ANNALES
SCIENCE AGRONOMIQUE
FRANĂAISE ET ĂTRANGĂRE
Comité de rédaction des Annales.
RĂ©dacteur en chef :
L. GRANDEAU, directeur de la Station agronomique de l'Est.
Secrétaire de la rédaction :
H. GRANDEAU, sous-directeur de la Station agronomique de l'Est.
U. Gayon, directeur de la Station
agronomique de Bordeaux.
Guinon, directeur de la Station agro-
nomique de ChĂąteauroux.
Margottet, recteur de l'Académie de
Chambéry.
Th. SchlĂŠsing, de l'Institut, professeur
Ă l'Institut national agronomique.
E. Risler, directeur de lâInstitut na-
tional agronomique.
A. Girard, de lâInstitut, professeur au
Conservatoire des arts et métiers.
A. MĂŒntz, professeur Ă l'Institut na-
tional agronomique.
A. Ronna, membre du Conseil supé-
rieur de l'agriculture.
Ed. Henry, professeur Ă lâĂcole na-
tionale forestiĂšre.
E. Reuss, inspecteur des forĂšts Ă
Alger.
Correspondants des Annales pour l'Ă©tranger.
ALLEMAGNE.
L. Ebermayer, professeur Ă l'Univer-
sité de Munich.
J. KĂŽnig, directeur de la Station agro-
nomique de MĂŒnster.
Fr. Nobbe, directeur de la Station
agronomique de Tharand.
Tollens, professeur à l'Université de
GĂŽttingen.
ANGLETERRE.
R. Warington, chimiste du laboratoire
de Rothamsted.
Ed. Kinch, professeur de chimie agri-
cole au collĂšge royal d'agriculture
de Cirencester.
BELGIQUE.
A. Petermann, directeur de la Station
agronomique de Gembloux.
CANADA.
Dr Q. Trudel, Ă Ottava.
ĂCOSSE.
T. Jamieson, directeur de la Station
agronomique d'Aberdeen.
ESPAGNE ET PORTUGAL.
JoĂąo Motta dĂą Prego, Ă Lisbonne.
ĂTATS-UNIS D'AMĂRIQUE.
E. W. Hilgard, professeur Ă l'Univer-
sité de Berkeley (Californie).
HOLLANDE.
A. Mayer, directeur de la Station agro-
nomique de Wageningen.
ITALIE.
A. Cossa, professeur de chimie Ă l'E-
cole d'application des ingĂ©nieurs, Ă
Turin.
NORWĂGE ET SUĂDE.
Zetterlund, directeur de la Station
agronomique d'Orebro.
Dr Al. Atterberg, directeur de la Sta-
tion agronomique et d'essais de se-
mences de Kalmar.
SUISSE.
E. Schultze, directeur, du laboratoire
ssronnnique de lâĂcole polytech-
nique de Zurich.
RUSSIE.
Thoms, directeur de la Station agro-
nomique de Riga.
Nora.â Tous Les ouvrages adressĂ©s franco Ă La RĂ©daction seront annoncĂ©s dans
Le premier fascicule qui paraßtra aprÚs leur arrivée. Il sera, en outre, public
s'il y a lieu, une analyse des ouvrages dont La spécialité rentre dans le cadre
des Annales (chimie, physique, géologie, minéralogie, physiologie végétale et
animale, agriculture, sylviculture, technologie, etc ).
Tout ce qui concerne la rédaction des Annales de la Science agronomique
francaise el Ă©trangĂšre (manuscrits, Ă©preuves, correspondance, etc.) devra Ă©tre
adressé franco à M. Henry Grandeau, «docteur Ús sciences, secrélaire de la
RĂ©daction, 3, quai Vollaire, Ă Paris.
ANNALES
DE LA
SCIENCE AGRONOMIQUE
FRANĂAISE ET EĂTRANGERE
ORGANE
DES STATIONS AGRONOMIQUES ET DES LABORATOIRES AGRICOLES
PUBLIĂES
Sous les auspices du MinistĂšre de l'Agriculture
PAR
OURS LCR AN'D-E AU
DIRECTEUR DE LA STATION AGRONOMIQUE DE L'EST
PROFESSEUR AU CONSERVATOIRE NATIONAL DES ARTS ET MĂTIERS
INSPECTEUR GĂNĂRAL DES STATIONS AGRONOMIQUES
VICE-PRĂSIDENT DE LA SOCIĂTĂ NATIONALE D ENCOURAGEMENT Ă L'AGRICULTURE
MEMBRE DU CONSEIL SUPĂRIEUR DE L'AGRICULTURE
DIXIĂME ANNĂE â 1893
Tome I
Avec figures dans le texte et deux planches
PARES
BERGER - LEVRAULT ET C*, LIBRAIRES - ĂDITEURS
», rue des Beaux-Arts
MĂME MAISON 4 NANCY
1894
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES
SUR
L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT
PAR
L. GRANDEAU et H. BALLACEY
SIXIĂME PARTIE
EXPĂRIENCES DâALIMENTATION AVEC UN MĂLANGE DE FĂVEROLE
ET DE PAILLE D'AVOINE
Les expĂ©riences qui font lâobjet de ce mĂ©moire ont eu pour but
l'étude de la valeur alimentaire de la féverole. Elles continuent la
sĂ©rie des essais exĂ©culĂ©s antĂ©rieurement et qui ont portĂ© dâabord
sur la ration « mélange » de la Compagnie, puis sur le foin seul, sur
lâavoine seule, sur un mĂ©lange dâavoine et de paille d'avoine, enfin
sur le mais consommĂ© dâabord avec de la paille d'avoine, puis avec
de la paille de blé".
On à vu précédemment? que, pour entreprendre avec succÚs
lâĂ©tude dâun aliment concentrĂ© (grain, tourteau), il est nĂ©cessaire de
lui adjoindre un fourrage fibreux destiné à éviter la trop grande
vacuilĂ© de l'intestin. La paille d'avoine a Ă©tĂ© lâadjuvant de la fĂ©verole
dans les expériences présentes.
1. Voir Ătudes expĂ©rimentales sur l'alimentation du cheval de trait, 1°, 2°,
3°, 4° et 5° mémoires. (Annales de la Science agron. franc. el élrang., passim.}
2. Voir Ătudes expĂ©rimentales sur l'alimentation du cheval de trait, 4° mĂ©-
moire.
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893, â 1, 1
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
[Qt
Chevaux d'expérience.
Les trois chevaux qui ont servi à ces essais sont entrés au labora-
toire le 12 novembre 1889. Ce sont :
Cheval n° 1. Age: 10 ans. N° matricule : 34 614, du dépÎt Saint-Martin.
â n°2, â Sans. â 34464, â SĂ©gur.
RTE MT EURE = 990 NN TC PATAGO
La santé des chevaux a été bonne pendant Llout le cours des re-
cherches, qui ont pu ĂȘtre ainsi exĂ©cutĂ©es sans interruplion.
Toutefois le cheval n° 3 a été atteint de diarrhée persistante pen-
dant plusieurs mois. Cet Ă©tat, dont il ne paraissait nullement souffrir,
nâa, d'ailleurs, entravĂ© en rien les essais. En Portugal, oĂč les chevaux
sont alimentés presque exclusivement avec de la féverole pendant
six mois par an, les excréments correspondant à cette alimentation
sont semi-liquides. La persistance de lâĂ©tat du cheval n° 5 nâa donc
rien qui doive Ă©tonner.
RĂ©gime de transition.
Les chevaux ont reçu, à leur entrée au laboratoire, une ration
composée de 9 kilogr. du mélange distribué quotidiennement dans
les dĂ©pĂŽts. Le temps qui sâest Ă©coulĂ© du 13 novembre au 1° dĂ©cembre
a été employé à les faire passer de cette alimentation à celle qu'il
s'agissait dâexpĂ©rimenter.
Voici comment sâest effectuĂ©e cette transition :
MOIS DE NOVEMBRE MĂLANGE. FĂVES. PAILLE.
« Kilogé. Kilogr. Kilogr.
ER ES Er reteo 40 9 » »
1GAUERLS fe 9 0,500 »
19 20e EE Eee 6 1,000 2
PA PR 5 HN Ut ⏠3 2,000 4
23.21 OS TRE 3 3,000 4
27, 28, 29, 30 » 4,500 6
Bien que cette période ait été assez courte, aucun des chevaux
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 3
nâeut Ă en souffrir ; tous trois, au contraire, augmentĂšrent de poids
sous l'influence dâune ration trop forte pour le simple entretien.
Leurs poids respeclifs étaient, le 1°" décembre 1889, premier jour
des expériences : cheval n° 1, 476'6,8 ; cheval n° 2, 475 kilogr. ;
cheval n° 3, 461 kilogr.
Programme des expériences.
Les expĂ©riences ont Ă©tĂ© conduites dâaprĂšs la marche dĂ©jĂ adoptĂ©e
pour les recherches antérieures. Eiles ont comporté trois séries
ainsi réparties :
1'e sĂ©rie. â ExpĂ©riences au manĂšge, au pas. â Chaque cheval
passe successivement, et pendant un mois, par les alternatives de
repos, marche au pas, travail au manÚge au pas. Cette série a occupé
les mois de décembre 1889, janvier et février 1890.
2° sĂ©rie. â ExpĂ©riences au manĂšge, au trot. â Les chevaux se
retrouvent, pendant les mois de mars, avril et mai 1890, dans les
mĂȘmes situations que dans la 1"° sĂ©rie; la marche et le travail ont
lieu Ă lâallure au trot.
3° sĂ©rie. â ExpĂ©riences Ă la voiture. â Les six derniers mois, de
juin Ă novembre 1890 inclusivement, ont Ă©tĂ© consacrĂ©s aux essais Ă
la voiture. Les chevaux y sont au repos, Ă lâentrainement ou au
travail Ă la voiture.
Voici dâailleurs le dĂ©tail des situations de chaque cheval pendant
toute la durée des expériences :
MANĂGE AU PAS MANĂGE AU TROT.
âââ âââ
DĂCEMBRE| JANVIER FĂVRIER MARS AVRIL
1889. 1890. 1890. 1890. 1390.
Cheval n° 1. .| Repos. Marche, | Travail. | Travail. | Repos. Marche.
Cheval n° 2. .| Marche. | Travail. | Repos. Repos. Marche. | Travail.
Cheval n° 3. .| Travail. | Repos. Marche. | Marche. | Travail. Repos.
SE â â
4 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
VOITURE.
JUILLET AOĂT SEPTEMBRE! OCTOBRE |NOVEMBRE
1890. 1890. 1890. 1890. 1390.
Cheval n° 1. .|Entrainement.| Travail. Repos. Repos. Repos. Repos.
Cheval n° 2. .| Repos. Repos. Repos. Repos. | Entrainement.| Travail.
Cheval n° 3. .| Repos. Repos. | Entraßnement.| Travail. Repos. Repos.
Fixation des rations.
En se basant sur les données résultant des expériences précédentes,
les rations furent fixĂ©es ainsi quâil suit :
: PAILLI
FE d'avoine.
Kilogr. Kilogr.
Reposâ... 2-7 2Raton d'entretien nee 4,500 4
1'e série . { Marche. . . . Ration de transport au pas . ,000 4
Travail, . . . Ration de travail au pas . . 6,000 Ă
Les rĂ©sultats de ces trois mois ayant montrĂ© que la ration dâen-
tretien était sensiblement trop forte, elle fut réduite ; la ration de
transport au pas était aussi un peu trop élevée ; elle fut conservée
pour le transport au trot, et les trois rations devinrent :
Rae PAILEE
d'avoine.
Kilogr. Kilogr.
Repos. . . . Ration d'entretien. . . . . 4 Ă
Pere rene . . . Ration de transport au trot . G] Ă
Travail. . . . Ration de travail au trot . . 7 4
Pendant la derniÚre période les chevaux reçurent :
se PAILLE
FĂVES davoe.
Kilogr. Kilogr.
Las Tr Rationientreliens enter 4 4
3° sĂ©rie. . / Entrainement . : : Ă
= , Ration de {ravail . . . . . 8 4
{ Travail. .
Ces quantités ne furent pas toujours intégralement consommées et
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 5
quelquefois, pour permettre la consommation, des restes des jours
précédents, les chevaux ne recevaient qu'une partie de leur ration,
mais dans tous les cas on tint rigoureusement compte des quan-
tités supprimées, et on trouvera plus loin, au chapitre des rations
consommées, les quantilés exactes de féveroles et de paille in-
gérées par chacun des chevaux dans les diverses conditions.
Résultats généraux.
Pa
Sans entrer dans le détail des opérations, rappelons que tous les
malins Ă la mĂȘme heure on prend les poids et les LempĂ©ratures des
chevaux, en mĂȘme temps quâon dĂ©termine les quantitĂ©s exactes de
fÚces et d'urine émises pendant 24 heures. Chaque cheval reçoit,
une heure aprĂšs les repas, de lâeau en quantitĂ© suffisante pour qu'il
boive Ă son grĂ©, mais les quantitĂ©s dâeau bue sont exactement
déterminées.
On trouvera dans les tableaux qui suivent les donnĂ©es relatives Ă
lâeau consommĂ©e et aux fĂšces Ă©mises par les chevaux. Leurs poids
et leurs températures de chaque matin y figurent également. On
trouvera dans un autre chapitre les données relatives à l'urine.
s TABLEAUX.
6 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL NO 1.
REPOS.
(Numéro matricule 34 614.)
EAU BUE totale PO'DS HATRE du RATURE
= ER du con- El Cheval du
Décembre l'à 7 h. à à 6 h. four- sommée es p.100 | totale | à Th. +
du du totale. pas fĂšc:s. des des du du
1889: matin, | midi. soir. is jour. fĂšces. | feces, | Matin.| matin,
> ss
Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Kil. | Degrés
" 5 250 7760 | 13010 | 1 159,2 u 12950 | 29.17] 3567 | 476,8] 38 0
" 5 150 6720 | 11870 " n 10 87 26.70| 2902 | 463,5] 37 8
" 11 900 7 040 | 15 940 1 Ă " 10260 | 28.32| 2906 | 465,3| 37 8
Q 13 060 6 820 | 19 890 " " 11920 | 27.50] 3278 | 467,5] 37 8
" 11050 7 820 18 870 " " 9510 | 24.92] 2370 | 468,7] 33 0
1 400 9 650 9 870 | 20 920 u " 10920 | 25.95| 2834 | 472,0] 37 9
" 8 260 5910 | 14170 1 " 10470 | 25.95| 2717 | 473,5] 37 9
3 050 8 580 7 080 | 18 710 u n 10710 | 25.87] 2771 | 472,6] 37 8
ñ 10 650 4 900 | 15 550 " u 11 27 25.77| 2904 | 470,2| 37 9
" 6 600 9 990 | 16 590 " " 10610 | 28.50] 3024 | 466,4| 37 8
2250 | 11650 4740 | 18620 n n 11440 | 27.45| 3140 | 470,0! 57 9
" 11140 7 590 | 19050 0 " 9 690 | 27.35| 2 650 1 37 9
1 770 6160 | 10020 | 17 950 " u 10 880 | 26.07| 2836 | 472,5| 37 9
H 7 950 8 960 | 16 890 " u 10930 | 26.95| 2869 | 471,7| 38 1
n 10 910 7090 | 18000 n u 11320 | 27.70] 3163 | 471,6! 38 0
Ă 10 530 7590 | 18220 u u 10500 | 27.75| 2914 | 472,1] 37 9
17 " 9 100 8 490 | 17 590 " " 10310 | 28,20! 2907 | 474,2| 38 0
18 2 S00 5 890 | 10150 | 18 840 u " 11450 | 28.85| 3303 | 476,0! 38 0
19 n 11160 5450 | 16610 " " 11070 | 28.35| 313 469,1! 37 9
20 1 590 9 230 5130 | 15 850 " u 10 820 | 27.45] 2970 | 474,0! 37 9
21 " 8 450 8 720 | 17170 " u 10 690 | 28.45| 5041 | 473,0] 58 1
22 980 | 11 600 8 010 | 20 590 " 1 8 690 | 26.607| 2318 | 472,8| 37 9
23 " 8 470 8 330 | 16 800 1 1 10 200 | 27.30| 2735 | 476,0! 35 0
24 " 10 590 4700 | 15 290 1 " 9 690 | 27.30| 2645 | 476,4| 37 9
25 n 12 450 3 840 | 16 290 " " 11 720 | 27.00| 3164 | 472,1| 37 9
26 Ă 7 610 7790 | 15 430 " u 710) 2720510241 475,0] 27 9
27 930 8 740 7 280 | 16950 M " 9 590 | 27.42] 2630 | 477,8| 38 0
| 28 " | 8640! 7060! 15700 | » c 8 350 | 27.37| 29288 | 478,5] 38 0
29 w 5 610 5 140 | 10780 " " 9700 | 27.35| 2653 | 477,4] 38 0
30 620 9 870 5 280 | 15 770 " " 9360 | 28.30| 2647 | 473,5| 55 1
31 () 6 700 | 10360 | 17 060 " " 10630 | 29.07] 3090 | 477,0| 35 0
Moyennes . | » " » [20 162,9] 4159,2| 94 322,4 | 10441 | " |2856,9| 472,7] 37 95
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 7
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 2.
(Numéro matricule 34 464.)
MARCHE. AU PAS.
io EU EURE are tite POIDS & He Ă vtr, TIRE
i #« A re en ÿ Ra des NT LT cheval Fe
Décembre INatT he à à 6h. four- | somméc pe 100 | totale ÿ bg
ar ; F Ă uĂŒ
1889. Pre midi. Fe 5 nt De â4 7. ee matin, nan |
mm | cames | commen | asc Ćmmmemeeress | memes | ee ommesmeumes [mcm meme mecs
Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Kil. | Degrés
1 " 5480 | 6890! 128370 | 1215,7 n 12 780 | 29.65] 3789 | 475,0! 38 1
2 " 8810 | 7080 | 15890 " u 11620 | 26.12] 3035 | 468,6] 37 8
3 " 5980 | 7480 | 12760 u u 11480 | 27.02| 3102 | 467,8| 37 9
4 n 11920 | 6020| 17950 " " 11180 | 25.05) 3186 | 464,0] 37 9
5 " 8560 | 9330 | 17890 " u 10 660 | 27.52] 2934 | 466,0| 37 9
ĂŽ " 5940 | 6960 | 12900 Ă u 11510 | 27.35] 3148 | 469,5] 37 5
7 " 11550 | 7820 | 19370 â " 40190 | 27.52| 2784 | 466,0! 27 9
8 " 11450 | 3040 | 14490 u u 10440 | 25.90) 9704 | 468,4| 37 9
9 " 13230 | 7340 | 20570 u " 11660 | 27.02| 5151 | 467,1] 38 0
10 " 4180 | 7320 | 11500 " " 10 890 | 27.70] 3017 | 471,6] 37 9
11 0 10990 | 4000 | 14990 " " 11290 | 28.90] 39292 | 466,6] 37 8
12 " 8150 | 7650 | 15 800 " 0 10 940 | 27.90! 3 052 RNIESTES
13 " 7950 | 6820 |. 14780 " â 10530 | 25.52| 2003 | 466,5] 37 9
14 u 9250 | 5830 | 15060 i NBA) 10910 | 27.47] 2997 | 466,2| 37 9
15 0 9150 | 3950 | 13100 " " 10 690 | 29.25] 3127 | 465,6| 38 0
16 " 8990 | 10120 | 19110 " " 10960 | 25.12] 3082 | 464,3] 38 0
| 17 " 8250 | 8270 | 16520 " mn | 10990 | 23.62] 3145 | 468,0] 37 9
ET u 8190 | 9500! 17690 " u 10 980 | 27.05) 2070 | 469,8] 38 1
19 " 5590 | 9580 | 15170 u D 10910 | 28.15] 5071 | 475,9| 37 9
20 " 8180 | 7050 | 15210 â " 11480 | 27.65| 3174 | 469,6| 37 9
21 " 10 880 | 41 050 | 21910 1 " 10170 | 26.60! 2705 | 469,1| 37 9
22 u 5430 | 9780! 15210 Ă " 11450 | 27.55] 3126 | 475,2| 27 9
23 " 4610 | 42970 | 17580 0 " 11440 | 28.30] 3938 | 474,1| 38 0
24 " 6860 | 8740 | 15 600 " Ă 11190 | 28.65] 3906 | 475,0] 27 8
25 " 8520 | 6340 | 14 870 u u 11590 | 27.80| 3166 | 473,3| 38 0
L of u 1020 | 14480 | 15570 " u 10200 | 27.87| 9843 | 472,5| 37 9
ET " 1250 | S300| 9650 u " 9650 | 29.25] 9825 | 474,6] 37 8
28 1 r 8040 | 8040 u Ă 10280 | 27.90] 2868 | 470,1| 38 1
29 " 14700 | 6720 | 21420 D " 9210 | 27.20! 2597 | 464,8] 38 1
30 " 4980 | 9090! 13370 " " 9 640 | 28.92] 2788 | 472,4] 37 8
31 " 3240 | 68420 | 11660 u Ă 9 620 | 28.92| 27855 | 473,5] 38 0
| Moyennes . n Q u 15 419,31 1 215,7] 16 635,0 | 10 S55 g 2964,7|469,77| 37 91
[l
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE,
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N° 3.
(Numéro matricule 37 999.)
DĂ©cembre
1889.
EAU BUE
TRAVAIL AU PAS.
E AU
du
_â 2 mm â
7 500
14 010
9 980
15 060
14190
8 $20
14 560
14 910
14 890
11 030
13 320
13 410
12 980
13 960
13 590
14 080
13 690
11 700
9 820
15 050
15 080
9 690
10110
14 870
14510
13 200
13 660
11 140
12 570
10 650
11180
Ă 6Gh.
du
12 060
10 020
13 670
7 850
8 430
8 040
12 270
6 050
10 220
7 920
13 930
13 950
11 600
13 280
10 540
7 550
13 510
11 470
15 420
13 390
12 850
15 660
14 500
14 490
9 650
14 700
12 760
7 810
12 700
14 760
12 590
four-
totale,
rage.
21 130
25 260
23 650
23 980
22 620
16 860
31 010
20 960
28 510
29 610
26 420
18 950
27 660
26 460
25 699,3] 1 328,6
EAU
totale
con-
somméc
par
jour.
27 097,9
POIDS
15 700
12 980
11 880
12 450
13 290
12 740
13 550
12 680
11 510
12 740
13 540
12 190
12 200
13 200
12 470
13 010
11720
12 850
15 960
13 950
11 870
12 960
14 220
14 030
11 610
12 450
11 929
11 980
13 430
12 900
12 830
12 867
MATIĂRE
sĂšche
Poips| TEMPĂ-
du
a NCRe val
totale
des
feces,
Ă 7h.
du
matin,
RATURE
du
cheval
Ă 7h.
du
6
1
8
1
0
1
0
0
0
9
0
0
0
0
0
U
0
0
1
1
0
0
0
0
(
0
(0
1
9
eo
LI
ALIMENTATION DU CHEVAL
DE TRAIT.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 1. =
(Numéro matricule 34 614.)
Janvier
1890.
Moyennes .
EAU BUE
MARCHE AU PAS.
du
âââââ
11 450
9 670
11210
7 630
10 600
12 920
10 270
10 020
Ă 6h.
four-
totale,
rage.
13 850
14 770
15 930
22 090
16 050
22 020
21 300
15 200
16 700
19 110
21 800
20 860
18 260
24150
19 300
20 210
15 800
23 410
20 920
18 350
19 680
17270
18 770
25 540
20 0140
23 020
20 870
17 440
15 420
18 240
22 990
19 527,7] 1 321,0
EAU
totale
con-
sommée
par
20 848,7
POIDS
fĂšces,
10 200
9 S40
11 250
10 750
10 020
11 660
10 540
11 240
10 080
11 420
9 700
10 819
19 220
9 910
11 610
10 400
11 700
10 340
11 850
10 200
10 950
11 580
9 900
10 600
11 850
9 930
12 740
10 750
10 160
10 600
11 170
10 773
MATIĂRE
sĂšche
â_ââ
p. 100
des
fĂšces.
â
totale
des
feces,
POIDS
du
cheval
Ă 7h.
du
malin.
TENPĂ-
RATURE
du
cheval
a7h.
du
malin.
Degrés
L=]
Ć OD'1SO Pr © © © â
5]
7
6
9
7
9
6
7 9
8
7
4
8
4
74
8
0
1
1
1
2
©
2]
CE
10 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
EV : 0 .
Te D ⏠TRAVAIL AU PAS.
(Numéro matricule 34 464.)
EAU MATIĂRE | PorDs| TEMPE-
EAU
EAU RUE totale POIDS ET du | RATURE
Ă du
, des a7h cheval
Janvier Ă Th. Ă Ă a6h. four- SOMME p.100 | totale [47% | 37
d du 22 totale. Says pas feces. des des du de
1890. midi. ge. matin. | tin
= du con- cheval
matin, ir. JOnrE feces. | feces,.
Degrés
=
18 320 11010 285 2,4| 38
20 100 12 940 | 26.45 42% 38
12 340 = 3 3: 38
11130 : 37
7 610 11150 2 3 79 >| 38
12450 24 11 550 Lu ; 37
12 350 2 11540 | 27.15 72,6| 37
2 550 9 10 160 | 25. 76 37
9 190 11 560 . 32 22 4,5| 37
10 820 )B 12 050 Ăč
6 790 Ă« 9 10 570
11310 20 48 11 260
5440 | 1388 2 11 740
4 420 3.8: 9 10 540
4410 10 780
14740 | 73: 22 9 500
11 930 3 ) 9 570
14 710 : 12 350
7 960 Ă 2 10 960
6 500 14 490 11360
3210 9e 17 140 9 460
9 540 6? 23 160 11 780
7 250 11220
3920 | 14 12 440
11310 24 50 10 760
11700 11 860
7 180 : 12 0:0
11 470 55 20 05 10 230
12630 | 44 10 82
10 490 f 6 11550
4620 | 12: 10 180
Ca
© D I A Ć Ă C 1
ne en ne De be
© LO = ©
EAP OD: LIL OT TOR: I al PONS SrS:. Ie
D
LL
L=}
OO = x de bn
SŸS © U ©
19 © RO
© 1 #
© © ©
2
1 © @ «1
Moyennes . " 19 029 | 1438,4| 20 467,4 | 11 183 3009
ALIMENTATION
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR
a
CHEVAL N0 3,
(Numéro matricule 37 999.)
DU CHEVAL
DE TRAIT.
11
L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
REPOS.
âLE et FAUâ/BUE sub nie POIDS = âere .
DR RTS du con- EPA ue
Janvier a7h. à a6h four- somméce ce p.100 | totale
Ă ar F
1890. Dre LE = Le + jé cet es ER
Gr. Gr Gr Gr. Gr. Gr Gr, Gr.
1 1960 | 8650| 4670| 14580 | 1 221,9 u 10 8:0 | 20.55] 2731
2 3810 | 12740| 5150 | 21700 D u 12 840 | 22.10| 2838
3 5110 | 8770 | 14200 | 28 080 " u 15 140 | 15.12] 29289
4 990 | 9170 | 10370 | 20 550 " " 14 140 | 15.67| 9216
5 4170 | 93C0 | 10220 | 23 690 " u 9960 | 15.80! 1 574
6 940 | 13390 | 6210 | 20 540 " u 16170 | 15.80] 2555
7 7670 | 5010 | 13800 | 26 480 " u 16490 | 17.12] 2 823
s 2970 | 8950 | 14200 | 26 120 Ă Ă 17960 | 15.72| 9 823
2 1150 | 9210 | 13 600 | 23960 " " 16710 | 16.27| 2719
10 1170 | 9690 | 13470 | 24330 " Ă 15 630 | 15.45| 2415
11 m 9 700 | 12670 | 22570 n n 17920 | 17.15| 2953
12 " 9 750 | 12740 | 22 490 " " 15 550 | 19.55| 3 040
13 â 6870 | 14970 | 21 840 Ă D 13720 | 15.75| 2161
14 n 7 620 | 13760 | 21 380 " u 11 370 | 17.85| 2030
15 D 8870 | 135:0 | 92410 " " 15 110 | 17.67| 2670
16 =" 6590 | 13000 | 20 490 0 1 13 020 | 17.65| 2298
17 n 12240 | 7000 | 19240 " n 14 550 | 20.67! 3007
18 550 | 10220 | 13290 | 24130 " u 14190 | 47.72] 2514
19 1170 | 7200 | 13380 | 21750 Ă u 14020 | 15.67| 2199
20 " 11350 | 14100 | 55430 " D 159250 | 13.80! 2105
21 D 9 660 | 13450 | 23110 u u 15460 | 14.35| 2219
22 1160 | 12200 | 13870 | 27250 " D 16530 | 15.97| 2640
23 290 | 10750 | 12970 | 24110 " u 18980 | 14.17| 2689
24 1400 | 10260 | 15780 | 27 440 u " 16610 | 13.17| 2188
25 670 | 13600 | 13050 | 27 320 " u 18570 | 13.80! 2563
26 1420 | 10770 | 12080 | 24 270 Ă " 16820 | 15.27] 2570
27 7710 | 13210 | 41770 | 392 750 u u 19780 | 14.35| 283$
28 940 | 8220 | 14540 | 23 700 " 0 189260 | 13.87| 2533
29 1610 nu 7700 | 9310 " u 12 350 | 13.40| 1652
30 4630 | 6720| 5860 | 17210 " " 12590 | 11.35| 4429
31 " 10 200 | 11150 | 21350 " u 12680 | 11.80] 1496
Moyennes . n n â| 92 881,9] 1 221,9) 94 103,8 | 154141 " | 2412
POIDS
du
cheval
Ă 7h.
du
malin,
TEMPĂ-
RATURE
du
cheval
Ă 7h.
du
matin,
Degrés
D
CL OS ES - 2]
CO © © 1 1 D OO 1 ©
OO OO © © OO © © EE GC 1
1
ĂŠ
12
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N9 1,
(Numéro matricule 34 614.)
TRAVAIL AU PAS,
DATES,
Ă 7 h.
du
matin.
FĂ©vrier
1890.
Gr.
Ă
midi.
Gr.
10 050
12 470
10 040
7 650
13 100
9 830
19 250
12 520
12 990
11 670
11 200
9 870
12 530
12 220
12 760
10 560
13 260
12 510
12 530
14220
11 160
11 710
12 950
15 260
12 020
43 750
10 510
14 020
(0
soir,
Gr.
14 570
12 030
113560
13 490
7 180
13 890
12 3550
9 570
11 560
13 260
14 220
5 790
13 650
14 160
12 050
15 720
11050
14 590
15 650
15 200
13 540
13 090
11270
11 780
11 470
3 440
14 540
9 240
(1
totale.
Gr.
24 420
24 500
21 400
21 140
20 720
25 380
24580
22 090
24 550
24 930
25 420
15 660
28 390
26 380
25 410
24 580
24 310
27 700
28 390
27 440
24 700
24 800
24 290
25 040
23 490
17 190
28 990
23 260
du
four-
rage.
Gr.
24 252,8] 1 420,0
EAU
toiale
con-
sommée
par
jour.
POIDS
3
fĂšves.
Gr.
11 370
12 590
11 780
11 570
11 410
15 670
11 030
12 790
12 440
13 050
11 900
12 760
12 450
12 270
13 350
13 440
11 940
14 440
15 330
11 080
12 420
11 680
12 830
12 170
13 390
12 020
13 730
13 260
12 696
MATIĂRE
sĂšche
Ă
p.100 | totale
des des
feces. | fĂšces.
Gr.
29.27] 3328
27.22] 3497
27.35| 3 222
26.07! 3095
26.97] 3077
22.95| 3487
24.20| 92 880
28.05| 3579
23.90| 3215
25.50] 3199
24.99] 3397
24.39] 3 269-
25.02| 2987
22.92] 3310
22.20] 3403
20.50] 2249
25.17| 3126
24.22] 9 899
25.45] 3965
24.77| 3015
24.40| 3267
27.80] 3342
27.00] 3610
23.65] 34135
nm | 3177
Porps| TEMPĂ-
du
cheval
Ă 0h:
du
malin.
Kil.
480,5
479,5
480,2
478,9
479,5
480,4
RATURE
du
cheval
Ă 7 b.
du
malin,
Degrés
C5
Let
re be © © © © oo
co
Le
©
C2
Le 2]
to
Q2
1
19: © © 1 ©
Q2
Le
9: ©, SD Sun, © -0. © ©
ce
C2
© © ©
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 13
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N° 2 POS
(Numéro matricule 34 464.) FER
EAU mariĂšre |poins| TEMPĂ-
EAU BUE totale POIDS du RATURE
nn" â con- ne | CHIC VAL du
D F des : cheval
FĂ©vrier . Ă a6h. fouet ES p.100 | totale [a7h li,
_ du rage DAS fĂšces. des des du du
= midi, C :
malin. soir. Rours feces. malin. | matin,
seche
1890.
Degrés
11050 | 16920
9 160 | 11070
9510 | 13800
7050 | 14000
7 620 | 11 460
8290 | 14300
10 140 | 14 840
9270 | 11650
5170 | 13290
13520 | 17 670
11980 | 12 870
8640 | 12 620
13930 | 15 690
10 760 | 13 460
10010 | 11450
7990 | 14950
13 620 | 13 630
9 640 | 11190
7410 | 13 870
9 040 | 14770
8260 | 11510
7 440 7 440
5130 | 15200
6 890 | 16 550
4190 | 11500
10250 | 16460
10 860 | 12410
10 700 | 13 410
Moyennes . u 13 502,5| 1244.8| 14 747.3
14
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAI, DE TRAIT.
CHEVAL N0 8.
(Numéro matricule 37 999.)
FĂ©vrier
1890,
Moyennes .
EAU
Gr.
14 520
6 680
9 860
7 920
11 220
8 640
10 430
12 170
11 340
10 200
15 640
11010
12 S20
12 490
12 850
8 490
13 350
14 220
9 060
15 450
11 790
15 070
13 120
14 510
15 420
14370
15 400
15 410
"
BUE
Ă 6 b.
du
soir.
14 340
14 450
13 900
10 110
1% 110
9 960
14 680
14 170
14 110
MARCHE AU PAS.
totale.
19
LS La
1
[-2
=]
25 566
1 303,2
EAU
totale
con-
sommée
par
jour.
Gr.
26 869,2
MariĂšre | Porps| TEMPĂ-
POIDS SĂšche du: | RATURE
ARE Cheval du |
des a7h | cheval
p.100 | totale TIR
fĂšces. des des Fe du ,
feccs, | feces, | MAUR! matin,
Gr Gi. Kil. | Degrés
12980 | 14.35] 1762 | 443,1| 58 2
14960 | 18.35] 2745 | 471,6| 38 0
19 880! 13.95! 2773 | 466,4| 37 9
13 300 | 25.10] 333 460,6| 37 9
45 310°] 16.77] 2567 | 456,1| 38 1
9 000 | 19.00! 1881 | 455,3| 38 0
12910 | 16.80! 2169 | 453,0| &8 0
18060 | 17.80] 3215 | 465,5] 37 8
15 760 | 15.60! 2459 | 463,1| 38 0
16550 | 17.40| 2880 | 461,0! 38 1
16 880 | 13.55| 29287 | 461,5| 37 8
13 860 | 15.80| 2193 | 463,2] 38 0
16930 | 14.60| 2472 | 467,6] 38 2
15510 | 15.50] 2373 | 464,3] 38 2
15240 | 15.15] 2309 | 464,6| 38 1
17 720 | 13.65] 2420 | 465,0] 38 1
17 500 | 14.37] 2515 | 460,2] 38 2
18 350 | 12.77| 2341
16 380 2
16 290 | 14.67] 239
20 530 | 13.60
18 970 | 13.12
16340 | 13.90| 29271
16290 | 13.30! 2
17 000 | 12.
17 400 | 12.87] 22:
21 260 | 12.80| 2566
19910 | 13.32| 2582
16 442 u 2451 | 462,0] 38 09
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 15
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
YAL o
CRT. ; TRAVAIL AU TROT.
{Numéro matricule 34 614.)
EAU MariĂšre |poips| TEMPĂ-
EAU BUE totale POIDS seche du RATURE
â 2 con- ee, cheval du
S cheval
mmé des 1 à 7h
ah. | à |a6h. somméc p.100 | totale [#7 lag
du du totale, par feces. des des u du
malin. midi. soir. Jour. feces. | feces, [Matin | parun.
Gr. Gr. Gr, : P, Gr. à . | Degrés
co
Le]
â]
13530 | 10550 | 24 0S0 13 680
11210 | 15720 | 50 460 13 250
10250 | 12560 | 23910 13 000
11310 | S520 | 22100 11 250
6500 | 13500 | 21 020 12 440
11150 | 12210 | 27 010 13 280
15 670 | 14260 | 30 720 16350
14330 | 9120 | 23 460 13 350
12 500 | 14 290 2 11450
13 280 | 11 410 12 420
13 020 | 10 760 : 13 220
14150 | 9280 497 13 710
13 670 | 13 960 ÂŁ 11 610
13 770 | 11 160 4 13 050
14 690 | 12150 | © 12 860
11970 | 10 660 Ă« 10 670
11260 | 13410 4 10 560
10770 | 11 640 3 0: 11 850
12 700 | 12 290 Ă 11 760
10590 | 9840 11780
13 490 | 11 090 6 11 510
15 640 | 12250 13 740
11020 | 13 880 Ă 12 760
13 420 | 13 250 12 610
10 600 | 13 470 4 13 160
12 090 | 13 220 ! 13 200
15 350 | 11 730 13 530
11 8S0 | 14180 11 590
15 160 | 14560 13 420
12010 | 14530 12 120
9750 | 14750 | 26950 13 000
CR
J ©
© © © © = © ©
D © = = ]
2
" | 26 587,7] 1474,6| 28 062,3 | 12 662 4,8 464,1
16 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N9 2,
; - HART REPOS.
(Numéro matricule 34 464.)
EAU MATIĂRE |Porps| TEMPĂ-
tolale POIDS du | RATURE
du
DATES.
seche
con- à «heval
sommée des p. 100 : : cheval
totale ET
PES feces. des des du
feces. | feces, malin,
Gr. 5 Kil. | Degrés
11930 | 15 530 10 550 AE 480,7 3
3170 | 10750 10 0x0 | 27. 2 484,0
20 020 11570 | 25.92| 2 486,8
14 660 11 750 .62| 31: 491,2
18 650 \ 15 560 | 25.62| 3 492,6
14 020 12 620 | 25. ; 494,5
14 140 9 410 | 35. 3 490,2
13 790 14 540 | 26.: 3043 | 492,0
12 620 15 010 f 4 | 492,8
21 380 12 850 | 95.9: Ă 491,4
11 500 12 010 | 26. 5 1° 496,2
11 840 ! 10 050 | 26. 2 6 494,1
15 690 10 400 : â 492,3
5 800 9 370 Ă 495,4
19 190 11670 | 95° : 486,4
14 560 11 740 S 2920 | 499,5
10 170 ».1° 493,5
10 870 5.75| 2799 | 495,8
11920 | 26.95| 3129 | 490,3
11310 | 22.85] 2584 | 493,5
15 350 .37| 2666 | 495,4
12 570 .65| 2431 | 494,5
14060 | 23.02] 39237 | 498,9
11 490 13 560 | 23. Ăš 502,4
10 310 11 130 SM 2 | 493,1
16 720 10 990 4.62 706 | 494,8
9 560 9990 | 24.15| 29 497,7
13 950 10 270 4,5 ) 496,1
1610 | 11230 Ăš 20 250 9 890 5.21 497,0
u 3 450 3 15 16 530 11310 5.25 490,3
4090 15 550 9 630 ; 26 | 501,8
ho ho
ro to
Lie]
de be D à re + ©
[=
14 805,2] 1 220,0| 16 125,2 |11428,7 495,1
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. LT
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N03.
Ă Ă MARCHE AU TROT.
(Numéro matricule 37 999.)
EAU MATIĂRE | porps| IBMPĂ-
EAU BUE totale POIDS du | RATURĂ
con- EN PV A du
; des * cheval
sommée p.100 | totale | à Th. à 7h.
sĂšche
four-
pan feces. des des du du
Jour. feces. | fĂšces, | MAN. inatin,
Degrés
26 110 â 15 S40
29 880 17 540
27 560 17 480
28 990 17 560
26 860 17 250
29 260 20 690
29 350 19 950
25 680 17 100
35 400 20 790
36 910 20 660
14580 | 37 770 21 510
14400 | 14620 | 39140 20 420
15030 | 14820 | 35410 21 300
15010 | 14410 | 39910 21 930
44160 | 15280 | 37110 21 620
15 0$0 | 14640 | 35450 20 160
142920 | 14980 | 32770 17 850
12 740 | 14480 | 36 500 19 980
12 660 | 15390 | 34540 19 360
14 500 | 10750 | 30 850 20 440
1484 5 2 35 670 18 790
14240 | 15 02 32 410 21 620
14 810 34 800 20 140
11710 | 1475 29 300 19 180
10 190 | 1: 30 080 18 890
11720 | 1: 36 550 19 060
12 160 26 170 17 1460
15 020 ; 40 700 16 650
14 690 31 890 17 290
10 810 31 010 15 070
11 060 o {: 36 350 15 960
19
D = © ©
0
1
8
1
l
0
8
9
8
7
9
9
6
8
6
0
8
0
8
S
0
8
1
9
6
32 915,5) 1317,6| 34233,1 | 19 116
1]
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893, â 1.
13 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 1.
(Numéro matricule 34 614.)
REPOS.
EAU MATIĂRE |Porps| TEMPĂ-
totale POIDS Seche du RATURE
0 : â | cheval + |
es Ă :
sommée p.100 | totale | à 7 hi KR Th
Par fices. des des du du
ere Ă ne jour. fĂšces. | fĂšces, | MAUR. matin.
Gr. Gr. : Gr, : ; Gr. à . |Degrés
4700 | 14630 | 142 53 620 10 180 | 27. 456,6
8 200 560 | 18 760 10 570 -3 461 ,4
7 920 17 310 9 960 | 25.3: 3 463,0
5 530 3 16550 9 960 JE 463,5
19 550 9 820 .3 463,5
16 74 9710 | 26.75| 2597 | 464,3
16 430 10 090 | 26. ; 465,1
16 470 10 460 ; 2852 | 464,3
14 200 10 470 s 2740 | 466,1
15 660 8 500 ; : 465,1
18 900 11 210 ; 2 | 466,5
17 350 11 250 L 4 | 469,1
17 150 10 140 : 469,0
17 670 10 250 ; j 472,6
15 590 10 050 | 26.62 470,5
17 700 11 870 89! 5 469,4
14 740 11950 | 24.45] 2999 | 468,9
15 790 9 190 : 466,7
18 910 12 150 | 24. 467,4
16 360 10 660 : 2 886 | 464,6
18 850 9 980 ; 464,9
13 150 9 380 c 9 469,2
15 310 10 710 .05 469,4
16 350 Ă 9 750 .75 469 ,1
16 030 9 850 .d: 514 | 471,5
6250 | 15940 10250 | 25.8: 547 | 473,1
10980 | 16 790 10 000 .34| 2634 | 474,3
7 660 | 14 860 10 100 .: 475,8
7850 | 17 300 10 600 | 25. 475,5
7450 | 15440 9 710 .25 4 475,9
Le]
9
0
9
0
9
9
8
9
0
8
9
0
9
9
6
9
1
9
1
9
8
9
0
0
0
0
8
9
8
eo
es
Moyennes . " 17 182,6] 1 094,0 5 | 10303 467,8
ERA DRE PR RE 0 ASE
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 19
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N° 2.
; MARCHE AU TROT.
(Numéro matricule 34 464.)
EAU MATIĂRE |porps| TEMPE-
EAU BUE totale POIDS Seche du RATURE
du con- Ă Us CNE VAL sa i
; es cheva
Ă 6h. four- BATMIEE p. 100| totale [Ă 7h. AUTRE
du totale. age por fĂšces. | des des du in
Jour. feces. | feces. | Malin.| tin.
©
Ć
LE)
"
Re
CI
Gr. Gr. Gr.
co
co
=]
5310 | 9160! 14470 12 610 | 26. 3 554
12010 | 12500 | 24 510 13 080 , 3 617
2780 | 11750 | 14530 11 030 - 3 024
" 14780 | 14780 10 450 : 2 797
13 060 | 10020 | 29 500 12 120 S 3 259
7840 | 9430 | 17270 10 370 : 2 686
9060 | 6080| 154140 11 260 3 063
10 900 | 12770 | 23670 11 730 | 27. 3 187
5360 | 3550 8 910 11 520 | 28. 3 257
11440 | 7530 | 22080 11 410 | 27. 3 157
9070 | 13570 | 22640 11 260 4 3085
9190 | 10420 | 19 610 12 130 | 24. 3 008
7660 | 12410 | 19970 11 550 | 26. 3023
7210 | 12660 | 19 870 11 310 . 3 005
11600 | 10000 | 21 600 11 560 | 25. 2 979
10560 | 14600 | 25 160 12 120 : 3 208
6850 | 14160 | 21 030 11 430 | 27. 3 088
10770 | 11370 | 22 140 12110 5 3 163
6540 | 11680 | 18 220 12 760 | 26. 3 320
9920 | S150 | 18070 10 320 | 26. 2 773
7950 | 12700 | 20 620 12 100 5 3 158
11970 | 74100 | 19070 11590 .25 | 5158
11830 | 8450 | 20 280 11 940 | 27. 3 224
13850 | 9520 12 370 | 25. 3 194
C2 009 (0209 02 O3: (0/7 09) C2 09
@Q â1 © © OO Ć@ J OC ©
15010 | 12560 | 25: 10 900 | 27.25 | 2970
10960 | 8710 19 000 | 27.32 | 39278
7950 | 14810 | 2274 11 570 | 96. 3 057
9730 | 14640 | 9244 12 510 | 26. 3295 | 479,0
0
0
1
8
0
1
1
1
8
1
0
7
0
1
0
1
1
1
0
8
9
1
1
1
{
1
7
1
11270 | 14570 | 95 84 11960 | 28. 5417 | 451,4
10 720 | 12350 | 9: 12 280 | 29. 3561 | 481,6
1
je 90 #70 2 11698,3 3145,5| 487,6
<
L°21
20
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N9 3.
(Numéro matricule 37 999.)
TRAVAIL AU TROT.
DA'TES,
Moyennes .
A â
4 650
9 040
2 150
â
EAU BUE
7 090
15 720
14 900
15 030
15 500
14940
15 520
15 530
14 450
15 480
15 220
15 440
15 350
14 760
13 920
14 600
14 810
15 600
15 050
15 300
15 250
15 010
15 940
12 920
14 590
15 640
15 190
Ă 6h.
du
soir,
13 900
14 820
11 260
15 210
14 650
9 040
13 810
12 740
15 540
12 950
12 920
15 440
14 640
15 070
15 260
15 700
13 270
13 400
15 200
14 610
15 550
10 920
15 440
15 440
15 270
15 660
15 170
15 660
15 020
15 530
totale.
30 810
32 000
33 280
27 850
51210
51 070
DAS EAU
totale
du con-
four- sommée
par
Le jour.
1363,0| 35 478,0
POIDS
17 480
17 780
17 610
15 480
14 380
12 690
12 940
15 540
15 520
14 920
15 100
12 280
15 550
12 910
11 010
13 250
15 320
15 650
11310
12 720
15 560
12 200
15 400
10 150
11530
10 450
9 800
12 270
11 950
16 910
13 621
MATIĂRE
seche
p-100
des
feces,
totale
des
fĂšces.
Gr.
19 ©
Le
pois! TEMPĂ-
du
cheval
Ă 7h,
du
mat.n,
Kil.
467,4
468,7
470,4
467,4
467,1
464,0
RATURS
du
cheval
Ă 7 h.
du
matin.
Degrés
co
co
19 > de de D be be © = PO D + ©
o2
co
19 ©
©) ©
@ ©
L9 © 19
ce
L°2]
19
o3 2
co [°2]
â > 19 ©
> co
@ ©
19 19
[45]
[°]
Ê © ©
c2
Le]
2
19
| 3
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 21
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 1.
: MARCHE
(Numéro matricule 34614.)
AU TROT.
Moyennes .
14 370
14 790
14 200
12 690
13 710
14 330
9 980
12 890
13 250
6 330
8 640
15 040
14 240
9 120
15 180
12 140
13 160
14 920
12 310
12 640
14 020
15 140
10 910
8 940
8 470
13 360
12 560
12 870
1"
Fawn etes
du con-
four- sommée des
totale. rage. D? fĂšces.
jour.
Gr. Gr. Gr. Gr.
20 900 | 1 115,7 u 15 180
92 410 Q " 13 040
18 020 " 1 15 760
26 670 " " 14 580
23 920 0 u 14 450
91 010 u u 16 500
18 270 u u 12 280
25 500 " u 11 860
22410 " u 14 290
19 090 M u 12 930
27 260 n " 12 090
22 640 " " 15 170
19 240 " u 11180
22 290 " u 11 350
22 450 " D 12 180
25 63 " " 11 910
18 990 " " 12 770
28 450 u " 13 640
27 840 " " 13 410
24 520 u " 11 880
24 380 " n 12 810
26 870 " D 15 350
28 580 " 1 12 850
26 970 " " 12 820
22 140 u " 11220
24 710 " u 11 090
15 830 " " 13 750
21 970 " " 12 150
21 890 u " 13 270
22 850 " Ă 13 590
29.290 " Q 11 740
23 105,5] 1 115,7
MATIĂRE |POIDs
sĂšche du
OO VAL
p.100 | totale Ă Th.
des des fe
fĂšces, | feces, | Matin.
Gr Kil.
26.80 3532 | 474,6
25.95| 3293 | 472,9
24.05] 8309 | 473,0
95.97| 5495 | 472,8
24.85| 3591 | 471,0
19.02| 5138 | 469,6
25.70| 3156 | 468,1
95.72| 5050 | 469,6
93.52| 3361 | 473,1
24.65| 3187 | 469,2
24.00| 2902 | 468,0
29.95| 3482 | 470,5
23.35| 2611 | 466,4
27.45] 3114 | 468,5
25.60| 3118 | 469,5
26.75| 3186 | 468,4
26.35| 3365 | 465,5
26.37| 3597 | 463,8
26.47| 3550 | 466,1
26.30! 3124 | 467,9
27.10] 3472 | 467,5
27.95| 3632 | 467,8
27.20| 3503 | 469,9
26.50| 3597 | 467,4
27.70| 3108 | 466,0
27.42| 3041 | 468,7
27.07| 3722 | 469,0
27.50| 3341 | 468,2
27.30] 3623 | 469,8
24.62| 2346 | 471,2
28.87| 3389 | 469,0
TEMPĂ-
RATURE
du
cheval
Ă 7 b.
du.
matin,
C2
Let
D © oo
V2
(w2]
CC D â PE DRAC â TR â EN YA © DT © et EC PT AE â RL =)
©2
1
DIS NSEONES EDR D IONM STONE
es
Le21
e
22 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N°9 2,
(Numéro matricule 34 464.) CRAVATE
DATES. EAU MATIĂRE |poros| TĂMPĂ-
totale POIDS RATURE
con- d a , cheval e I
; es e cheva
four- sORmec p.100 | totale Ă 7 h. a7h
IE féces. des des du du
jour.
sĂšche du
rage.
feces, | fĂšces. | Malin.
Gr.
7 650 | 14 490 11 980
13 150 | 14 490 1 13 670
14730 | 14260 14 550
14340 | 14560 13 810
12 190 | 14 670 13 210
14 160 15 240 15 600
13630 | 15350 | 33 780 14 030
15 310 | 15620 | 32 880 12 950
14710 | 15370 | 32 960 15 760
12 580 | 11610 | 27 900 15 050
10610 | 14710 | 30 650 13 910
14950 | 143950 | 34 450 14 220
12 490 | 14790 | 34 860 15 550
14790 | 15300 | 31 020 14 710
13240 | 14630 | 28 610 14 420
13710 | 144760 | 324110 13 050
12910 | 13970 | 35330 14 490
5780 | 14170 | 24 370 12 210
13170 | 14660 | 41 850 14 790
10 440 | 15 380 | 925 820 13 110
10170 | 144250 | 34 790 12 110
14 400 | 14750 | 37 140 13 470
14720 | 14990 | 30 530 12 260
15130 | 15120 | 37130 15 810
8 390 | 12 400 | 26 560 9 170
13750 | 14480 | 35480 15 160
45150 | 15160 | 20310 12 500
13 720 9 940 | 23660 10 990
12250 | 10550 | 27 220 13 320
13990 | 144230 | 30 500 13 980
12080 | 14220 | 30 530 14 680
Ć OO 1 OO OĂ d C2 RO
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31538 |1318,5| 32 856,5 [13630,9
=
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 23
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHKVAL N0 3.
(Numéro matricule 37 999.)
REPOS.
EAU MATIĂRE |Porps| TEMPE-
FR E
ERA EAU BUE ge totale | PoIps che du | RATURE
ââ du con- Ă PE ll cheval es
; es 7 cheva
COCA "0 VRP RCE fours Jp APM mĂE p.100 | totale [aTh |,
du du totale. pen fĂšces. des des du du
midi HAGES ; matin
matin. S soir. jour. feces, | fĂšces, *| matin,
Degrés
1210 | 10730 | 11010 | 22 950 n n 6370 | 21.82] 1590 | 460,5| 38 2
2150 | 13550 | 14510 | 30210 " â 11130 | 22.97] 2479 | 464,6| 38 1
6390 | 14430 | 14460 | 35280 " " 12110 | 18.10] 2192 | 469,3| 38 0
1
1
39230 | 10330 | 12640 | 26 200 " " 13 000 | 14.62] 1901 | 472,4| 38
1350 | 14070 | 12210 | 27 650 " n 13 500 | 15.57| 2102 | 474,0| 38
3060 | 10470 | 14470 | 28 000 " " 15030 | 15.
1 870 7 600 | 44740 | 24210 " m 18130 | 13.65] 2475 | 475,0| 38 :
6 520 9780 | 11650 | 27950 â " 19 740 | 13.02] 2570 | 476,9] 37
3740 | 11780 | 13160 | 28 680 n u 17580 | 14.92] 2623 | 473,4| 38
11 850 | 10520 | 24500 " " 13750 | 15.07| 2072 | 472,6| 38
14 880 14 880
10 500 14560
14260 | 11710 | 26 760 " " 12980 | 18.70] 2427 | 474,5] 58
13 810 12 890 5
8190 11 540
10 490 13 920
12 800 14 090
6480 7 870
8 800 8 650
4 290 10 320
8 690 10 840
7760 15 050
10 980 15 150
9 860 13 950
15 480 13 310
11 800 11110
13 760 13 680
9130 10 980
7 470 10 460
7130 11560
9 050 10 560
[=]
19
Le]
C2
S
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S
1
Le]
-
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29
1
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19 © âŹ
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L2
es
o2
24 853,2] 877,4 | 25 370,6 |12790,9
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 1.
(Numéro matricule 34614.)
Moyennes .
ELA D
du
malin,
14 149
11 370
14 760
5 410
5 870
3 560
14 320
Ă
midi,
11970
14 870
8 970
14 440
S 010
15 160
3 140
10 530
15 350
10 570
15 840
12 660
12,210
13 8:0
6210
15 600
S 610
15 510
8 000
14 690
13 000
Gr.
11 350
14 950
11 750
13 110
9 060
14 830
11 430
15 180
7 620
15 730
5 890
15 900
14 680
15 020
14 520
15 450
12 920
15 380
13 230
14 660
10 650
10 750
15 090
7 380
16 150
13 910
15 750
11 790
15 310
8 750
I â
Ă 6 h.
du iolale.
soir,
28 320
55 410
24 380
29 2S0
28 950
27 750
31 858
VOITURE.
AE | EAU
totale POIDS
du con-
four sommée
par feces.
rage. :
Jour.
Gr. Gr. Gr.
u " 14410
u " 13 560
u " 11 720
" 1 11460
u u 11 390
u u 13 180
" u 10 490
1 D 12 280
u u 13 660
ĂŻ ĂŻ 9 420
u " 12110
u " 10 660
" " 14 290
u u 12 770
u D 14130
D u 9 200
u D 15 230
â u 11710
u n 14070
u Ă 15 830
" 1" 13 290
1 1 12 470
u u 10 870
u u 11730
u u 11140
u n 12 130
u " 10 100
MATIĂRE
seche
ââ
p. 100
des
fĂšces.
(1
totale
des
feces.
3 091,3
POIDS
du
cheval
Ă 7 h,
du
malin.
473,5
TEMPĂ-
RATURE
du |
cheval
a7h.
du
matin.
Degrés
C2
.*
e
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 29
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N°0 2.
REPOS,
(Numéro mairicule 34 464.)
EAU MATIĂRE |Porns| IEMPĂ-
totale POIDS du RATURE
du
seche
du con- eee" cheval
A des ae
sommée p 100 cheval
Ă a7h.
four- totale
Ă 7 h,
feces. des des du du
malin,
ne tolale. ga ES
midi. g°- jour.
matin. soir. feces. | feces. matin.
Gr. Gr. Gr, Gr. Gr. ds Gil. | Degrés
10940 | 25 650 12910
11900 | 25 650 11 680
9 460 | 17190 11 750
12 450 | 21 870 9 860
18 510 11 270
10 560
15 690 10 420
90 710 14 120
17 770 11110
20 360 10 960
12 820
10 960
9 310
10 240
11 720
11 050
8 660
11 490
10 280
11 250
11 420
12 060
10 950
11 060
10 590
11790 | Âź:,: | 5154 | 489,8
Ăš 9 489,5
10960! 34 10 200 | 29. 2978 | 488,2
12450! 85: 10 560 | 29.40! 3105 | 486,2
7 920 40 11170 | 29.85] 5354 | 489,9
Moyennes . ' " 15 093,3] 937,2 | 19 030,5 | 41 049 3 050,5| 489,9
26 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 3.
(Numéro matricule 37 999.)
REPOS.
MATIĂRE |Poips| TEMPE-
EAU
E A
EAU BUE 3 totale POIDS sĂšche du RATURE
oo du con- d ââââ | cheval a
5 es ; heval
Ă Ă 6 h. four- EOMMĂE p.100 | totale | Ă 7h. Fe
du totale fĂšces. des des du du Ă
midi : ape ; matin :
soir feces. | fĂšces. | matin,
RE NRLATCOIITE | CREME | RLES-COMNS CREER ORNE CCE
Gr Gr Gr. Gr Gr. Gr. Kil. |Degrés
7 640 | 13610 | 23 460 " 13140 | 19.07] 2506 | 471,7| 38 1
8070 | 12930 | 25 120 " 15240 | 16.62] 2533 | 473,4| 38 1
10 430 | 12540 | 28 920 " 16100 | 18.07] 2909 | 478,7| 38 0
14470 | 11580 | 26 050 " 15 300 | 20.52] 3140 | 473,4] 38 1
6730 | 15510 | 26140 n 15390 | 16.55| 9547 | 475,3| 38 2
8590 | 9300 | 20 740 " 14920 | 18.65| 2783 | 474,4] 38 1
7 450 | 13380 | 29 020 m 13 950 | 17.22| 2402 | 476,3| 38 1
10 270 | 14620 | 25 550 " 13450 | 16.17] 2175 | 472,5] 38 1
10 860 | 12390 | 26 630 " 17 320 | 15.75] 2728 | 475,5| 38 2
13 250 | 11370 | 927 950 " 17510 | 16.10! 2819 | 474,9] 38 1
10 080 | 15170 | 28 510 " 17 620 | 15.60| 9749 | 474,1| 38 1
5 760 | 15610 | 925 380 " 18 680 | 15.60! 2914 | 475,6| 38 1
11850 | 5320 | 22 480 " 19 690 | 15.15] 2983 | 475,2] 38 1
15 180 9070 | 26370 " 17 140 | 15.25] 2614 | 475,5| 38 0
11 990 | 12480 | 28250 " 18 380 | 14.00] 2573 | 477,7] 38 1
16 4 880 | 14520 | 12930 | 32 330 " 20 510 | 14.12| 2S96 | 475,0| 38 1
17 8 090 6 350 | 15040 | 29 460 " 18 060 | 14.87| 2686 | 479,5] 38 0
18 3 960 8 000 | 15390 | 27 350 u 15 800 | 13.60] 24149 | 476,1 38 2
19 2930 | 11 110 | 12310 | 26 550 " 14 690 | 15.87] 2958 | 474,4] 58 3
20 u 12 100 | 15 000 | 27 1400 " 13 600 | 15.25] 2074 | 471,1| 38 3
21 1510 | 11 660 | 43960 | 27 130 " 14 620 | 16.65] 2434 | 474,2] 38 2
11 660 | 15440 | 29 650 " 17930 | 16.20] 2905 | 478,0| 38
15010 | 15010 Q
4280 | 3100 | 31890 "
977) | 15360 | 35610 â
6490 | 14340 | 25 230 "
12 000 | 15210 | 36 600 u
10 580 | 12210 | 37 370 "
9770 | 14300 | 33890 "
7200 | 4040 | 49200 "
13240 | 16.02] 2121 | 472,7| 38
45 730 | 16.05] 2525 | 481,0] 37
19950 | 14.35] 2863 | 481,0| 38
14240 | 15.75] 2243 | 477,2] 38
20 150 | 15.50! 3123 | 480,0| 38
21190 | 14.65] 310% | 479,5] 38
20 590 | 15.92] 3278 | 485,5| 38
45490 | 15.55] 2409 | 481,9] 38
© © © © = © J à ©
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es
27 491,3] 882,8 | 28 374,1 | 166541 " |92648,1| 475,6| 38
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. A
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N° 1.
voi E.
(Numéro matricule 34 614.) EE
EAU MATIĂRE POIDS TEMPĂ-
totale POIDS sĂšche du RATURE
du
DATES.
con- tee Ncheyal
i four- sommée des (00 | toal à 7h. cheval
du , Ă Le p. otale Ă 7h,
par fĂšces. des des du du
TĂBĂE matin,
jour. fĂšces. | fĂšces. matin.
Degrés
15480 | 34400 10 800 : 38
10 920 | 34650 13 180 0! 38
15160 | 34320 7 170 : 38
15 170 | 32940 12 420 : 38
15940 | 33 690 13 240 | 22,50! 38
13150 | 33170 12100 | 25.2: 38
15 240 | 97 970 15 110 : 33
12140 | 35 440 12 330
15 090 | 34 960 16 420
10160 | 33 190 12 030
15 120 | 33 960 10 060
10 920 | 37 140 13 9570
15 730 | 37 800 13 500
12540 | 39 980 12 780
15 930 | 36 880 9 020
12 750 | 42 750 12 450
15 690 | 36530 8 270
13350 | 39510 k 11 510
15 690 | 38810 10 250
11210 | 36 830 12 950
15 670 | 35 600 " 9 600
8 680 | 39220 11 690
15 760 | 39 870 9 960
13 870 | 43 360 12 180
15 240 | 34 550 11 720
11870 | 37710 16010
15 120 | 38060 8 070
15 690 | 14060 | 45 320 14 780
15 640 | 15530 | 43 890 15 800
15 250 9190 | 39 860 11 690
16 060 | 15 820 | 40 860 S 170
â | 37200,6| 1 405,4! 38 604,0 |11897,7
28 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 2.
J REPOS.
(Numéro matricule 34464.)
EAU MArTiĂšrEe | Porps| TEMPI-
EAU BUE totale POIDS She du | RATURE
ILE OPEN LU LORS con- Te que PRG TE a RE
, des Ă 7h | cheval
JuiĂŒlet Ă 7h. Ă Ă 6 h. four- EOMMEE p.100 | totale [#42 |,%,
du du toiale. Ăč par fĂšces. | des des du du
1890. midi. : rage. jour : matin 3
matin. soir, Jour. fĂšces. | feces. â| matin,
Gr. Gr. Gr. Gr. . Fe. il. | Degrés
14950 | 14930 : 38 ©
14010 | 14010
14800 | 16 870
6 970 6 970
10220 | 18 390
12 040 | 16 480
14950 | 14950
8 060 8 060
13 190 | 26190
14000 | 14090
13 500 4 9 749
15 570 -07| 2664
17 890 »0 . 2 S86
17 540 4 28: 2 980
16 920 : 2e 2 870
15 180 26, 2 703
23 660 : 2 : 2 986
15 050 23. 2 603
3 040
2 673
2 979
3 939
3 013
9 680
10 620
11 460 4 9 130
9 500 GE ! 11 540
11 650 D 3 10 810
12 890 5 10 190
12810 | 274 12 160
= Op be © D ©
M | 16514,5| 1 002,0! 17 516,5 |10315,5
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 29
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 3.
(Numéro matricule 37 999.) Here
se DR La EAU MATIĂRE |Poips TENPĂ-
EAU BUE totale POIDS seche du |RATURE
â D RE Re UP ES NAME con- nmdeset. Meheval |: du
4 des : cheval
Juillet à 7h. à à 6h. four- sommée p.100 | totale |à 7 b. à 7h
du du totale. pa feces. | des des du EUR
1890, matin. Hus soir. a jour. fĂšces. | fĂšces, | Malin. | main,
es PS, PRE CE | ms a
Gr. Gr. Gre Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Kil. | Degrés
1 5 200 7 660 7 680 | 20 540 " âU 15880 | 15.35| 2131 | 474,9] 38 2
2 8 400 6 850 8 850 | 24100 " " 11640 | 18.77] 2179 | 476,0) 38 2
3 500 7 660 | 10160 | 23 120 " " 15 890 | 16.02] 2546 | 479,9! 38 0
4 6 360 9 560 7750 | 25670 " M 17090 | 14.82] 25353 | 481,5| 38 1
Ăč 5 010 6 570 50:0 | 16920 " u 16750 | 14.67] ,2457 | 479,5| 38 2
ĂŽ 8310 | 4510 | 12760 | 25 580 " M 14450 | 15.05] 2175 | 477,0] 38 1
7 11 430 | 15 430 9 220 | 36080 " " 18940 | 14.52] 2750 | 484,5| 38 2
8 b 880 » 140 6530 | 17050 " " 14400 | 16.95] 2340 | 482,5] 38 1
9 7 380 5 990 8180 | 21550 1 u 13 500 | 19.15] 2595 | 481,2| 58 2
10 6 540 6 480 5 290 | 15310 " u 13080 | 924.37] 3188 | 482,0| 38 {
11 8440 | 6750 8960 | 24150 " u 12110 | 93.45] 2840 | 482,9| 38 2
12 7 140 7 700 7 120 | 21960 Q " 10 820 | 93.15! 2505 | 487,6| 38 1
13 670 7 190 7720 | 15 580 1 " 13160 | 23.25| 50735 | 483,0] 38 1
14 6110 | 10 210 8590 | 24910 " " 16 190 | 21.47| 3476 | 485,6| 58 0
#5 9 740 8 160 5 870 | 23770 1 " 19 890 | 22.95| 2949 | 489,5| 38 2
16 10 750 7 630 6 620 | 24380 " " 9450 | 24.05| 2268 | 489,8| 58 2
17 1 690 8 520 5270 | 15480 1 Ă S 940 | 20.10| 1797 | 484,9] 58 2
18 8 160 6 060 9 450 | 23 670 " 1 14 980 | 22.971 2594 | 487,0| 58 1
19 7 270 6 400 9 420 | 25 090 1 LU 13 650 | 17.77| 2496 | 459,6] 37 9
20 4 500 4720 | 10290 | 19510 1 " 16 760 | 16.97| 2844 | 487,4| 38 1
21 8 120 8 570 5 800 | 22490 u â 16520 | 17.95] 2965 | 486,6! 38 1
99 9 850 | 3900 6350 | 20100 â " 15 000 | 19.55! 2953 | 486,8| 38 0
23 5 350 7 040 4750 | 17170 1 " 10 620 | 20.85| 2914 | 483,4] 38 1
94 6 520 5 900 5 590 | 18610 " M 11520 | 20.80| 2296 | 482,6| 38 1
95 4 380 7 360 7 660 | 19900 () " 9910 | 26.80| 2656 | 480,5! 38 1
26 5 910 4910 4320 | 15140 "â " 10 930 | 26.70| 2918 | 482,7| 38 1
er 5 940 4910 4320 | 15140 â " 111108] 25.52] 2835 | 482,7| 58 1
28 6 600 5 920 6 320 | 15 540 " " 10540 | 24.80! 2614 | 485,4) 58 1
99 5 580 7 040 4750 | 17170 ( u 10 680 | 24.52| 2619 485,5| 58 0
20 6 310 8 960 6 93 29 200 2 " 11 000 | 26.57| 2923 | 454,0| 37 9
31 6 450 8450 8420 | 23350 # u 10 340 | 28.37| 2933 | 484,2| 38 1
Moyennes . w u u |o1o8t,6| 945,4 | 22027,0 [12097,4] â |2655,9| 480,7] 58 1
De PER EP EEE ER LORS 7 | PR ER RP EE COR ER Ren PE PEER LERTREES ER |
30 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 1,
REPOS.
(Numéro matricule 34 614.)
: EAU MATIĂRE TEMPĂ-
2ent EAU BUE * MH. ĂrĂ©tate Seche BATURE
Ni 0 du con- ARR AT Er du
: cheval
Août à Th. à à 6h. foue A1) SCORE p. 100 | totale à 7h
ar
1890. ES CE Co nn ef ET el Ve RATE qu
matin. soir. 50 feces. | feces. matin,
Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Degré
1 15 600 | 15100 | 15 180 | 45 880 " " 10 150 38 5
2 6760 | 6790 | 13470 | 27 020 " D 10 700 38 1
3 2070 | 13460 | 12 380 | 27 910 u m 14 420 38 1
4 780 | 11 500 | 10 650 | 23 230 " " 13 260 38 0
5 960 | 12 280 7 910 | 21 150 " " 13 000 1
6 "â 10 830 | 14 890 | 25 720 " u 11 350 1
7 870 9 180 | 14 420 | 24 470 u " 12 520 0
8 " 7450 | 13020 | 20470 " " 11490 0
9 u 11 470 | 11 360 | 22 830 n " 12 570 0
10 " 6370 | 14640 | 21010 " " 10 600 0
11 1 890 | 11710 7 340 | 20 940 " " 11 340 0
12 " 11 650 | 11 070 | 22720 " " 12 330 1
13 " 8460 | 10650 | 19110 » ' 12 560 0
14 " 6570 | 14310 | 20 880 " u 11 860 1
15 " 14 180 | 12 280 | 26 460 " " 11 820 0
16 u 9 820 | 11 250 | 21 070 " u 11 800 1
17 M 8 360 | 12 420 | 20 780 " u 11 060 0
18 " 5 920 | 15 020 | 20 940 " " 11 920 0
19 Q 9 840 9 540 | 19 380 " " 10 110 0
20 n 9 350 | 12 380 | 21 730 " " 12 060 0
21 " 11000 | 11 490 | 22 490 " " 10 630 S 0
22 u 4300 | 15160 | 19 460 " u 10 620 0
23 " 8950| 6380 | 15 330 " Ă 11 620 0
24 " 6070 | 13840 | 19910 " u 10 980 1
29 Q 8 220 9 090 | 17 310 1 " 12 080 0
26 0 5200 | 12 620 | 17 820 " " 10 390 0
97 u 8100 | g1360 | 9460 " " 11110 0
28 " 7230 | 14010 | 21 240 " " 11 810 1
29 " 5 920 | 12 140 | 18 060 " " 10 580 1
:0 n 4 840 | 10 280 | 15 120 " " 10 750 Ă»
51 " 6100 | 12810 | 18910 " " 10 820 0
Moyennes . â " " 29 196,8] 982,8 | 23 179,6 |11558,7
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 31
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N9 2. REPOS
(Numéro matricule 34 464.)
EAU MATIĂRE | Porps| TEMPĂ-
EU EU totale | pois lache du | RATURE
cheval du
A â â âââ con- j âââ <a Leo
3 des cheva
sommée totale | à 7h.
Ă 7h, : Ă 6h, four- Ă 7h,
du du totale. par feces. des du du
rage. : :
matin. JODEs feces. | Matin. | maun.
Gr. : . |Degrés
19
15 770 10 180 | 27.: 38
13 490 12940 | 27.5: 38
21 980 14 110 | 99. 5| 38
15 720 10 810 | 29. 38
14 470 10 320 | 29.2 38
91 190 10 680 | 29. 38
28 460 12 960 | 27. 2| 38
17 930 12 230 | 28.6 33
19 900 9 590 | 29. s| 38
14 810 8560 | 32.25 5| 38
13 430 10 170 | 29. 38
2400 | 11610 27 900 11 760 | 28.0: | 38
; . 10 290 10 790 | 98. :,2| 38
5070 | 14620 | 90590 9 480 | 31.7: 295,6| 38
2260 | 14120 | 16350 12 290
4 890 | 14 19 240 10 030
3550 | 95 35 10 310
16 470 10 960
10 070 22 210 13 400
3510 4 670 11 290
3890 | 3450 14520 | 91 860 14 520
"| 10010 | 125 251 11 300
2540 | 8: 12 940 11 000
6 520 20 070 9 380
3 690 15 890 10 240
11 880 10 410
; 10 090
18 660 11 190
14 330 10 560
15 930 10 560
13 120 10 790
DAS Se Oum OL nm Oo. Suis nr O ie
en
= EEE D TN EC DO â OT TS
©
ts
Moyennes . , 16466,5| 982,8 | 17 449,3 |10855,8
32
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 3.
(Numéro matricule 37 999.)
VOITURE.
DATES.
AoĂčt a7h.
1800 M
f malin.
Gr.
1 S 740
2 8 490
3 9 220
4 9 450
5 10 700
6 4 590
7 12 670
8 7 230
9 7 500
10 14 420
11 9 840
12 5 390
13 12 780
14 4 270
15 14 770
16 2 420
17 15 920
18 1 750
19 15 260
20 7 610
21 11 110
22 6 320
23 12 120
24 43210
25 10 140
26 5 920
27 15 590
28 7 270
| 99 15 440
30 10 520
31 15 030
Moyennes . "
EAU
6 630
10 600
10 540
=
Ăudi
7 490
12 260
7 200
12 700
10 570
14 760
9 000
14 040
2 940
15 390
2 780
15 550
2 640
15 380
7 360
14 810
9 030
15 490
2 760
15 110
10 850
14 900
5 050
13 110
11 530
12 110
040
BUE
Ă 6h,
du
soir.
9 080
8 280,
8 580
3 440
11 200
14 820
11 920
14 670
10 490
15 940
11 420
14 980
15 240
15 290
15 120
15 690
13 009
15 810
10 860
15 350
14 150
15 930
14 730
15 030
14 150
15 700
10 650
15 420
5 960
15 620
14 080
totale,
17 690
29 390
31 670
31 790
34 600
28 560
42 120
30 260
34 410
30 960
34 950
32 670
33 660
31 560
32 970
33 480
37 770
34 290
37 740
29 610
34 480
35 140
36 520
31 290
35 809
32 930
38 250
34 150
32 544,21 1 145,9] 33 688,1
EAU
EAU
totale
du
POIDS
con-
des
four- sommée
par fĂšces.
rage. L
8 jour.
â 12 630
" 8 880
" 11550
" 7 780
" 9 580
" 7 140
" 8 330
" 10 280
n 9 300
" 8 830
" 8 860
" 11530
â 8 840
" 10 790
" 9 320
" 10 910
u 8 390
â 8 590
" 7 630
Ă 9 780
1 10 230
" 7 960
" 9 750
" 9 850
" 9 320
" 10 850
â 9 440
u 9 830
" 10 880
" 8 130
" 9 730
9 506,1
MATIĂRE
seche
â â
p.100 | totale
des des
feces, | feces.
Gr.
24.90! 3 145
27.55| 2446
22.40! 9 542
23.70| 1 844
20.47| 1961
24.90] 1728
26.02| 2167
25.40! 9611
93.85| 2218
28.37| 9 505
26.82| 2376
26.47| 3 052
26.95] 2 382
25.47| 2748
24.87| 2518
25.65] 2 798
23.90, 2 005
25.00! 2148
24.22| 1 848
26.47| 2589
22.62| 2314
26.37| 2099
93.37| 2279
28.70| 2827
94.49! 2 276
25.95| 2810
22.60| 2135
25.27| 9 484
24.27| 2641
27.27|" 2217
23,97| 2332
Porps| TĂMPĂ-
du
cheval
a7h.
du
malin,
RATURE
du
cheval
Ă 7 b.
du
matin.
Degrés
© C2
co A
LO ⏠me pe pe me me RO ÊÊ 19
2
co
LS = Ê ©
Ć âŹ
Ć
D
38
19 ⏠pe RO > be Pe be be
co
oo -
S = â
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. | 33
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N9 1.
Ă REPOS.
(Numéro matricule 34 614.)
EAU MATIĂRE |Porns| TEMPĂ-
totale Ă©che du RATCRE
con- du
o cheval
Septembre | Ă 7 h. a6h, | SA |" some p.100 | totale [a7h. |
des des du du
feces. | feces. | Matin.
a â | CHEVAl
ee
Degrés
38
14 180 12 400
1
0
0
0
0
1
1
2 810 10 720 0
11 430 11 100 0
11 620 ; 11 130 1
15 370 ; 10 480 1
15 300 10 680 1
13 940 Ăš 10 970 . 468,5 0
11 860 | 15 750 8 7;0 ; 333 | 467,4 0
13070 | 18790 10 230 .: 467,4 0
14640 | 25 210 12 180 L 25 471,0 0
14 650 | 30 560 13 320 | 24.87 468,9 1
7000! 17350 10 410 | 26. 2766 | 467,8 0
8910 | 17170 11 230 | 26. 2 469,5 1
10480 | 6550 | 17030 9 200 | 25. 1 | 468,3 0
7 840 | 10980 | 18 820 12 550 Ă« 2 467,9 1
8080 | 9700! 17780 11 720 © 469,9 0
6340 | 11240 | 17 580 11150 | 25.62 469,2 0
6050! 7420 | 13470 9750 5 2834 | 471,5 1
9380 | 7180 | 16560 10 300 Ă 469,7 1
10 220 | 14150 | 24370 11960 : LE 469,4 0
9910 | 10 950 | 23 650 10 720 4 466,5 1
6990 | 8580| 15570 9 260 . 468,3 1
9440 | 8840| 41S 280 10 150 : 469,6 1
6910 | 12090 | 19000 11110 . 22 | 470,5 1
Moyennes . u "| 18 848,8] 4 010,6! 19 858,9 |11071,3 3000,9| 467,8| 38 05
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1. 3
34
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N° 2,
(Numéro matricule 34 464.)
Septembre
1890.
Moyennes .
REPOS.
EAU BUE
EAU
du
©
Ă 7h.
matin.
Ă
midi,
Ă 6 h.
du
soir.
four-
totale, rage.
11 510
9 970
8 030
"
4 000
3 370
3 480
9 000
4 300
10 550
5 290
10 250
2 320
"
Gr.
12 860
10 040
6 140
8 850
14 990
13 170
13 680
"
9 260
13 710
14440
13 830
11 500
5 750
11 660
13 110
13 020
4 390
8 750
7 440
15 460
12 270
4930
13 040
6710
11380
9 360
5 590
10 590
12 090
"
Gr. Gr.
15 630
14 460
6 900
20 240
14 990
15 980
15 360
13 270
18 590
17 820
14 440
13 830
16310
13 730
21 150
15 110
13 020
15 900
18 720
15 470
13 460
1627
8 300
16 520
15 710
15 680
19 910
11140
20 810
14 410
993,6
15 388,7] 993,6
EAU
totale POIDS
con- Ă
sommée Se
par
jour.
9 680
10 880
8 920
9 460
10 910
10 510
11220
10010
9 460
12 300
7 670
8 790
9 580
10 480
11 060
9 990
9 250
10 160
10 730
9 360
11 020
9510
10 440
9 520
10 960
10 160
8 230
10 520
11560
7 900
16 382,3 |10016,5
MATIĂRE
sĂšche
ne
p.100
des
feces.
totale
des
feces.
TEMPĂ-
RATURE
du
cheval
Ă 7h.
du
malin.
Degrés
37 9
37
38
38
38
38
38
37
37
9
0
0
1
0
0
9
9
9
0
9
0
0
1
1
9
1
Q
1
0
9
1
9
0
9
9
9
0
1
98
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
30
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 3.
(Numéro matricule /37 999.)
DATES.
Septembre
1890.
Moyennes .
apon.
du
matin.
15 860
15 550
7 830
15 480
9 770
8 620
13 690
15 140
9 750
15 660
13 400
15 420
12 650
30 770
33 570
36 010
33 680
26 270
38 950
31 510
32 710
32 620
26 660
32 980
35 620
37 360
26 370
34 440
39 150
31 560
36 340
36 170
30 950
36 890
34 520
30 200
38 190
32 420
36 280
31 230
40 680
32 810
39 160
54 202,3
VOITURE.
EAU
totale POIDS
du con-
, des
sommée
10 320
10 140
8 500
10 530
11 350
5 950
8 950
6 930
10 710
6 800
9 590
8 280
11 530
7 980
10 000
9 190
9 740
8 630
9 510
9257
MATIĂRE
sĂšche
p.100
des
totale
des
fĂšces. | fĂšces.
POIDS
du
cheval
Ă 7h,
du
matin.
TEMPĂ-
RATURE
du
cheval
Ă 7h.,
du
matin,
Degrés
38 1
38 1
38 1
38 1
38 2
38 1
38 3
37 9
38 1
1
2
38 12
36 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL.DE TRAIT.
CHEVAL N° 1.
(Numéro matricule 34 614.)
REPOS.
EAU MaTiĂšre | Porps| TEMPĂ-
totale POIDS Peche du RATURE
con- té havah [RL
sommée Fe p.100 | uotale | à 7h. sen
par feces. des des du du t
1890. jour. feces. | fĂšces. | Matin. | patin.
Octobre
Gr. Kil. |Degrés
5210 | 9820 | 15030 11 480 | 98.! 471,5| 38
#710| 7270 | 12980 10 550 | 27.6: 471,4| 38
6260 | 10040 | 46 300 10 520 | 29. 470,5| 38
6200 | 6940 | 13140 9 650 | 27. 470,9| 37
39%0-| 11 900 | 15 850 9 860 | 25. 467,1| 38
8440 |â10 450 | 18 590 11 760 | 25. 168,9] 38
7470 | 12280 | 19 750 11 620 | 25. 469,6| 38
9440 | 8340 | 17 780 19 530 | 96.: 470,9| 38
14610 | 10110 | 94 720 11 840 | 94. 468,7
11490 | 5620 | 17410 13910 | 27.15 475,9
8 790 | 13340 | 92130 13 950 | 27.9: 476,2
10 250 | 10770 | 21 020 11 520 | 98. 477,6
6 600 | 11220 | 17 820 10 610 | 29.32 478,8
7490 | 7580| 15070 12 690 | 29.95 476,8
10440 | 8160 | 18600 19 760 | 27.: 476,4
9930 | 8520 | 18450 19 000 | 26. 476,1
11 040 | 10 850 | 21 890 14530 | 28. 478,4
8010 | 9280 | 17:290 12250 | 26. 480,4
2950 | 8080 | 12330 11 170 | 27. 471,0
11430 | 7950 | 19400 9 350 | 28.5 479,5
6430 | 9440 | 15870 11 410 | 99. 473,1
8790 | S370| 17160 19 870 | 30.72 473,3
1860 | 8070| 12930 | Ă 10 900 | 31. 470,7
8870 | 7610 | 16480 11 280 | 26.67 469,1
6540 | 7020| 13560 10 820 | 20. 469,4
9760 | 7870 | 17630 10 960 | 28. 468,9
6390 | 9380 | 15770 19 170 | 30.52 473,5
2680 | 7180| 9860 10 770 | 33. 474,4
6090 | 8520 | 14610 11 400 | 29.5 468,3
11 460 | 11450 | 22510 13510 | 29. 471,0
6680 | 11140 | 17820 10 960 | 30.9: 478,3
© © 1 OO CO à ©) ©
ad
[=]
he ble ee D ele te le te
© OO NI QG OO # CO 19 be
Moyennes . u â |17072,6| 1078 | 18450,6 [11635,5 473,1
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 37
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 2, VOITURE
(Numéro matricule 34 464.) x
ââ
EAU MarTiĂšree |porps| TSMPE-
totale POIDS Seche du RATURE
d cheval + 1
; es $ cheva
Octobre | Ă 7 b. PPREe p.100 | totale | * fe Ă 7h.
du ; A AE des du du
fĂšces, | fĂšces. | Matin.
con- a
1890. malin.
14 630 | 17420
2 500 | 17330
13 550 | 34 640
8240 | 21910
13570 | 21 990
10960 | 16770
14150 | 28710
8 440 | 27 280
13 540 | 15 060 | ° 30 990 9 520
12200 | 7050 | 24020 9 020
11 800 | 14720 | 26 520 9 660
3 620 | 11820 | 25150 9 700
13 500 | 14550 | 31340 11 660
1 13710 | 17 440 9 010
12 970 | 13030 | 36 650 10 520
8970 | 8700 | 24220 9 360
13510 | 13980 | 27490 12 470
9 900 | 9780 | 30 980 10 920
10 170 | 15060 | 25 230 7 860
9360 | 11190 | 33 550 11 540
10 700 | 14870 | 25 570 10 160
10760 | 6430 | 29340 11 150
15 360 | 14690 | 30 050 8 320
10290 | 10850 | 28 410 11 390
10 240 | 14980 | 26 900 10 460
9750 | 10220 | 32 270 12 710
11 800 | 14590 | 26 390 8 180
8720 | S750 | 25 560 9 440
12 660 | 13830 | 26490" 10 480
8480 | 9010! 27790 12 180
10290 | 15140 | 25430 9 190
" n | 26575,1| 1364,0| 27 939,1 | 10 208
38 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 3,
REPOS.
(Numéro matricule 37 999.) As
EAU MarrĂšre |pPoips| TEMPi-
RADĂBUR totale | PoIps roche du | RATURE
PMR AIRERL > PRE du con- ne heaven
à ñ des 4 cheval
Octobre ah: Ă 6h, four- PDU p.100 | totale | Ă 7h. a7h
du du totale, par feces. des des du Fe
3 rage. : ;
matin. Jour feces. | fĂšces, | Maun.
Gr. Gr. x IT. Gr.
11710 | 25 540 9 110
4330 | 14090 6 250
13 600 | 20 920 8 580
11090 | 18 920 8 840
12020 | 15410 9 840
9180 | 17 560 9 960
11 470 | 20450 10 610
6670 | 15550 11 290
13280 | 17 530 8 160
9 300 | 16630 9 320
6570 | 16040 10 800
7570 | 16710â 11 210
5990 | 16 330 10 250
13 620 2 830 | 16450 9 100
12 030 6180 | 18210 10 210
10 920 9 900 | 20 820 12 190
8 620 | 10 860 | 19 480 13 580
8150 | 12610 | 20 760 13 850
4 920 | 11 580 | 16 500 11 050
8 360 2 700 | 11 060 10 500
10 350 570 | 17 920 10 320
9 410 90 | 18 160 12 150
8 340 | 11920 | 20 260 9 12 780
3160 | 13720 | 16 880 10 730
3890 | 9160 | 13 050 14 070
9 590 8330 | 17 920 11 940
7 090 5 940 | 13 030 11 250
7 410 7080 | 16370 12 640 | 21. GE 470 ,0
8 780 6980 | 15 760 . 12 160 | 29, 26 468,4
9350| 7340 | 16 690 13 980 | 22.45! 31: 469,5
31 12 870 8 250 | 91 120 14 250 | 22.4 468,6
S OO SL mm OO nm © = © = © = D 7 Le
Moyennes . u â |17499,5| 1 006,9! 18 429,4 |10994,2 464,6
â
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 39
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 1.
(Numéro matricule 34 464.)
REPOS.
EAU MATIĂRE | Porps| TEMPE-
EAU BURK totale POIDS HA du RATURE
con- ane | cheval du
cheval
Novembre Ă 6 h. : Ă 7h.
du totale, te feces. des des nu du
NPaD 4 Jour, feces, | fĂšces. | MAUR. patin,
: des . 7
sommée p.100 | totale à Th.
par
Degrés
7 530 | 11 190 9 10 270 | 50. ; 5| 37 9
13180 | 8080 | 212 11 110
8850 | 9850 | 18 9 520
9440 | 5900! 153 10 520
9200 | 3760 | 12 10 150
8080 | 9420 11 850
129270 | 9190 | 21460 11 270
9950 | 5450 | 15400 11 970
6 300 | 11680 | 17980 13 250
19 440 | 11530 | 23 970 15 170
4310 | 9590 | 15900 12 150
6790 | 7930 | 14720 13 710
6970 | 9300 | 16270 13 520
11650 | 7760 | 19410 11 900
7650 | 8970 | 16620 13 730
9 010 | 13570 | 22 580 11 180
12 500 22 930 10 950
12 460 10 240
10 070 Ăż 4: 10 890
11 550 9 910
11 780 2, 9 920
10 190 3 10 770
5 890 | 12 5 12 450
12 200 Ă 12 150
10 140
8 370
9 950
8 930
11 910 9 910
9 360 | 15 880 10 970
D à NI QD NJ A ©
1
Moyemes , mn. |17760,7| 1153,2| 18 915,9 111218,7
L
40 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N° 2.
(Numéro matricule 34 464.) VORRE
PASS EAU BUE Re bre POIDS < an 7 ane sl
tes du con- = PRO TE RAM cheva Rent
Ăš ; des = : cheval
Novembre Là 7 à a6h. four- | sommée p.100 | totale [à 7h. |,
du du totale. par fĂšces, des des du du
1890. PE NUE soir. pe jour. feces. | fĂšces. | Matin. | marin
Gr Gr Gr Gr Gr. Gr Gr Gr Kil. |Degrés
1 11 890 | 16 260 9 740 | 31 890 | 1552,9 " 11730 | 29,45] 3454 | 474,5| 37 9
2 1 13 550 | 12 750 | 96 280 " " 7960 | 29.32] 9334 | 475,9 1
3 10 090 9 100 9 970 | 29 160 " " 114910 | 30.00! 3573 | 477,1 "
4 1 13 090 | 14400 | 27 490 " " 11410 | 27.77| 3169 | 476,6] 38 0
5 11340 | 10 150 9 320 | 30 810 n " 10580! 28.57| 3023 | 472,6| 38 0
6 5 569 | 12110 | 13360 | 31 030 1 â 11570 | 29.05| 3361 | 479,6| 38 0
1( 15 350 | 10 320 | 10 150 | 33 800 Ćž # 12 030 | 28.47| 34925 | 474,1| 38 0
8 5 460 | 11990 | 15550 | 33 000 u # 11160 | 28.57| 3188 | 478,5| 38 0
9 12 680 7860 | 12470 | 23010 1 â 11100 | 29.62| 3 288 278,6 37 9
10 1 13 570 | 13 480 | 27050 1 # 9360 | 30.67| 2871 | 471,8] 37 9
11 3 680 7 460 | 12 210 | 22 750 u â 11 940 | 25.17| 3005 | 472,4| 58 0
12 3 890 | 12 770 | 14 820 | 31 480 " # 11590 | 27.90] 3934 | 476,5] 38 0
13 13 570 9 940 | 11850 | 35 360 â 1 13 670 | 23.95] 39274 | 473,1| 37 9
14 n 14 670 | 13550 | 28 220 â F 9980 | 24.70! 2465 | 472,0| 37 9
15 14 510 2 120 | 14380 | 31010 u â 11 100 | 25.97| 92883 | 474,2| 37 9
16 10 890 | 14 710 | 15210 | 40 810 " " 10 100 | 25.97| 2583 | 474,3] 37 8
17 12 550 | 11510 | 12700 | 36 760 # u 12900 | 24.40] 3148 | 469,6] 37 9
°l,48 2 990 | 14420 | 15 040 | 32 450 " â 14 110 | 28.12] 3124 | 472,0] 37 8
19 10 910 | 10 190 | 12880 | 33 980 u â 11260 | 26.20| 2950 | 465,0| 37 9
20 > 860 | 13990 | 14120 | 33970 " " 11350 | 26.17] 297 473,9] 38 0
21 11 890 | 10180 | 11050 | 33 120 " " 12330 | 25.67! 3165 | 465,4] 37 9
22 690 | 14 890 | 14490 | 30 070 Q â 10340 | 27.15| 2807 | 465,8| 37 9
23 15 980 | 11 300 | 11210 | 36490 " " 10610 | 26.92! 2556 | 465,5| 37 9
24 4210 | 15 410 | 15210 | 34 830 1 " 10 670 | 27.80| 2966 | 468,0] 37 9
25 11 590 7430 | 10 140 | 29 460 1 1 10 650 | 26.47| 2819 | 467,0| 37 8
26 4540 | 13020 | 15270 | 32 830 Ćž " 12 900 | 27.32] 3524 | 468,5| 37 9
27 13 080 7210 | 10190 | 30 480 1 u 11140 | 29.50] 3286 | 467,3| 37 8
28 3 280 9210 | 14600 | 27 090 " â 11430 | 25.37] 3248 | 469,6] 37 8
29 10 780 9 980 9170 | 29 930 " " 11650 | 29.47] 3433 | 464,6| 37 8
30 1 14 400 | 14370 | 28 770 " # 10290 | 28.22] 2904 | 464,7| 37 9
Moyennes . " u n 31 446 | 1552,9| 32 998,9 | 11 194 mn | 3077,5| 471,5] 37 9
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 41
ĂTUDES EXPĂRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL N0 8.
(Numéro matricule 37 999.)
REPOS,
EAU MATIĂRE POIDs| TEMPE-
EAU BUE e totale | Porps sĂšche du | RATURE
"TE â_â 2 con- re â, cheval du
; des ne cheval
Novembre & a à 6 h. sommée P. 100 totale à 7Th. à Th.
% du totale. pa fĂšces. | des des du du
1890: in. © ; jour. feces. | fÚces. | matin. |ouin,
Degrés
38,0
13 360
15 230
12 940
13 280 14510
7150 12 390
4 690 14 080
5 920 14 000
7 520 13 080
7 650 ; 9 210
7 220 12 320
8 070 19 100
7 270 10 080
7 090 2 15 210
7070 19 160
6260 90 : 13 500
7 860
8 380
9 280
6 450
6 880
.7 530
4 330
5 440
9 430
3 880 17: 10 930
6 720 12 640
8 050 11 680
1°
ra
19
19
]
=
O2
1O += 19
to CO LO
CAPES OS Se SN SM et ot otS) Se © Croce. otre cieus
o
Moyennes . " 26 | 1153,2| 19 179,9 |12741,7
42 ANNALES DE LA SGIENCE AGRONOMIQUE.
RATIONS CONSOMMĂES.
On a vu précédemment que les chevaux ne consommaient pas
toujours entiÚrement les rations qui avaient été fixées. On trouvera
dans le tableau suivant, en mĂȘme temps que la teneur en eau des
fourrages, les quantités réellement ingérées.
TAUX
p. 100 dâeau
a Ă Ă â â â
de la de la
féverole.| paille.
CERTES Ze a nl SNS CRE
Kilogr. | Kilogr. | Kilogr. | Kilogr. | Kilogr.
DĂ©cembre 1839. . . . . Ă .28 4,000 | 5,000 | 4,000 | 6,000! | 4,000!
Janvier 1890 . 74 8.35 | 5,0 4,060 | 6,000 | 4,000 | 4,056 4,064
FĂ©vrier 1890 . 68 .98 4,000 | 4,500 | 4,000 | 5,000
Mars 1890 : .80 3,290 | 4,000 | 4,000 | 5,000
Avril 1890 2 .04 | 4 4,000 | 5,000 | 4,000 | 7,000
Mai 1890 2 2 4,000 ,000 | 3,710 | 3,742
Juin 1390 2. .12:) 8 2,683 ,000 | 4,000 | 4,000
Juillet 1890 Ă 2.30 | 7 8,226 ,000 | 4,000 | 4,000
Août 1890 : 2.00 4,000 | 4,000 | 4,000 | 7,129
Septembre 1890 . . . . : .05 4,000 ,000 | 4,000 | 7,467
Octobre 1890 4 202 4,000 ,164 | 3,065 4 4,000
Novembre 1890. . . . .| 43. 5.07 4,000 | 8,000 | 3,000 | 4,000
CHEVAL N° 1. | CHEVAL x0 2. CHEVAL N° 3.
FĂ©verole| Paille, [FĂ©verole| Paille, |FĂ©verole.| Paille.
4. Le cheval nv 3 a laissĂ© en janvier 5k:,920 de restes contenant 19.63 p. 100 dâeau. Nous avons tenu
compte de ces restes dans le calcul des coeflivients de digestibilité.
De ces données, il est facile de tirer les quantités de matiÚre sÚche
de la féverole et de la paille consommées chaque jour par les chevaux.
Le tableau suivant donne ces quantités.
CHEVAL N° 1. CITEVAL N° 2. CHEVAL N° 3.
Re RE PER â Ă
FĂ©verole.| Paille. [FĂ©verole,| Paille, |FĂ©verole.| Paille.
DĂ©cembre 1889. . . . 39 3348,8 | 4435,5 | 3 348,8 | 5 322,6
Janvier 1890 44 D | 3266,0 | 5 295,6 3 579,8
FĂ©vrier 1890 5 299,2 | 3 280,8 | 3 974,4 28 4 416,0
Mars 1590 6 111,0 | 2704,4 | 3 492,0 | 3: 4 365,0
Avril 1890 3 507,6 | 3398,4 | 4384,5 | 3 398 6 138,3
TA 1900 ER MER EE CEE 4 399,5 | 3484,8 | 6 159,3 | 3 2: 3 292,6
Juin 1890 21 2651,31 3507,6 | 3 55: 3 507,6
Juillet 1590 TRAIT QUO EE 2 827,3 | 3 492,4! 3 505 3 492,4
Août 1890 3497,9 | 3590,0 | 3 497,2 6 232,9
Septembre 1590 3 604 3518,0 | 3 438,4! 3518,0 | 6 512,0
Ogtobre 1890!L. % ATEN MER 5 5 443,9 | 6956,6 | 2 638,4 | 3478,8
Novembre 1890 3 249, 3397,2 | 6 899,92] 2 547,9 | 3 449,6
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 43
COMPOSITION CENTĂSIMALE DE LA MATIĂRE SĂCHE DES FĂVEROLES
ET DES PAILLES CONSOMMĂES.
Le tableau suivant donne la composition centésimale de la matiÚre
sÚche des féveroles et des pailles consommées :
CELLULOSE
saccha-
rifiable.
CENDRES,
GRAISSE.
INDĂTER-
brute,
PROTĂINE.
FĂ©verole.
DĂ©cembre 1889
Janvier 1590
FĂ©vrier 1890
Mars 1890
Avril 1890
Mai 1890
Juin 1890
Juillet 1890
Août 1890
Septembre 1890
Octobre 1890
S
ES à ©
RES
or #
OO OT QT D OO 1 nJ CE Or CE 1
Fe RC Co
en De be bi be pe be be De be De je
Ă t
NI © Or à OF QE OX
CS
CS
DĂ©cembre 1889
Janvier 1890
FĂ©vrier 1890
Mars 1890
Avril 1890
Mai 1890
Juin 1890
| Juillet 1890
PACAEAIROQN EN RER MERS R NUE
| Septembre 1890.
| Octobre 1890
| Novembre 1890
= Co
= ©
Fe & CC
co
CO + + C0
Qt LEO M O0 @ © QT © Oà mn 1 1
PNCAAE RS . DS Ă ss
19 pe 10 = ICO re +
19 +9 RO LO +9 RO 19 FO HO FD +9 19
ie). Le tes Ve EEE le dev
LO © 19
rs
|
1
l
{. L'amidon a été dosé par le procédé au chlorure de zine, imaginé par A, Leclerc. (V. Annales de la
Science agronomique, t. 1, 1859.) Cette méthode, applicable sans inconvénients aux grains, donne, dans
les fourrages fibreux, des chiffres trop forts par suite de lâattaque, par le chlorure de zinc, des parties les
plus solubles de la cellulose, Ce fait, qui explique les chiffres élevés d'amidon dosés dans la paille et dans
les feces, a eu pour conséquence que les nombres obtenus pour les coellicients de digestibilité de l'amidon
sont un peu trop faibles.
COMPOSITION CENTĂSIMALE DE LA MATIĂRE SĂCHE DES FĂCES.
Chaque jour, une partie des fÚces émises était séchée à 108 degrés
dans le vide ; on prélevait, sur la matiÚre sÚche ainsi obtenue, une
44 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
fraction constante de la matiÚre sÚche totale rendue, et ces prélÚve-
ments servaient Ă composer les Ă©chantillons moyens mensuels dont
la composition suit :
\
Ă CELLULOSE Ă S Ă« Ă« :
pa re AIT ES a & a A
A ĂȘ le] a 3 2%
3 brute. er © à = à 3
e) rifiable, < (Si cm H
Cheval n° 4.
DĂ©cembre 1889-71... 12.00 | 27.56 13.90 | 4.00 1 4.80 | 11.51 26.23
Janvier ASS0PM EC CE 40.95 | 28.66 | 11.00 | 3.53 " 5.19 13.29 | 27.38
RĂ©vrier 1890 MAIRE 11.86 | 26.97 | 13.26 | 4.82 1 5.19 14.34 | 24.26
MaTemeg0 EME C A ERA 11.24 | 24.81 12.98 | 7.00 " 4.98 | 15.44 | 23.55
Avr Bon Ge LUE CARRE 10.28 | 26.38 | 15.63 | 5.67 | » | 5.40 | 11.90 | 24.74
MANS 90 MEET CP UE 8.85 97,69 14.34 3.33 u 4.43 12.70 | 28.66
JUL SION EMEA ERNEST 8.73 | 26.74 |° 11.95 | 4.36 " 4.42 16.56 | 27.24
Jutllet lS90 427 ANT E 10.30 | 28.38 11.86 | 3.85 " 4.70 15.95 | 24.96
NOĂ 1000 ane ele bee hill OA) 29.02 13 97 4.92 1 4.65 12.24 | 94.78
Septembre 1590. . 1. . . - 9.78 95.69 12.50 6 9.54 Q 4.60 12.47 | 32.49
Ovrobre 18908 1: rPoumr ere 9.95 27.36 1727 4.84 â 4.95 42.40: | 29:7
Novembre 1890 .:. . . -/. . 9.38 27.83 15.86 4.20 1 5.18 13.07 24.48
Cheval n° 2.
Décembre 1889 . . . . . .. 12.65 | 30.04 | 12.53 | 5.46 | » | 4.04 | 9.05 | 24.43
Janvier 1890 . . . . . . . . 11,60 { 30.00 Ă 11.78 | 4.00 " 5.15 | 10.67 | 6.80
FĂ©vrier 1890..." + + + | 10.31 | 928.72 | 14.90 | 4.51 " 5.320/44-4701025 07
Mars 1890 2m RE ERe 10.83 | 31.94 14.17 6.31 " 4.63 8.94 | 23.18
AVANAMSTONEE PNR 11.05 | 29.57 14.32 | 4.40 1 5.08 | 10.62 | 24.96
Mai 8902 IA MT te 9.923 29.62 15.02 3.61 " 4.67 14.09 23.76
JUAN SOON died moe ol. 7.76 31.28 14.40 3.83 " 4.25 9.20 | 29.28
Jet SD ALMA ER ER 8.50 | 32.09 13.92 4.30 Q 4.36 8.82 28.01
AO SIO. Me msi arte e 9,71 31.40 17.85 3.73 â 4.32 10.30 | 22.69
Septembre 1890. . . . . . . 9.24 || 28.08 | 11.20 | 2.32 " 4.12 9.95 | 35.09
OCt0DrE MSIE RS CC 9.96 29.05 16.72 3.41 " 5.07 13.33 | 22.46
Novembre 1890 .. . . . . . . 9.89 | 28.55 | 15.29 | 3.42 " 5.80 | 14.00 | 23.55
Cheval n° 3.
DĂ©cembre 1889 . . . . . . .| 15.20 | 29.46 | 11.44 | 5.87 " 5.08 10.30 | 22.65
Janvier 1890 . .. . ...:..: 111916109724 40.31 2.68 " 4.53 9.37 | 30.71
FĂ©vrier 1890,. . . . . . . . 13.87 | 26.92 | 16.37 | 5.44 u 4.76 | 11.48 | 21.16
Mars 1890-P-° 5m are 10.70 | 29.94 12.78 | 4.55 â 4.09 9.86 | 28.08
AVTIUUTBSOOL MENU ENNT, AN. 13.76 26.00 15.25 | 4.98 " 6.15 14.00 19.83
MAL ALSOD ER SE TARN RE 9.36 | 29.7 13.73 | 3.78 " 4.57 11:04 27.78
Juin 1890 rame 9.47 30.72 14.54 | 4.26 " 4.26 9.67 27.08
Juillet. 1890, m0 1 A0: 06 110TO0EES 13.92 | 3.41 " 4.16 11.10 27.27
Août 1890771 12.20 | 28.05 16.02 | 3.82 " 5-52#240:04 19.35
Septembre 1890 . . . . . . . 13.64 22.40 10.03 | 3.85 " 4.28 19.61 26.19
Octobre 1890 |. . , . . . . | 11.34 123.82 | 45.66 14.47 5 Ăš
Novembre LSJOTM US 10.15 | 29.66 | 15.28 | 4.70
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 45
COMPOSITION DES RATIONS INGĂRĂES ET DES FĂCES RENDUES. â
QUANTITĂS DE PRINCIPES IMMĂDIATS DIGĂRĂES. â COEFFICIENTS
DE DIGESTIBILITĂ.
On trouvera, dans la série des tableaux qui suivent, la composition
des rations ingérées par les chevaux dans chacune des situations
quâils ont occupĂ©es, ainsi que la composition des fĂšces correspondant
à ces rations, et, par soustraction, les quantités de principes qui ont
été digérées. Avec ces données, il a été facile de déterminer les
coefficients de digestibilité des différents principes, coefficients qui
figurent Ă©galement dans ces tableaux.
Comme dans les recherches précédentes, nous avons négligé les
données relatives aux matiÚres minérales, données que les condi-
tions des expériences ne nous permettent pas de recueillir exacte-
ment.
On remarquera aussi que, dans presque tous les cas, les quantités
de matiÚres grasses rendues dans Les fÚces sont supérieures à celles
qui ont été ingérées. Les coefficients de digestibilité de la graisse
nâont, pour celte raison, pas pu ĂȘtre dĂ©terminĂ©s; ils eussent presque
ioujours été négatifs. Cette anomalie s'explique aisément si on con-
sidĂšre, dâune part, que la fĂ©verole et la paille contenant trĂšs peu de
matiÚres grasses, la ration en était presque dépourvue, et que,
dâautre part, les sucs intestinaux, la bile notamment, apportent aux
résidus de la digestion des quantités non négligeables de graisses
qui se sont trouvées, pour le cas présent, supérieures à celles que
les chevaux ont digérées.
Ceci constaté, voici les coefficients de digestibilité des autres
principes.
TABLEAUX.
46 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Coefficients de digestibilité.
CELLULOSE
,.
INDĂTERMINĂS.
TT " â
saccha-
organique.
de décembre 1589.
MATIĂRE
CENDRES
MATIĂRE
AMIDUN.
GRAISSE.
brute,
PROTĂINE.
rifiable.
Cheval n° 1.
3756,5| 269,5
3 162,5] 4 060,6
A ingéré à 6918,8| 1330,1| 714,8
A rendu 2514,11 787,%| 397,1
A digéré. . . . .|4483,9
Coefficients de di-
gestibilité . . .| 61.08 63.66 | 40.80 | 44.44 : 100.00
Cheval n° 2. â Marche au pas.
4173,8| 299,4] 245,8
3 162,3] 1 060,6
A rendu
A digéré. . . . . 4746,4| 459,4 ANA
Coefficients de di-
gestibilité . . . é f 21 d 93.00 | 100.00
Cheval n°3. â Travail au manĂšge au pas.
5 008,6! 359,3| 2 247,2
3 162,3] 1 060,6
8 170,9] 1 419,9
2634,1| 915,1
A digéré. . . . .| 556 504,8] 43, 2 541,6 1 394,7
Coefficients de di-
gestibilité . . .| 64. ' : } ; 81.34 | 33.22
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 47
CELLULOSE
saccha-
y
MATIĂRE
organique.
INDĂTERMINĂS,.
CENDRES.
MATIĂRE
de janvier 1890. brute.
GRAISSE
PROTĂINE.
rifiable.
|
992,9 | 4190,1
163,3 | 3 102,7
7 679,0| 386,2
2 840,0| 311,0
A digéré à Ge 85 2 159,4
Coefficients de di-
gestibilité . . . : 95.56 | 100.00
A ingéré
A rendu
A digéré
Coefficients de di-
gestibilité . . .
Cheval n° 3.
3399,0| 275,6
3152,4| 1 025,4
ASTECL- AU (0 0e 6 551,4] 1 501,0
A laissé à 142,2 34,6
A ingéré 6 409,2] 1 266,4
A rendu 2118,7| 657,0
609,4
Coeñfticients de di-
gestibilité . . .| 64. 65.38 | 48.12
48 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
CELLULOSE
TT,
Es saccha-
de février 1890. ent
MATIĂRE
CENDRES.
MATIĂRE
organique
GRAISSE
PROTĂINE.
rifiable,
INDĂTERMINĂS,
Cheval n° 4. â Travail
5009,8| : : 2 1 607,8
148,6
A ingéré.
A rendu
A digéré
Coefficients de di-
gestibilité . . .
Cheval n° 2.
FĂšves 0... .:.13974,4 3 757,0
Paille, . . AE 3 3 049,2
A digéré : 4 ,9| 412,3 | 185 1 063,4
Coefficients de di-
gestibilité . . . à g 10 4. $ 78.51
Cheval n° au pas.
4174,4| 925 260,5 |2025,8| 16: 1 339,8
3 049,2 3| 5 136,2| 134 148,6
7 293,6 2172,0| 297,2 / 1 488,4[1097,0
2 411,0 2 3: 116,7 | 9281,4| 518,6
Adigéré 204.11. L 4 2 2 038,7| 297,2 1207,0| 578,4
Coefficients de di-
gestibilité . . . 70.77 45.388 51.45 | 93.86 | 100.00 81.09 | 52.72
de mars 1890.
A digéré
CoefĂŻicients de di-
gestibilité . .
FĂšves. . .
Paille
à ingéré
A rendu.
A digéré. . . . .
Coefficients de di-
gestibilité . . .
à ingéré
A rendu
A digéré
Coefficients de di-
gestibilité . .
MATIĂRE
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CELLULOSE
EE Ă
saccha-
rifiable.
AMIDON
GRAISSE.
brute,
CENDRES.
organique
67.08 | 39.86
Cheval n° 2. â Repos.
3286,7| 198,0
118,6
59.66 | 30.26
4108,3| 247,5
2 929,5
7 037,8
2 440,7
4 897,1
69.58 â : 95.34 | 100.00
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1.
PROTĂINE.
1 314,0
236,4
1 077,6
49
INDĂTERMINĂS.
50 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
= El CELLULOSE : . E] #4
M OIS a Ă ARE ee z Ă z Ă
© 2 Be Ă â â [°) a mi <
A 5 8 m x
HS A = A D H A &
x 2 E g Ă < E
d'avrll 1890, 4 A EE de PE de LAS 4 à ° £
s S © rute, : 4 D me Ă
rifiable. M z
Cheval n° 4.
FĂȘves. . . . . .|3507,6| 196,8 |3340,8| 185,9] 162,0 | 1 642,3] 134,3 | 49,1 | 994,8] 149,4
Paille. . . . . .|3398,4| 994,3 | 3 474,1] 1 049,1] 597,1 | 992,2! 73,1 | 90,24 | 143,411068,8
Aingéré, . . .. 6 484,9] 1 235,0 207,4 | 139,5
Arendu. , . . .| 2710,7| 278,6 | 2482,1) 715,1| 423,7 153,7 " 146,4 322,6| 670,6
âA digĂ©rĂ©. . . . .|4195,3] " |4052,8] 519,9] 265,4 | 1710,8| 207,4 | v 815,6] 540,6
Coefficients de di-
gestibilité , . .| 60.75 " 62.50 | 42.10 | 38.K1 | 91.75 | 100.00 " 71.65 | 44.63
au trot.
FĂšves. . . . . .|4384,5| 246,0 | 4138,5| 232,4] 202,6 |2052,8] 167,9 | 61,4 | 1243,4| 178,0
Paille. . . , . .|3598,4| 294,3 | 374,1] 1 049,1 527,1 | 992,2! 73,1 | 90,4 | 143,411068,8
A ingéré. . 3 7 312,6] 1 281,5 240,0 | 151,8
Arendu. . , . .|3445,5| 347,6 |2797,9| 920,1| 450,4 | 138,4] 159,8 | 334,1] 785,1
A digéré. , , . .| 4637,4
Coefficients de di-
gestibilité , . .| 59.58 " 61.74 | 27.42 | 38.97 | 93.92 | 100.00 " 75.90 | 37.03
Cheval n° 3. â Travail au manĂ«ge au trot.
FÚves. . . « « .| 6138,3| 344,4 | 5 703,9] 325,3] 283,6 | 9 874,0] 255,1 | 85,9 | 1 740,8| 249,2
Paille,
Aingéré. . , . .| 8970,0| 531,3 | 8438,7| 1 199,4
A rendu, . . . .|2556,6| 351,8 | 2904,8] 664,7| 389, 197,3] 158,0 | 357,9] 507,0
A digéré. . . . .|[6413,4| " |6953,9] 534,7] 332,0 | 2 932,9) 296,0 | " |4502,4| 632,7
Coefhcients de di-
gestibilité 73.87 | 44.58 | 46.05 | 95.85 | 100.00 " 80.76 | 55.51
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 91
: À
a : 4 CELLULOSE : : A âa
a pis a Z%
LA a = 2 A n A el
| 2 A > a [°] e n Len] =:
H M '°E [e] o H âa ca
= À HS saccha- d = < = 5)
de mai 1890, < 4 Ă a F4 © âa
Ă a s © | brute. |. < D 4 Ă
© rifiable, mn z
La
EE TRE CREER CROSS EPS EE
Cheval n° 4. â Marche au trot.
FĂšves . . . , . .| 4399,5| 158,8 | 4240,7| 331,3| 242,8 | 2063,4| 209,4 49,7 | 1152,7| 191,4
Pauleâ {5 "1." 3484,3| 214,3 | 3270,5| 1153,1| 662,1 | 187,8] 59,6 | 980,9 | 148,5| 978,5
Aingéré. . . . . 7 884,3] 373,1 | 7 511,2] 1484,4| 904,9 | 2251,2| 969,0 | 130,6 | 1301,2/1169,9
A rendu. . . .. 3314,0| 293,3 | 3020,7| 917,6| 475,2 | 110,4] 146,8 | 420,9| 949,8
A digéré. . . . . 4570,3| nv 4490,5] 566,8| 429,7 | 2140,8| 269,0 u 880,3| 220,1
Coefficients de di-
gestibilité . . .| 57,97 n 59.78 | 38.18 | 47.48 | 95.10 | 100.00| » 67.65 | 18.81
Cheval n° 2. â Travail au manĂ«ge au trot,
3 033,4] 1 069,6! 614,1 174,2| . 55,2 75,0 137,7] 907,6
8 970,3
213,2
1533,4| 954,1 | 3062,9| 348,4 | 144,6 | 1751,4/1175,5
1048,5| 531,7 | 197,8] v 165,3 | 498,8| 841,1
A rendu. . . . .| 3539,9| 326,7
Adigéré. . . . .| 5851,6 n
Coefficients de di-
gestibilité . . .| 62.30 "
422,4 |2935,1| 348,4 | on" |19259,6| 334,4
44,27 | 95.83 | 100.00 " 71.52 | 28.45
;
FĂšves . . . . . .|6159,3| 222,4 : : 463,8] 340,0 | 2888,7| 293,2 | 69,6 | 1 613,7| 267,9
Cheval n° 3. â Repos.
FĂšves. . . . ..|3299,6| 118,9 | 3473,7| 247,9! 184,8 | 1 544,2] 156,7 | 37,2 | 862,7 | 143,9
Paille. . . . . .|2805,0| 178,0 |2717,0] 958,0, 550,1 | 456,0] 49,5 | 67,2 | 123,3 | 842,0
A ingéré. . . . .| 6187,6| 396,9 | 5 790,7] 1205,9) 731,9 | 1 700,2| 206,2 | 104,4 | 986,0 | 956,1
Arendu. . . . .|2407,8| 197,3 |1910,5] 626,9! 289,4 | 79,7] » 96,3 | 232,7 | 585,5
A digéré. , . . . 4 079,8 " 3880,2| 579,0! 442,5 | 1 620,5| 206,2 " 753,3 | 370,6
Coefficients de di-
gestibilité . . .| 65.93 " 67.00 | 48.00 | 60.45 | 95.31 | 100.00 " 76.40 | 38.76
52 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
: m
El = a CRLLULOSE Ă : a Ă
MOIS Fi = RS & E o z ÂŁ
BR © e AB > âââ "" â © > SE a =
LE 0 SR PES CN MN EE PE.
de juin 1890. cr Ă« 15 li NME ; p Ă 2 E
© à © 'rifiable. g a al
RE â
Cheval n° 4, â Travail Ă la voiture.
FĂ©vesk ee 7015,2| 995,9 | 6 789,3] 510,7] 372,5 | 3248,0| 324,1 91,2 | 4 829,6
Paillo LL 2651,3| 157,5 |2493,8] 845,2] 391,8 | 175,3] 56,0 | 60,2 | 103,1
AWingéré Ven se 9 666,5] 383,4 | 9 283,1] 1 355,9] 763,8 | 3 423,3| 380,1 | 151,4 | 1 932,7
Arendu. . . . .| 3091,3| 269,9 | 2821,4] 826,6] 369,4 134,8 u 136,6 511,9
AFPĂTON Re 6 575,2 u 6461,7| 529,3| 394,4 | 3288,5| 390,1 " 1 420,8
Coefficients de di-
gestibilité . . .| 68.00 " 69.60 | 39.00 | 51.63 | 96.06 | 100.00 m 73.51
Cheval n° 2. â Repos.
FĂšves . . . . . .| 3507,6| 112,9 | 3394,7| 9255,3| 186,3 | 1 624,0] 162,1 45,6 914,8
PRO T A REUr 3555,2| 211,2 | 3344,0] 1133,4| 524,7 235,0| 75,0 80,7 138,3
ANngĂTE nl 7062,8| 324,1 | 6 738,7] 1388,7|. 711,0 | 1 859,0| 937,1 | 126,3 | 1 053,1
ASrTendu re 3050,5| 236,7 | 2813,8| 954,2] 439,3 116,8 " 129,6 280,7
A digéré. . . . . 4012,3| nv 3924,9| 434,5| 271,7 | 1749,2| 237,1 " 772,4
Coefficients de di-
gestibilité . . .| 56.80 u 53.36 | 31.29 | 38.20 | 93.72 | 100.00 u 73.35
Cheval n° 3. â Repos
F'Ă©ves rime 3 507,6! 112,9 | 3394,7| 255,3] 186,3 | 1 624,0] 162,1 45,6 914,8
Paille, L'MRESRLE 8120,6| 185,4 | 2935,2|] 994,8] 460,6 206,3| 65,9 70,8 121,4
A ingéré, . . . .|6628,2| 298,3 | 6 329,9] 1 250,1| 646,9 | 1 830,3] 228,0 | 116,4 | 1 036,2
Atrendu..11. #0 Ă 2 648,1! 250,8 | 2397,3| 813,5| 385,0 112,8 u 112,8 256,1
A digéré. . . . . 3 980,1 " 3932,6| 436,6! 261,9 | 1717,5| 228,0 u 780,1! 504,9
Coefficients de di-
gestibilité . . .! 60.05 u 62.13 | 34.92 | 40.48 | 93.84 | 100.00 " 75.28 | 41.31
MOIS
de juillet 1890,
A ingéré
A rendu
A digéré
Coeficients de di-
gestibilité . ._.
A ingéré
A rendu.
A digéré
Coeffivients de di-
gestibilité .
A digéré
Coefticients de di-
gestibilité . . .
ALIMENTATION DU CHEVAL DE
69.29
59.62
CENDRES.
CELLULOSE
Ă,
saccha-
MATIĂRE
organique
AMIDON.
brute,
rifiable.
TRAIT.
Cheval n° 4. â Travail Ă la voiture.
259,9
191,4
450,6
6658,1| 431,3| 381,6 | 3147,
2 635,91 919,7| 452,4
9 289,0] 13
2 682,9
71.11 | 37.17
Cheval n° 2.
3 361,4
6 629,7
2 686,3
Cheval n° 3. â Repos.
3361,4| 217,9]
2 894,4[ 1 009,8
6255,5| 1 227,7
1 698,0
94.92
2
227,9
100,00
GRAISSE.
PROTĂINE.
1 842,1
71.90
INDĂTERMINĂS.
36.00
D4. ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
CELLULOSE
MOIS
d'août 1890.
CENDRES.
GRAISSE
.PROTĂINE.
INDĂTERMINĂS.
3497,2| 140,6 | 3 356,6
3520,0| 249,6 | 3270,4| 1 087,7
7 017,2 6 627,0] 1515,7 715,5 | 1 869,3
3071,7| 3 2751,6| 891,4] 429,1
A digéré. . . . .| 3945,5 3875,4l 424,3
Coefficients de di-
gestibilité . . .| 56.93
Gheval n° 2. â Repos.
171,7 | 1587,7| 165 935,9] 245,1
145,4|1029,9
A digéré 38 50,2
Coefficients de di-
gestibilité . . .| 54.87
FĂšves . + . . | 6 232 50,6 | 5982,3|[ 450,4! : 2 829,8
Palo EC 2] 128,8 | 1 688,4 280,7 145,4
8050,1| 379,4 | 7670,7| 1 041,9
2382,0| 290,7 |2091,3| 668,1
à digéré. . . . .|5668,1 5579,4| 343,8
Coefficients de di- Ă
gestibilité . . .| 70.41 72.73 | 33.97
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT,
MOIS
MATIĂRE
de septembre 1890.
FĂšves . .
Paille. .
A ingéré.
A rendu.
A digéré., . . . .
Coefficients de di-
gestibilité . . .
FĂšves. . REA
Palo, rors.e
3 488,4
Aingéré. :-. . .
A rendu
A digéré. . . .
Coefficients de di-
gestibilité . . .
FĂšves . .
Paille, .
A ingéré. . . . .
rendu... .".
Apdigéréses «131.
Coefficients de di-
gestibilité . ,. .
CENDRES.
CELLULOSE
Ă
saccha-
organique.
brute.
MATIĂRE
Cheval n° 14,
3 463,8
3 280,5
6 744,3
9 707,4
4 036,9
59.86
Cheval n° 2.
190,5
1 092,7
6 258,0
1 558,2
78.08 | 47.19
rifiable.
97.50
100.00
GRAISSE.
PROTĂINE.
79.34
43.12
D6 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
1
à ñ A CELLULOSE L : E â4
2 a & © z AR z Z
ae ES © A mn = =
2 © 2 A = 2 : Fa a =
ne A HAE à 5 » ë A
E .& x & aCrhas e <
d'octobre 1890, | < * Se SE p à © E
= = © brute, 3j < Ć e A
Ă rifiable, fa Z
RS EE RSS CEE Es RER RE | 7 CR SOS | CRE CANNES CRE RUES CESSE
Cheval n° 4. â Repos.
FĂȘves . . . .. .[3478,8| 155,9 | 3323,6| 107,3] 210,8 | 1569,6| 155,5 | 54,6 5
Paille. . . . . .|3443,2| 246,6 | 2196,6| 1191,0| 625,6 | 91,6] 59,5 | 74,0 | 196,7| 998,2
AANPOTE REC 6922,0| 401,8 | 6 520,2] 1 388,3] 856,4 | 1 661,2| 245,0 | 128,6 | 1 039,2/1224,5
Airendu. er 00 3295,6| 327,9 | 2967,7| 901,7| 586,3 | 159,5] on 163,1 | 408,7| 748,4
ANDPĂĂLE ES. 0. 3626,4| 3552,5] 486,6| 250,1 | 4 501,7| 245,0 u 630,5| 473,1
Coefficients de di-
gestibilité . . .| 52.39 u 54.48 | 35.05 | 29.90 | 90.40 | 100.00! " 60.67 | 38.7
Cheval n° 2. â Travail Ă la voiture.
FĂšves = 12. 0, 6256,6| 279,1 | 5977,5| 354,7| 379,1 2 823 ,0| 279,7 | 98,2 | 1641,1| 401,7
Paille nr. .| 2638,4| 188,9 |2449,5] 919,6] 479,5 70-2068 621667 97,1| 764,9
Aingéré. . . . .| 8895,0| 468,0 | 8427,0| 1 267,3| 858,6 | 2895,2| 328,3 | 154,9 | 1 738,2|1166,6
A rendu. . . . .| 3030,8| 301,9 | 2728,9| S80,4| 506,7 | 103,3]. v» 153,7 | 404,0| 680,7
APdigére re. 0). 5864,2, 5698,1| 386,9] 551,9 | 2 789,9| 348,3 " 1334,2| 485,0
Coefficients de di-
gestibilité . . .| 65.93 u 67.62 | 30.523 | 40.98 | 96.43 | 100.00! "» 76.76 | 41.65
Cheval n° 3. â Repos.
MOVE 2 Arr US 3478,8| 155,2 | 3393,6[ 197,2] 210,8 | 1 569,6] 155,5 54,6 | 942,5] 293,3
Paille = 3e 4, 3 002,3] 215,0 | 2 787,3] 1 038,5| 545,5 79,91 78,0 | 64,5 | 110,5] 870,4
Aingéré. . . . .| 6481,1| 370,2 | 6110,91 1235,8| 755,3 | 1649,5| 233,5 | 119,1 | 1 023,0|1093,7
A rendu. . . . .| 2499,7| 283,5 | 2246
A digéré. . . . .| 3981,4 u 3894,7| 515,4| 564,9 | 1 537,8| 233,5 n 750,0! 504,5
Coefficients de di-
gestibilité . . . 41.70 | 48.25 | 95.23 | 100.00 " 73.31 | 46.12
A ingéré
A rendu
A digéré
Coefficients de di-
gestibilité . . .
FĂšves . . .
Paille;
A digéré
Coefficients de di-
gestibilité .
FĂȘves .".:. .
Paille
A ingéré
A rendu.
A digéré
Coeflicients de di-
gestibilité . . .
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CELLULOSE
Re Ă
saccha-
CENDRES
MATIĂRE
organique
brute,
rifiable.
241,5 |1525,4
695,1
100.00
â Travail Ă la voiture.
6 899,2] 322 56,0| 482,9! 3050,8
2 547,9 70,5 8,2] 591,3] 139,9
533,7| 3 085,4
69.00 | 30.50 | 53.14 | 96.70 | 100.00
Cheval n° 3.
3 449,6 3 288,2
3 397,2 3 160,4
6 846,8 6 448,6
2 659,2 2 380,3
4187,6 4 059,5
61.16
GRAISSE.
PROTĂINE.
1 903,5
1 590,4
78.68
57
INDĂTERMINES.
58 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
En groupant tous les chiffres relatifs Ă un mĂȘme cheval, sans tenir
compte des différentes situations dans lesquelles il se trouve, on
obtient, pour chacun dâeux, les chiffres moyens suivants :
MATIĂRE CELLULOSE
â âm â
entre la féverole
et la paille
ingérées.
sacchari-
AMIDON
PROTĂINE.
INDĂTERMINĂS
cs
S
A
=
&
&
©
Cheval no 1 : as 56. 47. 93.911100.00! 69.87129.80
Chevalmo 2 era . De 2.9 .92| 45. 94.40|100.00| 75.93|32.13
Cheval n° 3 : : 0 2. 94.611100.00! 77.95140.11
Les nombres contenus dans la premiĂšre colonne de ce tableau
expriment le rapport entre les poids moyens de féverole et les poids
moyens de paille consommĂ©s, ou, ce qui revient au mĂȘme, ils reprĂ©-
sentent les poids de fĂ©verole consommĂ©s en mĂȘme temps que 1 kilogr.
de paille.
Ce rapport entre lâaliment concentrĂ© et lâaliment fibreux dâune
ration est lâun des principaux facteurs qui font varier les coefficients
de digestibilitĂ© ; on conçoit aisĂ©ment quâune ration contenant une
proportion trÚs élevée de paille soit, en bloc, moins bien digérée
quâune ration oĂč le grain domine. Si nous avions pu donner dans
tous les cas des rations oĂč le grain ait Ă©tĂ© Ă la paille dans un rapport
constant, nous aurions éliminé cet important facteur de variations
et, à ce point de vue, les chiffres obtenus auraient été comparables.
Les chevaux ne se prĂȘtent pas Ă ces rationnements exacts, et, dans
un mélange, ils savent toujours classer les éléments de façon à pou-
voir consommer l'aliment qui leur plait et mettre de cÎté celui
qu'ils veulent laisser. Faute de mieux, nous avons donc dĂ» nous en
tenir, pour apprécier l'influence que peut avoir la proportion de
paille ingérée sur les coefficients de digestibilité, à la détermination,
pour chaque ration, du rapport entre les quantités de fÚves et de
paille ingérées. |
S1 nous groupons maintenant les nombres obtenus pour les trois
chevaux dans chacune des situations de repos, marche ou travail,
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 99
nous aurons, en Ă©cartant l'influence individuelle, les coefficients
moyens pour chacune de ces situations.
Voici ces coeflicients :
MATIĂRE CELLULOSE
et la paille.
INDĂTERMINĂS,
RAPPORT
entre la féverole
AMIDON.
PROTĂINE.
organique
saccharifiable,
Au repos.
Cheval no 1 : 56.69! 58.77] 36.11 .45 73 100.00
Cheval no 2, . |4 58.40| 60.10| 31.12| 42. 3.57 100.00
Cheval 00:50 AE 62.09| 63.86] 41.12 5 .42 100.00
Coefficients moyens. .| 4, 59.06| 60.91| 36.12 L .24 100.00
Ă la marche au pas.
Chevalno 1. à « . | 140 63.00! 65.32[ 39.66[ 61.
Cheval no 2. . . . . : 61. 64.701 34.51
Chevaln0ĂŻ3, = 0x. .346 58. 70.77| 45.38
Coefficients moyens. . : 4.35| 66.931 39.85
marche au trot.
Cheval no 1. . . . . . .| 1.96 .97| 59.78 .18| 47. .10[100.00
Cheval no 2. . . . LA Ă .58| 61.74 1.42 3.921100.00
Cheval no 3. . . . . .. .| 1. 58.11| 69.58 .52| 61. .34|[100.00
Coefficients moyens. . s .89] 63.70 3 49. .791100.00
travail au pas.
Chevalno dE en Mu Ă 62.97! 65. 33.071 52. .061100.00
Cheval no MER RTS Ă .85| â67. 36.30 8. Ă 100.00
Chovalino 3m nf: Agl 67.761 35.85| 54. .311100.00
Coefficients moyens. .| 1. .00!| 66.76] 35.17 ; .28|100.00
Au travail au trot.
Cheval no 1 ; 65.23| 67.08] 39. 3 3.22]100.00
Cheval n° 2 .906 | 62.: 64,18] 32.9 .2 5.83| 100.00 ; 28.
Cheval no 3. . dis 97 .30! 73.87 . QU: 5.851100.00 : 55.
Coefficients moyens. .| 2. 68.38 : : .97 1100.00 30.79
60 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
MATIĂRE. | CELLULOSE
|
|
RAPPORT
entre la féverole
et la paille
AMIDON.
PROTĂINE
INDĂTERMINĂS.
organique.
[usastne
travail Ă la voiture.
Cheval no 1 2 68.65! 70.35] 38.08| 54.55 .30|100.00
Cheval n° 2 2.536] 66.68| 68.31| 30.52! 47.06 .06 | 100.00
Cheval no 3 .654| 73.08] 75.40] 40.58| 50.70 .22|100.00
Coefficients moyens. . : 69.47 .35| 36.30! 50.77| 96.691100.00
L'examen de ce tableau permet de constater dâabord l'influence
de lâindividualitĂ© sur les coefficients de digestibilitĂ©. Les chevaux
nÂź 4 et 2 dans chacune des situations de repos, de marche au trot
et de travail au pas se trouvent, au point de vue de la ration, dans
des conditions qui rendent les coefficients trĂšs comparables. La di-
gestibilité de la ration totale est plus élevée chez le cheval n° 2 que
chez le cheval n° 4. A la marche au pas et au travail au trot, les coef-
ficients du cheval n° 4 sont un peu supérieurs, mais sa ration conte-
nait alors une proportion de fÚves plus élevée.
Toutefois, au travail à la voiture, le cheval n° 1 a mieux digéré,
bien que les rations aient été semblables. Malgré cette restriction, si
on ne considÚre que les coefficients de la ration totale, la supériorité
du cheval n° 2 est, dans les autres cas, suffisamment manifeste. Par
contre, si on envisage isolément les coefficients de chacun des prin-
cipes, on voit que, dans presque tous les cas, le cheval n° 1 à beau-
coup mieux digéré les celluloses, tandis que le cheval n° 2 digérait
beaucoup mieux la matiÚre protéique.
Les comparaisons sont plus difficiles à établir avec le cheval n° 3,
dont la ration a toujours contenu une proportion de fÚves supérieure
Ă celle des deux autres. Toutefois, les Ă©carts trĂšs sensibles qui existent
entre les coefficients du cheval n° 3 et ceux du cheval n° 2 et du
cheval n° 1 ne nous paraissent pas simplement motivés par cette dif-
férence dans la composition des rations, car celte différence est
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 61
quelquefois peu appréciable, tandis que les coefficients sont toujours
trÚs notablement supérieurs.
Le cheval n° 3 a eu, pour les celluloses, Ă peu prĂšs la mĂȘme capa-
cité digestive que le cheval n° 1 ; pour la protéine, son coefficient a
toujours été supérieur à celui du cheval n° 2.
Ces chiffres sont donc intéressants à un double point de vue : non
seulement ils montrent (le fait nâest pas nouveau) lâinfluence de lâin-
dividualitĂ© sur les coefficients de digestibilitĂ© dâune ration prise en
bloc ; mais encore ils mettent en lumiÚre les aptitudes spéciales de
chaque organisme à mieux digérer Lel ou tel principe.
Examinons maintenant ces chitfres Ă un autre point de vue, sans
nous occuper des chevaux qui les ont fournis, et en nâenvisageant
que les situations dans lesquelles ils ont Ă©tĂ© obtenus. Câest ici sur-
tout que nous devons regretter que la proportion de paille nâait pas
Ă©tĂ© la mĂȘme dans toutes les rations; les diffĂ©rences dans les quan-
tités de paille consommée masquent presque entiÚrement l'influence
qu'ont pu avoir les situations des chevaux sur les coefficients.
On voit en effet les coefficients moyens sâaccroĂźtre presque paral-
lĂšlement avec lâaugmentation de la proportion de fĂšves.
COEFFICIENTS MOYENS
A ââ â
de la de la
matiĂšre matiĂšre
sĂšche totale. organique.
Au repos. PRESS Lo 59.06 69.91
ASIAEMALCHE AUAPOLE. CN. 61.89 63.70
AU (TAN AUS PAS SE 64.00 66.76
Avlamarche-autpas. Pure 64.35 | 66.93
AUATAVAIlL AU EL ERNEST 66.3 68.38
Au travail Ă la voiture . . . . . 73.08 75.40
Quantités de fÚves contenues dans la ration pour 4 kilogr. de paille.
UN rer la lon sliee de 9 1,078
AnIdimarpheran pass, ALES v 1,253
Ar la" marehefa trot" re Ha
AURĂTAVATNATINASE SA ET CNE PIE 1,608
AURITAVATI AUTO ED TT. 28 ME
Auetravail a 1100 ee 250 0e. 294
Seuls, les coefficients relatifs Ă la marche au pas ne suivent pas
62 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
lâaccroissement de la quantitĂ© de grains dans la ration ; ils sont plus
élevés que ceux de la marche au trot et du travail au pas qui cor-
respondent cependant Ă des rations plus riches en fĂšves.
Les chevaux digĂšrent donc mieux quand, sans produire de travail
extérieur, ils prennent un exercice modéré, qui a consislé chaque
jour, pour le cas présent, en deux promenades au pas de 10 kilo-
mÚtres chacune. Nous avons déjà maintes fois observé ce fait, et
depuis longtemps aussi on sait quâun exercice rĂ©gulier et modĂ©rĂ©
est plus favorable Ă lâaccomplissement des fonctions quâun repos
absolu ou un travail pénible.
Les Ă©carts extrĂȘmes entre les coefficients moyens correspondant
aux diverses situations ne sont pas trĂšs Ă©levĂ©s. Voici dâailleurs les
nombres minima et maxima qu'a atteint chacun des principes.
COEFFICIENT
âââ ĂCART.
MINIMUM. maximum,
MatiĂšre sĂšche totale . . . . 9.06 69.47 10.41
MatiĂšre organique . . . . . 60.91 N\GG 10.44
Gellulose brute . , . . . . JP 39.85 4.68
Gellulose saccharifiable . . . 45.40 55.38 9.98
AMIGON EP ARTE RES ACTE 93.24 96.69 3.45
Protéine RER APR 72.96 78.57 5 Gi
Indéterminés "=. mess 7 26.50 37.67 ET
Ces chiffres, établis sur les données moyennes de trois chevaux
ayant des aptitudes digestives diffĂ©rentes, Ă©chappent Ă lâinfluence
individuelle.
Les Ă©carts sont du mĂȘme ordre que ceux qui ont Ă©tĂ© observĂ©s
dans les essais Ă lâavoine et au maĂŻs, bien que les coefficients soient
quelquefois sensiblement différents.
Varialions du poids des chevaux dans les différentes situations,
comparées aux quantités ingérées el digérées.
Nous avons réuni, dans les tableaux qui suivent, les nombres
qui représentent les poids des différents principes ingérés et di-
gérés par chaque cheval, pendant les différentes périodes des expé-
riences.
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 63
QUANTITĂS INGĂRĂES PAR JOUR.
Cheval n° 1.
MATIĂRE CELLULOSE F ÂŁ Ă
2 â | â Ă€ A A A
: © a mn E 5
S _ A # a âA e
Ăl e es o E E A
5 = 2 Ă= 5 p = © al
es) a E] Fe n ĂŠ Le]
8 ES = Ă ji w 3 a
= om nr) ol A
© o M
a
Gr, Gr Gr Gr Gr. Gr Gr Gr Gr
Au repos.
DĂ©cembre 1889. . .| 7340,8| 6918,8] 1330,1| 714,8] 2 108,5| 267,4| 131,0] 1 314,8| 1 052,2
AVTILTSIDNE Nes re 6906,0| 6 484,9] 1 235,0! 659,1! 1 864,5] 207,4] 139,5! 1 138,2] 1 211,2
Août 1890. . . . .| 7017,2| 6 627,0] 1315,7| 715,5] 1 869,3) 266,1| 134,1] 1 081,3| 1 245,0
Septembro 1890 . .] 7122,4| 6 744,8] 1 219,5| 691,1] 1816,9| 284,5] 140,0] 1 164,1] 1 428,2
Octobre 1890. . . .] 6922,0| 6 520,2| 1 388,3| 856,41 1 661,2! 245,0| 128,6| 1 039,2| 1 221,5
Novembre 1890 . .| 6846,8| 6 448,6] 1 305,6| 936,6] 1 711,9] 265,1] 138,1] 1108,8| 982,4
Moyennes . . .| 7025,7| 6624,0| 1 209,0! 763,0] 1 828,7] 255,9! 135,2] 1 141,1] 1 190,1
A la marche au pas.
Janvier 1890. . . are
LEA EE de | ol il Al L 033,7
Ă la marche au trot.
1 169,9
Mai 1890... , . 16 Se
1
©
_
re
»
19
ââ
ee
rs
2]
LS
»
M
ss
[=]
[=]
ce
w
L'=]
nn,
Lo
9 4 Ju 130,0) 1 301,2
Au travail au pas.
FĂ©vrier 1890. . . Ron En 1 258,3| HR 07] SH 1 108,6
|
Au travail au trot.
Mars 1890 . . . , fe p ea) bu 205, 1 LT Op) 782,6
Au travail Ă la voiture.
Juin 1890 . . . . .|0 666,5] 9 283,1] 1355,0] 763,8] 3423,3| 380,1] 151,4] 1 932,7] 1 275,9
Juillet 1890 . . . .| 9 739,6] 9 289,0! 1 351,0| 854,0] 5 328,2] 390,4] 180,2] 1 952,6| 1 252,6
Moyennes . . .| 9 703,0| 9 286,0] 1 353,4] 798,9] 3375,7| 385,2] 165,8) 1 942,6] 1 264,2
64
Mars 1890
Juin 1890
Août 1390
FĂ©vrier 1890. . . .
Juillet 1890 . . . .
" Septembre 1890 . .
Moyennes. . . .
ANNALES DE LA SCIENCE
Cheval n° 2.
MATIĂRE
A â â
organique.
Q
y
7255,2| 6 806,2
6 780,0| 6 342,2
7062,8| 6 738,7
6998,0| 6 629,7
7 017,2| 6 627,0
7 006,4| 6 632,9
7019,9| 6 629,4
CELLULOSE
â
saccharifiable
a
ĂŻ
Au repos.
1 183,0
1 314,0
1 388,7
1 358,3
800 ,4
AGRONOMIQUE.
1 968,4
764,9| 1 956,7
711,0 1 859,0
753,7| 1 $14,5
1315,7
1 213,2
1 295,5
715,5] 1 869,3
684,7| 1 763,8
738,4| 1 872,0
GRAISSE,
127,9
118,6
126,5
144,9
134,1
138,1
151,5
PROJĂINE.
INDĂTERMINĂS.
1554,4| 1 091,2
1078,1| 907,8
1053,1| 1 363,5
1 067,8 | 1 256,0
1 081,8 | 1 245,0
1 132,0 | 1 422,6
1127,8| 1 214,3
Ă la marche au pas.
DĂ©cembre 1889. . JR EE PE
pal 1) 1 052, 7
A la marche au trot.
Avril 1890. . . . Ju nes Fi PEU ss] DE 1 246,8
Au travail au pas.
Janvier 1890. . . Ur EU 858,2] 2 661,3 si NET
Au travail au trot.
Mai1890. . . . AA eq RSA) HE ALES 1 175,5
Au travail Ă la voiture.
154,9! 1 738,2] 1 166,6
177,8| 2 021,2
Octobre 1890. . . .
Novembre 1890.
2 893,2
3 190,7
8 895,0! 8 427,0 1 267,3] 858,6
9 447,1| 8 946,6| 1 264,2|1004,2
Moyennes. . . 9171,0| 8 686,8] 1 265,7| 931,41 3 041,9 166,3| 1 879,7
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 65
Cheval n° 3.
Ă
MATIĂRE CELLULOSE Ă = &
EE A â CA Q A rA Z
s © â a S 3
cs 5 A Ăg x A e
d ot Ć = # < = =
2 = 3 Fe Ă Si CA a +4
Ă AN PER G S â 5
5 a M
Gr. Gr. Gr. Gr Gr Gr Gr. Gr Gr
Au repos.
Janvier 1890. . . .| 6744,6| 6 409,2| 1266,4| 737,9] 1 833,2] 297,4] 114,8| 1 132,7| 1 026,8
Mai 1890. . . . . 1 6187,6| 5 790,7] 1 205,9] 751,91 1 700,2| 206,2] 104,4] 986,0! 956,1
Juin 1890 . . . . .| 6628,2| 6 329,9] 1 250,1| 646,9| 1 830,5] 228,0| 116,4| 1 036,2| 1 222,0
Juillet 1890 . . . .| 6596,6| 6 255,5] 1 227,7| 689,5] 1 788,8| 227,9| 134,0] 1 052,1| 1 135,5
Octobre 1890. . . .[ 6481,1| 6 110,9] 1255,8| 756,3] 1 649,5| 233,5| 119,1] 1 023,0| 1 093,7
Novembre 1890. . .| 6846,8| 6 448,6| 1 505,6| 936,6] 1 711,9] 265,1] 138,1| 1108,8| 982,4
Moyennes. . . .| 6580,8| 6 224,11 1248,6| 749,8] 1752,3| 243,0] 121,1| 1 056,5] 1 069,4
A la marche au pas.
FĂ©vrier 1890. . . A
FR tenl nee] LE pal 1 097,0
A la marche au trot.
Mars 1890 . . . . Eure A FA) Ass = cl tal 881,7
Au travail au pas.
DĂ©c:mbre 1889. . | reel 8 cas) no ne Hi 2,7] guitl { 1 053,7
Au travail au trot.
Avril 1890. . . .. | HU sl 1 499,4
on] su] A0) né leu nl 1 139,7
Au travail Ă la voiture.
Août 1890 . . .
+1 8 050,1! 7 670,7] 1 011,9) 566,7] 2 975,2] 346,8| 136,1| 1743,0| 915,0
Septembre 1890. . .
8183,0| 7846,2] 841,4! 592,7] 305,5] 381,8] 146,2] 1882,5| 913,1
Moyennes, . . .| 8146,5| 7743,4] 996,6 3016,8| 364,3| 141,1| 1812,7| 914,0
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1. 5
66
QUANTITĂS DIGĂRĂES PAR JOUR.
Cheval n° 4.
MATIĂRE
em,
organique.
Au repos.
549,7
519,9
494,3
448,6
486,6
387,8
DĂ©cembre 1889 . . . . . . .
Avril 1890.14... 000.
AOUUISIO EE EE RTE
Septembre 18904 . 4.1...
Octobre 1890...
Novembre 1890. + + « .
4 404,7
4 059,8
3 875,4
4 036,9
3 559,5
3460,1
Moyennes. "..1".t4u0., 3 897,1] 468,3
Ă la marche au
Janvier 1890 . . . . . .. Jo 4 763,8
Mai 1890
Février 1890 . « . « « « . En nr)
Mars 1890
Jus 18100 VE TENUE
Juillet LOMME ANSE
6575,2| 6 461,7
6 748,6| 6 606,1| 502,2
Moyennes. 01.000
6 661,9] 6 533,9
|
AMIDON.
CELLULOSE
d
A
Ć
«a
ol
em
Ć
=
2
o
L1
a
1 994,2
1710,8
1 718,2
1 740,7
1 501,7
1 573,4
1 706,5
pas.
poil ao 2 me
A la marche au trot.
ee Je) ii I Rod
Au travail au pas.
Lt ei)
Au travail au trot.
|° rl rs Ju sel el
Au travail Ă la voiture.
394,4] 3 288,5
479,3] 3 243,1
3 250,8
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
s 3
A â22
ñ Lei CR
Su] 08 | ME
D a BR
a RUE PE UE)
cn] CI
+
Gr. | "Gr, |: Gui]
|
267,4] 986,0! 302,8
207,4| 815,6] 540,6 |
266,1| 705,3| 485,8
284,5| 789,9| 455,3
245,0] 630,5] 473,1 |
265,1] 677,8] 175,1 |
255,9] 767,5| 405,1
ul ti] 256,1
on] 880,3| 220,1
|
cs] nas 337,9
uit] lie 60,8
380,1| 1 420,8
390,4] 1 475,7
385,9
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 67
Cheval n° 2.
CELLULOSE
AMIDON.
SUCRE
PROTĂINE.
INDĂTERMINĂS.
organique,
brute
saccharifiable.
Au repos.
FĂ©vrier 1890 . . . . . . .. 4 650,2] 4469,8| 454,9] 412,3] 4 850,9! 280,9! 1 063,4| 438,1
1e 10 C0 RAI RE EP 3911,0| 3 783,9| 397,6| 358,3] 1 775,7| 202,1] 821,6| 241,8
Juin 1890. . . . . .... . | 4012, 3924,9| 434,5] 271,7] 1 742,2] 937,1] 772,4] 470,3
Juillet 1890. . . . . . . . .| 4062,1| 3043,4| 416,2] 345,0] 1688,3| 235,2] 808,8| 433,7
PART MR R CENT 3850,2| 3 767,5] 321,2] 150,2] 1 751,2] 266,1| 755,1] 526,4
Septembre 1890 . . . . . . .| 4196,4] 4019,0| 404,5| 362,1] 1 697,0] 278,5| 845,4] 412,0
Moyennes. . . . . . . .| 4106,0| 3984,7| 401,5] 316,6| 1 750,9] 250,0] 844,4] 420,4
A la marche au pas.
DĂ©cembre 1889 . . . . . . et) su] mal LE] pis] pl 328,4
A la marche au trot,
RRMLI8900S NE Se es 461,7
4 nie] 351,4
pos) 9 ni 240,0] 1 032,7
Au travail au pas,
Janvier 1890 . . . . . . . | il ne] mel 2 540,9
un a) 240,2
Au travail au trot.
MAT SOQ VAS CE. ani) 494,9 348,4| 1 252,6| 354,4
4 2 935,1
Au travail Ă la voiture.
Octobre 1890 . . . . . . . . 5 864,2] 5 698,1
386,9! 351,9
385,6] 533,7
348,3 | 1334,2| 485,0
Novembre 1890 . . . . . . . 6 369,6! 6 173,5
MOYĂNTEB EE Te ele» 6116,9| 5935,8] 386,2
68
Janvier 1890
Mai 1890 :. .
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Cheval n° 3.
SD Mate, te, Bite
Moyennes 1e fu. Ie 0
FĂ©vrier 1890
Mars 1890. .
DĂ©cembre 1889 . . . . . . .
Avril 1890 .
Août 1890. .
A Fe OMAN | 6 0 6 233,9
Septembre 1890. . . .
Moyennes
MATIĂRE CELLULOSE
AMIDON.
organique.
brute,
saccharifiable
Au repos.
4 532,6| 4290,5| 609,4] 489,9] 1 696,2
4079,8| 3 880,2] 579,0] 442,5] 1620,5
3980,1| 3952,6| 436,6| 261,9] 1 717,5
3932,7| 3 875,6] 442,4] 318,7] 1 698,0
3 981,4| 5894,7| 515,4] 364,9] 1 537,8
4187,6| 4059,2| 516,9] 530,3] 1 586,9
4082,4| 3988,8! 516,6| 401,2] 1 642,8
Ă la marche au pas.
| 5 ei Ăż en ol 495,9
A la marche au trot.
pur ph nl ul 2 255,4]
Au travail au pas.
|
Fee ss) 504,8 enr
Au travail au trot.
534,7
A
Z
-
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234,2
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7) DE)
346,8 | 1 384,8
381,8| 1 493,6
364,3| 1 439,2
INDĂTERMINĂS.
286,1
370,6
504,9
409,0
504,5
328,5
400,6
578,4
208,6
350 ,1
454,1
393,7
493,9
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 69
MATIĂRE CELLULOSE Ă€
| -ââ â | Ă âSUR 7 2
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cs Z A = a ce
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Gr Gr Gr Gr Gr, Gr Gr Gr Gr
Quantités ingérées par jour.
Aaireposs een Li 6875,5| 6492,5| 1981,0|750,7| 1 821,0/249,6/129,3| 1 108,5] 1 157,9
A la marche au pas. . .| 7720,0| 7 284,2| 1 306,0|789,4| 9 248,41307,5|132,4| 1 439,6|1 061,1
A la marche au trot. . .| 7728,2| 7 987,21 1 361,1|810,9| 2 296,91247,7|136,8| 1 334,0|1 099,5
Au travail au pas. . . .| 8 607,0] 8 120,1| 1 365,1|841,4| 2 654,81343,6/144,1| 1 700,9|1 069,6
Au travail au trot, . . .| 9 059,0! 8 558,0! 1 332,4|837,5| 3 095,71313,2|149,6| 1 797,0|1 032,6
Au travail Ă la voiture .| 8 996,8] 8572,11 1 181,91773,2| 3 144,81376,61157,7| 1 878,3|1 066,5
Quantités digérées par jour.
Au repos. . . . . . . .|4 4 058,4| 3 956,9] 462,1 |342,0| 1700,11249,6| " 813,5] 408,7
A la marche au pas. . .| 496S,1| 4 874,3] 517,6 |427,7| 2113,3/307,5| v |14121,7| 387,6
A la marche au trot . .| 4776,0| 4 634,1! 506,0 |400,2] 2177,6[247,7| w" |1003,5| 296,8
Au travail au pas. . . .| 5 506,9! 5 422,0| 480,9 |465,0! 2502,81343,6| w" |1335,4| 309,4
Au travail au trot . . .| 6005,2| 5 845,2| 511,9 |397,7| 2 939,31313,92] " |1353,7| 342,6
Au travail Ă la voiture .| 6237,6| 6 103,7] 420,8 |393,0| 3040,51376,6| " |1449,9| 404,0
Si nous nous reportons Ă lâĂ©tat des chevaux qui ingĂ©raient et
digĂ©raient ces quantitĂ©s, nous voyons quâau repos ils on! presque
constamment augmentĂ© de poids vif. Quand la ration nâa pas pro-
duit d'augmentation, il y a toujours eu entretien du cheval ; les nom-
bres précédents sont donc un peu au-dessus de la ration du strict
entretien.
De mĂȘme, la ration de transport au pas a produit un lĂ©ger accrois-
sement de poids vif chez les chevaux n° 1 et n° 2. Le cheval n° 3,
avec cette mĂȘme ration, sâest simplement entretenu ; on voudra bien
toutefois remarquer que, pendant presque toute la durée du mois
de fĂ©vrier, oĂč il recevait cette ration, il a Ă©tĂ© atteint de diarrhĂ©e, son
Ă©tat de santĂ© est peut-ĂȘtre la cause de cette diffĂ©rence. La ration
que les chevaux ont reçue pour le transport au pas est aussi un peu
trop forte.
70 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Cette ration a Ă©tĂ© conservĂ©e pour le transport au trot: il sâest
trouvé que, à cause de la différence d'humidité dans les fÚves, elle
a été en réalité moins élevée dans cette derniÚre situation que pour
le transport au pas. Le cheval n° 1 Ă perdu trĂšs peu de poids, il sâest
presque entretenu ; le cheval n° 2 a sensiblement diminué de poids
vif et le cheval n° 3 a lĂ©gĂšrement augmentĂ©. Cette ration sâest donc
montrée suffisante pour deux chevaux ; pour le troisiÚme elle a été
trop faible.
Au travail au pas, le cheval n° 2 sâest maintenu sans augmentation
ni perte de poids ; le cheval n° 3 a perdu trÚs peu de poids et le
cheval n° 1 à subi une diminution plus sensible, quoique peu impor-
tante. |
Ces différences s'expliquent si on se reporte aux tableaux du tra-
vail que lâon trouvera plus loin: les poids ont diminuĂ© en raison
directe du travail produit ; ce travail nâa pu ĂȘtre mesurĂ©, pour le
cheval n° 1, qui a perdu le plus de poids, que pendant les premiers
jours du mois ; il est vraisemblable, si lâon considĂšre les accroisse-
ments de la température du cheval produits par le travail, que lors-
que ce travail nâa pu ĂȘtre Ă©valuĂ©, 1l S'est trouvĂ© ĂȘtre plus Ă©levĂ© que
celui des deux autres chevaux. |
On peut admettre, en prenant toutefois seulement les nombres
fournis par les chevaux n° 2 et n°3, que la ration a été suffisante
pour leur permettre d'effectuer tous les jours Ă lâallure au pas, sur
un parcours d'environ 20 kilomĂštres, un travail de traction dâen-
viron 390 000 Ă 400 000 kilogrammĂštres.
Au travail au trot, les chevaux se sont aussi diversement compor--
tĂ©s : le cheval n° 3 seul sâest entretenu ; les chevaux n° 1 et n° 2 ont
perdu environ 10 kilogr. chacun. Le travail produit ne suffit pas Ă
justifier ces différences, car les deux chevaux qui ont perdu à peu
prĂšs le mĂȘme poids ont fourmi des quantitĂ©s de travail bien diffĂ©-
rentes (cheval n° 1, 367770 kilogrammÚtres, et cheval n° 9,
664089 kilogrammÚtres). Le cheval n° 2 à , il est vrai, ingéré
420 gr. de paille par jour de plus que le n° 1, mais cette quantité
serait insuffisante pour compenser l'Ă©cart dâenviron 300 000 kilo-
ogrammĂštres que lâon a relevĂ© dans Ăle travail fourni par ces deux
chevaux. Le cheval n° 3, qui a produit presque autant de travail que
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 71
le cheval n° 1 (355 909 kilogrammĂštres), sâest maintenu, tandis que
celui-ci a perdu plus de 10 kilogrammes.
Jl faut voir dans ces diffĂ©rences, l'influence de lâindividualitĂ© noĂ»
seulement sur la façon dâassimiler et ensuite d'utiliser les aliments,
mais encore sur lâaptitude qu'ont les chevaux Ă supporter l'allure du
trot. Les mĂȘmes chevaux qui, au travail au pas, se sont comportĂ©s
semblablement, diffĂšrent dâune façon trĂšs sensible au travail au trot;
la diffĂ©rence dâallure a suffi, seule, pour modifier diversement les
coefficients dâulilisation des matiĂšres assimilĂ©es.
Au travail Ă la voiture, des diffĂ©rences du mĂȘme ordre se mani-
festent ; en mettant de cÎté les mois d'entraßnement pour ne tenir
compte que des mois de travail effectif, on voit que le cheval n° 1,
qui Ă fourni le plus de travail, a aussi perdu le plus de poids (environ
17 kilogr. en juillet). Le cheval n° 2, qui a produit le moins de tra-
vail, a aussi perdu le moins de poids (environ 10 kilogr. en no-
vembre). Le cheval n° 3, qui nâa perdu que 41 kilogr. environ (sep-
tembre), a cependant produit un travail représentant sensiblement
la moyenne des nombres obtenus par les deux autres; encore a-t-il
consommĂ© une ration plus faible ; ce cheval, en mĂȘme temps quâil
sâest montrĂ© meilleur assimilateur des aliments, a Ă©lĂ© aussi meilleur
utilisateur des principes assimilés.
Les trois chevaux ayant perdu du poids Ă la voiture, nous
admettrons que les quantités moyennes digérées ont été insufli-
santes. :
Nous devons renouveler les réserves que nous avons toujours
faites sur les pertes de poids vif, les moyens de recherches dont
nous disposons ne nous permeltant pas de les imputer Ă lâun plutĂŽt
quâĂ lâautre des trois facteurs de ces variations, eau, graisse et
muscle.
Nous avons déterminé, comme pour les essais au maïs, les rela-
tions nutritives des ralions ingérées et des quantités digérées de ces
rations. Nous n'avons pas trouvĂ© dâĂ©carts du mĂȘme ordre que ceux
observés dans les essais précédents entre les relations des quantités
ingérées et celles des quantités digérées.
Voici dâailleurs les nombres qui expriment les dĂ©nominateurs de
ces relations, câest-Ă -dire les poids de substances hydrocarbonĂ©es
12 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
[amidon + sucre + (graisse X 2.5)] ingĂ©rĂ©es ou digĂ©rĂ©es en mĂȘme
temps quâun kilogramme de protĂ©ine.
CHEVAL NO 1. CHEVAL N° 2. CHEVAL N9 3.
RS D SE
Ingéré. | Digéré. | Ingéré. | Digéré. | Ingéré, | Digéré.
â âââ_â
A UDEDOS AMEL Fe bts MN elle LA ARURE DES 2,17
2,03
2,09
9,07
2545
2,04
»
ACTA MALCHEANPAS ALL L. CET RE 2.41
FO OĂ ee ĂčT
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A la marche au trot
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| Au travail au trot
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19
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Il nous resterait maintenant Ă comparer cette sĂ©rie dâexpĂ©riences
avec les séries antérieures, en tenant compte des quantités de chacun
des principes nutritifs ingérés et digérés. L'alimentation que nous
Ă©tudions actuellement se sĂ©pare dâune façon trĂšs nette, par sa
richesse en protĂ©ine, de celles qui ont fait lâobjet des prĂ©cĂ©dentes
recherches. Cette question est suffisamment importante pour néces-
siter un chapilre spécial que nous renvoyons à la fin de ce mé-
moire.
Slalique de: l'azote.
La série actuelle d'expériences comporte une alimentation trÚs
azotĂ©e, et, Ă ce litre, le bilan de lâazote Ă©tait intĂ©ressant Ă Ă©tablir ;
malheureusement il nâa pu lâĂȘtre que dâune façon trĂšs approxima-
tive. Nous avons dit dans les mémoires antérieurs que, pour toutes
les sources oĂč nous pouvons recueillir, Ă sa sortie de lâorganisme,
l'azote qui a été utilisé, les erreurs qui peuvent affecter nos résultats
sont des erreurs en moins. Elles proviennent soit de la récolte for-
cément incomplÚte des productions épithéliales, poils, corne, etc.,
que nous opĂ©rons, soil de lâaltĂ©ration des produits azotĂ©s de l'urine
et de leur exhalaison dans lâair quand, par suite de fermentation,
ils ont pris la forme ammoniacale. Cette perte s'effectue pendant la
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 173
journĂ©e mĂȘme de PĂ©mission (on sait que les urines sont recueillies
toutes les 24 heures), à cause de la rapidité avec laquelle l'urée se
transforme en ammoniaque. Pour le cas présent nous nous trouvions
en prĂ©sence de liquides trĂšs concentrĂ©s et les pertes nâen ont Ă©tĂ©
que plus élevées. On verra, dans le tableau qui résume la statique
de lâazote, que nous avons constalĂ© des dĂ©ficits qui, s'ils Ă©taient
réels, correspondraient à la formation de quantités énormes de chair
musculaire, mais qui en réalité sont dus surtout aux pertes signalées
plus haut.
Azote de l'urine.
Lâurine nâa pu ĂȘtre recueillie que pendant les expĂ©riences au ma-
nĂšge ; les expĂ©riences Ă la voiture ne se prĂȘtent pas, pour les chevaux
au travail, Ă la rĂ©colte de lâurine. Pour les chevaux au repos, elle
peut ĂȘtre recueillie en tout temps. Les chiffres que nous donnons se
rapportent aux mois de décembre 1889, janvier, février, mars, avril,
mai 4890, pour les trois chevaux, juin et juillet pour les chevaux
n° 2 et n° 3, août et septembre pour le cheval n° 1.
On trouvera dans les tableaux qui suivent la composition moyenne
journaliĂšre des urines recueillies.
TABLEAUX.
74
Mois de décembre 1889.
Poids moyen journalier. . . . gr.
BISRNILC Nes ie Nolle tetes ee
Volume correspondant. . . . . CC.
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg.
Arzote total. 0 ANUS. Te ONET:
dâoĂč
Azote total des urines. . . . . gr.
Volume et poids dâurine correspon-
dant Ă lâeau de lavage
dâoĂč
Poids total d'urine Ă©mise. . . . gr.
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes
d'CINne LEON SLR TE RSR gr.
MatiÚre minérale dans 5 centim. cubes
d'urine UPTANSr Ne ete gr.
MatiĂšre organique dans 5 centim.
cubes d'urine , . . . . . ARS D
MatiĂšre sĂšche totale. . . . . . gr.
HaudeEutTine CCC USE gr.
Mois de janvier 1890,
Poids moyen journalier. . . . gr
DOnsité arte ile th DE
Volume correspondant. . . . ce.
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg.
Arzoto total "51505 Na LAB
dâoĂč
Azote total des urines. . . . . gr,
Volume et poids d'urine correspon-
dant Ă lâeau de lavage. . . . . . -
dâoĂč
Poids total d'urine Ă©mise. . . gr.
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes
fie EME 0 PMR E Oà Qué gr.
MatiÚre minérale dans 5 centim. cubes
F6 Qi 64 ss CON ou gr.
MatiĂšre organique dans 5 centim.
cubes'd'uiine .. -. 000 tr
MatiĂšre sĂšche totale. . . . ., . gr.
Kaudelâurine.... 0,043, gr.
.[ 9 260,0
CHEVAL KX° 1.
Urine, | Lavage,
8 714,6 | 1 750,0
1,0374 | 1,0011
8 400,4 | 1 730,7
15,414 2,003
129,484 3,467
132,951
22407 ,9 â 2338" ,3| 194%, 5â 90287 51216 % 6
8 947,9
0,300
0,106
0,194
517,5
8 430,3
1 813,0
1,0086
1 797,5
1,225
2,201
1,0390
8 912,4
14,797
131,877
134,078
148,7 = 1548" ,5] 160,0 â1768",8| 144⏠2 â 1188" ,5
9 414,5
0,164
0,085
0,079
143,2
9 271,3
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
CHEVAL N0 2, CHEYAL N9 3.
Urine. | Lavage. | Urine, | Lavage.
7321,6 | 1738,0 | 14 479,3
1,0410 | 1,0090 | 1,0292
7033,2 | 1 722,4 | 14068,5
22,124 | 2,498 | 14,156
155,603 | 4,303 | 199,153
159,906 2
7 524,1
14 702,2
0,422 0,138
0,105 0,066
0,317 0,072
610,0 394,3
6 914,1 14 307,9
8 460,0 | 1727,0 | 8257,0 | 1 783,0
1,0462 | 1,6092 | 1,0373 | 1,0080
8086,4 | 1 711,2 | 7960,0 | 1 768,8
20,701 | 2,044 | 15,032 | 1,046
167,397 | 3,498 [119,655 | 1,797
8 636,8
8 375,5
0,207
0,154
0,095
0,071
0,142 0,083
234,5 134,0
8 402,3 8241,5
ALIMENTATION
DU CHEVAL DE TRAIT.
7
[bL
Mois de février 1890.
Poids moyen journalier. . . . gr.
DEnSĂO Ne de ane ns le
Volume correspondant. . . . . cc.
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg.
Anoteitotalf, WE. NEC E Sr ere
dâoĂč
Azote total des urines, . , . . gr.
Volume et poids d'urine correspon-
dant Ă lâeau de lavage . . , . . .
dâoĂč
Poids total d'urine Ă©mise. , . . gr.
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes
ĆUĂNMOR MUSĂE iso Fi CMS 3
MatiÚre minérale dans 5 centim. cubes
d'uriner: 4.4" COR PET
MatiĂšre organique dans 5 centim.
cubestarine PULL", gr.
MatiĂšre sĂšche totale de lâurine. gr.
Hatdoanineet. D. pr
Mois de mars 1890,
Poids moyen journalier. . . . gr.
Densité MNT EE et. CRETE PE
Volume correspondant. . . . . ec.
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg.
Anote total 2h. Proche gr
dâoĂč
Azote total des urines. . . ⊠. gr.
Volume et poids dâurine correspon-
dant Ă lâeau de lavage. . . . . ..
dâoĂč
Poids total dâurine Ă©mise. . . . gr.
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim, cubes
dâatine!s is CINE SN ET
MatiÚre minérale dans 5 centim, cubes
d'urInOl. Mens 4 star o NA SRE:
MatiĂšre organique dans 5 centim.
cubes dufine .. . 60 gr.
MatiĂšre sĂšche totale de l'urine. gr.
Eau de lâurine. . . ., SAC MEL LE
CHEVAL NO 1.
CHEVAL N° 2. CHEVAL N9 3.
ââ_. RS D ES CE
Urine. | Lavage. | Urine. | Lavage. | Urine. | Lavage.
10 086,7| 1 803,2 | 6 218,2 | 4 720,4 | 9 631,1 | 17°4,3
1,0380| 1,0070 | 1,0454 | 1
9 717,5] 1 790,6 | 5948,2 | 1 705,9 | 9 296,4 | 4 712,8
15,858| 1,263 | 22,079 | 41,308 | 14,309 | 1,028
154,100| 2,262 [131,330 | 2,231 [133,022 | 1,761
|, TT"
156,362
141% ,7â14
â
pl
o
LI
133,56
r,41 404% ,0â1
,0085 | 1,0360 | 1,0067
1 134,783
0587,6|123°%,1â1275",5
6 323,8 9 758,6
0,355 0,134
0,115 0,057
0,240 0,077
429,5 252,4
5 894,3 9 506,2
8 669,4 |1856,5 |5144,5 | 1 724,8 | 12264,5| 4 705,1
1,0446 | 1,0120 | 1,0510 | 1
8299,2 | 1834,4 | 4866,3 | 1
19,726 | 1,622 | 24,927
.[163,710 | 2,975 [106,703
,0075 | 1,0260| 1,0070
741,9 | 11953,7| 1 696,1
1,032 | 10,373] 0,851
1,767 | 123,996| 1,444
I â |] © |, TT
166,685
108,470 195,440
150,8â15781,5| 80,6 â8
8 926,9
0,181
0,095
0,086
305,9
8 621,0
aĂ«r,7 |139°,2â14428",8
5 199,2 12 407,3
0,352 0,127
0,144 0,054
0,208 0,073
348,3 307,2
4 850,9 12 100,1
Mois d'avril 1590.
Poids moyen journalier . gr:
Densité. . .
Volume correspondant. ce.
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg.
Azote total . gr.
dâoĂč
Azote total des urines. . . . . gr.
Volume et poids d'urine correspon-
dant Ă lâeau de lavage. . .
dâoĂč
Poids total d'urine Ă©mise. . . gr.
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes
durine . gr.
MatiÚre minérale dans 5 centim.
cubes d'urine . . gr.
MatiĂšre organique dans 5 centim.
cubes d'urine . gr.
MatiĂšre sĂšche totale . . gr.
Eau de lâurine. gr.
Mois de mai 1590.
Poids moyen journalier . . . . gr.
Densité .
Volume correspondant. ce.
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg.
Azote total . gr.
dâoĂč
Azote total des urines. . gr.
Volume et poids d'urine correspon-
dant Ă lâeau de lavage. . Ă
dâoĂč
Poids total d'urine Ă©mise. gr.
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes
d'urine . . gr.
MatiÚre minérale dans 5 centim.
cubes d'urine . gr.
MatiĂšre organique dans 5 centim.
cubes d'urine . . gr.
MatiĂšre sĂšche totale. . . gr.
Eau de lâurine. . gi
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
CHEVAL N° 1.
CHEVAL N° 2,
Ă |
Urine, | Lavage. | Urine. | Lavage.
6615,7 | 1872,0 | 6534,3 | 1 788,7
1,0419 | 1,0095 | 1,0500 | 1,0088
6349,6 | 1854,4 | 6223,1 | 1 733,1
15,095 1,390 | 22,478 1,602
95,847 2,578 |139,882 2,840
â_â_ââ
98,425 142,722
170,8 â 178%",0[196âŹ,3 â 13987 ,6|15300,3â 15787 8
6 793,7 6 666,9
0,189 0,259
0,100 0,120
0,089 0,139
246,5 328,9
6 547,2 6 338,0
6764,8 | 1754,5 | 6801,2 | 1 741,6
1,0404 | 1,0072 | 1,0506 | 1,0070
6502,1 | 1742,0 | 6473,6 | 1 729,5
15,411 | 0,924 | 94,258 | 1,545
100,203 | 1,610 [157,037 | 2,672
D
101,813 159,709
[404,5 â 1088",7/110âŹ0,4 â 11587 ,7
1
6873,5 6 916,9
0,190 0,209
0,100 0,104
0,090 0,105
251,1 275,2
6 622,4 8 641,7
a
0 â© |
CHEVAL N03.
Urine. | Lavage.
13 009,0! 1 757,3
1,0295| 1,0071
12 636,2| 1 744,9
13,144| 1,155
166,090! 2,015
168,105
13 166,8
0,118
0,056
0,062
301,8
19 865,0
8 143,2
1,0286
7 916,8
11,874
94,004
1 830,9
1,0062
1 819,6
0,990
1,801
154,7 â1568",0
8 299,2
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 17
Mois d'août 1890. Mois de juin 1890.
= ââââââââ
CHEVAL N° 1. | CHEVAL N° 2. CHEVAL N° 3.
Re TN Re 7
Urine. | Lavage. | Urine. | Lavage, | Urine. | Lavage.
Poids moyen journalier. . . . . gr.| 7 770,0 | 1855,4 | 5220,3 | 1 827,7 | 7 780,0 795,0
Densité. LME ... . . .] 1,0337 | 1,0070 | 1,0476 | 1,0082 | 1,0274 | 1,0070
Volume correspondant . . . . . cce.| 7516,8 | 1842,5 | 4983,1 | 1812,8 | 7 572,5 | 1 782,5
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg.| 11,433 0,987 | 19,782 1,438 | 11,642 0,867
Azote total. . . . . . . . . . . gr.| 85,940 | 41,849 | 98,576 | 2,607 | 88,159 | 41,545
dâoĂč ne en AE
Azote total des urines . . . . . gr. 87,749 101,153 89,704
Volume et poids dâurine correspon-
dant Ă lâeau de lavage . . . . . .1459%,1 â 16487 ,5 |131°°,8 = 1388" 11139 7 â1568",3
dâoĂč
PoĂŻds total d'urine Ă©mise. . . . gr. 7 984,5 5 358,4 7 916,3
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes
ĂUT IT CAMP EL TER MEME UPS 0,150 0,233 0,132
MatiÚre minérale dans 5 centim.
CHDES d'ONG 20 UC UET. 0,070 0,115 0,080
MatiĂšre organique dans 5 centim.
CHEB QUTIME NN. SN EUCN ET. 0,080 0,118 0,052
MatiĂšre sĂšche totale . . . . . . gr. 280,3 938,4 â 203,4
Hamde l'urine ere Le gr. 7 604,2 5 120,0 7 112,9
Mois de sept.1890. Mois de juillet 1890.
.
Poids moyen journalier. . . . . gr.| 6752,0 | 1778,0 | 5233,9 | 1 815,2 | 6 017,7 | 1 839,3
DEN SILS merde ne ro de ... . | 1,0885 | 1,0078 | 1,0498 | 1,0077 | 1,0380 | 1,0089
Volume correspondant . . . . . ce.| 6501,7 | 1764,2 | 4985,6 | 1 801,3 | 5 797,4 | 1 823,1
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg.| 13,354 1,168 | 20,768 1,120 | 16,893 1,130
Aote tntales., RAT ANRT Te gr.| 87,019 | 2,061 [103,541 | 2,017 | 97,935 | 2,060
dâoĂč CR gene or ee Qr
Azote total des urines . . . . . gr. 89,080 105,558 99,995
,
UE Re M 154,0 == 15987, 9! 97,1 â 1018" ,9 |121°°,9 â 1268" ,5
dâoĂč
Poids total d'urine Ă©mise. . . . gr. 6911,9 5 335,8 6 144,2
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes
d'urine.) MES RUE, : or 0,191 0,234 0,170
MatiÚre minérale dans 5 centim.
cubes d'urine. . . . . «4 1, gr 0,107 0,122 0,093
MatiĂšre organique dans 5 centim.
cubes d'urine. . . , . : .:. + gr. 0,084 0,112 0,077
MatiĂšre sĂšche totale . . . . . ET 254,2 237,9 201,3
Pau de l'urine. . . , . : . TBE 6 657,7 5 097,9 5 942,9
18 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Azote dégagé par les fÚces pendant la dessiccation.
On sait que, pendant leur dessiccation, les fĂšces perdent, sous
forme dâammoniaque, des quantitĂ©s dâazote apprĂ©ciables, provenant
soit de la fermentation de l'urine dont elles ont pu ĂȘtre souillĂ©es,
soit de la fermentation de leurs principes azotés. Ces fermentations
sâĂ©tablissent trĂšs rapidement, surtout pendant les Jours. dâĂ©tĂ©, entre
le moment oĂč les fĂšces sont Ă©mises et le moment oĂč elles sont pla-
cĂ©es dans lâĂ©tuve. Il y Ă ainsi, pendant ce temps, dĂ©perdition dans
l'air dâune partie de lâammoniaque formĂ©e.
La dessiccation est opérée dans le vide et les produits sont re-
cueillis pour servir Ă la dĂ©termination de lâazote dĂ©gagĂ©. On trou-
vera dans le tableau suivant les poids moyens dâazote recueilli par
jour durant la dessication des fĂšces.
CHEVAL N° 1. CHEVAL N° 2. CHEVAL N° 3.
A â â ââ
Poids ids Poids
moyen moyen
Mois d'expériences. [journalier] Mois d'expériences. |journalier| Mois d'expériences. |journalier
d'azote d'azote dâazote
recueilli, recueilli. recueilli,
DĂ©cembre 1889 . . . DĂ©cembre 1889 . . . DĂ©cembre 1859 . . .
Janvier 1890... . . Janvier 1890 . . . . Janvier 1890 . . . .
FĂ©vrier 1890, : . . : FĂ©vrier 1890 . âŠ.âŠ, FĂ©vrier 18901...
Mars 1390 Mars 1890 Mars 1890
Avril 1890 Avril 1890. . . . Avril 1890.
Mai 1890 Mai 1890 Mai 1890
Août 1890 Juin 1890 Juin 1890
Septembre 1890 . . . Juillet 1890 Juillet 1890
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
19
Azote des poussiĂšres de pansage et des poils recueillis pendant
la tonte du cheval.
Les quantitĂ©s dâazote fournies par les produits du pansage quoti-
dien des chevaux, ainsi que les poils provenant de la tonte sont
données par le tableau suivant :
CHEVAL N° 1. CHEVAL N° 2. CHEVAL N° 3.
EE Ă = D ââ â
Pails Poils Poils
Azote Azote
et et et
poussiĂšres correspon- poussiĂšres correspon- poussiĂšres correspon-
re- re- re-
cueillis, ur cueillis. dant. cueillis.
Gr
DĂ©cembre: 1889) MM Lee 0 22
JABVLCRIS ONE detente D 15
HĂVAET OT AN NS ete ae UE 49
DTALE ASIE ET RS N Ut PE / 4,739 76
AVEUUIBI0 TRS Mer ie 43,054 231
MAL SU ES RNe Men ereue â 79,228 310
A ER 9 PSE EE EEE ER PE ON 2 25,266 190
CN CC RCE RE TELA 2 27,565 260
A'OEASION. ENS MATE Tee 2,95 22,213 210
Septembre 18902... ; .!. 5: 30,670 210
Octobre 1890 0.2. 1 25 65,410 1070
Novembre 1890 er, 13,630 15
Soit une production moyenne
journaliĂšre de. . . , .... 2 1,168 "
. Les pieds ont été tondus.
. 630 gr. provenant de la tonte,
. 50 gr. provenant de la tonte,
CD 1O
=
Azote de la corne.
Azote
dant.
5,803
23,688
40,703
. 890 gr. provenant de la tonte.
La corne enlevée aux chevaux pendant la pose des fers est aussi
une source d'azote oĂč nous pouvons puiser. On trouvera dans le
Fr.
80 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
tableau qui suit les poids de corne recueillie et les quantitĂ©s dâazote
correspondantes.
CHEVAL NO 1. CHEVAL NO 2.
EE EE â
Corne Corne Corne
Dates. re- Dates. re- Dates. r'e-
cueillie. cueillie, cueillie.
ES RS SO | En ONCE Ă Re 5 nee come em meme deco mmeen
Gr. Gr. Gr.
31 décembre 1889. .
5 décembre 1889. .
23 décembre 1889. .
11 février 1890 . . . 140 7 janvier 1890. . . 70 9 février 1890, . . 100
19 février 1890 . . . 190 19 janvier 1890. . . 150 10 mars 1890. . . 930
12:mars 1890 |. |. .â, 110 23 janvier 1890. . . 140 30 mars 1890. . . . 130
21 mars 1890 . . . . 60 11 avril 1890. . . . 120 20 avril 1890. . . . 150
7:avril 189040: 110 25 avril 1890. . . . 50 30 avril 1890. . . . 80
16 mai 1890. . 1.0. 290 2 mai 1890:, . . . 70 5'juin 189057, 70e 50
20 mai 1890. . . . . 60 12mai 1890 un. ue 50 30 juillet 1890 . . . 940
2 juillet 1890. . . . 110 19/mai 1890.25, 70 20 août 1590 . . . . 30
| 16 juillet 1890. . . . 60 29mai 1890 . 1: 20 7 octobre 1890. . . 150
21 août 1890... , .!. 10 | 25 juillet 1890 . . . 30
21 septembre 1890. . 310 21 août 1890 . : . . 80
15 novembre 1890. . 180 2 septembre 1890 . 130
6 octobre 1890. . . 230
27 octobre 1890. . . 50
25 novembre 1890 . 110
Soit pour 320 jours Soit pour 355 jours Soit pour 288 jours
un total de . . , 1 560 un total de. . 1 370 un total de. . . 1 160
Moyenne par jour. .| 4,875 { Moyenne par jour . 3,859 | Moyenne par jour . 4,028
1. Corne non recuelllie.
La production moyenne de la corne a donc été par jour:
487,875
3 ,859
,028
Pour le cheval n° {.
Pour le cheval n° 2.
Pourile cheval 1035-14 PIN TEE RENE 4
Un Ă©chantillon moyen de la corne produite par les trois chevaux
a fourni Ă l'analyse 11.90 p. 100 dâazote, les chevaux ont donc
utilisé chaque jour à la production de la corne:
Le cheval n° 1. 05,580
Le-cheval. 092.25 Ar SR VER 0 ,459
Le cheval n° 3. 0 ,479
Azote de la sueur.
Nous n'avons pas, dans cette sĂ©rie dâessais, fait de nouvelles tenta-
tives pour dĂ©terminer la quantitĂ© dâazote Ă©liminĂ© par la transpiration
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 81
cutanée. Nous conserverons donc les chiffres obtenus en 1888 et
nous admettrons qu'un cheval au repos perd chaque jour, par la
sueur, 45,305 d'azote, tandis quâun cheval au travail en perd 28,179.
Toutes les données précédentes nous permettent d'établir dans le
tableau suivant le bilan de lazote :
DIF-
FĂRENCE
entre
VPazote du poids
digéré
et l'azote | des chevaux.
VARIATIONS
PROTĂINE
protéine.
de la sueur
total rendu.
Q
Ă«
«| des urines.
rendu.
des poils
et du pansage.
volatil des
Gr. Gr.
a | de la corne.
[P)
â+
Gr.
Cheval n° 1.
DĂ©cembre 1889 .| 986,0/157,760/132,951/1,120| 4,651|0,580 5[140,607| â17,153| Augmentation.
Janvier 1890 . .| 1005,0/160,800|134,078/1,120| 3,30210,580 140,385] â 920,415 | Augmentation.
FĂ©vrier 1890 . .| 1300,8[208,128/156,362/1,120| 7,054|0,580 2 167,295] â40,833| Diminution.
Mars 1890. . . .| 1 306,2[208,902/166,685/1,120| 5,782/0,580|2 176,846| â32,646| Diminution.
Avril1890 . . .| 815,6[130,496| 98,425/1,120| 4,427|0,580 105,858] â 24,638 | Augmentation.
Mai 1890 . . . .| 850,3/140,848/101,813/1,120| 5,39710,580 5[110,245| â30,633| Diminution.
AoĂ»t 1890. . . .| 705,3]112,848| 87,749/1,120| 2,654\0,580/1,305| 93,408| â19,410| Augmentation.
Septembre 1890.| 789,9/126,384| 89,080/1,120| 2,9840,580 95,069] â51,315| Augmentation.
Cheval n° 2.
DĂ©cembre 1889 . | 1153,1[184,500/150,906/1,168| 4,025[0,459 166,883 Augmentation.
Janvier 1890 . .| 1310,7|209,712/170,895|1,168| 5,067|0,459 179,768 Entretien,
FĂ©vrier 1890 . .| 1063,4/170,144/133,561|1,168| 2,67010,459|1,505|139,163 Augmentation,
Mars 1890. . . .| 821,6|131,456|108,470|1,168| 2,131|0,459 113,533 Augmentation,
Avril 1890 . . .| 1052,7/168,432/142,722|1,168| 3,64110,459 149,295 Diminution.
Mai 1890 . . . .| 1252,6|200,416/159,709|1,168| 3,230/0,459 166,745 Diminution,
Juin 1890. . . .| 772,4/193,584|101,183/1,168| 2,349/0,159/1,305 106,464 Augmentation,
Juillet 1890. . .| 808,8/120,408/105,558/1,168| 2,018/0,459/1,305/110,506 Augmentation,
Cheval n° 3.
DĂ©cembre 1889 .| 1394,7|223,152 0,980! 8,873/0,479|2 214,738 Diminution.
Janvier 1890 . .| 906,7|145,072 0,980! 3,80910,479 128,025 Augmentation.
FĂ©vrier 1890 . .| 1207,0|193,120|134,783/0,980| 5,695/0,479|1,305|143,242 Entretien,
Mars 1890. . . .| 1077,6|172,416/125,440|0,980 210,479|1,305|132,486 Augmentation,
Avril 1890 . . .| 1502,4/240,384/168,105|0,980 0,479 | 2 188,977 Entretien,
Mai 1890 . . . .| 753,3/120,528| 95,80510,980| : 0,479 103,445 Entretien.
Juin 1890. . . .| 780,11124,816| 89,704|0,980 50510,479|1,305| 96,973 Augmentation.
Juillet 1890. . .| 756,41121,024| 99,995|0,980 0,47911,305|111,542 Augmentation.
ANN, SCIENCE AGRON, â 1, â 1893. 6
82 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Dans tous les cas, et pour chacun des chevaux, il y a eu un déficit
d'azote, et ce déficit est quelquefois trÚs élevé ; on devrait constater
la formation de chair correspondante. Dans 14 cas seulement il y a
accroissement de poids vif, dans 4 il y a entretien et dans 6 ilya
perte de poids vif; les accroissements, Ă trois exceptions prĂšs, ne
correspondent pas aux dĂ©ficits dâazote constatĂ©s. Les mois pour les-
quels la concordance existe sont : pour le cheval n° 2, mars et juin,
oĂč les accroissements de poids sont respectivement 11 kilogr. et
12 kilogr., et pour le cheval n° 3, juillet, oĂč lâaugmentation est
d'environ 6 kilogr., ce qui fait par jour 355 gr. en mars et 400 gr.
en juin pour le cheval n° 2 et 193 gr. en juillet pour le cheval
n° 5.
En admettant que ces accroissements soient constitués par du
muscle tel quâon le trouve dans le corps dâun animal vivant, câest-
Ă -dire contenant environ 70 Ă 795 p. 100 dâeau et dosant 4.5 p. 100
d'azote, ils nécessiteraient, pour le cheval n° 2, en mars 158,975
d'azote par jour, et en juin 18 gr. ; et pour le cheval n° 3 en juillet,
85,689. Or, dâaprĂšs le tableau, les quantitĂ©s disparues sont respec-
tivement 178,993, 185',080 et 98',482.
Dans tous les autres cas, les quantitĂ©s dâazote disparues ne parais-
sent pas avoir élé entiÚrement employées à la formation de tissu
musculaire. Beaucoup de ces quantités sont exagérées par les pertes
importantes provenant de la fermentation de l'urine, et dont nous
avons dĂ©jĂ parlĂ© ; il est regrettable que nous nâayons aucune donnĂ©e
nous permeltant d'Ă©valuer, mĂȘme approximativement, ces pertes,
qui ont dĂ» beaucoup varier, pour chacun des chevaux et pour les
différents mois d'expériences, avec la concentration des urines et la
température extérieure.
Nous avons dâailleurs, montrĂ© dans les mĂ©moires antĂ©rieurs, Ă
quelle erreur on se trouve exposĂ© quand, dans lâĂ©tude des varia-
tions de poids dâun animal, on nĂ©glige un seul facteur de ces va-
riations. Or, lâĂ©tude des migrations de la graisse nous est rendue
impossible par le fait que les produits de la respiration ne sont pas
recueillis.
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 83
Stalique de l'eau.
Nous pouvons mesurer avec une exactitude suffisante, lâeau qui
entre dans le corps de lâanimal, en pesant soigneusement sa boisson
et en dosant lâeau qui lui apportent ses aliments. Par contre, nous
ne pouvons dĂ©terminer directement quâune partie de lâeau que lâa-
nimal rejette, celle qu'il rend dans lâurine et dans les 'fĂšces. Lâeau
perdue par exhalaison pulmonaire et par transpiration cutanée doit
ĂȘtre dĂ©terminĂ©e en bloc, par diffĂ©rence, et encore cette dĂ©termina-
tion est-elle soumise Ă l'erreur qui peut rĂ©sulter de la fixation dâeau
par les tissus de lâanimal, ce qui diminue le poids de lâeau gazeuse
excrĂ©tĂ©e, ou de l'Ă©limination dâune partie de lâeau constituant ces
tissus, ce qui lâaugmente.
On trouvera, dans le tableau suivant, toutes les données dont
nous disposons pour Ă©tablir la statique de lâeau. Nous avons joint Ă
toutes ces données, dans la derniÚre colonne, les pertes de poids des
chevaux pendant le travail ou la marche, car ces pertes de poids
sont constituées, pour la plus grande partie, par une élimination
dâeau Ă lâĂ©tat gazeux.
4. | PERTE
RE DIFFĂ
rence |d por SITUATION
RENTE : entre cheval
DATES. des totale d totale l'eau on pendant du
e des sommée le
bue, four- Lu EE PR pa et Peau es cheval,
rages. | sommée, ; 5 cueillie, recueillie, | OU Ja
marche.
EEE EEE
Gr. Gr, Gr. Gr. Gr. Gr, Gr, Gr,
Cheval n° 1.
DĂ©c. 1889 . .| 20 162,9! 1 159,2| 21 322,1| 8430,4| 7584,1|16014,5! 5% 307,6 "| Repos.
Janvier 1890.| 19 527,7| 1321,0| 20848,7| 9271,3| 7933,0| 17 204,3| 3644,4| 3630 |Marche au pas.
FĂ©vrier 1890.|249252,8| 1 420,0] 25672,8| 9953,8| 7 519,0! 19025,2| 6647,6| 5130 |Travail au pas.
Mars 1890 . .126587,7| 1 474,6| 28 062,3! 8621,0| 9597,2| 18 218,21 9944,1| 7 874 |Travail au trot.
Avril 1890. .1 17 182,8| 1094,0| 18 288,6! 6547,2| 7592,3| 14 139,5) 4149,1 n_ |Repos.
Mai 1890. . .| 23 103,5| 1 115,7! 24219,2| 6622,4| 9624,7| 16 247,1] 7972,1| 6572 |Marche au trot.
AoĂ»t 1890 . .[22196,8| 082,8 23197,6| 7604,2| 8487,0|16091,2| 7106,4 â |Repos. |
Sept. 1890. .| 18 848,3| 1010,6| 19 858,9! 6657,7| S070,4| 14728,1| 5 130,8 â | Repos.
84 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
EAU DIFF
7
SITUATION
,
tale lâeau con-| pendant du
des sommée le
con- lux fi re- et lâeau | travail
; urine. Ăšces. at ser p
somméc. cueillie, [recueillie, | Ou la
marche.
Gr. Gr. Gr. Gr,
totale te
cheval.
Cheval n° 2.
DĂ©c. 1889 . .| 15419,3| 1 215,7| 16 635,0[ 6914,1| 7 890,3| 14 804,4 2 099 | Marche au pas.
Janvier 1890. | 19029,0| 1 438,4] 20 467,4! 8402,3| 8174,0| 16 588,3 524 | Travail au pas.
FĂ©vrier 1890.| 13 502,5] 1244,8| 14 747,3| 5894,3| 6 867,0] 12 791,3 Repos.
Mars 1890 . .| 14 805,2] 1 220,0| 16125,2| 4 850,9| 8559,7| 13 410,6 Repos.
Avril 1890. .| 20 570,3| 1 217,1| 21 787,4| 6338,0| 8552,8| 14 890,8 Marche au trot.
Mai 1890. . .| 31 538,0| 1 318,5] 32856,5| 6 641,7| 10 091,0] 46 732,7 Travail au trot.
Juin 1890 . .| 18093,3| 937,2| 19 030,5] 5120,0| 8 998,5] 14118,5 Repos.
Juillet 1890 .| 46514,5| 4 002,0! 17516,5| 5097,9| 7 389,9] 12 487,8 Repos.
Cheval n° 3.
DĂ©c. 1889 . .| 25 699,3] 1 328,6| 27 027,9| 14 307,9| 9 760,8 6 Travail au pas.
Janvier 1890.| 29 881,9] 1 221,9] 24103,8| 8241,5| 12 702,0 43, Repos.
FĂ©vrier 1890. | 25 566,0| 1 303,2| 26 869,2! 5 506,2] 13 991,0 Ă Marche au pas.
Mars 1890 . .| 32 915,5| 1 317,6| 34 233,1] 12 100,1| 16 718,8 Marche au trot.
Avril 1890. .| 32 115,0| 1 363,0| 33478,0| 12 865,0| 11 064,4] 23 96 Travail au trot,
Mai 1890. . .1 24 853,2] 877,4 25 730,6| 8095,9| 10 683,1 7 Repos.
Juin 1890 . .[27491,3| 882,8| 28 374,1| 7712,9| 44 005,9 s Repos.
Juillet 1890 .|21081,6| 945,4! 22 027,0] 5 942,9| 10 363,5| 16 306,4 Repos.
Les nombres qui, dans la situation de repos, représentent la diffé-
rence entre lâeau totale consommĂ©e et lâeau recueillie dans les urines
et les fĂšces devraient nous donner, pour chaque cheval, la mesure de
lâeau expirĂ©e et perspirĂ©e, mais nous venons de dire que la fixation
dâeau dans les tissus ou lâĂ©limination dâeau de ces mĂȘmes tissus peut
fausser les résultats. Les écarts observés dans les chiffres relevés sur
chaque cheval viennent appuyer cette assertion.
On voit, en effet, le cheval n° à éliminer successivement en dé-
cembre 5 3078",6, en avril 41496" 1, en août 71065,4 et en septembre
51306",8 ; le cheval n° 2 en février 1 9566',1, en mars 21745",6, en
juin 4912 gr. et en juillet 5028#",7; le cheval n° 3 en janvier
31606°,3, en mai 6 9515,6, en juin 6 655%°,3 et en juillet 5 7205',6.
Les diffĂ©rences de tempĂ©rature des mois oĂč ces chiffres ont Ă©tĂ©
obtenus ne suffisent pas Ă justifier certains de ces Ă©carts, on voit
mĂȘme le cheval n° 1 Ă©liminer plus dâeau en dĂ©cembre quâen avril.
D'autre part, pendant le travail ou la marche, les quantitĂ©s dâeau
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 85
perdue par le cheval et constatées par la balance sont quelquefois
égales ou supérieures aux nombres que la colonne des différences
donne comme perte totale de la journé@; il est évident, dans ce cas,
que le cheval a cĂ©dĂ© de lâeau de ses tissus, ce qui a pu masquer la
formation de chair accusée par la statique de l'azote.
Pour terminer, faisons remarquer quâil existe des diffĂ©rences no-
tables, pour les trois chevaux, entre les nombres reprĂ©sentant lâeau
éliminée dans des situations correspondantes.
Du travail produit.
1° Au manÚge.
Le travail au manÚge a consisté, comme dans les séries précé-
dentes, dans lâexĂ©cution, chaque jour, de 700 tours de manĂšge :
350 tours le matin et 350 tours le soir. Le cheval qui Ă©tait Ă la ration
de transport, attelĂ© derriĂšre la flĂšche, effectuait le mĂȘme parcours,
lequel, la piste parcourue ayant une longueur de 28",965, corres-
pond Ă 20 275 mĂštres. Ces chiffres doivent ĂȘtre un peu modifiĂ©s en
ce qui concerne la période du travail au trot. Le cheval qui travaille
au manĂšge, Ă cette allure, a une tendance constante Ă se Jeter en
dehors de la piste en sâappuyant sur le trait extĂ©rieur. Par ce fait 1l
augmente d'environ 0",15 le rayon de la circonfĂ©rence quâil parcourt.
Le cheval qui suit sans effectuer un travail de traction a une tendance
contraire, il marche en dedans, diminuant le rayon de la piste dâun
nombre égal, soit 0,15. Il en résulte que, pour le cheval au travail
au trot, un tour de piste devient Ă©gal Ă 29,91 et, pour le cheval Ă la
marche au trot, Ă 28",09, soit, pour le premier, un parcours total
quotidien de 20 937 mĂštres, et, pour le second, 19 614 mĂštres.
Le travail a Ă©tĂ© mesurĂ© Ă lâaide du totalisateur Leclerc, dont il a
dĂ©jĂ Ă©tĂ© parlĂ©, Le travail produit par le cheval n° 1 en fĂ©vrier nâa pu
ĂȘtre dĂ©terminĂ© par suite dâun accident survenu au totalisateur.
Les tableaux qui suivent renferment les principales données, rela-
tives au travail, que nous avons pu recueillir : sa durée, sa mesure
exprimée en kilogrammÚtres, les pertes de poids du cheval au tra-
vail et du cheval à la marche et l'accroissement de la température
du corps du cheval pendant le travail.
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMĂIQUE.
CHEVAL NO 3, â Travail au manĂšge au pas.
CHEVAL No 2,
DATES. Marche au pas.
NS â OBSER-
Fa 1 Nonibre Pertefkle poids ĂlĂ©vation de la] Poids moyen |Perte de poids
- Durée L température dul du chevall du cheval! VATIONS.
DĂ©- \ de tours de la | du cheval pen-
du travail. l AS cheval pendant! pendant le] pendant la
ARS roulette. dant le travail. | [Ă travail. travail. marche,
ë TT 7 © a l
1889. |Matin. Soir. | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin| Soir, | Matin| Soir. | Matin| Soir.
Min. | Min. Gr. Gr. | Deg. | Deg. | Kil. | Kil. | Gr. | Gr.
1 120 125 0 u 2200 | 2200! 02 0 1 |468,21467,3| 300! 1 500
2 128 148 " u 1 440 | 1 840 (OR 0 2 |461,01469,7 mn | 1400
3 122 127 | 5319 | 5020 | 1290 | L 360 6 2 0 1 |460,21462,2) 700! { 400
4 122 126 | 5157 | 5 075 | 1 900 30 0 0 0 0 1462,11472,8] 600! 4 000
5 128 130 | 4677 | 4540 | 1 020 | 1730 0 1 0 Q |460,71470,5| 4110! 800
6 129 128 | 4387 | 4165] 1 110 | 1700! 02 0 1 |468,81463,5| 1200] 900
7 132 129 | 3 896 | 36341 2400 | 1450! 0 0 0 1 |457,51467,7| 800] 24100
8 128 | 427 | 3907 | 3598 | 1 290 | 20601 0 0 | 0 2 |458,51469,4| 1700! 900
9 129 124 | 4055 | 3 890 | 1 430 | 1 630 0 0 0 0 |458,91467,81 500! 1 100
10 125 132 | 3775 | 3 889 | 2 350 | 2 500 0 4 0 3 [458,71466,7! 1 400! 900
ai! 125 126 | 3 878 D 1510 1 0 2 0 1 |457,4| 700: 1"
12 128 126 | 4318 " u 2 640 0 [ 0 0 un |4066,7 u | { 800
13 128 | 4928 | 4742 | 4044 | 1540 | 12901 o 1 | 0 5 |460,0[468,5| 1 800| 1 000
14 125 122 | 4643 | 5 362 | 2 150 | | 700 02 0 1 [460,4/468,1[ 700! 900
15 119 122 | 4332 | 5 401 | 1349 | 1680! 0 2 0 1 |459,91469,8[ 900! 1 400
16 124 135 | 3 601 | 5 602 | 1 920 | 2 120 0 I 0 0 [459,61468,31 1 100! 400
7 125 116 | 4041 | 5 481 | 2640 | 1 990 0 0 0 0 |462,21471,41 300! 1 400
15 119 111 | 5285 | 5455 | 1 840 | 2 200 0 0 0 2 |463,0|469,41 1 200! { 500
19 118 112 | 5652 | 5 137 | 1 890 | 1 300 0 2 0 2 1455,71461,7| 4 200| 1 000
20 113 110 | 5205 | 59011 1610 | 1660! 01 9 1 [458,31467,51 1 400! 700
21 Al4 110 | 5497 | 5412 | 1970 | 2500 | O0 0 0 2 |456,41466,6| 1 800! 1 S00
22 101 113 u 5 1261 2700 | 3 000 0 4 0 4 |458,11461,3| 200! 1 100|Pluie.
23 113 | 110 | 5770 | 5624 | 3500 | 28701 0 4 | 0 4 |a57,5[461,21 4 400! 1 500
24 [Eu 110 | 6011 " 240 | 2250 0 3 0 3 1455,9[464,51 2 100! 1 090! Pluie,
95 115 140 Ă 5 696 | 2230 | 2 300 O1 0 1 |456,0/465,3| 200! 500
26 118 114 | 5487 | 5973 | 1940 | 2 490 0 2 0 2 |450,61464, 600! 2 000
27 116 114 | 5706 | 5 785 | 1640 | 2 760 01 0 2 [458,41464,21 500! 900
28 116 111 | 5899 | 6290! 2 420 | 2 170 0 Ă 0 2 |456,41462,7 600 | 4 000
29 117 109 | 4263 | 5089! 2 160 | 1 460 0 3 0 4 |455,21462,9] S00! 1 500
30 117 112 | 5492 | 5910 | 2320 | 1730] 0 2 0 3 |453,21461,41 590! 1 500
31 118 117 | 5884 | 56811 2090 | 1380[ 00 0 1 |457,S1463,21 1 100! 1 800
Moy. .[120,51|119,381 4647 | 5095 | 1 869 | 1958 | 0 17 | 0 16 " " 934| 1 109
4. Le 11, bascule en réparation,
T il matin . 4 647 X 40,8997 â 190 061 kilogrammĂštres.
ravall Moyen . Ă = Ă« ,
; soir. 5 095 XC 40 ,8997 â 208 384 _
ravailiati a cal minimum. 3 601 XX 40,8997 â 147.280
aval] naun . 0 3 YLE :
maximum. 6011 X40,8997 â 245 845 =
Travail d â minimum. 3 998 x 40,8997 = 147 157 _
ravail du soir. . ; : per
maximum 6 290 X 40,8997â 257 299 â
DATES.
Janvier
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT.
CHEVAL NO 2, â T:avail au manĂšge au pas.
Em
Durée
du travail.
2 a,
Nombre
de tours de la
roulette.
TT ,
du cheval pen-
dant le travail
ee
température du
cheval pendant
le travail,
a
Perte de poids ĂlĂ©vation de la] Poids moyen
du cheval
pendant le
travail.
CHEYAL No 1.
Marche an pas.
Perte de poids
du cheval
pendant la
marche,
â
VATIONS.
1890.
Matin.| Soir, | Matin.| Soir. | Matin. Matin.| Soir. | Matin Matin
Min. | Min.
Gr. Deg. Gr.
1 S0Ă»
9 500
3 100
1 800
2 700
1 990
1 (90
360
2 140
2 400
122
114
117
119
115
{10
123
118
123
118
117
117
114
130
126
128
125
117
151
133
128
122
123
125
125
124
120
119
122
123
2 400
{ S00
1 500
2 360
2 300
2 430
2 330
1 980
1 820
1810
1 330
1 460
1 510
2 S00
2 000
1 490
1 030
1 560
800
200
{ 090
440
1 540
1 390
2 240
1 500
L 580
CE
di
2 600 20 0
2 000 { 0
1 700
2 100
2 200
1 900
2 000
L 800
{ 500
2 000
2 300
{ 900
2 200
2 300
2 000
3 809 | 2000
3 969 | 1400
" 1 600
4 150 | 2 500
4 092
3 915
3 136
4 100
3 825
3 937
4374
4 146
4 053
3 783
3 943
118
116
108
114
106
111
114
117
AiLA
113
slt
F5 © ce
Pluie,
__â= WE +
ce
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2]
t9 ©
EC
G
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4 242
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OO] 1 = Ă OT RS
CS
CS
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â 19 19 © Ă 19 1$
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+
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QE 19
1 910/Pluie.
2 090
L 900
2 090
1 960
2 080
10
1 310
1790
LS
=
[=3
1
1
© a
9 © RO 9 19 F9 1© 9 RO t©
[214
PA
©
1 900
680
co
Ds
=
2
122,20 4279 1955
Ăš ue Ă Le Re REU ;
RL ose. | path ; 4 258 X 10,8997 â 174 151 kilogrammĂštres.
soir. 4279 X 10,8997 = 175 010 â
Tail ati ENnInARE 3 id XX 10,8997 = 138 691 â
maximum. 4 955 X 10,8997 â 202 658 =
ini 3 7$ 10.$997 = 154 72 =
DANS cru 3783 XX 40,599 â 154 724
maximum. 5 807 X 40,8997 â 237 505 ==
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Durée
du travail,
Matin.| Soir.
Min.
136
CHEVAL N°0 1.
Nombre
de tours de la
roulette,
Le
Matin.| Soir.
â Travail au manĂšge au pas.
Perte de poids ĂlĂ©vation de la| Poids moyen
température du
cheval pendant
le travail,
du cheval pen-
dant le travail,
Matin.| Soir. | Matin. | Soir.
Gr.
2 800
1 600
1 800
2 700
2 600
2 600
2 200
2 100
2 900
2 400
2 600
2 600
2 900
3 C00
3 300
3 600
D x +
ot
SO On mm © CE oo
dĂ© Pc 19 at co Or ĂD TI C0) CE M OL TO (0000700
du
cheval
peudant le
travail,
Matin
Soir.
486,3
485,8
[489,6
488,1
487,4
488,5
482,0
CHEVAL No 3.
Marche au pas.
Perte de poids
du ehevyal
pendant la
marche,
A ,
Matin| Soir.
1 190
1 10
1 140
1 100
1 170
1 070
1 300
1 460
2 380
1 890
1 370
OBSER-
VATIONS.
A
Matin | Soir.
Pluie, | Pluie.
1, Quatre poids de 40 kilogr ont été mis en surcharge sur le chapeau du manÚge du 5 au 11; du 12 au 28,
8 surcharges.
2, Un accident survenu au totalisateur a empĂȘchĂ© de mesurer le travail Ă partir du 12 au soir.
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 89
CHEVAL No 3,
Marche au trot,
© © © â OBSER-
:.ĂlĂ©vation de la] Poids moyen| Perte de poide
Durée Nombre L à qe température du| du cheval] du cheval] VATIONS.
de tours de la U:CREVA PED-| Chevalpendant| pendant le] pendant la
roulette, dant le travail! je travail. travail. marche,
A, ae Ă, ee |,
CHEVAL N° 1. â Travail au manĂšge au trot.
du travail.
Matin.| Soir. | Matin.| Soir, | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin| Soir. | Matin Matin| Soir.
Min, | Min, Ge, Gr. 2 Ă il. | Kil. | Gr.
=
69 3 000 | 3 800
71 400 | 3 100
74 2 900 | 3 100
3 600 | 3200
3 300 | 3 100
3 800 | 4 400
3 700 | 4 100
3 500 | 4200
4 400 | 4500
3700 | 2 600
3 600 | 4 300
3 600 | 4 500
5 129 4100 | 4 300
3 070 4700 | 5 400
5 037 4 000 | 4 500
3 770 4100 | 4700
4 348 4200 | 4 800
3 808 3000 | 3 500
3 865 3400 | 3600
4 488 3000 | 2400
4 078 3 200 | 3 600
3 744 3200 | 3500
4 071 3 000 | 3 700
3 950 3200 | 3500
4 824 3 600 | 3 200
4 307 -4 400 | 4 200
Ă 150 3 400 | 4100
5 464 5 400 | 6 300
5 281 5 500 | 5 700
5 027 4400 | 6 100
4 467 4 400 | 4 800
485,8] 1 300| 1 600
482,5| 1 900| 1 600
482,0| 1 300! 2 100
481/8| 1400! 900
476,6] 4 600! 1 900
480,2] 1 500| { 900
479,6] 2500| 2 300
479,1] 1000! 2 300
477,0! 1500| 1 500
478,8| 1 700| 2 200
477,6] 100! 1 500
471,2] 2 000| 2 100
473,4| 2 300| 2 300
473,7] 1 800| 2 400
473,2] 9 100| 2 200
51471,9] 1 600! 2 500
469,81 2 200| 2 300
469,8] 2 000! 2 400
470,2] 2 600| 2 500
471,9] 1200| 900|Pluie, | Pluie.
472,0! 1 800| 2 200
473,2| 1 800| 2 000
470,8] 1 500| 1 600
473,91 1 100! 1 700
465,91 2 000! 1 690
490,6! 2 100! 2 500
469,0] 2:00! 1 000
470,1] 2200! 3 600
470,6| 2 400| 2 300
471,4] 3 300| 3 200
467,7| 2 000! 3 900
en -
m © © OO "1 OĂč Qt Ă C0 L9'
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© © â1 OO Or & © 19
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CO 29 à © = Pr © = Ê © © 1 0 CS O0 CO 9 OO += ÊÊ © D = © © © = J © © ©
L9 PO 9 OO 9 © © E9 O0 O0 ⏠© © OO NU D © à DO = = D © © © © O0 D
Moy. .| 73,83 | 73,83 | 4 362 3784 | 4090! O0 97
=
So
â 1860! 2 115
1. Le totalisateur reste en rĂ©paration jusquâau 12.
MALIN #20 4 362 X 40,8997 â 178 404 kilogrammĂštres.
Travail moyen . . 2
ST soir. . . . 4630 x 40, 8997 â 189 366 =
90 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
CHEVAL No 2,
Marche au trot.
EEE â EE âââ â OBSER-
CHEVAL NO 3. â Travail au manĂšge au trot.
ĂlĂ©vation de la] Poids moyen|Perte dpoi ls
température du| du cheval] du cheval] VATIONS.
cheval pendant} pendant le! pendant la
travail. marche,
Nombre Perte de poids
de tours de la | du cheval pen-
Durée
du travail.
roulette. dant letravail.| je travail.
© Te | a à 2 | ee Lt,
Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Maun| Soir. | Matin| Soir. | Matin| Soir.
Gr. Deg.
3 200 0 |470.: S1 2 820| 2 000
3 190 4 S 9 800 | 2 800
3 660 82,3| 9 800| 3 200
3 500 2 3 2 700 | 3 100
5 600 471,5|47 9 400! 3 200
3 200
2 500
3 500
*3 000
4 000
3 600
4 100
4 700
4 300
4 700
3 300
2 600
3 700
2 500
3 900
3 600
4 100
3 800
2 800
3 300
3 600
4 400
4 400
3 400
" LL
2 800| 2700
9 400| 2 300
1 800 | 2 700
2 606| 3 000
1 900! 2 900
2 600| 2 S0C
3 600| 4 000
3 200! 3 400
2 600| 3 000
3 300| 3 000
2 300 | 2 500! Pluie.
2 600! 1 100! Pluie,
1400! 2 600 |Pluie,
1 700 | 3 100
2 800! 2 400
1 900! 2 000! Pluie
2 S00| 3 900
3 200| 2 400|Pluie.
2 800 | 2 600
3200| 2 700
3] 3 800! 6 100
3 400! 3 500
2 500! 2 800
3 900| 3 500
© © 19 ©
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[5
J © ©
1
= ©
D © © © &
1
_
3 655 2 710] 2 945
1. Deux poids de 40 kilogr. en surcharge du {er au 5; quatre du 5 au 30.
matin. . . . 4 393 X 40,8997 â 179 672 kilogrammĂštres.
soir. . . . . 4 309 X 40,8997 â 176 237 Me
minimum . . 3526 X 40,8997 = 144 212 â
| maximum . . 56771 X 10,8997 â 232 188 =
minimum . . 3212 X 40,8997 â 131 370 â
maximum . . 9 735 X 10,8997 â 234 560 â
Travail moyen . .
Travail du matin .
Travail du soir. . |
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 91
CHEVAL N0 2. â Travail au manĂšge au trot, CHRYAL No 4.
DATES Marche au pas.
RC â OBSER-
Nombre Perte de poids ĂlĂ©vation de la| Poids moyen | Perte de poids
dÚtours de la | du cheval pen- température du] du chevall du cheval
Ă d | l cheval pendant pendant le pendant la
roulette. ant le travail, | }, travail. trail marche.
Durée VATIONS.
du travail.
a â ne 2 | 2 Ă 2 Ă Ts,
Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin| Soir. | Matin| Soir. | Matin| Soir.
Min. ; Gr. s DR 'SE il. | Gr. | Gr.
â " 5 8 100
â 8 111 5 200
D775| 7648 5 600
5425| 5897! 5 5 500
5250| 6564 5 100
8750| 8 830 » 6 900
8480| 7710 5 300
7 814| 8 820 - 4 800
8163| 64923 4 900
7715| 7931 3 900
8119] 8830] 5 600 | 6300
8483| 8105] 4 5 400
7 858| 8004 100 | 5 800
7621| 7978 60 5 100
7 544 5 200
ne 5 900
7 136 6 100
7 296 4 100
7 398 6 100
8 645 5 600
8 932 » 000
11 263 Ă 6 800
9 663 6 300
9 964 Ă 6400
484,5 3 400! 5 009
481,5|4184,4| 4 500! 3 900
482,5 1486 4 000! 3 900
480 ,0|48 3 900 | 4 700
476,5 512700! 3 900
479,2|480,6| 4 200
476,9 31 2 000
476,3 3 800
479,3|485 2 700 | 3 500
480,5 | 51 3 500! 2 000
480,0 3 300| 2 700
478,3|483,8| 2 600| 3 000
483,0|486,6| 2 700| 3 400
478,0|484,5| 2 400! 3 700 Pluie.
475,0 |480,1| 2 300! 3 500
474,41477,5| # 500! 4 700
475,91480,0! 3 300| 3 900
473,2|469,6| 3 600! 1 300
476,2|1479,3| 4 000! 3500
470,5 1 800! 3 400
475,5 |474,7| 3 500! 3400
473,9 51 4 100! 3 200
468,2 |47: + 000 | 3 100
3 470,41478,3| 8 700| 4 300
" Cheval boiteux. u 1300 | 1 900
9795| 8112] 5 400 | 4 800 14 3 |[472,91479, n
8261| 7571] 4 900 | 5 600 15 469,04 2 400
6 420 » 500 " ss) 467,5 3 000
CE
CO 1 go Co
(2)
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a
© Q 1 EE Qt à CC L9O =
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DO Eeeeeeeeere Eee = =
HO HO = 19 = me RQ ee en Po me
19 RO 9 9 19 © 19
Ć + ©
COR â
" , Cheval boiteux 1 "
7 059 4 5 900 | 5 200 ( A [475,0 2 000! 3 100
8 843 979! 5 800 | 5 000 1 6 \ [475,4 2 800 | 3 300
70,52 | 71,14 5 362 | 5 589 | 1 65 " 3 172| 3 400
{ matin . . . 7 990 X 40,8997 â 326 789 kilogrammĂštres.
Le SOI AN A 8 247 X 40,8997 â 337 300 Tam
\ minimum. . 5 250 X 40,8997 â 214 723 Ă
| maximum. . 11 263 >< 40,8997 â 460 653 â
minimum, . 5 807 X 40,8997 â 237 505 â
maximum. . 10743 X 40,8997 â 439 385 -
Travail moyen .
Travail du matin
Travail du soir. .
92 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Au travail au manÚge au pas, les chevaux ont donc effectué par
jour :
CHEVAL N0 1. CHEVAL N°0 2. CHEVAL K0 3.
KilogrammĂštres. | KilogrammĂštres,
Lendaline 22m Us » 174 151 190 061
LCR MEN ORNE PE » 175 010 208 384
TOlAl SRE » 349 161 398 445
Il y a une différence entre le travail produit par le cheval n° 2 et
le travail produit par le cheval n° 3, de prÚs de 50 000 kilogrammÚ-
tres. Quant au travail du cheval n° 1, qui nâa pu ĂȘtre dĂ©terminĂ©, 1l
est vraisemblable, si lâon compare aux nombres correspondants des
autres chevaux ses accroissements de température et ses pertes de
poids, qu'il a dĂ» ĂȘtre plus Ă©levĂ©. Mais on ne saurait ĂȘtre aflirmatif
sur ce point, car, chez des animaux différents, les accroissements de
la tempĂ©rature sont rarement identiques pour un mĂȘme travail.
Pour sâen rendre compte, il suffit de se reporter aux chiffres fournis
par les chevaux n° 2 et 3 au travail au pas, oĂč prĂ©cisĂ©ment celui
qui a produit le plus de travail a présenté les accroissements de tem-
pérature les plus faibles.
Le minimum de travail produit pendant 350 tours de manĂšge a
été 138 691 kilogrammÚtres et le maximum 257 259 kilogrammé-
tres ; la variation est donc presque du simple au double.
Au manÚge au trot, le travail effectué par les chevaux a été chaque
jour :
CHEVAL N° 1. CHEVAL NO 2. CHEVAL N° 8.
Kilogrammetres. KilogrammĂštres. KilogrammĂštres.
Le MAIN ME RER 178 404 326 789 179 672
Le-SOIL LE TER 189 366 337 300 176 237
Total RER 367 770 664 089 3959 909
On voit combien ont été différentes les quantités de travail pro-
duites par les chevaux. Nous devons cependant faire une réserve au
sujet des nombres qui expriment le travail du cheval n° 2. Un acci-
dent ayant mis hors de service, au début du mois de mai, le dyna-
momĂštre totalisateur, on lui substitua, pour la mesure du travail,
un appareil de construction beaucoup moins parfaite ; les résultats
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 93
obtenus Ă lâaide de cet appareil prĂ©sentent peut-ĂȘtre un caractĂšre de
moindre précision.
Quoi qu'il en soit, les chiffres âobtenus pour le travail du cheval
° 9, sâils ne sont pas dâune exactitude rigoureuse, sâĂ©cartent peu de
la réalité, et nous avons pu constater que la résistance à la trac-
tion présentée par le manÚge, a été beaucoup plus élevée pendant
le mois de mai que pendant les deux mois précédents et que, par
conséquent, le travail produit par le cheval n° 2 a été bien supérieur
à celui qu'ont donné les chevaux n° 1 et n° 5.
Cette série d'expériences montre donc, comme les précédentes,
que la traction nécessaire pour actionner le manÚge varie cons-
tamment. La cause principale de ces variations réside dans la
source du travail lui-mĂȘme. Ce travail est produit par le frotte-
ment de lames métalliques fortement appliquées les unes contre les
autres.
On conçoit aisément que les moindres modifications qui se pro-
duisent dans lâĂ©tat des surfaces frottantes produisent des variations
importantes dans lâeffort nĂ©cessaire pour vaincre la rĂ©sistance due Ă
ces frottements.
Pendant le travail au trot, la traction a varié de 1 à 3 1/2.
La traction la plus faible a été observée quand le chapeau du ma-
nĂšge portait en surcharge 4 poids de 40 kilogr., et la traction la
plus forte correspond Ă un mois oĂč le manĂšge ne portait aucune
surcharge.
Les vitesses respectives moyennes des trois chevaux au manĂšge
ont été :
CHEVAL N°0 1. CHEVAL N°0 2. CHEVAL NO 3.
US CN TO MIENNTARE 15,303 1Âź,409 1,409
5 41:11 ASS RRSErE Ă 2 ,363 2 ,463 2 ,459
Enfin, la traction moyenne quâa dĂ» dĂ©velopper chacun dâeux pour
actionner le manÚge a été :
CHEVAL N° 1. CHEVAL N° 2. CHEVAL N° 3.
ERIC TC ENNEE STRNER » 1748, 221 19%5,652
AAĂOE MEN AT 4, 1768,565 31 ,718 17 ,000
94 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Les tractions extrĂȘmes relevĂ©es sur le travail des trois chevaux
ont été:
TRAOTION
â_ââ â ââ â
minimum. maximum.
RAS MES ve 2 2 LEE 13k8, 680 25k8 377
AINTROR d ict UNS 12 ,549 44 ,003
2° A la voiture.
Deux mois ont été consacrés, pour chaque cheval, à l'étude du
travail à la voiture ; le premier mois a été employé, comme dans la
série précédente, à amener progressivement le cheval à produire le
travail moyen effectué par les chevaux de place de la Compagnie.
Pendant ce mois d'entrainement, les chevaux traĂźnaient la voiture Ă
vide ; ils travaillaient tous les deux jours, et on graduait comme il
suit la durée du travail :
Les 2 premiers jours . . 5 courses de 1/2 heure . soit 2 heures 1/2.
Les 2? suivants . 4 â de3/4 d'heure. soit 3 heures.
Les 3 suivants . Po â . soit 3 heures 3/4.
LRO TAREUTE
Les 4 suivants MMS nn soit 4 heures {|
Ă 2 â de 1 heure 1/4.
Les 4 derniers . it 5 heures 1/2.
es 4 derniers JA See soit 5 heures {|
Ainsi entrainés, ils continuaient à travailler un Jour sur deux pen-
dant 5 heures et demie, durant tout le mois de travail effectif, avec
une charge, dans la voiture, de 140 kilogr., représentant le poids
moyen de deux voyageurs.
Lâodographe, qui donnait les chemins parcourus, a fonctionnĂ©
irrĂ©guliĂšrement pendant ces essais. Nous avons Ă©cartĂ©, pour lâĂ©ta-
blissement des moyennes que lâon trouvera plus loin, tous les chiffres
fournis par des tracés suspects, ne faisant entrer en ligne de compte
que ceux qui ont été donnés pendant un bon fonctionnement certain
de l'appareil.
La détermination de la traction moyenne de la voiture, sur la
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 95
piste mĂȘme oĂč avait lieu le travail, a donnĂ© les rĂ©sullats sui-
vants :
MPoldSide aevoIEuieranvitle, té" EAN ne 480 kilogr.
ROIS AQUNCOON ER ARTS Mt ut UE MCE 64 â
Poids'de deux YOyAgeurs 0. UNIS 140 â
Durée moyenne d'un essai, 2m Q$
Vitesse moyenne . . . . 10km 595 Ă l'heure.
Effort moyen Ă vide (avec le cocher) . . . . 204,684
Effort moyen en charge (cocher et voyageurs). 23,218
L'effort de traction de la voiture Ă vide est de 3.80 p. 100
du poids de la voiture, l'effort en charge nâest plus que de 3.40
p. 100 ; lâadjonction dâune charge Ă la voiture a donc eu pour
effet de faire baisser le rapport de la traction au poids total
Ă dĂ©placer. En dâautres termes, le poids ajoutĂ© au vĂ©hicule a
un coefficient de traction inférieur à celui du poids du véhi-
cule lui-mĂȘme. Pour le cas prĂ©sent, la traction de la charge de
140 kilogr. a été de 25,934 soit 1.81 p. 100 du poids de cette
charge.
Les chiffres de 20,684 pour la voiture Ă vide et 23*5,218 pour
la voiture en charge ne représentent pas exactement la résistance
qu'a dĂč vaincre le cheval.
La détermination du travail de traction est faite horizontalement,
tandis que le cheval effectue sa traction Ă lâaide de traits inclinĂ©s
sur lâhorizontale. Lâangle dâinclinaison a Ă©tĂ© dĂ©terminĂ©, il Ă©tait de
17,45. Il en résulte que les nombres obtenus, corrigés, deviennent
216,662 pour la voiture Ă vide, et 245,316 pour la voiture en
charge.
Pendant les mois dâaoĂ»t et d'octobre, oĂč les chevaux n% 3 et 2
étaient à l'entrainement, ils ont respectivement donné les vitesses
de 9*°,504 et 9%*,972 à l'heure, produisant ainsi pendant ce temps:
te cheval n° 3 en août, 205 876 kilogr., et le cheval n° 2, en octobre,
216 013 kilogr.
Les donnĂ©es correspondantes nâont pu ĂȘtre dĂ©terminĂ©es pour le
cheval n° 1, lâodographe ayant Ă©tĂ© en rĂ©paration pendant presque
tout le mois de juin.
96 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Les chemins parcourus par chaque cheval pendant les mois de
travail, avec la voiture en charge, sont les suivants :
Cheval n° 1.
Juillet 1890. â Moyenne journaliĂšre.
DURĂE CHEMIN
du travail. parcouru.
MĂštres.
Matin HS PR 2h30" 25 086
OU) LE ENT 3 00 29 162
Total ES 5h 30m 54 248
Soit une vitesse Ă l'heure de 9:",863.
Cheval n° 3.
Seplembre 1890. â Moyenne journaliĂšre.
DURĂE CHEMIN
du travail. parcouru.
MĂštres.
Man: ee 2" 30% 24 565
SOIT MESSE MEN EE 3 00 28 219
OP RER AEEE M 5230" 52 784
Soit une vitesse Ă lâheure de 9*",597.
Cheval n° 2.
Novembre 1890. â Moyenne journaliĂšre.
DURĂE CHEMIN
du travail. parcouru.
MĂštres.
Matin LR Dao qu 23 911
SOIT AN EVE RE RS 3 00 27 955
HE DENT 5x 307 51 866
Soit une vitesse Ă lâheure de 9:",430.
Le travail correspondant est donné, pour chaque cheval, dans le
tableau ci-aprĂšs :
Nous avons également noté la température du corps du cheval le
matin et le soir avant et aprĂšs le travail. Toutefois, comme les che-
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 97
vaux faisaient le matin deux courses de un quart d'heure, séparées
par un repos dâune demi-heure, et le soir deux courses de une heure
et demie, sĂ©parĂ©es par un repos de mĂȘme durĂ©e, les chiffres donnĂ©s
dans ce tableau ne représentent pas exactement les accroissements
de température qui correspondent au travail produit. Nos chiffres,
obtenus tous dans des conditions identiques, nâen sont pas moins
comparables entre eux.
TRAVAIL ; PRES TE
TEMPĂRATURE nr
produit STE
en EN 1 | température
du
cheval.
kilogrammĂštres. initiale.
Cheval n° 14.
Juillet 1890 :
Matin ea te lt 609 9914
SAONE ER OR RTC NS
1 319 094,3
Cheval n° 2.
Septembre 1890 :
MAR See cran h DUT d223
SUR 2 er a 6801732
{ 283 495,7
Cheval n° 3.
Novembre 1890 : â
Me HO ART A TU) 37°97
SDS na OPEN. 679 753,7 JIROZ
1 261 173,6
Les chevaux ayant fréquemment uriné pendant le travail, nous
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1. 7
98 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
n'avons pu déterminer que pendant un nombre de jours limité les
pertes de poids qu'ils ont subies. Voici les résultats obtenus :
CHAVAL N° 1. CHEVAL NO 2. CHEVAL N° 3.
Dates. Durée Pa ÿ x Perte
Ă du
Juillet HE. ids. de poids.
1890. travail.
travail.
Kilogr.}
Es
Les
es
S
i=
25,1
1
23,4
1
25,3
26,5 1
25,9!
30,9 |
1
29,5
38,9 |
32,8
33,4
36,7
34,8!
3197
40,2?
35,0!
36,2 !
©
[=]
C9 2 CO mmON Eater QG Em C3:
SNOMOMNOTrOSNS
1
Co
=
=
1
Lo
[26]
©
©
=]
Le]
=]
9 ID +9 19
ra
4
[=]
QT © OO OT OC Oà CO OC
co
© ©
QT QE OT OO QE OĂ OO QE OĂč CE UE CE OC Cr
C2 2
[=] =]
Moyennes u
4. Le cheval ayant uriné, les chiffres sont trop élevés. Les moyennes sont établies seulement sur les
chiffres exacts.
RĂSULTATS DES EXPĂRIENCES A LA FĂVEROLE COMPARĂS A CEUX
DES EXPĂRIENCES PRĂCĂDENTES
Dans les essais entrepris jusqu'alors, les rations essayées présen-
taient toutes ce caractĂšre commun que leurs relations nutritives
sâĂ©loignaient peu de 1/7, nombre adoptĂ© par la Compagnie des Voi-
tures pour l'Ă©tablissement des rations de sa cavalerie.
La série actuelle réalise des conditions toutes différentes. Le rap-
port de la protéine aux principes hydrocarbonés est beaucoup plus
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 99
élevé, et la relation nutritive est trÚs voisine de 1/4. En raison du
prix élevé attribué à la protéine dans la ration, il est important de
rechercher, par la comparaison de la série actuelle avec une autre
sĂ©rie oĂč lâalimentation Ă©tait beaucoup moins riche en protĂ©ine, si les
résultats obtenus avec la féverole justifient le surcroßt de dépenses
que comporte une telle alimentation. On sait déjà , par une pratique
de plus de 15 ans, quâune ration dont la relation nutrilive est com-
prise entre 1/6 et 1/7 est trĂšs favorable Ă lâaccomplissement des
fonctions et Ă la production du travail chez le cheval adulte. Le rem-
placement dâune telle ration par une autre de relation nutritive
de 1/4 est-il ou non avantageux? Tel est le problĂšme Ă©conomique
dont la solulion doit se dégager de la comparaison de ces deux
sortes d'alimentation.
La deuxiÚme série d'expériences au maïs (maïs et paille de blé) et
la sĂ©rie dâexpĂ©riences Ă la fĂ©verole, qui se sont succĂ©dĂ© dans lâordre
des essais, ont été exécutées dans des conditions identiques; elles
sont en tous points comparables et fourniront les données qui per-
mettront de conclure en faveur de lâun ou lâautre genre dâalimen-
tation.
Les différences sensibles qui peuvent exister entre les coefficients
de digestibilité de rations composées de fourrages différents ne per-
mettent pas de prendre comme termes de comparaison les rations
elles-mĂȘmes. Il est plus logique, et en mĂȘme temps plus exact, de
râenvisager que les quantitĂ©s des divers principes qui, solubilisĂ©es et
absorbées par l'intestin pendant l'acte de la digestion, sont réellement
entrĂ©es dans le sang et ont participĂ© Ă lâacte gĂ©nĂ©ral de la nutrition,
soit en produisant des matériaux destinés à réparer les pertes des
tissus, soit en fournissant lâĂ©nergie nĂ©cessaire aux diverses manifes-
tations extérieures de la vie.
Les différents principes hydrocarbonés, cellulose, amidon, sucre,
qui se comportent différemment au point de vue de la digestibilité,
ont sensiblement la mĂȘme valeur quand ils sont assimilĂ©s. Nous les
avons réunis et à leur somme nous avons ajouté la graisse, dont la
valeur a Ă©tĂ© calculĂ©e en amidon Ă lâaide du coefficient de Lawes et
Gilbert, et les indĂ©terminĂ©s. Lâaddition de ces derniers principes
nâest pas rigoureusement justifiĂ©e ; toutefois, bien que leur compo-
100 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
silion ne soit pas exactement connue, nous savons quâils sont cons-
tituĂ©s des mĂȘmes Ă©lĂ©ments que les hydrocarbonĂ©s, dont ils se diffĂ©-
rencient surtout par une teneur plus élevée en carbone. Nous ne
nous éloignons donc pas sensiblement de la vérité en leur assignant
la mĂȘme valeur.
Le tableau suivant donne, pour les essais au maĂŻs et pour les es-
sais à la féverole, et dans les différentes situations qu'ont occupées
les chevaux, les quantités de matiÚres protéiques et de matiÚres hy-
drocarbonĂ©es, groupĂ©es comme nous venons de lâexposer, qui,
chaque jour, ont été digérées par les chevaux : |
ESSAIS ESSAIS DIFFĂRENCE
] ; en faveur
au mais. à la féverole. de la féverole.
a âââ âââ ââ âââ à © |
Hydro- Hydro- { Hydro-
Protéine. Protéine, Protéine,
carbonés, carbonés, carbonés,
gr. gr. gr. gr. gr.
AUTODOS Sete let 336,4 3 712,2 813,9 3 162,5 477,1
A la marche au pas. . . 359,7 3 924,6 122157 3 753,7 762,0
A la marche au trot . . 364,3 4 013,5 1 003,5 3 628,3 639,2
Au travail au pas. . . . 372,5 3 883,7 1335,4 4101,7 962,9
Au travail au trot . . . 423,9 4513,6 1353,7 4 504,0 929,8
Au travail Ă la voiture . 330,0 3 874,3 1 449,9 4634,9 1 119,9
Il est facile de voir, par lâexamen de ce tableau, que, au cours des
essais Ă la fĂ©verole, les chevaux ont disposĂ© dâune somme plus grande
de principes nutrilifs quâau cours des essais au maĂŻs. Ce sont les
matiÚres protéiques surtout qui causent cette différence. Tandis que
pour les hydrocarbonés les différences sont tantÎt en faveur de la
féverole, tantÎt en faveur du maïs, elles sont, pour la protéine, tou-
jours en faveur de la féverole et toujours représentées par des nom-
bres assez élevés.
Si, partant de Ja chaleur de combustion de ces divers principes,
nous évaluons en calories la valeur énergétique de ces principes di-
vérés, nous obtenons les chiffres suivants :
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 101
ESSAIS AU MAĂS. ESSAIS Ă LA FĂVEROLE. ,
DIFFERENCE
EE © EE TT â
Valeur PE Valeur | Valeur Valeur | Valeur | 塉 fre
de la de 1 FE
Se & | hydro- | totale de la
protéine protéine Dunes
en On en en féverole.
e
hydro- totale
carbonés
en
en
calories. | calories, | Calories, | calories, | calories. | calories.
15466,0| 17 013,41 3 742,1 | 12 966,2] 16 708,3] â 305,1
A la marche au pas . . . 65. 16 090,8] 17 745,4] 5 159,8 | 15 390,2| 20 550,0! + 2 804,6
A la marche au trot. . . 5 16454,9| 18 130,6] 4616,1 | 14 876,0] 19 492,11 + 1 561,5
Au travail au pas. . . .| 1713,5 | 15 923,2| 17 636,7] 6 142,8 | 16 817,0| 22 959,8] + 5 323,1
Au travail au trot. . . . 4 18 505,7] 20 455,6] 6 227,0 | 18 466,4| 24 893,41 + 4 437,8
Au travail Ă la voiture. . 15 884,2| 17 402,2] 6 669,5 | 19 003, 1] 25 672,6] + 8 270,4
Ce tableau ne fait que confirmer le précédent : dans tous les cas,
sauf au repos, les différences sont en faveur de la féverole.
Voyons maintenant quel a été le travail produit par les chevaux
au cours des deux essais. Au repos et Ă la marche au trot, les condi-
tions ayant Ă©tĂ© identiques, les dĂ©penses sont du mĂȘme ordre.
Au travail au manĂšge au pas, les chevaux ont produit, en moyenne,
chaque jour, au maïs 390 761 et à la féverole 373 803 kilogram-
- mĂštres. |
Au travail au manÚge au trot, le travail a été, au maïs, de
369 119 et à la féverole de 462 456 kilogrammÚtres. Nous avons dit,
au cours de ce mémoire, que les chiffres relevés pour le travail du
cheval n° 2 sont vraisemblablement trop élevés; cette derniÚre
moyenne serait donc un peu au-dessus de la réalité.
Pendant les essais au maïs, le cheval n° 3 seul a pu accomplir le
travail à la voiture ; il a produit, pour chaque journée de travail,
1105 478 kilogrammÚtres. Aux essais à la féverole, le travail moyen
des trois chevaux a été de 1 291 954 kilogrammÚtres.
Il nous reste à examiner comment ont varié les poids des che-
vaux dans lâun et dans lâautre cas. Nous donnons flans le tableau
suivant les poids des chevaux au commencement et Ă la fin de
chaque mois dans chacune des deux séries. Toutefois, la compa-
raison de deux poids isolés n'ayant qu'une valeur relative à cause
des nombreuses influences auxquelles sont soumises les pesées quo-
102 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
tidiennes, les nombres que nous donnons comme poids des che-
vaux au commencement et à la fin de chaque mois représentent
la moyenne des poids des cinq premiers et des cinq derniers jours.
CHEVAL N° 1,
CHEVAL N° 2, CHEVAL N° 3.
â â ââ 0 â TT â
âââ â â â
a â | Poids | Poids | & _; | Poids Poids | ; _: | Poids Poids
ou 5 Ă SDS
E Ă au Ă E ÂŁ au Ă Ă ÂŁ au Ă
PB 5 | début. | la fin. | ? & | début. | la fin. | © | début. | la fin.
Kilogr. | Kilogr. Kilogr. | Kilogr. Kilogr.
41° Essais au maïs.
1er Ă 21 nov. 1888. .[ M. P.| 419,8 |-422,5 | R. | 475,9 | 483,3
22 nov, à 11 déc, . .| T.P,| 419,3 | 415,6 | M. P.| 479,6 | 479,1
12 à 31 décembre . .| R. | 413,8 | 422,5 | T.P.| 480,3 | 478,3
Janvier 1889 . . . .| KR. 424,0 | 431,8 |T.T.| 482,6 | 475,5
FĂ©vrier. . . . , . .| M. T.| 432,3 | 428,6 R. | 475,6 | 478,5
Mars . je» + lee + .]T. T. | 428,9 | 422,1 | M. T.| 480,0 | 475,9
AYTilN Fetes <Ă©etoh e ĂŒ u u R. | 475,3 | 483,7
MAS etienne " n R. 484,1
(1 "
Essais à la féverole.
Décembre 1889 . . .| R. | 469,4 | 476,9 | M°P-| 468,3 | 474,0
Janvier 1890 . . . .| M.P.| 476,3 | 480,2 | T-P-| 475,9 | 475,4
FĂ©vrier, ... . . .. T.P.| 479,7 | 479,7 | + | 474,5 | 480,1
Mars. . . . . . . .|T.T.| 471,4 | 460,0 | R. | 487,1 | 496,6
ANT ET | R. | 461,6 | 474,9 | M.T.| 498,7 | 480,6
Mai Res déc .|M. T.| 473,1 | 469,4 | T. T.| 478,4 | 468,5
Juin........| V. | 476,2 | 469,5 | R. | 476,2 | 488,7
Juillet . | v. | 471,5 | 454,1 | R. | 490,8 | 493,8
DAT EE .. | R. | 458,1 | 460,8 | R. | 493,5 | 500,3
Septembre . . . s.] R. | 465,9 | 468,9 | R. | 502,2 | 510,9
Octobre. . . . .. .| R. | 470,3 | 473,1 | -V. | 504,3 | 477,4
Novembre . . . .. R. | 476,0 | 474,9 | V. | 477,2 | 466,9
En déterminant les moyennes des augmentations ou des pertes de
ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 103
poids supportées par les trois chevaux dans chaque situation, on
trouve que, par mois, les chevaux ont :
AU MAĂS. A LA FĂVEROLE.
AuPPENOS TR AU MN gagnĂ©. "AMP G "gagnĂ©s! 7Ă6,5
Ă la marche au pas . . . . NS t.L 047 â , 210
Ala/marcheran trot: "71.7". perdu. , +040 perdu: 6522
AUNTAALI AU DAS ES SE 0. Ce. â .,. 2260 VS 3)
AUSPAVAIRAUELIO AMEN RE â 6 9
Au travail Ă la voiture . . . â ,. 20 3 4. 148
Reprenons maintenant, pour chaque situation, lâensemble des
conditions que nous venons de déterminer.
Au repos, pour des quantités assimilées trÚs peu différentes, toutes
les conditions Ă©tant les mĂȘmes dans les deux cas, nous voyons les
chevaux se comporter presque semblablement.
A la marche au pas, pour des quantités assimilées sensiblement
diffĂ©rentes, et supĂ©rieures dans les essais Ă la fĂ©verole, lâaugmenta-
lion de poids la plus élevée est obtenue dans les essais au maïs.
Ă la marche au trot, lâĂ©cart des poids est aussi en faveur du mais,
bien que la ration de féverole ait été encore supérieure.
Nous avons vu quâau travail au pas, les quantitĂ©s de travail me-
surées ont été peu différentes dans les deux essais ; les chevaux se
sont aussi semblablement comportés, bien qu'ils aient consommé
une quantité de matiÚres nutritives bien plus élevée dans les essais
à la féverole.
Au travail au trot, les mĂȘmes remarques sont applicables, bien
que les chiffres moyens du travail soient plus élevés pendant les es-
sais à la féverole que pendant les essais au maïs.
Au travail Ă la voiture, le seul cheval qui, pendant les essais au
maĂŻs, ait pu ĂȘtre observĂ©, a perdu plus de poids et a produit un peu
moins de travail que les chevaux qui ont participé aux essais à la
fĂ©verole, mais lâĂ©cart qui existe entre les quantitĂ©s de principes di-
gérés justifie largement ces différences.
En résumé, bien que les chevaux aient assimilé, au cours des
expériences à la féverole, des quantités d'éléments nutritifs bien su-
périeures à celles qui ont été assimilées au cours des essais au maïs,
104 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
dans la plupart des cas, le rĂ©sultat a Ă©tĂ© le mĂȘme, et, quand de lĂ©-
gÚres différences sont observées, elles sont toujours en faveur des
essais au mais.
Il y a donc eu, Ă nâen pas douter, meilleure utilisation des prin-
cipes, pendant ces derniers essais. [l suffit d'examiner le tableau qui
indique, pour les deux séries d'essais, les quantités de principes nu-
tritifs digĂ©rĂ©es, pour voir sur quoi a pu porter cette diffĂ©rence dâuti-
lisation. Dans les deux cas les quantités de principes hydrocarbonés
sont peu diffĂ©rentes, elles ont dĂč ĂȘtre semblablement utilisĂ©es ; les
quantités de matiÚres protéiques sont, au contraire, bien plus élevées
dans le cas des expĂ©riences Ă la fĂ©verole ; si leur coefficient dâutili-
sation avait Ă©lĂ© le mĂȘme pour les deux sĂ©ries dâexpĂ©riences, on de-
vrait remarquer, soit dans la production du travail, soit dans lâĂ©tat
des chevaux, des différences en la faveur de la féverole qui, en réa-
lité, ne se sont pas manifestées.
La question nous parait donc clairement résolue dans ce sens que
lâassociation des matiĂšres protĂ©iques aux matiĂšres hydrocarbonĂ©es,
en un mot, la relation nutritive est d'autant plus défavorable
MA
MNAâ
qu'elle se rapproche de lunitĂ©; elle ne doit pas cependant sâen
Ă©loigner au delĂ dâune certaine limite, mais cette limite nous paraĂźt
ĂȘtre encore un peu au delĂ de la relation 1/7 que nous avons adoptĂ©e
jusqu'ici.
ĂTUDE
sUuR
QUELQUES NEATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDEN
Par EMILE SAILLARD
Ingénieur agronome
(Suite)
â ââ ©
DEUXIĂME PARTIE
LA STATION AGRONOMIQUE DE HALLE
{Directeur : Professeur MArnckER)
| Méthodes d'analyse adoptées. |
Nature des essais institués par la Station dans les fermes
de la province de Saxe (Prusse).
La Station agronomique de Halle est la propriété de la Société des
agriculteurs de la province prussienne de Saxe. Elle est dirigée, de-
puis 1871, par M. Maercker, conseiller intime de gouvernement et
professeur Ă lâUniversitĂ©.
Les dĂ©buts de Ja Station ont Ă©tĂ© trĂšs modestes ; mais grĂące Ă lâac-
tivité du D° Maercker, elle a pris tous les jours une importance plus
grande et la premiĂšre installation est devenue peu Ă peu insuffisante,
De nouvelles constructions ont donc été adjointes aux premiÚres en
1882 et en 1888, ce qui donne Ă lâensemble des bĂątiments et Ă la dis-
position intérieure des locaux une irrégularité assez marquée.
En 1889, un laboratoire analogue, mais beaucoup moins impor-
tant, a été créé par les soins de la Société à Magdebourg. Il est aussi
dirigé par le professeur Maercker.
106 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Enfin, en 1890, une Station de végétation ( Vegelationsstation) ainsi
quâun champ dâexpĂ©riences ont Ă©tĂ© Ă©tablis Ă Halle, au nord-ouest de
la ville, et servent Ă des essais sur l'emploi des engrais et la culture
des plantes agricoles.
Les bĂątiments de la Station de Halle tels quâils sont en ce moment,
ont coûté 200 000 marcs (250 000 fr.) sans compter les 50 000 mares
(62500 fr.) qui ont été nécessaires pour appareiller le laboratoire.
La Société a en outre dépensé 25 000 marcs (31 250 fr.) pour
l'achat du champ d'expériences et l'établissement de la station de
végélation.
En ce moment donc, on fait Ă la Station de Halle-Magdebourg :
4° Des analyses de terres et dâengrais ;
2 Des essais de semences et des contrĂŽles de fourrages (section
botanique) ;
3 Des recherches intĂ©ressant la fabrication de lâalcool ;
4 Des recherches sur la nutrition des plantes et lâemploi des engrais
(dâaprĂšs la mĂ©thode des pots du professeur Wagner, de Darmstadt) ;
5° Des essais sur l'alimentation des animaux de la ferme ;
6° Des essais de culture avec différentes plantes et différents en-
grais, dans un grand nombre de fermes de la province de Saxe ;
Le lableau suivant dont les chiffres représentent le nombre des
analyses effectuées pendant chacune des quatre derniÚres années,
donnera une idée de l'importance de la Station :
4° A Halle.
| 1891. 1890. 1889. 1888.
Analyses d'engrais et de terres . . . . . 3 495 3 223 3 067 2 667
Analyses de fourrages et de betteraves . . 1 301 1 147 1 094 895
DĂ©terminations faites dans la section bota-
mIqUe 110. 1 145 966 656 502
DĂ©terminations d'acide One Lu
TES OPPOSER se 141 303 » »
Analyses des fourrages employés dans les
essais sur l'alimentation . . . . 125 661 819 712
Analyses nécessitées par les essais de En
ture sur la betterave sucriĂšre . . . . . 391 6 144 442
Analyses de récoltes obtenues à la Station
de VĂSĂ©LAION ES. GA eee 713 313 à »
Analyses de céréales. . + / .:. » 200 436 155
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 107
2° A Magdebourg.
1891 1890.
Analyses d'engrais"... T2. 407 397
Analyses de fourrages et de lait. . . 22197 1 924
ji MERE SE LE 2 544 21321
Si lâon ajoute que chacune des analyses indiquĂ©es comporte plu-
sieurs dosages et que chaque dosage, pour la sûreté des résultats,
est exécuté en double, on verra que le nombre des déterminations
faites dans une annĂ©e sâĂ©lĂšve Ă un chiffre trĂšs considĂ©rable.
Le personnel de la Station comprend :
A Halle :
4° Un directeur ;
2° Un sous-directeur ;
8° Huit préparateurs ;
4° Deux aides-préparateurs ;
5° Deux préparateurs pour la section botanique ;
6° Un secrétaire et un comptable ;
7° Deux jardiniers pour la station de végétation ;
8 Cinq garçons de laboratoire.
Ă Magdebourg :
1° Deux préparateurs ;
2% Un garçon de laboratoire.
Le budget de la Station s'Ă©levait en 1891 Ă 65000 marks
(81 250 fr.).
A lâĂ©tat dĂ©penses il faut attribuer :
4° Le paiement du personnel ;
Âź% L'entretien du laboratoire ;
3° Les frais occasionnés par les recherches de toutes sortes insti-
tuées par la Station.
Dans lâĂ©tat recelles figurent :
4° La subvention de 9000 marcs (11 250 fr.), donnée chaque année
par l'Ătat ;
2° La subvention de 3000 marcs (3750 fr.), donnée chaque année
par la province de Saxe ;
108 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
3° Le produit des analyses effectuées : 40 000 mares (50 000 fr.) ;
4° Diverses autres sources de recettes.
Ce court aperçu que nous venons de donner suffit pour montrer
combien est grande lâactivitĂ© de la Station de Halle. Et nous ne
croyons pas commettre une exagération en disant que, par le nombre
des analyses quâelle effectue, la nature et la diversitĂ© des essais
quâelle institue dans son champ dâexpĂ©riences et dans les fermes de
la province de Saxe, elle se place au premier rang des staLans ana-
logues de lâAllemagne. ;
J'ai eu lâoccasion dây travailler pendant trois mois comme prĂ©pa-
rateur volontaire. Ayant été occupé successivement dans toutes les
sections, j'ai pu faire, dans chacune d'elles, un certain nombre dâa-
nalyses et ainsi apprendre Ă connaitre AĂTALET la plus grande
partie des modes de dosage adoptés.
Ainsi que je viens de l'indiquer, la Station ne se borne pas Ă ĂȘtre
un laboratoire de contrĂŽle, elle fait en outre de nombreuses re-
cherches, surtout dans son champ dâexpĂ©riences et dans les fermes
de la province.
Le professeur Maercker, par des conférences et des relations
personnelles, a su initier aux essais agricoles les propriétaires ou
fermiers des grands domaines de la Saxe, et il trouve en eux de puis-
sants auxiliaires, quand il veut vérifier si les données fournies par le
laboratoire ou le champ dâexpĂ©riences sont applicables Ă la pratique
agricole, ou quand il veut instituer des essais sur l'alimentation des
vaches laitiĂšres ou lâengraissement des bovidĂ©s ou ovidĂ©s.
Une Ă©tude complĂšte sur la Station agronomique de Halle doit donc
comprendre deux parties :
4° Description de la Station et des mĂ©thodes dâ analyse employĂ©es ;
% Description des essais institués :
a) Sur la nutrition des plantes (station de végétation);
b) Sur la valeur agricole des engrais (station de végétation et
fermes de la province) ;
c) Sur l'alimentation du bétail (fermes de la province);
d) Sur la fabrication de l'alcool (section de la distillerie).
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 109
DESCRIPTION DE LA STATION ET DES MĂTHODES D ANALYSE EMPLOYĂES
Nous jugeons inutile de décrire en détail le plan des bùtiments,
car les constructions successives qui ont été faites le rendent peu
régulier et ne permettent pas de le prendre comme modÚle.
La petite description qui suit aura donc seulement pour but de
donner une idĂ©e gĂ©nĂ©rale de la disposition des locaux et dâindiquer
dans un ordre un peu méthodique les appareils qui sont employés.
Dans le sous-sol sont Ă©tablis les magasins, le logement du con-
cierge, le moteur Ă gaz, l'appareil de chauffage, la chaudiĂšre servant
Ă la prĂ©paration de lâeau distillĂ©e.
Au rez-de-chaussée, le laboratoire proprement dit.
Au 1°" étage, les appartements du directeur.
Au 2° étage, des chambres pour les préparateurs et plusieurs
piĂšces servant de bureau Ă lâadministration de la SociĂ©tĂ© dâagri-
culture.
Le rez-de-chaussée est l'étage qui a le plus d'importance pour
nous. Nous en désignerons les locaux par des numéros représentant
lâordre dans lequel ils se prĂ©sentent quand on traverse le labora-
toire.
La piĂšce 1 est le cabinet de travail du directeur.
La piÚce 2 est le secrétariat de la Station.
La piĂšce 8 renferme la bibliothĂšque, qui est riche dâenviron 1 500
volumes, sans compter les livres réservés spécialement au directeur
et ceux qui sont placés dans le laboratoire, lesquels sont des ou-
vrages de chimie analytique pouvant fournir des renseignements sur
tous les travaux de la Station.
La piÚce 4 es£ réservée aux balances. Huit de grandeur et de sen-
sibilité différentes y sont placées.
La piĂšce 5 sert pour les essais de digestion arĂŒficielle.
La piĂšce 6 est la salle oĂč sont faites les prĂ©cipitations dâacide phos-
110 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
phorique Ă lâaide des rĂ©actifs appropriĂ©s. On y trouve deux grands
flacons placés sur un support à environ 1,50 au-dessus du sol et
contenant : lâun la solution de citrate, lâautre la solution magnĂ©-
sienne (Magnesiamixtur). Tous les deux sont mis en communication
avec une burette, graduĂ©e en 25 ou 90 centim. cubes, Ă lâaide dâun
tube faisant fonction de siphon. Un réfrigérant est placé à cÎté et
sert à amener les liquides à la température de 17°,5. Il consiste en
une boĂźte de zinc divisĂ©e en compartiments oĂč circule un courant
dâeau.
La piÚce 7 est la plus grande du rez-de-chaussée. On y effectue
toutes les analyses qui nâexigent pas d'appareil fixe spĂ©cial et la dĂ©-
termination des substances sĂšches, Ă lâaide de lâĂ©tuve Ă rĂ©gulateur
que nous décrirons plus loin.
La piÚce 8 est appelée la chambre de l'acide phosphorique (Phos-
phorsÀurecapelle). On y a installé un agitateur mécanique mis en
mouvement par un moteur à eau et desliné à agiter les liquides
contenant des précipités de phosphate ammoniaco-magnésien ; un
appareil de filtration attelé à une trombe à eau; un flacon rempli
dâeau ammoniacale, placĂ©s Ă environ 2 mĂštres au-dessus du sol; une
moufle à gaz; un réfrigérant, et enfin une balance sensible au
dixiĂšme de milligramme.
La piĂšce 9 est le cabinet de travail du sous-directeur.
La piĂšce 10 renferme :
1° L'appareil Ă distiller servant au dosage de lâazote nitrique, dâa-
prÚs la méthode dite du fer et du zinc (12 déterminations peuvent
ĂȘtre exĂ©cutĂ©es en mĂȘme temps) ;
9° La burette de baryte servant Ă titrer lâacide sulfurique dans le
dosage de l'azote. Elle est mise en communication avec un flacon
rempli de baryte placé sur un support à environ 2 mÚtres au-dessus
du sol ;
3° Un cylindre, ouvert à l'extrémité supérieure, contenant, dans
sa double paroi, de la paraffine, et dont lâintĂ©rieur est destinĂ© Ă re-
cevoir les flacons Erlenmeyer oĂč on opĂšre la transformation des
matiÚres amylacées en glucose, sous l'influence des acides étendus
et de la chaleur ;
4 Une grande Ă©tuve en briques recevant la chaleur de lâappareil
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 111
de chauffage situé dans le sous-sol. Elle sert pour le séchage des
ballons et autres appareils qui ont été lavés.
Dans la piÚce 11, on fait l'analyse élémentaire des substances or-
ganiques et on effectue les premiÚres opérations que comporte le
dosage de lâazote, dâaprĂšs la mĂ©thode Kjeldahl.
Une balance permet de peser dans la chambre mĂȘme la quantitĂ©
de substance Ă analyser. GrĂące Ă un robinet Ă goutte, mis en com-
munication par un tube vertical avec un flacon rempli de mercure
placé plus haut, on peut facilement introduire une goutte de mercure
dans les ballons.
Une burette graduĂ©e en 20 centim. cubes pourvue dâun robinet Ă
la partie infĂ©rieure, pouvant ĂȘtre remplie par le haut, sert pour
lâaddition Ă la substance des 20 centim. cubes dâacide sulfurique
concentré.
Sous une large hotte sont placés six trépieds portant des plaques
de fer circulaires munies de six enfoncements en forme de segment
sphérique. Chacun de ces derniers correspond à un brûleur de gaz.
Au milieu de la salle est une table supportant l'appareil Ă distiller,
lequel permet de faire parallĂšlement 24 dosages. Sur un rebord de
ciment, fixĂ© Ă lâun des murs de la salle et faisant table, on peut ins-
taller un appareil pour lâanalyse Ă©lĂ©mentaire des matiĂšres orga-
niques.
Les piĂšces 12 et 13 forment la section botanique. Dans la piĂšce 12,
on fait les contrĂŽles de semences et de fourrages; dans la piĂšce 15,
les essais de germination. Ces derniers sont effectués dans des as-
siettes qu'on à préalablement remplies à moitié de sable humecté
dâeau, quâon recouvre dâune plaque de verre aprĂšs lâensemencement
et quâon place ensuite sur des Ă©tagĂšres ad hoc.
La piĂšce 14 sert pour la prĂ©paration des Ă©chantillons dâanalyse.
Elle renferme les appareils à pulvériser, dont quelques-uns peuvent
ĂȘtre mis en mouvement, soit par un moteur Ă eau dâune force dâun
demi-cheval-vapeur, soit par un moteur à gaz fixé dans le sous-sol
et ayant une force de deux chevaux. L'appareil à pulvériser, imaginé
par le professeur Maercker, mérite une mention spéciale. Nous en
donnons plus loin la description.
Dans la piÚce 15 sont effectuées la plupart des opérations que
112 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
nécessite le dosage des matiÚres grasses. On y trouve, à cet effet,
l'appareil Ă extraction de Soxhlet (voir la description au chapitre :
MĂ©thodes d'analyse des fourrages) permettant de faire parallĂšle-
ment 12 dĂ©terminations, et une Ă©tuve chauffĂ©e Ă la vapeur dâeau,
oĂč lâon dessĂšche jusquâĂ constance de poids le rĂ©sidu laissĂ© par
lâĂ©ther.
On y a aussi installĂ© un agitateur mĂ©canique, mĂ» par le moteur Ă
eau et dont nous aurons plus tard Ă indiquer l'emploi, et une Ă©tuve
à régulateur automatique employée surtout pour la dessiccation des
terres. |
La piÚce 16 est pourvue de plusieurs bains de sable placés sous
une large cheminée permettant d'assurer une forte ventilation. On
y effectue toutes les opérations pouvant donner lieu à un déga-
sement dâodeurs fĂ©tides ou acides.
La piÚce 17 est spécialement réservée aux analyses ou recherches
qui concernent les distilleries de grains ou de pommes de terre.
Elle renferme un petit appareil de Henze, une cuve Ă saccharifi-
cation munie dâun agitateur et placĂ©e dans un rĂ©frigĂ©rant Ă eau, une
colonne Savalle et enfin tous les appareils nécessaires au dosage des
maiiĂšres amylacĂ©es, des sucres et de lâalcool.
La vaseur quâexige le fonctionnement de l'appareil Henze provient
dâune chaudiĂšre qui est placĂ©e dans la piĂšce contiguĂ« 18. |
Cette derniĂšre peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme la salle des collections.
On y trouve un Ă©chantillon de toutes les principales espĂšces de terre
de la province de Saxe, de tous les engrais commerciaux, des prin-
cipaux tourteaux, grains, etc.
Enfin, la piĂšce 19 sert de magasin pour les objets de verrerie.
Quelques piÚces du sous-sol méritent une mention à cause des
appareils quâelles renferment.
Dans la piĂšce 1 sont les machines servant Ă lâextraction du jus de
la betterave, câest-Ă -dire une rĂąpe centrifuge (Centrifugalreibe)
qui peut ĂȘtre mise en mouvement Ă lâaide du moteur Ă gaz que nous
avons dĂ©jĂ citĂ©, et une presse hydraulique dâune force de 350 atmos-
phĂšres.
La piĂšce 2 renferme un appareil de Pettenkofer dont on ne se sert
pas en ce moment.
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 113
Dans la piÚce 3 est installée une véritable meunerie. On y trouve
en effet un Ă©motteur, un trieur, un broyeur Ă cylindres, un conver-
tisseur Ă cylindres, etc.
La piĂšce 4 peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e, Ă juste titre, comme un atelier de
boulangerie.
Ces appareils de meunerie et de boulangerie servent à déterminer
la valeur, pour la production du pain, des nouvelles variétés de blé
obtenues dans la province de Saxe par les nombreux agriculteurs,
marchands de semences. Ils permettent d'Ă©tablir en mĂȘme temps si
les influences (engrais, façons aratoires, etc.) qui font varier les ren-
dements des récoltes agissent aussi sur la qualité des produits ob-
tenus.
La piĂšce 5 renferme une chaudiĂšre Ă vapeur de 1 500 litres, des-
tinĂ©e Ă fournir lâeau distillĂ©e nĂ©cessaire pour les analyses.
Enfin, dans la piÚce 6 est installé le calorifÚre à air chaud qui
chauffe toute la maison.
Cette courte description étant terminée, nous allons maintenant
aborder lâĂ©tude dĂ©taillĂ©e des mĂ©thodes dâanalyse qui sont em-
ployées à Halle.
Disons tout dâabord que ces mĂ©thodes sont en gĂ©nĂ©ral les mĂȘmes
que dans tous les laboratoires agronomiques allemands, car elles
ont été élaborées et adoptées dans un CongrÚs tenu par l'Association
des Stations agronomiques.
Nous avons adoptĂ© l'ordre suivant dans lâexposĂ© de cette ques-
tion :
A. â MĂ©thodes dâanalyse des engrais ou matiĂšres fertilisantes ;
B. â MĂ©thodes dâanalyse des terres ; +
C. â MĂ©thodes dâanalyse des fourrages ;
D. â MĂ©thodes d'analyse du lait ;
E. â MĂ©thodes dâanalyse concernant lâindustrie sucriĂšre ;
F. â MĂ©thodes d'analyse concernant la distillerie de grains el tu-
bercules ;
G. â Essais de semences.
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1. 8
114 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
A. â MĂ©thodes d'analyse des engrais ou matiĂšres
fertilisantes.
a) Préparation de l'échantillon d'analyse.
Comme nous aurons souvent Ă parler de l'emploi du moulin Ă
pulvériser imaginé par le professeur Maercker, nous allons en donner
tout de suite la description.
Il se compose essentiellement dâun cylindre Ă parois peu Ă©levĂ©es,
dont le fond, qui est d'acier, est divisé en secteurs, lesquels sont,
comme les meules de moulin, munis de stries rectilignes, parallĂšles
dans chaque secteur Ă lâun des rayons extĂ©rieurs du secteur. Ce cy-
lindre repose sur un axe vertical muni dâune roue Ă laquelle on peut
communiquer un mouvement de rotation.
Sur le fond du cylindre, appuie, sans que les centres coĂŻncident, |
un tronc de cĂŽne dâacter de diamĂštre Ă©gal aux 3/5 environ de celui
du cylindre et dont la base est tailléz comme le fond du cylindre. Il
est supporté par un axe auquel on peut imprimer un mouvement de
rotation de sens contraire à celui que reçoit le cylindre. De cette.
disposition, il résulte que les stries dont nous avons parlé agissent
en mĂȘme temps comme des ciseaux et comme des scies.
L'axe du cylindre peut ĂȘtre mis en mouvement, soit par le moteur
Ă eau, soit par le moteur Ă gaz. Il est reliĂ© Ă lâaxe du tronc de cĂŽne
par une courroie de cuir dont les deux parties passent sur des poulies
intermédiaires à axe horizontal destinées à rendre inverses les mou-
vements de rotation du cylindre et du tronc de cĂŽne. Le tout est
fixé à un support commun qu'on peut visser sur une table.
Un levier coudé, qui a son point d'appui sur le support commun,
permet de soulever le tronc de cÎne quand une opération est ter-
minĂ©e. Des poids cylindriques, percĂ©s suivant leur axe, peuvent ĂȘtre
placĂ©s Ă la partie supĂ©rieure de lâaxe du tronc de cĂŽne, et accĂ©lĂšrent
par leur poids le travail de la pulvérisation.
Nous donnons plus loin le schéma de ce moulin (fig. 1)".
1. Les figures sont dessinées sur une planche qui paraßtra à la fin de ce travail.
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 115
Cette description Ă©tant faite, il sera plus facile de comprendre la
prĂ©paration quâon fait subir aux matiĂšres ferlilisantes ou aux engrais
avant de les soumettre Ă lâanalyse.
LâĂ©chantillon envoyĂ© est pesĂ©. Si son poids est supĂ©rieur Ă 100 gr.,
on nâen rĂ©serve que la moitiĂ© Ă lâanalyse, lâautre moitiĂ© est conservĂ©e
pendant quatre mois dans un flacon bien bouché.
Si son poids est inférieur à 100 gr., on le laisse tout entier pour
l'analyse.
Tous les phosphates, Ă quelques exceptions prĂšs, que nous men-
tionnons ci-dessous, sont broyĂ©s dans un mortier jusquâĂ ce quâils
passent Ă travers un tamis Ă mailles de 4 millimĂštre.
Les phosphates de la Somme, les craies phosphatées, la poudre
d'os, les guanos bruts, la poudre de viande (Fleischmehl) sont passés
au moulin Maercker, puis mélangés intimement sur une feuille de
papier.
Les coprolithes, les scories brutes, le sang desséché sont écrasés
finement dans un mortier de fer, jetés dans un tamis à mailles de
un demi-millimÚtre et enfin mélangés intimement.
Les apatites sont dâabord dessĂ©chĂ©es pendant 12 heures Ă la tem-
pérature de 100 degrés, pesées aussitÎt que le refroidissement est
obtenu, écrasées grossiÚrement et passées dans un tamis à mailles
de 4 millimÚtres. Un échantillon moyen est prélevé dans la partie
tamisĂ©e. On le broye dans un mortier de fer jusquâĂ ce quâil passe Ă
travers un {amis Ă mailles de un demi-millimĂštre.
Les autres engrais, fumier sec, poudrette, sont traités comme les
phosphates en général. La poudre et la sciure de corne sont pulvé-
risées avec le moulin Maercker.
LesalpĂȘtre du Chili, le sulfate dâ'ammoniaque, le kaĂŻnite et les autres
sels de potasse sont broyés dans un mortier et ensuite intimement
mélangés.
Les chaux, les marnes sont laissĂ©es Ă air libre jusquâĂ ce quâelles
aient atteint un certain état de dessiccation, puis elles sont pulvérisées
et jetées dans un filtre à mailles de 1 millimÚtre.
Les produits qui, comme les dĂ©bris de laine, ne peuvent ĂȘtre mĂ©-
langés intimement et donner un échantillon homogÚne sont chauffés
avec de l'acide chlorhydrique jusquâĂ Ă©vaporation complĂšte de l'acide,
: IG ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
mĂ©langĂ©s avec du gypse, broyĂ©s dans un mortier et soumis Ă lâana-
lyse.
Remarques importantes. â 1° Certains engrais comme les fumiers,
les gadoues, les purins, sont offerts Ă lâagriculteur sous une forme
boueuse ou plus ou moins liquide et contiennent généralement des
sels ammoniacaux volatils. Avant de les soumettre Ă lâanalyse, il faut
les dessĂ©cher Ă 100 degrĂ©s. On Ă©vite les pertes dâammoniaque en les
additionnant dâune substance fixatrice de lâammoniaque, telle que
l'acide oxalique. |
2 Ă cause de lâhygroscopicitĂ© souvent trĂšs grande de certains en-
grais, il est bon de déterminer leur teneur en humidité au moment
de la prise de l'échantillon. Si la substance est ensuite desséchée
pour quâelle puisse ĂȘtre moulue plus facilement, ou mĂȘme si elle est
simplement broyĂ©e, un deuxiĂšme dosage de lâhumiditĂ© est fait en
mĂȘme temps que les autres dĂ©terminations. On rapporte alors les
résullats donnés par ces derniÚres à 100 de substance initiale.
b) Détermination de l'humidité.
Elle est toujours faite au moyen dâune Ă©tuve chauffĂ©e au gaz et
pourvue dâun rĂ©gulateur de tempĂ©rature automatique. On nâobtient
pas avec cel appareil des rĂ©sultats rigoureusement exacts, car lâair
peut pĂ©nĂ©trer dans lâĂ©tuve et dĂ©terminer une oxydation de la subs-
tance ; mais quand il sâagit d'engrais, les rĂ©sultats trouvĂ©s sont suf-
fisamment exacts.
LâĂ©tuve employĂ©e (fig. 2) se compose dâune caisse parallĂ©lipipĂ©-
dique d'environ 0,40 de cĂŽtĂ© et fermĂ©e en avant par une porte Ă
double battant. Entre les deux parois de chaque face est un espace
qui peut ĂȘtre rempli avec de lâeau.
Un régulateur de température est placé sur la face supérieure de
lâĂ©tuve. Il est formĂ© dâun tube en U, rempli partiellement de mer-
cure ; lâune de ses extrĂ©mitĂ©s communique avec lâespace rempli
dâeau, tandis que lâautre reçoit le tube dâĂ©cuappement et le tube
d'arrivĂ©e du gaz. Ce dernier est terminĂ© par une plume dâoie taillĂ©e
en biais, dont la pointe plonge dans le mercure. Si le chauffage est
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 117
trop Ă©nergique, la vapeur dâeau acquiert une tension plus forte, fait
monter le mercure dans la branche oĂč est situĂ©e la plume dâoie, et
ralentit lâarrivĂ©e du gaz. Inversement, si la tempĂ©rature baisse, le
mercure en descendant laisse, dans la section de la plume dâoie,
un passage plus grand au gaz et la température revient au degré
convenable. |
LâĂ©tuve est aussi munie dâune soupape de sĂ»retĂ©.
Le dosage de lâhumiditĂ© dâun engrais est trĂšs simple Ă effectuer
avec cet appareil. 10 gr. de substance sont placés dans un petit verre
à précipité lavé, séché et taré. On les laisse pendant trois ou quatre
heures dans lâĂ©tuve quâon a portĂ©e prĂ©alablement Ă la tempĂ©rature
de 105 à 110 degrés. La différence des poids avant el aprÚs la des-
siccation donne le poids de lâeau contenue dans la quantitĂ© de subs-
tance employée.
c) Dosage de lâacide phosphorique.
Nous ne connaissons pas de procédé chimique permettant de dé-
terminer exactement la valeur agricole dâun phosphate.
Pendant longtemps, on a admis que lâacide phosphorique soluble
dans lâeau avait seul de l'effet sur la vĂ©gĂ©tation (Angleterre, Alle-
magne), puis on Ă accordĂ© Ă lâacide phosphorique soluble dans le
citrate dâammoniaque une valeur Ă©gale (France) et enfin depuis
quelque temps on tend de plus en plus Ă croire que lâĂ©tat de division
des phosphates, leur état de mélange intime avec la couche arable,
sont les facteurs les plus importants de leur valeur comme engrais.
Cette derniĂšre hypothĂšse sâest montrĂ©e exacte dans beaucoup de
cas, mais cependant pas toujours.
Suivant les idées admises sur l'assimilation de l'acide phospho-
rique pour les plantes, on a donc adopté, dans les laboratoires, di-
vers modes de dosage, et actuellement on dose encore :
Soit lâacide phosphorique soluble dans lâeau ;
Soit lâacide phosphorique soluble dans le citrate dâammoniaque ;
Soit lâacide phosphorique soluble dans les acides.
Lâacide phosphorique soluble dans lâeau se trouve en quantitĂ©
118 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
relativement grande dans les superphosphates. Ă Halle, on le fait
entrer en dissolution dâaprĂšs la mĂ©thode suivante :
20 gr. de superphosphate sont introduits dans un flacon de 1 litre
de capacitĂ© et additionnĂ©s de 800 centim. cubes dâeau distillĂ©e. Le
flacon, aprĂšs avoir Ă©tĂ© fermĂ© hermĂ©tiquement Ă lâaide dâun bouchon
de caoutchouc, est agité pendant une demi-heure dans un appareil
ad hoc imaginé par le professeur Maercker. |
On complĂšte ensuite le volume Ă 1 000, puis le liquide aprĂšs plu-
sieurs agitations qui mélangent intimement toute la masse est jeté sur
un double filtre et tombe dans des flacons de 400 centim. cubes ayant
la forme des bouteilles en usage dans les pharmacies.
90 centim. cubes de la liqueur filtrée (représentant 1 gr. de subs-
tance) sont transvasĂ©s Ă lâaide dâune pipette dans un flacon Erlen-
meyer (fig. 4) et soumis Ă lâaction des rĂ©actifs prĂ©cipitant lâacide
phosphorique. (Voir plus loin, page 122.)
Lâagitateur Maercker (fig. 18), qui vient dâĂȘtre mentionnĂ©, se com-
pose essentiellement dâune planche horizontale reposant sur deux
cadres métalliques dont la piÚce transversale inférieure peut osciller
dans des gonds fixés sur une table, et portant une caisse assez grande
pour contenir douze flacons de 1 litre. Ces derniers y sont couchés
obliquement six dans un sens, six en sens opposé. Une planche fixée
verticalement dans le milieu de la caisse et munie de douze entailles
supporte les cols. Les fonds des flacons ont leur place dans des
entailles demi-circulaires bordées de caoutchouc.
Lâacide phosphorique soluble dans le citrate dâammoniaque existe
dans les phosphates rétrogradés, dans les phosphates précipités, etc.
Le mode de dosage adopté est le suivant :
Dans un verre Ă prĂ©cipitĂ©, on laisse digĂ©rer 2 gr. dâengrais avec
100 centim. cubes de la solution dite Petermann â pendant une demi-
1. La solution dite « solution Petermann » se prépare de la maniÚre suivante :
250 gr. dâacide citrique cristallisĂ© sont dissous dans 500 centim. cubes d'eau bouil-
lante, puis additionnée de 550 centim. cubes d'eau et de 276 centim. cubes de solu-
tion ammoniacale à 24 p. 100. Si le mélange total est acide, on le neutralise exacte-
ment avec quelques goultes d'une solution d'acide citrique Ă 50 p. 100. Le liquide
ainsi préparé z une densité de 1.09.
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 119
heure à la température de 50 degrés. Le tout est ensuite jeté sur un
filtre et lavé plusieurs fois avec un liquide formé de une partie de
solution Petermann et une partie dâeau. Tout lâacide phosphorique
solubilisé est ainsi entrainé. Le filtre et son contenu sont alors des-
sĂ©chĂ©s Ă lâĂ©tuve, puis chauffĂ©s au rouge dans une capsule de platine
jusquâĂ incinĂ©ration du filtre el transvasĂ©s dans un ballon de 200
centim. cubes avec 2 centim. cubes dâacide azotique de densitĂ© 1.41
el 20 centim. cubes dâacide sulfurique concentrĂ©. On fait bouillir
pendant une demi-heure (voir la théorie du traitement dans la des-
cription de la mĂ©thode de dosage de lâacide phosphorique total),
laisse refroidir, ajoute avec prĂ©caution de lâeau au mĂ©lange acide,
refroidit à 17°,5, complÚte le volume à 200 centim. cubes, jette le
tout sur un double filtre aprĂšs plusieurs agitations et emploie 100
centim. cubes de la liqueur filtrée (représentant 1 gr. de substance)
pour les soumettre dans un Erlenmeyer Ă la prĂ©cipitation de lâacide
phosphorique par les réactifs appropriés. (Voir pages 122 et suiv.)
Lâacide phosphorique Ă lâĂ©tat de phosphate tribasique existe dans
presque tous les engrais phosphatés. Pour le dissoudre, on traite
l'engrais par un acide. Il va de soi que les deux autres formes de
l'acide, quand elles sont prĂ©sentes, entrent en mĂȘme temps en dis-
solution. Ce traitement conduit donc à la détermination des quantités
totales d'acide phosphorique. On lâeffectue de la mĂȘme maniĂšre avec
tous les phosphates, sauf avec les scories de déphosphoration.
9 gr. de substance sont introduits dans un ballon de un demi-litre
avec 20 centim. cubes dâacide azotique de densitĂ© 1.42 et 50 centim.
cubes d'acide sulfurique concentré pur. On fait bouillir le tout pen-
dant une demi-heure sur un bain de sable. Avec les engrais qui ren-
ferment beaucoup de matiÚres organiques, il est souvent nécessaire
d'employer plus de 20 centim. cubes dâacide azotique. En tout cas,
il est Ă recommander, et surtout avec ces derniers, d'ajouter au
mélange un peu de paraffine, afin d'éviter un boursouflement trop
considérable qui pourrait occasionner un débordement de la ma-
tiĂšre.
L'opération précédente étant terminée, on place le ballon sur une
feuille de papier et on le laisse refroidir. On le remplit ensuite len-
120 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
tement et presque entiĂšrement avec de lâeau distillĂ©e. La combi-
naison de lâeau et de lâacide sulfurique amĂšne une Ă©lĂ©vation de tem-
pérature et par conséquent une dilatation du liquide. On refroidit
jusqu'Ă 17°,5 dans un rĂ©frigĂ©rant qui nâest autre chose quâune boĂźte
de zinc divisĂ©e en compartiments oĂč peut circuler un courant dâeau
ordinaire. Le ballon est enfin rempli jusquâau trait 500. AprĂšs lâavoir
agité plusieurs fois en tous sens, on jette son contenu sur un double
filtre. 50 centim. cubes de la liqueur filtrée (correspondant à 05,5
de substance) sont transvasĂ©s Ă lâaide dâune pipette dans un flacon
Erlenmeyer et traitĂ©s en vue de la prĂ©cipitation de lâacide phospho-
rique.
Avant d'aller plus loin, il est utile d'indiquer sur quels principes
repose ce mode de traitement par l'acide azotique et lâacide sulfu-
rique.
Parmi les corps qui accompagnent gĂ©nĂ©ralement lâacide phospho-
rique dans les engrais phosphatés et qui sont susceptibles de fausser
les résultats du dosage, il faut citer en premiÚre ligne : les matiÚres
organiques, la silice et la chaux.
Il nâest pas nĂ©cessaire d'indiquer ici pourquoi les trois corps prĂ©-
citĂ©s peuvent ĂȘtre, dans lâanalyse prĂ©sente, une cause dâerreur. Ces
faits sont suffisamment connus.
GrĂące au traitement des phosphates par les deux acides en ques-
tion, on fait entrer en dissolution tout lâacide phosphorique, dĂ©truit
les matiĂšres organiques, rend la silice insoluble et Ă©limine une partie
de la chaux.
En effet :
1° Toutes les formes de lâacide phosphorique contenues dans les
engrais sont solubles dans un mĂ©lange bouillant âd'acide sulfurique
et dâacide azotique ;
2 Lâacide sulfurique dĂ©compose les matiĂšres organiques en leur
enlevant les Ă©lĂ©ments de lâeau, et laisse du carbone pour rĂ©sidu.
Lâacide azotique se trouvant Ă chaud en prĂ©sence de ce dernier
corps, le transforme en acide carbonique en lui cédant de son oxy-
gĂšne et il est amenĂ© lui-mĂȘme Ă lâĂ©tat de bioxyde dâazote qui, au
contact de l'air, donne des vapeurs rutilantes dâacide hypoazotique ;
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 121
3° Ă la tempĂ©rature oĂč le mĂ©lange des deux acides bout, lacide
sulfurique, qui est trĂšs avide dâeau, prend Ă la silice son eau de
constitution et la rend insoluble ;
4 Lâacide sulfurique peut en outre se combiner Ă la chaux et
donner du sulfate de chaux, soluble dans les acides, mais peu so-
luble dans les acides trĂšs Ă©tendus. Or, it arrive souvent que la chaux
contenue dans les engrais phosphatés est en trop grande quantité
pour quâelle puisse ĂȘtre redissoute entiĂšrement Ă lâĂ©tat de nitrate
double, par l'addition de la solution citrique.
Elle se prĂ©cipite alors Ă lâĂ©tat de citrate de chaux qui vient sâa-
jouter au précipité de phosphate ammoniaco-magnésien. Le sulfate
de chaux dont nous venons d'indiquer la formation se sépare en
partie aprĂšs quâon a complĂ©tĂ© le volume Ă 500, et il reste rarement
assez de chaux en solution pour fausser les résultats.
Le mode de traitement des scories est un peu différent, parce
que ces derniĂšres ne renferment pas de matiĂšres organiques.
On prend 10 gr. de substance quâon humecte dans une cap-
sule de porcelaine avec quelques gouttes dâeau. On ajoute ensuite
9 centim. cubes dâacide sulfurique renfermant la moitiĂ© de son poids
dâeau, et lorsque la masse est durcie, 50 centim. cubes dâacide sul-
furique concentrĂ©. Le mĂ©lange est remuĂ© avec un agitateur jusquâĂ
ce quâil soit bien homogĂšne, puis placĂ© sur un bain de sable et
chauffĂ© jusquâĂ lâĂ©bullition pendant une demi-heure. Il faut veiller
à ce qu'aucune parcelle de la substance ne devienne adhérente aux
parois de la capsule, car il pourrait se produire des projections vers
la fin du traitement.
Pendant le refroidissement, on lave les parois de la capsule avec
une pisselte Ă eau, remue et transvase le tout dans un ballon Ă fond
plat de un demi-litre quâon remplit Ă la tempĂ©rature de 17°,5 jus-
quâau trait 500.
La filtration du liquide ayant été faite comme il a été indiqué pour
les superphosphates, on prélÚve 50 centim. cubes de la liqueur
filtrĂ©e pour y faire le dosage de lâacide phosphorique. Ges 50 centim.
cubes représentent 1 gr. de substance.
Remarque. â 1] peut ĂȘtre utile ou intĂ©ressant de connaĂźtre la
122 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
quantité d'acide phosphorique libre contenue dans un superphos-
phate.
On opĂšre alors de la maniĂšre suivante :
5 gr. de lâengrais sont agitĂ©s dans un mortier avec de lâalcool
absolu et transvasés dans un flacon de 250 centim. cubes. On com-
plĂšte jusquâĂ la marque 250 avec de l'alcool pur. Le flacon ayant Ă©tĂ©
bien bouché, on laisse les corps en présence pendant deux heures,
en ayant soin dâagiter frĂ©quemment.
On filtre alors trĂšs vite, mesure avec la pipette 50 centim. cubes
(reprĂ©sentant 1 gr. de substance) de la liqueur filtrĂ©e, quâon intro-
duit dans un flacon Erlenmeyer, chauffe jusquâĂ Ă©vaporation com-
plĂšte de l'alcool, verse sur le rĂ©sidu de lâeau distillĂ©e, et contmue le
dosage comme dans les autres cas.
Toutes les solutions d'acide phosphorique dont nous venons d'in-
diquer la prĂ©paration et le transvasement Ă lâaide dâune pipette
dans un flacon Erlenmeyer sont traitĂ©es Ă partir de ce moment dâune
maniĂšre analogue.
On leur ajoute, dans le cas des superphosphates, 50 centim. cubes,
dans les autres cas, 100 centim. cubes dâune solution de eitrate
dâammoniaque ', quâon laisse tomber dâune burette graduĂ©e en
50 centim. cubes, et aussitĂŽt aprĂšs 25 centim. cubes dâune solution
magnésienne (MagnesiamiÊtur)* dont on a rempli auparavant une
burette graduée en 25 centim. cubes.
Lâaddition de la liqueur magnĂ©sienne doit ĂȘtre faite immĂ©diate-
ment aprĂšs celle de la liqueur citrique, afin dâĂ©viter la prĂ©cipitation
par cette derniĂšre du phosphate de chaux cristallin que la premiĂšre
_ne pourrait complĂštement redissoudre. Il est donc bon dâagiter
constamment les flacons Erlenmeyer contenant la solution Ă analyser
pendant quâon y introduit les rĂ©actifs prĂ©cipitants.
1. La solution de citrate d'ammoniaque est préparée ainsi qu'il suit :
1 500 gr. d'acide citrique sont dissous dans de l'eau, puis additionnés de 5 000 centim.
cubes de solution ammoniacale à 24 p. 100. Le tout est complété à 15 litres avec de
l'eau distillée.
2, Pour préparer la liqueur magnésiennne (Magnesiamixtur), on dissout dans
61,5 d'eau distillée, 550 gr. de chlorure de magnésium et 1 050 gr. de chlorhydrate
d'ammoniaque, on ajoute ensuite 3!,5 de solution ammoniacale Ă 24 p. 100.
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 123
La liqueur doit ĂȘtre complĂštement claire quand on a terminĂ©
l'addition du réactif magnésien, sinon 1l faudrait ajouter une nou-
velle quantitĂ© de ce dernier (jusquâĂ 25 centim. cubes) Ă moins que
le trouble existant ne soit quâune simple opalescence, comme le cas
se produit souvent avec les superphosphates provenant du noir
animal.
Les rĂ©actions qui se passent pendant quâon mĂ©lange les liquides
en question, déterminent une élévation de température qui pourrait
rendre difficile la précipitation du phosphate ammoniaco-magnésien.
On pare à cet inconvénient en plaçant pendant quelques minutes les
flacons Erlenmever dans le réfrigérant dont nous avons déjà parlé.
On hĂąte mĂȘme la formation du prĂ©cipitĂ©, et Ă©vite qu'il adhĂšre trop
fortement aux parois du verre en lâagitant pendant une demi-heure,
aprÚs avoir fermé hermétiquement les flacons avec de bons bouchons
de caoutchouc.
Getle agitalion est effectuĂ©e Ă lâaide dâune machine (/ig. 5) cons-
truite de la maniĂšre suivante :
à un axe vertical sont fixés horizontalement deux plateaux circu
laires sur chacun desquels sont formĂ©s Ă lâaide de palettes radiales
six compartiments. Un cordon de caoutchouc forme le cÎté extérieur
de chacun dâeux, de sorte que chaque plateau peut recevoir six fla-
cons Erlenmeyer. Un moteur Ă eau met en mouvement une roue
qui, par lâintermĂ©diaire dâune manivelle et dâune bielle, commu-
nique Ă l'axe et aux plateaux un mouvement Lournant de va-et-vient.
Une fois lâagitation terminĂ©e, les particules de prĂ©cipitĂ© adhĂ©-
rentes au bouchon sont sĂ©parĂ©es Ă lâaide dâune plume dâoie dont on
a enlevé les barbes jusque prÚs de l'extrémité et envoyées dans le
ballon correspondant Ă lâaide dâune pissette contenant de lâeau am-
moniacale Ă 5 p. 100.
On peut jeter le précipité sur le filtre aussitÎt aprÚs, ou bien
attendre un ou deux jours. Les rĂ©sultats sont les mĂȘmes quel que
soit celui de ces dĂ©lais quâon adopte.
La filtration a lieu dans une capsule de platine dont le fond est
percé de trous circulaires ayant un demi-millimÚtre de diamÚtre, et
recouvert d'amiante destinée à remplacer le papier-filtre.
L'amiante, pour ĂȘtre propre Ă cet usage, doit subir la prĂ©paration
124 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
suivante : Les fibres dâamiante les plus grossiĂšres sont rĂąclĂ©es sur une
plaque de verre avec une lame bien aiguisée et transformées ainsi
en une sorte de charpie trĂšs fine quâon fait bouillir pendant deux
heures au bain-marie avec de lacide chlorhydrique concentré.
Par une sĂ©rie dâadditions dâeau et de dĂ©cantations avec un siphon,
aprĂšs un repos suffisamment long, on enlĂšve peu Ă peu tout lâacide
chlorhydrique. Lâamiante qui flotte aprĂšs la derniĂšre dĂ©cantation
dans lâeau rendue ainsi Ă peu prĂšs neutre, peul alors ĂȘtre employĂ©e
à faire des filtres. à cet effet, la capsule de platine est attelée à une
trombe Ă eau au moyen de lâappareil (fig. 6) dont le tube supĂ©rieur
porte un cylindre de caoutchouc qui est repliĂ© vers lâintĂ©rieur sur
tout son pourtour et s'applique exactement sur la paroi extérieure
de la capsule. Lâeau avec lâamiante sont versĂ©es dans la capsule ;
l'amiante tassĂ©e avec un agitateur aplati Ă lâextrĂ©mitĂ©, lavĂ©e plu-
sieurs fois avec de lâeau distillĂ©e. La capsule de platine est alors
portée dans le moufle, chauffée au rouge pendant dix minutes,
exposée au refroidissement dans un exsiccateur, puis tarée.
La filtration du liquide contenant le précipité de phosphate am-
moniaco-magnĂ©sien a lieu suivant le mĂȘme mode que nous venons
d'indiquer. Les derniÚres parcelles du précipité sont détachées des
parois du flacon avec une plume dâoie et envoyĂ©es dans la capsule
Ă lâaide dâune solution ammoniacale Ă 5 p. 100. Cette derniĂšre est
contenue dans un flacon (fig. 7) placé à deux mÚtres au-dessus du
sol et est amenĂ©e Ă portĂ©e de lâopĂ©rateur par un tube formant
siphon, et terminé à son extrémité inférieure par un tube de verre
étiré que commande une pince de pression.
Quand la filtration est achevĂ©e, la capsule est essuyĂ©e Ă lâextĂ©-
rieur avec un linge sec, placée sur une plaque de fer (fig. 8) au-
dessous de laquelle brĂ»le un Bunsen, chauffĂ©e ainsi jusquâĂ ce que
le précipité se fendille et enfin introduite dans le moufle à gaz
(fig. 9) dont les parois sont portées au rouge.
On compte que 5 Ă 10 minutes suffisent pour transformer le phos-
phate ammoniaco-magnésien en pyrophosphate de magnésie.
La capsule est alors retirée du moufle. On hùte son refroidis-
sement en la plaçant dans un rĂ©frigĂ©rant composĂ© dâune sorte de
boĂźte de zinc (fig. 10) dans laquelle peut circuler un courant dâeau
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 125
et dont la face supérieure présente trois enfoncements doublés de
cuivre, ayant une forme de tronc de cÎne, et destinés à recevoir les
capsules. DÚs que ces derniÚres ont acquis la température de l'air
ambiant, elles sont portées sous une cloche de verre et peuvent
ĂȘtre pesĂ©es quelques instants aprĂšs.
En multipliant par 0,639 le poids de pyrophosphate, on obtient la
quantitĂ© dâacide phosphorique contenue dans la portion de liqueur
soumise Ă lâanalyse.
La balance employée est sensible au dixiÚme de milligramme.
Les quantités de pyrophosphate trouvées dans les deux dosages
parallÚles ne doivent pas différer de plus de 15,2 pour 08,5 de
substances, et de 26,4 pour 1 gr.; sinon, le dosage doit ĂȘtre re-
commencé.
Des tables construites par Stutzer et correspondant à 05°,5 de
matiĂšre permettent de trouver trĂšs vite quel poids dâacide phospho-
rique correspond à un poids donné de pyrophosphate de magnésie.
Si le liquide traitĂ© par les rĂ©actifs prĂ©cipitant lâacide phosphorique
correspondait Ă Ă gr. ou 4ÂŁ,5 dâengrais, une correction serait nĂ©-
cessaire.
Pour éviter des confusions, toutes les capsules sont numérotées.
Au printemps et en automne, câest-Ă -dire au moment des se-
mailles, quatre préparateurs sont employés exclusivement au dosage
de l'acide phosphorique; deux dâentre eux exĂ©cutent toutes les
opĂ©rations jusquâĂ et non compris la filtration du prĂ©cipitĂ© de phos-
phate ammoniaco-magnésien ; les deux autres achÚvent le dosage.
Avec une telle division du travail, 100 dĂ©terminations peuvent ĂȘtre
effectuées en une Journée de huit heures.
Quant aux capsules de platine, elles peuvent, malgré le précipité
quâelles renferment, servir Ă de nouvelles filtrations, sans quâil soit
nécessaire de leur faire subir une autre préparation.
Cependant quand elles sont remplies à moitié, on extrait le pyro-
phosphate avec précaution sans toucher au filtre d'amiante, tare de
nouveau la capsule et la rend ainsi apte Ă ĂȘtre utilisĂ©e de nouveau.
Dosage de l'acide phosphorique par le molybdate d'ammoniaque.
â DâaprĂšs une convention adoplĂ©e au CongrĂšs des stations agrono-
126 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
miques allemandes, lacide phosphorique doit ĂȘtre dosĂ© par le
molybdate d'ammoniaque, quand il sâagit dâune expertise Ă faire.
On opĂšre alors de la maniĂšre suivante :
On dissout lâacide phosphorique de la substance Ă analyser comme
nous lâavons indiquĂ© en dĂ©crivant la mĂ©thode par le phosphate am-
moniaco-magnésien.
50 centim. cubes de la liqueur filtrée sont transvasés avec une
pipette dans un flacon Erlenmeyer et additionnés de 200 centim. cubes
de liqueur molybdique*. Le tout est placé, pendant deux heures,
dans un bain d'eau à la température de 50 degrés. Le flacon étant
retiré du bain, et son contenu refroidi, on jette ce dernier sur un
filtre, en prenant som de laisser aller le moins possible de précipité
sur le filtre. |
La partie non entrainée est lavée neuf fois avec 20 centim. cubes
de liqueur molybdique Ă©tendue de son poids dâeau. Les eaux de
lavage sont jetées par décantation sur le filtre, et celui-ci est lavé
une dixiĂšme fois avec 20 centim. cubes de la mĂȘme solution.
Lâentonnoir avec son contenu est alors fixĂ© sur le flacon Erlen-
meyer correspondant, et on fait tomber le précipité dans ce dernier
en le dissolvant avec de lâeau ammoniacale Ă 5 p. 100. Pour en en-
trainer les derniĂšres traces, on lave deux ou trois fois avec de lâeau
bouillante.
Le liquide filtré est neutralisé à chaud avec de lacide chlorhydri-
que, câest-Ă -dire additionnĂ© de cet acide jusquâĂ ce que le prĂ©cipitĂ©
qui apparail ne se dissolve quâaprĂšs une agitation assez longue.
AprĂšs refroidissement, on ajoute goutte par goutte et en agitant,
20 centim. cubes de liqueur magnésienne ( Magnesiamixtur ),
25 centim. cubes de solution ammoniacale (Voir précédemment le
mode de préparation de ces deux solutions), mélange bien le tout et
laisse au repos pendant deux heures.
Le précipité est ensuite jeté dans une capsule de platine munie
d'un filtre d'amiante, et le ballon Erlenmeyer lavé comme nous
1. Pour préparer la solution moiybdique, on dissout dans un litre d'eau 150 gr. de
molybdate d'ammoniaque. AprĂšs refroidissement, on verse la solution dans un litre
d'acide azotique de densité 1.2.
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 127
l'avons indiqué dans la description de la méthode du phosphate
ammoniaco-magnésien.
Avec ce mode de dosage, il est Ă recommander de nâemployer le
mĂȘme filtre d'amiante quâune seule fois, car le prĂ©cipitĂ© de phos-
phate ammoniaco-magnĂ©sien quâon obtient se compose de cristaux
trĂšs fins qui pourraient ĂȘtre entrainĂ©s avec le liquide Ă travers les
fils d'amiante, si ces derniers ne formaient pas un réseau trÚs serré,
Une fois la filtration terminée, la capsule de platine est placée
dans un manchon de mĂȘme mĂ©tal, et chauffĂ©e sur un brĂ»leur Bunsen
jusquâĂ ce que le prĂ©cipitĂ© soit presque blanc. â Le but de ce
manchon est d'empĂȘcher laction des gaz rĂ©ducteurs de la flamme. â-
Elle est ensuite introduite seule et laissée pendant cinq à dix minutes
dans un moufle chauffé au rouge.
La transformation du précipité en pyrophosphate de magnésie
peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme terminĂ©e quand le prĂ©cipitĂ© est devenu
complĂštement blanc.
Le dosage est achevé comme d'habitude.
Quelques remarques sur les scories. â 1° De nombreuses expĂ©-
riences ont prouvĂ© que les scories rĂ©duites Ă lâĂ©tat de poussiĂšre trĂšs
fine et mélangées intimement à la couche arable produisent, dans
beaucoup de cas, les mĂȘmes effets comme engrais phosphatĂ©s que
les superphosphates.
Cette donnĂ©e a conduit les Stations agronomiques allemandes Ă
faire dans les scories la détermination des parties fines, et celle des
parties plus grossiĂšres.
Lâacide phosphorique des parties fines est considĂ©rĂ© comme pou-
vant produire son effet dans lâannĂ©e mĂȘme de son emploi, le reste
forme un stock qui arrivera petit Ă petit Ă la consommation, suivant
la grosseur des particules.
DâaprĂšs une convention adoptĂ©e au CongrĂšs des stations agrono-
miques, appartient Ă la partie fine tout ce qui passe Ă travers un
tamis dâau moins 20 centim. de diamĂštre et Ă mailles de 0,17,
90 gr. de scories sont introduits dans le tamis en question et
agités pendant un quart d'heure (ce temps a été fixé par le CongrÚs)
soit Ă la main, soit Ă lâaide de lâagitateur mĂ©canique que nous avons
128 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
dĂ©crit en parlant du mode de dissolution de lâacide phosphorique
des superphosphates.
2 Depuis quelques années, on falsifie les scories avec du phos-
phate dâalumine (Redondaphosphale), lequel semble ne pas ĂȘtre assi-
milable par les plantes.
Deux mĂ©thodes peuvent ĂȘtre employĂ©es pour dĂ©celer cette falsi-
fication. | |
a) MĂ©thode Richter. â Elle est basĂ©e sur le principe suivant: Les
solutions de sels dâalumine donnent, quand on les additionne de
potasse ou de soude, un prĂ©cipitĂ© dâalumine gĂ©latineuse soluble
dans un excÚs de réactif, tandis que le précipité obtenu dans les
mĂȘmes conditions par l'addition dâammoniaque ne se redissout pas,
quelle que soit la quantitĂ© dâammoniaque ajoutĂ©e.
2 gr. de la scorie à examiner sont laissés pendant quelques heures,
dans un verre à précipité, en présence de 10 centim. cubes de soude
caustique ayant une densité de 1,05 à 1,06. Le mélange est agité de
temps en temps.
AprÚs un repos suffisamment long, le liquide supérieur est dé-
cantĂ©, rendu lĂ©gĂšrement acide avec de lâacide azotique quâon ajoute
goutte Ă goulte, puis additionnĂ© dâammoniaque jusquâĂ rĂ©action
franchement alcaline.
Si la scorie nâa pas Ă©tĂ© falsifiĂ©e, il ne se produit aucun prĂ©ci-
pitĂ© ; Ă peine voit-on apparaĂźtre quelques flocons dâacide silicique.
S1, au contraire, du phosphate dâalumine lui a Ă©tĂ© mĂ©langĂ©, il se
sépare un précipité, qui, aprÚs un temps relativement long, occupe
la moitié du liquide.
D'ailleurs, si la potasse pendant son contact avec la scorie a pris
une coloration jaune ou rouge, si par lâaddition goutte Ă goutte de
l'acide azotique, il sâest formĂ© un prĂ©cipitĂ© tant que la liqueur
était encore alcaline, on peut sûrement conclure à une falsifica-
tion.
Mais supposons que toutes ces rĂ©actions nâaient pas Ă©tĂ© bien mar-
quĂ©es, et quâil subsiste encore des doutes. La mĂ©thode suivante
due au D° Gerlach, préparateur à la Station de Halle, permet de les
lever.
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMAYDES. 129
b) 5 gr. de scories sont traitĂ©s dans un tube Ă essai avec 10 Ă
15 centim. cubes de bromoforme. Si la scorie est pure, elle se
dissout à peu prÚs entiÚrement. Quelques débris organiques seule-
ment restent en suspension. Mais si elle a été mélangée de phosphate
dâalumine, ce dernier ne se dissout pas et nage Ă la surface du
bromoforme. La partie flottante est alors traitĂ©e dâaprĂšs la premiĂšre
méthode et cette fois les réactions sont trÚs prononcées et permettent
de porter un Jugement sûr.
Pour dĂ©terminer la quantitĂ© dâacide phosphorique attribuable au
phosphate dâalumine, on utilise cette propriĂ©tĂ© que possĂšdent les
phosphates des scories dâĂȘtre solubles dans les acides organiques.
1 gr. de scorie est mélangé dans un verre à précipité avec 150
centim. cubes dâune solution dâacide citrique contenant 50 gr. dâacide
citrique cristallisé par litre. Le tout est laissé pendant 12 heures
dans un bain dâeau dont la tempĂ©rature est comprise entre 50 et 70
degrés. On agite de temps en temps.
On Ă©tend ensuite la solution avec 100 centim. cubes dâeau, fait
bouillir pendant une minute, filtre et lave le résidu plusieurs fois
avec de lâeau bouillante.
Le filtre et son contenu sont introduits dans une capsule de pla-
tine, chauffés jusqu'à incinération du filtre, puis traités dans un
ballon avec de l'acide sulfurique concentré et de l'acide azotique,
suivant le mĂȘme mode que nous avons indiquĂ© en dĂ©crivant la
mĂ©thode de dosage de lâacide phosphorique dans les phosphates
en général.
La quantitĂ© dâacide phosphorique ainsi trouvĂ©e doit ĂȘtre consi-
dĂ©rĂ©e comme ne pouvant ĂȘtre d'aucun profit pour les plantes.
d) Dosage de lâazole sous ses divers Ă©tats.
1° Dosage de l'azote organique. â Le dosage de lâazote organique
est effectuĂ© dâaprĂšs la mĂ©thode Kjeldahl. On opĂšre sur 1 gr. ou 15,5
de substance suivant que les engrais sont censés renfermer plus
ou moins d'azote organique et sur 0",7 avec les sulfates dâammo-
niaque.
L'oxydation des matiĂšres organiques a lieu dans des ballons Ă
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1. 9
130 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
fond plat de 180 centim. cubes. Nous avons indiqué (page 5)
quelles dispositions permettent dâajouter facilement Ă la matiĂšre,
la goutte de mercure et les 20 centim. cubes dâacide sulfurique
concentré.
Pour éviter un boursouflement trop volumineux pendant la ré-
duction, on emploie la paraffine.
Les ballons sont alors portés sous la hotte, sur les trépieds que
nous avons dĂ©crits, lesquels sent dâabord placĂ©s de telle façon que
les enfoncements qui reçoivent les ballons se trouvent entre les
flammes. AprÚs une demi-heure, les enfoncements sont ramenés
au-dessus des flammes et la réaction peut s'effectuer plus vite.
On considĂšre que la transformation de lâazote organique en am-
moniaque est terminée quand le liquide est devenu complÚtement
clair et incolore. On transvase avec les précautions nécessaires le
liquide acide dans des flacons Erlenmeyer, 100 centim. cubes dâeau
distillée sont employés pour cette opération.
Le dosage est terminé comme d'habitude.
Nous voulons seulement mentionner quelques particularités qui
paraissent présenter des avantages.
L'appareil Ă distiller est des plus simples. Les Erlenmeyer con-
lenant le liquide à distiller sont placés au-dessus de brûleurs Bun-
sen, sur une planche mĂ©tallique couverte dâune toile d'amiante et
percée de trous circulaires correspondant à la base des ballons.
Ils communiquent avec les verres contenant les 20 centim. cubes
d'acide sulfurique titrĂ© Ă lâaide dâun tube de verre muni dâun ren-
flement en forme dâallonge Ă sa sortie de lâErlenmeyer et recourbĂ©
ensuite sur un bùton de bois de la forme indiquée dans le dessin.
Aucun appareil rĂ©frigĂ©rant nâest ici employĂ©, de sorte que la vapeur
d'eau ammoniacale dĂ©gagĂ©e porte l'acide sulfurique titrĂ© Ă lâĂ©bulli-
on, et dĂ©termine le dĂ©gagement de lâacide carbonique qui a pu
ĂȘtre contenu dans lâeau avec laquelle on a, avant la distillation, dou-
blĂ© le volume de l'acide sulfurique titrĂ©, ou dans la soude quâon a
employĂ©e pour chasser lâ'ammoniaque.
On arrĂȘte la distillation quand le liquide contenu dans lâErlenmever
a bouilli pendant vingt minutes.
Le titrage de lâacide sulfurique non saturĂ© par lâammoniaque se
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 131
fait avec de lâeau de baryte ; on nâemploie jamais la potasse ou la
soude.
On donne comme raison de cette préférence que la baryte, la soude
et la potasse donnant lieu, en prĂ©sence de lâacide carbonique de
l'air, Ă la formation dâun carbonate, le carbonate de baryte, Ă
cause de son insolubilité, se dépose dans la burette ou bien dans le
rĂ©cipient oĂč la baryte est conservĂ©e, tandis que les carbonates de
potasse et de soude, qui sont solubles, tombent avec la potasse ou la
soude dans l'acide sulfurique et tendent ainsi Ă fausser un peu les
résultats.
Lâensemble de lâappareil de titration est composĂ© de la maniĂšre
suivante : La provision dâeau de baryte est contenue dans un rĂ©ci-
pient de 30 à 40 litres placé sur un support à environ 2 mÚtres au-
dessus du sol.
Il est fermĂ© par un bouchon qui donne passage Ă trois tubes : lâun
de ces tubes faisant fonction de siphon, amĂšne lâeau de baryte Ă la
partie infĂ©rieure dâune burette verticale divisĂ©e en dixiĂšmes de
centim. cube et fixée à un support qui repose sur une table
ordinaire. Il est commandé par une pince placée prÚs de la bu-
rette.
La deuxiĂšme met en communication lâespace vide du rĂ©cipient
avec la partie supérieure de la burette.
Enfin le troisiĂšme permet Ă lâair extĂ©rieur dâarriver dans le rĂ©ci-
pient en passant Ă travers une allonge remplie de fragments de
potasse, destinĂ©s Ă retenir lâacide carbonique.
Un flotteur ayant la forme d'un cylindre étiré à ses deux extré-
mités el portant au milieu de sa hauteur un trait horizontal gravé
est introduit dans la burette. Si lâon suppose que le niveau de lâeau
de baryte dans la burette coïncide avec le trait gravé, la lecture des
résultats est singuliÚrement facilitée. |
Quand on ne fait pas de titration, la partie inférieure de la bu-
retle est soustraite au contact de l'air Ă lâaide dâun court tube de
caoutchouc fermĂ© Ă lâautre extrĂ©mitĂ© par une courte tige de verre
plein.
Comme indicateur de la fin de la réaction, on emploie deux
gouttes dâune solution dâacide rosolique dans l'alcool absolu (1 gr.
132 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
d'acide rosolique dans 50 gr. d'alcool). Au moment oĂč le liquide
devient alcalin, 1l prend une coloration blanche. Il est Ă remarquer
que le point critique est assez difficile Ă saisir, quand le liquide
titrĂ© contient une forte proportion dâammoniaque. Il vaut done
mieux, avec les sulfates dâammoniaque, employer la teinture de
tournesol.
Nous avons maintenant à donner quelques détails sur la prépara-
tion des liquides employés.
Pour prĂ©parer lâeau de baryte, on met 260 or. de baryte hy-
dratĂ©e en digestion dans de lâeau chaude. On agite et renouvel'e
l'eau jusqu'Ă dissolution complĂšte de la baryte. On complĂšte ensuite
Ă 10 litres.
La liqueur alcaline qui sert Ă chasser lâammoniaque est obtenue
en mélangeant 11 litres et demi de soude caustique de densité 1,379
avec 390 gr. de sulfure de potassium quâon a dissous dans deux
litres dâeau.
Pour prĂ©parer lâacide sulfurique titrĂ©, on complĂšte Ă 40 litres,
1524 gr. d'acide sulfurique concentré pur de densité 4,845 ; on
fixe son litre Ă lâaide de carbonate de soude pur, lequel est mainte-
nant fabriqué dans la grande industrie.
6 gr. de carbonate de soude sont placés dans une capsule de pla-
tine larĂ©e, et chauffĂ©s sur une lampe Ă alcool jusquâĂ constance de
poids. Soit p le poids du carbonate sec.
On les introduit ensuite avec de lâeau distillĂ©e dans un flacon
jaugĂ© Ă 1 litre et on complĂšte le volume Ă 1000 quand le sel sâest
dissous. La solution doit ĂȘtre parfaitement claire.
AprĂšs plusieurs agitations, on transvase Ă lâaide dâun pipeite
90 centim. cubes de la solution dans un flacon Erlenmeyer oĂč on a
introduit prĂ©alablement 20 centim. cubes dâacide sulfurique prĂ©parĂ©
comme il vient dâĂȘtre dit.
On fait bouillir le mĂ©lange jusquâĂ disparition complĂšte de lâacide
carbonique, el sature ensuite l'acide sulfurique avec de lâeau de
baryte titrĂ©e ; soit B la quantitĂ© dâeau de baryte employĂ©e.
On sature de mĂȘme 20 centim. cubes d'acide sulfurique auxquels
on nâa pas ajoutĂ© de dissolulion de carbonate de soude. Soit A la
quantité de baryte employée.
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 139
Les 50 centim. cubes de la solution de carbonate renferment
ep de sel qui correspondent en Ă©quivalent Ă 0 d'azote
100 930
Si donc, nous désignons par { la quantité d'azote correspondant
Ă 20 centim. cubes dâacide sulfurique, nous pouvons Ă©crire :
RES 930 (A âB)
1p
d'oĂč
PU SAME
930 (A âB)
Supposons quâon ait Ă interprĂ©ter les rĂ©sultats dâune analyse.
On aura alors, si on dĂ©signe par g la quantitĂ© dâeau de baryte em-
ployĂ©e pour saturer l'acide sulfurique non combinĂ© Ă lâammoniaque :
(Aâg)t
Quantité d'azote contenue dans la substance employée = \
% Dosage de l'azote ammoniacal. â- On lâexĂ©cute Ă Halle comme
en France.
3 Dosage de l'azote nitrique.â Il y a plusieurs cas Ă distinguer :
1° Lâengrais Ă analyser renferme de lâazote sous les trois formes ;
2 Lâengrais Ă analyser renferme de lazote ammontacal et de
l'azote nitrique ;
3 Lâengrais Ă analyser ne renferme que de l'azote nitrique.
Dans le premier cas, on dĂ©termine lâazote total dâaprĂšs la mĂ©thode
de Jodlbauer, puis lâazote organique et lâazote ammoniacal dâaprĂšs
la méthode Kjeldahl, La différence des résultats trouvés représente
lâazote nitrique, si toutefois on a eu soin, avant de procĂ©der au
dernier dosage , d'Ă©liminer complĂštement l'azote nitrique de lâen-
TaIS. |
La mĂ©thode Jodlbauer consiste Ă transformer lâazote nitrique en
une substance organique dont on amĂšne ensuite lâazote Ă lâĂ©tat
dâammoniaque dâaprĂšs la mĂ©thode Kjeldahl.
On opĂšre cette transformation en {raitant la substance Ă analyser
par un mĂ©lange de phĂ©nol et dâacide sulfurique. DĂšs quâelle est dis-
soute, on ajoute de temps en temps du zinc en poudre.
134 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Les réactions qui se produisent sont les suivantes :
Lâacide azotique, en rĂ©agissant sur le phĂ©nol, donne du nitro-
phénol suivant la réaction :
AzOâ I + CH, OH â C'H'AzO'OH + H0.
La poussiĂšre de zinc arrivant en contact de lâacide sulfurique
donne lieu à une production d'hydrogÚne, lequel réagit à son tour
sur le nitro-phĂ©nol et le transforme en amide, ainsi quâil suit :
CH AzO* OH + 4H? â C°H° Az HE? + 34H20.
Lâazote de lâamide est ensuite rĂ©duit en ammoniaque (mĂ©thode
Kjeldahl).
Nous avons dit que la poussiÚre de zinc est ajoutée par petites
quantités et par intervalles suffisamment éloignés.
Si on ajoute trop de zinc en une seule fois, il en résulte un grand
dégagement de chaleur et par conséquent une élévation de tempé-
rature du liquide. Lâacide sulfurique peut alors rĂ©agir sur les ma-
tiÚres organiques et donner lieu à la formation de CO° et de SO*.
LâhydrogĂšne donne en mĂȘme temps avec lâacide sulfureux nais-
sant de l'acide sulfhydrique et de lâeau :
SO? + CH = HS + 2H: 0.
Ainsi s'explique le dégagement d'IFS et de SO? qui se produit
aprĂšs chaque addition de zinc. On comprend aussi pourquoi il est
recommandable de maintenir les ballons dans un réfrigérant pendant
qu'on effectue cette opération.
Comme toutes ces rĂ©actions mettent de lâeau en libertĂ©, on ajoute
au mélange d'acide sulfurique et de phénol, de l'acide phosphorique
anhydre, lequel est trĂšs avide dâeau et permet ainsi de conserver
l'acide sulfurique Ă lâĂ©tat concentrĂ©, ce qui a son importance dans
la transformation de lâazote organique en azote ammoniacal dâaprĂšs
la méthode Kjeldah].
Le mĂ©lange dâacide sulfurique, de phĂ©nol, et dâacide phospho-
rique anhydre est préparé de la maniÚre suivante :
On dissout dans de lâacide sulfurique concentrĂ©, dâune part 66 er.
de phĂ©nol, dâautre part 250 gr. dâacide phosphorique anhydre.
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 19
AprÚs avoir refroidi les deux solutions, on les mélange et complÚte
le volume Ă 1!,690.
Il nous reste à dire comment on pratique la méthode Jodibauer.
On pĂšse 15',5 d'engrais quâon introduit dans un ballon Ă rĂ©duction
de 180 centim. cubes, avec 30 centim. cubes du mélange indiqué
ci-dessus. Les corps sont laissés ainsi en présence pendant une heure
environ. On agite souvent, pour que les principes solubles se dis-
solvent rapidement et entiÚrement. Les ballons sont ensuite placés
dans un rĂ©frigĂ©rant, â lequel consiste en une boĂźte mĂ©tallique
divisĂ©e en compartiments oĂč circule un courant dâeau froide â et
on commence l'addition du zinc. Celui-ci est déposé sur un papier
en forme de carte de visite, portant le mĂȘme numĂ©ro que le ballon
correspondant. Lorsque la quantité totale de zinc (1 gr.) a été intro-
duite, on laisse les ballons au repos pendant deux heures; on in-
troduit dans le liquide une goutte de mercure et un peu de paraffine
et on continue le dosage dâaprĂšs la mĂ©thode Kjeldahl.
Pour chasser lâammoniaque par distillation, on rend le liquide
alcalin avec un mélange de soude caustique et de sulfure de potas-
sium (méthode Kjeldahl).
Il est à remarquer que, dans le cas présent, il faut employer au
moins 109 centim. cubes de cette liqueur.
La titration de lâacide sulfurique non saturĂ© par lâammoniaque et
l'interprĂ©tation des rĂ©sultats nâoffrent rien de particulier.
Quand lâengrais ne contient que de l'azote ammoniacal et de
l'azote nitrique, on peut aussi avoir recours à la méthode Jodlbauer ;
mais il est préférable de déterminer séparément l'azote ammoniacal
el lâazote nitrique ; l'azote ammoniacal, dâaprĂšs la mĂ©thode ordi-
naire, l'azote nitrique dâaprĂšs la mĂ©thode dite du fer et du zinc qui
a été introduite à Halle pendant les derniers temps de mon séjour
au laboratoire, ou dâaprĂšs la mĂ©thode dite de l'aluminium qui est
adoptée par le professeur Wagner à Darmstadt.
Enfin quand lâengrais ne renferme que de l'azote nitrique (sal-
pĂȘtre du Chili), on peut effectuer le dosage de lâazote dâaprĂšs lâune
de ces deux derniÚres méthodes.
a) MĂ©thode dite du fer et du zinc. â Nous nous contenterons
136 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
d'indiquer comment on la pratique, car il nây a pas jusquâĂ prĂ©sent
de thĂ©orie qui explique dâune maniĂšre satisfaisante les rĂ©actions
qui se produisent. Mais il est bon de faire tout dâabord la des-
cripuon de lâappareil Ă distiller que nĂ©cessite lâemploi de cette mĂ©-
thode.
Les flacons Erlenmeyer contenant le liquide à distiller sont placés
au-dessus de brĂ»leurs, sur une planche mĂ©tallique couverte dâune
toile d'amiante et percée de trous circulaires destinés à recevoir le
fond des ballons. Ils sont mis en communication avec les verres con-
tenant lâacide sulfurique titrĂ© au moyen dâun tube de zinc, recourbĂ©
dâabord vers le haut et traversant ensuite un rĂ©frigĂ©rant. Pour Ă©viter
l'entrainement de gouttelettes alcalines, les vapeurs passent Ă leur
sortie de lâErlenmeyer dans un tube recourbĂ© de faible diamĂštre,
dont les deux branches sont verticales et qui est contenu dans un
Ă©largissement du tube de communication.
Les flacons contenant lâacide sulfurique titrĂ© sont fermĂ©s par un
bouchon donnant passage Ă deux tubes, lâun qui forme lâextrĂ©mitĂ©
du tube de communication dĂ©jĂ citĂ©, lâautre qui est un tube recourbĂ©
vers l'extérieur et présentant en dehors du flacon plusieurs renfle-
ments en forme dâallonge remplis en partie dâeau disullĂ©e. Aucun
dâeux ne plonge dans lâacide.
Pour faire un dosage dâazote nitrique dans le salpĂȘtre du Chih,
on introduit 05,5 d'engrais (10 gr. dissous dans un litre dâeau)
dans un Erlenmeyer de trois quarts de litre de capacité, avec 5 gr. de
zinc en poudre et 5 gr. de fine limaille de fer et 75 centim. cubes
dâeau distillĂ©e. Les flacons Ă acide sulfurique (on emploie ordinaire-
ment 20 centim. cubes dâacide sulfurique titrĂ©) sont alors fixĂ©s Ă
l'extrĂ©mitĂ© des tubes de communication. Avant dâatteler les Erlen-
meyer Ă l'appareil Ă distiller, on ajoute au mĂ©lange qui y est dĂ©jĂ
contenu, 80 centim. cubes de soude caustique, de densité de 1.3. Le
tout est laissĂ© au repos pendant une heure. On allume alors les brĂŒ-
leurs et disiille jusquâĂ ce que 100 centim. cubes de liquide aient
passé dans les flacons à acide sulfurique. Il arrive souvent que de
Peau provenant de la condensation des vapeurs sâamasse en trop
erande quantité dans l'élargissement du tube de communication. On
ferme alors le brĂ»leur correspondant; lâintĂ©rieur de lâErlenmeyer
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 137
se refroidit et la diminution de la pression fait revenir le liquide
dans le ballon, par l'intermédiaire du petit tube recourbé, faisant
ici l'office de siphon.
Quand la distillation est terminée, on sépare les flacons à acide
sulfurique de lâappareil, on fait couler dans leur intĂ©rieur lâeau
contenue dans les tubes Ă boules, on lave ces derniers avec de lâeau
distillĂ©e et on titre lâacide sulfurique avec lâeau de baryte comme
dans la méthode Kjeldahl.
b) La mĂ©thode dite de l'aluminium est adoptĂ©e Ă Darmstadt. â
20 gr. d'engrais sont introduits dans un flacon jaugé à 1 litre et
agitĂ©s avec de lâeau distillĂ©e, Ă l'effet de dissoudre les nitrates. On
complĂšte ensuite le volume Ă un litre. AprĂšs plusieurs agitations qui
mélangent bien toute la masse, le tout est jeté sur un filtre;
25 centim. cubes de la liqueur filtrĂ©e sont alors transvasĂ©s Ă lâaide
dâune pipelte dans un flacon Erlenmever dâenviron 3/4 de litre de
capacitĂ©, puis additionnĂ©s de 200 centim. cubes dâeau, de 30 centim.
cubes dâune dissolution de soude Ă 30 p. 100 et de 3 gr. dâalumi-
nium en fils courts d'environ 0°,5 de diamÚtre. AussitÎt aprÚs, les
Erlenmeyer sont attelĂ©s Ă lâappareil Ă distiller dont nous avons
donnĂ© la description en parlant du dosage de l'azote dâaprĂšs la
méthode Kjeldahl. Il va sans dire que lextrémité des tubes qui
emmĂšnent les produits de la distillation doit plonger dans de lâacide
sulfurique titré. On emploie, dans ce cas, 40 centim. cubes d'acide
sulfurique normal Ă©tendu de son poids dâeau.
Les corps sont ainsi laissĂ©s en contact, jusquâĂ ce que les fils
d'aluminium soient complĂštement dissous, câest-Ă -dire pendant en-
viron 18 heures. On distille ensuite et titre l'acide sulfurique non
saturĂ© par lâammoniaque comme d'habitude.
L'interprétation des résultats n'offre rien de particulier.
Quelques mots sur une falsification trĂšs commune. â- Souvent,
dans le commerce, on ajoute aux os dégélalinés pulvérisés des ma-
liÚres riches en azote (poudre de corne, sang desséché, etc.), et on
vend le mĂ©lange sous le nom de poudre dâos. Si lâon ne considĂšre
que Ja teneur de ces engrais en principes fertilisants, on ne remarque
1358 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
souvent quâune diffĂ©rence assez peu sensible. Cependant leur valeur
agricole est inĂ©gale, car la poudre dâos se montre supĂ©rieure dans
toutes les cultures.
Une telle fraude peut ĂȘtre dĂ©celĂ©e de la maniĂšre suivante :
9 gr. de lâengrais sont agitĂ©s dans un tube Ă essai avec du chloro-
forme. AprÚs un instant de repos, les impuretés remontent à la sur-
face du liquide, tandis que la poudre dâos tombe au fond. La couche
supérieure est transvasée dans un autre tube contenant du chloro-
forme, le tout agité vivement et laissé au repos.
Ce transvasement est nécessaire, car il arrive souvent que des
parties fines de poudre dâos sont retenues par les impuretĂ©s.
Les liquides contenant les parties les plus légÚres sont alors jetés
sur un filtre. On lave le résidu avec du chloroforme, on le sÚche
dans lâĂ©tuve et on y dose lâazote et lâacide phosphorique.
Par diffĂ©rence, on trouve la teneur en ces mĂȘmes principes de la
partie de lâengrais tombĂ©e au fond des tubes Ă essai.
On juge alors facilement sâil y a eu falsification en prenant en con-
sidération les données suivantes :
La poudre dâos renferme gĂ©nĂ©ralement de 3 Ă 5.3 p. 100 dâazote
et de 19 Ă 25 p. 100 dâacide phosphorique, câest-Ă -dire que le
rapport de lâazote Ă l'acide phosphorique y est compris entre 1/4
et 1/8.5.
Dans les os dégélatinés, la teneur en azote varie entre 1 et 3 p.100,
celle en acide phosphorique entre 24 et 30 p. 100, de sorte que le
rapport de l'azote Ă l'acide phosphorique oscille entre 1/8.5 et 1/30.
e) Dosage de la potusse.
Il est effectuĂ© dâaprĂšs la mĂ©thode classique du chlorure de pla-
tne, laquelle est suffisamment connue.
Nous ajouterons seulement que le liquide alcoolique contenant le
précipité de chlorure double de platine et de potassium est filtré
dans une capsule de platine dont le fond est percé de trous et cou-
vert dâune couche dâamiante, comme nous lâavons dit en parlant du
dosage de l'acide phosphorique.
On dessÚche à la température de 100 degrés pendant deux heures
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 139
el pÚse la capsule avec son contenu. On dissout ensuite le précipité
avec de lâeau bouillante, lave avec de lâalcool, sĂšche de nouveau
à 100 degrés et pÚse.
La différence des deux poids représente le poids du chlorure
double qui, multiplié par 0.193, donne la quantité de potasse con-
tenue dans la substance employée.
f) Dosage de la chaux.
Le mode de dosage employé varie suivant que la matiÚre à ana-
lyser contient, en mĂȘme temps que de la chaux, une quantitĂ© plus
ou moins grande d'acide phosphorique.
1° Dosage de la chaux dans les matiÚres fertilisantes contenant
relativement beaucoup d'acide phosphorique. â Tels sont les craies
phosphatées, les scories, les tangues, les faluns, etc.
o gr. de substance sont introduits dans une capsule de porcelaine
avec 20 centim. cubes dâacide chlorhydrique et 5 centim. cubes
dâacide azotique. On Ă©vapore Ă sec sur un bain dâeau bouillante. La
capsule est ensuite portée et maintenue pendant quelques heures
sur un bain de sable, à la température de 100 à 105 degrés à l'effet
d'insolubiliser la silice.
On verse sur le résidu quelques gouttes d'acide chlorhydrique et
de lâeau bouillante, on laisse pendant quelques instants les corps en
contact en ayant soin d'agiter fréquemment, puis on lave le tout
dans un ballon dâun demi-litre.
On complÚte le volume à 500, sépare la silice par filtration et
transvase 100 centim. cubes du liquide filtré (représentant 1 gr. de
matiĂšre) dans un Erlenmeyer.
On neutralise avec de lâammoniaque (A), ajoute quelques gouttes
dâacide chlorhydrique Ă©tendu (B), puis une certaine quantitĂ© (30 cent.
cubes pour 4 gr. de substance) dâune solution dâacĂ©tate dâammo-
niaque au dixiÚme. AprÚs avoir mélangé le tout par agitation, on
laisse au repos pendant six heures.
Une fois ce temps écoulé, on filtre, on ajoute au liquide quelques
gouttes d'acide acétique si la réaction n'était déjà pas acide el pré-
140 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
cipite la chaux avec de lâoxalate dâammoniaque. Le prĂ©cipitĂ© dâoxalate
de chaux est jeté sur un filtre aprÚs un repos de six heures dans un
endroit chaud, puis il est réduit en chaux dans un four ad hoc. Le
poids de chaux ainsi obtenu correspond Ă 1 gr. de substance.
Est-il bien certain quâon obtient ainsi un rĂ©sultat exact ?
Généralement, les maliÚres fertilisantes que nous envisageons en
ce moment contiennent, outre les corps déjà cités, des oxydes de fer
et dâalumine.
Par l'addition dâammoniaque (A), ces deux oxydes se prĂ©cipitent
entiĂšrement Ă lâĂ©tat de phosphate de fer et dâalumine, quand lacide
phosphorique est prĂ©sent en quantitĂ© suffisante et partie Ă lâĂ©tat de
phosphate, partie Ă lâĂ©tat dâoxydes, quand lacide phosphorique est
en défaut.
Or, il peut arriver quâun peu de phosphate de chaux ait Ă©tĂ© prĂ©-
cipitĂ© avec le phosphate de fer et dâalumine, ou que du phosphate de
chaux restĂ© en dissolution se sĂ©pare en mĂȘme temps que lâoxalate
de chaux sous lâinfluence de lâoxalate dâammoniaque.
Pour éviter la premiÚre cause d'erreur, on reprend le précipité
de phosphate avec de lâacide chlorhydrique, neutralise la solution
avec de lâammoniaque, ajoute quelques gouttes dâacide chlorhydrique
Ă©tendu et traite par la solution dâacĂ©tate dâammoniaque comme prĂ©-
cédemment.
AprÚs filtration, on mélange cette seconde liqueur filtrée à la pre-
miÚre correspondante et précipite la chaux dans une partie aliquote
du volume total.
On Ă©vite la seconde cause dâerreur en ajoutant Ă la liqueur acidulĂ©e
par de l'acide chlorhydrique (B) du protochlorure de fer en solution,
en quantitĂ© telle que le fer introduit corresponde en Ă©quivalent Ă lâexcĂ©-
dent d'acide phosphorique. On neutralise de nouveau avec de lâam-
moniaque, on laisse tomber quelques gouttes d'acide chlorhydrique
et on continue le dosage comme il a été indiqué précédemment.
2° Dosage de la chaux dans les matiÚres fertilisantes contenant
relativement peu d'acide phosphorique. â La chaux ayant Ă©tĂ© dis-
soute et la silice éliminée comme il a été dit précédemment, on rend
la liqueur lĂ©gĂšrement alcaline avec de lâammoniaque, remet la
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 141
chaux en dissolution avec de l'acide acétique et précipite ensuite la
chaux avec de lâoxalate dâammoniaque.
Rien de particulier Ă ajouter.
Cus particuliers. â Hs sont offerts par les marnes et le plĂątre.
On fait dans les premiers un dosage d'acide carbonique, dans le
second un dosage dâacide sulfurique dâaprĂšs les mĂȘmes mĂ©thodes
quâen France. Ă
g) Dosage du fer et de l'alumine.
[l peut ĂȘtre utile de connaĂźtre la quantitĂ© de fer et dâalumine qui
est contenue dans un phosphate. La méthode de dosage qui est
employĂ©e Ă Halle, sans ĂȘtre complĂštement exacte, donne cependant
des résultats assez approchés.
gr. de phosphate sont chauffés dans un ballon de 50 centim. cubes
avec 2 centim. cubes dâacide azotique de densitĂ© 1,2 et 12,5 dâa-
cide chlorhydrique de densité 1,12.
On complĂšte le volume Ă 500, filtre aprĂšs plusieurs agitations et
prend 100 centim. cubes de la liqueur filtrée (représentant 1 gr.
de substance) quâon transvase avec une pipette dans un ballon de
250 centim. cubes. On ajoute 25 centim, cubes dâacide sulfurique
de densité 1,84 et laisse les corps en présence pendant cinq minutes
en ayant soin dâagiter de temps en temps. |
Le ballon de 250 centim. cubes est rempli jusquâĂ la marque avec
de lâalcool Ă 95 degrĂ©s. Comme il y a contraction, on doit parfaire
le volume une ou deux fois. On bouche le ballon, laisse reposer
pendant une demi-heure et filtre ; 10 centim. cubes de la solution
filtrée représentant 0,4 de substance sont introduits dans une cap-
sule de platine et placĂ©s sur un bain dâeau bouillante jusquâĂ Ă©vapo-
ration complĂšte de lâalcool. La solution restante est transvasĂ©e dans
un verre Ă prĂ©cipiter ; on lave la capsule avec 50 centim. cubes dâeau
el fait bouillir le mĂ©lange. AussitĂŽt que lâĂ©bullition a cessĂ©, on rend le
liquide alcalin en ajoutant de lâammoniaque, chasse l'excĂšs dâammo-
niaque par une nouvelle Ă©bullition et laisse refroidir.
Il se sĂ©pare alors du phosphate de fer et dâalumine quâon jette
142 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
sur un filtre. Le prĂ©cipitĂ© est lavĂ© plusieurs fois avec de lâeau
chaude, puis laissé quelques instants dans un moufle chauffé au rouge
el enfin pesé.
On admet que la moitié du poids est formée d'oxyde de fer F?0° et
lâautre dâalumine AP 0°.
Les dosages de la magnĂ©sie, de lâacide chlorhydrique et de lâacide
sulfurique sont effectuĂ©s dâaprĂšs les mĂȘmes mĂ©thodes quâen France.
B. â MĂ©thodes d'analyse des terres.
a) Analyse mécanique.
On peut dire quâelle consiste Ă peu prĂšs uniquement Ă faire passer
la terre Ă travers des tamis dont les mailles ont respectivement les
dimensions suivantes :
LONGUEUR
©
du cÎté, de la diagonale,
en millimĂštres. en millimĂštres.
Tamis A: ea 3 »
Tamis B. . . 2 »
RATS Eee l »
Tamis DS Len 0,35 Ă 0,39 0,45 Ă 0,50
EU EMIRPESREE TE 0,14 Ă 0,17 0,22 Ă 0,24
Lam Eee 0,09 0,fi
On opĂšre de la maniĂšre suivante :
500 gr. de terre (l'Ă©chantillon est prĂ©levĂ© dans le champ dâaprĂšs
les prescriptions habituelles) sont introduits dans une grande capsule
de porcelaine avec environ 1 litre dâeau. On laisse les corps en prĂ©-
sence pendant deux heures en ayant soin dâagiter frĂ©quemment. Le
tout est ensuite jeté dans le tamis D. La partie restée sur le tamis est
remuĂ©e avec un pinceau pendant quâon lave avec un filet dâeau pour
entrainer les derniĂšres particules fines.
Elle est ensuite portée dans une capsule de porcelaine tarée ; on
la dessÚche dans une étuve chauffée à 100 degrés. Son poids repré-
sente « les pierres ».
La partie passée à travers le tamis D est jetée sur le tamis E. Ce
ĂTUDE SUR. QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 143
qui ne passe pas est désigné sous le nom de « gros sable » ; on en
détermine le poids aprÚs l'avoir lavé et desséché comme les pierres.
On obtient de mĂȘme le « sable fin » avec le tamis F.
Quant aux particules terreuses qui ont traversé ce dernier, et
auxquelles on donne le nom de « poussiÚre » (terre fine), on en
trouve le poids, soit par différence, soit par pesée directe, aprÚs
Ă©vaporation jusquâĂ sec de lâeau qui les a entrainĂ©es.
On sépare ensuite la poussiÚre en « poussiÚre sableuse » et en
⏠argile ».
Pour cela, on en prend 950 gr. quâon agite avec de lâeau dans une
capsule de porcelaine. On transvase ensuite le tout dans un cylindre
de verre de 3 centim. cubes de diamĂštre et de 30 centim. cubes
de hauteur, qu'on remplit ensuite dâeau. Le bouchon avec lequel on
le ferme donne passage Ă deux tubes : lâun, qui est recourbĂ© en
forme de crochet Ă sa partie infĂ©rieure, pĂ©nĂštre jusquâau fond du
vase, lâautre ne plonge pas dans le liquide. On agite vivement et
laisse reposer pendant 30 minutes. En soufflant dans le tube court,
on dĂ©termine la sortie du liquide placĂ© au-dessus du dĂ©pĂŽt quâon
remarque au fond du vase. La mĂȘme opĂ©ralion est rĂ©pĂ©tĂ©e plusieurs
fois jusquâĂ ce que ce liquide supĂ©rieur soit clair. Le dĂ©pĂŽt est
transvasé dans une capsule, desséché à 100 degrés et pesé. Il repré-
sente l'argile.
Quand on le juge utile, on sépare les « pierres » en « cailloux »,
« gros gravier » et ⏠gravier fin » Ă lâaide dâun tamisage Ă sec dans
les tamis ABC.
On dose l'humidité de la terre en déterminant la diminution de
poids que subit une quantitĂ© connue de terre quâon soumet Ă la des-
siccation dans une étuve chauffée à 100 degrés.
L'analyse mĂ©canique effectuĂ©e dâaprĂšs ces prescriptions donne
donc des résultats qu'on exprime sous les rubriques suivantes :
Cailloux ;
Pierres. . { Gros graviers ;
| Graviers fins ;
Gros sable ;
Sable fin ;
PoussiĂšre de sable ;
144 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Argile ;
Humidité.
Et on regarde comme substance minérale sÚche de la terre la
maliĂšre sĂšche totale diminuĂ©e de la perte de poids quâĂ©prouvent les
pierres et le sable quand on les laisse pendant un temps suffisamment
long dans un moufle chauffé au rouge. (Si on Juge que du caïcaire
a Ă©tĂ© amenĂ© Ă lâĂ©tat de chaux pendant lâopĂ©ration, on le ramĂšne
Ă lâĂ©tat de carbonate avant de faire la pesĂ©e. Pour cela, on se sert
dâoxalate dâammoniaque, quâon emploie suivant le procĂ©dĂ© connu.)
DĂ©termination des propriĂ©tĂ©s du sol. â- En dĂ©terminant, dans le
laboratoire, le pouvoir hygroscopique, l'aptitude Ă la dessiccation, on
obtient des résultats qui ne peuvent avoir beaucoup d'importance
pour la pratique agricole, car les conditions dâexpĂ©rience sont alors
tout autres que dans la nature.
Les procédés de laboratoire peuvent cependant donner une idée
assez exacte du pouvoir d'absorption dâune terre pour les prin-
cipes fertilisants.
La terre ayant été séchée à l'air, puis écrasée à la main, on en
prend 195 gr. quâon introduit dans un flacon avec 500 centim. cubes
dâune solution contenant par litre 1/10° du poids molĂ©culaire en
ovammes du sel Ă Ă©tudier. On laisse les corps en contact pendant
24 heures en ayant soin dâagiter frĂ©quemment. Le tout est ensuite
jeté sur un filtre.
Dans une partie aliquote de la liqueur filtrée dont on détermine
le volume ou le poids, on dose les éléments dont on a voulu étudier
l'absorption par le sol. Si ln veut avoir des résultats plus exacts, 1l
convient de tenir compte de la quantitĂ© de ces mĂȘmes principes
que retenait dĂ©jĂ la terre avant d'ĂȘtre mise en contact avec la solu-
tion précitée.
Pour trouver comment se comporte envers un sol donné une so-
lution contenant tous les éléments d'un engrais complet, on opÚre
dâune maniĂšre analogue; la composition centĂ©simale de la solution
d'essai est cependant un peu différente. Au lieu de contenir par
litre 1/10°, elle contient 1/50° du poids moléculaire en grammes de
chacun des sels.
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 145
Il va sans dire que des déterminations ainsi faites ne peuvent indi-
quer la valeur absolue du pouvoir d'absorption dâun sol envers un
sel quelconque, car, ainsi que le fait remarquer M. SchlĂŠsing, ee
pouvoir varie suivant lâĂ©tat de concentration et la quantitĂ© du sel
mise en présence. Mais elles peuvent fournir des résultats compara-
tifs trĂšs importants, car les conditions d'expĂ©rience sont les mĂȘmes
dans tous les cas.
b) Analyse chimique.
La prise de lâĂ©chantillon de terre dans le champ, la dessiccation Ă
l'air et le Lamisage Ă travers un tamis ayant des mailles de 3 milli-
mĂštres de cĂŽtĂ© sont effectuĂ©s dâaprĂšs les mĂȘmes prescriptions quâen
France.
Les rĂ©sultats de lâanalyse sont aussi rapportĂ©s Ă 100 de terre
sĂšche.
1° Dosage de l'azote total. â Ce dosage est effectuĂ© dâaprĂšs la
mĂ©thode de Jodlbauer sur 3 Ă 5 gr. de terre quâon introduit dans
un ballon de 180 centim. cubes environ avec 30 centim. cubes du
mélange d'acide sulfurique, de phénol, et d'acide phosphorique
anhydre. L'opĂ©ration est continuĂ©e comme nous lâavons indiquĂ© au
chapitre des engrais.
2° Dosage de l'acide phosphorique. â « Lâacide phosphorique
contenu dans la terre se trouve principalement en combinaison avec
lâalumine et lâoxyde de fer, avec les matiĂšres organiques ou encore
avec la chaux ou la magnésie. Quels que soient ses différents états,
tout l'acide phosphorique, sauf celui qui entre dans la constitution
des parties rocheuses, peut ĂȘtre mis en dissolution et dĂ©terminĂ©
par lâanalyse. Celle-ci peut Ă©valuer trĂšs approximativement la pro-
portion totale d'acide phosphorique des éléments terreux. »
En outre, des expĂ©riences exĂ©cutĂ©es Ă Halle, dans des pots, dâa-
prÚs la méthode Wagner, montrent qu'il existe une relation entre
la quantitĂ© dâacide phosphorique dâune terre, soluble dans une solu-
ĂŒon Ă 2 p. 100 dâacide citrique, et la quantitĂ© de ce mĂšme acide
contenue dans les produits de la récolte. |
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1. 10
146 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
La dĂ©termination de lâacide phosphorique total indiquera donc la
valeur du capital d'acide phosphorique contenu dans la terre ; celle
de l'acide phosphorique assimilable, l'intĂ©rĂȘt que ce capital livre
pendant une année.
Dosage de l'acide phosphorique total. â Ge dosage s'effectue de
la maniĂšre suivante : 25 gr. de terre sont introduits dans un ballon
Ă fond plat jaugĂ© Ă 500 centim. cubes avec 20 centim. cubes dâacide
azotique et 50 centim. cubes dâacide sulfurique concentrĂ©. On fait
bouillir trÚs modérément pendant une demi-heure tout en agitant
frĂ©quemment le ballon. Lâoxydation des matiĂšres organiques est
terminée quand il ne se dégage plus de vapeurs rutilantes. Il arrive
trĂšs rarement quâil faille, pour la rendre complĂšte, ajouter de nou-
velles quantitĂ©s dâacide azotique.
Les ballons ayant été exposés au refroidissement, on complÚte le
volume à 500 à la température de 17°5. 100 centim. cubes (repré-
sentant 5 gr. de matiÚres) sont transvasés dans un erlenmeyer, puis
neutralisĂ©s Ă lâaide dâune solution ammoniacale Ă 24 p. 100. On
aperçoit neltement la fin de la réaction, si lon a préalablement
colorĂ© le liquide avec deux gouttes dâune solution alcoolique dâacide
rosolique. On acidifie de nouveau le liquide avec quelques gouttes
d'acide chlorhydrique. Le prĂ©cipitĂ© auquel avait donnĂ© lieu lâaddi-
tion dâammoniaque doit se redissoudre complĂštement.
Les ballons sont alors placés quelques minutes dans le réfrigérant,
puis on verse dans la liqueur acide 50 centim. cubes de la solution
de citrate, 20 centim. cubes dâammoniaque Ă 24 p. 100 et 25 cen-
ĂŒm. cubes de liqueur magnĂ©sienne.
La filtration ne doit avoir lieu que 48 heures aprĂšs. Dans lâinter-
valle, on remue souvent le liquide avec un agitateur pour Ă©viter que
le prĂ©cipitĂ© ne sâattache trop fortement aux parois du ballon. Le
dosage est continué comme d'habitude.
Remarque. â Avec les terres trĂšs argileuses, il est bon de nâem-
ployer que 195,5 au lieu de 25 gr., sinon il faudrait, pendant le
traitement par les acides, agiter presque constamment pour Ă©viter
que des particules de terre adhérassent au fond du ballon. En outre,
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 147
l'addition de la solution ammoniacale déterminerait la formation
dâun abondant prĂ©cipitĂ©, lequel ne pourrait disparaĂźtre que par lin-
troduction dâune quantitĂ© relativement grande dâacide chlorhydrique,
ce qui pourrait obliger à employer une quantité plus grande de
liqueurs précipitantes.
Dosage de l'acide phosphorique soluble dans l'acide citrique. â
De nombreuses expériences ont été faites à la station de végétation
de Halle, dâaprĂšs la mĂ©thode des pots du professeur Wagner pour
Ă©tablir le rapport qui existe entre la quantitĂ© dâacide phosphorique
contenue dans une rĂ©colte (grain et paille) et la quantitĂ© dâacide
phosphorique de la terre soluble dans différents réactifs. Les ré-
sultats qui ont été obtenus par les docteurs Maerker et Gerlach per-
mettent de conclure que la solution Ă 2 p. 100 dâacide citrique est
le réactif le plus approprié pour mettre en solution l'acide phospho-
rique de la terre qui est directement assimilable.
Voici dâailleurs comment on effectue le dosage en question :
60 gr. de terre préparée comme d'habitude sont introduits dans
un flacon Erlenmeyer avec 300 centim. cubes de la solution dâacide
_citrique. On laisse les corps en contact pendant 24 heures, en ayant
soin dâagiter de temps en temps (4 Ă 5 fois). Les bouchons doivent
ĂȘtre simplement placĂ©s dans le corps des ballons, mais non fermer
hermétiquement de façon à permettre le dégagement à l'extérieur
de l'acide carbonique qui naĂźt sous l'influence de l'acide citrique sur
les carbonates de la terre.
Une fois les 24 heures écoulées, on filtre aprÚs avoir mélangé la
masse par plusieurs agitations. 200 centim. cubes de la liqueur
filtrée sont alors transvasés avec une pipette dans une capsule de
porcelaine dâune contenance dâenviron 300 centim. cubes, et Ă©va-
porĂ©s au bain-marie jusquâĂ consistance sirupeuse. Une fois le rĂ©sidu
refroidi, on lâadditionne de 20 centim. cubes dâacide sulfurique
concentrĂ© et de 5 centim. cubes dâacide azotique fumant, et chauffe
le tout sur un brĂŒleur Ă gaz.
DĂšs que le point dâĂ©bullition est atteint, on aperçoit un dĂ©gage-
ment de vapeurs rutilantes. Câest la preuve que les matiĂšres orga-
niques de la terre et lâacide citrique sont en voie de destruction.
148 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
S'il se produit une Ă©cume abondante, on arrĂȘte le feu un instant,
puis rechauffe de nouveau, et ainsi de suite jusquâĂ ce que lâappari-
ion de vapeurs rutilantes ait complÚtement cessé. Le mélange est
ensuite portĂ© Ă lâĂ©bullition pendant un quart d'heure, afin de rendre
la silice insoluble. (LâĂ©bullition doit ĂȘtre rĂ©glĂ©e de telle maniĂšre
quâelle donne lieu Ă un dĂ©gagement continuel, mais peu abondant,
de vapeurs dâacide sulfurique.)
Le contenu de la capsule est alors Ă©tendu avec de lâeau, remuĂ©
avec un agitateur, transvasé dans un ballon de 200 centim. cubes, et
refroidi à la température de 17°5. On complÚte le volume à 200 et
filtre. 100 cenlim. cubes de la liqueur filtrée (représentant 20 gr.
de terre) sont introduits dans un erlenmeyer, rendus légÚrement
alcalins avec de lâammoniaque, puis acidifiĂ©s avec quelques gouttes
d'acide chlorhydrique (2 gouttes dâune dissolution dâacide rosolique
dans l'alcool servent dâindicateur de la fin de la rĂ©action) et enfin,
aprÚs refroidissement, additionnés de 50 centim. cubes de liqueur
citrique et 25 centim. cubes de solution magnésienne (Magnesia-
mixture). Le mélange des liquides, aprÚs avoir été bien agité, est
laissé au repos pendant 48 heures. On sépare ensuite par filtration
le précipité de phosphate ammoniaco -magnésien, et termine le
dosage comme d'habitude.
3° Dosage de la potasse. â « En faisant agir Ă la tempĂ©rature
ordinaire, comme l'indique M. SchlÊsing, un acide trÚs dilué en
quantité suffisante pour dissoudre le calcaire et pour détruire les
propriétés absorbantes de la terre, on se place dans des conditions
telles que la potasse existant sous une forme soluble soit seule
mise en liberté et que celle des nitrates reste inattaquée. Il y a donc
là un moyen de différencier la forme la plus intéressante de cet
alcal.
Tel est le principe des modes de traitement suivis en Allemagne
pour dissoudre la potasse du sol qui mĂ©rite dâĂȘtre qualifiĂ©e de di-
rectement assimilable.
1 ProcĂ©dĂ©. â Disons dâabord que la terre, aprĂšs avoir Ă©tĂ© sĂ©chĂ©e
à l'air et écrasée entre les doigts comme d'habitude, est jetée dans
ĂTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 149
un tamis Ă mailles de 3 millimĂštres. Seule la partie qui passe doit
ĂȘtre soumise au traitement.
Pour chaque gramme de terre, on emploie 2 volumes dâacide
chlorhydrique quâon emprunte Ă une solution Ă 25 p. 100 du mĂȘme
acide. La terre et la solution sont introduites dans un ballon et
laissées en contact pendant 48 heures dans une chambre ayant une
tempĂ©rature ordinaire. On a soin dâagiter frĂ©quemment.
2e ProcĂ©dĂ©. â Pour chaque gramme de terre, on emploie deux
volumes dâacide chlorhydrique quâon apporte sous forme dâune
solution Ă 10 p. 100 du mĂȘme acide. Les corps sont placĂ©s dans un
ballon quâon expose, pendant trois heures, Ă la chaleur dâun bain
dâeau bouillante. Il est nĂ©cessaire dâagiter trĂšs souvent.
A Halle, on a recours au premier traitement, et on lâeffectue de
la maniÚre suivante : 100 gr. de terre étant placés dans un ballon,
sont additionnĂ©s de 500 centim. cubes dâune solution Ă 40 p. 100
d'acide chlorhydrique. On complĂšte ensuite le volume Ă 1 000. On
laisse la dissolution de la potasse sâeffectuer pendant quarante-huit
heures. Pour la faciliter, on agite le ballon de temps en temps.
Tout le contenu est ensuite jeté sur un filtre. On emploie un
volume déterminé du liquide filtré à la détermination de la potasse
dâaprĂšs la mĂ©thode du chlorure de platine.
4° Dosage de la chaux. â La chaux se trouve dans le sol princi-
palement Ă l'Ă©tat de carbonate, de sulfate, de nitrate, dâhumate et
de silicate.
« Suivant quâon traite par les acides plus ou moins concentrĂ©s et
qu'on prolonge davantage la durée du contact, on dissout des quan-
titĂ©s un peu diffĂ©rentes, car si le calcaire rĂ©el, lâhumate, le nitrate,
le sulfate laissent entrer rapidement la chaux en dissolution, il nâen
est pas de mĂȘme des silicates qui ne sâattaquent qu'avec lenteur. »
Le traitement de la terre adoptĂ© Ă Halle a pour but dâattaquer
tous les sels de chaux Ă l'exception des silicates. Il consiste soit Ă
mettre la terre en contact d'une dissolution Ă©tendue dâacide chlorhy-
drique et quelques gouttes dâacide azotique jusquâĂ ce que la silice
soit insoluble.
150 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE,
Le dosage est continué comme nous l'avons indiqué au chapitre
des engrais en parlant du dosage de la chaux, dans les engrais rela-
tivement pauvres en acide phosphorique.
D° Dosage de la magnĂ©sie. â On fait entrer la magnĂ©sie en solu-
tion comme la chaux, et on la prĂ©cipite Ă lâĂ©tat de phosphate ammo-
niaco-magnĂ©sien Ă lâaide des rĂ©actifs appropriĂ©s.
I nây a rien de particulier Ă dire sur les mĂ©thodes de dosage
de l'acide sulfurique et de l'acide chlorhydrique dans les terres.
6° Dosage de l'humus. â On peut calculer avec assez dâexactitude
la quantitĂ© dâhumus contenue dans une terre quand on connaĂźt la
teneur de cette derniĂšre en carbone.
5 Ă 10 gr. de terre sont introduits dans une capsule de verre Ă
parois trĂšs minces dite capsule Hoffmeister. Pour Ă©liminer l'acide
carbonique des carbonates, on ajoute une quantitĂ© suffisante dâacide
phosphorique en dissolution Ă©tendue et Ă©vapore au bain-marie jus-
qu'à sec. AprÚs avoir pulvérisé la capsule et son contenu dans
un creuset, on effectue un dosage de carbone dâaprĂšs la mĂ©thode
Dumas.
c) Interprétation des résullals.
Les résultats obtenus sont rapportés à 100 de terre fine. Ils ne
subissent donc pas la correction indiquĂ©e par M. FĂŒisler.
NĂ©anmoins les mĂ©thodes dâanalyse adoptĂ©es en Allemagne con-
duisent aussi Ă admettre qu'une terre renfermant 0.1 p.100 dâazote,
0.1 p. 100 dâacide phosphorique, 0.1 p. 100 de potasse est sufli-
samment pourvue en ces trois éléments.
LES
DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE
ENDIGUEMENTS, GOLMATAGES, POLDERS
PAR
A. RONNA
INGĂNIEUR
MEMBRE DU CONSEIL SUPĂRIEUR DE L'AGRICULTURE
a âââââ 0 0 âââââââââ
AVANT-PROPOS
« Quand on jette les yeux sur une carte d'Angleterre, on voit au
nord du Norfolk un large golfe qui entre assez profondément dans
les terres et quâon appelle Wash. Tout autour de ce golfe vaseux
s'Ă©tendent des plages basses et habituellement couvertes par les
eaux. Jadis inhabitables, elles figurent aujourd'hui parmi les plus
riches parties de l'Angleterre. Situées en face de la Hollande, elles
ont Ă©tĂ© assainies, comme elle, par les digues. LâĂ©tenlue totale des
trois comtés, Cambridge, Huntingdon et Lincoln, est d'environ un
million d'hectares ; les marais proprement dits en occupent environ
le Uiers.
« Les travaux dâassainissement, commencĂ©s par les Romains, ont
été poursuivis au moyen ùge par les moines qui s'étaient établis sur
les iles sortant çà el là des terres inondées. Les Anglais parlent peu
des services que leur ont rendus les anciens monastĂšres : il est cer-
tin cependant que, dans leur Ăźle, comme ailleurs, les seuls monur-
ments de quelque valeur, qui subsistent des temps les plus reculés,
152 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
proviennent du culte catholique; lâagriculture en particulier a dĂ»
ses premiers succĂšs aux ordres religieux.
« Lors de la réformation, les grandes familles reçurent en don
les biens des abbayes et se firent les continuateurs des moines. Les
résidences de beaucoup de grands seigneurs portent encore le nom
des abbayes quâelles ont remplacĂ©es ; on dit Woburn-Abbey, Wel-
beck-Abbey, etc.
« Dans la région marécageuse, les moines avaient poussé assez
avant leurs desséchements, quand ils furent chassés, laissant pour
traces de leur passage, outre leurs canaux et leurs cultures, les
belles Ă©glises de Peterborough et dâEly, qui dominent encore la
contrée.
«⏠Au commencement du xvu° siÚcle, un comte de Bedford se mit
Ă la tĂȘte dâune compagnie pour reprendre les travaux : une conces-
sion de 40 000 hectares lui fut accordĂ©e. DĂšs lors, lâentreprise nâa
jamais été interrompue. Des moulins à vent, des machines à vapeur,
Ă©tablies Ă grands frais, font jouer des pompes Ă Ă©puisement; des
tranchĂ©es immenses, des digues indestructibles achĂšvent lâĆuvre.
« Le pays conquis est maintenant traversé dans (ous les sens par des
routes et des chemins de fer ; on y a construit des villes, des fermes
sans nombre; ces terres, jadis submergées et improductives, se
louent de 75 Ă 100 fr. lâhectare. On y voit des cullures de cĂ©rĂ©ales
et de racines, mais la plus grande partie est en prairies; on y en-
graisse des bĆufs courtes-cornes et des moutons provenant du croi-
sement de la race ancienne du Lincoln avec des Dishley.
⏠Tout le nord du comté de Cambridge fait partie de la région
des marais ; la rente moyenne y a doublé depuis quarante ans; la
population sâest accrue rapidement, soit Ă cause de lâaugmentation
de salubrité, soit parce que les progrÚs du desséchement ont déve-
loppé la demande de travail...
« Si le comté de Norfolk a occupé longtemps le premier rang en
Angleterre pour le développement rural, cette place (depuis que le
desséchement des marais a eu lieu) lui est disputée par le comté de
Lincoln qui était, il y a un siÚcle, encore plus stérile que désert.
« Le district des marais, au sud et-Ă lâest du Lincoln, a reçu le
nom de Hollande, et lui ressemble beaucoup, en effet. Ce sont les
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 153
mĂȘmes digues qui sâavancent tous les jours el gagnent sur la mer de
nouveaux terrains ; ce sont les mĂȘmes prairies et presque les mĂȘmes
troupeaux ; câest le mĂȘme aspect vert, bas et humide. Sur quelques
points, le haut prix des grains avait encouragé la culture des cé-
rĂ©ales, mais cette culture recule aujourdâhui de toutes parts ; les
herbages, mieux appropriés au sol, lui succÚdent. La rente y atteint
en moyenne 100 fr. »
Ces passages, extraits du livre classique de LĂ©once de Lavergne
sur lâĂ©conomie rurale de l'Angleterre *, nous serviront d'entrĂ©e en
matiÚre pour décrire les travaux dont il parle si sommairement, qui
se sont poursuivis pendant des siĂšcles, dans le but, dâune part, de
dessĂ©cher et dâassainir les marais et les landes des comtĂ©s qui en-
tourent la baie du Wash, et, dâautre part, de conquĂ©rir sur la mer,
aux embouchures des riviĂšres Ouse, Nen, Welland et Witham et le
long des cĂŽtes, des alluvions dâune fertilitĂ© exceptionnelle.
La Hollande offre Ă©videmment des travaux dâendiguement et de
dessĂ©chement dâune continuitĂ© et dâune importance plus considĂ©-
rable encore. Une grande partie des provinces des Pays-Bas : Hol-
lande septentrionale et méridionale, Zélande, Frise, Groningue,
dont la surface se trouve de 1 mĂȘtre Ă 5 mĂštres au-dessous du
niveau de la mer, était occupée jadis par des lacs, des marais, des
tourbiÚres marécageuses ; transformées en polders cultivables, aussi
b'en que les terres limoneuses, rejetées par les marées sur les cÎtes,
et les lais des riviĂšres, de vastes surfaces, enceintes de digues et de
canaux, altestent de quelle puissance lâhomme dispose, dans la lutte
contre les éléments, quand ses efforts sont dirigés et soutenus vail-
lamment Ă force dâart et de science. Nulle part on nâopĂšre les des-
séchements et les endiguements plus simplement et sur une plus
grande Ă©chelle que dans les Pays-Bas. Dans le siĂšcle actuel seule-
ment, plus de 150 000 hectares ont été desséchés et mis en culture,
comprenant le Zuidplas, le lac de Harlem, les Ă©tangs de Nooddorp,
du Prince-Alexandre, les lais de Wadden, et des milliers de kilo-
mÚtres de digues ont été construits, déplacés ou réparés, pour la
1. L. de Lavergne, Essai sur l'économie rurale de l'Angleterre, 4° édit.,
p. 255.
154 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
défense des rivages, entre autres, les levées colossales de West-Kap-
pel, Hondsbossche, Helder et Texel.
Les ingénieurs les plus expérimentés de tous les pays ont rendu
célÚbres les travaux exécutés dans les Pays-Bas ; naguÚre, les ingé-
nieurs hollandais étaient appelés en France, en Angleterre et dans
les pays de la Baltique pour prendre charge des opĂ©rations dâendi-
guement et de desséchement. Les progrÚs accomplis de nos temps
en hydraulique, comme dans les autres sciences techniques, ont fait
peu Ă peu abandonner le systĂšme anciennement suivi par les prati-
ciens hollandais, qui les poussait Ă endiguer trop tĂŽt, sans que le
colmatage des terrains fĂ»t complĂ©tĂ©, et Ă rĂ©server aux canaux dâĂ©-
coulement des espaces superflus, au détriment du régime des riviÚres
à marée et des cultures. |
Les ingĂ©nieurs anglais, et, Ă leur tĂȘte, Rennie pĂšre et fils, en re-
nonçant Ă lâancienne routine, pour appliquer la mĂ©thode combinĂ©e
des canaux étroits, suffisamment déclives, et du colmatage des terres,
dans les comtĂ©s de lâest de l'Angleterre, ont obtenu les plus remar-
quables résultats, tant au point de vue de l'extension du territoire
et de lâaccroissement des produits du sol et des revenus, que de
l'assainissement des provinces marécageuses et de l'amélioration des
conditions de la navigation intérieure.
Les opérations grandioses que les ingénieurs anglais ont conduites
Ă bonne fin dans les deux derniers siĂšcles, mais notamment dans le
siĂšcle actuel, les classent parmi les bienfaiteurs de leur pays. Elles
sont si peu connues Ă l'Ă©tranger que nous avons cru devoir les tirer
de lâoubli, en leur consacrant une Ă©tude spĂ©ciale, qui embrasse
aussi bien les desséchements que les endiguements et les colmatages
exĂ©cutĂ©s dans les comtĂ©s du nord-est, et sur dâautres points moins
importants du littoral de lâAngleterre.
Dans le seul comté de Lincoln, les énormes dépenses faites en
amĂ©liorations de cette nature, sans que lâĂtat y ait contribuĂ© par la
plus minime subvention, représentent une charge perpétuelle sur
les terres bonifiĂ©es qui varie de 10 Ă 35 fr. par hectare. Câest Ă ce
1. Fr. Cooke, Farm-prise competition in 1888 (Journ. Roy. Agric. Sociely,
1888, vol, XXIV).
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 195
prix que les conditions agricoles, sanitaires et commerciales de ce
comté se sont modifiées, au point de le ranger parmi les plus floris-
sants de l'Angleterre. Plus de 208 000 hectares y ont été desséchés,
assainis ou conquis : 189 000 dans les districts du sud et de lâest,
11000 dans le district dâAncholme et 12000 dans ceux de lâAxholme
et de la Trentâ. :
I. â LES COMTĂS DE LA BAIE DU WASH
A. â LES FENS
Descriplion. â On dĂ©signe sous le nom de Fens (landes) la vaste
plaine bordĂ©e, Ă lâest, par les marais du littoral que lâon appelle
Marskhes, et Ă lâouest, par les collines dĂ©crivant une courbe qui pari
du Lincoln et aboutit Ă Lynn, en passant par Peterborough, Saint-
Yves, Mildenhall et Downham-Market. Ces collines encerclent les
Fens, en ne laissant libre que le cĂŽtĂ© de la mer (voir la carte dâen-
semble).
Le sol est formé en plus grande partie de tourbe noire, plus ou
moins Ă©paisse et friable, qui Ă valu au district entier lâĂ©pithĂšte de
noir, câest-Ă -dire de Black Fen, et, pour lâautre partie, dâalluvions
sablonneuses. Entre ces deux formations, lâancien sol se relĂšve çĂ
et lĂ , composĂ© dâargiles et de sables secondaires, qui Ă©mergeaient
dâailleurs Ă lâĂ©poque des marais. Ces terrains sont couverts aujour-
dâhui de pĂąturages de premiĂšre qualitĂ©.
La tourbe repose en gĂ©nĂ©ral sur un sous-sol dâargile bleuĂątre ; la
couche superficielle, aprÚs un bon drainage, est plutÎt légÚre et
spongieuse. Il en est de mĂȘme des terres dâalluvion, quoique plus
humides et plus compactes.
Enfin, on rencontre dans les Fens les argiles des grĂšs verts et des
{. A. Clarke, Farming of Lincolnshire (Journ. Roy. Agric. Soc., 1851, vol. XII,
p. 289).
2. Ă. Clarke, On practical agriculture (Journ. Roy. Agric. Society, vol. XIV
ire série).
156 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
terrains de transport, trĂšs diffĂ©rents, dâun classement difficile, qui
font varier plus ou moins la nature des récoltes et le mode de culture
sur divers points de celte région, aussi célÚbre par les progrÚs de
son agriculture et l'Ă©mancipation de ses tenanciers, que par les nom-
breuses améliorations réalisées. ,
C'est Ă lâouest et au sud des anciens marais (Marshes) que s'Ă©tend,
sur 16 à 50 kilomÚtres de largeur, le district auquel on a donné le
nom de Great Level (grand niveau). Divisé en trois parties, North,
Middle et South (septentrional, central et méridional), le Great Level
est bas et plat, couvert presque exclusivement dâherbages : point de
villages, mais des fermes isolées, des champs enclos de fossés ou de
haies vives, servant dâabri aux troupeaux innombrables de bĂȘtes Ă
cornes et de moutons qui paissent en liberté. Les arbres fruitiers,
dâailleurs assez rares, sont laillĂ©s en boule; les autres arbres sont
des peupliers ou des frĂȘnes. Entre les vastes pĂąturages, quelques
terrains au sol argileux sont cultivés en blé, en fÚves, en moutarde,
ou laissés en jachÚre. Pays singulier, dont on ne peut se faire une
idée exacte sans lavoir parcouru! La pente varie de quelques
mĂštres Ă peine dans toute l'Ă©tendue : ce qui donne l'impression dâun
lac immense en verdure !
Les Fens, aujourdâhui qu'ils sont drainĂ©s, et privĂ©s des brouillards
persistants qui désolaient jadis cette partie de la cÎte, comptent une
population aisĂ©e et valide, qui tend Ă sâaccroĂźtre. Une longue zone
de terrains, dont le sol est argileux et couvert de pĂąturages, les
Fen Ends, comme on les appelle, sépare les Fens proprement dits
des Marshes. Cette bande des Fen Ends, sur quelques kilomĂštres
de largeur, prĂ©sente les mĂȘmes caractĂšres.
GĂ©ologie. â Les alluvions du Great Level des Fens offrent un
intĂ©rĂȘt particulier au point de vue gĂ©ologique, en permettant de
fixer approximativement la date de leur formation, dâaprĂšs lâĂąge des
dĂ©pĂŽts tourbeux el sablonneux que lâon y rencontre.
Les digues romaines ont été élevées le long de la cÎte dans un ter-
rain qui a été recouvert depuis, sur quelques pieds d'épaisseur, par
des atterrissements dâorigine marine, et des routes romaines, cons-
tuiles sur la tourbe, sont recouvertes de tourbe de formation plus
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 197
rĂ©cente, de façon que lâĂąge des diverses couches modernes peut ĂȘtre
Ă©tabli. D'autre part, entre les strates du pliocĂšne et les couches plus
anciennes, se dĂ©couvre une immense forĂȘt souterraine dont les
arbres sont debout, sur un sol en contre-bas de plusieurs mĂštres,
par rapport au niveau des vives eaux ; ce qui indiquerait une modi-
fication relativement rĂ©cente dans le niveau des terres, eu Ă©gard Ă
celui de la mer, et expliquerait le phĂ©nomĂšne de forĂȘts sous-marines
que lâon retrouve Ă©galement sur les cĂŽtes des comtĂ©s de Lincoln, de
York, de Norfolk, de Kent, de Dorset et Somerset, etc.
Les argiles d'Oxford et de Kimmeridge du terrain oolithique for-
ment la cuvette dans laquelle se sont déposées les alluvions quater-
naires. Elles plongent non seulement, du nord Ă lâouest, sous le ter-
rain des Fens, mais elles reparaissent sur un grand nombre de
points, Ă Marsh, Whittlesey, Thorney, dans le Cambridge, et Ă Kyme,
dans le Lincoln, sans constituer pour cela, sauf au voisinage des
hautes terres, le sous-sol immédiat.
Câest ainsi quâĂ Boston, l'argile d'Oxford se rencontre Ă plus de
12 mÚtres au-dessous de la surface. D'une texture trÚs inégale, ré-
sullant sans doute de lâĂ©rosion des eaux, l'argile oolithique semble
avoir constituĂ© le lit dâune vaste baie dans laquelle les dĂ©pĂŽts se
sont successivement accumulĂ©s jusquâau niveau actuel. Les sables
et les graviers qui enveloppent l'argile directement ne sont pas dus
aux marées, mais bien à la formation secondaire dont le prolonge-
ment se retrouve dans les hautes terres limitrophes.
Le premier dĂ©pĂŽt dâalluvion, au-dessus des sables et graviers et
des argiles brunes de transport, revĂȘtant le terrain oxfordien, est
un sable vaseux, dur et bleuĂątre en profondeur, tendre et grisĂątre
Ă la surface, reprĂ©sentant des bancs au fond de lâancienne baie quâil
ne couvrait quâen partie. Ge dĂ©pĂŽt se relĂšve sur la cĂŽte de la baie
Ă d'assez grandes hauteurs, jusquâĂ percer la couche d'argile Ă
Gedney-Hill, dans le Sud-Holland, et Ă Wisbeach-Saint-Mary, dans
le Cambridge. Il surmonte de quelques centimĂštres le terrain du
Fen environnant et sâĂ©tend sur quelques kilomĂštres seulement de
largeur, trĂšs reconnaissable par les coquilles d'espĂšces marines.
Sur les points oĂč ce dĂ©pĂŽt est absent, on trouve la tourbe avec
0,30 Ă 0",90 d'Ă©paisseur. Dans les Fens du Witham, Ă l'ouest de
158 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
la riviĂšre de ce nom, la couche de tourbe, avec troncs et branches
d'arbres, repose sur une strate de 0",30 de sable qui surmonte
l'argile d'Oxford.
PrĂšs de Bardney, la tourbe presque superficielle renferme dâĂ©-
normes troncs de chĂȘne et de sapin dont les racines tiennent dans un
lit de sable trĂšs mince. Ă Boston, elle est Ă une profondeur de
6 mĂštres, câest-Ă -dire, Ă plusieurs mĂȘtres au-dessous du niveau des
basses marées.
La couche qui recouvre la tourbe ou le sable marin est formée
d'argile bleue, blue clay, douce (butyreuse), résultant du dépÎt des
lacs ou des riviĂšres Ă lâĂ©tat stagnant, qui baignaient la plus grande
partie du territoire. Dans les Fens du Witham, elle a une couleur
orisĂątre ; dans le Depping Fen, elle est rougeĂątre ; mais quelle que
soit sa couleur, elle est peu fournie de coquilles marines, tandis
que les coquilles dâeau douce abondent au voisinage de la tourbe;
ce qui dénoterait une double formation, due aux eaux de la mer et
des riviĂšres. AuprĂšs de Lynn, et dans une grande partie du Marsh-
land (Norfolk), cette argile, surmontĂ©e dâune couche de tourbe ou
de plusieurs couches sĂ©parĂ©es (comme Ă Sutton-Saint-Edmund, Ă
Lynn mĂȘme et dans le comtĂ© de Huntingdon), constitue le sol pro-
prement dit du Bedford Level. Câest elle qui, ramenĂ©e par le sous-
solage à la surface des terres, leur donne la consistance nécessaire
et la proportion de silice et dâalumine quâexige la culture des cĂ©rĂ©ales.
Dans le West Fen, l'argile bleue est recouverte dâune couche
argileuse trĂšs compacte. Sauf Ă Bolingbroke et Ă Coningsby oĂč elle .
a fait place, sur 400 Ă 500 hectares, Ă du sable blanc, aussi bien
dans le East Fen que dans les Marshes de Firsby, et le long des
rives de lâ'Humber, elle supporte la couche de tourbe ou de sables
dâalluvion marine. Son Ă©paisseur varie de 0",60 Ă 3 mĂštres dans le
Great Level, de 3 mĂštres Ă 3",70 dans les Fens du Witham, de
1,80 Ă 5",40 dans le East Fen, etc.
Au-dessus du blue clay, la tourbe revĂȘt la plus grande partie de
la surface. On trouve dans cette récente formation le résidu de la
destruction de forĂȘts immenses de chĂȘnes, de sapins, dâaunes et
dâessences diverses, dont les troncs sont encore en place, enracinĂ©s
dans l'argile ou bien jetĂ©s pĂȘle-mĂȘle, dĂ©sorganisĂ©s, Ă lâĂ©tat de ter-
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 159
reau dont lâĂ©paisseur varie entre quelques centimĂštres et 3 mĂštres,
et le niveau baisse de 5 Ă 6 mĂštres au-dessous de la limite des hautes
marées dans le Wash.
Cette formation qui embrasse plus de 4000 hectares, depuis le
Marshland, dans le Norfolk, jusquâĂ Lincoln et au delĂ , reparaiseant
entre Grimsby et Barton sur lâ'Humber, a fait l'objet de nombreuses
bypothĂšses, quant Ă son origine, Ă©tant donnĂ© le niveau quâelle occupe
par rapport Ă celui de la plage et des hautes mers. La seule hypo-
thĂšse plausible se rĂ©duit Ă admettre que le sol sâest soulevĂ© et
abaissĂ© successivement, jusquâĂ ce quâil ait pris le niveau actuel.
Lorsque la couche de tourbe a plus de 25 Ă 30 centimĂštres dâĂ©-
paisseur, elle se divise en plusieurs strates : une strate supérieure
de tourbe noire, décomposée, mélangée de vase et de sédiments
provenant des crues anciennes et renfermant quelques éléments mi-
néraux ; une strate moyenne de terreau de bruyÚre, brune, et de
fibres compactes; et une strate inférieure de substances spongieuses,
contenant des feuilles et des tiges végétales. On connaßt les carac-
tÚres de ces sols naturellement légers, trÚs hygrométriques, plus ou
moins acides, sâĂ©chauffant et se refroidissant avec une Ă©gale len-
teur, et sâaffaissant au point de devenir compacts par un bon drai-
nage souterrain. Ces sols que lâĂ©cobuage amende, acquiĂšrent un
haut degré de fertilité par leur mélange avec des terres lourdes,
telles que lâargile et les calcaires coquilliers ou marneux.
Sur la formation Lourbeuse des Fens, lâeau a longuement sĂ©journĂ©
Ă lâĂ©tat stagnant, chargĂ©e de vase, de sable, de matiĂšres animales et
vĂ©gĂ©tales, dont lâatterrissement a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© vers la cĂŽte par le flot
des marĂ©es qui a dĂ©posĂ© Ă son tour des sables vaseux ; câest-Ă -dire
que sur les points les plus rapprochĂ©s de la plage, lâalluvion a une
Ă©paisseur de 1",20 jusquâĂ 5 mĂštres, recouvrant la tourbe, et sur
les points les plus distants oĂč mouraient les vagues de l'OcĂ©an, elle
a Ă pee quelques centimĂštres d'Ă©paisseur. Lâalluvion argileuse,
sans traces de stratification, traversée par une myriade de filets
d'humus ou de sable rouge, est superficielle dans le Marshland du
Norfolk et dans les districts du centre de Sud-Holland; ailleurs, elle
acquiert la consistance du gault et se veine de filets trĂšs compacts
de diverses couleurs ; mais dans les riches pĂąturages autour de Bos-
160 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ton, de Kirton, Wigtoft, etc., elle forme un loam brun, Ă©pais, dâune
culture facile.
Les Romains avaient construit leurs digues sur ces alluvions ;
depuis lors, la mer a accumulĂ© sur la plage et sur les terres Ă lâin-
tĂ©rieur des digues, jusquâĂ Ă kilomĂštres de distance, de nouvelles
alluvions formant un loam brun, qui recouvre une argile brune,
associée à du sable.
Les atterrissements récents paraissent dus à un mélange intime
de sable et de matiÚres sédimentaires du Wash, avec des substances
végétales, probablement des plantes venues sur les sables maritimes
et les débris siliceux, calcaires, des infusoires marins et fluviaux
que les vagues pétrissent et mettent en mouvement dans la baie.
Au-dessous de cette formation trÚs perméable se rencontrent des
sources nombreuses (sock ou soak) dont la profondeur, entre 0",90
et 1",80, dĂ©pend de la chute dâeau pluviale, de lâĂ©gouttement des
drains de desséchement et du niveau des marées.
Depuis la construction des digues attribuées aux Romains, le dis-
trict de Sud-Holland a conquis sur la plage plus de 15 000 hectares ;
la derniĂšre digue construite est Ă 6 kilomĂštres en avant de la digue
romaine. Le long de la cĂŽte de Foss-Dyke jusquâĂ Grimshy (Lincoln),
l'Océan a enlevé des atterrissements anciens, sous lesquels on a re-
trouvĂ© des forĂȘts sous-marines ; mais plus de 6 000 hectares ont Ă©tĂ©
regagnés sur ce point dans les deux derniers siÚcles.
Le Wash, alimenté par les débris des falaises du Yorkshire, que
le Spurn-Point lui transmet directement, se colmate lentement, mais
sans arrĂȘt. Le sĂ©diment qui sâaccumule dans les 80 000 hectares
que couvre la baie nâest pas du sable, comme on pourrait le croire,
mais un sol riche, composé de terres argileuses et siliceuses, avec
du mica, du sel marin et des coquillages. AussitĂŽt que les Ă©pis per-
meltent de fixer ce sédiment au-dessus du niveau des basses marées,
Ă raison de 0,60 jusquâĂ 0,90 dâĂ©paisseur, dans le courant dâun
seul Ă©tĂ©, le sol enclĂŽturĂ© peut ĂȘtre immĂ©diatement mis en culture
et fournir d'excellentes récoltes.
Hydrographie. â Le bassin des Fens embrasse environ 150 000
hectares de terrain plat qui se draine dans le Wush par quatre cours
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. IGI
dâeau principaux : la Great Ouse, la Nen, le Wellund et le Withum
(voir la carte hydrographique).
Il suffit de jeter un coup dâĆil sur la carte pour comprendre que le
desséchement du territoire repose avant tout sur ces quatre artÚres,
qui aboutissent dans la baie, placĂ©e en retraite dâune trentame de
kilomĂštres sur la mer du Nord.
La pluie reçue dans le bassin des Fens, en raison mĂȘme de la
nature géologique du terrain et de son niveau absolument plan, re-
gagne si lentement la baie que, sans lâaide dâun drainage puissant,
elle resterait Ă lâĂ©tat stagnant, les riviĂšres ayant perdu la pente in-
dispensable Ă un Ă©coulement rapide.
La chute dâeau pluviale annuelle varie entre 0,62 et 0°,63 ; elle
atteint son maximum en hiver et au début du printemps. Quand elle
abonde dans les terrains Ă©levĂ©s qui bordent les Fens, les cours dâeau
entrent en crue, et il faut entretenir des ouvrages importants pour
faciliter leur écoulement, malgré le refoulement des marées. Le lit
de ces riviĂšres sinueuses Ă dĂč ĂȘtre rectifiĂ© pour crĂ©er une chute ca-
pable dâassurer la dĂ©charge Ă marĂ©e basse ; sur plusieurs points, il
a fallu recourir aux machines pour Ă©lever les eaux et les Ă©vacuer Ă
la mer dans des canaux spéciaux.
La riviĂšre Greal Ouse* qui draine 76 000 hectares environ, a un
parcours de 240 kilomÚtres, depuis sa source, dans le comté de
Buckingham, jusquâĂ la mer. Le district quâelle traverse se distingue
par la masse dâeau retenue Ă la surface aprĂšs les grosses pluies, aux
équinoxes principalement. Les inondations fréquentes de l'Ouse, en
sâĂ©tendant au loin, servent de rĂ©gulateur aux marĂ©es, car elles prĂ©-
viennent les crues des autres cours d'eau, qui ont un plus libre
accĂšs Ă la mer et activent leur courant.
De nombreuses coupures ont réduit le cours de cette riviÚre, dans
les Fens, en vue des endiguements que lâassainissement du district
a exigés. à partir de Huntingdon, elle coule dans son lit naturel
{. Le nom de Great Ouse, ou de Grande Ouse, est donné à celle riviÚre pour la
distinguer de l'Ouse, du comté de York, un des principaux affluents de l'Humber ; de
l'Ouse du comté de Sussex, qui débouche dans la Manche, prÚs de Newhaven; et de la
Petite Ouse (Little Ouse), qui s'appelle Ă©galement Brandon River, son propre tribu-
taire.
ANN. SCIENCE AGRON. â (893. â 1. {{
162 ANNĂ€LES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
pendant 8 kilomĂštres, puis dans un nouveau lit pendant 5 kilomĂštres
jusquâĂ Earith, oĂč elle devient partie intĂ©grante du systĂšme gĂ©nĂ©ral
de desséchement, basé sur l'établissement de deux grands canaux
parallĂšles, creusĂ©s sur 32 kilomĂštres de longueur Ă travers lâĂźle dâĂly
(Cambridge) et aboutissant Ă Denver (Norfolk).
Ces deux canaux portent le nom dâancienne et de nouvelle riviĂšre
Bedford (Old et New Bedford River). L'ancien lit de lâ'Ouse reparait
dans la direction est, sur 16 kilomĂštres de longueur jusquâĂ Stre-
tham, oĂč elle reçoit les eaux de la Cam, venant du nord. LâOuse
reçoit encore, 10 kilomÚtres plus loin, les eaux de la riviÚre Lark,
passĂ© Ăly; puis, Ă Ă©gale distance de ce confluent, aprĂšs Liltleport,
les eaux de la Petite Ouse (Little Ouse) oĂč Brandon River ; Ă 8 kilo-
mĂštres plus en aval, la riviĂšre Wissey, ou Stoke, et entre Wissey et
Downham-Market, 4 kilomĂštres plus bas, le Well Creek, qui apporte
les eaux de plusieurs grands canaux de desséchement du Bedford
Level. Finalement, suivant son cours jusquâĂ Lynn Regis, sur 21 ki-
lomĂštres de longueur, la Grande Ouse admet comme dernier affluent
la petite riviÚre Nar. à Lynn, elle débouche directement dans la
baie du Wash; autrefois, elle sây jetait Ă Wisbeach.
La riviÚre Nen ou Nene dont nous décrivons plus loin en détail le
cours supérieur, prend sa source dans les collines oolithiques du
comtĂ© de Northampton, et ne devient navigable quâĂ partir de cette
ville. Ă Peterborough, elle entre dans le district des Fens, pour se
ramifier du nord Ă lâest, et former de nombreux bras plus ou moins
artificiels qui proviennent des marais desséchés. Le plus important
de ces bras débouche à Wisbeach. AprÚs avoir servi de limite aux
deux comtés de Lincoln et de Northampton, elle se jette dans la baie
du Wash, Ă quelques kilomĂštres de distance de l'embouchure de
la Grande Ouse, ayant drainé un bassin de prÚs de 300 000 hec-
ares.
La riviÚre Welland traverse le comté de Northampton sur 80 ki-
lomÚtres de longueur, vers Le nord-est; elle reçoit entre Market-
Harborough et Stamford plusieurs petits tributaires : Wyebrook,
Chater, Guash, etc., venus du Rutland, elle est rejointe en aval de
Slamford, dans les Fens, passé les villes de Deeping et Crowland,
par le cours dâeau important, le Glen, qui draine un bassin assez
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 163
Ă©tendu, sur 57 kilomĂštres de parcours. Avant d'atteindre la baĂŻe du
Wash, la riviÚre Welland est dérivée dans des canaux qui font partie
de lâensemble du drainage appliquĂ© aux Fens, et dĂ©bouche Ă la
partie nord de la baie, aprĂšs avoir recueilli les eaux dâun bassin
couvrant environ 20 000 hectares.
La riviĂšre Witham prend naissance dans le Rutland, Ă Thist-
leton ; coule dans la direction nord par Grantham, jusquâĂ Lincoln,
aprÚs avoir reçu les eaux de la Brant ; tourne à partir de Lincoln
vers lâest, puis au sud-est, ayant recueilli les eaux des tributaires
Langworth et South Beck, et Ă Tattershall, celles du Bain et du
Sleaford, et se jette dans la baie du Wash, prĂšs de l'embouchure
de la riviĂšre Welland. Ă partir de sa jonction avec le Sleaford, le
Witham est canalisĂ© jusquâĂ Boston, et rendu, aprĂšs Boston, Ă son
lit naturel. Son bassin occupe 273 000 hectares.
Cette riviÚre joue un rÎle considérable dans le desséchement des
Fens ; elle Ă©coule non seulement les eaux des hauts districts dâoĂč
elle descend, mais encore la partie nord des Fens du Lincoln, Ă sa-
voir, ceux de Wildmore et de Holland, couvrant plus de 55 000 hec-
tares.
Tout ce district, Ă lâĂ©poque romaine, Ă©tait Ă un niveau de 3 Ă
2",90 plus bas quâil nâest aujourdâhui prĂšs de la plage, et de1",50 plus
bas Ă lâamont, le long du Witham. Aussi, les parties basses Ă©taient-
elles recouvertes chaque jour par la marée, tandis que les parties
plus Ă©levĂ©es, restant Ă sec, avaient conservĂ© leur parure de forĂȘts.
Les Romains les dĂ©frichĂšrent pour construire leurs digues et arrĂȘter
lâenvahissement de la mer, en permettant aux atterrissements de se
continuer â.
Les eaux qui affluent dans le Witham, provenant dâun bassin aussi
étendu, sont rejetées dans un chenal qui, à partir de Boston, ser-
pente sur une douzaine de kilomĂštres de longueur, avec une lar-
geur variable de 30 Ă 75 mĂštres, jusquâĂ lâembouchure dans le
Wash, oĂč elle pĂ©nĂštre presque Ă angle droit, Ă cause dâun banc
d'argile compacte qui fait dévier son cours.
La baie du Wash, dâune superficie de 78 000 hectares, est peu
1. Wheeler, Proceedings of the Institution of civil Engineers ; t, XXNIIIL.
164 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
profonde, encombrée de sables mouvants qui empiÚtent lentement
sur la mer. Sa largeur, en travers du cul-de-sac que forment les
embouchures du Witham et de la Grande Ouse, est de 24 kilo-
mĂštres, mais elle nâa plus que 15 kilomĂštres en travers des cĂŽtes
qui ferment lâentrĂ©e en mer.
La vase des eaux douces sây mĂ©lange, pendant les marĂ©es, avec les
alluvions marines et se dépose en eau morte, par l'effet des courants
contraires. Lâendiguement dâune partie de la baie a beaucoup con-
tribuĂ©, ainsi que lâĂ©tablissement des canaux de dĂ©charge pour le
desséchement, au dépÎt des alluvions, qui ne laissent plus aujour-
d'hui que deux passages dans le chenal ; au nord, les Boston deeps,
séparés par un banc considérable de sables mouvants, el le Lynn
well' au midi.
Historique des premiers travaux. â Que les Romains aient cons-
truit ou non toutes les digues quâon leur attribue, Ă lâĂ©poque oĂč ils
colonisĂ©rent la Bretagne, on nâa pu retrouver avec certitude, comme
Ćuvre romaine, malgrĂ© de nombreux et remarquables vestiges, que
la «longue chaussée » (Causey) allant de Denver, dans le Norfolk,
par Grandford, Eldernell et Eastra Fen, jusquâĂ Peterborough, sur
une longueur de 38 kilomĂštres. Construite en argile et en sable,
avec 0",90 d'Ă©paisseur Ă la crĂȘte et 18 mĂštres Ă la base, cette levĂ©e
est recouverte aujourdâhui de plus dâun mĂštre d'Ă©paisseur de terre.
Dans une tranchée pratiquée à travers la levée, à Eldernell, on a
constatĂ© le mode dâexĂ©cution suivi par les Romains. Le sol de la
lande Ă©tait revĂȘtu dâabord dâun lit de fascinages en branches de
chĂȘne, puis dâun lit Ă©pais de cailloux venant du Northampton, et
finalement, dâune sĂ©rie de couches dâargile et de sable, alternant
jusquâĂ la crĂȘte. Ces matĂ©riaux faisant prise, ont rĂ©sistĂ© Ă lâaction
des eaux et du temps, jusquâĂ ce Jour *.
Sir William Dugdale, qui Ă©crivit au xvr° siĂšcle lâhistoire des endi-
guements, mentionne à diverses reprises, comme ayant été cons-
truites par les Romains, de grandes digues élevées alors au bord du
1. Ansted, Waler and Water-Supply, 1878, p. 250.
2, Algernon Clarke, Journ. Roy. Agric. Soc., t. VIII, 1°° série, p. S1.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 165
Wash, dans le but de conquérir les alluvions que les marées sub-
mergeaient, inondant tout le district qui borde la baie. « La masse
des atterrissements dĂ©posĂ©s par la mer Ă lâentrĂ©e de la baie, dit-il,
s'était élevée si haut, refoulant les eaux douces et empiétant sur le
rivage, que les Romains, pour rester maßtres de ces terrains sédi-
mentaires si riches et si fertiles, déployÚrent une grande activité
jusquâĂ ce quâils les eussent enclos de fortes digues et protĂ©gĂ©s ainsi
contre lâirruption des vives eauxâ. »
Quoi quâil en soit, les endiguements paraissent avoir Ă©tĂ© complĂš-
tement abandonnés jusque sous les rois saxons. S'ils furent repris
alors, câest par les moines des riches et puissantes abbayes de Crow-
land, Thorney, Ramsey, Spinney, Ăly, etc., qui cullivaient les Ăźles
émergeant çà et là des terres inondées.
Indépendamment de la chaussée romaine, mentionnée précédem-
ment, on retrouve dans le Comté de Lincoln, de trÚs anciennes
digues, telles que le Old Sea Dyke, attribué aux Romains; le
Raven-bank, qui protĂšge un petit territoire entre Cowbit et Tidd-
Saint-Mary, mais plutĂŽt contre les crues des riviĂšres; son origine
est inconnue ; le New Sea Dyke, de 3 kilomÚtres plus rapproché
du cÎté des terres, dont on ignore aussi la date d'exécution. Les
nivellements opérés au siÚcle dernier, dans le but de creuser le
grand collecteur de décharge, à travers cette derniÚre digue, ont
montré que la surface du pays, en avançant vers la levée romaine,
s'Ă©levait subitement de 1",80, câest-Ă -dire que le niveau des atter-
rissements du cÎté de la mer se trouvait à 1",80 au-dessus de celui
des terres enclÎturées. Cette différence de niveau représente la
hauteur du colmalage dĂč aux eaux du Wash depuis que le New
Sea Dyke a Ă©tĂ© Ă©tabliâ.
D'ailleurs, lorsquâen 1635 on approfondit le chenal de la riviĂšre
1. Sir W, Dugdale, History of embanking and draining, 1° édit, 1652.
2. On rencontre aux environs de Wainfleet (Lincoln), le long de la digue romaine,
qui remonte vers le nord, une série de tertres de 40 mÚtres de longueur et de
4 mÚtres de hauteur. espacés sur une longueur de 3 kilomÚtres environ, et divisés en
cinq groupes à peu prÚs symétriques. Ces groupes sont séparés par des tranchées di-
rigées à angle droit vers la cÎte, qui s'est avancée depuis l'époque romaine de prÚs de
3 kilomĂštres sur la mer. La butte la plus importante, encore intacte, avec des talus
166 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Nen, à Wisbeach, on découvrit, à une profondeur de 2",45 au-
dessous du lit, un ancien lit empierrĂ©, oĂč la vase avait empri-
sonné sept barques. à Whittlesea, bien plus en amont, des fouilles
pratiquĂ©es Ă la mĂȘme profondeur, sous la lande, mirent au jour un
sol arable, recouvert de gazon, qui paraissait avoir été récemment
fauché. L
Il y a donc lieu de penser que les travaux de desséchement et de
culture, dans cette région, remontent à des époques fort reculées.
Henri de Huntingdon, dĂ©crivant la contrĂ©e sous le rĂšgne dâĂtienne
de Blois (1135), sâextasie sur les beautĂ©s des Fens, « dâun sĂ©jour
charmant, arrosées par une foule de ruisseaux, entrecoupées de lacs
et dâĂ©tangs, et embellies par un grand nombre de bois et de forĂȘts ».
William de Malmsbury, vivant au temps du roi Henri Il (1144), et
parlant des environs de Thorney, dĂ©clare que « câest un vĂ©ritable
paradis pour le plaisir des yeux ; les marais eux-mĂȘmes sont peuplĂ©s
de futaies aux troncs élancés, dont le feuillage épais cache les étoiles
du firmament; la plaine aussi nivelĂ©e que la mer, est couverte dâher-
bages Ă perte de vue, et pour rompre la monotonie, ici, des bou-
quets de pommiers, là des vignes, offrent une végétation luxuriante
pour les délices de la vie ».
Les ßles cultivées par les moines, que mentionne de Lavergne,
produisaient des récoltes abondantes de céréales et de foin, de
fruits et de légumes. Cerfs, chÚvres, liÚvres et gibier de toutes
sortes y étaient parqués en hberté. Les eaux fournissaient de pois-
sons les plus délicats la table des monastÚres. Entourées de saules,
dâaunes, de roseaux et de joncs, la plupart des Ăźles nâĂ©taient acces-
en pente douce, occupe le centre, et de 12 Ă 14 buttes sont rĂ©parties sur le terrain Ă
l'arriĂšre, jusqu'Ă 400 mĂštres du littoral ancien. Le terrain des buttes est le mĂȘme que
celui qui les supporte, sauf pour quelques-unes formées de tourbe noire, du reste peu
éloignée.
S'agit-il d'anciens villages de pĂȘcheurs, o1 de sauniers fabriquant du sel marin, Ă
l'usage des colonies romaines, dont les tertres maintenaient les habitations au-dessus
des hautes marées, et sont encore debout? On n'y retrouve pourtant aucuns vestiges de
l'industrie humaine ? Ou bien, s'agit-il de promontoires, de jetées construites par les
Danois pour mettre leurs bateaux Ă lâabri dans les goulets qui sĂ©paraient les tertres?
Le nom de Zofts par lequel on désigne ces monticules est d'origine danoise. (Sewell,
On Earthworks at Wainfleet in Lincolnshire. Report of the Brit. Assoc., 1878.)
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 167
sibles quâen bateau. Quant au pays dâalentour, demeurĂ© Ă PĂ©tat ma-
récageux, il servait de repaire aux braconniers et aux maraudeurs
de la pire espĂšce.
Quelques grands seigneurs imitĂšrent tardivement les moines, Ă©le-
vant des digues pour la défense de leurs propriétés contre les eaux
des crues et des marées. Richard de Rules entre autres, chambellan
de Guillaume le Normand (1066), entreprit les endiguements et les
canaux nécessaires pour assainir les marais communaux de Bourn et
de Deepping. Il fit, en outre, encaisser la riviĂšre Welland qui inon-
dait ses prairies, et dessécha un vaste territoire qu'il réparut entre
les cultivateurs, « de telle sorte, ajoute le chroniqueur, que des ma-
récages, étangs et fondriÚres, Sir Richard fit naßtre des champs et
pùturages fertiles ; et des terres les plus humides et fiévreuses, il fit
sortir des jardins et des vergers ».
Les ressources du district des Fens élaient encore vantées au
temps des rois Ătienne (1135) et Henri II Plantagenet (1154).
Quelques entreprises furent tentées avec plus ou moins de succÚs
depuis le rĂšgne d'Ădouard I (1272) jusque vers le xv° siĂšcle. Le
célÚbre Jean de Gand (Gaunt), qui mourut en 1393, et Marguerite,
comtesse de"Richmond, figurent parmi les concessionnaires, entre-
preneurs de desséchements. Sous le rÚgne de Henri VIT (1478),
Moreton, Ă©vĂȘque de Ăly, fit exĂ©cuter un travail {rĂšs important, le
canal de Peterborough Ă Guyhirn et Wisbeach, qui mesure 1",20 de
profondeur sur 12 mĂȘtres de largeur. Ce canal, muni dâune Ă©cluse
Ă la mer, fonctionne encore aujourdâhui, sous le nom de Woretonâs
Leam, pour les services de la navigation sur les riviĂšres Nen et Ouse,
et du desséchement du district Nord-Holland.
Lorsque les moines eurent été dépossédés et bannis par Henri VIN,
protecteur et chef suprĂȘme de lâĂglise rĂ©formĂ©e en Angleterre, les
efforts isolés demeurÚrent sans objet, et aprÚs un siÚcle d'abandon, le
pays des Fens se trouva dans une situation des plus critiques. Les ma-
récages avaient remplacé les bois et les pùturages ; les endiguements
partiels ne servaient quâĂ arrĂȘter l'Ă©coulement des eaux ; les canaux
s'étaient envasés; les riviÚres à faible pente n'étaient plus draguées,
et les eaux de la mer refoulant les eaux douces maintenaient la
contrée submergée. Le commissaire Atkins, sous Jacques 1° (1604),
168 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
constate que la triste incurie des seigneurs et des habitants des
Fens, en causant la ruine des terres jadis si fertiles et si salubres,
frappe surtout les populations des hautes landes, aux besoins des-
quelles les Fens suppléaient dans les années de sécheresse et de
disette.
Sir William Dugdale confirme les doléances de Lord Hardwicke ;
il nây a plus, de son tempsâ, que des marais oĂč lâon retrouve les
racines et les troncs de ces magnifiques chĂȘnes et sapins, encore
debout dans le sol ferme que la tourbe vaseuse a recouvert.
L'état devient si grave que les pétitions arrivent en masse au Par-
lement, sous le rĂšgne dâĂlisabeth, pour requĂ©rir du gouvernement
un plan général de desséchement. La reine désigna alors une com-
mission extraordinaire, chargée d'opérer un nivellement complet des
districts marĂ©cageux, ou inondĂ©s, et en lâan 1600 fut promulguĂ©e
la premiĂšre loi relative au drainage du Great Level. Un grand nom-
bre de plans furent dĂšs lors soumis aux Communes. En 1606, sous
Jacques [#, une loi locale pour le desséchement de 2 400 hectares,
compris dans les districts de Waldersee et Coldham (Ăly), concĂ©dait
aux entrepreneurs les deux tiers des terres assainies ; mais ce fut
seulement en 1630 que le comte de Bedford, prĂ©sident dâune asso-
ciation de 13 propriétaires, obtint la concession du desséchement
des terrains formant le Great Level, dans les comtés de Cambridge
et de Lincoln, moyennant lâabandon aux intĂ©ressĂ©s de 58 000 hec-
tares, à peu prÚs le tiers du territoire à dessécher. Les travaux de
lâassociation, dâabord activement poussĂ©s, furent suspendus pendant
la période des guerres civiles, et le comte Francis venant à mourir,
son fils et hérilier, William, premier duc de Bedford, dut faire re-
nouveler la concession du Great Level, en 1649, par le Convention
Parliament. En 1653, les opérations dont nous rendons compte plus
loin étaient achevées ; 115 000 hectares avaient été complÚtement
desséchés, moyennant une dépense de 10 millions de francs, et Pas-
sociation recevait en toute propriété 38 000 hectares, représentant
une valeur à peu prÚs égale aux débours, à raison de 262 fr. dé-
pensés par hectare.
1. Sir W. Dugdale, né en 1605, mourut en 1686.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 169
Sur lâensemble du territoire, les frais de dessĂ©chement sâĂ©taient
élevés effectivement à 86 fr. par hectare.
Sous le rĂšgne de Charles IT (1660), le comte Lennox obtenait Ă©ga-
lement la concession des terres qu'il pourrait endiguer dans le dis-
trict Sud-Holland, sur les cĂŽtes de la baie du Wash, aux environs
de Sulton ; et les communes de Gedney, de Holbeach, etc., par des
chartes spĂ©ciales, procĂ©daient au dessĂ©chement et Ă lâenclĂŽture des
landes et des marais leur appartenant. DÚs lors, les travaux reçurent
une impulsion qui ne sâest plus ralentie jusquâĂ lâĂ©poque prĂ©sente.
1. â DessĂ©chement du Bedford Great Level.
Le desséchement du Great Level, entrepris par Francis, qua-
triÚme comte de Bedford, et ses 13 associés, comprenait les travaux
suivant(s : ;
1° RiviĂšre Bedford (aujourdâhui ancienne riviĂšre Bedford), joi-
gnant Karith et Salter Lode, sur 33*",7 de longueur ; largeur 21",33.
2 Canal Sam, de Feltwell (Norfolk) Ă la riviĂšre Greal Ouse.
3° Canal de Ăly (aujourdâhui canal Sandy, ou Sandall) ; longueur
32 kilomĂštres ; largeur 12",90.
4 Bevill Leam, de Wbittlesey Mere Ă Guyhirn ; longueur 16 kilo-
mĂštres ; largeur 12",20.
9° Morelonâ's Leam, de Guyhirn Ă Wisbeach ; ce canal, construit
au xv° siĂšcle par lâĂ©vĂȘque Moreton, fut approfondi et Ă©largi.
6° Peakirk Drain ; longueur 16 kilomÚtres ; largeur 5,20.
7° New South Eau ; de Crowland à Clow Cross.
8° Canal Hill, prÚs de Peterborough ; longueur 3 kilomÚtres ;
largeur 15",25.
% Shire Drain, de Clow Cross Ă Tydd et Ă la mer.
Outre ces canaux et colateurs, un grand nombre dâĂ©cluses furent
établies pour protéger les Lerres contre les inondations et assurer
lâĂ©coulement des eaux pendant les marĂ©es.
Le comte Francis étant mort tandis que la guerre civile sévissait
dans les comtĂ©s de lâest et arrĂȘtait les travaux en cours, son fils
William, cinquiĂšme comte et premier duc de Bedford, partisan du
protecteur Cromwell, obtint le renouvellement de la concession
170 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
accordée à son pÚre (1649) et constitua une société dont il confia la
direction à un ingénieur Hollandais, qui avait conduit avec succÚs des
opérations de desséchement dans les comtés du sud-est, et plus
récemment, à Hatfield Chace, prÚs de Thorne, dans le comté de
York. Sir Cornelius Vermuyden, cet ingénieur, colonel de cavalerie
au service de Cromwell, reprit Lous les projets et poussa les travaux
assez activement pour que le Great Level fût complÚtement assaini
en 1663. L'année suivante, les conservateurs du desséchement se
constiluĂšrent en associalion par une loi du Parlement, dans le but
d'entretenir les travaux exécutés et de percevoir, à cet effet, les
taxes nécessaires; le duc de Bedford et ses associés lui firent remise
de 33 000 hectares ; 4 000 heciares furent transmis en outre Ă la cou-
ronne et Ă 000 hectares au duc de Portland ; en tout 38 000 hectares.
La taxe par hectare, prĂ©levĂ©e par l'association, fut dâabord uni-
que, mais en raison de lâassiette injuste de cet impĂŽt, elle fut ren-
due progressive et répartie en plusieurs classes.
En 1697, suivant un projet que Vermuyden avait élaboré, le Greal
Level fut divisé en trois districts : nord, centre et midi ; chaque dis-
trict, administré par un commissaire, fut desservi par des cours
1. Vermuyden, ingénieur renommé comme hydraulicien, s'était également distingué
aux premiers rangs, comme militaire, dans les combats contre les royalistes Ă Marston-
Moor (1544), à Nasseby (1645), etc. ; Cromwell l'avait fait colonel d'un de ses régi-
ments CÎtes-de-fer et l'avait créé baronet.
Aux yeux des chroniqueurs anglais, qui avaient vu leurs souverains appeler, dĂšs le
xuÂź siĂšcle, les colons de la Flandre pour faire valoir leurs domaines, tout Flarnand est
un homme qui sait manier les armes et la charrue. Les immigrations des premiers
Flamands continuĂšrent sous le protectorat de Cromwell et sâĂ©tendirent jusqu'au pays
de Galles.
C'est d'eux que les Anglais apprirent Ă construire des digues Ă la mer et le long
des riviÚres, à élever des moulins à vent pour épuiser les eaux, à dessécher et assainir
les marais et les terres humides, ete. (De Laveleye. Essais sur lâĂ©conomie rurale de
la Belgique, 1863, p. 13.)
En France Ă©galement, ce sont des Flamands qui dessĂšchent et mettent en culture
cette partie du Poitou, appelĂ©e la petite Flandre. Ćest au Flamand, sieur Humphrey
Bradley, « personnage fort expérimenté et entendu aux desséchements et diguages des
terres inondées », que le roi Henri IV confÚre le titre de grand maßtre des digues de
France et le privilĂšge des entreprises d'assainissement, par un Ă©dit du 8 avril 1599.
En 1642, c'est encore un Flamand, Jean Van Ens, conseiller du roi Louis XIII, qui
dessĂšche les marais d'Arles, avec un rare succĂšs.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 171
dâeau, des canaux, des digues et des Ă©missaires qui lui Ă©taient
. propres. Le nord Level, drainé par la riviÚre Nen, décharge ses eaux
dans la baie du Wash, au-dessous de Wisbeach ; le centre et le sud
Level, drainĂ©s par la riviĂšre Greal Ouse, dĂ©versent leurs eaux Ă
Lynn, Ă©galement dans le Wash.
Les digues de la riviĂšre Welland protĂšgent au nord le Deeping
Fen, et au midi, le nord Level ; celles de la riviÚre Nen défendent, sur
la rive gauche, le nord Level, et sur la rive droite, le centre Level.
Enfin, les levées de la riviÚre Great Ouse garantissent sur la rive
gauche le centre Level, et sur la rive droite le sud Level. Câest aux
trois riviÚres ainsi endiguées, formant les artÚres principales du
drainage de la surface totale, que se rapportent les travaux exé-
cutĂ©s depuis le commencement du siĂšcle dernier (voir la carte dâen-
semble).
Pour assurer le desséchement artériel, Vermuyden avait imaginé
de rĂ©server des lits d'inondation ou Washes, qui rĂ©gleraient lâĂ©cou-
lement Ă la mer des eaux de chaque riviĂšre. Ces lits d'inondation
consistent en terrains submersibles, câest-Ă -dire en prairies, dont les
moins Ă©tendues, Cowbit Washes, pour la riviĂšre Welland, en aval de
Spalding, mesurent de 500 Ă 1 000 mĂštres de largeur, et couvrent
600 hectares. Vermuyden admeltait que les riviĂšres, si elles eussent
conservé un débit normal, augmenté du débit des eaux de dessé-
chement, pouvaient maintenir leur chenal libre et ouvert jusque
dans l'estuaire ; mais comme, pendant les crues d'hiver, elles ont un
dĂ©bit trop fort, et quâen Ă©tĂ©, elles offrent un dĂ©bit insuffisant, câest-
Ă -dire, quâen hiver, les embouchures deviennent trop Ă©troites et
quâen Ă©tĂ©, les ensablements les bloquent, il adopta le systĂšme des
réservoirs ou lits d'inondation se remplissant par les crues et se
vidant progressivement Ă lâĂ©tiage.
On a reconnu depuis que l'estuaire Ă©tait le principal obstacle Ă
l'Ă©coulement rĂ©gulier des eaux douces, et que câĂ©tait une erreur dâat-
ténuer le courant des eaux en crue, si on voulait conserver le chenal
ouvert dâune maniĂšre durable, Ă travers les sables de l'estuaire â.
1. J. A. Clarke, Farming of Lincolnshire (Journ. Roy. Agric. Soc., 1851, vol. XII,
p. 298).
172 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Avant de procéder à l'examen des travaux en détail, rappelons
que la plus grande partie du territoire à dessécher, en y adjoignant
les 200 000 hectares du comté de Lincoln, est à un niveau de 1",920
à 4°,90 au-dessous de celui des plus hautes mers du nord ; que les
parties les plus élevées sont les plus rapprochées de la cÎle, par
sulle des endiguements, et que la pente diminuant vers lâintĂ©rieur
s'arrĂȘte aux terrains tourbeux et spongieux dont la tendance natu-
relle est de se saturer dâeau et de retenir lâeau de saturation.
Indépendamment de cette déclivité du terrain en sens inverse, la
grande baie qui sert de rĂ©ceptacle aux eaux dâĂ©coulement est si peu
profonde, recevant des alluvions de limon et de sable qui ne taris-
sent pas, que les eaux courantes, faute de vitesse, ne peuvent pas se
frayer un chemin Ă travers les passes. Les riviĂšres descendant des
plateaux supérieurs pourraient seules, en temps de crue, opérer
les chasses nécessaires, mais les crues ne débouchent pas aux points
les plus bas du district. Aussi a-t-il fallu encaisser les cours dâeau,
les rectifier, les pourvoir dâĂ©cluses pour retenir les marĂ©es et, le
plus souvent, Ă©lever Ă lâaide de machines les eaux de drainage,
pour les faire écouler par les riviÚres canalisées.
Pour le desséchement du nord Level, les digues du Welland et de
la Nen, entre Peterborough et Guyhirn, ont dĂ» ĂȘtre renforcĂ©es : elles
mesurent 21,50 Ă la base et 2,50 Ă la crĂȘte.
Les canaux d'écoulement ont été augmentés par la construction du
Smith Leam qui prolonge le canal Hill (Hillsâ Cut), dans le but dâa-
méliorer la navigation entre Wisbeach et Peterborough.
Le desséchement du centre Level a exigé le détournement des
eaux de la riviĂšre Nen, prĂšs de Peterborough, Ă Standground, oĂč
une Ă©cluse avait Ă©tĂ© installĂ©e, et son encaissement jusquâĂ Guyhirn
oĂč aboutit la levĂ©e de Waldersea. D'autre part, la riviĂšre Great
Ouse a été endiguée, depuis les plateaux de Over, dans le Cam-
bridge, jusquâĂ Hermitage, prĂšs de Earith, et de lĂ , dĂ©viĂ©e par une
Ă©cluse de navigation dans un nouveau canal Ă grande section qui
part de lâancien pont de lâOuse, non loin dâHermitage, elle se dirige
en ligne droite, parallĂšlement Ă lâancienne riviĂšre Bedford, jusquâĂ
lâĂ©cluse de Denver (Norfolk). Les dĂ©blais de ce canal, la nouvelle
riviÚre Bedford, rejetés sur la rive droite, forment une levée de
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 173
20",10 Ă la base, 2°,50 de hauteur et 3",05 Ă la crĂȘte qui dĂ©fend
spécialement le sud Level.
Une seconde levĂ©e de mĂȘmes dimensions, construite sur la rive
droite, au nord de lâancienne riviĂšre Bedford, enclĂŽture un lit dâinon-
dation ou Wash, de plus de 2000 hectares, destiné à recevoir les
hautes eaux hivernales des deux canaux Bedford.
Outre ces travaux considérables, de nombreux collecteurs ont été
successivement creusés afin de compléter le réseau artériel du centre
Level. Quelques-uns sont désignés uniquement par leurs dimen-
sions ; nous citerons les principaux :
4° Le canal Vermuyden, ou quarante pieds (Forty foot drain),
joignant la digue Welch, sur lâancienne riviĂšre Bedford, Ă la riviĂšre
Nen, prĂšs de Ramsey ;
2 Le Thurloe drain, ou seize pieds (Sixteen foot drain), reliant
le canal prĂ©cĂ©dent au canal dit Pophamâs Eau ;
9° Le Hammond's Eau, prÚs de Somersham ;
4° Le Stonea Drain, prÚs de March ;
9° Le Mooreâs Drain, ou vingt pieds (Twenty foot river), dans
la commune de March ;
6° Le Conquest Lode, aboutissant à l'étang Whittlesey et servant
de ligne de partage entre les communes de Yaxley et de Farcet,
dans le Northampton ;
7° Le Tong's Drain, au canal Marshland, avec écluses aux deux
extrémités.
Des amĂ©liorations furent apportĂ©es en mĂȘme temps Ă la digue de
Wluttlesey, au canal Popham et Ă lâancienne riviĂšre Nen canalisĂ©e,
tandis que lâĂ©cluse de Denver Ă©tait restaurĂ©e pour dĂ©tourner les
marĂ©es dans la nouvelle riviĂšre Bedford et empĂȘcher les eaux dou-
ces de refluer dans lâOuse Ă©galement canalisĂ©e, qui reçut le nom de
Dix mille riviĂšre (Ten thousand River), prĂšs de Littleport.
Le sud Level, prĂ©servĂ© contre les eaux de lâOuse par la digue
qui longe la nouvelle riviÚre Bedford, fut encore défendu par une
série de remblais et de levées contre les eaux des riviÚres Cam,
Mildenhall, Brandon et Stoke. Un grand canal appelé Downham, ou
Saint John's Eau, de 26",50 de largeur et 5 mĂštres de profondeur,
fut creusé, sur 8 kilomÚtres, entre l'écluse Denver et Stow-Bridge
174 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
pour recevoir toutes les eaux d'inondation, ou les eaux excédantes
provenant des cours dâeau qui sillonnent le sud Level.
La grande écluse Denver commande en somme le débouché de
la riviÚre Great Ouse dans la baie ; elle avait été établie, contrai-
rement aux projets de lâingĂ©nieur Vermuyden, Ă une vingtaine de
kilomĂštres de la ville de Lynn. Câest un autre ingĂ©nieur hollandais,
Westerdyck, au service de la commission du Bedford Level, qui
décida cette modification. Les plaintes les plus vives ne tardÚrent
pas Ă ĂȘtre adressĂ©es, et de nombreux procĂšs furent engagĂ©s devant
les tribunaux, par les autorités municipales, pour faire cesser les
obstacles apportés par cette écluse à la navigation du port de Lynn.
Fortement encastrée dans sa maçonnerie, pourvue de portes bus-
quĂ©es, lâĂ©cluse fonctionnait trĂšs bien au point de vue du dessĂ©che-
ment, sans quâil fĂ»t nĂ©cessaire de murailler la digue, ce qui eĂ»t Ă©tĂ©
le cas dans le projet de Vermuyden ; mais en diminuant le volume
des eaux dĂ©chargĂ©es devant Lynn elle avait causĂ© lâensablement
du port.
En 1713, une des plus fortes marĂ©es du siĂšcle enleva lâĂ©cluse Den-
ver, ce qui mit fin au conflit entre les intĂ©rĂȘts de la navigation et
ceux du dessĂ©chement ; toutefois lâapaisement ne fut pas de longue
durée, car en 1750, malgré les procÚs et les démonstrations mena-
çantes des habitants de Lynn, la commission du Bedford Level la fit
rĂ©Ă©difier au mĂȘme point oĂč elle fonctionne encore actuellement.
Dâautres Ă©cluses furent construites aux extrĂ©mitĂ©s de la nouvelle
riviĂšre Downham et sur beaucoup de points de jonction, ainsi que
des levées de défense. De plus petits canaux de dérivation, tels que
le Grunty Fen drain prÚs de Stratham, furent embranchés sur la
riviÚre Downham, et ceux déjà existants, connus sous le nom de
Lodâs Reach, Swaffham et Bottisham, furent rĂ©gularisĂ©s et curĂ©s.
Quoique ces travaux, aprÚs leur exécution, ne fussent pas reconnus
suffisants pour assurer le desséchement parfait du sud Level,
Vermuyden constatait quâen 1652, « plus de 16 000 hectares des
districts du nord et du centre étaient en pleine culture : blé, cé-
rĂ©ales d'hiver, navette ; les pĂąturages regorgeaient de bĂȘtes Ă cornes
1. Ilustrated Times, mai 1862.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 175
et de moutons lĂ oĂč il nây avait auparavant que marais et marĂ©-
cages ».
L'association du Bedford Level, trompée par ce brillant résultat,
ne s'était pas suffisamment préoccupée des débouchés à la mer, qui
demeuraient obstrués par les sables et les vases du Wash. En ouire,
par suite de la négligence apportée dans le curage des fossés et des
cours dâeau, le dessĂ©chement cessa de fonctionner naturellement, et
lâon dut bientĂŽt songer Ă recourir Ă des moyens mĂ©caniques, câest-
Ă -dire Ă des moulins Ă vent, pour activer des pompes dâĂ©puisement
qui relĂšvent lâeau des fossĂ©s et la rejettent dans les riviĂšres princi-
pales. Sous le rĂšgne de Georges [*, une premiĂšre loi relative au
desséchement du Haddenham Level, compris dans le district gé-
néral de Bedford, autorisa l'emploi de moulins à vent : dÚs lors,
l'exemple fut suivi dans une foule de localités, par des particuliers
et des communes, qui Ă©tablirent des moulins faisant mouvoir des
roues élévatoires. Ce systÚme pouvait convenir à certains proprié-
taires, mais au détriment des autres intéressés ; il ne remédiait en
rien à la situation générale, devenue trÚs précaire, en raison des
débordements incessants.
En 1770, une brĂšche survenue dans la digue du nord Level causa
lâinondation de la Nen, qui envahit tout le district; en 1795, les rup-
tures des digues maintinrent plus de 10 000 hectares sous 1",80
dâeau, pendant des semaines entiĂšres ; en 1799, les inondations des
riviĂšres, grossies par les lĂąchures de plus de 500 moulins, furent
encore plus désastreuses.
La commission du Bedford Level avait résolu, il est vrai, dÚs 1791,
de creuser un nouveau canal de décharge pour la riviÚre Nen, en
aval de Wisbeach, dans le but de la rejeter par le Shire Drain Ă
Petersâpoint, avec une chute de 1°,70. Ce canal, dâune longueur de
3 kilomĂštres et demi, devait sâamorcer Ă 8 kilomĂštres en aval de
Wisbeach, mais il ne put ĂȘtre achevĂ© quâen 1773, aux termes dâune
loi spéciale (Tydd and Newton drainage act).
LâingĂ©nieur Kinderley proposait, de son cĂŽlĂ©, en 1751, de con-
duire les eaux des riviĂšres Great Ouse et Nen jusquâau centre de la
baie du Wash, oĂč elles auraient rejoint celles des riviĂšres Welland
et Witham, de façon à créer un courant puissant qui eut refoulé les
176 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
sables des hauts-fonds, dégagé les passes et permis de conquérir sur
la mer une vaste surface dâalluvions, « plus vaste, disail-il, que le
comté de Rutland tout entier ».
Cette grande idée, que Sir John Rennie devait rappeler un siÚcle
plus tara, en proposant de créer un nouveau comté, Victoria, sur
les terrains du Washâ, ne trouva alors aucun Ă©cho : elle nâen honore
pas moins la haute intelligence de l'ingénieur qui, dans tous les
travaux dont il fut chargé, appliqua les principes soi-disant nou-
veaux, consistant Ă Ă©viter de donner trop de largeur au chenal des
cours dâeau pour Ă©viter les hauts-fonds et les ensablements des
passes. La rÚgle qu'il pratiquait se résumait dans le rélrécissement
du chenal pour obtenir lâapprofondissement voulu, au moyen de la
vitesse et de la force du courant.
JusquâĂ ce que le canal Kinderley (Xinderley's Cut) eut Ă©tĂ© fina-
lement exécuté, la riviÚre Nen, traversant le territoire du Great
Level, s'y épanchait périodiquement, et se ramifiait par une foule
de petits bras qui rejoignaient la Great Ouse, en aval de Wisbeach.
La Great Ouse, elle-mĂȘme, dĂ©tournĂ©e, comme on lâa vu, de longue
date sur Lynn, recevait par le canal Moreton (Morelonâs Leam), cons-
truit sous le rĂšgne de Henri VII, les eaux des deux riviĂšres, de telle
sorte que la Nen avait fini par trouver une issue Ă peu prĂšs directe
Ă la mer, pour ses eaux, quâune digue sĂ©parait encore de celles des
Levels situés au sud-est.
Wisbeach nâen restait pas moins le point dominant de lâĂ©coule-
ment en amont de la Nen. Déjà , en 1771, sur le rapport des ingé-
nieurs Golborne et Dunthorne, les commissaires du nord Level se
décidaient à imposer à la ville de Wisbeach un chenal de 30 mÚ-
tres d'ouverture, pour la décharge des eaux de leur district (20 000
hectares) et pour la défense des territoires riverains de la Nen,
entre Peterborough et Wisbeach. Ces territoires se trouvaient inon-
dés par suite de ruptures survenues dans les digues des Fens el
de la destruction des ouvrages qui protégeaient le canal Kinderley.
1. D'aprÚs le projet de Sir John Rennie, le comté Victoria devait embrasser 60 600
hectares, entre Wainfleet (Lincoln) et Hunstanton (Norfolk), sur lesquels 29 000 se
trouvaient dégagés d'ores et déjà , à marée basse (voir la carte d'ensemble).
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 17%
Aussi, en 1773, obtinrent-ils d'urgence du Parlement, malgré la
violente rĂ©sistance de la municipalitĂ©, le vote dâune loi spĂ©ciale
pour faire creuser un nouveau canal Ă la mer, Ă une profondeur plus
grande de 0,40 ; ce qui permettait dâabaisser de 1*,80 la surface ,
des eaux Ă lâĂ©cluse du nord Level, et de faire remonter Ă Wisbeach
des bateaux dâun plus fort tirant dâeau. Ce canal exĂ©cutĂ© la mĂȘme
année, sous le nom de Xinderley's Cut, permit, en effet, aux marées
de vive eau, dâaprĂšs le rapport de James Golborne, de sâĂ©lever Ă
3 mĂštres, Ă Wisbeach, au lieu de 1,20 ; et Ă lâĂ©tiage de la Nen, Ă
Guyhirn, de sâabaisser de 0",53, ou Ă Peterborough, de 0,85, par
rapport aux niveaux de lâannĂ©e 1767.
Cette situation, réellement améliorée, ne devait pas avoir une
longue durée, car en 1809, Rennie pÚre fut conduit à proposer un
remĂšde qui consistait dans le prolongement du canal Kinderley,
lâendiguement de lestuaire et un raccourci de la Nen, au nord de
la ville de Wisbeach.
a) La riviĂšre Great Ouse.
Pendant prĂšs dâun siĂšcle, lâidĂ©e de crĂ©er un nouveau dĂ©bouchĂ©
aux eaux de la Great Ouse, en la dérivant, pour la raccourcir, et
d'assurer ainsi une chute plus forte de 1",50 dans la baie, fut com-
battue par les propriétaires des Fens. Finalement, aprÚs la plus vive
opposition des habitants de la ville de Lynn, qui croyaient voir dans
la réalisation de cette idée la ruine de leur port et de leur com-
merce, une loi fut sanctionnĂ©e en 1781, pour mettre le projet Ă
exécution, moyennant une taxe de 1 fr. par hectare et par an, dans
toute lâĂ©tendue des terres qui devaient bĂ©nĂ©ficier des travaux. La
loi régla, en outre, certaines garanties pour le port de Lynn et pour
la navigation intĂ©rieure, de mĂȘme que pour les riverains de lâOuse.
Les deux ingénieurs désignés par la loi pour dresser le projet défi-
nitif, un pour le desséchement, Robert Mylne, architecte du pont
Blackfriars de Londres, et lâautre pour la navigation, Sir Thomas
Hyde Page, colonel du gĂ©nie, ne purent sâentendre sur la direction,
ni sur les dimensions du canal Ă creuser entre Saint-Germanâs Bridge
et le quai de Lynn, et quand le capitaine Joseph Hubbart, de Trinity
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1. 12
178 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
House, membre du conseil de lâAmirautĂ©, eut Ă©tĂ© choisi pour dĂ©par-
tager les deux commissaires et rendre une sentence arbitrale, on
constata qu'il nây avait plus de fonds pour exĂ©cuter le travail. Les
frais de procÚs et d'instance auprÚs du Parlement avaient absorbé
deux millions de francs,
Eau Brink Cut. â En attendant, la situation des Fens devenait
de plus en plus alarmante ; aussi les intĂ©ressĂ©s, Ă lâunanimitĂ©, solli-
citÚrent-ils du Parlement une nouvelle loi basée sur le projet de
l'expert, capitaine Hubbart, en consentant une augmentation de la
taxe. LâingĂ©nieur Rennie fut choisi comme ingĂ©nieur pour diriger
les travaux de drainage, et Telford, pour la navigation. Une com-
mission, présidée par le général Lord William Bentinck, reçut le
mandat de contrĂŽler les travaux. La loi connue sous le nom de Eau
Brink Cut Act, sanctionnée en 1795, ne reçut toutefois son applica-
ĂŒon quâen 1818, Sir Edward Banks sâĂ©tant rendu entrepreneur des
(ra vaux.
Les résultats de la dérivation dépassÚrent de beaucoup l'attente
sénérale ; non seulement le niveau des basses eaux, en amont,
sâabaissa de 1",50, mais les eaux du dessĂ©chement furent enlevĂ©es
avec une rapidité surprenante. Ainsi, pendant l'automne 1821, mal-
ré des pluies exceptionnelles, la plus grande partie des Fens fut
sauvĂ©e de lâinondation, grĂące au nouveau canal.
Les ingénieurs Telford et Rennie, tout en constatant que le tra-
vail avail été exécuté en tous points conformément au plan de Hub-
bart, ne durent pas moins convenir que le canal, Ă son point dâem-
branchement, était trop étroit pour le volume des eaux à débiter,
et que le courant finirait par rompre la digue dâamont vers lâancien
chenal. Ils recommandÚérent en consĂ©quence d'augmenter dâun tiers
la section, en affectant à ce remaniement les fonds destinés au cu-
rage de la riviĂšre, entre le canal et lâĂ©cluse Denver, le lit pouvant
se passer de curage.
Sur l'avis conforme de la commission, ces nouveaux travaux furent
confiés, en 1826, à Rennic ; le niveau baissa encore en amont, de
0",65, soit en tout de 2,15 ; mais entre temps, avant que lâĂ©largis-
sement eĂ»t Ă©tĂ© achevĂ©, les digues de lâĂ©cluse Denver sâaffouillĂ©rent,
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 179
le chenal navigable se dĂ©tourna du port de Lynn, les quais sâensa-
blĂšrent, et la commission, aux termes ae la loi, fut tenue dâindem-
niser la ville, de mĂȘme que les autres intĂ©ressĂ©s. Les indemnitĂ©s
dépassÚrent un million de francs ; soit, 700 000 fr. aux riverains de
lâ'Ouse, 250 000 fr. aux propriĂ©taires du Marshland, 175 000 fr. au
port de Lynn, etc. S
Aussi, dÚs que l'Eau Brink Cut eut été achevé, la commission
n'eut point de cesse que le Parlement la relevĂąt dâune aussi Ă©norme
responsabilité, par une nouvelle loi *.
b) La riviÚre Nen (vallée inférieure).
La riviÚre Nen, non moins que la Great Ouse, exigeait des amé-
liorations urgentes pour permettre lâĂ©coulement rĂ©gulier des eaux
du centre Level, et la mise en culture dâune surface considĂ©rable de
marais restĂ©s Ă lâĂ©tat stagnant.
Sur un premier rapport de Rennie pÚre engagé par le duc de Bed-
ford et par le syndicat des propriĂ©taires du nord Level (1809) Ă
donner son avis sur les travaux à exécuter, on avait reconnu la né-
cessilé : 1° d'approfondir et d'élargir la section de la Nen, depuis
Peterborough jusquâĂ la mer, câest-Ă -dire sur tout son parcours Ă
travers le district ; 2 de lui creuser un nouveau lit entre Rummery
Mill en amont et Horse Shoeband, en aval de Wisbeach ; 3° de
pourvoir ce canal dâĂ©cluses qui assureraient la navigation dans la
traversée de Wisbeach; et 4° de construire sur une longueur de
10 kilomÚtres environ un canal à grande section pour la décharge
des eaux dans la baie, entre le canal Kinderley et Crabb Hole, oĂč
le tirant dâeau Ă©tait suffisant. Ce nouveau canal pouvait ĂȘtre creusĂ©
aussi, en partie, dans l'enceinte fermée par la digue romaine, et
en partie, dans la plage des Marshes au dehors de lâenceinte ; mais
cette variante élait indiquée par Rennie comme moins directe et
moins sĂ»re que le tracĂ© par le chenal mĂȘme de la Nen.
Canal de Wisbeach. â Quoique Rennie fils et Telford ceussent
Ă©tĂ© amenĂ©s, en raison de la rĂ©sistance de la ville de Wisbeach, Ă
1. Aulobiography of Sir John Rennie, p. 192.
180 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
restreindre le projet primitif, les intéressés eurent gain de cause. Il
ne fut plus question que de cyeuser le nouveau lit en aval de Wis-
beach, et mĂȘme pour cette section, le tracĂ© sur Crabb Hole, Ă©tudiĂ©
par Rennie pÚre, vivement défendu par son fils, fut définitivement
Ă©cartĂ©. Au lieu de diriger le nouveau lit en dedans de lâenceinte des
vieilles digues, suivant la seconde variante, il fut résolu de tracer
la coupure dans la direction de Skates Corner. Le Parlement sanc-
tionna une loi spéciale dans ce but, et les travaux confiés aux entre-
preneurs Jolliffe et Banks furent achevés en 1831.
Sir John Rennie, au sujet de ces travaux, raconte un incident
qui dĂ©montre Ă quelles difficultĂ©s, dâun tout autre ordre que celui
des exigences techniques, se heurtent les opĂ©rations de lâingĂ©nieur,
lorsquâelles Ă©veillent la dĂ©fiance des populations, et Ă quels moyens
Ă©ncrgiques il faut parfois recourir pour tenir tĂȘte Ă des actes 1rrĂ©-
fléchis, ou mal intentionnés.
« Avant de détourner les eaux de la Nen dans le nouveau lit, en
aval de Wisbeach, nous avions ordonné, Telford et moi, aux entre-
preneurs, de réunir sur un point désigné autant d'hommes, de che-
vaux, tombereaux, brouettes et outils quâil serait possible, pour
pouvoir efficacement barrer lâancien lit Ă marĂ©e basse. Tout Ă©tait
prĂȘt ; les entrepreneurs se trouvaient sur les lieux ; l'heure du re-
flux approchait ; nous fimes signe de procéder au barrage. Il y avait
là à peu prÚs 1 200 ouvriers, avec les chevaux et les ustensiles né-
cessaires pour enlever rapidement le travail.
« Les membres de la municipalité de Wisbeach, opposés de tout
temps Ă lâentreprise, mais tenus par la loi de verser, pour les tra-
vaux, une quote-part de 750000 fr., arrivĂšrent sur les entrefaites,
accompagnĂ©s des officiers de justice ; tous, Ă bord dâun pelit steamer
naviguant sur la Nen. Ils venaient nous intimer de suspendre les
travaux, jusquâĂ ce que la Cour pĂŒt dĂ©libĂ©rer sur un rĂ©fĂ©rĂ© qu'ils
avaient introduit auprĂšs dâelle. Comme motif principal de leur som-
mation, ils dĂ©claraient que le nouveau lit nâavait pas Ă©tĂ© creusĂ© Ă
la profondeur que stipulait la loi. Les entrepreneurs intimidés à ce
moment critique par la démonstration municipale, allaient se reti-
rer, lorsque Telford et moi, sans nous laisser nullement Ă©mouvoir,
leur enjoignimes de poursuivre immĂ©diatement le travail. En mĂȘme
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 181
temps, nous faisions prévenir les conseillers municipaux et leur suite
que s'ils persistaient Ă rester sur place, ils couraient le risque de
sombrer avec leur steamer ; leur responsabilité demeurerait entiÚre.
Ils ne se le firent pas dire deux fois, mais rebroussĂšrent chemin
aprĂšs nous avoir signifiĂ© leur exploit. Trois jours plus tard, lâancien
chenal était comblé et la riviÚre Nen coulait à pleins bords dans son
nouveau litâ. »
Il est vrai que le nouveau lit n'avait pas Ă©lĂ© excavĂ© jusquâau ni-
veau des mortes eaux, stipulé dans la loi, mais les ingénieurs avaient
justement comptĂ© sur lâameublissement du radier, formĂ© de limon
sablonneux, et sur la vitesse du courant, pour lâapprofondissement
qui eut exigé, sans cela, en pure perte, beaucoup d'argent et de
temps. En effet, le courant lui-mĂȘme accomplit le travail naturel-
lement, sur le radier et sur les berges que lâon avait eu le soin de
ne pas empierrer.
Pendant les premiers mois, la pente Ă©tant faible, le courant agit
avec lenteur; câest seulement aprĂšs quâelle se fut accentuĂ©e, que
les progrĂšs devinrent trĂšs rapides. Au bout de six mois, le lit de la
dĂ©rivation Ă©tait abaissĂ© de 2,75 au-dessous des mortes eaux dâĂ©-
quinoxe, les rives s'étaient réguliÚrement corrodées, et la section
avait triplé par rapport au profil primitif. Les marées vives qui éle-
vaient les eaux de quelques pieds Ă peine, Ă Wisbeach et Ă Cross
Keys, montĂšrent dĂšs lors Ă un niveau tel, que les navires de fort
tirant eurent accĂšs dans le port, mĂȘme Ă marĂ©e basse, et la ville de
Wisbeach, grĂące Ă lâamĂ©lioration de ses recettes de navigation, fut
en mesure de payer sa quote-part des travaux. A
Lorsque lâĂ©missaire eut atteint ses dimensions dĂ©finitives, lâem-
pierrement des berges fut exécuté; le chenal de sortie fut également
dallĂ©. En 1837, Sir J. Rennie constatait quâĂ Cross Keys, et prapor-
tionnellement, à Wisbeach, les marées de vives eaux cotaient 6,09,
laissant un tirant de 2,75 aux mortes eaux.
Comme complément de cet important travail, et pour assurer la
conquĂȘte des lais de mer enclĂŽturĂ©s, un canal large et profond, North
Level drain, fut construit de Clowâs Cross Ă lâĂ©cluse Gunthorpe, en
1. Aulobiography, loc. cit.
182 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
remplacement de lâancien canal tortueux, Shire Drain; de telle
sorte quâen 1857, l'ingĂ©nieur Rennie pouvait hardiment annoncer
que 2 500 hectares de lais de mer étaient livrés à la culture, le dis-
trict ayant été absolument drainé, et la plus-value des terres ayant
doublé.
Cross Keys. â Un litige non moins grave que celui soulevĂ© par
la dĂ©rivation de la Nen Ă©clata au sujet de lâĂ©missaire, quand il fallut
construire un pont à Cross Keys, en plus de ceux déjà établis à laval
de l'Eau Brink Cut, et au Foss-Dyke Wash, sur la riviĂšre Welland,
dans le but de raccourcir la distance par voie de terre entre les
deux comtés de Lincoln et de Norfolk.
Dans la loi relative aux travaux de l'embouchure, une clause obli-
geait lâassociation du Bedford Level Ă construire, en mĂȘme temps
que le pont de Cross Keys, un autre pont, celui-ci tournant, qui
permit lâentrĂ©e et la sortie des navires en tout temps. Or, il eĂ»t Ă©tĂ©
imprudent, avant que les effets de la corrosion se fussent produits,
de fonder un pont tournant dans un sol aussi meuble. Malgré l'avis
formel de Sir John Rennie, les commissaires du Bedford Level, sous
la présidence de Lord Bentinck, crurent devoir passer outre. Le
pont fut construit, sans que les piles aient pu ĂȘtre assises solidement
à la profondeur voulue, de telle sorte que le courant exerçant plus
tard son plein effet, des enrochements Ă©normes devinrent indispen-
sables pour dĂ©fendre les piles. La passe sâobstrua tout de mĂȘme, et
un abaissement de 0",60 à 0,90 fut ainsi déterminé dans le niveau,
qui causa les plus sérieux préjudices à l'écoulement des eaux du
desséchement. Aussi dut-on recourir encore une fois au Parlement
pour obtenir une loi annexe (1848) qui mit Ă la charge des commis-
saires la réfection complÚte du pont tournant.
Le rapport de l'ingénieur R. Stephenson, à l'appui de cette der-
niÚre loi, signalait bien des améliorations de détail : quelques-unes
seulement furent exécutées, notamment le dragage du chenal jus-
qu'Ă Wisbeach et la construction dâĂ©pis, en vue de dĂ©barrasser la
passe des hauts-fonds qui lâobstruaient.
GrĂące Ă ces travaux dont la dĂ©pense totale sâĂ©leva Ă 750 000 fr.,
sur lesquels la municipalité de Wisbeach finit par payer 350 000 fr.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE, 133
pour sa quote-part, le nord Level à été complÚtement asséché ; les
eaux suivent la pente naturelle sur tous les points du district, pour
se décharger à la cote la plus basse de la riviÚre. Les collecteurs et
les drains intĂ©rieurs, installĂ©s dâaprĂšs les plans de l'ingĂ©nieur Tel-
ford, ont tous une pente de 0",006 par mĂštre, indispensable en vue
d'Ă©viter lâenvasement. La vitesse de 1 200 mĂštres par heure Ă Ă©tĂ©
reconnue suffisante pour dĂ©gager le chenal de la Nen, avec lâaide de
la marĂ©e et du flot des crues, mais Ă la condition de soigner lâen-
tretien et le faucardement des berges.
DĂ©penses des travaux du Great Level. â Les derniers travaux
que nous venons de détailler, exécutés aux termes de la loi de 1810,
intitulée Central Level River Acl, comportaient non seulement le
curage, la rectification et lâapprofondissement de la riviĂšre Nen,
mais encore l'amĂ©lioration des canaux et des autres cours dâeau du
district soumis au Des eCHemIEn ils ont représenté une a de
1750 000 fr.
D'autre part, les travaux entrepris dans le nord Level, en vertu
du Nen Act, ou loi de la Nen, en 1827, pour le desséchement des
Fens, ont comporté une dépense de 2556 500 fr., répartie comme
il suit :
QUOTE-PARTS
ECT
HECTARES. G6 contributions.
Fr.
Nord Level et Porsand. . . . . . EE Ru EN 19 500 1 200 000
Sud-Holland, y compris une partie des rat Sutton et
Tidd Saint-Mary LS SEP ET RTE RON 13 700 175 000
Sutton Saint-Edmumd . . . . . 2 300 56 500
Wisbeach Hundred, y compris les communes 4e Tidd >
Saint-Giles, Newton, Parson Drove et Leverington . 7 100 A
750 000
MANEGrREMBE BEBAAlE RE RTL EU AM AR UE 3 200 »
Moretonsdeama asser. nt ter er ne ur ui 1 200 »
ROLRURA VA TE RASi ET AU ee 47 000 2 556 500
L'ensemble des travaux de la Nen, complétés en 1831, aux termes
des lois de 1810 et de 1827, représentait ainsi une dépense «de
4 306 000 fr.
Depuis leur achĂšvement, 30 moulins Ă vent et les machines Ă
184 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
vapeur de Borough Fen, prĂšs de Thorney, devinrent dâun coup sans
emploi ; les frais de dessĂ©chement sâabaissĂšrent entre 19 et 15 fr.
par hectare et par an, et les terres reprises pour la culture des
céréales doublÚrent de valeur.
c) La baie du Wash.
En amont de Wisbeach, jusquâĂ Peterborough, aucune des amĂ©-
liorations projetĂ©es n'avait pu ĂȘtre entamĂ©e, malgrĂ© linitiative du
duc de Bedford ; mais le duc ne se tint pas pour battu, et il confia
de nouveau Ă Sir John Rennie la mission de reprendre le projet
d'ensemble du desséchement du centre Level, en y ajoutant le lac
Whittlesey et 22 000 hectares de Fens marécageux, situés entre la
Great Ouse et la Nen.
Rennie dĂ©posa son rapport en 1837 : il dĂ©montra quâen rĂ©gula-
risant la Men, en aval de Peterborough, de façon à y déverser les
eaux du lac Whittlesey par un canal spécial, et à rejeter celles du
drainage des plateaux par un canal de ceinture, dont lâĂ©cluse serait
située à Hermitage, dans la Great Ouse, non seulement on dessé-
cherait complĂštement le district, mais on faciliterait beaucoup la
navigation sur les deux riviĂšres. LâingĂ©nieur Robert Stephenson,
consulté sur ce projet par la commission du centre Level, émit un
avis favorable : mais, plus spécialement intéressée au desséchement
des basses terres, celle-ci obtint du Parlement de faire porter lâĂ©mis-
saire projetĂ© dans lâOuse Ă 16 kilomĂštres plus en aval, en doublant
la dépense, sans avantage marqué pour le desséchement.
Quoique le niveau des eaux basses eĂ»t baissĂ© de 1",83 dans lâOuse
Ă la suite de la coupure Eau Brink Cut, les sables avaient fini par
sâ'accumuler Ă son embouchure, en aval de Lynn. La navigation flu-
viale Ă©tait empĂȘchĂ©e par la barre, de telle sorte que les navires dâun
ĂŒrant moyen pouvaient seuls entrer Ă marĂ©e haute. Dâautre part, les
eaux des Level du centre et du sud sâĂ©coulaient trĂšs difficilement
Ă la mer.
Tandis que lâĂ©missaire de la Nen, dâaprĂšs le projet Rennie-Ste-
phenson, eut donné de 8",20 à 3,95 de chute, celui de l'Eau Brink
Cul, une fois les travaux de la commission (centre Level) exécutés,
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 185
devait faire perdre 0,60 de chute, par rapport Ă celle de 2",15
dĂ©jĂ rĂ©alisĂ©e pour lâOuse (voir $ a).
Ce fùcheux résultat, obtenu au prix de grands sacrifices, engagea
de nouveau un comité formé de Lord W. Bentinck, de Sir William
Foulkes et de quelques autres riches propriétaires, à consulter
l'ingénieur Rennie sur les moyens de remédier définitivement à la
situation du district entier des Fens.
Canal du delta. â Câest aprĂšs avoir procĂ©dĂ© pendant une annĂ©e
au nivellement de loute la contrée, y compris la baie du Wash et
les embouchures de lâOuse, de la Nen, du Welland et du Witham,
qui drainent 300 000 hectares de terrains en plaine, que Sir Jobn
Rennie remit son projet d'amĂ©lioration. Par ce projet, il sâengageait
Ă procurer une chute additionnelle de 2",15 pour lâOuse et de
0",65 pour les trois autres cours dâeau, moyennant l'Ă©tablissement
dâun canal Ă travers la baie du Wash. Ge plan, le mĂȘme que celui de
l'ingénieur Kinderley, proposé en 1751, eût permis, en outre, de
conquérir 45 000 à 60 000 hectares de terrains dans la baie, tout en
garantissant la rĂ©gularisation des cours dâeau, le dessĂ©chement des
terres en amont et la navigation, aussi bien fluviale que maritime.
Comme toutes les conceptions de cet ordre, lâidĂ©e de Rennie,
rendue publique par la distribution de son rapport, souleva les plus
graves objections. AprĂšs les avoir mĂŒrement examinĂ©es et victorieu-
sement combattues, en dĂ©voilant ses moyens de rĂ©alisation, lâĂ©minent
ingénieur dut toutefois reconnaßtre que si les propriétaires directe-
ment intéressés ne pouvaient pas se mettre d'accord sur le fond, il
Ă©tait inutile de faire appel au public pour fonder une compagnie.
«SI on avait pu réunir facilement les capitaux nécessaires, ajoute
Rennie, 1l eût été superflu de contester les principes de mon projet,
et de discuter les moyens pratiques d'exécution, comme aussi de
nier l'importance des résultats annoncés au point de vue national ;
mais prĂ©cisĂ©ment la grande difficultĂ© Ă©tait de concilier les intĂ©rĂȘts
dissidents, en vue de lâĆuvre commune, pour obtenir les ressources
indispensablesâ. »
1. Autobiography, loc. cit., p. 206.
186 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Le projet resta donc en suspens jusquâĂ ce que Lord George Ben-
tinck, nommé mernbre du Parlement en remplacement de son vncle,
Lord William, qui avait été appelé au gouvernement des Indes, eut
obtenu de le faire prendre en considération par la Chambre, mais
en le scindant en deux parties, lâune pour la Great Ouse et la Nen, et
l'autre pour le Welland et le Witham.
Compagnie du Norfolk. â Une compagnie se constitua finale-
ment pour exécuter la premiÚre partie du projet, comportant la re-
prise de 14000 hectares dâalluvions sur ia baie du Wash. Un Bill
fut sanctionnĂ© en 1845, suivi dâune loi, dite du Norfolk Estuary,
dans laquelle furent déterminées les clauses de l'association et de
lâentreprise. Parmi ces elauses se glissĂšrent, malheureusement pour
la compagnie, des obligations tellement onéreuses que les bénéfices
furent gravement compromis.
Ainsi, la compagnie Ă©tait obligĂ©e de prendre Ă sa charge lâentre-
tien du grand canal, qui aurait dĂč incomber Ă la navigation et aux
riverains ; de céder les terrains des Marshes, endigués à ses frais,
moyennant une part seulement de la plus-value ; dâindemniser les
riverains de lâOuse ; de verser une redevance de 5 p. 100 Ă la Cou-
ronne et une redevance aux cultes, etc. Aussi, les actionnaires
voyant diminuer les chances de bĂ©nĂ©fice de lâentreprise, voulurent-
ils attendre, avant de procéder aux travaux, que les intéressés dans
la navigation et le desséchement du district vinssent offrir leur con-
cours pécuniaire.
En effet, les propriétaires représentés par la Commission du centre
Level, quâune loi de 1846 avait instituĂ©e, et la municipalitĂ© de la ville
de Lynn, pour la navigation, consentirent chacun { million et demi
de francs, affectĂ©s Ă lâexĂ©cution du nouveau canal de lâOuse, moyen-
nant le concours de l'ingénieur Robert Stephenson. Une loi datée
de 1850 consacra cet arrangement.
Suivant lâusage en matiĂšre maritime, l'amirautĂ© dĂ©signa de son
cÎlé une commission composée de deux capitaines de la marine
royale, Veitch et Washington, pour faire un rapport, aprĂšs enquĂȘte
publique, sur les travaux projetés. Contrairement aux principes
généralement admis en hydraulique, cette commission crut devoir
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 187
recommander un tracé du canal en ligne courbe ; mais devant la
Chambre des Communes, cette conclusion, vivement combattue par
les plus éminents ingénieurs, fut repoussée. Le plan primitif fut dÚs
lors suivi, consistant Ă attaquer le canal sur 4 kilomĂštres en ligne
droite, Ă partir de Lynn.
Lâexcavation du lit sur plus de 3 kilomĂštres devait se pratiquer
dans les sables, par dragage, entre deux levées parallÚles cons-
truites en pierres brutes à la hauteur des mi-marées, et surmontées
de balises indiquant le tracé. Grùce au colmatage, les levées de-
vaient ĂȘtre exhaussĂ©es jusquâau niveau fixĂ©, en mĂȘme lemps que
lâendiguement des alluvions sur chaque rive consoliderait lâailuvion
à conquérir sur la baie.
Les travaux confiés aux entrepreneurs Peto furent solennellement
inaugurés sous la présidence de Sir William Foulkes, le 1° no-
vembre 1850. Le dragage, aprÚs avoir marché rapidement, fut sus-
pendu au moment oĂč les ingĂ©nieurs Rennie et Stephenson JugĂšrent
que le courant, puissamment aidé par les eaux de flux et de reflux,
suffirait pour achever lâapprofondissement. Comme ils donnaient
lâordre dâenlever les barrages, les propriĂ©taires alarmĂ©s leur firent
signifier dâavoir Ă les maintenir, tant que la profondeur fixĂ©e par
lâarticle de loi ne serait pas atteinte. CâĂ©lait la rĂ©pĂ©tition de ce qui
sâĂ©tait passĂ© pour la dĂ©rivation de la Nen. Cette fois, le procĂšs, plaidĂ©
devant le vice-chancelier Turner, fut perdu par les ingénieurs, et la
Cour dâappel confirma le jugement, le Conseil de l'AmirautĂ© ayant
décliné toute compétence. La compagnie fut ainsi forcée de solli-
citer devant le Parlement un nouveau Bill qui permit de continuer
les travaux dâaprĂšs le systĂšme dĂ©jĂ appliquĂ©, mais Ă la condition que
le chenal eût finalement les dimensions prescrites.
Deux années avaient été perdues ; des sommes considérables
furent gaspillées en frais de procédure, avant que les eaux de l'Ouse
pussent sâĂ©couler dans leur nouveau lit. DĂšs lors, la digue destinĂ©e
Ă combler lâancien lit fut commencĂ©e Ă lâamont, et le courant aug-
mentant d'intensitĂ©, lâaffouillement du chenal se produisit au bout
de quelques mois, à une profondeur plus grande que celle stipulée
dans la loi.
Les résultats de cette dérivation furent remarquables. Le niveau
188 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
des hautes mers, dans le port de Lynn, fut amenĂ© de 5,45 Ă
6%,10 ; celui des mortes eaux de 4",25 Ă 4",88 ; tandis que dans
le canal mĂȘme, lâĂ©tiage Ă©tait maintenu entre 2",75 et 3",55. Il
sâensuivit que les plus grands cĂŽtiers purent entrer et sortir avec
leur plein tonnage, par toutes les marées et en tout temps. Le
nombre de pilotes et les droits de péage furent réduits sensible-
ment ; l'accroissement du trafic permit, à bref délai, à la ville de
Lynn, de payer sa quote-part à la compagnie pour les travaux exé-
cutés.
Quant aux propriĂ©taires des terres riveraines, lâabaissement de
1,82, Ă la cote des basses-eaux, venant sâajouter Ă celui rĂ©alisĂ©
par l'Eau Brink Cut, représentait 3,35 au total. Aussi bien que
pour le centre Level tout entier, il permit de renoncer Ă l'emploi
des moulins Ă vent et des machines Ă vapeur pour lâĂ©puisement des
eaux aux niveaux les plus bas.
Les Polders. â La compagnie du delta de Norfolk, dont les
actions sont restées pendant si longtemps sans rapporter aucun
intĂ©rĂȘt, aurait dĂč trouver dans lâendiguement des 14000 hectares
de lais de mer, concédés par la Couronne, la rémunération des
capitaux engagés ; mais les opérations des polders occasionnÚrent,
dĂšs le dĂ©but, de graves dĂ©boires, Ă cause de la prĂ©cipitation mise Ă
enclĂŽturer. Ă partir de 1867 seulement, la compagnie, se confor-
mant aux instructions de Rennie, endiguait 400 hectares, au prix
de 998 fr. par hectare, et réalisait, à raison de 2500 fr. par hectare
eñdiguĂ©, une somme dâun million de francs ; Soit pour une dĂ©pense
de 371 200 fr. un bĂ©nĂ©fice net de 628 800 fr. LâannĂ©e suivante, le
Prince de Galles se rendait acquéreur de 250 hectares endigués,
moyennant paiement de la moitié de la plus-value.
Sur les procĂ©dĂ©s Ă suivre pour la conquĂȘte des lais de mer par
colmatage, Sir John Rennie nous a laissé dans ses mémoires les
instructions précieuses que lui suggérÚrent la pratique de son pÚre
et sa propre expĂ©rience pendant prĂšs dâun siĂšcleâ.
« Je ne me suis pas départi, dit-il, du systÚme qui consiste à agir
1. Aulobiography, loc. cil., p. 214.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 189
d'accord avec la nature, el jamais contre elle ; dans ce dernier cas,
on est toujours battu.
« J'avais appris, aprÚs une longue série d'essais, que les matiÚres
sédimentaires tenues en suspension dans les eaux de la baie (Grand
Wash) pouvaient ĂȘtre dĂ©terminĂ©es quantitativement ; que ces ma-
tiĂšres Ă©taient transportables dâun lieu Ă un autre suivant les vents et
les courants prédominants dans le golfe, et qu'elles se déposaient
seulement dans des circonstances favorables, telles que les remous,
aidés par les brises de large, et les eaux dormantes, abritées derriÚre
les contre-courants.
« Le but principal que j'ai poursuivi, lorsque les eaux douces et
les eaux de marée se sont trouvées réunies dans le nouveau lit
creusé pour l'embouchure de la riviÚre Ouse, en aval, au milieu du
Wash, a été de faciliter les atterrissements par le dépÎt de ma-
tiĂšres tenues en suspension dans les eaux. Ce but ne peut ĂȘtre atteint
quâĂ la condition de ralentir et dâarrĂȘter la marche du flot, et aussi
du jusant, de façon Ă ce que lâatterrissement se produise sur les
points oĂč il importe dâexhausser le sol au-dessus de la limite de la
laisse des hautes mers, en mortes eaux. AussitĂŽt, en effet, que ce
niveau est atteint, l'herbe peut pousser, et la surface se transforme
rapidement en marsh vert (herbe).
« Le procédé est des plus simples ; quand le dépÎt par colmatage
sâest Ă©levĂ© de quelques pieds au-dessus du niveau des eaux basses
des marées, une espÚce de végétation clairsemée couvre la surface
des alluvions sur certains points, puis sâĂ©tend jusquâĂ couvrir le
tout, au fur et Ă mesure de lâexhaussement du sol; la criste marine
(Salicornia herbucea) et le bacile (perce-pierre, passe-pierre, du
genre ombellifĂšre) font leur apparition ; puis, le. sol continuant Ă
s'Ă©lever, ils disparaissent Ă leur tour pour faire place Ă l'herbe
marine (Glyceria marilima) qui revĂȘt dâun tapis lâentiĂšre surface,
admirablement nivelĂ©e. Le lais est en herbu, dĂ©jĂ prĂȘt pour le pĂątu-
rage du bétail.
« à partir de ce moment, le colmatage est trÚs lent. Sur les cÎtes
de lâAngleterre, il dĂ©passe Ă peine la laisse des hautes mers en
mortes eaux, sauf dans les endroits oĂč le sable emportĂ© par la vio-
lence des vents forme des dunes, véritables digues, qui, en Hol-
190 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
lande, atteignent jusquâĂ 9 mĂštres de hauteur. Dans la baie du
Wash, les Marshes ne résultent que du dépÎt graduel des alluvions.
« La nature abandonnĂ©e Ă elle-mĂȘme accomplit le travail avec une
orande lenteur, mais aussi avec une rare exactitude. Il sâagit de
l'aider en se conformant Ă ses lois ; câest pourquoi 1l faut Ă©viter les
travaux Ă©normes et dispendieux qui consistent Ă entraver violem-
ment et subitement les courants de la mer pour les rejeter ailleurs ;
ce que lâon gagne dâun cĂŽtĂ©, on le perd de lâautre.
« GrĂące Ă une sĂ©rie dâobstacles lĂ©gers, tels que des fascinages
touffus ou en buissons, ou bien des coffres de fascines, installĂ©s Ă
0,30 ou 0,40 au-dessus du niveau des sables, que lâon espace
convenablement, sans continuitĂ©, mais, au contraire, de maniĂšre Ă
ce que les extrémités ne coïncident pas, on crée des chicanes qui
gĂȘnent les courants sans les obstruer et concourent Ă la stagnation
du mouvement des eaux. Lorsque le dépÎt atteint le niveau supé-
rieur des fascinages ou des Ă©pis, on en dispose dâautres Ă un niveau
un peu plus Ă©levĂ©, aux mĂȘmes endroits, ou ailleurs, selon les cir-
constances.
«Si lâon veut colmater un espace dĂ©terminĂ©, il est prĂ©fĂ©rable de
commencer en amont et de sâavancer vers lâaval ; on y gagne Ă exĂ©-
cuter des ouvrages moindres, Ă diminuer la hauteur du colmatage ;
lâeau refoulĂ©e par la marĂ©e Ă lâarriĂšre contient une plus grande masse
de matiĂšres sĂ©dimentaires ; de telle sorte quâau fur et Ă mesure de
lâatterrissement de la partie supĂ©rieure, celui de la partie infĂ©rieure
augmente plus rapidement.
⏠Dans lâexĂ©cution de ces travaux, il faut avoir soin, partout oĂč
lâon distingue une tendance au creusement dâun chenal sous lâac-
ĂŒon dâun courant, de le modĂ©rer graduellement en amont, pour
que la masse dâeau diminue peu Ă peu, jusquâĂ ce que le chenal se
comble.
« Lorsque lâespace dĂ©terminĂ© a Ă©tĂ© amenĂ© Ă lâĂ©tat de marsh vert,
naturellement ou artificiellement, sâil est assez vasle pour couvrir
la dĂ©pense, on devra lâenclĂŽturer complĂštement par une digue qui
empĂȘche le retour agressif de la mer. On ne court aucun risque de
se tromper en évaluant, rÚgle générale, la plus-value du terrain au
double des frais dâendiguement,
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. â191
« Quand il sâagit dâun grand delta oĂč lâon compte racheter plu-
sieurs milliers d'hectares, comme dans le Wash, la question du
meilleur mode d'opération est aussi grave au point de vue de Par-
gent que du temps.
« On devrait rĂ©duire lâĂ©tendue des digues maĂŻtresses, autant que
cela est praticable, en construisant la premiĂšre en aval, si la situa-
tion sây prĂȘte, et en ne la continuant qu'autant que les terrains en
amont montrent une tendance au colmatage. Les digues intérieures
ne devraient ĂȘtre Ă©tablies simultanĂ©ment que pour concourir au
meilleur effet de lâouvrage principal. Ainsi, quand un espace suffi-
sant, en amont de la digue maĂźtresse, a Ă©tĂ© reconnu propre Ă lâen-
clĂŽture, on devra continuer Ă maintenir cette digue dans un Ă©tat
convenable d'avancement, pour circonscrire lâespace, mais Ă lâaide
seulement de banqueltes moins coûteuses. Autrement, chaque en-
clÎture séparée devient une digue maßtresse et la dépense totale
sâaccroit dĂ©mesurĂ©ment.
« Les circonstances locales dĂ©termineront la meilleure marche Ă
suivre, en ce qui concerne les digues principales, exposées aux coups
furieux de la mer, comme aussi lâenclĂŽture des parcelles en une
ou plusieurs fois. Il vaut mieux restreindre l'opération à -150 on
200 hectares, et fermer le polder Ă lâĂ©poque des mortes eaux les
plus basses, à cause de la facilité plus grande dans le travail.
QIl est possible assurĂ©ment, dâaprĂšs le systĂšme hollandais, dâen-
clĂŽturer des surfaces bien plus vastes ; mais alors il faut laisser les
vides ouverts pendant plusieurs jours, les protéger par des musoirs
en pierres, ou par des clayonnages et des fascinages, au pied et sur
les bords du remblai, afin dâen dĂ©tourner les courants. Ces vides
sont ensuite comblés au moyen de pierres, d'argile, de fascines, etc.
Si, par malheur, une brĂšche vient Ă se produire pendant les terras-
sements, oĂč au moment de la fermeture, la masse dâeau dans lâen-
clÎture est si forte que la violence du courant extérieur augmentant
en proportion entraßne tout sur son passage ; le sol est affouillé
dans cette direction et recouvert ailleurs de sable inerte; enfin, une
difficulté imprévue se présente, celle de décharger les eaux accu-
mulĂ©es dans lâenclĂŽture.
« DâaprĂšs le systĂšme hollandais, on a effectivement besoin de
LOS: ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
moins de digues, mais la dépense par mÚtre courant augmente ;
aussi n'est-il recommandable que si la longueur des digues est pe-
tile relativement à la largeur des terrains à enclÎturer. »
Rennie estimait que sur plusieurs milliers d'hectares, déjà mûrs
pour lâenclĂŽture, les actionnaires du Norfolk estuary trouveraient
Ă rentrer dans leurs fonds, intĂ©rĂȘts compris. Si la compagnie se fĂ»t
opposée en temps utile aux clauses trop restrictives de la loi de
1890 ; si elle eĂ»t frappĂ© dâune taxe double les intĂ©ressĂ©s, et suivi
tout d'abord le mode pratique dâendiguement conseillĂ© en vue du
colmatage des alluvions du Wash, elle aurait indubitablement réa-
lisĂ© de gros profitsâ.
d) Le sud Level.
Le sud Level, dâune superficie de 48 500 hectares, sâĂ©tend au midi
de lâancienne RiviĂšre de Bedford, qui joint Earith en droite ligne
avec lâĂ©cluse de Saller's lode, sur une longueur de 34 kilomĂštres.
Le dessĂ©chement de cette surface sâopĂšre Ă lâaide de machines Ă
vapeur dont le détail, avec les surfaces drainées et les émissaires,
figure dans le tableau ci-aprĂšs. Il nây a plus de moulins Ă vent dans
ce district.
Indépendamment des surfaces désignées dans le tableau, sur les-
quelles 10 500 hectares sont directement taxés pour les travaux de
desséchement, on compte environ 1 600 hectares de terrains for-
mant lisiÚre, taxés pour des travaux extérieurs et pour l'entretien
de 48 kilomĂštres de canaux collecteurs.
Le sol du district est composĂ© de tourbe, dâalluvions sableuses et,
çà et là , des marnes gélives, tandis que le sous-sol est le plus sou-
vent du sable stĂ©rile. Partout oĂč lâon a pu amender le terrain avec
de l'argile, les résultats ont été satisfaisants pour la culture. Le dé-
pĂŽt dâalluvion argileuse qui traverse le pays de Littleport Ă Ely,
tourne Ă lâouest par Thetford, Stretham et Wilburton pour regagner
Ely par Haddenham, Witcham et Witchford, entoure un bassin de
terre noire, le Grunty Fen, de plus de 500 hectares, servant de
1. Aulobiography, loc. cit., p. 218.
LES DESSĂCHEMENTS EN
ANGLETERRE,
193
pùturage communal, et par conséquent abandonné sans clÎtures, ni
drainage.
Sur les terres fortes, entre Mepal et Ely, il y a d'excellents pĂątu-
rages, mais surtout de bonnes terres arables, âŹ
du blĂ©, de l'orge et des haricots ; les turneps nây viennent pas plus
que la navette, et lâavoine nây est cultivĂ©e qu'accidentellement.
lÎturées, produisant
Situation du desséchement dans le « sud Level » (1860).
MACHINES Ă VAPEUR.
NOUS
4 Emolace-
des Fens ou districts. Nombre )
ment,
. Cottenham, id. .
3. HaddenhĂąm . ... .
. Stretham
5. Thetford
. Burwell
. Swaffham
. Mildle
. Millenhall.
. Lakenheath , . .
2, leltwell Brandon
3. Southery
Nouvelle
BeĂŻford.
Canal
. Littleport et Down-
dix mille.
. Waterbeach . . . .
. Sohamsmere . . . .
SURFACES
drainées.
ĂMIS-
SAIRES,
Ancienne |
Ouse. f
Ouse. {
idher |
id.
Cam
et Ouse.
Cam.
Lark.
Brandon.
Lark,
Lark et
f
|
Brandon,
id.
Ouse.
Ouse,.
SOL DRAINĂ.
A â â
Nature géologique.
geolugiqu Nature
For
Surface. Sous-sol. physique.
LĂ©ger,
fertile.
Fort,
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Arzile.
Arcile
tenace,
id.
Marais
léger,
Gravier.
Gravier.
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!
l
{
l
id.
id.
Alluvions. » | su
f
in
Marais |
Ă©pais. f
Marais
léger,
Argile Marais
et marais.|et argile.
Argil
ae; te |
Moyen
id,
drainé.
»
Marais. Arsile. »
Terre noire s
ĂCART NE UTS.
marais, f
Marais | «
Ă©pais Sable.
Draivé.
id;
Mal
drainé.
Tourbe. rgile. »
id.
Bien
drainé.
Dans les terres basses,
Ă travers la tourbe
le drainage se borne à des fossés creusés
quant au mode de culture, 1l dépend de la
préparation du sol, suivant qu'il à été relourné avec le sous-sol,
amendé avec de l'argile et fumé plus ou moins abondamment avec
des poudres dâos, du guano, des tourteaux, ete. Lâassolement le plus
ANN. SCIENCE AGRON.
0) oi
13
194 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
frĂ©quent sâĂ©tend sur cinq annĂ©es, Ă savoir : 1° navette ; 2° avoine ;
9° froment ; 4° haricots ou fourrages ; 5° froment.
Les moutons de la race Leicester parquent aux environs dâEly et
de Littleport. Les chevaux et le bétail trouvent une nourriture excel-
lente dans la bande de terrain d'inondation (Hundred feet Washes),
réservée entre les deux riviÚres Bedford. Cette bande de 34 kilo-
mĂštres de longueur sur 1 kilomĂštre de largeur en moyenne, des-
tinée à emmagasiner, le cas échéant, les eaux d'inondation des deux
riviÚres qui séparent le Level du midi de celui du centre, produit
un fourrage de premiÚre qualité, une précieuse ressource pour les
Ă©leveurs et les fermiers des environs.
e) Le centre Level.
Le centre Level, situĂ© au nord de lâancienne riviĂšre Bedford,
embrasse 60 000 hectares, répartis en trois grandes divisions. Le
tableau suivant indique ces divisions, ainsi que les machines Ă va-
peur employées au desséchement, mais il faut compter, en outre,
quelques moulins Ă vent et des machines Ă vapeur appartenant Ă des
propriétaires.
Situation du desséchement dans le « centre Level » (1860).
MACHINES A VAPEUR. : SOL DRAINĂ.
NOMS mm ââ | Surfaces ĂMIS- â 0 ©
fu CH Ănpiace Nature gĂ©ologique. Vars
des Fens ou districts. Nombre. ue drainĂ©es. | SAIRES. | â
vapeur. ee Surface. | Sous-sol. physique.
à eut De dé Sie Mode NOR RME | CRC Ce PRE Re
Hectares.
Ancienne Tourbe | Argile et| Bonne
1. Manea et Welney. . : 60 L nel 3500 Ouse. légÚre. | gravier. fertile,
: Counter F Tourbe | Gault et TrĂšs
2. Sutton et Mepal. . . 1 80 lac ai 4200 id. Ă©paisse. | gravier. | fertile.
3. March. â 1er district ATEN | |
on Binnamoor . . 1 30 Nen. 1200 Nen. el Argile. id,
â4edistrict, ou West 3
en 2 el TeM: 40 IS Nen. ÂŁl 4000 PR EE } id. id.
Le drainage artificiel est peu pratiqué ; il est considéré comme
inutile dans la plupart des terres. La loi de 1844 pour lâamĂ©lio-
ralion du desséchement et de la navigation du centre Level a per-
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 195
mis, grùce aux travaux dont nous avons rendu compte, de créer un
: nouvel Ă©missaire plus au nord, dans le Wash, et dâabaisser le niveau
de lâOuse ; ces travaux ont mis fin Ă l'Ă©puisement des plus grands
districts par les moulins Ă vent et les machines, en procurant au plan
dâeau gĂ©nĂ©ral un Ă©coulement naturel jusquâen aval de Lynn.
Le sol est constitué, en plus grande partie, par de la tourbe re-
posant sur de lâargile bleue. Dans les terres hautes, depuis Whit-
ilesey, on retrouve de l'argile compacte qui, alternant avec le gra-
vier, sâĂ©tend par March jusqu'Ă Chatteris; on y cultive des turneps
et de la navette, puis de lâavoine ; le blĂ© vient pendant deux annĂ©es
consécutives, avec une récolte intercalaire de haricots. Sur cette
partie argileuse du Level, le drainage tubulaire a été appliqué en
grand.
Dans les terres basses, lâargile se rencontre sur bien des points
Ă 0%,60 ou 0,80 de profondeur, parfois Ă une profondeur de 2",50.
Les charrues sous-soleuses sont fort employées pour défoncer le
turf tourbeux et ramener l'argile en morceaux (clunch) qui se déli-
tent Ă lâair par la gelĂ©e et dĂ©cuplent la valeur des terrains par leur
mélange intime.
Le froment est la principale récolte des terres noires, amen-
dées par l'argile ; il alterne avec des fÚves, du trÚfle, du ray-grass,
la navette et les turneps. Dans la commune de March, comprenant
5 600 hectares de Fens, et dans Chalteris Fen (4000 hectares),
lâassolement le plus ordinaire est le suivant : 1° navette ; 2° avoine ;
3° blé ; 4° fourrage ; 5° blé. Onse sert, comme engrais, de tourteaux
et de poudre dâos ; la moutarde est enfouie en vert.
Le Holme Fen (2000 hectares), prĂšs de Whittlesey Mere, jadis
un marais, a été transformé par l'argile en un terrain à blé de pre-
miÚre qualité.
Middlemoor Fen (1 000 hectares), dans le voisinage immédiat de
Holme Fen, quâArthur Young prĂ©sentait au commencement de ce
siÚcle comme «un désert marécageux », aprÚs avoir élé amendé
nombre de fois par l'argile, est aujourd'hui en pleine culture de
cĂ©rĂ©ales, el dâune rare fertilitĂ©.
Whilllesey Mere, jadis un Ă©tang poissonneux, le rendez-vous des
excursionnistes, a Ă©tĂ© dessĂ©chĂ© en grande partie; de mĂȘme que
Hate,
196 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Ramsey Mere (296 hectares) et Ugg Mere. Ces trois Ă©tangs sont
couverts d'exploitations de premier ordre.
Les moulins qui épuisent encore les eaux de quelques propriétés
particuliÚres sont desservis par des usiniers qui ne reçoivent pen-
dant lâĂ©tĂ© que la rĂ©munĂ©ration affĂ©rente aux journĂ©es de travail
effectif; mais en hiver, ils Ă©puisent tant que le vent le permet, et ils
sont payés réguliÚrement à la semaine. Sauf dans les saisons trÚs
humides, le centre Level est suffisamment desséché par les machines
Ă vapeur des grands districts et les moulins des particuliers.
f) Le nord Level.
Le nord Level, y compris Porsand, occupe un territoire de
19000 hectares environ, que limitent les digues du canal More-
tons Leam et le Welland. Sur cette surface, 15 000 hectares seu-
lement paient la redevance du desséchement. Les communaux sui-
vants : Great Borough Fen (2 000 hectares desséchés et enclÎturés
en vertu dâune loi spĂ©ciale de Georges I), Flag Fen et Sulton-
Saint-Edmund Fen (ensemble 1 500 hectares), ne sont pas soumis
Ă la taxe.
Les terres frappées d'impÎt se partagent en cinq districts dont les
eaux sont dĂ©rivĂ©es par le Old et le New South Eau, Ă Clowâs Cross,
et dirigĂ©es de Clowâs Cross, par le canal nord Level, dans la riviĂšre
Nen, jusquâĂ lâĂ©cluse Gunthorpe, en aval de Wisbeach. Si l'entente
avait pu se produire en temps ulle entre les nombreux intéressés
de la région, le canal nord Level, dont la dépense représente deux
millions et demi de francs, aurait pu ĂȘtre remplacĂ© par la canalisa-
tion, depuis Peterborough, de la Nen qui coule parallĂšlement Ă une
hauteur de 2,50 Ă 2",75 au-dessus du niveau des eaux du canal.
Quoi quâil en soit, le nord Level sâest rendu absolument indĂ©pendant
de la Nen, en amont de Wisbeach, pour le desséchement.
Le drainage des terres y est complet. Jusqu'à ce que ce résultat
eut Ă©tĂ© obtenu, la pratique de lâĂ©cobuage, importĂ©e de France vers
le milieu du xvn° siÚcle par les réfugiés protestants que les ingé-
nieurs hollandais avaient amenĂ©s avec eux, nâavail pas peu contribuĂ©
à améliorer le sol du nord Level.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 197
A l'exception des terres argilo-sableuses de Thorley et des allu-
vions de Porsand, le sol du nord Level consiste principalement en
tourbe, sur une Ă©paisseur qui varie de 0,30 Ă 0",45. On l'amende
partout avec de lâargile, depuis que lâĂ©cobuage a cessĂ©.
Lâassolement est le mĂȘme que dans les deux autres districts. Sur
le territoire de Thorney Lordship (7 000 hectares), le drainage par
Luyaux Ă donnĂ© dâexcellents rĂ©sultats, en permettant de rendre Ă la
culture arable de grands espaces consacrés jusqu'alors aux pùtu-
rages el d'utiliser les fossés. D'ailleurs, sous le rapport du drainage
et des procédés d'exploitation, le nord Level occupe le premier rang.
2. â RĂ©gularisation et assainissement de la Nen.
Câest seulement aprĂšs que les travaux du chenal de la Nen Ă la
mer eurent été achevés, le pont Sutton Bridge ayant été supprimé,
que les propriétaires de la vallée en amont de Peterborough com-
mencĂšrent Ă sâagiter pour obtenir l'amĂ©lioration du dessĂ©chement
des terres riveraines et la régularisation de la riviÚre en aval.
Comme il ne pouvait plus compter sur le nord Level qui s'Ă©tait
rendu indépendant, le comité des propriétaires, y compris le comte
Fitz William, Lord Overstone, Lord Lilford, duc de Bucclengh, mar-
quis de Northamplon, etc., se retourna vers la ville de Wisbeach,
intéressée à l'amélioration de la navigation et du drainage de ses
communaux, vers les districts de Waldersey et Redmore (2 800 hec-
(ares), intĂ©ressĂ©s Ă la suppression des machines dâĂ©puisement, enfin,
vers les propriĂ©taires du Moretonâs Wash (1 500 hectares), soumis
aux inondations périodiques de la riviÚre, entre Peterborough et
Guybirn, pour lĂącher dâobtenir leur concours pĂ©cuniaire, en vue de
la réalisation du projet de l'ingénieur Rendel. AprÚs une série de
meelings tenus jusquâen 1851, sous la prĂ©sidence du duc de Bed-
ford, et une enquĂȘte prĂ©liminaire de lâAmirautĂ©, le comitĂ© obtint du
Parlement quâune commission spĂ©ciale fĂŒt dĂ©signĂ©e pour lâamĂ©lio-
ration de la Nen et de sa navigation (Nen Valley Act, 1852)".
L'importance de la loi de 1852, la gravité des conflits soulevés.
1. Ă. Clarke. On trunk drainage (Journ. Roy. Agric. Soc., 1831, vol. XV).
198 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
par son application, et le grand intĂ©rĂȘt des travaux confiĂ©s Ă la
commission de la Nen, ne peuvent ĂȘtre saisis quâen entrant dans les
détails de cette vaste entreprise, désignée par les Anglais sous le
nom de Trunk drainage, ou drainage artériel.
La riviĂšre Nen a deux sources : lâune au nord et lâautre au sud
de Daventry, qui se rejoignent Ă Weedon Beck et, 12 kilomĂštres
plus loin, traversent Northampton. Depuis cette ville oĂč elle devient
navigable, la Nen est Ă une distance de 96 kilomĂštres en ligne droite
de la baie du Wash; mais à cause des sinuosités de son chenal,
elle est effectivement Ă©loignĂ©e de 160 kilomĂštres de la mer. JusquâĂ
Peterborough, elle coule dâabord dans une direction nord-est vers
Higham Ferrars ; puis, passé Thrapstone et Oundle, elle se dirige
vers le nord Ă Wanford ; de lĂ vers lâest, Ă Peterborough, aprĂšs
avoir reçu à Wellingborough les eaux de lIse et, plus en aval, celles
des ruisseaux Harper et Willow, sans compter nombre de petits
ruisseaux peu importants.
Sauf deux courbes décrites par le chenal à Guyhirn et à Wis-
beach, la Nen, dont les circuits en aval Ă©taient mulliples, gagne la
mer en ligne droite sur 48 kilomÚtres ; la dérivation de 9 kilomÚtres,
en aval de Sutton Bridge, lui sert dâĂ©missaire.
Le bassin supĂ©rieur de la Nen, jusquâĂ Peterborough, embrasse
165 000 hectares, dont 6 500 étaient périodiquement submergés
avant lâexĂ©cution des travaux. La pente rĂ©duite Ă 0",56 par kilo-
mĂštre, Ă Peterborough, câest-Ă -dire Ă une distance de plus de 90 ki-
lomĂštres de la mer, abaissait tellement le plan dâeau que les marĂ©es
de vives eaux montaient Ă l'embouchure de 1",50 plus haut quâĂ
lâĂ©tiage, dans Peterborough ; mais Ă partir de cette ville oĂč affluent
les eaux Ă volume variable de la vallĂ©e supĂ©rieure jusquâĂ l'em-
bouchure, la diffĂ©rence de niveau entre lâĂ©tiage et la laisse des
mortes eaux nâĂ©tait que de 0,11 par kilomĂštre. La pente qui en
résultait était trÚs irréguliÚrement répartie ; toutefois, en enlevant
les obstacles sur le parcours, et notamment dans la traversée de la
ville de Wisbeach, elle pouvait ĂȘtre ramenĂ©e normalement Ă 0",06
par kilomÚtre, ce qui eut abaissé le niveau, au pont de Wisbeach, de
1,72; Ă Guyhirn, de 2",94; et Ă Northey Gravel (9 kilomĂštres en
aval de Peterborough), de 3",25.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 199
Dans ces conditions, rien ne pouvait ĂȘtre tentĂ© pour lâamĂ©liora-
tion de la vallĂ©e supĂ©rieure de la Nen, avant dâavoir rectifiĂ© et amĂ©-
lioré le cours en aval de Peterborough. Aussi le programme des
travaux visés par la loi de 1852 comportait-il, en premier lieu,
lâapprofondissement de 0",60 de la riviĂšre jusquâĂ Wisbeach, pour
assurer au hit une déclivité réguliÚre de 0",11 par kilomÚtre ; en
second lieu, lâagrandissement de la section transversale, de façon Ă
donner 10 mĂštres de largeur au radier, avec des berges de 2 sur 1
et une banquette de 12 mĂštres entre le bord de la berge Ă lâĂ©tiage
et la digue surĂ©levĂ©e ; en troisiĂšme lieu, la construction dâun nou-
veau pont Ă lâĂ©cluse de Dog Doublet, situĂ©e entre Guyhirn et Peter-
borough ; en quatriÚme lieu, l'endiguement sur la rive méridionale
du terrain des Washes (1450 hectares), réservé par Vermuyden
comme lit d'inondation; enfin, lâappropriation du canal Morelonâs
Leum au desséchement de ces Washes par une écluse à établir prÚs
de Guyhirn.
Pour l'exĂ©cution du programme, dont lâensemble comprend trois
sections : la premiĂšre et la seconde entre Peterborough et Nor-
thampton, et la troisiĂšme, entre Peterborough et Wisbeach, la loi
autorisait la perception dâune laxe de 95 fr. par hectare, et pour
l'amĂ©nagement des canaux intĂ©rieurs, dâune taxe additionnelle de
DIE.
Le programme sâest complĂ©tĂ© depuis, par la construction dâune
galerie voĂŒtĂ©e, destinĂ©e Ă conduire les eaux de riviĂšre en amont,
Ă travers la nouvelle digue, pour les besoins des Washes dont le
desséchement était décidé. Le Level du nord et celui du midi, de
chaque cĂŽtĂ© de la Nen, dĂ©rivaient en effet des quantitĂ©s dâeau im-
portantes, en Ă©tĂ©, pour lâabreuvage des bestiaux et l'irrigation des
terres. La question des eaux douces acquérait dÚs lors une certaine
gravité, par le fait que les travaux de régularisation, en facilitant le
reflux de la marée à Peterborough, pouvaient rendre saumùtres les
eaux jusqu'alors douces. Le rapport de l'ingénieur Stephenson, daté
de 1848, avait dĂ©montrĂ©, il est vrai, que lâeffet des marĂ©es, par le
creusement du chenal, se manifesterait sur le niveau des eaux et
non pas sur les eaux mĂȘmes. Sir John Rennie avait, de son cĂŽtĂ©,
constatĂ© quâĂ la distance de 28 kilomĂštres en amont du pont de
200 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Lynn, l'eau conduite par un aqueduc Ă travers la digue, pour les
besoins du bétail des Fens, était parfaitement douce. Or, les prises
dâeau sur la Nen Ă©taient de quelques kilomĂštres encore plus Ă©loi-
gnĂ©es de la mer que dans le cas de lâaqueduc de Lynn. Mais, câest
dans la ville de Wisbeach que se trouvaient les résistances les plus
sĂ©rieuses pour assurer le service indispensable de lâeau douce; et
câest pour les surmonter quâil fut rĂ©solu de creuser et d'agrandir le
chenal tortueux, dans la traversée de la ville, plutÎt que de dériver
la riviÚre par un raccourci, longeant un des cÎtés de la ville. La
municipalitĂ© de Wisbeach s'Ă©tait dâailleurs fortement opposĂ©e au
raccourci qui lâeĂ»t privĂ©e des bĂ©nĂ©fices du port. Il fut donc dĂ©cidĂ©
d'enlever le pont en pierre dans lâintĂ©rieur de la ville, et de le rem-
placer par une seule arche de 26 mÚtres de portée, moyennant une
dépense de 200 000 fr., de démolir les maisons en avancement sur
le coude de la riviĂšre, d'Ă©largir le chenal en reculant les magasins,
les berges et les appareils de navigation, d'approfondir le seuil en
enlsvant les matériaux et les pierres amoncelés pour attemdre le lit
mobile, et de construire des quais sur pilotis. La municipalité de
Wisbeach, moyennant la perception dâune taxe de 0 fr. 05 c. par
tonne sur la navigation, accepta de verser la somme nĂ©cessaire dâun
million de francs quâexigeait lexĂ©cution de ces travaux.
Deux. districts furent appelés à bénéficier immédiatement des
améliorations de Wisbeach.
Le district Great and Lille Waldersea quâadministrait une com-
mission, fondĂ©e sous les rĂšgnes de Jacques Iâ et de Georges IV,
avait recours, pour le desséchement de 2 000 hectares, à une ma-
chine Ă vapeur dont la pompe Ă©levait 63 mĂštres cubes dâeau par
minute, Ă une hauteur variant entre 2",45 et 4",80, selon le niveau
de la marée dans la Nen, moyennant une dépense annuelle de com-
bustible et d'entretien de 7 500 fr. Par suite de la régularisation de
Wisbeach, le district de Waldersea possédait désormais une chute
naturelle de 1°,27 le dispensant de tout service de machine dâĂ©pui-
sement; les commissaires acceplÚrent en conséquence de contribuer
pour un montant de 137 000 fr. à la dépense totale.
Le district de Redmore (730 hectares), desséché à deux niveaux
par des moulins Ă vent, Ă raison dâune taxe de 10 fr. par hectare,
LES DESSĂCHEMNENTS EN ANGLETERRE. 201
payée aux commissaires de drainage, se trouvant dÚs lors à un ni-
veau de un mÚtre plus élevé que le Waldersea, par rapport au plan
dâeau de la Nen, les commissaires consentirent, en faveur du dessĂ©-
chement par gravilalion, Ă verser une taxe de 1 fr. 50 c. par hectare,
pendant la période des travaux, et subséquemment, de 6 fr. 20 c.
De Peterborough Ă Wisbeach (3° section). â Le devis du pro-
gramme des travaux de la troisiĂšme section, Peterborough Ă Wis-
beach, avait été chiffré comme dépenses (travaux, terrains, bùli-
ments et moitié des frais pour la loi du Parlement), à 3 750 000 fr.,
et comme contributions à 1 818 300 fr., réparties de la maniÚre
suivante :
Contributhontdetaivillerdenmisheach em UT 1 000 000 fr.
Contribution de la ville de Peterborough , . . . . . . . . . . 25 000
Contributiontdumord Lever SAONE ENORME 112 500
Contribution de la vallée supérieure de la Nen, à raison de 3 fr. par
hectare, pour 6 509 hectares, capitalisée à . . . . . . . . . »05 800
Contribution de Ja commission du Bedford Level. . . . . . , . 37 500
Contribution du district de Waldersea . . . . . . . . . . . : 137 500
HD MAPS ET eat 1 818 300 fr.
Pour comprendre quelles difficultĂ©s il fallut vaincre, avant dâapai-
ser les conflits soulevĂ©s par les diverses juridictions et dâĂ©tablir
l'assiette des contributions à verser par les divers intéressés, il suf-
fira de rappeler que, pour faire rejeter le Bill du Nen Valley drai-
nage, 24 pétitions furent présentées et défendues avec le plus grand
acharnement devant la Chambre des Communes, et 9 devant la
Chambre des Lords.
La ville de Wisbeach refusait non seulement de participer aux
dépenses pour la somme de 1 250 000 fr. à laquelle elle était taxée,
mais encore de laisser exécuter aucuns travaux de nature à modifier
la navigation et le commerce sur la riviĂšre. Câest seulement sur les
injonctions de lâAmirautĂ©, la menaçant dâune dĂ©pense de 50 000 fr.
par an pour l'entretien de la Nen, et sur la déclaration des ingé-
nieurs fixant à 1 750 000 fr. les dépenses de rectification, que la
ville finit par souscrire un million.
La commission du Bedford Level repoussait toute ingérence des
202 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
commissaires de la Nen Valley placée dans sa juridiction, et refu-
sait toute participation aux dépenses; mais elle dut céder à son tour,
en raison des avantages quâelle retirait de la digue du canal More-
tonâs Leam longeant les Washes et protĂ©geant son pĂ©rimĂštre.
La commission du nord Level et le duc de Bedford, rejetant
toute contribution, nâadmirent pas que la surveillance de la digue
limite leur fĂŒt enlevĂ©e. [ls exigĂšrent des clauses assurant le service
de lâeau douce et la navigation par voie dâune Ă©cluse, jusquâĂ Thor-
ney. Les derniers points furent concĂ©dĂ©s, mais ils nâen furent pas
moins tenus de verser leur quote-part pour les travaux de consoli-
dation de la digue des Washes, et pour les autres avantages dont
ils profitaient.
Les districts de Waldersea et Redmore durent retirer leurs plaintes
fondĂ©es sur les sacrifices qu'ils avaient dĂ©jĂ faits pour lâĂ©tablisse-
ment de machines à vapeur et de canaux, créant un passif de plus
dâun million et demi de francs.
Les commissions de drainage de Wisbeach Hundred et dâautres
districts, n'ayant plus Ă entretenir de digues, consentirent Ă ne payer
la redevance annuelle, sur base dâune moyenne des huit derniĂšres
années, que pour une partie de leur périmÚtre; tandis que les arma-
teurs de Sutton Bridge et de Wisbeach, les conservateurs du canal
de Wisbeach, des routes à péage, etc., réclamÚrent contre toute
taxe nouvelle sur la navigation et sur la circulation routiĂšre.
Les compagnies de chemins de fer intervinrent Ă leur tour pour
exiger des compensations, Ă cause du changement de direction et
d'emplacement des ponts, sous le rapport des embarcadĂšres Ă quai.
Les commissaires du centre Level, d'accord avec ceux de la navi-
gation de la riviĂšre Nen, plaidĂšrent enfin pour obtenir le droit de
dĂ©river de lâeau douce, tout en maintenant la navigation Ă travers
lâĂ©cluse Standground, en aval de Peterborough, sans payer aucune
indemnitĂ©, et ainsi de suite, pour beaucoup dâautres protestataires.
Northampton Ă Peterborough (1"° el 2° sections). â Le programme
des travaux à exécuter dans la vallée supérieure de la Nen devait
soulever une foule de contestations non moins graves, au sujet des
droits de navigation et des riverains, meuniers ou agriculteurs, qui
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERNE. 203
invoquaient le bienfait des sabmersions fertilisantes; nous ne nous y
arrĂȘterons pas. Les travaux finalement inscrits dans la loi, pour ĂȘtre
exĂ©cutĂ©s en totalitĂ©, ou en partie, mais seulement aprĂšs lâachĂšve-
ment de ceux de la troisiĂšme division (Peterborough Ă Wisbeach),
câest-Ă -dire aprĂšs lâannĂ©e 1859, comprenaient la rĂ©gularisation de la
riviÚre et le desséchement de 6 500 hectares le long des rives. Leur
compte est donné ci-aprÚs :
Passif. # Actif,
r.
Devis des travaux. . . . . 2044850 Taxe de {5 fr. 40 c. par hec- Fr.
TETTANSE Are 800 000 tare sur 6 550 hectares . . 101 870
Frais de l'Acé du Palemene Contribution annuelle de la ville
bin 125 000 de Northamplon . . . . . 1 000
Navigation en amont. . . . 100 000 Droits de navigation Ă raison de
Navigation en aval. . . . . 50 000 2 fr. 50 c. par an sur 25 000
3 119 850 tonnes . 62 500
164 870
IntĂ©rĂȘt annuel Ă 4 p. 100. 124 794 on,
A retrancher intĂ©rĂȘt annuel. 124 794
Reste annuellement, . 40 076
Compte gĂ©nĂ©ral. â Y est intĂ©ressant de mettre en regard du
compte des dépenses et des contributions, pour les travaux à exé-
cuter dans les trois districts, les ressources annuelles sur lesquelles
pouvait compter la commission du Nen Valley drainage. Ces res-
sources Ă©laient les suivantes :
Droits de O fr. 05 c. sur 170 000 tonnes au port de Wisbeach . . . . 8 00 fr.
Droit de 10 fr. sur 1 510 hectares de terre des Washes, soumis au des-
sĂšchement: 22:07 TR SO UE PTE RESTO 0
Droit sur les prairies Ă deb PT RE M ET do er D pr ASE 200
PĂ©age au pont Dog-in-a-Doublet . . . . . SL Che NE 5 000
Droits de navigation sur 40 000 tonnes Ă 0 fr. 65 (OA ET ER Eee 26 000
Augmentation de 50 p. 100 sur la navigation. , . . 12 500
Taxe de 7 fr. 70 c. par hectare sur 688 hectares du district de RĂ©dintte, 5 300
Foret droirdmnAurersur les dignes... 7 LS Pere 5 000
Forfait pour l'entretien des digues nord et sud, . . . . . . . . . . 18 500
OP et Mets 2 a oc [19 090
à déduire :
IntĂ©rĂȘt Ă 4 p. 100 sur la diffĂ©rence de 1 931 700 fr. entre les dĂ©penses
etrlesérecetles duntroisiÚme dISMICL EME ais EN SIM EE 77 268
Reste pour amortissement, entretien, frais divers, etc. . 41 782
204 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
La dépense totale étant prévue à 6 875 000 fr. el la recette an-
nuelle Ă 350 000 fr., le revenu eĂŒt Ă©tĂ© lĂ©gĂšrement supĂ©rieur Ă
9 p. 100 : mais dĂ©jĂ les travaux nâayant pas Ă©tĂ© achevĂ©s lâannĂ©e
prĂ©cĂ©dente dans la vallĂ©e supĂ©rieure, comme lâexigeait Ja loi, les
commissaires durent solliciter du Parlement, en 1861, un nouveau
Bill pour augmenter de 2 millions de francs le capital nécessaire,
la ville de Wisbeach consentant Ă augmenter sa quote-part de
625 000 fr.
Le principe mĂȘme sur lequel le Parlement a basĂ© le choix des
commissaires esl une garantie que les intĂ©rĂȘts pĂ©cuniaires sont sau-
vegardés, dans les commissions, par des hommes compétents. La loi
de la Nen a commencé par désigner 37 membres, divisés en trois
groupes ; mais aussitÎt que les terres sujettes à impÎt ont été dési-
gnées et vérifiées comme quotité, tout propriétaire de 20 hectares
taxés à été de droit membre de la commission, ou a pu déléguer
un commissaire. Tout propriétaire de 80 hectares a pu en nommer
deux, dont lui-mĂȘme Ă©tait lâun. En cas de vacance, les propriĂ©taires
convoqués en assemblée générale (chaque titulaire de 5 hectares
ayant droit Ă une voix, jusquâĂ concurrence de 5 voix) ont eu Ă dĂ©si-
gner un commissaire, propriétaire d'au moins 9 hectares. Outre les
reprĂ©sentants des intĂ©rĂȘts fonciers et agricolesâ, la municipalitĂ© de
Wisbeach a le droit dâĂ©lire 4 commissaires ; la commission du Bed-
ford Level, 2 ; la commission du nord Level, 2; les commissions de
Waldersea et de Wisbeach Hundred, chacune 2; les municipalités
de Northampton et de Peterborough, chacune 1, et ainsi de suite.
Chaque intĂ©ressĂ© a voix au chapitre, non seulement pour lâexĂ©cution
de la loi et la répartition des dépenses, mais encore pour la fixation
des taxes.
1. Les terres comprises dans la spécification du Nen Valley act sont les suivantes :
HECTARES.
Prairies le long de la riviĂšre entre Peterborough et les au delĂ
de Northampton (vallée supérieure). . . . 12162090
Wash lands (lit d'inondation entre Peterborough ct Guyhir n)PUL 510
Distr'et:déWaldersoa Pers LOL PONS EURE
Districtide RedmOre M ANA CPC EN RPRE 688
Total: SP ESRER E STONSE
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 205
3. â DessĂ©chement des Fens en dehors du Great Level.
La description des Fens du Cambridge serait incomplĂšte si nous
omettions de signaler ceux qui se drainent en dehors du Great Level
de Bedford, Ă savoir : les Fens Downham, Bardolph, Magdalen et
Marshland avec ses annexes.
Le Downham Fen, d'une contenance de 650 hectares, est desséché
en vertu dâune loi spĂ©ciale de 1802. Ce sont des moulins Ă vent, sur
la digue de Well-Creek, qui dĂ©versent les eaux, par lâĂ©cluse Salters
lode, dans lâOuse. Le remplacement des moulins par unĂ© machine Ă
vapeur a Ă©tĂ© tentĂ©,-mais les frais dâĂ©puisement Ă©taient trop Ă©levĂ©s, en
raison de la faible surface Ă dessĂ©cher. LâinconvĂ©nient des moteurs
Ă vent, câest lâinondation inĂ©vitable dans les saisons pluvieuses, car
les moulins restent alors inactifs, faute de vent. On cultive dans ce
Fen du blĂ© et de lâavoine, et lâon fume le sol avec des tourteaux,
des os et des coquilles.
Le Bardolph Fen, situé au nord du Fen précédent (2 120 hec-
tares), est également asséché par deux moulins déversant les eaux
dans lâOuse, entre Downham et Stow Bridge. Le sol est formĂ©, sur
une Ă©paisseur de 1",50, de mousses tourbeuses que lâon a amendĂ©es
par l'argile et que lâon cultive sans jachĂšres vertes, en navette, en
avoine et en blĂ© sur blĂ©, Ă lâaide d'engrais abondants.
Le Magdalen Fen, au nord-est du Bardolph Fen, couvre environ
1 600 hectares du Marshland. Depuis 1833, le desséchement de ce
Fen, amĂ©liorĂ© par l'emploi dâune machine Ă vapeur de 40 chevaux,
a modifié absolument les conditions de la culture. Le sol, composé
de tourbe noire reposant sur des lits d'argile et de gravier, a été
drainé assez profondément pour rendre le sous-solage praticable ;
ce qui fait regretter la tourbe jadis consommĂ©e par lâĂ©cobuage, lâar-
gile étant devenue prédominante dans les terrains écobués.
Lâassolement comprend 7 rotations : 1° navette ; 2° avoine ; 3° blĂ© ;
4° fourrages, dont moitié est fauchée et le regain est pùturé; 5° blé,
moitiĂ© du fourrage Ă©tant pĂąturĂ© la mĂȘme annĂ©e ; 6° fĂšves ; 7° blĂ©.
La poudre dâos, Ă raison de 10 hectolitres par hectare, additionnĂ©e
de cendres et de guano, est la fumure ordinaire ; le bétail reçoit des
206 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
tourteaux en hiver. Il nâest pas rare, dans les terres bien fumĂ©es, de
récolter 45 et 47 hectolitres de froment par hectare.
Le Marshland Fen, placĂ© Ă lâouest du prĂ©cĂ©dent, s'Ă©tend vers
Outwell ; il est sĂ©parĂ© du Bardolph Fen, au midi, par lâancien canal
Podike. DessĂ©chĂ© en vertu dâune loi spĂ©ciale de Georges IT, ce dis-
trict se rĂ©partit entre 11 communes. Il y a quatre-vingts ans, lâĂ©pui-
sement des 2 900 hectares sâeffectuait Ă lâaide de quatre moulins
puissants ; aprĂšs le dessĂ©chement gĂ©nĂ©ral, il nâen exigea plus que
deux, déversant les eaux dans le canal Smeath and Fen, et de là ,
par lâĂ©cluse du Marshland, en amont dans la coupure Eau Brink
Cut. Sans lâopposition des propriĂ©taires communaux, les travaux du
centre Level, comprenant ceux de lâĂ©missaire en aval de Lynn, au-
raient permis de dessĂ©cher ce Fen par gravitation dâune maniĂšre
complĂšte.
Le sol formĂ© de tourbe noire sur une grande Ă©paisseur, sâest con-
densĂ© au point que lâon peut atteindre par le sous-solage la couche
d'argile, qui se trouve de 0,20 jusquâĂ 0",40 en profondeur. Lâas-
solement y est le mĂȘme que celui des bonnes terres de marais ; les
turneps remplacent la navette avec avantage.
Wellmoor Fen, Ă Outwell; Broad and Short Fens, tous deux
limitrophes du Marshland, ont été compris aussi dans le desséche-
ment de ce dernier, aux termes de la loi de Georges IIT (3° année).
4. â DessĂ©chement des Fens du Lincolnshire.
A lâexception du pays de Gedney et des autres communes limi-
trophes, situées au nord du collecteur Sud-Holland, qui le draine
directement, sur une longueur de 12 kilomĂštres, dans le canal Lut-
lon leam, et du Porsand Fen, dont le desséchement, dépend de la
commission du nord Level (Cambridge), tous les Fens du Lincoln
sont administrés, au point de vue du desséchement par des auto-
rités spéciales, classées en districts, ayant sous leur juridiction les
deux riviĂšres qui servent dâartĂšres principales: le Welland, avec son
affluent le Glen, et le Witham.
Le vaste district des Fens et des Marshes du Lincoln, indépendant
du territoire du Great Level de Bedford, est compris entre les villes
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 207
de Lincoln, Wainfleet, Deeping et l'estuaire de la Nen. Il mesure
38 kilomĂštres dans sa plus grande largeur, entre Bourn et la cĂŽte,
Ă Long Sutton, et 19 kilomĂštres dans sa plus petite largeur, entre
Helpringham au pied des Wolds et Foss Dyke Wash. Sa contenance
est évaluée à 145 000 hectares, pour une longueur de 56 kilomÚtres
environ, du nord au sud. Sur plus de 40 000 hectares, le sol est
formé de tourbe.
Les deux riviĂšres Welland et Witham, comme nous l'avons fait
déjà remarquer, débouchent dans le Wash à quelques kilomÚtres de
distance, au milieu des sables du littoral, et déversent, pour ainsi
dire au mĂȘme point, les eaux dâun bassin qui couvre 330 000 hec-
ares.
Laissant de cÎté les Marshes pour les examiner avec ceux du
Cambridge, nous décrirons successivement les Fens du Lincoln.
Deeping Fen. â Le territoire placĂ© au sud-ouest du comtĂ©, entre
Spalding et Deeping, bordĂ© au midi et Ă lâest par la riviĂšre Welland, au
nord par lâaffluent Glen et par le district Sud-Holland, comprend
10 000 hectares environ ; câest le Deeping Fen quâune compagnie
d'entrepreneurs (adventurers), sous le rĂšgne de Charles If, obtint
de dessécher, aux conditions fixées par une charte spéciale datée
de 1661. Les travaux de la compagnie eurent pour objet lâĂ©lar-
oissement et lâapprofondissement de la section du Welland, depuis
Waldram Hall jusquâĂ l'embouchure ; la construction dâun canal, le
Staker Drain, sur une largeur de 6 mÚtres, pour dégager la riviÚre
Glen, et de deux autres canaux, Hills Drain et Vernall's Drain,
devant servir de collecteurs pour les eaux de desséchement ; enfin,
lâachĂšvement du canal Exeler Drain, Ă partir de Cowbit Tunnel jus-
qu'Ă la mer, et l'Ă©tablissement dâune grande Ă©cluse sur le Welland,
prĂšs de Spalding.
A la suite de ces travaux, le Fen assĂ©chĂ© put ĂȘtre mis en culture ;
mais les troubles politiques survinrent, les paysans se révoltÚrent,
détruisirent ou abandonnÚrent les digues, de façon que le territoire,
malgré les moulins à vent construits pour épuiser les eaux, fut de
nouveau submergé pendant l'hiver.
En 1801, une loi spéciale (Zaclosure Act) autorisa les communes
208 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
de Spalding, Deeping, Pinchbeck, etc., à reprendre le desséchement
du Fen, avec facultĂ© de lâenclĂŽturer et de le lotir, en tant que les
terrains appartenaient aux communes. Deux collecteurs, le nord
et le sud Drove furent Ă©tablis pour Ă©couler les eaux de plus de
40 moulins, sans que les conditions générales du drainage se fussent
sensiblement amĂ©liorĂ©es. Câest Ă peine si, en dehors des pĂąturages,
par des printemps suffisamment secs, les fermiers pouvaient ense-
mencer de lâavoine, de la fin dâavril Ă la fin de mai, et obtenir une
récolte avant l'automne.
En 1824-1825, une loi additionnelle autorisa les communes Ă
substituer aux moulins Ă vent des machines Ă vapeur qui furent
installées à Pode Hole, à 3 kilomÚtres de Spalding.
Malgré l'introduction des machines à Pode Hole, les collecteurs
n'étant pas assez profonds, les moulins continuërent à fonctionner
jusquâen 1851, quand il fut rĂ©solu d'approfondir les canaux de 0,60
et d'ouvrir un nouveau canal Ă lâouest du Fen. DĂšs lors, les deux
machines Ă vapeur ont suffi pour maintenir lâĂ©puisement des 10000
hectares, Ă savoir :
HECTARES.
Adventurers lands (terres des entrepreneurs). . . . . . Ă 000
Freelonds:(Lerreselibres) ARS TEE EEE ER 2 000
Common lands (terres commnnales) . . , . . . . . . . 4 000
LORIE ut eu niet ann AE UNS EE 10 000
Les eaux de cette surface sont rejetées dans le Vernatts Drain
qui débouche dans la riviÚre Welland, et 11 kilomÚtres plus loin,
dans le réservoir éclusé de Spalding. Une des conséquences du des-
sĂ©chement a Ă©lĂ© dâabaisser le niveau gĂ©nĂ©ral de Deeping Fen de
0",60 environ; ce qui a permis de drainer le sous-sol Ă 0",40 plus
bas quâon n'aurait pu lâespĂ©rer, pour le plus grand bien des cul-
tures.
Le sol de Deeping Fen est formé principalement de tourbe, mais
la consistance de cette tourbe et sa fertilité varient suivant que le
gravier ou les argiles bleue et rouge du sous-sol ont été mélangés
plus ou moins complĂštement avec la couche arable. Le long du
Welland, les alluvions recouvrent la tourbe ; Ă lâouest, la tourbe
noire repose sur l'argile.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 209
Lâassolement en cours comprend # ou Ă rotations, Ă savoir :
1° navettes, turneps, mangolds ou carottes ; % blé; 3°trÚfle ou
herbes ; 4 blé; 95° blé, mais plus souvent avoine. Le froment est
remarquablement lourd et lâavoine est de bonne qualitĂ©.
Les moutons à longue laine sont au parcage, puis engraissés avec
de la navette. On donne des engrais aux céréales, sauf au blé qui
suit la navette, aprÚs avoir reçu une fumure de poudre d'os, de
cendres ou de superphosphate. Le drainage Ă lâaide de fossĂ©s et de
tuyaux, Ă une profondeur de 0,75, a donnĂ© dâexcellents rĂ©sultats
dans les terrains tourbeux dont la consistance a été accrue par la
culture des céréales et des fourrages.
Au sud de Spalding, les lits d'inondation du Welland, Crowland
et Cowbit Washes, s'Ă©tendent sur une longueur de 8 kilomĂštres.
Depuis que la riviĂšre a Ă©tĂ© rĂ©gularisĂ©e, ces rĂ©serves nâont plus
aucune ullité, mais elles fournissent un foin trÚs fin et trÚs re-
cherché.
Thurlby Fen. â Ce Fen de forme triangulaire est bordĂ© au
nord par Bourn Eau, canal de navigation qui Joint la riviĂšre Glen Ă
Tonnge-End, et Ă lâouest par le Car Dyke, canal construit par les
Romains pour recueillir les eaux des plateaux supérieurs entre Pe-
terborough et un autre canal, le Foss Dyke. Le Car Dyke, sur tout
son parcours, sépare les hautes terres de celles des Fens et des
Marshes.
Thurlby Fen, dâune contenance de 800 hectares, a Ă©tĂ© dessĂ©chĂ©
Ă part, Ă lâaide dâun canal passant sous la riviĂšre Glen, qui conduit
les eaux dans le Counter Drain, parallĂšle Ă la riviĂšre, et traverse
Deeping Fen jusqu'aux machines de Pode Hole. Quoique le sol se
trouve à un niveau inférieur à celui de Bourn Eau et du Glen, il est
plus Ă©levĂ© que celui du Deeping Fen. FormĂ© dâune couche trĂšs Ă©paisse
de tourbe noire, il nâa Ă©tĂ© rĂ©ellement dessĂ©chĂ© que depuis lâachĂšve-
ment des travaux de lâembouchure du Welland, qui ont abaissĂ© le
plan dâeau gĂ©nĂ©ral et spĂ©cialement celui du Vernatl's Drain.
Pinchbeck Fens. â Ă l'ouest de Pode Hole, bordĂ© par le Deeping
Fen et la riviĂšre Glen, le Pinchbeck Sud Fen, d'une contenance de
ANN. SCIENCE AGRON, â 1893. â 1, 14
210 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
700 h2clares, est desséché par une machine à vapeur de 20 che-
vaux, Ă©tablie en 1830, qui rejette les eaux dans le Vernall's Drain.
Depuis ce Fen, jusquâĂ la jonction du Glen et du Welland, sâĂ©ten-
dent le Spalding et Pinchbeck Fen, dâune contenance de 1 500 Ă
2 000 hectares. Quoique trĂšs rapprochĂ© de lâĂ©missaire, ce territoire
fut dĂ©finitivement assaini aprĂšs l'Ă©tablissement dâune machine de
20 ch2vaux, qui relĂšve les eaux du Blue Gout Drain, desservant le
district, et les rejette dans la riviĂšre Glen. Le sol, formĂ© dâun loam
assez mince, mais fertile, est trÚs bien cultivé par les communes
propriétaires ; le Spalding Fen possÚde notamment de magnifiques
pĂąturages dans la direction du Foss Dyke.
a) Moteurs et machines élévatoires.
Les deux machines de Pode Hole ont été les premiÚres établies
dans le district des Fens ; elles méritent à cet égard quelques détails.
L'une, de 80 chevaux-vapeur, et lâautre de 60, sont logĂ©es sous le
mĂȘme abri. La roue mue par la machine de 80 chevaux, de 8",50
de diamĂštre, avec palettes de 1",50 de largeur, devait plonger de
1,50 ; mais en raison du tassement du sol, elle plonge seulement
de 0",85. L'eau est élevée à 2",15 de hauteur, à raison de 160 mÚ-
tres cubes par minute. La roue mue par la machine de 60 chevaux
a 9",15 de diamĂštre, 1,50 de largeur et plonge de 0",35 plus bas
que la précédente, soit à 1,20, ce qui lui permet d'élever 140 mÚ-
tres cubes par minute. LâĂ©lĂ©vation totale de 300 mĂštres cubes par
minute représente une consommation de houille de 1 200 tonnes
par an. La figure 1 indique, en coupe verticale, le systĂšme de roue
hydraulique usitĂ© dans la plupart des Fens : Ă, roue de 10 mĂštres
de diamĂštre, faisant 3 tours et demi par minute ; palettes de 1,52
de longueur et de largeur variable (0",50 à 1°,60) ; B, coursier en
maçonnerie en arc de cercle ; G, pignon denté sur l'arbre de la ma-
chine, engrenant avec une roue dentée latérale ; D, collecteur prin-
cipal; profondeur 2",75. Le niveau dâeau est de 0",80 infĂ©rieur Ă
celui du terrain, quand la roue plonge en plein, soit de 1",53, et il
reste 0",30 de profondeur sous les palettes pour livrer passage aux
herbes et autres dĂ©tritus ; E, riviĂšre ; lâeau dans la riviĂšre est de
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 211
2*,43 plus élevée que dans le collecteur, soit à 1",53 au-dessus du
niveau du sol ; F, digue ; G, vannes pour empĂȘcher le refoulement
des eaux de la riviĂšre sur la roue, quand la machine est au repos.
Fig. 1. â Roue dâĂ©puisement (Fens du Lincoln).
Les roues Ă palettes et les pompes ne sont pas les seuls engins
employés dans les Fens pour l'épuisement des eaux par les machines
Ă vapeur. On trouve Ă©galement un certain nombre dâĂ©copes du sys-
tÚme Fairbairn, dont la figure 2 indique les détails.
Fig. 2. â Ycope Ă vapeur, systĂšme Fairbairn (Fens du Lineoln).
LâĂ©cope Ă tourne autour dâun tourillon B, placĂ© sur la digue C du
canal [, dans lequel doit ĂȘtre Ă©levĂ©e lâeau du drain J. A son autre
extrĂ©mitĂ©, lâĂ©cope est rĂ©unie en D Ă la bielle E du balancier F de la
machine Ă vapeur, qui pivole en G sur un bĂąti de fondalon, H. GrĂące
212 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Ă son mouvement alternatif, ce balancier abaisse lâĂ©cope au-dessous
du niveau de lâeau du drain, oĂč elle se remplit par le clapet K, et
la relÚve, pour lui faire déverser son contenu par le bec en B. La
longueur donnĂ©e Ă la bielle permet, pour une mĂȘme course du
cylindre, de faire varier la profondeur Ă laquelle lâĂ©cope plonge
dans le canal collecteur.
LâĂ©cope Fairbairn de 7",62 de longueur sur 9°,15 de largeur est
pourvue dâune cloison longitudinale qui donne de la rĂ©sistance aux
parois et un appui aux clapets. Ătablie en tĂŽle de chaudiĂšre, la cloi-
son la divise en deux parties Ă©gales. On Ă calculĂ© que pour âĂ©lever
27 mĂštres cubes dâeau par coup de piston, avec une force de 60 che-
vaux-vapeur, elle consomme 1,36 de houille par heure et par force
de chevalâ.
Au fur et à mesure que des progrÚs ont été réalisés dans la cul-
ture des Fens, les moteurs et les machines élévatoires se sont éga-
lement perfectionnés.
Les moulins à vent, mtroduits par les Hollandais et représentant
un travail utile moyen de 60 jours dans lâannĂ©e, ont Ă©lĂ© remplacĂ©s
peu Ă peu par les machines Ă vapeur. Les roues Ă palettes, aussi
bien que les Ă©copes, mues par les machines Ă vapeur, ont fait place
aussi, peu Ă peu, aux pompes centrifuges. Ge nâest pas que, dans
maints endroits, on n'aurait pu combiner trĂšs avantageusement le
moulin à vent et la machine à vapeur pour diminuer le coût de cette
derniĂšre, et que, dans dâautres localitĂ©s, on nâeĂ»t pas dĂč renoncer
au moteur Ă vapeur, pour conserver les moulins Ă vent des derniers
systÚmes. C'était là une question de coût, de rendement utile et
d'Ă©conomie.
La roue Ă palettes est la forme la plus simple que lâon puisse
donner à une machine élévatoire ; trÚs appropriée à de petits des-
sĂ©chements, elle peut ĂȘtre mue indiffĂ©remment par le vent, par
traction animale, par une locomobile ou par une machine fixe. Son
dĂ©faut principal consiste en ce quâelle ne peut s'adapter aux varia-
ions de niveau qui sont la conséquence des crues, pas plus pour la
prise que pour la décharge des eaux. Elle ne peut pas marcher au
1. A. Ronna, les Irrigalions, t. I, p. 680.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 213
delĂ dâune certaine vitesse, et si elle plonge trop, elle travaille mal.
Enfin, elle est plus encombrante quâune pompe et exige des fonda-
tions plus coûteuses.
Les deux machines Ă haute pression et Ă condensation, qui ont
été installées pour le desséchement de East Fen (district n° 4 du
Witham dont 1l est parlé plus loin), font mouvoir des pompes cen-
trifuges du systĂšme Appold ; le cylindre a 2,15 de diamĂštre, et la
course de piston 1°,52 de longueur. Ces pompes peuvent élever
700 mĂštres cubes dâeau par minute *.
Pour une machine de 44 chevaux de force et une course de 3",35,
une pompe de 1",01 de diamĂštre, avec 180 tours, accomplira le
mĂȘme travail quâune roue Ă palettes de 12",20 de diamĂštre, avec
une largeur de 0",45, tournant à 4 tours et demi. La différence
nâest pas seulement dans les proportions relalives des deux appa-
reils ; car la pompe centrifuge utilise complĂštement la puissance de
la machine ; si la course dĂ©croĂźt, le volume dâeau augmente, dâune
maniĂšre automatique, sans modification sensible de vitesse et sans
surveillance. De plus, elle maintient la surface desséchée avec moins
de dépense de force et de combustible que la roue à palettes.
Dâautres pompes centrifuges Ă vapeur, notamment celles des sys-
tÚmes Gwynne et Easton, se sont substituées, dans les trente der-
niĂšres annĂ©es, aux moulins Ă roues, partout oĂč cela Ă©tait Ă©cono-
miquement possible. Les grandes pompes Easton, Ă©tablies Ă Lode
Bank, prĂšs de Boston, comme celles Ă©tablies aux Ă©cluses de Zui-
derzĂ©e, en Hollande, dĂ©bitent 670 mĂštres cubes dâeau par minute
à une hauteur de 2",70. Les pompes Gwynne se sont vulgarisées,
depuis celles du diamĂštre de 0",90, qui Ă©lĂšvent 150 mĂštres cubes
par minute Ă 3 mĂštres de hauteur, jusquâĂ celles de 0",35 de dia-
mĂštre, qui Ă©lĂšvent 16 mĂštres cubes Ă 2 mĂštres.
L'Ă©conomie des pompes Ă vapeur, par rapport aux moulins, est
manifeste quand on compare la situation dâun dessĂ©chement de 4500
hectares, exigeant 30 moulins, outre le service de 30 Ă 40 hommes
(au prix de 825 000 fr.), et celle du mĂȘme dessĂ©chement opĂ©rĂ© par
1. Wheeler, History of the Fens of Lancashire (Trans. Inst, civil Engineers,
vol. XXXIII), et A. Ronna, les Irrigaltions, t. 1, p. 684.
214 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
# machines avec pompes centrifuges à vapeur (ayant coûté ensemble
250 000 fr.), desservies par 8 hommes, et assurant lâĂ©puisement en
tout temps, mĂȘme dans le cas de hautes eaux exceptionnelles.
La comparaison établie entre six districts des Fens, desséchés
respectivement Ă lâaide de pompes et de roues, a montrĂ© que par
unité de force, la surface desséchée par les pompes est de 1 000
Ă 1 298, tandis que par les roues, elle est de 600 Ă 830. On peut
compter dâune maniĂšre gĂ©nĂ©rale sur une force de ? chevaux et demi
à à chevaux trois quarts, pour le desséchement de 100 hectares de
Fens ou de marais stagnants, Ă une profondeur de 3 mĂštres â.
b) La riviĂšre Witham.
Black Sluice Level. â Le dessĂ©chement qui porte le nom de
Black Sluice correspond comme importance au Great Level de
Bedford. Il embrasse toutes les terres qui Ă©coulent leurs eaux dans
la riviĂšre Witham, jusque dans la passe de Boston, par le canal
principal South Forty foot Drain, et s'Ă©tend sur 32 kilomĂštres entre
Bourn Eau au midi, le Car Dyke Ă lâouest, Kyme Eau au nord et
le Old Haminond Beck Ă lâest, qui draine le Holland Fen.
Le canal South Forty foot reçoit les eaux de 26 000 hectares
soumis Ă la taxe de dessĂ©chement, et dâun nombre Ă peu prĂšs Ă©gal
d'hectares qui ne paient aucun impĂŽt ; le Hammond Beck, dont la
construction remonte Ă une trĂšs ancienne date, coule parallĂšlement
au canal précédent ; il complÚte, avec le Risegale Eau, prÚs de Gos-
berton, et une foule de lodes ou drains dirigĂ©s vers lâest, le des-
séchement des terres au midi. Dans les terres situées au nord, le
Heckington Eau et le Gill Dyke se dĂ©versent dans le Witham, Ă
lâĂ©cluse de Langerick, tandis que le Holland Dyke et le Skerth
sâĂ©coulent dans le Hammond Beck.
Sous le rĂšgne de Charles [*", Robert, comte de Linsey, lord cham-
bellan d'Angleterre, obtint la concession du desséchement de 14000
hectares compris entre la riviĂšre Glen et KyĂżme Eau, moyennant
l'abandon qui lui Ă©tait fait, ainsi quâĂ ses associĂ©s, de 10 000 hec-
1. Heathcote, Cambridge Press, 24 novembre 1877.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 219
tares. Le desséchement fut effectivement opéré et coûta 1150 000fr,;
les terrains furent enclÎturés et allotis aux colons dont le Lord fit
construire les habitations, les bĂątiments d'exploitation, et compter
les avances pour le cheptel et le matĂ©riel. Ă
Le canal principal Ă©tabli en 1638 par le comte Linsey suivait Ă
peu prĂšs le mĂȘme tracĂ© que le South Forly foot actuel.
Trois annĂ©es plus tard, le peuple sâĂ©tant mis en rĂ©volte, dĂ©truisit
les canaux, les écluses et les levées ; les récoltes furent abandonnées,
et le district ne tarda pas Ă se couvrir de marais. Le Linsey Level,
aux mains des populations factieuses, avait subi le mĂȘme sort que
celui de Deeping Fen.
Tant que le Witham ne fut pas rectifié, la triste situation du des-
séchement se maintint, d'autant plus qu'un nouveau canal, North
Forty foot, creusé en 1720 pour drainer le Holland Fen, avait dé-
tournĂ©, en amont de Boston, des volumes dâeau considĂ©rables, qui
se dĂ©chargeaient auparavant Ă lâĂ©cluse de Langerick, et Le chenal de
la riviĂšre sâobstruait chaque jour davantage par les marĂ©es.
Câest en 1762 que la premiĂšre loi pour la rĂ©gularisation du Wit-
ham fut sanctionnée. Les travaux à exécuter, aux termes de cette
loi, comprenaient : le creusement dâun nouveau chenal et la cons-
truction dâune Ă©cluse maĂźtresse Ă Boston ; l'Ă©tablissement dâun nou-
veau chenal, ou coupure, entre ladite Ă©cluse et Anthony Gout, puis
jusquâĂ Langcrick Ferry et finalement jusquâĂ Chapel Hill, sur une
longueur de 18 kilomĂštres environ, permettant de rectifier 14 coudes
successifs de la riviĂšre; enfin, de Chapel Hill jusquâĂ Lincoln, le
curage, lâapprofondissement et lâendiguement du Witham.
La grande écluse de Boston, formée de 4 sas de 7",30 de largeur,
dont trois pour l'écoulement des eaux de desséchement et un pour
la navigation, fut inauguré: en 1766 ; les autres travaux furent
achevés en 1788, au prix de 1 million et demi de francs, fournis
par les taxes et les droits de navigation. Le Linsey Level avait bien
Ă©tĂ© compris tout dâabord parmi les districts imposĂ©s, mais lâĂ©cluse
Langerick ayant été détruite, l'amélioration promise par les travaux
du Witham ne se réalisa pas, et il fallut obtenir une autre loi pour
ce district.
La loi de régularisation du Witham (Witham Act, 1762) visait le
216 _ ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
desséchement de 40 000 hectares, répartis en 6 districts, que nous
dĂ©crivons dans lâordre topographique.
SixiĂšme district. â Le Linsey Level, aussi bien que le Holland Fen
et Helpringham, constituant le sixiĂšme district, furent contraints de
construire un autre Ă©missaire que le Syke et le Langcrick Gout. Us
sollicitÚrent en conséquence du Parlement une loi spéciale (1765),
pour creuser un canal Ă grande section entre la riviĂšre Glen et
Boston, à travers le Holland Fen, avec une écluse indépendante, le
Black Sluice, et améliorer les autres canaux. Le canal South Forty
foot, construit conformément à cette loi, sur une longueur de 34 ki-
lomĂštres, coupe Ă angle droit tous les canaux (Eaux et Lodes) qui
descendent des terres supérieures, reçoit les eaux de drainage, éle-
vĂ©es mĂ©caniquement, des deux Fens Bourn et Dyke, dâune conte-
nance de 1 800 hectares, et plus loin Ă lâest, les eaux de dessĂ©che-
ment du Holland Fen, par le grand canal North Forty foot ; enfin,
celles du New Hammond Beck, avant quâelles dĂ©bouchent par lâĂ©cluse
Black Sluice, dans le Witham.
En 1770, le canal South Forty foot établissait déjà une commu-
nicalion directe entre le port de Boston, par lâĂ©cluse de Ja riviĂšre
Glen, et la ville de Bourn.
En 1846, une loi spĂ©ciale autorisa lâapprofondissement du mĂȘme
canal Ă 2,15, pour faciliter l'Ă©coulement des eaux provenant des
terres en dehors du district ; lâagrandissement de lâancien canal
Hammond Beck et la construction dâune Ă©cluse pour la dĂ©charge
des eaux. Ces travaux, confiĂ©s Ă lâmgĂ©nieur Cubitt, ont permis
d'achever, Ă la satisfaction gĂ©nĂ©rale, lâĆuvre de dessĂ©chement du
sixiĂšme district (Witham Act).
Cette Ćuvre, Ă considĂ©rer les diffĂ©rences de niveau et le rĂ©seau
inextricable de drains entrecroisés par les ruisseaux qui découlent
des terrains supĂ©rieurs, Ă©tait particuliĂšrement difficile. JusquâĂ ces
derniÚres années, de nombreux moulins à vent et quelques machines
Ă vapeur Ă©taient encore indispensables pour empĂȘcher la submersion
des niveaux les plus bas.
Câest ainsi que les Fens Bourn et Dyke durent obtenir une loi
en 1841, aprĂšs un long litige avec les commissaires du Black Sluice
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. LS 17
Level, Ă l'effet d'installer une machine de 50 chevaux-vapeur pour
Ă©lever les eaux de dessĂ©chement de 1 800 hectares jusquâau niveau
du canal South Forty foot. La machine, malgrĂ© lâaffaissement du sol
tourbeux, nâen rend pas moins un bon service en drainant le sous-
sol plus profondément.
Au nord de ces deux Fens el Ă lâouest du canal, quatorze com-
munes du haut plateau possĂšdent chacune leur Fen, qui se draine
dans le canal; ce sont les Fens Moreton, Haconby, Dunsby, etc.,
jusquâĂ Hale Fen. Ă lâest du canal, huit communes, Pinchbeck, Gos-
berton, Surfleet, elc., jusques et y compris Bicker Fen et Swines-
head Fen, rejettent les eaux de leurs Fens Ă©galement dans le canal
South Forly foot, avec lâaide de moulins Ă vent qui fonctionnent
pendant la saison pluviale.
Les Fens situĂ©s Ă lâouest du district, aussi bien le Howell Fen et
le Everby Fen dont les eaux se déversent dans le Car Dyke, que les
Fens South Kyme et Heckinglon, situés entre le Car Dyke et le Hol-
land Fen, sont le plus mal partagés au point de vue du desséche-
ment, en dépit des moulins à vent dont ils disposent. La raison en
est dans la confusion Ă©tablie par un double systĂšme de canaux, dont
les uns sont dirigĂ©s Ă lâest vers le Witham, et les autres vers le midi,
dans le canal South Forty foot. Les tracĂ©s sâentrecoupant avec les
ruisseaux venant des hautes terres et avec les canaux de districts
moins importants, ne constituent certes pas un desséchement simple,
quoique lâeau ne doive pas y ĂȘtre Ă©levĂ©e Ă une grande hauteur
(0,30 Ă 1,20).
MalgrĂ© cette complication et les travaux spĂ©ciaux dâĂ©puisement,
mis Ă la charge de celte partie du district, toutes les terres, aussi
loin que Little Hole Fen, paient la taxe fixée par hectare aux com-
missaires du Witham; mais le desséchement laisse encore à désirer.
Bourn Fen, Dyke Fen et Moreton Fen offrent un sol tourbeux,
Ă©pais, qui se convertit vers le nord en un loam noir ; tandis que les
Fens à l'est, Pinchbeck North, Surfleet, Donington, etc., présentent un
sol mélangé d'argile et de tourbe, sur un sous-sol argileux compact.
CinquiĂšme district. â Le cinquiĂšme district du Witham Act oc-
cupe le territoire entre Kyme Eau et Billinghay Dales Ă l'est, et
218 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. :
les hautes terres de Anwick, Digby, etc., Ă lâouest. A lâexception
du petit espace dâun niveau plus Ă©levĂ©, situĂ© entre South et North
Kyme, le district entier est drainĂ© mĂ©caniquement ; Ă lâouest et Ă
l'est du Car Dyke, les Fens North et South Kyme, Anwick, Rus-
kinglon, Donington, etc., rejettent leurs eaux de desséchement dans
le cours dâeau Bullinghay Skerth qui coule au nord-est et dĂ©bouche
dans le Witham, prĂšs du pont Ă bac de Tattershall. Ce cours dâeau,
transformé en colateur, reçoit également les eaux élevées par les
moulins de Fens moins importants.
Dans le Fen Anwick desséché et enclÎturé en 1792, la tourbe
forme une couche de plus dâun mĂštre d'Ă©paisseur ; elle a Ă©tĂ© utile-
ment amendée par l'argile. Les Fens North et South Kyme parti-
cipent aux mĂȘmes conditions de sol et de culture.
LâĂ©cobuage pratiquĂ© anciennement dans tout le district a con-
tribuĂ©, par la diminution de l'Ă©paisseur de la couche tourbeuse, Ă
l'amendement du sol par l'argile. Dans lâassolement suivi, les tur-
neps remplacent la navette comme jachĂšre verte ; le froment rend
couramment 30 hectolitres Ă lâhectare ; les prairies sont de bonne
qualité et le plus souvent pùturées.
Premier district. â Le premier district s'avance au nord vers Lin-
coln, au-dessus de Billinghay et de Walcot; il est limité par le Car
Dyke et les collines des wolds, ou hautes landes, Ă lâouest, et par le
Witham, Ă lâest. Sur une longueur de 29 kilomĂštres, il prĂ©sente au
midi une largeur de 5 kilomĂštres, prĂšs de Xyme Eau, et au nord,
prĂšs de Lincoln, dâun kilomĂštre seulement. La contenance totale est
de 10000 hectares. Une dizaine de communes riveraines du Witham,
comprenant Billinghay, Walcot, Martin, Blankney, Metheringham,
etc., jusqu'à Washingborough, se partagent les Fens de ce cÎté de
la riviĂšre.
Billinghay Fen dont le promontoire séparait le premier district
du cinquiĂšme, avant qu'il ne fĂŒt dessĂ©chĂ© et enclĂŽturĂ© en 1779,
Ă©tait couvert de grands lacs et dâĂ©tangs qui, Ă certaines Ă©poques de
lâannĂ©e, ne formaient quâune immense nappe dâeau, agilĂ©e par les
vagues. Les eaux trĂšs poissonneuses, les canards et les poules sau-
vages, abrités parmi les roseaux, fournissaient un revenu impor-
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 219
(ant aux habitants des communes. Aussi, quand il fut question de
dessĂ©cher le Fen, sans compensation pour les droits dâaffouage, (le
chasse et de pĂȘche, le peuple sâameuta et dĂ©truisit les premiers tr'a-
vaux Ă peine exĂ©cutĂ©s. Pour donner satisfaction aux intĂ©rĂȘts soi-
disant lésés des communes, il fut résolu de réserver le long du
cours dâeau, entre les digues, une zone libre pour les eaux dâinon-
dation et de la rĂ©partir entre les intĂ©ressĂ©s. Les Dales oĂč Washes,
comme on les dĂ©signa, furent dessĂ©chĂ©s plus tard Ă lâaide de mou-
lins Ă vent, et finalement de machines Ă vapeur, dont la force varie
entre 20 et 40 chevaux. Les Dales les plus importants, ceux de
Billinghay, Ă©coulent leurs eaux, en mĂȘme temps qu'une partie du
North Kyme Fen Ă©coule les siennes, Ă Dog Dyke, oĂč une machine
de 30 chevaux les Ă©lĂšve pour les rejeter dans le Witham. LâĂ©tablis-
sement de cette machine date de 1841. Depuis lors, les quatorze
moulins qui Ă©puisaient les eaux des Fens, en amont de Billinghay,
ont fait place Ă des machines. En vertu dâune loi de 1831 qui auto-
risait les travaux d'amélioration pour le desséchement des Fens
Nocton, Potler-Hanworth et Branston, une puissante machine a été
installée sur la digue du Witham, Une autre machine dessÚche les
Fens depuis Branston jusquâĂ Lincoln, Ă Heighington. Les Fens de
Metheringham et Dunston sont épuisés par une machine de 95 che-
vaux ; ceux de Marlin, Linwood et Blankney, par une machine de
30 chevaux ; enfin ceux de Timberland et Thorpe-Filney, par une
machine de 30 chevaux, Ă©tablie en 1839.
TroisiĂšme district. â Le troisiĂšme district du Witham Act reprĂ©-
sente les Fens de la vallée du Witham, sur la rive gauche, depuis la
riviĂšre Bain prĂšs de Tattershall jusqu'aux hauteurs de Willingham,
prĂšs de Lincoln. Les terres basses du Ăirkstead Fen sont dessĂ©chĂ©es
Ă lâaide dâune machine de 30 chevaux, et celles de lâenclĂŽture Stin-
would, Ă Bardney, par une machine de 30 chevaux, qui porte les
eaux Ă lrois mĂštres dâĂ©lĂ©vation dans le Witham. Plus au nord, au
confluent du ruisseau Langworth et du Witham, une machine Ă©ta-
blie en 1840 relĂšve les eaux des communes de Stainfields, Barlings
et Fiskerton, qui recouruient autrefois aux moulins Ă vent.
En dehors de la vallée, un vaste territoire de landes tourbeuses,
220 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
traversĂ© par la riviĂšre Till, s'Ă©tend Ă lâouest de la ville de Lincoln.
Un premier canal de ceinture les protĂšge contre les eaux en crue des
plateaux de Doddington, etc., au sud-ouest, et un second, contre les
hautes eaux venant de Burton et Carlton, au nord-est. Le desséche-
ment naturel sâohtient dĂšs lors par deux canaux principaux embran-
chés sur le Till et le Sock Dyke, coulant parallÚlement au Witham,
dans lequel ils dĂ©bouchent par deux Ă©cluses, lâune Ă Barlings et
lâautre Ă Kirkstead.
Ces deux Ă©cluses faisaient obstacle Ă la navigation du Witham, ou
à l'écoulement des eaux de desséchement, suivant leur mode de fonc-
tionnement ; une loi de 1812 ordonna leur suppression et leur rem-
placement par une seule Ă©eluse Ă Horsley Deeps. En mĂȘme temps,
pour assurer la navigation du Witham, elle prescrivit la construc-
tion dâun canal latĂ©ral (Sock Dyke), sur une longueur de 15 kilo-
mĂštres, pour permettre lâĂ©coulement continu des eaux de crue et
des terrains supĂ©rieurs. GrĂące Ă ces travaux, lâassĂ©chement du troi-
siÚme district au delà de Lincoln a été assuré. Une seule commune,
celle de Shellingthorpe, a dĂ» Ă©tablir deux petiles machines Ă va-
peur, Ă Decoy Farm, pour rejeter les eaux pendant les crues.
Le sol des Fens du troisiÚme district et de son annexe est formé
de tourbe dont l'épaisseur varie entre 0",20 au midi et 1°,50 au
nord, aux environs de Lincoln. Cette tourbe est entremĂȘlĂ©e de
mousses, de bruyĂšres, de branchages, etc., et de lits peu Ă©pais de
sable ; elle repose sur un sous-sol dâargile jaune, trĂšs compacte :
on amende la couche arable Ă lâaide de l'argile que lâon extrait en
tranchĂ©es et que lâon comble successivement. Lâassolement est trĂšs
variable ; il ramĂšne deux fois le blĂ© en six ans. Lâengrais principal
est de la poudre dâos. La culture, en raison des fumures_ peu abon-
dantes et de la qualité inférieure de la tourbe, est en retard par
rapport à celle des districts situés plus au midi.
DeuxiĂšme district. â Holland Fen, dâune contenance de 8 900 hec-
tares, constitue à lui seul le deuxiÚme district visé par le Witham
Act. BornĂ© au nord-est par Kyme Eau ; Ă lâouest par South Kyme
Fenet Heckington Fen, au midi par le Hammond Beck qui le sépare
des Fens appartenant aux communes Swineshead et Kirton Holme, Ă
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 221
lâest par Boston et le Witham, Holland Fen a Ă©tĂ© dessĂ©chĂ© et dĂ©fini-
tivement enclÎturé en vertu du Black Sluice drainage Act de 1765.
Le revenu foncier, avant lâenclĂŽture, s'Ă©levait Ă 78 000 fr. par an
et, aprÚs le desséchement, à 632 000 fr.
Le dessĂ©chement s'opĂšre par voie naturelle, Ă lâaide des canaux
North Forty foot, Clay Dyke, Hammond Beck, et de drains qui se
déversent dans le South Forty foot.
Sous Le rĂšgne de Charles [*", le Haut Huntre Fen, câest ainsi qu'on
dĂ©signait ce district, fut lâobjet dâune tentative de dessĂ©chement. Le
roi avait frappé à cet effet les communes de Braytoft, Swineshead,
Wigtoft, Southerby, Alderchurch, Foss Dyke, Kirton, Frampton,
Hole, Wiverton, Dock Dyke et Boston dâune taxe de 60 fr. par hec-
tare ; mais comme aucune ne voulut payer, il se rendit lui-mĂȘme
entrepreneur, en sâadjugeant 3 000 hectares pour son compte per-
sonnel. Quelques canaux furent alors construits, mais les événe-
ments politiques arrĂȘtĂšrent les travaux et le Fen se recouvrit dâeau
pendant la saison des pluies, comme par le passé.
Les plus rĂ©cents travaux comprenant l'amĂ©lioration de lâancien
canal Hammond Beck, l'Ă©tablissement d'une nouvelle Ă©cluse Ă
lâ'Ă©missaire, avec approfondissement de 1%,50, et l'agrandissement
du canal South Forly foot approfoudi (2",15) de façon à assurer
la communication par steamer entre Boston et Guthram Gote, ont
amélioré radicalement les conditions du desséchement de ce dis-
trict.
Le sol de Holland Fen est un loam lĂ©ger ; le sous-sol est de lâar-
gile mĂ©langĂ©e de gravier. Lâassolement nl cinq rotations
dans les meilleures terres, et quatre dans les terres inférieures. Le
blé est la sole dominante. Le fumier de ferme, additionné de tour-
teaux, constitue la principale fumure.
QuatriĂšme district. â A lâest du Witham, entre Boston et les
hautes terres ou wolds, s'Ă©tend le quatriĂšme district qui comprend
les Fens Wildmore, West, East et le Wrangle Common.
Wildmore et West Fens, dâune contenance de 16 000 hectares,
sont limités au sud et au sud-ouest par le Witham canalisé, au nord-
ouest par les wolds de Tattershall, Conigsby, Turnby, Maresham et
222 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Revesby, et Ă lâest par le East Fen, comprenant les terres des com-
munes Stickford, Stickney et Sibsey.
Ces deux Fens furent desséchés, lotis et mis en culture par des
entrepreneurs, Anthony Gout en tĂȘte, qui avaient obtenu la conces-
sion du roi Charles [*. La riviĂšre Witham se trouvant souvent Ă un
niveau supérieur à celui des terrains, et les écluses qui auraient
pu laisser passer les eaux étant maintenues fermées pendant des
semaines entiÚres, on dut creuser un canal indépendant, pour con-
duire les eaux en aval de Boston. Ce canal, construit par Anthony
Gout, est le Maud-foster Drain.
Les travaux principaux étaient à peine achevés que la populace,
révoltée contre le roi et les concessionnaires, mil tout au pillage et
tua un certain nombre de colons auxquels les ferres desséchées
avaient été distribuées. |
Pour expliquer ces actes de sauvagerie qui déshonorÚrent la
grande Rébellion, il y a lieu de rappeler que le roi, propriétaire de
grandes surfaces dans les Fens, frappait les communes de taxes trĂšs
élevées, par les commissaires de la Couronne, pour obtenir les fonds
nécessaires à ses propres entreprises. Dans le cas du Wildmore Fen,
les communes refusĂšrent de payer l'impĂŽt, etles commissaires du roi
traitÚrent avec un Sir Anthony Thomas, à ses risques et périls, pour
l'exĂ©cution des travaux. Lâentrepreneur, dans le dĂ©lai de quatre
années, devait dessécher 18 000 hectares, de façon à ne laisser au
plus que 1 200 hectares sous lâeau, moyennant la cession dâune part
proportionnelle de terrains asséchés. Le contrat fut ponctuellement
exéculé, sans aucun égard pour les droits des propriétaires du sol,
et sans aucune compensation pour la privation infligée aux com-
munes. Le roi et l'entrepreneur se partagĂšrent alors le pays.
Aussi, en 1642, les paysans et les ayants droit des communes, ne
pouvant recourir à aucuns moyens légaux ou constitutionnels, pour
se faire rendre Justice, prirent-ils les armes, démolirent les écluses,
ravagérent les terres des concessionnaires, pillÚrent les récoltes et
le matériel, renversÚrent les bùtiments, et mirent à mort ceux qui
fireat mine de résister.
En réponse à une pétition adressée à la Chambre des Lords par
les draineurs (sir Ă. Thomas et ses associĂ©s), une loi intervint en leur
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 223
faveur, motivée sur les avantages qui résultaient pour la couronne
de terres louées annuellement à 50 et 40 fr., au lieu de 1 fr. par
hectare, et ordonna le remboursement de 1 250 000 fr., montant de
leurs dépenses. Maisles paysans etles propriétaires des cinquante-deux
villes et villages, frustrés de leurs droits, protestÚrent, au nom de
4000 familles, contre cette décision des Lords et en appelÚrent à la
Chambre des Communes. Ils exposĂšrent que grĂące aux canaux, aux
fossĂ©s, aux ponts et ouvrages dâart extcutĂ©s Ă leurs frais, ils avaient
pu maintenir les Fens en Ă©tatetsâv procurer leurs moyens d'existence ;
qu'ils n'Ă©taient pas la proie des mendiants ni des voleurs, comme
le prétendaient les draineurs ; que si le Eust Fen était submergé,
les Fens Wildmore et West rapportaient de 30 Ă 40 fr. par hectare
annuellement, avant lâentreprise ; que le but de Sir A. Thomas avait
Ă©tĂ© de spĂ©culer sur lâacquisition des terres en sâappropriant les ca-
naux, les écluses, ete., appartenant aux habitants, el en leur déro-
bant une somme de 200 000 fr. par an, sous prétexte d'augmenter
le revenu annuel de la cassette de Sa Majesté ; que les Fens étaient
en plus mauvaise condition aprÚs le desséchement qu'auparavant ;
qu'il nây avait pas lieu dâindemniser des entrepreneurs qui, suivant
leur propre aveu, reconnaissaient avoir encaissé 1 425 000 fr. pen-
dant sept annĂ©es de jouissance, câest-Ă -dire, bien plus quâils nâaccu-
saient comme dépenses et comme sommes réellement déboursées ;
enfin, que le pays nâavait pas profitĂ© des opĂ©rations dans une me-
sure qui pĂ»t en aucune maniĂšre justifier lâaliĂ©nation de terres ainsi
traitées.
Les temps avaient changĂ© ; le roi Charles [* paya de sa tĂȘte les
excÚs de tous genres commis en son nom, taxes illégales, extor-
sions, concussions, etc., qui motivĂšrent la guerre civile. Les paysans
communaux eurent gain de cause devant la Chambre des Communes
et rentrĂšrent dans leurs droits et privilĂšges.
Le niveau des terrains des Fens du quatriĂšme district sâabaissant
au fur et Ă mesure quâils sâĂ©loignent des embouchures, une partie
considĂ©rable Ă lâintĂ©rieur demeurait le plus souvent sous lâeau ; ainsi
le No Man's Friend, dans le Wildmore, les Deeps dans le East Fen,
et le Wrangle Common restaient Ă lâĂ©tat de marais. Leur dessĂ©-
chement eut exigé des canaux profonds pour traverser les Tofts ou
224 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
tertres plus élevés longeant le littoral (voir la note p. 165) ; or, dans
les annĂ©es sĂšches ces canaux se comblaient, empĂȘchaient la descente
des eaux venant des wolds et débordaient continuellement. La com-
mission spéciale chargée, dans de telles conditions, de l'entretien du
desséchement, dut faire appel au Parlement pour obtenir une loi qui
permit dâĂ©couler dâahord directement les eaux des wolds.
Jusqu'Ă l'octroi de cette loi, en 1762, Wildmore et West Fens
furent laissés à la libre disposition des communes qui y envoyaient
paßtre leurs bestiaux, leurs moutons et leurs chevaux, pendant l'été,
exerçant leurs privilĂšges dâaffouage, de faucardement et de pĂšche,
pendant l'hiver ; mais Ă partir de 1769, les terres furent alloties.
En 1801, une nouvelle loi fut sanctionnĂ©e, qui incorpora le Ăast
Fen et le Wrangle Common dans le quatriĂšme district soumis Ă la
juridiction des commissaires du Witham, et autorisa les travaux, sur
la base du projet de Rennie pĂšre.
Les nivellements exécutés par cet ingénieur montrÚrent que la
surface de lâeau du Witham, en plein Ă©tiage, Ă©tait de 0,98 plus
Ă©levĂ©e Ă Anthonyâs Gout quâĂ la cote la plus basse des marĂ©es de
morte eau, Ă Maud-foster Gout. Il y avait donc lieu de tracer un
canal joignant les deux points, pour dessécher les deux Fens,
West et Wildmore, dont le niveau Ă©tait le mĂȘme, sauf dans la partie
No Man's Friend, située à 0",30 en contre-bas. Le canal principal,
dâune longueur de dix-huit kilomĂštres et demi, devait donner en
marée de morte eau une chute de 0",045 par kilomÚtre, et en marée
de vive eau, une chute de 0,065 par kilomÚtre ; ces chutes ont été
notablement accrues depuis.
Sur les 4315 hectares compris dans le Wildmore Fen, il y a
1190 hectares de hautes terres; sur les 6 850 hectares compris dans
le West Fen, 11 y en a 2215. Plus de 4000 hectares de ces terres
hautes se drainent dans des fossés (becks) qui traversent les Fens
et, en raison de leur pente, déversent trÚs rapidement leurs eaux
dont le volume a été Jjaugé à plus de 600 000 mÚtres cubes par jour,
en temps normal, et Ă trois fois autant, pendant la saison des crues.
Rennie proposa de recueillir cette masse dâeau dans un canal de
ceinture (calchwaler), qui couperait tous les ruisseaux et les fossés
Ă la descente dans les Fens, de mĂȘme que ceux qui dĂ©bouchaient
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 229
des wolds Ă Sibsey, Stickney et Stickford, jusquâĂ lâĂ©missaire de
Maud-foster. Ge canal de ceinture qui sâamorce prĂšs du confluent de
la riviÚre Bain dans un ruisseau de 1,50 à 1",80 plus élevé que celui
des Fens, a été construit sur 34 kilomÚtres de longueur, avec une
pente à peu prÚs double de celle des canaux de desséchement. La
nouvelle écluse à Maud-fosler présente trois ouvertures de 4,60
chacune, soit une ouverture totale de 13",80 au lieu de 4 mĂštres.
Le drainage des deux Fens par les canaux Howbridge, Newham,
Medlum, etc., dont l'entretien est soigné par les commissaires du
Witham, moyennant une taxe de 6 fr. par hectare et par an, fonc-
tionne dâune maniĂšre parfaite. Les commissaires du quatriĂšme dis-
trict prélÚvent en outre une taxe de 1 fr. 50 c. par hectare et par
an pour le curage des petits drains et des fossés.
Le sol des deux Fens est formĂ© en grande partie dâargile, entre-
mĂȘlĂ©e de lits de gravier ; le sous-sol est du sable. Le drainage, au
moyen de tuyaux et de tuiles sur semelles en poterie, a été pratiqué
à peu prÚs partout, de façon que la culture arable est partout pos-
sible et que les pĂąturages sont inutiles. Les terres argileuses four-
nissent d'excellentes et abondantes récoltes de turneps, de trÚfle et
de ray-grass, Ă la condition dâĂȘtre labourĂ©es en bandes de 2",50,
pour prévenir les effets de la sécheresse.
East Fen.â Avant son annexion aux deux Fens prĂ©cĂ©dents, East
Fen nâĂ©tait quâun vaste marĂ©cage, contenant quelques Ă©tangs pois-
sonneux, plantés de roseaux et de jones, lieux favoris du gibier de
marais. Sur quelques terrains Ă©mergeant des eaux et appartenant Ă
la commune de Friskney, la canneberge (Oxycoccus) Ă©tait si abon-
dante quâelle donnait son nom Ă la localitĂ©.
Le niveau du Fen est de 0",30 en contre-bas de celui de Wild-
more et de West Fen ; ce qui diminue d'autant la pente du canal de
desséchement, par rapport aux parties basses, les Deeps, situées
Ă 0,45 au-dessous de lâĂ©missaire Maud-foster. Rennie reconnut
qu'il ÿ avait lieu, pour ce motif, de chercher un débouché autre que
celui de Wainfleet, et dâun niveau plus Ă©levĂ© encore que le prĂ©cĂ©-
dent, Ă cause des ensablements du chenal. Il fit donc choix dâun point
de la riviĂšre, en aval de Maud-foster, Ă 5 kilomĂštres de distance,
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1. 15
226 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
appelĂ© Hob-Hole, oĂč, en l'absence de hauts-fonds, le niveau de lâeau
se maintenail Ă 1",22 plus bas.
Ce fut Ă Hob-Hole, sur une longueur de 22 kilomĂštres Ă partir
de Toynton, avec une pente de 0,035 par kilomĂštre, quâaboutit le
canal principal qui reçoit par des canaux latéraux Fodder Dyke,
Bur Lode, Bell Water, ete., les eaux des 4800 hectares de East Fen
et des 10500 hectares de terrains de East Holland, comprenant les
communaux de Wrangle, de Leake, de Butterwick, etc., se déchar-
geant autrefois Ă Maud-fosler.
LâĂ©cluse de Hob- Hole fut achevĂ©e en 1806, et celle de Maud-
foster l'année suivante.
Comme pour les deux Fens Wildmore et West, les eaux des
hautes terres au-dessus de Ăast Fen furent captĂ©es par un canal de
ceinture de 44 kilomĂštres, dĂ©bouchant avec celui des autres Fens, Ă
quelques kilomĂštres au nord de Boston.
Le desséchement fut si complet que sur une vaste surface de ma-
rais (Marshes) situés au nord de Wainfleet on put détourner les eaux
d'Ă©coulement de lâanse de Wainfleet jusquâĂ Hob-Iole. En effet, la
riviĂšre Sleeping qui recueillait les eaux des marais, venant de Sal-
monby, Aswarby, Harrington, Partney, RaĂŻthby, etc., les laissait en
route dans les Fens quâelle traversait, et exposait certaines localitĂ©s,
telles que Steeping, Firsby, Thorpe et Croft, Ă de terribles inonda-
tions dans la saison pluviale. Par une loi promulguée en 1818, ces
communes obtinrent dâendiguer la riviĂšre Steeping, en la rectifiant
entre Steeping Mill et Firsby Clough par un raccourci de 3 kilo-
mÚtres. Cette amélioration ne fut rendue possible que par le dessé-
chement de East Fen.
Les commissaires du Witham drainage perçoivent une taxe de
1 fr. Ă 1 fr. 50 c. par hectare et par an, pour l'entretien des drains
et des canaux secondaires de East Fen, et de 3 fr. pour les canaux
principaux. Le sol, formé de tourbe compacte, assise sur l'argile
bleue Ă une profondeur de 1,50 jusquâĂ 5°,50, a Ă©tĂ© amendĂ© nom-
bre de fois par l'argile ; aussi la culture arable sâest-elle installĂ©e sur
tout le territoire, et les pĂąturages anciens ont-ils Ă peu prĂšs dis-
paru, Lâassolement le plus usitĂ© consiste en : 1° navette ; 2° avoine ;
3° blĂ© avec ray-grass; 4° ray-grass et parfois Ă©cobuage. Lâavoine
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. DT.
rend de 50 Ă 60 hectolitres, et le froment, de 25 Ă 35 hectolitres
par hectare ; outre la poudre d'os et les superphosphates, lâengrais
de ville y est trÚs employé.
Canaux de ceinture. â L'application du principe des calchwalter,
ou canaux de ceinture, qui a donné des résultats si excellents dans
toutes les opérations de desséchement entreprises par Rennie pÚre,
mĂ©rite dâĂȘtre signalĂ©e avec quelques dĂ©tails. PrĂ©conisĂ©e par son fils
et vulgarisée par les ingénieurs anglais, la méthode des calchwater
a rendu les plus grands services, quand il sâest agi dâĂ©couler des vo-
lumes dâeau considĂ©rables dĂ©bouchant sur des terrains dâun niveau
inférieur à celui des hautes marées, quoique supérieur à celui des
marĂ©es basses. Câest, du reste, la mĂ©thode suivie dans les dessĂ©che-
ments des marais par écoulement permanent, pour détourner les
eaux pérennes ou de sources, et ne laisser arriver dans les marais
que les eaux zénitales.
Câest surtout pour l'assainissement des terres des vallĂ©es infĂ©-
rieures quâarrosent les cours dâeau, que sir John Rennie recom-
mande le départ des eaux du niveau supérieur de celles du niveau
inférieur.
Si on rĂ©unit ces eaux dans un mĂȘme collecteur, il arrive, en effet,
que celles des hauts niveaux, animĂ©es dâune plus grande vitesse, se
frayent la voie vers lâĂ©missaire, en refoulant celles des bas niveaux
qui inondent et saturent les terres adjacentes. En outre, un seul
émissaire oblige à établir un réseau bien plus étendu de fossés prin-
cipaux et de fossés secondaires, destinés à emmagasiner les eaux des
deux niveaux, jusquâĂ leur plein Ă©coulement.
A lâaide de deux Ă©missaires distincts, on permet, au contraire,
aux eaux supérieures de se déverser rapidement en amont dans la
riviÚre, tandis que les eaux inférieures se déchargent plus lentement
en aval, sans créer de gonflements, ni de remous. D'ailleurs, les
eaux supérieures débouchant en amont, approfondissent le chenal,
empĂȘchent quâil se comble en aval, et le maintiennent en meilleur
état pour le desséchement et la navigation.
Un dernier avantage quâoffrent les canaux calchwater consiste
dans la possibilitĂ© dâuliliser les eaux les plus pures, ou les plus
298 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
fraiches pour lâapprovisionnement des bas districts pendant la saison
sÚche, tant au point de vue du bétail que de l'irrigation.
Rennie a appliqué sa méthode le long du Witham, sur plus de
60 000 hectares, en se guidant dâaprĂšs les principes suivants :
Avant de procéder au desséchement de districts aussi vastes, situés
Ă des niveaux infĂ©rieurs, il importe dâexaminĂ©r en premier lieu
l'emplacement de lâĂ©missaire, et les conditions nĂ©cessaires pour
l'installer Ă la limite des plus basses eaux, câest-Ă -dire, pour abaisser
le plus possible le plan dâeau. DĂšs lors, ayant tracĂ© les fossĂ©s de
ceinture, destinĂ©s Ă l'Ă©coulement des eaux supĂ©rieures, lâassainisse-
ment des terrains bas pourra presque toujours sâopĂ©rer naturelle-
ment, suivant la pente. Au cas oĂč les eaux ne pourraient pas ĂȘtre
évacuées en tout temps suivant la pente, il faudra élargir la section
des fossés principaux et secondaires, afin qu'ils puissent emmaga-
siner les eaux pendant le temps que lâĂ©cluse restera fermĂ©e.
Aucune terre nâest rĂ©ellement assainie que si la surface de lâeau
dans les drains est, Ă toute Ă©poque, de 0",60 Ă 0,90 au-dessous de
la surface du sol adjacent. Tout en Ă©vitant la stagnation, il importe
de pouvoir disposer de lâeau pluviale, ou de lâeau des terres supĂ©-
rieures pour laisser au terrain assĂ©chĂ© le degrĂ© nĂ©cessaire dâhu-
midité.
Drainage. â La rĂšgle dominante Ă observer dans un dessĂ©che-
ment consiste à drainer complÚtement, mais en ménageant une
bonne distribution dâeauâ pour lâarrosage des terres, le cas Ă©chĂ©ant,
ou pour lâabreuvage du bĂ©tail.
Au cas oĂč le relief du terrain oblige de faire passer les canaux
de ceinture par-dessus ceux du desséchement, on a recours à des
siphons construits en tĂŽle ou en bois. Ces siphons peuvent toujours
ĂȘtre placĂ©s Ă une profondeur telle, par rapport Ă lâorifice dâadmis-
sion des eaux, quâil nây ait pas de frottement ; autrement, si les deux
orifices sont au mĂȘme niveau, celui servant dâĂ©missaire donnerait
lieu à une légÚre chute qu'il y a lieu d'éviter.
Quand la pente est trop forte et quâil importe de retenir les eaux
1. Autobiography of Sir John Rennie, p. 438.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 229
pour les besoins de l'irrigation ou de lâabreuvage, ou encore pour
empĂȘcher lâaffouillement du sol Ă la descente, on place des barrages
de ! mÚtre à 1°,90 de hauteur, avec des pertuis à vannes de 3 mÚ-
tres jusqu'Ă 1 mĂȘtre d'ouverture, qui servent de retenues. Câest le
systÚme qui à été appliqué pour le drainage du Hainault Forest,
prĂšs de Epping, dans le comtĂ© dâEssex *.
Quelque essentiel que soit le drainage souterrain, dans le but
d'empĂȘcher lâĂ©vaporation de la surface pendant lâhiver, il est non
moins utile, dans les terres légÚres et les pùturages, de garder le
niveau de lâeau souterraine pendant lĂ©tĂ© Ă une telle hauteur au-
dessous de la surface, que lâeau puisse y monter par le jeu de la
capillaritĂ© des racines. On y parvient en maintenant lâeau dans les
canaux et les cours dâeau qui font office de rĂ©servoirs, et en rĂ©glant le
niveau dâeau et les clĂŽtures pour le bĂ©tail en pacage. Câest une pra-
tique suivie partout dans les Fens. Quand les canaux principaux ne
sont pas ulilisés pour la navigation, on y conserve de 1,50 à 1,80
de profondeur dâeau, le radier Ă©tant de 1",20 Ă 1,50 au-dessous du
niveau gĂ©nĂ©ral du terrain. Ces canaux, aussi bien que les cours dâeau
supérieurs qui les alimentent, permettent de maintenir les fossés et
les drains constamment remplis, jusquâĂ 0",60 de profondeur dans
les terrains tourbeux, et 0",90 dans les terrains légers.
Par l'évacuation rapide des eaux pluviales excédantes, en hiver,
et l'apport en Ă©tĂ© du volume dâeau nĂ©cessaire, les terres en culture
atteignent dans les Fens leur haut degré de fertilité, sans crainte
de la sécheresse, ni de la stagnation des eaux.
Pour ĂȘtre efficace, le drainage souterrain qui maintient la per-
méabilité de la couche arable, linfiltration des eaux atmosphériques
et assure l'écoulement des eaux du sous-sol vers les fossés princi-
paux, doit ĂȘtre entretenu toujours en bon Ă©tat, si lâon veut Ă©viter la
slagnation. Aussi, la nature des drains, leur pose, leur débit, exi-
gent-ils des précautions spéciales dans des contrées comme celles
des Fens et des Marshes, dont le niveau, absolument plat jusquâĂ la
mer, ne permet pas de profiter de pentes suffisantes.
Il y a cinquante ans, on regardait le drainage souterrain de cette
1. Grantham, On arlerial drainage (Trans. Inst. civil Engineers, vol. XIX).
230 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
contrée comme impraticable, en raison des difficultés inhérentes au
terrain et Ă son niveau; mais peu Ă peu l'exemple fourni par les
exploitations des plateaux supĂ©rieurs sâest Ă©tendu Ă la zone du lit-
toral.
Les drains dont on sâest servi le plus communĂ©ment sont les
tuyaux ; mais on a eu Ă©galement recours aux drains en briques, en
fagots dâĂ©pine, en gazon et en tourbe. Les drains en fagots sont
usitĂ©s spĂ©cialement dans les Marshes, oĂč le sable limoneux recouvre
lĂ surface ; les tuyaux, en effet, sâobstruant plus facilement par le
sable, ne pourraient pas ĂȘtre curĂ©s en chasse, faute de pente. Dans
les terrains mobiles, ou compressibles, dont l'argile est superficielle,
comme on en rencontre dans certains districts des Fens, on emploie
la tourbe, débitée en briquettes, et séchée, pour combler le fond
des tranchĂ©es, ou bien, quand il sâagit de prairies, de mottes de
gazon, disposés en coins, qui forment des drains économiques et
rendent de bons services. Les briques ou les tuiles et les pierres, de
mĂȘme que le bois, Ă cause de leur prix, ou de leur raretĂ©, ne sont
guÚre employés.
Dans la pose des drains, on se guide, quant Ă la profondeur, sur
celle des fossés ou des colateurs qui assainissent les Marshes, suivant
que lâĂ©coulement des eaux de dessĂ©chement s'opĂšre artificiellement,
oĂč par gravitation. Il est rare, dans le Lincolnshire, que la profondeur
des drains excĂšde 0,75 ; si on lâaugmente, la bouche Ă©tant noyĂ©e
dans lâeau des fossĂ©s, l'Ă©coulement nâa plus lieu que par barbotage,
avec une extrĂȘme lenteur, puisqu'il y a une pression Ă vaincre.
La profondeur de la couche dâargile, dans les Fens, dĂ©termine le
plus souvent celle des drains. Cette profondeur, comme on a vu, est
assez variable ; tantĂŽt lâargile apparait Ă la surface de la tourbe,
tantĂŽt elle est en contre-bas de plusieurs pieds ; mais on la rencontre
généralement entre 0,60 et 1",50 de profondeur. Pour poser les
drains, on creuse la tranchée à travers la couche de tourbe, et on
ne les enterre dans lâargile que sur lâĂ©paisseur nĂ©cessaire pour re-
couvrir d'argile les tuyaux, et empĂȘcher les dĂ©bris de tourbe de les
obstruer â.
1. The Farmer's Magazine. â Drains and drainage, 1868, t. {.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 23
L'extension de la pratique du drainage nâa pas moins contribuĂ©
que lâamendement des tourbes par l'argile, que l'emploi des engrais
phosphatĂ©s et autres, et que lâassolement rationnel, Ă faire de la
contrĂ©e des Fens et des Marshes une des plus productives de lâAn-
gleterre.
c) Travaux Ă l'embouchure du Witham.
Comme on vient de le voir, lâassainissement gĂ©nĂ©ral des Fens du
Lincoln repose sur le fonctionnement régulier du débouché de la
riviĂšre Witham dans la baie du Wash.
Jusqu'en 1762, quand la premiĂšre Loi du Witham drainage fut
promulguĂ©e, ce cours dâeau avait cessĂ© dâĂȘtre navigable passĂ© Lin-
coln; le chenal sâĂ©tait ensablĂ© et les terres riveraines Ă©taient pĂ©rio-
diquement inondées dans toute la vallée.
Lorsque le canal à grande section, tracé en ligne droite, de Lin-
coln à Boston, sur 18 kilomÚtres de longueur, eut été achevé, la
navigation se trouva abrĂ©gĂ©e, et le plan dâeau gĂ©nĂ©ral du dessĂ©che-
ment fut abaissé, de façon à rendre le terriloire tout entier à la cul-
ture.
Ce fut seulement plus tard, Ă lâoccasion du dessĂ©chement de Wild-
more Fen, de West Fen, etc., que la question du débouché des eaux
acquit une sérieuse importance, et que Sir John Rennie fut chargé
de complĂ©ter lâĆuvre de son pĂšre, par la rectification du chenal
entre Maud-foster et Hob-Hole, sur un parcours de 3 kilomĂštres et
demi, qui sépare les deux écluses de l'embouchure du Wash, prÚs
de Boston.
Rennie pĂšre, en exĂ©cutant le drainage des Fens du Witham, Ă
lâaide de canaux de ceinture et de collecteurs qui conduisent les
eaux de ces canaux dans la riviĂšre, en amont de Boston, entendait
que la régularisation de embouchure se fit aux frais de la ville.
Des deux projets quâil soumit, en 1805, Ă la municipalitĂ© de Boston,
lâun consistait, en effet, Ă redresser lâancien chenal, Ă lâapprofondir,
à encaisser les berges et à créer un nouveau lit entre Hob-Hole et
Clay-Hole, oĂč il y avait un fort tirant dâeau en tous temps. L'autre
projet comprenait lâexĂ©cution dâun canal Ă travers les terres, allant
DDR ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
directement de Boston jusquâĂ Clay-Hole. En outre, les eaux dâĂ©cou-
lement des hautes terres devaient continuer à déboucher à Maud-
foster, en aval de la ville, pour maintenir la navigation libre ; tandis
que les eaux du dessĂ©chement des basses terres continueraient Ă
sâĂ©couler Ă Hob-Hole.
La municipalité recula devant la dépense que devait entrainer
lâune ou lâautre de ces variantes, et Rennie pĂšre se borna, pour
assurer la décharge des eaux, à faire établir un canal de communi-
cation entre le canal colateur de Mansfeld et celui de Hob-Hole, Ă
Cowbridge, oĂč il plaça une jauge qui permettait de dĂ©verser les
eaux par lâun ou par lâautre des canaux, suivant la hauteur nĂ©ces-
saire Ă la navigation.
MalgrĂ© cela, le Witham ne tarda pas Ă sâencombrer en amont de
lécluse de Maud-foster, comme il avait été prévu, et le service par
lâĂ©cluse Hob-Hole devint obligatoire, moyennant quâon lâĂ©largit.
Gelte mesure fut insuffisante à son tour, si bien qu'aux marées des
mortes eaux, les bateaux pĂȘcheurs pouvaient seuls accoster les quais,
et aux grandes marĂ©es dâĂ©quinoxe, les chaloupes seules pouvaient
aborder en ville. La situation de Boston comme port de mer Ă©tait
perdue.
Sir John Rennie, chargé par la municipalité de remédier à cette
situation, déclara, aprÚs un nivellement et des sondages complets,
exĂ©cutĂ©s par Francis Giles, quâil nây avait de salut que dans la rĂ©ali-
sation de lâun ou de lâautre des projets soumis par son pĂšre, tout
en inclinant vers le premier, qui consistait Ă utiliser lâancien chenal
et à le prolonger par un canal entre Hob-Hole et Clay-Hole. Indé-
pendamment de la ville de Boston, les commissaires du Witham et
du Black Sluice Drainage avaient, selon cet ingĂ©nieur, un intĂ©rĂȘt
direct Ă associer leurs efforts et leurs ressources pour atteindre
le but visé. Les commissaires du Black Sluice se désintéressÚrent
du projet, aprÚs avoir pris l'avis de l'ingénieur Telford qui s'était
prononcĂ© en faveur de la dĂ©molition de lâĂ©cluse situĂ©e en amont
de Boston, pour permettre aux marées de refluer dans le cours
dâeau.
Il y avait malheureusement plusieurs obstacles Ă la solution Tel-
ford ; Ă savoir : la riviĂšre, en amont de lâĂ©cluse, relevait dâune autre
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 233
juridiction ; et, pour recevoir les marĂ©es, les berges auraient dĂ» ĂȘtre
relevées sur le parcours ; or, il eut fallu, pour donner des compen-
sations, en raison de la perte des eaux douces, sâentendre avec des
intéressés hostiles à toute combinaison.
La ville de Boston dut reprendre seule et Ă son propre compte le
projet de Sir John Renmie qui sâoffrit, pour se conformer aux res-
sources modiques dont elle disposait, Ă lâexĂ©cuter en partie seule-
ment et progressivement.
Dés lors, il commença par faire exécuter le canal entre Hob-Hole
et la partie supĂ©rieure du Burtonâs Marsh, sar 800 mĂštres de lon-
gueur et endiguer en amont le chenal, sur 600 mĂštres de largeur.
La navigation devenait ainsi plus courte, en mĂȘme temps que le
flot de la mer augmentait par le refoulement des eaux douces; on
acquĂ©rail de plus la certitude dâabaisser la limite des mortes eaux
et d'approfondir le lit jusquâĂ la grande Ă©cluse, en amont de Boston.
Les travaux adjugés aux entrepreneurs Jolliffe et Banks présen-
tĂšrent de grandes difficultĂ©s Ă lâendiguement, Ă cause de la largeur
du chenal et de la masse du flot ; mais le résultat dépassa toutes les
espérances. |
Le chenal sâamĂ©liora au point que les marĂ©es de vives eaux, au
pont de Boston, atteignirent la cote de 4,27, tandis que la laisse
des mortes eaux monta Ă 3",05. Le lit sâapprofondit de 0",90 Ă
1",20 au-dessous des marées de mortes eaux, de telle sorte que les
navires de 4,60 Ă 4",85 de tirant dâeau purent accoster Ă quai, Ă
haute marĂ©e, et ceux de 3",65 Ă 8",95 de tirant dâeau purent
librement entrer à marée basse. En outre, tous les atterrissements
formĂ©s en amont de lâĂ©cluse de Maud-foster furent entrainĂ©s, en
facilitant l'écoulement des eaux du canal de ceinture et de décharge
par les Ă©cluses Grand et Black Sluices.
Encouragée par ces résultats, la ville de Boston, aprÚs avoir dé-
pensĂ© 825 000 fr., sâimposa de nouveaux sacrifices pour exĂ©cuter
les travaux projetés par Rennie pÚre et fils. DÚs 1845, les digues
longitudinales du Witham furent achevées : les navires de 300 ton-
neaux remontĂšrent en pleine mer jusquâĂ Boston. Le Witham avait
environ 180 mĂštres dâextravasement au point oĂč il nâĂ©tait plus navi-
gable, et donnait 1°,82 dâeau Ă mer pleine. Le lit de la riviĂšre
254 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
fut concentré dans un rétrécissement de 27 mÚtres, le seul courant
de descente enleva les vases et les sables et creusa un chenal de
4 mĂštres de profondeur en mer de vive eau, sans avoir recours au
dragage *.
La navigation et le desséchement furent améliorés au point que
Boston recouvra la situation commerciale que lui avait fait perdre
l'obstruction de son port, obligeant les navires de s'arrĂȘter Ă Clay-
Hole, Ă lâentrĂ©e de la baie. De plus, un bill introduit, dĂšs 1859,
auprÚs du Parlement, a autorisé, par des travaux en aval de Hob-
Hole et de Foss Dyke bridge, la reprise dans la baie du Wash de
14000 hectares de lais de mer, devenus accessibles.
B. â LES MARSHES ET LES POLDERS.
Description. â Les Marshes s'Ă©tendent sur une longueur de cĂŽte
de plus de 200 kilomĂštres, depuis l'embouchure de la riviĂšre Nen
jusquâĂ celle de la riviĂšre Trent, dans lâ'Humber, au nord du Lincoln.
Entre Lynn et Wainfleet, de mĂȘme que sur les bords de la Trent,
les terres des Marshes, situées en contre-bas du niveau des hautes
marées, sont défendues par des digues, parfois espacées sur trois
ou quatre rangées qui correspondent aux avancements obtenus
dans la conquĂȘte des alluvions sur la mer. Sur la cĂŽte mĂȘme du
Lincoln, directement battue par les vagues de l'Océan du Nord, les
dunes de sable tiennent lieu de digues.
Les Marshes proprement dits, qui séparent les Fens du littoral,
se distinguent dâaprĂšs la formation plus ou moins ancienne de leur
sol et se divisent en un certain nombre de districts; le Marshland,
entre Lynn et Wisbeach ; le South Holland, entre Wisbeach et Spal-
ding ; le East Holland entre Spalding et Boston; enfin, le Marsh et
Middle Marsh, entre Boston et Wainfleet, sur la cĂŽte du Wash. Sauf
ce dernier district, les autres comprennent des terres endiguées de-
puis des siĂšcles et des atterrissements plus modernes.
Pas plus que les Fens, les Marshes, aujourdâhui assainis, ne sont
1. Rapport Ă la Chambre de commerce de Rouen, 20 novembre 1845 ; Journal
du génie civil, 1846.
D
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 239
marécageux. S'ils sont humides en hiver, ils sont souvent trop secs
en été. Le terrain, bien égoutté dans les anciennes parties, est enclÎ-
turĂ©, parsemĂ© de bouquets dâarbres et gĂ©nĂ©ralement bien cultivĂ©.
Les fermes, dont l'importance varie entre 40 et 100 hectares,
comprennent trois quarts de terres arables qui produisent dâabon-
dantes récoltes : pommes de terre, racines, céréales, trÚfle et four-
rages verts, et un quart de terres en pĂąturage permanent. On y Ă©lĂšve
et engraisse des moutons Ă longue laine, ou des demi-sang des races
de Leicester et de Down, venant du Norfolk, du bétail courtes cornes
et des chevaux.
La qualitĂ© du sol varie suivant lâĂ©loignement de la cĂŽte, câest-Ă -
dire selon lâĂąge des alluvions reprises sur la mer. Au voisinage des
digues, le sol formé de limon onctueux, noirùtre, convient aux pà -
turages pour lâengraissement du bĂ©tail. Quand le sous-sol de sable
pur nâest pas trop rapprochĂ© de la surface, la culture arable est pro-
fitable pour le froment, la navette, la moutarde, etc. ; mais le drai-
nage des terres offre une certaine difficulté par suite de la couche
aquifÚre souterraine (soak ou sock) dont la profondeur dépend du
niveau des marĂ©es et de la chute dâeau pluviale. Les tuyaux des
drains à 0",60 et 1 mÚtre de profondeur sont souvent noyés, et les
fossés qui servent aussi de clÎture ont l'inconvénient, à cause de la
permĂ©abilitĂ© du sol, de rester Ă sec pendant lâĂ©tĂ©, tandis que la
terre Ă©tant saturĂ©e en hiver, ils demeurent remplis dâeau stagnante
pendant des mois entiers. Lâabaissement du niveau des aqueduecs qui
entraĂźnent les eaux Ă la mer sous les digues, et des drains collec-
teurs ne sauraient manquer d'amĂ©liorer lâĂ©gouttement des Marshes et
des terres en bordure des Fens. La plupart des aquedues, ou Gouts,
comme on les dĂ©signe, qui drainent les Marshes, pourraient ĂȘtre
dirigés sur les canaux des Fens, ou sur les riviÚres à écluses, dont
le radier est notablement plus bas que le plan dâeau de la couche
souterraine.
Depuis le cadastre de Guillaume le Conquérant (le Domesday
Book), oĂč figurent les bourgs et villages du district des WMarshes, de
nombreux centres de population se sont fixés auprÚs des digues.
Sur les terres oĂč, du temps de Charles IT, existaient les marais et les
pĂąturages, des routes et des chemins de fer sillonnent aujourdâhui
236 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
le territoire, et les exploitations agricoles qui sv sont installées rap-
portent un fermage de 100 Ă 150 fr. par hectare.
La derniĂšre digue de South Holland construite en 1660, par delĂ
les digues romaines et Ravenâs Bank, suit un tracĂ© irrĂ©gulier. Plu-
tÎt escarpée du cÎté des terres, elle à une pente de 1 sur 5 du cÎté
de la baie ; son talus est entiĂšrement revĂȘtu de gazon, et sa base,
vers la plage, est exhaussée par rapport au niveau des terres endi-
guĂ©es. Il en est ainsi du reste Ă chaque digue, de sorte quâen avan-
çant vers la mer, le sol, aprÚs chaque levée est plus élevé. Aussi, la
vue de la mer est-elle absolument cachĂ©e de lâintĂ©rieur des Marshes.
Câest Ă peine si lâon aperçoit les voiles et les cheminĂ©es des bateaux,
qui naviguent dans la baie. Les marins ne se repÚrent, en pénétrant
dans les passes du Wash, que sur les clochers des villages, derriĂšre
les digues.
Au dehors des levées, à marée basse, les sables s'étendent jus-
quâĂ l'horizon ; la plage des polders, recouverte d'herbe fine, au ton
vert foncé, est pùlurée par des milliers de moutons et de bestiaux ;
plus loin, les sables sont masqués par la criste marine aux nuances
vives ; enfin, les sables vaseux ne laissent plus apercevoir que les
balises qui guident les bateliers dans les passes ouvertes de la baie.
Les alterrissements et les polders ne cessent de grandir sous lâac-
tion du courant qui amÚne dans le Wask les débris arrachés aux
falaises par la mer du Nord. Au fur et à mesure que déceroit la
vitesse de ce courant, le dĂ©pĂŽt sâaccentue davantage ; aussi est-on
obligĂ© de maintenir le chenal libre pour la navigation, Ă lâaide de
digues submersibles en pierres ou en fascinages, qui détournent les
sables. Câest au pied de ces digues et le long des Ă©pis, du cĂŽtĂ© opposĂ©
aux passes, que sâopĂšre le colmatage des polders, Ă raison de 0",60
d'Ă©paisseur par an.
Quand les sables sont assez exhaussés pour se recouvrir du limon
fin et argileux qui se précipite seulement dans les eaux absolument
tranquilles, les marshes verts ou herbus (green Marshes) sont prĂȘts
pour lenclÎture. Leur fertilité dépend surtout de l'apport des ma-
tiÚres végétales et animales par les algues, les varechs et les infu-
soires que l'Océan accumule à chaque marée sur les terrains col-
matés.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 231
4. â ComtĂ©s de Norfolk et de Cambridge.
a) Marshland.
Le district du Marshland, dâune superficie de 12000 hectares
environ, entre Lynn et Wisbeach, comprend 17 communes qui se
partagent le territoire alluvien regagné sur la baie.
Depuis que les travaux dont nous avons rendu compte, pour la
dérivation de la Great Ouse, à son embouchure (Eau Brink Cut),
ont Ă©tĂ© achevĂ©s, lâassĂ©chement du Marshland est dĂ©finiuf. Les deux
canaux principaux, Chancellorâs Lode et West Lynn Gaol, recueil-
lent les eaux pour les rejeter dans la riviÚre canalisée.
Le sol arable est formĂ© dâun mĂ©lange de sable marin avec la vase
argileuse, qui lui donne une ténacité remarquable. Suivant la pro-
portion d'argile, lâassolement varie de 4 Ă 5 annĂ©es. Lâassolement
de quatre années comporte : 1° jachÚre nue, parfois des turneps, ou
de la navette ; 2 blé ; 5° trÚfle, ou fÚves; 4° blé. Chaque commune
réserve dans les Marshes les plus éloignés de la mer des pùturages
sur loam riche, oĂč lâon fait parquer par hectare jusquâĂ 30 moutons
mĂ©lis (Down-Leicester), plus une tĂȘte de gros bĂ©tail. Dans beaucoup
de localités, on cultive la pomme de terre et les racines.
Indépendamment des levées intérieures qui protÚgent les Harshes
contre les eaux des Fens et des hautes terres, les digues Ă la mer
constituent une lourde charge d'entretien pour les communes limi-
trophes. Malgré la surveillance la plus active, il arrive que ces ou-
vrages se laissent entamer par les fortes marées ; les catastrophes
qui résultent de ce retour offensif des eaux de la mer sont parfois
terribles. Nous rappellerons les détails de celle survenue en 1862.
Inondation de 1862. â Le dimanche 4 mai de cette annĂ©e, une
des Ă©cluses du centre Level, situĂ©e Ă 6 kilomĂštres au midi de Kingâs
Lynn, cĂ©dait sous la pression dâune des hautes marĂ©es dâĂ©quinoxe,
comme avait cĂ©dĂ©, en 1713, lâĂ©cluse de Denver, et livrait passage
aux eaux de la mer du Nord. Cet ouvrage important, Tilney-gale,
par lequel les eaux du canal se déchargeaient dans la riviÚre Great
238 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Ouse récemment canalisée, avait probablement été affouillé dans ses
fondations ; en mĂȘme temps, le radier de la riviĂšre s'Ă©tait effondrĂ© ;
tant est que la marée arasant les défenses créait une brÚche de plus
de 100 mÚtres de largeur dans la digue, menaçait la face opposée
du canal par la base, et submergeait prĂšs de 5 000 hectares de ter-
rains en pleine culture dans les Marshes.
La prĂ©occupation dominante, au milieu de lâaffolement des popu-
lations, fut d'empĂȘcher que le dĂ©sastre ne sâĂ©tendit Ă 30 000 ou
40 000 hectares désormais livrés à la merci des eaux.
DĂšs le 7 juin, la brĂšche dans la digue orientale fut Ă peu prĂšs
comblĂ©e, moyennant 5 000 sacs de terre; mais la brĂšche dans lâautre
digue parallĂšle avait atteint 140 mĂštres d'ouverture et 8 mĂȘlres de
profondeur. Les sacs rĂ©sisteraient-ils jusquâĂ ce quâun batardeau sur
pilotis pĂ»t ĂȘtre construit ? Telle Ă©tait la question pleine de cruelles
indécisions qui agitÚrent les ingénieurs sous les ordres de M. Lunn,
surintendant du centre Level. Si la berge de la digue de lâest cĂ©dait,
les Fens Magdalen, Bardolph et Downham devaient ĂȘtre infallible-
ment noyés, car ils n'avaient pas assez de machines pour se main-
tenir à sec, en régime normal. De plus, les eaux d'inondation frap-
pant les digues du canal du Marshland Fen, menaçaient dâemporter
lâĂ©cluse dont la section avait seulement 3",20.
Les travaux de premiÚre urgence se concentrérent sur la réfec-
tion de la berge, moyennant lâĂ©tablissement dâune digue provisoire
et dâun batardeau, postĂ© Ă 900 mĂštres en aval de lâĂ©cluse dĂ©truite.
La digue fut construite Ă lâaide de fascinages en berceaux, flottĂ©s
de lâaval Ă travers le courant, et plongĂ©s par des caissons de pierres.
Quant au batardeau, on se dĂ©cida Ă lâĂ©difier sur une double rangĂ©e
de pieux Ă vis de 18 mĂštres de longueur, avec Ă©cartement de 2",15
destinés à recevoir en coulisse, pendant l'intervalle des marées, des
panneaux en bois de 0",15 d'Ă©paisseur, revĂȘtus de tĂŽle de 0,025
d'Ă©paisseur, sur une hauteur de 0,90.
Dix sonnettes à vapeur furent montées sur la plate-forme installée
Ă hauteur des tĂȘtes, afin d'activer le battage des pieux que lâon relia
entre eux par de forts madriers et des tirants en fer. En outre, des
étançons de gros calibre maintinrent le centre du batardeau, au fur
et Ă mesure de son avancement, contre les quais en pilotis bordant
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 239
l'ouvrage en amont et en aval. On espĂ©rait ainsi maintenir lâĂ©carte-
ment rigide entre les deux rangĂ©es de pilotis pour poser lâarmature,
et offrir une résistance compacte au flot ; mais la quatriÚme rangée
de panneaux Ă©tait Ă peine placĂ©e, que, malgrĂ© lâemplissage Ă lâaide
de sacs dâargile et de corrois, le batardeau se lĂ©zarda sur un grand
nombre de points, sous lâaction de la marĂ©e haute.
Les panneaux supĂ©rieurs durent ĂȘtre relevĂ©s pour laisser passer
la marĂ©e et empĂȘcher la destruction totale de lâouvrage si pĂ©nible-
ment appareillĂ©. On reconnut alors, Ă lâaide des plongeurs, que lâun
des panneaux de pied avait crevĂ© ; beaucoup dâautres s'Ă©taient dĂ©-
jetés; trois des maßtres pilotis s'étaient brisés, et Le lit du canal avait
subi un affouillement profond.
Sur l'avis des ingénieurs en chef, Hawkshaw et Linn, 1l fut con-
venu dĂšs lors, pour arrĂȘter lâaffouillement produit au pied des pan-
neaux, de foncer des pilotis servant de support au blindage, dans
l'intervalle des entre-toises, de les scier Ă hauteur en les arasant, et
de leur faire porter les panneaux. En mĂȘme temps, ordre fut donnĂ©
de renforcer les berges par des sacs de gravier au lieu de terre, et
de consolider les cadres Ă lâintĂ©rieur par du corroi. Plus de 100 000
sacs de terre avaient été déjà employés à cette date; des centaines
de wagons de corroi furent ensuite utilisés pour la consolidation de
l'ouvrage, qui résista finalement aux efforts des derniÚres marées
de juin.
En attendant, le niveau des eaux d'inondation sâĂ©levant sans cesse
à cause des travaux du batardeau et de la décharge des eaux de
dessĂ©chement du centre Level par lâĂ©cluse de Well-Creek, on dĂ©cida
de recourir Ă des siphons pour lâĂ©puisement, et au besoin, de main-
tenir les siphons en Ă©tat, au lieu de faire les dĂ©penses dâune nou-
velle Ă©cluse. Au mois d'octobre suivant, neuf siphons de 0,90 de
diamĂštre abaissaient, aprĂšs quelques jours, le niveau des eaux de
2" 39 Ă 1,40 sur une distance de 25 kilomĂštres ; câest-Ă -dire Jjus-
qu'Ă March Bridge.
Tandis que le batardeau progressait sous la direction de lâingĂ©-
nieur Smith, les autres digues crevées ou affouillées dans le Marsh-
land Ă©taient lâobjet de travaux urgents, conduits par l'ingĂ©nieur
Page, pour compte de la commission du district.
240 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
La digue Muller avait été abandonnée ; un éboulement nouveau se
produisit sur prĂšs de 30 mĂštres de longueur et 14 mĂštres de pro-
fondeur, dans la digue de lâouest. Cinquante ouvriers furent employĂ©s
Ă la combler avec des sacs de gravier, transportĂ©s par des yoles Ă
fond plat, depuis l'embouchure de la riviĂšre Humber jusquâau nord
de la brĂšche.
Sur la digue de lâest, lâaffouillement constatĂ© par les plongeurs
auprĂšs de Wash-Bridge, en face de la premiĂšre brĂšche, avait de
100 Ă 130 mĂštres de longueur et pĂ©nĂ©lrait jusquâĂ 1,50 au-dessous
du radier du canal ; lĂ aussi il fallut recourir Ă immersion des sacs
pour arrĂȘter les progrĂšs de l'Ă©rosion.
D'une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, les berges, depuis le barrage jusquâĂ
lâĂ©cluse de dĂ©charge dans lOuse, avaient perdu de leur soliditĂ© en
raison de lâimbibition des terres ; on dut les revĂȘlir de corroi.
En outre, il fallut songer, par l'Ă©tablissement dâaquedues Ă travers
les remblais du canal de WMarshlund, Ă diminuer les eaux du centre
Level. GrĂące Ă ces aquedues, le niveau baissant de 0,025 par jour,
jusquâĂ la cote de 0",60 au-dessous de eaux moyennes, constatĂ©e
avant lâachĂšvement du batardeau, Bardolph Fen fut assĂ©chĂ©, et suc-
cessivement les autres Fens purent ĂȘtre remis en culture, malgrĂ©
lâatterrissement. La couche formĂ©e de limon onctueux atteignait
déjà quelques centimÚtres d'épaisseur sur beaucoup de points.
Enfin, en vue de lâavenir, les commissaires du Marshland prirent
la rĂ©solution de faire Ă©lever une digue transversale, par rapport Ă
la brĂšche, et d'Ă©tablir une nouvelle Ă©cluse qui assure la situation du
Smealh Fen. La digue Ă la mer, construite par lâingĂ©nieur Page,
consista dans le fonçage de deux rangées de pilotis, distants entre
eux de 0",20, avec écartement de 3",60 entre les rangées. Sur la
face intĂ©rieure, le revĂȘtement fut fait en pieux ou rails mĂ©tal-
liques, espacés de 0,60. Entre ces pieux et les pilotis, on inter-
calait des madriers. Quant au remblai extérieur il fut formé de
pierres et de gravier, tandis que lâintĂ©rieur se comblait avec des
fascinages, des sacs de gravier et de terre, etc.
DâaprĂšs les devis des ingĂ©nieurs, lâensemble des travaux exĂ©cutĂ©s
pour la rĂ©paration des digues, lâĂ©puisement des Fens inondĂ©s, etc.,
et de ceux nĂ©cessitĂ©s par la sĂ©curitĂ© du district, devait sâĂ©lever au
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 241
chiffre dâun million et demi de francs. Il y avait lieu dâajouter Ă cette
somme 800 000 fr. de dommages-intĂ©rĂȘts Ă payer par la commis-
sion, moyennant le prélÚvement de taxes additionnelles.
Le bilan de lâaccident du 4 mai 1862 sâest rĂ©sumĂ© de fait, pour
les commissaires du Marshland, en une premiÚre dette hypothécaire
d'un million de francs, Ă intĂ©rĂȘt de 4 p. 100 lâan, et en une dette de
1 300 000 fr., Ă intĂ©rĂȘt de 4 1/2 p. 100 ; au total, 2 300 000 fr., Ă
répartir sur une surface de 45 770 hectares.
Digues Ă la mer. â Sir Joha Rennie rĂ©sume, dâaprĂšs sa longue
expérience, les conditions qui doivent présider à l'établissement des
digues Ă la mer.
Le tracĂ© des digues doit ĂȘtre fixĂ© autant que possible de façon Ă
laisser au-devant dâelles une plage qui amortisse la force des vagues,
et ne donner Ă lâouvrage quâune hauteur de 1",80 Ă 2",15 de vives
eaux Ă soutenir. MĂȘme avec cette profondeur moyenne, aux marĂ©es
haules, il peut se prĂ©senter telle tourmente, sous lâaction de vents
violents, amenant pendant trois ou quatre heures un paquet de mer,
qui cause de sérieux dommages à une digue mal consolidée.
Si la plage d'avant est assez spacieuse, une digue en terre bien
battue, de 9 ou 6 pour 1 de pente vers la mer, avec revĂȘtement en
argile de 0",45 d'épaisseur, soigneusement gazonnée, dépassant de
1",80 le niveau des marĂ©es dâĂ©quinoxes, la crĂȘte ayant 1",80 de lar-
ceur, le talus du cĂŽtĂ© de terre Ă©tant de 2 sur 1, avec un fossĂ© Ă
3 mÚtres de distance du pied, offrira la résistance voulue sur la-
quelle on pourra compter,
Dans certaines circonstances exceptionnelles, la digue ainsi cons-
truite sera, en outre, empierrée sur 0,25 d'épaisseur, ou protégée
par des fascines qui offrent le désavantage d'exiger des renouvelle-
ments fréquents.
Lorsque la plage est sujette à érosion, il esl nécessaire de la
défendre par des épis disposés de maniÚre à faire déposer les allu-
vions en suspension dans lâeau.
Enfin, par une mer profonde, si la digue devait résister à 3°,65
dâeau, le profil sera modifiĂ© en donnant au Lalus un allongement de
7 Ă 9 pour 1. Le revĂȘlement en argile sera aussi plus Ă©pais ; lâem-
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1. 16
242 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
pierrement et les Ă©pis seront plus forts, pour assurer la protection
de lâouvrage.
Que lâinclinaison moyenne du talus vers le large soit de #4 Ă 5
pour 1, et mĂȘme parfois de 3 sur 1, selon les circonstances qui va-
rient dâune localitĂ© Ă lâautre, il est essentiel de surveiller le pied de
la digue, et dans le cas oĂč une fissure se produirait, il ne faut pas
tarder à la couvrir par un épi porté aussi loin que possible.
Il est d'usage de prélever les matiÚres du remblai de la digue
dans la plage située au dehors ; mais il importe de ne jamais creuser
Ă moins de 10 mĂštres de distance du pied et de ne pas approfondir
les fosses d'emprunt au delĂ de 0,30 Ă 0",45. Pour se procurer le
volume de terre nécessaire on devra s'étendre en largeur, et laisser
des banquettes entre les chambres d'emprunt, afin d'Ă©viter que des
courants sâĂ©tablissent et dĂ©rangent le dĂ©pĂŽt des limons entraĂźnĂ©s par
les marées.
Quand on ne dispose pas de bonne argile pour le revĂȘtement, on
Fig. 3. â Type de digue Ă la mer.
recourra à de la terre mélangée avec de la paille, dont on fait un
corroi vaseux que lâon applique Ă lâĂ©tat humide, sur une Ă©paisseur
de 0",45 environ. Sur ce corroi, on battra Ă la dame 0",20 de pierres
cassées qui complÚtent la face du talus.
La figure 3 reproduit le type courant de digues, A, construites
en terre avec un noyau B en blocailles, ou en pierres, et un revĂȘte-
ment C en maçonnerie, dont le parapet a la forme concave pour mieux
résister aux vagues. Le talus, à un et demi de base pour un de hau-
teur, varie suivant les matériaux. D indique la limite des plus hautes
marées, E celle des basses eaux au pied de la digue.
3
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 243
b) Marshland Smeath.
Le Marshland Smeath, qui occupe 650 hectares, est un des plus
fertiles. La culture intensive sây poursuit sans engrais, peut-on dire,
et sans jachĂšre nue. Le drainage par tuyaux a contribuĂ© Ă lâamĂ©lio-
ration des terres récemment conquises sur la baie.
c) Walpole Out-Marsh.
A la suite des travaux exécutés par la Compagnie du Delta de Nor-
folk, dans l'estuaire de la Great Ouse, le territoire augmente pro-
gressivement. Le Marsh de Walpole compte parmi les plus récents
polders; 1l couvre 550 hectares ; un autre polder de mĂȘmes dimen-
sions a Ă©tĂ© enclĂŽturĂ©, il y a peu dâannĂ©es, le long du nouveau chenal
de la Nen; enfin, sur les 2 000 hectares qni doivent constituer le
Wingland, au moyen du Cradge Bank, la moitiĂ© environ est prĂȘte
pour lâendiguement.
d) Waldersea Marsh.
Le Waldersea Marsh (3 200 hectares) représente, pour un sol
tourbeux, mĂ©langĂ© dâargile, un ensemble des plus riches pĂąturages
et des terres arables de premiÚre qualité, dont le desséchement est
rendu définitif depuis la réfection des ponts-écluses de Wisbeach et
de Sutton.
e) Wisbeach Hundred.
Au nord de Marshland, le Wisbeach Hundred (7000 hectares)
est Ă©galement dâune grande fertilitĂ©. Sur les parties plus Ă©levĂ©es,
les terres en culture arable produisent de lourdes récoltes de cé-
rĂ©ales et de pommes de terre. On fume avec de la poudre dâos la
jachĂšre en navette, et avec du fumier le froment qui suit le trĂšfle
ou les fĂšves. Aux environs de Leverington, la culture en grand de
la menthe poivrée alimente quelques distilleries importantes.
244 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
2. â ComtĂ© de Lincoln (Spalding).
a) South Holland.
Le district South Holland, dâune contenance de 32 000 hectares,
est tout entier dans le Lincolnshire; il est bornĂ© au nord et Ă lâest
par la baie, au midi par le nord Level Drain, et Ă l'ouest par le
Welland.
Du cÎté de la baie, il est défendu par la digue construite en 1660,
et par des digues romaines Old Sea Dyke et New Sea Dyke, dont le
sol extérieurement est plus élevé de 1,80.
Dâautres digues, Ravenâs Bank est du nombre, avaient Ă©tĂ© Ă©tablies
jadis pour dĂ©fendre les Marshes contre lâenvahissement des eaux des
Fens. On retrouve dans les pĂąturages un grand nombre de tran-
chées parallÚles qui servaient évidemment à retenir les crues; les
remblais étaient utilisés comme refuges pour le bétail. Comme les
bĂȘtes paissaient le jour dans les terres humides et se retiraient le
soir sur les monticules, les meilleurs pĂąturages se trouvent auJour-
dâhui sur les hauteurs.
Dans toute la partie méridionale, la plus basse de South Holland
(environ 12000 hectares), le dessĂ©chement sâopĂšre par un systĂšme
de canaux courant de lâest, depuis Peak Hill, prĂšs de la digue du
Welland, jusquâĂ lĂ©cluse de la riviĂšre Nen, prĂšs de Sutton Bridge.
Ces canaux coupent presque Ă angle droit les drains qui se diri-
geaient autrefois vers Lords Drain, dans le Welland, Ă travers les
terres de niveau plus Ă©levĂ©. MalgrĂ© lâĂ©tablissement des nouveaux
canaux, celte partie du district frappée de taxes trÚs onéreuses resta
longtemps dans une situation des plus précaires au point de vue de
l'assainissement et de la culture. Les travaux de l'Eau Brink Cul,
en crĂ©ant une chute additionnelle de 2",45 Ă lâĂ©cluse, amĂ©liorĂšrent
définitivement cette situation.
Câest Ă la suite dâun endiguement de 2100 hectares, effectuĂ© en
4792, que les intĂ©ressĂ©s obtinrent du Parlement le vote dâune loi
autorisant le desséchement complet de la partie du territoire com-
pris entre le Welland et Lulton Leam. DâaprĂšs cette loi, un canal,
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 245
South Holland Drain, fut creusĂ© (1794-1795) entre Peterâs Point,
prĂšs de Sutton Bridge, avec une Ă©cluse pour rejeter les hautes eaux
de la riviÚre Nen, et Peak Hill, prÚs de la levée de Cowbit, sur une
longueur de 22 kilomĂštres et demi. Deux canaux servent dâembran-
chements, le Highlandâ's Drain (8 kilomĂštres) et le Lowlandâs Drain
(6 kilomÚtres) ; ils complÚtent, pour la parliz méridionale de South
Holland, le dessĂ©chement opĂ©rĂ© Ă lâouest par le Lordâs Drain qui,
lui, se décharge dans le Welland, à Wragg Marsh, prÚs de Spalding.
Un certain nombre de communes font Ă©couler directement leurs
eaux de desséchement à la mer, soit par le Shire Drain, comme
Sutton-Saint-Edmund, Tidd-Saint-Mary, Sutton-Saint-James, etc.,
sur 2300 hectares; soit par Lullon Leam, Moullon Creek, et dâautres
aqueducs qui traversent les digues.
Le long de la Nen, le sol est un loam épais, de riche qualité, et le
sous-sol est permĂ©able ; mais en sâĂ©loignant de la riviĂšre, il devient
plus tenace, à cause du mélange de l'argile et de la tourbe. Un signe
de richesse de ces terres résulte du fait que le pastel peut se cul-
tiver pendant trois et cinq annĂ©es consĂ©cutives, et ĂȘtre suivi de plu-
sieurs années de blé.
Aux environs de Long Sutton, le sol se prĂȘte Ă la culture inten-
sive du froment, de la moutarde, des racines, etc. ; les prairies y
sont en plein rapport, quoique sur des terrains trop sablonneux, oĂč
il y a excĂšs de matiĂšres salines, laxatives, lâherbe ne soit pas aussi
recherchée par le bétail.
Au nord de Moulton, jusquâĂ Foss Dyke, le long du Welland, le
sol des Marshes, tout en jouissant dâune grande fertilitĂ©, a une con-
sistance bien plus ferme qui se rapproche de celle du gault.
b) East Holland.
East Holland, dans sa partie limitĂ©e au nord et Ă lâouest, par le
canal Old Hammond Beck et au midi, par les riviĂšres Glen et Wel-
land, est intermédiaire entre les Fens et les Marshes. Le terrain, de
plus ancienne formation que celui des marais, réparti entre les com-
mupes de Gosberton, Donington, Swineshead, Wigtofl, etc., est
soumis Ă la culture arable ; et comme ces communes possĂšdent des
246 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Murshes dans la direction de la cĂŽte, vers Bicker Haven, elles peu-
vent combiner ainsi lâĂ©lĂšve du bĂ©tail avec la culture des terres.
Les canaux de desséchement, Old Ouse Mer-Lode, Five Towns
Drain, Kirton Drain, ete., sont, à vrai dire, des fossés, décrivant
des sinuosités sans nombre, avec des embran*hements dans tous les
sens, insuffisants mĂȘme pour le drainage des eaux pluviales. Il en
rĂ©sulte que les eaux sâinfitrent dans le sol et le sous-sol trĂšs poreux,
pour regagner souterramement les riviÚres ; malgré cela les terres
sont relativement sĂšches et figurent parmi les plus fertiles de la
contrĂ©e ; câest le cas surtout pour les exploitations situĂ©es Ă Wigtoft,
entre Donington et Kirton.
La partie méridionale de East Holland est bien desséchée par le
canal Risegate Eau, qui se dirige en ligne Ă peu prĂšs droite entre le
Hammond Beck et le Welland, vers Foss Dyke. Le reste du district
est drainé par le Foss Dyke Gout, dans le Welland, et par le Xirlon
Gout, à travers la digue. Ces deux canaux ou (Gouts reçoivent éga-
lement les eaux de divers Marshes : Sullerton, Frampton, etc.
De la commune de Kirton Skeldike jusquâĂ Kirton Holme, et sur
les Marshes de Frampton et Wyberton, les terres sont de premier
choix et portent les récoltes les plus épuisantes, tandis que du cÎté de
Boston, de Sutterton et dâAlgarkirk, le long du Wash, les herbages
pour lâengraissement des moutons et des bĂȘtes Ă cornes sont rĂ©pu-
tés parmi les meilleurs.
c) Marsh et Middle Marsh.
Le littoral du Wash, Ă partir de Boston jusquâĂ Wainfleet, pro-
tégé contre les irruptions de la mer par une digue dite romaine, est
couvert par les Marshes les plus fertiles, dont les pĂąturages, au dire
mĂȘme des agronomes anglais, sont la gloire du comtĂ© de Lincoln.
Leur sol consiste en humus noir, fournissant un loam dâune texture
remarquable, qui repose sur un sous-sol d'argile marneuse.
Quoi quâil en soit, la gloire de ces Warshes est chĂšrement payĂ©e.
La taxe des riverains pour l'entretien des digues dépasse en effet
10 fr. par hectare, et les digues ont été trop souvent insuffisantes pour
empĂȘcher lâenvahissement des fortes marĂ©es. Au mois de novembre
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 247
1810 notamment, le Marsh, par une énorme marée et un violent
ouragan, fut complÚtement lavé ou enseveli sous les débris des
digues ; la ville de Boston fut en partie inondée, et de Wainfleet
jusquâĂ Spalding, le territoire demeura longtemps submergĂ©, avec
perte de bĂ©tail, de rĂ©coltes et dâhabitations. Depuis lors, les digues
ont été rélablies sur de plus fortes dimensions, et surtout à une plus
grande hauteur ; elles ont résisté à la puissance des marées, ct les
inondations se bornent au refoulement des eaux douces par les Gouts
qui traversent les digues.
Le Middle Mursh oĂč Clays, qui sĂ©pare la bande des Marshes ma-
rimes des terrains de l'Eust Fen, prĂ©sente aussi un sol arable dâune
rare fertilitĂ©. Câest dans les deux districts que les communes de Fries-
ton, Butterwick, Leverton, Wrangle, Friskney, Wainfleet, etc., par
l'Ă©lĂšve et lâengraissement du bĂ©tail, puisent les ressources nĂ©cessaires
pour le développement de l'exploitation des Fens assez médiocres
qui bordent les wolds.
3. â ComtĂ© de Lincoln (littoral).
North Marshes, â Les Marshes du Lincoln ne s'arrĂȘtent pas Ă
Wainfleet, mais se prolongent tout le long de la cĂŽte vers le nord,
jusque dans l'estuaire de lâ'Humber ; ils occupent environ 30000 hec-
tares.
Les eaux du vaste bassin des wolds et des clays qui domine la
cÎte descendent sur la plage, occupée par les Marshes, en se
frayant, vers l'embouchure dans la mer des lits qu'il a fallu endiguer
pour empĂȘcher les inondations et maintenir le chenal au milieu des
alluvions du littoral. Les cours dâeau naturels servent ainsi de ca-
naux collecteurs; ce sont les cloughs, eaux, fleets et grifts, comme
on les appelle, qui traversent les digues pour dĂ©charger les eaux Ă
marĂ©e basse. On rĂ©unit souvent trois ou quatre canaux que lâon fait
dĂ©boucher par un seul Ă©missaire ou aquedue, avec Ă©cluse, comme Ă
Saltfleet, à Trusthorpe, Anderby et Hogstorpe. Le desséchement des
Marshes du nord ne laisse guÚre à désirer que sur quelques points,
comme entre Grimsby et Barton, Ă Barrow, Ă cause du manque dâen-
trelien des canaux particuliers.
248 , ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Entre Humberston et Louth, les canaux de desséchement passent
sous le canal de navigation, Ă lâest duquel se retrouvent des Fens,
câest-Ă -dire des landes en terrain bas, appartenant aux communes
voisines et que lâon a complĂštement dessĂ©chĂ©s ; Grainthorpe Fen a
été un des premiers rendus à la culture.
De Carlton jusquâĂ la mer, la bande du littoral est traversĂ©e par
des digues parallÚles, constituant des polders séparés, dont les eaux
sont épuisées, à Great Carlton et à Gayton-le-Marsh, par des ma-
chines Ă vapeur. On compte Ă lâest dâAlford plus dâune douzaine de
moulins Ă vent qui Ă©puisent les eaux des Marshes appartenant aux
communes de Bilsby, Huttoft, Thurlby, Cumberworth, etc.
Enfin, les communes de Burgh, de Winthorpe, Skegness et Croft,
dont les Marshes sâĂ©gouttaient directement Ă la mer, ont dĂ©tournĂ©
les eaux par un canal de 5 kilomÚtres de longueur, pour les déverser
dans la crique de Wainfleet, oĂč les sables nâencombrent pas lâĂ©cluse.
I. â LES FENS ET LES COLMATAGES DU LINDSEY NORD LEVEL
(COMTĂ DE LINCOLN)
Les grands travaux de régularisation des riviÚres Welland et Wi-
tham, et le dessĂ©chement des Black Fens, de lâouest au nord de la
baie du Wash, ne sont pas les seuls dont le comté de Lincoln ait eu
Ă ĂŒrer parti pour l'amĂ©lioration du sol, le relĂšvement de la produc-
tion agricole et lâassainissement de la contrĂ©e. Il reste Ă dĂ©crire des
Opéralions non moins importantes, exécutées aux embouchures des
riviĂšres Trent, Ouse et Ancholme dans lâ'Humber, et dans les vallĂ©es
qui comprennent le Axholme Level et le Ancholme Level.
4. â Le bassin de l'Humber.
Le bassin hydrographique de lâHumber qui sĂ©pare le comtĂ© de
York de celui de Lincoln est le plus Ă©tendu que possĂšdent les Ăles
Britanniques, car il reçoit les eaux en totalité de trois comtés, York,
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 249
Derby et Stafford, et celles, en partie, des comtés de Leicester et de
Lincoln, représentant le cinquiÚme à peu prÚs de la superficie totale
de l'Angleterre. I embrasse 225 kilomĂštres du midi au nord, et
119 kilomĂštres de lâouest Ă lâest. Des quatre riviĂšres principales qui
dĂ©bouchent dans lâ'Humber, deux se rejoignent, la Trent et lâOuse,
pour former lâHumber ; le Hull y afflue de la rive du Yorkshire, et
lâAncholme, de la rive du Lincolnshire.
L'Ouse et la Trent, avec leurs nombreux affluents, lâAire, le Cal-
der, le Don, le Derwent, la Dove, le Devon, lIdle, etc., qui traver-
sent les terrains secondaires et triasiques, forment Ă leur confluent
un vaste delta, de plus de 400 kilomÚtres carrés, dont le niveau est
inférieur à celui de l'Océan du Nord. A partir de ce delta coule
lâ'Humber, servant de chenal aux deux riviĂšres, sur 64 kilomĂštres
environ, jusquâĂ la mer. Les rives de lâ'Humber sont situĂ©es Ă 1",85
au-dessous du niveau des marĂ©es de vives eaux, dans lâestuaire, non
loin de l'Océan. Aussi, ne serait-il pas endigué, que le delta tout
entier serait périodiquement submergé et converti en lagune.
Dans la contrée que nous avons précédemment décrite, les digues
le long de la cĂŽte du Lincoln et dans la partie de la baie du Wash,
qui arrĂȘtent les eaux des Fens, sont soumises Ă la fois aux attaques
des vagues et Ă la pression des eaux des crues. Dâautre part, les
riviĂšres du Wash ne drainent qu'un bassin de 15 000 kilomĂštres
carrĂ©s et dĂ©bouchent au milieu dâun large golfe oĂč la plage, formĂ©e
par de vastes bancs de sable, modĂšre lâaction des flots de la marĂ©e
et des crues. à marée basse, la plage a une largeur de 4 à 5 kilo-
mĂštres, et câest seulement Ă marĂ©e haute que les digues ont Ă sup-
porter lâaction des vagues.
Il nâen est pas ainsi de lâ'Humber, dont les riviĂšres tributaires
rayonnent dans les comiés de York, Derby, Statford et Nottingham,
sur un bassin bien plus vaste, oĂč un tiers est recouvert de gra-
viers et dâalluvions, et dĂ©bouchent dans un estuaire torlueux. Au
lieu de border les terres riveraines dâune ceinture, comme dans les
Marshes, les sables précipités par les eaux limoneuses de la Trent
et de lâOuse forment d'immenses bancs au milieu de lâ'Humber, tels
que le Witton Sand, le Old Warp, le Skilter Sand, etc., et le cou-
rant se divise le long des rives en deux passes profondes, de sorte
250 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
que les marais dâAncholme, qui sont siluĂ©s sur une courbe concave
de lâestuaire, en face dâune pointe de la cĂŽte du Yorkshire, ont Ă
supporter le choc direct du courant et des vagues de lâOcĂ©an. Le
chenal de lâ'Humber est dâailleurs si rapprochĂ© des digues de dĂ©fense
des marais, que lâaffouillement ne sâarrĂȘte pas sous lâaction de
marées dont la vitesse est de 15 kilomÚtres à l'heure. Aussi, quelles
que soient les dimensions des digues, le soin essentiel consiste dans
l'entretien des enrochements Ă leur pied, et du revĂȘtement de leur
talus, du cĂŽtĂ© de l'estuaire ; Ă dĂ©faut dâune surveillance et dâune
réparation continuelles, les digues cÚdent, et les nouvelles levées
doivent ĂȘtre reportĂ©es Ă l'arriĂšre pour faire place aux Ă©rosions com-
binées du fleuve et de la mer.
Les riviĂšres Ouse et Trent, dans leur trajet en aval sur les grĂšs du
trias, on! tellement corrodĂ© les marnes du Keuper, quâelles aban-
donnent dans l'estuaire de l'Humber des atterrissements Ă©normes
dont une partie seulement gagne la mer.
Soit Ă cause dâune chute moindre des pluies annuelles dans le
-bassin de ces riviĂšres, soit par suite de dĂ©rivations dans lâĂ©coule-
ment des eaux de drainage et de pluie, dues Ă l'extension des tra-
vaux de desséchement et à la culture plus profonde des terres, jadis
mal entretenues, la mer, depuis quelque temps, a repris le dessus
et nettoyĂ© une partie de lâancien delta. Le travail offensif de l'OcĂ©an
se poursuit Ă celte distance, dâannĂ©e en annĂ©e ; il a Ă©tĂ© Ă©valuĂ© Ă plus
de deux mĂȘtres dâĂ©rosion, sur toute la cĂŽte entre Kilnsea, prĂšs de
Spurn Point, et Bridlington*.
La masse de dĂ©tritus, en nâĂ©valuant quâĂ 10 mĂštres la hauteur
moyenne des falaises de la cĂŽte Holderness (or, celle de Dimlington
atteint 42 mĂštres au-dessus du niveau de la mer), peut ĂȘtre estimĂ©e
Ă 1 million de mĂȘtres cubes par an. Une grande partie tombe Ă la
mer et va rejoindre par les courants les matériaux déversés par le
Rhin et les Ă©rosions des cĂŽtes de la Hollande ; mais une partie no-
table est utilisée pour le colhnatage (warping) des rives de l'Hum-
ber. En effet, les eaux limoneuses repoussées par les hautes marées,
surtout aux équinoxes, sont introduites dans des canaux spéciaux
1. J. Oldham, Proceedings Inst. civil Engineers, t. XXI, p. 454.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 251
qui facilitent la submersion des terrains inférieurs et le dépÎt des
matiĂšres Lenues en suspension. On arrive ainsi, en renouvelant aussi
fréquemment que possible la circulation des eaux troubles, à com-
bler les dépressions, à élever de 0",30 à 0",45 le niveau de plu-
sieurs milliers d'hectares, dont le sol parfaitement nivelé, grùce au
mélange avec les sédiments, acquiert une fertilité exceptionnelle.
On estime que les sédiments entrainés par les eaux marines et
les eaux douces suffiraient pour colmater annuellement, sur 0",50
d'Ă©paisseur, plus de 300 hectares. Câest dans les annĂ©es sĂšches,
lorsque les eaux des riviĂšres sont moins troublĂ©es et Ă lâĂ©tiage, que
le colmatage progresse plus rapidement.
Câest Ă©galement pendant lâĂ©lĂ© que les atterrissements, dus Ă lâeau
des riviĂšres, augmentent dans le chenal, faute de courant, jusquâĂ
lâobstruer complĂštement aux environs de Thorne. Les marĂ©es dâau-
tomne et de printemps se chargent heureusement dâen dĂ©barrasser
l'estuaire.
La riviĂšre Humber, si on peut donner le nom de riviĂšre Ă cette
passe oĂč dĂ©bouchent lâOuse et la Trent, couvre, aux marĂ©es de
printemps, une surface de 285 kilomÚtres carrés ; les terrains qui
ont été conquis actuellement en dehors du périmÚtre submergé
représentent 790 kilomÚtres carrés. Aussi, la riviÚre est-elle endi-
guée sur tout son parcours ; les digues dominent certains lerrains
et les vastes marais Ă dessĂ©cher dâune hauteur de 2",75.
Au-dessous des alluvions servant de lit Ă l'estuaire, on rencontre
la craie, qui, en face de lâĂźle de Sunk, est Ă 6 mĂštres de profondeur.
Des amas dâargile, de gros gravier, de gros cailloux et de rognons
pierreux, reposant sur cette craie, forment des Ăźles que la mer a
respectées.
Avant de décharger ses eaux, à Spurn Head, dans l'Océan du
Nord, lâ'Humber reçoit: sur la rive nord, une sĂ©rie de petits affluents
ou de ruisseaux, et le Mill Beck, qui lui apportent les sédiments des
terrains du pied des wolds ; sur la rive sud, lâAncholme, qui a donnĂ©
lieu à des travaux trÚs importants de canalisation et de régularisa-
tion depuis le xvrr siĂšcle ; et finalement la riviĂšre Hull, sur la rive
nord, qui draine la cĂŽte de Holderness..
252 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
a) Pratique du colmatage (warping).
L'eau des marĂ©es remontant par lâHumber dans la Trent, l'Ouse,
le Don, etc., est trĂšs limoneuse. Un tube de 15 centimĂštres de lon-
gueur, rempli de cette eau, laisse dĂ©poser un centimĂštre, et mĂȘme
davantage, de limon vaseux. Quant Ă la riviĂšre mĂȘme, elle coule
limpide Ă son embouchure ; aucune crue de ses affluents ne lui
apporte de limon ; au contraire, les crues nuisent au colmatage, car
celui-ci s'opĂšre avec d'autant plus de rapiditĂ© et dâabondance que la
sĂ©cheresse de lâĂ©tĂ© s'Ă©tant prolongĂ©e, le volume des eaux de riviĂšre
est plus rĂ©duit. Câest donc aux eaux de marĂ©e que lâon est redevable
du colmalage qui se pratique avec tant de succĂšs sur les rives de
lâ'Humber. Il est probable toutefois que les matiĂšres minĂ©rales ter-
reuses, charriĂ©es par lâOuse et la Trent et reprises par le flot de la
mer, contribuent à la fertilité des alluvions.
Le procédé du warping, de l'avis d'Arthur Young, est efficace
dĂšs que lâon peut disposer des eaux Ă volontĂ©, les admettre sur le
terrain ou les évacuer librement, par des canaux bien aménagés.
En outre, faut-il que la nappe dâeau limoneuse ait l'Ă©paisseur voulue,
grĂące Ă un endiguement assez rĂ©sistant, el puisse ĂȘtre maintenue Ă
cette épaisseur pendant le temps nécessaire à la précipitation des
parties sédimentaires les plus fines.
Sur de grandes surfaces, le canal principal d'amenée peut avoir
plusieurs kilomĂštres de longueur ; on a Ă©tabli des canaux qui avaient
6 kilomÚtres, et des branchements en plus, de chaque cÎté ; mais il
y Ă lieu d'observer que lâeffet du limonage sâattĂ©nue lorsque la dis-
lance augmente, câest-Ă -dire que lâopĂ©ration exige dâautant plus de
temps que le terrain est plus éloigné du point d'admission des eaux
de marée, sur la rive.
La pratique du warping remonte à la moilié du siÚcle dernier.
CommencĂ©e sur les bords de lâ'Humber, Ă Rawcliff, puis Ă Howden,
en 1743, elle ne sâest dĂ©veloppĂ©e, dans le bassin en amont, que de-
puis les Ă©crits de Marshalâ, de Lord Hawke * et de Day°. En 1800,
1. Rural Economy of York, 1788.
2. Agricullural survey of Yorkshire, p. 164.
3. Report of West Riding of Yorkshire, Agricultural survey.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 253
on comptait à peine un millier d'hectares de terres colmatées dans
l'estuaire de lâ'Humber ; en 1860, dans lâĂźle dâAxholme seule, on avait
colmaté plus de 4000 hectares. Le territoire du Marshland de York-
shire, dans le voisinage immĂ©diat de Axholme, et celui situĂ© Ă lâest
de la Trent (5 000 hectares), ont été complÚtement colmatés depuis
le commencement du siĂšcle.
Le terrain soumis au warping est endigué de tous les cÎtés, au
moyen de levĂ©es faites en terre que lâon extrait sur place. Ces levĂ©es
ont une pente qui varie de 1,20 Ă 1",50 pour 1 de hauteur per-
pendiculaire, et une largeur Ă la crĂȘte qui dĂ©pend de la force des
marées ; mais le plus souvent, elle est de 0",60 à 0,90. Aussi bien
la hauteur que la largeur des digues se calculent, du reste, dâaprĂšs
le niveau des eaux vives, pour qu'on puisse les introduire ou les
exclure Ă volontĂ©, comme aussi dâaprĂšs la surface de lâenceinte du
terrain Ă colmater et le volume des eaux.
Suivant les dimensions du terrain endigué, on ménage une ou
plusieurs Ă©cluses ; le plus souvent, on en pratique deux, lâune
(floodgate) pour introduire la marĂ©e, lâautre (clough) pour lĂ©va-
cuer. La surface, pour deux Ă©cluses, est comprise entre 5 et 6 hec-
tares. Ă marĂ©e montante, lâĂ©cluse dâaccĂšs s'ouvre et livre passage Ă
lâeau dans le canal principal, dont la surface est environ trois fois
plus grande, afin dâĂ©viter toute rĂ©sistance Ă l'Ă©coulement, tandis que
la vanne de dĂ©charge est maintenue fermĂ©e par le poids de lâeau
mĂȘme qui monte. Ă marĂ©e descendante, lâaction inverse se produit.
LâĂ©cluse de dĂ©charge est construite de maniĂšre que les vannes fonc-
tionnent automatiquement à marée basse, entre le reflux et le flux
suivant, et lâeau retourne Ă la riviĂšre, en curant les canaux dans les-
quels elle a opĂ©rĂ© le dĂ©pĂŽt de matiĂšres. LâĂ©cluse dâaccĂšs est placĂ©e
Ă un niveau tel que les eaux vives seules peuvent entrer dans lâen-
ceinte ; câest-Ă -dire que le seuil est plus haut que le niveau des
marées de mortes eaux. Parfois, il convient de planter en avant de
la digue, du cÎté de la riviÚre, quelques arbres, des saules notam-
ment, qui brisent la vague et facilitent lâatterrissement au pied de la
digue.
Le canal principal dâamenĂ©e est tracĂ© jusquâĂ l'extrĂ©mitĂ© opposĂ©e
du terrain ; mais pour empĂȘcher que le dĂ©pĂŽt ne sâaccumule Ă lâen-
254 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
trée et sur son parcours, on pratique des saignées latérales qui con-
duisent lâeau directement et plus rapidement sur les autres points
Ă©loignĂ©s, de façon Ă Ă©galiser lâatterrissement. Il faut toujours avoir
soin, lors de lâĂ©vacuation des eaux, de ne laisser la nappe que sur
l'Ă©paisseur voulue, afin de ne pas empĂȘcher l'accĂšs des eaux de Ja
marée suivante.
Dans lâĂźle dâAxholme, tout propriĂ©taire dont les terres bordent un
des canaux publics de colmatage, peut se servir des eaux en perçant
la digue; mais sâil v a opposition, il est tenu dâacheter le terrain de
la dérivation. Le paiement de ce terrain se fait au prix d'usage, et
celui de la percée dans la digue, à demi-prix ; mais comme le ven-
deur conserve la propriĂ©tĂ© de la digue et le droit Ă lâherbe, l'mdem-
nité est plus que suffisante. De plus, tout propriétaire qui établit
une Ă©cluse sur la rive doit s'engager vis-Ă -vis des commissaires
(Sewers commissioners) Ă payer tous dommages, en cas d'accident.
On nâemploie d'ordinaire que les eaux vives ou malines, parce
quâelles ont assez de reflux pour dĂ©gager les canaux et Ă©viter leur
obstruction.
Le colmatage commence généralement en juillet, et dure tout l'été.
Les digues, les Ă©cluses et les canaux sont mis en Ă©tat avant la sai-
son, afin de ne pas perdre lâavantage dâaucune des marĂ©es de vives
eaux. L'Ă©tĂ© est la saison prĂ©fĂ©rĂ©e, parce que les colmates sâĂ©gouttent
plus vite et que les marĂ©es sont moins mĂ©langĂ©es dâeaux douces. Il
nâest pas rare, en nâayant recours qu'aux eaux vives, d'obtenir 0",45
d'Ă©paisseur de limon en un an, moyennant une seule Ă©cluse, sur un
compartiment peu Ă©tendu. On compte, dans lâĂźle dâAxholme, sur
0,80 Ă 0,90 d'Ă©paisseur en deux ans. Lorsque la couche tour-
beuse, de 2,50 à 3 mÚtres, a été colmatée, comme dans les Crowle
Moors, le sol sâaffaisse aprĂšs quelques annĂ©es de culture, et il de-
vient nécessaire de colmater une seconde fois.
Ă la distance de 35 ou 6 kilomĂštres de la riviĂšre, le limon est
encore assez abondant pour que lâon essaye de colmater avec chance
de rĂ©ussite, mais les canaux dâamenĂ©e doivent alors ĂȘtre trĂšs spa-
cieux, dâune largeur de 8 Ă 10 mĂštres. Il importe, en effet, que la
masse dâeaux vives soit rapidement introduite pendant le flot, et
s'écoule par un canal à large section entre deux marées.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 255
Il est facile de déterminer la section à donner aux écluses, en
recourant aux formules basées sur le débit en mÚtres cubes par
seconde ; mais on conçoit que plus les dimensions des vannes sont
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Fig. 4.
fortes, plus la dépense est grande quand le terrain à warper est peu
Ă©tendu.
Les vannes sont souvent automatiques; câest-Ă -dire que les marĂ©es
296 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
montantes ferment par leur pression la vanne de décharge elouvrent
la vanne dâamenĂ©e. Le contraire a lieu dans les marĂ©es basses.
La figure 4 reproduit le plan dâune opĂ©ration de colmatage sur
les bords de la Trent; les cotes de nivellement sont en mĂštres :
ab est la digue de riviĂšre, et cegh le canal principal dâamenĂ©e,
servant également à la décharge des eaux. Le terrain à warper est
partagé en six compartiments; les flÚches indiquent la direction que
suit lâeau dans les canaux pendant les marĂ©es montantes.
La hauteur de lâeau qui recouvre le terrain varie naturellement
suivant son niveau par rapport Ă celui des eaux vives ; quand cela
est possible, on la maintient entre 0",90 et 1,50, car la proportion
de limon dĂ©pend en somme de lâĂ©paisseur de la nappe dâeau de ma-
rĂ©e ; mais on obtient le mĂȘme rĂ©sultat en prolongeant lâopĂ©ration
avec des nappes moins profondes.
Il est dâusage de ne colmater que deux ou trois piĂšces de terrain
chaque annĂ©e, de façon Ă Ă©tendre sur un certain nombre dâannĂ©es
l'opĂ©ration de colmatage dâun domaine. Le limon, ou la colmate,
exige quelque temps avant de résister sous les pieds; 1l y a de graves
inconvénients à commencer la culture avant qu'il soit suffisamment
épais et naturellement drainé.
Le coût du colmatage est trÚs variable suivant la situation des
terrains relativement Ă la riviĂšre. |
Arthur Young regardait comme un maximum le coĂ»t de 350 Ă
000 fr. par hectare. Or, l'évaluation exacte de la dépense comprend
non seulement les frais de construction des digues, des canaux, des
vannes, etc., mais encore la surface que les travaux exécutés per-
mettront de cultiver Ă©conomiquement. En effet, avec un mĂȘme
nombre de vannes, ou bien, avec un nombre plus ou moins grand
de vannes dans une enceinte déterminée, on pourra beaucoup di-
minuer le coût général, si la surface est étendue.
Day estimait quâen dĂ©pensant de 120 Ă 250 fr. par hectare, dans
les meilleures conditions, on créait des terres dont la valeur aug-
mentait au décuple; plus le sol primitif est mauvais, ajoutait-il,
tout en Ă©tant permĂ©able, et plus il sâenrichit par le colmatage. Des
1. Pareto, Irrigation et assainissement, t. If, p. 1040.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE, 251
terrains valant Ă peine 300 fr. par hectare ont obtenu par le colma-
tage une plus-value de 2500 et 3 000 fr., due aux riches et abon-
dantes rĂ©coltes quâils produisent sans le secours dâaucuns engrais,
pendant nombre d'années, et à la possibilité de les limoner de nou-
veau. Il importe, pour cela, que le terrain soit toujours soigneuse-
ment entretenu, au point de vue des plantes adventices et des drains
qui Ă©gouttent les eaux, quand ils ne servent plus au colmatage.
Dans l'ile dâAxholme, le coĂ»t du colmatage des terres qui longent
les canaux publics (creusĂ©s lors de lâenclĂŽture en 1795), ne sâĂ©lĂšve
pas au-dessus de 130 fr. par hectare ; mais ailleurs, quand on doit
compter la dépense des canaux, des éciuses, etc., le coût atteint de
700 à 1 200 fr. ; le sol inculte et stérile avant le colmatage acquiert,
il est vrai, une valeur de 4 000 et 6 000 fr. par hectare *. D'ailleurs,
la qualité des terres colmatées varie beaucoup. Au voisinage des ca-
naux, elles sont plus sablonneuses que plus loin, et le rendement
agricole se ressent de la proportion de carbonate de chaux et dâar-
gile du terrain primitif, ou mieux, du sous-sol.
Quand le warping est achevĂ©, Ă la fin de lâannĂ©e, on donne un
léger labour ou hersage, pour installer des bandes de 3",60 de lar-
geur que lâon laisse en jachĂšre pendant tout lâhiver. Lâon sĂšme au
printemps, le plus souvent, des graines de prairie et dâavoine mĂ©-
langĂ©es ; on coupe lâavoime, les moutons pĂąturent l'herbe pendant
deux annĂ©es, en fertilisant le sol, et permettent Ă lâexcĂšs de sel de se
dissoudre. La récolte suivante est fournie par le blé qui reste pen-
dant plusieurs annĂ©es consĂ©cutives. Il arrive que lâon rĂ©colte avec le
blé, dÚs la premiÚre année, du trÚfle blanc, venu spontanément au
milieu dâune foule d'herbes adventices telles que, moutarde, cres-
son, céléri sauvage, patiences, chardons, etc. Le point essentiel est
dâassurer un bon drainage aux sols qui viennent dâĂȘtre colmatĂ©s.
La premiÚre récolte, trÚfle rouge ou blanc, mélangée avec du
ray-grass et maintenue pendant deux années, consolide le sol par
leutrage et le prépare à recevoir le blé. Les pommes de terre et le
chanvre ne réussissent pas dÚs le début ; le sol est trop froid*?. Tou-
{. Ă. Clarke, Farming of Lincolnshire, loc. cil.
2. Loudon, CyclopĂŠdia of agriculture, p. 664.
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â r. 17
258 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
tefois, sur la rive orientale de la Trent, on suit un assolement qui
consiste en : 1° graines fourragÚres avec quelque peu de navette ;
90 fÚves; 3° blé; 4 chanvre et 5° blé; puis une jachÚre nue pour se
débarrasser du chiendent qui se propage avec une activité remar-
quable. Clarke estime que la valeur des terres colmatées est sur-
faite : lorsque le blĂ© se vend Ă 25 fr. lâhectolitre, la rente locative
de ces terres ne devrait pas surpasser 120 fr. par hectare *.
Drainage des colmates. â Tous les atterrissements nâont pas un
égal besoin de drainage ; il faut considérer la profondeur du dépÎt,
la nature du sous-sol et la nature de lâalluvion elle-mĂȘme.
Parkes constate quâĂ l'embouchure de lâ'Humber, l'argile, dans
les atterrissements, prédomine sur la silice, et que l'inverse a lieu
aux environs de Goole et de Thorne, oĂč les alluvions sont formĂ©es
par lâOuse.
Lâalumine des atterrissements de lâ'Humber est trĂšs belle et trĂšs
hygroscopique. AprĂšs un mois dâune Ă©vaporation Ă©nergique et de
sĂ©cheresse (mai Ă juin), lâeau se montre dans le sol Ă 0,45 de la
surface, et les conduites de drainage placées à 1",20 et 1,80 de
profondeur suivant la pente, avec 12,50 d'intervalle, débitent
copieusement. Toutefois, dans son état primitif d'humidité, pendant
la saison sĂšche, le mĂȘme sol se crevasse aussi largement et aussi
profondément que les argiles les plus fortes.
Selon que les dĂ©pĂŽts de lâ'Humber sont formĂ©s par la Trent, ou
par lâOuse, et renferment des proportions diffĂ©rentes d'argile, de
silice et de sel, la fertilitĂ© est diffĂ©rente. Cette remarque sâapplique
en gĂ©nĂ©ral Ă tous les cours dâeau, suivant la distance plus ou moins
grande de leur embouchure.
A Bridgewater, dans le comté de Somerset, la riviÚre Parrot a
formé au milieu du petit bras de mer qui avançait jadis dans les
terres, des atterrissements, aujourdâhui couverts de riches prairies,
toujours verdoyantes. Or, câest Ă un mille au-dessus, et Ă un mille au-
dessous de la ville de Bridgewater, sur les bords mĂȘmes de la riviĂšre,
que lon trouve le limon servant de poudre de tripoli dans l'usage
1. Farming of Lincolnshire, loc. cit., p. 379.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 259
domestique (sous le nom de Bath brick). Sauf en ces deux endroits,
à la jonction des anciennes eaux salées et des eaux douces, on ne
trouve plus les substances propres à donner par leur réunion le poli
à la coutellerie et aux ustensiles en métal ; l'efficacité est attribuée
aux dĂ©bris siliceux des infusoires dĂ©truits par lâeau de merâ. Lâat-
terrissement formé plus avant dans les terres, ou plus prÚs de la
mer, nâa pas les mĂȘmes propriĂ©tĂ©s.
Dans certaines alluvions humides, plus rapprochées des embou-
chures, oĂč domine le sel, un drainage profond et complet peut seul
permettre dâen accroĂźtre la fertilitĂ©. Aux environs de Patrington
(Humber), on commence par les abandonner pendant trois ans Ă ce
que lâon appelle l'herbe aux moutons ; puis on laboure et on em-
blave en navette, quâon laisse venir Ă graine, au lieu de la donner
aux brebis portiÚres. Cette plante est trÚs propre à débarrasser le
sol de lâexcĂšs de sel, et fournit d'excellents rendements. On sĂšme
ensuite du blé, qui, malgré la cristallisation saline encore apparente
Ă la surface, donne jusquâĂ 22 hectolitres par hectare, et les cul-
tures aprÚs le blé ne sont soumises à aucun assolement pendant plu-
sieurs annĂ©es oĂč lâon se passe dâengrais.
Les alluvions plus Ă©loignĂ©es des embouchures demandent Ă ĂȘtre
drainées avec discernement. Un profond drainage, trÚs énergique,
soutire lâeau et lâentraĂźne loin de la surface, lorsqu'elle est en
excĂšs. En temps de sĂ©cheresse, on maintient le niveau de lâeau
dans les fossés, en y introduisant celle des drains des terres supé-
rieures, pour quâelle reste prĂšs de la surface, Ă la portĂ©e des ra-
eines.
Parfois on se borne Ă exploiter les atterrissements par piĂšces de
4 hectares, entourés de fossés découverts dont la pente est calculée
de façon Ă procurer au sol lâĂ©gouttement que lâon regarde comme
suffisant ; pendant les sĂ©cheresses on fait emplir dâeau ces fossĂ©s. Il
est Ă©vident quâun systĂšme combinĂ© de drainage profond et dâirri-
gation souterraine est à tous égards préférable pour de pareils sols,
dans la saison humide et pendant les chaleursâ.
1. David Page. Economic geology, 1874, p. 202.
2 J. Parkes. Du drainage profond. (Journ. agric. prat., 1850, p. 421.)
260 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
b) GĂ©ologie.
Le sol dâalluvion, le long de la riviĂšre Trent, Ă l'est, est extrĂȘme-
ment riche, jusquâĂ la rencontre des landes tourbeuses, au pied des
collines de grÚs rouge et du lias; mais ces landes ont été colmatées
sur une épaisseur de 0",45 à 0",90 et transformées en terres de
premiÚre qualité pour toutes espÚces de récoltes. La bande de ter-
rains riches qui cĂŽtoie la Trent reprĂ©sente une surface de 3000 Ă
4000 hectares.
Dans lâĂźle dâAxholme 6 000 hectares de terres colmatĂ©es, en partie
par la Trent et en partie par les eaux des marées, reposent sur
un sous-sol de sable et de tourbe : elles sont remarquablement
fertiles. La colmate sur sable blanc ou gris passe pour la plus riche,
à cause du drainage naturel du sous-sol. PrÚs de Alihorpe, le dépÎt
warpĂ© sur plusieurs pieds d'Ă©paisseur recouvre les dĂ©bris de forĂȘts
de la lande tourbeuse ; ailleurs, cette tourbe en décomposition re-
monte à la surface. Dans le comté de York, et sur les limites du
Nottingham et du Lincoln, la mousse (moss) tourbeuse Ă jusquâĂ
3 mÚtres et » mÚtres d'épaisseur, comme dans le Thorne Waste ;
elle couvre directement le sable. Des forĂȘts entiĂšres ont disparu sur
une Ă©tendue de plus de 4000 hectares, pour donner naissance Ă ces
landes de tourbiĂšres, par le fait probable de lâabaissement du sol
primitif, car on ne saurait admettre de variations dans le niveau de
l'OcĂ©an. Les mĂȘmes phĂ©nomĂšnes ont eu lieu sur la Trent, dans lâin-
térieur des terres, comme dans les Fens et les Marshes directement
accessibles aux marées.
La vallĂ©e de la riviĂšre Ancholme (11 000 hectares) appartient Ă
la formation tourbeuse, avec sous-sol d'argile, comme celle des
Marshes du midi du Lincoln. En aval, câest-Ă -dire en se rapprochant
de lâ'Humber, le sol est une alluvion foncĂ©e, un mĂ©lange dâargile,
de gravier et de matiĂšres vĂ©gĂ©tales que lâHumber a dĂ©posĂ©s avant
lâendiguement des rives. A lâĂ©cluse de Ferriby, l'Ă©paisseur de latter-
rissement est de plus de 10 mĂštres. Lâargile mĂȘme qui constitue le
sous-sol de la vallée entiÚre paraßt avoir été également déposée par
les eaux de la mer remontant l'Humber, Ă la rencontre des eaux
douces qui drainaient les collines. La tourbe Ă Worlaby et dans les
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 261
Carrs adjacentsâ, apparaĂźt au-dessus de largile, qu'un labour pro-
fond permet d'atteindre. Dans les Carrs de Roxby et dâAppleby, sur
la rive ouest de lAncholme, la tourbe a 10 centimĂštres d'Ă©paisseur ;
elle s'Ă©tend ainsi jusquâĂ Brigg au midi, mais en sâĂ©cartant de lâar-
oile et en acquérant une texture spongicuse due aux fragments de
bois et d'herbes en décomposition.
De lâautre cĂŽtĂ© de lâHumber, en face Ferriby, un grand banc de
sable (40 hectares), Old Warp, a été endigué; les autres bancs for-
més dans la riviÚre, par les dépÎts des marées, ne sont endigués
qu'autant que le courant des eaux vives peut ĂȘtre maĂźtrisĂ© par des
digues dans le chenal dont le lit est aussi mobile.
A Winteringhan, les lais dâalluvion sont Ă©troits, mais le sol, dâune
épaisseur de 1,80, est de qualité exceptionnelle.
2. â La riviĂšre Trent.
La riviĂšre Trent prend sa source dans le nord Staffordshire, Ă
240 mĂštres au-dessus du niveau de la mer; sur une longueur de
276 kilomÚtres, elle draine un bassin de 10 600 kilomÚtres carrés,
qui recouvre principalement les terrains du nouveau grĂšs rouge.
Ă parĂŒr de Newton, oĂč la Trent forme la limite du comtĂ© de Lin-
coln, jusquâĂ son confluent avec l'Ouse, sur une cinquantaine de ki-
lomĂštres, la pente de la riviĂšre, le long du cours tortueux quâelle
décrit, est trÚs faible. Aussi, les inondations sont-elles fréquentes et
parfois dĂ©sastreuses, comme en 1875. Lâeau des crues submerge de
vastes superficies en aval de Newark, mais surtout, dans le comté
de Lincoln, les alluvions richement cultivées de l'embouchure. La
marée, qui remonte librement dans l'Humber, pénÚtre dans la Trent
jusquâĂ Gainsborough, et par les vives eaux, le flot, animĂ© dâune vi-
tesse de plus de 15 kilomÚtres à l'heure, donne lieu périodiquement
au phénomÚne du mascaret (bore ou egre comme on l'appelle), dont
les vagues courbes surpassent de 1",20 les bancs et les hauts-fonds
du lit inférieur.
1. La désignation Carr, dans la région de l'Humber, correspond à celle de Fen du
Cambridge.
262 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Axholme Level. â En aval de Gainsborough, la Trent entre dans
le district des Fens du nord, dont les terrains, situés à un niveau
inférieur à celui de la marée haute dans la riviÚre, comprennent le
Axel Carr oĂč Haxey Carr, le Hatfield Chace, le Thorne Level, etc.
Au milieu de cette vallée occupée jadis par les marais, émerge un
territoire sous forme dâilot, Axholme Isle, dont le sol appartenant
au nouveau grÚs rouge est recouvert par les marnes irisées du
Lrias.
Sur la rive orientale de la Trent, immédiatement en aval de Gains-
borough, un district de 1 000 hectares environ, le Morton Carr,
autrefois humide et inculte, est aujourdâhui colmatĂ© et dessĂ©chĂ©.
Les travaux d'amélioration commencÚrent à la fin du siÚcle dernier ;
des canaux de ceinture furent creusĂ©s pour recevoir les eaux dâĂ©-
goultement des terrains supérieurs, et des canaux transversaux pour
le colmatage des terrains bas. Ces derniers n'avaient quâune chute
de 0,60 Ă lâĂ©tiage de la Trent, pour Ă©couler les eaux Ă Ravensfleet.
GrĂące au colmatage, le terrain sâexhaussant, le niveau du dessĂ©che-
ment s'est amélioré. En 1801, une loi spéciale autorisa les com-
munes de Morton, Walkerith, East Stockwith, Blyton, Warton, Pil-
ham et Gilby à enclÎturer le Morton Carr, aprÚs desséchement. Une
loi plus rĂ©cente a autorisĂ© l'Ă©tablissement dâune puissante machine
Ă vapeur pour l'Ă©puisement des eaux.
Plus en aval, sur la mĂȘme rive orientale, les terres basses (3 600
hectares environ) se drainent par gravitation dans la riviĂšre Eau,
qui descend des hautes terres de Corringham, Scotter, etc., et
débouche dans la Trent, à Butterwick. Un grand nombre de canaux
et de fossés déchargent leurs eaux par des écluses dans la riviÚre,
et comme le sol de la rive a été successivement colmaté en aval
de Butterwick, jusquâĂ lâĂ©missaire de la Trent, le drainage s'opĂšre
dans la section inférieure, par la pente naturelle, sans moyens mé-
caniques.
Sur la rive occidentale de la Trent, en aval de Stockwith, com-
pris entre le pied dâescarpement du lias et lâancien cours du Don,
un des affluents de lâOuse, en face du district que nous venons de
dĂ©crire, se trouve le territoire qui embrasse lâle dâAxholme, le
Halfield moor, le Thorne moor, etc., couvrant en plaine 20 000 hec-
â
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 263
tares, sur lesquels 12 000 en terres basses, marécageuses, dont le
dessĂ©chement remonte au rĂšgne dâĂdouard IT Plantagenet (1327).
Sous le rÚgne de Henri VI de Lancaster (6° année, 1428), une loi
fut promulguée, prescrivant à l'instar des lois et coutumes observées
dans le Romney Marsh, dans le comtĂ© de Kent, des rĂšgles dâaprĂšs
lesquelles les commissaires de drainage devaient procéder au dessé-
chement des Carrs du nord Lincolnshire. Pendant de longues années,
les commissaires, en vertu de cette loi, rendirent des ordonnances
concernant la construction et l'entretien des digues, et la fixation des
salaires à payer pour les travaux de curage, de tranchées, etc., en cas
d'urgence. Malgré cela, jusque sous Charles [°° Stuart (1625-1649),
le pays fut submergé périodiquement. Plus de 20 000 hectares se
trouvaient constamment sous lâeau, Ă une profondeur de mĂštre et
davantage. On naviguait en bateau de la riviĂšre Idle jusquâĂ la Trent,
à travers les marais, pour porter les provisions et les récoltes.
Le roi Charles I, seigneur de Axholme, de Hatfield-Chace, de
Dykes-Marsh, aussi bien que les seigneurs de Wroot et Finningley,
ne tirant aucuns revenus de leurs propriétés, résolurent de faire
opérer le desséchement, et engagÚrent les services de l'ingénieur
hollandais Cornelius Vermuyden, chargé plus tard des opérations
du Bedford Level.
L'inondation permanente était due au débordement des cours
dâeau lâIdle, le Thorne, le Don, et du canal Bycur's Dyke, qui sâen-
trecroisent sur des terres dâun niveau infĂ©rieur Ă celui des hautes
eaux de la Trent. Vermuyden songea dâabord Ă faire Ă©couler sĂ©pa-
rément dans la Trent les eaux des terres supérieures traversant les
marais et celles des canaux obstrués par les limons des marées. Ces
eaux furent écoulées dans le Snow canal et dans la riviÚre Al{horpe,
au moyen dâĂ©cluses qui sâouvraient seulement Ă marĂ©e basse. Le
reste du desséchement fut opéré en 5 ans, au prix de 1400000 fr.
Une partie des terres desséchées fut réservée au Roi, et Vermuyden,
avec ses associés, reçut un tiers de la surface, 10 000 hectares envi-
ron, pour la rémunération de ses services ; une société fut formée
plus tard dans le but dâentretenir les travaux, Ă lâaide d'une taxe
proportionnelle par hectare.
La plus grande partie de Huxey Carr, ensemencée en navette et
264 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
en froment, donna pendant trois années consécutives de magnifiques
récoltes. Les terres marécageuses, qui ne valaient pas 1 fr. 50 c. par
hectare, réalisÚrent, aprÚs desséchement, le prix de 30 fr., et quand
les maisons et les bùtiments d'exploitation eurent été construits, les
terres améliorées se traitÚrent à 40 et à 45 fr. l'hectare.
Les conditions de lâagriculture avaient progressĂ© si rapidement
dans le Trent Level, que le blé rendait couramment 22 hectolitres,
le seigle 21 hectolitres, lâavoine 55 hectolitres Ă lâhectare, pendant
quatre et six années consécutives. Les salaires avaient doublé. Deux
cents familles de réfugiés protestants venant des Flandres et de
France avaient reçu des terres dont elles tiraient le plus grand parti,
lorsquâen 1642 Ă©clatĂšrent les Ă©meutes populaires, comme dans les
autres parties du royaume, et les paysans, voulant reconquérir les
droits de vaine pĂąture, dâaffouage, de tourberie, de pĂȘche et de
chasse, dont ils avaient été frustrés, mirent au pillage toute la con-
trée des Garrs et des marais desséchés. Les arrangements contractés
au nom du roi, dans le but peu avouable d'augmenter sa liste civile
et d'entretenir les grandes chasses de Hatfeld, avaient exaspéré les
populations. Pour le manoir d'Epworth, dont les terres occupaient
9 420 hectares, 370 propriétaires qui avaient adhéré au projet de
desséchement n'avaient reçu au voisinage des villes et des bourgs
habités, que 2 400 hectares (Open field lands), et le reste avait été
distribué aux entrepreneurs. Plus des deux tiers des intéressés, en
dehors du territoire de Epworth, avaient toutefois refusé de sous-
crire aux conditions de lâentreprise. Aussi, lorsque le Parlement
mĂȘme eut donnĂ© lâexemple de lâinsubordination aux dĂ©crets du sou-
verain, les intĂ©ressĂ©s sâarmĂšrent en masse pour se faire justice. Câest
alors que, pendant des semaines entiĂšres, sâemparant des Ă©cluses,
ils laissÚrent déborder les eaux des marées par le Snow canal. La
Trent, Ă Misterton, rompant les digues, submergea le Level tout
entier, noyant le bétail et les récoltes et effondrant les bùtiments et
les maisons d'habitation des fermiers. En 1645, les habitants de lâĂźle
de Axholme détruisirent la plus grande partie des digues, com-
blĂšrent les canaux et menĂšrent leurs bĂȘtes paĂźtre dans les champs
de céréales des nouveaux colons.
Les émeutiers déboutés continuërent les troubles, malgré la force
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 265
armée envoyée contre eux, refusant l'impÎt et saccageant les pro-
priĂ©tĂ©s qui avaient Ă©tĂ© Ă©pargnĂ©es, Jusque vers lâannĂ©e 1714, quand
fut sanctionnée la loi sur les émeutes.
A la fin seulement du siÚcle dernier, les travaux furent restaurés
et quelque peu étendus. Une loi datée de 1795 autorisa les inté-
ressés à se taxer en vue de modifier le systÚme appliqué par Ver-
muyden, câest-Ă -dire, en creusant de nouveaux canaux Ă double fin,
pour drainer et pour colmater, et, aux termes dâune clause spĂ©ciale,
en utilisant les eaux au colmatage des terres adjacentes. Le grand
canal coulant dans la direction ouest, de la Trent vers Keadby, fut
établi conformément à cette loi, dans le but de fournir les eaux limo-
neuses par deux canaux secondaires parallĂšles, et en cas dâobstruc-
tion, de faire servir les eaux Ă curer les drains en chasse, afin de
faciliter le warping.
Dans lâĂźle dâAxholme, la partie basse qui sâĂ©carte de la Trent
baisse de niveau progressivement ; la partie élevée qui représente
les deux cinquiĂšmes de la surface totale occupe le centre, et sauf
entre Crowle et Belton, elle est ondulée en petites collines qui
sâĂ©lalent vers lâouest.
Déjà , à une époque ancienne, pour se défendre contre les crues
de la Trent, les moines de Selby avaient fait construire un fort bar-
rage en bois sur la Trent, en travers du ruisseau Mare Dyke. Le su-
périeur du cloßtre, John de Shireburn, voulut substituer plus tard au
barrage Ă©levĂ© par son prĂ©dĂ©cesseur, lâabbĂ© de Gaddesby, un ouvrage
en pierres, mais les commissaires du roi Henri V (1640) intervin-
rent, estimant que les murs ne résisteraient pas au flot des marées,
et décidÚrent les moines à refaire un barrage en charpente, de fort
équarrissage, avec un double pertuis de 1°,20 sur 2 mÚtres, en
mĂȘme temps quâĂ Ă©lever une double digue sur les rives de la Trentâ.
Ce sont les plus anciens travaux dont il soit fait mention.
Le dessĂ©chement des bas terrains de lâAxholme, Ă lâouest de la
digue Trent Bank, s'opĂšre par les canaux Folly Drain, New Idle
Drain, et dâautres moins importants qui les traversent et dĂ©versent
les eaux Ă Althorpe, ou prĂšs dâAlthorpe. Quant aux terrains de la
1. Dempsey, Drainage of districts and lands, p. 67.
266 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
partie septentrionale, ils sont desservis par des canaux rejoignant
directement la Trent.
Vermuyden avait projeté des canaux en ligne droite, pour écouler
les eaux des riviÚres qui décrivaient de trop longs circuits en raison du
niveau trop bas des terres ; mais 1l commit l'erreur de choisir Le ca-
nal Snow et le canal dâAlthorpe comme principaux collecteurs. Or, Ă
partir dâAlthorpe jusquâĂ son embouchure, la Trent a une pente de
0",001 par mĂštre, qui sâest trouvĂ©e perdue pour le dessĂ©chement du
district. Les eaux eussent Ă©tĂ© conduites par un canal principal jusquâĂ
lâOuse, que la chute aurait Ă©tĂ© augmentĂ©e de 1",50 Ă 1,80, per-
meltant aux terrains bas situĂ©s Ă lâouest et au midi dâĂ©couler leurs
eaux par gravitation, au lieu de recourir à l'épuisement mécanique.
Jusqu'Ă 1l y a cinquante ans, les fermiers des basses terres de
l'ile dâAxholme ont employĂ©, au lieu de pompes actionnĂ©es par des
moulins Ă vent, des Ă©copes mues par des chevaux qui Ă©taient abso-
lument insuffisantes pendant la saison des pluies. Depuis lors, on Ă
installĂ© partout des machines Ă vapeur, faisant mouvoir des roues Ă
palettes, au lieu de pompes trop sujettes à réparation.
Indépendamment des machines qui font le service public du des-
séchement des marais de Soss, de Heck-Dyke et de Hirst-Priory,
représentant ensemble une force de 155 chevaux-vapeur, pour
4 800 hectares, les autres machines de moindre puissance, réparties
sur les exploitations particuliĂšres, figuraient, en 1860, avec une
force totale de 110 chevaux, employée à dessécher 2 200 hectares,
comme 1l résulte du tableau ci-aprÚs.
La dĂ©pense dâĂ©puisement, par machine Ă vapeur, varie selon la
saison et lâĂ©vaporation ; elle est plus grande en Ă©tĂ© quâen hiver; on
lâĂ©value en moyenne de 6 fr. 50 c. Ă 15 fr. par hectareâ.
1. Suivant une Ă©valuation fournie Ă Algernon Clarke, par un fermier de Axholme,
employant une machine Ă vapeur de 5 chevaux, les frais d'Ă©puisement par hectare
seraient les suivants :
Coût de la machine avec transmission et de la roue à palettes, ete.
6250 F2 SO 20 Ep MODS ARR LEE a ee SES TES
Houille: 10 tonnes Ă 12 fr. 50 c. (0 fr. 75 c. par hectare) . 125
Salaire; \graissage téntretien, "ete: Lin RENTE
Total:pour 162-hectires Ce NS 75
Soit 5 fr. 40 c. par hectare.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 267
Axholme Level.
Détail des machines en service pour le desséchement (1860).
3e Re HAUTEUR
» S J
DES LOCALITES HOCSRE
en dâĂ©pui- ĂMISSAIRES.
DE :
ou des maximum.
propriétaires. densochése chevaux. | sement.
2 machines
180 25roues 3,02 |Ă Stockwith, dans la Trent.
Heck-Dyke. . 15 1 roue dans la Trent.
Hirst-Priory . i Ă Althorpe, dans la Trent.
Atkinson dans la Trent.
Kelsey .
Low Level.
Belk .
Jaques .
Broughton .
Butterwick. . 1 pompe
Kelfield. . . 5 1 roue
Carr . 3; i
Pearson.
Newland. .
Gervase.
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ToTAUx. .
Ua grand canal percĂ© entre Zdle-Stop et Trent-Fall, oĂč la Trent et
lâOuse dĂ©bouchent dans lâ'Humber, eĂ»t permis de dessĂ©cher tous les
terrains de Axholme et ceux adjacents, dans les comtés de York et
de Nottingham, sans recourir aux machines. La chute eût été de
3 mĂštres en contre-bas de celle dâAlthorpe, et le collecteur nâeĂ»t
reçu que les eaux des crues provenant des basses terres. Dâail-
leurs, la Trent étant étroite à Althorpe, les marées y montent à une
grande hauteur; tandis qu'Ă l'embouchure, la largeur Ă©tant plus
grande, les flots de marée ont peu d'influence sur la baisse des
eaux Ă lâĂ©tia ge.
Le canal projetĂ©, muni dâĂ©cluses Ă marĂ©e, aurait reçu Ă dle-Stop
les eaux de Bawtry, dans le Nottingham, qui sont déversées par le
Bycar-Dyke Ă Stockwith, et aurait pu ĂȘtre maintenu ainsi en bon Ă©tat
268 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
de curage. En outre, les eaux de marée du canal auraient assuré le
colmatage dâune surface de 8 000 hectares ; ce qui devient impos-
sible en employant les eaux de la Trent.
Les ingénieurs Smeaton, en 1776, et Rennie, en 1813, soumirent
les devis de ce canal. En 1828, un comité spécial proposa sur base de
ces devis le desséchement de 40 000 hectares, le colmatage de 6 500
hectares avec une plus-value annuelle de 500 000 fr. pour les terres,
etune navigation plus facile, moyennant une dépense de 8 750 000fr.;
mais, devant ce chiffre Ă©norme, les propriĂ©taires intĂ©ressĂ©s nâeurent
pas le courage de tenter une entreprise aussi fructueuse *.
3. â La riviĂšre Don.
La riviĂšre Don, qui a Ă©tĂ© dĂ©rivĂ©e dans lâOuse par une coupure de
8 kilomÚtres de longueur, appelée Dulch River, et la riviÚre Idle,
un des nombreux affluents de la Trent, coulaient jadis directement
dans lâ'Humber. On retrouve non seulement lâancien lit du Don, en
aval du confluent de la Went dans lâOuse, mais les lits dâautres bras
qui communiquaient avec lâestuaire. Un de ces bras, peut-ĂȘtre le
bras principal, avait un cours torlueux Ă partir de Thorne oĂč la
riviÚre se détourne actuellement dans une direction nord, et sui-
vant la direction est-nord-est, depuis Crowle jusque dans la Trent,
il aboutissait prĂšs de Adlingfleet.
De son cÎté, la riviÚre Idle, qui descendait, passé Misson, dans la
direction nord vers lâancien lit du Don, oĂč elle se jetait Ă 5 kilo-
mÚtres au sud-ouest de Crowle, a été également déviée par une cou-
pure de Misson, Ă West Stockwith.
Il s'ensuit quâun vaste territoire, sillonnĂ© jadis par les ramifica-
tions de ces cours dâeau, dans le but de remĂ©dier Ă lâobstruction du
delta de lâ'Humber, a Ă©tĂ© transformĂ© en marais que lâon a dĂ» assainir
pour les rendre Ă la culture. Ce territoire comprenant Thorney waste
couvre prÚs de 620 kilomÚtres carrés, en jonction avec les Fens du
Lincoln et les landes de lâautre rive de la Trent.
Aussi bien Thorney waste que les autres atterrissements de lâan-
1. Ă. Clarke, Farming of Lincolnshire, 1851, vol. XIL.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 269
cien delta des riviĂšres Don et Idle, ont Ă©tĂ© lâobjet de travaux consi-
dĂ©rables de dessĂ©chement, de drainage et dâenclĂŽture.
4. â La riviĂšre Ancholme.
La riviĂšre Ancholme prend naissance Ă Spridlington, dans les
hauts plateaux qui séparent Lincoln de Market-Rasen. AprÚs avoir
coulĂ© Ă lâouest, elle suit une direction vers le nord, reçoit Ă Glen-
tham les eaux dâun petit affluent, le Rasen, descendu des collines
crayeuses de Tealby, et remonte en ligne droite, sur une longueur
canalisée de 30 kilomÚtres, pour se jeter dans l'Humber, à lécluse
Ferriby.
La vallée longue et étroite de lAncholme contient environ
11000 hectares de terrains dâun niveau infĂ©rieur Ă celui des marĂ©es
de vives eaux. Depuis Bishops Bridge situé à ce niveau, les terrains
sâabaissent progressivement jusqu'Ă 1",37 au-dessous, Ă Kelsey ;
puis Ă 2°,75, Ă Brigg ; ils ne se relĂšvent quâĂ 0,90 vers lâĂ©cluse.
Quant au bassin de la riviĂšre, il s'Ă©tend sur plus de 80 000 hec-
tares, dont 20 000 en plaine, Ă 16 kilomĂštres environ du confluent
de la Trent et de lâ'Humber ; 40 000 en collines crayeuses qui re-
montent jusquâĂ 39 kilomĂštres, au nord et au sud de lâ'Humber; ce
sont les wolds; et 20 000 hectares en collines oolithiques, plus basses
que les précédentes, qui partagent les deux vallées de la Trent et de
VAncholme. Enfin, au sud, une formation alluvienne sépare les deux
vallĂ©es de lâAncholme et du Witham.
La largeur de la vallée varie entre un kilomÚtre et demi, en amont,
et » kilomĂštres, en aval. Le dĂ©bit journalier du bassin est Ă©valuĂ© Ă
4 millions de mĂštres cubes, susceptibles de colmater, sur 0,06 dâĂ©-
paisseur, le sol de la partie marĂ©cageuse qui touche Ă lâ'Humber *.
TrÚs anciennement endigué, pour contenir le flot des eaux de
lâHumber, lâAncholme, dont le cours Ă©tait particuliĂšrement sinueux,
avait fini par sâobstruer, au point que, sous le rĂšgne d'Ădouard II
(1307), le chenal entre Brigg et Ferriby se trouvait réduit de
12 mĂštres Ă 2 mĂštres de largeur. Les coudes de la riviĂšre, en amont,
1. Ansted, Waler and waler supply, p. 313.
210 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
étaient au nombre de 12 à 14, et quoique les eaux supérieures ne
fussent pas aussi abondantes, puisque le dessĂ©chement nâĂ©tait pas
opéré, les débordements étaient périodiques. Sir William Dugdale a
laissĂ© une carte de la vallĂ©e, datĂ©e de 1640, oĂč lâon retrouve encore
les coudes et les sinuositĂ©s de lâAncholme, avant l'exĂ©cution des tra-
vaux de rectification.
Ancholme Level. â Ce fut en 1635 (10° annĂ©e du rĂšgne de
Charles [°) que Sir John Munson obtint pour lui et pour un groupe
de grands propriétaires, ses associés, la concession du desséchement
des Fens et des Carrs des deux rives de lâAncholme ; il sâengagea Ă
exĂ©cuter les travaux dans le dĂ©lai de six annĂ©es et Ă installer lâĂ©mis-
saire à Ferriby, de façon que les terres complÚtement asséchées
fussent cultivables en prĂ©s et en prairies, moyennant lâabandon en
toute propriété, exempte de taxes et d'impÎts, de 2 357 hectares.
Trois ans plus tard, en 1638, le canal ayant été creusé sur 30 ki-
lomĂštres, depuis Glentham jusquâĂ lâHumber, et les canaux latĂ©raux
fonctionnant, voire ceux exĂ©cutĂ©s mĂȘme du temps d'Ădouard III
(1397-1377), pour le desséchement des terres entre Elsham et Fer-
riby, Sir John Munson et ses associés entrÚrent en possession de leurs
terrains et les exploitÚrent jusqu'aux jours de la rébellion pendant
laquelle les populations rurales tentĂšrent de ressaisir, les armes Ă la
main, les terres et les droits dont elles avaient été spoliées.
AprĂšs ces temps de troubles, les travaux ne furent plus entretenus,
les canaux sâobstruĂšrent, les alterrissements finirent par encombrer
le lit de la riviÚre, et les inondations replacÚrent la vallée dans la si-
tuation marĂ©cageuse oĂč elle se trouvait jadis. En 1767 finalement,
une loi fut votée, autorisant la reprise des travaux en vue de la na-
vigation et du drainage, et quelques années plus tard, malgré une
charge annuelle, pour compte de travaux, de 7 fr. 70 c. par hectare,
répartie sur 8000 hectares, la valeur locative des terres assainies
remonta de 30 Ă 90 fr., au lieu de 5 Ă 10 fr. par hectare.
Malgré cela, à la fin du siÚcle dernier, la pente générale était
devenue trop faible; le desséchement laissa de nouveau à désirer, et
force fut de faire appel à l'ingénieur des Fens, Rennie pÚre, pour
sortir d'urgence dâune situation qui sâaggravait de jour en jour.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 211
Le rapport de Rennie, remis aux intéressés en 1801, se fondait
sur les mĂȘmes principes que ceux proposĂ©s, et appliquĂ©s plus tard,
Ă lâassainissement des Fens que draine le Witham. Il concluait :
1° A la rectification et Ă lâapprofondissement de lâAncholme cana-
lisĂ©, pour obtenir la chute dâeau maximum ;
2 A la construction dâune grande Ă©cluse Ă marĂ©e, Ă Ferribv;
3° Ă l'exĂ©cution dâun canal de ceinture (catchwaler) sur la rive
méridionale, destiné à recueillir séparément les eaux des terrains du
niveau supérieur, avec une écluse spéciale pour la décharge de ces
eaux dans lâ'Humber.
Les eaux provenant des hautes terres, animĂ©es dâune plus grande
vitesse que celles des terres basses, Ă©lĂšvent le niveau de ces der-
niĂšres et les empĂȘchent de se dĂ©charger aux Ă©cluses que lâon ouvre
seulement dans l'intervalle des marées. Le canal de ceinture projeté
par Rennie pÚre devait non seulement détourner les hautes eaux,
mais fournir une réserve aux terrains inférieurs, en vue du colma-
tage et de la navigation.
Les conclusions du rapport de lâĂ©minent ingĂ©nieur furent adoptĂ©es,
mais exéculées en partie seulement.
LâAncholme fut rectifiĂ© ; le collecteur de ceinture ne fut creusĂ©
que jusquâĂ Brigg, et deux Ă©cluses Ă sas furent Ă©difiĂ©es, lâune pour
la navigation Ă Hortestow Green, au point oĂč la riviĂšre dĂ©bouche
dans les basses terres, et lâautre Ă Ferriby, sur lâ'Humber, pour em-
pĂȘcher lâenvahissement des marĂ©es. Ces travaux incomplets furent-ils
exécutés conformément aux plans de Rennie pÚre ? Toujours est-il
que vingt annĂ©es plus tard, son fils, Sir John Rennieâ, visitant le
district, constatait que lâassainissement Ă©tait dĂ©fectueux ; le lit de
lâAncholme Ă©tait ensablĂ©, la navigation qui devait permettre aux cĂŽ-
tiers du Yorkshire de remonter jusquâĂ Bishops Bridge Ă©tait arrĂȘtĂ©e
Ă quelques kilomĂštres en amont de Brigg ; enfin, les travaux et les
ouvrages d'art étaient dans le plus déplorable état. DÚs lors, Sir John
Rennie recommanda, dans un nouveau rapport, daté de 1825 :
1° Dâapprofondir et dâĂ©largir sur tout son parcours lâAncholme
canalisĂ©, de façon Ă lâapproprier Ă la navigation des bateaux cĂŽliers
1. Aulobiography, loc. cût., p. 225.
212 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONCMIQUE.
de 2 mĂštres de tirant dâeau, et Ă maintenir le flot jusquâĂ 0",60 et
0",90 au-dessus du niveau des basses terres, afin de prévenir les
inondations et d'assurer lâĂ©coulement des eaux de dessĂ©chement ;
2 De donner 1",82 dâabaissement au seuil de lâĂ©cluse Ă sas, pour
permettre la remonte des bĂątiments jusquâĂ Bishops Bridge, et de
faire prĂ©cĂ©der lâĂ©cluse dâun barrage, avec un bassin de rĂ©ception
des sables charriés par les eaux supérieures ;
3° De construire une nouvelle écluse à sas, à Ferriby, avec 1,82
dâabaissement et 6 mĂštres d'ouverture, en aval de lâancienne, et de
refaire les ponts avec de plus grandes ouvertures;
4° De dessĂ©cher le collecteur de ceinture, pour le curer, lâĂ©largir
et le prolonger jusquâau niveau supĂ©rieur extrĂȘme ; *
9° De creuser un autre collecteur de mĂȘmes dimensions sur la rive
nord, depuis a nouvelle Ă©cluse jusquâĂ l'extrĂ©mitĂ© du district ;
6° De munir dâun barrage Ă pertuis, avec puisard pour les sables,
toutes les embouchures de ruisseaux ou de canaux dans les collec-
teurs de chacune des rives.
Ces travaux, adoptĂ©s par la commission de lâAncholme Level, furent
confiés aux entrepreneurs Jolliffe et Banks, sous la direction de
l'ingĂ©nieur local Adam Smith, en vertu dâune loi portant la date
de 1825.
LâĂ©cluse de Ferriby, dont le seuil a Ă©tĂ© abaissĂ© de 2,45 par rap-
port Ă lâancien, offre plus de 6 mĂštres dâespacement pour lâentrĂ©e
des bateaux et la décharge des colatures. Les anciens ponts qui
rĂ©trĂ©cissaient le chenal Ă©tant dĂ©molis, la nouvelle Ă©cluse Ă©tablie Ă
28 kilomĂštres de l'embouchure, possĂšde trois ouvertures de 5,50
chacune et un développement total de 22",55. Chaque ouverture est
pourvue de portes automatiques que la marée ferme, et que les
eaux dâamont ouvrent, dĂšs que le flot baisse. Les portes, en outre,
sont surmontées de vannes qui rÚglent le niveau de la navigation
(soit 3,16 au-dessus du seuil), de façon à maintenir une profon-
deur dâeau de 2°,67 Ă Brigg (Ă 14 kilomĂštres en amont), et de
2%,98 Ă Harlem-Hill (Ă 29 kilomĂštres).
Le résultat de ces travaux qui ont coûté 600 000 fr., a été des
plus satisfaisants. Sir John Rennie admet que la nouvelle Ă©cluse est
une des mieux réussies et des plus économiques. Le desséchement
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 7
est parfait, en tant.que la navigation nâabuse pas des retenues qui
refoulent les eaux d'Ă©coulement venant dâamont.
LâAncholme peut dĂ©biter le volume total des eaux qu'il reçoit
dans l'intervalle de deux marĂ©es, quoique lâĂ©cluse reste fermĂ©e
moitié du temps; mais comme la navigation exige un niveau de
3,90 supérieur à la laisse des marées de morte eau, les crues ne
sont pas déchargées assez rapidement, et au flot suivant, elles sont
chassées sur les terres des Carrs, qui sont à 2",75 en contre-bas,
par rapport au niveau dâeau dans la riviĂšre.
Il y aurait lieu, en conséquence, de détourner une partie des eaux
des crues des terrains supĂ©rieurs par de nouveaux canaux dâĂ©gout-
tement, afin dâĂ©v'âer les submersions temporaires des Carrs Wad-
dingham, Suitterby, Kelsey, etc. Ces canaux, avec décharge spéciale
dans lâ'Humber, pourraient ĂȘtre dâailleurs utilisĂ©s pour les besoins de
la navigation, ou pour l'irrigation des terres trop sĂšches. De mĂȘme,
il y aurait lieu, dans le but de compléter le projet de Sir John Rennie,
qui projetait les canaux de ceinture aux niveaux élevés, d'établir des
réservoirs ou puisards, pour recueillir les sables charriés par les
eaux, et en dĂ©barrasser le chenal de lâAncholme.
Plus de 150 kilomĂštres carrĂ©s de lais de riviĂšre et dâautres allu-
vions, grace aux travaux de Rennie fils, ont pu ĂȘtre repris sur les
marais et convertis en terres arables de premiÚre qualité.
On cultive surtout, dans la vallĂ©e dâAncholme, sur les terres limo-
nées, la pomme de terre qui suit une récolte verte comme jachÚre, ou
bien des fÚves ou du lin. Sur les sols de meilleure qualité, la pomme de
terre et le blé se suivent alternativement pendant un certain nombre
d'années ; sur les autres sols, on intercale entre ces deux récoltes
de lâorge, de lâavoine, des fĂšves, du trĂšfle, du lin ou des oignonsâ,
5. â La riviĂšre Hull (Yorkshire).
Le dernier tributaire de l'Humber, sur la rive nord, sort du pied
des wolds Ă Driffield et Ă Killiam. Les deux ruisseaux qui forment la
riviÚre Hull se rejoignent à Frodingham. à partir de cette localité,
1. Ă. Clarke, The practice of agricullure, loc. cit.
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1. 15
274 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
pendant un trajet de 15 kilomĂštres, elle coule au midi jusquâĂ
Beverley, et 15 kilomÚtres plus loin, elle débouche dans l'Humber,
aprÚs avoir drainé, dans ce dernier parcours, 160 kilomÚtres carrés
de terres marĂ©cageuses qui sâĂ©lendent sur une largeur de 6 Ă 12 ki-
lomĂštres le long de la cĂŽte de Holderness, jusquâĂ Sunk Island,
situé à 16 kilomÚtres.
La digue qui protĂšge cette rive serait, dit-on, une Ćuvre romaine ;
elle fut complĂštement restaurĂ©e en lâan 1313. La ville de Kingston-
upon-Hull, avec les magnifiques docks quâexigent son important com-
merce et sa navigation Ă vapeur, est bĂątie elle-mĂȘme sur les lais de
PHumber, au confluent de la riviĂšre Hull, Ă un niveau de 0,90 Ă
1,50 en contre-bas de celui des marées de vives eaux.
Sur les terres de marais qui ont été desséchées par colmatage, la
pomme de terre est la principale rĂ©colte; on en obtient mĂȘme une
double récolte annuelle, en adoptant le procédé de la germination
préalable, suivant ce qui a lieu également sur les bords de la baie
de Morecambe, le long de la cĂŽte ouest du Lancashire. Le systĂšme
ordinaire est de faire suivre la pomme de terre par le trĂšfle, et le
blé, par les fourrages ou les féveroles.
On donne Ă la fin de lautomne un labour profond pour enterrer
le fumier (90 Ă 70 tonnes Ă lâhectare), et au printemps, un nouveau
labour en travers, avant de planter les pommes de terre-sur ados,
et de leur appliquer de 3 Ă 5 quintaux de guano Ă lâhectare. Les
semences sont plantées, à raison de 15 à 18 quintaux, à des intcr-
valles de 0,25 Ă 0",39, en rangĂ©es Ă©cartĂ©es lâune de lâautre de
0",70 Ă 0,75.
Cette culture caractéristique des terres colmatées est trÚs lucra-
live, lĂ oĂč le tubercule est Ă©pargnĂ© par la maladie qui dĂ©vaste pĂ©rio-
diquement les champs de lâAngleterre, depuis 1845. Le rendement
moyen varie de 15 Ă 25 tonnes Ă lâhectare, dans les meilleures terres,
et de 10 à 15 tonnes, dans les terres de qualité inférieure : la dépense
sâĂ©value entre 1 000 et 1 500 fr. par hectareâ.
1. Ch. Whitehead, On cultivalion of hops, fruit and vegetables (Journ. Roy.
Agric. Soc., 1878, vol. XIV).
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 275
IT, ââ LES ENDIGUEMENTS ET LES POLDERS DU LITTORAL
Les opérations qu'il nous reste à décrire concernent plutÎt le
littoral ; elles comprennent, pour quelques-unes, la mise en polders
des alluvions laissĂ©es par les marĂ©es, et pour dâautres, la dĂ©fense, Ă
lâaide de digues, de surfaces plus ou moins vastes, consacrĂ©es Ă la
culture.
A lâembouchure des riviĂšres, lĂ oĂč les alluvions prĂ©sentent le plus
d'intĂ©rĂȘt pour lâenclĂŽture, lâaction des vagues nâest pas toujours
aussi destructive que sur les cÎtes, directement exposées aux cou-
rants. Il est possible de remplacer les digues de terre, ou muraillées,
par des encaissements que les ingénieurs anglais ont exécutés de
longue date avec plein succĂšs.
Diques par encaissement. â Les encaissements sâĂ©tablissent de la
maniĂšre suivante. Sur un radeau en fascinages de 0",60 d'Ă©paisseur
et de 6 mĂštres de longueur, on dispose un lit dâargile ; puis sur ce
radeau, on en Ă©tablit un second, de mĂȘmes dimensions, avec lit
d'argile, et ainsi de suite, de telle sorte que les radeaux superposés
descendent dâaplomb par leur propre poids sur le fond du lit dont
les rives doivent ĂȘtre encaissĂ©es. La digue ainsi obtenue, de 6 mĂštres
Ă la base, de 5",50, par exemple, Ă la crĂȘte, sâavance isolĂ©e, sans
accotoirs, du cÎté des rives, et résiste parfaitement à la double
action des courants dus aux marées et du courant de riviÚre.
Elle est submersible à marée de mortes eaux ; mais quand on veut
ĂŒrer parti des terrains laissĂ©s en arriĂšre, submersibles au-dessous
du niveau des eaux moyennes, il y a lieu de lâexhausser et, au
besoin, de la revĂȘtir de perrĂ© au-dessus de la ligne des vives eaux,
ou bien encore, de la faire servir comme fondation Ă des enroche-
ments en pierres perdues qui forment la partie supérieure des digues
longitudinales. |
Les digues par encaissement que les ingénieurs Rennie, pÚre et
fils, ont fait construire dans un grand nombre de baies, ont parfai-
tement tenu, notamment le long de la Severn, qui se jette par un
210 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
large estuaire dans le canal de Bristol. Maigré la barre (mascaret)
atteignant 1",85 de hauteur, malgrĂ© un courant de 15 nĆuds Ă
l'heure et un flot de marée qui monte de 6 mÚtres au-dessus de la
mer basse et reflue avec une vitesse de 6 Ă 8 kilomĂštres Ă l'heure,
les ouvrages en fascines et bourrĂ©es ont rĂ©sistĂ© jusquâĂ la hauteur
qui leur a été donnée, de 1",85, au-dessus de la limite des vives
eaux. Elles reposent sur des bancs de sable que balayent les cou-
rants, sans leur faire subir aucune dĂ©formation. Aussi, lâĂ©minent
ingĂ©nieur W. Cubitt nâhĂ©sitait-1l pas Ă proposer de jeter une digue
de 6 kilomĂštres de longueur, en travers de l'estuaire de la Severn,
Ă Hock-Crib, sur un banc de sable, dans le but de raccourcir le che-
nal navigable et de gagner plusieurs milliers d'hectares de terrain
cultivable sur la plage.
Une variante a été adoptée pour la délimitation du chenal des
divers cours dâeau, Ă travers lestuaire du Wash, qui consiste dans
l'emploi de fascinages, faits avec des épines de haies entourées
d'argile. Ces fascinages ont 1",80 de longueur, y compris les
branches, et 0",90 de circonférence ; Les gros bouts tournés dans le
mĂȘme sens sont liĂ©s par des cordes goudronnĂ©es. On les dispose le
long du nouveau chenal projeté, sur une ou plusieurs rangées, sui-
vant la profondeur et la force du courant, et on les recouvre dâun
lit de 0",15 d'argile. On continue Ă Ă©lever des lits de fascinage
Ă©tablis de la mĂȘme maniĂšre, les uns au-dessus des autres, jusquâĂ
ce que lâon ait atteint le niveau de la plage, et dans les grandes ri-
viÚres, le niveau des demi-marées. Ces sortes de digues peuvent
ĂȘtre Ă©tablies dans un chenal de 6 mĂštres de profondeur, Ă marĂ©e
basse, sans souffrir du flux ou du reflux ; elles offrent un revĂȘte-
ment durable lĂ oĂč la maçonnerie serait entrainĂ©e. On Ă©value le
coĂ»t de cet encaissement Ă 5 fr. par mĂštre cubeâ.
Digues Ă la mer. â Les encaissements nâont pas Ă©tĂ© reconnus
assez rĂ©sistants sur dâautres points du littoral, ou du moins, le sys-
tĂšme ordinaire des digues en terre a prĂ©valu, car Ă lâembouchure,
par exemple, de la petite riviĂšre Crouch, Ă lâentrĂ©e de l'estuaire de
1. Wheeler, Fascine work and reclamaltion. (Trans. Inst. civil Engineers, t. XIL.)
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. DU
la Tamise (comtĂ© dâEssex), oĂč le courant est assez Ă©troit, mais pro-
fond, la digue de dĂ©fense construite en terre est revĂȘtue de maçon-
nerie. La mer déferle obliquement, venant du nord, et use beaucoup
plus rapidement le front des ouvrages que si elle frappait Ă angle
droit.
Pour les remblais du chemin de fer qui longe l'embouchure de
l'Humber, sur la rive gauche du comitĂ© de York, on a suivi les mĂȘmes
errements, en tenant compte de la direction des lames, afin dâamor-
tir le choc des vagues et de préserver les talus.
Ailleurs, les digues ne sont pas maçonnĂ©es. A lâembouchure mĂȘme
de lâ'Humber, la digue de Louth a Ă©tĂ© construite, partie en sable ei
partie en argile battue; seulement, dâaprĂšs lâorientation des marĂ©es,
les talus sont Ă 6, ou Ă 3 de base, pour 1 de hauteur. Ă Wells, sur
la cĂŽte du Norfolk, la digue de Cromer, dâune longueur de 6 kilo-
mĂštres et demi, a Ă©tĂ© construite en argile battue et revĂȘtue de gazon,
avec un talus de 5 pour 1.
La digue qui défend Romney Marsh (comté de Kent), dont nous
nous occupons plus loin, a une longueur de 6 kilomĂštres et demi.
Attribuée aux Romains, comme les digues des Marshes du Lincoln,
elle a Ă©tĂ© construite en terre, mais on Ă dĂč la fortitier par des pilotis
sur deux rangées, entre lesquelles le vide a été comblé par de la
craie. Les eaux de desséchement des 10 000 hectares enclÎturés par
la digue sâĂ©coulent Ă marĂ©e basse, par trois aqueducs de grandes
dimensions, avec écluses, au travers de la levée.
Sur les rives de lâestuaire de la Tamise, oĂč la marĂ©e monte de
9,05, les digues comportent trois sections en élévation ; la section
principale infĂ©rieure a 5 mĂȘtres de base pour 1 mĂštre de hauteur et
6,10 de largeur Ă la crĂȘte ; elle supporte la section centrale (out-
burst bank) dont le talus est de 1 mĂȘtre et demi pour Ă mĂštre de
hauteur, sur 1,52 dâĂ©lĂ©vation et 2",45 de largeur Ă la crĂȘte. La
section supĂ©rieure (swash bank) nâa que 0,75 de hauteur et 0,75
de largeur au couronnement. Ces digues en terre sont revĂȘtues en
argile corroyée et, sur les points plus exposés, en perré. Les talus
supérieurs sont gazonnés, ou semés en ray-grass, en luzerne, etc. .
1. Knight, American Diclionary, p. 2085.
278 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
1. â Les polders de la baie Holkham (Norfolk).
Câest en 1855 que le comte de Leicester fit entreprendre le des-
séchement et la mise en polders des lais de mer qui se trouvent à la
pointe occidentale de la baie Holkham. Cette baie doit son nom au
domaine princier des comtes de Leicester, dont les palais furent
édifiés sur les plans des architectes Palladio et Inigo Jones, au siÚcle
dernier ; elle donne accĂšs au petit port de Wells et aux parcs dâhui-
triÚres de cette localité.
Les premiers travaux entrepris par le comte de Leicester consis-
tĂ©rent dans lâĂ©tablissement dâune digue de 1350 mĂštres de longueur,
Ă lâest du port de Wells. Du cĂŽtĂ© du nord, les alluvions sont pro-
tĂ©gĂ©es dâune maniĂšre complĂšte contre la mer par une longue chaĂźne
de dunes sablonneuses, suffisamment larges et élevées, couvertes
depuis des siĂšcles de saules marins (marram). Nulle protection est
aussi efficace contre l'assaut des marées que ces dunes plantées,
quand on a soi dâentretenir les plantations aprĂšs les coups trop
violents des ouragans. Les sables fraßchement entrainés se conso-
lident rapidement par le marram. Du cÎté du midi, les marais sont
depuis longtemps assainis et cultivés. La digue commencée à lest
de ces marais, en 1857, fut achevĂ©e lâannĂ©e suivante ; elle part de la
pointe du quai de Wells, suit le chenal en ligne droite vers le nord,
jusquâĂ une sorte de falaise en cailloux roulĂ©s, qui se relie Ă lâest
avec les dunes de sable. Dans son parcours, elle coupe lâancien che-
nal à deux reprises, de façon à ménager un lit plus profond pour
l'accĂšs du port. Construite en argile sur 400 mĂštres de longueur,
Ă lâextrĂ©mitĂ© sud, la digue, pour le restant, est formĂ©e de sable,
avee un revĂȘtement en perrĂ© sur 0",60 d'Ă©paisseur, qui plonge de
1,50 du cĂŽtĂ© de la mer, tandis que du cĂŽtĂ© des terres le perrĂ© nâa
que 0",30.
L'ouvrage offre 1",50 de largeur Ă la crĂȘte, avec un talus du cĂŽtĂ©
de la mer, de 4 sur 1 dans la partie supérieure, sur une hauteur de
2%,50 à partir du couronnement, et de 5 sur à dans sa partie infé-
rieure. Du cÎté des terres, le talus est de 2 sur 1 au sommet, et de
3 sur 1 Ă la base.
En
59 ARS
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 279
La crĂȘte et le pied du talus du cĂŽtĂ© de la mer ont Ă©tĂ© empierrĂ©s
avec des galets ; le reste, lĂ oĂč il nây a pas de perrĂ©, a Ă©tĂ© gazonnĂ©
sur une Ă©paisseur de 0,07.
L'expérience a appris que pour les dimensions ici adoptées, le sable
rĂ©siste mieux que lâargile. LâĂ©cluse placĂ©e Ă l'extrĂ©mitĂ© sud de la
jetée est fondée sur pilotis dans l'argile ; elle est fermée du cÎté de
la mer par une porte de flot automatique, et du cÎté de la cam-
pagne, par une marteliÚre à vis. Elle permet de débiter non seule-
ment les eaux des 255 hectares de lais de mer endigués, mais encore
les eaux de 400 hectares de marais soumis au desséchement, aux-
quelles se joignent celles des sources.
Un seul accident à été causé, au mois de décembre 1862, par
un coup de mer qui a enlevé la falaise de galets sur laquelle la
digue sâappuyait, en affouillant le sol Ă une profondeur de 8°,50,
par une brÚche de 115 mÚtres. La falaise a été rapidement rem-
placĂ©e, grĂące Ă deux tramways dâun kilomĂštre de longueur pour
le transport des matériaux, par une levée dont la déclivité est de 12
sur 1 du cÎté de la mer, et de 5 sur à du cÎté des terres. Le saule
marin (marram) y à pris croissance el à consolidé en peu d'années
le nouvel endiguement dont la hauteur est de 1",50 au-dessus des
vives eaux.
La premiĂšre digue de sable, sauf le renouvellement des galets
entraĂźnĂ©s par les eaux de la brĂšche, nâa exigĂ© aucunes rĂ©parations ;
elle est protégée par les marais contre les vents impétueux qui souf-
flent de lâouest et du nord-ouest.
Sur les 235 hectares mis en polders, plus de 80 hectares, au voi-
sinage des prairies autrefois marécageuses, sont en sol argileux
compact ; 33 hectares sont en limon vaseux, Ă la limite des collines
argileuses ; 69 hectares en argile bleue que recouvre une couche
de sable de 0,15 Ă 0,90 d'Ă©paisseur, et le reste est formĂ© dâun
mélange de sables et de graviers plus ou moins fins. Le sol enclÎ-
turĂ© a exigĂ© une dĂ©pense dâautant plus forte pour la mise en culture
quâĂ la rencontre des courants de marĂ©e venant de lâouest et de
l'est, en ce point de la petite baie, de grandes criques déchiraient
le terrain, et ailleurs, des flaques dâeau en grand nombre restaient
Ă lâĂ©tat stagnant sur les parties argileuses.
280 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
DĂšs l'automne de 1859, les travaux pour lâallotissement furent
entrepris ; dâabord, les routes furent construites ; la principale,
tracée dans toute la longueur, est coupée à chaque 500 mÚtres par
des chemins de traverse de 9 mĂštres de largeur, bordĂ©s dâun fossĂ©
de chaque cÎté. Les bandes de terrains ainsi aménagées sont en-
suite divisĂ©es par des fossĂ©s, en compartiments dâune contenance de
4 Ă 8 hectares. Comme chaque compartiment se trouve accessible
par une route empierrée, la culture à vapeur a été introduite. Mais
avant de labourer, il fallut combler les crevasses au moyen de sables
transportés par vole ferrée, et niveler la surface entiÚre des remblais
et des déblais.
La plus grande partie du polder, en 1862, Ă©tait en callure : na-
velte, pois, froment et avoine, lorsque la mer vint envahir toute la
surface. Pendant les deux premiÚres années, les récoltes furent su-
périeures, au point de vue du rendement et de la qualité, à celles
obtenues aprÚs l'accident. Le sol s'était imprégné de sel en excÚs,
et si les routes ne souffrirent pas trop de la submersion prolongée,
les rĂ©coltes en terre furent absolument perdues pour lâannĂ©e sui-
vante.
Le drainage a été pratiqué sur une centaine d'hectares. Les drains,
de 0,44 de diamĂštre, placĂ©s Ă 10 mĂštres dâĂ©cartement dans lâar-
gile, et à 20 mÚtres dans les sables, sont dirigés vers les fossés. En
raison du nivellement de la surface, la pose des drains a donné lieu
à quelques difficultés, pour assurer une pente convenable et un
dĂ©bit rĂ©gulier. On a dĂč repĂ©rer le plan dâeau gĂ©nĂ©ral, avant d'Ă©tablir
le fond des drains Ă un niveau constant de 1,95, reconnu suffisant
pour obtenir la chute nécessaire dans les collecteurs.
En dehors des terres livrées immédiatement à la culture, les argiles
compactes ont été amendées par le sable, sur une épaisseur de 0",10
et retournées par des charrues à vapeur. Lorsque l'argile ne pouvait
pas ĂȘtre atteinte par le labour, on a foncĂ© des puits desquels on a
extrait lâargile pour la brouetter sur le sable prĂ©alablement Ă©croĂ»tĂ©.
Enfin, ailleurs, l'argile Ă©tant Ă la profondeur de 0",30 Ă 0",40, on
a creusé des tranchées, pour ramener de 0",20 à 0,25 d'argile et
remblayer en couverture les autres terrains, puis on a comblé les
tranchĂ©es Ă lâaide de sable.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 281
Les appareils de labourage Fowler ont servi au dĂ©foncement Ă
0",40 et au nivellement de toute la surface amendée. Aprés une
année de jachÚre seulement, les terrains ont été ensemencés. Depuis
1867, la salure due Ă la submersion accidentelle nâexerçant plus
aucun effet, les cultures sont en pleine réussite. Aucun assolement
particulier nâest adoptĂ©; on cultive tour Ă tour le blĂ©, l'orge, lâa-
voine, la navette, les racines et le trĂšfle, avec de bons rendements *.
Celle opĂ©ration, qui a exigĂ© une dizaine dâannĂ©es pour ĂȘtre com-
plĂȘte, nâest qu'une de celles que Lord Leicester, digne successeur
de son pÚre, a réalisées dans son immense domaine de Holkham,
sur 12 000 hectares. AprÚs une dépense de 10 millions de francs, faite
par le premier comte, et de 42 millions et demi, par ses fermiers,
les sables stériles et les terrains maigres de Holkham ont été trans-
formĂ©s en terres Ă blĂ©. Câest la consĂ©quence des amendements
par largile et la marne, des engrais artificiels Ă hautes doses,
de lâassolement quadriennal, des jachĂšres sur labour, de l'Ă©levage
des moutons et de lâengraissement du bĂ©tail en hiver, des bĂąti-
ments modĂšles d'exploitation, des baux Ă long terme, etc., en un
mot de la rĂ©novation moderne de lâagriculture, dont les Lords de
Leicester ont été les promoteurs puissants et infatigables dans le
comté de Norfolk.
2. â Les marais du Westmoreland,
Sur la cÎte du Westmoreland, le desséchement des marais de
Helsington, qui couvrent plus de 800 hectares, peut compter comme
une des opérations les plus satisfaisantes, récemment lentées en
Angleterre.
Helsington. â Les marais, dâun niveau trĂšs peu supĂ©rieur Ă celui
des basses marées, avaient été allotis et enclÎturés au commence-
ment du siĂšcle, au profit dâun grand nombre de propriĂ©taires, en
vertu dâune loi intitulĂ©e Heversham Inclosure Act. Jusquâalors on
1. Shellabear, Reclamation of land from the sea. (Journ. Roy. Agric. Soc.,
t. IL, 1867.)
282 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
s'était borné à extraire de la tourbe pour Ana riSiouRes la ville de
Kendal et les environs.
Les commissaires, aux termes de la loi, firent construire des digues
contre les hautes marées, des fossés collecteurs et des écluses de dé-
charge dans la mer ; mais, soit Ă cause dâune pente insuffisante, soit
en raison du peu de profondeur du plan dâeau, les travaux exĂ©cutĂ©s
nâempĂȘchĂšrent pas le terrain dâĂȘtre inondĂ© par les fortes marĂ©es. En
1858, il fallut recourir Ă une nouvelle loi pour reporter Ă 5 kilomĂš-
tres plus en amont le collecteur et lâĂ©cluse de dĂ©charge principale,
dans le della mĂȘme du Kent, Ă Ulphacrag. GrĂące Ă cet avancement,
la chute augmenta de 1",22 ; les collecteurs purent ĂȘtre Ă©largis et
approfondis, et Ă lâaide dâun fossĂ© de ceinture (catchwater), on par-
vint Ă capter les eaux des hauteurs environnantes pour les Ă©vacuer
sĂ©parĂ©ment. Le coĂ»t des nouveaux travaux sâĂ©leva Ă 375 000 fr.
Ă 1%,20 au-dessous de la surface de tourbe, on rencontre de
l'argile marneuse. Comme les canaux principaux d'Ă©coulement sont
assez profonds pour que les fossĂ©s secondaires pĂ©nĂštrent dans lâar-
gile, on creuse ces derniers Ă lâaide dâun outil spĂ©cial (long mouth) et
on forme avec le dĂ©blai des bourrelets superficiels que lâon gazonne.
On obtient ainsi des drains excellents au prix dâenviron 100 fr. par
hectare. Les tuyaux deviennent ainsi inutiles ; le défaut de pente et
le refoulement des eaux Les rendraient du reste peu pratiques.
Le drainage achevé, on extrait l'argile du sous-sol par des puits,
situés eur les bords des piÚces à mettre en culture, et on la répand
sur la surface de la tourbe, à raison de 250 charretées par hectare.
Il en résulte un terreau meuble, riche en matiÚres végétales, trÚs
approprié aux céréales, aux racines et au trÚfle.
Les bùtiments d'exploitation sont installés en dehors du marais.
Les engrais ne sont employés que pour les récoltes fourragÚres, dans
lâassolement de quatre ans, adoptĂ© par les cultivateurs. Sur quelques
points oĂč les tourbiĂšres ont Ă©tĂ© conservĂ©es, on continue Ă prĂ©lever
du combustible, dans les villages de Brigsteer et de Beathwaite, qui
approvisionnent Kendal.
La fertilitĂ© du sol nâa pas diminuĂ©, et la pomme de terre est deve-
nue lĂŠ culture dominante du marais, quoiquâelle soit parfois retardĂ©e
jusqu'en mai et juin par les fortes gelées. Avant le desséchement,
"
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 283
les fiĂšvres intermittentes dĂ©cimaient la population ; il nây a plus de
fiĂšvres aujourdâhui.
La mer reprend quelquefois ses droits sur le marais. Pendant
l'hiver de 1852, un ras de marée surmonta les digues et sabmergea
sous quelques pieds dâeau les districts de Foulshaw et de Levens, en
noyant le bétail; mais ces accidents sont exceptionnels ; l'entretien
des digues et des travaux représente annuellement une taxe de
6 fr. 20 c. par hectareâ.
3. â Les polders du Westmoreland.
Le chemin de fer de Ulverston Ă Lancaster, traversant lâ'embou-
chure de la riviĂšre Kent, dans la baie de Morecambe, laisse voir
de vastes lais de mer et des marais coupés de la terre ferme et
dĂ©lavĂ©s chaque jour par les marĂ©es. M. Brogden sâest rendu ac-
quéreur de 250 hectares de ces terrains qu'il a endigués et mis en
polders. Les sables, aprĂšs avoir Ă©tĂ© scarifiĂ©s, ensemencĂ©s et fumĂ©s Ă
lâaide de phosphates et d'engrais de ville, ont Ă©tĂ© convertis en pĂątu-
rages luxuriants oĂč les moutons et les bestiaux font lâadmiration
des cultivateurs du Westmoreland. Les terres marécageuses, aprÚs
assainissement, sont soumises Ă lâassolement de la localitĂ© et en plein
rapportâ.
C'est à la suite de cette opération lucrative que la Warton land
Company a dĂ©cidĂ© dâenclĂŽturer 4 000 hectares de ces mĂȘmes sables,
Ă lâaide dâune digue Ă la mer s'Ă©tendant depuis la gare de Hest Bank,
du chernin de fer Londres nord-ouest, jusquâĂ Arnside Point. Outre
la digue, la compagnie Ă©tablit une route de communication de Mo-
recambe Ă Arnside, destinĂ©e Ă raccourcir dâune vingtaine de kilo-
mÚtres la distance entre Lancaster et Barrow. Les travaux ont été
âestimĂ©s Ă prĂšs de 4 millions de francs, et la valeur des lais de mer
mis en culture Ă 10 millions de francs *.
1. Crayston Webster, Farming of Westmoreland. (Journ. Roy. Agric. Soc.,
1876.)
2. Crayston Webster, loc. cil., p. 34.
3. Iron, 23 juin 1877.
284 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
4.â Le littoral des comtĂ©s de Kent et de Somerset.
En dehors des riches terres marécageuses du comté de Kent, qui
bordent la Tamise, le Medway, le Rother, le Stour et le Swale, unc
plaine alluviale considérable s'étend le long de la cÎte entre Rye, au
midi, et Hyde au nord, limitĂ©e Ă lâouest par le district argileux du
Weald, et Ă lâest par les graviers de Hastings.
Romney Marsh. â C'est dans cette plaine dont le niveau est infĂ©-
rieur à celui des marées de vives eaux (4,10 à Dowls), que se trou-
vent les marais de Romney et de Denge et les alluvions de Walland.
semble quâelle ait Ă©tĂ© jadis l'estuaire de la riviĂšre Rother, qui
comprend entre ses deux bras lâĂźle de Oxney, et dĂ©bouche aujour-
dâhui dans la Manche au-dessous de Rye.
Le marais de Romney aurait été endigué du temps des Romains,
et dessĂ©chĂ© par leurs soins, ce quâaffirme Sir William Dugdale. Tou-
jours est-il que Henri IT ordonna « que toutes les terres du district
« fussent défendues contre la mer et contre les crues, et pour cela
« maintenues par des digues et des fossĂ©s ». Le roi Ădouard [°° rĂ©Ă©-
dita ces ordonnances et successivement les rois Ădouard II et IE,
Richard IT, ete., confirmĂšrent les dispositions qui rendent obliga-
toire l'entretien des digues et des canaux de desséchement.
La plus ancienne institution pour la surveillance du desséchement
et de lâendiguement des terres basses, en Angleterre, a Ă©tĂ© fondĂ©e
dans le Romney Marsh.Une commission, composée de 24 membres,
y fonctionnait avant le xrr° siĂšcle, dâaprĂšs dâanciennes coutumes; elle
avait le pouvoir de lever les contributions nécessaires pour les répa-
rations urgentes, de poursuivre et de punir les rĂ©calcitrants. Câest
eu s'inspirant de ces traditions locales quâen 1250, sous le rĂȘgne de
Henri HI, furent rendues les six ordonnances stalutaires qui créÚrent
les commissions de drainage (commissioners of sewers). Henri VIT
étendit les prérogatives de ces commissions, qu'il désigna dans une
douzaine de comtés, y compris le Great Level des Fens (1532, 25° an-
nĂ©e du rĂšgne), et Ădouard VI (1550, 3° annĂ©e du rĂšgne) les confirma
à perpétuité.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 285
Aussi bien les marais de Romney que ceux de Walling, de Denge
et de Guilford, sont défendus sur le rivage de la Manche par des
digues de galets et de sable, et dans les endroits les plus exposés,
par de puissantes Jetées.
Le sol est tourbeux sur certains points, mais le plus souvent il
forme un loam argileux, avec quelques parties sablonneuses. Le
sous-sol est de lâargile, et au-dessous de l'argile se trouve le sable
du Weald. La cĂŽte de Denge est absolument envahie par les galets,
sur une longueur de 5 kilomĂštres ; on nây rencontre d'autre vĂ©gĂ©-
tation que des touffes de joncs et de genĂȘts Ă©pineuxâ. En dehors de
celte cĂŽte dĂ©solĂ©e, le district est couvert de riches pĂąturages, oĂč
lâon Ă©lĂšve et engraisse de nombreux troupeaux, Ă raison de 5 Ă 7
moutons par hectare, pendant l'hiver, et environ le double pendant
l'été. Dans les étés trÚs favorables, la pousse d'herbe est parfois si
forte quâil devient nĂ©cessaire dây faire paĂźtre de jeunes bĆufs, afin
que la prairie ne devienne pas trop luxuriante Ă lâusage des mou-
tons de transhumance, qui reviennent aprÚs avoir hiverné sur des
champs de turneps.
Sur les terres fortes des confins de Romney Marsh, une petite
partie est en labour. Le drainage y a opéré de grandes améliora-
tions. Le blĂ© sâalterne chaque annĂ©e avec les pois, ou les fĂ©veroles ;
parfois on lui substitue de lâavoine, avec des turneps. On y cultive
surtout comme porte-graines, des turneps, des betteraves et des
radis pour les besoins du commerce.
Somersel Marshes. â Dans la baie de Bridgewater, la cĂŽte du So-
merset Ă©tait jadis dans les mĂȘmes conditions que celle du Lincoln,
bordant le Wash. Les marées et les crues des riviÚres telles que le
Parrot avec ses affluents, l'Ile, le Yeo et Tone et la Brue, entrete-
naient sur toul le territoire, au midi de Wells et de Glastonbury, des
alluvions marécageuses qui ont élé endiguées, desséchées et con-
verties en terres dâune grande fertilitĂ©.
Le territoire embrasse plus de 20 kilomĂštres Ă partir de la cĂŽte,
1. Topley, Agricultural geology of the Weald. (Journ. Roy. Agric. Soc., 1882,
vol. VIIL.)
286 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
entre Bridgewater, Glastonbury, Wells, Axbridge et Brent Marsh; il
nâest formĂ© que dâalluvions, de sables, retenant les vases des crues
et barrant lâĂ©coulement des eaux qui descendent du Bruton et de
Shepton Malet. Dugdale mentionne les travaux considérables qui
furent exécutés de son temps pour protéger les terres contre les
marées et les assainir au point de vue des pùturages à rente trÚs
Ă©levĂ©e. Caird cite les Hams de Pawlet, qui sont une terre dâalluvion
des plus riches, le long de la riviĂšre Parrot et du rivage de la baie
Bridgewater, comme rapportant en location pour pĂąturage de 325
Ă 875 fr. lâhectareâ.
IV. â LĂGISLATION.
MalgrĂ© une lĂ©gislation confuse dont lâorigine se perd au milieu
des us et coutumes dâavant le x1v° siĂšcle ; malgrĂ© lâincompĂ©tence des
juridictions Ă©tablies en vertu des statuts de Henri VIIL?, et de la loi
gĂ©nĂ©rale promulguĂ©e par la reine Ălisabeth; malgrĂ© le conflit dâat-
tributions soulevé devant les cours de justice pour les rÚglements
applicables au régime des eaux ; enfin, malgré les procÚs intermi-
nables et les oppositions violentes des intĂ©ressĂ©s, la grande Ćuvre
du desséchement des Fens a pu se poursuivre pendant deux siÚcles,
et s'achever, de façon Ă prĂ©senter le type le plus parfait de lâassai-
nissement des terres qui ait été réalisé en Angleterre.
Inaugurés par des entrepreneurs, sous le contrÎle des commis-
saires de drainage (sewers commissioners) que le roi désignait ;
puis, par des grands seigneurs, titulaires de chartes royales, les tra-
vaux des Fens donnÚrent lieu à des abus de spéculation qui insur-
gĂšrent dâabord les populations rurales dont les droits avaient Ă©tĂ©
mĂ©connus et les intĂ©rĂȘts sacrifiĂ©s. Plus tard, lâapaisement des esprits
1. Sir James Caird, General view of British agriculture. (Journ. Roy. Agric.
Soc., 1878, vol. XIV.)
2. Henry VIIL, Sfatute 231, année 1531.
3. General drainage act ; Elisabeth 43", année 1600.
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 281
s'Ă©tant fait, le Parlement intervint Ă partir du rĂšgne de Jacques I,
par des lois locales (local acts) au lieu de statuts, et institua dĂšs
lors des rĂšgles dâaprĂšs lesquelles les entreprises furent continuĂ©es et
développées, moyennant des conditions débattues à forfait ou des
taxes prélevées en vertu de pouvoirs conférés aux commissions que
nommait chaque loi spéciale.
En 1847 seulement, sur l'initiative de Lord Lincoln, une loi gé-
nérale * fut promulguée, aux termes de laquelle, pour des petits
cours dâeau et des pĂ©rimĂštres restreints, compris dans les domaines
particuliers, les propriétaires purent faire appel aux compagnies
(Land drainage) afin de dessécher, drainer, irriguer, colmater, en-
diguer les terres et faire Ă©couler les eaux au dehors. Toutefois, jus-
qu'à ce que cette loi eût été complétée en 1861, aucun individu,
aucune association d'individus, mĂȘme avec lâaide des compagnies,
ne put triompher dâune minoritĂ©, fĂŒt-elle dâun seul intĂ©ressĂ©, qui
eût fait opposition au projet d'amélioration.
La loi de 1861 ?, finalement, est venue faciliter l'institution de con-
seils administratifs (Drainage trustees) réunissant les pouvoirs né-
cessaires pour organiser et amĂ©liorer les cours dâeau et le rĂ©gime
des eaux de tout un bassin. Aux termes de cette loi, les intéressés
de chaque district comprenant lâaffluent dâune riviĂšre peuvent dĂ©lĂ©-
ouer leurs pouvoirs à une commission générale chargée du bassin
de la riviĂšre, pour faire exĂ©cuter et entretenir les travaux dâamĂ©-
lioration, et prélever les taxes indispensables proportionnellement
aux surfaces el aux intĂ©rĂȘts de chaque participant.
Le Land drainage act de 1861, amplifiant les pouvoirs déjà con-
férés aux commissaires de drainage que Henri VIT fit désigner (23°
année de son rÚgne), accorde aux propriétaires de lais de riviÚre ou
de mer le droit de se syndiquer pour couvrir les dĂ©penses de lâen-
clĂŽture, au moyen de taxes proportionnelles. Ils ont ainsi l'avantage,
chacun ayant sa part dans lâentreprise, de pouvoir combiner leurs
efforts pour assurer une bonne direction aux travaux, sous le con-
trĂŽle public des commissaires dâenclĂŽture (/nclosure commissioners).
1. General drainage act (Nict. 10 et 11).
2. Land drainage general act (Nict. 25 et 26).
288 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Câest dâaprĂšs ce mĂȘme principe que le dessĂ©chement des Fens,
en dehors de celui du Great Level, rĂ©gi par un statut spĂ©cialâ, a
pu sâopĂ©rer, mais les pouvoirs des commissaires furent malheureu-
sement restreints Ă une section des cours dâeau, au lieu de com-
prendre la totalitĂ© du parcours dâune riviĂšre et de ses affluents. Les
lois relatives au desséchement des Fens du Witham, par exemple,
ne visent qu'une section de 48 kilomĂštres de la riviĂšre, entre Lin-
coln et Boston, et le territoire correspondant à cette section a été
partagé en six districts. Chaque district nomme sa commission de
drainage intĂ©rieur, Ă raison dâun membre par paroisse. Les com-
missions de district désignent, chacune dans son sein, les membres
qui doivent les représenter dans la commission générale (Board of
general commissioners), composée de 33 titulaires, dont 31 pour
les districts et un pour chacune des villes, Lincoln et Boston. Enfin
la commission gĂ©nĂ©rale nâexerce le contrĂŽle sur la riviĂšre et ses
affluents que dans le parcours de 48 kilomÚtres visé par la loi,
comme sur les canaux principaux de dessĂ©chement, et nâa le pouvoir
de prĂ©lever des impositions qui permettent d'amĂ©liorer, dâĂ©tendre
et de maintenir en bon Ă©tat les travaux dâassainissement, que dans
la section limitée.
Quoi quâil en soit, depuis lâannĂ©e 1600 jusquâen 1861, ce fut seu-
lement en recourant Ă des Bills introduits devant le Parlement,
motivant des lois locales (local acts), que la plupart des amélio-
rations ont été entreprises dans les Fens isolés el sur les cours
dâeau Ă rectifier, pour l'Ă©coulement rĂ©gulier des eaux de dessĂ©che-
ment.
Les frais exorbitants auxquels ont donné lieu les procédures du
Parlement, en cas d'opposition aux BĂŒlls, câest-Ă -dire, aux projets
de lois, ont imposĂ© une des plus lourdes charges quâaient eu Ă sup-
porter les entreprises d'améliorations fonciÚres.
Ces frais ont dĂ» ĂȘtre garantis tout dâabord par les parties intĂ©ressĂ©es,
dans le cas oĂč le Bill eĂ»t Ă©tĂ© rejetĂ©, et aussi, en considĂ©ration des
difficultĂ©s quâeĂ»t prĂ©sentĂ© un paiement aprĂšs coup, si l'opposition ve-
nait à triompher, car les dépenses eussent incombé à la partie adverse.
1. Incorporaled slatute (Charles IL, 15).
ÂŁ
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE, 289
Dans un pays qui vante lâabsentĂ©isme de son gouvernement en
matiÚre d'agriculture, ou les relations établies entre les proprié-
taires et les prolétaires agricoles, on à quelque peine à concevoir
l'utilité de dépenses aussi ruineuses que celles constatées récem-
ment encore pour faire trancher par le Parlement des conflits dâat-
tribution concernant des travaux dâintĂ©rĂȘl gĂ©nĂ©ral. Ainsi pour faire
sanctionner les amĂ©liorations projelĂ©es dans la section dâaval dâune
riviÚre secondaire, le coût de la procédure parlementaire, pendant
50 annĂ©es de litige, sâest Ă©levĂ© Ă 2 millions et demi de francs; et
pour obtenir les pouvoirs nécessaires en vue de régulariser un autre
cours dâeau, qui dessert les comtĂ©s du Middland, le coĂ»t, aprĂšs un
mĂȘme nombre d'annĂ©es, a atteint 3 750 000 fr". La loi qui a autorisĂ©
la rectification de la riviĂšre Don (un des aflluents de l'Ouse), sur un
parcours de 20 kilomÚtres, a représenté une dépense, en procédure,
de 175 000 fr., dont 75 000 fr. Ă la charge des adversaires du pro-
jet ; câest le tiers du devis total des travaux !
Si encore la lĂ©gislation sâĂ©lait amendĂ©e par le fait de lâinterven-
tion du Parlement ; mais câest le contraire qui a eu lieu.
Telle section dâun cours dâeau nâa pas de juridiction, elle est la
mieux partagée ; telle autre a été canalisée pour un objet déterminé
relevant dâune juridiction spĂ©ciale ; telle autre enfin est grevĂ©e du
privilĂšge des usiniers. Ici, le fond appartient Ă une commission ; et
les berges dĂ©pendent dâune autre, ou bien ailleurs, des propriĂ©taires
riverains : câest le cas pour la riviĂšre Aire, affluent de lâOuse (York-
shire). De Skipton jusquâĂ Keighley, les commissaires du drainage
de lâAire Dale ont le contrĂŽle du chenal; plus loin, les riverains
sont libres de tout contrĂŽle et agissent Ă leur guise; plus loin encore,
Ă partir de Leeds, intervient une compagnie de navigation, et fina-
lement, depuis la limite de la compagnie de navigation jusquâĂ
l'embouchure, 1l nây a plus de contrĂŽle. Il s'ensuit que les travaux
exécutés aussi bien à laval pour le drainage, que dans la section
centrale pour la navigation, exposent les autres sections à des débor-
dements constants.
1. Wheeler, On river conservancy. (Journ. R, Agric, Soc., 1883, vol. XIX,
p. 391.)
ANN,. SCIENGE AGRON. â 18593. â 1. 19
290 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
La riviĂšre Nen, sur un parcours de 48 kilomĂštres, entre Peter-
borough et la mer, ne compte rien moins que 14 juridictions ayant
droit de contrĂŽle sur le chenal et sur les berges, et pour la riviĂšre
Witham, entre Grantham et la mer, 17 commissions, ou comités, se
déclarent compétents sur divers points du parcours, indépendamment
de la commission générale et des six commissions de district du
drainage des fens. Ce sont pourtant les deux affluents principaux
sur lesquels repose âle dessĂ©chement des Fens, pour l'Ă©coulement
des eaux excédantes.
L'absence dâun contrĂŽle unique se fait sentir surtout pour lâen-
semble des riviĂšres traversant les Fens, en raison mĂȘme de leur
régime qui fait que le territoire plat absorbe la plus grande partie
des eaux pluviales et des sources fournies par les hautes terres. Ainsi
le Witham dont le bassin, de 2750 kilomÚtres carrés, comprend
moins de la moitié du territoire des Fens, est alimenté dans son
cours supérieur par des sources pérennes, émanant de la formation
oolithique ; mais dans les Ă©tĂ©s trĂšs secs, lâ'absoption est telle sur les
terres des Fens, et les réserves faites en amont pour le service des
canaux de navigation et des fossés de desséchement sont si consi-
dĂ©rables, que la riviĂšre tarit en aval. Câest ce que lâon Ă constatĂ©
notamment dans les étés trÚs secs des années 1864 et 1868 ; l'étiage
ordinaire, qui eĂčt permis de curer les sables et les vases amoncelĂ©s
Ă l'embouchure, nâa reparu quâĂ la fin de l'automne, au-dessous de
Lincoln.
Cette circonstance est aggravée par le fait que le flot de marée est
barrĂ© Ă 8 kilomĂštres de embouchure par une Ă©cluse ; le plan dâeau
souterrain ne profite ainsi nullement du jeu des marées pour le
maintien de la perméabilité dans le sous-sol, et le chenal reste en-
vasĂ© pendant plusieurs mois de lâannĂ©e. Le dessĂ©chement trop rapide
de la tourbe, Ă cause du manque dâeau en Ă©tĂ© et de sa dĂ©composition
Ă lâair, favorise la compression et lâabaissement du sol de Ă mĂštre,
parfois de 2°,50 comme à Whittlesey Mere, et modifie le niveau des
drains et fossés de tout un district.
Or, les riviÚres à marée relÚvent de la Couronne, dont la juri-
diction est exercée par le Board of Trade (conseil du commerce), et
sâĂ©tend sur tout le chenal que recouvre la haute marĂ©e moyenne, Ă
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 291
moins quâen vertu de concessions spĂ©ciales la juridiction nâait Ă©tĂ©
abandonaée au seigneur suzerain (Lord'of the manor), aux proprié-
laires riverains, ou à des commissions désignées par les lois spé-
ciales. La Couronne est également chargée de la conservation des
riviĂšres navigables, en raison des fonctions quâelle dĂ©tient du Lord
de la haute amirautĂ© ; mais si elle peut empĂȘcher toutes dĂ©grada-
Lions, elle nâa aucun pouvoir, donnĂ© par la loi, de forcer Ă entre-
tenir le chenal navigable en bon Ă©iat. La loi n'autorise pas davan-
tage les riverairs ni les corps constitués à faire curer ou draguer
ces riviĂšres pour les besoins de la navigation.
Quant aux riviĂšres non navigables, chaque riverain dont la pro-
priĂ©tĂ© est limitĂ©s par le fil de lâeau, peut en faire usage pour con-
duire les eaux sur ses terres, faire tourner des moulins, ete., mais
à la condition de ne porter aucun préjudice aux coriverains d'amont:
ou dâaval, de restituer l'eau au cours dâeau aprĂšs emploi, sans pou-
voir en détourner un volume quelconque. Il est tenu également de
recevoir les eaux qui lui arrivent par la voie naturelle, mĂȘme si elles
inondent ses terres, par suite d'obstacles créés naturellement, sans
avoir aucun droit à indemnité. Il est vrai qu'il peut endiguer ses
terres, mais sans causer aucun préjudice au fonds d'autrui par ses
travaux.
Il s'ensuit quâen Angleterre, aucune autoritĂ© administrative dĂ©finie
nâa le contrĂŽle responsable, ni la police des eaux ; Ă moins que cer-
laines riviĂšres, ou seclions de riviĂšres, nâaient Ă©tĂ© comprises dans le
ressort des commissions permanentes, telles que celles de drainage
(sewers commissioners), instituĂ©es par Henri VIE; celles dâenclĂŽture
(inclosure commissioners), chargées de lexécution des Land drai-
nage acts ; celles du gouvernement local (Local government board),
qui surveillent application des Pollutionâs acts; ou, bien les nom-
breuses commissions désignées par les lois locales du Parlement
(local acts), dont les attributions se partagent avec celles du Board
of Trade, de l'Amirauté, de la navigation, etc.
La difficulté de codifier les prescriptions formulées par autant de
corps constitués, et de faire une loi générale qui fixe le régime des
eaux, rĂ©sulte principalement de la nĂ©cessitĂ© dâindemniser des droits
et des intĂ©rĂȘts qui ont force de prescription, et aussi dâasscoir Ă©qui-
292 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
iablement les contributions et taxes qui permeltent d'exécuter les
travaux indispensables d'amélioration et d'entretien.
Les droits communaux, ou individuels, de pacage, de tourbage,
d'affouage, de chasse, de pĂȘche, etc., de mĂȘme que les enclaves de
terrains pour enclĂŽtures, pour fossĂ©s et canaux, etc., ont pu ĂȘtre
compensés en leur temps, et la plus-value des terres desséchées ou
endiguĂ©es, de mĂȘme que lâaugmentation du bien-ĂȘtre gĂ©nĂ©ral et de
la salubrité, ont largement indemnisé les propriétaires atteints dans
l'exercice de leurs privilĂšges ou de leurs droits de possession ; mais
les intĂ©rĂȘts de la navigation sont restĂ©s en collision avec ceux du
desséchement et de la rectification des riviÚres. Les plus graves con-
lestations sont soulevĂ©es encore aujourdâhui par les compagnies de
bateaux, par les autorités des ports, et les villes, menacées dans
leurs relations commerciales, au point de vue des transports par
riviĂšre et par mer.
Quant à l'assiette équitable des taxes, les propriétaires des ter-
rains situĂ©s en aval des cours dâeau, sâappuyant sur ce que les ri-
viĂšres servent dâexutoire Ă lâexcĂ©dent des eaux pluviales qui tombent
dans leur bassin, nâont pas cessĂ© de revendiquer l'imposition de
toute la surface du bassin, proportionnellement aux cotes de con-
tribution fonciÚre. D'autre part, les propriétaires des terres situées
en amont, à des niveaux élevés que les crues épargnent, excipent
qu'ils nâont aucun avantage Ă tirer des travaux exĂ©cutĂ©s en aval,
aux risques des propriétaires qui drainent, dessÚchent et endiguent,
pour cultiver profitablement leurs terres. Ts se refusent Ă admettre
que les cours dâeau, naturellement chargĂ©s dâĂ©vacuer les eaux
dâamont, les intĂ©ressent ; d'autant plus quâils sont plus Ă©loignĂ©s de
l'Ă©missaire et qu'ils les utilisent sur une plus grande longueur, mais
pour les besoins de la navigation.
Le comitĂ© de la Chambre des lords, chargĂ© en 1877 de lâenquĂȘte
sur la conservation des riviĂšres, a dĂ» reconnaĂźtre que les conditions
particuliĂšres de chaque cours dâeau ne se prĂȘlaient pas Ă une rĂ©gle-
mentation unique, et quâil failait user de prudence, en rachetant les
droits des usiniers, pour supprimer les barrages et les Ă©cluses ; car
il nâest pas dĂ©montrĂ© que ces ouvrages, quand ils sont bien Ă©tablis,
soient nĂ©cessairement nuisibles. Le comitĂ© sâest prononcĂ© contre le
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 293
principe des taxations, tel qu'il est spécifié dans le statut de [lenri VIT,
qui consiste à percevoir les impositions sur base des avantages ré-
sultant, dans chaque cas particulier, des travaux d'amélioration ou
d'entretien ; ce mode de taxation nâest pas toujours Ă©quitable, ni
susceptible dâĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ©. Il en est de mĂȘme de limposition qui
frappe évalement tous les propriétaires dans une zone déterminée.
Le comitĂ© en consĂ©quence Ă©met lâavis de rĂ©partir les taxes sur loule
lâĂ©tendue du bassin, mais en imposant plus fortement les terres et
les habitations situées au-dessous du niveau moyen des crues. La
laxe devrait ĂȘtre basĂ©e sur la cote fonciĂšre ; les villes et les habi-
tations ou autres bĂątiments, devraient payer leur quote-part des
contributions pour la conservation des riviĂšres. Quant aux terres
hautes, elles devraient ĂȘtre comprises dans la rĂ©partition des taxes
qui servent Ă maintenir le chenal des riviĂšres oĂč elles Ă©coulent le
surplus des eaux pluviales et de sources qui les atteignent.
En se fondant sur ces recommandations, le Gouvernement a sou-
mis, depuis 1881, au Parlement divers projets de loi, dâaprĂšs les-
quels, sur les trois zones constituant le bassin dâune riviĂšre, celle
dâamont ne serait imposĂ©e que du dixiĂšme de la taxe fixĂ©e pour la
zone dâaval, aprĂšs enquĂȘte publique par les fonctionnaires de l'Ătat.
En France, les questions de cet ordre sont depuis longtemps ré-
glĂ©es par la jurisprudence. Il est vrai quâon y a dĂ©veloppĂ© le prin-
cipe trĂšs rationnel dâassocier entre elles les diverses parties intĂ©-
ressĂ©es dâun mĂȘme bassin, et de rĂ©gler les associations syndicales
par département, sous le rapport des dépenses de travaux que sup-
porte proportionnellement chacun des intĂ©rĂȘts associĂ©s.
La mĂ©thode usitĂ©e consiste, quand il sâagit, par exemple, dâinonda-
tions, à diviser les terrains submergés en zones déterminées par la
profondeur de ces terrains au-dessous des eaux ; puis, chaque ter-
rain est classé suivant sa valeur de production. La premiÚre partie
est censée représenter la fréquence des inondations, et la seconde,
la valeur de la perte. Câest Ă une commission spĂ©ciale quâincombe
l'application de cette méthode, qui admet du reste à coopérer les
autres intĂ©rĂȘts engagĂ©s. Toujours est-il que les riverains aboutis-
sants son! les plus intéressés à l'amélioralion de la riviÚre, et que,
sauf quelques cas particuliers, oĂč lâĂ©tendue de la propriĂ©tĂ© protĂ©gĂ©e
291 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
n'est pas en rapport avec la servitude qui lui est imposée, les pro-
priétaires riverains supportent de fait les sacrifices les plus considé-
rables. D'abord, le syndicat les exonĂšre de lobligation dâentretenir
la riviĂšre, et puis, en refusant de se syndiquer, ils perdent non seu-
lement leurs récoltes, mais encore leurs terrains. Le syndicat a le
droit par contre de compter sur leur concours le plus actif; car en
vertu dâune clause insĂ©rĂ©e dans le rĂšglement administratif des asso-
cialions syndicales, ils peuvent exécuter personnellement les travaux
nécessaires, mais sous la direction du syndicat.
Les dépenses sont ensuite remboursées pur la remise de l'impÎt ;
mais comme la valeur de cet impĂŽt est rarement suffisante pour
couvrir toute la dépense, il y à lieu de tenir compte de l'excédent,
soit avec les ressources des autres impĂŽts, soit Ă lâaide d'emprunts.
La promptitude d'exécution est tellement appréciée, que le syndicat
a tout intĂ©rĂȘt Ă presser l'administration pour obtenir le tracĂ© nĂ©ces-
saire à l'exécution des travaux.
Dans le projet de Code rural présenté au Sénat, concernant le
rĂ©gime des eaux, l'administration, au cas oĂč les propriĂ©taires ne
peuvent pas s'entendre pour former une association libre ou auto-
risĂ©e (loi du 21 juin 1865), peut faire procĂ©der elle-mĂȘme Ă leur
exécution, quand elle juge les travaux urgents ; un décret déclare
alors dâublitĂ© publique les travaux, fixe le montant de la subvention
de l'Ătat et le chiffre de la contribution qui sera mise chaque annĂ©e
Ă la charge des intĂ©ressĂ©s, sans quâelle puisse jamais excĂ©der, pour
chacun, le quart du reveuu annuel de sa propriété.
De toutes maniĂšres, quand les travaux de curage, dâendiguement,
d'Ă©largissement ou de redressement des cours dâeau non navigables
et non flottables intĂ©ressent la salubritĂ© publique, le dĂ©cret ou lâar-
rĂȘlĂ© qui les ordonne peut, aprĂšs avis du conseil gĂ©nĂ©ral, mettre une
partie de la dépense à la charge des communes dont le territoire est
assaini.
D'autre part, la loi du 16 septembre 1807 sur le desséchement
des marais restant en vigueur, sauf quelques modilications intro-
duites par la loi de 1865 sur les associations syndicales, les proprié-
laires, les associalions ou les concessionnaires, en France, sont ga-
rantis par une législation qui n'a pas donné grands fruits, en raison
LES DESSĂCHEMENTS EN ANGLETERRE. 295
des difficultés, pour ainsi dire insurmontables, que crée la fixation:
de la plus-value.
Aussi bien, pour les étangs dont l'assainissement a exercé une
trĂšs heureuse influence sur lâĂ©tat sanitaire et agricole de certaines
contrĂ©es, la loi de 1807 arme lâadmunistration qui applique le sys-
tĂšme de coercition pure, câest-Ă -dire, le dessĂ©chement obligatoire
imposé aux propriétaires des étangs insalubres, ou bien le systÚme
mixte qui consiste à allouer des primes aux propriétaires disposés
Ă faire les travaux leur incombant et Ă user de la coercition vis-Ă -vis
des récalcitrants.
Reste l'exĂ©cution des travaux dâassainissement des terres humides
et insalubres qui ont pour but dâabaisser le plan dâeau du sous-sol,
en régularisant les riviÚres (curage et redressement), ou en ouvrant
des canaux et des fossĂ©s dâassainissement. Ces travaux peuvent don-
ner lieu Ă la constitution entre les propriĂ©taires intĂ©ressĂ©s dâune
association syndicale, libre vu autorisée (loi du 21 juin 1865), ou
bien, aux termes de la loi du 18 juillet 1837, ils peuvent ĂȘtre mis Ă
la charge des communes intéressées, formées en syndicat ; le con-
tingent est fixĂ© suivant le degrĂ© dâintĂ©rĂȘt quâa chaque commune Ă
l'exéculion des travaux. 3
Sur tous les points d'application générale, la législation française
offre ainsi des garanties à la propriété privée, tout en organisant et
rĂ©glant lâexĂ©cution et le paiement des travaux.
LâAngleterre n'offre rien de pareil; si elle a Ă©chappĂ© au mal de
l'administration, elle a ressenti tous les effets de mauvaises lois.
Aussi doit-il lui ĂȘtre tenu grand compte des efforts prodigieux quâelle
a faits, sous le systÚme de la liberté, pour paralyser une action légis-
lative hétéroclite, trouver dans l'initiative individuelle les ressources
indispensables et mener à bien, dans le siÚcle présent, des opéra-
tions aussi grandioses que celles que nous venons de décrire*.
Les Hollandais ont inscrit Ă leur budget, de 1849 jusquâen 1875,
pour leurs travaux de canaux et lâentretien de leurs dessĂ©chements,
plus de 40 millions de francs (19 millions 1/2 de florins), en dehors
1. Malgré les bonnes lois dont on jouit en France, surtout celles qui régissent les
syndicats, il n'a été desséché, pendant 70 ans, que 60 000 hectares de marais, dont
la moitiĂ© en tourbiĂšres, pour un intĂ©rĂȘt purement industriel.
296 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
des dépenses consenties annuellement par les provinces, les com-
munes ou les compagnies propriétaires, La conservation des riviÚres,
pendant ladite pĂ©rivde, a absorbĂ© la mĂȘme somme Ă peu prĂšs, indĂ©-
pendamment des travaux dâamĂ©lioration proprement dits. L'Ătat,
comme en France, prend à son compte, sous la responsabilité du
conseil des eaux, le Waterslatt, le fardeau des plus lourdes dé-
penses, que paient les contribuables *.
Le rĂŽle de lâĂtat anglais, pour favoriser le dĂ©veloppement des
amĂ©liorations agricoles d'intĂ©rĂȘt public ou privĂ©, sâest bornĂ© Ă des
avances de fonds depuis lâannĂ©e 1842.
Les prĂȘts de lâĂtat nâont Ă©tĂ© consentis, il est vrai, que pour le
drainage souterrain, le défrichement des terres incultes et la cons-
truction de bĂątiments dâexploitation agricole, en rlande, jusquâĂ
concurrence dâune somme de 200 millions, qui a Ă©tĂ© dâailleurs rem-
boursĂ©e aprĂšs une pĂ©riode de 22 ans, intĂ©rĂȘts el amortissement
compris, la terre restant libre de cette charge. Quant Ă lâĆuvre des
desséchements, qui échappait au contrÎle du Gouvernement, quoi-
quâelle constitue une affaire d'intĂ©rĂȘt public, non moins urgente que
le drainage, les chemins, les clĂŽtures ou les plantations, ce sont les
propriĂ©taires: eux-mĂȘmes, au moyen de leurs ressources particu-
lÚres, les communes propriétaires et les villes intéressées à la navi-
gation commerciale sur les riviĂšres desservant les districts Ă assainir,
qui ont dĂč fournir les fonds nĂ©cessaires aux travaux, aux indemnitĂ©s
et aux acquisitions de matériel, en faisant peser la charge à perpé-
tuité sur la terre. Aussi bien, l'augmentation des revenus provenant
des travaux exécutés et de la prospérité du district, de la plus-value
des terres et des denrées, du développement des ressources locales,
ont largement indemnisé les contribuables de leurs avances, et sau-
vegardĂ© amplement les intĂ©rĂȘts des propriĂ©taires. |
Quoi quâil en soit, Le rĂ©sultat final des vastes entreprises que nous
avons dĂ©crites rĂ©pond pleinement Ă lâattente du pays, qui nâa reculĂ©
devant aucun obstacle pour obtenir des améliorations sans précédent
dans lâhistoire de lâagriculture.
1. Van Kerkwjik, Les Travaux publics dans Le royaume des Pays-Bas, 187$.
â LES D âââââ
NOTE PRĂLIMINAIRE
SUR LA
TENEUR EN AZOTE DE L'HUMUS
DANS LES
SOLS DES RĂGIONS ARIDES ET HUMIDES
PAR MM.
E. W. HILGARD M. E. JAFFA
DIRECTEUR DE LA STATION EXPĂRIMENTALE ASSISTANT EN CHIMIE
DE LA CALIFORNIE
= +0e
Dans un mĂ©moire prĂ©cĂ©dent *, j'ai discutĂ© les influences quâexer-
cent les climats aride et humide sur la constitution physique et chi-
mique des sols. Jây ai consignĂ© le fait que les sols caractĂ©ristiques
des climats arides sont trĂšs pauvres en humus (⏠matiĂšre noire »), Ă
cause de lâextrĂȘme intensitĂ© de la combustion lente, ou Ă©rĂ©macausie,
par la concurrence de l'air chaud avec la porosité prédominante de
ces terres : jusquâau point que quelquefois on trouve dans la partie
superficielle du sol moins de matiĂšre organique que dans la couche
qui, d'ordinaire, serait considérée comme sous-sol.
ConsidĂ©rant que lâhumus doit ĂȘtre envisagĂ© comme la source la
plus importante de lâazote pour les vĂ©gĂ©taux non lĂ©gumineux, par la
voie de nitrification lente, on serait naturellement disposé à admettre
que, dans lâexploitation agricole de ces sols si riches en Ă©lĂ©ments
{. Annales de la Science agronomique, 1892, t. II.
298 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
minéraux nutritifs des plantes, les engrais azotés joueraient le pre-
mier rÎle. Dans le passé, j'ai donc maintes fois recommandé lemploi
des fumures azotées, notamment du nitrate de soude et du sulfate
dâammoniaque, dans des cas oĂč une culture prolongĂ©e avait dimi-
nué la production premiÚre, surtout dans les terrains dits mesus,
câest-Ă -dire sur les plateaux Ă sols trĂšs poreux, du sud de la Cali-
forme et de lâArizona.
Dans beaucoup de cas ces recommandalions nâont pas Ă©lĂ© suiviĂ©s
dâun rĂ©sultat favorable ; au contraire, on a constatĂ© quelquefois les
symplĂŽmes qui indiquent lâaction dĂ©favorable dâun excĂšs d'azote.
Câest alors que je me mis Ă Ă©tudier le taux dâazote de la matiĂšre
noire des sols des chmats arides; et le résultat de ces recherches
m'a bientĂŽt convaincu que je me trouvais en prĂ©sence dâun problĂšme
tout nouveau.
Pour me mettre Ă lâabri de toute possibilitĂ© d'erreur par suite de
lâusage dâun rĂ©actif azotĂ©, j'ai toujours substituĂ©, dans le dosage de
l'azote par le procĂ©dĂ© Grandeau, la polasse ou la soude hydratĂ©es Ă
lâeau ammoniacale. Cependant, pour Ă©viter les inconvĂ©nients que
comporte lâemploi des alcalis fixes pour le dosage de la matiĂšre
noire elle-mĂȘme, ce dosage Ă Ă©tĂ© fait, dans un Ă©chantillon spĂ©cial
de la terre, au moyen de la solution ammoniacale. Câest surtout
dans lâapplication de ce rĂ©actif Ă des sols ayant une rĂ©action acide
que pourraient survenir des erreurs sensibles dans le dosage de
lâazote.
Ăvidemment la dissolution de lâhumus dans les alcalis fixes ne
pourrait ĂȘtre soumise Ă lâĂ©vaporation sans perte d'ammoniaque. Le
filtrat alcalin a donc été neutralisé ou acidulé quelque peu par
l'acide sulfurique ; le rĂ©sidu de lâĂ©vaporation a Ă©tĂ© soumis au pro-
cédé Kjeldal pour le dosage de l'azote, dont le taux pour cent fut
calculĂ© sur celui de lâhumus obtenu par lextraction ammonia-
cale.
J'admets que, rigoureusement parlant, le dosage de l'humus de-
vrait ĂȘtre fait, de mĂȘme que celui de lâazote, par une dissolution
d'aleali fixe. Mais il est bien difficile d'Ă©viter toute erreur, qui sur-
viendrait par Pemploi presque inĂ©vitable dâun excĂšs dâacide sulfu-
rique dans la neutralisation, qu'on ne saurait neutraliser Ă son Lour
NOTE SUR LA TENEUR EN AZOTE DE L'HUMUS. 299
par aucun oxyde qui se prĂȘterait Ă la fois Ă une pesĂ©e exacte Ă 100,
puis Ă la combustion de lâhumus. Peut-ĂȘtre le carbonate de baryte
pourrait-il servir, en employant des précautions spéciales ; cepen-
dant la présence de la silice, toujours si abondante dans les cen-
dres de la matiÚre noire, rendrait incertaine toute présomption
quant Ă lâĂ©tat de combinaison de la base aprĂšs lâincinĂ©ration ; et
selon mon avis, cela enlraverait beaucoup plus le dosage de Phumu:;
que ne le ferait l'emploi des différents alcalis.
J'ai rĂ©uni dans le tableau suivant les dosages faits jusquâĂ prĂ©sent
par la voie indiquĂ©e. Jây ai compris tant des sols caractĂ©ristiques des
régions aride et humide, que ceux qui, quoique dérivés de la région
aride, se sont formés dans des conditions d'humidité plus ou moins
grande. On comprend que, sous tous les climats, les sols des maré-
cages el des terres basses doivent montrer les caractĂšres essentiels
des sols humides ; et de plus, que les terres des vallĂ©es de lâĂ©poque
actuelle devront prĂ©senter des caractĂšres arides moins extrĂȘmes que
ceux des collines ou mesas. J'ai donc classé les résultats en catégo-
ries distinctes dans le tableau, selon les caractĂšres locaux des sols
aussi bien que selon le climat.
TABLEAU.
ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
HUMUS AZOTE
dans dans
la terre.| lâhumus,
P. 100. | P. 100.
Terres de la région aride.
Terrains élevés, Californie.
1113 Terre rouge aurifĂšre de la Sierra Nevada prise Ă
la station culturale, comté d'Amador . 0.5£ | 16.60
1115 Sol granitique sableux, mĂȘme localitĂ© . 110 85 1MS3E20
1291 Sol granitique sableux de Ghaparral, mĂȘme loca-
lité. 0.76 | 14.34
1117 Sol granitique de pins, prĂšs de Pa HO 0SONMS 7
863 Terre rouge, prÚs de Grass Valley, comté de Ne-
vada . 208101
1679 Terre noire « She » » rt JU ra
Berkeley var AP OSIEE8"SS
1147 Sol sablonneux, station rte dé Paso Robles,
San-Luis-Obispo. . . . . . . ele 0 60216206
1126 Sol sablonneux, mĂȘme localitĂ©, re en ar-
riĂšre. : NO or e7
1423 Terre couleur CheolaEe Hate Gaia, gants
Obispo . . Ă AO) DEN LA ASETE
704 Terre poudreuse de « seidié Hole », pen 0.60 | 18.66
1 159 Sol sablonneux de plaine, station A prĂšs
Dularee ee : 0.37 | 16.79
1 172 Terre rouge ese du Man Ă l'est Tu-
lare . ; DFA PAZ TS
1167 Terre noire arg Anse f Mean Ă one de Tu-
PORTE EU Ă 1.66 | 18.19
332 Terre sablonneuse F ateah + ue, dés de
la station . Ă : 110228712250
1 607 Sol sablonneux du ne at prĂšs Le she
caster. 0.25 | 16.80
1406 Terre rouge des coiines d RAR, PE River-
side . 5 0.30 | 15.00
1536 Terre brune de Windsor, ĂrĂšs Riverside Ă 0.20 | 15.09
1281 Terre rougeùtre de « mesa », prÚs Chino, comté
de San-Bernadino . 0.58 | 15.50
Moyennes pour les terres élevées, strictement arides.| 0.75 | 15.87
AZOTE
humique
dans
la terre.
P:190:
NOTE SUR LA TENEUR EN AZOTE DE L'HUMUS. 801
AZOTE
HUMUS | AZOTE
humique
dans dans
dans
e ,
la terre.| lâhumus. la terre.
Il
P2100"|MP.:100: P.100. |
Terrains bas ou de vallée, Californie.
1 143 Sol de bas-fond, station culturale de Paso-Robles | 1.16 O6 OT? |
©
©
es
©
77 Terre alluviale du lac de Tulare, au sud-est. . .| 0.47 9.37
585 Terre dite « de jone » (wére grass) prÚs \isalia.
comté de Tulare . . . à 1.00 | 14.10 | 0.146.
586 Sol sablonneux de plaine, ne Outside ar
comté de Tulare.. 207 LAIT D MTON TROT
1466 Terre sablonneuse alluviale, raonte re de
| Kennals sur 0.60 | 10.66 | 0.064
| 168 Terre alluviale HĂ© test du eut Sunta- Clara,
comté de Ventura. . . . 0.84 71.99 | 0.067
| 1284 Terre argileuse « adobe », He iralese Chino 1.99 | 10.20 | 0.203
607 Sol alluvial du rio nb prĂšs de Yuma.
| evintétde-San-Dfégo an. Me ERA 76 7.47 | 0.056
| Moyennes pour les terrains bas, semi-arides . . . .| 0.99 | 10.03 | 0.102 |
Terres humides des régions aride et humide.
Californie.
207 Terre alluviale de l'Eel River, comté de Humbolit.| 1.25 6.96 | 0.067
188 Terre rouge poudreuse, pente humide, prĂšs Sunoma.| 2.54 4.53 | 0.115
110 Terre alluviale du Putah creek, comté de Solano .| 1.71 4.25 | 0,072
213 Terre de marais sablonneuse, de Novato, comté |
deMarin ASC NL 54 6.36 | 0.098 ||
37 Terre noire sablonneuse de « bots rouge » HR
Comte er OA MACON En M ES 28 3.07 | 0.070
Hors de Californie.
Terre de marais, prĂšs Grand Rapids, Michigan. .[33.02'| 6.08 | 2.012!
Terre alluviale de Houma, Louisiane . . . . .| ».07 4.30 | 0.218
Terre argileuse noire de prairie, comté de Harris,
Texas iesteine: A2 LE 8.66 | 0.184
Terre rouge raiblee KohÀla, ile à ar
(HAWAII) 2 A ACT NT Me RES: et TE OĂ) 2931108229
Moyennes pour la région humide. . . . . . . . .| 3.04 5.242160 152
1. Ces dosages ont été exclus des moyennes comm2 cas anormal, hormis le taux d'azote
| daus lâhumus,
|
302 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Un coup dâĆil jetĂ© sur le tableau suffit pour dĂ©montrer les diffĂ©-
rences Ă©normes et vraiment surprenantes dans le taux de l'azote
contenu dans lâhumus de provenance diffĂ©rente. MĂȘme en admettant
que des erreurs sérieuses puissent exister dans le dosage absolu de
lâhumus et de lâazote correspondant, vu l'unitĂ© de la mĂ©thode em-
ployée dans tous les cas, il ne peut y avoir de doute quant au résul-
tal gĂ©nĂ©ral, quâon peut Ă©noncer comme suit : en moyenne, l'humus
* des terres strictement arides conlient trois fois plus d'azote que celui
des contrĂ©es ou localitĂ©s humides : dans les cas extrĂȘmes, cette
diffĂ©rence peut monter jusquâau double, soit six fois plus dâazoie
dans lâhumus dâune terre aride que dans celui de quelques terres
humides; et dans les terres arides ce taux peut aller jusquâĂ devenir
supérieur à la teneur en azote des substances albuminoïdes.
On comprend maintenant que, dans les régions arides, un taux
dâhumus qui, dans la rĂ©gion humide, serait de tout droit considĂ©rĂ©
comme insuffisant pour une culture normale, peut néanmoins, dans
la rĂ©gion aride, suffire Ă tous les besoins dâune vĂ©gĂ©lation mĂȘme
exigeante. Cela ressort clairement de la comparaison des produits
obtenus en multipliant les données des deux colonnes contenant,
lâune le pour-cent de lâhumus existant dans le sol, lâautre le pour-
cent dâazote relevĂ© par lâanalyse. On voit que dans beaucoup de cas
le taux dâazole devient trĂšs considĂ©rable dans les sols arides dont la
production, jugĂ©e dâaprĂšs leur teneur en humus seulement, serait
considĂ©rĂ©e comme Ă©tant gravement compromise par suite dâun dĂ©faut
dâazote.
Mais on peut encore se demander si, dans le cas dâune matiĂšre si
riche en azote, la nitrification ne prendra pas un essor spécial, sur-
tout sous l'influence des conditions favorables de température, de
porosité et de la présence invariable des carbonates terreux dans les
sols arides. On sait que câest dans les climats arides seulement que
se sont formĂ©s les dĂ©pĂŽts de nitrate qui, de nos jours, sont dâune
importance si capitale pour lâagriculture. Je rappelle aussi, Ă ce
propos, les analyses nombreuses par lesquelles j'ai dĂ©montrĂ© lâexis-
tence des nitrates en quantités considérables dans les « sels de
steppe » au sels alcalins des régions arides. (Voir le mémoire pré-
citĂ©.) Ă ce sujet, le n° 1159 du tableau prĂ©sente un intĂ©rĂȘt spĂ©-
NOTE SUR LA TENEUR EN AZOTE DE L'HUMUS. 303
cial. Câest une terre franchement « alcaline », dont les sels sont
caraclérisés par un taux élevé de carbonate de soude, comme aussi
de nitrate et de phosphate de la mĂȘme base, et de potasse. En la
dĂ©lavant avec de lâeau, on obtient un liquide rendu presque n'ir
par lâhumus en dissolution. NĂ©anmoins, cet humus, aprĂšs prĂ©cipi-
talion, contient presque 17 p. 100 dâazote. Il est donc dĂ©montrĂ© que
la prĂ©seuce du carbonate alcalin nâentrave pas l'accumulation de
l'azote dans la matiĂšre noire; d'autre part, il est Ă©vident que ce
carbonate, en agissant sur lâhumus Ă dĂšs tempĂ©ratures un peu Ă©le-
vées, non seulement favorise la formation de lammoniaque libre ou
carbonatĂ©e, mais quelquefois mĂȘme l'active jusquâau point de la
rendre Ă©vidente par lâodeur ammoniacale Ă©mise Ă l'air libre. (Voir le
mémoire susdit.) On comprend donc bien que l'oxydation de l'azote
humique peut ĂȘtre favorisĂ©e par la prĂ©sence de ces carbonates ; et
aussi que, dans le cas oĂč le carbonate alcalin serait en excĂšs jus-
quâau point dâentraver sĂ©rieusement lâaction ou mĂȘme la vie du fer-
ment mitrique, Pabsorption directe de lâammoniaque dĂ©gagĂ©e par
lâalcali pourrait, vis-Ă -vis des plantes, remplacer labsorption des
nitrates aprĂšs formation.
Il nâest guĂšre douteux que la nature tant physique que chimique
du sol peut dĂ©terminer des diffĂ©rences plus oĂč moins grandes dans
le taux dâazote de lâhumus, hormis les influences elimatĂ©riques. La
discussion détaillée des données du tableau fait ressortir nettement
que, dans les sols poreux, l'accumulation de l'azote est moins consi-
dérable que dans les sols compacts, argileux. (Voir les n° 1157 et
1 679 du tableau.) On peut aussi soupçonner que celte accumulation
est en relation plus ou moins directe avec la teneur en chaux carbo-
natée, et qu'au contraire, une forte proportion d'oxyde de fer hy-
draté agit défavorablement sur elle. Mais à l'heure qu'il est, le
nombre des données ne suffit pas encore pour affirmer positivement
ces corollaires. |
Ce qui ressort dâune maniĂšre Ă©clatante de ces analyses, câest la
différence tranchée entre les processus de décomposition des ma-
liĂšres vĂ©gĂ©lales dâune part, et des composĂ©s constituant le corps
animal de lâautre. Dans le cas des matiĂšres vĂ©gĂ©tales, il y a surtout
oxydation de la matiÚre hydrocarbonée, avec accumulation perma-
304 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
nente de lâazote sous formes amidiques. Dans le cas des matiĂšres
animales, Ă©limination prompte, avant tout, de l'azote sous forme
dâammoniaque, en laissant des rĂ©sidus presque dĂ©pourvus dâazote,
si tant est quâelles en retiennent. En partant de ce fait hypothĂ©tique,
que âla matiĂšre vĂ©gĂ©tale contient la majeure partie de son azote sous
forme albuminoĂŻde, on ne comprend pas trop pourquoi existe cette
différence si tranchée.
Nos recherches se poursuivent activement, et J'espĂšre quâelles
nous donneront bientÎt des lumiÚres plus précises sur ces substances
richement azotées des sols arides.
LA
FĂMURE DES CHAMPS
ET DES JARDINS
ââ25900 â
AVANT-PROPOS
Méconnaitre le progrÚs considérable accompli depuis une dizaine
d'annĂ©es dans les diverses branches de lâagriculture française, ce
serait nier l'Ă©vidence. Le trait caractĂ©ristique de ce progrĂšs, câest
lâaccroissement du rendement moyen de la terre, sous l'influence
combinée de fumures plus abondantes et mieux adaptées au sol et
aux rĂ©coltes, dâun meilleur choix de semences et de l'emploi dâun
outillage perfectionné.
Dâautre part, si, tenant compte de ce progrĂšs incontestable, on
compare la production moyenne de nos terres avec celle de cer-
taines rĂ©gions de lâEurope moins favorisĂ©es que la France sous le
rapport du climat et de la qualitĂ© du sol, on ne peut s'empĂȘcher
de penser qu'il reste bien Ă faire encore Ă nos cultivateurs pour
obtenir Ă©conomiquement de la terre le maximum de produits quâelle
peut donner.
La France, bien cultivée, doit suffire à sa consommation en pain
et en viande ; elle devrait mĂȘme ĂȘtre exportatrice de grains et de
bĂ©tail. Ce double but sera atteint, 1l nâen faut pas douter, dans un
avenir prochain, si, dâun cĂŽlĂ©, restreignant la culture du blĂ© aux
terres aptes Ă fournir un bon rendement, de lâautre, dĂ©veloppant la
ANN, SCIENCE AGRON, â 1S93. â 1, 20
306 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
culture fourragÚre par un meilleur traitement des prés naturels et
par la création de prairies temporaires, nos cultivateurs savent et
peuvent faire au sol les avances nécessaires en matiÚres fertilisantes
complémentaires du fumier de ferme.
LâInstruction pratique sur l'emploi du nitrate et du phosphate,
dont la premiÚre édition, parue en 1890, a été suivie de nombreux
tirages, avait précisément pour objet de résumer en quelques pages
les conditions essentielles du progrÚs réalisable en cullure par
l'emploi judicieux des engrais commerciaux associés au fumier de
ferme.
L'accueil bienveillant que cette Instruction a rencontré dans le
monde agricole mâa engagĂ© Ă en Ă©tendre le cadre et Ă rĂ©unir, sous
une forme succincte, les indications essentielles pour la famure des
principales récoltes de la France.
Jusqu'ici, les végétaux de la grande culture : céréales, plantes
sarclées, plantes fourragÚres, ont presque exclusivement bénéficié
de lâemploi des engrais commerciaux. Il m'a semblĂ© intĂ©ressant
d'appeler lâattention des cultivateurs, des propriĂ©taires de jardin et
des amateurs dâhorticulture sur les services que peut rendre lâap-
plication des mĂȘmes matiĂšres fertilisantes Ă la production maraĂźchĂšre
et horticole.
De mĂȘme, la culture arbustive (arbres fruitiers, vignes, houblons,
etc.) doit entrer rĂ©solument dans la voie qui Ă Ă©tĂ© si profitable Ă
lâagriculture proprement dite. Les cultures maraĂŻchĂšre, arbustive,
florale et la viticulture, qui constituent une des richesses de notre
pays, ont tout à gagner à l'emploi intelligent des engrais minéraux.
Les quantitĂ©s de fumier dâĂ©table et dâĂ©curie produites annuellement
en France sont tout Ă fait insuffisantes pour lâaccroissement du rende-
ment de nos terres : nos fumiers sont généralement mal traités et la
majeure partie des déjections humaines et animales est perdue pour
la ferulisation du sol. {l est donc de toute nécessité de recourir aux
sources minérales d'azote, d'acide phosphorique et de potasse que
industrie met Ă notre disposition, pour parer Ă lâinsuffisance des
fumures organiques.
Appliqués aux prairies et aux pùturages naturels, les engrais
commerciaux permettent d'en doubler le rendement dans la plupart
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 307
des cas; or, doubler la rĂ©colte de fourrage câest rendre possibles
l'Ă©levage et l'entretien dâune quantitĂ© de bĂ©tail double et accroĂźtre
dâautant la production du fumier de ferme qui demeurera toujours
l'élément fondamental de fertilisation des terres arables. Quelque
bruyantes quâaient Ă©tĂ© depuis vingt-cinq ans les attaques dirigĂ©es
contre le fumier de ferme, considéré par certains esprits faux
comme inutile pour lâagriculture et pouvant ĂȘtre remplacĂ© exelusi-
vement par les engrais dits chimiques, les agriculteurs sérieux et
instruits â notre pays nâen manque pas â nâaccordent pas de
créance à ces exagérations. [ls savent que l'introduction dans le sol
dâune quantitĂ© notable de matiĂšre organique est le moyen le plus
sĂ»r d'assurer lâaction des engrais minĂ©raux, et de communiquer Ă
la terre des propriétés physiques et chimiques essentielles à sa fécon-
ditĂ©. Câest donc dans lâassociation du fumier de ferme aux matiĂšres
minĂ©rales que lâon est certain de rencontrer le moyen le plus sĂ»r
dâaccroitre la fertilitĂ© de la terre.
Si lâassertion qui consiste Ă nier l'utilitĂ© du rĂŽle du fumier et Ă
admettre la possibilitĂ© de substituer, partout et en tout temps, Ă
ce précieux engrais, l'addition au sol de quelques centaines de
kilogrammes d'azote ou dâacide phosphorique est, Ă notre sens,
absolument fausse, lâerreur des cultivateurs qui repoussent les
engrais minéraux, sous le prétexte, tout à fait dénué de fonde-
ment, que ceux-ci Ă©puisent le sol, nâest pas moins complĂšte. Con-
tinuons à employer le fumier de ferme: entourons sa récolte et
sa conservation de tous nos soins et complélons son aclion par
celle des nitrates, des phosphates, des sels de potasse, partout oĂč
nos terres accusent une proportion de ces aliments de la plante -
insuffisante, soit en quantité, soit en qualité : là est la vérité,
chaque jour rendue plus Ă©vidente dans les exploitations rurales
bien dirigées.
J'ai pensĂ© ĂȘtre utile aux nombreux amateurs de fleurs dâapparte-
ment et de serre, en joignant Ă l'Ă©tude des engrais applicables en
grande culture et au jardinage, quelques indications sur les mé-
langes nutrilifs Ă lâaide desquels on peut entretenir les vĂ©gĂ©taux
cultivés en pots et en caisses. On trouvera dans un chapitre spécial
tous les renseignements dĂ©sirables Ă ce sujet. Lâhorticulture en
308 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
chambre, si je puis ainsi la désigner, a pris un trÚs grand déve-
loppement et J'espĂšre ĂȘtre agrĂ©able Ă beaucoup de personnes en
leur faisant connaßtre les procédés trÚs simples qui en assurent le
succĂšs. :
Il ne faut point chercher dans les pages qui vont suivre des re-
celtes infaillibles, indistinctement applicables aux diverses récoltes
quâelles auraient le pouvoir de dĂ©cupler comme par enchante-
ment. Laissons aux charlatans les formules merveilleuses qui, sc-
lon eux, doivent renouveler du Jour au lendemain la face de lagri-
culture.
Nos visées sont moins ambitieuses : nous nous estimerons trÚs
heureux si la lecture de ces quelques pages amĂšne la conviction
que lâagriculture française doit arriver Ă nourrir le pays et, grĂące
aux conditions exceptionnelles de climat et de sol oĂč la nature la
placée, devenir exportatrice chez les nations moins favorisées, à cÎté
de produits uniques au monde, tels que nos vins et nos fruits, de
PexcĂ©dent de rĂ©coltes quâelle devra au progrĂšs cultural. Nous se-
rions heureux dâavoir contribuĂ© Ă ce progrĂšs, dans une mesure si
faible que ce fût, par cette modeste étude sur la fumure des champs
et des jardins.
I. â- CĂRĂALES ET PLANTES SARCLĂES
_ I. â Remarques prĂ©liminaires. â NĂ©cessitĂ© d'associer lâacide
phosphorique Ă lâazote dans la fumure du sol.
Les vĂ©gĂ©taux, quels quâils soient, plantes de grande culture, lĂ©-
gumes, arbustes, fleurs, etc., ne peuvent vivre quâĂ la condition de
rencontrer dans le sol, indépendamment des aliments que leurs
feuilles puisent dans lâatmosphĂšre, des quantitĂ©s suffisantes de quel-
ques substances minérales dont les deux plus importantes, vu leur
raretĂ© dans la plupart des sols, sont lâazole et l'acide phosphorique.
La chaux, la magnésie et la potasse, beaucoup plus répandues que
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 302
ces deux corps, dans les terres de la plupart des régions de Ja
France, font beaucoup moins souvent défaut à la végétation. :
Dans les sols argilo-siliceux ou siliceux, l'apport de chaux est fré-
quemment nĂ©cessaire ; mais le chaulage peut ĂȘtre avantageusement
remplacĂ© par lâaddition, Ă ces terres, de quantitĂ©s un peu considĂ©-
rables de scories de dĂ©phosphoration : 4 000 Ă 2 000 kilogr. Ă lâhec-
tare, par exemple. Les scories, en effet, apportent prÚs de la moitié
de leur poids de chaux trĂšs assimilable, ce qui explique comment
leur introduction dans le sol peut remplacer le chaulage, avec cet
avantage de fournir en mĂȘme temps de l'acide phosphorique Ă ces
sortes de terres qui en manquent presque toujours.
La magnésie fait, plus souvent qu'on ne le croit, défaut dans les
sols, surtout les terres non calcaires. Lâaddition de kaĂŻnite est trĂšs
favorable dans ce cas. â Quand tous les principes fertilisants sont
abondants dans le sol, Ă un Ă©lat qui les rende aptes Ă nourrir la
plante, on oblient une abondante rĂ©colte. Si lâun seulement de ces
principes manque, par son apport le rendement de la terre sâĂ©lĂšve
tout de suite dans une trĂšs notable proportion.
Câest ainsi, par exemple, que 200 kilogr. de nitrate de soude,
renfermant 31 kilogr. environ dâazote, permeltent, si la terre ren-
ferme de l'acide phosphorique, de la potasse, etc., en proportion
convenable, dâoblenir 5 Ă 7 quintaux de froment de plus (avec la
paille correspondante) que nâen produirait la mĂȘme terre Ă laquelle
on n'aurait pas donnĂ© d'azote. De mĂȘme, l'emploi de 60 Ă 80 kilogr.
d'acide phosphorique, si le sol, manquant de ce principe Ă un Ă©tat
assimilable, renferme assez d'azote et de potasse, Ă©lĂšvera trĂšs nota-
blement le rendement.
Que sont ces quelques kilogrammes dâazote et dâacide phospho-
rique, par rapport aux quantitĂ©s des mĂȘmes corps existant dans le
champ oĂč on les apporte ? Relalivement trĂšs peu de chose, car les
terres trĂšs pauvres, presque stĂ©riles, en lâabsence de fumure, ren-
ferment rarement Ă lâhectare moins de 1 200 Ă 1 500 kilogr. d'azote,
et autant d'acide phosphorique, dans l1 couche de 20 centimĂštres
oĂč vivent les cĂ©rĂ©ales (soit de 06,04 Ă 05,05 d'azote ou dâacide
phosphorique par 100 gr. de terre). Les terres de moyenne qualité
en contiennent toujours au moins le double. Mais lâaction des faibles
310 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
quantités d'azote et d'acide phosphorique ajoutées au sol, sous forme
d'engrais, s'explique par lâĂ©tat dâassimilabilitĂ© oĂč ces corps se trou-
vent dans les matiÚres fertilisantes employées (nitrate de soude,
phosphates, ele.).
Un fait essentiel quâil ne faut jamais perdre de vue, fait qui est
acquis dâune façon absolument certaine, par les nombreuses expĂ©-
riences quâon Ă inslituĂ©es et suivies, tant en France quâĂ l'Ă©tranger,
câest que les engrais azolĂ©s et le nitrate de soude, en particulier,
ne donnent leur plein effet que si le sol offre, en mĂȘme temps,
à la plante, les quantités d'acide phosphorique assimilable et de
polasse dont celle-ci a besoin. â On ferait donc, presque en
pure perte, une dépense de nitrate de soude, en lépandant sur
une terre insuffisamment pourvue en acide phosphorique et en
potasse, tandis qu'on accroĂźt, dans une proportion trĂšs notable,
parfois dans le rapport de un Ă quatre, le rendement de certaines
cultures, céréales, plantes sarclées, sous l'influence combinée du
nitrate et de lâacide phosphorique.
Quelques chiffres, empruntés aux quarante années de culture de
Rothamsted, vont mettre cette vérité en évidence. Sir J. Bennet
Lawes et le docteur Gilbert cultivent méthodiquement, depuis plus
dâun demi-siĂšcle, Ă la ferme expĂ©rimentale de Rothamsted, les princi-
pales plantes agricoles, dans le mĂȘme sol diversement fumĂ©. Voici,
en ce qui regarde lâaction du nitrate de soude, employĂ© seul ou
conjointement avec les phosphates, les moyennes des résultats tout
à fait significatifs de trente années consécutives de culture de blé,
seize annĂ©es d'orge et neuf annĂ©es dâavoine.
L'augmentation du rendement, Ă lâhectare, en grain et en paille,
comparativement Ă celui dâun sol demeurĂ© sans fumure, par lâem-
ploi de 100 kilogr. de nitrate, suivant quâil Ă Ă©tĂ© additionnĂ© ou non
de phosphate, a été la suivante :
Blé.
GRAINS. PAILLE,
Kilogr. Kilogr,
AVECDIOSDNA LE EEE RENE RS 2147 566
Sans phosphate NP ARE TMRIE 101 269
DITOĂTENCE AE APE RE ER 116 297
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. OĂ
Orge.
GRAINS. PAILLE.
Kilogr. Kilozr,
AVEB RHOSDRAMO LL REA TTL 492 662
Sans phosphate ent: 2): NOR 288 A7T9
Diférencereee. ar. ee 204 183
Avoine.
Avec phosphate. M7 ARE 204 369
DANS DROSHIAIC SENTE: MAR" EE 159 269
Diérente dr NL 45 100
Pommes de terre.
AVECHDROSDRATO RU ER ee cl. 1 250 kilogr.
SANS DNOSDN AE A MR ET Ne RS res 308 â
DITĂTENC ORAN UNE RME TRRERSR Lie 942 kilogr.
Il résulte donc clairement de ces chiffres qu'il importe, pour ob-
âtenir du nitrate de soude le maximum de rĂ©colte quâil peut donner,
que le champ oĂč on le rĂ©pand contienne une quantitĂ© dâacide phos-
phorique assimilable suffisante pour assurer le développement com-
plet de la végétation.
J'indiquerai plus loin les proportions dâacide phosphorique, sous
les différentes formes, à employer pour les diverses récoltes avec le
nitrate de soude, pour assurer lâeffet maximum de ce prĂ©cieux agent
de ferliisation. Nous verrons à cette occasion que les excédents de
rendement en grains, paille et tubercules que Je viens de citer ont
été, fréquemment, trÚs notablement dépassés dans la pratique.
S'il est une vérité surabondamment démontrée par la pratique
agricole comme par les recherches physiologiques des agronomes,
câest la nĂ©cessitĂ© de la prĂ©sence dans le sol, en quantitĂ© suffisante et
sous une forme assimilable, de {ous les aliments de la plante. Câest
dans la rĂ©alisation, par lâapport en quantitĂ© suffisante dâengrais
convenablement choisis, Ă©tant donnĂ©e la nature chimique dâun sol,
que rĂ©side lâart de la fumure.
Lâindication des moyens Ă©conomiques Ă mettre en Ćuvre pour
atteindre ce but est lâobjet spĂ©cial de cette Ă©tude.
312 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
II. â Lâazote nitrique, agent essentiel des fumures azotĂ©es.
Lâazote nitrique, qui forme l'Ă©lĂ©ment actif du nitrate de soude,
est lâaliment azotĂ©, par excellence, des vĂ©gĂ©taux.
Câest sous la forme dâacide nitrique, combinĂ© avec la chaux, la
magnésie etles autres bases, que les sols fertiles offrent aux plantes
leur alimentation azotĂ©e. Il est dĂ©montrĂ© aujourdâhui que Paction
fertilisante du fumier de ferme, comme celle des engrais organi-
ques : cuir, corne, laine, plumes, sang desséché, débris de viande
et, en gĂ©nĂ©ral, de tous les dĂ©tritus animaux, ne se manifeste quâa-
prÚs la transformation en nitrates des matiÚres azotées qui consti-
tuent la plus grande partie de leur valeur.
Le processus chimique qui donne naissance, dans les champs, aux
nitrates dont se nourrissent nos rĂ©coltes est le mĂȘme, Ă l'intensitĂ©
prÚs du phénomÚne, que celui auquel les régions tropicales doivent
les amas gigantesques de nitrate, aujourdâhui exploitĂ©s pour le plus
grand profit de lâagriculture. Dans nos terres, comme au Chili etau
PĂ©rou, un organisme microscopique se charge, ainsi que lâont Ă©tabli
les belles recherches de MM. SchlĂŠsing, MĂŒntz et Marcano, de trans-
former les détritus azotés animaux en nitrates, avec cette différence,
en faveur des régions tropicales des cÎtes du Nouveau-Monde, que
le nitrate de chaux produit sây transforme au contact du sel marin en
nitrate de soude, beaucoup moins soluble que les nitrates de chaux
ou de magnĂ©sie. Le nitrate de soude sâaccumule, en l'absence de
pluies, pour former, à la longue, ces gisements colossaux, réserve
de longtemps inĂ©puisable Ă laquelle nous demandons aujourdâhui
l'accroissement de nos récoltes.
Sous notre climat, au contraire, une grande partie des nitrates
formés dans le sol par l'oxydation de l'azote des maliÚres organi-
ques, est entraßnée dans le sous-sol par les pluies. Du sous-sol, le
nitrate sâĂ©coule dans les sources, ruisseaux, riviĂšres et finalement
sâen va Ă la mer. De lĂ , la nĂ©cessitĂ© d'importer de l'azote mitrique
dans nos lerres, pour en maintenir el en accroßtre la fertilité.
Les résultats des expériences physiologiques concernant le rÎle
des nitrates dans la végétation ont été constamment confirmés par
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 315
la pratique agricole. Depuis lâĂ©poque, dĂ©jĂ Ă©loignĂ©e, Ă laquelle
J. B. Boussingault a Ă©tabli la valeur alimentaire du nitrate pour les
plantes, toutes les recherches scientifiques et les résultats culturaux
sont venus sanctionner les observations de lâĂ©minent agronome.
A l'heure qu'il est, la question est absolument rĂ©solue : câest le
nitrate, directement introduit daas le sol ou résultant de la trans-
formation des autres engrais azotés, qui nourrit nos récoltes de
céréales et autres.
Les principaux avantages de l'emploi du nitrate dans la pratique
agricole sont les suivants :
1° Le nitrate sert directement Ă lâalimentation de la plante. N'ayant,
pour cela, Ă subir aucune modification dans la terre, il agit donc
beaucoup plus rapidement que les autres engrais azotĂ©s dâorigine
organique, lâaction de ces derniers Ă©tant subordonnĂ©e Ă leur nitrifi-
cation préalable ;
2° La rapidité avec laquelle le nitrate est absorbé par les végétaux
mel promptement ceux-ci en état de résister, par leur vigueur et
par leur dĂ©veloppement, aux intempĂ©ries, Ă lâaction des insectes
nuisibles et aux parasites ;
9° Dans les années à hivers rigoureux, le nitrate employé en cou-
verture, sur les blés et les seigles, permet aux semailles d'automne
de réparer le retard produit sous l'influence de conditions climaté-
riques défavorables ;
4° Enfin, comme nous allons en donner la preuve, le nitrate ac-
croit Ă©conomiquement, d'une maniĂšre trĂšs notable, le rendement de
la plupart des cullures.
Nous commencerons par étudier son influence sur les céréales.
III. â Influence du nitrate de soude sur le rendement
des céréales d'automne et de printemps.
On possĂšde aujourdâhui un assez grand nombre d'expĂ©riences
méthodiquement conduites, pour fixer approximativement l'excédent
de grain et de paille que le cultivateur peut attendre de l'emploi du
nilrate, en sol suffisamment pourvu des autres aliments de ces plantes
el nolamment d'acide phosphorique.
314 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Par expĂ©riences mĂ©thodiquement conduites, j'entends celles oĂč
ont été exactement déterminées les quantités de matiÚres fertili-
santes employées, le poids et la qualité des récoltes obtenues, ainsi
que lâensemble des conditions culturales.
LâexcĂ©dent de grain et de paille reprĂ©sente le nombre de kilo-
erammes de ces produits rĂ©coltĂ©s en plus, par hectare, sous lâin-
fluence du nitrate. Get excédent est déduit d'expériences compara-
tives faites, sur une mĂȘme surface de terre, dans des conditions iden-
tiques de sol et de fumure, sauf une : lâaddition de nitrate. Dans
son intéressant travail sur l'influence du nitrate de soude, M. le doc-
teur Stutzer, directeur de la Station agronomique de Bonnâ, a rĂ©uni
et discuté plusieurs centaines d'expériences culturales sur le blé,
lâavoine, l'orge et le seigle. En Ă©cartant les rĂ©sultats qui, pour un
molif ou pour un autre, peuvent sembler douteux, M. Stutzer
est arrivé, comme moyenne des récoltes sur lesquelles il a pu re-
cueillir des données certaines, aux accroissements de rendement
suivants :
100 kilogr. de nitrate de soude Ă lâhectare, employĂ©s conjointe-
ment avec un engrais phosphaté, ont donné les excédents de récolte
que voici :
GRAINS. PAILLE.
Kilogr. Kilogr.
PLOMEN SM rEs NedEe Edvee 270 574
D'OISE SES SE Te ES DRE PR ER 281 540
OTBe SR RER CT ANR Da ME 510 673
AFDINE 22 MMA AE LOS RE D EREENTE ane 537 823
Ces excĂ©dents de rendement ont Ă©tĂ© dĂ©passĂ©s dans certains casâ,
mais il est prudent, dans les discussions de lâordre qui nous occupe,
dâĂ©carter les chiffres extrĂȘmes et de se baser sur des moyennes rĂ©-
sultant du plus grand nombre de données comparables, parmi celles
1. Le Nilrale de soude, son importance el son emploi comme engrais. In-12.
Paris, 1887, Gauthier-Villars.
2. La composition du sol, sa fécondité naturelle ou acquise, influent considéra-
blement, cela va de soi, sur les résultats obtenus avec une fumure additionnelle :
tout ce qui va suivre doit donc ĂȘtre regardĂ© seulement comme une indication gĂ©nĂ©-
rale touchant la plus-value résultant de l'emploi des fumures.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 919
qui ont été recueillies. Deux mots sur le mode d'application de sa
fumure. Pour les céréales de printemps, on peut, lorsque le temps
nâest pas pluvieux, Ă©pandre avant la semaille de l'orge et de lâavoine le
mélange de nitrate et de phosphate, aussi uniformément que possible
Ă la surface du sol, puis lâenfouir Ă une faible profondeur par un
dernier labour. L'emploi du semoir d'engrais assure cette réparti-
lion mieux que lâĂ©pandage Ă la volĂ©e, mais il nâest pas imdispen-
sable. On facilite singuliĂšrement lâĂ©gale rĂ©partition de lâengrais Ă
la surface du sol en le mélangeant à sept ou huit fois son volume
de terre fine passée à la claie. Si le temps était pluvieux au moment
de la semaille, il serait préférable de ne répandre que le phosphate
et de réserver au moins la plus grande partie du nitrate pour le
rĂ©pandre lorsque lâavoine ou lâorge auront atteint la hauteur de 12
Ă 19 centimĂštres.
Quant aux terres destinées aux cultures d'hiver, blé et seigle, que
nous examinerons plus loin, câest avant l'hiver quâil faut leur donner
le phosphate. Ce dernier, pour agir sur la rĂ©colte, doit ĂȘtre incor-
poré au sol avant le dernier labour d'automne.
Nous verrons plus loin que la fabrication récente, sur une échelle
industrielle, du phosphate de potasse et du phosphate dâammoniaque,
permet de recourir, dans certains cas, Ă lâemploi des phosphates en
couverture sur les céréales d'hiver.
Pour celles-ci, le cultivateur Ă©pandra le nitrate en couverture au
printemps, en une ou plusieurs fois, Ă©galement, Ă dose variant de
60 Ă 200 kilogr., suivant lâĂ©tat de fumure de sa terre. Si les champs
sont largement pourvus d'acide phosphorique, cette fumure com-
plĂ©mentaire donnera son plein effet; dans le cas contraire, lâaug-
mentation de rĂ©colte rĂ©sultant de lâapplication de nitrate sera encore
rémunératrice, l'excédent de grain et paille récoltés devant égaler,
au minimum, la moitié des poids indiqués plus haut.
Une pratique excellente, surtout dans les années pluvieuses, con-
siste Ă fractionner lâĂ©pandage du nitrate, pour s'opposer le plus pos-
sible Ă son entrainement dans le sous-sol par les eaux pluviales.
Câest au moment oĂč la vĂ©gĂ©tation est active quâa lieu lâutilisation la
plus complĂšte de lâazote nitrique par la plante.
316 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
IV. â Utilisation de l'azote du nitrate par les cĂ©rĂ©ales. Com-
paraison du nitrate avec le fumier de ferme au point de
vue de lâutilisation de l'azote.
Ă quelle quantitĂ© dâazote nitrique ou de nitrate, ce qui revient au
mĂȘme, correspond un excĂ©dent de rĂ©colte de 100 kilogr. de grain
avec la paille correspondante ? Telle est la question Ă©conomique
qu'il est facile de résoudre en partant des excédents moyens de ren-
dement indiqués par M. Stutzer.
100 kilogr. de nitrate, contenant 15*,65 dâazote, ont donnĂ© un
excĂ©dent moyen sur la rĂ©colte du mĂȘme sol sans nitrate, de :
GRAIN, PAILLE,
Kilozr. Kilogr.
EROMEN TARN TE NE" 270 574
SO RES SEE EEE 281 540
OrSB LEE APCE o10 673
AVOIR MR MAL 537 823
Ea divisant le poids d'azote (15*#,65) employé, par l'excédent en
orain récollé, on oblient la quantité d'azote correspondant à une
production dâun quintal de grain, avec sa paille, en plus quâen lâah-
sence du nitrate ; on trouve ainsi :
LE de soude.
Pour 100 kilogr. de blé et sa paille, une quan- + =
titĂ©âd'azote de... 0 ire 2021588706 correspondant 374085
Pour 100 kilogr. de seigle . SEM RE ER DO â 39 ,090
Poar dODKlo Sr dOrSB TEE NE SE 06 = 19 ,600
Pour 100 kilogr. d'avoine D RAOIĂE â 18 ,620
La premiÚre conséquence de ces constatalions numériques est que
l'excédent des récoltes s'obtient pour les céréales de printemps,
avec une dépense d'engrais azoté, sensiblement moitié moindre de
celle quâexigent les cĂ©rĂ©ales d'hiver. La conclusion gĂ©nĂ©rale est que
G kilogr. dâazote environ, soit 40 kilogr. de nitrate, permettent
d'obtenir un excédent de rendement (pour le blé et pour le seigle)
dâun quintal de grains, plus sa paille, tandis que 3 kilogr. d'azote
nitrique suffiraient, en moyenne, pour produire le mĂȘme excĂ©dent
en grains et paille d'orge et d'avoine. La totalitĂ© de lâazote de lâen-
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. Es x
grais ne se retrouve pas, tant sâen faut, dans l'excĂ©dent de grains et
de paille de la récolte. On sait, en effet, que le nitrate de soude est
facilement entraßné dans le sous-sol par les eaux pluviales, le pou-
voir absorbant du sol ne sâexerçant pas sur lâacide nitrique. En effet,
si lâon rapproche les quantitĂ©s totales dâazute, contenues dans ces
excĂ©dents de rĂ©colte, des poids dâazote nitrique qui ont aidĂ© Ă les
produire, on arrive aux constatations suivantes :
Blé,
AZOTE
A" â
contenu non
TE ent F2 récupéré
de nitrate. ME
récolte. la récolte,
(Différence).
Quint.mét. P.100. Kilogr. Kilogr, Kilogr, Kilogr.
Grain. . 2,70 Ă 2.08 â 5,616 | ee L
8,371 15,650 7,279
Paille. . 5,74 Ă 0.48 â 2,755 +51
Seigle.
Ă PA dr
Grain: . 2,81 â 1.60 k,946 1,106 15,650 S,544
Paille. . 5,40 Ă 0.40 â 2,160
Orge.
Grain. . 5.10 Ă 1.76 â 8,160
6 12,167 15,6 8
Paille. . 6,73 Ă 0.64 â 4,307 ANUS
Avoine.
Grain. . 531 Al r0â- 19,451 Ă
s 1,590
Paille. . 8,23 Ă 0,56 â 4,609 | RS dd ADN TR
Il rĂ©sulte de cette comparaison quâen supposant que tout l'azote
de lâexcĂ©dent de rĂ©colte vienne du nitrate employĂ©, ce qui nâest
pas, lâutilisation maxima du nitrate par les rĂ©coltes serait la sui-
vante, pour les diverses céréales :
AZOTE
utilisé, perdu.
P. 100. P. 100.
BlĂ© . . 53.49 + 46.51 â 100
Seigle . 45.40 + 54,60 â 100
Orge. . 19.72 + 20.28 = 100
Avoine. . 89.S4 + 10.16 â 100
318 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Les cĂ©rĂ©ales d'hiver (seigle et blĂ©) se comportent donc, dâaprĂšs
cela, trÚs différemment des céréales de printemps (orge et avoine),
sous lâinfluence du nitrate. Ge nâest point ici le lieu de discuter les
questions que soulÚvent ces comparaisons {héoriques : je me borne
Ă les signaler Ă l'attention des directeurs des Stations agronomiques
comme un intĂ©ressant sujet dâĂ©tudes.
Pourquoi, avec une quantitĂ© Ă©gale de nitrate de soude, â câest
le fait qui résume les nombreux essais de cultures rapportés par
M. Stutzer â lâavoine et l'orge donnent-elles un excĂ©dent moyen,
en grain et paille, double de celui du blé et du seigle ? Tel est le
problĂšme physiologique posĂ© et dont la solution doit ĂȘtre cherchĂ©e
expérimentalement.
Les chiffres indiqués par M. Stutzer, comme représentant la
moyenne des excĂ©dents obtenus, rĂ©sultent en effet dâun grand nom-
bre dâexpĂ©riences en sols diffĂ©rents ; il y aurait donc lieu d'Ă©tudier
la question dans des conditions de sols bien déterminées.
Un autre point de vue de la question, étroitement lié aux faits
que je viens de discuter, concerne la récupération pratique, par la
récolte, de l'azote donné sous différentes formes par la fumure aux
diverses céréales.
Quelle est la quantitĂ© dâazote des fumures retrouvĂ©es effective-
ment dans les rĂ©coltes au bout dâune certaine pĂ©riode de culture de
la mĂȘme cĂ©rĂ©ale? Quelle quantitĂ© dâazote des fumures, par contre,
demeure inutilisée par les plantes? Comment se comportent compa-
rativement le nitrate de soude, le sulfate dâammoniaque et lâazote
organique (fumier de ferme, tourteau, etc.) sous ce rapport ?
Une longue succession de la mĂȘme plante sur le mĂȘme sol, avec
détermination de la composition des fumures et de celles des ré-
coltes, peut seule permettre de rĂ©pondre Ă ces divers points dâinter-
rogalion.
Ces études ont été faites dans la ferme expérimentale de Rotham-
sted, annexe de la Station agronomique fondée dans le Herts par
sir J. Bennet Lawes, vers 1840, et continuées sans interruption jus-
qu'Ă ce jour, par lâĂ©minent agronome et son collaborateur de la
premiÚre heure, le docteur Gilbert. Un résumé sommaire des résul-
tats constatés à Rothamsted trouvera naturellement place ici.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 319
Dans leurs recherches magistrales sur la culture des céréales, sir
J. Bennet Lawes et le docteur Gilbert ont Ă©tudiĂ© la question de lâuti-
lisation de l'azote par le blĂ©, l'orge et lâavoine pendant des pĂ©riodes
assez longues (vingt années pour les deux premiÚres récoltes et
trois annĂ©es seulement pour lâavoine), pour en pouvoir dĂ©duire des
conclusions trĂšs importantes au point de vue pratique.
Connaissant, dâune part, la quantitĂ© d'azote apportĂ©e sous diverses
formes, par les fumures affectées, sans variation ni discontinuité,
pendant vingt ans, Ă la mĂȘme plante ; ayant, de lâautre, dĂ©terminĂ©
par lâanalyse les quantitĂ©s dâazote contenues dans les rĂ©coltes, ces
savants agronomes ont déduit, de la comparaison de ces deux don-
nĂ©es, les taux pour 100 dâazote de lâengrais nie par lâexcĂ©dent
de produits (grain et paille).
Je résume dans le tableau suivant les résultats de ces importantes
recherches :
Blé.
TAUX P. 100
de l'azote de lâengrais.
âââ â
Récupéré Non récupéré
ENGRAIS AZOTĂS A L'HECTARE ET PAR AN,
A"
En sols pourvus de principes mi-
nĂ©raux : acide phosphorique, Azote. par lâexvĂ©dent par lâexcĂ©dent
potasse, etc. de récolte, de récolte,
Kilogr. Pee100: P. 100.
Sels ammoniacaux. 45,9 32.4 67.6
â 91,9 329 Greul
â 137,8 315 68.5
â : 183,7 28.5 11.5
Nitrate de soude . 20 45.3 04.7
Fumier de ferme . 294,0 14.6 85.4
Orge
Sels ammoniacaux. ! 45,9 48.1 51.9
Sels ammoniacaux et nitrate. . S Ăż Aa 49.8 50.2
Tourteaux . 106,0 36.3 63.7
Fumier de ferme . 224,0 10.7 89.3
Avoine
Sels ammoniacaux. 989 019 48.1
Nitrate de soude . 920 00.4 49.6
DâaprĂšs cela, le blĂ©, l'orge et lâavoine utilisent de 45 Ă 51 p. 100,
soit moitié, en nombre rond, de l'azote du nitrate. Deux faits des
320 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
plus intéressants ressortent de ce tableau ; ils concernent le fumier
et le sulfate dâammoniaque : 10 Ă 15 p. 100 seulement de lâazote
du fumier de ferme se retrouvent dans lâexcĂ©dent de la rĂ©colte obte-
nue, par rapport Ă un sol non fumĂ©; la rĂ©cupĂ©ration de lâazote du
sulfate dâammoniaque dans la culture du blĂ© s'Ă©lĂšve Ă peine au tiers
de la teneur de lâengrais en ce principe, tandis que l'orge et lâavoine
utilisent le sulfate dâammoniaque presque aussi bien que le nitrate.
La premiÚre conclusion générale, qui se dégage de ces comparai-
sons, câest que l'azote soluble (nitrate ou sulfate), et en particulier
celui du nitrale, est l'aliment azoté le plus favorable à la production
des céréales.
AprÚs l'azote soluble, vient l'azote des tourteaux de graines oléa-
oineuses, dont lâutilisation dĂ©passe, dans la culture de l'orge, la pre-
portion (36 p. 100) constatĂ©e pour le sulfate dâammoniaque dans le
cas du blé (28 à 30 p. 100); en dernier lieu se range l'azote du fu-
mier de ferme, la culture du blé durant vingt années consécutives
nâayant fixĂ© que 14.6 p. 100 de lâazote du fumier : celle de lâorge,
moins encore, 10.7 p. 100.
De ces derniĂšres constatations, du plus haut intĂ©rĂȘt Ă©conomique,
il résulte que le nitrate de soude est au taux actuel de 93 à 95 fr.
les 100 kilogr., une source dâazote pour les vĂ©gĂ©taux, bien moins
chĂšre que le fumier de ferme.
Autrement dit, partout oĂč le cultivateur ne pourra pas se procu-
rer, Ă un prix trĂšs bas, le fumier que son exploitation ne lui fourni-
rait pas en quantitĂ© suffisante pour ses rĂ©coltes, 1l aura intĂ©rĂȘt Ă lui
substituer le nitrate de soude associé au phosphate et au besoin à la
potasse, si la terre manque de cet élément, cas assez rare dans la
plupart des régions de la France.
Pour se convaincre de lâĂ©conomie de cette substitution, il suffit
de comparer la valeur du fumier, dâaprĂšs sa richesse en azote, acide
phosphorique et polasse, Ă celle des mĂȘmes quantitĂ©s de principes
fertilisants achetĂ©s dans le commerce, en tenant compte de lâulilisa-
tion de lâazote par la rĂ©colte, constatĂ©e par sir J. Lawes et le doc-
teur Gilbert.
DâaprĂšs les prix actuels de lâazote dans le nitrate de soude (1 fr.
60 c. le kilogramme), de l'acide phosphorique soluble (0 fr. 50 c.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 321
le kilogramme) et de la potasse (0 fr. 40 e. le kilogramme), la valeur
du fumier basée sur sa teneur en ces principes fertilisants serait la
suivante :
Le fumier de ferme, moyennement consommé, renferme en
moyenne par Ă 000 kilogr. :
AAQLORS TR 5ks 0 Ă 1f,60° â Sf,00c
Acide phosphorique . . 2 0 A0 UUS = 100
POĂISSRP M TAN AS. 623) 240402725271
Valeur des 1 000 kilogr. . . . 121, 02°
Le mĂ©lange minĂ©ral qui renfermerait les mĂȘmes quantitĂ©s de
principes fertilisants, cotĂ©s au mĂȘme prix, serait le suivant :
32k8 65 nitrate de soude à 15.65 p. 100 azote, coûtant. . . . . . . sf, 00°
21 ,08 superphosphate à 12 p. 100 acide phosphorique, coûtant. 1f,27° l {1 50
2
32 ,05 phosphate minéral à 16 p. 100, coûtant. . . . . . . 1,50 | ;
12 ,06 chlorure de potassium à 50 p. 100, coûtant : . . . . . . . 2e
12f,02°
Mais, en raison de la trÚs grande inégalité d'utilisation de Pazote
des deux fumures, plus de trois fois supérieure pour le nitrate (dans
le rapport de 50 Ă 19 â3.33), c'est une quantitĂ© plus que triple,
câest-Ă -dire 3 333 kilogr. de fumier, qui Ă©quivaudrait Ă la fumure
minérale pour les céréales. Il faudrait donc, pour que l'équilibre se
A9f 9e
si
| it
3.33 a tonne, soi
rétablit, que le fumier de ferme ne coûtùt que
3 fr. 60 c.
Comme nous nâavons comptĂ© dans le calcul de la valeur du fumier
que ses trois principaux éléments, nous admettrons une plus-value,
sur ce prix de 3 fr. 60 c., de 2 fr. 40 c. pour la chaux, la magné-
sie, la matiÚre organique, etc, Lors donc que le cultivateur, obligé
d'acheter du fumier, ne pourra se le procurer au prix de 6 fr, les
1 000 kilogr., il aura avantage à réparur le fumier produit dans son
exploitation sur une surface double ou triple, suivant le cas, de celle
qu'il pourrait fumer Ă dose suffisante au fumier de ferme, sâil avait
1. Les valeurs attribuées à l'azote, à l'acide phosphorique et à la potasse sont celles
de ces substances dans les engrais commerciaux.
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893, â TJ, 2 |
322 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
assez d'engrais, et Ă complĂ©ter ses fumures par lâemploi du nitrate
de soude, des phosphates et, au besoin, des sels potassiques.
Le rĂŽle du fumier de ferme ne consistant pas uniquement dans
un apport dâacide phosphorique, dâazote et de potasse, mais aussi
dans la modification des propriétés physiques et chimiques de la
terre, par l'introduction des matiĂšres organiques dans le sol, il est
de beaucoup préférable de répandre le fumier de ferme, à moitié
dose, sur deux hectares par exemple et de recourir pour le reste de
la fumure aux engrais minéraux, plutÎt que de fumer isolément un
hectare au fumier de ferme et lâautre exclusivement avec des en-
grais minéraux.
V. â Froment. Seigle. MĂ©teil. Orge. Avoine.
Leurs exigences.
Le petit tableau ci-dessous indique les quantités des trois prin-
cipes fondamentaux des engrais Commerciaux : azote, acide phos-
phorique et potasse contenus dans 100 kilogr. de blé, de seigle et
de méteil et dans la paille correspondante. Ce sont des chiffres
moyens, susceptibles de varier, mais dans dâĂ©troites limites seule-
ment, avec les sols, les variétés cultivées et les autres circonstances".
AZOTE, ACIDE PHOSPHORIQUE ET POTASSE
contenus dans
(en nombres ronds) :
EE ââ EE âââ
100 kilogr. 100 kilogr. 100 kilogr.
de blé de seigle de méteil
et sa paille. et sa paille. et sa paille.
azote. . SAP 2k8 06 2k8,96 DT
DOPASSO SAN RE ARE LES LEE 1 ,14 3 ,16 RUE
Acide phosphorique . di 04 1 ,60 1:,30*
{. Nous avons pris, comme base des calculs qui nous ont conduits aux chiffres ci-
dessus, les données suivantes :
100 kilogr. de blé (grain) correspondant à 168 kilogr. de paille ;
100 kilcgr. de seigle (grain) correspondant Ă 309 kilogr. de paille ;
100 kilogr. de méteil supposé, pour simplifier l'exemple, un mélange à parties égales
de blé et de seigle, donneraient environ 230 kilogr. de paille.
2. 100 kilogr. d'orge et la paille correspondante renferment : 2â8,50 d'azote, 1s,95
d'acide phosphorique, 1K5,97 de potasse.
Un quintal d'avoine et sa paille coatiennent : azote 35,02, acide phosphorique 1%5,31,
potasse 4ke,15,
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. DA
Pour fixer les idĂ©es, supposons une exploitation produisant Ă
l'hectare, 15 quintaux de chacune de ces céréales avec la paille cor-
respondante, la récolte contiendra les quantités suivantes de chacun
des trois principes fertilisants :
RĂCOLTE:
15 quintaux métriques grain
ALIMENTS ASSIMILĂS. et paille correspondante.
EEE
Blé. Seigle. Méteil.
rates ee MAR EU LE: | ar ge MARS ADN Lake 85
POS CAMERA. Et RU 23 ,42 47 ,40 39 ,41
Acide phosphorique . . . . . IN MSC, 24 ,00 20-49
Ces quelques chiffres donnent une idée des exigences des céréa-
les d'hiver, idée qui se présentera sous une forme plus saisissante si
nous transformons en nitrate de soude, phosphate de chaux et chlo-
rure de polassium les poids dâazote, d'acide phosphorique et de po-
tasse, fixĂ©s par celte rĂ©colte de 45 quintaux Ă lâhectare.
QUANTITĂ DâENGRAIS
en nombres ronds.
NATURE DE L'ENGRAIS. D RTEE PĂUN PRE re"
Blé. Seigle, Méteil.
= Kilogr. Kilogr. Kilogr.
NTITATE Te SOU RARE TE RL 276 284 253
Chlorure de potassium Ă 50 p. 100!. . . AG 95 70
Phosphate Ă 16 et 17 p. 100 (scories)?. . 100 140 120
Ou superphosphate Ă 12 p. 100. . . . 145 200 172
Ou phosphate minéral à 22 p. 100°. . . 79 110 95
Nous ferons remarquer, tout de suite, que les rapprochements
entre les poids dâengrais reprĂ©sentant les quantitĂ©s dâazote, d'acide
phosphorique et de potasse contenus dans une récolte, ne sont pas
ceux, qu'il soit suffisant ou nécessaire, suivant le cas particulier,
d'introduire dans un hectare de terrain, pour obtenir une récolte de
15 quintaux de grain, avec la paille correspondante. Cela tient Ă ce
que les conditions en jeu dans la culture tendent Ă rendre ces chif-
fres tantĂŽt trop Ă©levĂ©s, LantĂŽt trop bas, et câest la pratique, câest-Ă -
dire lâexpĂ©rience fondĂ©e sur les faits bien observĂ©s, qui seule servira
1. De rotasse réclle.
2. D'acide phosphorique réel.
524 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Ă indiquer les doses de phosphates, de sels de potasse el de nitrate
à apporter par les engrais, pour amener le sol à une fertilité voisine
de celle qui permet de rĂ©colter 15 quintaux de grain Ă lâhectare.
En effet, dâune part, la terre arable de qualitĂ© moyenne, bien la-
bourée et propre, fournit aux plantes une bonne partie des aliments
qui leur sont nĂ©cessaires ; de lâautre, la totalitĂ© des matiĂšres fertili-
santes apportĂ©es par la fumure est loin d'ĂȘtre utilisĂ©e par les rĂ©col-
tes, mĂȘme dans les conditions les plus favorables, câest-Ă -dire lors-
que les engrais sont aussi bien disséminés que possible dans la
couche arable. Il résulte de ces deux conditions, qui agissent en sens
contraire, que, dans les terres riches, les quantitĂ©s dâazote, dâacide
phosphorique et de potasse indiquées par la composition de la ré-
colte Ă©tant, en majeure partie, fournies par la rĂ©serve du sol, lâen-
grais ne fera que complĂ©ter la fertilitĂ© naturelle de la terre et nâaura
quâĂ lui fournir un contingent de tel ou tel principe nutritif, infĂ©-
rieur aux exigences finales de la récolte, Dans les terres trÚs pauvres
au contraire, les exigences des vĂ©gĂ©taux ne pourraient pas ĂȘtre sa-
ĂŒisfaites par l'apport des quantitĂ©s dâengrais correspondantes Ă leur
teneur en azote, potasse, elc., puisque la totalitĂ© de ces engrais nâest
jamais, dans lâannĂ©e, utilisĂ©e par la rĂ©colte. La fumure, dans ce cas,
devra ĂȘtre plus Ă©levĂ©e que ne lâindique la composition de la rĂ©colte.
Enfin, en ce qui regarde le nitrate de soude que les pluies entraĂźnent
si facilement dans le sous-sol, la couche arable n'ayant pas la faculté
de retenir l'acide nitrique comme elle fait de lâacide phosphorique
et de la potasse, la quantitĂ© Ă employer devra dĂ©passer dâautant plus
celle quâindique la composition de la rĂ©colte, que le sol sera plus
pauvre en azole, plus perméable et le climat plus humide.
Les indications donnĂ©es plus haut nâont donc quâune valeur relative.
Cependant, elles peuvent utilement servir Ă des calculs sur lâĂ©pui-
sement, par les diverses cĂ©rĂ©ales dâun sol dont on connaĂźtrait la com-
position ; mais, comme nous le disions Ă l'instant, câest Ă des expĂ©-
riences culturales répétées dans des terres de composition variable,
expériences multipliées au point de donner aux moyennes qui en
rĂ©sultent âune valeur susceptible de gĂ©nĂ©ralisation, qu'il faut avoir
recours pour fixer le dosage des engrais Ă appliquer Ă la culture
dâune plante el en particulier Ă celle des cĂ©rĂ©ales.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 325
VI. â Des engrais pour cĂ©rĂ©ales d'hiver. Fumier de ferme.
Phosphates divers. Sels de potasse. Nitrate de soude.
Le fumier de ferme est lâengrais par excellence ; 1l apporte au sol,
en mĂȘme temps que les Ă©lĂ©ments minĂ©raux indispensables Ă lâali-
mentation des plantes, la maliĂšre organique, qui, en se transfor-
mant en humus, joue un rĂŽle si utile, au point de vue de lâameu-
blissement de la couche arable.
Malheureusement, nous ne produisons pas, en France, Ă beaucoup
prĂšs, la quantitĂ© de fumier nĂ©cessaire Ă lâentretien de la fertilitĂ© de
nos terres et, de plus, nous perdons, par notre négligence, une
bonne partie des matiĂšres fertilisantes contenues dans le fumier et
le purim.
Cette insuffisance dans la production du fumier, 1l nous faut la
combler par l'emploi des engrais commerciaux.
Reprenons donc la comparaison du fumier Ă ces derniers, sous le
rapport de sa teneur en azote, en acide phosphorique et en potasse.
La composition du fumier de ferme est Ă©minemment variable,
avec l'alimentation du bétail qui le produit et avec la nature de la
litiĂšre.
Pour fixer les idées, nous avons admis comme terme de compa-
raison un trÚs riche fumier moyennement consommé. Nous serons
certain, par lĂ , dâavoir un terme de comparaison nous donnant toute
sécurité pour le calcul des poids d'engrais complémentaires à em-
ployer.
La comparaison peut s'Ă©tablir ainsi quâil suit, comme nous l'avons
dit tout Ă lâheure, avec les engrais commerciaux :
QUANTITĂS
1000 KILOGR. DE FUMIER ; < :
cor:espondantes d'engrais commerciaux
renfermant : (en nombres ronds).
Azole 5 kilogr . . . . . â 33 kilogr. nitrate de soude, Ă 15.6 p. 100.
â= 12 â assi D
botasse 645,3 { 12 chlorure de potassium, Ă 50 p. 100.
| = 53 â kaĂŻnite, Ă 12 p. 100.
| â 15 â scories, Ă 16-17 p. 100.
Acide phosphorique 2*#,6.{ â 21 â superphosphate, Ă 12 p. 100.
â 12 â phosphate minĂ©ral, Ă 22 p. 100.
On peut considérer comme une faible fumure, 20 000 kilogr. de
326 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
fumier Ă lâhectare ; comme une fumure moyenne, 40 000 kilogr. et,
comme une forte fumure, 60 000 kilogr.
Voyons, Ă titre de renseignement, quels poids d'engrais commer-
ciaux il faudrait employer, si lâon voulait apporter au sol les quan-
tilés d'azote, d'acide phosphorique et de potasse contenues dans
60 tonnes de fumier de ferme. En appliquant les données que nous
venons de rappeler, on trouve les poids suivants en nombres ronds :
Nitrate de soude, 1 920 kilogr.;
Acide phosphorique, suivant lâĂ© tat auquel on le considĂšre :
a) Scories de déphosphoration, 945 kilogr. ;
b) Superphosphate, 1 300 kilogr. ;
c) Phosphate minéral en poudre, 710 kilogr. ;
Potasse, Ă lâĂ©tat de chlorure, 756 kilogr.; Ă lâĂ©tat de sulfate
(kaĂŻnite), 8 150 kilogr.
En réalité, par suite des différences trÚs grandes que présentent,
au point de vue de leur assimilabilitĂ© par les plantes, les mĂȘmes
principes fertilisants contenus dans le fumier et dans les engrais mi-
nĂ©raux, la substitution ne doit pas se faire dâaprĂšs les proportions
indiquées par ce calcul arithmétique. Il y a lieu, en effet, de présen-
ter Ă ce sujet quelques remarques importantes :
1° Lâazote des nitrates est beaucoup mieux utilisĂ©, comme nous
lâavons vu, par les vĂ©gĂ©taux que celui du fumier, et lâexpĂ©rience Ă
montrĂ© quâil suffit de donner, Ă lâĂ©tat de nitrate, le cinquiĂšme envi-
ron de la quantitĂ© dâazote que renferment 60 tonnes de funuer, pour
obtenir un résultat au moins égal. (380 kilogr. de nitrate de soude
constituent pratiquement une trÚs forte fumure azotée.)
2 La quantité de phosphate fournie à la terre, sous forme insolu-
ble doit, au contraire, ĂȘtre sensiblement Ă©gale Ă celle qu'apporte-
rait le fumier de ferme. Parfois, une plus-value dâun tiers Ă moitiĂ©,
suivant les sols, peut ĂȘtre attribuĂ©e au superphosphate comparĂ© aux
phosphates insolubles, dans les terres calcaires notamment : cela
tient sans doute Ă la plus grande diffusibilitĂ© de lâacide phosphori-
que du superphosphate et, pour une part aussi, Ă la teneur de cet
engrais en sulfate de chaux. Dans les sols argileux, silicéo-argileux,
sablonneux ou tourbeux, les scories de déphosphoration et la plu-
part des phosphates de chaux naturels, réduits en poudre trÚs fine,
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. IA
ont une action fertilisante égale et parfois supérieure à celle des
superphosphates, Ă poids Ă©gal d'acide phosphorique.
3 Si lâon excepte les sols tourbeux, extra-calcaires ou sableux,
on peut, le plus souvent, s'abstenir de l'emploi des sels de potasse,
le sol renfermant cette base en quantité suffisante. La magnésie
manque plus frĂ©quemment quâon ne le croit communĂ©meañt dans les
sols : aussi, pour certaines terres, lâemploi de la kaĂŻnite renfermant
16 à 18 p. 100 de sulfate de magnésie, est-il recommandable, de
préférence au chlorure de potassium, lorsqu'on a recours à un en-
grais potassique.
En tenant compte des remarques prĂ©cĂ©dentes et en sâappuyant sur
les expériences les mieux suivies et les plus concluantes, on peut
indiquer approximativement les quantités d'acide phosphorique,
dâazote et, le cas Ă©chĂ©ant, de potasse, Ă substituer Ă 60,000 kilogr.
de fumier de ferme.
60 000 kilogr. de fumier de ferme peuvent ĂȘlre remplacĂ©s, dans
la pratique agricole, au point de vue des principes fondamentaux
(azote, acide phosphorique et potasse), par des quantités d'engrais
chimiques correspondant aux taux suivants :
Acide phosphorique réel. , . . . . . 125 kilogr.'
AZOLENIFIQUE M re LT ne. NOTES 60 â
POfISSe rĂ© Mers 00e ste ON ee VO 60 â
Suivant les quantités de fumier de ferme dont on disposera, on
fera varier proportionnellement les poids d'acide phosphorique,
dâazote et de potasse que nous venons d'indiquer.
Le prix de la fumure chimique, substituée à 60 tonnes de fumier
de ferme, sâĂ©lĂšvera au maximum Ă 170 fr. par hectare; il peul
mĂȘme ĂȘtre Ă©valuĂ© Ă moins de 160 fr., en partant des cours moyens
1. Beaucoup de fumiers de ferme, ainsi que nous l'avons dit, sont moins riches en
azote, acide phosphorique et potasse que celui dont j'indique plus haut la composition ;
le taux dâacide phosphorique tombe souvent au-dessous de 2 p. 100 et celui de l'azote
au-dessous de 4.5 p. 100, 125 kilogr. d'acide phosphorique correspondent donc Ă la
richesse d'un fumier moyen de bonne qualité, 60 kilogr. d'azote représentant large-
ment le 1/5 de la teneur de 60 000 kilogr. de fumier moyen, en azote et 60 kilogr.
de potasse, plus du 1/5 de la teneur du fumier, en cette base.
328 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
de chacun des principes qui entrent dans les engrais minéraux, sa-
voir :
Acide phosphorique. ._. . 125 kilogr. Ă 0f,30° le kilogr. â 37°,50c
Azote nitrique. . . . . . CO U60 0206 00
PORASSES S PR R ES On ns 60 â Ă 0,40 400
A Total SEL Ăd OS AU ECS A ET SEA
Les deux tableaux ci-dessous résument les formules de fumures
Ă©quivalentes, suivant quâon emploiera, Ă lâhectare, 60, 40 ou 20 ton-
nes de fumier ou quâon aura recours aux engrais commerciaux seuls :
TABLEAU I. â QuantitĂ©s d'azote, d'acide phosphorique et de potasse
remplaçant le fumier de ferme.
DAXS LES ENGRAIS CHIMIQUES.
A
Se UE D Azote. OR Potasse.
Kilogr. Kilogr. Kilogr.
1° 60 000 kilogr.. . . . . . . » » »
LD A 0IDOD KO TE NME Ar 20 42 20
3222010 00ME our Am EME REN 40 83 40
AOPPAS de fumier. SRE DUR 60 125 60
Suivant la nature des phosphates et des sels de potasse auxquels
on donnera la préférence, il faudra employer les quantités indiquées
ci-dessous :
TABLEAU II â QuantitĂ©s (nombre rond) de phosphate, de nitrate et de sels
de potasse Ă ajouter au fumier de ferme, par hectare*.
NITRATE PHOS- SUPER- CHLORURE
FUMIER DE FERME, de SCORIES. PHATE PHOS- KAINITE. de
soude. minéral. PHATE. potassium.
Kilogr. Kilozr. Kilogr. Kilogr. Kilogr. Kilogr.
1° 60 000 kilogr. . » » » » » »
29 40000 â .. 130 255 255 230 170 40
3° 20000 â .. 260 510 510 460 340 80
4° Pas de fumier. . 390 765 765 690 510 120
1. Ces prix sont au moins égaux, sinon supérieurs à ceux que la culture peut obtenir
par l'intermédiaire des syndicats. Ils correspondent à 25 fr. les 100 kilogr. de nitrate
de soude, 50 fr. les 1 000 kilogr. de scories de déphosphoration et 22 fr. 50 c. les
100 kilogr. de chlorure de potassium.
2. La dose d'acide phosphorique donnée à l'hectare, à l'état de superphosphate,
peut ĂȘtre d'un tiers infĂ©rieure Ă celles qu'apporteraient les scories de dĂ©phosphoration
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 329
VII. â Prix de revient de la fumure minĂ©rale dâun hectare
de blé dans ces diverses conditions.
Laissant de cÎté la valeur du fumier de ferme, que chacun de nos
lecteurs pourra Ă©valuer dâaprĂšs les conditions de son exploitation,
valeur qui dépendra surtout du mode de comptabilité adopté, je me
contenterai d'indiquer la dépense correspondant à l'achat des en-
grais chimiques, dans les trois cas que j'ai envisagés plus haut :
n° 4, forte fumure, n° 3, fumure moyenne, n° 2, faible fumure chi-
mique :
Nez
Nitrate de soude : 130 kilogr. à 25 fr. les 100 kilogr. . . . . : . . 32f,50°
Scories 298" Kilo0r-n7 9 0"fr; lestt 000 loge Se te 12 To
Ou superphosphate : 230 kilogr. à 6 fr. 25 ce. les 100 re 14°,40°
Ou phosphate minéral : 255 kilogr. à 4 fr. 50 c. les 100 kilogr. 11 ,47
KaĂŻnite : 170 kilogr. Ă G fr. 25 ce. les 100 kilogr.. . . . . . . . . 10 ,60
Ou chlorure de potassium Ă 22 fr. 50 c. les 100 kilogr. . . 9f,00âŹ
LE CRAN PS LT EAN AP ANEOT D A S G
Avec superphosphate et chlorure, la fumure coĂ»tera le mĂȘme
prix, 90 fr. 89 c.
Avec phosphate minéral et chlorure, 53 fr. seulement.
On ne dĂ©pensera donc pas plus de 56 fr. Ă lâhectare, pour lâen-
grais commercial complémentaire de 40 000 kilogr. de fumier.
La formule n° 3 coûterait le double, soit 112 fr. à ajouter au prix
de 20 000 kilogr. de fumier et la formule ne 4 (pas de fumier, en-
grais chimique seul) reviendrait Ă 168 fr. environ.
Ces chiffres peuvent servir de base aux calculs du cultivateur dé-
sireux d'employer les engrais chimiques, soit seuls, soit conjointe-
(28 kilogr. au lieu de 42 kilogr., et ainsi de suite). Il y a lieu, inversement, d'augmen-
ter d'un tiers environ, par rapport aux scories, la quantité d'acide phosphorique donnée
sous forme de phosphate minéral (56 kilogr. au lieu de 42 kilogr., et ainsi de suite).
Aucune rĂšgle absolue ne peut ĂȘtre formulĂ©e Ă l'Ă©gard de ces Ă©quivalences, les nombres
que nous indiquons rĂ©sultent d'expĂ©riences culturales, mais ils pourront ĂȘtre modifiĂ©s
utilement par les cultivateurs, suivant les conditions locales de leur exploitation (na-
ture du sol, etc.).
330 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ment, ce qui est préférable, avec des quantités variables de fumier
de ferme. |
Rappelons encore que, dans la plupart des sols, on pourra faire
lâĂ©conomie des sels de potasse, ce qui ramĂšnera la dĂ©pense, Ă lâhec-
tare, Ă 160 fr., au maximum, pour une forte fumure en engrais
chimiques substitués au fumier de ferme.
VIII. â Emploi du nitrate dans la culture des plantes sarclĂ©es.
Pommes de terre, betteraves, navets, turneps, etc.
Si les céréales sont les plantes dans la culture desquelles l'emploi
du nitrate donne le maximum de rendement, les plantes sarclées,
loin dâĂȘtre indiffĂ©rentes Ă ce mode dâalimentation, sâen trouvent trĂšs
bien et peuvent, à son aide, donner des excédents de rendements
trÚs rémunérateurs.
Comme pour les céréales, si le sol est imparfaitement pourvu en
phosphate, l'addition de cette matiĂšre au nitrate augmente trĂšs no-
tablement le rendement.
La moyenne de 51 essais de culture de pommes de terre et de
17 essais de culture de betteraves Ă sucre, avec le nitrate seul, Ă
permis à M. le docteur Stutzer de constater les excédents de rende-
ment suivants par 100 kilogr. de nitrate de soude :
Pommes ide) ĂeRRe EL TSI RS ANS 101712
Bettéravess le (Ostende TMRENS 20 ,29
tandis qu'avec le phosphate employé simultanément avec le mitrate,
les excédents ont été de :
Pommeside terre; "11204740" 124,92 (18 essais)
Betterayesi tee 24 ,16 (55 essais)
L'expĂ©rience a montrĂ© qu'il nây a aucun avantage Ă©conomique Ă
dĂ©passer, Ă lâhectare, une certaine dose de nitrate dans la fumure
du sol destiné à la pomme de terre et à la betterave : 200 kilogr.
pour les premiĂšres et 250 Ă 300 kilogr. pour les secondes sont les
doses moyennes quâil convient d'employer. Le nitrate nâaugmente
pas Ja richesse en fécule des pommes de terre, cette derniÚre dé-
pendant avant tout de la variété cultivée. Comme pomme de terre
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 331
industrielle, la Richterâs imperator doit ĂȘtre conseillĂ©e ; elle donne
Ă la fois un trĂšs fort rendement en tubercules et une grande ri-
chesse de ces derniers en fĂ©culeâ.
Le nitrate, qui accroĂźt trĂšs sensiblement le poids de betteraves Ă
sucre rĂ©coltĂ© Ă lâhectare, nâĂ©lĂšve pas le taux du sucre dans cette ra-
cine : on a mĂȘme prĂ©tendu quâil le diminuait parfois dans des pro-
portions notables, ce qui nâest pas exact. M. le professeur MĂŠrcker,
qui à étudié expérimentalement la question dans de nombreux essais
faits dans six fermes diffĂ©rentes, est arrivĂ© Ă cette conclusion quâune
fumure de 400 kilogr. de nitrate de soude Ă lâhectare (dose trop
forte) comparativement Ă l'emploi de 200 kilogr. du mĂȘme sel nâa
provoquĂ© quâune diminution de 0.21 p. 100 dans le taux du sucre et
un abaissement du degré de pureté de 0.38 p. 100 seulement, dans
71 essais entrepris sur de nombreuses variétés de betteraves sucriÚ-
res. Le cultivateur nâa donc pas Ă redouter l'emploi du nitrate de
soude pour la famure de la betterave, aux conditions suivantes :
4° Cultiver une bonne variété, riche en sucre ;
2° Employer de la semence de premiÚre qualité et de provenance
qui assure la pureté de la variété ;
9° Joindre une fumure phosphatée à l'emploi du nitrate, de ma-
niĂšre Ă ne pas retarder la maturation de la betterave ;
4° Incorporer le nitrate au sol avant lâensemencement et ne pas
employer en couverture (ce quâil faut Ă©galement Ă©viter de faire
pour la pomme de terre) ;
9° Planter les betteraves à de faibles écartements et faire quatre
ou cinq binages.
En suivant ces prescriptions, le cultivateur n'aura quâĂ se louer
de l'emploi du nitrate, Ă la dose de 250 Ă 350 kilogr. au maximum
pour les betteraves, et de 200 Ă 250 kilogr. pour les pommes de
terre, dans des sols de richesse moyenne.
Du rapprochement de tous les essais comparables faits méthodi-
quement sur la betterave Ă sucre, sur la betterave fourragĂšre et sur
la pomme de terre, M. le docteur Stutzer a déduit les excédents de
â1. Voir le remarquable mĂ©moire de M. Ă. Girard, La Pomme de terre industrielle.
2° édition, in-8°, chez Gauthier-Villars. Paris, 1891.
232 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
rendements obtenus Ă lâhectare avec 100 kilogr. de nitrate de soude
associés aux quantités d'acide phosphorique que nous mdiquons plus
loin, Voici ces excédents :
BELĂERAYES Et. 4 IE MeNENeNr 481,52
Pommies:de terre 1672 ue Re en 15 .94
Nayets HUINEDSL er RAR Re 49 ,86
Les deux premiĂšres cultures Ă©tant de beaucoup les plus impor-
tantes pour la France, je m'occuperai dâelles principalement dans
les calculs qui vont suivre.
Ă titre d'exemple, je prendrai pour base de ces calculs les prix
moyens du quintal, pour la France entiĂšre, dâaprĂšs la statistique
agricole officielle (annĂ©e 1890â).
La valeur moyenne du quintal a été la suivante :
Pommes -deterre. MSN RE ATEN 5,43 *?
Betteraves"fDurrasbres :: 1100 ANT Dee 2 ,06
BĂ©tteraves/Ă :sucre #2" HESMAREMEReSr 2 ,23
Pommes de terre.
La dépense en engrais s'établit comme suit :
Nitrate/de:soude:: 23100 100 kilogr. Ă 25 fr. â 1200,
Acide phosphorique soluble . . Lo AO ELONCA RE
Ou acide phosphorique insoluble. 20:17, 40130"
DĂ©pense tetale de fumure . . . . . . . . 34 fr.
Excédent de rendement produit par cette famure, comparative-
ment au mime sol non fumé :
Pommes-de derce:: Lou QL-A 0 280 ER ENeAEr ne 86f,55°
AdĂ©AQiTE POUR ĂUMURES 7. PRE ROME 34 ,00
HĂnĂfLe RE AL PORTEURS CARRE DA:
Soit 153 p. 100 de la dĂ©pense dâengrais.
1. Slalistique agricole annuelle, publiée par le ministÚre de l'agriculture, année
1890. Imprimerie nationale, 1891, in-4°.
2. La campagne de 1892 a été particuliÚrement mauvaise pour la culture, au point de
vue du prix de la pomme de terre qui est tombĂ© Ă 3 fr, les 100 âkilogr. et mĂȘme
moins dans certaines régicns.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 333
L'emploi de 200 kilogr. de nitrate additionnés de la quantité cor-
respondante dâacide phosphorique (30 Ă 60 kilogr., suivant lâĂ©tat de
ce dernier) doublerait le rendement et porterait le bénéfice à 105 fr.
environ Ă lâhectare.
Belteraves.
La plus-value dans le rendement Ă©tant, pour les betteraves four-
ragĂšres, au moins Ă©gale Ă celle que le nitrate donne avec la bette-
rave sucriĂšre, nous appliquerons le chiffre moyen de 48 quintaux 52
aux deux récoltes.
Le compte de fumure sâĂ©tablit alors comme suit :
Nitrate de soude. . . . . 100 kilogr. Ă 25 fr. 250 {r
Acide phosphorique !. . . 30 â Ă Ofr.60c. Er je
Ou acide phosphorique . . 60 â Ă Ofr.30c.
DĂ©penses desfnmure = er een 43 fr.
Valeur des excédents de récolte :
Betteraves fourragĂšres.
ADD A 06 le qUMtAL eee Lin dE 99f:95°
DĂ©pensestde tte PR CNRC SDS NOTE 43 ,00
DĂMĂR NEA ete Prades Ă des DUT La ĂŠ0 Sas 561,95°
Soit 138 p. 100 de la dépense.
Betteraves sucriĂšres.
RCE AO) Ce MS CAE (11e RPM EE SEE RE 108f,20°
IT On EN PE RO ARTE PE 42 ,00
BENCREE CERN re a MEN ae ele ce 69f,20°
Soit 158 p. 100 de la dépense.
1. La quantité d'acide phosphorique exigée par une récolte de pommes de terre est
sensiblement moindre de moitié de celle qu'enlÚve une récolte de betteraves.
La récolte moyenne à l'hectare, en France, est de 71 quintaux métriques de pommes
de terre, celle de la betterave à sucre étant de 270 quintaux métriques (année 1888),
ce qui correspond, d'aprĂšs la richesse en acide phosphorique des deux plantes, Ă un
prélÚvement moyen de 25*,3 pour la betterave et 112,360 pour la pomme de terre
(les feuilles et les fanes de ces plantes, demeurant sur le sol et retournant Ă la terre,
re sont pas comprises dans ce calcul).
334 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Dans les deux cas, la dépense sera donc largement rémunératrice,
alors mĂȘme que la moyenne indiquĂ©e pour les excĂ©dents de rende-
ment par M. Stutzer, ou le prix du quintal sâabaisseraient HUE
ment par suite de circonstances locales.
Le nitrate employé à la fumure des plantes racines ne doit jamais
ĂȘtre rĂ©pandu Ă la surface du sol aprĂšs la levĂ©e des plantes ; il doit
ĂȘtre introduit dans le sol avec le dernier labour ; lâĂ©pandage du ni-
trate en couverture à toujours donné de mauvais résultats dans la
pratique. Tout ce que nous avons dit précédemment à propos des
céréales relativement à l'emploi simultané du fumier de ferme à doses
variables et dâengrais minĂ©raux s'applique Ă©galement aux plantes
sarclées.
IX. â De la prĂ©paration du sol et de lâĂ©pandage
des engrais.
De toutes les opérations desquelles dépendent les hauts rende-
ments du sol, la premiĂšre et non la moins importante est le net-
toyage de la terre, Ă laquelle on va confier les engrais, ensuite la
semence. |
Tous les vĂ©gĂ©taux, en effet, vivent de la mĂȘme maniĂšre. Qu'âelles
soient utiles Ă lâhomme ou quâelles ne lui servent de rien, les plan-
tes dont les semences se rencontrent spontanément dans un champ
et celles que nous y apportons consomment les mĂȘmes aliments.
Toutes ont besoin de phosphate, de nitrate, de sels de potasse, de
magnésie, de chaux, etc. Les mauvaises herbes, aussi bien que le blé,
lâavoine ou la pomme de terre, assimilent les substances nutritives
contenues dans la terre ou dans la fumure. Il rĂ©sulte deâ lĂ que
tout ce qui sert Ă nourrir la mauvaise herbe est perdu pour les
récoltes, sans compter la dépréciation qui frappe les pailles, sil
s'agit des céréales, lorsque les mauvaises herbes ont envahi nos
champs.
Le nettoyage du sol s'impose donc, en premier lieu. Le déchau-
mage est une excellente pratique : il consiste Ă arracher Ă la houe Ă
main, Ă la charrue ou au scarificateur, suivant l'importance de la
culiure, les chaumes des blés, des seigles, des colzas, etc., el à les
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 920)
enfouir immédiatement aprÚs la moisson, pour permettre aux graines
des mauvaises herbes de germer.
Quand les plantes nuisibles, provenant de ces semences, auront
acquis un certain développement, un labour qui les enterrera avant
quâelles aient pu fleurir et grainer en dĂ©barrassera le cultivateur.
Le déchaumage est bien préférable à un labour qu'on donnerait
immĂ©diatement aprĂšs la moisson. L'opĂ©ration doit ĂȘtre superficielle,
en effet, afin que les graines, Ă peine recouvertes de terre, puissent
germer Ă la premiĂšre pluie. La charrue enfouirait beaucoup trop
profondĂ©ment les semences que le labour d'automne ramĂšnerait Ă
la surface, leur permettant ainsi de germer en mĂȘme temps que Ăle
blé ou le seigle. Les mauvaises herbes envahiraient de nouveau la
sole des céréales. |
Si le champ Ă dĂ©chaumer est infestĂ© par le chiendent, lâagrostis,
lâoseille sauvage et autres plantes vivaces Ă racines traçantes, il faut
se garder d'abandonner sur le sol, aprÚs le déchaumage, ces mau-
dites plantes. MĂȘme exposĂ©es pendant longtemps Ă lâardeur du so-
leil, aprĂšs leur arrachage, elles ne meurent point et nâattendent
qu'une pluie pour s'implanter de nouveau dans le sol. Il faut donc
les enlever Ă lâaide du rĂąteau Ă main ou Ă cheval, suivant la dimen-
sion du champ, les rĂ©unir en tas et les brĂŒler.
En définitive, toutes les opérations qui auront pour résultat, tant
avant la semaille quâau cours de la vĂ©gĂ©tation, de dĂ©truire les plan-
tes Ă©trangĂšres Ă la rĂ©colte quâon se propose, feront bĂ©nĂ©ficier dâau-
tant cette récolte des matériaux nutritifs du sol et des engrais.
Le sol, Ă©tant bien propre, doit ĂȘtre prĂ©parĂ© Ă recevoir la semence
par des labours, hersages, etc., et par lâaddition dâune fumure
convenable.
Je nai pas à parler ici des labours et autres opérations mécani-
ques propres Ă chaque culture et qui sont bien connues de mes lec-
teurs. Je me bornerai Ă insister sur lâutilitĂ© des labours rĂ©pĂ©tĂ©s, au
point de vue de lâaction des engrais. Plus lâameublissement et la di-
vision dâun sol qui a Ă©tĂ© bien fumĂ© est considĂ©rable, plus la dissĂ©mi-
nation de lâengrais qui en est la consĂ©quence est parfaite, plus grande
sera la facilité qu'auront les plantes de développer leurs racines,
organes essentiels de l'assimilation des matiĂšres fertilisantes, et plus
336 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Ă©levĂ©, par consĂ©quent, sera le rendement de la terreâ. Le nombre
des labours dĂ©pendra dâun ensemble de conditions spĂ©ciales Ă cha-
que exploitation, telles que la constitution physique du sol et sa com-
pacitĂ©, la nature de la rĂ©colte antĂ©rieure et de celle que lâon prĂ©pare,
etc. Les connaissances pratiques du cultivateur le guideront, en
cela, mieux que ne pourraient le faire de courtes indications. |
J'arrive aux soins Ă prendre pour lâĂ©pandage des engrais et leur
incorporalion au sol.
Câest au moment des labours d'automne quâil convient dâintro-
duire les phosphates minéraux ou le superphosphate dans le sol :
le nitrate de soude devra ĂȘtre exclusivement employĂ© en couverture,
au printemps.
Si lâon a recours aux scories ou au phosphate minĂ©ral en poudre
fine, lâun des modes les plus Ă©conomiques d'emploi consiste Ă le rĂ©-
pandre Ă lâĂ©table sur le fumier. Suivant les quantitĂ©s que lâon aura
décidé de donner au sol auquel on réserve le fumier, on fera varier
la dose de phosphate de 200 Ă 500 gr. au plus, par jour et par tĂȘte
de bétail, Plus l'état de ténuité auquel le phosphate minéral est ré-
duit sera considĂ©rable et plus il se dissĂ©minera dans le sol sous lâin-
fluence du labour, mieux il sera assimilĂ© par les rĂ©coltes. LâĂ©pan-
dage du oct sur le fumier Ă lâĂ©table aide Ă cette dissĂ©mination.
Le superphosphate et le plùtre mélangés au fumier ont la pro-
priĂ©tĂ© de sâopposer Ă la perte de lâammoniaque Ă lâĂ©table ?.
L'avantage principal du superphosphate est de se disséminer,
grùce à l'humidité du sol, et de diffuser dans un rayon plus étendu
* du point oĂč 1l est tombĂ© sur la terre, lors de son Ă©pandage, que ne
le peuvent faite les phosphates insolubles.
1. Des expériences récentes de M. SchlÊsing semblent favorables à l'application des
engrais en lignes, entre les plantes qu'elles doivent nourrir. Mais ces intéressants essais
ont besoin dâĂȘtre rĂ©pĂ©tĂ©s avant qu'on en tire des conc'usions immĂ©diatement applicables
Ă Ja pratique agricole.
2. Pour l'épandage des scories de déphosphoration, l'emploi du semoir est indispen-
sable, la semaille à la volée offrant des dangers pour l'homme qui l'exécute, à raison
des poussiÚres métalliques que les scories renferment toujours. Ges poussiÚres, sans
parler de leur action sur les mains du semeur, peuvent causer des accidents graves si
elles pénÚtrent dans les bronches. C'est une raison de plus pour épandre les scories
sur 1e fumier de l'Ă©table,
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 331
On a considéré jusqu'ici que la condition essentielle à remplir,
dans lâapplication au sol de toutes les matiĂšres fertilisantes, pour en
assurer le maximum d'efficacité, est d'opérer aussi parfaitement que
possible sa dissĂ©mination dans la couche de terre oĂč les plantes vont
puiser leur alimentation. DâĂ©paisseuÂź variable, suivant la nature des
récoltes, cette couche, on l'admet jusqu'ici, sera d'autant plus fé-
conde que les matiĂšres fertilisantes y seront plus Ă©galement distri-
buĂ©es. DâaprĂšs les rĂ©centes expĂ©riences de M. Th. SchlĂŠ:ng que
semblent confirmer indirectement les observations que j'ai faites, il
y a deux ans, dans mon champ dâexpĂ©riences du Parc des Princes,
il y a lieu dâexpĂ©rimenter les procĂ©dĂ©s qui consistent Ă semer lâen-
grais en rigoles, en poquets, entre les lignes de plantes, etc.
J'ai constaté, en 1899, dans mes essais de culture de la pomme
de terre, quâĂ dose Ă©gale de phosphate, Ă Y'hectare, les rendements
maxima ont été obtenus par l'emploi des phosphates les plus riches
absolument parlant, ce qui tendrait à montrer, comme les expé-
riences de M. Th. SchlĂŠsing, que l'alimentation de la plante se fait
dâautant mieux que les racines rencontrent, en un point, une agglo-
mĂ©ration de principes nutritifs. Peut-ĂȘtre y aura-t-il lieu de modifier
le systÚme de répartition des engrais dans le sol, lorsque les expé-
riences de M. Th. SchlÊsing et les miennes auront reçu une confirma-
tion qui permette de généraliser les résultats que nous avons observés.
En attendant, il me parait prudent de ne pas renoncer à disséminer
le mieux possible les matiĂšres fertilisantes dans la couche arable.
En grande culture, le but est plus complĂštement atteint par la
distribulion de lâengrais au semoir que par lâĂ©pandage Ă la volĂ©e.
Un bon semoir, convenablement réglé, peut répandre uniformé-
ment, sur le sol, telle quantitĂ© dâengrais quâaura fixĂ©e le cultivateur,
dâaprĂšs les besoins de sa terre.
Si lâon sĂšme Ă la volĂ©e, seul systĂšme praticable pour les petites
cultures, 1l est bon de faire l'opération en deux fois : on partagera
l'engrais Ă distribuer en deux parties Ă©gales; la premiĂšre sera
semée dans le sens de la longueur du champ, et la deuxiÚme dans
le sens de la largeur, perpendiculairement, par conséquent, à la di-
rection suivie par le serneur dans la premiÚre opération. Un ouvrier
intelligent corrigera, en augmentant ou diminuant, suivant le cas,
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893, â 1. 22
338 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
la quantitĂ© dâengrais semĂ©e au second tour, les inĂ©galitĂ©s de la pre-
miÚre répartition.
Il faut choisir, pour semer les engrais pulvérulents, une journée
calme afin dâĂ©viter lâinĂ©gale rĂ©partilion quâentrainerait lâaction du
vent.
Une pratique excellente consiste, comme je lâai dĂ©jĂ indiquĂ©, Ă mĂ©-
langer, Ă lâengrais Ă semer Ă la volĂ©e, une certaine quantitĂ© de terre
fine passĂ©e au tamis ou du plĂątre (ce dernier est trĂšs utile si lâengrais
est humide). On augmente ainsi le volume de la matiĂšre Ă distribuer
sur une surface donnée et on en rend la répartition égale plus facile.
Toujours en vue dâassurer la plus grande homogĂ©nĂ©itĂ© dans la
rĂ©partition de lâengrais, il est prĂ©fĂ©rable de faire Ă lâavance, sur l'aire
dâune grange, le mĂ©lange des diverses substances quâon veut em-
ployer, dans des proportions quâon a fixĂ©es au prĂ©alable. Ce mĂ©lange
sera rendu aussi intime que possible. Supposons, pour fixer lesidées,
quâon veuille employer un mĂ©lange formĂ© de 200 kilogr. de nitrate
de soude, 250 kilogr. de phosphate minéral, scories, etc., ete., et
100 kilogr. de sels de potasse. On Ă©tendra sur le sol, par couches
superposĂ©es, les trois sortes dâengrais sur une surface assez grande
pour que le mĂ©lange ait 0,95 Ă 0*,30 de hauteur, comme si lâon
voulait prĂ©parer un compost; cela fait, Ă lâaide dâune pelle on cou-
pera et recoupera en tous sens le tas formĂ©, jusquâĂ ce que le mĂ©-
lange paraisse tout à fait homogÚne, ce que la couleur des différents
engrais permettra de reconnaßtre aisément.
Si lâon veut employer simultanĂ©ment le nitrate de soude et le su-
perphosphate, il faut absolument Ă©viter de mĂ©langer Ă lâavance ces
deux engrais. Lâacide de superphosphate, rĂ©agissant sur le nitrate
de soude, peut décomposer partiellement ce dernier, ce qui entrai-
nerait une perte dâazolic nitrique ; le mieux est de faire alors la se-
maille en deux fois.
La terre fine, au cas oĂč lâon en emploierait, sera introduite de la
mĂȘme maniĂšre. Cette prĂ©paralion, qui demande des soins et un peu
de lemps, trouvera largement sa rĂ©munĂ©iation dans lâhomogĂ©nĂ©itĂ©
du mélange à semer.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 339
Il. ââ CULTURE MARAICHĂRE
X. â Les engrais commerciaux et la culture maraĂźchĂšre.
Ă de rares exceptions prĂšs, la culture maraichĂšre, le jardinage,
la floriculture et lâarboriculture nâont pas eu recours Ă l'emploi de
fumures autres que le fumier de ferme, Lâattention des horticulteurs
et des arboriculteurs semble sâĂȘtre portĂ©e presque exclusivement
sur la création des mille variétés qui font l'admiration des amateurs
ou les dĂ©lices des gourmets. De mĂȘme, dans le jardinage propre-
ment dit, les efforts des praticiens se sont concentrés, avec succÚs,
sur l'obtention ou lâacclimatation d'espĂšces et de variĂ©tĂ©s nouvelles,
sans que le mode dâalimentalion des vĂ©gĂ©taux ait paru prĂ©occuper
les producteurs. Ces branches spéciales de la culture ont beaucoup
Ă attendre de la voie ouverte dans la production agricole par lâem-
ploi des succédanés du fumier.
Il sâagit dâune part importante de la richesse agricole du pays. En
effet, sans parler des cultures florales, de celle des fleurs Ă parfum,
notamment, qui occupent une place si considérable dans la région
méridionale, au sujet desquelles les données statistiques nous man-
quent pour en Ă©valuer lâĂ©tendue et la valeur, la culture maraĂŻchĂšre,
Ă elle seule, reprĂ©sente un chiffre annuel de production voisin dâun
milliard de francs.
DâaprĂšs la derniĂšre enquĂȘte dĂ©cennale (1882), la superficie des
jardins potagers et maraichers sâĂ©tendait sur 429 701 hectares four-
nissant annuellement une production évaluée à plus de 900 millions
de francs, ce chiffre pouvant, Ă coup sĂŒr, ĂȘtre considĂ©rĂ© comme
inférieur à la réalité.
Les jardins destinĂ©s Ă l'alimentation de la famille couvraient, Ă
eux seuls, prĂšs des trois quarts de la surface maraĂŻchĂšre totale
(339 698 hectares), et les terrains cultivés, en vue de la vente des
légumes, occupaient une surface de 90 000 hectares environ. Depuis
dix ans, lâĂ©tendue de ces cultures a dĂ» augmenter sensiblement ;
l'enquĂȘte dĂ©cennale qui se poursuit en ce moment nous fixera sur
l'importance de cet accroissement.
340 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Les cultures arborescentes, fruitiĂšres, chĂątaigneraies, oliviers,
mĂŒriers, vergers, Jardins (vignes non comprises, bien entendu), sâĂ©-
tendent ensemble sur prÚs de 850 000 hectares. La récolte annuelle
des pommes et poires comestibles oĂč destinĂ©es Ă la prĂ©paration des
cidres, représentaient, en 1882, prÚs de 20 millions de francs; celle
des autres arbres fruitiers s'Ă©levait Ă une valeur de plus de 6 mil-
lions. On voit, par ces quelques chiffres, que lâensemble de ces di-
verses cultures maraichĂšres, horticoles et fruitiĂšres couvre dans
notre pays des surfaces considérables et mérite, par conséquent,
quâon Ă©tudie l'application Ă leur production des mĂ©thodes de fumure
dont lâagriculture proprement dite commence Ă recueillir des fruits
si manifestes, sous le rapport de lâaccroissement des rendements.
Il est un autre point de vue de la question dont 1l convient de dire
un mot Ă propos de la fumure des cullures maraĂźchĂšres et arbustives.
On sait combien sont nombreuses les maladies parasitaires, sans
parler des insectes, qui sâattaquent aux cultures maraĂŻĂźchĂšres et aux
arbres fruitiers. !l nâest pas dâannĂ©e, de mois pour ainsi dire, quâon
ne signale lâapparition de nouveaux ennemis de ces rĂ©coltes. Or,
sâil est un fait physiologique bien Ă©tabli, câest l'inĂ©galitĂ© de rĂ©sis-
tance aux parasites vĂ©gĂ©taux ou animaux de deux plantes de mĂȘme
espĂšce dont lâune est bien nourrie, vigoureuse, et dont lâautre, faute
d'alimentation, est languissante ou maladive. Les ĂȘtres vivants rĂ©-
sistent dâautant mieux Ă ces invasions parasitaires que leur nutrition
est plus parfaite, leurs organes mieux développés, les fonctions de
ces derniers mieux assurées par une alimentation suffisante, en qua-
litĂ© et en quantitĂ©. Lâexemple de la rĂ©sistance au phylloxĂ©ra de cer-
tains vignobles abondamment fumés et croissant dans un sol large-
ment pourvu d'éléments minéraux assimilables, d'acide phosphorique
notamment, est lĂ pour prouver que chez les plantes, comme chez
les animaux et chez lâhomme lui-mĂȘme, lâĂ©tat particulier que lâon
dĂ©signe sous le nom de misĂšre physiologique est lâune des causes
principales de la facilité avec laquelle les affections parasitaires ou
microbiennes ont raison dâun individu. Câest pourquoi, pour le dire
en passant, on ne saurait trop donner d'attention dans les régions,
comme la Champagne, oĂč le flĂ©au phylloxĂ©rique commence Ă se
montrer, Ă la fumure du sol. Sans doute cela ne suffit pas et lâon
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 341
doit expérimenter les insecticides en vue de la destruction de lPin-
secte ; mais, en attendant, et sans perdre de temps, il faut apporter
ausol, en abondance, les aliments de la vigne qui y font défaut. On
retardera d'autant lâaffaiblissement du cep par lâaction du parasite
el lâon aura chance de l'empĂȘcher de succomber pendant assez long-
temps pour que l'application dâun insecticide, appropriĂ© aux condi-
tions locales du sol, produise son effet, permette à la vigne de ré-
sister aux alteintes du phylloxéra et de continuer, malgré la présence
du terrible insecte, à donner une récolte.
Les allérations de l'écorce et celle des fruits des poiriers, par
exemple, les tavelures, comme les appellent les jardiniers, dispa-
raissent sous l'influence d'une forte fumure phosphatée. J'ai eu, il y
a quelques annĂ©es, lâoccasion de conseiller Ă dâhabiles arboricul-
teurs lâemploi, Ă haute dose, des scories de dĂ©phosphoration dans
le sol qui devait recevoir des plantations dâarbres fruitiers et lâap-
plication du mĂȘme engrais Ă des arbres dĂ©pĂ©rissants et dont l'Ă©corce,
les feuilles et les fruits portaient, depuis plusieurs années, des traces
manifestes de dégùts causés par diverses affections parasitaires. Pour
les plantations, j'avais conseillé l'emploi des scories à la dose mini-
mum de 1 000 kilogr. Ă lâhectare (environ 160 kilogr. d'acide phos-
phorique) mĂ©langĂ©s Ă la terre jusquâĂ la profondeur de 0",60 Ă 0,86
qui Ă©tait celle des trous oĂč lâon devait planter les arbres. Pour les
vieux poiriers oĂč pommiers qui prĂ©sentaient un aspect dĂ©notant une
alimentation minérale insuffisante, j'avais fait enlever la terre tout
autour de l'arbre, jusquâĂ la profondeur oĂč sâimplantait le chevelu
des racines : on rebouchait ensuite le trou ainsi pratiqué avec un
mélange de terre et de scories, en quantité calculée sur le chiffre
que je viens de donner (1 000 kilogr. Ă lâhectare). Cette opĂ©ration,
dans les deux cas, Ă©tait faite Ă lâautomne ou Ă la fin de l'hiver, avant
toule trace de départ de la végétation. Ce traitement était complété,
lorsque la pauvretĂ© du sol lâexigeait, par l'addition au printemps,
en arrosage dans un bassin ouvert au pied de chaque arbre et dâune
dimension correspondant Ă l'expansion latĂ©rale des racines, dâune
certaine quantitĂ© de nitrate de soude (100 Ă 200 kilogr. Ă lâhectare,
suivant les cas), et de sels potassiques, si la nature-du sol lâexigeait.
DÚs la premiÚre année, cette médication, car la fumure consti-
342 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
tuait véritablement un traitement pour les arbres malades, produi-
sait déjà un effet manifeste : les feuilles nouvelles avaient presque
repris leur aspect normal ; l'écorce élait déjà moins rugueuse et les
fruits eux-mĂȘmes avaient meilleure apparence. Au bout de la se-
conde ou de la troisiÚme année, l'écorce était redevenue lisse, les
feuilles étaient débarrassées des taches noirùtres qui les couvraient
précédemment et les tavelures des fruits avaient disparu. Quant aux
Jeunes arbres, ils prenaient, dÚs la deuxiÚme année de plantation,
une apparence vigoureuse, luxuriante, pleine de promesses pour la
fructification, promesses que lâĂ©vĂ©nement nâa pas dĂ©menties.
Je cite cet exemple pour montrer les bons rĂ©sultats que lâon est
autorisĂ© Ă allendre de lâapplication judicieuse des engrais minĂ©raux
Ă la fumure des arbres fruitiers. J'espĂšre, dans ces quelques pages,
mettre entre les mains des propriétaires de jardins et de vergers, des
maraichers et des arboriculteurs, non pas des recettes partout indis-
Unctement applicables, mais dâutiles renseignements sur les moyens
d'élever les rendements de leur terre et des bases précises pour en-
treprendre des expĂ©riences qu'aucune indication, si complĂšte quâelle
semble ĂȘtre, ne saurait remplacer. Il ne faut jamais oublier, en
agriculture surtout, que les notions gĂ©nĂ©rales nâont quâune valeur
relative et doivent surtout servir de point de départ et de direction
pour des essais individuels adaptĂ©s aux conditions locales oĂč se
trouve lâexpĂ©rimentateur. Il n'existe pas de panacĂ©e universelle en
agriculture, pas plus quâen mĂ©decine, et les charlatans seuls donnent
des recettes infaillibles, partout applicables.
XI. â Insuffisance du fumier pour la culture maraĂźchĂšre
et le jardinage.
Le premier point sur lequel j'appellerai lâattention est lâinsuffi-
sance du fumier dâĂ©table et des engrais vĂ©gĂ©taux en gĂ©nĂ©ral, presque
exclusivement employĂ©s Ă l'heure quâil est dans la culture marai-
chĂšre et horticole.
D'oĂč vient cette insuffisance ? Comment peut-on la dĂ©montrer ?
Câest ce que je commencerai par examiner.
Lâhorticulture, qui a beaucoup de points communs avec lâagricul-
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 343
ture proprement dite, en diffĂšre essentiellement sous de nombreux
rapports. Examinons les différences les plus saillantes entre ces
deux cultures. Les légumes-que nous cultivons dans nos jardins ont
une durée de croissance beaucoup moindre que celle des végétaux
de la grande culture. Il s'ensuit que, dans lâespace dâune annĂ©e, on
demande deux ou trois rĂ©coltes au mĂȘme terrain maraicher, en y
cultivant successivement plusieurs espÚces différentes. La valeur vé-
nale du sol des terres à légumes, situées d'ordinaire dans le voisi-
nage immédiat des grands centres de population, est trÚs sensible-
ment plus élevée que celle du territoire agricole. Enfin, comme
conséquence de ces deux conditions, le terrain maraßcher est occupé,
pour ainsi dire, sans discontinuté, par des végétaux : la jachÚre y
est inconnue ou à peu prÚs et la récolte a lieu durant tous les mois
de lâannĂ©e, Ă quelques rares intervalles prĂšs. On sait, de plus, que,
d'une façon générale, les exigences des végétaux, en principes nu-
trilifs, sont d'autant plus grandes que la plante parcourt, dans un
temps plus court, les diverses phases de son Ă©volution. Une plante
qui, dans lâespace de trois mois, doit croĂźtre et arriver Ă maturitĂ©
ou, pour mieux dire, Ă lâĂ©tat de dĂ©veloppement auquel elle sera
comestible, exige, naturellement, la prĂ©sence dans le sol dâune
quantilé d'aliments plus élevée que le végétal dont la période de
dĂ©veloppement est de huit ou dix mois, comme câest le cas du blĂ©,
par exemple. La consommation en principes nutritifs, faite par la
culture maraichÚre, est encore accrue par les fréquents arrosages
qui activent la végétation. De plus, les exigences des nombreux
vĂ©gĂ©taux horticoles sont trĂšs diffĂ©rentes, dâune espĂšce Ă lâautre,
comme nous allons le voir dans un instant.
Enfin, la nĂ©cessitĂ© dâobtenir, pour les cultures des primeurs, une
chaleur suflisante, Ă des Ă©poques de lâannĂ©e oĂč la tempĂ©rature am-
biante est souvent trÚs basse, oblige à la création de couches chaudes
dont le fumier sera ensuite utilisé pour les cultures de pleine terre.
L'ensemble des conditions que je viens de rappeler Ă©tablit donc,
au point de vue de la fumure, des différences profondes entre les
récoltes agricoles et celles de nos jardins. La rapidité de croissance
des lĂ©gumes, la succession quasi ininterrompue, sur le mĂȘme sol,
de plantes trĂšs exigeantes, et dâexigences trĂšs diffĂ©rentes en azote,
344 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
âpotasse, acide phosphorique, obligent le jardinier Ă l'emploi de
doses de fumier dâĂ©table Ă©normes, et dĂ©passant de beaucoup, par
hectare, celles dont peut se contenter de sol agricole. De lĂ , une
dĂ©pense trĂšs considĂ©rable et quâon pourrait, je crois, rĂ©duire no-
tablement par l'association des engrais industriels au fumier d'Ă©-
tableâ.
Pour mettre en Ă©vidence, dâune façon claire, l'insuffisance du
fumier dâĂ©table dans la culture maraĂŻichĂšre, j'aurai recours Ă quel-
ques rapprochements numériques entre la composition de cet en-
grais et celle des produits horticoles.
Supposons quâil s'agisse dâune culture potagĂšre s'Ă©tendant sur un
hectare : admettons quâon ait donnĂ© Ă cette surface 60 000 kilogr.
de fumier dâĂ©table de composition moyenne, câest-Ă -dire une fumure
deux fois plus forte que celle que reçoit annuellement le sol agricole
soumis à un assolement convenable. Laissons de cÎté les matériaux
les moins prĂ©cieux du fumier dâĂ©table, Ă raison de leur abondance
relative dans la plupart des terres, et ne considérons que les trois
Ă©lĂ©ments fondamentaux : lâazote, l'acide phosphorique et la potasse.
En partant de la teneur moyenne du fumier dâĂ©table en ces trois
éléments, savoir, par 4 000 kilogr. de fumier : azote, 5 kilogr. ; acide
phosphorique, 24,6 ; potasse, 6,5, on calcule aisĂ©ment lâapport,
en chacun dâeux, que reprĂ©sentent les 60 tonnes de fumier reçues
par cet hectare. On trouve ainsi :
LU OT SRE USE MN RER D AT EC 300 kilogr.
Acide PNOSPNOrIQUE ARE ES E TETPMS 156 â
POLASS ONE Me ee ee NS Re RE EN te TOR
Une récolte de 30 quintaux de blé avec sa paille enlÚve environ
85 kilogr. dâazote, 35 kilogr. dâacide phosphorique et 45 kilogr. de
potasse : le fumier, Ă la dose de 60 tonnes Ă lâhectare, laisserait
donc encore, aprĂšs la rĂ©colte de blĂ©, 215 kilogr. dâazote, 121 ki-
logr. d'acide phosphorique et 333 kilogr. de potasse. On s'explique
dĂšs lors quâon puisse obtenir encore, aprĂšs le froment, au moims
1. L'achat du fumier pour la culture maraïßchÚre pourrait se borner à la quantité
nécessaire pour la création des couches.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 345
deux rĂ©coltes en cĂ©rĂ©ales dâĂ©lĂ© ou en plantes dâautres espĂšces vĂ©gĂ©-
tales qui Lrouveront dans le sol une réserve suffisante pour leur ali-
mentation. Comparons les exigences des plantes poltagĂšres Ă celles
du froment, et nous reconnaĂźtrons tout de suile que les 60 000 ki-
logr. ne suffisent pas, dans la plupart des cas, Ă la croissance des
deux ou trois récoltes que le jardinage demande à la terre dans une
seule année.
XII. â Exigences minĂ©rales des lĂ©gumes.
Pour Ă©tablir cette comparaison, il nous faut dâabord connaĂźtre les
quantités de chacun des trois principes essentiels contenus dans une
récolte de légumes, comparable, par son poids, à une récolte de
30 quintaux de blĂ©, câest-Ă -dire Ă une bonne rĂ©colte moyenne, en
culture intensive.
Je réunis dans le petit tableau ci-dessous la teneur en azote, acide
phosphorique et potasse dâune rĂ©colte de dix variĂ©tĂ©s de lĂ©gumes ;
les chiffres de la colonne qui suit le nom de la plante indiquent le
poids Ă lâhectare de la rĂ©colte utilisable (tubercules, grains ou feuilles
suivant les cas). Les poids dâazote, dâacide phosphorique et de po-
tasse expriment la totalitĂ© de ces Ă©lĂ©ments enlevĂ©s au sol, câest-Ă -dire
existant tant dans la partie comestible que dans les déchets dont le
poids ne figure pas dans la premiĂšre colonne, celle-ci nâindiquant
que les quantités livrées à la consommation.
QUANTITĂS
RĂCOLTE des principes minĂ©raux contenus
dans la récolte totale.
ESPĂCES. Ă TT ââ
lâhectare. Azote. Re ee y Potasse,
Kilogr. Kilogr. Kilogr. Kilogr.
ROIS SR ARTE EC 2 600 126 33 57
HAMCPIS ES TR Le. 1 500 96 25 Gyl
Caroest.s Marins, 50 000 133 53 153
Choux-fleurs. . . . . 24 000 156 59 204
Choux-raves, . . . . 30 000 206 89 230
Salade (laitue). . . . 14 000 31 13 54
Concombre . . . . . 60 000 96 130 63
ROLE md 15 Lie 15 000 64 99 27
Oignons . . . . . . 30 000 si 42 si
Pommes de terre. . . 25 000 96 45 155
GHOURAS REINE Li, 70 000 168 99 406
346 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Ce qui frappe tout dâabord, Ă lâinspection de ces chiffres, câest
l'énorme disproportion entre les exigences minérales des plantes
potagÚres et celles da blé ; en second lieu, les variations non moins
considérables des quantités de chacun des trois principes fertilisants,
dâune espĂšce de lĂ©gume Ă lâautre. Ces divergences sont rendues
plus Ă©videntes encore si lâon groupe les dix espĂšces vĂ©gĂ©tales par
ordre de teneur de chacune dâelles en azote, acide phosphorique et
potasse, ce que montre le tableau ci-dessous :
Classification des lĂ©gumes dâaprĂšs leurs exigences.
1° EN AZOTE. 29 EN POTASSE. 30 EN ACIDE PHOSPHORIQUE.
Kilogr. Kilozr. Kilogr.
Choux-raves: 2120906 E1Choux: 2: 61217406 2 Ghoux se 205040000099
Choux TE GS MC houx-raves 250 CNOUx-rAVĂS ES EMEA)
Choux-fleurs. . . 156 Choux-fleurs . . . 204 Concombres. . . . 63
Carottes. . . . . 133 Pommes de terre. . 155 Choux-fleurs . . . 99
POIs 2 2 EL MO Cartes SEULE DES LS CANON EST RC RUES E
Haricots. . . . . 96 CGoncombres. . . . 130 Pommes de terre. . 45
Pommes de terre . O'GRRR Ai TOT I ER 99 Oignons EN?
Concombres . . . JG MMOISAONS 2-00. SUAMIPOIS SEE MEN SE CS 0
Oignons eo Rose POI RME MEL ST SRATOrEME Ne 27
RaĂŻfort 222% TS GE CHaricots 2:22 04 ne oil Ă2HHaricois ATEN OEES
Salade: (laitue} "7 81: Salade. 7 7.0" DAS Salades ne
Ăcarts extrĂȘmes. . 175 352 86
Lâassimilation de lâazote, de la potasse ct de l'acide phospho-
rique varie donc, pour les plantes que nous envisageons, dâune
espĂšce Ă lâautre, dans le rapport de Ă Ă 7 pour le premier, de
1 Ă 7 1/2 pour le second et de 1 Ă 7 pour le troisiĂšme, avec dif-.
fĂ©rents Ă©carts entre ces deux extrĂȘmes. Il suit de lĂ qu'une quan-
titĂ© dĂ©terminĂ©e de fumier â 60 000 kilogr. Ă lâhectare â ne peut
suffire Ă la succession de rĂ©coltes que lâon demande Ă un jardin
dans une mĂȘme annĂ©e. Un exemple va rendre plus sensible encore
celte insuffisance du fumier pour la production Ă©conomique des
légumes.
Supposons que lâon cultive successivement la mĂȘme annĂ©e,
dans un jardin maraßcher qui aura reçu, en hiver, 60 tonnes
de fumier, des choux, des carottes et de la salade, et voyons
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 347
quels vont ĂȘtre les prĂ©lĂšvements exercĂ©s par lâensemble des trois
récolles :
AZOTE,. POTASSE. DoanĂ Ont de,
Kilogr. Kilozr. Kilogr.
70 000 kilogr. de choux enlĂšveront . . 168 406 99
50000 â- de carottes. . . . . . 135 153 23
14000 â de salade. . . . . . . 31 b4 13
SON AU TOI le a Ras Dia 613 165
60 000 kilogr. de fumier apportent . . 300 378 156
D'oĂč un dĂ©ficit de, . . . 32 235 9
DâaprĂšs cela, mĂȘme en supposant que les 60 tonnes de fumier
aient cédé intégralement aux plantes leur azote, acide phosphorique
el polasse, ce qui est loin dâĂȘtre possible, elles nâauraient pas suffi,
à 90 p. 100 prÚs, à alimenter en potasse les trois récoltes.
Ce bilan explique comment les jardiniers qui sont âamenĂ©s Ă intro-
duire dans le sol dâĂ©normes quantitĂ©s de fumier, pour la confection
des couches et la préparation des primeurs, arrivent à maintenir la
fécondité de leur sol, malgré les exigences si grandes des légumes
qu'ils cultivent. Ge nâest done que par l'accumulation successive
d'Ă©normes quantitĂ©s de fumier dâĂ©table dans leur champ que les ma-
raßchers réussissent à entretenir sa fertilité. La disproportion existant
entre les poids dâazote, d'acide phosphorique et de potasse quâexigent
les différents légumes suffit à elle seule pour obliger le jardinier
à une dépense excessive en fumier, puisqu'il doit toujours fournir.
Ă ses lĂ©gumes une quantitĂ© minima dâaliments potassiques, azolĂ©s
ou phosphatés et que le fumier ne peut apporter, par exemple, le
minimum de potasse nĂ©cessaire, quâen donnant en mĂȘme temps au
sol des quantitĂ©s dâazote ou dâacide phosphorique doubles de celles
quâexige la constitution de la rĂ©colte.
Ă eux d'examiner si, comme je le pense, l'emploi des engrais
spéciaux, nitrate, poudreiltes, phosphates, sels de potasse, etc., en
addition au fumier dâĂ©table, ne leur permettrait pas de rĂ©gler la fu-
mure sur les besoins des plantes, quelque différentes que soient
leurs exigences, en réduisant à la plus stricte limite nécessaire à la
confection des couches, la quantité de fumier qu'ils achÚtent chaque
348 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
année et en restituant à la grande-culture une bonne partie du fu-
mier quâils lui enlĂšvent.
XIII, â NĂ©cessitĂ© de l'apport des matiĂšres minĂ©rales
dans le maraĂźchage.
Les terres de longue date soumises Ă la culture maraĂŻchĂšre nâont
pas besoin d'apport de matiĂšres organiques, mais bien de matiĂšres
minĂ©rales quâelles sont, plus qu'aucun sol, aptes Ă rendre prompte-
ment utilisables par les vĂ©gĂ©taux. Câest dans cette voie que doit en-
trer la culture potagĂšre pour rĂ©aliser lâobjectif de toute opĂ©ration
agricole : obtenir, avec le minimum de dépense, le maximum de ren-
dement. Nous allons aborder ce cÎté de la question, ayant établi,
nous lâespĂ©rons, l'insuffisance, au point de vue Ă©conomique, de la
fumure exclusive au fumier dâĂ©table pour la culture maraĂŻchĂšre,
comme pour toute autre dâailleurs.
En rĂ©alitĂ©, câest dans du terreau presque pur, câest-Ă -dire dans
du fumier plus ou moins dĂ©composĂ©, plutĂŽt que dans de la terre, Ă
proprement parler, que se pratique la culture maraĂźchĂšre intensive.
Il y a lieu, dĂšs lors, de se demander, dâune part, si les errements
de cette culture nâentrainent pas, en achat de fumier, une dĂ©pense
excessive que diminuerail, dans une large proportion, l'emploi
simultanĂ© des engrais commerciaux ; de lâautre, si le remplacement
du fumier, dans une notable proportion, par les engrais minéraux
n'aurait pas, Ă cĂŽtĂ© du rĂ©sultat Ă©conomique, lâavantage d'amĂ©liorer
la qualité des légumes produits.
La réponse à la premiÚre question ne fait pas de doute à nos
yeux et j'espĂšre prouver aisĂ©ment qu'elle doit ĂȘtre affirmative. En
ce qui regarde le second point, à savoir si les légumes récoltés dans
un sol plus riche en principes minéraux ne posséderaient pas une
saveur et un goĂ»t plus agrĂ©ables, en mĂȘme temps quâune richesse
plus grande en principes alimentaires, je suis tenté de répondre
Ă©galement par lâaffirmative. Mais j'ajouterai tout de suite que lexpĂ©-
rience directe seule donnera une réponse décisive. Occupons-nous
donc pour l'instant de l'examen de la premiĂšre question seulement.
Quelques remarques sur les conditions dans lesquelles le fumier
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 349
dâĂ©table cĂšde Ă la plante ses principes actifs pour la vĂ©gĂ©tation sont
indispensables pour nous guider dans le choix des engrais minéraux
Ă introduire dans un sol de longue date abondamment pourvu en
fumure organique.
Si lâon excepte les plantes dites lĂ©gumineuses, telles que pois, ha-
ricots, etc., les végétaux ne puisent l'azote indispensable à leur
existence que dans les nitrates ou dans les sels ammoniacaux et plus
sĂ»rement dans les premiers. Lâazote organique qui forme la masse,
presque la totalitĂ© de l'azote du fumier frais, ne peut donc servir Ă
la vĂ©gĂ©tation qu'aprĂšs s'ĂȘtre oxydĂ©, câest-Ă -dire transformĂ© en acide
nitrique, sous l'influence dâun organisme infĂ©rieur (microbe nitri-
fiant), agissant en présence de bases métalliques telles que la chaux,
la magnĂ©sie, la potasse ou la soude, avec le concours de lâoxygĂšne
de l'air, de lâhumiditĂ© du sol et dâune certaine tempĂ©rature.
Les phosphates et les sels de potasse, de chaux et de magnésie,
qui existent toujours dans le fumier, nâont pas Ă subir des modifica-
tions aussi complexes pour servir d'aliments aux plantes ; ces corps
pĂ©nĂštrent dans le vĂ©gĂ©tal, soit Ă la faveur de lâeau, sâils sont solu-
bles, soit par dialyse, Ă travers la membrane externe des poils radi-
culaires, sâils sont solides. Gette absorption se fait par l'intermĂ©diaire
des sucs acides de la plante, capables de dissoudre, Ă travers la
membrane des radicelles, les matiĂšres insolubles, les phosphates
notamment, et de les mettre à la disposition du végétal, sans le con-
cours direct de lâeau.
- De cette diffĂ©rence profonde dans le mode dâassimilation de lâazote,
des phosphates et des sels minéraux du fumier, doit résulter une
trĂšs inĂ©gale consommation de chacun dâeux dans lâutilisation du fu-
mier ; 1l est utile dâinsister sur ce point fondamental. Reprenons,
pour cela, l'exemple dâune fumure de 60 000 kilogr. de fumier
dâĂ©table, Ă lâhectare, qui nous a prĂ©cĂ©demment servi : ces 60 tonnes
de fumier renferment :
ATOUT AP TR Re En 300 kilogr.
Acide phosphorique. . . . . . . . 156 â
RO TASSE Ne Es En SE DES 378 â
Ces 300 kilogr. dâazote, pour servir Ă la nutrition de la plante,
devront ĂȘtre transformĂ©s en nitrale : combien de temps exigera
320 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
celte transformation indispensable pour que l'azote du fumier serve
intĂ©gralement dâaliment Ă la rĂ©colte ? On ne saurait le prĂ©ciser, lâac-
tivité de la nitrification dépendant, comme je le rappelle plus haut,
dâun ensemble de conditions qui nâest pas susceptible de mesures
exactes ni mĂȘme d'Ă©valuations approchĂ©es. La pratique nous apprend
qu'il sâĂ©coulera un temps fort long, depuis le moment de lâintroduc-
tion du fumier dans le sol jusquâĂ sa complĂšte nitrification et, par con-
sĂ©quent, jusquâĂ lâutilisation de son azote par les vĂ©gĂ©taux. J. B. Bous-
singault a constatĂ©, par l'analyse de terres de maraĂŻicher, câest-Ă -dire
de fumier trĂšs consommĂ©, quâun dixiĂšme seulement de l'azote total
sây trouve Ă lâĂ©tat de nitrate, les neuf autres parties y exislant encore
Ă lâĂ©tat dâazote organique. Sir J. Lawes et le docteur Gilbert, dans
leurs expériences sur la culture du blé et des plantes sarclées que
j'ai rappelĂ©es plus haut, sont arrivĂ©s Ă celte conclusion que lâaction
du fumier de ferme nâest complĂšte quâau bout de 15 ans environ.
On voit, dâaprĂšs cela, quâen apportant 60 tonnes de fumier Ă un
hectare de terre, ce nâest pas sur 300 kilogr. d'azote actif pour la
vĂ©gĂ©lation que lâon peut compter dans lâannĂ©e, mais sur une frac-
tion plus ou moins grande de celte quantité. Si l'on adoptait les
chiffres de Lawes et de Boussingault, on estimerait Ă 20 ou 30 kilogr.
d'azote nitrique seulement le poids de ce principe fertilisant em-
prunté, par la récolte, la premiÚre année, au fumier employé.
Suivant toute probabilitĂ©, lâassimilation des sels alcalins et de
lâacide phosphorique du fumier se fait dans une mesure beaucoup
plus large que celle de l'azote : lâaction absolument certaine du ni-
trate de soude employé en couverture, sur un sol médiocrement
fumĂ© en fumier de ferme, le dĂ©montre. En effet, l'addition dâune
faible quantité de nitrate, au printemps, dans un champ de blé,
d'avoine ou d'orge précédemment fumé au fumier de ferme, pro-
duit une trĂšs notable augmentation dans le rendement en grain et
en paille Ă l'automne. On ne peut s'expliquer, il me semble, lâin-
fluence de la seule addition du nitrate Ă un sol, quâen admettant
que le sol ou la fumure ont livré à la récolle assez d'acide phospho-
rique, de potasse, etc., mais pas assez d'azote assimilable et que le
nitrate est venu fournir le complĂ©ment dâazote nĂ©cessaire pour pro-
duire lâexcĂ©dent de rĂ©colte constatĂ©.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 391
Je pense donc que dans la culture maraïchÚre, l'énorme quantité
de fumier de ferme quâon est obligĂ© d'introduire dans le sol, tous
les ans, est nécessitée par le besoin de satisfaire aux exigences des
lĂ©gumes en azote. En dâautres termes, les lĂ©gumes se dĂ©veloppent
grĂące Ă lâemmagasinement dans le sol de quantitĂ©s considĂ©rables
dâazote organique dont la rapiditĂ© de nitrification ne suit pas celle
de la croissance des plantes, de sorte que celles-ci sâalimentent
beaucoup plus avec le concours de lâazote des nitrates provenant
des fumures antérieures qu'avec celui du nitrate formé pendant la
pĂ©riode de quelques mois, suffisante pour lâĂ©volution complĂšte de la
plante.
La conséquence de l'interprétation que je viens de lenter de la
pralique qui consiste Ă rapporter tous les ans, dans un sol marai-
cher, une Ă©norme masse de fumier dâĂ©table est que, Ă un moment
donnĂ©, le champ renferme, Ă lâĂ©lal inerte pour la vĂ©gĂ©lation, des
quantitĂ©s considĂ©rables dâazote, tandis que la plus grande partie de
la potasse et de l'acide phosphorique est exportée annuellement par
les rĂ©coltes qui se succĂšdent dans le cours dâune campagne. Le pro-
blĂšme Ă©conomique dont la solution s'impose au maraicher est
double : hĂąter la transformation de lâazote organique en nitrate et
fournir au sol à meilleur marché l'acide phosphorique et la potasse
qui leur manquent.
Examinons les moyens d'atteindre ce double but.
Il ne sâagit, pour le moment, que des vieilles cultures maraichĂšres.
Pour les terrains neufs quâon destine Ă la culture maraĂŻchĂšre, on
procédera autrement. Nous examinerons plus tard ce cas spécial.
XIV. â Les phosphates minĂ©raux et les cultures
maraĂźchĂšres.
La constitution des sols consacrés de longue date à la culture ma-
raichĂšre appelle une observation dont nous devons tirer un parti
avantageux pour la fumure économique de ces terres. La présence
d'une grande quantité de matiÚre organique (d'humus) dans un sol
est Ă©minemment favorable Ă lâassimilation directe des phosphates
minéraux en poudre fine. Les faits culturaux bien observés, les ex-
392 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
périences que je poursuis depuis plus de vingt ans sur les conditions
dâassimilation des phosphates minĂ©raux par les plantes, lâheureuse
influence des phosphates dans les terrains de landes, nous montrent
que deux terres, de teneur identique en phosphate minéral et qui ne
diffĂ©rent quâen ce que lâun a reçu de la matiĂšre organique, tandis
quâon nâen a pas donnĂ© Ă lâautre, fournissent des rendements trĂšs
diffĂ©rents : la terre oĂč la matiĂšre organique abonde donne des excĂ©-
dents de rĂ©coltes de 50 Ă 60 p.100 sur ceux de lâautre sol. La quantitĂ©
plus ou moins grande de phosphate assimilé par la plante semble
donc Ă©troitement liĂ©e Ă lâaction que la matiĂšre organique exerce sur
le phosphate. Il se produit dans le sol des combinaisons, encore im-
parfaitement connues dans leur mode de formation, entre le car-
bone, l'hydrogĂšne et l'oxygĂšne des substances organiques el le phos-
phate de chaux, de fer ou dâalumine, combinaisons qui se prĂȘtent on
ne peut mieux Ă la dialyse du phosphate par la racine de la plante.
Cette observation conduit tout naturellement Ă songer Ă l'emploi
des phosphates minéraux dans les sols maraßchers, trÚs aptes par
leur forte teneur en matiĂšres organiques Ă rendre promptement
assimilable la plus grande partie du phosphate quâon leur confiera.
Parmi les nombreuses variĂ©tĂ©s de phosphates minĂ©raux que lâin-
dustrie met aujourdâhui, Ă si bon compte, Ă la disposition des agri-
culteurs, il en est deux quâil serait particuliĂšrement intĂ©ressant dâex-
périmenter : les phosphates minéraux riches en carbonate de chaux
et les scories de déphosphoration. Au point de vue de l'alimentation
phosphatée de la plante, tous les phosphates en poudre fine pour-
raient ĂȘtre indiffĂ©remment employĂ©s ; je suis certain que les phos-
phates siliceux aussi bien que les phosphates calcaires seront promp-
tement assimilés dans ces terrains, dont la matiÚre organique
constitue un des éléments les plus abondants. Mais si je crois parti-
culiĂšrement intĂ©ressants les essais quâon ferait avec les scories de
dĂ©phosphoration et avec les phosphates calcaires, câest quâil y a lieu
de penser que la forte teneur en chaux des premiÚres, la présence
du carbonate de chaux dans les seconds concourraient trĂšs effica-
cement à la nitrification de la matiÚre azotée accumulée depuis de
longues années dans les terrains maraïchers. Il est à penser qu'on
obtiĂ©endrait ainsi du mĂȘme coup deux rĂ©sultats importants : 1° met-
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 393
tre Ă la disposition des rĂ©coltes lâacide phosphorique qui leur est
indispensable ; 2 provoquer la nitrification de lâazote organique.
L'addition de sels de potasse compléterait la famure minérale des
sols de maraichage.
Dans quelles proportions conviendrait-il d'employer les phos-
phates et les sels de potasse ? L'expérience pourrait seule fixer exac-
tement les jardiniers Ă ce sujet. Voici, en attendant, les bases sur
lesquelles on pourrait, Je crois, entreprendre des essais. Jâestime que
l'emploi de 150 Ă 180 kilogr. d'acide phosphorique Ă lâĂ©tat de scories
de dĂ©phosphoration (1000 kilogr. environ de scories Ă lâhectare),
ou l'introduction de 200 kilogr. d'acide phosphorique sous forme
de phosphate brut (Ă 25 ou 30 p. 100 d'acide phosphorique) rem-
pliraient le but. La potasse pourrait ĂȘtre employĂ©e Ă la dose de 80 Ă
100 kilogr. Ă lâhectare, soit 160 Ă 200 kilogr. de chlorure de po-
Lassium. [l va sans dire que ces engrais devraient ĂȘtre introduits
dans la premiÚre année des essais, sans nouvelle addition de fumier
dâĂ©table au sol. Que coĂčlerait cette famure Ă lâhectare ? Le voici Ă
peu de chose prĂšs :
1 000 kilogr. de scories, Ă 18.90 p.100, valent 50 fr.
200 kilogr. de chlorure de potassium coûtent environ 55 fr.
Soit une dépense d'engrais de 105 fr.; 200 kilogr. d'acide phos-
phorique dans les phosphates minéraux coûteraient aussi (à 0 fr. 25 c.
le kilogr.) environ 50 fr. Dans les deux cas, la dépense serait donc
la mĂȘme et l'expĂ©rience seule dĂ©ciderait de l'avantage que lâun des
mĂ©langes prĂ©senterait sur lâautre. Cette dĂ©pense nâattemdrait guĂšre
que le cinquiĂšme de celle quâentraĂźne une fumure annuelle de
60 000 kilogr. de fumier dâĂ©table, Ă 10 fr. la tonne. Maintenant de
deux choses lâune : ou, comme je le pense, la nitrification du fumier
sâeffectuerait assez rapidement pour suffire Ă la culture intensive
dâun jardin maraicher, et il nây aurait alors pas lieu de pourvoir au-
tement à la nutrition azotée des légumes ; ou celte nitrification
marcherait moins vite que je ne le suppose, et lâon devrait recourir
au nitrate de soude. Dans ce cas, 200 ou 400 kilogr. de nitrate de
soude à 29 fr. les 100 kilogr. compléteraient la fumure minérale,
dont le coĂ»t total resterait infĂ©rieur Ă 200 fr. par hectare, nâaltei-
onant pas la moitié du prix du fumier employé jusqu'ici.
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1, 23
394 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Je voudrais aussi voir essayer, concurremment aux phosphates et
aux sels de potasse, le plĂątre cru Ă la dose de 3 000 kilogr. Ă lâhec-
tare ; il est probable que lâon constaterait, dans la culture marai-
chĂšre, les effets si remarquables sur la production des vignes abon-
damment pourvues de fumures azotées organiques.
Ces divers essais sont peu dispendieux et mĂ©ritent, je crois, dâĂȘtre
tentĂ©s. Dans le chapitre suivant jâexamine la fumure des jardins
potagers, dans lesquels, en général, on ne fait pas usage du fumier
de ferme aux doses Ă©levĂ©es quâemploient les maraichers de profes-
sion et j'indique la nature et la quantité des engrais qu'ils récla-
ment.
De ce qui prĂ©cĂšde je ne voudrais pas quâon pĂŒt conclure que je
propose de bannir le fumier dâĂ©table de ia culture maraĂŻchĂšre et de
le remplacer intĂ©gralement par un mĂ©lange dâengrais commerciaux :
phosphates, nitrates, sels de potasse, etc. Cette maniĂšre de voir ex-
clusive est bien loin de ma pensĂ©e, et je m'arrĂȘterai encore un ins-
tant Ă lâinterprĂ©talion exacte des faits que je viens d'exposer et des
moyens que je recommande aux maraĂźchers.
Moins que toute autre, la culture maraĂźchĂšre en sol ordinaire,
câest-Ă -dire en terre mĂ©diocrement pourvue naturellement de ma-
tiĂšres organiques, ne saurait se passer du fumier dâĂ©table : la nĂ©ces-
sité d'obtenir des légumes tendres, de croissance rapide, puisque
plusieurs espÚces doivent se succéder sans interruption dans le
champ du maraĂźcher, exige un sol riche en humus, capable dâabsor-
ber et de retenir de grandes quantitĂ©s dâeau d'arrosage, celle-ci
Ă©tant un des facteurs dominant dâune production rapide des lĂ©gumes,
en mĂȘme temps que des qualitĂ©s requises par le consommateur qui
repousserait des produits durs ou coriaces (salades, radis, etc.).
Il ne sâagit donc point de renoncer aux fumures organiques, mais
seulement dâen restreindre l'emploi, tant au point de vue des ren-
dements à obtenir que de la dépense à faire.
Cela Ă©tant entendu, J'ai montrĂ© que la nĂ©cessitĂ© dâapporter aux
rĂ©coltes quâon se propose d'obtenir, les quantitĂ©s dâazote, de po-
tasse et dâacide phosphorique quâelles rĂ©clament, a conduit les ma-
raichers, qui s'adressent, dans ce but, exclusivement au fumier
dâĂ©table, Ă emmagasiner dans leur lerrain des quantitĂ©s Ă©normes de
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 395
cet engrais. Jâestime que, dans la plupart des cultures maraĂŻchĂšres
anciennes, dans les champs dont le sol est bondé de matiÚres orga-
niques et qui, par suite, a acquis pour longtemps les qualités spé-
ciales que les matiĂšres organiques communiquent Ă la terre : poro-
sitĂ©, ameublissement, pouvoir absorbant considĂ©rable pour lâeau,
elc., le moment est venu d'entrer dans une voie Ă la fois plus ra-
tionnelle et plus Ă©conomique, par la substitution, dans une large
mesure, des engrais minéraux au fumier.
La connaissance exacte du sol sur lequel on opÚre, l'expérience
acquise par le maraicher lui-mĂȘme, seront les meilleurs guides pour
l'appréciation des limites dans lesquelles devra se faire cette substi-
tution. Est-ce, pendant un an ou deux, la totalité du fumier con-
sommĂ© annuellement qui devra ĂȘtre remplacĂ©e par des phosphates,
des sels de potasse, des nitrates ? Faudra-t-1l réduire d'un quart ou
de moiliĂ© seulement la quantitĂ© de fumier employĂ©e ? Câest au prati-
cien à apprécier, à faire des essais et à en tirer les conclusions que
justifieraient les résultats constatés localement. Ce qui me parait in-
contestable, ce que Jai tenu Ă signaler, câest quâil y a beaucoup Ă
faire dans cette voie et que lâacide phosphorique, la potasse et
lâazote sous forme minĂ©rale doivent ĂȘtre fournis aux sols maraĂŻĂźchers
dans une large proportion, tout en réalisant une grande économie
dans les frais de fumure.
III, â CULTURE POTAGĂRE
GRANDE CULTURE â JARDINAGE
XV. â CrĂ©ation dâun jardin.
Arrivons Ă la culture potagĂšre, faite en vue de lâapprovisionne-
ment de la famille du propriétaire de jardin.
Cette culture comporte ordinairement des conditions générales
toul autres que la culture maraichĂšre proprement dite. Beaucoup
396 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
moins intensive que celte derniĂšre, nâoccupant que des surfaces res-
treintes, visant Ă Ja fois, le plus souvent, Ă la culture des arbres
fruitiers et Ă la production des fleurs, en mĂȘme temps quâĂ celle des
légumes, le jardinage privé exige des quantités de fumier bien moins
considérables et s'adapte on ne peut mieux à l'emploi des engrais
commerciaux. Au lieu d'envisager les rendements Ă lâhectare, tant au
point de vue des produits quâĂ celui des fumures, je les rapporterai
Ă lâare, soit Ă une surface de 100 mĂštres carrĂ©s, et, pour les fleurs, Ă
une surface moindre, celle dâune plate-bande de jardin par exemple.
J'envisagerai successivement les deux cas qui peuvent se présen-
ter : 1° la crĂ©ation dâun jardin fruitier et potager ; 2 l'entretien dâun
jardin créé de longue date.
S'agit-il de transformer en jardin un terrain jusqu'ici en cullure
ordinaire ou en friche, la premiÚre opération doit consister dans un
dĂ©fonçage Ă la bĂȘche, d'autant plus profond que la couche de sol
proprement dite sâĂ©tendra elle-mĂȘme plus profondĂ©ment. Un dĂ©fon-
çage pratiqué sur une profondeur de 0,60 suffira pour le potager ;
il sera bon dâaller jusquâĂ 1 mĂštre en vue de la plantation dâarbres
fruitiers ou de treilles. Une des meilleures opĂ©rations quâon puisse
faire, au moment de ce dĂ©fonçage, consiste Ă mĂȘler Ă la terre une
forte dose de scories de dĂ©phosphoration, si le sol nâest pas trĂšs
riche en humus, ou de phosphate minĂ©ral en poudre fine, si lâon a
affaire Ă une terre tourbeuse ou abondamment pourvue par des cul-
tures ou fumures antérieures de détritus organiques.
Pour les légumes, par are, 20 kilogr. de scories de déphosphora-
lion, ou 40 kilogr. de phosphate minéral finement moulu et de ri-
chesse moyenne, constitueront, une fumure phosphatĂ©e dont lâeffet
se fera sentir pendant de longues annĂ©es. Pour les plantations dâar-
bres fruitiers, le sol devant ĂȘtre remuĂ© Ă 1 mĂštre de profondeur, la
dose de scories pourrait avantageusement ĂȘtre doublĂ©e : 40 kilogr.
Ă lâare correspondent Ă 400 gr. par mĂȘtre carrĂ©. Le dĂ©foncement
alteignant à mÚtre, cette quantité se trouvera répartie dans un vo-
lume de terre d'un mĂštre cube. Admettons un poids de 1 200 kilogr.
pour ce mĂȘtre cube de terre : il est aisĂ© de se rendre compte de la
quantitĂ© dâacide phosphorique que renfermeraient 100 parties de
terre ainsi traitées.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 3951
100 kilogr. de scories de déphosphoration contiennent en moyenne
17 à 18 kilogr. d'acide phosphorique réel; 400 gr. en renferment
donc 68 Ă 72 gr., soit 70 gr. en moyenne. Les 1 200 kilogr. de terre
recevant 70 gr. dâacide phosphorique en renfermeraient 6 gr. par
100 kilogr. Si faible que paraisse celte dose d'acide phosphorique,
elle dépasse de beaucoup celle des fumures de la grande culture,
puisque l'emploi de 400 gr. de scories au mÚtre carré représente
4 tonnes de scories Ă lâhectare, quantitĂ© quadruple de celle que lâon
considĂšre comme devant assurer lâalimentalion phosphatĂ©e de plu-
sieurs récoltes de céréales. Mais on remarquera que la couche dans
laquelle pénÚtrent les racines des céréales et dans laquelle, par con-
séquent, celles-ci se nourrissent, n'excÚde pas 0,20 en profondeur,
soit le cinquiÚme seulement de la hauteur que nous avons assignée
à la couche défoncée pour la culture des arbres fruitiers. Notre fu-
mure phosphatée, répartie sur un volume de terre cinq fois plus
considérable que dans le cas des céréales, ne représenterait en réa-
litĂ©, pour la couche de 0",20 d'Ă©paisseur, quâune dose de 800 kilogr.
de scories Ă lâhectare.
Il va sans dire que lâanalyse chimique du sol, faite prĂ©alablement
Ă la fumure, servirait utilement de guide pour fixer la nature et la
quantité de cette derniÚre ; connaissant la teneur du sol vierge en
acide phosphorique, potasse et azote, on dĂ©terminerait plus sĂŒre-
ment les quantités de chacun de ces principes à y introduire. On
peut, en lâabsence de renseignements fournis par lâanalyse directe,
considérer & priori la fumure phosphatée que je viens d'indiquer
comme suffisante dans la plupart des cas. Je reviendrai plus loin
dâailleurs sur les moyens de la complĂ©ter si l'allure de la vĂ©gĂ©tation
en démontrait la nécessité.
En ce qui regarde la potasse, qui fait, généralement, beaucoup
moins défaut dans le sol que l'acide phosphorique, mais dont les
plantes potagĂšres sont trĂšs avidesâ, il est prudent, dans la crĂ©ation
dâun jardin potager ou fruitier, dâen introduire dans le sol, au mo-
ment du défonçage, une certaine quantité. Par are, il faut répandre,
suivant la nateze du sol, de 20 Ă 40 kilogr. de kaĂŻnite ou de 5 Ă
1. Voir le tableau de la composition des récolles, pages 345 et 346.
398 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
10 kilogr. de chlorure de potassium. Ces sels peuvent ĂȘtre mĂ©lan-
gés sans inconvénient aux scories ou aux phosphates minéraux en
poudre fine et incorporés à la terre par l'opération du défonçage.
Les quantités minima, 20 kilogr. de kaïnite et 5 kilogr. de chlorure
de potassium, par are, correspondent au défonçage à 0",60 du sol
destiné aux légumes ; les quantités maxima, 40 kilogr. ou 10 kilogr..,
au sol dĂ©foncĂ© Ă 1 mĂštre, pour plantation dâarbres fruitiers.
Ces quantitĂ©s correspondent aux poids suivants de ces engrais, Ă
lâhectare : |
Kane ERP EEE 20 Ă 40 kilogr. Ă l'are â 2 000 Ă 4 000 kilogr.
Chlorure 674108 5 Ă 10 â â 500 Ă 1000 â
Soit, en potasse réelle : 250 à 500 kilogr.
Ces doses représentent, pour une couche de 0",20 d'épaisseur,
des quantitĂ©s de polasse Ă©gales Ă 50 et 100 kilogr. Ă lâhectare.
Pour compléter la famure fondamentale, il faut ajouter aux deux
engrais prĂ©cĂ©dents une certaine dose dâazote.
On peut avoir recours, dans ce but, surtout pour les arbres frui-
liers, aux sources dâazote lentement assimilables, sauf Ă appliquer
plus tard, comme nous le dirons, du nitrate de soude ou de potasse.
Le fumier de ferme, la laine et le cuir torréfiés, les tourteaux de
graines oléagineuses*, le sang desséché sont les principales substan-
ces auxquelles on peut avoir recours. Dans la plupart des cas, le
plus simple sera d'employer pour les petites surfaces dont 1l sâagit,
1. La kaĂŻnite contient 12 Ă 13 p. 100 environ et le chlorure 50 p. 100 de potasse
réelle.
2, Dans le midi de la France oĂč, dâune part, le fumier dâĂ©table est rare et, de l'autre,
la température du printemps beaucoup plus élevée que dans le reste de notre pays,
les tourteaux de graines oléagineuses (ricin, coton, palmiste, etc.) sont entrés dans la
consommation rĂ©guliĂšre du maraĂźchage et employĂ©s mĂȘme par la grande culture, sur
une large Ă©chelle.
Les tourteaux de graines de coton d'Ăgypte dont les dĂ©partements des Bouches-du-
RhĂŽne et de Vaucluse consomment, pour la fumure des jardins maraĂźchers, 8 000 tonnes
par an environ, sont particuliÚrement usités dans la partie de ces départements qui
est irriguée par de nombreux canaux et dans les terrains d'alluvion formés par la
Durance.
Dans les cantons de Saint-Rémy et Chùteaurenard, ces tourteaux sont employés,
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 399
de bon fumier dâĂ©table, Ă la dose de 300 Ă 400 kilogr. Ă lâare,
suivant la teneur primilive du sol en azote.
On remarquera que des trois principes fondamentaux de la ferti-
litĂ©, câest lâazote qui est le moins important au moment de la crĂ©ation
du jardin, par cette raison quâon peut toujours, aprĂšs la plantation
des arbres fruitiers et la levée ou la reprise des plantes potagÚres,
recourir avec succĂšs Ă l'emploi, en couverture, du nitrate de soude
ou du sulfate dâammoniaque, au moment du labour. Lorsqu'un sol
est abondamment pourvu d'acide phosphorique et de potasse, con-
dilion indispensable pour que les engrais azotés aient, sur les ren-
dements, toute leur efficacité, il est toujours facile de compléter la
fumure par l'application dâazote soluble.
Si nous rĂ©capitulons ce qui vient dâĂȘtre dit, nous voyons que la
dĂšs le mois de juillet, pour la culture des salades que lâon sĂšme immĂ©diatement aprĂšs
la récolte du blé. Dans les environs de Cavaillon, bien connus pour la production des
primeurs, on les utilise, en novembre, pour la culture des aulx, mais câest surtout Ă
partir de février qu'on les emploie en plus grande quantité, pour la pomme de terre
prĂ©coce et autres primeurs. Les tourteaux de graines de coton d'Ăgypte sont Ă©pandus
Ă raison de 2 000 kilogr. Ă 5 000 kilogr. Ă l'hectare : les jardiniers du Midi constatent
que cette fumure a, pour rĂ©sultat, d'activer considĂ©rablement la vĂ©gĂ©tation et dâaug-
menter la production. Les plantes maraßchÚres fumées avec ces tourteaux sont géné-
ralement en avance de deux Ă trois semaines sur les autres.
5 000 kilogr. de tourteaux de graines de coton représentent un apport au sol de
95 kilogr. d'acide phosphorique, 180 kilogr. d'azote et 75 kilogr. de potasse,
Les bons effets de l'emploi des tourteaux unanimement constatés par les maraßchers
du Midi pour la production des primeurs, sont dus bien plus aux matiÚres minérales
fertilisantes qu'à la quantité relativement faible de substance organique que ces résidus
apportent au sol. 5 000 kilogr. de tourteaux reprĂ©sentent, en effet, 4 300 kilogr. Ă
peine de substance végélale sÚche, tandis que 60 tonnes de fumier frais correspondent
Ă {5 300 kilogr. de substance organique, soit prĂšs de quatre fois autant.
La facilité des transports de l'ouest et du midi de la France, voire de l'Algérie, vers
les rĂ©gions de lâest et du nord amĂšnera, sans doute, de plus en plus les maraichers de
ces derniÚres contrées à réduire la culture des primeurs proprement dites pour con-
centrer leurs efforts sur la culture intensive des légumes de saison obtenus dans des
conditions éconcmiques. Il nous semble que la substitution des engrais minéraux à la
plus grande partie du fumier employé aujourd'hui est une des conditions essentielles
de cette production économique ; le fumier d'élable ou d'écurie limité, dans son emploi,
à la confection des couches pour semis de légumes de saison, cédera peu à peu la
place aux phosphates minéraux, au nitrate de soude et aux sels de potasse, coûtant
beaucoup moins cher à raison des quantités bien plus restreintes auxquelles il faut
recourir pour donner au sol une fumure Ă©gale Ă celle que fournit le fumier.
360 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
fumure dâun terrain oĂč lâon veut crĂ©er un jardin potager ou fruitier
exige, pour assurer la réussite de la récolte, l'introduction dans le
sol, au moment du dĂ©fonçage, dâune quantitĂ© assez notable dâengrais ;
calculons approximativement à quelle dépense entraine, par are, la
fumure que nous recommandons aux essais des créateurs de jardin.
Les scories valent 5 fr. les 100 kilogr. ; les phosphates minéraux
en poudre fine Ă 50-55 p. 100 de phosphate de chaux pur, 3 fr. 20 c.
Ă 3 fr. 50 c. les 100 kilogr. ; la kaĂŻnite, 7 fr. les 100 kilogr. ; le
chlorure de potassium Ă 50 p. 100 de potasse, 93 fr. les 100 kilogr.
Il sera aisĂ©, dâaprĂšs cela, Ă chacun, suivant le choix quâil fera des
engrais à associer, d'établir le coût de la fumure dans le cas des dé-
fonçages à deux profondeurs dont nous avons parlé. On verra que la
dépense en acide phosphorique et en potasse oscillera entre 2 fr. 40 c.
et 9 fr. par 100 mÚtres carrés. Ajoutons une dépense de 3 fr. euvi-
ron en fumier de ferme ou autre engrais azolé organique et nous
atteindrons environ le chiffre de 5 Ă 8 fr. par are pour la fumure
fondamentale de notre jardin.
Il nous reste maintenant Ă envisager le cas dâun jardin crĂ©Ă© depuis
un certain temps et Ă indiquer les divers mĂ©langes dâengrais minĂ©-
raux auxquels on peut avoir recours pour en assurer et en accroĂźtre
la fertilité.
XVI. â Fumure d'entretien en grande culture.
La fumure d'entretien dâun jardin potager appelle quelques re-
marques préliminaires. Nous distinguerons le cas de la culture des
lĂ©gumes sur une grande Ă©chelle, câest-Ă -dire sur plusieurs hectares
au moins, telle quâelle se pratique dans certaines exploitations ru-
rales, et la culture dans le jardin privé de petite étendue.
La culture potagĂšre, faite en plein champ, diffĂšre essentiellement
de la culture maraichĂšre proprement dite, en ce qu'il ne sâagit plus
ici de la fabrication de primeurs, mais bien des légumes de saison
dont la production intéresse davantage la masse des consommateurs.
Nous commencerons par indiquer les fumures Ă appliquer Ă la
grande culture potagĂšre, puis nous nous occuperons du jardinage
privé.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 361
M. P. Wagner, directeur de la Station agronomique de Darmstadt,
dont les travaux sont trĂšs estimĂ©s, sâest adonnĂ© spĂ©cialement, de-
puis quelques années, à l'étude de ces intéressantes questions. Dans
des sĂ©ries considĂ©rables dâessais mĂ©thodiquement conduits, sur les
exigences des principales espÚces de légumes, fruits et fleurs au
point de vue de leur alimentation, il a cherché à fixer expérimenta-
lement la nature des engrais les plus aptes Ă fournir, pour chacune
d'elles, les rendements les plus élevés. Comme contrÎle de ces essais
physiologiques, il a eu recours Ă des cultures en plein champ, et du
rapprochement des résultats obtenus par les deux méthodes, il a
dĂ©duit certaines rĂšgles pratiques de fumure que je vais rĂ©sumer, Ă
titre de renseignements trÚs utiles pour les cultivateurs de légumes.
Je reviendrai ensuite à la famure du Jardin potager, dont j'ai parlé
dans le paragraphe précédent au point de vue de la création, mais
non de l'entretien annuel.
Avant d'indiquer les formules dâengrais recommandĂ©es par
M. P. Wagner, formules générales que chaque cultivateur pourra,
Ă lâoccasion, modifier dâaprĂšs la composition et lâĂ©tat antĂ©rieur de
fumure de son champ, il me paraĂźt utile de mettre sous les yeux de
mes lecteurs la teneur moyenne de quelques-uns des légumes les plus
répandus, en azote, polasse, chaux, magnésie et acide phosphorique.
Ces données leur permettront de calculer, approximalivement, les
quaulités de chacun de ces principes essentiels exportés par une ré-
colte dâun poids connu.
1 000 kilogr. de légumes verts contiennent :
ACIDE
AZOTE. POTASSE. CHAUX. MAGNĂSIE. phos-
phorique,
Pois nes MB 38 1084 1ks 1 1K5,9 8ks,4
Cioux-fleurs. . 4 ,0 3 ,6 0 ,5 0 ,3 130
Choux-raves . . . 4 ,8 42 ;3 JL DES DUT
Concombres . F9 36 PUS 0 ,4 UE ie
Salades . De LE 31,9 1745 Ur 6 ESC
1. Ces chiffres sont afférents à la partie comestible et ne comprennent pas les
feuilles ou autres parties du végétal, suivant les cas, inutilisés pour l'alimentation : ce
sont done des minima. â On ne possĂšde pas beaucoup d'analyses de lĂ©gumes et j'espĂšre
pouvoir combier en partie celte lacune par les recherches analytiques entreprises dans
le laboratoire de la Station agronomique de l'Est,
362 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ACIDE
AZOTE. POTASSE. CHAUX. MAGNĂSIE. phos-
phorique.
Oignons. . DĂS 2k8 5 158,6 OK, 3 115,3
Choux . . D 0) 4,3 Le (DB One
Asperges . AE 142 DC 0 ,0 0 9
CĂ©leri . 24 11296 Dies 3,0 PAS Aa
Epinards . 4 ::49 Da A 0 1856
Choux de Savoie . 02.5 Ca, SO 0,5 y il
Radis. . 159 LG OT OS 0 ,5
Artichauts. + RE 1770 0 ,4 RE)
M. Wagner a déduit de ses nombreuses expériences la composi-
tion des mĂ©langes d'engrais quâil conseille d'appliquer en grande
culture à la production légumiÚre.
Voici les indications relatives Ă chacun des groupes principaux de
légumes.
1 Pois et haricots.
Ces plantes nâont pas besoin dâengrais azolĂ©s complĂ©mentaires.
Le sol fumĂ© rĂ©guliĂšrement au fumier dâĂ©table leur fournit assez dâa-
zote, dans la premiĂšre pĂ©riode de leur existence, pour quâelles se
développent vigoureusement et soient en état de puiser leur alimen-
tation azotĂ©e dans lâair atmosphĂ©rique. Les pois, les haricots et les
autres plantes de la famille des papilionacées sont aptes, on le
sait, à se nourrir, par l'intermédiaire des micro-organismes de
leurs nodositĂ©s, de lâazote gazeux de lâair. Cette facultĂ© fait dĂ©faut
à tous les autres végétaux cultivés. On peut donc se contenter de
donner aux pois et aux haricots de lâacide phosphorique et de la
potasse.
M. P. Wagner recommande par hectare la fumure suivante :
250 kilogr. de superphosphate doubleâ ou 550 kilogr. de super-
phosphate Ă 16 p. 100 et 200 kilogr. de chlorure de potassium ;
Ou 230 kilogr. de phosphate de potasse â et 80 kilogr. de chlorure
de potassium.
On mélange ces engrais et on les répand sur le sol, en automne,
1. Voir, pages 367 et 388, la composition de ces engrais concentrés et les avan-
tages que présente leur emploi.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 363
en hiver ou au printemps, puis on les enfouil Ă 10 ou 15 centimĂštres
de profondeur, par un trait de charrue ou de herse.
2 Choux, choux frisés, choux-fleurs, choux-raves el autres variétés
de choux.
Ces plantes exigent une forte fumure, particuliĂšrement en potasse
et en azote. Il y a lieu de leur donner, par hectare :
200 kilogr. de superphosphate double ou 550 kilogr. de super-
phosphate Ă 16 p. 100 et 250 kilogr. de chlorure de potassium ;
Ou 230 kilogr. de phosphate de potasse et 130 kilogr. de chlorure
de potassium.
On fume Ă l'automne, en hiver ou au printemps et lâon enterre
l'engrais.
Immédiatement aprÚs la mise en place des replants, on répand
250 kilogr. de nitrate de soude en couverture ; quatre semaines aprĂšs
on donne encore mĂȘme dose de nitrate quâon mĂ©lange au sol en bi-
nant les plants. Comme le nitrate de soude favorise la formation de
croûles à la surface du sol, il faut pratiquer soigneusement le binage
de la terre Ă la houe.
3 Carolles, navels, radis noirs, salsifis, raiforl
et plantes analogues.
On peut donner Ă ce groupe de lĂ©gumes la mĂȘme fumure phos-
phatĂ©e et potassique qu'aux choux. M. P. Wagner recommande lâĂ©pan-
dage de 150 kilogr. de nitrate de soude (Ă lâhectare), au moment du
semis, ou mieux, si le sol est trÚs léger et trÚs perméable, aprÚs le
semis. Deux ou trois semaines aprÚs la levée des plantes, on donne
de nouveau 150 kilogr. de nitrate et, trois semaines plus tard, on
renouvelle encore cette fumure. Lâhectare a ainsi reçu, en trois fois,
450 kilogr. de nitrate de soude. |
4 Concombres, oignons, etc.
Au printemps, ou mĂȘme dĂ©jĂ Ă lâautomne, on rĂ©pand, Ă lâhectare,
un mélange composé de :
200 kilogr. superphosphate double ou 550 kilogr. superphos-
364 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
phate Ă 16 p. 100 et 200 kilogr. chlorure de potassium; ou 250 ki-
logr. de phosphate de potasse et 80 kilogr. de chlorure de potassium,
et lâon enfouit lâengrais. Avant la plantation des pĂ©pins des cucurbi-
tacées ou le semis des graines d'oignons, on répand 100 kilogr. de
nitrate de soude, on herse et lâon Ă©galise le sol. Quinze jours aprĂšs
la levée, on sÚme de nouveau à la volée 100 kilogr. de nitrate et,
deux semaines aprĂšs, une derniĂšre dose de 50 kilogr. du mĂȘme sel.
3° Saludes.
Les salades redoutent les fumures trop Ă©nergiques; le mitrate de
soude, notamment, ne doit leur ĂȘtre donnĂ© quâĂ de faibles doses Ă
la fois. Voici le mélange que conseille M. P. Wagner, pour un hec-
(are : Ăč
150 kilogr. de superphosphate double ou 400 kilogr. superphos-
phate Ă 16 p.100; 100 kilogr. chlorure de potassium, ou 175 kilogr.
de phosphate de potasse.
Lâengrais doit ĂȘtre rĂ©pandu sur le sol avant le bĂȘchage de ce der-
nier : immédiatement avant la plantation, on donnera 100 kilogr.
de sulfate dâammoniaque. Quelques semaines aprĂšs la plantation, on
peut répandre à la volée 30 kilogr. de nitrate de soude et, trois se-
maines plus tard, la mĂȘme quantitĂ© encore de cet engrais, si lâaspect
de la rĂ©colte indique un besoin dâazote.
6° Pommes de terre.
M. P. Wagner dit quâil Ă constatĂ© dans ses expĂ©riences que la
pomme de terre ne se trouve pas bien du chlorure de potassium et
qu'il ne faut recourir Ă ce sel, comme source de potasse, quâĂ de
faibles doses. Il recommande, pour le précieux tubercule, le mé-
lange suivant par hectare :
150 kilogr. de phosphate de potasse ; 100 kilogr. de sulfate dâam-
moniaque.
La fumure est répandue en mars et légÚrement enfouie à la herse,
J'ai obtenu, en 1892, dans mon champ dâexpĂ©riences du Pare des
Princes, d'excellents résultats : 28 000 à 35000 kilogr. de tubercules
Ă lâhectare, par l'emploi de la fumure suivante : 300 kilogr. dâacide
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 369
phosphoriqne sous forme de scories, 200 kilogr. de potasse Ă lâĂ©tat
de sulfate (kaĂŻnite) et 300 kilogr. de nitrate de soude Ă lâhectare.
7° Asperges.
à l'automne, ou, dans les sols légers, au printemps, M. P. Wagner
recommande la fumure suivante, rapportĂ©e Ă lâhectare :
200 kilogr. de superphosphate double ou 550 kilogr. superphos-
phate Ă 16 p.100, 200 kilogr. chlorure de potassium ; ou 230 kilogr.
phosphate de potasse et 84 kilogr. chlorure de potassium.
Il faut enterrer lĂ©gĂšrement lâengrais par un binage.
DÚs que les asperges commencent à pointer, on répand à la volée
250 kilogr. de nitrate de soude et on lâenfouit par un bĂȘchage lĂ©ger.
Un mois plus tard, on renouvelle cette fumure Ă la mĂȘme dose
Je prie le lecteur de ne pas perdre de vue que câest Ă titre dâin-
dicalions que je donne ces formules, auxquelles il ne faut pas attri-
buer une fixité qu'elles ne comportent pas: la constitution du sol,
son Ă©tat antĂ©rieur de fumure, sa ferĂŒilitĂ© naturelle ou acquise sont
autant de conditions dont le cultivateur doit tenir compte dans le
choix de ces fumures.
Les quantités d'azote, d'acide phosphorique et de potasse, aux-
quelles correspondent les formules dont M. Wagner recommande
l'emploi pour la famure dâun hectare des divers groupes de lĂ©gumes
énumérés plus haut, sont les suivantes :
AZOTE. TS TMO de POTASSE. PRIX.
Kilogr. Kilozr. Kilogr. Fr.
(MPOISMNTICOLS SRE » 100 90 58
PO CDOUX PESTE LR ERIMNE 18 125 90 220
3. Carottes, navets. . . 70 135 90 207
4. CGoncombres, oignons. 39 100 90 145
». Salades diverses . . 16 50 75 83
G. Pommes de terre . . 20 40 D4 7
Te TASDELSES LES Pen iette 78 100 90 125
La dĂ©pense Ă lâhectare est Ă©tablie, en admettant les valeurs sui-
vantes : pour le kilogramme dâacide phosphorique soluble 0 fr. 50 c.,
pour la potasse 0 fr. 40 c. et pour lâazote nilrique ou ammoniacal
4 fr. 60 c. Ătant donnĂ©e la production trĂšs abondante quâon
366 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
obtient sur un hectare de terre, le prix de la fumure proposée par
M. P. Wagner ne semblera pas excessif.
Il me reste Ă parler maintenant de la famure du jardin potager
privé, de celle des fleurs, des arbustes et des arbres fruitiers.
XVII. â La fumure du jardin privĂ©.
Ce qui prĂ©cĂšde montre lâimportance que la fumure chimique est
appelĂ©e Ă prendre dans la grande culture maraĂŻĂźchĂšre. Je vais mâoc-
cuper maintenant de lentretien du jardin potager, fruitier et dâagrĂ©-
ment de petites dimensions, puis jâexaminerai la fumure des plantes
de serre et d'appartement.
Pour le propriĂ©taire dâun petit jardin, attenant Ă sa maison dâha-
bitalion ou situĂ© non loin dâelle, il ne saurait ĂȘtre question de tenir
compte, dans la famure, des exigences individuelles de chacun des
lĂ©gumes ou fleurs qui doivent se succĂ©der dans le mĂȘme sol. En
effet, les surfaces affectées à chaque succession de récolte sont trop
faibles pour quâil devienne pratique de donner, Ă chaque plante, un
mĂ©lange spĂ©cial de substances fertilisantes. Le plus souvent câest par
mÚtres que se comptera, dans un jardin privé, la superficie plantée
en salade, carottes ou choux : de plus, la faible dimension des par-
celles consacrées à une plante fera que les racines de celles-ci
envahiront le sous-sol de la parcelle contiguë. Pour ces raisons et
dâautres faciles Ă imaginer, il nây aura donc pas lieu de recourir,
comme en grande culture, Ă des mĂ©langes divers dâengrais, mais, au
contraire, de faire choix dâun mĂ©lange unique, renfermant les trois
Ă©lĂ©ments essentiels de fertilisation, en proportions telles que lâen-
grais puisse, dans tous les cas, suffire aux besoins des diverses es-
pĂšces de plantes que lâon se propose de culliver dans la mĂȘme annĂ©e.
Engrais pour jardins.
Lâengrais choisi pour la famure des lĂ©gumes et des fleurs doit
ĂȘtre promptement assimilable, la durĂ©e de ces rĂ©coltes Ă©tant courte ;
de plus, 1l pourra ĂȘtre trĂšs avantageux dâappliquer Ă ces cultures
spĂ©ciales lâengrais en dissolution dans lâeau, comme on le fait cou-
ramment dans certaines cultures florales du Midi.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 367
En recourant Ă des matiĂšres fertilisantes rapidement utilisables
par le vĂ©gĂ©tal et solubles dans lâeau, lâamateur de jardinage y trou-
vera une Ă©conomie, rĂ©sultant de ce quâil pourra diriger, en quelque
sorte Ă son grĂ©, dâaprĂšs lâaspect des plantes, la rĂ©partition des doses
dâengrais Ă leur donner.
S'inspirant de ces considérations, M. P. Wagner, qui a fait de
lâĂ©tude des engrais pour lĂ©gumes et pour fleurs lâobjet de recherches
expérimentales des plus intéressantes, est arrivé à formuler la com-
posilion dâun engrais spĂ©cial pour jardinage.
Le mélange de substances fertilisantes, expérimenté avec succÚs,
depuis plusieurs années, tant dans la serre de végétation que dans
les champs dâessais de la Stalion agronomique de Darmstadt, est
connu, en Allemagne et en Belgique, dans le commerce des engrais,
sous le nom dâengrais pour jardins (GartendĂŒnger). I renferme par
100 kilogr. : 14 kilogr. dâacide phosphorique, 20 kilogr. de potasse,
12 kilogr. d'azote, tous trois Ă lâĂ©tat soluble dans lâeau.
Il est constitué par quatre sels minéraux, savoir : phosphate
dâammoniaque, nitrate de potasse, nitrate de soude et sulfate dâam-
moniaque. Dans son mémoire, M. P. Wagner n'indique pas les
proportions de chacun des sels entrant dans le mélange. Mais il est
aisé de les déduire approximativement de leur teneur en chacun des
trois principes fertilisants essentiels.
Je crois utile d'indiquer sommairement la composition de ces
engrais concentrés, qui ont le double avantage de renfermer, sous le
plus faible poids, la plus grande quantité de principes utiles à la
végétation, condition économique au point de vue des transports,
et d'apporter aux sols le minimum de matiĂšres inutiles :
TAUX PAR 100 KILOGk.
Superphosphate double . . . . . 45K,0 d'acide phosphorique.
36 ,0 d'acide phosphorique,
27 ,0 de potasse.
45 ,0 d'acide phosphorique.
7 ,0 d'azote.
4,0 de potasse.
3 ,6 d'azote.
Nitrate d'ammoniaque. . . . . . 30 Ă 33 kilogr. d'azote.
Phosphate de potasse. .
Phosphate d'ammoniaque .
Nitrate de potasse.
Ce tableau rĂ©sume la composition des cinq sortes dâengrais con-
368 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
centrés auxquels la grande culture potagÚre, comme le jardinage, a
intĂ©rĂȘt Ă recourir !. |
Si nous ajoutons à ces matiÚres fertilisantes les engrais déjà entrés
couramment dans la pratique : superphosphate Ă 15/18 dâacide
phosphorique, nitrate de soude Ă 15.6 p. 100 dâazote; sulfate
dâammoniaque Ă 20 p. 100 dâazote, chlorure de potassium Ă 50 p.
100 de potasse, kaĂŻnite Ă 19 p. 100 de potasse, sans oublier les
scories de déphosphoration et les phosphates minéraux en poudre
fine que j'ai indiqués comme devant former avec le famier de firme
la famure fondamentale dâun jardin, j'aurai Ă©numĂ©rĂ© les produits
commerciaux qui offrent aux cultivateurs et aux jardiniers les sources
les plus importantes de la famure complĂ©mentaire du fumier dâĂ©-
table.
Revenons maintenant Ă lâengrais pour jardin. Les proportions
d'azote, d'acide phosphorique et de potasse rappelées plus haut,
seront sensiblement fournies par 400 kilogr. dâun mĂ©lange formĂ©,
suivant la pureté de chacun des sels, de :
Phosphate d'ammoniaque. . . . . . . 28 Ă 30 kilogr.
NITEA TER ACIDOLISSC MEME PEER NE 14 Ă 45 â
NitrateadĂ© soudĂ© RME UMR TT Re 19 Ă 16 â
Sulfate d'ammoniaque . . . . . . . . 10 Ă 11 â
M. P. Wagner considĂšre comme une fumure normale pour jardin
potager l'emploi de 500 kilogr. de ce mĂ©lange Ă lâhectare, soit
o kilogr. par are ou 500 gr. par planche de 1 mĂštre de large
sur 10 mÚtres de long. On sÚme celie dose aussi réguliÚrement que
possible, sur le sol, avant le labour Ă la bĂȘche qui prĂ©cĂšde les semis
ou la plantation, au printemps, par conséquent. Il est bon de ne pas
1. Depuis plusieurs annĂ©es en usage en Allemagne, lâengrais pour jardin et les sels
riches solubles qui le composent sont produits en grand en Allemagne Ă Biebrich et en
Belgique à Engis. [ls sont à peine connus en France. J'expérimente depuis deux ans
ces engrais au champ d'expĂ©riences de la Station agronomique de lâEst du Parc des
Princes : j'en obtiens les meilleurs résullats pour la culture des légumes ct des fleurs.
Je ferai connaßtre prochainement aux lecteurs des Annales, avec tous les développe-
ments nécessaires les résultats des trois premiÚres années d'expériences entreprises
au Pare des Princes et j'apprécierai les conclusions favorables que j'en puis tirer sur
les rendements obtenus dans les différentes récoltes.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 369
se borner Ă rĂ©pandre lâengrais sur les seules surfaces destinĂ©es Ă la
culture, mais aussi sur les étroits sentiers réservés entre les plates-
bandes, les racines des plantes pénétrant dans le sous-sol de ces
sentiers. Dans les allées qui bordent les treilles, les plantations
d'arbres fruitiers, les massifs dâarbustes et fleurs, les carreaux
dâasperges, on peut aussi rĂ©pandre des engrais que la pluie se char-
gera de faire pĂ©nĂ©trer dans le sol des allĂ©es sous lesquelles sâĂ©ten-
dent les racines de ces divers végétaux.
Dans les terres meubles, suffisamment pourvues en humus,
susceptibles de donner une production trĂšs intensive, on ne se con-
tentera pas de cette fumure de printemps et lâon recourra avec
profit à des fumures additionnelles, pour lesquelles on sera guidé
par lâaspect des vĂ©gĂ©taux et par le nombre des rĂ©coltes qui se succĂ©-
deront Ă la mĂȘme place.
Suivant le plus ou moins de rapidité de croissance des végétaux
cullivĂ©s et, dâaprĂšs leurs exigences plus ou moins grandes en prin-
cipes nutrilifs, on pourra employer des doses d'engrais variant entre
250 et 500 kilogr. Ă lâhectare, soit 25,500 Ă 5 kilogr. Ă lâare ou
250 Ă 900 gr. par plate-bande de 1 mĂštre de large sur 10 mĂš-
tres de longueur. Le meilleur mode de faire sera souvent de ré-
partir ces quantités en deux ou trois doses qu'on répandra dans
les mois de mai, juin et juillet. LâĂ©pandage de lâengrais sera suivi
dâun lĂ©ger binage Ă la herse, qui enterrera suffisamment lâengrais.
Fumure en arrosage.
M. P. Wagner recommande, avec sa compétence en cette matiÚre,
un autre mode de fumure qui est plus efficace encore que lâĂ©pandage
du mélange à la volée.
Ce mode consiste dans lâemploi dâune solution de lâengrais dans
lâeau. Voici comment on doit opĂ©rer : dans 1 000 litres dâeau, on
dissout un kilogr. de lâengrais pour jardin (1 gramme par litre) et
lâon arrose avec 20 litres de cette dissolution 1 mĂštre carrĂ© de sol ;
cet arrosage revient Ă donner 200 kilogr. dâengrais par hectare, ou
2 kilogr. par are. Les arbustes, plantes dâornements, arbres Ă fruits
et raisins, dont la production ligneuse est chétive, les asperges, choux,
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 7. 24
370 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
betteraves, céleri, concombres, les fleurs à feuillage abondant se
montrent parliculiĂšrement reconnaissauts, dit M. P. Wagner, dâun
semblable arrosage renouvelé toutes les quatre ou six semaines. Les
arbres et arbustes ùgés de plusieurs années ne doivent plus recevoir
de fumure Ă partir du mois d'aoĂ»t, lâengrais donnĂ© Ă cetle Ă©poque
pouvant empĂȘcher le bois de mĂ»rir convenablement.
M. P. Wagner recommande, ainsi que nous, lâemploi des scories
de déphosphoration comme fumure fondamentale des jardins, cette
excellente matiĂšre apportant, en plus que l'acide phosphorique, de
la chaux assimilable trĂšs utile dans la plupart des terrains potagers.
Fumure de pelouses el gazons.
Ici, encore, Je suis en parfait accord avec M. P. Wagner, qui
considĂšre, en dehors du choix des semences, de lâarrosage et des
coupes frĂ©quentes, une fumure intense et rĂ©pĂ©tĂ©e comme lâĂ©lĂ©ment
prĂ©pondĂ©rant de la belle venue et de lâentrelien des pelouses. De
mĂȘme que, trop souvent, les cultivateurs abandonnent, sans les
fumer, les prairies de leur exploitation, les propriétaires de jardin
négligent de donner à leurs pelouses l'alimentation dont elles ont
d'autant plus besoin quâon les fauche plus frĂ©quemment et de plus
prĂšs. La jeune herbe Ă©tant particuliĂšrement riche en azote, en
potasse et acide phosphorique, chaque coupe appauvrit le sol et
bientÎt, malgré les soins, l'herbe qui repousse jaunit et périt partiel-
lement, ce qui amÚne ces manques dans la végétation, si déplaisants
Ă lâĆil.
Les expériences de M. P. Wagner sur la fumure des gazons l'ont
conduit Ă constater que, pour avoir des pelouses vigoureuses, trĂšs
bien garnies et loujours vertes, il est indispensable de les fumer Ă
petites doses, pendant l'été, à diverses reprises. Il recommande de
rĂ©pandre, vers le milieu de fĂ©vrier, 9 kilogr. dâengrais pour jardin,
par 100 mĂštres carrĂ©s de pelouse, soit 500 kilogr. Ă lâhectare ; puis,
Ă partir dâavril, toutes les trois, quatre ou six semaines, suivant
lâĂ©tat de la vĂ©gĂ©tation, environ 15,500 des mĂȘmes engrais pour la
mĂȘme superficie (1 are). Lâengrais ne doit pas ĂȘtre Ă©pandu sur Ja
pelouse mouillée par la pluie ou par la rosée. Il faut choisir, pour
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. AT
celte opĂ©ration, le moment oĂč l'herbe est sĂšche et avoir soin que
lâengrais ne reste pas attachĂ© aux tiges. LâĂ©pandage doit se faire, de
prĂ©fĂ©rence, vers le milieu du jour et non Ăle matin, au moment de
la rosĂ©e. Si lâon Ă©tait obligĂ© dâĂ©pandre lâengrais sur le gazon humide,
il faudrait arroser immĂ©diatement aprĂšs lâĂ©pandage. Un arrosage
abondant est particuliĂšrement Ă recommander aprĂšs la fumure, si
la pluie ne doit pas survenir prochainement.
Fumure des fleurs de pleine terre.
Le premiÚre condition de succÚs dans la culture florifÚre réside
dans la nature du sol, qui doit ĂȘtre riche en humus, poreux et chaud ;
mais les qualitĂ©s physiques de la terre ne sont quâun des Ă©lĂ©ments de
rĂ©ussite de cette culture ; lâautre rĂ©side dans une alimentation abon-
dante assurĂ©e, Ă toutes les Ă©poques, par lâaddition dâune fumure
convenable.
M. P. Wagner recommande lâĂ©pandage de 3 kilogr. dâengrais de
jardin, sur une plate-bande de 100 mÚtres carrés (30 gr. par mÚ-
tres) avant le bĂȘchage du sol; puis, lorsque le labour est terminĂ©,
une addition dâengrais dâĂ©gale quantitĂ© ; on nivelle alors la terre au
rĂąteau. |
Dans le courant de l'été, il faut revenir à des fumures complé-
mentaires, et le mieux est de faire usage Ă cet effet de la dissolution
dont j'ai parlĂ© plus haut (1 kilogr. d'engrais pour 1 000 litres dâeau)
et de répéter deux, trois fois ou plus ces arrosages, durant la saison
chaude, en tenant compte de l'aspect de la végétation.
Les rosiers, géraniums, fuchsias et toutes les plantes à feuillage
abondant, telles que maĂŻs, rhubarbe, tabac, ricin, canna, etc., se
trouvent trÚs bien de fumures liquides fréquemment répétées. Les
végétaux dont les feuilles sont basses, prÚs de terre, les fleurs peu
développées en été, la ramification faible, ont naturellement des
exigences beaucoup moindres. Câest Ă lâhorticulteur, au propriĂ©-
taire de jardin, à apprécier les modifications à apporter suivant les
cas, aux indications générales que nous venons de rappeler.
512 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
IV. â PLANTES D'APPARTEMENT ET DE SERRE
S1 le nombre des amateurs de jardin est considérable, celui des
floriculteurs en chambre, quâon me passe le mot, lâest bien davan-
tage. Dans les villes oĂč la chertĂ© du terrain sâoppose Ă la multipli-
cation des jardins, le goût des fleurs est universel: depuis la serre
attenant aux somptueuses constructions des hĂŽtels particuliers, jus-
quâĂ lâhumble jardin suspendu qui Ă©gaye la fenĂȘtre de lâouvrier,
sans oublier le salon du plus modeste bourgeois, partout on ren-
contre des fleurs, attestant, par leur présence, le goût inné de
l'homme pour la nature.
Parler de la culture des plantes d'appartement, indiquer les pro-
cédés simples et économiques de les défendre, le plus longtemps
et le mieux possible, contre lâĂ©tiolement insĂ©parable des conditions
anormales de milieu dans lesquelles elles vivent, câest, il me semble,
aborder un sujet intéressant un grand nombre d'amateurs.
Nos plantes d'appartement sont condamnées à vivre, plus ou
moins, Ă lâabri de la lumiĂšre et dans une atmosphĂšre confinĂ©e; en
outre, l'alimentation que leur offre la terre du pot dans lequel elles
sont placées est forcément limitée au volume et à la teneur de cette
terre en substances nutritives. Or, on sait que lâaction de la lumiĂšre
est la condition essentielle sine qué non, de l'assimilation, par les
parties vertes du vĂ©gĂ©tal, du carbone que lâatmosphĂšre lui apporte
Ă lâĂ©tat dâacide carbonique, carbone qui forme prĂšs de la moitiĂ© du
poids de la plante, dĂ©duction faite de lâeau que renferment ses tissus.
La premiĂšre condition Ă observer dans lâentretien des plantes
dâappartement est donc de permettre le plus souvent et le plus long-
temps quâon le peut, lâaccĂšs de la lumiĂšre solaire et celui de l'air ex-
tĂ©rieur, chaque fois que la tempĂ©rature ne sây oppose pas. Mais les
plantes ne vivent pas seulement de l'air du temps ; elles ont besoin
de trouver, dans le milieu oĂč plongent leur racines, les quantitĂ©s
d'éléments minéraux nécessaires pour constituer, avec le concours
de lâeau et de lâacide carbonique de l'air, leurs diffĂ©rents organes et
pourvoir à leur entretien. La grande cause de dépérissement des
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. ga
vĂ©gĂ©taux en pots, rĂ©side dans lâ'appauvrissement rapide du sol confinĂ©
oĂč ils vivent.
Les fleuristes de profession se contentent généralement, pour
parer à cet appauvrissement, de transplanter le végétal dans de la
terre neuve ; j'ai montrĂ©, il y quelques annĂ©esâ, comment l'analyse
chimique du sol justifie cette pratique. J'en rappellerai ici un seul
exemple. Au moment de la transplantation dâun vigoureux pied de
kentzia, j'avais prélevé un échantillon moyen de la terre de bruyÚre
du grand-duché de Luxembourg, avec laquelle mon jardinier allait
remplir le pot, dâune capacitĂ© de 12 litres environ. Deux ans plus
tard, lorsqu'on procéda au rempotage du kentzia, je pris un échan-
tillon de la terre dans laquelle avait séjourné le palmier, sans avoir
reçu aucune espÚce d'engrais. Les deux échantillons de terre ont été
analysés, et le résultat de cette opération fut le suivant : le poids du
litre de ces terres Ă©tant trĂšs voisin de 800 er. les 12 litres de terre
pesaient 95,600 et contenaient respectivement, aux deux Ă©poques
indiquées, les quantités suivantes de principes nutritifs :
TERRE
A â DIFFĂRENCE.
neuve. epuisee.
CHAT SEM ER ETATS 1845",3 60:",00 1245r,03
Acide phosphorique . . 9282 TON 44 ,05
PORASSO, a Lee etre a M6 7 ,40 4 ,02
VAI TN CPP TER NEA EE 39 ,4 8 ,64 30 ,76
On voit, par là , que les quantités de matiÚres minérales fixées par
le kentzia ou entrainées au dehors par les arrosages (ce qui se pro-
duit principalement pour la chaux) avaient trĂšs notablement appau-
vri le sol et rendu nécessaire son renouvellement. Le rempotage est
donc une pratique trÚs justifiée, non seulement au point de vue de
l'aĂ©ration des racines, gĂȘnĂ©es, Ă la longue, par le tassement naturel
du sol sous lâinfluence des arrosages, mais, surtout, par le renou-
vellement de la provision d'Ă©lĂ©ments nutritifs. AppliquĂ©es Ă dâautres
vĂ©gĂ©taux, ces analyses comparatives conduisent au mĂȘme rĂ©sultat
général, avec des variations plus ou moins notables dans les taux des
1. Ătudes agronomiques. 5° sĂ©rie, 1889-1890, (Hachette et Gic.)
314 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
divers principes nutritifs, suivant les exigences particuliĂšres des
plantes quâon observe.
L'opération du rempotage, facile à à exécuter dans une lon
horticole, est impraticable, ou tout au moins peu commode à réaliser
dans un appartement. Elle nâest, dâailleurs, qu'un expĂ©dient, en ce
qui regarde la famure de la plante, et il est aisĂ© dây supplĂ©er pen-
dant un temps fort long, par l'emploi des mélanges nutritifs dont je
parlerai tout Ă l'heure. En mesure, grĂące Ă ces solutions, de fournir
Ă la plante, beaucoup mieux que par le renouvellement de la terre, les
aliments quâelle rĂ©clame, on peut se borner, dans les appartements,
à opérer la transplantation des végétaux, lorsque leur développe-
ment exige le remplacement du pot primitif par un vase de plus
grande dimension.
D'une façon générale, on peut dire que les plantes d'appartement
sont soumises Ă la ration dâinanition, lâeau Ă©lant lâunique aliment
qu'on leur donne : lâĂ©tiolement, le jaunissement et finalement la
mort, ne tardent pas ĂȘtre la consĂ©quence de lâabsence de fumure Ă
laquelle sont, d'ordinaire, vouées les fleurs et les plantes vertes qui
font lâornement de nos demeures.
M. P. Wagner, dont j'ai résumé plus haut les importantes re-
cherches sur la fumure des végétaux horticoles et potagers, a con-
sacrĂ© plusieurs annĂ©es Ă lâĂ©tude expĂ©rimentale de la fumure des
plantes en pots. Il sâest proposĂ© de dĂ©terminer, pour les principales
espĂšces florales, les exigences alimentaires de chacune dâelles, afin
d'arriver à formuler un mélange de divers sels répondant à ce double
but : satisfaire aux exigences moyennes des plantes en potet ne
contenir que des principes utiles Ă ces plantes, afin d'Ă©viter, par
l'emploi répété de cet engrais, l'accumulation, dans le petit volume
de terre que renferme le pot, de substances inutiles à la végétation
ou pouvant lui nuire par leur emmagasinement dans la terre. Cette
derniÚre crainte, qui a engagé M. Wagner à proscrire du mélange
quâil emploie les sulfates et le nitrate de soude, par ce motif que
lâacide sulfurique et la soude, en excĂšs dans le sol, pourraient
exercer une action dĂ©favorable sur la plante, semblera peut-ĂȘtre
exagérée ; mais comme la soude est inutile el que la terre contient
toujours assez de soufre poar assurer le développement du végétal,
9
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. DJ F9
l'exclusion des substances qui apportent lâacide sulfurique et la soude
ne présente, en tout cas, aucun inconvénient.
De lâensemble de nombreux rĂ©sultats obtenus dans les expĂ©riences
qui comptent plusieurs années de durée el qui ont porté sur les
plantes d'appartement les plus diverses : rosiers, fuchsias, géra-
niums, ricin, calla, coleus, palmiers, héliotrope, camélias, azalées,
gloxinias, etc., M. Wagner est arrivé à considérer, comme étant le
meilleur engrais, un mĂ©lange composĂ© de nitrate dâammoniaque,
de nitrate de polasse et de phosphate dâammoniaque, renfermant
pour 100 parties, les proportions suivantes des trois éléments
fondamentaux :
Acide phosphorique. . . . . . . . 12 parties.
POLASSE PARA SRRS ER NRC TELE ALT Are 19 â
AZOLOL ARE EE CNE M ROSE 17 â
En partant de la composition des engrais riches que j'ai déjà in-
diquée, on obtiendra un mélange présentant les teneurs ci-dessus en
associant les trois sels dans les proportions suivantes :
Phosphate d'ammoniaque . . . . . . 25 kilogr,
NJĂTALE Te IDOTASSP EEE EME 45 â
Nitrate d'ammoniaque . . . . . . . SON
L'application réguliÚre de ce mélange nutritif aux diverses plantes
d'appartement a donné, durant les années 1890 et 1891, les meil-
leurs résultats. La vigueur des végétaux, la belle couleur vert foncé
de leur feuillage, l'abondance de leurs fleurs, contrastaient singu-
liĂ©rement avec l'aspect des mĂȘmes plantes Ă©levĂ©es, Ă titre de compa-
raison, dans le terreau non fumé. M. Wagner a conclu de ses essais
que la formule que nous venons de rappeler convient, non seulement
aux plantes en pot, mais également aux cultures forcées, aux plates-
bandes, Ă l'Ă©levage des boutures et aux semis de fleurs.
Câest seulement pendant l'Ă©tĂ©, d'avril en septembre, quâil convient
de fumer les plantes d'appartement et celles de serre froide. A partir
d'octobre jusquâĂ la fin de mars, on ne doit leur donner, si toutefois
on est conduit Ă le faire, que de trĂšs faibles doses d'engrais.
Pour guider les personnes qui voudraient recourir Ă ce mode de
fumure des plantes d'appartement, je crois utile de préciser les
316 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
quanlités du mélange ci-dessus que M. Wagner conseille d'employer,
dâaprĂšs la dimension des pots qui contiennent les plantes Ă fumer.
Le petit tableau ci-dessous indique les quantités approximatives de
terre que renferment les pots Ă fleurs de divers diamĂštres et les doses
moyennes du mélange à appliquer, dans chaque cas particulier :
: 0 PRO2
POIDS DIAMĂTRE DU POT POP ARC
du mélange. à la partie supéricure!. ja nt pot.
06,5 10°, 0 300 gr.
1290 JE 600
210 1500 1 200
DO 20 ,0 2 400
Be) 21000 5 000
On saupoudre la suface de la terre avec le mélange pulvérulent
et lâon a soin dâarroser immĂ©diatement aprĂšs, trĂšs lentement et avec
prĂ©caution, en Ă©vitant que lâeau passe par-dessus les bords du pot.
Il faut employer assez dâeau, dans cet arrosage, pour dissoudre tout
le sel déposé à la surface et le faire pénétrer dans la terre. Les
fumures indiquĂ©es plus haut doivent ĂȘtre, suivant la dimension des
plantes et leur croissance plus ou moins rapide, répétées toutes les
quatre ou huit semaines. Il est difficile de donner Ă priori des indi-
cations plus rigoureuses sur le renouvellement des fumures, car les
conditions que présentent les plantes sont trÚs diverses.
Si lâon a affaire Ă des vĂ©gĂ©taux Ă croissance trĂšs lente, aux diffĂ©-
rentes variĂ©tĂ©s de palmiers et autres plantes vertes qui, dans lâappar-
tement, reçoivent peu de lumiÚre et, par suite, se développent len-
tement, on ne doit renouveler la fumure quâĂ de longs intervalles,
tous les deux mois, par exemple, ou moins fréquemment encore.
Au contraire, les plantes Ă croissance rapide, telles que les rosiers,
les fuchsias, les gĂ©raniums, lâhĂ©liotrope, etc., rĂ©clament des famures
plus fréquentes, à des intervalles de trois semaines, par exemple.
Les amateurs de fleurs, habituĂ©s Ă juger dâaprĂšs l'aspect de ces der-
niÚres, de leur état de santé et de vigueur, apprécieront bientÎt le
traitement différent à leur donner, suivant la coloration de leur feuil-
lage, leur port et l'abondance de leur végétation. La chose essentielle
1. Mesuré en dedans du rebord.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. St
dont il faut se convaincre, câest que lâarrosage Ă lâeau simple ne
suffit pas pour conserver les plantes qui ornent nos appartements.
Or, on sait que cet arrosage est, pour ainsi dire, le seul soin quâon
regarde, généralement, comme nécessaire pour l'entretien des végé-
taux en pots. M. E. Roman, inspecteur général des ponts et chaus-
sées, qui charme les loisirs de sa retraite par la culture des orchidées,
si curieuses et dâune beautĂ© si Ă©trange parfois, mâa fait connaitre les
bons rĂ©sultats quâil obtient, depuis plusieurs annĂ©es, de l'emploi des
engrais minĂ©raux dans leur culture. L'opinion des Ă©leveurs dâorchi-
dĂ©es est loin dâĂȘtre unanime Ă ce sujet: les uns, et Ă leur tĂȘte
M. L. Linden, le directeur si connu des serres du parc Léopold, ré-
pudient dâune façon absolue toute fumure organique ou minĂ©rale,
dans lâentretien des orchidĂ©es. Dâautres prĂ©conisent l'emploi, en so-
lution trĂšs Ă©tendue, des engrais organiques, tels que la bouse de
vache, le guano, etc. M. E. Roman, au contraire, repousse l'emploi
des fumures organiques, mais il dĂ©clare dans la lettre quâil m'a fait
l'honneur de m'écrire, et dans un article récent publié par le Journal
des OrchidĂ©es, quâil est nĂ©cessaire de donner de lâengrais minĂ©ral
aux orchidées et que son emploi, continué dans ses serres depuis
plusieurs annĂ©es, est couronnĂ© dâun grand succĂšs et dĂ©termine de
sérieuses modifications dans le mode de végétation de certaines
dâentre elles.
Malgré mon incompétence en ce qui concerne cette culture spé-
ciale, je suis tenté de me ranger à l'opinion de M. E. Roman, sur
l'utilité des phosphates, des sels alcalins et azotés dans l'élevage des
orchidées. Il me semble, en tout cas, utile de signaler à l'attention
des spĂ©cialistes la composition de lâengrais liquide dont M. E. Roman
proclame lâefficacitĂ©. Je transcris le passage de la lettre de mon ho-
norable correspondant, relatif à son mode d'opérer.
« Jâemploie, m'Ă©critil, le mĂ©lange de deux solutions salines dont
voici la composition :
« La premiÚre dissolution est formée de :
Phosphate neutre d'ammoniaque . . . . 100 gr.
Nitrate d'ammoniaque ". . 1. . . 60
Carbonate d'ammoniaque. . . . . ne 10
Nitraté: dé DOtASS A SRE MONS DC 5
MB AIT RON Se APR LA EN PRE 2 litres.
518 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
« La deuxiÚme dissolution se compose de 45 gr. de silicate de
polasse liquide (Ă 30° BaumĂ©) dans deux litres dâeau.
« Ces dissolutions ne doivent pas ĂȘtre employĂ©es pures: dans
12 litres dâeau on verse 16 gr. de chacune d'elles, ce qui donne un
liquide contenant environ 1 gr. de mélange de sel (supposé solide)
pour 7 litres dâeau. Je ne me sers que de ce liquide pour arrosage,
Ă lâexclusion de lâeau ordinaire. »
Il me paraßt cerlain que la faible dose (1/7 000) de sels minéraux
renfermés dans cette dissolution ne peut occasionner aucun acci-
dent ; il y aurait donc intĂ©rĂȘt, en prĂ©sence des bons effets que
M. E. Roman lui a reconnus, Ă lâexpĂ©rimenter dans les serres dâor-
chidées.
Il me paraĂźt incontestable, dâaprĂšs tout ce qui prĂ©cĂšde, que l'horti-
culteur el le floriculleur peuvent attendre de l'emploi des engrais
commerciaux tout autant de services que la culture proprement dite
en a reçus Jusqu'ici, et câest dans la pensĂ©e de stimuler les marai-
chers, les amateurs de jardins et de fleurs que j'ai, dâune part, cru
utile de donner de la publicité aux intéressants travaux de la station
de Darmstadtet, de lâautre, dâinstituer dans mon champ d'expĂ©riences
du Parc des Princes des essais méthodiques sur l'application des fu-
mures minérales à la culture des légumes, des arbres fruitiers et des
fleurs.
V. â VIGNES ET ARBRES FRUITIERS
Les divers engrais dont j'ai parlé à propos de la culture marai-
chĂšre et de la fumure des jardins s'appliquent Ă©galement avec succĂšs
aux arbres fruitiers et Ă la vigne. Jâindiquerai dâabord les mĂ©langes
recommandés par M. Wagner.
XVIII. â Fumure des arbres fruitiers.
M. P. Wagner s'Ă©lĂšve, comme nous lâavons fait nous-mĂȘme prĂ©cĂ©-
demment, contre l'insuffisance de la fumure des arbres fruitiers.
LA.FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 319
Comme nous, il voit dans l'emploi judicieux des engrais un moyen
trÚs efficace de combattre le dépérissement des arbres de nos jar-
dins par la sécheresse, les attaques des insectes et les affections
parasilaires.
â Pour les arbres isolĂ©s, dont la couronne, mesurĂ©e Ă un demi-
mĂštre au-dessus des plus hautes branches, couvrirait, par sa pro-
jection, une surface de 25 mÚtres carrés, il recommande par pied
d'arbre, la fumure suivante :
200 gr. superphosphate double ou 1 400 gr. superphosphate Ă
16 p. 100, 400 gr. chlorure de potassium, 9500 gr. de nitrate de
soude, ou 570 gr. de phosphate de polasse, 100 gr. de chlorure de
potassium, 900 gr. de nitrate de soude.
On rĂ©pand cet engrais sur le sol en novembre ou dans le cĆur de
l'hiver, on laboure Ă la bĂȘche, en enfouissant lâengrais Ă une
profondeur qui dépend de la nature du terrain et des dimensions
de lâarbre.
Pour les vergers, on peut employer, Ă hectare :
200 kilogr. superphosphate double ou 550 kilogr. superphosphate
Ă 16 p. 100, les 160 kilogr. chlorure de potassium, ou 230 kilogr. de
phosphate de potasse et 40 kilogr. de chlorure de potassium.
Cette fumure est donnée de novembre à février et, le cas échéant,
en mars ou avril : on laboure le sol et au printemps on sĂšme, Ă la
volée, 200 kilogr. de nitrate de soude.
Dans les sols abondamment fumés de longue date au fumier de
ferme, ce qui est fréquemment le cas des jardins particuliers, je re-
commande tout particuliÚrement l'emploi des scories de déphospho-
ration au moment de la plantation des arbres fruitiers (voir page 356).
Dans les mĂȘmes sols, l'introduction du plĂątre dans la couche de
terre qui avoisine les racines de l'arbre devra donner de bons
rĂ©sultats : il y a lieu dâaprĂšs les faits constatĂ©s par M. Oberlin, dont
il sera question plus loin Ă propos de la fumure de la vigne, dâexpĂ©ri-
menter lâaction du plĂątre Ă la dose de 500 gr. Ă un 1 kilogr. par pied
dâarbre en sol abondamment pourvu dâĂ©lĂ©ments azotĂ©s, par suite de
l'emploi rĂ©pĂ©tĂ© de famier dâ'Ă©table.
380 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
XIX. â Treilles et vigne.
La fumure soluble convient particuliĂšrement aux vignes dâun
certain Ăąge et aux arbres fruitiers, jusquâaux racines desquels il est
difficile, sinon impossible, de faire pénétrer les engrais minéraux
insolubles et notamment le phosphate de chaux.
Lâengrais pour jardin trouve donc ici une application rationnelle.
La vigne aime les sols riches et, sans admettre quâelle soit aussi peu
apte Ă utiliser les engrais peu solubles que paraĂźt le penser M. Wa-
oner, on doit regarder comme avantageux lâemploi des mĂ©langes
qui permettent de porter les matiĂšres fertilisantes jusquâau contact
du lacis de racines de vieilles souches.
Le moyen de faire pénétrer à la profondeur voulue les aliments de
la plante consiste Ă donner superficiellement Ă la vigne une forte
fumure soluble, dépassant de beaucoup, par sa teneur en éléments
nutritifs, les besoins annuels de la récolte, feuille et bois compris.
Câest le procĂ©dĂ© recommandĂ© par M. Wagner qui lâa appliquĂ© avec
succÚs. Se basant sur les expériences faites jusqu'ici par lui, ou sous
sa direction, M. P. Wagner propose une sorte de rotation quadrien-
nale dans l'application des fumures auxquelles il sâest arrĂȘtĂ©.
Voici les mĂ©langes quâil recommande et leur rĂ©partition; ces
quantités se rapportent à un hectare de vigne :
1°° annĂ©e. â 60 000 kilogr. de fumier et 100 kilogr. de super-
phosphate double.
2° annĂ©e. â 150 kilogr. de superphosphate double, 100 kilogr. de
chlorure de potassium, 120 kilogr. de nitrate de soude; ou 175 ki-
logr. de phosphate de potasse et 120 kilogr. de nitrate de soude.
3° annĂ©e. â 150 kilogr. de superphosphate double, 150 kilogr.
de chlorure de potassium, 150 kilogr. de nitrate de soude ; ou
175 kilogr. de phosphate de potasse, 50 kilogr. de chlorure de po-
tassium, 150 kilogr. de nitrate de soude.
4 annĂ©e. â 150 kilogr. de superphosphate double, 200 kilogr.
de chlorure de potassium, 150 kilogr. de nitrate de soude ; ou
175 kilogr. de phosphate de potasse, 100 kilogr. de chlorure de
potassium, 150 kilogr. de nitrate de soude.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 381
Le superphosphate, le chlorure de potassium et le phosphate de
potasse peuvent ĂȘtre rĂ©pandus Ă lâautomne, pendant l'hiver ou au
printemps à la surface du sol, puis enfouis aussi profondément que
le permet le mode de labour ou de bĂȘchage en usage dans le vignoble.
Le nitrate de soude est épandu isolément au mois de mars et aban-
donnĂ© sur le sol, sans bĂȘchage. La pluie et la rosĂ©e se chargeront
de lintroduire dans le sol. Lâemploi successif des mĂ©langes que
je viens d'indiquer constitue la fumure de la vigne que M. Wa-
gner nomme fumure normale. Elle doit, dâaprĂšs lui, subir quel-
ques modifications, notamment dans les cas suivants : pour les
sols bas et humides, la dose de nitrate doit ĂȘtre attĂ©nuĂ©e ; les sols
secs et en cĂŽte exigeront au contraire, pour les mĂȘmes quantitĂ©s
d'acide phosphorique et de potasse, une fumure azotée plus abon-
dante.
Plus le bois est vigoureux, plus doivent ĂȘtre restreintes les
quantités de fumier et de nitrate employées, et, inversement, si le
bois est chétif, il y aura lieu de répéter plus souvent (tous les trois
ans, par exemple) l'application du fumier dâĂ©table et d'augmenter la
dose de nitrate. Enfin, dans les parcelles de vignes oĂč la chlorose se
produit, le plus souvent par suite de la présence à une faible profon-
deur dâune couche dâargile impermĂ©able, on se trouvera bien dâune
fumure additionnelle dâun mĂ©lange Ă parties Ă©gales de nitrate et de
phosphate de potasse.
L'emploi du nitrate de soude en viticulture prend, dans le midi
de la France surtout, un développement marqué et les vignerons
constatent une augmentation trĂšs notable dans le rendement des
vignes soumises Ă ce traitement. Je ne puisrappeler icilesnombreuses
formules de mĂ©langes dâengrais prĂ©conisĂ©es pour la vigne : je me
bornerai Ă insister sur lâimportance du rĂŽle de lâazote associĂ© Ă une
large fumure phosphatée et, dans un certain nombre de sols, aux
engrais potassiques.
MM. Trouchaud-Verdier et Chauzit emploient, dans le Gard, le
mĂ©lange suivant, Ă lâhectare :
Nitraterde soude RS er. 360 kilogr.
Superphosphate, 0.15 p. 100 . . . 400 â
Sulfaterde DOfASSE RE ERNN NE. 200 â
389 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Ils associent avec succĂšs le plĂątre Ă cette fumure, dans les sols
riches en azote.
Les expĂ©riences de M. Oberlinâ' ont mis en relief, de la façon la
plus nette, les bons effets du plùtre. Les années derniÚres, les résultats
constalĂ©s par lâĂ©minent viticulteur alsacien ont Ă©tĂ© confirmĂ©s dans le
Beaujolais par les essais de MM. Battanchon et Condeminal. Le plĂątre,
Ă la dose de 2000 Ă 4 006 kilogr. Ă lâhectare, augmente trĂšs notable-
ment le rendement en vin des vignes plantées en sol abondamment
pourvu en azote.
Les doses de nitrate ont été poussées, dans cerlains vignobles du
Midi, jusquâĂ 800 kilogr. et plus Ă lâhectare ; mais je ne conseille pas
d'adopter ce mode de faire. DâaprĂšs les renseignements fournis par
des viticulteurs dâune compĂ©tence indiscutable, le nitrate de soude,
à ces doses exagérées, augmente, 1l est vrai, considérablement la
quantité de vin récolté, mais celui-ci est de qualité et notamment
de richesse alcoolique trÚs inférieures à celles des vins obtenus la
mĂȘme annĂ©e dans des vignobles, de tout point comparables, sauf
que les quantités de nitrate employées étaient bien moindres.
Il semble quâon doit considĂ©rer une dose de 300 Ă 409 kilogr. de
nitrate Ă lâhectare comme une fumure azotĂ©e trĂšs suffisante et devant
donner dâexcellents rĂ©sultats, tant sous le rapport de la quantitĂ©
que sous celui de la qualité du vin produit.
Je terminerai en indiquant la composition dâun mĂ©lange dâengrais
minéral qui, employé en sol pauvre, sur mes indications, a donné
de trÚs bons résultats, depuis trois ans, dans différents vignobles
de lâest de la France, en mĂ©diocre Ă©tat et dont il a trĂšs sensiblement
accru la production en vin.
Scories de déphosphoration, . . . . . . . . 1 000 kilogr.
Ou phosphate minĂ©ral en poudre fine. . 2 000 D. â
RANGER ES D LE NN OUT POELE Re ER ERET A Ur 1 000 â
Nitratéade Soude: ser TARA ve Er JOURNEE
PALTEMONlUGE "SOA ATP ere Ph PE A 1500 â
SOI MAUNIO IE CAUSE 4 500 ou 3 S00 kilogr.
reprĂ©sentant, par are, 38 Ă 48 kilogr, et, par mĂštre carrĂ©, 980 Ă
1. Voir Ătudes agronomiques. 6° sĂ©rie, 1899-1891, Hachette et Gi,
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 383
480 gr. de mélange, suivant qu'on emploie les scories ou le phos-
phate minéral.
En divisant par le nombre des ceps ou des arbres fruitiers exis-
tant sur un hectare planté à larges espacements entre chaque arbre
le poids du mélange (3 800 kilogr.), on aura la quantité moyenne
d'engrais Ă mettre en cuvelie au pied de lâarbre dans le voisinage
du fumier.
Cette fumure, du prix de 200 fr. enviroĂ Ă lâhectare, pourra ĂȘtre
réduite suivant la richesse naturelle du sol ou l'emploi simultané du
fumier de ferme, sauf le nitrate, quâil y aura intĂ©rĂȘt Ă employer tous
les ans dans la plupart des cas. Les quantités ci-dessus indiquées de
phosphate et de sel de potasse suffiront pour plasieurs annĂ©es. Lâazote
peut Ă©galement ĂȘtre donnĂ© aux vignes, parlie sous forme de nitrate,
partie sous forme dâazote organique, poudrettes riches, fumier de
ferme, sang desséché, laine, déchets de cuirs, ou laine torréfiée, etc.
La pratique et les conditions locales modifieront nécessairement
les proportions d'engrais à employer, le mélange ci-dessus repré-
sentant un maximun qui aura rarement besoin dâĂȘtre atteint pour
assurer un bon rendement. Ă
En terminant, je crois devoir insister sur le traitement trÚs différent,
à mon avis, que réclament les vignobles sous le rapport de la fumure,
suivant la valeur des vins qu'ils produisent. Toutes les vignes, celles
des grands crus comme celles qui produisent les vins ordinaires, ont
besoin d'engrais. Lâazote, l'acide phosphorique et la potasse sont
aussi indispensables aux unes qu'aux autres; mais, si lâon envisage
le but à atteindre qui est, avant tout, la qualité pour les grands vins,
qui placent la France hors de pair avec tous les pays du monde,
tandis que la quantité importe non moins autant que la qualité pour
les vignobles ordinaires, on comprend aisément que le traitement
qui convient aux derniers ne saurait ĂȘtre appliquĂ© aux premiers. La
qualité n'est pas compatible avec la quantité, du moins dans certaines
limites; une fumure exagérée conduisant à une production considé-
rable nuit certainement à la qualité des vins. Il s'ensuit que les
vignerons de nos crus célÚbres devront viser à maintenir, par une
fumure convenable, le rendement de leurs vignes sans chercher Ă
lâexagĂ©rer. Ă ce point de vue, l'emploi du plĂątre, qui, dâaprĂšs ce que
384 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
nous avons dit plus haut, augmente trĂšs notablement le rendement
des vignes plantĂ©es en sol riche en azote organique, doit ĂȘtre pratiquĂ©
trĂšs modĂ©rĂ©ment dans les grands crus, si Lant est qu'il y doive ĂȘtre
introduit, tandis que, dans les crus moyens ou médiocres, 1l pourra
ĂȘtre dâune grande utilitĂ© au point de vue du produit brut de la vigne.
Les propriétaires des grands crus de Bourgogne, du Bordelais et
de la Champagne risqueraient de tuer la poule aux Ćufs dâor, en
exagérant les fumures.
Les cultures arbustives autres que les fruitiers et la vigne, hou-
blons, oseraies, etc., ont sensiblement les mĂȘmes exigences que ces
derniers et les fumures indiquĂ©es prĂ©cĂ©demment peuvent leur ĂȘtre
appliquées avec succÚs.
Les oliviers, amandiers et autres arbustes du sud de lâEurope sont
trop souvent délaissés sous le rapport de la fumure.
L'emploi des phosphates minéraux et des scories de déphospho-
ration dans les sols siliceux, celui des superphosphates dans les
terrains calcaires, associésaux engraisazotés, tourteaux oléagineux ou
fumier, nâest pas moins efficace pour ces arbustes que pour la vigne.
VI, â PRAIRIES NATURELLES.
Câest une erreur absolue, beaucoup trop rĂ©pandue encore chez
certains cultivateurs, de considérer comme inutile, de fumer les
prairies. L'alimentation du bétail sera d'autant meilleure et les
rendements en foin d'autant plus élevés, que les prés seront mieux
entretenus et fumés. L'idéal serait de pouvoir concentrer, dans une
exploitation, les fumures intensives sur les prairies, de maniĂšre Ă
récolter beaucoup de fourrage, ce qui permettrait d'élever ou de
nourrir beaucoup de bétail et de produire beaucoup de fumier.
La garniture de la prairie est dâautant plus abondante que le sol
est mieux pourvu en éléments minéraux assimilables et notamment
en acide phosphorique.
Les deux matiĂšres fertilisantes par excellence pour les prairies,
et notamment pour celles qui sont déjà anciennes, sont les phosphates
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 389
el les sels de potasse (kaĂŻnite). Si lâon recourt Ă l'emploi du nitrate
de soude, il ne faut pas en exagĂ©rer la dose : 60 Ă 80 kilogr. Ă lâhec-
tare suffisent en général. Les légumineuses, qui forment la garniture
de la prairie, puisent dans l'air azote nécessaire à leur nutrition,
mais cette assimilation de l'azote gazeux nâa lieu quâautant que les
plantes rencontrent dans le sol une quantitĂ© suffisante dâacide phos-
phorique, de potasse, etc.
Une fumure annuelle Ă lâautomne ou Ă la fin de lâhiver, de 600 Ă
1 000 kilogr, de scories de déphosphoration et de 400 à 500 kilogr.
de kaïnite, si le sol manque de potasse, est tout à fait rémunératrice,
dans la plupart des cas. La dĂ©pense quâoccasionne cette fumure est
Ă lâhectare de 55 Ă 80 fr. Lâacide phosphorique transforme la nature
dâune prairie, en permettant le dĂ©veloppement des lĂ©gumineuses,
trĂšfle blanc, etc., dont les graines enfouies dans le sol ne se montrent
que sous lâinfluence de la fumure phosphatĂ©e. On se trouve parti-
culiĂšrement bien de l'emploi des sels de potasse pour la fumure des
prairies humides.
On double parfois le rendement en foin et en regain dâune vieille
prairie, par l'apport de quantités convenables de phosphate et de
polasse.
Contrairement au prĂ©jugĂ©, trop rĂ©pandu encore, que lâherbe doit
pousser sans fumure, les cultivateurs ont donc tout intĂ©rĂȘt Ă faire
une large part aux prairies dans la rĂ©partition des engrais et câest,
dans le plus grand nombre des cas, Ă la fumure minĂ©rale quâils
devront recourir, réservant pour les terres en culture le fumier
dâĂ©table, presque partout produit en quantitĂ© insuffisante pour sub-
venir aux exigences des champs.
VII ââ LES ENGRAIS COMMERCIAUX
XX. â Indications sommaires sur la composition, le mode
d'achat et le contrĂŽle des engrais.
Les engrais commerciaux, complémentaires du fumier de ferme,
ĂŒrent leur valeur de leur richesse en azote, acide phosphorique,
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1. 25
386 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
potasse et magnésie. Leur prix est basé, à la fois, sur leur teneur en
lâun ou plusieurs de ces principes fertilisants et sur lâĂ©tat chimique
de chacun de ceux-ci dans lâengrais considĂ©rĂ©.
Pour complĂ©ter les renseignements pratiques que j'ai cherchĂ© Ă
condenser dans cette Ă©tude, touchant lâemploi des engrais commer-
ciaux, je crois utile de rappeler sommairement la composition des
principales matiĂšres fertilisantes quâon trouve dans le commerce, les
prĂ©cautions dont lâagriculteur doit sâentourer pour leur achat et les
moyens simples auxquels il doit recourir pour Ă©viter dâĂȘtre trompĂ©
sur la nature et le prix de vente des engrais.
Je suivrai dans cet exposé la classification suivante : 1° engrais
azotés; Ÿ engrais phosphatés; 8 engrais polassiques; 4° engrais
mixtes, câest-Ă -dire contenant plus dâun principe fertilisant.
1° Engrais azotĂ©sâ'.
Nitrale de soude. â Ă lâĂ©tat de puretĂ©, renferme 16.47 dâazote;
le nitrate du commerce à 95 p. 100 de pureté correspond à 15.60
dâazote environ.
Sulfate dâammoniaque. â Pur, contient 21.21 p. 100 dâazote ; le
sulfate de commerce en renferme de 20 Ă 20.6 p. 100.
Nitrate d'ammoniaque. â Pur, contient 38.8 p. 100 dâazote ; le
nitrate du commerce en renferme de 30 Ă 33 p. 100.
Sang dessĂ©chĂ© moulu. â Titre de 11 Ă 15 p. 100 d'azote orga-
nique.
Corne torrĂ©fiĂ©e moulue. â Titre de 15 Ă 15 p. 100 dâazote orga-
nique.
Laine, cuir, ete. â Titrant de 9 Ă 13 p. 100 d'azote.
2 Engrais phosphaltés.
La teneur en acide phosphorique varie de 10 Ă 50 p. 100 dans les
engrais phosphatĂ©s que livre lâindustrie.
Phosphales minéraux bruts (phosphates naturels en poudre fine)
contiennent de 44 Ă 37 p. 100; mais les phosphates dâun titre supĂ©-
{. Leur valeur dépend uniquement de leur teneur en azote.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 387
rieur à 23 ou 24 p. 100 sont généralement employés à la fabrication
des superphosphates, tous ceux dâun titre infĂ©rieur Ă 24 Ă©tant plus
particuliĂšrement uulisĂ©s directement par lâagriculture. Le degrĂ© de
finesse de la mouture des phosphates importe beaucoup.
Superphosphates (phosphate naturel ou poudre dâos traitĂ©s par
l'acide sulfurique); ils sont de richesse trĂšs variable en acide phos-
phorique ; les superphosphates doubles contiennent de 45 Ă 50 p.100
d'acide phosphorique ; les superphosphates ordinaires en renferment
de 10 Ă 20 p. 100. Il y a toujours intĂ©rĂȘt Ă acheter des superphos-
phates Ă haut titre, puisque le transport de la matiĂšre inerte grĂšve
dâautant plus le prix de l'acide phosphorique que lâengrais renferme
de ce dernier une moindre proportion.
Scories de déphosphoration renfermant, suivant leur provenance,
de 14 Ă 22 p. 100 dâacide phosphorique et de 45 Ă 55 p. 100 de
chaux trÚs assimilable. Comme pour le phosphate naturel, le degré
de finesse des scories a une grande importance au point de vue de
la rapidité de son utilisation pour les plantes. On doit exiger des
vendeurs la garantie de teneur en poudre fine (75 Ă 80 p. 100).
Noir d'os de raffinerie (29 p.100 dâacide phosphorique) ; la poudre
d'os et la tournure dâos contiennent de 22 Ă 26 p. 100 dâacide phos-
phorique, suivant qualité.
Calcul de la teneur en acide phosphorique d'un phosphate. âUne
simple opĂ©ration arithmĂ©tique permet dâĂ©tablir la richesse en acide
phosphorique dâune matiĂšre dont on connaĂźt la teneur en phosphate
tribasique de chaux. Il suffit de diviser le poids du phosphate de
chaux contenu dans 100 parties dâengrais par le nombre 2,183 pour
obtenir le taux centésimal de cet engrais en acide phosphorique pur ;
inversement, pour connaĂźtre le poids de phosphate tribasique de
chaux auquel correspond une teneur donnĂ©e dâun engrais en acide
phosphorique, on multiplie, par le mĂȘme nombre 2,183, le taux
d'acide phosphorique.
Exemple : 1° On a acheté 100 kilogr. de superphosphate à 18 p.100
d'acide phosphorique, on demande à quelle quantité de phosphate
tribasique de chaux correspond le superphosphate.
RĂ©ponse : 18 X 2,183 â 39.29 p. 100 de phosphate tribasique pur.
388 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
2° On a acheté une tonne de phosphate minéral en poudre avec
une garantie de 65 p. 100 de phosphate pur. On demande combien
ce phosphate renferme dâacide phosphorique pur.
RĂ©ponse : â 29.7 p. 100 d'acide phosphorique.
65
2,183
3° Engrais potassiques.
Le chlorure de potassium pour engrais renferme de 48 Ă 50 p. 100
ce potasse pure. Le sulfate de potasse contient de 48 Ă 51 p. 100 de
cette base.
4 Engrais mixtes.
Je donne le nom d'engrais mixtes aux substances naturelles qui
contiennent plusieurs éléments fertilisants. (Acide phosphorique,
azote, potasse et magnésie.) Nous allons énumérer les plus impor-
tants de ces engrais.
4° Phosphate de potasse. â I contient 36 p. 100 dâacide phos-
phorique et 27 p. 100 de potasse. Il est entiĂšrement soluble Ă lâeau.
% Phosphate d'ammoniaque. â I renferme 46 p. 100 dâacide
phosphorique et 7 p. 100 dâazote.
Ces deux sels, et notamment le phosphate de potasse, peuvent
ĂȘtre utilement employĂ©s en couverture, au printemps, dans le cas oĂč
lâon voudrait, Ă cette Ă©poque, donner de lâacide phosphorique Ă un
sol portant une récolte.
3 Nitrale de potasse. â I contient 44 p. 100 de potasse et 13.6
p. 100 dâazote. Ces trois matiĂšres, associĂ©es convenablement au
nitrate de soude et au nitrate dâammoniaque, constituent les mĂ©-
langes que j'ai fait connaitre sous le nom dâ Engrais pour jardins
et Engrais pour fleurs d'appartement et de serre.
Lâengrais pour jardin se vend approximativement aux prix suivantsâ:
Parisacaide#lO0NKIIOST EN RE PMP Er S0 fr. sur wagon Paris.
â DOMINANT LT ESS 45 fr. =
â LOL PRET et ce 12 fr. =
et franco dans toutes les gares de France, en colis postal, aux prix
1. Fabrique de H. et E, Albert, Ă Biebrich am/Rhein (Allemagne), Ă Engis (Belgique).
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 389
de 2 fr. le kilogr. par caisses de 5 kilogr. et 2 fr. 50 par caisses
de 3 kilogr.
4° KaĂŻnile. â Ce sel renferme 12 Ă 13 p. 100 de potasse et 15 p.
100 de magnĂ©sie Ă lâĂ©tat de sulfate.
9° Poudrelles el tourleaux organiques des matiÚres fécales. Teneur :
1 Ă 2 p. 100 d'azote, 2 Ă 6 p. 100 d'acide phosphorique, suivant le
mode de préparation. |
6° Tourleaux de graines olĂ©agineuses. â 3 Ă 6 p.100 d'azote orga-
nique, 1.5 Ă 2 p. 100 dâacide phosphorique, 2 Ă 4 p. 100 de potasse.
XXI â Achat et contrĂŽle des engrais.
La loi du 4 février 1888 et le rÚglement d'administration publique
du 10 mai 1889 qui la complÚte, mettent désormais les agriculteurs
à l'abri des fraudes éhontées dont le commerce des engrais a été
trop longtemps lâobjet. L'organisation de nombreux syndicats agri-
coles et la multiplication des Stations agronomiques et des labora-
toires agricoles offrent, en outre, toutes facilités aux cultivateurs de
se soustraire Ă la fraude, d'acheter, aux meilleures conditions, des
engrais de composition bien dĂ©finie et dâen faire vĂ©rifier la valeur et
la richesse par lâanalyse.
Les cultivateurs qui seront les dupes des nĂ©gociants malhonnĂȘtes
pe devront donc, Ă l'avenir, sâen prendre quâĂ eux-mĂȘmes, Ă leur
crédulité dans les paroles des commis-voyageurs en engrais, dont je
leur conseille de repousser les offres, présque toujours dolosives
pour l'acheteur.
Quel que soit le mode choisi pour lâachat des engrais, il devra
toujours avoir pour base la garantie Ă©crite du vendeur indiquant :
1° La richesse en chacun des principes fertilisants (azote, acide
phosphorique, potasse) rapportĂ©e aux 100 kilogr. dâengrais ;
2 L'Ă©tat sous lequel lâengrais renferme ces trois corps : azote
organique, nitrique ou ammoniacal; acide phosphorique soluble ou
insoluble ; potasse Ă lâĂ©tat de sulfate, chlorure ou carbonate ;
3 L'origine ou lâĂ©tat naturel de lâengrais (phosphate minĂ©ral,
phosphate d'os, scories de déphosphoration, ete.).
Nous conseillons au cultivateur dâacheter les matiĂšres premiĂšres
390 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
de ses famures (nitrate de soude, phosphates, superphosphates, sels
de potasse, elc.), et de faire lui-mĂȘme Ă la ferme les mĂ©langes Ă
rĂ©pandre sur ses terres. Entre autres avantages, ce mode dâachat
rend la vérification du titre et de la pureté des engrais beaucoup
plus facile que si lâon a affaire Ă un mĂ©lange expĂ©diĂ© de lâusine.
Pour faciliter aux acheteurs la vérification, par un laboratoire
agricole, du degré de pureté des engrais, je reproduis ci-dessous
l'instruction que j'ai rédigée pour le prélÚvement des échantillons
destinĂ©s Ă lâanalyse. En se conformant aux indications relatives aux
dosages à demander, les expéditeurs d'échantillons d'engrais facilite-
ront le travail du chimiste auquel ils sâadresseront et Ă©viteront les
frais dâune analyse complĂšte.
Indications Ă joindre Ă l'envoi d'Ă©chantillons d'engrais commerciaux
a analyser.
Les principales matiĂšres qui servent Ă Ă©tablir la valeur dâun
engrais sont les suivantes :
1° Azole sous trois formes :
a) Azote organique insoluble ;
b) Azote ammoniacal ;
c) Azote nitrique.
2 Acide phosphorique sous trois formes :
a) Acide phosphorique soluble dans lâeau ;
b) Acide phosphorique soluble dans le citrate ;
c) Acide phosphorique insoluble.
3° Polasse Ă lâĂ©tat de sel soluble :
a) Chlorure ;
b) Sulfate ;
c) Carbonate ;
d) Nitrate ;
e) Phosphate.
Afin de faciliter aux agriculteurs la rédaction de la note dont
ils doivent accompagner tout envoi, au laboratoire, d'Ă©chantillons Ă
analyser, je rappellerai, pour chacun des principaux engrais indus-
triels, les dosages quâils doivent indiquer, s'ils dĂ©sirent obtenir une
391
analyse complĂšte et pouvant les renseigner exactement sur la valeur
de ces engrais. Si, par suite de lâarrangement fait avec le vendeur,
la garantie ne porte que sur une des matiĂšres fertilisantes, lâexpĂ©di-
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS.
teur pourra se borner Ă l'indication de cette substance.
Rnb Ulilhes: traités? por | AephoAnEUnqne soluble dans l'eau, dans
Laeide sulfurique, \ le citrate, insoluble.
1, â Superphosphates d'os, ĂŻ noir de Acide phosphorique soluble dans l'eau,
raffinerie, etc . : dans le citrate, insoluble. Azote.
f Azote total.
IT. â Guanos traitĂ©s par l'acide sulfu- De an vert GANT MEUS
niques FNOĂPAOEAAIOX | Azote ar ;
Azole organique.
IV. â Phosphorites : scories de dĂ©phos- ete D tuent
phoration : coprolithes; phosphate Chaus,
d'os prĂ©citĂ© : cendre dâos
V. â Poudre d'os; tournure d'os; pou- | Acide phosphorique total,
drettes; noir de raflinerie; os dégé- Azute-organique.
latinés. ;
VI. â Phosphate de potasse. . ; DR ON Her
VII, â Phosphate d'ammoniaque . . . tu DATE ANS EN
VIII. â Nitrate de potasse. e Azote nitrique. Potasse.
IX. â Nitrate de soude. . 4 Azote nitrique.
X. â Sulfate d'ammoniaque. HA Azote ammoniacal.
XI. â Laine. DĂ©chets de draps. Gone |
Cuir. Sang dĂ©ssĂ©chĂ©. â DĂ©bris ani- ? Azote total.
maux . : \ :
XIT, â Cendre de PS #e nie) de Acide phosphorique totai.
tourbe . : â dis Potasse.
XIII. â Sels de AS M ouee si ce |
sont des chlorures, sulfates, carbo- } Potasse.
nates, salins de betterave, etc. . . |
Acide phosphorique total.
XIV, â Tourteaux . . 4 Azote.
Potasse.
Acide phosphorique total.
XV.â Engrais pour jardins et pour }) Azote nitrique.
fleurs . ! | Azote ammoniacal.
Potasse.
NATURE
des engrais industriels.
I. â Superphosphates minĂ©raux, phos-
PRINCIPES A DOSER
pour
établir la valeur vénale et agricole.
392 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
XVI. Engrais composĂ©s. â Cette derniĂšre catĂ©gorie peut contenir tous les principes
nutritifs ; azote et acide phosphorique sous leurs trois formes, et potasse. Il importe
d'indiquer si ces mélanges sont formés de nitrate de soude ou de potasse comme source
d'azote; s'ils contiennent du sulfate d'ammoniaque, des superphosphates. ete.
Nora â Tous les Ă©chantillons d'engrais Ă analyser doivent ĂȘtre expĂ©diĂ©s dans des
flacons de verre bien bouchĂ©s. L'envoi dans des sacs en toile oĂč en papier, boĂźtes en
carton, etc., doit ĂȘtre proscrit, Ă raison des variations que la matiĂšre Ă analyser peut
subir en prenant de l'humidité ou en perdant de l'eau pendant le transport.
L'analyse du sol est parfois indispensable pour l'application judi-
cieuse des engrais. Si elle ne permet pas d'apprĂ©cier dâune maniĂšre
absolue le degrĂ© de fertilitĂ© dâune terre, elle a tout au moins pour
résultat de faire connaßtre la richesse ou la pauvreté de la terre en
chacun des principes fertilisants importants, acide phosphorique,
azote, potasse, chaux et magnésie. Bornée à la recherche et au
dosage de ces cinq éléments, l'analyse d'une terre suffit généralement
pour guider trĂšs utilement le cultivateur dans le choix des engrais
et dans les quantitĂ©s Ă employer. â Lâinstruction suivante indique
comment doivent ĂȘtre prĂ©levĂ©s les Ă©chantillons de sols destinĂ©s Ă
l'analyse. |
Instruction sur la prise d'échantillons du sol destinés à l'analyse.
Il y a deux cas Ă considĂ©rĂ©r pour un mĂȘme champ : 1° cas dâun
sol homogĂšne ; 2° cas dâun sol variable dans son aspect et dans sa
composition.
1° Si le sol présente, en ce qui concerne sa conslilution géologique,
sa fertilité ou son aspect physique, des parties trÚs différentes, il
sera bon de prélever, dans chacune de ces différentes parties, des
Ă©chantillons spĂ©ciaux. Cette prise dâessai se fera avec toutes les prĂ©-
cautions indiquées plus loin.
2° Si le sol est homogĂšne, sâil appartient dans toute l'Ă©tendue du
terrain Ă la mĂȘme formation gĂ©ologique, il suffira de prĂ©lever un
Ă©chantillon moyen, en observant exactement les indications qui vont
suivre.
PrĂ©lĂšvement des Ă©chantillons. â On commence par diviser le
champ par des diagonales, ou par des lignes transversales dont la
direction ne saurait ĂȘtre prĂ©cisĂ©e Ă l'avance, mais que lâinspection
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 393
de la forme et la configuration extérieure du champ indiqueront
suffisamment. â Dans les conditions ordinaires dâhomogĂ©nĂ©itĂ© (sols
franchement calcaires, granitiques, argileux, siliceux), il suffit de
dĂ©terminer une quinzaine de points (par hectare) oĂč devront ĂȘtre
prélevés les échantillons de terre.
Ces points une fois dĂ©tĂ©rminĂ©s, on nettoie la surface du sol Ă lâaide
dâune pelle, de maniĂšre Ă Ă©loigner du lieu oĂč lâon prĂ©lĂšvera la terre,
les détritus qui la couvrent accidentellement, tels que feuilles sÚches,
fragments de bois, corps étrangers, débris de vaisselle, fer-blanc,
etc., elc. La place Ă©tant bien propre, sur une surface de 0",50 Ă
0",60 de cĂŽtĂ©, on pratique, Ă la bĂȘche, un trou Ă parois aussi verti-
cales que possible, en rejetant au dehors la terre quâon extrait de cette
petite fosse. La longueur du trou doit ĂȘtre environ 0",40 ; sa largeur
est dĂ©terminĂ©e par celle de l'instrument quâon emploie ; quant Ă sa
profondeur, elle varie avec celle des labours en usage dans le pays;
la couche de terre arable est, en effet, celle qui constitue le sol pro-
prement dit, et ne doit pas ĂȘtre mĂ©langĂ©e, dans lâĂ©chantillonnage,
avec la terre du sous-sol. Lorsque la fosse est complÚtement neltoyée,
on enlĂšve, par tranches verticales, Ă la bĂȘche, des couches paral-
lĂšles, en pratiquant un nombre suffisant de sections perpendiculaires,
pour extraire environ 4 Ă 5 kilogr. de terre. Au soruir de la fosse,
la terre est dĂ©posĂ©e sur une petite bĂąche en toile dont sâest muni
lâopĂ©rateur.
On répÚte ce prélÚvement d'échantillons sur autant de points du
champ qu'il est nécessaire pour obtenir une représentation aussi
exacte que possible de sa composition moyenne. On réunit ensuite,
sur une bĂąche de plus grande dimension, tous les Ă©chantillons de
terre, on les mĂ©lange aussi intimement que possible avec la bĂȘche
et lâon prĂ©lĂšve sur la masse un Ă©chantillon moyen du poids de 4 Ă 5
kilogr. environ. On Ă©tale cet Ă©chantillon sur une toile, dans un lieu
couvert, et on le laisse se ressuyer Ă lâair. Lorsque la dessiccation est
suffisante, la terre est mise dans un sac ou mieux dans un vase en
terre et soigneusement étiquetée.
Durant le mélange des divers échantillons sur la bùche, on a écarté
les pierres et les cailloux qui dépassent le volume d'une noix, en
nolant approximalivement leur nombre, relativement Ă un poĂŻds
394 . ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
donné de terre, leur grosseur et leur nature géologique et chimique
(calcaire, siliceuse, etc).
On procĂšde ensuite, exactement de la mĂȘme maniĂšre et avec les
mĂȘmes prĂ©cautions, Ă la prise d'Ă©chantillons du sous-sol, en utili-
sant les petites fosses faite en vue du prĂ©lĂšvement du sol. â La
nature, l'aspect et la disposition des couches indiquent Ă quelle pro-
fondeur il faut prélever le sous-sol; en général, une profondeur
égale à celle du sol cultivé suffit. Si la couche arable a 0",15 de
profondeur, on prĂ©lĂšvera le sous-sol sur la mĂȘme profondeur. La
profondeur à laquelle pénÚtrent les racines des plantes récoltées
dans le terrain fournit aussi une indication précieuse.
Quand :il sâagit de sols forestiers, le sous-sol doit ĂȘtre recueilli
entre 0", 40 et 0",50 au-dessous du plan oĂč s'Ă©tendent ou pĂ©nĂštrent
les racines. Un peu de coup dâĆil et d'habitude renseignent dâailleurs
trĂšs vite Ă ce sujet.
DOCUMENTS A CONSULTER
I. â Ătablissement de champs de dĂ©monstration.
Aucune dissertation ne vaut, pour Ă©difier les cultivateurs, sur le
profit que peut donner l'application judicieuse des engrais, la vue
dâun champ, convenablement traitĂ© et fumĂ©, situĂ© Ă cĂŽtĂ© dâune par-
celle de mĂȘme Ă©tendue, cultivĂ©e et famĂ©e suivant la routine du pay-
san de la localité. Les associations et les syndicats agricoles, les
grands propriétaires doivent prendre l'initiative de la création de
champs de démonstration pour lesquels ils sont certains de rencontrer
le concours pécuniaire du Gouvernement, s'ils lui font appel en se
conformant aux rĂšgles qui ont Ă©tĂ© posĂ©es par le ministĂšre de lâagri-
culture.
La premiĂšre observation sur laquelle je ne saurais trop insister
est la définition exacte du but que doivent se proposer les organisa-
teurs dâun champ de dĂ©monstration.
Il rÚgne à ce sujet une confusion déplorable dans l'esprit de beau-
coup d'hommes animés des meilleures intentions. Gette confusion a
pour consĂ©quence de fausser entiĂšrement l'institution excellente Ă
laquelle le ministĂšre de lâagriculture attache, Ă juste titre, une
grande importance au point de vue du progrĂšs de notre agriculture :
elle conduit finalement à un résultat diamétralement opposé à celui
que poursuivent les organisateurs de ces champs.
La distinction la plus tranchée existe entre le champ d'expériences
et le champ de démonstration. Le premier a pour objet l'étude
expérimentale de divers modes de fumure, de diverses méthodes de
culture, de différentes semences, appliquées à une plante quelconque
de grande culture. Les tùtonnements, les divergences dans les ré-
sultats, les insuccĂšs mĂȘme sont autant de conditions insĂ©parables de
=
396 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
l'expérimentation; ils portent avec eux leurs enseignements, mais
ne sauraient ĂȘtre placĂ©s sans commentaires sous les veux des culti-
vaieurs.
Les champs de démonstration, au contraire, ne doivent laisser aux
rĂ©sultats quâon en attend dâautres alĂ©as que l'influence des conditions
climatologiques de lâannĂ©e, qui Ă©chappent entiĂšrement Ă lâaction de
lâhomme. Ils ont pour but de dĂ©montrer les rĂ©sultats acquis dans les
champs dâexpĂ©riences ou dans la pratique agricole la mieux entendue
de la rĂ©gion. Câest donc uniquement la reproduction de faits acquis
par lexpérience et par la pratique intelligente, concernant le choix
de telle ou telle variĂ©tĂ© de graine prolifique, sâil sâagit de semences,
de telle ou telle matiĂšre fertilisante, la plus avantageuse pour une
rĂ©colte donnĂ©e, sâil sâagit d'engrais, que les champs de dĂ©monstration
ont pour objet unique de mettre sous les yeux des cultivateurs du pays.
à part les cas de force majeure, les résultats des champs de dé-
monstration doivent toujours Ă©tre bons ; ceux quâon obtient dans les
champs d'expĂ©riences peuvent ĂȘtre bons, mĂ©diocres ou mauvais,
puisqu'ils ont pour objet l'Ă©tude dâun procĂ©dĂ©, dâune semence ou dâun
engrais NOUVEAUX.
Câest pour avoir trop souvent confondu dĂ©monstration avec expĂ©-
rience que lâon a fait fausse route.
L'insuccĂšs dâun champ de dĂ©monstralion mal compris porte Le plus
grand préjudice à la propagation des vérités qu'il s'agissait de démon-
trer Ă son aide. OĂč doit done instituer un champ de dĂ©monstration
uniquement en vue de mettre en évidence les résultats acquis et non
pour résoudre tel ou tel problÚme agronomique. Aux directeurs des
Slalions agronomiques appartient l'organisation et la direction de
champs d'expériences ; aux professeurs départementaux, aux prali-
ciens Ă©mĂ©rites dâune rĂ©gion, la crĂ©ation de champs de dĂ©monstration
oĂč ils appliqueront les procĂ©dĂ©s, les semences et les engrais dont la
valeur leur est connue Ă l'avance.
C'est dans cet ordre d'idées qu'il y a lieu d'instituer le plus grand
nombre de champs de démonstration de la valeur agricole du nitrate
de soude associĂ© ou non, suivant lâĂ©tat du terrain et les ressources
dont on dispose, au fumier de ferme, aux phosphates et Ă la po-
tasse.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 397
Les principales rÚgles à suivre pour la création de ces champs de
dĂ©monslration me paraissent ĂȘtre les suivantes :
Choix dâun terrain situĂ© dans un lieu frĂ©quentĂ©, dâun accĂšs facile.
Division du terrain (1 hectare, au maximun, suffit) en deux parties
Ă©gales, d'orientation identique, sĂ©parĂ©es par un sentier de 0Âź,80 Ă
1 mĂštre. â Mise en Ă©tat de lâune des pareclles par les procĂ©dĂ©s de
culture reconnus les meilleurs dans la localitĂ© dâaprĂšs la nature du
terrain; culture de la deuxiĂšme parcelle Ă la mode des paysans du
pays.
Fumure de lâune des parcelles suivant la mĂ©thode des paysans,
comme nature d'engrais et comme quantité de fumure.
Fumure de lâautre parcelle avec le mĂ©lange de nitrate et de phos-
phale quâon aura fixĂ©, dâaprĂšs les rĂ©sultats obtenus dans la rĂ©gion,
200 kilogr. de nitrate, par exemple, et 60 kilogr. dâacide phospho-
rique ou tout autre mélange d'efficacité reconnue.
Ensemencement du champ, le mĂȘme jour, avec la mĂȘme semence
dans les deux parcelles.
En opérant ainsi, on aura modifié deux conditions : celles de la
mise en Ă©tat du sol et de la fumure de la terre. Si lâon dispose dâun
espace double de terrain, on pourra répéter la démonstration, en ne
faisant valoir quâune seule condition, la fumure ; il suffira, pour cela,
de donner la mĂȘme culture aux deux parcelles.
L'objectif quâon ne doit pas perdre de vue est dâassurer le rĂ©sul-
tat de la dĂ©monstration quâon se propose ; ilne sâagit donc nullement
de faire une expĂ©rience, mais de montrer l'effet dâune fumure expe-
rimentée ailleurs.
Les insuccĂšs auxquels ont conduit, dâune part, la falsification des
engrais minĂ©raux, de lâautre, leur emploi dĂ©fectueux, ont eu la plus
fùcheuse influence ; ils ont jeté, sur une pratique excellente en soi,
une dĂ©faveur quâil est trĂšs difficile de dĂ©truire dans l'esprit des petits
cultivateurs, que le résultat final seul a frappé.
On retomberait dans le mĂȘme danger en instituant des champs
d'expériences au lieu et à la place de champs de démonstration, le
succĂšs, câest-Ă -dire lâaccroissement de rĂ©colte, dans l'espĂšce, Ă©tant
la condition sine qu& non pour porter la conviction dans lâesprit de
nos laborieux paysans qui nâont ni le loisir ni lâinstruction suffisante
398 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
pour discuter les rĂ©sultats dâune expĂ©rience, mais que le doublement
dâun rendement de la rĂ©colte ne saurait laisser de convaincre rapide-
ment.
II. â Lettres de MM. Pozzi-Escot et G. Dethan.
Mont-de-Nérac, par Bergerac, le 10 août 1890.
Monsieur,
J'ai suivi, dĂšs le dĂ©but, avec un puissant intĂ©rĂȘt, la campagne que vous
avez entreprise dans vos belles Ătudes agronomiques en faveur de la culture
rémunératrice du blé en France ; non pas tant que la question me touchùt
personnellement, puisque je m'occupe surtout de viticulture, que parce
quâil se trouvait prĂ©cisĂ©ment que ce que vous Ă©tablissez avec tant de force :
qu'il est possible, sans protection douaniÚre, de produire avec bénéfice,
en France, des céréales, à condition de les cultiver intensivement, mais
Ă cette condition seulement, s'applique absolument aussi Ă la culture de
la vigne et Ă ses conditions nouvelles.
Vous veniez ainsi confirmer, avec toute l'autorité qui s'attache à votre
nom, une thÚse qui m'était chÚre et dont je m'efforce de démontrer la
vérité, autour de moi, par les résultats de mon vignoble.
Rien, vous le comprenez, ne pouvait m'intéresser davantage.
J'avais déjà emplové les scories dans mes vignes, en remplacement
du phosphate précipité, depuis que vous les aviez signalées comme source
économique d'acide phosphorique et je m'en était fort bien trouvé. En
1883 donc, me trouvant avoir une piÚce de vigne détruite par le phylloxéra,
de 80 ares environ, que je ne voulais pas replanter encore, je résolus
d'y essayer la culture des céréales, avec les scories et le nitrate de soude.
J'ai cultivĂ© sur cette terre, en 1888 et 1889, du blĂ© et de lâavoine, sans
autre fumure que 1000 kilogr. de scories 16/20 et 250 kilogr. de nitrate
de soude, Ă lâ'hectare.
Cette terre, en coteau Ă©levĂ©, trĂšs sec, silicĂ©o-argileux, de qualitĂ© Ă
peine moyenne, et qui de temps immémorial portait de la vigne sans avoir
jamais reçu de fumure, ensemencĂ©e aprĂšs un seul labour, mâa donnĂ© un
rendement supérieur à celui obtenu dans les meilleures terres à blé de la
riche plaine de Bergerac, avec la culture du pays.
Je nâai pas, Ha lhedr ments le chiffre exact du rendement de ces
premiĂšres expĂ©riences, mais je suis, je vous lâaffirme, au-dessous de la
vĂ©ritĂ©, en lâestimant dâun quart supĂ©rieure Ă la moyenne la plus Ă©levĂ©e du
pays. Les variĂ©tĂ©s ensemencĂ©es Ă©taient le blĂ© barbu et lâavoine noire du
pays.
Je voulus aussi, l'an dernier, faire un essai de culture en ligne Ă grand
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 399
espacement, suivant la méthode du major Hallett. Je semai donc en ligne,
à la main, sur une étendue de 2 ares environ, les variétés de blé suivantes
que je m'étais procurées dans la maison Vilmorin : Shireff square-head ;
Dattel- Hickling-Hallettâs pedigree rouge, et, comme point de comparaison,
blé barbu de pays.
Le semis fut fait le 8 octobre 1888, Ă 25 centimĂštres, en tout sens. Au
labour précédent de la semaille, j'avais répandu, à la volée, des scories,
Ă la dose de 1 000 kilogr. En mars, je semai 150 kilogr. seulement de
nitrate de soude. Comme le semis avait été fait dans un jardin fumé de
longue date, je craignais de provoquer la verse en mettant une plus forte
proportion de nitrate.
Le semis leva bien, talla énormément, et au moment de la floraison,
ces blés étaient aussi fournis que ceux semés à la méthode ordinaire.
Chose remarquable, la variété du pays le cédait à peine aux variétés amé-
liorées comme développement de nombre des tiges par pied.
Les rĂ©sultats de cette expĂ©rience promettaient donc dâĂȘtre trĂšs intĂ©res-
sants; malheureusement un trĂšs violent orage, dans les derniers jours de
juin 1889, occasionna la verse complĂšte de mon petit champ; les oiseaux
se jetÚrent dessus, dévorÚrent les épis, et il me fut imposssible d'obtenir
un chiffre de rendement de quelque exactitude.
Néanmoins, encouragé par les résultats du semis clair en ligne que
J'avais pu apprĂ©cier jusquâĂ un certain point, malgrĂ© lâaccident survenu Ă mon
champ d'expérience, je résolus de semer encore en blé, pour la troisiÚme
fois consécutive, ma piÚce de vigne arrachée.
N'ayant pas de semoir Ă ma disposition et ne pouvant songer Ă semer Ă
la main une Ă©tendue aussi considĂ©rable, je cherchai Ă obtenir dâune
autre façon, à peu prÚs le résultat du semis en ligne, et voici comment
jy parvins : Au lieu de labourer en billon, suivant la coutume locale, je
fis labourer, à plat, en planches, et je fis répandre la semence, trÚs clair
et seulement dans le sens du labour, au lieu de la jeter, comme cela se
pratique habituellement, de cÎté, en lui faisant décrire une parabole;
puis on hersa en long.
De cette façon, lâaspect de mes blĂ©s, aprĂšs la levĂ©e, Ă©tait presque celui
de blĂ©s semĂ©s au semoir en ligne. LâĂ©cartement des pieds sur la ligne
n'était pas aussi régulier, cela va de soi, mais la distance entre les lignes'ne
laissait guÚre rien à désirer, celle-ci correspondant à chaque trait de charrue.
On employa 150 litres seulement de semence Ă lâhectare ; la semaille
fut faite le 7 octobre 1889. Le blé semé était de la variété Kissengland et
m'avait été vendu par le Syndicat libre des agriculteurs de la Dordogne.
Comme les années précédentes, la lerre avait reçu 1 000 kilogr. de
scories à l'hectare, et je fis répandre au printemps (fin mars), 200 kilogr.
de nitrate de soude Ă lâhectare. On donna un hersage aprĂšs. Les blĂ©s
400 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
furent également ésherbés et sarelés à la main, travail rendu facile et peu
coûteux par le semis trÚs clair et en ligne.
Ces blés, qui, au début, paraissaient, surtout aux yeux des agriculteurs
mes voisins, ridiculement clairsemĂ©s, ont tallĂ© Ă©normĂ©ment aprĂšs lâĂ©par-
dage du nitrate et ont pris un développement absolument inattendu.
GrĂące Ă l'influence des scories, sans doute aussi Ă leur espacement, ils
nâont pas versĂ© bien que leur hauteur alteignit, en moyenne, 1,65; beau-
coup de tiges avaient jusquâĂ 1",80, Jâai trouvĂ© des pailles dâun diamĂštre
de 6 millimĂštres. Jâai comptĂ© sur certains pieds jusquâĂ 17 tiges, mais la
moyenne Ă©lait de 8 Ă 12 par pied.
Chaque pied portait plusieurs Ă©pis de 10 Ă #1 centimĂštres de long,
comptant 55 Ă 60 grains ; il y avait un grand nombre dâĂ©pis beaucoup plus
grands, de 12 Ă 14 centimĂštres, comptant jusquâĂ 78 grains.
Jâai voulu avoir un point de comparaison; j'ai donc cherchĂ© dans le blĂ©
le mieux réussi que j'ai pu trouver dans la plaine de Bergerac, le plus bel
Ă©pi quâon y pĂ»t voir : il mesurait 8 centimĂštres et contenait 39 grains. La
hauteur du blé était à peine de 1",40 et c'était pourtant un champ excep-
tionnellement beau !
Jâai fini hier de battre ce blĂ©. Le rendement a Ă©tĂ©, pour 80 ares 64
cenliares :
Grains, 1968 kilogr.; paille, 4950 kilogr.; ce qui correspond aux
rendements suivants, Ă lâhectare :
Grains, 2440 kilogr. ; paille, 6138 kilogr.
Ce dernier chiffre surtout m'a vivement frappé. La production de la
paille est toujours insuffisante par ici. Plus de la moitié des fermes achÚ-
tent pour litiÚre des bruyÚres et des ajoncs fournis par la partie boisée
du nord de l'arrondissement, et la dépense occasionnée de ce chef à la
culture ne laisse pas dâĂȘtre considĂ©rable, cesliliĂšres Ă©tant vendues un prix
relativement élevé, soit de 12 à 14 fr. la charretée du poids moyen
de 1000 kilogr. Le prix de la paille atteint souvent 5 fr. les 100 kilogr.
et ne descend jamais au-dessous de 4 fr. le quintal, sur le marché de
Bergerac, oĂč sa vente est Loujours assurĂ©e. Il y a donc pour le cultivateur
un intĂ©rĂȘt de premier ordre Ă obtenir, avec un rendement en grains Ă©levĂ©,
une production de paille aussi considérable que celle que j'ai obtenue,
susceptible d'accroĂźtre dans une trĂšs notable mesure le revenu net de
son exploitation.
Le blé pÚse 81 kilogr. l'hectolitre.
Les rendements que je viens dâavoir l'honneur de vous faire connaĂźtre
sont absolument exceptionnels pour ma région; je vous affirme qu'ils ne
sont jamais atteints dans nos meilleures terres à blé, avec les plus grosses
fumures au fumier de ferme, qui est seul employé ici. Pour moi, il est
manifeste qu'ils sont altribuables surtout Ă l'apport d'acide phosphorique
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 401
et de nitrate fait Ă la terre, et, pour une bonne part aussi, au semis trĂšs
clair que j'ai praliqué.
Dans une autre parcelle contiguë de 44 ares, que j'ai achetée en sep-
tembre dernier, vieille vigne phylloxérée arrachée depuis quatre ans et abso-
lument inculte, jâai obtenu un rĂ©sultat qui confirme absolument le premier.
J'ai ensemencĂ© cette parcelle, aprĂšs un seul labour suivi dâun hersage,
câest-Ă -dire dans les plus mauvaises conditions, avec de lâavoine noire du
pays. Au moment du labour, j'ai fait répandre des scories à raison de
1000 kilogr., et fin mars, du nitrate Ă raison de 250 kilogr. Les semailles
ont été faites tardivement, fin octobre. La récolte, sur ces 44 ares, a été
de 879 kilogr. de grain et de 2000 kilogr. de paille (191,88 Ă lâhectare).
LĂ encore, lâaction des scories et du nitrate est prĂ©pondĂ©rante dans le
résultat obtenu.
En effet, en 1887 el 1888, le propriétaire de cette parcelle l'avait, avant
moi, ensemencĂ©e dâavoine, celle-ci n'avait mĂȘme pas pu Ă©pier et n'avait
pas Ă©lĂ© rĂ©collĂ©e, nâen valant pas la peine.
Voici, enfin, un détail bien typique pour qui connaßt le paysan et son
instinctive horreur pour les pratiques nouvelles! Mon laboureur qui est
en mĂȘme Lemps propriĂ©taire dâun petit lopin de terre, aprĂšs s'ĂȘtre bien
rendu compte des résultats obtenus sur ces deux parcelles, est venu me
prier de lui cĂ©der ce quâil lui faudra de semence de blĂ© Kissengland, et
de faire venir pour lui, cette année, avec les miens, quelques sacs de ces
sels noirs el blancs que j'avais employés.
Et voilĂ un converti Ă la cause des engrais chimiques et des semences
améliorées.
J'ai l'intention dâensemencer encore une quatriĂšme fois, en blĂ©, la
mĂȘme piĂšce de terre.
En procédant comme cette année, je veux, de plus, recommencer mon
expérience de semis à la main, en ligne, à grand espacement. Dans ce
but, j'ai triĂ© moi-mĂȘme, avant la moisson, 300 des plus beaux Ă©pis dont
aucun n'a moins de 12 centimĂštres de long; je compte ne prendre sur
chacun d'eux que les plus beaux grains, et j'espĂšre arriver ainsi Ă des
rĂ©sultats curieux. â Si ce nouvel essai peut prĂ©senter pour vous quelque
intĂ©rĂȘt, je serai heureux de vous en communiquer les rĂ©sultats.
J'espĂšre, Monsieur, que vous excuserez cette bien longue lettre et me
pardonnerez la liberté que j'ai prise de vous entretenir de mes essais ;
il m'a semblĂ©, je l'avoue, que vous ne sauriez en vouloir, mĂȘme Ă uu
parfait inconnu, de vous apporter ce qui lui paraĂźt ĂȘtre un argument de
plus Ă l'appui de la cause dâun intĂ©rĂȘt, si vĂ©ritablement national, que
vous avez prise en mains.
Veuillez, agréer, etc.
P. Pozzi-Escor.
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893, â 1, 26
402 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
M. Pozzi-Escot fait des prosélytes autour de lui : quelques passages
empruntés à sa correspondance intéresseront sans doute nos lecteurs,
en leur montrant quâil ne sâagit pas dâun cas isolĂ©, dâune expĂ©rience
plus ou moins probante, mais bien de procédés de culture économi-
que des blés suscepubles de généralisation.
Voici ce que m'Ă©crivit M. Pozzi en mâenvoyant les rĂ©sultats de la
récolte de 1891 :
Avant de vous faire connaßtre les résultats que j'ai encore obtenus cette
année dans le sol que vous savez, permettez-moi de vous entretenir de
ceux qu'ont obtenus les personnes que j'avais dĂ©cidĂ©es, lâan dernier, Ă
suivre vos conseils.
M. L. Pothier, propriĂ©taire Ă Fronsac, par Douville (Dordogne), mâĂ©crit
le 4 courant :
⏠Jâai fait un essai sur 45 ares qui m'ont produit quinze fois la semence
dans un terrain médiocre. Il est bon de vous dire que cette petite expé-
rience a attirĂ© lâattention de plusieurs propriĂ©taires et ils me demandaient
dâoĂč venait cette diffĂ©rence avec les blĂ©s voisins. D'aprĂšs les explications
et les conseils que je leur donnai plusieurs en essayeront. J'ajoute quâĂ
lâavenir tout le blĂ© que je ferai venir sera traitĂ© dans les mĂȘmes conditions. »
M. Pimouquet, propriétaire à Bardesse, commune de Mandacou, canton
dâIssigeac, m'Ă©crit de son cĂŽtĂ© :
« Pour me bien rendre compte, j'ai employé les engrais dans différents
endroits de terres non fumées depuis bien des années et qui donnent
ordinairement une petite moyenne de paille, mais dont le rendement en
grain est mĂ©diocre. Jâai employĂ© 100 kilogr. de scories sur une conte-
nance de 12 Ă 13 ares et, au printemps, du nitrate de soude, Ă raison de
200 kilogr. Ă lâhectare. Le blĂ©, semĂ© Ă la mode ordinaire du pays, Ă
beaucoup souffert de la gelée dans toute la piÚce, qui contient environ
00 ares; mais lĂ oĂč j'avais employĂ© les scories, il y a eu beaucoup moins
de mal. Aussi, aprĂšs lâĂ©pandage du nitrate, a-t-il pris une vigueur magni-
fique, et je ne crains pas de dire que, dans cette portion, la récolte était
triple de ce quâelle Ă©tait dans le reste de la piĂšce. A cĂŽtĂ©, j'ai employĂ© du
nitrate sans scories : là , au printemps, le blé a bien pris de la verdeur,
mais les tiges nâont pas pris un grand dĂ©veloppement, et, câest Ă peine si
j'ai Ă©tĂ© rĂ©munĂ©rĂ© de la dĂ©pense. Dans dâautres terres de coteau, trĂšs cal-
caires, qui donnent peu de paille, mais relativement beaucoup de grain,
le nitrate seul m'a donné de trÚs beaux résultats, mais avec les scories,
quoique la différence fût moins grande que dans la premiÚre piÚce, le
rendement a encore été supérieur. Inutile de vous dire que je ferai mon
possible pour encourager mes voisins Ă en faire lâessai.
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 403
« Cette année, notamment, M. BoissiÚre, maire de Monsaguel, que vous
connaissez sans doute comme un excellent agriculteur, est dĂ©cidĂ© Ă
employer beaucoup de scories et de nitrate. Je ne puis, donc, Monsieur,
que vous remercier encore d'avoir bien voulu me donner les renseigne-
ments qui m'ont amenĂ© aux bons rĂ©sultats que jâai obtenus ».
Les renseignements verbaux fournis par les intéressés me permeltent
de vous citer encore les résultats suivants : M. JérÎme Monteil, proprié-
taire Ă la Mouline, prĂšs Bergerac, a obtenu de lâemploi des scories et du
nitrate des rendements de 17 et 21 pour 1 de semence, suivant les ter-
rains ; M. Branda, pharmacien à Bergerac, a eu, dans sa propriété de
Saint-Agne, prÚs Bergerac, en terres, il est vrai, excellentes, de qualité
similaire à celles de la Graulet, que vous avez analysées, le magnifique
rendement de 49 hectolitres sur 45 ares (42°!,2 Ă lâhectare) avec 59 kilogr.
de semence, soit plus de 28 1/2 pour 1 de semence, (Je lui avais fourni
pour la semence de mon blé Kissengland sélectionné.) Le blé de M. Branda
ne pÚse que 76 kilogr. à l'hectolitre, ayant versé ; la quantité de 200 ki-
logr. de nitrate à l'hectare était, je crois, trop forte, étant donnée la ri-
chesse natureile du sol.
M. Pozzi-Escot, en me rendant compte des essais de culture de
blĂ© dont je viens de parler, mâĂ©crivait ce qui suit :
Le rendement des céréales a sensiblement baissé dans notre région
depuis une trentaine d'années. J'ai, comme point de comparaison, les
notes de culture de mon grand-pĂšre sâappliquant Ă deux mĂ©tairies de
40 hectares environ chacune, situées sur la rive gauche de la Dordogne,
dans la partie la plus fertile de la plaine de Bergerac.
De 1837 à 1852, le rendement moyen de ces deux métairies était de
17 hectolitres de blé à l'hectare; il a atteint, dans certaines années, 23 hec-
tolitres, et parfois il est descendu Ă 12. Jâai eu occasion de suivre de
prĂšs le rendement de ces mĂȘmes propriĂ©tĂ©s, sous une autre administra-
tion, de 4870 Ă 1884. Pendant cette pĂ©riode, le renlement moyen nâa Ă©tĂ©
que de 45 hectolitres; le plus élevé atteignant 19 hectolitres et le plus
faible tombant Ă 9 hectolitres.
Depuis une dizaine d'années, le rendement moyen de celte région me
paraĂźt ĂȘtre de 14 hectolitres environ pour le froment; de 25 hectolitres
pour lâavoine; le maximum de 18 hectolitres, pour les blĂ©s, Ă©tant rare-
ment atteint. Pour l'avoine, les deux extrĂȘmes vont de 30 hectolitres,
trĂšs exceptionnellement, Ă 15 hectolitres. Le poids de la paille rĂ©coltĂ©e Ă
lâhectare ne dĂ©passe pas 2 000 kilogr. en moyenne. On emploie 225 litres
de semence Ă lâhectare. On sĂšme trop tard, du 15 octobre au 15 no-
vembre, et presque jamais sur fumure récente, et quelle fumure ! 20 000
404 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
à 25 000 kilogr. de mauvais fumier, mal fait, pailleux et lavé par les pluies,
passent pour un maximum que peude cultivateurs se permettent. Les instru-
ments perfectionnés, semoirs, scarificateurs, etc., font défaut, pas un seul
des grands propriétaires ne se décidant à les introduire dans leurs exploi-
tations. Le gros bĂ©tail est rare; en moyenne, il nâatteint pas le chiffre
dâune bĂȘte pour 3 hectares dans la plaine et beaucoup moins dans le reste
du pays.
Ainsi donc, de 17 hectolitres en 1840, le rendement moyen en
blĂ© est tombĂ© Ă 14 hectolitres Ă lâhectare, soit 3 hectolitres, ou plus
de 18 p. 100 de la récolte d'il y a un demi-siÚcle. Ce résultat qui
nâest pas exclusif au dĂ©partement de la Dordogne, semble con-
firmer lâopinion que l'Ă©lĂ©vation du rendement moyen du sol fran-
çais en blĂ© qui, vers 1840, nâatteignait pas 14 hectolitres et qui est
aujourdâhui Ă prĂšs de 16, est dĂč bien plus Ă l'accroissement trĂšs
notable de nombreuses cultures partielles qu'Ă lâaugmentation de la
production sur la plus grande partie des terres consacrées à la cul-
ture du blĂ©. Quoi quâil en soit de la valeur de cette hypothĂšse, il
nâest pas douteux que la diminution signalĂ©e par M. Pozzi-Escot tient
Ă lâappauvrissement progressif du sol de la Dordogne, par suite de
la soustraction des matiÚres fertilisantes insuffisamment compensées
par la médiocre fumure indiquée plus haut. Comme Pa constaté la
statistique officielle, en 1891, la rĂ©colte moyenne nâa pas dĂ©passĂ©,
en Dordogne, le chiffre de 10 hectolitres Ă lâhectare, si tant est
quâelle lâait atteint. (En 1893, elle a Ă©tĂ© de 131,6).
Voilà donc un département dans lequel on récoltait en moyenne :
A L'HECTARE.
ENRNS AOL EAU LAN TURANSPESREE 17 hectolitres.
Derts80:Ă 41890 LASER IENER 14 â
et qui nâa donnĂ© en 1891 que 10 hectolitres.
Les résultats obtenus, depuis quatre ans, à Mont-de-Neyrac, par
M. Pozzi-Escot, tirent de ces constatations numériques une importance
toute spéciale. Ils nous apportent, en effet, une démonstration de
plus dâune vĂ©ritĂ© trop mĂ©connue encore de la plupart de nos petits
cultivateurs, Ă savoir quâon peut, en sol mĂ©diocre, dans une annĂ©e
mauvaise, obtenir des récoltes trÚs rémunératrices.
En pareille matiĂšre, on ne saurait trop multiplier les exemples
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 405
prĂ©cis du succĂšs des bonnes mĂ©thodes culturales. La publication dâun
extrait de la lettre que m'a adressée M. Georges Dethan, agriculteur
au chĂąteau de la CĂŽte, me paraĂźt propre Ă servir trĂšs utilement la
cause que Je défends avec une persistance rendue chaque jour plus
tenace, à raison des témoignages nombreux que les cultivateurs
m'apportent de lâefficacitĂ© des moyens que je voudrais faire pĂ©nĂ©trer
jusque dans les plus humbles de nos exploitations rurales.
Parmi les sols qui constituent le territoire français, 1l en est deux
catégories qui couvrent des superficies immenses : les terres argilo-
siliceuses et les terres calcaires. Je viens de faire connaßtre les résul-
tats excellents obtenus en sol de la premiÚre catégorie (silicéo-argi-
leux) par emploi simultané des phosphates et du nitrate de soude :
28 à 99 hectolitres de blé en sol pauvre, alors que, par les procédés
de fumure usités dans le voisinage, on récoltait cette année 6 à 8
hectolitres seulement. Dans le mĂȘme dĂ©partement, mais en sol fran-
chement calcaire, M. G. Dethan nâa pas employĂ© avec moins de
succÚs, en grande culture, les engrais phosphatés et azotés, comme
on va le voir par sa correspondance. La dissemblance totale de la
constitution des terres emblavées par MM. Pozzi-Escot et Dethan
donne aux rapprochements faciles à faire entre les beaux résultats
quâils ont obtenus dans lâune des plus mauvaises annĂ©es que nous ayons
subies depuis longtemps, un intĂ©rĂȘt considĂ©rable : ils doivent ĂȘtre
un puissant encouragement pour les cultivateurs désireux de prépa-
rer, pour les années prochaines, une revanche éclatante sur la cam-
pagne de 1890-1891.
Voici ce que mâĂ©crivait M. G. Dethan Ă la date du 14 octobre
1891 :
ChĂąteau de la CĂŽte. par Bourdeilles (Dordogne).
... Veuillez me permettre de venir vous donner quelques renseigne-
ments sur les résultats que j'ai obtenus depuis plusieurs années dans une
autre partie de la Dordogne (dans des terres assez différentes de celles de
M. Pozzi-Escot, puisque les miennes sont fort chargées en calcaire), en
opĂ©rant sur toute une sole de blĂ© qui comprend chaque annĂ©e 12 Ă
15 hectares. Ceci ne s'applique quâĂ une partie de ma propriĂ©tĂ© que
J'exploite en faire-valoir direct; lâautre partie est cultivĂ©e par des
métayers qui jusqu'ici s'étaient montrés rebelles aux améliorations et
innovations.
406 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Dans la période de 1882 à 1835, nos rendements en blés, obtenus sans
engrais commerciaux et suivant les procédés de culture usités dans le
pays, varialent de 81,6 Ă 12 quintaux mĂ©triques de grains Ă lâhectare,
moyenne 104,7 (14 hectolitres environ).
à cette époque, l'analyse de mes terres démontra leur insuffisance trÚs
nolable en acide phosphorique. Ces terres Ă©lant trĂšs calcaires, l'emploi
du superphosphate était tout indiqué '. En 1886 et 1887, je commencai
Ă employer les superphosphates seuls; les rendements sâĂ©levĂšrent Ă
12%%,2 en 1886, et Ă 141,7 de grains par hectare lâannĂ©e suivante. A
partir de la récolte de 1888, j'employai, concurremment avec le super-
phosphate, du nitrate de soude : la production sâĂ©leva aussitĂŽt, en 1888,
Ă 19%%,2 de grains Ă l'hectare; en 1889, annĂ©e oĂč il a plu beaucoup Ă
lâĂ©poque de la floraison, on ne rĂ©colte que 171,30 ; en 1890, on atteint
214,6. En mĂȘme temps, la rĂ©colte de paille a doublĂ©. Dans la pĂ©riode
de 1882 Ă 1889, celle-ci Ă©tait de 1 500 kilogr. Ă 2000 kilogr. Ă lâhectare;
aujurdâhui elle est de plus de 4000 kilogr. Les blĂ©s, qui avaient 1 mĂštre
de hauteur, ont maintenant de 1",80 Ă 2 mĂštres.
J'ai lâhabitude de semer mes blĂ©s de bonne heure; actuellement, au
15 octobre, j'ai plus de la moitiĂ© de mes blĂ©s en terre ; lâannĂ©e derniĂšre,
Ă pareille Ă©poque, cette proportion Ă©tait mĂȘme dĂ©passĂ©e. Aussi, la plu-
part de mes blés ont peu souffert de la température rigoureuse de l'hiver
dernier, et, cependant, le thermomĂštre est descendu ici Ă â 18°, sans
neige. Les blés exposés au midi avaient peu souffert; quelques piÚces
exposées au nord et semées plus tardivement étaient, aprÚs l'hiver,
plus endommagĂ©es, mais sous lâaction de vigoureuses fumures au nitrate
de soude, répandu dans les pieces les plus atteintes, à la dose de 180
et mĂšme de 200 kilogr. Ă lâhectare, le blĂ© a tallĂ© et a repris bon aspect.
Sur une surface de 12 hectares je nâai dĂ» rĂ©pandre au printemps qu'un
hectolitre de semence (blé de Bordeaux semé dans les premiers jours
de mars). Aussi, malgré cel hiver rigoureux, ma récolte de blé sur mon
faire-valoir a été, cette année, la meilleure que j'aie jamais eue; dans
la partie exploitĂ©e par mes mĂ©layers, câest, au contraire, la plus piteuse
récolte qu'il ait jamais été donné de voir et, cependant, les terres sont
situées cÎte à cÎle.
Un autre flĂ©au de lâannĂ©e a Ă©tĂ© la rouille qui, chez nos mĂ©tayers et chez
1. J'ai dit, à plusieurs reprises, qu'en général les superphosphates donnent, en sol
calcaire, de meilleurs résultats que les phosphates minéraux non traités par l'acide
sulfurique On n'a pas donné jusqu'ici d'explication bien nette de ce fait d'observation
pratique ; dans certains terrains extra-calcaires on a attribuĂ© lâaction des Ssuperphos-
pha'es Ă l'absence dâacide sulfurique dans le sol; mais les preuves certaines Ă l'appui
de cette interprétation font encore défaut. LG:
LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 407
nos voisins, Ă ravagĂ© la plus grande partie des blĂ©s, ne laissant quâun
grain petit, ridé, impropre à la semence. Grùce, sans doute, à leur
précocité, à leur vigueur, les miens ont été préservés : ils étaient mûrs,
lorsque la rouille sâest produite.
En résumé, ma récolte, sur une surface totale de 11",74, atteint,
Ă lâhectare, une moyenne de 261,08 de grain bien plein. Seulement,
vu la saison pluvieuse, le blĂ© avait Ă©tĂ© rentrĂ© humide et lâhectolitre de
grain ne pesait que 79 kilogr., ce qui donne un rendement moyen de
34,71 par hectare (prĂšs de 21 hectolitres de plus que la moyenne de
celte année).
Les principales variétés de blé cultivées ont été :
Le blé rouge de Bordeaux (sur5"?,43), qui a donné une moyenne de 251,33
Ă lâhectare, atteignant dans la meilleure piĂšce 31%,05 (41"!,4), descendant,
dans la moins bonne, Ă 191,62.
Le blé Kissengland, cultivé sur 64 ares, qui a donné 221,05 de grains
Ă lâhectare.
Le mĂȘme blĂ©, mĂ©langĂ© de Bordeaux, cultivĂ© sur 1,51, a atteint
26 quintaux mĂ©triques Ă lâhectare.
Le blé de Bordeaux, en mélange avec le blé Lamed, cultivé sur
22,50, a fourni 31,44 de grains Ă lâhectare (42 hectolitres).
Enfin, le blé jaune à barbe de Desprez de Capelle (Nord), cultivé sur
82 ares, a donnĂ© 321,01 Ă lâhectare (prĂšs de 43 hectolitres).
Les meilleurs rendements ont donc été fournis par le blé jaune à barbe
Desprez, le mélange de Bordeaux et Lamed, le blé de Bordeaux pur : les
rendements dĂ©passent 40 hectolitres Ă lâhectare ou s'approchent beaucoup
de ce chiffre.
La quantitĂ© moyenne dâengrais employĂ© a Ă©tĂ© de 4 Ă 600 kilogr. de
superphosphate (13 p. 100 Ă 15 p. 100 dâacide phosphorique) par hectare.
La dose de nitrate a variĂ© de 65 Ă 200 kilogr. par hectare, suivant lâĂ©tat
de végétation des différentes piÚces de terre et le degré auquel elles
avaient Ă©tĂ© Ă©prouvĂ©es par la gelĂ©e. La dose de 200 kilogr. nâa Ă©tĂ© atteinte
que sur les parties paraissant sérieusement éprouvées.
Pendant que jâobtenais les chiffres ci-dessus, mes mĂ©tayers avaient une
rĂ©colte moyenne de 8 hectolitres par hectare : ce pouvait ĂȘtre Ă peu prĂšs
la moyenne de la contrĂ©e. (M. G. Dethan a donc rĂ©coltĂ©, Ă lâhectare, cinq
fois autant de blé que ses voisins.)
En comparant les résultats que je viens de vous indiquer avec ceux de
la pĂ©riode 1882-18%5, on voit que le rendement a plus que doublĂ©; il nâa
pas encore triplĂ©; mais avec le temps, j'ai lâespoir dây arriver. Ge rĂ©sultat
est-il dĂ» entiĂšrement Ă l'emploi des engrais commerciaux? En grande
partie; cependant, je dois ajouter que des terres mieux fumées, un meil-
leur outillage, car tout mon matériel a été renouvelé depuis cette époque,
408 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE,. :
l'emploi de charrue, double-brabant, herses Howard, semoir en ligne,
rouleau Croskill, etc., enfin le sarclage des blĂ©s ont dĂ» aussi contribuer Ă
cette élévation des rendements.
Je tenais Ă vous faire part de ces chiffres, pour vous confirmer, dans la
mĂȘme rĂ©gion et en grande culture, les rĂ©sullats obtenus pÀùr vos hono-
rables correspondants sur des champs dâexpĂ©rience plus restreints. Je
voulais prouver que, mĂȘme dans nos terres assez infĂ©rieures et longtemps
mal entretenues du PĂ©rigord, on pouvait atteindre des rendements qui,
sans égaler ceux des terres depuis longtemps améliorées du pays nord,
ne sâen Ă©loignent plus, du moins trop sensiblement. Je serais trĂšs heureux
si lâapport de mon modeste contingent pouvait ĂȘtre de quelque utilitĂ©
- à la vulgarisation des procédés de culture que vous ne cessez de recom-
mander.
Si lâon rapproche les faits constatĂ©s dans cette lettre de ceux que
j'ai rapportés précédemment, on est frappé de leur concordance,
malgé la profonde différence des terres de MM. Pozzi-Escot et
G. Dethan.
En sol siliceux, comme en sol calcaire, lâacide phosphorique etle
nitrate de soude ont donné ou rendu au blé, aprÚs les rigueurs
extrĂȘmes de l'hiver, une vigueur remarquable permettant Ă la plante
de taller, de se développer incomparablement mieux que les blés
voisins et de résister aux atteintes de la rouille, qui, à Mont-de-Neyrac
comme à la CÎte, a porté le dernier coup à la récolte des voisins
de mes correspondants. 180 kilogr. dâacide phosphorique dans le
cas de l'emploi des scories; moitiĂ© de cette dose environ dans Ăle
cas des superphosphates, préférables en sol calcaire, ont suffi, avec
lâaide de 60 Ă 200 kilogr. de nitrate (Ă lâhectare), suivant les al-
lures de la rĂ©colte, Ă produire des rendements presque Ă©gaux Ă
ceux des terres de premiÚre qualité du centre ou du nord de Ja
France, tant en grain quâen paille. Les rendements obtenus Ă Mont-
de-Neyrac sur de petites surfaces ont été atteints el parfois dépassés
en grande culture à la CÎte; enfin, la densité du grain (poids de
lâhectolitre) a dĂ©passĂ© de beaucoup, surtout Ă Mont-de-Neyrac, celle
des misérables blés de la région.
L. GRANDEAU.
ET DES JARDINS. 409
FUMURE DES CHAMPS
LA
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DESTRUCTION
DES
ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE
(RONGEURS ET INSECTES)
PAR LES MALADIES CONTAGIEUSES
Par Jean DANYSZ
IMPORTANCE DES PERTES ET ORGANISATION DES MOYENS
DE DĂFENSE
Les pertes occasionnées par les animaux nuisibles se chiffrent par
centaines de millions. Le hannelon et sa larve, le ver blanc, dé-
truisent annuellement, dâaprĂšs les Ă©valuations de M. L. Grandeau,
pour 300 millions de francs de récoltes, les mulots et les campagnols
en enlÚvent presque autant, la noctuelle des moissons el le nématode
ne laissent rien sur les champs de betteraves; les innombrables
espÚces de pucerons, dont le phylloxéra est le plus redoutable, ra-
vagent les vignes et les arbres fruitiers ; le charançon, lâĂ©phestia et
plusieurs espĂšces de mites sâattaquent aux grains et aux farines;
enfin, les champignons parasites, les moisissures, qui sâattaquent
indifféremment à toutes les substances alimentaires dans les champs
et dans les magasins, complÚtent la série de ces pertes et ravages,
dont le Lotal atteint certainement, sâil ne dĂ©passe pas, le quart de
toutes nos récoltes.
Abandonner ces richesses aux parasites, câest perdre en grande
partie la plus-value en rĂ©coltes que lâagriculture espĂšre obtenir par
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES Ă L'AGRICULTURE. 4ll
la culture intensive, et naturellement plus cette culture devient coĂč-
teuse, plus considĂ©rables et plus sensibles deviennent en mĂȘme temps
les pertes.
Ce serait, en effet, une grave erreur que de croire que, dans les
pays infestĂ©s dâune façon chronique par les campagnols, les vers
blancs, ou tout autre insecte, on obtiendra des rendements plus
forts au moyen des semailles plus intenses et des amendements
appropriĂ©s. Le cultivateur se dit quâen semant deux quintaux de blĂ©
par hectare au lieu dâun et en ajoutant au fumier des phosphates et
des nitrates, il fera la part du feu et obtiendra tout de mĂȘme une
belle récolte.
Malheureusement ce raisonnement est loin dâĂȘtre juste. Les para-
sites de lâagriculture, les insectes comme les rongeurs, se plaisent
bien davantage dans les terres fertiles et dans une végétation riche
et luxuriante que dans les terres maigres oĂč il nây a que peu de chose
Ă manger.
Les animaux qui vivent aux dépens de nos récoltes se développent
d'autant mieux et deviennent d'autant plus nombreux qu'ils trouvent
une nourriture plus abondante, câest un fait bien reconnu aujour-
dâhui. D'autre part, la culture rĂ©pĂ©tĂ©e dâune denrĂ©e sur le mĂȘme
champ favorise le développement de certaines espÚces d'insectes qui,
trouvant toujours une nourriture abondante, se multiplient dâune
façon tout à fait anormale. Le bénéfice des cultures intensives de-
vient ainsi fort souvent illusoire. Il faut donc se défendre contre les
animaux nuisibles et cette défense, qui amënera la diminution pro-
gressive des pertes, doit ĂȘtre conduite d'une façon tout aussi mĂ©tho-
dique, elle mĂ©rite tout autant d'intĂ©rĂȘt et de soins que lâensemble
des moyens mis en jeu par lâagricullure moderne pour augmenter le
rendement de la terre.
La science met chaque jour entre nos mains des moyens de dé-
fense nouveaux ; on nâa quâĂ les mettre Ă profit et donner Ă cette
dĂ©fense contre les animaux nuisibles lâorganisation conforme Ă lâim-
portance des intĂ©rĂȘts engagĂ©s.
Les résultats deviendront certainement trÚs vite appréciables ;
mais il ne faudrait pas croire pourtant que le mal sera enlevé du
jour au lendemain comme avec une baguette magique.
412 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
De mĂȘme que pour amender une terre et en augmenter le rende-
ment, il faut, pour défendre les récoltes el diminuer les pertes, des
efforts persistants et soutenus; mais combien peu de chose seront
ces efforts en comparaison avec le résultat final !
Prenons, pour fixer les idées, comme exeïinple une ferme de 50
hectares de bonnes terres fortes cultivées en blé et en prairies artifi-
cielles, comme on en rencontre beaucoup dans les départements de
Est. â Supposons cette ferme infestĂ©e par les campagnols, qui
causent, au bas mot, une perte moyenne de 20 fr. par hectare, soit
1 000 fr. par an. Cela fera pour un bail de 12 ans une perte totale
de 12 000 fr.
Or, avec une dépense de 5 fr. au maximum par hectare, tous frais
compris, continuée pendant deux années, on peut détruire tous les
campagnols et pour toujours. La dépense pour la destruction de ces
animaux sâĂ©lĂšvera donc Ă 250 fr. par an, soit Ă 900 fr. en tout, au
maximum, Le fermier aura, par conséquent, réalisé de ce chef, au
bout de 12 années, un bénéfice de 11 000 fr. en chiffres ronds.
On pourrait en dire autant des vers blancs, des noctuelles, néma-
todes, etc., dans les champs, des Ă©phestias dans les moulins, des cha-
rançons dans les greniers el les granges, etc., etc.
La recherche des movens de destruction des animaux nuisibles est
une science qui demande tout autant d'application el mérite tout
autant d'intĂ©rĂȘt que toute autre branche des sciences agronomiques.
Elle mĂ©rite dâĂȘtre tout autant rĂ©pandue et vulgarisĂ©e, et, une fois
bien appliquée, elle permettra au cultivateur de profiter réellement
des amendements et des amĂ©liorations coĂ»teuses quâil sâefforce dâin-
troduire dans la préparation de ses terres pour en augmenter le
rendement.
Comme nous le verrons plus loin, les maladies contagieuses
donnent au cultivateur des moyens de défense bien plus efficaces,
en mĂȘme temps que plus simples Ă employer et moins coĂ»teux, que
tout ce que lâon Ă prĂ©conisĂ© jusquâĂ prĂ©sent pour dĂ©truire les ani-
maux nuisibles.
GrĂące Ă lâheureuse initiative de M. Le Moult et aux travaux de
MM. Giard, Prilleux et Delacroix, on connaĂźt aujourd'hui un champi-
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 413
gnon parasite qui cause une maladie mortelle aux hannetons et aux
vers blancs ; d'autre part, une épidémie spontanée que nous avons eu
lâoccasion d'observer chez les campagnols qui infestaient une localitĂ©
voisine de Paris, nous a permis de trouver et d'Ă©tudier un microbe
trĂšs virulent pour tous les petits rongeurs connus en France. Des
travaux trÚs importants et trÚs concluants quant aux résultats obte-
nus, ont Ă©lĂ© faits sur ces sujets en Russie et aux Ătats-Unis dâAmĂ©-
rique. Aussi, ayant suivi de trÚs prÚs les expériences et les essais,
faits jusquâĂ prĂ©sent, nous croyons pouvoir affirmer aujourdâhui que
cette nouvelle mĂ©thode de dĂ©fense Ă fait ses preuves ; quâelle peut
passer définitivement dans le domaine de la pratique et que, bien
appliquée, elle seule finira par avoir raison de ces terribles ennemis
de lâagriculture.
CHAPITRE PREMIER
LE CHOLĂRA DES RONGEURS NUISIBLES
(Gampagnols, mulots, souris et rats)
Les campagnols font le désespoir des cultivateurs depuis que l'on
cultive la terre. DĂšs la plus haute antiquitĂ©, dans lâancienne GrĂšce
surtout, ces petits rongeurs ont acquis une célébrité presque aussi
triste que les vols de sauterelles en Ăgypte. On les rencontre dans
toute la zone tempĂ©rĂ©e et mĂȘme dans les rĂ©gions froides de l'Asie,
de lâEurope et de l'AmĂ©rique, oĂč ils sont, de tous les mammifĂšres,
certainement les plus nombreux.
En France, oĂč on les confond gĂ©nĂ©ralement avec les rats et les
souris sous le nom de mulols, on en connait quatre espĂšces et plu-
sieurs variétés.
Le campagnol des champs (Arvicola agrestis ou arvalis), le plus
répandu de tous, occupe les riches plaines de l'Est, du Nord-Est
dâune part, celles du Sud-Ouest et plus particuliĂšrement la rĂ©gion
comprise entre Paris, Bordeaux et Nantes d'autre part.
414 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Le campagnol souterrain (A. sublerraneus) préfÚre les plaines
basses aux régions montagneuses. En France, il habite surtout les
prairies humides, les vallées boisées au pied des montagnes et les
prés salés au bord de la mer. |
Le campagnuol roussĂątre (A. rutilus) est une espĂšce plutĂŽt monta-
gnarde. On le rencontre dans le massif des Alpes et des Pyrénées
oĂč 1l s'Ă©lĂšve jusquâĂ la limite des neiges perpĂ©tuelles ; on le trouve
aussi sur les hauteurs du Languedoc et du Roussillon.
Enfin, nous avons encore, répandue dans toute la France, la plus
grande espĂšce en genre Arvicola, le campagnol amphibie ou rat
dâeau qui habite les berges des cours dâeau et des Ă©tangs.
Les deux premiĂšres espĂšces qui habitent et nichent dans des ga-
leries souterraines, parfois trĂšs Ă©tendues et profondes, sont aussi les
seules rĂ©ellement dangereuses aux rĂ©coltes. Dans les rĂ©gions oĂč il y
en a, une invasion est à craindre chaque année et alors toutes les
récoltes sont ravagées.
Ils apparaissent presque subitement, vers la fin de l'été, en légions
innombrables, ne respectant ni les plantes fourragÚres, ni les céréales
etsâattaquant mĂȘme aux vignes et aux jeunes arbres dont ils rongent
l'Ă©corce et les racines.
Dans le courant de ce siÚcle on a gardé, en France, la mémoire
de neuf grandes invasions de campagnols. â En 1801, toute la
France septentrionale et centrale fut ravagée ; les départements de
la Vendée, des Deux-SÚvres et de la Charente-Inférieure perdirent
presque toutes leurs rĂ©coltes. Une commission nommĂ©e par lâAca-
démie des sciences pour constater les dégùts causés, releva pour
quinze communes seulement du département de la Vendée une perte
de 3 millions de francs. â En 1829, 32, 56, 63, 67, 72, 80 et 84 et
enfin en 1892 il y avait des invasions partielles ou générales qui ont
occasionnĂ© des pertes se chiffrant par 10, 15 et mĂȘme 90 millions
par département.
La question de la destruction des campagnols Ă©tait donc de tout
temps dâune importance capitale pour lâagriculture, et on peut mĂȘme
affirmer quâelle devient chaque annĂ©e plus importante. Nous n'avons
vu, en effet, que trois grandes invasions dans la premiÚre moitié de
ce siĂšcle, cinq invasions entre 1850 et 1880, et trois dans la der-
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 419
niÚre douzaine d'années. Il semblerait donc que ces invasions de-
viennent de plus en plus fréquentes et comme la valeur de la terre,
les frais d'exploitation et de culture deviennent en mĂȘme temps
chaque année plus élevés, les pertes le deviennent, par conséquent,
aussi dans la mĂȘme proportion.
L'Ă©tude de cette question a donc Ă©tĂ© lâune des premiĂšres dont a
eu Ă sâoccuper le Laboratoire crĂ©Ă© Ă la Bourse de commerce de
Paris dansle but spĂ©cial dâĂ©tudier les moyens pratiquement appli-
cables pour défendre les cultures contre les animaux nuisibles.
Nous avons dit plus haut que les campagnols se montrent tou-
jours presque subitement vers la fin de lâĂ©tĂ©; or quelles sont les
causes de ces apparitions subites? de quelle façon se produisent
les invasions aussi intenses et parfois aussi générales à certaines
Ă©poques ?
Câest ce qu'il fallait dâabord bien Ă©tablir pour chercher un moyen
de défense rationnel et radical.
On a admis pendant bien longtemps â et cette opinion est encore
aujourdâhui gĂ©nĂ©ralement accrĂ©ditĂ©e chez les cultivateurs â que les
campagnols sont des animaux migrateurs; et, en effet, quand on
observe la vie de ces rongeurs dans une région délerminée pendant
plusieurs années de suite, on voit leur nombre augmenter et dimi-
nuer en certaines saisons et en certaines années sans aucune tran-
sition apparente. Peu nombreux au printemps, on les voit parfois
apparaßtre en légions innombrables en septembre et octobre et dis-
paraitre complÚtement en décembre ; la croyance à des invasions
subites suivies par des Ă©migrations en masse semblait donc trĂšs
admissible.
Or, dâaprĂšs les recherches de Crampe, confirmĂ©es par celles de
Ritzema Bos et par nos propres observations, on peut toujours
admettre avec certitude que, quel que soit le nombre de campagnols
dans une région à un moment donné, ils sont tous nés sur place.
Ils s'Ă©tendent bien dâun champ sur dâautres champs voisins en les
envahissant progressivement dans toutes les directions et formant,
pour ainsi dire, des taches de plus en plus larges, mais nâĂ©migrent
jamais au loin en troupes nombreuses, comme, par exemple, les
lemmings en Scandinavie ou les tamias et spermophiles (marmottes
416 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
de Sibérie) qui descendent par centaines de-millions des hauteurs de
l'Oural et envahissent les plaines de la Russie orientale.
L'intensité et la rapidité de leurs invasions sont dues exclusive-
ment à la fécondité incroyable de ces rongeurs, fécondité favorisée
encore par la prépondérance numérique constante des femelles sur
les mĂąles.
La saison des amours commence avec les premiers beaux jours de
printemps, câest-Ă -dire, dans nos rĂ©gions, bien souvent en fĂ©vrier;
la femelle porte dix-huit jours et met bas cinq Ă sept petits, qui
Ă deux mois sont dĂ©jĂ adultes et prĂȘts Ă la reproduction. Dix Ă
douze jours aprĂšs la naissance des petits, les femelles peuvent
sâaccoupler Ă nouveau, de sorte quâun couple de campagnols, en
supposant que le premier accouplement ait lieu le 20 février, don-
nera dans le courant de la belle saison :
La. â 920 fĂ©vrier. Premier accouplement.
8 mars. PremiÚre portée : 7 petits dont 5 femelles.
46. â 20 mars. DeuxiĂšme accouplement.
8 avril. DeuxiÚme portée : 7 pelits dont 5 femelles.
Nous aurons donc en avril 16 campagnols.
Les campagnols qui ont passé l'hiver donnent rarement plus de
3 portées dans le courant de la deuxiÚme année ; ils meurent géné-
ralement au commencement de lâĂ©tĂ©.
La premiÚre portée (14) du 8 mars donnera :
24. â S mai. Premier accouplement, fin avril . HU RENTE asc ei DER
26 mai. 1°° portée : 5 femelles dont chacune donnera 4 petits. . . 20
20, â 8 juin. DeuxiĂšme accouplement : |
26 juin. 2° portée : 5 femelles dont chacune donnera 4 petits. . . 20 } 95
2c. â 26 juillet. 3° portĂ©e : 5 femelles dont chacune donnera 5 petits. 29
24. â 16 aoĂ»t. 4° portĂ©e : 5 femelles dont chacune donnera G petits. , . 30
La portĂ©e 15 du 8 avril au 26 septembre donnera un nombre de petits Ă©gal Ă
celui dela portée la; s0it: 4 1709 MO EMNRNt CARNET ENS
ENULOUL ;e EM NN EN TEE PE CICRE
Ainsi, un seule couple adulte au mois de février peut donner en
automne 206 descendants, auxquels peut venir encore sâajouter la
descendance des portées 24 (60 petits en juillet), 2b (60 petits en
août); de sorte que, dans des conditions exceptionnellement favo-
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 417
rables Ă leur reproduction, la descendance dâun seul couple peut dĂ©-
passer le nombre de 350 individus dont, en moyenne, 250 femelles.
Dans un champ dâun hectare sur lequel il serait restĂ© au sortir de
lâhiver 150 campagnols, câest-Ă -dire un nombre Ă peine apprĂ©ciable,
il y en aurait donc en juillet déjà plus de 10 000 et en septembre plus
de 20 000 individus par le seul effet de leur multiplication normale.
Heureusement pour lâagriculture, les campagnols ont des ennemis
naturels aussi nombreux que variés : les portées de septembre et
d'octobre n'arrivent généralement pas en pleine vigueur avant l'en-
trĂ©e de lâhiver et les premiĂšres intempĂ©ries les font souvent pĂ©rir
presque complÚtement; les gelées tardives du printemps, quand elles
surviennent brusquement aprĂšs quelques jours dâun temps sec et
doux, détruisent un grand nombre de femelles pleines et de petits
nouveau-nés. Les oiseaux de proie et les petits mammifÚres carnas-
siers, tels que les taupes, les musaraignes, les hérissons, les petites
belettes et mĂȘme les renards leur font une chasse impitoyable pen-
dant toute lâannĂ©e. Enfin, quand en l'absence de ces diffĂ©rentes
causes de destruction, ou malgré elles, le nombre des campagnols
devient extrĂȘmement grand en automne, la rapiditĂ© et l'intensitĂ© de
leur mulĂŒplication devient elle-mĂȘme la cause principale de leur
disparition en masse.
En effet, quand ils deviennent extrĂȘmement nombreux dans un
espace donnĂ©, comme ils gaspillent encore plus quâils ne mangent,
ils finissent presque toujours par manquer dâaliments substantiels ;
alors, affaiblis par une nourriture insuffisante, ils sont envahis Ă
leur tour par des insectes et champignons parasites (puces, tiques,
etc.) et enfin, ils sont dĂ©cimĂ©s par des maladies Ă©pidĂ©miques dâau-
tant plus meurtriĂšres pour eux qu'ils sont plus nombreux.
M. Ritzema Bos relate plusieurs cas dâĂ©pidĂ©mie charbonneuse
parmi les campagnols en Allemagne ; nous-mĂȘme, nous avons eu
lâoccasion d'observer, depuis que nous nous occupons de cette ques-
lion, une disparition presque complĂšte de ces rongeurs Ă la suite
dâune Ă©pidĂ©mie dâune nature spĂ©ciale qui sâest dĂ©clarĂ©e spontanĂ©-
ment au commencement de l'hiver de 1892 dans une ferme du dé-
partement de Seine-et-Marne, et qui sâest prolongĂ©e jusquâen fĂ©vrier
de lâannĂ©e suivante.
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893, â 1. 97
418 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Bien que lâon nâait constatĂ© l'apparition spontanĂ©e de ces Ă©pidĂ©mies
que dans quelques cas isolés, il est trÚs probable que toutes les
grandes invasions se terminent toujours ainsi. Il en résulte toujours
une destruction naturelle de presque tous les campagnols dans la ré-
gion infestĂ©e ; aussi nâa-L-on jamais observĂ© deux grandes invasions
se suivant pendant deux annĂ©es consĂ©culives dans la mĂȘme contrĂ©e.
Nous avons reprĂ©sentĂ© lâĂ©volution des campagnols dans un champ
ou dans une rĂ©gion par deux tableaux graphiques qui nâindiquent
bien entendu que des moyennes, mais donnent une idée trÚs exacte
de lâaugmentation et de la diminution successives de ces animaux
dans le courant dâune annĂ©e et pendant une pĂ©riode de dix ans.
Sur le tableau n° 4 on voit 150 campagnols répandus sur un champ
en février se multiplier progressivement et augmenter en nombre
de mois en mois, atteindre en septembre le chiffre de 24000 Ă 25 000
individus, restér dans ce champ jusque vers le milieu de novembre
et disparaĂźtre rapidement dans les derniers Jours de novembre et en
décembre, La cause de cette brusque disparition a été, dans ce cas,
une épidémie spontanée.
Le tableau graphique n° 2 reprĂ©sente lâĂ©volution des campagnols
pendant une période de dix ans, de 1880 à 1890. Les deux grandes
invasions en 1880 er en 1884 sont suivies, la premiĂšre de trois an-
nées, la deuxiÚme de six années pendant lesquelles le nombre des
campagnols nâĂ©tait pas bien considĂ©rable. On remarque Ă©galement
que lâannĂ©e qui suit immĂ©diatement une grande invasion est gĂ©nĂ©-
ralement plus pauvre en rongeurs que les années suivantes et que
câest du nombre des campagnols au printemps et de la tempĂ©rature
en avril que dépend principalement leur nombre en automne.
La nature nous fournit donc elle-mĂȘme le moyen de dĂ©fense le
plus sûr et le plus rapide contre ces animaux par trop prolifiques ;
malheureusement, les maladies contagieuses ne se déclarent spon-
tanément que quand tout a été ravagé et mangé dans les champs
envahis ; de plus, une Ă©pidĂ©mie spontanĂ©e nâest pas toujours sans
danger pour les animaux de la ferme ou le gibier. Nous avons vu
plus haut quâon a observĂ© en Allemagne des Ă©pidĂ©mies de charbon
et rien ne s'oppose Ă ce que, dans dâautres cas, ces maladies ne
soient dues Ă des microbes Ă©galement pathogĂšnes pour les animaux
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 419
de la ferme et pour les petits rongeurs. Il peut donc en résulter une
épizootie Lout aussi désastreuse pour le cultivateur que le sont les
campagnols eux-mĂȘmes.
Pour sâen faire une arme dĂ©fensive contre ces animaux, il faudrait
donc réglementer, pour ainsi dire, ces épidémies : choisir celles qui
ne peuvent ĂȘtre nuisibles qu'aux petits rongeurs et crĂ©er des foyers
d'infection au moment le plus opportun pour prévenir les grandes
invasions.
Des essais, déjà assez nombreux, d'application des cultures arti-
ficielles de microbes pathogĂšnes Ă la destruction des animaux nui-
sibles ont donnĂ© des rĂ©sultats trĂšs encourageants. Au mois dâavril
1892, M. LeĆĂŠffler, professeur de bactĂ©riologie Ă Greifswald (Alle-
magne), à réussi à modérer une invasion des campagnols qui mena-
çait les rĂ©coltes de lâune des plus riches rĂ©gions de la Thessalie, avec
les cultures de son bacillus typhi murium quâil a dĂ©couvert sur les
souris blanches de son laboratoire et qui sâest montrĂ© pathogĂšne
pour les campagnols ; en France, nous avons eu lâoccasion dâex-
pĂ©rimenter et dâessayer en grande culture les microbes provenant
de lâĂ©pidĂ©mie que nous avons observĂ©e et Ă©tudiĂ©e dans le dĂ©parte-
ment de Seine-et-Marne.
LE VIRUS N° Ă
Le microbe que nous avons trouvé sur les campagnols morts de
l'épidémie observée en Seine-et-Marne est un bacille le plus sou-
vent court et gros, mais présentant des formes trÚs variées et dis-
semblables suivant les milieux et les conditions de culture. On le
trouve toujours dans le sang et dans tous les organes dâun animal
mort de cette maladie ; mĂȘme l'urine et le liquide du tube digestif
ensemencé sur gélose , nous en ont donné souvent des cultures
pures. Il se développe trÚs rapidement et en grande abondance dans
tous les milieux nutritifs artificiels connus. Exposé à une tempéra-
ture de 18 à 20 degrés, un ensemencement du sang, par exemple,
donne des cultures trĂšs apparentes et abondantes en 24 heures. Cul-
ĂŒvĂ© sur gĂ©lose, il donne dâabord des colonies rondes qui sâĂ©talent
rapidement, se confondent les unes avec les autres et finissent par
420 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
former une couche uniforme dâun gris-sale, lĂ©gĂšrement verdĂątre.
Exposée à une température de 12 à 18 degrés, la culture se déve-
loppe progressivement pendant 15 jours environ, ensuite elle semble
disparaĂźtre, elle devient de plus en plus transparente et un mois
aprÚs l'ensemencement la gélose redevient claire et transparente
comme si elle nâavait jamais contenu des cultures. Il nâen contient
pas moins une couche sensible et on peut sâen convaincre aisĂ©ment
en grattant la surface avec un fil de platine et en réensemençant sur
dâautres milieux.
Sur gĂ©latine les cultures sâĂ©talent moins, mais conservent, par
contre, beaucoup plus longtemps leur apparence primitive.
Gardées à l'abri de la lumiÚre et à une température ne dépassant
pas 18 degrés, les cultures peuvent conserver leur virulence pendant
trĂšs longtemps. A doses Ă©gales, les cultures de six et huit mois nous
ont donnĂ© les mĂȘmes rĂ©sultats que les cultures de 8 ou 15 jours.
Toutefois 1l nâen est pas toujours ainsi ; des cultures dâun mois nous
ont donné quelquefois des résultats négatifs, de sorte que, dans la
pratique, pour obtenir des résultats certains, on devrait employer
de préférence les cultures de 8 à 20 jours.
L'action du virus n° 1 à été expérimentée sur toutes les espÚces
de souris et de campagnols connues en France : Mus musculus, M.
sylvatlicus, M. raltus, M. decumanus, Arvicola arvalis, A. subter-
raneus, Ă. rutilus et Ă. amphibius. I sâest montrĂ© extrĂȘmement
virulent pour toutes les espĂšces de campagnols, pour les souris do-
mestiques, les mulots des bois et des jardins et les rats noirs; â son
action sur les gros rats gris est moins prononcée.
La maladie produite par ce microbe est toujours mortelle pour
les petits rongeurs et extrĂȘmement contagieuse, une simple cohabi-
tation suffit pour que l'infection soit communiquée par un animal
malade Ă tous ceux qui l'approchent; ainsi toutes les souris bien
portantes enfermées dans une grande cage avec une souris inoculée
succombent toujours Ă la mĂȘme maladie.
Ă lâautopsie on trouve gĂ©nĂ©ralement lâhypertrophie de la rate (cet
organe devient deux ou mĂȘme trois fois plus volumineux quâĂ lâĂ©tat
normal), la dégénérescence graisseuse du foie plus ou moins pro-
noncée et une congestion générale de l'intestin et du péritoine. La
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 421
durée de l'incubation est trÚs variable suivant la force de résistance
des individus et aussi suivant les différentes espÚces de souris et de
campagnols.
Une injection hypodermique de 1/10 de centimĂštre cube dâun
bouillon de culture de deux jours tue les souris généralement en
12 Ă 24 heures; toutefois nous avons observĂ© des cas oĂč la mort des
individus inoculĂ©s nâest survenue que 5 et mĂȘme 8 jours aprĂšs lâopĂ©-
ration.
Absorbé avec les aliments, le virus semble agir beaucoup plus
rapidement sur les campagnols et les mulots que sur les souris do-
mestiques et les souris blanches des laboratoires.
Pour les campagnols et les mulots, lâincubation peut durer 2 Ă
12 jours, pour les souris domestiques 5 Ă 20 jours. Quelquefois on
observe des cas de mort foudroyante â l'animal meurt en quelques
beures.
La maladie ne devient manifeste quâun ou tout au plus deux jours
avant la mort. Le premier symptÎme est une forte diarrhée, peu aprÚs
on observe comme une paralysie de lâarriĂšre-train, les jambes de
derriĂšre semblent inertes, l'animal se met en boule et ne bouge plus
de place jusquâĂ la mort, il se laisse prendre Ă la main sans manifester
le moindre mouvement de frayeur. Câest Ă cet Ă©tat, pendant quâils
sont encore malades, que les campagnols sont achevés et mangés
par ceux d'entre eux qui sont encore bien portants.
Ces diffĂ©rences trĂšs sensibles dans la durĂ©e du temps dâincubation
observĂ©es chez les individus de la mĂȘme espĂšce ou appartenant Ă des
espÚces différentes peut provenir d'une prédisposition spéciale à la
contagion plus grande chez certains individus que chez dâautres el
peut-ĂȘtre aussi du degrĂ© de virulence des cultures que nous avons
employées.
Cette derniĂšre supposition nous a donnĂ© lâidĂ©e de sĂ©lectionner les
cultures suivant que la mort des individus inoculés était plus ou
moins prompte. L'ensemble des observations recueillies ne nous a
pas encore fourni de donnĂ©es suffisantes pour nous permettre dâen
ĂŒrer des conclusions dĂšs Ă prĂ©sent, mais nous croyons pouvoir affir-
mer que ce genre de recherches donnera certainement des résultats
intéressants.
492 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
PremiÚres expériences.
Avant de mettre Le virus Ă la disposition des cultivateurs, nous
avons fait expérimenter son action dans les champs infestés par les
rongeurs dans un certain nombre dâĂ©coles pratiques dâagriculture et
notamment aux Merchines (Meuse) et Ă Berthonval dans le Pas-de-
Calais.
Aux Merchines lâexpĂ©rience a Ă©tĂ© faite en mars et avril 1893
sur un champ de luzerne presque complÚtement ravagé. Elle a été
dirigĂ©e par M. Julien Krantz, directeur de lâĂ©cole et propriĂ©taire du
domaine.
Au commencement de mars, M. Krantz a fait distribuer dans les
champs infestés du pain imprégné de virus en plaçant un morceau
de ce pain dans chaque trou de souris.
à partir du quatriÚme jour aprÚs cette opération on trouvait dans
le champ en expériences et aux alentours des campagnols morts à la
surface de la terre. En avril, on a fait défricher une partie du champ
de luzerne. La charrue a mis alors Ă jour les galeries souterraines
remplies de cadavres de campagnols, tous plus ou moins rongés.
(Les campagnols dĂ©vorent leurs morts et câest Ă cette pratique quâest
due la propagation rapide de la maladie.) Le résultat obtenu a dé-
passé les espérances, les campagnols ont été complÚtement détruits
non seulement sur le champ de luzerne en expérience, mais aussi
sur une certaine étendue des champs de blé contigus.
L'expérience des Merchines a été pleinement confirmée par celle
quâa faite M. Dickson, directeur de lâĂ©cole d'agriculture de Berthon-
val, sur des souris et des campagnols, tant en captivité que dans les
champs. M. Dickson a constaté que les campagnols succombent plus
rapidement que les souris domestiques, que ceux qui survivent man-
gent toujours les cadavres des premiĂšres viclimes, aussi bien en li-
bertĂ© quâen captivitĂ©, et enfin, que ces cadavres, quand ils sont man-
gés par les animaux de la ferme, poules, lapins, canards, chiens, etc.,
ne produisent sur eux aucun effet nuisible.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 423
Application en grande culture, dans les jardins
et dans les magasins.
AprÚs que les expériences des Merchines ct de Berthonval ont dé-
montré l'efficacité et les avantages de destruction des rongeurs par
le virus contagieux, un grand nombre de cultivateurs ont demandé
de l'appliquer dans leurs champs, et nous avons pu faire ainsi toute
une sĂ©rie dâessais pendant les mois d'aoĂ»t, de septembre, dâoctobre
et de novembre.
Nous nâen citerons que quelques cas se rapportant Ă trois espĂšces
de rongeurs différents.
1° Destruction des campagnols sur Le terriloire de la commune
de Payns (Aube).
Les terres de Payns sont trÚs légÚres et friables avec du sable pour
sous-sol. On y cultive principalement du seigle, un peu de blĂ©, dâa-
voine, peu de prairies artificielles.
Les cultivateurs comptent ordinairement une année de mulots sur
deux, ce qui veut dire que bien qu'il y ait des campagnols chaque
année, ils ne deviennent trÚs nombreux et dangereux pour les ré-
coltes que tous les deux ans.
L'année 1892 ayant été une année de mulots, il y avait donc lieu
d'espĂ©rer quâen 1893 il y en aurait moins. Toutefois la sĂ©che-
resse et la chaleur exceptionnelle du printemps et de l'été de 1893
ont été tellement favorable à la multiplication et au développement
des campagnols, quâune grande invasion Ă©lait Ă craindre pour lâau-
tomne.
La configuration du pays est trÚs favorable pour le développement
des campagnols. Câest une vallĂ©e plate, large de 10 Ă 15 kilomĂštres,
coupée par la Seine et bordée des deux cÎtés par des coteaux mar-
neux. Les campagnols apparaissent en grand nombre ordinairement
en juillet et en août au bas de ces coteaux, se répandent ensuite peu
Ă peu dans la plaine jusqu'aux bords de la Seine.
Les annĂ©es dâinvasion, les semailles dâautomne sont gĂ©nĂ©ralement
424 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
complÚtement perdues, les grains sont mangés pour ainsi dire der-
riÚre le semoir, les prairies artificielles sont parfois rasées en une
seule nuil.
Devant ce danger menaçant, le conseil municipal de Payns a dé-
cidé, sur la proposition d'un de ses membres, M. N. Sainton, de
faire aux frais de la commune un essai de destruction des rongeurs
par le virus contagieux.
La premiÚre opération a été faite le 22 août dans les conditions
suivantes :
930 tubes de cultures virulentes de huit jours ont été dilués dans
10 litres dâeau ; dans cette solution on a trempĂ© 12000 morceaux de
pain blanc de 1 centimĂštre cube environ.
Ce pain préparé a été distribué sur une étendue de 20 hectares ;
on plaçait un morceau de pain dans un trou sur quatre en moyenne.
Les 5 et 6 septembre suivant on a t'ouvé des campagnols morts
un peu partout sur les champs en expérience.
Le 13 septembre on a labouré un champ de 35 ares criblé de
trous (en moyenne 10 trous par mĂȘtre carrĂ©). Au moment du labour
on nâa trouvĂ© dans ce champ qu'un seul Campagnol vivant, huit
jours aprĂšs le labour on nâa trouvĂ© sur toute l'Ă©tendue de ce mĂȘme
champ que 50 trous de campagnols.
Ces 90 trous furent de nouveau garnis de pain imprégné et fermés
quelques jours plus tard â ils ne se sont plus rĂ©ouverts.
Sur dâautres parties des 20 hectares en expĂ©rience dans les champs
de sainfoin, on ne trouvait quâun trou rĂ©ouvert, en moyenne, sur
cent fermés.
Lâessai a donc donnĂ© des rĂ©suliats complĂštement satisfaisants.
Deux distributions successives Ă un mois de distance ont suffi pour
détruire tous les campagnols.
Les frais de cet essai se sont élevés en tout à :
80 tubes de virus Ă 12 fr. les 10 tubes. . : . . . . 361,00c
6 kilogr. de pain Ă O fr. 35 c. LR ME 200
50 heures de main-d'Ćuvre Ă 0 fr. 50 âŹ. . , . . . . 25 ,00
63°, 10°
pour 20 hectares, câest-Ă -dire Ă 3 fr. 15 c. par hoctare.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICGULTURE. 425
Ÿ Destruction des campagnols el des mulots au hameau « La Borde »,
prĂšs Bar-sur-Seine (Aube).
Sur la demande de M. Guyard, prĂ©sident de la SociĂ©tĂ© dâagricul-
ture et du Syndicat agricole de Bar-sur-Seine, nous nous sommes
rendu le 29 septembre 1893 au hameau La Borde oĂč des champs,
dâune Ă©tendue de 50 hectares environ, Ă©taient fortement infestĂ©s par
les petits rongeurs. |
Nous constatons dâabord que la situation du hameau et la nature
de ses terres se prĂȘtent trĂšs bien au dĂ©veloppement des campa-
gnols.
De bonnes terres fortes, argileuses, assurent une grande consis-
lance aux nids et aux galeries souterraines des rongeurs ; d'autre
part, les pentes assez prononcĂ©es de tous les cĂŽtĂ©s permettent lâĂ©cou-
lement facile des eaux et empĂȘchent les inondations qui, dans dâautres
conditions, détruisent un grand nombre de ces animaux au printemps
et en aulomne.
Lâinspection des champs envahis nous montre que le nombre de
lrous varie de à à 15 par mÚtre carré ce qui, en comptant 1 rongeur
pour Ă trous, en moyenne, donne 10 000 Ă 50 000 de ces animaux
par hectare.
Des piÚges placés la nuit dans les champs envahis ont pris quelques
rongeurs et nous avons pu constater la présence dans ces champs de
campagnols (Arvicola arvalis) et de mulots (Mus sylvaticus), ces
derniers dans une proportion bien moins forte.
La distribution des cultures virulentes a été faite dans les conditions
suivantes :
120 tubes de culture de 5 et de 6 jours ont été dilués dans
50 litres dâeau bouillie et salĂ©e. Dans cette solution on a trempĂ©
80.000 morceaux de pain bis de 4 Ă 1 1/2 centimĂštre cube. Le pain
trempĂ© a Ă©tĂ© distribuĂ© dans les champs Ă raison dâun petit cube par
trou nouvellement frayĂ©, câest-Ă -dire, en moyenne, dans un trou
sur Six.
L'opération a occupé 20 personnes pendant trois journées succes-
sives, environ ? heures par jour, de # Ă 6 heures.
Lâinspection des trous le lendemain de chaque distribution Ă mon-
426 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
hé que le pain introduit dans les trous a été mangé dans le courant
de la nuit.
Des pluies assez fortes sont tombées pendant les trois jours qu'ont
duré les opérations.
DĂ©duction faite de nos frais de voyage qui ne peuvent pas ĂȘlre com-
pris dans les frais de l'expérience, ceux-ci se sont élevés à la somme
totale de 456 fr. Ă savoir :
120 "tubes A OLPC Re Er UE 90 fr.
2OKIOSr AE PAIN A ON DIRE RE PR 6
t20heurestde travail a 0 fre DICO ENPRSRERRREE 60
OAI A PERTE 156 fr.
Ce qui fait, au prix de la main-d'Ćuvre (0 fr. 50 c. l'heure), prix
certainement exagéré, parce que, les virus n'étant nullement dange-
reux, on peut employer des enfants pour le distribuer, une dépense
totale de 3 fr. 10 c. par hectare.
La préparation du pain et sa distribution a été faite en présence
de M. Guyard, des membres du bureau du Syndicat agricole de Bar-
sur-Seine et de M. R. Danguy, professeur dĂ©partemental dâagri-
cullure.
Occupé à la préparation des virus que les cultivateurs nous de-
mandaient en quantités de plus en plus considérables, 1l nous a été
impossible d'aller sur place constater par nous-mĂȘme les rĂ©sultats
de cette expĂ©rience. Câest Ă lâobligeance de M. R. Danguy, qui a con-
signĂ© ces rĂ©sullats dans un article publiĂ© par lâAgricullure nouvelle
(n° du 18 dĂ©cembre 1893), que nous devons de les connaĂźtre dâune
façon exacte.
« L'opération faite vers la fin de septembre, écrit M. Danguy,
quinze jours aprÚs, dans une luzerne traitée, Lrois souris seulement
étaient remontées, vivantes encore, mais déjà paralysées. Dans une
luzerne voisine, non traitée, plus de cinquante rongeurs en parfait
Ă©tat se montraient sous le soc de la charrue, un bien plus grand
nombre se dérobait aux regards.
« Dans les Ă©teules, mĂȘme rĂ©ussite, un grand nombre de souris
mortes et quelques-unes en partie dévorées par leurs congénÚres se
découvraient. »
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 4277
3° Destruction des mulols (Mus sylvaticus) dans un verger.
Un verger dâune Ă©tendue de deux hectares et appartenant Ă M. Ch.
Lambert, du Havre, a été envahi par les mulots (M. sylvaticus). Les
ravages causés étaient fort importants, les rongeurs mangeaient et
dĂ©tĂ©rioraient des fruits de luxe, des pommes, poires et pĂȘches.
Six tubes de virus diluĂ©s dans deux litres dâeau et rĂ©partis sur
2 000 morceaux de pain ont suffi pour détruire complÚtement les
A
mulots et arrĂȘter les dĂ©gĂąts.
Ă# Destruction des souris (Mus museulus) dans les magasins.
M. Boutroux, officier d'administration comptable des subsistances
militaires à Amiens, a employé un tube de virus pour détruire les
souris ordinaires (Mus musculus) dont était infesté un des magasins
qui se trouve sous sa surveillance.
Vingt jours aprÚs la distribution du pain imprégné, toutes les souris
ont disparu dans le magasin en expérience ; et comme dans les autres
magasins également infestés les souris pullulaient toujours, on peut
en conclure que leur disparition dans le local en expérience était
bien due Ă lâaction du virus.
Instructions.
Pour détruire les campagnols ou les mulots dans les champs,
dâune façon complĂšte et dĂ©finitive, il faut faire deux ou trois opĂ©ra-
tions successives et procéder de la façon suivante :
1° PremiÚre distribution de cullures virulentes.
Dans tous les pays infestĂ©s dâune façon chronique, les campagnols
ou les mulots deviennent les plus nombreux aux mois dâaoĂ»t et de
septembre.
Câest Ă cette Ă©poque que le virus agira le mieux parce que prĂ©ci-
sĂ©ment grĂące Ă la rĂ©union dâun grand nombre de ces animaux qui
428 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
vivent en famille, â sur un espace donnĂ© â lâĂ©pidĂ©mie se propagera
rapidement et sera trĂšs mortelle.
Les premiÚres distributions de pain imprégné de cultures virulÚntes
doivent donc commencer en août aussitÎt aprÚs les récoltes de cé-
rĂ©ales et peuvent ĂȘtre continuĂ©es en septembre et octobre sur les
champs de pommes de terre, de betteraves, sur les prairies aruifi-
cielles, etc.
Cette premiĂšre distribution de virus dĂ©truit gĂ©nĂ©ralement 90 Ă
95 p. 100 des rongeurs qui infestaient les champs. LâĂ©pidĂ©mie ainsi
provoquĂ©e se prolonge dâelle-mĂȘme pendant six semaines au moins.
Les rĂ©sultats obtenus par ce premier traitement peuvent ĂȘtre
appréciés de différentes façons.
Le plus simple est de faire labourer les champs 15 jours Ă six se-
maines aprĂšs la distribution du pain. On trouvera en labourant des
cadavres dans les terriers et pas du tout ou trĂšs peu de campagnols
vivants. AprĂšs le labour on ne trouvera que trĂšs peu de trous nou-
vellement ouverts Ă la surface du sol.
Dans le cas oĂč les champs en expĂ©rience ne seraient pas labourĂ©s
en automne, on fermera les trous un mois aprĂšs le premier traite-
ment en y faisant passer une herse ou un rouleau.
Quand il s'agira de prairies artificielles ou naturelles il ne sera pas
indispensable de fermer les trous pour reconnaĂźtre si les campa-
gnols ont disparu. Le cultivatĂšur saura facilement reconnaitre sâil y
a encore des trous fréquentés et nouvellement frayés.
TrĂšs souvent on trouvera des cadavres Ă la surface du sol.
Pour celte premiÚre opération, on ne doit pas ménager le pain
préparé, 1l faut en mettre un morceau dans chaque trou frayé.
Suivant lâimportance de lâinvasion il faut employer pour cette pre-
miÚre opération 3 à 10 tubes par hectare.
2% DeuxiĂšme distribulion de cultures virulentes.
Avec une seule opération on n'obtient que bien rarement la des-
truction complĂšte des petits rongeurs. â Il faut donc complĂ©ter la
premiÚre opération par une deuxiÚme en garnissant à nouveau les
trous nouvellement ouverts (sur les champs labourés ou hersés)
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 429
ou encore frĂ©quentĂ©s, avec du pain prĂ©parĂ© de la mĂȘme façon que
la premiĂšre fois.
Cette deuxiĂšme opĂ©ration doit ĂȘtre faite un mois ou six semaines
aprĂšs la premiĂšre. â On y emploiera 1 tube de virus pour 2 ou
3 hectares.
3° TroisiÚme opéralion.
Les quelques campagnols qui pourraient encore rĂ©sister Ă lâĂ©pi-
dĂ©mie ne seront plus gĂȘnants pour les cultures dâhiver. â II nâen
restera en effet que 40 ou 50 par hectare au plus et les dĂ©gĂąts quâils
peuvent causer dans le courant de l'hiver seront en tout cas absolu-
ment insignifiants.
Il en serait tout autrement toutefois, si on laissait ces quelques
campagnols se multiplier au printemps suivant ; chaque couple don-
nerait 300 rejetons dans le courant de la belle saison et en automne
les champs se trouveraient repeuplés à nouveau.
Une troisiÚme opération est donc souvent nécessaire au printemps
pour obtenir un résultat définitif.
AprĂšs les deux premiers traitements en automne, il ne restera sur
les champs, comme nous venons de le dire, quâune cinquantaine de
campagnols par hectare, cette troisiÚme opération ne sera donc ni
difficile, ni coûteuse. Pour détruire ces derniers rongeurs on peul
encore employer le virus, mais il serait peut-ĂȘtre tout aussi simple
dâavoir recours Ă tout autre moyen.
Les campagnols sont en effet, dans ce cas, trop peu nombreux et
en mĂȘme temps trop dissĂ©minĂ©s pour quâon puisse compter sur le
dĂ©veloppement dâune Ă©pidĂ©mie, câest-Ă -dire sur la propagation de
la maladie par contagion ; un empoisonnement ou des piĂšges don-
neront le mĂȘme rĂ©sultat.
Les frais de la troisiĂšme opĂ©ration qui doit ĂȘtre faite dĂšs le dĂ©but
de la belle saison, en février ou mars, ne dépasseront pas 0 fr. 90 c.
par hectare.
L'ensemble des frais pour ces trois opérations : achat de virus et
du blĂ© prĂ©parĂ©, le pain et la main-d'Ćuvre, ne dĂ©passera certaine-
ment pas Ă fr. par hectare; faites avec soin sur toute l'Ă©tendue des
430 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
champs envahis, ces trois opérations successives permellront de dé-
truire les campagnols d'une facon complĂšle el pour loujours.
Le traitement en trois opĂ©rations, tel que nous venons de lâindi-
quer, est le plus rationnel el le moins coûteux. En procédant ainsi
on détruira tous les rongeurs (nous disons bien lous sans en excepter
un seul) en une année.
Le coût de ce traitement est tellement minime en comparaison de
lâimportance des dĂ©gĂąts causĂ©s par les campagnols quâil nous semble
inutile dâinsister sur les avantages qui en rĂ©sultent; toutefois, nous
tenons Ă ajouter que, si les exigences de la culture ou des causes
dâune autre nature ne permettaient pas de lâappliquer Ă la fois sur
toute l'Ă©tendue des champs envahis, ou de les commencer en au-
tomne, il est possible dâarriver au mĂȘme rĂ©sultat final par une sĂ©rie
d'applications partielles en automne el au printemps, ou bien pen-
dant lâune ou lâautre de ces deux saisons.
L'important est de poursuivre la destruction avec persévérance et
de ne sâarrĂȘter que quand tous les rongeurs auront disparu. Fait
ainsi dâune façon partielle Ă tour de rĂŽle sur les diffĂ©rents champs
dâune ferme ou dâune rĂ©gion envahie, le traitement devra ĂȘtre pro-
longé pendant deux ou trois ans, mais sera tout aussi efficace.
D'une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, que lâon commence le traitement au
printemps ou à l'automne, il faut procéder de la façon suivante :
4° Faire une distribution de virus (pain trempé dans une solution
de cultures virulentes) 15 jours ou mieux trois semaines avant le
labour, sur tous les champs quâon aura Ă labourer ;
2 Faire une deuxiĂšme distribution de virus sur les mĂȘmes
champs, 8 jours aprÚs le labour, en garnissant de pain préparé tous
les trous qui se seront réouverts à nouveau ;
3° Détruire les campagnols qui auraient pu résister encore (aprÚs
un hersage ou un autre travail par lequel les trous réouverts seront
fermĂ©s une deuxiĂšme fois), par lemploi du virus ou dâun toxique si
les campagnols sont trĂšs peu nombreux.
En un mot il faut saisir toute occasion, tout travail dans les champs
(labours, hersages, roulages, etc.) envahis permettant de vérifier
d'une façon certaine lesrésultats obtenus, pour faire une premiÚre opé-
ralion et en refaire une seconde, et une troisiĂšme si câesl nĂ©cessaire.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 431
Dans les prairies et les bois on peut fermer les trous avec une
bĂȘche ou tout simplement en marchant dessus.
Ainsi que nous lâavons montrĂ© dans un travail prĂ©cĂ©dent ?, les cam-
pagnols vivant en France, tout en Ă©tant de tous les mammifĂšres les
animaux les plus nuisibles Ă lâagriculture, ne sont pas migrateurs
et ce fait facilite leur destruction. Les générations qui se succÚdent
toujours restent cantonnĂ©es dans les mĂȘmes champs et ne sâen rĂ©-
pandent Ă lâentour quâen automne (en septembre et octobre) dans
les années mémorables, mais relativement rares, de trÚs grandes
invasions.
Le traitement partiel des champs, Ă tour de rĂŽle, aura donc toute
son efficacitĂ©, il nâest pas Ă craindre en effet que les champs une
fois traités soient envahis à nouveau par des campagnols venus des
champs voisins, avant que ces derniers n'aient été traités à leur tour.
Mode d'emploi du virus n° 1.
Le virus n° 1 est préparé dans des tubes en verre sur une couche
de gélatine végétale. Ces tubes sont fermés avec un bouchon de
ouate.
Pour se servir des cultures virulentes qui recouvrent la surface
libre de la gélatine et y forment une couche grisùtre, on délaye le
contenu du tube dans de lâeau salĂ©e, dans laquelle on trempe du
pain, des grains ou, à défaut de ces produits, toutes autres substances
dont les souris ou les campagnols sont friands.
Voici de quelle façon il faut procéder* :
On prépare une solution de 10 gr. de sel de cuisine dans un litre
dâeau, on fait bouillir dans une casserole et on laisse refroidir.
Avec ce liquide refroidi, on remplit jusqu'aux deux tiers environ
(aprÚs avoir enlevé le bouchon de ouate) le tube contenant le virus,
on secoue fortement jusqu'au moment oĂč la gĂ©latine se sera dĂ©ta-
chée du verre et on verse le contenu dans la casserole. La gélatine
n'Ă©tant pas facilement soluble dans lâeau, il faut Ă©craser avec la main
les morceaux qui sont restés compacts.
1. Revue scienlifique, n° 11, 2° semestre 1893.
2, ProcĂ©dĂ© indiquĂ© par M. LĆfier.
432 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Du pain blanc rassis est ensuite coupé en cubes de 1 à 2 centi-
mÚtres de cÎté.
Ces petits cubes sont jetés dans la casserole, et lorsqu'ils sont suf-
fisamment imprĂ©gnĂ©s du liquide, ce qui a lieu au bout dâune Ă deux
minutes, ils sont retirés et jetés dans un vase.
On peut imprĂ©gner au moyen dâun litre de ce liquide environ
1 000 Ă 1 200 de ces cubes.
Pour la destruction des souris, mulols et campagnols, on doit
prendre deux tubes par litre dâeau.
On distribue ensuite le pain coupĂ©, de prĂ©fĂ©rence pendant lâaprĂšs-
midi; on place un morceau de pain dans chaque trou, ou on en ré-
pand dans les endroits visités par les souris.
Le virus doit ĂȘtre employĂ© aussitĂŽt que le tube a Ă©tĂ© ouvert.
On ne peut conserver ni la solution, ni le pain imprégné pendant
plus dâune journĂ©e.
Pour obtenir de bons résultats dans les champs envahis, il faut
employer en moyenne » tubes par hectare.
On peut remplacer le pain blanc par du pain bis ; dans ce cas, ce
dernier doit ĂȘtre bien rassis de quatre ou cinq jours, et comme ce
pain boit moins dâeau que le pain blanc, il faut prĂ©parer des solu-
tions plus concentrĂ©es : prendre quatre tubes par litre dâeau au lieu
de deux, et tremper dans celte solution 2000 Ă 2400 petits cubes
de pain bis au lieu de 1 000 Ă 1 200.
De sorte que la dose de virus répandue sur chaque morceau de
pain soit toujours la mĂȘme.
Quant Ă la place du pain on trouvera plus commode d'employer
du grain (blé, orge, avoine ou maïs), il faut faire concasser ce grain
grossiĂšrement en le coupant en deux ou trois parties et le tremper
dans une solution trĂšs concentrĂ©e : dix tubes par litre dâeau.
On fera tremper dans un litre de cette solution environ deux
litres de grains, en remuant de temps en Llemps pour que les grains
soient Ă©galement trempĂ©s. Le liquide qui restera pourra reservir Ă
tremper une nouvelle portion de grains.
Le résidu, petits débris et farine, qui restera au fond du vase doit
ĂȘtre employĂ© de la mĂšme façon que le grain.
Si, au moment de la distribution du pain préparé, il pleuvait ou
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 433
faisait bien froid, on devrait préparer des solutions plus concerftrées :
prendre quatre tubes par litre dâeau pour le pain blanc ou huit tubes
pour le pain bis et mouiller le pain moins que dans les conditions
ordinaires, toujours en conservant les mĂȘmes proportions de 1 000
petits cubes de pain par tube de virus.
EnfermĂ© dans une boĂźte, Ă lâabri de la lumiĂšre et dans un endroit
dont la température est comprise entre 5° et 25°, le virus n° 1 con-
serve toutes ses propriétés pendant plusieurs mois; toutefois le maxi-
mum de virulence et de développement des cultures est obtenu gé-
nĂ©ralement cinq Ă vingt jours aprĂšs la prĂ©paration du tube; câest
donc des cultures fraĂźches quâil faut employer de prĂ©fĂ©rence.
VIRUS N° 2? POUR LA DESTRUCTION DES RATS
Les premiers essais de lâaction du virus n° 1 sur les diffĂ©rentes
espÚces de rats ont donné, comme nous l'avons dit plus haut, des
résultats variables et incertains.
InoculĂ©es Ă lâaide dâune seringue de Pravaz (dans ce cas le virus
est introduit dans lâorganisme par une piqĂŒre sous la peau ou dans
les muscles), toutes les espÚces de rats mouraient aprÚs une période
dâincubation de deux Ă quinze jours. Nourris avec des aliments im-
prégnés de cultures virulentes ou avec des organes de souris tuées
par ce virus, les rats dâeau proprement dits, Ă courte queue velue
(Arvicola amphibius), ct les rats noirs (Mus raitus) succombent
aussi rapidement que les campagnols et les souris. Pour les gros
rats gris, appelés aussi rats voyageurs (Mus decumanus), les plus
forts, les plus rĂ©pandus dans le monde entier et en mĂȘme temps les
plus nuisibles, lâaction de ce virus sâest montrĂ©e le plus souvent
insufisante. Il en mourait bien quelques-uns, la plupart devenaient
manifestement malades, mais ne succombaient pas.
Ce virus est donc bien pathogĂšne pour ces animaux, mais il nâest
pas suffisamment actif pour les tuer. Ce fait donnait Ă supposer
quâen augmentant la virulence des cultures par une prĂ©paration spĂ©-
ciale, on arriverait peut-ĂȘtre Ă atteindre ces redoutables rongeurs,
qui sont devenus dans certains pays un véritable fléau des cultures
ou plantations, Ă lâĂ©gal des campagnols dans lâEurope septentrionale.
ANN. SCIEXCE AGRON. â 1893. â 1. 28
434 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Au Brésil, au Mexique, dans les Antilles, dans presque toutes les
iles de OcĂ©an Indien, oĂč les plantations de cannes Ă sucre et de
cacao ont pris une grande importance, le rat, amené primilivement
dans les ports sur des navires, sâest rĂ©pandu de lĂ dans les champs
cultivĂ©s et y cause des dommages extrĂȘmement importants.
GrĂące Ă lâobligeance de deux de nos correspondants, M. le docteur
Desenne, de lâile Maurice, et M. Bordaz, de la Martinique, nous
avons pu rĂ©unir un certain nombre de renseignements sur lâhistoire
naturelle de ces rongeurs et des données statistiques précises sur
lâimportance des pertes dont ils sont la cause dans ces pays.
« Les deux variétés de rats que nous avons ici, nous écrit M. De-
senne, ont été introduites dans le courant du xvir° siÚcle. Les Portu-
gais, Ă lâĂ©poque de la dĂ©couverte de lâĂźle, nâen font aucune mention,
de mĂȘme les Hollandais Ă leur premiĂšre tentative de colonisation.
Ce nâest quâĂ leur deuxiĂšme descente dans lâĂźle que le nombre pro-
digieux des rats obligea les Hollandais Ă abandonner la colonie. Tout
élait dévasté et détruit.
QIl paraĂźt mĂȘme que si la France, qui occupa lâĂźle le 1°* septem-
bre 1715, nâavait pas obĂ©i Ă de hautes considĂ©rations politiques pour
se maintenir dans ce poste de lâOcĂ©an Indien, elle aurait certaine-
ment suivi l'exemple des Hollandais.
«Il semble le plus probable que câest Ă la suite dâun naufrage que
les rats ont pu aborder dans notre Ăźle. En effet, dans lâarchipel dâA-
galĂ©ga, les rats sont encore aujourdâhui inconnus sur toutes les Ăźles,
sauf une seule oĂč ils ont pĂ©nĂ©trĂ© Ă la suite du naufrage dâun navire
de commerce.
⏠Trouvant là , comme à Maurice, un sol et des conditions clima-
tériques favorables, ils y ont pullulé de façon à envahir tout : les
champs et les habitations.
« La nature du terrain a aussi une grande importance sur le plus
ou moins grand développement des rats dans une région donnée ; il
y en a généralement beaucoup plus dans les terres rocheuses que
dans les terres franches.
⏠Ainsi, sur deux plantations dâĂ peu prĂšs la mĂȘme contenance
(3 000 hectares), Ă©loignĂ©es lâune de lâautre de trois Ă quatre kilo-
mĂštres Ă vol d'oiseau, on a pris au piĂšge :
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 439
« à Saint-Aubin (terres franches), du 1° janvier au 31 décembre
1892, 4 853 rats:
« à Bel-Air (terres rocheuses), du 2 mars au 27 août 1893, 5 A0
rats.
« L'écart des chiffres saute aux yeux, les terres rocheuses ont
fourni plus de rats dans un semestre que les terres franches dans
une annĂ©e, toutes choses Ă©tant Ă©gales dâailleurs.
« Les poisons (strychnine, arsenie, etc.) éveillent trÚs vite la mé-
fiance de ces animaux, qui ne sây laissent plus prendre; les piĂšges
qui en ont pris une fois nâen reprendront plus s'ils ne sont pas pas-
sĂ©s chaque fois Ă la flamme dâun feu de paille.
« Voici maintenant comment les rats sây prennent dans leur Ćuvre
de destruction.
« Le rat s'attaque toujours aux nĆuds infĂ©rieurs de la plante, non
pas parce quâils sont plus Ă sa portĂ©e (il est grimpeur par excel-
lence), mais bien parce quâils sont plus sucrĂ©s que les nĆuds supĂ©-
rieurs.
« Il ne jettera pas la canne à bas, il y fera une forte encoche puis
passera Ă une seconde, Ă une troisiĂšme, elc., jusquâĂ ce que son
appĂ©tit soit satisfait. La canne nâen meurt pas, mais il est inutile
d'insister sur les effets destructeurs dâune brise un peu forte sur
une telle plantation et des éléments de fermentation que des cannes
coupées dans ces conditions apportent forcément aux jus à mani-
puler.
«Il y a des annĂ©es oĂč la dĂ©vastation est plus importante que dans
dâautres, et cela tient Ă ce que la canne nâest pas toujours Ă©galement
riche en sucre. Or les annĂ©es oĂč la canne est moins riche en sucre,
le rongeur en passe un plus grand nombre en revue jusquâĂ ce quâil
en ail trouvé une à son goûl.
«Pour lâĂźle Maurice, les dĂ©gĂąts apprĂ©ciables atteignent 20 millions
de francs par an en moyenne. »
En Europe, en dehors de quelques régions de la Russie voisines
de lâUral, dâoĂč 1l semble originaire, le rat gris ou fauve (Mus decu-
manus) n'est guĂšre connu que dans les granges, greniers, Ă©curies,
etc., en un mot dans les fermes et dans les villes, quelquefois dans
les jardins, mais jamais dans les champs.
436 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Si lâensemble des dĂ©gĂąts quâil peut occasionner ainsi peut devenir
parfois considĂ©rable, jamais ces pertes nâatteignent l'importance de
celles causĂ©es par ces mĂȘmes rongeurs dans les plantations de canne
à sucre et de cacao, ou celles causées par les campagnols et les mu-
lots dans nos champs.
Aussi, si la question de la destruction des rats nâa pas pour nos
pays la mĂȘme importance que celle de la destruction des cam-
pagnols, elle prĂ©sente par contre un trĂšs grand intĂ©rĂȘt pour un
certain nombre de nos colonies, et nous avons été trÚs heureux
quand, aprÚs une série d'expériences, nous avons fini par obtenir
des cultures assez virulentes pour atteindre les gros rats gris
fauve.
Le virus n° 2 est prĂ©parĂ© avec le mĂȘme microbe que le virus n°1,
mais il est rendu plus actif que ce dernier par une sĂ©rie dâinocula-
tions successives sur des rongeurs de plus grande taille.
Ce virus a été employé pour la premiÚre fois au mois de juin 1893
au chùteau de la BoissiÚre (Indre-et-Loire), une grande propriété
infestée par les rats, appartenant à M. J. de Forestier, comte de
Coubert, qui, avec beaucoup de bonne grĂące, a bien voulu nous
prĂȘter son concours pour lâexpĂ©rimentation pratique de nos virus.
Voici un extrait des observations que M. de Forestier, comte de
Coubert, nous a communiquées :
« Nous croyons avoir obtenu un excellent résultat avec le virus
n° 2 que vous nous avez envoyĂ©. Les rats extrĂȘmement nombreux
qui infestaient tous les bĂątiments de la ferme, les Ă©curies et les
berges dâun cours dâeau qui traverse le parc, ont complĂštement dis-
paru.
« Les tubes ont Ă©tĂ© employĂ©s exactement comme vous lâavez indi-
qué, et les rats ont bien mangé dans la nuit le pain imprégné de
virus, distribué la veille au soir. Les résultats ne deviennent guÚre
apprĂ©ciables que dix Ă quinze jours aprĂšs lâopĂ©ration. On voit alors
des rats, qui sortent de leurs trous en plein jour, courir avec diffi-
culté et se laisser attraper par des chiens sans opposer aucune résis-
tance. De plus, une odeur de pourriture qui se dégage des endroits
prĂ©cĂ©demment habitĂ©s par ces animaux indique bien quâil y a des
morts dans les trous.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 4317
« VoilĂ nos observations, et câest mon jardinier, fort sceptique
pour toutes ces nouveautés, qui a été obligé de le reconnaitre. »
Instructions.
D'une maniÚre générale, il est plus difficile de détruire les rats
que les campagno!s, les souris ou les mulots.
Plus agile, plus remuant et surtout plus intelligent que les petites
espĂšces de rongeurs, le rat va souvent chercher sa nourriture trĂšs
loin de son nid, change de gite Ă la moindre alerte et se montre trĂšs
dĂ©fiant pour les appĂąts toxiques (prĂ©parations Ă base dâarsenic, de
phosphore ou de strychnine).
L'emploi dâun virus prĂ©sente donc tout dâabord ce grand avan-
tage sur les poisons que, ne commençant à agir que huit ou quinze
jours aprĂšs avoir Ă©tĂ© absorbĂ© par l'animal, il nâĂ©veille pas sa dĂ©fiance
Ă l'endroit du pain imprĂ©gnĂ© et peut ĂȘtre donnĂ© avec succĂšs Ă plu-
sieurs reprises.
Pour obtenir un bon résultat, il faut autant que possible distri-
buer la prĂ©paration virulente Ă la fois partout oĂč.il y a des rats dans
la localitĂ© infestĂ©e ; ainsi, sâil sâagit dâune ferme, il faut faire la dis-
tribution en mĂȘme temps dans tous les bĂątiments infestĂ©s, placer
quelques morceaux de pain imprégné dans tous les trous de rats et
dans tous les endroits ordinairement visités par ces animaux.
Dans les jardins ou dans les champs infestés par les rats, il faut
garnir de pain imprégné tous les trous et terriers.
Quinze jours aprÚs cette premiÚre opération, si le résultat définitif
nâest pas obtenu, câest-Ă -dire sâil reste encore des rats vivants, il
est bon de refaire le mĂȘme traitement une deuxiĂšme fois. Deux ou
trois opĂ©rations, rĂ©pĂ©tĂ©es Ă quinze jours ou trois semaines dâinter-
valle, seront généralement suffisantes pour faire disparaßtre tous les
rats.
Il arrive quelquefois que cinq Ă huit jours aprĂšs la distribution
du virus, on constate la disparition subite des rats, on nâen retrouve
ni morts, ni vivants dans les endroits précédemment infestés.
Lâexplication la plus vraisemblable de ce fait que nous avons pu.
constater plusieurs fois, câest que ces animaux, trĂšs dĂ©fiants et intel-
438 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
ligents, ont cherchĂ© Ă fuir devant les premiĂšres atteintes de lâĂ©pi-
démie.
Dan; les pays oĂč, comme Ă la Martinique ou Ă Maurice, les rats
ont envahi les plantations et habitent dans les champs, le traitement
Ă suivre doit ĂȘtre, en rĂšgle gĂ©nĂ©rale, le mĂȘme que celui indiquĂ©
précédemment pour la destruction des campagnols.
La distribution des virus devrait, croyons-nous, commencer aus-
sitĂŽt aprĂšs la rĂ©colte et devrait ĂȘtre poursuivie pendant toute la
saison qui correspond Ă notre automne.
Mode d'emploi du virus n° 2.
Pour produire un effet certain, le virus n° 2 doit ĂȘtre employĂ© Ă
un degré de concentration déterminé,
1° DĂ©layer le contenu de chaque tube dans un dĂ©cilitre dâeau
préalablement bouillie et salée ;
2 Tremper dans ce liquide du pain blanc rassis coupé en petits
cubes de à centimÚtre de cÎté, en plongeant successivement les
morceaux, un Ă un, dans le liquide.
Le pain doit ĂȘtre trĂšs peu mouillĂ©.
Bien agiter le liquide avant de sâen servir;
9° Placer les morceaux trempés dans un vase quelconque et les
distribuer (de préférence tard dans la soirée) dans les trous et les
endroits visités par les rats.
Le contenu dâun tube suffit pour imprĂ©gner 75 Ă 100 petits cubes
de pain.
CHAPITRE II
LA MUSCARDINE DU HANNETON COMMUN (MELOLONTHA VULGARIS)
La muscardine, appelée par M. Giard Jsaria densa et par MM. Pril-
lieux et Delacroix Botrilis tenella, et que lâon a appelĂ©e aussi mus-
cardine rose, pour la distinguer de lâ{saria densa (un champignon
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 439
parasite découvert par M. Metchnikoff et pathogÚne pour plusieurs
espÚces de coléoptÚres) dont les spores présentent une coloration
vert intense, et du Botritis bassania, un> muscardine blanche, pa-
rasite du ver Ă soie, est connue des mycologistes depuis fort long-
temps dĂ©jĂ . Comme lâa montrĂ© M. A. Giard dans son remarquable
travail sur ce sujet, la muscardine rose a été en effet décrite pour
la premiĂšre fois en 1809 par un naturaliste allemand, H. F. Link,
sous le nom de Sporotrichum densum.
La nature du parasite et son action sur l'organisme de linsecte
ont Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©es et dĂ©crites par M. Ă. Giard' et par MM. Prillieux et
Delacroix *. Nous ne nous Ă©tendrons pas sur ces questions dâun intĂ©rĂȘt
purement scientifique, il ne nous semble important dâindiquer ici
avec précision que les points suivants :
4° La façon dont la muscardine pénÚtre dans l'organisme du ver
blanc et du hanneton ;
2° L'aspect que présentent ces derniers quand ils sont morts mus-
cardinés ;
3° La façon dont la maladie peut se propager parmi les hannelons
sortis de terre et parmi les vers blancs dans la terre.
M. A. Giard croit que les hyphes des Zsaria sécrÚtent à leur extré-
mité un liquide altérant la chitine et pénÚtrent ainsi dans le sang de
l'insecte ; on peut admettre aussi que le champignon parasite pé-
nĂštre dans l'organisme du hanneton ou de sa larve principalement
par des dĂ©chirures accidentelles de lâenveloppe chitineuse dont les
insectes sont entourés de toutes parts.
On peut admettre que pour la larve cette condition essentielle de
l'infestation se trouve toujours réalisée dans la nature.
Le ver blanc est recouvert dâune enveloppe chitineuse relative-
ment mince et tendre et ses mouvements continuels dans la terre
doivent lâamener frĂ©quemment en contact avec les surfaces ru-
gueuses des cailloux, des éclats d2 verre ou des racines qui dé-
1. Alfred Giard, Zsaria densa, Link Fries, champignon parasite du hanneton com-
mun (Melolontha vulgaris). [Bulletin scientifique de la France et de la Belgique,
t. XXIV, 5 mai 1893.]
2. Prillieux et Delacroix : Le champignon parasile de la larve du hanneton (C. 2.
de lâAcad. des Sc., 11 mai 1891).
440 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
chirent cette enveloppe et crĂ©ent ainsi une voie dâaccĂšs facile pour
le parasite.
Les hannetons sâinfestent tout aussi facilement que les vers blancs.
Dans ce cas les germes de la maladie pĂ©nĂštrent probablement Ă lâin-
térieur du corps à travers la chitine moins résistante des articula-
ons et des trachées.
L'aspect des hannetons ct des vers blancs infestés est trÚs carac-
tĂ©ristique et facile Ă reconnaĂźtre pour tous ceux qui lâont vu une
seule fois.
Nous empruntons Ă lâouvrage de M. Giard, citĂ© plus haut, la des-
cription quâil en donne avec beaucoup de prĂ©cision et de dĂ©tails.
Quand un ver blanc meurt sous lâaction dâun poison, dâun produit
corrosif ou par suite dâune blessure, il devient rapidement noir et
flasque ; quand, au contraire, il est atteint par la muscardine, il
devient dur et présente une coloration rose.
Ensuite, dans les endroits secs et dans les sols légÚrement sablon-
neux, les cadavres de vers blancs tuĂ©s par lâ/saria sont durcis, cas-
sants el recouverts dâun mince duvet blanc qui occupe une Ă©tendue
plus ou moins grande de la surface, ne laissant parfois Ă nu que les
portions chitineuses Ă©paisses, dâun brun rougeĂ»tre, dont sont for-
mĂ©es la tĂȘte et les pattes.
Ce revĂȘtement blanchĂątre prĂ©sente lâaspect dâune moisissure ou
dâune substance pulvĂ©rulente, suivant que le dĂ©veloppement du
champignon est plus ou moins avancé, suivant aussi que le sol est
plus ou moins humide.
Au labour, les vers ainsi momifiés ramenés à la surface par la char-
rue prĂ©sentent lâaspect de petites concrĂ©tions calcaires.
Dans les terres humides et argileuses, le champignon ne forme pas
simplement une sorte de gazon enveloppant comme dâun linceul le
cadavre du ver blanc; il émet en outre des prolongements irrégu-
liers, longs parfois de 5, 6 centimĂštres et mĂȘme plus.
Ces prolongements agglutinent des blocs de terre, des racines des
vĂ©gĂ©taux et autres corps Ă©trangers. Ils s'Ă©tendent souvent dâune mo-
mie à une momie voisine, réunissant par un réseau vivant toutes les
victimes que le champignon a failes dans un espace déterminé.
Les cordons ainsi formĂ©s sont couverts, comme le revĂȘtement des
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 441
momies, par une fine poussiĂšre blanche qui laisse sur les doigts de
lâobservateur une lĂ©gĂšre empreinte, comme lorsque lâon manie un
bĂąton de craie.
Câest gĂ©nĂ©ralement Ă une profondeur de 20 Ă 35 centimĂštres que
lâon rencontre le plus de vers momifiĂ©s dans les endroits oĂč sĂ©vis-
sent les Ă©pidĂ©mies naturelles dâIsaria.
Chez le hanneton Ă lâĂ©tat adulte, le revĂȘtement blanchĂątre ne sâĂ©-
tend que sur la surface ventrale de la tĂȘte et du thorax et se montre
parfois à l'extrémité de l'abdomen.
IL est trĂšs important de bien savoir reconnaitre un ver blanc ou
un hanneton infestĂ© par la muscardine; câest, en effet, en distribuant
dans les champs envahis par le ver blanc ces momies provenant des
Ă©pidĂ©mies soit naturelles, soit arĂŒficielles, que lâon propagera la
maladie de la façon la plus facile et la plus sûre.
Le mĂ©canisme de la propagalion dâune maladie causĂ©e par un
champignon entomophyte diffĂšre essentiellement de celui qui carac-
térise la transmission et la propagation des maladies bactériennes
observées chez les animaux supérieurs.
On sait que dans ce dernier cas, que la transmission se fasse par
- l'air inspiré comme dans la rougeole, la diphtérie, la clavelée du
mouton, la pĂ©ripneumonie des bĂȘtes bovines, etc., ou avec les ali-
ments et lâeau de boisson, comme dans la fiĂšvre typhoĂŻde, le cholĂ©ra
de lâhomme, le rouget et la pneumo-entĂ©rite du porc, etc., ou bien
encore par contact, câest-Ă -dire par dĂ©pĂŽt du principe virulent sur
une plaie, une gerçure de la peau ou sur une muqueuse comme pour
la rage ou la syphilis, l'agent principal de la propagation est toujours
le sujet malade.
Pendant toute la durée de sa maladie et souvent encore quelque
temps aprÚs sa guérison apparente, le sujet malade est un danger
constant pour tous ceux qui l'entourent. Ses vĂȘtements, ses excrĂ©-
ments, sa salive, les objets qu'il touche contiennent des germes viru-
lents, peuvent les répandre au loin et les transmettre à un nombre
illimitĂ© dâautres sujets.
En un mot, les maladies infectieuses causées par les bactéries sont
transmissibles pendant la maladie, quelque temps aprÚs la guérison
apparente et longtemps aprĂšs la mort des sujets atteints. Les bac-
442 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
téries sont virulentes et peuvent communiquer la contagion à tous
les Ă©tats de leur dĂ©veloppement connus, câest-Ă -dire Ă lâĂ©tat de fila-
ments, de bĂątonnels et de spores.
Il en cest tout autrement dans les cas des maladies des insectes cau-
sées par des champignons entomophytes et particuliÚrement dans le
Cas qui nous préoccupe.
LâIsaria densa ne devient facilement transmissible quâĂ lâĂ©tat de
spores bien mĂ»res, et ce nâest quâĂ cet Ă©tat seulement quâon peut
lâemployer pour rĂ©pandre la contagion.
Les spores ne se produisent dans la nature sur des vers blancs ou
hannetons infestés, ou sur des milieux nutritifs artificiels que quand
le champignon se trouve dans un milieu favorable et quand il est
arrivé à un étal de développement déterminé.
Un ver blanc ou un hanneton muscardiné, déjà malade, mais en-
core vivant, ne peut pas transmettre sa maladie Ă dâautres sujets,
mĂȘme quand il se sera trouvĂ© directement en contact avec eux; il ne
peut pas, non plus, répandre la maladie autour de lui par ses excré-
ments ou les objets qu'il aura touchĂ©s; mĂȘme le cadavre dâun insecte
muscardiné (une momie) ne peut devenir une source de contagion
pour ses congĂ©nĂšres, qu'au moment oĂč le champignon qui a dĂ©ter-
miné sa mort aura produit des spores.
Ainsi, la muscardine du hanneton et du ver blanc ne peut pas ĂȘtre
propagée directement par les sujets qui en sont déjà atteints, et ne
devient rĂ©ellement contagieuse quâĂ lâĂ©tat de spores mĂŒres ; les
spores virulentes de cette maladie ne peuvent ĂȘtre rĂ©pandues que par
l'intermĂ©diaire dâautres agents : le vent, la pluie et les ĂȘtres vivants
qui s'étant trouvés en contact avec une culture sporulée transpor-
teront les spores dâun endroit Ă un autre et peuvent les mettre en
contact avec des hannetons ou des vers blancs.
Ilest donc trĂšs important, dans la pratique, de savoir bien recon-
naitre les cultures mĂŒres, bien sporulĂ©es (sur des momies ou sur des
milieux artificiels), de celles qui ne prĂ©sentent encore quâun mycĂ©-
Hum stĂ©rile. Les cultures mĂ»res peuvent seules, en effet, ĂȘtre em-
plovées utilement et donner des résultats satisfaisants.
Une culture non sporulĂ©e se prĂ©sente sous lâaspect dâun fin duvet
blanc pur, qui, mĂȘme sous lâaction de fortes secousses, ne se dĂ©-
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 443
tache pas de lâobjet sur lequel il est fixĂ©, tandis quâune culture bien
sporulée présente une teinte jaunùtre et tombe en poussiÚre à la
moindre secousse. Une momie ou une culture sur pomme de terre
sporulée tache les doigts comme un bùton de craie.
Modes d'emploi préconisés et résultats obtenus
jusquâĂ prĂ©sent.
Le mĂ©rite dâavoir le premier, en France, songĂ© Ă utiliser la mus-
cardine comme agent destructeur des vers blancs revient Ă M. Le
Moull, conducteur des ponts et chaussées et président du syndicat
de hannetonnage de Goron.
Ayant trouvé dans un champ des vers blancs muscardinés et ayant
constatĂ© ensuite que cette Ă©pidĂ©mie naturelle sâĂ©tendait d'elle-mĂȘme
et atteignait un nombre d'individus de plus en plus considérable, 1l
a essayĂ© Lout dâabord de propager la contagion en distribuant dans
les champs envahis par le ver blanc des momies naturelles ou obte-
nues au moyen dâinoculations artificielles.
Ensuite, trouvant ce procédé peu pratique, M. Le Moult a entre-
puis la prĂ©paration en grand des cultures dâsaria densa sur pomme
de terre et a conseillé de propager la contagion au moyen de ces
cultures artificielles.
Les premiers essais ayant donné à peu prÚs partout des résultats
nĂ©galifs, on Ă cru quâen modifiant les modes d'emploi de ces cul-
tures on obliendrait des résultats plus appréciables et on en a pro-
posé un assez grand nombre.
On a conseillé notamment les procédés suivants :
4° Quand on peut se procurer des vers blancs momifiés provenant
soit dâun gisement naturel (ces gisements ne sont pas aussi rares
quâon pourrait le croire, nous en avons rencontrĂ© plusieurs dans le
département de Seine-et-Marne, entre Crécy et Coulommiers), soit
dâun champ prĂ©cĂ©demment traitĂ© par des cultures artificielles de
muscardine, il faut répandre ces momies sur les champs infestés par
les vers blancs pendant toute la durée de la belle saison, du mois
dâavril jusquâau mois dâoctobre.
Les momies doivent ĂȘtre placĂ©es dans des trous de 15 Ă 20 cen-
444 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
timĂštres de profondeur et ensuite recouvertes. M. Le Moult croit
quâen rĂ©pandant ainsi 300 momies par hectare on peut obtenir un
bon résultat.
2 MM. Prillieux et Delacroix ont conseillé de répandre la con-
tagion au moyen de vers blancs infestés, mais encore vivants, en
procédant de la façon suivante :
Prendre une terrine plate, la tapisser dâune COUR de terre dâen-
viron Ă centimĂštre (assez peu profonde pour que les vers ne- puis-
sent sây cacher), lâimbiber lĂ©gĂšrement dâeau et y dĂ©poser une cen-
taine de vers blancs; veiller Ă ce que la terrine soit assez grande
pour que les vers ne se heurtent pas les uns contre les autres et ne
se blessent pas avec leurs pinces. Il est de la plus haute importance
que les vers ne meurent pas de mort naturelle pendant la durée du
traitement par les spores du Botrytis tenella ;
Prendre, avec un petit pinceau en crin, des spores soit sur une
momie, soit sur une culture artificielle et toucher avec ce pinceau
les vers un à un, de façon à les saupoudrer en entier ;
Recouvrir la terrine de planches sur lesquelles on met de la
mousse mouillĂ©e, et lâenterrer dans un endroit frais Ă ombre ;
Au bout de 10 heures environ, les vers sont atteints de la ma-
ladie. On les prend un à un, toujours avec assez de précaution pour
ne pas les endommager ni les blesser, et on les disperse dans les
diverses parties du terrain, Ă environ 20 centimĂštres de profondeur
dans le sol. On les recouvre de terre. Choisir de préférence les
endroits les plus attaqués par les vers blancs.
Pour se rendre compte si la muscardine a réellement agi sur les
vers blancs ainsi traitĂ©s, il est bon dâen placer une dizaine dans un
grand pot Ă fleurs rempli de terre et de les examiner 16 Ă 15 Jours
aprĂšs lâopĂ©ralion.
3° Dans le cas oĂč on nâaurait pas de momies Ă sa disposition et
que, pour une raison ou une autre, on ne pourrait pas en faire par
le procédé que nous venons d'indiquer, on a proposé de remplacer
les momies par des cultures sur pomme de terre.
Ces cultures se présentent sous forme de bùtons de 10 centimÚtres
de long, en moyenne. Chacun de ces bĂątons peut ĂȘtre divisĂ© en 15 Ă
20 morceaux et ces morceaux doivent ĂȘtre enfouis un Ă un dans a
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 449
terre, exactement de la mĂȘme façon que les momies. Suivant lâinten-
sité de l'invasion, on à conseillé d'employer 10 à 20 de ces bùtons
par hectare.
4° On a également conseillé de répandre la muscardine dans les
champs infeslés au moment des semailles sous forme de spores mé-
langĂ©s Ă du sable fin ou Ă de lâamidon stĂ©rilisĂ©.
Dans ce cas on a préconisé divers procédés :
Prendre pour vĂ©hicule de lâeau, câest-Ă -dire diluer un tube de
spores dans 100 litres dâeau et en asperger la terre un jour ou
quelques heures avant le labour, de façon à les recouvrir de terre
aussitĂŽt que possible aprĂšs lâĂ©pandage ; ou bien, mĂ©langer ces spores
Ă lâĂ©tat sec avec les grains ou graines quâon a l'intention de semer
et les jeter dans la terre en mĂȘme temps que ces derniers.
(Bien entendu, le contact de ces spores nâa aucune action sur les
grains.)
9° Une autre méthode encore consiste à saupoudrer les vers
blancs avec la muscardine au moment des labours.
On fait suivre la charrue par une personne munie dâun bol con-
tenant des spores Ă lâĂ©tat sec et dâun tampon de ouate ou dâun pin-
ceau en crin. Ă lâaide de ce tampon ou de ce pinceau trempĂ© prĂ©a-
lablement dans les spores on touchera tous les vers découverts par
la charrue de façon à bien les saupoudrer, sans les écraser, toute-
fois, et on les recouvrira dâun peu de terre, pour qu'ils ne soient pas
mangés par les corbeaux ou autres oiseaux qui en sont friands.
On contaminera ainsi une grande quantité de vers blancs à peu
de frais ; trois tubes de spores suffiront généralement pour un hec-
are.
6° En dernier lieu, M. Le Moult propose de répandre les spores
sous forme de cultures sur pomme de terre, en les jetant à la volée
sur les champs. Il conseille d'employer 1 Ă 2 kilogr. de ces cul-
tures par hectare.
7° M. Delacroix a préconisé encore, comme moyen de propagation
de la maladie causée par la muscardine, de contaminer les hanne-
tons Ă lâĂ©tat adulte en procĂ©dant de la façon suivante :
On dĂ©laye 2 ou 3 tubes de spores dans un seau dâeau ordinaire
dâune contenance de 20 litres environ. AprĂšs l'avoir bien agitĂ©e, on
446 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
plonge dans cette eau autant de hannetons que lâon pourra sâen pro-
curer et on les laisse s'Ă©chapper et sâenvoler ensuite. AprĂšs une pre-
miĂšre fournĂ©e, on peut tremper dans la mĂȘme eau une deuxiĂšme,
puis une troisiĂšme fournĂ©e et ainsi de suite tant quâon aura des
hannetons Ă sa disposition et quâil restera de lâeau dans le seau.
Ce procédé à été essayé en grand par M. Gaston de Vaux qui se
déclare satisfait des résuitats obtenus.
Voici maintenant le récit de tous les essais dont les résultats ont
Ă©tĂ© publiĂ©s jusquâĂ prĂ©sent et tels qu'ils ont Ă©tĂ© publiĂ©s :
4. â M. Le Moult a dissĂ©minĂ© des cultures artificielles dâIsaria densa
dans une pépiniÚre de 50 ares environ appartenant à M. Robichon, de
Goron. Le traitement eut lieu en septembre 1891. Au commencement de
mai 1892, la pépiniÚre était à peu prÚs débarrassée de vers blancs et
l'épidémie artificielle se propageait avec intensité.
Chaque coup de bĂȘche amenait Ă la surface soit une momie, soil une
masse de poudre blanche provenant de la dissociation du cadavre et uni-
quement composĂ©e de spores. (On nâindique ni la quantitĂ© de spores em-
ployée, ni la façon dont elles ont été répandues).
2. â Chez M. Recton fils, au village de Verger, prĂšs de Goron,
l'expérience a été faite dans une prairie. Dans la partie ravagée de
cette prairie (00 ares environ) on avait crĂ©Ă© 90 foyers dâinfection
(morceau de culture sur pomme de terre et sur viande). Les vers
blancs y Ă©taient trĂšs nombreux.
Le traitement eut lieu en septembre 1891 ; le 30 mai 1892, Ă©crit M. Le
Moult, cette prairie est magnifique, .on nây remarque plus aucune trace
des ravages des larves.
Mais le plus curieux, câest qu'une parcelle situĂ©e en face, de l'autre
cĂŽtĂ© de la route, et qui nâavait pas Ă©tĂ© traitĂ©e, a profitĂ© de lâexpĂ©rience
faite dans la prairie, les spores y ayant sans doute été transportées par le
vent.
Je viens d'assister au labourage de cette parcelle. Les vers sains y
sont encore nombreux, mais on trouve aussi des vers contaminés en trÚs
grande abondance (jusquâĂ 60 par raie). J'ai dĂ©ja ramassĂ© prĂšs de 2000
momies dans ce champ. Or, le travail nâest pas terminĂ© et j'espĂšre bien
en recueillir plus de 4000 (la superficie de ce champ est dâun hectare
environ).
On trouve ces momies Ă divers Ă©tats d'avancement; les unes sont com-
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. +441
plĂštement envahies par le champignon qui sâest ramifiĂ© dans le sol ; la
mort de ces insectes doit remonter au mois d'octobre dernier. Dâautres
larves sont bien recouvertes par le champignon, mais celui-ci nâest pas
encore ramifié dans le sol; la mort doit remonter à plusieurs semaines.
Puis, enfin, lâon trouve des larves dont la mort ne date que de deux ou
trois jours seulement. Elles prennent cette teinte rosée que j'ai indiquée
comme caractérisant la maladie.
Il est enfin certain que parmi les-larves vivantes que lâon trouve dans
ce terrain, un grand nombre sont atteintes et ne tarderont pas à périr;
les autres auront certainement le mĂȘme sort avant la transformation.
Dans le deuxiĂšme champ d'expĂ©riences, dâune superficie de un hec-
tare, oĂč nous avons crĂ©Ă© environ 100 foyers d'infection, j'ai Ă©galement
trouvĂ© des vers contaminĂ©s, mais en moins grand nombre; dâailleurs, les
vers blancs y sont rares, le propriétaire du champ ayant toujours fait ra-
masser les larves aprĂšs la charrue.
Mais dans le champ voisin, oĂč les vers Ă©taient extrĂȘmement nombreux,
j'ai pu constater le fait déjà cité plus haut : abondance de vers contaminés
aux différents états.
Puis, dans un autre champ un peu plus éloigné, j'ai encore constaté la
maladie, mais nâai pu trouver que des larves colorĂ©es, ce qui indique que
le parasite ne sây est introduit que tout rĂ©cemment. Plus on se rapproche
des parcelles traitĂ©es et plus les vers sont nombreux; plus on sâen Ă©loigne
et plus les momies deviennent rares.
3. â Le 16 juillet 1891, M. Leizour, professeur dĂ©partemental de
la Mayenne, écrivait au Journal d'agriculture pratique, t. WE, n° 29,
p. 74-75 :
Nous touchons enfin Ă la destruction complĂšte des vers blancs {ures ou
mans qui depuis si longtemps dĂ©solent les cultivateurs. L'Ćuvre est Ă
peu prĂšs accomplie dans tout l'arrondissement de Mayenne, que nous
avons récemment parcouru et sur les divers points duquel nous avons eu
la satisfaction de constater en mĂȘme temps que la prĂ©sence du champi-
gnon destructeur lâarrĂȘt complet des ravages occasionnĂ©s par la larve du
hanneton.
Partout cette larve travaillait encore activement il nây a pas plus de
trois semaines et beaucoup de champs dâorge et de sarrazin ont eu Ă en
souffrir ; puis tout à coup on a vu les récoltes atteintes reverdir; les vers
ayant disparu comme par enchantement! Cette disparition, atiribuée par
tous à une descente provoquée par les pluies et un abaissement trÚs grand
de la tempĂ©rature, nâa Ă©tĂ© au contraire que la consĂ©quence de la dissĂ©-
mination du champignon parasite et de la contamination des insectes.
448 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
On les trouve aujourdâhui, Ă des profondeurs variables, morts et en-
tourés de la moisissure caractéristique ou mourants et présentant tous les
caractĂšres des vers atteints par le bienheureux champignon.
Des essais exécutés en pleine terre à la fin du mois de juin nous per-
mettent d'affirmer qu'il suffit d'introduire quelques vers contaminés dans
les champs infestés du ver blanc, en ayant soin de les mettre en contact
immédiat avec quelques vers sains, pour obtenir rapidement la destruction
de tous ceux qui existent dans le champ.
Les agriculteurs chez lesquels le ver blanc nâest pas atteint par la
maladie nâont donc quâĂ se procurer, le plus tĂŽt possible, pour profiter
des chaleurs de lâĂ©tĂ© et de l'automne, des vers contaminĂ©s avec leur
champignon et Ă les rĂ©pandre dans leurs champs oĂč ils ne tarderont pas
Ă accomplir lâĆuvre de destruction aprĂšs laquelle ils aspirent.
4. â M. Charles Babinet annonce Ă M. A. Giard les rĂ©sultats sui-
vants :
Paris, 16 décembre 1891.
AAA Mon fils, inspecteur des forĂȘts Ă Tours, ayant enfoui dans un
carré de pépiniÚre de deux ares, le 20 août, 4 ou 5 vers infestés, y a
retrouvé le 47 octobre 150 vers, au moins, momifiés par le champignon,
qui, dâailleurs, Ă©tendait de tous cĂŽtĂ©s dans le sol ses cordons blancs de
mycĂ©lium parfaitement visibles Ă l'Ćil nu. Ailleurs que dans le carrĂ© de
deux ares le champignon ne sâest dĂ©veloppĂ© qu'aprĂšs les pluies d'octobre.
Les vers sâĂ©taient enfoncĂ©s plus bas et on nâa rien constatĂ©. PĂ©riront-ils
Les lettres que nous venons de citer ont été publiées par M. A.
Giard?, celles qui suivent ont été publiées dans le supplément du
Bulletin du Syndicat central des agriculteurs de France du 1° avril
1893 ; ces lettres étaient adressées à MM. Fribourg et Hesse.
Nous nâextrayons de ces lettres que les passages concernant les
essais en plein champ, négligeant les petites expériences faites dans
des caisses ou des pots Ă fleurs qui ne donnent aucun renseigne-
ment intéressant ou nouveau.
1. M. Delacroix fait remarquer que la disparition apparente des vers blanes observée
par M. Leyzour coincidait avec leur transformation en nymphes (Journ. dâagr. pral.,
tirage Ă part, Librairie agricole, 26, rue Jacob, Paris).
2. Ă Giard, loc. cil., p. 93 et suivantes.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 449
5. â Lettre de M. de Bossereille (Maine-et-Loire) :
21 septembre 1891.
4
Vous me demanilez le résultat de mes essais de contamination des vers
blancs. Je suis d'autant plus heureux de vous les transmettre que j'ai été
pleinement satisfait des tubes que vous m'avez adressés. Le premier envoi
est de fin juillet et le seconil de septembre. Les premiers tubes Ă©taient
destinés à mes propriélés des environs de Segré. Ne pouvant m'occuper
moi-mĂȘme de leur emploi, j'avais envoyĂ© des instructions Ă mon garde.
Il devait saupoudrer un grand nombre des vers étalés sur des planches
et au bout de douze Ă quatorze heures les mettre dans des boĂźtes, dont
le fond contenait une couche de terre légÚre (4 à 5 centimÚtres). Un lit
de mousse recouvrant celte terre devait en maintenir l'humidité; ces
boĂźtes furent placĂ©es dans diffĂ©rents locaux, voire mĂȘme en plein air. Câest
dans un appartement presque obscur et sous une tablette de verre que
les résultats furent les meilleurs. Les insuccÚs partiels ont été dus à un
excÚs d'humidité et aussi à une trop grande agglomération de vers. Les
animaux se battent, se blessent avec leurs pinces et meurent. Au fur et
à mesure que les vers étaient momifiés et bien roses, ils étaient déposés
dans les champs avec deux ou trois centimĂštres de terre en couverture.
En dehors de ces essais Ă lâintĂ©rieur, le garde devait saupoudrer des vers
sur place sans les dĂ©ranger. Il a Ă©tĂ© impossible de constater lâeffet pro-
duit, les vers pouvant ĂȘtre allĂ©s mourir fort loin du lieu de contamination.
Cet essai a amené un résultat inattendu.
Au commencement de décembre, le garde a trouvé sur terre, au mi-
lieu dâun champ ensemencĂ©, un ver couvert de mycĂ©lium, et ce, Ă 800
ou 1 000 mĂštres du point oĂč les spores avaient Ă©tĂ© rĂ©pandues.
Je me crois aulorisĂ© Ă conclure qu'il nâa pas Ă©tĂ© seul atteint et que le
vent peut entraĂźner fort loin les spores du Botrytis, les pluies se chargeant
probablement de les amener au contact des vers.
Leltre du garde de M. de Bossereille :
J'ai fait hier une bonne découverte en cherchant des vers vivants pour
M. Fribourg. Dans le jardin de la ferme oĂč j'avais Ă©tĂ© voir si un des gar-
çons en train de bĂšcher la vigne nâen trouvait pas, ayant remarquĂ© quelque
chose de blanc sur la terre retournée, je vis un ver parfaitement momifié.
J'en ai trouvĂ© cinq, et dans bien des endroits il nây avait plus que la pous-
siÚre blanche. Le ver était complÚtement défait ou bien il ne restait que
la tĂȘte. Il a dĂ» en ĂȘtre enterrĂ© beaucoup que je nâai pas vus.
Je suis allĂ© dans la prairie oĂč j'avais fait mes premiĂšres expĂ©riences et
j'ai trouvĂ© une dizaine de vers.-LĂ encore, il y en avait qui nâexistaient
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â I. 29
450 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
plus, on ne voyait que lâemplacement du ver et une poussiĂšre dâun blane
jaunĂątre. Jen ai trouvĂ© surtout aux environs des endroits oĂč j'avais semĂ©
du Botrytis; mais aussi quelques-uns au loin. Il nây a plus dâerreur pos-
sible, le champignon est dans le pays et le premier fermier que je verrai
labourer, je suivrai la charrue pour voir si je ne découvrirai pas quelque
chose.
Lettre du garde de M. de Bossereille, Ă Bellevue :
4 février 1892.
Voilà la façon dont j'ai opéré pour contaminer les vers en plein champ.
Câest le 8 aoĂ»t que j'ai reçu le premier tube de Botrytis de M. Fribourg et
que j'ai commencĂ© dans la prairie de la ferme de Riban. Jâai dâabord sou-
levĂ© lâherbe et saupoudrĂ© chaque ver sans les dĂ©ranger et recouvert en-
suite (il est possible quâen saupoudrant avec la pointe de mon couteau, le
vent ait emporté beaucoup de spores de Botrytis) ; dans ces endroits-là je
trouve en ce moment beaucoup de vers contaminés. Ensuite, j'ai semé les
spores sur la terre et donnĂ© un coup dâarrosoir dans un endroit oĂč j'Ă©tais
sĂ»r quâil y avait des vers â en ce moment, je trouve dans ces endroits
des vers contaminés, mais en moins grande quantité que dans le pre-
mier cas.
Enfin, j'ai mis dans la prairie de Riban une trentaine de vers qui avaient
passĂ© quarante-huit heures dans du sable mĂȘlĂ© avec le Botrytis.
DâaprĂšs les recherches que j'ai faites, je trouve des vers momifiĂ©s un
peu partout dans cette prairie (1 kilomĂštre). |
Dans la prairie de la RibaudiĂšre, oĂč j'avais saupoudrĂ© et mis des vers
ayant passé vingt-quatre heures dans le sable et le Bofrytis, une dizaine
de jours plus tard (vers le 22 août), je trouve aussi des vers momifiés,
mais en moins grande quantité.
Dans la prairie de la premiĂšre, oĂč j'avais fait la mĂȘme chose, je n'ai
rien trouvé, mais là il y a beaucoup d'humidité, et je n'ai pas fait de
grandes recherches.
Dans les labours, au nord du Granlrais et de la Martinais et au midi
de Bartort, je nâai rien trouvĂ©. J'en ai trouvĂ© deux momifiĂ©s dans les
labours Ă lâest de Riban (devant la maison).
Le plus Ă©tonnant, câest celui trouvĂ© dans le champ de la ChouanniĂšre,
Ă 900 ou 600 mĂštres dâoĂč j'en avais mis.
Je ferais bien, je crois, de voir autre part, Ă Maraus ou au Lion dâAn-
gers, dans des endroits oĂč lâon nâa pas eu de Botrylis, pour voir si je ne
trouverais pas de vers momifiés.
S'il y en avait, ce ne pourrait ĂȘtre que le vent qui en aurait apportĂ© de
la Mayenne, au moment des labours, et de cette façon, cela marcherait
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 451
tout seul. Si on nâen trouve pas, il y aurait alors deux façons de propager :
par le vent et par contact; pour ce dernier cas, je crois quâune boĂźte
Ă 2, 4 ou 6 compartiments oĂč il y aurait terre ou sable avec de la semence
de Botrytis, prise bien Ă point, et oĂč l'on ferait passer vingt-quatre heures
Ă un seul ver seulement par compartiment pour qu'ils ne se tuent pas
entre eux. On arrive en peu de temps Ă contaminer un grand espace.
Les vers que j'ai trouvés dans les champs mis sur du sable sous une
cloche ont lâair de se remettre Ă pousser; il se forme dessus une petite
mousse blanche ; je remarque que, lĂ oĂč j'ai commencĂ© le premier Ă les
expérimenter, Je trouve le plus de vers momifiés. Ces derniers sont
Ă cinq centimĂštres du sol â les vivants sont enfoncĂ©s en ce moment jus-
quâau fond de la terre â et il est possible qu'il y en ait qui se soient
enfoncĂ©s avec la maladie et qui soient morts, quâon ne retrouvera pas.
Cette série d'essais ne nous donne que bien peu de renseignements
précis, si on a trouvé, en effet, dans les champs traités et dans le voi-
sinage de ses parcelles, quelques vers muscardinés, le nombre des
vers atteints relativement à ceux qui sont restés vivants semble tout
Ă fait insignifiant.
En somme résultat peu appréciable.
6. â Lettre de M. E. Devaux :
La Bazoche, 19 novembre 1S91.
Vous me demandez des renseignements sur les spores que vous m'avez
fournies en vue de la destruction des vers blancs; je mâempresse de vous
les envoyer, heureux sâils peuvent vous ĂȘtre de quelque utilitĂ©.
AprÚs avoir procédé suivant vos indications, les corps de quelques vers
blancs contaminés ont été répandus un à un dans une piÚce de terre de
neuf hectares plantée en betteraves, carottes et pommes de terre. La
quantité de vers blancs y était incalculable, ils m'ont détruit les quatre
cinquiĂšmes de ma rĂ©colte de pommes de terre, et lâon a pu trouver Ă un
pied quarante-deux vers. Pour ce motif, la récolte ayant été faite préma-
turément, les vers contaminés ont été mis aprÚs celle-ci terminée, et
voici ce que j'ai constaté.
Lorsque, vingt-trois jours aprĂšs, lâon a commencĂ© les labours pour les
blés, T5 à 80 p. 100 des vers retournés par la charrue étaient malades,
les uns présentant tous les caractÚres indiqués dans vos instructions, les
autres dans un état moins avancé, mais suffisamment atleints déjà pour
n'avoir plus la force de sâenfoncer en terre et mourir sur place. Le succĂšs
Ă©lait tellement Ă©vident que plusieurs personnes de ma commune sont ve-
nues ramasser des vers pour les mettre sur leurs terres.
452 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Dans mes betteraves, le rĂ©sultat a Ă©lĂ© bien infĂ©rieur, el câest Ă peine
si 12 p. 100 des vers étaient atteints quoique le labour eût été fait trois
semaines oĂč un mois aprĂšs celui de pommes de terre.
Pour moi, en voici le motif. Dans la portion plantée en pommes de
terre, comme celles-ci venaient dâĂȘtre arrachĂ©es, les vers se sont remuĂ©s,
ont couru à la recherche de nourriture et, par conséquent, ont répandu
la maladie un peu partout ; dans les carottes et betteraves, au contraire,
trouvant tout ce qui leur Ă©tait nĂ©cessaire, ils nâont pas bougĂ©, car le ver
blanc est essentiellement sédentaire.
J'en conclus, par consĂ©quent, quâil est prĂ©fĂ©rable dâensemencer avec
les spores les terres privĂ©es de rĂ©coltes et venant dâĂȘtre labourĂ©es, la
contamination se produisant presque instantanément. Un dernier mot en
terminant, pour rĂ©pondre aux craintes qui mâavaient empĂȘchĂ© dâessayer
le Botrytis tenella, dĂšs son apparition, craintes que je sais ĂȘtre partagĂ©es
par un grand nombre de personnes.
Environ 250 ou 300 poules ont, selon leur habitude, accompagné les deux
charretiers pendant tous les labours ; ce quâelles ont consommĂ© de vers
blancs est incalculable, et pas une nâa Ă©tĂ© indisposĂ©e; c'est, je crois, la preuve
évidente que ces spores ne présentent aucun danger pour les autres animaux.
Le résultat accusé par cette lettre est plutÎt trop favorable. I a
suffi de distribuer quelques vers blancs contaminés sur un espace de
neuf hectares, pour obtenir en %3 jours la destruction de 79 p. 100
des mans qui ravageaient ces champs.
Or, nous savons quâil faut au moins quinze jours pour quâun ver
contaminé se transforme en momie et produise des spores, qui
seules peuvent, Ă leur tour, transmettre la contagion Ă dâautres sujets.
Il aurait donc fallu que tous les vers blancs du champ en question
soient venus en 2 ou 3 jours se frotter contre les momies sporulées
pour devenir malades 5 ou 6 jours aprĂšs.
Cela nous semble inadmissible et si les 75 Ă 80 p. 100 des vers
signalés dans la lettre comme malades étaient réellement muscar-
dinĂ©s, il nous semble beaucoup plus probable quâon se trouvait lĂ
en prĂ©sence dâune Ă©pidĂ©mie spontanĂ©e.
7.â Lettres de M. J. Triboudeau (Ă©lĂšve diplĂŽmĂ© de Grand-Jouan) :
Grand-Jouan, 13 novembre 1891.
J'ai complÚtement réussi dans l'essai que j'ai tenté, mais avant de vous
répondre, j'ai voulu me rendre compte de l'efficacité du procédé. Hier,
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 493
j'ai fait labourer la parcelle qui avait porté des betteraves et des carottes
et dans laquelle j'avais crĂ©Ă© des foyers dâinfection. Ă chaque raie de
charrue, les laboureurs trouvent trois Ă quatre mans plus ou moins con-
taminés, les uns complÚtement recouverts du champignon destructeur,
enveloppés comme dans un cocon blanc duquel se détachent en rayonnant
les filaments du parasite cherchant une nouvelle victime. Les autres ont
seulement les premiers anneaux de leur corps attaqués par la terrible
moisissure et affectent particuliÚrement ia couleur violacée caractéristique.
Chaque raie mesurant 100 mĂštres de long, 33 centimĂštres de large,
a donc montré quatre turcs détruits, ce qui représente un nombre de
1 200 par hectare. Il est incontestable que la charrue nâa pas mis Ă nu
toutes les larves et que ce chiffre est un minimum; nul doute donc que
dans la période de trois années qui est nécessaire pour la transformation
de la larve en hanneton on ne puisse arriver à détruire tous les vers
blancs.
Le 26 mai 1892.
Monsieur,
Depuis mes premiers essais de Jâautomne dernier, j'ai trouvĂ© sur des
parcelles distantes de cinq Ă six cents mĂštres du premier champ conta-
miné un nombre assez grand de larves alteintes par le Bofrytis tenella et
Ă une profondeur pour quelques-unes d'environ 0",30. Ge fait semble-
rait donc indiquer que par un moyen quelconque la transmission et la
propagation des spores ont dĂ» sâopĂ©rer avant l'hiver ou les premiers
froids, que, ceux-ci survenus, les turcs dĂ©jĂ malades sâenfonçant plus
profondĂ©ment ont trouvĂ© la mort dans leurs quartiers d'hiver oĂč ils sont
restés momifiés.
8. â Lettre de M. PrĂ©voleau :
Augervilliers, 4 mai 1892, par Limours (S.-et-0 ).
Ăl m'est absolument prouvĂ© aujourd'hui que le contact dâune des spores
de ces tubes (cultures Fribourg et Hesse) suffit à faire périr un ver blanc,
que ce ver, au bout d'un temps variable (de 2 Ă 3 mois, souvent plus, en
hiver), donne une assez grande quantité de spores nouvelles qui donnent
la maladie Ă des vers sains Ă la condition dâĂȘtre mis en contact avec eux.
De lĂ Ă prĂ©dire le succĂšs de cette mĂ©thode il nây a qu'un pas. Je dois
vous rendre compte des expériences qui m'ont fait connaßtre ces résul-
tats. Dans le mode d'emploi des tubes, j'ai modifié le moyen indiqué en
ce sens que j'ai contaminĂ© les vers sur le terrain mĂȘme, ce qui m'a per-
mis de le faire en moins de temps, puisque je n'avais pas Ă les ramasser
pour les rapporter ensuite. J'ai employé à cet effet un flacon à goulot plus
large que les tubes, dans lequel chaque jour je mettais une petite quan-
454 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
litĂ© de spores et un petit tampon de ouate fixĂ© au bout dâun fragment
d'aiguille Ă tricoter dont je me servais comme dâun lĂ©ger pinceau pour
saupoudrer les vers blancs. Aux labours de déchaumage, aux derniers
labours de jachÚres, en août et en septembre, j'ai contaminé les vers de
place en place par ce procédé et j'avais soin de les replacer dans la terre
fraĂźchement remuĂ©e afin de leur Ă©viter lâaction du soleil et le choc de la
charrue. Aux labours d'octobre, pour ensemencer en blé des terrains
ainsi traités, je n'ai pu mettre à découvert une assez grande quantité de
larves mortes enveloppĂ©es dâune moisissure blanche qui leur donnait l'as-
pect de cocons de grosses chenilles. Jâai pu constater la maladie dans
quelques parties que je n'avais pas traitées, ce que j'ai attribué au lrans-
port de spores enlevées de mes flacons soit par le vent, soit par mes vÚ-
tements. Je nâai pas encore pu constater si, dans ces terrains, la maladie
gagnait de proche en proche, mais j'ai traité de cette façon des embla-
vures de trĂšfle incarnat que je labourerai en juillet, et lĂ , je pourrai ĂȘtre
fixĂ© d'autant mieux que l'apparition des hannetons n'ayant lieu quâen 1893
dans nos contrées, les vers contaminés et morts resteront seuls dans le
labour à cette époque, les autres étant enfouis pour la métamorphose.
9. â Lettre de MM. Westerweller et Rigot, corralerie (GenĂšve) :
GenĂšve, 7 novembre 1892,
Nous avons mis en terre nos vers blancs badigeonnés conformément
aux prescriptions contenues dans votre brochure le 28 juillet. Nous ne
disposions pas dâune parcelle entourĂ©e de bois ou de chemins et avons
fait lâessai dans une parcelle en culture (betteraves et fourrages verts) et
dans une prairie contiguë. Nous avons utilisé deux tubes et contaminé
environ 200 vers.
Nous venons de labourer les parcelles en culture et avons constaté que
nombre de vers sont complĂštement momifiĂ©s, les spores en rĂ©sultant sâĂ©-
tendent dans le sol Ă plusieurs endroits et on le constate facilement.
Mais nous avons retrouvé une quantilé assez grande de vers parfaite-
ment sains et vigoureux.
10. â Lettre de M. Pailleret, agriculleur Ă Vauluisant, par Vil-
leneuve-lâArchevĂ©que (Yonne) :
26 octobre 1892.
Je vous écris un peu tard, au sujet des tubes que vous m'avez expédiés
en juin dernier. J'ai voulu, avant de vous Ă©crire, possĂ©der moi-mĂȘme des
renseignements certains au sujet de la propagation du Botrytis tenella.
J'ai commencé mes expériences aussitÎt les tubes reçus; j'ai obtenu de
suite le Botrytis lenella, mais tout d'abord avec de nombreux Ă©checs que
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 4)9
j'attribue à la sécheresse excessive dont nous avons été afiligés cette année.
Comme je m'attendais à ce résultat, je n'avais disposé que de la moitié
des tubes. Jâai attendu, pour employer lâautre moitiĂ©, une bonne pluie
d'orage, qui est arrivée en juillet. Immédiatement derriÚre mes charrues,
j'ai placé les vers contaminés ; malheureusement, cette fois encore, la
terre est redevenue trÚs sÚche puisque nous avons eu deux mois (août et
septembre) sans pluie. NĂ©anmoins, au labour donnĂ© fin aoĂ»t, jâai observĂ©
des vers momifiés ou atteints par le Botrylis lenella, dans la plus grande
partie de la piĂšce de terre oĂč j'avais expĂ©rimentĂ©. Toutefois, comparĂ©e Ă
l'immense quantité de vers blancs, la quantité était absolument négligeable
et la lenteur de la propagation me paraissait un obstacle invincible.
Il y a huil jours, j'ai fait donner le labour de semailles; cette fois-ci,
j'ai été émerveillé par la quantité de vers blancs, morts, mourants ou at-
teints par le Botrytis tenella. Dans certains endroits, la terre est remplie
de taches blanches de Botrytis et la quantité de vers blancs est incalcu-
lable. Ici, le résultat est certain et, je puis le dire, a dépassé mes espé-
rances.
A noter quâil est impossible de se rendre compte du travail fait par les
vers contaminĂ©s sans faire labourer ou bĂȘcher tout le terrain sur lequel
on à opéré, car le ver blanc voyage beaucoup avant de mourir.
Je ne saurais trop engager ceux de mes collÚgues qui sont affligés par
le mĂȘme flĂ©au Ă employer le Potrytis tenella, et surtout qu'ils ne se dĂ©-
couragent pas si, tout dâabord, le rĂ©sultat ne rĂ©pond pas Ă leur attente.
Je suis bien dĂ©cidĂ© Ă recommencer lâan prochain mes expĂ©riences dans
plusieurs terrains différents et dans différentes conditions, afin d'étudier
avec plus de détails l'existence du bienheureux parasite. La ferme de
Vauluisant, par son Ă©tendue et la diversitĂ© de ses terrains, se prĂȘte, du
reste, trĂšs bien Ă cette Ă©tude.
J'ajoute un dĂ©tail dans le mode de traitement qui aura peut-ĂȘtre son
importance. Jâai suivi, pour la moitiĂ© des tubes, la mĂ©thode dâinoculation
indiquĂ©e par la brochure ; je m'empresse d'ajouter quâelle nâa donnĂ© de
trĂšs bons rĂ©sultats ; mais j'ai obtenu dâautres rĂ©sultats non moins bons
en opĂ©rant ainsi quâil suit, ce qui est, Ă nâen pas douter, beaucoup plus
simple : je verse dans une petite soucoupe la poudre blanche de Botrytis
et, suivant dans la raie, derriĂšre la charrue, Ă l'aide du tampon de ouate
qui ferme le tube, je saupoudre le ver blanc dans la raie ; Ă la seconde
raie faile par la charrue, il est immédiatement enterré. Par ce moyen, je
supprime toutes les prĂ©parations : terrine plate, blanc dâĆuf, etc., et,
comme je vous l'ai dit plus haut, j'ai obtenu le mĂȘme rĂ©sultat. Je n'irai
pas jusqu'Ă conseiller ce procĂ©dĂ© qui est peut-ĂȘtre par trop primitif et que
Je me rĂ©serve dâexpĂ©rimenter.
Je constate seulement le fait.
496 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
41. â Lelire de M. Ovide Benoist, agriculleur Ă Gas, par Eper-
non (E.-et-L.):
Gas, le 22 mai 1892.
Vers les premiers jours d'avril dernier, vous mâadressiez, sur la recom-
mandation de M. Garola, professeur d'agriculture dâEure-et-Loir, deux
tubes d'essais de votre fabrication du Botrytis tenella, et je dois aujour-
dâhui vous rendre compte du rĂ©sultat obtenu.
Le premier tube que j'ai employé le fut le lendemain de son arrivée en
suivant exactement les prescriptions qui y Ă©taient jointes; mais, au bout
de quinze jours, probablement Ă cause de la basse tempĂ©rature quâil fai-
sait Ă cette Ă©poque, aucun ver nâĂ©tait encore contaminĂ©, et ce nâest quâa-
prÚs un mois, vers les premiers jours de mai, aprÚs quelques journées
chaudes (le pot Ă©tait exposĂ© au midi dâun mur pour subir une tempĂ©rature
plus élevée et fréquemment arrosé), que je pus constater le plein succÚs
du procédé.
Le second tube fut employé huit jours aprÚs son arrivée et me donne
les mĂȘmes rĂ©sultats en ce moment; je puis donc vous assurer de ma sa-
tisfaction de la valeur de vos produits, et si lâannĂ©e derniĂšre, Ă l'automne,
je nâai pas rĂ©ussi avec les tubes que vous mâaviez encore gracieusement
envoyés, cela a dû dépendre des instructions que vous donniez alors : de
ne laisser les vers que six heures en contact avec le ferment pour les dis-
séminer ensuite.
Il me paraĂźt bien aujourdâhui quâil faut un temps beaucoup plus long,
surtout quand la température est basse.
Avec le produit restreint que j'ai déjà obtenu, je compte maintenant
contaminer { 500 vers que j'ai mis Ă nouveau dans un grand baquet rem-
pli de terre, et alors quand j'aurai obtenu cet abondant ferment de Bo-
trytis tenella, je le disperserai sur mes terres infestées de vers blanes, et
je pourrai par la suite vous rendre compte des rĂ©sultats que jâobtiendrai.
Nous avons tenu Ă citer celte derniĂšre lettre, bien quâelle ne relate
que les rĂ©sultats dâune expĂ©rience faite dans un pot Ă fleurs, parce
quâelle signale un procĂ©dĂ© sur lequel nous aurons Ă revenir plus
loin. Il sâagit de la prĂ©paration des momies en grande quantitĂ© pour
les distribuer ensuite dans les champs envahis.
Nous avons trouvé en tout onze attestations favorables. Il est pos-
sible quâon ait obtenu des rĂ©sultats analogues dans quelques autres
cas que nous ne connaissons pas, mais, en admettant mĂȘme que le
nombre de cas dans lesquels on a réussi à propager l'épidémie ait
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 4517
Ă©tĂ© dix fois supĂ©rieur Ă celui que nous venons dâannoncer, cela ne
changerait en rien la conclusion que lâon doit tirer de lâensemble des
essais faits depuis trois ans, câest-Ă -dire depuis que lâon a mis les
cultures de muscardine Ă la disposition des agriculteurs.
Dâune part, nous constatons que sur 100 essais on nâa eu que tout
au plus un succĂšs Ă enregistrer ; dâautre part, {ous ces essais en
grande culture, quel quâen ait Ă©tĂ© dâailleugs le rĂ©sultat, ont Ă©tĂ© faits
dans des conditions telles quâil est impossible aujourdâhui dâen tirer
le moindre renseignement précis.
Tous ces essais ne nous ont appris ni la proportion des hannetons
et des vers blancs qui, saupoudrés directement de spores, un à un,
succombent muscardinĂ©s, â ni le meilleur procĂ©dĂ© pour infester le
plus grand nombre de sujets, toutes choses dâailleurs Ă©gales, â ni
la proportion et la nature des cultures naturelles ou artificielles qu'il
faudrait employer pour obtenir un résultat probable dans un temps
et sur un espace donnĂ©, â ni dans quelles conditions et dans quelles
terres la muscardine peut se développer et pendant combien de temps
elle peut conserver sa virulence pour les vers blancs. â En un mot,
il est impossible de savoir encore aujourdâhui quel rĂ©sultat approxi-
matif on pourrait espĂ©rer dâobtenir en grande culture, au moyen dâun
traitement que des expériences préalables auraient montré le plus
efficace, et cela pour la bonne raison quâon nâa pas songĂ© Ă faire une
seule expérience précise, avant de passer à la pratique.
On a proposé l'application en grand de la muscardine, la prépara-
tion et la vente de ce produit est devenue une affaire commerciale,
bien avant quâon ait eu le temps d'Ă©tudier la question, mĂȘme au point
de vue purement scientifiqueâ. Aussi en est-il rĂ©sultĂ©, comme on
devait sây attendre, que cette mĂ©thode qui est appelĂ©e peut-ĂȘtre Ă
rendre de grands services Ă lâagriculture se trouve complĂštement
discrĂ©ditĂ©e aujourdâhui.
« Que serait devenue, dit M. Giard?, la pratique si utile de la vac-
1. La muscardine a été mise en vente en automne 1890, tandis que le travail de
M. Giard, câest-Ă -dire le premier travail complet sur lâZsaria densa, parasite du han-
neton, nâa paru que le 5 mai 1893.
2. Ă. Giard, Loc. cit., p. 86.
458 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
cination contre le charbon, quel résultat aurait donné le traitement
antirabique par inoculation prĂ©ventive, si M. Pasteur nâavait gardĂ© en
quelque sorte le monopole de ces précieuses découvertes et n'avait
surveillĂ© lui-mĂȘme ou avec lâaide de ses disciples immĂ©diats lappli-
cation des nouvelles méthodes ? ».
Et nous pouvons ajouter, que seraient devenues ces découvertes
si, aprÚs les premiÚres expériences de laboratoire, M. Pasteur avait
confié la préparation et la vente de ses vaccins à une maison de com-
merce qui les aurait fabriqués et /ancés comme on lance dans le com-
merce un spécifique infaillible quelconque ?
On aurait certainement eu de nombreux accidents à déplorer et le
cultivateur, déjà trÚs méfiant et sceptique en ce qui concerne toutes
ces nouveaulĂ©s, n'aurait jamais consenti Ă profiter dâune des plus im-
portantes découvertes de ce siÚcle.
Le plus mauvais service quâon ait pu rendre Ă la cause de la pro-
pagation des méthodes scientifiques parmi les cullivateurs et par con-
sĂ©quent Ă lâagriculture, câest dâavoir procĂ©dĂ© comme on lâa fait pour
la muscardine du ver blanc. Non seulement on nâa obtenu aucun
résultat appréciable en fait de destruction des hannetons et des vers
blancs, mais, £e qui est plus grave, on a appelé scientifique une fa-
çon d'opérer qui n'avait en réalité de scientifique que le nom.
En rĂ©sumĂ©, on peut affirmer aujourdâhui, d'une part, que si les
essais tentĂ©s jusquâĂ prĂ©sent nâont donnĂ© que des rĂ©sultats peu encou-
rageants, ces mauvais rĂ©sultats ne sont dus quâĂ l'emploi de procĂ©dĂ©s
insuffisamment étudiés; d'autre part que, la destruction des hanne-
tons et des vers blancs par des épidémies naturelles de muscardine
Ă©tant une chose absolument certaine, il ne nous semble pas impos-
sible de propager ces épidémies.
Il ne faudrait, pour y arriver, quâentreprendre Ă nouveaux frais des
recherches expérimentales proprement dites. La durée de ces re-
cherches sera peut-ĂȘtre longue, l'Ă©tude complĂšte de celte importante
question demandera peut-ĂȘtre beaucoup de soins et d'application,
mais comme câest le seul moyen d'arriver Ă un rĂ©sultat certain, il
se trouvera toujours un nombre suffisant de personnes dĂ©vouĂ©es Ă
lâagriculture pour entreprendre cette Ă©tude dans l'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 499
Ătude expĂ©rimentale de l'application de la muscardine Ă la
destruction des hannetons et des vers blancs en grande
culture.
Nous avons vu dans un des chapitres précédents (p. 442 el suiv.)
quâil y a une diffĂ©rence trĂšs marquĂ©e entre le mode de transmission
des maladies bactériennes et la façon dont peut se répandre une
maladie des insectes causée par un champignon entomophyte.
Or, il y a une différence non moins sensible entre les maniÚres
dont ces deux genres de maladies et leurs applications Ă©ventuelles
peuvent et doivent ĂȘtre Ă©tudiĂ©es.
Les méthodes d'investigation seront, bien entendu, toujours les
mĂȘmes en ce que toutes les recherches expĂ©rimentales, quel quâen
soit dâailleurs lâobjet, ont de commun : une prĂ©cision el un contrĂŽle
suffisants pour que chaque observalion isolée puisse fournir son con-
tingent de renseignements exacts et pour que, de lâensemble de ces
observations recueillies en nombre suffisant, oĂč puisse tirer des con-
clusions certaines.
Mais si, par exemple, pour l'Ă©tude des maladies contagieuses des
hommes, il suffit dâavoir Ă sa disposition un laboratoire bien installĂ© et
un certain nombre de sujets d'expérience ; si, dans ce cas, un savant
peut, sans pour ainsi dire sortir de son laboratoire, étudier et pré-
parer ses virus ou ses vaccins et les distribuer ensuite avec des ins-
tructions suffisantes pour que tout le monde puisse sâen servir et en
obtenir des rĂ©sultats certains et prĂ©dits, il nâen est plus du tout de
mĂȘme quand il sâagit d'atteindre des ĂȘtres qui vivent dans la terre
isolément, ne communiquant entre eux que par hasard et dont la
présence sous lerre ne nous est révélée que quand ils produisent des
ravages visibles Ă la surface ; quand il sâagit en outre de les atteindre
au moyen dâun virus qui ne peut agir que sous une forme et dans
des conditions spĂ©ciales quâil faut dĂ©terminer.
L'Ă©tude de la destruction des vers blancs par la muscardine se
trouve précisément dans ce dernier cas.
Le ver blanc vit dans la terre, câest donc en plein champ, dans
son milieu naturel, qu'ii faut Ă©tudier les moyens de lâatteimdre.
460 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
Les expĂ©riences de laboratoire, bien quâindispensables, seront,
dans ce cas, absolument insuffisantes ; elles nous apprendront la fa-
çon de procéder pour préparer les cultures les plus virulentes et
pour atteindre le plus grand nombre des sujets en les traitant par
inoculalion directe, mais ne nous donneront jamais que des indica-
tions bien vagues sur le traitement Ă suivre en plein champ.
Nous ne saurions mieux comparer cette Ă©tude quâĂ celles de lâap-
plication des engrais ou des semences qui demandent, elles aussi,
tout dâabord des recherches de laboratoire, ensuite des expĂ©riences
dans des petits champs dâessai et, en dernier lieu, toute une sĂ©rie
dâessais en grande culture.
Pour toutes ces Ă©tudes la collaboration directe de lâagriculteur est
absolument indispensable, elle seule donnera des résultats pratiques
Ă la condition toutefois dâĂȘtre bien dirigĂ©e et dâĂȘtre conduite avec
méthode.
* Ainsi, en rĂ©sumĂ©, pour mener Ă bonne fin lâĂ©tude de la destruc-
tion des hannetons et des vers blancs par la muscardine, il faut en-
treprendre un ensemble de travaux, Ă savoir :
1° Recherches de laboratoire ;
2° Recherches expĂ©rimentales dans des petits champs dâessai ;
3° Ătude des applications en grande culture.
1° Recherches de laboratoire.
Cette partie est la seule de lâensemble de lâĂ©tude qui a reçu jus-
quâĂ prĂ©sent un commencement d'exĂ©cution. Nous savons aujour-
dâhui avec certitude:
1° Que les spores mûres peuvent donner la maladie aux vers blancs
et aux hannetons par simple contact, câest-Ă -dire quâil suffit de dĂ©-
poser sur le corps de ces insectes un certain nombre de ces spores,
pour les infester et les faire mourir muscardinés ;
2° Que ces spores virulentes peuvent ĂȘtre recueillies soit sur des
insectes morts muscardinés, soit sur des cultures artificielles de
muscardine (cultures sur pomme de terre, sur gélatine ou sur des
milieux nutritifs liquides).
Les rĂ©sullats des expĂ©riences de laboratoire faites jusquâĂ prĂ©sent
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 461
peuvent nous fournir déjà quelques indications intéressantes. Nous
citerons toutes celles dont nous avons pu avoir connaissance et que
nous avons faites nous-mĂȘmes.
EpĂ©riences faites par M. Jean Dufourâ, directeur de la Station viticole
de Lausanne.
A. â Le 30 juillet, trois gros vers blancs vivants furent placĂ©s dans un
pot, dans du terreau. On sema directement sur les vers des dĂ©bris dâun
insecte momifiĂ© provenant dâun gisement naturel. Le 5 aoĂ»t: un ver mort
rose, deux vers vivants. Le 21 août : deux vers morts muscardinés, un
vivant. Le 28 octobre : Deux vers muscardinés, un vivant.
B. â Le 30 juillet : trois petits vers blancs de lâannĂ©e dans du terreau,
infestés avec des débris des vers morts. Le 20 août : tous vivants, intectés
de nouveau avec la moisissure du pot Ă. Le 28 octobre : les trois vers
sont morts momifiés.
D. â Le 5 aoĂ»t : terre de jardin ordinaire. Dix vers de seconde annĂ©e
infestés avec une culture de MM. Prillieux et Delacroix (culture sur pomme
de terre). Cette culture fut raclée au-dessus des vers qui en recevaient ainsi
les débris. Le 28 octobre : neuf vers vivants, un seul mort muscardiné.
E. â Le 5 aoĂ»t : terre forte. Une vingtaine de petits vers blancs. In-
lection par arrosage d'eau dans laquelle un fragment de culture Prillieux
avait été émielté. Le 27 octobre : sept vers vivants, un mort, noir, non
infeclé, un seul contaminé, complÚtement recouvert de moisissure. Les
autres avaient disparu.
F. â Le 5 aoĂ»t : six vers de seconde annĂ©e dans un pot avec terre de
jardin. Les six vers sont enfouis aprĂšs avoir Ă©tĂ© trempĂ©s dans de lâeau
contenant des débris de culture Prillieux. Le 28 octobre : les six vers
morts, attaqués par le champignon; trois sont déjà à demi décomposés.
La terre du vase est remplie des masses blanches du Botrytis.
G.â Le 2 septembre: mis dans un pot trois vers blancs vivants et deux
morts, couverts de moisissure. Le 23 octobre : pas de changement, in-
fection nulle.
Cette sĂ©rie dâexpĂ©riences nous montre :
1° Que les spores récoltées sur les momies (A et B) ont détruit
o vers sur 0;
1. Jean Dufour, Note sur le Botrylis lenella, etc. (Bull. Soc. vaud. sc, nal.,
XXVIIT, 106)
462 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
2° Que les spores des cultures artificielles sur pomme de terre
employĂ©es de la mĂȘme façon Ă lâĂ©tat sec nâont dĂ©truit que 2 vers sur
90 (expériences D et E) ;
3° Que les spores des cultures artificielles dĂ©layĂ©es dans lâeau ont
détruit 6 vers sur 6;
4° Que 2 vers momifiés enfermés avec 3 vers vivants dans un espace
d'environ un dĂ©cimĂšĂȘtre cube nâont donnĂ© aucun rĂ©sultat.
Le nombre de ces expériences et surtout le nombre de sujets trai-
tĂ©s est trop restreint pour quâon puisse en tirer des enseignements
précis, toutefois elles tendent à démontrer :
1° Que les spores récoltées sur des momies sont plus virulentes
que celles provenant de la culture artificielle qui a été employée dans
ce cas particulier ;
2° Que, toutes conditions dâailleurs Ă©gales, lâinfestation par contact
direct est plus certaine en employant des spores délayées dans un
liquide quâen les emplovant Ă lâĂ©tat sec.
M. G. Delacroix â a fait une sĂ©rie dâexpĂ©riences sur les vers blancs
et sur les hannetons.
Pour infester les vers blancs il a employé le procédé que nous
avons indiqué plus haut (p.445). En saupoudrant les vers blancs bien
sains de spores Ă lâĂ©tat sec et en laissant ces vers disposĂ©s sur une
mince couche de sable humide pendant 4 à 6 heures, de façon à ce
qu'ils ne puissent pas se dĂ©barrasser de leurs spores en sâenfonçant
dans la terre, M. Delacroix a obtenu, en moyenne, lâinfestation des
quatre cinquiÚmes des vers blancs traités. Dix à quinze jours aprÚs
l'opération, les vers morts muscardinés étaient déjà couverts de
moisissure.
Pour infester les hannelons, M. Delacroix a enfermé ces insectes
dans un cristallisoir et les a aspergĂ©s Ă lâaide dâun pulvĂ©risateur, de
spores dĂ©layĂ©es dans de lâeau stĂ©rilisĂ©e.
« Les 20 et 21 juin : 134 hannetons ainsi traités furent placés dans un
panier avec des feuilles fraßches. Le 23 juin : 65 hannetons avaient péri ;
pas de trace de moisissure sur leur corps. On les retira et ils furent pla-
cés sur du sable humide sous une cloche.
1. Journal de lâagriculture pralique, n°5 des 23 et 30 juillet, 6 et 13 aoĂ»t 1891
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 463
Le 26 juin, une seconde série de 42 hannetons, et le 30 juin une der-
niÚre de 27 étaient retirés morts sans moisissure visible et placés dans
les mĂȘmes conditions que les premiers.
De la premiÚre série (65 hannetons) on observa sur un seul la moisis-
sure caractéristique qui commença à s'y développer aprÚs un séjour de
o jours en chambre humide ; les autres pourrirent.
De la deuxiĂšme sĂ©rie, 30 sur 42 sâinfectĂšrent ; dans la troisiĂšme sĂ©rie
l'infection sâopĂ©ra sur les 27 hannetons sans exception. Ce sont donc les
hannetons qui ont vĂ©cu le maximum de temps (9 jours) chez qui lâinfec-
Lion a le mieux réussi. C'étaient les plus jeunes. Et, fait remarquable, pas
une seule des femelles infestĂ©es nâa pondu. »
M. Delacroix conclut de celte expĂ©rience quâen traitant des han-
netons jeunes, autant que possible le jour mĂȘme de leur sortie de
terre, on arriverait Ă les infester presque tous.
Une expĂ©rience analogue a Ă©tĂ© faite par M. Fontaineâ, membre de
la Société d'agriculture de Melun.
M. Fontaine a opéré sur 1 000 hannetons enfermés dans une caisse
avec une couche de terre de 20 centimĂštres. Sur les 1 000 hannetons sau-
poudrés de spores, 100 sont rentrés en terre, 300 sont morts à la surface.
Deux mois aprĂšs lâopĂ©ration, on a trouvĂ© :
HANNKTONS
a â
morts morts
muscardinés, non muscardinés.
Dans-hiterre. 2 Rene 329 371
AN IAFSUT ACT. SEE RE 60 240
ENDRIOUL TA TIANERCS 389 611
Le 29 décembre 1893, nous avons enfermé dans une caisse de 80 cen-
timĂštres de long sur 60 centimĂštres de large et 60 centimĂštres de haut
250 vers blancs de deuxiÚme année.
Les vers blancs ont été disposés sur cinq couches superposées séparées
les unes des autres par des couches de terre de 6 Ă 8 centimĂštres. Pour
nourrir les vers blancs, des pommes de terre ont élé répandues à profu-
sion sur chaque couche.
Tous les vers blancs ont Ă©tĂ© saupoudrĂ©s de spores Ă lâĂ©tat sec (1"° cul-
ture de M. Delacroix).
1. Supplément du Bullelin du Syndicat central des agriculleurs de France du
197 avril 1893.
464 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
La caisse, recouverte de mousse et arrosĂ©e de temps en temps, Ă
Ă©lĂ© placĂ©e dans une serre oĂč rĂ©gnait une tempĂ©rature constante de 12
440%
Le 7 mai 1894, la caisse a été ouverte et la terre tamisée. Il a été
trouvé :
Vers blancs morts muscardinés couverts de moisissure qui a
poussé des ramifications dans la terre de tous cÎtés. . . . 96
Vers blancs morts muscardinés rouges. . . . . . . . . . 8
Vers'blancs vivantstet bien portants EPP RE 50
Vers blancs morts non muscardinés ou disparus . . . . . . 96
Totale IA PRE 250
Les 90 vers blancs vivants ont été trouvés presque tous au
fond de la caisse oĂč ils sont descendus pour se transformer en
nymphes. (Maintenus pendant les trois mois d'hiver dans une
serre chaude, les vers blancs en expérience pouvaient se trans-
former deux mois plus tĂŽt que dans les conditions ordinaires.) On
peut donc les considérer comme définitivement échappés à la con-
lagion.
En somme, en saupoudrant les vers blancs avec des spores Ă sec,
nous avons obtenu leur destruction par la muscardine dans la pro-
portion de #1 p. 100.
Le 21 mai 1894, 95 hannetons ont été enfermés dans un bocal, sau-
poudrĂ©s de spores Ă sec (deuxiĂšme culture prĂ©parĂ©e par nous-mĂȘme),
laissés ainsi pendant 3 heures et enfermés ensuite dans une grande cage
à moitié remplie de terre.
Le 29 mai : 45 hannetons morts Ă la surface de la terre, les autres, soil
90 hannetons, enterrés. Les hannetons trouvés à la surface de la terre ont
été placés dans une chambre humide.
Le 2 juin, nous trouvons :
Des 45 hannetons placés en chambre humide, 22 muscardinés ;
Des 50 hannetons enterrés, 47 muscardinés.
En tout 79 hannetons muscardinés sur 95 mis en expérience, soit en-
viron 82 p. 100 infestés.
Simultanément, nous avons trailé 90 hannetons en les trempant dans
un liquide sucré et acidulé dans lequel nous avons délayé des spores de
la mĂȘme culture.
Le 2 juin, nous avons trouvé, sur 90 hannetons, 61 hannetons, soit
environ 70 p. 100, muscardinés.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES Ă L'AGRICULTURE. 469
En résumant les résultats de toutes les expériences que nous
venons de citer, nous voyons que les procĂ©dĂ©s employĂ©s jusquâĂ
présent ont donné au laboratoire des résultats favorables dans la
proportion de 40 Ă 50 p. 100, câest-Ă -dire que sur 100 insectes
(hannetons ou larves) traités, 40 à 50 ont succombé muscardimés et
20 à 60 ont échappé à la contagion. Ces expériences qui, au point de
vue de la qualité des cultures employées, avaient presque toules été
faites dans des conditions diffĂ©rentes, et dont le nombre est tout Ă
fait insuffisant pour quâon puisse en tirer des renseignements prĂ©cis,
nous ont montrĂ© par contre qu'il nous reste encore Ă chercher et Ă
bien déterminer au laboratoire les points suivants :
4° La composition et la préparation des milieux nutritifs et des
cultures artificielles qui donneraient les meilleures garanties au
point de vue de la virulence et du nombre des spores;
2 Le mode d'emploi de ces spores pour obtenir, toutes condi-
tions dâailleurs Ă©gales, les rĂ©sultats les plus satisfaisants, câest-Ă -dire
pour contaminer la plus forle proportion des sujets (vers blancs ou
hannetons) traités ;
9° L'Ă©tat de dĂ©veloppement des vers blancs le plus favorable Ă lâin-
festation ;
4° La façon de procéder pour obtenir des spores virulentes aux
prix les plus réduits.
Ces données connues, 1l sera possible de procéder, en connais-
sance de cause, aux expériences en plein champ.
2° Recherches expérimentales en pleine terre.
Nous venons de le voir, les expériences de laboratoire ne nous
apprendront, en somme, qu'à préparer de bonnes cultures viru-
lentes et Ă contaminer les vers blancs dans des pots Ă fleurs.
Pour apprendre comment il faut procéder pour atteindre les vers
blancs dans leur milieu naturel, il est indispensable de refaire une
série d'expériences en pleine terre.
En effet, 1l sâagit de dĂ©terminer dans quelles conditions, sous quelle
forme et en quelle quantitĂ© la muscardine doit ĂȘtre introduite dans la
terre pour sây dĂ©velopper et atteindre les vers blancs qui sây trouvent.
ANN, SCIENCE AGRON. â 1893, â 1. 30
466 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
« Il eût été intéressant, dit M. Giard!, de faire en grand et dans
des condilions variées de saison, de terrain, etc., des expériences
dâinfestation artificielle conduites avec mĂ©thode et dâune facon ri-
soureusement scientifique. »
L'insuccĂšs de toutes les tentatives faites jusquâĂ prĂ©sent pour Ă©ta-
blir des foyers dâĂ©pidĂ©mie dans les champs envahis par les vers blancs
nous montre que celte étude expérimentale ét rigoureusement scien-
tifique ne serait pas seulement intéressante, elle est absolument in-
dispensable ; elle seule peut nous apprendre s'il est possible de
détruire les vers blancs par la muscardine et comment il faut pro-
céder pour y arriver.
Continuer Ă employer en grand les procĂ©dĂ©s conseillĂ©s jusquâĂ
présent serait perdre bien inutilement du temps et de l'argent.
Ne fallait-il pas, en effet, une certaine dose de naĂŻvetĂ© pour sâima-
giner quâon atteindra les vers blancs en semant sur un champ des
spores Ă raison de quelques tubes ou de quelques boĂźtes Ă lâhectare,
ou bien en y enfouissant des petits morceaux de cultures sur pomme
de terre ou des larves préalablement contaminées, tous les 10, 20
ou mĂȘme 90 mĂštres ?
Le seul conseil que lâon puisse donner aux agriculteurs aujourdâhui,
câest de commencer sans tarder lâĂ©tude expĂ©rimentale proprement
dite qui seule peut nous donner des renseignements précis et qui ne
produira de rĂ©sultats apprĂ©ciables quâavec le concours effectif des
cultivateurs.
Cette Ă©tude nâest ni bien difficile ni compliquĂ©e ; pour la mener Ă
bonne fin il suffit de procéder avec méthode, noter avec soin les
faits observĂ©s et la poursuivre pendant un, deux ou trois ans, câesl-
à -dire le temps nécessaire pour obtenir des résultats définitifs.
Au lieu de répandre la muscardine au hasard, à une dose plus ou
moins arbitraire sur toute l'Ă©tendue des champs envahis par les vers
blancs, il faut commencer par employer la quantité nécessaire de ce
produit sur un petit champ â spĂ©cialement choisi et prĂ©parĂ© dans
ce but â pour y obtenir des vers momifiĂ©s en aussi grande quantitĂ©
que possible.
1. Ă. Giard, loc, cit., p. 92.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 467
Le champ rĂ©servĂ© doit ĂȘtre prĂ©parĂ© de la façon suivante :
1° Choisir un terrain de préférence bien envahi par les vers blancs
et aussi éloigné que possible des habitations pour que les oiseaux de
la basse-cour ne puissent pas y pénétrer;
2% Lâentourer dâun petit fossĂ© de 80 centimĂštres de profondeur
pour le garantir dâune inondation et aussi pour empĂȘcher les vers
blancs d'en sortir ;
3° Répandre sur ce champ de la muscardine à profusion en y
semant des spores dĂ©layĂ©es dans lâeau ou Ă lâĂ©tat sec, ou bien en y
enfouissant des cultures sur pomme de terre ou des vers blancs préa-
lablement contaminés par la méthode de MM. Prillieux et Delacroix,
Ă raison dâau moins 400 par mĂštre carrĂ© (ce dernier procĂ©dĂ© nous
semble, jusquâĂ nouvel ordre, prĂ©senter les garanties les plus sĂ©-
rieuses) ;
4 Semer sur ce champ du gazon, de la luzerne ou toute autre
plante dont les vers blancs sont friands;
5° Ăloigner du champ ainsi prĂ©parĂ© les taupes et les oiseaux qui
pourraient manger les vers blancs ou les momies.
Dans les conditions les plus favorables lâinfestation deviendra ma-
nifeste 15 à 20 jours aprÚs l'opération; dans ce cas, les momies
produiront des spores deux ou trois mois plus tard et pourront
communiquer la contagion Ă dâautres vers blancs. DĂšs ce moment
on pourra jeter dans le terrain réservé tous les vers blancs vivants
et bien portants que lâon pourra ramasser au moment des labours.
En admettant quâon aura procĂ©dĂ© Ă lâinstallation du champ rĂ©servĂ©
le 4° avril, on pourra faire une premiÚre fouille le 1° mai et alors,
si le rĂ©sultat est favorable, câest-Ă -dire si lâon trouve des vers blancs
momifiés ou malades, on pourra y jeter tous les vers blancs vivants
quâil sera possible de se procurer pendant toute la durĂ©e de la belle
saison, câest-Ă -dire jusque vers le 15 octobre.
à ce moment il sera nécessaire de constater le premier résultat
obtenu.
On verra :
4° A la premiÚre fouille (le 1° mai) la proportion des vers conta-
minés par la culture artificielle employée en premier lieu ;
2 A la deuxiĂšme fouille (le 15 octobre), si la maladie sâest pro-
468 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
pagĂ©e dâelle-mĂȘme aux autres vers quâon aura introduits dans le
champ d'expĂ©rience depuis le 1% mai et, â en comptant les vers
momifiĂ©s et ceux qui sont restĂ©s encore vivants, â la proportion
des vers contaminés de cette façon.
Durant la premiÚre année, les vers momifiés et les vivants doivent
ĂȘtre laissĂ©s en place.
Au printemps suivant, 1l y aura lieu d'examiner Ă nouveau lâĂ©tat
des cultures et d'alimenter le champ réservé en vers blancs vivants
jusquâen octobre ou en novembre.
Dans le courant de la deuxiÚme année on pourra déjà commencer
à prendre des momies dans le champ réservé (en choisissant celles
qui seront les plus mĂŒres et sur lesquelles la moisissure se sera le
mieux dĂ©veloppĂ©e) pour les rĂ©pandre dans dâautres endroits infestĂ©s
par les vers blancs ou pour contaminer des hannetons.
Pour obtenir des rĂ©sultats dĂ©cisifs, l'expĂ©rience doit ĂȘtre continuĂ©e
au moins encore pendant une troisiÚme année ; elle doit durer au
moins aussi longtemps quâun cycle d'Ă©volution complĂšte du hanneton,
de lâĆuf Ă lâĆuf.
En suivant une telle expérience avec méthode et en notant soi-
gneusement les faits observés (la proportion des vers morts mus-
cardinĂ©s) ainsi que la nature du sol du champ dâexpĂ©rience et les
conditions atmosphĂ©riques pendant la durĂ©e de lâexpĂ©rience, on
apprendra à connaßtre toutes les données qui nous manquent encore
relativement aux procédés à suivre pour détruire les vers blancs en
grande culture. On apprendra notamment :
1° La proportion des vers blancs qui peuvent ĂȘtre dĂ©truits par la
muscardine dans un temps donné ;
2° Les conditions de développement de la muscardine dans la terre.
Mais ce nâest pas lĂ le seul avantage dâune telle façon de procĂ©der.
L'Ă©tablissement dâun champ dâexpĂ©rience dans les conditions que
nous venons d'indiquer, tout en nous fournissant des renseigne-
ments précis et indispensables, permettra seul de multiplier les
foyers naturels de la muscardine et de mettre, en mĂȘme temps, les
germes de cette maladie à la disposition de tous les intéressés sans
autres frais et manipulations que lâentretien de ces champs une fois
quâils seraient Ă©tablis.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L AGRICULTURE. 469
D'autre part, les spores récoltées sur les vers blancs ou les hanne-
tons muscardinés étant plus virulentes que celles produites sur des
milieux nutrilifs arĂŒficiels, les cullivateurs auront toujours Ă leur
disposition une muscardine présentant beaucoup plus de garantie
au point de vue de son efficacité La les cultures artificielles en tubes
ou en boĂźtes.
En un mot les champs d'expérience deviendront dans la suite des
« gisements momifÚres », véritables pépiniÚres dans lesquelles on
pourra puiser des momies pour les répandre sur les terres envahies
par les vers blancs.
LâĂ©tendue de ce gisement ne peut pas ĂȘtre fixĂ©e d'avance dâune
façon bien précise, sa richesse dépendra naturellement de la quantité
des vers blancs qu'on y aura enfouie; nous croyons toutefois que
chaque mÚtre carré du champ réservé fournira une quantité suffi-
sante de momies pour traiter ensuite avec succĂšs un hectare de
terrains envahis.
Pour une ferme de 50 hectares, il faudra donc un champ réservé
de 50 à 60 mÚtres carrés, pour une commune dont le territoire
aurait 3 000 hectares dâĂ©tendue, il faudrait un Sharon de 300 Ă 350
mÚtres carrés.
Les frais de premier Ă©tablissement dâun gisement momifĂšre
s'élÚveront, au maximum, à 5 fr. par mÚtre carré; mais 1l ne faut
pas oublier que cette dépense serait faite une {os pour toutes,
qu'une fois Ă©tabli, un tel gisement durera aussi longtemps quâil y
aura des hannetons et des vers blancs pour lâalimenter.
En procédant ainsi, chaque cultivateur pourra préparer sa mus-
cardine comme il prĂ©pare aujourdâhui son fumier et ce nâest quâĂ
celte seule condilion â quand chaque intĂ©ressĂ© produira sa mus-
cardine lui-mĂȘme et en aura Ă sa disposition des quantitĂ©s sufli-
santes sans autres frais quâun peu de travail et de persĂ©vĂ©rance,
quand, par cela mĂȘme, la muscardine pourra ĂȘtre rĂ©pandue partout,
dans toutes les contrĂ©es envahies par les hannelons â que cette
merveilleuse dĂ©couverte donnera le rĂ©sultat que lâon est en droit
dâen attendre.
En résumé, la muscardine ne deviendra une arme réellement effi-
470 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
cace contre les hannetons et les vers blancs que dans les conditions
suivantes :
1° Quand on aura déterminé par une série d'expériences en pleine
terre les conditions de développement du champignon dans la terre
et son action sur les hannetons et les vers blancs ;
2° Quand, dans toutes les contrées envahies par ces insectes,
chaque cultivateur aura Ă sa disposition et emploiera une muscardine
réellement virulente et en quantité suffisante pour obtenir des ré-
sultatsapprĂ©ciables, câest-Ă -dire quand tous les cultivateurs intĂ©ressĂ©s
auront Ă©tabli des champs dâexpĂ©riences pour en faire, dans la suite,
des « gisements momifÚres ».
Avant de terminer ce chapitre il nous faut dire quelques mots sur
la possibilité de multiplier la muscardine en la cultivant sur des
milieux nutritifs artificiels de façon à remplacer éventuellement
les « gisements momifÚres » par des gisements de cultures arti-
ficielles.
En principe, il nâest point impossible de dĂ©couvrir pour la mus-
cardine un milieu nutritif qui donnerait des cultures non seulement
aussi virulentes, mais mĂȘme plus virulentes que celles qui viennent
directement sur les hannetons ou les vers blancs. Malheureusement
ce milieu nutrilif nâesl pas encore trouvĂ© ; bien au contraire, on sait
que les reports successifs sur les milieux nutritifs connus et essayés
Jusqu'à présent affaiblissent progressivement la virulence de la mus-
cardine de sorte que les quatriĂšmes ou cinquiĂšmes reports ne pro-
duisent plus aucun effet sur les insectes.
Pour préparer des cultures artificielles de muscardine dans les la-
boratoires en assez grande quantité pour pouvoir les mettre ensuite
à la disposition des cullivateurs, on procÚde actuellement de la façon
suivante :
Les spores recueillies sur un ver blanc ou un hanneton momifié
sont ensemencées sur des pommes de terre stérilisées en tubes. C'est
ce quâon appelle le premier report ou la premiĂšre culture,
Ce premier report ne donne généralement pas des cultures pures;
pour les purifier il faut prendre des spores de la premiĂšre culture
pour les réensemencer sur une deuxiÚme série de pommes de terre.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 471
On obtient ainsi des « deuxiÚmes cultures » qui sont généralement
pures mais qui, par les deux reports successifs, ont perdu, Ă chaque
réensemencement, un peu de leur virulence.
Ce sont ces « deuxiĂšmes cultures » qui peuvent ĂȘtre mises Ă la
disposition des cultivateurs qui, sâils voulaient les mulliplier Ă nou-
veau par rĂ©ensemencement sur dâautres milieux nutritifs artificiels,
nâobtiendraient, par consĂ©quent, que des « troisiĂšmes cultures »
nécessairement encore moins virulentes que les précédentes.
Ce serait là déjà un inconvénient bien grave et il ne serait pas le
seui, La muscardine cultivée en pleine terre, dans un milieu non
stĂ©rilisĂ©, serait promptement envahie par dâautres moisissures que
le cultivateur n'aurait aucun moyen de reconnaßtre et il serait néces-
sairement amené à employer souvent, en pure perte, des produits
absolument imoffensifs.
Donc, jusquâĂ nouvel ordre, le seul procĂ©dĂ© rationnel pour multi-
plier la muscardine de façon à en rendre emploi possible partout,
est de la cultiver sur des vers blancs.
La matiĂšre premiĂšre, pour faire ces cultures, nâest malheureuse-
ment pas prĂȘle Ă manquer. En ramassant des vers blancs pour Ă©tablir
des gisements momifĂšres on en dĂ©barrassera dâautant les champs et
quand il nây en aura plus, il nây aura plus besoin de muscardine pour
les détruire.
ĂpidĂ©mies naturelles.
La muscardine rose est une maladie naturelle du hanneton et du
ver blanc, il est donc trĂšs probable quâelle a existĂ© toujours, sinon
partout, lĂ oĂč il y avait des hannetons, en obĂ©issant dans son Ă©volu-
tion aux mĂȘmes lois que toutes les maladies contagieuses, câest-Ă -
dire apparaissant et disparaissant successivement avec plus ou moins
d'intensitĂ© et dâĂ©tendue.
Ainsi que lâindique M. Giard', des Ă©pidĂ©mies causĂ©es trĂšs proba-
blement par le mĂȘme champignon que celle observĂ©e Ă CĂ©aucĂ© par
M. Le Moult, ont déjà été signalées par J. Reiset en France en 1867
et par Bail et de Bary en Allemagne en 1869.
1. Ă, Giard, Loc. cit., p. 87.
472 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
M. Le Moult a le premier suivi une de ces épidémies pendant
plusieurs mois pour se rendre compte de son extension et de ses
effets.
S'inspirant des travaux de MM. Metchnikoff et Ras ee sur la
destruction du Cleonus puncliventris au moyen des cultures artifi-
cielles dâIsaria destructor, et conseillĂ© par M. Gard, M. Le Moult
sâest mis Ă la recherche dâun champignon parasite spĂ©cial au ver
blanc. Il à trouvé le premier gisement naturel de vers blancs momni-
fiés à Céaucé, dans une propriété appartenant à M. Le Marchand. |
Lâune des prairies surtout, dit-il dans une note prĂ©sentĂ©e Ă lâAcadĂ©mie
des sciences ', présentait un aspect des plus lamentables. Les vers blancs
y Ă©taient si nombreux que l'herbe n'avait plus de racines. Câest [Ă que
nous fimes nos fouilles les plus sérieuses, celles qui ont enfin récompensé
nos efforts...
Au nombre des larves que nous mettions à découvert, nous en avons
trouvé dont la mort était de date assez récente et qui présentaient cette
particularitĂ© quâelles Ă©taient complĂštement couvertes dâune sorte de moi-
sissure blanche envahissant toute la masse et se développant dans tous les
sens Ă travers la terre... |
La proportion des vers atteints par rapport aux vers sains Ă©lait dâenvi-
ron 10 91005
Nous avons pensĂ© que les observations faites sur le terrain mĂȘme, dans
la prairie oĂč nous avons dĂ©couvert le parasite du ver blanc, prĂ©senteraient
Ă la fois plus d'intĂ©rĂȘt et dâexactitude..âŠ.
M. Le Marchand avait décidé de faire labourer sa prairie dÚs les pre-
miers jours de septembre. Nous lui demandÀmes de réserver une zone
d'environ 10 mÚtres carrés dans la partie contenant la plus grande quan-
tité de vers malades. La partie épargnée par la charrue devait nous servir
de champ dâ expĂ©riences.
La prairie nâa dâailleurs pas Ă©tĂ© labourĂ©e et ne fa sera probablement
pas, nous en donnerons tout Ă lâheure la raison...
Nous avions constaté au mois de juillet que les vers atteints par le
champignon représentaient environ 1/10 des larves trouvées dans le ter-
rain. Le 10 septembre, nous avons fait pratiquer de nouvelles fouilles, la
proportion des vers atteints Ă©tait d'environ 65 Ă 70 p. 100...
Enfin, il nâest pas jusquâĂ l'aspect gĂ©nĂ©ral de la prairie qui nâait subi
une transformation complĂšte.
Au mois de juillet, lâherbe complĂštement flĂ©trie nâadhĂ©rait plus au sol.
1. C. R., 3 novembre 1890.
DESTRUGTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 473
Au mois de septembre, au contraire, et malgré la sécheresse, la prairie
se trouvait complĂštement reverdie et l'herbe ne pouvait plus sâarracher Ă
la main, tandis que la prairie voisine, situĂ©e dans les mĂȘmes conditions
sous le rapport de la nature du terrain, de [a pente, de lâarrosage et de
l'exposition, Ă©tait demeurĂ©e complĂštement dessĂ©chĂ©e, le gazon sâenlevait
avec la plus grande facilité.
Le 28 septembre, nous avons fait de nouvelles fouilles sur le terrain
réservé. Cette fois, il nous a élé presque impossible de trouver des vers
vivants, tandis que les vers parasités se rencontraient en grand nombre.
Leur présence nous était toujours signalée par de longues traßnées blan-
ches formĂ©es par les filaments des champignons et sâĂ©cartant toujours de
1 à 8 centimÚtres du point de départ...
Depuis, on a trouvé des gisements naturels de vers blancs momi-
fiĂ©s un peu partout. M. Giard en signale plusieurs quâil a observĂ©s
lui-mĂȘme ou qui lui ont Ă©tĂ© signalĂ©s par ses correspondants. Nous
mĂȘme nous avons trouvĂ© des vers blancs muscardinĂ©s Ă Sceaux
(Seine), dans plusieurs localités du département de Seine-et-Marne,
dans des endroits oĂč on nâa Jamais fait usage de cultures artificielles.
Enfin M. Gouin, président du comice agricole du canton de Vertou
(Loire-InfĂ©rieure), a signalĂ© dâabord dans le Journal de l'agricul-
Lure pratique et nous à communiqué ensuite par lettres une série
d'observations trÚs intéressantes, concernant une épidémie naturelle
de muscardine sur une Ă©tendue de plus de 100 hectares.
M. Gouin a constatĂ© la prĂ©sence de vers momifiĂ©s sur toute lâĂ©-
tendue de ses terres en juin 1892. Il a suivi celte épidémie durant
toute la belle saison de lâannĂ©e 1893 et a recommencĂ© ses observa-
tions celle année. | |
En 1891 (deuxiĂšme annĂ©e de vers blanes), dit M. Gouin, malgrĂ© lâabon-
dance de vers blancs, on nâa pas trouvĂ© un seul ver malade. En juin 1892
(vers blancs de 3° année), on trouve partout des momies et des vers ma-
lades.
LâĂ©pidĂ©mie semble disparaĂźtre en juillet avec la descente des vers
blancs et leur transformation en nymphes pour reparaitre en aulomne
sur des hannetons en terre.
En 1893, apparition de lâĂ©pidĂ©mie dĂšs le dĂ©but du printemps sur toute
l'Ă©tendue de mes terres et principalement dans les prairies et autres
champs non labourés, excepté dans mon jardin potager.
En 1894, apparition de l'épidémie en avril. J'ai trouvé pour la premiÚre
474 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
fois des vers roses et momifiés dans mon jardin, mais seulement dans une
partie qui nâa reçu aucun labour depuis neuf mois. Dans les parcelles la-
bourées en mars, beaucoup de vers blancs bien portants, pas un seul
malade.
Les ouvriers de M. Gouin affirment que, antérieurement à 1891,
ils trouvaient fréquemment dans les champs des vers blancs et des
hannetons couverts de moisissure ; lâun dâeux se rappelle mĂȘme
quâen 1859 presque tous les vers blancs que lâon dĂ©couvrait au la-
bour étaient muscardinés.
Cette sĂ©rie d'observations montre dâune façon indiscutable que
dans certaines régions la muscardine des hannelons el des vers
blancs rĂšgne Ă lâĂ©tat endĂ©mique et on est en droit dâen conclure que
dans les champs oĂč on rĂ©ussira Ă crĂ©er des foyers dâĂ©pidĂ©mie, la
maladie sâĂ©lendra peu Ă peu d'elle-mĂȘme et y persistera pendant de
longues années.
Il est trĂšs probable que partout, dans les terrains oĂč elle peut se
dĂ©velopper, lâIsaria vit dans la terre Ă lâĂ©tat saprophyte, quâelle
atteint dâabord les sujets prĂ©disposĂ©s Ă contracter la maladie et que,
ayant régénéré sa virulence en passant par le corps des premiers
vers blancs atteints, elle devient ou redevient parasite. En infestant
dâune façon continue des vers blancs ou des hannetons, au moven
des cultures artificielles, on maintiendra constamment la virulence
du champignon, et en multipliant les foyers épidémiques, on aidera
simplement la nature à répandre rapidement la maladie et à la
rendre plus intense.
CHAPITRE IT
LES CHAMPIGNONS PARASITES QUI ONT ĂTĂ EMPLOYĂS JUSQU'A
PRĂSENT A LA DESTRUCTION DES INSECTES NUISIBLES
Le nombre des champignons entomophytes, câest-Ă -dire des
champignons qui sâatlaquent aux insectes vivants et en dĂ©terminent
la mort, connus aujourdâhui, est dĂ©jĂ assez considĂ©rable. Il est trĂšs
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 475
probable que grĂące Ă des recherches nouvelles, on finira par trouver
un parasite spĂ©cial Ă chaque espĂšce nuisible d'insectes ou bien quâen
améliorant et en modifiant les procédés de laboratoire et les milieux
de culture on arrivera Ă pouvoir infester avec la mĂȘme facilitĂ© plu-
sieurs espĂšces d'insectes avec le mĂȘme champignon.
Au point de vue de leur application pratique, un bien pelit nombre
seulement de ces champignons ont été suffisamment étudiés et expé-
rimentĂ©s ; aussi, dans ce travail qui nâa dâautres prĂ©tentions que
de montrer aux cultivateurs les résultats obtenus et la voie à suivre,
nous bornerons-nous à examiner en détail les seuls cas dans lesquels
cette méthode a été appliquée en grande culture et a donné des
résultats appréciables.
Muscardine verte (Isaria destructor).
Son application à la destruction du « hannelon des blés » (Anisoplia
austriaca) el du « coléoptÚre des betteraves » (Cleonus punctiventris)
en Russie.
En 1878, M. Metchnikoff", alors professeur Ă lâUniversitĂ© dâOdessa
et actuellement professeur Ă lâInstitut Pasteur, sâinspirant des tra-
vaux de De Bary sur lâ/saria farinosa, sâest mis Ă la recherche dâun
champignon parasite du hanneton des blés (Anisoplia austriaca) qui
faisait alors beaucoup de ravages dans les provinces méridionales de
la Russie.
M. Metchnikoff ne Larda pas à trouver des larves atteintes et tuées
par divers parasites et principalement par une ⏠muscardine verte »
qu'il appela dâabord Entomophthora anisopliĂŠ et ensuite, son atten-
tion ayant été attirée par le professeur Cienkowski sur la ressem-
blance de sa muscardine avec les IsariĂŠ, Isaria destructor.
Peu de temps aprĂšs, il trouva la mĂȘme maladie causĂ©e par la mus-
cardine verte sur un autre insecte, le Cleonus puncliventris qui ravage
les champs de betteraves.
M. Metchnikoff est arrivé promptement à cultiver sa muscardine
sur des milieux nutritifs artificiels et notamment sur du moût de
1. E. Metchnikoff, Zoo. Anz., 1880, p. 44.
476 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
biÚre stérilisé et à infester avec les spores provenant de ces cul-
tures les Anisopliu et les Cleonus, ces derniers Ă tous les Ă©tats de leur
développement.
Pour obtenir ces spores en grande quantité, M. Cienkowski procé-
dait dâune autre façon : il plaçait les chenilles infestĂ©es par le cham-
pignon dans des boĂźtes dâune certaine grandeur, remplies avec de la
terre et, Ă mesure que les chenilles mouraient, il en introduisait de
nouvelles. Puis il mélangeait la terre avec les cadavres desséchés et
pulvérisés, et de cette façon chaque particule de terre renfermait une
grande quantité de spores de muscardine verte (terre de muscar-
dine, poudre de champignons). Câest cette poudre quâil rĂ©pandait
dans les champs pour infester les larves des hannetons du blé.
Cienkowski admettait que, pour obtenir un résultat satisfaisant, il
faudrait couvrir la terre dâune couche continue de spores. DâaprĂšs
ses calculs et ceux des professeurs De la Rue et Saikewitch, 11 fau-
drait environ 90 litres de spores pures ou le double, soit 180 litres,
de terre muscardinée pour un hectare.
En 1884, M. Krassilstchik, de lâUniversitĂ© dâOdessa, a mis Ă profit
les travaux de Metchnikoff et de Cienkowski pour fonder, avec le con-
cours de quelques propriétaires intéressés, un laboratoire à Sméla,
prĂšs de Kieff, dans le but de produire en grand des spores de mus-
cardine verte et de les répandre sur les champs envahis par les
Cleonus.: :
Ainsi que l'indique M. Le Moull dans sa communication Ă lâAca-
démie des sciences de 1890, ce laboratoire a fonctionné pendant
4 mois et a produit 55 kilogr. de spores. Ces spores ont été répan-
dues dans les champs Ă raison de 8 kilogr. par hectare, elles ont
déterminé la destruction des insectes dans la proportion de 55 à 80
p. 100. â Tous les frais de cette opĂ©ration ne dĂ©passeraient pas
10 fr. Ă lâhectare.
«AprĂšs que lâusine que J'avais construite Ă SmĂ©la, dit M. Krassils-
{chik dans une lettre adressée à M. Giard et publiée par M. Le Moult,
eut démontré à tous que la production industrielle des parasites vé-
gétaux est devenue un fait accompli et que les essais que j'ai faits en
plein champ, bien que sur une échelle restreinte, eurent prouvé
lâaction mortelle du parasite sur le Cleonus, quelques-uns de nos cul-
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 477
tivateurs de betteraves se sont résolus à construire une plus grande
usine afin de produire assez de spores pour faire un essai sur une
vaste Ă©chelle. Il s'agissait de poursuivre ces essais pendant deux ans
el, si le résultat en était favorable, on n'aurait qu'à élargir les di-
mensions de lâusine qui deviendrait alors lusine dĂ©finitive. Cette
rĂ©solution une fois prise, je me suis mis Ă lâĆuvre. L'usine de
SmĂ©la fut fermĂ©e ; un endroit fut choisi oĂč le Cleonus est toujours en
abondance. Le devis de la construction de l'usine que j'ai fait fut
adopté et les fonds nécessaires furent accordés par un groupe de dix
cultivateurs de betteraves qui voulaient ĂȘtre les fondateurs de lâen-
treprise. Toute l'affaire semblait alors mise dans la bonne voie et il
ne nous restait plus quâĂ aborder l'exĂ©cution de notre dessein.
«Mais voilĂ que tout dâun coup une crise vint Ă©clater sur notre pro-
duction de sucre provoquée par une surproduction des betteraves.
« Dans ces conditions, et vu la disposition des esprits, aucune rai-
son ne se présentait de déclarer la guerre au Cleonus. »
En résumé, les travaux et les expériences des savants russes ont
montrĂ© quâil est possible de trouver sur les insecles qui envalussent
en grand nombre les champs cullivés, des champignons parasites qui
les détruisent et que ces champignons peuvent étre cultivés sur des
milieux nutritifs arhficiels et, pour ainsi dire, fabriqués industriel-
lement.
Maladies contagieuses : « Sporotrichum globuliferum »,
« Empusa aphidis » et « Micrococcus insectorum ».
Leur application à la destruction du « Chinch bug » (Blissus
leucopterus, Say, punaise des blĂ©s) aux Ătats-Unis d'AmĂ©-
rique.
Le Chinch bug a été signalé pour la premiÚre fois en Amérique en
1781 dans la Caroline du Nord. Depuis, Ă mesure que sâĂ©tendaient
les terres cultivĂ©es, cet insecte sâest rĂ©pandu dans tous les autres
Ătats, en ravageant les cĂ©rĂ©ales ct quelques lĂ©gumineuses.
En 1850, William le Baron écrivait dans le Prairie Farmer : «I
est peu probable quâon trouvera jamais un moyen prĂ©ventif ou des-
478 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
tructif pour arrĂȘler la dĂ©vastation causĂ©e par ces insectes. » En effet,
aucun des moyens chimiques ou mĂ©caniques employĂ©s jusquâĂ ces
derniers temps nâa donnĂ© de rĂ©sultats apprĂ©ciables.
En 1891, le gouvernement de lâĂtat de Kansas a chargĂ© M. T. H.
Snow, professeur Ă lâUniversitĂ© de Lawrence, d'installer, auprĂšs de
celte université el de diriger une station expérimentale avant pour
but « de propager les maladies contagieuses ou infectieuses qui sont
supposées pouvoir détruire les Chinch bugs ». Cette station a été
installĂ©e en mars 1891 ; en avril 1892, M. Snowâ publia son premier
report, un travail admirable de précision, dans lequel il refait Phis-
torique des études antérieures des maladies contagieuses des insectes
aux Ătats-Unis, dĂ©crit en dĂ©tail ses mĂ©thodes de recherches et la
maniÚre de procéder pour répandre la contagion dans les champs,
et enfin, indique les résultats obtenus en appuyant ses conclusions
par plusieurs centaines de rapports envoyés par les cultivateurs qui
ont appliqué les procédés préconisés par lui.
Une carte de lâĂtat de Kansas indiquant les points et les rĂ©gions
trailĂ©es et les rĂ©sultats obtenus complĂšte ce travail remarquable Ă
tous les points de vue.
Suivant les notices bibliographiques contenues dans lâouvrage de
M. Snowâ, la premiĂšre observation dâune Ă©pidĂ©mie bien caractĂ©risĂ©e
parmi les Chinch bugs a été faite par M. Henry Shimer en 1865.
(Proceedings of the Acad. of haln. sc. of Philadelphia, vol. XIX,
1867, p. 79-80.)
16 juillet 1865. â Dans les parties basses et humides des champs, on
trouve un grand nombre de larves mourantes sans cause apparente.
22 juillet. â Grand nombre de jeunes insectes morts, la maladie s'Ă©-
tend des terrains bas sur les collines,
28 juillet. â On trouve partout des insectes mourants et morts Ă tous
les stades de leur développement.
8 aoĂ»t. â La plupart des Chinch bugs (stade imago) dĂ©truits. Lâexten-
sion de la maladie est plus rapide que celle du choléra asiatique parmi les
hommes. Il reste un insecte vivant sur mille de ceux qui Ă©taient encore
vivants et bien portants en juin.
1. F. H. Snow, Report of the Exp. Stat. of Kansas. Lawrence, 1892 et 1893.
2. Ibid, p. 245.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES Ă L'AGRICULTURE. 479
13 septembre. â TrouvĂ©, aprĂšs une journĂ©e de recherches, seulement
deux larves et quelques imago vivants dans toute la région précédemment
envahie par les Chinch bugs.
En 1866, au printemps, il a été impossible de trouver un seul insecte
vivant; pendant les récoltes, on a trouvé en tout quelques spécimens dans
les localités précédemment envahies.
M. Shimer nâa pas pu dĂ©terminer les causes de cette Ă©pidĂ©mie, il
dit en terminant: « Les maladies contagieuses sont les agents de
destruction de beaucoup les plus importants et les plus actifs dans
la lutte contre les animaux nuisibles. »
D'autres épidémies ont été signalées depuis par plusieurs natura-
listes américains, sur plusieurs espÚces d'insectes.
M. Cyrus Thomas (U. St. Dep. of interior, Bulletin de lâannĂ©e 1879)
signale une destruction des mouches domestiques en 1849 par une
épidémie due à un champignon ; en 1872 il a observé une épidémie
parmi les criquets dans les Ătats de Minnesota, Dakota et lowa ; en
1877 une destruction complĂšte de la larve des Caloptenus spretus.
M. S. Ă. Forbes", St. ent. de l'Illinois, a cherchĂ© le premier Ă con-
naßtre les causes et les agents actifs de ces épidémies.
Aidé dans la détermination des microbes trouvés par M. T. J. Bui--
rill, professeur de botanique et de bactĂ©riologie Ă lâuniversitĂ© dâIlli-
nois, M. Forbes a publié entre 1882 et 1892 une série de travaux sur
cette question. Il a reconnu que les maladies observées chez les
Chinch bugs sont causées par trois microbes différents, deux cham-
pignons entomophytes : une Enlomophlorea (Empusa aphidis), un
Botrytis ou Isaria (Sporotrichum globuliferum) et une Baclériacée,
le Micrococcus insectorum. N'a reconnu ensuite que ces trois microbes
peuvent ĂȘtre cultivĂ©s sur des milieux nutrilifs artificiels, liquides et
solides, et peuvent infester plusieurs espĂšces d'insectes.
Ayant reçu de M. R. Thaxter une culture de Sp. globuliferum sur
gélose prise sur une larve de Copipanolis vernalis, il a réussi à infec-
ter avec les spores provenant de cette culture des Chinch bugs, des
imago de Cecropia, des Aphis et dâautres pucerons et des Tentre-
dines.
1. Reports of the Illinois State Entomologist, 1882 Ă 18972,
480 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
«Il semble démontré, dit-il, que le Sp. globuliferum est un ento-
mophyte capable dâatteindre beaucoup dâespĂšces dâinsectes vivants,
Ă tous les Ă©tats de leur dĂ©veloppement, que son action commence Ă
se manifester deux jours aprĂšs lâinfestation, mais que la formation
des spores mûres demande 9 à 10 jours. La maturité complÚte des
spores est nécessaire pour atteindre les insectes vivants... L'action
de ce champignon ne devient manifeste que quand son développe-
ment et son extension rapides sont favorisés par un ensemble de
conditions météorologiques et entomologiques convenables. »
En 1888, le D' Otto Lugger (Bulletin n° 4 of the Univ. of Minne-
sota Agr. Exp. St.) signale la destruction complĂšte des Chinch bugs
qui ont envahi les cultures du champ dâexpĂ©riences de la station,
par une épidémie naturelle due au Micrococcus inseclorum et à une
Enthomophtorée.
Des spécimens malades et morts de ces maladies ont été envoyés
et distribués dans plusieurs fermes du sud du Minnesota ; partout il
sâen esl suivi une disparition complĂšte des Chinch bugs.
Dans la mĂȘme annĂ©e (1888) M. F. M. Webster (Bulletin 22, Div.
Ent. U. St. Dep. of Agr.) a fait une sĂ©rie dâexpĂ©riences sur les con-
ditions de lâinfestation des Chinch bugs en plein champ. Il Ă notĂ©
que, par un temps humide et doux, l'Ă©pidĂ©mie sâest Ă©tendue en
48 jours Ă un quart de mille du point iniual.
Câest aussi en 1888 que M. Snow a commencĂ© Ă s'occuper de cette
question.
Il a reconnu que les trois maladies des Chinch bugs qu'il trou-
vait constamment dans les champs et dans ses cultures de labora-
toires Ă©taient dues au Micrococcus inseclorum, Ă une muscardine
grise, lâ'Empusa aphidis, et Ă une muscardine b'anche considĂ©rĂ©e par
M. Thaxler comme une Jsaria, mais qu'il considĂšre plutĂŽt comme
un Trichoderma ou un Sporatrichum et quâil assimila en dĂ©finitive
au Sporotrichum globuliferum Spegazzini.
AprÚs une série d'expériences au laboratoire et dans les champs,
poursuivies pendant trois ans, M. Snow a adopté, pour détruire les
Chinch bugs, la méthode suivante :
AprÚsavoirfaitramasser dans un champ précédemmenttraité 10000
Chinch bugs morts infestĂ©s, il sâest procurĂ© ensuile environ 20 000
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 481
de ces insectes vivants et bien portants quâil a enfermĂ©s dans une
grande cage et infestés en y jetant un certain nombre de Chinch
bugs muscardinés du lot de 10 000 précédemment ramassés.
Ensuite, 1l a installé un certain nombre de « vases à infestation »
dans lesquels il traitait les insectes qui lui étaient adressés par les
cultivateurs.
Ayant fait ainsi une provision suffisante dâinsectes infestĂ©s, il a fait
annoncer quâil tenait Ă la disposition des cultivateurs intĂ©ressĂ©s des
Chinch bugs infestés pouvant servir à la propagation de l'épidémie
dans les champs envahis par ces insectes et en envoyait un certain
nombre Ă tous ceux qui lui en faisaient la demande.
Chaque envoi Ă©tait accompagnĂ© dâune note ainsi conçue :
« Je vous adresse une petite boßte contenant quelques Ghinch
bugs infestés et vous prie de les employer suivant les instructions
ci-dessous indiquées et de m'annoncer les résultats que vous aurez
obtenus. |
⏠Mettre dans un récipient les insectes envoyés avec 10 ou 20 fois
autant de Chinch bugs bien portants et les laisser ensemble pendant
36 Ă 48 heures. Ensuite jeter les morts et les vivants dans les champs
à traiter. Suivre de prÚs et noter soigneusement les résultats appré-
ciables.
« Les Chinch bugs doivent commencer à mourir dans les champs
9 jours aprÚs la distribution des insectes infestés.
« Je vous prie de me faire parvenir un rapport aussi détaillé que
possible sur la façon dont vous avez procédé. Je suis, en effet, trÚs
désireux de découvrir la meilleure méthode de propagation de ces
maladies. »
En procédant ainsi, M. Snow envoyait aux cultivateurs des lots de
Chinch bugs dans lesquels il y avait presque toujours des spécimens
atteints respectivement par lâun des trois microbes ci-dessus indi-
quĂ©s; de sorte quâil y avait dans chaque lot les germes de toutes ces
maladies, du Sporotrichum, de l'Empusa et du Micrococcus, et que
câest la maladie dont le germe trouvait au moment donnĂ© les condi-
tions les plus favorables à son développement qui prenait dans les
champs une importance prĂ©dominante et sâĂ©tendait le plus rapide-
ment.
ANN. SCIENCE AGRON. â 1893. â 1. 81
482 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
C'est ainsi, comme il ressort des rapports des cultivateurs, que,
depuis le mois dâavril jusque vers la fin de juin, pendant un temps
relativement frais et humide, câest le Sporotrichum qui sâest dĂ©ve-
loppé le mieux et a donné les résultats les plus satisfaisants ; tandis
quâen juillet, aoĂ»t et septembre, comme le temps Ă©tait sec et chaud
et par conséquent peu favorable au développement du Sporotrichum,
mais par contre trÚs favorable au développement du WMicrococcus*,
câest ce dernier qui a provoquĂ© des Ă©pidĂ©mies de beaucoup les plus
meurtriĂšres et Ă marche beaucoup plus rapide que celles dues aux
muscardines.
La muscardine grise (Empusa) nâa Ă©tĂ© signalĂ©e dans les champs
que du 20 juin au 1° août, mais jamais seule, toujours en compa-
gnie du Sporotrichum et du Micrococcus.
Chacune de ces maladies et notamment celles causées par le Spo-
rotrichum et le Micrococcus se manifestent par un ensemble de ca-
ractĂšres particuliers qui permettent de faire un diagnostic certain
dÚs le début de linfestation.
Sporotrichum. â La maladie causĂ©e par la « muscardine blanche »
commence Ă se manifester 2 Ă 4 Jours aprĂšs lâinfestation. Les Chinch
bugs encore vivants quittent les plantes sur lesquelles ils vivent et
montrent des signes d'inquiétude en courant rapidement et sans but
de place en place. Le jour suivant ils deviennent paresseux et cher-
chent Ă fuir la lumiĂšre et la chaleur en se cachant sous les mottes
de terre, sous la paille, ou en se réunissant dans les endroits ombra-
gés et humides. Du 6° au 8° jour on commence à trouver des Chinch
bugs couverts de moisissure. DĂšs ce moment lâĂ©pidĂ©mie se propage
trĂšs rapidement.
Micrococcus. â Les Chinch bugs atteints par le Micrococcus se
rĂ©unissent sur le sol en groupes et sâattachent les uns aux autres de
façon à former des grappes plus ou moins volumineuses*. Cette ma-
ladie, véritable choléra des insectes, est plus prompte dans ses effets
et son extension plus rapide et plus intense que celles causées par
les muscardines.
En 1891, 2000 cultivateurs environ ont eu recours au procédé
{. Voir Schmidt : DĂ©e Nonne (Liparia monacha), ete... Ratibor, 1893.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 483
de M. Snow pour détruire les Chinch bugs. De ces 2000 cultiva-
teurs, 1 400 lui ont adressé des rapports détaillés, dont 1 071, soit
76.55 p.100 accusent des résultats complÚtement satisfaisants, 147,
soit 10.51 p. 100, des résultats douteux et 181, soit 12.94 p. 100,
des résultats négatifs.
En 1892, on a opéré dans 5 500 fermes différentes. Sur ces 3 500
cas M. Snow a reçu 1 732 rapports dont 1 04%, soit 67.9 p. 100, ac-
cusent des résultats complÚtement satisfaisants, 120, soit 7.8 p.100,
douteux, et 372, soit 24.3 p. 100, négatifs.
En résumé, M. Snow a obtenu sur 3132 cas contrÎlés, 2 115 succÚs
(destruction complĂšte des insectes nuisibles). Des expertises officielles
ont permis d'évaluer que les récoltes sauvées de cette façon repré-
sentent une valeur de 1 520 675 fr. et que ce résultat a été obtenu
au prix dâune dĂ©pense totale de 19150 fr., ce qui reprĂ©sente pour
chaque cultivateur, en moyenne, une plus-value en récoltes de 745 fr.
Ce sont là des résultats indiscutables ; les maladies contagieuses
propagĂ©es dâune façon rationnelle ont seules eu raison dâun insecte
qui ravageait les rĂ©coltes des Ătats-Unis depuis plus dâun siĂšcle et
contre lequel tous les autres moyens employés sont restés impuis-
sants.
CHAPITRE IV
MĂTHODES A SUIVRE POUR INFECTER LES INSECTES VIVANT A
LA SURFACE ET CEUX QUI VIVENT ENFOUIS DANS LA TERRE
Pour détruire les vers blancs au moyen de la muscardine rose,
M. Le Moull à suivi la méthode indiquée par M. Arassilstchik.
Il a fait répandre sur les champs infestés par les vers blancs des
spores préparées en grand sur des milieux nutritifs artificiels.
Il aurait pu se faire que, par un hasard heureux, ce procédé donnût
des rĂ©sultats satisfaisants ; dans ce cas on n'aurait eu quâĂ suivre les
indications de M. Le Moult, sans se préoccuper autrement des con-
ditions de développement et d'existence du champignon parasite et
des insectes quâil sâagissait d'atteindre.
484 . ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. :
Malheureusement, le hasard nâa pas favorisĂ© M. Le Moult; comme
nous l'avons vu plus haut, les tentatives dâinfestation des vers
blancs dans les champs nâont pas Ă©tĂ© jusquâĂ prĂ©sent couronnĂ©es
de succĂšs.
Bien au contraire, les nombreux essais dâinfestation des vers blancs
faits en France pendant prĂšs de quatre ans ont montrĂ© dâune façon
incontestable que dans la lutte avec ces insectes les procédés de
MM. Xrassilstchik et de Snow ne pourront jamais donner des résul-
tats appréciables.
On se trouve là , en effet, en présence de cas absolument dissem-
blables, tant au point de vue entomologique que mycologique.
Le Cleonus comme le Chinch bug sont des insectes qui font le plus
de ravages Ă lâĂ©tat dâimago ou de larves, vivant Ă la surface ou trĂšs
prĂšs de la surface du sol, se dĂ©plaçant facilement en courant dâune
plante à une autre et, par conséquent, se trouvant fréquemment en
contact les uns avec les autres. En répandant des spores virulentes
mĂȘme en quantitĂ© relativement petite sur les champs infestĂ©s par ces
insectes on a beaucoup de chances de les atteindre directement et il
est possible d'admettre Ă priori que les sujets qui ont pu Ă©chapper
Ă ce premier traitement direct sâinfesteront dans la suite par con-
tact avec les sujets morts contaminés.
L'extension rapide des épidémies est encore favorisée dans ces deux
cas par ce fait, que la muscardine verle employée contre le Cleonus
et les deux muscardines (Sporotrichum et Empusa) dont sâest servi
M. Snow pour détruire les Chinch bugs sont des champignons à évo-
lution rapide.
Il leur faut 8 Ă 12 jours dans des conditions normales pour passer
par tous les stades de leur développement et produire des spores
mures, virulentes.
Quant au Micrococcus insectorum, la maladie causée par ce microbe
est contagieuse aussitĂŽt aprĂšs lâinfestation et peut ĂȘtre propagĂ©e par
des sujets atteints encore vivants.
Il était donc relativement facile, dans ces conditions, de créer des
foyers dâinfestation et d'admettre logiquement que, ces foyers une
fois Ă©tablis, l'Ă©pidĂ©mie se propagera dâelle-mĂȘme rapidement sur
toute l'Ă©tendue des champs envahis par les insectes quâil s'agissait
-
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 48
d'atteindre. Les rĂ©sultats obtenus en Russie et surtout aux Ătats-Unis
ont montrĂ© quâil en est effectivement ainsi.
Or, les conditions d'existence des vers blancs ne ressemblent en
rien Ă celles du Cleonus et du Chinch bug, pas plus que les conditions
de développement de la muscardine rose ne ressemble à celles des
muscardines précitées.
On sait, en effet, que les vers blancs se tiennent enfouis dans la
terre à des profondeurs variant entre 10 et 20 centimÚtres en été
et 30 Ă 60 centimĂštres en hiver, qu'ils ne viennent jamais dâeux-
mĂȘmes Ă la surface, qu'ils se dĂ©placent peu, vivent isolĂ©s et peuvent,
par consĂ©quent, ne jamais se rencontrer les uns les autres. Dâautre
part on sait que la muscardine rose est un champignon Ă Ă©volution
relativement trĂšs lente, quâil faut attendre un, deux et parfois mĂȘme
trois mois pour quâune culture sur ver blanc ou sur pomme de terre
donne des spores bien mûres.
Ce sont là des faits qui, à premiÚre vue déjà , permettent de pré-
juger que les procédés employés par MM. Xrassilstchik et Snow ne
peuvent pas ĂȘtre appliquĂ©s tels quels Ă la destruction des vers blancs.
Il nous semble mĂȘme impossible d'admettre quâun naturaliste tant
soit peu au courant des conditions de développement de la muscar-
dine rose et des conditions dâexistence des vers blancs, ait jamais pu
espérer d'atteindre ces derniers dans une proportion appréciable, en
répandant sur les champs des spores à raison de quelques tubes ou
mĂȘme de quelques kilogrammes de cultures sur pomme de terre,
ou en enfouissant ces mĂȘmes cultures dans le sol Ă raison dâun petit
morceau pour 10 ou 20 mÚtres carrés".
1. Ce sont pourtant ces procédés qui ont été adoptés et conseillés par M. Le Moult
dont toute la bonne volontĂ© et toute l'Ă©nergie digne dâĂ©loges dĂ©ployĂ©e dans la lutte
acharnée ct désintéressée contre le hanneton ne pouvait compenser le manque de
connaissances spéciales indispensables non seulement pour mener à bien une pareille
entreprise, mais pour prĂ©voir et apprĂ©cier les diflicultĂ©s de toutes sortes que lâon ren-
contre toujours dans ce genre de recherches.
M. Le Moult, s'il n'a pas été le premier à découvrir le parasite du hanneton et du
ver blanc, a eu le grand mĂ©rite de le chercher et de le retrouver au moment oĂč per-
sonne nây pensait plus. Il a Ă©tĂ© le premier en France qui ait songĂ© Ă l'utiliser comme
moyen de destruction et surtout, qui ait attiré sur cette importante question l'attention
des savants et des cultivateurs. En outre, président du syndicat du hannetonnage du
486 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
L'expĂ©rience suivante prouve bien, croyons-nous, quâil nây Ă pas
de doute possible Ă ce sujet :
Nous avons placé 100 vers blancs de 2° année dans 10 pots à fleurs
Ă moitiĂ© remplis de terre. Ces vers blancs ont Ă©tĂ© recouverts dâune
couche de terre de 2 centimĂštres d'Ă©paisseur sur laquelle nous avons
rĂ©pandu le contenu dâun tube de culture sur pomme de terre (tubes
Le Moult) par pot. Ensuite, nous avons rempli les pots de terre
jusquâen haut et nous y avons semĂ© du blĂ© et du gazon. Pour arriver
aux racines, les vers blancs étaient donc obligés de traverser la cou-
che des spores.
Le contenu de ces 10 pots a été vérifié 34 jours aprÚs et nous
n'avons pas trouvé un seul ver blanc muscardiné.
Une couche de terre de 2 centimÚtres a donc suffi, malgré des
arrosages fréquents, à garantir les vers blancs de toule contagion
pendant plus d'un mors.
Dâautres expĂ©riences faites simultanĂ©ment avec les mĂȘmes cul-
tures nous ont prouvé que, bien que fortement atténuées, ces cul-
tures Ă©taient encore assez virulentes pour infester en moyenne 4 vers
blancs sur 10, traités par contact direct.
canton de Gorron (Mayenne), il a créé presque tous les syndicats de hannetonnage exis-
tants en France ou provoqué leur création, Ge sont là des services importants rendus
Ă lâagriculture et des titres que personne ne songe Ă lui disputer. Nous reconnaissons
mĂȘme volontiers que, si nous nous occupions bien antĂ©rieurement de « zoolagie appli-
quée », c'est la grande publicité donnée aux premiÚres notes communiquées par M. Le
Moult sur le parasite du hanneton, à l'Académie des sciences, qui nous a montré toute
l'importance de cette question et qui nous a décidé à nous y consacrer entiÚrement.
Mais M. Le Moult, il le reconnaĂźt lui-mĂȘme, n'est pas naturaliste. L'Ă©tude des maladies
contagieuses et de leurs applications, étude d'autant plus diflicile et compliquée que
cette science est toute nouvelle et ne repose encore que sur des observalions bien peu
nombreuses, demande, en dehors des connaissances spéciales de mycologie et d'er-
tomologie, des connaissances trÚs étendues de biologie générale. Or, de toutes ces
sciences, M. Le Moult n'avait et ne peut avoir encore que des notions tout Ă fait
insuffisantes. Qu'il laisse donc aux naturalistes qui s'en sont fait la spécialité la re-
cherche des procédés à suivre dans chaque cas particulier et la direction des re-
cherches expérimentales; son concours est par contre tout indiqué quand il s'agira
d'appliquer en grand les procédés suflisamment étudiés et expérimentés. En groupant
les agriculteurs, en organisant des syndicats, non seulement de hannetonnage, mais, en
général, de défense contre tous les animaux nuisibles, et en propageant les méthodes
de défense réellement scientifiques, il sera dans son rÎle et rendra à l'agriculture des
services tout aussi importants.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 487
Nous avons vu aussi plus haut (p.476) que M. Cienkowski Ă©valuait
à 90 litres la quantité nécessaire de spores pures à répandre sur un
hectare pour atteindre les larves du hanneton des blés ; or, pour
obtenir 90 litres de spores pures, il faudrait environ 40 quintaux
métriques de cultures sur pomme de terre.
Pour trouver un procĂ©dĂ© rationnel dâinfestation des insectes dans
les champs, il faut donc tenir compte de toutes les particularités qui
caractĂ©risent dâune part le dĂ©veloppement du champignon parasite que
lâon veut employer, dâautre part le genre de vie des insectes visĂ©s.
Pour expliquer la propagation des maladies contagieuses parmi
les ĂȘtres qui vivent sur la terre, on admet gĂ©nĂ©ralement que les
germes de ces maladies ont dĂ» ĂȘtre absorbĂ©s avec lâair inspirĂ©, les
aliments ou lâeau de boisson, en un mot que ces ĂȘtres ne peuvent
sâinfester quâĂ la condition de vivre dans un milieu infestĂ© lui-mĂȘme,
câest-Ă -dire contenant des germes pathogĂšnes en quantitĂ© suffisante.
Or, les vers blanes qui vivent dans la terre ne seront atteints par
la muscardine que quand cette terre elle-mĂȘme sera suffisamment
infestée, quand le germe virulent du parasite vivra et se développera
dans la terre.
Câest ce quâoĂč observe, en effet, en suivant avec attention et pen-
dant plusieurs années de suite les épidémies de muscardine dans
leurs stations naturelles (voir les observations de M. Gouin p. 473).
Il nous semble impossible de s'expliquer l'apparition, Ă un moment
donné, des vers blancs momifiés, un peu partout sur une vaste
Ă©tendue, autrement quâen admettant la prĂ©existence du champignon
parasite dans ces terres.
Ce qu'il faudrait chercher, par conséquent, dans le cas particulier
de la destruction des vers blanes par la muscardine, ce nâest donc
pas autant Ă atteindre directement les vers blanes, quâĂ provoquer
le dĂ©veloppement de la muscardine dans les terres qu'il sâagit de
préserver de leur invasion.
Ce serait là , du moins, la seule méthode basée, nous semble-t-il,
sur lâensemble des donnĂ©es connues jusquâĂ prĂ©sent.
En résumé, les insectes qui vivent à la surface de la terre, sur les
tiges, les feuilles ou les fleurs des plantes, tels que les hannetons,
488 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
les Cleonus, les Chinch bugs, les taupins, les sylphes, les mouches
de blé, les pucerons, les charançons, la plupart des insectes para-
sites de la vigne, etc., etc., peuvent ĂȘtre traitĂ©s avec succĂšs par les
mĂ©thodes adoptĂ©es par MM. Arassilstchik et Snow, câest-Ă -dire en
répandant des spores virulentes à la surface des champs ou sur les
plantes envahies. Dans tous ces cas lâinfestation directe dâun certain
nombre d'insectes est trÚs possible et l'épidémie pourra se propager
ensuite d'elle-mĂȘme toutes les fois que le microbe employĂ© sera une
bactĂ©riacĂ©e oĂč une muscardine Ă Ă©volution rapide.
Par contre, on ne peut espérer d'atteindre et de détruire au
moyen des maladies contagieuses les insectes (principalement des
larves) qui vivent enfouis dans la terre et sâattaquent aux racines,
quâen infestant la terre elle-mĂȘme, câest-Ă -dire quâen provoquant
dans cette terre le développement des champignons parasites.
Dans ce dernier cas, l'application de microbes pathogĂšnes Ă la
destruction des insectes nuisibles présente bien des difficultés, elle
demandera certainement encore beaucoup et de longues Ă©tudes; ces
difficultés ne semblent pourtant pas insurmontables.
Les épidémies naturelles qui déciment les vers blancs et proba-
blement beaucoup dâautres larves vivant dans les mĂȘmes conditions,
prouvent dâune façon indiscutable quâil est possible de rĂ©aliser dans la
terre les conditions nécessaires au développement des muscardines,
le tout est de savoir commentsâ y prendre, et les recherches expĂ©rimen-
tales conduites avec mĂ©thode ne manqueront pas de nous lâapprendre.
En tous cas, il nous semble bien dĂ©montrĂ© aujourdâhui que, dans la
lutte avec les animaux nuisibles, la méthode maugurée par M. Wetcl-
nikoff et suivie avec tant de succÚs par les naturalistes américains
est lu seule qui a donné jusqu'à présent des résultats satisfaisants
el indiscutables, La seule qui peut nous assurer la vicloire.
Conseils pratiques pour contaminer les vers blancs et les
hannetons et pour Ă©tablir des foyers dâinfestation dans les
champs.
Pour infecter des vers blancs on peut se servir de hannetons ou
de larves momifiées, ou bien de cultures artificielles.
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 489
Les momies, comme les cultures artificielles, ne peuvent ĂȘtre
employées utilement que quand elles contiennent des spores bien
mûres. 2
Les momies sont mûres quand la moisissure qui les recouvre est
pulvĂ©rulente et dâune teinte grise-jaunĂątre.
Les culiures artificielles de muscardine peuvent ĂȘtre faites sur
différents milieux nutritifs préalablement stérilisés, le plus souvent
on les fait sur des bĂątons de pommes de terre Ă demi cuites sous
pression, avec un peu de jus sucré et acidulé, dans des tubes en
verre.
Si les tubes sont bien préparés et contiennent de la muscardine
bien virulente, les bùtons de pommes de terre présentent une colo-
ration rouge-violacée ou lie de vin foncée et sont entiÚrement cou-
verts de moisissure.
Les cultures qui nâont donnĂ© Ă la pomme de terre quâune colora-
ration rose-tendre ou jaunùtre sont généralement plus ou moins
fortement atténuées ; leur emploi ne peut donner que des résultats
peu appréciables.
Il est assez facile de se rendre compte de lâĂ©tat de dĂ©veloppement
de la muscardine dans les tubes. Il faut secouer le tube, et alors, si
les spores sont bien fnûres, elles se détacheront de la pomme de
terre et formeront Ă lâintĂ©rieur du tube un nuage gris-jaunĂątre,
semblable Ă de la farine bise; dans le cas contraire, la moisissure
restera adhérente à la pomme de terre.
Seule, la poussiÚre qui se délache facilement de la pomme de terre
* peut Ă©lre utilement employĂ©e pour lâinfestation des hannetons et des
vers blancs. |
Il est bon de ne prendre dans les tubes pour sâen servir que la
poussiÚre qui se sera détachée seule aprÚs quelques secousses ; re-
boucher ensuite et laisser le tube en repos pendant quelques jours.
Chaque tube peut servir plusieurs fois et on nâutilisera chaque fois
que des spores mûres.
Pour contaminer les vers blancs, il faut procéder de la façon sui-
vante :
1° Faire ramasser des vers blancs en aussi grande quantité que
possible. On les prend avec précautions, pour ne pas les blesser, et
490 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE.
on les place dans des paniers ou autres récipients avec de la terre,
pour quâils ne meurent pas en se blessant les uns les autres ;
% Choisir un endroit peu éclairé (grange, remise ou écurie) et
rĂ©pandre par terre les vers blancs ramassĂ©s, de façon Ă ce quâils ne
puissent pas se toucher et se blesser les uns les autres ;
3° Verser le contenu des tubes, en les secouant fortement, dans
une assiette, un bol ou un récipient quelconque, prendre, avec un
petit pinceau, la poussiÚre blanche qui se détache de la pomme de
terre et toucher les vers blancs un à un, de façon à les saupoudrer
de spores (sâil reste des spores attachĂ©es aux parois intĂ©rieures des
tubes, il faut rincer ces derniers avec un peu dâeau et toucher les
vers blancs avec un pinceau trempé dans cette eau) ;
4° Laisser les vers blancs, ainsi saupoudrés de spores, pendant
trois ou quatre heures ;
5° Ramasser les vers blancs ainsi traités et les placer en pleine
terre, en les enfouissant Ă dix ou quinze centimĂštres de profondeur
et Ă dix centimĂštres de distance lâun de lâautre. â Il faut placer, au
moins, 100 vers blancs contaminĂ©s sur un mĂȘtre carrĂ©, en choisis-
sant les parcelles qui ont le plus Ă souffrir ;
6° Les bùtons de pommes de terre, dont on a enlevé les spores avec
le pinceau, doivent ĂȘtre coupĂ©s en quinze ou'vingt petits morceaux
et enfouis en mĂȘme temps que les vers contaminĂ©s.
Pour que le traitement que nous venons d'indiquer devienne
réellement efficace et donne des résultats appréciables, 1l faut lap-
pliquer de la façon suivante :
4° Mettre à profit les travaux des champs pour commencer à faire
ramasser les vers blancs au printemps, aussitÎt qu'ils seront remontés
prÚs de la surface, et continuer ainsi pendant la durée de la belle
saison, câest-Ă -dire jusquâen octobre. Les vers ramassĂ©s dans la
journée, pendant les labours et autres travaux des champs, doivent
ĂȘtre traitĂ©s le soir et enfouis le lendemain matin;
2° Ătablir des gisements momifĂšres pour avoir constamment de la
muscardine bien virulente Ă sa disposition. Isoler une petite parcelle
de quelques mĂštres carrĂ©s en lâentourant de planches, de feuilles de
tĂŽle ou dâardoises enfoncĂ©es dans la terre Ă 30 ou 40 centimĂštres de
profondeur ; enfouir dans ce champ des vers blancs contaminés par
DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 491
le procĂ©dĂ© ci-dessus indiquĂ©, en raison dâune centaine par mĂštre
carrĂ©; jeter ensuite, dans ce champ rĂ©servĂ©, en les enfouissant Ă
cinq ou dix centimĂštres de profondeur, tous les vers blancs que lâon
pourra se procurer. En procĂ©dant ainsi, on aura, un an aprĂšs lâĂ©ta-
blissement du champ réservé, une quantité suffisante de vers mus-
cardinés pour traiter les champs envahis par les vers blancs, sans
avoir recours aux cultures artificielles.
En résumé : 1° employer des cultures artificielles pour créer des
foyers dâinfestation dans les parcelles qui ont le plus Ă souffrir (au
lieu de rĂ©pandre les vers blancs contaminĂ©s en les enfouissant un Ă
un Ă 9 ou 10 mĂštres de distance, comme on lâa conseillĂ© jusquâĂ
présent, il faut en enfouir 50 à 100 par mÚtre carré, de place en
place, dans les parcelles qui ont le plus Ă souffrir) ; 2 Ă©tablir des
gisements momifĂšres pour avoir toujours de la muscardine bien
virulente Ă sa disposition.
Pour contaminer les hannetons, il faut :
1° Enfermer les hannetons dans des seaux, des pots ou autres
récipients analogues ;
. 2% RĂ©pandre sur eux des spores en raison dâun tube de culture
sur pomme de terre pour 200 ou 300 hannetons en moyenne ;
3° Les laisser enfermés ainsi pendant cinq ou six heures ;
4 Les relĂącher ensuite et les laisser s'envoler.
Une partie des hannetons contaminĂ©s succomberont avant de sâen-
terrer et se couvriront de moisissure qui sera répandue partout par
le vent. Dâautres mourront muscardinĂ©s dans la terre et propageront
la maladie parmi les vers blancs.
Les vers blancs el les hannelons momifiés peuvent conserver leur
virulence pendant au moins deux ans.
Les foyers dâinfestation crĂ©Ă©s en pleine terre y persisteront pendant
plusieurs années de suile, tant qu'il y aura des vers blancs pour les
alimenter.
TABLEAUX.
TABLEAUX GRAPHIQUES
22 000
21000
20000
mt mm mm
Févr. |Mars.|Avril | Mai. | Juin. | Juil. |Août.| Sept.| Oct. | Nov| Déc.| Janv.
No 1. â Multiplication des campagnols en une annĂ©e de grande invasion.
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â3 5: S
TABLE DES MATIĂRES
DU TOME PREMIER.:(1893)
Pages
L. Grandeau et H. Ballaçay. â Ătudes expĂ©rimentales sur lâaii-
mentation du cheval de trait. SixiÚme mémoire. . . . . . . . 1
Ă. Saillard. â Ătude sur quelques stations agronomiques alle-
mandes. â DeuxiĂšme partie. La station agronomique de Halle . 105
Ă. Ronna.â Les dessĂ©chements en Angleterre (avec deux cartes). 151
E. W. Hilgard et M. E. Jaffa. â Note prĂ©liminaire sur la leneur
en azote de lâhumus dans les rĂ©gions arides et humides . . . . 297
L. Grandeau. â La fumure des champs et des jardins. . . . . . 305
J. Danysz. â Destruction des animaux nuisibles Ă lâagriculture
(rongeurs et insectes) par les maladies contagieuses (avec deux
LĂO) PS AR NE AR CS EE Se EE
Ă
Nancy, imprimerie Berger-Levrault et Cie.
18!
PAPE
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Re <râ Ă # 1 ge.
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