, 1900). —
L'auteur de cette excellente élude ne s'est pas contenté de
dégager les solutions de la jurisprudence française, son
livre débute par un essai théorique, bref mais fort clair,
— 322 —
Hénon, imp. de TAss. publ.). — M. Worms est partisan
du statu quo et repousse tout à la fois la proposition pré-
sentée par M. Berry à la Chambre des députés, tendant
à ne frapper du droit que les bénéfices nets des entrepri-
ses de spectacles, et la proposition^ de la Commission de
la Chambre des députés, pour la répression de la mendi-
cité^ tendant à supprimer les contrats d'abonnement pour
la perception du droit des pauvres, frapper les billets de
faveur et percevoir le droit au moyen d'un timbre apposé
sur le billet. M. Worms ne s'est pas contenté de faire la
critique très minutieuse des deux projets, il a fait précé-
der sa discussion d'un historique, fortement documenté et
attrayant, du Droit des Pauvres et il Ta fait suivre d'une
série d'annexés fort curieuses : diagramme des recettes
effectuées parle service du Droit des pauvres, de Tan V à
1897 ; produit détaillé de l'impôt pour Tannée 1896, feuille
complète d'une journée de recettes ; liste des lois, décrets,
arrêtés et principaux actes interprétatifs concernant le
droit des pauvres ; tableau chronologique des circulaires
et décisions ; bibliographie de la matière ; table des dé-
libérations du Conseil général des hospices, du Conseil de
surveillance, du Comité consultatif (on y voit comme un
reflet de l'histoire des spectacles et des exhibitions de
1809 à 1898, ce sont des modérations de droit pour fêles
ou expositions dans des buts charitables., représentations
à bénéfice, des propositions d'abonnement pour certaines
entreprises, des questions litigieuses pour certaines au-
tres, des difficultés de recouvrement pour tel ou tel éta-
blissement, etc.). EUG. POUILLIT.
Allemagne.
Die Immaterialgûter im intemationalen Becht^ par
J. Kohler, professeur à l'Université de Berlin (Zeitschrift
fur internationales Privât und Strafrecht, Leipzig, Duncker
et Humblot). — Etude, fort intéressante comme tout ce
que publie Téminent professeur, sur les biens immatériels
(c'est l'étiquette qu'il attribue à la propriété intellectuelle)
en droit international.
Das Urhebef^recht an archilektonischen^ gewerbetechnis-
— 323 —
chen tind œhnliehen Zeichnungen und Abbildungen (Le
droit d'auteur sur les dessins et images arcbilectonlques,
de technique industrielle et autres semblables), par Karl
ScHABFKR {G. R. s, y aoùt 1899, p. 228). — C'est un article
où il est expliqué que les dessins d'architecture n'ont d*au-
Ire protection que l'article 43 de la loi du H juin 1870 sur
les écrits, dessins, etc., c'est-à-dire qu'ils ne sont proté-
gés que contre la reproduction mécanique, et l'architecte
qui a publié, par exemple dans un journal, les dessins
d'une maison ou d'une installation d'appartement ne peut
empêcher qu'un tiers les utilise pour une construction ou
une décoration, en effet la loi du 9 janvier 1876 sur les
œuvres des arts figuratifs refuse, par son article 3, sa pro-
tection à l'architecture et l'article 43 de la loi de 1870 im-
plique que les dessins d'architecture ne sont pas à consi-
dérer, dans leur but principal, comme des œuvres d'art. Il
en est de même des dessins et illustrations d'art industriel
et scientifiques, qui servent comme modèles et comme
enseignement et peuvent être utilisés par les tiers pour
l'exécution de produits industriels ou artistico-indus-
Iriels : la reproduction n'en est interdite que par la repro-
duction mécanique de la forme même sous laquelle ils ont
paru. L'auteur de l'article critique vivement ces consé-
quences de la législation allemande, qui sont également
constatées dans le commentaire du droit d'auteur en ma-
tière d'art « Das artisiiche Urheberrechi » par AUfeld, et il
demande la réforme de la loi.
Die Vtriràge des Bildhauers "(Les contrats du sculpteur),
par Hans Kobbl (Berlin, 1900, Cari Heymanns Verlag). —
Manuel juridique et pratique, publié sous le patronage de
l'Union des artistes de Berlin et de l'association générale
allemande d'art.
Deutscker Theaterrecht {Le droit théâtral en Allemagne),
par 0. Opbt, Berlin, 1897 (Calvary et Cie, 819 pages).
Entwurf eines Gesetzes betreffend das Urheberrechi an
Werken der Litleratur und TonAuns^ (Projet de loi concer-
nant le droit d'auteur sur les œuvres de la littérature et
de l'art musical), édition officielle (J. Gullentag, Berlin,
'-'-try'BTÇ?-^
— 324 —
1899) (1). — Cet avant-projet, que le Gouvernement avait
communiqué officiellement aux intéressés pour attirer
leurs observations, a donné lieu à de nombreuses publi-
cations dont nous indiquerons seulement quelques-unes :
Denkschrift der Genossenschaft deutscher Komponisten
(G. R. s.y décembrel899, p. 345), die Reform des Urheber-
rechtesparle prof. Karl Birkmayer (Ackermann, Munich,
1899), Krilische Bemerkungen du prof, von Calcker (Nie-
meyer, Halle), Wider die Kommunislen am geisLigen
eigenthum (Deutscher Autoren Verlag, Berlin, 1900), Ob-
servations de MM. Vichert (G. fl. s., octobre 1900, p. 286)
et Leander (eod, loc.^ç. 291). Voir, suprày p.314 les travaux
de^l'Associalion littéraire et artistique internationale ; voir
aussi l'analyse de Tavant-projel et une notice bibliogra-
phique dans le Droit d'auteur^ 1899, p. 89 et 138, et le
compte rendu de la 25® assemblée des jurisconsultes
allemands, à Bamberg en 1900 [eod. loc, 1900, p. 157).
Le Gouvernement a ensuite présenté un projet remanié
{Gewerblicher Bechtschutz und Urheberrecht, 1900, p. 376)
qui a été discuté au Parlement en 1" lecture {le Droii
d'auteur^ 1901. 11). Voir encore observations d'Osterrieth
(fi. R. s., 1900. 371), article du prof.Schusler (de Prague)
et réponse de M. Kœsch pour la Société des compositeurs
allemands {G. R. s., 1901.14).
Bemerkungen zum Entwurf eines Gesetzesûber dos Ver-
lagsrecht^ par Albert Ostbrrieth (2) (Extrait de la Revue
Gewerblicher Rechtschutz und Urheberrechty octobre 1900,
p. 298), in-12 de 100 p., Berlin, Cari Heymanns Verlag,
1901. — Observations sur le projet de loi allemand, con-
cernant le droit d'édition, présenté au Parlement en dé-
cembre 1890 (y compris le texte du projet de loi).
Droii d'édition. — Gutachlen der Herrn D^ Albert Oster-
RiKTH, in Berlin, ùberdie Frage, Soll der Verleger hère-
chtigt sein das Verlagsrecht ohne Zustimmung des Autors
uz ubertragen ? (Consultation de A. Osterrieth sur la ques-
(i) Voir le texte allemand aassi dans G. R. s., juillet 1899, p. 210^
(2) Voir aussi observations critiques du prof. Birkmeyer, Die Kodifi-
kation des Verlagsrechtes (broch. gr. in-8, Tli. Ackermann, Munich,
1900.
- t
t
^
f-
•V
— 326 —
les instructions complémentaires (1). Le bulletin 3 cons-
titue rhistorique comlpet de la législation sur le copyright
de 1783 à 1900. Le bulletin 4 comprend la Convention de
Berne et TActe additionnel, les circulaires relatives à Ten
^ registrement à Londres, la législation du Canada de 1886
Grande-Bretagne.
j L'effet rétroactif et la Conven lion de Berne en A ngleterre.
! — Article par M. J . F. Iselin dans le Droit d'auteur^ 1899.38.
I Seven Lectures on the Law and History of copyright in
Books (Sept lectures sur la législation et Thistoire du
droit d'auteur en matière de livres, par A. Birell (Cassel,
London, 1899).
The law of copyright in designs with the stututes (La
^ loi sur le droit d'auteur des dessins), par H. Knox et J.
W. Hind (Reeves and Turner, London, 1899).
Artistic Copyright with spécial Référence to ArchitectSyby
Georges Harmand, avocat à la Cour d'appel de Paris. —
Conférence à The Royal Institute of Brilish Architects, le
4 avril 1898 (broch. in-4^ extrait du journal de Tlnstitut
royal des architectes britanniques, vol. V, n. 11).
Grèce. .
To Aexacov tvjç IIvïupaTtxYJç KtoxTYîo-taç (Traité de la propriété
intellectuelle), par Teodoros Apostolopoulos, avocat à
Athènes (petit in-8, Athènes, 1900).
Italie.
Il Diritto Morale delVAutore sulle Opère dellHngegno
(Le droit moral de Fauteur sur les œuvres de l'esprit)» par
Ferracio FoA,avocat à la Cour de Milan, directeur de la re-
vue « I Diritti d'autore », broch. in-8, Milano, 1899 (Extrait
de la revue « I Diritti d'autore », n"9 et 10, septembre et
octobre 1899). — Etude. critique des travaux du Congrès
(1) Les instructions pour l'obtention du Copyright ont été tradaltas en
français dans le Droit d^autetir^ 1899.114.
«
,-uVr.:
t
vVh:>.a;,.
teressant pour déterminer la nature de ce droit moral.
M, Foa estime qu'il faudrait dire plus esaclement droit in-
leilecluelei que cela se résume dans l'inlangibilité désœu-
vrés de l'esprit: l'auteur seul est maître de choisir le mo-
ment de faire connaître son œuvre au public et nul ne peut
fairesubiraucunemodiScation, demauvaisefoi, à l'œuvre,
même s'il est cessionnaira des droits pécuniaires de l'au-
teur ; le droit intellectuel n'est pas, comme le droit pécu-
niaire, un droit civil transmissible aux héritiers ou ayants
cause, il rentre dans le domaine du droit public,, 11 doit
avoir sanction pénale el, après la mort de l'auteur, c'est au
ministère public qu'il appartient seul d'interdire les modi-
fications apportées à l'œuvre, les exécutions qui le déna-
tureraient. Eco. POOILLBT.
l diritli d'autore degli Arckitetti, parJ. Uell'Oro, avocat
à Milan, Giovanni Gusson, 1898.
L'archiletiurae le leggi sullaproprietaartistica et lilteria,
par Fb. Pahodi, ingénieur à Turin (article du Monilore tec-
nicOiMtlan, 10 décembre 1900). — L'auteur est un des vail-
lants défenseurs de droit de l'architecte el de ringénieur(t),
il se plaint que les lois récentes, telles que la Brésilienne
et la Japonaise ne fassent pas à l'architecture la place
qu'elle mérite.
NOBVÈGI.
Der Schutx des geistigen Eigentums in Norvegen (La pro-
tection de la propriété intellectuelle en Norvège), par Pap-
PAPAVA (Article dans Jahrbuch des internationales vereini'
gung, l. 5, p. 260).
RotmANIE.
La propriété littéraire et artistique en Roumanie, par
j. T. Ghica. — 1 vol. in-8, Paris, Kousseau, 1900
Conventions de ta Roumanie avec les Etats étrangers con-
cernant le commerce el les marques de fabrique, par Const.
Brailïand, 1 vol. in-S", Bucarest, Carol Gobi, 1899,
1
I
- 328 -
Suisse
Bas internationale Urheberrecht an Photographient mu-
sikalischen Auffïihrungen und Ueberseizungen (Le droit
d'auteur international sur les photographies, les exécu-
tions musicales et les traductions), par 0. Wyss (1 vol.
in-8o, Zurich, Schullhess).
Le droit d'auteur dans les arts plastiques et délinéatotres
en Suisse, p^vAhFiŒD MELi(Genève,Kundig,l 900,104 pages.)
— Commentaire de la loi du 23 avril 1883.
Du droit des compositeurs de musique quant à Vexécu-
lion de leurs œuvres en Suisse, d* après la légisation actuelle
et d'après les traités. Examen de la question au point de
vue d'une loi à faire (rapport présenté par M. Philippe Du-
NANT, docteur en droit, avocat à Genève, à la Société des
Juristes, session de 1898). — M. Dunant s'est déjà distin-
gué, outre son livre sur les marques dont nous rendons
compte plus haut, par un Volume fort bien fait, intitulé :
Du droit des compositeurs de musique sur leurs œuvres {Ge-
nève, imp. Romet, 1893). Il revient cette fois sur une par-
tie du même sujet, le droit d'exécution, en se plaçant plus
particulièrement au point dé vue suisse, droit des compo-
siteurs nationaux et étrangers en Suisse, droit des com-
positeurs étrangers en Suisse, et il étudie les projets de
réfoi-me de la loi suisse de 1883. Il critique le système qui
consisterait à lier le droit d'exécution à l'achat d'un ma-
tériel licite pour cette exécution. Personnellement il serait
partisan de la reconnaissance absolue à Fauteur ou à ses
ayants cause du droit d'exécution ; mais il reconnait
qu'en Suisse l'introduction du droit d'exécution est encore
trop récente, la production musicale trop peu importante
pour qu'on puisse obtenir de l'assentiment populaire la
proclamation de ce droit sans limites. Il conclut qu'il faut
s'en tenir au système de la loi en vigueur, c'est-à-dire li-
mitée à 2 p. 100 du tantième à exiger pour le droit d'exécu- •
tion et liberté des exécutions gratuites et de bienfaisance,
mais remanier le texte de l'article 7, qui manque de clarté,
et accorder une action civile à l'auteur, même quand l'exé-
cutant n'a commis qu'une simple faute, négligence ou im-
prudence. EUG. POUILLBT.
■♦iTfr^' '»
— 330 —
Il est entendu que les marques de fabrique ou de commerce
auxquelles s'applique le présent arrangement sont celles qui,
dans les deux pays, sont légitimement acquises aux industriels
et négociants qui en usent, c*est-à'dire que le caractère d^une
marque française devra en être apprécié d'après la loi française,
de même que celui d'une marque costaricienne devra être jugé
d'après la loi costaricienne.
Art. 3. — Si une marque de fabrique ou de commerce appar-
tient au domaine public dans le pays d'origine, elle ne pourra
être l'objet, d'un droit privatif dans l'autre pays.
Art. 4. — Le présent arrangement sera exécutoire pendant
cinq ans, qui commenceront à courir aussitôt après l'échange
des ratiOcations. Néanmoins, si, un an avant l'expiration de ce
terme, aucune des deux parties contractantes n'annonce à l'au-
tre, par une déclaration ofQcielle, son intention d'en faire cesser
les effets, ledit arrangement restera encore obligatoire pendant
une année après les cinq ans et ainsi de suite d'année en année.
Il restera en vigueur aussi longtemps que la notification préalable
n'aura pas été faite.
Art. 5. — Le présent arrangement devra être ratifié et ré-
change des ratifications aura lieu à Paris, dans les six mois qui
suivront la signature de la présente Convention.
Fait & Pans, en double exemplaire, le 8 juillet 1896.
Art. 4143.
Comrentlons Intornatlonales. — Co«ta-IUca. ~
Propriété littéraire et artlstlcfue.
Convention^ du 28 août 1896, entre la France et le Costa^
Rica pour la garantie réciproque de la propriété litté'^
raire et artistique (1).
Cette Convention a été promulguée en France le 17
août 1897 (Journ. off., 19 août). Elle est ainsi conçue :
Article premier. — Les auteurs d'œuvres littéraires, scienti*
(1) Elle a été approuvée par la loi française du 30 jaillet 1897, /. o/^.,
10 août (Chambre, ezp. mot., doe. 1896, p. 1550; rapport, doc. 1897,
p. 1416; adoption, 25 juin 1897, Sénat, exp. mot., doc. 1897, p. 509 ;
rap., p. 526; adoption, 12 juillet 1897). Elle avait été approuvée parle
Congrès de Costa-Rica le 17 octobre 1896 (Droit d'auteur, 1896, p. 137)
et ratifiée par décret présidentiel du 6 novembre, pais promalguée
— 3;32 —
4. — Sont expressément assimilées aux œuvres originales
idactions des teiirres nationales ou étrangères faites par
leur appartenant à l'un des deux Etats. Ces traductions
tt, à ce titre, de la protection stipulée par la présente Con-
n pour les œuvres originales en ce qui concenie leur re-
ition non autorisée dans l'autre Etat. Il demeure bien
lu, toutefois, que le présent article a uniquement pour
I protéger le traducteur en ce qui concerne la Tersion qu'il
de l'œuvre originale et non de conférer un droit exclusif
Inction au premier traducteur d'une œuvre quelconque
en langue morte ou vivante.
5. — Les nationaux des deux pays, auteurs d'œuvres ori-
s, auront le droit de s'opposer à la publication dans l'au-
ja de toute traduction de ces œuvres non autorisée par
émes; et cela pendant toute la durée de la période de
qui leur est concédée pour la jouissance du droit de pro-
littéraire ou scientifique sur l'œuvre originale, c'est-à-dire
publication d'une traduction non autorisée est assimilée
)us les rapports à la réimpression illicite de l'œuvre.
auteurs d'œnvres dramatiques jouiront réciproquement
âmes droits en ce qui concerne les traducUons on les re-
tationsdes traductions de leurs œuvres.
6. — Sont également interdites les appropriations indî-
non autorisées, telles que les adaptations, les imitations
e bonne foi, les emprunts, les transcriptions d'œurres
Lies et en général tout usage d'œuvres qui se fait par la
! l'impression, ou sur ta scène, sans le consentement de
7. — Sera néanmoins licite réciproquement la publica-
ns chacun des deux pays d'extraits ou de fragments en-
:compagné3 de notes explicatives des œuvres d'un auteur
tre pays, soit en langue originale, soit en traduction, pourvu
n en indique la provenance et qu'ils soient destinés à
jnement ou à l'étude.
8. — Les articles insérés dans les publications pérîodi-
lontles droits n'auront pas été expressément réservé»,
ni être reproduits par toutes autres publications du mfime
mais à condition que l'on indique l'original sur lequel ils
pies.
9. — Les mandataires légaux ou représentants des au-
iompositeurs et artistes, jouiront, réciproquement et sous
i rapports, des mêmes droits que ceux que la présente
ition concède aux auteurs, compositeurs et artistes.
10. — Les droits de propriété littéraire, artistique et scîea-
reconnus par la présente Convention, sont garantis aux
portatioD sur son propre territoire de livres qni, d'après ses lois
inlérieureson des Btipalatioas souscrites avec d'autres puiss&o-
CM, sont on seraient déclarés Être des contrefaçons.
Art. 14.^ — It est entendu que les ventes, exécutions, représen-
talioDS on exhibitions des oeuTres scientifiques, littéraires ou ar-
tistiquea qni sont interdites par cette Convention, sont celles
qui s'efTectueront en public on par spéculation et non pas celles
qai seroDt faites par des particuliers, sans but de gain, telles que
les ventes conclues pmément entre des personnes qni ne font
pas le commerce des ouvrages dont il est question, ou les exé-
cutions, représentations et eiliibitions d'œnvres littéraires et ar-
tistiques faites privëment dans des maisons particulières.
Art. 15. — La défense de réimprimer, publier, introduire,
•endre, représenter, exhiber, on exécuter dans l'un ou l'autre
(1) Il n'est question que des formalités dans le pajs d'origine (voir la
tciteda l'art. 9 et llnlerprètution de l'eiposé des molUs dn gouverne-
neal français). Voir aasai Droit d'auteur, 1896, p. 147, et 1897, p. 113.
Ici,
étc
tage
lite
Iqa
Miaistëre de rioslruction publique trois exemplaires de l'œuvre
doDl ils veaLent gamntir dans les deui paya la propriété contre
toate contrefaçon ou reprodaction illicite ; le Ministre de l'Ins-
truction publique derra leur délivrer un certificat constatant le
dépât des auvres y indiquées, lequel permettra k l'intéressé de
ae présenter devant l'autorité publique compétente, pour reven-
diquer ses droits (1).
Néanmoins, en ce qai concerne les œuvres d'&rt, telles que
statues, vitraaï, médailles, tableaux, œuvres d'arcbitecture, etc.,
etc., il suffira que l'auteur ou le propriétaire eFTeclue le dépAt
d'une reproduction soua forme de dessin, de gravure ou de pho-
tographie.
Art, 3, — Les stipulations Se l'article premier s'appliquent
également à la représentation ou à rexécution,dans l'un des deux
Etats, des œuvres dramatIqueR ou musicales d'auteurs ou de com-
positeurs de l'autre pays.
Art. 4. — Sont expressément assimilées ans œuvres originales
les traductions des œuvres nationales ou ëtrangërea, Taites par
un auteur appartenant à l'un des deux Etats. Ces traductions
jouiront, h ce titre, de la protection stipulée par ta présente Con-
vention pour les œuvres originales, en ce qui concerne leur re-
production non autorisée dans l'autre État. Il demeure bien en-
tendu, toutefois, que le présent article a uniquement pour but
de protéger le traducteur en ce qui concerne la version qu'il a
faite de l'œuvre originale et non de conférer un droit exclusif
de traduction au premier traducteur d'une œuvre quelconque,
écrite eu langue morte ou vivante.
(I) Le Sjndieat des sociétés littérairat et irtistiques pour la protection
de la propriété Intel lectaelie a vivement protesté contre cette disposi-
tion et demandé à U commission de la Chambre des députés qu'on n'ap.
prouvAt ancune Coavenlion qui ne contiendrait pas le principe, posé
par la Convention d'Union de Berne, de l'accumpliaseraenl des formalités
seulement dans le pays d'origine. Le gouvernement répondit qu'on
n'avait pu obtenir diplomatique ment davantage du Guatemala, qu'il
fallait ae contenter momentanâmeol de la protection accordée sous ces
conditions et qu'on s'efforcerait d'améliorer la situation, notamment en
obtenant que le dépât put s'effectuer h la légation du Guatemala i Paris,
(voir rapport de H. Vallé à la Chambre des députés et rapfiort de H. Ha-
mel aa Sénat). Cest ce qui a été obtenu, ainsi qu'il résulte d'une lettre
adressa le 16 mai 1899 par le Ministre des affaires étrangËres au pré-
BÏdeot da Syndicat pour la protection de la propriété iatelleciDelle
(Droit d'aultur, 1889, p. S3).
— 338 —
Art. 5. — Les nationaux de Tun des deux pays, auteurs d'œa-
très originales, auront le droit de s*opposer à ta publication dans
Tautre pays de toute traduction de ces œuvres non autorisée par
eux-mêmes, et cela, pendant toute la durée Âe la période de
temps qui leur est concédée pour la jouissance du droit de pro-
priété littéraire ou scientifique sur l'œuvre originale ; c'est-à-dire
que la publication d'une traduction non autorisée est assimilée,
sous tous les rapports, à la réimpression illicite de l'œuvre.
Les auteurs d'œuvres dramatiques jouiront réciproquement
des mêmes droits en ce qui concerne la traduction ou la repré-
sentation des traductions de leurs œuvres.
Art. 6. — Sont également interdites les appropriations indirec-
tes non autorisées, telles que les adaptations, les imitations dites
de bonne foi, les emprunts, les transcriptions d'œuvres musicales
et en général tout usage d'œuvres qui se fait par la voie de l'im-
pression ou sur la scène sans le consentement de l'auteur.
Art. 7. — Sera, néanmoins, licite, réciproquement, la publi-
cation dans chacun des deux pays d'extraits ou de fragments
entiers accompagnés de notes explicatives des œuvres d'un auteur
de l'autre pays, soit en langue originale, soit en traduction,
pourvu que l'on indique la provenance et qu'ils soient destinés
à l'enseignement ou à l'étude.
Art. 8. — Les écrits insérés dans les publications périodiques,
dont les droits n'auront pas été expressément réservés, pourront
être reproduits par toutes autres publications du même genre,
mais à condition que Ton indique l'original sur lequel ils sont
copiés.
Art. 9. — Les mandataires légaux ou représentants des auteurs,
compositeurs et artistes, jouiront réciproquement et sous tous
les rapports des mêmes droits que ceux que la présente Con-
vention concède aux auteurs, traducteurs, compositeurs et ar-
tistes.
Art. 10. — Les droits de propriété littéraire, artistique et scien-
tifique reconnus par la présente Convention sont garantis aux
auteurs, traducteurs, compositeurs et artistes dans chacun des
deux pays pendant toute la durée de la protection que leur ac-
corde la législation de leur pays d'origine.
Art. 11 . — Après l'accomplissement des formalités nécessaires
pour assurer dans les deux États le droit de propriété sur une
œuvre littéraire, scientifique ou artistique déterminée, il sera
interdit de l'introduire, de la vendre ou de l'exposer dans chaque
pays respectivement, sans la permission des auteurs, éditeurs ou
propriétaires.
Art. 12. — Toute édition ou reproduction d'une œuvre scien-
tifique, littéraire ou artistique, faite sans qu'on se soit conformé
D, et que le négociant français ne sera pas déchu de
loe ses produit* auront cessé d'être fondas an Meii>
rëcîsêroeiit par suite des contrefaçons dont il aura ea
lepât
M négociants frant^ais, Boucieui de faire protiger lenrs
Eiique, devront avoir le soin de les y faire promple-
'j expédier leurs articles et de s'assarer qne ces arti-
en vente de façon continue.
noter que la marque ne pourra être déposée an Meii
l'a ét^ préalablement e[ régulièrement en France,
alinéa de l'article 3 prévoit que la marque ponrra, en
ilsrdite si elle est, par sa nature, contraire à la morale,
ou aui bonnes mœurs. C'est une restriction qui s'im-
I saurait critiquer si on n'entend par contraires i l'or-
les marques qui porteraient atteinte à l'Etat ou senienl
ubier la paii publique.
s de c
uellemcnt aucune législation spéciale sur ces malièrei.
t Dessins al modèles de fabrique.
t modèles de fabrique auront an Meiiqne nne protec-
>lemenl large et facile, plus étendue que dans aucun
effet, pai' une disposition singulière, c'est la loi sut
I s'appliquera aux dessins et modèles. Il en résullen
français pourra déposer au Mexique le dessin ou mo-
le premier e]tploité et déposa régulièrement en France.
I moilËle sera protégé indéSniment dan» les mêmes
ae marque.
€ Noms des localités tt régions.
vention, par les articles 5 à 9, assure la protection ao
ims de localités et de régions françaises et, d'nne façon
ncérité des indications de provenance française. Ce<
)l d'autant plus utiles qu'un décret du S février 18%
larerux étrangère donnée à des produits mexicains el
1 circulation dans le rayon des douanes et sur les biti-
age.
de l'Arrangement de Madrid de 1891, concernani la
fausses indications de provenance sur les marchandi-
nt auquel ont adhéré le Brésil, l'Espagne, la France,
agiie. le Portugal, la Suisse el la Tunisie, qui a été
Convention franco-meiicaine. .. >
ement français, par l'intermédiaire de Bon ministre à
é aupris du gouvernement meiicain contre une dé-
r suprême du Mexique qui, dans une li ' "' '
344
Art. 6. — Tout produit portant une fausse indication de pro-
tenance, dans laquelle un des Etats contractants ou un lien situé
dans Fun d'entre eux serait directement ou indirectement indiqué
comme pays ou comme lieu d'origine, sera saisi à l'importation
dans chacun desdits Etats.
La saisie pourra aussi s'effectuer dans l'Etat où la fausse indi-
cation de provenance aura été apposée ou dans celui où aura été
introduit le produit muni de cette fausse indication.
Si la législation de Tun des deux Etats n'admet pas la saisie
à l'importation, cette saisie sera remplacée par la prohibition
d'importation. Si la législation de l'un des deux Etats n*admet
ni la prohibition à l'importation, nila saisie à Timportation ou
à l'intérieur, cette prohibition ou cette saisie sera remplacée par
les actions et moyens que les lois de cet Etat assurent ou assu-
reront au ministère public ou aux nationaux en pareil cas.
Art. 7. — L'application des dispositions contenues aux articles
3, 5 et 6 aura lieu à la requête soit du ministère public, soit d'une
partie intéressée, individu ou société, conformément à législation
de chaque Etat.
Sera réputé partie intéressée tout fabricant, commerçant ou
producteur, engagé dans la fabrication, le commerce ou la pro-
duction du produit et établi dans la ville, la localité, la région
ou le pays faussement indiqué comme lieu de provenance ;
Les autorités ne seront pas tenues d'effectuer la saisie en cas de
transit.
Art. 8. — Les présentes dispositions ne font pas obstacle à ce
que le vendeur indique son nom et son adresse sur les produits
provenant d'un pays différent de celui de la vente ; mais, dans
ce cas, l'adresse ou le nom doit être accompagné de l'indication
précise et en caractères apparents du pays ou du lieu de fabri*
cation ou de production.
Art. 9. — Les tribunaux de chaque pays auront à décider
quelles sont les appellations qui, à raison de leur caractère gé-
nérique, échappent aux dispositions de la présente Convention.
Les appellations régionales de provenance des produits vinicoles
ne sont pas, cependant, comprises dans la réserve édictée par
cet article.
Art. 10. — La présente convention sera ratifiée et les ratifi-
cations en seront échangées aussitôt après l'accomplissement
des formalités prescrites par les lois constitutionnelles des Etats
contractants.
Elle sera exécutoire à partir du jour dudit échange (1) et elle
demeurera obligatoire jusqu'à ce que l'une des deux*parties con-
(1) L'échange des ratifications a eu lieu à Mexico le 11 septembre 1900.
se, autorisépar une loi du 30 juillet 1891 (J.o/f.AO aoûl)(l),
a rendu, le 17 août 1897 {Joum. off:, 21 août ; le Droit d'au-
teiir, septembre 1897, p. 97) un décret déclarant que » cette
ion produira son plein et entier effet dans les
t de la France et de la République Argentine qui
:te de l'adhésion de la France (2). Le gouverne-
1 Paraguay ayant donné son acceptation le 7 avril
président dé la République française a rendu le
1900 (/. off., 27 mai) un décret déclarant en vi-
» Convention de Uontévidéo dans les rapports
Paraguay (3).
le texte du traité de Montevideo,
premier, — T^es États signataires s'engagent à recon-
à protéger les droits de la propriété littéraire et sriis-
Q formé ment aux stipulations du présent traité.
— L'auteur de toute œuvre littéraire ou artistique et ses
roit jouiront dans les États signataires, des droits que
rde la loi du pays où a eu lieu ta première publication
ction de l'œuvre.
— Le droit de propriété d'une oeuvre littéraire ou artia-
iprend la facalté pour l'auteur d'en disposer, de la pa-
l'aliéner, de la traduire ou d'autoriser sa traduction et
roduire de toutes manières.
— Aucun État ne sera obligé de reconnaître le droit de
littéraire ou artistique pendant un laps de temps plus
celui qui est accordé aux auteurs jouissant de ce droit
iropre territoire. Ce laps de temps pourra être limitée
est établi dans le pays d'origine, si ce dernier est d'une
lindre.
abre, eip. mol., doc. 1897, p. 1191 ; rapport, p. 1417 ; adop-
in iWn. Sénat, eip. mot., doc. 1897, p. 509; rapport, p. 5SS,
tSjDUIetl897.
la législatton de la République Argentine, voir dans U
tteur, 1897, p. 100, analyte d'un travaU de M. Carloi Baires
application pratique de la Convention de Monléridéo dans ce
-oit d'auteur, 1901 . 3. — Un jugement argentin du 10 seplem-
ient d'accorder des doramages-intérétt contre les conlrefac-
essionnaire légitime d'on roman de Zola, bien qne l'article 17
ililution argentine pose simplement le principe qne ■ tont an-
venteur est propriétaire exclusif de son (Boïre, de son inven-
sa découverte pendant le délai qne la loi lai accorde ■, tait-
loi annoncée n'est pas encore faits (Cf. Irib. féd. argentio,
9, le Droit d'auteur, 1899. p. 119).
les dispositions en vigueur au Paraguay sur le droit d'auteur,
roU d'auteur, 1300. 6 et 11. Le Paraguay a également accepté
de l'Espagne et de l'ilalie iUroit d'auteur, 1900, 113 et 149)
— 349 —
Art. 5. ^ Par Texpression œuwre$ littéraires et artistiques, on
entend les livres, les brochures et toas autres écrits, les oBuvres
dramatiques ou dramatico-mnsicales, les œuvres chorégraphi-
ques, les compositions musicales avec on sans paroles, les des-
sins, les peintures, les sculptures, les gravures, les œuvres pho-
tographiques, les lithographies, les cartes géographiques, croquis
et travaux plastiques relatifs à la géographie, à la topographie,
à l'architecture on aux sciences en général ; enfin cette expression
s'applique à toute production du domaine littéraire ou artistique
qui peut être publiée d'une manière quelconque par voie d'im-
pression ou de reproduction.
Art. 6. — Les traducteurs d*œuvres pour lesquelles n'existe
pas ou est éteint le droit de propriété littéraire garanti jouiront,
pour leurs traductions, des droits établis par Tarticle 3, mais ils
ne pourront empêcher la publication d'autres traductions de la
même œuvre.
Art. 7. — Les articles de journaux pourront être reproduits,
en indiquant la source où on les prend, à l'exception des articles
consacrés aux sciences et aux arts et dont la reproduction aura
été interdite expressément par leurs auteurs.
Art. 8. ^ Peuvent être publiés dans la presse périodique, sans
nécessité d'autorisation aucune, les discours prononcés ou lus
dans les assemblées délibérantes, devant les tribunaux judiciai-
res ou dans les réunions publiques.
Art. 9. — Sont considérées comme reproductions illicites les
appropriations indirectes non autorisées d'une œuvre littéraire ou
artistique désignées sous des noms divers tels que <c adaptations,
arrangements, etc. », et qui ne sont en réalité que des reproduc-
tions de cette œuvre ne présentant pas le caractère d'une œuvre
originale.
Art. 10. — Les droits d'auteur seront reconnus, jusqu'à preuve
contraire, en faveur des personnes dont les noms ou les pseudo-
nymes seront indiqués sur l'œuvre littéraire ou artistique.
Si les auteurs ne veulent pas faire connaître leur nom, ils de-
vront désigner les éditeurs auxquels les droits d'auteur seront
attribués.
Art. il. — Les responsabilités encourues par ceux qui usur-
pent le droit de propriété littéraire ou artistique, seront établies
devant les tribunaux et régies par les lois du pays où la fraude
anra été commise.
Art. 12. — La reconnaissance du droit de propriété des œuvres
littéraires ou artistiques n'empêche pas les États signataires d'in-
terdire, conformément à leur législation, qu'on reproduise, pu-
blie, fasse circuler, représente ou expose les œuvres considérées
comme contraires à la morale et aux bonnes mœurs.
■ V * ».•
- 350 —
Art. 13. — Il n'est pas indispensable, pour que ce traité soit
mis en vigueur, qu'il soit ratifié simultanément par ton? les
États signataires. Ceux qui Tapprouvent le, feront savoir aux
gouvernements des Républiques Argentine et Orientale de l'U-
ruguay qui en informeront les autres parties contractantes. Cette
procédure tiendra lien d'échange de ratification.
Art. 14. — L'échange une fois effectué dans la forme indiquée
par l'article précédent, le présent traité demeurera en vigueur à
partir de l'accomplissement de cette formalité pendant un temps
illimité.
Art. 15. — Si l'un des Etats signataires jugeait à propos de
dénoncer le traité ou d'y introduire des modifications, il en avi-
serait les autres; mais la dénonciation ne produira ses effets
que deux ans après l'acte de dénonciation, délai pendant lequel
on pourra conclure un nouvel accord.
Art. 16. — L'article 13 s'applique aux Etats qui, n'ayant pas
participé à ce Congrès, voudraient adhérer au présent traité.
Art. 4150.
CJonventions internAttonalea. — C^n^ventlon de
Berne. — Prc^rlété littéraire et arttetlcfne. — Con-
férenee de révision à Parte en 1806.
Actes de la Conférence de Paris, du 4 maf 1896.
L'accord entre les plénipotentiaires présents s*étantfaiU
sauf avec la Norvège pour les modifications à apporler
au texte et avec la Grande-Bretagne pour l'interprétation
du texte en vigueur, il a fallu signer séparément un acte
additionnel et une déclaration interprétative. Ces deux
instruments ont été promulgués en France par décret du
29 septembre 1897 (1) {J, off., 20 octobre). Ils sont ainsi
conçus (2) :
(1) Loi approbative du 15 avril 1897, J. o/f., 18 avril (Chambre, exp.
mot., doc. 1897, p. 307 ; rapport de M. VaUé, p. 921 ; adoption» 8 awil
1897. Sénat, rapport de M. Thézard, doc. 1897, p. 415; adoption
9 avril 1897).
L'acte additionnel et la déclaration interprétative ont été ratifiés par
tous les signataires. L'échange des ratificaUons a eu lieu le 9 septembre
1897 (le Droit d'auteur, octobre 1897, p. 109) : la déclaration interpré-
tative est entrée en vigueur, de même que Tacte additionnel, le 9 dé-
cembre .
On trouvera dans le Droit (Tautnur^ année 1898, les mesures prises
ces œuvrei, de la protection accordée par U
! présent acte additionnel (1). n
Art. a. Le premier alinéa de l'arl
auteurs ressortiassant à l'uD des pa]
cause, jouissent, dans les autres p
: oa d'autoriser la traduction de!
durée du droit sur l'œuvre origini
de traduction cessera d^exister lorsi
usage dans un délai de dix ans à pai
I de Cœuvre originale, en publiant (
des pays de l'Union, une Iraducliû
la protection sera réclamée. »
■ Art. 7. L'article 7 aura la teneur
romans- feuilletons, y comprà les i
naux ou recueils périodiques d'un c
t être reproduits, en original ou e
ays, sans l'autotisation des auteurs c
sera de même pour les autres articles
iriadiques, lorsque les auteurs ou éd
îclaré, dans le journal ou le recueil
aitre, qu'ils en interdisent la reprodu
que rinlerdiclion soit faite d'une m
ue numéro.»
lèfaut d'interdiction, la reproducti
)n d'indiquer la source. »
aucun cas, l'interdiction ne ponrr
discussion politique, aui nouvelle
Art. 12. L'article 12 aara la teneni
ite œuvre contrefaite peut être saisi
' des pays de PVnion où l'œuvre ori^
légale.
saisie a lieu conformément à la lé
pays. »
- Art. 20. Le deuxième alinéa i
suivante :
leune mesure transilojre n'ayaul été )
; traduction des œuvres publiées avan
Iditionnel, des difflcullès peuvent le {
aent examinées par M . Amar dans le 1
onr les droits acquis pir les publicate
Qcien régime voir, au point de vue ita
udiciaire de U Soeielà ilaliana degli
c. 1900, p. 106.
produclion de cette ceuvre même, et dans les limites des conven-
tions privées entre les ayants droit.
II. — ffuméro 4. Ce numéro aura la teneur suivante :
» i. L'accord comman prévu à l'article 64 de la Convention est
déterminé ainsi qu'il suit :
n L'application da la Convention de Berne et dn prisent Acte
Additionnel aux œuvres non tombées dans le domaine public
(fans Uvr pays d'origine au moment de la mise en vigueur dt cet
Ktis, aura lieu suivant les stipulations j relatives contennes
dans les Conventions spéciales existantes on à conclure h cet
effet.
" A défaut de semblables stipulations entre pays de l'Union,
les pays respectifs régleront, chacun pour ce qui le concerne,
pîir la législation intérieure, les modalités relatives h l'applica-
tion du principe contenu dans l'article 14.
« les stipulations de l'article 14 de fa Convention de Berne et dv
pTiient numéro du Protocole de clôture s'appliquent également au
liroit exclusif de traduction, tel qu'il est assuré par le prisent Acte
aWiliomiei.
let dispositions transitoires menlionnée' ei-dessus sont apptiea- '
iiies en cas de nouvelles accessions à l'Union. »
Art, 3. —Les pays de l'Union ijui n'ont point participé au pré-
sent Acte additionnel seront admis k y accéder en tout temps
X
*.î
— 354 —
'0 sur leur demande. Il en sera de même pour les pays qui accéde-
ront ultérieurement à la Convention du 9 septembre 1886. Il suf-
fira, à cet effet, d'une notification adressée par écrit au Conseil
fédéral suisse, qui notifiera à son tour cette accession aux autres
gouvernements.
Art. 4. — Le présent Acte additionnel aura même valeur et
durée que la Convention du 9 septembre 1886. '
Il sera ratifié et les ratifications en seront échangées à Paris
dans la forme adoptée pour cette Convention, aussitôt que faire
se pourra, et au plus tard dans le délai d'une année.
Il entrera en vigueur, trois mois après cet échange, entre les
pays qui l'auront ratifié. '
DÉCLARATION
du 4 mai 1896,
Interprétant certaines propositions de la Convention de Berne
du 9 septembre 1886 et de l'acte additionnel signé à Paris le 4
mai 1896 :
Les plénipolentiaires soussignés de l'Allemagne, de la
Belgique, de l'Espagne, de la France, de l'Italie, da
Luxembourg, de Monaco, du Monténégro, de la Norvège,
de la Suisse et de la Tunisie (1), dûment autorisés à cet
effet par leurs gouvernements respectifs, sont convenus
de ce qui suit, en ce qui concerne l'interprétation de la
Convention de Berne du 9 septembre 1886 et de l'acte ad-
ditionnel de ce jour :
1*^ Aux termes de l'article 2, alinéa 2, de la Convention,
la protection assurée par les actes précités dépend unique-
ment de l'accomplissement, dans le p^ays d'origine de
l'œuvre, des conditions et formalités qui peuvent être pres-
crites par la législation de ce pays. Il en sera de même pour
la protection des œuvres photographiques mentionnées
dans le n® 1, lettre B, du protocole de clôture modifié.
2*» Par œuvres publiées^ il faut entendre les œuvres idi-
tées dans un des pays de l'Union. En conséquence, la re-
présentation d'une œuvre dramatique ou dramatico-musi-
cale, l'exécution d'une œuvre musicale, l'exposition d'une
œuvre d'art, ne constituent pas une publication dans le
sens des actes précités.
(1) La République de Haïti a adhéré à la déclaration comme à l'acte
additionnel (voir suprà, p. 851, note 3).
': * ■^'"»*e»>«
— 356 -
t
privé se rapportant à la procédure civile (1) a été conclue
à La Haye, le 14 novembre 1896, entre la France, la Bel-
gique, TEspagne, Tltalie, le Luxembourg, les Pays-Bas,
le Portugal, la Suisse. A cette Convention ont adhéré pos-
térieurement TAllemagne, TAutriche-Hongrie, le Dane-
mark, la Roumanie, la Russie, la Suède et la Norvège.
Un protocole additionnel à la dite Convention a été signé
à La Haye le 23 mai 1897 {i).
Nous nous bornerons à extraire ce qui a trait à la
suppression de la caution judicatum solviy qui jusqu'ici
constituait pour le demandeur étranger une entrave sé-
rieuse à Texercice de ses droits (3).
Convention du 14 novembre 1896.
Caution » judicatum solvi » .
Art. 11 — Aucune caution ni dépôt, sons quelque dénomination
que ce soit (4), ne pent être imposé, à raison soit de leur qualité
tious nationales afin de réprimer rusurpation des noms, signatures oa
signes des auteurs en matière d'œavres littéraires et artistiques .
V. — Que des délibérations de la prochaine Conférence sorte un
texte unique de GonTention,
(1) Elle traite : 1* de la communication des actes judiciaires et eitra-
judiciaires ; 2* des commissions rogatoires ; 3<> de la caution judicatum
solvi ; ifi de Tassistance judiciaire gratuite ; 5* de la contrainte par corpi
(voir le texte complet, Ann. lég, française^ Soc. lég, contp.4900,p.l09).
(2) La convention et le protocole ont été approuvés par une loi du
4 février 1899 {Joum . o/f. du 7) qu'a modifiée une loi du 31 mars 1889
(Journ. off, du 9), la première ayant omis de mentionner certaines ad-
• hésions (Chambre, exp. mot., doc. 1898, p. 1355 ; rapport, doc. 1896,
sess. extraordinaire, p. ^9 ; adoption, 8 décembre 1896. Sénat : exp.
mot., doc. 1898, p. 625; rapport, doc. 1899, p. 57; adoption, 91 Janvier
1899).
L'échange des ratifications a eu lieu à La Haye le 29 avril 1899. La
convention a été promulguée en France le 16 mai 1899 {^ioum. off»
du 19).
(3) Une Convention avait été signée entre la France et la Russie les
15-27 juillet i896.aux termes de laquelle « il ne sera exigé des scgets rus-
ses, qui auraient à poursuivre une action en France ou dans les colo-
nies françaises comme demandeurs principaux ou intervenants, aucuns
droit, caution ou dépôt auxquels ne seraient pas soumis les Français
conformément aux lois françaises, et réciproquement.» Otte conTention
a été promulguée en France le 12 avril 1899, /. off. du 14. (Loi du
31 mars 1899, J. o/f. 2 avril. Chambre : exp. mot., doc. 1898, p. 1355;
rap., doc. 1899, p. 221 ; adoption, 8 février 1899. Sénat : exp, mot.,doc.
1899, p. 82 ; rap., p. 107 ; adoption, 23 mars 1899). Elle n'est pas abro-
gée par la Convention de La Haye, elle se concilie avec elle (V. Ann, Ug.
fr.. Soc. lég, comp., 1900, p. 97).
(4) Ces termes si généraux semblent nécessairement s'appliqaer au
aatlonntiiiADl que l'trticle 47 de la loi du 5 joUlet 1SU eifge de l'é-
triDger qai requiert le eaiiie poar CDiiatater la MnlTefecoD. Le juge
ponm toDJODre, en intoriunt li aiisie, imposer un cautlonuemeut,
eoiDDie il peut le faire même quand le brerelA est [rtncais. maie il ne
>era ploi obligé, i peine de nullité, d'imposer ce cautionnement aux bé-
DiScùîreede la Canveolion de la Haye comme aux autres élransera.
(t) I4 question de la caution judicaliim tolvi était restée en dehors
des disposiliont de la Convention d Union de Pans ,du 10 mars ISHS.L'ar-
■icle % de cette Convention, tout en spëciBant que les étrangère unionis-
tci devaient avoir la même protection que les nationaux, ne les dispen-
ttit pas de fournir caution; cela résullsit formellement du n* b du proto-
coledeclâture où il estapéciliéque l'article 2 ne porteaucune atleinieàla
tégislation de chaque Etat contracIflDi en ce qui concerne la procédure
iniTie devant lea tribunani et la compétence. ;Voir Pouillel, Brev. d'inv.,
ti'GBStùet Unole.)
— 358 —
Art. 4152.
Thé&tre. — Contrat de flri*lllé. — Contrat de clnQue.
— IndlirlelblUté. — Obllffrntlon Ilelte. — Inex^eo-
tlon. — Dommniree et Intérêtii.
Est licite et doit produire tous ses effets le traité passé
entre un directeur de théâtre et un marchand de billets,
chef de claque^ par lequel le directeur a, moyennant une
somme payée d'avance^ mis à la disposition de cet individu
un certain nombre de fauteuils et des places de troisième
galerie, spécialement affectées au service de claque : un tel
contrat ne saurait être divisé en un contrat de griffe pour
les fauteuils et un contrat de claque pour les places de troi-
siéme galerie^ mais constitue un tout indivisible formant
un contât de claque (1).
Par suite, lorsque ce traité a été signé pour un nombre
déterminé de représentations et que le directeur de théâtre
vient à cesser son exploitation avant d'avoir donné le nom-
bre de représentation déterminés, ce directeur doit être con-
damné à rembourser au marchand de billets, chef de claque,
à titre de dommages-intérêts, la somme représentant la ré-
paration du dommage qu'il a éprouvé par la privation des
places qui devaient être mises à sa disposition (2).
(1) La jurisprudence s'était jusqu'ici prononcée en sens contraire ; elle
considérait comme illicite la convention intervenue entre un directeur
de théâtre et un entrepreneur de succès, dans le but d'assurer au théâ-
tre le service de la claque. Voir notamment, Paris, 8 août 1853. Strey,
53.2.499; Lyon, 25 mars 1873, Sirey, 73.2.179. Comp. Lacan et Paul-
mier, Législ. des théâtres^ t. 2, p. 119 et 486.
Un ari^t de la Cour de Paris du 29 décembre 1866 {Droit J janvier 1867)
avait décidé que le contrat de griffe, ainsi désigné à raison de la griffe
spéciale appcsée sur les billets vendns en bloc, était distinct do
contrat de claque, qui seul devait être considéré comme illicite.
(2) Le jugement, conforme à la jurisprudence HUtérieure, avait, en
raison du caractère illicite qu'il reconnaissait au contrat, reChsé au mar-
chand de billetSfChef de claque, son droit de répéter les sommes versées
en exécution du contrat. Cette question du droit de répétition en ma-
tière d'obligation illicite a divisé profondément la jurisprudence : tandis
que la chambre des requêtes de la Cour de cassation et un grand nom-
bre de Cours d'appel repoussent l'action en réparation, la chambre civile
et d'autres Cours admettent sa recevabilité.
Pour la non-recevabilité, voir : Cass. req., 4 juillet 1892, Sirey, 92.
1.513; Cass. req., 1" avril 4895, Sirey, 96.1.299 et la. note ; Nancy,
2 janvier 1893. Sirey, 94.2.206 ; Riom, 30 nov. 1893, Sirey, 94.2.302.
Pour la recevabilité : Cass. civ., 11 fév. 1884, Sirey, 84.1.265; Cass.
civ., 13 juillet 1885, Sirey, 86.1.205 ; 25 janv. 1887, Sirey, 87.1.224 ;
QD bat indivisible et qu'il s'agit d'un contrat de claque ;
Considérant qae c'est k tort que les premiers jages ont déclaré
que te service des claqueurs est essentiellement basé sur le men-
Caen, 18 janv. 1883, Sirey, 90,3.97; BesaD;on, 6 mars 1895. Siivy,
95.a.l96, elc.
A. T.
Le cessitmnaire du droit de reproduction doit donc se
antonner dans le procédé pour lequel il a traité et publier
'œuvre telle qu'elle lui a été vendue : il ne peut altère
elle-ci, la modifier, y faire des changements, sans porter
tteinle aux droits de l'artiste (1).
Ainsi le cessionnaire porte atteinte aux droits de l'artiite
n publiant les dessins, sous la signature de l'artiste, tuée
'es légendes et dialogues différents des légendes et dialogvet
riginaux (2).
En revanche, l'éditeur petit changer les dimensions du
essin, si ce changement ne modifie pas, en réalité, lecarae-
)re de Vœuvre ; il a, de méme,le choix du coloris, s'il n'est
as établi que le coloris le plus propre à faire ressortir Ib
essin fût compris dans la cession (3).
rrib.civ.S«ine,16 décembre 1899,— Agnès,dît A..Sorel c.Faj«rd frèrw.)
Jugé en ces termes :
Le Tridun&l, Attendu qa'Agnès collabore & lies jonruanx
lustrés, notamioent à U Caricature, sous le pseudonyme de
L. Sorel, en y publiant habituellement des silhouettes en noir
iir fond de couleur, accompagnées de légendes et de dialogues ;
ue ces œuvres, dont l'originalité n'est pas contestée, peuvent
il) a. Pouillet, Prop.liti., n" 323 et s. ; Couhio.Prop. ind.art. »t UU.,
2, p. 535 et s.
Voir : pour une scalptare.trib. dv. Seine, 29 octobre i891,du Passafre.
nn., 95.2.32 : pour une série de dessins, irib. civ. Seine, 7 «vril 189t,
oëa, .4nn.,94,1fô. Jugé encore que l'éditeur qui a acquis le droit de
iproduire un tableau i ne saurait modifler la composition de l'autear
; changer les propopllons par la suppression d'une parlie important»
1 paysage, formant le fond dudit tableau >, que ces ehangemenls oo-
rent une action, au profit de l'auteur ; qn'en effet il saFlil qu'une i^a-
re d'art soit modifiée et altérée sans le consentement de l'auteur et
ubliée BOUS son do m, pour que celui-ci soU fondé à réclamer (Trib.ci*-
eine, 1" ch.,39 d<^cembre 1896, Besséde, cilé par Couhin, op. cit., t.S.
532, note 837, chiff. 10),
Pour une œuvre littéraire voir : trib. cIv, Seine, 19 décembre 189*.
ontégut,,.lnn,, 98.34.
(2) Même solution a été donnée au Congrès des Associations de pn»^
Rome en 189.1 (voir rappe rt Morel-Relz e1 discussion dans le Bulte-
n officiel den Aisedntinns de pre.4s«,n° 4, p. 52, analysés dans le Droit
■auteur, 1899, p. 57), à Paris en 1900 (voir rapport Georges Mailtirdi?/
eu reproduit dans le Droit tfaufeur. 1900. 100).
(3) C'est sons prétexte que le caractère de Tceuvre n'était paa nodiflé
ii'ona même autorisé l'édileor àajoDteràune gravure des remarque'
«vées {Irib. civ. Seine, 19 juin 1897, Chanet, Ann., 98.33).
' aa± termes ae la loi ao i»jaiiiei i ivi ;
Attendu qu'il est admis par lea parties qu'Agnès a Teu<lu,sanfi
réserte, les dessios faisant l'objet du litige à l'éditeur Stork,
qui en a Ini-même transmis plus tard la propriété entière &
Fayard frères ;
Attendu que ceux-ci ont publié dans la Jeunesse amusante
quelques-unes des sillionettes du demandeur, en modifiant les
légendes, les dialogues, les fonds de couleur et les dimensions
des dessins reproduits dans la Caricature ; qu'Agnès se plaint de
ces modifications, soutient qu'elles portent atteinte à ses droits
et réclame 5.000 francs de dommage s- intérêts à Fayard- frères ;
En droit :
Attendu qu'il a été dit, à jnsLe titre, que l'artiste qui Tend son
œuvre et reçoit un équivalent du proflt qu'elle eût pu lui pro-
curer s'il l'eût publiée pour son nomple, n'aliène pas l'espérance
de réputation que peut lui assurer la publicité, parce qu'il s'agit
lii d'une chose inaliénable ; qu'il a donc le droit, même lorsqu'il
est dépouillé de sa propriété par une vente sans réserve, de se
défendre contre un fait qui consiste à lui imputer une œuvre
différente delà sienne ; qu'il s'ensuit que le cessionnaire du droit
de reproduction doit se cantonner dans le procédé pour lequel
il a traité et publier l'œuvre telle qu'elle lui a été vendue ; qu'il
porte dès lora atteinte aux droits de l'artiste s'il se permet d'al-
térer cette œuvre, de la modifier, d'y faire des changements, &
l'iasu et sans le consentement de ce dernier ;
Ed fait :
Attendu que les légendes et les dialogues qui accompafinenl
les silhouettes de Sorel s'accouplent avec le dessin pour réaliser
une idée comique, se complètent et forment avec lui une œuvre
indivisible; qu'il est manifeste, en effet, que le dessin de Sorel,
sans sa légende ou son dialogue, perd singulièrement son in-
térêt et ne répond plus au but poursuivi ;
Attendu, en conséquence que Fayard frères, en changeant les
légendeset les dialogues des dessins de Sorel et en les publiant
ainsi modifiées, avec la signature de celui-ci, dans la Jeunesse
amasanfe, ont placé anus les yeui du public des matières étran-
Rères à Sorel et dénaturé la composition de son œuvre ; que c'est
donc à bon droit qu'il se plaint des publications dont les défen-
deurs lui font encourir, malgré lui, la responsabilité ;
Attendu, en ce qui concerne les changements apportés dans
les dimensions des dessins, qu'ils ne modifient pas en réalité le
caractère de l'œuvre ; que, d'autre part, il n'est pas établi que
ït cnJuris le plus propre k faire ressortir les silhouettes de Sorel
— 364 —
ait été également compris dans la vente ; que» de ces deux chefs,
les réclamations de Sorel ne sont pas, dès lors, justifiées;
A regard des dommages-intérêts :
Attendu que le demandeur n^apporte pas an tribunal la preuve
que de nombreuses compositions aient été modifiées ; que, si
elles ont paru altérées dans un journal dont le tirage est impor-
tant, il est constant que la réputation de Sorel n*a pas été at-
teinte au point de lui causer un très grave préjudice ; qu*en ou-
tre, il est équitable de retenir que Fayard frères ne paraissent
pas avoir agi de mauvaise foi, en pensant peut-être que, par
suite de la cession des dessins en toute propriété, ils pouvaient
modifier à leur gré les légendes et les dialogues ; que, dans ces
conditions, il sera suffisamment indemnisé par rallocation d'une
somme de 500 francs ;
Par ces motiitb, Condamne Fayard frères à payer à Agnès^dit
Sorel, une somme de 500 francs à titre de dommages-intérêts;
Leur fait défense de publier & l'avenir les dessins de Sorel
autrement qu'avec les légendes et les dialogues originaires et
ce, à peine de 10 francs par chaque contravention constatée ;
Déclare Agnès mal fondé dans le surplus de sa demande ;
L*en déboute ;
Condamne Fayard frères aux dépens.
!'• Chambre. — Présidence de M. Plantkau. — M»» Hon-
teux et DE BiGAULT pu 6RANRUT,avocats.— Ministère public :
H. Drouart, substitut.
TABLE ALPHiBÉTIODE BES MATIÈRES
CONTENUES DANS LE TOME XLVI
(Année 1900)
A^OEUTT BXCI^USIF. Uagent
exclusif d*ane maison de com-
merce, qui est chargé de la trans-
mission des commandes, se rend
coupable, si les produits de cette
maison constituent une imitation
fraaduleuse et une concurrence
déloyale, d*nsage de marque frau-
duleusement imitée et de concur*
rence déloyale et sa responsabi-
lité se trouve engagée yis-à-vis du
propriétaire de la marque. P. 173.
ABOMWTWM (RBPUBUI -
aUB). Y. Traité de Montevi-
deo).
ARRAIVGBIIIEIVT DB MA-
DRID (V. Assignation^ confis-
cation, saisie^ tribunaux (pou-
voir des), — L'arrangement de
Madrid (1891), concernant la ré-
pression des fausses indications
de provenance sur les marchan-
dises, ne dispense pas de la cau-
tion judicatum solvi les étran-
fers qui l'invoquent. P. 189. —
l'arrangement signé à Madrid
le 14 avril 1891, notamment par
l'Espagne, le Portugal et la France
et sanctionné par la loi française
du 13 avril 18d2, en édictant, dans
son article 4, que les tribunaux ne
pourront pas considérer comme
des appellations génériques, dé-
pourvues de protection, les appel-
lations régionales de provenance
des produits vinicoles, a entendu
interdire toute discussion sur le
caractère des noms des régions
connues pour leurs produits vini-
coles, quand même il aurait été
Cait, dans la pratique commer-
ciale, usage illicite du nom de la
région pour désigner des produits
d'autre provenance. P. %\%
ASSIGIVATION. L'article 59,
§ 3, du Code de procédure civile,
qui prévoit que le demandeur
{>eut, s'il y a plusieurs défendeurs,
es assigner tous au domicile de
l'un d'eux, doit recevoir son ap-
plication non seulement entre
Français, mais encore lorsqu'un
ou plusieurs défendeurs sont
étrangers ; c'est donc è bon droit
que des Portugais assif[nent de-
vant un tribunal français des né-
gociants espagnols en même temps
que des négociants français domi-
ciliés dans le ressort de ce tribu-
nal, lorsqu'il est constant que les
négociants français étaient des
défendeurs sérieux et n'avaient
pas été introduits dans l'instance
pour distraire les étrangers de
leurs juges naturels. — Les mê-
mes règles s'appliquent sous l'em-
pire de la (Convention de Paris de
1883 et de l'arrangement de Ma-
drid de 1891 qui en est le com-
plément (Résolu par la Cour de
Rouen). P. 196.
ATTBINTBS ^ A LiA PBR-
SOrVIVALiITE (V. Compétence,
débats judiciaires). — Le droit,
pour les écrivains, de puiser dans
des faits historiques ou dans des
épisodes révélés par des débats
judiciaires le sujet d'un roman
on d'une pièce de tbéAtre n'en
laisse pas moins ouverte l'action
en dommages-intérêts, au profit
des tiers à qui préjudicierait l'œu-
vre et à l'encontre de l'auteur qui
serait en faute. P. 96. — Toute
Sersonne a le droit incontestable
e se plaindre de l'abus qui,mal-
8 ré elle, a été fait de son nom et
e réclamer la réparation du pré-
judice qu'elle a souffert. — Spé-
cialement, un négociant juif peut
* réclamer des dommages et inté-
rêts à un journal anti-sémitique,
'«ï-" »"? ■
, ■^*jl
— 366 -
qui a fait figurer son nom sur
une liste de personnes appartenant
à la religion Israélite et prétend
ainsi le désigner à ranimaoversion
publique. P. 100.
BIBUOGHAPHIE. P. 284 et s.
BREVBT (V. Certificat d'addv-
tion^ collaboratiùn, combinaison
nouvelle, compétence, condition
potestative. contrefaçon, copro-
priétéf déchéance, description,
emploi nouveau, exploitation,
Grande-Bretagne, licence, nullité,
ouyrier,perfectionnemenl8, potcr-
suite, produit industriel nouveau,
résultat industriel, société, ttHbu-
naux {pouvoir des). — V. aussi
Bibliographie. P. 295).
BREVKT ÉTRAIWGER (V.
Nullité^ tribunaux {pouvoir des),
C
CATALiOGUB (V. Dommaoes-
intérêts). — La reproduction, dans
un cataiogue, d'une machine bre-
vetée, étant de nature à laisser
croire à des fabricants spéciaux et
à indiquer aux tiers que le droit
privatif de Tinventeor est contesté
on même n'existe pas, constitue
un fait dommageable dont il est
dû réparation. P. 55.
CAUnOIV JUDIOATUM
SOEiVI {\, Arrangement de Ma-
drid, cautionnement, dommages-
intérêts, Portugal), — Conven-
tion de la Haye. P. 855.
CAUTIOlVlVBJliBIVT (V. Dom-
mages-intérêts), — Le cautionne-
ment exigé pur le président du
tribunal, soit dans rordonnance
autorisant la saisie aux termes de
l'Arrangement de Madrid, soit en
référé sur opposition du saisi, ne
prive pas le saisi du droit de sou-
lever devant le tribunal l'exception
de caution judicatum solvi, car le
cautionnement est seulement des-
tiné à couvrir le préjudice pou-
vant dériver de raltération ou de
la perte des marchandises saisies ;
il importe peu que le président
ait employé dans Tordonnance le
mot c caution », mais il appartient
an tribunal, dans la fixation de la
CàVLiïon judicatum solvi, de tenir
compte du cautionnement dëà
exigé. P. 189.
CERTIFICAT D'ADDITIOZV
(V. Contrefaçon). — Lorsqu'on
brevet (pris pour un affût cuirassé à
embrasure minima) porte sur deux
dispositifs différents : 1* combi-
naison d*un affût mobile verticale-
ment au moyen d'un contrepoids
hydraulique et d'une cnirasse,
mobile horizontalement, qu'oo
élève, pour permettre la rotation,
au moyen d'un levier équilibré ;
2<» affût porte-cuirasse, mobile ver-
ticalement et horizontalement sur
un piston-pivot qui s'élève et s'a-
baisse au moyen d'un contrepoids
hydraulique ou d'un contrepoids
à chaîne, le certificat d'addition
qui décrit un affût porte-cuirasse
sur piston-pivot mû par un levier
équilibré, se rattachant tout à
la fois au premier et au deuxiè-
me dispositif du brevet, ne sera
f>as frappé de nullité par la nol-
ité d'un seul des dispositifs do
brevet. P. 234.
CHOSB jruOBB. Lorsque le
demandeur, qui concluait à inter-
dire l'usage, par un concurrent,
des chiffres 1 à 10 pour la dési-
§ nation de ses produits, a, par
es conclusions, invoqué l'autorité
de la chose jugée, résultant, de oe
qu'un arrêt précédent, entre les
ayants droit des mômes parties, a
déclaré illicite l'usage des n«* 1,
3, 5, 7 pour désigner le dosage des
sources d'eau minérale en bicarbo-
nate de soude, le juge du fait est
tenu de s'expliquer sur ce moyen.
P. 0(>«
COIXABORATIOIV {V, Co-
propHété, brevet). — La question
de savoir si celui qui a coopéré à
la découverte d'une invention a un
droit de propriété sur cette inven*
tion^ est une question de fait. Pour
la résoudre, il y a lieu d'examiner
quelle a été la nature de cette
coopération, son importance et de
voir si réellement l'invention est
le fruit des recherches d'un seul
ou le résultat de la combinaison
des efforts commnns faits poor
réaliser et rendre pratique ridée
de l'inventeur. P. 70. — Si celui
dont l'inventeur réclame les se^
vices n'a fait qu'exécuter matériel-
lement les ordres reçus, que réa-
liser un plan, un dessin qui loi est
remis avec tontes les indications
^» i
— 367
de détail nécessaires et ne parti-
cipe pas aux rechercties faites^ et
aux perfectionnements successifs,
sli n'est en un mot que Tinstra-
ment passif de l'inventeur, l'inven-
tion, née à la vie pratique par une
semblable collaboration, n'en est
pas moins la création de Tinven-
teur seul ; il en serait autrement
si l'aide choisi par celui-ci à rai-
son même de ses connaissances
pratiques, de son intelligence avait
apporté à Tinventenr le concours
de ses lumières et de ses obser-
vations personnelles. P. 70.
COMBUVAISOIV IVOUVEL.-
I4E (V. Contrefaçon). — Est bre-
vetable la combinaison, dans un
affût cuirassé à embrasare minima,
d'éléments qui tous étaient isolé-
ment dans le domaine public mais
non réunis. P. 235.
CtOllf PÉTEIVCB (V. Tribunaux)
{pouvoir des). — Si la compé-
tence des tribunaux civils s'étend
à tous les litiges gui mettent en
cause les brevets dlnvention, cette
compétence a elle-même pour li-
mite le principe de l'indivisibilité
de l'action et de la procédure.
Lorsque l'action porte sur des
chefs complexes se rattachant aux
effets indivisibles d'un même con-
trat de vente, la compétence du
juge saisi de l'action s'étend né-
cessairement à Texception. P. 40.
— Les tribunaux de commerce
sont compétents pour statuer sur
une cession de licence, c'est-à-dire
sur l'achat et la cession d'un droit
dans un bot commercial. P. 89.
— Le tribunal de commerce est
incompétent pour connaître de
l'action en dommages-intérêts in-
tentée contre un journal à raison
de la publication d'une liste de
commerçants désignés comme Is-
raélites, cette publication ne cons-
titoantpas un agissement dénature
commerciale au profit du journal
et visant les personnes désignées,
à raison de la religion qu'elles pro-
fessent et non du métier qu'elles
exercent. P. 103. — Les tribu-
naux français sont compétents
pour statuer sur une instance en-
tre étrangers oui a pour but la
réparation d'un aélit ou d'un quasi-
délit commis en France, parexem-
ple sur l^introdoclion en France
d'une marchandise vendue ou des-
tinée à être mise en vente sous
une fausse indication de prove-
nance. P. 196.
COIVCURREIWCB DÉliOYA-
I«B (\. Agent exclusif, dommages-
intérêts, nom patronymique, tri-
bunaux {pouvoir des) . — V. aussi
Bibliographie, p. 802). — Il y a
concurrence déloyale, pour une
société d'eaux minérales (la société
des eaux du Boulou), à revêtir ses
bouteilles d'éticjuettes portant en
vedette une désignation suscepti-
ble de tromper l'acheteur peu
éclairé ou peu attentif (telle que
Vichy du Midi) et à exalter dans
ses réclames l'eau dont elle est
propriétaire, au détriment d'autres
eaux (les eaux de Vichy). P. 15. —
Constitue un acte de concurrence
blâmable qui doit être interdit, le
fait par un ancien administrateur
de tournées théâtrales de prendre
dans ses aftiches, prospectus et
circulaires, le titre sous lequel il
a exercé pendant un certain temps
ces fonctions alors qu'il n'en est
plus investi, et n'appartient plus
a la même troupe. P. 34. — Com-
met une usurpation de nom abu-
sive et se rend passible de dom-
mages-intérêts, tant à l'égard de
l'inventeur que de ceux auxquels
il a concédé Je droit d'exploiter sa
méthode, celui qui, après s'être
initié à ladite méthode et être resté
un certain temps comme profes-
seur dans les écoles fondées par
l'inventeur ou ses cessionnaires, a
ouvert une école similaire et a,
dans ses affiches, prospectus, en-
seignes, rédigés en vue de créer
une confusion préjudiciable à ces
derniers, annoncé que l'enseigne-
ment des langues vivantes était
donné dans son école suivant ladite
méthode, P. 151. — Celui qui a usé
de bonne foi d'un nom qu'il pouvait
croire tombé dansle domaine public
ne s*est pas rendu coupable d'actes
de concurrence déloyale par usur-
pation de nom, mais il pourrait
être condamné à des dommages-
intérêts pour faute préjudiciable
au demandeur ; dans le cas même
où le demandeur ne justifierait
d'aucun préjudice pécuniaire, les
frais de l'instance doivent ce-
pendant être mis à la charge de
celui qui l'a rendu nécessaire en
usant a tort du nom commercial
d'autrui. P. 156.
COIVCURRBIVCB UJLICITB
{W. Dommages-intérêts, nom de la
— 368 —
/jsmme. — Y. auBsi Bibliographie,
P. 2)02). — N'a pas commis de
concurrence illicite )e débitant
orai, sar une demande d'eau de
Yichy, a livré des eaux çroYenant
non de Vichy môme, mais du bas-
sin de Vichy, s'il a averti i'ache-
tear que les liouteilles livrées ren-
fermaient de l'eau des sources
Larbaud St-Torre et Guerrier et si
l'acheteur a en toutes facilités pour
distinguer ces sources de celles de
Vichy. P. a
COIVDITIOIV POTE8TATI-
VES. La cession d'une licence par-
tielle de brevet d'invention con-
sentie sous la condition que le
licencié paiera au breveté ane cer~
taine redevance par machine cons-
truite est licite, alors même que
robligation de construire un nom-
bre minimum de machines n'est
j>as stipulée: on ne saurait soutenir
que ce contrat soit vicié par une
condition potestative dépendant
de la seule volonté du licencié,
une telle condition n'affectant pas
la validité d'une obligation, lors-
qu'elle a été stipulée au profit de
la personne envers laquelle un
engagement ferme a été pris. P.
81.
COmnSCATIOlV. L'arrange-
ment de Madrid ayant pour sanc-
tion la législation intérieure de
chaque Etat, la confiscation des
objets saisis peut-être prononcée
aux termes de l'article 14 de la
loi du 23 juin 1857. P. 212. — La
confiscation, étant, en cette ma-
tière, un élément de dommages-
intérêts, peut être, prononcée par
le tribunal civil. P. 212.
COnnTRAT D'BDinOIV. L'é-
crivain qui, ayant promis i un
journal un roman inédit, composé
spécialement pour les lecteurs du
journal, livre audit journal un ro-
man anciennement publié, dont la
propriété littéraire lui est dévolue
en héritage, mais dont il n'est pas
l'auteur et ou'll s'est contenté de
modifier légèrement et transposer
maladroitement, manque aux en-
gagements qu'il a pris, justifie, de
la part du journal, une demande
en résiliation du contrat et ne sau-
rait se plaindre des procédés un
peu sévères dont le journal a usé
envers lui. P. 86.
COIVTRBFAÇON (BRB-
VfiTS) (V^ Licence iconwinaiMon
nouvelle), -— Lorsque, un brevet
ayant été pris en commun, une
convention est intervenue entre
les deux copropriétaires, aux ter-
mes de laquelle un d'eux a droit
à une redevance sur les bénéfices
que réaliserait l'autre par l'emploi
de la machine ou des procédés
brevetés, celui qui fabrique sans
payer la redevance pourra être
actionné en paiement des redevan-
ces, mais non poursuivi comme
contrefacteur. P. 76. — Le bre*
veté peut exiger, pour l'appréda-
tion de la contrefaçon, (^u'on com-
bine un certificat d'addition avec
le dispositif du brevet auquel il se
rattache et que l'on compare à
cette combinaison l'engin argué
de contrefaçon. P. 234. -* L'en-
gin revendiqué, consistant en an
affût pivotant à éclipse, porteur
d'une coupole cuirassée dont la
combinaison avec la contre-cui-
rasse assure l'abri de la tourelle,
la volée du canon se plaçant, à la
position d*abri, dans un logement
a ciel ouvert pratiqué dans la con-
tre-cuirasse, un piston servant de
pivot à l'affût et mu à volonté aa
moyen d'un levier équilibré, le
recul étant neutralisé par la masse
de l'appareil, ne constitue pas une
contrefaçon l'engin, différent par
sa nature et contenant des orga-
nes nouveaux et essentiels, qui
consiste en une chambre de tir
contenant un canon sur son affût,
l'affût étant indépendant de la cui-
rasse et n'en devenant solidaire
qu'au moment du tir, la cuirasse
étant elle-même immobilisée, à ce
moment, dans l'étreinte d'une
couronne métallique qui fait corps
avec la maçonnene, le canon ren-
trant complètement dans la tou-
relle à la position d'abri, le mouve-
ment de montée et de descente
de la cuirasse étant obtenu au
moyen d'un levier excentré auto-
moteur. P. 234. — Il ne saurait y
avoir de contrefaçon dans le fait
de puiser dans le domaine public
les éléments qui se trouvent réu-
nis dans un autre brevet pour les
combiner en vue d'un résultat
identique, mats de manière à leur
attribuer une fonction toute dif-
férente. P. 257. — Lorsqu'une
invention consiste dans l'emploi
d'une jante métallique à bords
inclinés l'un vers l'antre c'est-à-
— 369 —
dire, à quene d'aronde, avec un
bandage de caoutchoac plat, plus
large que la jante, de façon qu*on
est obligé de la cintrer pour l'en-
trer dans celle-ci, le dit bandage
présentant ainsi avec l'intérieur
de la jante un vide occupé soit par
on tube pneumatique entoilé soit
par une substance élastique, de
telle façon que la ligne diamé-
trale du bandage circulaire passe
en dedans du diamètre intérieur
de la jante, ne peut être consi-
déré comme une contrefaçon un
bandage constitué par une bande
soople pourvue de talons ancrés
dans les gorges en crochets d'nne
jante presque plate où ils sont
maintenus par leur forme et par
la pression intérieure d'un pneu-
matique à libre dilatation. P. 276.
COIVTREFAÇOIV (JHAR-
CIUE8). Lorsque la marque re-
vendiquée consiste en une série
d'étiquettes destinées à être appo-
sées sur des bouteilles d*eaux mi-
nérales et présentant une disposi-
tion caractéristique dans laquelle
un numéro imprimé en grands
caracléres sert a désigner tout à
la fois une source déterminée et
la garantie approximative en bi-
carbonate de soude contenue dans
Teaa débitée par cette source, il
n'y a pas contrefaçon à inscrire,
sur des étiquettes absolument diffé-
rentes, des chiffres qui ne servent
pas de dénominations aux sour-
ces et qui, accompagnant le nom
de la source, indiquent seulement
son degré de minéralisation. P.
32.
coivvEnnrioiv db berivb.
Révision de la conférence à Paris
en 1896. P.350.
COIWEJVTIOIVS EWTEHIVA-
TIOIVALB» t\. Caution judi-
catum solvifConvention de Berne).
Cotta'Rica, Guatemala, Luxem-
bourg, Mexique, Pérou, Traité de
Montevideo, Paraguay, Républi-
que Argentine,
COPROPRIÉTÉ (BRE-
VETS) (V. Collaboration, con-
trefaçon [brevets), — Lorsqu'une
machine nouvelle est construite,
soQsla direction d'un ingénieur,
inais aux frais et dans les ateliers
d'une société, et que d'autres in-
génieurs, dessinateurs ou ouvriers
de la société ont coopéré à son
exécution, chacun apportant À
l'œuvre sa part d'imagination de
travail et de soin, l'invention
ainsi réalisée doit être considérée
comme la propriété commune de
l'ingénieur et de la société. P.
67. — Lorsqu'il est constant, en
fait, qu'il a existé entre deux par-
ties une véritable association, en
vue d'une découverte nouvelle,
l'une apportant l'idée et ses con-
naissances théoriques techniques,
l'autre faisant tous les frais des
recherches et apportant à la réa-
lisation du but commun son ex-
périence pratique, il y a lieu de
décider que ces deux parties sont
copropriétaires de l'invention
qu elles ont Tune et l'autre con-
tribué à créer. P. 70.
COSTA-RICA. Convention du
8 juillet 1896 entre la France et
le Costa-Rica pour la protection
réciproque des marques de fabri-
que et de commerce. P. 329. —
Convention du 28 août 1896 entre
la France et le Costa-Rica pour la
garantie réciproque de la propriété
littéraire et artistique. P . 380.
CRITIQUE (V. Droit de réponse).
DÉBATS JURICIAIRES (V
Atteintes à ta personnalité), —
Ne commet aucune faute l'écri-
vain qui utilise dans un drame,
comme sujet d'observations et
d'étude, des faits rendus publics
par un procès criminel plus de
20 ans auparavant, sans les déna-
turer ni altérer en rien. P. 96.
DÉCBÉAIVC^E (V. Poursuite en
contrefaçon), — La déchéance du
brevet encourue pour défaut de
paiement d'une annuité avant le
commencement des années de
jouissance est irrémédiable et le
paiement des annuités ultérieures
ne peut la réparer. P. 40.
DÉCORS- L'arrêt qui, sur la de-
mande d'un directeur de théâtre,
fait défense à un journal de repro-
duire les décors et la mise en scène
d'une pièce représentée sur ce
théâtre ne s'applique pas à la re-
production des décors et de la mise
en scène de la même pièce, tels
fu'ils sont sur un autre théâtre.
^ 121.
l\
U
— 370 —
DJBIVOIIIIIVATIOIWS (V. Con-
currence illicite^ nom palronymi"
Eue, TribUTiaux {pouvoir des). —
orsque deux propriétés ont, au
moins ponr partie, une origine
commune et que le propriétaire
originaire a mis en valeur le vin
qu'il y récollait en le livrant au
commerce sous un nom déterminé,
tel que Crû Lards, les détenteurs
actuels des deux propriétés au-
jourd'hui distinctes peuvent égale-
ment se réclamer de la propriété
et de la jouissance d'une dénomi-
nation qui constitue l'élément pré-
pondérant de leur étampe ; ils ont
aussi, à titre égal^ le droit d'em-
ployer la dénomination Château
Larcis, le mot Château étant de-
venu une expression banale dans
les exploitations vinicoles de la
Gironde, et de la faire suivre du
mot crû Saint'Emilion parce^ une
ces expressions, en tant qu'elles
désignent exactement le lieu de
production, sont vulgaires et né-
cessaires et parce que, dans Tusage,
la faveur qui s'attache au nom
Saini'Emitlon s'étend à d'antres
communes limitrophes, notamment
à celle de Saint-Laurent des Com-
bes. P. 5.
DESCKIPTIOIV. Une invention
ne peut être stérilisée par une
légère erreur du dessinateur des
planches du brevet, alors que le
constructeur est nécessairement
appelé à la rectifier dans l'exécu-
tion. P. 257. — La loi française
n'exige pas que la description du
brevet se termine par des reven-
dications ; il suffit que l'invention
se dégage de l'ensemble des énon-
ciations du mémoire descriptif.
P. 257.
OESSIIVS ET JHODÈLiBS (Y*
Bibliographie, P. 299).
DOiMMAGES-lIVrÉRÊTS (V.
Atteintes à la personnalité^catalo-
gue, concurrence déloyale, plagiat,
publicité, résiliation). — S'il est
de principe que la mauvaise foi
est un élément nécessaire de la
concurrence déloyale, certains ac-
tes d'un commerçant, lorsqu'ils
sont de nature i nuire à un autre
commerçant et qu'ils laissent à la
charge de leur auteur une faute
ou une imprudence, peuvent, en
dehors de toute intention fraudu-
leuse, donner ouverture à une ac-
tion en dommages-intérêts. P. 56.
— Lorsque le demandeur a dû dé-
Soser des sommes i la Caisse des
épôts et consignations on en
compte courant dans une banque,
•soit à titre de cautionnement, soit
à titre de CAuiïon judicatum solrn,
le défendeur, si la demande ^t
ensuite reconnue bien fondée, doit,
à titre de supplément de domma-
ges-intérêts, rembourser an de-
mandeur la diûérence d'intérêts
sur les sommes déposées entre le
taux de la Caisse ou de la maison
de banque et le taux légal de b 0/0.
P. 212. — Des saisies pratiquées
à tort causent un dommage dont
il est dû réparation. P. 276.
DROIT DE RBPOIVSE. Le
droit de réponse, dans les termes
de l'arUde 13 de la loi du 29 juil-
let 1881, appartient à tonte per-
sonne nommée ou désirée dans
un journal, même à qui a sollicité
de ce journal le compte-renda
d'un ouvrage. Mais l'insertiop
de la réponse ne saurait être exi-
gée quand elle est conçue en des
termes qui sont contraires aux
lois, aux bonnes mœurs, à l'inté-
rêt légitime des tiers, à Thonnear
ou à la considération du journa-
liste. P. 139. — La Cour de cas-
sation peut, lorsque l'auteur de la
réponse a assimilé son œuvre a
celle d'un tiers, examiner et com-
parer elle-même ces deux œuvres
et dire si ce tiers avait un intérêt
légitime à ce que son œiiTTe ne
fût pas l'objet de cette assimila-
tion. P. 139.
EAUX MlJWERAJLiES {V .Con-
currence déloyale, concurrence
illicite, débitant, nom de localité).
ÉDITEUR (V. Gage).
EMBLiÈlIlB "SATêOKAMj. -
L'emblème national suisse peut
être employé par tout citoyen
suisse sur des étiqttettes.par exem-
ple pour le commerce des absio-
thés. P. 169.
EJIIPL.01 IVOUVEAU (BBB:
VETS). U y a simple emploi
nouveau, non brevetable, dans le
fait d'employer en vue de dimi-
nuer les chocs on vibrations, des
garnitures pneumatiques pour les
^ 371 —
rooes de vélocipèdes, alors qa'an-
térieuremeDt on a fait usage da
même procédé, dans le môme bat,
pour garnir les rooes d'autres
véhicules et particulièrement de
véhicules légers. P. fô7.
EMPIiOVé (V. Copropriété (bre-
vets).
ÉTRAIVOERS (V. Compétence).
^IX {V .Condition
potestative^ licence^ nutUté, rési-
liation). — Ne justifie pas suffi-
samment des causes de son inac-
tion, pour être relevé de la dé-
chéance faute d'exploitation, le
breveté dont le centre de fabrica-
tion est en Allemagne et qui,
ayant des commandes en Rouma-
nie pour les engins cuirassés fai-
sant Tobjet du brevet, n'a pas cru
devoir organiser des ateliers de
construction sur le territoire fran-
çais, bien quMl disposât des capi-
taux et ressources nécessaires, ni
faire fabriquer par des licenciés
français. P. 234. — On ne sau-
rait considérer comme suffisant à
éviter la déchéance, Texploitation
réduite k la fabrication de quel-
ques spécimens qui n'ont pas eu
un cours commercial. P. 257. —
On ne peut considérer comme une
exploitation suffisante l'envoi en
France d'un ouvrier pendant un
mois, le cintrage de quelques
jantes. Tachât de chambres à air,
U location d'un petit atelier et des
négociations en vue d'arriver à on
contrat d'exploitation, menées
avec une lenteur calculée et tou-
jours infractuenses , notamment
lorsque les prospectus distribués
en France ne font jamais mention
4]De de fabrique à l-étranger. P.
FAUSSES IXDICATIOIVSDE
PBOVEIVAIVCE: (V. Arranae-
^ent de Madrid, madère^. — Un
fabricant d'eau -de-vie qui appose
^ mention Very Old Brandy Ma-
linard frères^ Cognac sur des
prodaits qu'il fabrique dans le
Pas-de-Calais contrevient à la loi
<la 28 juillet 1824, soit qu'il ait
voulu faire croire que la maison
fictive Malinard frères était éta-
blie dans la Tille de Cognac, soit
Tu'il ait voulu présenter son eau-
de-Tie comme étant du cognac,
c'est-à-dire une liqueur récoltée
et fabriquée dans la région à la-
quelle ce nom s'applique. P. 177.
— Lorsque les destinataires d'une
marchandise munie d'une fausse
indication de provenance sont dé-
clarés indemnes de tous domma-
ges-intérêts, à raison de leur
bonne foi et parce qu'ils n'ont par-
ticipé par aucun fait illicite aux
fausses indications de provenance
incriminées, il y a lieu néanmoins
de les maintenir en cause pour
prononcer la validité de la saisie
des marchandises dont ils étaient
propriétaires aux termes du con-
naissement et de condamner les
expéditeurs aux dépens de cette
mise en cause. P. 212.
GAGS3. L'auteur qui a cédé à un
éditeur le droit de publier un ou-
vrage moyennant, par chacun des
exemplaires tirés, une redevance
stipulée payable lors de la mise en
vente de chaque mille, devient, au
moment des tirages successifs,
créancier de la redevance conve-
nue et n'a, sur les volumes im-
primés, aucun droit opposable aux
créanciers de l'éditeur qui ont
reçu de celui-ci une partie de ces
volumes en nantissement d'un
prêt, alors qu'aucune preuve de
mauvaise foi ou de faute n'est rap-
portée à leur encontre ; les créan-
ciers gagistes sont fondés à invo-
quer l'article 2279 du Code civil
contre toute action de l'auteur qui
tendrait à faire décider que les
exemplaires, faisant l'objet du
nantissement, ne pourraient être
mis en vente qu'à la charge de
lui payer une redevance convenue,
pour chacun des exemplaires ven-
dus. P. 124.
GRAIVDE-BRETAOIWB. Aux
yeux de la loi anglaise, comme de
la loi française,un brevet est réputé
connu dès l'instant où il est de-
mandé et est censé avoir été pu-
blié, avant le dépôt de la demande
d'un deuxième brevet, si court
que soit l'intervalle de temps écou-
lé. P. 259.
GUATESAIAIjA. Convention du
12 novembre 1895 entre la France
et le Guatemala pour la protec-
tion réciproque des marques de
fabriques et de commerce. P. 334.
- 372 —
— Convention du 21 août 1895
entre la France et le Guatemala
pour la garantie réciproque de la
propriété littéraire et artistique.
P. 336.
IMITATIOIV FRAUDUliEU-
SB (V. Agent exclusif), — Lors-
qu'il y a entre deux étiquettes des
ressemblances voulues et calcu-
lées de manière à tromper l'ache-
teur (même forme rectangulaire,
même dimension, même couleur
bleue sur gris argent rayé et avec
arabesque, aux mêmes places un
écusson et cinq cartouches se dé-
tachant d'une manière saisissante,
avec inscriptions en lettres blan-
ches, les trois cartouches placés à
lu partie supérieure se reliant de
manière à former une banderoUe
ondulée, caractères identiques,
notamment pour le mot Cognac
dans le cartouche inférieur), il
y a imitation frauduleuse de mar-
que , bien qu'une comparaison
attentive des deux marques rap-
prochées et placées en même
temps sous les yeux fasse ressortir
chaînes dissemblances qui se per-
dent dans l'ensemble sans chan-
ger le caractère général, l'appa-
rence et la physionomie de la mar-
que. P. 177.
nVDEX (MISE AL.') (Y. Liberté
commerciale et indu8trielle,syndi-
cats),
lIWEIirTEUR (V. Concurrence
déloyale, nom patronymique).
Peut être prononcée d'office par
la Cour la jonction d'instances
distinctes introduites par les mê-
mes demandeurs cortfre des défen-
deurs divers et n'ayant entre eux
aucun lien de droit, mais dans
lesquelles est soulevée une seule
et même question qui n'est pas
susceptible de recevoir une solu-
tion différente pour les uns et
pour les autres. P. 196.
JOURI¥AIi ( V. Contrat d'édi^
tion), — Le journal ayant, sur la
foi de l'écrivain aVec lequel il
avait contracté , commencé la
publication d'un roman présenté
comme inédit et ayant dû l'inter-
rompre quand il a connu Ji^Véri-
table situation, a subi uA préju-
dice dont il lui est dû réparation,
car les lecteurs de ce jourfl»!, sé-
duits et attirés par les réclames
annonçant la publication d*une
œuvre nouvelle et inédite, écrite
spécialement pour eux, ont dû
être singulièrement désappointés
lorscp'ils ont appris que le ronoan
publié était de vieille date et d'an
auteur profondément oublié et
Sue la clairvoyance du directeur
u journal avait été mise en dé-
faut sur ce point. P. 36.
JOURI¥ALilSTB. La question
de savoir si le fait de congédier
un rédacteur, avec lequel aucun
contrat n'a été passé, peut don-
ner ouverture à des dommages-
intérêts, est subordonnée aux cir-
constances de fait dans lesquelles
le congé a été donné. Il n^ a lien
à dommages-intérêts si an préavis
a été donné avec un délai suffi-
sant, délai que les tribunaux ont
pouvoir d'apprécier et si, en ou-
tre, le congé n'apparaît pas avoir
été donné dans des conditions abu-
sives ou dolosives. La preuve de
l'abus, du dol ou de l'insuffisance
des délais incombe à celai qui les
invoque. P. 63.
liETTRRS MISSIVES (V.fie5
ponsabilité),
LIBERTE DU COMMERCE
ET DE L'ITVDUSTRIE (V.
Syndicats). — Si depuis Tabroga-
tion de l'article 416 du Code pénal
l'atteinte portée à la liberté da
travail par la proscription et l'in-
terdiction ne constitue plus un
délit passible de peines correc-
tionnelles, les mêmes faits peuvent
constituer une faute, entraînant
responsabilité civile si elle cause
préjudice à autrui. P. 1(6. —
Commet un abus, passible de
dommaffes-intérêts, la chambre
syndicale qui, conformément i
ses statuts par une circulaire â
d'autres chambres syndicales, met
à l'index un marchand de gros
f>our s'être adressé directement à
a clientèle de détail sans verser
une somme de 20 0/0 à la cham-
bre syndicale ; en effet, une sem-
blable mesure est contraire à la
liberté du commerce et de l'in-
dustrie. P. 105.
/
— 373 —
LICEIVCE (V. Résiliation, société,
tribunaua; de commerce). — Le
licencié est en droit de munir de
perfectionnements inventés par
lui les appareils brevetés qu'il fa-
brique licitement. P. 78. — Le
licencié qui n'a licence de fabri-
quer qne pour son usage person-
nel peot être poursuivi en con-
trefaçon, à raison de la vente
d'appareils brevetés à des tiers.
P. 7o. — L'acte qui ne confère à
son bénéficiaire qu'un avantage
personnel et limité et ne lui attri-
bue nallement le droit de pour-
suivre en son nom les contrefac-
teurs constitue non une cession de
brevet, mais seulement une licence
d'exploitation ; pour qu'un tel acte
devienne opposable aux tiers, il
n'est pas nécessaire qu'il ait été
préalablement soumis à la forma-
lité de la transcription spéciale
des articles 90 et 21 de la loi du
5 juillet 1844 : en particulier pour
qu'un tiers devenu régulièrement
propriétaire du brevet soit tenu
de le respecter, il sufQt qu'en
tait, il en ait eu connaissance.
P. 89.
liOl de: 1894 (V. Fausses indi-
cations de provenance, nom de
localité).
LOUAGE DE HERVlCaBS
(V, Journaliste).
tiUXBMBOURG. Convention de
1856 et de 1865 entre la France
et le Luxembourg. Dénonciation.
P. 339.
MAMimHE.(\, Produits vinicoles}.
— Le nom de Madère n'a jamais
cessé de désigner la provenance
d'an vin qui, bien que soumis à
un mode de préparation spéciale,
emprunte se» qualités essentielles
an terroir et au climat qui le pro-
duisent ; l'exportation du vin de Vile
de Madère n'a jamais été inter-
rompue malgré les ravages de
l'oïdium et du phylloxéra ; les né-
gociants madérois n'ont, à aucune
époque, entendu renoncer à se
prévaloir de cette appellation
commerciale et ils ont poursuivi
leurs concurrents en France dès
que l'Arrangement de Madrid de
1891 leur en a fourni les moyens.
La dénomination Madère ou vin de
Hadere n'a donc pu*, à aucun mo-
ment, tomber dans le domaine pa-
blic : elle est indicative non d^un
genre et d'un type, mais bien
d'un lieu de production et de fa-
brication de certains vins naturels
spécialement connus sous cette
qualification et lait partie, à ce ti-
tre, du patrimoine commun des
négociants et viticulteurs de l'Ile
de Madère ; il appartient à un ou
plusieurs d'entre eux de faire ré-
primer l'usage illicite de cette
dénomination pour désigner des
vins de provenance espagnole.
P. 212.
MAJORAT. On ne saurait con-
fondre avec un nom patronymique,
qui a pour destination de désigner
une personne et passe nécessaire-
ment et indéfiniment à tous les
enfants sans distinction, un titre
nobiliaire, émané de la puissance
souveraine; destiné non à dési-
gner mais à honorer celui à qui
il a été conféré ; d'ailleurs, si les
titres nobiliaires n'entraînent plus
de privilèges d'aucune sorte, ils
n'en doivent pas moins être main-
tenus dans le caractère qui leur a
été donné à Torigine, en tant qu'il
est compatible avec l'état social
et dans les conditions de trans-
missibilitéqui leuront été imposées
par l'acte de création. Dès lors,
le titulaire actuel d'un titre héré-
ditaire conféré dans les mêmes
conditions que ceux créés par le
décret du \^* ma;>s 1808 et dont
l'acte de collation indique qu'à
chaque transmission le bénéficiaire
auquel ce titre échoit, non & raison
de sa qualité d'héritier mais en
vertu dudit acte de collation, doit
le recevoir tel qu'il a été créé,
c'est-à-dire ayant conservé intact
son caractère honorifique,n'est pas
lié par une convention par laquelle
un précédent titulaire du titre
l'avait engagé dans une société de
commerce, dont, avec les insijgnnes
qui lui sont attachés, il constitue-
rait la marque. P. 141.
MARQUES DE FABRI-
QUÎBS (\., Agent exclusif, chose
jugée, concurrence illicite, con-
trefaçon, Costa Rica^ emblème
national, Guatemala, majorât,
prédécesseur, tribunaux {pouvoir
des, — V. aussi Bibliographie,
P. 302).
MÉDAlIXiB (V. Œuvre artUti-
que,o^Hginal),
-- 374 —
MESXiaÛE. Cotivention du 19
avril 1899 entre la France et le
Mexique pour la protection de la
propriété industrielle. P. 340^
MISE EIV 6CEIVE (V. Décors).
MODÈUB (V. Portrait).
IV
IVAIVTISSEIMEIVT (V. Gage).
1VATIOIVAI.1TÉ. One société
qui a son siège social à Funchal
(île de Madère) et a pour objet le
négoce des vins de Madère est de
nationalité portugaise, bien que
les associés soient de nationalité
anglaise. P. 189.
N^OjH (V. Atteintes d la person-
nalitéy compétence^ concurrence
déloyale, majorât, prédécesseur.
~ V. aussi Bibliographie.?. 312).
— Le fait, par Tinventeur d'une
méthode cour renseignement des
langues vivantes, de donner son
nom à cette méthode (Berlitz
Sckool) constitue non une déno-
mination tirée de la nature de la
chose, mais une désij^nation fan-
taisiste qui est la propriété privative
dudit inventeur, alors qu'il est
constant qu'il a le premier fait
usage en France de ladite déno-
mination. P. 151. — Le nom com-
mercial constitue une propriété
imprescriptible qui survit même
au cas où, le brevet de Tinventeur
étant tombé dans le domaine pu-
blic, chacun acquiert la faculté de
fabriquer et de vendre le produit ou
la marchandise autrefois brevetée ;
l'emploi du nom d'autrui ne peut
donc devenir légitime qu'à la con-
dition que ce nom soit tombé dans
le domaine public par le fait ou la
tolérance de l'inventeur ou qu'il
.soit devenu la seule désignation
usuelle de Tobjet fabriqué ; la re-
nonciation ne se présume pas et
ne saurait s'induire de quelques
actes isolés, non réprimés par le
propriétaire et résultant, par ex-
emple, de l'emploi de son nom
dans qfuelques catalogues. P. 156.
IVOM DB L.A FEMimS. Si la
pratique du commerce autorise
dans certains cas un commerçant
à joindre le nom de sa femme au
sien, cet usage ne constitoe point
un droit mais une simple tolé>
rance et les tribunaux doivent
prévenir ou faire cesser les abus
qui peuvent en résulter. Si celte
addition de nom doit être no-
tamment la cause d'une confu-
sion préjudiciable pour un antre
commerçant,elle constitue un acte
de concurrence illicite gui ne peat
être toléré. P. 166. — On ne sau-
rait interdire à un négociant l'ad-
jonction du nom de sa femme,
même si cela est préjudiciable à
un concurrent, lorsque le négo-
ciant a employé ce nom dans le
commerce non avec une intention
frauduleuse, mais parce qu'il avait
déjà antérieurement, même dans
les actes de la vie civile, pris (k>s-
session de ce nom en adjonction
au sein, conformément à Tnsage.
P. 169.
l^OAl DE liOCAI^ITÉ (V. Ar-
rangement de Madrid, fausse in-
dication de provenance^ Madère,
produits vimcoles), — - La ville de
fiar-le-Duc s'étant acquis une ré-
putation méritée par la façon spé-
ciale dont elle fabrique la confi-
ture de groseille, les termes con-
fitures de Bar-le-Duc désignent
non pas un produit fabriqué au
moyen de tel procédé tombé dans
le domaine public, mais bien an
produit oriç^inaire de Bar-le-Duc ;
il ne saurait donc être permis que
des confitures plus ou moins sem-
blables, mais fabriquées ailleurs
puissent être vendues sous ce nom.
Alors même qu'il serait établi qae
depuis un temps plus ou moins
long les confiseurs de Ligny (loca-
lité à environ quatre lieues de
Bar-le-Duc) ont qualifié leurs pro-
duits de confitures de Bar, cette
habitude constituerait de leor
part, un abus contre lequel les
confiseurs de Bar- le- Duc n'ont
point, par leur tolérance plus on
moins large,renoncé à revendiquer
la propriété imprescriptible de
cette dénomination et un abus ne
saurait justifier un autre abus.
Les confiseurs qui fabriquent des
confitures en dehors de Bar le-Duc
avec des groseilles provenant de
ce territoire ne peoyent se servir
du nom de BaT-le-Duc que sons
cette forme Confitures dégrossi'
les de Bar-le-Duc et à la condi-
tion que sur les étiquettes, les
mots Groseilles de Bar -le-Duc
•^ « ".M
— 375 —
soient en caractères différents du
mot Confitures^ mais identiques
entre eux et que sur les factures,
en-têtes, prospectus, etc, lexpres-
sion Confitures de groseilles de
Bar^le-Duc soit toujours suivie de
la raison de commerce et du do-
micile do fabricant, en caractères
au moins aussi apparents. P. 10.
— La loi du 28 juillet 1824 n'é-
tant pas applicable aux produits
naturels et, par suite, aux eaux
minérales, l'usurpation d'un nom
de localité pour une eau miné-
rale ne peut faire l'objet que
d'une action en concurrence dé-
loyale. P. 15. — Le nom d'Orez-
za ayant toujours été, depuis un
temps immémorial, employé pour
désigner une des paroisses de l'ile
de Corse et ayant continué à être
employé pour désigner usuelle-
ment les produits naturels qui
sont tirés de cette contrée, même
depuis que l'expression adminis-
trative de paroisse a été remplacée
par celle ae canton et que le can-
ton d'Orezza est devenu officielle-
ment le canton de Piedicroce, les
propriétaires d'eaux minérales
jaillissant sur ce territoire ont
tous le droit de vendre leurs pro-
duits sous le nom d'eaux d'Orezza
et sans qu'il y ait à se préoccuper
de savoir si ce nom figurait ou ne
figurait pas dans l'arrêté ministé-
riel autorisant l'exploitation de la
source. P. 21.
IVUIXilTÉ (V. Certificat d'addi-
tion, condition potestative) , --
Lorsque un brevet étranger doit
.être considéré comme nul, en
Vertu cle l'article 29 de la loi de
1884 le brevet correspondant doit
partager le même sort. P. 257.
O
OSUVRES ARTISTiaUES.
En transportant sur une médaille,
avec l'autorisation de l'auteur, une
œuvre de sculpture, le graveur en
médailles fait incontestablement
une œuvre artistique nouvelle dont
il devient propriétaire. P. 135.
ŒUVRES FUTURES. Des
conventions relatives au droit
d'auteur sur les œuvres futures,
par Albert Vannois. P. 57.
CBUVRES UnrrÉRAIRES.
La qualité de légataire des œuvres
littéraires d'un écrivain ne donne
pas au bénéficiaire le droit de les
publier sons son propre nom.
P. 35.
ORIGlIVALi. Si l'on doit admet-
tre en principe que l'originai d'une
médaille consiste dans le poinçon
ou relief exécuté par l'artiste d'a-
près son modèle en pl&tre, en
glaise ou en cire et que la livrai-
son de ce poinçon seule entraîne
Ï présomption de la cession de
'œuvre, pour que la rétention du
poinçon implique la propriété de
Pœuvre il faut que cette rétention
soit non équivoque et à titre de
propriétaire. P. 135.
OUVRIER (V. Collaborateur,
concurrence déloyale, copropri-
été), — Le fait qu'un ouvrier ou
contremaître a découvert une in-
vention pendant qu'il était em-
ployé chez un patron ne suffit pas
pour permettre à ce dernier de
revenoiquer à son profit ladite
invention. Pour que ce résultat
puisse être obtenu il faut que les
découvertes soient le résultat de
travaux exécutés par l'ouvrier dans
son service pour des objets qui
s'y rattachent, d'après les ordres
ou sous la direction de son pa-
tron. P. 75.
PARAGUAY (V. Traité de
Montevideo).
PERFECTIOrVIVElMRIVTS .
Lorsque des améliorations à un
système tombé dans le domaine
public ont fait l'objet d'un brevet,
il n'y a pas contrefaçon de la part
d'un concurrent qui sans rien em-
prunter aux améliorations breve-
tées, apporte, de son côté, des
modifications nouvelles au pro-
cédé du public. Spécialement, il
n'y a pas contrefaçon lorsque l'in-
violabilité d'une caisse d'embal-
lage est obtenue, non parle noie-
ment de la tête de la lance dans le
bois, comme dans le brevet, mais
f)ar les crans ou épaulements de
a lance qui, par suite du refou-
lement ultérieur de l'agraphe, ne
se retrouve plus en regard des
déchirures des parois des trous de
cette agraphe. P. 49.
— 376 —
PEROU. Convention du 90 juillet
4897 entre la France et le Pérou
ponr la protection de la propriété
industrielle. P. 845.
PERSOIVrVAI^ITJB (V. Attein-
tes à la),
photographie:. Doit être
condamné à des dommages-inté-
rêts le photographe qui, sans auto-
risation du peintre, a reproduit
les œuvres que celui-ci a vendues
à des amateurs et a mis en vente
ces reproductions , sauf à tenir
compte, dans la fixation du chilTre
des dommages-intérêts alloués, de
cette circonstance qae le peintre
n'a guère subi en réalité qu'un
préjudice moral. P. 129.
PliAGIAT (Y. Responsabilité),
— • Le fait de s'approprier, pour en
composer un roman, un drame
historique, dans son titre, son su-
jet, sen plan, ses scènes, leur agen-
cement, leur marche, ses person-
nages, leurs noms, leurs titres,
leurs professions, leurs passions*
leurs actes, leur langage et leurs
impressioi s particulières, cons-
titue un plagiat général qui doit
être réprimé non par la suppres-
sion de certains passages servile-
ment reproduits du drame, mais
par une mesure de suppression
totale, avec allocation de domma-
ges et intérêts. P. 118.
PORTRAIT. La convention par
laquelle un peintre s'engage à
exécuter un portrait moyennant
un prix déterminé constitue un
contrat d'une nature spéciale, en
vertu duquel la propriété du ta-
bleau n'est définitivement acquise
à la partie (jui l'a commandé, quo
lorsque Tarliste a mis ce tableau
à sa disposition et qu'il a été agréé
par elle ; jusqu'à ce moment, le
peintre reste maître de son œuvre
sans toutefois qu'il lui soit loisible
de la retenir pour lui-même ou
d'en disposer au profit d'un tiers
à Tétat de portrait, le droit de
reproduire les traits du modèle
ne lui ayant été concédé crue con-
ditionnellement, en vue de l'exé-
cution complète du contrat. Le
peintre, faute de satisfaire à ses
engaigements, se rend seulement
passible de dommages-intérêts en-
vers l'auteur de la commande,
sans que ce dernier, qui n'est pas
devenu propriétaire du tableau,
puisse exiger que remise lui en
soit faite en l'état actuel. P. 111.
PORTUGAIS. La clause de libre
et facile accès insérée dans le
traité de commerce franco-portugais
de 1853 et qui, non abrogée par
les traités de 1866 et de 1881, dis-
pensait les Portugais, en France,
de la caution judicatum solvi, a
cessé de produire efitet après la
dénonciation, en 1892, du traité de
commerce alors en vigueur. P.
189.
POURSUITE finir CONTRE-
FAÇOIV. Est régulière et vala-
ble la poursuite exercée en vertu
d'un brevet qui n'a jamais été
exploité, si elle est intentée moins
de deux ans après la délivrance
du brevet ; on ne saurait attacher
à l'inaction dans laquelle est de-
meuré postérieurement le breveté
un effet rétroactif que la loi n'a
pas édicté. P. 257.
PRÉDÉCESSEUR. Bien qu'an
industriel puisse, avec l'assenti-
ment de son prédécesseur, laisser
apparaître seulement le nom de
ce dernier sur ses produits, éti-
quettes et prospectus, cet indus-
triel se rend coupable de concur-
rence déloyale en profitant de
l'identité de consonnance du nom
de son prédécesseur (Daver) avec
celui d'un antre concurrent (Piver)
et en indiquant, alors que 1 indus-
triel concurrent habite Paris, sur
ses produits, étiquettes et pros-
pectus Paris, tandis que le dé-
fendeur ou son prédécesseur ont
toujours habité la province et
n'ont jamais en à Paris ou aux
environs leur usine ou même une
maison de débit. P. 173.
PROCÉDURE (V. Assignations
jonction d'instances). — Les ac-
tions en nullité ou déchéance des
brevets, les contestations relatives
à la propriété des brevets doivent
être jugés par les tribunaux civils
comme matières sommaires ; maù
les poursuites civiles en contre-
façon doivent être jugées en la
forme ordinaire, alors même qu a-
vant de les introduire, le deman-
deur aurait fait saisir des échan-
tillons des produits qu'il prétenil
avoir été contrefaits. Il n'en serait
autrement que si le défendeur,
^■9"^
— 377 —
agissant reconventionnellement,
avait soulevé une question de nul-
lité, de déchéance ou de propriété
de brevet. P. 64.
PRODUITS VirVlCOUBS. Les
appellations régionales de prove-
nance de produits vinicoles ne
peuvent, aux termes de la loi du
13 avril 1892, portant approbation
de l'Arrangement de Madrid, être
considérées comme devenues gé-
nériques. Il en est ainsi du nom
de Cognac pour les eauz-de-vie,
car les eauz-de-vie de Cognac
sont des eauz-de-vie de vin et par
conséquent des produits vinicoles.
P. 177. — Les vins dits de liqueur,
tels que les vins de Madère, sont
compris parmi les produits vini-
coles dont les appellations régio-
nales de provenance ne peuvent
être considérées comme généri-
ques, anz termes de Tarficle 4 de
TÂrrangement de Madrid. P. 212.
PROPRIÉTÉ ARTlSTiaiIK
(V. Convention de Berne, Costa-
Rica, décora, GuatemcUa, Luxem-
bourg^ œuvres artistiques, photo-
graphie,portrait, propriétaire, re-
production, responsabilité, traité
de Montevideo, vérification d'écri-
ture. — V. aussi Bibliographie,
P. 312).
PROPRIÉTÉ L.ITTÉRA1RB
(V. Plagiat, responsabilité, — V-
aussi Bibliographie. P. 312).
PCBI^ICATIOIV DE JUGU-
MifilVT. En rahsence de faute et
de préjudice il n'y a pas lieu d'au-
tonsër la {publication d'une déci-
sion judiciaire auz frais de la par-
lie intéressée ; il lui appartient, si
elle juge utile de faire connaître
la consécration de son droit par
les tribunaux, de se conformer
aux règles do droit commun en
évitant toute indication de nature
à nuîie à des tiers. P. 157.
PROPRIÉTÉ UVDUSTRIEL.-
I«B {V , Pérou, Mexique,^ V.anssi
Bibliographie, p. 286).
PUBIjICITÉ. Le fait, par un in-
dustriel,dedonnerunepubiicitéex-
cessive à un procès en contrefaçon
intenté à une maison rivale dont
il cherche plus particulièrement à
combattre la concurrence, notam-
ment par des annonces réitérées
dans les journaux spéciaux et par
l'apposition d*affiches sur les murs
d'une ville où la maison poursui-
vie a des dépôts de ses produits
constitue des agissements abusifs»
dont il est dû réparation. P. 257.
REPRODUCTIOIV (DROIT
DE) (V. Médailles, original, pro-
priétaire), — En matière de pro-
priété artistique et dans le silence
du contrat, l'amateur qui achète
une œuvre d'art doit être pré-
sumé n'avoir acquis que l'objet
même ; le droit de le reproduire
(spécialement par la pnotogra-
phie) demeure la propriété de
l'artiste. Mais si le propriétaire
d'une œuvre d'art ne peut la re-
produire ou la laisser reproduire,
il est en droit d'empêcher Tauteur
de faire lui-même des reproduc-
tions-répétitions, à sa guise, car à
moins de convention contraire il a
acheté l'objet dans le but de le
posséder à titre exclusif. P. 129.
— L'auteur d'une œuvre d'art en
devient propriétaire par le seul
fait de sa création ; c'est à celui
2ui prétend se prévaloir d'un
roit de reproduction de prouver
que ce droit lui a été cédé. P. 131.
— La remise, par un tiers, de
modèles de fontaines à un fondeur
pour les reproduire en bronze
ne saurait lui concéder le droit
d'exécuter d'autres fontaines, en
dehors de celles qui lui ont été
commandées. P. 131. — Jugé, au
contraire, qu'il est de principe
consacré par la jurisprudence que
le droit de reproduction est l'ac-
cessoire du droit de propriété de
l'objet matériel, dont il ne peut
être détaché que par l'effet d^une
convention spéciale. P. 135. —
L'artiste qui vend son œuvre sans
réserve n'aliène pas l'espérance de
réputation que peut lui assurer la
publicité,' parce qu'il s'agit là
d'une cliose inaliénable : u a le
droit de se défendre contre un
fait qui consiste à lui imputer une
œuvre différente de la sienne. Le
cessionnaire du droit de repro-
duction doit donc se cantonner
dans le procédé pour lequel il a
traité et publier l'œuvre telle
qu'elle lui a été vendue : il ne
peut altérer celle-ci, la modifier,
y flaire des changements, sans
porter atteinte aux droits de l'ar-
tiste. Ainsi, le cessionnaire porte
— 378
atteinte aux droits de l'artiste en
publiant des dessins, sous la si-
gnature de l'artiste, avec des lé-
gendes et dialogues différents des
légendes et dialogues originaux.
En revanche, l'éditeur peut chan-
ger les dimensions du dessin, si
ce changement ne modifie pas,
en réalité, le caractère de l'œuvre;
il a, de même, le choix du coloris,
s'il n*est pas établi que le coloris
le plus propre à faire ressortir le
dessin rût compris dans la ces-
sion. P. 361.
liÉSULlATIOIV. Lorsque Tinven-
teur oui a concédé une licence
* pour 1 exploitation de son inven-
tion a stipulé que, dans le cas où
se réaliserait une condition' déter-
minée, il reprendrait la libre dis-
position de tout ou partie de Tin-
vention concédée, il ne saurait lui
appartenir de se faire juge de la
réalisation de la condition : à dé-
faut de mise en demeure et tant
qu'il n'a point fait constater judi-
ciairement l'arrivée de la condi-
tion, il demeure dans les liens de
son traité et ne saurait être con-
sidéré comme ayant recouvré son
droit de disposition ; par suite,
s'il concède à un établissement
concurrent la licence primitive-
ment concédée par un traité tou-
jours en vigueur, le nouveau
traité doit être rétracté et des dom-
mages-intérêts doivent êtrealloués
au concessionnaire primitif, indû-
ment dépossédé. P. 84.
BESPOIWSABILITÉ (V. Agent
général). — Le fait d'avoir, dans
une lettre confidentielle, dénié
l'authenticité d'un tableau , ne
saurait donner ouverture à une
action en responsabilité, alors sur-
tout que la réception de cette let-
tre n'a causé aucun préjudice
au tiers détenteur du tableau.
P. 109. — Les auteurs d'un ro-
man, alors même qu'ils se sont
dessaisis de la propriété de leur
ouvrage, restent responsables du
préjudice qu'ils ont causé en l'é-
crivant et en le livrant au public.
P. 118.
RRSUIiTAT IIVOUSTRIEXi.
On ne saurait considérer comme
une invention positive et prati(|ne
réalisant un résultat industriel,
celle qui, destinée au public en
général, exige par sa mise en œu-
vre un outillage spécial et une
hnbileté peu commune. P. 2.^7.
SAISIE (Y. Arrangement de
Madi^id, caulionnemenfy domma-
ges-intérêts). — L'Arrangement de
Madrid ayant expressément pro-
hibé l'introduction, dans on des
Etats signataires, de produits vi-
nicoles revêtus d'une fausse indi-
cation de provenance, il j a Heu
à saisie, même si les destinataires
connaissaient la provenance réelle.
P. 212. — La saisie dans les for-
mes de la loi régionale (art. 19
de la loi du 28 juin 1857) est ex-
pressément la sanction légale des
dispositions prohibitives de l'Ar-
rangement de Madrid. P. 212. —
Les articles 1 et 2 de PÀrrange-
ment de Madrid, autorisant ex-
pressément la saisie des produits
revêtus d'une fausse indication
de provenance et s'en référanf,
pour la forme de cette saisie, à la
lé^'islation intérieure de chaque
Elat, ont étendu à tous les fabri-
cants ou producteurs appartenant
aux Etats contractants le bénéfice
des lois qui répriment les fausses
indications de nom ou de lien d'une
fabrique française ; la saisie peut
donc avoir lieu en vertu de l'article
11) de la loi du 23 juin 1857. P.
2:)2.
SOCIÉTÉS (V. NationalUé), -
Une société étant formée pour
l'exploitation des brevets pris ou
à prendre au nom du gérant, avec
stipulation que la libre disposition
et la jouissance de ces brevets
feront retour audit gérant après
la dissolution de la société, le
gérant n'a pas qualité pour passer
en son nom personnel des contrats
de cession de licence des brevets;
même si ces contrats excèdent le
terme fixé pour la durée de U
société, le prix des cessions con-
senties pendant l'existence de la so-
ciété appartient tout entier à celle-
ci. P. 43. — L'apport fait à une
société par l'un des associés de
son droit à l'exploitation d'un bre-
vet d'invention dont il conserve
la |)ropriété, fait partie de l'avoir
social et permet à cette société, in-
tegri status ^ de céder ce droit i un
tiêrs.Le breveté qui ne s'est ]^8 ré-
servé la reprise de l'exploitation en
cas de dissolution anticipée de la
- 379 —
société est tenu de respecter cette
cession faite dans la limite de la
dnrëe prévue de la société. P. 46.
SYNDICAT (V. Liberié commer-
ciale et industrielle). — Les syn-
dicats professionnels, établis dans
les termes de la loi do 21 mars
1884y peuvent se concerter poar
défendre leurs intérêts, mais à
condition de se conformer anx rè-
gles de la justice et sans porter
atteinte aux droits d*autrni. P. 105.
THOSATRE (V. Décors). — Est
licite et doit produire tous ses ef-
fets, le traité passé entre un di-
recteur de théâtre et un marchand
de billets, chef de claque, par le-
quel le directeur a, moyennant
ane somme payée d'avance, mis à
la disposition de cet individVun
certain nombre de fauteuils et des
places de troisième galerie, spé-
cialement affectées an service de
claque : un tel contrat ne saurait
âtre divisé en un contrat de griffe
pour les fauteuils et un contrat de
claque pour les places de troi-
sième galerie, mais constitue un
tout indivisible formant un contrat
de claque. Par suite, lorsque ce
traité a été signé pour un nombre
déterminé de représentations et
qae le directeur de théâtre vient à
cesser son exploitation avant d'a-
voir donné le nombre de repré-
sentations déterminé, ce directeur
doit être condamné à rembourser
au marchand de billets, chef de
clague, à titre de dommages-inté-
rêts, la somme représentant la ré-
paration du dommage qu'il a
éprouvé par la privation des pla-
ces qui devaient être mises à sa
disposition. P, 358.
TmUB DB UrOBI^SSB (V.
Majorai),
TRAITB DB MOIVTÉ VIDÉO.
Adhésion de la France, accepta-
tion de la République Argentine
et du Paraguay. P. 347.
TIUBUIVAUX (POUVOIR
DBSj. Les tribunaux ont un pou-
voir souverain pour réglementer
des droits rivaux et notamment
pour individualiser chaque mar-
que ou étampe en imposant à ces
marques ou étampes des signes
distinctif^ de nature à prévenir
toute confusion. P. 6. — Il n'ap-
partient pas aux tribunaux de pres-
crire dans quelle mesure et sous
quelle forme il serait licite pour un
industriel d'invoquer sur des éti-
quettes et dans des réclames l'a-
nalogie que présenterait une eau
mise en vente avec des eaux simi-
laires antérieurement réputées.
P. 15. — 11 appartient aux tribu-
naux français d'interpréter une
convention internationale, telle
que l'Arrangement de Madrid, qui,
par la volonté du Parlement, est
devenue une loi française, alors
surtout que la disposition litigieu-
se de cette convention n'est su-
jette à aucune ambiguïté et a uni-
cruement pour obiet des intérêts
d'ordre privé. P. 212. — Les tri-
bunaux minçais ont la faculté de
se prononcer sur la validité d'un
brevet étranger, au regard de la
loi à laquelle il est soumis ; mais
ils ne doivent user de cette faculté
que lorsqu'il s'agit d'appliquer un
texte formel ou un principe essen-
tiel dominant la législation dont
s'agit. P. 257.
VBRIFICATIOIW D'BCRrrU-
RB. La procédure de vérification
d'écriture n'est pas applicable à
la signature d'un tableau, puisque
l'authenticité de cette signature ne
suffit j^s toujours à établir l'au-
thenticité de l'œiivre et que l'ar-
tiste qui, en produisant, n'a con-
tracté aucun engagement vis-à-vis
de personne ne saurait être tenu
de déférer aux réquisitions indis-
crètes d'un tiers avec lequel il n'a
aucun lien de droit. P. 109.
/
p
TABLE CIR0N0L06IQDE
DES JUGEMENTS ET ARRÊTS
CONTENUS DANS LE TOME XL VI
18T7
8 Août G. DE Lton,
1880
21 Joill. C. D*Aix,
âO JanT. C. DE Bastia,
10 Aoàt I'rib. de Besançon,
12 Dec. C. DE Besançon,
1890
29 Avril G. de Nancy,
1804
15 Mars G. de Riom,
() Juin Trib. Seine,
12 Dec. Trib. Seine,
1806
19 Mars Trib. Seine,
16 Mai Trib. mixte du Caire,
17 Jain Trib. Seine,
25 Nov. Trib. comm. Seine,
24 Dec. Trib. du Havre,
tsent
1«rFévr.
8 c
17 Mars
6 Mai
25 «
15 Jain
30 «
29J[nin.
29 «
10 Août
17 Nov .
24 c
16 Dec.
11 Janv. C. d'Aix,
81
15
21
169
169
9
43
60
234
173
129
232
34
190
Cabs. giv., 43
Trib. Seine, 109
Trib. civ. Bruxelles, 70
Trib. Seine,
259
Trie. Seine,
60
Trib. Seine,.
234
Trib. Seine,
275
G. DE Bordeaux,
49
G. DE Douai,
46
C. DE Paris,
21
G. DE Bordeaux,
40
G. DE Rouen,
197
G. DE Bordeaux,
5
7 Avril
10 Mai
8 Jaill.
25 0ct.
9 Nov.
9 c
12 Dec.
Trib.
Trib.
Trib.
Gass.
Cabs.
Gass.
Cabs.
Seine,
Seine,
Havre,
civ.,
civ.,
REQ.,
REQ.,
1899
5 Janv.
18 «
24 «
27 c
27 «
9 Févr.
6 Mars
7 «
13 «
2 Mai
10 c
30 «
2 Juin
16 «
21 «
21 Juin.
l«'Août
6 Nov.
29 a
7 Dec.
16 «
26 «
Trib. Seine,
Trib. Seine,
G. DE Bordeaux,
G. de Paris,
Trib. du Havre,
G. DE Dijon,
Trib. comm. Seine,
G. DE Paris,
G. DE Paris,
Gass. rbq.,
Trib. Seine,
G. DE Lton,
Trib. Seine,
Trie. Seine,
G. DE Paris,
G. DE Douai,
G. DE Paris,
Trib. Seine,
Trir. Arras,
G. DE Paris,
Tbib. Seine,
Cabs. req.,
1900
15
2 Janv.
25 c
29 «
2 Févr.
7 «
5 Mars
14 «c'
15 «
17 €
5 Avril
1er Mai
8 «
18 «
20 Juin
26 c
G. DE
G. DE
G. DE
G. DE
G. DE
Gass.
Gass.
G. DE
G. DE
G. DE
G. DE
G. DE
G. DE
Gass.
G. DE
Paris,
Paris,
Paris,
Paris,
Riom,
REQ.,
civ.,
Paris,
Paris,
Paris,
Paris,
Paris,
Douai,
CRIM.,
Rouen,
151
67
215
141
33
32
8
55
100
96
89
218
157
103
124
232
49
35
166
75
135
17»
64
131
151
176
62
361
196
89
119
82
121
105
76
111
234
78
358
259
84
177
139
227
TV^
TABLE DES NOMS DES PARTIES
Achard (Frédéric).
Àncelin (veuve).
Arger.
Amoald.
Aubriot
B
Bady.
Bandsept. *
Banillat.
Bartlett.
Belol.
Bergère,
Berlitz.
fiemheim jeune.
Berthelot.
Besflp
Blandy. 189, 212
Blot.
Bondreaux.
Bottffard.
Bonffé.
Bonhours.
34
89
23
22
10
55
70
166
275
60
358
151
109
96
275
et 232
275
64
6
32
257
103
Cahen.
CaOQtchoac manu-
facturé (Gompa -
gnie française du) 275
Chauffage hygiéni-
gue (Compaffnie
internationale). 89
Clemenceau. 63
Clémencet. 156
Clément Gtadiator '
Humbert (Société). 67
Clerc. 64
Clermont - Ferrand
Chambre (syndica-
le de Fameuble-
ment de). 105
Cohen. 173
Gollonge. 151
Comiot. 275
CarUer. 232
D
Dalifol.
257
Damaire.
64
Debiëre.
124
Decourdemanche. 275
Oegrave. 275
Degrelle. 47
Delacroix. 76
Depay. 96
Di Ghiara. 151
Diez hermanos. 212
prumont. 124
Dubois. 134
Dumartheraj. 151
Dumas (héritiers). 119
Dunlop (The Dunlop
TyreCie et Compa-
gnie française des
pneumatiqu es
(Dunlop). 257
Du verger. 76
B
Eaux du Boulbu (Société
des). 15
Eaux minérales et Bains
de mer (Société
des). 32
Eaux d'Orezza (Société
des). 22
Eaux de Vais et du Pes-
trin (Société des) 31
Eclair 36
Edeline. 257
Eden. 111
F
Faure. 43
Fayard (frères). 119,361
Fleury. 75
Force (Société la). 275
Forest. 89
Forpomis. 139
Fourmentin. 276
François. 275
Frère. 15
G
Gaillardet (héritiers) 119
Gally 10
Gallus (Société des
pneumatiques). 275
Garnier (consorts). 96
Gauthier (L.). 166
Germain. 34
Gillet. 89
Gillou. 31
Grellou. 275
Gruson (héritiers). 234
Guérin. 100,108
Guibaud. 49
Guichard. 41
n
Hamond.
275
Hauzer frères.
275
Henry et Oie.
32
Hetley.
275
Hydrominérale de
Vais (Grande Cie).
I
Industrielle (1').
31
81
J
Jacques frères.
109
Job.
10
Juge (de).
142
K
Ressler.
43
Kircheiss.
55
L.
Lageanèvre(de).
358
Lallouette.
47
Lanneau.
109
Lassalle.
47
Lauret.
31
Le Bourg.
131
Legler Pernod.
169
Lekizian.
129
Levé-Diéval.
177
Lcvy (G. et M.)
275
Locomotion universelle
(la).
275
Luigi.
22
M
Mainguet.
139
Marlier.
10
Marié et Cie.
275
Martell et Cie.
277
May.
124
Mayaudon.
173
— 384 —
Meissonnier.
Métaux (Compagnie
française des).
Metenier (Oscar).
Idichelin.
Michelin.
Monplot.
Montebelio (de).
Moral.
Muller.
Nicolaï.
O
Obier.
Oury.
Parent.
Paul Dupont (impri-
meries).
Peugeot frères.
Photo-programme .
Piat et fils.
Piatier V'«.
31
84
86
257
275
22
141
275
156
Pingault. 64
Pi ver et Cie. 173
Préfet de la Corse. 22
R
Raba.
Radigoin.
Real.
Rey (F. et H.).
Richard (G.).
6
100,130
32
70
275
22
Savine.
Schiffi.
41 Schmoll.
275 Schneider et Cie.
Serramalera y Com-
pos.
47 Serve.
Serve.
103 Soir (le).
259 Sorel (Agnès dit),
121 fm
78 *
22 Tascher frères.
124
129
100
234
75
81
84
63
361
49
Théâtre de la Porte St-
Martin (Société do). 121
Thioust. 105
Torilhon et Cie. 275
Val d'Osne. 131
Varinard. 8
Vasseor. GO
Veil Picard. 169
Vicherat Norizot. 10
Vichy (Cie fermière
de). 8,15
Vital. 259
U
Union des Sociétés de
tir de France. 13i
i;v
Wellhoff.
Whistler.
Willame.
151
111
55
Imp. J. Tbevenot, Sainl-Dider (Hte-Marae^.
six autres semaines moyennant le payement d'une sur-
taxe. Le nouveau mode de compuLation des délais pres-
crit par le Code civil va faire rentrer dans ledélai le jour
(1) Nom doanoni cette Conv«nlton à titre de renBe[gneineiil. Uuw on
peut se deiDioder » ce texte aEiure aux regsortisBonls la protection de
la propriétâ indoehlelle et des marques.
— 12 —
euvenl èlre vendus commercialement ou mis en vente,
a détail, que dans certaines unités de poids et avec in-
icalion du poids total, les fils de coton jusqu'à concur-
înce de 100 mètres de long, aussi dans certaines unités
e longueur et avec indication de la longueur. Sont ex-
eplés : les tîls qui sont vendus pour l'achèvement de ma^
handises préparées et en combinaison avec elles, les âls
e colon à coudre qui sont disposés sur des bobines de
ois, les iils qui sont mesurés ou pesés à l'acheteur. Suit
indication des poids el des longueurs, avec prescrip-
ons détaillées. Ces dispositions n'entreront en vigueur
u'au 1" janvier 1903.
Désignations et réclames médicales. — Un arrêté de la
ireclion do la police royale à Berlin, en date du là fé-
rier 1898, prescrit à quelles conditions est soumis l'u-
âge des litres de médecin el autres désignalions profes-
ionnelles reJRtives à l'art de guérir, ainsi que des quali-
califs honorifiques (G. S s., juin 1898, p. 190).
Dispositions relatives à la protection de la propriété lit-
iraire, artistique et industrielle dans les circonscriptions
insulaires et les pays de protectorat. — Les dispositions
es lois concernant la protection des œuvres de littéra-
ire et d'art, des photographies, des inventions, des des-
ins et modèles, des modèles d'utilité el des marques de
larchandiseH sont applicables dans les circonscriptions
onsulaireset dans les pays de protectorat. Cela résultait
éjà de communications faites parle patenlamt au Bu-
ïau de Berne (/e Droit d'auteur, 1897. 77 ; la Prop. ind.,
1499. 91) (l).C'eat confirmé définitivement par la loi du 7
vril 1900 sur la juridiction consulaire etla loi du 25 juil-
;t 1900 sur les protectorats (le Droit d'auteur, i9fiiAi).
Antilles ânql&isës
{Trinidad et Tobago). — Ordonnance,»" lO.de 1900. por-
(1) Voir un article iuliluld Da$ Gellungtgetiet det tleuUchen Pa-
nt und toniligenAuÊichhutrechte (le domaine de la légiilalîoD alle-
ande ttir Us breveta et autres droiU eicluiifs), par P. Damme {Arekiv
tr ùffentlichet Rechl, anoée IBOO, 1" cahier). C'est une étade sur l'ap-
jcatilitë de la iëgislalion allemande en matière da propriété indas-
ielle et de concurrence déloyale dans les coloniea et les tribunaui eon-
ilaires de rAllenia^iDe.
( imponanon et la
fabrication tféliquettei de nature à induire en erreur sur la
provenance des marchandises. — Cette loi (Prop. ind., fév.
1898, p. 18) interdit: a — d'imporler et de fabriquer des
étîqueltes qui se prêtent à la fabrication de boissons ou de
tous autres produits nationaux, dans le but de les vendre
comme s'ils étaient étrangers ; 6 — de mettre en vente des
préparations pharmaceutiques sans la déclaration du nom
du fabricant, du produit et du lieu de provenance ; c — de
mettre en vente des marciiandises ou produits manufactu-
rés nationaux sous une étiquette en langue étrangère. Ex-
ception est faite: à l'interdiction a, pour les succursales
de maisons européennes, sous la condition de faire cer-
taines preuves ; à l'inlerdiction c,pour les étiquettes, sauf
celles de produits alimentaires, qui, sans constituer une
Le même droit apparlie
invention ou de sa déco
■ Les lois concernant
luslrielle désignent tes |
:e droit, les modes 'de
Dans les cas non prévu:
es, seront appliquées le
,e présent Code en mati
L'ne loi sur les brevets,
30.74), dit seulement (
liront d'un monopole \
:e annuelle de 5 à 10 pt
r. 50] et l'accomplissem
es par un règlement sf
i auront obtenu des brev
faire enregistrer dans
:ionaux, mais en pa^aii
[iscription, une somme
i (le peso or vaulBfr.).
reau des brevets dépen
.'article 269 du Code p
menor à son degré m(
vaux forcés] la falsidcat
contre-marques emplo
jsements d'industrie ou
re passible de la peine
jrieur (31 jours à un ai
a mis en circulation df
çant sur ceux-ci la ma
it par la marque ou le
;é.
Jersey e
^rûleclion international
mances du 14 juillet 18
a publication des lois e
irnationalc des droits d<
îure soil essentielle p
., mais dans le but de fi
;3 qui y résident qu'ellt
par elle {le Droit d'à
pourra encore être versée dans les 3 mois qui suivront
l'éctiéance. mais moyennant une amende égale à 10 0/0
de la taie, le l"mois, à 15 0/0, le second mois, à 35 le
3*, toute fraction du mois étant comptée pour un mois
(ta Prop. ind., 1900. 184).
SoÊDE
Brevet» d'invention. — Marques. — Ordonnances roya-
les et instruction royale révisées pour le Bureau des bre-
vets et de l'enregislremenlelpourla tenue du registre des
marques de fabrique et de commerce, du 18 novembre
1898 (la Prop. ind., 1899. 219) (1).
Brevets étrangers. — Délai de priorité. — Obligation
d'exploiter. — Loi du TI mai 1898, modiHanl l'article 35
de l'ordonnance du 16 mai 1884 (2) et d'après laquelle le
Koi /courra, par décret, fixer le délai de priorité accordé
aux brevetés étrangers, soit à 7 mois du jour de la demande
dans l'Etat étranger, soit à 3 mois de l'annonce de la dé-
livrance du brevet étranger, et dispenser de l'exploitation
de son brevet en Suède le sujet d'un Etat étranger ou
toute autre personne ayant son domicile ou son principal
établissement dans ledit Etat, qui aura obtenu antérieu-
rement dans l'Etal étranger un brevet, encore valable,
pour la même invention (la Prop. ind., 1899. 34) (3).
ZOLOLAND
Propriété industrielle. — Il résulte d'une communica-
tion faite au Bureau de Berne par l'administration britan-
nique que la province du Zululand a été incorporée à la
colonie de Natal. En conséquence les brevets délivrés et
les marques enregistrées dans cette colonie produisent
effet dans le Zululand (la Prop. ind., 1899. «6).
{]) Voir lit» indications relatives à la législalioD >uédoi«e snr tu breiete,
Ann., 97. 222.
(2] Les anciennes instrucliona pour la tenue des registres sont an lUc.
Ug. prop. ind., Berne, 1807, t. a, p. 472 el 493.
(D) Cette loi a pour but de permettre bu gouvernement de traiter avec
ïel ou tel Etat sur des bases qui af niant élé proposées dans les traTaai
prâparaloirea de la Conférence de Brnieltes.
[■^■^#^,.TW
— 21 —
Art. 4155.
Eféffislatlon. ^ France. — Breveis d'Invention.
Circulaire du ministre du commerce, du 18 janvier 1898,
concernant les récépissés à délivrer pour les versements de
première annuité de brevets d'invention.
Monsieur le Préfet,
Aux termes de Tarticle 378 de l'Instruction générale, les rece-
veurs des ûnances chargés de recouvrer les taxes et autres droits
se rapportant aux brevets d'invention doivent consigner avec soin
dans leurs articles de recettes, ainsi que dans les récépissés qu'ils
souscrivent, la désignation sommaire, mais précise de l'invention
qui a donné lieu à la demande de brevet.
En vue de diminuer les formalités exigées au moment même
du dépôt des brevets, M. le ministre des finances vient de déci-
der, sur ma proposition, que les parties versantes auront à l'avenir
la faculté de ne plus faire porter sur les récépissés constatant
des versements de première annuité de brevets d'invention re-
nonciation du titre du brevet à déposer.
Les récépissés pourront contenir simplement le nom de la par-
tie versante, le montant de la somme encaissée et la mention
que le versement est fait à titre de première annuité pour un
brevet à déposer. Dans ce cas, c'est au préfet qu'il appartiendra,
au moment où le récépissé sera remis à l'appui d'une demande
de brevet, de le faire compléter par le déposant, qui souscrira
au verso une déclaration indiquant formellement l'invention à
laquelle il est affecté.
Des dispositions analogues seront appliquées aux récépissés
concernant les versements effectués pour l'obtention de certificats
d'addition ou de copies de brevets.
Toutefois, afin d'éviter les fraudes auxquelles pourrait donner
lieu ce nouveau mode de procéder, soit par la présentation de
déclarations de versement correspondant à des récépissés dont
il aurait déjà été fait emploi, soit par Taffectation, à des annuités
subséquentes, de récépissés afférents en réalité à des versements
de première annuité, dans le but d'éviter la déchéance, il a été
convenu entre nos deux départements :
1"^ Qne, dans aucun cas, les receveurs des finances ne délivre-
ront de déclarations de versement correspondant aux^récépissés
sans affectation déterminée ;
2<* Qu'il ne sera admis aucune rectification au libellé de ces ré-
cépissés sous prétexte d'erreurs commises par la partie dans les
déclarations faites au moment du versement ;
- 28 —
ticle S4 de la loi du 3 juillet 1844 sur les brevets d'in-
linsi conçu : « Après le payement de la deuiième an-
! descriptions et dessins seront publiés soit textuetle-
t par extrait» ;
rèté ministériel du 3 août 1873, qui a constitué le comité
alion des brevets d'invention ;
premier. — Les descriptions et dessins des brevets d'in-
lont la publication aura été jugée utile par application
le 24 de la loi du 5 juillet <8i4, seront imprimés m or-
lar fascicule séparé pour chaque brevet,
veau mode de publication commenceraavecles brevets
199.
— Les fascicules seront mis en vente aux prix indiquât
fascicules isolés seront vendus à raison de lOcentimes
e d'impression complète ou commencée, et de 10 centi-
ilanche de dessin, sans que le prix d'un fascicule puisse
leur à 50 centimes.
:a consenti des réductions de prix d'après le tarif suî-
lle que soit l'importance de chaque fascicule :
>ourune série de 25 fascicules 10 francs
— 50 —
— 100 —
— 500 —
— 1,000 —
— 2,000 —
- Le conseiller d'État, Directeur de 1'
ition du présent arrêté.
e 30 décembre 1899.
13 —
as —
idustrie, est chargé
Art. 4159.
tlon« éti^nsér^s. — Répnbllqne Atw«ntlne.
— M«rt|ue* de fabrique.
14 octobre 1900, stir les marques de fabrique,
de commerce et d'agriculture.
PEtËUIEn. — Des uarqurs dp. fabrique, de covherck
ET d'agbicultube.
S PRBHIER . — Du droit de propriété des marques.
. — Pourront être employés comme marques de fabri-
crile parVarlicle précédent, il ne s'est pi
et si des marques indentiques ou ressen
tioDS prévues aux articles 6 et 8, n'ont pi
marque sera enregistrée et le cerliQca
sera délivré.
Art. 28, — Le droit de priorité pour
que sera accordé d'après le jour et l'he
présentée au Bureau.
Art. 23. — Le certificat de marque,
Bureau des brevets, consistera en une
qui l'aura concédée, accompagnée d'un
tion et des dessins. Il sera délivré au no
nera l'autorisation du gouvernement, et
du cher et du secrétaire du Bureau d(
timbre du même bureau.
- Art. 24, — Dans les provinces et les
dépôt prescrit par l'article 17 de la loi
de poste que détermineront les règleme
Art. 23. — Le chef du Bureau des h
ministraleurs des postes un registre où
verbaux relatifs aux demandes préseii
certificat de marque, chaque fois que
déposées en la forme et dans les con
loi.
Art, 20. — Ces registres seront folio
nistre compétent, de la même manière
posé au Bureau des breveta,
Art. 27. — Chaque fois que les ad
auront reçu un dépôt, ih devront trai
au chef du Sureau des brevets une c
verbal y relatif, avec la description et
et une attestation constatant le verseni
la loi, faute de quoi aucune demande i
Art. 2S. ~ Chaque fois que le che
recevra une demande par l'entremise
postes, il en dressera procès-verbal dan:
copié le procès^verbal transmis parle
procédera ensuite eu la forme prescri
Les intéressés pourront également dé
des postes le cliché typographique reqi
Art. 29. — L'opposition à la conceasi
tuera en la forme prescrite par les arti
Art. 30. — Si la chef du Bureau a ol
- 34 —
r
En cas de litige, on produira devant le juge compétent le des-
sin de la marque et une copie certifiée de sa description, ou de
toute autre pièce qui s'y rapporte.
Art. 40. — Les marques et leurs descriptions seront tenues,
au Bureau des brevets, à la disposition de toute personne qui
désirerait en prendre connaissance.
Art. 41. — Pour que les marques étrangères paissent jouir des
garanties accordées par la présente loi, elles devront être enre-
gistrées conformément aux prescriptions de cette dernière.
Les propriétaires de ces marques, ou leurs agents dûment au-
torisés, sont seuls admis à en solliciter Tenregistrement.
TITRE IL — Dbs noms industriels, commerciaux et agricoles.
Art. 42. — Le nom de Tagriculteur, du commerçant ou du fa-
bricant, la raison sociale, renseigne ou la désignation d'une
maison ou d'un établissement faisant le commerce d'articles ou
de produits déterminés, constituent une propriété pour les efifets
de la présente loi.
Art. 43. -— Toute personne qui voudra exercer une industrie,
un commerce ou une branche d'agriculture déjà exploitée par
une autre personne sous le même nom ou sous la même dési-
gnation conventionnelle, devra y apporter une modiûcation de
telle nature que ce nom ou cette désignation soient visiblement
distincts de ceux employés par la maison on par rétablissement
de date plus ancienne.
Art. 44. — Toute personne se prétendant lésée par l'usage d'un,
nom industriel, commercial ou agricole devra, sous peine de
prescription, présenter ses réclamations y relatives dans le délai
d'un an à partir du jour où ce nom aura été employé par une
autre personne.
Art. 45. * Les sociétés anonymes ont droit au nom qu'elles
portent comme tout particulier, et sont soumises aux mêmes res-
trictions.
Art. 46. — Le droit à l'usage exclusif d'un nom comme pro«
priété prend fin avec la maison de commerce qui le porte ou
avec l'exploitation industrielle ou agricole qu'il sert à désigner.
Art. 47. — Pour exercer les droits reconnus par la présente
loi, l'enregistrement du nom n'est pas nécessaire, sauf dans le
cas où ce nom ferait partie de la marque.
TITRE III. — Dispositions pénales.
Art. 48. — Sont punis d'une amende de vingt à cinq cents pias-
tres de monnaie nationale et d'un emprisonnement d'un mois à
un an, sans qu'une peine pécuniaire puisse être substituée à la
peine corporelle :
destractii
tant des I
sente loi,
des êcoli
effectuée.
Art. 54.
les marqu
trompe usf
servi à co.
Art. 5S
intentée p
ou la r£ci
taire de la
du dëlit.
Les acte
dans le di
Art. 56.
du présen
ront fait u
de l'ensei^
d'une fabr
con formel
Art. 57.
commerce
capsules, I
sa marque
te, dans ui
senter dei
desdits obj
lité du déni
Le juge i
caution, si
Art. S8. '
dises ou pr
tre faite, es
priétaire d<
écrit concei
procuré la
la vente. E
à fournir c
complice d
Art. S9.
-51 -
outre passible d'une amende de 20 à 3,000 mari» ou s'il existe
des circonstances particali ère ment afigravantes, d'un emprison-
nement ne dépassant pas nn an.
Si, dans les cas ci-dessus, la marchandise illtgalemenl fabri-
quée, employée, vendue ou importée se trouTe encore dans la
possession de l'inc jlpé, elle sera, à la demande da la partie lésée
et sauf entente contraire entre les intéressés, réduite à une forme
qui la rende impropre à l'usage, sauf les cas où elle pourrait être
conservée sans inconvénient jusqu'à l'expiration du privilège
aous les scellés du pouvoir exécutif, dans un local approprié que
f ioculp^ aurait à fournir.
La présente rè^le s'applique aussi aux appareils qui ont servi
à U contrefaçon et qui y sont exclusivement appropriés.
A la demande de la partie lésée, le tribunal peut prononcer la
séquestralion desdits objets jusqu'au moment où l'arrêt devien-
dra déHnilif ; le demandeur doit fournir, si cela est nécessaire,
UD local approprié pour leurconservation et déposer une caution
pour les dommages-intérêts.
Les délits prévus par le présent arircle ne peuvent être pour-
soim par le représentant du Ministère public qu'à la demande
de la partie lésée.
g 6. — Quiconque, dans le but d'induire en erreur, appose sur
la marchandise ou sur son emballage une inscription ou une au-
tre indication aflirmanl que ladite marchandise est protégée dans
le pays par un privilèi;e, ou quiconque affirme mensongèrement
dans une annonce, une circulaire, une enseigne ou par tout autre
moyen de publicité, qu'une marchandise déterminée jouit d'un
privilège est passible d'une amende pouvant s'élever au maximum
à oOO marks.
^7. —Le tribunal de Hclsinnsfors est compétent pour connaî-
tre des affaires suivantes:
a. De la rémunération à accorder pour la mise à la libre dispo-
sition de chacun d'une invention privilégiée, ou pour sa prise en
exploitation pour le compte du iisc.
b. De l'obligation incombant au propriétaire d'un privilège d'ac-
corder une licence d'exploitation h des tierces personnes, dans les
cas on cette question doit être résolue par les tribunaux ;
c. Delà nullité ou de la déchéance d'un privilège ou de la
déclaration de sa dépendance k l'égard d'un privilège antérieure-
Tnent octroyé, ou, enfin, de l'adjudication d'un privilège aune
autre personne.en vertu d'un droit préférable à celui du déposant.
Les affaires uonceroant la violation d'un privilège d'autrui ou
toute autre lésion du droit résultant du privilège, sontjugées par
le tribunal du lieu où les actes ont été commis.
§ 8. — Si, dansun procès en violation d'un pririlège d'invention
on soulève l'exception de la nullité ou de la déchéance du priW-
— 52 —
|e, ou celle de sa dépendance relativement à un privilège anté-
ur, et s'il y & doute, le tribunal suspendra la décision qu&nt au
td et invitera les intéressés, sans peine d'une responsabilité
r lai indiquée.Jt intenter une action spéciale devant le tribunal
intionné à l'article 7, et cela dans un délai liié par le tribunal,
ce délai s'écoule sans avoir été utilisé, le procès sera jugé
ant au fond indépendamment de l'exception soulevée.
i 9. — Il n'est pas admis de recours spéciaux contre la» juge-
!n(s des tribunaux de première instance rejetant les exceptions
compétence ou statuant sur la mise en cwne de tierces pér-
onés.
\ 10. ~ Dans les procès jugés par les tribunaux en vertu des
positions du présent décret, le tribunal peut, s'il le juge iiéces-
re, exiger l'avis de l'organe chargé de délivrer les inventious ;
tribunal est de plus autorisé, si cela est nécessaire, à inviter à
séance, pour fournir les renseignements dont il a besoin, on
deux experts, qui seront tenus de prêter serment préolable-
int dans uneforme appropriée. Nul ne peut, sanF empêche ment
clément reconnu, se dérober à une telle invitation. Les experts
doivent pour chaque séance une rémunération qui sera établie
r le tribunal et payée d'avance sur les disponibilités du fisc ;
Lribunal doit indiquer dans les jugemenls les sommes que les
rties doivent restituer au fisc.
j H.— Le présent décret entrera en vigueur le I" jonvier 1899,
le sera cependant appliqué aux violations do privilèfie d'inven-
n que dans les cas où il statuera sur une punition moindre que
le établie par la loi antérieure ; les dispositions du présent dé-
)t relativesà la compétence en matière denullité, dedéchéan-
et de violations de privilèges, de même que celles se rappor-
it à la procédure en ces matières, ne seront pas applicables
I actions intentées avant la susdite date.
Tout ce qui précède doit être observé par chacun en tant que
a le concerne.
HelsiuRfors, le SI janvier I86S.
(Suivent les signatures.)
Déclaration souveraine de Sa Majetté impériale, du
janvier 1898, concernant les privilèges d'invention (i).
Chapitre I". — Des objets pour lesquels les privilèges sont
délivrés, tlu droit aux privilèges et de leur durée.
: 1. — Il est accordé des privilègei pour les inventions nou-
les, applicables i l'industrie.
t reneplace le
— 55 —
Pour toutes les irrégularités autres que celles qui
d'étn énumérées, la Direction de l'Industrie assigne au deman-
deur un délai raisonnable pour les faire disparaître. Si le de*
mandear présente les recUDcations exigées dans ce délai, la de-
mande est considérée comme ayant été déposée régulièrement
dès le commencement. En cas contraire, il n'est pas donné suite
à la demande.
g 8. — S'il n'existe aucun des motifs de refus énumérés au j 7,
la Direction de l'Industrie, dans les deux mois à partir du dépAt
de la demande ou des renseignements supplémentaires, publiera
la demande dans le journal ofllciel du pays, en indiquant l'objet
de l'iavention et en annonçant que l'invention est provisoirement
protégée ; la demande et les documents y annexés devront être
mis i la disposition de quiconque voudra prendre connaissance
de leur contenu.
§9.— Si le déposant le demande en temps utile, la publica-
tion mentionnée au ^ 8 peut être ajournée jusqu'à concurrence
de 4 mois en sus du terme indiqué dans ledit paragraphe.
Que lapublication soit ajournée ou non, le déposant a le droit,
avant la publication, d'apporter des modilicalions à sa descrip-
tion.
g 10. — Avant la reprise de lu procédure, qui doit avoir lieu
à l'expiration de deux mois k partir de la publication, cbacun
a le droit, sauf dans les cas indiqués dans l'alinéa suivant, de
combattre la demande en déposant auprès delà Direction de l'In-
dustrie une opposition par écrit, fondée sur les articles I, 2 et 3.
Une oppositioQ affirmant que le déposant s'est illégalement
approprié l'invention d'autrui, non encore publiée ou publique-
ment exploitée, ou que l'invention n'appartient pas exclusive-
ment au déposant, ne peut être présentée que par la partie lésée. .
En pareil cas, la partie lésée peut exiger qa'on lui accorde le
privilège pour l'invenliou entière, ou pour celles de ses partie!!
auxquelles elle a droit.
§ 11. — Si, avant ou après la publication, il est reconnu utile
qae le déposant fournisse des explications, la Direction de l'In-
dustrie l'intitera, en lui indiquant ses motifs, à fournir les
explications dont il s'agit ; l'audition orale des parties est admis-
sible, si le déposant ou l'opposant l'exigent. Si la partie intéres-
sés veut fournir des dépositions de témoins, elle est tenue de
faire déposer le témoin devant un tribunal, et de remettre le
procès-verbal à la Direction de l'Industrie.
S'il y a lieu de procéder, après opposition, à une audition
orale, la partie opposante, si elle demeure dans le pays et si son
adresse est indiquée à la Direction de l'Industrie ou autrement
connue a'élle, est avisôé en temps nlile pour pouvoir assister à
""■"^«■P
!. L'qtis concernnnt la déposition de lëmoins incoiobe
li l'exige.
ctîon de l'InduBlrie peut, si elle le jufte utile, requérir
lersonnes compétentes.
Si l'invention pour laquelle le privilège est demandé
rtie identique & une invention déjà pmiléi;iée en laveur
tre personne, le privilège n'est accordé que pour les
luveiles de l'invention.
invention dépend d'une autre invention déjà privilégiée
le ne pouvoir être exploitée sans l'autorisation du pro-
du privilège antérieur, la Direction de l'induslrie le
era sur la patente ; mais cette mention n'empêchera
ibunaux de prononcer sur la question de dépendance.
' Si la demande de privilège n'est pas admise à l'eia-
si elle est rejetée, ou si le privilège n'est pas délivré
le l'étendue demandée, ou s'il est donné suite à une
fondée sur le § 10, alinéa 3, le déposant a le droit, s'il
satisfait de la décision, d'interjeter appel auprès du
lent administratif du Sénat dans les soiiante jours qui
L décision.
lel porte sur une question technique, le Sénat le soa-
li cela est nécessaire, k un second examen de personnes
ites.
pels formés contre les décisions de la Direction de i'In-
orlant qu'il ne devait pas être donne suite aux opposi-
lui demandes spécifiées au § 10 ne sont pas admissibles,
adice du droit de l'intéressé d'intenter une des actions
lUx g§ 23 et 24.
- Si le privilège est accordé par un arrêt délinitifet non
ipel, la Direction de l'Industrie délivrera un brevet au
t et ordonnera la publication aussi prompte qne possi-
délivrance dans le journal officiel du pays, avec indi-
igulière des parties essentielles de la description. Si le
est refusé après la publication faite en vertu du §8, ce
li publié dans le Journal officiel.
' I] est institué à la Directiou de l'Industrie un registre
lèges accordés pour inventions, dans lequel seront indi-
[et de chaque privilège, sa durée, le nom et l'adresse
iétaire du privilège et de son fondé de pouvoir,
consignés dans le registre et publiés dans le Journal
'expiration du privilège par suite de renonciation, d'un
iciaire ou d'une des règles établies par le présent réglc-
: même que le transfert du privilège k une personne
1 droit préférable à celui du premier privilégié, ou la
ion d'un fondé de pouvoir, conformément au § 30.
— 57 —
L'enregistrement de la cession du privilège ou des droits qui
en découlent fait l'objet du § 19. Cet enregistrement doit aussi
être publié de la manière indiquée plus haut.
Le registre, les description^ les dessins et les modèles relatifs
aux privilèges accordés doivent être accessibles à quiconque
voudrait en prendre connaissance. Des extraits du registre et
des copies des documents sont délivrés par la Direction contre
le payement des taxes établies.
Chapitre IIL — Ikê obligations du titulaire d'un privilège
d'invention.
§ 16. ^ Pour chaque privilège d'invention, sauf les privilèges
additionnels, le titulaire est tenu de verser annuellement, à par-
tir de la deuxième année de sa durée, une taxe de vingt marks
pour la 2« et la 3* années ; pour les années de la 4" à la 6* inclu-
sivement, une taxe de quarante marks ; pour les années de la
7« à la 9« inclusivement, cinquante marks ; pour les années de
laiO« à la 12* inclusivement, soixante marks, et pour les années
de la 13* à la i5« inclusivement, soixante-dix marks. La taxe
doit être payée à la Direction de rinduslrie pour chaque année
de la durée du privilège avant le commencement de cette année,
sauf à payer plus tard un« taxe augmentée du cinquième. Si la
taxe ainsi augmentée n^est pas payée dans les trois mois à par-
tir du commencement de Tannée correspondante du privilège^
celui-ci tombe en déchéance.
Le propriétaire du privilège est autorisé à payer lesdites taxes
par anticipation pour plusieurs années ; mais dans ce cas, les
sommes ainsi payées ne peuvent être restituées si le brevet cesse
d'être en vigueur.
§ 17. — Si, dans les trois ans à partir de la délivrance, le pro-
priétaire du privilège ne Ta pas mis en exploitation dans le pays
dans une mesure considérable, ou si, plus tard, Texploitation
est interrompue pendant un an, le titulaire du privilège est
tenu d'accorder à d'autres personnes une licence d'exploitation,
conformément à l'article 4 du décret en date de ce jour, relatif
aux privilèges d'invention et à la procédure judiciaire dans les
affaires relatives à ces privilèges.
§18. — Si l'invention n'est pas exploitée dans 1 pays dans
une mesure considérable, mais qu'au contraire, elle est exploitée
hors du pays, le titulaire du privilège est tenu, en tant que cela
lui est possible, de rendre accessible dans le pays, à un prix
raisonnable, la marchandise privilégiée ou fabriquée d'après le
procédé privilégié. Faute de cela, le tribunal peut le déclarer
déchu de son droit, à la demande des personnes qui se croiraient
lésées.
Tt^TTir"
— 58 —
§ 19. — La cessioa des privilèges doit être notifiée par écrit,
sous envoi des documents établissant la cession, à la Direction
de riudustrie. Si la Direction de l'Industrie reconnaît que cet
enregistrement peut être effectué, elle y procède immédiatement.
Si les documents ne sont pas complets, un terme est assigné au
requérant, après quoi Taifaire est liquidée d'après les règles
établies.
Si la cession n'est pas notifiée de la manière susindiquée, tou-
tes les mesures qui, sur l'initiative du cédant, seraient prises, en
attendant, par la Direction de Tlndustrie au sujet du privilège,
resteraient valables ; la cession demeurerait aussi sans effet à
regard des tierces personnes qui auraient traité de bonne foi
avec le cédant.
Si un privilège a été cédé à deuK personnes, et si le premier
cessionnaire, avant le second, ou simultanément avec lui, fait
la déclaration d'acquisition pour être enregistrée, cette cession
reste valable même si le second cessionnaire avait agi de bonne
foi.
Si le titulaire du privilège cède à une autre personne Tusage
exclusif d'un droit quelconque fondé sur le privilège, une telle
transmission et les cessions ultérieures de ce droit doivent être
enregistrées de la manière susindiquée.
§ 20. — Si le titulaire du privilège quitte le pays, ou s'il cède
le privilège à une personne qui ne demeure pas dans le pays,
le titulaire du privilège est tenu de déposer à la Direction de
rindustrie un pouvoir délivré à une personne répondant aux
conditions de Tarticie 6. Si le fondé de pouvoir quitte le pays,
ou si, pour une cause quelconque, son mandat prend fin, le pro-
priétaire doit déposer un pouvoir délivré à une autre personne.
En cas d'inobservation de ces règles, la Direction de l'Indus-
trie, avisée par une déclaration appuyée de preuves suffisantes,
invite le titulaire du privilège, par une publication dans le Jour-
nal officiel et par une lettre à lui adressée, si son adresse postale
est déposée, à se mettre en règle avec les dispositions susindi"
quées, dans les trois mois à compter de la publication. Si le titu>
laire du privilège ne s'exécute pas, le privilège tombe en dé-
chéance.
g 21 . — Une renonciation à un privilège doit être faite par le
titulaire sous la forme d'une déclaration écrite, déposée à la Di-
rection de l'Industrie. Si la Direction de l'Industrie considère que
cette renonciation lèse les droits de tierces personnes, elle ne
lui donnera aucune suite.
§ 22. — Quiconque n'est pas satisfait d'une décision de la Di-
rection de l'Industrie refusant l'enregistrement d'une cession dé
privilège on d'un droit reposant sur le privilège, ou se rappbr-
— 59 —
tant à une autre question du ressort de la Direction de l'Indus-
trie et relative aux mesures postérieures à la délivrance du pri-
vilège, peut interjeter appel dans le délai, et d'après les formes
indiqués au § 13.
Chapitre IV. — Des actions qui peuvent être intentées en Justice
au sujet (Tun privilège cfinvention accordé.
§ 23. — Si le privilège a été accordé à rencontre des disposi-
tions des §§ 1, 2 et 3, ou si la description de l'invention, en vertu
de laquelle le privilège est délivré, est tellement inexacte ou in-
complète qu^une personne experte ne peut pas mettre Tinven-
tion à exécution en se fondant sur cette description, celui qui
s'estime lésé (sauf les dispositions de l'article 24), de môme que
le représentant du fisc (ce dernier dans Tintérôt public), pour-
ront intenter devant le tribunal une action en nullité.
Si cette action se fonde sur le fait que l'invention privilégiée
ressemble en partie à une invention protégée au nom d'un au-
tre, ce privilège est déclaré nul dans les parties correspondantes^
et demeure en vigueur pour celles qui sont nouvelles.
Une action en reconnaissance de la dépendance qui existe en-
tre un privilège postérieur et un autre qui lui est antérieur, peut
être intentée parle propriétaire du privilège respectif.
§ 24. — Si quelqu'un s'approprie illégalement l'invention d'un
autre qui ne Ta pas publiée ni exploitée publiquement, et s'il se
fait accorder un privilège, ou s'il obtient un privilège pour une
invention dont il ne peut disposer seul, l'action en nullité n'ap-
partient qu'à la partie lésée. Dans ces cas, la partie lésée a le
droit d'exiger la cession du privilège en entier ou en tant qu'il
lui appartient ; mais ces actions ne doivent pas léser les droits
des personnes qui ont traité de bonne foi avec le titulaire du
privilège.
§ 25. — Si le tribunal prononce la nullité ou la déchéance du
privilège, ou s'il l'adjuge à une autre personne ayant justifié d'uu
droit préférable, l'arrêt est communiqué parles soins du tribu-
nal à la Direction de l'Industrie.
Ghapitrb V. — IHspositions spéciales,
§ 26. — Dans toutes les affaires qui, aux termes du présent
règlement, relèvent de la Direction de l'Industrie, les intéressés
ont le droit de présenter leurs exploits, avec pièces justificatives,
par lettre affranchie adressée à la Direction de l'Industrie, s'ils
ne veulent pas les déposer personnellement ou par un fondé de
pouvoir. Les versements mentionnés à l'article 16 peuvent éga-
lement être transmis à la Direction de l'Industrie, par lettre af-
franchie ou par mandat postal.
IPP«VIIPi^.HI LU . I ■.•■■. I .' 1 1 «'■I^W— 1-^ Li M. lumj I ■ *-
— 63 —
noms propres et sîf^nes distiuctifs qu'ils jugeront convenables;
sont seuls exceptes :
1* Les armoiries de la République ou celles de tout autre pays^
à moins qu*on ne présente Tautonsation du gouvernement res-
pectif ;
2"* Le portrait de toute personne autre que le fabriquant com-
merçant ou industriel, sans le consentement préalable de cette
personne ;
3® Les signes distinctifs qui pourraient donner lieu à confusion
avec d'autres marques enregistrées.
Art. i3. — Quiconque désirera obtenir la propriété d'une
marque de fabrique, de commerce ou d'industrie devra en faire
la demande auprès de la Secrétairie d'État du Département du
Fomento.
Art. 14. — La demande tendant à l'obtention d'une marque
devra être rédigée sur du papier timbré de la valeur correspon-
dante, et être accompagnée :
i^ De deux exemplaires de la marque ou signe distinctif dont
on veut faire usage ;
2^ D'une description, en duplicata, de la marque ou du signe,
s'il s'agit de figures ou d'emblèmes, description qui devra en
outre indiquer le genre d'objets auxquels ils sont destinés, et
dire s'ils seront appliqués aux produits d'une fabrique ou aux
objets d'un commerce ;
3* D'un reçu constatant le dépôt, à la Trésorerie nationale,
de la taxe établie par l'article 22, laquelle sera restituée si l'en-
registrement de la marque est refusé ;
4^ D'un pouvoir en forme, si l'intéressé ne se présente pas en
personne.
Art. 15. — Si la marque contient un contresigne, et si les
intéressés désirent en faire une mention secrète, ils pourront le
faire sous pli fermé et cacheté à la cire, que seul le juge com-
pétent pourra ouvrir en cas de litige ou de plainte criminelle.
Ce pli restera déposé au Bureau des marques.
Art. 16. — La date et l'heure du dépôt seront constatés au
bas de la demande, au moyen d*une mention signée et timbrée
par le sous-secrétaire compétent ; l'intéressé aura le droit d'exiger
qa^onlui délivre un reçu de la demande, avec mention de l'heure
à laquelle il Ta présentée.
Art. 17. — Le droit de préférence pour la propriété d'une
marque sera déterminé d'après le jour et l'heure où la demande
a été déposée au Bureau, et si \t» demandes coïncident quanta
l'heure, on prendra en considération, pour cet effet, la date du
mémorial (1)*
(i) Le mot mémorial peut désigner soit un mémoire, soit un livre
Journal.
. yw^S'-.'i '■ "■i.Piiï^^^^fR" *'!tm"AJ v
- 65-
Art. 23. — Les marques et leur description demeureront, au
Bureau, à la disposition de quiconque voudra en prendre con-
naissance, à Texception des contresignes secrets.
Art. 24. — Les fabriques des pays avec lesquels la République
possède des conventions en vigueur sur la matière pourront faire
enregistrer leurs marques ; à cet effet, les propriétaires desdites
marques se présenteront, par eux-mêmes ou par l'entremise d'ua
mandataire muni d'un pouvoir légal et d*une pièce constatant
i^enregistrement dç la marque dans Tautre pays ; ces deux docu-
ments devront être traduits, le cas échéant, et devront toujours
être légalisés.
Art. 25. — Celui qui a fait enregistrer sa marque en a la pro-
priété aussi longtemps que les tribunaux n'auront pas ordonné
la radiation de Tinscriptiou y relative. Il peut, en conséquence,
la transmettre ou accorder l'autorisation d'en faire usage, moyen-
nant un avis dans le journal officiel et l'enregistrement, au
Bureau des marques, de l'acte de transfert ou de Tautorisation
accordée.
Ceux qui ont omis ces formalités précédemment auront soin
de les accomplir pour régulariser leurs droits.
Art. 26. — Le nom du commerçant et celui de la raison sociale,
ainsi que celui de l'enseigne ou désignation d'une maison qui
fait le commerce d'articles déterminés, constituent une propriété
industrielle pour les efTets de la présente loi.
Art. 27. — Si un commerçant veut exercer une industrie déjà
exploitée par une autre personne portant le même nom ou ayant
la même désignation conventionnelle, il devra adopter une modi-
fication qui différencie visiblement ce nom ou cette désignation
de ceux employés par la maison préexistante.
Art. 28. — Les sociétés anonymes ont droit au nom qu'elles
portent, comme un particulier quelconque, et elles sont soumises
aux mêmes prescriptions.
Art. 29. — Le droit à l'usage exclusif du nom, comme pro-
priété industrielle, prendra fin en même temps que la maison
de commerce qui le porte, ou que l'exploitation de la branche
d'industrie pour laquelle on l'utilise.
Art. 30. — L'enregistrement du nom n'est pas nécessaire pour
Texercice des droits accordés parla présente loi, sauf dans le
cas où le nom ferait partie de la marque.
Art. 31. — L'enregistrement des marques est entendu accordé
sans aucune responsabilité du gouvernement ; les personnes qui
se croiraient lésées par un tiers n'ont que le droit de recourir
aux tribunaux pour intenter l'action civile ou criminelle cor-
respondante.
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- 67 —
Art. 35. — Pour quMl y ait délit, il n'est pas nécessaire que
la contrefaçon comprenne tous les objets qui devaient être mar-
qués ; Tapplication à un seul objet suffît.
Art. 36. — Les personnes qui auront vendu ou mis en vente
des marchandises munies d'une marque usurpée ou contrefaite
seront tenues de fournir, sur sa demande, au commerçant ou
fabricant qui en est le propriétaire, des renseignements com-
plets, par écrit, concernant le nom et l'adresse de celui qui leur
a vendu ou procuré ces marchandises et Tépoque où elles ont
commencé à les débiter ; en cas de résistance, elles pourront
être contraintes judiciairement à répondre, sous peine d'être
considérées comme complices du délinquant.
Art. 37. — Les marchandises munies d*une marque contre-
faite qui seront trouvées en possession du contrefacteur ou de ses
agents seront conOsquées et vendues, et leur produit sera versé
à la trésorerie des établissements de bienfaisance de la localité,
après payement des frais et indemnités établis par la présente
loi.
Art. 38. — Les marques contrefaites qui se trouveront en
possession du contrefacteur ou de ses agents seront rendues
inutilisables, de même que les instruments qui auront servi spé-
cialement pour la contrefaçon.
' Art. 39. — Afin que le Bureau des marques soit organisé
d^une manière sérieuse, les industriels, commerçants ou fabri-
cants, possesseurs d'une marque enregistrée dans la République,
devront s'adresser audit Bureau dans le délai de trois mois,
pour qu'on y prenne note de l'enregistrement de leur marque.
Art. 40. — Si, antérieurement à la promulgation de la pré-
sente loi, plusieurs industriels, commerçants ou fabricants ont
fait usage de la même marque, le droit à Tusage exclusif de cette
dernière appartiendra à celui qui pourra établir qu'il en a fait
un usage légitime avant les autres.
Si aucun des intéressés ne peut justifier de la priorité dans
l'usage de la marque, la propriété en sera attribuée à celui qui
possédera les éléments de production les plus importants.
Art. 41. — A défaut d'avoir fait enregistrer la marque dans
le délai iïxé à l'article 39, nul ne pourra se prévaloir de l'usage
qu'il en a fait avant la sanction de la présente loi, pour reven-
diquer le droit de priorité.
Art. 42. — Pour que les marques étrangères soient admises à
jouir des garanties accordées par la présente loi, elles devront
être enregistrées conformément aux traités respectifs.
Leurs propriétaires, ou les agents dûment autorisés de ces
derniers, sont les seuls qui puissent demander Tenregistrement.
Art. 43. — La Direction générale de la Statistique est chargée
— 69 —
La mise en inlerdU de leur localy ei la signiftcaéion faite
à des tiers par la même société qu'elle ne laissera exécuter
chez eux aucune œuvre de son répertoire, est un acte abusif
et gui ouvre une action en dommages-intérêts (1).
(C. de Paris, 12 mai 1899. » Fabre et Cie, Association des anciens
élèves de l'Ecole Turgot et Union des anciens élèves des Ecoles sapé-
Heures de commerce, c. Société des auteurs, compositeurs et éditeurs
de musique, Antreassian et autres.)
Le Tribunal civil de la Seine avait rendu, le 25 mai 1897,
le jugement suivant :
Le Tribunal, Attendu que Fabre et Gie sont propriétaires ou
principaux locataires d'un immeuble sis à Paris, 72, avenue des
Champs-Elysées et rue de Ponthieu, à usage de réunions, bals,
concerts et banquets ;
Que cette salle ayant été mise en interdit par la Société des
auteurs, compositeurs et éditeurs de musique Fabre et Cie ont
assigné cette société et lui réclament 100.000 francs à titre de
dommages-intérêts ;
Que, de leur côté, les président et membres du syndicat et
quarante-cinq membres de la société ont assigné :
4« Fabre et Cie ;
2<* Copeau et Hirsch, comme présidents de l'Association ami*
cale des anciens élèves de TEcole municipale Turgot ;
'S^ Siegfried, comme président de TUnion des anciens élèves
des Ecoles supérieures du commerce ;
Qu'ils prétendent qu'aux dates des P' et 8 février 1896, les dé-
fendeurs auraient organisé et dirigé des bals publics et auraient
exécuté iliicitement un grand nombre de leurs œuvres musicales
malgré la défense signifiée à Fabre et Cie : que ces faits consti-
tueraient, suivant eux, la violation de la propriété artistique et
musicale qui leur appartient et une infraction à l'article 3 de la
loi du 19 janvier 1791 et à l'article 428 du Code pénal ; qu'ils ré-
clament, en conséquence, des dommages-intérêts à fixer par état
et une provision de 420 francs ;
Qu'ils concluent subsidiairement à une enquête et à une ex-
pertise ;
Attendu que Copeau et Hirsch demandent purement et simple-
(1) La mise en interdit peut entraîner des difficultés très délicates.
Le Tribunal de la Seine a déclaré abusif pour la Société des auteurs de
mettre une salle en interdit et de signifier cette interdiction aux tiers.
Dans des circonstances différentes, il est vrai, la Cour d'Amiens a dé-
claré légitime une signification adressée par la même société aux di-
recteurs des sociétés invitées à an festival organisé par la ville d'Amiens
(Amiens, 13 mars 1893, ^nn., 93.92).
MitL.
— 71 —
leur avait signifié une défense expresse d*exécater ou laisser exé-r
enter en tout ou en partie et de quelque manière que ce soit, au*
cune des œuvres littéraires ou musicales composant son réper*
toire ;
Mais que Fabre n'étant ni directeur ni entrepreneur de spec-
tacles n'avait pas à tenir compte d'une défense de cette nature
qui ne pouvait s'adresser à lui en tant que propriétaire ; et qu'a-
près avoir avisé la société des réunions projetées, il n'avait qu'à
inviter ses locataires de leur côté à se mettre en règle avec la so-
ciété ;
Attendu que cette défense n'avait été signifiée à Fabre et Gie
qu*à raison de leur refus de souscrire un contrat d'abonnement
que la société prétendait leur imposer ;
Qu'elle ne s'en est pas tenue là et qu'à la date du 1*' février 1896
elle a signifié au président de l'Union des associations des anciens
élèves des Ecoles supérieures du commerce que la salle dite « Ga-
lerie des Champs-Elysées »,étant mise par la société en état d'in-
terdiction, il lui était fait la plus expresse défense d'exécuter,
faire ou laisser exécuter aucune des œuvres littéraires ou musi-
cales composant son répertoire dans ladite salle dite : « Galerie
des Champs-Elysées » ;
Attendu qu'une signification de cette nature est un acte mani-
festement abusif ; que si la Société des auteurs et compositeurs de
musique a le droit d'accorder ou de refuser à son gré l'autorisa-
tion d'exécuter les œuvres de son répertoire, bien qu'elle ait été
fondée dans le but de favoriser l'exécution de ces œuvres et de
faciliter la perception des droits d'auteurs, elle n'a pas le droit
cependant de mettre une salle en interdit et de signifier cette
interdiction aux tiers ;
Qu'une mesure semblable était de nature à causer à Fabre et
Cie un réel préjudice en éloignant la clientèle et en jetant la dé-
faveur sur leur immeuble ;
Que le tribunal a les éléments nécessaires pour évaluer le pré-
judice qui leur a été causé et pour fixer la réparation qui leur
est due ;
En ce qui concerne l'Association amicale des anciens élèves de
l'Ecole municipale Turgot ;
Attendu qu'il est justifié en fait et non contesté qu'à la date
du !•» février 4896, cette association a donné dans la v Galerie
des Champs-Elysées » un bal comme elle le fait chaque année.
et que divers morceaux de musique ont été exécutés;
Que parmi ces œuvres musicales, quatorze avaient pour auteurs
Mêlé et Soyer qui remplissaient à ce bal les fonctions de chef
et de sous-chef d'orchestre
Que Mêlé et Soyer qui figurent parmi les demandeurs nesau-
■...inijl .Jwm
- 73-
du répertoire de la Société des auteurs et compositeurs de musi-
que est dès à présent justiÛée, il n'est pas établi, quant à présent,
si le bal du 8 février 1896 avait un caractère public devant don-
ner lieu à la perception des droits ou s'il s'agissait d'une réu-
nion purement privée ; quMl y a lieu, dès lors, sur ce point, de
faire droit aux conclusions subsidiaires de la société demande-
resse et d'ordonner une enquête, tous droits et moyens des par-
ties d'ailleurs expressément réservés ;
Par ces motifs. Met Copeau et Hirsch purement et simplement
hors de cause;
Condamne la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de
musique à payer à Fabre et Cie, la somme de H. 000 francs à titre
de dommages-intérêts ;
Déclare Antreassiau et consorts non recevables, en tous cas
mal fondés dans toutes leurs demandes, fins et conclusions, tant
contre Fabre et Cie que contre Chédeville ès-qualités ;
Les en déboute ;
Déclare Chédeville ès-qualités mal fondé en sa demande re-
conventionnelle en dommages-intérêts ;
L'en déboute ;
Dit que la demande en garantie de Chédeville ès-qualités con-
tre Fabre et Cie se trouve sans objet ;
Et statuant avant faire droit en ce qui concerne Siegfried ès-
qualités ;
Autorise Antreassiau et consorts à prouver tant par titres que
par témoins en la forme ordinaire des enquêtes que le bal du
8 février i896,donné dans la « Galerie des Champs-Elysées »,avait
un caractère public ;
Commet M. Turcas pour procéder à l'enquête et à la contre-
enquête, s'il y a lieu ;
Dit qu'en cas d'empêchement du juge, il sera pourvu à son
remplacement par ordonnance de M. le président rendue sur
simple requête ;
Fait masse des dépens ;
Condamne dès à présent Antreassiau et consorts ainsi que les
présidents et membres du syndicat de la Société des auteurs et
compositeurs de musique aux trois quarts desdits dépens..
Sur appel, la Cour (!'« ch.), sous la présidence de M.Le-
F£BVRE DE ViEFviLLE sprès Bvcir entendu les plaidoiries de
M*^* DouMERG, Debagq elE. Crémieux, a rendu Tarrêt sui-
vant, à la date du 12 mai 1899 :
La Cour, Adoptant les motifs des premiers juges ;
Et considérant que le tribunal a ordonné une enquête sur le
" """ — I ■■ -■"«IP
— 74 —
savoir si le bal du 8 février 1896 avait ou non un carac-
ic, seule question présentant un intérSt au point de
solution du litige ; qu'il n'est point dénié que des mor-
musique dont les auteurs Tout partie de la Société des
^t compositeurs de musique aient ét£ exécutés au cou-
a soirée ;
tilité d'une enquête de ce cbef n'est point démontrée ;
'.% HOTiFs, Confirme dans toutes ses parties le jugement
appel ;
e les parties de toutes autres conclusions principales et
:6S ;
nne Antreassiau et consorts en tous les dépens d'appel
i ceux de l'appel éventuel devenu sans objet et rendu
e par l'appel principal.
Art. 4169.
■ mualeale*. — Bnireprenenede «pcctaeles.
eatlon llllelte. — Balle de eaneerta. — C«fffr.
- ComplIcKé .
tt élre considéré ni comme auteur ni comme corn-
délit d' exécution rmtsicale illicite, le cafetier qui
atuitement une de ses salles à un musicien et reste
enl étranger à l'organisation du bal installé chez
participer au cboixdes morceaux exécutés, et tara
même prévoir ceux qui seraient exécutés illicile-
n, Attendu que Fougeron est poursuivi pour avoir fait
publiquemeut, au cours d'un bal donné dans son éta-
it, trois morceaux de musique : Lototle, polka de Bois-
lâleau d'If, quadrille de Bléger, PizMata, polka do
ins avoir préalablement obtenu le consentement des
:e qui constituerait le délit prévu par l'article 4S8 du
al ;
1 que le sieur Blin, employé chez Pavillon, représentant
"ipi' ' i" I ■ ''ST^nmf'fnm^^
— 75 -
de la Société des auteurs, a déclaré devant les premiers juges
avoir noté le 11 mai 1899, au cours du balinstallé parles musi-'
ciens Maloiseau et Roufland, dans une salie appartenant à Fou-
geron, trois morceaux de musique qu'un de ses amis, auquel les
airs ont été fredonnés,lui a dit être Estelle, le Château (TlfeiPiZ'
zicata ; mais que la Cour n'a pas sur le savoir musical de cet agent
d'assurances des renseignements lui permettant d'ajouter une
foi absolue à sa déposition ; que celle-ci est contredite par celle
du musicien, affirmant n'a voir joué que des morceaux du réper-
toire Dupeyrat ; que Blin et son ami ont pu commettre une er-
reur en confondant entr'eux des airs présentant une certaine
analogie ;
Attendu qu'une expertise ordonnée aujourd'hui ne pourrait,
à raison du temps écoulé depuis le fait incriminé» donner des ré-
sultats utiles ;
Attendu qu'à supposer même, ce qui n'est nullement établi,
que les œuvres musicales susvisées aient été exécutées le 11 mai
1899, la décision des premiers juges devrait encore être mainte-
nue ;
Que Fougeron, tonnelier et cafetier^ a prêté à des musiciens
ce jour là, ce qu'il fait deux ou trois fois l'an, une salle qui n'a
aucune communication avec le café, sans exiger aucune rétribu-
tion et sans augmenter le prix des consommations : qu'il est
resté étranger à l'organisation du bal installé chez lui et que
c'est avec raison que dans ces circonstances le tribunal a décidé
qu'il ne pouvait être considéré comme un directeur ou un entre-
preneur de bals publics, au sens de l'article 428 du Gode pénal, et
par suite comme étant l'auteur principal de l'infraction préten-
due;
Attendu qu'on ne saurait voir non plus en lui le complice d'un
acte dont Maloizeau et Roufland seraient les auteurs principaux ;
Que la complicité est punissable, il est vrai^ alors même que
celui à qui elleest reprochée n'a tiré aucun profit personnel
de son concours, mais qu'aux termes de l'article 60 du Gode pé-
nal n'est considéré comme complice que celui qui a fourni avec
connaissance le moyen devant servir à l'action ;
Que si Fougeron connaissait par les démarches faites auprès de
lui la prétention de la société demanderesse d'exiger la percep-
tion des droits qui pouvaient lui être dus, il n'a pas participé au
choix des morceaux joués le 11 mai, dans une salle de son éta-
blissement ; qu'il n'a ni pr évuni pu prévoir que, parmi ces œu-
vres musicales, il s'en trouverait trois que ces messieurs exécu-
teraient, au mépris des droits que protège l'article 428 du Gode
pénal.
Acquitte Denys, directeur du « Jardin Artistique », et le ren-
e sans dépens ;
'ondamne LeRls et Leroy aux dépens.
Sur appel de M. Jules Barbier et autres, est intervenu
rrèt suivant rendu par la Cour de Douai, le SJuiUet 1899,
113 la présidence de M. Vallir.
ji CouH, Attendu que Denys, locataire de l'immeuble, sis k
le, 63, rue du Long-Pont et dans lequel il a organisé un
é et une salie de concert contiguë, ne fait preuve ni offre de
iuves que, par bail écrit ou verbal, il ait fait, à Lellls et Le-
r, la cession d'aucun de ses droits sur ladite salle ;
}n'élant demeuré locataire de la salle, il l'a mise à la dispo-
ion du Cercle dramatique fivois et du Groupe Wodson ; qu'il a
isi fourni le moyen de donner, les 22 et 89 janvier 1899, les
icerts publics, dans lesquels ont été exécutés les morceaui
;riminé3 ;
iju'en outre, il est constant que, plusieurs jours a*ant les
acerts, il avait été expressément infité par la Société des an-
1rs et compositeurs de musique k ne pas tolérer que de pareil-
exécutions musicales fussent données cbez lui, sans autori-
jon préalable ; que c'est donc sciemment que Denys a enfreint
te prohibition ; que dans ces circonstances en tolérant que sa
le fut ainsi utilisée par LeBls et Leroy, il s'est rendu complice
ta contravention commise par ceux-ci ;
ïtc.....
Plaidants : M' Douubrg, du barreau de Paris, et Bataille,
barreau de Lille, avocats. — Min. publ. : M- Scbolbr-
Obskhvations. — Au sujet de la responsabilité (pénale
civile) du propriétaire du local où a lieu une exécution
isicale illicite, il faut, dans chaque espèce, résener
ppréciation des circonstances, qui peuvent être infini-
int variables.
Il convient cependant de noter des divergences réelles
ns les trois décisions que nous publions : la Cour de
ris et celle d'Orléans exigent la preuve formelle d'un
t de complicité intentionnelle à la charge du propriétaire
local, pour le déclarer responsable des indemnités
ilamées. tandis que la Cour de Douai le condamne,
ime pénalement, par ce seul motif qu'il a fourni le local
que la Société des auleurs l'avait anlérîeurement invite
Pour écMpper à celte conséquence on a généralement
essayé d'atteindre les cafetiers et les autres personnes vi-
mnie auteurs principaus du délit et en tant qu'en-
iurs de spectacles. En effet, l'article 426 du Code
it ainsi conçu : • tout directeur, tout entrepreneur
tacles... qui aura fait représenter sur son théâtre
•âges dramatiques au mépris des lois et règlements
à la propriété des auteurs sera puni... ■
ciété des auteurs a fait plaider qu'il s'agissait là
)rle de contravention; que les inculpés sont pu-
is dès que la propriété des auteurs est violée, sans
il à se préoccuper du plus ou moins de bonne foi
ipables. Cette thèse est inadmissible en principe
iUet, Propriété IW. et art., n" 803).
vrai néanmoins que, lorsqu'un plaignant établit
latériel de la violation de ses droits, on n'exige de
aucune autre preuve à l'encontre de l'auteur prin-
u délit ; cet auteur est réputé conscient et respon-
on ne présume pas sa bonne foi (V. Pouiilet, Propr.
479) tandis que la bonne foi du complice est pré-
3U, en tout cas, beaucoup plus facilement admise.
par conséquent un intérêt manifeste a rechercher
ropriétaire de salle pour réunions, un cafetier, un
ir de société de courses, etc.. est auteur principal
plice du délit d'exécution musicale illicite et, pour
se demander s'il est entrepreneur de spectacles
sens de 1 article 428 du Code pénal,
lu'il s'agisse d'un texte pénal, el par suite d'inter-
m étroite, l'expression entrepreneurs de speelacles
conipréhensive.
our de cassation, par un arrêt du 22 janvier 1869
1869, p. 408), a déclaré que ces mots « nedoivent
e limités aux industriels qui font de l'exploitation
intreprise théâtrale leur profession spéciale, mais
'appliquent également à tous ceux qui, accidentel-
ou d'une manière plus ou moins permanente, en-
inent de faire jouir le public de la vue ou de l'audi-
euvres dramatiques ou musicales >. Le cafetier qui
une troupe d'artistes ambulants, installe donc cliei
î entreprise de spectacles,
est-il le véritable entrepreneur,c'est-à-dire l'auteur
— 89 —
ison.pour la Suisse, les décisions suivantes, indiquées
le remarquable rapport présenté en 1898 à la Société
se des juristes, par M. Pliilippe Dunant, avocat à Ge-
1(1):
Il y a faute grave entraînant responsabililé pénale de
irt du cantinier qui, averti par la Société des auteurs
le avait des droits â prétendre sur rexécution des
«aux joués dans son établissement, s'est borné à don-
;onnaissance des prétenlions de la société au comité
nanisation de la fête et qui, sur le vu des assurances
lées par ce dernier, n'a plus rien fait pour empêcher
cution des œuvres interdites (Trib, fédéral, 12 juin
, aff. Huhn, Droit d'aut., 1896. p. 159); 2- dans le
le sens, chambre de police de la Cour d'appel et de
ation du canton de Berne, 18 avril 1896, aflf. Gesell-
rtshaus Muséum de Berne, Droit d'auteur, 1897, p.
ions. 2) ; 3' de même, Cour d'appel et de Cassa-
du canton de Berne, 26 mai 1894, Soc. des auteurs
der, Droit d'aut., 1898, p. 20 ; 4= Trib. de Genève,
i 1898, Cour dejuslice, 30 novembre 189S,/>roi7rf"ati/.,
p. 44; 5° jugé plus récemment encore que le ca-
' qui consent à l'exécution dans son établissement
vres musicales, en vue de l'achalander, annonce ou
i annoncer ces concerts au public par la voie des jour-
, agil dans un but de lucre et, averti par la Société
tuteurs, compositeurs et éditeurs de musique qu'elle
id faire respecter les droits de ses sociétaires, il en-
une responsabilité pénale pour les œuvres musica-
Lécutées sans le consentement del'auleur (Trib. pol.
inne, 21 juillet 1899, Torleschi, le Droit d'auteur,\90\ .
I.— Contra : (action pénale rejelée pour absence d'in-
)n dolosive, tous droits réservés au civil) Tribunal
de Bâie, U décembre \891, Droit d'aut., 1898, p.
pourra consulter encore pour la Suisse une brochure,
ée à Berne, imprimerie Bilchler et Cie, 1899 (29 pa-
n-12) et contenant un rapport des experts et les ar-
lu Tribunal cantonal du canton d'Argovie, du 16 fé-
« npport, dans t»
T^
-83 -
vrier 1899 et du Tribunal fédéral, du SO juin 1899 (Société
des auteurs c. Société du casino de Baden et Moller (1).
Les premiers juges avaient condamné pénalement pour
faute grave, conformément au texte de l'article 13 de la
loi fédérale suisse sur le droit d'auteur, les membres de la
Société du casino de Baden, à raison des exécutions illici-
tes dirigées par le chef d'orcheslre du casino. Le Tribunal
fédéral n*a pas eu à se prononcer sur le recours contre
l'action pénale (recours qui n'a pas été déclaré receva-
ble dans l'espèce), mais il a maintenu les condamnations
civiles.
Au point de vue spécial delà Belgique, il y a lieu de
consulter la brochure intitulée « Le droit des auteurs en
Belgique. — Des exécutions musicales illicites, — Recueil
des principales décisions sur la matière, réunies et coor-
données par Paul Wauwermans, avocat à la Cour d'appel
de Bruxelles, vice-président de l'Association artistique et
littéraire internationale, Bruxelles, Société belge de librai-
rie, 1897, in-8», 76 p. ». On a condamné pénalement, sans
admettre la bonne foi, le directeur de théâtre qui orga-
nise des bals où l'orchestre joue illicilement certains mor-
ceaux (Cour d'appel de Bruxelles, 8 nov. 1890), — un di-
recteur de cercle musical, qui avait du reste contesté le
droit de l'auteur de la musique (Trib. de Mons, 8 fév.
1893), — un directeur de cirque qui avait refusé antérieu-
rement de payer aux auteurs des redevances qu'il jugeait
exagérées (Cour de Bruxelles, l«'mai 1896, Wauwermans,
op, cit., p. 48 à 52). D'autres décisions, applicables aux
cafetiers et propriétaires de salles, ont admis leur respon-
sabilité civile [Wilbid, diverses décisions de justices de
paix, p. 20 et suiv.). Jugé qu'il y a faute grave, entraînant
la responsabilité pénale de son auteur, de la part d*un
cafetier possesseur d'une salle de danse qui, averti à plU'
sieurs reprises par la Société des auteurs, compositeurs
et éditeurs de musique qu'elle entendait voir respecter
les droits de ses sociétaires, a passé outre à cette défense
et a continué à faire exécuter les œuvres interdites (Cass.
belge, 16 déc. 1895, Droit d*auleur, 1896, p. 28).
(1) L'arrêt da trib. féd. a été également publié dans le Droit (Vauteuv^
1899, p. lae.
— 84 —
Enfin nolons, pour terminer celle revue étrangère for-
cément incomplète, les décisions suivantes, en Allemagne :
— Un directeur de théâtre est responsable des exécutions
illicites de son orchestre ; mais un aubergiste, qui fait
venir une musique militaire et n'exige du public qu'un
supplément léger de prix quand les concerts ont lieu à
couvert, n'est pas responsable du choix des morceaux
(Cour supérieure de Colmar, 2 décisions citées ; Gew.R.^
l 1897, n. 2, p. 66). — L'hôtelier qui engage une musique
I militaire pour des concerts dans son restaurant n'est pas
responsable de l'exécution illicite de certaines œuvres si
le choix des morceaux était abandonné au chef de musi-
que (Trib. imp., 2* ch. civ., 10 juillet 1896, le Droit d'au-
leur, 1897.31).
Albert Vaunois.
V
Art. 4171.
CBavre« manicalos. — Exéeution illicite. —Entre-
preneur de speetneles.— Cafetier.— Instrument de
musique dit c Automate y. — Publicité.
Le cafetier qui installe chez lui dans sa salle publique
et à la disposition des clients un instrument de musique
dit « l* Automate t, dont les sons peuvent être normalement
perçus par plusieurs personnes placées autour de Vinslru-
ment, est un entrepreneur de spectacles (1).
H est responsable pénalemenl de Inexécution musicale
illicite faite au moyen de cet instrument alors même qu'il
n'en serait pas propriétaire, que la mise en marche serait
provoquée par une des personnes composant le public et
qu'il ne profiterait pas de V argent versé pour chaque audi-
tion (2).
(C. de Lyon, 14nov. 190). — Gillet et autres c. Vve Dechavanne.)
(1) Y. Tobservation pi as haut, p. 78. Crr. les arrêts de Paris, Doaai,
Orléans qui précèdent, sur la définition de l'entrepreneur de specta^
clés.
(*2) Le fait que le propriétaire du local ne tirerait aucun profit de Taa-
dition illicite est absolument indifférent (V. Pouillet, Propr, litL,
n* 810).
La question de publicité est une question de fait, qui a été tranchée
souverainement. (Cfr. Pouillet, ibid,, n*« 807 à 812, sur les caractères
— 86 —
être entendus qu'à une courte distance, surtout dans un café au
milieu du bruit des consommateurs et des conversations ;
Que d'ailleurs chaque personne qui met dix centimes dans
l'appareil se procure une audition toute personnelle et particu-
lière des morceaux de musique sans vouloir en aucune façon en
faire bénéficier le public ;
Par CBS motifs, Le tribunal jugeant correctionnellement et en
premier ressort;
Déboute les demandeurs de leur demande ;
En conséquence, relaxe Mme veuve Dechavanne des Uns de la
poursuite sans peine ni dépens ;
Condamne les demandeurs aux dépens.
Sur appel des compositeurs, la Cour de Lyon, sous la
présidence de M. Tallon, a rendu Tarrèt suivant à la date
du 14 novembre 1900 sur les plaidoiries de M* Doumbrc,
du barreau de Paris, pour les appelants et de M® Rivière,
du barreau de Lyon, pour la veuve Dechavanne :
La Cour, Considérant que Gillet, les héritiers Gounod, Lecocq,
Guéteville et Mascagni articulent en fait que la dame Decha-
vanne a fait exécuter, le 2 janvier 1900 notamment, dans son
café dit des Deux-Mondes, à Saint-Etienne, par un instrument
de musique dit V Automate, les morceaux suivants qui sont leur
propriété :
o Adèle t'es belle », Guéteville ;
c( La fille de Mme Angot », Lecocq ;
« Loin du bal », Gillet ;
c< Pausi », Gounod ;
« Cavalleria Rusticana », Mascagni ;
Considérant que, sans contester dans ses déclarations faites à
Taudience de la Cour l'exactitude de ces allégations, la dame
Dechavanne s'est bornée à soutenir avec le jugement dont est
appel :
jo Que les sons de V Automate sont assez faibles pour ne pou-
vo iiélreperçus dans un café qu'à une courte distance, et ne
peuvent constituer une exécution publique d'un morceau de
musique ;
2o Que cet instrument de musique est mis en mouvement par
la dame Dechavanne, dans le but d'offrir l'audition à tous ceux
qui fréquentent son établissement, mais par le versement d'une
somme de dix centimes, opéré par un consommateur agissant
dans son intérêt personnel et privé ;
Sur le premier moyen :
Considérant que VAutomate n'est point un instrument construit
•V
— 87 —
de telle sorte que les sons n'en puissent être entendus que par
une seule personne à la fois, placée dans des conditions parti-
culières et nécessaires pour les percevoir ;
Que ces sons se répandent autour de Tappareil et sont de
nature à être entendus par toutes les personnes qui Tentourent ;
Considérant que cette qualité suffit, lorsque cet instrument
est placé dans un lieu public, comme un café, pour constituera
ce point de vue la publicité de ses auditions ;
Qu'il importe peu que la perception des sons puisse être gênée
parles conversations particulières et le bruit qui se fait parfois
dans un café ;
Considérant que, s*il en était autrement, il faudrait ranger
dans la même catégorie tous les instruments dont Les sons,
comme ceux du piano ou du violon, peuvent être plus ou moins
absorbés et confondus dans les bruits qui se font dans une salle
ouverte à un public non astreint au silence ;
Qu'il faudrait alors réserver le caractère de publicité aux exé-
cutions faites par des instruments dont le fracas serait capable
de couvrir tous les autres bruits ;
Considérant qu'une telle condition n'est nullement nécessaire
et qu'il suffit, pour constituer le caractère d'exécution publique,
que les sons de l'instrument placé dans un lieu public puissent
normalement, comme cela se produit pour un Automate, être
perçus avec netteté suffisante par les personnes placées autour
de lui ;
Sur le second moyen :
Considérant que V Automate de la dame Dechavanne a été placé
par elle dans la salle de café à la disposition du public qui fré-
quente son établissement et pour la récréation de ce public ;
Considérant, dès lors, qu'il importe peu que sa mise en jeu
nécessite l'intervention d'une des personnes composant ce public,
et le versement d'une somme de dix centimes par celle-ci puis-
que l'audition qui en résulte est publique par suite du lieu même
où la dame Dechavanne a installé l'instrument ;
Considérant qu'elle allègue vainement que cet instrument ne
lui appartient pas et que ce n'est pas elle qui profite des 10 cen-
times versés pour chaque audition ;
Considérant en effet qu'en tenant ces allégations pour exac-
tes, il n'en reste pas moins établi que VAutomate a été installé
par elle dans la salle de café qu'elle exploite pour la récréation
de sa clientèle ;
Considérant qu'elle doit être dès lors considérée comme un
entrepreneur de spectacles publics dans le sens de l'article 428
du Code pénal ;
Considérant que ces faits prévus et réprimés par les articles 3
la loi du ISjativier 1791 et 428 du Code pénal ont causé aux
pelants uu préjudice dont il leur est dû réparation et que la
>ur a les éléments suHIsants pour évaluer ce préjudice ;
Par cesmotiks, Après en avoir délibéré ;
Réformatitle jugement du Tribunal de Saint- Etienne du 9 jail-
t 1900;
Condamne lesdits appelants aux frais envers l'Etat, sauf leur
cours contre la veuve Decba vanne qu'elle supportera tant en
eraiëre instance qu'en appel ;
Condamne la dame Decbavanne aux frais avancés par les par-
is civiles tant en première instance qa'en appel ;
Fixe à l'égard de la dame Decba vu noe, la durée de la contrainte
ir corps au minimum légal.
Art. 4172.
En^pea mnalcale*. — Exécntloii illicite. — 8*l«le
de* pecettea. — l^ktelété de« nuteHr* et «oibikmkI-
(etips «tramatlqneB. — Action «n Jii«tloe.
La Société des auteurs el compositeurs dramatiques n'etl
2sun simple agent d'à/faire! ou mandataire, chargé de
lire respecter les droits des auteurs et compositeurs et de
ercevoir leurs receltes ; elle peut passer avec les tiers des
■ailés valables, et les membres de la commission de la so-
'élê ont le droit d'ester en justice pour faire exécuter ces
■aités, dans lesquels ils ont d'ailleurs un intérêt person-
,1(1).
Les membres de la commission de la société en désaccord
>ec un théâtre sur le montant des droits à percevoir^ ne
|1] Sur le droit d'agir en Justice de la Société des tuteur* et compo-
leurs dramaliques, M. Pouillet distingue deui ordres de tiits : j'ceni
i la sociale, élre moral, est directement intéressée el pour lesquels
le peut agir ; j° ceux qui intéressent les auteurs dont elle est le man-
ilaire, et pour lesquels elle ne peut se substituer à eux. V. Pouillet,
;*ii|ii'. tiu. et arrêts cités, n<» 82», 829. Adde : note dans les Ânti., 98.
), sous Trib. Honlluçon, 7 février 139G (décision relalire à la Société
s gens de lellres) : - Trib. Seine, 10 déc. 1890, Droit a'auleur, 1891,
tt (inleriention de la Sociélé des artistes français dans une alT.
ofTbauer). — V. sur la jurisprudence en Belgique, Droit d'oui., 1895,
76. — Voir également l'opinion de M . Darras crilïquaul le droit d'aciton
I la Sociélé des uuteuis et composlleuri d ramatiques, et les renvois de
jctrine, Dmit d'aiileuy, 1895, p. 9ti.
Une question de même ordre se présente pour U plupart des syndi-
Is ; Cf. jurisprudence citée. Vaunois, Deia. et mod., n' SU.
■ ■!■ I !.■ ■■ IRi.
— 89 -
peuvent^ en vertu d'une ordonnance du président du tribu-'
nal civil, faire saisir les recettes de ce théâtre ; cette saisie
n'est, dans ces circonstances, permise ni en vertu de la loi
des ii-iQ janvier 1791, ni des articles 4S8 etiid du Code
pénal ni d'aucun autre texte de la loi (1).
(1) Pour qu'il y ait saisie des recettes d'un théâtre en vertu des arti-
cles 425 et suivants du Code pénal, la première condition est qu'il
s'agisse d'une représentation illicite. Les juges déclarent dans notre es-
pèce que cette condition n'était pas remplie. L'un des trois auteurs
avait donné son autorisation ; mais, à moins que cet auteur ne fût le
mandataire de ses deux collaborateurs, le motif donné à cet égard par
le jugement nous parait inopérant. Une représentation est délictueuse
du moment qu'elle est donnée contre la volonté d'un seul des auteurs
de la pièce. Cfr. Pouillet, n»» 493-494.
Reste l'antre motif donné par le jugement : la représentation n'était
pas illicite, ayant été précédée d'un traité passé avec la Société des au-
teurs ; les parties étaient seulement en désaccord sur le montant des
redevances à payer.
On est alors amené à se poser cette question : l'inexécution partielle
ou le désaccord sur l'interprétation du traité passé entre l'auteur et le
cessionnaire suffit-il pour constituer à la charge du cessionnaire déclaré
en faute un fait de contrefaçon ? C'est là un problème sur lequel la ju-
risprudence n'est pas absolument fixée. V. Pouillet, n^^ 499 et 500. — Si
Ton estimait que la violation du contrat est une contrefaçon, il aurait
pu être question de saisir les recettes et de poursuivre ensuite pénale-
ment.
Le tribunal n'a pas abordé cette discussion parce qu'il a pensé que
les défendeurs étaient de bonne foi, — décision souveraine — que la
bonne foi était exclusive du délit, — solution presque universellement
admise, —et que /a sainte n'est permise qu'en cas de délit. Tel est au
moins le sens qu'on peut attribuer a cette partie du jugement.
La Cour de cassation, dans une hypothèse voisine de celle qui nous
occupe, déclare que la confiscation, visée par l'article 427, est une peine
et ne peut être prononcée qu'en cas de condamnation correctionnelle
(Cass., 29 déc. 1882, Ann., 84.359 et 23 juin 1893, D. P. 93.1.616). Il y
a pourtant controverse sur ce point en doctrine et dans les Cours
d'appel.
Mais il faut distinguer la confiscation (art. 427), prononcée en vertu
d'un jugement, et la saisie, préalable aux poursuites (art. 429), dont il
s'agissait dans TafTaire Paulus-Habans.
Le droit que s'attribuent les auteurs, de commencer par faire saisir
les objets argués de contrefaçon ou les recettes des représentations il-
licites et de n'exercer ensuite leurs poursuites qu'au civil sans deman-
der aucune condamnation correctionnelle, ce droit était considéré gé-
néralement, en principe, comme pouvant toujours s'exercer (sauf à voir
par quel moyen, ce que nous allons examiner). L'article 429 du Gode
pénal suppose en effet la saisie préalable quand il fixe comment la
condamnation sera réglée « s'il n'y :\ pas eu saisie » ■
Le jugement Paulus-Habans tendrait à faire admettre que cette saisie
doit être déclarée nulle quand elle n'aboutit pas A une condamnation
pénale. C'est li une solution que nous croyons neuve et qui en tout
cas soulève d'autres problèmes.
Il fiiut écarter ici les souvenirs de la loi de 1844 sur les brevets d1n-
— 90 —
(Trib. civ. de la Seine, 15 janvier 18%. -^ Société des auteurs et com-
positeurs dramatiques c. Paulus Habans et Gie.)
Ainsi jugé par le Tribunal civil de la Seine (1" chambre)
sous la présidence de M. Planteau :
vention et ne trancher la difficulté qu'avec les textes spéciaux à notre
matière.
Pour les imprimés, l'article 3 de la loi des 19-24 juillet 1793 et le
décret du 25 prairial an III ne paraissent subordonner le droit de saisie
des auteurs à aucun jugement, soit préalable, soit même postérieur,
et à aucune poursuite ni pénale, ni civile.
Ce n'est donc qu'en matière de représentation théâtrale et pour la
saisie des recettes que la question se pose.
L'article 428 du Code pénal — si l'on est partisan de la thèse consacrée
par la Cour de cassation, — prévoit bien une confiscation consécutive à
un jugement correctionnel ; mais cet article et même Tarticle 429 sont
absolument muets sur la façon d^effectner une saisie préalable aux pour-
suites.
La loi de 1793 est étrangère au droit de représentation des écrivains
dramatiques. On ne peut l'invoquer pour saisir des recettes (Trib. Seine,
3 avril 1878, cité ci-après. Y. pourtant, en sens contraire, Pouillet,
Propr. lut,, n» 832 et Trib. Seine, 6déc. 1876, cité ci-après).
La loi du 13 janvier 1791 (qui est rappelée dans la loi du 8 avril 1854
et la loi du 19 juillet 1791 (modifiée le 30 août 1792, puis remise en vi-
gueur le 1*' septembre 1793) n'ont pas été abrogées expressément ; ces
deux lois consacrent le droit exclusif de représentation pour les auteurs
dramatiques « sous peine de confiscation du produit total des représen-
tations au profit des auteurs ». Il semble bien qu'il s'agisse là d'une
peine, qui ne pourrait être prononcée que par les tribunaux. C'est la
première rédaction de ce qui est devenu l'article 428 du Code pénal ; on
n'y donne en tout cas aucun pouvoir de réquisition directe aux auteurs,
aucune mission d'exécution aux officiers de paix ou commissaires de
police.
Je ne connais pas d'autre loi spéciale à laquelle on puisse recourir.
Nous ne trouvons donc nulle part, en matière dramatique, l'organisa-
tion du droit de saisie des recettes, préalablement aux poursuites (1).
On comprendrait du reste que la loi de 1793 ait permis d'empêcher
la circulation d'un objet contrefait, qui porte atteinte peut-être à la ré-
putation de l'auteur, mais que l'écrivain dramatique ne soit pas pro-
tégé de même. Théoriquement, à propos des représentations théâtrales,
la contrefaçon a un autre caractère ; elle est orale et immatérielle ; elle
ne donne pas facilement matière à saisie ; l'argent des recettes ne porte
pas atteinte à la réputation de l'auteur ; il n'est pas délictueux par sa
nature ; sa possession par le délinquant est seulement vicieuse ; mais il
en est ainsi de tous les bénéfices produi ts par un délit quelconque, par
l'abus de confiance, par exemple ; le plaignant n'est pas, pour cela, au-
torisé à faire saisir, avant toute poursuite, l'argent qu'il réclame, à
moins d'un texte exorbitant du droit commun.
L'article 429 du Code pénal peut être ce texte, mais il est certaine-
ment incomplet et difficile à appliquer.
La Société des auteurs dramatiques essaie généralement d'obtenir la
saisie préalable des recettes par ministère d'huissier et en vertu d'une
(i) Cf. sur oelta question, et en sens divera : Trib. Seine, 6 décembre 1876 ; Trib»
Seine, 3 avrU ld78, et observaUons de M. P. M. S. L., Aii»., 99, p. 129, 233, 236.
I^^PW. ■Hffi.^UPW
— 91 —
Lb Tribunal» Attendu que» par acte sous signatures privées,
en date du 4 octobre 1892, enregistré, Roger et Peilerin, agents
généraux de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques,
ont concédé à Paulus Habans et Gie la faculté de se servir du
répertoire de ladite Société moyennant un droit proportionnel
à prélever sur les recettes brutes des réprésentations ;
Attendu qu'aux termes de Tarticle premier de ce traité le droit
proportionnel est fixé à 5 0/0 lorsque la pièce est jouée en deux
actes, et à 2 0/0 quand Touvrage est en un acte ; que cet article
se termine par une clause manuscrite ainsi conçue : « En ce qui
concerne les pièces en plusieurs tableaux, il est entendu que les
tableaux séparés par le baisser du rideau, ceux pour lesquels le
décor aura été changé, ou enfin ceux dont la durée excédera
quarante minutes, seront comptés chacun comme un acte,etque
les droits seront perçus d'après le tarif ci-dessus comme s'il s'a-
gissait d'actes proprement dits »;
ordonnance du président da tribunal civil, rendue sur requête.
Le jugement Paalus-Habans écarte ce moyen, au moins en matière
civile.
Le tribunal de la Seine avait précédemment admis le contraire dans
un jugement du 3 avril 1878, Oller, A/in., 92. 229. Y. Observations,
ibid.f p. 296, en faveur de la validité de cette procédure. On se fonde,
en ce cas sur l'interprétation de l'article 54 du décret du 80 mars 1808,
relatif aux pouvoirs du président concernant les mesures d'urgence.
L'interprétation en est cependant sujette à controverse. Les uns sou-
tiennent que le président peut statuer, sur requête, dans tous les cas
possibles qui présentent un caractère d'urgence exceptionnelle, — mais
à condition de réserver aux parties lésées la faculté de lui en référer en
cas de difficulté. Les autres refusent au président le droit de statuer en
dehors des cas formellement prévus par la loi et des cas analogues où
la mesure réclamée ne constitue pas une véritable demande et n'appelle
pas de contradiction (V. Dalioz, C. proc, annoté, sur l'appendice à la
1"» partie, liv. V, titre XVI, G. proc.j.
La question serait alors de savoir si l'article 429 du Code pénal pose
précisément le principe que le président serait chargé d'appliquer en
vertu de son pouvoir d'administration. Mais si le droit de saisie ne dérive
que de l'article 429 du Code pénal, ne serait-ii pas en effet limité aux pro-
cédures correctionnelles ? — On voit en somme que cette question de la
saisie préalable des recettes ne va pas sans difficulté.
Outre les décisions citées dans le cours de cette note, on pourra con-
sulter l'arrêt de cassation du 6 janvier 1893, reproduit ci-après. Cette
fois, la Cour de cassation a refusé de prononcer la confiscation des recettes
après un jugement, par ce motif que le plaignant n'avait pas fait procéder
à la saisie préalable. Elle admet donc cette saisie, il est vrai qu'il s'a-
gissait de poursuites correctionnelles ; mais elle omet de dire quels
sont les textes qui la légitiment et quelle procédure on doit employer.
De façon que les décisions de la jurisprudence aboutissent actuelle-
ment au chaos. Aucun texte clair et formel n'organise la saisie préalable ;
quelque procédure qu'emploie le plaignant pour y arriver, on en dis-
cute la validité : et quand il n'a pas opéré cette saisie, si contestable, la
Cour de cassation lui refaite la confiscation ! A. V.
— 92 —
Attendu que, pendant la saison théâtrale de 4892-1893, la So-
ciété Paulus Habans et Gie a fait représenter au Café-Concert
Ba-Ta-Clan une pièce dudit répertoire désignée sur les pro-
grammes et affiches sous le titre : Paulussonneries de fannée,
revue en deux parties, de MM. Nu mes et Garnier, musique de
M. Gall;
Attendu que cette pièce était en deux tableaux séparés par un
baisser de rideau, pendant lequel Tacteur Paulus, placé sur la
scène entre la rampe et le rideau, jouait un intermède avec trois
autres acteurs disséminés dans la salle ; que malgré cet inter-
mède la séparation des deux tableaux par le baisser de rideau
était complète, et que par suite, d'après la clause ci-dessus visée,
chacun de ces tableaux devait être considéré comme un acte
pour la perception du droit proportionnel ; que, du reste, il ré-
sulte du procès-verbal dressé par l'huissier Vigneron, le 14 jan-
vier 1893, que le deuxième tableau durait plus de quarante mi-
nutes ;
Attendu, en conséquence, que le droit proportionnel à préle-
ver, au profit de la Société des auteurs et compositeurs dramati-
ques à Foccasion des représentations des Paulussonneries de Can-
née était de 5 0/0 de la recette brute ;
Attendu que, la Société Paulus Habans et Cie ayant refusé de
payer sur cette base les droits d'auteur afférents à cette pièce, le
président et les membres de la commission de la Société des
auteurs et compositeurs dramatiques lui firent sommation, sui-
vant acte dudit Vigneron, en date du 16 janvier 1893, d'avoir à
payer les sommes dont elle était débitrice, mais que cette som-
mation resta infructueuse ;
Que le lendemain, 17 janvier, Paulus Habans et Cie firent
offrir réellement à ces mêmes personnes, suivant acte de Noël,
huissier près le Tribunal de la Seine, la somme de 599 fr. 75,
représentent le droit proportionnel de 2 0/0 sur le chiffre des re-
cettes effectuées du 16 au 31 décembre 1892 ; que le président el
les membres de ladite commission refusèrent ces offres, et ob-
tinrent du président de ce siège deux ordonnances, datées des 19
et 26 du même mois, les autorisant à saisir les recettes du concert
Ba-ta-clan ; qu'en exécution de ces ordonnances les recettes des
20, 24, 26 et 28 janvier furent saisies jusqu'à concurrence des
sommes évaluées par le président ; que le total de ces sommes,
s'élevant à 3,150 francs, fut déposé à la Caisse des dépôts et
consignations, le 1*' février suivant ;
Attendu que c'est dans cet état du litige que, le 4 du même
mois, le président et les membres de la commission de la Société
des auteurs et compositeurs dramatiques, agissant poursuites et
diligences de Aoger et Pellerin, agents généraux, ont assigné
minmff
Paulns Habans et Cie pour les faire condamner h payer: 1" 1
somme de ? 0/0 sur les recettes effectuées ; 2° les frais de s&isi
et de dépôt ; que par cette même assi^^nation ils ont aussi d<
mandé l'attribution à leur profit des sommes consignées;
Attendu que, le même joar, Paulus Habans et Cie ont égali
ment assigné les personnes susnommées, ainsi que Numé
damier et Gall, auteurs de la pièce, pour faire prononcer la nu
lité des saisies, obtenir la restitution des sommes consignées i
faire condamner conjointement et solidairement toutes les pe
sonnes assignées à leur payer des dommages-intérêts à Qxer pi
état et à leur rerser, dès à présent, une provision de S,000 fr.
qu'ils demandent, en outre au Tribunal d'ordonner la publici
tion et l'afficbage du jugement â intervenir aux trais de leai
adversaires ;
Atlendn que, ces deux instances étant connexes, il y a lieu c
les joindre et de t<tatuer sur le tout par no seul et même jugi
ment;
Sur la fin de non-recevoir :
Attendu que Paulus Habans et Cie prétendent que l'instanc
engagée par la Société des auteurs dramatiques ne pouvait êti
valablement introduite qu'à la requête de Numès, r.arnier i
<;aH, auteurs de la revue dont la représentation a donné lien a
procès ; qu'en eiïet, disent-ils, celte société est simplement I
mandataire des auteurs, et dés lors son action n'est pas pli
recevable que ne le serait celle d'un agent d'affaires qui, charf
d'un recouvrement, poursuivrait le débiteur en son nom persoi
nel au lieu de l'assigner au nom du créancier; que cette actio
doit donc Stre repoussée en vertu de la règle de droit : " Nul e
France ne plaide par procureur » ;
Attendu qu'il y a lieu d'examiner si ce système est justifié ;
Attendu que la Société des auteurs et compositeurs dramat
ques a pour objet: P la défense mutuelle des droits des associi
vis-à-vis des administrations théâtrales ou de tous autres en ra|
port d'intérêts avec les auteurs ; 2° la perception à moindres fra
des droits des auteurs vis-à-vis des administrations théâtrale
et ta mise en commun de ces droits; S" la constitution d'u
fonds de secours au profit des associés, de leurs veuves, héritie
ou parents; 4° la constitution d'un fonds commun de bénéflci
partageables; que celte société, créée surtout dans un but ci
défense et d'assistance mutuelles, ne saurait à aucun lilre êti
considérée comme une agence d'affaires; que, pour atteindre
but éminemment utile qu'elle se propose, elle peut, conform'
ment à ses statuts, qui n'ont rien de contraire aux lois et àl'oi
dre public, passer avec les tiers des traités parfaitement valabli
mm^.
■ 95 —
Attendu que, dans l'espèce, aucun autre texte de loi m
mettait les saisies ; que dès lors ; les ordonnances qui le
autorisées ont été rendues par erreur et que ces saisies so
dicalement nulles ; qu'il s'ensuit que les sommes cooaij
doivent âtre restituées à Paulus Habans et Cie ;
Sur tes dommoffes'intéréls réclamés par ces derniers :
Attendu qu'il n'est pas démontré que la Société des au
dramatiques ailaKÎ de mauiraise Toi en présentant ses requ
que, d'autre part, les saisies ne paraissent pas avoir caui
préjudice sérieux a Paulus Habans et Cie ; que, dans ces cir
lances, et eu éj{ard aux autres faits de la cause, ceuz-ci si
suffisamment indemnisés par la condamnation de la Sociëtf
auteurs dramatiques à tous les frais occasionnés par les si
et à une partie des dépens de l'instance, sans qu'il soit n<
saire de donner au jugement la publicité demandée ;
Sur l'exécution provisoire sollicitée par la Société des au
dramatiques :
Attendu qu'elle est de droit aux termes du § l>r de l'art ici
du Code de procédure civile ;
Par ces udtifs, Joint les causes ;
Déclare recevable l'action introduite par la Société des aut
et compositeurs dramatiques ;
Dit que le droit proportionnel dit à celte dernière pour lei
présentations des Paulussonneries de l'année était de 5 0/1
recettes brutes ;
En conséquence, déclare nulles et de nu! effet les offres ré
du 17 janvier 1693, et condamne la Société Paulus Habai
Cie à payer à la Société des auteurs et compositeurs drai
ques, avec les intérêts de droit, les sommes représentai
droits proportionnels de fi 0/0 afférents auxdiles recettes ;
Commet d'office M* Vandewalle, avoué le plus ancien, àl
de déterminer le montant de ces droits et de régler le coi
d'entre les parties ',
Dit qu'à défaut par celles-ci d'accepter ce règlement, il
de nouveau statué par le tribunal ce qu'il appartiendra s
rapport de Me Vandewalle ;
Ordonne de ces quatre derniers chefs l'exécution provi:
nonobstant appel et sans caution ;
Prononce la nullité des saisies pratiquées en vertu des ai
aations susénoncées, et en fait mainlevée pure et simple
lîère et définitive ;
Autorise la Société Paulus Habans et Cie à retirer delaC:
des dépôts et consignations toutes les sommes consignées
suite des saisies, et dit qu'en leur remettant ces sommes s
A^\ ii>»..r. ."Il M'
— 96 —
VU du présent jugement, le directeur de ladite caisse sera vala-
blement déchargé;
Déclare les parties réciproquement mal fondées dans le surplus
de leurs demandes, fins et conclusions, les en déboute ;
Fait masse des dépens des deux instances, y compris les frais
de contrat, pour être supportés dans la proportion des trois
quarts par la Société Paulus Habans et Cie, et d'un quart par la
Société des auteurs et compositeurs dramatiques.
Art. 4173.
Œa^resmoslcmles. — Exécution miclte. •— ConeerC.
— Recetiefli. — Confiscation. ~ Oommapres-lntérêts.
Lorsque les recettes d'une entreprise de spectacles ont été
saisies, puis confisquées en vertu des articles 428 et 429 du
Code pénale le montant total de ces recettes peut et doit être
attribué aux auteurs lésés ; mais, lorsque la saisie n'a pas
été opérée, les juges du fait ont un pouvoir souverain pour
apprécier le préjudice éprouvé par le plaignant ; ils peu*
vent en fixer Viinportance à une somme même inférieure
au produit de la recette ; ils ne peuvent en tout cas pro-
noncer une confiscation non prévue par la loi (1).
(1) 11 est admis que les jages du fait ont un pouvoir souverain pour
fixer le montant des dommages-intérêts.
La décision ci-dessus s'appuie sur la lettre de l'article 429 du Code
pénal.
V. les critiques élevées contre l'arrêt dans les notes de Dalloz, D. P.
93. 1.407. En effet la Cour admet que si le plaignant avait commencé
par faire saisir les recettes, le juge du fait aurait dû les lui attribuer
intégralement. Quand le plaignant use de toutes les rigueurs que la
Cour de cassation déclare être k sa disposition, il obtient un dédom-
magement raisonnable i quand il attend sa réparation de l'appréciation
des tribunaux, il court le risque d'une indemnité dérisoire. Cette solu-
tion est loin d'être satisfaisante.
On éviterait ces objections si l'on pouvait une bonne fois s'entendre
sur les principes à poser quant à la fixation des dommages-intérêts et
si, au lieu de chercher seulement quel est le préjudice éprouvé réelle-
ment par le plaignant,on admettait, comme base d'appréciation et comme
minimum, que le prévenu ne doit rien conserver des bénéfices illicites
qu41 a encaissés.
Alors on n'entendrait plus parler de dommages-intérêts Inférieurs an
montant des recettes produites par le délit. Mais la jurisprudence ne
parait pas être en ce sens. Cf. l'article de M. A.Taillefer sur les dom-
mages -intérêlSfAnn., 1806, p. 350. V. au surplus sur les questions de
confiscation et de saisie des recettes ce qui est dit à rarticte précédent.
A. V.
- 97 -
(CaM.,cr. rej., 6 janv. i898. — Boisson et autres c.Rogter et Pionnier.)
Ainsi jugé par le rejet du pourvoi formé contre Tarrél de
la Cour de Nancy du 24 mars 1897 :
La Goub, Sur le premier moyen pris de la violation des arti-
cles 428 et 429 du Gode pénal, en ce que l'arrêt attaqué a fixé l'in-
demnité due aux auteurs des morceaux exécutés dans un concert
public, sans Tautorisation de ces auteurs, à un chiffre inférieur
à celui de la recette produite par ce concert:
Attendu que Rogier et Pionnier, directeurs de la fanfare de la
commune de Robert-Espagne, put été condamnés à un franc dV
mende et à huit francs «de dommages-intérêts envers les sieurs
Boisson et autres membres de la Société des auteurs et éditeurs
de musique dénommés dans le pourvoi, pour avoir le 21 avril
1895 fait exécuter par la dite fanfare, dans un concert public et
payant, huit morceaux de musique sans avoir obtenu préalable-
ment le consentement des auteurs ou éditeurs de ces œuvres
musicales ;
Attendu que le pourvoi soutient que l'arrêt attaqué a violé les
articles 428 et 429 du Gode pénal, en n'attribuant pas aux de-
mandeurs le produit de la recette perçue par les organisateurs
du concert, recette qui se serait élevée à 50 francs ;
Attendu qu'aux termes des articles précités ce n'est que dans
le cas où la recette a été saisie que le juge peut et doit en pronon*
cer la conGscation au profit des auteurs ; que lorsque cette sai'
sie n'a pas été opérée, l'article 429 dispose que l'indemnité due
aux auteurs sera réglée par les voies ordinaires ;
Attendu que, dans l'espèce^ les sieurs Boisson et les autres par-
ties civiles n*ont pas fait saisir le montant de la recette effectuée
lors du concert dont il s'agit; que dans ces conditions les juges
du fait, d'après le droit commun, avaient un pouvoir souverain
pour apprécier l'importance du préjudice éprouvé par les parties
civiles et qu'ils ne pouvaient en tous cas prononcer une conûs-
cation non prévue par la loi ; que dès lors loin d'avoir violé les
dispositions de Tarticle 429 du Gode pénal, l'arrêt attaqué en a
fait une saine application ;
Sur le second moyen pris de la violation de l'article 7 de la loi
du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué aurait omis de statuer
5ur les conclusions prises par les demandeurs, à l'efTet d'obtenir
l'allocation à leur proût de la recette opérée par les organisateurs
du concert dont il s'agit et en ce que l'arrêt n'aurait pas statué
d'une manière spéciale sur chacun des éléments du préjudice que
les parties civiles prétendaient avoir subi :
Attendu que si la loi du 20 avril 1810 impose aux juges Tobli-
7
mmmtmw^B^t
\i
— 99 —
méconnaissable f et la confusion entre les deux œuvres {stan-
ces et couplets) n'est ni possible ni admissible (1).
Sans rechercher si une simple imitation rythmique peut
être considérée comme contrefaçon d'une œuvre musicale^
le juge d'appel n'a pas outrepassé ses pouvoirs en décla-
rant que le fait d'avoir emprunté^ pour 3 morceaux sur 53
dont se compose la partition d'une féerie, le rythme de 3
airs d'opérette^ était insuffisant pour constituer le délit de
contrefaçon^ et qu'il pouvait y avoir là des circonstances
involontaires, exemptes de toute intention délictueuse (2) .
(Cass., cr. rej., 7 décembre 1900. — Flëgier et aatres c. Potel.)
La Cour, Sur l*anique moyen pris de la violation des arti-
cles 428, 429 du Code pénal, et 3 de la loi des 13-19 janvier 1791,
en ce que les motifs exprimés dans Tarrét ne pourraient léf;ale~
ment justifler son dispositif :
En ce qui touche la représentation de la féerie dite La Belle aux
cheveux Wor :
Attendu que si, après avoir déclaré non établie Timitation ou
contrefaçon de la musique de Flégier, adaptée aux paroles de
Loviot dans Tœuvre dite les Stances, Tarrêt entrepris déclare :
« que pour composer les couplets incriminés il a été fait des em^
prunts à la poésie de Loviot et que certains vers ont même été pres-
que littéralement copiés, » ledit arrêt visant la double constatation
qui précède ajoute, qu'en cet état, Tœuvre susvisée est : « devenue
méconnaissable », et encore : « que la confusion entre les stances et
les couplets de la féerie n'est ni possible ni admissible » ;
Attendu que cette appréciation de fait est, k elle seule, exclu-
sive de la prévention d'avoir fait représenter Tœuvre dite les
Stances de Flégier et qu'en tout état de cause elle justifle, de ce
chef, le dispositif de l'arrêt, sans qu'il y ait lieu de faire état des
motifs de droit qui, surabondamment, y sont déduits ;
En ce qui touche la représentation de la féerie dite : L'oiseau
bleu:
Attendu que la cour d'appel s'est fondée, en premier lieu, pour
écarter l'action des demandeurs, sur ce que : a sans rechercher si
une simple imitation rythmique peut être considérée comme la con-
trefaçon d'une œuvre musicale, le fait d'avoir emprunté, pour trois
morceaux sur les 53 dont se compose la partition de l'Oiseau bleu, le
rythme de trois airs d'opérette, est insuffisant pour constituer le
délit relevé contre les frères Potel ; qu'il peut y avoir là des rémi*
(1) Cf. Pouillet. Prop, liiê. etarl., n^ 508.
(2^ Cf. Pouillet, op, ci/., n« 556.
— 100 —
niscenees involontaires exemptes de toute intention délictueuse » ;
Attendu qu'il appartenait au juge du fait de rechercher dans
la prévention Texistence de l'élémeRt intentionnel, et s'il ne l'y
rencontrait, de statuer par voie de relaxe ; qu'il n'a fait qu'user
de ce droit en déduisant du caractère exceptionnel des simi-
litudes rythmiques relevées entre quelques morceaux de la féerie
que les frères Potel ont fait représenter et certains fragments des
opérettes La Mascotte et le Jour et la Nuit^ l'influence possible de
réminiscences involontaires et,par suite, l'expression d'un doute
sur la réunion, en l'espèce , des éléments constitutifs du délit;
qu'en fondant sa décision sur ce motif, l'arrêt n'a pu violer au-
cun des textes visés au moyen ;
Attendu que,le dispositif étant ainsi justifié de ce chef, il n'ë-
chet de faire état des autres motifs surabondamment énoncés
dans l'arrêt ;
Et attendu que le dit arrêt est régulier en la forme ;
Rejette le pourvoi de Flégier et consorts contre l'arrêt de la
Cour de Poitiers, du 17 mars 1899.
MM. LoEW, président; Laurent Atthalin, rapporteur;
Pbuilloley, avocat général. — M* Agdillon, avocat.
Un second arrêt en termes presque identiques a été ren-
du le même jour dans une autre affaire de Choudens et
Cie et Maquel c. Potel.
Art. 4175.
4Eavre« iniuilcmles.— Exéeatlon.— Témoin.— ReiNro-
ebe. — Affent de Im Société des compositeurs et
Éditeare de mtuil<|ae.
V agent de la Société des auteurs^ compositeurs et éditeurs
de musique, cité comme témoin^ ne peut être reproché et
doit être entendu dans sa déposition ; en effets bien que man-
dataire de ladite société, cet agent n'est pas compris au nom-
bre des personnes visées dans Varticle 156 du Code d'ins-
truction criminelle (1).
(1) La Cour de Toulouse considère qu'un témoin ne peut être reproché
qu'en vertu d'une disposition formelle de la loi : cette disposition n'existe
pas dans l'espèce.
Si tes agents de la Société des compositeurs ne pouvaient être entendus
comme témoins, la preuve des exécutions illicites de musique d'orches»
tre deviendrait très difficile à faire, car on ne trouverait pas toajours un
huissier ou un commissaire de police pour reconnaître les morceaaz*
— 101 —
(C. de Toulouse, ch. corr., 27 février 1901. — Société des compoeiteors
de musiqae c. Rameau et LafTon.)
Le 11 octobre 1900, MM. Capoul, Armand Sylvestre, De-
lormel, Garnier et autres, membres de la Société des au-
teurs, compositeurs et éditeurs de musique, avaient as-
signé devant le Tribunal correctionnel de Saint-Girons,
MM. Rumeau, propriétaire, et Laffon, directeur du Casino-
Club d'Aulus,en dommages-intérêts pour avoir, pendant la
saison thermale de Tannée 1900, exécuté leurs œuvres
sans leur autorisation et ce en violation de Tarticle 3 de la
loi du 19 janvier 1791 et des articles 428 et 429 du Code
pénal.
Le premier témoin cité à la requête des demandeurs
était l'agent de la société à Saint-Girons, M. Heuillet, ar-
tiste musicien, qui avait assisté aux représentations illici-
tes du Casino-Club d'Aulus et noté les œuvres qui avaient
été exécutées, après avoir lui-même, par une lettre recom-
mandée, mis en demeure les propriétaire et directeur du
Casino-Club d'Aulus de n'exécuter les œuvres de la société
que muni de l'autorisation expresse, préalable et par écrit»
des auteurs et compositeurs de ces œuvres.
M* Buffelan, avocat des prévenus a conclu à ce qu'il plût
au tribunal ordonner que le témoin étant agent salarié de
la société dont les demandeurs sont membres, ne serait
pas entendu.
Malgré la plaidoirie de M"" Doomkrc, avocat des auteurs
el compositeurs de musique, le tribunal a fait droit à ces
conclusions par jugement du 6 novembre 1900, en ces
termes :
Li Tribunal, Attendu que Heuillet, cité comme témoin dans
rinstance en dommages introduite contre Rumeau et LafTon par
Capoul et consorts, agissant en qualité de parties civiles, a dé-
claré à Taudience qu'il était le mandataire salarié des deman-
deurs et que son salaire était proportionné aux sommes dont
ceux-ci poursuivent le recouvrement contre tes défendeurs ; que
Heuitlet a donc un intérêt personnel dans Tinstance, en sorte que
le reproche qui est dirigé contre lui de ce chef est fondé ;
Parcrs motifs, Jugeant publiquement en séance de police cor-
rectionnelle et en premier ressort :
Dit que HeuîDet ne sera pas entendu comme témoin ;
condamne Capoul, Armand Sylvestre, Delormel, Garnierel
irts, demandeurs, aux dépens.
rappel des demandeurs, la Gourde Toulouse a infirmé
icision des premiersjuges.paran-ètdu 27 février 1901,
î3 termes :
CoDR, Attendu, en droit, qu'il n'y a que les seules pér-
is énumérées dans l'article <56 du Code d'instruction cri-
Ile qui ne peuvent être entendues comme témoins, et qu'il
lartieul pas aux cours ou tribunaux d'ëtendre les dispositions
ictives dudit article à d'autres individus ;
«ndu, en fait, qu'Heuillet, s'il est l'agent de la Société des
irs, compositeurs et éditeurs de musique, et son mandataire,
pas compris au nombre des personnes misées dans l'article
:i-dessns invoqué; d'où il suit qu'alors même qu'il eût eu
itérét personnel dans les poursuites exercées au nom de
société, ainsi qu'il l'a reconnu, il y avait lieu, nonobstant
circonstance, de procédera son audition ;
endu que lorsqu'un jugement est inSrmë pour d'autres
■■S que celle d'incompétence, la cour doit évoquer;
!t CES HOTiPS, La Cour, le ministère public entendu, après en
délibéré;
qu'À tort tes premiers ju|;es ont accueilli le reproche pro-
par Rumeaa ;
conséquence :
irme le jugement rendu par le Tribunal correctionnel de
-Girons, le 6 novembre 1600;
tuant à nouveau, évoquant ;
lonne qu'il sera procédé à l'audience de ce jour à l'audition
lillet devant la Cour;
idamne Humeau aux dépens de l'incident exposés tant en
ière instance qu'en appel.
,. corr. Présidence de M. Sjuonet. — Plaidants:
oriiBBc (du Barreau de Paris) pour la Société des au-
i, compositeurs et éditeurs de musique; M* Ebelot,
Rumeauet LafTon.
Art. 4176.
ret Ollbnrd- — >4o«lété de ; flkit. — Invention
r ■■■■ nmaoclé. — Exploitation. — Propriété dn
) découvertes constituent une propriété personnelle gue
^n^gmfwmuM^^ m, III i «111 «UN^.4W«;4 Jf j^w^f'HPt.
— 103 —
rinvenêeur conserve tant qu'il ne Va pas formellement alié-
née ; dès lors, à moins de convention contraire, Vassocié
qui, par suite des travaux que lui imposaient ses fonc-
tions sociales^ fait une découverte et prend un brevet^ est
présumé faire apport à la société du droit d'exploitation,
mais il conserve la propriété du brevet^ alors surtout que
depuis la dissolution de la société, l'inventeur a seul payé
les annuités et conservé sans réclamations entre ses mains
le titre du brevet (1).
(G. de Douai, 1«' août 1900. — Société Roabaisienne de construc-
tions mécaniques et Gilbart c. Desfrennes.)
Le Tribunal civil de Lille avail, le 28 janvier 1900, rendu
le jugement suivant :
Lb Tribunal, Attendu que Gilbart, se disant propriétaire du
brevet 269.394 pour la construction de broches ,de cannetières
coconneuses, a fait saisir des appareils qu*il prétend être la con"
trefaçon de son invention dans les magasins de la Société Rou-
baisienne de constructions mécaniques et demande la répara-
tion du préjudice à lui causé ;
Attendu que Desfrennes, membre de cette société, intervient
en son nom personnel, et soutient que le brevet est devenu sa
propriété, que par suite l'action de Gilbart est non recevable ;
Attendu qu'il est constant que, pendant environ dix-huit mois,
en 1896 et 1897, une société de fait pour la construction des
machines, et notamment des cannetières, a existé entre Gilbart
et Desfrennes ;
Attendu que Gilbart, qui avait été choisi par Desfrennes
comme membre de cette société, à raison même de ses connais-
sances mécaniques, devait donner tout son temps et son intelli-
gence à la direction de Tatelier et chercher les moyens de per-
fectionner tout à la fois son mode de fabrication et les métiers à
livrer au public ; qu'il fut ainsi amené à modifler les systèmes
antérieurs de broches et à prendre le brevet litigieux ;
Attendu que si cette découverte et ce brevet sont le fruit des
ëtudes imposées à Gilbart par ses fonctions sociales et la consé-
quence de ses travaux sociaux, il n'en résulte pas nécessaire-
ment que la société en soit propriétaire ; que les découvertes
(1) Voir, dans le cas où le brevet existait avant la constitution de la
société et a fait Tobjet d'un apport, Pouillet, Breo.d'inv,, no"315, 316.
La Cour de Douai semble avoir statué difTéremment parce que le bre-
vet avait été pris au cours de rassociation.
— 104 -
propriété perionnelle, que conserve l'inventeur
pas formelletnenl aliénée ;
>i Gilbart, au sa qualité d'associé, était tenu,
. de laisser la société existant entre loi et Des-
son brevet, il ne résulte nullement de là qu'il
la propriété ; qu'une société peut avoir, soit la
:evet, soit seulement le droit de l'exploiter;
l'une convention réglant la question, on doit
t du simple droit d'exploitation lorsqu'il s'agit,
pèce, d'une découverte faite au cours de la so-
lesfreDues a si bien compris que Gilbart restait
du brevet litigieux, qu'il n'en a pas payé les
n'a jamais réclamé avant le procès la remise
it le brevet, bien qu'il toit propriétaire de tou-
! l'ancienne société Gilbart-Deifrennes ;
atraire, que Gilbart a tonjoura conservé son Utr«
tés;
pour justiRer sa revendication, Desfrennes ob-
[ue la Société Gilbart-DesfreuDes a payé la pre-
brevet ; qu'en effet, ce paiement, qui était une
lissance qu'elle en avait, ne peut Stre dés lors
ireuve de sa propriété ;
la Société Gilbart-Deafrennes n'a jamais ea la
ivet, la revendication de Desfrennes, qui agit
aux droits de cette société, doit être rejetée et
t déclarée recevable.
rél confirmatif en ces termes :
du que le jugement dont est appel a, dans ses
as son dispositif, fait une juste appréciation des
en cause ; qu'à la vérité Gilbart devait & DesfreD-
é la société qui les réunissait, tons les avantages
du brevet litigieux; que Desfrennes ne saurait
être aujourd'hui privé, puisque c'est lui qui a
r la communauté d'intérêts et a obtenu la dis-
ciété ;
Confirme. . .
1" chambre civile. — M . Paul, premier
M. DE Lajonkairb, substitut du procureur
îcais : M" Allaert et Plovvier.
^■•■
^V — I
— 105 ^
Art. 4177.
Brevet Chatlllon. — Coiiiblnal«on nouvelle de
moyens eonnus. — Contrefaçon. — Produit noa-
venu. ^ Poooeoolon antérieure. — Oonenrrenee
déloyale. — Compétenee.
Lorsqu'un brevet porte sur une combinaison de moyens
conntÂS, reconnue nouvelle en vue de l'obtention d'un pro-
duit industriel nouveau, il y a contre façon dans le fait de
faire usage des éléments essentiels de cette combinaison pour
obtenir le même résultat et le même produit ; spécialement
lorsqu'un brevet est pris pour F emploi d'un four à manche
ou cubilot, recevant des charges alternées de combustible et de
minerai, et de ventilateurs aspirant les vapeurs ou fumées
métalliques, avec injection d'eau pulvérisée, et les refou-
lant dans des chambres de condensation, il y a contrefaçon
dans l'emploi, même à sec, de la combinaison du four à
manche et des ventilateurs, alors que cet emploi permet
d'obtenir des produits identiques au point de vue chimie
que{i).
Constitue un produit nouveau brevetable, r oxyde d anti-
moine presque pur et soluble répondant à la formule Sb^O^^
alors que ce corps n'avait pas été, jusqu'à la prise du bre-
vet, obtenu industriellement ; et un oxyde d'antimoine solu-
ble, répondant à la même formule, même de couleur un peu
plus foncée et contenant plus d'impureté (arsenic), en est la
contre façon (i) .
Jl est de règle que lorsqu'une demande portée devant un
tribunal civil contient différents chefs dont un ouplusieurs
sont de la compétence des tribunaux civils et un autre de
celle des tribunaux de commerce, mais dérivant de chefs
civils, le tribunal civil est compétent pour le tout (3).
(1) V.Poaillet, Brev, (Tinv.^n* 727 ; Allart,Brei;, d'inv,, l.lll, n«443; —
Cass., 5 janvier 1878, Meunier, Ann.JS, 33 ; Rej., 2 février 1881, Boitel,
i4nn. ,8t. 167 ; Paris, 14 mars 1896, Chaboche, Ann.,99. 180. Comp. Rej.,
3 août 1897, Nicolas, Ann. .99.66; Rej.^ 14 avril 1899, Léon i, il nn., 99.246.
(%) Sur les caractères du produit industriel nouveau, voir Pooillet,
n** 21 et s. et 721 et la jarisprodence citée, notamment Rej . , 10 février
't893,Société générale de dynamite, Ann., 98.53. V. encore : Paris,!*' août
1899,Brion et Pftté, iinn., 99.267. Comp. Cass.,1899, Léoni,4nn.. 99.246,
et Lyon, 19 juillet 1896,Dacoté et Coté, Ann., 99.281.
(8) V. Pouîllet, Marquesj n'671 ; Darras, De la concurrence déloyale ^
':i!-~7vS^»'
— 106 —
Uy a concunence déloyale dans le fait de s'assurer , en
vue de s'emparer des procédés de fabrication d'un concur-
rent^ le concours d'un de ses ouvriers par l'offre d'appoin-
tements et avantages exceptionnels et dans celui d'annoncer
son produit sous la même dénomination que celui de son
concurrent {\).
Une possession antéHéure ne peut constituer un droit
au profit de celui qui s'en prévaut ^ si elle a un caractère
frauduleux^ notamment si elle n*a été obtenue qu'en détour-
nant un ancien ouvrier du breveté j au courant de la fabri-
cation, au moyen d'appointements et avantages exception-
nels (2).
(C. de Riom, 5 avril 1900. — ChaUlIon c. Giraud.)
Ainsi jagé par arrêt de la Cour de Riom, en date du
5 avril 1900, sous la présidence de M.Vacher, premier pré-
sident, après plaidoiries de M** Allart (du barreau de
Paris),SALVY (du barreau de Riom) el Rubbllin (du barreau
de Lyon), et conclusions de M. Delp?, avocat général.
La Cour, Gonsidërant que Ghatillon a prisa la date du 16 avril
i888 un brevet d'invention pour un procédé de condensation
des vapeurs métalliques, notamment de Toxyde d'antimoine ;
Considérant que ce procédé consiste dans 1 emploi d'un four à
manche ou cubilot, qui reçoit des charges alternées de combus-
tible et de minerai, et dans celui de ventilateurs aspirant les va-
peurs ou fumées métalliques et les refoulant dans des chambres
de condensation ; que le brevet porte en outre l'indication d'une
injection d'eau pulvérisée dans les ventilateurs ;
Considérant que le produit obtenu ainsi est de l'oxyde d'anti-
moine pur et sotuble, ayant la formule Sb'O' ;
Considérant que Chatillon ayant, dès le début de la fabrica-
tion, constaté que l'injection d'eau pulvérisée dans les ventila-
n* 756. V. aussi Montpellier, 24 février 1879, Mialane, Ann., 82.135 ;
Trib. civ. Gharleville, 7 mars 1879, Chachoin, Ann., 82.S51 ; Douai, 13
avril 1885, fichier, Ann., 85.277.
(1) Le simple embauchage d'ouvriers d'aulrui, môme en leur offrant
un salaire plus élevé, ne constituerait pas un acte de concurrence dé-
loyale ; il en est autrement lorsqu'il est fait en vue de surprendre des se-
crets de fabrication ou de détourner une clientèle. Douai, 15 jniliet 1887,
Wallard, ^/i»..91.306; Trib. comm. Nantes, 14 avril 1897, Rec. de San-
r65, 98.1.27. V. cependant Paris, 26 janvier 1856, d*Âriincourt, AHn,%
56.125. Comp.Cass., 28 novembre 1898, Lecomte, Ann,^ 99.241.
(2) V. Pouillet, Breo. rf'm«., n» 432 et la jurisprudence citée, V. aussi
Pou, 14 janvier 1899, Cornet, Ann,r 99.259.
rr^^^frm^'imimr
— 107 —
leurs était inutile, surtout pour les minerais pauvres, et qu'on
obtenait en opérant à sec des résultats à peu près identiques, a,
dans une addition à son brevet, en date du 21 février 1893, sup-
primé l'injection d'eau indiquée dans le brevet de 1888 ;
Considérant que Giraud a acquis en 1890, du sieur Focqueray^
une usine sise à Brioude, quartier du Reclus, non loin de celle
de Ghatillon, qui en possède en outre une autre à Blesle ; qu'il
a pris à son service Martin Hermet, ancien ouvrier de Ghatillon,
et qu'il s'est immédiatement livré à la fabrication de l'oxyde
d'antimoine ;
Considérant que Ghatillon prétend que Giraud a, dans cette
fabrication, contrefait le procédé de son brevet d'invention et les
produits en résultant, qu'il lui reproche en outre d'avoir fait à
son encontre acte de concurrence déloyale ;
Considérant que, par jugement interlocutoire du tribunal de
Brioude en date du 4 mai 1897, une expertise a été ordonnée,
et qu'il y a été procédé par MM. Riche, Schutzemberg et Périsse,
experts à ces fins commis, qui se sont expliqués dans leur rap-
port à la fois sur la contrefaçon et sur la concurrence déloyale ;
I. — Sur la contrefaçon :
Considérant qu'il échet tout d'abord de rechercher si la fabrica-
tion de Ghatillon, telle qu'elle vient d'être décrite, était breveta-
ble ; que pour cela il était nécessaire qu'elle constituât une inven-
tion nouvelle ; que ce point est contesté par Giraud et qu'il a été
examiné par les experts ;
Considérant que diverses antériorités ont été citées par ceux-
ci, mais qu'elles ne paraissent pas s'appliquer exactement à l'es-
pèce;
Considérant en effet qu'on ne saurait voir une antériorité pro-
prement dite dans le brevet Huet, du 18 février 1875, qui, au lieu
de ventilateurs, indique une turbine ou un appareil tournant
dans une cuve, dont la partie inférieure contient du liquide ;
qu'en outre ledit brevet Huet ne mentionne pas l'emploi d'un
four à manche ou cubilot, sans lequel il est impossible d'obte-
nir de l'oxyde d'antimoine soluble ;
Considérant qu'on ne saurait voir davantage une antériorité
dans le brevet Hembacker (1883), qui indique un four à cuve,
combiné avec un injecteur système Karting ;
Considérant qu'il en est encore de même du brevet Wetherill
(1883), indiqué dans le cours de métallurgie de M. Le Verrier, et
comportant l'emploi d'un four à soie, différent du four à manche
ou cubilot de Ghatillon et ne permettant pas de fabriquer de
l'oxyde d'antimoine soluble ;
Considérant que par conséquent les antériorités susénoncées
ne sauraient être opposées à Ghatillon, et que son procédé de
;y^-' "Wii—
— 108 —
fabrication constitue bien une invention noiiYelle, d'où résultait
un produit nouveau ; qu'il était dès lors brevetable ;
Considérant que, co point établi, il y a lieu de rechercher si
Giraud a réellement contrefait, le procédé inventé par Chatillon
et ses produits ;
En ce qui concerne le procédé :
Considérant que Giraud prétend et que les experts et après eux
les premiers juges ont admis qu'il n*a pas contrefait le procédé
de Chatillon, parce qu'il a toujours opéré à sec depuis son ins-
tallation, en 1890, et que le brevet de Chatillon, de 1888, com-
porte la marche à Teau ; que la marche à sec n'a été prévue que
par l'addition de 1893, laquelle ne serait pas opposable à Giraud,
sa fabrication n'ayant commencé qu'en 1890 ;
Mais considérant, d'une part, qu'à son usine de Blesle, Chatil-
lon a toujours, en fait, pratiqué la marche à sec^ ce qui est re-
connu par les experts ; qu'à celle de Brioude,méme avant 1893,
il a marché soit à sec, soit à Teau, selon que le minerai était
plus ou moins pauvre ; que d'autre part, la possession antérieure
dont se prévaut Giraud ne saurait constituer un droit à son profit,
parce qu'elle a un caractère frauduleux ; qu'il est constant en
effet que Martin Hermet, ancien ouvrier de Chatillon, qui con«
naissait parfaitement la fabrication de celui-ci, est entré en 1890
à l'usine de Giraud, avec des appointements et des avantages ex-
ceptionnels, qui ne peuvent s'expliquer que par les services par-
ticuliers qu'il lui a rendus, en lui révélant les procédés de son
ancien patron ;
Considérant d'ailleurs qu'en fait, il importe peu que Giraud
ait fait uniquement usage de la marche à sec ; qu'il est constant
que, soit que l'on opère à sec, soit que l'on opère à l'eau, on ob-
tient un produit identique au point de vue chimique ;
Considérant d'autre part que l'on trouve dans l'outillage de
Giraud des similitudes incontestables avec celui décrit dans le
brevet de 1888, spécialement dans la combinaison du four à
manche ou cubilot, avec les ventilateurs, combinaison qui a pour
effet d'obtenir de l'oxyde d'antimoine soluble ; que par consé-
quent la contrefaçon du procédé parait manifeste ;
En ce qui concerne les produits :
Considérant que les experts et les premiers juges ont estimé
que la contrefaçon des produits n'existait pas davantage que celle
du procédé, tout d'abord parce que l'oxyde d'antimoine de Giraud
ne titre que 91.33 0/0 d'antimoine soluble, tandis que le produit
de Chatillon titre au minimum 96 0/0, et ensuite parce que le
produit de Giraud contient plus d'arsenic que celui de Chatillon,
et qu'il est d'une couleur plus foncée ;
Mais considérant que ni dans le brevet de 1888, ni dans le cer->
FiW f" ^'Ti'l^i^^.giyv» w.y*ri^ 'K . ■ %' vim^myfvgmmmmf
— 1U9 —
tificat d'addition de 1893, Ghatillon n'a précisé ]e titre de Toxyde
d^antimoiné fabriqué par lui, ni sa contenance d'arsedic, ni sa
couleur; que dans le brevet de 1888, il est simplement parlé
d'oxyde d'antimoine pur, et dans Taddition de 1893, d'ocyde neu-
tre d'antimoine Sb'O', dénommé dans le commerce oxyde d'an-
timoine soluble ;
Considérant d'ailleurs que les experts n'ont examiné qu'un
seul échantillon du produit de Giraud et que ce qui prouve que
le titre de 91.33 0/0 constaté dans cet échantillon ne doit pas
être considéré comme invariable, c'est que Giraud a annoncé
lui-même son oxyde comme étant titré à 98 0/0, ce qui se rap-
proche singulièrement du titre du produit de Ghatillon ;
Considérant au surplus que le produit de Giraud est livré au
commerce sous la dénomination d'oxyde d'antimoine soluble, qui
est celle indiquée par Ghatillon dans l'addition de 1893 ; et qu'il
peut, dès lors, être et a été, en réalité, confondu avec le produit
de l'appelant ;
II. — Sur ta concurrence déloyale :
Considérant que c'est à tort que les premiers juges se sont dé-
clarés incompétents de ce chef ; qu'il est, en effet, de règle cer-
taine que lorsqu'une demande portée devant un tribunal civil
contient différents chefs, dont un ou plusieurs sont de la com-
pétence des tribunaux civils, et un autre de celle des tribunaux
de commerce, mais dérivant des chefs civils, le tribunal civil est
compétent pour le tout ; qu'en l'espèce le chef de concurrence
déloyale dérive directement de celui de contrefaçon ;
Considérant que la concurrence déloyale est en l'espèce mani-
feste ; qu'elle résulte des agissements de Giraud, pour s'empa-
rer des procédés de fabrication de Ghatillon, et de l'annonce
qu'il a faite de son produit, sous la même dénomination que
celui de Ghatillon ;
Considérant que les experts eux-mêmes ont, du reste, reconnu
formellement dans leur rapport l'existence de la concurrence dé*
loyale ;
Considérant que Ghatillon a éprouvé un préjudice important
dont il lui est dû réparation ;
Par ces motifs, Dit mal jugé, bien appelé ;
Emendant et faisant ce que les premiers juges auraient dû
faire;
Dit que Giraud a contrefait le procédé inventé par Ghatillon,
et quia fait l'objet de son brevet d'invention du 16 avril 1888 et
du certificat d'addition du 21 février 1893 ;
Dit qu'il a également contrefait les produits résultant dudit
procédé, dénommé oxyde d'antimoine soluble et ayant la for-
mule Sb«0» ;
— 110 —
Se déclare compétente pour connattre du chef de concurrence
déloyale ;
Dit que Giraud a fait acte de concurrence déloyale vis-à-vis de
Chatillon ; que celui-ci a éprouvé un préjudice pour lequel il loi
est dû réparation ;
Condamne en conséquence Giraud à payer à Chatillon des dom-
mages-intérêts à Oxer par état, par les soins des experts déjà
commis^ et dès à présent une provision de 10,000 francs ;
Ordonne l'insertion du présent arrêt dans six journaux, au
choix de l'appelant, et ce aux frais de Tintimé, sans que le prix
de chaque insertion puisse dépasser 100 francs ;
Validant la saisie opérée le 27 septemhre 1894, dans rûsine
Giraud, par le ministère de Pirayre, huissier à Brioude, pro»
nonce la confiscation des appareils et produits reconnus contre-
faits ;
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes, ÛAs et
conclusions ;
Ordonne la restitution de l'amende ;
Condamne Tintimé à tous les dépens de première instance et
d'appel.
Art. 4178.
MjégfimtwMonm éttntntférem. — Hongrie. — Marqaefli.
La loi hongroise du 30 juillet 1896 (la Prop. ind.^ 1899-
199) est identique, dans ses 7 premiers articles, à la loi
autrichienne de même date (il nn., 95.262). Les suivants
sont ainsi conçus :
§ 8. — Le § 23 de l'article législatif de 1890 est modifié comme
suit (1) :
Quiconque, sciemment, introduit dans le commerce ou met en
vente des produits indûment revêtus d'une marque à Tusage de
laquelle un tiers possède un droit exclusif^ et quiconque con-
trefait sciemment une marque à cet effet, commet une contra-
vention et est passible d'une amende de 200 à 600 couronnes, et
en cas de récidive, — quand il ne s*est pas encore écoulé deux
ans depuis le moment où la dernière condamnation est derenue
définitive, — d'une détention pouvant durer jusqu'à deux mois
et d'une amende pouvant s'élever jusqu'à 600 couronnes.
Cela n'exclut pas Tapplication simultanée des dispositions plus
1) La loi de 1890 est aux Ann.^ 93, 26.
— 111 —
sévères du code pénal, et en particulier de celles relatives au
crime ou au délit de fraude.
§ 9. — Le § 24 de l'article législatif de 1890 est modiOé comme
suit :
Les dispositions du § 8 sont également applicables à ceux qui,
sciemment, introduisent dans le commerce ou mettent en vente
des produits indûment munis du nom,de la raison de commerce,
des armoiries ou de la dénomination commerciale de rétablisse-
ment d'un producteur, d'un industriel ou d'un commerçant indi-
gène ; elles s'appliquent également à celui qui, sciemment, con-
fectionne à cet effet les désignations susmentionnées.
§ 10. — Le §26 de Tancieune loi est modifié comme suit :
La répression des contraventions mentionnées aux §§ 8 et 9 est
placée dans la compétence des tribunaux royaux de district.
Les dispositions du § 7 du VI* article législatif de 1883, qui ap-
portent des restrictions à l'appel contre les arrêts de seconde ins-
tance, ne sont pas applicables à de telles contraventionSé
§ it. — Les faits mentionnés comme délitH dans les alinéas 1
et 5 du § 27 du II« article législatif de 1890, doivent être considé-
rés comme constituant des contraventions (1).
§ 12. - L'alinéa 2 du § 29 de l'ancienne loi est modifié comme
suit:
Si, au cours de la procédure pénale (§§ 8 et 9 de la présente loi),
il surgit une question qui,d'après l'alinéa précédent, rentre dans
la compétence du Ministre du commerce, le tribunal correction-
nel devra communiquer les pièces nécessaires à ce Ministre, en
le priant de résoudre cette question, et attendre la décision mi*
nistérielle.
§ 13. — La présente loi entrera en vigueur à partir de sa pu-
blication, à l'exception du § 5, lequel ne produira ses effets que
six mois plus tard.
Les dispositions du g 4 ne sont applicables qu'aux marques qui
ont été enregistrées postérieurement à la date de la susdite pu-
blication ; de même, les dispositions du § 6 ne s'appliqueront
qu'aux affaires pénales entamées après cette date.
(i) Dans le texte de la loi autrichienne de 1890, qui a été donné comme
identiqae sur ce point avec celui de la loi hongroise, le § 27 n'a que trois
alinéas. Dans le texte hongrois, les deux dernières phrases du troisième
alinéa constituent chacune un alinéa indépendant. Le cinquième alinéa,
dans la loi hongroise, est donc, dans la loi autrichienne, la dernière
phrase du troisième alinéa.
Il est aussi à remarquer que le § 27 de la loi autrichienne ne qua-
lifie pas la contrefaçon. En fait, elle était bien considérée comme un dé-
lit dans les deux pays jusqu'en 1895. Depuis la loi hongroise reproduite
ci- dessus, elle n'est pins traitée en Hongrie que comme une conlraveti'
lion .
,
— 112 —
§ 14. — Le Ministre du commerce et le Ministre de la jaslice
— en ce qui concerne la Croatie et la Slavonie, le Ministre du
commerce agissant d'un commun accprd avec le Bande Croatie,
de Slavonie et de Dalmatie,— sont chargés de Texécution de la pré-
sente loi.
Art. 4179.
Eié^Uitetlons étrAnyères. — Japon. ~
Brevete d'Invention.
Loi sur les brevets (f invention (l) (N* 36, du 2 mars 1899).
(2) Article {",— La personne qui, en ce qui concerne un pro-
duit ou procédé de production industrielle a, la première, fait
une invention, ou ses ayants cause, pourront, conformément
à la présente loi, obtenir un brevet d'invention.
Le brevet relatif à l'invention d'un produit confère à son ti-
tulaire les droits exclusifs de fabriquer, d'utiliser, de vendre ou
de mettre en circulation le produit de l'invention.
Le brevet relatif à Tinvention d'un procédé confère à son titu->
laire le droit exclusif d'utiliser ou de mettre en circulation ce
procédé, et son effet s'étend aux produits obtenus par ce procédé.
Art. 2. — Ne sont pas brevetables les inventions ci-dessous
énumérées :
i« Les produits alimentaires, les boissons et les articles de
consommation (shikéboutsu) ;
2* Les médicaments et les procédés pharmaceutiques :
3^ Les produits ou procédés pouvant porter atteinte à Tordre
public ou aux bonnes mœurs ;
4^ Les produits ou procédés qui sont connus ou d'un usage
public avant le dépôt de la demande de brevet. Cette disposition
ne s'applique pas aux produits ou procédés qui ont été connus
depuis deux ans au plus, par suite de leur mise à l'essai.
Art. 3. — La durée du brevet est de quinze ans, à dater du
Jour de l'enregistrement au rôle des brevets.
Art. 4.<- Tout brevet peut être cédé avec ou sans restrictions,
mis en communauté ou déposé en gage.
(t) Pour la comparaison entre cette loi et la précédente de 1888 voir
la Prop, ind., 1899, 64, 97 et 167. Cette nouvelle loi a pour principal
objet d'assurer l'application de la Convention d'Union, elle est con-
forme dans ses grandes lignes à la législation antérieure.
(2) Texte communiqué an Bureau de Berne par le Ministère du Com-
merce du Japon.
— 113 —
Dans ces cas, poar être opposable à un tiers, l'acte devra être
enregistré au Bureau des brevets d'invention sur la demande de
rintéressé.
Art. 5. — Tout agent du Bureau des brevets d'invention, tant
qu'il conservera sa fonction ou son emploi, n'aura pas le droit
de posséder des brevets, à moins, toutefois, que la propriété d'un
brevet ne vienne à lui échoir par voie de succession, ou lui ait
été acquise antérieurement à son entrée en fonctions.
Art. 6. — Toute personne qui, en matière de brevets, veut faire
une demande ou une réclamation, ou est titulaire d'un brevet,
est tenue, loriqu'elie n'a pas de domicile dans TEmpire, de cons-
tituer un représentant parmi des personnes qui s'y trouvent
domiciliées.
Conformément à la présente loi et aux ordonnances ultérieures
qui en dériveront, le susdit représentant remplacera l'intéressé,
pour ce qui concerne soit les formalités à remplir devant le Bu-
reau des brevets d'invention, soit les procès civils et les plaintes
en matière de brevets.
Art. 7. — Le chef du Bureau des brevets pourra, s'il le juge
nécessaire, prescrire le changement d'un représentant en matière
de brevets.
Art. 8. — Quiconque voudra exercer la profession de représeu'
tant en matière de brevets devra obtenir son inscription par une
demande adressée au chef du Bureau des brevets d'invention.
Une ordonnance établira ultérieurement les prescriptions rela-
tives aux conditions de cette inscription.
Art. 9. — Lorsqu'un représentant professionnel se sera rendu
coupable d'une infraction à la loi on d'un acte malhonnête con-
cernant ses propres aiTaires, le chef du Bureau des brevets d'in-
vention pourra le suspendre ou lui interdire Texercice de sa
profession.
Art. 40. — Toute demande ou réclamation en matière de
brevets sera déclarée nulle et de nul effet, si les formalités ré-
glementaires ou éventuellement prescrites n'ont pas été remplies
soit dans le délai déterminé par la présente loi ou par une or-
donnance ultérieure qui en dérivera, soit dans le délai fixé par
le chef du Bureau des brevets d'inventiou ou par le président du
Tribunal du Bureau des brevets, conformément à la présente loi
on à une ordonnance ultérieure qui en dérivera.
Art. H. — Toute personne qui voudra obtenir un brevet d'in-
vention devra adresser au chef du Bureau des brevets d'invention
une demande tendant à l'obtention de ce brevet, à laquelle de-
vront être joints : une description de chaque invention; des des-
sins explicatifs.
'"^•v»»'".T. »*^^^.!r ;< T -
— 114 —
Le chef da Bureau des brevets pourra, s*il le juge nécessaire,
exiger le dépôt de modèles ou échantillons.
Art. 12. — Toute invention formant l'objet d'une demande
de brevet devra être soumise à Texaminateur du Bureau des bre-
vets d'invention.
Art. 43. — Si, après examen, l'examinateur décide qu'il y a
lieu de délivrer le brevet sollicité, le chef du Bureau des brevets
enregistrera, au rôle des brevets, celui qui sera remis au dépo-
sant.
Le certificat sera signé par le chef du Bureau des brevets d^in-
vention. On y joindra la description de Tinvention et les dessins
explicatifs.
Art. 14. — Dans le cas où une personne ayant déposé, pour
une invention, une demande de brevet dans l'un des Etats de
l'Union internationale pour la protection de la propriété indus-
trielle déposerait dans les sept mois à dater du jour du premier
dépôt une demande tendant à Tobtention d'un brevet relatif à
la même invention, ce dépôt ultérieur aurait le même effet que
s'il avait été fait au même moment que le premier dépôt.
Art. 15. — Quiconque veut prendre part à une exposition ou
à un concours organisé soit par le Gouvernement, soit par une
administration départementale de Fu ou de Ken (préfecture)
et a rintention de déposer ultérieurement une demande de bre-
vet pour un article qu'il y aura exposé et qui est le produit de
son invention, est tenu de déclarer cette intention au Bureau des
brevets avant l'admission de cet article à l'exposition ou au con-
cours.
Dans le cas prévu par l'alinéa précédent, si la demande de bre-
vet a été déposée dans les six mois à dater de l'admission de Fob-
jetde l'invention à l'exposition ou au concours,Ie dépôt aura le mê-
me effet que s'il avait été fait au moment même de la déclaration
de ladite intention.
Sera également valable dans l'Empire, le délai que l'un des
Etats de l'Union internationale pour la protection de la propriété
industrielle accordera pour le dépôt de la demande de brevet
relative aux objets admis à une exposition internationale qui a
lieu sur son territoire.
Art. 16. — S11 s'agit d'une invention dont l'intérêt public
réclame la vulgarisation ou dont l'utilisation au point de vue
militaire est nécessaire ou doit être gardée secrète, le chef du
Bureau des brevets d'invention pourra n'accorder le brevet que
sous conditions, ou même le refuser ou imposer des conditions
relatives à la jouissance d'un brevet déjà accordé, ouïe révoquer
suivant qu'il jugera lui-même nécessaire l'une ou l'autre de ces
f^V
— 115 —
mesures ou qu'elle lui aura été demandée par l'autorité compé*
tente.
Dans ces cas» le Gouvernement devra accorder une compen-
sation à rinventeur ou au titulaire du brevet.
Art. 17. — Quiconque aura demandé un brevet pour une in-
vention ayant pour objet des perfectionnements apportés à une
autre invention antérieurement brevetée au profit d'un tiers devra,
quand Tobjet de sa demande aura été jugé brevetable, s'entendre
avec le porteur du brevet original et obtenir son consentement
pour exploiter l'invention principale.
Au cas où ce consentement n'aura pu être obtenu, l'inventeur
devra rapporter le fait au chef du Bureau des brevets et lui ex-
poser la situation. Si le chef du Bureau des brevets d'invention
trouve la plainte justifiée, il pourra délivrer le brevet de*
mandé. Toutefois, le titulaire du brevet ainsi obtenu ne pourra
pas en bénéficier avant d'avoir payé au porteur du brevet ori-
ginal une indemnité que le chef du Bureau des brevets fixera.
ART. 18. — Quiconque n'acceptera pas les indemnités mention-
nées dans les deux articles précédents pourra en appeler aux tri-
bunaux sans que, toutefois, l'exécution des mesures prescrites
par l'article 16 puisse être suspendue.
Art. 19.— Tout titulaire de brevet pourra obtenir un brevet
additionnel pour une invention obtenue par l'utilisation d'une
précédente invention à lui appartenant.
Le brevet additionnel se transmet et s'éteint conjointement
avec le brevet principal.
Art. 20. — Seront nuls et de nul effet les brevets délivrés
dans l'un des cas prévus ci-après :
lo S'il y a eu violation des dispositions des articles 1*' et 2 ;
20 Si, dans la description, les détails nécessaires à l'exécution
de l'invention ont été intentionnellement omis ;
3» Si des détails non nécessaires à Texécution de l'invention
ont été intentionnellement insérés dans la description.
Art. 21. — Lorsque l'examinateur aura décidé qu'il n'y a pas
lieu de délivrer le brevet demandé, le chef du Bureau des brevets
d^nvention devra envoyer au requérant copie de cette décision.
Art. 22. — Lorsquo l'examinateur aura décidé qu'une inven-^
tion pour laquelle un brevet est demandé se trouve en collision
avec une autre demande de brevet déposée par un tiers, ou avec
an brevet déjà délivré au profit d'un tiers, le chef du Bureau des
brevets d'invention devra envoyer copie de cette décision aux
intéressés.
Art. 23. -*- Quiconque ne sera pas satisfait de la décision prévue
par les deux articles précédents pourra» dans un délai de
soixante jours à dater du jour où la décision lui aura été notifiée»
- il6-
raloir, auprès du chef du Bureau des brevets d'iiiTention
Dtifs de son refus et réclamer un nouvel examen.
s le cas où un nouvel examen aurait été ainsi réclamé, le
u Bureau des brevets d'invention soumettra l'alTaire à on
nateur qai n'aura pas pris part au premier examen,
et examinateur rejette les motifs sur lesquels s'appuie la
ide de revision, le cher du Bureau des brevets d'invention
netlra cette décision au requérant.
24. — Lorsqu'il aura été reconnu, après examen, qu'une
ion se trouve en collision avec une autre invention, le
1 Bureau des brevets d'invention invitera les intéressés à
r des renseignements circonstanciés sur leur invention. II
aluer par Texaminateur sur la question de la propriété
diverses inventions, et sa décision sera portée par écrit
nnaissance des intéressés.
25. — Lorsque, dans le cas de l'article précédent, un bre-
|à délivré aura été annulé, et qu'un nouveau brevet aura
sordé à l'invenleur, ce brevet ultérieurement délivré sera
comptera partir dn jour de l'enregistrement du premier
26. — Lorsqu'un breveté s'apercevra que les descriptions
ins relatifs h son invention sont insuffisants, il pourra
er l'amendement de son brevet et, dans ce but, il renou-
la description ou les dessins qu'il joindra à sa demande.
ra de même, s'il reconnaît la nécessité de diviser un bre-
plusieurs brevets distincts. Toulefois, les dispositions de
cle ne s'appliquei'ojit pas au cas où il s'agirait d'introduire
ingements essentiels dans l'invention.
37. — Les réclamations visées par l'article précédent se-
u mises à L'examinateur,
^nque, dans ce cas, ne sera pas satisfait de la décision de
nateur pourra en réclamer un nouvel examen, en se con-
t aux dispositions de l'article 23.
28. — Quiconque ne sera pas satisfait du résultat de la
I visée par les articles 23 et 27 pourra, dans tes soixante
dater du Jour de la réception de cette décision, réclamer
meut du Bureau des brevets d'invention.
sera de même pour le refus d'admettre la décision spé-
l'artideai.
Î9. — Lorsqu'il aura été reconnu que plusieurs inventions
ivetées ae trouvent en collision entre elles, ou qu'une in-
brevetée est en collision avec un produit ou procédé non
, les intéressés pourront réclamer lejugementdu Bureau
vêts d'invention, afin de faire préciser leurs droits res-
W^fT^HpilfUiHlliHii «î*^
— 117 —
Art. 30. — Quiconqae aura reconna qu'âne invention brevetée
se trouve dans l'un des cas prévus par Tarticle 20, pourra inteu:
ter uue action en nullité du brevet délivré, et réclamer à cet
effet le jugement du Bureau des brevets d'invention.
Art. 31. — Toutes les fois que le Bureau des brevets d'inven-
tion le jugera nécessaire en vue de prononcer sur un examen ou
un jugement ou de Qxer le montant d'une compensation, il
pourra, sur la demande des parties, procéder lui-même à la
recberche des preuves ou de requérir le tribunal de Ku (justice
de paix) du lieu où Taffaire en question doit être traitée, de
procéder à. cette opération.
En ce qui concerne cette recherche des preuves^ on appliquera
par analogie les dispositions du Code de procédure civile, sec-
tions 5 à 11, chapitre i«% livre II.
Art. 32. — Toutes les affaires soumises au jugement du Bureau
des brevets d'invention seront examinées par trois ou cinq juges,
sous la présidence de l'un d'entre eux.
La décision des juges devra être accompagnée d'un exposé
des motifs.
Art. 33. — La demande de jugement devra être dûment mo-
tivée et rédigée en double expédition.
Le Bureau des brevets d'invention, au reçu de cette demande»
en fera parvenir le duplicata à la partie défenderesse et l'invitera
à produire une réplique en double expédition dans un délai
convenable qu'il lui fixera.
Le Bureau des brevets d'invention, dans les cas où il le jugera
nécessaire, pourra inviter le demandeur et le défendeur à pré-
senter respectivement une réfutation et une nouvelle réplique
dans un délai fixé.
' Le président des juges pourra, d'office ou sur la demande
commune des parties, rendre un jugement oral.
Tout jugement oral sera public.
Aat. 34. — Lorsque le demandeur ou le défendeur n'aura pas
présenté, dans le délai réglementaire ou dans un délai spéciale-
ment fixé, la réponse ou réfutation nécessaire, ou lorsqu'il n'aura
pas comparu aux débats, le président des juges pourra, après
audition de la partie adverse^ prononcer le jugement.
Art. 35. — Quiconque ne sera pas satisfait des décisions ren-
dues en vertu des dispositions de l'alinéa 2 de l'article 28, de l'ar-
ticle 29 et de l'article 30, pourra se pourvoir à la Cour suprême
dans les soixante jours à datep du jour de la notification de
ces décisions, mais seulement s'il peut baser sa plainte sur
une violation ou une fausse application de la loi.
En ce qui concerne les pourvois et jugements mentionnés à
l'alinéa précédent, les dispositions du Code de procédure civile
— 118 —
relatives aux pourvois et à leur jugement seront applicables
par analogie.
Art. 36. — Si la Coup suprême admet le bien-fondé du pourvoi,
elle cassera la décision primitive et renverra Taffaire au Bureau
des brevets pour qu'elle y soit re visée.
Les opinions exprimées par la Cour suprême sur un point de
droit, en rendant une décision, sont obligatoires pour le Bureau
des brevets d*invention dans Taffaire en question.
Art. 37. — Le président des juges déterminera, selon son ap-
préciation, l'imputation et le montant des frais du jugement re-
quis dans le cas de l'alinéa 2 de l'article 28, de Tarticle 29 et de
Particle 30.
Dans les cas où la Cour suprême aura statué sur la répartition
des frais de procédure entre les intéressés, le président des juges
en déterminera aussi le montant selon son appréciation.
En ce qui concerne les frais mentionnés aux deux alinéas pré-
cédents, seront applicables par analogie les dispositions du Code
de procédure civile, articles 72 à 82 et 86, et celles de la loi
sur les frais des procès civils.
Art. 38. — Lorsqu'une invention déjà brevetée se trouvera
dans l'un des cas ci-après .énumérés, le chef du Bureau des bre-
vets d'invention pourra révoquer le brevet relatif à cette inven-
tion :
i^ Si le breveté, n'ayant pas publiquement mis en exploitation
son invention dans l'Empire trois ans après la date du brevet on
ayant cessé depuis au moins trois ans d'exploiter publiquement
son invention dans l'Empire a refusé néanmoins, sans motif va-
lable, la cession ou la licence de ladite invention à une tierce
personne qui offrait des conditions convenables ;
20 Si le breveté, soixante jours après l'échéance, n'a pas en-
core acquitté le payement de la taxe ;
3^ Si le breveté, sans un motif valable, est resté six mois on
plus sans constituer le représentant mentionné k l'article 6.
Art. 39. — Le breveté aura k payer une taxe annuelle de dix
yens par brevet.
Cette taxe annuelle sera augmentée d'une surtaxe de 5 yens
tous les trois ans (i).
(1) Le yen vaut environ 5 fr. 23. La taxe ressort ainsi à :
3 ans fr. 156.90
3 » » S85.3d
3 » » 313.80
3 » » 392.25
3 » » 470,70
Total fr. 1,569. », valeur en or.
— 119 —
Lorsque le breveté aura obtenu un brevet additionnel, il ver-
sera la somme de vingt yens une fois payée.
Art. 40. — Les taxes annuelles seront payables d'avance pour
une année entière, au jour anniversaire de la délivrance du bre-
vet. Cependant, la taxe de la première annuité et la taxe du bre-
vet additionnel seront payables dans un délai de soixante jours
à partir du jour où la décision relative au brevet aura été no-
tifiée à rintéressé.
Les taxes versées d'avance ne seront pas restituées ; toutefois,
peuvent être restituées les annuités qui ne sont pas encore exigi-
bles, si elles ont été payées par anticipation.
Art. 41. — Le breveté est tenu de revêtir les articles de son
invention d'une indication propre à faire connaître qu'ils sont
brevetés.
Art. 42. — Le Bureau des brevets d'invention publiera, dans
un bulletin ofOciel, les descriptions et dessins des brevets dé-
livrés, les modifications apportées aux brevets, les mutations de
propriété des brevets et tous les autres faits relatifs aux brevets
délivrés et dont la publication est nécessaire, sans toutefois que
ces publications puissent porter préjudice à ce qui doit rester
secret.
Art. 43. — Quiconque en fera la demande pourra obtenir, du
Bureau des brevets d'invention, des copies de dossiers, des repro-
ductions de dessins et Tautorisation de consulter le rôle des bre-
vets, sauf pour ces qui doit être tenu secret.
Art. 44. — Les témoins et les experts qui auront porté un
faux témoignage ou fait une expertise frauduleuse devant le Bu-
reau des Brevets d'invention ou devant le tribunal désigné seront
punis d'emprisonnement majeur d'un mois à un an et d'une
amende de cinq à cinquante yens.
Quiconque aura^ par corruption ou par tous autres moyens,
amené une tierce personne à porter un faux témoignage ou à
faire une expertise frauduleuse encourra la peine édictée à l'ali-
néa précédent.
Les auteurs des infractions prévues dans les deux alinéas pré-
cédents, qui se seront dénoncés au Bureau des brevets d'inven-
tion ou au tribunal désigné, antérieurement à la décision de
Texaminateur ou des juges ou encore à la décision du chef du
Bureau des brevets d'invention relative aux indemnités, seront
exemptés des peines encourues.
Art. 45. — Quiconque aura contrefait ou imité l'objet d'une
invention brevetée, ou aura employé ou vendu sciemment un
article contrefait ou imité ou aura usurpé sciemment un procédé
breveté par autrui, ou aura employé ou vendu sciemment un
produit obtenu par une tierce personne d'après un procédé bre-
— Ivîl —
année deMeiji (i 888) concernant les brevets d'invention se trou-
vera abrogée à dater du jour où la présente loi deviendra exé-
cutoire.
Les brevets délivrés conformément aux lois antérieures à la
présente loi auront, durant le temps qui leur a été assigné, la
même valeur que ceux obtenus d'après la présente loi.
Toutes demandes ou réclamations relatives aux brevets, qui
n'auront pas été expédiées avant le jour de la mise en vigueur de
la présente loi, seront traitées comme les demandes ou réclama-
tions formulées conformément à la présente loi.
Art. 4180.
IéëgîmUk.tîonm étrangère». — Japon. —
De««ins et miMlèle».
Loi sur les dessins et modèles industriels (1)
(n*» 3'7du2 mars 1899).
(2) Art. i*'. — L'auteur d'un dessin ou modèle nouveau, ap-
plicable à un article industriel et relatif à sa forme, à son des-
sin, à ses couleurs ou à la combinaison de sa forme, de son
(1) Comme la nouvelle loi japonaise sur les brevets d'invention, celle
sur les dessina et modèles industriels repose sur les mêmes principes
généraux que celle dont elle vient prendre la place (voir Rec. lég.
prop. ind. Berne, 1897, t. 2, p. 746).
Le changement capital qu'on y constate est qu'elles prévoient la pro-
tection des étrangers, dont il n'était pas parlé dans les lois précédentes,
et qu'elle contient des dispositions spéciales destinées à appliquer
aux ressortissants de l'Union internationale les délais de priorité et la
protection temporaire en cas d'exposition, conformément aux stipula-
tions de la Convention du 20 mars 18b3. En outre, les principes et la
procédure établis par la loi sur les brevets pour le dépôt, l'examen préa-
lable, les actions en nullité et les recours contre les décisions adminis-
tratives, ont été rendus applicables en matière de dessins et de modèles»
par un simple renvoi aux divers articles de la susdite loi, en sorte
qu'il y a unification complète sur tous ces points dans les diverses bran-
ches de la propriété industrielle.
Les taxes ont été notablement augmentées ; elles s'élèvent à 15 yens
(78 francs), au lieu de 10.
Les peines qui frappent la contrefaçon ont été aggravées ; au lieu d'un
emprisonnement de 15 jours à 6 mois ou d'une amende de 10 à 100
yens, le contrefacteur est passible, en matière de dessins et modèles, de
15 jours à un an de prison ou de 10 à 200 yens d'amende. La loi prononce
(2) Texte français communiqué au Bureau de Berne par le Ministère
du commerce du Japon.
'Tf^'Zr
122
dessin et de ses couleurs, ou les ayants cause d'un tel auteur,
pourront, conformément à la présente loi, obtenir l'enregistre-
ment de ce dessin ou modèle, et s*en assurer Tusage exclusif.
Art. 2. — Ne seront pas admis à Tenregistremenl :
1° Les dessins et modèles reproduisant le chrysanthème des
armes impériales ou une représentation analogue ;
20 Ceux qui peuvent porter atteinte à Tordre public ou aux
bonnes mœurs ;
3° Ceux qui, avant le dépôt de la demande dVnregistremenf,
étaient déjà connus du public ou entrés dans Tusage public, ou
qui ressemblent à de tels dessins et modèles, à moins, toutefois,
qu'ils ne rappellent des dessins ou modèles originaux du même
auteur.
Art. 3. — La durée de l'usage exclusif d'un dessin ou modèle
est de dix ans, à dater du jour de son enregistrement au rôle
des dessins et modèles industriels. La durée de l'usage exclusif
d*un dessin ou modèle qui en rappellera un autre, sera celle de
Toriginal.
Art. 4. — L'usage exclusif d'un dessin ou modèle sera limité
aux articles désignés par le déposant d'après la classification
établie par le Ministre de l'Agriculture et du Commerce.
Art. 5. — En ce qui concerne un dessin ou modèle exécuté
pour le compte d'autrui ou aux frais d*un patron, le droit à l'en-
registrement appartiendra, sauf stipulation contraire, à celui qui
a fait la commande ou audit patron.
Art. (i. — Le droit à l'usage exclusif d'un dessin ou modèle
pourra, avec ou sans restriction, être cédé, mis en communauté
ou donné en gage. En pareil cas. Pacte devra, pour être opposa-
ble aux tiers^ être enregistré en suite d'une demande adressée
à cet effet au Bureau des brevets d'invention.
Le propriétaire d'un dessin ou modèle qui en possédera un ou
plusieurs autres similaires, ne pourra obtenir l'enregistrement
mentionné à l'alinéa précédent que s'il cède, met en communauté
ou donne en gage ensemble ces divers dessins ou modèles.
Art. 7. — Aucun agent du Bureau des brevets d'invention,
tant qu'il conservera sa fonction ou son emploi, ne pourra ob-
eii outre, des peines sévères contre ceux qui ont obtenu un enregistre-
ment par la fraude ou qui font passer pour enregistré un objet qui ne
Test pas et contre ceux qui se sont rendus coupables de faux témoignages
ou d'expertises frauduleuses ou s'en sont faits les instigateurs. L'an-
cienne disposition privant de toute action en dommages-intérêts celai
qui avait omis d*apposer sur ses produits la mention relative à leur
enregistrement, a été atténuée en ce sens qu'en pareil cas Tintéressé
ne pourra actionner que celui qui a sciemment usurpé ses droits. (Cette
note est empruntée, en partie, à la Prop, ind,ii9&9f 181.)
— 123 —
tenir le droit à Tusage exclusif d*un dessin ou modèle, à moins
qu'il ne I*ait acquis par voie de succession, ou que ce droit ne
soit antérieur à son entrée en fonctions.
ART. 8. — Quiconque voudra obtenir l'enregistrement d*un
dessin ou modèle devra adresser au chef du Bureau des brevets
une demande accompagnée, pour chaque dessin ou modèle, de
la désignation des articles auxquels il doit s'appliquer et d'une
reprod action, d'un échantillon ou d'une figuration dudit dessin
ou modèle.
Le chef du Bureau des brevets pourra exiger du déposant des
reproductions, échantillons ou figurations supplémentaires, ainsi
que des notes explicatives.
Art. 9. — Si deux ou plusieurs personnes demandent l'enre-
gistrement de dessins ou modèles, identiques ou similaires, c'est
la première demande qui sera enregistrée. Au cas où les deman-
des auraient été déposées simultanément, aucune d'elles ne sera
enregistrée. Néanmoins, si les déposants demandent, d'un com-
mun accord, l'enregistrement en leur nom collectif, ou s'il ne
subsiste qu'un seul- déposant, ou procédera à l'enregistrement.
Art. 10. — Lorsque la demande d'enregistrement d'un des-
sin ou modèle sera présentée dans l'Empire dans le délai de
quatre mois à dater de son dépôt dans l'un des États de l'Union
internationale pour la protection de la propriété industrielle,
cette demande aura le môme effet que si elle avait été faite à la
date dudit dépôt.
Art. 11. — L'enregistrement d'un dessin ou modèle sera
nul et de nul effet s'il contrevient aux dispositions des articles
1««", 2, 5 ou 9.
Art. 12. — Le chef du Bureau des brevets pourra radier l'en-
registrement d'un dessin ou modèle dans l'un des cas suivants :
io Lorsque le propriétaire du certificat d'enregistrement d'un
dessin ou modèle n'aura pas acquitté la taxe d'enregistrement
dans un délai de soixante jours à compter de la date fixée pour
ce payement ;
2^ Lorsque, sans motifs plausibles^ il n'a pas constitué dans les
six mois, conformément à l'article 22, le représentant mentionné
à l'article 6 de la loi sur les brevets d'invention.
Art. 13. — Le propriétaire du certificat d'enregistrement des
dessins ou modèles aura à acquitter, pour chaque dessin ou mo-
dèle, une taxe annuelle fixée à trois yens pour les trois premiè-
res années, cinq yens pour les trois années suivantes et sept
yens pour les quatre dernières années (1).
Pour l'enregistrement d'un dessin ou modèle similaire, la taxe
par dessin ou modèle sera de trois yens une fois payés.
(i) Le yen or vaut 5 fr. 23 environ.
9^9^ J' ^".^t
— 124 —
Art. 14. — Les taxes annuelles seront payables d'avance pour
une année entière, à la date que porte le certificat d'enregistré*
ment. Cependant, celle pour la première année et celle visée
par Talinéa 2 de l'article précédent seront payables dans un délai
de soixante jours à partir de la date où la décision accordant Ten-
registrement aura été signifiée au déposant.
Les taxes versées d'avance ne seront pas restituées ; les annui-
tés non encore exigibles peuvent, toutefois, être restituées, si
elles ont été payées par anticipation.
Art. 45. — Le propriétaire du certificat d'enregistrement d'an
dessin ou modèle est tenu d'apposer, sur les articles auxquels
est appliqué le dessin ou modèle, une indication constatant l'en*
registrement.
Art. 16. — Les témoins et experts qui auront porté un faux
témoignage ou fait une expertise frauduleuse devant le Bureau
des brevets ou devant le tribunal désigné, seront punis d'empri-
sonnement majeur d'un mois à un an et d'une amende de cinq
à cinquante yens.
Quiconque aura, par corrjaption ou par tous autres moyens,
amené un tiers à porter un faux témoignage ou à faire une
expertise frauduleuse, encourra les peines édictées à Falinéa
précédent.
Les auteurs des infractions prévues par les deux alinéas pré-
cédents, qui se seront dénoncés au Bureau des brevets d'inven-
tion ou au tribunal désigné, antérieurement à la décision de
l'examinateur ou du juge de Taffaire en question, seront exemp-
tés des peines susmentionnées.
Art. 47. — Sera puni d'emprisonnement majeur, de quinze
jours à un an ou d'une amende de dix à deux cents yens, qui-
conque aura contrefait ou imité le dessin ou modèle d'autrui, ou
vendu sciemment des articles fabriqués d'après un dessin ou
modèle contrefait ou imité.
Sera puni des mêmes peines quiconque aura importé de l'é-
tranger un article qu'il savait pouvoir nuire à un dessin ou mo-
dèle déjà enregistré en faveur d'un tiers, ou qui aura vendu sciem-
ment cet article.
Art. 18. — Les objets conflsqués dans les cas de l'article pré-
cédent seront remis au propriétaire du dessin ou modèle enre-
gistré.
Art. 19. — Sera puni d'emprisonnement majeur de quins^
jours à six mois ou d'une amende de dix à cent yens quiconque
aura frauduleusement obtenu l'enregistrement d'un dessin ou
modèle qu apposé une indication d'enregistrement ou une men-
tion similaire sur un article muni d'un dessin ou modèle non
|l^ii^,Bi|W»nip}iPUiiJi «.■^ni.i|4pi.i««,\PI^Jippi3nppa|pV^
:ar'
— 125 —
enregistré, oa qui aura sciemmeut vendu un article ainsi mar-<
que.
Sera puni des mêmes peines quiconque, pour faire valoir
des articles munis d'un dessin ou modèle non enregistré, aura
inséré dans une annonce, enseigne ou un prospectus, une
mention pouvant faire croire que ledit dessin ou modèle a été
enregistré.
Art. 20. — Les infractions prévues par Tarticle i7 ne seront
poursuivies que sur la plainte de la partie lésée.
Art. 21. — Le propriétaire du certificat d'enregistrement d^un
dessin ou modèle, qui aura négligé de revêtir ses articles d'une
indication d'enregistrement, ne pourra réclamer d'indemnité que
de ceux qui auront sciemment préjudicié à son droit de pro-
priété.
Art. 22. — Les dispositions des articles 6 à 10, 12, 13, 1^,21,
23, 28 à 37, 43 et 51 de la loi sur les brevets d'invention seront
applicables, par analogie, en matière de dessins et modèles.
Dispositions additionnelles (I).
Art. 23. — La présente loi entrera en vigueur à dater du
premier jour du septième mois delà trente-deuxième année de
Mei.ii(i« juillet 1899).
Art. 24. — L'ordonnance impériale n** 85 de la vingt-unième
année de Meiji (1888) sera abrogée à dater du jour de la mise en
vigueur de la présente loi.
Les enregistrements obtenus en vertu de la susdite ordonnance
auront, pendant tout le temps qui leur aura été assigné, la même
valeur que ceux obtenus conformément à la présente loi.
Toutes les demandes et réclamations sur lesquelles il n'aura
pas été statué avant la mise en vigueur de la présente loi seront
examinées d'après les dispositions de cette loi.
Art. 4181.
liéffUilatlon» étrangères. —Japon. — ]IIari|ae«.
Loi sur les marques de fabrique ou de commerce (2)
(No 38 du 2 mars 1899).
(3) Art. l»». — Quiconque veut se réserver l'usage exclusif
(1) Voir le règlement dans la notice citée p. 120, note 1.
(2) Môme observation générale que pour la loi sur les dessins et mo-
(3) Texte français communiqué au bareau de Berne par le Ministère
du Commerce du Jupon.
'"ï^^ r^ T "r»"*i-
— 126 —
d'une marque servant à distinguer ses marchandises, est tena
de demander Tenregistrement de cette marque conformément à
la présente loi.
Art. 2. — Ne pourront être enregistrés comme marques de
fabrique et de commerce les lettres, figures et signes suivants :
1^ Ceux qui représentent le chrysanthème des armes impé-
riales ou qui lui ressemblent ;
2« Ceux qui représentent le drapeau national, le drapeau mili-
taire, les insignes des ordres impériaux et les drapeaux étran-
gers, ou qui leur ressemblent;
3o Ceux qui pourraient porter atteinte à Tordre public ou aux
bonnes mœurs, ou qui pourraient tromper le public;
4<* Ceux qui, destinés à être apposés sur des marchandises de
même nature que celles d'un tiers, sont identiques ou sembla-
blés à une marque de fabrique ou de commerce déjà enregistrée
en faveur de ce tiers, ou à une marque antérieurement employée
par un tiers et tombée en déchéance depuis moins d'une année ;
5^ Ceux qui sont identiques ou similaires à une marque de
fabrique ou de commerce déjà en usage avant la mise en vigueur
de la présente loi ;
6<* Ceux qui consistent, soit en une désignation communément
employée pour désigner une marchandise en général, soit dans
rindication de la provenance d'une marchandise, soit dans l'in-
dication de la nature, de la qualité ou de la forme d'une mar-
chandise, au moyen de lettres, de figures ou de signes commu-
nément usités dans le commerce, soit dans la reproduction, en
lettres ou caractères usuels, des nom et prénoms d'un individu,
d'un nom commercial ou d'une raison sociale particulière aune
compagnie ou association, si ces nom, prénoms et raisons so-
ciales sont d'un usage courant ;
7° Ceux qui consistent en un encadrement, en nu dessin de
fond ou en autre élément dépourvu de toute apparence distînc-
tive.
Art. 3. — Le droit à l'usage exclusif d'une marque de fabri*
dèles (voir loi du 18 déc. 1888, Rec. lég. prop. md., Berne, 1897, L^,
p. 757). Seulement la taxe est de 30 yens (157 fr«), la pénalité en ma-
tière de contrefaçon est de 1 mois à 2 ans de prison ou de 100 à 200 yens
d'amende. Est supprimée la défînition restrictive qui se trouvait dans
la loi précédente et qui aurait empêché Tapplication intégrale de l'ar-
ticle 6 de la Convention d'Union.
Jusqu'ici, les entreprises commerciales ou industrielles étaient seules
admises à faire enregistrer leurs marques^ La nouvelle loi étend cette
faculté aux syndicats professionnels autorisés par Tadministration «
(Cette note est empruntée, en partie, à la Prop, ind.^ 1899. 181.)
— 127 —
que ou de commerce est limité à vingt ans. Ce délai court à
partir de la date de l'enref^iatrement des marques [i).
Une marque de fabrique ou de commerce déjà enregistrée à
l'étranger, et qu'on aura fait enregistrer dans l'Empire, jouira
de la durée de protection obtenue en vertu du premier enregis-
trement, sans cependant que cette durée puisse dépasser vingt
ans.
Art. ^. — Si le propriétaire de la marque de fabrique ou de
commerce désire continuer à jouir de sou droit exclusif après
l'expiration du terme de protection, il pourra renouveler l'eu-
regislremeut.
Akt. 5. — L'usa(;e exclusif d'une marque sera limité aux mar-
chandises désignées par le déposant d'aprës la classification éta-
blie par le Ministre de l'Agriculture et du Commerce.
Aht. 6. — Le propriétaire de la marque de fabrique ou de
commerce ne pourra la céder ou la mettre en communauté que
s'il cède ou met en communauté éi^alement son établissement.
Dans ce cas, l'acte devia, pour être opposable aux tiers, être
enregistré en suite d'une demande adressée à cet elTet au Bureau
des brevets d'inveution.
Si le propriétaire d'une marque de fabrique ou de commerce
enregistrée possède une ou plusieurs autres marques de fabrique
ou de commerce similaires et applicables à des articles identi-
ques, il ne pourra obtenir l'enregistrement susmentionné que s'il
cède ou met en communauté ensemble ces deux marques de fa-
brique ou de commerce, ou s'il renonce à l'usage de la seconde.
Abt. 7. — Quiconque voudra obtenir l'enregistrement d'une
marque de fabrique ou de commerce, sera tenu d'en adresser la
demande écrite au chef du Bureau des brevets, en y joignant un
exemplaire de cette marque et eu spécitlant les marchandises
auxquelles elle est destinée.
Aht. 8. — Si deux ou plusieurs personnes demandent l'enre-
gistrement d'une même marque ou de marques qui se ressem-
blent, dans le but de les apposer sur les mêmes marchandises,
la demande qui aura été reçue la première sera seule enregistrée.
Si les demaudes sont simultanées, l'enregistrement ne sera fait
que s'il ne subsiste qu'une seule demande.
Art. 9. — Lorsque la demande sera présentée dans l'Empire
dans le délai de quatre jnois à dater de son dépAt dans l'un des
Etals de l'Union internationale pour la protection de la propriété
(I) Le bureau dts Patenies a décidé le 25 juin 1899 que le négociant
japonais qui a le premier déposé une murque au Japon ne peut en
être dépossédé par l'étranger, même si celui-ci justifie qu'il a le pre-
mier créé la marque et qu'elle a été usurpée par le négociant japonais
{La Prop. ind.,i%m. 158).
— 123 —
industrielle, cetle demande aura te même effet que si elle avait
été faite à la date dudit dépât.
Aht. 10. — L'enregistrement d'une marque de fabrique ou de
nerce sera nul et de nul eiïet s'il contrevient aux dispositions
trticles S ou 8. Exception est faite cependant en faveur des
lues enregistrées tombant sous les prescriptions des alinéas
5 de l'article 2, ou enregistrées contrairement aux disposi-
ide l'article 8, lorsqu'il se seru écoulé trois ans depuis leur
gislrement.
T. il, — Le chef du Bureau des brevets d^nvenlion pourra
»r du rôle des marques toute marque enregistrée qui se
'era dans l'un des cas suivants :
lorsque le propriétaire d'une marque enregistrée aura,
s l'enregistrement, joint à sa marque apposée sur un arlicle
fausse indication relative à l'origine ou à la qualité de cet
le;
Lorsque, sans motif valable, le propriétaire d'une marque
gislrée sera resté plus de six mois sans constituer, confor-
lent k l'article 28, le représentant mentionné k l'article Ode
li sur tes brevets d'invention.
iT. 12. -- Le droit à l'usage exclusif d'une marque s'éteiut
la cessation de l'entreprise à laquelle le propriétaire de la
lue l'avait destinée.
T. 13. — Tout déposant de marque de fabrique ou de corn-
;e payera une taxe de trente yens par marque et par calé-
1 de produits (I). La taxe sera la même pour le réenregis-
ent d'une marque à l'expiration du terme de protection.
T. 14. — Le Bureau des breveta d'invention publiera, dans
ulletiu ofliciel des marques de Fabrique et de commerce,
les renseignements nécessaires concernant l'enregistrement
marques de fabrique el de commerce.
iT. 15. — Les témoins et experts qui auroul porté un faux
lignage ou fait une expertise frauduleuse devant le Bureau
jrevels d'invention ou devant le tribunal désigné, seront pu-
. 'emprisonnement majeur d'un mois à un an et d'une amende
nq à cinquante yens.
liconque aura, par corruption ou par tous autres moyens,
16 un tiers à porter un faux témoignage ou à faire une ex-
se frauduleuse, encourra les peines édictées à l'alinéa pré-
nt.
s auteurs des infractions prévues par les deux alinéas pré-
nts, qui se seront dénoncés an Bureau des brevets d'invention
u tribunal désigné, antérieurement à la décision de l'exami-
■■ •nwv^
— 129 —
nateur oa du juge de raffaire en question» seront exemptés des
peines mentionnées plus haut,
Art. 16. ~~ Sera puni d'emprisonnement majeur d'un mois à
deux ans ou d'une amende de vingt à cinq cents yens, celui qui,
sciemment et sans le consentement du propriétaire, aura contre-
fait une marque de fabrique ou de commerce enregistrée, ou
aura fabriqué une marque identique ou similaire à cette dernière
et l'aura donnée ou vendue, ou qui aura revêtu une marchandise
de même nature d'une marque appartenant à autrui ou d'une
marque identique ou similaire, ou qui aura sciemment vendu
ou conservé pour la vente un article ainsi marqué.
Sera puni des mêmes peines, celui qui aura sciemment em-
ployé, pour une marchandise de même nature, un récipient ou
un emballage, etc., revêtus d'une marque enregistrée par autrui,
ou qui aura, sciemment, vendu ou conservé pour la vente un
article ainsi marqué, ou qui, pour faire valoir ses propres mar-
chandises, aura introduit dans une annonce, une enseigne ou un
prospectus, etc., une marque identique ou similaire à une mar-
que déjà enregistrée en faveur d'autrui.
Art. 17. — Sera puni d'emprisonnement majeur de quinze
jours à un an ou d'une amende de dix à trois cents yens, celui
qui aura obtenu frauduleusement un enregistrement ou qui aura
indiqué qu'une marque était enregistrée, quand elle ne Tétait
pas, ou qui l'aura munie d'une indication pouvant la faire pren-
dre pour une marque enregistrée par suite d'une confusion, ou
qui aura sciemment, vendu ou conservé pour la vente un article
de commerce revêtu d'une de ces marques illégales.
Sera puni des mêmes peines celui qui, pour faire valoir ses
propres marchandises, aura introduit dans une annonce, une
enseigne ou un prospectus, etc., une marque non enregistrée,
avec une mention disant qu'elle Test ou pouvant la faire prendre
pour une marque enregistrée, par suite d'une confusion.
Art. 18. — Dans les cas prévus par les articles 16 et 17, les
marques illégales et les instruments servant à les reproduire
seront confisqués, et si les marchandises, leurs récipients ou
leurs emballages, etc., sont inséparables de la marque, ils seront
détruits avec elle.
Art. 19. — Les infractions prévues par l'article 16 ne seront
poursuivies que sur la plainte de la partie lésée.
Art. 20. — Les dispositions des articles 6 à 10, i2, 13, 15, 21,
23, 28 à 37, 43 et 51 de la loi sur les brevets d'invention seront
applicables, par analogie, en matière de marques de fabrique ou
de commerce.
Art. 21. — Un syndicat professionnel, approuvé par l'adminis-
tration compétente, qui voudra réserver pour son usage exclusif
0
- 130 --
une marque distinctîve à Tlustar des marques de fabrique ou de
commerce, pourra en obtenir l'enregistrement conformément à la
présente loi.
Une marque ainsi enregistrée sera assimilée à une marque de
fabrique ou de commerce.
Dispositions additionnelles (1),
Art. 22. — La présente loi entrera en vigueur à dater du pre-
mier jour du septième mois de la trente-deuxième année de
Meiji (i» juillet 1899).
Art. 23. — L'ordonnance impériale N<* 86 de la vingt-unième
année de Meiji (1888), réglementant les marques de fabrique ou
de commerce, se trouvera abrogée à dater du jour de la mise en
vigueur de la présente loi.
Les enregistrements obtenus en vertu de ladite ordonnance
auront les mêmes effets que les enregistrements obtenus coafor*
mément à la présente loi.
Toutes les demandes et réclamations relatives aux marques de
fabrique ou de commerce, sur lesquelles il n'aura pas été statué
avant le jour de la mise en vigueur de la présente loi, seront
examinées d'après les dispositions de la présente loi.
Art. 24. — En ce qui concerne les marques enregistrées con-
trairement aux dispositions de Tarticle 8 et de Talinéa 3 de l'ar-
ticle 2 de Tordonnance impériale de la vingt-unième année de
Meiji, marques dont la nullité est prévue par Tarticle 10 de la
môme ordonnance, Taction en nullité s'éteindra quand deux ans
se seront écoulés après la mise en vigueur de la présente loi.
Art. 4182.
EiéffUilffttioas étrmngérem. — Japoa. — DiH»lt <l*auie«ir.
Loi sur le droit d'auteur (3 mars 1899) (2).
CHAPITRE I"
Du droit de Vauteur.
Art. l«r. — L'auteur d'écrits, de conférences, peintures eldes-*
sins, sculptures, ouvrages plastiques, photographies et autres
(1) Voir règlement et formalaire^ p. 57 de la notice citée plus haut
(2) Voir étude sur le Japon et la protection des auteurs, le Droit
(Tautetir, 1899, 126 et le rapport de M . Sabouro Yamada aa Congrès de
^ > '.iT "■, 'V- "JF
• >
— 131 —
œuvres da domaioe de la littérature, des sciences ou des arts a
le droit exclusif de les reproduire.
Le droit d'auteur sur une œuvre littéraire ou scientifique com-
prend celui de la traduire, et le droit d'auteur sur une œuvre
dramatique ou musicale celui de l'exécuter et de la représenter
publiquement.
Art. 2. — Le droit d^auteur est transmissible.
Art. 3. — Le droit d'auteur sur une œuvre qui a été publiée,
représentée ou exécutée, durera la vie de Fauteur et trente ans
après sa mort.
Pour un ouvrage composé en collaboration par plusieurs au-
teurs, le droit d'auteur durera trente ans après la mort du dernier
survivant des collaborateurs.
Art. 4. — Le droit d'auteur sur une œuvre posthume publiée,
représentée ou exécutée après le décès de Tante ur, durera trente
ans à partir de sa première publication, représentation ou exé-
cution.
Art. 5.—- Le droit d'auteur sur une œuvre anonyme ou pseu-
donyme durera trente ans à partir de sa première publication,
représentation ou exécution.
Si, toutefois, dans le cours de ce délai, Tauteurfait enref^istrer
son vrai nom, les dispositions de l'article 3 seront applicables.
Art. 6. — Pour une œuvre publiée, représentée ou exécutée
par les autorités publiques, les établissements d'instruction, les
temples shintoistes ou bouddhiques, les associations, sociétés
ou autres corporations quelconques, se déclarant comme auteur
de cette œuvre, le droit d'auteur durera trente ans à partir de
sa première publication, représentation ou exécution.
Art. 7. — Lorsque l'auteur ou son ayant cause n'aura pas
publié la traduction de ses œuvres dans un délai de dix ans à
partir de la première publication de l'œuvre originale, le droit
de traduction cessera d'exister.
Si, dans le cours de ce délai, il publie la traduction de cette
œuvre dans une langue pour laquelle la protection sera réclamée,
son droit de traduction ne s'éteindra pas eu ce qui concerne cette
langue.
Art. 8. — Pour les œ.uvres paraissant en une série de volumes
ou fascicules, les délais mentionnés dans les quatre articles pré-
cédents courront à partir de la date de chaque volume ou fasci-
cule.
Pour une œuvre publiée par livraisons et complétée seulement
quand celles-ci sont terminées, lesdits délais ne comptent qu'à
la Propriété littéraire et artistique, Paris 1900, analyse dans le Droit
et auteur, 1900.103.
t ■ "^ ' *^ "TV'TyTi " » ' "^T
— 132 —
dater de la publication de la dernière livraison. Si, toutefois il
s'est écoulé trois ans sans que les livraisons qui devaient former
la suite paraissent, celle qui a déjà paru sera considérée comme
étant la dernière.
Art. 9. — Pour calculer les délais indiqués dans les six articles
précédents, on ne tient pas compte du reste de Tannée où est
mort Tauteur, ni de celui de Tannée où Touvrage a été publié,
représenté ou exécuté.*
Art. 10. — Le droit d'auteur s'éteint à défaut d'héritiers.
Art. 11. — Ne peuvent pas faire Tobjet du droit d'auteur :
i^ Les lois, ordonnances et les actes officiels des autorités pu-
bliques ;
2^ Les faits divers^ les nouvelles du jour et les articles de dis-
cussion politique insérés dans les journaux et recueils périodi-
ques ;
3* Les discours et plaidoiries prononcés en public devant les
cours et tribunaux, ainsi que dans les assemblées délibéralives
et réunions politiques.
Art. 12. — Quiconque édite, exécute ou fait exécuter une œuvre
anonyme ou pseudonyme est fondé à sauvegarder les droits
appartenant à l'auteur et son ayant cause, excepté le cas où l'au-
teur aura fait enregistrer son vrai nom.
Art. 13. — Le droit d'auteur sur une œuvre faite eu collabo-
ration par plusieurs auteurs appartient en commun à tous les
collaborateurs.
Dans le cas où, les parts des collaborateurs dans une œuvre
n'étant pas distinctes, l'un deux s'opposerait à la publication ou
à la représentation ou exécution de cette œuvre, les autres pour-
ront acquérir, moyennant une indemnité, la part de l'opposant,
à moins de convention contraire.
Mais si, la part de chacun étant distincte, Tun des collabora-
teurs s'oppose à la publication ou à la représentation ou exécution
de Tœuvre commune, les autres pourront en détacher chacun sa
part et la publier ou la représenter, ou Texécuter séparément,
sauf convention contraire.
Dans le cas de l'alinéa 2 du présent article, le nom du co-auteur
opposant ne pourra pas être^ contre sa volonté, mis sur l'œuvre
dont il s'agit.
Art. i4. — Quiconque aura compilé licitement plusieurs tra-
vaux appartenant à différents auteurs, sera considéré comme
auteur de la compilation et aura le droit d'auteur sur l'ensemble
de Tœuvre ainsi composée,ce droit appartenant,ence qui concerne
les parties distinctes de Touvrage, à leurs auteurs respectifs.
Art. 15. -^ L'auteur ou son ayant cause peut faire enregistrer
son droit.
I
— 133 —
L'auteur oa son ayant cause ne pourra, sans avoir fait enregis-
trer son droit, intenter aucune action civile en contrefaçon à
regard d'une œavre publiée, représentée ou exécutée.
A moins d'avoir été légalement enregistrés, la cession et ren-
gagement du droit d'auteur ne seront pas opposables aux tiers.
L'auteur d'une œuvre anonyme ou pseudonyme pourra obtenir
Tenregistrement de son vrai nom.
Art. i6. — Les enregistrements s'opéreront par les soins des
autorités administratives.
Les dispositions relatives aux enregistrements seront ultérieur
rement fixées par une ordonnance.
Art. 17. — L'exemplaire original d'une œuvre qui n'a pas été
publiée, représentée ou exécutée, ainsi que le droit d'auteur sur
cette œuvre ne seront pas saisissables par les crëanciers,à moins
que l'auteur ou son ayant cause n'y ait consenti.
Art. d8.— Le cessionnaire du droit d'auteur ne pourra, sans
le consentement de l'auteur, changer le nom ou prénom de ce-
lui-ci ou une appellation quelconque par lui adoptée, ou modi-
fier le titre de l'ouvrage cédé ou corriger cet ouvrage même.
Art. 19. — L'addition des signes dits « Kun-ten » (1), des tra-
ductions interlinéaires, des ponctuations, des notes critiques,
des annotations ou commentaires, des appendices, des plans et
dessins et d'autres corrections, additions, suppressions faites à
l'œuvre originale ainsi que le remaniement du plan original
(adaptation) de l'œuvre ne créeront pas le droit d'auteur spécia-
lement pour ces modifications, sauf les travaux de ce genre qui
pourraient être considérés comme œuvres nouvelles.
Art. 20. — A l'exception des romans et nouvelles, les articles
des journaux et de recueils périodiques, non pourvus d'une
mention expresse insérée par l'auteur ou son ayant cause pour
en interdire la reproduction, pourront être reproduits avec l'in-
dication de la source.
Art. 21. — Quiconque aura fait licitement une traduction sera
considéré comme auteur et jouira de la protection de la présente
loi.
S'il s'agit d'une œuvre pour laquelle le droit de traduction est
entré dans le domaine public, le traducteur ne peut pas s'opposer
à ce que d'autres personnes traduisent la même œuvre.
Art. 22. — Quiconque aura reproduit licitement une œuvre
artistique par un art différent de celui employé dans la produc-
(1) On appelle « Kun-ten » les signes auxiliaires facilitant chez les
Japonais la lecture des textes chinois. De même les traductions interli-
néaires et les ponctuations ne s'appliquent exclusivement qu'aux textes
chinois.
«
«••»'' v7«pppÇBf«i- . -- « -^f- .=■:,-» jv.T>^tT--»'''^" ^ — »^" •■ •--— «cyr . ^*w Wf-^^
— 134 —
tion de Toriginal sera considéré comme auteur et jouira de la
protection de la présente loi.
Art. 2^. — Le droit d'auteur sur une œuvre photographique
durera dix ans.
Ce délai se compte à partir de Tannée qui suit celle de la pre-
mière publication de Tœuvre dont il s'agit ou celle où a été ob-
tenue répreuve négative de l'édition photographique en cas de sa
non-publication.
Quiconque aura licitement reproduit une œuvre d'art au moyen
de l'art photographique, jouira de la protection de la présente
loi aussi longtemps que durera le droit de reproduction de l'œu-
vre originale dans les limites des conventions privées entre les
ayants droit.
Art. 24. — Le droit d'auteur sur les œuvres photographiques
insérées dans une œuvre littéraire ou scientifique appartiendra
à l'auteur de cette dernière et durera tant que le droit d'auteur
sur celle-ci sera protégé, si l'auteur les a exécutées ou fait exé-
cuter spécialement pour cette destination.
Art. 25. — Le droit de reproduction de portraits obtenus par
la photographie appartient à celui qui en a fait la commande.
Art. 26. ~ Les dispositions relatives aux photographies seront
applicables aux œuvres obtenues par un procédé analogue à l'art
photographique.
Art. 27. — Les œuvres dont Tauteur et son ayant cause sont
restés inconnus et qui n'ont pas été publiées, représentées on
exécutées pourront être publiées, représentées ou exécutées, con-
formément aux prescriptions d'une ordonnance ultérieure.
Art. 28. —Les dispositions de la présente loi seront appliquées
aux étrangers, pour ce qui concerne la protection de leur droit
d'auteur, sous réserve des stipulations spéciales, s'il y en a, con-
tenues dans les traités et conventions ; à défaut de semblables
stipulations, la protection de la présente loi sera accordée à
ceux-là seuls qui auront opéré dans l'Empire la première publi-
cation de leurs œuvres.
CHAPITRE II. — De la contrefaçon.
Art. 29. — Quiconque aura porté atteinte au droit d'auteur
sera considéré comme contrefacteur et sera responsable des torts
ainsi causés, qu'il aura à réparer en conformité avec les disposi-
tions y relatives de la présente loi et aussi avec celles du Gode
civil, livre III, chapitre V.
Art. 30. — Ne seront pas considérés comme une atteinte au
droit d'auteur par rapport à une œuvre déjà publiée :
1* le fait de la reproduire autrement que par un procédé mé-
canique ou chimique et sans intention de la livrer à la publicité;
r
J VH'riC"-'
— 135 —
2o le fait d^en faire des extraits et d*en citer des passages,
pourvu que ces citations se renferment dans des limites légitimes;
3<^ le fait de choisir et de recueillir des morceaux dans les li-
mites légitimes,en vue de les destiner à l'usage des écoles pour
un livre de lecture ou un cours de morale ;
4^ le fait d'introduire des phrases extraites d'une œuvre lit-
téraire ou scientiûque dans une œuvre dramatique, ou de s'en
servir comme texte d'une œuvre musicale ;
5^ le fait d'insérer dans une œuvre littéraire'ou scientifique des
productions artistiques à titre de documents explicatifs ou vice
versa :
6° le fait de reproduire par Fart plastique une œuvre des arts
du dessin ou de la peinture et réciproquement.
Dans les divers cas précités, il est nécessaire que la source des
emprunts soit clairement indiquée.
Art. 31. — Quiconque, dans le but d'en mettre en vente les
exemplaires et de les répandre dans TEmpire, y importera une
œuvre contrefaite sera assimilé au contrefacteur.
Art. 32. — Quiconque éditera un recueil des solutions répon-
dante des problèmes destinés à des exercices classiques sera as-
similé au contrefacteur.
Art. 33. — Quiconque, de bonne foi et sans faute de sa part
aura commis une contrefaçon et en aura retiré des bénéfices au
détriment d'une tierce personne, est tenu à la restitution de ces
bénéfices.
Art. 34. — L'un des copropriétaires du droit d'auteur à l'égard
d'une œuvre faite en collaboration par plusieurs personnes,
pourra, sans le consentement des autres copropriétaires, pour-
suivre le contrefacteur et réclamer des dommages-intérêts pour
sa part, ou réclamer dans la même proportion la restitution des
bénéfices mentionnés à l'article précédent.
Art. 35. — Dans les cas où il s'agit d'intenter une action civile
en contrefaçon, quiconque aura mis ses nom et prénom comme
auteur sur l'œuvre déjà éditée, sera considéré comme tel jus- i
qu'à preuve contraire.
Pour une œuvre anonyme ou pseudonyme, sera considéré
comme éditeur, jusqu'à preuve contraire, celui qui aura été dé-
signé comme tel sur l'œuvre.
S'il s'agit de la représentation ou exécution d'une œuvre dra-
matique ou musicale non encore éditée, sera considéré comme
auteur, jusqu'à preuve contraire, celui qui aura été désigné com-
me tel dans l'annonce de la représentation. Et si, dans ce cas,
les nom et prénom de l'auteur de l'œuvre représentée ou exécutée
n'ont pas été indiqués, l'organisateur de la représentation ou
f
^
— 136 —
exécution sera considéré comme auteur jusqa*à preuve con-
traire.
Art. 36.— Lorsqu'il sera saisi d'une action civile ou criminelle en
contrefaçon, le tribunal, sur la requête du demandeur ou dn
plaignant, pourra, moyennant ou Bans dépôt de cautionnement et
à titre provisoire, suspendre la mise en vente et en circulation
d'une œuvre soupçonnée d'être contrefaite, ou la saisir on en
suspendre la représentation ou exécution.
Dans ces cas, quand la décision portant que Tœuvre suspectée
n'a pas été une contrefaçon sera devenue irrévocable, le requé-
rant sera civilement responsable des préjudices résultant de la
mesure judiciaire qu'il aura occasionnée.
CHAPITRE III. — Des peines.
Art. 37. — Sera passible d'une amende de 50 à 500 yens qui-
conque aura commis une contrefaçon ou l'aura, sciemment, mise
en vente et répandue.
Art. 38. — Sera passible d'une amende de 30 à 300 yens qui-
conque aura contrevenu à la disposition de l'article 18.
Art. 39. — Sera passible d'une amende de 10 à 100 yens qui-
conque aura, contrairement aux dispositions de l'article 20 et de
l'alinéa 2 de l'article 30, reproduit une œuvre sans mention
exacte de Ja source de son emprunt, ou aura contrevenu à la dis-
position de l'alinéa 4 de l'article 13.
Art. 40. — Sera passible d'une amende de 30 à 500 yens qui-
conque aura édité une œuvre en y mettant les nom et prénom
ou appellation usuelle [nom de plume) d'une personne autre que
l'auteur.
Art. 41.— Sera passible d'une amende de 29 à 200 yens qui-
conque aura édité une œuvre, bien que tombée déjà dans le do-
maine public, soit en la corrigeant contrairement aux intentions
de l'auteur soit en changeant le titre, soit en déguisant les nom
et prénom ou appellation usuelle de l'auteur, soit enfin en l'at-
tribuant à un autre qu'à l'auteur.
Art. 42. — Sera passible d'une amende de 10 à 100 yens qui-
conque aura frauduleusement obtenu l'enregistrement.
Art. 43. — Les exemplaires contrefaits,ainsi que les instruments
et outils destinés exclusivement à la contrefaçon, seront confis-
qués seulement dans le cas où ils appartiendront en propre au
contrefacteur, à l'imprimeur ou k la personne qui l'aura mise
en vente ou en circulation.
Art. 44. — Les délits prévus au présent chapitre ne donneront
lieu aux poursuites que sur la plainte de la partie lésée, sauf
toutefois, le cas de l'article 38, quand l'auteur sera décédé, et
ceux des articles 40 à 42.
'C/ «'■^ ••• ■ * r^-^f-f^T- ^Ti-
— 137 —
Art. 45. ~ L'action civile et pénale résultant des délits prévus
au présent chapitre se prescrira par deux ans.
CHAPITRE IV. — Dispositions additionnelles.
Art. 46. — La date de la mise en vigueur de la présente lot
sera altérieurement fixée par une ordonnance impériale.
La loi no 16 de la 26* année de Meiji (1893) sur la propriété,
littéraire et les ordonnances impériales n*" 78 et 79 de la 20« an-
née de Meiji (1887), la première relative aux œuvres dramatiques
et musicales et la deuxième aux œuvres photographiques, se
trouveront abrogées le jour où la présente loi sera entrée en
vigueur.
Art. 47. — Les œuvres, dont le droit d'auteur ne sera pas éteint
avant la mise en vigueur de la présente loi, jouiront de la pro-
tection de celle-ci à partir du jour de son entrée en vigueur.
Art. 48. — Toutes reproductions qui, n'étant pas considérées
avant la mise en vigueur de la présente loi, comme contrefaçons,
se trouveront, lors de son entrée eu vigueur, déjà faites ou
commencées, pourront être achevées et mises en vente et ré-
pandues.
Les instruments et outils qui auront servi à ces reproductions
pourront, s'ils existent encore, être utilisés encore pendant cinq
ans, à partir de la mise en vigueur de la présente loi.
Art. 49. — Les traductions qui, avant la mise en vigueur de la
présente loi, auront été faites ou commencées, n'étant pas jus-
qu'alors considérées comme contrefaçons, pourront être achevées
et mises en vente et répandues, à condition cependant qu'elles
seront éditées dans un délai de sept ans après l'entrée en vigueur
de la présente loi.
Lesdites traductions pourront être reproduites pendant cinq
ans à compter de leur première publication.
Art. 50. — Les œuvres qui, avant la mise en vigueur de la
présente loi, auront été déjà représentées ou exécutées, ou dont
la représentation ou Texécution aura été préparée à cette date,
sans ôtre, jusqu'alors, considérées comme contrefaçons, pourront
être représentées ou exécutées encore pendant cinq ans après
l'entrée en vigueur de la présente loi.
Art. 51. — Dans les cas des articles 48 à 50, les reproductions
qui y sont mentionnées ne pourront être mises en vente ou ré-
pandues ni représentées ou exécutées sans que les formalités qui
seront ultérieurement prescrites par une ordonnance, aient été
remplies.
Art. 52. — La présente loi ne sera pas applicable aux œuvres
d'architecture.
138 —
Art. 4183.
liéffltilAtloiui étr^m^ére». — Eiuxembour^. ^ Oroli
d'auteur.
Loi sur le droit d'auteur (1) (Du 10 mai 1898.)
Nous,Adolphb, par la grâce de Dieu,Grand-Dac de Luxembourg,
Duc de Nassau, etc., etc., etc. ;
Notre Conseil d'Etat entendu ;
De l'assentiment de la Chambre des députés ;
Vu la décision de la Chambre des députés du 28 avril 1898 et
celle du Conseil d'État du 29 du môme mois, portant qu'il n*y a
pas lieu à second vote ;
Avons ordonné et ordonnons :
» Section I. — Du droit d'auteur en général.
Art. 1*'. — L'auteur d'une œuvre littéraire ou artistique a
seul le droit de la reproduire ou d'en autoriser la reproduction,
de quelque manière et sous quelque forme que ce soit.
L'expression « œuvres littéraires et artistiques » comprend les
livres, brochures ou tous autres écrits ; les œuvres dramatiques
ou dramatico-musicales, les compositions musicales avec ou sans
paroles, les œuvres de dessin, de peinture, de sculpture, de gra-
vure ; les lithographies, les illustrations, les cartes géographi-
ques ; les plans, croquis et ouvrages plastiques, relatifs à la géo-
graphie, à la topographie, à l'architecture ou aux sciences en
général ; les œuvres d'architecture, les œuvres photographiques
et celles obtenues par un procédé analogue ; enfin toute produc-
tion quelconque du domaine littéraire, scientiûque ou artistique
qui pourrait être publiée de quelque manière et sous quelque
forme que ce soit.
Art. 2. — Le droit d'auteur se prolonge pendant cinquante
ans après le décès de l'auteur, au proût de ses héritiers ou ayants
droit.
Art. 3. — Le droit d'auteur est mobilier, cessible et transmis-
sible, en tout ou en partie, conformément aux règles du Code
civil.
Art. 4. — Les propriétaires d'un ouvrage posthume jouissent
du droit d'auteur pendant cinquante ans à partir du jour où il
est publié, représenté, exécuté ou exposé.
(1) Voir sur cette loi une étude complète dans le Droit d'auteur, 1898,
57 et 69. Elle a été faite sur le modèle de la loi belge. — Voir une étude
pins sommaire de 6. Rôthusberger dans le Journal de Clunet^ 1899,
p. 502.
■ ■•■■f'.^
— 139 —
Un arrêté grand-dacal déterminera la manière dont sera cons-
tatée, sons peine de déchéance, la date à partir de laquelle le
terme de cinquante ans prendra cours.
Art. 5. — Lorsque Fœuvre est le produit d'une collaboration,
le droit d'auteur existe au profit de tous les ayants droit jusque
cinquante ans après la mort du survivant des collaborateurs.
Art. 6. — Lorsque le droit d*auteur est indivis, Texercice de
ce droit est réglé par les conventions. A défaut de conventions,
aucun des copropriétaires ne peut Texercer isolément, sauf aux
tribunaux à prononcer en cas de désaccord.
Toutefois, chacun des propriétaires reste libre de poursuivre,
en son nom et sans Tintervention des autres, l'atteinte qui serait
portée au droit d*auteur et de réclamer des dommages-intérêts
pour sa part.
Les tribunaux pourront toujours subordonner Tautorisation
de publier Tœuvre à telles mesures qu'ils jugeront utile de pres-
crire ; ils pourront décider, à la demande du copropriétaire op-
posant, que celui-ci ne participera ni aux frais, ni aux bénéfices
de la publication ou que le nom du collaborateur ne figurera pas
sur Tœuvre.
Art. 7. — L'éditeur d'un ouvrage anonyme ou pseudonyme est
réputé, à l'égard des tiers, en être l'auteur.
Dès que celui-ci se fait connaître, il reprend l'exercice de son
droit.
Si le vrai nom de l'auteur est révélé, soit par l'auteur, soit par
ses ayants cause à ce autorisés, la durée de la protection se cal-
cule sur la vie de l'auteur.
j^nT. 8. — Le cessionnaire du droit d'auteur ou de l'objet qui
matérialise une œuvre littéraire ou artistique ne peut modifier
l'œuvre pour la vendre ou l'exploiter, ni exposer publiquement
l'œuvre modifiée, sans le consentement de l'auteur ou de ses
ayants cause.
Art. 9. — Sont toujours insaisissables les œuvres littéraires
ou musicales, tant qu'elles sont inédites, et, du vivant de l'auteur,
les autres œuvres d'art, tant qu'elles ne sont pas prêtes pour la
vente ou la publication.
Section II. — Du droit d'auteur sur les œuvres littéraires.
Art. 10. — Le droit d'auteur s'applique non seulement aux
écrits de tout genre, mais aux leçons, sermons, conférences,
discours, ou à toute autre manifestation orale de la pensée.
Toutefois, les discours prononcés dans les assemblées délibé-
rantes, dans les audiences publiques des tribunaux, ou dans les
réunions politiques, peuvent être librement publiés; mais à
l'auteur seul appartient le droit de les tirer à part.
"MU ^"^«y
— 140 —
Art. 11. — Les actes officiels de Fautorité ne donnent pas lien
au droit d'auteur.
Toutes autres publications faites par TEtat, les communes ou
les établissements publics donnent lieu au droit d'auteur, soit au
profit de ces administrations pendant une durée de cinquante
ans, à partir de leur date, soit au profit de l'auteur, s'il ne i*a pas
aliéné en faveur de ces administrations.
Un arrêté grand-ducal déterminera la manière dont sera cons-
tatée, sous peine de déchéance, la date de la publication.
Art. 12. — Les auteurs ou leurs ayants cause jouissent du
droit exclusif de faire ou d'autoriser la traduction de lears œuvres
pendant la durée du droit sur Toeuvre originale. Toutefois, le droit
exclusif de traduction cessera d'exister lorsque l'auteur n'en
aura pas fait usage dans un délai de dix ans à partir de la pre-
mière publication de l'œuvre originale, en publiant ou en faisant
publier une traduction dans la langue pour laquelle la protection
sera réclamée.
Pour les ouvrages publiés par livraisons le délai de dix années
ne compte qu'à dater de la publication de la dernière livraison
de l'œuvre originale.
Pour les œuvres composées de plusieurs volumes publiés par
intervalles, ainsi que pour les bulletins ou cahiers publiés par
des sociétés littéraires ou savantes ou par des particuliers, cha-
que volume, bulletin ou cahier est, en ce qui concerne le délai
de dix années, considéré comme ouvrage séparé.
Dans les cas prévus au présent article, est admis comme date
de publication, pour le calcul des délais de protection, le 31 dé-
cembre de l'année dans laquelle l'ouvrage a été publié.
Art. 13. — Le droit de l'auteur n'exclut pas le droit de faire
des citations lorsqu'elles ont lieu dans un but de critique, de po-
lémique ou d'enseignement.
Art. U. — Les romans-feuilletons, y compris les nouvelles,
publiés dans les journaux ou recueils périodiques, ne pourront
être reproduits, en original ou en traduction, sans l'autorisation
des auteurs ou de leurs ayants cause.
Il en sera de même pour les autres articles de journaux on
de recueils périodiques, lorsque les auteurs ou éditeurs auront
expressément déclaré, dans le journal ou le recueil même où ils
les auront fait paraître, qu'ils en interdisent la reproduction.
Pour les recueils, il suffit que l'interdiction soit faite d'une ma-
nière générale en tête de chaque numéro.
A défaut d'interdiction, la reproduction sera permise à la coq*
dition d'indiquer la source.
Les aHicles de discussions politiques, les nouvelles du jour,
les faits divers et les emprunts à des œuvres littéraires ou ar-
li, uni .■ "J
— 141 —
tistiques pour des publications destinées àrenseignement ou ayant
un caractère scientifique, ou pour des chrestomatbies, pourront
être librement publiés.
Art. 15. — Le droit de représentation d'une œuvre littéraire
est réglé conformément aux dispositions relatives aux œuvres
musicales.
Section III. — Dm droit d^ auteur sur les œuvres musicales.
Art. 16. — Aucune œuvre musicale ne peut être publiquement
exécutée ou représentée, en tout ou en partie, sans le consente-
ment de l'auteur.
Le droit de Fauteur ou de ses ayants droit s'applique même à
l'exécution publique des œuvres musicales non publiées, ou de
celles qui ont été publiées, mais dont l'auteur a expressément
déclaré sur le titre ou en tête de l'ouvrage qu'il en interdit l'exé-
cution'publique.
Art. il. — Le droit d'auteur sur les compositions musicales
comprend le droit exclusif de faire des arrangements sur des
motifs de l'œuvre originale.
Art. 48. — Lorsqu'il s'agit d'ouvrages qui se composent de
paroles ou de livrets et de musique, le compositeur et l'auteur
ne pourront traiter de leur œuvre avec un collaborateur nouveau.
Néanmoins, ils auront le droit de l'exploiter isolément par des
publications, des traductions ou des exécutions publiques.
Section IV. — Du droit d^auteur sur les œuvres plastiques.
Art. 19. — La cession d'un objet d'art n'entraine pas cession
du droit de reproduction au profit de l'acquéreur.
Art. 20. — Ni l'auteur, ni le propriétaire d'un portrait n'a le
droit de le reproduire ou de l'exposer publiquement sans l'as-
sentiment de la personne représentée ou celui de ses ayants
droite pendant vingt ans à partir de son décès.
Moyennant ledit assentiment, le propriétaire a le droit de re-
production, sans toutefois que la copie puisse porter l'indication
d'un nom d'auteur.
Art. 21. — L'œuvre d'art reproduite par des procédés indus-
triels ou appliquée à l'industrie reste néanmoins soumise aux
dispositions de la présente loi.
Sbction V. — De la contrefaçon et de sa répression.
Art. 22. — Toute atteinte méchante ou frauduleuse portée au
droit de l'auteur constitue le délit de contrefaçon.
Ceux qui, avec connaissance, vendent, exposent en vente, tien-
nent dans leurs magasins pour être vendus, ou mettent en cir«
— 142 —
culation sur le territoire luxembourgeois dans un but commer-
cial, les objets contrefaits, sont coupables du même délit.
Art. 23. — Les délits prévis à l'article précédent seront punis
d'une amende de vingt-six francs à deux mille francs.
La confiscation des ouvrages ou objets contrefaits, de même que
celle des planches, moules ou matrices et autres ustensiles ayant
directement servi à commettre ces délits, sera prononcée contre
les condamnés.
Art. 24. — En cas d'exécution ou de représentation faite en
fraude des droits de l'auteur, les recettes pourront être saisies
par la police judiciaire comme objets provenant du délit,et seront
allouées au réclamant, à valoir sur les réparations lui revenant,
mais seulement en proportion de la part que son œuvre aura
eue dans la représentation ou l'exécution.
Art. 2b. — L'application méchante ou frauduleuse sur an objet
d'art, un ouvrage de littérature ou de musique, du nom d^un
auteur, ou de tout signe distinctif adopté par lui pour désigner
son œuvre, sera punie d*un emprisonnement de trois mois à deux
ans et d'une amende de cent francs à deux mille francs ou de
Tune de ces peines seulement.
La confiscation des objets contrefaits sera prononcée dans tous
les cas.
Ceux qui, avec connaissance, vendent, exposent en vente, tien-
nent dans leurs magasins pour être vendus, ou mettent en circu-
lation sur le territoire luxembourgeois, dans un but commercial,
les objets désignés dans le § f , seront punis des mômes peines
Art. 26. — L'article 191 du Gode pénal est remplacé par les dis-
positions suivantes ;
(( Quiconque aura, soit apposé, soit fait apposer par addition,
retranchement ou par une altération quelconque, sur des objets
fabriqués, le nom d'un fabricant autre queceluiquien est l'auteur,
ou la raison commerciale d'une fabrique autre que celle de la
fabrication, sera puni d'un emprisonnement d'un mois à six
mois.
« La même peine sera prononcée contre tout marchand, com-
missionnaire ou débitant quelconque, qui aura sciemment ex-
posé en vente ou mis en circulation des objets marqués de noms
supposés ou altérés. »
Art. 27. — Les infractions à la présente loi, sauf celles prévues
par l'article 25, ne peuvent être poursuivies que sur la plainte de
la personne qui se prétend lésée.
Art. 28. — Le livre l«r du Code pénal, l'article 566 du même
Gode, ainsi que la loi du 18 juin 1879, portant attribution aux
cours et tribunaux de l'appréciation des circonstances atténuan-
tes^ sont applicables aux infractions prévues par la présente loi.
— 143 —
Art. 29. — La disposition suivante est ajoutée au n^ 23 de
l'article 1*' de la loi du 13 mars 1870,sar les extraditions :
« . • . . Ainsi que pour le délit prévu par Tarticle 25 de la
loi sur le droit d'auteur. »
Section VI. — Action civile résultant du droit d^auteur.
Art. 30. — Les titulaires du droit d'auteur] pourront, avec
l'autorisation du président du tribunal de première instance du
lieu de la contrefaçon, obtenue sur requête^ faire procéder par un
ou plusieurs experts, que désignera ce magistrat, à la description
des objets prétendus contrefaits ou des faits de la contrefaçon
et des ustensiles qui ont directement servi à les accomplir.
Le président pourra, par la même ordonnance, faire défense
aux détenteurs des objets contrefaits de s'en dessaisir, permettre
de constituer gardien ou même de mettre les objets sous scellés.
Cette ordonnance sera signifiée par un huissier à ce commis.
S'il s'agit de faits qui donnent lieu à recette, le président pourra
autoriser la saisie conservatoire des deniers par un huissier qu'il
commettra.
Art. 31 . — La requête contiendra élection de domicile dans
les communes où doit avoir lieu la description.
Les experts prêteront serment entre les mains du président
avant de commencer leurs opérations.
Art. 32. — Le président pourra imposer au requérant l'obli-
gation de consigner un cautionnement. Dans ce cas, l'ordonnance
ne sera délivrée que sur la preuve de la consignation faite.
Art. 33. — Les parties pourront être présentes à la description
si elles y sont spécialement autorisées par le président.
Art. 34. — Si les portes sont fermées ou si l'ouverture en est
refusée, il est opéré conformément à l'article 587 du Gode de
procédure civile.
Art. 35. — Copie du procès-verbal de description sera envoyée
par les experts, sous pli recommandé, dans le plus bref délai au
saisi et au saisissant.
Art. 36. — Si, dans la huitaine de la date de cet envoi, cons-
tatée par le timbre de la poste, ou de la saisie conservatoire
des recettes^ il n'y a pas eu assignation devant le tribunal dans
le ressort duquel la description a été faite, l'ordonnance cessera
de plein droit ses efTets et le détenteur des objets décrits ou des
deniers saisis pourra réclamer la remise de l'original du procès-
verbal avec défense au requérant de faire usage de son contexte
et de le rendre public, le tout sans préjudice de dommages-in-
térêts.
Art. ^7. — La juridiction consulaire ne connaît point des ac-
tions dérivant de la présente loi .
— 144 —
La cause sera jugée comme affaire sommaire et urgente.
Art. 38. — Les recettes et les objets conQsqués pourront être
alloués à la partie civile, à compte ou à concurrence du préjudice
souffert.
Section VII. — Droits des étrangers.
Art. 39. — Les étrangers jouissent dans le Grand-Duché des
droits garantis par la présente loi, sans que la durée de ceux-ci
puisse, en ce qui les concerne, excéder la durée fixée par la loi
luxembourgeoise.
Section Vlll. — Disposition transitoire.
Art. 40. — Il n'est porté aucune atteinte aux contrats sur la
matière légalement formés sous Tempire des lois antérieures.
Les auteurs ou leurs héritiers dont les droits exclusifs, résultant
de ces lois, ne seront pas épuisés au moment de la publication
de ta présente loi, seront pour Tavenir régis par celle-ci. Si avant
cette publication ils ont cédé la totalité de leurs droits, ceux-ci
resteront soumis aux lois en vigueur au moment de la cession
Section IX. — Abrogation de la législation existante.
Art. 41. — Sont abrogées toutes dispositions antérieures rela-
tives au droit d'auteur régié,par la présente loi.
Mandons et ordonnons que la présente loi soit insérée au
Mémorialy pour être exécutée et observée par tous ceux que la
chose concerne (1).
Abbazia, le 10 mai 1898.
Adolphk.
Le ministre d^État, Président du Gouvernement,
Eyschbn.
Art, 4184,
•latioiui étranirèreti. — IVorvè^e. — lllarc|ve«.
Loi apportant des modifications et des adjonctions à la loi
sur les marques de fabrique et de commerce du 26 mai
1884 (2).
(Du 31 mai 1900)
Nous, Oscar, par la grâce de Dieu, Roi de Suède et de Norvège,
des Goths et des Vendes,
(1) Les arrêtés d'ezécation sont an Droit d^auteur, 1898.67.
(2) Voir la loi de 1884, Ann, 85« 169.
— 145 —
Faisons savoir qu^on Nous a présenté la décision rendue le 25
mai de cette année par le Storting, actuellement réuni en session
ordinaire, laquelle décision est conçue en ces termes :
Les articles 4, n<^" 1, 7 et 15, no" 5 et 7 de la loi sur la protec-
tion des marques de fabrique et de commerce, doivent être mo-
difiés comme suit :
Art. 4. — Ne peuvent être enregistrées :
i^ Les marques qui consistent exclusivement en chiffres, let-
tres ou mots, ne revêtant pas une forme assez distinctive pour
pouvoir les faire considérer comme marques figuratives ; toute-
fois, Tenregistrement ne doit pas être refusé si la marque con-
siste en mots pouvant être considérés comme constituant une
dénomination inventée spécialement pour certaines espèces de
marchandises indiquées dans la demande conformément aux
dispositions de Tarticle 3, et ne visant pas à en indiquer Torigine,
la composition, la destination, la quantité ou le prix«
Art. 7. — Si une marque enregistrée contient des chiffres,
lettres ou mots qui ne peuvent pas être enregistrés séparément,
aux termes de Tarticle 4, ou si elle se compose entièrement ou
en partie de signes ou de marques communément employés dans
certaines branches de commerce, leur enregistrement ne peut
empêcher les tiers de faire usage des mêmes signes comme mar-
ques ou parties de marques.
Art. 15. — ^^ Si pendant un certain délai, qui peut être fixé
soit à 4 mois au plus après le dépôt de Ja marque dans un pays
étranger, soit à trois mois au plus après que Tautorité étrangère
compétente aura publié que Tenregisirement a été accordé, quel*
qu'un dépose une marque à l'enregistrement dans le royaume,
cette demande sera considérée,par rapport à d'autres demandes,
comme ayant eu lieu en même temps que celle effectuée dans
le pays étranger.
1^ Toute marque qui aura été légalement enregistrée dans un
pays étranger avant l'entrée en vigueur de la protection récipro-
que, et qui consistera exclusivement ou principalement en chif-
fres, lettres ou mots non susceptibles d'enregistrement spécial,
aux termes de l'article 4, jouira après enregistrement dans le
royaume, si elle est protégée dans le pays étranger, de cette
faveur que personne ne pourra faire usage des mêmes chiffres,
lettres ou mots comme marques pour la même espèce de mar-
chandises, à moins de s'en être déjà servi au moment où la pro-
tection réciproque est entrée en vigueur ; cependant, l'enregis-
trement d'une telle marque n'empêchera personne d'employer
comme marque les initiales de son nom ou de sa raison de com*
merce, sauf en ce qui concerne les marques pour les fers et les
bois.
10
— 146 —
& présente loi entrera en vigneur le 1" juillet 1900.
i dans les trois mois après l'entrée eu TÎ^uenr de la présente
un industriel ou un comiaerçanl dépose, de la manière près-
i h l'article 3, une marque originale, légalement employée
lui au moment de la publication de cette loi dans le Lovti-
U, et consistant exclusiTement ou principalement en mots
ectant pas une forme distinctive, mais pouvant être consi-
:s comme une dénomination inventée spécialement pour
ilnes espèces de marchandises auxquelles la marque estap-
uée, nul autre ne pourra, en vertu d'un dépdt ou d'un en-
itrement de date antérieure, acquérir un droit sur cette
que ou sur une marque assez ressemblaute pour pouvoir
confondue avec elle.
I conséquence, Nous avons adopté et conGrmé ladite décision
me Nous l'adoptons et la confirmons par les présentes en
ité de toi, par l'apposition du sceau du Royaume.
>nné au Cblteau de Stockholm, le 31 mai 1900.
1 l'absence de Sa Majesté, mon gracieux Roi et Maître.
Gustave (L. S.)
0. Blbuh. Lebxakn.
Art. 4185.
concernant la protection de certains dessins et modèles.
(Du 10 juillet 1899) (t).
us, OsCAH, par la grîce de Dieu, Roi de Suède, de Norvège,
loths et des Vendes, faisons savoir que, sur la proposition
. Diète, Nous avons trouvé bon de décréter ce qui suit :
T. 1". — Au moyen d'un enregistrement effectué confor-
lent aux dispositions de la présente loi, l'auteur d'un dessin
m ayant cause peut acquérir, si le dessin est nouveau, le
exclusif de l'exploiter dans la fabrication, faite en vue de
Qte, de produits appartenant à l'industrie des métaux.
La loi se complète par deux décrets concernant les piAcM à déposer
e de renregiatrement et le terme du registre {laProp. ind., 1900,
r commentaire de la loi et comparaison avec un projet de )ol
i (Prop. ind., tUOO. 35) et le projet de loi lulrictiien iGnc. R. «.,
900, p. S35).
> loi spéciale, également du 10 juillet 1809 (fa /Vop. ind., 1000.33).
la manière de calculer les délais visés par la loi.
pwT*i». r*^v
u-7;* "T:,"^ ■ "T-^y •" -. ^
— 147
J
Sous le terme de « dessins », la présente loi comprend aussi
les modèles qui sont assimilables aux dessins quant à leur des-
tination.
Art. 2. — Ne pourra être enregistré un dessin contenant des
reproductions de nature scandaleuse ou dont remploi serait con-
traire aux lois ou aux bonnes mœurs.
Art. 3. — Un dessin ne pourra être considéré comme nouveau
si, avant le dépôt de la demande d'enregistrement auprès de
l'autorité à ce préposée, il a déjà été reproduit dans un imprimé
rendu public ou sur des produits publiquement mis en vente,
ou s'il ne se distingue pas essentiellement d'un dessin déjà di-
vulgué de Tune ou de l'autre des manières indiquées ci-dessus.
Quand un dessin aura figuré à une exposition internationale,
le fait qu'à l'occasion de cette exposition, ou à une date ulté-
rieure, ce dessin aura été divulgué par un imprimé ou par la
mise en vente d'un produit, ne portera pas obstacle à son enre-
gistrement, si la demande d'enregistrement est déposée dans le
délai de six mois après l'exposition du dessin.
Art. 4. — Le registre des dessins sera tenu, pour l'ensemble
du royaume, par telle administration publique de Stockholm
que le Roi désignera à cet effet.
Art. 5. — 1« Quiconque voudra faire enregistrer un dessin,
remettra ou enverra par lettre affranchie à l'autorité préposée à
l'enregistrement une demande écrite indiquant la nature générale
du dessin et à laquelle sera jointe une reproduction claire et
complète du dessin en trois exemplaires.
La demande contiendra l'indication du nom, de la profession
et de l'adresse postale du déposant.
Si le déposant n'est pas domicilié dans le royaume, il joindra
à la demande un pouvoir autorisant un mandataire y domicilié
à répondre en son nom pour tout ce qui conc(!rne les droits ré*
sultant du dépôt (1).
Quand l'enregistrement sera demandé pour plusieurs dessins,
il sera déposé une demande par dessin .
2» Si le déposant désigne une autre personne comme étant
l'auteur du dessin, il devra produire un acte établissant qu'il est
l'ayant cause de l'auteur.
3° Le déposant joindra en outre à sa demande la taxe de dix
couronnes.
Art. 6. — Dans le cas où l'autorité préposée à l'enregistre-
ment constaterait que le déposant n'a pas rempli les prescriptions
énumérées sous le numéro 1 de l'article 5, elle tiendra à sa
(1) SkyddsrdU ; littéralement : droit de protection. Ce terme désigne,
dans cette loi, les droits qui résultent du dépôt.
— 148 —
disposition un avis écrit lui donnant connaissance de ce fait, ou,
si elle possède l'adresse complète du 'déposant, elle lui trans-
mettra cet avis par la poste. Si le déposant ne complète pas sa
demande dans an certain délai fixé par l'autorité compétente,
celle-ci déclarera la demande déchue.
Art. 7. — La demande sera rejetée : si le dessin n*est pas de
nature à pouvoir être enregistré ; s*il n'est évidemment pas nou-
veau ; si le déposant qui a désigné une autre personne comme
étant Pauteur du dessin n'établit pas qu'il est l'ayant cause de
l'auteur; enfin, si le déposant a négligé de payer la taxe men-
tionnée sous le numéro 3 de Tarticle 5.
Art. 8. — Si la demande a été déclarée déchue ou si elle a été
rejetée, la décision y relative, avec motifs à Tappui, sera com-
muniquée par écrit au déposant de la manière prescrite par
l'article 6 pour les cas qui y sont prévus.
Le déposant qui se jugera lésé par une telle décision devra,
sons peine de forclusion, se pourvoir en appel auprès du Roi
dans un délai de soixante jours à partir de celui du refus, ce
délai prenant fln à l'heure de midi du dernier jour.
Art. 9. — Si les pièces remises sont complètes, et s'il n^y a
pas lieu de rejeter la demande, le dessin sera enregistré, et un
certificat constatant le fait de l'enregistrement ainsi que la date
du dépôt sera remis au déposant. Un des exemplaires déposés
du dessin sera de plus fixé au certificat.
Par les soins de l'autorité préposée à l'enregistrement, un avis
de l'inscription sera inséré dans le journal des annonces offi-
cielles.
Art. 10. — Si plusieurs personnes demandent l'enregistre-
ment d'un même dessin ou de dessins dont les éléments essen-
tiels se ressemblent, la priorité sera accordée à la personne qui,
la première, aura déposé une demande complète.
Art. 11. — Le dessin enregistré est protégé pour un terme de
cinq ans à partir du jour du dépôt de la demande d'enregistre-
ment.
Art. 12. — Si le droit résultant du dépôt passe à un tiers, il
en sera fait déclaration à l'autorité préposée à Tenregistrement,
sous production de l'acte qui constate la mutation. Aussi long-
temps que cette formalité n'aura pas été remplie, sera considéré
au point de vue de la protection légale, comme détenteur des
droits résultant du dépôt, celui qui se trouvera avoir été inscrit le
dernier en cette qualité par l'autorité compétente.
Art. 13. — Si l'ayant droit transfère son domicile à l'étranger,
ou si le droit passe à une personne non domiciliée dans le
royaume, le détenteur du droit enverra à l'autorité compétente
une procuration constituant le mandataire prévu à l'article S,
ip ■ * . • '*^ "T 1 •••••' ^
— 149 —
alinéa 1. Si ce mandataire transfère son domicile hors du
royaume, ou sMl cesse pour une autre cause de fonctionner en
cette qualité, Tayant droit devra déposer une procuration en fa-
veur d'un autre mandataire. Dans le cas où ces prescriptions
ne seraient pas suivies, le juge pourra, s'il y a lieu, constituer
d*offlce un mandataire légal pour l'ayant droit.
Art. i4. — Les droits résultant du dépôt sont sans effet contre
celui qui, à Tépoque où la demande d*enregistrement a été dépo-
sée, exploitait déjà dans le royaume le dessin enregistré ou avait
pris des mesures sérieuses en vue de cette exploitation.
Art. 15. — Si un dessin a été enregistré contrairement aux
dispositions des articles i, 2et 3, toute personne estimant que
son droit a été lésé par l'enregistrement de môme que le minis-
tère public, s'il y a lieu, pourront requérir auprès des tribunaux
l'annulation de l'enregistrement.
Pour les cas prévus ci-dessus, Tinstance compétente est le tri-
bunal de première instance de Stockholm.
L'arrêt annulatif de Tenregistrement sera transmis par les soins
du tribunal à l'autorité compétente.
Art. i6. — Quiconque, sans l'autorisation de l'ayant droit, ap-
pliquera un dessin qu'il saura avoir été enregistré en Suède à
la fabrication, faite en vue de la vente, de produits appartenant
à rindustrie des métaux; ou quiconque tiendra en vente dans le
royaume, ou y importera en vue de la vente, des produits appar-
tenant à cette même industrie et fabriqués sans l'autorisation de
rayant droit. ~ sauf le cas prévu à l'article 14, —> sera puni
d'une amende de vingt à mille couronnes, et condamné à réparer
le dommage causé. La poursuite n'aura lieu que sur la plainte
de l'ayant droit.
Si le plaignant le demande, tout produit indûment fabriqué ou
importé dans le royaume lui sera délivré contre payement de la
valeur, ou à valoir sur le montant des dommages-intérêts qui lui
auront été attribués. Quant à l'outillage exclusivement destiné à
la fabrication déclarée illicite, on procédera, si le plaignant le
demande, de manière à rendre impossible tout abus. Toute per-
sonne qui, pendant qu'elle est sous le coup de poursuites rela-
tives à l'infraction mentionnée dans le présent article, continuera
à se livrer aux mêmes actes illicites, sera frappée, si la preuve
légale est faite contre elle, d'une peine spéciale pour chaque
fois qu'une assignation lui aura été adressée et signifiée.
Les amendes qui auront été prononcées en vertu du présent
article seront acquises au trésor. En cas de non-payement, elles
seront converties en prison, conformément au}^ dispositions du
code pénal.
Art. 17. — Les dispositions de l'article 16 seront également
- 150 —
icabtes aux dessins reproduits snr une autre échelle ou en
[res couleurs, on n'offrant à tous autres égards que des
gements sans importance.
T. 48.— En cas de poursuite pour violation du droit résul-
dud^pdt, s'il résulte de l'instruction que l'enregistrement a
ITectuë contrairement aux dispositions des articles !•', 2 et 3
présente loi, l'action intentée sera abandonnée.
T. 19. —Quand l'enregistrement aura été annulé, que le
e de protection du dessin enregistré sera expiré, ou quand
nt droit en aura fait la demande, le dessin sera radié do
itre, et l'avis de la radiation sera publié dans le journal des
nces orflcielles,
T. 20, — En ce qui concerne les dessins protégés dans un
accordant la réciprocité pour les dessins enregistrés dans le
urne, le Roi pourra décréter que : si quelqu'un a demandé
le royaume l'eurfifiiistrement d'un dessin avant l'expiration
certain délai, — délai qui peut être fixé par le décret soit
Ure mois au plus à partir de la date où la protection a été
indée pour le même dessin dans l'Etat étranf^er, soit k trois
au plus à partir de la date où l'autorité compétente de cet
a annoncé que cette protection était accordée, — la demande
ée en Suède sera, par rapport à d'autres demandes ou aux
icles qui, aux termes de l'article 3, peuvent s'opposera l'en-
tremenl, considérée comme si elle avait été déposée simul-
nent avec la demande effectuée dans le pays étranger (I).
T. 2i, — l.e Roi édictera des prescriptions spéciales tant en
li concerne la nature des pièces devant être déposées avec la
inde d'enregistrement, qu'en ce qui concerne le registre des
nset les publications mentionnées dans la présente loi.
présente loi entrera en vigueur le I" janvier 1900.
Un décret du 34 novembre 1899 (Ca Prop. îtuf.,1900. !5) applique
'ticle à tout dessin dont la prateclion aura été iccordée dans an
étranger appartenant à l'Union pourla proteclion de la propriété
trielle, avec cette observslion que le délai courra de la dile â U-
i la protection aura été demandée dans l'Ëlut étranger et loaa les
9 si cet Ëtat est situé en Europe et de i mois s'il esl situé hors d'En-
■t. 30 laissail l'option entre deux points de départ do délai parce
ivait été question dans les projel» de revision de la Convention de
à Umxelles de moJifler, au moin^ pour lei brevets et à la Tticullê
svelè, le point de départ adnel du délai de priorité (voir Ann. au.
ii'op. ind., iWn, p. 170). La loi Euëdoisc da 5 mars iflVl, sur lei
jes {Ann., 97-321) et l'ordonnanue royale du 26 mara 1897 [Ann.,
!) contiennent des dispositions analogues à cellei de l'art. 30 de la
r les dessins et modèles.
-ï^- -.-.'^ -i pri ■:fr- .-'»- - ' -mr-WF- -» --^^nn.»^ t^ -'^T^ X"' > Wt •" ^ » " - |
— 151 —
Donné pour semr de gouverne à tous ceux à qui il appartien-
dra. En foi de quoi. Nous avons signé cette loi de Notre propre
main, et Tavons fait conOrmer par l'apposition de Notre sceau
Royal.
Au cMteau de Stockholm, le 40 juillet 1899.
OSCAR (L. S.)
L. Annrrstedt.
Dans les cas où les délais visés par la loi sur la protection de
certains dessins et modèles sont indiqués en mois, sera considéré
comme jour tinal du délai celui qui, par le quantième du mois,
correspond à celui où le délai a commencé à courir. Si le dernier
mois du délai ne contient pas de jour correspondant, le dernier
jour de ce mois sera considéré comme jour final du délai (1).
Art. 4186.
LiéfflvlAtlôas étran||ère«. — Snliiiie. — Demvlnis
eC UMKlèles lii«la*Crleki .
Loi fédérale sur les dessins et modèles industrielSy
30 mars 1900 (2).
L'Assemblée fédérale de la Confédération suisse, en applica-
tion de Tarticle 64 de la Constitution fédérale, vu le message du
Conseil fédéral du 2^ novembre i899, décrète :
I. — Dispositions générales.
Article 1*^. — La Confédération accorde aux auteurs de des-
sins et modèles industriels et à leurs ayants cause les droits spé-
cifiés dans la présente loi.
Art. 2. — Constitue un dessin ou modèle au sens de la pré-
sente loi toute disposition de lignes ou toute forme plastique^
combinées ou non avec des couleurs, devant servir de type pour
la production industrielle d'un objet.
Art. 3. — La protection accordée parla présente loi ne s'appli-
que pas aux procédés de fabrication, à Tutilisation ou à Teffet
(1) Loi du 10 juillet 1899.
(2) Voir analyse du projet [la Prop. ind.^ février 1900, p. 26) et modi-
fications apportées au projet {la Prop. ind., mars 1901, p. 47). Voir en-
core une étude de M. Fray-Godet, secrétaire du bureau international
de la Propriété industrielle de Berne, au Congrès international de la
Propriété industrielle à Paris en 1900.
— 152 —
que de l'objet fabriqué sur le type du dessin ou modèle
!é.
. 4. — Le droit de l'auteur passe à tes héritiers. Il est
naissible, en tout ou en partie, par toutes voies de droit,
iitear peut autoriser d'autres personnes à exploiter son
I ou modèle en leur accordant une licence.
ir être opposables aux tiers de bonne Toi, lee actes transla-
1 droit de l'auteur et les licences doivent être inscrits an
re des dessins et modèles.
. 5. — Les dessins et modèles ne jouissent delaprotection
I que s'ils sont déposés conformément k la présente loi.
ne pourra, avant l'expiration de la protection légale, faire
, dans un but industriel ou commercial, d'un dessin on
le régulièrement déposé, s'il n'y est autorisé par l'auteur
n ayant cause.
'. 6. —Le fait du dépAt crée la présomption que l'objet
é était nouveau au moment du dépôt, et que le déposant
t l'auteur.
r. 7. — Les dessins et modèles peuvent être déposés isolé-
ou réunis en paquets.
nombre des dessins ou modèles renfermés dans un paquet
ra limité que par les dimensions et le poids prescrits pour
rnier. Ce mode de dépôt sera réglé en détail paruneordon-
idu Conseil fédéral, qui déterminera en même temps le
mum des dimensions et du poids des dessins et modèles
lés isolément.
r. 8. — La protection légale des dessins et modèles a une
I de IS ans au plus ; elle est accordée par périodes conséca-
de SS ans, dont la première commence à la date du dép6t.
r. 9. — Les dessins et modèles peuvent être déposés, pen-
la première période de protection de cinq ans, soit à dëcou-
soil sous pli cacheté.
Conseil fédéral pourra établir par voie de règlement, que
!ssins et modèles de certaines industries ou de certaines
ories de produits industriels pourront rester déposés sous
icheté mémo pendant la deuxième et la troisième période
olertion ; il peut décider, de même, que les dessins et
lies de certaines industries ou de certaines catégories de
lits industriels ne pourront être déposés qu'à découvert, et
en sera publié une représentation graphique.
T. 10. — Le déposant paye une taxe pour chaque période
'oteclion et pour chaque dessin ou modèle, ou pour chaque
et de dessins ou modèles déposé ; le Conseil fédéral fixe
taxe par voie d'ordonnance. Les taxes doivent présenter
>rogresston importante d'une période à l'autre
TV»! «T" ^T<r*» — T. — •-- t-\îvi^^**'-
— 153 —
Le montant des taxes pour la première période doit être payé
au moment du dépôt (article 15 chiffre 2) ; les taxes de la deu-
xième et de la troisième période sont échues le premier jour
de chacune de ces périodes.
Art. 11. — Sera déchu des droits résultant du dépôt:
i* Le déposant qui n'aura pas payé dans les deux mois de
leur échéance les taxes dues pour la prolongation de la protection.
L'office où s*es( fait le dépôt avisera le déposant en temps utile
que la taxe est échue, sans toutefois encourir de ce chef aucune
responsabilité en cas d'omission.
2<* Le déposant qui n'exploitera pas en Suisse le dessin ou le
modèle dans une mesure convenable et qui, en même temps,
importera, fera ou laissera importer, par d'autres, des objets
fabriqués à l'étranger d'après le même dessin ou modèle.
Cette disposition ne s'applique pas aux objets en question
importés en Suisse sous le régime du trafic de perfectionnement ;
Le Conseil fédéral peut déclarer la disposition du chifTre 2
non applicable aux Etats qui accordent la réciprocité à la Suisse.
Art. i2. — Le dépôt d'un dessin ou modèle sera déclaré nul
et de nul effet :
!• Si le dessin ou le modèle n'était pas nouveau au moment
du dépôt ; un dessin ou modèle est nouveau, au sens de la pré-
sente loi, aussi longtemps qu'il n'est connu ni du public ni des
milieux industriels et commerciaux intéressés ;
2° Si le déposant n'est ni l'auteur du dessin ou modèle, ni
son ayant droit ;
3<^ Si, en cas de dépôt sous pli cacheté, le déposant est con-*
vaincu d'avoir fait, dans une intention frauduleuse, une décla-
ration inexacte du contenu ;
4** Si l'objet déposé n'a pas les caractères d'un dessin ou modèle
au sens de la présente loi ;
5<» Si le contenu du dépôt est contraire aux dispositions d'une
loi fédérale ou d'une convention internationale, ou s'il porte
atteinte aux bonnes mœurs.
Art. 13. — L'action en déchéance pour exploitation insuffi-
sante en Suisse et l'action en nullité peuvent être intentées par
toute personne qui justifie d'un intérêt.
Art. 14. — Celui qui n*a pas de domicile fixe en Suisse ne
peut opérer le dépôt d'un dessin ou modèle et exercer les droits
résultant de ce dépôt que par un mandataire domicilié en Suisse.
Le mandataire est autorisé à représenter le déposant dans
les démarches à faire à teneur de la présente loi et dans les con-
testations en justice relatives au dessin ou au modèle. Demeurent
réservées les dispositions cantonales sur l'exercice de la profes
sion d'avocat.
— 154 —
l.« tribunal dans le ressort duquel le représentant est dorai-
ou, à défaut d'un mandataire, celui dans le ressort duquel
■ouve le siège du bureau de dépôt est compétent pour con-
7e des actions intentées au déposant.
n. - Dépôt.
T. 15. — Le dépôt d'un dessin ou modèle industriel s'opère
loyen d'une demande adressée au bureau de dépôt et rédi-
tuivant formulaire dans une des trois langues nationales,
la demande devront être joints ;
Un exemplaire numéroté de chaque dessin ou modèle dont
!pAt est demandé soit sous la forme du produit industriel
lel il est destiné, soit sous celle d'une autre représentation
ïBnte dudit dessin ou modèle ;
Le montant de la taie pour la première période de proteC'
Conseil fédéral peut prescrire d'autres formalités pour le
t des dessins ou modèles dont la représentation graphique
publiée.
T. 16. — Les dessins et modèles sont déposés au Bureau
:al de la propriété intellectuelle à Berne,
le besoin s'en fait sentir, le Conseil fédéral pourra créer
re d'autres bareaus de dépôt.
T. 17. — Tout dépôt fait contrairement aux prescriptions
, loi ou du règlement et non régularisé par le demandeur
;ré l'avertissement du bureau de dépôt, sera rejeté par ce
bureau refusera tous objets ou représentations graphiques
ses h découvert, qui n'auraient pas les caractères d'un dessin
lodèle au sens de la présente loi, dont Texécntion serait
'aire aux dispositions d'une loi fédérale on d'une convention
nationale, ou qui porteraient atteinte aux bonnes mœurs.
s mêmes dispositions s'appliquent d'une façon analogue
is où un dépôt secret serait transformé en dépôt ouvert.
le dépôt est rejeté par le bureau, le demandeur pourra
irtr contre cette décision, dans le délai d'un mois h, partir de
tificatiori y relative, auprès du département duquel relève
ireau ; la décision du département sera déllnitive.
r. Itl. '— Tout dessin ou modèle régulièrement déposé sera
it par le bureau au registre des dessins et modèles, sans
len préalable des droits du déposant, ni de la nouveauté
)bjet déposé ; un certiticat de dépôt sera remis au déposant.
T. 19. — Le registre des dessins et modèles contiendra les
ations suivantes : l'objet et le mode de dépôt (à découvert
lUs pli cacheté), le nom et le domicile du déposant et, le
TT" ^^ • -«^^ •" ^ '""•" •' . * * .^-TT-
— 155 —
cas échéant, de son mandataire, la date du dépôt, le payement des
taxes et leur montant, ainsi que les changements survenus dans
la personne ou dans les droits da titulaire ; ces changements
ne seront inscrits au registre que s'ils sont établis par un titre
authentique ou par un acte sous seing privé dûment légalisé.
Art. 20. — Le bureau publie, conformément aux inscriptions
faites dans le registre, le titre des dessins et modèles déposés,
le mode de dépôt, le nom et le domicile du déposant et, le cas
échéant, de son mandataire, la date et le numéro d*ordre de
chaque dépôt, ainsi que les changements survenant dans la per-
sonne ou dans les droits du titulaire.
Le Conseil fédéral déterminera par un règlement le mode
de publication graphique qui pourra être adopté pour les dessins
et modèles de certaines industries ou de certaines catégories de
produits (art. 9).
Art. 21. — L'ayant droit pourra demander en tout temps
que ses dépôts sous pli cacheté soient convertis en dépôts ouverts.
Dans tous les autres cas, les plis cachetés ne seront ouverts
qu*à la demande de Tayant droit ou sur la réquisition d'une
autorité judiciaire, et ils seront refermés après usage.
Art. 22. — Toute personne pourra obtenir du bureau de dépôt
des renseignements oraux ou écrits sur le contenu du registre
des dessins et modèles, et prendre connaissance, en présence
d'un fonctionnaire de ce bureau, des dessins et modèles déposés
à découvert.
Le Conseil fédéral fixera, d'après un tarif modéré, les émolu-
ments à payer de ce fait.
Art. 23. — Le déposant peut en tout temps renoncer à la
protection légale en retirant les dessins et modèles déposés.
A Texpiration de la troisième année, le bureau les renverra
à l'ayant droit ou à son mandataire, ou il les détruira; dans des
circonstances spéciales, il pourra aussi en disposer autrement.
III. ~ Sanction civile et pénale.
Art. 24. — Est passible de poursuites civiles ou pénales, con-
formément aux dispositions ci-après :
1* Quiconque aura contrefait un dessin ou modèle déposé, ou
l'aura imité sans droit de telle manière que le produit véritable
ne puisse être distingué du produit contrefait qu'après un exa-
men attentif ; la seule modification des couleurs n'est pas con-
sidérée comme constituant une différence ;
2" Quiconque aura vendu, mis en vente ou en circulation, ou
importé en Suisse des objets contrefaits ou imités sans droit ;
3^* Quiconque aura coopéré aux infractions ci-dessus, ou en
aura favorisé ou facilité l'exécution ;
'TrrjfMm-
— 156 —
4^ Quiconque refuse de déclarer à l'autorité compétente la
provenance d'objets contrefaits ou imités se trouvant en sa pos»
session.
Art. 2^. — Quiconque commet intentionnellement Tune des
infractions mentionnées à l'article 24, est tenu de réparer le
dommage causé à la partie lésée et sera puni d'une amende
de 20 à 2,000 francs, ou d'un emprisonnement de 1 jour à 1 an,
ou des deux peines réunies, dans les limites indiquées ci-dessus.
En cas de récidive, ces peines pourront être élevées jusqu'au
double.
Art. 26. — Si les infractions mentionnées à l'article 24 sont
commises par négligence, l'auteur n'est passible d'aucune peine
mais il demeure civilement responsable du dommage causé.
Art. 27. — Les poursuites pénales ont lieu sur plainte de la
partie lésée et conformément à la procédure pénale cantonale,
soit au domicile du délinquant, soit au lieu où le délit a été
commis.
En aucun cas, il ne pourra y avoir cumulation de poursuites
pénales pour le même délit. L'autorité nantie la première de
la plainte est seule compétente.
L'action pénale sera prescrite par deux ans à compter de la
dernière contravention.
Art. 28. — Le tribunal nanti d'une demande civile ou d'une
plainte pénale ordonnera les mesures conservatoires nécessaires.
Il pourra notamment faire procéder à une description précise
des objets prétendus contrefaits, des instruments et ustensiles
servant exclusivement à la contrefaçon et, le cas échéant, à la
saisie desdits objets.
Dans ce dernier cas, le tribunal pourra imposer au requérant
un cautionnement qu'il sera tenu de déposer au préalable.
Art. 29. — Le tribunal pourra ordonner la conûscation et la
vente des objets saisis.
Il pourra ordonner, même en cas d'acquittement, la destruc-
tion des instruments et des ustensiles exclusivement destinés à
la contrefaçon. Le produit de la vente des objets confisqués sera
appliqué au payement de l'amende, des frais judiciaires et de
l'indemnité due à la partie lésée ; l'excédent reviendra au pro-
priétaire desdits objets.
Art. 30. — Le tribunal peut ordonner la publication du juge-
ment pénal dans la Feuille officielle suisse du commerce et dans
un ou plusieurs autres journaux, aux frais du condamné.
Art. 31* — Quiconque aura indûment muni ses papiers de
commerce, annonces ou produits d'une mention endant à faire
croire qu'un dessin ou modèle a été déposé en vertu de la pré-
— 157 —
sente loi sera puni, d'office ou sur plainte d^in particulier, d^une
amende âe 20 à 500 franco.
En cas de récidive, la peine pourra être élevée jusqu'au dou-
ble.
Art. 32. — Le produit des amendes revient aux cantons. Le
jugement portant condamnation à une amende statuera que,
faute de payement pour cause d'insolvabilité, Tamende sera
convertie de plein droit en emprisonnement (art. 151 de la loi
fédérale sur Torganisation judiciaire fédérale, du 22 mars 1893).
Art. 33. — Les cantons désigneront un tribunal compétent
pour juger les contestations civiles relatives à la protection des
dessins et modèles, lequel statuera comme instance cantonale
unique.
Le recours au tribunal fédéral est recevable sans égard à la
valeur de l'objet du litige (art. 62 de Torganisation judiciaire
fédérale).
IV. — Dispositions finales.
Art. 34. — Les ressortissants d'États qui auront conclu avec
la Suisse des conventions sur ces matières pourront,dans le délai
fixé à partir de la date de leur premier dépôt, à condition que
ce dépôt ait eu lieu dans Tun des Etats visés par la convention,
et sous réserve des droits des tiers, déposer leurs dessins et mo-
dèles industriels en Suisse sans que des faits survenus dans l'in-
tervalle, tels qu'un autre dépôt ou un acte de publicité, puissent
être opposés à la validité du dépôt opéré par eux.
Les citoyens suisses qui aurontopéré le premier dépôt de leurs
dessins et modèles dans l'un des Etats désignés à l'alinéa précé-
dent jouiront en Suisse des mômes avantages que les ressortis-
sants de cet Etat.
Art. 35. — Il sera accordé à tout auteur d'un dessin ou modèle
industriel figurant dans une exposition nationale ou internationale
en Suisse, moyennant l'accomplissement des formalités à déter-
miner par le Conseil fédéral, un délai de 6 mois h, partir du jour
de l'admission du produit à l'exposition, délai pendant lequel il
pourra déposer valablement son dessin ou modèle, nonobstant
tout dépôt opéré par un tiers ou tout fait de publicité survenu
dans l'intervalle.
De même, lorsqu'une exposition internationale aura lieu dans
un état qui aura conclu avec la Suisse une convention sur cet
objet, le délai de priorité que le pays étranger accordera aux
dessins et modèles exposés leur sera accordé aussi en Suisse. Ce
délai, toutefois, ne dépassera pas 6 mois dès le jour de l'admis-
sion du produit à l'exposition.
Art. 36. — Aussi longtemps qu'un arrêté fédéral spécial n'aura
-■V
- 158 —
pas été édicté, les dispositions de la présente loi ne s'appliquent
pas à l'impression sur cotonnades, ni aux tissas de soie ou de
i-soie autres que les tissus Jacquard.
Aht. 37. — Le Conseil fédéral est chargé d'édicter les règle-
ents nécessaires pour l'exécution de la présente loi.
Art. 38. — La loi fédérale du 21 décembre 1S88 sur les dessins
modèles eet abrogée.
Les dessins el modèles qui ne seront pas déposés depuis pluâ
! deux ans au moment de l'eutrée en vigueur de cette loi jooi-
nt de plein droit de la protection léfjale pendant la période de
nq ans, établie par la présente loi, à compter depuis le moment
1 dépat.
Art. 39. — Le Conseil fédéral est chargé, conformément aux
spositions de la loi du 17 juin IS74 concernant les volations
)pulaires sur les lois et arrêtés fédéraux, de publier la présente
i et de Hxer l'époque où elle entrera en vigueur.
Ainsi décrété par le Conseil des Etats.
Berne, le 30 mars 1900.
Art. 4187.
èBl*lKttOD« étrangère*. — Vénémnéin. — Frandea
mur l'orlclne et I» qiutlllïé de« old«ts>
Code prinai de 1897 [entré en vigueur le ZO février 1898),
Art, 301 . — Celui qui, dans un but commercial, aura introduit
ins le pays, mis en vente ou mis en circulation de toute antre
anière, des œuvres de l'esprit ou des produits manufacturés
irtaiit des noms, des marques ou des sifçnes distinctifs oontre-
its ou altérés, ou des noms, des marques ou des signes distinc-
's susceptibles d'induire l'acbeteur en erreur quant à l'origine
I à la qualité de ces objets, sera passible, si la propriété des
uvres, des noms, des marques uu des signes dont il s'agit a été
gaiement enregistrée dans le Venezuela, d'un emprisonnement
i un k douze mois et d'une amende de 50 à 2,000 bolivars.
> déloyale.
— Sappr«««ioit du non
in ve«-lntérét« .
Commet un acte de concurrence déloyale ou au moim
^ V-.."^^~» - -,- -, --„^-,,^,— -.->-^y-^ -y-,
— 159 -
un acte dommageable tombant sous Vapplication de Varti-
cle 1382 du Code civil y le commerçant qui distribue gratui-
tement à sa clientèle un almanach que les négociants d'une
ville ont fait éditer au moyen d'une subvention versée par
ux et indiquant à titre de réclame leur adresse^ leur genre
de commerce et leur spécialité, après avoir pris soin de
coller ensemble les feuillets oii figure l'annonce de son con-
current^ de manière à ne laisser que celle qui lui est per-
sonnelle (1).
(C. de Riom, 28 mars 1900. ~ fioagerolle c Guillot.)
Ainsi jugé par arrêt du 28 mars 1900, sous la présidence
de M. Vacher, premier président, après plaidoiries de
M**" MoNANOEs (du barreau de Monlluçon) et Lacarrièrb, avo-
cats, et conclusions de M. Delpy, avocat général, sur appel
d'un jugement du 7 février 1899 :
La Cour, Considérant qu'au moyen d'une subvention versée
par eux, les négociants de Commentry ont fait éditer pour Tannée
i899, par Laurent, libraire dans la même ville, un almanach dit
Almanach de Commentry indiquant à titre de réclame leur
adresse, leur genre de commerce et leurs spécialités ; que le nom
de Bougerolle épicier à Commentry figure dans cet almanach à
la page 40, avec toutes les indications se référant à son com-
merce; qu'il en est de même à la page 29 de Guillot également,
épicier dans la même localité ;
Considérant que Guillot, ayant acheté, aux environs du jour de
l'an 1895, 200 exemplaires dudit almanach, lésa distribués gra-
tuitement à un certain nombre de ses clients, après avoir fait
disparaître Tinsertion concernant Bougerolle, en collant Tune à
Tautre les pages 40 et 41 de cette brochure ; qu6 le fait a été
régulièrement constaté par acte de Pobeaud huissier en date du
30 décembre 1899;
Considérant que c'est à tort que les premiers juges ont consi-
déré cet acte de Guillot comme sinon correct, du moins parfaite-
ment licite et accompli dans la plénitude de son droit;
Considérant qu'en effet, cette manœuvre contraire à. la loyauté
commerciale avait pour eiïet de supprimer, dans les exemplaires
achetés et distribués par Guillot, la publicité payée par Bougerolle
et était de nature par cela même à porter à autrui un certain pré-
judice.
(1) Sur la concurrence déloyale au moyen d'annonces et prospectas v.
PouUlet, Conc. déL, n« 614.— Gomp. Orléans, 3 décembre 1898, Boursy,
Ann. 1899.182.
- ^ r"^ "^n^y^ 1 1 '
^ ■
— 160 —
Considérant qu'elle peut dès lors être considérée comme un
acte de concurrence déloyale, et qu'au dit cas elle constitue, sans
doute possible, un fait dommageable tombant sous Tapplication
de l'article 1382 du Gode civil ; que, dès lors, il y a lieu, aa regard
de la cause et aux deux points de vue qui précèdent, d'accorder à
Bougerolle une réparation du préjudice par lui éprouvé ;
Mais considérant que le préjudice a été peu considérable, la
distribution de Talmanach ainsi altéré par les soins de Guillot
ayant été peu étendue ; que la somme de 2000 francs demandée
par rappelant à titre de dommages-intérêts est notoirement exa-
gérée ; que la Cour possède les éléments d*apprécialion néces-
saires pour Hxer à 200 francs le montant de ladite réparation ;
Par ces motifs, Dit mal jugé, bien appelé, émendant, condamne
Guillot à payer et porter à Bougerolle la somme de 200 francs
à titre de dommages-intéréts,tantpour le fait de concurrence dé-
loyale que pour application de l'article 1382 du Gode civil; lai
fait défense de distribuer à l'avenir Falmanach de Commentry
tronqué ou altéré par collage des feuilles ou autrement, sous
peine de 100 francs de dommages-intérêts par chaque fait nouveau
dûment constaté.
Art. 4189.
Concurrence licite. — AlCKléle» du domnlne
public, — DénomlnnClonis différente*.
On ne saurait voir une similitude dommageable dans rem-
ploi des termes /'Inusable et /'Indéchirable pour désigner
des serviettes d'écolier ou d'homme d'affaires^ ces deux ex-
pressions indiquant des qualités différentes et se présentant
chacune à Vesprit avec un sens particulier (1),
Le fait de vendre^ comme un concurrent, des serviettes
caractérisées par l'arrêt des coutures au moyen d^ œillets mé^
talliquesypar douzaines dans un casier formant plan incliné
et en les présentant par rang de tailles^ ne constitue pas un
acte de concurrence déloyale, alors quilest constaté que les
serviettes ne sont pas nouvelles en soi, que ces disposi-
lions sont généralement usitées dans le commerce des mêmes
articles et que le nom donné à ces serviettes, de fabrication
connue, est différent (2).
(1) Sur la concurrence déloyale pur usurpation de dénomination , v,
Pouillet, Marques^ n^ 460 et s. et la jurisprudence allée.
(2) Sur l'imitation de l'aspect d'ensemble d'une marchandise, Pouiliet
— 161 —
(C. de Paris, 12 juillet 1900. — Herment c, Koppenhague.)
A la date du 5 janvier 1898, le Tribunal de commerce de
la Seine, sous la présidence de M. Legrand, a rendu le ju-
gement suivant :
Le Tribunal, Attendu que la demande originairement portée
devant ce Tribunal, tendait : 1<> A voir dire que Herment était
propriétaire exclusif des modèles de fabrication pour serviettes
d'écoliers par lui déposés au conseil des prud'hommes de la Seine
le 5 décembre 1893 ; 2<» A voir défendre à Koppenhague de fabri-
quer à l'avenir des serviettes dont les coutures seraient arrêtées
aux huit coins par des œillets en métal ; 3° A voir défendre éga-
lement à ce dernier de mettre en vente des serviettes ainsi
fabriquées, antres que celles du demandeur, le tout à peine de
100 francs par chaque contravention constatée ; 4* A voir or-
donner que dans le jour du jugement à intervenir, Koppenhague
serait tenu de détruire toutes les serviettes fabriquées d'après
le modèle du demandeur à peine de 5.000 francs de dommages-
intérêts ; 5« Enfin à s'entendre condamner Koppenhague à 5.000
francs de dommages-intérêts pour le préjudice causé tant par
cette fabrication que par l'usage qui en avait été fait :
Sur l'ensemble des demandes :
Attendu que Herment appuie ses prétentions sur un dépôt de
son modèle de serviette par lui fait au Conseil des Prud'hommes
Je 5 décembre 1893,au triple point de vue de leur confection avec
œillets métalliques, des noms de «' l'indéchirable » qu'il leur a
donné et de la marque A. H. dont il les a revêtues ; qu'il prétend
que ce dépôt fait par application de la loi du 18 mars 1806 au-
rait pour effet de lui conférer un droit privatif à l'exploitation
des serviettes à coutures protégées paç des œillets ; que dès lors
Koppenhague, en en mettant de semblables en vente sous la dé-
nomination « l'Inusable » avec les initiales A. K. se serait livré
à une concurrence déloyale à son encontre ; que ce fait ressorti-
rait d'ailleurs avec plus d'évidence encore de cette circonstance
que le défendeur vendrait comme lui ses serviettes par douzai-
nes et en boites presque semblables aux siennes ; qu'en consé-
quence il y aurait lieu de prendre à son égard les diverses me-
sures ci-dessus énumérées et de le contraindre à la réparation
du préjudice qu'il lui aurait causé ;
Mais attendu que le dépôt d'un modèle au conseil des pru.-
d'hommes ne saurait assurer un droit de priorité à un fabricant
qu'à la condition essentielle que son modèle soit nouveau ;
èod loc, no473. — Comp. Paris, 10 décembre 1856, Guillout, Ann,i
57.123; Caen, il janvier 1871, Carpentier, Ann., 72.333. ^^
•V ■ %-,\
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TT
— 162 —
Qu'il appert des débats et de Tinstruction ordonnée par ce
tribunal que tel n'a pas été le cas en Tespèce, des serviettes gar-
nies d'œillets métalliques émanant d'autres maisons que celle
du demandeur étant d'une vente courante dans le commerce de
la place de Paris depuis 4 889 c'est-à-dire depuis quatre années
avant le dépôt dont excipe Herment;
Et attendu qu'en ce qui touche la marque ce l'Indéchirable k
et les initiales A. H.^ le dépôt fait au greffe du conseil des prud'-
hommes est inopérant, leur propriété ne pouvant s'affirmer
que par un dépôt au grefTe du tribunal de commerce efîectué
d'après les dispositions de la loi du 23 juin 1857 ;
Qu'au reste, il n'apparaît pas qu'une similitude dommageable
puisse être relevée entre les termes « l'Inusable >* et « l'Indéchi-
rable » employés par les parties, ces deux expressions indiquant
des qualités différentes et se présentant chacune à l'esprit avec
un sens particulier ;
Attendu que le tribunal estime en outre qu'on ne saurait faire
reproche àKoppenhague d'avoir fait usage de ses initiales A. E.
qui ne sont pas celles du demandeur, ni v.oir l'indice d'une con-
currence déloyale dans le fait d'avoir vendu par douzaines et
dans des boites, en fait dissemblables de celles de Herment, des
serviettes qui avaient cours dans le commerce, longtemps avant
que celui-ci en ait entrepris la fabrication :
Que la demande de ce dernier doit donc être repoussée à tou-
tes Qns qu'elle est introduite.
Par ces motiks, Déclare Herment mal fondé en toutes ses de-
mandes, fins et conclusions, l'en déboute, et le condamne par les
voies de droit en tous les dépens.
M. Herment ayant interjeté appel de ce jugement, la
Cour de Paris, sous la présidence de M. Hauel, président,
après plaidoiries de M" Claro et Deroste, avocats et
conclusions de M. Fourniek, substitut du procureur géné-
ral, a, le 12 juillet 1900, rendu l'arrêt confirmalif suivant.
La Cour, Adoptant les motifs du jugement ;
Considérant, en outre, que Herment reproche à Koppenhague
(l'avoir commis des actes de concurrence illicite en copiant les
dispositions nouvelles qu'il aurait imaginées pour la vente des
serviettes d'écoliers ou hommes d'affaires lesquelles consistaient
dans l'arrêt des coulures par des œillets métalliques, dans la dé-
signatinn de ses produits par le nom particulier VIndéchirabie
et dans leur mise en vente dans un casier formant plan incliné»
et pre'sentant les serviettes par rang de tailles;
— 163 —
Considérant que Tensemble de ces dispositions n'offre aucun
caractère de nouveauté et d'originalité,qu'elles sont généralement
usitées dans le commerce des mêmes articles et qu'il n'est nul-
lement établi, que Koppenhague qui a donné un nom différent
à ses serviettes ait causé un préjudice à l'appelant.
Par ces motifs, Déclare Herment mal fondé dans ses deman-
des, fins et conclusions, Ten déboute, confirme.
Art. 4190.
Brevet 'Wlllame. — Combina tison nonveUe. — Contre-
façon. — Antériorité. — Divulgation, ~ Témolflrna-
ge. — Correispondanee. — Liettre-nil»islve. — Usa^e
dana une usine étrangrére.
Esi brevelable U7ie machine destinée à la pose des filins de
matière plastique dans les couvercles des boîtes de conserves^
comprenant deux organes principaux ; un organe mâle for-
mé par un manchon chauffé directement par le gaz d'éclai-
rage^ et un organe femelle^ adapté sur une glissière j formé
de deux tubes concentriques coulissant Vun dans Vautre au
moyen d'un ressort à boudin, alors qu'antérieurement au
brevet^ il existait déjà une machine destinée au même usa-
ge^ comprenant également deux organes, un organe mâle,
formé d'un tampon plein non chauffé, et un organe femelle
semblable à celui de la machine brevetée mais non monté
sur glissière (1).
Doit être considérée comme une contrefaçon une machine
permettant l'emploi simultané de la chaleur et de la pres-
sion, gui malgré l'absence de glissière et l'adoption d'un
mode de chauffage différent, pour l'organe mâle, repro-
duit néanmoins dans leurs particularités ou éléments carac-
téristiques la combinaison de ces deux organes princi-
paux (2).
Lorsque une antériorité invoquée contre un brevet se pré-
(1-2) Sur la brevetabilité et la contrefaçon des combinaisons nouvelles
d'éléments connus, V. Pouillet {Brev, ifinv.)^ n* 46 et suiv.^n» 727 et
suiv.et la jurisprudence citée. — Comp. Gass.req.,8 août 1897, iNicolas,
i4nn., 99.65 ; Cass.» 26oct. 96, Guillaumin, Ann., 99.66 ; Cass., 14 avril
1899, Leoni, Ann,, 99.246: Paris, 15 mars 19U(), Gruson, Ann., 1900.
234 ; Hiom, 5 avril 1900, Chàtillon, Ann., 1900.
— 164 —
sente entourée de circonstances suspectes, elle doit être écar^
tée (Résoin par le tribunal) (1).
Des attestations et des témoignages^par eux-mêmes pro-
bants, ne peuvent permettre de prononcer la nullité cTun
brevety quand ils trouvent leur contradiction dans une cor-
respondance antérieure (2).
Ne constitue pas antériorité Findication d'un appareil
dans une lettre-missive si la description n'étml pas suffisam-
ment claire^ dans l'état des connaissances à cette époque^
pour permettre la fabrication de V appareil sans un effort
considérable d'invention de la part du lecteur (3) .
Une lettre missive ne crée pas d'ailleurs la publicité, étant
de sa nature toute secrète; mais la publicité peut résulter des
faits qui y sont rapportés pour lesquels elle constitue un
témoignage irrécusable (4).
Le mot publicité ne saurait avoir un autre sens dans la
loi particulière des brevets, que celui qui lui appartient
par sa signification même qui est de signifier « fait, répan-
du ou livré au public ». La loi de 1844, loin de restreindre
le sens du mot publicité, y ajoute, pour pouvoir rejeter la
prétention du breveté, la condition que la publicité ait été de
nature telle qu'elle ait suffi pour l'exécution de l'invention;
ne répond pas à cette condition la seule existence dans une
usine étrangère, d'une machine similaire à la machine bre-
vetée, résultat du perfectionnement par les ingénieurs ou
ouvriers de l'usine d'une machine antérieure, alors que fu-
sine ne se livre pas à la fabrication de ces machines^ mais
se borne à les utiliser dans la fabrication de ses produits ;
qu'il n'est pas produit un seul document pour établir qu^en
fait la machine a été connue d'un ingénieur, d'un construc-
teur ou d'un homme du métier, et, que l'existence de cette
machine ainsi perfectionnée, publiquement connue au dire
du constructeur de la machine sus-énoncée, a été découvertey
(1 à 4) Les Tribunaux ont nn pouvoir souverain d'appréciation sur les
antériorités qui sont invoquées devant eux ; si elles sont obscures ou se
présentent entourées de circonstances suspectes ils doivent les écarter.
Sur le caractère que doivent présenter les antériorités, V. Pouillet, eod,
loc.y no 376 et suiv. Comp. Paris, 7 janv. 1897, Soc. Âuer^ Ann., 97.
162 ; et ce qui concerne les lettres missives : n« 884 et Metz, 14 août 1850;
Âlcan, Sir. 50.2.604 ; Paris, 17 fév. 1883, Lecolnte, Ann., 84.109.
r.--,-^- - - - -- • . r" w-w--. ^ --, ^^—m-f^~,~-^'
— 165 —
en fait^ non par ce constructeur lui-même^ mais par V ac-
quéreur de la dite machine (1).
Doit être déclaré contrefacteur, celui qui a acheté pour
un usage commercial une machine contrefaite si à raison
des circonstances, et notamment de poursuites intentées
antérieurement contre le constructeur de la machine in-
criminée, il est établi quil a agi sciemment : il ne peut
dans ce cas invoquer sa bonne foi (2).
(Trib. civ. Versailles, 18 mars 1896 et 2 février 1898. — C. de Paris,
20 juin 1900. — Leroy et Cie, et Lecourt c. Wiilame.)
Le Tribunal, Attendu que dans son brevet du 18 novembre
1885, Wiilame revendique la propriété exclusive d'un outillage
décrit et son application dans le but de placer automatiquement
au point voulu du couvercle ou du fond la quantité de substance
jointoyante nécessaire et de l'y rendre adhérente de manière à
obtenir des joints homogènes et hermétiques pouvant remplacer
les joints soudés à chaud des boites métalliques.
Attendu que cet outillage se compose de deux organes princi-
paux, Torgane mâle formé d'un manchon creux dans lequel le
gaz d'éclairage est introduit et porte l'ensemble à la température
voulue, et l'organe femelle composé de deux tubes concentriques
(1) D'après l'article IM de la loi du 5 juillet 1844, pour que l'invention
cesse d'être nouvelle, il faut qu'elle ait reçu avant la prise du brevet en
France et à l'étranger une publicité suffisante pour pouvoir être exé-
cutée. Or, dans respcce, il était certain que la machine, des plus simples
à comprendre à première inspection, avait été exécutée, qu'elle avait
fonctionné dans une importante usine, ouverte à un grand nombre de
personnes, même en dehors des ouvriers et employés ; le public, en ad-
mettant même qu'on ne rapportât pas la preuve qu'il eût connu Tin-
vention, était à même de la connaître, cela aurait dû suffire à notre avis,
pour faire admettre qu'il y avait eu publicité, antérieurement à la prise
du brevet. Quant aux circonstances, relevées par le jugement, que la
machine opposée comme antériorité était le résultat de perfectionnements
par les ingénieurs même de l'usine, d'une machine antéiieure ; que l'u-
sine ne livrait pas au commerce des machines semblables mais se bor-
nait à les employer ; qu'enfin, la prétendue antériorité avait été décou-
verte non parle constructeur lui-même delà machine incriminée mais
par un de ses clients, elles sont manifestement sans intérêt au point
de vue de la publicité. Sur retendue de la publicité, V. Bédarride,
no 370.
(2) La jurisprudence va plus loin et décide que celui qui a acheté pour
un usage commercial une machine contrefaite doit être déclaré contre-
facteur aux termes de l'article 40 de la loi du 5 juillet 1844, sans qu'il
puisse invoquer sa bonne foi. V. Pouillet, n» 673 et suiv., la jurispru-
dence citée et surtout, Cass., ch. réunies, 30 oct. 1899, Soc. Auer,
Ann., 99.285.
A. T.
— 166 —
coulissant l'un dans l'autre, le second tube reposant sur un res-
sort à boudin, qui, l'opération faite, le ramène dans sa position
primitive, avec cette circonstance que le dit organe femelle se
déplace sur une glissière qui en permet la manœuvre et facilite
pour l'ouvrier la pose du joint qui est fixé ultérieurement par
la pression de l'organe supérieur chauffé ;
Attendu que quelle que soit la nomenclature déjà donnée
par diverses décisions judiciaires ou sollicitée par M. Willame
lui-même des organes indispensables de cette invention, l'ensem-
ble qu'elle forme paraît au Tribunal susceptible d'être ramené
aux éléments essentiels suivants pour obtenir le résultat indus-
triel cherché ; savoir : un organe mâle chauffé, un organe fe-
melle cédant sous la pression de Torgane supérieur, et revenan
à sa position primitive par TelTet d'un ressort à boudin ;
Attendu que la glissière qui facilite le travail et en assure la
promptitude et la régularité, n'est pas à la rigueur, malgré toute
son importance tellement indispensable à l'obtention du produit
désiré que sa réunion seule aux antres éléments ait pu rendre
l'invention de Willame brevelable, bien qu'il ait été jugé que
son emploi dans l'appareil saisi ait donné la preuve d'une con-
trefaçon ;
Attendu que Ch. Leroy et Cie reconnaissent qu'ils ont fourni à
Lecourt l'appareil saisi dans son usine, mais qu'ils soutiennent
d'abord que l'appareil argué de contrefaçon est de tous points
semblable à celui qui avait été breveté en 4866 par un sieur Bour-
gine et qui est aujourd'hui tombé dans le domaine public;
Attendu que cet appareil Bôurgine a déjà été produit comme
antériorité dans une précédente instance en contrefaçon suivie
devant le Tribunal civil de Bordeaux, que devant cette juridiction
il est vrai, l'appareil saisi différait beaucoup plus du 4ype imaginé
par Bonrgine que celui qui a fait l'objet du procès actuel, que
notamment le cylindre ou organe supérieur formait un récipient
à gaz, au lieu d'être un bloc massif, agissant sur le filin par le
seul effet de la pression, comme dans le véritable appareil Bôur-
gine ;
Attendu que la machine Bôurgine véritable, diffère essentielle-
ment de l'appareil saisi chez Lecourt en ce qu'il ne présente pas
le réflecteur ni la couronne à gaz percée de trous capillaires qui
ne sont que le déplacement d'une des particularités de l'invention
de Willame, du dedans d'un manchon creux au dehors d'un cy-
lindre plein ;
Attendu que Ch. Leroy contrefacteur habituel en quelque sorte
de Willame comprend d'autant mieux l'importance du chauffage
de l'organe supérieur pour l'obtention du jointoyage hermétique,
qu'il avoue que c'est de parti pris que ne pouvant continuer la
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— 167 —
fabrication des appareils Willame, que le Tribunal et la Cour
de Bordeaux avaient jugés contrefait, il s'est décidé à copier le
modèle de Bour^ine ;
Attendu qu'il soutient il est vrai, que le fait d'user de la cha-
leur pour faciliter l'adhérence du filin n'est point susceptible d'un
brevet mais qu'il ne peut expliquer comment au lieu de s'en te-
nir au type Bourginc, agissant parle seul effet de la pression, il
a imité c'est-à-dire contrefait Willame en cherchant comme Leroy
à accumuler l'emploi de la chaleur et de la pression et à dissimu-
ler son imitation en apportant le gaz à la périphérie du cylindre
au lieu de le maintenir à Tintérieur ;
Sur les conclusions subsidiaires des défendeurs :
Attendu que par des conclusions subsidiaires, Leroy a produit
un articulât contenant quatre faits; que Lecourt s'est joint à cette
deniande d'enquête en ajoutant divers chefs et qu'ils demandent
d'être admis à prouver particulièrement par la voie d'une exper-
tise ;
Attendu que ces faits tendent à démontrer que l'invention de
Willame était dans le domaine public avant la prise du brevet ;
r* Parce que la maison Kircheis de Aue en Saxe aurait vendu
depuis 1880 et même avant cette époque des appareils réalisant
le collage des joints par les moyens précisés dans la description
du brevet Willame (faits un, deux et trois de l'articulât Lecourt
et trois de l'articulât Leroy) ; 2° parce que la maison Kargès de
Brunswick a livré à la maison Ign. Eislerà Inzersdorf (Autriche)
des mêmes appareils (articles un et deux de l'articulât Leroy,
quatre et cinq de l'articulât Lecourt) ; 3° parce que en 1885, avant
la prise du brevet, la même machine a élé offerte à un négociant
de la ville de Carentan (numéro six de l'articulât Lecourt) ; 4° par
ce que Kircheis en novembre 1885, a signé avec Willame un
contrat par lequel il s'engageait à ne pas fournir en France ses
appareils de jointoyage ;
Attendu, qu'en admettant que la pertinence et la précision de
ces faits ne soient pas suffisantes, le demandeur en conteste
l'admissibilité ;
Attendu que suivant lui les défendeurs devraient produiront
des catalogues des maisons Kargès et Erdmann Kircheis, anté-
rieurs à l'année 1885, sur lesquels figurerait l'annonce de l'ap-
pareil breveté par Willame, que lui demandeur produit la 75^
édition du mois de mars de l'année 1887 de la maison de cons-
truction de Kircheis sur laquelle aucune mention n'est faite
d'un semblable appareil ;
Attendu que sur ce sujet, une lettre datée du 4 février 1896 et
émanée du représentant de la dite maison Kircheis porte seule-
ment que cette maison n'a eu aucune occasion de vendre en
— 168 —
France des machines et appareils à poser les joints, parce que
par un traité spécial elle en avait abandonné la fabrication
à la maison Willame, que cette expression un peu vague ne
permet pas de considérer comme prouvé que Kircheis n'a pas
vendu ces appareils avant 1885 ailleurs qu'en France ;
Attendu que dans la même lettre, il est fait allusion à un
traité dont Willame produit la copie, mais que cette copie ne
coïncide pas avec les termes de la lettre précitée, le traité pré-
sente au Tribunal ne paraissant porter que sur la cession d'une
machine à fermer hermétiquement les boites en fer blanc aa
moyen d'une double agrafe;
Qu'il serait nécessaire de préciser par une enquête les conven-
tions passées entre les deux maisons au sujet de la machine liti-
gieuse ou d'un appareil similaire, que si Kircheis a abandonné
le droit de fabriquer l'appareil àjointoyer à Willame, il ne s'en
suit pas nécessairement qu'il n'en ait pas lui-même fabriqué ou
vendu avant les 25, 31 mars 1885, ou qu'il lui ait fait la cession
d^un brevet ou du droit à un brevet sur cette machine ;
Attendu que par la même lettre du 4 février 1896, Kircheis dit
bien que le sieur Asche alors son représentant à Paris, avait été
autorisé à vendre de ces appareils à la condition de les prendre
là bas, ce qui semble indiquer à la maison Willame, et que ce
sieur Asche l'avait invité à diverses reprises à les fabriquer lui-
même, ce qu'il avait refusé par suite des engagements pris,mais
que sur ce point encore une enquête seule pourra faire connaître
dans quelles conditions précises s'étaient présentées les propo-
sitions de Asche et les refus de la maison qu'il représentait ;
Attendu qu'il est allégué que Asche avait en septembre 1885,
dans une lettre dont la reproduction photographique est pro-
duite, proposé l'appareil breveté à un de ses correspondants, le
sieur Naux, négociant à Garentan;
Qu'en admettant que les termes de la lettre ne suffisent pas,
par la description qu'elle contient, à constituera publication de
l'invention, il est possible que l'enquête produise des éléments
importants pour établir la publicité ;
Attendu que de ces considérations, il ressort que Willame n'a
pas établi que les faits allégués soient inadmissibles ;
Attendu que l'expertise sollicitée de préférence par Lecourt,
I n'est qu'un moyen détourné de faire procéder à une enquête, sans
! l'entourer des garanties nécessaires propres à ce moyen d'ins-
I tr uction
Par crs motifs, Le tribunal joint les instances, maintient en
cause Lecourt dont la bonne foi n'est pas établie ;
Dit et ordonne avant faire droit, qu'à l'audience du mercredi
•Kl I KWf'J .'W>ÇT"« '-'^ ■•' — Z-^'^T^r — ^^^■^■ w^wy. i»n.,inr
— 169 —
i3 mai prochain les défendeurs seront admis à faire la preuve
des faits articulés ; savoir :
Premièrement, Leroy et Cie : 1° Dès i 880, Kargèsde Bruns-
wick fabriquait l'appareil à poser le joint avec tampon supérieur
chauffé, le tout sur un chariot ; 2» II en a livré dès cette époque
à la maison Ign. Eisler à Inzersdorf (Autriche) ; 3® Kircheis
d'Aue, en Saxe, en fabriquait à la même époque, et son re-
présentant en France, Otto Asche, en offrait aux fabricants, no-
tamment à un sieur Naux en septembre 1885 ; 4<> Kircheis, en
novembre 4885, s*est mis d'accord avec Willame pour n'en pas
livrer en France ; un contrat fut signé entre eux à cette époque,
à la suite duquel Willame prit son brevet du 18 novembre 1885,
qu'il savait être sans nulle valeur ;
Deuxièmement, Lecourt : i^ Dès avant 1880, la maison Kircheis
de Aue en Saxe, fabriquait et vendait couramment en Allema-
gne, dans les pays d'Europe et en France^ une machine à coller
par chauffage et pression, les joints destinés h fermer herméti-
quement les bottes de produits alimentaires ; 2<^Les machines à
coller les joints, fabriquées et vendues par la maison Kircheis
comportent exactement les trois éléments de composition re-
vendiquées depuis dans le brevet Willame et Cie, soit un cy-
lindre supérieur chauffé par le gaz, un cylindre inférieur com-
posé de deux anneaux concentriques, une glissière formant
chariot; 3» Les machines fabriquées et vendues avant 1880 réa-
lisaient le collage des joints par les moyens précisés depuis la
description du brevet Willame, soit par le chauffage du cylin-
dre supérieur, soit par l'affaissement d'un des anneaux du cy-
lindre inférieur, soit par la pression avec chaleur sur le joint
à fixer) 4<» Dès la même époque de 1880, la maison Kargès de
Brunswick fabriquait également la machine à coller les joints
par pression et chauffage avec cylilidre supérieur, cylindre in-
férieur et mouvement de pression avec chauffage, et elle offrait
cette machine à la vente par des représentants, et elle la li-
vrait aux fabriques de produits alimentaires ; 5o La maison
Eisler et Cie d'Inzersdorf, près Vienne, se servait dès une épo-
que rapprochée de 4880, de la machine à coller les joints pour
adapter sur les couvercles des boîtes à conserves, des rondelles
de caoutchouc par le triple moyen des cylindres, du chauffage et
de la pression ; 6® Depuis 1880, les représentants de fabriques ont
constamment offert en France la livraison de machines à coller
les joints, provenant de divers fabricants. En septembre 1885,
notamment avant le brevet Willame, la machine à coller les
joints a été offerte et vendue à un fabricant de produits alimen-
taires de Garentan ;
Réserve aux demandeurs la preuve contraire.
I ■ ■ . *m\ m^fffH^ttÊ
Sur l'enquête, le Tribunal de Versailles, après conclu-
01) de M. Mattrb, substilul, a statué en ces termes le
février 1898:
Lb Tribunal, En ce qui concerne les conclusions reconTen-
onnelles lie Lecourt tendant à faire dire par le tribunal qne la
achine à coller les joints, revendiquée par Willame et Ci*
i[ composée d'éléments appartenant au domaine public;
Attendu que tes considérants des jugements de ce siège dn
) mars 1896 ont déjà écarté cette conclusion, et qu'il en résulte
ne l'appareil de Willame dans son ensemble, et tel qu'il a été
îcrit et dessiné pour l'obtention du brevet, est ea lui-même nne
ivention brevetable ;
En ce qui concerne les antériorités invoquées avant la précé-
eiite instance :
Attendu qu'il a été ordonné par le même jugement qne Lerov
. Cie et Lecourt seraient admis k faire la preuve des faits par eui
-ticulés, que ces faits étaient relatifs à des faits de fabrication et
) mise en vente de machines similaires à coller les joints, par
s maisons Kargès de Brunswick, Kircheis d'Aue, en Saxe, Eisler
Inzersdorf, près Vienne (Autriche), qui aurait fait usage depuis
IHO d'une machine à poser les joints, identique dans son fonc-
«nnemenl à la machine brevetée par Willame et Cie,
1» En ce qui touche l'anlénorité de Kargis ;
Attendu que su[' l'antériorité de Kargès de Brunswick, il n'a
ê fait aucune preuve, qu'il y a lieu seulement de retenir sur
point qu'il avait été allégué dans l'articulât que c'est Kàtfii
I Brunswick qui avait dèi> 1S80 vendu l'appareil à la maison
sler d'lnïer?dorf.
2" En ce qui touche rantériorité de Kircheis :
Attendu que les preuves de l'antériorité alléguée ont porté sur
ïis faits qu'il convient d'examiner successivement ;
1» Proposition d'Otto Asefte, représentant de la maison Kircheis.
Naux fabricant de conserves à C;irantan :
Attendu qu'à l'enquête faite le 13 mai 1896 à l'audience du Tri-
nal de Versailles, Otto Asche a déclaré que, représentant de
rcheis depuis tSSS, il avait su qu'un constructeur avait ven-
à Eialer (sans doute d'Iii«rsdorf) le brevet d'un appareil Mar-
et destiné à la fermature des boites de conserves moyennant
D.OOO francs, que cette alTaire avait attiré son attention ; qu'il
ait été avisé en 1S81 que Kircheis avait construit de nouvelles
icliines k fermer lus boites à conserves, qu'il s'était alors rendu
e\poditioii d'Amsterdam pour y voir les machines exposées de
Jonghe, représentant en Hollande, de cette maison, qu'il avait
— 171 —
alors écrit à cette maison et s'était mis en mesure de fournir à
la clientèle française ;
QuMl ne s'agissait alors que des machines à agrafer et qu'il
avait facilité la conclusion d'un traité entre la maison qu'il re-
présentait et Willame pour ces sortes de machines ;
Que Naux, ayant eu besoin d'une fermeture plus hermétique
lui avait manifesté le désir de posséder un système plus parfait
sous ce rapport, et qu'il n'avait éprouvé aucune difficulté à ima-
giner l'appareil dont la description se trouve dans sa lettre du
29 septembre 1885 à ce même Naux ;
Que vers la fin de 1885, ayant vu justement chez Willame un
appareil se composant d'un tampon chauffé au gaz sous lequel
on plaçait le couvercle à garnir avec le joint, et encore qu'une
légère pression du levier suffisait pour coller le joint au couver-
cle, cette vue l'avait fait sourire, car il avait remarqué que leurs
idées s'étaient justement rencontrées, qu'il ne connaissait pas
la maison Eisler d'ïnzersdorf (Vienne), laquelle n'avait point à ven-
dre ces appareils, puisqu'elle fabriquait elle-même des conserves
pour l'armée;
Attendu que le témoin Naux entendu à la même audience, a
précisé qu'il avait bien reçu, à la date, la lettre du 29 septem-
bre 1885 relative à la machine à coller le joint, mais que ce n'est
qu'à la date du 12 mars 1886 (le brevet Willame est du 18 no-
vembre 1885), qu'il avait reçu ce nouvel appareil;
Attendu que de ces témoignages et de leur comparaison, il
ressort que Asche ne considère pas les machines à coller les
joints comme inventées par la maison Kircheis, qu'il s'en pré-
tend l'inventeur lui-même et soutient qu'il y avait eu simple
coïncidence d'invention entre Willame et lui ;
Attendu qu'il est possible, pour ne pas dire probable, que Otto
Asche ait vu plus ou moins complètement dans les ateliers de
Willame, la machine brevetée parce dernier, en cours de cons-
truction, qu'il en a fait une description plus ou moins exacte dans
la lettre du 29 septembre, mais qu'il est loin de prouver qu'il en
ait été l'inventeur lui-même ;
Attendu d'autre part que si avec la connaissance aujourd'hui
acquise grâce aux modèles présentés ou aux descriptions du bre-
vet, la lettre du 29 septembre peut donner une idée du système,
il est difficile d'admettre que la description qu'elle contient et
particulièrement la désignation d'une double bague, dont une à
ressort sur laquelle repose la corde en cuir feutré, en ait permis
la fabrication sans un effort considérable d'invention de la part
du lecteur ;
Attendu en tous cas que l'invention d'Asche se présente entou-
-r^-
'>
\*
— 172 —
rée de circonstances suspectes qui doivent la faire écarter da
débat.
3° De l'antériorité dite de Kircheis ; l'exposition d^ Amsterdam
et l'achat de f^umann :
Attendu que le témoin Numann, d'Amsterdam, a déclaré à
Tenquête le 29 août 1896, qu'en Tannée 1883, àTexposition inter-
nationale, une machine servant à fermer des boites de fer blanc
et routillage s'y rapportant pour,à Taide d'une pression au moyen
d'un tampon creux chauffé au gaz, fermer avec du caoutchouc
Temboitement des fonds et des couvercles de boites, avaient été
exposés ;
Qu'il ajoute que cette machine a été exposée par de Jooghe à
l'exposition agricole de 1884;
Attendu que le sieur Hillebrand, concessionnaire, se souvient
d'avoir autrefois demandé des renseignements à de Jonghe sur
les machines servant à la fermeture des boites à conserves ali-
mentaires, et qu'alors celui-ci lui aurait dit qu'il les tenait de
Kircheis d'Aue en Saxe,que de plus de Jonghe lui aurait avoué les
avoir mises aux expositions de 4883 et 1884, et qu'enfin il aurait
vu l'appareil acheté par Numann, qui se rapportait bien à celui
décrit ;
Attendu que ces témoignages seraient décisifs si Willame ne
faisait à l'aide d'éléments sérieux, la preuve de l'inexactitude des
faits qu'ils contiennent ;
Que d'abord il est à remarquer que Numann ne fournit pas la
facture acquittée de de Jonghe, que de plus une carte postale
d'un représentant de la maison de Jonghe à Amsterdam, datée
du 2 septembre i88Ô,démontre qu'à cette dernière date, Willame
fournissait les appareils à poser les joints à la maison de Jonghe,
que les employés de cette maison n'en connaissaient pas le fonc-
tionnement ;
Attendu que par lettre du 15 mai 1890, le même de Jonghe
demandait à Willame une machine à poser les joints, que le 5 juil-
let 1886, la maison Willame faisait l'envoi demandé et donnait
les instructions pour son fonctionnement, que cette lettre rappe-
lait la visite faite par de Jonghe lui-même dans les ateliers de
Glichy et que c'est vraisemblablement à la suite de cette affaire
que la carte postale du 2 septembre fait allusion ;
Attendu que Otto Asche n'a pas vu en 1885 chez de Jonghe les
machines en question ;
Attendu qu'il est à peine utile de faire remarquer que si de
Jonghe avait vendu en 1883, comme représentant de la maison
Kircheis, des machines à poser les joints, il n'en aurait pas
fait la commande en 1886 à Willame, qu'encore moins, lui ou ses
Mf:-r- T^wr-T^^-^v;
,. -j — .---■•— ,T ' -7—- f -ttr
— 173 —
employés n'auraient point été en état d'en comprendre le fonc-
tionnement ;
Attendu qu'au cours du délibéré, une attestation du contre-
maître de Wolff de la maison Numann d'Amsterdam, en 1884 et
années suivantes,porte que Toutil servant au moyen d'un tampon
creux à fixer, par le chauffage au gaz et la pression, les anneaux
de caoutchouc au couvercle des boites de conserves; a été em-
ployé sous sa surveillance dès i884;
Attendu que cette attestation trouve sa contradiction dans la
correspondance de la maison de Jonghe, avec Willame exami-
née ci-dessus, en face du témoignage de Numann, et ne saurait
davantage déterminer la conviction des juges ;
30 Existence d'un traité secret entre Kircheis Willame :
Attendu que Otto Âsche dans sa déposition ci-dessus, rappelle
les circonstances du- traité fait entre Kircheis et Willame pour les
machines à agrafer, traité qui se passait au printemps 4885 ;
Attendu que d'après Asche, de Jonghe avait assisté à la négo-
ciation, que les termes du traité sont maintenant connus dans
leur entier, et qu'ils ne se rapportent pas à la machine liti-
gieuse ;
Attendu qu'il convient même de remarquer à cette occasion,
que le fait Numann, Hillebrand, de Jonghe, et l'échange des cor-
respondances produites au tribunal est de nature à dissiper les
accusations de concert entre Kircheis et Willame ;
Qu'en effet, il aurait fallu qu'en prévision du procès actuel, et
dès 1886, de Jonghe représentant de Kircheis et Willame, cession-
naire d'une des inventions de cette maison, s'entendissent pour
fournir a priori, les preuves que Kircheis n'avait pas traité en
1885, de la cession de l'invention de la machine à fermer les
joints ;
4« Antériorité Eisler d'Inzerdorf :
Attendu qu'à la date du 3 novembre 1896, devant le représen-
tant du Tribunal impérial et royal de Vienne, Emile Schulz, direc-
teur actuel de la fabrique de conserves Eisler et Cie, a déclaré
que depuis 1878, la fabrique employait des machines pour établir
la fermeture à double agrafe pour les boites à conserves, système
dans lequel des anneaux en caoutchouc sont employés comme
moyen d'obturation ;
Qu'il résulte de sa déposition que la maison Eisler avait reçu en
1881 une machine Marquet, dans laquelle le disque compresseur
devait être chauffé par le gaz, que les propres mécaniciens de la
maison avaient en 1878, disposé dans la partie intérieure, un res-
sort à spirales, que pendant un certain temps après la réception
de la machine Marquet, on avait chauffé les anneaux obturateurs
au moyen de la vapeur, mais qu'à partir de 1887, l'usine ayant
r» l> s'f»«V^.MV,
— 174 —
été dotée du gaz d'éclairage, on avait utilisé ce gaz pour le chauf-
fage de Tappareil ;
Attendu que le témoin Schulz annonçait qu'il possédait une
photographie de la machine employée par sa maison, antérieu-
rement à 1885 et qu'il la ferait parvenir ;
Attendu que cette photographie a été représentée au tribunal,
qu'elle a été accompagnée depuis de dessins, et qu'en outre à la
date des 10 et 14 janvier, des lettres dont les originaux et traduc-
tion ont été mis sous les yeux du tribunal après communication,
commentent cette déclaration ;
Attendu que la comparaison de l'appareil avec celui qui a été
l'objet du brevet Willame, démontre une grande analogie, que les
différences paraissent consister surtout dans l'absence de trous
à la périphérie, au manchon ou organe mâle; dans l'existence
d'une charnière à l'organe femelle et dans l'absence de glis-
sières, et quelques menus détails même moins importants;
Attendu que si l'appareil ainsi transformé et perfectionné par
Ig. Eisler n'est plus l'appareil Marquet proprement dit, mais cons-
titue une machine propre à la maison qui Ta construit, ce qu'il
n'est pas utile d'examiner pour le moment, il ne pourrait, en
tous cas, être opposé comme antériorité à la maison Willame
et Cie, que s'il avait été rendu public ;
Attendu que sur ce point, les parties en cause proposent des
interprétations différentes de l'article 31 de la loi de 1844, lequel
avant toute discussion doit être rappelé dans ses termes :
« Ne sera pas réputée nouvelle, toute invention, découverte ou
application qui, en France ou à l'étranger et antérieurement à la
date du dépôt de la demande aura reçu une publicité suffisante
pour pouvoir être exécutée. »>
Que chaque espèce renferme en elle-même, les éléments de l'ap-
plication de cette publicité ;
Qu'en définitive le niot« publicité » ne peut avoir d'autre sens
dans une loi spéciale que celui qui lui appartient par sa signifi-
cation même, qui est de signifier, i< fait répandu ou livré au pu-
blic » ; que la loi de 1884, loin de restreindre le sens du mol de
publicité, y a ajouté une condition pour rejeter la prétention
du breveté, à savoir, que cette publicité soit de nature telle qu'elle
ait suffi pour l'exécution de l'invention;
Attendu que, sans doute, on ne peut exiger des défendeurs la
preuve d'un fait de publicité précis pour en suivre la marche et
les progrès dans le monde industriel, mais qu'encore ne faut-il
pas comme dans l'espèce, que leur ignorance même du perfec-
tionnement apporté par Eisler à la machine Marquet, n'éclate
dans tous les antécédents de la cause, que s'il s'agissait de juger
en dehors de tout texte l'imitation par Leroy et Cie de la ma-
— 175 —
chine Willame, on en pourrait parcourir les phases nécessaires
dans les procès antérieurs ;
Qu'il ressort de tous les faits révélés par les procédures que
rinvention d'£isler était restée confinée dans les ateliers de son
usine ;
Attendu que dans les procès divers où les tribunaux ont fixé
les principes de la publicité au point de vue de la loi du 5 juillet
1844, à côté des définitions on retrouve des faits qui établissent
non pas uniquement la possibilité de la connaissance de l'inven-
tion, mais de la divulgation manifeste ; que l'exemple invoqué,
notamment, de la publicité au moyen d'une seule lettre missive,
est contraire au fond à Tinterprétation des défendeurs, puisque ce
n'est pas la lettre missive qui avait créé la publicité, étant de sa
nature toute secrète, mais les faits de publicité attestés par cette
lettre, laquelle n'avait au fond que la valeur d'un témoignage
irrécusable, puisqu'elle émanait d'un ingénieur ou d'un spécia-
liste ;
Attendu que Leroy et Gie sont particulièrement en mauvaise
posture pour soutenir que le perfectionnement pratiqué dans cette
localité d'inzersdorf par des ingénieurs ou des ouvriers intelli-
gents, d'une machine défectueuse, était répandue dans le public
ou livré à la publicité, alors qu'ils n'ont pu découvrir le village
industriel ou la maison où s'abritait cette même invention, qu'il
est même très significatif, que ce perfectionnement « publique-
ment » connu ait été découvert par Lecourt, simple acquéreur de
la machine arguée de contrefaçon, alors que les fabricants eux-
mêmes en ignoraient l'existence jusqu'aux débats de l'instance
actuelle ;
Attendu que l'invention de la maison Eisler est si peu publi-
que, que Otto Asche supposait que leur appareil leur avait été
fourni par la maison Kargès ;
Que la maison Eisler ne se livre pas à la fabrication des ma-
chines, mais procède elle-même à la fabrication de ses boîtes de
conserves pour l'armée, dont elle est le fournisseur, et que pas
un seul document n'est produit pour établir qu'en fait la machine
d'inzersdorf a été connue d'un ingénieur, d'un constructeur,
d'un homme du métier ;
Attendu que des faits de publicité ne satisferaient pas encore
au vœu de la loi, s'il n'était établi en mémo temps qu'ils ont été
suffisants pour faire exécuter la machine, que ce double élément
manque dans la cause :
Par ces motifs, Déclare les défendeurs mal fondés dans leurs
uns, moyens et conclusions et demandes reconventionnelles, et
les en déboute ;
Condamne les sieurs Leroy et Cie et Lecourt, conjointement
^^i — ^-
— 176 —
et solidairement comme contrefacteurs des machines à poser
les joints, brevetées par Willame et Gie ;
Valide les saisies des contrefaçons pratiquées le 12 mai 4894 et
le 27 janvier 1896, suivant procès-verbal de Boulland haissier à
Versailles ;
Ordonne la conQscation et la remise aux mains des deman-
deurs des machines contrefaites et notamment de celles saisies
ou décrites ;
Condamne les sieurs Leroy et Cie et Lecourt sous la même
solidarité à payer aux demandeurs des dommages-intérêts à
fixer par état ;
Les condamne dès à présent, et à titre de provision, à payer
aux dits sieurs Willame et Cie la somme de 3.000 francs ;
Ordonne l'insertion du présent jugement dans trois journaux
in-extenso, et par extrait dans sept journaux aux choix des
demandeurs ;
Dit toutefois que le coût de chaque insertion ne dépassera pas
100 francs par extrait ;
Condamne conjointement et solidairement les défendeurs en
tous les dépens qui comprendront les frais de saisies, tous droits
d'enregistrement qui ont été perçus ou qui seront perças sur
tous titres et actes produits, ainsi qu'amendes et doubles droits
à titre de suppléments de dommages'intérêts, etc.
MM. Leroy et Lecourl ayant interjeté appel de ces deux
jugements, la Cour de Paris, sous la présidence de M. Gaze,
président, après avoir entendu M'" Taillefer, BoyercI Des-
jardin, avocats des parties, en leurs plaidoiries a, le 20 juin
1900, rendu Tacrôt confirmatif suivant :
La Cour, Au fond : Sur le chef des conclusions principales ten-
dant à faire décider que les machines saisies sur Lecourt ne cons-
titueraient pas des contrefaçons de la machine brevetée par Wil-
lame et Cie ;
Considérant que Willame et Gie, revendiquent dans leur brevet,
en vue de produire le résultat industriel qui s'y trouve spécifié,
un outillage composé de deux organes principaux, le premier
ou organe mâle formé d'un manchon chauffé directement par du
gaz d'éclairage, le second ou organe femelle, adapté sur une
glissière et formé de deux tubes concentriques, coulissant l'un
dans l'autre au moyen d'un ressort à boudin : qu'il résulte d'au-
tre part, des documents soumis à la Cour, spécialement de la des-
cription des appareils saisis sur Lecourt, que ces appareils, s'ils
ne sont pas une copie servile de la macbine brevetée, reprodui-
— 177 —
sent cependant dans leurs particalarités ou éléments caractéris-
tiques, la combinaison de ces deux organes principaux ;
Que si la glissière a été supprimée dans l'organe femelle et si
Fapplication àTorgane mâle du chauffage au gaz a été modifiée,
ces changements n'altèrent pas dans son essence leur combi-
naison ;
Qu'ils ne donnent à aucun égard un caractère de nouveauté
aux machines saisies ; qu'ils n'apparaissent en réalité dans les
circonstances de la cause à bon droit relevées dans le jugement,
que comme un moyen de masquer la contrefaçon ;
En ce qui touche les autres chefs des conclusions principales ;
Adoptant les motifs du jugement ;
Sur les conclusions subsidiaires :
i^ En ce qui concerne la solidarité :
Considérant qu'il est constant que Leroy et Gie ont fabriqué les
machines saisies et contrefaites :
Considérant, d'autre part, que ces machines ont été saisies
dans les ateliers de Lecourt qui s'en servait pour son industrie ;
qu'à raison des poursuites intentées dès 1893, notamment à Bor-
deaux par Willame et Cie, contre Leroy etCie pour contrefaçon,
Lecourt ne saurait invoquer sa bonne foi, et qu'il résulte en
réalité des documents et des faits de la cause, qu'en acquérant
ces machines en vue d'un usage commercial, il a participé
sciemment et par un concert formé avec Leroy et Cie, aux actes
de contrefaçon imputables à ces derniers.
2^ En ce qui touche les dommages-intérêts :
Considérant que les mesures d'instruction prescrites par les
premiers juges, de même que les condamnations qu'ils ont pro-
noncées dès à présent, par provision, sont justifiées ;
Par ces motifs, En la forme, reçoit Leroy et Cie et Lecourt en
leurs appels respectifs ;
Au fond, met les appellations à néant ;
Ordonne que ce dont est appel sortira son plein et entier effet
pour être exécuté selon sa forme et teneur ;
Déclare les appelants respectivement mal fondés dans leurs de-
mandes, fins et conclusions contraires, les en déboute ; et con-
damne les dits appelants Leroy et Cie et Lecourt, à l'amende et
aux frais de leurs appels, desquels frais, distraction, etc.
li
,«j>ijr««r
— 178 —
Art. 4191.
Brevet Taverdou. — DIvul^Atloa. — Essai. — IKîvto.
On ne saurait trouver les éléments d'une divulgation de
nature à entraîner la déchéance d'un brevet d'invention ^
dans V expérimentation d'une machine par le fabricant
devant un amateur ^ tenu en vertu d^une règle élémentaire
de loyauté d la discrétion absolue, alors surtout que ce
fjonctionnement n'était pas de nature à en révéler le méca-
nisme des rouages intérieurs, et ce qui constituait Vàme
même de Vinvention ; non plus que dans la remise à titre
confidentiel de devis et avant-projets de construction dans
lesquels des parties notables de f appareil ne figuraient pas
et trop incomplets pour permettre la réalisation de Vinven»
tion,
m
(C. de Paris, 10 jaillet 1900. — Fromholt c. dEspine et Aehard.)
Le Tribunal civil de la Seine, 3"^ chambre avait, le 2 mai
1894, rendu le jugement suivant :
Le Tribunal, Attendu que Fromholt, cessionnaire d'an brevet
Taverdon, du 30 juin i884, ayant pour objet un mode perfectionné
d'application de Toutillage diamanté à des machines-outils pour
le travail des roches et métaux,demande que les sieurs d^Espi ne et
Aehard soient déclarés contrefacteurs et condamnés & 150.000 fr.
de dommages-intérêts ;
Attendu que ledit Fromholt intente également contre les dé-
fendeurs, en vertu de Tarticle 34 de la loi de 4844, une action en
nullité d'un brevet par eux pris le 18 novembre 1890 pour des
perfectionnements dans les machines à scier les pierres ;
Qu'il prétend que la nullité résulterait de l'existence de brevets
antérieurs et aussi de ce que l'invention prétendue nouvelle au-
rait été divulguée par ses auteurs avant la prise du brevet ;
Sur la demande en contrefaçon :
(1) Sur les essais, V. Pouillet, Bt*êv, <Vinv,,ik*' S9i et s. et li jaris-
prudence citée. Spécialement dans Tespèce rapportée, la constatation,
faite par la Cour, que l'examen du mode de fonctionnement de la ma-
chine ne permettait pas d'en apercevoir le mécanisme intérieur était de
nature à faire écarter la divulgation : Gorop. rej., 25 mai 1868, Imba,
Dali. 63.1.442; Douai, 30 juin 1885, Oudit, Ann., 86.65 ; Grenoble,
{•^ août 1 887, Bonjour, iinn., 90.38 et.en matière de produit industriel
nouveau : Pau, 14 janvier 1899, Cornet, Ann., 99.S50 et la note.
A.T.
s-j -i
— 179 —
Attendu qu'il y a lieu de recourir à une expertise à laquelle
les parties s'accordent à conclure subsidiairement;
Sur la demande en nullité de brevet ;
En ce qui touche le grief tiré de la divulgation :
Attendu qu'à l'appui de sa prétention, Fromholt invoque la
remise faite dans le mois d'octobre 1890 par d'Espine et Achard
à la maison Civet, Crouet, Gautier etCie, de descriptions à titre
d'avànt-projet, et le fonctionnement public à Glarens (Suisse)
d'une machine identique dans la maison Chaudet ;
Mais attendu que les faits par lui allégués n'ont, en fait ni en
droit, la portée qu'il leur attribue ;
En ce qui touche le fonctionnement public à Glarens :
Attendu que devant le Tribunal de Bâle déjà saisi par le sieur
Fromholt de la même demande en nullité de brevet pour divul-
gation et ayant déjà fait justice du grief, le sieur Ghaudet, as^-
socié de la société Ghaudet frères, à Glarens^ chez lesquels
d'Ëspine et Achard avaient installé en 1890 leur machine achetée
par la dite société, a déclaré : qu'elle se trouvait dans un local
fermé,que l'entrée de ce local était absolument interdite au public;
que la société H. et G. Ghaudet frères avait pris l'engagement de
ne laisser voir la machine à personne sans une autorisation
écrite des défendeurs ;
Attendu que la seule personne dont Fromholt puisse prouver
ainsi l'admission est le sieur Jacquin, ingénieur mandataire de
la maison Civet, Crouet, Gautier et Cie, avec laquelle d'Espine
et Achard étaient en pourparlers pour l'achat d'une de leurs
machines ;
Que d'une part, l'expérimentation de cette machine par le
fabricant devant l'amateur^ tenu, en vertu d'une règle élémentaire
de loyauté, à la discrétion absolue^ ne constitue pas un fait de
publicité au sens de la loi ;
Que Fromholt essaie bien de prétendre 4ue Jacquin ou ^es
mandants auraient trahi le secret, mais qu'il ne rapporte pas de
preuves sur ce point ;
Attendu d'autre part et en tous cas, que la loi ne décrète de
déchéance qu'autant que Tinvention a reçu une publicité suffi-
sante pour pouvoir être exécutée ;
Que si Jacquin a vu fonctionner la machine, ce fonctionne-
ment n'était pas de nature à en révéler le mécanisme des rouagçs
intérieurs, soit ce qui constituait l'àme même de l'invention ;
Que les documents de la cause montrent qu'il n'a pas en effet
été suffisamment éclairé sur ce point ;
Que dans une lettre du 12 décembre 1890, postérieure à la
prise du bretet, mais antérieure à l'instance actuelle, d'Espine et
Achard écrivaient à Civet, Crouet, Gautier et Cie i
•à
— 180 -
Comme Monsieur Jacquin n'a pu »oir l'été dernier qu'im-
Ekitement le fonctionnement de la grande scie de Clarens,
: les courroies avaient besoin d'être raccourcies te jour de sa
e, il nous serait très agréable que Monsieur Jacquin veuille
renouveler sa visite entre le 21 elle 24 de ce mois. »
1 ce qui touche la remise d'avant-projets k la maison Civet,
let, (iautier et Ci e :
.tendu d'unepart qu'il convient de rappeler encore ici le
ctère confidentiel qui s'attachait à cette remise, caractère
exclut la publicité;
tendu d'autre part, que les documents de la cause établissent
issi qu'en tous cas, les projets n'étaient pas assez complets
- permettre l'exécution de l'invention qui a été brevetée;
le le sieur Jacquin lui-même, dans une lettre du 10 janvier
, signalait l'état incomplet de ces projets dont le dernier
t été expédié à sa maison le 13 novembre précédent ;
Quant au principe même de la machine que nous projetons,
rait-il, c'est bien un plateau circulaire à diamants avec trucs
.anis portant la pierre ; mais nous ne supposons pas que ce
]h l'objet de votre brevet, car le sciage par plateau circu-
avec truc glissant existe partout.
Renseignez- nous donc sur tout ce qui est spécial k votre
et en dehors du principe du sciage par plateau circulaire dia-
té, par an système autre que le vétre avec truc «lissant in-
ur portant la pierre, car ce principe est forcément aussi ce-
[ue nous projetons » ;
tendu qu'à cette lettre d'Ëspine et Achard répondaient le
emain :
]e principe d'une machine circulaire (etc.) fait partie impli-
de notre brevet combiné » avec une série de dispositifs di-
de nature à eu préciser l'emploi en vue du résultat k obte-
foas n'êtes pas sans savoir qu'en mécanique les matières à
:t sont assez délicates, et que le principal but d'une étude
[■evet est d'en combiner les éléments de façon qu'il soit aussi
lile que possible à tourner le breret sans en adopter certai-
jarties suffisantes pour établir la contrefaçon.
}'est pour cette étude que nous avons eu soin de recourir
collaboration d'un spécialiste, etc.
>our le reste, nous ne pouvons que vous renvoyer k notre
st. ..
tendu que cette correspondance établit bien que cartainea
es essentielles du brevet ne égaraient pas dans le projet et
nt ignorées de la maison Civet, Crouet, Gsutieret Cia, comme
m mandataire Jacquin ;
r^ -^~.
— 181 —
Qae la constatation à cet égard fournit encore un argument
pour démontrer, comme il a été déjà dit plus haut, que la vue
de la machine n'avait pas suffi au* dit sieur Jacquin pour lui
permettre d'exécuter l'invention de d'Espine et de Achard ;
Attendu que de tout ce qui précède il résulte que la divulga-
tion alléguée n'existe pas ;
En ce qui touche l'existence d'antériorités :
Attendu que le tribunal n'a pas les éléments suffisants pour
se prononcer quant à présent ;
Qu'il convient de recourir sur ce point à l'expertise demandée
subsidiairement de part et d'autre ;
Par ces motifs, Sur la demande de contrefaçon :
Dit, avant faire droit, quepar Hignette Grimer et Planche que
le tribunal commet à cet effets qui prêteront serment préala-
blement devant le président de cette chambre s'ils n'en sont dis-
pensés par les parties, le brevet Taverdon de 1884 sera examiné ;
Dit que les experts devront déclarer si le brevet contient une
description suffisante et s'il constitue ou non une invention nou-
velle ;
Sur la demande en nullité de brevet :
Dit, dès à présent, que le brevet de d'Espine etÂchard de 1890
ne tombe pas sous le coup de l'article 31 de la loi de 1844 ;
Donne mission aux experts d'évaluer, s'il y a lieu, tous dom-
mages-intérêt
Pour le surplus,
Avant faire droit,
Dit que le brevet dont s'agit sera examiné par les experts réu-
nis, à l'effet par ceux-ci de déclarer s'il y a là une invention nou-
velle ou s'il existait des antériorités ;
Dit qu'en cas d'empêchement, les experts commis seront rem-
placés par ordonnance de M. le président de celte chambre ren-
due sur simple requête.
M. Fromholt ayant interjeté appel de celte décision, la
Cour de Paris (2' ch.), sous la présidence de M. Harel, pré-
sident, après plaidoiries de M""" Lamare et Pouillet, avocats,
conclusions de M.Bonnbt, avocat général, a rendu, le 10 juil-
let 1900, l'arrêt suivant :
La Cour, Considérant que d'Espine et Achard, ingénieurs cons-
tructeursjse sont livrés à des études pour perfectionner l'outillage
servant au travail des pierres dures ;
Qu'après une série d'essais et de tâtonnements ils ont,à la date
du 18 novembre 1890, demandé la délivrance d'un brevet d'inven-
TT7T
— 182 —
tion pour une nouvelle machine destinée à scier les roches avec
une lame circulaire diamantée, et que le 20 juin suivant ils ont
pris un certificat d'addition ;
Considérant que le 20 février 1893, Fromholt qui exploite une
industrie similaire à celle de d'Espine et Achard, a fait procéder
dans les magasins de ces derniers à la saisie des machines qu^ils
avaient fait breveter :
Qu'il les a assignés devant le Tribunal civil de la Seine pour
voir dire que ces machines étaient une contrefaçon d*un brevet
d'invention délivré à un sieur Taverdon dès Tannée 1884, et que
la prétendue découverte de ses adversaires ne serait pas breve-
table, parce que leur procédé avait été antérieurement breveté et
parce qu'ils l'avaient rendu public avant l'obtention deleurbrevet ;
Considérant que les premiers juges ont ordonné une expertise
à l'effet de rechercher s'il y avait contrefaçon du brevet Taverdon
çt s'ily avait nullité du brevet de d'Espine et Achard à cause d'an-
tériorités, mais qu'ils ont rejeté le moyen de nullité de la divul-
gation ; ■
Considérant que Fromholt a interjeté appel de cette sentence ;
Qu'il prétend qu'après avoir songé à la faire breveter, d'Espine
et Achard avaient fait connaître leur machine-outil :
10 en en communiquant tous les plans à la société Civet, Crouet
et Gauthier;
2"* en installant une de ces machines à Glarens dans l'usine
de Chaudet frères ;
3* en exécutant deux autres machines pour la société des
carrières de Villette et Vinimes, et en les exposant dans leurs
ateliers ;
En ce qui concer^ie la divulgation résultant des communicatiom
faites à la société Civet et Cie :
Considérant que pendant la période d'essai, d'Espine et Achard
ont été en relations avec cette société pour la construction d'une
machine à scier les pierres ;
Que Civet et Cie signalèrent aux constructeurs les inconvé-
nients des machines qu'ils avaient précédemment établies ; '
Qu'une correspondance assez suivie s'engagea entre eux au
sujet d'importantes modifications à faire & l'outillage proposé
par d'Espine et Achard qui envoyèrent divers plans et rensei-
gnements au sieur Jacquin, ingénieur de la Société Civet ;
Considérant qu'après les avoir complétés d'une manière qui
semblait répondre aux exigences de leurs clients, les intimés
furent surpris de ne pas recevoir leur commande et qu'ils fu-
rent plus surpris encore d'apprendre qu'elle avait été donnée à
un concurrent le sieur Fromholt, et que, pour exécuter cette
commande, on lui avait livré tous les plans qu'ils avaient com-
.ïïi^^-T'r'» V* V' - ♦!( - nr»^"* -*■■»»■,--
— 183 -
muniqués à Civet et Gie, ainsi que toute la correspondance
échangée entre eux ;
Considérant que les premiers juges, par des motifs que la
cour s'approprie, ont estimé avec raison, que les intimés n'avaient
remis des documents qu'à un titre conûdentiel qui excluait la
publicité et qui imposait à Civet, Crouet et Gauthier une discrétion
absolue ;
Considérant que les pièces versées au débat par Froinholt n'ont
pu parvenir en sa possession qu'à la suite d'actes répréhensibles
qui ne lui permettent pas de s'en prévaloir ;
Considérant que d*Espine et Achard avaient confié des plans
à Civet et Cie à un moment où, loin de vouloir divulguer leur
découverte,ils se disposaient à s*en assurer l'exploitation exclusive
par un brevet d'invention ;
Qu'ils n'ont tardé à réaliser leur intention, hautement manifes-
tée à cet égard que parce qu'ils espéraient atteindre des résultats
encore meilleurs ;
QuMls en ont obtenu même après la délivrance de leur brevet
auquel ils ont fait ajouter un certificat d'addition;
Considérant d'ailleurs que des parties notables de l'appareil
breveté ne figuraient pas dans le projet soumis à Civet et Cie, et
étaient ignorées de cette société ainsi que de Jacquin son ingé-
nieur ;
Qu'on ne saurait trouver dans ces circonstances la preuve d'une
publicité suffisante pour pouvoir exécuter l'invention ;
En ce qui touche VinstaHation d'une machine à Clarens :
Considérant qu'il n'j a point à s'arrêter à l'erreur signalée par
l'appelant dans l'un des motifs du jugement qui indique que le
Tribunal de Bàle aurait été déjà saisi par Fromhoit lui-même,
d'une demande de nullité du brevet dont il s'agit, fondée sur cette
prétendue divulgation ;
Qu'il appert des documents delà cause, que si Fromhoit n'était
pas partie au procès jugé à Bâie il avait été le conseil d'un sieur
Girauc), poursuivi en contrefaçon par d'Espine et Achard, et qu'il
avait fourni à Giraud toutes les pièces et tous les moyens de dé-
fense pour lesquels l'appelant s'appuie aujourd'hui devant la Cour
pour soutenir que les faits qui se rattachent à l'installation d'une
machine à Clarens constituaient la divulgation de la découverte
breyetée ;
Considérant que si la décision des magistrats de Bâie ne peut
pas avoir l'autorité de la chose jugée, elle fournit néanmoins des
éléments d'appréciation dont il convient de tenir compte pour
écarter le moyen de nullité invoqué par Fromhoit ;
Qu'il a vainement allégué que la législation Suisse ne serait
— 184 ~
pas conforme à la loi française quant à la divulgation des décou-
vertes ;
QuMl suffit de comparer les textes poar constater leur concor-
dance sur ce point ;
Adoptant au surplus sur ce second moyen les motifs du juge-
ment en tant qu'ils n'ont rien de contraire à ceux du présent
arrêt ;
En ce qui concerne la commande faite par la Société des carrière$
de VUlette et Vinimes :
Considérant que les deux machines exécutées par les intimés
pour la Société des carrières de Villette et Vinimes, différaient
de celles qui ont été brevetées ;
Que la commande a été donnée au mois d'avril 1890 à l'épo-
que des essais préliminaires encore inachevés, avant que d'Es-
pine et Âchard aient pu compléter les perfectionnements néces-
saires pour donner à leur découverte toute sa valeur ;
Que du reste ces machines n'ont jamais été. livrées à l'ache-
teur;
Qu'elles ne sont point sorties des ateliers des intimés, et qu'il
est constant que lorsque ceux-ci les ont fait voir à quelques per-
sonnes» ils ne leur ont montré que le résultat qu'on pouvait obte-
nir, sans leur faire connaître les détails compliqués du méca-
nisme intérieur ;
Qu'on ne saurait pas davantage trouver dans ces faits la preuve
d'une divulgation susceptible d'entraîner la nullité du brevet
délivré à d'Espine et Achard ;
En ce qui concerne la demande subsidiaire à fin d'enquête et
d'expertise :
Considérant que les faits ci-dessus rappelés rendraient inopé-
rantes soit une expertise, soit une enquête afin d'établir les faits
articulés par Fromholt, lesquels sont d'ores et déjà démentis par
les éléments du débat ;
<^ Qu'il n'échet de les ordonner ;
Par cbs motifs, Déclare l'appelant mal fondé dans ses deman-»
des, fins et concFusions tant principales que subsidiaires ;
L'en déboute ;
Dit qu'il n'échet d'ordonner l'enquête sollicitée ;
Confirme le jugement attaqué.
«-*
— 185 —
Art. 4192.
Brevet Michel Perret. — Application nouvelle. ~
Résultat. — Divulgation. — Usine fermée an public.
— Organes essentiels non apparents.
La loi du 8 juillet 1844 considère comme invention nou"
velleet dès lors brevetable V application nouvelle de moyens
connus pour l'obtention d'un résultat industriel.
La nouveauté de V application peut résulter de ce que Vin-
venteur applique autrement les mêmes moyens ou en chan-
ge les combinaisons ou les simplifie par des suppressions ou
les complète par Vadjonction d'autres moyens également
connus et arrive ainsi à un résultat industriel : ce résultat
ne doit pas nécessairement être d^ autre nature que celui qui
était obtenu auparavant^ il n'a besoin que d'être plus
rapide y plus économique ou plus complet pour pouvoir être
considéré comme digèrent (1).
Spécialement, bien que le principe de la construction du
foyers à plusieurs étages de combustion superposés ^ aum oyen
de dalles perforées, soit connu,et qu'il ait même existé U7i ap*
pareil s' allumant au moyen de deux foyers latéraux séparés^
caractérisé par la présence de dalles rapprochées, creusées
d'une série d'orifices en entonnoirs se rejoignant par leurs
bordSy de telle façon que le combustible pulvérulent versé
par le haut de l'appareil descende par son propre poids d'é-
tage en étage en remplissant les parties creuses des dalles, et
se disposant en cônes dans les intervalles des étages, de ma-
nière à constituer autant de colonnes verticales qu'il y a
d'entonnoirs et de trous percés dans les dalles, et qu'il
(1) Lorsqu'il s'agit^comme dnns l'espèce, de cette variété d'application
nouvelle de moyens connus qae Ton désigne généralement sous le nom
de combinaison nouvelle de moyens connus, il faut aller plus loin et
dire qoe la combinaison est brevetable alors môme que le résultat ne
différerait pas de celui obtenu précédemment ; comme le dit M. Pouillet,
Brev, dHnv», no 46, c'est alors l'objet lui-môme consistant dans le rap-
prochement d'éléments auparavant épars qui est nouveau, et sa nou-
Teauté vient de ce que les éléments qui le composent n'avaient pas en-
core été réunis. Si la combinaison produit un résultat non encore obtenu
auparavant, on au moins obtenu moins rapidement, moins économi-
quement, la nouveauté et par suite la brevetabilité est par là môme éta-
blie ; mais le résultat f&t-il le môme, identiquement, que la combinaison
pourrait être brevetable si, prise en soi, elle était nouvelle. Y. Pouillet,
Brev, d'inv,, no 46 et s.
— 186 —
suffise d'agir sur des tiroirs métalliques placés à la base des
colonnes pour faire descendre la masse entière de chaqueco-
lonne de haut en bas^doit être considéré comme constittiant
.une application nouvelle brevetable un foyer s'allumant
par Cétage inférieur sans adjonction d^aucun accessoire
latéralyConstitué par des dalles plus espacées, percées de trous
cylindriques disposés de façon que chacun des orifices cor-
responde à une surface plane de la dalle inférieure^ et que
par suite, le combustible en tombant d'une dalle sur F autre
s'y forme bien automatiquement en tas coniques, mais que
sa chute doive être provoquée par rintervention du chauf-
feur détruisant à intervalles réglés à Paide d'un râteau, les
cônes d'un étage pour les faire se reformer sur l'autre, la
suppression des tiroirs métalliques et des foyers latéraux
constituant une simplification etTadjonclion dubrassageau
moyen du râteau pour régulariser la chute et renouveler
les surfaces étant un complément essentiel du foyer pour
combustible pulvérulent (1).
La connaissance qu'ont eue d'une invention ou d'une ap-
plication ceux qui l'ont conçue ou ceux qui en petit nombre
ont été les agents nécessaires des essais auxquels elle adonné
lieu, ne saurait constituer une divulgation, alors surtout que
ces agents, même en l'absence de toute injonction expresse
étaient tenus à la discrétion ; qu'il est constaté que bien
qu'aucune précaution spéciale ne paraisse avoir été prise en
ce qui concerne l'appareil expérimenté, le régime habituel
de l'usine oii ont eu lieu les essais s'opposait à ce qu'il fût
connu du public, et qu'en outre la disposition même de
l'appareil dont les organes essentiels étaient enfermés dans
une enveloppe en maçonnerie ne permettait pas aux ou*
vriers de l'usine ni aux personnes qui y pénétraient acci-'
dentellement, d'en deviner le fonctionnement et la destina-
tion (2).
La présence des dessins ayant servi à la construction
d'un appareil dans les archives du cabinet d'un ingénieur
»
(1) Le tribunal, dans le jugement infirmé, avait, au contraire admis
conformément au rapport des experts que le four construit à titre d'essai
à l'usine Huiler à Ivry constituait une antériorité pour le brevet de
M. Michel Perret.
(2) Gomp. trib. Versailles, 18 mars 1896 et Paris, 90jaia 1900, Wtl-
lame, Ann,, 1901, p. 163.
r^!.?v»«".!"**' -v
— 187 -
ne peut élre considérée comme les mettani à la disposition
du public, alors qu'il n'est pas juslifté qu'aucune commu-
nication en ait été donnée ou demandée avant la prise du
brevet auquel l'appareil est opposé comme antériorité (1 ).
(C. de Paris, 10 }anTîer 1901.— Hériliera Uicbel Perret c.Vva Robin.)
Le 28 décembre 1897, la 3* chambre du Tribunal de la
Seine avait, aous la présidence de M. RotLLSAu, président
de seclîon, rendu le jugement suivant:
Lb Tribomal, Attendu qu'un jugement de cette chambre en
date du S mars 1895 a joint les demandeadirigées par Miche)
Perret contre Robin et ordonné qu'il serait procédé à une ex-
pertise à l'effet de rechercher si le foyer breveté le 7 juillet 1887
par Michel Perret constituait une invention breTelable et noo-
velle et si les appareils fabriqués par Robin constituent une con-
trefaçon du brevet Perret ;
Attendu qu'il résulte du rapport des experts que le foyer bre-
veté par Michel Perret en 1887 réalisait un progrès sur les an-
ciens foyers du môme constructeur en augmentant considérable-
ment la surface de combustion par la mise en contact de l'air
avec du combustible pulvérulent disposé en petits tas coniques
qui pouvaient passer successivement de la dalle la plus élevée à
la dalle inférieure par des ouvertures multiples ménagées à cet
effet, en renouvelant à chaque opération la surface de combui-
tion ;
Attendu que la descente automatique du combustible et la
disposition en petits tas séparés et indépendants soumis tous à
l'action de l'air d'où résulte une combustion intense, constituent
un résultat industriel déterminé mais qui ne peut assurer au
brevet sa validité qu'à la condition d'être
(1) Il semble que l'eiistence, antérieure ment à la prise du brevet Perret,
dam lei archives du cabinet Muller et Ficliet, des plans qoi avaient servi
i établir le tour de l'usine d'Ivr;, alors qu'ils n'étaient nullement gardés
secrets, mais étaient à la disposition du personnel de la maison et par
suite de la clientèle, aurait dû conduire la Cour à décider, comme l'avait
fait le tribunal, que ai l'appareil Muller était opposable comme antériorité
nu four Perret, le brevet manquait de nouveauté sans qu'il fût nécessaire
d'établir si, en fait, des tiers en avaient pris connaissance. Les Iribu-
naui hésitent souvent à prononcer la déchéance dei brevets par défani
de nouveauté et ont tendance à atténuer la rigueur de la loi ; celte to-
lérance paraît peu conforme à la lettre et à l'esprit des textes qui exigent
pour qu'une inieniion soit brevetabie, qu'elle sait nouvelle, pour tout
le monde ; qu'elle n'ait re^u nulle part, pas plus en France qu'à l'Etran-
ger, une publicité sufBsanta pour pouvoir être exécutée.
A. T.
■^' -sr^vap.-'-T*^
— 188 —
Attendu que deux antériorités ont été opposées par Robin,
la première provenant d'un certificat d'addition pris par Michel
Perret le 20 mars 1878, qui est écarté avec raison parles experts,
les éléments distinctifs du foyer breveté ne s'y trouvant pas
réunis ; la deuxième tirée de la construction à Ivry en 1878 dans
Tusine Mulier, d'un foyer dont les plans auraient été fournis par
Muller et Fichet et dont les dispositions analogues à celles do
foyer Perret auraient donné des résultats industriels identiques ;
Attendu que les experts constatent dans leur rapport que le
four Muller se rapproche suffisamment du four breveté par Michel
Perret pour constituer une antériorité qui serait opposable à ce-
lui-ci au cas où la divulgation aurait été suffisante pour entraîner
la nullité du brevet ;
Qu^en effet, dans l'un comme dans l'autre foyer, le combastible
est bien disposé en petits tas indépendants sur chaque plaque et
à chaque étage ;
Qu'il importe peu que ces tas occupent une position correspon-
dante dans le prolongement les uns des autres ou qu*ils soient dis-
posés en quinconces, puisque les deux dispositions permettent
de fragmenter le combustible sur l'étage, afin d'en activer la
combustion, ce qui est le fond môme de l'invention dont Michel
Perret se prétend propriétaire ;
Qu'il est également sans intérêt de rechercher si la descente du
combustible d'étage en étage s'opère à l'aide d'un crochet ou sim-
plement en tirant pendant un instant un registre placé sous l'é-
tage le moins élevé, puisque les résultats fournis sont identiques
et que la différence dans la disposition des trous et dans la
manœuvre pour arrivera la descente du combustible ne modifie
pas le résultat industriel obtenu ;
Qu'il ressort avec évidence des constatations des experts que
le foyer de Muller et Fichet donne les mômes résultats indus-
triels que le foyer breveté par Perret et cela par les mêmes
moyens, qu'il constitue donc une antériorité devant entraîner la
nullité du brevet pris par Perret le 7 juillet 1887 ;
Attendu que le demandeur soutient que cette invention de
Muller et Fichet n'aurait pas, dans tous les cas, été l'objet d'une
publicité suffisante pour qu'il soit possible de lui opposer la
déchéance édictée par l'article 31 de la loi du 5 juillet 1844 ;
Attendu qu'il est établi par les documents versés aux débats
et notamment parles déclarations de Gaudron, Fichet^ Sellerin et
Mittau, recueillies par les experts du consentement des parties,
que le foyer dont Millier et Fichet ont dressé les plans a été exé-
cuté à Ivry dans l'usine de céramique exploitée par Muller ;
qu'il a fonctionné dans cette usine pendant plusieurs mois au
poussier de coke et au poussier de charbon maigre, et que tous
•^^ '^ 1 •' ^ » TVT^» _ -^mi f.~
— 189 —
ceux qae cette installation intéressait, pouvaient le voir fonc-
tionner ;
Que Muiler et Fichet, n'ayant pas l'intention dt prendre de bre-
vet, n'avaient pas recommandé le secret au personnel de Tusine
et n'avaient d'ailleurs aucun intérêt à ce que le système de com-
bustion appliqué par eux ne fut pas divulgué ;
Attendu qu'il est établi que les plans qui ont servi à la cons-
truction de ce four ont été catalogués, classés et datés ; qu'ils
ont été représentés aux experts et qu'ils figurent dans les ar-
chives du cabinet des ingénieurs Muiler et Fichet où ils peuvent
être consultés;
Qu'il appert de tout ce qui précède que le foyer de Muiler et
Fichet avait été, dès l'année 1878,robjet d'une publicité suffisante
pour constituer une antériorité opposable au brevet pris par
Michel Perret en 1887 ;
Par ces motifs, Déclare Michel Perret mal fondé en ses deman-
des, fins et conclusions, l'en déboute ;
Et le condamne aux dépens.
Sur appel des hérîliers de M. Michel Perret décédé, la
Cour de Paris, sous la présidence de M. Cazs, présidenf ,
après plaidoiries de M«"Allard et Pouillbt, avocats, et con-
clusions de M. Jambois, avocat général, a, le 10 janvier,
rendu l'arrêt infirmatif suivant.
La Goub, Statuant sur Fappel interjeté par M. Michel Perret
d'un jugement du Tribunal civil de la Seine, en date du 28 dé-
cembre 1897;
En la forme :
Considérant que l'appel est régulier et qu'aucun moyen de nul-
lité n'est relevé contre lui ;
En ce qui concerne la reprise d'instance :
Considérant que Michel Perret est décédé le 4 janvier 1900,
sans laisser ni ascendants ni descendants ;
Que par divers testaments, il a institué pour exécuteurs tes-
tamentaires Le Tellier et Armengaud et pour légataires univer-
sels conjoints, les autres parties figurant aux conclusions de re-
prise d'instance de Labey avoué ; qu'il est justifié de ces qualités ;
qu'il y a donc lieu de lui donner acte de la reprise d'instance ;
Au fond :
Considérant que Michel Perret a pris, à la date du 17 février
1887, sous le numéro 183.623, un brevet pour foyer destiné à brû-
ler les combustibles pulvérulents ;
Que Robin qui, après avoir été son employé, avait fondé une
— 190 —
maison de construction, a sollicité de lai une licence et lai a payé
pendant plusieurs années des redevances pour les foyers qu'il
construisait lui-même en conformité du sus dit brevet ;
Qu'en 1894 il a cessé de payer cette redevance et a fabriqué et
posé divers calorifères ou foyers, qui d'après Michel Perret au-
raient constitué de$ contrefaçons du système breveté ;
Que diverses saisies-contrefaçons ont été pratiquées à la re-
quête de ce dernier, aux dates des 21 et 30 maps, 4 et 17 avril
1^94;
Qu'assigné devant le Tribunal de la Seine pour ^'entendre dé-
clarer contrefacteur et condamner à dès dommages-intérêts, Ro-
bin a argué de nullité le brevet de Michel Perret ;
Qu'un jugement du 5 mars 1895 a nommé trois experts qui
ont déposé leur rapport et que sur le vu de ce document, un se-
cond jugement, en date du 28 décembre 1897, a débouté Michel
Perret de sa demande ; qu^il a été appelé de ce jugement ;
En ce qui concerne les objets argués de contrefaçon :
Considérant que les calorifères et foyers construits par Robin
et saisis à la requête de Michel Perret reproduisent les disposi-
tions essentielles de l'appareil décrit au brevet;
Que cette similitude, constatée par les experts et reconnue
par le jugement dont est appel, n'est pas sérieusement contes-
tée ; qu'en conséquence, si le brevet Michel Perret est valable,
Robin, ou ses représentants actuels, doivent être déclarés con*
trefacteurs ;
Mais que devant la Cour, comme devant le tribunal, ils arguent
ledit brevet de nullité, à raison d'une double antériorité qui
résulterait: lo d'un certificat d'addition pris par Michel Perret,
le 20 mars 1878 et se référant à un brevet antérieur pris en 1874,
brevet et certificat aujourd'hui tombés dans le domaine public ;
2» de la construction d'un foyer établi sur les dessins de Mal-
1er et Fichet et qui aurait fonctionné dans les ateliers de MuUer
àivry en 1878.
En ce qui concerne le certificat d'addition :
Considérant que les premiers juges ont, ajuste titre, écarté
cette prétendue antériorité; qu'il résulte en effet du rapport des
experts, confirmé par les documents de la cause que le certificat
d'addition ne donnait pas la combustion intense obtenue par le
foyer breveté en 1887 ; qu'aucun appel incident n'a d^ illeurs été
fofmé et que ce point doit être considéré comme bien et défini-
tivement jugé ;
En ce qui concerne le foyer construit par Mulleret Fichet:
Considérant, en fait, qu'en 1878, dans les ateliers de cérami*
que de Muller, à Ivry, il a été construit un appareil commandé
par le dit Muller et dont les dessins ont été fournis par Fichet ;
'T'^r-
— 191 —
Que cet appareil qualifié par ce dernier, dans sa déposition
devant les experts, de four calorifère, a fonctionné pendant plu-
sieurs mois à titre d'essai, puis a été démoli ;
Que les plans et dessins sont restés dans les archives du cabi-
net d'ingénieur de Fichet, doù ils sont 'sortis pour être produits
dans le litige actuel ;
Considérant que les experts ont admis comme conclusion de
leur rapport que ce four calorifère, antérieur au foyer pour le-
quel Michel Perret a demandé un brevet en 1887, donnait les
mêmes résultats et par les mêmes moyens ;
Que le jugement entrepris, après s'être approprié cette con-
clusion,a déclaré, en outre, que Fessai fait par MuUer et Fichet
avait été Tobjet d'une publicité suffisante pour constituer une
antériorité opposable au susdit brevet ; qu'il a ainsi prétendu
faire application de l'article 31 de la loi du 5 juillet 1844, aux
termes duquel une découverte, invention, ou application,ne peut
être réputée nouvelle et, comme telle brevetable, si antérieure-^
ment à la date du dépêt de la demande de brevet, elle a reçu
une publicité suffisante pour être exécutée ;
Mais considérant que la connaissance qu'ont eue d'une inven*
tien ou d'une application, ceux qui Tout conçue, ou ceux qui, en
petit nombre ont été les agents nécessaires des essais auxquels
elle a donné lieu, ne saurait constituer une divulgation, alors
surtout que ces agents, même en l'absence de toute injonction
expresse, étaient tenus à la discrétion;
Qu*il a été constaté par les'experts que l'usine d'Ivry a toujours
été fermée au public et qu'il était difficile de se procurer des
renseignements précis sur les appareils qui y étaient employés;
• Qu'ainsi, bien qu'aucune précaution spéciale ne paraisse avoir
été prise en ce qui concerne le four édifié en 1878, sur les des-
sins de Fichet, le régime habituel de Tusine s'opposait à ce qu'il
fût connu du public ;
Que la disposition même de l'appareil, dont les organes essen-
tiels étaient enfermés dans une enveloppe en maçonnerie, ne
permettant point ni aux ouvriers de l'usine ni aux personnes qui
y pénétraient accidentellement, d'en deviner le fonctionnement
et la destination ;
Qu'après sa destruction, la présence des dessins dans le cabi-
pet de Fichet, ne les mettait nullement à la disposition du pu-
blic et qu'il n'est pas justifié qu'aucune communication en ait été
donnée ou demandée, avant leur production dans le débat actuel,
ç'est-à-dire bien postérieurement au dépôt de la demande de
brevet par Michel Perret ;
^ Qu'ainsi, ni le projet préparé par Fichet, ni les essais faits
par Muller,n'avaient reçu une publicité suffisante pour être exé*
-5192-
outée, c'est-à-dire pour qu'une personne quelconque antre quê
les inventeurs eux-mêmes fût en mesure de reproduire leur in-
yention sans leurs concours ;
Que la décision des premiers juges doit donc être réformée en
ce qu'elle a reconnu, dans les circonstances ci-dessus analysées,
les éléments juridiques de la publicité ;
Considérant, au surplus, que même au cas où Tappareil de
Muller et Fichet aurait été connu, cette circonstance ne suffirait
pas pour enlever à l'invention de Michel Perret son caractère de
nouveauté et entraîner la nullité de son brevet;
Qu'en effet la loi du 5 juillet 1844, considère comme invention
nouvelle et dès lors brevetable, Tapplication nouvelle de moyens
connus pour Tobtention d'un résultat industriel ;
Que la nouveauté de l'application peut résulter de ce que l'in-
venteur applique' autrement les mêmes moyens on en change les
combinaisons, ou les simplifie par des suppressions, ou les com-
plète par Tadjonction d'autres moyens également connus et arrive
ainsi à un résultat industriel ;
Que celui-ci ne doit pas nécessairement être d'autre nature que
celui qui était obtenu auparavant ; qu'il n'a besoin que d'être plus
rapide, plus économique ou plus complet pour pouvoir être con-
sidéré comme différent ;
Considérant que pour faire une saine application de ces prioci-
pes aux faits de la cause, il importe tout d'abord de distinguer :
1<^ quels sont les moyens employés tant par Muller et Fichet que
par Michel Perret ; 2^ quels sont les résultats obtenus soit par
les uns, soit par l'autre ;
Qu'il est constant que le foyer de Muller et Fichet et celui de
Michel Perret ont pour principe commun l'établissement de plu-
sieurs étages superposés de combustion, système emprunté à un
premier brevet de Michel Perret, pris par lui en 1874 et aujour-
d'hui tombé dans le domaine public ;
Qu'un premier perfectionnement y a été apporté par rinven-
teur lui-même dans son certificat d'addition précité du 20 mars
1878 ;
Qu'à l'aide d'oriûces longitudinaux percés dans les dalles su-
perposées, il facilitait la descente successive du combustible d'une
dalle sur l'autre, en même temps que sa combustion plus com-*
plète grâce à la forme prismatique qu'il prenait dans sa chute ;
Que Muller et Fichet, à cette même date de 1878, ont conçu l'i-
dée et tenté la réalisation d'un nouveau progrès en substituant aux
orifices longitudinaux, peu nombreux, du certificat d*addition,
une quantité plus considérable de trous ronds dont la forme et
la disposition devaient, dans leur pensée, produire automatique-
ment la descente du combustible, et le diviser, sur chaque ëtagSi
• »l
— 193 —
en nombreux tas coniques, présentant à la combustion des sur-
faces multiples ;
Considérant que dans son brevet de 1887, Michel Perret pro-
cède également par yoie de perforations multiples dans chaque
dalle ;
Qu'il revendique comme éléments de son invention la descente
automatique et le fonctionnement du combustible, sur chaque
étage, en tas coniques indépendants ;
Mais que si les procédés paraissent, au premier abord identi*
qaes, le mode d'application est sensiblement différent ;
Qu'ainsi, d'après le dessin qui reproduit le foyer Muller, tel
qu'il a été exécuté à Ivry, les dalles, très rapprochées, sont
creusées d'une série d'entonnoirs au fond desquels est un orifice
rond de petit diamètre ; que ces entonnoirs se rejoignent parleurs
bords, sans laisser sur la dalle aucune surface plane et se corres-
pondent d'étage en étage ;
Qu'il en résulte que le combustible pulvérulent, versé par le
haut de l'appareil, descend immédiatement par son propre poids
d'étage en étage, remplissant les parties creuses des dalles/se
disposant en cènes dans les intervalles des étages^ mais sans
interruptions entre ces diverses couches qui forment ainsi autant
de colonnes verticales qu'il y a d'entonnoirs et de trous se cor-»
respondant dans toute la hauteur de l'appareil ;
Que chacune de ces colonnes, repose à sa base sur un tiroir
métallique dont le jeu Caît immédiatement descendre la masse
entière d'un mouvement i^niforme de haut en bas ;
Qu'enfin, pour provoquer ou activer la combustion, les con8<»
tructeurs ont jugé nécessaire de flanquer l'appareil, à droite et
à gauche, de deux foyers séparés, se chargeant par des orifices
en forme de cheminée ;
Considérant que les dalles du foyer de Michel Perret breveté
en 1887, sont plus espacées et forées de distance en distance, de
trous ronds d'un diamètre plus grand et à section droite ;
Que chacun de ces orifices correspond dans la dalle inférieure
à une surface plane ; que le combustible, en tombant d'une dalle
sur Tautre s'y forme bien automatiquement en tas coniques, mais
que sa chute doit être provoquée par l'intervention du chatiffeur,
qui, à intervalles réglés et à l'aide d'un râteau, détruit les cônes
d'un étage pour les faire se reformer sur l'autre ;
Que chacun de ces cônes constitue un foyer indépendant dont
les surfaces de combustion sont renouvelées à chaque brassagei
sans que, dans les mouvements successifs ainsi provoqués, aucune
parcelle puisse échapper au contact de l'agent comburant qui
circule d'étage en étage, avec des chocs répétés grâce A la dispo-
sition des cônes en quinconce ;
13
"7^
— 194 —
. Qu*enûa le fo;^er décrit au brevet se suffit à lui-même ets'al*
lume par Tétage inférieur sans Tadjonction d'aacun accessoire
latéral ;
Considérant que les différences ainsi constatées ne sont point
accidentelles, ni sans importance, comme L*ont, à tort, prétenda
les experts et les premiers juges ;
Que les organes des deux appareils, s'ils procèdent d'idées
communes, et antérieurement connues ne sont identiques ni
dans leur forme, ni dans leur combinaison, ni dans leurs effets ;
Que la suppression des tiroirs métalliques et -des foyers laté-
raux est une sinipUûcation;
Que l'adjonction du brassage au râteau pour régulariser la
chute et renouveler les surfaces, est an complément essentiel du
foyer pour combustible pulvérulent;
Que cet ensemble de modifications constitue véritablement une
application nouvelle et méritant d'autant mieux cette qualifi-
cation qu'elle produit dans le foyer Michel Perret le résultat
industriel cherché, la combustion intense et complète avec puis*
santé production de calorique que n*a pu obtenir le four cons-
truit à Ivry ;
Qu'en effet, sans vérifier si cet essai, dans la pensée de ses
auteurs n'était pas destiné à un séchoir plutôt qu'à un foyer, et
même en admettant qu'ils cherchassent à brûler une grande
quantité de combustible, comme FichetTa déclaré aux experts,
il résulte des termes mêmes de cette déclaration, que le but pour-
suivi n'a pas été atteint et que c'est pour ce motif que la cons-
truction de ce four a été abandonnée ;
Que l'essai a donc été reconnu infructueux par ses propres»
auteurs ;
Considérant qu'aussitôt après la prise du brevet du 17 février
1887, le nouveau foyer de Michel Perret a été accueilli comme
un progrès des plus utiles et a reçu de nombreuses applications
industrielles qui ont consacré la réalité du résultat obtenu ;
Que Muller, en présence de ce succès, n'a pas songé à reprendre
sa tentative avortée, ni à revendiquer pour lui-même l'honneur et
le profit de l'invention ;
Que Robin, quoique ami intime de Fichet, ainsi qu'il résulte
d'une lettre de ce dernier, en date du o août 1877, qui sera
enregistrée, connaissait si mai l'essai fait par celui-ci en 1878,
ou le considérait comme ayant produit dés effets si peu utiles,
qu'il a sollicité de Michel Perret en 1889, la licence dont il a été
ci-dessus fait mention ;
Qu'enfin,lorsqu'après avoir payé pendant plusieurs années des
redevances, il a voulu s'en affranchir en invoquant les plans de
l'es 8 ai de 1878 que Fichet mettait à sa disposition, il s'est bien
T^^^im^rj^^- r, i^.^ ..^^-r-^^^^
— 195 —
gardé de copier cette prétendue antériorité, mais a conservé dans-
les appareils contrefaits les organes et les dispositions qui cons-
tituaient la nouveauté de l'application faite par Michel Perret,et
la supériorité pratique du système pour lequel il avait demandé
on brevet ;
Qu'ainsi, par toute sa conduite antérieure au procès,Robin avait
reconnu le caractère brevetable de l'invention, son efficacité in-
dustrielle et rinanité de l'essai qu'il fait apparaître aujourd'hui
comme une anté riorité ;
Considérant, dès lors, qu'il y a Heu de réformer le jugement
et de déclarer contrefacteur Tintimée en les qualités qu'elle agit ;
Considérant que les faits de contrefaçon constatés à sa charge
par les procès-verbaux précités ^t ceux qui pourront être établis
par les documents qui y sont visés, ont causé à Michel Perret un
préjudice dont ses représentants réclament à juste titre la répa-
ration ;
Que la Cour n'a point les éléments nécessaires pour en fixer
définitivement l'importance ;
Mais qu'une somme de 2.000 francs doit être accordée à titre
de provision comme dès à présent justifiée;
Considérant que la confiscation demandée doit être prononcée
au profit des demandeurs en vertu de l'article 49 de la loi du
5 juillet 1844, mais qu'il y a lieu de la limiter aux appareils sai-'
sis,à défaut de justification suffisante quant au surplus de la de-
mande ;
Considérant que le préjudice dont se plaignent les représen-
tants de Michel Perret ne résulte point d'une publication faite par
la voie de la presse ;
Qu'aucune insertion du présent arrêt ne saurait donc être or-
donnée comme supplément de dommages-intérêts ;
Par ces motifs, Donne acte aux représentants de Michel Perret»
partie de Labey avoué, de leur reprise d'instance ;
En la forme, les reçoit appelants du jugement rendu par le
Tribunal civil de la Seine le 28 décembre 1897 ;
Au fond, met l'appellation et ce dont est appel à néant ;
Infirme le dit jugement en ce qu'il a déclaré Michel Perret mal
fondé dans ses demandes, fins et conclusions,l'en a débouté et l'a
condamné anx dépens ;
Emendant, décharge les appelants des condamnations pro-
noncées ;
Statuant â nouveau, dit que le certificat d'addition pris par
Michel Perret le 20 mars 1878^ et la construction faite à Ivry, en
1S78, dans l'usine de MuUer, d'un foyer dont les plans avaient
été fournis par MuUer et Pichet,ne constituent pas des antériori*
— 196 —
tés opposables au brevet pris par Michel Perret,le 17 février 1887,
sous le numéro 183.623 ;
Dit que les objets saisis suivant procès-verbaux des 21 mars
1894 ; à Sens, 30 mars 1894, à Chartres, 4 avril 1894, à Limoges,
et 17 avril 1894 à Paris, sont la contrefaçon de Tappareil décrit
au susdit brevet ;
Déclare, en conséquence, contrefacteur la veuve Robin, tant
en son nom personnel, que comme tutrice de son fils mineur, et
étant, en les susdites qualités, l'ayant cause de son mari décédé ;
La condamne, en ces mêmes qualités, à payer aux demandeurs
comme représentant la succession de Michel Perret,des domma-
ges-intérêts à fixer pur état, et, dès à présent, à titre de provi-
sion, la somme de 2.000 francs ;
Prononce la confiscation des objets contrefaits, visés aux
procès-verbaux, précités, au profit desdits demandeurs ;
Autorise ceux-ci à se faire, si besoin est, assister du commis-
saire de police et de la force armée,
Déclare lesdits demandeurs mal fondés dans le surplus de
leurs demandes, fins et conclusions, les en déboute ;
Ordonne la restitution de l'amende et condamne la dame veuve
Robin, tant en son nom personnel que comme tutrice de son
fils mineur, en tous les dépens de première instance, y compris
les frais d'expertise, et en tous les dépens d*appel ;
Art. 4193.
ttreiret Boadreaux. — PerfectionnemenA. ^ €}oatre-
teçon. ^ Possession personnelle. — Essais sans
résultat industriel. — Consultation demandée A la
> Cour. — Rejet. ~ Intervention foreée. — Irreeeva-
Milté.
V auteur d'un perfectionnement à une invention breveléct
ne peut en tirer parti sans violer le droit du breveté et com-
mettre une contrefaçon (1).
L'exception de possession personnelle invoquée par un
prévenu de contrefaçon doit être rejetée dès lors qu'il est
établi que celui qui en excipe ne s'est livré qu'à des essais
avec lesquels il n'est arrivé à aucun résultat industriel et
(1) Sar l'exploitation , par un tiers^ du perfectionnement à nne înTen-
tion bevetée, v. PoolUet, Brev. d'inv., n« 645; Âllart, id., n« 437 ; Mai-
nié, îd., no 2367.
— 197 —
qu'il n^a pas appliqués^ même pour les besoins de soninr
dusirie; qu'il n'est pas sorti de la période des tâtonnements
et n'a entrevu que de loin la découverte que le brevet a fait
entrer plus tard dans le domaine de la pratique (1).
Il n'y a pas lieu de tenir compte de certiftcals versés aux
débats, conçus en termes vagues, et n'indiquant pas d'une
façon formelle la similitude entre les objets employés anté-
rieurement au brevet et ceux du brevet, alors surtout que
ces certificats émanent de rivaux en industrie du breveté et
qu'il est constant que postérieurement au brevet leurs signa-
taires ont fait au breveté de nombreuses commandes de ces
objets (2).
Hy a lieu d'écarter les conclusions d'un défendeur pour-
suivi en contrefaçony tendant à faire déclarer dans quelles
conditions il pourrait continuer, sans commettre de con-
tre façon^ la fabrication du produit incriminé car il n^ ap-
partient pas aux tribunaux de donner aux parties une
sorte de consultation sur l'étendue de leurs droits et de pré-
juger ainsi des difficultés qui pourront naître dans l'ave-
nir (3).
L'intervention forcée n'est recevable en cause d'appel qu'à
rencontre de la partie qui aurait le droit de former tierce-
opposition à Varrét à intervenir, et la tierce-opposition
n'est admissible que de la part d'un tiers à qui V arrêt pour-
(1) Sur les caractères de la possession personnelle, Y. Pouillet, n* 431 ;
Mainié, no 177(5 et s. 11 ne faudrait pas croire, comme semble l'indiquer
l'arrêt, que la possession antérieure ne puisse être opposée que par ce-
lui qui antérieurement à la demande de brevet avait déjà, dans une
mesure plus ou moins large, soit fabriqué le produit, soit employé le
moyen objet de ce brevet ; cette possession peut être certaine, alors même
qull n*y aurait eu ni fabrication ni emploi, et à fortiori de simples essais
devraient être, s'ils étaient non équivoques, réputés suffisants. Dans
l'espèce, il paraissait bien prouvé que Henrion avait dès avant le brevet
Boudreaux essayé l'emploi de balais en métal extrêmement mince, et
que s'il n'avait pas donné une suite à cet essai, au point de vue indus-
triel, c'est que à cette époque les machines électriques telles qu'elles
étaient construites ne pouvaient comporter ce genre de balais. 11 sem-
ble que, dans ces conditions, l'exception de possession personnelle pro-
posée par Henrion aurait dû être accueillie. Comp., Paris, 6 mars 1896,
Rondepierrre, Ann., 96.73 ; Pau, 14 janvier 1899 ; Cornet, Ann., 99.
260.
• (2) Sur les preuves de la publicité, V. Pouillet, n» 485.
(3) Sur les demandes indirectes d'interprétation de brevets, V. Mai-
nié, no 2168 ; Àllart, t. 3, n« 378.
}■
— 198 -
ratt préjudicter, ou à rencontre de qui Varrét à intervenir
serait de nature à constituer un préjugé (1).
(Trib. de Nancy, 27 Juin 1898 ; Goar de Nancy, 22 juillet 1899. —
Boudreaux c. Fabius-Henrion.)
M. BoudreauXy propriétaire d'un brevet d'invention en
date du 2 juillet 1892, avec certificat d'addition du 18 mars
1893 s'appliquant à la fabrication d'un balai électri-
que constitué par une, ou plusieurs feuilles superposées de
métal laminé excessivement mince, entama, en 189S, des
poursuites en contrefaçon contre divers fabricants, et les
âl condamner comme contrefacteurs par arrêt de la Cour
de Paris du 8 juin 1896. M. Henrion, ayant au cours de
l'instance précédente donné aux défendeurs un certificat
tendant à prouver que lui-même avait fabriqué des balais
semblables avant la date du brevet de Boudreaux fut pour-
suivi à son tour en contrefaçon devant le Tribunal de
Nancy, qui, après avoir, par un premier jugement ordonné
une expertise, rendit à la date du 27 juin 1898 le jugement
suivant:
Le Tribunal, Attendu que Boudreatix, propriétaire d'un brevet
d'invention délivré en France, le 18 octobre 1892 avec certificat
d'addition du 18 mars 1893, pour un balai électrique, a fait assi-
gner Fabius Henrion, électricien, devant le tribunal en contrefa-
çon dadit brevet ;
« Attendu que le tribunal, par jugement du 27 novembre 1895
a nommé des experts, à l'effet d'examiner les brevets et autres
documents produits, les balais saisis chez Henrion, les balais
délivrés par Boudreaux et de donner leur avis sur diverses ques-
tions; que les experts ont procédé à leur mission et ont consigné
leurs opérations dansunprocès-verbaloomplet et documenté qa^ils
ont déposé au greffe de ce siège, le 3 août 1897, duquel ii résulte :
(I) Le Gode de procédure civile ne mentionne pas rintervention forcée ;
elle a lieu lorsque une partie en cause craignant de voir an tiers noo
intervenant, attaquer plut tard la décision rendue en dehors de lai psr
la voie de la tierce opposition, prend les devants et l'assigne endéda-
ralion déjugeaient commun : ne peuvent être ainsi assignés que les tiers
à qui la chose jugée serait, en foit, opposable ou qui auraient le droit
de faire tierce opposition. V. Garsonnet, Proc, ctv., t.% p. 686 et 722 :
Boitard et Glasson, ief., n« 580. la note ; Dalloz, Rép., V» Inierveniian^
n* 142 et .Supp. rép,, eod, verb, n» 63 ; Bourges, il août 1871, DalL 73»
2.34; Pau, 24 janvier 1887, Dali. 87.3.278; Bordeani, 81 juillet 18B3»
Dali. 91.2.5U ; Cass., 21 octobre 1895, Dali. 96.1.417.
A. T.
iT-'^'V 1'-
— 199 —
i<» que Boudreauz est le premier qui ait employé les lames en clin^
quant dans Tiadustne des ixalais électriques ; 2° que rien, dans
les lames précédemment employées, notamment par Gafriôrei
Siemen et Gravier, ne pouvait infirmer le brevet Boudreaux ; Z^
que rinvention Boudreaux était encore brëvetâbie en 18^2 ^-V^
que les balais saisis chez Henrion malgré la plômbagînetet' léF
toiles métalliques qui s'y trouvent, malgré la douille dont Ils sdnti
munis, présentent avec ceux de Boudreaux une simjlitade suffi-
sante pour constituer une contrefaçon ; 5^ qu*avant le brevet
Boudreaux, Henrion a fait l'essai pour ses balais de lames min^
ces de moins d'un dixième de millimètre d'épaisseur, mais sur
one très petHe échelle et que ces balais n'ont pas été employés
dans la construction des machines vendues ; v
- Attendu que cette expertise est absolument concluante «t dé-^
montre le bien fondé des prétentions de Boudreaux ;
Attendu que, malgré cette expertise, Fabius Henrion prétend
que, dès 1887, la maison Allioth de Bâle (Suisse), fabriquait dee
balais en lames de métal de moins d'un dixième de millimètre
et semblables à ceux de Boudreaux :
Mais attendu que cette allégation qui ne repose que sur des
offres de service peu explicatives, lesquelles n'établissent point
que ces balais avaient les mêmes particularités que ceux brevetés
de Boudreaux sont en outre contredites par les faits, Boudreaux
ayant, depuis 1893, fourni des balais brevetés à Allioth lui-même
qui ne les considérait aucunement comme ressemblant aux siens
et se bornait aies trouver d'un prix trop élevé pour sa clientèle;
Attendu que Henrion invoque également comme antérieur le
brevet Ydoux, du 7 novembre 1891, qui emploie pour la confec-
tion des balais du laiton alternativement entaillé et pris dans des
plaques aussi minces que possible ; mais que cette dernière ex-
pression n'indique pas , comme pour les balais Boudreaux,
l'emploi de clinquant de 3/100* de millimètre seulement, offrant
l'avantage de se replier quantité de fois sur lui-même ;
Attendu que le simple essai auquel se serait livré Henripn en
1887, de construction d'un balai ayant quelque analogie ayec le
balai Boudreaux, ne peut lui conférer aucun droit à l'encontre
de ce dernier, puisque cet essai n'a pas été suivi d'opéra^pn in-
dustrielle;
Attendu que, malgré l'avis des experts, Henrion persiste à sou-
tenir que les balais saisis chez lui ne sont point fabriqués ea
contrefaçon du brevet Boudreaux ; que celte prétention est inad-.
niissible ; qu'en effet, l'emploi d'une douille, l'interposition, dans
le clinquant, de toiles métalliques et de plombagine pulvérisée,
dont l'efâcacité est d'ailleurs niée par les experts et les cons-
tructeurs les plus connus, constituassent-ils un perfectionne»
Zi-
— 200 ~
ment» n'en laissent pas moins subsister le caraotère essentiel et
original de Tobjet perfectionné, le balai Boudreaux, à savoir :
l'emploi du métal extrêmement mince, dit clinquant, se repliant
comme du papier : et que, suivant les dispositions générales de
l'article 19 de la loi du 5 juillet 1884, Tauteur du perfectionne-
ment ne peut en tirer parti sans violer le droit de Tauteur de
Tobjet perfectionné, s'il est breveté ;
Attendu que, par ces considérations, la contrefaçon commise
par Henrion parait bien et dûment établie et qu'une seconde ex-
pertise, subsidiairement sollicitée par lui, est inutile ;
Attendu que cette contrefaçon a causé à Boudreaux, un pré-
judice dont il lui est dû réparation et qui consiste : 1* dans ses
voyages, dépenses et faux frais ; 2» dans le bénéfice illégitime
réalisé par Henrion ; que, pour fixer ce dernier, il est indispensa-
ble de recourir à une expertise ;
Par ces 'motifs. Homologue le rapport des experts ; déclare
Henrion contrefacteur du brevet n^ 222,567 du 18 octobre, de
Boudreaux ;
Ordonne la confiscation des balais contrefaits, fabriqués par
Henrion et qui se trouvent dans ses fabriques et ceux décrits aa
procès-verbal du 5 mai 1894, ainsi que des feuilles laminées, pré-
parées ou non, et ce suivant Tartlcle 9 de la loi du 5 juillet 1844,
avec remise à Boudreaux aux frais de Henrion ; ordonne, confor-
mément aux articles 1036 du Gode procédure civile et 49 de la
loi du 5 Juillet 1844, Tinsertion du présent jugement dans quinze
journaux de France et de Tétranger, au choix de Boudreaux, aux
frais de Henrion, mais limitée à 100 francs par insertion ;
Autorise de plus Boudreaux à faire à ses frais la publicité de
ce jugement dans toutes revues et journaux spéciaux et ordinai-
res qu^il jugera convenables aux initiales seulement des parties;
dit et ordonne que par experts convenus par les parties dans les
trois jours de la signification du présent jugement, sinon par
MM. Perreau, professeur de physique industrielle à Nancy ; Colin,
ancien notaire, rue Kléber, à Nancy ; GoUombier, ingénieur à
Nancy, experts nommés d'office, serment préalablement prêté
devant le président de ce siège, il sera établi et déterminé par
état, au vu de la comptabilité de Henrion, lesbénéfices illégiti-
mes qu'il a réalisés par sa contrefaçon et dont il doit indemniser
Boudreaux.
'( Condamne néanmoins, dès à présent, Henrion, par provision
à payer à Boudreaux une somme de 2,000 francs à titre de dom-
mages-intérêts pour l'indemniser de ses voyages, dépenses et
faux frais ; le condamne en outre en tous les dépens. »
M. Henrion ayant interjeté appel de cette décision, el
— 201 —
produit des certificats et attestations d'électriciens, pour
établir qu'antérieurement à la prise du brevet de Bou*
dreaux, on construisait déjà des balais électriques sem-
blables aux siens, M. Boudreaux forma devant la Cour
de Nancy une demande en intervention forcée contre les
signataires des certificats pour les contraindre à les re-
connaître et à les désavouer. La Cour, après plaidoiries
de M*" PouiLLET et Desjardin (tous deux du barreau de Pa*
ris) et de M** Mbngin, Moreau et Lbvy, et conclusions de
M. Obrin, avocat général, rendit le 22 juillet 1899, sous la
présidence de M. Sadoul, premier président, Tarrèt sui«
vant:
La Goub, Adoptant les motifs des premiers juges ;
Attendu que la possession personnelle quUnvoque rappelant
pour obtenir, en ce qui le concerne, la nullité du brevet Bou-
dreaux, ne saurait être admise ; que s*il semble établi, en effet,
que Fabius Henrion s'est livré & des essais, vers Tannée 1887,
pour arriver à la fabrication de balais électriques, à Taide de
feuilles de laiton très minces alternant avec des toiles métalli-
ques enduites^de plombagine, le tout maintenu par une feuille de
clinquant formant gaine,il est certain néanmoins qu'il n'est arrivé
à aucun résultat industriel, et qu'il n'a jamais appliqué même
pour les besoins de son industrie, le procédé qui a fait l'objet du
brevet pris en 1892 par l'intimé ; qu'il n'est point sorti de la pé*
riode des tâtonnements et n'a entrevu que de loin la découverte
que Boudreaux a fait entrer plus tard dans le domaine de la pra-
tique ; qu'on peut donc affirmer, d'après les éléments du procès
que jamais il n'a fait usage, môme pour son compte personnel,
d'un balai électrique constitué de la même façon que le balai
Boudreaux et pouvant être confondu avec lui ; qu'il s'ensuit qu'il
ne justifie d'aucune possession personnelle qui soit susceptible
de faire écarter la demande ;
Sur les afûdavit ou certificats qui ont motivé la réouverture
des débats :
Attendu que les diverses attestations produites par Fabius Hen-
rion, au cours du premier délibéré, ne sont nullement proban-
tes par elles-mêmes, qu'elles sont conçues en termes trop vagues
pour qu'on puisse en induire que les industriels qui les ont dé-
livrées ont été réellement, avant 1892, en possession de l'inven-
tion revendiquée par Boudreaux ; qu'elles n'indiquent pas d'une
manière formelle, qu'il y a similitude entre les balais employés
antérieurement au brevet, soit par la maison Elmore, soit par la
maison Alliôth, et les balais électriques fabriqués par l'intimé ;'
— 202 —
qa*aucune certitude n'existe à cet égard en présence de la des*
cription incomplète, faite de mémoire, qu*en donnent les certifi-
cats présentés à la dernière heure et qui proviennent tous de ri-
vaux en industrie de la maison Boudreaux ou de quelques-uns de
leurs préposés ; qu'il y a d'autant moins lieu d'en tenir compte,
qu'ils se trouvent infirmés par les réticences qu'ils semblent con-
tenir et le peu de sûreté des affirmations qui y sont produites ;
— que ces diverses constatations suffiraient à elles seules pour
les faire rejeter, même si Boudreaux ne fournissait pas un élé-
ment de conviction qui leur enlève toute portée ;
Attendu, en effet, qu'il est incontestable que dans les années
qui ont suivi 1892, la compagnie française El more, comme la
compagnie anglaise du même nom et la maison Allioth, ont fait
à Boudreaux de nombreuses commandes de balais brevetés,
qu'elles en ont discuté tout d'abord le prix, qu'elles trouvaient
trop élevé, puis, qu'elles ont fini par accepter les conditions qui
leur étaient faites ; qu'on ne s'expliquerait pas, comment se trou-
vant en possession du procédé de Boudreaux et fabriquant de-
puis plusieurs années des balais électriques semblables aux siens,
ces industriels se seraient adressés & lui malgré les exigences de
prix, qu'ils déclaraient excessives, pour obtenir les appareils né-
cessaires (à leurs machines électriques ; que la justification que
Boudreaux a faite de ces achats est pleinement démonstrative et
ne saurait laisser subsister aucun doute sur l'inanité des produc-
tions tardives de l'appelant ;
Attendu qu'il est ainsi établi que Fabius Henrion ne saurait
s'appuyer sur aucune antériorité pour contester la validité du bre-
vet qui lui est opposé ; qu'il s'est bien rendu contrefacteur de ce
brevet, ainsi que l'ont déclaré avec juste raison les premiers
Juges ; que c'est du reste là la seule question qui soit déférée à la
Gour, après avoir été soumise à l'appréciation du tribunal; que,
dans cette situation, les conclusions prises par Henrion, dans le
but de faire déclarer dans quelles conditions il pourrait continuer,
sans commettre une contrefaçon, la fabrication des balais élec-
triques, doivent être nécessairement écartées, puisqu'elles sont
absolument eu dehors du débat ; qu'il n'y a évidemment pas
Heu de donner à l'appelant une sorte de consultation sur l'éten-
due de ses droits et de préjuger ainsi les difficultés qui pourront
naître dans l'avenir :
Attendu, enOn, que le travail des experts présente les plus
sérieuses garanties; qu'il a été établi avec le soin le plus cons-
ciencieux et avec une indiscutable compétence ; qu'il est complet
et répond catégoriquement à toutes les questions qui ont été
posées dans rintérêt de la manifestation de la vérité ; qu'il n*y a
Mpa^it-cr^t^# -•-■^r» -T«i<»»'^r «""^ v^'
— 203 —
pas lieu, dès lors, d^ordonner une nouvelle expertise comme le
sollicite l'appelant dans ses conclusions subsidiaires ;
Sur la demande en intervention forcée introduite, par Boa-
dreaux contre Elmore et consorts :
Attendu que Boudreaux a appelé en cause devant la Cour Elmore
et autres, dans le seul but, d'après ses dernières conclusions,, de
faire déclarer par la Cour que l'arrêt rendu contre Fabius Hen-
rion leur serait commun ; qu'il convient d'examiner, tout d'à-"
bord, si cette demande en intervention forcée est recevable ;
Attendu qu'il est de principe que Tintervention forcée n'est
recevable, en cause d'appel, qu'à rencontre de la partie qui au-
rait le droit de former tierce opposition à Tarrét à intervenir ;
que, d'un autre côté, la tierce opposition n'est admissible que
de la part d'un tiers à qui l'arrêt pourrait préjudicier ou à ren-
contre de qui l'arrêta intervenir serait de nature à constituer un
préjugé ;
Attendu que la décision de la Cour, rendue dans le procès
pendant entre Fabius Henrion et Boudreaux, ne pourrait, en au-
cun cas, causer un préjudice à Elmore et autres, qu'il soit con-
firmatif ou qu'il soit inûrmatif ; que ces derniers n'ont d'intérêt
ni de près, ni de loin, dans le litige engagé entre les parties en
cause ; qu'ils n'émettent aucune prétention contraire aux pré-
tentions de Boudreaux, n'étant pas même menacés par lui d'un
procès en contrefaçon ; qu'ils se sont bornés à affirmer un fait
qui, ^elon Fabius Henrion, pouvait avoir une influence sur la
solution du procès, les intérêts de Boudreaux et ceux de Fabius
Henrion. étant seuls en présence ; qu'il n'existe aucun lien entre
l'appelant et Elmore et consorts, et qu'il importe peu aux intérêts
de ceux-ci que Fabius Henrion soit déclaré contrefacteur ou que
l'intimé soit débouté de sa demande ; que l'arrêt restera pour eux
res inter alios judicata ; qu'il ne pourrait leur préjudicier en rien,
ni constituer un préjugé à leur encontre puisque Boudreaux ne
réclame rien aux appelés en cause qui, de leur côté, ne formu-
lent aucune prétention contre lui ; qu'il est donc certain que
ceux-ci ne pourraient, à aucun titre, attaquer l'arrêt par la voie de
la tierce-opposition ; que la demande en intervention forcée dont
ils sont l'objet de la part de Boudreaux doit, en conséquence,
être déclarée non recevable ;
Attendu, toutefois,qu'il n'est nullement démontré qu'en appe-
lant Elmore et autres devant la Cour, Boudreaux ait agi dans iin
esprit de vexation et avec mauvaise foi ; que la condamnation
aux dépens constitue seule la peine du plaideur téméraire, aux
termes de l'article 130 du Gode de procédure civile; qu'il échet»
en conséquence, de décider que la demande de dommages-intét
têts, intentée par Elmore et autres contre Boudreaux, manque
— 204 —
de base et doit être rejetée, les frais nécessités par la demande
en intervention forcée devant rester à la charge de ce dernier ;
Par ces motifs, Sans s*arrêter aux conclusions snbsidiaires de
rappelant, une nouvelle expertise étant inutile et ne pouvant
occasionner que des retards et des frais fru stratoires, met l^ap-
pel au néant ; rejette toutes les conclusions prises devant la Gonr
par Fabius Henrion ; confirme, en conséquence, dans toutes ses
parties, le jugement attaqué ; dit qu'il sortira son plein et entier
effet;
Déclare non recevable la demande en intervention forcée,for-
mée par Boudreaux contre Elmore et autres ;
Rejette comme non fondée la demande de dommages-intérêts
intentée par Elmore et autres contre Boudreaux ;
Condamne Fabius Henrion à l'amende et aux entiers dépens
d'appel, dans lesquels seront compris les frais d'autographie
nécessités par l'instruction de la cause ;
Met néanmoins les frais occasionnés par les demandes en in-
tervention forcée intentées contre Elmore et autres à la charge
de Boudreaux.
Art. 4194,
Brevet Boadreanx. — OMitpeAiçoii partieUe.
Lorsqu'une invention porte sur un balai électrique cons-
titué par une ou plusieurs feuilles de laiton laminé exces-
sivement mincCy repliées, plissées ou enroulées sur elles-
mémeSy il y a contrefaçon dissimulée ou tout au moins
partielle dans le fait de constituer un balai par deux pa-
quets de lamelles de clinquant découpées et superposées^
séparés par une toile métallique^ le tout formant un fais-
ceau consolidé par des rivets et enveloppé de deux feuilles
de clinquant formant une surface continue et plusieurs fois
enroulées sur elles-mêmes (1).
(C. de Douai,8 décembre 1898.— Boudreaux c. Damade.) (2).
«
(1) Sur la contrefaçon partielle, voir Pouillet, Brw,dHnv,, n* 639 ; Al-
lart, id,,i. 3, no435.— V. Ga8s..l7 septembre 1858,Perin, i4nn., 58.312;
Aiz, 6 avril 1867, Coq, Xnn., 68.37 ; Amiens,19 ]uin 1884, Dapont,i4nn.,
87.118 ; Paris, 27 février 1889, Charageat, Ann„ 90.281.
' (2) C'est sur le règlement des frais de cette décision qu'a été rendu
Tarrôt de la Cour de Douai du 21 juillet 1899, que nous avons d^ rap-
porté aax Annatet, 1900.64.
^f^9imF^^M$^m tii^^v -^ ''fvr=?'«Tr"M».v'-*î^'^-v^
— 205 —
Pendant que se poursuivait l*instànce dirigée contre
Henrion (v. article précédent) M. Boudreaux avait intenté
une action en contrefaçon contre M. Damade devant le
Tribunal de Douai, qui rendit le 23 décembre 1897 un
jugement condamnant Damade comme contrefacteur.
Sur appel de Damade, la Cour de Douai après avoir en-
tendu M*' Allârt et Desjardin, en leurs plaidoiries a, sous
la présidence de M. Mauflastrs, président, rendu, le 8 dé-
cembre 1898, l'arrêt confirmatif suivant :
La Goor, Attendu que Boudreaux est titulaire d'un brevet d'in-
vention en date du 2 juillet 1892 et d'un certificat d'addition du
18 mars 1893 s'appliquant à la fabrication d'un balai feuilleté
pour machines électriques ; qu'il a fait saisir chez Damade et
Gie, fabricants à Sin-le-Noble, des balais qu'il prétend être l'imi-
tation frauduleuse de ceux dont il s'est réservé la propriété et
poursuit les défendeurs en contrefaçon ;
Attendu que le balai Boudreaux est constitué par une ou plu-
sieurs feuilles de laiton, dit clinquant, laminé excessivement
mince (de quelques centièmes de millimètres seulement d'épais-
seur) et susceptibles de se plisser aussi facilement que du papier ;
ces feuilles sont repliées sur elles-mêmes ou plissées en accor«
déon sans solution de continuité et serrées le plus possible les
unes contre les autres ; le plissage peut être obtenu par l'enrou-*
iement des feuilles métalliques sur un gabarit ou mandrin et
leur aplatissement, après extraction du mandrin qui a servi à
former le rouleau ; aux feuilles continues peuvent être subs-
tituées des lamelles isolées, réunies ensuite entre elles par tout
moyen convenable ;
Attendu que les balais ainsi constitués donnent des résultats
industriels importants, à raison de la parfaite conductibilité pro-
duite par la continuité des feuilles métalliques et à cause de leur
faible usure, de leur élasticité et de la douceur de leurs frotte-
ments ; que la brevetabilité du procédé Boudreaux n'est d'ailleurs
pas contestée ;
Attendu que le balai construit et vendu par Damade et Gie
se compose de deux paquets de lamelles de clinquant, décou-
pées et superposées, que sépare une toile métallique en laiton^
le tout formant un faisceau consolidé par des rivets et enve-
loppé de deux feuilles de clinquant formant une surface conti-
nue et plusieurs fois enroulées sur elles-mêmes.
Attendu que ce balai est la contrefaçon dissimulée ou tout au
moins partielle de celui de Boudreaux ; que si la partie intérieure
formée de lamelles isolées, diffère du balai Boudreaux, il n'en
— 206 —
est pas de même de la partie extérieure qui est constitaée par
Tenroulement de feuilles métalliques continues et présenté une
identité absolue avec le balai breveté par le demandeur ;
Attendu que vainement Damade et Gie à Fappui du droit qu'ils
revendiquent de fabriquer librement leurs produits, invoquent
le brevet Ydoux du 7 novembre 1891 et le brevet Lhuîllier etCa*
ron du 7 décembre 1879, lesquels sont tombés dans le domaine
public ;
Attendu que le balai Ydoux est formé de lamelles de laiton
entaillées et non de feuilles métalliques continues plissées ou
enroulées sur elles-mêmes ; qu'il diffère donc de ce qui fait Tun
des éléments du brevet Boudreaux ;
Attendu que le balai Lbuillier et Garon est formé d'une toile
métallique enroulée sur elle-même et n'emploie pas des feuilles
de métal offrant une surface continue comme le balai du deman-
deur qu'il n'existe entre ces deux produits qu'une lointaine ana-
logie ;
Attendu que Boudreaux s'étant réservé, pour la fabrication de
son balai, l'emploi de feuilles de clinquant (ou de tout autre mé-
tal convenable) plusieurs fois pliées, plissées ou enroulées sur
elles-mêmes et offrant une surface continue, Damade n'avait pas
le droit d'envelopper son faisceau intérieur de feuilles métalliques
présentant la même disposition ; que Ton doit voir dans cette
enveloppe non pas une simple gaine destinée à protéger les la-
melles intérieures, mais bien Tun des organes principaux du
balai, organe à l'aide duquel Damade obtient les résultats indus-
triels que Boudreaux a réalisés par son invention ; que c'est donc
à bon droit que les premiers juges ont déclaré Damade et Cie con-
trefacteurs des brevet et certificat d'addition du demandeur ;
Attendu que l'expertise subsidiairement demandée serait inu-
tile et frustratoire ; que notamment, alors même qu'il serait prou-
vé que Tenveloppe extérieure du brevet Damade joue au point de
vue de la conductibilité, le môme rôle proportionnellement à son
poids, que les lamelles intérieures, il n'en serait pas moins éta-
bli que par l'emploi de cette enveloppe extérieure, Damade a
contrefait le produit de Boudreaux ;
Par ces motifs. Et adoptant au besoin [ceux non contraires
des autres juges ;
Met Tappellation à néant ;
Dit que si Damade et Gie ont le droit, au regard de Bou-
dreaux, de fabriquer des balais en feuilles de laiton aussi minces
que possible, superposées sans pliage ni plissage, suivant le pro-
cédé Ydoux, ils n'en ont pas moins commis une contrefaçon en
entourant ces feuilles isolées d'une enveloppe formée en feuilles
métalliques continues et enroulées sur elles-mêmes ;
— 207 —
En conséquence, confirme le jugement attaqué ;
Dit qu'il sortira effet;
Déclare Damade et Gie mal fondés en leurs demandes, fins et
conclusions tant principales que subsidiaires, les déboute de leur
demande reconventionnelie ; les condamne à l'amende et aux
dépens de la cause d'appel.
Art. 4195,
Brevet Roux. ^ Emploi nonirean. — Brevet «le per-
feetlonnemeiit. — GertlAeat d'addUion. — JWuUité.
— Bonne foi. « Dommagreo-intérêto.
Est nul le brevet qui ne contient que r application sans
combinaison nouvelle d'un moyen déjà connu^pour tobten-
tion d'un résultat industriel que ce moyen avait pu procu-
rer y&t est par suite dépourvu de l'idée créatrice qui caracté-
rise Vinvention (1).
Ne fait pas une invention brevetable celui qui sans indi-
quer de modifications particulières se borne à appliquer
un procédé connu en faisant appel à V habileté de V ouvrier
en vue de sa bonne exécution ; spécialement^ étant connu
pour empêcher les fentes des plafonds l'usage d'une toile
interposée entre la couche de dégrossissage et celle de fini,
ne saurait constituer une invention brevetable l'indication
qu'il convient de procéder au fini du plafond à l'aide d'une
couche de plâtre très mince ne couvrant que superficielle^
ment la toile, sans indication des moyens de réaliser ce ré-
suUat.
Ne peut être considéré^ subsidiairement, comme un brevet
de perfectionnement d'un brevet antérieur, un brevet portant
sur un procédé connu et par suite nu/, alors que l'inven-
teur n'a décrit les perfectionnements qu'il entendait appor-
ter à ce procédé connu que dans des certificats d'addition
à ce brevet, et que ces perfectionnements n'étaient même
pas en germe dans le brevet principal (3).
(i)V. Pouillet, Brev. dHno,, n«S7et suiv.et371.
(2) Gorop. rej., 30 mars 1854, Auzet, Sir., 55.1.226; Rej., 3 août
1858 Buisson, Z)a/^, 58.1.369; Paris, 28 novembre 1862, Favre, Ann,,
64.90, Paris, 23 mai 1863, Rasreil, Ann., 64.276 ; Y. Pouillet, eod.
toc^, n* 41*
(3) Jurisprudence coDstante. Peu importe que le certificat d'addition
— 208 —
Il fCy a pas lieu de condamner à des dommages et intérêts
le demandeur en contrefaçon lorsqu'il a agi de bonne foi^
et qu'il n'est pas établi que sa demande ait causé un préju-
dice à celui contre qui elle était dirigée (4).
(C. de Dijon, 5 juin 1899. — Roux c. Denier.)
Le 29 novembre 1898, le Tribunal civil de Chalon-sur-
Saône a rendu le jugement suivant :
Li Tribunal, Attendu que Roux, sculpteur ornemaniste demeu-
rant à Ghâlons-sur-Marne, est titulaire d'un brevet demandé le
li mai 1895 et complété par des certificats d'addition en date
des 26 mai 1896, 22 mars et i\ mat 1897, ayant pour objet un
procédé destiné à rendre les plafonds en plâtres souples et incas-
sables ; que Tinvention revendiquée consisterait d'après le mé-
moire descriptif : « à appliquer,après Tavoir trempé au préala-
ble dans du plâtre gâché convenablement et surtout de toute pre-
mière qualité,de la toile grossière ou de Tétoupe...» sur la « cou-
che dite de dégrossissage bien dressée mais laissée grossière pour
donner de l'adhérence ».... «en tamponnant fortement au pla-
fond avec une brosse trempée elle-même dans le plâtre » puis « i
procéder au fini du plafond par une couche de plâtre très mince
de façon à ne couvrir que superficiellement la toile ou Tétoupe »
étant, en outre, observé que « ce genre de travail étant appliqué
aux plafonds neufs ou anciens ne change presque rien à la façon
de faire actuelle, le changement très important réside dans l'ap^
plication de la toile, ou Tétoupe enfermée entre deux couches de
plâtre, la couche de dégrossissage et la couche de fini du pla-
fond,cette dernière étant mince de façon qu'elle se marie avec la
toile ou rétoupe dans des conditions très favorables » ; que les
perfectionnements consignés dans les certificats d'addition ont
pour objet de fixer tout d'abord la toile avec des clous,puis delà
coller avec une colle spéciale dont la composition est donnée
ainsi que celle de divers plâtres à employer ;
Attendu que Roux, en vertu d'autorisations obtenues confor-
mément à l'article 47 de la loi du 5 juin 1844 a fait procéder,
par ministère de l'huissier Ragot, assisté d'un homme de Fart,
dans une maison en construction appartenant au sieur Jannin-
Naltet, à diverses constatations qui tendent à établir qu'an
deuxième étage des plafonds du vestibule, de Tévier et do la
Considéré en lui-même présente toutes les conditions de brevetabilité ;
si le brevet est atteint d*an vice, ce vice frappe du même coup le cer-
tificat d'addition. V. Pouillet, eod, loc,^ n« 154 et jarisp. citée.
(i) V. Pouillet, eod, loc, 1006, la jurisprudence citée, et aussi, Rej.i
8 mai 1896 ; Zipemowski, Ann., 95.176.
■I ,1 p.p^r ■■^ «-^'^ ff-rvm, ,■■ %i- '-^-i.-^^
— 209 —
salle à manger, du grand et du petit salon, de la chambre à cou-
cher, sont munis en tout ou en partie d'entoilages appliqués à
Taide de clous entre deux couches de plâtre blanc, Tune liée puis
piquée, l'autre ayant environ deux millimètres et demi d'épais-
seur ; qu'en suite des procès-verbaux ainsi dressés, il a, par ex-
ploit en date du 4 juillet i898,enregistré, assigné le sieur Denier
qui avait été chargé de la façon des plafonds examinés, pour
s'entendre déclarer contrefacteur des brevets et certificats d'ad-
dition sus-relatês, et s'ouïr condamner à 10.000 francs de dom-
mages-intérêts :
Attendu que le défendeur ne discute pas la matérialité des
faits reconnus par les constats, mais dénie le caractère de nou-
veauté de l'invention revendiquée et oppose comme antériorité
un brevet délivré le 23 décembre 1891 à un sieur Vaché de Gre-
noble ;
Attendu que la description annexée à ce brevet porte que le
procédé consiste à appliquer pendant la construction du plafond
entre le grossissage et le dernier enduit, une toile assez forte, à
mailles suffisamment larges qui, le plâtre pris dans les mailles
ne pouvant plus faire de retrait, éviterait les fentes qui se pro-
duisent fatalement avec l'usage ordinaire dans les plafonds neufs
et supprimerait celles existant dans les plafonds vieux ; ... que
l'idée revendiquée est un entoilage sur place et dans l'intérieur
du plafond ayant pour but de supprimer les fentes et d'augmen-
ter la solidité et la beauté dudit » ;
Attendu que sans avoir à chercher si la prétendue découverte de
Roux présente un résultat industriel et à ce titre peut être bre-
veté, il y a lieu de reconnaître que le procédé par lui revendiqué
à la date du 11 mai 1895 est identique â celui que Vaché a fait
breveter quatre ans auparavant ; qu'en effet l'idée fondamentale
des deux systèmes, déclarés applicables aussi bien aux plafonds
neufs qu'aux plafonds vieux, est Tincorporation entre deux cou-
ches de plâtre d'une toile qui, pour Roux, est une toile « gros-
sière » et pour Denier, une toile « assez forte, à mailles suffisam-
ment larges » ; que pour les deux inventeurs qui arrivent au
même but par le même moyen, mais sans s'expliquer ni l'un ni
l'autre sur un procédé spécial permettant de la fixer, la toile est
placée d'après le brevet de 1895 « entre la couche de dégrossissage
et la couche de fini » ; d'après le brevet de 1891 : « entre le dégros-
sissage et le dernier enduit » ; que la similitude des deux préten-
dues inventions est absolue ; qu'à la vérité Roux signale comme
l'indication d'un procédé primitif, partant brevetable, cette énon-
ciation du mémoire descriptif : «< procéder au fini du plafond par
une couche de plâtre très mince,de façon à ne couvrir que super-
ficiellement la toile » ; que peut-être le demandeur aurait fait
i4
1
— 210 —
une découverte susceptible d'être brevetée s'il avait trouvé le
inoyen de régulariser l'épaisseur de la couche, mais qu*il n'in-
ventait rien alors qu'il faisait simplement appel à rtiàbileté de
TouvrieV pour garder des proportions convenables et non déter-
minées a priori ; qu'il y a même lieu d'observer en fait que d'a-
près les constats, la couche de uni des plafonds établis par Denier
avait une épaisseur d'environ deux millimètres et demi qui ne
diffère pas de 'celle habituellement donnée dans la région, au
dernier enduit des plafonds ordinaires, enduit désigné par les
gens du métier sous le nom caractéristique de feuille de plâtre ;
Qu'en tous cas, une modification de détail dans l'application
d'un procédé connu, alors même qu'elle permet d'obtenir un ré-
sultat meilleur, ne constitue qu'une habileté de mise en pratique
et non une invention brevetable ; qu'en réalité le brevet de Roux
ne contenait que l'application sans combinaison nouvelle, d'un
moyen déjà connu pour l'obtention d'un résultat industriel que
ce moyen avait pu antérieurement procurer; qu'il était donc
dépourvu de l'idée créatrice qui caractérise l'invention et se trou-
vant par suite frappé de caducité, ne peut être opposé à Denier ;
Attendu que Roux soutient à titre subsidiaire que le brevet à
lui délivré est tout au moins valable comme brevet de perfec-
tionnement du brevet Vaché ; qu'à l'appui de sa prétention, il
pourrait peut-être invoquer, comme des découvertes utiles à Tin-
dustrie, l'idée avant de coller la toile, de la fixer au moyen de
clous ainsi que la composition spéciale de la colle à employer
et du plâtre destiné au dernier enduit ; mais que, sans rechercher
Al en fait le clouage de la toile qui seul est établi à la chargé
de Denier par les procès- verbaux de constat a quelque valeur
brevetable, il y a lieu de constater qu'en tout cas et en droit, le
breveté ne s'est point régulièrement placé sous la protection
légale ; qu^en effet, le procédé revendiqué qui n'était point en
germe dans le brevet n'a été décrit, ou plus exactement n*a été
indiqué que dans les mémoires joints aux certificats d'addition
successivement demandés et qu'il est de principe en doctrine
(Jur. gén. Supplément^ Vo Brevet d^invention, n** 123, 124 ; Poail^
let. Traité des brevets d'invention, n^* 154, 155), et en jurispm-
dence (Civ. cass., i*' juin 1865, D. P. 06.1.457; 14 déc. 1868,
D. P. 69.1.81 ; 20 déc. 1886, D. P. 87.1.352) que les certificats de
cette nature prennent fin avec le brevet quelle que soit la cause
qui en interrompt l'effet; que le brevet Roux étant nul comme
s'appliquant à une invention déjà connue et dans le domaine
public, les certificats d'addition ne valant qu^accessoirement
au brevet, tombent avec ce brevet lui-même et ne peuvent dès
lors ni conférer un droit au demandeur ni servir de base à une
poursuite ; que, dans ces circonstances, l'action en contrefaçon
^ffti
— ail —
introdoile par Roux e t dénuée de fondement et doit être reje-^
tée;
• Attendu que Denier a formé une demande reconventipnnelle
en dommages-intérêts;
Attendu que Roux en invoquant à l'appui de sa demande un
brevet frappé de caducité a commis une faute et une impru-<
dence qui engagent sa responsabilité ;
Qu'en dehors des frais de l'instance qui sont la peine du plai-^
deur téméraire, il doit être tenu de réparer le préjudice qni est
résulté pour Denier de Timputation de contrefacteur dirigé^
contre lui, ainsi que des saisies et constatations à tort pratiquées
chez le propriétaire qui Favait occupé ;
Attendu que le tribunal a les éléments d'appréciation néces-
saires pour évaluer l'importance de ce préjudice ;
Attendu que les dépens sont à la charge de la partie qui suc-
combe ;
Par ces motifs, Déclare Roux mc^ fondé dans sa demande, l'en
déboute ;
Déclare au contraire, Denier bien fondé dans sa demande
reconventionnelle ; en conséquence condamne Roux à lui payer
à titre de dommages-intérêts et en réparation du préjudice à lui
causé, la somme de 200 francs ;
Ck>ndamne Roux en tous les dépens de Tinslance, dans les-
quels seront compris au besoin à titre de supplément de dom-
mages-intérêts tous droits d'enregistrement et d'amende qui
pourraient être perçus à l'occasion du présent litige ;
Le sieur Roux ayant interjeté appel de ce jugement, la
Cour de Dijon a, sous la présidence de M. Gilbert, prési-
dent, après plaidoiries de W^ Durotaume (du barreau de
Paris) et Godjbt, rendu le 3 juin 1891 Tarrèt suivant :
La Cour, En ce qui touche les conclusions du demandeur prin*
cipal Roux : — Adoptant les motifs des premie^'s juges ;
En ce qui touche la demande reconventionnellè de Denier :
Attendu que Denier ne justifie pas qu'il était résulté pour lui
un préjudice de l'imputation de contrefaçon dirigée contre lui
de bonne foi, d'ailleurs, par Roux, ainsi que des saisies et des
constatations faites chez le propriétaire qui Tavait occupé, que
toutefois, si la défense de l'intimé ou l'action de rappelant a
entraîné Tapplication de droits ou d'amendes d'enregistrement,
il est juste que Roux, comme l'ayant déterminé,ren dédommage ;
Que sous cette réserve il y a lieu d'infirmer le jugement au
chef contenant l'allocation de dommages-intérêts à Denier ;
Attendu que nonobstant cette inûrmation sur un chef d'im-
» 1^
— 212 —
portance secondaire, il convient de condamner Roax aux dépens
de l'appel ;
Par CBS hotips, Statuant sur Tappel du jugement du Tribunal
civil de Chalon-sur-Saône du 29 novembre 1898 ;
Confirme ce jugement quant aux dispositions relatives, soit à
la demande et aux conclusions du demandeur principal Roux, soit
à sa condamnation aux dépens et à titre de dommages-intérêts
aux droits ou amendes d'enregistrement qui seraient perçus à
Foccasion du litige et dit qu'en cette partie, le jugement sortira
son plein et entier effet ;
Infirme cette décisision quant à la condamnation à la somme
de 200 francs de dommages-intérêts prononcée en faveur de
Denier, et repousse comme mal fondée la demande en dom*
mages-intéréts.
Art. 4196.
Médaille*. — U«urp»tJoii.
Contrevient aux dispositions de la loi du 30 avril 1886,
le négociant qui fait figurer sur des étiquettes apposées
sur un produit un certain nombre de médailles, sans qu'il
soit fait mention de leur date, de leur nature et de l'expo-
sition ou du concours où elles ont été obtenues, alors sur-
tout qu'en fait, ce négociant n'a jamais obtenu de récom-
penses dans les concours pour le produit sur lequel étaient
apposées lesdites étiquettes (1).
(Trib. corr. de Nevers, 32 mars 1900. — Merland.)
Ainsi jugé, sur poursuite du ministère public par le
Tribunal correctionnel de Nevers le 22 mars 1900.
Li Tribunal, Attendu qu'au cours d*un procès civil pendant
entre le prévenu et autres, trois bouteilles de liqueur ont été
saisies par procès-verbal régulier du 7 octobre 1899, au domicile
de Merland et produites à Taudience du 16 janvier dernier ;
Qu'au cours des débats, M. le procureur de la République a
constaté, par procès-verbal régulier du même jour, que ces trois
bouteilles étaient revêtues d'une étiquette en papier blanc sur
laquelle figuraient un certain nombre de médailles imprimées
(1) Bar rapplication de la loi de 1886 et sa portée, V. Poaillet,afarçi<e«,
584 et 8. — L'espèce rapportée est an des rares exemples de poursuites
engagées directement par le ministère public.
■ •■;■■,■ I"
— 213 —
en or et sans qa*il soit fait mention de leur date, de leur nature
et de l'exposition ou du concours où elles ont été obtenues ;
Attendu qu*à l'audience da 22 février 1900, le prévenu tout en
reconnaissant Fezactitude des faits matériels relevés ci-dessus,
a demandé à être relaxé purement et simplement des poursui-
tes exercées contre lui et alléguant qu'il ne croyait avoir commis
aucun délit ;
Mais attendu que les termes de la loi du 30 avril 1886 sont for-
mels ; que cette loi, a été promulguée en vue de protéger les vé-
ritables attributaires de récompenses dans les différents concours
où leurs produits ont été exposés, contre les fabricants de mau-
vaise foi qui tentent, par ce procédé, de laisser croire que leurs
produits ont été primés ou récompensés en raison de leur qua-
lité ;
Qu'en fait, Merland n*a jamais obtenu de récompenses dans
les concours pour le produit contenu dans les trois bouteilles
saisies ;
Que, dans ces conditions, les faits ci-dessus relevés contre
Merland tombent dans l'application des articles 1,2 et 4 de la loi
du 30 avril 1886 ;
Attendu toutefois qu'il apparaît au tribunal que, dans l'espèce,
le prévenu a plutôt suivi un usage trop répandu ; qu'il y a lieu
de le faire bénéficier, dans une large mesure, des circonstances
atténuantes, et de lui faire application des articles 463 du Gode
pénal et 6 de la loi du 30 avril 1886 ;
Par CBS motifs, Déclare Merland coupable du délit ci-deisus
spécifié ;
Et le condamne à une amende de 16 francs ;
Mais attendu que, jusqu'à ce jour, le prévenu n'a jamais été
condamné ; qu'il y a lieu, en raison de ses bons antécédents, de
lui faire application des articles 1, 2, 3 et 4 de la loi du 26 mars
1891;
Dit et ordonne qu'il sera sursis pendant cinq ans à l'exécution
de la peine, etc. ;
Condamne en outre Merland au remboursement des frais liqui-
dés, etc. ;
Fixe la durée de la contrainte par corps à deux jours.
— 214 —
Art. 4197.
Conearrenee déloyale. — Maa^atoe fbl. — > Paate. —
IKMiiinaffes-liitérêto. — Ck^neliisloiMi nomrelle*; — •
M<»tlAi munmm.ntm.
Lorsque les circonstances de la cause excluent toute idée
de mauvaise foi, les allégations et les procédés de réclame
dont une partie a usé vis-à-vis d*une autre, et qui lui ont
porté préjudice constituent à V égard de cette partie^ non
pas les éléments d'une concurrence déloyale mais les élé-
ments d*une simple faute passible de dommages-intérêts (1).
Est suffisamment motivé Varrét qui ayant à statuer tur
des conclusions d'appel contenant une demande d allocation
supérieure de dommages-intérêts, et d'insertion de la dé^
cision à intervenir dans plusieurs journaux aux frais de
l'intimé et à titre de supplément de dommages-intérêts^
s'est borné à déclarer que les premiers juges avaient fait
une saine appréciation du préjudice causé à la partie de*
manderesse et à débouter celle-ci de ses fins, moyens et
conclusions prises de ce chef.
(G. de Gasi., ReJ., 9 avril 190a — Doffoil c. Camille.)
Ainsi jugé par la chambre des requêtes le 9 avril 1900»
sous la présidence de M. Tanon, président, sur le rapport
de M. Alphandért, conseiller, après plaidoiries de M* Db-
FERT,avocat, et conclusions de M.MÉRiLLON,avocat général.
La Goua, Sar le premier moyen, pris de la violation des arti-
cles 1382 et suivants da Gode civil et des principes généraux en
matière de quasi-délit:
Attendu que Tarrôt attaqué déclare que si certaines aUëgations
du défendeur éventuel et les procédés de réclame dont il a usé
vis-à-vis du sieur DofToil, ont occasionné un préjudice & ce der-
(1) En l'absence de mauvaiie foi, la concurrence déloyale n^existe pas,
mais il peut y avoir néanmoins préjudice et faute donnant lien, par ap-
plication des principes de Tarticle 1382 à des dommage-intérêts. Y.
Feuillet, Mat'ques, n* 678 ; V. aussi, Douai, 20 juillet 1866, Leblondel,
DalL, 67.5.^39 ; Paris, 28 mars 1878, Leroux, Dali., 79.2.10 ; Trib.
Nantes, 6 mars 1880, Pellier, Ann., 83.133 ; Req.^ 28 juin 1889, Oalt.^
90.1.88.
(2) Sur les motifs des jugements, V. Dali., Jur, gén,, V« Jugement»
no 774 et s.
!■ * »fcVW"Jh*'»- "-.^W-'t"****' ■'■\>T?»»T-^'^'V^»7
— 215 —
nier, on ut troufe pas dans les faits de la cause les éléments
constitutifs d'une concurrence déloyale nettement définie ;
Qu'une telle appréciation implique dans les circonstances de
la cause relevées par les juges du fond, l'absence de mauvaise
foi de la part du défendeur ;
Que par suite, en ne voyant dans les actes retenus contre le
sieur Camille qu'une simple faute passible de dommages-intérêts,
la Cour de Paris, loin de violer les textes de loi et les principes
sus-visés, au moyen, en a fait au contraire une juste application ;
S^r le deuxième moyen tiré de la violation de Tarticle 7 de la
loi du 20 avril 1810 :
Attendu que dans ses conclusions d'appel, le sieur DofToil de-
mandait une allocation supérieure de dommages-intérêts ainsi
que l'autorisation de publier la décision à intervenir dans
quarante journaux à son choix, et ce « aux frais du défendeur
éventuel, et à titre de supplément et dommages et intérêts >i ;
Attendu que l'arrêt attaqué a confirmé la décision de pre-
mière instance, en ce qui concerne les dommages-intérêts, en
déclarant que les premiers juges avaient sainement apprécié le
préjudice causé à DofToil, et en déboutant ce dernier de ces
moyens, fins et conclusions prises de ce chef;
Qu*en statuant ainsi, la Cour de Paris a virtuellement répondu
aux nouvelles conclusions prises par l'appelant ;
Pae CBS MOTiFSj Rejette.
Art. 4198.
Appel Ineldent. — • Intimé. — IVon-reee^ablllié.^ Bre-
wet. — Contrefaçon. — Recel. — Bonne fol. — Action
en Juetlce. — Garnctére ▼exntolre.— Faute.— Doni-
maffea-lntéréte.
L'appel incident n'est pas recevable de la part d'un in-
limé (1).
Varmateurj qui a gardé provisoirement dans ses ma-
gasins des marchandises reçues pour être expédiées à
Vétranger^ ne peut dans le cas où ces marchandises ont été
saisies, sans opposition de sa part, par un tiers préfendant
qu'elles étaient la contrefaçon de produits pour lesquels il
(1) V. Garsonnet, Traité de procédure, t. V, p. 294, Dali., Jur, yen.
suppl.f y'* Appel incident, n» 18. Comp. Rej., 29 avril 1895, Dali,, 9^,
1.454 ; Dijon, 25 février 1898, Dali., 99.2.127, .
— 216 —
était breveté^ être considéré comme receleur et condamné
comme tel^ alors que les juges du fond, par une apprécia-
tion souveraine des faits de la cause et de la correspondance
des parties, ont constaté sa bonne foi (1).
Le fait par un tiers d'avoir demandé à ces armateurs^sans
V accomplissement d* aucune formalité judiciaire de lui U-
wer des marchandises appartenant à leurs commeUants ;
d*avoir traduit ces armateurs en justice pour avoir résisté
à cette prétention ; d'avoir porté contre eux une aecnsaiion
de recel déclarée téméraire et dénuée de fondement, et de
leur avoir suscité un procès purement vexatoire, peut être
à bon droit considéré par les juges du fond comme une
faute lourde donnant lieu à des réparations pécuniaires en
outre des dépens légaux (2).
(G. de cass., 24 octobre 1898. — Agostini c. Caillot et Saint-Pierre.)
Ainsi jugé par la chambre des requêtes sous la prési-
dence de M. Tanon, président, au rapport de M. le conseil-
ler Gborgk LEMAiRE,après plaidoiries de HL^ André Morillot,
avocat et conclusions conformes de M. Puboh, avocat gé-
néral, sur le pourvoi de Agostini contre un arrêt de la
Courd'Aix du 22 juin 1897.
La Codr, Sur le moyen unique tiré des articles 47, 49 de la loi
du b juillet 1844, 14, 17, 19 de la loi du 23 juin 1857, 1882, 1883
du Gode civil et 7 de la loi du 20 avril 1810.
Sur la première branche :
Attendu qu'Antoine Roger et Gie avaient adressé à Caillot et
Saint-Pierre, armateurs à Marseille, quatre caisses de marchan-
dises pour être expédiées à Odessa ; que les armateurs se bor-
nèrent i les retirer du chemin de fer pour éviter des frais de
magasinement, et à les garder provisoirement dans leurs maga-
sins ;
Qa'Agostini prétendant que les marchandises contenues dans
les dites caisses étaient la contrefaçon de produits pour lesquels
il était breveté, demanda aux armateurs de les lui expédier i
(1) Les seules conditions oonstitotives du recel sont : la détention ma--
térielU et la connaissance que l'objet est délictoeox ; si donc la bonne
foi du détenteur est reconnue il ne peut y avoir recel. V. Pouillet, Brev*
dHnv., no«7i7 et 696; Allart, id., no 464 ; Mainié, id,, n» 3508 et soir. ;
GoulûB, Prop. ind., art, et liU,, t. Il, p. 266 et aussi Ann., 88. 1S3,
article de Plé.
(2) L*action en jostioe intentée témérairement donne oavertim â des
dommages et intérêts. V. Poailtek, eod /oc.,n« 1006.
.Tf^ — « r^.ww — ^\g"' ** ~ '-
< * .
— 217 —
lui-mèm6, et sur leur refus, les fit saisir danâ leurs magasins,
sans d'ailleurs opposition de leur part ; qu'il assigna ensuite de-
vant le Tribunal civil de Marseille, Antoine Roger et Gie comme
contrefacteurs, et Caillot et Saint-Pierre comme receleurs ;
Que le tribunal donna défaut contre Antoine Roger et Gie, et
en conséquence déclara contrefaites les marchandises saisies, et
en ordonna la confiscation au profit d'Âgostini ; qu'en outre il
condamna solidairement Antoine Roger et Gie ainsi que Caillot et
Saint-Pierre à 100 francs de dommages-intérêts envers Agostini ;
Attendu qu'Antoine Roger et Cie n'ont pas appelé de cette dé-
cision ; que Caillot et Saint-Pierre ont seuls interjeté appel contre
Agostini ; que s'ils ont mis en cause Antoine Roger et Cie, ceux-
ci n'ont pas comparu ; qu'intimés, ils n'auraient pu d'ailleurs
former appel incident contre Agostini également intimé ;
Que la décision rendue à son profit contre eux, décision qui
déclare leurs marchandises contrefaites et en ordonne la confis-
cation ne pouvait donc être et n'a pas été réformée par la Cour
d'appel ; que la Cour n'avait à statuer que sur Tappel de Caillot
et Saint-Pierre et à décider s'ils devaient être considérés comme
ayant recelé sciemment les marchandises contrefaites, et si par
suite il y avait lieu de maintenir leur condamnation aux dom-
mages-intérêts et aux dépens ;
Que la Cour d'Aix, par une appréciation souveraine des faits
de la cause, et de la correspondance des parties a constaté la
bonne foi de Caillot et Saint-Pierre ; que par suite elle a été
fondée à refuser de les considérer comme receleurs et de les
condamner à ce titre.
Sur la deuxième branche :
Attendu que le fait par Agostini d'avoir demandé aux arma-
teurs Caillot et Saint-Pierre sans l'accomplissement d'aucune for-
malité judiciaire, de lui livrer à lui-même des marchandises
appartenant à leurs commettants ; d'avoir traduit les armateurs
en justice pour avoir, dit l'arrêt, résisté à cette étrange demande ;
d'avoir porté contre eux une accusation de recel que l'arrêt dé-
clare aussi téméraire que dénuée de fondement, et de leur avoir
suscité un procès qualifié par la Cour d'appel de purement vexa-
toire, a pu être considéré par les juges du fond comme une faute
lourde donnant lieu à des réparations pécuniaires en outre des
dépens légaux ;
D*o\ï il suit que la décision attaquée, d'ailleurs régulièrement
motivée, ne viole aucun des articles de loi visés au pourvoi ;
Par cif MOTIFS, Rejette.
— 218 —
Art. 4199-
Brevet. -* Compétence. — SoMle. — In^énlear
de breveté. — CkHniiierçAnt. — CUurauitle.
Lorsqu'au cours d'une instance principale portée régu-
lièrement devant le tribunal de commerce, il s*élève une
question relative à lapropriété d'un brevet d'invention dont
la connaissance, en vertu de Fart. 31 de la loi du iO juillet
1844 est réservée aux tribunaux cimls, ce tribunal ne doit
pas se dessaisir du litige, mais surseoir à statuer sur le
fond et renvoie Fincident devant la juridiction compéten-
te (1).
Les ingénieurs civils qui exploitent une agence de brevets
sont commerçants et par suite justiciables de la juridiction
consulaire.
Vappelé en garantie est tenu de procéder devant le tri--
bunal ou est pendante la demande originaire et principale
dont la demande en garantie est F accessoire (2).
(Paris, 3 jain 1900. — Gomp, françuBe des métaux c. Société meUI-
largica italiana, société de métallargie du coivra et Freydier,Oabreuil
et Janicot.)
Ainsi jugé par la Cour de Paris sur l'appel d*ua jugement
du Tribunal de commerce de la Seine en date du SO jan-
vier 1899 (3).
La. Goor, Gonsiëérant que la Compagnie française des métaux
étant aux droits de la Société de métallurgie du cuivre de Lyon^
(1) Sur la compétence du trib. de commerce en matière de propriété
industrieUe, V. Pouilletf Brev. d*tnt;., n«*601 et 593 ; Gomp. Douai,
10 novembre 1897, Delattre, Joum. dr, ind,t 99. 121 ; Besançon, %i fé-
vrier 1899, Japy, Ann,, 99.206 et la note ; Bordeaux, 17 novembre 1897,
Obier, Ann., 1900-41.
(2) Ce principe (art. 59, G. proc. civ.),80uflHrait exception si letriba-
nal oii est pendante la demande originale était incompétent rtuione
materia pour l'excepUon de garantie ; si, par exemple, les appelés en gm-
rantie n'étaient pas commerçants et n*avaient pas fait acte de commerce ;
Paris, 28 mai 1877, Mercier, 6V., 79.2.86; si Tappel de garantie ten-
dait à soumettre au tribunal français une contestation entre étrangers^
relative à un contrat formé et exécutoire en pays étranger : ciss.,
15 janvier 1878, Gharlier, ÀV. ,78. 1.300 ; si l'action en garantie était re-
lative à un contrat de travaux publics dont la connaissance est réservée
aux tribunaux administratife ; Gaen, 22 juillet 1886, Rec. de Rouen «1
Caen, 87.2.86 et s.
3) V. ce jugement dans La Loi du 12 juillet 1900.
A. T.
'*v.-f.J y i'.' y.*/ ■'!' "vy • ''--■yw-^"-"'yT^-^^"-TTyr?^ *^- "v^v^-r "^ •
— 219 —
a assigné ia Société la metallurgica italiana devant le Tribunal
de commerce de la Seine àia suite de difficultés survenues entre
elle et cette dernière sur Texécution de la cession d'une licence
pour la fabrication du cuivre en Italie, d'après les procédés ayant
fait Tobjet du brevet Manbès ;
Que, de son côté, la Société la metallurgica italiana a formulé
contre la Société française des métaux une demande reconven-
tionnelle prétendant que les brevets étaient tombés dans le do-
maine public ; qu'alors celle-ci a appelé en garantie Freydier,
Dubreuil et Janicot ;
Que ces derniers ont décliné la compétence du tribunal de com-
merce, d'abord parce qu'ils étaient domiciliés à Lyon, puis parce
qu'ils n'étaient pas commerçants, enfin parce que les contesta-
tions relatives à la déchéance d'un brevet ne pouvaient être sou-
mises qu'aux tribunaux civils ;
Que le tribunal n'a pas statué sur les deux premiers moyens ;
mais qu'il a accueilli le troisième et s'est déclaré incompétent
ratione materiaf et a renvoyé la cause et les parties devant les ju-
ges qui devaient en conn^tre et condamné les trois sociétés cha-
cune aux dépens de sa demande, ainsi qu'au tiers du coût du ju-
gement, les dépens du chef de Freydier, Dubreuil et Janicot étant
taxés en marge de la minute ;
Qu'il a basé sa décision sur ce qu'il serait nécessairement amené
pour apprécier le litige qui lui était soumis, à se faire juge d'une
question de déchéance de brevet, dé la compétence exclusive des
tribunaux civils, aux termes de l'article 34 de la loi du 20 juillet
1884;
Que la Compagnie française des métaux a interjeté appel prin-
cipal de ce jugement ; que la Société de métallurgie du cuivre
de Lyon en a relevé appel éventuel ;
Que la Compagnie française des métaux prétend en premier
lieu que le Tribunal de commerce de la Seine ne devait pas se
dessaisir, ayant, non à se faire juge d'une question de déchéance
de brevets, mais à rechercher seulement si une taxe avait été
ou non régulièrement payée, simple constatation de fait^ et qu'il
s^agissait, au surplus, d'une licence concédée pour Tltalie, d'une
taxe devant être payée en Italie par application d'une loi italienne
qui ne parait pas contenir de dispositions analogues à l'article 34
de la loi française de 1844 ;
Que cette prétention ne saurait être admise ;
Que rechercher et décider si une taxe a été ou non régulière-
ment payée, c'est rechercher et décider si le breveté est ou non
déchu de ses droits et qu'il s'agisse de la taxe, au paiement de
laquelle chaque brevet donne lieu en France, ou d'une taxe édic-
tée par une loi italienne, pour 1& conservation d'un brevet en
— 220 —
Italie, l68 mômes motifs d*ordre public existent qui ont fait rè-
server aux seuls tribunaux civils la connaissance des questions
de déchéance de brevets ;
Mais considérant qu'au contraire la Compagnie française des
métaux est bien fondée à soutenir, comme elle lofait subsidiai-
rement, que le tribunal de commerce devait se borner à sur-
seoir, jusqu'à ce que l'exception soulevée à Rencontre de la de-
mande originaire et principale eftt été jugée par le tribunal civil
et retenir la connaissance du surplus du litige ;
Qu'en effet, la constatation de l'impossibilité dans laquelle il
était de se prononcer sur ladite exception, ne pouvait avoir pour
conséquence d'entraîner son dessaisissement total, alors qu'il
était régulièrement saisi, aux termes de l'attribution de jaridi&-
tion faite par les parties, d'une demande prenant sa source dans
une convention et dans des opérations commerciales naissant
entre sociétés commerciales à raison d'actes de commerce ; qu'il
doit donc rester saisi de tout le surplus du litige ;
Considérant que Cunit et Platon es qualités qui s'en rapportent
en fin de compte à justice sur l'incompétence ratione materÙB ad-
mise par les premiers juges demandent à la Cour, pour le cas
où le jugement serait infirmé, de déclarer que l'action en garan-
tie formée par la Société de métallurgie du cuivre contre Freydier,
Dubreuii et Janicot a]ëté formée entre des commerçants qui peu-
vent, de ce chef, être appelés devant la juridiction consulaire de
la Seine, saisie de la demande originaire et principale ;
Que ces conclusions sont fondées ;
Que d'une part, Freydier, Dubreuii et Janicot ne sauraient sé-
rieusement soutenir qu'ils ne sont pas commerçants ; qu'ils pren-
nent le titre d'ingénieurs civils, mais qu'ils tiennent une maison
intitulée par eux-mêmes « Ancien office Louis Bachelet ^>, dans
laquelle ils s'occupent de toutes sortes d'opérations, obtention
de brevets, consultations,rédactions d'actes, directions de procès,
mémoires, rapports, expertises, préparations mécaniques des
minerais, analyses chimiques, installations d'usines, vérifications
de comptes, etc., etc. ;
Qu'ils sont en réalité des agents louant moyennant salaire leur
entremise et leurs services à autrui, c'est-à-dire faisant actes de
commerce ;
Que, d'autre part, l'appelé en garantie est tenu de procéder
devant le tribunal où la demande originaire et principale dont
elle est l'accessoire est pendante ;
Par ces motifs, Reçoit la Compagnie ft^ançaise des métaux ap-
pelante principale et la Société de métallurgie du cuivre appelante
éventuelle du jugement rendu par le Tribunal de commerce de
la Seine, le 9' janvier 1699 ;
•T ''■^'~, -~^^rirr — -i#-.7VT
— 221 —
Donne acte à Ganit et Platon^ es qualités qu'ils agissent, de
leur reprise d'instance ;
Met les appellations tant principales qu'éventuelles et ce dont
est appel à néant ;
Infirme ledit jugement ;
Ëmendant ;
Décharge les appelants des dispositions et condamnations leur
faisant grief ;
Statuant à nouveau ;
Dit que c'est à tort que le tribunal s'est dessaisi de l'ensemble
du litige porté devant lui ;
Dit qu'il devait simplement surseoir à statuer jusqu'à ce que la
question de déchéance des brevets Manhès ait été tranchée de*
Tant la juridiction compétente ;
Dit que cette question devra être portée devant ladite juridic-
tion à la requête de la partie la plus diligente et ce, dans un mois
à partir de ce jour ;
Dit que le Tribunal de commerce de la Seine devra rester saisi
de tout litige ;
Dit que Faction en garantie formée par la Société de métallur-
gie du cuivre contre Freydier, Dubreuil et Janicot a été formée
contre des commerçants qui peuvent de ce chef être appelés en
garantie devant le Tribunal de commerce de la Seine, saisi de la
demande originaire et principale ;
Renvoie la cause et les parties devant ledit tribunal composé
d'autres juges ;
Déclare les parties respectivement mal fondées dans tous leurs
autres moyens, fins et conclusions ; les en déboute ;
Ordonne la restitution des amendes consignées tant sur l'appel
principal que sur l'appel éventuel, réserve les dépens.
M. Benoit, président ; M*" Dufraissk, Henry Bonnet, Du-
CREux et Allart, avocats.
Art. 4200.
Brevet d^lnventlon. — Déeliéanee. — d
— Ck^n^entlon. — Erreur «or les «lUAlltés «uImi-
tanUcUe». — NaUité.
Cest à bon droit que le tribunal de commerce saisi d*une
instance soulevant une question de déchéance de brevet,
surseoit à statuer jusquà ce que cette déchéance ait été tran*
chée par le juge compétent.
."ï
— 222 —
Mais le principe du double degré de juridiction n'étant
établi que dans l'intérêt des parties^ bien que le premier
degré de juridiction ne soit pas épuisé^ la Cour saisie de
rappel de la décision de sursis, peut sur les conclusions
conformes des parties statuer sur le fond (1).
La croyance à la validité d'un brevety en réalité frappé
de déchéance peut constituer une erreur sur les qualités
substantielles, si, lors de la convention dont ce brevet est
Pobjetyles parties ont eu spécialement en vue sa validité : si
Von doit admettre que, un brevet même frappé de déchéan»
ce, tant que celle-<^i n'est pas judiciairement prononcée peut
permettre au breveté de concéder des licences valables, et
que, le licencié n'est pas recevable à proposer en justice la
nullité ou la déchéance d'un brevet, tant qu'il en retire des
avantages matériels appréciables, parce qu'il est en quelque
sorte associé à l'exploitation de l'invention et que les béné-
fices qu'il en retire font que n'ayant pas d'intérêt, il n'a
pas d'action, il en est autrement lorsqu'il s'agit d'une con-
vention d'une nature spéciale ne pouvant avoir d'objet, et
ne pouvant procurer d'avantages, qu'autant que le brevet
considéré avait non seulement une existence de fait^ mais
une valeur légale. Dans ces conditions, même en Vabsence
de dol ou de faute lourde équipollente, Verreur sur la vor
lidité du brevet, vicie le consentement des parties et entrai^
ne la nullité de la convention (2).
(G. de Besançon, 18 jaillet1900. ^ Frossard c. Perrin Mres.)
M. Frossard ayant assigné MM. Perrin frères devant le
Tribunal de St-Claude jugeant commercialement^ en exér
culion d'une convention aux termes de laquelle celui-cit
possesseur d*un brevet antérieur en date au leur» s'enga-
geait moyennant redevance à ne pas faire obstacle à Tex-
(1) Sur la compétence, V . l'article précédent, n» 4199, p. 218 et la note.
Le tribanal d'appel saisi comme tel d'une contestation déjà portée de-
vant un premier juge, ne peut statuer sur le fond, même en snppo*
sant TalTaire en état, qu*au cas d'infirmation de la première décision ;
Gass., 29 juillet 1884, S. 87.1.22. Des conclusions formelles des parties
étaient donc ici indispensables pour donner à la Cour le droit de statuer
sur le fond.
(2) Sur le caractère de la licence, V. Pouillet, Brev» cTinv,, n* 388 et
la Jurisprudence citée. Àdd. Cass. civ., 29 Juillet 1891, Do/t., 92.1.
150 ; Trib. d'Angouléme, S9 mars 1900, Peyrusson, La Loi, 25 mai;
Trib. de Limoges, 18 mai 1900, Peyrusson, La Loi, 14 novembre.
— 223 —
ploitation de leur brevet, les défendeurs opposèrent à la
demande, la déchéance du brevet de Frossard. Le Tribu-
nal de St-Claudese déclara incompétent pour apprécier la
question de déchéance et par jugement en date du 14 mars
1900 décida de surseoir à statuer jusqu'à ce qu'il ait été
statué par le Tribunal compétent sur la question de dé-
chéance.
Sur appel de M. Frossard, la Cour de Besançon a, le 18
juillet 1900, rendu Tarrêt suivant :
La Cour, Attenda que les premiers juges ont décidé avec rai-
son que le procès qui leur était soumis donnait à apprécier des
questions de déchéance du brevet Frossard,. dont le tribunal de
commerce ne pouvait connaître, aux termes de l'article 34 de la
loi de 1844 ; que c'est donc à bon droit qu'ils ont sursis à statuer
jusqu'à ce que la juridiction civile, exclusivement compétente,
se soit prononcée sur ce chef ; que par suite, leur décision doit
être conûrmée, mais qu'il y a lieu cependant de dire qu'elle ne
sortira pas effet, parce que les parties de cause, tant celle qui
sur ses conclusions subsidiaires a obtenu le sursis que celle à la-
quelle cette décision est opposable, demandent que le juge d'ap-
pel statue au fond et y concluent formellement ;
Attendu qu'il résulte de cet état de la procédure que le juge
d'appel est à bon droit saisi de l'ensemble des questions à dé-
battre, encore bien que le premier degré de juridiction ne soit
pas épuisé, parce que le principe du double degré de juridiction
n'étant établi que dans l'intérêt des parties, celles-ci peuvent y
renoncer expressément ou tacitement et que les conclusions
prises en appel sur le fond impliquent de part et d'autre cette
renonciation (Gass., 29 avril 1885) et parce que encore, à raison
de l'effet dévolutif de l'appel, toutes les difficultés soumises au
premier juge sur lesquelles l'appel a été interjeté, relèvent de
la juridiction du juge supérieur, lorsque comme dans l'espèce,
soit l'appel principal, soit l'appel incident, soumettent au juge
d'appel les chefs donnés à juger en première instance ;
Attendu que la cause est en outre en état de recevoir une solu-
tion définitive ; qu'aucune exception de litispendance n'est soule-
vée et qu'il ne peut y être suppléé d'office ; que c'est donc le cas
de retenir le débat au fond ;
Au fond :
Attendu que les frères Perrin, brevetés en 1895 pour l'inven-
tion d'une pipe à double perçage, sachant que Frossard avait,
depuis 1885, obtenu un brevet de quinze années, pour une pipe
présentant des avantages analogues ont, dans le but d'éviter les
/ '^-^
— 224 —
difficultés judiciaires pouvant résulter pour eux de la concur*
rence des deux brevets, conclu avec Frossard, le 10 juillet 1896,
une convention aux termes de laquelle ce dernier renonçait à
les inquiéter dans Texploitation de leur brevet de 1895 à la con-
dition notamment qu'il lui serait payé des redevances détermi-
nées par le contrat, que ce contrat a reçu un commencement
d'exécution, mais que peu de temps après, les frères Perrln ont,
non seulement refusé de payer les redevances qu'ils avaient con-
senties, mais en outre, exigé de Frossard la restitution de celles
par eux payées, en se fondant sur ce que le brevet de ce dernier
était frappé de déchéance depuis 1892, par suite d*an retard
apporté par Frossard dans le paiement de l'annuité afférente à
cette même année ;
Attendu que la matérialité du fait étant reconnue par Frossard,
il en résulte cette double conséquence, d*abord, que la déchéance
de son brevet était encourue de plein droit depuis 1892, avant la
convention de 1896 par conséquent (article 32 de la loi de 1844}
et ensuite que cette convention était annulable par suite d*erreur,
article lilO du Code civil ; que sur ce premier point aucune dif-
ficulté ne peut s'élever ; que sur le second, Tannulation de la
convention devra être prononcée, s'il est reconnu que Terreur
portait sur la substance de la chose ou sur ses qualités substan-
tielles et s'il est établi en outre que Terreur qui a vicié le con-
sentement de Tune des parties procédait du dol ou d'une faute
équi pollen te au dol de Tautre partie, ou que cette erreur a été
commune à chacune d'elles ;
Attendu que les frères Perrin ne peuvent prétendre que leur
erreur portait sur la substance même de la chose ayant fait l'ob-
jet de leur accord, parce que cette substance, c'était le brevet
Frossard ; que la déchéance de ce brevet, si elle avait été encou-
rue, n'avait pas été prononcée ; qu'il avait donc sinon une exis-
tence de droite tout au moins une existence de fait, et que cette
existence de fait permettait à Frossard d'en tirer certains avan-
tages ; mais que ce n'est pas sur la substance même de la chose
qu'a porté l'erreur des frères Perrin ; que c'est sur ses qualités
substantielles et que l'erreur sur les qualités substantielles de la
chose qui fait l'objet d'une convention, la rend annulable aussi
bien que l'erreur sur la substance, lorsque ce sont ces qualités
que les parties ont eu seulement en vue lorsqu'elles ont contracté,
et lorsqu'il est hors de doute qu'elles n'auraient pas traité si
elles n'avaient pas été induites à cet égard dans une erreur qui
a vicié leur consentement, soit que ce vice de consentement pro-*
cède d'une erreur de fait, soit qu'il procède d'une erreur de
droit ;
Attendu dans l'espèce que la qualité substantielle sur laquelle
— 225 —
a porté Terreur des frères Perrin, c'était la validité, en droit, du
brevet de Frossard et que ce point ne peut être dénié ; qu'il est
certain que les frères Perrin ne se seraient pas obligés à payer
des redevances à Frossard, aux seules fins de pouvoir exploiter
librement et sans inquiétude, non pas le brevet de ce dernier,
mais leur propre brevet, s'ils n'avaient été convaincus que le bre-
vet Frossard constituait entre ses mains. un obstacle sérieux à leur
entreprise et qu'il n'en était rien, puisque ce dernier ne pouvait
le leur opposer en justice, sans que sa déchéance fût aussitôt pro-
noncée ; que c'est donc, non l'existence matérielle du brevet,
mais sa validité qui était la cause unique de l'engagement ; que
l'erreur des frères Perrin sur cette validité a été par suite une
erreur relativement à la qualité substantielle de la chose sur la-
quelle portait la convention ; qu'elle la rend annulable si les au-
tres conditions exigées par la loi se rencontrent dans l'espèce ;
Attendu que, dans les contrats synallagmatiques, l'erreur de
l'une des parties ne peut entraîner la nullité de la convention, à.
moins que cette erreur ne procède du dol do l'autre partie ou
qu'elle n'ait été commune à chacune d'elles (Larombière, t. 1«%
art. 1110, n» 3) ; que, dans l'espèce, le dol, qui ne se présume pas,
ou la faute lourde équipoUente au dol qui doit être démontré avec
certitude, ne sont pas établis à la charge de Frossard ; qu'il ré-
sulte, en effet, de tous les documents du procès, que ce dernier,
qui avait payé toutes les annuités postérieures à 1892 et cela jus-
qu'à l'expiration de son brevet qui ne tombait dans le domaine
public qu'en 1900, avait, de bonne foi, considéré que Texistence
de fait de ce même brevet lui permettait, tant que la déchéance
n'était pas judiciairement prononcée, d'être la base de conven*
tions d'une valeur légale certaine, mais qu'il a confondu en cela
la délivrance des licences avec la convention, fort différente, par
lui passée avec les frères Perrin ;
Attendu que, sans doute, un brevet frappé de déchéance peut,
tant que celle-ci n'est pas judiciairement prononcée, permettre
au breveté de concéder des licences valables ; que, sans doute,
encore, le licencié n'est pas recevable à proposer en justice la
nullité ou la déchéance d'un brevet, tant qu'il en retire des avan-
tages matériels appréciables, parce qu'il est, en quelque sorte,
associé à l'exploitation de l'invention et que les bénéfices qu'il
en retire font que, n'ayant pas d'intérêt, il n'a pas d'action, mais
que la convention du 10 juin 1896 ne présentait aucune ana-
logie avec la concession d'une licence, puisqu'il ne s'agissait pas
de l'exploitation du brevet Frossard 6t que, d'autre part, c'était
une convention suigeneriSy d'une nature spéciale, qui ne pouvait
avoir d'objet et ne pouvait procurer d'avantages aux frères Pér-
is
— 226 -
rin, qu'autant que le brevet Frossard avait, non pas seulement
une existence de fait, mais une valeur légale ;
Attendu que, si le dol ou la faute lourde équipollente ne se
rencontrent pas dans Tespèce, l'erreur de droit est admissible
de la part de Frossard comme de la part de Perrin, et Terreur
commune suffisamment établie ; qu'elle a de part et d*autre
vicié le consentement des parties ; qu'elle entraîne la nullité de
leur convention ; que, par suite, Frossard doit être tenu à resti-
tution des redevances à lui payées ; mais que, cette restitution
couvrant les frères Perrin de la totalité du préjudice qu'ils ont
éprouvé, il n'y a lieu à dommages-intérêts ;
Sur les dépens :
- Attendu, tant à raison de l'erreur commune que de ce que les
parties succombent dans divers cbefs de leur demande, qu'il y a
lieu de les partager ;
Par ces motifs^ Statuant sur l'appel principal de Frossard d^un
jugement du Tribunal de commerce de Saint-Claude du 14 mars
i900 et sur l'appel incident des frères Perrin ;
Reçoit, en la forme, ces appels contre lesquels aucune un de
non-recevoir n'est élevée ;
Au fond :
Confirme le jugement entrepris, mais faisant droit aux con-
clusions prises de part et d'autre sur le fond, dit que ce juge-
ment ne sortira pas effet ;
Et statuant à nouveau en vidant le débat, au fond :
Dit nulle et de nul effet la convention des 10 et 29 juin 1896,
comme entacbée d'erreur commune ;
Donne acte à Frossard de ce qu'il reconnaît devoir aux frères
Perrin, la somme de 507 fr. 90, montant du reliquat des fourni-
tures qui lui ont été faites par les frères Perrin ; le condamne,
mais en tant que de besoin seulement, à réaliseï: cette obéis-
sance ;
Le condamne à rembourser aux frères Perrin la somme de
847 fr» 25, montant des redevances à lui payées par ces derniers
en exécution de la convention annulée ;
Hejette la demande en dommages -intérêts formée par les frè-
res Perrin ;
Condamne Frossard à Tamende de fol appel ;
Dit qu'il sera fait masse des dépens pour être supportés cinq
sixièmes par Frossard et un sixième par les frères Perrin ;
Et dit que ce faisant, etc.
-I~
— 227 —
Art. 4201.
Brevet. -^ Poai«vol en cassation. — Partie civile. -^
Ministère public. — Procédure.
// ne peut être fait état par la Cour de cassation d'un mé-
moire non timbré déposé par la partie civile demanderesse
en même temps que son pourvoi, toutes les pièces pro'
duites à l'appui de la requête en cassation devant aux
termes de Part. 24 de la loi du 13 brumaire an Vif être
écrites sur papier timbré (1).
Aux termes de l'article iii du Code d'instruction crimi-
nelle la partie civile ne peut soumettre à la Cour aucun
document^ même sur timbre, sans la garantie du ministère
d'un avocat à la Cour de cassation (2).
Lorsque la décision attaquée concerne exclusivement les
intérêts de la partie civile et ne touche en rien à l'ordre
public, le ministère public est sans qualité pour proposer
contre elle, et d'office, des moyens de cassation (3).
(G. de cass.crim., 12 janvier 1901. — Piret c. Mildé et autres.)
La Goor, Vu les mémoires déposes par Piret, partie civile,
ensemble les lois du 13 brumaire an VII, les articles 422. 423^
424 du Gode d'instruction criminelle ;
Attendu que Piret s'est, en qualité de partie civile, seul pourvu
lë 22 mars 1899 contre Tarrêt rendu le 21 du même mois par la
(1-2) Les parties, condamné, ou partie civile, peuvent user de deux
voies pour faire parvenir leurs pièces à la Cour de cassation : ou déposer
ces pièces au greffe de la Gour d'appel où elles ont fait leur déclaration
de pourvoi dans les dix jours au plus de cette déclaration ; ces pièces
sront alors transmises par le parquet au ministre de la justice qui les fait
parvenir à la Cour de cassation, sans que dans ce cas aussi bien par
la partie civile que par le condamné, le ministère d'un avocat à la Gour
de cassation soit nécessaire (V. Gass., 29 mars 1856, Sir. 56.1.753 ; Cass.,
13 juin 183i, Sir. 87.1.341) ; on bien transmettre elles-mêmes leur re^
quête et les pièces jointes à la Cour de cassation en les déposant au
greffe, mais dans ce cas, en ce qui concerne la partie civile, le minis-
tère d'un avocat à la Cour de cassation devient indispensable (art. 424,
G. inst. crim., in fine. V. Gass., 22 janv. 1887, Sir. 88.1.96). Quant à
Tobligation d'écrire sur timbre les pièces produites, elle résulte, comme
rîndique l'arrêt, de l'art. 24 de la loi du 13 brumaire an Vif.
(3) Le pourvoi de la partie civile n'est recevable que dans la mesure
où elle a intérêt, c'est-à-dire qu'en ce qui concerne les réparations
civiles ; par suite, dans Tespèce, en présence du seul pourvoi de la partie
civile,rintérét public n'étant pas en jeu, le ministère public représentant
de la société était sans qualité pour proposer d'office des moyens de cas-
sation. A. T*
»• - - -1^.' ; - »-^— ^-- T-ï^a-^
— 228 -
Cour d*appel de Paris chambre correctionnelle, qui a relaxé
Mildé, Kœnig et Vuitton de la poursuite en contrefaçon qu'il
leur avait intentée, en vertu d'un brevet que ladite Cour a dé-
claré non valable par le motif que la prétendue invention du de-
mandeur n'était pas brevetable ;
Attendu que le demandeur a joint à son pourvoi, qui u*énonce
d'ailleurs aucun moyen, un mémoire contenant ses moyens de
cassation, mais que ce document est sur papier libre et qu'aux
termes de l'article 24 de la loi du 13 brumaire an VII qui exige
que toutes les pièces produites à Tappui de la requête en cassa-
tion soient timbrées, la Cour n'en saurait faire état;
Attendu que si, au cours du mois de décembre 1900, et après
le rapport déposé, Piret a produit un mémoire sur timbre, il n'y
a lieu de tenir compte de ce document qui n'aurait pu être ré-
gulièrement présenté à la Cour conformément à l'article 424 du
Gode d'instruction criminelle, que sous la garantie du ministère
d'un avocat à la Cour de cassation ;
Dit qu'il n'y a lieu de statuer sur les moyens produits irrégu-
lièrement par Piret devant la Cour de cassation ;
Sur les moyens proposés d'office par le ministère public et
tirés : !<> de la violation de l'article 2 de la loi du 5 juillet 1844,
en ce que le jugement, dont l'arrêt entrepris a adopté les motifs,
aurait subordonné la brevetabilité de l'invention de Piret à la
nouveauté du résultat industriel obtenu ; 2o de la violation de l'ar-
ticle 7 de la loi du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué n'au-
rait pas répondu aux conclusions d'appel du demandeur, ni jus-
tifié suffisamment d'une antériorité opposée au brevet de Piret;
Attendu que la décision attaquée concerne exclusivement les
intérêts de la partie civile et ne touche en rien à l'ordre public,
que le ministère public est par suite sans qualité pour proposer
contre elle et d'office des moyens de cassation ;
Par oks motifs, Rejette le pourvoi contre l'arrêt de la Cour
d'appel de Paris, chambre correctionnelle, -du 21 mars 1899 ;
Condamne le demandeur, partie civile, à l'amende et aux
dépens, ainsi qu'à l'indemnité fixée par l'article 436 du Code
d'instruction criminelle.
Art. 4202.
Contrai d'édition ~ Exemplalreu édité*. --
IVantUisenient .
Ne constituent pas un contrat de société pour rexploiia-
(ion d'un ouvrage les conventions d'après lesquelles Cédi*
iimiptipimjic-^-. - - f -w%-' ■ ". -..•. — . --
. ■»
— 229 —
teur est autorisé à faire une édition moyennant une rede^
vance par exemplaire mis en vente (i).
Il appartient au juge du fond d'apprécier si le créancier
gagiste qui a reçu en gage des objets mobiliers {des exem-
plaires tirés par l'éditeur en vertu d'un contrat qui pré-
voyait une certaine redevance par exemplaire mis en vente)
est de bonne foi {2).
(C. de Cass., req.,25 mars 1901. ^ Dru mont c. faillUe Savina.)
Rejet du pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour de Pa-
ris du 7 mars 1899, publié aux Ann. 1900,124.
La Godr, Sur le premier moyen:
Atteodu que Tarrét déclare que suivant conventions des il juin
1888 et 11 février 1892 Edouard Drumont a cédé à Savine éditeur
le droit de publier dans le format in-18, deux de ses ouvrages
moyennant par chacun des exemplaire tirés une redevance sti-
pulée payable lors de la mise en vente de chaque mille ;
Attendu que, pour prétendre que Drumont aurait sur ces
exemplaires des droits qui n^auraient pas permis à Savine d'en
disposer librement, le pourvoi se fonde sur ce qu'il y aurait eu
entre eux une société pour exploiter les deux ouvrages en les
éditant de compte à demi ;
Attendu qu'il résulte de ces conventions constatées par Tar-
rét que Drumont a cédé à Savine le droit de faire une édition
in-18 des deux ouvrages moyennant un prix déterminé ; qu'au-
cune des clauses relatées ne contient une stipulation de société
et qu'on n'y trouve pas davantage les éléments essentiels de ce
contrat; que,dèslors,et sans qu'il soit besoin d'examiner les con-
séquences que le pourvoi entend tirer de la prétendue société, il
suffit de constater qu'elle n'a pas existé et qu'ainsi le moyen
manque en fait ;
Sur le 2« moyen :
Attendu que l'article 2279 du Code civil portant qu'en « fait de
meubles la possession vaut titre » peut être invoqué par le créan-
cier gagiste qui a reçu en gage, de bonne foi, des objets mobi-
liers ; qu'il appartient au juge du fond d'apprécier cette bonne
foi qui est toujours présumée; que l'arrêt déclare qu'aucune
(1) Il n'y avait pas société puisque Tauteur devait toucher sa redevance
à la mise en vente sans courir aucun risque. II y avait là le contrat
d'édition proprement dit (cf. Gustave Huard, Des contrats entre les
auteurs et les éditeurs, p. 17 et 120).
(2) La Cour de cassation n'a pas eu à examiner le caractère particulier
du contrat d'édition et de l'œuvre littéraire en elle-même ( voir i4nn. ,1900.
124, note 1-2). G. M.
T.- - r^Ff gi— y wwiUV"!"
— 230 —
preuve de mauvaise foi ou de fraude n'a été rapportée contre les
défendeurs éventuels ;
Attendu qu'eu les admettant par suite à invoquer la dispo-
sition de l'article 2279 précité, l'arrêt n'a violé ni cet article, ni
l'article 1315 également visé au pourvoi ;
Par ces motifs, Rejette.
MM. Tanon, président; M. George-Lemairjb, rapporteur;
MÊRiLLON, avocat général. — M® de Râmel, avocat.
Art. 4203.
Œuvres umstcales. ^ Kntrepreiiear de spc^etacle.—
m
Kxécntioii illicite. — 8alles de réunions et de con-
certs. — Propriétoire. — Responsubllité. — Société
des auteurs compositeurs et éditeurs de musUiae.
— Mise en Interdit pur la S€M!tlété.
Cest à bon droit que la Cour d'appel a considéré comme
constituant une faute et un abus, de la part de la Société
des auteurs^ compositeurs et éditeurs de musique, du droit
d'accorder ou de refuser l'autorisation d'exécuter les œu-
vres qui leur appartiennent, le fait d'avoir cherché à im-
poser au propriétaire d'une salie, qui la loue pour des réu-
nions publiques, un contrat d'abonnement, sur la menace de
mettre la salle en interdit, et d'avoir, sur son refus de su-
bir l'abonnement, exécuté cette menace en signifiant aux
tiers Finterdit mis sur la salle^ et qu'elle a condamné les
auteurs de ce fait à des dommages et intérêts envers lepro^
prié faire de la salle (1).
A'e viole aucune loi l'arrêt qui,après avoir constaté que les
entrepreneurs de spectacles loin d'avoir voulu se passer de
Vautorisaiion de la Société des auteurs, compositeurs et
éditeurs de musique,se sont conformés au mode habituelle-
ment usité pour la demander^ l'ont informée de la réunion
projetée et lui ont offert après contrôle de la recette effec-
tuée, les droits fixés par son tarif, et que par suite la so-
ciété ne pouvait établir à leur charge aucune faute ni au-
cun préjudice résultant d'une faute, rejette la demande de
dommages et intérêts formée par elle (2).
(1-2) V. Gourde Paris, 12 mai 1899, et la note, Ann., 1901, p. 68.
»• -,
— 231 —
(G. de cass. , req., 4 mars 1901 .— Société des auteurs, compositeurs et
éditeurs de musique, Ândreassiou et autres c. Fabre et Gie, Association
des anciens élèves de TEcole Turgot et autres.)
La Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de mu-
sique,s*étant pourvue en cassation contre l'arrêt rendu par
la Cour de Paris, le 12 mai 1899 (v. suprà, art. 4168, p. 68),
la Cour de cassation a, le 4 mars 1901, rendu Tarrél de re-
jet suivant:
La Cour, Sur le !•' moyen :
Attendu que Tarrêt attaqué n'a pas contesté à la Société des
auteurs et compositeurs et éditeurs de musique le droit d'accor-
der ou de refuser l'autorisation d'exécuter les œuvres qui leur
appartiennent, mais qu'il a simplement considéré comme uii
abus de ce droit le fait d*avoir cherché à imposer au proprié-
taire d'une salie ou d'une galerie, qui la loue au jour pour des
réunions publiques ou privées, un contrat d'abonnement sous (a
menace de mettre la salle en interdit et d'avoir, sur son refus
de subir l'abonnement, exécuté cette menace, en signifiant aux
tiers l'interdit mis sur la salle ; que la Cour d'appel a consi-
déré, à bon droit, ce fait comme constituant une faute ; qu'elle a
constaté, en outre, qu'elle avait causé à Fabre et Cie un réel
préjudice, en éloignant leur clientèle et en jetant la défaveur
sur leur immeuble et que dès lors, elle a pu légalement con-
damner les auteurs de ce fait à des dommages-intérêts;
Que le l«r moyen n'est donc pas fondé ;
Sur le 2« moyen :
Attendu que l'action en dommages-intérêts des demandeuri
en cassation contre l'Association des anciens élèves de l'Ecole
Turgot n'aurait été fondée que s'ils avaient établi tout à la fois
une faute à la charge de cette association et un préjudice ré-
sultant de cette faute ;
Attendu, sur le premier point, que l'arrêt constate que l'Asso-
ciation, loin de vouloir se passer de l'autorisation de la Société
des auteurs de musique, n'a fait que se conformer au mode usité
entre elles pour la demander et la donner; que « suivant un usage
constant, remontante plusieurs années, la Société des composi-
teurs de musique, prévenue à l'avance, faisait percevoir au cours
même de la soirée, un droit proportionnel à la recette et donnait
à ce moment son autorisation sous forme de reçu ; que, pour
ce bal de février 1896, la Société des compositeurs avait été infor-
mée de la réunion et qu'elle pouvait d'autant moins l'ignorer
que les chefs d'orchestre étaient deux de ses membres, lesquels,
après avoir inscrit au programme 14 morceaux de leur compo-
sition et en avoir dirigé l'exécution, figurent néanmoins parmi
— 232 —
les demandeurs et réclament des dommages-intérêts sons pré*
texte quMls n'auraient pas autorisé ladite exécution ; que la So-
ciété des compositeurs n'a signifié aucune défense déjouer son
répertoire à l'Association des élèves de TEcole Turgot, comme
elle Ta fait pour une autre, et que l'association Turgot devait éri-
demment supposer que les choses se passeraient comme précé*
demment; que l'arrêt déclare que sa bonne foi est certaine ;
qu'il appartenait à la Cour d'appel de constater ces faits et de
reconnaître la bonne foi de l'Association ; qu'elle a pu en induire
que celle-ci n'était pas en faute ;
Attendu d'ailleurs, sur le second point, que la Société des com-
positeurs, avertie du bal annuel de l'Ecole Turgot, ne lui ayant
pas défendu d'exécuter son répertoire et ne lui ayant pas plus
imposé que les années précédentes des conditions spéciales, ne
pouvait prétendre qu'à percevoir les droits d'auteur fixés par son
tarif; que l'arrêt constate que la recette ayant été contrôlée dans
le but précisément de déterminer ces droits, ils lui ont été im-
médiatement offerts et mis à sa disposition et qu'elle ne justifie
d'aucun préjudice ;
Attendu qu'en rejetant dans ces conditions la demande en
dommages-intérêts formée par elle, l'arrêt attaqué n'a pas violé
les articles de loi invoqués par le pourvoi ;
Par ces motifs, Rejette etc...
MM.TANON,présidenl ; Gborgk-Lemairb, rapporteur ; Feuil-
lOLEY, avocat général. — M* Aguillon, avocat.
Art. 4204.
CBSuvreM musicales. — Entrepreneur de speetacles.
— Exécution sans le consentement des auteurs. —
Publicité. — Contrôle de la Cour de cassation.
L article 428 du Code pénal punissant d'une amende et^
sHl y a lieu, de la confiscation des recettes , tout directeur ^
tout entrepreneur de spectacles, toute association d* artistes^
qui aura fait représenter sur son théâtre des ouwrages
dramatiques au mépris des lois et règlements sur la pro-
priété des auteurs^ il importe peu, pour l'application de
cet article, que la représentation ait eu lieu ou non sur un
théâtre public proprement dit ou qu'elle ait été gratuite, il
suffit qu'il y ait eu, même accidentellement, exécution pu-
bflique, sans le consentement des auteurs ou de leurs ayants
— 233 —
droite d'œuvres littéraires ou musicales non tombées dans
le domaine public (1).
Il appartient à la Cour de cassation de vériflery au vu des
faits constatés par les juges du fond, si la représentation a
eu un caractère public ou privé ; dès lorSy qiuind^ en pré-
sence de conclusions demandant à prouver des faits d'oU
résulterait la publicité d'un bal où des morceaux de musi-
que appartenant à des œuvres du domaine privé ont été
joués le juge du fait se borne à déclarer que le dit bal n'était
pas publiCy la Cour de cassation se trouvant dans Vim*
possibilité d'exercer sur la légalité de la décision attaquée
le contrôle qui lui appartient, cette décision doit être cassée.
(C. de cass. crim., 15 mars 1901. — Veuve Desormes et autres
c. Polette et Houdy.)
Mme Vve Desormes s'étanl pourvue contre un arrêt
rendu par la Cour de Lyon le 14 novembre 1900, la Cour
de cassation a le 15 mars 1901 rendu Tarrêl suivant :
r La Cour, Sur le moyen unique du pourvoi, pris de la yiola-
tion de Tarticle 428 du Gode pénal et de Tarticle 7 de la loi
du 20 avril 1810^ en ce que Tarrôt attaqué n'aurait pas suffisam-
ment répondu aux conclusions prises par les parties civiles, de-
manderesses, en vue défaire déclarer la publicité d'une réunion
dans laquelle avaient été exécutées des œuvres musicales ;
Attendu qu'aux termes de la loi des 13-19 janvier 1791, les ou-
vrages des auteurs vivants ne peuvent être représentés sur aucun
théâtre public sans le consentement formel et par écrit de ces
auteurs ; que, d'autre part, l'article 428 du Gode pénal punit
d^une amende et, s'il y a lieu, de la confiscation des recettes,
tout directeur, tout entrepreneur de spectacles, toute association
d'artistes qui aura fait représenter sur son thé&tre des ouvrages
(1) Sur le caractère de publicité des représentations : v. Pouillet, Prop,
liU„ n<» 800 etsaiv. et jurisprudence citée. Sur la nécessité de l'auto-
risation préalable en matière d'exécution d'œuvres musicales, jurispru-
dence constante, v. notamment: Gass., 11 mai 1860, Soc.Philharmonique
du Mans, Ann., 62.382 ; Rej., 28 janvier 1831, Gambier, Ann.y 81.228 ;
Rennes, 9 février 1892, Mullot et Hemmerlé, Sir., 93.2.179; Besançon,
18 juin 1*)9I, Amourdediea, Sir., 95.2.12. Quant aux mots, entre-
preneurs de spectacle, ils doivent être interprétés dans le sens le plus
large, V. Lyon, 4 janvier 1834, Balloux, il nn., 85.110. Il n'est pas néces-
saire que Texécution musicale ait été pour son organisateur une source de
gain : Cass., 22 janvier 1869, Champagne, Ann., 69.408 et Cass., 28 jan-
vier 1881 précité. — En ce qui concerne les exécutions musicales d'airs de
danse dans des bals publics : v. Cass., 22 janvier 1869, précité, et Cass.,
9 mai 1891, Dalt., 91.1.4^. A. T.
— 234 —
dramatiques au mépris des lois et règlements relatifs à la pro-
priété des auteurs ; qu'il importe peu, du reste, que la représen-
tation ait eu lieu ou non sur un théâtre public proprement dit
ou qu'elle ait été gratuite ; qu'il suffit, pour donner lieu à Tappli-
cation de l'article 428 précité, qu'il y ait eu, môme accidentelle*
ment, exécution publique, sans le consentement des auteurs ou
de leurs ayants droit, d'œuvres littéraires ou musicales non
tombées dans le domaine public ;
Attendu qu'il appartient à la Cour de cassation de vérifier, au
▼u des faits constatés par la Cour d'appel, si la représentation a
eu un caractère public ou privé ;
Attendu qu'il résulte du jugement du Tribunal correctionnel
de Saint-Etienne, dont les motifs sont adoptés par l'arrêt attaqué,
que Polette, en qualité de président du comité des ouvriers plâ-
triers-peintres syndiqués, a organisé, dans les aalles du restau-
rant tenu par Roudy, un banquet par souscription suivi d'un
bal ; que, pendant ce bal, des membres de la société ont exécuté,
sans autorisation préalable, des morceaux de musique emprun-
tés à des œuvres qui sont la propriété des parties civiles deman-
deresses ; que le jugement ajoute que ledit bal n'était pas pu-
blic ;
Attendu que, devant la Cour d'appel, les parties civiles ont
déposé des conclusions dans lesquelles elles prétendaient : no-
tamment, que des hommes et des femmes, n'ayant entre eux
aucunes relations, avaient pris part à ce bal ; qu'on y avait admis
des tiers étrangers à l'association qui Pavait organisé ; que, par
des annonces insérées dans des journaux, on y avait enfin con-
vié le public; que, par conséquent, ledit bal avait un caractère
incontestable de publicité ; que, subsidiairement et par les
mêmes conclusions, les parties civiles ont demandé à la Cour
d'appel d'ordonner une enquête et une expertise destinées à
établir la réalité des faits par elles allégués ;
Attendu qu'en réponse à ces conclusions, l'arrêt attaqué se
borne à déclarer, comme l'avait déjà fait le jugement de pre-
mière instance, que le bal n'était pas public ;
Attendu que cette affirmation laconique ne suffit pas pour
répondre juridiquement à une articulation de faits précis et con-
cordants, et que la Cour de cassation se trouve ainsi dans l'im-'
possibilité absolue d'exercer, sur la légalité de la décision atta-
quée, le contrôle qui lui appartient ;
Par ces motifs. Casse et annule l'arrêt rendu par la Cour d'ap-
pel de Lyon, le 14 novembre 1900 ;
Et, pour être statué conformément à la loi,
Renvoie la cause et les parties, en l'état, devant la Courd^ap-
pel de Chambéry, ' *
*^-»i^»« "■■■yarrw '----,-—■-.-— r-'i ^' ^^ — -w^-— -^- ^ — • —yi --r-»v*-j
'7^
— 235 —
MM. LoEw, président ; Roulier, rapporteur ; Duboin,
avocat général. — M* Agdillon, avocat.
Art. 4205.
IV«m comiiBerelal. — - Foncls de eommeree.— CU^mulaii
partielle.— Usa^e dii nom. — • Meanre* ordonnées
pour éviter In conftislon.— Adresse iélégrraplilqae.
Le propriétaire dCun fonds de commerce de chapellerie,
comprenant d la fois le commerce de détail et le commerce
de groSjde chapeaux français et de chapeaux de provenance
étrangère.qui cède à un acquéreur, avec le nom et la marque
de sa maisonyune partie de son commerce, en s'en réservant
spécialement Vautre partie {importation et vente en gros de
ious les articles extra-européens, fabrication des feutres et
fournitures de ehupeUerie),conÈerve le droit d'exercer sous
son nom le commerce qu'il s'est réservé, à condition de ne
pas créer une concurrence à son acquéreur dans la branche
faisant l'objet de la cession (1).
Mais il appartient aux tribunaux d'ordonner les mesu-
res nécessaires pour éviter toute confusion et distinguer
les deux maisons d'une façon non équivoque, notamment
de décider que le cédant devra, dans son commerce, faire
précéder son nom patronymique de son prénom écrit en ca-
ractères semblables et égaux à ceux de son nom,le faire sui-
vre du nom de ses associés et ajouter enfin la mention de
la branche de commerce spéciale qu'il s'est réservée, telle
qu'elle figure dans le contrat de vente : par contre, on ne
saurait obliger le cédant à faire suivre son nom du mot
c maison fondée en 1895 «, date du contrat, du moment
qu'il est constant que le commerce qu'il s'est réservé re-
monte à une date bien antérieure (2).
(l-2j En principe, on doit admettre que toat commerçant, exerçant
réellement et personnellement un commerce, a le droit de Tezercer sous
son nom. Mais les tribunaux peuvent imposer des conditions spéciales à
Tusage du nom et même Tinterdire lorsqu'il leur apparaît que ce nom
est fourni par son titulaire, non directement intéressé à Texploitation
commerciale, à des tiers pour créer une confusion frauduleuse avec
une maison de commerce existante portant le même nom. Toutefois,
Tinterdiction ne porte jamais que sur le genre de commerce pour lequel
la fraude se révèle et n'est pas absolue et générale. V. Pooillet, Mar-
— 236 —
A défaut de convention spéciale, la vente du fonds de
commerce ne comprend pas l'adresse télégraphique cons*
tituée par le nom même du cédant^ alors surtout que le cé-
dant s'est réservé le droit de continuer pour son compte une
partie des affaires, notamment les affaires d'importation
pour lesquels son emploi devait lui faciliter ses relations
avec les pays extra-européens (Résolu par le tribunal de
commerce) (3).
(C. de Paris, 22 novembre 1899. — Albert Ledac c, les fils
de Pinay jeune.)
ues de fab,, n» 496 etsuiv. etjurisp. citée ; Dalloz, Jurisp. générale^
Vo Industrie et commerce, n^ 425 et suiv. et Suppl.^ n» 430, V® Nom^
no 134 et Supp., n«»138 et 139. Y. aussi Paris, 29déc. 1893, Pommerf.
Ann., 94.90; ^Rej., 4 déc. 1893, Piron, Ann., 94.80 ; Aix, 22 avril 1894,
V» Buffard, Ann., 96.292; Rej. 18 mars 1895, Pommery, Ann. ^.270,
Paris, 16 mai 1895, Rœderer, Ann., 96.293.
Lorsqu'un commerçant vend son fonds, il ne perd pas le droit de se
rétablir sous son nom, à moins d'une clause spéciale dans Tacte, à la
condition de ne pas faire sous ce nom,dans le même commerce, une con-
currence préjudiciable à son acheteur. Il en est a fortiori ainsi lorsque
le propriétaire du fonds vendu se réserve une ou plusieurs branches de
son ancien commerce, mais les tribunaux peuvent toujours,en cas de
difficultés, ordonner les mesures nécessaires pour rendre entre les deux
maisons la confusion impossible. V. notamment, Rej., 4 déc.1893, déjà
cité, et la note.
Parmi les mesures souvent prescrites par les tribunaux, la mention
de la date de fondation de la maison qui cherche à faire naître la confu-
sion est une des plus fréquentes. On peut se demander si elle a ioote
l'efficacité qu'on lui prête, car, si an début, lorsque les faits sont ré*
cents,elle permet de distinguer la nouvelle maison de rancienne,il ar-
rive trop souvent qu'au bout de quelques années c'est la maison dont
les papiers commerciaux ne portent aucune date, l^ncienne, qui ap-
paraît au consommateur peu renseigné, comme nouvelle par rapport
à la maison concurrente dont la fondation lui semble déjà relativement
éloignée. Quoi qu'il en soit,le tribunal n'avait évidemment pas le droit,
dans respèce, d'obliger Leduc à indiquer comme date de fondation de la
branche de commerce conservée par lui i'année 1895, puisque,en fait, i|
était constant que ce commerce, créé par lui-même, remontait à une date
bien antérieure ; une telle mention eut été contraire à la réalité des
faits.
(3) L'adresse télégraphique d'un commerçant ne fait pas partie a priori
de la marque du commerçant. Tout au plus pourrait-on soutenir que
lorsqu'elle est de pure fantaisie,eile constitue un accessoire du fonds de
commerce; mais quand, comme dans l'espèce, c'est le nom patronymi-
que lui-môme du commerçant, quand le fonds n'est pas cédé tout entier,
et que ce commerçant conserve, malgré la vente de son fonds, le droit
de continuer sous son nom, certaines branches de son ancien commerce
et en particulier le commerce d'importation de produits étrangers. Il
semble que c'est avec raison que, dans le silence du contrat, le tribunal
de commerce lui en a réservé l'emploi. D'ailleurs la question n'a pas été
soumise au juge d'appel • A. T.
•il- r"%^^*"
— 237 —
Le tribunal de commerce de la Seine a rendu, le 10 sep-
tembre 1896, le jugement suivant :
Le Tribunal, Âttenda que les fils de Pinay jeune, acquéreurs
moyennant 50,000 francs du nom et de la marque de la maison
Leduc, des affaires en chapeaux de paille et tous articles de
commission exploités par elle à Paris, faubourg Poissonnière,
n<» 5 et? et de l'achalandage attaché à cette branche de com-
merce, reprochent à Albert Leduc de se li vrer à leur égard, au
mépris de l'interdiction qu'il avait acceptée, à des actes de con-
currence déloyale et de se servir de la faculté réservée de conti-
nuer Texploitation et la vente en gros des articles extra-euro-
péens, la fabrication des feutres el la vente des fournitures de
chapellerie, pour créer une confusion entre la maison qu'il dirige
el la marque Leduc qu'il a vendue ;
Qu'ils demandent au tribunal : de faire défendre à Albert Leduc
d'employer à l'avenir, soit sur son papier à lettres, soit sur ses
circulaires, soit dans la publicité, le nom de Leduc, même précédé
du nom d'Albert, et ce, sous une astreinte à impartir; de dire
que l'adresse télégraphique « Leduc » est comprise dans la mar-
que de la maison Leduc qu'ils ont achetée, que l'administration
des postes et télégraphes sera tenue de leur distribuer faubourg
Poissonnière n^"5 et 7 les lettres portant lasuscription «Leduc»
rue Saint-Georges, n* 28, nouvelle adresse d'Albert Leduc, et
révélant par leur aspect extérieur qu'elles se rapportent au
commerce des chapeaux de paille, ainsi que les télégrammes
adressés « Leduc Paris » ; de dire que Leduc devra obliger la
maison Macdonnat et Cie à supprimer de ses papiers et annon-
ces toute mention indiquant que son exploitation s'exerce dans
les locaux et avec le matériel de l'ancienne maison Leduc; de
dire qu'Albert Leduc s'est rendu coupable de concurrence dé-
loyale en vendant des chapeaux de paille autrement qu'en gros
et en faisant visiter par son représentant la clientèle de détail
qu'il a vendue et la clientèle de gros pour laquelle il s'était
interdit de se servir de son nom ; d'obliger Albert Leduc à re-
mettre les fiches de renseignements des clients de son ancienne
maison ; de le condamner en 100,000 francs de dommages-inté-
rêts et d'autoriser l'insertion du jugement à intervenir, à ses
frais, dans vingt journaux de Paris et des départements;
En ce qui touche l'adresse télégraphique « Leduc » :
Attendu que cette adresse n'a pas été cédée avec le nom et la
marque de Leduc ;
Que le contrat de vente est muet sur ce point ;
Que les fils de Pinay jeune avaient toujours considéré, avant
et après la vente,que ce nom restait la propriété d'Albert Leduc ;
— 238 —
qu'ils avaient eux-mômes adopté un vocable télégraphique par-
ticulier; qu'il était, d'ailleurs, naturel que le vendeur, en se ré-
servant les afTaires d'importation,gardât la désignation qui lui fa-
cilitait ses relations avec les pays extra-européens; que la pré-
tention des fils de Pinay jeune à l'attribution de cette désignation
avec toutes les conséquences qu'elle comporte est donc mal fondée
et doit être rejetée ;
En ce qui touche l'usage du nom de Leduc et tout le surplus de
la demande:
Attendu que les différents griefs des (ils de Pinay jeune basés
sur les anciennes entêtes de Leduc, ses cartes de visite, son
adresse conservée faubourg Poissonnière, ses insertions dans le
Bottin et ses publications spéciales,la souscription d'un colis en-
voyé de Marseille avec son ancienne adresse, etc., procèdent d'un
désir tardif de récriminer et sont de minime importance ;
Que le tribunal doit cependant examiner dans quelle condition
Leduc a le droit de faire usage commercial d'un nom qu il a
livré moyennant payement d'une somme de 50.000 francs ;
Attendu qu'aux termes de l'acte intervenu entre les parties le
d octobre 1894 enregistré, Leduc a cédé la marque et le nom de
sa maison, la vente des afTaires eu chapeaux de paille et tons arti-
cles de commission, qu'il exploitait à Paris faubourg Poissonnière,
n<>' 5 et 7, l'achalandage attaché à cette partie de son commerce ,
Qu'il s'est interdit toutes opérations qui pourraient faire con-
currence aux fils de Pinay jeune dans la branche du commerce
cédée, mais qu'il s'est réservé l'importation et la vente en gros
de chapeaux grèges et de tous articles extra- européen.s (rotins,
manilles, etc.), à la condition de ne point se servir du nom et
de la marque Leduc cédée ;
Que c^est dans ces conditions qu'une circulaire contradictoi-
rement rédigée a été envoyée à la clientèle; qu'il apparaît donc
bien que Leduc ne peut faire un usage commercial de son nom
que dans des cas restrictifs et limités ;
Que l'aliénation de sa maison faubourg Poissonnière, de son
nom et de sa marque moyennant une somme que justifiait leur
notoriété, comporte, en fait, un changement complet dans sa si-
tuation commerciale et l'oblige, pour la mise en œuvre du négoce
qu'il s'est réservé, à l'organisation d'une maison nouvelle et dis-
tincte qu'il a le devoir de nettement différencier de celle cédée .
Que c'est vainement que Leduc prétendrait qu'il ne fait point
d'affaires sous son nom, mais comme représentant d'une maison
Maintz et Gie ;
Qu'il est établi que Maintz et Gie, sont ses anciens agents
aux Indes ;
Que son nom est apposé sur leur papier à lettre ;
— 239 —
Qu'il signe leurs lettres en son nom personnel ;
Que, bien que traitant en apparence les affaires sous leur cou-
vert, dans un local spécial, Leduc se révèle personnellement aux
clients sous son nom de A. Leduc ou Albert Leduc ;
Qu'il est en réalité, sous sa propre responsabilité, le véritable
metteur en œuvre, le bénéficiaire direct desdites affaires ou tout
au moins le participant de Maintz et Cie dans la plus large
mesure ;
Qu'il importe de réglementer cette situation pour l'avenir et,
afin d'éviter tonte confusion entre la maison cédée et celle que
Leduc gère actuellement, d'obliger dorénavant celui-ci à rappeler
sur ses en-tôtes, lettres, factures, cartes, adresses, dans la pu-
blicité touchant son négoce, y compris les affaires faites en com-
mun avec Maintz et Gie, la réalité des faits, c'est-à-dire le nom
d'Albert Leduc, la date de sa création et le genre d'affaires qu'il
traite : « Albert Leduc, rue Saint-Georges,n« 28 » et au-dessous en
caractères égaux et de même nature que les précédents « Mai-
son fondée en 1895^ chapeaux grèges en gros, importation d'ar^
ticles extra-européens » : que c'est dans ces limites étroites
qu'il doit être fait droit à l'ensemble des demandes des fils de
Pinay jeune, en rejetant le surplus de leurs fins et conclusions,
notamment leur demande en dommages-intérêts basée sur des
faits de concurrence déloyale non établis et leur demande en
insertion dans divers journaux du présent jugement.
Par ces motifs, etc.
Sur appel principal par Leduc et appel incident par les
fils de Pinay jeune,mais seulement sur la question d'emploi
de nom commercial, la Cour, sous la présidence de M,
Mersier, conseiller, après plaidoiries de M®" Mennesson et
Jules Fabrb, et conclusions de M. Laffon, avocat général,
a, le 22 novembre 1899, rendu Tarrêl suivant :
Considérant que Leduc, propriétaire d^un fonds de commerce
de chapellerie, comprenant à la fois le commerce de détail et le
commerce de gros de chapeaux français et de chapeaux de pro-
venance étrangère, a cédé aux sieurs Pinay, avec le nom et la
marque de la maison Leduc une partie de son commerce en s'en
réservant expressément l'autre partie : l'importation et la venté
en gros de tous articles extra-européens, la fabrication des feu-
tres, les fournitures de chapellerie ;
Considérant que Leduc, qui avait acquis une notoriété commer-
ciale et conservait une des branches importantes de son commerce
na jamais pu avoir l'idée d'abdiquer, d'une manière absolue, son
nom de Leduc et de n'exercer que sous un nom inconnu le
— 240 —
commerce quMl s'était réservé ; que si, d'après l'article 7 da traité
le vendeur ne doit pas se servir du nom de la maison Leduc, le
môme article spécifie que les actes interdits au vendeur sont
ceux qui seraient de nature à créer une concurrence aux fils de
Pinay jeune, mais seulement dans la branche faisant Tobjet de
la cession ;
Considérant que les fils de Pinay n'essaient même pas d'éta-
blir cette concurrence ;
Considérant qu'il est,au contraire,démontré que Leduc a envoyé
chez ses successeurs les personnes qui s'étaient adressées acci-
dentellement à lui pour des opérations concernant le commerce
des premiers ;
Considérant que c'est à bon droit, toutefois, que les premiers
juges ont reconnu que les annonces et factures de Leduc pour-
raient encore créer une certaine confusion et décidé de distinguer
d'une façon non équivoque sa maison de celle des llls Pioay ;
Considérant que le moyen indiqué par eux doit être modifié ;
qu'en effet, eu obligeant Leduc à faire suivre son nom des mots
« maison fondée en 1895 », le tribunal lui a imposé l'indication
d'un fait inexact, puisque le commerce réservé par Leduc est bien
antérieur à 1895 et que par suite une telle indication peut lui être
nuisible dans une certaine mesure ;
Considérant que,pour faire la distinction entre les deux maisons
il suffit d'ordonner que Leduc fera précéder son nom du prénom
(( d'Albert », en caractères semblables et de même dimension que
ceux de Leduc ; qu'en outre, il ajoutera les mots suivants, qui
figurent dans son traité : « importation et vente en gros d'articles
extra-européens » et qu'enfin son nom sera accompagné de celui
de « Haintz et comp. », mentions et indications offertes d'ailleurs
par Leduc dans ses conclusions ;
Par CBS motifs, Infirme le jugement attaqué, et statuant à nou-
veau, dit que sur ses lettres, en-têtes, factures, cartes et dans
sa publicité, Leduc devra faire précéder son nom du prénom
« d'Albert » en caractères semblables et de même dimension
que ceux du nom ;
Qu'il devra y ajouter en caractères très apparents les mots
« Maison d'importation et de vente en gros d'articles extra-euro-
péens » et enfin y faire figurer en caractères aussi apparents que
ceuxd'« Albert Leduc » le nom de« Maintz et comp. » ; déclare
les fils de Pinay mal fondés dans le surplus de leurs demandes,
fins et conclusions, les en déboute ; ordonne la restitution de
l'amende consignée par Leduc sur son appel ; condamne les
fils de Pinay à l'amende de leur appel et en tous les dépens.
^-r-^^.Tiji
— 241 -
Art. 4206.
Dénomination. — Pâte aamande. — Produit breveté .
— Déchéance du brevet.
Une dénomination arbitraire et de fantaisie, appliquée à
un produit breveté {dans Vespèce^ la dénomination Pâte
flamande, jE>our une pâte à noircir les fourneaux), ne tombe
pas dans le domaine public par le fait de la chute du bre^
vet dans le domaine public (1).
Le dépôt de marques étant simplement déclaratif de pro-
priété, il importe peu que le dépôt de la dénomination ait
été fait postérieurement à la déchéance du brevet, du mo-
ment qu'il est constant que le créateur de cette dénomina-
tion en continuant à en faire usage, depuis Vépoque de la
déchéance du brevet jusqu'à l'époque du procès, a entendu
en conserver la propriété (2j.
(C. de Paris, 23 mai 1901. — Lemoine c, Damoalin.)
Nous avons rapporté {Ann., 1899, p. 272) les décisions
rendues par la Cour de Paris et la Cour de cassation sur
les poursuites correctionnelles en contrefaçon intentées
par M. Dumoulin contre M. Lemoine pour l'emploi de la dé-
nomination Pâle flamande. Peu après l'arrêt de la Cour
de cassation. M. Lemoine assigna M. Dumoulin devant le
Tribunal civil de la Seine pour ouïr dire que la dénomi-
nation Pâte flamande appliquée à une pâte à noircir les
fourneaux était tombée dans le domaine public et s'enten-
dre condamner à des dommages-intérêts. Le tribunal re-
poussa cette demande le 4 décembre 1900 par le jugement
suivant :
Lb Tribunal, Attendu que Lemoine demande contre Damou-
lin 5000 francs de dommages-intérêts pour le préjudice que ce
dernier, lui aurait causé en se prétendant propriétaire exclusif
de la dénomination Pâte Flamande qui serait tombée dans le do«
maine public et que lui, demandeur exploite ;
Attendu que Dumoulin a fait deux dépôts réguliers de cette
dénomination qui étant nouvelle et étant arbitraire et de fantaisie
présentait le caractère de validité requis pour une marque ;
(1>2) Gonf. Casa, req., il mars 1899, Lemoine, Ann., 99.272 et la
note*
i6
— 242 —
Attendu qu'il importe peu que le premier dépôt ait porté sur
la dénomination toute seule, tandis que le second aurait été ef-
fectué pour celle-ci accompagnée d'un emblème, soit d'un fer à
cheval ; qu'aucune loi n'empêche un commerçant de se ménager
ainsi une double marque ;
Attendu que la marque étant ainsi valable à l'origine n^a pas
perdu son efficacité pour avoir été incorporée dans le brevet du
produit qu'elle désignait et qui en raison du défaut de paiement
des annuités est devenu caduc après 3 ans ; que la marque, qu'elle
figure ou non dans le brevet, en constitue un élément bien dis-
tinct ; qu'en effet le brevet a pour but de garantir le monopole de
fabrication ; qu'au contraire la marque qui n'a d'autre but que
d'attester l'authenticité du produit demeure la propriété du com-
merçant tant qu'il en fait usage ; que dès lors ladite marque doit
survivre au brevet à moins qu'elle n'y soit demeurée si longtemps
attachée qu'elle se serait en quelque sorte incorporée avec le pro*
duit et que la confisquer au profit de l'ancien breveté ce soit
alors laisser en fait à celui-ci le monopole du brevet dont il est
cependant déchu et paralyser en fait la vente d'un produit dont
juridiquement la fabrication et le débit seraient libres ; mais que
dans l'espèce, en présence de la très courte durée du brevet, H-
dentification de la dénomination avec le produit ne s'est pas
opérée et que Dumoulin est donc bien demeuré propriétaire de
sa marque; que la demande de Lemoine est donc mal fondée;
Sur la demande reconventionnelle :
Attendu que Lemoine, déjà débouté de ses prétentions par un
arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation, a, en
renouvelant ses prétentions devant la juridiction civile à l'occa-
sion d'un débat épuisé, intenté une action empreinte d'un carac-
tère vexatoire ; que le Tribunal a les éléments nécessaires pour
fixer à 1000 francs le montant des dommages-intérêts qui sont
dus de ce chef à Dumoulin.
Par ces motifs, Déclare Lemoine mal fondé en ses demande,
fins et conclusions, l'en déboute et recevant Dumoulin reconven-
tionnellement demandeur, condamne Lemoine à lui payer la
somme de iOOO francs à titre de dommages-intérêts pour répa-
ration du préjudice à lui causé par sa poursuite téméraire et
vexatoire ; dit qu'il n'y a lieu d'ordonner les insertions demandées;
condamne Lemoine en tous les dépens.
Sur l'appel de Lemoine, la Cour, sous la présidence de
M. Potier, président, après plaidoiries de M" Werthbimsr
et PociLLET et conclusions de M. l'avocat général Selioman,
a, le 23 mai 1901, rendu l'arrêt confîrmalif suivant :
■."^'.■.•^■'Wfl?
■V ;
— 243 —
■
La Cour, Considérant que, le 6 juillet 1897, Dumoulin a pris
un brevet pour une composition propre à Tentretien de tous .
ustensiles, tels que poêles, fourneaux, etc., dite Pâte Flamande ;
Considérant que cette invention est tombée dans le domaine
public, la 4' annuité du brevet n'ayant été payée que tardivement;
Considérant que la dénomination Pâte Flamande^ arbitraire et
de fantaisie, n'était nullement nécessaire pour désigner le pro-
duit breveté ; qu'elle n'est donc pas tombée avec ce produit dans
le domaine public; que cette dénomination constitue une marque
de fabrique demeurée la propriété exclusive de Dumoulin, qui
en avait le premier fait usage en 1887, et dont il n'a cessé de se
servir depuis cette époque pour désigner les produits de sa fabri-
cation ;
Considérant que le 19 septembre 1894, Dumoulin a déposé une
marque de fabrique consistant dans une étiquette sur laquelle
était figuré un fer à cheval traversé par les mots « marque de
fabrique » et comportant la revendication de la dénomination
Pâte flamande^ ^lui y était inscrite en lettres majuscules ;
Considérant, que le 28 mai 1895, Dumoulin a déposé une mar-
que de fabrique consistant dans la dénomination Pâte Flamande
avec ou sans adjonction de nom ou de qualificatif;
Considérant qu'il n'importe pas que les dépôts fussent posté-
rieurs à la déchéance du brevet puisque opérés dans les condi-
tions prévues par la loi du 23 juin 1857, ils étaient simplement
déclaratifs et non attributifs de la propriété de la marque que Du-
moulin avait toujours conservée en continuant à en faire usage
entre l'époque de la déchéance de son brevet et celle des dé-
pôts effectués au greffe du Tribunal de commerce de la Seine ;
Sur la demande reconventionnelle :
Considérant que si la condamnation correctionnelle déjà in-
tervenue contre Lemoine pour contrefaçon de la dénomination
Pâte Flamande comme constituant la marque de fabrique de Du-
moulin n'a pas entre les parties l'autorité de la chose jugée sur
la propriété de cette marque, la demande aux fins civiles intro-
duite par Lemoine apparaît dans les circonstances de la cause
comme téméraire et vexatoire ; qu'elle a causé à Dumoulin un
préjudice dont les premiers juges ont H'n^ l'exacte réparation ;
Adoptant au surplus les motifs des premiers juges, en ce qu'ils
n'ont pas de contraire à ceux du présent arrêt ;
Par ces motifs. Reçoit Lemoine, dit Martin, appelant du juge-
ment du tribunal civil de la Seine du 4 décembre 1900 ;
Le déclare mal fondé en ses demandes, fins et conclusions,ren
déboute ;
Confirme en conséquence le jugement dont est appel.
■^v'-'K i.i II §a9wmw,lWtP
— 244 —
Art. 4207.
Propriété artistique. — Dessin. ~ Citation. — Biil-
teur. — < Li'AflnAlre et l'Image ».
Le droit de citation ne s'applique pas en matière de des-
sins ; un dessin, en effet, constitue une œuvre indivisible,
qui conserve son individualité, quoique réunie ou associée
avec d'autres œuvres, et ne peut être publiée sous quelque
forme que ce soit sans être entièrement reproduite et ainsi
complètement portée à la connaissance des tiers (i).
Il est donc dû réparation du préjudice causé à l'artiste
par la reproduction, sans son consentement, de quelques-uns
de ses dessins même dans une collection spéciale où ils ont été
groupés avec des dessins d* autres artistes en vue d'une syn-
thèse historique et pour constituer un recueil ou document
d'enseràble (2).
L'éditeur de l'album encourt la même responsabilité que
l'auteur de la composition (3).
(Trib. civ. Seine, 90 novembre 1900. — Ibels c. Grand-Carteret.)
(1-2) L'écrivain ou i*artiste qui a conçu et réalisé une création doit
rester, en principe, le seul maître de la reproduire et d'en retirer tous
les bénéfices qu'elle comporte. Ce droit reste intégral tant que l'auteur a
maintenu son œuvre inédite ; mais lorsqu'il l'a livrée à la publicité,
il Ta livrée à la discussion publique et à l'histoire, il en a fait an do-
cument que les tiers peuvent utiliser à titre de document historique ;
il conserve, il est vrai, le droit de propriété littéraire, mais sous réserve
des conséquences naturelles qu'entraîne la publicité voulue par lui-
même et il ne peut empêcher les reproductions qui correspondent aux
nécessités de la critique et de la documentation historique. C'est du
moins par ces considérations que dans la plupart des pays on a, en Cace
du droit de l'auteur sur son œuvre, reconnu, pour le public, le droit de
faire des citations de Tœuvre littéraire dans un but de critique ou de
polémique. Logiquement cela s'applique à Tinformation et à l'histoire.
Pourquoi ce qui est vrai des œuvres littéraires ne le serait-il pas éga-
lement des œuvres artistiques ? Les conséquences de la publicité telle
qu'elle a été voulue par l'auteur sont les mêmes, les nécessités de la ci-
tation sont identiques.
Le jugement que nous rapportons exclut toute citation en matière gra-
phique parce que reproduire un dessin pour le citer dans un ouvrage
c'est le reproduire tout entier. 11 ne nous parait pas exact de dire que
la reproduction partielle est de l'essence même de la citation : si le
droit de citation n'avait pas d'autre base que le caractère fragmentaire
de l'emprunt il ne serait pas légitime, car la jurispradence panit la
reproduction partielle comme la reproduction totale, et la citation d'une
œuvre en entier est parfaitement permise en matière littéraire quand il
■^T^-r- —r T- -^ î« -^ -- -»,^.r^- m-<^im~^-rj^-i . . "i — n- -- T^»- ■ ■■«wijip^
— 245 —
Lb Tribunal, Sur ]a demande principale :
Attendu que Grand-Garteret a publié sous le titre V Affaire et
ritnage, un album dans lequel il a reproduit sept dessins du de-
mandeur sans son autorisation ;
Qu'il a ainsi porté atteinte au droit exclusif d'Ibels, auteur de
ces dessins ;
Qu'il importe peu qu'il ait compris ces mêmes dessins dans
une collection spéciale où il les a groupés avec des dessins d'au-
tres artistes, en vue d'une synthèse historique et pour constituer
un recueil ou document d'ensemble ;
Qu'il ne s'est pas, pour cela, maintenu dans les limites du
droit de citation ;
Que ce droit ne s'applique pas en matière de dessins ;
Qu'un dessin, en effet, constitue une œuvre indivisible, qui
conserve son individualité, quoique réunie ou associée avec
d'autres œuvres, et qu'il ne peut être publié, sous quelque forme
ce soit, sans être entièrement reproduit et ainsi complètement
porté à la connaissance des tiers et mis en possession des ache
teurs ;
Attendu, en conséquence, que Grand-Garteret doit à Ibels ré-
paration du préjudice qu'il lui a causé par la reproduction illi-
cite de ses dessins ;
Que ce préjudice n'a, d'ailleurs, pas l'importance que lui attri-
bue Ibels, ses dessins n'ayant plus leur valeur d'actualité, ni le
prix d'œuvres inédites, et leur reproduction ayant affirmé, sinon
augmenté sa notoriété ;
Que le tribunal a les éléments d'appréciation suffisants pour
fixer l'indemnité due ;
Attendu que la Société du journal le Siècle, qui a édité l'album
de Grand-Garteret, a, de concert avec lui, méconnu le droit d'I-
bels, dont elle n'a ni obtenu ni même demandé l'autorisation ;
Qu'elle est donc tenue, au même titre que Grand-Garteret, d'in-
demniser Ibels ;
Qu'elle prétend vainement avoir acheté et publié dans son jour-
nal l'un des dessins litigieux ;
s'agit d^une courte pièce, telle qu'une lettre (v. trib. civ. Seine,
11 mars 1897, à propos de lettres de George Sand, Ann., 98. 312).
Il serait donc logique de permettre la citation d'un dessin lorsqu'elle
est réellement faite dans un but de critique ou de polémique ou lorsqu'il
s'agit d'an document historique. Ou alors il faudrait interdire toutes
citations littéraires ou artistiques.
II est à remarquer que le tribunal, en disant que le droit de citation
ne s'applique pas en matière de dessin, semble interdire même la re-
production, dans un but de critique, d'un fragment de dessin.
G. M.
t. ■»■■ 'f^'mw^tn^
— 246 —
Que le droit de reproduction de ce dessin ne lui a pas été for-
mellement cédé, mais seulement celui de le publier nne fois;
Qu'elle r^a donc pu légitimement le reproduire sans autorisa-
tion expresse ;
Par ces motifs, Condamne Grand-Garteret et la Société du jour-
nal le SièciSj solidairement, à payer à Ibels, à titre dédommages
et intérêts, la somme de 100 francs ;
Les condamne, sous la même solidarité, aux dépens ;
Condamne Grand-Carteret à garantir et indemniser la Société
du journal le Siècle des condamnations prononcées contre elle et
aux dépens de la demande en garantie.
1'* Ch. — Présidence de M. Lanbyrie. — Avocats : M«* La-
BORi et Georges Maillard.
Art. 4208.
Propriété littéraire et artistique. — Droit de
réponse. ~ Reproduction llllelte.
L'exercice du droit de réponse, dans les termes de far-
ticle 13 de la loi de 1881, n'entraîne point V aliénation du
droit de proprié té y en ce sens que, s*il consacre, au profit
de l'intéressé, le droit d'être publié et imprimé malgré son
contradicteur, il n'implique point, la polémique une fois
close, V obligation, pour Vune ou Vautre des parties, d'être,
contre son gré, imprimée et publiée à nouveau (1).
Par suite, les lettres missives publiées par un journal, en
réponse à des articles parus dans ce même journal, ne per-
dent point, par cette publication, leur caractère d'œuvre
littéraire personnelle, susceptible de propriété privée, et le
directeur de ce journal qui les reproduit ensuite dans une
brochure, sans nécessité démontrée ni autorisation préala-
ble, porte atteinte à cette propriété et peut être condamné,
de ce chef, à des dommages-intérêts envers leur auteur (2).
On ne saurait arguer du droit de citation pour justifier
(1-2) Le jugement fait observer que le droit de publication n*est
transmis au destinataire de la lettre que dans la mesure fixée par la
volonté de Fauteur et que l'auteur, qui use du droit de réponse pour
faire insérer sa lettre dans un journal, n*est présumé demander et
autoriser que la publication dans le journal.
— 247 —
la reproduction, dans ces conditions, de lettres entières (1).
La confiscation conserve, en matière de contrefaçon lit-
téraire et artistique, le caractère de peine ; le tribunal
civil est incompétent pour connaître des conclusions prises
devant lui^ de ce chef{i) (Résolu par le jugement).
(G. de Paris, SI février 1901 . — Bmnetière c, Yves Gayot et
journal /e Siècle.)
La l'« Chambre du Tribunal civil de la Seine, sous la
présidence de M. Baudoin, conformément aux conclusions
de M. le substitut Servin, avait, le 14 décembre 1899,
rendu le jugement suivant :
Le Tribunal, Attendu que, le journal le Siècle ayant publié,
(1) Pour le droit de citation voir suprà, p. 244, le jagement Ibels c.
Grand-Carteret et la note.
(2) Cf. Cass. cr., 29 décembre 1882, Ann., 84.359 et 23 juin 1893,
i4nn., 98.229, arrêts qui ne donnent du reste, aucun motif, et Paris,
12 juillet 1862, Ann,, 62.314 ; Paris, corr., 27 mars 1868, Ann,, 68.325 ;
Paris, 25 juin 1870. Ann,, 70.264; Paris, 29 juin 1878, Ann., 79.85;
Trib. civ. Lyon, 18 mars 1890, Ann., 95.135 ; Paris, 24 décembre 1896,
Ann., 98.37 {on cite aussi Tarrét de la Cour de cassation du 5 juin 1847,
mais il ne tranche nullement la question, il dit seulement que la con-
fiscation peut être prononcée à la requête du ministère public, même
en Tabsence d'un partie civile pour en profiter). —En sens contraire :
Pouillet,Prop. liU,, n« 699 ; Pataille, ^nn.,1868, p.305 ; Trib. civ. Niort,
17 février 1891, Ann,, 92.205 ; Angers, 26 janvier 1880, Ann.. 80.204 ;
Paris, corr., 31 janvier 1868, Ann., 68.56; Paris, corr., 21 novembre
1867, Ann., 67.359 ; Trib. corr. Seine, 13 novembre 1867, Ann., 68.31 ;
Paris, 12 juillet 1867, Ann., 67.407 ; Douai, 8 août 1865, Ann., 69.248;
Trib. corr. Seine, 22 novembre 1831, Oaz. Trib,, 25 novembre ; Paris,
1«r mars 1830, Ann,, 68.320.
Les objets contrefaits peuvent, d'après l'article 3 de la loi du 19 juillet
1798 et l'article 429 du Code pénal, être saisis à la requête de la partie
lésée et lui être remis pour l'indemniser d'autant du préjudice souf-
fert. Il y a bien là une réparation civile, un supplément de domma-
ges-intérêts. Il est difficile de comprendre comment la partie saisie
pourrait, après la condamnation, réclamer les produits contrefaits. Le
tribunal saisi de l'action, au civil comme au correctionnel, doit donc
pouvoir ordonner la remise des objets au demandeur. C'est l'objet qui
est illicite, il doit être remis à la partie lésée. Il serait à désirer que
la Cour de cassation fût appelée à s'expliquer à nouveau sur cette
question et la résolût enfin en ce sens.
La même question se pose en matière de dessins et modèles de fabri-
que,par application des articles 427 et 429 du Code pénal.La Cour de Douai
n'admet pas la confiscation au civil. Douai, 29 juin 1867, Anfi,^ 68.77.
— En sens contraire : Paris, corr., 25 juillet 1895, Ann., 96.24 ; Lyon,
27 mai 1879, Ann., 81.42; Aix, 23 janvier 1867, Ann., 68.107 ; Paris,
27 janvier 1846, Ann., 68.321 ; Paris, 21 août 1837, Journ. trib. comm.,
57.229. G. M. .
— 248 —
le 12 avril 1898, sous la signature « Michel Colline >» el sous le
titre Billets de province, un article dans lequel Brunetière, nette-
ment désigné sous le nom de « Basile », était violemment pris
à partie à raison d*un article intitulé Après le procès et publié par
lui au sujet de l'affaire Dreyfus, Brunetière, agissant en vertu
de Farticie 13 de la loi du 29 juillet 1881, a sommé le Siècle d'in-
sérer sa réponse ; qu'Yves Guyot, directeur de ce journal, a fait
droit à cette réquisition,maisafait suivre dans son journal cette
réponse de ses commentaires ; que Brunetière y a répliqué et que
les choses ont ainsi continué à dix reprises différentes jusqu'au
5 septembre suivant ;
Que dès, le 29 août, Stock a prévenu Brunetière qu'il avait Tin-
tention de publier une brochure contenant to ute cette polémique ;
que Brunetière lui a fait savoir qu'il s'opposait absolument, pour
sa part, à la reproduction, sous forme de brochure, des lettres
qu'il avait écrites :
Qu'Yves Guyot, lui ayant, suivant exploit d'Ârnoux, huissier à
Paris, en date du 12 septembre suivant, fait sommation d'avoir à
donner son autorisation et ne l'ayant pas obtenue, a passé outre
et que le Siècle a annoncé, dans son numéro du 24 novembre, la
publication à la librairie Stock, sous le titre les Raisons de Basile
d'une brochure contenant in extenso toute la polémique échangée
entre Brunetière et Yves Guyot et reproduisant par suite en entier
les lettres de Brunetière ;
Que ce dernier a fait aussitôt saisir chez Stock 252 exemplaires
de la brochure, reliquat du tirage des 1,600 qui en avait été fait
et que, par acte du 16 décembre suivant, il a fait assigner Hlf .
Yves Guyot et Stock devant ce tribunal pour s'entendre déclarer
contrefacteurs, vT>ir ordonner la confiscation et la destruction des
exemplaires saisis, l'insertion du jugement à intervenir, aux frais
des défendeurs, dans dix journaux à son choix et s'entendre con-
damner solidairement, pour le préjudice causé, à 3,000 francs de
dommages-intérêts et aux dépens ;
Qu'Yves Guyot et Stock concluent à ce que Brunetière soit
déclaré irrecevable et mal fondé dans sa demande ; qu'ils soutien-
nent que les lettres de Brunetière, ayant été insérées dans les ar-
ticles d'Yves Guyot, en font partie intégrale, qu'elles n'étaient pas
de nature confidentielle puisque la publication en avait été re-
quise,qu'en les reproduisant ils n'ont fait qu'user du droit de cita-
tion, que Brunetière pouvait tout au plus, à titre de collaborateur
d'Yves Guyot, réclamer une part du bénéfice qu'aurait donné la
brochure et que, de ce chef, il lui était fait offre de la moitié des
droits d'auteur, montant à 10 0/0, alloués à Yves Guyot par son
contrat avec Stock ; que reconventionnellement ils demandent
que Brunetière, ayant fait saisir sans droit 252 exemplaires de
— 249 —
la brochure, soit condamné à 1 franc de dommages-intérêts et aux
frais de l'insertion dans dix journaux à leur choix ;
Attendu que, si Brunetière n'a invoqué l'article 13 de la loi du
29 juillet 1881 qu'en ce qui concerne sa réponse à l'article de
« Michel Colline », il a adressé toutes ses autres lettres à Yves
Guyot avec l'intention de les voir publier par le Siècle ; mais que
cette circonstance n*altère en rien leur caractère propre, qu'elles
n'en restent pas moins des lettres missives, complètes par elles*
mêmes, et qu'il est inexact de prétendre qu'elles soient devenues
partie intégrante des réponses qui leur ont été faites et qu'elles
aient ainsi perdu leur individualité ;
Qu'une telle correspondance, n'ayant point trait à des relations
d'affaires mais constituant une de ces communications qui, par
lour mérite, ont la valeur d'une œuvre littéraire, reste soumise au
dr oitde propriété littéraire comme tous autres écrits ; que cette
propriété n'est pas entrée d'elle-même dans le domaine du des-
tinataire, qui n'a acquis de droit que sur l'objet matériel lui-même
qu'il a reçu ; qu'elle est restée aux mains de l'auteur ; que, tout
particulièrement, le droit de publication, qui en est le principal
attribut, n'a été transmis au destinataire que dans la mesure que
Brunetière a lui-même fixée et s'est épuisé par l'exercice qui en a
été fait; que, si Brunetière a requis l'insertion dans le Siècle de
sa réponse à l'article de « Michel Colline » et s'il a laissé publier
les lettres suivantes dans le même journal, l'autorisation qu'il a
ainsi donnée était limitée nécessairement à cette publication,
éphémère comme la feuille où elle a eu lieu, et n'a pas créé, au
profit d'Yves Guyot, le droit de réunir le^ mêmes lettres en un
volume destiné à être conservé ;
Qu*Yves Guyot et Stock prétendent, à la vérité, justifier la pu-
blication qu'ils ont faite, par l'usage du droit de citation qui,
de tout temps, a été reconnu au critique littéraire ; mais que s'il
est légitime et légal de citer un ou plusieurs passages d'un ou-
vrage, soit pour le discuter, soit pour en tirer argument au pro6t
d'une doctrine, il n'en peut être ainsi lorsque les emprunts faits
àTœuvre d'autrui sont assez étendus pour tenir lieu de cette œu-
vre, à plus forte raison lorsqu'ils constituent, comme dans l'es-
pèce, la reproduction totale et absolue de l'ouvrage lui-même ;
qu'une telle reproduction ne peut être faite qu'avec l'assentiment
de l'auteur ;
Qu'Yves Guyot n'est pas plus fondé à prétendre que ses propres
réponses seraient inintelligibles sans les lettres de Brunetière ;
qu'il lui appartient de les rendre claires par un tel procédé qui
lui conviendra, mais que l'utilité qu'il invoque ne lui donne pas
le droit de s'emparer à sa fantaisie de l'œuvre d'autrui ;
Qu'il n'est pas plus sérieux de soutenir qu'en écrivant ses let-
— 250 —
très Branelière s'est fait le collaboratear d'Yves Gujot et qu'il a
par là conféré à celui-ci un droit de propriété sur Tensemble de
Tœavre commune ; que toute collaboration suppose à rorigine
un contrat passé entre deux ou plusieurs personnes associant
leurs efforts pour faire ensemble une œuvre littéraire ou artis-
tique, chacun s'étant, suivant la tournure de son esprit et la
nature de son talent, chargé d'une partie de la tâche à faire et
les avantages que comporte l'œuvre commune devant être égale-
ment acquis à tous ; qu'aucun accord de ce genre n'est intervenu
entre Brunetière et Yves Guyot, qui se sont bornés à mener l'un
contre l'autre une polémique sans que chacun d'eux ait entendu
conférer à l'autre aucun droit sur son œuvre personnelle;
Que la demande de Brunetière est donc recevable et fondée et
qu'il convient d'y faire droit ;
Que le tribunal ne saurait toutefois accueillir le chef de ses con-
clusions relatif à la confiscation ;
Que si la confiscation prononcée d'abord par le décret du i9 juil-
let 1793 et plus tard par les articles 427 et suivants du Gode pé-
nal est de nature complexe en ce que, d'une part, elle apourbul
de réprimer l'infraction et, d'autre part, d'attribuer aux auteurs
lésés les objets contrefaits, elle n'en perd pas pour cela son ca-
ractère dominant de disposition de répression ;
Qu'un arrêté interprétatif du 29 messidor an VII, rendu au rap-
port de Gambacérès, a, sur ce point, dissipé toute incertitude ;
que le Gode pénal de 1810 n'a rien innové à cet égard ; que son ar-
ticle 11 range la confiscation parmi les peines; qu'il en est de
même de l'article 427 au chapitre delà contrefaçon ; que la des-
tination ultérieure des choses qui sont le produit de la confiscation
ne change pas la nature de celle-ci et ne saurait, alors surtout
que l'article 429 la distingue expressément de la confiscation en
tant que mesure de répression, dépouiller celle-ci, en l'absence
d'une dérogation expresse au principe susmentionné, du caractère
essentiellement répressif qui lui est propre ;
Qu'à la vérité, l'article 49 de la loi du 5 juillet 1844 porte que
la confiscation des objets contrefaits doit être prononcée même
en cas d'acquittement contre le contrefacteur, le receleur, l'in-
troducteur ou le débitant; mais que c'est là une disposition
exceptionnelle qui ne s'applique qu'en matière de brevets d'in-
vention et qui doit être restreinte aux cas expressément prévus
par cette loi ; que la contrefaçon littéraire et artistique réprimée
par le décret du 49 juillet 1793 et par les articles 427 et suivants
du Gode pénal reste régie par les règles du droit commun ; que
dès lors la confiscation ne peut en cette matière, où elle a con-
servé le caractère de peine, être prononcée que par le tribunal
de police correctionnelle et que le tribunal est incompétent
-^ 251 —
pour statuer sur les conclusions prises de ce chef devant lui ;
Attendu qu'il a, par ailleurs, les éléments nécessaires pour ap-
précier le préjudice causé ;
Par ces motifs, Dit Brunetière recevable et bien fondé dans
ses conclusions tendant à le faire indemniser du préjudice qull
a subi du fait de la reproduction illicite, en forme de brochures,
des lettres par lui adressées à Yves Guyot pour être publiées
dans le journal le Siècle ;
Condamne, en conséquence, solidairement Yves Guyot et Stock
à lui payer la somme de 500 francs à titre de dommages-inté-
rêts ;
Ordonne sous la même solidarité l'insertion du présent juge-
ment dans cinq journaux au choix de Brunetière et aux frais des
défendeurs, sans que le coût de chaque insertion puisse dépasser
200 francs :
Se dit incompétent pour statuer sur la confiscation des exem-
plaires saisis ;
Dit Yves Guyot et Stock mal fondés dans leurs conclusions
reconventionnelles : et les condamne solidairement en tous les
dépens.
Arrêt conflrmatif en ces termes :
La Cour, Considérant que Yves Guyot a fait publier par la
librairie Stock une brochure, intitulée Les Raisons de Basile, con-
tenant toute la polémique échangée entre Brunetière et lui, et
reproduisant in extenso des lettres de Brunetière ;
Considérant que Texercice du droit de réponse, dans les ter-
mes de Tarticle 13 de la loi de 1881, n'entraîne point Taliénation
du droit de propriété ; que, s'il consacre au profit de l'intéressé
le droit d'être publié et imprimé malgré son contradicteur, il
n'implique point, la polémique une fois close, l'obligation, pour
Tune ou l'autre des parties, d'être contre son gré imprimée et
publiée à nouveau ;
Considérant que les lettres de Brunetière n'ont point perdu,
par la première publication dans le journal de Guyot, leur ca-
ractère propre ; qu'elles constituent une œuvre littéraire person-
nelle, susceptible de propriété privée, dont, par suite, il n'était
pas licite de faire usage sans le consentement de Tauteur ; que
Guyot ne peut arguer du droit de citation, reconnu de tout temps
aux auteurs d'ouvrages de critique ou de polémique ; que le
droit de citation et celui de reproduction intégrale ne sauraient
être confondus, sans donner lieu aux plus graves abus ;
Considérant que Guyot ne s'est point borné à citer les passages
indispensables pour éclairer la discussion ; qu'il reproduit l'œu-
IT
•f-r-
— 252 —
vre complète de Brunetière sans nécessité démontrée et sans au-
torisation préalable, faisant ainsi de Brunetière un collaborateur
malgré lui;
Par crs motifs, Et adoptant ceux des premiers juges en ce qui
touche la confiscation, les dommages-intérêts et les insertions;
Confirme le jugement dont est appel ;
Condamne les appelants à l'amende et aux dépens nouYeaux.
1'* Ch. — M. Lefedvrb de Viefvillb, président. — M« Lbvy-
Salle, avocat, pour les appelants ; M. Brunetière pour lui-
même.
Art. 4209.
Nonikm de loealltés. — Arran^emeiit de madrld.
Prodalto irlnlcoles. — Madère.
Peuvent être valablement saisis^ dans les termes de f arti-
cle 19 de la loi du 23 juin 1887, des vins qui, ne provenant
pas des îles de Madère, sont contenus dans des fûts qui
portent V indication Madère ou Madeira, V Arrangement de
Madrid de 1891 étant applicable à Vespèce (1).
(G. de cass., req., 22 juillet 1901. — Sancho Hermanoa c. Blandy frères.)
La Chambre des requêtes, sous la présidence de
M. Tanon, au rapport de M. le conseiller Denis et confor-
mément aux conclusions de M. Tavocat général Mérillon,
après plaidoiries de M*"" Trêzel et Sabatier, a rejeté les
pourvois formés par Sancho Hermanos et par Diez frères
contre les arrêts de la Cour de Rouen, du 26 juin 1900,
rapportés aux Ann., 1900. 212 :
(1) La Cour de cassation a pleinement confirmé la doctrine de la Cour
de Rouen. Mais il s'est glissé dans la rédaction de l'arrêt deux erreors
qu'il faut rectifier.
Les articles 19 et 20 de la loi de 1B57 ne s'appliquaient pas originaire-
ment aux fausses indications de provenance étrangère, c'est la loi du
18 avril 1892, approuvant 1* Arrangement de Madrid de 1891, qui les rend
applicables aux fausses indications de provenance dans lesquelles un des
Etats contractants ou un lieu situé dans l'un d'entre eux serait, direc-
tement ou indirectement|indiqué comme pays ou comme lieu d*origine*
Pour apprécier si l'Arrangement de Madrid est applicable à Tespèce,
il n'y a pas lieu de tenir compte de la nationalité du défendeur, il suf-
fit d'examiner si TEtat dont le nom a été usurpé ou dans lequel est si-
tué le lieu dont le nom a été usurpé a adhéré, comme la France, à l'Ar-
rangement de Madrid, c'est donc par un lapsus que l'arrêt se contente
de citer parmi les pays adhérents la France et l'Espagne : au lieu de
« Espagne » il faut lire « Portugal ». G« M.
— 253 —
La Goub, Sur le moyen aaique pris de la violation par fausse
application, des articles 1 et 4 de TArrangement international de
Madrid du 14 avril 1891 concernant la répression des fausses in-
dications de provenance sur les marchandises^ de la loi du
13 avril 1892 portant approbation de cet Arrangement et du dé-
cret du 15 juillet 1892 en portant promulgation, fausse applica-
tion de Tarticle !•' de la loi du 28 juillet 1824 et violation de Tar-
ticle 7 de la loi du 20 avril 1810 :
Attendu que la loi du 28 juillet 1824, dans le but de maintenir
et de protéger la loyauté du commerce, interdit d'apposer sur
un objet fabriqué le nom d'un lieu autre que celui de sa fabri-
cation ; que les articles 19 et 20 de la loi du 23 juin 1857 étendent
cette garantie aux vins français, étrangers et autres boissons ;
qu'enfin l'Arrangement concernant la répression des fausses in-
dications de provenance sur les marchandises conclu le 15 avril
1891 à Madrid entre divers Etats au nombre desquels se trouvent
la France et l'Espagne et approuvé par la loi française du
13 avril 1892, interdit dans ses articles 1 et 4 toute fausse appel-
lation régionale de provenance sur les produits vinicoles ;
Qxxe, par suite, en décidant que les marchandises litigieuses
portant l'indication « Madère » ou « Madeira », alors qu'elles
ne provenaient pas de l'Ile de ce nom, avaient été valablement
saisies à la poursuite des négociants Madérois intéressés et que
les auteurs de ces fausses indications étaient responsables du
préjudice causé aux poursuivants par l'usage illicite du nom de
« Madère », la Cour de Rouen, qui n'a été saisie d'aucune autre
question, a suffisamment justiQé sa décision et, loin de violer
les lois visées par le pourvoi, en a fait au contraire une juste
application ;
Par ces motifs, Rejette.
Art. 4210.
Marques de tebrlque. — Dépôt péi*liné. — Saisie. -»
Coneurrenee déloyale. — Convention de Paris de
1883. — Dépôt International des marques.
Le fait que le dépôt d'une marque de fabrique n'a pas
été renouvelé et est périmé ne fait pas obstacle à ce que le
propriétaire de la marque poursuive par la voie de la con-
currence déloyale celui qui imite frauduleusement cette
marque (1).
(1) Le dépôt est purement déclaratif de propriété (Pouillet, Marq^
fab,, no 102 et suiv.) en vertu de l'article 1382. D'autre part, rabseUce
— 254 —
Il y a imitation frauduleuse d'une marque consistant
dans la dénomination Robert inscrite en gros caractères
sur le couvercle de boîtes de forme oblongue, et portant à
leur face latérale deux cartouches avec les mots en langue
française et anglaise Sardines à Thuile et Sardines in oil,
et sur chaque coin la lettre R, dans le fait d'employer des
boîtes de même forme, portant le nom de Norbert en ca-
ractères identiques et présentant les mêmes mentions Sar-
dines à rhuile et Sardines in oil, à la même place^ et dam
les coins les lettres FetJ rapprochées de façon à offrir par
leur réunion V aspect d'une lettre unique rappelant VinitiaU
La Convention de 1883 est absolument étrangère à la
force exécutoire des jugements rendus à r étranger, et l'en-
registrement d'une marque au Bureau international de
Berne ne saurait porter atteinte aux droits de propriété
antérieurement acquis sur la même marque (2).
(G. d'Aiz, % avril 1901. — Etablissements F. Delory c, JuUien.)
Le jugement dont appel était ainsi conçu :
Le Tribunal, Attendu que la Société « Les Etablissements F.
Delory», de Lorient, fabricants de sardines à l'huile, exploitent
une marque de fabrique qu'ils ont déposée au greffe da tribunal
de renouvellement du dépôt ne fait pas, d'elle-même, tomber la mar-
que dans le domaine public (Pouillet, Marq, fab,^ n» 131 6û; Bor-
deaux, 6 juillet 1891. Pector et Ducout, Ann,, 98.202; Trib. Marseille.
12 juin 1884, Plagniol et James, Revue d'Aix, 1885, p. 37). Le pro-
priétaire de la marque, s*il en a effectué le dépôt mais n*a pas renou-
velé le dépôt au bout de 15 ans, peut donc poursuivre au civil les
imitateurs, et le négociant qui s'est licitement approprié une mar-
que en remployant lorsqu'elle n'était employée par aucun concurrent
a, s'il ne la dépose pas, l'action en concurrence déloyale contre ceux
qui lui causeraient préjudice en employant ou imitant la môme mar-
que ; le dépôt permet simplement d'invoquer, pour les faits ultérieurs,
les sanctions prévues par la loi du 23 juin 1857.
(1) Sur les conditions de Timitation frauduleuse, v. Pouillet, Marques
de fab., n» 181 et suiv. Comp. rej., 18 juillet 1891, Sicre, Ann,^ 9B.
171 ; Trib. Seine. 3 février 1898, Léonard et Ellis, Ann., 99.334 ; Pa-
ris, 21 févr. 1899, Manuf. royale de Saxe, Ann.^ 99.846; Trib. Seine,
26 avril 1898, Vilcocq, Ann., 99.355 ; Douai, 18 mai 1900, Martell, Ann.^
1900.178.
(2) L'enregistrement international des marques est réglé par le second
protocole de la Conférence de revision de la Convention d^ Paris tenue
à Madrid, en 1892. Sur les caractères de l'enregistrement international
des marques et son fonctionnement, v. Pouillet et Plé, Commentaire
de la Convention d'union internationale de 1883, no 119 et suivants.
i-^-~^^—-T ^ r-—- — ^
— 255 —
de commerce de ladite ville le 10 novembre fSRl ; que cette mar-
que consiste dans Timpression, sur les tranches d'une boîte,
ainsi qu'il en est employé pour les conserves de sardines, du
nom de Robert, des mots Sardines à Vhuik, Sardines in oil et,
dans le coin, de l'initiale R. ;
Attendu qu'il résulte d'un procès-verbal de saisie opérée à
Marseille le 6 décembre 1898 aux mains des sieurs Pleury, négo-
ciante, et de Maillard, représentant de commerce, agissant à
Marseille pour le sieur JuUien, fabricant de S6urdines à l'huile à
Sétubal (Portugal), que ce dernier apposait sur des boîtes de
même forme sur les tranches le nom de Norbert, ainsi que les
mots : Sardines à V huile, Sardines in oil, avec les mêmes carac-
tères, et, dans les coins, les initiales PJ., disposées de façon
à être confondues avec l'initiale R. ;
Attendu qu'il y a lieu de conclure de ces constatations que Jul-
lien s'est, dans le but de tromper les acheteurs, rendu auteur de
rimitation frauduleuse d'une marque des établissements F. De-
lory, auxquels il fait concurrence ; que ces faits sont prévus et
réprimés par les articles 8 et 19 de la loi du 23 juin 1857 ;
Que JuUien a causé par ses agissements à la société deman-
deresse un certain préjudice dont il lui doit réparation et que le
tribunal peut évaluer ;
Attendu que les sieurs Fleury et de Maillard ne sauraient être
considérés comme ayant coopéré sciemment aux actes reprochés
à JuUien ; qu'ils y sont par suite étrangers et qu'il y a lieu en
l'état de les mettre hors de cause ;
Par CBS motifs. Dit que JuUien a, par l'emploi des indications
ci-dessus visées, frauduleusement imité la marque de la société
demanderesse ;
Lui fait, en conséquence, inhibition et défense d'en faire usage
à l'avenir ;
Ety en réparation du préjudice ainsi causé jusqu'à ce jour,
le condamne à payer à la société demanderesse, à titre de
dommages-intérêts, la somme de 1,000 francs, avec intérêts de
droit du jour de la demande ;
Ordonne que le présent jugement sera inséré par extrait dans
cinq journaux au choix de la société demanderesse, aux frais de
JuUien et sans que chaque insertion puisse dépasser la somme
de 100 francs ;
Met hors de cause Fleury et de Maillard sans dépens ;
Condamne JuUien à tous les dépens de l'instance ;
Prononce la confiscation de tous les produits contrefaits, au
profit de la société demanderesse ;
Et déboute cette dernière de toutes autres ôus et conclusions
«r— j-^^.-zfjr-^i-:^ ^-- — T- S ".■.V'^« ■ '-■ » VV'inP^^^WPB^BViMP
— 256 —
La Cour d'Aix, sous la présidence de M. Mallbt, prési-
dent, a le 28 avril 1901 rendu l'arrêt suivant :
La. Goqr, Attendu que la Société dite des Etablissements De-
lory n'ayant pas renouvelé le dépôt qu'elle a fait le 10 novembre
1881 d'une marque de fabrique, dépôt périmé depuis quatre
anS; n'avait pas le droit d'agir par voie de saisie à Tégard da
sieur Jullien, pour contrefaçon de cette marque ;
Que, dès lors, la saisie qu'elle a fait pratiquer le il novembre
i898, dans les docks et entrepôts de Marseille, de boites de sardi-
nes provenant de la fabrication de ce négociant est illégale et
frappée d'une nullité absolue ;
Qu'il en est de même de l'action qu'elle a introduite devant
le tribunal contre le sieur Jullien en se fondant sur les disposi-
tions des articles 7, 8 et 19 de la loi de 1857 ;
Mais attendu que la Société des Etablissements Delory avait pris
soin d'énoncer, dans son exploit d'assignation, qu'elle poursui-
vait, en outre, l'appelant, pour concurrence déloyale et qu'à ce
point de vue la recevabilité de sa demande ne saurait être con-
testée ;
Attendu, au fond, que la société intimée qui se livre au même
commerce que le sieur Firmin Jullien, enferme depuis de longues
années ses produits dans des boites oblongaes snr le couvercle
desquelles est écrit en gros caractères le nom de Robert et qui
portent sur leur face latérale deux cartouches avec ces mots en
langue française et anglaise : Sardines à Chuile et Sardines in oil
et sur chaque coin la lettre A. ;
Qu'elle a fait de cette marque un usage continu et en a, dès
lors, conservé la propriété nonobstant la péremption, faute de
renouvellement du dépôt qu'elle en a fait en 1881 ;
Que les boftes de sardines de la maison Jullien sont de la même
forme, avec le nom de Norbert, imprimé en caractères identiques
à celui de Robert, présentant les mêmes mentions Sardines à
Vhuile et Sardines in ail à la même place, et, dans les coins, les
lettres F. et /. rapprochées de façon à offrir par leur réunion l'as-
pect d'une lettre unique rappelant l'initiale A. ;
Que si les boites Delory et les boîtes de F. Jullien sont faciles
à distinguer, placées les unes à côté des autres, elles offrent
néanmoins dans leurs éléments essentiels et caractéristiques une
ressemblance propre à tromper l'acheteur qui n'a sous les yeux
que celles du sieur Jullien, surtout à l'étranger ;
Qu'on ne saurait admettre qu'un simple hasard ait présidé, dans
la conception de la marque du sieur Jullien, à l'adoption de noms
et de signes à peu près identiques à ceux dont les Etablissements
Delory faisaient usage : le nom de Norbert, de même consonnance
iT-m^
— 257 —
que celui de Robert et les deux initiales F. et J. imprimées dans
les coins de la boite et conjuguées de façon à former la lettre H.
des boites de cette société ;
Qu'il y a donc preuve sufûsante que l'appelant a frauduleuse-
ment imité la marque d'un fabricant, son concurrent ;
Que si ce fait ne constitue pas le délit prévu et puni par la loi
de 1857, il a tous les caractères d'un acte illicite de nature è^
porter préjudice à autrui et à ouvrir à celui qui en a souffert une
action en dommages-intérêts ;
Attendu que le sieur Jullien invoque pour sa défense des juge-
ments rendus en sa faveur par le Tribunal portugais de Sétubai
et qui seraient, dit-il, exécutoires en France, en vertu de la Con-
vention de Paris, et, en outre, Tenregistrement qu'il aurait fait
effectuer de sa marque au bureau international de Berne le
12 juin 1899;
Attendu que la Convention de Paris est absolument étrangère
à la force exécutoire en France des jugements rendus à l'étranger
et que l'enregistrement, dont se prévaut le sieur Jullien, du dépôt
de la marque à Berne, ne saurait porter atteinte aux droits de
propriété antérieurement acquis par les Etablissements Delory ;
Sur l'appel incident de la Société des Etablissement Delory \
Attendu que la réparation qui leur est allouée par les premiers
juges est suffisante et qu'il n'y a pas lieu d'en augmenter l'impor-
tance;
Par ces motifs. Réformant pour partie le jugement dont est
appel ;
' Dit et déclare nulle la saisie, pratiquée dans les docks et entre*
pots de Marseille, de boites de sardines appartenant au sieur Jul-
lien, à la requête de la Société des Etablissements Delory ;
Dit et déclare en môme temps irrecevable l'action de ladite com*
pagnie contre le sieur Jullien pour délit d'imitation frauduleuse
de marque en vertu de la loi de 1857 ;
Mais dit, en même temps, que la Société des Etablissements
Delory, ayant conservé la propriété de sa marque pour avoir con-
tinué à en user après la péremption du dépôt qu'elle en avait fait'
estrecevable et fondée dans la demande qu'elle a formée contre
le sieur Jullien en réparation du préjudice que celui-ci lui a
causé par l'adoption, frauduleusement calculée, d'une marque
qui présente avec la sienne des similitudes propres à amener la
confusion de ses produits avec ceux de l'intimé ;
Confirme, en conséquence, le jugement entrepris, au point d&
vue des dommages-intérêts et insertions prononcées par les pre-
miers juges ;
Mais dit que cette réparation est suffisante et qu'il n'y a pas
lieu d'en augmenter l'étendue ;
— 258 -
Déboute, en conséquenceja Société des Etablissements Delory
de son appel incident ;
Condamne ]a Société des Etablissements Delorj pour toas dom-
mages-intérêts aux frais de sa requête au président du Tribunal
de Marseille ainsi que de l'ordonnance de ce magistrat et de la
saisie qui en a été la suite, cette procédure étant déclarée nulle ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes, fins et con-
clusions ;
Condamne la société intimée aux dépens de son appel inci-
dent ;
Condamne le sieur JuUien au surplus des dépens ;
Ordonne la restitution de Tamende.
Art. 4211.
Noms de loewMtém, — Eaux minérale*, — Orexxa.
Les noms de lieux sont dans le domaine public en ce sens
que Vusage commercial en est permis à tous pour indiquer
la provenance des produits qui en sont réellement tirés (1).
Il importe peu qu'un nom ait cessé de constituer la qua^
lificalion officielle d'une circonscription administrative,
s'il a continué à servir, dans le langage usuel, à désigner
la région (2).
Spécialement le nom (f'Orezza, bien qu'il ait été remplacé
dans l'usage officiel par celui de Piedicroce, continue à
constituer une indication de provenance dépendant du do-
maine public et non susceptible d'appropriation (3).
(G. de cass. req., 4 juillet 1899. — Piatier c. Monplot.)
La Chambre de requêtes, sous la présidence de
M. Tanon, au rapport de M. le conseiller George-Lkmairb,
conformément aux conclusions de M. l'avocat général
PuEGH et malgré la plaidoirie de M* Sabatier, a rejelé le
pourvoi formé contre l'arrêt de la Cour de Paris du 10 août
1897 (ilnn., 97.21):
Sur le premier moyen, tiré de la violation des articles 1* delà
loi du 28 juillet 1824, l^r et suivants de la loi du 23 juin 1857 et
7 de la loi du 20 avril 1810:
(1-3) Cf. Cass., i*r mai 1889, Ann„ 91.168.
- 259 —
Attendu que les noms de lieux sont dans le domaine public, en
de sens que l'usage commercial en est permis à tous, pour indi-
quer la provenance des produits réellement tirés des lieux indi*.
qués;
Attendu que Tarrèt attaqué constate que le nom d'Orezza a.
toujours été, depuis un temps immémorial, employé pour dési-
gner, avant comme après Tannexion de la Corse à la France, une
partie du territoire de cette île ; que ce nom désigna d'abord
î*une des soixante-quatre pieves ou paroisses entre lesquelles le
territoire annexé était divisé ; qu'ensuite, lorsque la Corse fut
constituée en département français en 1790, la pieve d*Orezza
devint le canton d*Orezza ; que ce fut seulement en 1828, en vertu
d'une ordonnance royale, que le canton d'Orezza, fut appelé
canton de Piedicroce ;
'^ Attendu qu'il importe peu que le nom d'Orezza ait cessé alors
d*être le nom officiel de la circonscription administrative, sMl a
continué à servir dans le langage usuel à indiquer la région ;
que l'arrêt constate qu'il a toujours été employé pour dési-
gner les produits naturels qui en sont tirés; qu'ainsi Ton dési-
gne les marbres, les vins, les bois, les châtaignes qui en provien-
nent, sous les noms de marbres, de vins, de bois, de châtaignes
d'Orezza ; que Tarrét ajoute qu'il en a été constamment de même
pour les eaux minérales acidulées, naissant du sol dépendant de
l'ancien canton d'Orezza, ainsi dit l'arrêt, qu'il est établi par les
diverses publications scientifiques, géographiques et médicales,
versées aux débats par les intimés eux-mêmes ;
Attendu qu'en tirant de ces faits la conséquence que le nom
d'Orezza appliqué aux eaux minérales exploitées par les parties,
était un nom de lieu de provenance et d'origine, dépendant du
domaine public, non susceptible d'appropriation privée et pou-
vant être, dès lors, employé par Monplot comme par les deman-
deurs en cassation pour désigner les eaux minérales qu'ils offrent
au public, à la condition d'éviter réciproquement toute confusion
entre l'eau provenant de la source qu'ils exploitent et celle de
la source exploitée par leur concurrent, l'arrêt n'a nullement
violé les dispositions légales invoquées par le pourvoi ;
Sur le deuxième moyen pris de la violation des articles 1382 et
J383 du Code civil, 1" et suivants de la loi du 23 juin 4857, 7 de
la loi du 20 avril 1810:
Attendu que le pourvoi reproche à l'arrêt d'avoir refusé d'or-
donner les prescriptions nécessaires pour éviter toute confusion
entre les deux sources ;
Attendu que la confusion dont se plaignaient les demandeurs
en cassation serait résultée de ce que Monplot mettait l'eau de sa
source en vente sous le nom d'Orezza ; que leur prétention-était
~r^^
- 260 —
d'être propriétaires exclusifs de ce nom ; que cette question de
propriété était Tobjet du débat et qu'elle a été tranchée par Tar-
rét attaqué, contrairement à leurs conclusions ;
Attendu que le jugement de première instance constatait que
les étiquettes de Mônplot différaient de celles des demandeurs
en cassation ; que ceux-ci ont conclu à la confirmation du juge-
ment par adoption de motifs et qu'ils n'ont pas pris en appel de
conclusions tendant à d'autres modifications que celles relatives
au nom d^Orezza ; que la Cour d'appel constate d'ailleurs que Mod*
plot indique expressément que l'eau d'Orezza qu'il offre au pu*
blic provient de la source Colomba, de même que celle exploitée
pa les intimés est indiquée par eux comme provenant de la
source départementale, noms spéciaux sous lesquels l'une et
l'autre sont connues dans le pays ; qu'en l'état des conclusions
prises devant elle et en raison' des constatations ci-dessus énon-
cées, la Cour d'appel n'était pas tenue, dans le but d'éviter une
confusion qui n'était même pas alléguée, d'ordonner les mesu-
res qui ne lui étaient même pas demandées ; que le moyen n'est
donc pas fondé ;
' Reett .
Art. 4212.
{MarcfucM de fabrlcfue. — Remède* «ecrete. -^ €e«*
«Ion de fonds de commerce comprenaiit des remè-
des »ecre(«. — Pharmacie trantunlse par IMlntei»-
médlalre d'un non-pliarmacleii. — Action en nvl-
\ llté de contrat. — Ce««lon de remédea «eeret*. —
Moyen nouveau. — Clioae Ju^ée.
Le droit à la marque est indépendant de l'usage qu*on en
peut faire ; ainsi^ celui qui a acquis la propriété dune
fnarque peut en poursuivre les contrefacteurs^ alors même
que les produits auxquels elle s'applique seraient desremè-
îles secrets (i) (Résolu par la Cour d'appel).
. En conséquence, une cession de marque de fabrique ne
peut être déclarée nulle comme s' appliquant à des remèdes
secrets et il n'y a pas lieu de rechercher si tel est le carac-
tère du produit sur lequel repose la marque (2) (Id,).
(1) Cf. Cass. crim,,27 mai 1898, Choffé d. Panchèvre, Ann., 98.Î88;
Paris, !23 avi:il 1895, Brigonnet-Naville, An»:, 98.251 ; Paris, 23 décem-
bre 1802, Luper-Mouchet, le Droit, il février 1893 et nombreux arrêts
«ités par Pouillet, Afarg. fab,, n. 128 6i«.
(2-3) Ce que soatenait l'appelant c'était que la cession de lamarqae était
-^ 261 —
La nullité^ pour cause illicite d un objet cédé dans un
contrat (exploitation de remèdes secrets) n'entraîne pas la
nullité des autres éléments de la cession du fonds de corn*
merce qui comprend notamment les marques de fabri-
que (3) (Id.).
IV*est pas nulle la cession d'une officine à un non-phar-
macienySi elle est rétrocédée à un pharmacien (1) (Id.).
(C. de Paris, il avril 1899 ; C. de cass., 13 février 1900. —
Guinet et Cie c. Rocher et antres.)
Jugement rendu par le Tribunal civil de la Seine (3» ch.)
le 16 juin 1898, en ces termes :
Lb Tribunal, Attendu que les sieurs Guinet et Gie revendi-
quant la propriété exclusive des marques de fabrique ayant pour
titre : « Poudre Rocher ou laxatif Rocher » ; « Quina anti-dia-
bétique Rocher à base de glycérine v ; « Pilules benzoïques
Rocher », régulièrement déposées à la date du 28 février i896,ont
fait procéder, par exploits en date des 26, 27, 30 juin et !•' juillet
1896, sur les sieurs Duquesne, Rocher, Michaud et Monnier, à des'
saisies-contrefaçons de marques, dont ils demandent de prononcer
la validité avec confiscation, dommages et intérêts à fixer par
état, insertions et afHches ;
Sur la fin de non-recevoir basée sur ce que les produits pha r-
maceutiques dont s'agit doivent être considérés comme des remèdes
secrets qui^ à ce titre y ne sauraient faire tobjet d'une action en jus-
tice :
intimement liée à la cession du produit illicite qu'elle servait à désigner
et que la nullité de la cession du produit entraînait la nullité de la ces-
sion de la marc[ue. Cf. Paris, 3 février 1898, Tartenson c. Duflot, Ann.,
1901.268. De nombreux arrêts ont décidé que l'exploitation d'un remède
secret ne pouvait donner ouverture à aucune action en justice ( V . Paris,
30 novembre 1876, pilules Morisson, Journ. Irib, comm,^ XXVII, p. C8 ;
Trib. comm. Seine^ 11 juin 1890, Bricemoret c. Gœtz, la Loi^ 30 juin ;
Trib. comm. Seine, 20 mai 1889, Duriez c. Delouche, la Loi, 6 juin). En
tons cas les conventions relatives à un remède secret sont nulles (Cass.,
30 décembre 1863, D. 64.1.61 ; Cass., 17 août 1867, D. 68.1.44 ; Cass.,
8 mai 1868, Journ. Mb. comm., XIX, n. 6.290; Paris, 5 février 1889,
Mercier c. Foulon, la Loi, 11 mars ; Trib. comm. Seine, 10 novembre
1897, Démarquez c. Baboiand et Géraudel, la Loi, 15 décembre), d'une
nullité d'ordre public, qu'il appartient au juge de soulever d'office (V.
notamment Paris, 28 novembre 1868, La ville, Journ. trib. comm., XVIII,
p. 465; Paris, 3 mai 1888, Dame de Rochefort de Luçay c. Déclat et
Lemettais, la Loi, 1*' juin).
(1) On objectait que la cession d'une officine i un non-pharmacien,étant
radicalement nulle, n'avait pu servir de base à la rétrocession à un
pharmacien.
— 262 —
Attendu qu'il est admis en doctrine et en jurispradence que la
propriété d*une marque de fabrique est indépendante de l'usage
auquel elle est appliquée et qu'elle peut faire Tobjet d*une re-
vendication alors même qu'elle s'appliquerait à un remède se-
cret ;
Attendu que si les produits sur lesquels soiit appliquées les
marques revendiquées par les sieurs Guinet et Gie doivent être
considérés comme des remèdes secrets, comme n^étant inscrit
ni au Codex, ni au Bulletin de l* Académie demédecine, il ne sen-
suit pas que l'action des sieurs Guinet et Gie, ayant pour but la
revendication exclusive d'une marque déposée, doive être décla*
rée non recevable ;
Sur la fin de non-recevoir tirée de ce que les sieurs Guinet et
Cie ne seraient pas propriétaires de la marque revendiquée^ par suite
de la nullité de la cession à eux consentie^ la dite cession s'appli-
quant à des remèdes secrets^ et, d'un autre côtéy le syndicat de
créanciers de qui les sieurs Guinet et Cie tiennent leurs droits
n'ayant pu [^acquérir valablement du sieur Rocher, puisque aucun
des membres de ce syndicat n'était pourvu dun diplôme de pharma*
cieni.
Attendu qu'un arrêt de la Gour de Paris, en date du i*' avril
1398, confirmant un Jugement du Tribunal de commerce de la
Seine et passé en force de chose jugée, a souverainement recon-
nu le droit de propriété des sieurs Guinet et Gie ;
Sur la fin de non-recevoir tirée de ce \ique la cession consentie
aux sieurs Guinet et Cie n'aurait pu valablement porter sur le nom
patronymique de Rocher, les noms patronymiques étant de leur na-
ture incessibles :
Attendu qu'en dehors de toute question d'état, aucune dis-
position de loi n'empêche la cession d'un nom patronymique au
point de vue de l'usage industriel et commercial et comme élé-
ment constitutif d'une marque de fabrique ;
Qu'après avoir profité de la cession consentie par lui, le sieur
Rocher est mal fondé à invoquer une prétendue nullité résultant
de rincessibilité du nom patronymique comme élément consti-
tutif de la marque déposée ;
Au fond :
Attendu que l'imitation de la marque ayant fait l'objet du dé-
pôt du 28 février 1896 est justifiée ;
Qu'elle n'est pas d'ailleurs contestée ;
Qu'il convient donc de faire droit aux conclusions desdeman
deurs, en restreignant toutefois à cinq insertions la publicité de-
mandée par le présent jugement.
Par ces motifs. Valide les saisies-contrefaçons suséncncées ,
mM]}m.i\^}iWiV'^mi^
— 263 —
Déclare Duquesne, Rocher, Michaud et Monnier, contrefacteurs
des marques dont s*agit ;
Les condamne conjointement et solidairement à des domma-
ges et intérêts à fixer par état et à l'insertion du présent juge-
ment dans cinq journaux, au choix de Guinet et Gie et aux frais
des défendeurs ;
Fixe à la somme de 100 francs le coût maximum de chaque
insertion ;
Ordonne la confiscation,au profit des demandeurs,des produits
et marques saisis et déposés au greffe du tribunal ;
Condamne, sous la même solidarité, les défendeurs aux dé-
pens.
Arrêt confirma tif de la 2* chambre de la Cour de Paris,
présidée par M. Harel, sur les plaidoiries de M«s Georges
Maillard et Bliegk pour les appelants, DALLONOEyu.LE pour
rintervenant, Desjardin pour rintimée :
La Cour, Vu la connexité, joint les causes et statuant par un
seul et même arrêt sur l'appel interjeté par Rocher, Monnier et
Michaud du jugement rendu par le Tribunal civil delà Seine du
16 juin 1898, sur Tappel interjeté par Rocher des deux jugements
rendus par ledit tribunal le 28 juillet 1898 et sur les interventions
de Delaire ;
En ce qui touche Tappel, formé par Rocher, des jugements des
16 juin et 28 juillet 1898 qui ont accueilli la demande en contre-
façon intentée parla Société Guinet et Cie :
Considérant que la Société Guinet et Cie cessionnaire de trois
marques de fabrique Hgiirées sous forme d'étiquettes portant les
mentions : « Poudre Rocher ou Laxatif Rocher », «Quina anti-dia-
bétique Rocher », ^ Pilules benzolques Rocher », a fait procéder à
la saisie de marques identiques au domicile de Rocher ; que celte
Société Ta assigné devant le Tribunal civil de la Seine pour le
faire déclarer contrefacteur et passible de dommages-intérêts et
qu'elle a obtenu gain de cause par deux jugements dont Tappel
est soumis à la Cour ;
Considérant qu'avant d'examiner les moyens invoqués par l'ap-
pelant, il est utile de rappeler les faits à la suite desquels la pro-
priété de ces trois marques de fabrique a été cédée à Guinet et
Gie;
Considérant qu'au mois de février 1889, Rocher, pharmacien,
qui avait fait une grande publicité pour la vente de ses spéciali-
tés se trouvait dans Timpuissance d'acquitter un passif considé-
rable ; que pour éviter sa faillite il sollicita l'intervention de ses
trois plus forts créanciers,le comptoir Lyon-Allemand, lademoi-
— 264 —
selle Renaudière et le sieur Piatier ; qae ceux-ci furent les pro
moteurs d'un arrangement conclu entr^ Rocher et ses créanciers
syndiqués, aux termes duquel il était affranchi de ses dettes
moyennant Tabandon de son actif, qui comprenait notamment la
cession de ses marques de fabrique ;
Considérant que, par acte sous seings privés du 29 mai 1896
enregistré, le syndicat des créanciers de Rocl^er a rétrocédé au
pharmacien Guinet la propriété de ces marques et que Guinet en
a fait apport à la société qu'il a constituée sous la raison sociale
Guinet et Gie ;
Considérant que la validité de ces transmissions successives a
été contestée par Rocher ; qu'après la saisie pratiquée à son do-
micile, le 26 juin 1896» il a,dès le 27 août suivant, introduit devant
le tribunal de commerce une instance en nullité de son abandon
d*«ctif, dirigée contre le comptoir Lyon- Allemand, Piatier, la de-
moiselle Renaudière et la Société Guinet et Gie; qu*il a prétenda
que Tabandon de son droit de propriété sur des marques de fa-
brique avait été subordonné à des conditions qui ne s'étaient
point réalisées et que ce droit n'avait pas pu être valablement
transmis à Guinet ;
Mais considérant qu'un jugement rendu parles juges consu-
laires le 19 décembre 1896, confirmé le i*' avril 1898 par la
3* chambre de la Cour, a décidé que les créanciers de Rocher
avaient agi dans la plénitude de leurs pouvoirs en vendant à Gui-
net à la date du 29 mai 1896, un actif comprenant la propriété
.des dites marques ; qu'il y a chose jugée sur ce point ;
Considérant que Rocher oppose à Guinet et Gie que leur action
en contrefaçon de marques de fabrique ne serait pas recevable
soit parce que ces marques s'appliqueraient à des remèdes secrets
.et que le caractère illicite du produit vicierait la cession de la
marque qui en serait inséparable, soit parce que cette cession
avait été faite par une convention traitant également de l'exploi-
tation de remèdes secrets ou tout au moins de l'exploitation de
produits pharmaceutiques par des personnes non pourvues du
diplôme exigé par la loi ;
Considérant que ces diverses fins de non-recevoir reposent sur
un moyen unique consistant à soutenir que la propriété d'une
marque de fabrique subit le sort de l'objet qu'elle sert à désigner
et qu'elle participe à tous ses vices de nullité ;
Considérant que cette thèse est erronée ; qu'il est de principe
que la marque constitue une propriété distincte de l'objet sur
lequel elle peut être apposée et susceptible d'être cédée séparé-
ment ; que le droit à la marque est indépendant de l'usage qu'on
en peut faire et des produits auxquels elle s'applique ; qu'ainsi,
celui qui a acquis la propriété d'une marque peut en poursuivre
.'••Pfc!»*:^*»'
TJ|% "
— 265 —
les contrefacteurs, alors même que ces produits seraient des re-
mèdes secrets ; qu'il suit de là que la cession des marques de fa-
brique faite à l'intimée ne serait pas nulle parce qu'elle s'appli-
querait à des remèdes secrets et qu'il n'y a point à rechercher si
tel est le caractère de la Poudre laxative, des Pilules benzoîques
et du Quina anti-diabétique ; que pour justifier la poursuite en
contrefaçon de marques, il suffît de constater l'existence du droit
de propriété de la Société Guinet.et Gie sur ces marques et leur
imitation sur les étiquettes saisies, laquelle est certaine et non
déniée ;
Considérant que l'actif abandonné par Rocher au profit de ses
créanciers ne se réduisait pas seulement à Texploitation de pro-
duits pharmaceutiques ; qu'il s'étendait à tous ses biens, son mo-
bilier, son matériel, ses marchandises, ses créances, un immeu-
ble sis au Parc Saint-Maur, le droit aux baux des magasins où il
exerçait son industrie ainsi qu'à ses marques de fabrique ;
Considérant que la nullité pour .cause illicite d'un des objets
cédés n'entraîne pas la nullité de la cession des marques de fabri-
que qui est licite et qu'il est inadmissible que Rocher puisse se
pré?aloir du caractère illicite d'un des objets compris dans l'aban-
don de son actif pour le reprendre tout entier sans restituer le
prix qu'il en a reçu sous forme de paiement de ses dettes ;
Considérant que les mêmes raisons conduisent à écarter la fin
de non-recevoir tirée de ce que l'acte d'abandon d'actif implique-
rait la cession, par Rocher à ses créanciers non pharmaciens, du
droit d'exploiter des produits pharmaceutiques ;
Considérant, en outre, que si la loi interdit la préparation des
médicaments à toute personne qui n'est pas munie d'un diplôme
de pharmacien, elle n'empêche pas qu'un non-diplômé de?ienne
propriétaire d'une officine soit par héritage, soit autrement ;
Que sans doute il ne peut pas utiliser par lui-môme son droit
de propriété, mais qu'il peut le transmettre à un tiers diplômé,
sans que l'inaptitude professionnelle du cédant ait pour effet
d'entraîner la nullité de la cession ;
Considérant enfin que Guinet et Cie ne revendiquent pas l'usage
du nom patronymique de Rocher, mais seulement la propriété
des trois marques de fabrique sur lesquelles le nom commercial
de Rocher est ajouté à certaines inscriptions et écrit d'une façon
particulière ;
Adoptant au surplus les motifs des jugements des 16 juin et
28 juillet 1898 en tant qu'ils ont trait à Rocher ;
En ce qui touche au contraire l'appel interjeté par Michaud et
Monnier du premier de ces jugements :
Considérant que la demandé formée contre eux par Guinet
et Cie est basée sur un procès-verbal de saisie-description de
— 266 —
marques contrefaites opérée en leur domicile à la date da
i*' juillet 1896 par l'huissier Thiellement ;
Considérant que cet officier ministériel a constaté sarleslifres
de Michaud et Monnier des mentions établissant que ces impri-
meurs avaient accepté, les 25 janvier et 30 mai 1896^ d^exécuter
des commandes d'étiquettes reproduisant les marques litigieu*
ses ;
Sur la première commande :
Considérant quUl n*est point prouvé que les appelants aient
fabriqué et livré de ces étiquettes antérieurement au dépdt des
marques qui n*a eu lieu que le 28 février 1896 ; que d'ailleurs
les faits de la cause établissent la bonne foi de Michaud et Mon-
nier qui ont légitimement imprimé des étiquettes semblables
pendant plusieurs années, sur Tordre de Rocher et qui ignoraient
au moment où ils ont reçu la commande du 25 janvier, que
Rocher n'avait plus le droit de se servir de ses marques ;
Sur la seconde commande :
Considérant qu'il ressort des documents versés au débat qu'au
jour de la saisie-description du 1*' juillet, les étiquettes ayant
fait l'objet de la commande du 30 mai 1896 n'avaient point en-
core été tirées ; que le travail a été interrompu et que le tirage
n'a pas eu lieu ; qu'il n'y a donc eu qu'un simple commencement
d'exécution insuffisant pour caractériser la contrefaçon ;
En ce qui touche l'appel de Rocher contre le jugement du
28 juillet 1898 qui a repoussé l'action en contrefaçon qu'il avait
engagée contre Guinet et Gie et la Société Adrian et Cie :
Considérant que, le 26 octobre 1895, Rocher a fait procéder au
siège de ces deux sociétés à la saisie-contrefaçon d'étiquettes
portant la marque de fabrique Poudre Rocher ou Laxatif Rocher ;
qu'il a formé contre elles une demande en contrefaçon de cette
marque dont il revendique la propriété ; mais considérant qu'il
vient d'être établi que cette propriété appartenait à Guînet et
Gie ; que c'est donc à bon droit que le jugement attaqué a dé-
bouté Rocher de sa demande ;
En ce qui touche les interventions de Delaire :
onsidérant que, depuis que les trois jugements frappés d'appel
ont été rendus, Delaire a acheté une créance due par Rocher à
un sieur Badei, dans le but manifeste de former devant la Cour
une intervention concertée avec l'appelant dont Delaire est l'em-
ployé ;
Considérant que les conclusions de l'intervenant tendent à faire
juger que des avantages particuliers interdits par les articles 597
et 598 du Code de commerce auraient été consentis par Rocher
à quelques-uns de ses créanciers, au détriment de la masse de
ceux qui avaient souscrit à un concordat amiable ;
ttffnmp^^m 1 ,1, 9- W.WM ; " MJM MW *)
— 267 -
Considérant qa*il n'est point permis à an intervenant de modi*
tier Le débat et de demander à la Cour 'ie juger qae oertains
créanciers ont reça des avantages prohibés alors que ces créan-
ciers ne sont point en cause ; que T intervention de Delaire n'est
pas recevable ;
Par ces motifs, Reçoit Michaud et Monnier appelants du juge-
ment du 16 juin 1898, et faisant droit sur leur appel, les décharge
des dispositions et condamnations qui leur font grief; infirme h
leur égard ledit jugement ;
Et statuant à nouveau, déclare la Société Guinet et Gie mal
fondés dans leurs demandes, fins et conclusions contre Michaud
et Monnier ;
Les en déboute ;
Ordonne à leur profit la restitution de Tamen depar eux con-
signée ;
Et statuant sur les appels de Rocher contre le jugement du
16 juin et contre les deux jugements du 28 juillet 1898 ;
Déclare Rocher mal fondédans ses moyens, fins et conclusions
relativement à ses trois appels ;
L*en déboute ;
Confirme à son égard lesdits jugements;
Ordonne qu'ils sortiront leur plein et entier effet ;
Condamne Rocher à l'amende de ses appels ;
Lui donne acte de ce qu'il s'en rapporte à justice sur le mérite
de l'intervention de Delaire ;
Déclare cette intervention non recevable ;
Condamne Delaire aux dépens de son intervention ;
Dit que les dépens, exposés tant en première instance qu'en
appel du jugement du 16 juin 1898, seront supportés 3/4 par
Rocher, i/i par la Société Guinet et Gie qui succombe au regard
de Michaud et Monnier ;
Condamne Rocher aux dépens d'appel des deux autres affaires
jointes et au coût du présent arrêt.
Le pourvoi formé contre cet arrêt a été rejeté par la Cour
de cassation (ch. des Requêtes), le 13 février 1900, en ces
termes :
La Cour, Sur les trois moyens réunis et tirés de la violation et
fausse application des articles 7 de la loi du 20 avril 1810, 597 et
598 du Code de commerce et.l6 de la loi du 4 mars 1889, 1351 du
Code civil, et de l'autorité de la chose jugée, 466 du Gode de pro-
cédure civile, et des principes de l'intervention en cause d'appel ;
Attendu qu'il n'est pas exact de prétendre que l'arrêt attaqué
a repoussé sans donner aucune espèce de motifs à l'appui de sa
— 268 —
décision les conclusions des demandeurs tendant à la nullité d'un
abandon amiable d'actif consenti par Tun d'eux à ses créancie rs
dans des conditions illégales ; que le dit arrêt s*est attaché au
contraire à rappeler avec soin toutes les circonstances dans les-
quelles ce dernier, le sieur Rocher, pour éviter sa faillite, solli-
cita l'intervention de ses trois plus forts créanciers et comment,
à la suite de conventions intervenues à cet effet entre ces der-
niers et leur débiteur, celui-ci avait vainement tenté de faire an-
nuler par justice les dites conventions ;
Attendu qu'en décidant qu'il y avait, à cet égard, chose jugée,
le dit arrêt a pleinement motivé le rejet des conclusions du sieur
Rocher ;
Attendu, d'autre part, qu'en repoussant ces mômes conclusions
par l'exception de chose jugée, Tarrêt attaqué n'a ni méconnu,
ni faussement appliqué les dispositions de l'article 1351 du Gode
civil, ni les principes qu'il consacre, Tobjet de la demande étant
resté le même encore que se fondant sur de nouveaux moyens ;
Attendu, en ce qui concerne les conclusions du sieur Delaire,
intervenant en appel, qu'il résulte des déclarations dudit arrêt
que depuis que les trois jugements frappés d'appel ont été ren-
dus, ce demandeur a acheté une créance dont le montant était
dû par le sieur Rocher à un sieur Badel, dans le but manifeste
de former devant la Cour une intervention concertée avec le dit
Rocher dont le sieur Delaire est l'employé, qu'il n'était pas d'ail-
leurs permis à cet intervenant de modifier le débat en l'absence
des créanciers intéressés ;
Qu'en statuant ainsi, ledit arrêt a satisfait aux prescriptions de
l'article 7 de la loi du 20 avril 1820 et n*a point violé l'article 466
du Code de procédure civile ;
Par CBS motifs. Rejette.
Ch. des req. — M. Tanon, président. — M. Loubers, con-
seiller-rapporteur. — M. MÉRiLLON, avocat général. —
M* Bernier, avocat.
Art, 4213.
IVom patronymique. — Ck^ntrat.— Retnedea seerete.
-^ Marciae de tebplc|ue. — Vin Duflot.
Ne peut revendiquer à titre de marque de fabrique une
dénomination comprenant un nom patronymique^ telle que
Vin Duflot, le tiers qui fonde son droit sur une convention
iiiimii p.,.. i.iim v[L«^}-f Vf w.
— 269 —
par laquelle Pusage de ce nom lui a été cédé, si la conveth
lion a trait à un remède secret^ car une telle convention est
nulle (1).
Est un remède secret toute préparation ayant un carac»
(ère médicinal^ à moins qu'elle ne figure au Codex ou qu'elle
n'ait été acquise ou publiée par le Gouvernement, ou qu'elle
n*ait été insérée dans le Bulletin de l'Académie de méde-
cine (2).
(C. de Paris, 3 février 1896. — Tartenson c. Daflot et Vieillard.)
La 3" chambre du Tribunal civil de la Seine a, le 28 dé-
ceipbre 1895, rendu le jugement suivant:
Le Tribunal, Âttenda que Tartenson, qui justifie avoir déposé
régulièrement le 16 juillet 1881, à titre de marque de fabrique, la
dénomination Vin Duflot pour un vin antirhumatismal dont il
se dit l'inventeur, revendique le droit exclusif d'exploitation et
reproche à Duflot d*y avoir porté atteinte en déposant lui-même,
postérieurement, une marque identique;
Qu'il impute à Vieillard, successeur de Duflot, la même usur-
pation frauduleuse et réclame, à l'encontre des deux défendeurs,
outre Taunulation du dépôt effectué par eux, le 17 février 1894,
des dommages-intérêts et la publication du jugement ;
Attendu que, de leur côté. Vieillard et Duflot ont assigné aux
mêmes fins Tartenson et Grand, en demandant tant l'annula-
tion du dépôt du i 6 juillet 188i, avec ses conséquences de droite
que celle des conventions intervenues entre Tartenson et Duflot
le 25 novembre 1880 ;
Attendu que Tartenson se prétend en droit de conserver le
bénéfice de la marque dont s'agit, en soutenant que toute mar-
que est indépendante du produit auquel elle s'applique et que
la loi de 1857 en garantit la propriété sous la seule condition du
(1) Pour la nullité des conventions relatives à des remèdes secrets,
V. Taffaire Guinet c. Rocher, suprà^ p. 2C0.
Ici le déposant de la marque faisait le même raisonnement qai a
réussi au demandeur dans l'affaire Guinet : il soutenait que la marque
était indépendante du remède secret et que le contrat, nul au point de
vue du remède secret, était valable pour la transmission de la marque.
La 4« chambre de la Cour n*a pas voulu faire cette distinction et a con-
sidéré le contrat comme nul pour le tout.
' (2) Cela résulte formellement de l'article B2 de la loi du 2*1 germinal
an XI, de la loi du 25 prairial an XIII, des décrets des 18 août 1810 et
3 mai 1850 (voir Dalloz, Jur.gén.y V* Médecine, n. 198 et s. ; Trib.corr.
Charleville, 0 mai 1888, D. 90.3.24; Trib. comra. Seine, 20 mai 1889,
Duriez, la Loi, 6 juin; Trib. comm. Seine, 11 juin 1890, Bricemoret, la
Loi, 80 juin).
7r™"r ~ ■ •^' «JPiivvj ifni^v«F
— 270 -
dépôt, sans distinguer si le déposant est ou non autorisé à met-
tre en vente les objets auxquels elle se réfère;
Mais attendu que la dénomination Vin Du/lot n*est point
une appellation de fantaisie ; que^d'autre pari,8on emploi récent
ne permet pas de la considérer comme une désignation néces-
saire et consacrée par Tusage ; •
Attendu que Duflot est donc en principe fondé à s'opposer à ce
que son nom figure sur les produits mis en vente par Tartenson,
même après en avoir voulu ou toléré Tusage pendant de longues
années, le. nom constituant une propriété absolue qui ne p^at
être prescrite par autrui ;
"' Attendu, il est vrai, que le demandeur se prétend autorisé à
l'appropriation qu'il en a faite par le traité antérieur entre lui
et Duflot à la date du 25 novembre 1880 ;
Mais attendu que la dite convention, sans qu'il y ait lieu de
distinguer entre ses stipulations principales et ses clauses acces-
soires, a pour objet la fabrication et la vente d'un produit phar-
maceutique dont la composition ne figure pas au Codex, c'esl-à^
dire d'un remède secret prohibé par la loi du 21 germinal an XI ;
Que par suite, eUe est nulle comme ayant une cause illicite
et que les parties sont irrecevables à en poursuivre l'exécution en
justice;
Attendu que Tartenson a paru s'incliner devant cet obstacle
juridique en déclarant, dans ses conclusions signifiées le 4 dé-
cembre 1894, qu'en présence de Texception de droit soulevée par
Duflot pour se soustraire à l'exécution d'engagements librement
consentis, il lui laissait présentement toute liberté de fabriquer
un vin médical et de l'annoncer comme fabriqué par lui Duflot;
qu'enfin il a conformé sa conduite à cette déclaration en dépo-
sant comme marque nouvelle la dénomination Vin Tartenson^
encore appliquée à une préparation de même nature ;
Attendu que pour les motifs qui militent contre la prétention
de Tartenson, il y a lieu d'admettre au contraire celle de Duflot
et Vieillard sauf en ce qui concerne les dommages-intérêts ; que
ceux-ci ne justifiant d'aucun préjudice appréciable, la condam-
nation aux dépens constituera une réparation suffisante ;
Par gbs motifs, Déclare nuls tous dépôts de marque de fabri-
que elTectués par Tartenson, sur lesquels le nom de Duflot se
trouverait apposé ; fait défense à Tartenson et à Grand de faire
usage à l'avenir de la dénomination Vin Duflot sur leurs étiquet-
tes et prospectus.
Ce jugement a été confirmé par la 4* chambre de la Cour
de Paris, le 3 février 1898, en ces termes :
— 271 —
La GooRyGonsidérant qu'aux termes d'une convention du 25 no-
vembre 4880, qui sera enregistrée en même temps que le présent
arrêt, Duflot devait s'occuper de la vente d'un produit pharma-
ceutique dont Tartenson se disait l'inventeur et que celui-ci
croyait propre à la guérison des afTections arthritiques ; que,
dans la commune intention des parties, cette préparation avait
un caractère médicinal ; qu^elle ne figure pas au Godex ; qn^elle
n^a été ni acquise ni publiée par le gouvernement ; qu'elle n'a
pas été non plus insérée au Bulletin de P Académie de médecine^
en conformité du décret du 3 mai 1850 ; qu'elle constitue donc
un remède secret ;
Gonsidérant que la convention susvisée stipule formellement
que la formule dénommée « restera secrète entre les parties et que
Duflot ne pourra la divulguer sans Tautorisation écrite de Tar-
tenson » ; qu'il importe peu que les parties aient inséré dans diffé-
rents journaux, à titre de réclames, des articles qui contenaient
une formule prétendue de cette préparation, formule différente,
du reste, de celle indiquée dans la convention ; que celle-ci n'en
conserve pas moins son caractère de remède secret ; que la con-
vention du 25 novembre 1880, qui est relative à l'exploitation
dudit remède, est, par suite, nulle comme ayant une cause illi-
cite;
Que Duflot, antérieurement à ladite convention, n'a jamais
donné à Tartenson le droit d'incorporer son nom dans une mar«
que de fabrique ; que c'est dans cette convention seulement que
se trouve pour Tartenson la source du droit de faire usage du
Aom de Duflot ; mais que ladite convention étant nulle ne peut
produire aucun effet ; que la demande de Tartenson manqué donc
de base légale ;
Adoptant, au surplus, les motifs des premiers juges en ce qu'ils
ne sont pas contraires & ceux qui précèdent ;
Par ces motifs, Gonflrme..,
4« eh. de la Cour. — M. Dupont, président. — M. Mé-
RiLLON, avocat général. — M«» Cadsel et Flogny, avocats.
Art. 4214.
Marcfiies de ftibriqae. -> Dénomliiatloiifi. — Produits
pharmaeeutlques.— Antlpyrlne.— Marque» étran-
Sèree.
Si nul produit pharmaceutique ne peut être breveté, la
— 272 -
fabrication d'un produit de même nature peut faire^ au
contraire f l'objet d'un droit privatif et son titre seul être
déposé utilement (1).
Mais la dénomination choisie pour désigner le produit
pharmaceutique y à la différence de tout autre produit^ doit
être une dénomination de fantaisie et non pas une marque
usuelle et nécessaire^ capable de révéler, par son seul
énoncé, soit la nature particulière, soit la vertu propre et
médicale du produit déposé (2).
La dénomination Antipyrine ne peut constituer une mar-
que de fabrique parce qu'elle est un simple dérivé de Vadr
yec/f/" € antipyrétique », usité depuis près d'un siècle pour
désigner le caractère des substances fébrifuges, qu'elle a été
choisie par l'inventeur du produit pour remplacer, dans
les besoins de la pratique, le nom purement scientifique de
€ ditnéthyloxyquinizine *,qu'elle est entrée, d'emblée,dans le
vocabulaire des médecins et des pharmaciens et a été uni-
versellement adoptée par les malades même les moins in-
tellectuels (S).
Une société française, cessionnaire du droit de fabriquer
un produit inventé par un Allemand, a le droit, de par la
loi du a juin 1887, de faire protéger en France la marque
affectée à ce produit, sans qu'il y ait à examiner si cette
marque est protégée ou non en Allemagne (Résolu par le
jugement infirmé) (4).
(i) Ce que . vent dire la Cour c'est qoe Tinventear d'un prodmt, «Til
ne peut s'en réserver le monopole par un brevet, peut, tout an moins,
s'assurer une marque pour désigner le produit préparé par loi-même ou
par ses ayants droit ; cette marque peut être une dénomination, mais à
la condition que cette dénomination né soit pas la désignation usuelle
et nécessaire du produit.
(2-3) Cf. Paris, 8 février 1898, Chloralose, Ann., 08.216 ; Paris, 10 mars
1898, Salol, Ann,, 98.221. En revanche ont été protégées pour des pro-
duits pharmaceutiques les dénominations Exalgine (Paris, 28 avril 1895,
Ann,, 98.2M), Giycero-Kola (Grenoble, 31 janvier 1897, A nn., 99.341) et
toutes celles citées par Pouillet, Marq, fab.^ n» 68 6û.
(4) Le jugement a été infirmé, au fond, par la Cour, mais la Cour n'a
pas eu à statuer sur ce point : la décision des premiers juges conserve
donc, dans cette partie, sa valeur théorique.
L'étranger qui a son établissement en France jouit pour les prodoits
de cet établissement de la pleine protection, aux termes de Partide 5
de la loi du 23 juin 1857, sans aucune condition de réciprocité ; la so-
ciété française qui exploite, dans un établissement français, une marque,
même en vertu d'un contrat avec un étranger, ne semble pas avoir
moins de droits.
Le jugement parait, du reste, considérer que même l'étranger, aux
— 273 —
(Trib. ciY. Seine, 26 juillet 18d8 ; G. de Paris, 4 mai 1900. — Chambre
syndicale des pharmaciens da département de la Seine c. Cie pari-
sienne des couleurs d'Aniline.)
La 3* chambre du Tribunal de la Seine, sous la prés>-
dence de M. LEFEBVRE-DEyAnx,avait,le 26 juillet 1898;rendu
le jugement suivant :
Le Tribdnal, Attendu que RiethS) agissant tant en son nom
personnel qu'en qualité de président de la Chambre syndicale
des pharmaciens du département de la Seine, a introduit contre
la Compagnie parisienne de couleurs d'Aniline, le 26 janvier
1897, une action ayant pour but de faire décider par le tribunal
que la Compagnie de couleurs d'Aniline est sans droit pour reven-
diquer la propriété exclusive de la dénomination Antipyrine et
de faire prononcer la nullité de la marque déposée par elle le
iS février 1888;
Attendu que la dénomination donnée à un produit pharma-
ceutique par Tinventeur ou premier préparateur est susceptible
d appropriation lorsque cette dénomination n'est pas devenue le
moyen usuel et nécessaire pour faire comprendre la nature du
produit et n'est pas tombée ainsi dans le domaine public ;
Que les dispositions de la loi des 23-27 juin 1857 protègent
aussi bien les produits pharmaceutiques que les autres produits
fabriqués :
Attendu que la dénomination Antipyrine adoptée par le doc-
teur Knorr en 1884 pour désigner un produit appelé d'abord par
lui Dimethyiozyquinizine, au cours de travaux ayant pour but
de faire artificiellement de la quinine, est un nom arbitrairement
choisi par l'inventeur en vue de s'en assurer l'usage exclusif ;
qu'il présente le caractère d'originalité exigé par la loi de 1857 ;
Que si i'étymologie du nom rappelle une des propriétés thé-
rapeutiques attribuées, à l'origine, au produit, il n'est pas pos-
sible de dire que ce soit un nom empruntée la substance faisant
1 élément principal et actif du remède ;
Que la dénomination Antipyrine est si peu un terme générique
nécessaire à la désignation du produit la Diméthyioxiquinizine,
qu'il en existe une autre « Analgésîne » donnée en 1897 pour indi-
quer le même produit et que ce sont précisément les propriétés
analgésiques du médicament qui en font le succès ;
termes de Tarticle 6, c'est-à-dire sous condition de réciprocité pour les
produits de ses établissements situés à l'étranger, a droit à la protec-
tion sans avoir à justifier que la marque est protégée dans le pays d'ori-
gine (V. en sens contraire, Pouillet, îdarq, fab,^ n. 333 bis^ et s., avec
jurisp. citée et Trib. civ. Seine, 20 mars 1897, Hugo Schneider c. Bois.
son, Ann,j 98.5). G. M.
18
^r^^^-
— 274 —
Que la dénomination Antipyrine doit être rangée dans la catë*
gorie des noms de fantaisie pouvant constituer des marques de
fabrique ;
Qu'à l'appui de sa demande Riethe soutient ensuite que la
marque revendiquée serait dans le domaine public ;
Mais attendu que rien ne prouve que le docteur Knorr ou ses
cessionnaires aient renoncé à leurs droits, qu'ils aient abandonné
au domaine public une désignation prise par eux dans leur ex-
clusif intérêt ;
Que les documents du procès établissent, au contraire, que,
dès le H février 1887, la Compagnie parisienne de couleurs
d'Aniline a, avec Tassentiment de Knorr lui-même, qui l'atteste
pris un brevet pour le procédé de production des Oxypirazols
connus dans le commerce sous le nom (T Antipyrine ;
Que Tannée suivante, le 18 février^ elle en a pris un nouveau
complétant et perfectionnant le premier, et que, le même jour,
elle a déposé comme marque de fabrique la dénomination Anti-
pyrine ;
Que le certificat de dépôt énonce : « la marque consiste dans
la dénomination Antipyrine et constitue la marque de fabrique
de la société » ;
Attendu que, cette dénomination étant bien l'élément essen-
tiel de la marque déposée, ainsi que l'explique la description
ainsi conçue : « La marque est caractérisée par la dénomination
Antipyrine que nous donnons à un produit fébrifuge, antisep-
tique et pouvant avoir encore d'autres applications thérapeuti-
ques, de notre fabrication », on doit en déduire que le dépdt fait
en 1885, suffisamment précis dans ses termes, protégeait à cette
date la dénomination Antipyrine ;
Qu'il est donc à tort allégué que le mot Antipyrine serait de-
venu une dénomination du domaine public, par suite de Tinac-
tion prolongée de la compagnie défenderesse ;
Attendu, quant à la régularité du dépôt, que le demandeur
prétend que la compagnie défenderesse, cessionnaire du droit
d'exploiter le produitinventé parle docteur Knorr,ne pouvait avoir
plus de droits en France que celui-ci et la maison d'Hoescbst-
sur-le-Mcin n'en avaient dans leur propre pays, ne saurait vala-
blement revendiquer la dénomination Antipynne comme marque
de fabrique ; qu'il expose qu'au moment où cette dénomination
a été employée pour la première fois^ née sous le régime de la
loi d'Empire du 30 novembre 1874, elle a suivi le sort de toute
marque composée exclusivement de lettres, chiffres ou mots,
qui, aux termes de la loi, n'était pas protégée ;
Mais attendu que, si l'interprétation de la loi de 1857 permet
à un négociant allemand de [faire protéger en France la marque
!'^M"^W1^!"
— 275 ~
qu'il y dépose, sans qu'il soit besoin d'examiner la possibilité
pour lui de faire respecter cette marque en Allemagne, à plus
forte raison une société française, cessionnaire da droit de fa-
briquer un produit inventé par un allemand, a-t-elle le droit,
usant des facultés que lui accorde la loi précitée, de déposer
sa marque de fabrique et de la faire protéger en France ;
El Qu'à ce point de vue encore la marque déposée en 1888 n'est
pas nulle ;
Qu'il ressort de ce qui précède que la dénomination Antipyritie
créée par le docteur Knorr et régulièrement déposée en France^
le 18 février 1888, par la Compagnie parisienne de couleurs
d'Aniline, constitue la propriété exclusive de cette dernière ;
Que la demande de Riethe ne doit pas être acceptée ;
Par ciEs motifs, Déclare le demandeur mal fondé en ses actions
et conclusions, l'en déboute et le condamne aux dépens.
Le Syndicat des pharmaciens de Paris el de la Seine a
relevé appel de cette décision.
La 1" chambre de la Cour de Paris, sous la présidence
de M. Ricard, après plaidoiries de M® Allart pour les appe-
lants el de M® Pouillet pour la Société des couleurs d'Ani-
line, a statué dans les termes suivants :
La Cour, Considérant que, le 26 janvier 1897, le président de
la Chambre syndicale des pharmaciens de Paris et de la Seine a
introduit contre la Société parisienne des couleurs d'Aniline une
action ayant pour objet de faire décider que ladite compagnie est
sans droit pour revendiquer la propriété exclusive de la déno-
mination Antipyrine appliquée à un produit pharmaceutique fa*
briqué par elle, et de faire, en conséquence, prononcer la nullité
de la marque de fabrique déposée par elle sous cette dénomina-
tion, au greffe du Tribunal de la Seine, le 18 février 1888 ;
Considérant que cette demande a été déclarée mal fondée ;
que, pour ainsi statuer, les premiers ju^es se sont fondés sur ce
principe que l'inventeur ou premier préparateur d'un produit
pharmaceutique est autorisé à s'approprier d'une manière exclu-
sive la dénomination de ce produit, à la condition seulement
qu'elle ne soit pas usuelle et nécessaire, qu'elle ne révèle ni la
nature^ ni la vertu substantielle du produit ; qu'en fait, les pre-
miers juges ont vu dans le mot « Antipyrine » une appellation de
pure fantaisie» choisie arbitrairement par l'inventeur du produit,
le docteur Knorr, et de nature à satisfaire par le simple dépôt
de ce mot aux prescriptions de la loi des 23-27 juin 1857 qui pro-
tège la fabrication du produit pharmaceutique au môme titre
que tous autres produits fabriqués ;
— 276 —
Considérant qae le jugement entrepris ajoute, à titre d'exem-
ple, que le mot Antipyrine est si peu générique et nécessaire
que le produit ainsi désigné par le docteur Enorr aurait pu Têtre
indifféremment par tout autre mot, et entre autres par celai
d' (c analgésine >» exprimant la vertu dolorifuge du remède;
qu^enfin il est fait observer par la décision dont est appel que la
Société parisienne des couleurs d'Aniline n'a cessé de revendi-
quer à aucun moment le monopole de la fabrication du produit
déposé sous le nom Antipyrine ; qu'ainsi ce mot n'est pas tombé
dans le domaine public et a été à bon droit approprié par ladite
société ;
Considérant qu'il convient d'examiner la portée juridique de
la décision dont est appel et les moyens de fait relevés à Tap-
pui de cette décision ;
Considérant que des dispositions rapprochées de la loi du
5 juillet 1844 sur les brevets d'invention et de la loi des 23-27
juin 1857, sur les marques de fabrique. Il résulte bien que si
nul produit pharmaceutique ne peut être breveté, la fabrication
d'un produit de même nature peut faire, au contraire, Tobjet
d*un droit privatif et son titre seul être déposé utilement ; qa*il
est par ce moyen protégé par la loi à l'égal de tout autre produit
fabriqué ; que, cependant, pour qu'il en puisse être ainsi et qu'il
soit à la fois satisfait aux dispositions spéciales des lois de 1844
et de 1857, il est indispensable que la dénomination choisie pour
désigner le produit pharmaceutique, à la différence de tout autre
produit, soit une dénomination de fantaisie et non pas une
marque usuelle et nécessaire, capable de révéler par son seul
énoncé soit la nature particulière, soit la vertu propre et médicale
du produit déposé ; que s'il en était autrement, tout fabricant
de produit pharmaceutique s'assurerait aisément le monopole
de la vente du produit en même temps que celui de sa fabrica-
tion et ferait échec aux dispositions susvisées des lois de 1844
et 1857 ;
Gonsidérant,dès lors,que le seul point à examiner dans l'espèce
soumise à l'appréciation de la Cour, est de savoir si le mot An-
tipyrine, en le supposant régulièrement déposé par la Société
parisienne des couleurs d'Aniline, est un mot banal et de fantaî-
sie, arbitrairement choisi en vue d'un dépôt légal comme l'ont
pensé les premiers juges, ou si, au contraire, il a été intention-
nellement adopté par son auteur le docteur Knorr pour le faire
accepter dans le monde médical et pour répondre aux besoins
de la thérapeutique ;
Considérant qu'à ce point de vue tout concourt à établir que
le mot adopté par Knorr, loin de relever du capHce ou de la
fantaisie, a été par lui emprunté au vocabulaire médical ; que,
UMF IL MM l|l .Ul"ll"if |JPm.llJM»W \y^ WflVffi
— 277 —
par son origine, son objet, et l'asage qui en a été fait par ce
savant, ce mot révèle tout ensemble une découverte scientiûque
et une application de cette découverte à Part de guérir ;
Considérant, en effet qu'il n'est pas contesté que le docteur
Knorr a simplement substitué le mot Antipyrine à une formule
chimique primitivement donnée au produit par lui découvert ;
qu'en .effet, appliqué à la recherche d'un procédé chimique de
fabrication artiûcielle de la quinine et de la quinizine, deux subs-
tances essentiellement fébrifuges ou antipyrétiques, il a,au cours
de ses recherches, découvert un produit nouveau, considéré par
lui comme un fébrifuge plus actif que les deux autres ; qu'il a
d'abord donné à ce produit le nom purement scientifique de
« diméthyloxyquinizine *», mais que bientôt pour les besoins de la
pratique, il a substitué à ce nom celui d"* Antipyrine , simple dé-
rivé de Tadjectif « antipyrétique », usité depuis près d'un siècle
pour désigner le caractère particulier des substances fébrifuges ;
ainsi, à vrai dire,le mot à*Antipyrine désigne clairement unremède
spécifique contre le feu de la fièvre comme son étymologie l'in-
diqne ;
Considérant, d'autre part, que ce même mot a été employé
par Knorr lui-même et par d'autres savants dans un grand nom-
bre de publications scientifiques, excluant toute banalité ei
toute fantaisie ; qu'en outre, le mot Antipyrine est entré, pour
ainsi dire, d'emblée dans le vocabulaire des médecins et des phar-
maciens ; qu'il a été universellement adopté par les malades,
môme les moins intellectuels ; qu'ainsi il est tombé dans le dOf
maine public avantjméme que la Société parisienne des couleurs
d'Aniline ait tenté de se l'approprier ;
Considérant qu'à la vérité, et postérieurement au dépôt faif
de ce mot par la Société parisienne, VAntipyrine a été reconnue
non seulement comme un fébrifuge actif tel que l'avait jugé le
docteur Knorr, mais aussi comme un dolorifuge énergique ;
qu'il est exact que c'est surtout sous cet aspect médical que son
importance thérapeutique ne cesse d'être proclamée ; que les
premiers juges en infèrent que ce remède aurait pu être appel^
aussi bien (c analgésine » que dénommé Antipyrine ; mais que ce
mot même eût révélé nécessairement Tunedés vertus scientifiques
du produit ; que, d'ailleurs, c'est comme fébrifuge sûr que Knorr
a considéré VAntipyrine et que la Société parisienne des couleurs
d'Aniline s'en est approprié le nom ; que de tout ce qui précède
il résulte que le mot Antipyrine est un nom générique, qu'il n'a
pu. à aucune époque être à bon droit revendiqué comme une
jnarque de fabrique ; que ce mot relève de la science médicale
et non delà fantaisie individuelle; qu'au lendemain de sa créa-
tion par Knorr ou plus exactement de son emprunt au vocabii-
— 278 -
laire des médecins, il est en réalité tombé dans le domaine
public et n'a pu, dès lors, être utilement approprié par la So-
ciété parisienne des couleurs d'Aniline ;
Par ces motifs, Infirme le jugement dont est appel ; et sta-
tuant à nouveau, dit et juge que la Compagnie parisienne des
couleurs d*Aniline est sans droit pour revendiquer la propriété
exclusive de la dénomination pure et simple à^Antipyrine ; pro-
nonce la nullité des marques déposées par elle sous ce seul et
unique titre ; ordonne la restitution de Famende ; condamne la
compagnie intimée en tous les dépens de première instance et
d'appel.
Art. 4215.
Marques de iabrlqae. — Dénointiiatloiis. — Pagiler
Cyano-Fcr.
L'emploi des dénominations^ à titre de marques^ est au-
torisé par la toi du 23 juin 1857, alors que, n'étant pas la
désignation nécessaire du produity ces dénominations ne
tendent pas à attribuer indirectement au déposant^ sous le
prétexte de marque, le monopole du produit lui-même (1).
Les mots Papier Cyano-Fer, employés pour désigner des
papiers photographiques industriels, constituent une déno-
mination susceptible d'être possédée privativement à titre
de marque de fabrique (2).
(C. de Paris, 28 décembre 1900. — Dlle Cl. Joltrain c. Société GéDénde
pour la fabrication des papiers photographiques industriels.)
Ainsi jugé par Tinfirmalion d'un jugement du Tribunal
civil de Versailles, du 6 janvier 1897 (tfas.'/nô., 16 janvier
1897), par la 4« chambre de la Gourde Paris, sous la prési-
dence de M. Gaze, président :
La Cour, Au fond :
Considérant que la demoiselle Cl. Joltrain, en vue de distinguer
(1) V. Ann,^ 98.98, une série de décisions variées eu matière de dé-
nominations. On trouvera cité en note le jugement infirmé par le présent
arrêt.
On comparera avec intérêt le jugement du Tribunal correctionnel de
la Seine, 4 mars 1898, qui refusait de voir une marque dans la déno-
-mination Chlorol, Voir aussi suprà^ p. 271, Tarrêt relatif  Pantipyiine
jet les arrêts cités en note*
r
Zf^^^^rm^^^^mv.**' M
— 279 —
des papiers industriels fabriqués par elle, a fait régalièrement^ le
15 février 1884, le dépôt de la marque litigieuse dont il est justi-
flé qu'elle avait antérieurement l'usage exclusif;
Qu'il est établi d'autre part, que la société intimée a mis en
vente sous la même marque des produits similaires provenant de
sa fabrication ;
Considérant que cette marque consistant dans la dénomination
de Papier Cyano-Perj si elle paraît se rattacher au [procédé en
usage pour utiliser le produit, ne contient nullement la formule
scientifique de sa fabrication ;
Et considérant que de l'esprit de la loi du 23 juin 1857, comme
du texte même de son article i*% il résulte que cette loi a auto-
risé remploi des dénominations à titre de marques, alors que,
n'étant pas la désignation nécessaire du produit, ces dénomina-
tions ne tendent pas à attribuer indirectement au déposant sous
le prétexte de marque, le monopole du produit lui-même ;
En ce qui touche la réparation du préjudice :
Considérant qu*en l'état des documents soumis à la Cour et eu
égard au dommage réellement éprouvé par l'appelante, la
demande des insertions dansles journaux n^est point justifiée ;
Que la somme de 5,000 francs doit être réduite dans une forte
proportion ;
Qu'il échet^ d'autre part, de réduire le chiffre de l'astreinte et
d augmenter le délai après lequel elle sera encourue ;
Par ces motifs, En la forme :
Reçoit la demoiselle Cl. Joltrain appelante du jugement du Tri-
bunal civil de Versailles, en date du 6 janvier 18S7 ;
Au fond :
Met à néant l'appellation et ce dont est appel ;
Emendant, décharge la demoiselle Cl. Joltrain des condam-
nations contre elle prononcées et des dispositions du jugement
lui faisant grief :
Statuant à nouveau ;
Dit que les mots Papier Cyano-Fer constituent une dénomina-
tion susceptible d'être possédée privativement à titre de marque
de fabrique ;
Dit que cette marque est la propriété exclusive de la demoiselle
Cl. Joltrain ;
Fait défense à la Société générale pour la fabrication des pa-
piers photographiques industriels de s'en servir à l'avenir pour
la désignation de ses produits, de quelque manière et sous quel-
que forme que ce soit ;
Dit que ladite société sera tenue de la faire disparaître dans le
mois du présent arrêt de tous prospectus, prix courants, catalo-
gues, étiquettes, en-tétes de lettres et généralement de tous im-
— 280 —
primés et écrits quelconques et cela à peine de iO francs par jour
de retard pendant un mois, passé lequel délai il sera fait droit;
Et pour réparation du préjudice causé déjà à l'appelante ;
Condamne la Société générale pour la fabrication des papiers
photographiques industriels à payer à la demoiselle CI. Joltrain
la somme de 200 francs à titre de dommages-intérêts ;
Pour le surplus de ses demandes, déclare la demoiselle Cl. Jol-
train mal fondée dans ses demandes, fins et conclusions d^appel ;
L'en déboute ;
Déclare la Société générale pour la fabrication des papiers
photographiques mal fondée dans ses demandes, fins et conclu-
rions contraires au présent arrêt ;
' L'en déboute ;
Ordonne la restitution de Tamende ;
Et condamne ladite société en tous les dépens de première ins-
tance et d'appel et ce, au besoin, à titre de supplément de dom-
mages-intérêts. '
Art. 4216.
Marques de tebrlque.— Dénoinliiatloiis.— Produite
pharmaceutiques. — CcMiltar aaponlné. — Tei
L'expression Coaltar saponihé ne constitue point une
marque de fabrique^ parce qu'elle désigne un médicament
antiseptique obtenu par la combinaison du coaltar et de
la saponine, que ces tei'mes sont entrés depuis longtemps
dans la langue usuelle et que le produit figure notamment
dans le Manuel de Pharmacie de Dorvault sous le titre de
c Coallar saponiné ou saponifié » (1).
(G. de P«ris, 13 mars 1900. — Le Bœuf c. Gamaud.)
Ainsi décidé par infirmation d'un Jugement du Tribunal
civil de la Seine en date du 16 décembre 1897 :
Considérant que Le Bœuf, pharmacien à Bayonne, a intenté
il Garn^ud, pharmacien à Paris, une demande tendant à faire
déclarer que la dénomination de coaltar saponiné employé par
(i) Le demandeur soutenait : qu'il n'y avait pas.en réalité, saponifica-
tion ; que, par suite, l'expression revendiquée n'avait rien de nécessaire
et qu'elle servait à désigner depuis longtemps, en fait, le produit de
Le Boeuf, à rexclusion de tout autre.
— 281 —
lui comme marque de fabrique était sa propriété exclusive ; que
Garnaud ne pouvant pas s'en servir pour désigner le même
médicament, non. plus que des mots a coaltar saponifié » qui
n'étaient qu'une imitation frauduleuse de la marque dç Le Bœuf;
Considérant que cette demande a été admise par un jugement
dont Garnaud a relevé appel et que Ta question au procès est de
savoir si la dénomination de coaltar itaponiné a pu être adoptée
comme marque de fabrique parce qu'elle serait arbitraire et de
pure fantaisie ;
Considérant qu'il est incontestable que le coaltar saponiné déi>
couvert par Ferdinand Le Bœuf, père de Tintéressé, est un
médicament antiseptique obtenu par la combinaison du coaltar
et de la saponifie ;
Que cette découverte a été signalée à l'Académie des sciences
dans sa séance du 25 juin 1860 et qu'on remarque dans le compte
rendu officiel, page 1178, les passages suivants :
ce M. Le Bœuf, pharmacien à Bayonne, a reconnu dés 1850 que
toutes les substances insolubles dans l'eau et solubles dans Fal-
cool forment avec Teau des émulsions stables lorsqu'on ajoute
de la saponine à leur soivité alcoolique. C'est cette propriété de la
saponine qui a été appliquée par cet habile pharmacien au gou-
dron minéral pour en faciliter l'emploi. »
Et plus loin :
Dans le pansement des plaies on obtient « avec Témulsion des
effets bien remarquables où la saponine et le coaltar manifestent
leurs propriétés m.
Considérant que les termes de coaltar saponine sont entrés
depuis longtemps dans la langue usuelle ;
Que le manuel de pharmacie publié par Dervaultenl8ô7 indi-
que le mode de préparation de cet antiseptique sous le titre de
coaltar saponine ou saponifié ;
Considérant que le 10 novembre 1880 l'intimé Ferdinand Le
Bœuf a déposé comme marque de fabrique non pas les trois
mots coaltar saponine Le Bœuf soas lesquels le médicament avait
acquis une grande notoriété, mais seulement les deux mots coal-
tar saponine ;
Considérant que ces expressions ne pouvaient pas être prises
comme marque de fabrique ni devenir une propriété privative,
parce qu'elles ne constituent pas une dénomination fantaisiste
et qu'elles désignent en termes vulgaires les éléments qui com-
posent un produit pharmaceutique ;
Qu'il suit de là que la demande de Le Bœuf était mal fondée
et qu'il échet d'inûrmer le jugement qui l'avait acueillie ;
Sur les dommages-intérêtslréclamés par Vappelant.
Considérant que si l'action dirigée par Le Bœuf contre Garnaud
— 282 —
a'étail pas justifiée, elie n^avait pas le caractère d'une actioik
abusive» vexatoire, pouvant donner lieu à Tailocation de dom-
magae-intéréts et à ineertioas dans les journaux du présent
jugement ;
Par CBS motifs, Infirme..,
Décharge Garuaud des dispositions et condamnations qui lai
font grief.
2*Ch. — M. Harel, président. — M*» Lton-Gaxn elPoca-
LKT, avocats.
Art. 4217.
Marqué de tebiHkiae. — DénomlMsUlaii 4le Auitetale.
— Créollne. -i- Imitetloii frawiitileiMie. — Ci*étillltt#«
— PiHMlait hysléalqtae. — Remède «eerei. -^ Falirir
cation.
Toute désignation pouvant servir à individualiser te
produit d'une industrie, est protégée par la loi de 1857, à
la condition que cette dénomination soit susceptible d'une
appropriation privative et ne soit pas tombée dans le do-
maine public avant le dépôt légal (1).
Constitue une marque valable la dénominaliarkde aréo^
Une, qui est une dénomination arbitraire et de pure fan-
taisie, sans aucun rapport soit avec la composition du
produit^ soit avec Vusage auquel il est destiné (2).
La propriété d'une marque légalement étctblie confère un
droit absolu^ indépendamment de Vusage qui peut en être
fait, et donne au déposant le droit de poursuivre tout con-
trefacteur ; il en est ainsi alors même que le produit
auquel est appliqué la marque pourrait être considéré
comme un remède secret, cette circonstance n'étant pas de
(1-2) Déjà par jugement en date da 19 juin 1897 le Tribunal de la Seine
avait reconnu le droit de Pearson à la marque Créoline et décidé que li
dénomination Crésiline en constituait une imitation frauduleuse (Trib.
Seine, 19 juin 1897, Pearson, La Loi^ 12nov.). V. article sur les déno-
minations, par Georges Maillard, ilnn. 98.2 et s.
En Belgique, Pearson a également fait condamner quelqu'un qui se
servait de la dénomination créoline en prétendant l'appliquer à des
produits de Pearson,dont il disait avoir modifié le mode de présentation.
Lo tribunal civil d'Anvers, 20 mars 1897, Pa«. Belge, 97.3.349, a jugéqne
la dénomination Créoline ne pouvait être employée dans ces conditions
sans le consentement de Pearson (cf. Pouillet, n. 165).
— 283 -
nature à légitimer les cas d'usurpation vis-à'Vis duproprié'
iairede la marque (1).
(G. de Roaen, 29 mars 1899. -- William Pearson c. Crié.)
A la date du 29 janvier 1898, le Tribunal civil de Rouen
avait rendu le jugement suivant:
Le Tribunal, Attendu que par exploit du 10 juillet 1897,
Pearson a fait assigner Crié pour voir dire ; que Pearson est pro«
priétaire exclusif d'une marque de fabrique constituée par la
dénomination Créoline ; que Crié a contrefait cette marque et
sciemment vendu et mis en vente un produit revêtu de cette con*
trefaçon ; qu'il a fait une imitation frauduleuse ou illicite de
cette marque et a sciemment vendu un produit revêtu de cette
imitation frauduleuse ou illicite ; qu'en livrant, sur une demande
de Créoline, un produit étranger au demandeur, il a commis à
regard de celui-ci des actes de concurrence déloyale ; qu'à la
suite d'un procès-verbal de saisie à l'asile Saint- Yon, en date du
25 novembre 1897, Pearson a, par exploit du 7 décembre 1897,
fait assigner Crié aux mêmes lins que précédemment, et ce, à
raison de nouvelles constatations, et l'a, de plus, par le même
exploit, fait assigner en validité de saisie ;
Attendu que la jonction des deux instances est demandée par
Pearson et par Crié ; que d'ailleurs il y a lieu de la prononcer
puisque les deux demandes soulèvent les mêmes questions et ont
trait au même litige entre les mêmes parties ;
Attendu que Crié oppose à Pearson une exception fondée sur
ce que le produit mis en vente parle demandeur sons la marque
revendiquée serait un remède secret ;
Sur l'exception :
Attendu que le produit vendu par Crié sous le nom de créo-
line est plutôt un antiseptique, un désinfectant, qu'un remède
proprement dit; que d'ailleurs, ce produit fut-il un remède,
Pearson n'en pourrait pas moins être propriétaire exclusif de la
marque sous laquelle il le vend ; que, même dans ce cas, il aurait
intérêt à conserver et à défendre son droit de propriété pour le
faire valoir après en avoir régularisé l'usage au point de vue de
l'application des lois sur la police de la pharmacie ;
Sur la propriété de la marque :
Attendu qu'il résulte d'un certificat délivré par le greffier du
Tribunal de commerce de la Seine, qu'à la date du 6 décembre
1888, Pearson a déposé une marque de fabrique consistant en une
étiquette, sans autre signe distinctif que le mot Créoline qui y
(1) Cf. Paris, 11 avril 1899, Gainet, il nn., 1901. 260 et les notes 1-8.
-7T^*^B,w--irM. - '•tmj^w ^9Wf^wvmmmv
— 284 —
figare ; qa'à cette époque le mot Créoline n*était pas dans le do-
maine public^ quMl n'avait pas par lui-môme une signification
déterminée ; qu'il devait, pour être compris, être accompagne
d'un autre terme ou d'une explication faisant connaître ce qu*il
désignait ; qu'il résulte des documents versés aux débats, notam-
ment d'un numéro de VExpress de Mulhouse, en date du 19 juiu
1888, qu'à cette époque le produit appelé Créoline était signalé
au public par des réclames comme une découverte récente de la
maison Pearson : que des publications médicales en ont parlé
en France, en septembre et novembre 1888, comme d^nne subs-
tance nouvelle, mal connue encore, produite et expérimentée en
Allemagne ; que cette dénomination parait avoir été inventée
par la maison Pearson qui s'en est servie pour désigner un de
ses produits et en a fait une marque de fabrique ; qu'en tout cas
le dépôt de cette marque a suivi de près la première apparition
du mot Créoline ; que, dès lors, le dépôt de cette dénomination
inusitée suffit à établir en faveur de celui qui a le plus contribué
à la répandre une présomption de priorité ; que c'est à Crié qu'in-
combe la charge de prouver que le mot Creoh'ne, entre son appa-
rition et le dépôt de la marque était tombé dans le domaine
public et y avait un sens par lui-môme et à lui seul ; que Crié ne
fait pas cette preuve ;<
Sur la contrefaçon et la mise en vente d'un produit revêtu de
la marque contrefaite :
Attendu que Crié ne nie pas avoir vendu en 1897 un produit
autre que celui de' Pearson, dans des flacons revêtus d'une éti-
quette portant le mot Créoline ; que ce fait est d'ailleurs établi,
notamment par un procès verbal de constat de Lieugard,huîssier,
en date du 9 avril 1897 et an procès-verbal de saisie de Wagner,
huissier, en date du 25 novembre 1897; que^Grié prétend que,
sur ces étiquettes où se trouve son nom, le mot Créoline écrit à
la main ne peut être une contrefaçon de la marque de Pearson ;
mais que cette marque consistant uniquement en une déno-
mination, est contrefaite dès que la dénomination est repro-
duite ;
Sur l'imitation de la marque et la mise en vente d'un produit
revêtu de la marque imitée :
Attendu qu'il résulte encore du procès-verbal de saisie ci-des-
sus indiqué que sur une demande de créoline faite par Tadmi-
nistration de l'asile Saint- Yon, Crié a livré le 17 avril un pro-
duit revêtu d'une marque consistant dans la dénomination de
Crésiline ;
Attendu que l'emploi du mot Crésiline, qui n'a pas plus que le
mot de Créoline un sens déterminé par lui-même, a été fait pour
imiter la marque de Pearson, que cela ne saurait être mis en
7»r. ^K-'-T ,- *. s •» r,-
285
doute, puisque Crié s'en est servi pour un produit différent de
celui de Pearson, produit qu'il a livré sur une demande de Gréo-
line, puisqu^il a légèrement modifié la marque CréoHne, parce
qu'antérieurement au 17 avril Pearson, avait par des recherches
et des actes préparé la revendication de ses droits, que l'imita-
tion dont s'agit était destinée à amener et pouvait amener une
confusion entre la marque de Pearson et celle qui imitait cette
marque ;
Sur la concurrence déloyale :
Attendu que livrer sciemment un produit dans des conditions
et avec des procédés propres à tromper sur Torigine de ce pro-
duit, notamment livrerses produits revêtus de la marque d'autrui,
c'est faire acte de concurrence déloyale ; que Crié, notamment
après être devenu adjudicataire de fourniture de Gréoline pour
l'asile de Saint- Yon, a fait à cet établissement des livraisons d'une
substance autre que la Gréoline Pearson sous la marque con-
trefaite Créoline et sous la marque imitée Crésiline ;
Sur la mauvaise foi :
Attendu que la contrefaçon, Timitation, les ventes et mises en
vente, les actes de concurrence qui viennent d'être relevés ont
un caractère essentiellement frauduleux ; que Grié, qui était dépo-
sitaire à Rouen de la Gréoline Pearson, n'a pu par inadvertance
commettre la contrefaçon de la marque de ce produit ; qu'après
avoir contrefait cette marque, craignant les poursuites de Pear-
son, il a substitué l'imitation à la contrefaçon ; que cet ensemble
de faits révèle une mauvaise foi manifeste ;
Sur les dommages-intérêts et autres réparations :
Attendu que le tribunal a des éléments suffisants d'apprécia-
tion pour fixer les réparations auxquelles Pearson a droit à rai-
son du préjudice que lui a causé Grié ; qu'il y a lieu d'abord d'al-
louer à Pearson à titre d'indemnité une somme de i,000 fr., en
sus de tous les frais qui vont être mis à la charge de Grié, au
besoin à titre de supplément de dommages-intérêts ; qu'il con-
vient en outre d'accorder à Pearson la publication du présent
jugement par la voie de la presse dans les conditions qui vont
être déterminées ci-après ;
Sur la saisie :
Attendu qu'elle est régulière ; qu'il y a lieu d'ordonner la des-
truction des marques saisies et contrefaites ou imitées et de dé-
cider que les produits revêtus des marques, produits dont la con-
fiscation n'est pas demandée et dont la destruction ne doit pas
être prononcée en l'espèce, resteront ensuite libres entre les
mains du tiers saisi ;
Par ces motifs, Prononce la jonction des deux demandes
'"V^
-- 286 —
formées par Pearson suivant exploits (la'40 juillet et du 7 dé^
cembre 1897 ;
Et statuant par un seul et méoie jugement, sans s'arrêtera
Texception tirée de ce que la Créoline serait un remède secret,
exception qui est rejetée comme mal fondée ;
Dit que la dénomination Créoline constitue la propriété ezclor
sive de Pearson à titre de marque de fabrique ;
Dit que Crié a depuis moins de trois ans, à Rouen, fait une
contrefaçon de ladite marque appartenant à Pearson et qu'il a
sciemment vendu et mis en vente un produit revêtu de cette con-
trefaçon ;
Dit qu'il a fait depuis moins de trois ans, à Rouen, une imi-
tation frauduleuse de ladite marque appartenant à Pearson et
qu'il a sciemment vendu et mis en vente un prodoit revêtu de
cette imitation ;
Dit que Crié a commis à Tégard de Pearson des actes de con-
currence déloyale en livrant, sur des demandes de Créoli$ie, un
produit autre que celui de Pearson ;
Fait défense à Crié de renouveler ces actes à l'avenir ;
Déclare valable et régulière la saisie du 25 novembre 1897 ;
Ordonne la destruction des marques saisies et contrefaites oo
imitées et dit, qu'après la destruction de ces marques, les pro-
duits qui en sont revêtus seront remis ou resteront aux mains
du tiers saisi qui pourra en disposer à son gré ;
Et, en réparation du préjudice causé, condamne Crié à payer
à Pearson une somme de 1,000 francs à titre de dommages-inté-
rêts ;
Ordonne Tinsertion, aux frais de Crié, du présent jugement
dans deux journaux de Paris ou des départements, au choix de
Pearson, sans que le coût de chaque insertion puisse dépasser
150 francs;
Condamne Crié en tous les dépens qui comprendront le «coût
du procès-verbal de constat, du 9 avril 1897, dont distraction an
profit de M. Macqueron, avoué, qui affirme les avoir avancés ;
Rejette au besoin comme mal fondées pour le surplus les au-
tres demandes et conclusions des parties.
Sur appel, la Cour de Rouen, sous la présidence de
M. Bbrghon, premier président, et sur les conclusions con-
formes de M. ANDRÉ, avocat général, a rendu Tarrèt con-
ârmalif qui suit :
La Cour, Attendu que les premiers juges ont a bon droit,
repoussé la fin de non-recevoir proposée par Crié et tirée de ce
— 287 —
que la Créoline constituerait un remède secret insusceptible à ce
titre de faire l'objet d'une action en justice ;
Attendu, en effet, qu'il résulte des attestations des prospectus
produits et du but même des commandes faites, que la Créoline
est principalement une composition hygiénique et que si néan-
moins elle est aussi employée dans des proportions infinitési-
males à des usages thérapeutiques, cette destination purement
accidentelle ne saurait avoir pour résultat de lui attribuer le ca-
ractère d'un médicament;
Attendu, d'autre part, que lors même que la Créoline pourrait
être considérée comme constituant un remède, cette circons-
tance ne serait pas de nature à légitimer les cas d'usurpation qui
sont reprochés à Crié ;
Que la propriété d'une marque légalement établie comme dans
l'espèce, confère un droit absolu, indépendamment de l'usage
qui peut en être fait et que l'article 2 de la loi de 1857 différant sur
ce point de la loi de 1844 sur les brevets d'invention, donne au
déposant le droit de poursuivre le contrefacteur d'une marque
qui est sa propriété personnelle et dont nul n'a le droit de se
servir sans son autorisation ;
Au fond :
Attendu en premier lieu, que chacun des signes distinctifs
d'une marque pris isolément constitue dans le sens delà loi une
marque de fabrique ; que par suite la propriété de Pearson, qui
a déposé régulièrement la marque de son produit sous la déno-
mination de Créoline, s'applique aussi bien à cette dénomination
qu'aux emblèmes et signes distinctifs dont il l'a accompagnée
par la suite, et que, manifestement, son droit n'a pu être altéré
par l'apposition de son propre nom ajouté à la dénomination
Créoline ;
Attendu, en second lieu, que toute désignation pouvant servir
à désigner le produit d'une industrie est protégée par la loi de
1857 à la condition que la dénomination soit susceptible d'une
appropriation privative et qu'elle ne soit pas tombée dans le do-
maine public avant le dép6t légal ;
Que cette double condition se rencontre dans les faits de la
cause ;
Qu'ainsi, la dénomination de Créoline sous laquelle Pearson a
désigné son produit, est une dénomination arbitraire et de pure
fantaisie sans aucun rapport, soit avec sa composition, soit avec
l'usage auquel elle est destinée ;
Que, d'autre part, il n'est justifié par Crié à qui incombe la
charge de la preuve, d'aucune antériorité ; que le dép6t de la
marque qui a été régulièrement fait le 20 août 1887 est une ré-
ponse péremptoire à la production des divers documents invo-
— 288 —
qués par Crié qui ne remontent pas à une époque antérieure à
4888 et que, surabondamment, Crié lai-môme a fait Taveu for-
mel de la propriété de Pearson par la lettre qu'il lut écriTait le
9 avril 1897 ;
Que vainement il est soutenu que les produits pbarmaceoti-
ques ne peuvent faire Tobjet d'une appropriation privative ; qoHl
importe de distinguer, à cet égard, la marque du produit dont elle
est indépendante ; qu'une marque ou dénomination constitue
Tindication d'un mode de fabrication ou de préparation d^un
produit sans le caractériser intrinsèquement et que s'il appar-
tient à un pharmacien de fabriquer le produit il ne saurait lui
appartenir d'apposer la marque d'autrui sur les produits de sa
fabrication ;
Attendu que, par les motifs des premiers juges que la Goar
entend s'approprier, il y a lieu de déclarer Crié atteint et con-
vaincu des faits de contrefaçon ou d'imitation frauduleuse et de
concurrence déloyale accomplis de mauvaise foi qui lui sont re-
prochés ;
Adoptant au surplus les motifs des premiers juges ;
Sans s'arrêter ni avoir égard à toutes fins et conclusions con-
traires de Crié dont il est débouté ;
Met son appellation à néant ;
Et confirme le jugement attaqué qui sortira son pleio et entier
effet
Art. 4218.
Marciaes de tebrlqae.— Dénomination de tentnlsle.
— Penineular.— Imitation Arandulenae. — Priorité
d'emploi.
Peut être valablement prise comme marque de fabrique
la dénomination « Peninsular » pour désigner, indépendam"
ment de tous autres signes distinctifs, une attache métal-
lique (1).
Est passible de dommages-intérêts, envers le propriétaire
de la dénomination < Peninsular *, le concurrent qui im-
prime sur des factures et sur des cartes « Attache-boutons
dits péninsulaires > (i).
C'est à la date d'emploi et npn à la date du dépôt qu'il
(1) Sur les conditions requises pour qu'âne dénomination puiate eons*
tituer une marque, voïr Ann, y 98.80.
(V) Jugé, au contraire, que Tindustriel qui 9, appliqué le mot anii-fer'
V. «rv «ir^TT^%^
— 289 —
faul se reporter pour déterminer V appropriation de la mar^
que (1).
(C. de Paris, 90 janvier 1900. — Riekmann et Société Haeton
Peninsular c. Pautre.)
Le 25 juin 1897, la 3" chambre du tribunal civil de la
Seine avait rendu le jugement suivant :
Le Tribunal, Attendu que par exploit en date du 4 juin 1895,
Riekmann a intenté contre Pautre une poursuite en contrefa-'
çon;
Que par autre exploit du 4 mai 1896 le même demandeur et
la société « Heaton Peninsular Busson Pastener Go » dont il est
ragent général, ont formé contre Pautre une demande en dom-
mages-intérêts pour imitation frauduleuse de marque de fabri-
que;
Sur la contrefaçon :
Attendu que Riekmann justifie qu'il est titulaire d*un brevet
i lui délivré le 25 août 1892, portant à la fois sur une machine à
poser des boutons de chaussures, laquelle n'est pas en cause,
et sur des crampons ou attache- boutons de forme particulière ;
Attendu que l'attache métallique dont s*agit se caratérise par
2 pointes se terminant par une partie élargie et taillée en biseau
tranchant ;
Qu'elle est décrite, d'une façon précise, dans le mémoire des-
criptif, fidèlement représentée dans les dessins qui y sont an-
nexés, et revendiquée en termes formels ;
Que le tribunal doit donc la considérer comme une invention
brevetable de nature à assurer à son auteur un droit exclusif
d'exploitation, si elle n'est mise en échec par aucune antériorité ;
Attendu que telle est précisément Tobjection de Pautre, lequel
sans nier la fabrication et l'emploi d'attaches identiques, sou-
tient qu'elles sont tombées depuis longtemps dans lé domaine
public et qu'en conséquence on ne saurait lui imputer une con-
trefaçon ;
Mais attendu qu'il n'apporte à l'appui de son assertion aucunes
justifications telles que factures, prospectus ou autres documents
ment à des produits pour la conservation des denrées alimentaires, ne
peut interdire à un négociant en sels d'assaisonnement et conserves de
produits alimentaires,ru8age de la dénomination a authentique anti-fer-
ment d'origine », parce que le mot « anli-ferraent >» est employé techno-
logiquement pour désigner des produits spéciaux combattant la fermen-
tation des matières organiques et ne peut donc être, à lui seul, une mar-
que (Trib. comm., Seine, 29 décembre 1898, Hardy c, Vve de Si-Martin,
La Loi, 15 février 1899).
(1) Jurisprudence constante : Pouillet, Mai^q, fabr., n* 104 ;
--290 —
analogues, et lïe Conclut même pas à une expertise, tandis que
le demandeur produit comme ayant cours dans le commerce
de la cordonnerie des types de crampons avec lesquels rattache
brevetée, par sa pointe élargie et son double biseau tranchant,
présente des difTérences essentielles ;
Que la contrefaçon reprochée à Pautre est donc établie :
Sur l'imitation fraqduleuse de marque :
Attendu qu'il ressort du dép6t efTectué dans les formes ré^a-
Aères, le 28 février 1896, que la société susnommée a pris
comme marque de fabrique la dénomination Peniruular poar
désigner indépendamment de tous signes distinctifs rattaché
métallique brevetée par Riekmann et cédée par lui à la deman-
deresse ;
. Attendu que cette appellation de fantaisie est, au sens de la
loi, susceptible d*appropriation privative et que les déposants
sont en droit d'en interdire toute usurpatio;i ;
• Attendu que Pautre ne conteste pas avoir fait imprimer sur
des factures et sur des cartes les mots Attacke-boutons ditx pe«
nimulaires ;
Qu'il allègue pour tout système de défense qu*il y a entre les
deux dénominations une notable dissemblance s'opposanl â la
confusion ;
Mais qu'il n'est pas besoin de faire ressortir, au contraire^
1 étroite analogie qui existe entre les deux marques et ne peut
manquer d'induire le public en erreur ;
Attendu que de ce second chef la demande est donc égalëmenf
justifiée ;
Attendu que par ses agissements illicites Pautre a causé aax
demandeurs un préjudice dont réparation est due;
' Par ces motifs, Du chef de la contrefaçon du brevet d'inven-
tion ;
Déclare Pautre contrefacteur du brevet susénoncé ;
Déclare valable la saisie pratiquée au domicile du sieur Pan»
tre, suivant procès-verbal de Doré, huissier, à Paris, en date du
20 mai 1895 ;
Prononce la confiscation et ordonne la remise aux deman*
deurs des objets reconnus contrefaits ;
Du chef de la contrefaçon de marque :
Dit que la dénomination Peninsular appliquée aux outils ser
vanta fixer les boutons aux chaussures, gants, etc., constitue la
propriété exe usive des demandeurs à litre de marque de fa-
brique ;
' Dit que la dénomination Peninsular employée par Paatref
pour les produits similaires en est une contrefaçon ;
- 291 —
Prononce la confiscation des appareils destinés à appliquer la
marque contrefaite avec leurs accessoires ;
Condamne Pautre pour toutes causes de préjudice à payer aux
demandeurs, la somme de 200 francs à titre de dommages-inté-
rêts
Sur appel, arrêt confirmatif en ces termes :
La Cour, Adoptant les motifs des premiers juges,
Considérant, en outre, en ce qui concerne l'imitation fraudu-
leuse de la marque, que l'appelant a soutenu qu'il avait pu dé-
signer ses agrafes servant à fixer les boutons de chaussures par
le nom de Peninsular qui aurait été employé longtemps avant
les intimés ; que ceux-ci n'auraient fait le dépôt de la marque
Peninsular que le 28 février 1896 et que, dès le 1er avril 1889, le
Moniteur de la Cordonnei^ie annonçait la mise en vente chez le I
sieur Pocock, 11, rue de Flandre à Paris, d'un outil dit: Penin-
sular, employé pour attacher les boutons de chaussures ; mais
considérant qu'il appert d*une lettre de Pocock, que cet outil
provenait précisément de la maison Adolphe Riekmann ; que
c'est cette maison qui a la première fait usage de ce nom de
fantaisie dont la propriété lui était acquise, indépendamment du
dépôt de la marque de fabrique qui ne crée pas la propriété du
nom mais ne fait que la garantir par une sanction pénale ;
Pjol ces motifs. Confirme
2« eh. — M. Harel, président. — Plaidants : M* Cladd*
CouHiN pour Riekmann et la Société Heaton Peninsular,
et M* Vxl-Durand pour Pautre .
Art. 4219.
Aforciaes de tebriqae. — Dénomlnatloii. — I«eÉi0ive
Pliénlx. — UMiffe illieiCe.
Im dénomination c Lessive Phénix >, nom de fantaisie
régulièrement déposé^ constitue une marque de fabrique (1).
(i) n a été jugé, d'autre part, et cela n'a rien de contradictoire, que
la ùisive Phénix ne se diiférenciant pas des produits similaires, n'était
pas brevetable (Trib. corr. Bordeaux, 2 juillet 1888, le Droit induitrielf
1888.543). La Cour de Paris avait le 8 juillet 1885 {Ann,, 88.56) jugé en
sens contraire.
La dénomination Phénix constitue, d'autre part, une marque dans
l'industrie des cravates (voir trib. corr., 29 octobre 1864, Hayem, Ann.y
64. 188).
— 292-
Le seul. fait par un fabricant^ autre que le propriétaire
de cette marque^ d*avoir proposé^ vendu et facturé ses pro-
pres produits sous le nom de < Lessive Phénix » ou* Les-
sive genre Phénix > constitue une usurpation de marque
de fabrique (1).
(G. cl'Aix, 28 juin 1899. — Picot c. Gouston.)
A la date du 7 décembre 1898, le Tribunal civil d*Aix,
sur les plaidoiries de M* E. Plum (du barreau de Paris)
pour M. Picot et de M« Marids Arnaud pour M. Couston,
avait rendu le jugement suivant :
Le Tribunal, Attendu qae Picot est cessionnaire d'an produit
industriel qui a reçu la dénomination de lessive Phénix, nom abso-
lument de fantatsijs ; que ce nom a fait l'objet d'un dépôt aa
greffe du Tribunal de commerce de la Seine en date du 27 janvier
1897 ; qu*il constitue une marque de fabrique dont la propriété
n'est pas contestée à Picot ;
Attendu qu'au mois de février 1898, Gouston a vendu iOO kilos
de lessive qu'il a facturés lessive Phénix, bien que ce produit fAt
fabriqué par lui-môme ; que, de plus, il résulte des pièces pro-
duites que Gouston a vendu, le 6 avril 1898, 100 kilos de lessive
fabriquée par lui, qu'il a facturés lessive genre Phénix; que le
fait seul d'avoir proposé, vendu et facturé ses produits sous le
nom de lessive Phénix ou genre Phénix, constitue une usurpation
de marque de fabrique ;
Attendu que la mauvaise foi de Gouston est certaine ; que les
faits de manœuvres établis contre lui constituent des infractions
aux articles 1", 7 et 8 de la loi des 23-27 juin 1857 sur les mar-
ques de fabrique et de commerce, et que Gouston a commis un
délit qui crée contre lui l'action intentée par Picot en dom-
mages et intérêts ;
Attendu que le tribunal a les éléments pour en déterminer le
chijQPre ; qu'il y a lieu d'accueillir la demande de Picot en inser-
tion de la décision qu'il sollicite, dans un certain nombre de
journaux ;
(i) Le foit d'ajouter « genre » « ou façon de w ne supprime p«8 plus
la contrefaçon de marque que rusurpatton du nom (voir pour TuBiirpi-
tien de nom, Pouillet, Marq, fab., n« 416;.
Egalement pour une lessive, le Tribunal civil de Poitiers a considéré
comme portant atteinte à la marque c la Violette » des paquets susoep-»
tibles de faire confusion avec ceux du demandeur et portant la mention
« parfumés i la Violette i>,ces deux derniers mots étant en évidence, et le
tribunal adn^el pourtant qu'il serait licite de vendre une lessive «dite
parfumée à la Violette », à condition d'éviter toute confusion (Trib. dv.
Foitièrè, 2 juillet 1900, Jatowski et Loiseau c. Lefort, la Loi, 11 déoesB^
bre 1900).
'^.i«^uii;«| vv v^snp^wfiHmpfVP
— 294 —
- La désignation d'un produit demeure la propriété de
celui qui le premier en a fait usage, alors surtout que^par
un dépôt régulier j il a ultérieurement manifesté sa volonté
de s'assurer la propriété de ladite dénomination (1).
V^xpression Idéal pour désigner des rasoirs^ étant de
pure fantaisie^ constitue une marque valable sHl n*est pas
établi en fait qu*elle était tombée dans le domaine public
de cette industrie (2).
(G. de Paris, 24 janvier 1900. — Longy c. Bain.)
A la date du 8 juillet 1899, le Tribunal de la Seine (11'
ch.) a rendu le jugement suivant :
Le TRiBUNAL,Attendu que Longy a, le 7 août 1895, pour se con-
former à la loi du 23 juin i857, déposé au greffe du Tribanal de
commerce de la Seine une marque dite Rasoir Idéal destinée à
désigner les rasoirs de sa fabrication, indépendamment de jtootes
formes distinctiTes ;
Attendu qu*il résulte du constat dressé par Leprince, haissieri
le 10 décembre 1898, à la requête de Longy, que le sieur Bain
fabrique et met en vente une espèce de rasoirs qu*il dénomme
Vldéal et portant cette dénominatioa inscrite comme marque de
fabrique ;
Attendu que Bain ne conteste pas ce fait, mais qa*ii prétend
que c*est à tort et sans droit que Longy le poursuit en vertu de
l'article 8 de la loi du 23 juin 1857 ; qu'à Tappui de sa préten-
tion, il soutient qne Tadjectif banal et usuel Idéal ne saurait cons-
tituer une propriété exclusive, étant un simple qualificatif du
domaine public et qu*en tout cas aucune confusion ne saurait naî-
tre de remploi simultané de ces deux dénominations différentes
Le Rasoir Idéal d*une part, et V Idéal d'autre part ; qu'eu outre les
deux rasoirs ne se ressemblent pas : Tun étant à monture de
inétal et l'autre à monture de corne ou de celluloïd ;
. Mais attendu que pour déterminer si une dénomination est
susceptible ou non de constituer une marque, de fabrique,il faut
8*attacher au point de savoir si elle'est motivée par un .élément
usuel et nécessaire du produit désigné, ou si, au contraire, elle
est arbitraire çt de pure fantaisie ; que c^est dans ce dernier cas
seulement qu*elle peut devenir l'objet d*une propriété exclusi-
ve ; qu'il en est ainsi certainement dans Tespèce actuelle,radjec-
(1) Rappel d'une jurisprudence constante (voir Pouillet, Marq, fàb.,
n. 104).
' (2) La dénomination Idéale a été protégée comme marque pour les
bougies (Trib. corr. Seine, 17. novembre 1894).
4 > •
— 295 —
lif Idéal étant de pure fantaisie et ne se rapportant à aucun élé-
ment du rasoir en question ; qu*il est sans intérêt de rechercher
si cette ëpithète a pu devenir banale par suite de Tabus qu'en ont
fait les exagérations du langage industriel ; qu'il suffit de cous*
tater que le défendeur ne démontre pas qu'elle soit tombée dans
le domaine public, notamment en ce qui concerne les rasoirs ;
■ Attendu d'autre part que, s*il est vrai que la confusion ne peut
guère se concevoir pour la personne à qui les deux rasoirs sont
présentés en même temps et qui peut en constater les différeo*
ces, il en est autrement de l'acheteur non averti qui veut se pro-
curer un rasoir Idéal parce que cette marque lui aura été recom-
mandée : que la seule chose qui frappe et qu'on retienne sera
répithète Idéal sans considérer si le nom nécessaire et usuel du
produit y est ou non ajouté ; que dé même lea différences de forme
ou de montures de: rasoirs sont sans intérêt, alors surtout que le
dépôt n'est limité h aucune forme particulière et qu'il y est ex-
pressément déclaré au contraire que la marque s'appliquera aux
rasoirs fabriqués par Longy, indépendamment de leur forme ;
Attendu qu'en second lieu le défendeur invoque ce fait qu'an-
térieurement au dépôt de Longy, qui est du 7 août 1895, il avait
lui-même déposé le 26 décembre 1894 une marque dénommée
Idéal machine Bain^ destinée à des rasoirs ;
Mais attendu que, malgré la confusion que pourrait faire naî-
tre ce dernier membre de phrase des conclusions de Bain, ce dé*
pôt s^appliquait, non à des rasoirs, mais à une machine, destinée
à affiler les rasoirs et autres instruments tranchants ; qu'il s'a-
gissait donc d'un produit diiïérent et que, par suite, ce dépôt né
saurait constituer une antériorité à rencontre de celui de
Longy;
- Attendu enfin que Bain rappelle que, le 14 février 1894, Longy
a pris un brevet pour un rasoir de monture métallique qu'il a
dénommé Rasoir Idéale mais que, n'ayant pas payé les annuités
de son brevet, il en a été déchu le 14 février 1895 ; qu'il en con-
clut que la dénomination désignant le produit breveté a subi le
sort du brevet et qu'elle est, par suite, tombée dans le domaine
public ;
Mais attendu qu'ainsi qu'il a été ci-dessus établi, la dénomina-
tion Rasoir Idéal n'est pas une dénomination générique et né-
cessaire du produit ; qu'elle est au contraire tout arbitraire et
de fantaisie, et que par suite elle ne saurait être considérée
comme étant incorporée au produit lui-même pour former avec
celui-ci un ensemble indivisible et qu'elle est restée, après la
péremption du brevet, la propriété de Longy, lequel a manifesté
•ou intention formelle à cet égard au moyen du dépôt sosdi^l^
— 296 —
tlu 7 août 1895, postérieur par conséquent à la péremption du
"brevet ;
Attendu qu'il résulte des inscriptions mômes gravées sur les
tasoir^ mis en vente par Bain avec la mention « Idéal » qu'il en
'est le fabricant ; qu'en outre c*esten pleine connaissance de cause
qu'il a 'commis Timitation frauduleuse de marque et la vente de
produits frauduleusement imités, puisqu'il avait été formelle-
ment invité h y mettre fin, suivant sommation à lui signifiée le
^ octobre 1898 ;
Par ces motifs, Gondatnne Bain à 50 francs d'amende et à
payera Langy 500 francs à titre de dommages-intérêts, ainsi
qu'aux dépens.
Sur appel formé par Bain, la Cour a confirmé la sen-
tence des premiers juges en ces termes :
P Sur le droit de Longy à la marque Rasoir Idéal :
Considérant que Longy a pris, à la date du 14 février 1894,
un brevet d'invention ayant pour objet un rasoir auquel il don-
nait le nom de Rasoir Idéal ;
Considérant que, ce brevet ayant été frappé de déchéance le
14 février 1895, par sqite du non-paiemeni de l'annuité échue &
cette date, la désignation Rasoir Idéal donnée au produit breveté
n'est point, à raison de cette seule circonstance, tombée dans le
domaine public ; qu'en effet cette dénomination n'était point
l'élément générique et nécessaire de la désignation du pro-
duit.;
Qu'elle était, au contraire, arbitraire et de fantaisie et qu'elle
était nouvelle quand J^ongy l'a employée pour la première fois
dans 9a demande de brevet ;
Considérant que Longy a continué à désigner les rasoirs fabri-
<}ués par lui depuis février 1895 par ladite dénomination de
Rasoir Idéal, et qu'il est établi par un certificat émanant de la
imaison Gelle, et par une facture de prospectus émanant de l'im-
primerie Durand, de Melun, lesquelles pièces seront enregistrées
avec le présent arrêt, que Longy a fait usage de ladite dénomi-
nation pour désigner des rasoirs vendus par lui depuis lé 19 fé<
Vrier 1894 jusqu'au 11 octobre 1898 ;
* Considérant enfin que Longy a manifesté, par un dépôt régu-
lier du 7 août 1895, la volonté de s'assurer la propriété de ladite
dénomination dont il est établi qu'il faisait usage habituellement
depuis le 19 février 1894 ;
^ Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Longy était
seul propriétaire de la dénomination Rasoir Idéal, lorsque Schwob
à déposé, le 3 décembre 1894, la marque VIdéal pour être ap«
'^,- ..•* i'*.'***' '^^ *i^ ^
» ,'
— 297 —
posée sur des articles de coutellerie, rasoirs, ciseaux, etc., et
lorsque Bain a déposé, le 26 décembre 1894 la marque Vldéal^
machine Bain, destinée à être appliquée sur des rasoirs ;
Considérant en conséquence que ces dépôts de marque n^ont
pu porter aucune atteinte au droit de propriété de Longy sur la
dénomination Rasoir Idéal et qu*ils ne constituent point au re-
gard du plaignant des antériorités de nature à faire tomber dans
le domaine public la dénomination le Rasoir Idéal antérieure-
ment adoptée et employée par lai et lui appartenant ainsi qu'il
est dit plus haut ;
- Considérant d'ailleurs que cette dénomination est susceptible
de constituer une marque de fabrique, ainsi que Font établi
les premiers juges dont la Cour adopte expressément les motifs
sur ladite question ;
Sur la prévention :
Considérant qu'il est établi par un procès-verbal de constat de
Leprince, huissier à Paris, du 10 décembre 1898, que Bain a mis
en vente et vendu, à ladite date, un rasoir en métal argenté por-
tant sur Tun des côtés du fourreau les mots déposé, V Idéal, bre<»
▼été S. G. D. G, et sur la lame elle-môme la suscription sui-
vante : ce VIdéal, brevetés. G. D. G. » ;
Considérant que ces indications et suscriptions constituent
une imitation de la marque le Rasoir Idéal appartenant à Longy
et que cette imitation est de nature à établir une confusion en-
tre les deux produits ;
Considérant de plus que cette imitation a été, de la part de
Bain, cherchée et voulue, et qu'elle a eu pour but d'établir, en-
tre les deux produits, la confusion obtenue et préjudiciable aux
intérêts de Longy ;
Considérant en effet que Bain n'ignorait pas les droits de Longy
à la marque dont il s'agit ainsi qu'il résulte d'une lettre de lui à
Longy en date du 27 octobre 1898, laquelle sera enregistrée avec
le présent arrêt ; que Longy les lui avait, au surplus, expressé-
ment notifiés et rappelés en tant que de besoin par une somma-
tion de Guérin, huissier à Paris, du 26 octobre 1898 et par une
lettre chargée en date du 30 octobre, môme année, laquelle sera
enregistrée ;
Considérant en conséquence que Bain s'est rendu coupable du
délit d'imitation frauduleuse de la marque de fabrique Longy et
qu'il a été justement condamné de ce chef par les premiers juges,
dont la Cour adopte les motifs en ce qu'ils n'ont rien de contraire
à ce qui précède ;
Par ces motifs. Confirme....
, M. DiTTE, président. — M*" Charles Constant et Decori^
avocats.
— 298 —
Art. 4221.
Marciues de fabrique. — Dénomliiation de AuitaMe.
— Corieide. — Imitation frauduleuse. — Abseace
de eonfVialoo. — Pouranite imprudente. — Doumia-
' ffea-intéréta.
Le mot Coricidê, bien qu'il soie tiré des qualités niéme$
du produit fabriquée bien qu'il éveille Vidée de son empUn^
ne constitue pas la dénomination nécessaire de tout topique
contre les cors, il pourrait donc servir de marque si le dé-
posant justifiait de la priorité d'usage (1).
En tout cas il ne saurait y avoir condamnation correc-
tionnelle pour imitation frauduleuse de marque lorsqu'au-
çune confusion n'est possible entre les produits (3).
Une poursuite non justifiée devant le tribunal correction"
nel.bien qu'elle ne soit pas à qualifier de téméraire et vexa-
toire^ peut donner lieu à des dommages-intérêts si ellea été,
au moins Mgèrement et imprudemment engagée et il y. a lieu
de tenir compte du préjudice particulier que le poursuivi a
subi, à raison de la nature de sa profession (3).
(Trib. corr. Cognac, 1*' février 1899. -* Lebrun c. Pharmaciens
de Cognac.)
Le sieur Lebrun, pharmacien à Paris, a acquis, en 1887,
âe la Compagnie générale des anliseptiques la marque
Coricide russe, déposée le 16 décembre 1882. Il poursui-
vit d'abord en concurrence déloyale quelqu'un qui em-
ployait la marque Coricide français^ il fui débouté de sa
demandé (Paris^ 24 octobre 189i, Esménard, Gaz. Pal.t
93.1.2, 2* partie). Puis en 1893 il renouvela le dépôt en
déclarant revendiquer aussi la dénomination Coricide
prise isolément et fit condamner pour imitation fraudu-
leuse de marque un concurrent qui se servait de l'expres-
sion Vrai coricide (Paris, 4 février 1897, Garùaud, Gaz.
PaL., 13 mars 1897). Il introduisit alors toute une série
de poursuites correctionnelles contre divers pharma*
(i) Cf. Pouillet, Marq, fab,, n. 46.
(2) Cf. Pouillel, Marq, fab,, n. iS\ ei B, I
(3) Pour les poursuites, de bonne foi mais imprudentes, cf. en ma-
tière de brevets, Douai, 16 février 1852.* Jiém. comm. et tiuf., 1858, 11,
506 : Dijon, 2 décembre 1886, Ann., 87.24 ; Paris, 29 octobre 1888, Ânn,,
90.277.
■jUMjiji. .w,.l^[t>JWiaiiPjnw wpv }^mmsm\fffm^v
— 299 —
ciens de France ; il obtint gain de cause devant les Tribu*
•naux d'Orléans et de Poitiers ; il fut débouté par les
Tribunaux de Toulouse (11 novembre 1898, Gaz. Pal.^
28 décembre), de Sarlat (3 décembre 1898] et de Bagnères-
de-Bigorre.
Devant le tribunal de Cognac, les pharmaciens pour-
suivis arguaient d'un usage du mot Coricide, antérieur au
dépôt initial de 1882. En présence de cette démonstration,
M. Lebrun se désista, mais les prévenus, repoussant ce
désistement^ ont réclamé reconventionnellement des dom-
mages-intérêts.
Jugement en ces termes :
Le Tribunal, Sur Faction principale :
Attendu qae Lebrun,ces8ionnaire de la compagnie générale des
Produits antiseptiques et excipant du dépôt légalement effectué
d'une marque de fabrique consistant en la dénomination d'un to«
pique pour les cors désigné et connu sous le nom de Coricide
russe ou simplement Coricide^ a assigné les sieurs Gorvaizier, Har*
mand, Saint-Mëzard et Manseau pour s'entendre condamner aux
peines édictées par la loi sur la contrefaçon et Timitation fraudu-*
leuse et chacun' en 1,500 francs de dommages-intérêts;
Attendu que les défendeurs reconnaissent la matérialité- des
faits relevés à leur charge, mais dénient à Lebrun tout 4roit pri*
vatif à i*usage de ladite marque ;
Attendu qu'il est de principe qu'une dénomination suflRt à cons-
tituer une marque indépendamment de tout signe ou emblème,
de toute disposition extérieure si elle est considérée comme suf-
fisamment arbitraire et fantaisiste ; qu'en l'état, bien que le mot
Coricide soit tiré des qualités mômes du produit fabriqué, bien
qa'il éveille l'idée de son emploi, on ne saurait soutenir qa'il
constitue la dénomination nécessaire de toat topique contre les
cors ; que ce mot donnant au produit une sprte d'individualisation
apparaît, au contraire, comme suffisamment arbitraire et fantai-
siste et susceptible, en conséquence, d'appropriation privative ;
Mais, attendu que fùt-il établi que les prévenus avaient con-
naissance du dépôt Lebrun, rien dans leurs procédés n'implique
une intention frauduleuse ; qu'au contraire leur effort pour
différencier leur spécifique de celui de Lebrun et éviter toute con-
fusion résulterait manifestement tant des qualificatifs Saint^Mar"
iiriy et Charentais dont ils font suivre le mot Coricide, que de la
forme des flacons, que de la coloration des liquides et de la na-
ture des enveloppes ou étuis ;
Attendu, en outre, qu'au cours de ses explications, Lebrun
— 300 -
Analysant en quelque sorte son acte de dépôt s'est efforcé de dé-
montrer que l'adjonction du qualificatif ru^se était sans intérêt,
le mot coricide étant la partie prédominante, Télément caracté*
ristique et substantiel de sa marque ; il convient poar Texamen
de l'argument d'antériorité de retenir cette reconnaissance ;
Attendu qae la doctrine et la jurisprudence enseignent que les
caractères essentiels de toute marque sont la spécialité et la nou-
veauté ; que la propriété d'une marque résulte de la priorité et
de la continuité de son usage exclusif et que le dépôt, simple-
ment déclaratif, ne crée qu'une présomption de propriété qui
tombe devant la preuve d'un usage antérieur;
Attendu qu'il est constant, en fait, que dès 1880, c'est-à-dire
deux ans avant le dépôt, effectué le 16 décembre 1882 par la So-
ciété des Antiseptiques, auteur Lebrun, le mot Coricide était en
usage ;
Attendu, en effet, qu'au résultat d'un interlocutoire rendu par
le Tribunal de Cognac, à la date du 14 décembre dernier, les sieurs
Coulouma, pharmacien, Viguier et Sévère, docteurs- médecins,
ont été rogatoirement entendus à Béziers ;que Coulouma a déclaré
que, dès 1878, il fabriquait un spécifique contre les cors qu'il dé-
nommait Corricide Coulouma ; qu'à Tappui de son dire il a montré
et remis deux ordonnances, l'une du 21 août 1880, du D' Vi-
guier, prescrivant tin flacon du Corricide Coulouma; l'autre da
21 mars 1881, du D' Sévère, où on lit : Corricide de votre eom'
position;
Attendu que ces deux ordonnances dont le papier maculé at-
teste l'ancienneté ont été présentées à leurs signataires, les D**
Viguier et Sévère susnommés, qui, sous la foi du sermenl.en ont
proclamé l'absolue sincérité et la parfaite authenticité ; que ces
deux documents, produits pour la première fois en justice,ont été
timbrés et enregistrés à Cognac, le lendemain de leur dépôt au
greffe et communiqués à Lebrun avec indication d'une audience
ultérieure pour les discuter;
Sur le désistement :
' Attendu qu'en présence de cette antériorité démontrée, Lebrun
par des combinaisons où se voient des réserves, des restrictions
et môme la méconnaissance formelle de la sincérité des docu-
ments devant lesquels, par une étrange contradiction, il croit
cependant devoir s'incliner a offert-de se désister, mais en per-
sistant à requérir la condamnation des prévenus en tous les
dépens ;
Attendu qu'un pareil système ne mérite pas examen et qu'il
y a lieu, faisant droit au refus d'acceptation des prévenus, de
repousser un désistement présenté dans ces termes, d'autant que
le tribunal est saisi d'une demande reconventionnelle pour abus
m.:Hi^,«f^^lM'*W'
-r^-
-sol-
de citation directe, demande dont il convient d'examiner la
portée ;
Sur la demande reconventionnelle :
Attendu que, si l'action de Lebrun ne peut être considérée
comme téméraire et vexatoire, on ne saurait contester qu'elle a
été légèrement, imprudemment engagée ; que le seul fait de Tan-
tériorité démontrée suffit à établir la négligence de Lebrun qui,
avant de traîner les prévenus devant une juridiction pénale, avait
le devoir de s'assurer par tous les moyens d'investigation de la
réalité de son droit exclusif, notamment par une recherche mi-
nutieuse des antériorités possibles ; que ce défaut de contrôle
préalable constitue une faute aggravée par cette considération
que Lebrun, ayant, aux termes de la loi de 1857, l'option entre la
juridiction civile et la juridiction correctionnelle, n'a pas hésité
à saisir celle dernière, sans avoir égarcl à la bonne foi de ses
adversaires ;
Attendu que de toutes les professions libérales, nulle autant
que celle de pharmacien n'est subordonnée à la confiance que le
titulaire inspire au public, la clientèle, hors d'état de contrôler
la qualité des produits et la fidèle exécution des ordonnances^
recherchant l'homme capable et surtout l'homme scrupuleux ;
qu'en conséquence, la moindre suspicion est de nature à jeter un
discrédit sur un pharmacien et à porter une grave atteinte à ses
intérêts matériels ; que s'il est impossible, en fait, d'apprécier
sous ce rapport l'étendue du dommage, on ne saurait méconnaître
que dans le procès retentissant intenté par Lebrun aux pharma-
ciens de Cognac, l'obligation de répondre en personne à l'inculpa-
tion dirigée contre eux constitue un indéniable préjudice moral ;
qu'ainsi les deux éléments susceptibles de donner ouverture à des
dommages-intérêts se rencontrent en l'espèce: la faute et le
préjudice ;
Par CES motifs.
Le tribunal, après délibéré, jugeant en matière correctionnelle
et en premier ressort, dit n'y avoir lieu d'accueillir le désistement
offert par Lebrun ; renvoie les sieurs Gorvaizier, Harmand, Saint-»
Mézard et Mauseau des fins de la plainte ;
Condamne Lebrun en tous les dépens ;
Et, statuant sur la demande reconventionnelle, condamne
Lebrun à payer à chacun des prévenus acquittés la somme de
50 francs, à titre de réparation civile.
Présidence de M. Saioe. — Avocats : M** Emile Foucault
(du barreau de Paris) et Pinaud-Martinr.
— 302 —
Art. 4222.
Marqaea de Aibrltiae. '— Dénomlnatloii de tentalste.
— 4c Bloe >► pour im «Avon.
L'industriel qui a déposé la dénomination Bloc Hyalin
pour un produit solide à Vacide borique et à la glycérine,
destiné à calmer l'irritation produite à la peau parkrasoir,
peut faire interdire Vusage des expressions* Bloc Kremlin»,
c Crislal Bloc », c Bloc antiseptique », lesquelles sont des
contrefaçons, car le mot t Bloc » doit être considéré comme
un des éléments essentiels, caractéristiques et appropria-
bles^ de la marque déposée (1).
(Trib. civ. Seine, 10 novembre 1899. — Dalbis a. Juste, Perrier et Wolf.)
La 3*" chambre du Tribunal civil de la Seine, sous la pré-
sidence de M.Lefebvrb-Devaux, a rendu, sur plaidoiries de
M« H. Allart pour le demandeur, de M«* Félicibn Paris el
Cabn pour les défendeurs, à la date du 10 novembre 1899,
le jugement suivant :
Le Tribunal, Adjugeant le proQt du défaut prononcé le 24 ami
1899, etc., donne de nouveau défaut contre Juste qai, quoique
régulièrement réassigné, n^a pas constitué avoué, et statuant
à regard de toutes les parties contradictoirement :
Attendu que, pour désigner un produit spécial de sa fabrica-
tion, Dalbis a adopté la dénomination : Bloch Hyalin et en a fait,
le 21 février 1896, au greffe du Tribunal de commerce de la
Seine, le dépôt régulier ; qu'il prétend s'être approprié cette
expression pour distinguer, dans le commerce de la parfumerie,
une sorte de savon qu'il produit à Taide de glycérine et d'acide
borique ;
Attendu que la dénomination fi/oc donnée par Dalbis à un
objet de sa fabrication est susceptible de constituer une pro-
priété, puisqu'elle n'est pas un terme générique naturel et né-
cessaire pour la désignation d'un produit ; qu'elle est nouvelle
dans l'industrie de la parfumerie où l'on en fait usage pour la
première fois ; que le mot Bloc, pris isolément, constitae, dans
le sens de la loi du 23 juin 1857, l'élément essentiel et caracté-
ristique de la marque du demandeur; que c'est sous ce nom
que le produit est connu, qu'il est demandé ;
|i) Voir les articles qui précèdent.
'\
— 303 —
Atlendu que les défendeurs, Juste, Perrier et Wolf^ en livrant
au commerce un produit de leur fabrication sous le nom de Bloc,
Kremlin f Cristal Bloc y Bloc antiseptique se sont appropries une
marque qui n^était pas, comme ils le soutiennent, dans le com-
merce, ont contrevenu aux dispositions de la loi précitée, ont
causé à Dalbis un préjudice dont ils lui. doivent réparation ; \
Attendu, en ce qui touche les dommages-intérêts réclamés à
Perrier, qu'il convient de retenir que le défendeur a pris une
dénomination qui, par sa signification, présente avec celle dont
le demandeur est propriétaire, de grande analogie : Hyalin étant
synonyme de Cristal; qu'en outre, pour préconiser son produit,
il s'est prévalu de « médailles auxquelles il n'a aucun droit,
puisqu'elles auraient été obtenues avant la création même du
produit » ; qu'il a ainsi commis une infraction à la loi de 1886 ;
Attendu que le tribunal aies renseignements nécessaires pour
fixer le montant du préjudice causé par chacun des défendeurs
à Dalbis ;
' Par ces motifs, Déclare Juste, Perrier et Wolf contrefacteurs
de la marque de fabrique du 21 février 1896 ;
Leur fait défense d'employer le mot Bloc pour désigner des
produits analogues à ceux du demandeur ;
Fait défense à Perrier de mentionner sur lesdits produits des
médailles dont la nature n'est pas indiquée ;
Condamne, pour le préjudice causé au demandeur, savoir:
Perrier à 1,000 francs, Wolf et Juste chacun à 500 francs de
dommages-intérêts ;
^ Ordonne l'insertion du présent jugement dans deux journaux
aux frais des défendeurs, sans que le coût de chaque insertion
puisse excéder iOO francs ;
Condamne les défendeurs conjointement et solidairement aux
dépens. i
Art. 4223.
Marques do Ikbriqué. — Dénomination do fantal^
aie. — Cordon rouiro. — Bmplol llolte d'un rnban-
rougo.
Lorsque l'emploi d'un ruban rouge pour rhabillage des
bouteilles de liqueur est tombé dans le domaine public^
si la dénomination Cordon rouge peut encore constituer
une marque de fabrique^' en tous cas V emploi d'un ruban
— 304 —
rouge y pour V habillage de la bouteille ^ ne constitue pat la
contrefaçon de cette marque (1).
(Trib. civ. Ramboaillet, 28 mai 1897. — Marnier-Laposkolle c.
Kerckhoven et Lebard.)
Jugé en ces termes :
Lb Tribunal, Attendu que^par exploit da 3i juillet 1896, Marnier*
Lapostoile a assigné devant ce tribunal KerckhoTen et Lebard,
distillateurs à Neauphle-le Château, pour voir dire que ceux-ci
s'étaient rendus coupables d'asnrpation de marque, ainsi que
d'usurpation de médailles et de concurrence déloyale et qa'il
leur serait défendu à Tavenir d'employer la dénomination de
Ruban rouge et rhabillage spécial à Maroier-Lapostolle des bou-
teilles de curaçao, comme aussi d'annoncer sous quelque forme
que ce soit la médaille de TExposition de Bordeaux qu^ils pré-
tendent faussement avoir obtenue ;
Attendu que, pour réparation du préjudice que lui auraient
causé ces usurpations et cette concurrence déloyale, le deman-
deur conclut à Tallocation de 150,000 francs de dommages-inté-
rêts et à rinsertion du jugement ;
Attendu que Kerckhoven et Lebard opposent une 6n de non-
recevoir à la demande de Marnier : qu'ils prétendent qu'à la
date du 31 juillet précité, la société en nom collectif « Kerckho-
ven et Lebard » n'existait plus ; que Kerckhoven ayant cédé ses
droits à un sieur Gauret, il s'était formé une nouvelle société
sous la raison sociale Lebard et Gauret » ; qu'à l'appui de leur
prétention ils produisent le Journal VIndépendant de Rambouillet
contenant publication de l'extrait de l'acte constitutif de la nou-
velle société ;
Mais attendu que le numéro dudit journal porte la date du
7 août 1896, que la publicité est postérieure à l'assignation déli-
vrée à la requête de Marnier, que par suite la fin de non-rece-
voir doit être rejetée ;
Sur la demande principale en murpation de marque :
Attendu que Marnier a déposé au greffe du Tribunal de Ram-
bouillet le 20 août 1894, comme marque de fabrique destinée &
distinguer un curaçao de sa fabrication, la dénomination At<6an
rouge indépendamment de toute forme distinctive ;
Attendu qu'il n'est pas douteux qu'une dénomination constitue
une marque et que Marnier a un droit privatif sur cette marque ;
Attendu que Marnier prétend que Kerckhoven et Lebard pré-
(1) Ce jugement a été cité aux Ann.^ 98.155, note 3, comme frappa
d'appel. Il est devenu définitif, nous le pubUons.
^"•vV
— 305 —
sentent et vendent au public sous cette dénomination Ruban
rouge un curaçao de leur fabrication ; qu'il se prévaut à Tappui
de sa prétention de quatre procès-verbaux de constat et d'un pro-
cès-verbal de saisie opérée chez les défendeurs : qu'il a fait cons-
tater le iO juillet 1896 que Edmond Néel avait à Paris vendu à
un de ses mandataires, qui avait demandé du curaçao Ruban
rouge un flacon de curaçao Eerckhoven orné d'un ruban rouge ;
que le même jour il a fait faire la même constatation à Paris
chez M. Pênes ;
Que Je 20 juillet, il a fait faire une autre constatation du même
genre à Neauphle-le-Chàteau au domicile de la veuve Laine ;
Attendu qu'aucun de ces flacons ne porte la dénomination de
Ruban rouge, qu'en admettant que ces constatations puissent
faire preuve contre Néel, Pênes et veuve Laine qui ne sont pas
en cause, il ne saurait en être de même vis-à-vis de Kerckhoven
et Lebard alors qu'il n'est pas établi par ces constats qu'ils
aient personnellement vendu leur produit sous cette dénoroina-
tion,ni que les différentes personnes susnommées aient agi comme
mandataires ou dépositaires de la société Kerckhoven et Lebard ;
qu'il s'agit d'un fait personnel qui ne peut être mis à la charge
des défendeurs comme s'il s'agissait d'une imitation frauduleuse
qui serait leur œuvre et qui serait trouvée chez un tiers ;
Attendu que Marnier-LapostoUe a en outre fait constater, le
20 juillet 1896 que l'un des associés de la société Kerckhoven et
Lebard avait, dans un magasin de ladite société à Neauphle-
le-Ch&teau, vendu à l'un de ses mandataires qui avait demandé
du curaçao Cordon rouge, 3 flacons de curaçao Kerckhoven ornés
d'un ruban rouge ;
Attendu que Kerckhoven et Lebard n'ont pas été assignés pour
usurpation de marque Cordon rouge, mais pour usurpation de
marque Ruban rouge ;
Attendu, au surplus, que Marnier n'a fait aucun dépôt comme
marque de fabrique destinée à distinguer un curaçao de sa fa-
brication, de la dénomination Cordon rouge ; qu'il oppose, il
e%i vrai, un jugement du Tribunal de la Seine, du 19 novem-
bre 1896 qui a admis que la dénomination Cordon rouge appli-
quée à un curaçao appartenait à Marnier exclusivement, comme
ayant le premier employé cette dénomination ;
Mais attendu qu'il n'est pas établi que le jugement soit devenu
déûnitif et que, le fut-il, l'assignation délivrée à Kerckhoven et
Lebard et les conclusions ne visent pas Tusurpationde la déno-
mination Cordon rouge ;
Attendu que, par ordonnance du président du tribunal civil,
en date du 23 juillet 1896, Marnier a été autorisé à procéder à
la saisie de tous les récipients ou flacons de curaçao portant
— 306 —
la marque Ruban rouge au domicile et dans les magasins de
Kerckhoven et Lebard ;
Attendu que le procès-verbal de saisie ne constate pas qa'il
ait été trouvé des récipients ou flacons portant la dénomination
Ruban rouge qu'il constate seulement que l'huissier a saisi pour
en faire la description un flacon portant la dénomination CuTa-
çao Kerckhoven et orné d*un ruban rouge ;
Que de cette saisie ne résulte donc pas la preuve de Tusorpa-
tion par Kerckhoven et Lebard de la dénomination Ruban rouge ;
Que cette preuve ne résulte pas davantage des termes da pro-
cès-verbal comme le prétend Marnier; qu*en effet si sur la som-
mation de Thuissier de lui remettre du curaçao Ruban rougeh
dame Lebard lui a remis un flacon, parce qu*il était orné d'un
ruban rouge, il n'eu ressort nullement qu'elle ait entendu par
là reconnaître que le curaçao de la société était vendu sous celte
dénomination ;
Qu'il a été justifié que Kerckhoven et Lebard avaient dans de
nombreux documents présenté et vendu leur produit ainsi dé-
nommé Curaçao Kerko rouge ou Curaçao Kerko 6/anc, suivant
rhabillage, qu'aucuns documents contraires n'ont été produits
soit au point de vue de la publicité, soit au point de vue de la
vente ;
Attendu que la similitude dans l'habillage particulier des fia*
cons par l'emploi des rubans, faveurs ou liserés rouges, sans que
Kerckhoven et Lebard désignent cet habillage par une déno-
mination spéciale à Mamier, ne saurait non plus être retenu con-
tre eux ;
Qu'en effet Kerckhoven et Lebard soutiennent que rhabillage
par l'emploi d'un ruban rouge est tombé dans le domaine public
et qu'ils se prévalent à l'appui de leurs dires des antériorités
Guilot et Cointrot qui n'ont pas été contredits par Marnier;
qu'au surplus l'habillage du flacon Marnier a lieu par l'emploi
d'un ruban rouge moiré tandis que celui du flacon Kerko a lieu
par l'emploi d'un liseré de faveur rouge^ moins large, moins
épais et uni ;
Sur la concurrence déloyale :
Attendu que Marnier prétend que la vue seule des bouteilles
suffit à établir la recherche de la confusion ;
Attendu que de l'examen des flacons concurrents il résulte que
des ressemblances existent assurément;
Qu'ainsi ils sont surmontés l'un et l'autre d'un cachet de cire
rouge, qu'ils ont une capsule de parchemin et que la disposition
du ruban rouge qui les orne est à peu près la même ; que ce
ruban part du goulot, entoure le col du flacon, passe sous un ca-
chet rouge pour se perdre sous l'étiquette placée en dessous;
— 307 —
mais qae ie col de la bouteille Kerko est droit, tandis que celui
de la bouteille Marnier offre des renflements et quil se forme
un renforcement dans lequel est passé et retenu le ruban autour
de la bouteille ;
Attendu que si ces. ressemblances dans quelques détails ont
été voulues et rechercbées comme le prétend Marnier, encore
faut-il qu'elles puissent amener la confusion ; qu'il n'apparatt
pas pour le tribunal qu'elles puissent tromper un acheteur
même inattentif et faire confondre les deux produits ;
Attendu en effet qu'il existe des dissemblances capitales qui
sont de nature à empêcher la confusion en donnant aux flacons
un aspect d'ensemble absolument différent ; que c'est ainsi que
la différence de forme des deux flacons présentés même séparé-
ment doit frapper aussitôt la vue ; que le flacon Kerko porte
dans le commerce le nom de forme droite tandis que ie flacon
Marnier porte le nom de forme marteau ;
Attendu d'autre part qu'il n'existe entre les étiquettes aucune
analogie de forme, de dimensions, de dispositions générales ou
de détail et de coloration, que sur le flacon Marnier l'étiquette
est apposée au bas du flacon, que les mots Grand Marnier se dé-
tachent en blanc sur le fond sombre de l'étiquette et parallèle-
ment à la base du flacon ; que sur le flacon Kerko au contraire
l'étiquette, de dimensions beaucoup plus grandes et placée en
haut, est de couleur blanche sur laquelle se détachent, différents
des premiers et de couleur rouge avec initiales noires, les mots
Curaçao Kerko ;
Que les contre-étiquettes sont comme les étiquettes absolu-
ment différentes de forme, de dimensions et de dispositions ;
Qu'il n'apparaît donc pas pour le Tribunal qu'une confusion
puisse se produire ;
Sur l'usurpation de médailles :
Attendu que Kerkhoven et Lebard justifient être légitimement
propriétaires des récompenses dont ils se prévalent et qui leur
ont été décernées au concours de Bordeaux 1895 ;
Sur la demande reconventionnelle :
Attendu que l'action dirigée par Marnier contre Kerkhoven et
Lebard n*a pas été introduite de mauvaise foi comme le préten*
dent ces derniers, qu'au surplus les demandeurs reconveution-
Bellement ne justifient d'aucun dommage, qu'il y a donc lieu de
les débouter de leur demande ;
Par ces motifs, Déclare Marnier mal fondé dans ses différen-
tes demandes ; l'en déboute.
M. JoLioT, président.— Plaidants : M" Maunodry, avocat
du barreau de Paris, et Lambert, avoué.
-»--_;i% '-•»-• ^w
308 —
Art, 4224.
MMHiaes de Aibrlqae«. — Dénominatioiis. — <7aeao
Cboava. — Domaine publie.
Apprécie souverainement les faits V arrêt qui constate que,
avant le dépôt de la dénomination Cacao Chouva, prise iso-
lément comme marque, cette dénomination était exploitée
par divers fabricants de liqueurs, qui tous s'en servaient
librement selon leur fantaisie et leurs besoins^et que Pinven-
teur de la dénomination a, jusqu'à sa mort, gardé, à Végard
de ces fabricants, un silence qui implique la reconnaissance
des droits du domaine public (1).
(C. de cass., req., 29 janvier 1900. — Gros» e. Toussai nl-Cosnard et O.)
(1) La véritable difficulté n*apparait pas dans Tarrét de la Cour de
cassation ; mais elle résultait de Texposé même des faits dans Tarrèt de
la Cour de Bordeaux. Elle consiste en ce que la dénomination Cacao-
Chouva avait bien été employée pour la première fois par Dro7, aux
droits de qui était le demandeur, qu'il n*avait cessé de l'exploiter et
avait disposé, dès 1862, puis à diverses reprises, une étiquette dans
laquelle figurait cette dénomination, qu'il avait, dès 1867, poursuivi des
contrefacteurs de son étiquette, mais qu'il n'avait déposé la dénomina-
tion, prise isolément, qu'en 1896. La Cour de cassation ne semble pas
tenir compte de l'appropriation, antérieure au dépôt,de la dénomination
isolée ni de ce fait qu'une dénomination peut être considérée comme un
des éléments essentiels d'une étiquette déposée.Or il est admis couram-
ment par la doctrine et la jurisprudence que l'emploi d'une marque,
donc d'une dénomination, pour un produit, est une appropriation qui
confère un droit sanctionné par l'article 1382 du Code civil (Pouillet,
Marq. fab.y n* 102 et s.). Le propriétaire de cette marque-dénomination
n'entendait évidemment pas l'abandonner quand il déposait des éti-
quettes où elle figurait et poursuivait les concurrents qui imitaient ces
étiquettes. 11 a même été jugé que le dépôt d'une étiquette comprenant
une dénomination parmi ses éléments essentiels, équivalait à nne re-
vendication de' cette dénomination, et que celui qui empruntait la dé-
nomination sans les autres éléments de l'étiquette, commettait une
contrefaçon ^Amiens, 8 novemjare 1898, Châtelain, i4nn., 98.269 ; cf. Be-
sançon, 6 août 1879, Serve^ Anti,, 79.214 et décisions citées par Pouillet,
Marq. fab.^ n9 140; voir encore la revendication implicite du mot Bloc
tout seul, dans la dénomination Bloc-Hyalin, iuprà^ p. 802). Les dépôts
des étiquettes auraient donc dCi à eux seuls, suffire à conserver, dans
Tespèce, la dénomination comme marque au profit du déposant et le
fait de n'avoir pas poursuivi les concurrents qui usurpaient la dénomi-
nation sans imiter l'étiquette aurait pu être considéré dans ces condi-
tions comme insuffisant, à lui seul, pour constituer l'abandon (voir,
pour les faits constitutifs de l'abandon, Pouillet, jlfar^. fab., n« 81).
On comprend donc aisément que la Cour de Lyon ait pu donner une
solution contraire à celle de la Cour de Bordeaux et reconnaître un
droit privatif sur la dénomination « Cacao Chouva • (C. de Lyon, fô fé-
vrier 1892, Mon.jvd, Lyon, 22 avril ; cf. Trib. cit. Lyon, 14 décembre
•■'■^ T m^'^^ "i^ - VT
f • •
- 309 —
La Cour d'appel de Bordeaux, à la date du 21 mai 1898,
a rendu l'arrêt suivant :
La Cour, Attendu que, par l'effet de Tappel incident formé
par les parties de M^ Blay, la Cour est saisie de tout litige ;
Que la cause est eu état de recevoir une solution définitive
sans attendre les résultats de Tenquète ordonnée par les pre-
miers juges ;
Qu'il y a lieu de statuer au fond sur tous les chefs de la de-
mande ;
l. — En ce qui concej'tie la dénomination de la marque » Cacao
Chouva » :
Attendu qne sans contredit cette dénomination, quelle qu'en
soit Torigine, était susceptible, par son originalité, de constituer
une marque ; mais qu*il faut retenir que la maison Gross-Droz
ne l'a revendiquée comme signe distinctif qu'à partir du 8 avril
1895, date du dépôt spécial qui en a été fait ;
Que jusque là, la dénomination dont il s'agit n'a été exploitée
et revendiquée qu'en tant qu'elle était incorporée dans les éti-
quettes et marques qui ont fait l'objet de la part de Ja maison
Gross-Droz des dépôts successifs de 1862, 1878, 1888 et 1894 ;
Qu'à J a vérité la dénomination « Cacao Chouva » constitue l'un
des éléments essentiels de ces étiquettes et qu'à ce titre il y a
lieu de rechercher si elle est entrée dans le patrimoine du re-
vendiquant à titre privatif ou si elle n'a été par lui possédée
qu'en concours et partage avec le domaine public;
Or attendu que de l'ensemble des nombreux documents, d'ail-
leurs contradictoires, versés au débat, il ressort qu'antérieure-
ment à toute revendication et avant le dépôt du 9 avril 1862 la
dénomination litigieuse était exploitée sur la place de Bordeaux
par divers fabricants de liqueurs ;
Que les uns l'employaient avec la petite étiquette blanche si
répandue dans le commerce des liqueurs dites u des Iles » et
rappelant les marques de la vieille maison Amphoux ; d'autres
l'incorporaient dans des éliquettes de couleurs variées ; tous en-
fin s'en servaient librement selon leur fantaisie ou leurs besoins ;
Qu'il n'est pas douteux que cet usage commun s'est largement
.répandu à mesure que le commerce des liqueurs prospérait ;
1894, Mon. jud. Lyon^ 10 avril).
Il est certain que la Chambre des requétos se montre actuellement
très favorable à la tendance qu'ont certaines Cours, lorsqu'une étiquette
a été déposée, à ne réprimer que les imitations de l'étiquette dans son
ensemble et à exiger, pour la revendication de la dénomination prise
isolément, un dépôt spécial (cf. Cass. req., 3 février 1898, Thierry
frères, marque Le Cronstadt, Ann., 98.271).
Les propriétaires de marques-dénominatipns feront sagement de les
déposer isolément. G. M.
— 310 -
Qu*aiD8i généralisé, cet usage est devena le signe caractériiti-
que de l'absorption du mot « Chouva >) par le domaine public;
Attendu que parmi les preuves irrécusables de Tautorité de
cet usage il convient dé retenir :
i^ Les nombreuses commandes faites par plusieurs distilla-
teurs à divers lithographes, antérieurement à 1862, d'étiquettes
portant les mots « Cacao-Gbouva » ;
2® L'attitude passive de la maison Droz dans la période com-
prise entre Tannée 1856 à laquelle elle fait remonter la création
de sa marque et l'année 1867, époque de ses premières revendi-
cations en justice ; quMl est constant que durant cet intervalle
de 17 ans la maison d'Alexandre Droz n*a inquiété aucun de ses
concurrents ;
3® La procédure suivie à Marseille en 1867, qui révèle que la
maison Droz n'entendait protéger que l'étiquette, sans viser spé-
cialement la dénomination ;
4* Bnûn et surtout les tableaux-réclame répandus par cette
maison à l'époque contemporaine du dépôt de 1862, qui témoi-
gnent de l'indivisibilité intentionnelle établie par Alexandre
Droz entre les divers éléments de sa marque : l'étiquette, la dé-
nomination et la signature ;
Que sa préoccupation de donner la prépondérance à la signa-
ture a été constante chez le dit Alexandre Droz ; qu'elle s'affirme,
dès l'origine, dans l'étiquette déposée par Tanet à la Préfecture
de la Gironde le 31 mars 1858 ;
Que cette particularité jointe au silence gardé par Alexandre
Droz jusqu'à sa mort vis-à-vis de ses co-usagers a une portée
décisive ;
Qu'elle implique la reconnaissance des droits du domaine pu-
blic ;
Que dans ce domaine, qui est celui de la libre concurrence, la
loi ne reconnaît pas des usurpateurs ; il n'y a que des rivaux;
Attendu il est vrai qu'on ne peut méconnaître au vu de ses
anciens livres et des références qu'elle produit, que la maison
Gross-Droz a, par de constants efTorts et de longs sacriûces, tra-
vaillé à accréditer sa liqueur de « Crème de Cacao Chouva»
comme une spécialité ; mais qu'alors qu'elle n'a prétendu con-
quérir la faveur publique que par la supériorité des produits et
par la valeur de sa signature, elle a renoncé aux privilèges at-
tachés par la loi de 1857 aux marques régulièrement déposées;
Que le dépôt de 1862 et les dépôts subséquents ayant été tar-
difs les droits acquis du domaine public restaient indivisibles ;
Qu'il y a lieu dès lors de déclarer l'appelant mal fondé dans
sa demande sans recourir à une enquête devenue sans objet ;
— 314 —
II. — En ce qui eaneeme l'étiquette vert et or :
Attendu que cette étiquette n*a fait Tobjet d'un dëpôt qu*à la
date du 5 février 1894 ; qu'elle ne porte pas le nom de la maison*
Droz et qu'elle ne comprend dans l'ensemble et dans les détails
que des éléments d'une banalité courante;
Qu'en définitive cette étiquette est depuis longtemps dans
le commerce ;
Que sur ce point les intimés ont rapporté la preuve complète
des articulations admises par l'interlocutoire ;
III. — En ce qui concerne l'étiquette à cartouche rouge :
Attendu que les premiers juges en ont fait une exacte appré-*
ciation ;
Qu'il est certain que des dissemblances existent entre l'éti-
quette revendiquée par Gross et les étiquettes incriminées ;
Qu'elles sont caractéristiques particulièrement dans la distri-
bution des couleurs et dans la forme du cartouche et de la cap«-
sule;
Qu'encore de ce chef l'appel doit être rejeté ;
Par ces motifs, La Cour, statuant sur l'appel incident des
parties de M* Biay, infirme le jugement attaqué dans la dispo-
sition qui a ordonné Tenquéte ;
Statuant sur le fond et par nouveau jugé, dit que la dénomi-
nation u Cacao Chou va » appartient au domaine public antérieu-
rement à ce dépôt ;
En conséquence déclare l'appelant mal fondé dans sa demande,
l'en déboute ;
Confirme le jugement attaqué dans le chef relatif à l'étiquette
à cartouche rouge et condamne Gross à tous les dépens de pre-
mière instance et d'appel envers toutes parties en cause»
Le pourvoi formé contre cet arrèl a élé rejeté par la
Chambre des requêtes, le 29 janvier 1900, en ces termes :
0
La Coor, Attendu que le demandeur en cassation Gross reven-
diquait le droit exclusif d'employer la dénomination Cacao Chouva
pour désigner les produits de sa distillation;
Que l'arrêt attaqué constate en fait que longtemps avant l'é-
poque où son prédécesseur Droz avait déposé une marque de
fabrique comprenant entre autres éléments la dénomination Ca-
cao Chouva^ cette dénomination était exploitée sur la place de
Bordeaux par divers fabricants de liqueurs qui tous s'en servaient
librement selon leur fantaisie et leurs besoins et que Droz jusqu'à
sa mort avait gardé vis-à-vis de ses co-usagers un silence qui
implique aux yeux de la Cour la reconnaissance des droits du
domaine public ;
l'
— 312 —
Attendu que cette appréciation des faits, qui rentraient dans
le pouvoir de la Cour d^appel, justifie la décision par laquelle
elle a repoussé la prétention de Gross à la propriété exclusive
de la dénomination Cacao Chouva à titre de marque de fabrique ;
que cette décision ne yiole aucun des articles de loi visés an
pourvoi ;
Par gbs motifs, Rejette. . .
M. Tanon, président. — MM. Gborgb-Lemairb, conseiller
rapporteur; Mérillon, avocat général. — M* Bouchib db
Bbllb, avocat.
Art. 4225.
Procédure correctionnelle. — AmBl^niatlcMi. — So-
ciété commerciale. — SaUiie. — Nfolilté. — Marques
de fabrique. — Dénomination. — DcMuaine publie.
— CbantIUsr.
Une société commerciale est un être moral qui ne saurait
répondre pénalement d'un délit et ne peut^ par conséquent,
être valablement assigné au correctionnel comme pénale-
ment responsable (Résolu par le tribunal) (1).
La saisie qui n*est suivie, dans le délai de Varticle 18 de
la loi du iSjuin 1857, que d'une assignation devant le tri-
bunal correctionnel adressée à une société commerciale,
par conséquent nulle, est nulle elle-même et le tribunal ne
peut attacher aucune importance aux faits et constatations
qu'elle a relatés (Résolu par le tribunal) (2).
Une dénomination qui constitue antérieurement au dépôt
une désignation usuelle et nécessaire du produit auquel elle
s'applique, ne saurait, si on la considère en elle-même et en
dehors de l'aspect extérieur qu'elle peut offrir, être valable-
ment déposée et faire l'objet d'une appropriation exclusive à
titre de marque de fabrique (3).
La dénomination Chantilly étant, depuis de longues
années, usitée pour désigner un parfum qui est dans le do-
(1) Cf. Gass., 10 mars 1877, Meunier, Ann., 77.205.
(2) Le tribanal a considéré comme inexistante, donc ne donnant pas
salisfaction à l'article 18 de la loi de 1857, Tassignation donnée devant le
tribunal correctionnel à une société commerciale.
(8) Cf. Tarrêt relatif au Cacao Ghoava, 9uprà, p. 308.
Tr^zrr,^^^^ -■^*ii'.-/-r»'ï«i.-is-" r.ijv^un'i^
— 313 —
maine public, ne peut servir de marque pour certains pro-
duits de parfumerie^ tels que savons, etc.. (4).
(G. de Paris, 25 novembre 1900. ^ Epoax Salabert c. Viirain et Cie.)
Le Tribunal correctionnel de la Seine, à la date du 11 mai
1900, a rendu le jugement suivant :
Le Tribunal, Attendu que les époux Sa]abert Kien ont assigné
deTant le tribunal correctionnel: l^à la date du 28 février 4900,
MM.Villain et Cie, directeurs et administrateurs des magasins du
Petit St-Thomas; 2'' à la date du iO mars i900,MM.les directeurs et
administrateurs de la même maison ; 3^ à la date du {9 avril sui-
vant, M.^Jules Villain seul gérant responsable, pour,suivant dis-
positif commun à tous ces exploits,s'en tendre déclarer contrefac-
teurs de la marque de fabrique des requérants,dite marque Chan-
tilly ; s'entendre condamné à 10.000 de dommages-intérêts ainsi
qu'à la confiscation des objets contrefaits ;
Attendu que préalablement à l'examen du fond, il convient
tout d'abord de faire droit à l'exception de nullité invoquée par
le défendeur contre les deux premières assignations, délivrées
en la forme rappelée ci-dessus,c'est-à*dire à une société commer-
ciale ;
Attendu en effet que Ton ne peut poursuivre devant les tribu-
naux de répression que des êtres réels sur lesquels peut porter
une peine ; qu'une société commerciale est un être moral, et ne
saurait répondre pénalement d'un délit ; que l'assignation qui
lui est délivrée se trouve donc viciée d'une nullité qui entache
toute la procédure qui en a découlé ;
Attendu que les deux assignations des 28 février et 19 mars 1900
se trouvant ainsi dépourvues d'effet, il s'en suit comme consé-
quence et par application de l'article 18 de la loi de 18o7 que la
saisie-contrefaçon en date du 16 février 1900 perd toute sa valeur
et doit être annulée, sans que le tribunal puisse attacher aucune
importance aux faits et constatations qu'elle a relatés ;
Attendu que la troisième assignation du 19 avril 1900 a été dé-
livrée à Villain personnellement ; qu'elle s'appuie sur un pro-
cès-verbal de description régulier des objets revêtus de la préten-
(4) n est constant qu*il exi&te depuis de longues années, dans le com-
merce de la parfumerie, un parfum de composition déterminée, toujours
identique à lui-môme, connu sous le nom de parfum Chantilly. Maison
peut se demander si ce fait était de nature à faire obstacle à l'adoption
de la dénomination ChanliUy pour désigner tout Tensemble des produits
sortant d'une maison de parfumerie déterminée, cette dénomination de
vaut être jointe aux différents produits (eau de Cologne Chantilly, crème
d*iris Chantilly, etc. ..) dans le but d*en préciser l'origine et de servir en
quelque sorte d'enseigne à la maison.
— 314 —
due marque contrefaite ; qu'elle répond à tontes les exigences de
la loi et doit être déclarée valable ;
Au fond : Attendu qa'à la date da 5 mars 1890, la demoiselle
Marie -Joséphine Kien, négociante à Paris, aujoard*hni épouse dn
requérant Salabert, a fait le dépôt an greffe du tribunal de com-
merce de la Seine d'ane marque destinée à des produits de par-
fumerie et savonnerie, ladite marque consistant dans la dénomi-
nation Chantilly et constituant sa marque de fabrique ;
Attendu que depuis 1890 elle a revêtu de cette marque toutes
les marchandises de parfumerie vendues dans sa maison et Ta
appliquée notamment à toute une série de produits tels que sa-
vons, blanc de crôme, poudre, eaux et vinaigres de toilette,hui-
les, etc. ; qu'elle prétend avoir acquis la propriété exclusive de
cette marque en sorte qu'elle demande au tribunal de déclarer
objets de contrefaçon les boites de savon livrées en vente dans les
magasins du Petit St-Thomas,lesquelles au moyen d'une étiquette
collée sur le couvercle, annoncent à la clientèle cette marchan-
dise sous le nom de savon aux violettes de Chantilly;
Mais attendu qu'il est démontré par tous les documents sou-
mis au tribunal tant par les demandeurs que par le défendeur,
que la dénomination de Chantilly a, depuis une époque très an-
cienne, en tous cas depuis 184t, été employée dans la parfumerie
pour désigner un parfum, classé constamment sur les catalogues
des principales maisons au nombre des parfums ou odeurs cou-
rantes dont on se sert pour parfumer les différentes huiles,savon8
ou crèmes de toilette ; que le nom de Chantilly appliqué à des
articles de parfumerie figure dans le catalogue de la maison Guer-
lain en date de 1841 ; que le Manuel des parfumeurs de l'ency-
clopédie Roret, édition i870 p. 93, relate, au nombre des for-
mules des produits de parfumerie courants, celle de l'extrait de
bouquet Chantilly , que la parfumerie Saint-James vendait en
1876 une pommade désignée dans son tarif sous le nom de pom-
made Chantilly et spécialement un savon désigné sous le nom de
savon Chantilly ; que la maison Gottance Dagot et Gie, devenue
propriétaire de la parfumerie Saint- James^ n'a cessé de livrer
les mêmes produits à sa clientèle jusqu'en 1890 et à continué de-
puis lors à faire figurer dans son catalogue général notamment
un savon Chantilly ;
Que les propriétaires ou directeurs des principales maisons de
parfumerie, entre autres MM. Houbigant, Roger et Gallet, Violet
et Guerlain, sont unamines à déclarer que, de tout temps, leurs
maisons ont fabriqué et livré au commerce un extrait dénommé
bouquet Chantilly qui se trouve du reste communément classé
dans tous les catalogues sous cette désignation pour spéciJer une
odeur déterminée, destinée soit à être mise en usage isolément
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1 ♦ «
— 315 —
soit à entrer dans la composition à une série de produits tels
que crèmes, huiles, et sarons, ainsi que le démontre Tezamen
des documents ci-dessus analysés ;
Attendu qu'il ressort de toutes ces constatations et considéra-
tions que la dénomination Chantilly était, au moment du dépôt
qui a été fait comme marque de fabrique par la Demoiselle Kien
en 1890, et a?ait été depuis de nombreuses années, antérieure-
ment au dépôt employée pour dénommer dans la classification
usuelle des parfums, Tun de ces parfums dont l'emploi, sous ce
nom qu'un long usage a rendu nécessaire, était habituel dans Tin-
du strie et le commerce de la parfumerie ;
Attendu qu'il est de doctrine et de jurisprudence qu'une déno-
mination qui constitue, antérieurement au dépôt,une désignation
usuelle et nécessaire du produit auquel elle s'applique, ne sau-
rait si on la considère en elle-même, et en dehors de l'aspect ex-
térieur qu'elle peut offrir,être valablement déposée, et faire l'ob-
jet d'une appropriation exclusive à titre de marque de fabrique
ou de commerce au profit de l'occupant, sans porter atteinte &
la possession antérieure du domaine public, ou au principe fon-
damental de la liberté du. commerce et de l'industrie ;
Qu'il résulte de l'application de ce principe à l'espèce, que la
dénomination de Chantilly appliquée à des produits de parfume-
rie n'a pu devenir, en 1890 ni depuis lors, la propriété d'aucun
disposant et que la revendication présentement émise par les
époux Salabert ne saurait être accueillie ;
Sur la demande reconventionnelle de Villain, concluant à l'al-
location d'une somme de 2000 francs de dommages-intérêts et &
la publicité du présent jugement dans 10 journaux aux frais des
requérants ;
Attendu qu'il importe de faire remarquer que les époux Sala-
bert ont agi avec une entière bonne foi, et sans arrière-pensée
de vexation à l'égard de leur concurrent, mais avec la confiance
que les droits invoqués par eux et dont ils avaient joui sans con-
teste depuis 1890 étaient susceptibles d'être proclamés et sanc-
tionnés par la justice; que cette croyance de leur part n'avait
rien de téméraire, et qu*en introduisant l'instance actuelle, ils ont,
sans mauvaise foi, usé d'une faculté réservée à tout justiciable
qui se croit lésé ;
Attendu cependant que cet appel à la justice n'en a pas moins
été préjudiciable à Villain qui a dû subir une saisie faite publi-
quement dans sa maison qu'il dirige, qu'il s'est vu obligé par
cette saisie de retirer de la vente le genre de savon fabriqué,faire
toutes démarches et enfin tous frais nécessaires pour assurer le
succès de 8a défense contre l'action reconnue sans fondement
dirigée contre lui ;
— 316 —
Que tous ces chefs de lésion, lai ont causé un dommage, que
le tribunal, en présence de tous les éléments d^appi'éciation qui
Be rencontrent dans les dossiers ou les faits de la caase,croit de-
voir fixer à 500 francs, sans qu'apparaisse comme sufBsamment
justifiée la demande de publicité ;qui fait Tobjet du second chef
de la demande reconventionnelle ;
Par ces motifs, Relaie Villain
Et statuant sur la demande reconventionnelle de Villain,7 fai-
sant droit :
Condamne les époux Salabert à payer solidairement au susdit
Villain une somme de 500 francs à titre d'indemnité
Sur appel des époux Salabert, la Cour de Paris a le
SB novembre 1900, confirmé par adoption de motifs la dé-
cision des premiers juges.
Avocats : M" Pouillet et Couhin.
Art. 4226.
Cyoncarreneo illicite. — 9ynMeak,tm professlonnelfl.
— Dénomlnatloii. — Titre de « cbambre myndUk-
eaio )►.
Les syndicats professionnels ont, comme toutes les sodé'
tést le droit de se distinguer les uns des autres au moyen
d'une dénomination qui appartient en propre à celui quia
été te premier à V adopter (1).
Les mots < Chambre syndicale » ne sont pas génériques
et indispensables pour la désignation d*un syndicat profes-
sionnel ; en conséquence, le syndicat professionnel qui les
a le premier adoptés dans son titre est fondé à en faire in-
terdire Vusage pgcr un autre syndicat , même avec L'addition
d'un qualificatif ou d*un sous-titre, s'il en doit résulter une
confusion dans l'esprit des tiers (2).
(C. de Paris, 26 juillet 1898. ^ Chambre syndicale des mailres Uiliears
de Paris c. Union fraternelle des maîtres taillears.)
Le 28 avril 1897, le tribunal de la Seine a rendu le ju-
gement suivant:
(!) V. sur les dénominations: Pouillet, Marques de fah,, n^ 4()0 et
suiv.
(2) Cr.Paris,!*'' mars 1888, Chambre syndicale d'éclairante etdecheaf*
fage par le gai, Ann., 89.194.
'• -«
F jpT'ni . < t ti ■■ ^ n^'k" ^
— 317 —
Lb Tribunal, Attendu qu'en 1867,ane association de maîtres toi/-
/«urs s'est constituée à Paris pour défendre les intérêts généraux
de la profession ;
Attendu que, dès cette époque, cette association a pris le nom
de Chambre syndicale des maîtres tailleurs de Paris ; que depuis
lors, elle n'a jamais cessé de se présenter sous ce nom, tant au
public qu'aux autorités ;
Que, toujours sous le même nom, elle a publié, dès 1889, un
bulletin mensuel des procès-verbaux de ses assemblées, et rédigé
en 1892 des statuts qu'elle a déposés à la préfecture de la Seine
pour se constituer en syndicat professionnel ;
Attendu que la société fondée, en 1888, sous le nom d'Union
fraternelle des maîtres tailleurs, a pris, en 1865, le nom de Cham-
bre syndicale des maîtres tailleurs de Paris que la société deman-
deresse s'était attribué dès son origine et qu'elle n'avait cessé de
porter ;
Attendu que cette usurpation de nom n'a eu d'autre but que
de faire naître dans l'esprit du public une confusion entre les
'deux sociétés, dans l'intérêt de l'Union fraternelle, aûn d'amë»
liorer son apparence, selon les expressions d'un article publié par
le secrétaire lui-même dans )e bulletin du mois d'octobre 1895 ;
Attendu qu'à supposer que la dénomination de Chambre Syn-
dicale soit habituellement appliquée dans le langage du com-
merce aux associations formées pour la défense des intérêts
généraux d'une certaine catégorie d'industriels ou de commer-
çants, elle n'en constitue pas moins un nom propre, quand il ré-
sulte des circonstances qu'un groupe déterminé d'individus en
a fait le premier, publiquement et de façon continue, un usage
exclusif ;
Qu'en pareil cas, cette dénomination appartient à ce groupe et
ne peut être adoptée par une société du même genre même avec
addition d'un qualificatif ou d'un sous-titre, s'il en résulte néces-
sairement une confusion dans l'esprit des tiers ;
Que nul ne peut, sans motif légitime, s'emparer de ce qui, par
occupation ou autrement, est devenu la propriété d'autrui ;
Attendu que l'Union fraternelle des maîtres tailleurs, d'abord
priée à plusieurs reprises par le syndicat demandeur, puis som-
mée de renoncer à son appellation nouvelle, a répondu par un
refus formel ;
Attendu que, dans ces circonstances, la Chambre syndicale des
maîtres tailleurs de Paris demande à bon droit que l'usage de
son nom soit interdit au syndicat défendeur ;
Par ces motifs. Dit que dans la quinzaine de la notification du
— 318 —
présent jugement la société défenderesse, connue sons le nom
d'Union fraternelle des maîtres tailleurs de Paris, cessera de pren-
dre dans les imprimés, annonce8,papiers à lettres et autres écrits
publiés par elle ou pour son compte, le nom de Chambre syn-
dicale des maîtres tailleurs de Paris.
Sur appel du syndicat, la Cour a, par arrêt du 26 juillet
1898, confirmé en ces termes le jugement attaqué:
La Cour, Au fond :
Considérant que les associations syndicales ont, comme toutes
les sociétés, le droit de se distinguer les unes des autres aa
moyen d'une dénomination qui appartient en propre à celle qui
a été la première à Tadopter ;
Que si les mots Chambre syndicale sont employés dans Tnsage
comme synonymes de syndicat, d'association syndicale oa d*unton
syndicale, la variété de ces expressions démontre que les termes
de Chambre syndicale ne sont pas génériques et indispensables;
Adoptant au surplus les motifs des premiers juges qui ont dé-
cidé arec raison que les intimés avaient droit et intérêtà empê-
cher les appelants de s'en emparer;
Sur les conclusions subsidiaires :
Considérant que la société appelante demande qu'il lui soit
donné acte de ce qu'elle consent à ajouter à son titre primitif
d' Union fraternelle des maîtres tailleurs de Paris, celui de Chambre
syndicale fondée en 1888 ;
Considérant qu'en raison des circonstances particulières de la
cause et du temps depuis lequel la société intimée estexclusive-
Tement connue dans le commerce de Thabillement sous le nom
de Chambre syndicale, les modifications proposées n'empêche-
raient point la confusion qu'il importe de faire cesser;
Par ces motifs, Déclare le syndicat dit V Union fraternelle des
maîtres tailleurs de Paris mal fondé dans ses conclusions princi-
pales et subsidiaires, Ten déboute ;
Confirme le jugement attaqué.
Art. 4227.
BxperUi. — BxpUeadon À raudienoe. — Serment.
Les experts appelés aux débals pour rendre compte de
leurs opérations ou pour donner des explications doivent^
à peine de nullité^ prêter le serment de l'article 1S5 du Code
I ll.|iMii,i- •,■■« ^FÎ'P »JV!ir
— 319 -
d'instruction criminelle^ sauf à prêter de nouveau leserment
de ^article 44 du même code si le tribunal correctionnel ou
la cour d'appel les chargent de procéder à une nouvelle ex-
pertise (1).
(C. de cas8. crim., 23 février 1901. — de Sichen c.
Compagnie universelle du gaz acétylène.)
La Cour, Sur le moyen pris de la yiolation de l'article 1S^5 du
Gode d'instruction criminelle :
Vu ledit article;
Attendu que les experts appelés aux débats pour rendre compte
de leurs opérations ou pour donner des explications doivent, à
peine de nullité prêter le serment de rarticle 155, sauf à prêter
de nouveau le serment de l'article 44 du même Code, si le tri-
bunal correctionnel ou la cour d'appel les chargent de procéder
à une nouvelle expertise ;
Attendu en fait que l'expert Pelegry a été entendu par la Cour
d'appel de Toulouse en ses explications orales relatives à son
expertise sans qu'il ait prêté le serment de Farticle 155 du Gode
d'instruction criminelle ;
Attendu que le pouvoir discrétionnaire du président n'existe
pas en matière correctionnelle ; qu'ainsi, il y a eu violation de
l'article 155 susvisé ;
Sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens du
pourvoi ;
Gasse et annule l'arrêt de la Gour d'appel de Toulouse, en date
du i i avril dernier, renvoie devant la Cour d'appel d'Agen.
MM. LoBW, président ; — CuAynARAUD, rapporteur; — Du-
BoiN, avocal général. — M* Bressoles. avocat.
Art. 4228.
Ck^nearrence Aéloymâe.^ Hdtol Temalniis.— Cbemlii*
de flsr. — Autorisation de* poavolns publie*.
Ne constitue pas, au regard de l'industrie privée, un acte
(i) La Cour de cassation a déjà jugé (Cass., 26 août 1875, Dalloz,
Supp. au Répertoire^ Y* Expertise^ no 188, note) que les experts appe-
lés à donner des explications comme témoins devant la Cour d'assises
sont astreints au serment, il en est a fortiori ainsi en matière correc-
tionnelle, où le pouvoir discrétionnaire du Président n*existe pas (art. 155,
C. instr. erim.).
— 320 —
de concurrence déloyale le fait, par une Compagnie de che-
mins de fer, de construire un hôtel terminus dans une de
ses gares {en l'espèce l'édification d'un hôtel à voyageurs,
par la Compagnie d' Orléans, dans sa gare du quai d* Or say)^
alors que la création de cet hô tel , autorisé par les pouvoirs
publics et d'ailleurs non exploité directement par la compa-
gnie, a pour but et doit avoir pour effets tout comme les
buffets, restaurants, librairies y installés dans V intérieur des
gares et stations, une amélioration dans les conditions gé-
nérales de transport des voyageurs (1).
(€• de Paris, 2 août 1900. — Chambre syndicale des grands hôtels et
maisons meublées c. Compagnie des chemins de fer d*Orléans.)
La Chambre syndicale des grands hôtels et maisons
meublées de Paris, émue de la concurrence qu'allait faire
à ses adhérenls la construction d'un hôtel Terminus par
la Compagnie des chemins de fer d'Orléans actionna cette
(1) V. sur la question des hôtels terminus : à propos de l'hôtel de la
gare de Marseille, Àix, 15 février 188*2, Compagnie des chemins de fer
P.-L.-Iil., Ann.^ 82.33 avec la note, et Gass.,rej., 19 décembre i882,i4nn.,
83. 139 et StVey, 84. 1.433 avec le rapport de M.le conseiller Féraud-Giraad
et la note de M. Lyon-Caen ; à propos de l'hôtel de la gare de Bordeaux-
St-Jean« Trib. comm. Bordeaux, 12 janvier 1898, Compagnie des chemins
de fer du Midi, DaZ^oz, 99.2.44. — V. encore, Dalloz, Rép., Supplément,
V* Voirie par chemins de fer, n« 23. et Bulletin annoté des chemins de
ftr, 1898.95 et 105, article de M. Lamé-Fleury.
La Cour de Paris a soin de constater, dans l'espèce, que la création
de rhôtel était autorisée par les pouvoirs publics et avait pour but
l'amélioration des conditions générales de transport des voyageurs. Il
s'ensuit que cette création se rattache intimement à l'œuvre pour laquelle
le monopole a été accordé et la complète. Dans le même ordre d'idées
il a été jugé qu'une Compagnie de chemins de fer est en droit de faire
le camionnage pour le service de la gare et d'exploiter un buffet (Caas.
crim., 29 décembre 1860, D. 61.5.71). Mais une Compagnie de chemins
de fer abuse de son monopole et fait concurrence illicite lorsqu'elle
exerce le commerce des charbons (Cass. rej., 5 juillet 1865, D. 65.1.
348).
Depuis l'arrêt de la Cour, que nous rapportons, sur une nouvelle poar-
suite le tribunal de commerce a décidé, par jugement du 20 mai 1901,
que si la Compagnie d'Orléans avait le droit d'exploiter l'hôtel Terminus
construit par elle pour le bien-être de ses voyageurs et qui était pour eux
comme un accessoire du transport, elle outrepassait ses droits en
convertissant, chaque soir, son hôtel en salles de banquet, repas de
noces, bals, etc., et qu'elle devrait désormais le consacrer exclusivement
à ses voyageurs. Le jugement condamne la Compagnie i payer au Grand
Hôtel et à l'Hôtel Continental des dommages-intérêts à fixer par état ;
il a été frappé d'appel par la Compagnie d'Orléans.
— 321 —
compagnie devant le Tribunal de commerce de la Seine
pour se voir faire défense de construire cet hôteL
Le Tribunal de commerce a, le 80 mars 1899, repoussé
cette demande par un jugement ainsi conçu :
Lb TRiBur^ÂL, Attendu que la Chambre syndicale des grands
hôtels et maisons meublées de Paris prétend et fait plaider, que
ce serait sans droit que la Compagnie d^Orléans procède à Tédi-
fication d'un hôtel à voyageurs sur remplacement des terrains
de la Cour des Comptes et de la caserne du quai d'Orsay qui de-
vraient être exclusivement consacrés à l'installation de sa nou-
velle gare sur ledit emplacement; qu'en effet la dite Compagnie;
régie par les statuts qui lui ont cédé l'exploitation de certaines
lignes de chemins de fer, ne peut exercer une industrie autre
que celle' qui a fait Tobjet de sa concession ;
Qu'on ne saurait admettre qn'une compagnie, qui jouit d'un
monopole qu'elle tient de l'Etat, pût proûter de cette situation
privilégiée pour créer une concurrence directe ou indirecte à
une industrie quelconque ;
Que cette faculté de commerce et d'industrie en faveur des
compagnies de chemins de fer serait contraire aux considérations
qui leur ont fait accorder le monopole dont elles jouissent, puis-
que l'Etat avait eu seulement en vue de faciliter et développer
les moyens de transport dans un intérêt public et général et non
de créer des concurrences nuisibles aux industries constituant
la fortune nationale, qu'il a pour mission de protéger et de dé-
fendre ;
Que c'est ainsi que les statuts imposés aux compagnies de
chemins de fer ont établi à l'égard de tous une égalité de traite-
ment dans l'application des tarifs ;
Que ces principes généraux ont été consacrés par les auteurs et
la jurisprudence ;
Qu'on ne saurait tirer argument des décisions judiciaires
rendues relativement à l'hôtel Terminus de la gare Saint-Charles
à Marseille alors que les trois juridictions qui avaient eu à se
prononcer sur le différend survenu entre les hôteliers de Mar-
seille et la Compagnie de Paris-Lyon-Méditerranée avaient consi-
déré la création dudit hôtel comme une nécessité de l'exploita-
tion du service en raison de l'éloignement de la gare et la facilité
donnée ainsi aux voyageurs de s'arrêter en cours de route sans
être astreints à un déplacement fatigant ;
Que ces considérations de fait qui auraient motivé ces déci-
sions judiciaires ne se rencontreraient pas en l'espèce alors que
la nouvelle gare d'Orsay serait en fin de parcours et au centre
de Paris ;
Qu'on ne saurait non plus se prévaloir de l'existence de Thôtel
21
I.
— 322 -
Terminus de la gare Saint-Lazare tous droits ayant été réserTés
sur ce point en vertu d'une protestation par acte extrajudiciaire
signifiée par les intéressés ;
Que la création des hôtels dans les gares, & Texemple de ceux
existant à l'étranger, ne saurait non plus être invoquée, l'exploi-
tation des lignes de chemins de fer à Tétranger étant libre et les
compagnies ne jouissant d'aucun monopole ;
Que la Compagnie d'Orléans, société anonyme constituée avant
la loi du 24 juillet 1867 et n'ayant pas usé du bénéfice de Tarti-
cle 46 de ladite loi lui permettant de se transformer se trouve
tbujours sous Tempire des dispositions de l'article 37 du Gode
de commerce ;
Qu'aux termes dudit article sa formation en société anonyme
et ses statuts ayant dil être approuvés par l'Etat elle ne pouvait
les modifier sans son assentiment ;
Que le Parlement n'avait été saisi que d'un projet de loi con-
cernant l'aliénation des terrains domaniaux de la Cour des Comp-
tes et de la caserne du quai d'Orsay pour l'établissement de la
nouvelle gare de la Compagnie d'Orléans sur ledit emplacement;
Que la construction de l'hôtel ayant donné naissance au pré-
sent litige aurait été entièrement réservé» ;
Qu'on ne saurait donc voir dans le vote de cette loi une auto-
risation même tacite de l'établissement d'un hôtel ; que ce serait
donc contrairement à ses statuts et sans l'autorisation préalable
qui lui eût été nécessaire que la Compagnie d'Orléans aurait
décidé la construction d'un hôtel sur l'emplacement des terrains
aliénés avec affectation spéciale ;
Qu'en admettant l'autorisation administrative pour la construc-
tion dudit hôtel elle ne saurait être considérée que comme
réglant les rapports financiers de l'Etat avec la Compagnie d'Or-
léans relativement à la garantie d'intérêts sans pouvoir préjudi-
cier en rien aux droits des tiers ;
Que l'industrie que le syndicat représente, imposée pour des
sommes considérables, concourt à la garantie d'intérêts de
l'Etat vis-à-vis des compagnies de chemins de fer ;
Qu'à ce titre cette industrie ne saurait être l'objet d'une con-
currence de la part desdites compagnies, laquelle serait désas-
treuse en raison des privilèges dont ces dernières jouissent et
notamment de la sécurité du loyer de l'argent de leur capital ;
Que l'importance de l'hôtel en construction suffirait pour per-
mettre d'apprécier l'étendue de la concurrence et du préjudice
qu'aura à supporter l'industrie dont la chambre syndicale a
charge de défendre les intérêts.
Qu'ainsi la Compagnie d'Orléans, en construisant sur rempla-
cement de la gare projetée un hôtel pour l'exploiter sans qae
* . '
— 323 —
cTette construction puisse être considérée comme étant nécessi-
tée pour les besoins ou améliorations de son service d'entreprise
des lignes concédées agirait en violation de ses statuts et crée-
rait à Tindustrie des hôteliers une concurrence déloyale ou tout
au moins illégale ;
Qu'il conviendrait de la déclarer telle en faisant défense à
la Compagnie d'Orléans de construire l'hôtel dont s'agit et ce
en donnant acte à la demanderesse de ses plus expresses réser-
ves de réclamer ultérieurement tous dommages et intérêts ;
Mais attendu que la demande dont le tribunal est saisi tend à
voir dire que la compagnie se rend coupable de concurrence
déloyale et à lui faire défense de construire un hôtel à voyageurs
sur l'emplacement destiné au prolongement de sa ligne ;
Attendu que si les compagnies ne peuvent se livrer aux opé-
rations commerciales et à Texercice d'industries que la nature
de leur concession leur interdit et qui ne sauraient être consi-
dérées comme un accessoire de leur exploitation destiné à amé-
liorer le service des transports de marchandises ou voyageurs
faisant l'objet de leur concession, il convient d'observer tout
d'abord que la Compagnie d'Orléans n'a pu se rendre coupable
d'actes effectifs et caractérisés de concurrence déloyale en raison
de l'exploitation directe ou indirecte d'un hôtel qui n'existe pas
actuellement et qui reste à construire ;
Qu'il résulte des documents versés au débat que les projets
présentés par la Compagnie d'Orléans pour la création d'une
gare quai d'Orsay ont été soumis à une commission spéciale
nommée par le ministre des travaux publics ;
Que cette commission qui avait reçu mandat d'indiquer le
projet qu'elle croirait devoir être adopté a fixé son choix sur le
projet de gare comportant un hôtel à voyageurs ;
Que ce choix a été ratifié par le ministre des travaux publics
qui Ta notifié à la Compagnie d'Orléans avec certaines modifica-
tions de détail dans les dispositions architecturales pour donner
satisfaction au vœu exprimé par ladite commission ;
Que la dépense de la gare avec hôtel a été comprise dans les
frais d'établissement de prolongement de la ligne sur lesquels
joue la garantie d'intérêts de l'Etat ;
Qu'on ne saurait donc contester l'autorisation des pouvoirs
publics pour la construction d'un hôtel sur remplacement de la
gare à édifier par la Compagnie d'Orléans ;
Attendu que ce tribunal n'a pas qualité pour interdire l'édifi-
cation d'une construction autorisée par l'Etat et de ce chef infir-
mer une décision prise par les pouvoirs publics ;
Qu'on ne saurait admettre d'une façon générale que les voya-
geurs arrivant à Paris,soient à fin de parcours puisqu'ils peuvent
— 324 —
avoir à emprunter le réseau d'autres compagaies poar se rendre
i leur destination définitive ;
Que lesdits voyageurs sont même dans bien des cas munis de
billets pour la totalité de leur trajet sur les réseaux des diffé-
rentes compagnies ;
Que les voies des diverses compagnies sont toutes en commu-
nication par la ligne du chemin de fer de ceinture ; qu'ainsi les
mêmes considérations de repos eu cours de route pour les voya-
geurs qui ont été utilement invoquées dans d'autres procès pour
la construction d'hôtels par les compagnies trouveraient place
dans le présent débat ;
Qu'en fait ce sont ces facilités offertes aux voyageurs c'est-à-
dire au public en général et qui constituent une amélioration
dans le service du transport des voyageurs qui créent une con-
currence nécessaire dans l'intérêt du plus grand nombre et non
le monopole dont jouissent les compagnies de chemins de fer ;
Qu'on ne saurait interdire aux compagnies,qui font des acqui-
sitions d'emplacements dans Paris en vue des besoins toujours
croissants de leur exploita tion,de tirer parti dans les meilleures
conditions possibles en tant que propriétaires desdits emplace-
ments qui n'ont pu trouver une utilisation immédiate; quetce
faisant, elles ne font que gérer leur patrimoine ; qu'elles ne
sauraient être recherchées de ce chef ;
Qu'il convient d'observer que la Compagnie de l'Ouest a donné
à bail son hôtel de la gare Saint-Lazare ainsi que la Compagnie
d'Orléans l'hôtel projeté à la gare du quai d'Orsay qui fait l'objet
du présent litige ;
Qu'il n'y a point là d'exploitation directe avec risques person-
nels ;
Que d'ailleurs la considération de garantie d'intérêts ne sau-
rait être utilement alléguée ;
Qu'il ressort en effet des débats parlementaires lorsque la
question fut posée devinU les Chambres, que la création des
hôtels dont s'agit fut considérée comme de nature à diminuer
dans l'avenir le jeu de ladite garantie et que c'est même pour
ce motif que l'Etat a exigé que les dépenses des hôtels en ques-
tion fussent comprises dans les frais d'établissement des lignes
concédées ;
Qu'ainsi il convient à tous égard de rejeter la demande de la
Chambre syndicale des grands hôtels et maisons meublées de
Paris à toutes fins qu'elle comporte, en lui donnant acte de ses
réserves ;
Par ces uotifs, Donne acte à la Chambre syndicale des grands
hôtels et maisons meublées de Paris de ses plus expresses réser
ves de demander ultérieurement tous dommages et intérêts ;
,, irr^"
— 325 —
La déclare mal fondée en sa demande à toutes fins qu'elle
comporte ;
L'en déboute ;
Et la condamne aux dépens.
Sur rappel de la Chambre syndicale des grands hôtels
la Cour de Paris (!'• ch.),sous la présidence de M. de Vief-
viLLE président, après avoir entendu M*» Ferré et R. Rous-
SBT en leurs plaidoiries a, le 2 août 1900, conQrmé en ces
termes la sentence des premiers juges :
La Cour, Considérant qu'il est de principe que les Compa-
gnies qui jouissent d'un monopole ne peufent exercer d'autre
industrie que celle pour laquelle elles ont été créées ;
Qu'il importe peu, au regard des tiers, dont les droits prifés
sont placés sous la sauvegarde des tribunaux de droit commun,
que des autorisations administratives aient été accordées impli-
citement ou explicitement, régulièrement ou irrégulièrement ;
Qu'il y a lieu seulement de rechercher, en fait, si certaines
opérations commerciales peuvent être, en certains cas, l'acces-
soire licite de l'exploitation principale et si l'établissement par
la Compagnie d'Orléans dans la gare du quai d'Orsay d'un hôtel
Terminus peut, ou non, rentrer dans cette catégorie ;
Considérant qu'il résulte des plans, documents et explications
présentés à la Cour, que la création de cet hôtel, non exploité
directement par la Compagnie, a pour but et doit avoir pour
effet une amélioration dans les conditions générales des trans-
ports, par suite des facilités qu'elle offre aux voyageurs auxquels
soit en cours de route, soit aux points de départ et d'arrivée,
s'impose, par des causes diverses, la nécessité d'un arrêt qui ne
doit point être un séjour;
Que cette amélioration, dont le public est appelé à profiter
dans les mêmes conditions que la création plus ancienne, et non
critiquée, de buffets, restaurants, librairies, etc., installés dans
rintérieur des gares et stations, n'apparatt point, dans les cir-
constances spéciales où elle intervient, comme un abus de son
monopole commis par la Compagnie dans son intérêt exclusif ;
Qu'elle ne constitue point, au regard de l'industrie privée, un
acte de concurrence déloyale pouvant servir de base à une ac-
tion en justice ;
Par CBS motifs. Et adoptant, en tant qu'ils n'ont rie n de con-
traire au présent arrêt, ceux des premiers juges;
Met l'appellation à néant, ordonne que ce dont est appel sor-
tira effet ;
Condamne l'appelant à l'amende et aux dépens de l'appel.
— -m —
Art. 4229.
Brevet Bailler. — Produit nouveau. — <' Procédé. —
Antérloritéfli. — Comuiuiilcation à un coriMi cu-
vant d'un ftelt «eientUlque.
Constitue un produit industriel nouveau le carbure de
calcium CaC^ caractérisé par sa fluidité à la température à
laquelle il se forme, cristallisé après fusion, se présentant
alors sous l'aspect d'une masse compacte^ solide, homogène
et presque exclusivement constituée par du carbure de cal-
cium CaC^^ alors qu'antérieurement on connaissait seule-
ment sous le nom de carbure de calcium, un produit fria-
ble, amorphe, non cristallisé, contenant non seulement du
carbure de calcium, mais du carbone et d'autres corps (1).
Est brevetable le procédé de préparation industrielle des
carbures des métaux alcalino-terreux consistant à chauffer
à V aide d^un four électrique jusqu'à la fusion un mélange
des corps composants dans des proportions déterminées (2).
Pour apprécier une antériorité, il importe d'en préciser
les termes sans y rien ajouter, sans en rien retrancher et
d'examiner les documents d'après les connaissances exis-
tant au moment de son apparition, et antérieurement à la
date du brevet auquel on veut opposer l'antériorité (3).
(1) Sur les caractères du produit industriel nouveau v.Pouillet Brev.
d*inv., n° 20. Pour être nouveau aux yeux de la loi, il n'est pas néces-
saire que le produit n'ait jamais eu de similaire, il faut et il.ouffit qu'il
se distingue par des caractères nouveaux, certains, et essentiel& des pro-
duits existant antérieurement. Les corps chimiques peuvent constituer
des produits nouveaux brevetables, lorsque leur formation est le résultat
du travail et de l'intelligeace de Thomme; il en serait différemment s*il
s'agissait de corps existant tout formés dans la nature, et n'ayant à subir
en vue de leur obtention aucune transformation industrielie.y.PoDillet,
n» 24.
(2) Le fait d'employer le four électrique pour en tirer un résultat non
encore obtenu constitue Tapplication nouvelle de moyens connus, bre-
vetable aux termes de Tarticle 2 de la loi de 184i.II y a d'ailleurs
invention dans le fait d'avoir reconnu l'utilité d'amener à la fusion
les corps composant3,et d'avoir réussi à déterminer les proportions dans
lesquelles ils devaient être employés.
(3-4-5) La règle formulée parle tribunal, est d'une importance capi-
tale. Il faut avoir grand soin, sous peine de s'exposer aux erreurs les
plus graves, quand on examine une antériorité, de faire abstraction des
connaissances acquises par la suite, et de se replacer par lu pensée, pour
l'interpréter, à Tépoque de la prise du brevet. V. sur le caractère que
doit présenter une antériorité, Pouillet, n» 376, et sur raVitérioritéJ
scientifique, n* 413 et suiv.
<|.-^i|^p.>lili|«^ I iflp^ljf^inp^lH
— 327 -
Ne saurait conslittier une antériorité une patente dan$
laquelle, si le produit est mentionné, on ne retrouve du
moins aucune description, ni du produit, ni des procédés
à l'aide desquels il await été obtenu et alors que d'autre
part, il résulte du rapprochement de cette patente avec
d'autres brevets postérieurs du même inventeur que ce n'est
qu'à une date postérieure à celle du brevet attaqué que cet
inventeur a revendiqué un corps de la nature du produit
breveté (4).
Une communication faite à un corps savant^ dans la-
quelle est relaté un phénomène scientifique, donnant nais-
" sance,par un simple incident survenu au cours d'une opéra-
tion de laboratoire, à un corps resté indéterminé, qui n'a pas
été analysé, dont on n'a indiqué ni l'aspect ni les pro'
priétés et ne conduisant par suite à aucun résultat in--
dustriel, ne peut constituer une antériorité (5).
(€. de Paris, 22 février 1901. — Société des carbures de calciam et So-
ciété des forces motrices du Haut-Grésifaudan c. Buliier et Société
des carbures métalliques [1J.)
A la date du 13 juillet 1900, la 3' chambre du Tribunal
civil de la Seine, sous la présidence de M. Lbfbbvre-Ds-
VAUX, a rendu le jugement suivant :
Le Tribunal, Attendu que, sur la demande de la Société des
forces motrices du Haut-Grësivaudan et de la Compagnie des
carbures de calcium en nullité des brevets d'invention pris par
Buliier les 9 février 1894, 28 décembre 1895, ainsi que des cer-
tificats d'addition à ces brevets des 6 février 1895, 27 juin 1896,
le tribunal par jugement de cette chambre du 12 décembre 1898,
a nommé de Parville, Lhoste et Street, experts, à TefTet de re-
* chercher et dire si le produit détini carbure de calcium cristallisé
revendiqué par Buliier dans son brevet du 9 février 1894 et les
l^rocédés de fabrication décrits dans ce brevet ainsi que dans'
ceux du 28 décembre 1895 étaient nouveaux et brevetables à la'
date du dépôt de la demande de ces brevets ; rechercher si, à
Taide des indications contenues tant dans les diverses antério-
rités invoquées que dans la communication de Moissan à TAcadé-'
(1) Depuis Tarrét de la Cour de Paris, la troisième chambre du tribu-
nal civil a, le 17 mai 1901 (la Loi, 19 mai), sur les poursuites de la so-
ciété des carbures, condamné pour contrefaçon du carbure de calcium
considéré comme produit nouveau, la société électro-métallargiqae de ,
Ffoges et divers vendeurs. ^
— 328 —
mie des sciences, on trouve des éléments suffisants pour fabriquer
le produit décrit au brevet Bullier ;
Attendu que les experts ont procédé à leur mission et consi-
gné leurs opérations avec les résultats de leurs recherches daDS
un procès-verbal complet et documenté qu'ils ont déposé aa
greffe de ce tribunal ; qu'il en résulte que les brevets et certifi-
cats d'addition dont s'agit pris par Bullier sont valables ;
Attendu que, malgré Tavis des experts, les sociétés demande-
resses persistent à soutenir que ces brevets seraient nuls pour
défaut de nouveauté et leur opposent diverses antériorités, no-
tamment les antériorités Wahler, Beilstein, Maquenne, Borchers,
Âckinson, Havé, Moissan, Wilson ;
Attendu que le brevet de Bullier, du 9 février 1894,1e seul qui
ait fait Tobjet d'une discussion en plaidoiries, a été pris pour un
procédé de préparation des carbures des métaux alcalino-terreux,
procédé consistant à cbauffer dans un four électrique, par exem-
ple celui de Moissan, un mélange de charbon avec l'oxyde du
métal alcalino-terreux que l'on veut transformer en carbure ;
que le brevet indique que le produit obtenu dans le four est
fluide à la température à laquelle il se forme, et donne par re-
froidissement, une masse compacte, solide, homogène et cris-
talline ; qu'en employant cinquante-six parties de chaux vive et
trente-six parties de charbon, on obtient un [carbure défini ré-
pondant à la formule GaC ;
Attendu que les carbures ainsi obtenus peuvent, sous la simple
action de l'eau, donner immédiatement naissance à racétyléne
pur et que, fabriqués industriellement, ils sont susceptibles de
fournir de l'acétylène à un prix abordable ;
Attendu que, dans le résumé de son brevet, Bullier ne reven-
dique il est vrai que le procédé, mais qu'il n'en a pas moins le
droit de revendiquer le produit qu'il décrit et dont il précise
ainsi les caractères : fluidité à la température à laquelle il se
forme, cristallisation, formule CaC, si ce produit est nouveau ;
que la validité du brevet est exclusivement subordonnée à l'exis-
tence ou an défaut d'antériorité ;
Attendu que pour apprécier une antériorité, il importe d'en
préciser les termes, sans y rien ajouter, sans en rien retran-
cher, et d'examiner le document d'après les connaissances exis-
tant au moment de son apparition et antérieurement à la date
du brevet auquel on veut opposer l'antériorité ;
Attendu que c*est en s'inspirant de cette règle pratique que
les experts déclarèrent que, dans les expériences de Wahler, on
ne retrouve ni la réduction au four électrique de la chaux par
le charbon, ni le produit carbure de calcium coulé et cristallisé
— 329 —
après refroidissement, les températures mises en jeu étant in*
suffisantes pour obtenir un produit défini industriel ;
Attendu que, dans les travaux de Beilstein, il ne s*agit pas
d''ane antériorité proprement dite, puisque, si Beilstein donne la
formule théorique, il n'indique pas qu'il ait obtenu ce carbure
et ne fournit pas les moyens de le préparer ; quMl en est de même
des expériences de Maquenne où, comme pour celles de Wah-
1er, on ne retrouve pas la réduction de la chaux par le carbone
dans le four électrique conduisant à la production du carbure
déûui et cristallisé, et du passade du traité d'électro-métallurgie
de Borchers qui se borne à faire observer que tous les oxydes
sont réduits par le carbone chauffé électriquement ;
Attendu que, dans le brevet Ackinson, il s^agit de la prépara*
lion d'un corps spécial, le earborandum, qui est un carbure de
silicium impur caractérisé par sa dureté, ses qualités réfractai-
r«s et son insolubilité dans tous les dissolvants ordinaires ; que
le corps cristallisé obtenu par chauffage au four électrique ne
présente aucun des caractères du carbure de calcium, dont Tin-
venteur ne parle même pas ; que Havé, en indiquant que le pro-
duit obtenu par lui et désigné sous le nom de carbure de cal-
cium n'est attaqué ni par Tacide chlorhydrique ni par l'acide
sulfurique, démontre, par là môme, que ce produit n'était pas
du carbure de calcium ; qu'il ressort de l'examen de ces anté-
riorités qu'aucun des savants ayant signalé le carbure de calcium
n'a décrit soit un procédé, soit un produit qui puisse mettre eu
échec le brève! Bullier.
En ce qui concerne l'antériorité tirée de la communication
faite par Moissan, le 12 décembre 1862, à l'Académie des sciences
et où il signale, dans un cas particulier, la formation, sur les
électrodes du four électrique, d'un carbure de calcium :
Attendu que si Moissan, en étudiant la marche de son four
électrique, a remarqué que, vers 3,000 degrés, la chaux consti-
tuant le four entrait en fusion et qu'au dehors coulait une ma-
tière fondue, résultant, selon lui, de l'union du calcium avec le
carbone des électrodes, il est constant que ce savant n'a fait que
noter un phénomène scientifique sans analyser ce qu'il a supposé
être un carbure de calciumj sans en indiquer ni l'aspect ni les
propriétés; qu'à la place d'un simple incident survenu au cours
d'une opération de laboratoire et d'une note constatant un fait
scientifique, il y a eu de la part de Bullier, obtention du carbure
de calcium cristallisé et d'un procédé de fabrication, par le trai-
tement, au four électrique, d'un mélange de chaux et de carbone
en proportions convenables (56 de chaux et 36 de charbon) ;
Attendu que la communication de Moissan, qui ne conduisait
pas à un résultat industriel, ne peut constituer une antériorité
» t"
— 330 —
^u brevet de 1894, ni pour le produit ni pour le procédé ;
En ce qui- concerne la patente Wilson du 21 février 1893, ayant
pour titre : la réduction électrique de composés métalliques réfrac-
taires :
Attendu que la découverte revendiquée dans cette patente
consiste à produire l'aluminium en évitant la formation du bain
de fusion et en employant un excès de carbone dans les mélan-
ges, ce qui est le contraire du but poursuivi et atteint par Bul-
lier ; que l'inventeur ne parle qu'incidemment de Tapplication
qu*il aurait faite de son procédé à la production du carbure de
calcium en disant : « Par exemple, je Tai déjà employé pour la
réduction de la chaux et la production du carbure de calcium »
et ne parle d'aucune analyse de carbure, comme il n'en indique
aucune propriété, pas même celle que le carbure pouvait avoir
de dégager de l'acétylène au contact de Peau ; qu'il suffirait en-
core, pour écarter cette antériorité, de constater que, d'après
Wiison, les matières en réaction dans le four électrique doivent
rester poreuses, en évitant la formation du bain liquide,alorsqae
le bain de fusion est précisément la condition essentielle de la
formation du carbure de calcium industriel ; que le carbure po-
reux, amorphe, fritte, obtenu par Wiison n'a rien de commun
avec le produit industriel déQni par BuUier, produit qui est fluide
à la température à laquelle il se forme, se présente sous Faspect
d'une masse compacte, solide, homogène et cristallisée après
fusion ;
Attendu que c'est donc à bon droit que les experts, avec leur
indiscutable' compétence, concluent que le produit industriel
défini carbure de calcium cristallisé et son procédé de fabrica-
tion décrits dans les brevets dont la nullité est demandée étaient
nouveaux et brevetables à la date du dépôt des demandes et que
les indications contenues tant dans les diverses antériorités in-
voquées que dans la communication de Moissan à l'Académie
des sciences ne constituent pas des éléments suffisants pour fa-
briquer le produit décrit au brevet BuUier ; qu'il convient d'en-
tériner le rapport des experts et de déclarer bons et valables les
brevets et certificats d'addition prérappelés;
Sur la demande de 30,000 francs de dommages-intérêts :
Attendu qu'une condamnation à des dommages-intérêts ne
peut être justifiée que par la constatation d'une fraude ; que la
bonne foi des compagnies demanderesses n'est point en question
dans le procès et qu'il s'agit d'un litige ordinaire au cours du-
quel elles n'ont pas dépassé les limites permises à ceux qui plai-
dent; que BuUier et la Société des Garbures métalliques nejas-
Ufient d'ailleurs d'aucun préjudice ;
— 331 —
Par ces motifs, Entérinant purement et simplement le rap-
port des experts ;
Dit et déclare que le produit industriel « le carbure de cal-
cium défini cristallisé Ga G2 » a été valablement breveté par
BuUier ; qu'il en est de même des procédés indiqués pour sa
préparation ;
Déclare les brevets et certifîcats d'addition susvisés bons et
valables ;
Déclare en conséquence la Société des forces motrices du Haut-f
Grésivaudan et laGompagnie des Garbures de calcium mal fon-
dées en leurs demandes, fins et conclusions;
Les en déboute ;
Dit n'y avoir lieu d'accorder des dommages-intérêts aux par-
ties défenderesses, ni d'ordonner Tinsertion du présent jugement
ainsi qu'il est demandé ;
Les déboute de ce chef de leurs conclusions ;
Condamne les sociétés demanderesses en tous les dépens qui
comprendront les frais d'expertise, etc.
Sur appel interjeté par la Compagnie des Garbures de
calciun), la Cour sous la présidence de M. Gaze, président,
a, le 22 février 1901, rendu Tarrêl confirmatif suivant :
La Cour, — Au fond :
En ce qui concerne le brevet pris par Ballier le 9 février 1894
sous le numéro 236.160 :
Sur le moyen de nullité tiré du défaut de nouveauté tant du
procédé que du produit qui forment l'objet de ce brevet, relative-
ment aux antériorités tirées des travaux et découvertesde Wahler,
Beilstein, Maquenne, Borchers, Ackinson, Havé, Moissan et
Wilson :
Adoptant les motifs du jugement ;
Et, en outre, sur l'antériorité invoquée par les sociétés appe-
lantes devant la Cour et résultant, d'après elle, des travaux de
Travers:
Considérant que des documents soumis à la Cour et discutés
contradictoirement par les parties, il ressort que Travers, en 1893,
a seulement opéré la réduction du chlorure de calcium par le
sodium en présence du charbon, et obtenu par ce procédé un
produit friable qui contenait non seulement du carbure de cal-
cium mais du chlorure de calcium et du cyanure de sodium ;
En ce qui touche les nouveaux documents produits à l'appui-
de l'antériorité qui résulterait de la patente américaine de Wilson ,j
des 9 août 1792 et 21 février 1893, n» 492.377 ;
— 332 —
Gonsidéraut que ces documents ne sont pas suffisamment précis
ou concordants pour établir la preuve qu'ayant le 9 férrier 1894
Wllson avait réussi à isoler un carbure de calcium identique à
celui de BuUier ;
Mais qu'en fût-il ainsi, au surplus, d'une part, il résulte de
Tezpertise que la patente de 1892-93 susyisée n'avait eu nulle-
ment pour objet de décrire et, en fait, n'avait nullement décrit,
ni ce produit, ni le procédé à l'aide duquel il aurait été obtenu
et il ressort, d'autre part, du rapprochement des brevets, ou rec-
tificatifs ou complémentaires, pris par Wilson en divers paysaax
dates des 24 août 1894, 24 novembre 1894 et 4 février 1895 que ce
n'est que dans ces brevets, postérieurs à celui de BuUier, qu'il a
revendiqué pour la première fois un carbure de calcium pur et
cristallisé ;
En ce qui touche les décisions de juridictions qui auraient re-
jeté la demande de brevet faite par BuUier en pays étranger :
Considérant que ces décisions, intervenues sous Tempire de
législations spéciales, dans des conditions qui échappent à l'exa-
men de la Cour, ne sauraient être de nature à infirmer la valeur
des éléments de solution résultant des débats contradictoires qui
ont eu lieu devant elle ;
Considérant que, de ces débats, il ressort que BuUier, en uti-
lisant les travaux et découvertes qui avaient été réalisés avant
lui, a, le premier,par la combinaison d'éléments qui pouvaient être
connus, réalisé et appliqué pour la préparation industrielle des
carbures de métaux alcalino-terreux le procédé par lui décrit
consistant dans le chauffage jusqu'à la fusion, à l'aide d'un four
électrique d'un mélange des corps composants dans des proposi-
tions déterminées ;
Qu'en outre, il a le premier, dans les conditions déterminées
par ce procédé même, et au moyen d'un mélange de chaux et
de carbone dans des proportions correspondant à la formule
théorique CaC*, obtenu spécialement un produit industriel noQ-
veau caractérisé par sa fluidité à la température à laquelle il se
forme, cristallisé après fusion, se présentant alors sous l'aspect
d'une masse compacte, solide, homogène et presque exclosive-
ment constituée par du carbure de calcium CaC, et que son
invention, limitée d'ailleurs dans les termes mêmes de son brevet, |
lui donne le droit de revendiquer et le procédé et le prodoit
spécial par lui décrits ;
Sur le moyen de nullité fondé sur les paragraphes 2 à 7 de
l'article 30 et les autres articles de la loi du 5 juillet 1844 visés
sous cette formule dans les conclusions d'appel :
Considérant, d'une part, que les travaux des experts établissent
la preuve que la description jointe au brevet est suffisante
— 333 —
pour Texécation de l'inyention ; que la demande en indique bien
le véritable objet et que cette invention est légalement bre-
▼etable ;
Considérant, d'autre part, qa^à Tappui des autres moyens de
nallité visés d'une manière générale dans leurs conclusions, les
sociétés appelantes ne produisent aucune justification ni aucun
élément de preuve ;
En ce qui touche les deux brevets pris par BuUier le 28 dé-
cembre 1895 sous le n* 252.805 et sous le n* 252.808 et les certi-
ficats d'addition du 6 février 1895 et du 27 janvier 1896 :
Considérant que les sociétés appelantes n'invoquent aucune
cause de nullité et ne produisent aucun élément de preuve qui
soient spéciaux auxdits brevets et certificats d'addition ; que les
motifs du présent arrêt leur sont également applicables ;
Pab ces votifs, Et adoptant ceux des premiers juges qui ne
sont point contraires à ceux qui précèdent ;
Au fond:
Met l'appellation à néant ;
Ordonne que ce dont est appel sortira son plein et entier effet ;
Précisant toutefois les dispositions du jugement ;
Dit que le produit industriel nouveau valablement breveté par
Bullierest un carbure de calcium défini, cristallisé, obtenu dans
les conditions du procédé décrit et également breveté par lui ;
Déclare les sociétés appelantes mal fondées dans leurs deman-
des, fins et conclusions contraires au présent arrêt ;
Les en déboute ;
Les condamne à l'amende et aux dépens de leur appel.
Plaidants: M" Cruppi, Pouillbt et Allart, avocats. —
Min. pub. : M. Jaubois, avocat général.
Art. 4230.
Brevet Combret. ^ Objets eontreftlit*. — ConflseA-
tion. — Disparition des oltfets mentionnés dans la
saisie deseriptive. — Ooniniaffes et Intérêts.
La confiscation prescrite par Varticle 49 de la loi du
^juillet 1844 est obligatoire et les objets contrefaits qu'ils
aient été saisis ou non lors de la constatation du délit de
contrefaçon doivent être remis au propriétaire du brevet
(Résolu par la Cour de cassation) (1).
(1) La confiscation est obligatoire pour le juge, quelle que soit la valeur
— 334 —
^' Mais cette remise ne pouvant s*effectuer que $i les objets
contrefaits sont encore en la possession du contrefacteur
tu moment où la condamnation est prononcée, dans le cas
contraire la réparation civile due au breveté se réduit à des
dommages et intérêts (Résolu par la Cour de cassation) {i\
Cette circonstance pouvant seule justifier le défaut de
confiscation, est insuffisamment motivé, V arrêt qui ne pro-
nonçant pa^ la confiscation des objets contrefaits omet de
mentionner la disparition et n'indique pas qu'il en a e-<^
tenu compte dans l'allocation des dommages et intérêts (Ré-
solu par la Cour de cassation).
Lorsque la partie pou7*suivie ne peut plus remettre en na-
ture les objets décrits soit qu'elle ait usé de son droit d'alié-
nation^ soit même quHis aient été perdus, le breveté n'étant
pas lié par la vente faite en dehors de lui, et qu'il n'a pu
contrôler, est fondé à réclamer comme représentation des
objets une valeur fixe qui ne peut être que celle quih
avaient au moment de l'introduction de l'instance (Résolu
par la Cour de Douai, après cassation) (3).
// n'y a pas lieu de prononcer la confiscation des ma-
chines ayant servi à fabriquer les objets contrefaits, lors-
qu'elles n'ont rien d^ spécial, il suffit d'attribuer au breveté
les organes modifiés en vue de la contrefaçon (Résolu parla
Cour d'Amiens) (4).
des objets contrefaits, qu'ils aient été saisis ou non. L'article 49, alinéa
1*' de la loi du 5 juillet 1844 dispose en effet non que la confiscation
pourra être, mais sera prononcée toutes les fois que la contrefaçon sera
reconnue. 11 en est de même de la remise au breveté des objets confis-
qués. — V. Pouillet, Brev. d'inv., n» 967,9(39, 979 ; AUart. lll, h"689.
696, Mainié, II, 3i56, 8170; Couhin, Prop, ind., Il, 188 et s.; Cass.,
20 août 1851, Alcan, Ann, 70.886 ; Cass., 14 août 1871, Ghamponnois,
Ann. 72.131 ; Nancy, 11 janvier 1875, Frezon, Ann, 75.20 ; Paris, l«'jail-
let 1861, Brunon, Ann. 93.73.
(2-3) Si la contrefaçon a pour fondement ce principe qu'an objet con-
trefait et par suite illicite, ne doit pas rester entre les mains de son fa-
bricant ou détenteur, de telle sorte qu'elle doive, d'après les termes de
Tarticle 49, être prononcée même en cas d'acquittement, elle cons-
titue également un mode de réparation du préjudice causé an bre-
veté, sans préjudice de plus amples dommages et intérêts s'i/yalteu,'
ajoute le législateur dans le second paragraphe de Tarticle 49. La
conséquence en est que, si les objets contrefaits, existant au moment
de rassignation, ont disparu, le juge doit évaluer le préjudice ainsi
causé au breveté, et lui allouer des dommages et intérêts correspon-
dants, mais, comme c'est la date de Tassignation qui fixe les droilJ
respectifs des parties, c'est à cette époque qu'il faut se placer pour
apprécier la valeur des objets contrefaits.
(4) C'est avec raison que la Cour s'est refusé à prononcer la confiscation
^T:rv^^' : . . #-"tf»"» "^"^ - ■ ^' ■■■■ •■ 7.' * . i ■ '\9/i " ii|p n j j I
— 335 —
(C. d'Orléans, 21 juillet 1896 ; a de Cass., 14 janvier 1B98 et G. d^Âraîens^
2 déceiAbre 1898 ; C. de cass., 9 juin 1899; G. de Doaai, 9 avril 1900.
— Gombret c. Bondonneau . )
Le sieur Gombrel, en vertu d*un brevet pris par lui à la
date du 30 novembre 4885 pour un système de briquettes
de charbon perfectionnées, avait, le 21 novembre 1887, fait
saisir, comme contrefaçon de son système, des briquettes
de charbon chez les sieurs Bondonneau marchand de bois
et Masson et Renard directeurs de la Société des allume-
feux écossais et les avait poursuivis comme contrefacteurs
devant le Tribunal correctionnel de la Seine.
Le tribunal renvoya les défenseurs des fins de la plainte
en se fondant sur ce que le brevet n'ayant pas été exploi-
té pendant le délai imparti par la loi, le demandeur devait
être considéré comme déchu de ses droits et non recevable
dans son action. La Cour de Paris sur Tappel de Gom-
bret par arrêt du 9 juillet 1888 {Ann., 89. 168) reconnut au
contraire que Taction de Gombret était recevable nonobs-
tant le défaut d'exploitation du brevet, Taction ayant été
intentée avant l'expiration des deux années imparties par
la loi pourTexploitalion du brevet à partir de sa délivran-
ce ; mais constatant en fait, que Gombrel n'ayant pas ex-
ploité, ni tenté d'exploiter industriellement sa prétendue
invention, aucun préjudice n'a pu lui être causé, elle ren-
voya les intimés des fins de la poursuite sans dépens.
Pourvoi de Gombret devant la Gourde cassation qui, par
arrêt du 10 janvier 1889 (V. Anw., 89. 168), casse l'arrêt de
la Cour de Paris, comme ayant violé l'article 32 et Tarti-
cle 40 de la loi du 8 juillet 1844 en faisant résulter l'ab-
sence du préjudice pour le breveté uniquement de ce que
au moment où il a exercé son action il n'avait pas encore
exploité sa découverte et de ce qu'il se serait ensuite trouvé
des machines qui ne présentaient en elle-même rien de caractéristique
et s'est bornée à attribuer au breveté la valeur des seuls organes parti-
culiers employés à la confection des objets contrefaits. — V. Pouillet,
n»978; Allart, III, 698; Paris, 23 août 1866, Gourant, Ann. 67.aS7 ;
Paris, 5 juillet 1884, Fournier, Ann. 85.259; et aussi, Amiens, 2 juin
1883, Barreau-Pinchon, Ann. 85.259; Paris, 19 juin 1890, Sourbé,
Ann. 90.252; Con//YÏ, Nancy, 10 déc. 1894, Dervaux, Rec. Nanci/,9b.
143. A. T.
■r-\i-t^w- '- • - -- ■- -r T- T^»-.-. «-^^^- '^-— -^-«.•■,— V|'J|'r=^
- 336 —
déchu de ses droits faute d'exploitation, méconnaissant
ainsi Feffet du droit exclusif accordé au brevet à partir
de la signature du brevet, et faussement attribué à la dé*
chéance un effet rétroactif (1).
La Cour d'Orléans statuant comme Gourde renvoi, mit
par arrêt du 28 mai 1888 Masson et Renard hors de cause
et ordonna une expertise ; enfin par arrêt du 21 juillet 1896,
sans tenir compte du rapport des experts (2) qu'elle dé-
clara dépourvu de tout caractère probant, elle repoussa
dans les termes suivants les prétentions de Combret :
La Cour, Statuant comme Cour de renvoi en vertu de Tarrét
de la Cour de cassation du 10 janvier 1889 :
Attendu que, par procès-verbal du 21 novembre 1887, Com-
bret a fait saisir chez Bondonneau des briquettes qui diaprés le
poursuivant auraient été la contrefaçon de briquettes faisant
l'objet d'un brevet pris par Combret le 25 août 1885 ;
Attendu qu'à la suite de cette saisie Combret a, suivant deax
procès- verbaux en date du 23 novembre 1887, déposé au greffe
correctionnel de la Seine deux briquettes saisies, au travers des-
quelles était passé un ruban portant les inscriptions suivantes :
« Procès-verbal du 21 novembre 1887 ; briquette arfçuée de con-
trefaçon ; allume-feux écossais Maifon et Renaud, 28, avenue de
rOpéra. L'buissier : Langlet ; le commissaire de police : Dufour-
mantelle » ;
Attendu qu'à la suite d'un arrêt rendu par la Cour de cassation,
le 10 janvier 1889, la Cour d'Orléans a nommé un expert chargé
notamment de dire quelle est la nature des différents produits
fabriqués par Bondonneau (briquettes L. B. sans trous, briquettes
L. B. avec trous, briquettes L.B. avec trous et rainures), dédire
si l'un ou l'autre de ces modèles constitue la contrefaçon des
briquettes faisant l'objet du brevet de Combret;
Attendu que le sieur Combret, ayant abandonné les poursui-
tes pendant plusieurs années, les a reprises en 1895 ; qu'au mois
de mai 1895 il s'est présenté devant l'expert, lui demandant de
procéder aux opérations qui lui avaient été confiées ;
(1) Sur la non-rétroactivité de la déchéance faute d'exploitation et sur
le fait que l'absence totale de préjudice ne suffit pas à faire disparaître
la contrefaçon, v. Feuillet, n<» 363 à 866 ; Allart, Prop.des brev. cTtue.,
no* 295 et 434 et Cass., 26 juillet 1889, Vacher, Ann. 89.234.
(2) L'expertise est une mesure d'instruction que le juge ordonne afin
de s'éclairer, mais dont les résultats ne s'imposent à lai en aucune fa-
çon, n peut, après la nullité d'une expertise ordonnée, juger sans en
ordonner une autre. — Y. Ponillet, n» U28 et Paris, 22 mars 1863 ;
Masse, Ann. 62.388; Rej., 30 janv. 1869 ; Langlois, Ann. 69.128.
— 337 —
Attendu que, pour apprécier la valeur de Tinvention prétendue,
l*ezpert a effectué, sur le même foyer, la combustion de bri-
quettes « ordinaires » à trous et de briquettes à trous « avec
rainures »; que les briquettes qui ont servi à cette expérience
ont été, aux termes du rapport, « apportées par M. Gombret » ;
que l'expert constate qu'il n'a pu opérer sur les briquettes pré-
sentées à la Cour d'Orléans ;
Attendu que l'expert s'est borné à faire brûler simultanément
des briquettes sans rainures et des briquettes avec rainures (sys-
tème Gombret, 8 trous) et qu'il a constaté que les briquettes à
rainures et trous présentent sur les autres une supériorité in-
contestable au point de vue de la combustion ;
Attendu que ce second rapport, qui porle la date du 2 novem-
bre 1895, ne s'explique pas sur les points essentiels à vérifier,
o'est-à-dire sur la nature des produits fabriqués et sur la ques-
tion de savoir si les divers modèles de Bondonneau constituent
la contrefaçon des briquettes brevetées ;
Attendu qu'à la date du 31 mai 1896 Texpert a rédigé un sup-
plément de rapport ; qu'il constate que le sieur Gombret lui a
remis un procès-verbal de dépôt du 23 mars 1887, en l'informant
que les pièces à conviction étaient restées au greffe de la Gour de
Paris ;
Attendu que l'expert, en examinant extérieurement les deux
briquettes saisies, déclare qu'elles présentent sur Tune et l'au-
tre face une rainure qui établit une communication entre les
deux trous du milieu et les bords libres de la briquette ; que
cette disposition est celle des briquettes faisant l'objet du bre-
vet Gombret ;
Attendu que le rapport principal n'est pas régulier et n'offre
aucun caractère probant ; que Texpert s'est borné à comparer
des briquettes qu'il nomme ordinaires à trous avec des briquet-
tes à trous et rainures ; que ces objets lui ont été apportés par
Gombret ; qu'il eût dû comparer des briquettes brevetées de
Gombret avec celles de Bondonneau, ce qui eût dû être constaté
préalablement par les deux parties ; qu'il est impossible de sa-
voir où Gombret s'est procuré les deux espèces de briquettes
qu'il a remises à l'expert ; qu'enfin celui-ci n'indique, ni par une
analyse, ni même par une simple affirmation, quelle était la na-
ture des matières composant les objets expertisés, ce qui, indé-
pendamment des trous et des rainures, devait avoir une influence
notable sur leur combustibilité ;
Attendu que le rapport supplémentaire se borne à mentionner
la forme extérieure (trous et rainures) des briquettes saisies,
mais que ces briquettes n'ont été l'objet d'aucune expérience de
vérification ou d'analyse ; qu'il est impossible dès lors d'affir-
22
— 338 —
mer avec certitude quelle est la contrefaçon des briquettes Gom-
bret ;
Attendu, en conséquence, qu'il n'y a lieu d'homologuer le
double rapport dont il s'agit, quelle que soit la compétence de
l'expert qui Ta rédigé ;
Attendu que l'interlocutoire ne lie pas le juge ;
Attendu qu'en annulant un rapport d'expert les juges peuvent,
sans recourir à un nouyel examen, statuer au fond sur les pré-
tentions des parties ;
Attendu qu'il résulte des documents de la cause qu'avant l'ob-
tention du brevet Combret, et notamment en 1883 et 1884, Bon-
donneau avait fabriqué et vendu des modèles de briquettes avec
trous et rainures et que celles-ci étaient produites par les ini-
tiales L. B. en creux, correspondant aux trous; que si ces rai-
nures n'atteignaient pas complètement le bord des briquettes,
l'espace de moins d'un centimètre existant entre la lin de la rai-
nure et le bord de la briquette était insignifiant au point de vue
de la combustion ;
Attendu que Combret ne justifie ni d*une contrefaçon ni d'an
préjudice par lui éprouvé ; que, soit avant, soit depuis la pour-
suite, il ne s'est livré à aucune fabrication ni à aucun commerce
de ses prétendus produits industriels ; d'où il suit que la de-
mande doit être rejetée ;
Par ors motifs, Et adoptant ceux des premiers juges non con-
traires au présent arrêt,
Déclare nulle et non probante la double expertise ;
Et sans qu'il y ait lieu de recourir à une nouvelle expertise
qui serait inutile,
Rejette les diverses demandes de Combret ;
Réforme le jugement du Tribunal correctionnel de la Seine
du 28 avril 1888 dont est appel ;
Et condamne Combret aux dépens de première instance et d'ap-
pel tant ceux faits devant la Cour de Paris que devant la Cour de
renvoi, moins toutefois ceux de l'arrêt cassé de la Cour de Pa-
ris du 9 juillet 1888.
Nouveau pourvoi de la part de Combret et arrêt de la
Cour de cassation du 4 janvier 1897 cassant l'arrêt delà
Cour d'Orléans par insufSsance de motifs.
La Coor, Vu l'article 7 de la loi du 20 avril 1810 :
Attendu que Combret a obtenu le 30 novembre 1883 un brevet
d'invention par un système de briquettes de charbon perfection-
nées dites fumivores ; que l'arrêt attaqué a déclaré ce brevet nul
par ce motif qu'antérieurement à la date dudit brevet Bondonneau
■'"''^-^-'•.■•Tïf—
— 339 —
poursuivi par Gombret comme contrefacteur avait fabriqué et
vendu des briquettes avec trous et rainures ;
Attendu que si le juge du fait a un pouvoir souverain pour ap-
précier soit la nouveauté, ou la non-nouveauté d'une invention,
soit la valeur des ressemblances ou des dissemblances existant
entre Tobjet breveté et Tobjet argué de contrefaçon, c'est à la
condition qu'il ressorte nettement de sa décision qu'il a examiné
les éléments essentiels de l'invention et qu'il a bien compris le
sens et la portée du brevet formant le titre de l'action ;
Attendu que Tarrét attaqué se borne à constater que Gombret
a pris un brevet d'invention en 1885 sans dire quel est l'objet de
ce brevet, et sans indiquer quel est le résultat ou le produit in-
dustriel que l'inventeur s'est proposé d'obtenir ; que l'arrêt ne
contient môme pas la description des modèles de briquettes que
Gombret prétend avoir inventées et qu'il déclare seulement « qu'a-
yant l'obtention du brevet en litige et notamment en 1883 et 1884
Bondonneau avait fabriqué et vendu des modèles de briquettes
avec trous et rainures, celles-ci étant produites par les initiales
L. B. en creux correspondant aux trous » ;
Attendu que ces constatations sont insufûsantes pour permettre
à la Gour de cassation d'exercer son droit de contrôle ; que l'arrêt
attaqué ne fournit aucuns termes de comparaison à l'aide des-
quels il soit possible de reconndtre si les briquettes brevetées
au profit de Gombret sont ou non semblables à celles qui avaient
été mises en vente par Bondonneau, antérieurement au brevet,
et si la loi du brevet a été exactement comprise par le juge du
fait.
D'où il suit que l'arrêt attaqué a violé l'article 7 susvisé de la
loi du 20 avril 1810 ;
Par CBS motifs, Gasse...
L'affaire ayant été renvoyée devant la Cour de Rouen
celle-ci déclara M. Bondonneau coupable de contrefaçon,
le condamna à 50 francs d'amende et à SOO francs de dom.
mages-intérêts, mais ne prononça^ au profit de Gombret, la
confiscation que pour les deux briquettes saisies réelle-
ment comme échantillons au début de la procédure.
H. Gombret s'étant pour la troisième fois pourvu devant
la Gour de cassation, la chambre criminelle sous la prési-
dence de M. LoEv^ président, après avoir entendu M. le con-
seiller Sallantin en son rapport, M. l'avocat général Puech
en ses conclusions et M"" Morbt en ses plaidoiries, a, le 14
janvier 1898, rendu le nouvel arrêt de cassation suivant :
— 340 —
La Gour, VidaQt son délibéré ordonné en la chambre du con-
seil ;
Sur le premier moyen du pourvoi pris de la violation de l*ar-
ticle 49 de la loi du 5 juillet 1844 et de l'article 7 de la loi du
20 avril 1810 :
Vu lesdits articles ;
Attendu^ en droit, que Tarticle 49 de la loi du 5 juillet 1844 dis-
pose que les objets reconnus contrefaits seront confisqués ; que la
confiscation prescrite par cet article est obligatoire et que les ob-
jets contrefaits, qu'ils aient été ou non saisis lors de la consta-
tation du délit, doivent être remis au propriétaire du brevet ;
Attendu toutefois que cette remise ne peut s'effectuer qu'au-
tant que les objets contrefaits sont encore en la possession du
contrefacteur au moment où la condamnation est prononcée ;
que dans le cas contraire la réparation civile due au breveté se
réduit à des dommages-intérêts dont l'évaluation reste soumise
aux règles du droit commun ;
Attendu, en fait, que Tarrét attaqué constate : 1** que deux
lots de briquettes arguées de contrefaçon et dont le nombre s'é-
levait à 185,180 ont été trouvés le 21 novembre 1887 dans le chan-
tier de Bondonneau et décrites par un procès-verbal régulier;
2* que l'huissier n'aprocédé à la saisie réelle que de deux briquet-
tes à titre d'échantillons ; que statuant sur la confiscation, l'arrêt
déclare a qu'il n'y a lieu d'appliquer cette mesure qu'à l'égard des
deux briquettes qui avaient été saisies réellement, les domma-
ges-intérêts alloués à la partie civile constituant une réparation
suffisante » ;
Attendu que si, par suite du long temps écoulé depuis le com-
mencement de l'instance, les briquettes décrites par l'huissier ne
se trouvaient plus en la possession de Bondonneau et si, dès lors,
la réparation civile due à Gombret, à raison de ces briquettes
devait être convertie en dommages-intérêts,rarrôt attaqué aurait
dû faire mention de cette circonstance qui pouvait seule justifier
le défaut de confiscation ; que l'arrêt attaqué ne contient aucune
constatation sur ce point et qu'il n'indique même pas d'une ma-
nière précise si,dans l'évaluation du préjudice causé au breveté,
il a tenu compte des briquettes décrites au procès-verbal du 21
novembre 1887 ; que, dans ces conditions, la Gour de cassation est
dans l'impossibilité d'exercer son droit de contrôle et de s'assu-
rer que les prescriptions de l'article 49 de la loi du 5 juillet 1844
ont été observées ;
Par CBS motifs, Et sans qu*il y ait lieu de statuer sur les autres
moyens du pourvoi ;
Gasse, etc.
— 341 —
La Cour d'Amiens, saisie du renvoi, après avoir entendu
M** Allart et Poucet du barreau de Paris, a,le 2 décembre
1898, statué en ces termes :
La Cour, Statuant par suite du renvoi que lui a fait la Cour de
cassation par arrêt du 14 janvier 1898 :
Considérant que la Cour de Rouen saisie également par suite
d'un renvoi a par arrêt du 25 juin 1897 déclaré que les briquettes
saisies le 21 novembre 1887 et fabriquées par Bondonneau
étaient la contrefaçon de celles brevetées en 1885 par le docteur
Combret,et Ta condamné sur les réquisitions du minîsière public
en 50 francs d*amende, a prononcé la saisie et la confiscation de
deux briquettes, disant qu'il n'y avait lieu d'étendre au delà
les saisie et confiscation et enfin Ta encore condamné à payer
au docteur Combret 500 francs à titre d^ dommages-intérêts ;
Considérant que cet arrêt causait à Bondonneau un grief con-
sidérable puisqu'il le déclarait contrefacteur, alors que devant
les autres juridictions, Tribunal de Seine, Cours de Paris et d'Or-
léans, il avait été renvoyé des fins des poursuites dirigées contre
lui par la partie civile et le ministère public ; que cependant il
ne s'est pas pourvu devant la Cour régulatrice pour en obtenir le
redressement; que seul le docteur Combret s'est pourvu contre
cette décision se fondant sur deux moyens : le premier tiré de
la violation de Tarticle 49 de la loi du 5 juillet 1844 en ce que
l'arrêt avait limité la confiscation aux seuls objets réellement
saisis : le deuxième, de la violation du même article et en outre
de l'article 7 de la loi du 20 avril 1810,puisque la Cour de Rouen
se refusant à prononcer la confiscation des machines ayant
servi à la fabrication des choses contrefaites par le seul motif
que ces machines n'avaient pas été réellement saisies, mais sim-
plement décrites, avait manifestement enfreint les dispositions
de ces articles et rendu un arrêt manquant de base légale ;
Considérant que la Cour de cassation sur Tunique pourvoi de
la partie civile n'avait à s'occuper et ne s'est en effet occupée que
des point? dont elle était touchée ; que pour s'en convaincre il
suffit de rapprocher les motifs du dispositif qui ne statue que sur
les deux points formant Tobjet du pourvoi ;
Considérant qu'en l'état la Cour d'Amiens, se renfermant dans
l'objet du renvoi, ne peut plus élargir le débat et rechercher si
Bondonneau était réellement un contrefacteur et si dans cette
hypothèse des peines correctionnelles pouvaient encore être pro-
noncées contre lui ;
Considérant qu'elle a les éléments nécessaires pour apprécier
la valeur des 185.180 briquettes saisies par description en te-
nant compte de leur valeur réelle au jour de la saisie et de la
— 342 —
dépréciation qu'elles aaraient subie par suite des avaries et
intempéries résultant d*un séjour prolongé dans un chantier
ouvert exposé aux injures du temps et des saisons,qu'il convient
de fixer à 20 fr. le mille le prix de ces briquettes soit pour le
lout3,70:H fr.60;
En ce qui concerne la confiscation des machines :
Considérant qu'il n'a été construit par Bondonneau aucnne
machine spéciale ; qu'il s'est borné à placer dans les machines
servant à la fabrication de toutes les briquettes bien antérieures
au brevet Gombret, des matrices qui ont modifié les dispositions
des anciennes briquettes, afin de les transformer en produits
prétendus contrefaits ; qu'il a, le 21 novembre 1887, c'est-à-dire
le jour môme où l'huissier Langlet avait procédé à la saisie de
deux briquettes et à la description des autres, ainsi que des ou-
tils de fabrication, fait modifier ses moules de façon à ne plus
fabriquer qu'une briquette avec trous, mais sans rayures ou ca-
nalicules ; que ceci résulte d'un procès-verbal de constat du
22 novembre 1887 enregistré ; que la valeur des matrices modi-
fiées peut être évaluée à 10 francs ;
Considérant que le docteur Combret réclame la confiscation
des matières ayant servi à la fabrication des objets contrefaits ;
Considérant qu'il n'apporte aucune preuve à l'appui de cette
prétention ; qu'il n'est nullement justifié que Bondonneau ait
employé une matière spéciale pour fabriquer les briquettes dont
s'agit ; que tout prouve au contraire qu'il n'a employé que le
mélange ordinaire et en usage depuis de longues années pour
fabriquer les charbons agglomérés ;
Considérant encore que le docteur Combret prétend que Bon-
donneau, en dehors des briquettes saisies et décrites, a fabriqué
et vendu un nombre considérable de briquettes semblables ; que
de ce chef il demande la condamnation en dommages-intérêts à
fixer par état, après expertise et prise de connaissance des livres
de commerce de Bondonneau ; que sur ce point encore il se borue
à de pures allégations ; qu'il établit tout au plus qu'une briquette
paraissant semblable à celles contrefaites aurait été exposée
chez un client de Bondonneau ; que cela n'établirait pas qu'il y
ait eu vente ; que ce procès remontant à onze ans, cette exper-
tise serait inopérante et n'amènerait aucun résultat sérieux, sur
lequel une décision pourrait intervenir; qu'il n'y a pas lieu da-
vantage, sur des présomptions absolument dénuées de précision,
de faire compulser les registres d'un négociant d*une honora-
bilité reconnue jusqu'ici ;
Considérant enfin qu'il demande la réparation du préjudice
que lui a causé une contrefaçon qui a mis longtemps en cause la
validité de son brevet ; que l'allocation de 500 fr. de dommages-
— 343 —
intérêts par l'arrSt de Rouen constitue une réparation largement
safflsante puisqu'il est avéré que pour une raison quelconque,
le docteur Gombret n'a jamais sérieusement cherché ni par
lui-même, ni par d'autres d'exploiter pratiquement son brevet ;
Par cks motifs, Prononce la confiscation des 185.180 briquettes
trouvées chez Bondonneau et à défaut de pouvoir remettre à
Gombret les briquettes ^AÎsies ainsi que les matrices qui n'exis-
tent plus et pour tons dommages-intérêts sur ces deux chefs les
seuls soumis àlaGour, alloue à Gombret la somme globale de
3.703 fr.60 ;
Gondamne Bondonneau à payer cette somme ;
Dit qu'il n'y a lieu à la confiscation des matrices ayant servi à
la fabrication des briquettes contrefaites, ni à condammation à
des dommages-intérêts à fixer par état ou autrement ; qu'il n'y a
lieu en conséquence de nommer des experts afin de rechercher
la quantité de briquettes contrefaites, fabriquées et vendues par
Bondonneau, ni de faire prendre connaissance des livres de com-
merce cotés et paraphés le 21 novembre 1887 ;
Gondamne Bondonneau en tous les dépens de première ins-
tance et d'appel, qui comprendront tant ceux faits devant la
Gour de Paris que devant les Gours de renvoi comme ayant été
nécessités par la défense de Gombret.
La Cour d'Amiens ayant apprécié la valeur des briquet-
tes non d'après leur valeur réelle au moment de la saisie,
mais en tenant compte de la dépréciation qu'elles auraient
subies par suite des avaries et intempéries résultant du
séjour prolongé dans un chantier ouvert exposé aux in-
jures du temps et des saisons, jusqu'au jour de Tarrèt dé-
finitif les lui attribuant, M. Gombret déféra l'arrêt de la
Cour d'Amiens à la Cour de cassation qui, sur les conclu-
sions de M. l'avocal général Melgot, rendit le 9 juin 1899
l'arrêt suivant :
La Goor, Vidant son délibéré en la chambre du conseil ;
Sur l'unique moyen du pourvoi pris de la violation des arti-
cles 47 et 49 de la loi du 5 juillet 1844 et de l'article 7 de la loi
du 20 avril 1810, en ce que l'arrêt attaqué aurait déterminé d'une
manière hypothétique la valeur des briquettes contrefaites par
Bondonneau au lieu d'en fixer le prix à la date du procès-verba ^
de description des dites briquettes et de l'assignation qui en a
été la suite ;
Vu les articles 47 et 49 de la loi du 5 juillet 1844 ;
Attendu en fait que Gombret a pris le 30 novembre 1885 un
— 344 —
brevet d'invention pour an modèle de briquettes de chauffage,
que prétendant que son invention avait été contrefaite par Bon-
donneau, ii a fait citer ce dernier devant le Tribunal correction-
nel de la Seine après avoir fait constater par un procès-verbal
régulier, en date du 21 novembre 1887, que 185.180 briquettes
arguées de contrefaçon se trouvaient dans le chantier de Bondon-
neau ;
Attendu que Taction en contrefaçon formée par Combret a été
successivement rejetée par deux arrêts des Cours d'appel de Pa-
ris et d'Orléans, qui ont été cassés et qu'en dernier lien, sa de-
mande a été déclarée fondée par un arrêt de la Cour d'appel de
Rouen du 25 juin 1897, lequel a condamné Bondonneau à 50 francs
d'amende et 500 francs de dommages-intérêts envers la partie
civile ;
Attendu que sur le pourvoi de Combret, ce dernier arrêt a été
cassé partiellement pour avoir omis de statuer sur la confiscation
des briquettes faisant l'objet du procès-verbal de description ci-
dessus visé ; que la Cour d'appel d'Amiens saisie comme Cour
de renvoi a prononcé la confiscation desdites briquettes en dé-
clarant toutefois que, faute par Bondonneau de remettre ces
briquettes ainsi que les matières ayant servi à leur fabrication,
dans le cas où elles n'existeraient plu8,le prévenu serait tenu de
payer à la partie civile pour tous dommages- intérêts la somme
globale de 3.703 fr. 60 ;
Attendu que pour déterminer le montant des réparations ci-
viles dues à Combret l'arrêt attaqué déclare « qu'il a tenu compte
de la valeur des briquettes en question au jour de leur saisie et
de la dépréciation qu'elles auraient subies par suite des avaries
et intempéries résultant d'un séjour prolongé dans un chantier
ouvert, exposé aux injures du temps et des saisons *> ;
Attendu, en droit que l'article 49 de la loi du 5 juillet 1844
dispose que les objets reconnus contrefaits seront confisqués ;
que la confiscation prévue par cet article est obligatoire et que
les objets contrefaits doivent être remis au propriétaire du bre-
vet ; que si cette remise ne peut plus s'effectuer matériellement
lorsquèles objets contrefaits ne sont plus en la possession du con-
trefacteur, les réparations civiles dues au breveté doivent être
évaluées d'après les règles du droit commun ;
Attendu que pour cette évaluation, l'arrêt attaqué s'est placé
à tort au moment où il prononçait la condamnation ; que c'est à
la date de l'assignation donnée à la requête de Combret qu'il
aurait dû se reporter pour fixer les droits des parties ; que c est
en eiïet à cette date que la confiscation ordonnée en vertu de
Tarticle 49 de la loi du 5 juillet 1844 produisait rétroactivement
son efTet ; que dès lors, eu tenant compte de la dépréciation que
■ f»-" ifr^^ ww^: -- »-. ^ .-- -- — ;— »— V"^-» — -^^r— r.' -^ "vr
— 345 —
ces briquettes contrefaites ont pu subir postërieu rement, Tarrét
attaqué a méconna ces principes et il a violé les articles 47 et 49
de la loi du 5 juillet 1844 ;
Paa CBS MOTIFS, Gasse , mais uniquement dans ses dispo-
sitions relatives à l'évaluation des briquettes contrefaites dé-
crites dans le procès- verbal du 2i novembre 1887 et dont l'arrêt
prononce la confiscation au profit de Gombret. . . etc.
Sur le renvoi, la Cour de Douai, sous la présidence de
M. Bosquet, président et sur les plaidoiries de M®» Allabt et
Poucet, du barreau de Paris, après conclusions de M. Ber-
trand, avocat général, a statué en ces termes.
La Gour, Statuant par suite du renvoi que lui a fait la Gour de
cassation par arrôt du 9 juin 1899 ;
Attendu que Gombret a fait procéder à Paris, le 21 novembre
1887, à la saisie réelle de deux échantillons et à la désignation
et à la description sans saisie, de 185.480 briquettes (agglomérées
de houille), conformément à une ordonnance du président du
Tribunal civil de la Seine du 15 novembre 1887 ; qu'il a intenté,
le 27 du même mois, contre Bondonneau une action en contre-
façon ;
Attendu que tous les points qui font l'objet du litige ont été
tranchés par Tarrêt rendu le 2 décembre 1898 par la Cour d'appel
d'Amiens saisie elle-même par suite d'un renvoi ;
Que cet arrêt a été cassé par la Gour de cassation le 9 juin 1899,
dans une seule de ses dispositions, celle qui, en prononçant la
confiscation des 185.180 briquettes décrites, en fixait l'évaluation
pour le cas où Bondonneau ne pourrait les remettre en nature à
Gombret ;
Attendu qu'aux termes de l'article 44 de la loi du 5 juillet 1844,
la confiscation est obligatoire non seulement pour les objets con-
trefaits qui ont été saisis, mais encore pour ceux qui ont été sim-
plement décrits dans le procès-verbal, sauf aux tribunaux à fixer
une somme pour représenter la valeur des objets que les saisis
ont pu aliéner, n'étant pas tenus de les représenter en nature ;
Attendu, en efTet, que la description a pour but unique de cons-
tater la contrefaçon et laisse pendant l'instance litigieuse, l'objet
prétendument contrefait à la libre disposition du détenteur, sans
le frapper d'indisponibilité ; que telle a été l'intention du légis-
lateur qui a voulu éviter les graves inconvénients que présenterait
une complète immobilisation, pour une durée souvent fort longue,
opérée sur la simple allégation du breveté ; que, d'ailleurs, les
termes qu'il a employés dans l'article 47 « avec ou sans saisie »
- 846 —
ndiqaant nettement que la description « sans laisie » n'emporte
pas inaliénabilité même provisoire des objets décrits ;
Attendu que si la partie poursuivie ne peut plus remettre en
nature les objets décrits, soit qu'elle ait usé de son droit d*alié-
nation, soit même qu'ils aient été perdus, le breveté n'étant pas
lié par la vente faite en dehors de lui, et qu'il n'a pu contrôler,
est fondé à. réclamer, comme représentation des objets, une valear
fixe, qui ne peut être que celle qu'ils avaient au moment derin-
troduction de l'instance ;
Attendu que cette évaluation est, en l'espèce, beaucoup plos
favorable que toute autre à la partie civile qui ne subira pas les
conséquences de la dépréciation qui aurait frappé les objets dé-
crits par suite du long temps écoulé, s'ils lui étaient remis en
nature ;
Attendu que des éléments de la cause il résulte que les briquet'
tes décrites avaient, en novembre 1887, une valeur de 32 francs
le mille, ce qui assigne aux 185.180 briquettes décrites une valeur
totale de 4.925 fr. 76 ; qu'il y a donc lieu de dire que Bondon-
neau doit, ou remettre en nature les 185.180 briquettes ou payer
cette somme représentative de leur valeur ;
Attendu que Gombret réclame, de plus, les intérêts de la som-
me représentant la valeur des 185.180 briquettes depuis le jour
de Tassignation et même de la description ;
Attendu, sur ce point, que la Cour de renvoi n'a compétence
pour statuer que sur ce qui lui a été dévolu par l'arrêt de la Cour
suprême qui la saisit ;
Attendu que cet arrêt est ainsi conçu :
« Casse et annule l'arrêt rendu par la Cour d*appel d'Amiens
« le 2 décembre 1898, mais uniquement dans ses dispositions
tf relatives à l'évaluation des briquettes contrefaites, décrites dans
« le procès-verbal du 21 novembre 1887 et dont l'arrêt prononce
« la confiscation au profit de Gombret ;
« Et pour être statué à nouveau sur les conclusions prises sur
u ce point par Gombret, renvoie la cause et les parties devant la
(' Gour d*appel de Douai » ;
Qu'il suit de là que la Gour de Douai ne peut statuer que comme
eût dû le faire la Gour d'Amiens, et sur les conclusions dont celle-
ci était saisie sur ce point précis ;
Attendu que les conclusions prises par Gombret demandaient
à la Gour de prononcer la confiscation des 185.180 briquettes et
de condamner Bondonneau à lui payer la valeur qu'elles avaient
en 1887, mais ne demandaient nullement, en outre, les intérêts de
la somme représentative de leur valeur, calculés rétroactivement
à partir de 1887 ; qu'il suit de là que la Gour d'Amiens n'avait pas
à allouer ces intérêts non demandés ; et que la Gour de Douai
— 347 —
devant statuer comme eût dû le faire la Cour d'Amiens et sur
les conclusions dont celle-ci était saisie, doit déclarer cette de-
mande non recevable, en l'état du débat, en tant que Gombret
entend la différencier de sa demande générale en dommages-in-
térêts présentée par lui à la Cour d'A^niens et sur laquelle celle-ci
a statué par décision ayant force de chose jugée ;
Attendu, d'ailleurs, que fût-elle recevabie, cette demande nou-
velle n'est, en tout cas, nullement fondée ;
Attendu que Gombret soutient qu'en la matière, il entre dans
Tappréciation souveraine de la Cour de régler l'indemnité due à
Gombret, soit au moyen d'une somme déterminée unique, soit au
moyen d'une somme principale et d'une allocation d'intérôts,
qui formeraient ensemble l'indemnité dont il lui appartient de
fixer le chiffre ;
Attendu que la Cour estime que la somme de 4.925 fr. 76 al-
louée à Gombret, Tindemnisera complètement de la plus haute
valeur des objets reconnus contrefaits ; qu'elle représente donc
pour lui l'indemnité intégrale à laquelle il a droit, et qu'il n'y a
lieu de la majorer par une allocation supplémentaire d'inté-
rêts;
Attendu que cette allocation serait encore d'autant moins jus-
tifiée en l'espèce, que, si l'instance s'est prolongée aussi long-
temps, c'est par suite de la négligence de Gombret qui, notam-
ment, après avoir obtenu le 28 mai 1889 un arrêt de la Cour
d'Orléans, est resté pendant trois ans, jusqu'au 14 mai 1892,
avant d'agir et même de signifier. cet arrêt, a laissé s'écouler trois
nouvelles années jusqu'au il mai 1895, avant de faire délivrer
une nouvelle assignation au prévenu ;
Attendu que Gombret n'est pas davantage fondé à prétendre
que les intérêts doivent lui être alloués d'une manière obliga-
toire ;
Attendu qu'en matière de contrefaçon, la confiscation a pour
effet de transférer la propriété des objets reconnus contrefaits
de la partie poursuivie au propriétaire du brevet ; qu'elle a prin-
cipalement le caractère de réparation civile, dont elle se diffé-
rencie cependant par ce fait qu'elle doit être nécessairement
prononcée, et alors même que la valeur des produits contrefaits
dépasserait de beaucoup, comme dans l'espèce actuelle, le pré-
judice réellement causé au breveté ;
Attendu que, sans qu'il soit nécessaire d'examiner si la trans-
mission de propriété résultant de la confiscation peut s'opérer
antérieurement à la décision de justice qui la prononce, il suffit
de constater que le législateur a réglé les effets de la confiscation
dans l'article 49, § 2, ainsi conçu : « Les objets confisqués seront
I . »«i<«p«<4if niwv.M
— 348 —
« remis au propriétaire du brevet, sans préjudice de plas amples
« dommages-intérêts s'il y a lieu » ;
Qu*ii résulte de là qu'au point de vue de la confiscation, la
partie poursuivie remplit, au vœu de la loi, son obligation en
remettant intégralement les objets contrefaits au breveté, après
la décision rendue, et qu'en ajoutant « sans préjudice de plus
amples dommages-intérêts, s'il y a lieu », le législateur indiqae
nettement que la confiscation ne doit pas être assortie, d'une
manière nécessaire, d'une condamnation supplémentaire quel-
conque, mais que c*est seulement s'il y a lieu de le faire que Ton
y ajoutera des dommages-intérêts plus amples ; que loin d'être
obligatoire, toute condamnation s'ajoutant à la confiscation pure
et simple est donc abandonnée à Tappréciation souveraine des
tribunaux;
Attendu qu'aux termes de l'article 41, § 3 du Gode civil, les in-
térêts non stipulés sont à proprement parler des dommages-in-
térêts ;
Attendu, en fait, que Gombret n'a jamais pu exploiter son
brevet, soit par lui-môme, soit par d'autres, et qu'il l'a même
laissé frapper de déchéance ; que le préjudice réel qui lui a été
causé par la contrefaçon de Bondonneau sera plus que réparé
parla remise des 185. i80 briquettes contrefaites ou de la somme
représentative de la valeur et des 500 francs qui lui ont été alloués
à titre de dommages-intérêts supplémentaires ;
Qu'il n'y a donc lieu d'allouer encore, en outre, les intérêts de
la somme représentative des objets confisqués ;
Attendu, enfin, qu'il y a lieu de compléter l'arrêt de la Con-
d'Amiens, en fixant un délai très bref, passé lequel, faute par
Bondonneau d'avoir remis les objets contrefaits, il devra payer
la valeur qui les représente, ainsi que Tavait demandé Gombret
dans ses conclusions ;
Par CBS motifs, f^a Gour, reprenant le dispositif de l'arrêt ren-
du par la Gour d'Amiens, le complète ainsi qu'il suit, en la
partie qui a été cassée :
Prononce la confiscation des 185.180 briquettes décrites au
procès-verbal du 21 novembre 1887, et déclare Bondonneau
tenu de les remettre à Gombret, conformément à l'article 49, § 2
de la loi du 5 juillet 1844, dans la huitaine du présent arrêt;
Et faute par lui d'avoir effectué cette remise dans ce délai,
le condamne à payer à Gombret la somme représentative de la
valeur de ces 185.180 briquettes Vixée à 4.925 fr. 76 ;
Oit n'y avoir lieu d'allouer à Gombret, supplémentalrement
aux 500 francs de dommages-intérêts par lui obtenus, les inté-
rêts à 6 0/0 de la dite somme à partir du 21 novembre 1887 ;
r
'WKTW-'
— 349 —
Déboute Gombret du surplus de ses conclusions ;
Sur les dépens :
Attendu qu'il a été statué définitivement, par la Cour d'Amiens,
sur tous les dépens exposés depuis le début de Tinstance jusqu*à
son arrêt ;
Condamne Bondonneau aux dépens exposés depuis l'arrêt de
a Cour d'Amiens et notamment à ceux faits devant la Cour de
Douai, etc.
A la suite de cet arrêt, qui lui refusait les intérêts ré-
clamés par lui, Combret forma encore un pourvoi en cas-
sation, mais il se désista du pourvoi à la date du S2 mai
1900, et l'arrêt de la Cour de Douai est aujourd'hui définitif.
Art. 4231.
Brevet d^lnventlon. — Convention. — Exploitation.
— Défeniie du brevet.— Réslllntlon.— RedevAnce«b
Dommnffea-lal^rêiif .
Quand un propriétaire d'un brevet a traité avec un tiers
de Vexploitation de son brevet^ et que, seul qualifié pour en
défendre la validité^ il se refuse, lorsque des contrefaçons lui
sont signalées, à en poursuivre les auteurs et n'obtempère
pas aux sommations qui lui sont faites à cet effet, il y a
lieu de prononcer la résiliation de la convention à ses torts
et griefs, à dater du jour oii il a été mis en demeure de faire
respecter son brevet, de décider qu'il ne peut prétendre au
paiement des redevances postérieures à cette date, et de le
condamnera des dommages-intérêts pour le préjudice quHl
a par son attitude causé à celui qui avait traité avec lui (1 ) .
(G. de Paris, 14 mars 1901. — Walch c. consorts Lemaire.)
Le 28 janvier 1900 le Tribunal d'Epernay a rendu le ju-
gement suivant :
•"
(1) Sur les droits du licencié exclusif ou non : v.Pouillet, Brev, d'inv.,
n^ 286. Le contrat de licence assure, moyennant un prix déterminé, au
licencié la jouissance paisible de Tinvention. Le porteur de licence ne
peat prétendre à antre chose qa'à la garantie de cette jouissance paisible;
mais lorsqu'une contrefaçon surgit, il est en droit d'exiger la cessation
du trouble qui lui est ainsi causé, et si le contrefacteur triomphe, ou si
le breveté refuse de le poursuivre, il peut demander la résiliation à son
profit du contrat avec dommages-intérêts.
— 350 —
Le Tribunal, Après en avoir délibéré conformément à U loi.
Jugeant en premier ressort ;
Attendu que par exploit de Olivier, en date du 8 juillet 1898,
enregistré, Ottmar Waich, ingénieur, demeurant 43, rue d*Hau-
teville, à Paris, a assigné les consorts Lemaire, propriétaires et
gérants de la fabrique de construction de machines^connue à Eper-
nay sous le nom de Victor Lemaire, en paiement de redevances
à lui dues, en vertu de la convention passée entre eux à la date
du 23 février 1893 et aux intérêts de droit ;
Qu'il demande qu'il plaise au tribunal de dire qae le montant
de ces redevances sera fixé par état d*aprés le relevé fait par tel
expert qu'il lui plaira de nommer ;
De condamner solidairement les consorts Lemaire à la somme
de 4.000 francs à titre de provision ;
De prononcer & leur charge la résiliation de la convention da
23 février 1896, sous réserve de tous dommages-intérêts à cet
égard, de condamner en outre, sous la dite solidarité, les con-
sorts Lemaire en 100 francs de dommages-intérêts judiciaires et
aux dépens ;
Attendu que de leur côté les consorts Lemaire prétendent que
Tinexécution du contrat provient du fait de Walch, qu'il est non
recevable et mal fondé dans les divers chefs de sa demande ;
Que par ses agissements Walch leur a causé un préjudice et
que, se portant reconventionnellement demandeurs et se basant
sur les éléments actuellement connus, ils demandent qu'il plaise
au tribunal de condamner au paiement de 10.000 francs à titre
de dommages-intérêts avec intérêts tels que de droit et aux dom-
mages-intérêts judiciaires et aux dépens ;
Attendu que sans s'attacher à la valeur du brevet pris par
Walch, le tribunal doit se borner à statuer sur l'exécution ou sur
l'inexécution du contrat sjnallagmatique conclu par les parties;
Qu'il résulte des documents produits à la barre, qu'une conven-
tion en date du 23 février 1893 a été rédigée et signée par les par-
ties en vertu de laquelle le sieur Victor Lemaire avait seul le droit
de vendre et fabriquer les muselets du système Walch moyennant
une redevance;
Attendu que dans cette convention, il est notamment spécifié
que:
Dans le cas où une contrefaçon se produirait, les deux parties
s'entendraient pour prendre telles mesures qu'exigerait la dé-
fense de leurs droits ;
Attendu que les conventions doivent être exécutées de bonne
foi et que les parties s'obligent non seulement à ce qui y était ex-
primé, mais à toutes les suites que l'équité, l'usage oo la loi don-
naient à la convention intervenue entre elles ;
— 351 —
Attenda que Texécution effective du contrat nepouvait être rem-
plie qu*avec Taide matérielle et morale de Waich, propriétaire da
brevet et seul qualifié pour en défendre la validité, qu*il convient
d'examiner si ces conditions ont été remplies ;
Attendu qu'il résulte des pièces versées au débat que Lemaire
signalait à Walcb les différentes contrefaçons qui se faisaient à
Epernay de son système de muselet, qu'il l'engageait dès le mois
de mai 1893 à en poursuivre les auteurs ;
Qu'il renouvelait cette demande par une lettre du 9 juin, con-
tenant cette phrase :
« Il faudrait en Qnir avec H. et L. » ;
Que Walcb répondait à ladale du 15 du même mois:
« Je suis bien de votre avis, il faut en finir avec H. et L. et je
me propose de leur écrire en nom collectif une lettre bien rédi-
gée pour leur éclairer leurs erreurs » ;
Qu'il était évident pour Lemaire que Walcb prenait l'affaire en
mains et qu'il allait agir en son nom comme au sien ;
Qu'il reconnaissait les muselets de H. et L, comme une con-
trefaçon patente à son système ;
Attendu que trois ans après, Lemaire n'ayant reçu aucune
satisfaction faisait à la date du 10 novembre 1896 par le minis-
tère de Moreau, huissier près le Tribunal civil de la Seine, une
sommation à Walcb d'avoir à prendre sans délai les mesures
nécessaires à la poursuite des contrefacteurs, lui déclarant que
faute par lui de ce faire, il cesserait de lui payer la redevance
convenue et l'actionnerait en dommages-intérêts ;
Attendu qu'en réponse Walcb soutint qu'il considérait que
le contrefacteur ne pourrait aller loin à cause du bas prix auquel
les muselets étaient vendus ;
Que Lemaire insiste à nouveau pour une poursuite rendue in-
dispensable par l'élargissement du cercle de l'industrie des mu-
selets provoqué par l'impunité du contrefacteur signalé en 1893,
mais que Walcb n'en tint aucun compte ;
Attendu que ces non-poursuites mettaient Walcb en contradic-
tion flagrante avec les termes de son con tract ;
Que c'était à bon droit que Lemaire par la sommation en date
du 10 novembre rappelait à Walcb les termes de leur conven-
tion, ses avertissements et le défaut de diligences qu'il mettait à
faire cesser un état de choses préjudiciable à ses intérêts ;
Attendu que, si Walcb peut à juste titre se plaindre de la né-
gligence de Lemaire, à cause du temps écoulé entre la découverte
de la contrefaçon et la sommation, il résulte des documents
Tersés aux débats que ce retard peut s'expliquer par la maladie
de Lemaire et par l'incertitude dans laquelle Walcb laissait
Lemaire au sujet de l'opportunité des poursuites, ainâi que par
r^ "' ^^^ ^ — ■ Jfv-unLn"'."
— 352 --
l'hésitation que Walch lui-même apportait à défendre ses droits
sachant que Lemaire ne pouvait le contraindre matériellement
à remplir cette obligation ;
Attendu que Walch qui n'a pas exécuté les engagements pris
par lui ne peut faire un grief à Lemaire de ne pas s'être conformé
aux termes de son contrat, qu'il n'est donc pas fondé à se baser
sur Tarticle 1184 du Gode civil pour demander la résolution du
contrat ;
Attendu qu'il y a Heu néanmoins en présence des circonstances
de la cause de décider que Lemaire doit à Walch la redevance
stipulée dans le contrat du 23 février d893, jusqu'au jour de la
mise en demeure, c'est-à-dire jusqu'au 10 novembre 1896, date
de la sommation ;
Attendu d'autre part que Walch par l'inexécution des con-
ventions a causé un préjudice à Lemaire, dont il lui doit répara-
tion, et que le tribunal possède tous les éléments d'appréciation
pour en déterminer l'importance ;
Par gks hotifs, Déclare Walch non recevable, en tous cas mal
fondé en sa demande en résiliation des conventions du 23 février
1893, l'en déboute ;
Dit qu'il aura droit seulement aux redevances stipulées dans
le contrat du 23 février 1893, jusqu'à la date de la sommation à
lui faite, c'est-à-dire le 10 novembre 1896 ;
Et recevant les consorts Lemaire, reconventionnellement de-
mandeurs,
Condamne Walch à leur payer la somme de 1.200 francs pour
préjudice causé avec les intérêts de droit ;
Et le condamne en outre en tous les dépens ;
Dit que par le sieur Roger,comptable à Ëpernay, expert que le
tribunal désigne à cet effet, le compte des redevances dues i
Walch par les consorts Lemaire sera établi et définitivement
arrêté.
Sur appel de Walch, la Gourde Paris sous la présidence
de M. Gaze, président, après plaidoiries de M~ Highil Lb
Tellier et Allart et conclusions de M. l'avocat général Jam-
Bois, a le 14 mars 1901 rendu Tarrél confirmatif suivant :
La Gour, Considérant que l'appel est régulier en la forme ;
Que la reprise par Auguste Walch de l'instance, engagée par
Ottomar Walch est régulière et fondée;
Que les consorts Lemaire demandent acte de ce que, sur cette
reprise d'instance, ils déclarent s'en rapportera justice ;
Au fond :
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— 353 -
Sur la résiliation du traité intervena entre les parties le 23 fé-
vrier < 893;
Considérant qu'en l'état des dernières conclusions devant la
Cour, ia résiliation est demandée par toutes les parties ;
Qu'il échet de la prononcer ;
Sur la demande de Walch :
Considérant que la réalité et le caractère des faits dénoncés
de 1893 à 1896 par Lemairecomme constituant des contrefaçons
du brevet de Walch ne sont point sérieusement contestés par ce
dernier ;
Que Lemaire se trouvant par suite de ces faits, menacé, ou trou-
blé dans la jouissance du brevet, dont l'exploitation lui avait été
concédée pour le département de la Marne, était en droit de de-
mander à Waich de faire cesser ce trouble, en poursuivant les
contrefacteurs ;
Considérant que si le traité du 23 février 1893 susvisé stipule
pour ce cas que les deux parties devraient s'entendre en vue des
mesures à prendre pour la défense de leurs droits, il résulte des
circonstances et documents visés et appréciés exactement dans
les motifs du jugement que Lemaire a fait, tout au moins à la fin
de l'année 1896, ce qui était en son pouvoir pour que l'entente
prévue par la convention se réalisât, qu'il a avisé, à diverses re.
prises, Walch de l'existence des contrefaçons, des conditions dans
lesquelles elles s'étaient produites et de la nécessité de les ré*
primer ;
Que s'il a, à certains égards, à s'imputer d'avoir laissé les pour-
parlers se prolonger sans résultat jusqu'au 10 novembre i896,il
a, à cette dernière date, par une sommation régulière, suivant
exploit de Moreau, huissier àParis,mis Walch en demeure d'exé-
cuter le contrat, lui notifiant expressément que faute par lui
d'accomplir son obligation dans un délai déterminé, il cesserait
de lui payer les redevances ;
Que Walch,malgré cette mise en demeure n'a fait aucune dili-
gence et n'a pris aucune disposition dont il puisse justiûer en vue
de se concerter sérieusement avec Lemaire pour la poursuite des
contrefacteurs ;
Qu'il lui a répondu dans des termes que ce dernier était auto-
risé à considérer comme évasifs et dilatoires ;
£t qu'ainsi, par l'unique faute de Walch, la sommation du
10 novembre 1896 susviséeest demeurée sans résultat ;
Que si Walch allègue que la contrefaçon aurait été sans gra-
vité et la fabrication des contrefacteurs sans importance il ne
produit aucune preuve à l'appui de son allégation,que la corres-
pondance antérieure est, au contraire, de nature à démentir ;
'inc
' r^jT^.^ •.-.-• ^.Y ".•'■^•' «
— 354 —
Considérant qu'en cet état des faits, il ne saurait obtenir à son
prottt la résiliation du traité ;
Qu'il a seul rendu cette résiliation nécessaire par sa faute, et
qu'elle doit être prononcée à sa charge exclusiye, à dater du
10 novembre 1896;
Considérant par suite, en ce qui touche les redevances, que si
Walch a droit comme Ta reconnu le jugement au paiement de
celles qui lui seraient encore dues pour la période antérieure
au 10 novembre 1896, il n'est pas fondé à en réclamer pour la
période écoulée depuis cette date, sauf son recours s'il y échet,
contre Lemaire au cas, où ainsi qu'il Pallègue, ce dernier aurait
indûment continué, à partir de cette date, l'exploitation du bre-
vet;
Sur la demande de la dame veuve Lemaire et consorts :
Considérant que des motifs qui précèdent, il résulte que les
consorts Lemaire sont fondés à demander à leur profit, la rési-
liation du traité du 23 février 1893, à compter du 10 novembre
1896;
Considérant, d'autre part, que Tallocation qui leur a été faite
d'une somme de 1200 francs, à titre de dommages-intérêts est
justifiée ;
Par ces motifs^ et ceux du jugement que la Cour adopte en ce
qu'ils n'ont rien de contraire au présent arrêt ;
En la forme :
Reçoit Walch appelant du jugement du Tribunal de commerce
d'Epernay en date du 26 janvier 1899;
Donne acte aux parties qui le requièrent de leurs conclusions
relatives à la reprise de l'instance par Auguste Walch ;
Déclare l'instance reprise ;
Au fond :
Met l'appellation à néant ;
Ordonne que ce dont est appel sortira effet;
Faisant droit aux conclusions dernières des consorts Lemaire
et y ajoutant au jugement;
Déclare résilié à compter du 10 novembre 1896, le traité do
23 février 1893, aux torts et griefs de Walch ;
Déclare Walch mal fondé dans toutes ses demandes, fins et
conclusions contraires au présent arrêt, l'en déboute ;
Et condamne Auguste Walch à l'amende et aux dépens d'ap-
pel.
Art. 4232.
De««ln de fabrique. — AiMMDee de nouveauté. —
Inefflcaiolté du dépôt. — Brevet dinvention. —
Forme nouvelle. — Ré«ultat Industriel. — Produit
InduMtrlel nonveuu.
Un dessin bien que comportant les caractères de dessin
de fabrique, doit, s'il est d'une forme essentiellement ba-
nale, élre considéré comme étant dans le domaine public et
dans ces conditions le dépôt régulièrement effectué est ûio-
pérant pour en assurer la propriété au déposant (1 ).
La production d'un résultat industriel nouveau est bre-
vetable, alors même qu'elle ne serait due qu'à une combinai-
ion nouvelle dans les formes et proportions d'objets déjà
connus.
Par suite ne peut être déclaré nul le brevet pris pour la
fabrication de briques creuses en porcelaine ou matières si-
milaires, sous le prétexte que la fabrication par coulage
d'objets creux en porcelaine est pratiquée depuis longtemps,
si tout en employant un procédé tombé dans le domaine
public l'inventeur prétendu est parvenu à l'aide de combi-
naisons nouvelles dans les formes el proportions , à créer
un produit industriel nouveau et la décision judiciaire qui,
sans faire cette recherche, déclare nul un tel brevet comme
portant sur une invention tombée dans le domaine public
manque de base légale (2).
Est brevetable l'invention consistant dans la fabrication
d'une brique èvidée en porcelaine, ou toute autre matière si-
milaire bien que cette fabrication ait été obtenue par le pro-
cédé déjà connu du coulage, si elle constitue une applica-
tion nouvelle de ce procédé etune combinaison nouvelle dans
les formes et proportions de cette brique (3).
(1) L» loi de 1808 ne permet derevendiquerla propriélè d'un dessin de
fabrique qu'autant que ce dessin est nonveau. Celle nouveauté est appré-
ciée souverainement par les tribunaux, et sa décision échappe an contrôle
de la Cour de cassation . Dans l'espèce, il s'agissait d'un mode d'emboî-
tement pour bordures à moulures, el tout en déclarant que le dessin aiiiil
bien UD caractère ornemental comportant la qualiflcatian légale de
dessin de fabrique, les juges du fond avaient décidé qu'il était banal. V.
Ponillet, Deuim et modèle*, a' 40 ; Vaunols, id., n" 105, el les arrêts
dtés de ces auteurs.
(tl-3) Le changemeot de formes ou ds dimensions lorsqu'il conduit i
— 356 —
Lorsqu'une intention est le fait de la collaboration de
deux personnes ^r une d'elles n'est pas fondée à prendre seule
un brevet et en tout cas ce brevet n'est pas opposable à son
collaborateur (4) .
Constitue la publicité destructrice de la nouveauté de
l'invention, le fait par l'inventeur avant la prise de son bre-
vet d'avoir passé et exécuté des marchés importants pour la
fourniture du produit inventé. De telles opérations ne peu-
vent être considérées comme un simple essai fait dam Fin-
térêt de l'inventeur (5).
(C. de Cass., 16 janvier 1899. — G. d*Amiens, 14 décembre 1899. —
Moaret c. Pillivuyt et Cie.)
M. Mourel avait pris le 10 mars 1894 un brevet pour
un nouveau système d'éléments de construction en porce-
laine ou en matières similaires et avait le 2 juin 1894
effectué le dépôt d'un modèle.
un résultat industriel est essentiellement brevetable. Cette modification
doit être considérée comme un moyen nouveau au sens de l'article S de
la loi du 5 juillet 1844. Ici le résultat était d'utiliser dans les construc-
tions la porcelaine, matière dure et inaltérable, à la place des briques en
terre, de qualité médiocre, et de poids supérieur. — V. Pouillet, Brevelt
d*inv.^ no 46 ; Mainié, n« 51 ; Allart, n^" 12 et 13. De nombreux arrêts ont
consacré celte doctrine. V. notamment, Cass., 9 févr. 1853, Sax, S. 53.
1.198; Cass. req., 26 janv. 1866, Chapellier, Ann., 66.88 etc.
Le produit industriel nouveau doit être considéré en lui-même, abstrac-
tion faite des moyens mis en œuvre pour le fabriquer ; il doit se présenter
avec une forme et des caractères spéciaux. l\ ne s'en suit pas que le pro-
duit industriel, pour être nouveau aux yeux de la loi, ne doive jamais
avoir eu de similaires, il suffit qu'il ait des qualités spéciales le diffé-
renciant des produits antérieurs. C'est pour avoir omis d'examiner ces
différences que la Cour de Paris est tombée dans l'erreur relevée par la
Cour de cassation. — V. Pouillet, n« 20 ; Mainié, n* 96 et s.
Lorsque les juges du fait apprécient la nouveauté d'une invention ils
doivent motiver leur décision de telle façon que la Cour de cassation
puissent vérifier si les procédés décrits au brevet ont été bien compris
par eux dans leur portée, leur but, et leurs moyens d'action. V. Pouillet,
no 436 et s. ; Mainié, no 707 et-e. ; Couhin, Prop, ind. et nrl., t. 2.
p. 134 et s., etc. iStc,Cass., 11 juin 1898, Lcclerc, S. 98. 1.329 et la note.
(4) Pour la collaboration en matière d'invention, V. Trib. Bruxelles,
7 mars 1897, Baudsept, ^nn.,1900.70 : Trib. Seine, 10 mai 1898, Société
Clément, Gladiator, Humber, Ann., 1900.67 et la note.
(5) En matière de produit nouveau pour que la vente du produit avant
la prise du brevet soit destructive de la nouveauté, il faut, comme dans
le cas de Tarrôl, que l'inspection du produit ou son analyse permette de
se rendre compte du procédé de fabrication. Dans le cas contraire, It
mise dans le commerce du produit ne ferait pas obstacle à la prise d'on
brevet valable. Comp. Pau, 14 janv. 1899, Cornet, Ann., 99.259 et It
note. A. T.
?rn!»?i??'«v"'"^ "^ ^^. •??^
— 357 —
Il assigna M. Pillivuyt et Cie devant le Tribunal de la
Seine pour s'entendre déclarer contrefacteurs tant de son
brevet que de son modèle. Le tribunal repoussa cette
double demande en déclarant que le dessin était banal et
appartenait au domaine public, que le brevet ne portait
que sur la forme d'un produit tombé dans le domaine
public et que la forme n'étant pas brevetable en elle-même,
sa nouveauté était inopérante pour imprimer au produit
un caractère nouveau. Le jugement fut confirmé par adop*
lion de motifs par la Cour de Paris le 26 février 1897 (Voir
Ann.y 97,158). Un pourvoi fut formé par M. Mouret ; il fut
admis par la chambre des requêtes à la date du 19 jan-
vier 1898, et le 16 janvier 1899, la chambre civile de la
Cour de cassation, après avoir entendu M. le conseiller
Grépon en son rapport, sur les plaidoiries de M«* Desmonts
et MoRKT, conformément aux conclusions de. M. Tavocat
général Desjardins, a rendu l'arrêt suivant :
Là Cour, Sur le deuxième moyen da pourvoi :
Attendu que, si Tarrêt attaqué constate que le dessin déposé
avait un caractère ornemental et comportait bien la qualification
légale de dessin de fabrique, il déclare que ce dessin, étant d'une
forme essentiellement banale, se trouvait, par cela môme, être
dans le domaine public ; que, dans ces conditions, il n'a violé
aucune loi en déclarant inopérant, pour assurer la propriété de
Mouret, le dépôt effectué par lui ;
Rejette ce moyen :
Mais, sur le premier moyen :
Vu l'article 30 de la loi du 5 juillet 1844 ;
Attendu que, dans un mémoire descriptif joint à sa demande
de brevet, Mouret explique que son invention a pour objet un
nouvel élément de construction architecturale obtenu par le
dépôt, dans des moules de forme appropriée, de pâte à porce-
laine ou de matières analogues ; que son système permet d'ob-
tenir des pièces creuses imperméables, légères et résistantes,
remplaçant avec de grands avantages les briques, panneaux et
tuiles de tous genres, employés jusqu'à ce jour ; qu'il a voulu
substituer à ces produits une matière inaltérable, dure, qui. sous
des formes et dans des conditions déterminées tout en étant
d'un poids moindre que les matériaux jusqu'alors employés,
aurait une résistance à Técrasement au moins égale, sinon su-
périeure ;
Attendu que, pour déclarer nul le brevet pris par Mouret,
l'arrêt attaqué s'est borné à dire : que la fabrication par coulage
— 358 —
d'objets creux en porcelaine était pratiquée depuis longtemps et,
par suite, était tombée dans le domaine public, ce que personne
ne contestait ; que le brevet de Mouret, ne portant dès lors que
sur la forme du produit, ne pouvait être valable, la forme à elle
seule n'étant point brevetable et ne pouvant suffire pour impri-
mer au produit un caractère nouveau ;
Mais attendu que la production d'un résultat industriel noa-
veau est une invention brevetable, alors môme qu'elle ne serait
due qu'à une combinaison nouvelle dans les formes et les pro-
portions d'objets déjà connus ; que Tarrêt attaqué devait recher-
cher si, tout en employant le procédé, depuis longtemps conna,
du coulage dans la fabrication de la porcelaine, Mouret, à Taide
de combinaisons nouvelles, n'était pas parvenu à réaliser les
promesses de son mémoire descriptif et à créer ainsi un produit
industriel nouveau, pouvant se substituer aux éléments de cons-
truction employés jusque-là ;
Attendu qu'en ne faisant pas cette recherche, l'arrêt attaqué
n'a pas donné de base légale à sa décision et a ainsi violé l'arti-
cle de loi susvisé ;
Par ces motifs. Casse. .. mais seulement en ce qui concerne
la validité du brevet pris par Mouret.... renvoie devant la
Cour d'Amiens.
La Cour d'Amiens, statuant comme Cour de renvoi,
sous la présidence de M. Marquet, premier présidenl,après
plaidoiries de M®» Honoré et Allart (du barreau de Paris) et
conclusions de M. Laf avérais, avocat général, a rendu à la
date du 14 décembre 1899 l'arrêt suivant :
La Cour, Considérant que la Cour suprême, par son arrêt du
16 janvier 1899, a cassé l'arrêt de la Cour de Paris, du 26 février
1897, en ce qui concerne seulement la validité du brevet pris
par Mouret et,quant à ce,a remis la cause et les parties en même
et semblable état qu'avant l'arrêt cassé ;
Qu'il ressort manifestement de cette décision que la Cour de
renvoi est appelée à se prononcer sur la validité du brevet dans
les mêmes conditions que la Cour de Paris ; que Pillivuyt et Oie
sont dès lors recevables à invoquer devant elle tous les moyens
susceptibles de faire échec à la validité du brevet ;
Considérant que Pillivuyt et Cie soutiennent en premier lien
que l'invention pour laquelle Mouret a pris un brevet à la date
du 10 mars 1894 n'était pas brevetable parce qu'elle ne rentrait
pas dans les termes de l'article 30 de la loi du 5 Juillet 1844;
qu'ils prétendent en second lieu que cette invention en la sup-
posant brevetable n'était pas la propriété de Mouret et que seuls
— 359 -
i]s auraient éié fondés à en revendiquer le bénéfice ; qu'ils se pré-
valent enfin de ce que la prétendue invention aurait été divul-
guée et serait devenue publique avant la prise du brevet ;
Qu'il échet d'examiner successivement les trois questions sou-
mises à la Cour ;
Sur la première question :
Considérant que la production d'un résultat industriel nouveau
est une invention brevetafile, alors même qu*elle ne serait due
qu'à une combinaison nouvelle dans les formes et les proportions
d'objets déjà connus ;
Considérant que si la brique évidée en porcelaine ou toute au-
tre matière similaire, pour laquelle a été pris le brevet du 10 mars
1894, a été obtenue par le procédé déjà connu du coulage, il
n'est pas douteux que ce soit par une application nouvelle de ce
procédé et par une combinaison nouvelle dans les formes et pro-
portions de ladite brique ; que cette brique, différente de toutes
celles qui avaient été fabriquées antérieurement, présente la
forme d'une boite à paroi continue complètement creuse et sans
cloison intérieure, qu'elle est d*un poids moindre et offre une
résistance à l'écrasement au moins égale, sinon supérieure ;
Que l'inventeur de cette brique a certainement créé un produit
industriel nouveau, pouvant se substituer aux éléments de cons-
truction employés jusque-là ;
Que dans ces conditions, il convient de décider que l'invention
dont s'agit était brevetable.
Sur la deuxième question :
Considérant que si Mouret réclame la paternité de cette in-
vention, Pillivuyt etCie soutiennent, au contraire, qu'elle leur
appartient et qu'eux seuls auraient eu le droit de prendre un bre-
vet;
Considérant que tous les documents de la cause démontrent que
ni Tune ni l'autre de ces prétentions ne saurait être admise ;
Qu'il résulte d'une façon certaine de la correspondance échan-
gée entre les parties, que la brique évidée en porcelaine a été le
résultat de la collaboration pendant plusieurs mois de Mouret et
de Pillivuyt et Cie ;
Que Mouret parait, à la suite d'une convention avec M. de la
Brosse, ingénieur en chef de la Compagnie d'Orléans, avoir eu
le premier l'idée d'employer des briques creuses pour la construc-
tion ;
Qu'il a communiqué cette idée à Pillivuyt et Cie en les char-
geant d'étudier les moyens de la réaliser ;
Que c'est Pillivuyt et Cie qui ont songé à recourir au procédé
du coulage, et qui, après des essais multiples, ont réussi à obtenir
an résultat qui a donné satisfaction à M. de la Brosse ;
«
«'■» ■ • - "^
— 360 —
Considérant que dans ces circonstances, Mouret n'était pas
fondé à prendre seul un brevet ; que ce brevet est sans valeur
au regard de Pillivuyt et Gie ;
Sur la troisième question : '
Considérant qu'à la date à laquelle le brevet a été pris
(10 mars 1894) Tinvention était déjà divulguée;
Que la fabrication n'avait pas eu lieu dans des conditions sus-
ceptibles d'assurer le secret de cette invention ; qu'aucune re-
commandation ne parait avoir été faite par Mouret et aucune
précaution prise par Pillivuyt dans ce but ; que tous les ouvriers
de la fabrique de Joêcy ont pu voir librement et examiner les
briques ;
Considérant qu'au mois d'août 1893, Mouret et Pillivuyt et Gie
ont passé avec la Compagnie d'Orléans un marché par lequel Us
s'engageaient à lui fournir soixante mille briques ;
Que des livraisons importantes ont été faites en novembre et
décembre ;
Que les trente-six mille briques qui ont fait l'objet de ces ex-
péditions ont été employées, tout au moins en grande partie, dès
le mois de janvier 1894 à la construction des voûtes de la gare
de Sceaux à Paris ;
Considérant qu'on ne saurait sérieusement soutenir que l'em-
ploi de ces briques par la Compagnie d'Orléans fût un essai fait
dans l'intérêt de l'inventeur ;
Que cette Compagnie n'eût certainement pas conclu un mar-
ché aussi important, si la qualité des briques n'eût été déjà cons-
tatée et reconnue ;
Considérant qu'il ressort, en outre, des documents de la cause
qu'au commencement du mois de décembre 1893, Pillivayt et
Cie avaient envoyé à titre d'échantillons des briques creuses à
un certain nombre d'Ingénieurs qui leur avaient été indiqués par
Mouret ;
Considérant qu'il y a lieu, par suite de tout ce qui précède, de
déclarer que l'invention, pour laquelle a été pris le brevet du
10 mars, était à cette date devenue publique et que cette publi-
cité rend ledit brevet radicalement nul ;
En ce qui concerne les conclusions de Mouret tendant à faire écar-
ter diverses pièces communiquées par Pillivuyt et Cie après Tau*
dience du 23 novembre dernier :
Considérant qu'à l'audience du 30 novembre dernier, avant
que le ministère public prit la parole, les avoués des parties ont
été invités à présenter toutes observations qu'ils jugeraient uti-
les ;
Que l'avoué de Mouret avait eu antérieurement et a eu posté-
— 361 —
rieurement à cette audience toute latitude pour critiquer les do-
cuments produits ;
Qu'au surplus ces documents nouveaux n'étaient pas nécessai-
res et que la Cour n'en a pas fait état ;
Par CBS motifs, Statuant par suite du renvoi ordonné par la
Cour de cassation par arrêt du 16 janvier 1899 ;
Proclame nul et de nul effet le brevet du 10 mars 1894.
Art. 4233.
Jugrements et Arrêts |»a.r défaut. — Slgrniacatloii À
domicile. — Délai d'opposition. — Partie civile. —
Doinmagres - Int érê ts .
La disposition de l'article 187 du Code d'instruction cri-
minelle, aux termes de laquelle, si la signification n'a pas
été faite à personne ou s'il ne résulte pas d'actes d'exécu-
tion du jugement que le prévenu en a eu connaissance, Vop-
position est recevable jusqu'à l'expiration des délais de
prescription de la peine, n'a trait qu'à l'exécution de la
peine. En dehors de ce cas, la signification à domicile con-
serve tous ses effets légaux ; elle continue donc de faire
courir le délai de l'opposition en ce qui concerne la con^
damnation aux dommages-intérêts prononcés au profit de
la partie civile (1).
(Cass. crim., 18 janvier 1901. — £lie, Valen, Robin, et autres.)
Ainsi jugé par la Cour de cassation (Ch. crim.), le 18 jan-
vier 1901, sous la présidence de M. Lcew, président;
La Goor, Après délibéré en chambre du conseil ;
Sur le moyen unique du pourvoi, pris de la violation de Tar-
ticle 187, § 3, du Gode d'instruction criminelle, en ce que l'arrêt
attaqué a considéré la signification à domicile d'un jugement par
(1) On peut se demander si la distinction établie par la Cour, qui peut
être si grave dans ses conséquences, repose sur une base bien solide. Le
texte de Tarticle 187 § 3 parait applicable aussi bien à la peine qu'aux
dommages-intérêts. Il semble difticile d'admettre que le droit du prévenu
de faire opposition, jusqu'à la prescription de la peine, puisse être réduit,
en ce qui concerne la condamnation aux dommages-intérêts, accessoire
de la peine, au simple délai de 5 jours, prévu à Tarticle 187, môme
lorsque la signification n'a pas été faite à personne.
I
?
— 362 —
défaut comme faisant courir le délai de 1 ^opposition en ce qai
concerne la condamnation à des dommages-intérêts prononcés
au profit de la partie civile :
Attendu, en ce qui touche Elie, que l'arrêt attaqué constate
que la signification du jugement par défaut a été faite k la per-
sonne du condamné ; qu'ainsi, le moyen manque en fait ;
Attendu en ce qui touche les autres demandeurs en cassation,
que le jugement qui a condamné par défaut Valen, Robin, De-
bouche et Arnaud, à 1 mois de prison et à 2.500 francs de dom-
mages-intérêts, envers Maulmont, partie civile, a été, à la re-
quête de ce dernier, signifié au domicile de chacun d'eux, sans
que ceux-ci aient formé opposition dans le délai de cinq jours
imparti par l'article 187 du Gode d'instruction criminelle; que
le Tribunal de Blida et, après lui, la Cour d'Alger, dans l'arrêt
attaqué, ont décidé que l'opposition ultérieurement formée par
les prévenus était recevable quant à l'action publique et à la
peine, mais irrecevable quant aux dommages-intérêts obtenus
par la partie civile ;
Attendu, sur ce dernier point, que la loi du 27 juin 1896, sur
les crimes, délits et contraventions commis à l'étranger, a ajouté
à l'article 187 du Gode d'instruction criminelle la disposition
suivante, relative aux condamnations par défaut : « Toutefois,
si la signification n'a pas été faite à personne, ou s'il ne résulte
pas d'actes d'exécution du jugement que le prévenu en a eu con-
naissance, l'opposition sera recevable jusqu'à l'expiration des
délais de prescription de la peine » ;
Attendu que ce texte, ainsi que l'indiquent ses derniers mots,
se rapporte seulement à l'exécution de la peine ; que les travaux
préparatoires de la loi montrent que telle a été la seule préoc-
cupation du législateur ; que, en dehors du cas expressément
prévu, la signification à domicile conserve tous ses effets lé-
gaux ; que, d'après le principe maintenu dans le paragraphe 1*'
de Farticle 187, elle continue donc de faire courir le délai de
l'opposition en ce qui concerne la condamnation aux dommages-
intérêts prononcée au profit.de la partie civile ; qu'en le décidant
ainsi, l'arrêt attaqué, loin de violer l'article précité, en a fait
une saine application ;
Attendu, d'autre part, que cet arrêt est régulier en la forme ;
Rejette.
Rapporteur: M. Bard, conseiller. — Ministère public :
M. Fruilloley, avocat général. — Plaidants: M'^SabatibroI
GossET, avocats.
TABLE ALPHAB
CONTENUES
(A
A1.UEUIA6NB. Calcul dei
lais pour te paiement des U
P. 9. — Brevets d'invetii
P. 11. —Modèles d'utilité. P
— Marque de marchandises
11 . — Concurrence déloyale
11. — Désiiinations et réel
médicales. P. 13. — Prole<
de la propriété lilléraire, e
tique et industrielle daoa lei
conscriptions consulaires et
de prolecloral. P. IS.
(V. France.)
AIjHAIVACH. Commet un
de concurrence déloyale oi
moins un acte dommageable
bant sous l'application de 1
mer^ant qui distribue gratultei
â sa clientèle un almanael)
les négociants d'une ville on
édiler au moyen d'une subvei
venée par eux et indiqaa
litre de réclame leur adresse,
genre de commerce et leur
cialité, après avoir pris soi
coller ensemble les feuilleb
figure J'annonce de son coi
reni, de manière à ne laisser
celle qui lui est personn
P. 158
iUVTÈRIORITÉ . Loraqi
aniériorilé invoquée conirt
brevet se présente enlourëi
circonstances suspectes, elle
être écartée. P. 16*. — Pour
Îrécier nae antériorité, ilimi
'en préciser les termes sa
n ajoo
cher et d'ei
làminei
r les docun
d'après les
t de ao
n apparitioi
la date du
TCt auquel i
on veut
opposer I'(
riorilé. P.
328,
- Ne sa
une antériorité un<
lente dans
laquelle, si le prt
est mentionné, on
moins auoi
lae dei
.criptlon, r
— 364 —
I-
ç.
que l'inventeur applique autre-
ment les mêmes moyens ou en
change les combinaisons ou les
simplifie par des suppressions ou
les complète par Tadjonction d'au-
tres moyens également connus et
arrive amsi à un résultat indus-
triel: ce résultat ne doit pas né-
cessairement être d'autre nature
que celui qui était obtenu aupara-
vant, il n'a besoin que d'être plus
rapide, plus économique ou plus
complet pour pouvoir être consi-
déré comme différent. — Spécia-
lement, bien aue le principe de la
construction au foyer à plusieurs
étages de combustion superposés,
au moyen de dalles perforées,
soit connu, et qu'il ait môme
existé un appareil s'allumant au
moyen de deux foyers latéraux sé-
parés, caractérisé par la présence
de dalles rapprochées, creusées
d'une série d'orifices en entonnoirs
se rejoignant par leurs bords, de
telle façon que le combustible pul-
vérulent versé par le haut de l'ap-
pareil descende par son propre
poids d'étage en étage en remplis-
sant les parties creuses des dalles,
et se disposant en cônes dans les
intervalles des étages, de manière
a constituer autant de colonnes
verticales qu'il y a d'entonnoirs et
de trous percés dans les dalles, et
qu'il suffise d'agir sur des tiroirs
métalliques placés à la base des
colonnes pour faire descendre la
masse entière de chaque colonne
de haut en bas, doit être considéré
comme constituant une application
nouvelle brevetable un loyer s'al-
lumant par l'étage inférieur sans
adjonction d'aucun accessoire la-
téral constitué par des dalles plus
espacées percées de trous cylindri-
ques disposés de façon que chacun
des orifices corresponde à une sur-
face plane de la dalle inférieure,
et que par suite, le combustible
en tombant d'une dalle sur l'autre
s'y forme bien automatiquement
en tas coniques, mais que sa chute
doive être provoquée par l'inter-
vention du chauffeur détruisant à
intervalles réglés à 1 aide d'un râ-
teau, les cônes d'un étage pour les
faire se reformer sur l'autre, la
suppression des tiroirs métalliques
et des foyers latéraux constituant
une simplification et l'adjonction
du brassage au râteau pour régu-
lariser la chute et renouveler lés
surfaces étant un complément es-
sentiel du foyer pour combustible
pulvérulent. P. 185. — Est breve-
table l'invention consistant dans
la fabrication d'une brique évidée
en porcelaine, ou toute autre ma-
tière similaire bien que cette b-
brjcation ait été obtenue par le
procédé déjà connu du coulage, si
elle constitue une application nou-
velle de ce procédé et une combi-
naison nouvelle dans les formes
et proportions de cette brique.
(V. Combinaison de moyens connus.
Emploi nouveau. Formes et pro-
portions.)
ARGEnmunBB ( républi -
aUE). Brevets d'invention. P. 13.
— Loi du 14 octobre 194.0 sur les
marques de fabrique, de com-
merce, d'agriculture. P. ^.
DB MA-
OHID Peuvent être valablement
saisis, dans les termes de l'arti-
cle 19 de la loi du 23 juin 1857,
des vins qui, ne provenant pas des
lies de Madère, sont contenus dans
des fûts qui portent l'indication
Madère ou Madeira, l'Arrange-
ment de Madrid de 1891 étant ap-
plicable à l'espèce. P. 252.
AUTEUR DU DÉLilT. (V.
Exécution musicale illicite,)
AUTRICHE. Ordonnance rela-
tive aux bureaux des brevets,coar
des brevets, agent* des brevets.
P. 18.
AUTRICHE-HOIVGRIB. Or-
donnance concernant les relations
économiques entre les deux par-
ties de la monarchie. P. 18.
(V. France,)
BBIiGiaUE. (V. France,)
BLiOC HYAI^UV. (V. Dénomi-
nation*)
BOIVrVE FOI. Il appartient au
juge du fond d'apprécier si le
créancier gagiste qui a reçu en
gage des objets mobiliers (des
exemplaires tirés par l'éditeur en
vertu d'un contrat qui prévoyait
une certaine redevance par exem-
plaire mis en vente) est de bonne
foi. P. 228.
(V. Dommages-intérêts^ Recel)
J
^T
■5^T
^
— 365 —
BRESII^. Loi do 8 novembre 4897
interdisant Timportation et la fa-
brication d'étiquettes de nature à
induire en erreur sur la prove-
nance des marchandises. P. 13.
— Loi du !•' août 1898 concer-
nant la définition et la protection
des droits des auteurs. P. 39.
BREVETS. (V. Antériorité, Ap*
plication nouvelle, Brevet de per-
fectionnement y Certificats, Colla-
boration ^ Combinaison nouvelle.
Confiscation, Contrefaçon, Em-
ploi nouveau. Erreur sur les
qualités substantielles, Formes et
proportions, Af arques. Procédé,
Propriété, Possession antérieure,
Publicité.)
BREVET BE PERFEC-
TIOIVIVEMEIVT. Ne peut être
considéré,subsidiairement,comme
un brevet de perfectionnement
d'un brevet antérieur, un brevet
portant sur un procédé connu et
par suite nul,a]ors que l'inventeur
n'a décrit les perfectionnements
qu'il entendait apporter à ce pro-
cédé cohnu que dans des certifi-
cats d'addition à ce brevet, et que
ces perfectionnements n'étaient
même pas en germe dans le bre-
vet principal. P. 207.
BUIiOARlE. Loi des 21 décem-
bre 1893, 2 janvier 4894 complé-
tant l'article 1 de la loi sur les
marques de fabrique et de com-
merce. P. 4i.
CAPETIER. (V. Exécution mu-
sicale illicite.)
CAJVABA. Acte du 18 juillet 1900
modifiant l'acte concernant les
droits d'auteur. P. 45.
1L.IJC1TE. (V. Cession
de fonds de commerce.)
CERTIFICATS. Il n'f a pas
lieu de tenir compte pour iiiGrmer
la valeur d'un brevet de certificats
versés aux débats, conçus en ter-
mes vagues, et n'indiquant pas de
façon formelle la similitude entre
les objets employés antérieurement
au brevet et ceux du brevet, alors
surtout que ces certificats émanent
de rivaux en industrie du breveté
et qu'il est constant que postérieu-
rement au brevet leurs signataires
ont fait au breveté de nombreuses
commandes de ces objets.
CESSIOIV BE FOIVB8 BE
COJlOIERCE.La nullité,pour
cause illicite d'un objet cédé dans
un contrat (exploitation de remè-
des secrets) n'entraîne pas la nul-
lité des autres éléments de la ces-
sion du fonds de commerce qui
comprend notamment les marques
de fabrique. P. 260.
CHiL.1. Loi du 24 octobre 1898
concernant la répression de la
contrefaçon en matière de mar-
ques.
CHOTE. (V. France.)
CITATIOIV (BROIT BE). Le
droit de citation ne s'applique pas
en matière de dessins ; un dessin,
en effet, constitue une œuvre in-
divisible, qui conserve son indi-
vidualité, quoique réunie ou asso-
ciée avec d'autres œuvres, et ne
peut être publiée sous quelque
forme que ce soit sans être entiè-
rement reproduite et ainsi complè-
tement portée à la connaissance des
tiers. P. 244.
COAI^TAR SAPOIVIIVE. (V.
Dénomination.)
CACAO CHOUVA. (V. Déno-
mination.)
CHAMBRE SYIVBICAI.E.
V. Dénomination.)
COULABORATIOIV. Lorsqu'u-
ne invention est le fait de la col-
laboration de deux personnes,rune
d'elles n'est pas fondée à prendre
seule un brevet et en tout cas ce
brevet n'est pas opposable à son
collaborateur. P. cëo.
COLiOMBIE. Usurpation de nom
et contrefaçon. Code pénal (édi-
tion de 1900). P. 47.
COiHBlIVAISOIV BE MOY-
EI¥S COrVIVUS. Est brevetable
une machine destinée à la pose
des filins de matières plastiques
dans les couvercles des boites de
conserve comprenant deux orga-
nes principaux; un organe mâle
formé par un manchon chauffé
— 366 —
directement par le gaz d^éclairage,
et an organe femelle, adapté sur
une glissière, formé de deux tubes
concentriques coulissant l'un dans
l'autre au moyen d'un ressort à
boudin, alors qu'antérieurement
au brevet, il existait déjà une ma-
chine destinée au même usage,
comprenant également deux orga-
nes, un organe mâle, formé d'un
tampon plein non chauffé, et un
organe femelle semblable à celui
de la machine brevetée mais non
monté sur glissière. — Doit être
considérée comme une contrefa-
çon une machine permettant Tem-
f)loi simultané de la chaleur et de
a pression, qui malgré l'absence
de glissière et l'adoption d'un
mode de chauffage différent, pour
l'organe mâle, reproduit néan-
moins dans leurs particularités ou
éléments caractéristiques la com-
binaison de ces deux organes
principaux. P. 163.
(V. Applicatio?i nouvelle^ Contre'
façon (brevets).)
COMPÉTEIVCE. Il est de règle
Sue lorsqu'une demande portée
evant un tribunal civil contient
différents chefs dont un ou plu-
sieurs sont de la compétence des
tribunaux civils et un autre de
celle des tribunaux de commerce,
mais dérivant de chefs civils, le
tribunal civil est compétent pour
le tout. P. 105. — C'est à bon
droit que le tribunal de commerce
saisi d'une instance soulevant une
question de déchéance de brevet,
surseoit à statuer jusqu'à ce que
cette déchéance ait été tranchée
par le juge compétent. — Mais le
principe du double degré de juri-
diction n'étant établi que dans l'in-
térêt des parties, bien que le pre-
mier degré de juridiction ne soit
pas épuisé, la Cour saisie de l'ap-
pel de la décision de sursis, peut
sur les conclusions conformes des
parties statuer sur le fond. P.
221.
C01I1PL.ICITÉ. (V. Exécution
musicale illicite.)
coivcurreivce: déloya-
L£ ou 1L.L.ICITE. Il y a
concurrence déloyale dans le fait
de s'assurer, en vue de s'emparer
des procédés de fabrication d'un
concurrent, le concours d'un de
ses ouvriers par l'offre d'appointe-
ments et avantages exceptionnels
et dans celui d'annoncer son pro-
duit sous la même dénomination
Îue celui de son concurrent. P.
05. — Le fait de vendre, comme
un concurrent, des serviettes ca-
ractérisées par l'arrêt des coutures
au moyen d œillets métal li(raes,par
douzaines, dans un casier formant
plan incliné et en les présentant
par rang de tailles, ne constitue
pas un acte de concurrence dé-
loyale alors qu'il est constaté que
les serviettes ne sont pas nouvelles
en soi et que ces dispositions sont
généralement usitées dans le com-
merce des mêmes articles, et qoe
le nom donné à ces serviettes de
fabrication connue est différente.
P. 160. — Lorsque les circonstan-
ces de la clause excluent toute
idée de mauvaise foi, les al lo-
tions et les procédés de réclame
dont une partie a usé vis-à-vis
d'une autre, et qui lui ont porté
préjudice constituent à l'égard de
cette partie, non pas les éléments
d'une concurrence déloyale mais
les éléments d'une simple faute
passible de ' dommages- intérêts.
P. 114. — Ne constitue pas, ao
regard de l'industrie privée, un
acte de concurrence déloyale, le
fait, par une compagnie de che-
mins de fer, de construire on
hôtel terminus dans une de ses
gares (^en l'espèce l'édification d'un
hôtel a voyageurs, par la compa-
gnie d'Orléans dans sa gare do
quai d'Orsay}, alors que la créa-
tion de cet hôtel, autorisé par les
pouvoirs publics et d'ailleurs non
exploité directement par la com-
pagnie, a pour but et doit avoir
pour effet, tout comme les buffets,
restaurants, librairies, installés
dans l'intérieur des gares et sta-
tions, une amélioration dans les
conditions générales de transport
des voyageurs. P. 319.
(V. Almanach^ Dénomination,)
€H>IVF1SCAT10IV. La confisca-
tion conserve, en matière de con-
trefaçon littéraire et artistique, le
caractère de peine ; le tribunal
civil est incompétent pour con-
naître des conclusions prises de-
vant lui, de ce chef. P. 2A6. —
La confiscation prescrite par l'ar-
ticle 49 de la loi du 5 juillet 1844
est obligatoire et les objets con-
trefaits qu'ils aient été saisis oa
non lors de la constatation du
i
pffnr-t • «PA^
TTivr r^-F--^
— 367 —
délit de contrefaçon doivent être
remis au propriétaire du brevet.
P. 383. — Cette remise ne pouvant
s'effectuer que si les objets con-
trefaits sont encore en la posses-
sion du contrefacteur au moment
où la condamnation est prononcée,
dans le cas contraire ta réparation
civile due au breveté se réduit à
des dommages et intérêts. P. 333.
— Lorsque la partie poursuivie ne
peut plus remettre en nature les
objets décrits soit qu'il ait usé de
son droit d'aliénation, soit même
qu'ils aient été perdus, le breveté
n'étant pas lié par la vente même
faite en dehors de lui, et qu'il n'a
pu contrôler, est fondé à réclamer
comme représentation des objets
une valeur fixe qui ne peut être
que celle qu'ils avaient au moment
de l'introduction de l'instance.
P. 333. — 11 n'y a pas lieu de
prononcer la confiscation des ma-
chines ayant servi à fabriquer les
objets contrefaits , lorsqu'elles
n'ont rien de spécial, il suffit
d'attribuer au breveté les organes
modifiés en vue de la contrefaçon.
P 333.
(V. Motifs desan-éts. Théâtre,)
COIVSULiTATlOIV. (V. Pouvoir
des tribunaux.)
COIVTRAT DE SOCIÉTÉ.
Ne constitue pas un contrat de
société pour l'exploitation d'un
ouvrage les conventions d'après
lesquelles l'éditeur est autorisé à
faire une édition moyennant une
redevance par exemplaire mis en
vente. P. 228.
COIVTREFAÇOIV (BRE-
VETS) . Lorsqu un brevet porte
sur une combinaison de moyens
connus, reconnue nouvelle en vue
de l'obtention d'un produit indus-
triel nouveau il y a contrefaçon dans
le fait de faire usage des éléments
essentiels de cette combinaison
Î>our obtenir le même résultat et
e même produit ; spécialement
lorsqu'un brevet est pris pour
l'emploi d'un four à manche ou
cubilot, recevant des charges al-
ternées de combustible et de mi-
nerai, et de ventilateurs aspirant
les vapeurs ou fumées métalli-
ques, avec injection d'eau pulvé-
risée, et les refoulant dans des
chambres de condensation, il y a
contrefaçon dans l'emploi, même
à sec, de la combinaison du four
à manche et des ventilateurs,
alors que cet emploi permet d'ob-
tenir des produits identiques au
point de vue chimique. P. 105.
— Doit être déclaré contrefac-
teur, celui qui a acheté par un
moyen commercial une machine
contrefaite, si à raison de circons-
tances, et notamment de pour-
suites intentées antérieurement
contre le constructeur de la
machine sus-énoncée, il est établi
3u'il a agi sciemment, il ne peut
ans ce cas invoquer sa bonne
foi. P. 165. — Lorsqu'une inven-
tion porte sur un balai électrique
constitué par une ou plusieurs
feuilles de laiton laminé excessi-
vement mince, repliées, plissées
ou enroulées sur elles-mêmes, il
y a contrefaçon dissimulée ou tout
au moins partielle dans le fait de
constituer un balai par deux pa-
3uets de lamelles de clinquant
écoupées et superposées, sépa-
rés par une toile métallique, le
tout formant un faisceau conso-
lidé par des rivets et enveloppé
de deux feuilles de clinquant for-
mant une surface continue et
plusieurs fois enroulées sur elle-
mômes. P. 204.
(V. Combinaison nouvelle de
moyens connus, Perfectionne-
7nent.)
COIVTREFAÇOIV (MAR-
QUES). Lorsque l'emploi d'un ru-
ban rouge pour rhabillage des bou-
teilles de liqueurs est tombé dans
le domaine public, si la dénomi-
nation Cordon rouge peut encore
constituer une marque de fabri-
que, en tous cas l'emploi d'un ru-
ban rouge, pour l'habillage de la
bouteille, ne constitue pas la con-
trefaçon de cette marque. P. 303.
(V. Dénomination.)
COIVrREFACOIV ( PRO
PRIÉTÉ ARTISTIQUE ) .
Sans rechercher si une simple
imitation rythmique peut être
considérée comme contrefaçon
d'une œuvre musicale, le juge
d'appel n'a pas outrepassé ses
pouvoirs en déclarant que le fait
d'avoir emprunté, pour 3 mor-
ceaux sur 58 dont se compose la
partition d'une féerie, le rythme
de 3 airs d'opérette, était insuffi-
sant pour constituer le délit de
contrefaçon, il pouvait y avoir là
^ W^-i^
— 368 —
des circonstances involontaires,
exemptes de toute intention dé~
lictueuse. P. 98.
<?0IWEIVT10IVS. (V. France.)
COirVENTlOIV DE 4883.
Adhésion du Japon à la conven-
tion. P. 5. — Calcul du délai de
priorité. P. 5. — La convention
de 1883 est absolument étrangère
a la force exécutoire des jugements
rendus à l'étranger, et Tenregis-
trement d'une marque au bureau
international de Berne, ne saurait
porter atteinte aux droits de pro-
{)riété antérieurement acquis sur
a même marque. P. 253.
COirVEIVTION D' UIVIOIV
DB i88e. Adhésion du Japon à
la convention. P. 5. — Dénon-
ciation de la convention par te
Monténégro. P. 5.
CORÉE. (V. France.)
(X>IUCIDE. (V. Dénomination.)
COUR RE CASSATIO^W. 11
appartient à la Cour de cassation
de vérifler au vu des faits consta-
tés par les juges du fait, si la re-
présentation a eu un caractère
public ou privé ; dès lors, lorsque
en présence de conclusions de-
mandant à prouver des faits d'où
résulterait la publicité d'un bal
où des morceaux de musique ap-
partenant à des œuvresdtt domaine
privé ont été joués, le juge du
fait se borne à déclarer que le dit
bal n'était pas public, la Cour de
cassation se trouvant dans Tim-
possibilité d'exercer sur la léga-
lité de la décision attaquée le
contrôle qui lui appartient, cette
décision doit être cassée. P. 232.
(V. Publicité.)
CRÉAIVCIER GAGISTE. (V.
Bonne foi.)
CRÉOI^UVE. (V. Dénomination,)
CUBA. PORTO-RICO ET
JLES PHIUPPIIVES. Trait>
de paix du 10 décembre 1898 en-
tre l'Espagne et les Etats-Unis.
P. 14.
D
DANEMARK. Protection de la
propriété industrielle dans les
possessions danoises. P. 15. "
Marques composées exclusivement
de chiffres, lettres on mots. P.
15.
DÉlVOlIllIVATlOIir . On ne
saurait voir une similitude dom-
mageable dans l'emploi des termes
l'Inusable et l'Indéchirable poar
désigner des serviettes d'écolier
ou d'homme d'affaires, ces deux
expressions indiquant des qualités
différentes et se présentant chacan
à l'esprit avec un sens particulier.
P. 160. — Une dénomination ar-
bitraire et de fantaisie, appliauée
à un produit breveté (dans l'es-
pèce, la dénomination Pâle /fa-
mande^ pour une pâte à noircir les
fourneaux), ne tombe pas dans le
domaine public par le fait de la
chute du orevet dans le domaine
public. P. 241. — L'emploi des
aénominations,à titre de marques,
est autorisé par la loi du 23 juin
1857, alors que, n'étant pas la
désignation nécessaire du produit,
ces dénominations ne tendent pas
h attribuer indirectement au dépo-
sant, sous le prétexte de marque,
le monopole du produit lui-méine.
— Les mots Papier Cyano-Fer,
employés pour désigner des pa-
piers photographiques industriels,
constituent une dénomination sus-
ceptible d'être possédée privative-
ment à titre de marque de Cabri
quel. P. 278. — L'expression
Coaltar saponiné ne constitue
point une marque de fabrique
parce qu'elle désigne un médica-
ment antiseptique obtenu par la
combinaison du coaltar et de la
saponiné, que ces termes sont en-
trés depuis longtemps dans la lan-
gue usuelle et que le produit
figure notamment dans le alanuel
de Pharmacie de Dorvault sous le
titre de Coaltar saponiné ou sapo-
nifié. P. 280. — Constitue une
marque valable la dénomination
de créoline, qui est nne dénomi-
nation arbitraire et de pare fan-
taisie, sans aucun rapport soit
avec la composition du produit,
soit avec l'usage auquel il est des-
tiné. P. 282. — Peut être valable-
ment prise comme marque de fa-
brique la dénomination Peninsu-
lar pour désigner, indépendam-
ment de tous autres signes dis-
tinctifs, une attache métalliaae.
P. 288. — La dénomination Les-
sive Phénix, nom de fantaisie ré-
gulièrement déposé, constitue une
r-w*--"'
■. IV'- «V^*^* 'rTî'
— 369
'
marque de fabrique. P. 291. —
La désignation d'un produit de-
meure la propriété de celui qui le
premier en a fait usage, alors sur-
tout que, par un dépôt régulier,
il a ultérieurement manifesté sa
volonté de s'assurer la propriété
de ladite dénomination. — L'ex-
pression ldéa( pour désigner des
rasoirs, étant de pure fantaisie,
constitue une marque valable s'il
n'est pas établi en fait qu'elle était
tombée dans le domaine public de
cette industrie. P. 293. — Le mot
Coricide, bien qu'il soit tiré des
qualités mômes du produit fabri-
qué, bien qu'il éveille l'idée de
son emploi, ne constitue pas la
dénomination nécessaire de tout
topique contre les cors ; il pour-
rait donc servir de marque si le
déposant justifiait de la priorité
d'usage. P. 298. — L'industriel
Îui a déposé la dénomination Bloc
Jyalin pour un produit solide à
l'acide borique et à la glycérine,
destiné à calmer l'irritation pro-
duite à la peau par le rasoir, peut
faire interdire l'usage des expres-
sions Bloc Kremlin^ Cristal BloCj
Bloc antiseptique^ lesquelles sont
des contrefaçons, car le mot Bloc
doit être considéré comme un des
éléments essentiels, caractéristi-
quesetappropriables,de la marque
cléposée. P. 302. — Apprécie
souverainement les faits l'arrêt qui
constate que, avant le dépôt de la
dénomination Cacao - Chouva ,
prise isolément comme marc[ue,
cette dénomination était exploitée
par divers fabricants de liqueurs,
qui tous s'en servaient librement
selon leur fantaisie et leurs be-
soins, et que l'inventeur de la
dénomination a, jusqu'à sa mort,
^ardé, à l'égard de ces fabricants,
un silence qui implique la recon-
naissance des droits du domaine
public. P. 306. — Une dénomina-
tion qui constitue antérieurement
au dépôt une désignation usuelle et
nécessaire du produit auquel elle
s'applique, ne saurait, si on la
considère en elle-m^me et en
dehors de l'aspect extérieur qu'elle
peut offrir, être valablement dépo-
sée et faire l'objet d'une appro-
priation exclusive a titre de mar-
que de fabrique. — La dénomina-
tion Chantilly^ étant, depuis de
longues années, usitée pour dési-
gner un parfum qui est dans le
domaine public, ne peut servir de
marque pour certains produits de
parfumerie, tels que savons, etc. 4.
P. 308. — Les mots Chambre
syndicale ne sont pas génériques
et indispensables pour la désigna-
tion d'un syndicat professionnel ;
en conséquence, le syndicat pro-
fessionnel qui les a le premier
adoptés dans son titre est fondé à
en faire interdire l'usage par un
autre syndicat, même avec l'addi-
tion d'un qualificatif ou d'un sons-
titre, s'il en doit résulter une
confusion dans l'esprit des tiers.
P. 816.
( V . Dépôt {maraues). Produit phar-
maceutique, usurpation de mar-
que.)
DÉPÔT (MARaUES). Le dépôt
de marques étant simplement aé-^
claratif de propriété, il importe
peu que le dépôt d'une dénomi-
nation ait été fait postérieurement
à la déchéance a' un brevet pris
pour le môme produit, du moment
qu'il est constant que le créateur
de cette dénomination en conti-
nuant i en faire usage, depuis
l'époque de la déchéance du bre-
vet jusqu'à l'époque du procès, a
entendu en conserver la propriété.
P. 241. ' Le fait que le dépôt
d'une marque de fabrique n'a pas
été renouvelé et est périmé ne
fait pas obstacle à ce que le pro-
priétaire de la marque poursuive
f>ar la voie de la concurrence dé-
oyale celui qui imite frauduleu-
sement cette marque. P. 253. —
C'est à la date d'emploi et non à
la date du dépôt qu il faut se re-
porter pour déterminer l'appro-
priation de la marque. P. 2w.
DESSUlfS BT 1I10D1BL.BH.
Un dessin bien que comportant les
caractères de dessin de fabrique,
doit, s'il est d'une forme essentiel-
lement banale , être considéré
comme étant dans le domaine pu-
blic et dans ces conditions le dé-
pôt régulièrement effectué est ino-
pérant pour en assurer la propriété
au déposant. P. 356.
DIVUIiOATIOIV. On ne sau-
rait trouver les éléments d'une
divulgation de nature à entraîner
la déchéance d'un brevet d'inven-
tion : dans l'expérimentation d'une
machine par le fabricant devant
un amateur, tenu en vertu d'une
règle élémentaire de loyauté à
la discrétion absolue, alors surtout
S4
t -
— 370 —
que ce fonctionnement n'était pas
de nature à en révéler le méca-
nisme des rouages intérieurs, et
ce qui constituait l'âme même de
l'invention ; non plus cfue dans la
remise à titre confidentiel de devis
et avant-projets de construction
dans le(^uei des parties notables de
Tappareil ne figuraient pas et trop
incomplet pour permettre la réa-
lisation de l'invention. P. 178. —
La connaissance qu'ont eue d'une
invention ou d'une application ceux
qui l'ont conçue ou ceux qui, en
petit nombre, ont été les agents
nécessaires des essais auxquels
elle a donné lieu, ne saurait cons-
tituer une divulgation, alors sur-
tout que ces agents, même en
l'absence de toute injonction ex-
presse, étaient tenus a la discré-
tion, qu'il est constaté que bien
qu'aucune précaution spéciale ne
paraisse avoir été prise en ce qui
concerne l'appareil expérimenté,
le régime habituel de l'usine où
ont eu lieu les essais s'opposait à
ce qu'il fût connu du public, et
3u'en outre la disposition même
e l'appareil dont les organes es-
sentiels étaient enfermés dans une
enveloppe en maçonnerie ne per-
mettait pas aux ouvriers de l'u-
sine ni aux personnes qui y pé-
nétraient accidentellement, den
deviner le fonctionnement et la
destination. P. 185. — La pré-
sence des dessins ayant servi à la
construction d'un appareil dans
les archives du cabinet d'un ingé-
nieur ne peut être considérée
comme les mettant à la disposi-
tion du oublie, alors qu'il n'est
pas Justine qu'aucune communi-
cation en ait été donnée ou de-
mandée avant la prise du brevet
auquel l'appareil est opposé com-
me antériorité. P. 185.
(V. Antériorité, Publicité.)
DOMMAGKS-IIVTÉRÊTS. Il
n'y a pas lieu de condamner à des
dommages-intérêts le demandeur
en contrefaçon lorsqu'il a agi de
bonne foi, et qu'il n'est pas éta-
bli que sa demande ait causé un
préjudice à celui contre qui elle
était dirigée. P. 207. — Le fait
par un tiers d'avoir demandé à
des armateurs, sans l'accomplis-
sement d'aucune formalité judi-
ciaire, de lui livrer des marchan-
dises appartenant à leurs commet-
tants ; d'avoir traduit ces arma-
teurs en justice pour avoir résisté
à cette prétention ; d'avoir porté
contre eux une accusation de recel
déclarée téméraire et dénuée de
fondement, et de leur avoir sus-
cité un procès purement vexa-
toire, peut être à bon droit consi-
déré par les juges du fond comme
une faute lourde donnant lien à
des réparations pécuuiairesen plus
des dépens légaux. P. 215. — Il est
dû réparation du préjudice causé
à l'artiste par la reproduction,
sans son consentement, de quel-
aues-uns de ses dessins même
dans une collection spéciale où
ils ont été groupés avec des des-
sins d'autres artistes en vue d*nne
synthèse historique et pour cons-
tituer un recueil ou document
d'ensemble. — L'éditeur de l'al-
bum encourt la même responsa-
bilité que l'auteur de la composi-
tion. P. 244. — Est passible de
dommages -intérêts envers le pro-
priétaire de la dénomination
« Peninsulcu* », le concurrent qui
imprime sur des factures et sur
des cartes c Attache-boutons dits
.péninsulaires ». P. 288. — Quand
un propriétaire d'un brevet a
traite avec un tiers de l'exploita-
tion de son brevet, et que seul
âualifté pour en défendre la vali-
ité il se refuse lorsque des con-
trefaçons lui sont signalées à en
poursuivre les auteurs et n'obtem-
père pas aux sommations qui lui
sont faites à cet effet, il y a lieu
de prononcer la résiliation de la
convention à ses torts et griefs, à
dater du jour on il a été mis en
demeure de faire respecter son
brevet, de décider qu'il ne peut
prétendre au paiement des rede-
vances postérieures à cette dale,et
de le condamner à des dommages-
intérêts pour le préjudice qu il a
par son attitude causé à celui
qui avait traité avec lui. P. 349.
(V. Confiscation^ Motifs des «r-
rêtSi Société des auteurs,compo-
siteurs et éditeurs de fnusique^
Théâtre, Tribunal correctionnel,)
E
EDITEUR. (V. Dommages-inié'
rets,)
EMPLOI NOUVEAU. Est
nul le brevet qui ne contient que
l'application sans combinaisoii
r'^rr^^'^'
— 371 —
nouvelle d'un moyen déjà connu,
pour l'obtention d'un pésollal in-
dustriel que ce moyen avait pu
procurer, et est par suite dépourvu
de ridée créatrice qui caractérise
l'invention. — Ne fait pas une
invention brevetable celui qui sans
indiquer de modifications parti-
culières se borne à appliquer un
procédé connu en faisant appel à
l'habileté de l'ouvrier en vue de
sa bonne exécution ; spéciale-
ment, étant connu pour empêcher
les fentes des plafonds rusage
d'une toile interposée entre la
couche de dégrossissage et celle
de fini, ne saurait constituer une
invention brevetable, l'indication
qu'il convient de procéder au fini
du plafond à l'aide d'une couche
de plâtre très mince ne couvrant
que superficiellement la toile,
sans indication des moyens de
réaliser ce résultat. P. '207.
SPECTACEiES. (W. Exécution
rmisicale illicite^ Publicité, So-
ciété des auteurs, compositeurs et
éditeurs de musique.)
£RR£UR SUR LiE:8 QUA.
IMITÉS SUBSTAI¥TIE:Li.
MJES, La croyance h la validité
d'un brevetp en réalité frappé de
déchéance, peut constituer une er-
reur sur les qualités substantiel-
les, si, lors de la convention dont
ce brevet est l'objet, les parties ont
eo spécialement en vue sa vali-
dité ; si Ton doit admettre que,
un brevet même frappé de dé-
chéance, tant que celle-ci n'est pas
judiciairement prononcée, peut
permettre au breveté de concéder
des licences valables, et que le,
licencié n'est pas recevable à pro-
poser en justice la nullité ou la
déchéance d-an brevet, tant qu'il
en relire des avantages matériels
appréciables, parce qu'il est en
c^uelque sorte associé à l'exploita-
tion de l'invention et que les bé-
néfices qu'il en retire font que,
n'ayant pas d'intérêt, il n'a pas
d'action, il en est autrement lors-
qu'il s'agit d'une convention d'une
nature spéciale ne pouvant avoir
d'objet, et ne pouvant procurer
d'avantages, qu'autant que le bre-
vet considéré avait non seulement
une existence de fait, mais une
Taleur légale. Dans ces condi-
tions, même en l'absence de dol
ou de faute lourde équipollente,
l'erreur sur la validité du brevet
vicie le consentement des parties
et entraîne la nullité de la con-
vention. P. 221.
ESP ACTIVE. Ordonnance du 7 no-
vembre 1899 relative aux marques
consistant dans les attributs de
l'association de la croix rouge. P.
16. — Marques obligatoires pour
certaines marchandises. P. 16.
(V. France.)
ESSAIS. (V. Divulgation^ Posses-
sion personnelle. Publicité (bre-
vet).)
ÉTATS-UIVIS. Brevets d'in-
vention. P. 16.— Loi de l'Etat de
New- York concernant les annon-
ces frauduleuses. P. 17. — Loi
du ^ février 1899 modifiant la
section 4896 des statuts revisés en
ce c(ui concerne la demande et la
délivrance des brevets en faveur
des inventeurs Frappés de démence.
P. 47. — Loi du 22 mai 1899 de
l'Etat de New- York amendant le
Code pénal en matière de droit
d'auteur. P. 48.
(V. Cuba.)
EXÊCUTIOIV MUSICAI^E
ILXilClTE. Les propriétaires
ou principaux locataires d'un im-
meuble qui le louent à la journée
pour des réunions publiques ou
privées, ne sont ni directeurs ni
entrepreneurs de spectacles : ils
ne peuvent être, devant les tribu-
naux civils, responsables d'une
exécution musicale illicite qui au-
rait eu lieu dans leur local que si
on peut établir à leur charge une
faute dans les termes de l'arti-
cle 1382 du Code civil. — La dé-
fense à eux adressée par la Société
des auteurs et compositeurs de
musique, défense d'exécuter ou
de laisser exécuter chez eux au-
cune des œuvres composant son
répertoire, est sans valeur et sans
effet, les dits propriétaires ou lo-
cataires n'étant ni directeurs ni
entrepreneurs de spectacles ; au-
cune faute ne peut leur être re-
prochée s'ils ont avisé la société
des réunions projetées chez eux
et invité leurs sous-locataires h se
mettre en règle avec ladite so-
ciété. — La mise en interdit de
leur local, et la signification faite
à des tiers par la même société
— 372 —
qu*elle ne laisse exécuter chez eux
aucune œuvre de son répertoire,
est un acte abusif et qui ouvre
une action en dommages-intérêts.
P. 68. — Ne peut être considéré
ni comme auteur ni comme com-
plice du délit d'exécution musicale
illicite, le cafetier qui prête gra-
tuitement une de ses salles à un
musicien et reste absolument
étranger a ror|[anisation du bal
installé chez lui, sans participer
au choix des morceaux exécutés,
et sans |X)uvoir même prévoir ceux
Îui seraient exécutés illicitement.
. 74. — Le cafetier qui met une
partie de ses locaux à la disposi-
tion d'amateurs, en vue de réu-
nions publiques et sans aliéner
aucun de ses droits sur les locaux
en question, fournit à ces ama-
teurs le moyen de donner des
concerts publics et se rend com-
plice du délit d'exécution musicale
illicite qui peut être ainsi commis
chez lui. P. 76.
{W, Instruments de musique méca-
niques.)
EXPERT. Les experts appe-
lés aux débats pour rendre compte
de leurs opérations ou pour don-
ner des explications doivent, à
peine de nullité, prêter le serment
de l'article 155 du Code d'instruc-
tion criminelle, sauf à prêter de
nouveau le serment de Tarticle 44
du môme Code si le tribunal cor-
rectionnel ou la cour d'appel les
chargent de procéder à une nou-
velle expertise. P. 318.
EXPLiOlTATlOIV. (V. Domma-
ges-in lérêts , Prop riél é. )
FlNLiAIVDE. Décret du 21 jan-
vier 1898 de Sa Majesté impériale
concernant les privilèges d'inven-
tion et la procédure juciiciaire dans
les affaires relatives à ces privi-
lèges. P. 49. — Déclaration sou-
veraine de Sa Majesté Impériale du
21 janvier 1898 concernant les pri-
vilèges d'invention. P. 52.
FONDS DE COMMERCE. A
défaut de convention spéciale, la
vente du fonds de commerce ne
comprend pas l'adresse télégra-
Shique constituée par le nom même
u cédant, alors surtout que le cé-
dant s'est réservé le droit de con-
tinuer pour son compte une partiV
des affaires,notamment les affaires
d'importation pour lesquelles son
emploi devait lui faciliter ses re-
lations avec les pays extra-euro-
péens. P. 235.
FORMES ET PROPOR-
TIOIVS. La production d'un ré-
sultat industriel nouveau est bre-
vetable, alors même qu'elle ne«ie-
rait due qu'à une combinaison
nouvelle dans les formes et pro-
portions d'objets déjà connus. ~
Par suite ne peut être déclaré nul
le brevet pris pour la fabrication
de briques creuses en porcelaine oa
matières similaires, sous le pré-
texte que la fabrication par oonlage
d'objets creux en porcelaine est
pratiquée depuis longtemps,si tout
en employant un procédé tombé
dans le domaine public nnveniear
prétendu est parvenu, à l'aide de
combinaisons nouvelles dans les
formes et proportions, à créer an
produit industriel nouveau et la
décision judiciaire qui, sans faire
cette recherche, déclare nul un tel
brevet portant sur une inven-
tion tombée dans le domaine pu-
. blic manque de base légale. P.
356.
(V. Application nouvelle.)
FRAIVCE. Convention avec la
Belgique sur la compétence judi-
ciaire, l'autorité et l'exécution des
décisions judiciaires. P. 6. — Con-
vention avec l'Allemagne, la Bel-
gique et les Pays-Bas, pour la pro*
tection réciproque des marques en
Chine. P. 6. — Convention avec
la Grande-Bretagne pour la protec-
tion réciproque des marques en
Corée. P. 7. — Convention avec
l'Equateur pour la garantie de la
propriété littéraire et artistiqoe.
P. 7. — Convention avec T Autri-
che-Hongrie pour la protection ré-
ciproque des marques an Maroc.
p. 8. — Convention avec la Répu-
blique d'Uruguay. P. 8. — Circu-
laire du ministre du commerce
du 18 janvier 1898 concernant les
récépissés de versement des pre-
mières annuités des brevets. P. SI.
— Loi du 1"' février 1899, indica-
tion obligatoire d'origine des vins
étrangers. P. 23. — Circulaire de
la Direction générale des douanes
du 6 février 1899. P. 23. — Loi do
30 décembre 1899 relative à la pro-
«?»!Wr™»'WJ^p^!WT?«?^!*!=T'ffTBPr''!*^!^
tection de la propriélé inJuslrlelle
pour [esobJeUaiImiȈ l'exposition
nniverselle de 1900. P. 2ô. — Ar-
rêta da 30 décembre ISgOrelatirà
la publicatJOD des d«<sins et des-
uriplïons des brevets d'inventioD.
P. 27.
GRAnmE-BRBrrAONE. bi^
rets d'Invention. P. 17. — Mar-
ques de m archaadj ses. P. 17. —
Eiposilion de Paris. P. 17.
(V. France.)
GUATEMALA. Loi do 12 mai
iSHS concerna Dt l'en registre ment
des marques de fabrique, de com-
merce el d'indnstrie, P. 61.
salle publique el à la di
musique dit a l'Automali
les sons peuvent être i
mant.per; us par plusieun
iBclea. — It est responsat
lemenl de l'exécullon i
illicite Taile au moyen de
trament nior» même qii
serait pas propriétaire,
n marche
par une des personnes
le public et qu'il n
pas de l'argent vers
que audition. P. 84.
(V. Exéculion music
it pr
lie I
RVTERVEIVTIOIV FOI
L'intervention forcée n'e
vabte en cause d'appel q<
contre de la partie qui a
droit de former tierce-op
opposition n'est admis^iblf
la part d'un tiers à qui
pourrait prëjudicier, ou ï
tre de qui 1 arrêt à intervi
rait de nature à constit
préjugé. P. 196.
I
lIMITATIOnr FRAUDU-
LEUSE. It yaiiniialion d'une
marque i:onsiatant dans la déno-
mination Robert inscrite en gros
caractËres sur le couvercle de
bottes de forme oblongue, et por-
t:int à leur face latérale deux car-
touches avec les mots en langue
française et anglaise Sardines à
Vhuite et Sardinm in nil. et sur
chaque coin la lettre R, dans le
fait d'employer des boites de
même forme, portant le nom de
Norbert en caractères identiques
el présentant les mêmes mentions
Sardines à rhuile el Sardines
tn oil, à la même place, et dans
les coins les lettres K et S rap-
prochées de façon k offrir par
leur réunion l'aspect d'une lettre
unique rappelant l'initiale R. P.
253.
(V. Tribunai correclioJtnel.)
■NSTRUIHBIVT DE IHUSl-
aUE MÉCANIttUE. Le ca-
fetier qui installe chez lui dans sa
JAPON. Loi sur les brève
venlion dn 2 mars 1899.
— Loi sur les dessins el i
industriels du 2 man 18'IQ.
— Loi sur les marques de ti
et de commerce du 2 mar
P. 125. - Loi SI
I. P. 13
Priiteclion inti
nale des droits des aute
18. — Protection des marqi
LEGISLATIONS II
ttlEVUES. {\ .Allemagi.
tilles anglaises, Argentine
blique), Aulriche-llonqrie,
Bulgarie, Canada, Chili, i
bie, Cuba, Danemark, Ei
Elals-Vnis, Finlande, 1
T^'
— 374 —
Grande Bretagne , Guatemala ,
Guernetey, Honduras^ Hongrie,
Japon , Jersey , Luxembourg ,
Norwège, Orange, Portugal, Sud
africaine (Hépublique), Bussie,
Suède, Suisse, Venezuela, Zulu-
land.)
L.BTTRB MI881VB. Ne cons-
titue pas antériorité Tindication
d'un appareil dans une lettre mis-
sive si la description n'était pas
suffisamment claire, dans l'état
des connaissances à cette époque
f»our permettre la fabrication de
'appareil sans un effort considé-
rable d'invention de la part du
lecteur. — Une lettre missive ne
crée pas d'ailleurs la publicité,
étant de sa nature toute secrète,
mais la publicité peut résulter des
faits qui y sont rapportés par les-
quels elle constitue un témoignage
irrécusable. P. 164.
(V. Reproduction (droit rfe), Ré-
ponse {droit de),)
LiICEIVCB . (V. Erreur sur les
qualités substantielles. Dommages-
intérêts,)
LiI^LBIMBOURG . Loi sur le
droit d'auteur du 10 mai 1898. P.
138.
M
MADÈRB. (V. Ai^angement de
Madrid.)
MAROC. (V. France,)
MARaUBS DBFABRiaUB.
Une société française, cessionnaire
du droit de fabriquer un produit
inventé par un Allemand, a le
droit de par la loi du 23 juin 1857,
de faire protéger en France la
marque affectée à ce produit, sans
qu'il y ait à examiner si cette
marque est protégée ou non en
Allemagne. P. 271. —Toute dési-
gnation pouvant servir à indivi-
dualiser le produit d'une industrie,
est protégée par la loi de 1857, à
la condition que cette dénomina-
tion soit susceptible d'une appro-
priation privative et ne soit pas
tombée dans le domaine public
avant le dépôt légal. P. 282. —
La désignation d'un produit bre-
veté ne tombe pas dans le domaine
public par le fait seul de la dé-
chéance du brevet, lorsque cette
dénomination n'est point l'élément
générique et nécessaire de la dé-
signation du produit et quelle est
au contraire arbitraire et de fan-
taisie. P. 293.
(V. Dépôt, Dommages-intérêts,
Imitation frauduleuse. Nom pa-
tronymique, Produit pharmaceu-
tique. Remède secret^ Usurpa-
tion.)
MBDAILJLfBS. Contrevient aux
dispositions de la loi du 30 avril
188i6, le négociant qui fait figurer
sur des étiquettes apposées sur un
produit un certain nombre de
médailles, sans qu'il soit fait men-
tion de leur date, de leur nature
et de rexposition ou du concours
où elles ont été obtenues, alors
surtout qu'en fait, ce négociant
n'a jamais obtenu de récompenses
dans les concours pour le prodoit
sur lequel étaient apposées lesJites
étiquettes. P. 212.
MIIV18TÈRE PUBUC. Lors-
que la décision attaquée concerne
exclusivement les intérêts de la
partie civile et ne touche en rien
à l'ordre public, le ministère pu-
blic est sans qualité pour proposer
contre elle, et d'office, des moyens
de cassation. P. 228.
MISB BJNf UVTERDIT. (V.
Exécution ynusicale illicite. So-
ciété des auteurs, compositeurs. et
éditeurs de musique.)
MOIVTEIVBGRO.(V. Convention
d'union de 1886.)
MOTIFS DBS ARRÊTS. Est
suffisamment motivé l'arrêt qni
ayant à statuer sur des conclusions
d'appel contenant une demande
d'allocation supérieure de dom-
maRes-intéréts, et d'insertion de
la décision à intervenir dans |>lc-
sieurs journaux aux frais de Tio-
timé et à titre de supplément de
dommages-intérêts, s>st borné à
déclarer que les premiers juges
avaient fait une saine appréciation
du préjudice causé à la partie de-
manderesse et à débouter celle-c;
de ses fins, moyens et conclusions
prises de ce chef. P. 114. — La
non-existence entre les main? de
contrefacteur des objets jugés con-
trefaits pouvant seule justifier >
défaut de confiscation, est insufli-
samment motivé l'arrêt qui ce
— 375 —
prononçant pas la confiscation des
objets contrefaits omet de mention-
ner la disparition et n'indique pas
qa'il en a été tenu compte dans
l'allocation des dommages et inté-
rêts. P. 333.
nr
IVOM COMMERClALi. Le
propriétaire d'un fonds de com-
merce de chapellerie, comprenant
à la fois le commerce de détail, et
le commerce de gros, de chapeaux
français et de chapeaux de pro-
venance étrangère qui cède a un
acquéreur avec le nom et la mar-
que de sa maison, une partie de
son commerce en s'en réservant
spécialement l'autre partie (impor-
tation et vente en gros de tous
les articles extra-européens, fabri-
cation des feutres et fournitures
de chapellerie), conserve le droit
d'exercer sous son nom le com-
merce qu'il s'est réservé à condi-
tion de ne pas créer une concur-
rence à son acquéreur dans la
branche faisant l'objet de la ces-
sion. — Mais il appartient aux
tribunaux d'ordonner les mesures
nécessaires pour éviter toute con-
fusion et distinguer les deux mai<
sons d'une façon non équivoque ;
notamment de décider que le cé-
dant devra, dans son commerce,
faire précéder son nom patrony-
mique de son prénom écrit en
caractères semblables et égaux à
ceux de son nom, le faire suivre
du nom de ses associés et ajouter
enfin la mention de la branche
de commerce spéciale qu'il s'est
réservée, telle qu'elle figure dans
le contrat de vente : par contre,
on ne saurait obliger le cédant à
faire suivre son nom du mot a mai-.
son fondée en 1895 » date du con-
trat, du moment qu'il est cons-
tant que le commerce qu'il s'est
r^ervé remonte à une date bien
antérieure. P. 236.
nrOMS DE L.OCAL.1TÉ. Les
noms de lieux sont dans le do-
maine public en ce sens que l'u-
sage commercial en est permis
à tous pour indiGjuer la provenance
des produits qui en sont réelle-
ment tirés. — il importe peu qu*un
nom ait cessé de constituer la qua-
lification officielle d'une circons-
cription administrative, s'il a con-
tinué à servir, dans le langage
usuel, à désigner la région. — Spé-
cialement le nom d'Orezza, bien
qu'il ait été remplacé dans l'usage
officiel par celui de Piedicroce,
continue à constituer une indica-
tion de provenance dépendant du
domaine public et non susceptible
d'appropriation. P. 258.
(V. Arrangements de Madrid),
IVOM PATKOIVYMiaUB.
Ne peut revendiquer à titre de
marque de fabrique une dénomi-
nation comprenant un nom patro-
nymique, telle que Vin Duflot,
le tiers qui fonde son droit sur
une convention par laquelle Tu-
sage de ce nom lui a été cédé, si
la convention a trait à un remède
secret, car une telle convention
est nulle. P. 268.
NORVÈGE. Loi apportant des
modifications ou adjonctions à la
loi sur les marques de fabrique
et de commerce du 26 mai 188i
(du 31 mai 1900) . P. 144.
O
OKAIVGE. Propriété industrielle.
P. 19.
OUVRIERS. (V. Concurrence
déloyale^ Possession antérieure,)
PAPIER CYANO FER. (V.
Dénominalion.)
PAYS-BAS. (V. France.)
PERFECTi;OIirnrEIMEIVT.
L'auteur d'un perfectionnement à
une invention brevetée, ne peut
en tirer parti sans violer le droit
du breveté et commettre une con-
trefaçon. P. 196.
PHARMACIE. N'est pas nulle
la cession d'une officine'à un non-
pharmacien, si elle est rétrocédée
à un pharmacien. P. 261.
PLAGIAT. Âpprécie]^sooverai-
nemeiit les faits de la cause, l'ar-
rêt de la Cour d'appel quî,tcons-
tate que si pour composer les
couplets d'une féerie, des em-
prunts ont été faits à des stances
r.
î
À
»^
— 376 —
antérieures et des vers ont été
littéralement copiés, il n*y a pas
contrefaçon parce que l'œuvre an-
térieure est devenue méconnais-
sable, et la confusion entre les
deux œuvres (stances etcoui>let8)
n'est ni possible ni admissible.
P. 9o»
(V. Contrefaçon.)
PORTUGAIS. Loi concernant la
Jaranlie des titres de propriété in-
ustrielle et commerciale. P. 19.
POURSUITB IVOÏV JUSTI-
FIBB. (V. Tribunal correction'
nel,)
POURVOI EN CASSATlOrV
11 ne peut être fait état par la
Cour de cassation d'un mémoire
non timbré déposé par la partie
civile demanaeresse en même
temps que son pourvoi, toutes les
pièces produites à l'appui de la
requête en cassation devant aux
termes de l'article 24 de la loi du
13 brumaire an VU être écrites
sur papier timbré. — Aux termes
de l'article 424 du Gode d'instruc-
tion criminelle la partie civile ne
S eut soumettre à la Cour aucun
ocumeut, même sur timbre, sans
la garantie du ministère d'un avo-
cat à la Cour de cassation. P.
228.
POUVOIR DBS TRIBU-
IVAUX. Il Y a lieu d'écarter les
conclusions d un défendeur pour-
suivi en contrefaçon, tendant à
faire déclarer dans quelles condi-
tions il pourrait continuer, sans
commettre de contrefaçon, la fa-
brication du produit incriminé
car il n'appartient pas aux tribu-
naux de donner aux parties une
sorte de consultation sur l'éten-
due de leurs droits et de préjuger
ainsi des difficultés qui pourront
naître dans l'avenir. P. 196.
(V. Bonne foi. Nom commercial.)
P08SB88I0IV ANTBRIBU-
RB. Une possession antérieure
ne peut constituer un droit au pro-
fit oe celui qui s'en prévaut si elle
a un caractère frauduleux, notam-
ment si elle n'a été obtenue qu'en
détournant un ancien ouvrier bre-
veté au courant de la fabrication
au moyenM'appointementset avan-
tages exceptionnels. P. 10^. —
L'exception de possession person
nelle invoquée par un préTenu de
contrefaçon doit être rejetée dès
lors qu'il est établi que celai qui
en excipe ne s'est livré qii*â des
essais avec lesquels il n'est arrivé
à aucun résultat industriel et qnll
n'a pas appliqués, même pour les
besoins de son industrie ; qu'il
n'est pas sorti de la période des
tâtonnements et n'a entrevu que
de loin la découverte que le brevet
a fait entrer plus tard dans le do-
maine de la pratique.
PROCBDÉ. Est brevetable le
procédé de préparation industrielle
des carbures aes métaux alcaline-
terreux consistant à chauffer à
l'aide d'un four électrique jusqu'à
la fusion un mélange des corps
composants dans des proportions
déterminéeH. P. 326.
PROCBDURB. (V. Pouvoirg de
tribunaux, significalion des Juge-
ments).
PRODUIT NOUVEAU. Cons-
titue un produit nouveau breveta-
ble, l'oxvde d'antimoine presaue
pur et soluble répondant a la tat-
mule Sb*0', alors que ce corps
n'avait pas été, jusqu'à la prise au
brevet, obtenu industriellement et
un oxyde d'antimoine soluble, ré-
pondant à la même formule, même
de couleur un peu plus foncée et
contenant plus d'impureté (arse-
nic) en est la contrefaçon. P. 106.
— Constitue un produit industriel
nouveau le carbure de calcium
CaC* caractérisé par sa fluidité à
la température à laquelle il se
forme ; cristallisé après fusion se
présentant alors sous l'aspect d'une
masse compacte, solide, homogène
et presque exclusivement consti-
tuée par du carbure de calcium,
CaC, alors qu'antérieurement on
connaissait seulement sous le nom
de carbure de calcium, un produit
fîriable, amorphe, non cristallisé
contenant non seulement du car-
bure de calcium, mais du carbone
et d'autres corps. P. 326.
(V. Dénomination.)
PRODUITS PHARMACEU-
TiaUBS. Si nul produit phar-
maceutique ne peut être breveté,
la fabrication d'un prodoit de
même nature peut faire, au con-
traire, l'objet d'un droit privatif
et son titre seul être déposé uti-
r«— ^-'
^ «s ,
- 377 —
lement. P. 271. — La dénomina-
tion choisie pour désigner le pro-
duit pharmaceutique, à la diffé-
rence de tout autre produit, doit
être une dénomination de fantaisie
et non pas une marque usuelle et
nécessaire, capable de révéler, par
son seul énoncé, soit la nature
particulière, soit la vertu propre
et médicale du produit déposé. —
La dénomination antipy^rine ne
peut constituer une marque de fa*
Dric|i]e parce qu'elle est un simple
dérivé de Tadjectif anti^rétique^
usité depuis près d*un siècle pour
désigner le caractère ^es substan-
ces fébrifuges, qu'elle a été choi-
sie par l'inventeur du prodoit pour
remplacer, dans les besoins de la
pratique, le nom purement scien-
tifique de diméthyloxyquinizine^
qu'elle est entrée, d'emblée, dans
le Yocabulalre des médecins et des
pharmaciens et a été universelle-
ment adoptée par les malades même
les moins intellectuels. P. 271.
PmiVClPAL. L.OCATA1RB.
(V. Exécution musicale illicile),
PROPRlÉTAllUE. {W. Exécu-
tion musicale illicite.)
PROPRIÉTB ARTISTiaUK.
(V. Citation^ Contrefaçon, Dom-
mages-inléréls. Editeur P^lagiat) .
PROPRIÉTÉ UTTÉRAIRB.
(V. Confiscation, Lettre missive,
Beproduction (droit de). Réponse
(droit de.)
|>ROPRlÉTE (BRETVBT ) .
. Les découvertes constituent une
propriété personnelle que Ttnven-
tear conserve tant qu'il ne Ta pas
formellement aliénée ; dès lors, à
moins de convention contraire,
l'associé c|ai, par suite des travaux
que lui imposaient ces fonctions
sociales, fait une découverte et
prend un brevet, est présumé faire
apport à la société du droit d'ex-
ploitation, mais il conserve la pro-
priété du brevet, alors surtout que
depuis la dissolution de la société,
l'inventeur a seul payé les annui-
tés et conservé sans réclamations
entre ses mains le titre du brevet.
P. 102.
P17BL.IC1TB (BXBCUTIOIV
MUSIC AL.B) . L'article 428 du
Gode pénal punissant d'une amen-
de et s'il y a lieu de la confisca-
tion des recettes, tout directeur,
tout entrepreneur de spectacles,
toute association d'artistes qui au-
ra fait représenter sur son théâtre
des ouvrages dramatiques au mé-
pris des lois et règlements sur la
propriété des auteurs, il importe
peu, pour l'application de cet ar-
ticle, que la représentation ait eu
lieu ou non sur un théâtre public
proprement dit ou qu'elle ait été
gratuite, il suffit qu'il y ait eu
même accidentellement exécution
publique sans le consentement des
auteurs ou^ de leurs ayants droit
d'œuvres littéraires ou musicale,
non tombées dans le domaine pu-
blic. P. 232.
(V. Cour de cassation.)
PUBL.IC1TÉ (BRBVBT). Le
mot publicité ne saurait avoir un
autre sens dans la loi particulière
des brevets, que celui qui lui ap-
partient par sa signification même
qui est de signifier « fait, répandu
ou livré au public ». La loi de
1844, loin de restreindre le sens
du mot publicité, y ajoute, pour
Eouvoir rejeter la prétention du
reveté, la condition que la publi-
cité'ait été de nature telle qu'elle
ait suffi pour l'exécution de l'in-
vention ; ne répond pas à cette
condition la seule existence dans
une usine étrangère, d'une ma-
chine similaire à la machine bre-
vetée, résultat du perfectionne-
ment par les ingénieurs ou ou-
vriers de l'usine d'une machine
antérieure, alors que l'usine ne se
livre pas à la fabrication de ces ma-
chines, mais se borne à les utiliser
dans la fabrication de ses pro-
doits : qu'il n'est pas produit un
seul document pour établir qu'en
fîEiit la machine a été connue d'un
ingénieur, d'un constructeur ou
d'un homme du métier, et, ^ue
l'eiistence de cette machine amsi
perfectionnée, publiquement con-
nue au dire du constructeur de la
machine sus-énoncée, a été décou-
verte, en fait, non par ce construc-
teur lui-même, mais par l'acqué-
reur de ladite machine. P. 164. —
Constitue la publicité destructive
de la nouveauté de l'invention le
feit par l'inventeur, avant la prise
de son brevet d'avoir passé et exé-
cuté des marchés importants pour
la fourniture du produit inventé,
de telles opérations ne peuvent
être considérées comme un simple
essai fait dans l'intérêt de l'inven-
teur. P. 366.
•Mil '■wM""itip.%^^;'k.9 m.' MA^tilUlUp
— 378 —
ReCELi. L*armateur, qui a gardé
Srovisoirement dans ses magasins
es marchandises reçues pour être
expédiées à Tétrangcr, ne peut
dans le cas où ces marchandises
ont été saisies, sans opposition de
sa part, par un tiers prétendant
qu'elles étaient la contrefaçon de
produits pour lesquels il était bre-
veté, être considéré comme rece-
leur et condamné comme tel, alors
que les juges du fond, par une
appréciation souveraine des faits
de la cause et de la correspondance
des parties, ont constaté sa bonne
foi. P. 246.
KEMÈDES SBCKBTS . Le
droit à la marque est indépendant
de Tusage qu'on en peut faire :
ainsi, celui qui a acquis la pro-
priété d'une marque peut en pour-
suivre les contrefacteurs, alors
même que les produits auxquels
elle s'applique seraient des remè-
des secrets. — En conséquence,
une cession de marque de fabrique
ne peut être déclarée nulle comme
s'appliquant à des remèdes secrets
et il n'y a pas lieu de rechercher
si tel est le caractère du produit
sur lequel repose la marque. P.
260. — Est un remède secret toute
préparation ayant un caractère
médicinal à moins qu'elle ne figure
au Codex ou qu'elle n'ait été ac-
quise ou publiée par le Gouverne-
ment, ou qu'elle n'ait été insérée
dans le Bulletin de l'Académie de
médecine. P. 268. — La propriété
d'une marque légalement établie
confère un droit absolu, indépen-
damment de l'usage qui peut en
être fait, et donne au déposant le
droit de poursuivre tout contre*
facteur ; il en est ainsi alors même
que le produit auquel est appliqué
la marque pourrait être considéré
comme un remède secret, cette
circonstance n'étant pas de nature
à. légitimer les cas d'usurpation
vis-à-vis du propriétaire de la
marque. P. 282.
KÉMIIVlSCBIirCB. (V. Confre-
façon,)
REPOIVSE (DROIT DE).
L'exercice du droit de réponse,
dans les termes de l'article 18 de
la loi de 1881, n'entraîne point
l'aliénation du droit de propriété
en ce sens que, s'il consacre, au
proHt de rintéreasé, le droit d'être
publié et imprimé malgré son con-
tradicteur, il n'implique poini, la
polémique une fois close, l'obliga-
tion, pour l'une ou l'autre des par-
ties, d'être, contre son gré, im-
primée et publiée à nouveau.
REPRODC7CTIOIV (DROIT
DE). Les lettres missives publiées
par un journal, en réponse à des
articles parus dans ce même jour-
nal, ne perdent point, par cette
publication, leur caractère d'œo-
vre littéraire personnelle, suscep-
tible de propriété privée, et le di-
recteur de ce journal qui les
reproduit ensuite dans une bro-
chure, sans nécessité dér: entrée,
ni autorisation préalable, porte
atteinte à cotte propriété et peut
être condamné, de ce chef, à des
dommages-intérêts envers leur au-
teur. — On ne saurait arguer do
droit de citation pour justiGer la
reproduction, dans ces conditions,
de lettres entières. P. 246.
(V. Réponse {droit de),)
RESPOIVSABIL.ITÉ. (V. Exé-
cution musicale ilticite, Inslru-
menls de musique mécanique.)
RUSSIE. Brevets d'invention.
P. 19.
SAISlfe DES RECETTES
D'UIVE REPRÉSEIVTA-
TIOIV THÉATRAIf. (V.
Thédt7^e.)
SAISIE (MARaUBS). U sai-
sie qui n'est suivie, dans le délai
de l'article 18 de la loi du t23 juin
1857, que d'une assignation devant
le tribunal correctionnel adressée
à une société commerciale, par
conséquent nulle, est nulle elle-
même et le tribunal ne peut atta-
cher aucune importance aux faits
et constatations qu'elle a relatés.
P. 312.
SBRMBIVT. (V. Expert,)
SIGIVIFICATIOIV DES JV-
GEMEIVTS. La disposition de
l'art. 187 C. d'inst. crim. aux ter-
mes de laquelle, si la signification
n'a pas été faite à personne, et s'il
ne résulte pas d'acte d'exécution
•tTfsan
— 379 —
da jagement qne le prévenu en a
eu connaissance, l'opposition est
recevabie jusqu'à l'expiration des
délais de prescription de la peine,
n'a trait qu'à l'exécution de la
peine. En dehors de ce cas, la si-
gnification k domicile conserve
tons ses effets légaux ; elle conti-
nue donc de faire courir le délai
de ropposilinn^ en ce qui concerne
la condamnation aux dommages-
intérêts prononcés au profit de la
partie civile. P. 861.
80CI ÉTÉ COMMBRCI /k-
LE. Une société commerciale est
un être moral qui ne saurait ré-
pondre pénalement d'un délit et
ne peut, par conséquent, être va-
lablement assigné au correctionnel
comme pénalement responsable.
P. 312.
SOCIÉTÉ DBS AUTEURS,
COMPOSITEURS ET
ÉDITEURS DE MUSI-
QUE. La Société des auteurs et
compositeurs dramatiques n'est
pas un simple agent d'affaires ou
mandataire, chargé de faire res-
pecter les droits des auteurs et
de percevoir leurs recettes ; elle
peut passer avec les tiers des trai-
tés valables, et les membres de la
commission de la société ont le
droit d'ester en justice pour faire
exécuter ces traités, dans lesquels
ils ont d'ailleurs un intérêt per-
sonnel. P. 88. — C'est à non
droit que la Cour d'appel a con-
sidéré comme constituant une
faute et un abus de la part de la
Société des auteurs, compositeurs
et éditeurs de muslaue, du droit
d'accorder ou de reiuser l'autori-
sation d'exécuter les œuvres qui
leur appartiennent, le fait d'avoir
cherché à imposer au propriétaire
d'une salle qui la loue pour des
réunions publiques un contrat
d'abonnement, sur la menace de
mettre la salle en interdit, et
d'avoir, sur son refus de subir
l'abonnement, exécuté cette me-
nace en signifiant aux tiers l'in-
terdit mis sur la salle, et qu'elle a
condamné les auteurs de ce fait à
des domma^^es et intérêts envers
le propriétaire de la salle. P. 230.
— Ne viole aucune loi l'arrêt
qui, après avoir constaté que les
entrepreneurs de spectacles, loin
d'avoir voulu se passer de l'auto-
risation de la Société des au-
teurs, compositeurs et éditeurs de
musique, se sont conformés au
mode habituellement usité pour
la demander, l'ont informée de la
réunion projetée et lui ont offert
après contrôle de la recette effec-
tuée, les droits fixés par son ta-
rif, et que par suite la société ne
pouvait établir à leur charge au-
cune faute ni aucun préjudice ré-
sultant d'une faute, rejette la de-
mande de dommages et intérêts
formée par elle. P. 230.
ry. Ba-écution musicaie illicite ^
Publicité^ Témoignage,)
SUD AFRICAIIVE (RÉPU-
BLflIlUE). Propriété industrielle.
P. 19.
SUÈDE . Brevets d'invention .
Brevets étrangers, délai de prio-
rité, exploitation. P. 20. — Loi
concernant la protection de cer-
tains desHins et modèles (du
10 juillet 1899). P. 146.
SUISSE. Loi fédérale sur les des-
sins et modèles industriels (du
30 mars lUOO). P. 151.
SYIVDICATS PROFES-
SlOIVrVELfS. Les syndicats
professionnels ont, comme toutes
les sociétés, le droit de se distin-
Suer les uns des autres au moyen
'une dénomination qui appartient
en propre à celui qui a été le pre-
mier à l'adopter. P. 316.
(V. Dénomination,)
TEMOIGIVAGE. L'agent de la
Société des auteurs, compositeurs
éditeurs de musique, cité comme
témoin ne peut être reproché et
doit être entendu dans sa déposi-
tion ; en effet, bien que manda-
taire de ladite société cet agent
n'est pas compris au nombre des
personnes visées dans l'article 156
du Code d'instruction criminelle.
P. 100. — Des attestations et des
témoignages, par eux-mêmes pro-
bants, ne peuvent permettre de
prononcer la nullité d'un brevet,
quand ils trouvent leur contradic-
tion dans une correspondance an-
térieure. P. 160.
THEATRE. Les membres de la
commission de la société des au-
— 880
leurs et compositeurs de musique
en désaccord avec un théâtre sur
le montant des droits à percevoir,
ne peuvent, en vertu d*une ordon-
nance du président du tribunal
civil, faire saisir les recettes de ce
théâtre ; cette saisie n'est, dansces
circonstances, permise ni en vertu
de la loi des 1iM9 janvier 1791, ni
des articles 428 et 429 du Code de
procédure ni d'aucun autre texte
de la loi. P. 90. — Lorsque les
recettes d'une entreprise de spec-
tacjes ont été saisies, puis eontis-
2uées en vertu des articles 428 et
29 du Code pénal, le montant to-
tal de ces recettes peut et doit être
attribué aux auteurs lésés ; mais,
lorsque la saisie n'a pas été opé-
ré<>, les juges du fait ont un pou-
voir souverain pour apprécier le
préjudice éprouvé par le plaignant;
lis peuvent en fixer l'importance
à une somme même inférieure au
produit de la recette ; ils ne peu-
vent en tout cas prononcer une
confiscation non prévue par la loi.
P. 96.
(V. tiociété des auteurs^ éditeurs
et compositeurs de musique,)
CIV1L.9. (V.
Compétence, Pouvoir des tribU'
naux,)
TRIBUNAUX DB COMMER-
CE. (V. Compétence.)
TRIBUIVAUX CORRBC -
TlOIVIVELS. Il ne saurait y
avoir condamnation correction-
nelle pour imitation frauduleuse
de marque lorsqu'aucune confu-
sion n'est possible entre les pro-
duits. P. 298. — Une poursuite
non justifiée devant le tribunal
correctionnel, bien qu'elle ne soit
pas â qualifier de téméraire et
vexatoire, peut donner lieu à des
dommages-intérêts si elle a été,
au moins, légèrement et impru-
demment engagée et s'il y a lieu
de tenir compte du préjudice par-
ticulier que le poursuivi a subi, i
raison de la nature de sa profes-
sion. P. 298.
(V. Société commerciale, Saisie,)
U
UfSfJRPATIOIV DE MAR-
4iCJE8. Le seul fait par un fa-
bricant, autre qHe le propriétaire
de c(>tte marque, d'avoir proposé,
vendu et facturé ses produits sous
le nom de Lessive Phénix ou
Lessive genre Phénix constitue
une usurpation de marque de fa-
brique. P. 291.
URUGUAY. (V. France.)
VEIVEZUELA. Fraudes suri 0-
rigine et la qualité des objets. —
Code pénal de 1897, entré en vi-
gueur le 20 février 1898. P. 158.
ZUliULiAIVD. Propriété indus-
trielle. P. 20.
^'^ëfrr? ' V-Wf ••
TABLE CHRONOLOGIQUE
DES JUGEMENTS ET ARRÊTS
CONÏENDS DA.NS LE TOME XLVII
r> •
1804
22 Mai. T. civ. Seinb. 178
1895
T. CIV. Sbinb, 88
T. CIV. Sbine, 268
T. CI V.Versailles, 163
C. Orléans, 233
T. COMM. Seine, 235
189T
T. av. Seine, 68
T.CIV.RAMBOUILLET,d03
T. CIV. Srinb, 288
T. CIV. Seinb, 185
4898
14 Janv.
28 Dec.
18 Mars.
21 Juillet.
10 Sept,
25 Mai.
2S p
25 Juin.
28 Dec.
6 Janv.
14 »
2 Fév.
8 »
21 Mai.
16 Juin.
27 »
26 Juillet.
26 »
24 Oct.
2 Dec.
7 »
8 »
16 Janv.
20 »
30 »
1" Fév.
20 Mars.
29 »
11 ivril.
2 Mai.
3 ]»
5 Juin.
9 »
28 »
4 Juillet.
8 »
8 »
22 juillet. G. Nancy.
10 Nov. T. CIV. Seine,
22 » C. Paris,
14 Dec. T. CIV. Seine,
14 » C. Amiens^
196
302
235
246
355
Cass. cr. rej.,
97
Cass. civ.
333
T. Veksaillks,
103
C. Paris,
268
C. Bordeaux,
308
T. CIV. Seine,
260
T. CIV. Nancy,
196
T. CIV. Sbinb,
272
C. Paris,
315
Cass. rbj.,
215
C. Amiens,
333
T. CIV. Aix,
292
C. Douai.
204
1899
Cass. civ., 355
T. COMM. Seine, 218
C. Orléans, 74
T. coRR . Cognac, 208
T. COMM. SeiNB, 319
C. Rouen, 282
C. Paris, 260
C. » 68
T. CORR. Lillk, 76
C. DuoN, 207
Cass. civ., H3S
C. Aix, 291
Cass. req., 258
T. CIV. Seine, 293
G. Douai, 76
22 Janv.
25 )»
25 »
29 »
30 »
18 Fév.
13 Mars.
22 »
28 »
9 Avril.
9 »
2 Juin.
20 »
9 Juillet.
10 »
12 »
13 »
18 »
1«' Août.
2 «
6 Nov.
14 »
25 »
30 »
7 Dec.
28 »
10 Janv.
12 »
18 »
21 Fév.
22 »
23 »
27 »
4 Mars.
14 »
15 »
25 »
25 Avril.
23 Mai.
22 Juillet.
293
849
102
308
288
260
280
1900
C. Paris,
T. Epernat,
T. Lille,
Cass. req.,
G. Paris,
Cass.,
C. Paris.
T. coRR. Nevbrs, 212
C. RiOM, 158
Cass. rej., 214
C. Douai, 333
C. Paris 218
C. » 163
T. St-Etibnnb 85
C. Paris, 178
G. » 160
T. CIV. Seine, 326
C. Besançon, • 221
C. Douai, 102
C. Paris, 319
T.cor.St-Girons, 101
G. Lyon, 84
C. Paris, 312
T. CIV. Seine, 244
Cass. cr. rej., 98
C. Paris, 278
i901
C. Paris, 185
Cass. ck., 227
Cass. cr., Hiji
G. Paris, 246
G. » m
Cass. cr., 318
G. Toulouse, 100
Cass. req., 230
G. Paris, 349
Cass. req., 232
Cass. » 229
C. Aix, 253
G. Paris, 24^
Cass. kbq., 25q
'»« «Wi
TABLE DES
Achard. 178 Dalbi
Agosiioi.. 215 Dam.
Andreassion. 68 Deoli
AQieura et composi- 0^^^
(Société des). 90 Drun
àuleurs composileura ny^r,
et éditeurs de musi- n.ifln
que (Société de.), œ ^IJ™
- KO
Auieore lyriques (Soc.
des). ' ^ ' 74 Elle.
_ Eepin
Barbier (Jules).
76
Fabn
Blandy frères.
252
BoUson.
96
Fiégli
Force
hau
(Soi
Foup
Freyd
From
Bcugerolle.
Brooeiière.
Huilier.
1S6
204
158
246
826
C
Froas
ciiiot.
215
Camille.
214
Carbure de calcium
(Société du).
Gaz s
Châlillon.
105
Chemina de fer d'Or-
léans (Comp. des).
819
Gillet
Chedeville.
UB
Girau
ChoudeDs.
99
Grantl
Corabret.
Composileur de mus
i-
que (Soc. aes).
100
ciel
Coustructiona mécani-
Gross
ques (Soc. Touliai
Guillc
sienne des).
' 102
Corvabier. 29B
Couleursd'aDiline(Cie
Gu;ol
parisienne des),
272
Couston.
291
Crié.
Haclo)
Cuivres (Société mé-
ciéli
tatliqne drt).
218
Harm
Paulre. 288
Peawon. 282 Rendï.
Perret (Michel). 185 Riekmanii.
Perriei'. 302 Robin.
Perrin. 3!t Robin Vve.
pharmacie m du d*- Rocher.
partement de la Rogier.
Seine iChambre sjn- Boax.
J"-|-des). 272 Bumean.
258
355 ,
Is l^
^ S^iabeViV
jlS Sancho fr.
^ Savine (faillite).
^ Sichen Ide).
** Siècle (le).
! Union des anciens élè-
! ves des écoles supé-
rieures du com-
i Valen.
S Vieillard.
l Villain.
Walch.
; Willame.
' Wolt.
nsofl.
1 j«K?f^
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