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Full text of "Annales de la science agronomique franaise et trangre"

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ANNALES 


SCIENCE AGRONOMIQUE 


FRANÇAISE ET ÉTRANGÈRE 


Comité de rédaction des Annales. 


RĂ©dacteur en chef : 
L. GRANDEAU, directeur de la Station agronomique de l'Est. 


Secrétaire de la rédaction : 
H. GRANDEAU, sous-directeur de la Station agronomique de l'Est. 


U. Gayon, directeur de la Station 
agronomique de Bordeaux. 

Guinon, directeur de la Station agro- 
nomique de ChĂąteauroux. 

Margottet, recteur de l'Académie de 
Chambéry. 

Th. SchlĂŠsing, de l'Institut, professeur 
Ă  l'Institut national agronomique. 

E. Risler, directeur de l’Institut na- 
tional agronomique. 


A. Girard, de l’Institut, professeur au 
Conservatoire des arts et métiers. 
A. MĂŒntz, professeur Ă  l'Institut na- 
tional agronomique. 

A. Ronna, membre du Conseil supé- 
rieur de l'agriculture. 

Ed. Henry, professeur à l’École na- 
tionale forestiĂšre. 

E. Reuss, inspecteur des forĂšts Ă  
Alger. 


Correspondants des Annales pour l'Ă©tranger. 


ALLEMAGNE. 


L. Ebermayer, professeur Ă  l'Univer- 
sité de Munich. 

J. KĂŽnig, directeur de la Station agro- 
nomique de MĂŒnster. 

Fr. Nobbe, directeur de la Station 
agronomique de Tharand. 

Tollens, professeur à l'Université de 
GĂŽttingen. 

ANGLETERRE. 


R. Warington, chimiste du laboratoire 
de Rothamsted. 

Ed. Kinch, professeur de chimie agri- 
cole au collĂšge royal d'agriculture 
de Cirencester. 

BELGIQUE. 


A. Petermann, directeur de la Station 
agronomique de Gembloux. 
CANADA. 
Dr Q. Trudel, Ă  Ottava. 
ÉCOSSE. 
T. Jamieson, directeur de la Station 
agronomique d'Aberdeen. 
ESPAGNE ET PORTUGAL. 
JoĂąo Motta dĂą Prego, Ă  Lisbonne. 


ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE. 
E. W. Hilgard, professeur Ă  l'Univer- 
sité de Berkeley (Californie). 


HOLLANDE. 


A. Mayer, directeur de la Station agro- 
nomique de Wageningen. 


ITALIE. 


A. Cossa, professeur de chimie Ă  l'E- 
cole d'application des ingénieurs, à 
Turin. 


NORWÈGE ET SUÈDE. 
Zetterlund, directeur de la Station 
agronomique d'Orebro. 
Dr Al. Atterberg, directeur de la Sta- 
tion agronomique et d'essais de se- 
mences de Kalmar. 


SUISSE. 


E. Schultze, directeur, du laboratoire 
ssronnnique de l’École polytech- 
nique de Zurich. 


RUSSIE. 


Thoms, directeur de la Station agro- 
nomique de Riga. 


Nora.— Tous Les ouvrages adressĂ©s franco Ă  La RĂ©daction seront annoncĂ©s dans 
Le premier fascicule qui paraßtra aprÚs leur arrivée. Il sera, en outre, public 
s'il y a lieu, une analyse des ouvrages dont La spécialité rentre dans le cadre 
des Annales (chimie, physique, géologie, minéralogie, physiologie végétale et 
animale, agriculture, sylviculture, technologie, etc ). 

Tout ce qui concerne la rédaction des Annales de la Science agronomique 
francaise el Ă©trangĂšre (manuscrits, Ă©preuves, correspondance, etc.) devra Ă©tre 
adressé franco à M. Henry Grandeau, «docteur Ús sciences, secrélaire de la 
RĂ©daction, 3, quai Vollaire, Ă  Paris. 


ANNALES 


DE LA 


SCIENCE AGRONOMIQUE 


FRANÇAISE ET EÉTRANGERE 


ORGANE 


DES STATIONS AGRONOMIQUES ET DES LABORATOIRES AGRICOLES 


PUBLIÉES 


Sous les auspices du MinistĂšre de l'Agriculture 


PAR 


OURS LCR AN'D-E AU 


DIRECTEUR DE LA STATION AGRONOMIQUE DE L'EST 
PROFESSEUR AU CONSERVATOIRE NATIONAL DES ARTS ET MÉTIERS 
INSPECTEUR GÉNÉRAL DES STATIONS AGRONOMIQUES 
VICE-PRÉSIDENT DE LA SOCIÈTÉ NATIONALE D ENCOURAGEMENT À L'AGRICULTURE 


MEMBRE DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'AGRICULTURE 


DIXIÈME ANNÉE — 1893 


Tome I 


Avec figures dans le texte et deux planches 


PARES 
BERGER - LEVRAULT ET C*, LIBRAIRES - ÉDITEURS 


», rue des Beaux-Arts 


MÊME MAISON 4 NANCY 


1894 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES 


SUR 


L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT 


PAR 


L. GRANDEAU et H. BALLACEY 


SIXIÈME PARTIE 


EXPÉRIENCES D’ALIMENTATION AVEC UN MÉLANGE DE FÉVEROLE 
ET DE PAILLE D'AVOINE 


Les expĂ©riences qui font l’objet de ce mĂ©moire ont eu pour but 
l'étude de la valeur alimentaire de la féverole. Elles continuent la 
sĂ©rie des essais exĂ©culĂ©s antĂ©rieurement et qui ont portĂ© d’abord 
sur la ration « mélange » de la Compagnie, puis sur le foin seul, sur 
l’avoine seule, sur un mĂ©lange d’avoine et de paille d'avoine, enfin 
sur le mais consommĂ© d’abord avec de la paille d'avoine, puis avec 
de la paille de blé". 

On à vu précédemment? que, pour entreprendre avec succÚs 
l’étude d’un aliment concentrĂ© (grain, tourteau), il est nĂ©cessaire de 
lui adjoindre un fourrage fibreux destiné à éviter la trop grande 
vacuilĂ© de l'intestin. La paille d'avoine a Ă©tĂ© l’adjuvant de la fĂ©verole 
dans les expériences présentes. 


1. Voir Études expĂ©rimentales sur l'alimentation du cheval de trait, 1°, 2°, 
3°, 4° et 5° mémoires. (Annales de la Science agron. franc. el élrang., passim.} 


2. Voir Études expĂ©rimentales sur l'alimentation du cheval de trait, 4° mĂ©- 
moire. 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893, — 1, 1 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


[Qt 


Chevaux d'expérience. 


Les trois chevaux qui ont servi à ces essais sont entrés au labora- 
toire le 12 novembre 1889. Ce sont : 


Cheval n° 1. Age: 10 ans. N° matricule : 34 614, du dépÎt Saint-Martin. 
— n°2, — Sans. — 34464, — SĂ©gur. 
RTE MT EURE = 990 NN TC PATAGO 


La santé des chevaux a été bonne pendant Llout le cours des re- 
cherches, qui ont pu ĂȘtre ainsi exĂ©cutĂ©es sans interruplion. 

Toutefois le cheval n° 3 a été atteint de diarrhée persistante pen- 
dant plusieurs mois. Cet Ă©tat, dont il ne paraissait nullement souffrir, 
n’a, d'ailleurs, entravĂ© en rien les essais. En Portugal, oĂč les chevaux 
sont alimentés presque exclusivement avec de la féverole pendant 
six mois par an, les excréments correspondant à cette alimentation 
sont semi-liquides. La persistance de l’état du cheval n° 5 n’a donc 


rien qui doive Ă©tonner. 


RĂ©gime de transition. 


Les chevaux ont reçu, à leur entrée au laboratoire, une ration 
composée de 9 kilogr. du mélange distribué quotidiennement dans 
les dĂ©pĂŽts. Le temps qui s’est Ă©coulĂ© du 13 novembre au 1° dĂ©cembre 
a été employé à les faire passer de cette alimentation à celle qu'il 
s'agissait d’expĂ©rimenter. 

Voici comment s’est effectuĂ©e cette transition : 


MOIS DE NOVEMBRE MÉLANGE. FÈVES. PAILLE. 

« Kilogé. Kilogr. Kilogr. 
ER ES Er reteo 40 9 » » 
1GAUERLS fe 9 0,500 » 
19 20e EE Eee 6 1,000 2 
PA PR 5 HN Ut € 3 2,000 4 
23.21 OS TRE 3 3,000 4 
27, 28, 29, 30 » 4,500 6 


Bien que cette période ait été assez courte, aucun des chevaux 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 3 


n’eut à en souffrir ; tous trois, au contraire, augmentùrent de poids 
sous l'influence d’une ration trop forte pour le simple entretien. 

Leurs poids respeclifs étaient, le 1°" décembre 1889, premier jour 
des expériences : cheval n° 1, 476'6,8 ; cheval n° 2, 475 kilogr. ; 
cheval n° 3, 461 kilogr. 


Programme des expériences. 


Les expĂ©riences ont Ă©tĂ© conduites d’aprĂšs la marche dĂ©jĂ  adoptĂ©e 
pour les recherches antérieures. Eiles ont comporté trois séries 
ainsi réparties : 


1'e sĂ©rie. — ExpĂ©riences au manĂšge, au pas. — Chaque cheval 
passe successivement, et pendant un mois, par les alternatives de 
repos, marche au pas, travail au manÚge au pas. Cette série a occupé 
les mois de décembre 1889, janvier et février 1890. 


2° sĂ©rie. — ExpĂ©riences au manĂšge, au trot. — Les chevaux se 
retrouvent, pendant les mois de mars, avril et mai 1890, dans les 
mĂȘmes situations que dans la 1"° sĂ©rie; la marche et le travail ont 
lieu à l’allure au trot. 


3° sĂ©rie. — ExpĂ©riences Ă  la voiture. — Les six derniers mois, de 
juin à novembre 1890 inclusivement, ont été consacrés aux essais à 
la voiture. Les chevaux y sont au repos, à l’entrainement ou au 
travail Ă  la voiture. 

Voici d’ailleurs le dĂ©tail des situations de chaque cheval pendant 
toute la durée des expériences : 


MANÈGE AU PAS MANÈGE AU TROT. 
——— ——— 
DÉCEMBRE| JANVIER FÉVRIER MARS AVRIL 


1889. 1890. 1890. 1890. 1390. 


Cheval n° 1. .| Repos. Marche, | Travail. | Travail. | Repos. Marche. 
Cheval n° 2. .| Marche. | Travail. | Repos. Repos. Marche. | Travail. 
Cheval n° 3. .| Travail. | Repos. Marche. | Marche. | Travail. Repos. 


SE  — — 


4 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


VOITURE. 


JUILLET AOÛT SEPTEMBRE! OCTOBRE |NOVEMBRE 
1890. 1890. 1890. 1890. 1390. 


Cheval n° 1. .|Entrainement.| Travail. Repos. Repos. Repos. Repos. 
Cheval n° 2. .| Repos. Repos. Repos. Repos. | Entrainement.| Travail. 
Cheval n° 3. .| Repos. Repos. | Entraßnement.| Travail. Repos. Repos. 


Fixation des rations. 


En se basant sur les données résultant des expériences précédentes, 
les rations furent fixĂ©es ainsi qu’il suit : 


: PAILLI 
FE d'avoine. 
Kilogr. Kilogr. 
Repos”... 2-7 2Raton d'entretien nee 4,500 4 
1'e série . { Marche. . . .  Ration de transport au pas . ,000 4 
Travail, . . .  Ration de travail au pas . . 6,000 Î 


Les rĂ©sultats de ces trois mois ayant montrĂ© que la ration d’en- 
tretien était sensiblement trop forte, elle fut réduite ; la ration de 
transport au pas était aussi un peu trop élevée ; elle fut conservée 
pour le transport au trot, et les trois rations devinrent : 


Rae PAILEE 
d'avoine. 
Kilogr. Kilogr. 
Repos. . . . Ration d'entretien. . . . . 4 À 
Pere rene . . .  Ration de transport au trot . G] Â 
Travail. . . .  Ration de travail au trot . . 7 4 
Pendant la derniÚre période les chevaux reçurent : 
se PAILLE 
FÈVES davoe. 
Kilogr. Kilogr. 
Las Tr Rationientreliens enter 4 4 
3° sĂ©rie. . / Entrainement . : : À 
= , Ration de {ravail . . . . . 8 4 
{ Travail. . 


Ces quantités ne furent pas toujours intégralement consommées et 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 5 


quelquefois, pour permettre la consommation, des restes des jours 
précédents, les chevaux ne recevaient qu'une partie de leur ration, 
mais dans tous les cas on tint rigoureusement compte des quan- 
tités supprimées, et on trouvera plus loin, au chapitre des rations 
consommées, les quantilés exactes de féveroles et de paille in- 
gérées par chacun des chevaux dans les diverses conditions. 


Résultats généraux. 


Pa 


Sans entrer dans le détail des opérations, rappelons que tous les 
malins Ă  la mĂȘme heure on prend les poids et les LempĂ©ratures des 
chevaux, en mĂȘme temps qu’on dĂ©termine les quantitĂ©s exactes de 
fÚces et d'urine émises pendant 24 heures. Chaque cheval reçoit, 
une heure aprĂšs les repas, de l’eau en quantitĂ© suffisante pour qu'il 
boive Ă  son grĂ©, mais les quantitĂ©s d’eau bue sont exactement 
déterminées. 

On trouvera dans les tableaux qui suivent les données relatives à 
l’eau consommĂ©e et aux fĂšces Ă©mises par les chevaux. Leurs poids 
et leurs températures de chaque matin y figurent également. On 
trouvera dans un autre chapitre les données relatives à l'urine. 


s TABLEAUX. 


6 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL NO 1. 


REPOS. 
(Numéro matricule 34 614.) 


EAU BUE totale PO'DS HATRE du RATURE 
= ER du con- El Cheval du 
Décembre l'à7 h. à à 6 h. four- sommée es p.100 | totale | à Th. + 
du du totale. pas fĂšc:s. des des du du 
1889: matin, | midi. soir. is jour. fĂšces. | feces, | Matin.| matin, 
> ss 
Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Kil. | Degrés 
" 5 250 7760 | 13010 | 1 159,2 u 12950 | 29.17] 3567 | 476,8] 38 0 
" 5 150 6720 | 11870 " n 10 87 26.70| 2902 | 463,5] 37 8 
" 11 900 7 040 | 15 940 1 Ă  " 10260 | 28.32| 2906 | 465,3| 37 8 
Q 13 060 6 820 | 19 890 " " 11920 | 27.50] 3278 | 467,5] 37 8 
" 11050 7 820 18 870 " " 9510 | 24.92] 2370 | 468,7] 33 0 
1 400 9 650 9 870 | 20 920 u " 10920 | 25.95| 2834 | 472,0] 37 9 
" 8 260 5910 | 14170 1 " 10470 | 25.95| 2717 | 473,5] 37 9 
3 050 8 580 7 080 | 18 710 u n 10710 | 25.87] 2771 | 472,6] 37 8 
ñ 10 650 4 900 | 15 550 " u 11 27 25.77| 2904 | 470,2| 37 9 
" 6 600 9 990 | 16 590 " " 10610 | 28.50] 3024 | 466,4| 37 8 
2250 | 11650 4740 | 18620 n n 11440 | 27.45| 3140 | 470,0! 57 9 
" 11140 7 590 | 19050 0 " 9 690 | 27.35| 2 650 1 37 9 
1 770 6160 | 10020 | 17 950 " u 10 880 | 26.07| 2836 | 472,5| 37 9 
H 7 950 8 960 | 16 890 " u 10930 | 26.95| 2869 | 471,7| 38 1 
n 10 910 7090 | 18000 n u 11320 | 27.70] 3163 | 471,6! 38 0 
Ü 10 530 7590 | 18220 u u 10500 | 27.75| 2914 | 472,1] 37 9 
17 " 9 100 8 490 | 17 590 " " 10310 | 28,20! 2907 | 474,2| 38 0 
18 2 S00 5 890 | 10150 | 18 840 u " 11450 | 28.85| 3303 | 476,0! 38 0 
19 n 11160 5450 | 16610 " " 11070 | 28.35| 313 469,1! 37 9 
20 1 590 9 230 5130 | 15 850 " u 10 820 | 27.45] 2970 | 474,0! 37 9 
21 " 8 450 8 720 | 17170 " u 10 690 | 28.45| 5041 | 473,0] 58 1 
22 980 | 11 600 8 010 | 20 590 " 1 8 690 | 26.607| 2318 | 472,8| 37 9 
23 " 8 470 8 330 | 16 800 1 1 10 200 | 27.30| 2735 | 476,0! 35 0 
24 " 10 590 4700 | 15 290 1 " 9 690 | 27.30| 2645 | 476,4| 37 9 
25 n 12 450 3 840 | 16 290 " " 11 720 | 27.00| 3164 | 472,1| 37 9 
26 Ù 7 610 7790 | 15 430 " u 710) 2720510241 475,0] 27 9 
27 930 8 740 7 280 | 16950 M " 9 590 | 27.42] 2630 | 477,8| 38 0 
| 28 " | 8640! 7060! 15700 | » c 8 350 | 27.37| 29288 | 478,5] 38 0 
29 w 5 610 5 140 | 10780 " " 9700 | 27.35| 2653 | 477,4] 38 0 
30 620 9 870 5 280 | 15 770 " " 9360 | 28.30| 2647 | 473,5| 55 1 
31 () 6 700 | 10360 | 17 060 " " 10630 | 29.07] 3090 | 477,0| 35 0 
Moyennes . | » " » [20 162,9] 4159,2| 94 322,4 | 10441 | " |2856,9| 472,7] 37 95 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 7 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 2. 
(Numéro matricule 34 464.) 


MARCHE. AU PAS. 


io EU EURE are tite POIDS & He Æ vtr, TIRE 

i #« A re en ÿ Ra des NT LT cheval Fe 
Décembre INatT he à à6h. four- | somméc pe 100 | totale ÿ bg 

ar ; F Ê uĂŒ 

1889. Pre midi. Fe 5 nt De “4 7. ee matin, nan | 
mm | cames | commen | asc  Ɠmmmemeeress | memes | ee ommesmeumes [mcm meme mecs 
Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Kil. | Degrés 

1 " 5480 | 6890! 128370 | 1215,7 n 12 780 | 29.65] 3789 | 475,0! 38 1 

2 " 8810 | 7080 | 15890 " u 11620 | 26.12] 3035 | 468,6] 37 8 

3 " 5980 | 7480 | 12760 u u 11480 | 27.02| 3102 | 467,8| 37 9 

4 n 11920 | 6020| 17950 " " 11180 | 25.05) 3186 | 464,0] 37 9 

5 " 8560 | 9330 | 17890 " u 10 660 | 27.52] 2934 | 466,0| 37 9 

î " 5940 | 6960 | 12900 Û u 11510 | 27.35] 3148 | 469,5] 37 5 

7 " 11550 | 7820 | 19370 ” " 40190 | 27.52| 2784 | 466,0! 27 9 

8 " 11450 | 3040 | 14490 u u 10440 | 25.90) 9704 | 468,4| 37 9 

9 " 13230 | 7340 | 20570 u " 11660 | 27.02| 5151 | 467,1] 38 0 

10 " 4180 | 7320 | 11500 " " 10 890 | 27.70] 3017 | 471,6] 37 9 

11 0 10990 | 4000 | 14990 " " 11290 | 28.90] 39292 | 466,6] 37 8 

12 " 8150 | 7650 | 15 800 " 0 10 940 | 27.90! 3 052 RNIESTES 

13 " 7950 | 6820 |. 14780 " ” 10530 | 25.52| 2003 | 466,5] 37 9 

14 u 9250 | 5830 | 15060 i NBA) 10910 | 27.47] 2997 | 466,2| 37 9 

15 0 9150 | 3950 | 13100 " " 10 690 | 29.25] 3127 | 465,6| 38 0 

16 " 8990 | 10120 | 19110 " " 10960 | 25.12] 3082 | 464,3] 38 0 

| 17 " 8250 | 8270 | 16520 " mn | 10990 | 23.62] 3145 | 468,0] 37 9 

ET u 8190 | 9500! 17690 " u 10 980 | 27.05) 2070 | 469,8] 38 1 

19 " 5590 | 9580 | 15170 u D 10910 | 28.15] 5071 | 475,9| 37 9 

20 " 8180 | 7050 | 15210 “ " 11480 | 27.65| 3174 | 469,6| 37 9 

21 " 10 880 | 41 050 | 21910 1 " 10170 | 26.60! 2705 | 469,1| 37 9 

22 u 5430 | 9780! 15210 Û " 11450 | 27.55] 3126 | 475,2| 27 9 

23 " 4610 | 42970 | 17580 0 " 11440 | 28.30] 3938 | 474,1| 38 0 

24 " 6860 | 8740 | 15 600 " Û 11190 | 28.65] 3906 | 475,0] 27 8 

25 " 8520 | 6340 | 14 870 u u 11590 | 27.80| 3166 | 473,3| 38 0 

L of u 1020 | 14480 | 15570 " u 10200 | 27.87| 9843 | 472,5| 37 9 

ET " 1250 | S300| 9650 u " 9650 | 29.25] 9825 | 474,6] 37 8 

28 1 r 8040 | 8040 u Û 10280 | 27.90] 2868 | 470,1| 38 1 

29 " 14700 | 6720 | 21420 D " 9210 | 27.20! 2597 | 464,8] 38 1 

30 " 4980 | 9090! 13370 " " 9 640 | 28.92] 2788 | 472,4] 37 8 

31 " 3240 | 68420 | 11660 u Û 9 620 | 28.92| 27855 | 473,5] 38 0 


| Moyennes . n Q u 15 419,31 1 215,7] 16 635,0 | 10 S55 g 2964,7|469,77| 37 91 


[l 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE, 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N° 3. 
(Numéro matricule 37 999.) 


DĂ©cembre 


1889. 


EAU BUE 


TRAVAIL AU PAS. 


E AU 


du 


_— 2 mm — 


7 500 
14 010 
9 980 
15 060 
14190 
8 $20 
14 560 
14 910 
14 890 
11 030 
13 320 
13 410 
12 980 
13 960 
13 590 
14 080 
13 690 
11 700 
9 820 
15 050 
15 080 
9 690 
10110 
14 870 
14510 
13 200 
13 660 
11 140 
12 570 
10 650 
11180 


Ă 6Gh. 
du 


12 060 
10 020 
13 670 
7 850 

8 430 

8 040 
12 270 

6 050 
10 220 

7 920 
13 930 
13 950 
11 600 
13 280 
10 540 

7 550 
13 510 
11 470 
15 420 
13 390 
12 850 
15 660 
14 500 
14 490 

9 650 
14 700 
12 760 

7 810 
12 700 
14 760 
12 590 


four- 


totale, 
rage. 


21 130 
25 260 
23 650 
23 980 
22 620 
16 860 
31 010 
20 960 
28 510 


29 610 
26 420 
18 950 
27 660 


26 460 


25 699,3] 1 328,6 


EAU 
totale 


con- 

somméc 
par 
jour. 


27 097,9 


POIDS 


15 700 
12 980 
11 880 
12 450 
13 290 
12 740 
13 550 
12 680 
11 510 
12 740 
13 540 
12 190 
12 200 
13 200 
12 470 
13 010 
11720 
12 850 
15 960 
13 950 
11 870 
12 960 
14 220 
14 030 
11 610 
12 450 
11 929 
11 980 
13 430 
12 900 
12 830 


12 867 


MATIÈRE 


sĂšche 


Poips| TEMPÉ- 


du 


a NCRe val 


totale 
des 
feces, 


Ă  7h. 
du 
matin, 


RATURE 
du 
cheval 
Ă 7h. 
du 


6 
1 
8 
1 
0 
1 
0 
0 
0 
9 
0 
0 
0 
0 
0 
U 
0 
0 
1 
1 
0 
0 
0 
0 
( 
0 
(0 
1 
9 


eo 
LI 


ALIMENTATION DU CHEVAL 


DE TRAIT. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 1. = 
(Numéro matricule 34 614.) 


Janvier 


1890. 


Moyennes . 


EAU BUE 


MARCHE AU PAS. 


du 


————— 


11 450 
9 670 
11210 
7 630 
10 600 
12 920 
10 270 
10 020 


Ă  6h. 


four- 


totale, 
rage. 


13 850 
14 770 
15 930 
22 090 
16 050 
22 020 
21 300 
15 200 
16 700 
19 110 
21 800 
20 860 
18 260 
24150 
19 300 
20 210 
15 800 
23 410 
20 920 
18 350 
19 680 
17270 
18 770 
25 540 
20 0140 
23 020 
20 870 
17 440 
15 420 
18 240 
22 990 


19 527,7] 1 321,0 


EAU 
totale 
con- 
sommée 
par 


20 848,7 


POIDS 


fĂšces, 


10 200 
9 S40 
11 250 
10 750 
10 020 
11 660 
10 540 
11 240 
10 080 
11 420 
9 700 
10 819 
19 220 
9 910 
11 610 
10 400 
11 700 
10 340 
11 850 
10 200 
10 950 
11 580 
9 900 
10 600 
11 850 
9 930 
12 740 
10 750 
10 160 
10 600 
11 170 


10 773 


MATIÈRE 


sĂšche 


—_—— 

p. 100 
des 

fĂšces. 


— 
totale 
des 


feces, 


POIDS 
du 
cheval 
Ă  7h. 
du 
malin. 


TENPÉ- 
RATURE 
du 
cheval 
a7h. 
du 
malin. 


Degrés 


L=] 


ƒ OD'1SO Pr © © © ” 


5] 
7 
6 
9 
7 
9 
6 
7 9 
8 
7 
4 
8 
4 
74 
8 
0 
1 
1 
1 
2 


© 


2] 
CE 


10 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


EV : 0 . 
Te D € TRAVAIL AU PAS. 


(Numéro matricule 34 464.) 


EAU MATIÈRE | PorDs| TEMPE- 
EAU 
EAU RUE totale POIDS ET du | RATURE 
É du 


, des a7h cheval 
Janvier Ă Th. Ă  Ă a6h. four- SOMME p.100 | totale [47% | 37 


d du 22 totale. Says pas feces. des des du de 
1890. midi. ge. matin. | tin 


= du con- cheval 


matin, ir. JOnrE feces. | feces,. 


Degrés 


= 


18 320 11010 285 2,4| 38 
20 100 12 940 | 26.45 42% 38 
12 340 = 3 3: 38 
11130 : 37 
7 610 11150 2 3 79 >| 38 
12450 24 11 550 Lu ; 37 
12 350 2 11540 | 27.15 72,6| 37 
2 550 9 10 160 | 25. 76 37 
9 190 11 560 . 32 22 4,5| 37 
10 820 )B 12 050 Ăč 
6 790 Ă« 9 10 570 
11310 20 48 11 260 
5440 | 1388 2 11 740 
4 420 3.8: 9 10 540 
4410 10 780 
14740 | 73: 22 9 500 
11 930 3 ) 9 570 
14 710 : 12 350 
7 960 Ë 2 10 960 
6 500 14 490 11360 
3210 9e 17 140 9 460 
9 540 6? 23 160 11 780 
7 250 11220 
3920 | 14 12 440 
11310 24 50 10 760 
11700 11 860 
7 180 : 12 0:0 
11 470 55 20 05 10 230 
12630 | 44 10 82 
10 490 f 6 11550 
4620 | 12: 10 180 


Ca 


© D I A ƒ Ă  C 1 


ne en ne De be 
© LO = © 
EAP OD: LIL OT TOR: I al PONS SrS:. Ie 


D 
LL 
L=} 


OO = x de bn 
SŸS ©  U © 
19 © RO 
© 1 # 
© © © 
2 
1 © @ «1 


Moyennes . " 19 029 | 1438,4| 20 467,4 | 11 183 3009 


ALIMENTATION 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR 


a 


CHEVAL N0 3, 
(Numéro matricule 37 999.) 


DU CHEVAL 


DE TRAIT. 


11 


L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


REPOS. 


“LE et FAU’/BUE sub nie POIDS = ‘ere . 
DR RTS du con- EPA ue 
Janvier a7h. à a6h four- somméce ce p.100 | totale 
Ê ar F 

1890. Dre LE = Le + jé cet es ER 

Gr. Gr Gr Gr. Gr. Gr Gr, Gr. 

1 1960 | 8650| 4670| 14580 | 1 221,9 u 10 8:0 | 20.55] 2731 

2 3810 | 12740| 5150 | 21700 D u 12 840 | 22.10| 2838 

3 5110 | 8770 | 14200 | 28 080 " u 15 140 | 15.12] 29289 
4 990 | 9170 | 10370 | 20 550 " " 14 140 | 15.67| 9216 
5 4170 | 93C0 | 10220 | 23 690 " u 9960 | 15.80! 1 574 

6 940 | 13390 | 6210 | 20 540 " u 16170 | 15.80] 2555 

7 7670 | 5010 | 13800 | 26 480 " u 16490 | 17.12] 2 823 

s 2970 | 8950 | 14200 | 26 120 Û Û 17960 | 15.72| 9 823 

2 1150 | 9210 | 13 600 | 23960 " " 16710 | 16.27| 2719 
10 1170 | 9690 | 13470 | 24330 " Û 15 630 | 15.45| 2415 
11 m 9 700 | 12670 | 22570 n n 17920 | 17.15| 2953 
12 " 9 750 | 12740 | 22 490 " " 15 550 | 19.55| 3 040 
13 ” 6870 | 14970 | 21 840 Û D 13720 | 15.75| 2161 
14 n 7 620 | 13760 | 21 380 " u 11 370 | 17.85| 2030 
15 D 8870 | 135:0 | 92410 " " 15 110 | 17.67| 2670 
16 =" 6590 | 13000 | 20 490 0 1 13 020 | 17.65| 2298 
17 n 12240 | 7000 | 19240 " n 14 550 | 20.67! 3007 
18 550 | 10220 | 13290 | 24130 " u 14190 | 47.72] 2514 
19 1170 | 7200 | 13380 | 21750 Û u 14020 | 15.67| 2199 
20 " 11350 | 14100 | 55430 " D 159250 | 13.80! 2105 
21 D 9 660 | 13450 | 23110 u u 15460 | 14.35| 2219 
22 1160 | 12200 | 13870 | 27250 " D 16530 | 15.97| 2640 
23 290 | 10750 | 12970 | 24110 " u 18980 | 14.17| 2689 
24 1400 | 10260 | 15780 | 27 440 u " 16610 | 13.17| 2188 
25 670 | 13600 | 13050 | 27 320 " u 18570 | 13.80! 2563 
26 1420 | 10770 | 12080 | 24 270 Û " 16820 | 15.27] 2570 
27 7710 | 13210 | 41770 | 392 750 u u 19780 | 14.35| 283$ 
28 940 | 8220 | 14540 | 23 700 " 0 189260 | 13.87| 2533 
29 1610 nu 7700 | 9310 " u 12 350 | 13.40| 1652 
30 4630 | 6720| 5860 | 17210 " " 12590 | 11.35| 4429 
31 " 10 200 | 11150 | 21350 " u 12680 | 11.80] 1496 
Moyennes . n n “| 92 881,9] 1 221,9) 94 103,8 | 154141 " | 2412 


POIDS 
du 


cheval 

Ă  7h. 
du 

malin, 


TEMPÉ- 
RATURE 
du 
cheval 
Ă  7h. 
du 
matin, 


Degrés 


D 


CL OS ES - 2] 


CO © © 1 1 D OO 1 © 


OO OO © © OO © © EE GC 1 


1 
ĂŠ 


12 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N9 1, 


(Numéro matricule 34 614.) 


TRAVAIL AU PAS, 


DATES, 


Ă  7 h. 
du 
matin. 


FĂ©vrier 


1890. 


Gr. 


Ă  


midi. 


Gr. 
10 050 
12 470 
10 040 

7 650 
13 100 

9 830 
19 250 
12 520 
12 990 
11 670 
11 200 

9 870 
12 530 
12 220 
12 760 
10 560 
13 260 
12 510 
12 530 
14220 
11 160 
11 710 
12 950 
15 260 
12 020 
43 750 
10 510 
14 020 


(0 


soir, 


Gr. 
14 570 
12 030 
113560 
13 490 

7 180 
13 890 
12 3550 

9 570 
11 560 
13 260 
14 220 

5 790 
13 650 
14 160 
12 050 
15 720 
11050 
14 590 
15 650 
15 200 
13 540 
13 090 
11270 
11 780 
11 470 

3 440 
14 540 

9 240 


(1 


totale. 


Gr. 


24 420 
24 500 
21 400 
21 140 
20 720 
25 380 
24580 
22 090 
24 550 
24 930 
25 420 
15 660 
28 390 
26 380 
25 410 
24 580 
24 310 
27 700 
28 390 
27 440 
24 700 
24 800 
24 290 
25 040 
23 490 
17 190 
28 990 
23 260 


du 
four- 


rage. 


Gr. 


24 252,8] 1 420,0 


EAU 
toiale 
con- 
sommée 


par 


jour. 


POIDS 


3 


fĂšves. 


Gr. 


11 370 
12 590 
11 780 
11 570 
11 410 
15 670 
11 030 
12 790 
12 440 
13 050 
11 900 
12 760 
12 450 
12 270 
13 350 
13 440 
11 940 
14 440 
15 330 
11 080 
12 420 
11 680 
12 830 
12 170 
13 390 
12 020 
13 730 
13 260 


12 696 


MATIÈRE 


sĂšche 


À 


p.100 | totale 
des des 
feces. | fĂšces. 


Gr. 
29.27] 3328 
27.22] 3497 
27.35| 3 222 
26.07! 3095 
26.97] 3077 
22.95| 3487 


24.20| 92 880 
28.05| 3579 
23.90| 3215 
25.50] 3199 
24.99] 3397 
24.39] 3 269- 
25.02| 2987 
22.92] 3310 
22.20] 3403 
20.50] 2249 
25.17| 3126 
24.22] 9 899 
25.45] 3965 
24.77| 3015 
24.40| 3267 
27.80] 3342 
27.00] 3610 
23.65] 34135 

nm | 3177 


Porps| TEMPÉ- 


du 
cheval 
Ă  0h: 

du 
malin. 


Kil. 
480,5 
479,5 
480,2 
478,9 
479,5 
480,4 


RATURE 
du 
cheval 
Ă  7 b. 
du 
malin, 


Degrés 


C5 
Let 
re be © © © © oo 


co 
Le 
© 


C2 
Le 2] 
to 


Q2 
1 
19: © © 1 © 


Q2 
Le 
9: ©, SD Sun, © -0. © © 


ce 
C2 
© © © 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 13 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N° 2 POS 
(Numéro matricule 34 464.) FER 


EAU mariùre |poins| TEMPÉ- 
EAU BUE totale POIDS du RATURE 


nn" — con- ne | CHIC VAL du 
D F des : cheval 
FĂ©vrier . Ă  a6h. fouet ES p.100 | totale [a7h li, 


_ du rage DAS fĂšces. des des du du 
= midi, C : 
malin. soir. Rours feces. malin. | matin, 


seche 


1890. 


Degrés 
11050 | 16920 
9 160 | 11070 
9510 | 13800 
7050 | 14000 
7 620 | 11 460 
8290 | 14300 
10 140 | 14 840 
9270 | 11650 
5170 | 13290 
13520 | 17 670 
11980 | 12 870 
8640 | 12 620 
13930 | 15 690 
10 760 | 13 460 
10010 | 11450 
7990 | 14950 
13 620 | 13 630 
9 640 | 11190 
7410 | 13 870 
9 040 | 14770 
8260 | 11510 
7 440 7 440 
5130 | 15200 
6 890 | 16 550 
4190 | 11500 
10250 | 16460 
10 860 | 12410 
10 700 | 13 410 


Moyennes . u 13 502,5| 1244.8| 14 747.3 


14 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAI, DE TRAIT. 


CHEVAL N0 8. 


(Numéro matricule 37 999.) 


FĂ©vrier 


1890, 


Moyennes . 


EAU 


Gr. 

14 520 
6 680 
9 860 
7 920 
11 220 
8 640 
10 430 
12 170 
11 340 
10 200 
15 640 
11010 
12 S20 
12 490 
12 850 
8 490 
13 350 
14 220 
9 060 
15 450 
11 790 
15 070 
13 120 
14 510 
15 420 
14370 
15 400 
15 410 


" 


BUE 


Ă  6 b. 
du 


soir. 


14 340 
14 450 
13 900 
10 110 
1% 110 
9 960 
14 680 
14 170 
14 110 


MARCHE AU PAS. 


totale. 


19 

LS La 
1 
[-2 
=] 


25 566 


1 303,2 


EAU 
totale 
con- 
sommée 
par 
jour. 


Gr. 


26 869,2 


Mariùre | Porps| TEMPÉ- 


POIDS SĂšche du: | RATURE 

ARE Cheval du | 

des a7h | cheval 
p.100 | totale TIR 
fĂšces. des des Fe du , 
feccs, | feces, | MAUR! matin, 

Gr Gi. Kil. | Degrés 
12980 | 14.35] 1762 | 443,1| 58 2 
14960 | 18.35] 2745 | 471,6| 38 0 
19 880! 13.95! 2773 | 466,4| 37 9 
13 300 | 25.10] 333 460,6| 37 9 
45 310°] 16.77] 2567 | 456,1| 38 1 
9 000 | 19.00! 1881 | 455,3| 38 0 
12910 | 16.80! 2169 | 453,0| &8 0 
18060 | 17.80] 3215 | 465,5] 37 8 
15 760 | 15.60! 2459 | 463,1| 38 0 
16550 | 17.40| 2880 | 461,0! 38 1 
16 880 | 13.55| 29287 | 461,5| 37 8 
13 860 | 15.80| 2193 | 463,2] 38 0 
16930 | 14.60| 2472 | 467,6] 38 2 
15510 | 15.50] 2373 | 464,3] 38 2 
15240 | 15.15] 2309 | 464,6| 38 1 
17 720 | 13.65] 2420 | 465,0] 38 1 
17 500 | 14.37] 2515 | 460,2] 38 2 


18 350 | 12.77| 2341 
16 380 2 

16 290 | 14.67] 239 
20 530 | 13.60 
18 970 | 13.12 
16340 | 13.90| 29271 
16290 | 13.30! 2 
17 000 | 12. 
17 400 | 12.87] 22: 
21 260 | 12.80| 2566 
19910 | 13.32| 2582 


16 442 u 2451 | 462,0] 38 09 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 15 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


YAL o 
CRT. ; TRAVAIL AU TROT. 
{Numéro matricule 34 614.) 


EAU Mariùre |poips| TEMPÉ- 
EAU BUE totale POIDS seche du RATURE 


— 2 con- ee, cheval du 
S cheval 


mmé des 1 à7h 
ah. | à |a6h. somméc p.100 | totale [#7 lag 
du du totale, par feces. des des u du 


malin. midi. soir. Jour. feces. | feces, [Matin | parun. 


Gr. Gr. Gr, : P, Gr. à . | Degrés 


co 
Le] 
—] 


13530 | 10550 | 24 0S0 13 680 
11210 | 15720 | 50 460 13 250 
10250 | 12560 | 23910 13 000 
11310 | S520 | 22100 11 250 
6500 | 13500 | 21 020 12 440 
11150 | 12210 | 27 010 13 280 
15 670 | 14260 | 30 720 16350 
14330 | 9120 | 23 460 13 350 
12 500 | 14 290 2 11450 
13 280 | 11 410 12 420 
13 020 | 10 760 : 13 220 
14150 | 9280 497 13 710 
13 670 | 13 960 ÂŁ 11 610 
13 770 | 11 160 4 13 050 
14 690 | 12150 | © 12 860 
11970 | 10 660 Ă« 10 670 
11260 | 13410 4 10 560 
10770 | 11 640 3 0: 11 850 
12 700 | 12 290 É 11 760 
10590 | 9840 11780 
13 490 | 11 090 6 11 510 
15 640 | 12250 13 740 
11020 | 13 880 Ê 12 760 
13 420 | 13 250 12 610 
10 600 | 13 470 4 13 160 
12 090 | 13 220 ! 13 200 
15 350 | 11 730 13 530 
11 8S0 | 14180 11 590 
15 160 | 14560 13 420 
12010 | 14530 12 120 
9750 | 14750 | 26950 13 000 


CR 
J © 


© © © © = © © 


D © = = ] 


2 


" | 26 587,7] 1474,6| 28 062,3 | 12 662 4,8 464,1 


16 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N9 2, 


; - HART REPOS. 
(Numéro matricule 34 464.) 


EAU MATIÈRE |Porps| TEMPÉ- 
tolale POIDS du | RATURE 
du 


DATES. 
seche 
con- À «heval 


sommée des p. 100 : : cheval 


totale ET 


PES feces. des des du 
feces. | feces, malin, 


Gr. 5 Kil. | Degrés 


11930 | 15 530 10 550 AE 480,7 3 
3170 | 10750 10 0x0 | 27. 2 484,0 
20 020 11570 | 25.92| 2 486,8 

14 660 11 750 .62| 31: 491,2 

18 650 \ 15 560 | 25.62| 3 492,6 

14 020 12 620 | 25. ; 494,5 

14 140 9 410 | 35. 3 490,2 

13 790 14 540 | 26.: 3043 | 492,0 

12 620 15 010 f 4 | 492,8 

21 380 12 850 | 95.9: É 491,4 

11 500 12 010 | 26. 5 1° 496,2 

11 840 ! 10 050 | 26. 2 6 494,1 

15 690 10 400 : ‘ 492,3 

5 800 9 370 Ă  495,4 

19 190 11670 | 95° : 486,4 

14 560 11 740 S 2920 | 499,5 

10 170 ».1° 493,5 

10 870 5.75| 2799 | 495,8 

11920 | 26.95| 3129 | 490,3 

11310 | 22.85] 2584 | 493,5 

15 350 .37| 2666 | 495,4 

12 570 .65| 2431 | 494,5 

14060 | 23.02] 39237 | 498,9 

11 490 13 560 | 23. Ăš 502,4 

10 310 11 130 SM 2 | 493,1 

16 720 10 990 4.62 706 | 494,8 

9 560 9990 | 24.15| 29 497,7 

13 950 10 270 4,5 ) 496,1 

1610 | 11230 Ăš 20 250 9 890 5.21 497,0 
u 3 450 3 15 16 530 11310 5.25 490,3 
4090 15 550 9 630 ; 26 | 501,8 


ho ho 


ro to 


Lie] 


de be D À re + © 


[= 


14 805,2] 1 220,0| 16 125,2 |11428,7 495,1 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. LT 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N03. 


à É MARCHE AU TROT. 
(Numéro matricule 37 999.) 


EAU MATIÈRE | porps| IBMPÉ- 
EAU BUE totale POIDS du | RATURÉ 
con- EN PV A du 


; des * cheval 
sommée p.100 | totale | à Th. à7h. 


sĂšche 


four- 
pan feces. des des du du 


Jour. feces. | fĂšces, | MAN. inatin, 


Degrés 


26 110 ‘ 15 S40 

29 880 17 540 

27 560 17 480 

28 990 17 560 

26 860 17 250 

29 260 20 690 

29 350 19 950 

25 680 17 100 

35 400 20 790 

36 910 20 660 

14580 | 37 770 21 510 

14400 | 14620 | 39140 20 420 
15030 | 14820 | 35410 21 300 
15010 | 14410 | 39910 21 930 
44160 | 15280 | 37110 21 620 
15 0$0 | 14640 | 35450 20 160 
142920 | 14980 | 32770 17 850 
12 740 | 14480 | 36 500 19 980 
12 660 | 15390 | 34540 19 360 
14 500 | 10750 | 30 850 20 440 
1484 5 2 35 670 18 790 
14240 | 15 02 32 410 21 620 
14 810 34 800 20 140 
11710 | 1475 29 300 19 180 
10 190 | 1: 30 080 18 890 
11720 | 1: 36 550 19 060 
12 160 26 170 17 1460 
15 020 ; 40 700 16 650 
14 690 31 890 17 290 
10 810 31 010 15 070 
11 060 o {: 36 350 15 960 


19 


D = © © 


0 
1 
8 
1 
l 
0 
8 
9 
8 
7 
9 
9 
6 
8 
6 
0 
8 
0 
8 
S 
0 
8 
1 
9 
6 


32 915,5) 1317,6| 34233,1 | 19 116 


1] 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893, — 1. 


13 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 1. 
(Numéro matricule 34 614.) 


REPOS. 


EAU MATIÈRE |Porps| TEMPÉ- 
totale POIDS Seche du RATURE 


0 : — | cheval + | 
es Ă  : 
sommée p.100 | totale | à 7 hi KR Th 


Par fices. des des du du 
ere À ne jour. fùces. | fùces, | MAUR. matin. 


Gr. Gr. : Gr, : ; Gr. à . |Degrés 
4700 | 14630 | 142 53 620 10 180 | 27. 456,6 
8 200 560 | 18 760 10 570 -3 461 ,4 
7 920 17 310 9 960 | 25.3: 3 463,0 
5 530 3 16550 9 960 JE 463,5 
19 550 9 820 .3 463,5 

16 74 9710 | 26.75| 2597 | 464,3 

16 430 10 090 | 26. ; 465,1 

16 470 10 460 ; 2852 | 464,3 

14 200 10 470 s 2740 | 466,1 

15 660 8 500 ; : 465,1 

18 900 11 210 ; 2 | 466,5 

17 350 11 250 L 4 | 469,1 

17 150 10 140 : 469,0 

17 670 10 250 ; j 472,6 

15 590 10 050 | 26.62 470,5 

17 700 11 870 89! 5 469,4 

14 740 11950 | 24.45] 2999 | 468,9 

15 790 9 190 : 466,7 

18 910 12 150 | 24. 467,4 

16 360 10 660 : 2 886 | 464,6 

18 850 9 980 ; 464,9 

13 150 9 380 c 9 469,2 

15 310 10 710 .05 469,4 

16 350 Û 9 750 .75 469 ,1 

16 030 9 850 .d: 514 | 471,5 

6250 | 15940 10250 | 25.8: 547 | 473,1 

10980 | 16 790 10 000 .34| 2634 | 474,3 

7 660 | 14 860 10 100 .: 475,8 

7850 | 17 300 10 600 | 25. 475,5 

7450 | 15440 9 710 .25 4 475,9 


Le] 


9 
0 
9 
0 
9 
9 
8 
9 
0 
8 
9 
0 
9 
9 
6 
9 
1 
9 
1 
9 
8 
9 
0 
0 
0 
0 
8 
9 
8 


eo 
es 


Moyennes . " 17 182,6] 1 094,0 5 | 10303 467,8 


ERA DRE PR RE 0 ASE 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 19 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N° 2. 


; MARCHE AU TROT. 
(Numéro matricule 34 464.) 


EAU MATIÈRE |porps| TEMPE- 
EAU BUE totale POIDS Seche du RATURE 


du con- É Us CNE VAL sa i 
; es cheva 
Ă 6h. four- BATMIEE p. 100| totale [Ă  7h. AUTRE 


du totale. age por fĂšces. | des des du in 
Jour. feces. | feces. | Malin.| tin. 


© 
Ɠ 
LE) 
" 
Re 
CI 


Gr. Gr. Gr. 


co 
co 
=] 


5310 | 9160! 14470 12 610 | 26. 3 554 
12010 | 12500 | 24 510 13 080 , 3 617 
2780 | 11750 | 14530 11 030 - 3 024 
" 14780 | 14780 10 450 : 2 797 

13 060 | 10020 | 29 500 12 120 S 3 259 
7840 | 9430 | 17270 10 370 : 2 686 
9060 | 6080| 154140 11 260 3 063 
10 900 | 12770 | 23670 11 730 | 27. 3 187 
5360 | 3550 8 910 11 520 | 28. 3 257 
11440 | 7530 | 22080 11 410 | 27. 3 157 
9070 | 13570 | 22640 11 260 4 3085 
9190 | 10420 | 19 610 12 130 | 24. 3 008 
7660 | 12410 | 19970 11 550 | 26. 3023 
7210 | 12660 | 19 870 11 310 . 3 005 
11600 | 10000 | 21 600 11 560 | 25. 2 979 
10560 | 14600 | 25 160 12 120 : 3 208 
6850 | 14160 | 21 030 11 430 | 27. 3 088 
10770 | 11370 | 22 140 12110 5 3 163 
6540 | 11680 | 18 220 12 760 | 26. 3 320 
9920 | S150 | 18070 10 320 | 26. 2 773 
7950 | 12700 | 20 620 12 100 5 3 158 
11970 | 74100 | 19070 11590 .25 | 5158 
11830 | 8450 | 20 280 11 940 | 27. 3 224 
13850 | 9520 12 370 | 25. 3 194 


C2 009 (0209 02 O3: (0/7 09) C2 09 
@Q “1 © © OO ƒ@ J OC © 


15010 | 12560 | 25: 10 900 | 27.25 | 2970 
10960 | 8710 19 000 | 27.32 | 39278 
7950 | 14810 | 2274 11 570 | 96. 3 057 
9730 | 14640 | 9244 12 510 | 26. 3295 | 479,0 


0 
0 
1 
8 
0 
1 
1 
1 
8 
1 
0 
7 
0 
1 
0 
1 
1 
1 
0 
8 
9 
1 
1 
1 
{ 
1 
7 
1 


11270 | 14570 | 95 84 11960 | 28. 5417 | 451,4 
10 720 | 12350 | 9: 12 280 | 29. 3561 | 481,6 


1 


je 90 #70 2 11698,3 3145,5| 487,6 


< 
L°21 


20 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N9 3. 


(Numéro matricule 37 999.) 


TRAVAIL AU TROT. 


DA'TES, 


Moyennes . 


A — 


4 650 
9 040 
2 150 


“ 


EAU BUE 


7 090 
15 720 
14 900 
15 030 
15 500 
14940 
15 520 
15 530 
14 450 
15 480 
15 220 
15 440 
15 350 
14 760 
13 920 
14 600 
14 810 
15 600 
15 050 
15 300 
15 250 
15 010 
15 940 
12 920 
14 590 
15 640 
15 190 


Ă  6h. 
du 
soir, 


13 900 
14 820 
11 260 
15 210 
14 650 
9 040 
13 810 
12 740 
15 540 
12 950 
12 920 
15 440 
14 640 
15 070 
15 260 
15 700 
13 270 
13 400 
15 200 
14 610 
15 550 
10 920 
15 440 
15 440 
15 270 
15 660 
15 170 
15 660 
15 020 
15 530 


totale. 


30 810 
32 000 
33 280 
27 850 
51210 
51 070 


DAS EAU 
totale 
du con- 
four- sommée 
par 
Le jour. 


1363,0| 35 478,0 


POIDS 


17 480 
17 780 
17 610 
15 480 
14 380 
12 690 
12 940 
15 540 
15 520 
14 920 
15 100 
12 280 
15 550 
12 910 
11 010 
13 250 
15 320 
15 650 
11310 
12 720 
15 560 
12 200 
15 400 
10 150 
11530 
10 450 
9 800 
12 270 
11 950 
16 910 


13 621 


MATIÈRE 


seche 
p-100 
des 


feces, 


totale 


des 


fĂšces. 


Gr. 


19 © 


Le 


pois! TEMPÉ- 


du 
cheval 
Ă  7h, 

du 
mat.n, 


Kil. 
467,4 
468,7 
470,4 
467,4 
467,1 
464,0 


RATURS 
du 
cheval 
Ă  7 h. 
du 
matin. 


Degrés 


co 
co 
19 > de de D be be © = PO D + © 


o2 
co 
19 © 


©) © 
@ © 
L9 © 19 


ce 
L°2] 
19 


o3 2 
co [°2] 
— > 19 © 


> co 
@ © 
19 19 


[45] 
[°] 
 Ê © © 


c2 
Le] 
2 
19 


| 3 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 21 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 1. 


: MARCHE 
(Numéro matricule 34614.) 


AU TROT. 


Moyennes . 


14 370 
14 790 
14 200 
12 690 
13 710 
14 330 
9 980 
12 890 
13 250 
6 330 
8 640 
15 040 
14 240 
9 120 
15 180 
12 140 
13 160 
14 920 
12 310 
12 640 
14 020 
15 140 
10 910 
8 940 
8 470 
13 360 
12 560 
12 870 


1" 


Fawn etes 
du con- 
four- sommée des 
totale. rage. D? fĂšces. 
jour. 

Gr. Gr. Gr. Gr. 
20 900 | 1 115,7 u 15 180 
92 410 Q " 13 040 
18 020 " 1 15 760 
26 670 " " 14 580 
23 920 0 u 14 450 
91 010 u u 16 500 
18 270 u u 12 280 
25 500 " u 11 860 
22410 " u 14 290 
19 090 M u 12 930 
27 260 n " 12 090 
22 640 " " 15 170 
19 240 " u 11180 
22 290 " u 11 350 
22 450 " D 12 180 
25 63 " " 11 910 
18 990 " " 12 770 
28 450 u " 13 640 
27 840 " " 13 410 
24 520 u " 11 880 
24 380 " n 12 810 
26 870 " D 15 350 
28 580 " 1 12 850 
26 970 " " 12 820 
22 140 u " 11220 
24 710 " u 11 090 
15 830 " " 13 750 
21 970 " " 12 150 
21 890 u " 13 270 
22 850 " Ù 13 590 
29.290 " Q 11 740 


23 105,5] 1 115,7 


MATIÈRE |POIDs 
sĂšche du 
OO VAL 
p.100 | totale Ă  Th. 
des des fe 
fĂšces, | feces, | Matin. 
Gr Kil. 
26.80 3532 | 474,6 
25.95| 3293 | 472,9 
24.05] 8309 | 473,0 
95.97| 5495 | 472,8 
24.85| 3591 | 471,0 
19.02| 5138 | 469,6 
25.70| 3156 | 468,1 
95.72| 5050 | 469,6 
93.52| 3361 | 473,1 
24.65| 3187 | 469,2 
24.00| 2902 | 468,0 
29.95| 3482 | 470,5 
23.35| 2611 | 466,4 
27.45] 3114 | 468,5 
25.60| 3118 | 469,5 
26.75| 3186 | 468,4 
26.35| 3365 | 465,5 
26.37| 3597 | 463,8 
26.47| 3550 | 466,1 
26.30! 3124 | 467,9 
27.10] 3472 | 467,5 
27.95| 3632 | 467,8 
27.20| 3503 | 469,9 
26.50| 3597 | 467,4 
27.70| 3108 | 466,0 
27.42| 3041 | 468,7 
27.07| 3722 | 469,0 
27.50| 3341 | 468,2 
27.30] 3623 | 469,8 
24.62| 2346 | 471,2 
28.87| 3389 | 469,0 


TEMPÉ- 
RATURE 
du 
cheval 
Ă  7 b. 
du. 
matin, 


C2 
Let 
D © oo 


V2 
(w2] 
CC D — PE DRAC — TR — EN YA © DT © et EC PT AE — RL =) 


©2 
1 
DIS NSEONES EDR D IONM STONE 


es 
Le21 


e 
22 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N°9 2, 


(Numéro matricule 34 464.) CRAVATE 


DATES. EAU MATIÈRE |poros| TÉMPÉ- 

totale POIDS RATURE 

con- d a  , cheval e I 

; es e cheva 

four- sORmec p.100 | totale Ă 7 h. a7h 
IE féces. des des du du 

jour. 


sĂšche du 


rage. 


feces, | fĂšces. | Malin. 


Gr. 

7 650 | 14 490 11 980 
13 150 | 14 490 1 13 670 
14730 | 14260 14 550 
14340 | 14560 13 810 
12 190 | 14 670 13 210 
14 160 15 240 15 600 
13630 | 15350 | 33 780 14 030 
15 310 | 15620 | 32 880 12 950 
14710 | 15370 | 32 960 15 760 
12 580 | 11610 | 27 900 15 050 
10610 | 14710 | 30 650 13 910 
14950 | 143950 | 34 450 14 220 
12 490 | 14790 | 34 860 15 550 
14790 | 15300 | 31 020 14 710 
13240 | 14630 | 28 610 14 420 
13710 | 144760 | 324110 13 050 
12910 | 13970 | 35330 14 490 

5780 | 14170 | 24 370 12 210 
13170 | 14660 | 41 850 14 790 
10 440 | 15 380 | 925 820 13 110 
10170 | 144250 | 34 790 12 110 
14 400 | 14750 | 37 140 13 470 
14720 | 14990 | 30 530 12 260 
15130 | 15120 | 37130 15 810 

8 390 | 12 400 | 26 560 9 170 
13750 | 14480 | 35480 15 160 
45150 | 15160 | 20310 12 500 
13 720 9 940 | 23660 10 990 
12250 | 10550 | 27 220 13 320 
13990 | 144230 | 30 500 13 980 
12080 | 14220 | 30 530 14 680 


ƒ OO 1 OO OÙ d C2 RO 


de 
Ê © 


CC 
© © 1 @ OO CO 19 
19 © Ê mm © © © YO Ê © © @ © © 


+9 +9 © 
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1QO Ê PO pe be © Le © © © OO 1Ÿ OO + 


31538 |1318,5| 32 856,5 [13630,9 


= 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 23 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHKVAL N0 3. 
(Numéro matricule 37 999.) 


REPOS. 


EAU MATIÈRE |Porps| TEMPE- 


FR E 
ERA EAU BUE ge totale | PoIps che du | RATURE 
—— du con- à PE ll cheval es 
; es 7 cheva 
COCA "0 VRP RCE fours Jp APM mÉE p.100 | totale [aTh |, 
du du totale. pen fĂšces. des des du du 
midi HAGES ; matin 
matin. S soir. jour. feces, | fĂšces, *| matin, 


Degrés 


1210 | 10730 | 11010 | 22 950 n n 6370 | 21.82] 1590 | 460,5| 38 2 
2150 | 13550 | 14510 | 30210 " ” 11130 | 22.97] 2479 | 464,6| 38 1 
6390 | 14430 | 14460 | 35280 " " 12110 | 18.10] 2192 | 469,3| 38 0 
1 
1 


39230 | 10330 | 12640 | 26 200 " " 13 000 | 14.62] 1901 | 472,4| 38 
1350 | 14070 | 12210 | 27 650 " n 13 500 | 15.57| 2102 | 474,0| 38 
3060 | 10470 | 14470 | 28 000 " " 15030 | 15. 
1 870 7 600 | 44740 | 24210 " m 18130 | 13.65] 2475 | 475,0| 38 : 
6 520 9780 | 11650 | 27950 ” " 19 740 | 13.02] 2570 | 476,9] 37 
3740 | 11780 | 13160 | 28 680 n u 17580 | 14.92] 2623 | 473,4| 38 
11 850 | 10520 | 24500 " " 13750 | 15.07| 2072 | 472,6| 38 
14 880 14 880 
10 500 14560 
14260 | 11710 | 26 760 " " 12980 | 18.70] 2427 | 474,5] 58 
13 810 12 890 5 
8190 11 540 
10 490 13 920 
12 800 14 090 
6480 7 870 
8 800 8 650 
4 290 10 320 
8 690 10 840 
7760 15 050 
10 980 15 150 
9 860 13 950 
15 480 13 310 
11 800 11110 
13 760 13 680 
9130 10 980 
7 470 10 460 
7130 11560 
9 050 10 560 


[=] 
19 
Le] 
C2 
S 
Ɠ 
S 
1 
Le] 
- 
Ce] 
29 
1 
1 


© © "1 O OO C0 ED 
19 © € 


— 
e 


CS 
= 


= 
L2 


es 
o2 


24 853,2] 877,4 | 25 370,6 |12790,9 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 1. 


(Numéro matricule 34614.) 


Moyennes . 


ELA D 
du 


malin, 


14 149 
11 370 
14 760 
5 410 
5 870 
3 560 
14 320 


Ă  


midi, 


11970 
14 870 
8 970 
14 440 
S 010 
15 160 
3 140 


10 530 
15 350 
10 570 
15 840 
12 660 
12,210 
13 8:0 
6210 
15 600 
S 610 
15 510 
8 000 
14 690 
13 000 


Gr. 
11 350 
14 950 
11 750 
13 110 
9 060 
14 830 
11 430 
15 180 

7 620 
15 730 

5 890 
15 900 
14 680 
15 020 
14 520 
15 450 
12 920 
15 380 
13 230 
14 660 
10 650 
10 750 
15 090 

7 380 
16 150 
13 910 
15 750 
11 790 
15 310 

8 750 


I — 
Ă  6 h. 

du iolale. 
soir, 


28 320 
55 410 
24 380 
29 2S0 
28 950 


27 750 


31 858 


VOITURE. 


AE | EAU 
totale POIDS 
du con- 
four sommée 
par feces. 
rage. : 
Jour. 


Gr. Gr. Gr. 
u " 14410 
u " 13 560 
u " 11 720 
" 1 11460 
u u 11 390 
u u 13 180 
" u 10 490 
1 D 12 280 
u u 13 660 
ĂŻ ĂŻ 9 420 
u " 12110 
u " 10 660 
" " 14 290 
u u 12 770 
u D 14130 
D u 9 200 
u D 15 230 
“ u 11710 
u n 14070 
u Ü 15 830 
" 1" 13 290 
1 1 12 470 
u u 10 870 
u u 11730 
u u 11140 
u n 12 130 
u " 10 100 


MATIÈRE 


seche 


—— 
p. 100 
des 
fĂšces. 


(1 


totale 
des 
feces. 


3 091,3 


POIDS 


du 


cheval 
Ă  7 h, 


du 


malin. 


473,5 


TEMPÉ- 


RATURE 
du | 
cheval 
a7h. 
du 
matin. 


Degrés 


C2 
.* 
e 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 29 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N°0 2. 


REPOS, 
(Numéro mairicule 34 464.) 


EAU MATIÈRE |Porns| IEMPÉ- 
totale POIDS du RATURE 
du 


seche 
du con- eee" cheval 


A des ae 
sommée p 100 cheval 


Ă a7h. 


four- totale 


Ă  7 h, 
feces. des des du du 
malin, 


ne tolale. ga ES 
midi. g°- jour. 


matin. soir. feces. | feces. matin. 


Gr. Gr. Gr, Gr. Gr. ds Gil. | Degrés 


10940 | 25 650 12910 
11900 | 25 650 11 680 
9 460 | 17190 11 750 
12 450 | 21 870 9 860 
18 510 11 270 
10 560 
15 690 10 420 
90 710 14 120 
17 770 11110 
20 360 10 960 
12 820 
10 960 
9 310 
10 240 
11 720 
11 050 
8 660 
11 490 
10 280 
11 250 
11 420 
12 060 
10 950 
11 060 
10 590 
11790 | Âź:,: | 5154 | 489,8 
Ăš 9 489,5 
10960! 34 10 200 | 29. 2978 | 488,2 
12450! 85: 10 560 | 29.40! 3105 | 486,2 
7 920 40 11170 | 29.85] 5354 | 489,9 


Moyennes . ' " 15 093,3] 937,2 | 19 030,5 | 41 049 3 050,5| 489,9 


26 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 3. 
(Numéro matricule 37 999.) 


REPOS. 


MATIÈRE |Poips| TEMPE- 


EAU 


E A 

EAU BUE 3 totale POIDS sĂšche du RATURE 

oo du con- d ———— | cheval a 
5 es ; heval 

à à6 h. four- EOMMÉE p.100 | totale | à 7h. Fe 

du totale fùces. des des du du À 

midi : ape ; matin : 
soir feces. | fĂšces. | matin, 

RE NRLATCOIITE | CREME | RLES-COMNS CREER ORNE CCE 

Gr Gr Gr. Gr Gr. Gr. Kil. |Degrés 


7 640 | 13610 | 23 460 " 13140 | 19.07] 2506 | 471,7| 38 1 

8070 | 12930 | 25 120 " 15240 | 16.62] 2533 | 473,4| 38 1 

10 430 | 12540 | 28 920 " 16100 | 18.07] 2909 | 478,7| 38 0 

14470 | 11580 | 26 050 " 15 300 | 20.52] 3140 | 473,4] 38 1 

6730 | 15510 | 26140 n 15390 | 16.55| 9547 | 475,3| 38 2 

8590 | 9300 | 20 740 " 14920 | 18.65| 2783 | 474,4] 38 1 

7 450 | 13380 | 29 020 m 13 950 | 17.22| 2402 | 476,3| 38 1 

10 270 | 14620 | 25 550 " 13450 | 16.17] 2175 | 472,5] 38 1 

10 860 | 12390 | 26 630 " 17 320 | 15.75] 2728 | 475,5| 38 2 

13 250 | 11370 | 927 950 " 17510 | 16.10! 2819 | 474,9] 38 1 

10 080 | 15170 | 28 510 " 17 620 | 15.60| 9749 | 474,1| 38 1 

5 760 | 15610 | 925 380 " 18 680 | 15.60! 2914 | 475,6| 38 1 

11850 | 5320 | 22 480 " 19 690 | 15.15] 2983 | 475,2] 38 1 

15 180 9070 | 26370 " 17 140 | 15.25] 2614 | 475,5| 38 0 

11 990 | 12480 | 28250 " 18 380 | 14.00] 2573 | 477,7] 38 1 

16 4 880 | 14520 | 12930 | 32 330 " 20 510 | 14.12| 2S96 | 475,0| 38 1 

17 8 090 6 350 | 15040 | 29 460 " 18 060 | 14.87| 2686 | 479,5] 38 0 

18 3 960 8 000 | 15390 | 27 350 u 15 800 | 13.60] 24149 | 476,1 38 2 

19 2930 | 11 110 | 12310 | 26 550 " 14 690 | 15.87] 2958 | 474,4] 58 3 

20 u 12 100 | 15 000 | 27 1400 " 13 600 | 15.25] 2074 | 471,1| 38 3 

21 1510 | 11 660 | 43960 | 27 130 " 14 620 | 16.65] 2434 | 474,2] 38 2 
11 660 | 15440 | 29 650 " 17930 | 16.20] 2905 | 478,0| 38 


15010 | 15010 Q 
4280 | 3100 | 31890 " 
977) | 15360 | 35610 ” 
6490 | 14340 | 25 230 " 

12 000 | 15210 | 36 600 u 

10 580 | 12210 | 37 370 " 
9770 | 14300 | 33890 " 
7200 | 4040 | 49200 " 


13240 | 16.02] 2121 | 472,7| 38 
45 730 | 16.05] 2525 | 481,0] 37 
19950 | 14.35] 2863 | 481,0| 38 
14240 | 15.75] 2243 | 477,2] 38 
20 150 | 15.50! 3123 | 480,0| 38 
21190 | 14.65] 310% | 479,5] 38 
20 590 | 15.92] 3278 | 485,5| 38 
45490 | 15.55] 2409 | 481,9] 38 


© © © © = © J à © 


= 
es 


27 491,3] 882,8 | 28 374,1 | 166541 " |92648,1| 475,6| 38 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. A 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N° 1. 


voi E. 
(Numéro matricule 34 614.) EE 


EAU MATIÈRE POIDS TEMPÉ- 
totale POIDS sĂšche du RATURE 
du 


DATES. 


con- tee Ncheyal 
i four- sommée des (00 | toal à 7h. cheval 
du , É Le p. otale à 7h, 


par fĂšces. des des du du 


TÉBÉE matin, 


jour. fĂšces. | fĂšces. matin. 


Degrés 
15480 | 34400 10 800 : 38 
10 920 | 34650 13 180 0! 38 
15160 | 34320 7 170 : 38 
15 170 | 32940 12 420 : 38 
15940 | 33 690 13 240 | 22,50! 38 
13150 | 33170 12100 | 25.2: 38 
15 240 | 97 970 15 110 : 33 
12140 | 35 440 12 330 
15 090 | 34 960 16 420 
10160 | 33 190 12 030 
15 120 | 33 960 10 060 
10 920 | 37 140 13 9570 
15 730 | 37 800 13 500 
12540 | 39 980 12 780 
15 930 | 36 880 9 020 
12 750 | 42 750 12 450 
15 690 | 36530 8 270 
13350 | 39510 k 11 510 
15 690 | 38810 10 250 
11210 | 36 830 12 950 
15 670 | 35 600 " 9 600 
8 680 | 39220 11 690 
15 760 | 39 870 9 960 
13 870 | 43 360 12 180 
15 240 | 34 550 11 720 
11870 | 37710 16010 
15 120 | 38060 8 070 
15 690 | 14060 | 45 320 14 780 
15 640 | 15530 | 43 890 15 800 
15 250 9190 | 39 860 11 690 
16 060 | 15 820 | 40 860 S 170 


” | 37200,6| 1 405,4! 38 604,0 |11897,7 


28 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 2. 
J REPOS. 
(Numéro matricule 34464.) 


EAU MArTiĂšrEe | Porps| TEMPI- 
EAU BUE totale POIDS She du | RATURE 
ILE OPEN LU LORS con- Te que PRG TE a RE 


, des Ă  7h | cheval 
JuiĂŒlet Ă  7h. Ă  Ă  6 h. four- EOMMEE p.100 | totale [#42 |,%, 


du du toiale. Ăč par fĂšces. | des des du du 
1890. midi. : rage. jour : matin 3 
matin. soir, Jour. fùces. | feces. ‘| matin, 


Gr. Gr. Gr. Gr. . Fe. il. | Degrés 
14950 | 14930 : 38 © 
14010 | 14010 
14800 | 16 870 

6 970 6 970 
10220 | 18 390 
12 040 | 16 480 
14950 | 14950 

8 060 8 060 
13 190 | 26190 
14000 | 14090 

13 500 4 9 749 
15 570 -07| 2664 
17 890 »0 . 2 S86 
17 540 4 28: 2 980 
16 920 : 2e 2 870 
15 180 26, 2 703 
23 660 : 2 : 2 986 
15 050 23. 2 603 
3 040 
2 673 
2 979 
3 939 


3 013 


9 680 
10 620 
11 460 4 9 130 
9 500 GE ! 11 540 
11 650 D 3 10 810 
12 890 5 10 190 
12810 | 274 12 160 


= Op be © D © 


M | 16514,5| 1 002,0! 17 516,5 |10315,5 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 29 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 3. 


(Numéro matricule 37 999.) Here 
se DR La EAU MATIÈRE |Poips TENPÉ- 
EAU BUE totale POIDS seche du |RATURE 
— D RE Re UP ES NAME con- nmdeset. Meheval |: du 
4 des : cheval 
Juillet à7h. à à 6h. four- sommée p.100 | totale |à7 b. à7h 
du du totale. pa feces. | des des du EUR 
1890, matin. Hus soir. a jour. fĂšces. | fĂšces, | Malin. | main, 
es PS, PRE CE | ms a 
Gr. Gr. Gre Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Kil. | Degrés 
1 5 200 7 660 7 680 | 20 540 " “U 15880 | 15.35| 2131 | 474,9] 38 2 
2 8 400 6 850 8 850 | 24100 " " 11640 | 18.77] 2179 | 476,0) 38 2 
3 500 7 660 | 10160 | 23 120 " " 15 890 | 16.02] 2546 | 479,9! 38 0 
4 6 360 9 560 7750 | 25670 " M 17090 | 14.82] 25353 | 481,5| 38 1 
Ăč 5 010 6 570 50:0 | 16920 " u 16750 | 14.67] ,2457 | 479,5| 38 2 
ĂŽ 8310 | 4510 | 12760 | 25 580 " M 14450 | 15.05] 2175 | 477,0] 38 1 
7 11 430 | 15 430 9 220 | 36080 " " 18940 | 14.52] 2750 | 484,5| 38 2 
8 b 880 » 140 6530 | 17050 " " 14400 | 16.95] 2340 | 482,5] 38 1 
9 7 380 5 990 8180 | 21550 1 u 13 500 | 19.15] 2595 | 481,2| 58 2 
10 6 540 6 480 5 290 | 15310 " u 13080 | 924.37] 3188 | 482,0| 38 { 
11 8440 | 6750 8960 | 24150 " u 12110 | 93.45] 2840 | 482,9| 38 2 
12 7 140 7 700 7 120 | 21960 Q " 10 820 | 93.15! 2505 | 487,6| 38 1 
13 670 7 190 7720 | 15 580 1 " 13160 | 23.25| 50735 | 483,0] 38 1 
14 6110 | 10 210 8590 | 24910 " " 16 190 | 21.47| 3476 | 485,6| 58 0 
#5 9 740 8 160 5 870 | 23770 1 " 19 890 | 22.95| 2949 | 489,5| 38 2 
16 10 750 7 630 6 620 | 24380 " " 9450 | 24.05| 2268 | 489,8| 58 2 
17 1 690 8 520 5270 | 15480 1 Ù S 940 | 20.10| 1797 | 484,9] 58 2 
18 8 160 6 060 9 450 | 23 670 " 1 14 980 | 22.971 2594 | 487,0| 58 1 
19 7 270 6 400 9 420 | 25 090 1 LU 13 650 | 17.77| 2496 | 459,6] 37 9 
20 4 500 4720 | 10290 | 19510 1 " 16 760 | 16.97| 2844 | 487,4| 38 1 
21 8 120 8 570 5 800 | 22490 u “ 16520 | 17.95] 2965 | 486,6! 38 1 
99 9 850 | 3900 6350 | 20100 “ " 15 000 | 19.55! 2953 | 486,8| 38 0 
23 5 350 7 040 4750 | 17170 1 " 10 620 | 20.85| 2914 | 483,4] 38 1 
94 6 520 5 900 5 590 | 18610 " M 11520 | 20.80| 2296 | 482,6| 38 1 
95 4 380 7 360 7 660 | 19900 () " 9910 | 26.80| 2656 | 480,5! 38 1 
26 5 910 4910 4320 | 15140 "“ " 10 930 | 26.70| 2918 | 482,7| 38 1 
er 5 940 4910 4320 | 15140 “ " 111108] 25.52] 2835 | 482,7| 58 1 
28 6 600 5 920 6 320 | 15 540 " " 10540 | 24.80! 2614 | 485,4) 58 1 
99 5 580 7 040 4750 | 17170 ( u 10 680 | 24.52| 2619 485,5| 58 0 
20 6 310 8 960 6 93 29 200 2 " 11 000 | 26.57| 2923 | 454,0| 37 9 
31 6 450 8450 8420 | 23350 # u 10 340 | 28.37| 2933 | 484,2| 38 1 
Moyennes . w u u |o1o8t,6| 945,4 | 22027,0 [12097,4] “ |2655,9| 480,7] 58 1 


De PER EP EEE ER LORS 7 | PR ER RP EE COR ER Ren PE PEER LERTREES ER | 


30 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 1, 


REPOS. 
(Numéro matricule 34 614.) 

: EAU MATIÈRE TEMPÉ- 
2ent EAU BUE * MH. ÉrĂ©tate Seche BATURE 

Ni 0 du con- ARR AT Er du 
: cheval 

Août à Th. à à6h. foue A1) SCORE p. 100 | totale à7h 

ar 

1890. ES CE Co nn ef ET el Ve RATE qu 

matin. soir. 50 feces. | feces. matin, 


Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Gr. Degré 

1 15 600 | 15100 | 15 180 | 45 880 " " 10 150 38 5 

2 6760 | 6790 | 13470 | 27 020 " D 10 700 38 1 

3 2070 | 13460 | 12 380 | 27 910 u m 14 420 38 1 

4 780 | 11 500 | 10 650 | 23 230 " " 13 260 38 0 

5 960 | 12 280 7 910 | 21 150 " " 13 000 1 

6 "“ 10 830 | 14 890 | 25 720 " u 11 350 1 

7 870 9 180 | 14 420 | 24 470 u " 12 520 0 

8 " 7450 | 13020 | 20470 " " 11490 0 

9 u 11 470 | 11 360 | 22 830 n " 12 570 0 

10 " 6370 | 14640 | 21010 " " 10 600 0 
11 1 890 | 11710 7 340 | 20 940 " " 11 340 0 
12 " 11 650 | 11 070 | 22720 " " 12 330 1 
13 " 8460 | 10650 | 19110 » ' 12 560 0 
14 " 6570 | 14310 | 20 880 " u 11 860 1 
15 " 14 180 | 12 280 | 26 460 " " 11 820 0 
16 u 9 820 | 11 250 | 21 070 " u 11 800 1 
17 M 8 360 | 12 420 | 20 780 " u 11 060 0 
18 " 5 920 | 15 020 | 20 940 " " 11 920 0 
19 Q 9 840 9 540 | 19 380 " " 10 110 0 
20 n 9 350 | 12 380 | 21 730 " " 12 060 0 
21 " 11000 | 11 490 | 22 490 " " 10 630 S 0 
22 u 4300 | 15160 | 19 460 " u 10 620 0 
23 " 8950| 6380 | 15 330 " Ü 11 620 0 
24 " 6070 | 13840 | 19910 " u 10 980 1 
29 Q 8 220 9 090 | 17 310 1 " 12 080 0 
26 0 5200 | 12 620 | 17 820 " " 10 390 0 
97 u 8100 | g1360 | 9460 " " 11110 0 
28 " 7230 | 14010 | 21 240 " " 11 810 1 
29 " 5 920 | 12 140 | 18 060 " " 10 580 1 
:0 n 4 840 | 10 280 | 15 120 " " 10 750 Ă» 
51 " 6100 | 12810 | 18910 " " 10 820 0 


Moyennes . “ " " 29 196,8] 982,8 | 23 179,6 |11558,7 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 31 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N9 2. REPOS 
(Numéro matricule 34 464.) 


EAU MATIÈRE | Porps| TEMPÉ- 
EU EU totale | pois lache du | RATURE 
cheval du 


A —  — ——— con- j ——— <a Leo 
3 des cheva 
sommée totale | à7h. 


Ă 7h, : Ă  6h, four- Ă 7h, 
du du totale. par feces. des du du 


rage. : : 
matin. JODEs feces. | Matin. | maun. 


Gr. : . |Degrés 


19 


15 770 10 180 | 27.: 38 
13 490 12940 | 27.5: 38 
21 980 14 110 | 99. 5| 38 
15 720 10 810 | 29. 38 
14 470 10 320 | 29.2 38 
91 190 10 680 | 29. 38 
28 460 12 960 | 27. 2| 38 
17 930 12 230 | 28.6 33 
19 900 9 590 | 29. s| 38 
14 810 8560 | 32.25 5| 38 
13 430 10 170 | 29. 38 
2400 | 11610 27 900 11 760 | 28.0: | 38 
; . 10 290 10 790 | 98. :,2| 38 
5070 | 14620 | 90590 9 480 | 31.7: 295,6| 38 
2260 | 14120 | 16350 12 290 
4 890 | 14 19 240 10 030 
3550 | 95 35 10 310 
16 470 10 960 
10 070 22 210 13 400 
3510 4 670 11 290 
3890 | 3450 14520 | 91 860 14 520 
"| 10010 | 125 251 11 300 
2540 | 8: 12 940 11 000 
6 520 20 070 9 380 
3 690 15 890 10 240 
11 880 10 410 
; 10 090 
18 660 11 190 
14 330 10 560 
15 930 10 560 
13 120 10 790 


DAS Se Oum OL nm Oo. Suis nr O ie 


en 


= EEE D TN EC DO — OT TS 


© 
ts 


Moyennes . , 16466,5| 982,8 | 17 449,3 |10855,8 


32 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 3. 


(Numéro matricule 37 999.) 


VOITURE. 


DATES. 

AoĂčt a7h. 

1800 M 
f malin. 

Gr. 
1 S 740 
2 8 490 
3 9 220 
4 9 450 
5 10 700 
6 4 590 
7 12 670 
8 7 230 
9 7 500 
10 14 420 
11 9 840 
12 5 390 
13 12 780 
14 4 270 
15 14 770 
16 2 420 
17 15 920 
18 1 750 
19 15 260 
20 7 610 
21 11 110 
22 6 320 
23 12 120 
24 43210 
25 10 140 
26 5 920 
27 15 590 
28 7 270 
| 99 15 440 
30 10 520 
31 15 030 

Moyennes . " 


EAU 


6 630 
10 600 
10 540 


= 
Æudi 


7 490 
12 260 
7 200 
12 700 
10 570 
14 760 
9 000 
14 040 
2 940 
15 390 
2 780 
15 550 
2 640 
15 380 
7 360 
14 810 
9 030 
15 490 
2 760 
15 110 
10 850 
14 900 
5 050 
13 110 
11 530 
12 110 
040 


BUE 


Ă 6h, 
du 
soir. 


9 080 
8 280, 
8 580 
3 440 
11 200 
14 820 
11 920 
14 670 
10 490 
15 940 
11 420 
14 980 
15 240 
15 290 
15 120 
15 690 
13 009 
15 810 
10 860 
15 350 
14 150 
15 930 
14 730 
15 030 
14 150 
15 700 
10 650 
15 420 
5 960 
15 620 
14 080 


totale, 


17 690 
29 390 
31 670 
31 790 
34 600 
28 560 
42 120 
30 260 
34 410 
30 960 
34 950 
32 670 
33 660 
31 560 
32 970 
33 480 
37 770 
34 290 
37 740 
29 610 
34 480 
35 140 
36 520 
31 290 
35 809 
32 930 
38 250 
34 150 


32 544,21 1 145,9] 33 688,1 


EAU 


EAU 
totale 


du 


POIDS 


con- 
des 


four- sommée 


par fĂšces. 


rage. L 
8 jour. 


“ 12 630 
" 8 880 
" 11550 
" 7 780 
" 9 580 
" 7 140 
" 8 330 
" 10 280 
n 9 300 
" 8 830 
" 8 860 
" 11530 
“ 8 840 
" 10 790 
" 9 320 
" 10 910 
u 8 390 
“ 8 590 
" 7 630 
Ù 9 780 
1 10 230 
" 7 960 
" 9 750 
" 9 850 
" 9 320 
" 10 850 
“ 9 440 
u 9 830 
" 10 880 
" 8 130 
" 9 730 


9 506,1 


MATIÈRE 


seche 


— — 


p.100 | totale 
des des 
feces, | feces. 

Gr. 
24.90! 3 145 
27.55| 2446 
22.40! 9 542 
23.70| 1 844 
20.47| 1961 
24.90] 1728 
26.02| 2167 
25.40! 9611 
93.85| 2218 
28.37| 9 505 
26.82| 2376 
26.47| 3 052 
26.95] 2 382 
25.47| 2748 
24.87| 2518 
25.65] 2 798 
23.90, 2 005 
25.00! 2148 
24.22| 1 848 
26.47| 2589 
22.62| 2314 
26.37| 2099 
93.37| 2279 
28.70| 2827 
94.49! 2 276 
25.95| 2810 
22.60| 2135 
25.27| 9 484 
24.27| 2641 
27.27|" 2217 
23,97| 2332 


Porps| TÉMPÉ- 


du 
cheval 
a7h. 

du 


malin, 


RATURE 
du 
cheval 
Ă  7 b. 
du 
matin. 


Degrés 


© C2 
co A 
LO € me pe pe me me RO éé 19 


2 
co 
LS = Ê © 


Ɠ € 
 Ɠ 
D 


38 


19 € pe RO > be Pe be be 


co 
oo - 
S = — 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. | 33 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N9 1. 


É REPOS. 
(Numéro matricule 34 614.) 


EAU MATIÈRE |Porns| TEMPÉ- 
totale Ă©che du RATCRE 
con- du 


o cheval 
Septembre | Ă  7 h. a6h, | SA |" some p.100 | totale [a7h. | 


des des du du 


feces. | feces. | Matin. 


a — | CHEVAl 


ee 
Degrés 
38 


14 180 12 400 


1 

0 

0 

0 

0 

1 

1 

2 810 10 720 0 

11 430 11 100 0 

11 620 ; 11 130 1 

15 370 ; 10 480 1 

15 300 10 680 1 

13 940 Ăš 10 970 . 468,5 0 

11 860 | 15 750 8 7;0 ; 333 | 467,4 0 

13070 | 18790 10 230 .: 467,4 0 

14640 | 25 210 12 180 L 25 471,0 0 

14 650 | 30 560 13 320 | 24.87 468,9 1 

7000! 17350 10 410 | 26. 2766 | 467,8 0 

8910 | 17170 11 230 | 26. 2 469,5 1 

10480 | 6550 | 17030 9 200 | 25. 1 | 468,3 0 
7 840 | 10980 | 18 820 12 550 Ă« 2 467,9 1 
8080 | 9700! 17780 11 720 © 469,9 0 
6340 | 11240 | 17 580 11150 | 25.62 469,2 0 
6050! 7420 | 13470 9750 5 2834 | 471,5 1 
9380 | 7180 | 16560 10 300 Ë 469,7 1 
10 220 | 14150 | 24370 11960 : LE 469,4 0 
9910 | 10 950 | 23 650 10 720 4 466,5 1 
6990 | 8580| 15570 9 260 . 468,3 1 
9440 | 8840| 41S 280 10 150 : 469,6 1 
6910 | 12090 | 19000 11110 . 22 | 470,5 1 


Moyennes . u "| 18 848,8] 4 010,6! 19 858,9 |11071,3 3000,9| 467,8| 38 05 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 3 


34 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N° 2, 


(Numéro matricule 34 464.) 


Septembre 


1890. 


Moyennes . 


REPOS. 


EAU BUE 


EAU 


du 


© 


Ă 7h. 


matin. 


Ă  


midi, 


Ă  6 h. 
du 
soir. 


four- 


totale, rage. 


11 510 
9 970 
8 030 

" 
4 000 
3 370 
3 480 
9 000 
4 300 

10 550 
5 290 

10 250 
2 320 


" 


Gr. 


12 860 
10 040 
6 140 
8 850 
14 990 
13 170 
13 680 
" 
9 260 
13 710 
14440 
13 830 
11 500 
5 750 
11 660 
13 110 
13 020 
4 390 
8 750 
7 440 
15 460 
12 270 
4930 
13 040 
6710 
11380 
9 360 
5 590 
10 590 
12 090 


" 


Gr. Gr. 


15 630 
14 460 
6 900 
20 240 
14 990 
15 980 
15 360 
13 270 
18 590 
17 820 
14 440 
13 830 
16310 
13 730 
21 150 
15 110 
13 020 
15 900 
18 720 
15 470 
13 460 
1627 
8 300 
16 520 
15 710 
15 680 
19 910 
11140 
20 810 
14 410 


993,6 


15 388,7] 993,6 


EAU 


totale POIDS 


con- Ă  
sommée Se 


par 
jour. 


9 680 
10 880 
8 920 
9 460 
10 910 
10 510 
11220 
10010 
9 460 
12 300 
7 670 
8 790 
9 580 
10 480 
11 060 
9 990 
9 250 
10 160 
10 730 
9 360 
11 020 
9510 
10 440 
9 520 
10 960 
10 160 
8 230 
10 520 
11560 
7 900 


16 382,3 |10016,5 


MATIÈRE 


sĂšche 


ne 


p.100 
des 
feces. 


totale 
des 
feces. 


TEMPÉ- 
RATURE 
du 
cheval 
Ă 7h. 
du 
malin. 


Degrés 
37 9 
37 
38 
38 
38 
38 
38 
37 
37 


9 
0 
0 
1 
0 
0 
9 
9 
9 
0 
9 
0 
0 
1 
1 
9 
1 
Q 
1 
0 
9 
1 
9 
0 
9 
9 
9 
0 
1 


98 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


30 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 3. 


(Numéro matricule /37 999.) 


DATES. 


Septembre 


1890. 


Moyennes . 


apon. 


du 


matin. 


15 860 
15 550 
7 830 
15 480 
9 770 
8 620 
13 690 
15 140 
9 750 
15 660 
13 400 
15 420 
12 650 


30 770 
33 570 
36 010 
33 680 
26 270 
38 950 
31 510 
32 710 
32 620 
26 660 
32 980 
35 620 
37 360 
26 370 
34 440 
39 150 
31 560 
36 340 
36 170 
30 950 
36 890 
34 520 
30 200 
38 190 
32 420 
36 280 
31 230 
40 680 
32 810 
39 160 


54 202,3 


VOITURE. 


EAU 


totale POIDS 


du con- 


, des 
sommée 


10 320 
10 140 
8 500 
10 530 
11 350 
5 950 
8 950 
6 930 
10 710 
6 800 
9 590 
8 280 
11 530 
7 980 
10 000 
9 190 
9 740 
8 630 
9 510 


9257 


MATIÈRE 
sĂšche 


p.100 
des 


totale 
des 


fĂšces. | fĂšces. 


POIDS 
du 


cheval 

Ă 7h, 
du 

matin. 


TEMPÉ- 
RATURE 
du 
cheval 
Ă 7h., 
du 
matin, 


Degrés 
38 1 
38 1 
38 1 
38 1 
38 2 
38 1 
38 3 
37 9 
38 1 

1 

2 


38 12 


36 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL.DE TRAIT. 


CHEVAL N° 1. 
(Numéro matricule 34 614.) 


REPOS. 


EAU MaTiùre | Porps| TEMPÉ- 
totale POIDS Peche du RATURE 
con- té havah [RL 
sommée Fe p.100 | uotale | à 7h. sen 
par feces. des des du du t 
1890. jour. feces. | fĂšces. | Matin. | patin. 


Octobre 


Gr. Kil. |Degrés 


5210 | 9820 | 15030 11 480 | 98.! 471,5| 38 
#710| 7270 | 12980 10 550 | 27.6: 471,4| 38 
6260 | 10040 | 46 300 10 520 | 29. 470,5| 38 
6200 | 6940 | 13140 9 650 | 27. 470,9| 37 
39%0-| 11 900 | 15 850 9 860 | 25. 467,1| 38 
8440 |‘10 450 | 18 590 11 760 | 25. 168,9] 38 
7470 | 12280 | 19 750 11 620 | 25. 469,6| 38 
9440 | 8340 | 17 780 19 530 | 96.: 470,9| 38 
14610 | 10110 | 94 720 11 840 | 94. 468,7 
11490 | 5620 | 17410 13910 | 27.15 475,9 
8 790 | 13340 | 92130 13 950 | 27.9: 476,2 
10 250 | 10770 | 21 020 11 520 | 98. 477,6 
6 600 | 11220 | 17 820 10 610 | 29.32 478,8 
7490 | 7580| 15070 12 690 | 29.95 476,8 
10440 | 8160 | 18600 19 760 | 27.: 476,4 
9930 | 8520 | 18450 19 000 | 26. 476,1 
11 040 | 10 850 | 21 890 14530 | 28. 478,4 
8010 | 9280 | 17:290 12250 | 26. 480,4 
2950 | 8080 | 12330 11 170 | 27. 471,0 
11430 | 7950 | 19400 9 350 | 28.5 479,5 
6430 | 9440 | 15870 11 410 | 99. 473,1 
8790 | S370| 17160 19 870 | 30.72 473,3 
1860 | 8070| 12930 | Ă  10 900 | 31. 470,7 
8870 | 7610 | 16480 11 280 | 26.67 469,1 
6540 | 7020| 13560 10 820 | 20. 469,4 
9760 | 7870 | 17630 10 960 | 28. 468,9 
6390 | 9380 | 15770 19 170 | 30.52 473,5 
2680 | 7180| 9860 10 770 | 33. 474,4 
6090 | 8520 | 14610 11 400 | 29.5 468,3 
11 460 | 11450 | 22510 13510 | 29. 471,0 
6680 | 11140 | 17820 10 960 | 30.9: 478,3 


© © 1 OO CO À ©) © 


ad 
[=] 


he ble ee D ele te le te 
© OO NI QG OO # CO 19 be 


Moyennes . u ” |17072,6| 1078 | 18450,6 [11635,5 473,1 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 37 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 2, VOITURE 
(Numéro matricule 34 464.) x 


—— 
EAU MarTiĂšree |porps| TSMPE- 


totale POIDS Seche du RATURE 
d cheval + 1 
; es $ cheva 
Octobre | Ă 7 b. PPREe p.100 | totale | * fe Ă 7h. 
du ; A AE des du du 


fĂšces, | fĂšces. | Matin. 


con- a 


1890. malin. 


14 630 | 17420 

2 500 | 17330 

13 550 | 34 640 

8240 | 21910 

13570 | 21 990 

10960 | 16770 

14150 | 28710 

8 440 | 27 280 
13 540 | 15 060 | ° 30 990 9 520 
12200 | 7050 | 24020 9 020 
11 800 | 14720 | 26 520 9 660 
3 620 | 11820 | 25150 9 700 
13 500 | 14550 | 31340 11 660 
1 13710 | 17 440 9 010 
12 970 | 13030 | 36 650 10 520 
8970 | 8700 | 24220 9 360 
13510 | 13980 | 27490 12 470 
9 900 | 9780 | 30 980 10 920 
10 170 | 15060 | 25 230 7 860 
9360 | 11190 | 33 550 11 540 
10 700 | 14870 | 25 570 10 160 
10760 | 6430 | 29340 11 150 
15 360 | 14690 | 30 050 8 320 
10290 | 10850 | 28 410 11 390 
10 240 | 14980 | 26 900 10 460 
9750 | 10220 | 32 270 12 710 
11 800 | 14590 | 26 390 8 180 
8720 | S750 | 25 560 9 440 
12 660 | 13830 | 26490" 10 480 
8480 | 9010! 27790 12 180 
10290 | 15140 | 25430 9 190 


" n | 26575,1| 1364,0| 27 939,1 | 10 208 


38 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 3, 


REPOS. 
(Numéro matricule 37 999.) As 


EAU MarrĂšre |pPoips| TEMPi- 
RADÉBUR totale | PoIps roche du | RATURE 


PMR AIRERL > PRE du con- ne heaven 
À ñ des 4 cheval 
Octobre ah: Ă  6h, four- PDU p.100 | totale | Ă 7h. a7h 


du du totale, par feces. des des du Fe 


3 rage. : ; 
matin. Jour feces. | fĂšces, | Maun. 


Gr. Gr. x IT. Gr. 

11710 | 25 540 9 110 

4330 | 14090 6 250 

13 600 | 20 920 8 580 

11090 | 18 920 8 840 

12020 | 15410 9 840 

9180 | 17 560 9 960 

11 470 | 20450 10 610 

6670 | 15550 11 290 

13280 | 17 530 8 160 

9 300 | 16630 9 320 

6570 | 16040 10 800 

7570 | 16710’ 11 210 

5990 | 16 330 10 250 

13 620 2 830 | 16450 9 100 

12 030 6180 | 18210 10 210 

10 920 9 900 | 20 820 12 190 

8 620 | 10 860 | 19 480 13 580 

8150 | 12610 | 20 760 13 850 

4 920 | 11 580 | 16 500 11 050 

8 360 2 700 | 11 060 10 500 

10 350 570 | 17 920 10 320 

9 410 90 | 18 160 12 150 

8 340 | 11920 | 20 260 9 12 780 

3160 | 13720 | 16 880 10 730 

3890 | 9160 | 13 050 14 070 

9 590 8330 | 17 920 11 940 

7 090 5 940 | 13 030 11 250 
7 410 7080 | 16370 12 640 | 21. GE 470 ,0 
8 780 6980 | 15 760 . 12 160 | 29, 26 468,4 
9350| 7340 | 16 690 13 980 | 22.45! 31: 469,5 
31 12 870 8 250 | 91 120 14 250 | 22.4 468,6 


S OO SL mm OO nm © = © = © = D 7 Le 


Moyennes . u ” |17499,5| 1 006,9! 18 429,4 |10994,2 464,6 


— 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 39 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 1. 
(Numéro matricule 34 464.) 


REPOS. 


EAU MATIÈRE | Porps| TEMPE- 


EAU BURK totale POIDS HA du RATURE 


con- ane | cheval du 
cheval 


Novembre Ă  6 h. : Ă 7h. 
du totale, te feces. des des nu du 
NPaD 4 Jour, feces, | fĂšces. | MAUR. patin, 


: des . 7 
sommée p.100 | totale àTh. 


par 


Degrés 


7 530 | 11 190 9 10 270 | 50. ; 5| 37 9 
13180 | 8080 | 212 11 110 
8850 | 9850 | 18 9 520 
9440 | 5900! 153 10 520 
9200 | 3760 | 12 10 150 
8080 | 9420 11 850 
129270 | 9190 | 21460 11 270 
9950 | 5450 | 15400 11 970 
6 300 | 11680 | 17980 13 250 
19 440 | 11530 | 23 970 15 170 
4310 | 9590 | 15900 12 150 
6790 | 7930 | 14720 13 710 
6970 | 9300 | 16270 13 520 
11650 | 7760 | 19410 11 900 
7650 | 8970 | 16620 13 730 
9 010 | 13570 | 22 580 11 180 
12 500 22 930 10 950 
12 460 10 240 
10 070 Ăż 4: 10 890 
11 550 9 910 
11 780 2, 9 920 
10 190 3 10 770 
5 890 | 12 5 12 450 
12 200 É 12 150 
10 140 
8 370 
9 950 
8 930 
11 910 9 910 
9 360 | 15 880 10 970 


D À NI QD NJ A © 


1 


Moyemes , mn. |17760,7| 1153,2| 18 915,9 111218,7 


L 


40 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N° 2. 


(Numéro matricule 34 464.) VORRE 
PASS EAU BUE Re bre POIDS < an 7 ane sl 
tes du con- = PRO TE RAM cheva Rent 
Ăš ; des = : cheval 
Novembre Là 7 à a6h. four- | sommée p.100 | totale [à7h. |, 
du du totale. par fĂšces, des des du du 
1890. PE NUE soir. pe jour. feces. | fĂšces. | Matin. | marin 
Gr Gr Gr Gr Gr. Gr Gr Gr Kil. |Degrés 
1 11 890 | 16 260 9 740 | 31 890 | 1552,9 " 11730 | 29,45] 3454 | 474,5| 37 9 
2 1 13 550 | 12 750 | 96 280 " " 7960 | 29.32] 9334 | 475,9 1 
3 10 090 9 100 9 970 | 29 160 " " 114910 | 30.00! 3573 | 477,1 " 
4 1 13 090 | 14400 | 27 490 " " 11410 | 27.77| 3169 | 476,6] 38 0 
5 11340 | 10 150 9 320 | 30 810 n " 10580! 28.57| 3023 | 472,6| 38 0 
6 5 569 | 12110 | 13360 | 31 030 1 “ 11570 | 29.05| 3361 | 479,6| 38 0 
1( 15 350 | 10 320 | 10 150 | 33 800 Ćž # 12 030 | 28.47| 34925 | 474,1| 38 0 
8 5 460 | 11990 | 15550 | 33 000 u # 11160 | 28.57| 3188 | 478,5| 38 0 
9 12 680 7860 | 12470 | 23010 1 “ 11100 | 29.62| 3 288 278,6 37 9 
10 1 13 570 | 13 480 | 27050 1 # 9360 | 30.67| 2871 | 471,8] 37 9 
11 3 680 7 460 | 12 210 | 22 750 u “ 11 940 | 25.17| 3005 | 472,4| 58 0 
12 3 890 | 12 770 | 14 820 | 31 480 " # 11590 | 27.90] 3934 | 476,5] 38 0 
13 13 570 9 940 | 11850 | 35 360 “ 1 13 670 | 23.95] 39274 | 473,1| 37 9 
14 n 14 670 | 13550 | 28 220 “ F 9980 | 24.70! 2465 | 472,0| 37 9 
15 14 510 2 120 | 14380 | 31010 u “ 11 100 | 25.97| 92883 | 474,2| 37 9 
16 10 890 | 14 710 | 15210 | 40 810 " " 10 100 | 25.97| 2583 | 474,3] 37 8 
17 12 550 | 11510 | 12700 | 36 760 # u 12900 | 24.40] 3148 | 469,6] 37 9 
°l,48 2 990 | 14420 | 15 040 | 32 450 " “ 14 110 | 28.12] 3124 | 472,0] 37 8 
19 10 910 | 10 190 | 12880 | 33 980 u “ 11260 | 26.20| 2950 | 465,0| 37 9 
20 > 860 | 13990 | 14120 | 33970 " " 11350 | 26.17] 297 473,9] 38 0 
21 11 890 | 10180 | 11050 | 33 120 " " 12330 | 25.67! 3165 | 465,4] 37 9 
22 690 | 14 890 | 14490 | 30 070 Q “ 10340 | 27.15| 2807 | 465,8| 37 9 
23 15 980 | 11 300 | 11210 | 36490 " " 10610 | 26.92! 2556 | 465,5| 37 9 
24 4210 | 15 410 | 15210 | 34 830 1 " 10 670 | 27.80| 2966 | 468,0] 37 9 
25 11 590 7430 | 10 140 | 29 460 1 1 10 650 | 26.47| 2819 | 467,0| 37 8 
26 4540 | 13020 | 15270 | 32 830 Ćž " 12 900 | 27.32] 3524 | 468,5| 37 9 
27 13 080 7210 | 10190 | 30 480 1 u 11140 | 29.50] 3286 | 467,3| 37 8 
28 3 280 9210 | 14600 | 27 090 " “ 11430 | 25.37] 3248 | 469,6] 37 8 
29 10 780 9 980 9170 | 29 930 " " 11650 | 29.47] 3433 | 464,6| 37 8 
30 1 14 400 | 14370 | 28 770 " # 10290 | 28.22] 2904 | 464,7| 37 9 
Moyennes . " u n 31 446 | 1552,9| 32 998,9 | 11 194 mn | 3077,5| 471,5] 37 9 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 41 


ÉTUDES EXPÉRIMENTALES SUR L'ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL N0 8. 
(Numéro matricule 37 999.) 


REPOS, 


EAU MATIÈRE POIDs| TEMPE- 


EAU BUE e totale | Porps sĂšche du | RATURE 
"TE —_— 2 con- re —, cheval du 


; des ne cheval 
Novembre & a à 6 h. sommée P. 100 totale à7Th. à Th. 


% du totale. pa fĂšces. | des des du du 
1890: in. © ; jour. feces. | fÚces. | matin. |ouin, 


Degrés 
38,0 


13 360 
15 230 
12 940 
13 280 14510 
7150 12 390 
4 690 14 080 
5 920 14 000 
7 520 13 080 
7 650 ; 9 210 
7 220 12 320 
8 070 19 100 
7 270 10 080 
7 090 2 15 210 
7070 19 160 
6260 90 : 13 500 
7 860 
8 380 
9 280 
6 450 
6 880 
.7 530 
4 330 
5 440 
9 430 
3 880 17: 10 930 
6 720 12 640 
8 050 11 680 


1° 
ra 


19 
19 


] 
= 


O2 


1O += 19 
to CO LO 
CAPES OS Se SN SM et ot otS) Se © Croce. otre  cieus 


o 


Moyennes . " 26 | 1153,2| 19 179,9 |12741,7 


42 ANNALES DE LA SGIENCE AGRONOMIQUE. 


RATIONS CONSOMMÉES. 


On a vu précédemment que les chevaux ne consommaient pas 
toujours entiÚrement les rations qui avaient été fixées. On trouvera 
dans le tableau suivant, en mĂȘme temps que la teneur en eau des 
fourrages, les quantités réellement ingérées. 


TAUX 
p. 100 d’eau 
a À À — — — 
de la de la 
féverole.| paille. 
CERTES Ze a nl SNS CRE 
Kilogr. | Kilogr. | Kilogr. | Kilogr. | Kilogr. 
DĂ©cembre 1839. . . . . Ă  .28 4,000 | 5,000 | 4,000 | 6,000! | 4,000! 
Janvier 1890 . 74 8.35 | 5,0 4,060 | 6,000 | 4,000 | 4,056 4,064 
FĂ©vrier 1890 . 68 .98 4,000 | 4,500 | 4,000 | 5,000 
Mars 1890 : .80 3,290 | 4,000 | 4,000 | 5,000 
Avril 1890 2 .04 | 4 4,000 | 5,000 | 4,000 | 7,000 
Mai 1890 2 2 4,000 ,000 | 3,710 | 3,742 
Juin 1390 2. .12:) 8 2,683 ,000 | 4,000 | 4,000 
Juillet 1890 À 2.30 | 7 8,226 ,000 | 4,000 | 4,000 
Août 1890 : 2.00 4,000 | 4,000 | 4,000 | 7,129 
Septembre 1890 . . . . : .05 4,000 ,000 | 4,000 | 7,467 
Octobre 1890 4 202 4,000 ,164 | 3,065 4 4,000 
Novembre 1890. . . . .| 43. 5.07 4,000 | 8,000 | 3,000 | 4,000 


CHEVAL N° 1. | CHEVAL x0 2. CHEVAL N° 3. 


FĂ©verole| Paille, [FĂ©verole| Paille, |FĂ©verole.| Paille. 


4. Le cheval nv 3 a laissĂ© en janvier 5k:,920 de restes contenant 19.63 p. 100 d’eau. Nous avons tenu 
compte de ces restes dans le calcul des coeflivients de digestibilité. 


De ces données, il est facile de tirer les quantités de matiÚre sÚche 
de la féverole et de la paille consommées chaque jour par les chevaux. 
Le tableau suivant donne ces quantités. 


CHEVAL N° 1. CITEVAL N° 2. CHEVAL N° 3. 
Re RE PER “ Æ 
FĂ©verole.| Paille. [FĂ©verole,| Paille, |FĂ©verole.| Paille. 


DĂ©cembre 1889. . . . 39 3348,8 | 4435,5 | 3 348,8 | 5 322,6 
Janvier 1890 44 D | 3266,0 | 5 295,6 3 579,8 
FĂ©vrier 1890 5 299,2 | 3 280,8 | 3 974,4 28 4 416,0 
Mars 1590 6 111,0 | 2704,4 | 3 492,0 | 3: 4 365,0 
Avril 1890 3 507,6 | 3398,4 | 4384,5 | 3 398 6 138,3 
TA 1900 ER MER EE CEE 4 399,5 | 3484,8 | 6 159,3 | 3 2: 3 292,6 
Juin 1890 21 2651,31 3507,6 | 3 55: 3 507,6 
Juillet 1590 TRAIT QUO EE 2 827,3 | 3 492,4! 3 505 3 492,4 
Août 1890 3497,9 | 3590,0 | 3 497,2 6 232,9 
Septembre 1590 3 604 3518,0 | 3 438,4! 3518,0 | 6 512,0 
Ogtobre 1890!L. % ATEN MER 5 5 443,9 | 6956,6 | 2 638,4 | 3478,8 
Novembre 1890 3 249, 3397,2 | 6 899,92] 2 547,9 | 3 449,6 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 43 


COMPOSITION CENTÉSIMALE DE LA MATIÈRE SÈCHE DES FÉVEROLES 
ET DES PAILLES CONSOMMÉES. 


Le tableau suivant donne la composition centésimale de la matiÚre 
sÚche des féveroles et des pailles consommées : 


CELLULOSE 


saccha- 
rifiable. 


CENDRES, 
GRAISSE. 
INDÉTER- 


brute, 


PROTÉINE. 


FĂ©verole. 


DĂ©cembre 1889 
Janvier 1590 
FĂ©vrier 1890 
Mars 1890 
Avril 1890 

Mai 1890 

Juin 1890 
Juillet 1890 
Août 1890 
Septembre 1890 
Octobre 1890 


S 


ES à © 
RES 


or # 


OO OT QT D OO 1 nJ CE Or CE 1 
Fe RC Co 

en De be bi be pe be be De be De je 

Ë t 


NI © Or À OF QE OX 


CS 


CS 


DĂ©cembre 1889 
Janvier 1890 
FĂ©vrier 1890 
Mars 1890 

Avril 1890 

Mai 1890 

Juin 1890 

| Juillet 1890 
PACAEAIROQN EN RER MERS R NUE 
| Septembre 1890. 
| Octobre 1890 

| Novembre 1890 


= Co 
= © 


Fe & CC 


co 


CO + + C0 


Qt LEO M O0 @ © QT © OÙ mn 1 1 

PNCAAE RS . DS Ă  ss 
19 pe 10 = ICO re + 

19 +9 RO LO +9 RO 19 FO HO FD +9 19 

ie). Le tes Ve EEE le dev 


LO © 19 


rs 


| 
1 
l 


{. L'amidon a été dosé par le procédé au chlorure de zine, imaginé par A, Leclerc. (V. Annales de la 
Science agronomique, t. 1, 1859.) Cette méthode, applicable sans inconvénients aux grains, donne, dans 
les fourrages fibreux, des chiffres trop forts par suite de l’attaque, par le chlorure de zinc, des parties les 
plus solubles de la cellulose, Ce fait, qui explique les chiffres élevés d'amidon dosés dans la paille et dans 
les feces, a eu pour conséquence que les nombres obtenus pour les coellicients de digestibilité de l'amidon 
sont un peu trop faibles. 


COMPOSITION CENTÉSIMALE DE LA MATIÈRE SÈCHE DES FÈCES. 


Chaque jour, une partie des fÚces émises était séchée à 108 degrés 
dans le vide ; on prélevait, sur la matiÚre sÚche ainsi obtenue, une 


44 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


fraction constante de la matiÚre sÚche totale rendue, et ces prélÚve- 
ments servaient Ă  composer les Ă©chantillons moyens mensuels dont 
la composition suit : 


\ 


Ă  CELLULOSE À S Ă« Ă« : 
pa re AIT ES a & a A 
A ĂȘ le] a 3 2% 
3 brute. er © Ë = Ă  3 
e) rifiable, < (Si cm H 
Cheval n° 4. 
DĂ©cembre 1889-71... 12.00 | 27.56 13.90 | 4.00 1 4.80 | 11.51 26.23 
Janvier ASS0PM EC CE 40.95 | 28.66 | 11.00 | 3.53 " 5.19 13.29 | 27.38 
RĂ©vrier 1890 MAIRE 11.86 | 26.97 | 13.26 | 4.82 1 5.19 14.34 | 24.26 
MaTemeg0 EME C A ERA 11.24 | 24.81 12.98 | 7.00 " 4.98 | 15.44 | 23.55 
Avr Bon Ge LUE CARRE 10.28 | 26.38 | 15.63 | 5.67 | » | 5.40 | 11.90 | 24.74 
MANS 90 MEET CP UE 8.85 97,69 14.34 3.33 u 4.43 12.70 | 28.66 
JUL SION EMEA ERNEST 8.73 | 26.74 |° 11.95 | 4.36 " 4.42 16.56 | 27.24 
Jutllet lS90 427 ANT E 10.30 | 28.38 11.86 | 3.85 " 4.70 15.95 | 24.96 
NOÉ 1000 ane ele bee hill OA) 29.02 13 97 4.92 1 4.65 12.24 | 94.78 
Septembre 1590. . 1. . . - 9.78 95.69 12.50 6 9.54 Q 4.60 12.47 | 32.49 
Ovrobre 18908 1: rPoumr ere 9.95 27.36 1727 4.84 ” 4.95 42.40: | 29:7 
Novembre 1890 .:. . . -/. . 9.38 27.83 15.86 4.20 1 5.18 13.07 24.48 
Cheval n° 2. 
Décembre 1889 . . . . . .. 12.65 | 30.04 | 12.53 | 5.46 | » | 4.04 | 9.05 | 24.43 
Janvier 1890 . . . . . . . . 11,60 { 30.00 À 11.78 | 4.00 " 5.15 | 10.67 | 6.80 
FĂ©vrier 1890..." + + + | 10.31 | 928.72 | 14.90 | 4.51 " 5.320/44-4701025 07 
Mars 1890 2m RE ERe 10.83 | 31.94 14.17 6.31 " 4.63 8.94 | 23.18 
AVANAMSTONEE PNR 11.05 | 29.57 14.32 | 4.40 1 5.08 | 10.62 | 24.96 
Mai 8902 IA MT te 9.923 29.62 15.02 3.61 " 4.67 14.09 23.76 
JUAN SOON died moe ol. 7.76 31.28 14.40 3.83 " 4.25 9.20 | 29.28 
Jet SD ALMA ER ER 8.50 | 32.09 13.92 4.30 Q 4.36 8.82 28.01 
AO SIO. Me msi arte e 9,71 31.40 17.85 3.73 “ 4.32 10.30 | 22.69 
Septembre 1890. . . . . . . 9.24 || 28.08 | 11.20 | 2.32 " 4.12 9.95 | 35.09 
OCt0DrE MSIE RS CC 9.96 29.05 16.72 3.41 " 5.07 13.33 | 22.46 
Novembre 1890 .. . . . . . . 9.89 | 28.55 | 15.29 | 3.42 " 5.80 | 14.00 | 23.55 
Cheval n° 3. 
DĂ©cembre 1889 . . . . . . .| 15.20 | 29.46 | 11.44 | 5.87 " 5.08 10.30 | 22.65 
Janvier 1890 . .. . ...:..: 111916109724 40.31 2.68 " 4.53 9.37 | 30.71 
FĂ©vrier 1890,. . . . . . . . 13.87 | 26.92 | 16.37 | 5.44 u 4.76 | 11.48 | 21.16 
Mars 1890-P-° 5m are 10.70 | 29.94 12.78 | 4.55 ” 4.09 9.86 | 28.08 
AVTIUUTBSOOL MENU ENNT, AN. 13.76 26.00 15.25 | 4.98 " 6.15 14.00 19.83 
MAL ALSOD ER SE TARN RE 9.36 | 29.7 13.73 | 3.78 " 4.57 11:04 27.78 
Juin 1890 rame 9.47 30.72 14.54 | 4.26 " 4.26 9.67 27.08 
Juillet. 1890, m0 1 A0: 06 110TO0EES 13.92 | 3.41 " 4.16 11.10 27.27 
Août 1890771 12.20 | 28.05 16.02 | 3.82 " 5-52#240:04 19.35 
Septembre 1890 . . . . . . . 13.64 22.40 10.03 | 3.85 " 4.28 19.61 26.19 
Octobre 1890 |. . , . . . . | 11.34 123.82 | 45.66 14.47 5 Ăš 
Novembre LSJOTM US 10.15 | 29.66 | 15.28 | 4.70 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 45 


COMPOSITION DES RATIONS INGÉRÉES ET DES FÈCES RENDUES. — 
QUANTITÉS DE PRINCIPES IMMÉDIATS DIGÉRÉES. — COEFFICIENTS 
DE DIGESTIBILITÉ. 


On trouvera, dans la série des tableaux qui suivent, la composition 
des rations ingérées par les chevaux dans chacune des situations 
qu’ils ont occupĂ©es, ainsi que la composition des fĂšces correspondant 
à ces rations, et, par soustraction, les quantités de principes qui ont 
été digérées. Avec ces données, il a été facile de déterminer les 
coefficients de digestibilité des différents principes, coefficients qui 
figurent Ă©galement dans ces tableaux. 

Comme dans les recherches précédentes, nous avons négligé les 
données relatives aux matiÚres minérales, données que les condi- 
tions des expériences ne nous permettent pas de recueillir exacte- 
ment. 

On remarquera aussi que, dans presque tous les cas, les quantités 
de matiÚres grasses rendues dans Les fÚces sont supérieures à celles 
qui ont été ingérées. Les coefficients de digestibilité de la graisse 
n’ont, pour celte raison, pas pu ĂȘtre dĂ©terminĂ©s; ils eussent presque 
ioujours été négatifs. Cette anomalie s'explique aisément si on con- 
sidĂšre, d’une part, que la fĂ©verole et la paille contenant trĂšs peu de 
matiÚres grasses, la ration en était presque dépourvue, et que, 
d’autre part, les sucs intestinaux, la bile notamment, apportent aux 
résidus de la digestion des quantités non négligeables de graisses 
qui se sont trouvées, pour le cas présent, supérieures à celles que 
les chevaux ont digérées. 

Ceci constaté, voici les coefficients de digestibilité des autres 
principes. 


TABLEAUX. 


46 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Coefficients de digestibilité. 


CELLULOSE 


,. 


INDÉTERMINÉS. 


TT  " — 


saccha- 


organique. 


de décembre 1589. 


MATIÈRE 
CENDRES 
MATIÈRE 
AMIDUN. 
GRAISSE. 


brute, 


PROTÉINE. 


rifiable. 


Cheval n° 1. 


3756,5| 269,5 
3 162,5] 4 060,6 


A ingĂ©rĂ© Ë 6918,8| 1330,1| 714,8 
A rendu 2514,11 787,%| 397,1 


A digéré. . . . .|4483,9 


Coefficients de di- 
gestibilité . . .| 61.08 63.66 | 40.80 | 44.44 : 100.00 


Cheval n° 2. — Marche au pas. 
4173,8| 299,4] 245,8 


3 162,3] 1 060,6 


A rendu 


A digéré. . . . . 4746,4| 459,4 ANA 


Coefficients de di- 
gestibilité . . . é f 21 d 93.00 | 100.00 


Cheval n°3. — Travail au manùge au pas. 


5 008,6! 359,3| 2 247,2 
3 162,3] 1 060,6 


8 170,9] 1 419,9 
2634,1| 915,1 


A digéré. . . . .| 556 504,8] 43, 2 541,6 1 394,7 


Coefficients de di- 
gestibilité . . .| 64. ' : } ; 81.34 | 33.22 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 47 


CELLULOSE 


saccha- 


y 


MATIÈRE 
organique. 
INDÉTERMINÉS,. 


CENDRES. 
MATIÈRE 


de janvier 1890. brute. 


GRAISSE 
PROTÉINE. 


rifiable. 


| 


992,9 | 4190,1 
163,3 | 3 102,7 


7 679,0| 386,2 
2 840,0| 311,0 


A digĂ©rĂ© É Ge 85 2 159,4 


Coefficients de di- 
gestibilité . . . : 95.56 | 100.00 


A ingéré 


A rendu 


A digéré 


Coefficients de di- 
gestibilité . . . 


Cheval n° 3. 


3399,0| 275,6 
3152,4| 1 025,4 


ASTECL- AU (0 0e 6 551,4] 1 501,0 
A laissĂ© É 142,2 34,6 


A ingéré 6 409,2] 1 266,4 
A rendu 2118,7| 657,0 


609,4 


Coeñfticients de di- 
gestibilité . . .| 64. 65.38 | 48.12 


48 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


CELLULOSE 


TT, 


Es saccha- 
de février 1890. ent 


MATIÈRE 
CENDRES. 
MATIÈRE 
organique 
GRAISSE 
PROTÉINE. 


rifiable, 


INDÉTERMINÉS, 


Cheval n° 4. — Travail 


5009,8| : : 2 1 607,8 
148,6 


A ingéré. 


A rendu 


A digéré 


Coefficients de di- 
gestibilité . . . 


Cheval n° 2. 


FĂšves 0... .:.13974,4 3 757,0 
Paille, . . AE 3 3 049,2 


A digéré : 4 ,9| 412,3 | 185 1 063,4 


Coefficients de di- 
gestibilité . . . à g 10 4. $ 78.51 


Cheval n° au pas. 


4174,4| 925 260,5 |2025,8| 16: 1 339,8 
3 049,2 3| 5 136,2| 134 148,6 


7 293,6 2172,0| 297,2 / 1 488,4[1097,0 
2 411,0 2 3: 116,7 | 9281,4| 518,6 


Adigéré 204.11. L 4 2 2 038,7| 297,2 1207,0| 578,4 


Coefficients de di- 
gestibilité . . . 70.77 45.388 51.45 | 93.86 | 100.00 81.09 | 52.72 


de mars 1890. 


A digéré 


CoefĂŻicients de di- 
gestibilité . . 


FĂšves. . . 
Paille 


À ingĂ©rĂ© 


A rendu. 


A digéré. . . . . 


Coefficients de di- 
gestibilité . . . 


À ingĂ©rĂ© 
A rendu 


A digéré 


Coefficients de di- 
gestibilité . . 


MATIÈRE 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CELLULOSE 
EE À 
saccha- 


rifiable. 


AMIDON 
GRAISSE. 


brute, 


CENDRES. 
organique 


67.08 | 39.86 


Cheval n° 2. — Repos. 


3286,7| 198,0 


118,6 


59.66 | 30.26 


4108,3| 247,5 
2 929,5 


7 037,8 
2 440,7 


4 897,1 


69.58 ‘ : 95.34 | 100.00 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 


PROTÉINE. 


1 314,0 
236,4 


1 077,6 


49 


INDÉTERMINÉS. 


50 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


= El CELLULOSE : . E] #4 
M OIS a Ê ARE ee z à z Æ 
© 2 Be Ă  —  — [°) a mi < 
A 5 8 m x 

HS A = A D H A & 

x 2 E g É < E 
d'avrll 1890, 4 A EE de PE de LAS 4 à ° £ 
s S © rute, : 4 D me À 
rifiable. M z 


Cheval n° 4. 


FĂȘves. . . . . .|3507,6| 196,8 |3340,8| 185,9] 162,0 | 1 642,3] 134,3 | 49,1 | 994,8] 149,4 
Paille. . . . . .|3398,4| 994,3 | 3 474,1] 1 049,1] 597,1 | 992,2! 73,1 | 90,24 | 143,411068,8 


Aingéré, . . .. 6 484,9] 1 235,0 207,4 | 139,5 
Arendu. , . . .| 2710,7| 278,6 | 2482,1) 715,1| 423,7 153,7 " 146,4 322,6| 670,6 


‘A digĂ©rĂ©. . . . .|4195,3] " |4052,8] 519,9] 265,4 | 1710,8| 207,4 | v 815,6] 540,6 


Coefficients de di- 
gestibilité , . .| 60.75 " 62.50 | 42.10 | 38.K1 | 91.75 | 100.00 " 71.65 | 44.63 


au trot. 


FĂšves. . . . . .|4384,5| 246,0 | 4138,5| 232,4] 202,6 |2052,8] 167,9 | 61,4 | 1243,4| 178,0 
Paille. . . , . .|3598,4| 294,3 | 374,1] 1 049,1 527,1 | 992,2! 73,1 | 90,4 | 143,411068,8 


A ingéré. . 3 7 312,6] 1 281,5 240,0 | 151,8 
Arendu. . , . .|3445,5| 347,6 |2797,9| 920,1| 450,4 | 138,4] 159,8 | 334,1] 785,1 


A digéré. , , . .| 4637,4 


Coefficients de di- 
gestibilité , . .| 59.58 " 61.74 | 27.42 | 38.97 | 93.92 | 100.00 " 75.90 | 37.03 


Cheval n° 3. — Travail au manĂ«ge au trot. 


FÚves. . . « « .| 6138,3| 344,4 | 5 703,9] 325,3] 283,6 | 9 874,0] 255,1 | 85,9 | 1 740,8| 249,2 


Paille, 


Aingéré. . , . .| 8970,0| 531,3 | 8438,7| 1 199,4 
A rendu, . . . .|2556,6| 351,8 | 2904,8] 664,7| 389, 197,3] 158,0 | 357,9] 507,0 


A digéré. . . . .|[6413,4| " |6953,9] 534,7] 332,0 | 2 932,9) 296,0 | " |4502,4| 632,7 


Coefhcients de di- 


gestibilité 73.87 | 44.58 | 46.05 | 95.85 | 100.00 " 80.76 | 55.51 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 91 


: À 
a : 4 CELLULOSE : : A ‘a 
a pis a Z% 
LA a = 2 A n A el 
| 2 A > a [°] e n Len] =: 
H M '°E [e] o H “a ca 
= À HS saccha- d = < = 5) 
de mai 1890, < 4 À a F4 © ‘a 
à a s © | brute. |. < D 4 à 
© rifiable, mn z 
La 
EE TRE CREER CROSS EPS EE 


Cheval n° 4. — Marche au trot. 


FĂšves . . . , . .| 4399,5| 158,8 | 4240,7| 331,3| 242,8 | 2063,4| 209,4 49,7 | 1152,7| 191,4 


Paule” {5 "1." 3484,3| 214,3 | 3270,5| 1153,1| 662,1 | 187,8] 59,6 | 980,9 | 148,5| 978,5 
Aingéré. . . . . 7 884,3] 373,1 | 7 511,2] 1484,4| 904,9 | 2251,2| 969,0 | 130,6 | 1301,2/1169,9 
A rendu. . . .. 3314,0| 293,3 | 3020,7| 917,6| 475,2 | 110,4] 146,8 | 420,9| 949,8 
A digéré. . . . . 4570,3| nv 4490,5] 566,8| 429,7 | 2140,8| 269,0 u 880,3| 220,1 
Coefficients de di- 

gestibilité . . .| 57,97 n 59.78 | 38.18 | 47.48 | 95.10 | 100.00| » 67.65 | 18.81 


Cheval n° 2. — Travail au manĂ«ge au trot, 


3 033,4] 1 069,6! 614,1 174,2| . 55,2 75,0 137,7] 907,6 


8 970,3 


213,2 


1533,4| 954,1 | 3062,9| 348,4 | 144,6 | 1751,4/1175,5 
1048,5| 531,7 | 197,8] v 165,3 | 498,8| 841,1 


A rendu. . . . .| 3539,9| 326,7 


Adigéré. . . . .| 5851,6 n 


Coefficients de di- 
gestibilité . . .| 62.30 " 


422,4 |2935,1| 348,4 | on"  |19259,6| 334,4 


44,27 | 95.83 | 100.00 " 71.52 | 28.45 


; 


FĂšves . . . . . .|6159,3| 222,4 : : 463,8] 340,0 | 2888,7| 293,2 | 69,6 | 1 613,7| 267,9 


Cheval n° 3. — Repos. 


FĂšves. . . . ..|3299,6| 118,9 | 3473,7| 247,9! 184,8 | 1 544,2] 156,7 | 37,2 | 862,7 | 143,9 
Paille. . . . . .|2805,0| 178,0 |2717,0] 958,0, 550,1 | 456,0] 49,5 | 67,2 | 123,3 | 842,0 


A ingéré. . . . .| 6187,6| 396,9 | 5 790,7] 1205,9) 731,9 | 1 700,2| 206,2 | 104,4 | 986,0 | 956,1 
Arendu. . . . .|2407,8| 197,3 |1910,5] 626,9! 289,4 | 79,7] » 96,3 | 232,7 | 585,5 


A digéré. , . . . 4 079,8 " 3880,2| 579,0! 442,5 | 1 620,5| 206,2 " 753,3 | 370,6 
Coefficients de di- 
gestibilité . . .| 65.93 " 67.00 | 48.00 | 60.45 | 95.31 | 100.00 " 76.40 | 38.76 


52 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


: m 
El = a CRLLULOSE À : a à 
MOIS Fi = RS & E o z ÂŁ 
BR © e AB > ——— "" — © > SE a = 
LE 0 SR PES CN MN EE PE. 
de juin 1890. cr Ă« 15 li NME ; p À 2 E 
© À © 'rifiable. g a al 
RE — 
Cheval n° 4, — Travail à la voiture. 
FĂ©vesk ee 7015,2| 995,9 | 6 789,3] 510,7] 372,5 | 3248,0| 324,1 91,2 | 4 829,6 
Paillo LL 2651,3| 157,5 |2493,8] 845,2] 391,8 | 175,3] 56,0 | 60,2 | 103,1 
AWingéré Ven se 9 666,5] 383,4 | 9 283,1] 1 355,9] 763,8 | 3 423,3| 380,1 | 151,4 | 1 932,7 
Arendu. . . . .| 3091,3| 269,9 | 2821,4] 826,6] 369,4 134,8 u 136,6 511,9 
AFPÉTON Re 6 575,2 u 6461,7| 529,3| 394,4 | 3288,5| 390,1 " 1 420,8 
Coefficients de di- 
gestibilité . . .| 68.00 " 69.60 | 39.00 | 51.63 | 96.06 | 100.00 m 73.51 
Cheval n° 2. — Repos. 
FĂšves . . . . . .| 3507,6| 112,9 | 3394,7| 9255,3| 186,3 | 1 624,0] 162,1 45,6 914,8 
PRO T A REUr 3555,2| 211,2 | 3344,0] 1133,4| 524,7 235,0| 75,0 80,7 138,3 
ANngÉTE nl 7062,8| 324,1 | 6 738,7] 1388,7|. 711,0 | 1 859,0| 937,1 | 126,3 | 1 053,1 
ASrTendu re 3050,5| 236,7 | 2813,8| 954,2] 439,3 116,8 " 129,6 280,7 
A digéré. . . . . 4012,3| nv 3924,9| 434,5| 271,7 | 1749,2| 237,1 " 772,4 
Coefficients de di- 
gestibilité . . .| 56.80 u 53.36 | 31.29 | 38.20 | 93.72 | 100.00 u 73.35 
Cheval n° 3. — Repos 
F'Ă©ves rime 3 507,6! 112,9 | 3394,7| 255,3] 186,3 | 1 624,0] 162,1 45,6 914,8 
Paille, L'MRESRLE 8120,6| 185,4 | 2935,2|] 994,8] 460,6 206,3| 65,9 70,8 121,4 
A ingéré, . . . .|6628,2| 298,3 | 6 329,9] 1 250,1| 646,9 | 1 830,3] 228,0 | 116,4 | 1 036,2 
Atrendu..11. #0 Ă  2 648,1! 250,8 | 2397,3| 813,5| 385,0 112,8 u 112,8 256,1 
A digéré. . . . . 3 980,1 " 3932,6| 436,6! 261,9 | 1717,5| 228,0 u 780,1! 504,9 
Coefficients de di- 


gestibilité . . .! 60.05 u 62.13 | 34.92 | 40.48 | 93.84 | 100.00 " 75.28 | 41.31 


MOIS 


de juillet 1890, 


A ingéré 


A rendu 


A digéré 


Coeficients de di- 
gestibilité . ._. 


A ingéré 


A rendu. 


A digéré 


Coeffivients de di- 
gestibilité . 


A digéré 


Coefticients de di- 
gestibilité . . . 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE 


69.29 


59.62 


CENDRES. 


CELLULOSE 


À, 


saccha- 


MATIÈRE 
organique 
AMIDON. 


brute, 
rifiable. 


TRAIT. 


Cheval n° 4. — Travail à la voiture. 


259,9 
191,4 


450,6 


6658,1| 431,3| 381,6 | 3147, 


2 635,91 919,7| 452,4 


9 289,0] 13 
2 682,9 


71.11 | 37.17 


Cheval n° 2. 


3 361,4 


6 629,7 
2 686,3 


Cheval n° 3. — Repos. 


3361,4| 217,9] 
2 894,4[ 1 009,8 


6255,5| 1 227,7 


1 698,0 


94.92 


2 


227,9 


100,00 


GRAISSE. 


PROTÉINE. 


1 842,1 


71.90 


INDÉTERMINÉS. 


36.00 


D4. ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


CELLULOSE 
MOIS 


d'août 1890. 


CENDRES. 
GRAISSE 
.PROTÉINE. 


INDÉTERMINÉS. 


3497,2| 140,6 | 3 356,6 
3520,0| 249,6 | 3270,4| 1 087,7 


7 017,2 6 627,0] 1515,7 715,5 | 1 869,3 
3071,7| 3 2751,6| 891,4] 429,1 


A digéré. . . . .| 3945,5 3875,4l 424,3 


Coefficients de di- 
gestibilité . . .| 56.93 


Gheval n° 2. — Repos. 


171,7 | 1587,7| 165 935,9] 245,1 
145,4|1029,9 


A digéré 38 50,2 


Coefficients de di- 
gestibilité . . .| 54.87 


FĂšves . + . . | 6 232 50,6 | 5982,3|[ 450,4! : 2 829,8 
Palo EC 2] 128,8 | 1 688,4 280,7 145,4 


8050,1| 379,4 | 7670,7| 1 041,9 
2382,0| 290,7 |2091,3| 668,1 


À digĂ©rĂ©. . . . .|5668,1 5579,4| 343,8 


Coefficients de di- Ê 
gestibilité . . .| 70.41 72.73 | 33.97 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT, 


MOIS 


MATIÈRE 


de septembre 1890. 


FĂšves . . 
Paille. . 


A ingéré. 


A rendu. 


A digéré., . . . . 


Coefficients de di- 
gestibilité . . . 


FĂšves. . REA 


Palo, rors.e 


3 488,4 


Aingéré. :-. . . 


A rendu 


A digéré. . . . 


Coefficients de di- 
gestibilité . . . 


FĂšves . . 
Paille, . 


A ingéré. . . . . 


rendu... .". 


Apdigéréses «131. 


Coefficients de di- 
gestibilité . ,. . 


CENDRES. 


CELLULOSE 


À 


saccha- 


organique. 


brute. 


MATIÈRE 


Cheval n° 14, 
3 463,8 
3 280,5 


6 744,3 
9 707,4 


4 036,9 


59.86 


Cheval n° 2. 


190,5 
1 092,7 


6 258,0 


1 558,2 


78.08 | 47.19 


rifiable. 


97.50 


100.00 


GRAISSE. 


PROTÉINE. 


79.34 


43.12 


D6 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


1 
É ñ A CELLULOSE L : E ‘4 
2 a & © z AR z Z 
ae ES © A mn = = 
2 © 2 A = 2 : Fa a = 
ne A HAE À 5 » Ă« A 
E .& x & aCrhas e < 
d'octobre 1890, | < * Se SE p à © E 
= = © brute, 3j < Ɠ e A 
À rifiable, fa Z 
RS EE RSS CEE Es RER RE | 7 CR SOS | CRE CANNES CRE RUES CESSE 


Cheval n° 4. — Repos. 


FĂȘves . . . .. .[3478,8| 155,9 | 3323,6| 107,3] 210,8 | 1569,6| 155,5 | 54,6 5 
Paille. . . . . .|3443,2| 246,6 | 2196,6| 1191,0| 625,6 | 91,6] 59,5 | 74,0 | 196,7| 998,2 


AANPOTE REC 6922,0| 401,8 | 6 520,2] 1 388,3] 856,4 | 1 661,2| 245,0 | 128,6 | 1 039,2/1224,5 
Airendu. er 00 3295,6| 327,9 | 2967,7| 901,7| 586,3 | 159,5] on 163,1 | 408,7| 748,4 
ANDPÉÉLE ES. 0. 3626,4| 3552,5] 486,6| 250,1 | 4 501,7| 245,0 u 630,5| 473,1 
Coefficients de di- 

gestibilité . . .| 52.39 u 54.48 | 35.05 | 29.90 | 90.40 | 100.00! " 60.67 | 38.7 


Cheval n° 2. — Travail à la voiture. 


FĂšves = 12. 0, 6256,6| 279,1 | 5977,5| 354,7| 379,1 2 823 ,0| 279,7 | 98,2 | 1641,1| 401,7 
Paille nr. .| 2638,4| 188,9 |2449,5] 919,6] 479,5 70-2068 621667 97,1| 764,9 
Aingéré. . . . .| 8895,0| 468,0 | 8427,0| 1 267,3| 858,6 | 2895,2| 328,3 | 154,9 | 1 738,2|1166,6 
A rendu. . . . .| 3030,8| 301,9 | 2728,9| S80,4| 506,7 | 103,3]. v» 153,7 | 404,0| 680,7 
APdigére re. 0). 5864,2, 5698,1| 386,9] 551,9 | 2 789,9| 348,3 " 1334,2| 485,0 
Coefficients de di- 

gestibilité . . .| 65.93 u 67.62 | 30.523 | 40.98 | 96.43 | 100.00! "» 76.76 | 41.65 


Cheval n° 3. — Repos. 


MOVE 2 Arr US 3478,8| 155,2 | 3393,6[ 197,2] 210,8 | 1 569,6] 155,5 54,6 | 942,5] 293,3 
Paille = 3e 4, 3 002,3] 215,0 | 2 787,3] 1 038,5| 545,5 79,91 78,0 | 64,5 | 110,5] 870,4 
Aingéré. . . . .| 6481,1| 370,2 | 6110,91 1235,8| 755,3 | 1649,5| 233,5 | 119,1 | 1 023,0|1093,7 
A rendu. . . . .| 2499,7| 283,5 | 2246 

A digéré. . . . .| 3981,4 u 3894,7| 515,4| 564,9 | 1 537,8| 233,5 n 750,0! 504,5 


Coefficients de di- 


gestibilité . . . 41.70 | 48.25 | 95.23 | 100.00 " 73.31 | 46.12 


A ingéré 


A rendu 


A digéré 


Coefficients de di- 
gestibilité . . . 


FĂšves . . . 
Paille; 


A digéré 


Coefficients de di- 
gestibilité . 


FĂȘves .".:. . 


Paille 


A ingéré 
A rendu. 


A digéré 


Coeflicients de di- 
gestibilité . . . 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CELLULOSE 


Re À 


saccha- 


CENDRES 
MATIÈRE 
organique 


brute, 
rifiable. 


241,5 |1525,4 
695,1 


100.00 


— Travail à la voiture. 


6 899,2] 322 56,0| 482,9! 3050,8 
2 547,9 70,5 8,2] 591,3] 139,9 


533,7| 3 085,4 


69.00 | 30.50 | 53.14 | 96.70 | 100.00 


Cheval n° 3. 
3 449,6 3 288,2 
3 397,2 3 160,4 


6 846,8 6 448,6 


2 659,2 2 380,3 


4187,6 4 059,5 


61.16 


GRAISSE. 


PROTÉINE. 


1 903,5 


1 590,4 


78.68 


57 


INDÉTERMINES. 


58 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


En groupant tous les chiffres relatifs Ă  un mĂȘme cheval, sans tenir 
compte des différentes situations dans lesquelles il se trouve, on 
obtient, pour chacun d’eux, les chiffres moyens suivants : 


MATIÈRE CELLULOSE 


—  —m  — 


entre la féverole 
et la paille 
ingérées. 


sacchari- 
AMIDON 
PROTÉINE. 
INDÉTERMINÉS 


cs 

S 
A 
= 

& 

& 
© 


Cheval no 1 : as 56. 47. 93.911100.00! 69.87129.80 
Chevalmo 2 era . De 2.9 .92| 45. 94.40|100.00| 75.93|32.13 
Cheval n° 3 : : 0 2. 94.611100.00! 77.95140.11 


Les nombres contenus dans la premiĂšre colonne de ce tableau 
expriment le rapport entre les poids moyens de féverole et les poids 
moyens de paille consommĂ©s, ou, ce qui revient au mĂȘme, ils reprĂ©- 
sentent les poids de fĂ©verole consommĂ©s en mĂȘme temps que 1 kilogr. 
de paille. 

Ce rapport entre l’aliment concentrĂ© et l’aliment fibreux d’une 
ration est l’un des principaux facteurs qui font varier les coefficients 
de digestibilitĂ© ; on conçoit aisĂ©ment qu’une ration contenant une 
proportion trÚs élevée de paille soit, en bloc, moins bien digérée 
qu’une ration oĂč le grain domine. Si nous avions pu donner dans 
tous les cas des rations oĂč le grain ait Ă©tĂ© Ă  la paille dans un rapport 
constant, nous aurions éliminé cet important facteur de variations 
et, à ce point de vue, les chiffres obtenus auraient été comparables. 
Les chevaux ne se prĂȘtent pas Ă  ces rationnements exacts, et, dans 
un mélange, ils savent toujours classer les éléments de façon à pou- 
voir consommer l'aliment qui leur plait et mettre de cÎté celui 
qu'ils veulent laisser. Faute de mieux, nous avons donc dĂ» nous en 
tenir, pour apprécier l'influence que peut avoir la proportion de 
paille ingérée sur les coefficients de digestibilité, à la détermination, 
pour chaque ration, du rapport entre les quantités de fÚves et de 
paille ingérées. | 

S1 nous groupons maintenant les nombres obtenus pour les trois 
chevaux dans chacune des situations de repos, marche ou travail, 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 99 


nous aurons, en Ă©cartant l'influence individuelle, les coefficients 
moyens pour chacune de ces situations. 
Voici ces coeflicients : 


MATIÈRE CELLULOSE 


et la paille. 
INDÉTERMINÉS, 


RAPPORT 
entre la féverole 
AMIDON. 
PROTÉINE. 


organique 
saccharifiable, 


Au repos. 


Cheval no 1 : 56.69! 58.77] 36.11 .45 73 100.00 
Cheval no 2, . |4 58.40| 60.10| 31.12| 42. 3.57 100.00 
Cheval 00:50 AE 62.09| 63.86] 41.12 5 .42 100.00 


Coefficients moyens. .| 4, 59.06| 60.91| 36.12 L .24 100.00 


À la marche au pas. 


Chevalno 1. à « . | 140 63.00! 65.32[ 39.66[ 61. 
Cheval no 2. . . . . : 61. 64.701 34.51 


Chevaln0ĂŻ3, = 0x. .346 58. 70.77| 45.38 


Coefficients moyens. . : 4.35| 66.931 39.85 


marche au trot. 


Cheval no 1. . . . . . .| 1.96 .97| 59.78 .18| 47. .10[100.00 
Cheval no 2. . . . LA Ă  .58| 61.74 1.42 3.921100.00 
Cheval no 3. . . . . .. .| 1. 58.11| 69.58 .52| 61. .34|[100.00 


Coefficients moyens. . s .89] 63.70 3 49. .791100.00 


travail au pas. 


Chevalno dE en Mu É 62.97! 65. 33.071 52. .061100.00 
Cheval no MER RTS à .85| ‘67. 36.30 8. À 100.00 
Chovalino 3m nf: Agl 67.761 35.85| 54. .311100.00 


Coefficients moyens. .| 1. .00!| 66.76] 35.17 ; .28|100.00 


Au travail au trot. 


Cheval no 1 ; 65.23| 67.08] 39. 3 3.22]100.00 
Cheval n° 2 .906 | 62.: 64,18] 32.9 .2 5.83| 100.00 ; 28. 
Cheval no 3. . dis 97 .30! 73.87 . QU: 5.851100.00 : 55. 


Coefficients moyens. .| 2. 68.38 : : .97 1100.00 30.79 


60 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


MATIÈRE. | CELLULOSE 


| 
| 


RAPPORT 
entre la féverole 
et la paille 
AMIDON. 


PROTÉINE 
INDÉTERMINÉS. 


organique. 


[usastne 


travail Ă  la voiture. 


Cheval no 1 2 68.65! 70.35] 38.08| 54.55 .30|100.00 
Cheval n° 2 2.536] 66.68| 68.31| 30.52! 47.06 .06 | 100.00 
Cheval no 3 .654| 73.08] 75.40] 40.58| 50.70 .22|100.00 


Coefficients moyens. . : 69.47 .35| 36.30! 50.77| 96.691100.00 


L'examen de ce tableau permet de constater d’abord l'influence 
de l’individualitĂ© sur les coefficients de digestibilitĂ©. Les chevaux 
nÂź 4 et 2 dans chacune des situations de repos, de marche au trot 
et de travail au pas se trouvent, au point de vue de la ration, dans 
des conditions qui rendent les coefficients trĂšs comparables. La di- 
gestibilité de la ration totale est plus élevée chez le cheval n° 2 que 
chez le cheval n° 4. A la marche au pas et au travail au trot, les coef- 
ficients du cheval n° 4 sont un peu supérieurs, mais sa ration conte- 
nait alors une proportion de fÚves plus élevée. 

Toutefois, au travail à la voiture, le cheval n° 1 a mieux digéré, 
bien que les rations aient été semblables. Malgré cette restriction, si 
on ne considÚre que les coefficients de la ration totale, la supériorité 
du cheval n° 2 est, dans les autres cas, suffisamment manifeste. Par 
contre, si on envisage isolément les coefficients de chacun des prin- 
cipes, on voit que, dans presque tous les cas, le cheval n° 1 à beau- 
coup mieux digéré les celluloses, tandis que le cheval n° 2 digérait 
beaucoup mieux la matiÚre protéique. 

Les comparaisons sont plus difficiles à établir avec le cheval n° 3, 
dont la ration a toujours contenu une proportion de fÚves supérieure 
Ă  celle des deux autres. Toutefois, les Ă©carts trĂšs sensibles qui existent 
entre les coefficients du cheval n° 3 et ceux du cheval n° 2 et du 
cheval n° 1 ne nous paraissent pas simplement motivés par cette dif- 
férence dans la composition des rations, car celte différence est 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 61 


quelquefois peu appréciable, tandis que les coefficients sont toujours 
trÚs notablement supérieurs. 

Le cheval n° 3 a eu, pour les celluloses, Ă  peu prĂšs la mĂȘme capa- 
cité digestive que le cheval n° 1 ; pour la protéine, son coefficient a 
toujours été supérieur à celui du cheval n° 2. 

Ces chiffres sont donc intéressants à un double point de vue : non 
seulement ils montrent (le fait n’est pas nouveau) l’influence de l’in- 
dividualitĂ© sur les coefficients de digestibilitĂ© d’une ration prise en 
bloc ; mais encore ils mettent en lumiÚre les aptitudes spéciales de 
chaque organisme à mieux digérer Lel ou tel principe. 

Examinons maintenant ces chitfres Ă  un autre point de vue, sans 
nous occuper des chevaux qui les ont fournis, et en n’envisageant 
que les situations dans lesquelles ils ont Ă©tĂ© obtenus. C’est ici sur- 
tout que nous devons regretter que la proportion de paille n’ait pas 
Ă©tĂ© la mĂȘme dans toutes les rations; les diffĂ©rences dans les quan- 
tités de paille consommée masquent presque entiÚrement l'influence 
qu'ont pu avoir les situations des chevaux sur les coefficients. 

On voit en effet les coefficients moyens s’accroütre presque paral- 
lùlement avec l’augmentation de la proportion de fùves. 


COEFFICIENTS MOYENS 
A —— — 


de la de la 
matiĂšre matiĂšre 
sĂšche totale. organique. 
Au repos. PRESS Lo 59.06 69.91 
ASIAEMALCHE AUAPOLE. CN. 61.89 63.70 
AU (TAN AUS PAS SE 64.00 66.76 
Avlamarche-autpas. Pure 64.35 | 66.93 
AUATAVAIlL AU EL ERNEST 66.3 68.38 
Au travail Ă  la voiture . . . . . 73.08 75.40 


Quantités de fÚves contenues dans la ration pour 4 kilogr. de paille. 


UN rer la lon sliee de 9 1,078 
AnIdimarpheran pass, ALES v 1,253 
Ar la" marehefa trot" re Ha 
AURÉTAVATNATINASE SA ET CNE PIE 1,608 
AURITAVATI AUTO ED TT. 28 ME 
Auetravail a 1100 ee 250 0e. 294 


Seuls, les coefficients relatifs Ă  la marche au pas ne suivent pas 


62 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


l’accroissement de la quantitĂ© de grains dans la ration ; ils sont plus 
élevés que ceux de la marche au trot et du travail au pas qui cor- 
respondent cependant Ă  des rations plus riches en fĂšves. 

Les chevaux digĂšrent donc mieux quand, sans produire de travail 
extérieur, ils prennent un exercice modéré, qui a consislé chaque 
jour, pour le cas présent, en deux promenades au pas de 10 kilo- 
mÚtres chacune. Nous avons déjà maintes fois observé ce fait, et 
depuis longtemps aussi on sait qu’un exercice rĂ©gulier et modĂ©rĂ© 
est plus favorable à l’accomplissement des fonctions qu’un repos 
absolu ou un travail pénible. 

Les Ă©carts extrĂȘmes entre les coefficients moyens correspondant 
aux diverses situations ne sont pas trĂšs Ă©levĂ©s. Voici d’ailleurs les 
nombres minima et maxima qu'a atteint chacun des principes. 


COEFFICIENT 


——— ÉCART. 

MINIMUM. maximum, 
MatiĂšre sĂšche totale . . . . 9.06 69.47 10.41 
MatiĂšre organique . . . . . 60.91 N\GG 10.44 
Gellulose brute . , . . . . JP 39.85 4.68 
Gellulose saccharifiable . . . 45.40 55.38 9.98 
AMIGON EP ARTE RES ACTE 93.24 96.69 3.45 
Protéine RER APR 72.96 78.57 5 Gi 
Indéterminés "=. mess 7 26.50 37.67 ET 


Ces chiffres, établis sur les données moyennes de trois chevaux 
ayant des aptitudes digestives diffĂ©rentes, Ă©chappent Ă  l’influence 
individuelle. 

Les Ă©carts sont du mĂȘme ordre que ceux qui ont Ă©tĂ© observĂ©s 
dans les essais à l’avoine et au maïs, bien que les coefficients soient 
quelquefois sensiblement différents. 


Varialions du poids des chevaux dans les différentes situations, 
comparées aux quantités ingérées el digérées. 


Nous avons réuni, dans les tableaux qui suivent, les nombres 
qui représentent les poids des différents principes ingérés et di- 
gérés par chaque cheval, pendant les différentes périodes des expé- 
riences. 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 63 


QUANTITÉS INGÉRÉES PAR JOUR. 


Cheval n° 1. 


MATIÈRE CELLULOSE F £ Ë 

2 — | — Ă€ A A A 

: © a mn E 5 

S _ A # a ‘A e 

Êl e es o E E A 

5 = 2 É= 5 p = © al 

es) a E] Fe n ĂŠ Le] 

8 ES = È ji w 3 a 

= om nr) ol A 

© o M 

a 
Gr, Gr Gr Gr Gr. Gr Gr Gr Gr 
Au repos. 

DĂ©cembre 1889. . .| 7340,8| 6918,8] 1330,1| 714,8] 2 108,5| 267,4| 131,0] 1 314,8| 1 052,2 
AVTILTSIDNE Nes re 6906,0| 6 484,9] 1 235,0! 659,1! 1 864,5] 207,4] 139,5! 1 138,2] 1 211,2 
Août 1890. . . . .| 7017,2| 6 627,0] 1315,7| 715,5] 1 869,3) 266,1| 134,1] 1 081,3| 1 245,0 
Septembro 1890 . .] 7122,4| 6 744,8] 1 219,5| 691,1] 1816,9| 284,5] 140,0] 1 164,1] 1 428,2 
Octobre 1890. . . .] 6922,0| 6 520,2| 1 388,3| 856,41 1 661,2! 245,0| 128,6| 1 039,2| 1 221,5 
Novembre 1890 . .| 6846,8| 6 448,6] 1 305,6| 936,6] 1 711,9] 265,1] 138,1] 1108,8| 982,4 


Moyennes . . .| 7025,7| 6624,0| 1 209,0! 763,0] 1 828,7] 255,9! 135,2] 1 141,1] 1 190,1 


A la marche au pas. 


Janvier 1890. . . are 


LEA EE de | ol il Al L 033,7 


À la marche au trot. 


1 169,9 


Mai 1890... , . 16 Se 


1 
© 
_ 
re 
» 
19 
—— 
ee 
rs 
2] 
LS 
» 
M 
ss 
[=] 
[=] 
ce 
w 
L'=] 
nn, 
Lo 


9 4 Ju 130,0) 1 301,2 


Au travail au pas. 


FĂ©vrier 1890. . . Ron En 1 258,3| HR 07] SH 1 108,6 
| 


Au travail au trot. 


Mars 1890 . . . , fe p ea) bu 205, 1 LT Op) 782,6 


Au travail Ă  la voiture. 


Juin 1890 . . . . .|0 666,5] 9 283,1] 1355,0] 763,8] 3423,3| 380,1] 151,4] 1 932,7] 1 275,9 
Juillet 1890 . . . .| 9 739,6] 9 289,0! 1 351,0| 854,0] 5 328,2] 390,4] 180,2] 1 952,6| 1 252,6 


Moyennes . . .| 9 703,0| 9 286,0] 1 353,4] 798,9] 3375,7| 385,2] 165,8) 1 942,6] 1 264,2 


64 


Mars 1890 
Juin 1890 


Août 1390 


FĂ©vrier 1890. . . . 


Juillet 1890 . . . . 


" Septembre 1890 . . 


Moyennes. . . . 


ANNALES DE LA SCIENCE 


Cheval n° 2. 


MATIÈRE 
A  —  — 


organique. 


Q 
y 


7255,2| 6 806,2 
6 780,0| 6 342,2 
7062,8| 6 738,7 
6998,0| 6 629,7 
7 017,2| 6 627,0 
7 006,4| 6 632,9 


7019,9| 6 629,4 


CELLULOSE 


— 


saccharifiable 


a 
ĂŻ 


Au repos. 


1 183,0 
1 314,0 
1 388,7 
1 358,3 


800 ,4 


AGRONOMIQUE. 


1 968,4 


764,9| 1 956,7 
711,0 1 859,0 
753,7| 1 $14,5 


1315,7 
1 213,2 


1 295,5 


715,5] 1 869,3 
684,7| 1 763,8 


738,4| 1 872,0 


GRAISSE, 


127,9 
118,6 
126,5 
144,9 
134,1 
138,1 


151,5 


PROJÉINE. 
INDÉTERMINÉS. 


1554,4| 1 091,2 
1078,1| 907,8 
1053,1| 1 363,5 
1 067,8 | 1 256,0 
1 081,8 | 1 245,0 
1 132,0 | 1 422,6 


1127,8| 1 214,3 


À la marche au pas. 


DĂ©cembre 1889. . JR EE PE 


pal 1) 1 052, 7 


A la marche au trot. 


Avril 1890. . . . Ju nes Fi PEU ss] DE 1 246,8 


Au travail au pas. 


Janvier 1890. . . Ur EU 858,2] 2 661,3 si NET 


Au travail au trot. 


Mai1890. . . . AA eq RSA) HE ALES 1 175,5 


Au travail Ă  la voiture. 


154,9! 1 738,2] 1 166,6 
177,8| 2 021,2 


Octobre 1890. . . . 
Novembre 1890. 


2 893,2 
3 190,7 


8 895,0! 8 427,0 1 267,3] 858,6 
9 447,1| 8 946,6| 1 264,2|1004,2 


Moyennes. . . 9171,0| 8 686,8] 1 265,7| 931,41 3 041,9 166,3| 1 879,7 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 65 


Cheval n° 3. 
Ă  
MATIÈRE CELLULOSE É = & 
EE A — CA Q A rA Z 
s © “ a S 3 
cs 5 A Ég x A e 
d ot Ɠ = # < = = 
2 = 3 Fe À Si CA a +4 
È AN PER G S “ 5 
5 a M 
Gr. Gr. Gr. Gr Gr Gr Gr. Gr Gr 
Au repos. 
Janvier 1890. . . .| 6744,6| 6 409,2| 1266,4| 737,9] 1 833,2] 297,4] 114,8| 1 132,7| 1 026,8 
Mai 1890. . . . . 1 6187,6| 5 790,7] 1 205,9] 751,91 1 700,2| 206,2] 104,4] 986,0! 956,1 
Juin 1890 . . . . .| 6628,2| 6 329,9] 1 250,1| 646,9| 1 830,5] 228,0| 116,4| 1 036,2| 1 222,0 
Juillet 1890 . . . .| 6596,6| 6 255,5] 1 227,7| 689,5] 1 788,8| 227,9| 134,0] 1 052,1| 1 135,5 
Octobre 1890. . . .[ 6481,1| 6 110,9] 1255,8| 756,3] 1 649,5| 233,5| 119,1] 1 023,0| 1 093,7 
Novembre 1890. . .| 6846,8| 6 448,6| 1 505,6| 936,6] 1 711,9] 265,1] 138,1| 1108,8| 982,4 
Moyennes. . . .| 6580,8| 6 224,11 1248,6| 749,8] 1752,3| 243,0] 121,1| 1 056,5] 1 069,4 


A la marche au pas. 


FĂ©vrier 1890. . . A 


FR tenl nee] LE pal 1 097,0 


A la marche au trot. 


Mars 1890 . . . . Eure A FA) Ass = cl tal 881,7 


Au travail au pas. 


DĂ©c:mbre 1889. . | reel 8 cas) no ne Hi 2,7] guitl { 1 053,7 


Au travail au trot. 


Avril 1890. . . .. | HU sl 1 499,4 


on] su] A0) né leu nl 1 139,7 


Au travail Ă  la voiture. 


Août 1890 . . . 


+1 8 050,1! 7 670,7] 1 011,9) 566,7] 2 975,2] 346,8| 136,1| 1743,0| 915,0 
Septembre 1890. . . 


8183,0| 7846,2] 841,4! 592,7] 305,5] 381,8] 146,2] 1882,5| 913,1 


Moyennes, . . .| 8146,5| 7743,4] 996,6 3016,8| 364,3| 141,1| 1812,7| 914,0 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 5 


66 


QUANTITÉS DIGÉRÉES PAR JOUR. 


Cheval n° 4. 


MATIÈRE 
em, 


organique. 


Au repos. 


549,7 
519,9 
494,3 
448,6 
486,6 
387,8 


DĂ©cembre 1889 . . . . . . . 
Avril 1890.14... 000. 
AOUUISIO EE EE RTE 
Septembre 18904 . 4.1... 
Octobre 1890... 
Novembre 1890. + + « . 


4 404,7 
4 059,8 
3 875,4 
4 036,9 
3 559,5 
3460,1 


Moyennes. "..1".t4u0., 3 897,1] 468,3 


À la marche au 


Janvier 1890 . . . . . .. Jo 4 763,8 


Mai 1890 
Février 1890 . « . « « « . En nr) 
Mars 1890 


Jus 18100 VE TENUE 
Juillet LOMME ANSE 


6575,2| 6 461,7 
6 748,6| 6 606,1| 502,2 


Moyennes. 01.000 


6 661,9] 6 533,9 


| 


AMIDON. 


CELLULOSE 


d 
A 
Ɠ 
«a 
ol 
em 
Ɠ 
= 
2 
o 
L1 
a 


1 994,2 
1710,8 
1 718,2 
1 740,7 
1 501,7 
1 573,4 


1 706,5 


pas. 


poil ao 2 me 


A la marche au trot. 


ee Je) ii I Rod 


Au travail au pas. 


Lt ei) 


Au travail au trot. 


|° rl rs Ju sel el 


Au travail Ă  la voiture. 


394,4] 3 288,5 
479,3] 3 243,1 


3 250,8 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


s 3 
A ‘22 
ñ Lei CR 
Su] 08 | ME 
D a BR 
a RUE PE UE) 
cn] CI 
+ 
Gr. | "Gr, |: Gui] 
| 
267,4] 986,0! 302,8 
207,4| 815,6] 540,6 | 
266,1| 705,3| 485,8 
284,5| 789,9| 455,3 
245,0] 630,5] 473,1 | 
265,1] 677,8] 175,1 | 
255,9] 767,5| 405,1 


ul ti] 256,1 


on] 880,3| 220,1 


| 


cs] nas 337,9 


uit] lie 60,8 


380,1| 1 420,8 
390,4] 1 475,7 


385,9 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 67 


Cheval n° 2. 


CELLULOSE 


AMIDON. 
SUCRE 
PROTÉINE. 


INDÉTERMINÉS. 


organique, 
brute 
saccharifiable. 


Au repos. 


FĂ©vrier 1890 . . . . . . .. 4 650,2] 4469,8| 454,9] 412,3] 4 850,9! 280,9! 1 063,4| 438,1 
1e 10 C0 RAI RE EP 3911,0| 3 783,9| 397,6| 358,3] 1 775,7| 202,1] 821,6| 241,8 
Juin 1890. . . . . .... . | 4012, 3924,9| 434,5] 271,7] 1 742,2] 937,1] 772,4] 470,3 
Juillet 1890. . . . . . . . .| 4062,1| 3043,4| 416,2] 345,0] 1688,3| 235,2] 808,8| 433,7 
PART MR R CENT 3850,2| 3 767,5] 321,2] 150,2] 1 751,2] 266,1| 755,1] 526,4 
Septembre 1890 . . . . . . .| 4196,4] 4019,0| 404,5| 362,1] 1 697,0] 278,5| 845,4] 412,0 


Moyennes. . . . . . . .| 4106,0| 3984,7| 401,5] 316,6| 1 750,9] 250,0] 844,4] 420,4 


A la marche au pas. 


DĂ©cembre 1889 . . . . . . et) su] mal LE] pis] pl 328,4 


A la marche au trot, 


RRMLI8900S NE Se es 461,7 


4 nie] 351,4 


pos) 9 ni 240,0] 1 032,7 


Au travail au pas, 


Janvier 1890 . . . . . . . | il ne] mel 2 540,9 


un a) 240,2 


Au travail au trot. 


MAT SOQ VAS CE. ani) 494,9 348,4| 1 252,6| 354,4 


4 2 935,1 


Au travail Ă  la voiture. 


Octobre 1890 . . . . . . . . 5 864,2] 5 698,1 


386,9! 351,9 
385,6] 533,7 


348,3 | 1334,2| 485,0 
Novembre 1890 . . . . . . . 6 369,6! 6 173,5 


MOYÉNTEB EE Te ele» 6116,9| 5935,8] 386,2 


68 


Janvier 1890 
Mai 1890 :. . 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Cheval n° 3. 


SD Mate, te, Bite 


Moyennes 1e fu. Ie 0 


FĂ©vrier 1890 


Mars 1890. . 


DĂ©cembre 1889 . . . . . . . 


Avril 1890 . 


Août 1890. . 


A Fe OMAN | 6 0 6 233,9 


Septembre 1890. . . . 


Moyennes 


MATIÈRE CELLULOSE 


AMIDON. 


organique. 
brute, 
saccharifiable 


Au repos. 


4 532,6| 4290,5| 609,4] 489,9] 1 696,2 
4079,8| 3 880,2] 579,0] 442,5] 1620,5 
3980,1| 3952,6| 436,6| 261,9] 1 717,5 
3932,7| 3 875,6] 442,4] 318,7] 1 698,0 
3 981,4| 5894,7| 515,4] 364,9] 1 537,8 
4187,6| 4059,2| 516,9] 530,3] 1 586,9 


4082,4| 3988,8! 516,6| 401,2] 1 642,8 


À la marche au pas. 


| 5 ei Ăż en ol 495,9 


A la marche au trot. 


pur ph nl ul 2 255,4] 


Au travail au pas. 


| 


Fee ss) 504,8 enr 


Au travail au trot. 


534,7 


A 
Z 
- 
© 
mA 
fu 


234,2 


os 
ar] ae] 
7) DE) 


346,8 | 1 384,8 
381,8| 1 493,6 


364,3| 1 439,2 


INDÉTERMINÉS. 


286,1 
370,6 
504,9 
409,0 
504,5 
328,5 


400,6 


578,4 


208,6 


350 ,1 


454,1 
393,7 


493,9 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 69 


MATIÈRE CELLULOSE À 
| -—— — | à “SUR 7 2 
Ë RENE Se = 2 
cs Z A = a ce 
= : | a (Ă ) Ce a Hi 
2 1 £ £ Ê D < A 
E 2 & < a Ăź eo - 
2 & = 
ca Fe D s) fu Z 
© © H 
a 
emmmrnes | memes |. | concu | mens | emmmmme
 | emenemnse | aemmemeuss 
Gr Gr Gr Gr Gr, Gr Gr Gr Gr 


Quantités ingérées par jour. 


Aaireposs een Li 6875,5| 6492,5| 1981,0|750,7| 1 821,0/249,6/129,3| 1 108,5] 1 157,9 
A la marche au pas. . .| 7720,0| 7 284,2| 1 306,0|789,4| 9 248,41307,5|132,4| 1 439,6|1 061,1 
A la marche au trot. . .| 7728,2| 7 987,21 1 361,1|810,9| 2 296,91247,7|136,8| 1 334,0|1 099,5 
Au travail au pas. . . .| 8 607,0] 8 120,1| 1 365,1|841,4| 2 654,81343,6/144,1| 1 700,9|1 069,6 
Au travail au trot, . . .| 9 059,0! 8 558,0! 1 332,4|837,5| 3 095,71313,2|149,6| 1 797,0|1 032,6 
Au travail Ă  la voiture .| 8 996,8] 8572,11 1 181,91773,2| 3 144,81376,61157,7| 1 878,3|1 066,5 


Quantités digérées par jour. 


Au repos. . . . . . . .|4 4 058,4| 3 956,9] 462,1 |342,0| 1700,11249,6| " 813,5] 408,7 
A la marche au pas. . .| 496S,1| 4 874,3] 517,6 |427,7| 2113,3/307,5| v |14121,7| 387,6 
A la marche au trot . .| 4776,0| 4 634,1! 506,0 |400,2] 2177,6[247,7| w" |1003,5| 296,8 
Au travail au pas. . . .| 5 506,9! 5 422,0| 480,9 |465,0! 2502,81343,6| w" |1335,4| 309,4 
Au travail au trot . . .| 6005,2| 5 845,2| 511,9 |397,7| 2 939,31313,92] " |1353,7| 342,6 
Au travail Ă  la voiture .| 6237,6| 6 103,7] 420,8 |393,0| 3040,51376,6| " |1449,9| 404,0 


Si nous nous reportons Ă  l’état des chevaux qui ingĂ©raient et 
digĂ©raient ces quantitĂ©s, nous voyons qu’au repos ils on! presque 
constamment augmentĂ© de poids vif. Quand la ration n’a pas pro- 
duit d'augmentation, il y a toujours eu entretien du cheval ; les nom- 
bres précédents sont donc un peu au-dessus de la ration du strict 
entretien. 

De mĂȘme, la ration de transport au pas a produit un lĂ©ger accrois- 
sement de poids vif chez les chevaux n° 1 et n° 2. Le cheval n° 3, 
avec cette mĂȘme ration, s’est simplement entretenu ; on voudra bien 
toutefois remarquer que, pendant presque toute la durée du mois 
de fĂ©vrier, oĂč il recevait cette ration, il a Ă©tĂ© atteint de diarrhĂ©e, son 
Ă©tat de santĂ© est peut-ĂȘtre la cause de cette diffĂ©rence. La ration 
que les chevaux ont reçue pour le transport au pas est aussi un peu 
trop forte. 


70 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Cette ration a Ă©tĂ© conservĂ©e pour le transport au trot: il s’est 
trouvé que, à cause de la différence d'humidité dans les fÚves, elle 
a été en réalité moins élevée dans cette derniÚre situation que pour 
le transport au pas. Le cheval n° 1 à perdu trùs peu de poids, il s’est 
presque entretenu ; le cheval n° 2 a sensiblement diminué de poids 
vif et le cheval n° 3 a lĂ©gĂšrement augmentĂ©. Cette ration s’est donc 
montrée suffisante pour deux chevaux ; pour le troisiÚme elle a été 
trop faible. 

Au travail au pas, le cheval n° 2 s’est maintenu sans augmentation 
ni perte de poids ; le cheval n° 3 a perdu trÚs peu de poids et le 
cheval n° 1 à subi une diminution plus sensible, quoique peu impor- 
tante. | 

Ces différences s'expliquent si on se reporte aux tableaux du tra- 
vail que l’on trouvera plus loin: les poids ont diminuĂ© en raison 
directe du travail produit ; ce travail n’a pu ĂȘtre mesurĂ©, pour le 
cheval n° 1, qui a perdu le plus de poids, que pendant les premiers 
jours du mois ; il est vraisemblable, si l’on considùre les accroisse- 
ments de la température du cheval produits par le travail, que lors- 
que ce travail n’a pu ĂȘtre Ă©valuĂ©, 1l S'est trouvĂ© ĂȘtre plus Ă©levĂ© que 
celui des deux autres chevaux. | 

On peut admettre, en prenant toutefois seulement les nombres 
fournis par les chevaux n° 2 et n°3, que la ration a été suffisante 
pour leur permettre d'effectuer tous les jours à l’allure au pas, sur 
un parcours d'environ 20 kilomùtres, un travail de traction d’en- 
viron 390 000 Ă  400 000 kilogrammĂštres. 

Au travail au trot, les chevaux se sont aussi diversement compor-- 
tĂ©s : le cheval n° 3 seul s’est entretenu ; les chevaux n° 1 et n° 2 ont 
perdu environ 10 kilogr. chacun. Le travail produit ne suffit pas Ă  
justifier ces différences, car les deux chevaux qui ont perdu à peu 
prĂšs le mĂȘme poids ont fourmi des quantitĂ©s de travail bien diffĂ©- 
rentes (cheval n° 1, 367770 kilogrammÚtres, et cheval n° 9, 
664089 kilogrammÚtres). Le cheval n° 2 à, il est vrai, ingéré 
420 gr. de paille par jour de plus que le n° 1, mais cette quantité 
serait insuffisante pour compenser l'Ă©cart d’environ 300 000 kilo- 
ogrammĂštres que l’on a relevĂ© dans Île travail fourni par ces deux 
chevaux. Le cheval n° 3, qui a produit presque autant de travail que 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 71 


le cheval n° 1 (355 909 kilogrammùtres), s’est maintenu, tandis que 
celui-ci a perdu plus de 10 kilogrammes. 

Jl faut voir dans ces diffĂ©rences, l'influence de l’individualitĂ© noĂ» 
seulement sur la façon d’assimiler et ensuite d'utiliser les aliments, 
mais encore sur l’aptitude qu'ont les chevaux à supporter l'allure du 
trot. Les mĂȘmes chevaux qui, au travail au pas, se sont comportĂ©s 
semblablement, diffùrent d’une façon trùs sensible au travail au trot; 
la diffĂ©rence d’allure a suffi, seule, pour modifier diversement les 
coefficients d’ulilisation des matiĂšres assimilĂ©es. 

Au travail Ă  la voiture, des diffĂ©rences du mĂȘme ordre se mani- 
festent ; en mettant de cÎté les mois d'entraßnement pour ne tenir 
compte que des mois de travail effectif, on voit que le cheval n° 1, 
qui Ă  fourni le plus de travail, a aussi perdu le plus de poids (environ 
17 kilogr. en juillet). Le cheval n° 2, qui a produit le moins de tra- 
vail, a aussi perdu le moins de poids (environ 10 kilogr. en no- 
vembre). Le cheval n° 3, qui n’a perdu que 41 kilogr. environ (sep- 
tembre), a cependant produit un travail représentant sensiblement 
la moyenne des nombres obtenus par les deux autres; encore a-t-il 
consommĂ© une ration plus faible ; ce cheval, en mĂȘme temps qu’il 
s’est montrĂ© meilleur assimilateur des aliments, a Ă©lĂ© aussi meilleur 
utilisateur des principes assimilés. 

Les trois chevaux ayant perdu du poids Ă  la voiture, nous 
admettrons que les quantités moyennes digérées ont été insufli- 
santes. : 

Nous devons renouveler les réserves que nous avons toujours 
faites sur les pertes de poids vif, les moyens de recherches dont 
nous disposons ne nous permeltant pas de les imputer à l’un plutît 
qu’à l’autre des trois facteurs de ces variations, eau, graisse et 
muscle. 

Nous avons déterminé, comme pour les essais au maïs, les rela- 
tions nutritives des ralions ingérées et des quantités digérées de ces 
rations. Nous n'avons pas trouvĂ© d’écarts du mĂȘme ordre que ceux 
observés dans les essais précédents entre les relations des quantités 
ingérées et celles des quantités digérées. 

Voici d’ailleurs les nombres qui expriment les dĂ©nominateurs de 
ces relations, c’est-Ă -dire les poids de substances hydrocarbonĂ©es 


12 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


[amidon + sucre + (graisse X 2.5)] ingĂ©rĂ©es ou digĂ©rĂ©es en mĂȘme 
temps qu’un kilogramme de protĂ©ine. 


CHEVAL NO 1. CHEVAL N° 2. CHEVAL N9 3. 
RS D SE 
Ingéré. | Digéré. | Ingéré. | Digéré. | Ingéré, | Digéré. 

— ———_— 


A UDEDOS AMEL Fe bts MN elle LA ARURE DES 2,17 
2,03 
2,09 
9,07 
2545 


2,04 


» 


ACTA MALCHEANPAS ALL L. CET RE 2.41 


FO OÙ ee ĂčT 
19 C5 
ĂŒ 


A la marche au trot 


| . 
ANT ÉTA VAT AUS DAS EN Le): NE 


| Au travail au trot 


(#2) 
[=] 19 19 — C2 
EO 2 Qt = 1 


19 LO LO RO 9 1 


» 
RO 19 1LO 19 19 19 


19 
eu | 


Il nous resterait maintenant Ă  comparer cette sĂ©rie d’expĂ©riences 
avec les séries antérieures, en tenant compte des quantités de chacun 
des principes nutritifs ingérés et digérés. L'alimentation que nous 
Ă©tudions actuellement se sĂ©pare d’une façon trĂšs nette, par sa 
richesse en protĂ©ine, de celles qui ont fait l’objet des prĂ©cĂ©dentes 
recherches. Cette question est suffisamment importante pour néces- 
siter un chapilre spécial que nous renvoyons à la fin de ce mé- 
moire. 


Slalique de: l'azote. 


La série actuelle d'expériences comporte une alimentation trÚs 
azotĂ©e, et, Ă  ce litre, le bilan de l’azote Ă©tait intĂ©ressant Ă  Ă©tablir ; 
malheureusement il n’a pu l’ĂȘtre que d’une façon trĂšs approxima- 
tive. Nous avons dit dans les mémoires antérieurs que, pour toutes 
les sources oĂč nous pouvons recueillir, Ă  sa sortie de l’organisme, 
l'azote qui a été utilisé, les erreurs qui peuvent affecter nos résultats 
sont des erreurs en moins. Elles proviennent soit de la récolte for- 
cément incomplÚte des productions épithéliales, poils, corne, etc., 
que nous opĂ©rons, soil de l’altĂ©ration des produits azotĂ©s de l'urine 
et de leur exhalaison dans l’air quand, par suite de fermentation, 
ils ont pris la forme ammoniacale. Cette perte s'effectue pendant la 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 173 


journĂ©e mĂȘme de PĂ©mission (on sait que les urines sont recueillies 
toutes les 24 heures), à cause de la rapidité avec laquelle l'urée se 
transforme en ammoniaque. Pour le cas présent nous nous trouvions 
en prĂ©sence de liquides trĂšs concentrĂ©s et les pertes n’en ont Ă©tĂ© 
que plus élevées. On verra, dans le tableau qui résume la statique 
de l’azote, que nous avons constalĂ© des dĂ©ficits qui, s'ils Ă©taient 
réels, correspondraient à la formation de quantités énormes de chair 
musculaire, mais qui en réalité sont dus surtout aux pertes signalées 
plus haut. 


Azote de l'urine. 


L’urine n’a pu ĂȘtre recueillie que pendant les expĂ©riences au ma- 
nĂšge ; les expĂ©riences Ă  la voiture ne se prĂȘtent pas, pour les chevaux 
au travail, Ă  la rĂ©colte de l’urine. Pour les chevaux au repos, elle 
peut ĂȘtre recueillie en tout temps. Les chiffres que nous donnons se 
rapportent aux mois de décembre 1889, janvier, février, mars, avril, 
mai 4890, pour les trois chevaux, juin et juillet pour les chevaux 
n° 2 et n° 3, août et septembre pour le cheval n° 1. 

On trouvera dans les tableaux qui suivent la composition moyenne 
journaliĂšre des urines recueillies. 


TABLEAUX. 


74 


Mois de décembre 1889. 


Poids moyen journalier. . . . gr. 
BISRNILC Nes ie Nolle tetes ee 
Volume correspondant. . . . . CC. 


Azote dosé dans 1 centim. cube. mg. 

Arzote total. 0 ANUS. Te ONET: 
d’oĂč 

Azote total des urines. . . . . gr. 


Volume et poids d’urine correspon- 
dant à l’eau de lavage 


d’oĂč 
Poids total d'urine Ă©mise. . . . gr. 
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes 
d'CINne LEON SLR TE RSR gr. 
MatiÚre minérale dans 5 centim. cubes 
d'urine UPTANSr Ne ete gr. 
MatiĂšre organique dans 5 centim. 
cubes d'urine , . . . . . ARS D 
MatiĂšre sĂšche totale. . . . . . gr. 
HaudeEutTine CCC USE gr. 
Mois de janvier 1890, 
Poids moyen journalier. . . . gr 
DOnsité arte ile th DE 
Volume correspondant. . . . ce. 
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg. 
Arzoto total "51505 Na LAB 
d’oĂč 
Azote total des urines. . . . . gr, 
Volume et poids d'urine correspon- 
dant à l’eau de lavage. . . . . . - 
d’oĂč 
Poids total d'urine Ă©mise. . . gr. 
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes 
fie EME 0 PMR E OÙ QuĂ© gr. 
MatiÚre minérale dans 5 centim. cubes 
F6 Qi 64 ss CON ou gr. 


MatiĂšre organique dans 5 centim. 


cubes'd'uiine .. -. 000 tr 
MatiĂšre sĂšche totale. . . . ., . gr. 
Kaudel’urine.... 0,043, gr. 


.[ 9 260,0 


CHEVAL KX° 1. 


Urine, | Lavage, 
8 714,6 | 1 750,0 
1,0374 | 1,0011 
8 400,4 | 1 730,7 
15,414 2,003 
129,484 3,467 
132,951 


22407 ,9 — 2338" ,3| 194%, 5— 90287 51216 % 6 


8 947,9 
0,300 
0,106 


0,194 
517,5 
8 430,3 


1 813,0 
1,0086 
1 797,5 

1,225 


2,201 


1,0390 
8 912,4 
14,797 
131,877 


134,078 


148,7 = 1548" ,5] 160,0 —1768",8| 144€ 2 — 1188" ,5 


9 414,5 
0,164 
0,085 


0,079 
143,2 
9 271,3 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


CHEVAL N0 2, CHEYAL N9 3. 


Urine. | Lavage. | Urine, | Lavage. 


7321,6 | 1738,0 | 14 479,3 
1,0410 | 1,0090 | 1,0292 
7033,2 | 1 722,4 | 14068,5 
22,124 | 2,498 | 14,156 
155,603 | 4,303 | 199,153 


159,906 2 


7 524,1 


14 702,2 


0,422 0,138 


0,105 0,066 


0,317 0,072 
610,0 394,3 
6 914,1 14 307,9 


8 460,0 | 1727,0 | 8257,0 | 1 783,0 
1,0462 | 1,6092 | 1,0373 | 1,0080 
8086,4 | 1 711,2 | 7960,0 | 1 768,8 
20,701 | 2,044 | 15,032 | 1,046 
167,397 | 3,498 [119,655 | 1,797 


8 636,8 


8 375,5 


0,207 


0,154 


0,095 


0,071 


0,142 0,083 
234,5 134,0 
8 402,3 8241,5 


ALIMENTATION 


DU CHEVAL DE TRAIT. 


7 
[bL 


Mois de février 1890. 
Poids moyen journalier. . . . gr. 
DEnSÉO Ne de ane ns le 
Volume correspondant. . . . . cc. 
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg. 
Anoteitotalf, WE. NEC E Sr ere 


d’oĂč 
Azote total des urines, . , . . gr. 


Volume et poids d'urine correspon- 
dant à l’eau de lavage . . , . . . 


d’oĂč 
Poids total d'urine Ă©mise. , . . gr. 


MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes 
ƒUÉNMOR MUSÉE iso Fi CMS 3 


MatiÚre minérale dans 5 centim. cubes 
d'uriner: 4.4" COR PET 


MatiĂšre organique dans 5 centim. 
cubestarine PULL", gr. 


Matiùre sùche totale de l’urine. gr. 


Hatdoanineet. D. pr 


Mois de mars 1890, 


Poids moyen journalier. . . . gr. 
Densité MNT EE et. CRETE PE 

Volume correspondant. . . . . ec. 
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg. 


Anote total 2h. Proche gr 
d’oĂč 


Azote total des urines. . . 
 . gr. 


Volume et poids d’urine correspon- 
dant à l’eau de lavage. . . . . .. 


d’oĂč 
Poids total d’urine Ă©mise. . . . gr. 


MatiĂšre sĂšche dans 5 centim, cubes 
d’atine!s is CINE SN ET 


MatiÚre minérale dans 5 centim, cubes 
d'urInOl. Mens 4 star o NA SRE: 


MatiĂšre organique dans 5 centim. 
cubes dufine .. . 60 gr. 


MatiĂšre sĂšche totale de l'urine. gr. 
Eau de l’urine. . . ., SAC MEL LE 


CHEVAL NO 1. 


CHEVAL N° 2. CHEVAL N9 3. 


——_. RS D ES CE 


Urine. | Lavage. | Urine. | Lavage. | Urine. | Lavage. 


10 086,7| 1 803,2 | 6 218,2 | 4 720,4 | 9 631,1 | 17°4,3 
1,0380| 1,0070 | 1,0454 | 1 
9 717,5] 1 790,6 | 5948,2 | 1 705,9 | 9 296,4 | 4 712,8 
15,858| 1,263 | 22,079 | 41,308 | 14,309 | 1,028 
154,100| 2,262 [131,330 | 2,231 [133,022 | 1,761 


|, TT" 


156,362 


141% ,7—14 


” 
pl 


o 
LI 


133,56 


r,41 404% ,0—1 


,0085 | 1,0360 | 1,0067 


1 134,783 


0587,6|123°%,1—1275",5 


6 323,8 9 758,6 
0,355 0,134 
0,115 0,057 
0,240 0,077 
429,5 252,4 


5 894,3 9 506,2 


8 669,4 |1856,5 |5144,5 | 1 724,8 | 12264,5| 4 705,1 
1,0446 | 1,0120 | 1,0510 | 1 
8299,2 | 1834,4 | 4866,3 | 1 
19,726 | 1,622 | 24,927 


.[163,710 | 2,975 [106,703 


,0075 | 1,0260| 1,0070 
741,9 | 11953,7| 1 696,1 
1,032 | 10,373] 0,851 
1,767 | 123,996| 1,444 


I — |] © |, TT 


166,685 


108,470 195,440 


150,8—15781,5| 80,6 —8 


8 926,9 
0,181 
0,095 


0,086 
305,9 
8 621,0 


aĂ«r,7 |139°,2—14428",8 


5 199,2 12 407,3 
0,352 0,127 
0,144 0,054 
0,208 0,073 
348,3 307,2 
4 850,9 12 100,1 


Mois d'avril 1590. 


Poids moyen journalier . gr: 
Densité. . . 
Volume correspondant. ce. 


Azote dosé dans 1 centim. cube. mg. 


Azote total . gr. 


d’oĂč 
Azote total des urines. . . . . gr. 


Volume et poids d'urine correspon- 
dant à l’eau de lavage. . . 


d’oĂč 
Poids total d'urine Ă©mise. . . gr. 
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes 
durine . gr. 


MatiÚre minérale dans 5 centim. 
cubes d'urine . . gr. 


MatiĂšre organique dans 5 centim. 


cubes d'urine . gr. 

MatiĂšre sĂšche totale . . gr. 

Eau de l’urine. gr. 
Mois de mai 1590. 

Poids moyen journalier . . . . gr. 


Densité . 
Volume correspondant. ce. 


Azote dosé dans 1 centim. cube. mg. 


Azote total . gr. 
d’oĂč 
Azote total des urines. . gr. 


Volume et poids d'urine correspon- 
dant à l’eau de lavage. . É 


d’oĂč 
Poids total d'urine Ă©mise. gr. 
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes 
d'urine . . gr. 


MatiÚre minérale dans 5 centim. 
cubes d'urine . gr. 


MatiĂšre organique dans 5 centim. 


cubes d'urine . . gr. 
MatiĂšre sĂšche totale. . . gr. 
Eau de l’urine. . gi 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


CHEVAL N° 1. 


CHEVAL N° 2, 


À | 


Urine, | Lavage. | Urine. | Lavage. 
6615,7 | 1872,0 | 6534,3 | 1 788,7 
1,0419 | 1,0095 | 1,0500 | 1,0088 
6349,6 | 1854,4 | 6223,1 | 1 733,1 
15,095 1,390 | 22,478 1,602 
95,847 2,578 |139,882 2,840 
—_—_—— 
98,425 142,722 


170,8 — 178%",0[196€,3 — 13987 ,6|15300,3— 15787 8 


6 793,7 6 666,9 
0,189 0,259 
0,100 0,120 
0,089 0,139 
246,5 328,9 
6 547,2 6 338,0 
6764,8 | 1754,5 | 6801,2 | 1 741,6 
1,0404 | 1,0072 | 1,0506 | 1,0070 
6502,1 | 1742,0 | 6473,6 | 1 729,5 
15,411 | 0,924 | 94,258 | 1,545 
100,203 | 1,610 [157,037 | 2,672 


D 


101,813 159,709 
[404,5 — 1088",7/110€0,4 — 11587 ,7 
1 
6873,5 6 916,9 
0,190 0,209 
0,100 0,104 
0,090 0,105 
251,1 275,2 
6 622,4 8 641,7 


a 


0 —© | 


CHEVAL N03. 


Urine. | Lavage. 


13 009,0! 1 757,3 


1,0295| 1,0071 
12 636,2| 1 744,9 

13,144| 1,155 
166,090! 2,015 


168,105 


13 166,8 
0,118 
0,056 


0,062 
301,8 
19 865,0 


8 143,2 
1,0286 
7 916,8 
11,874 
94,004 


1 830,9 
1,0062 
1 819,6 
0,990 
1,801 


154,7 —1568",0 


8 299,2 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 17 


Mois d'août 1890. Mois de juin 1890. 
= ———————— 
CHEVAL N° 1. | CHEVAL N° 2. CHEVAL N° 3. 
Re TN Re 7 
Urine. | Lavage. | Urine. | Lavage, | Urine. | Lavage. 
Poids moyen journalier. . . . . gr.| 7 770,0 | 1855,4 | 5220,3 | 1 827,7 | 7 780,0 795,0 
Densité. LME ... . . .] 1,0337 | 1,0070 | 1,0476 | 1,0082 | 1,0274 | 1,0070 
Volume correspondant . . . . . cce.| 7516,8 | 1842,5 | 4983,1 | 1812,8 | 7 572,5 | 1 782,5 
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg.| 11,433 0,987 | 19,782 1,438 | 11,642 0,867 
Azote total. . . . . . . . . . . gr.| 85,940 | 41,849 | 98,576 | 2,607 | 88,159 | 41,545 
d’oĂč ne en AE 
Azote total des urines . . . . . gr. 87,749 101,153 89,704 
Volume et poids d’urine correspon- 
dant à l’eau de lavage . . . . . .1459%,1 — 16487 ,5 |131°°,8 = 1388" 11139 7 —1568",3 
d’oĂč 
PoĂŻds total d'urine Ă©mise. . . . gr. 7 984,5 5 358,4 7 916,3 
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes 

ÉUT IT CAMP EL TER MEME UPS 0,150 0,233 0,132 
MatiÚre minérale dans 5 centim. 

CHDES d'ONG 20 UC UET. 0,070 0,115 0,080 
MatiĂšre organique dans 5 centim. 

CHEB QUTIME NN. SN EUCN ET. 0,080 0,118 0,052 
Matiùre sùche totale . . . . . . gr. 280,3 938,4 ‘ 203,4 
Hamde l'urine ere Le gr. 7 604,2 5 120,0 7 112,9 

Mois de sept.1890. Mois de juillet 1890. 
 . 
Poids moyen journalier. . . . . gr.| 6752,0 | 1778,0 | 5233,9 | 1 815,2 | 6 017,7 | 1 839,3 
DEN SILS merde ne ro de ... . | 1,0885 | 1,0078 | 1,0498 | 1,0077 | 1,0380 | 1,0089 
Volume correspondant . . . . . ce.| 6501,7 | 1764,2 | 4985,6 | 1 801,3 | 5 797,4 | 1 823,1 
Azote dosé dans 1 centim. cube. mg.| 13,354 1,168 | 20,768 1,120 | 16,893 1,130 
Aote tntales., RAT ANRT Te gr.| 87,019 | 2,061 [103,541 | 2,017 | 97,935 | 2,060 
d’oĂč CR gene or ee Qr 
Azote total des urines . . . . . gr. 89,080 105,558 99,995 
, 
UE Re M 154,0 == 15987, 9! 97,1 — 1018" ,9 |121°°,9 — 1268" ,5 
d’oĂč 
Poids total d'urine Ă©mise. . . . gr. 6911,9 5 335,8 6 144,2 
MatiĂšre sĂšche dans 5 centim. cubes 

d'urine.) MES RUE, : or 0,191 0,234 0,170 
MatiÚre minérale dans 5 centim. 

cubes d'urine. . . . . «4 1, gr 0,107 0,122 0,093 
MatiĂšre organique dans 5 centim. 

cubes d'urine. . . , . : .:. + gr. 0,084 0,112 0,077 


MatiĂšre sĂšche totale . . . . . ET 254,2 237,9 201,3 


Pau de l'urine. . . , . : . TBE 6 657,7 5 097,9 5 942,9 


18 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Azote dégagé par les fÚces pendant la dessiccation. 


On sait que, pendant leur dessiccation, les fĂšces perdent, sous 
forme d’ammoniaque, des quantitĂ©s d’azote apprĂ©ciables, provenant 
soit de la fermentation de l'urine dont elles ont pu ĂȘtre souillĂ©es, 
soit de la fermentation de leurs principes azotés. Ces fermentations 
s’établissent trĂšs rapidement, surtout pendant les Jours. d’étĂ©, entre 
le moment oĂč les fĂšces sont Ă©mises et le moment oĂč elles sont pla- 
cĂ©es dans l’étuve. Il y Ă  ainsi, pendant ce temps, dĂ©perdition dans 
l'air d’une partie de l’ammoniaque formĂ©e. 

La dessiccation est opérée dans le vide et les produits sont re- 
cueillis pour servir Ă  la dĂ©termination de l’azote dĂ©gagĂ©. On trou- 
vera dans le tableau suivant les poids moyens d’azote recueilli par 
jour durant la dessication des fĂšces. 


CHEVAL N° 1. CHEVAL N° 2. CHEVAL N° 3. 
A  — —  —— 
Poids ids Poids 


moyen moyen 


Mois d'expériences. [journalier] Mois d'expériences. |journalier| Mois d'expériences. |journalier 


d'azote d'azote d’azote 


recueilli, recueilli. recueilli, 


DĂ©cembre 1889 . . . DĂ©cembre 1889 . . . DĂ©cembre 1859 . . . 
Janvier 1890... . . Janvier 1890 . . . . Janvier 1890 . . . . 
FĂ©vrier 1890, : . . : FĂ©vrier 1890 . 
.
, FĂ©vrier 18901... 
Mars 1390 Mars 1890 Mars 1890 

Avril 1890 Avril 1890. . . . Avril 1890. 

Mai 1890 Mai 1890 Mai 1890 

Août 1890 Juin 1890 Juin 1890 

Septembre 1890 . . . Juillet 1890 Juillet 1890 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


19 


Azote des poussiĂšres de pansage et des poils recueillis pendant 


la tonte du cheval. 


Les quantitĂ©s d’azote fournies par les produits du pansage quoti- 
dien des chevaux, ainsi que les poils provenant de la tonte sont 


données par le tableau suivant : 


CHEVAL N° 1. CHEVAL N° 2. CHEVAL N° 3. 


EE À = D ——  — 


Pails Poils Poils 
Azote Azote 
et et et 


poussiĂšres correspon- poussiĂšres correspon- poussiĂšres correspon- 


re- re- re- 
cueillis, ur cueillis. dant. cueillis. 
Gr 
DĂ©cembre: 1889) MM Lee 0 22 
JABVLCRIS ONE detente D 15 
HÉVAET OT AN NS ete ae UE 49 
DTALE ASIE ET RS N Ut PE / 4,739 76 
AVEUUIBI0 TRS Mer ie 43,054 231 
MAL SU ES RNe Men ereue ‘ 79,228 310 
A ER 9 PSE EE EEE ER PE ON 2 25,266 190 
CN CC RCE RE TELA 2 27,565 260 
A'OEASION. ENS MATE Tee 2,95 22,213 210 
Septembre 18902... ; .!. 5: 30,670 210 
Octobre 1890 0.2. 1 25 65,410 1070 
Novembre 1890 er, 13,630 15 
Soit une production moyenne 
journaliĂšre de. . . , .... 2 1,168 " 


. Les pieds ont été tondus. 
. 630 gr. provenant de la tonte, 
. 50 gr. provenant de la tonte, 


CD 1O 


= 


Azote de la corne. 


Azote 


dant. 


5,803 
23,688 
40,703 


. 890 gr. provenant de la tonte. 


La corne enlevée aux chevaux pendant la pose des fers est aussi 
une source d'azote oĂč nous pouvons puiser. On trouvera dans le 


Fr. 


80 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


tableau qui suit les poids de corne recueillie et les quantitĂ©s d’azote 
correspondantes. 


CHEVAL NO 1. CHEVAL NO 2. 


EE EE — 


Corne Corne Corne 
Dates. re- Dates. re- Dates. r'e- 
cueillie. cueillie, cueillie. 


ES RS SO | En ONCE À Re 5 nee come em meme deco mmeen 


Gr. Gr. Gr. 


31 décembre 1889. . 


5 décembre 1889. . 


23 décembre 1889. . 


11 février 1890 . . . 140 7 janvier 1890. . . 70 9 février 1890, . . 100 
19 février 1890 . . . 190 19 janvier 1890. . . 150 10 mars 1890. . . 930 
12:mars 1890 |. |. .”, 110 23 janvier 1890. . . 140 30 mars 1890. . . . 130 
21 mars 1890 . . . . 60 11 avril 1890. . . . 120 20 avril 1890. . . . 150 
7:avril 189040: 110 25 avril 1890. . . . 50 30 avril 1890. . . . 80 
16 mai 1890. . 1.0. 290 2 mai 1890:, . . . 70 5'juin 189057, 70e 50 
20 mai 1890. . . . . 60 12mai 1890 un. ue 50 30 juillet 1890 . . . 940 
2 juillet 1890. . . . 110 19/mai 1890.25, 70 20 août 1590 . . . . 30 
| 16 juillet 1890. . . . 60 29mai 1890 . 1: 20 7 octobre 1890. . . 150 
21 août 1890... , .!. 10 | 25 juillet 1890 . . . 30 
21 septembre 1890. . 310 21 août 1890 . : . . 80 
15 novembre 1890. . 180 2 septembre 1890 . 130 
6 octobre 1890. . . 230 
27 octobre 1890. . . 50 
25 novembre 1890 . 110 
Soit pour 320 jours Soit pour 355 jours Soit pour 288 jours 
un total de . . , 1 560 un total de. . 1 370 un total de. . . 1 160 
Moyenne par jour. .| 4,875 { Moyenne par jour . 3,859 | Moyenne par jour . 4,028 


1. Corne non recuelllie. 


La production moyenne de la corne a donc été par jour: 


487,875 
3 ,859 
,028 


Pour le cheval n° {. 
Pour le cheval n° 2. 
Pourile cheval 1035-14 PIN TEE RENE 4 


Un Ă©chantillon moyen de la corne produite par les trois chevaux 
a fourni à l'analyse 11.90 p. 100 d’azote, les chevaux ont donc 
utilisé chaque jour à la production de la corne: 


Le cheval n° 1. 05,580 
Le-cheval. 092.25 Ar SR VER 0 ,459 
Le cheval n° 3. 0 ,479 


Azote de la sueur. 


Nous n'avons pas, dans cette sĂ©rie d’essais, fait de nouvelles tenta- 
tives pour dĂ©terminer la quantitĂ© d’azote Ă©liminĂ© par la transpiration 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 81 


cutanée. Nous conserverons donc les chiffres obtenus en 1888 et 
nous admettrons qu'un cheval au repos perd chaque jour, par la 
sueur, 45,305 d'azote, tandis qu’un cheval au travail en perd 28,179. 

Toutes les données précédentes nous permettent d'établir dans le 
tableau suivant le bilan de lazote : 


DIF- 
FÉRENCE 
entre 
VPazote du poids 

digéré 
et l'azote | des chevaux. 


VARIATIONS 


PROTÉINE 


protéine. 
de la sueur 
total rendu. 


Q 
Ă« 
«| des urines. 


rendu. 


des poils 
et du pansage. 
volatil des 


Gr. Gr. 


a | de la corne. 


[P) 
“+ 


Gr. 


Cheval n° 1. 


DĂ©cembre 1889 .| 986,0/157,760/132,951/1,120| 4,651|0,580 5[140,607| —17,153| Augmentation. 
Janvier 1890 . .| 1005,0/160,800|134,078/1,120| 3,30210,580 140,385] — 920,415 | Augmentation. 
FĂ©vrier 1890 . .| 1300,8[208,128/156,362/1,120| 7,054|0,580 2 167,295] —40,833| Diminution. 
Mars 1890. . . .| 1 306,2[208,902/166,685/1,120| 5,782/0,580|2 176,846| —32,646| Diminution. 
Avril1890 . . .| 815,6[130,496| 98,425/1,120| 4,427|0,580 105,858] — 24,638 | Augmentation. 
Mai 1890 . . . .| 850,3/140,848/101,813/1,120| 5,39710,580 5[110,245| —30,633| Diminution. 
AoĂ»t 1890. . . .| 705,3]112,848| 87,749/1,120| 2,654\0,580/1,305| 93,408| —19,410| Augmentation. 
Septembre 1890.| 789,9/126,384| 89,080/1,120| 2,9840,580 95,069] —51,315| Augmentation. 


Cheval n° 2. 


DĂ©cembre 1889 . | 1153,1[184,500/150,906/1,168| 4,025[0,459 166,883 Augmentation. 
Janvier 1890 . .| 1310,7|209,712/170,895|1,168| 5,067|0,459 179,768 Entretien, 
FĂ©vrier 1890 . .| 1063,4/170,144/133,561|1,168| 2,67010,459|1,505|139,163 Augmentation, 
Mars 1890. . . .| 821,6|131,456|108,470|1,168| 2,131|0,459 113,533 Augmentation, 
Avril 1890 . . .| 1052,7/168,432/142,722|1,168| 3,64110,459 149,295 Diminution. 
Mai 1890 . . . .| 1252,6|200,416/159,709|1,168| 3,230/0,459 166,745 Diminution, 
Juin 1890. . . .| 772,4/193,584|101,183/1,168| 2,349/0,159/1,305 106,464 Augmentation, 
Juillet 1890. . .| 808,8/120,408/105,558/1,168| 2,018/0,459/1,305/110,506 Augmentation, 


Cheval n° 3. 


DĂ©cembre 1889 .| 1394,7|223,152 0,980! 8,873/0,479|2 214,738 Diminution. 
Janvier 1890 . .| 906,7|145,072 0,980! 3,80910,479 128,025 Augmentation. 
FĂ©vrier 1890 . .| 1207,0|193,120|134,783/0,980| 5,695/0,479|1,305|143,242 Entretien, 
Mars 1890. . . .| 1077,6|172,416/125,440|0,980 210,479|1,305|132,486 Augmentation, 
Avril 1890 . . .| 1502,4/240,384/168,105|0,980 0,479 | 2 188,977 Entretien, 
Mai 1890 . . . .| 753,3/120,528| 95,80510,980| : 0,479 103,445 Entretien. 
Juin 1890. . . .| 780,11124,816| 89,704|0,980 50510,479|1,305| 96,973 Augmentation. 
Juillet 1890. . .| 756,41121,024| 99,995|0,980 0,47911,305|111,542 Augmentation. 


ANN, SCIENCE AGRON, — 1, — 1893. 6 


82 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Dans tous les cas, et pour chacun des chevaux, il y a eu un déficit 
d'azote, et ce déficit est quelquefois trÚs élevé ; on devrait constater 
la formation de chair correspondante. Dans 14 cas seulement il y a 
accroissement de poids vif, dans 4 il y a entretien et dans 6 ilya 
perte de poids vif; les accroissements, Ă  trois exceptions prĂšs, ne 
correspondent pas aux dĂ©ficits d’azote constatĂ©s. Les mois pour les- 
quels la concordance existe sont : pour le cheval n° 2, mars et juin, 
oĂč les accroissements de poids sont respectivement 11 kilogr. et 
12 kilogr., et pour le cheval n° 3, juillet, oĂč l’augmentation est 
d'environ 6 kilogr., ce qui fait par jour 355 gr. en mars et 400 gr. 
en juin pour le cheval n° 2 et 193 gr. en juillet pour le cheval 
n° 5. 

En admettant que ces accroissements soient constitués par du 
muscle tel qu’on le trouve dans le corps d’un animal vivant, c’est- 
à-dire contenant environ 70 à 795 p. 100 d’eau et dosant 4.5 p. 100 
d'azote, ils nécessiteraient, pour le cheval n° 2, en mars 158,975 
d'azote par jour, et en juin 18 gr. ; et pour le cheval n° 3 en juillet, 
85,689. Or, d’aprĂšs le tableau, les quantitĂ©s disparues sont respec- 
tivement 178,993, 185',080 et 98',482. 

Dans tous les autres cas, les quantitĂ©s d’azote disparues ne parais- 
sent pas avoir élé entiÚrement employées à la formation de tissu 
musculaire. Beaucoup de ces quantités sont exagérées par les pertes 
importantes provenant de la fermentation de l'urine, et dont nous 
avons dĂ©jĂ  parlĂ© ; il est regrettable que nous n’ayons aucune donnĂ©e 
nous permeltant d'Ă©valuer, mĂȘme approximativement, ces pertes, 
qui ont dĂ» beaucoup varier, pour chacun des chevaux et pour les 
différents mois d'expériences, avec la concentration des urines et la 
température extérieure. 

Nous avons d’ailleurs, montrĂ© dans les mĂ©moires antĂ©rieurs, Ă  
quelle erreur on se trouve exposĂ© quand, dans l’étude des varia- 
tions de poids d’un animal, on nĂ©glige un seul facteur de ces va- 
riations. Or, l’étude des migrations de la graisse nous est rendue 
impossible par le fait que les produits de la respiration ne sont pas 
recueillis. 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 83 


Stalique de l'eau. 


Nous pouvons mesurer avec une exactitude suffisante, l’eau qui 
entre dans le corps de l’animal, en pesant soigneusement sa boisson 
et en dosant l’eau qui lui apportent ses aliments. Par contre, nous 
ne pouvons dĂ©terminer directement qu’une partie de l’eau que l’a- 
nimal rejette, celle qu'il rend dans l’urine et dans les 'fùces. L’eau 
perdue par exhalaison pulmonaire et par transpiration cutanée doit 
ĂȘtre dĂ©terminĂ©e en bloc, par diffĂ©rence, et encore cette dĂ©termina- 
tion est-elle soumise Ă  l'erreur qui peut rĂ©sulter de la fixation d’eau 
par les tissus de l’animal, ce qui diminue le poids de l’eau gazeuse 
excrĂ©tĂ©e, ou de l'Ă©limination d’une partie de l’eau constituant ces 
tissus, ce qui l’augmente. 

On trouvera, dans le tableau suivant, toutes les données dont 
nous disposons pour Ă©tablir la statique de l’eau. Nous avons joint Ă  
toutes ces données, dans la derniÚre colonne, les pertes de poids des 
chevaux pendant le travail ou la marche, car ces pertes de poids 


sont constituées, pour la plus grande partie, par une élimination 
d’eau Ă  l’état gazeux. 


4. | PERTE 
RE DIFFÉ 


rence |d por SITUATION 
RENTE : entre cheval 
DATES. des totale d totale l'eau on pendant du 
e des sommée le 
bue, four- Lu EE PR pa et Peau es cheval, 
rages. | sommée, ; 5 cueillie, recueillie, | OU Ja 
marche. 
EEE EEE 
Gr. Gr, Gr. Gr. Gr. Gr, Gr, Gr, 
Cheval n° 1. 
DĂ©c. 1889 . .| 20 162,9! 1 159,2| 21 322,1| 8430,4| 7584,1|16014,5! 5% 307,6 "| Repos. 
Janvier 1890.| 19 527,7| 1321,0| 20848,7| 9271,3| 7933,0| 17 204,3| 3644,4| 3630 |Marche au pas. 
FĂ©vrier 1890.|249252,8| 1 420,0] 25672,8| 9953,8| 7 519,0! 19025,2| 6647,6| 5130 |Travail au pas. 
Mars 1890 . .126587,7| 1 474,6| 28 062,3! 8621,0| 9597,2| 18 218,21 9944,1| 7 874 |Travail au trot. 
Avril 1890. .1 17 182,8| 1094,0| 18 288,6! 6547,2| 7592,3| 14 139,5) 4149,1 n_ |Repos. 
Mai 1890. . .| 23 103,5| 1 115,7! 24219,2| 6622,4| 9624,7| 16 247,1] 7972,1| 6572 |Marche au trot. 
AoĂ»t 1890 . .[22196,8| 082,8 23197,6| 7604,2| 8487,0|16091,2| 7106,4 ” |Repos. | 
Sept. 1890. .| 18 848,3| 1010,6| 19 858,9! 6657,7| S070,4| 14728,1| 5 130,8 ” | Repos. 


84 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


EAU DIFF 


7 


SITUATION 


, 
tale l’eau con-| pendant du 
des sommée le 
con- lux fi re- et l’eau | travail 
; urine. Ăšces. at ser p 
somméc. cueillie, [recueillie, | Ou la 
marche. 


Gr. Gr. Gr. Gr, 


totale te 


cheval. 


Cheval n° 2. 


DĂ©c. 1889 . .| 15419,3| 1 215,7| 16 635,0[ 6914,1| 7 890,3| 14 804,4 2 099 | Marche au pas. 
Janvier 1890. | 19029,0| 1 438,4] 20 467,4! 8402,3| 8174,0| 16 588,3 524 | Travail au pas. 
FĂ©vrier 1890.| 13 502,5] 1244,8| 14 747,3| 5894,3| 6 867,0] 12 791,3 Repos. 
Mars 1890 . .| 14 805,2] 1 220,0| 16125,2| 4 850,9| 8559,7| 13 410,6 Repos. 
Avril 1890. .| 20 570,3| 1 217,1| 21 787,4| 6338,0| 8552,8| 14 890,8 Marche au trot. 
Mai 1890. . .| 31 538,0| 1 318,5] 32856,5| 6 641,7| 10 091,0] 46 732,7 Travail au trot. 
Juin 1890 . .| 18093,3| 937,2| 19 030,5] 5120,0| 8 998,5] 14118,5 Repos. 
Juillet 1890 .| 46514,5| 4 002,0! 17516,5| 5097,9| 7 389,9] 12 487,8 Repos. 


Cheval n° 3. 


DĂ©c. 1889 . .| 25 699,3] 1 328,6| 27 027,9| 14 307,9| 9 760,8 6 Travail au pas. 
Janvier 1890.| 29 881,9] 1 221,9] 24103,8| 8241,5| 12 702,0 43, Repos. 
FĂ©vrier 1890. | 25 566,0| 1 303,2| 26 869,2! 5 506,2] 13 991,0 À Marche au pas. 
Mars 1890 . .| 32 915,5| 1 317,6| 34 233,1] 12 100,1| 16 718,8 Marche au trot. 
Avril 1890. .| 32 115,0| 1 363,0| 33478,0| 12 865,0| 11 064,4] 23 96 Travail au trot, 
Mai 1890. . .1 24 853,2] 877,4 25 730,6| 8095,9| 10 683,1 7 Repos. 
Juin 1890 . .[27491,3| 882,8| 28 374,1| 7712,9| 44 005,9 s Repos. 
Juillet 1890 .|21081,6| 945,4! 22 027,0] 5 942,9| 10 363,5| 16 306,4 Repos. 


Les nombres qui, dans la situation de repos, représentent la diffé- 
rence entre l’eau totale consommĂ©e et l’eau recueillie dans les urines 
et les fĂšces devraient nous donner, pour chaque cheval, la mesure de 
l’eau expirĂ©e et perspirĂ©e, mais nous venons de dire que la fixation 
d’eau dans les tissus ou l’élimination d’eau de ces mĂȘmes tissus peut 
fausser les résultats. Les écarts observés dans les chiffres relevés sur 
chaque cheval viennent appuyer cette assertion. 

On voit, en effet, le cheval n° À Ă©liminer successivement en dĂ©- 
cembre 5 3078",6, en avril 41496" 1, en août 71065,4 et en septembre 
51306",8 ; le cheval n° 2 en février 1 9566',1, en mars 21745",6, en 
juin 4912 gr. et en juillet 5028#",7; le cheval n° 3 en janvier 
31606°,3, en mai 6 9515,6, en juin 6 655%°,3 et en juillet 5 7205',6. 
Les diffĂ©rences de tempĂ©rature des mois oĂč ces chiffres ont Ă©tĂ© 
obtenus ne suffisent pas Ă  justifier certains de ces Ă©carts, on voit 
mĂȘme le cheval n° 1 Ă©liminer plus d’eau en dĂ©cembre qu’en avril. 

D'autre part, pendant le travail ou la marche, les quantitĂ©s d’eau 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 85 


perdue par le cheval et constatées par la balance sont quelquefois 
égales ou supérieures aux nombres que la colonne des différences 
donne comme perte totale de la journé@; il est évident, dans ce cas, 
que le cheval a cĂ©dĂ© de l’eau de ses tissus, ce qui a pu masquer la 
formation de chair accusée par la statique de l'azote. 

Pour terminer, faisons remarquer qu’il existe des diffĂ©rences no- 
tables, pour les trois chevaux, entre les nombres reprĂ©sentant l’eau 
éliminée dans des situations correspondantes. 


Du travail produit. 


1° Au manÚge. 


Le travail au manÚge a consisté, comme dans les séries précé- 
dentes, dans l’exĂ©cution, chaque jour, de 700 tours de manĂšge : 
350 tours le matin et 350 tours le soir. Le cheval qui Ă©tait Ă  la ration 
de transport, attelĂ© derriĂšre la flĂšche, effectuait le mĂȘme parcours, 
lequel, la piste parcourue ayant une longueur de 28",965, corres- 
pond Ă  20 275 mĂštres. Ces chiffres doivent ĂȘtre un peu modifiĂ©s en 
ce qui concerne la période du travail au trot. Le cheval qui travaille 
au manĂšge, Ă  cette allure, a une tendance constante Ă  se Jeter en 
dehors de la piste en s’appuyant sur le trait extĂ©rieur. Par ce fait 1l 
augmente d'environ 0",15 le rayon de la circonfĂ©rence qu’il parcourt. 
Le cheval qui suit sans effectuer un travail de traction a une tendance 
contraire, il marche en dedans, diminuant le rayon de la piste d’un 
nombre égal, soit 0,15. Il en résulte que, pour le cheval au travail 
au trot, un tour de piste devient Ă©gal Ă  29,91 et, pour le cheval Ă  la 
marche au trot, Ă  28",09, soit, pour le premier, un parcours total 
quotidien de 20 937 mĂštres, et, pour le second, 19 614 mĂštres. 

Le travail a Ă©tĂ© mesurĂ© Ă  l’aide du totalisateur Leclerc, dont il a 
dĂ©jĂ  Ă©tĂ© parlĂ©, Le travail produit par le cheval n° 1 en fĂ©vrier n’a pu 
ĂȘtre dĂ©terminĂ© par suite d’un accident survenu au totalisateur. 

Les tableaux qui suivent renferment les principales données, rela- 
tives au travail, que nous avons pu recueillir : sa durée, sa mesure 
exprimée en kilogrammÚtres, les pertes de poids du cheval au tra- 
vail et du cheval à la marche et l'accroissement de la température 
du corps du cheval pendant le travail. 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMÏIQUE. 


CHEVAL NO 3, — Travail au manùge au pas. 


CHEVAL No 2, 


DATES. Marche au pas. 
NS — OBSER- 
Fa 1 Nonibre Pertefkle poids ÉlĂ©vation de la] Poids moyen |Perte de poids 
- Durée L température dul du chevall du cheval! VATIONS. 
DĂ©- \ de tours de la | du cheval pen- 
du travail. l AS cheval pendant! pendant le] pendant la 
ARS roulette. dant le travail. | [Ă  travail. travail. marche, 
ë TT 7 © a l 
1889. |Matin. Soir. | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin| Soir, | Matin| Soir. | Matin| Soir. 
Min. | Min. Gr. Gr. | Deg. | Deg. | Kil. | Kil. | Gr. | Gr. 
1 120 125 0 u 2200 | 2200! 02 0 1 |468,21467,3| 300! 1 500 
2 128 148 " u 1 440 | 1 840 (OR 0 2 |461,01469,7 mn | 1400 
3 122 127 | 5319 | 5020 | 1290 | L 360 6 2 0 1 |460,21462,2) 700! { 400 
4 122 126 | 5157 | 5 075 | 1 900 30 0 0 0 0 1462,11472,8] 600! 4 000 
5 128 130 | 4677 | 4540 | 1 020 | 1730 0 1 0 Q |460,71470,5| 4110! 800 
6 129 128 | 4387 | 4165] 1 110 | 1700! 02 0 1 |468,81463,5| 1200] 900 
7 132 129 | 3 896 | 36341 2400 | 1450! 0 0 0 1 |457,51467,7| 800] 24100 
8 128 | 427 | 3907 | 3598 | 1 290 | 20601 0 0 | 0 2 |458,51469,4| 1700! 900 
9 129 124 | 4055 | 3 890 | 1 430 | 1 630 0 0 0 0 |458,91467,81 500! 1 100 
10 125 132 | 3775 | 3 889 | 2 350 | 2 500 0 4 0 3 [458,71466,7! 1 400! 900 
ai! 125 126 | 3 878 D 1510 1 0 2 0 1 |457,4| 700: 1" 
12 128 126 | 4318 " u 2 640 0 [ 0 0 un  |4066,7 u | { 800 
13 128 | 4928 | 4742 | 4044 | 1540 | 12901 o 1 | 0 5 |460,0[468,5| 1 800| 1 000 
14 125 122 | 4643 | 5 362 | 2 150 | | 700 02 0 1 [460,4/468,1[ 700! 900 
15 119 122 | 4332 | 5 401 | 1349 | 1680! 0 2 0 1 |459,91469,8[ 900! 1 400 
16 124 135 | 3 601 | 5 602 | 1 920 | 2 120 0 I 0 0 [459,61468,31 1 100! 400 
7 125 116 | 4041 | 5 481 | 2640 | 1 990 0 0 0 0 |462,21471,41 300! 1 400 
15 119 111 | 5285 | 5455 | 1 840 | 2 200 0 0 0 2 |463,0|469,41 1 200! { 500 
19 118 112 | 5652 | 5 137 | 1 890 | 1 300 0 2 0 2 1455,71461,7| 4 200| 1 000 
20 113 110 | 5205 | 59011 1610 | 1660! 01 9 1 [458,31467,51 1 400! 700 
21 Al4 110 | 5497 | 5412 | 1970 | 2500 | O0 0 0 2 |456,41466,6| 1 800! 1 S00 
22 101 113 u 5 1261 2700 | 3 000 0 4 0 4 |458,11461,3| 200! 1 100|Pluie. 
23 113 | 110 | 5770 | 5624 | 3500 | 28701 0 4 | 0 4 |a57,5[461,21 4 400! 1 500 
24 [Eu 110 | 6011 " 240 | 2250 0 3 0 3 1455,9[464,51 2 100! 1 090! Pluie, 
95 115 140 Ü 5 696 | 2230 | 2 300 O1 0 1 |456,0/465,3| 200! 500 
26 118 114 | 5487 | 5973 | 1940 | 2 490 0 2 0 2 |450,61464, 600! 2 000 
27 116 114 | 5706 | 5 785 | 1640 | 2 760 01 0 2 [458,41464,21 500! 900 
28 116 111 | 5899 | 6290! 2 420 | 2 170 0 Ô 0 2 |456,41462,7 600 | 4 000 
29 117 109 | 4263 | 5089! 2 160 | 1 460 0 3 0 4 |455,21462,9] S00! 1 500 
30 117 112 | 5492 | 5910 | 2320 | 1730] 0 2 0 3 |453,21461,41 590! 1 500 
31 118 117 | 5884 | 56811 2090 | 1380[ 00 0 1 |457,S1463,21 1 100! 1 800 
Moy. .[120,51|119,381 4647 | 5095 | 1 869 | 1958 | 0 17 | 0 16 " " 934| 1 109 
4. Le 11, bascule en réparation, 
T il matin . 4 647 X 40,8997 — 190 061 kilogrammùtres. 
ravall Moyen . É = Ă« , 
; soir. 5 095 XC 40 ,8997 — 208 384 _ 
ravailiati a cal minimum. 3 601 XX 40,8997 — 147.280 
aval] naun . 0 3 YLE : 
maximum. 6011 X40,8997 — 245 845 = 
Travail d ‘ minimum. 3 998 x 40,8997 = 147 157 _ 
ravail du soir. . ; : per 
maximum 6 290 X 40,8997— 257 299 — 


DATES. 


Janvier 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 


CHEVAL NO 2, — T:avail au manùge au pas. 


Em 


Durée 


du travail. 


2 a, 


Nombre 
de tours de la 
roulette. 


TT , 


du cheval pen- 
dant le travail 


ee 


température du 
cheval pendant 
le travail, 


a 


Perte de poids ÉlĂ©vation de la] Poids moyen 


du cheval 
pendant le 
travail. 


CHEYAL No 1. 
Marche an pas. 


Perte de poids 
du cheval 
pendant la 
marche, 


— 


VATIONS. 


1890. 


Matin.| Soir, | Matin.| Soir. | Matin. Matin.| Soir. | Matin Matin 


Min. | Min. 


Gr. Deg. Gr. 


1 S0Ă» 
9 500 
3 100 
1 800 
2 700 
1 990 
1 (90 

360 
2 140 


2 400 


122 
114 
117 
119 
115 
{10 
123 
118 
123 
118 
117 
117 
114 
130 
126 
128 
125 
117 
151 
133 
128 
122 
123 
125 
125 
124 
120 
119 
122 


123 


2 400 
{ S00 
1 500 
2 360 
2 300 
2 430 
2 330 
1 980 
1 820 
1810 
1 330 
1 460 
1 510 
2 S00 
2 000 
1 490 
1 030 
1 560 

800 

200 
{ 090 

440 
1 540 
1 390 
2 240 
1 500 
L 580 


CE 


di 


2 600 20 0 

2 000 { 0 

1 700 

2 100 

2 200 

1 900 

2 000 

L 800 

{ 500 

2 000 

2 300 

{ 900 

2 200 

2 300 

2 000 

3 809 | 2000 

3 969 | 1400 
" 1 600 

4 150 | 2 500 

4 092 

3 915 

3 136 

4 100 

3 825 

3 937 

4374 

4 146 

4 053 

3 783 

3 943 


118 
116 
108 
114 
106 
111 
114 
117 
AiLA 
113 
slt 


F5 © ce 


Pluie, 


__—= WE + 


ce 


19 ƒ I 


2] 


t9 © 


EC 
G 
= Lé—- © = 


re 
w3 


Qt 19 = = 


4 242 


4 015 


+ 
ee] 


= RO 1 RO «© © © D — 
OO] 1 = Ă  OT RS 


CS 


CS 


CR TENTE DCE MT 


pe 


es 
— 19 19 © À 19 1$ 
cs Ăš 


D 
ES 
+ 


e € 
= 
I © 
. 


ƒ 1 — 
= pe 


QE 19 


1 910/Pluie. 
2 090 
L 900 
2 090 
1 960 
2 080 
10 
1 310 
1790 


LS 
= 
[=3 


1 


1 


© a 


9 © RO 9 19 F9 1© 9 RO t© 
[214 


PA 
© 


1 900 
680 


co 
Ds 


= 
2 


122,20 4279 1955 


Ăš ue Ă  Le Re REU ; 
RL ose. | path ; 4 258 X 10,8997 — 174 151 kilogrammùtres. 
soir. 4279 X 10,8997 = 175 010 — 
Tail ati ENnInARE 3 id XX 10,8997 = 138 691 — 
maximum. 4 955 X 10,8997 — 202 658 = 
ini 3 7$ 10.$997 = 154 72 = 
DANS cru 3783 XX 40,599 — 154 724 
maximum. 5 807 X 40,8997 — 237 505 == 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Durée 


du travail, 


Matin.| Soir. 


Min. 


136 


CHEVAL N°0 1. 


Nombre 
de tours de la 
roulette, 


Le 
Matin.| Soir. 


— Travail au manùge au pas. 


Perte de poids ÉlĂ©vation de la| Poids moyen 


température du 
cheval pendant 
le travail, 


du cheval pen- 
dant le travail, 


Matin.| Soir. | Matin. | Soir. 


Gr. 


2 800 
1 600 
1 800 
2 700 
2 600 
2 600 
2 200 
2 100 
2 900 
2 400 
2 600 
2 600 
2 900 
3 C00 
3 300 
3 600 


D x + 


ot 


SO On mm © CE oo 


dĂ© Pc 19 at co Or ÉD TI C0) CE M OL TO (0000700 


du 


cheval 


peudant le 
travail, 


Matin 


Soir. 


486,3 


485,8 


[489,6 


488,1 
487,4 
488,5 


482,0 


CHEVAL No 3. 
Marche au pas. 


Perte de poids 
du ehevyal 
pendant la 
marche, 


A , 


Matin| Soir. 


1 190 
1 10 
1 140 
1 100 
1 170 
1 070 
1 300 
1 460 
2 380 
1 890 
1 370 


OBSER- 


VATIONS. 


A 


Matin | Soir. 


Pluie, | Pluie. 


1, Quatre poids de 40 kilogr ont été mis en surcharge sur le chapeau du manÚge du 5 au 11; du 12 au 28, 
8 surcharges. 


2, Un accident survenu au totalisateur a empĂȘchĂ© de mesurer le travail Ă  partir du 12 au soir. 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 89 


CHEVAL No 3, 
Marche au trot, 


© © © — OBSER- 


:.ÉlĂ©vation de la] Poids moyen| Perte de poide 
Durée Nombre L à qe température du| du cheval] du cheval] VATIONS. 
de tours de la U:CREVA  PED-| Chevalpendant| pendant le] pendant la 

roulette, dant le travail! je travail. travail. marche, 


A, ae À, ee |, 


CHEVAL N° 1. — Travail au manùge au trot. 


du travail. 


Matin.| Soir. | Matin.| Soir, | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin| Soir. | Matin Matin| Soir. 


Min, | Min, Ge, Gr. 2 Ă  il. | Kil. | Gr. 


= 


69 3 000 | 3 800 
71 400 | 3 100 
74 2 900 | 3 100 
3 600 | 3200 

3 300 | 3 100 

3 800 | 4 400 

3 700 | 4 100 

3 500 | 4200 

4 400 | 4500 

3700 | 2 600 

3 600 | 4 300 

3 600 | 4 500 

5 129 4100 | 4 300 
3 070 4700 | 5 400 
5 037 4 000 | 4 500 
3 770 4100 | 4700 
4 348 4200 | 4 800 
3 808 3000 | 3 500 
3 865 3400 | 3600 
4 488 3000 | 2400 
4 078 3 200 | 3 600 
3 744 3200 | 3500 
4 071 3 000 | 3 700 
3 950 3200 | 3500 
4 824 3 600 | 3 200 
4 307 -4 400 | 4 200 
Ă  150 3 400 | 4100 
5 464 5 400 | 6 300 
5 281 5 500 | 5 700 
5 027 4400 | 6 100 
4 467 4 400 | 4 800 


485,8] 1 300| 1 600 
482,5| 1 900| 1 600 
482,0| 1 300! 2 100 
481/8| 1400! 900 
476,6] 4 600! 1 900 
480,2] 1 500| { 900 
479,6] 2500| 2 300 
479,1] 1000! 2 300 
477,0! 1500| 1 500 
478,8| 1 700| 2 200 
477,6] 100! 1 500 
471,2] 2 000| 2 100 
473,4| 2 300| 2 300 
473,7] 1 800| 2 400 
473,2] 9 100| 2 200 
51471,9] 1 600! 2 500 
469,81 2 200| 2 300 
469,8] 2 000! 2 400 
470,2] 2 600| 2 500 
471,9] 1200| 900|Pluie, | Pluie. 
472,0! 1 800| 2 200 
473,2| 1 800| 2 000 
470,8] 1 500| 1 600 
473,91 1 100! 1 700 
465,91 2 000! 1 690 
490,6! 2 100! 2 500 
469,0] 2:00! 1 000 
470,1] 2200! 3 600 
470,6| 2 400| 2 300 
471,4] 3 300| 3 200 
467,7| 2 000! 3 900 


en - 
m © © OO "1 OĂč Qt À C0 L9' 


ne D ble be fe be bn bin 
© © “1 OO Or & © 19 


ro 
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ne bn À = © mm © on on 0 On nn One = On me = © = © © 


= re mb À pr À Pr Ă  © © ©0000 On © em Or re = © © © 
CO 29 À © = Pr © = ĂŠ © © 1 0 CS O0 CO 9 OO += ĂŠĂŠ © D = © © © = J © © © 
L9 PO 9 OO 9 © © E9 O0 O0 € © © OO NU D © À DO = = D © © © © O0 D 


Moy. .| 73,83 | 73,83 | 4 362 3784 | 4090! O0 97 


= 
So 


“ 1860! 2 115 


1. Le totalisateur reste en rĂ©paration jusqu’au 12. 


MALIN #20 4 362 X 40,8997 — 178 404 kilogrammùtres. 


Travail moyen . . 2 
ST soir. . . . 4630 x 40, 8997 — 189 366 = 


90 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


CHEVAL No 2, 
Marche au trot. 
EEE — EE ——— — OBSER- 


CHEVAL NO 3. — Travail au manùge au trot. 


ÉlĂ©vation de la] Poids moyen|Perte dpoi ls 
température du| du cheval] du cheval] VATIONS. 
cheval pendant} pendant le! pendant la 

travail. marche, 


Nombre Perte de poids 
de tours de la | du cheval pen- 


Durée 


du travail. 


roulette. dant letravail.| je travail. 


© Te | a À 2 | ee Lt, 


Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Maun| Soir. | Matin| Soir. | Matin| Soir. 


Gr. Deg. 


3 200 0 |470.: S1 2 820| 2 000 
3 190 4 S 9 800 | 2 800 
3 660 82,3| 9 800| 3 200 
3 500 2 3 2 700 | 3 100 
5 600 471,5|47 9 400! 3 200 
3 200 
2 500 
3 500 
*3 000 
4 000 
3 600 
4 100 
4 700 
4 300 
4 700 
3 300 
2 600 
3 700 
2 500 
3 900 
3 600 
4 100 
3 800 
2 800 
3 300 
3 600 
4 400 
4 400 
3 400 


" LL 
2 800| 2700 
9 400| 2 300 
1 800 | 2 700 
2 606| 3 000 
1 900! 2 900 
2 600| 2 S0C 
3 600| 4 000 
3 200! 3 400 
2 600| 3 000 
3 300| 3 000 
2 300 | 2 500! Pluie. 
2 600! 1 100! Pluie, 
1400! 2 600 |Pluie, 
1 700 | 3 100 
2 800! 2 400 
1 900! 2 000! Pluie 
2 S00| 3 900 
3 200| 2 400|Pluie. 
2 800 | 2 600 
3200| 2 700 
3] 3 800! 6 100 
3 400! 3 500 
2 500! 2 800 
3 900| 3 500 


© © 19 © 


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SUN ET ET PTT ST 


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La EL ECS MES ec CS CS ECC Ă  
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A «1 
[5 
J © © 


1 


= © 
D © © © & 


1 
_ 


3 655 2 710] 2 945 


1. Deux poids de 40 kilogr. en surcharge du {er au 5; quatre du 5 au 30. 


matin. . . . 4 393 X 40,8997 — 179 672 kilogrammùtres. 

soir. . . . . 4 309 X 40,8997 — 176 237 Me 
minimum . . 3526 X 40,8997 = 144 212 — 

| maximum . . 56771 X 10,8997 — 232 188 = 

minimum . . 3212 X 40,8997 — 131 370 — 

maximum . . 9 735 X 10,8997 — 234 560 — 


Travail moyen . . 
Travail du matin . 


Travail du soir. . | 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 91 


CHEVAL N0 2. — Travail au manùge au trot, CHRYAL No 4. 
DATES Marche au pas. 


RC — OBSER- 


Nombre Perte de poids ÉlĂ©vation de la| Poids moyen | Perte de poids 


dÚtours de la | du cheval pen- température du] du chevall du cheval 
Ï d | l cheval pendant pendant le pendant la 
roulette. ant le travail, | }, travail. trail marche. 


Durée VATIONS. 


du travail. 


a — ne 2 | 2 À 2 À Ts, 


Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin.| Soir. | Matin| Soir. | Matin| Soir. | Matin| Soir. 


Min. ; Gr. s DR 'SE il. | Gr. | Gr. 


“ " 5 8 100 

“ 8 111 5 200 
D775| 7648 5 600 
5425| 5897! 5 5 500 
5250| 6564 5 100 
8750| 8 830 » 6 900 
8480| 7710 5 300 
7 814| 8 820 - 4 800 
8163| 64923 4 900 
7715| 7931 3 900 
8119] 8830] 5 600 | 6300 
8483| 8105] 4 5 400 
7 858| 8004 100 | 5 800 
7621| 7978 60 5 100 
7 544 5 200 
ne 5 900 
7 136 6 100 
7 296 4 100 
7 398 6 100 
8 645 5 600 
8 932 » 000 
11 263 È 6 800 
9 663 6 300 
9 964 Ù 6400 


484,5 3 400! 5 009 
481,5|4184,4| 4 500! 3 900 
482,5 1486 4 000! 3 900 
480 ,0|48 3 900 | 4 700 
476,5 512700! 3 900 
479,2|480,6| 4 200 
476,9 31 2 000 
476,3 3 800 
479,3|485 2 700 | 3 500 
480,5 | 51 3 500! 2 000 
480,0 3 300| 2 700 
478,3|483,8| 2 600| 3 000 
483,0|486,6| 2 700| 3 400 
478,0|484,5| 2 400! 3 700 Pluie. 
475,0 |480,1| 2 300! 3 500 
474,41477,5| # 500! 4 700 
475,91480,0! 3 300| 3 900 
473,2|469,6| 3 600! 1 300 
476,2|1479,3| 4 000! 3500 
470,5 1 800! 3 400 
475,5 |474,7| 3 500! 3400 
473,9 51 4 100! 3 200 
468,2 |47: + 000 | 3 100 
3 470,41478,3| 8 700| 4 300 

" Cheval boiteux. u 1300 | 1 900 
9795| 8112] 5 400 | 4 800 14 3 |[472,91479, n 
8261| 7571] 4 900 | 5 600 15 469,04 2 400 
6 420 » 500 " ss) 467,5 3 000 


CE 


CO 1 go Co 
(2) 


JF 
a 


© Q 1 EE Qt À CC L9O = 


— 
[=] 
1 OO © 


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© = © 
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9 


L 


DO Eeeeeeeeere Eee = = 


HO HO = 19 = me RQ ee en Po me 


19 RO 9 9 19 © 19 
Ɠ + © 
COR — 


" , Cheval boiteux 1 " 
7 059 4 5 900 | 5 200 ( A [475,0 2 000! 3 100 
8 843 979! 5 800 | 5 000 1 6 \ [475,4 2 800 | 3 300 


70,52 | 71,14 5 362 | 5 589 | 1 65 " 3 172| 3 400 


{ matin . . . 7 990 X 40,8997 — 326 789 kilogrammùtres. 

Le SOI AN A 8 247 X 40,8997 — 337 300 Tam 

\ minimum. . 5 250 X 40,8997 — 214 723 Æ 

| maximum. . 11 263 >< 40,8997 — 460 653 — 
minimum, . 5 807 X 40,8997 — 237 505 — 
maximum. . 10743 X 40,8997 — 439 385 - 


Travail moyen . 
Travail du matin 


Travail du soir. . 


92 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Au travail au manÚge au pas, les chevaux ont donc effectué par 
jour : 


CHEVAL N0 1. CHEVAL N°0 2. CHEVAL K0 3. 

KilogrammĂštres. | KilogrammĂštres, 
Lendaline 22m Us » 174 151 190 061 
LCR MEN ORNE PE » 175 010 208 384 
TOlAl SRE » 349 161 398 445 


Il y a une différence entre le travail produit par le cheval n° 2 et 
le travail produit par le cheval n° 3, de prÚs de 50 000 kilogrammÚ- 
tres. Quant au travail du cheval n° 1, qui n’a pu ĂȘtre dĂ©terminĂ©, 1l 
est vraisemblable, si l’on compare aux nombres correspondants des 
autres chevaux ses accroissements de température et ses pertes de 
poids, qu'il a dĂ» ĂȘtre plus Ă©levĂ©. Mais on ne saurait ĂȘtre aflirmatif 
sur ce point, car, chez des animaux différents, les accroissements de 
la tempĂ©rature sont rarement identiques pour un mĂȘme travail. 
Pour s’en rendre compte, il suffit de se reporter aux chiffres fournis 
par les chevaux n° 2 et 3 au travail au pas, oĂč prĂ©cisĂ©ment celui 
qui a produit le plus de travail a présenté les accroissements de tem- 
pérature les plus faibles. 

Le minimum de travail produit pendant 350 tours de manĂšge a 
été 138 691 kilogrammÚtres et le maximum 257 259 kilogrammé- 
tres ; la variation est donc presque du simple au double. 

Au manÚge au trot, le travail effectué par les chevaux a été chaque 
jour : 

CHEVAL N° 1. CHEVAL NO 2. CHEVAL N° 8. 


Kilogrammetres.  KilogrammĂštres. KilogrammĂštres. 


Le MAIN ME RER 178 404 326 789 179 672 
Le-SOIL LE TER 189 366 337 300 176 237 
Total RER 367 770 664 089 3959 909 


On voit combien ont été différentes les quantités de travail pro- 
duites par les chevaux. Nous devons cependant faire une réserve au 
sujet des nombres qui expriment le travail du cheval n° 2. Un acci- 
dent ayant mis hors de service, au début du mois de mai, le dyna- 
momĂštre totalisateur, on lui substitua, pour la mesure du travail, 
un appareil de construction beaucoup moins parfaite ; les résultats 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 93 


obtenus Ă  l’aide de cet appareil prĂ©sentent peut-ĂȘtre un caractĂšre de 
moindre précision. 

Quoi qu'il en soit, les chiffres ‘obtenus pour le travail du cheval 

° 9, s’ils ne sont pas d’une exactitude rigoureuse, s’écartent peu de 
la réalité, et nous avons pu constater que la résistance à la trac- 
tion présentée par le manÚge, a été beaucoup plus élevée pendant 
le mois de mai que pendant les deux mois précédents et que, par 
conséquent, le travail produit par le cheval n° 2 a été bien supérieur 
à celui qu'ont donné les chevaux n° 1 et n° 5. 

Cette série d'expériences montre donc, comme les précédentes, 
que la traction nécessaire pour actionner le manÚge varie cons- 
tamment. La cause principale de ces variations réside dans la 
source du travail lui-mĂȘme. Ce travail est produit par le frotte- 
ment de lames métalliques fortement appliquées les unes contre les 
autres. 

On conçoit aisément que les moindres modifications qui se pro- 
duisent dans l’état des surfaces frottantes produisent des variations 
importantes dans l’effort nĂ©cessaire pour vaincre la rĂ©sistance due Ă  
ces frottements. 

Pendant le travail au trot, la traction a varié de 1 à 3 1/2. 

La traction la plus faible a été observée quand le chapeau du ma- 
nĂšge portait en surcharge 4 poids de 40 kilogr., et la traction la 
plus forte correspond Ă  un mois oĂč le manĂšge ne portait aucune 
surcharge. 

Les vitesses respectives moyennes des trois chevaux au manĂšge 
ont été : 


CHEVAL N°0 1. CHEVAL N°0 2. CHEVAL NO 3. 
US CN TO MIENNTARE 15,303 1Âź,409 1,409 
5 41:11 ASS RRSErE Ă  2 ,363 2 ,463 2 ,459 


Enfin, la traction moyenne qu’a dĂ» dĂ©velopper chacun d’eux pour 
actionner le manÚge a été : 


CHEVAL N° 1. CHEVAL N° 2. CHEVAL N° 3. 


ERIC TC ENNEE STRNER » 1748, 221 19%5,652 
AAÇOE MEN AT 4, 1768,565 31 ,718 17 ,000 


94 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 
Les tractions extrĂȘmes relevĂ©es sur le travail des trois chevaux 
ont été: 


TRAOTION 
—_——  —  —— — 


minimum. maximum. 
RAS MES ve 2 2 LEE 13k8, 680 25k8 377 
AINTROR  d ict UNS 12 ,549 44 ,003 


2° A la voiture. 


Deux mois ont été consacrés, pour chaque cheval, à l'étude du 
travail à la voiture ; le premier mois a été employé, comme dans la 
série précédente, à amener progressivement le cheval à produire le 
travail moyen effectué par les chevaux de place de la Compagnie. 
Pendant ce mois d'entrainement, les chevaux traĂźnaient la voiture Ă  
vide ; ils travaillaient tous les deux jours, et on graduait comme il 
suit la durée du travail : 


Les 2 premiers jours . . 5 courses de 1/2 heure . soit 2 heures 1/2. 
Les 2? suivants . 4 —  de3/4 d'heure. soit 3 heures. 

Les 3 suivants . Po — . soit 3 heures 3/4. 

LRO TAREUTE 
Les 4 suivants MMS nn soit 4 heures {| 
À 2 — de 1 heure 1/4. 

Les 4 derniers . it 5 heures 1/2. 
es 4 derniers JA See soit 5 heures {| 


Ainsi entrainés, ils continuaient à travailler un Jour sur deux pen- 
dant 5 heures et demie, durant tout le mois de travail effectif, avec 
une charge, dans la voiture, de 140 kilogr., représentant le poids 
moyen de deux voyageurs. 

L’odographe, qui donnait les chemins parcourus, a fonctionnĂ© 
irrĂ©guliĂšrement pendant ces essais. Nous avons Ă©cartĂ©, pour l’éta- 
blissement des moyennes que l’on trouvera plus loin, tous les chiffres 
fournis par des tracés suspects, ne faisant entrer en ligne de compte 
que ceux qui ont été donnés pendant un bon fonctionnement certain 
de l'appareil. 

La détermination de la traction moyenne de la voiture, sur la 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 95 


piste mĂȘme oĂč avait lieu le travail, a donnĂ© les rĂ©sullats sui- 


vants : 
MPoldSide aevoIEuieranvitle, té" EAN ne 480 kilogr. 
ROIS AQUNCOON ER ARTS Mt ut UE MCE 64 — 
Poids'de deux YOyAgeurs 0. UNIS 140 — 


Durée moyenne d'un essai, 2m Q$ 
Vitesse moyenne . . . . 10km 595 Ă  l'heure. 


Effort moyen Ă  vide (avec le cocher) . . . . 204,684 
Effort moyen en charge (cocher et voyageurs). 23,218 


L'effort de traction de la voiture Ă  vide est de 3.80 p. 100 
du poids de la voiture, l'effort en charge n’est plus que de 3.40 
p. 100 ; l’adjonction d’une charge à la voiture a donc eu pour 
effet de faire baisser le rapport de la traction au poids total 
Ă  dĂ©placer. En d’autres termes, le poids ajoutĂ© au vĂ©hicule a 
un coefficient de traction inférieur à celui du poids du véhi- 
cule lui-mĂȘme. Pour le cas prĂ©sent, la traction de la charge de 
140 kilogr. a été de 25,934 soit 1.81 p. 100 du poids de cette 
charge. 

Les chiffres de 20,684 pour la voiture Ă  vide et 23*5,218 pour 
la voiture en charge ne représentent pas exactement la résistance 
qu'a dĂč vaincre le cheval. 

La détermination du travail de traction est faite horizontalement, 
tandis que le cheval effectue sa traction Ă  l’aide de traits inclinĂ©s 
sur l’horizontale. L’angle d’inclinaison a Ă©tĂ© dĂ©terminĂ©, il Ă©tait de 
17,45. Il en résulte que les nombres obtenus, corrigés, deviennent 
216,662 pour la voiture Ă  vide, et 245,316 pour la voiture en 
charge. 

Pendant les mois d’aoĂ»t et d'octobre, oĂč les chevaux n% 3 et 2 
étaient à l'entrainement, ils ont respectivement donné les vitesses 
de 9*°,504 et 9%*,972 à l'heure, produisant ainsi pendant ce temps: 
te cheval n° 3 en août, 205 876 kilogr., et le cheval n° 2, en octobre, 
216 013 kilogr. 

Les donnĂ©es correspondantes n’ont pu ĂȘtre dĂ©terminĂ©es pour le 
cheval n° 1, l’odographe ayant Ă©tĂ© en rĂ©paration pendant presque 
tout le mois de juin. 


96 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Les chemins parcourus par chaque cheval pendant les mois de 
travail, avec la voiture en charge, sont les suivants : 


Cheval n° 1. 
Juillet 1890. — Moyenne journaliùre. 


DURÉE CHEMIN 

du travail. parcouru. 

MĂštres. 

Matin HS PR 2h30" 25 086 
OU) LE ENT 3 00 29 162 
Total ES 5h 30m 54 248 


Soit une vitesse Ă  l'heure de 9:",863. 


Cheval n° 3. 
Seplembre 1890. — Moyenne journaliùre. 
DURÉE CHEMIN 
du travail. parcouru. 
MĂštres. 
Man: ee 2" 30% 24 565 
SOIT MESSE MEN EE 3 00 28 219 
OP RER AEEE M 5230" 52 784 
Soit une vitesse à l’heure de 9*",597. 
Cheval n° 2. 
Novembre 1890. — Moyenne journaliùre. 
DURÉE CHEMIN 
du travail. parcouru. 
MĂštres. 
Matin LR Dao qu 23 911 
SOIT AN EVE RE RS 3 00 27 955 
HE DENT 5x 307 51 866 


Soit une vitesse à l’heure de 9:",430. 

Le travail correspondant est donné, pour chaque cheval, dans le 
tableau ci-aprĂšs : 

Nous avons également noté la température du corps du cheval le 
matin et le soir avant et aprĂšs le travail. Toutefois, comme les che- 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 97 


vaux faisaient le matin deux courses de un quart d'heure, séparées 
par un repos d’une demi-heure, et le soir deux courses de une heure 
et demie, sĂ©parĂ©es par un repos de mĂȘme durĂ©e, les chiffres donnĂ©s 
dans ce tableau ne représentent pas exactement les accroissements 
de température qui correspondent au travail produit. Nos chiffres, 
obtenus tous dans des conditions identiques, n’en sont pas moins 
comparables entre eux. 


TRAVAIL ; PRES TE 
TEMPÉRATURE nr 
produit STE 
en EN 1 | température 


du 


cheval. 


kilogrammĂštres. initiale. 


Cheval n° 14. 


Juillet 1890 : 


Matin ea te lt 609 9914 
SAONE ER OR RTC NS 


1 319 094,3 


Cheval n° 2. 


Septembre 1890 : 


MAR See cran h DUT d223 
SUR 2 er a 6801732 


{ 283 495,7 


Cheval n° 3. 


Novembre 1890 : “ 


Me HO ART A TU) 37°97 
SDS na OPEN. 679 753,7 JIROZ 


1 261 173,6 


Les chevaux ayant fréquemment uriné pendant le travail, nous 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 7 


98 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


n'avons pu déterminer que pendant un nombre de jours limité les 
pertes de poids qu'ils ont subies. Voici les résultats obtenus : 


CHAVAL N° 1. CHEVAL NO 2. CHEVAL N° 3. 


Dates. Durée Pa ÿ x Perte 


Ă  du 
Juillet HE. ids. de poids. 


1890. travail. 


travail. 


Kilogr.} 


Es 


Les 

es 

S 
i= 


25,1 

1 
23,4 

1 
25,3 
26,5 1 
25,9! 
30,9 | 

1 
29,5 
38,9 | 
32,8 
33,4 
36,7 
34,8! 
3197 
40,2? 
35,0! 
36,2 ! 


© 
[=] 


C9 2 CO mmON Eater QG Em C3: 
SNOMOMNOTrOSNS 


1 


Co 
= 
= 


1 


Lo 


[26] 
© 


© 
=] 


Le] 
=] 
9 ID +9 19 
ra 


4 

[=] 
QT © OO OT OC OÙ CO OC 
co 
© © 


QT QE OT OO QE OÙ OO QE OĂč CE UE CE OC Cr 
C2 2 
[=] =] 


Moyennes u 


4. Le cheval ayant uriné, les chiffres sont trop élevés. Les moyennes sont établies seulement sur les 
chiffres exacts. 


RÉSULTATS DES EXPÉRIENCES A LA FÉVEROLE COMPARÉS A CEUX 
DES EXPÉRIENCES PRÉCÉDENTES 


Dans les essais entrepris jusqu'alors, les rations essayées présen- 
taient toutes ce caractĂšre commun que leurs relations nutritives 
s’éloignaient peu de 1/7, nombre adoptĂ© par la Compagnie des Voi- 
tures pour l'Ă©tablissement des rations de sa cavalerie. 

La série actuelle réalise des conditions toutes différentes. Le rap- 
port de la protéine aux principes hydrocarbonés est beaucoup plus 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 99 


élevé, et la relation nutritive est trÚs voisine de 1/4. En raison du 
prix élevé attribué à la protéine dans la ration, il est important de 
rechercher, par la comparaison de la série actuelle avec une autre 
sĂ©rie oĂč l’alimentation Ă©tait beaucoup moins riche en protĂ©ine, si les 
résultats obtenus avec la féverole justifient le surcroßt de dépenses 
que comporte une telle alimentation. On sait déjà, par une pratique 
de plus de 15 ans, qu’une ration dont la relation nutrilive est com- 
prise entre 1/6 et 1/7 est trùs favorable à l’accomplissement des 
fonctions et Ă  la production du travail chez le cheval adulte. Le rem- 
placement d’une telle ration par une autre de relation nutritive 
de 1/4 est-il ou non avantageux? Tel est le problĂšme Ă©conomique 
dont la solulion doit se dégager de la comparaison de ces deux 
sortes d'alimentation. 

La deuxiÚme série d'expériences au maïs (maïs et paille de blé) et 
la sĂ©rie d’expĂ©riences Ă  la fĂ©verole, qui se sont succĂ©dĂ© dans l’ordre 
des essais, ont été exécutées dans des conditions identiques; elles 
sont en tous points comparables et fourniront les données qui per- 
mettront de conclure en faveur de l’un ou l’autre genre d’alimen- 
tation. 

Les différences sensibles qui peuvent exister entre les coefficients 
de digestibilité de rations composées de fourrages différents ne per- 
mettent pas de prendre comme termes de comparaison les rations 
elles-mĂȘmes. Il est plus logique, et en mĂȘme temps plus exact, de 
r’envisager que les quantitĂ©s des divers principes qui, solubilisĂ©es et 
absorbées par l'intestin pendant l'acte de la digestion, sont réellement 
entrĂ©es dans le sang et ont participĂ© Ă  l’acte gĂ©nĂ©ral de la nutrition, 
soit en produisant des matériaux destinés à réparer les pertes des 
tissus, soit en fournissant l’énergie nĂ©cessaire aux diverses manifes- 
tations extérieures de la vie. 

Les différents principes hydrocarbonés, cellulose, amidon, sucre, 
qui se comportent différemment au point de vue de la digestibilité, 
ont sensiblement la mĂȘme valeur quand ils sont assimilĂ©s. Nous les 
avons réunis et à leur somme nous avons ajouté la graisse, dont la 
valeur a Ă©tĂ© calculĂ©e en amidon Ă  l’aide du coefficient de Lawes et 
Gilbert, et les indĂ©terminĂ©s. L’addition de ces derniers principes 
n’est pas rigoureusement justifiĂ©e ; toutefois, bien que leur compo- 


100 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


silion ne soit pas exactement connue, nous savons qu’ils sont cons- 
tituĂ©s des mĂȘmes Ă©lĂ©ments que les hydrocarbonĂ©s, dont ils se diffĂ©- 
rencient surtout par une teneur plus élevée en carbone. Nous ne 
nous éloignons donc pas sensiblement de la vérité en leur assignant 
la mĂȘme valeur. 

Le tableau suivant donne, pour les essais au maĂŻs et pour les es- 
sais à la féverole, et dans les différentes situations qu'ont occupées 
les chevaux, les quantités de matiÚres protéiques et de matiÚres hy- 
drocarbonĂ©es, groupĂ©es comme nous venons de l’exposer, qui, 
chaque jour, ont été digérées par les chevaux : | 


ESSAIS ESSAIS DIFFÉRENCE 
] ; en faveur 
au mais. à la féverole. de la féverole. 
a  ——— ——— ——  ——— À © | 
Hydro- Hydro- { Hydro- 
Protéine. Protéine, Protéine, 
carbonés, carbonés, carbonés, 
gr. gr. gr. gr. gr. 
AUTODOS Sete let 336,4 3 712,2 813,9 3 162,5 477,1 
A la marche au pas. . . 359,7 3 924,6 122157 3 753,7 762,0 
A la marche au trot . . 364,3 4 013,5 1 003,5 3 628,3 639,2 
Au travail au pas. . . . 372,5 3 883,7 1335,4 4101,7 962,9 
Au travail au trot . . . 423,9 4513,6 1353,7 4 504,0 929,8 
Au travail Ă  la voiture . 330,0 3 874,3 1 449,9 4634,9 1 119,9 


Il est facile de voir, par l’examen de ce tableau, que, au cours des 
essais Ă  la fĂ©verole, les chevaux ont disposĂ© d’une somme plus grande 
de principes nutrilifs qu’au cours des essais au maïs. Ce sont les 
matiÚres protéiques surtout qui causent cette différence. Tandis que 
pour les hydrocarbonés les différences sont tantÎt en faveur de la 
féverole, tantÎt en faveur du maïs, elles sont, pour la protéine, tou- 
jours en faveur de la féverole et toujours représentées par des nom- 
bres assez élevés. 

Si, partant de Ja chaleur de combustion de ces divers principes, 
nous évaluons en calories la valeur énergétique de ces principes di- 
vérés, nous obtenons les chiffres suivants : 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 101 


ESSAIS AU MAÏS. ESSAIS À LA FÉVEROLE. , 
DIFFERENCE 
EE © EE TT — 
Valeur PE Valeur | Valeur Valeur | Valeur | °” fre 
de la de 1 FE 
Se & | hydro- | totale de la 
protéine protéine Dunes 
en On en en féverole. 


e 
hydro- totale 
carbonés 
en 


en 
calories. | calories, | Calories, | calories, | calories. | calories. 


15466,0| 17 013,41 3 742,1 | 12 966,2] 16 708,3] — 305,1 
A la marche au pas . . . 65. 16 090,8] 17 745,4] 5 159,8 | 15 390,2| 20 550,0! + 2 804,6 
A la marche au trot. . . 5 16454,9| 18 130,6] 4616,1 | 14 876,0] 19 492,11 + 1 561,5 
Au travail au pas. . . .| 1713,5 | 15 923,2| 17 636,7] 6 142,8 | 16 817,0| 22 959,8] + 5 323,1 
Au travail au trot. . . . 4 18 505,7] 20 455,6] 6 227,0 | 18 466,4| 24 893,41 + 4 437,8 
Au travail Ă  la voiture. . 15 884,2| 17 402,2] 6 669,5 | 19 003, 1] 25 672,6] + 8 270,4 


Ce tableau ne fait que confirmer le précédent : dans tous les cas, 
sauf au repos, les différences sont en faveur de la féverole. 

Voyons maintenant quel a été le travail produit par les chevaux 
au cours des deux essais. Au repos et Ă  la marche au trot, les condi- 
tions ayant Ă©tĂ© identiques, les dĂ©penses sont du mĂȘme ordre. 

Au travail au manĂšge au pas, les chevaux ont produit, en moyenne, 
chaque jour, au maïs 390 761 et à la féverole 373 803 kilogram- 
- mĂštres. | 

Au travail au manÚge au trot, le travail a été, au maïs, de 
369 119 et à la féverole de 462 456 kilogrammÚtres. Nous avons dit, 
au cours de ce mémoire, que les chiffres relevés pour le travail du 
cheval n° 2 sont vraisemblablement trop élevés; cette derniÚre 
moyenne serait donc un peu au-dessus de la réalité. 

Pendant les essais au maïs, le cheval n° 3 seul a pu accomplir le 
travail à la voiture ; il a produit, pour chaque journée de travail, 
1105 478 kilogrammÚtres. Aux essais à la féverole, le travail moyen 
des trois chevaux a été de 1 291 954 kilogrammÚtres. 

Il nous reste à examiner comment ont varié les poids des che- 
vaux dans l’un et dans l’autre cas. Nous donnons flans le tableau 
suivant les poids des chevaux au commencement et Ă  la fin de 
chaque mois dans chacune des deux séries. Toutefois, la compa- 
raison de deux poids isolés n'ayant qu'une valeur relative à cause 
des nombreuses influences auxquelles sont soumises les pesées quo- 


102 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


tidiennes, les nombres que nous donnons comme poids des che- 
vaux au commencement et à la fin de chaque mois représentent 
la moyenne des poids des cinq premiers et des cinq derniers jours. 


CHEVAL N° 1, 


CHEVAL N° 2, CHEVAL N° 3. 


— — —— 0 — TT — 


——— — — — 


a — | Poids | Poids | & _; | Poids Poids | ; _: | Poids Poids 

ou 5 Ë SDS 

E à au à E £ au à É £ au à 

PB 5 | début. | la fin. | ? & | début. | la fin. | © | début. | la fin. 
Kilogr. | Kilogr. Kilogr. | Kilogr. Kilogr. 


41° Essais au maïs. 


1er Ă  21 nov. 1888. .[ M. P.| 419,8 |-422,5 | R. | 475,9 | 483,3 


22 nov, à 11 déc, . .| T.P,| 419,3 | 415,6 | M. P.| 479,6 | 479,1 
12 à 31 décembre . .| R. | 413,8 | 422,5 | T.P.| 480,3 | 478,3 
Janvier 1889 . . . .| KR. 424,0 | 431,8 |T.T.| 482,6 | 475,5 
FĂ©vrier. . . . , . .| M. T.| 432,3 | 428,6 R. | 475,6 | 478,5 
Mars . je» + lee + .]T. T. | 428,9 | 422,1 | M. T.| 480,0 | 475,9 
AYTilN Fetes <Ă©etoh e ĂŒ u u R. | 475,3 | 483,7 
MAS etienne " n R. 484,1 


(1 " 


Essais à la féverole. 


Décembre 1889 . . .| R. | 469,4 | 476,9 | M°P-| 468,3 | 474,0 
Janvier 1890 . . . .| M.P.| 476,3 | 480,2 | T-P-| 475,9 | 475,4 
FĂ©vrier, ... . . .. T.P.| 479,7 | 479,7 | + | 474,5 | 480,1 
Mars. . . . . . . .|T.T.| 471,4 | 460,0 | R. | 487,1 | 496,6 


ANT ET | R. | 461,6 | 474,9 | M.T.| 498,7 | 480,6 
Mai Res déc .|M. T.| 473,1 | 469,4 | T. T.| 478,4 | 468,5 
Juin........| V. | 476,2 | 469,5 | R. | 476,2 | 488,7 
Juillet . | v. | 471,5 | 454,1 | R. | 490,8 | 493,8 
DAT EE .. | R. | 458,1 | 460,8 | R. | 493,5 | 500,3 
Septembre . . . s.] R. | 465,9 | 468,9 | R. | 502,2 | 510,9 
Octobre. . . . .. .| R. | 470,3 | 473,1 | -V. | 504,3 | 477,4 
Novembre . . . .. R. | 476,0 | 474,9 | V. | 477,2 | 466,9 


En déterminant les moyennes des augmentations ou des pertes de 


ALIMENTATION DU CHEVAL DE TRAIT. 103 


poids supportées par les trois chevaux dans chaque situation, on 
trouve que, par mois, les chevaux ont : 


AU MAÏS. A LA FÉVEROLE. 
AuPPENOS TR AU MN gagnĂ©. "AMP G "gagnĂ©s!  7É6,5 
À la marche au pas . . . . NS t.L 047 — , 210 
Ala/marcheran trot: "71.7". perdu. , +040 perdu: 6522 
AUNTAALI AU DAS ES SE 0. Ce. — .,. 2260 VS 3) 
AUSPAVAIRAUELIO AMEN RE — 6 9 
Au travail à la voiture . . . — ,. 20 3 4. 148 


Reprenons maintenant, pour chaque situation, l’ensemble des 
conditions que nous venons de déterminer. 

Au repos, pour des quantités assimilées trÚs peu différentes, toutes 
les conditions Ă©tant les mĂȘmes dans les deux cas, nous voyons les 
chevaux se comporter presque semblablement. 

A la marche au pas, pour des quantités assimilées sensiblement 
diffĂ©rentes, et supĂ©rieures dans les essais Ă  la fĂ©verole, l’augmenta- 
lion de poids la plus élevée est obtenue dans les essais au maïs. 

À la marche au trot, l’écart des poids est aussi en faveur du mais, 
bien que la ration de féverole ait été encore supérieure. 

Nous avons vu qu’au travail au pas, les quantitĂ©s de travail me- 
surées ont été peu différentes dans les deux essais ; les chevaux se 
sont aussi semblablement comportés, bien qu'ils aient consommé 
une quantité de matiÚres nutritives bien plus élevée dans les essais 
à la féverole. 

Au travail au trot, les mĂȘmes remarques sont applicables, bien 
que les chiffres moyens du travail soient plus élevés pendant les es- 
sais à la féverole que pendant les essais au maïs. 

Au travail Ă  la voiture, le seul cheval qui, pendant les essais au 
maĂŻs, ait pu ĂȘtre observĂ©, a perdu plus de poids et a produit un peu 
moins de travail que les chevaux qui ont participé aux essais à la 
fĂ©verole, mais l’écart qui existe entre les quantitĂ©s de principes di- 
gérés justifie largement ces différences. 

En résumé, bien que les chevaux aient assimilé, au cours des 
expériences à la féverole, des quantités d'éléments nutritifs bien su- 
périeures à celles qui ont été assimilées au cours des essais au maïs, 


104 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


dans la plupart des cas, le rĂ©sultat a Ă©tĂ© le mĂȘme, et, quand de lĂ©- 
gÚres différences sont observées, elles sont toujours en faveur des 
essais au mais. 

Il y a donc eu, à n’en pas douter, meilleure utilisation des prin- 
cipes, pendant ces derniers essais. [l suffit d'examiner le tableau qui 
indique, pour les deux séries d'essais, les quantités de principes nu- 
tritifs digĂ©rĂ©es, pour voir sur quoi a pu porter cette diffĂ©rence d’uti- 
lisation. Dans les deux cas les quantités de principes hydrocarbonés 
sont peu diffĂ©rentes, elles ont dĂč ĂȘtre semblablement utilisĂ©es ; les 
quantités de matiÚres protéiques sont, au contraire, bien plus élevées 
dans le cas des expĂ©riences Ă  la fĂ©verole ; si leur coefficient d’utili- 
sation avait Ă©lĂ© le mĂȘme pour les deux sĂ©ries d’expĂ©riences, on de- 
vrait remarquer, soit dans la production du travail, soit dans l’état 
des chevaux, des différences en la faveur de la féverole qui, en réa- 
lité, ne se sont pas manifestées. 

La question nous parait donc clairement résolue dans ce sens que 
l’association des matiĂšres protĂ©iques aux matiĂšres hydrocarbonĂ©es, 


en un mot, la relation nutritive est d'autant plus défavorable 


MA 
MNA” 
qu'elle se rapproche de lunitĂ©; elle ne doit pas cependant s’en 
Ă©loigner au delĂ  d’une certaine limite, mais cette limite nous paraĂźt 
ĂȘtre encore un peu au delĂ  de la relation 1/7 que nous avons adoptĂ©e 
jusqu'ici. 


ÉTUDE 


sUuR 


QUELQUES NEATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDEN 


Par EMILE SAILLARD 


Ingénieur agronome 


(Suite) 


— —— © 


DEUXIÈME PARTIE 


LA STATION AGRONOMIQUE DE HALLE 


{Directeur : Professeur MArnckER) 


| Méthodes d'analyse adoptées. | 
Nature des essais institués par la Station dans les fermes 
de la province de Saxe (Prusse). 


La Station agronomique de Halle est la propriété de la Société des 
agriculteurs de la province prussienne de Saxe. Elle est dirigée, de- 
puis 1871, par M. Maercker, conseiller intime de gouvernement et 
professeur Ă  l’UniversitĂ©. 

Les dĂ©buts de Ja Station ont Ă©tĂ© trĂšs modestes ; mais grĂące Ă  l’ac- 
tivité du D° Maercker, elle a pris tous les jours une importance plus 
grande et la premiĂšre installation est devenue peu Ă  peu insuffisante, 
De nouvelles constructions ont donc été adjointes aux premiÚres en 
1882 et en 1888, ce qui donne à l’ensemble des bñtiments et à la dis- 
position intérieure des locaux une irrégularité assez marquée. 

En 1889, un laboratoire analogue, mais beaucoup moins impor- 
tant, a été créé par les soins de la Société à Magdebourg. Il est aussi 
dirigé par le professeur Maercker. 


106 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Enfin, en 1890, une Station de végétation ( Vegelationsstation) ainsi 
qu’un champ d’expĂ©riences ont Ă©tĂ© Ă©tablis Ă  Halle, au nord-ouest de 
la ville, et servent Ă  des essais sur l'emploi des engrais et la culture 
des plantes agricoles. 

Les bñtiments de la Station de Halle tels qu’ils sont en ce moment, 
ont coûté 200 000 marcs (250 000 fr.) sans compter les 50 000 mares 
(62500 fr.) qui ont été nécessaires pour appareiller le laboratoire. 

La Société a en outre dépensé 25 000 marcs (31 250 fr.) pour 
l'achat du champ d'expériences et l'établissement de la station de 
végélation. 

En ce moment donc, on fait Ă  la Station de Halle-Magdebourg : 

4° Des analyses de terres et d’engrais ; 

2 Des essais de semences et des contrĂŽles de fourrages (section 
botanique) ; 

3 Des recherches intĂ©ressant la fabrication de l’alcool ; 

4 Des recherches sur la nutrition des plantes et l’emploi des engrais 
(d’aprĂšs la mĂ©thode des pots du professeur Wagner, de Darmstadt) ; 

5° Des essais sur l'alimentation des animaux de la ferme ; 

6° Des essais de culture avec différentes plantes et différents en- 
grais, dans un grand nombre de fermes de la province de Saxe ; 

Le lableau suivant dont les chiffres représentent le nombre des 
analyses effectuées pendant chacune des quatre derniÚres années, 
donnera une idée de l'importance de la Station : 


4° A Halle. 
| 1891. 1890. 1889. 1888. 
Analyses d'engrais et de terres . . . . . 3 495 3 223 3 067 2 667 
Analyses de fourrages et de betteraves . . 1 301 1 147 1 094 895 
DĂ©terminations faites dans la section bota- 
mIqUe 110. 1 145 966 656 502 
DĂ©terminations d'acide One Lu 
TES OPPOSER se 141 303 » » 
Analyses des fourrages employés dans les 
essais sur l'alimentation . . . . 125 661 819 712 
Analyses nécessitées par les essais de En 
ture sur la betterave sucriĂšre . . . . . 391 6 144 442 
Analyses de récoltes obtenues à la Station 
de VÉSĂ©LAION ES. GA eee 713 313 Ù » 
Analyses de céréales. . + / .:. » 200 436 155 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 107 


2° A Magdebourg. 


1891 1890. 
Analyses d'engrais"... T2. 407 397 
Analyses de fourrages et de lait. . . 22197 1 924 

ji MERE SE LE 2 544 21321 


Si l’on ajoute que chacune des analyses indiquĂ©es comporte plu- 
sieurs dosages et que chaque dosage, pour la sûreté des résultats, 
est exécuté en double, on verra que le nombre des déterminations 
faites dans une annĂ©e s’élĂšve Ă  un chiffre trĂšs considĂ©rable. 

Le personnel de la Station comprend : 

A Halle : 

4° Un directeur ; 

2° Un sous-directeur ; 

8° Huit préparateurs ; 

4° Deux aides-préparateurs ; 

5° Deux préparateurs pour la section botanique ; 

6° Un secrétaire et un comptable ; 

7° Deux jardiniers pour la station de végétation ; 

8 Cinq garçons de laboratoire. 

À Magdebourg : 

1° Deux préparateurs ; 

2% Un garçon de laboratoire. 

Le budget de la Station s'Ă©levait en 1891 Ă  65000 marks 
(81 250 fr.). 

A l’état dĂ©penses il faut attribuer : 

4° Le paiement du personnel ; 

Âź% L'entretien du laboratoire ; 

3° Les frais occasionnés par les recherches de toutes sortes insti- 
tuées par la Station. 

Dans l’état recelles figurent : 

4° La subvention de 9000 marcs (11 250 fr.), donnée chaque année 
par l'État ; 

2° La subvention de 3000 marcs (3750 fr.), donnée chaque année 
par la province de Saxe ; 


108 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


3° Le produit des analyses effectuées : 40 000 mares (50 000 fr.) ; 
4° Diverses autres sources de recettes. 


Ce court aperçu que nous venons de donner suffit pour montrer 
combien est grande l’activitĂ© de la Station de Halle. Et nous ne 
croyons pas commettre une exagération en disant que, par le nombre 
des analyses qu’elle effectue, la nature et la diversitĂ© des essais 
qu’elle institue dans son champ d’expĂ©riences et dans les fermes de 
la province de Saxe, elle se place au premier rang des staLans ana- 
logues de l’Allemagne. ; 

J'ai eu l’occasion d’y travailler pendant trois mois comme prĂ©pa- 
rateur volontaire. Ayant été occupé successivement dans toutes les 
sections, j'ai pu faire, dans chacune d'elles, un certain nombre d’a- 
nalyses et ainsi apprendre à connaitre AÉTALET la plus grande 
partie des modes de dosage adoptés. 

Ainsi que je viens de l'indiquer, la Station ne se borne pas Ă  ĂȘtre 
un laboratoire de contrĂŽle, elle fait en outre de nombreuses re- 
cherches, surtout dans son champ d’expĂ©riences et dans les fermes 
de la province. 

Le professeur Maercker, par des conférences et des relations 
personnelles, a su initier aux essais agricoles les propriétaires ou 
fermiers des grands domaines de la Saxe, et il trouve en eux de puis- 
sants auxiliaires, quand il veut vérifier si les données fournies par le 
laboratoire ou le champ d’expĂ©riences sont applicables Ă  la pratique 
agricole, ou quand il veut instituer des essais sur l'alimentation des 
vaches laitiĂšres ou l’engraissement des bovidĂ©s ou ovidĂ©s. 

Une Ă©tude complĂšte sur la Station agronomique de Halle doit donc 
comprendre deux parties : 

4° Description de la Station et des mĂ©thodes d’ analyse employĂ©es ; 

% Description des essais institués : 

a) Sur la nutrition des plantes (station de végétation); 

b) Sur la valeur agricole des engrais (station de végétation et 
fermes de la province) ; 

c) Sur l'alimentation du bétail (fermes de la province); 

d) Sur la fabrication de l'alcool (section de la distillerie). 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 109 


DESCRIPTION DE LA STATION ET DES MÉTHODES D ANALYSE EMPLOYÉES 


Nous jugeons inutile de décrire en détail le plan des bùtiments, 
car les constructions successives qui ont été faites le rendent peu 
régulier et ne permettent pas de le prendre comme modÚle. 

La petite description qui suit aura donc seulement pour but de 
donner une idĂ©e gĂ©nĂ©rale de la disposition des locaux et d’indiquer 
dans un ordre un peu méthodique les appareils qui sont employés. 

Dans le sous-sol sont Ă©tablis les magasins, le logement du con- 
cierge, le moteur Ă  gaz, l'appareil de chauffage, la chaudiĂšre servant 
Ă  la prĂ©paration de l’eau distillĂ©e. 

Au rez-de-chaussée, le laboratoire proprement dit. 

Au 1°" étage, les appartements du directeur. 

Au 2° étage, des chambres pour les préparateurs et plusieurs 
piĂšces servant de bureau Ă  l’administration de la SociĂ©tĂ© d’agri- 
culture. 

Le rez-de-chaussée est l'étage qui a le plus d'importance pour 
nous. Nous en désignerons les locaux par des numéros représentant 
l’ordre dans lequel ils se prĂ©sentent quand on traverse le labora- 
toire. 

La piĂšce 1 est le cabinet de travail du directeur. 

La piÚce 2 est le secrétariat de la Station. 

La piùce 8 renferme la bibliothùque, qui est riche d’environ 1 500 
volumes, sans compter les livres réservés spécialement au directeur 
et ceux qui sont placés dans le laboratoire, lesquels sont des ou- 
vrages de chimie analytique pouvant fournir des renseignements sur 
tous les travaux de la Station. 

La piÚce 4 es£ réservée aux balances. Huit de grandeur et de sen- 
sibilité différentes y sont placées. 

La piĂšce 5 sert pour les essais de digestion arĂŒficielle. 

La piĂšce 6 est la salle oĂč sont faites les prĂ©cipitations d’acide phos- 


110 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

phorique Ă  l’aide des rĂ©actifs appropriĂ©s. On y trouve deux grands 
flacons placés sur un support à environ 1,50 au-dessus du sol et 
contenant : l’un la solution de citrate, l’autre la solution magnĂ©- 
sienne (Magnesiamixtur). Tous les deux sont mis en communication 
avec une burette, graduĂ©e en 25 ou 90 centim. cubes, Ă  l’aide d’un 
tube faisant fonction de siphon. Un réfrigérant est placé à cÎté et 
sert à amener les liquides à la température de 17°,5. Il consiste en 
une boĂźte de zinc divisĂ©e en compartiments oĂč circule un courant 
d’eau. 

La piÚce 7 est la plus grande du rez-de-chaussée. On y effectue 
toutes les analyses qui n’exigent pas d'appareil fixe spĂ©cial et la dĂ©- 
termination des substances sĂšches, Ă  l’aide de l’étuve Ă  rĂ©gulateur 
que nous décrirons plus loin. 

La piÚce 8 est appelée la chambre de l'acide phosphorique (Phos- 
phorsÀurecapelle). On y a installé un agitateur mécanique mis en 
mouvement par un moteur à eau et desliné à agiter les liquides 
contenant des précipités de phosphate ammoniaco-magnésien ; un 
appareil de filtration attelé à une trombe à eau; un flacon rempli 
d’eau ammoniacale, placĂ©s Ă  environ 2 mĂštres au-dessus du sol; une 
moufle à gaz; un réfrigérant, et enfin une balance sensible au 
dixiĂšme de milligramme. 

La piĂšce 9 est le cabinet de travail du sous-directeur. 

La piĂšce 10 renferme : 

1° L'appareil à distiller servant au dosage de l’azote nitrique, d’a- 
prÚs la méthode dite du fer et du zinc (12 déterminations peuvent 
ĂȘtre exĂ©cutĂ©es en mĂȘme temps) ; 

9° La burette de baryte servant à titrer l’acide sulfurique dans le 
dosage de l'azote. Elle est mise en communication avec un flacon 
rempli de baryte placé sur un support à environ 2 mÚtres au-dessus 
du sol ; 

3° Un cylindre, ouvert à l'extrémité supérieure, contenant, dans 
sa double paroi, de la paraffine, et dont l’intĂ©rieur est destinĂ© Ă  re- 
cevoir les flacons Erlenmeyer oĂč on opĂšre la transformation des 
matiÚres amylacées en glucose, sous l'influence des acides étendus 
et de la chaleur ; 

4 Une grande Ă©tuve en briques recevant la chaleur de l’appareil 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 111 


de chauffage situé dans le sous-sol. Elle sert pour le séchage des 
ballons et autres appareils qui ont été lavés. 

Dans la piÚce 11, on fait l'analyse élémentaire des substances or- 
ganiques et on effectue les premiÚres opérations que comporte le 
dosage de l’azote, d’aprĂšs la mĂ©thode Kjeldahl. 

Une balance permet de peser dans la chambre mĂȘme la quantitĂ© 
de substance Ă  analyser. GrĂące Ă  un robinet Ă  goutte, mis en com- 
munication par un tube vertical avec un flacon rempli de mercure 
placé plus haut, on peut facilement introduire une goutte de mercure 
dans les ballons. 

Une burette graduĂ©e en 20 centim. cubes pourvue d’un robinet Ă  
la partie infĂ©rieure, pouvant ĂȘtre remplie par le haut, sert pour 
l’addition à la substance des 20 centim. cubes d’acide sulfurique 
concentré. 

Sous une large hotte sont placés six trépieds portant des plaques 
de fer circulaires munies de six enfoncements en forme de segment 
sphérique. Chacun de ces derniers correspond à un brûleur de gaz. 

Au milieu de la salle est une table supportant l'appareil Ă  distiller, 
lequel permet de faire parallĂšlement 24 dosages. Sur un rebord de 
ciment, fixĂ© Ă  l’un des murs de la salle et faisant table, on peut ins- 
taller un appareil pour l’analyse Ă©lĂ©mentaire des matiĂšres orga- 
niques. 

Les piĂšces 12 et 13 forment la section botanique. Dans la piĂšce 12, 
on fait les contrĂŽles de semences et de fourrages; dans la piĂšce 15, 
les essais de germination. Ces derniers sont effectués dans des as- 
siettes qu'on à préalablement remplies à moitié de sable humecté 
d’eau, qu’on recouvre d’une plaque de verre aprùs l’ensemencement 
et qu’on place ensuite sur des Ă©tagĂšres ad hoc. 

La piĂšce 14 sert pour la prĂ©paration des Ă©chantillons d’analyse. 
Elle renferme les appareils à pulvériser, dont quelques-uns peuvent 
ĂȘtre mis en mouvement, soit par un moteur Ă  eau d’une force d’un 
demi-cheval-vapeur, soit par un moteur à gaz fixé dans le sous-sol 
et ayant une force de deux chevaux. L'appareil à pulvériser, imaginé 
par le professeur Maercker, mérite une mention spéciale. Nous en 
donnons plus loin la description. 

Dans la piÚce 15 sont effectuées la plupart des opérations que 


112 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


nécessite le dosage des matiÚres grasses. On y trouve, à cet effet, 
l'appareil Ă  extraction de Soxhlet (voir la description au chapitre : 
MĂ©thodes d'analyse des fourrages) permettant de faire parallĂšle- 
ment 12 dĂ©terminations, et une Ă©tuve chauffĂ©e Ă  la vapeur d’eau, 
oĂč l’on dessĂšche jusqu’à constance de poids le rĂ©sidu laissĂ© par 
l’éther. 

On y a aussi installé un agitateur mécanique, mû par le moteur à 
eau et dont nous aurons plus tard Ă  indiquer l'emploi, et une Ă©tuve 
à régulateur automatique employée surtout pour la dessiccation des 
terres. | 
La piÚce 16 est pourvue de plusieurs bains de sable placés sous 
une large cheminée permettant d'assurer une forte ventilation. On 
y effectue toutes les opérations pouvant donner lieu à un déga- 
sement d’odeurs fĂ©tides ou acides. 

La piÚce 17 est spécialement réservée aux analyses ou recherches 
qui concernent les distilleries de grains ou de pommes de terre. 

Elle renferme un petit appareil de Henze, une cuve Ă  saccharifi- 
cation munie d’un agitateur et placĂ©e dans un rĂ©frigĂ©rant Ă  eau, une 
colonne Savalle et enfin tous les appareils nécessaires au dosage des 
maiiĂšres amylacĂ©es, des sucres et de l’alcool. 

La vaseur qu’exige le fonctionnement de l'appareil Henze provient 
d’une chaudiĂšre qui est placĂ©e dans la piĂšce contiguĂ« 18. | 

Cette derniĂšre peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme la salle des collections. 
On y trouve un Ă©chantillon de toutes les principales espĂšces de terre 
de la province de Saxe, de tous les engrais commerciaux, des prin- 
cipaux tourteaux, grains, etc. 

Enfin, la piĂšce 19 sert de magasin pour les objets de verrerie. 

Quelques piÚces du sous-sol méritent une mention à cause des 
appareils qu’elles renferment. 

Dans la piùce 1 sont les machines servant à l’extraction du jus de 
la betterave, c’est-à-dire une rñpe centrifuge (Centrifugalreibe) 
qui peut ĂȘtre mise en mouvement Ă  l’aide du moteur Ă  gaz que nous 
avons dĂ©jĂ  citĂ©, et une presse hydraulique d’une force de 350 atmos- 
phĂšres. 

La piĂšce 2 renferme un appareil de Pettenkofer dont on ne se sert 
pas en ce moment. 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 113 


Dans la piÚce 3 est installée une véritable meunerie. On y trouve 
en effet un Ă©motteur, un trieur, un broyeur Ă  cylindres, un conver- 
tisseur Ă  cylindres, etc. 

La piĂšce 4 peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e, Ă  juste titre, comme un atelier de 
boulangerie. 

Ces appareils de meunerie et de boulangerie servent à déterminer 
la valeur, pour la production du pain, des nouvelles variétés de blé 
obtenues dans la province de Saxe par les nombreux agriculteurs, 
marchands de semences. Ils permettent d'Ă©tablir en mĂȘme temps si 
les influences (engrais, façons aratoires, etc.) qui font varier les ren- 
dements des récoltes agissent aussi sur la qualité des produits ob- 
tenus. 

La piĂšce 5 renferme une chaudiĂšre Ă  vapeur de 1 500 litres, des- 
tinĂ©e Ă  fournir l’eau distillĂ©e nĂ©cessaire pour les analyses. 

Enfin, dans la piÚce 6 est installé le calorifÚre à air chaud qui 
chauffe toute la maison. 


Cette courte description étant terminée, nous allons maintenant 
aborder l’étude dĂ©taillĂ©e des mĂ©thodes d’analyse qui sont em- 
ployées à Halle. 

Disons tout d’abord que ces mĂ©thodes sont en gĂ©nĂ©ral les mĂȘmes 
que dans tous les laboratoires agronomiques allemands, car elles 
ont été élaborées et adoptées dans un CongrÚs tenu par l'Association 
des Stations agronomiques. 

Nous avons adoptĂ© l'ordre suivant dans l’exposĂ© de cette ques- 
tion : 

A. — MĂ©thodes d’analyse des engrais ou matiĂšres fertilisantes ; 

B. — MĂ©thodes d’analyse des terres ; + 

C. — MĂ©thodes d’analyse des fourrages ; 

D. — MĂ©thodes d'analyse du lait ; 

E. — MĂ©thodes d’analyse concernant l’industrie sucriĂšre ; 

F. — MĂ©thodes d'analyse concernant la distillerie de grains el tu- 
bercules ; 

G. — Essais de semences. 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 8 


114 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


A. — MĂ©thodes d'analyse des engrais ou matiĂšres 
fertilisantes. 


a) Préparation de l'échantillon d'analyse. 


Comme nous aurons souvent Ă  parler de l'emploi du moulin Ă  
pulvériser imaginé par le professeur Maercker, nous allons en donner 
tout de suite la description. 

Il se compose essentiellement d’un cylindre Ă  parois peu Ă©levĂ©es, 
dont le fond, qui est d'acier, est divisé en secteurs, lesquels sont, 
comme les meules de moulin, munis de stries rectilignes, parallĂšles 
dans chaque secteur Ă  l’un des rayons extĂ©rieurs du secteur. Ce cy- 
lindre repose sur un axe vertical muni d’une roue à laquelle on peut 
communiquer un mouvement de rotation. 

Sur le fond du cylindre, appuie, sans que les centres coĂŻncident, | 
un tronc de cĂŽne d’acter de diamĂštre Ă©gal aux 3/5 environ de celui 
du cylindre et dont la base est tailléz comme le fond du cylindre. Il 
est supporté par un axe auquel on peut imprimer un mouvement de 
rotation de sens contraire à celui que reçoit le cylindre. De cette. 
disposition, il résulte que les stries dont nous avons parlé agissent 
en mĂȘme temps comme des ciseaux et comme des scies. 

L'axe du cylindre peut ĂȘtre mis en mouvement, soit par le moteur 
Ă  eau, soit par le moteur Ă  gaz. Il est reliĂ© Ă  l’axe du tronc de cĂŽne 
par une courroie de cuir dont les deux parties passent sur des poulies 
intermédiaires à axe horizontal destinées à rendre inverses les mou- 
vements de rotation du cylindre et du tronc de cĂŽne. Le tout est 
fixé à un support commun qu'on peut visser sur une table. 

Un levier coudé, qui a son point d'appui sur le support commun, 
permet de soulever le tronc de cÎne quand une opération est ter- 
minĂ©e. Des poids cylindriques, percĂ©s suivant leur axe, peuvent ĂȘtre 
placĂ©s Ă  la partie supĂ©rieure de l’axe du tronc de cĂŽne, et accĂ©lĂšrent 
par leur poids le travail de la pulvérisation. 

Nous donnons plus loin le schéma de ce moulin (fig. 1)". 


1. Les figures sont dessinées sur une planche qui paraßtra à la fin de ce travail. 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 115 


Cette description Ă©tant faite, il sera plus facile de comprendre la 
prĂ©paration qu’on fait subir aux matiĂšres ferlilisantes ou aux engrais 
avant de les soumettre à l’analyse. 

L’échantillon envoyĂ© est pesĂ©. Si son poids est supĂ©rieur Ă  100 gr., 
on n’en rĂ©serve que la moitiĂ© Ă  l’analyse, l’autre moitiĂ© est conservĂ©e 
pendant quatre mois dans un flacon bien bouché. 

Si son poids est inférieur à 100 gr., on le laisse tout entier pour 
l'analyse. 

Tous les phosphates, Ă  quelques exceptions prĂšs, que nous men- 
tionnons ci-dessous, sont broyĂ©s dans un mortier jusqu’à ce qu’ils 
passent Ă  travers un tamis Ă  mailles de 4 millimĂštre. 

Les phosphates de la Somme, les craies phosphatées, la poudre 
d'os, les guanos bruts, la poudre de viande (Fleischmehl) sont passés 
au moulin Maercker, puis mélangés intimement sur une feuille de 
papier. 

Les coprolithes, les scories brutes, le sang desséché sont écrasés 
finement dans un mortier de fer, jetés dans un tamis à mailles de 
un demi-millimÚtre et enfin mélangés intimement. 

Les apatites sont d’abord dessĂ©chĂ©es pendant 12 heures Ă  la tem- 
pérature de 100 degrés, pesées aussitÎt que le refroidissement est 
obtenu, écrasées grossiÚrement et passées dans un tamis à mailles 
de 4 millimÚtres. Un échantillon moyen est prélevé dans la partie 
tamisĂ©e. On le broye dans un mortier de fer jusqu’à ce qu’il passe Ă  
travers un {amis Ă  mailles de un demi-millimĂštre. 

Les autres engrais, fumier sec, poudrette, sont traités comme les 
phosphates en général. La poudre et la sciure de corne sont pulvé- 
risées avec le moulin Maercker. 

LesalpĂȘtre du Chili, le sulfate d’'ammoniaque, le kaĂŻnite et les autres 
sels de potasse sont broyés dans un mortier et ensuite intimement 
mélangés. 

Les chaux, les marnes sont laissĂ©es Ă  air libre jusqu’à ce qu’elles 
aient atteint un certain état de dessiccation, puis elles sont pulvérisées 
et jetées dans un filtre à mailles de 1 millimÚtre. 

Les produits qui, comme les dĂ©bris de laine, ne peuvent ĂȘtre mĂ©- 
langés intimement et donner un échantillon homogÚne sont chauffés 
avec de l'acide chlorhydrique jusqu’à Ă©vaporation complĂšte de l'acide, 


: IG ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 
mĂ©langĂ©s avec du gypse, broyĂ©s dans un mortier et soumis Ă  l’ana- 
lyse. 


Remarques importantes. — 1° Certains engrais comme les fumiers, 
les gadoues, les purins, sont offerts à l’agriculteur sous une forme 
boueuse ou plus ou moins liquide et contiennent généralement des 
sels ammoniacaux volatils. Avant de les soumettre à l’analyse, il faut 
les dessĂ©cher Ă  100 degrĂ©s. On Ă©vite les pertes d’ammoniaque en les 
additionnant d’une substance fixatrice de l’ammoniaque, telle que 
l'acide oxalique. | 

2 À cause de l’hygroscopicitĂ© souvent trĂšs grande de certains en- 
grais, il est bon de déterminer leur teneur en humidité au moment 
de la prise de l'échantillon. Si la substance est ensuite desséchée 
pour qu’elle puisse ĂȘtre moulue plus facilement, ou mĂȘme si elle est 
simplement broyĂ©e, un deuxiĂšme dosage de l’humiditĂ© est fait en 
mĂȘme temps que les autres dĂ©terminations. On rapporte alors les 
résullats donnés par ces derniÚres à 100 de substance initiale. 


b) Détermination de l'humidité. 


Elle est toujours faite au moyen d’une Ă©tuve chauffĂ©e au gaz et 
pourvue d’un rĂ©gulateur de tempĂ©rature automatique. On n’obtient 
pas avec cel appareil des rĂ©sultats rigoureusement exacts, car l’air 
peut pĂ©nĂ©trer dans l’étuve et dĂ©terminer une oxydation de la subs- 
tance ; mais quand il s’agit d'engrais, les rĂ©sultats trouvĂ©s sont suf- 
fisamment exacts. 

L’étuve employĂ©e (fig. 2) se compose d’une caisse parallĂ©lipipĂ©- 
dique d'environ 0,40 de cÎté et fermée en avant par une porte à 
double battant. Entre les deux parois de chaque face est un espace 
qui peut ĂȘtre rempli avec de l’eau. 

Un régulateur de température est placé sur la face supérieure de 
l’étuve. Il est formĂ© d’un tube en U, rempli partiellement de mer- 
cure ; l’une de ses extrĂ©mitĂ©s communique avec l’espace rempli 
d’eau, tandis que l’autre reçoit le tube d’écuappement et le tube 
d'arrivĂ©e du gaz. Ce dernier est terminĂ© par une plume d’oie taillĂ©e 
en biais, dont la pointe plonge dans le mercure. Si le chauffage est 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 117 


trop Ă©nergique, la vapeur d’eau acquiert une tension plus forte, fait 
monter le mercure dans la branche oĂč est situĂ©e la plume d’oie, et 
ralentit l’arrivĂ©e du gaz. Inversement, si la tempĂ©rature baisse, le 
mercure en descendant laisse, dans la section de la plume d’oie, 
un passage plus grand au gaz et la température revient au degré 
convenable. | 

L’étuve est aussi munie d’une soupape de sĂ»retĂ©. 

Le dosage de l’humiditĂ© d’un engrais est trĂšs simple Ă  effectuer 
avec cet appareil. 10 gr. de substance sont placés dans un petit verre 
à précipité lavé, séché et taré. On les laisse pendant trois ou quatre 
heures dans l’étuve qu’on a portĂ©e prĂ©alablement Ă  la tempĂ©rature 
de 105 à 110 degrés. La différence des poids avant el aprÚs la des- 
siccation donne le poids de l’eau contenue dans la quantitĂ© de subs- 
tance employée. 


c) Dosage de l’acide phosphorique. 


Nous ne connaissons pas de procédé chimique permettant de dé- 
terminer exactement la valeur agricole d’un phosphate. 

Pendant longtemps, on a admis que l’acide phosphorique soluble 
dans l’eau avait seul de l'effet sur la vĂ©gĂ©tation (Angleterre, Alle- 
magne), puis on Ă  accordĂ© Ă  l’acide phosphorique soluble dans le 
citrate d’ammoniaque une valeur Ă©gale (France) et enfin depuis 
quelque temps on tend de plus en plus Ă  croire que l’état de division 
des phosphates, leur état de mélange intime avec la couche arable, 
sont les facteurs les plus importants de leur valeur comme engrais. 
Cette derniĂšre hypothĂšse s’est montrĂ©e exacte dans beaucoup de 
cas, mais cependant pas toujours. 

Suivant les idées admises sur l'assimilation de l'acide phospho- 
rique pour les plantes, on a donc adopté, dans les laboratoires, di- 
vers modes de dosage, et actuellement on dose encore : 

Soit l’acide phosphorique soluble dans l’eau ; 

Soit l’acide phosphorique soluble dans le citrate d’ammoniaque ; 

Soit l’acide phosphorique soluble dans les acides. 


L’acide phosphorique soluble dans l’eau se trouve en quantitĂ© 


118 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


relativement grande dans les superphosphates. À Halle, on le fait 
entrer en dissolution d’aprĂšs la mĂ©thode suivante : 

20 gr. de superphosphate sont introduits dans un flacon de 1 litre 
de capacitĂ© et additionnĂ©s de 800 centim. cubes d’eau distillĂ©e. Le 
flacon, aprĂšs avoir Ă©tĂ© fermĂ© hermĂ©tiquement Ă  l’aide d’un bouchon 
de caoutchouc, est agité pendant une demi-heure dans un appareil 
ad hoc imaginé par le professeur Maercker. | 

On complĂšte ensuite le volume Ă  1 000, puis le liquide aprĂšs plu- 
sieurs agitations qui mélangent intimement toute la masse est jeté sur 
un double filtre et tombe dans des flacons de 400 centim. cubes ayant 
la forme des bouteilles en usage dans les pharmacies. 

90 centim. cubes de la liqueur filtrée (représentant 1 gr. de subs- 
tance) sont transvasĂ©s Ă  l’aide d’une pipette dans un flacon Erlen- 
meyer (fig. 4) et soumis Ă  l’action des rĂ©actifs prĂ©cipitant l’acide 
phosphorique. (Voir plus loin, page 122.) 

L’agitateur Maercker (fig. 18), qui vient d’ĂȘtre mentionnĂ©, se com- 
pose essentiellement d’une planche horizontale reposant sur deux 
cadres métalliques dont la piÚce transversale inférieure peut osciller 
dans des gonds fixés sur une table, et portant une caisse assez grande 
pour contenir douze flacons de 1 litre. Ces derniers y sont couchés 
obliquement six dans un sens, six en sens opposé. Une planche fixée 
verticalement dans le milieu de la caisse et munie de douze entailles 
supporte les cols. Les fonds des flacons ont leur place dans des 
entailles demi-circulaires bordées de caoutchouc. 


L’acide phosphorique soluble dans le citrate d’ammoniaque existe 
dans les phosphates rétrogradés, dans les phosphates précipités, etc. 

Le mode de dosage adopté est le suivant : 

Dans un verre Ă  prĂ©cipitĂ©, on laisse digĂ©rer 2 gr. d’engrais avec 
100 centim. cubes de la solution dite Petermann ‘ pendant une demi- 


1. La solution dite « solution Petermann » se prépare de la maniÚre suivante : 

250 gr. d’acide citrique cristallisĂ© sont dissous dans 500 centim. cubes d'eau bouil- 
lante, puis additionnée de 550 centim. cubes d'eau et de 276 centim. cubes de solu- 
tion ammoniacale à 24 p. 100. Si le mélange total est acide, on le neutralise exacte- 
ment avec quelques goultes d'une solution d'acide citrique Ă  50 p. 100. Le liquide 
ainsi préparé z une densité de 1.09. 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 119 
heure à la température de 50 degrés. Le tout est ensuite jeté sur un 
filtre et lavé plusieurs fois avec un liquide formé de une partie de 
solution Petermann et une partie d’eau. Tout l’acide phosphorique 
solubilisé est ainsi entrainé. Le filtre et son contenu sont alors des- 
sĂ©chĂ©s Ă  l’étuve, puis chauffĂ©s au rouge dans une capsule de platine 
jusqu’à incinĂ©ration du filtre el transvasĂ©s dans un ballon de 200 
centim. cubes avec 2 centim. cubes d’acide azotique de densitĂ© 1.41 
el 20 centim. cubes d’acide sulfurique concentrĂ©. On fait bouillir 
pendant une demi-heure (voir la théorie du traitement dans la des- 
cription de la mĂ©thode de dosage de l’acide phosphorique total), 
laisse refroidir, ajoute avec prĂ©caution de l’eau au mĂ©lange acide, 
refroidit à 17°,5, complÚte le volume à 200 centim. cubes, jette le 
tout sur un double filtre aprĂšs plusieurs agitations et emploie 100 
centim. cubes de la liqueur filtrée (représentant 1 gr. de substance) 
pour les soumettre dans un Erlenmeyer Ă  la prĂ©cipitation de l’acide 
phosphorique par les réactifs appropriés. (Voir pages 122 et suiv.) 


L’acide phosphorique Ă  l’état de phosphate tribasique existe dans 
presque tous les engrais phosphatés. Pour le dissoudre, on traite 
l'engrais par un acide. Il va de soi que les deux autres formes de 
l'acide, quand elles sont prĂ©sentes, entrent en mĂȘme temps en dis- 
solution. Ce traitement conduit donc à la détermination des quantités 
totales d'acide phosphorique. On l’effectue de la mĂȘme maniĂšre avec 
tous les phosphates, sauf avec les scories de déphosphoration. 

9 gr. de substance sont introduits dans un ballon de un demi-litre 
avec 20 centim. cubes d’acide azotique de densitĂ© 1.42 et 50 centim. 
cubes d'acide sulfurique concentré pur. On fait bouillir le tout pen- 
dant une demi-heure sur un bain de sable. Avec les engrais qui ren- 
ferment beaucoup de matiÚres organiques, il est souvent nécessaire 
d'employer plus de 20 centim. cubes d’acide azotique. En tout cas, 
il est Ă  recommander, et surtout avec ces derniers, d'ajouter au 
mélange un peu de paraffine, afin d'éviter un boursouflement trop 
considérable qui pourrait occasionner un débordement de la ma- 
tiĂšre. 

L'opération précédente étant terminée, on place le ballon sur une 
feuille de papier et on le laisse refroidir. On le remplit ensuite len- 


120 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


tement et presque entiĂšrement avec de l’eau distillĂ©e. La combi- 
naison de l’eau et de l’acide sulfurique amĂšne une Ă©lĂ©vation de tem- 
pérature et par conséquent une dilatation du liquide. On refroidit 
jusqu'Ă  17°,5 dans un rĂ©frigĂ©rant qui n’est autre chose qu’une boĂźte 
de zinc divisĂ©e en compartiments oĂč peut circuler un courant d’eau 
ordinaire. Le ballon est enfin rempli jusqu’au trait 500. Aprùs l’avoir 
agité plusieurs fois en tous sens, on jette son contenu sur un double 
filtre. 50 centim. cubes de la liqueur filtrée (correspondant à 05,5 
de substance) sont transvasĂ©s Ă  l’aide d’une pipette dans un flacon 
Erlenmeyer et traitĂ©s en vue de la prĂ©cipitation de l’acide phospho- 
rique. 


Avant d'aller plus loin, il est utile d'indiquer sur quels principes 
repose ce mode de traitement par l'acide azotique et l’acide sulfu- 
rique. 

Parmi les corps qui accompagnent gĂ©nĂ©ralement l’acide phospho- 
rique dans les engrais phosphatés et qui sont susceptibles de fausser 
les résultats du dosage, il faut citer en premiÚre ligne : les matiÚres 
organiques, la silice et la chaux. 

Il n’est pas nĂ©cessaire d'indiquer ici pourquoi les trois corps prĂ©- 
citĂ©s peuvent ĂȘtre, dans l’analyse prĂ©sente, une cause d’erreur. Ces 
faits sont suffisamment connus. 

GrĂące au traitement des phosphates par les deux acides en ques- 
tion, on fait entrer en dissolution tout l’acide phosphorique, dĂ©truit 
les matiĂšres organiques, rend la silice insoluble et Ă©limine une partie 
de la chaux. 

En effet : 

1° Toutes les formes de l’acide phosphorique contenues dans les 
engrais sont solubles dans un mĂ©lange bouillant ‘d'acide sulfurique 
et d’acide azotique ; 

2 L’acide sulfurique dĂ©compose les matiĂšres organiques en leur 
enlevant les Ă©lĂ©ments de l’eau, et laisse du carbone pour rĂ©sidu. 
L’acide azotique se trouvant Ă  chaud en prĂ©sence de ce dernier 
corps, le transforme en acide carbonique en lui cédant de son oxy- 
gĂšne et il est amenĂ© lui-mĂȘme Ă  l’état de bioxyde d’azote qui, au 
contact de l'air, donne des vapeurs rutilantes d’acide hypoazotique ; 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 121 


3° À la tempĂ©rature oĂč le mĂ©lange des deux acides bout, lacide 
sulfurique, qui est trùs avide d’eau, prend à la silice son eau de 
constitution et la rend insoluble ; 

4 L’acide sulfurique peut en outre se combiner à la chaux et 
donner du sulfate de chaux, soluble dans les acides, mais peu so- 
luble dans les acides trĂšs Ă©tendus. Or, it arrive souvent que la chaux 
contenue dans les engrais phosphatés est en trop grande quantité 
pour qu’elle puisse ĂȘtre redissoute entiĂšrement Ă  l’état de nitrate 
double, par l'addition de la solution citrique. 

Elle se prĂ©cipite alors Ă  l’état de citrate de chaux qui vient s’a- 
jouter au précipité de phosphate ammoniaco-magnésien. Le sulfate 
de chaux dont nous venons d'indiquer la formation se sépare en 
partie aprĂšs qu’on a complĂ©tĂ© le volume Ă  500, et il reste rarement 
assez de chaux en solution pour fausser les résultats. 


Le mode de traitement des scories est un peu différent, parce 
que ces derniĂšres ne renferment pas de matiĂšres organiques. 

On prend 10 gr. de substance qu’on humecte dans une cap- 
sule de porcelaine avec quelques gouttes d’eau. On ajoute ensuite 
9 centim. cubes d’acide sulfurique renfermant la moitiĂ© de son poids 
d’eau, et lorsque la masse est durcie, 50 centim. cubes d’acide sul- 
furique concentrĂ©. Le mĂ©lange est remuĂ© avec un agitateur jusqu’à 
ce qu’il soit bien homogĂšne, puis placĂ© sur un bain de sable et 
chauffĂ© jusqu’à l’ébullition pendant une demi-heure. Il faut veiller 
à ce qu'aucune parcelle de la substance ne devienne adhérente aux 
parois de la capsule, car il pourrait se produire des projections vers 
la fin du traitement. 

Pendant le refroidissement, on lave les parois de la capsule avec 
une pisselte Ă  eau, remue et transvase le tout dans un ballon Ă  fond 
plat de un demi-litre qu’on remplit Ă  la tempĂ©rature de 17°,5 jus- 
qu’au trait 500. 

La filtration du liquide ayant été faite comme il a été indiqué pour 
les superphosphates, on prélÚve 50 centim. cubes de la liqueur 
filtrĂ©e pour y faire le dosage de l’acide phosphorique. Ges 50 centim. 
cubes représentent 1 gr. de substance. 


Remarque. — 1] peut ĂȘtre utile ou intĂ©ressant de connaĂźtre la 


122 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


quantité d'acide phosphorique libre contenue dans un superphos- 
phate. 

On opĂšre alors de la maniĂšre suivante : 

5 gr. de l’engrais sont agitĂ©s dans un mortier avec de l’alcool 
absolu et transvasés dans un flacon de 250 centim. cubes. On com- 
plĂšte jusqu’à la marque 250 avec de l'alcool pur. Le flacon ayant Ă©tĂ© 
bien bouché, on laisse les corps en présence pendant deux heures, 
en ayant soin d’agiter frĂ©quemment. 

On filtre alors trĂšs vite, mesure avec la pipette 50 centim. cubes 
(reprĂ©sentant 1 gr. de substance) de la liqueur filtrĂ©e, qu’on intro- 
duit dans un flacon Erlenmeyer, chauffe jusqu’à Ă©vaporation com- 
plĂšte de l'alcool, verse sur le rĂ©sidu de l’eau distillĂ©e, et contmue le 
dosage comme dans les autres cas. 


Toutes les solutions d'acide phosphorique dont nous venons d'in- 
diquer la prĂ©paration et le transvasement Ă  l’aide d’une pipette 
dans un flacon Erlenmeyer sont traitĂ©es Ă  partir de ce moment d’une 
maniĂšre analogue. 

On leur ajoute, dans le cas des superphosphates, 50 centim. cubes, 
dans les autres cas, 100 centim. cubes d’une solution de eitrate 
d’ammoniaque ', qu’on laisse tomber d’une burette graduĂ©e en 
50 centim. cubes, et aussitît aprùs 25 centim. cubes d’une solution 
magnésienne (MagnesiamiÊtur)* dont on a rempli auparavant une 
burette graduée en 25 centim. cubes. 

L’addition de la liqueur magnĂ©sienne doit ĂȘtre faite immĂ©diate- 
ment aprĂšs celle de la liqueur citrique, afin d’éviter la prĂ©cipitation 
par cette derniĂšre du phosphate de chaux cristallin que la premiĂšre 
_ne pourrait complùtement redissoudre. Il est donc bon d’agiter 
constamment les flacons Erlenmeyer contenant la solution Ă  analyser 
pendant qu’on y introduit les rĂ©actifs prĂ©cipitants. 


1. La solution de citrate d'ammoniaque est préparée ainsi qu'il suit : 

1 500 gr. d'acide citrique sont dissous dans de l'eau, puis additionnés de 5 000 centim. 
cubes de solution ammoniacale à 24 p. 100. Le tout est complété à 15 litres avec de 
l'eau distillée. 

2, Pour préparer la liqueur magnésiennne (Magnesiamixtur), on dissout dans 
61,5 d'eau distillée, 550 gr. de chlorure de magnésium et 1 050 gr. de chlorhydrate 
d'ammoniaque, on ajoute ensuite 3!,5 de solution ammoniacale Ă  24 p. 100. 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 123 


La liqueur doit ĂȘtre complĂštement claire quand on a terminĂ© 
l'addition du réactif magnésien, sinon 1l faudrait ajouter une nou- 
velle quantitĂ© de ce dernier (jusqu’à 25 centim. cubes) Ă  moins que 
le trouble existant ne soit qu’une simple opalescence, comme le cas 
se produit souvent avec les superphosphates provenant du noir 
animal. 

Les rĂ©actions qui se passent pendant qu’on mĂ©lange les liquides 
en question, déterminent une élévation de température qui pourrait 
rendre difficile la précipitation du phosphate ammoniaco-magnésien. 
On pare à cet inconvénient en plaçant pendant quelques minutes les 
flacons Erlenmever dans le réfrigérant dont nous avons déjà parlé. 
On hĂąte mĂȘme la formation du prĂ©cipitĂ©, et Ă©vite qu'il adhĂšre trop 
fortement aux parois du verre en l’agitant pendant une demi-heure, 
aprÚs avoir fermé hermétiquement les flacons avec de bons bouchons 
de caoutchouc. 

Getle agitalion est effectuĂ©e Ă  l’aide d’une machine (/ig. 5) cons- 
truite de la maniĂšre suivante : 

À un axe vertical sont fixĂ©s horizontalement deux plateaux circu 
laires sur chacun desquels sont formĂ©s Ă  l’aide de palettes radiales 
six compartiments. Un cordon de caoutchouc forme le cÎté extérieur 
de chacun d’eux, de sorte que chaque plateau peut recevoir six fla- 
cons Erlenmeyer. Un moteur Ă  eau met en mouvement une roue 
qui, par l’intermĂ©diaire d’une manivelle et d’une bielle, commu- 
nique Ă  l'axe et aux plateaux un mouvement Lournant de va-et-vient. 

Une fois l’agitation terminĂ©e, les particules de prĂ©cipitĂ© adhĂ©- 
rentes au bouchon sont sĂ©parĂ©es Ă  l’aide d’une plume d’oie dont on 
a enlevé les barbes jusque prÚs de l'extrémité et envoyées dans le 
ballon correspondant à l’aide d’une pissette contenant de l’eau am- 
moniacale Ă  5 p. 100. 

On peut jeter le précipité sur le filtre aussitÎt aprÚs, ou bien 
attendre un ou deux jours. Les rĂ©sultats sont les mĂȘmes quel que 
soit celui de ces dĂ©lais qu’on adopte. 

La filtration a lieu dans une capsule de platine dont le fond est 
percé de trous circulaires ayant un demi-millimÚtre de diamÚtre, et 
recouvert d'amiante destinée à remplacer le papier-filtre. 

L'amiante, pour ĂȘtre propre Ă  cet usage, doit subir la prĂ©paration 


124 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


suivante : Les fibres d’amiante les plus grossiĂšres sont rĂąclĂ©es sur une 
plaque de verre avec une lame bien aiguisée et transformées ainsi 
en une sorte de charpie trùs fine qu’on fait bouillir pendant deux 
heures au bain-marie avec de lacide chlorhydrique concentré. 
Par une sĂ©rie d’additions d’eau et de dĂ©cantations avec un siphon, 
aprùs un repos suffisamment long, on enlùve peu à peu tout l’acide 
chlorhydrique. L’amiante qui flotte aprĂšs la derniĂšre dĂ©cantation 
dans l’eau rendue ainsi Ă  peu prĂšs neutre, peul alors ĂȘtre employĂ©e 
Ă  faire des filtres. À cet effet, la capsule de platine est attelĂ©e Ă  une 
trombe Ă  eau au moyen de l’appareil (fig. 6) dont le tube supĂ©rieur 
porte un cylindre de caoutchouc qui est repliĂ© vers l’intĂ©rieur sur 
tout son pourtour et s'applique exactement sur la paroi extérieure 
de la capsule. L’eau avec l’amiante sont versĂ©es dans la capsule ; 
l'amiante tassĂ©e avec un agitateur aplati Ă  l’extrĂ©mitĂ©, lavĂ©e plu- 
sieurs fois avec de l’eau distillĂ©e. La capsule de platine est alors 
portée dans le moufle, chauffée au rouge pendant dix minutes, 
exposée au refroidissement dans un exsiccateur, puis tarée. 

La filtration du liquide contenant le précipité de phosphate am- 
moniaco-magnĂ©sien a lieu suivant le mĂȘme mode que nous venons 
d'indiquer. Les derniÚres parcelles du précipité sont détachées des 
parois du flacon avec une plume d’oie et envoyĂ©es dans la capsule 
à l’aide d’une solution ammoniacale à 5 p. 100. Cette derniùre est 
contenue dans un flacon (fig. 7) placé à deux mÚtres au-dessus du 
sol et est amenĂ©e Ă  portĂ©e de l’opĂ©rateur par un tube formant 
siphon, et terminé à son extrémité inférieure par un tube de verre 
étiré que commande une pince de pression. 

Quand la filtration est achevĂ©e, la capsule est essuyĂ©e Ă  l’extĂ©- 
rieur avec un linge sec, placée sur une plaque de fer (fig. 8) au- 
dessous de laquelle brĂ»le un Bunsen, chauffĂ©e ainsi jusqu’à ce que 
le précipité se fendille et enfin introduite dans le moufle à gaz 
(fig. 9) dont les parois sont portées au rouge. 

On compte que 5 Ă  10 minutes suffisent pour transformer le phos- 
phate ammoniaco-magnésien en pyrophosphate de magnésie. 

La capsule est alors retirée du moufle. On hùte son refroidis- 
sement en la plaçant dans un rĂ©frigĂ©rant composĂ© d’une sorte de 
boüte de zinc (fig. 10) dans laquelle peut circuler un courant d’eau 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 125 


et dont la face supérieure présente trois enfoncements doublés de 
cuivre, ayant une forme de tronc de cÎne, et destinés à recevoir les 
capsules. DÚs que ces derniÚres ont acquis la température de l'air 
ambiant, elles sont portées sous une cloche de verre et peuvent 
ĂȘtre pesĂ©es quelques instants aprĂšs. 

En multipliant par 0,639 le poids de pyrophosphate, on obtient la 
quantitĂ© d’acide phosphorique contenue dans la portion de liqueur 
soumise à l’analyse. 

La balance employée est sensible au dixiÚme de milligramme. 

Les quantités de pyrophosphate trouvées dans les deux dosages 
parallÚles ne doivent pas différer de plus de 15,2 pour 08,5 de 
substances, et de 26,4 pour 1 gr.; sinon, le dosage doit ĂȘtre re- 
commencé. 

Des tables construites par Stutzer et correspondant à 05°,5 de 
matiùre permettent de trouver trùs vite quel poids d’acide phospho- 
rique correspond à un poids donné de pyrophosphate de magnésie. 

Si le liquide traitĂ© par les rĂ©actifs prĂ©cipitant l’acide phosphorique 
correspondait Ă  À gr. ou 4ÂŁ,5 d’engrais, une correction serait nĂ©- 
cessaire. 

Pour éviter des confusions, toutes les capsules sont numérotées. 

Au printemps et en automne, c’est-à-dire au moment des se- 
mailles, quatre préparateurs sont employés exclusivement au dosage 
de l'acide phosphorique; deux d’entre eux exĂ©cutent toutes les 
opĂ©rations jusqu’à et non compris la filtration du prĂ©cipitĂ© de phos- 
phate ammoniaco-magnésien ; les deux autres achÚvent le dosage. 
Avec une telle division du travail, 100 dĂ©terminations peuvent ĂȘtre 
effectuées en une Journée de huit heures. 

Quant aux capsules de platine, elles peuvent, malgré le précipité 
qu’elles renferment, servir à de nouvelles filtrations, sans qu’il soit 
nécessaire de leur faire subir une autre préparation. 

Cependant quand elles sont remplies à moitié, on extrait le pyro- 
phosphate avec précaution sans toucher au filtre d'amiante, tare de 
nouveau la capsule et la rend ainsi apte Ă  ĂȘtre utilisĂ©e de nouveau. 


Dosage de l'acide phosphorique par le molybdate d'ammoniaque. 
— D’aprĂšs une convention adoplĂ©e au CongrĂšs des stations agrono- 


126 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


miques allemandes, lacide phosphorique doit ĂȘtre dosĂ© par le 
molybdate d'ammoniaque, quand il s’agit d’une expertise à faire. 

On opĂšre alors de la maniĂšre suivante : 

On dissout l’acide phosphorique de la substance à analyser comme 
nous l’avons indiquĂ© en dĂ©crivant la mĂ©thode par le phosphate am- 
moniaco-magnésien. 

50 centim. cubes de la liqueur filtrée sont transvasés avec une 
pipette dans un flacon Erlenmeyer et additionnés de 200 centim. cubes 
de liqueur molybdique*. Le tout est placé, pendant deux heures, 
dans un bain d'eau à la température de 50 degrés. Le flacon étant 
retiré du bain, et son contenu refroidi, on jette ce dernier sur un 
filtre, en prenant som de laisser aller le moins possible de précipité 
sur le filtre. | 

La partie non entrainée est lavée neuf fois avec 20 centim. cubes 
de liqueur molybdique Ă©tendue de son poids d’eau. Les eaux de 
lavage sont jetées par décantation sur le filtre, et celui-ci est lavé 
une dixiĂšme fois avec 20 centim. cubes de la mĂȘme solution. 

L’entonnoir avec son contenu est alors fixĂ© sur le flacon Erlen- 
meyer correspondant, et on fait tomber le précipité dans ce dernier 
en le dissolvant avec de l’eau ammoniacale à 5 p. 100. Pour en en- 
trainer les derniùres traces, on lave deux ou trois fois avec de l’eau 
bouillante. 

Le liquide filtré est neutralisé à chaud avec de lacide chlorhydri- 
que, c’est-Ă -dire additionnĂ© de cet acide jusqu’à ce que le prĂ©cipitĂ© 
qui apparail ne se dissolve qu’aprùs une agitation assez longue. 

AprĂšs refroidissement, on ajoute goutte par goutte et en agitant, 
20 centim. cubes de liqueur magnésienne ( Magnesiamixtur ), 
25 centim. cubes de solution ammoniacale (Voir précédemment le 
mode de préparation de ces deux solutions), mélange bien le tout et 
laisse au repos pendant deux heures. 

Le précipité est ensuite jeté dans une capsule de platine munie 
d'un filtre d'amiante, et le ballon Erlenmeyer lavé comme nous 


1. Pour préparer la solution moiybdique, on dissout dans un litre d'eau 150 gr. de 
molybdate d'ammoniaque. AprĂšs refroidissement, on verse la solution dans un litre 
d'acide azotique de densité 1.2. 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 127 


l'avons indiqué dans la description de la méthode du phosphate 
ammoniaco-magnésien. 

Avec ce mode de dosage, il est à recommander de n’employer le 
mĂȘme filtre d'amiante qu’une seule fois, car le prĂ©cipitĂ© de phos- 
phate ammoniaco-magnĂ©sien qu’on obtient se compose de cristaux 
trĂšs fins qui pourraient ĂȘtre entrainĂ©s avec le liquide Ă  travers les 
fils d'amiante, si ces derniers ne formaient pas un réseau trÚs serré, 

Une fois la filtration terminée, la capsule de platine est placée 
dans un manchon de mĂȘme mĂ©tal, et chauffĂ©e sur un brĂ»leur Bunsen 
jusqu’à ce que le prĂ©cipitĂ© soit presque blanc. — Le but de ce 
manchon est d'empĂȘcher laction des gaz rĂ©ducteurs de la flamme. —- 
Elle est ensuite introduite seule et laissée pendant cinq à dix minutes 
dans un moufle chauffé au rouge. 

La transformation du précipité en pyrophosphate de magnésie 
peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme terminĂ©e quand le prĂ©cipitĂ© est devenu 
complĂštement blanc. 

Le dosage est achevé comme d'habitude. 


Quelques remarques sur les scories. — 1° De nombreuses expĂ©- 
riences ont prouvĂ© que les scories rĂ©duites Ă  l’état de poussiĂšre trĂšs 
fine et mélangées intimement à la couche arable produisent, dans 
beaucoup de cas, les mĂȘmes effets comme engrais phosphatĂ©s que 
les superphosphates. 

Cette donnée a conduit les Stations agronomiques allemandes à 
faire dans les scories la détermination des parties fines, et celle des 
parties plus grossiĂšres. 

L’acide phosphorique des parties fines est considĂ©rĂ© comme pou- 
vant produire son effet dans l’annĂ©e mĂȘme de son emploi, le reste 
forme un stock qui arrivera petit Ă  petit Ă  la consommation, suivant 
la grosseur des particules. 

D’aprĂšs une convention adoptĂ©e au CongrĂšs des stations agrono- 
miques, appartient Ă  la partie fine tout ce qui passe Ă  travers un 
tamis d’au moins 20 centim. de diamùtre et à mailles de 0,17, 

90 gr. de scories sont introduits dans le tamis en question et 
agités pendant un quart d'heure (ce temps a été fixé par le CongrÚs) 
soit Ă  la main, soit Ă  l’aide de l’agitateur mĂ©canique que nous avons 


128 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


dĂ©crit en parlant du mode de dissolution de l’acide phosphorique 
des superphosphates. 

2 Depuis quelques années, on falsifie les scories avec du phos- 
phate d’alumine (Redondaphosphale), lequel semble ne pas ĂȘtre assi- 
milable par les plantes. 

Deux mĂ©thodes peuvent ĂȘtre employĂ©es pour dĂ©celer cette falsi- 
fication. | | 


a) MĂ©thode Richter. — Elle est basĂ©e sur le principe suivant: Les 
solutions de sels d’alumine donnent, quand on les additionne de 
potasse ou de soude, un prĂ©cipitĂ© d’alumine gĂ©latineuse soluble 
dans un excÚs de réactif, tandis que le précipité obtenu dans les 
mĂȘmes conditions par l'addition d’ammoniaque ne se redissout pas, 
quelle que soit la quantitĂ© d’ammoniaque ajoutĂ©e. 

2 gr. de la scorie à examiner sont laissés pendant quelques heures, 
dans un verre à précipité, en présence de 10 centim. cubes de soude 
caustique ayant une densité de 1,05 à 1,06. Le mélange est agité de 
temps en temps. 

AprÚs un repos suffisamment long, le liquide supérieur est dé- 
cantĂ©, rendu lĂ©gĂšrement acide avec de l’acide azotique qu’on ajoute 
goutte Ă  goulte, puis additionnĂ© d’ammoniaque jusqu’à rĂ©action 
franchement alcaline. 

Si la scorie n’a pas Ă©tĂ© falsifiĂ©e, il ne se produit aucun prĂ©ci- 
pitĂ© ; Ă  peine voit-on apparaĂźtre quelques flocons d’acide silicique. 

S1, au contraire, du phosphate d’alumine lui a Ă©tĂ© mĂ©langĂ©, il se 
sépare un précipité, qui, aprÚs un temps relativement long, occupe 
la moitié du liquide. 

D'ailleurs, si la potasse pendant son contact avec la scorie a pris 
une coloration jaune ou rouge, si par l’addition goutte à goutte de 
l'acide azotique, il s’est formĂ© un prĂ©cipitĂ© tant que la liqueur 
était encore alcaline, on peut sûrement conclure à une falsifica- 
tion. 

Mais supposons que toutes ces rĂ©actions n’aient pas Ă©tĂ© bien mar- 
quĂ©es, et qu’il subsiste encore des doutes. La mĂ©thode suivante 
due au D° Gerlach, préparateur à la Station de Halle, permet de les 
lever. 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMAYDES. 129 


b) 5 gr. de scories sont traités dans un tube à essai avec 10 à 
15 centim. cubes de bromoforme. Si la scorie est pure, elle se 
dissout à peu prÚs entiÚrement. Quelques débris organiques seule- 
ment restent en suspension. Mais si elle a été mélangée de phosphate 
d’alumine, ce dernier ne se dissout pas et nage à la surface du 
bromoforme. La partie flottante est alors traitĂ©e d’aprĂšs la premiĂšre 
méthode et cette fois les réactions sont trÚs prononcées et permettent 
de porter un Jugement sûr. 

Pour dĂ©terminer la quantitĂ© d’acide phosphorique attribuable au 
phosphate d’alumine, on utilise cette propriĂ©tĂ© que possĂšdent les 
phosphates des scories d’ĂȘtre solubles dans les acides organiques. 

1 gr. de scorie est mélangé dans un verre à précipité avec 150 
centim. cubes d’une solution d’acide citrique contenant 50 gr. d’acide 
citrique cristallisé par litre. Le tout est laissé pendant 12 heures 
dans un bain d’eau dont la tempĂ©rature est comprise entre 50 et 70 
degrés. On agite de temps en temps. 

On Ă©tend ensuite la solution avec 100 centim. cubes d’eau, fait 
bouillir pendant une minute, filtre et lave le résidu plusieurs fois 
avec de l’eau bouillante. 

Le filtre et son contenu sont introduits dans une capsule de pla- 
tine, chauffés jusqu'à incinération du filtre, puis traités dans un 
ballon avec de l'acide sulfurique concentré et de l'acide azotique, 
suivant le mĂȘme mode que nous avons indiquĂ© en dĂ©crivant la 
mĂ©thode de dosage de l’acide phosphorique dans les phosphates 
en général. 

La quantitĂ© d’acide phosphorique ainsi trouvĂ©e doit ĂȘtre consi- 
dĂ©rĂ©e comme ne pouvant ĂȘtre d'aucun profit pour les plantes. 


d) Dosage de l’azole sous ses divers Ă©tats. 


1° Dosage de l'azote organique. — Le dosage de l’azote organique 
est effectuĂ© d’aprĂšs la mĂ©thode Kjeldahl. On opĂšre sur 1 gr. ou 15,5 
de substance suivant que les engrais sont censés renfermer plus 
ou moins d'azote organique et sur 0",7 avec les sulfates d’ammo- 
niaque. 


L'oxydation des matiĂšres organiques a lieu dans des ballons Ă  
ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 9 


130 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


fond plat de 180 centim. cubes. Nous avons indiqué (page 5) 
quelles dispositions permettent d’ajouter facilement à la matiùre, 
la goutte de mercure et les 20 centim. cubes d’acide sulfurique 
concentré. 

Pour éviter un boursouflement trop volumineux pendant la ré- 
duction, on emploie la paraffine. 

Les ballons sont alors portés sous la hotte, sur les trépieds que 
nous avons dĂ©crits, lesquels sent d’abord placĂ©s de telle façon que 
les enfoncements qui reçoivent les ballons se trouvent entre les 
flammes. AprÚs une demi-heure, les enfoncements sont ramenés 
au-dessus des flammes et la réaction peut s'effectuer plus vite. 

On considùre que la transformation de l’azote organique en am- 
moniaque est terminée quand le liquide est devenu complÚtement 
clair et incolore. On transvase avec les précautions nécessaires le 
liquide acide dans des flacons Erlenmeyer, 100 centim. cubes d’eau 
distillée sont employés pour cette opération. 

Le dosage est terminé comme d'habitude. 

Nous voulons seulement mentionner quelques particularités qui 
paraissent présenter des avantages. 

L'appareil Ă  distiller est des plus simples. Les Erlenmeyer con- 
lenant le liquide à distiller sont placés au-dessus de brûleurs Bun- 
sen, sur une planche mĂ©tallique couverte d’une toile d'amiante et 
percée de trous circulaires correspondant à la base des ballons. 
Ils communiquent avec les verres contenant les 20 centim. cubes 
d'acide sulfurique titrĂ© Ă  l’aide d’un tube de verre muni d’un ren- 
flement en forme d’allonge Ă  sa sortie de l’Erlenmeyer et recourbĂ© 
ensuite sur un bùton de bois de la forme indiquée dans le dessin. 
Aucun appareil rĂ©frigĂ©rant n’est ici employĂ©, de sorte que la vapeur 
d'eau ammoniacale dĂ©gagĂ©e porte l'acide sulfurique titrĂ© Ă  l’ébulli- 
on, et dĂ©termine le dĂ©gagement de l’acide carbonique qui a pu 
ĂȘtre contenu dans l’eau avec laquelle on a, avant la distillation, dou- 
blĂ© le volume de l'acide sulfurique titrĂ©, ou dans la soude qu’on a 
employĂ©e pour chasser l’'ammoniaque. 

On arrĂȘte la distillation quand le liquide contenu dans l’Erlenmever 
a bouilli pendant vingt minutes. 

Le titrage de l’acide sulfurique non saturĂ© par l’ammoniaque se 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 131 


fait avec de l’eau de baryte ; on n’emploie jamais la potasse ou la 
soude. 

On donne comme raison de cette préférence que la baryte, la soude 
et la potasse donnant lieu, en prĂ©sence de l’acide carbonique de 
l'air, à la formation d’un carbonate, le carbonate de baryte, à 
cause de son insolubilité, se dépose dans la burette ou bien dans le 
rĂ©cipient oĂč la baryte est conservĂ©e, tandis que les carbonates de 
potasse et de soude, qui sont solubles, tombent avec la potasse ou la 
soude dans l'acide sulfurique et tendent ainsi Ă  fausser un peu les 
résultats. 

L’ensemble de l’appareil de titration est composĂ© de la maniĂšre 
suivante : La provision d’eau de baryte est contenue dans un rĂ©ci- 
pient de 30 à 40 litres placé sur un support à environ 2 mÚtres au- 
dessus du sol. 

Il est fermĂ© par un bouchon qui donne passage Ă  trois tubes : l’un 
de ces tubes faisant fonction de siphon, amùne l’eau de baryte à la 
partie infĂ©rieure d’une burette verticale divisĂ©e en dixiĂšmes de 
centim. cube et fixée à un support qui repose sur une table 
ordinaire. Il est commandé par une pince placée prÚs de la bu- 
rette. 

La deuxiĂšme met en communication l’espace vide du rĂ©cipient 
avec la partie supérieure de la burette. 

Enfin le troisiĂšme permet Ă  l’air extĂ©rieur d’arriver dans le rĂ©ci- 
pient en passant Ă  travers une allonge remplie de fragments de 
potasse, destinĂ©s Ă  retenir l’acide carbonique. 

Un flotteur ayant la forme d'un cylindre étiré à ses deux extré- 
mités el portant au milieu de sa hauteur un trait horizontal gravé 
est introduit dans la burette. Si l’on suppose que le niveau de l’eau 
de baryte dans la burette coïncide avec le trait gravé, la lecture des 
résultats est singuliÚrement facilitée. | 

Quand on ne fait pas de titration, la partie inférieure de la bu- 
retle est soustraite au contact de l'air à l’aide d’un court tube de 
caoutchouc fermĂ© Ă  l’autre extrĂ©mitĂ© par une courte tige de verre 
plein. 

Comme indicateur de la fin de la réaction, on emploie deux 
gouttes d’une solution d’acide rosolique dans l'alcool absolu (1 gr. 


132 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


d'acide rosolique dans 50 gr. d'alcool). Au moment oĂč le liquide 
devient alcalin, 1l prend une coloration blanche. Il est Ă  remarquer 
que le point critique est assez difficile Ă  saisir, quand le liquide 
titrĂ© contient une forte proportion d’ammoniaque. Il vaut done 
mieux, avec les sulfates d’ammoniaque, employer la teinture de 
tournesol. 

Nous avons maintenant à donner quelques détails sur la prépara- 
tion des liquides employés. 

Pour prĂ©parer l’eau de baryte, on met 260 or. de baryte hy- 
dratĂ©e en digestion dans de l’eau chaude. On agite et renouvel'e 
l'eau jusqu'Ă  dissolution complĂšte de la baryte. On complĂšte ensuite 
Ă  10 litres. 

La liqueur alcaline qui sert à chasser l’ammoniaque est obtenue 
en mélangeant 11 litres et demi de soude caustique de densité 1,379 
avec 390 gr. de sulfure de potassium qu’on a dissous dans deux 
litres d’eau. 

Pour prĂ©parer l’acide sulfurique titrĂ©, on complĂšte Ă  40 litres, 
1524 gr. d'acide sulfurique concentré pur de densité 4,845 ; on 
fixe son litre à l’aide de carbonate de soude pur, lequel est mainte- 
nant fabriqué dans la grande industrie. 

6 gr. de carbonate de soude sont placés dans une capsule de pla- 
tine larĂ©e, et chauffĂ©s sur une lampe Ă  alcool jusqu’à constance de 
poids. Soit p le poids du carbonate sec. 

On les introduit ensuite avec de l’eau distillĂ©e dans un flacon 
jaugĂ© Ă  1 litre et on complĂšte le volume Ă  1000 quand le sel s’est 
dissous. La solution doit ĂȘtre parfaitement claire. 

Aprùs plusieurs agitations, on transvase à l’aide d’un pipeite 
90 centim. cubes de la solution dans un flacon Erlenmeyer oĂč on a 
introduit prĂ©alablement 20 centim. cubes d’acide sulfurique prĂ©parĂ© 
comme il vient d’ĂȘtre dit. 

On fait bouillir le mĂ©lange jusqu’à disparition complĂšte de l’acide 
carbonique, el sature ensuite l'acide sulfurique avec de l’eau de 
baryte titrĂ©e ; soit B la quantitĂ© d’eau de baryte employĂ©e. 

On sature de mĂȘme 20 centim. cubes d'acide sulfurique auxquels 
on n’a pas ajoutĂ© de dissolulion de carbonate de soude. Soit A la 
quantité de baryte employée. 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 139 


Les 50 centim. cubes de la solution de carbonate renferment 


ep de sel qui correspondent en Ă©quivalent Ă  0 d'azote 
100 930 
Si donc, nous désignons par { la quantité d'azote correspondant 


Ă  20 centim. cubes d’acide sulfurique, nous pouvons Ă©crire : 


RES 930 (A —B) 
1p 
d'oĂč 
PU SAME 
930 (A —B) 


Supposons qu’on ait Ă  interprĂ©ter les rĂ©sultats d’une analyse. 
On aura alors, si on dĂ©signe par g la quantitĂ© d’eau de baryte em- 
ployĂ©e pour saturer l'acide sulfurique non combinĂ© Ă  l’ammoniaque : 


(A—g)t 


Quantité d'azote contenue dans la substance employée = \ 


% Dosage de l'azote ammoniacal. —- On l’exĂ©cute Ă  Halle comme 
en France. 


3 Dosage de l'azote nitrique.— Il y a plusieurs cas à distinguer : 

1° L’engrais à analyser renferme de l’azote sous les trois formes ; 

2 L’engrais à analyser renferme de lazote ammontacal et de 
l'azote nitrique ; 

3 L’engrais à analyser ne renferme que de l'azote nitrique. 

Dans le premier cas, on dĂ©termine l’azote total d’aprĂšs la mĂ©thode 
de Jodlbauer, puis l’azote organique et l’azote ammoniacal d’aprùs 
la méthode Kjeldahl, La différence des résultats trouvés représente 
l’azote nitrique, si toutefois on a eu soin, avant de procĂ©der au 
dernier dosage , d'Ă©liminer complĂštement l'azote nitrique de l’en- 
TaIS. | 
La mĂ©thode Jodlbauer consiste Ă  transformer l’azote nitrique en 
une substance organique dont on amĂšne ensuite l’azote Ă  l’état 
d’ammoniaque d’aprĂšs la mĂ©thode Kjeldahl. 

On opĂšre cette transformation en {raitant la substance Ă  analyser 
par un mĂ©lange de phĂ©nol et d’acide sulfurique. DĂšs qu’elle est dis- 
soute, on ajoute de temps en temps du zinc en poudre. 


134 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Les réactions qui se produisent sont les suivantes : 
L’acide azotique, en rĂ©agissant sur le phĂ©nol, donne du nitro- 
phénol suivant la réaction : 


AzO‘ I + CH, OH — C'H'AzO'OH + H0. 


La poussiùre de zinc arrivant en contact de l’acide sulfurique 
donne lieu à une production d'hydrogÚne, lequel réagit à son tour 
sur le nitro-phĂ©nol et le transforme en amide, ainsi qu’il suit : 


CH AzO* OH + 4H? — C°H° Az HE? + 34H20. 


L’azote de l’amide est ensuite rĂ©duit en ammoniaque (mĂ©thode 
Kjeldahl). 

Nous avons dit que la poussiÚre de zinc est ajoutée par petites 
quantités et par intervalles suffisamment éloignés. 

Si on ajoute trop de zinc en une seule fois, il en résulte un grand 
dégagement de chaleur et par conséquent une élévation de tempé- 
rature du liquide. L’acide sulfurique peut alors rĂ©agir sur les ma- 
tiÚres organiques et donner lieu à la formation de CO° et de SO*. 

L’hydrogĂšne donne en mĂȘme temps avec l’acide sulfureux nais- 
sant de l'acide sulfhydrique et de l’eau : 


SO? + CH = HS + 2H: 0. 


Ainsi s'explique le dégagement d'IFS et de SO? qui se produit 
aprĂšs chaque addition de zinc. On comprend aussi pourquoi il est 
recommandable de maintenir les ballons dans un réfrigérant pendant 
qu'on effectue cette opération. 

Comme toutes ces rĂ©actions mettent de l’eau en libertĂ©, on ajoute 
au mélange d'acide sulfurique et de phénol, de l'acide phosphorique 
anhydre, lequel est trùs avide d’eau et permet ainsi de conserver 
l'acide sulfurique Ă  l’état concentrĂ©, ce qui a son importance dans 
la transformation de l’azote organique en azote ammoniacal d’aprùs 
la méthode Kjeldah]. 

Le mĂ©lange d’acide sulfurique, de phĂ©nol, et d’acide phospho- 
rique anhydre est préparé de la maniÚre suivante : 

On dissout dans de l’acide sulfurique concentrĂ©, d’une part 66 er. 
de phĂ©nol, d’autre part 250 gr. d’acide phosphorique anhydre. 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 19 


AprÚs avoir refroidi les deux solutions, on les mélange et complÚte 
le volume Ă  1!,690. 

Il nous reste à dire comment on pratique la méthode Jodibauer. 
On pĂšse 15',5 d'engrais qu’on introduit dans un ballon Ă  rĂ©duction 
de 180 centim. cubes, avec 30 centim. cubes du mélange indiqué 
ci-dessus. Les corps sont laissés ainsi en présence pendant une heure 
environ. On agite souvent, pour que les principes solubles se dis- 
solvent rapidement et entiÚrement. Les ballons sont ensuite placés 
dans un rĂ©frigĂ©rant, — lequel consiste en une boĂźte mĂ©tallique 
divisĂ©e en compartiments oĂč circule un courant d’eau froide — et 
on commence l'addition du zinc. Celui-ci est déposé sur un papier 
en forme de carte de visite, portant le mĂȘme numĂ©ro que le ballon 
correspondant. Lorsque la quantité totale de zinc (1 gr.) a été intro- 
duite, on laisse les ballons au repos pendant deux heures; on in- 
troduit dans le liquide une goutte de mercure et un peu de paraffine 
et on continue le dosage d’aprĂšs la mĂ©thode Kjeldahl. 

Pour chasser l’ammoniaque par distillation, on rend le liquide 
alcalin avec un mélange de soude caustique et de sulfure de potas- 
sium (méthode Kjeldahl). 

Il est à remarquer que, dans le cas présent, il faut employer au 
moins 109 centim. cubes de cette liqueur. 

La titration de l’acide sulfurique non saturĂ© par l’ammoniaque et 
l'interprĂ©tation des rĂ©sultats n’offrent rien de particulier. 

Quand l’engrais ne contient que de l'azote ammoniacal et de 
l'azote nitrique, on peut aussi avoir recours à la méthode Jodlbauer ; 
mais il est préférable de déterminer séparément l'azote ammoniacal 
el l’azote nitrique ; l'azote ammoniacal, d’aprĂšs la mĂ©thode ordi- 
naire, l'azote nitrique d’aprĂšs la mĂ©thode dite du fer et du zinc qui 
a été introduite à Halle pendant les derniers temps de mon séjour 
au laboratoire, ou d’aprĂšs la mĂ©thode dite de l'aluminium qui est 
adoptée par le professeur Wagner à Darmstadt. 

Enfin quand l’engrais ne renferme que de l'azote nitrique (sal- 
pĂȘtre du Chili), on peut effectuer le dosage de l’azote d’aprĂšs l’une 
de ces deux derniÚres méthodes. 


a) MĂ©thode dite du fer et du zinc. — Nous nous contenterons 


136 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

d'indiquer comment on la pratique, car il n’y a pas jusqu’à prĂ©sent 
de thĂ©orie qui explique d’une maniĂšre satisfaisante les rĂ©actions 
qui se produisent. Mais il est bon de faire tout d’abord la des- 
cripuon de l’appareil Ă  distiller que nĂ©cessite l’emploi de cette mĂ©- 
thode. 

Les flacons Erlenmeyer contenant le liquide à distiller sont placés 
au-dessus de brĂ»leurs, sur une planche mĂ©tallique couverte d’une 
toile d'amiante et percée de trous circulaires destinés à recevoir le 
fond des ballons. Ils sont mis en communication avec les verres con- 
tenant l’acide sulfurique titrĂ© au moyen d’un tube de zinc, recourbĂ© 
d’abord vers le haut et traversant ensuite un rĂ©frigĂ©rant. Pour Ă©viter 
l'entrainement de gouttelettes alcalines, les vapeurs passent Ă  leur 
sortie de l’Erlenmeyer dans un tube recourbĂ© de faible diamĂštre, 
dont les deux branches sont verticales et qui est contenu dans un 
Ă©largissement du tube de communication. 

Les flacons contenant l’acide sulfurique titrĂ© sont fermĂ©s par un 
bouchon donnant passage Ă  deux tubes, l’un qui forme l’extrĂ©mitĂ© 
du tube de communication dĂ©jĂ  citĂ©, l’autre qui est un tube recourbĂ© 
vers l'extérieur et présentant en dehors du flacon plusieurs renfle- 
ments en forme d’allonge remplis en partie d’eau disullĂ©e. Aucun 
d’eux ne plonge dans l’acide. 

Pour faire un dosage d’azote nitrique dans le salpĂȘtre du Chih, 
on introduit 05,5 d'engrais (10 gr. dissous dans un litre d’eau) 
dans un Erlenmeyer de trois quarts de litre de capacité, avec 5 gr. de 
zinc en poudre et 5 gr. de fine limaille de fer et 75 centim. cubes 
d’eau distillĂ©e. Les flacons Ă  acide sulfurique (on emploie ordinaire- 
ment 20 centim. cubes d’acide sulfurique titrĂ©) sont alors fixĂ©s Ă  
l'extrĂ©mitĂ© des tubes de communication. Avant d’atteler les Erlen- 
meyer à l'appareil à distiller, on ajoute au mélange qui y est déjà 
contenu, 80 centim. cubes de soude caustique, de densité de 1.3. Le 
tout est laissĂ© au repos pendant une heure. On allume alors les brĂŒ- 
leurs et disiille jusqu’à ce que 100 centim. cubes de liquide aient 
passé dans les flacons à acide sulfurique. Il arrive souvent que de 
Peau provenant de la condensation des vapeurs s’amasse en trop 
erande quantité dans l'élargissement du tube de communication. On 
ferme alors le brĂ»leur correspondant; l’intĂ©rieur de l’Erlenmeyer 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 137 
se refroidit et la diminution de la pression fait revenir le liquide 
dans le ballon, par l'intermédiaire du petit tube recourbé, faisant 
ici l'office de siphon. 

Quand la distillation est terminée, on sépare les flacons à acide 
sulfurique de l’appareil, on fait couler dans leur intĂ©rieur l’eau 
contenue dans les tubes à boules, on lave ces derniers avec de l’eau 
distillĂ©e et on titre l’acide sulfurique avec l’eau de baryte comme 
dans la méthode Kjeldahl. 


b) La mĂ©thode dite de l'aluminium est adoptĂ©e Ă  Darmstadt. — 
20 gr. d'engrais sont introduits dans un flacon jaugé à 1 litre et 
agitĂ©s avec de l’eau distillĂ©e, Ă  l'effet de dissoudre les nitrates. On 
complĂšte ensuite le volume Ă  un litre. AprĂšs plusieurs agitations qui 
mélangent bien toute la masse, le tout est jeté sur un filtre; 
25 centim. cubes de la liqueur filtrĂ©e sont alors transvasĂ©s Ă  l’aide 
d’une pipelte dans un flacon Erlenmever d’environ 3/4 de litre de 
capacitĂ©, puis additionnĂ©s de 200 centim. cubes d’eau, de 30 centim. 
cubes d’une dissolution de soude à 30 p. 100 et de 3 gr. d’alumi- 
nium en fils courts d'environ 0°,5 de diamÚtre. AussitÎt aprÚs, les 
Erlenmeyer sont attelĂ©s Ă  l’appareil Ă  distiller dont nous avons 
donnĂ© la description en parlant du dosage de l'azote d’aprĂšs la 
méthode Kjeldahl. Il va sans dire que lextrémité des tubes qui 
emmùnent les produits de la distillation doit plonger dans de l’acide 
sulfurique titré. On emploie, dans ce cas, 40 centim. cubes d'acide 
sulfurique normal Ă©tendu de son poids d’eau. 

Les corps sont ainsi laissĂ©s en contact, jusqu’à ce que les fils 
d'aluminium soient complùtement dissous, c’est-à-dire pendant en- 
viron 18 heures. On distille ensuite et titre l'acide sulfurique non 
saturĂ© par l’ammoniaque comme d'habitude. 

L'interprétation des résultats n'offre rien de particulier. 

Quelques mots sur une falsification trùs commune. —- Souvent, 
dans le commerce, on ajoute aux os dégélalinés pulvérisés des ma- 
liÚres riches en azote (poudre de corne, sang desséché, etc.), et on 
vend le mĂ©lange sous le nom de poudre d’os. Si l’on ne considĂšre 
que Ja teneur de ces engrais en principes fertilisants, on ne remarque 


1358 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


souvent qu’une diffĂ©rence assez peu sensible. Cependant leur valeur 
agricole est inĂ©gale, car la poudre d’os se montre supĂ©rieure dans 
toutes les cultures. 

Une telle fraude peut ĂȘtre dĂ©celĂ©e de la maniĂšre suivante : 

9 gr. de l’engrais sont agitĂ©s dans un tube Ă  essai avec du chloro- 
forme. AprÚs un instant de repos, les impuretés remontent à la sur- 
face du liquide, tandis que la poudre d’os tombe au fond. La couche 
supérieure est transvasée dans un autre tube contenant du chloro- 
forme, le tout agité vivement et laissé au repos. 

Ce transvasement est nécessaire, car il arrive souvent que des 
parties fines de poudre d’os sont retenues par les impuretĂ©s. 

Les liquides contenant les parties les plus légÚres sont alors jetés 
sur un filtre. On lave le résidu avec du chloroforme, on le sÚche 
dans l’étuve et on y dose l’azote et l’acide phosphorique. 

Par diffĂ©rence, on trouve la teneur en ces mĂȘmes principes de la 
partie de l’engrais tombĂ©e au fond des tubes Ă  essai. 

On juge alors facilement s’il y a eu falsification en prenant en con- 
sidération les données suivantes : 

La poudre d’os renferme gĂ©nĂ©ralement de 3 Ă  5.3 p. 100 d’azote 
et de 19 à 25 p. 100 d’acide phosphorique, c’est-à-dire que le 
rapport de l’azote à l'acide phosphorique y est compris entre 1/4 
et 1/8.5. 

Dans les os dégélatinés, la teneur en azote varie entre 1 et 3 p.100, 
celle en acide phosphorique entre 24 et 30 p. 100, de sorte que le 
rapport de l'azote Ă  l'acide phosphorique oscille entre 1/8.5 et 1/30. 


e) Dosage de la potusse. 


Il est effectuĂ© d’aprĂšs la mĂ©thode classique du chlorure de pla- 
tne, laquelle est suffisamment connue. 

Nous ajouterons seulement que le liquide alcoolique contenant le 
précipité de chlorure double de platine et de potassium est filtré 
dans une capsule de platine dont le fond est percé de trous et cou- 
vert d’une couche d’amiante, comme nous l’avons dit en parlant du 
dosage de l'acide phosphorique. 

On dessÚche à la température de 100 degrés pendant deux heures 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 139 


el pÚse la capsule avec son contenu. On dissout ensuite le précipité 
avec de l’eau bouillante, lave avec de l’alcool, sùche de nouveau 
à 100 degrés et pÚse. 

La différence des deux poids représente le poids du chlorure 
double qui, multiplié par 0.193, donne la quantité de potasse con- 
tenue dans la substance employée. 


f) Dosage de la chaux. 


Le mode de dosage employé varie suivant que la matiÚre à ana- 
lyser contient, en mĂȘme temps que de la chaux, une quantitĂ© plus 
ou moins grande d'acide phosphorique. 


1° Dosage de la chaux dans les matiÚres fertilisantes contenant 
relativement beaucoup d'acide phosphorique. — Tels sont les craies 
phosphatées, les scories, les tangues, les faluns, etc. 

o gr. de substance sont introduits dans une capsule de porcelaine 
avec 20 centim. cubes d’acide chlorhydrique et 5 centim. cubes 
d’acide azotique. On Ă©vapore Ă  sec sur un bain d’eau bouillante. La 
capsule est ensuite portée et maintenue pendant quelques heures 
sur un bain de sable, à la température de 100 à 105 degrés à l'effet 
d'insolubiliser la silice. 

On verse sur le résidu quelques gouttes d'acide chlorhydrique et 
de l’eau bouillante, on laisse pendant quelques instants les corps en 
contact en ayant soin d'agiter fréquemment, puis on lave le tout 
dans un ballon d’un demi-litre. 

On complÚte le volume à 500, sépare la silice par filtration et 
transvase 100 centim. cubes du liquide filtré (représentant 1 gr. de 
matiĂšre) dans un Erlenmeyer. 

On neutralise avec de l’ammoniaque (A), ajoute quelques gouttes 
d’acide chlorhydrique Ă©tendu (B), puis une certaine quantitĂ© (30 cent. 
cubes pour 4 gr. de substance) d’une solution d’acĂ©tate d’ammo- 
niaque au dixiÚme. AprÚs avoir mélangé le tout par agitation, on 
laisse au repos pendant six heures. 

Une fois ce temps écoulé, on filtre, on ajoute au liquide quelques 
gouttes d'acide acétique si la réaction n'était déjà pas acide el pré- 


140 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


cipite la chaux avec de l’oxalate d’ammoniaque. Le prĂ©cipitĂ© d’oxalate 
de chaux est jeté sur un filtre aprÚs un repos de six heures dans un 
endroit chaud, puis il est réduit en chaux dans un four ad hoc. Le 
poids de chaux ainsi obtenu correspond Ă  1 gr. de substance. 

Est-il bien certain qu’on obtient ainsi un rĂ©sultat exact ? 

Généralement, les maliÚres fertilisantes que nous envisageons en 
ce moment contiennent, outre les corps déjà cités, des oxydes de fer 
et d’alumine. 

Par l'addition d’ammoniaque (A), ces deux oxydes se prĂ©cipitent 
entiĂšrement Ă  l’état de phosphate de fer et d’alumine, quand lacide 
phosphorique est prĂ©sent en quantitĂ© suffisante et partie Ă  l’état de 
phosphate, partie Ă  l’état d’oxydes, quand lacide phosphorique est 
en défaut. 

Or, il peut arriver qu’un peu de phosphate de chaux ait Ă©tĂ© prĂ©- 
cipitĂ© avec le phosphate de fer et d’alumine, ou que du phosphate de 
chaux restĂ© en dissolution se sĂ©pare en mĂȘme temps que l’oxalate 
de chaux sous l’influence de l’oxalate d’ammoniaque. 

Pour éviter la premiÚre cause d'erreur, on reprend le précipité 
de phosphate avec de l’acide chlorhydrique, neutralise la solution 
avec de l’ammoniaque, ajoute quelques gouttes d’acide chlorhydrique 
Ă©tendu et traite par la solution d’acĂ©tate d’ammoniaque comme prĂ©- 
cédemment. 

AprÚs filtration, on mélange cette seconde liqueur filtrée à la pre- 
miÚre correspondante et précipite la chaux dans une partie aliquote 
du volume total. 

On Ă©vite la seconde cause d’erreur en ajoutant Ă  la liqueur acidulĂ©e 
par de l'acide chlorhydrique (B) du protochlorure de fer en solution, 
en quantitĂ© telle que le fer introduit corresponde en Ă©quivalent Ă  l’excĂ©- 
dent d'acide phosphorique. On neutralise de nouveau avec de l’am- 
moniaque, on laisse tomber quelques gouttes d'acide chlorhydrique 
et on continue le dosage comme il a été indiqué précédemment. 


2° Dosage de la chaux dans les matiÚres fertilisantes contenant 
relativement peu d'acide phosphorique. — La chaux ayant Ă©tĂ© dis- 
soute et la silice éliminée comme il a été dit précédemment, on rend 
la liqueur lĂ©gĂšrement alcaline avec de l’ammoniaque, remet la 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 141 


chaux en dissolution avec de l'acide acétique et précipite ensuite la 
chaux avec de l’oxalate d’ammoniaque. 
Rien de particulier Ă  ajouter. 


Cus particuliers. — Hs sont offerts par les marnes et le plñtre. 

On fait dans les premiers un dosage d'acide carbonique, dans le 
second un dosage d’acide sulfurique d’aprĂšs les mĂȘmes mĂ©thodes 
qu’en France. À 


g) Dosage du fer et de l'alumine. 


[l peut ĂȘtre utile de connaĂźtre la quantitĂ© de fer et d’alumine qui 
est contenue dans un phosphate. La méthode de dosage qui est 
employĂ©e Ă  Halle, sans ĂȘtre complĂštement exacte, donne cependant 
des résultats assez approchés. 

gr. de phosphate sont chauffés dans un ballon de 50 centim. cubes 
avec 2 centim. cubes d’acide azotique de densitĂ© 1,2 et 12,5 d’a- 
cide chlorhydrique de densité 1,12. 

On complĂšte le volume Ă  500, filtre aprĂšs plusieurs agitations et 
prend 100 centim. cubes de la liqueur filtrée (représentant 1 gr. 
de substance) qu’on transvase avec une pipette dans un ballon de 
250 centim. cubes. On ajoute 25 centim, cubes d’acide sulfurique 
de densité 1,84 et laisse les corps en présence pendant cinq minutes 
en ayant soin d’agiter de temps en temps. | 

Le ballon de 250 centim. cubes est rempli jusqu’à la marque avec 
de l’alcool Ă  95 degrĂ©s. Comme il y a contraction, on doit parfaire 
le volume une ou deux fois. On bouche le ballon, laisse reposer 
pendant une demi-heure et filtre ; 10 centim. cubes de la solution 
filtrée représentant 0,4 de substance sont introduits dans une cap- 
sule de platine et placĂ©s sur un bain d’eau bouillante jusqu’à Ă©vapo- 
ration complĂšte de l’alcool. La solution restante est transvasĂ©e dans 
un verre Ă  prĂ©cipiter ; on lave la capsule avec 50 centim. cubes d’eau 
el fait bouillir le mĂ©lange. AussitĂŽt que l’ébullition a cessĂ©, on rend le 
liquide alcalin en ajoutant de l’ammoniaque, chasse l'excùs d’ammo- 
niaque par une nouvelle Ă©bullition et laisse refroidir. 

Il se sĂ©pare alors du phosphate de fer et d’alumine qu’on jette 


142 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


sur un filtre. Le prĂ©cipitĂ© est lavĂ© plusieurs fois avec de l’eau 
chaude, puis laissé quelques instants dans un moufle chauffé au rouge 
el enfin pesé. 

On admet que la moitié du poids est formée d'oxyde de fer F?0° et 
l’autre d’alumine AP 0°. 


Les dosages de la magnĂ©sie, de l’acide chlorhydrique et de l’acide 
sulfurique sont effectuĂ©s d’aprĂšs les mĂȘmes mĂ©thodes qu’en France. 


B. — MĂ©thodes d'analyse des terres. 


a) Analyse mécanique. 


On peut dire qu’elle consiste à peu prùs uniquement à faire passer 
la terre Ă  travers des tamis dont les mailles ont respectivement les 
dimensions suivantes : 


LONGUEUR 
© 


du cÎté, de la diagonale, 
en millimĂštres. en millimĂštres. 
Tamis A: ea 3 » 
Tamis B. . . 2 » 
RATS Eee l » 
Tamis DS Len 0,35 Ă  0,39 0,45 Ă  0,50 
EU EMIRPESREE TE 0,14 Ă  0,17 0,22 Ă  0,24 
Lam Eee 0,09 0,fi 


On opĂšre de la maniĂšre suivante : 

500 gr. de terre (l'Ă©chantillon est prĂ©levĂ© dans le champ d’aprĂšs 
les prescriptions habituelles) sont introduits dans une grande capsule 
de porcelaine avec environ 1 litre d’eau. On laisse les corps en prĂ©- 
sence pendant deux heures en ayant soin d’agiter frĂ©quemment. Le 
tout est ensuite jeté dans le tamis D. La partie restée sur le tamis est 
remuĂ©e avec un pinceau pendant qu’on lave avec un filet d’eau pour 
entrainer les derniĂšres particules fines. 

Elle est ensuite portée dans une capsule de porcelaine tarée ; on 
la dessÚche dans une étuve chauffée à 100 degrés. Son poids repré- 
sente « les pierres ». 

La partie passée à travers le tamis D est jetée sur le tamis E. Ce 


ÉTUDE SUR. QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 143 


qui ne passe pas est désigné sous le nom de « gros sable » ; on en 
détermine le poids aprÚs l'avoir lavé et desséché comme les pierres. 

On obtient de mĂȘme le « sable fin » avec le tamis F. 

Quant aux particules terreuses qui ont traversé ce dernier, et 
auxquelles on donne le nom de « poussiÚre » (terre fine), on en 
trouve le poids, soit par différence, soit par pesée directe, aprÚs 
Ă©vaporation jusqu’à sec de l’eau qui les a entrainĂ©es. 

On sépare ensuite la poussiÚre en « poussiÚre sableuse » et en 
€ argile ». 

Pour cela, on en prend 950 gr. qu’on agite avec de l’eau dans une 
capsule de porcelaine. On transvase ensuite le tout dans un cylindre 
de verre de 3 centim. cubes de diamĂštre et de 30 centim. cubes 
de hauteur, qu'on remplit ensuite d’eau. Le bouchon avec lequel on 
le ferme donne passage Ă  deux tubes : l’un, qui est recourbĂ© en 
forme de crochet Ă  sa partie infĂ©rieure, pĂ©nĂštre jusqu’au fond du 
vase, l’autre ne plonge pas dans le liquide. On agite vivement et 
laisse reposer pendant 30 minutes. En soufflant dans le tube court, 
on dĂ©termine la sortie du liquide placĂ© au-dessus du dĂ©pĂŽt qu’on 
remarque au fond du vase. La mĂȘme opĂ©ralion est rĂ©pĂ©tĂ©e plusieurs 
fois jusqu’à ce que ce liquide supĂ©rieur soit clair. Le dĂ©pĂŽt est 
transvasé dans une capsule, desséché à 100 degrés et pesé. Il repré- 
sente l'argile. 

Quand on le juge utile, on sépare les « pierres » en « cailloux », 
« gros gravier » et € gravier fin » Ă  l’aide d’un tamisage Ă  sec dans 
les tamis ABC. 

On dose l'humidité de la terre en déterminant la diminution de 
poids que subit une quantitĂ© connue de terre qu’on soumet Ă  la des- 
siccation dans une étuve chauffée à 100 degrés. 

L'analyse mĂ©canique effectuĂ©e d’aprĂšs ces prescriptions donne 
donc des résultats qu'on exprime sous les rubriques suivantes : 

Cailloux ; 
Pierres. . { Gros graviers ; 
| Graviers fins ; 
Gros sable ; 
Sable fin ; 
PoussiĂšre de sable ; 


144 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 
Argile ; 
Humidité. 

Et on regarde comme substance minérale sÚche de la terre la 
maliĂšre sĂšche totale diminuĂ©e de la perte de poids qu’éprouvent les 
pierres et le sable quand on les laisse pendant un temps suffisamment 
long dans un moufle chauffé au rouge. (Si on Juge que du caïcaire 
a Ă©tĂ© amenĂ© Ă  l’état de chaux pendant l’opĂ©ration, on le ramĂšne 
Ă  l’état de carbonate avant de faire la pesĂ©e. Pour cela, on se sert 
d’oxalate d’ammoniaque, qu’on emploie suivant le procĂ©dĂ© connu.) 


DĂ©termination des propriĂ©tĂ©s du sol. —- En dĂ©terminant, dans le 
laboratoire, le pouvoir hygroscopique, l'aptitude Ă  la dessiccation, on 
obtient des résultats qui ne peuvent avoir beaucoup d'importance 
pour la pratique agricole, car les conditions d’expĂ©rience sont alors 
tout autres que dans la nature. 

Les procédés de laboratoire peuvent cependant donner une idée 
assez exacte du pouvoir d'absorption d’une terre pour les prin- 
cipes fertilisants. 

La terre ayant été séchée à l'air, puis écrasée à la main, on en 
prend 195 gr. qu’on introduit dans un flacon avec 500 centim. cubes 
d’une solution contenant par litre 1/10° du poids molĂ©culaire en 
ovammes du sel Ă  Ă©tudier. On laisse les corps en contact pendant 
24 heures en ayant soin d’agiter frĂ©quemment. Le tout est ensuite 
jeté sur un filtre. 

Dans une partie aliquote de la liqueur filtrée dont on détermine 
le volume ou le poids, on dose les éléments dont on a voulu étudier 
l'absorption par le sol. Si ln veut avoir des résultats plus exacts, 1l 
convient de tenir compte de la quantitĂ© de ces mĂȘmes principes 
que retenait dĂ©jĂ  la terre avant d'ĂȘtre mise en contact avec la solu- 
tion précitée. 

Pour trouver comment se comporte envers un sol donné une so- 
lution contenant tous les éléments d'un engrais complet, on opÚre 
d’une maniĂšre analogue; la composition centĂ©simale de la solution 
d'essai est cependant un peu différente. Au lieu de contenir par 
litre 1/10°, elle contient 1/50° du poids moléculaire en grammes de 
chacun des sels. 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 145 
Il va sans dire que des déterminations ainsi faites ne peuvent indi- 
quer la valeur absolue du pouvoir d'absorption d’un sol envers un 
sel quelconque, car, ainsi que le fait remarquer M. SchlĂŠsing, ee 
pouvoir varie suivant l’état de concentration et la quantitĂ© du sel 
mise en présence. Mais elles peuvent fournir des résultats compara- 
tifs trĂšs importants, car les conditions d'expĂ©rience sont les mĂȘmes 
dans tous les cas. 


b) Analyse chimique. 


La prise de l’échantillon de terre dans le champ, la dessiccation Ă  
l'air et le Lamisage Ă  travers un tamis ayant des mailles de 3 milli- 
mĂštres de cĂŽtĂ© sont effectuĂ©s d’aprĂšs les mĂȘmes prescriptions qu’en 
France. 

Les rĂ©sultats de l’analyse sont aussi rapportĂ©s Ă  100 de terre 
sĂšche. 


1° Dosage de l'azote total. — Ce dosage est effectuĂ© d’aprĂšs la 
mĂ©thode de Jodlbauer sur 3 Ă  5 gr. de terre qu’on introduit dans 
un ballon de 180 centim. cubes environ avec 30 centim. cubes du 
mélange d'acide sulfurique, de phénol, et d'acide phosphorique 
anhydre. L'opĂ©ration est continuĂ©e comme nous l’avons indiquĂ© au 
chapitre des engrais. 


2° Dosage de l'acide phosphorique. — « L’acide phosphorique 
contenu dans la terre se trouve principalement en combinaison avec 
l’alumine et l’oxyde de fer, avec les matiùres organiques ou encore 
avec la chaux ou la magnésie. Quels que soient ses différents états, 
tout l'acide phosphorique, sauf celui qui entre dans la constitution 
des parties rocheuses, peut ĂȘtre mis en dissolution et dĂ©terminĂ© 
par l’analyse. Celle-ci peut Ă©valuer trĂšs approximativement la pro- 
portion totale d'acide phosphorique des éléments terreux. » 

En outre, des expĂ©riences exĂ©cutĂ©es Ă  Halle, dans des pots, d’a- 
prÚs la méthode Wagner, montrent qu'il existe une relation entre 
la quantitĂ© d’acide phosphorique d’une terre, soluble dans une solu- 
ĂŒon Ă  2 p. 100 d’acide citrique, et la quantitĂ© de ce mĂšme acide 
contenue dans les produits de la récolte. | 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 10 


146 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

La dĂ©termination de l’acide phosphorique total indiquera donc la 
valeur du capital d'acide phosphorique contenu dans la terre ; celle 
de l'acide phosphorique assimilable, l'intĂ©rĂȘt que ce capital livre 
pendant une année. 


Dosage de l'acide phosphorique total. — Ge dosage s'effectue de 
la maniĂšre suivante : 25 gr. de terre sont introduits dans un ballon 
Ă  fond plat jaugĂ© Ă  500 centim. cubes avec 20 centim. cubes d’acide 
azotique et 50 centim. cubes d’acide sulfurique concentrĂ©. On fait 
bouillir trÚs modérément pendant une demi-heure tout en agitant 
frĂ©quemment le ballon. L’oxydation des matiĂšres organiques est 
terminée quand il ne se dégage plus de vapeurs rutilantes. Il arrive 
trùs rarement qu’il faille, pour la rendre complùte, ajouter de nou- 
velles quantitĂ©s d’acide azotique. 

Les ballons ayant été exposés au refroidissement, on complÚte le 
volume à 500 à la température de 17°5. 100 centim. cubes (repré- 
sentant 5 gr. de matiÚres) sont transvasés dans un erlenmeyer, puis 
neutralisĂ©s Ă  l’aide d’une solution ammoniacale Ă  24 p. 100. On 
aperçoit neltement la fin de la réaction, si lon a préalablement 
colorĂ© le liquide avec deux gouttes d’une solution alcoolique d’acide 
rosolique. On acidifie de nouveau le liquide avec quelques gouttes 
d'acide chlorhydrique. Le prĂ©cipitĂ© auquel avait donnĂ© lieu l’addi- 
tion d’ammoniaque doit se redissoudre complùtement. 

Les ballons sont alors placés quelques minutes dans le réfrigérant, 
puis on verse dans la liqueur acide 50 centim. cubes de la solution 
de citrate, 20 centim. cubes d’ammoniaque à 24 p. 100 et 25 cen- 
ĂŒm. cubes de liqueur magnĂ©sienne. 

La filtration ne doit avoir lieu que 48 heures aprùs. Dans l’inter- 
valle, on remue souvent le liquide avec un agitateur pour Ă©viter que 
le prĂ©cipitĂ© ne s’attache trop fortement aux parois du ballon. Le 
dosage est continué comme d'habitude. 


Remarque. — Avec les terres trùs argileuses, il est bon de n’em- 
ployer que 195,5 au lieu de 25 gr., sinon il faudrait, pendant le 
traitement par les acides, agiter presque constamment pour Ă©viter 
que des particules de terre adhérassent au fond du ballon. En outre, 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 147 


l'addition de la solution ammoniacale déterminerait la formation 
d’un abondant prĂ©cipitĂ©, lequel ne pourrait disparaĂźtre que par lin- 
troduction d’une quantitĂ© relativement grande d’acide chlorhydrique, 
ce qui pourrait obliger à employer une quantité plus grande de 
liqueurs précipitantes. 


Dosage de l'acide phosphorique soluble dans l'acide citrique. — 
De nombreuses expériences ont été faites à la station de végétation 
de Halle, d’aprĂšs la mĂ©thode des pots du professeur Wagner pour 
Ă©tablir le rapport qui existe entre la quantitĂ© d’acide phosphorique 
contenue dans une rĂ©colte (grain et paille) et la quantitĂ© d’acide 
phosphorique de la terre soluble dans différents réactifs. Les ré- 
sultats qui ont été obtenus par les docteurs Maerker et Gerlach per- 
mettent de conclure que la solution à 2 p. 100 d’acide citrique est 
le réactif le plus approprié pour mettre en solution l'acide phospho- 
rique de la terre qui est directement assimilable. 

Voici d’ailleurs comment on effectue le dosage en question : 

60 gr. de terre préparée comme d'habitude sont introduits dans 
un flacon Erlenmeyer avec 300 centim. cubes de la solution d’acide 
_citrique. On laisse les corps en contact pendant 24 heures, en ayant 
soin d’agiter de temps en temps (4 à 5 fois). Les bouchons doivent 
ĂȘtre simplement placĂ©s dans le corps des ballons, mais non fermer 
hermétiquement de façon à permettre le dégagement à l'extérieur 
de l'acide carbonique qui naĂźt sous l'influence de l'acide citrique sur 
les carbonates de la terre. 

Une fois les 24 heures écoulées, on filtre aprÚs avoir mélangé la 
masse par plusieurs agitations. 200 centim. cubes de la liqueur 
filtrée sont alors transvasés avec une pipette dans une capsule de 
porcelaine d’une contenance d’environ 300 centim. cubes, et Ă©va- 
porĂ©s au bain-marie jusqu’à consistance sirupeuse. Une fois le rĂ©sidu 
refroidi, on l’additionne de 20 centim. cubes d’acide sulfurique 
concentrĂ© et de 5 centim. cubes d’acide azotique fumant, et chauffe 
le tout sur un brĂŒleur Ă  gaz. 

DĂšs que le point d’ébullition est atteint, on aperçoit un dĂ©gage- 
ment de vapeurs rutilantes. C’est la preuve que les matiùres orga- 
niques de la terre et l’acide citrique sont en voie de destruction. 


148 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


S'il se produit une Ă©cume abondante, on arrĂȘte le feu un instant, 
puis rechauffe de nouveau, et ainsi de suite jusqu’à ce que l’appari- 
ion de vapeurs rutilantes ait complÚtement cessé. Le mélange est 
ensuite portĂ© Ă  l’ébullition pendant un quart d'heure, afin de rendre 
la silice insoluble. (L’ébullition doit ĂȘtre rĂ©glĂ©e de telle maniĂšre 
qu’elle donne lieu Ă  un dĂ©gagement continuel, mais peu abondant, 
de vapeurs d’acide sulfurique.) 

Le contenu de la capsule est alors Ă©tendu avec de l’eau, remuĂ© 
avec un agitateur, transvasé dans un ballon de 200 centim. cubes, et 
refroidi à la température de 17°5. On complÚte le volume à 200 et 
filtre. 100 cenlim. cubes de la liqueur filtrée (représentant 20 gr. 
de terre) sont introduits dans un erlenmeyer, rendus légÚrement 
alcalins avec de l’ammoniaque, puis acidifiĂ©s avec quelques gouttes 
d'acide chlorhydrique (2 gouttes d’une dissolution d’acide rosolique 
dans l'alcool servent d’indicateur de la fin de la rĂ©action) et enfin, 
aprÚs refroidissement, additionnés de 50 centim. cubes de liqueur 
citrique et 25 centim. cubes de solution magnésienne (Magnesia- 
mixture). Le mélange des liquides, aprÚs avoir été bien agité, est 
laissé au repos pendant 48 heures. On sépare ensuite par filtration 
le précipité de phosphate ammoniaco -magnésien, et termine le 
dosage comme d'habitude. 


3° Dosage de la potasse. — « En faisant agir Ă  la tempĂ©rature 
ordinaire, comme l'indique M. SchlÊsing, un acide trÚs dilué en 
quantité suffisante pour dissoudre le calcaire et pour détruire les 
propriétés absorbantes de la terre, on se place dans des conditions 
telles que la potasse existant sous une forme soluble soit seule 
mise en liberté et que celle des nitrates reste inattaquée. Il y a donc 
là un moyen de différencier la forme la plus intéressante de cet 
alcal. 

Tel est le principe des modes de traitement suivis en Allemagne 
pour dissoudre la potasse du sol qui mĂ©rite d’ĂȘtre qualifiĂ©e de di- 
rectement assimilable. 


1 ProcĂ©dĂ©. — Disons d’abord que la terre, aprĂšs avoir Ă©tĂ© sĂ©chĂ©e 
à l'air et écrasée entre les doigts comme d'habitude, est jetée dans 


ÉTUDE SUR QUELQUES STATIONS AGRONOMIQUES ALLEMANDES. 149 


un tamis Ă  mailles de 3 millimĂštres. Seule la partie qui passe doit 
ĂȘtre soumise au traitement. 

Pour chaque gramme de terre, on emploie 2 volumes d’acide 
chlorhydrique qu’on emprunte Ă  une solution Ă  25 p. 100 du mĂȘme 
acide. La terre et la solution sont introduites dans un ballon et 
laissées en contact pendant 48 heures dans une chambre ayant une 
tempĂ©rature ordinaire. On a soin d’agiter frĂ©quemment. 


2e ProcĂ©dĂ©. — Pour chaque gramme de terre, on emploie deux 
volumes d’acide chlorhydrique qu’on apporte sous forme d’une 
solution Ă  10 p. 100 du mĂȘme acide. Les corps sont placĂ©s dans un 
ballon qu’on expose, pendant trois heures, à la chaleur d’un bain 
d’eau bouillante. Il est nĂ©cessaire d’agiter trĂšs souvent. 

A Halle, on a recours au premier traitement, et on l’effectue de 
la maniÚre suivante : 100 gr. de terre étant placés dans un ballon, 
sont additionnĂ©s de 500 centim. cubes d’une solution Ă  40 p. 100 
d'acide chlorhydrique. On complĂšte ensuite le volume Ă  1 000. On 
laisse la dissolution de la potasse s’effectuer pendant quarante-huit 
heures. Pour la faciliter, on agite le ballon de temps en temps. 

Tout le contenu est ensuite jeté sur un filtre. On emploie un 
volume déterminé du liquide filtré à la détermination de la potasse 
d’aprĂšs la mĂ©thode du chlorure de platine. 


4° Dosage de la chaux. — La chaux se trouve dans le sol princi- 
palement Ă  l'Ă©tat de carbonate, de sulfate, de nitrate, d’humate et 
de silicate. 

« Suivant qu’on traite par les acides plus ou moins concentrĂ©s et 
qu'on prolonge davantage la durée du contact, on dissout des quan- 
titĂ©s un peu diffĂ©rentes, car si le calcaire rĂ©el, l’humate, le nitrate, 
le sulfate laissent entrer rapidement la chaux en dissolution, il n’en 
est pas de mĂȘme des silicates qui ne s’attaquent qu'avec lenteur. » 

Le traitement de la terre adoptĂ© Ă  Halle a pour but d’attaquer 
tous les sels de chaux Ă  l'exception des silicates. Il consiste soit Ă  
mettre la terre en contact d'une dissolution Ă©tendue d’acide chlorhy- 
drique et quelques gouttes d’acide azotique jusqu’à ce que la silice 
soit insoluble. 


150 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE, 


Le dosage est continué comme nous l'avons indiqué au chapitre 
des engrais en parlant du dosage de la chaux, dans les engrais rela- 
tivement pauvres en acide phosphorique. 


D° Dosage de la magnĂ©sie. — On fait entrer la magnĂ©sie en solu- 
tion comme la chaux, et on la prĂ©cipite Ă  l’état de phosphate ammo- 
niaco-magnĂ©sien Ă  l’aide des rĂ©actifs appropriĂ©s. 

I n’y a rien de particulier Ă  dire sur les mĂ©thodes de dosage 
de l'acide sulfurique et de l'acide chlorhydrique dans les terres. 


6° Dosage de l'humus. — On peut calculer avec assez d’exactitude 
la quantitĂ© d’humus contenue dans une terre quand on connaĂźt la 
teneur de cette derniĂšre en carbone. 

5 Ă  10 gr. de terre sont introduits dans une capsule de verre Ă  
parois trĂšs minces dite capsule Hoffmeister. Pour Ă©liminer l'acide 
carbonique des carbonates, on ajoute une quantitĂ© suffisante d’acide 
phosphorique en dissolution Ă©tendue et Ă©vapore au bain-marie jus- 
qu'à sec. AprÚs avoir pulvérisé la capsule et son contenu dans 
un creuset, on effectue un dosage de carbone d’aprĂšs la mĂ©thode 
Dumas. 


c) Interprétation des résullals. 


Les résultats obtenus sont rapportés à 100 de terre fine. Ils ne 
subissent donc pas la correction indiquĂ©e par M. FĂŒisler. 

NĂ©anmoins les mĂ©thodes d’analyse adoptĂ©es en Allemagne con- 
duisent aussi à admettre qu'une terre renfermant 0.1 p.100 d’azote, 
0.1 p. 100 d’acide phosphorique, 0.1 p. 100 de potasse est sufli- 
samment pourvue en ces trois éléments. 


LES 
DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE 


ENDIGUEMENTS, GOLMATAGES, POLDERS 


PAR 


A. RONNA 


INGÉNIEUR 


MEMBRE DU CONSEIL SUPÉRIEUR DE L'AGRICULTURE 


a ————— 0 0 ————————— 


AVANT-PROPOS 


« Quand on jette les yeux sur une carte d'Angleterre, on voit au 
nord du Norfolk un large golfe qui entre assez profondément dans 
les terres et qu’on appelle Wash. Tout autour de ce golfe vaseux 
s'Ă©tendent des plages basses et habituellement couvertes par les 
eaux. Jadis inhabitables, elles figurent aujourd'hui parmi les plus 
riches parties de l'Angleterre. Situées en face de la Hollande, elles 
ont Ă©tĂ© assainies, comme elle, par les digues. L’étenlue totale des 
trois comtés, Cambridge, Huntingdon et Lincoln, est d'environ un 
million d'hectares ; les marais proprement dits en occupent environ 
le Uiers. 

« Les travaux d’assainissement, commencĂ©s par les Romains, ont 
été poursuivis au moyen ùge par les moines qui s'étaient établis sur 
les iles sortant çà el là des terres inondées. Les Anglais parlent peu 
des services que leur ont rendus les anciens monastĂšres : il est cer- 
tin cependant que, dans leur Ăźle, comme ailleurs, les seuls monur- 
ments de quelque valeur, qui subsistent des temps les plus reculés, 


152 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


proviennent du culte catholique; l’agriculture en particulier a dĂ» 
ses premiers succĂšs aux ordres religieux. 

« Lors de la réformation, les grandes familles reçurent en don 
les biens des abbayes et se firent les continuateurs des moines. Les 
résidences de beaucoup de grands seigneurs portent encore le nom 
des abbayes qu’elles ont remplacĂ©es ; on dit Woburn-Abbey, Wel- 
beck-Abbey, etc. 

« Dans la région marécageuse, les moines avaient poussé assez 
avant leurs desséchements, quand ils furent chassés, laissant pour 
traces de leur passage, outre leurs canaux et leurs cultures, les 
belles Ă©glises de Peterborough et d’Ely, qui dominent encore la 
contrée. 

«₏ Au commencement du xvu° siĂšcle, un comte de Bedford se mit 
Ă  la tĂȘte d’une compagnie pour reprendre les travaux : une conces- 
sion de 40 000 hectares lui fut accordĂ©e. DĂšs lors, l’entreprise n’a 
jamais été interrompue. Des moulins à vent, des machines à vapeur, 
Ă©tablies Ă  grands frais, font jouer des pompes Ă  Ă©puisement; des 
tranchĂ©es immenses, des digues indestructibles achĂšvent l’Ɠuvre. 

« Le pays conquis est maintenant traversé dans (ous les sens par des 
routes et des chemins de fer ; on y a construit des villes, des fermes 
sans nombre; ces terres, jadis submergées et improductives, se 
louent de 75 Ă  100 fr. l’hectare. On y voit des cullures de cĂ©rĂ©ales 
et de racines, mais la plus grande partie est en prairies; on y en- 
graisse des bƓufs courtes-cornes et des moutons provenant du croi- 
sement de la race ancienne du Lincoln avec des Dishley. 

€ Tout le nord du comtĂ© de Cambridge fait partie de la rĂ©gion 
des marais ; la rente moyenne y a doublé depuis quarante ans; la 
population s’est accrue rapidement, soit à cause de l’augmentation 
de salubrité, soit parce que les progrÚs du desséchement ont déve- 
loppé la demande de travail... 

« Si le comté de Norfolk a occupé longtemps le premier rang en 
Angleterre pour le développement rural, cette place (depuis que le 
desséchement des marais a eu lieu) lui est disputée par le comté de 
Lincoln qui était, il y a un siÚcle, encore plus stérile que désert. 

« Le district des marais, au sud et-Ă  l’est du Lincoln, a reçu le 
nom de Hollande, et lui ressemble beaucoup, en effet. Ce sont les 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 153 


mĂȘmes digues qui s’avancent tous les jours el gagnent sur la mer de 
nouveaux terrains ; ce sont les mĂȘmes prairies et presque les mĂȘmes 
troupeaux ; c’est le mĂȘme aspect vert, bas et humide. Sur quelques 
points, le haut prix des grains avait encouragé la culture des cé- 
rĂ©ales, mais cette culture recule aujourd’hui de toutes parts ; les 
herbages, mieux appropriés au sol, lui succÚdent. La rente y atteint 
en moyenne 100 fr. » 

Ces passages, extraits du livre classique de LĂ©once de Lavergne 
sur l’économie rurale de l'Angleterre *, nous serviront d'entrĂ©e en 
matiÚre pour décrire les travaux dont il parle si sommairement, qui 
se sont poursuivis pendant des siùcles, dans le but, d’une part, de 
dessĂ©cher et d’assainir les marais et les landes des comtĂ©s qui en- 
tourent la baie du Wash, et, d’autre part, de conquĂ©rir sur la mer, 
aux embouchures des riviĂšres Ouse, Nen, Welland et Witham et le 
long des cĂŽtes, des alluvions d’une fertilitĂ© exceptionnelle. 

La Hollande offre Ă©videmment des travaux d’endiguement et de 
dessĂ©chement d’une continuitĂ© et d’une importance plus considĂ©- 
rable encore. Une grande partie des provinces des Pays-Bas : Hol- 
lande septentrionale et méridionale, Zélande, Frise, Groningue, 
dont la surface se trouve de 1 mĂȘtre Ă  5 mĂštres au-dessous du 
niveau de la mer, était occupée jadis par des lacs, des marais, des 
tourbiÚres marécageuses ; transformées en polders cultivables, aussi 
b'en que les terres limoneuses, rejetées par les marées sur les cÎtes, 
et les lais des riviĂšres, de vastes surfaces, enceintes de digues et de 
canaux, altestent de quelle puissance l’homme dispose, dans la lutte 
contre les éléments, quand ses efforts sont dirigés et soutenus vail- 
lamment à force d’art et de science. Nulle part on n’opùre les des- 
séchements et les endiguements plus simplement et sur une plus 
grande Ă©chelle que dans les Pays-Bas. Dans le siĂšcle actuel seule- 
ment, plus de 150 000 hectares ont été desséchés et mis en culture, 
comprenant le Zuidplas, le lac de Harlem, les Ă©tangs de Nooddorp, 
du Prince-Alexandre, les lais de Wadden, et des milliers de kilo- 
mÚtres de digues ont été construits, déplacés ou réparés, pour la 


1. L. de Lavergne, Essai sur l'économie rurale de l'Angleterre, 4° édit., 
p. 255. 


154 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 
défense des rivages, entre autres, les levées colossales de West-Kap- 
pel, Hondsbossche, Helder et Texel. 

Les ingénieurs les plus expérimentés de tous les pays ont rendu 
célÚbres les travaux exécutés dans les Pays-Bas ; naguÚre, les ingé- 
nieurs hollandais étaient appelés en France, en Angleterre et dans 
les pays de la Baltique pour prendre charge des opĂ©rations d’endi- 
guement et de desséchement. Les progrÚs accomplis de nos temps 
en hydraulique, comme dans les autres sciences techniques, ont fait 
peu Ă  peu abandonner le systĂšme anciennement suivi par les prati- 
ciens hollandais, qui les poussait Ă  endiguer trop tĂŽt, sans que le 
colmatage des terrains fĂ»t complĂ©tĂ©, et Ă  rĂ©server aux canaux d’é- 
coulement des espaces superflus, au détriment du régime des riviÚres 
à marée et des cultures. | 

Les ingĂ©nieurs anglais, et, Ă  leur tĂȘte, Rennie pĂšre et fils, en re- 
nonçant Ă  l’ancienne routine, pour appliquer la mĂ©thode combinĂ©e 
des canaux étroits, suffisamment déclives, et du colmatage des terres, 
dans les comtĂ©s de l’est de l'Angleterre, ont obtenu les plus remar- 
quables résultats, tant au point de vue de l'extension du territoire 
et de l’accroissement des produits du sol et des revenus, que de 
l'assainissement des provinces marécageuses et de l'amélioration des 
conditions de la navigation intérieure. 

Les opérations grandioses que les ingénieurs anglais ont conduites 
Ă  bonne fin dans les deux derniers siĂšcles, mais notamment dans le 
siĂšcle actuel, les classent parmi les bienfaiteurs de leur pays. Elles 
sont si peu connues Ă  l'Ă©tranger que nous avons cru devoir les tirer 
de l’oubli, en leur consacrant une Ă©tude spĂ©ciale, qui embrasse 
aussi bien les desséchements que les endiguements et les colmatages 
exĂ©cutĂ©s dans les comtĂ©s du nord-est, et sur d’autres points moins 
importants du littoral de l’Angleterre. 

Dans le seul comté de Lincoln, les énormes dépenses faites en 
amĂ©liorations de cette nature, sans que l’État y ait contribuĂ© par la 
plus minime subvention, représentent une charge perpétuelle sur 
les terres bonifiĂ©es qui varie de 10 Ă  35 fr. par hectare. C’est Ă  ce 


1. Fr. Cooke, Farm-prise competition in 1888 (Journ. Roy. Agric. Sociely, 
1888, vol, XXIV). 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 195 
prix que les conditions agricoles, sanitaires et commerciales de ce 
comté se sont modifiées, au point de le ranger parmi les plus floris- 
sants de l'Angleterre. Plus de 208 000 hectares y ont été desséchés, 
assainis ou conquis : 189 000 dans les districts du sud et de l’est, 
11000 dans le district d’Ancholme et 12000 dans ceux de l’Axholme 
et de la Trent’. : 


I. — LES COMTÉS DE LA BAIE DU WASH 
A. — LES FENS 
Descriplion. — On dĂ©signe sous le nom de Fens (landes) la vaste 


plaine bordĂ©e, Ă  l’est, par les marais du littoral que l’on appelle 
Marskhes, et Ă  l’ouest, par les collines dĂ©crivant une courbe qui pari 
du Lincoln et aboutit Ă  Lynn, en passant par Peterborough, Saint- 
Yves, Mildenhall et Downham-Market. Ces collines encerclent les 
Fens, en ne laissant libre que le cĂŽtĂ© de la mer (voir la carte d’en- 
semble). 

Le sol est formé en plus grande partie de tourbe noire, plus ou 
moins Ă©paisse et friable, qui Ă  valu au district entier l’épithĂšte de 
noir, c’est-à-dire de Black Fen, et, pour l’autre partie, d’alluvions 
sablonneuses. Entre ces deux formations, l’ancien sol se relùve çà 
et lĂ , composĂ© d’argiles et de sables secondaires, qui Ă©mergeaient 
d’ailleurs Ă  l’époque des marais. Ces terrains sont couverts aujour- 
d’hui de pĂąturages de premiĂšre qualitĂ©. 

La tourbe repose en gĂ©nĂ©ral sur un sous-sol d’argile bleuĂątre ; la 
couche superficielle, aprÚs un bon drainage, est plutÎt légÚre et 
spongieuse. Il en est de mĂȘme des terres d’alluvion, quoique plus 
humides et plus compactes. 

Enfin, on rencontre dans les Fens les argiles des grĂšs verts et des 


{. A. Clarke, Farming of Lincolnshire (Journ. Roy. Agric. Soc., 1851, vol. XII, 
p. 289). 

2. À. Clarke, On practical agriculture (Journ. Roy. Agric. Society, vol. XIV 
ire série). 


156 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


terrains de transport, trĂšs diffĂ©rents, d’un classement difficile, qui 
font varier plus ou moins la nature des récoltes et le mode de culture 
sur divers points de celte région, aussi célÚbre par les progrÚs de 
son agriculture et l'Ă©mancipation de ses tenanciers, que par les nom- 
breuses améliorations réalisées. , 

C'est Ă  l’ouest et au sud des anciens marais (Marshes) que s'Ă©tend, 
sur 16 à 50 kilomÚtres de largeur, le district auquel on a donné le 
nom de Great Level (grand niveau). Divisé en trois parties, North, 
Middle et South (septentrional, central et méridional), le Great Level 
est bas et plat, couvert presque exclusivement d’herbages : point de 
villages, mais des fermes isolées, des champs enclos de fossés ou de 
haies vives, servant d’abri aux troupeaux innombrables de bĂȘtes Ă  
cornes et de moutons qui paissent en liberté. Les arbres fruitiers, 
d’ailleurs assez rares, sont laillĂ©s en boule; les autres arbres sont 
des peupliers ou des frĂȘnes. Entre les vastes pĂąturages, quelques 
terrains au sol argileux sont cultivés en blé, en fÚves, en moutarde, 
ou laissés en jachÚre. Pays singulier, dont on ne peut se faire une 
idée exacte sans lavoir parcouru! La pente varie de quelques 
mĂštres Ă  peine dans toute l'Ă©tendue : ce qui donne l'impression d’un 
lac immense en verdure ! 

Les Fens, aujourd’hui qu'ils sont drainĂ©s, et privĂ©s des brouillards 
persistants qui désolaient jadis cette partie de la cÎte, comptent une 
population aisĂ©e et valide, qui tend Ă  s’accroĂźtre. Une longue zone 
de terrains, dont le sol est argileux et couvert de pĂąturages, les 
Fen Ends, comme on les appelle, sépare les Fens proprement dits 
des Marshes. Cette bande des Fen Ends, sur quelques kilomĂštres 
de largeur, prĂ©sente les mĂȘmes caractĂšres. 


GĂ©ologie. — Les alluvions du Great Level des Fens offrent un 
intĂ©rĂȘt particulier au point de vue gĂ©ologique, en permettant de 
fixer approximativement la date de leur formation, d’aprùs l’ñge des 
dĂ©pĂŽts tourbeux el sablonneux que l’on y rencontre. 

Les digues romaines ont été élevées le long de la cÎte dans un ter- 
rain qui a été recouvert depuis, sur quelques pieds d'épaisseur, par 
des atterrissements d’origine marine, et des routes romaines, cons- 
tuiles sur la tourbe, sont recouvertes de tourbe de formation plus 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 197 


rĂ©cente, de façon que l’ñge des diverses couches modernes peut ĂȘtre 
Ă©tabli. D'autre part, entre les strates du pliocĂšne et les couches plus 
anciennes, se dĂ©couvre une immense forĂȘt souterraine dont les 
arbres sont debout, sur un sol en contre-bas de plusieurs mĂštres, 
par rapport au niveau des vives eaux ; ce qui indiquerait une modi- 
fication relativement récente dans le niveau des terres, eu égard à 
celui de la mer, et expliquerait le phĂ©nomĂšne de forĂȘts sous-marines 
que l’on retrouve Ă©galement sur les cĂŽtes des comtĂ©s de Lincoln, de 
York, de Norfolk, de Kent, de Dorset et Somerset, etc. 

Les argiles d'Oxford et de Kimmeridge du terrain oolithique for- 
ment la cuvette dans laquelle se sont déposées les alluvions quater- 
naires. Elles plongent non seulement, du nord à l’ouest, sous le ter- 
rain des Fens, mais elles reparaissent sur un grand nombre de 
points, Ă  Marsh, Whittlesey, Thorney, dans le Cambridge, et Ă  Kyme, 
dans le Lincoln, sans constituer pour cela, sauf au voisinage des 
hautes terres, le sous-sol immédiat. 

C’est ainsi qu’à Boston, l'argile d'Oxford se rencontre à plus de 
12 mÚtres au-dessous de la surface. D'une texture trÚs inégale, ré- 
sullant sans doute de l’érosion des eaux, l'argile oolithique semble 
avoir constituĂ© le lit d’une vaste baie dans laquelle les dĂ©pĂŽts se 
sont successivement accumulĂ©s jusqu’au niveau actuel. Les sables 
et les graviers qui enveloppent l'argile directement ne sont pas dus 
aux marées, mais bien à la formation secondaire dont le prolonge- 
ment se retrouve dans les hautes terres limitrophes. 

Le premier dĂ©pĂŽt d’alluvion, au-dessus des sables et graviers et 
des argiles brunes de transport, revĂȘtant le terrain oxfordien, est 
un sable vaseux, dur et bleuĂątre en profondeur, tendre et grisĂątre 
Ă  la surface, reprĂ©sentant des bancs au fond de l’ancienne baie qu’il 
ne couvrait qu’en partie. Ge dĂ©pĂŽt se relĂšve sur la cĂŽte de la baie 
à d'assez grandes hauteurs, jusqu’à percer la couche d'argile à 
Gedney-Hill, dans le Sud-Holland, et Ă  Wisbeach-Saint-Mary, dans 
le Cambridge. Il surmonte de quelques centimĂštres le terrain du 
Fen environnant et s’étend sur quelques kilomĂštres seulement de 
largeur, trĂšs reconnaissable par les coquilles d'espĂšces marines. 
Sur les points oĂč ce dĂ©pĂŽt est absent, on trouve la tourbe avec 
0,30 Ă  0",90 d'Ă©paisseur. Dans les Fens du Witham, Ă  l'ouest de 


158 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


la riviĂšre de ce nom, la couche de tourbe, avec troncs et branches 
d'arbres, repose sur une strate de 0",30 de sable qui surmonte 
l'argile d'Oxford. 

PrĂšs de Bardney, la tourbe presque superficielle renferme d’é- 
normes troncs de chĂȘne et de sapin dont les racines tiennent dans un 
lit de sable trùs mince. À Boston, elle est à une profondeur de 
6 mĂštres, c’est-Ă -dire, Ă  plusieurs mĂȘtres au-dessous du niveau des 
basses marées. 

La couche qui recouvre la tourbe ou le sable marin est formée 
d'argile bleue, blue clay, douce (butyreuse), résultant du dépÎt des 
lacs ou des riviĂšres Ă  l’état stagnant, qui baignaient la plus grande 
partie du territoire. Dans les Fens du Witham, elle a une couleur 
orisĂątre ; dans le Depping Fen, elle est rougeĂątre ; mais quelle que 
soit sa couleur, elle est peu fournie de coquilles marines, tandis 
que les coquilles d’eau douce abondent au voisinage de la tourbe; 
ce qui dénoterait une double formation, due aux eaux de la mer et 
des riviĂšres. AuprĂšs de Lynn, et dans une grande partie du Marsh- 
land (Norfolk), cette argile, surmontĂ©e d’une couche de tourbe ou 
de plusieurs couches séparées (comme à Sutton-Saint-Edmund, à 
Lynn mĂȘme et dans le comtĂ© de Huntingdon), constitue le sol pro- 
prement dit du Bedford Level. C’est elle qui, ramenĂ©e par le sous- 
solage à la surface des terres, leur donne la consistance nécessaire 
et la proportion de silice et d’alumine qu’exige la culture des cĂ©rĂ©ales. 

Dans le West Fen, l'argile bleue est recouverte d’une couche 
argileuse trĂšs compacte. Sauf Ă  Bolingbroke et Ă  Coningsby oĂč elle . 
a fait place, sur 400 Ă  500 hectares, Ă  du sable blanc, aussi bien 
dans le East Fen que dans les Marshes de Firsby, et le long des 
rives de l’'Humber, elle supporte la couche de tourbe ou de sables 
d’alluvion marine. Son Ă©paisseur varie de 0",60 Ă  3 mĂštres dans le 
Great Level, de 3 mĂštres Ă  3",70 dans les Fens du Witham, de 
1,80 Ă  5",40 dans le East Fen, etc. 

Au-dessus du blue clay, la tourbe revĂȘt la plus grande partie de 
la surface. On trouve dans cette récente formation le résidu de la 
destruction de forĂȘts immenses de chĂȘnes, de sapins, d’aunes et 
d’essences diverses, dont les troncs sont encore en place, enracinĂ©s 
dans l'argile ou bien jetĂ©s pĂȘle-mĂȘle, dĂ©sorganisĂ©s, Ă  l’état de ter- 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 159 


reau dont l’épaisseur varie entre quelques centimĂštres et 3 mĂštres, 
et le niveau baisse de 5 Ă  6 mĂštres au-dessous de la limite des hautes 
marées dans le Wash. 

Cette formation qui embrasse plus de 4000 hectares, depuis le 
Marshland, dans le Norfolk, jusqu’à Lincoln et au delà, reparaiseant 
entre Grimsby et Barton sur l’'Humber, a fait l'objet de nombreuses 
bypothĂšses, quant Ă  son origine, Ă©tant donnĂ© le niveau qu’elle occupe 
par rapport Ă  celui de la plage et des hautes mers. La seule hypo- 
thĂšse plausible se rĂ©duit Ă  admettre que le sol s’est soulevĂ© et 
abaissĂ© successivement, jusqu’à ce qu’il ait pris le niveau actuel. 

Lorsque la couche de tourbe a plus de 25 Ă  30 centimĂštres d’é- 
paisseur, elle se divise en plusieurs strates : une strate supérieure 
de tourbe noire, décomposée, mélangée de vase et de sédiments 
provenant des crues anciennes et renfermant quelques éléments mi- 
néraux ; une strate moyenne de terreau de bruyÚre, brune, et de 
fibres compactes; et une strate inférieure de substances spongieuses, 
contenant des feuilles et des tiges végétales. On connaßt les carac- 
tÚres de ces sols naturellement légers, trÚs hygrométriques, plus ou 
moins acides, s’échauffant et se refroidissant avec une Ă©gale len- 
teur, et s’affaissant au point de devenir compacts par un bon drai- 
nage souterrain. Ces sols que l’écobuage amende, acquiĂšrent un 
haut degré de fertilité par leur mélange avec des terres lourdes, 
telles que l’argile et les calcaires coquilliers ou marneux. 

Sur la formation Lourbeuse des Fens, l’eau a longuement sĂ©journĂ© 
Ă  l’état stagnant, chargĂ©e de vase, de sable, de matiĂšres animales et 
vĂ©gĂ©tales, dont l’atterrissement a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© vers la cĂŽte par le flot 
des marĂ©es qui a dĂ©posĂ© Ă  son tour des sables vaseux ; c’est-Ă -dire 
que sur les points les plus rapprochĂ©s de la plage, l’alluvion a une 
Ă©paisseur de 1",20 jusqu’à 5 mĂštres, recouvrant la tourbe, et sur 
les points les plus distants oĂč mouraient les vagues de l'OcĂ©an, elle 
a Ă  pee quelques centimĂštres d'Ă©paisseur. L’alluvion argileuse, 
sans traces de stratification, traversée par une myriade de filets 
d'humus ou de sable rouge, est superficielle dans le Marshland du 
Norfolk et dans les districts du centre de Sud-Holland; ailleurs, elle 
acquiert la consistance du gault et se veine de filets trĂšs compacts 
de diverses couleurs ; mais dans les riches pĂąturages autour de Bos- 


160 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ton, de Kirton, Wigtoft, etc., elle forme un loam brun, Ă©pais, d’une 
culture facile. 

Les Romains avaient construit leurs digues sur ces alluvions ; 
depuis lors, la mer a accumulĂ© sur la plage et sur les terres Ă  l’in- 
tĂ©rieur des digues, jusqu’à Ă  kilomĂštres de distance, de nouvelles 
alluvions formant un loam brun, qui recouvre une argile brune, 
associée à du sable. 

Les atterrissements récents paraissent dus à un mélange intime 
de sable et de matiÚres sédimentaires du Wash, avec des substances 
végétales, probablement des plantes venues sur les sables maritimes 
et les débris siliceux, calcaires, des infusoires marins et fluviaux 
que les vagues pétrissent et mettent en mouvement dans la baie. 
Au-dessous de cette formation trÚs perméable se rencontrent des 
sources nombreuses (sock ou soak) dont la profondeur, entre 0",90 
et 1",80, dĂ©pend de la chute d’eau pluviale, de l’égouttement des 
drains de desséchement et du niveau des marées. 

Depuis la construction des digues attribuées aux Romains, le dis- 
trict de Sud-Holland a conquis sur la plage plus de 15 000 hectares ; 
la derniĂšre digue construite est Ă  6 kilomĂštres en avant de la digue 
romaine. Le long de la cîte de Foss-Dyke jusqu’à Grimshy (Lincoln), 
l'Océan a enlevé des atterrissements anciens, sous lesquels on a re- 
trouvĂ© des forĂȘts sous-marines ; mais plus de 6 000 hectares ont Ă©tĂ© 
regagnés sur ce point dans les deux derniers siÚcles. 

Le Wash, alimenté par les débris des falaises du Yorkshire, que 
le Spurn-Point lui transmet directement, se colmate lentement, mais 
sans arrĂȘt. Le sĂ©diment qui s’accumule dans les 80 000 hectares 
que couvre la baie n’est pas du sable, comme on pourrait le croire, 
mais un sol riche, composé de terres argileuses et siliceuses, avec 
du mica, du sel marin et des coquillages. AussitĂŽt que les Ă©pis per- 
meltent de fixer ce sédiment au-dessus du niveau des basses marées, 
Ă  raison de 0,60 jusqu’à 0,90 d’épaisseur, dans le courant d’un 
seul Ă©tĂ©, le sol enclĂŽturĂ© peut ĂȘtre immĂ©diatement mis en culture 
et fournir d'excellentes récoltes. 


Hydrographie. — Le bassin des Fens embrasse environ 150 000 
hectares de terrain plat qui se draine dans le Wush par quatre cours 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. IGI 
d’eau principaux : la Great Ouse, la Nen, le Wellund et le Withum 
(voir la carte hydrographique). 

Il suffit de jeter un coup d’Ɠil sur la carte pour comprendre que le 
desséchement du territoire repose avant tout sur ces quatre artÚres, 
qui aboutissent dans la baie, placĂ©e en retraite d’une trentame de 
kilomĂštres sur la mer du Nord. 

La pluie reçue dans le bassin des Fens, en raison mĂȘme de la 
nature géologique du terrain et de son niveau absolument plan, re- 
gagne si lentement la baie que, sans l’aide d’un drainage puissant, 
elle resterait Ă  l’état stagnant, les riviĂšres ayant perdu la pente in- 
dispensable Ă  un Ă©coulement rapide. 

La chute d’eau pluviale annuelle varie entre 0,62 et 0°,63 ; elle 
atteint son maximum en hiver et au début du printemps. Quand elle 
abonde dans les terrains Ă©levĂ©s qui bordent les Fens, les cours d’eau 
entrent en crue, et il faut entretenir des ouvrages importants pour 
faciliter leur écoulement, malgré le refoulement des marées. Le lit 
de ces riviĂšres sinueuses Ă  dĂč ĂȘtre rectifiĂ© pour crĂ©er une chute ca- 
pable d’assurer la dĂ©charge Ă  marĂ©e basse ; sur plusieurs points, il 
a fallu recourir aux machines pour Ă©lever les eaux et les Ă©vacuer Ă  
la mer dans des canaux spéciaux. 

La riviĂšre Greal Ouse* qui draine 76 000 hectares environ, a un 
parcours de 240 kilomÚtres, depuis sa source, dans le comté de 
Buckingham, jusqu’à la mer. Le district qu’elle traverse se distingue 
par la masse d’eau retenue à la surface aprùs les grosses pluies, aux 
équinoxes principalement. Les inondations fréquentes de l'Ouse, en 
s’étendant au loin, servent de rĂ©gulateur aux marĂ©es, car elles prĂ©- 
viennent les crues des autres cours d'eau, qui ont un plus libre 
accĂšs Ă  la mer et activent leur courant. 

De nombreuses coupures ont réduit le cours de cette riviÚre, dans 
les Fens, en vue des endiguements que l’assainissement du district 
a exigĂ©s. À partir de Huntingdon, elle coule dans son lit naturel 


{. Le nom de Great Ouse, ou de Grande Ouse, est donné à celle riviÚre pour la 
distinguer de l'Ouse, du comté de York, un des principaux affluents de l'Humber ; de 
l'Ouse du comté de Sussex, qui débouche dans la Manche, prÚs de Newhaven; et de la 
Petite Ouse (Little Ouse), qui s'appelle Ă©galement Brandon River, son propre tribu- 
taire. 


ANN. SCIENCE AGRON. — (893. — 1. {{ 


162 ANNĂ€LES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


pendant 8 kilomĂštres, puis dans un nouveau lit pendant 5 kilomĂštres 
jusqu’à Earith, oĂč elle devient partie intĂ©grante du systĂšme gĂ©nĂ©ral 
de desséchement, basé sur l'établissement de deux grands canaux 
parallĂšles, creusĂ©s sur 32 kilomĂštres de longueur Ă  travers l’üle d’Ély 
(Cambridge) et aboutissant Ă  Denver (Norfolk). 

Ces deux canaux portent le nom d’ancienne et de nouvelle riviùre 
Bedford (Old et New Bedford River). L'ancien lit de l’'Ouse reparait 
dans la direction est, sur 16 kilomùtres de longueur jusqu’à Stre- 
tham, oĂč elle reçoit les eaux de la Cam, venant du nord. L’Ouse 
reçoit encore, 10 kilomÚtres plus loin, les eaux de la riviÚre Lark, 
passĂ© Ély; puis, Ă  Ă©gale distance de ce confluent, aprĂšs Liltleport, 
les eaux de la Petite Ouse (Little Ouse) oĂč Brandon River ; Ă  8 kilo- 
mĂštres plus en aval, la riviĂšre Wissey, ou Stoke, et entre Wissey et 
Downham-Market, 4 kilomĂštres plus bas, le Well Creek, qui apporte 
les eaux de plusieurs grands canaux de desséchement du Bedford 
Level. Finalement, suivant son cours jusqu’à Lynn Regis, sur 21 ki- 
lomĂštres de longueur, la Grande Ouse admet comme dernier affluent 
la petite riviĂšre Nar. À Lynn, elle dĂ©bouche directement dans la 
baie du Wash; autrefois, elle s’y jetait à Wisbeach. 

La riviÚre Nen ou Nene dont nous décrivons plus loin en détail le 
cours supérieur, prend sa source dans les collines oolithiques du 
comtĂ© de Northampton, et ne devient navigable qu’à partir de cette 
ville. À Peterborough, elle entre dans le district des Fens, pour se 
ramifier du nord à l’est, et former de nombreux bras plus ou moins 
artificiels qui proviennent des marais desséchés. Le plus important 
de ces bras débouche à Wisbeach. AprÚs avoir servi de limite aux 
deux comtés de Lincoln et de Northampton, elle se jette dans la baie 
du Wash, Ă  quelques kilomĂštres de distance de l'embouchure de 
la Grande Ouse, ayant drainé un bassin de prÚs de 300 000 hec- 
ares. 

La riviÚre Welland traverse le comté de Northampton sur 80 ki- 
lomÚtres de longueur, vers Le nord-est; elle reçoit entre Market- 
Harborough et Stamford plusieurs petits tributaires : Wyebrook, 
Chater, Guash, etc., venus du Rutland, elle est rejointe en aval de 
Slamford, dans les Fens, passé les villes de Deeping et Crowland, 
par le cours d’eau important, le Glen, qui draine un bassin assez 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 163 


Ă©tendu, sur 57 kilomĂštres de parcours. Avant d'atteindre la baĂŻe du 
Wash, la riviÚre Welland est dérivée dans des canaux qui font partie 
de l’ensemble du drainage appliquĂ© aux Fens, et dĂ©bouche Ă  la 
partie nord de la baie, aprùs avoir recueilli les eaux d’un bassin 
couvrant environ 20 000 hectares. 

La riviĂšre Witham prend naissance dans le Rutland, Ă  Thist- 
leton ; coule dans la direction nord par Grantham, jusqu’à Lincoln, 
aprÚs avoir reçu les eaux de la Brant ; tourne à partir de Lincoln 
vers l’est, puis au sud-est, ayant recueilli les eaux des tributaires 
Langworth et South Beck, et Ă  Tattershall, celles du Bain et du 
Sleaford, et se jette dans la baie du Wash, prĂšs de l'embouchure 
de la riviùre Welland. À partir de sa jonction avec le Sleaford, le 
Witham est canalisĂ© jusqu’à Boston, et rendu, aprĂšs Boston, Ă  son 
lit naturel. Son bassin occupe 273 000 hectares. 

Cette riviÚre joue un rÎle considérable dans le desséchement des 
Fens ; elle Ă©coule non seulement les eaux des hauts districts d’oĂč 
elle descend, mais encore la partie nord des Fens du Lincoln, Ă  sa- 
voir, ceux de Wildmore et de Holland, couvrant plus de 55 000 hec- 
tares. 

Tout ce district, Ă  l’époque romaine, Ă©tait Ă  un niveau de 3 Ă  
2",90 plus bas qu’il n’est aujourd’hui prùs de la plage, et de1",50 plus 
bas Ă  l’amont, le long du Witham. Aussi, les parties basses Ă©taient- 
elles recouvertes chaque jour par la marée, tandis que les parties 
plus Ă©levĂ©es, restant Ă  sec, avaient conservĂ© leur parure de forĂȘts. 
Les Romains les dĂ©frichĂšrent pour construire leurs digues et arrĂȘter 
l’envahissement de la mer, en permettant aux atterrissements de se 
continuer ‘. 

Les eaux qui affluent dans le Witham, provenant d’un bassin aussi 
étendu, sont rejetées dans un chenal qui, à partir de Boston, ser- 
pente sur une douzaine de kilomĂštres de longueur, avec une lar- 
geur variable de 30 à 75 mùtres, jusqu’à l’embouchure dans le 
Wash, oĂč elle pĂ©nĂštre presque Ă  angle droit, Ă  cause d’un banc 
d'argile compacte qui fait dévier son cours. 

La baie du Wash, d’une superficie de 78 000 hectares, est peu 


1. Wheeler, Proceedings of the Institution of civil Engineers ; t, XXNIIIL. 


164 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


profonde, encombrée de sables mouvants qui empiÚtent lentement 
sur la mer. Sa largeur, en travers du cul-de-sac que forment les 
embouchures du Witham et de la Grande Ouse, est de 24 kilo- 
mùtres, mais elle n’a plus que 15 kilomùtres en travers des cîtes 
qui ferment l’entrĂ©e en mer. 

La vase des eaux douces s’y mĂ©lange, pendant les marĂ©es, avec les 
alluvions marines et se dépose en eau morte, par l'effet des courants 
contraires. L’endiguement d’une partie de la baie a beaucoup con- 
tribuĂ©, ainsi que l’établissement des canaux de dĂ©charge pour le 
desséchement, au dépÎt des alluvions, qui ne laissent plus aujour- 
d'hui que deux passages dans le chenal ; au nord, les Boston deeps, 
séparés par un banc considérable de sables mouvants, el le Lynn 
well' au midi. 


Historique des premiers travaux. — Que les Romains aient cons- 
truit ou non toutes les digues qu’on leur attribue, Ă  l’époque oĂč ils 
colonisĂ©rent la Bretagne, on n’a pu retrouver avec certitude, comme 
Ɠuvre romaine, malgrĂ© de nombreux et remarquables vestiges, que 
la «longue chaussée » (Causey) allant de Denver, dans le Norfolk, 
par Grandford, Eldernell et Eastra Fen, jusqu’à Peterborough, sur 
une longueur de 38 kilomĂštres. Construite en argile et en sable, 
avec 0",90 d'Ă©paisseur Ă  la crĂȘte et 18 mĂštres Ă  la base, cette levĂ©e 
est recouverte aujourd’hui de plus d’un mĂštre d'Ă©paisseur de terre. 
Dans une tranchée pratiquée à travers la levée, à Eldernell, on a 
constatĂ© le mode d’exĂ©cution suivi par les Romains. Le sol de la 
lande Ă©tait revĂȘtu d’abord d’un lit de fascinages en branches de 
chĂȘne, puis d’un lit Ă©pais de cailloux venant du Northampton, et 
finalement, d’une sĂ©rie de couches d’argile et de sable, alternant 
jusqu’à la crĂȘte. Ces matĂ©riaux faisant prise, ont rĂ©sistĂ© Ă  l’action 
des eaux et du temps, jusqu’à ce Jour *. 

Sir William Dugdale, qui Ă©crivit au xvr° siĂšcle l’histoire des endi- 
guements, mentionne à diverses reprises, comme ayant été cons- 
truites par les Romains, de grandes digues élevées alors au bord du 


1. Ansted, Waler and Water-Supply, 1878, p. 250. 
2, Algernon Clarke, Journ. Roy. Agric. Soc., t. VIII, 1°° série, p. S1. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 165 


Wash, dans le but de conquérir les alluvions que les marées sub- 
mergeaient, inondant tout le district qui borde la baie. « La masse 
des atterrissements dĂ©posĂ©s par la mer Ă  l’entrĂ©e de la baie, dit-il, 
s'était élevée si haut, refoulant les eaux douces et empiétant sur le 
rivage, que les Romains, pour rester maßtres de ces terrains sédi- 
mentaires si riches et si fertiles, déployÚrent une grande activité 
jusqu’à ce qu’ils les eussent enclos de fortes digues et protĂ©gĂ©s ainsi 
contre l’irruption des vives eaux’. » 

Quoi qu’il en soit, les endiguements paraissent avoir Ă©tĂ© complĂš- 
tement abandonnés jusque sous les rois saxons. S'ils furent repris 
alors, c’est par les moines des riches et puissantes abbayes de Crow- 
land, Thorney, Ramsey, Spinney, Ély, etc., qui cullivaient les üles 
émergeant çà et là des terres inondées. 

Indépendamment de la chaussée romaine, mentionnée précédem- 
ment, on retrouve dans le Comté de Lincoln, de trÚs anciennes 
digues, telles que le Old Sea Dyke, attribué aux Romains; le 
Raven-bank, qui protĂšge un petit territoire entre Cowbit et Tidd- 
Saint-Mary, mais plutĂŽt contre les crues des riviĂšres; son origine 
est inconnue ; le New Sea Dyke, de 3 kilomÚtres plus rapproché 
du cÎté des terres, dont on ignore aussi la date d'exécution. Les 
nivellements opérés au siÚcle dernier, dans le but de creuser le 
grand collecteur de décharge, à travers cette derniÚre digue, ont 
montré que la surface du pays, en avançant vers la levée romaine, 
s'Ă©levait subitement de 1",80, c’est-Ă -dire que le niveau des atter- 
rissements du cÎté de la mer se trouvait à 1",80 au-dessus de celui 
des terres enclÎturées. Cette différence de niveau représente la 
hauteur du colmalage dĂč aux eaux du Wash depuis que le New 
Sea Dyke a Ă©tĂ© Ă©tabli”. 

D'ailleurs, lorsqu’en 1635 on approfondit le chenal de la riviùre 


1. Sir W, Dugdale, History of embanking and draining, 1° édit, 1652. 

2. On rencontre aux environs de Wainfleet (Lincoln), le long de la digue romaine, 
qui remonte vers le nord, une série de tertres de 40 mÚtres de longueur et de 
4 mÚtres de hauteur. espacés sur une longueur de 3 kilomÚtres environ, et divisés en 
cinq groupes à peu prÚs symétriques. Ces groupes sont séparés par des tranchées di- 
rigées à angle droit vers la cÎte, qui s'est avancée depuis l'époque romaine de prÚs de 
3 kilomĂštres sur la mer. La butte la plus importante, encore intacte, avec des talus 


166 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Nen, à Wisbeach, on découvrit, à une profondeur de 2",45 au- 
dessous du lit, un ancien lit empierrĂ©, oĂč la vase avait empri- 
sonnĂ© sept barques. À Whittlesea, bien plus en amont, des fouilles 
pratiquĂ©es Ă  la mĂȘme profondeur, sous la lande, mirent au jour un 
sol arable, recouvert de gazon, qui paraissait avoir été récemment 
fauché. L 

Il y a donc lieu de penser que les travaux de desséchement et de 
culture, dans cette région, remontent à des époques fort reculées. 
Henri de Huntingdon, dĂ©crivant la contrĂ©e sous le rĂšgne d’Étienne 
de Blois (1135), s’extasie sur les beautĂ©s des Fens, « d’un sĂ©jour 
charmant, arrosées par une foule de ruisseaux, entrecoupées de lacs 
et d’étangs, et embellies par un grand nombre de bois et de forĂȘts ». 
William de Malmsbury, vivant au temps du roi Henri Il (1144), et 
parlant des environs de Thorney, dĂ©clare que « c’est un vĂ©ritable 
paradis pour le plaisir des yeux ; les marais eux-mĂȘmes sont peuplĂ©s 
de futaies aux troncs élancés, dont le feuillage épais cache les étoiles 
du firmament; la plaine aussi nivelĂ©e que la mer, est couverte d’her- 
bages Ă  perte de vue, et pour rompre la monotonie, ici, des bou- 
quets de pommiers, là des vignes, offrent une végétation luxuriante 
pour les délices de la vie ». 
Les ßles cultivées par les moines, que mentionne de Lavergne, 
produisaient des récoltes abondantes de céréales et de foin, de 
fruits et de légumes. Cerfs, chÚvres, liÚvres et gibier de toutes 
sortes y étaient parqués en hberté. Les eaux fournissaient de pois- 
sons les plus délicats la table des monastÚres. Entourées de saules, 
d’aunes, de roseaux et de joncs, la plupart des Ăźles n’étaient acces- 


en pente douce, occupe le centre, et de 12 à 14 buttes sont réparties sur le terrain à 
l'arriĂšre, jusqu'Ă  400 mĂštres du littoral ancien. Le terrain des buttes est le mĂȘme que 
celui qui les supporte, sauf pour quelques-unes formées de tourbe noire, du reste peu 
éloignée. 

S'agit-il d'anciens villages de pĂȘcheurs, o1 de sauniers fabriquant du sel marin, Ă  
l'usage des colonies romaines, dont les tertres maintenaient les habitations au-dessus 
des hautes marées, et sont encore debout? On n'y retrouve pourtant aucuns vestiges de 
l'industrie humaine ? Ou bien, s'agit-il de promontoires, de jetées construites par les 
Danois pour mettre leurs bateaux Ă  l’abri dans les goulets qui sĂ©paraient les tertres? 
Le nom de Zofts par lequel on désigne ces monticules est d'origine danoise. (Sewell, 
On Earthworks at Wainfleet in Lincolnshire. Report of the Brit. Assoc., 1878.) 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 167 


sibles qu’en bateau. Quant au pays d’alentour, demeurĂ© Ă  PĂ©tat ma- 
récageux, il servait de repaire aux braconniers et aux maraudeurs 
de la pire espĂšce. 

Quelques grands seigneurs imitĂšrent tardivement les moines, Ă©le- 
vant des digues pour la défense de leurs propriétés contre les eaux 
des crues et des marées. Richard de Rules entre autres, chambellan 
de Guillaume le Normand (1066), entreprit les endiguements et les 
canaux nécessaires pour assainir les marais communaux de Bourn et 
de Deepping. Il fit, en outre, encaisser la riviĂšre Welland qui inon- 
dait ses prairies, et dessécha un vaste territoire qu'il réparut entre 
les cultivateurs, « de telle sorte, ajoute le chroniqueur, que des ma- 
récages, étangs et fondriÚres, Sir Richard fit naßtre des champs et 
pùturages fertiles ; et des terres les plus humides et fiévreuses, il fit 
sortir des jardins et des vergers ». 

Les ressources du district des Fens élaient encore vantées au 
temps des rois Étienne (1135) et Henri II Plantagenet (1154). 

Quelques entreprises furent tentées avec plus ou moins de succÚs 
depuis le rùgne d'Édouard I (1272) jusque vers le xv° siùcle. Le 
célÚbre Jean de Gand (Gaunt), qui mourut en 1393, et Marguerite, 
comtesse de"Richmond, figurent parmi les concessionnaires, entre- 
preneurs de desséchements. Sous le rÚgne de Henri VIT (1478), 
Moreton, Ă©vĂȘque de Ély, fit exĂ©cuter un travail {rĂšs important, le 
canal de Peterborough Ă  Guyhirn et Wisbeach, qui mesure 1",20 de 
profondeur sur 12 mĂȘtres de largeur. Ce canal, muni d’une Ă©cluse 
à la mer, fonctionne encore aujourd’hui, sous le nom de Woreton’s 
Leam, pour les services de la navigation sur les riviĂšres Nen et Ouse, 
et du desséchement du district Nord-Holland. 

Lorsque les moines eurent été dépossédés et bannis par Henri VIN, 
protecteur et chef suprĂȘme de l’Église rĂ©formĂ©e en Angleterre, les 
efforts isolés demeurÚrent sans objet, et aprÚs un siÚcle d'abandon, le 
pays des Fens se trouva dans une situation des plus critiques. Les ma- 
récages avaient remplacé les bois et les pùturages ; les endiguements 
partiels ne servaient qu’à arrĂȘter l'Ă©coulement des eaux ; les canaux 
s'étaient envasés; les riviÚres à faible pente n'étaient plus draguées, 
et les eaux de la mer refoulant les eaux douces maintenaient la 
contrée submergée. Le commissaire Atkins, sous Jacques 1° (1604), 


168 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


constate que la triste incurie des seigneurs et des habitants des 
Fens, en causant la ruine des terres jadis si fertiles et si salubres, 
frappe surtout les populations des hautes landes, aux besoins des- 
quelles les Fens suppléaient dans les années de sécheresse et de 
disette. 

Sir William Dugdale confirme les doléances de Lord Hardwicke ; 
il n’y a plus, de son temps’, que des marais oĂč l’on retrouve les 
racines et les troncs de ces magnifiques chĂȘnes et sapins, encore 
debout dans le sol ferme que la tourbe vaseuse a recouvert. 

L'état devient si grave que les pétitions arrivent en masse au Par- 
lement, sous le rĂšgne d’Élisabeth, pour requĂ©rir du gouvernement 
un plan général de desséchement. La reine désigna alors une com- 
mission extraordinaire, chargée d'opérer un nivellement complet des 
districts marĂ©cageux, ou inondĂ©s, et en l’an 1600 fut promulguĂ©e 
la premiĂšre loi relative au drainage du Great Level. Un grand nom- 
bre de plans furent dĂšs lors soumis aux Communes. En 1606, sous 
Jacques [#, une loi locale pour le desséchement de 2 400 hectares, 
compris dans les districts de Waldersee et Coldham (Ély), concĂ©dait 
aux entrepreneurs les deux tiers des terres assainies ; mais ce fut 
seulement en 1630 que le comte de Bedford, prĂ©sident d’une asso- 
ciation de 13 propriétaires, obtint la concession du desséchement 
des terrains formant le Great Level, dans les comtés de Cambridge 
et de Lincoln, moyennant l’abandon aux intĂ©ressĂ©s de 58 000 hec- 
tares, à peu prÚs le tiers du territoire à dessécher. Les travaux de 
l’association, d’abord activement poussĂ©s, furent suspendus pendant 
la période des guerres civiles, et le comte Francis venant à mourir, 
son fils et hérilier, William, premier duc de Bedford, dut faire re- 
nouveler la concession du Great Level, en 1649, par le Convention 
Parliament. En 1653, les opérations dont nous rendons compte plus 
loin étaient achevées ; 115 000 hectares avaient été complÚtement 
desséchés, moyennant une dépense de 10 millions de francs, et Pas- 
sociation recevait en toute propriété 38 000 hectares, représentant 
une valeur à peu prÚs égale aux débours, à raison de 262 fr. dé- 
pensés par hectare. 


1. Sir W. Dugdale, né en 1605, mourut en 1686. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 169 


Sur l’ensemble du territoire, les frais de dessĂ©chement s’étaient 
élevés effectivement à 86 fr. par hectare. 

Sous le rĂšgne de Charles IT (1660), le comte Lennox obtenait Ă©ga- 
lement la concession des terres qu'il pourrait endiguer dans le dis- 
trict Sud-Holland, sur les cĂŽtes de la baie du Wash, aux environs 
de Sulton ; et les communes de Gedney, de Holbeach, etc., par des 
chartes spĂ©ciales, procĂ©daient au dessĂ©chement et Ă  l’enclĂŽture des 
landes et des marais leur appartenant. DÚs lors, les travaux reçurent 
une impulsion qui ne s’est plus ralentie jusqu’à l’époque prĂ©sente. 


1. — DessĂ©chement du Bedford Great Level. 


Le desséchement du Great Level, entrepris par Francis, qua- 
triÚme comte de Bedford, et ses 13 associés, comprenait les travaux 
suivant(s : ; 

1° Riviùre Bedford (aujourd’hui ancienne riviùre Bedford), joi- 
gnant Karith et Salter Lode, sur 33*",7 de longueur ; largeur 21",33. 

2 Canal Sam, de Feltwell (Norfolk) Ă  la riviĂšre Greal Ouse. 

3° Canal de Ély (aujourd’hui canal Sandy, ou Sandall) ; longueur 
32 kilomĂštres ; largeur 12",90. 

4 Bevill Leam, de Wbittlesey Mere Ă  Guyhirn ; longueur 16 kilo- 
mĂštres ; largeur 12",20. 

9° Morelon’'s Leam, de Guyhirn à Wisbeach ; ce canal, construit 
au xv° siĂšcle par l’évĂȘque Moreton, fut approfondi et Ă©largi. 

6° Peakirk Drain ; longueur 16 kilomÚtres ; largeur 5,20. 

7° New South Eau ; de Crowland à Clow Cross. 

8° Canal Hill, prÚs de Peterborough ; longueur 3 kilomÚtres ; 
largeur 15",25. 

% Shire Drain, de Clow Cross Ă  Tydd et Ă  la mer. 

Outre ces canaux et colateurs, un grand nombre d’écluses furent 
établies pour protéger les Lerres contre les inondations et assurer 
l’écoulement des eaux pendant les marĂ©es. 

Le comte Francis étant mort tandis que la guerre civile sévissait 
dans les comtĂ©s de l’est et arrĂȘtait les travaux en cours, son fils 
William, cinquiĂšme comte et premier duc de Bedford, partisan du 
protecteur Cromwell, obtint le renouvellement de la concession 


170 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


accordée à son pÚre (1649) et constitua une société dont il confia la 
direction à un ingénieur Hollandais, qui avait conduit avec succÚs des 
opérations de desséchement dans les comtés du sud-est, et plus 
récemment, à Hatfield Chace, prÚs de Thorne, dans le comté de 
York. Sir Cornelius Vermuyden, cet ingénieur, colonel de cavalerie 
au service de Cromwell, reprit Lous les projets et poussa les travaux 
assez activement pour que le Great Level fût complÚtement assaini 
en 1663. L'année suivante, les conservateurs du desséchement se 
constiluĂšrent en associalion par une loi du Parlement, dans le but 
d'entretenir les travaux exécutés et de percevoir, à cet effet, les 
taxes nécessaires; le duc de Bedford et ses associés lui firent remise 
de 33 000 hectares ; 4 000 heciares furent transmis en outre Ă  la cou- 
ronne et À 000 hectares au duc de Portland ; en tout 38 000 hectares. 

La taxe par hectare, prĂ©levĂ©e par l'association, fut d’abord uni- 
que, mais en raison de l’assiette injuste de cet impît, elle fut ren- 
due progressive et répartie en plusieurs classes. 

En 1697, suivant un projet que Vermuyden avait élaboré, le Greal 
Level fut divisé en trois districts : nord, centre et midi ; chaque dis- 
trict, administré par un commissaire, fut desservi par des cours 


1. Vermuyden, ingénieur renommé comme hydraulicien, s'était également distingué 
aux premiers rangs, comme militaire, dans les combats contre les royalistes Ă  Marston- 
Moor (1544), à Nasseby (1645), etc. ; Cromwell l'avait fait colonel d'un de ses régi- 
ments CÎtes-de-fer et l'avait créé baronet. 

Aux yeux des chroniqueurs anglais, qui avaient vu leurs souverains appeler, dĂšs le 
xuÂź siĂšcle, les colons de la Flandre pour faire valoir leurs domaines, tout Flarnand est 
un homme qui sait manier les armes et la charrue. Les immigrations des premiers 
Flamands continuĂšrent sous le protectorat de Cromwell et s’étendirent jusqu'au pays 
de Galles. 

C'est d'eux que les Anglais apprirent Ă  construire des digues Ă  la mer et le long 
des riviÚres, à élever des moulins à vent pour épuiser les eaux, à dessécher et assainir 
les marais et les terres humides, ete. (De Laveleye. Essais sur l’économie rurale de 
la Belgique, 1863, p. 13.) 

En France Ă©galement, ce sont des Flamands qui dessĂšchent et mettent en culture 
cette partie du Poitou, appelĂ©e la petite Flandre. ƒest au Flamand, sieur Humphrey 
Bradley, « personnage fort expérimenté et entendu aux desséchements et diguages des 
terres inondées », que le roi Henri IV confÚre le titre de grand maßtre des digues de 
France et le privilĂšge des entreprises d'assainissement, par un Ă©dit du 8 avril 1599. 

En 1642, c'est encore un Flamand, Jean Van Ens, conseiller du roi Louis XIII, qui 
dessĂšche les marais d'Arles, avec un rare succĂšs. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 171 
d’eau, des canaux, des digues et des Ă©missaires qui lui Ă©taient 
. propres. Le nord Level, drainé par la riviÚre Nen, décharge ses eaux 
dans la baie du Wash, au-dessous de Wisbeach ; le centre et le sud 
Level, drainés par la riviÚre Greal Ouse, déversent leurs eaux à 
Lynn, Ă©galement dans le Wash. 

Les digues de la riviĂšre Welland protĂšgent au nord le Deeping 
Fen, et au midi, le nord Level ; celles de la riviÚre Nen défendent, sur 
la rive gauche, le nord Level, et sur la rive droite, le centre Level. 
Enfin, les levées de la riviÚre Great Ouse garantissent sur la rive 
gauche le centre Level, et sur la rive droite le sud Level. C’est aux 
trois riviÚres ainsi endiguées, formant les artÚres principales du 
drainage de la surface totale, que se rapportent les travaux exé- 
cutĂ©s depuis le commencement du siĂšcle dernier (voir la carte d’en- 
semble). 

Pour assurer le desséchement artériel, Vermuyden avait imaginé 
de rĂ©server des lits d'inondation ou Washes, qui rĂ©gleraient l’écou- 
lement Ă  la mer des eaux de chaque riviĂšre. Ces lits d'inondation 
consistent en terrains submersibles, c’est-à-dire en prairies, dont les 
moins Ă©tendues, Cowbit Washes, pour la riviĂšre Welland, en aval de 
Spalding, mesurent de 500 Ă  1 000 mĂštres de largeur, et couvrent 
600 hectares. Vermuyden admeltait que les riviĂšres, si elles eussent 
conservé un débit normal, augmenté du débit des eaux de dessé- 
chement, pouvaient maintenir leur chenal libre et ouvert jusque 
dans l'estuaire ; mais comme, pendant les crues d'hiver, elles ont un 
dĂ©bit trop fort, et qu’en Ă©tĂ©, elles offrent un dĂ©bit insuffisant, c’est- 
Ă -dire, qu’en hiver, les embouchures deviennent trop Ă©troites et 
qu’en Ă©tĂ©, les ensablements les bloquent, il adopta le systĂšme des 
réservoirs ou lits d'inondation se remplissant par les crues et se 
vidant progressivement Ă  l’étiage. 

On a reconnu depuis que l'estuaire Ă©tait le principal obstacle Ă  
l'Ă©coulement rĂ©gulier des eaux douces, et que c’était une erreur d’at- 
ténuer le courant des eaux en crue, si on voulait conserver le chenal 
ouvert d’une maniùre durable, à travers les sables de l'estuaire ‘. 


1. J. A. Clarke, Farming of Lincolnshire (Journ. Roy. Agric. Soc., 1851, vol. XII, 
p. 298). 


172 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Avant de procéder à l'examen des travaux en détail, rappelons 
que la plus grande partie du territoire à dessécher, en y adjoignant 
les 200 000 hectares du comté de Lincoln, est à un niveau de 1",920 
à 4°,90 au-dessous de celui des plus hautes mers du nord ; que les 
parties les plus élevées sont les plus rapprochées de la cÎle, par 
sulle des endiguements, et que la pente diminuant vers l’intĂ©rieur 
s'arrĂȘte aux terrains tourbeux et spongieux dont la tendance natu- 
relle est de se saturer d’eau et de retenir l’eau de saturation. 

Indépendamment de cette déclivité du terrain en sens inverse, la 
grande baie qui sert de rĂ©ceptacle aux eaux d’écoulement est si peu 
profonde, recevant des alluvions de limon et de sable qui ne taris- 
sent pas, que les eaux courantes, faute de vitesse, ne peuvent pas se 
frayer un chemin Ă  travers les passes. Les riviĂšres descendant des 
plateaux supérieurs pourraient seules, en temps de crue, opérer 
les chasses nécessaires, mais les crues ne débouchent pas aux points 
les plus bas du district. Aussi a-t-il fallu encaisser les cours d’eau, 
les rectifier, les pourvoir d’écluses pour retenir les marĂ©es et, le 
plus souvent, Ă©lever Ă  l’aide de machines les eaux de drainage, 
pour les faire écouler par les riviÚres canalisées. 

Pour le desséchement du nord Level, les digues du Welland et de 
la Nen, entre Peterborough et Guyhirn, ont dĂ» ĂȘtre renforcĂ©es : elles 
mesurent 21,50 Ă  la base et 2,50 Ă  la crĂȘte. 

Les canaux d'écoulement ont été augmentés par la construction du 
Smith Leam qui prolonge le canal Hill (Hills’ Cut), dans le but d’a- 
méliorer la navigation entre Wisbeach et Peterborough. 

Le desséchement du centre Level a exigé le détournement des 
eaux de la riviĂšre Nen, prĂšs de Peterborough, Ă  Standground, oĂč 
une Ă©cluse avait Ă©tĂ© installĂ©e, et son encaissement jusqu’à Guyhirn 
oĂč aboutit la levĂ©e de Waldersea. D'autre part, la riviĂšre Great 
Ouse a été endiguée, depuis les plateaux de Over, dans le Cam- 
bridge, jusqu’à Hermitage, prĂšs de Earith, et de lĂ , dĂ©viĂ©e par une 
Ă©cluse de navigation dans un nouveau canal Ă  grande section qui 
part de l’ancien pont de l’Ouse, non loin d’Hermitage, elle se dirige 
en ligne droite, parallùlement à l’ancienne riviùre Bedford, jusqu’à 
l’écluse de Denver (Norfolk). Les dĂ©blais de ce canal, la nouvelle 
riviÚre Bedford, rejetés sur la rive droite, forment une levée de 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 173 


20",10 Ă  la base, 2°,50 de hauteur et 3",05 Ă  la crĂȘte qui dĂ©fend 
spécialement le sud Level. 

Une seconde levĂ©e de mĂȘmes dimensions, construite sur la rive 
droite, au nord de l’ancienne riviùre Bedford, enclîture un lit d’inon- 
dation ou Wash, de plus de 2000 hectares, destiné à recevoir les 
hautes eaux hivernales des deux canaux Bedford. 

Outre ces travaux considérables, de nombreux collecteurs ont été 
successivement creusés afin de compléter le réseau artériel du centre 
Level. Quelques-uns sont désignés uniquement par leurs dimen- 
sions ; nous citerons les principaux : 

4° Le canal Vermuyden, ou quarante pieds (Forty foot drain), 
joignant la digue Welch, sur l’ancienne riviùre Bedford, à la riviùre 
Nen, prĂšs de Ramsey ; 

2 Le Thurloe drain, ou seize pieds (Sixteen foot drain), reliant 
le canal prĂ©cĂ©dent au canal dit Popham’s Eau ; 

9° Le Hammond's Eau, prÚs de Somersham ; 

4° Le Stonea Drain, prÚs de March ; 

9° Le Moore’s Drain, ou vingt pieds (Twenty foot river), dans 
la commune de March ; 

6° Le Conquest Lode, aboutissant à l'étang Whittlesey et servant 
de ligne de partage entre les communes de Yaxley et de Farcet, 
dans le Northampton ; 

7° Le Tong's Drain, au canal Marshland, avec écluses aux deux 
extrémités. 

Des amĂ©liorations furent apportĂ©es en mĂȘme temps Ă  la digue de 
Wluttlesey, au canal Popham et Ă  l’ancienne riviĂšre Nen canalisĂ©e, 
tandis que l’écluse de Denver Ă©tait restaurĂ©e pour dĂ©tourner les 
marĂ©es dans la nouvelle riviĂšre Bedford et empĂȘcher les eaux dou- 
ces de refluer dans l’Ouse Ă©galement canalisĂ©e, qui reçut le nom de 
Dix mille riviĂšre (Ten thousand River), prĂšs de Littleport. 

Le sud Level, prĂ©servĂ© contre les eaux de l’Ouse par la digue 
qui longe la nouvelle riviÚre Bedford, fut encore défendu par une 
série de remblais et de levées contre les eaux des riviÚres Cam, 
Mildenhall, Brandon et Stoke. Un grand canal appelé Downham, ou 
Saint John's Eau, de 26",50 de largeur et 5 mĂštres de profondeur, 
fut creusé, sur 8 kilomÚtres, entre l'écluse Denver et Stow-Bridge 


174 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


pour recevoir toutes les eaux d'inondation, ou les eaux excédantes 
provenant des cours d’eau qui sillonnent le sud Level. 

La grande écluse Denver commande en somme le débouché de 
la riviÚre Great Ouse dans la baie ; elle avait été établie, contrai- 
rement aux projets de l’ingĂ©nieur Vermuyden, Ă  une vingtaine de 
kilomĂštres de la ville de Lynn. C’est un autre ingĂ©nieur hollandais, 
Westerdyck, au service de la commission du Bedford Level, qui 
décida cette modification. Les plaintes les plus vives ne tardÚrent 
pas Ă  ĂȘtre adressĂ©es, et de nombreux procĂšs furent engagĂ©s devant 
les tribunaux, par les autorités municipales, pour faire cesser les 
obstacles apportés par cette écluse à la navigation du port de Lynn. 

Fortement encastrée dans sa maçonnerie, pourvue de portes bus- 
quĂ©es, l’écluse fonctionnait trĂšs bien au point de vue du dessĂ©che- 
ment, sans qu’il fĂ»t nĂ©cessaire de murailler la digue, ce qui eĂ»t Ă©tĂ© 
le cas dans le projet de Vermuyden ; mais en diminuant le volume 
des eaux dĂ©chargĂ©es devant Lynn elle avait causĂ© l’ensablement 
du port. 

En 1713, une des plus fortes marĂ©es du siĂšcle enleva l’écluse Den- 
ver, ce qui mit fin au conflit entre les intĂ©rĂȘts de la navigation et 
ceux du dessĂ©chement ; toutefois l’apaisement ne fut pas de longue 
durée, car en 1750, malgré les procÚs et les démonstrations mena- 
çantes des habitants de Lynn, la commission du Bedford Level la fit 
rĂ©Ă©difier au mĂȘme point oĂč elle fonctionne encore actuellement. 

D’autres Ă©cluses furent construites aux extrĂ©mitĂ©s de la nouvelle 
riviĂšre Downham et sur beaucoup de points de jonction, ainsi que 
des levées de défense. De plus petits canaux de dérivation, tels que 
le Grunty Fen drain prÚs de Stratham, furent embranchés sur la 
riviÚre Downham, et ceux déjà existants, connus sous le nom de 
Lod’s Reach, Swaffham et Bottisham, furent rĂ©gularisĂ©s et curĂ©s. 
Quoique ces travaux, aprÚs leur exécution, ne fussent pas reconnus 
suffisants pour assurer le desséchement parfait du sud Level, 
Vermuyden constatait qu’en 1652, « plus de 16 000 hectares des 
districts du nord et du centre étaient en pleine culture : blé, cé- 
rĂ©ales d'hiver, navette ; les pĂąturages regorgeaient de bĂȘtes Ă  cornes 


1. Ilustrated Times, mai 1862. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 175 


et de moutons lĂ  oĂč il n’y avait auparavant que marais et marĂ©- 
cages ». 

L'association du Bedford Level, trompée par ce brillant résultat, 
ne s'était pas suffisamment préoccupée des débouchés à la mer, qui 
demeuraient obstrués par les sables et les vases du Wash. En ouire, 
par suite de la négligence apportée dans le curage des fossés et des 
cours d’eau, le dessĂ©chement cessa de fonctionner naturellement, et 
l’on dut bientĂŽt songer Ă  recourir Ă  des moyens mĂ©caniques, c’est- 
Ă -dire Ă  des moulins Ă  vent, pour activer des pompes d’épuisement 
qui relĂšvent l’eau des fossĂ©s et la rejettent dans les riviĂšres princi- 
pales. Sous le rĂšgne de Georges [*, une premiĂšre loi relative au 
desséchement du Haddenham Level, compris dans le district gé- 
néral de Bedford, autorisa l'emploi de moulins à vent : dÚs lors, 
l'exemple fut suivi dans une foule de localités, par des particuliers 
et des communes, qui Ă©tablirent des moulins faisant mouvoir des 
roues élévatoires. Ce systÚme pouvait convenir à certains proprié- 
taires, mais au détriment des autres intéressés ; il ne remédiait en 
rien à la situation générale, devenue trÚs précaire, en raison des 
débordements incessants. 

En 1770, une brĂšche survenue dans la digue du nord Level causa 
l’inondation de la Nen, qui envahit tout le district; en 1795, les rup- 
tures des digues maintinrent plus de 10 000 hectares sous 1",80 
d’eau, pendant des semaines entiùres ; en 1799, les inondations des 
riviĂšres, grossies par les lĂąchures de plus de 500 moulins, furent 
encore plus désastreuses. 

La commission du Bedford Level avait résolu, il est vrai, dÚs 1791, 
de creuser un nouveau canal de décharge pour la riviÚre Nen, en 
aval de Wisbeach, dans le but de la rejeter par le Shire Drain Ă  
Peters’point, avec une chute de 1°,70. Ce canal, d’une longueur de 
3 kilomùtres et demi, devait s’amorcer à 8 kilomùtres en aval de 
Wisbeach, mais il ne put ĂȘtre achevĂ© qu’en 1773, aux termes d’une 
loi spéciale (Tydd and Newton drainage act). 

L’ingĂ©nieur Kinderley proposait, de son cĂŽlĂ©, en 1751, de con- 
duire les eaux des riviùres Great Ouse et Nen jusqu’au centre de la 
baie du Wash, oĂč elles auraient rejoint celles des riviĂšres Welland 
et Witham, de façon à créer un courant puissant qui eut refoulé les 


176 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

sables des hauts-fonds, dégagé les passes et permis de conquérir sur 
la mer une vaste surface d’alluvions, « plus vaste, disail-il, que le 
comté de Rutland tout entier ». 

Cette grande idée, que Sir John Rennie devait rappeler un siÚcle 
plus tara, en proposant de créer un nouveau comté, Victoria, sur 
les terrains du Wash’, ne trouva alors aucun Ă©cho : elle n’en honore 
pas moins la haute intelligence de l'ingénieur qui, dans tous les 
travaux dont il fut chargé, appliqua les principes soi-disant nou- 
veaux, consistant Ă  Ă©viter de donner trop de largeur au chenal des 
cours d’eau pour Ă©viter les hauts-fonds et les ensablements des 
passes. La rÚgle qu'il pratiquait se résumait dans le rélrécissement 
du chenal pour obtenir l’approfondissement voulu, au moyen de la 
vitesse et de la force du courant. 

Jusqu’à ce que le canal Kinderley (Xinderley's Cut) eut Ă©tĂ© fina- 
lement exécuté, la riviÚre Nen, traversant le territoire du Great 
Level, s'y épanchait périodiquement, et se ramifiait par une foule 
de petits bras qui rejoignaient la Great Ouse, en aval de Wisbeach. 

La Great Ouse, elle-mĂȘme, dĂ©tournĂ©e, comme on l’a vu, de longue 
date sur Lynn, recevait par le canal Moreton (Morelon’s Leam), cons- 
truit sous le rĂšgne de Henri VII, les eaux des deux riviĂšres, de telle 
sorte que la Nen avait fini par trouver une issue Ă  peu prĂšs directe 
Ă  la mer, pour ses eaux, qu’une digue sĂ©parait encore de celles des 
Levels situés au sud-est. 

Wisbeach n’en restait pas moins le point dominant de l’écoule- 
ment en amont de la Nen. Déjà, en 1771, sur le rapport des ingé- 
nieurs Golborne et Dunthorne, les commissaires du nord Level se 
décidaient à imposer à la ville de Wisbeach un chenal de 30 mÚ- 
tres d'ouverture, pour la décharge des eaux de leur district (20 000 
hectares) et pour la défense des territoires riverains de la Nen, 
entre Peterborough et Wisbeach. Ces territoires se trouvaient inon- 
dés par suite de ruptures survenues dans les digues des Fens el 
de la destruction des ouvrages qui protégeaient le canal Kinderley. 


1. D'aprÚs le projet de Sir John Rennie, le comté Victoria devait embrasser 60 600 
hectares, entre Wainfleet (Lincoln) et Hunstanton (Norfolk), sur lesquels 29 000 se 
trouvaient dégagés d'ores et déjà, à marée basse (voir la carte d'ensemble). 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 17% 


Aussi, en 1773, obtinrent-ils d'urgence du Parlement, malgré la 
violente rĂ©sistance de la municipalitĂ©, le vote d’une loi spĂ©ciale 
pour faire creuser un nouveau canal Ă  la mer, Ă  une profondeur plus 
grande de 0,40 ; ce qui permettait d’abaisser de 1*,80 la surface , 
des eaux Ă  l’écluse du nord Level, et de faire remonter Ă  Wisbeach 
des bateaux d’un plus fort tirant d’eau. Ce canal exĂ©cutĂ© la mĂȘme 
année, sous le nom de Xinderley's Cut, permit, en effet, aux marées 
de vive eau, d’aprĂšs le rapport de James Golborne, de s’élever Ă  
3 mĂštres, Ă  Wisbeach, au lieu de 1,20 ; et Ă  l’étiage de la Nen, Ă  
Guyhirn, de s’abaisser de 0",53, ou à Peterborough, de 0,85, par 
rapport aux niveaux de l’annĂ©e 1767. 

Cette situation, réellement améliorée, ne devait pas avoir une 
longue durée, car en 1809, Rennie pÚre fut conduit à proposer un 
remĂšde qui consistait dans le prolongement du canal Kinderley, 
l’endiguement de lestuaire et un raccourci de la Nen, au nord de 
la ville de Wisbeach. 


a) La riviĂšre Great Ouse. 


Pendant prĂšs d’un siĂšcle, l’idĂ©e de crĂ©er un nouveau dĂ©bouchĂ© 
aux eaux de la Great Ouse, en la dérivant, pour la raccourcir, et 
d'assurer ainsi une chute plus forte de 1",50 dans la baie, fut com- 
battue par les propriétaires des Fens. Finalement, aprÚs la plus vive 
opposition des habitants de la ville de Lynn, qui croyaient voir dans 
la réalisation de cette idée la ruine de leur port et de leur com- 
merce, une loi fut sanctionnée en 1781, pour mettre le projet à 
exécution, moyennant une taxe de 1 fr. par hectare et par an, dans 
toute l’étendue des terres qui devaient bĂ©nĂ©ficier des travaux. La 
loi régla, en outre, certaines garanties pour le port de Lynn et pour 
la navigation intĂ©rieure, de mĂȘme que pour les riverains de l’Ouse. 
Les deux ingénieurs désignés par la loi pour dresser le projet défi- 
nitif, un pour le desséchement, Robert Mylne, architecte du pont 
Blackfriars de Londres, et l’autre pour la navigation, Sir Thomas 
Hyde Page, colonel du gĂ©nie, ne purent s’entendre sur la direction, 
ni sur les dimensions du canal à creuser entre Saint-German’s Bridge 
et le quai de Lynn, et quand le capitaine Joseph Hubbart, de Trinity 

ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 12 


178 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


House, membre du conseil de l’AmirautĂ©, eut Ă©tĂ© choisi pour dĂ©par- 
tager les deux commissaires et rendre une sentence arbitrale, on 
constata qu'il n’y avait plus de fonds pour exĂ©cuter le travail. Les 
frais de procÚs et d'instance auprÚs du Parlement avaient absorbé 
deux millions de francs, 


Eau Brink Cut. — En attendant, la situation des Fens devenait 
de plus en plus alarmante ; aussi les intĂ©ressĂ©s, Ă  l’unanimitĂ©, solli- 
citÚrent-ils du Parlement une nouvelle loi basée sur le projet de 
l'expert, capitaine Hubbart, en consentant une augmentation de la 
taxe. L’ingĂ©nieur Rennie fut choisi comme ingĂ©nieur pour diriger 
les travaux de drainage, et Telford, pour la navigation. Une com- 
mission, présidée par le général Lord William Bentinck, reçut le 
mandat de contrĂŽler les travaux. La loi connue sous le nom de Eau 
Brink Cut Act, sanctionnée en 1795, ne reçut toutefois son applica- 
ĂŒon qu’en 1818, Sir Edward Banks s’étant rendu entrepreneur des 
(ra vaux. 

Les résultats de la dérivation dépassÚrent de beaucoup l'attente 
sénérale ; non seulement le niveau des basses eaux, en amont, 
s’abaissa de 1",50, mais les eaux du dessĂ©chement furent enlevĂ©es 
avec une rapidité surprenante. Ainsi, pendant l'automne 1821, mal- 
ré des pluies exceptionnelles, la plus grande partie des Fens fut 
sauvĂ©e de l’inondation, grĂące au nouveau canal. 

Les ingénieurs Telford et Rennie, tout en constatant que le tra- 
vail avail été exécuté en tous points conformément au plan de Hub- 
bart, ne durent pas moins convenir que le canal, à son point d’em- 
branchement, était trop étroit pour le volume des eaux à débiter, 
et que le courant finirait par rompre la digue d’amont vers l’ancien 
chenal. Ils recommandÚérent en consĂ©quence d'augmenter d’un tiers 
la section, en affectant à ce remaniement les fonds destinés au cu- 
rage de la riviĂšre, entre le canal et l’écluse Denver, le lit pouvant 
se passer de curage. 

Sur l'avis conforme de la commission, ces nouveaux travaux furent 
confiés, en 1826, à Rennic ; le niveau baissa encore en amont, de 
0",65, soit en tout de 2,15 ; mais entre temps, avant que l’élargis- 
sement eĂ»t Ă©tĂ© achevĂ©, les digues de l’écluse Denver s’affouillĂ©rent, 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 179 


le chenal navigable se dĂ©tourna du port de Lynn, les quais s’ensa- 
blùrent, et la commission, aux termes ae la loi, fut tenue d’indem- 
niser la ville, de mĂȘme que les autres intĂ©ressĂ©s. Les indemnitĂ©s 
dépassÚrent un million de francs ; soit, 700 000 fr. aux riverains de 
l’'Ouse, 250 000 fr. aux propriĂ©taires du Marshland, 175 000 fr. au 
port de Lynn, etc. S 

Aussi, dÚs que l'Eau Brink Cut eut été achevé, la commission 
n'eut point de cesse que le Parlement la relevĂąt d’une aussi Ă©norme 
responsabilité, par une nouvelle loi *. 


b) La riviÚre Nen (vallée inférieure). 


La riviÚre Nen, non moins que la Great Ouse, exigeait des amé- 
liorations urgentes pour permettre l’écoulement rĂ©gulier des eaux 
du centre Level, et la mise en culture d’une surface considĂ©rable de 
marais restĂ©s Ă  l’état stagnant. 

Sur un premier rapport de Rennie pÚre engagé par le duc de Bed- 
ford et par le syndicat des propriétaires du nord Level (1809) à 
donner son avis sur les travaux à exécuter, on avait reconnu la né- 
cessilé : 1° d'approfondir et d'élargir la section de la Nen, depuis 
Peterborough jusqu’à la mer, c’est-à-dire sur tout son parcours à 
travers le district ; 2 de lui creuser un nouveau lit entre Rummery 
Mill en amont et Horse Shoeband, en aval de Wisbeach ; 3° de 
pourvoir ce canal d’écluses qui assureraient la navigation dans la 
traversée de Wisbeach; et 4° de construire sur une longueur de 
10 kilomÚtres environ un canal à grande section pour la décharge 
des eaux dans la baie, entre le canal Kinderley et Crabb Hole, oĂč 
le tirant d’eau Ă©tait suffisant. Ce nouveau canal pouvait ĂȘtre creusĂ© 
aussi, en partie, dans l'enceinte fermée par la digue romaine, et 
en partie, dans la plage des Marshes au dehors de l’enceinte ; mais 
cette variante élait indiquée par Rennie comme moins directe et 
moins sĂ»re que le tracĂ© par le chenal mĂȘme de la Nen. 


Canal de Wisbeach. — Quoique Rennie fils et Telford ceussent 
été amenés, en raison de la résistance de la ville de Wisbeach, à 


1. Aulobiography of Sir John Rennie, p. 192. 


180 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

restreindre le projet primitif, les intéressés eurent gain de cause. Il 
ne fut plus question que de cyeuser le nouveau lit en aval de Wis- 
beach, et mĂȘme pour cette section, le tracĂ© sur Crabb Hole, Ă©tudiĂ© 
par Rennie pÚre, vivement défendu par son fils, fut définitivement 
Ă©cartĂ©. Au lieu de diriger le nouveau lit en dedans de l’enceinte des 
vieilles digues, suivant la seconde variante, il fut résolu de tracer 
la coupure dans la direction de Skates Corner. Le Parlement sanc- 
tionna une loi spéciale dans ce but, et les travaux confiés aux entre- 
preneurs Jolliffe et Banks furent achevés en 1831. 

Sir John Rennie, au sujet de ces travaux, raconte un incident 
qui dĂ©montre Ă  quelles difficultĂ©s, d’un tout autre ordre que celui 
des exigences techniques, se heurtent les opĂ©rations de l’ingĂ©nieur, 
lorsqu’elles Ă©veillent la dĂ©fiance des populations, et Ă  quels moyens 
Ă©ncrgiques il faut parfois recourir pour tenir tĂȘte Ă  des actes 1rrĂ©- 
fléchis, ou mal intentionnés. 

« Avant de détourner les eaux de la Nen dans le nouveau lit, en 
aval de Wisbeach, nous avions ordonné, Telford et moi, aux entre- 
preneurs, de réunir sur un point désigné autant d'hommes, de che- 
vaux, tombereaux, brouettes et outils qu’il serait possible, pour 
pouvoir efficacement barrer l’ancien lit Ă  marĂ©e basse. Tout Ă©tait 
prĂȘt ; les entrepreneurs se trouvaient sur les lieux ; l'heure du re- 
flux approchait ; nous fimes signe de procéder au barrage. Il y avait 
là à peu prÚs 1 200 ouvriers, avec les chevaux et les ustensiles né- 
cessaires pour enlever rapidement le travail. 

« Les membres de la municipalité de Wisbeach, opposés de tout 
temps à l’entreprise, mais tenus par la loi de verser, pour les tra- 
vaux, une quote-part de 750000 fr., arrivĂšrent sur les entrefaites, 
accompagnĂ©s des officiers de justice ; tous, Ă  bord d’un pelit steamer 
naviguant sur la Nen. Ils venaient nous intimer de suspendre les 
travaux, jusqu’à ce que la Cour pĂŒt dĂ©libĂ©rer sur un rĂ©fĂ©rĂ© qu'ils 
avaient introduit auprùs d’elle. Comme motif principal de leur som- 
mation, ils dĂ©claraient que le nouveau lit n’avait pas Ă©tĂ© creusĂ© Ă  
la profondeur que stipulait la loi. Les entrepreneurs intimidés à ce 
moment critique par la démonstration municipale, allaient se reti- 
rer, lorsque Telford et moi, sans nous laisser nullement Ă©mouvoir, 
leur enjoignimes de poursuivre immĂ©diatement le travail. En mĂȘme 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 181 


temps, nous faisions prévenir les conseillers municipaux et leur suite 
que s'ils persistaient Ă  rester sur place, ils couraient le risque de 
sombrer avec leur steamer ; leur responsabilité demeurerait entiÚre. 
Ils ne se le firent pas dire deux fois, mais rebroussĂšrent chemin 
aprĂšs nous avoir signifiĂ© leur exploit. Trois jours plus tard, l’ancien 
chenal était comblé et la riviÚre Nen coulait à pleins bords dans son 
nouveau lit”. » 

Il est vrai que le nouveau lit n'avait pas Ă©lĂ© excavĂ© jusqu’au ni- 
veau des mortes eaux, stipulé dans la loi, mais les ingénieurs avaient 
justement comptĂ© sur l’ameublissement du radier, formĂ© de limon 
sablonneux, et sur la vitesse du courant, pour l’approfondissement 
qui eut exigé, sans cela, en pure perte, beaucoup d'argent et de 
temps. En effet, le courant lui-mĂȘme accomplit le travail naturel- 
lement, sur le radier et sur les berges que l’on avait eu le soin de 
ne pas empierrer. 

Pendant les premiers mois, la pente Ă©tant faible, le courant agit 
avec lenteur; c’est seulement aprĂšs qu’elle se fut accentuĂ©e, que 
les progrĂšs devinrent trĂšs rapides. Au bout de six mois, le lit de la 
dĂ©rivation Ă©tait abaissĂ© de 2,75 au-dessous des mortes eaux d’é- 
quinoxe, les rives s'étaient réguliÚrement corrodées, et la section 
avait triplé par rapport au profil primitif. Les marées vives qui éle- 
vaient les eaux de quelques pieds Ă  peine, Ă  Wisbeach et Ă  Cross 
Keys, montĂšrent dĂšs lors Ă  un niveau tel, que les navires de fort 
tirant eurent accĂšs dans le port, mĂȘme Ă  marĂ©e basse, et la ville de 
Wisbeach, grĂące Ă  l’amĂ©lioration de ses recettes de navigation, fut 
en mesure de payer sa quote-part des travaux. A 

Lorsque l’émissaire eut atteint ses dimensions dĂ©finitives, l’em- 
pierrement des berges fut exécuté; le chenal de sortie fut également 
dallĂ©. En 1837, Sir J. Rennie constatait qu’à Cross Keys, et prapor- 
tionnellement, à Wisbeach, les marées de vives eaux cotaient 6,09, 
laissant un tirant de 2,75 aux mortes eaux. 

Comme complément de cet important travail, et pour assurer la 
conquĂȘte des lais de mer enclĂŽturĂ©s, un canal large et profond, North 
Level drain, fut construit de Clow’s Cross Ă  l’écluse Gunthorpe, en 


1. Aulobiography, loc. cit. 


182 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


remplacement de l’ancien canal tortueux, Shire Drain; de telle 
sorte qu’en 1857, l'ingĂ©nieur Rennie pouvait hardiment annoncer 
que 2 500 hectares de lais de mer étaient livrés à la culture, le dis- 
trict ayant été absolument drainé, et la plus-value des terres ayant 
doublé. 


Cross Keys. — Un litige non moins grave que celui soulevĂ© par 
la dĂ©rivation de la Nen Ă©clata au sujet de l’émissaire, quand il fallut 
construire un pont à Cross Keys, en plus de ceux déjà établis à laval 
de l'Eau Brink Cut, et au Foss-Dyke Wash, sur la riviĂšre Welland, 
dans le but de raccourcir la distance par voie de terre entre les 
deux comtés de Lincoln et de Norfolk. 

Dans la loi relative aux travaux de l'embouchure, une clause obli- 
geait l’association du Bedford Level Ă  construire, en mĂȘme temps 
que le pont de Cross Keys, un autre pont, celui-ci tournant, qui 
permit l’entrĂ©e et la sortie des navires en tout temps. Or, il eĂ»t Ă©tĂ© 
imprudent, avant que les effets de la corrosion se fussent produits, 
de fonder un pont tournant dans un sol aussi meuble. Malgré l'avis 
formel de Sir John Rennie, les commissaires du Bedford Level, sous 
la présidence de Lord Bentinck, crurent devoir passer outre. Le 
pont fut construit, sans que les piles aient pu ĂȘtre assises solidement 
à la profondeur voulue, de telle sorte que le courant exerçant plus 
tard son plein effet, des enrochements Ă©normes devinrent indispen- 
sables pour dĂ©fendre les piles. La passe s’obstrua tout de mĂȘme, et 
un abaissement de 0",60 à 0,90 fut ainsi déterminé dans le niveau, 
qui causa les plus sérieux préjudices à l'écoulement des eaux du 
desséchement. Aussi dut-on recourir encore une fois au Parlement 
pour obtenir une loi annexe (1848) qui mit Ă  la charge des commis- 
saires la réfection complÚte du pont tournant. 

Le rapport de l'ingénieur R. Stephenson, à l'appui de cette der- 
niÚre loi, signalait bien des améliorations de détail : quelques-unes 
seulement furent exécutées, notamment le dragage du chenal jus- 
qu'Ă  Wisbeach et la construction d’épis, en vue de dĂ©barrasser la 
passe des hauts-fonds qui l’obstruaient. 

GrĂące Ă  ces travaux dont la dĂ©pense totale s’éleva Ă  750 000 fr., 
sur lesquels la municipalité de Wisbeach finit par payer 350 000 fr. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE, 133 
pour sa quote-part, le nord Level à été complÚtement asséché ; les 
eaux suivent la pente naturelle sur tous les points du district, pour 
se décharger à la cote la plus basse de la riviÚre. Les collecteurs et 
les drains intĂ©rieurs, installĂ©s d’aprĂšs les plans de l'ingĂ©nieur Tel- 
ford, ont tous une pente de 0",006 par mĂštre, indispensable en vue 
d'Ă©viter l’envasement. La vitesse de 1 200 mĂštres par heure Ă  Ă©tĂ© 
reconnue suffisante pour dĂ©gager le chenal de la Nen, avec l’aide de 
la marĂ©e et du flot des crues, mais Ă  la condition de soigner l’en- 
tretien et le faucardement des berges. 


DĂ©penses des travaux du Great Level. — Les derniers travaux 
que nous venons de détailler, exécutés aux termes de la loi de 1810, 
intitulée Central Level River Acl, comportaient non seulement le 
curage, la rectification et l’approfondissement de la riviùre Nen, 
mais encore l'amĂ©lioration des canaux et des autres cours d’eau du 
district soumis au Des eCHemIEn ils ont représenté une a de 
1750 000 fr. 

D'autre part, les travaux entrepris dans le nord Level, en vertu 
du Nen Act, ou loi de la Nen, en 1827, pour le desséchement des 
Fens, ont comporté une dépense de 2556 500 fr., répartie comme 
il suit : 


QUOTE-PARTS 
ECT 
HECTARES. G6 contributions. 


Fr. 

Nord Level et Porsand. . . . . . EE Ru EN 19 500 1 200 000 
Sud-Holland, y compris une partie des rat Sutton et 

Tidd Saint-Mary LS SEP ET RTE RON 13 700 175 000 
Sutton Saint-Edmumd . . . . . 2 300 56 500 

Wisbeach Hundred, y compris les communes 4e Tidd > 
Saint-Giles, Newton, Parson Drove et Leverington . 7 100 A 
750 000 

MANEGrREMBE BEBAAlE RE RTL EU AM AR UE 3 200 » 

Moretonsdeama asser. nt ter er ne ur ui 1 200 » 
ROLRURA VA TE RASi ET AU ee 47 000 2 556 500 


L'ensemble des travaux de la Nen, complétés en 1831, aux termes 
des lois de 1810 et de 1827, représentait ainsi une dépense «de 


4 306 000 fr. 
Depuis leur achĂšvement, 30 moulins Ă  vent et les machines Ă  


184 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


vapeur de Borough Fen, prùs de Thorney, devinrent d’un coup sans 
emploi ; les frais de dessĂ©chement s’abaissĂšrent entre 19 et 15 fr. 


par hectare et par an, et les terres reprises pour la culture des 
céréales doublÚrent de valeur. 


c) La baie du Wash. 


En amont de Wisbeach, jusqu’à Peterborough, aucune des amĂ©- 
liorations projetĂ©es n'avait pu ĂȘtre entamĂ©e, malgrĂ© linitiative du 
duc de Bedford ; mais le duc ne se tint pas pour battu, et il confia 
de nouveau Ă  Sir John Rennie la mission de reprendre le projet 
d'ensemble du desséchement du centre Level, en y ajoutant le lac 
Whittlesey et 22 000 hectares de Fens marécageux, situés entre la 
Great Ouse et la Nen. 

Rennie dĂ©posa son rapport en 1837 : il dĂ©montra qu’en rĂ©gula- 
risant la Men, en aval de Peterborough, de façon à y déverser les 
eaux du lac Whittlesey par un canal spécial, et à rejeter celles du 
drainage des plateaux par un canal de ceinture, dont l’écluse serait 
située à Hermitage, dans la Great Ouse, non seulement on dessé- 
cherait complĂštement le district, mais on faciliterait beaucoup la 
navigation sur les deux riviĂšres. L’ingĂ©nieur Robert Stephenson, 
consulté sur ce projet par la commission du centre Level, émit un 
avis favorable : mais, plus spécialement intéressée au desséchement 
des basses terres, celle-ci obtint du Parlement de faire porter l’émis- 
saire projetĂ© dans l’Ouse Ă  16 kilomĂštres plus en aval, en doublant 
la dépense, sans avantage marqué pour le desséchement. 

Quoique le niveau des eaux basses eĂ»t baissĂ© de 1",83 dans l’Ouse 
Ă  la suite de la coupure Eau Brink Cut, les sables avaient fini par 
s’'accumuler à son embouchure, en aval de Lynn. La navigation flu- 
viale Ă©tait empĂȘchĂ©e par la barre, de telle sorte que les navires d’un 
ĂŒrant moyen pouvaient seuls entrer Ă  marĂ©e haute. D’autre part, les 
eaux des Level du centre et du sud s’écoulaient trĂšs difficilement 
Ă  la mer. 

Tandis que l’émissaire de la Nen, d’aprĂšs le projet Rennie-Ste- 
phenson, eut donné de 8",20 à 3,95 de chute, celui de l'Eau Brink 
Cul, une fois les travaux de la commission (centre Level) exécutés, 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 185 


devait faire perdre 0,60 de chute, par rapport Ă  celle de 2",15 
dĂ©jĂ  rĂ©alisĂ©e pour l’Ouse (voir $ a). 

Ce fùcheux résultat, obtenu au prix de grands sacrifices, engagea 
de nouveau un comité formé de Lord W. Bentinck, de Sir William 
Foulkes et de quelques autres riches propriétaires, à consulter 
l'ingénieur Rennie sur les moyens de remédier définitivement à la 
situation du district entier des Fens. 


Canal du delta. — C’est aprĂšs avoir procĂ©dĂ© pendant une annĂ©e 
au nivellement de loute la contrée, y compris la baie du Wash et 
les embouchures de l’Ouse, de la Nen, du Welland et du Witham, 
qui drainent 300 000 hectares de terrains en plaine, que Sir Jobn 
Rennie remit son projet d'amĂ©lioration. Par ce projet, il s’engageait 
à procurer une chute additionnelle de 2",15 pour l’Ouse et de 
0",65 pour les trois autres cours d’eau, moyennant l'Ă©tablissement 
d’un canal Ă  travers la baie du Wash. Ge plan, le mĂȘme que celui de 
l'ingénieur Kinderley, proposé en 1751, eût permis, en outre, de 
conquérir 45 000 à 60 000 hectares de terrains dans la baie, tout en 
garantissant la rĂ©gularisation des cours d’eau, le dessĂ©chement des 
terres en amont et la navigation, aussi bien fluviale que maritime. 

Comme toutes les conceptions de cet ordre, l’idĂ©e de Rennie, 
rendue publique par la distribution de son rapport, souleva les plus 
graves objections. AprĂšs les avoir mĂŒrement examinĂ©es et victorieu- 
sement combattues, en dĂ©voilant ses moyens de rĂ©alisation, l’éminent 
ingénieur dut toutefois reconnaßtre que si les propriétaires directe- 
ment intéressés ne pouvaient pas se mettre d'accord sur le fond, il 
Ă©tait inutile de faire appel au public pour fonder une compagnie. 

«SI on avait pu réunir facilement les capitaux nécessaires, ajoute 
Rennie, 1l eût été superflu de contester les principes de mon projet, 
et de discuter les moyens pratiques d'exécution, comme aussi de 
nier l'importance des résultats annoncés au point de vue national ; 
mais prĂ©cisĂ©ment la grande difficultĂ© Ă©tait de concilier les intĂ©rĂȘts 
dissidents, en vue de l’Ɠuvre commune, pour obtenir les ressources 
indispensables”. » 


1. Autobiography, loc. cit., p. 206. 


186 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

Le projet resta donc en suspens jusqu’à ce que Lord George Ben- 
tinck, nommé mernbre du Parlement en remplacement de son vncle, 
Lord William, qui avait été appelé au gouvernement des Indes, eut 
obtenu de le faire prendre en considération par la Chambre, mais 
en le scindant en deux parties, l’une pour la Great Ouse et la Nen, et 
l'autre pour le Welland et le Witham. 


Compagnie du Norfolk. — Une compagnie se constitua finale- 
ment pour exécuter la premiÚre partie du projet, comportant la re- 
prise de 14000 hectares d’alluvions sur ia baie du Wash. Un Bill 
fut sanctionnĂ© en 1845, suivi d’une loi, dite du Norfolk Estuary, 
dans laquelle furent déterminées les clauses de l'association et de 
l’entreprise. Parmi ces elauses se glissùrent, malheureusement pour 
la compagnie, des obligations tellement onéreuses que les bénéfices 
furent gravement compromis. 

Ainsi, la compagnie Ă©tait obligĂ©e de prendre Ă  sa charge l’entre- 
tien du grand canal, qui aurait dĂč incomber Ă  la navigation et aux 
riverains ; de céder les terrains des Marshes, endigués à ses frais, 
moyennant une part seulement de la plus-value ; d’indemniser les 
riverains de l’Ouse ; de verser une redevance de 5 p. 100 à la Cou- 
ronne et une redevance aux cultes, etc. Aussi, les actionnaires 
voyant diminuer les chances de bĂ©nĂ©fice de l’entreprise, voulurent- 
ils attendre, avant de procéder aux travaux, que les intéressés dans 
la navigation et le desséchement du district vinssent offrir leur con- 
cours pécuniaire. 

En effet, les propriétaires représentés par la Commission du centre 
Level, qu’une loi de 1846 avait instituĂ©e, et la municipalitĂ© de la ville 
de Lynn, pour la navigation, consentirent chacun { million et demi 
de francs, affectĂ©s Ă  l’exĂ©cution du nouveau canal de l’Ouse, moyen- 
nant le concours de l'ingénieur Robert Stephenson. Une loi datée 
de 1850 consacra cet arrangement. 

Suivant l’usage en matiĂšre maritime, l'amirautĂ© dĂ©signa de son 
cÎlé une commission composée de deux capitaines de la marine 
royale, Veitch et Washington, pour faire un rapport, aprĂšs enquĂȘte 
publique, sur les travaux projetés. Contrairement aux principes 
généralement admis en hydraulique, cette commission crut devoir 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 187 


recommander un tracé du canal en ligne courbe ; mais devant la 
Chambre des Communes, cette conclusion, vivement combattue par 
les plus éminents ingénieurs, fut repoussée. Le plan primitif fut dÚs 
lors suivi, consistant Ă  attaquer le canal sur 4 kilomĂštres en ligne 
droite, Ă  partir de Lynn. 

L’excavation du lit sur plus de 3 kilomùtres devait se pratiquer 
dans les sables, par dragage, entre deux levées parallÚles cons- 
truites en pierres brutes à la hauteur des mi-marées, et surmontées 
de balises indiquant le tracé. Grùce au colmatage, les levées de- 
vaient ĂȘtre exhaussĂ©es jusqu’au niveau fixĂ©, en mĂȘme lemps que 
l’endiguement des alluvions sur chaque rive consoliderait l’ailuvion 
à conquérir sur la baie. 

Les travaux confiés aux entrepreneurs Peto furent solennellement 
inaugurés sous la présidence de Sir William Foulkes, le 1° no- 
vembre 1850. Le dragage, aprÚs avoir marché rapidement, fut sus- 
pendu au moment oĂč les ingĂ©nieurs Rennie et Stephenson JugĂšrent 
que le courant, puissamment aidé par les eaux de flux et de reflux, 
suffirait pour achever l’approfondissement. Comme ils donnaient 
l’ordre d’enlever les barrages, les propriĂ©taires alarmĂ©s leur firent 
signifier d’avoir Ă  les maintenir, tant que la profondeur fixĂ©e par 
l’article de loi ne serait pas atteinte. C’élait la rĂ©pĂ©tition de ce qui 
s’était passĂ© pour la dĂ©rivation de la Nen. Cette fois, le procĂšs, plaidĂ© 
devant le vice-chancelier Turner, fut perdu par les ingénieurs, et la 
Cour d’appel confirma le jugement, le Conseil de l'AmirautĂ© ayant 
décliné toute compétence. La compagnie fut ainsi forcée de solli- 
citer devant le Parlement un nouveau Bill qui permit de continuer 
les travaux d’aprĂšs le systĂšme dĂ©jĂ  appliquĂ©, mais Ă  la condition que 
le chenal eût finalement les dimensions prescrites. 

Deux années avaient été perdues ; des sommes considérables 
furent gaspillées en frais de procédure, avant que les eaux de l'Ouse 
pussent s’écouler dans leur nouveau lit. DĂšs lors, la digue destinĂ©e 
Ă  combler l’ancien lit fut commencĂ©e Ă  l’amont, et le courant aug- 
mentant d'intensitĂ©, l’affouillement du chenal se produisit au bout 
de quelques mois, à une profondeur plus grande que celle stipulée 
dans la loi. 

Les résultats de cette dérivation furent remarquables. Le niveau 


188 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


des hautes mers, dans le port de Lynn, fut amené de 5,45 à 
6%,10 ; celui des mortes eaux de 4",25 Ă  4",88 ; tandis que dans 
le canal mĂȘme, l’étiage Ă©tait maintenu entre 2",75 et 3",55. Il 
s’ensuivit que les plus grands cîtiers purent entrer et sortir avec 
leur plein tonnage, par toutes les marées et en tout temps. Le 
nombre de pilotes et les droits de péage furent réduits sensible- 
ment ; l'accroissement du trafic permit, à bref délai, à la ville de 
Lynn, de payer sa quote-part à la compagnie pour les travaux exé- 
cutés. 

Quant aux propriĂ©taires des terres riveraines, l’abaissement de 
1,82, Ă  la cote des basses-eaux, venant s’ajouter Ă  celui rĂ©alisĂ© 
par l'Eau Brink Cut, représentait 3,35 au total. Aussi bien que 
pour le centre Level tout entier, il permit de renoncer Ă  l'emploi 
des moulins Ă  vent et des machines Ă  vapeur pour l’épuisement des 
eaux aux niveaux les plus bas. 


Les Polders. — La compagnie du delta de Norfolk, dont les 
actions sont restées pendant si longtemps sans rapporter aucun 
intĂ©rĂȘt, aurait dĂč trouver dans l’endiguement des 14000 hectares 
de lais de mer, concédés par la Couronne, la rémunération des 
capitaux engagés ; mais les opérations des polders occasionnÚrent, 
dÚs le début, de graves déboires, à cause de la précipitation mise à 
enclîturer. À partir de 1867 seulement, la compagnie, se confor- 
mant aux instructions de Rennie, endiguait 400 hectares, au prix 
de 998 fr. par hectare, et réalisait, à raison de 2500 fr. par hectare 
eñdiguĂ©, une somme d’un million de francs ; Soit pour une dĂ©pense 
de 371 200 fr. un bĂ©nĂ©fice net de 628 800 fr. L’annĂ©e suivante, le 
Prince de Galles se rendait acquéreur de 250 hectares endigués, 
moyennant paiement de la moitié de la plus-value. 

Sur les procĂ©dĂ©s Ă  suivre pour la conquĂȘte des lais de mer par 
colmatage, Sir John Rennie nous a laissé dans ses mémoires les 
instructions précieuses que lui suggérÚrent la pratique de son pÚre 
et sa propre expĂ©rience pendant prĂšs d’un siĂšcle’. 

« Je ne me suis pas départi, dit-il, du systÚme qui consiste à agir 


1. Aulobiography, loc. cil., p. 214. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 189 


d'accord avec la nature, el jamais contre elle ; dans ce dernier cas, 
on est toujours battu. 

« J'avais appris, aprÚs une longue série d'essais, que les matiÚres 
sédimentaires tenues en suspension dans les eaux de la baie (Grand 
Wash) pouvaient ĂȘtre dĂ©terminĂ©es quantitativement ; que ces ma- 
tiĂšres Ă©taient transportables d’un lieu Ă  un autre suivant les vents et 
les courants prédominants dans le golfe, et qu'elles se déposaient 
seulement dans des circonstances favorables, telles que les remous, 
aidés par les brises de large, et les eaux dormantes, abritées derriÚre 
les contre-courants. 

« Le but principal que j'ai poursuivi, lorsque les eaux douces et 
les eaux de marée se sont trouvées réunies dans le nouveau lit 
creusé pour l'embouchure de la riviÚre Ouse, en aval, au milieu du 
Wash, a été de faciliter les atterrissements par le dépÎt de ma- 
tiĂšres tenues en suspension dans les eaux. Ce but ne peut ĂȘtre atteint 
qu’à la condition de ralentir et d’arrĂȘter la marche du flot, et aussi 
du jusant, de façon à ce que l’atterrissement se produise sur les 
points oĂč il importe d’exhausser le sol au-dessus de la limite de la 
laisse des hautes mers, en mortes eaux. AussitĂŽt, en effet, que ce 
niveau est atteint, l'herbe peut pousser, et la surface se transforme 
rapidement en marsh vert (herbe). 

« Le procédé est des plus simples ; quand le dépÎt par colmatage 
s’est Ă©levĂ© de quelques pieds au-dessus du niveau des eaux basses 
des marées, une espÚce de végétation clairsemée couvre la surface 
des alluvions sur certains points, puis s’étend jusqu’à couvrir le 
tout, au fur et à mesure de l’exhaussement du sol; la criste marine 
(Salicornia herbucea) et le bacile (perce-pierre, passe-pierre, du 
genre ombellifĂšre) font leur apparition ; puis, le. sol continuant Ă  
s'Ă©lever, ils disparaissent Ă  leur tour pour faire place Ă  l'herbe 
marine (Glyceria marilima) qui revĂȘt d’un tapis l’entiĂšre surface, 
admirablement nivelĂ©e. Le lais est en herbu, dĂ©jĂ  prĂȘt pour le pĂątu- 
rage du bétail. 

« À partir de ce moment, le colmatage est trĂšs lent. Sur les cĂŽtes 
de l’Angleterre, il dĂ©passe Ă  peine la laisse des hautes mers en 
mortes eaux, sauf dans les endroits oĂč le sable emportĂ© par la vio- 
lence des vents forme des dunes, véritables digues, qui, en Hol- 


190 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


lande, atteignent jusqu’à 9 mùtres de hauteur. Dans la baie du 
Wash, les Marshes ne résultent que du dépÎt graduel des alluvions. 

« La nature abandonnĂ©e Ă  elle-mĂȘme accomplit le travail avec une 
orande lenteur, mais aussi avec une rare exactitude. Il s’agit de 
l'aider en se conformant Ă  ses lois ; c’est pourquoi 1l faut Ă©viter les 
travaux Ă©normes et dispendieux qui consistent Ă  entraver violem- 
ment et subitement les courants de la mer pour les rejeter ailleurs ; 
ce que l’on gagne d’un cĂŽtĂ©, on le perd de l’autre. 

« GrĂące Ă  une sĂ©rie d’obstacles lĂ©gers, tels que des fascinages 
touffus ou en buissons, ou bien des coffres de fascines, installés à 
0,30 ou 0,40 au-dessus du niveau des sables, que l’on espace 
convenablement, sans continuité, mais, au contraire, de maniÚre à 
ce que les extrémités ne coïncident pas, on crée des chicanes qui 
gĂȘnent les courants sans les obstruer et concourent Ă  la stagnation 
du mouvement des eaux. Lorsque le dépÎt atteint le niveau supé- 
rieur des fascinages ou des Ă©pis, on en dispose d’autres Ă  un niveau 
un peu plus Ă©levĂ©, aux mĂȘmes endroits, ou ailleurs, selon les cir- 
constances. 

«Si l’on veut colmater un espace dĂ©terminĂ©, il est prĂ©fĂ©rable de 
commencer en amont et de s’avancer vers l’aval ; on y gagne Ă  exĂ©- 
cuter des ouvrages moindres, Ă  diminuer la hauteur du colmatage ; 
l’eau refoulĂ©e par la marĂ©e Ă  l’arriĂšre contient une plus grande masse 
de matiĂšres sĂ©dimentaires ; de telle sorte qu’au fur et Ă  mesure de 
l’atterrissement de la partie supĂ©rieure, celui de la partie infĂ©rieure 
augmente plus rapidement. 

€ Dans l’exĂ©cution de ces travaux, il faut avoir soin, partout oĂč 
l’on distingue une tendance au creusement d’un chenal sous l’ac- 
ĂŒon d’un courant, de le modĂ©rer graduellement en amont, pour 
que la masse d’eau diminue peu à peu, jusqu’à ce que le chenal se 
comble. 

« Lorsque l’espace dĂ©terminĂ© a Ă©tĂ© amenĂ© Ă  l’état de marsh vert, 
naturellement ou artificiellement, s’il est assez vasle pour couvrir 
la dĂ©pense, on devra l’enclĂŽturer complĂštement par une digue qui 
empĂȘche le retour agressif de la mer. On ne court aucun risque de 
se tromper en évaluant, rÚgle générale, la plus-value du terrain au 
double des frais d’endiguement, 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. ‘191 


« Quand il s’agit d’un grand delta oĂč l’on compte racheter plu- 
sieurs milliers d'hectares, comme dans le Wash, la question du 
meilleur mode d'opération est aussi grave au point de vue de Par- 
gent que du temps. 

« On devrait rĂ©duire l’étendue des digues maĂŻtresses, autant que 
cela est praticable, en construisant la premiĂšre en aval, si la situa- 
tion s’y prĂȘte, et en ne la continuant qu'autant que les terrains en 
amont montrent une tendance au colmatage. Les digues intérieures 
ne devraient ĂȘtre Ă©tablies simultanĂ©ment que pour concourir au 
meilleur effet de l’ouvrage principal. Ainsi, quand un espace suffi- 
sant, en amont de la digue maĂźtresse, a Ă©tĂ© reconnu propre Ă  l’en- 
clĂŽture, on devra continuer Ă  maintenir cette digue dans un Ă©tat 
convenable d'avancement, pour circonscrire l’espace, mais à l’aide 
seulement de banqueltes moins coûteuses. Autrement, chaque en- 
clÎture séparée devient une digue maßtresse et la dépense totale 
s’accroit dĂ©mesurĂ©ment. 

« Les circonstances locales détermineront la meilleure marche à 
suivre, en ce qui concerne les digues principales, exposées aux coups 
furieux de la mer, comme aussi l’enclîture des parcelles en une 
ou plusieurs fois. Il vaut mieux restreindre l'opération à-150 on 
200 hectares, et fermer le polder Ă  l’époque des mortes eaux les 
plus basses, à cause de la facilité plus grande dans le travail. 

QIl est possible assurĂ©ment, d’aprĂšs le systĂšme hollandais, d’en- 
clĂŽturer des surfaces bien plus vastes ; mais alors il faut laisser les 
vides ouverts pendant plusieurs jours, les protéger par des musoirs 
en pierres, ou par des clayonnages et des fascinages, au pied et sur 
les bords du remblai, afin d’en dĂ©tourner les courants. Ces vides 
sont ensuite comblés au moyen de pierres, d'argile, de fascines, etc. 
Si, par malheur, une brĂšche vient Ă  se produire pendant les terras- 
sements, oĂč au moment de la fermeture, la masse d’eau dans l’en- 
clÎture est si forte que la violence du courant extérieur augmentant 
en proportion entraßne tout sur son passage ; le sol est affouillé 
dans cette direction et recouvert ailleurs de sable inerte; enfin, une 
difficulté imprévue se présente, celle de décharger les eaux accu- 
mulĂ©es dans l’enclĂŽture. 


« D’aprĂšs le systĂšme hollandais, on a effectivement besoin de 


LOS: ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


moins de digues, mais la dépense par mÚtre courant augmente ; 
aussi n'est-il recommandable que si la longueur des digues est pe- 
tile relativement à la largeur des terrains à enclÎturer. » 

Rennie estimait que sur plusieurs milliers d'hectares, déjà mûrs 
pour l’enclîture, les actionnaires du Norfolk estuary trouveraient 
Ă  rentrer dans leurs fonds, intĂ©rĂȘts compris. Si la compagnie se fĂ»t 
opposée en temps utile aux clauses trop restrictives de la loi de 
1890 ; si elle eĂ»t frappĂ© d’une taxe double les intĂ©ressĂ©s, et suivi 
tout d'abord le mode pratique d’endiguement conseillĂ© en vue du 
colmatage des alluvions du Wash, elle aurait indubitablement réa- 
lisĂ© de gros profits‘. 


d) Le sud Level. 


Le sud Level, d’une superficie de 48 500 hectares, s’étend au midi 
de l’ancienne Riviùre de Bedford, qui joint Earith en droite ligne 
avec l’écluse de Saller's lode, sur une longueur de 34 kilomĂštres. 
Le dessĂ©chement de cette surface s’opĂšre Ă  l’aide de machines Ă  
vapeur dont le détail, avec les surfaces drainées et les émissaires, 
figure dans le tableau ci-aprùs. Il n’y a plus de moulins à vent dans 
ce district. 

Indépendamment des surfaces désignées dans le tableau, sur les- 
quelles 10 500 hectares sont directement taxés pour les travaux de 
desséchement, on compte environ 1 600 hectares de terrains for- 
mant lisiÚre, taxés pour des travaux extérieurs et pour l'entretien 
de 48 kilomĂštres de canaux collecteurs. 

Le sol du district est composĂ© de tourbe, d’alluvions sableuses et, 
çà et là, des marnes gélives, tandis que le sous-sol est le plus sou- 
vent du sable stĂ©rile. Partout oĂč l’on a pu amender le terrain avec 
de l'argile, les résultats ont été satisfaisants pour la culture. Le dé- 
pît d’alluvion argileuse qui traverse le pays de Littleport à Ely, 
tourne à l’ouest par Thetford, Stretham et Wilburton pour regagner 
Ely par Haddenham, Witcham et Witchford, entoure un bassin de 
terre noire, le Grunty Fen, de plus de 500 hectares, servant de 


1. Aulobiography, loc. cit., p. 218. 


LES DESSÉCHEMENTS EN 


ANGLETERRE, 


193 


pùturage communal, et par conséquent abandonné sans clÎtures, ni 


drainage. 


Sur les terres fortes, entre Mepal et Ely, il y a d'excellents pĂątu- 
rages, mais surtout de bonnes terres arables, € 
du blĂ©, de l'orge et des haricots ; les turneps n’y viennent pas plus 
que la navette, et l’avoine n’y est cultivĂ©e qu'accidentellement. 


lÎturées, produisant 


Situation du desséchement dans le « sud Level » (1860). 


MACHINES À VAPEUR. 
NOUS 


4 Emolace- 
des Fens ou districts. Nombre ) 


ment, 


. Cottenham, id. . 
3. HaddenhĂąm . ... . 
. Stretham 


5. Thetford 
. Burwell 
. Swaffham 


. Mildle 


. Millenhall. 


. Lakenheath , . . 


2, leltwell Brandon 


3. Southery 

Nouvelle 

BeĂŻford. 
Canal 


. Littleport et Down- 


dix mille. 


. Waterbeach . . . . 
. Sohamsmere . . . . 


SURFACES 


drainées. 


ÉMIS- 


SAIRES, 


Ancienne | 
Ouse. f 


Ouse. { 
idher | 
id. 


Cam 
et Ouse. 


Cam. 


Lark. 


Brandon. 


Lark, 


Lark et 
f 
| 


Brandon, 


id. 


Ouse. 


Ouse,. 


SOL DRAINÉ. 
A  — — 
Nature géologique. 
geolugiqu Nature 
For 


Surface. Sous-sol. physique. 


LĂ©ger, 
fertile. 
Fort, 
fert: le. 


Arzile. 
Arcile 
tenace, 
id. 
Marais 
léger, 


Gravier. 


Gravier. 


ay 
! 
l 
{ 
l 
id. 
id. 
Alluvions. » | su 
f 
in 


Marais | 
Ă©pais. f 
Marais 
léger, 
Argile Marais 
et marais.|et argile. 


Argil 
ae; te | 


Moyen 


id, 
drainé. 


» 


Marais. Arsile. » 


Terre noire s 
ÉCART NE UTS. 
marais, f 


Marais | « 
Ă©pais Sable. 


Draivé. 


id; 
Mal 
drainé. 

Tourbe. rgile. » 


id. 


Bien 
drainé. 


Dans les terres basses, 
Ă  travers la tourbe 


le drainage se borne à des fossés creusés 
quant au mode de culture, 1l dépend de la 


préparation du sol, suivant qu'il à été relourné avec le sous-sol, 
amendé avec de l'argile et fumé plus ou moins abondamment avec 
des poudres d’os, du guano, des tourteaux, ete. L’assolement le plus 


ANN. SCIENCE AGRON. 


0) oi 


13 


194 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 
frĂ©quent s’étend sur cinq annĂ©es, Ă  savoir : 1° navette ; 2° avoine ; 
9° froment ; 4° haricots ou fourrages ; 5° froment. 

Les moutons de la race Leicester parquent aux environs d’Ely et 
de Littleport. Les chevaux et le bétail trouvent une nourriture excel- 
lente dans la bande de terrain d'inondation (Hundred feet Washes), 
réservée entre les deux riviÚres Bedford. Cette bande de 34 kilo- 
mĂštres de longueur sur 1 kilomĂštre de largeur en moyenne, des- 
tinée à emmagasiner, le cas échéant, les eaux d'inondation des deux 
riviÚres qui séparent le Level du midi de celui du centre, produit 
un fourrage de premiÚre qualité, une précieuse ressource pour les 
Ă©leveurs et les fermiers des environs. 


e) Le centre Level. 


Le centre Level, situĂ© au nord de l’ancienne riviĂšre Bedford, 
embrasse 60 000 hectares, répartis en trois grandes divisions. Le 
tableau suivant indique ces divisions, ainsi que les machines Ă  va- 
peur employées au desséchement, mais il faut compter, en outre, 
quelques moulins Ă  vent et des machines Ă  vapeur appartenant Ă  des 
propriétaires. 


Situation du desséchement dans le « centre Level » (1860). 


MACHINES A VAPEUR. : SOL DRAINÉ. 
NOMS mm —— | Surfaces ÉMIS- — 0 © 
fu CH Énpiace Nature gĂ©ologique. Vars 
des Fens ou districts. Nombre. ue drainĂ©es. | SAIRES. | — 
vapeur. ee Surface. | Sous-sol. physique. 
À eut De dĂ© Sie Mode NOR RME | CRC Ce PRE Re 
Hectares. 
Ancienne Tourbe | Argile et| Bonne 
1. Manea et Welney. . : 60 L nel 3500 Ouse. légÚre. | gravier. fertile, 
: Counter F Tourbe | Gault et TrĂšs 
2. Sutton et Mepal. . . 1 80 lac ai 4200 id. Ă©paisse. | gravier. | fertile. 
3. March. — 1er district ATEN | | 
on Binnamoor . . 1 30 Nen. 1200 Nen. el Argile. id, 
—4edistrict, ou West 3 
en 2 el TeM: 40 IS Nen. ÂŁl 4000 PR EE } id. id. 


Le drainage artificiel est peu pratiqué ; il est considéré comme 
inutile dans la plupart des terres. La loi de 1844 pour l’amĂ©lio- 
ralion du desséchement et de la navigation du centre Level a per- 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 195 


mis, grùce aux travaux dont nous avons rendu compte, de créer un 
: nouvel Ă©missaire plus au nord, dans le Wash, et d’abaisser le niveau 
de l’Ouse ; ces travaux ont mis fin Ă  l'Ă©puisement des plus grands 
districts par les moulins Ă  vent et les machines, en procurant au plan 
d’eau gĂ©nĂ©ral un Ă©coulement naturel jusqu’en aval de Lynn. 

Le sol est constitué, en plus grande partie, par de la tourbe re- 
posant sur de l’argile bleue. Dans les terres hautes, depuis Whit- 
ilesey, on retrouve de l'argile compacte qui, alternant avec le gra- 
vier, s’étend par March jusqu'Ă  Chatteris; on y cultive des turneps 
et de la navette, puis de l’avoine ; le blĂ© vient pendant deux annĂ©es 
consécutives, avec une récolte intercalaire de haricots. Sur cette 
partie argileuse du Level, le drainage tubulaire a été appliqué en 
grand. 

Dans les terres basses, l’argile se rencontre sur bien des points 
Ă  0%,60 ou 0,80 de profondeur, parfois Ă  une profondeur de 2",50. 
Les charrues sous-soleuses sont fort employées pour défoncer le 
turf tourbeux et ramener l'argile en morceaux (clunch) qui se déli- 
tent Ă  l’air par la gelĂ©e et dĂ©cuplent la valeur des terrains par leur 
mélange intime. 

Le froment est la principale récolte des terres noires, amen- 
dées par l'argile ; il alterne avec des fÚves, du trÚfle, du ray-grass, 
la navette et les turneps. Dans la commune de March, comprenant 
5 600 hectares de Fens, et dans Chalteris Fen (4000 hectares), 
l’assolement le plus ordinaire est le suivant : 1° navette ; 2° avoine ; 
3° blé ; 4° fourrage ; 5° blé. Onse sert, comme engrais, de tourteaux 
et de poudre d’os ; la moutarde est enfouie en vert. 

Le Holme Fen (2000 hectares), prĂšs de Whittlesey Mere, jadis 
un marais, a été transformé par l'argile en un terrain à blé de pre- 
miÚre qualité. 

Middlemoor Fen (1 000 hectares), dans le voisinage immédiat de 
Holme Fen, qu’Arthur Young prĂ©sentait au commencement de ce 
siÚcle comme «un désert marécageux », aprÚs avoir élé amendé 
nombre de fois par l'argile, est aujourd'hui en pleine culture de 
cĂ©rĂ©ales, el d’une rare fertilitĂ©. 

Whilllesey Mere, jadis un Ă©tang poissonneux, le rendez-vous des 
excursionnistes, a Ă©tĂ© dessĂ©chĂ© en grande partie; de mĂȘme que 


Hate, 


196 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Ramsey Mere (296 hectares) et Ugg Mere. Ces trois Ă©tangs sont 
couverts d'exploitations de premier ordre. 

Les moulins qui épuisent encore les eaux de quelques propriétés 
particuliÚres sont desservis par des usiniers qui ne reçoivent pen- 
dant l’étĂ© que la rĂ©munĂ©ration affĂ©rente aux journĂ©es de travail 
effectif; mais en hiver, ils Ă©puisent tant que le vent le permet, et ils 
sont payés réguliÚrement à la semaine. Sauf dans les saisons trÚs 
humides, le centre Level est suffisamment desséché par les machines 
Ă  vapeur des grands districts et les moulins des particuliers. 


f) Le nord Level. 


Le nord Level, y compris Porsand, occupe un territoire de 
19000 hectares environ, que limitent les digues du canal More- 
tons Leam et le Welland. Sur cette surface, 15 000 hectares seu- 
lement paient la redevance du desséchement. Les communaux sui- 
vants : Great Borough Fen (2 000 hectares desséchés et enclÎturés 
en vertu d’une loi spĂ©ciale de Georges I), Flag Fen et Sulton- 
Saint-Edmund Fen (ensemble 1 500 hectares), ne sont pas soumis 
Ă  la taxe. 

Les terres frappées d'impÎt se partagent en cinq districts dont les 
eaux sont dĂ©rivĂ©es par le Old et le New South Eau, Ă  Clow’s Cross, 
et dirigĂ©es de Clow’s Cross, par le canal nord Level, dans la riviĂšre 
Nen, jusqu’à l’écluse Gunthorpe, en aval de Wisbeach. Si l'entente 
avait pu se produire en temps ulle entre les nombreux intéressés 
de la région, le canal nord Level, dont la dépense représente deux 
millions et demi de francs, aurait pu ĂȘtre remplacĂ© par la canalisa- 
tion, depuis Peterborough, de la Nen qui coule parallĂšlement Ă  une 
hauteur de 2,50 Ă  2",75 au-dessus du niveau des eaux du canal. 
Quoi qu’il en soit, le nord Level s’est rendu absolument indĂ©pendant 
de la Nen, en amont de Wisbeach, pour le desséchement. 

Le drainage des terres y est complet. Jusqu'à ce que ce résultat 
eut Ă©tĂ© obtenu, la pratique de l’écobuage, importĂ©e de France vers 
le milieu du xvn° siÚcle par les réfugiés protestants que les ingé- 
nieurs hollandais avaient amenĂ©s avec eux, n’avail pas peu contribuĂ© 
à améliorer le sol du nord Level. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 197 


A l'exception des terres argilo-sableuses de Thorley et des allu- 
vions de Porsand, le sol du nord Level consiste principalement en 
tourbe, sur une Ă©paisseur qui varie de 0,30 Ă  0",45. On l'amende 
partout avec de l’argile, depuis que l’écobuage a cessĂ©. 

L’assolement est le mĂȘme que dans les deux autres districts. Sur 
le territoire de Thorney Lordship (7 000 hectares), le drainage par 
Luyaux Ă  donnĂ© d’excellents rĂ©sultats, en permettant de rendre Ă  la 
culture arable de grands espaces consacrés jusqu'alors aux pùtu- 
rages el d'utiliser les fossés. D'ailleurs, sous le rapport du drainage 
et des procédés d'exploitation, le nord Level occupe le premier rang. 


2. — RĂ©gularisation et assainissement de la Nen. 


C’est seulement aprùs que les travaux du chenal de la Nen à la 
mer eurent été achevés, le pont Sutton Bridge ayant été supprimé, 
que les propriétaires de la vallée en amont de Peterborough com- 
mencĂšrent Ă  s’agiter pour obtenir l'amĂ©lioration du dessĂ©chement 
des terres riveraines et la régularisation de la riviÚre en aval. 

Comme il ne pouvait plus compter sur le nord Level qui s'Ă©tait 
rendu indépendant, le comité des propriétaires, y compris le comte 
Fitz William, Lord Overstone, Lord Lilford, duc de Bucclengh, mar- 
quis de Northamplon, etc., se retourna vers la ville de Wisbeach, 
intéressée à l'amélioration de la navigation et du drainage de ses 
communaux, vers les districts de Waldersey et Redmore (2 800 hec- 
(ares), intĂ©ressĂ©s Ă  la suppression des machines d’épuisement, enfin, 
vers les propriĂ©taires du Moreton’s Wash (1 500 hectares), soumis 
aux inondations périodiques de la riviÚre, entre Peterborough et 
Guybirn, pour lĂącher d’obtenir leur concours pĂ©cuniaire, en vue de 
la réalisation du projet de l'ingénieur Rendel. AprÚs une série de 
meelings tenus jusqu’en 1851, sous la prĂ©sidence du duc de Bed- 
ford, et une enquĂȘte prĂ©liminaire de l’AmirautĂ©, le comitĂ© obtint du 
Parlement qu’une commission spĂ©ciale fĂŒt dĂ©signĂ©e pour l’amĂ©lio- 
ration de la Nen et de sa navigation (Nen Valley Act, 1852)". 

L'importance de la loi de 1852, la gravité des conflits soulevés. 


1. À. Clarke. On trunk drainage (Journ. Roy. Agric. Soc., 1831, vol. XV). 


198 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

par son application, et le grand intĂ©rĂȘt des travaux confiĂ©s Ă  la 
commission de la Nen, ne peuvent ĂȘtre saisis qu’en entrant dans les 
détails de cette vaste entreprise, désignée par les Anglais sous le 
nom de Trunk drainage, ou drainage artériel. 

La riviùre Nen a deux sources : l’une au nord et l’autre au sud 
de Daventry, qui se rejoignent Ă  Weedon Beck et, 12 kilomĂštres 
plus loin, traversent Northampton. Depuis cette ville oĂč elle devient 
navigable, la Nen est Ă  une distance de 96 kilomĂštres en ligne droite 
de la baie du Wash; mais à cause des sinuosités de son chenal, 
elle est effectivement Ă©loignĂ©e de 160 kilomĂštres de la mer. Jusqu’à 
Peterborough, elle coule d’abord dans une direction nord-est vers 
Higham Ferrars ; puis, passé Thrapstone et Oundle, elle se dirige 
vers le nord à Wanford ; de là vers l’est, à Peterborough, aprùs 
avoir reçu à Wellingborough les eaux de lIse et, plus en aval, celles 
des ruisseaux Harper et Willow, sans compter nombre de petits 
ruisseaux peu importants. 

Sauf deux courbes décrites par le chenal à Guyhirn et à Wis- 
beach, la Nen, dont les circuits en aval Ă©taient mulliples, gagne la 
mer en ligne droite sur 48 kilomÚtres ; la dérivation de 9 kilomÚtres, 
en aval de Sutton Bridge, lui sert d’émissaire. 

Le bassin supĂ©rieur de la Nen, jusqu’à Peterborough, embrasse 
165 000 hectares, dont 6 500 étaient périodiquement submergés 
avant l’exĂ©cution des travaux. La pente rĂ©duite Ă  0",56 par kilo- 
mùtre, à Peterborough, c’est-à-dire à une distance de plus de 90 ki- 
lomĂštres de la mer, abaissait tellement le plan d’eau que les marĂ©es 
de vives eaux montaient à l'embouchure de 1",50 plus haut qu’à 
l’étiage, dans Peterborough ; mais Ă  partir de cette ville oĂč affluent 
les eaux Ă  volume variable de la vallĂ©e supĂ©rieure jusqu’à l'em- 
bouchure, la diffĂ©rence de niveau entre l’étiage et la laisse des 
mortes eaux n’était que de 0,11 par kilomĂštre. La pente qui en 
résultait était trÚs irréguliÚrement répartie ; toutefois, en enlevant 
les obstacles sur le parcours, et notamment dans la traversée de la 
ville de Wisbeach, elle pouvait ĂȘtre ramenĂ©e normalement Ă  0",06 
par kilomÚtre, ce qui eut abaissé le niveau, au pont de Wisbeach, de 
1,72; Ă  Guyhirn, de 2",94; et Ă  Northey Gravel (9 kilomĂštres en 
aval de Peterborough), de 3",25. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 199 

Dans ces conditions, rien ne pouvait ĂȘtre tentĂ© pour l’amĂ©liora- 
tion de la vallĂ©e supĂ©rieure de la Nen, avant d’avoir rectifiĂ© et amĂ©- 
lioré le cours en aval de Peterborough. Aussi le programme des 
travaux visés par la loi de 1852 comportait-il, en premier lieu, 
l’approfondissement de 0",60 de la riviùre jusqu’à Wisbeach, pour 
assurer au hit une déclivité réguliÚre de 0",11 par kilomÚtre ; en 
second lieu, l’agrandissement de la section transversale, de façon à 
donner 10 mĂštres de largeur au radier, avec des berges de 2 sur 1 
et une banquette de 12 mĂštres entre le bord de la berge Ă  l’étiage 
et la digue surĂ©levĂ©e ; en troisiĂšme lieu, la construction d’un nou- 
veau pont Ă  l’écluse de Dog Doublet, situĂ©e entre Guyhirn et Peter- 
borough ; en quatriÚme lieu, l'endiguement sur la rive méridionale 
du terrain des Washes (1450 hectares), réservé par Vermuyden 
comme lit d'inondation; enfin, l’appropriation du canal Morelon’s 
Leum au desséchement de ces Washes par une écluse à établir prÚs 
de Guyhirn. 

Pour l'exĂ©cution du programme, dont l’ensemble comprend trois 
sections : la premiĂšre et la seconde entre Peterborough et Nor- 
thampton, et la troisiĂšme, entre Peterborough et Wisbeach, la loi 
autorisait la perception d’une laxe de 95 fr. par hectare, et pour 
l'amĂ©nagement des canaux intĂ©rieurs, d’une taxe additionnelle de 
DIE. 

Le programme s’est complĂ©tĂ© depuis, par la construction d’une 
galerie voĂŒtĂ©e, destinĂ©e Ă  conduire les eaux de riviĂšre en amont, 
Ă  travers la nouvelle digue, pour les besoins des Washes dont le 
desséchement était décidé. Le Level du nord et celui du midi, de 
chaque cĂŽtĂ© de la Nen, dĂ©rivaient en effet des quantitĂ©s d’eau im- 
portantes, en Ă©tĂ©, pour l’abreuvage des bestiaux et l'irrigation des 
terres. La question des eaux douces acquérait dÚs lors une certaine 
gravité, par le fait que les travaux de régularisation, en facilitant le 
reflux de la marée à Peterborough, pouvaient rendre saumùtres les 
eaux jusqu'alors douces. Le rapport de l'ingénieur Stephenson, daté 
de 1848, avait dĂ©montrĂ©, il est vrai, que l’effet des marĂ©es, par le 
creusement du chenal, se manifesterait sur le niveau des eaux et 
non pas sur les eaux mĂȘmes. Sir John Rennie avait, de son cĂŽtĂ©, 
constatĂ© qu’à la distance de 28 kilomĂštres en amont du pont de 


200 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

Lynn, l'eau conduite par un aqueduc Ă  travers la digue, pour les 
besoins du bétail des Fens, était parfaitement douce. Or, les prises 
d’eau sur la Nen Ă©taient de quelques kilomĂštres encore plus Ă©loi- 
gnĂ©es de la mer que dans le cas de l’aqueduc de Lynn. Mais, c’est 
dans la ville de Wisbeach que se trouvaient les résistances les plus 
sĂ©rieuses pour assurer le service indispensable de l’eau douce; et 
c’est pour les surmonter qu’il fut rĂ©solu de creuser et d'agrandir le 
chenal tortueux, dans la traversée de la ville, plutÎt que de dériver 
la riviÚre par un raccourci, longeant un des cÎtés de la ville. La 
municipalitĂ© de Wisbeach s'Ă©tait d’ailleurs fortement opposĂ©e au 
raccourci qui l’eĂ»t privĂ©e des bĂ©nĂ©fices du port. Il fut donc dĂ©cidĂ© 
d'enlever le pont en pierre dans l’intĂ©rieur de la ville, et de le rem- 
placer par une seule arche de 26 mÚtres de portée, moyennant une 
dépense de 200 000 fr., de démolir les maisons en avancement sur 
le coude de la riviĂšre, d'Ă©largir le chenal en reculant les magasins, 
les berges et les appareils de navigation, d'approfondir le seuil en 
enlsvant les matériaux et les pierres amoncelés pour attemdre le lit 
mobile, et de construire des quais sur pilotis. La municipalité de 
Wisbeach, moyennant la perception d’une taxe de 0 fr. 05 c. par 
tonne sur la navigation, accepta de verser la somme nĂ©cessaire d’un 
million de francs qu’exigeait lexĂ©cution de ces travaux. 

Deux. districts furent appelés à bénéficier immédiatement des 
améliorations de Wisbeach. 

Le district Great and Lille Waldersea qu’administrait une com- 
mission, fondĂ©e sous les rĂšgnes de Jacques I‘ et de Georges IV, 
avait recours, pour le desséchement de 2 000 hectares, à une ma- 
chine Ă  vapeur dont la pompe Ă©levait 63 mĂštres cubes d’eau par 
minute, Ă  une hauteur variant entre 2",45 et 4",80, selon le niveau 
de la marée dans la Nen, moyennant une dépense annuelle de com- 
bustible et d'entretien de 7 500 fr. Par suite de la régularisation de 
Wisbeach, le district de Waldersea possédait désormais une chute 
naturelle de 1°,27 le dispensant de tout service de machine d’épui- 
sement; les commissaires acceplÚrent en conséquence de contribuer 
pour un montant de 137 000 fr. à la dépense totale. 

Le district de Redmore (730 hectares), desséché à deux niveaux 
par des moulins à vent, à raison d’une taxe de 10 fr. par hectare, 


LES DESSÉCHEMNENTS EN ANGLETERRE. 201 
payée aux commissaires de drainage, se trouvant dÚs lors à un ni- 
veau de un mÚtre plus élevé que le Waldersea, par rapport au plan 
d’eau de la Nen, les commissaires consentirent, en faveur du dessĂ©- 
chement par gravilalion, Ă  verser une taxe de 1 fr. 50 c. par hectare, 
pendant la période des travaux, et subséquemment, de 6 fr. 20 c. 


De Peterborough à Wisbeach (3° section). — Le devis du pro- 
gramme des travaux de la troisiĂšme section, Peterborough Ă  Wis- 
beach, avait été chiffré comme dépenses (travaux, terrains, bùli- 
ments et moitié des frais pour la loi du Parlement), à 3 750 000 fr., 
et comme contributions à 1 818 300 fr., réparties de la maniÚre 
suivante : 


Contributhontdetaivillerdenmisheach em UT 1 000 000 fr. 
Contribution de la ville de Peterborough , . . . . . . . . . . 25 000 
Contributiontdumord Lever SAONE ENORME 112 500 
Contribution de la vallée supérieure de la Nen, à raison de 3 fr. par 
hectare, pour 6 509 hectares, capitalisée à . . . . . . . . . »05 800 
Contribution de Ja commission du Bedford Level. . . . . . , . 37 500 
Contribution du district de Waldersea . . . . . . . . . . . : 137 500 
HD MAPS ET eat 1 818 300 fr. 


Pour comprendre quelles difficultĂ©s il fallut vaincre, avant d’apai- 
ser les conflits soulevĂ©s par les diverses juridictions et d’établir 
l'assiette des contributions à verser par les divers intéressés, il suf- 
fira de rappeler que, pour faire rejeter le Bill du Nen Valley drai- 
nage, 24 pétitions furent présentées et défendues avec le plus grand 
acharnement devant la Chambre des Communes, et 9 devant la 
Chambre des Lords. 

La ville de Wisbeach refusait non seulement de participer aux 
dépenses pour la somme de 1 250 000 fr. à laquelle elle était taxée, 
mais encore de laisser exécuter aucuns travaux de nature à modifier 
la navigation et le commerce sur la riviùre. C’est seulement sur les 
injonctions de l’AmirautĂ©, la menaçant d’une dĂ©pense de 50 000 fr. 
par an pour l'entretien de la Nen, et sur la déclaration des ingé- 
nieurs fixant à 1 750 000 fr. les dépenses de rectification, que la 
ville finit par souscrire un million. 

La commission du Bedford Level repoussait toute ingérence des 


202 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


commissaires de la Nen Valley placée dans sa juridiction, et refu- 
sait toute participation aux dépenses; mais elle dut céder à son tour, 
en raison des avantages qu’elle retirait de la digue du canal More- 
ton’s Leam longeant les Washes et protĂ©geant son pĂ©rimĂštre. 

La commission du nord Level et le duc de Bedford, rejetant 
toute contribution, n’admirent pas que la surveillance de la digue 
limite leur fĂŒt enlevĂ©e. [ls exigĂšrent des clauses assurant le service 
de l’eau douce et la navigation par voie d’une Ă©cluse, jusqu’à Thor- 
ney. Les derniers points furent concĂ©dĂ©s, mais ils n’en furent pas 
moins tenus de verser leur quote-part pour les travaux de consoli- 
dation de la digue des Washes, et pour les autres avantages dont 
ils profitaient. 

Les districts de Waldersea et Redmore durent retirer leurs plaintes 
fondĂ©es sur les sacrifices qu'ils avaient dĂ©jĂ  faits pour l’établisse- 
ment de machines à vapeur et de canaux, créant un passif de plus 
d’un million et demi de francs. 

Les commissions de drainage de Wisbeach Hundred et d’autres 
districts, n'ayant plus Ă  entretenir de digues, consentirent Ă  ne payer 
la redevance annuelle, sur base d’une moyenne des huit derniùres 
années, que pour une partie de leur périmÚtre; tandis que les arma- 
teurs de Sutton Bridge et de Wisbeach, les conservateurs du canal 
de Wisbeach, des routes à péage, etc., réclamÚrent contre toute 
taxe nouvelle sur la navigation et sur la circulation routiĂšre. 

Les compagnies de chemins de fer intervinrent Ă  leur tour pour 
exiger des compensations, Ă  cause du changement de direction et 
d'emplacement des ponts, sous le rapport des embarcadĂšres Ă  quai. 

Les commissaires du centre Level, d'accord avec ceux de la navi- 
gation de la riviĂšre Nen, plaidĂšrent enfin pour obtenir le droit de 
dĂ©river de l’eau douce, tout en maintenant la navigation Ă  travers 
l’écluse Standground, en aval de Peterborough, sans payer aucune 
indemnitĂ©, et ainsi de suite, pour beaucoup d’autres protestataires. 


Northampton à Peterborough (1"° el 2° sections). — Le programme 
des travaux à exécuter dans la vallée supérieure de la Nen devait 
soulever une foule de contestations non moins graves, au sujet des 
droits de navigation et des riverains, meuniers ou agriculteurs, qui 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERNE. 203 


invoquaient le bienfait des sabmersions fertilisantes; nous ne nous y 
arrĂȘterons pas. Les travaux finalement inscrits dans la loi, pour ĂȘtre 
exĂ©cutĂ©s en totalitĂ©, ou en partie, mais seulement aprĂšs l’achĂšve- 
ment de ceux de la troisiĂšme division (Peterborough Ă  Wisbeach), 
c’est-Ă -dire aprĂšs l’annĂ©e 1859, comprenaient la rĂ©gularisation de la 
riviÚre et le desséchement de 6 500 hectares le long des rives. Leur 
compte est donné ci-aprÚs : 


Passif. # Actif, 
r. 
Devis des travaux. . . . . 2044850 Taxe de {5 fr. 40 c. par hec- Fr. 
TETTANSE Are 800 000 tare sur 6 550 hectares . . 101 870 
Frais de l'Acé du Palemene Contribution annuelle de la ville 
bin 125 000 de Northamplon . . . . . 1 000 
Navigation en amont. . . . 100 000 Droits de navigation Ă  raison de 
Navigation en aval. . . . . 50 000 2 fr. 50 c. par an sur 25 000 
3 119 850 tonnes . 62 500 


164 870 


IntĂ©rĂȘt annuel Ă  4 p. 100. 124 794 on, 
A retrancher intĂ©rĂȘt annuel. 124 794 


Reste annuellement, . 40 076 


Compte gĂ©nĂ©ral. — Y est intĂ©ressant de mettre en regard du 
compte des dépenses et des contributions, pour les travaux à exé- 
cuter dans les trois districts, les ressources annuelles sur lesquelles 
pouvait compter la commission du Nen Valley drainage. Ces res- 
sources Ă©laient les suivantes : 


Droits de O fr. 05 c. sur 170 000 tonnes au port de Wisbeach . . . . 8 00 fr. 
Droit de 10 fr. sur 1 510 hectares de terre des Washes, soumis au des- 
sĂšchement: 22:07 TR SO UE PTE RESTO 0 
Droit sur les prairies Ă  deb PT RE M ET do er D pr ASE 200 
PĂ©age au pont Dog-in-a-Doublet . . . . . SL Che NE 5 000 
Droits de navigation sur 40 000 tonnes Ă  0 fr. 65 (OA ET ER Eee 26 000 
Augmentation de 50 p. 100 sur la navigation. , . . 12 500 
Taxe de 7 fr. 70 c. par hectare sur 688 hectares du district de RĂ©dintte, 5 300 
Foret droirdmnAurersur les dignes... 7 LS Pere 5 000 
Forfait pour l'entretien des digues nord et sud, . . . . . . . . . . 18 500 
OP et Mets 2 a oc [19 090 
À dĂ©duire : 
IntĂ©rĂȘt Ă  4 p. 100 sur la diffĂ©rence de 1 931 700 fr. entre les dĂ©penses 


etrlesérecetles duntroisiÚme dISMICL EME ais EN SIM EE 77 268 


Reste pour amortissement, entretien, frais divers, etc. . 41 782 


204 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


La dépense totale étant prévue à 6 875 000 fr. el la recette an- 
nuelle Ă  350 000 fr., le revenu eĂŒt Ă©tĂ© lĂ©gĂšrement supĂ©rieur Ă  
9 p. 100 : mais dĂ©jĂ  les travaux n’ayant pas Ă©tĂ© achevĂ©s l’annĂ©e 
prĂ©cĂ©dente dans la vallĂ©e supĂ©rieure, comme l’exigeait Ja loi, les 
commissaires durent solliciter du Parlement, en 1861, un nouveau 
Bill pour augmenter de 2 millions de francs le capital nécessaire, 
la ville de Wisbeach consentant Ă  augmenter sa quote-part de 
625 000 fr. 

Le principe mĂȘme sur lequel le Parlement a basĂ© le choix des 
commissaires esl une garantie que les intĂ©rĂȘts pĂ©cuniaires sont sau- 
vegardés, dans les commissions, par des hommes compétents. La loi 
de la Nen a commencé par désigner 37 membres, divisés en trois 
groupes ; mais aussitÎt que les terres sujettes à impÎt ont été dési- 
gnées et vérifiées comme quotité, tout propriétaire de 20 hectares 
taxés à été de droit membre de la commission, ou a pu déléguer 
un commissaire. Tout propriétaire de 80 hectares a pu en nommer 
deux, dont lui-mĂȘme Ă©tait l’un. En cas de vacance, les propriĂ©taires 
convoqués en assemblée générale (chaque titulaire de 5 hectares 
ayant droit Ă  une voix, jusqu’à concurrence de 5 voix) ont eu Ă  dĂ©si- 
gner un commissaire, propriétaire d'au moins 9 hectares. Outre les 
reprĂ©sentants des intĂ©rĂȘts fonciers et agricoles”, la municipalitĂ© de 
Wisbeach a le droit d’élire 4 commissaires ; la commission du Bed- 
ford Level, 2 ; la commission du nord Level, 2; les commissions de 
Waldersea et de Wisbeach Hundred, chacune 2; les municipalités 
de Northampton et de Peterborough, chacune 1, et ainsi de suite. 
Chaque intĂ©ressĂ© a voix au chapitre, non seulement pour l’exĂ©cution 
de la loi et la répartition des dépenses, mais encore pour la fixation 
des taxes. 


1. Les terres comprises dans la spécification du Nen Valley act sont les suivantes : 


HECTARES. 

Prairies le long de la riviĂšre entre Peterborough et les au delĂ  
de Northampton (vallée supérieure). . . . 12162090 
Wash lands (lit d'inondation entre Peterborough ct Guyhir n)PUL 510 
Distr'et:déWaldersoa Pers LOL PONS EURE 
Districtide RedmOre M ANA CPC EN RPRE 688 


Total: SP ESRER E STONSE 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 205 


3. — DessĂ©chement des Fens en dehors du Great Level. 


La description des Fens du Cambridge serait incomplĂšte si nous 
omettions de signaler ceux qui se drainent en dehors du Great Level 
de Bedford, Ă  savoir : les Fens Downham, Bardolph, Magdalen et 
Marshland avec ses annexes. 

Le Downham Fen, d'une contenance de 650 hectares, est desséché 
en vertu d’une loi spĂ©ciale de 1802. Ce sont des moulins Ă  vent, sur 
la digue de Well-Creek, qui dĂ©versent les eaux, par l’écluse Salters 
lode, dans l’Ouse. Le remplacement des moulins par unĂ© machine Ă  
vapeur a Ă©tĂ© tentĂ©,-mais les frais d’épuisement Ă©taient trop Ă©levĂ©s, en 
raison de la faible surface Ă  dessĂ©cher. L’inconvĂ©nient des moteurs 
Ă  vent, c’est l’inondation inĂ©vitable dans les saisons pluvieuses, car 
les moulins restent alors inactifs, faute de vent. On cultive dans ce 
Fen du blĂ© et de l’avoine, et l’on fume le sol avec des tourteaux, 
des os et des coquilles. 

Le Bardolph Fen, situé au nord du Fen précédent (2 120 hec- 
tares), est également asséché par deux moulins déversant les eaux 
dans l’Ouse, entre Downham et Stow Bridge. Le sol est formĂ©, sur 
une Ă©paisseur de 1",50, de mousses tourbeuses que l’on a amendĂ©es 
par l'argile et que l’on cultive sans jachùres vertes, en navette, en 
avoine et en blĂ© sur blĂ©, Ă  l’aide d'engrais abondants. 

Le Magdalen Fen, au nord-est du Bardolph Fen, couvre environ 
1 600 hectares du Marshland. Depuis 1833, le desséchement de ce 
Fen, amĂ©liorĂ© par l'emploi d’une machine Ă  vapeur de 40 chevaux, 
a modifié absolument les conditions de la culture. Le sol, composé 
de tourbe noire reposant sur des lits d'argile et de gravier, a été 
drainé assez profondément pour rendre le sous-solage praticable ; 
ce qui fait regretter la tourbe jadis consommĂ©e par l’écobuage, l’ar- 
gile étant devenue prédominante dans les terrains écobués. 

L’assolement comprend 7 rotations : 1° navette ; 2° avoine ; 3° blĂ© ; 
4° fourrages, dont moitié est fauchée et le regain est pùturé; 5° blé, 
moitiĂ© du fourrage Ă©tant pĂąturĂ© la mĂȘme annĂ©e ; 6° fĂšves ; 7° blĂ©. 

La poudre d’os, Ă  raison de 10 hectolitres par hectare, additionnĂ©e 
de cendres et de guano, est la fumure ordinaire ; le bétail reçoit des 


206 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


tourteaux en hiver. Il n’est pas rare, dans les terres bien fumĂ©es, de 
récolter 45 et 47 hectolitres de froment par hectare. 

Le Marshland Fen, placĂ© Ă  l’ouest du prĂ©cĂ©dent, s'Ă©tend vers 
Outwell ; il est sĂ©parĂ© du Bardolph Fen, au midi, par l’ancien canal 
Podike. DessĂ©chĂ© en vertu d’une loi spĂ©ciale de Georges IT, ce dis- 
trict se rĂ©partit entre 11 communes. Il y a quatre-vingts ans, l’épui- 
sement des 2 900 hectares s’effectuait à l’aide de quatre moulins 
puissants ; aprĂšs le dessĂ©chement gĂ©nĂ©ral, il n’en exigea plus que 
deux, déversant les eaux dans le canal Smeath and Fen, et de là, 
par l’écluse du Marshland, en amont dans la coupure Eau Brink 
Cut. Sans l’opposition des propriĂ©taires communaux, les travaux du 
centre Level, comprenant ceux de l’émissaire en aval de Lynn, au- 
raient permis de dessĂ©cher ce Fen par gravitation d’une maniĂšre 
complĂšte. 

Le sol formĂ© de tourbe noire sur une grande Ă©paisseur, s’est con- 
densĂ© au point que l’on peut atteindre par le sous-solage la couche 
d'argile, qui se trouve de 0,20 jusqu’à 0",40 en profondeur. L’as- 
solement y est le mĂȘme que celui des bonnes terres de marais ; les 
turneps remplacent la navette avec avantage. 

Wellmoor Fen, Ă  Outwell; Broad and Short Fens, tous deux 
limitrophes du Marshland, ont été compris aussi dans le desséche- 
ment de ce dernier, aux termes de la loi de Georges IIT (3° année). 


4. — DessĂ©chement des Fens du Lincolnshire. 


A l’exception du pays de Gedney et des autres communes limi- 
trophes, situées au nord du collecteur Sud-Holland, qui le draine 
directement, sur une longueur de 12 kilomĂštres, dans le canal Lut- 
lon leam, et du Porsand Fen, dont le desséchement, dépend de la 
commission du nord Level (Cambridge), tous les Fens du Lincoln 
sont administrés, au point de vue du desséchement par des auto- 
rités spéciales, classées en districts, ayant sous leur juridiction les 
deux riviùres qui servent d’artùres principales: le Welland, avec son 
affluent le Glen, et le Witham. 

Le vaste district des Fens et des Marshes du Lincoln, indépendant 
du territoire du Great Level de Bedford, est compris entre les villes 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 207 


de Lincoln, Wainfleet, Deeping et l'estuaire de la Nen. Il mesure 
38 kilomĂštres dans sa plus grande largeur, entre Bourn et la cĂŽte, 
Ă  Long Sutton, et 19 kilomĂštres dans sa plus petite largeur, entre 
Helpringham au pied des Wolds et Foss Dyke Wash. Sa contenance 
est évaluée à 145 000 hectares, pour une longueur de 56 kilomÚtres 
environ, du nord au sud. Sur plus de 40 000 hectares, le sol est 
formé de tourbe. 

Les deux riviĂšres Welland et Witham, comme nous l'avons fait 
déjà remarquer, débouchent dans le Wash à quelques kilomÚtres de 
distance, au milieu des sables du littoral, et déversent, pour ainsi 
dire au mĂȘme point, les eaux d’un bassin qui couvre 330 000 hec- 
ares. 

Laissant de cÎté les Marshes pour les examiner avec ceux du 
Cambridge, nous décrirons successivement les Fens du Lincoln. 


Deeping Fen. — Le territoire placĂ© au sud-ouest du comtĂ©, entre 
Spalding et Deeping, bordĂ© au midi et Ă  l’est par la riviĂšre Welland, au 
nord par l’affluent Glen et par le district Sud-Holland, comprend 
10 000 hectares environ ; c’est le Deeping Fen qu’une compagnie 
d'entrepreneurs (adventurers), sous le rĂšgne de Charles If, obtint 
de dessécher, aux conditions fixées par une charte spéciale datée 
de 1661. Les travaux de la compagnie eurent pour objet l’élar- 
oissement et l’approfondissement de la section du Welland, depuis 
Waldram Hall jusqu’à l'embouchure ; la construction d’un canal, le 
Staker Drain, sur une largeur de 6 mÚtres, pour dégager la riviÚre 
Glen, et de deux autres canaux, Hills Drain et Vernall's Drain, 
devant servir de collecteurs pour les eaux de desséchement ; enfin, 
l’achùvement du canal Exeler Drain, à partir de Cowbit Tunnel jus- 
qu'Ă  la mer, et l'Ă©tablissement d’une grande Ă©cluse sur le Welland, 
prĂšs de Spalding. 

A la suite de ces travaux, le Fen assĂ©chĂ© put ĂȘtre mis en culture ; 
mais les troubles politiques survinrent, les paysans se révoltÚrent, 
détruisirent ou abandonnÚrent les digues, de façon que le territoire, 
malgré les moulins à vent construits pour épuiser les eaux, fut de 
nouveau submergé pendant l'hiver. 


En 1801, une loi spéciale (Zaclosure Act) autorisa les communes 


208 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


de Spalding, Deeping, Pinchbeck, etc., à reprendre le desséchement 
du Fen, avec facultĂ© de l’enclĂŽturer et de le lotir, en tant que les 
terrains appartenaient aux communes. Deux collecteurs, le nord 
et le sud Drove furent Ă©tablis pour Ă©couler les eaux de plus de 
40 moulins, sans que les conditions générales du drainage se fussent 
sensiblement amĂ©liorĂ©es. C’est Ă  peine si, en dehors des pĂąturages, 
par des printemps suffisamment secs, les fermiers pouvaient ense- 
mencer de l’avoine, de la fin d’avril à la fin de mai, et obtenir une 
récolte avant l'automne. 

En 1824-1825, une loi additionnelle autorisa les communes Ă  
substituer aux moulins Ă  vent des machines Ă  vapeur qui furent 
installées à Pode Hole, à 3 kilomÚtres de Spalding. 

Malgré l'introduction des machines à Pode Hole, les collecteurs 
n'étant pas assez profonds, les moulins continuërent à fonctionner 
jusqu’en 1851, quand il fut rĂ©solu d'approfondir les canaux de 0,60 
et d'ouvrir un nouveau canal à l’ouest du Fen. Dùs lors, les deux 
machines Ă  vapeur ont suffi pour maintenir l’épuisement des 10000 


hectares, Ă  savoir : 


HECTARES. 
Adventurers lands (terres des entrepreneurs). . . . . . À 000 
Freelonds:(Lerreselibres) ARS TEE EEE ER 2 000 
Common lands (terres commnnales) . . , . . . . . . . 4 000 
LORIE ut eu niet ann AE UNS EE 10 000 


Les eaux de cette surface sont rejetées dans le Vernatts Drain 
qui débouche dans la riviÚre Welland, et 11 kilomÚtres plus loin, 
dans le réservoir éclusé de Spalding. Une des conséquences du des- 
sĂ©chement a Ă©lĂ© d’abaisser le niveau gĂ©nĂ©ral de Deeping Fen de 
0",60 environ; ce qui a permis de drainer le sous-sol Ă  0",40 plus 
bas qu’on n'aurait pu l’espĂ©rer, pour le plus grand bien des cul- 
tures. 

Le sol de Deeping Fen est formé principalement de tourbe, mais 
la consistance de cette tourbe et sa fertilité varient suivant que le 
gravier ou les argiles bleue et rouge du sous-sol ont été mélangés 
plus ou moins complĂštement avec la couche arable. Le long du 
Welland, les alluvions recouvrent la tourbe ; à l’ouest, la tourbe 
noire repose sur l'argile. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 209 


L’assolement en cours comprend # ou à rotations, à savoir : 
1° navettes, turneps, mangolds ou carottes ; % blé; 3°trÚfle ou 
herbes ; 4 blé; 95° blé, mais plus souvent avoine. Le froment est 
remarquablement lourd et l’avoine est de bonne qualitĂ©. 

Les moutons à longue laine sont au parcage, puis engraissés avec 
de la navette. On donne des engrais aux céréales, sauf au blé qui 
suit la navette, aprÚs avoir reçu une fumure de poudre d'os, de 
cendres ou de superphosphate. Le drainage Ă  l’aide de fossĂ©s et de 
tuyaux, Ă  une profondeur de 0,75, a donnĂ© d’excellents rĂ©sultats 
dans les terrains tourbeux dont la consistance a été accrue par la 
culture des céréales et des fourrages. 

Au sud de Spalding, les lits d'inondation du Welland, Crowland 
et Cowbit Washes, s'Ă©tendent sur une longueur de 8 kilomĂštres. 
Depuis que la riviĂšre a Ă©tĂ© rĂ©gularisĂ©e, ces rĂ©serves n’ont plus 
aucune ullité, mais elles fournissent un foin trÚs fin et trÚs re- 
cherché. 


Thurlby Fen. — Ce Fen de forme triangulaire est bordĂ© au 
nord par Bourn Eau, canal de navigation qui Joint la riviĂšre Glen Ă  
Tonnge-End, et à l’ouest par le Car Dyke, canal construit par les 
Romains pour recueillir les eaux des plateaux supérieurs entre Pe- 
terborough et un autre canal, le Foss Dyke. Le Car Dyke, sur tout 
son parcours, sépare les hautes terres de celles des Fens et des 
Marshes. 

Thurlby Fen, d’une contenance de 800 hectares, a Ă©tĂ© dessĂ©chĂ© 
à part, à l’aide d’un canal passant sous la riviùre Glen, qui conduit 
les eaux dans le Counter Drain, parallĂšle Ă  la riviĂšre, et traverse 
Deeping Fen jusqu'aux machines de Pode Hole. Quoique le sol se 
trouve à un niveau inférieur à celui de Bourn Eau et du Glen, il est 
plus Ă©levĂ© que celui du Deeping Fen. FormĂ© d’une couche trĂšs Ă©paisse 
de tourbe noire, il n’a Ă©tĂ© rĂ©ellement dessĂ©chĂ© que depuis l’achĂšve- 
ment des travaux de l’embouchure du Welland, qui ont abaissĂ© le 
plan d’eau gĂ©nĂ©ral et spĂ©cialement celui du Vernatl's Drain. 


Pinchbeck Fens. — À l'ouest de Pode Hole, bordĂ© par le Deeping 
Fen et la riviĂšre Glen, le Pinchbeck Sud Fen, d'une contenance de 


ANN. SCIENCE AGRON, — 1893. — 1, 14 


210 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


700 h2clares, est desséché par une machine à vapeur de 20 che- 
vaux, Ă©tablie en 1830, qui rejette les eaux dans le Vernall's Drain. 

Depuis ce Fen, jusqu’à la jonction du Glen et du Welland, s’éten- 
dent le Spalding et Pinchbeck Fen, d’une contenance de 1 500 à 
2 000 hectares. Quoique trĂšs rapprochĂ© de l’émissaire, ce territoire 
fut dĂ©finitivement assaini aprĂšs l'Ă©tablissement d’une machine de 
20 ch2vaux, qui relĂšve les eaux du Blue Gout Drain, desservant le 
district, et les rejette dans la riviĂšre Glen. Le sol, formĂ© d’un loam 
assez mince, mais fertile, est trÚs bien cultivé par les communes 
propriétaires ; le Spalding Fen possÚde notamment de magnifiques 
pĂąturages dans la direction du Foss Dyke. 


a) Moteurs et machines élévatoires. 


Les deux machines de Pode Hole ont été les premiÚres établies 
dans le district des Fens ; elles méritent à cet égard quelques détails. 
L'une, de 80 chevaux-vapeur, et l’autre de 60, sont logĂ©es sous le 
mĂȘme abri. La roue mue par la machine de 80 chevaux, de 8",50 
de diamĂštre, avec palettes de 1",50 de largeur, devait plonger de 
1,50 ; mais en raison du tassement du sol, elle plonge seulement 
de 0",85. L'eau est élevée à 2",15 de hauteur, à raison de 160 mÚ- 
tres cubes par minute. La roue mue par la machine de 60 chevaux 
a 9",15 de diamĂštre, 1,50 de largeur et plonge de 0",35 plus bas 
que la précédente, soit à 1,20, ce qui lui permet d'élever 140 mÚ- 
tres cubes par minute. L’élĂ©vation totale de 300 mĂštres cubes par 
minute représente une consommation de houille de 1 200 tonnes 
par an. La figure 1 indique, en coupe verticale, le systĂšme de roue 
hydraulique usitĂ© dans la plupart des Fens : À, roue de 10 mĂštres 
de diamĂštre, faisant 3 tours et demi par minute ; palettes de 1,52 
de longueur et de largeur variable (0",50 à 1°,60) ; B, coursier en 
maçonnerie en arc de cercle ; G, pignon denté sur l'arbre de la ma- 
chine, engrenant avec une roue dentée latérale ; D, collecteur prin- 
cipal; profondeur 2",75. Le niveau d’eau est de 0",80 infĂ©rieur Ă  
celui du terrain, quand la roue plonge en plein, soit de 1",53, et il 
reste 0",30 de profondeur sous les palettes pour livrer passage aux 
herbes et autres dĂ©tritus ; E, riviĂšre ; l’eau dans la riviĂšre est de 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 211 


2*,43 plus élevée que dans le collecteur, soit à 1",53 au-dessus du 
niveau du sol ; F, digue ; G, vannes pour empĂȘcher le refoulement 
des eaux de la riviĂšre sur la roue, quand la machine est au repos. 


Fig. 1. — Roue d’épuisement (Fens du Lincoln). 


Les roues Ă  palettes et les pompes ne sont pas les seuls engins 
employés dans les Fens pour l'épuisement des eaux par les machines 
Ă  vapeur. On trouve Ă©galement un certain nombre d’écopes du sys- 
tÚme Fairbairn, dont la figure 2 indique les détails. 


Fig. 2. — Ycope à vapeur, systùme Fairbairn (Fens du Lineoln). 


L’écope À tourne autour d’un tourillon B, placĂ© sur la digue C du 
canal [, dans lequel doit ĂȘtre Ă©levĂ©e l’eau du drain J. A son autre 
extrĂ©mitĂ©, l’écope est rĂ©unie en D Ă  la bielle E du balancier F de la 
machine Ă  vapeur, qui pivole en G sur un bĂąti de fondalon, H. GrĂące 


212 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Ă  son mouvement alternatif, ce balancier abaisse l’écope au-dessous 
du niveau de l’eau du drain, oĂč elle se remplit par le clapet K, et 
la relÚve, pour lui faire déverser son contenu par le bec en B. La 
longueur donnĂ©e Ă  la bielle permet, pour une mĂȘme course du 
cylindre, de faire varier la profondeur Ă  laquelle l’écope plonge 
dans le canal collecteur. 

L’écope Fairbairn de 7",62 de longueur sur 9°,15 de largeur est 
pourvue d’une cloison longitudinale qui donne de la rĂ©sistance aux 
parois et un appui aux clapets. Établie en tîle de chaudiùre, la cloi- 
son la divise en deux parties Ă©gales. On Ă  calculĂ© que pour â€˜Ă©lever 
27 mùtres cubes d’eau par coup de piston, avec une force de 60 che- 
vaux-vapeur, elle consomme 1,36 de houille par heure et par force 
de cheval”. 

Au fur et à mesure que des progrÚs ont été réalisés dans la cul- 
ture des Fens, les moteurs et les machines élévatoires se sont éga- 
lement perfectionnés. 

Les moulins à vent, mtroduits par les Hollandais et représentant 
un travail utile moyen de 60 jours dans l’annĂ©e, ont Ă©lĂ© remplacĂ©s 
peu Ă  peu par les machines Ă  vapeur. Les roues Ă  palettes, aussi 
bien que les Ă©copes, mues par les machines Ă  vapeur, ont fait place 
aussi, peu à peu, aux pompes centrifuges. Ge n’est pas que, dans 
maints endroits, on n'aurait pu combiner trĂšs avantageusement le 
moulin à vent et la machine à vapeur pour diminuer le coût de cette 
derniĂšre, et que, dans d’autres localitĂ©s, on n’eĂ»t pas dĂč renoncer 
au moteur Ă  vapeur, pour conserver les moulins Ă  vent des derniers 
systÚmes. C'était là une question de coût, de rendement utile et 
d'Ă©conomie. 

La roue à palettes est la forme la plus simple que l’on puisse 
donner à une machine élévatoire ; trÚs appropriée à de petits des- 
sĂ©chements, elle peut ĂȘtre mue indiffĂ©remment par le vent, par 
traction animale, par une locomobile ou par une machine fixe. Son 
dĂ©faut principal consiste en ce qu’elle ne peut s'adapter aux varia- 
ions de niveau qui sont la conséquence des crues, pas plus pour la 
prise que pour la décharge des eaux. Elle ne peut pas marcher au 


1. A. Ronna, les Irrigalions, t. I, p. 680. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 213 


delà d’une certaine vitesse, et si elle plonge trop, elle travaille mal. 
Enfin, elle est plus encombrante qu’une pompe et exige des fonda- 
tions plus coûteuses. 

Les deux machines Ă  haute pression et Ă  condensation, qui ont 
été installées pour le desséchement de East Fen (district n° 4 du 
Witham dont 1l est parlé plus loin), font mouvoir des pompes cen- 
trifuges du systĂšme Appold ; le cylindre a 2,15 de diamĂštre, et la 
course de piston 1°,52 de longueur. Ces pompes peuvent élever 
700 mùtres cubes d’eau par minute *. 

Pour une machine de 44 chevaux de force et une course de 3",35, 
une pompe de 1",01 de diamĂštre, avec 180 tours, accomplira le 
mĂȘme travail qu’une roue Ă  palettes de 12",20 de diamĂštre, avec 
une largeur de 0",45, tournant à 4 tours et demi. La différence 
n’est pas seulement dans les proportions relalives des deux appa- 
reils ; car la pompe centrifuge utilise complĂštement la puissance de 
la machine ; si la course dĂ©croĂźt, le volume d’eau augmente, d’une 
maniĂšre automatique, sans modification sensible de vitesse et sans 
surveillance. De plus, elle maintient la surface desséchée avec moins 
de dépense de force et de combustible que la roue à palettes. 

D’autres pompes centrifuges à vapeur, notamment celles des sys- 
tÚmes Gwynne et Easton, se sont substituées, dans les trente der- 
niĂšres annĂ©es, aux moulins Ă  roues, partout oĂč cela Ă©tait Ă©cono- 
miquement possible. Les grandes pompes Easton, Ă©tablies Ă  Lode 
Bank, prĂšs de Boston, comme celles Ă©tablies aux Ă©cluses de Zui- 
derzĂ©e, en Hollande, dĂ©bitent 670 mĂštres cubes d’eau par minute 
à une hauteur de 2",70. Les pompes Gwynne se sont vulgarisées, 
depuis celles du diamĂštre de 0",90, qui Ă©lĂšvent 150 mĂštres cubes 
par minute à 3 mùtres de hauteur, jusqu’à celles de 0",35 de dia- 
mĂštre, qui Ă©lĂšvent 16 mĂštres cubes Ă  2 mĂštres. 

L'Ă©conomie des pompes Ă  vapeur, par rapport aux moulins, est 
manifeste quand on compare la situation d’un dessĂ©chement de 4500 
hectares, exigeant 30 moulins, outre le service de 30 Ă  40 hommes 
(au prix de 825 000 fr.), et celle du mĂȘme dessĂ©chement opĂ©rĂ© par 


1. Wheeler, History of the Fens of Lancashire (Trans. Inst, civil Engineers, 
vol. XXXIII), et A. Ronna, les Irrigaltions, t. 1, p. 684. 


214 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


# machines avec pompes centrifuges à vapeur (ayant coûté ensemble 
250 000 fr.), desservies par 8 hommes, et assurant l’épuisement en 
tout temps, mĂȘme dans le cas de hautes eaux exceptionnelles. 

La comparaison établie entre six districts des Fens, desséchés 
respectivement Ă  l’aide de pompes et de roues, a montrĂ© que par 
unité de force, la surface desséchée par les pompes est de 1 000 
Ă  1 298, tandis que par les roues, elle est de 600 Ă  830. On peut 
compter d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale sur une force de ? chevaux et demi 
à à chevaux trois quarts, pour le desséchement de 100 hectares de 
Fens ou de marais stagnants, à une profondeur de 3 mùtres ‘. 


b) La riviĂšre Witham. 


Black Sluice Level. — Le dessĂ©chement qui porte le nom de 
Black Sluice correspond comme importance au Great Level de 
Bedford. Il embrasse toutes les terres qui Ă©coulent leurs eaux dans 
la riviĂšre Witham, jusque dans la passe de Boston, par le canal 
principal South Forty foot Drain, et s'Ă©tend sur 32 kilomĂštres entre 
Bourn Eau au midi, le Car Dyke à l’ouest, Kyme Eau au nord et 
le Old Haminond Beck à l’est, qui draine le Holland Fen. 

Le canal South Forty foot reçoit les eaux de 26 000 hectares 
soumis Ă  la taxe de dessĂ©chement, et d’un nombre Ă  peu prĂšs Ă©gal 
d'hectares qui ne paient aucun impĂŽt ; le Hammond Beck, dont la 
construction remonte Ă  une trĂšs ancienne date, coule parallĂšlement 
au canal précédent ; il complÚte, avec le Risegale Eau, prÚs de Gos- 
berton, et une foule de lodes ou drains dirigĂ©s vers l’est, le des- 
séchement des terres au midi. Dans les terres situées au nord, le 
Heckington Eau et le Gill Dyke se déversent dans le Witham, à 
l’écluse de Langerick, tandis que le Holland Dyke et le Skerth 
s’écoulent dans le Hammond Beck. 

Sous le rĂšgne de Charles [*", Robert, comte de Linsey, lord cham- 
bellan d'Angleterre, obtint la concession du desséchement de 14000 
hectares compris entre la riviĂšre Glen et KyĂżme Eau, moyennant 
l'abandon qui lui Ă©tait fait, ainsi qu’à ses associĂ©s, de 10 000 hec- 


1. Heathcote, Cambridge Press, 24 novembre 1877. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 219 


tares. Le desséchement fut effectivement opéré et coûta 1150 000fr,; 
les terrains furent enclÎturés et allotis aux colons dont le Lord fit 
construire les habitations, les bĂątiments d'exploitation, et compter 
les avances pour le cheptel et le matĂ©riel. É 

Le canal principal Ă©tabli en 1638 par le comte Linsey suivait Ă  
peu prĂšs le mĂȘme tracĂ© que le South Forly foot actuel. 

Trois annĂ©es plus tard, le peuple s’étant mis en rĂ©volte, dĂ©truisit 
les canaux, les écluses et les levées ; les récoltes furent abandonnées, 
et le district ne tarda pas Ă  se couvrir de marais. Le Linsey Level, 
aux mains des populations factieuses, avait subi le mĂȘme sort que 
celui de Deeping Fen. 

Tant que le Witham ne fut pas rectifié, la triste situation du des- 
séchement se maintint, d'autant plus qu'un nouveau canal, North 
Forty foot, creusé en 1720 pour drainer le Holland Fen, avait dé- 
tournĂ©, en amont de Boston, des volumes d’eau considĂ©rables, qui 
se dĂ©chargeaient auparavant Ă  l’écluse de Langerick, et Le chenal de 
la riviĂšre s’obstruait chaque jour davantage par les marĂ©es. 

C’est en 1762 que la premiĂšre loi pour la rĂ©gularisation du Wit- 
ham fut sanctionnée. Les travaux à exécuter, aux termes de cette 
loi, comprenaient : le creusement d’un nouveau chenal et la cons- 
truction d’une Ă©cluse maĂźtresse Ă  Boston ; l'Ă©tablissement d’un nou- 
veau chenal, ou coupure, entre ladite Ă©cluse et Anthony Gout, puis 
jusqu’à Langcrick Ferry et finalement jusqu’à Chapel Hill, sur une 
longueur de 18 kilomĂštres environ, permettant de rectifier 14 coudes 
successifs de la riviùre; enfin, de Chapel Hill jusqu’à Lincoln, le 
curage, l’approfondissement et l’endiguement du Witham. 

La grande écluse de Boston, formée de 4 sas de 7",30 de largeur, 
dont trois pour l'écoulement des eaux de desséchement et un pour 
la navigation, fut inauguré: en 1766 ; les autres travaux furent 
achevés en 1788, au prix de 1 million et demi de francs, fournis 
par les taxes et les droits de navigation. Le Linsey Level avait bien 
Ă©tĂ© compris tout d’abord parmi les districts imposĂ©s, mais l’écluse 
Langerick ayant été détruite, l'amélioration promise par les travaux 
du Witham ne se réalisa pas, et il fallut obtenir une autre loi pour 
ce district. 

La loi de régularisation du Witham (Witham Act, 1762) visait le 


216 _ ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


desséchement de 40 000 hectares, répartis en 6 districts, que nous 
dĂ©crivons dans l’ordre topographique. 


Sixiùme district. — Le Linsey Level, aussi bien que le Holland Fen 
et Helpringham, constituant le sixiĂšme district, furent contraints de 
construire un autre Ă©missaire que le Syke et le Langcrick Gout. Us 
sollicitÚrent en conséquence du Parlement une loi spéciale (1765), 
pour creuser un canal Ă  grande section entre la riviĂšre Glen et 
Boston, à travers le Holland Fen, avec une écluse indépendante, le 
Black Sluice, et améliorer les autres canaux. Le canal South Forty 
foot, construit conformément à cette loi, sur une longueur de 34 ki- 
lomĂštres, coupe Ă  angle droit tous les canaux (Eaux et Lodes) qui 
descendent des terres supérieures, reçoit les eaux de drainage, éle- 
vĂ©es mĂ©caniquement, des deux Fens Bourn et Dyke, d’une conte- 
nance de 1 800 hectares, et plus loin Ă  l’est, les eaux de dessĂ©che- 
ment du Holland Fen, par le grand canal North Forty foot ; enfin, 
celles du New Hammond Beck, avant qu’elles dĂ©bouchent par l’écluse 
Black Sluice, dans le Witham. 

En 1770, le canal South Forty foot établissait déjà une commu- 
nicalion directe entre le port de Boston, par l’écluse de Ja riviĂšre 
Glen, et la ville de Bourn. 

En 1846, une loi spĂ©ciale autorisa l’approfondissement du mĂȘme 
canal Ă  2,15, pour faciliter l'Ă©coulement des eaux provenant des 
terres en dehors du district ; l’agrandissement de l’ancien canal 
Hammond Beck et la construction d’une Ă©cluse pour la dĂ©charge 
des eaux. Ces travaux, confiĂ©s Ă  l’mgĂ©nieur Cubitt, ont permis 
d'achever, Ă  la satisfaction gĂ©nĂ©rale, l’Ɠuvre de dessĂ©chement du 
sixiĂšme district (Witham Act). 

Cette Ɠuvre, Ă  considĂ©rer les diffĂ©rences de niveau et le rĂ©seau 
inextricable de drains entrecroisés par les ruisseaux qui découlent 
des terrains supĂ©rieurs, Ă©tait particuliĂšrement difficile. Jusqu’à ces 
derniÚres années, de nombreux moulins à vent et quelques machines 
Ă  vapeur Ă©taient encore indispensables pour empĂȘcher la submersion 
des niveaux les plus bas. 

C’est ainsi que les Fens Bourn et Dyke durent obtenir une loi 
en 1841, aprĂšs un long litige avec les commissaires du Black Sluice 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. LS 17 


Level, Ă  l'effet d'installer une machine de 50 chevaux-vapeur pour 
Ă©lever les eaux de dessĂ©chement de 1 800 hectares jusqu’au niveau 
du canal South Forty foot. La machine, malgrĂ© l’affaissement du sol 
tourbeux, n’en rend pas moins un bon service en drainant le sous- 
sol plus profondément. 

Au nord de ces deux Fens el à l’ouest du canal, quatorze com- 
munes du haut plateau possĂšdent chacune leur Fen, qui se draine 
dans le canal; ce sont les Fens Moreton, Haconby, Dunsby, etc., 
jusqu’à Hale Fen. À l’est du canal, huit communes, Pinchbeck, Gos- 
berton, Surfleet, elc., jusques et y compris Bicker Fen et Swines- 
head Fen, rejettent les eaux de leurs Fens Ă©galement dans le canal 
South Forly foot, avec l’aide de moulins à vent qui fonctionnent 
pendant la saison pluviale. 

Les Fens situĂ©s Ă  l’ouest du district, aussi bien le Howell Fen et 
le Everby Fen dont les eaux se déversent dans le Car Dyke, que les 
Fens South Kyme et Heckinglon, situés entre le Car Dyke et le Hol- 
land Fen, sont le plus mal partagés au point de vue du desséche- 
ment, en dépit des moulins à vent dont ils disposent. La raison en 
est dans la confusion Ă©tablie par un double systĂšme de canaux, dont 
les uns sont dirigĂ©s Ă  l’est vers le Witham, et les autres vers le midi, 
dans le canal South Forty foot. Les tracĂ©s s’entrecoupant avec les 
ruisseaux venant des hautes terres et avec les canaux de districts 
moins importants, ne constituent certes pas un desséchement simple, 
quoique l’eau ne doive pas y ĂȘtre Ă©levĂ©e Ă  une grande hauteur 
(0,30 Ă  1,20). 

MalgrĂ© cette complication et les travaux spĂ©ciaux d’épuisement, 
mis Ă  la charge de celte partie du district, toutes les terres, aussi 
loin que Little Hole Fen, paient la taxe fixée par hectare aux com- 
missaires du Witham; mais le desséchement laisse encore à désirer. 

Bourn Fen, Dyke Fen et Moreton Fen offrent un sol tourbeux, 
Ă©pais, qui se convertit vers le nord en un loam noir ; tandis que les 
Fens à l'est, Pinchbeck North, Surfleet, Donington, etc., présentent un 
sol mélangé d'argile et de tourbe, sur un sous-sol argileux compact. 


Cinquiùme district. — Le cinquiùme district du Witham Act oc- 
cupe le territoire entre Kyme Eau et Billinghay Dales Ă  l'est, et 


218 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. : 

les hautes terres de Anwick, Digby, etc., à l’ouest. A l’exception 
du petit espace d’un niveau plus Ă©levĂ©, situĂ© entre South et North 
Kyme, le district entier est drainĂ© mĂ©caniquement ; Ă  l’ouest et Ă  
l'est du Car Dyke, les Fens North et South Kyme, Anwick, Rus- 
kinglon, Donington, etc., rejettent leurs eaux de desséchement dans 
le cours d’eau Bullinghay Skerth qui coule au nord-est et dĂ©bouche 
dans le Witham, prùs du pont à bac de Tattershall. Ce cours d’eau, 
transformé en colateur, reçoit également les eaux élevées par les 
moulins de Fens moins importants. 

Dans le Fen Anwick desséché et enclÎturé en 1792, la tourbe 
forme une couche de plus d’un mĂštre d'Ă©paisseur ; elle a Ă©tĂ© utile- 
ment amendée par l'argile. Les Fens North et South Kyme parti- 
cipent aux mĂȘmes conditions de sol et de culture. 

L’écobuage pratiquĂ© anciennement dans tout le district a con- 
tribué, par la diminution de l'épaisseur de la couche tourbeuse, à 
l'amendement du sol par l'argile. Dans l’assolement suivi, les tur- 
neps remplacent la navette comme jachĂšre verte ; le froment rend 
couramment 30 hectolitres à l’hectare ; les prairies sont de bonne 
qualité et le plus souvent pùturées. 


Premier district. — Le premier district s'avance au nord vers Lin- 
coln, au-dessus de Billinghay et de Walcot; il est limité par le Car 
Dyke et les collines des wolds, ou hautes landes, à l’ouest, et par le 
Witham, Ă  l’est. Sur une longueur de 29 kilomĂštres, il prĂ©sente au 
midi une largeur de 5 kilomĂštres, prĂšs de Xyme Eau, et au nord, 
prùs de Lincoln, d’un kilomùtre seulement. La contenance totale est 
de 10000 hectares. Une dizaine de communes riveraines du Witham, 
comprenant Billinghay, Walcot, Martin, Blankney, Metheringham, 
etc., jusqu'à Washingborough, se partagent les Fens de ce cÎté de 
la riviĂšre. 

Billinghay Fen dont le promontoire séparait le premier district 
du cinquiĂšme, avant qu'il ne fĂŒt dessĂ©chĂ© et enclĂŽturĂ© en 1779, 
Ă©tait couvert de grands lacs et d’étangs qui, Ă  certaines Ă©poques de 
l’annĂ©e, ne formaient qu’une immense nappe d’eau, agilĂ©e par les 
vagues. Les eaux trĂšs poissonneuses, les canards et les poules sau- 
vages, abrités parmi les roseaux, fournissaient un revenu impor- 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 219 


(ant aux habitants des communes. Aussi, quand il fut question de 
dessĂ©cher le Fen, sans compensation pour les droits d’affouage, (le 
chasse et de pĂȘche, le peuple s’ameuta et dĂ©truisit les premiers tr'a- 
vaux Ă  peine exĂ©cutĂ©s. Pour donner satisfaction aux intĂ©rĂȘts soi- 
disant lésés des communes, il fut résolu de réserver le long du 
cours d’eau, entre les digues, une zone libre pour les eaux d’inon- 
dation et de la rĂ©partir entre les intĂ©ressĂ©s. Les Dales oĂč Washes, 
comme on les dĂ©signa, furent dessĂ©chĂ©s plus tard Ă  l’aide de mou- 
lins Ă  vent, et finalement de machines Ă  vapeur, dont la force varie 
entre 20 et 40 chevaux. Les Dales les plus importants, ceux de 
Billinghay, Ă©coulent leurs eaux, en mĂȘme temps qu'une partie du 
North Kyme Fen Ă©coule les siennes, Ă  Dog Dyke, oĂč une machine 
de 30 chevaux les Ă©lĂšve pour les rejeter dans le Witham. L’établis- 
sement de cette machine date de 1841. Depuis lors, les quatorze 
moulins qui Ă©puisaient les eaux des Fens, en amont de Billinghay, 
ont fait place à des machines. En vertu d’une loi de 1831 qui auto- 
risait les travaux d'amélioration pour le desséchement des Fens 
Nocton, Potler-Hanworth et Branston, une puissante machine a été 
installée sur la digue du Witham, Une autre machine dessÚche les 
Fens depuis Branston jusqu’à Lincoln, à Heighington. Les Fens de 
Metheringham et Dunston sont épuisés par une machine de 95 che- 
vaux ; ceux de Marlin, Linwood et Blankney, par une machine de 
30 chevaux ; enfin ceux de Timberland et Thorpe-Filney, par une 
machine de 30 chevaux, Ă©tablie en 1839. 


TroisiĂšme district. — Le troisiĂšme district du Witham Act reprĂ©- 
sente les Fens de la vallée du Witham, sur la rive gauche, depuis la 
riviĂšre Bain prĂšs de Tattershall jusqu'aux hauteurs de Willingham, 
prĂšs de Lincoln. Les terres basses du Æirkstead Fen sont dessĂ©chĂ©es 
à l’aide d’une machine de 30 chevaux, et celles de l’enclîture Stin- 
would, Ă  Bardney, par une machine de 30 chevaux, qui porte les 
eaux Ă  lrois mĂštres d’élĂ©vation dans le Witham. Plus au nord, au 
confluent du ruisseau Langworth et du Witham, une machine Ă©ta- 
blie en 1840 relĂšve les eaux des communes de Stainfields, Barlings 
et Fiskerton, qui recouruient autrefois aux moulins Ă  vent. 

En dehors de la vallée, un vaste territoire de landes tourbeuses, 


220 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


traversĂ© par la riviĂšre Till, s'Ă©tend Ă  l’ouest de la ville de Lincoln. 
Un premier canal de ceinture les protĂšge contre les eaux en crue des 
plateaux de Doddington, etc., au sud-ouest, et un second, contre les 
hautes eaux venant de Burton et Carlton, au nord-est. Le desséche- 
ment naturel s’ohtient dùs lors par deux canaux principaux embran- 
chés sur le Till et le Sock Dyke, coulant parallÚlement au Witham, 
dans lequel ils dĂ©bouchent par deux Ă©cluses, l’une Ă  Barlings et 
l’autre à Kirkstead. 

Ces deux Ă©cluses faisaient obstacle Ă  la navigation du Witham, ou 
à l'écoulement des eaux de desséchement, suivant leur mode de fonc- 
tionnement ; une loi de 1812 ordonna leur suppression et leur rem- 
placement par une seule Ă©eluse Ă  Horsley Deeps. En mĂȘme temps, 
pour assurer la navigation du Witham, elle prescrivit la construc- 
tion d’un canal latĂ©ral (Sock Dyke), sur une longueur de 15 kilo- 
mĂštres, pour permettre l’écoulement continu des eaux de crue et 
des terrains supĂ©rieurs. GrĂące Ă  ces travaux, l’assĂ©chement du troi- 
siÚme district au delà de Lincoln a été assuré. Une seule commune, 
celle de Shellingthorpe, a dĂ» Ă©tablir deux petiles machines Ă  va- 
peur, Ă  Decoy Farm, pour rejeter les eaux pendant les crues. 

Le sol des Fens du troisiÚme district et de son annexe est formé 
de tourbe dont l'épaisseur varie entre 0",20 au midi et 1°,50 au 
nord, aux environs de Lincoln. Cette tourbe est entremĂȘlĂ©e de 
mousses, de bruyĂšres, de branchages, etc., et de lits peu Ă©pais de 
sable ; elle repose sur un sous-sol d’argile jaune, trùs compacte : 
on amende la couche arable à l’aide de l'argile que l’on extrait en 
tranchĂ©es et que l’on comble successivement. L’assolement est trĂšs 
variable ; il ramĂšne deux fois le blĂ© en six ans. L’engrais principal 
est de la poudre d’os. La culture, en raison des fumures_ peu abon- 
dantes et de la qualité inférieure de la tourbe, est en retard par 
rapport à celle des districts situés plus au midi. 


Deuxiùme district. — Holland Fen, d’une contenance de 8 900 hec- 
tares, constitue à lui seul le deuxiÚme district visé par le Witham 
Act. BornĂ© au nord-est par Kyme Eau ; Ă  l’ouest par South Kyme 
Fenet Heckington Fen, au midi par le Hammond Beck qui le sépare 
des Fens appartenant aux communes Swineshead et Kirton Holme, Ă  


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 221 


l’est par Boston et le Witham, Holland Fen a Ă©tĂ© dessĂ©chĂ© et dĂ©fini- 
tivement enclÎturé en vertu du Black Sluice drainage Act de 1765. 
Le revenu foncier, avant l’enclĂŽture, s'Ă©levait Ă  78 000 fr. par an 
et, aprÚs le desséchement, à 632 000 fr. 

Le dessĂ©chement s'opĂšre par voie naturelle, Ă  l’aide des canaux 
North Forty foot, Clay Dyke, Hammond Beck, et de drains qui se 
déversent dans le South Forty foot. 

Sous Le rùgne de Charles [*", le Haut Huntre Fen, c’est ainsi qu'on 
dĂ©signait ce district, fut l’objet d’une tentative de dessĂ©chement. Le 
roi avait frappé à cet effet les communes de Braytoft, Swineshead, 
Wigtoft, Southerby, Alderchurch, Foss Dyke, Kirton, Frampton, 
Hole, Wiverton, Dock Dyke et Boston d’une taxe de 60 fr. par hec- 
tare ; mais comme aucune ne voulut payer, il se rendit lui-mĂȘme 
entrepreneur, en s’adjugeant 3 000 hectares pour son compte per- 
sonnel. Quelques canaux furent alors construits, mais les événe- 
ments politiques arrĂȘtĂšrent les travaux et le Fen se recouvrit d’eau 
pendant la saison des pluies, comme par le passé. 

Les plus rĂ©cents travaux comprenant l'amĂ©lioration de l’ancien 
canal Hammond Beck, l'Ă©tablissement d'une nouvelle Ă©cluse Ă  
l’'Ă©missaire, avec approfondissement de 1%,50, et l'agrandissement 
du canal South Forly foot approfoudi (2",15) de façon à assurer 
la communication par steamer entre Boston et Guthram Gote, ont 
amélioré radicalement les conditions du desséchement de ce dis- 
trict. 

Le sol de Holland Fen est un loam lĂ©ger ; le sous-sol est de l’ar- 
gile mĂ©langĂ©e de gravier. L’assolement nl cinq rotations 
dans les meilleures terres, et quatre dans les terres inférieures. Le 
blé est la sole dominante. Le fumier de ferme, additionné de tour- 
teaux, constitue la principale fumure. 


Quatriùme district. — A l’est du Witham, entre Boston et les 
hautes terres ou wolds, s'Ă©tend le quatriĂšme district qui comprend 
les Fens Wildmore, West, East et le Wrangle Common. 

Wildmore et West Fens, d’une contenance de 16 000 hectares, 
sont limités au sud et au sud-ouest par le Witham canalisé, au nord- 
ouest par les wolds de Tattershall, Conigsby, Turnby, Maresham et 


222 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Revesby, et à l’est par le East Fen, comprenant les terres des com- 
munes Stickford, Stickney et Sibsey. 

Ces deux Fens furent desséchés, lotis et mis en culture par des 
entrepreneurs, Anthony Gout en tĂȘte, qui avaient obtenu la conces- 
sion du roi Charles [*. La riviĂšre Witham se trouvant souvent Ă  un 
niveau supérieur à celui des terrains, et les écluses qui auraient 
pu laisser passer les eaux étant maintenues fermées pendant des 
semaines entiÚres, on dut creuser un canal indépendant, pour con- 
duire les eaux en aval de Boston. Ce canal, construit par Anthony 
Gout, est le Maud-foster Drain. 

Les travaux principaux étaient à peine achevés que la populace, 
révoltée contre le roi et les concessionnaires, mil tout au pillage et 
tua un certain nombre de colons auxquels les ferres desséchées 
avaient été distribuées. | 

Pour expliquer ces actes de sauvagerie qui déshonorÚrent la 
grande Rébellion, il y a lieu de rappeler que le roi, propriétaire de 
grandes surfaces dans les Fens, frappait les communes de taxes trĂšs 
élevées, par les commissaires de la Couronne, pour obtenir les fonds 
nécessaires à ses propres entreprises. Dans le cas du Wildmore Fen, 
les communes refusĂšrent de payer l'impĂŽt, etles commissaires du roi 
traitÚrent avec un Sir Anthony Thomas, à ses risques et périls, pour 
l'exĂ©cution des travaux. L’entrepreneur, dans le dĂ©lai de quatre 
années, devait dessécher 18 000 hectares, de façon à ne laisser au 
plus que 1 200 hectares sous l’eau, moyennant la cession d’une part 
proportionnelle de terrains asséchés. Le contrat fut ponctuellement 
exéculé, sans aucun égard pour les droits des propriétaires du sol, 
et sans aucune compensation pour la privation infligée aux com- 
munes. Le roi et l'entrepreneur se partagĂšrent alors le pays. 

Aussi, en 1642, les paysans et les ayants droit des communes, ne 
pouvant recourir à aucuns moyens légaux ou constitutionnels, pour 
se faire rendre Justice, prirent-ils les armes, démolirent les écluses, 
ravagérent les terres des concessionnaires, pillÚrent les récoltes et 
le matériel, renversÚrent les bùtiments, et mirent à mort ceux qui 
fireat mine de résister. 

En réponse à une pétition adressée à la Chambre des Lords par 
les draineurs (sir À. Thomas et ses associĂ©s), une loi intervint en leur 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 223 


faveur, motivée sur les avantages qui résultaient pour la couronne 
de terres louées annuellement à 50 et 40 fr., au lieu de 1 fr. par 
hectare, et ordonna le remboursement de 1 250 000 fr., montant de 
leurs dépenses. Maisles paysans etles propriétaires des cinquante-deux 
villes et villages, frustrés de leurs droits, protestÚrent, au nom de 
4000 familles, contre cette décision des Lords et en appelÚrent à la 
Chambre des Communes. Ils exposĂšrent que grĂące aux canaux, aux 
fossĂ©s, aux ponts et ouvrages d’art extcutĂ©s Ă  leurs frais, ils avaient 
pu maintenir les Fens en Ă©tatets’v procurer leurs moyens d'existence ; 
qu'ils n'Ă©taient pas la proie des mendiants ni des voleurs, comme 
le prétendaient les draineurs ; que si le Eust Fen était submergé, 
les Fens Wildmore et West rapportaient de 30 Ă  40 fr. par hectare 
annuellement, avant l’entreprise ; que le but de Sir A. Thomas avait 
Ă©tĂ© de spĂ©culer sur l’acquisition des terres en s’appropriant les ca- 
naux, les écluses, ete., appartenant aux habitants, el en leur déro- 
bant une somme de 200 000 fr. par an, sous prétexte d'augmenter 
le revenu annuel de la cassette de Sa Majesté ; que les Fens étaient 
en plus mauvaise condition aprÚs le desséchement qu'auparavant ; 
qu'il n’y avait pas lieu d’indemniser des entrepreneurs qui, suivant 
leur propre aveu, reconnaissaient avoir encaissé 1 425 000 fr. pen- 
dant sept annĂ©es de jouissance, c’est-Ă -dire, bien plus qu’ils n’accu- 
saient comme dépenses et comme sommes réellement déboursées ; 
enfin, que le pays n’avait pas profitĂ© des opĂ©rations dans une me- 
sure qui pĂ»t en aucune maniĂšre justifier l’aliĂ©nation de terres ainsi 
traitées. 

Les temps avaient changĂ© ; le roi Charles [* paya de sa tĂȘte les 
excÚs de tous genres commis en son nom, taxes illégales, extor- 
sions, concussions, etc., qui motivĂšrent la guerre civile. Les paysans 
communaux eurent gain de cause devant la Chambre des Communes 
et rentrĂšrent dans leurs droits et privilĂšges. 

Le niveau des terrains des Fens du quatriùme district s’abaissant 
au fur et Ă  mesure qu’ils s’éloignent des embouchures, une partie 
considĂ©rable Ă  l’intĂ©rieur demeurait le plus souvent sous l’eau ; ainsi 
le No Man's Friend, dans le Wildmore, les Deeps dans le East Fen, 
et le Wrangle Common restaient Ă  l’état de marais. Leur dessĂ©- 
chement eut exigé des canaux profonds pour traverser les Tofts ou 


224 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


tertres plus élevés longeant le littoral (voir la note p. 165) ; or, dans 
les annĂ©es sĂšches ces canaux se comblaient, empĂȘchaient la descente 
des eaux venant des wolds et débordaient continuellement. La com- 
mission spéciale chargée, dans de telles conditions, de l'entretien du 
desséchement, dut faire appel au Parlement pour obtenir une loi qui 
permit d’écouler d’ahord directement les eaux des wolds. 

Jusqu'Ă  l'octroi de cette loi, en 1762, Wildmore et West Fens 
furent laissés à la libre disposition des communes qui y envoyaient 
paßtre leurs bestiaux, leurs moutons et leurs chevaux, pendant l'été, 
exerçant leurs privilùges d’affouage, de faucardement et de pùche, 
pendant l'hiver ; mais Ă  partir de 1769, les terres furent alloties. 

En 1801, une nouvelle loi fut sanctionnĂ©e, qui incorpora le Æast 
Fen et le Wrangle Common dans le quatriĂšme district soumis Ă  la 
juridiction des commissaires du Witham, et autorisa les travaux, sur 
la base du projet de Rennie pĂšre. 

Les nivellements exécutés par cet ingénieur montrÚrent que la 
surface de l’eau du Witham, en plein Ă©tiage, Ă©tait de 0,98 plus 
Ă©levĂ©e Ă  Anthony’s Gout qu’à la cote la plus basse des marĂ©es de 
morte eau, Ă  Maud-foster Gout. Il y avait donc lieu de tracer un 
canal joignant les deux points, pour dessécher les deux Fens, 
West et Wildmore, dont le niveau Ă©tait le mĂȘme, sauf dans la partie 
No Man's Friend, située à 0",30 en contre-bas. Le canal principal, 
d’une longueur de dix-huit kilomùtres et demi, devait donner en 
marée de morte eau une chute de 0",045 par kilomÚtre, et en marée 
de vive eau, une chute de 0,065 par kilomÚtre ; ces chutes ont été 
notablement accrues depuis. 

Sur les 4315 hectares compris dans le Wildmore Fen, il y a 
1190 hectares de hautes terres; sur les 6 850 hectares compris dans 
le West Fen, 11 y en a 2215. Plus de 4000 hectares de ces terres 
hautes se drainent dans des fossés (becks) qui traversent les Fens 
et, en raison de leur pente, déversent trÚs rapidement leurs eaux 
dont le volume a été Jjaugé à plus de 600 000 mÚtres cubes par jour, 
en temps normal, et Ă  trois fois autant, pendant la saison des crues. 
Rennie proposa de recueillir cette masse d’eau dans un canal de 
ceinture (calchwaler), qui couperait tous les ruisseaux et les fossés 
Ă  la descente dans les Fens, de mĂȘme que ceux qui dĂ©bouchaient 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 229 
des wolds Ă  Sibsey, Stickney et Stickford, jusqu’à l’émissaire de 
Maud-foster. Ge canal de ceinture qui s’amorce prùs du confluent de 
la riviÚre Bain dans un ruisseau de 1,50 à 1",80 plus élevé que celui 
des Fens, a été construit sur 34 kilomÚtres de longueur, avec une 
pente à peu prÚs double de celle des canaux de desséchement. La 
nouvelle écluse à Maud-fosler présente trois ouvertures de 4,60 
chacune, soit une ouverture totale de 13",80 au lieu de 4 mĂštres. 

Le drainage des deux Fens par les canaux Howbridge, Newham, 
Medlum, etc., dont l'entretien est soigné par les commissaires du 
Witham, moyennant une taxe de 6 fr. par hectare et par an, fonc- 
tionne d’une maniùre parfaite. Les commissaires du quatriùme dis- 
trict prélÚvent en outre une taxe de 1 fr. 50 c. par hectare et par 
an pour le curage des petits drains et des fossés. 

Le sol des deux Fens est formĂ© en grande partie d’argile, entre- 
mĂȘlĂ©e de lits de gravier ; le sous-sol est du sable. Le drainage, au 
moyen de tuyaux et de tuiles sur semelles en poterie, a été pratiqué 
à peu prÚs partout, de façon que la culture arable est partout pos- 
sible et que les pĂąturages sont inutiles. Les terres argileuses four- 
nissent d'excellentes et abondantes récoltes de turneps, de trÚfle et 
de ray-grass, Ă  la condition d’ĂȘtre labourĂ©es en bandes de 2",50, 
pour prévenir les effets de la sécheresse. 


East Fen.— Avant son annexion aux deux Fens prĂ©cĂ©dents, East 
Fen n’était qu’un vaste marĂ©cage, contenant quelques Ă©tangs pois- 
sonneux, plantés de roseaux et de jones, lieux favoris du gibier de 
marais. Sur quelques terrains Ă©mergeant des eaux et appartenant Ă  
la commune de Friskney, la canneberge (Oxycoccus) Ă©tait si abon- 
dante qu’elle donnait son nom Ă  la localitĂ©. 

Le niveau du Fen est de 0",30 en contre-bas de celui de Wild- 
more et de West Fen ; ce qui diminue d'autant la pente du canal de 
desséchement, par rapport aux parties basses, les Deeps, situées 
Ă  0,45 au-dessous de l’émissaire Maud-foster. Rennie reconnut 
qu'il ÿ avait lieu, pour ce motif, de chercher un débouché autre que 
celui de Wainfleet, et d’un niveau plus Ă©levĂ© encore que le prĂ©cĂ©- 
dent, à cause des ensablements du chenal. Il fit donc choix d’un point 
de la riviĂšre, en aval de Maud-foster, Ă  5 kilomĂštres de distance, 

ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 15 


226 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


appelĂ© Hob-Hole, oĂč, en l'absence de hauts-fonds, le niveau de l’eau 
se maintenail Ă  1",22 plus bas. 

Ce fut Ă  Hob-Hole, sur une longueur de 22 kilomĂštres Ă  partir 
de Toynton, avec une pente de 0,035 par kilomùtre, qu’aboutit le 
canal principal qui reçoit par des canaux latéraux Fodder Dyke, 
Bur Lode, Bell Water, ete., les eaux des 4800 hectares de East Fen 
et des 10500 hectares de terrains de East Holland, comprenant les 
communaux de Wrangle, de Leake, de Butterwick, etc., se déchar- 
geant autrefois Ă  Maud-fosler. 

L’écluse de Hob- Hole fut achevĂ©e en 1806, et celle de Maud- 
foster l'année suivante. 

Comme pour les deux Fens Wildmore et West, les eaux des 
hautes terres au-dessus de Æast Fen furent captĂ©es par un canal de 
ceinture de 44 kilomÚtres, débouchant avec celui des autres Fens, à 
quelques kilomĂštres au nord de Boston. 

Le desséchement fut si complet que sur une vaste surface de ma- 
rais (Marshes) situés au nord de Wainfleet on put détourner les eaux 
d'Ă©coulement de l’anse de Wainfleet jusqu’à Hob-Iole. En effet, la 
riviĂšre Sleeping qui recueillait les eaux des marais, venant de Sal- 
monby, Aswarby, Harrington, Partney, RaĂŻthby, etc., les laissait en 
route dans les Fens qu’elle traversait, et exposait certaines localitĂ©s, 
telles que Steeping, Firsby, Thorpe et Croft, Ă  de terribles inonda- 
tions dans la saison pluviale. Par une loi promulguée en 1818, ces 
communes obtinrent d’endiguer la riviùre Steeping, en la rectifiant 
entre Steeping Mill et Firsby Clough par un raccourci de 3 kilo- 
mÚtres. Cette amélioration ne fut rendue possible que par le dessé- 
chement de East Fen. 

Les commissaires du Witham drainage perçoivent une taxe de 
1 fr. Ă  1 fr. 50 c. par hectare et par an, pour l'entretien des drains 
et des canaux secondaires de East Fen, et de 3 fr. pour les canaux 
principaux. Le sol, formé de tourbe compacte, assise sur l'argile 
bleue Ă  une profondeur de 1,50 jusqu’à 5°,50, a Ă©tĂ© amendĂ© nom- 
bre de fois par l'argile ; aussi la culture arable s’est-elle installĂ©e sur 
tout le territoire, et les pĂąturages anciens ont-ils Ă  peu prĂšs dis- 
paru, L’assolement le plus usitĂ© consiste en : 1° navette ; 2° avoine ; 
3° blĂ© avec ray-grass; 4° ray-grass et parfois Ă©cobuage. L’avoine 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. DT. 


rend de 50 Ă  60 hectolitres, et le froment, de 25 Ă  35 hectolitres 
par hectare ; outre la poudre d'os et les superphosphates, l’engrais 
de ville y est trÚs employé. 


Canaux de ceinture. — L'application du principe des calchwalter, 
ou canaux de ceinture, qui a donné des résultats si excellents dans 
toutes les opérations de desséchement entreprises par Rennie pÚre, 
mĂ©rite d’ĂȘtre signalĂ©e avec quelques dĂ©tails. PrĂ©conisĂ©e par son fils 
et vulgarisée par les ingénieurs anglais, la méthode des calchwater 
a rendu les plus grands services, quand il s’est agi d’écouler des vo- 
lumes d’eau considĂ©rables dĂ©bouchant sur des terrains d’un niveau 
inférieur à celui des hautes marées, quoique supérieur à celui des 
marĂ©es basses. C’est, du reste, la mĂ©thode suivie dans les dessĂ©che- 
ments des marais par écoulement permanent, pour détourner les 
eaux pérennes ou de sources, et ne laisser arriver dans les marais 
que les eaux zénitales. 

C’est surtout pour l'assainissement des terres des vallĂ©es infĂ©- 
rieures qu’arrosent les cours d’eau, que sir John Rennie recom- 
mande le départ des eaux du niveau supérieur de celles du niveau 
inférieur. 

Si on rĂ©unit ces eaux dans un mĂȘme collecteur, il arrive, en effet, 
que celles des hauts niveaux, animĂ©es d’une plus grande vitesse, se 
frayent la voie vers l’émissaire, en refoulant celles des bas niveaux 
qui inondent et saturent les terres adjacentes. En outre, un seul 
émissaire oblige à établir un réseau bien plus étendu de fossés prin- 
cipaux et de fossés secondaires, destinés à emmagasiner les eaux des 
deux niveaux, jusqu’à leur plein Ă©coulement. 

A l’aide de deux Ă©missaires distincts, on permet, au contraire, 
aux eaux supérieures de se déverser rapidement en amont dans la 
riviÚre, tandis que les eaux inférieures se déchargent plus lentement 
en aval, sans créer de gonflements, ni de remous. D'ailleurs, les 
eaux supérieures débouchant en amont, approfondissent le chenal, 
empĂȘchent qu’il se comble en aval, et le maintiennent en meilleur 
état pour le desséchement et la navigation. 

Un dernier avantage qu’offrent les canaux calchwater consiste 
dans la possibilitĂ© d’uliliser les eaux les plus pures, ou les plus 


298 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


fraiches pour l’approvisionnement des bas districts pendant la saison 
sÚche, tant au point de vue du bétail que de l'irrigation. 

Rennie a appliqué sa méthode le long du Witham, sur plus de 
60 000 hectares, en se guidant d’aprùs les principes suivants : 

Avant de procéder au desséchement de districts aussi vastes, situés 
Ă  des niveaux infĂ©rieurs, il importe d’examinĂ©r en premier lieu 
l'emplacement de l’émissaire, et les conditions nĂ©cessaires pour 
l'installer à la limite des plus basses eaux, c’est-à-dire, pour abaisser 
le plus possible le plan d’eau. DĂšs lors, ayant tracĂ© les fossĂ©s de 
ceinture, destinĂ©s Ă  l'Ă©coulement des eaux supĂ©rieures, l’assainisse- 
ment des terrains bas pourra presque toujours s’opĂ©rer naturelle- 
ment, suivant la pente. Au cas oĂč les eaux ne pourraient pas ĂȘtre 
évacuées en tout temps suivant la pente, il faudra élargir la section 
des fossés principaux et secondaires, afin qu'ils puissent emmaga- 
siner les eaux pendant le temps que l’écluse restera fermĂ©e. 

Aucune terre n’est rĂ©ellement assainie que si la surface de l’eau 
dans les drains est, Ă  toute Ă©poque, de 0",60 Ă  0,90 au-dessous de 
la surface du sol adjacent. Tout en Ă©vitant la stagnation, il importe 
de pouvoir disposer de l’eau pluviale, ou de l’eau des terres supĂ©- 
rieures pour laisser au terrain assĂ©chĂ© le degrĂ© nĂ©cessaire d’hu- 
midité. 


Drainage. — La rĂšgle dominante Ă  observer dans un dessĂ©che- 
ment consiste à drainer complÚtement, mais en ménageant une 
bonne distribution d’eau‘ pour l’arrosage des terres, le cas Ă©chĂ©ant, 
ou pour l’abreuvage du bĂ©tail. 

Au cas oĂč le relief du terrain oblige de faire passer les canaux 
de ceinture par-dessus ceux du desséchement, on a recours à des 
siphons construits en tĂŽle ou en bois. Ces siphons peuvent toujours 
ĂȘtre placĂ©s Ă  une profondeur telle, par rapport Ă  l’orifice d’admis- 
sion des eaux, qu’il n’y ait pas de frottement ; autrement, si les deux 
orifices sont au mĂȘme niveau, celui servant d’émissaire donnerait 
lieu à une légÚre chute qu'il y a lieu d'éviter. 

Quand la pente est trop forte et qu’il importe de retenir les eaux 


1. Autobiography of Sir John Rennie, p. 438. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 229 
pour les besoins de l'irrigation ou de l’abreuvage, ou encore pour 
empĂȘcher l’affouillement du sol Ă  la descente, on place des barrages 
de ! mÚtre à 1°,90 de hauteur, avec des pertuis à vannes de 3 mÚ- 
tres jusqu'Ă  1 mĂȘtre d'ouverture, qui servent de retenues. C’est le 
systÚme qui à été appliqué pour le drainage du Hainault Forest, 
prĂšs de Epping, dans le comtĂ© d’Essex *. 

Quelque essentiel que soit le drainage souterrain, dans le but 
d'empĂȘcher l’évaporation de la surface pendant l’hiver, il est non 
moins utile, dans les terres légÚres et les pùturages, de garder le 
niveau de l’eau souterraine pendant lĂ©tĂ© Ă  une telle hauteur au- 
dessous de la surface, que l’eau puisse y monter par le jeu de la 
capillaritĂ© des racines. On y parvient en maintenant l’eau dans les 
canaux et les cours d’eau qui font office de rĂ©servoirs, et en rĂ©glant le 
niveau d’eau et les clĂŽtures pour le bĂ©tail en pacage. C’est une pra- 
tique suivie partout dans les Fens. Quand les canaux principaux ne 
sont pas ulilisés pour la navigation, on y conserve de 1,50 à 1,80 
de profondeur d’eau, le radier Ă©tant de 1",20 Ă  1,50 au-dessous du 
niveau gĂ©nĂ©ral du terrain. Ces canaux, aussi bien que les cours d’eau 
supérieurs qui les alimentent, permettent de maintenir les fossés et 
les drains constamment remplis, jusqu’à 0",60 de profondeur dans 
les terrains tourbeux, et 0",90 dans les terrains légers. 

Par l'évacuation rapide des eaux pluviales excédantes, en hiver, 
et l'apport en Ă©tĂ© du volume d’eau nĂ©cessaire, les terres en culture 
atteignent dans les Fens leur haut degré de fertilité, sans crainte 
de la sécheresse, ni de la stagnation des eaux. 

Pour ĂȘtre efficace, le drainage souterrain qui maintient la per- 
méabilité de la couche arable, linfiltration des eaux atmosphériques 
et assure l'écoulement des eaux du sous-sol vers les fossés princi- 
paux, doit ĂȘtre entretenu toujours en bon Ă©tat, si l’on veut Ă©viter la 
slagnation. Aussi, la nature des drains, leur pose, leur débit, exi- 
gent-ils des précautions spéciales dans des contrées comme celles 
des Fens et des Marshes, dont le niveau, absolument plat jusqu’à la 
mer, ne permet pas de profiter de pentes suffisantes. 

Il y a cinquante ans, on regardait le drainage souterrain de cette 


1. Grantham, On arlerial drainage (Trans. Inst. civil Engineers, vol. XIX). 


230 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


contrée comme impraticable, en raison des difficultés inhérentes au 
terrain et Ă  son niveau; mais peu Ă  peu l'exemple fourni par les 
exploitations des plateaux supĂ©rieurs s’est Ă©tendu Ă  la zone du lit- 
toral. 

Les drains dont on s’est servi le plus communĂ©ment sont les 
tuyaux ; mais on a eu Ă©galement recours aux drains en briques, en 
fagots d’épine, en gazon et en tourbe. Les drains en fagots sont 
usitĂ©s spĂ©cialement dans les Marshes, oĂč le sable limoneux recouvre 
là surface ; les tuyaux, en effet, s’obstruant plus facilement par le 
sable, ne pourraient pas ĂȘtre curĂ©s en chasse, faute de pente. Dans 
les terrains mobiles, ou compressibles, dont l'argile est superficielle, 
comme on en rencontre dans certains districts des Fens, on emploie 
la tourbe, débitée en briquettes, et séchée, pour combler le fond 
des tranchĂ©es, ou bien, quand il s’agit de prairies, de mottes de 
gazon, disposés en coins, qui forment des drains économiques et 
rendent de bons services. Les briques ou les tuiles et les pierres, de 
mĂȘme que le bois, Ă  cause de leur prix, ou de leur raretĂ©, ne sont 
guÚre employés. 

Dans la pose des drains, on se guide, quant Ă  la profondeur, sur 
celle des fossés ou des colateurs qui assainissent les Marshes, suivant 
que l’écoulement des eaux de dessĂ©chement s'opĂšre artificiellement, 
oĂč par gravitation. Il est rare, dans le Lincolnshire, que la profondeur 
des drains excĂšde 0,75 ; si on l’augmente, la bouche Ă©tant noyĂ©e 
dans l’eau des fossĂ©s, l'Ă©coulement n’a plus lieu que par barbotage, 
avec une extrĂȘme lenteur, puisqu'il y a une pression Ă  vaincre. 

La profondeur de la couche d’argile, dans les Fens, dĂ©termine le 
plus souvent celle des drains. Cette profondeur, comme on a vu, est 
assez variable ; tantît l’argile apparait à la surface de la tourbe, 
tantĂŽt elle est en contre-bas de plusieurs pieds ; mais on la rencontre 
généralement entre 0,60 et 1",50 de profondeur. Pour poser les 
drains, on creuse la tranchée à travers la couche de tourbe, et on 
ne les enterre dans l’argile que sur l’épaisseur nĂ©cessaire pour re- 
couvrir d'argile les tuyaux, et empĂȘcher les dĂ©bris de tourbe de les 
obstruer ‘. 


1. The Farmer's Magazine. — Drains and drainage, 1868, t. {. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 23 


L'extension de la pratique du drainage n’a pas moins contribuĂ© 
que l’amendement des tourbes par l'argile, que l'emploi des engrais 
phosphatĂ©s et autres, et que l’assolement rationnel, Ă  faire de la 
contrĂ©e des Fens et des Marshes une des plus productives de l’An- 
gleterre. 


c) Travaux Ă  l'embouchure du Witham. 


Comme on vient de le voir, l’assainissement gĂ©nĂ©ral des Fens du 
Lincoln repose sur le fonctionnement régulier du débouché de la 
riviĂšre Witham dans la baie du Wash. 

Jusqu'en 1762, quand la premiĂšre Loi du Witham drainage fut 
promulguĂ©e, ce cours d’eau avait cessĂ© d’ĂȘtre navigable passĂ© Lin- 
coln; le chenal s’était ensablĂ© et les terres riveraines Ă©taient pĂ©rio- 
diquement inondées dans toute la vallée. 

Lorsque le canal à grande section, tracé en ligne droite, de Lin- 
coln à Boston, sur 18 kilomÚtres de longueur, eut été achevé, la 
navigation se trouva abrĂ©gĂ©e, et le plan d’eau gĂ©nĂ©ral du dessĂ©che- 
ment fut abaissé, de façon à rendre le terriloire tout entier à la cul- 
ture. 

Ce fut seulement plus tard, Ă  l’occasion du dessĂ©chement de Wild- 
more Fen, de West Fen, etc., que la question du débouché des eaux 
acquit une sérieuse importance, et que Sir John Rennie fut chargé 
de complĂ©ter l’Ɠuvre de son pĂšre, par la rectification du chenal 
entre Maud-foster et Hob-Hole, sur un parcours de 3 kilomĂštres et 
demi, qui sépare les deux écluses de l'embouchure du Wash, prÚs 
de Boston. 

Rennie pÚre, en exécutant le drainage des Fens du Witham, à 
l’aide de canaux de ceinture et de collecteurs qui conduisent les 
eaux de ces canaux dans la riviĂšre, en amont de Boston, entendait 
que la régularisation de embouchure se fit aux frais de la ville. 
Des deux projets qu’il soumit, en 1805, Ă  la municipalitĂ© de Boston, 
l’un consistait, en effet, à redresser l’ancien chenal, à l’approfondir, 
à encaisser les berges et à créer un nouveau lit entre Hob-Hole et 
Clay-Hole, oĂč il y avait un fort tirant d’eau en tous temps. L'autre 
projet comprenait l’exĂ©cution d’un canal Ă  travers les terres, allant 


DDR ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


directement de Boston jusqu’à Clay-Hole. En outre, les eaux d’écou- 
lement des hautes terres devaient continuer à déboucher à Maud- 
foster, en aval de la ville, pour maintenir la navigation libre ; tandis 
que les eaux du desséchement des basses terres continueraient à 
s’écouler Ă  Hob-Hole. 

La municipalité recula devant la dépense que devait entrainer 
l’une ou l’autre de ces variantes, et Rennie pùre se borna, pour 
assurer la décharge des eaux, à faire établir un canal de communi- 
cation entre le canal colateur de Mansfeld et celui de Hob-Hole, Ă  
Cowbridge, oĂč il plaça une jauge qui permettait de dĂ©verser les 
eaux par l’un ou par l’autre des canaux, suivant la hauteur nĂ©ces- 
saire Ă  la navigation. 

MalgrĂ© cela, le Witham ne tarda pas Ă  s’encombrer en amont de 
lécluse de Maud-foster, comme il avait été prévu, et le service par 
l’écluse Hob-Hole devint obligatoire, moyennant qu’on l’élargit. 
Gelte mesure fut insuffisante à son tour, si bien qu'aux marées des 
mortes eaux, les bateaux pĂȘcheurs pouvaient seuls accoster les quais, 
et aux grandes marĂ©es d’équinoxe, les chaloupes seules pouvaient 
aborder en ville. La situation de Boston comme port de mer Ă©tait 
perdue. 

Sir John Rennie, chargé par la municipalité de remédier à cette 
situation, déclara, aprÚs un nivellement et des sondages complets, 
exĂ©cutĂ©s par Francis Giles, qu’il n’y avait de salut que dans la rĂ©ali- 
sation de l’un ou de l’autre des projets soumis par son pùre, tout 
en inclinant vers le premier, qui consistait à utiliser l’ancien chenal 
et à le prolonger par un canal entre Hob-Hole et Clay-Hole. Indé- 
pendamment de la ville de Boston, les commissaires du Witham et 
du Black Sluice Drainage avaient, selon cet ingĂ©nieur, un intĂ©rĂȘt 
direct Ă  associer leurs efforts et leurs ressources pour atteindre 
le but visé. Les commissaires du Black Sluice se désintéressÚrent 
du projet, aprÚs avoir pris l'avis de l'ingénieur Telford qui s'était 
prononcĂ© en faveur de la dĂ©molition de l’écluse situĂ©e en amont 
de Boston, pour permettre aux marées de refluer dans le cours 
d’eau. 

Il y avait malheureusement plusieurs obstacles Ă  la solution Tel- 
ford ; Ă  savoir : la riviĂšre, en amont de l’écluse, relevait d’une autre 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 233 
juridiction ; et, pour recevoir les marĂ©es, les berges auraient dĂ» ĂȘtre 
relevées sur le parcours ; or, il eut fallu, pour donner des compen- 
sations, en raison de la perte des eaux douces, s’entendre avec des 
intéressés hostiles à toute combinaison. 

La ville de Boston dut reprendre seule et Ă  son propre compte le 
projet de Sir John Renmie qui s’offrit, pour se conformer aux res- 
sources modiques dont elle disposait, Ă  l’exĂ©cuter en partie seule- 
ment et progressivement. 

Dés lors, il commença par faire exécuter le canal entre Hob-Hole 
et la partie supĂ©rieure du Burton’s Marsh, sar 800 mĂštres de lon- 
gueur et endiguer en amont le chenal, sur 600 mĂštres de largeur. 
La navigation devenait ainsi plus courte, en mĂȘme temps que le 
flot de la mer augmentait par le refoulement des eaux douces; on 
acquĂ©rail de plus la certitude d’abaisser la limite des mortes eaux 
et d'approfondir le lit jusqu’à la grande Ă©cluse, en amont de Boston. 

Les travaux adjugés aux entrepreneurs Jolliffe et Banks présen- 
tĂšrent de grandes difficultĂ©s Ă  l’endiguement, Ă  cause de la largeur 
du chenal et de la masse du flot ; mais le résultat dépassa toutes les 
espérances. | 

Le chenal s’amĂ©liora au point que les marĂ©es de vives eaux, au 
pont de Boston, atteignirent la cote de 4,27, tandis que la laisse 
des mortes eaux monta à 3",05. Le lit s’approfondit de 0",90 à 
1",20 au-dessous des marées de mortes eaux, de telle sorte que les 
navires de 4,60 à 4",85 de tirant d’eau purent accoster à quai, à 
haute marĂ©e, et ceux de 3",65 Ă  8",95 de tirant d’eau purent 
librement entrer à marée basse. En outre, tous les atterrissements 
formĂ©s en amont de l’écluse de Maud-foster furent entrainĂ©s, en 
facilitant l'écoulement des eaux du canal de ceinture et de décharge 
par les Ă©cluses Grand et Black Sluices. 

Encouragée par ces résultats, la ville de Boston, aprÚs avoir dé- 
pensĂ© 825 000 fr., s’imposa de nouveaux sacrifices pour exĂ©cuter 
les travaux projetés par Rennie pÚre et fils. DÚs 1845, les digues 
longitudinales du Witham furent achevées : les navires de 300 ton- 
neaux remontùrent en pleine mer jusqu’à Boston. Le Witham avait 
environ 180 mĂštres d’extravasement au point oĂč il n’était plus navi- 
gable, et donnait 1°,82 d’eau à mer pleine. Le lit de la riviùre 


254 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


fut concentré dans un rétrécissement de 27 mÚtres, le seul courant 
de descente enleva les vases et les sables et creusa un chenal de 
4 mĂštres de profondeur en mer de vive eau, sans avoir recours au 
dragage *. 

La navigation et le desséchement furent améliorés au point que 
Boston recouvra la situation commerciale que lui avait fait perdre 
l'obstruction de son port, obligeant les navires de s'arrĂȘter Ă  Clay- 
Hole, Ă  l’entrĂ©e de la baie. De plus, un bill introduit, dĂšs 1859, 
auprÚs du Parlement, a autorisé, par des travaux en aval de Hob- 
Hole et de Foss Dyke bridge, la reprise dans la baie du Wash de 
14000 hectares de lais de mer, devenus accessibles. 


B. — LES MARSHES ET LES POLDERS. 


Description. — Les Marshes s'Ă©tendent sur une longueur de cĂŽte 
de plus de 200 kilomĂštres, depuis l'embouchure de la riviĂšre Nen 
jusqu’à celle de la riviùre Trent, dans l’'Humber, au nord du Lincoln. 

Entre Lynn et Wainfleet, de mĂȘme que sur les bords de la Trent, 
les terres des Marshes, situées en contre-bas du niveau des hautes 
marées, sont défendues par des digues, parfois espacées sur trois 
ou quatre rangées qui correspondent aux avancements obtenus 
dans la conquĂȘte des alluvions sur la mer. Sur la cĂŽte mĂȘme du 
Lincoln, directement battue par les vagues de l'Océan du Nord, les 
dunes de sable tiennent lieu de digues. 

Les Marshes proprement dits, qui séparent les Fens du littoral, 
se distinguent d’aprùs la formation plus ou moins ancienne de leur 
sol et se divisent en un certain nombre de districts; le Marshland, 
entre Lynn et Wisbeach ; le South Holland, entre Wisbeach et Spal- 
ding ; le East Holland entre Spalding et Boston; enfin, le Marsh et 
Middle Marsh, entre Boston et Wainfleet, sur la cĂŽte du Wash. Sauf 
ce dernier district, les autres comprennent des terres endiguées de- 
puis des siĂšcles et des atterrissements plus modernes. 

Pas plus que les Fens, les Marshes, aujourd’hui assainis, ne sont 


1. Rapport Ă  la Chambre de commerce de Rouen, 20 novembre 1845 ; Journal 
du génie civil, 1846. 


D 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 239 


marécageux. S'ils sont humides en hiver, ils sont souvent trop secs 
en été. Le terrain, bien égoutté dans les anciennes parties, est enclÎ- 
turĂ©, parsemĂ© de bouquets d’arbres et gĂ©nĂ©ralement bien cultivĂ©. 

Les fermes, dont l'importance varie entre 40 et 100 hectares, 
comprennent trois quarts de terres arables qui produisent d’abon- 
dantes récoltes : pommes de terre, racines, céréales, trÚfle et four- 
rages verts, et un quart de terres en pĂąturage permanent. On y Ă©lĂšve 
et engraisse des moutons Ă  longue laine, ou des demi-sang des races 
de Leicester et de Down, venant du Norfolk, du bétail courtes cornes 
et des chevaux. 

La qualitĂ© du sol varie suivant l’éloignement de la cĂŽte, c’est-Ă - 
dire selon l’ñge des alluvions reprises sur la mer. Au voisinage des 
digues, le sol formé de limon onctueux, noirùtre, convient aux pà- 
turages pour l’engraissement du bĂ©tail. Quand le sous-sol de sable 
pur n’est pas trop rapprochĂ© de la surface, la culture arable est pro- 
fitable pour le froment, la navette, la moutarde, etc. ; mais le drai- 
nage des terres offre une certaine difficulté par suite de la couche 
aquifÚre souterraine (soak ou sock) dont la profondeur dépend du 
niveau des marĂ©es et de la chute d’eau pluviale. Les tuyaux des 
drains à 0",60 et 1 mÚtre de profondeur sont souvent noyés, et les 
fossés qui servent aussi de clÎture ont l'inconvénient, à cause de la 
permĂ©abilitĂ© du sol, de rester Ă  sec pendant l’étĂ©, tandis que la 
terre Ă©tant saturĂ©e en hiver, ils demeurent remplis d’eau stagnante 
pendant des mois entiers. L’abaissement du niveau des aqueduecs qui 
entraĂźnent les eaux Ă  la mer sous les digues, et des drains collec- 
teurs ne sauraient manquer d'amĂ©liorer l’égouttement des Marshes et 
des terres en bordure des Fens. La plupart des aquedues, ou Gouts, 
comme on les dĂ©signe, qui drainent les Marshes, pourraient ĂȘtre 
dirigés sur les canaux des Fens, ou sur les riviÚres à écluses, dont 
le radier est notablement plus bas que le plan d’eau de la couche 
souterraine. 

Depuis le cadastre de Guillaume le Conquérant (le Domesday 
Book), oĂč figurent les bourgs et villages du district des WMarshes, de 
nombreux centres de population se sont fixés auprÚs des digues. 
Sur les terres oĂč, du temps de Charles IT, existaient les marais et les 
pñturages, des routes et des chemins de fer sillonnent aujourd’hui 


236 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 
le territoire, et les exploitations agricoles qui sv sont installées rap- 
portent un fermage de 100 Ă  150 fr. par hectare. 

La derniĂšre digue de South Holland construite en 1660, par delĂ  
les digues romaines et Raven’s Bank, suit un tracĂ© irrĂ©gulier. Plu- 
tÎt escarpée du cÎté des terres, elle à une pente de 1 sur 5 du cÎté 
de la baie ; son talus est entiĂšrement revĂȘtu de gazon, et sa base, 
vers la plage, est exhaussée par rapport au niveau des terres endi- 
guĂ©es. Il en est ainsi du reste Ă  chaque digue, de sorte qu’en avan- 


çant vers la mer, le sol, aprÚs chaque levée est plus élevé. Aussi, la 


vue de la mer est-elle absolument cachĂ©e de l’intĂ©rieur des Marshes. 
C’est Ă  peine si l’on aperçoit les voiles et les cheminĂ©es des bateaux, 
qui naviguent dans la baie. Les marins ne se repÚrent, en pénétrant 
dans les passes du Wash, que sur les clochers des villages, derriĂšre 
les digues. 

Au dehors des levées, à marée basse, les sables s'étendent jus- 
qu’à l'horizon ; la plage des polders, recouverte d'herbe fine, au ton 
vert foncé, est pùlurée par des milliers de moutons et de bestiaux ; 
plus loin, les sables sont masqués par la criste marine aux nuances 
vives ; enfin, les sables vaseux ne laissent plus apercevoir que les 
balises qui guident les bateliers dans les passes ouvertes de la baie. 

Les alterrissements et les polders ne cessent de grandir sous l’ac- 
tion du courant qui amÚne dans le Wask les débris arrachés aux 
falaises par la mer du Nord. Au fur et à mesure que déceroit la 
vitesse de ce courant, le dĂ©pĂŽt s’accentue davantage ; aussi est-on 
obligĂ© de maintenir le chenal libre pour la navigation, Ă  l’aide de 
digues submersibles en pierres ou en fascinages, qui détournent les 
sables. C’est au pied de ces digues et le long des Ă©pis, du cĂŽtĂ© opposĂ© 
aux passes, que s’opùre le colmatage des polders, à raison de 0",60 
d'Ă©paisseur par an. 

Quand les sables sont assez exhaussés pour se recouvrir du limon 
fin et argileux qui se précipite seulement dans les eaux absolument 
tranquilles, les marshes verts ou herbus (green Marshes) sont prĂȘts 
pour lenclÎture. Leur fertilité dépend surtout de l'apport des ma- 
tiÚres végétales et animales par les algues, les varechs et les infu- 
soires que l'Océan accumule à chaque marée sur les terrains col- 
matés. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 231 


4. — ComtĂ©s de Norfolk et de Cambridge. 


a) Marshland. 


Le district du Marshland, d’une superficie de 12000 hectares 
environ, entre Lynn et Wisbeach, comprend 17 communes qui se 
partagent le territoire alluvien regagné sur la baie. 

Depuis que les travaux dont nous avons rendu compte, pour la 
dérivation de la Great Ouse, à son embouchure (Eau Brink Cut), 
ont Ă©tĂ© achevĂ©s, l’assĂ©chement du Marshland est dĂ©finiuf. Les deux 
canaux principaux, Chancellor’s Lode et West Lynn Gaol, recueil- 
lent les eaux pour les rejeter dans la riviÚre canalisée. 

Le sol arable est formĂ© d’un mĂ©lange de sable marin avec la vase 
argileuse, qui lui donne une ténacité remarquable. Suivant la pro- 
portion d'argile, l’assolement varie de 4 Ă  5 annĂ©es. L’assolement 
de quatre années comporte : 1° jachÚre nue, parfois des turneps, ou 
de la navette ; 2 blé ; 5° trÚfle, ou fÚves; 4° blé. Chaque commune 
réserve dans les Marshes les plus éloignés de la mer des pùturages 
sur loam riche, oĂč l’on fait parquer par hectare jusqu’à 30 moutons 
mĂ©lis (Down-Leicester), plus une tĂȘte de gros bĂ©tail. Dans beaucoup 
de localités, on cultive la pomme de terre et les racines. 

Indépendamment des levées intérieures qui protÚgent les Harshes 
contre les eaux des Fens et des hautes terres, les digues Ă  la mer 
constituent une lourde charge d'entretien pour les communes limi- 
trophes. Malgré la surveillance la plus active, il arrive que ces ou- 
vrages se laissent entamer par les fortes marées ; les catastrophes 
qui résultent de ce retour offensif des eaux de la mer sont parfois 
terribles. Nous rappellerons les détails de celle survenue en 1862. 


Inondation de 1862. — Le dimanche 4 mai de cette annĂ©e, une 
des Ă©cluses du centre Level, situĂ©e Ă  6 kilomĂštres au midi de King’s 
Lynn, cĂ©dait sous la pression d’une des hautes marĂ©es d’équinoxe, 
comme avait cĂ©dĂ©, en 1713, l’écluse de Denver, et livrait passage 
aux eaux de la mer du Nord. Cet ouvrage important, Tilney-gale, 
par lequel les eaux du canal se déchargeaient dans la riviÚre Great 


238 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Ouse récemment canalisée, avait probablement été affouillé dans ses 
fondations ; en mĂȘme temps, le radier de la riviĂšre s'Ă©tait effondrĂ© ; 
tant est que la marée arasant les défenses créait une brÚche de plus 
de 100 mÚtres de largeur dans la digue, menaçait la face opposée 
du canal par la base, et submergeait prĂšs de 5 000 hectares de ter- 
rains en pleine culture dans les Marshes. 

La prĂ©occupation dominante, au milieu de l’affolement des popu- 
lations, fut d'empĂȘcher que le dĂ©sastre ne s’étendit Ă  30 000 ou 
40 000 hectares désormais livrés à la merci des eaux. 

DĂšs le 7 juin, la brĂšche dans la digue orientale fut Ă  peu prĂšs 
comblĂ©e, moyennant 5 000 sacs de terre; mais la brĂšche dans l’autre 
digue parallĂšle avait atteint 140 mĂštres d'ouverture et 8 mĂȘlres de 
profondeur. Les sacs rĂ©sisteraient-ils jusqu’à ce qu’un batardeau sur 
pilotis pĂ»t ĂȘtre construit ? Telle Ă©tait la question pleine de cruelles 
indécisions qui agitÚrent les ingénieurs sous les ordres de M. Lunn, 
surintendant du centre Level. Si la berge de la digue de l’est cĂ©dait, 
les Fens Magdalen, Bardolph et Downham devaient ĂȘtre infallible- 
ment noyés, car ils n'avaient pas assez de machines pour se main- 
tenir à sec, en régime normal. De plus, les eaux d'inondation frap- 
pant les digues du canal du Marshland Fen, menaçaient d’emporter 
l’écluse dont la section avait seulement 3",20. 

Les travaux de premiÚre urgence se concentrérent sur la réfec- 
tion de la berge, moyennant l’établissement d’une digue provisoire 
et d’un batardeau, postĂ© Ă  900 mĂštres en aval de l’écluse dĂ©truite. 

La digue fut construite Ă  l’aide de fascinages en berceaux, flottĂ©s 
de l’aval Ă  travers le courant, et plongĂ©s par des caissons de pierres. 
Quant au batardeau, on se dĂ©cida Ă  l’édifier sur une double rangĂ©e 
de pieux Ă  vis de 18 mĂštres de longueur, avec Ă©cartement de 2",15 
destinés à recevoir en coulisse, pendant l'intervalle des marées, des 
panneaux en bois de 0",15 d'Ă©paisseur, revĂȘtus de tĂŽle de 0,025 
d'Ă©paisseur, sur une hauteur de 0,90. 

Dix sonnettes à vapeur furent montées sur la plate-forme installée 
Ă  hauteur des tĂȘtes, afin d'activer le battage des pieux que l’on relia 
entre eux par de forts madriers et des tirants en fer. En outre, des 
étançons de gros calibre maintinrent le centre du batardeau, au fur 
et Ă  mesure de son avancement, contre les quais en pilotis bordant 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 239 


l'ouvrage en amont et en aval. On espĂ©rait ainsi maintenir l’écarte- 
ment rigide entre les deux rangĂ©es de pilotis pour poser l’armature, 
et offrir une résistance compacte au flot ; mais la quatriÚme rangée 
de panneaux Ă©tait Ă  peine placĂ©e, que, malgrĂ© l’emplissage Ă  l’aide 
de sacs d’argile et de corrois, le batardeau se lĂ©zarda sur un grand 
nombre de points, sous l’action de la marĂ©e haute. 

Les panneaux supĂ©rieurs durent ĂȘtre relevĂ©s pour laisser passer 
la marĂ©e et empĂȘcher la destruction totale de l’ouvrage si pĂ©nible- 
ment appareillĂ©. On reconnut alors, Ă  l’aide des plongeurs, que l’un 
des panneaux de pied avait crevĂ© ; beaucoup d’autres s'Ă©taient dĂ©- 
jetés; trois des maßtres pilotis s'étaient brisés, et Le lit du canal avait 
subi un affouillement profond. 

Sur l'avis des ingénieurs en chef, Hawkshaw et Linn, 1l fut con- 
venu dĂšs lors, pour arrĂȘter l’affouillement produit au pied des pan- 
neaux, de foncer des pilotis servant de support au blindage, dans 
l'intervalle des entre-toises, de les scier Ă  hauteur en les arasant, et 
de leur faire porter les panneaux. En mĂȘme temps, ordre fut donnĂ© 
de renforcer les berges par des sacs de gravier au lieu de terre, et 
de consolider les cadres Ă  l’intĂ©rieur par du corroi. Plus de 100 000 
sacs de terre avaient été déjà employés à cette date; des centaines 
de wagons de corroi furent ensuite utilisés pour la consolidation de 
l'ouvrage, qui résista finalement aux efforts des derniÚres marées 
de juin. 

En attendant, le niveau des eaux d'inondation s’élevant sans cesse 
à cause des travaux du batardeau et de la décharge des eaux de 
dessĂ©chement du centre Level par l’écluse de Well-Creek, on dĂ©cida 
de recourir Ă  des siphons pour l’épuisement, et au besoin, de main- 
tenir les siphons en Ă©tat, au lieu de faire les dĂ©penses d’une nou- 
velle Ă©cluse. Au mois d'octobre suivant, neuf siphons de 0,90 de 
diamĂštre abaissaient, aprĂšs quelques jours, le niveau des eaux de 
2" 39 à 1,40 sur une distance de 25 kilomùtres ; c’est-à-dire Jjus- 
qu'Ă  March Bridge. 

Tandis que le batardeau progressait sous la direction de l’ingĂ©- 
nieur Smith, les autres digues crevées ou affouillées dans le Marsh- 
land Ă©taient l’objet de travaux urgents, conduits par l'ingĂ©nieur 
Page, pour compte de la commission du district. 


240 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


La digue Muller avait été abandonnée ; un éboulement nouveau se 
produisit sur prĂšs de 30 mĂštres de longueur et 14 mĂštres de pro- 
fondeur, dans la digue de l’ouest. Cinquante ouvriers furent employĂ©s 
à la combler avec des sacs de gravier, transportés par des yoles à 
fond plat, depuis l'embouchure de la riviùre Humber jusqu’au nord 
de la brĂšche. 

Sur la digue de l’est, l’affouillement constatĂ© par les plongeurs 
auprĂšs de Wash-Bridge, en face de la premiĂšre brĂšche, avait de 
100 Ă  130 mĂštres de longueur et pĂ©nĂ©lrait jusqu’à 1,50 au-dessous 
du radier du canal ; lĂ  aussi il fallut recourir Ă  immersion des sacs 
pour arrĂȘter les progrĂšs de l'Ă©rosion. 

D'une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, les berges, depuis le barrage jusqu’à 
l’écluse de dĂ©charge dans lOuse, avaient perdu de leur soliditĂ© en 
raison de l’imbibition des terres ; on dut les revĂȘlir de corroi. 

En outre, il fallut songer, par l'Ă©tablissement d’aquedues Ă  travers 
les remblais du canal de WMarshlund, Ă  diminuer les eaux du centre 
Level. GrĂące Ă  ces aquedues, le niveau baissant de 0,025 par jour, 
jusqu’à la cote de 0",60 au-dessous de eaux moyennes, constatĂ©e 
avant l’achĂšvement du batardeau, Bardolph Fen fut assĂ©chĂ©, et suc- 
cessivement les autres Fens purent ĂȘtre remis en culture, malgrĂ© 
l’atterrissement. La couche formĂ©e de limon onctueux atteignait 
déjà quelques centimÚtres d'épaisseur sur beaucoup de points. 

Enfin, en vue de l’avenir, les commissaires du Marshland prirent 
la résolution de faire élever une digue transversale, par rapport à 
la brĂšche, et d'Ă©tablir une nouvelle Ă©cluse qui assure la situation du 
Smealh Fen. La digue Ă  la mer, construite par l’ingĂ©nieur Page, 
consista dans le fonçage de deux rangées de pilotis, distants entre 
eux de 0",20, avec écartement de 3",60 entre les rangées. Sur la 
face intĂ©rieure, le revĂȘtement fut fait en pieux ou rails mĂ©tal- 
liques, espacés de 0,60. Entre ces pieux et les pilotis, on inter- 
calait des madriers. Quant au remblai extérieur il fut formé de 
pierres et de gravier, tandis que l’intĂ©rieur se comblait avec des 
fascinages, des sacs de gravier et de terre, etc. 

D’aprĂšs les devis des ingĂ©nieurs, l’ensemble des travaux exĂ©cutĂ©s 
pour la rĂ©paration des digues, l’épuisement des Fens inondĂ©s, etc., 
et de ceux nĂ©cessitĂ©s par la sĂ©curitĂ© du district, devait s’élever au 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 241 


chiffre d’un million et demi de francs. Il y avait lieu d’ajouter à cette 
somme 800 000 fr. de dommages-intĂ©rĂȘts Ă  payer par la commis- 
sion, moyennant le prélÚvement de taxes additionnelles. 

Le bilan de l’accident du 4 mai 1862 s’est rĂ©sumĂ© de fait, pour 
les commissaires du Marshland, en une premiÚre dette hypothécaire 
d'un million de francs, Ă  intĂ©rĂȘt de 4 p. 100 l’an, et en une dette de 
1 300 000 fr., Ă  intĂ©rĂȘt de 4 1/2 p. 100 ; au total, 2 300 000 fr., Ă  
répartir sur une surface de 45 770 hectares. 


Digues Ă  la mer. — Sir Joha Rennie rĂ©sume, d’aprĂšs sa longue 
expérience, les conditions qui doivent présider à l'établissement des 
digues Ă  la mer. 

Le tracĂ© des digues doit ĂȘtre fixĂ© autant que possible de façon Ă  
laisser au-devant d’elles une plage qui amortisse la force des vagues, 
et ne donner à l’ouvrage qu’une hauteur de 1",80 à 2",15 de vives 
eaux Ă  soutenir. MĂȘme avec cette profondeur moyenne, aux marĂ©es 
haules, il peut se prĂ©senter telle tourmente, sous l’action de vents 
violents, amenant pendant trois ou quatre heures un paquet de mer, 
qui cause de sérieux dommages à une digue mal consolidée. 

Si la plage d'avant est assez spacieuse, une digue en terre bien 
battue, de 9 ou 6 pour 1 de pente vers la mer, avec revĂȘtement en 
argile de 0",45 d'épaisseur, soigneusement gazonnée, dépassant de 
1",80 le niveau des marĂ©es d’équinoxes, la crĂȘte ayant 1",80 de lar- 
ceur, le talus du cÎté de terre étant de 2 sur 1, avec un fossé à 
3 mÚtres de distance du pied, offrira la résistance voulue sur la- 
quelle on pourra compter, 

Dans certaines circonstances exceptionnelles, la digue ainsi cons- 
truite sera, en outre, empierrée sur 0,25 d'épaisseur, ou protégée 
par des fascines qui offrent le désavantage d'exiger des renouvelle- 
ments fréquents. 

Lorsque la plage est sujette à érosion, il esl nécessaire de la 
défendre par des épis disposés de maniÚre à faire déposer les allu- 
vions en suspension dans l’eau. 

Enfin, par une mer profonde, si la digue devait résister à 3°,65 
d’eau, le profil sera modifiĂ© en donnant au Lalus un allongement de 
7 Ă  9 pour 1. Le revĂȘlement en argile sera aussi plus Ă©pais ; l’em- 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 16 


242 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


pierrement et les Ă©pis seront plus forts, pour assurer la protection 
de l’ouvrage. 

Que l’inclinaison moyenne du talus vers le large soit de #4 à 5 
pour 1, et mĂȘme parfois de 3 sur 1, selon les circonstances qui va- 
rient d’une localitĂ© Ă  l’autre, il est essentiel de surveiller le pied de 
la digue, et dans le cas oĂč une fissure se produirait, il ne faut pas 
tarder à la couvrir par un épi porté aussi loin que possible. 

Il est d'usage de prélever les matiÚres du remblai de la digue 
dans la plage située au dehors ; mais il importe de ne jamais creuser 
Ă  moins de 10 mĂštres de distance du pied et de ne pas approfondir 
les fosses d'emprunt au delĂ  de 0,30 Ă  0",45. Pour se procurer le 
volume de terre nécessaire on devra s'étendre en largeur, et laisser 
des banquettes entre les chambres d'emprunt, afin d'Ă©viter que des 
courants s’établissent et dĂ©rangent le dĂ©pĂŽt des limons entraĂźnĂ©s par 
les marées. 

Quand on ne dispose pas de bonne argile pour le revĂȘtement, on 


Fig. 3. — Type de digue à la mer. 


recourra à de la terre mélangée avec de la paille, dont on fait un 
corroi vaseux que l’on applique Ă  l’état humide, sur une Ă©paisseur 
de 0",45 environ. Sur ce corroi, on battra Ă  la dame 0",20 de pierres 
cassées qui complÚtent la face du talus. 

La figure 3 reproduit le type courant de digues, A, construites 
en terre avec un noyau B en blocailles, ou en pierres, et un revĂȘte- 
ment C en maçonnerie, dont le parapet a la forme concave pour mieux 
résister aux vagues. Le talus, à un et demi de base pour un de hau- 
teur, varie suivant les matériaux. D indique la limite des plus hautes 
marées, E celle des basses eaux au pied de la digue. 


3 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 243 


b) Marshland Smeath. 


Le Marshland Smeath, qui occupe 650 hectares, est un des plus 
fertiles. La culture intensive s’y poursuit sans engrais, peut-on dire, 
et sans jachĂšre nue. Le drainage par tuyaux a contribuĂ© Ă  l’amĂ©lio- 
ration des terres récemment conquises sur la baie. 


c) Walpole Out-Marsh. 


A la suite des travaux exécutés par la Compagnie du Delta de Nor- 
folk, dans l'estuaire de la Great Ouse, le territoire augmente pro- 
gressivement. Le Marsh de Walpole compte parmi les plus récents 
polders; 1l couvre 550 hectares ; un autre polder de mĂȘmes dimen- 
sions a Ă©tĂ© enclĂŽturĂ©, il y a peu d’annĂ©es, le long du nouveau chenal 
de la Nen; enfin, sur les 2 000 hectares qni doivent constituer le 
Wingland, au moyen du Cradge Bank, la moitiĂ© environ est prĂȘte 
pour l’endiguement. 


d) Waldersea Marsh. 


Le Waldersea Marsh (3 200 hectares) représente, pour un sol 
tourbeux, mĂ©langĂ© d’argile, un ensemble des plus riches pĂąturages 
et des terres arables de premiÚre qualité, dont le desséchement est 
rendu définitif depuis la réfection des ponts-écluses de Wisbeach et 
de Sutton. 


e) Wisbeach Hundred. 


Au nord de Marshland, le Wisbeach Hundred (7000 hectares) 
est Ă©galement d’une grande fertilitĂ©. Sur les parties plus Ă©levĂ©es, 
les terres en culture arable produisent de lourdes récoltes de cé- 
rĂ©ales et de pommes de terre. On fume avec de la poudre d’os la 
jachĂšre en navette, et avec du fumier le froment qui suit le trĂšfle 
ou les fĂšves. Aux environs de Leverington, la culture en grand de 
la menthe poivrée alimente quelques distilleries importantes. 


244 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


2. — ComtĂ© de Lincoln (Spalding). 


a) South Holland. 


Le district South Holland, d’une contenance de 32 000 hectares, 
est tout entier dans le Lincolnshire; il est bornĂ© au nord et Ă  l’est 
par la baie, au midi par le nord Level Drain, et Ă  l'ouest par le 
Welland. 

Du cÎté de la baie, il est défendu par la digue construite en 1660, 
et par des digues romaines Old Sea Dyke et New Sea Dyke, dont le 
sol extérieurement est plus élevé de 1,80. 

D’autres digues, Raven’s Bank est du nombre, avaient Ă©tĂ© Ă©tablies 
jadis pour dĂ©fendre les Marshes contre l’envahissement des eaux des 
Fens. On retrouve dans les pĂąturages un grand nombre de tran- 
chées parallÚles qui servaient évidemment à retenir les crues; les 
remblais étaient utilisés comme refuges pour le bétail. Comme les 
bĂȘtes paissaient le jour dans les terres humides et se retiraient le 
soir sur les monticules, les meilleurs pĂąturages se trouvent auJour- 
d’hui sur les hauteurs. 

Dans toute la partie méridionale, la plus basse de South Holland 
(environ 12000 hectares), le dessĂ©chement s’opĂšre par un systĂšme 
de canaux courant de l’est, depuis Peak Hill, prùs de la digue du 
Welland, jusqu’à lĂ©cluse de la riviĂšre Nen, prĂšs de Sutton Bridge. 
Ces canaux coupent presque Ă  angle droit les drains qui se diri- 
geaient autrefois vers Lords Drain, dans le Welland, Ă  travers les 
terres de niveau plus Ă©levĂ©. MalgrĂ© l’établissement des nouveaux 
canaux, celte partie du district frappée de taxes trÚs onéreuses resta 
longtemps dans une situation des plus précaires au point de vue de 
l'assainissement et de la culture. Les travaux de l'Eau Brink Cul, 
en crĂ©ant une chute additionnelle de 2",45 Ă  l’écluse, amĂ©liorĂšrent 
définitivement cette situation. 

C’est Ă  la suite d’un endiguement de 2100 hectares, effectuĂ© en 
4792, que les intĂ©ressĂ©s obtinrent du Parlement le vote d’une loi 
autorisant le desséchement complet de la partie du territoire com- 
pris entre le Welland et Lulton Leam. D’aprùs cette loi, un canal, 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 245 


South Holland Drain, fut creusĂ© (1794-1795) entre Peter’s Point, 
prĂšs de Sutton Bridge, avec une Ă©cluse pour rejeter les hautes eaux 
de la riviÚre Nen, et Peak Hill, prÚs de la levée de Cowbit, sur une 
longueur de 22 kilomùtres et demi. Deux canaux servent d’embran- 
chements, le Highland’'s Drain (8 kilomùtres) et le Lowland’s Drain 
(6 kilomÚtres) ; ils complÚtent, pour la parliz méridionale de South 
Holland, le dessĂ©chement opĂ©rĂ© Ă  l’ouest par le Lord’s Drain qui, 
lui, se décharge dans le Welland, à Wragg Marsh, prÚs de Spalding. 

Un certain nombre de communes font Ă©couler directement leurs 
eaux de desséchement à la mer, soit par le Shire Drain, comme 
Sutton-Saint-Edmund, Tidd-Saint-Mary, Sutton-Saint-James, etc., 
sur 2300 hectares; soit par Lullon Leam, Moullon Creek, et d’autres 
aqueducs qui traversent les digues. 

Le long de la Nen, le sol est un loam épais, de riche qualité, et le 
sous-sol est permĂ©able ; mais en s’éloignant de la riviĂšre, il devient 
plus tenace, à cause du mélange de l'argile et de la tourbe. Un signe 
de richesse de ces terres résulte du fait que le pastel peut se cul- 
tiver pendant trois et cinq annĂ©es consĂ©cutives, et ĂȘtre suivi de plu- 
sieurs années de blé. 

Aux environs de Long Sutton, le sol se prĂȘte Ă  la culture inten- 
sive du froment, de la moutarde, des racines, etc. ; les prairies y 
sont en plein rapport, quoique sur des terrains trop sablonneux, oĂč 
il y a excùs de matiùres salines, laxatives, l’herbe ne soit pas aussi 
recherchée par le bétail. 

Au nord de Moulton, jusqu’à Foss Dyke, le long du Welland, le 
sol des Marshes, tout en jouissant d’une grande fertilitĂ©, a une con- 
sistance bien plus ferme qui se rapproche de celle du gault. 


b) East Holland. 


East Holland, dans sa partie limitĂ©e au nord et Ă  l’ouest, par le 
canal Old Hammond Beck et au midi, par les riviĂšres Glen et Wel- 
land, est intermédiaire entre les Fens et les Marshes. Le terrain, de 
plus ancienne formation que celui des marais, réparti entre les com- 
mupes de Gosberton, Donington, Swineshead, Wigtofl, etc., est 
soumis Ă  la culture arable ; et comme ces communes possĂšdent des 


246 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Murshes dans la direction de la cĂŽte, vers Bicker Haven, elles peu- 
vent combiner ainsi l’élĂšve du bĂ©tail avec la culture des terres. 

Les canaux de desséchement, Old Ouse Mer-Lode, Five Towns 
Drain, Kirton Drain, ete., sont, à vrai dire, des fossés, décrivant 
des sinuosités sans nombre, avec des embran*hements dans tous les 
sens, insuffisants mĂȘme pour le drainage des eaux pluviales. Il en 
rĂ©sulte que les eaux s’infitrent dans le sol et le sous-sol trĂšs poreux, 
pour regagner souterramement les riviÚres ; malgré cela les terres 
sont relativement sĂšches et figurent parmi les plus fertiles de la 
contrĂ©e ; c’est le cas surtout pour les exploitations situĂ©es Ă  Wigtoft, 
entre Donington et Kirton. 

La partie méridionale de East Holland est bien desséchée par le 
canal Risegate Eau, qui se dirige en ligne Ă  peu prĂšs droite entre le 
Hammond Beck et le Welland, vers Foss Dyke. Le reste du district 
est drainé par le Foss Dyke Gout, dans le Welland, et par le Xirlon 
Gout, à travers la digue. Ces deux canaux ou (Gouts reçoivent éga- 
lement les eaux de divers Marshes : Sullerton, Frampton, etc. 

De la commune de Kirton Skeldike jusqu’à Kirton Holme, et sur 
les Marshes de Frampton et Wyberton, les terres sont de premier 
choix et portent les récoltes les plus épuisantes, tandis que du cÎté de 
Boston, de Sutterton et d’Algarkirk, le long du Wash, les herbages 
pour l’engraissement des moutons et des bĂȘtes Ă  cornes sont rĂ©pu- 
tés parmi les meilleurs. 


c) Marsh et Middle Marsh. 


Le littoral du Wash, à partir de Boston jusqu’à Wainfleet, pro- 
tégé contre les irruptions de la mer par une digue dite romaine, est 
couvert par les Marshes les plus fertiles, dont les pĂąturages, au dire 
mĂȘme des agronomes anglais, sont la gloire du comtĂ© de Lincoln. 
Leur sol consiste en humus noir, fournissant un loam d’une texture 
remarquable, qui repose sur un sous-sol d'argile marneuse. 

Quoi qu’il en soit, la gloire de ces Warshes est chĂšrement payĂ©e. 

La taxe des riverains pour l'entretien des digues dépasse en effet 
10 fr. par hectare, et les digues ont été trop souvent insuffisantes pour 
empĂȘcher l’envahissement des fortes marĂ©es. Au mois de novembre 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 247 


1810 notamment, le Marsh, par une énorme marée et un violent 
ouragan, fut complÚtement lavé ou enseveli sous les débris des 
digues ; la ville de Boston fut en partie inondée, et de Wainfleet 
jusqu’à Spalding, le territoire demeura longtemps submergĂ©, avec 
perte de bĂ©tail, de rĂ©coltes et d’habitations. Depuis lors, les digues 
ont été rélablies sur de plus fortes dimensions, et surtout à une plus 
grande hauteur ; elles ont résisté à la puissance des marées, ct les 
inondations se bornent au refoulement des eaux douces par les Gouts 
qui traversent les digues. 

Le Middle Mursh oĂč Clays, qui sĂ©pare la bande des Marshes ma- 
rimes des terrains de l'Eust Fen, prĂ©sente aussi un sol arable d’une 
rare fertilitĂ©. C’est dans les deux districts que les communes de Fries- 
ton, Butterwick, Leverton, Wrangle, Friskney, Wainfleet, etc., par 
l'Ă©lĂšve et l’engraissement du bĂ©tail, puisent les ressources nĂ©cessaires 
pour le développement de l'exploitation des Fens assez médiocres 
qui bordent les wolds. 


3. — ComtĂ© de Lincoln (littoral). 


North Marshes, — Les Marshes du Lincoln ne s'arrĂȘtent pas Ă  
Wainfleet, mais se prolongent tout le long de la cĂŽte vers le nord, 
jusque dans l'estuaire de l’'Humber ; ils occupent environ 30000 hec- 
tares. 

Les eaux du vaste bassin des wolds et des clays qui domine la 
cÎte descendent sur la plage, occupée par les Marshes, en se 
frayant, vers l'embouchure dans la mer des lits qu'il a fallu endiguer 
pour empĂȘcher les inondations et maintenir le chenal au milieu des 
alluvions du littoral. Les cours d’eau naturels servent ainsi de ca- 
naux collecteurs; ce sont les cloughs, eaux, fleets et grifts, comme 
on les appelle, qui traversent les digues pour décharger les eaux à 
marĂ©e basse. On rĂ©unit souvent trois ou quatre canaux que l’on fait 
déboucher par un seul émissaire ou aquedue, avec écluse, comme à 
Saltfleet, à Trusthorpe, Anderby et Hogstorpe. Le desséchement des 
Marshes du nord ne laisse guÚre à désirer que sur quelques points, 
comme entre Grimsby et Barton, à Barrow, à cause du manque d’en- 
trelien des canaux particuliers. 


248 , ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Entre Humberston et Louth, les canaux de desséchement passent 
sous le canal de navigation, à l’est duquel se retrouvent des Fens, 
c’est-à-dire des landes en terrain bas, appartenant aux communes 
voisines et que l’on a complĂštement dessĂ©chĂ©s ; Grainthorpe Fen a 
été un des premiers rendus à la culture. 

De Carlton jusqu’à la mer, la bande du littoral est traversĂ©e par 
des digues parallÚles, constituant des polders séparés, dont les eaux 
sont épuisées, à Great Carlton et à Gayton-le-Marsh, par des ma- 
chines à vapeur. On compte à l’est d’Alford plus d’une douzaine de 
moulins Ă  vent qui Ă©puisent les eaux des Marshes appartenant aux 
communes de Bilsby, Huttoft, Thurlby, Cumberworth, etc. 

Enfin, les communes de Burgh, de Winthorpe, Skegness et Croft, 
dont les Marshes s’égouttaient directement Ă  la mer, ont dĂ©tournĂ© 
les eaux par un canal de 5 kilomÚtres de longueur, pour les déverser 
dans la crique de Wainfleet, oĂč les sables n’encombrent pas l’écluse. 


I. — LES FENS ET LES COLMATAGES DU LINDSEY NORD LEVEL 
(COMTÉ DE LINCOLN) 


Les grands travaux de régularisation des riviÚres Welland et Wi- 
tham, et le dessĂ©chement des Black Fens, de l’ouest au nord de la 
baie du Wash, ne sont pas les seuls dont le comté de Lincoln ait eu 
Ă  ĂŒrer parti pour l'amĂ©lioration du sol, le relĂšvement de la produc- 
tion agricole et l’assainissement de la contrĂ©e. Il reste Ă  dĂ©crire des 
Opéralions non moins importantes, exécutées aux embouchures des 
riviĂšres Trent, Ouse et Ancholme dans l’'Humber, et dans les vallĂ©es 
qui comprennent le Axholme Level et le Ancholme Level. 


4. — Le bassin de l'Humber. 


Le bassin hydrographique de l’Humber qui sĂ©pare le comtĂ© de 
York de celui de Lincoln est le plus Ă©tendu que possĂšdent les Îles 
Britanniques, car il reçoit les eaux en totalité de trois comtés, York, 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 249 


Derby et Stafford, et celles, en partie, des comtés de Leicester et de 
Lincoln, représentant le cinquiÚme à peu prÚs de la superficie totale 
de l'Angleterre. I embrasse 225 kilomĂštres du midi au nord, et 
119 kilomùtres de l’ouest à l’est. Des quatre riviùres principales qui 
dĂ©bouchent dans l’'Humber, deux se rejoignent, la Trent et l’Ouse, 
pour former l’Humber ; le Hull y afflue de la rive du Yorkshire, et 
l’Ancholme, de la rive du Lincolnshire. 

L'Ouse et la Trent, avec leurs nombreux affluents, l’Aire, le Cal- 
der, le Don, le Derwent, la Dove, le Devon, lIdle, etc., qui traver- 
sent les terrains secondaires et triasiques, forment Ă  leur confluent 
un vaste delta, de plus de 400 kilomÚtres carrés, dont le niveau est 
inférieur à celui de l'Océan du Nord. A partir de ce delta coule 
l’'Humber, servant de chenal aux deux riviùres, sur 64 kilomùtres 
environ, jusqu’à la mer. Les rives de l’'Humber sont situĂ©es Ă  1",85 
au-dessous du niveau des marĂ©es de vives eaux, dans l’estuaire, non 
loin de l'Océan. Aussi, ne serait-il pas endigué, que le delta tout 
entier serait périodiquement submergé et converti en lagune. 

Dans la contrée que nous avons précédemment décrite, les digues 
le long de la cĂŽte du Lincoln et dans la partie de la baie du Wash, 
qui arrĂȘtent les eaux des Fens, sont soumises Ă  la fois aux attaques 
des vagues et à la pression des eaux des crues. D’autre part, les 
riviĂšres du Wash ne drainent qu'un bassin de 15 000 kilomĂštres 
carrĂ©s et dĂ©bouchent au milieu d’un large golfe oĂč la plage, formĂ©e 
par de vastes bancs de sable, modĂšre l’action des flots de la marĂ©e 
et des crues. À marĂ©e basse, la plage a une largeur de 4 Ă  5 kilo- 
mĂštres, et c’est seulement Ă  marĂ©e haute que les digues ont Ă  sup- 
porter l’action des vagues. 

Il n’en est pas ainsi de l’'Humber, dont les riviùres tributaires 
rayonnent dans les comiés de York, Derby, Statford et Nottingham, 
sur un bassin bien plus vaste, oĂč un tiers est recouvert de gra- 
viers et d’alluvions, et dĂ©bouchent dans un estuaire torlueux. Au 
lieu de border les terres riveraines d’une ceinture, comme dans les 
Marshes, les sables précipités par les eaux limoneuses de la Trent 
et de l’Ouse forment d'immenses bancs au milieu de l’'Humber, tels 
que le Witton Sand, le Old Warp, le Skilter Sand, etc., et le cou- 
rant se divise le long des rives en deux passes profondes, de sorte 


250 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


que les marais d’Ancholme, qui sont siluĂ©s sur une courbe concave 
de l’estuaire, en face d’une pointe de la cîte du Yorkshire, ont à 
supporter le choc direct du courant et des vagues de l’OcĂ©an. Le 
chenal de l’'Humber est d’ailleurs si rapprochĂ© des digues de dĂ©fense 
des marais, que l’affouillement ne s’arrĂȘte pas sous l’action de 
marées dont la vitesse est de 15 kilomÚtres à l'heure. Aussi, quelles 
que soient les dimensions des digues, le soin essentiel consiste dans 
l'entretien des enrochements Ă  leur pied, et du revĂȘtement de leur 
talus, du cĂŽtĂ© de l'estuaire ; Ă  dĂ©faut d’une surveillance et d’une 
réparation continuelles, les digues cÚdent, et les nouvelles levées 
doivent ĂȘtre reportĂ©es Ă  l'arriĂšre pour faire place aux Ă©rosions com- 
binées du fleuve et de la mer. 

Les riviĂšres Ouse et Trent, dans leur trajet en aval sur les grĂšs du 
trias, on! tellement corrodĂ© les marnes du Keuper, qu’elles aban- 
donnent dans l'estuaire de l'Humber des atterrissements Ă©normes 
dont une partie seulement gagne la mer. 

Soit à cause d’une chute moindre des pluies annuelles dans le 
-bassin de ces riviĂšres, soit par suite de dĂ©rivations dans l’écoule- 
ment des eaux de drainage et de pluie, dues Ă  l'extension des tra- 
vaux de desséchement et à la culture plus profonde des terres, jadis 
mal entretenues, la mer, depuis quelque temps, a repris le dessus 
et nettoyĂ© une partie de l’ancien delta. Le travail offensif de l'OcĂ©an 
se poursuit Ă  celte distance, d’annĂ©e en annĂ©e ; il a Ă©tĂ© Ă©valuĂ© Ă  plus 
de deux mĂȘtres d’érosion, sur toute la cĂŽte entre Kilnsea, prĂšs de 
Spurn Point, et Bridlington*. 

La masse de dĂ©tritus, en n’évaluant qu’à 10 mĂštres la hauteur 
moyenne des falaises de la cĂŽte Holderness (or, celle de Dimlington 
atteint 42 mĂštres au-dessus du niveau de la mer), peut ĂȘtre estimĂ©e 
Ă  1 million de mĂȘtres cubes par an. Une grande partie tombe Ă  la 
mer et va rejoindre par les courants les matériaux déversés par le 
Rhin et les Ă©rosions des cĂŽtes de la Hollande ; mais une partie no- 
table est utilisée pour le colhnatage (warping) des rives de l'Hum- 
ber. En effet, les eaux limoneuses repoussées par les hautes marées, 
surtout aux équinoxes, sont introduites dans des canaux spéciaux 


1. J. Oldham, Proceedings Inst. civil Engineers, t. XXI, p. 454. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 251 


qui facilitent la submersion des terrains inférieurs et le dépÎt des 
matiĂšres Lenues en suspension. On arrive ainsi, en renouvelant aussi 
fréquemment que possible la circulation des eaux troubles, à com- 
bler les dépressions, à élever de 0",30 à 0",45 le niveau de plu- 
sieurs milliers d'hectares, dont le sol parfaitement nivelé, grùce au 
mélange avec les sédiments, acquiert une fertilité exceptionnelle. 

On estime que les sédiments entrainés par les eaux marines et 
les eaux douces suffiraient pour colmater annuellement, sur 0",50 
d'Ă©paisseur, plus de 300 hectares. C’est dans les annĂ©es sĂšches, 
lorsque les eaux des riviĂšres sont moins troublĂ©es et Ă  l’étiage, que 
le colmatage progresse plus rapidement. 

C’est Ă©galement pendant l’élĂ© que les atterrissements, dus Ă  l’eau 
des riviùres, augmentent dans le chenal, faute de courant, jusqu’à 
l’obstruer complĂštement aux environs de Thorne. Les marĂ©es d’au- 
tomne et de printemps se chargent heureusement d’en dĂ©barrasser 
l'estuaire. 

La riviĂšre Humber, si on peut donner le nom de riviĂšre Ă  cette 
passe oĂč dĂ©bouchent l’Ouse et la Trent, couvre, aux marĂ©es de 
printemps, une surface de 285 kilomÚtres carrés ; les terrains qui 
ont été conquis actuellement en dehors du périmÚtre submergé 
représentent 790 kilomÚtres carrés. Aussi, la riviÚre est-elle endi- 
guée sur tout son parcours ; les digues dominent certains lerrains 
et les vastes marais Ă  dessĂ©cher d’une hauteur de 2",75. 

Au-dessous des alluvions servant de lit Ă  l'estuaire, on rencontre 
la craie, qui, en face de l’üle de Sunk, est à 6 mùtres de profondeur. 
Des amas d’argile, de gros gravier, de gros cailloux et de rognons 
pierreux, reposant sur cette craie, forment des Ăźles que la mer a 
respectées. 

Avant de décharger ses eaux, à Spurn Head, dans l'Océan du 
Nord, l’'Humber reçoit: sur la rive nord, une sĂ©rie de petits affluents 
ou de ruisseaux, et le Mill Beck, qui lui apportent les sédiments des 
terrains du pied des wolds ; sur la rive sud, l’Ancholme, qui a donnĂ© 
lieu à des travaux trÚs importants de canalisation et de régularisa- 
tion depuis le xvrr siĂšcle ; et finalement la riviĂšre Hull, sur la rive 
nord, qui draine la cĂŽte de Holderness.. 


252 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


a) Pratique du colmatage (warping). 


L'eau des marĂ©es remontant par l’Humber dans la Trent, l'Ouse, 
le Don, etc., est trĂšs limoneuse. Un tube de 15 centimĂštres de lon- 
gueur, rempli de cette eau, laisse dĂ©poser un centimĂštre, et mĂȘme 
davantage, de limon vaseux. Quant Ă  la riviĂšre mĂȘme, elle coule 
limpide Ă  son embouchure ; aucune crue de ses affluents ne lui 
apporte de limon ; au contraire, les crues nuisent au colmatage, car 
celui-ci s'opĂšre avec d'autant plus de rapiditĂ© et d’abondance que la 
sĂ©cheresse de l’étĂ© s'Ă©tant prolongĂ©e, le volume des eaux de riviĂšre 
est plus rĂ©duit. C’est donc aux eaux de marĂ©e que l’on est redevable 
du colmalage qui se pratique avec tant de succĂšs sur les rives de 
l’'Humber. Il est probable toutefois que les matiĂšres minĂ©rales ter- 
reuses, charriĂ©es par l’Ouse et la Trent et reprises par le flot de la 
mer, contribuent à la fertilité des alluvions. 

Le procédé du warping, de l'avis d'Arthur Young, est efficace 
dĂšs que l’on peut disposer des eaux Ă  volontĂ©, les admettre sur le 
terrain ou les évacuer librement, par des canaux bien aménagés. 
En outre, faut-il que la nappe d’eau limoneuse ait l'Ă©paisseur voulue, 
grĂące Ă  un endiguement assez rĂ©sistant, el puisse ĂȘtre maintenue Ă  
cette épaisseur pendant le temps nécessaire à la précipitation des 
parties sédimentaires les plus fines. 

Sur de grandes surfaces, le canal principal d'amenée peut avoir 
plusieurs kilomĂštres de longueur ; on a Ă©tabli des canaux qui avaient 
6 kilomÚtres, et des branchements en plus, de chaque cÎté ; mais il 
y Ă  lieu d'observer que l’effet du limonage s’attĂ©nue lorsque la dis- 
lance augmente, c’est-Ă -dire que l’opĂ©ration exige d’autant plus de 
temps que le terrain est plus éloigné du point d'admission des eaux 
de marée, sur la rive. 

La pratique du warping remonte à la moilié du siÚcle dernier. 
CommencĂ©e sur les bords de l’'Humber, Ă  Rawcliff, puis Ă  Howden, 
en 1743, elle ne s’est dĂ©veloppĂ©e, dans le bassin en amont, que de- 
puis les Ă©crits de Marshal’, de Lord Hawke * et de Day°. En 1800, 


1. Rural Economy of York, 1788. 
2. Agricullural survey of Yorkshire, p. 164. 
3. Report of West Riding of Yorkshire, Agricultural survey. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 253 


on comptait à peine un millier d'hectares de terres colmatées dans 
l'estuaire de l’'Humber ; en 1860, dans l’üle d’Axholme seule, on avait 
colmaté plus de 4000 hectares. Le territoire du Marshland de York- 
shire, dans le voisinage immĂ©diat de Axholme, et celui situĂ© Ă  l’est 
de la Trent (5 000 hectares), ont été complÚtement colmatés depuis 
le commencement du siĂšcle. 

Le terrain soumis au warping est endigué de tous les cÎtés, au 
moyen de levĂ©es faites en terre que l’on extrait sur place. Ces levĂ©es 
ont une pente qui varie de 1,20 Ă  1",50 pour 1 de hauteur per- 
pendiculaire, et une largeur Ă  la crĂȘte qui dĂ©pend de la force des 
marées ; mais le plus souvent, elle est de 0",60 à 0,90. Aussi bien 
la hauteur que la largeur des digues se calculent, du reste, d’aprùs 
le niveau des eaux vives, pour qu'on puisse les introduire ou les 
exclure Ă  volontĂ©, comme aussi d’aprĂšs la surface de l’enceinte du 
terrain Ă  colmater et le volume des eaux. 

Suivant les dimensions du terrain endigué, on ménage une ou 
plusieurs Ă©cluses ; le plus souvent, on en pratique deux, l’une 
(floodgate) pour introduire la marĂ©e, l’autre (clough) pour lĂ©va- 
cuer. La surface, pour deux Ă©cluses, est comprise entre 5 et 6 hec- 
tares. À marĂ©e montante, l’écluse d’accĂšs s'ouvre et livre passage Ă  
l’eau dans le canal principal, dont la surface est environ trois fois 
plus grande, afin d’éviter toute rĂ©sistance Ă  l'Ă©coulement, tandis que 
la vanne de dĂ©charge est maintenue fermĂ©e par le poids de l’eau 
mĂȘme qui monte. À marĂ©e descendante, l’action inverse se produit. 
L’écluse de dĂ©charge est construite de maniĂšre que les vannes fonc- 
tionnent automatiquement à marée basse, entre le reflux et le flux 
suivant, et l’eau retourne à la riviùre, en curant les canaux dans les- 
quels elle a opĂ©rĂ© le dĂ©pĂŽt de matiĂšres. L’écluse d’accĂšs est placĂ©e 
à un niveau tel que les eaux vives seules peuvent entrer dans l’en- 
ceinte ; c’est-à-dire que le seuil est plus haut que le niveau des 
marées de mortes eaux. Parfois, il convient de planter en avant de 
la digue, du cÎté de la riviÚre, quelques arbres, des saules notam- 
ment, qui brisent la vague et facilitent l’atterrissement au pied de la 
digue. 

Le canal principal d’amenĂ©e est tracĂ© jusqu’à l'extrĂ©mitĂ© opposĂ©e 
du terrain ; mais pour empĂȘcher que le dĂ©pĂŽt ne s’accumule Ă  l’en- 


254 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


trée et sur son parcours, on pratique des saignées latérales qui con- 
duisent l’eau directement et plus rapidement sur les autres points 
Ă©loignĂ©s, de façon Ă  Ă©galiser l’atterrissement. Il faut toujours avoir 
soin, lors de l’évacuation des eaux, de ne laisser la nappe que sur 
l'Ă©paisseur voulue, afin de ne pas empĂȘcher l'accĂšs des eaux de Ja 
marée suivante. 

Dans l’üle d’Axholme, tout propriĂ©taire dont les terres bordent un 
des canaux publics de colmatage, peut se servir des eaux en perçant 
la digue; mais s’il v a opposition, il est tenu d’acheter le terrain de 
la dérivation. Le paiement de ce terrain se fait au prix d'usage, et 
celui de la percée dans la digue, à demi-prix ; mais comme le ven- 
deur conserve la propriĂ©tĂ© de la digue et le droit Ă  l’herbe, l'mdem- 
nité est plus que suffisante. De plus, tout propriétaire qui établit 
une Ă©cluse sur la rive doit s'engager vis-Ă -vis des commissaires 
(Sewers commissioners) Ă  payer tous dommages, en cas d'accident. 

On n’emploie d'ordinaire que les eaux vives ou malines, parce 
qu’elles ont assez de reflux pour dĂ©gager les canaux et Ă©viter leur 
obstruction. 

Le colmatage commence généralement en juillet, et dure tout l'été. 
Les digues, les Ă©cluses et les canaux sont mis en Ă©tat avant la sai- 
son, afin de ne pas perdre l’avantage d’aucune des marĂ©es de vives 
eaux. L'Ă©tĂ© est la saison prĂ©fĂ©rĂ©e, parce que les colmates s’égouttent 
plus vite et que les marĂ©es sont moins mĂ©langĂ©es d’eaux douces. Il 
n’est pas rare, en n’ayant recours qu'aux eaux vives, d'obtenir 0",45 
d'Ă©paisseur de limon en un an, moyennant une seule Ă©cluse, sur un 
compartiment peu Ă©tendu. On compte, dans l’üle d’Axholme, sur 
0,80 Ă  0,90 d'Ă©paisseur en deux ans. Lorsque la couche tour- 
beuse, de 2,50 à 3 mÚtres, a été colmatée, comme dans les Crowle 
Moors, le sol s’affaisse aprĂšs quelques annĂ©es de culture, et il de- 
vient nécessaire de colmater une seconde fois. 

À la distance de 35 ou 6 kilomùtres de la riviùre, le limon est 
encore assez abondant pour que l’on essaye de colmater avec chance 
de rĂ©ussite, mais les canaux d’amenĂ©e doivent alors ĂȘtre trĂšs spa- 
cieux, d’une largeur de 8 à 10 mùtres. Il importe, en effet, que la 
masse d’eaux vives soit rapidement introduite pendant le flot, et 
s'écoule par un canal à large section entre deux marées. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 255 


Il est facile de déterminer la section à donner aux écluses, en 
recourant aux formules basées sur le débit en mÚtres cubes par 
seconde ; mais on conçoit que plus les dimensions des vannes sont 


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Fig. 4. 


fortes, plus la dépense est grande quand le terrain à warper est peu 
Ă©tendu. 
Les vannes sont souvent automatiques; c’est-Ă -dire que les marĂ©es 


296 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


montantes ferment par leur pression la vanne de décharge elouvrent 
la vanne d’amenĂ©e. Le contraire a lieu dans les marĂ©es basses. 

La figure 4 reproduit le plan d’une opĂ©ration de colmatage sur 
les bords de la Trent; les cotes de nivellement sont en mĂštres : 
ab est la digue de riviĂšre, et cegh le canal principal d’amenĂ©e, 
servant également à la décharge des eaux. Le terrain à warper est 
partagé en six compartiments; les flÚches indiquent la direction que 
suit l’eau dans les canaux pendant les marĂ©es montantes. 

La hauteur de l’eau qui recouvre le terrain varie naturellement 
suivant son niveau par rapport Ă  celui des eaux vives ; quand cela 
est possible, on la maintient entre 0",90 et 1,50, car la proportion 
de limon dĂ©pend en somme de l’épaisseur de la nappe d’eau de ma- 
rĂ©e ; mais on obtient le mĂȘme rĂ©sultat en prolongeant l’opĂ©ration 
avec des nappes moins profondes. 

Il est d’usage de ne colmater que deux ou trois piùces de terrain 
chaque annĂ©e, de façon Ă  Ă©tendre sur un certain nombre d’annĂ©es 
l'opĂ©ration de colmatage d’un domaine. Le limon, ou la colmate, 
exige quelque temps avant de résister sous les pieds; 1l y a de graves 
inconvénients à commencer la culture avant qu'il soit suffisamment 
épais et naturellement drainé. 

Le coût du colmatage est trÚs variable suivant la situation des 
terrains relativement Ă  la riviĂšre. | 

Arthur Young regardait comme un maximum le coût de 350 à 
000 fr. par hectare. Or, l'évaluation exacte de la dépense comprend 
non seulement les frais de construction des digues, des canaux, des 
vannes, etc., mais encore la surface que les travaux exécutés per- 
mettront de cultiver Ă©conomiquement. En effet, avec un mĂȘme 
nombre de vannes, ou bien, avec un nombre plus ou moins grand 
de vannes dans une enceinte déterminée, on pourra beaucoup di- 
minuer le coût général, si la surface est étendue. 

Day estimait qu’en dĂ©pensant de 120 Ă  250 fr. par hectare, dans 
les meilleures conditions, on créait des terres dont la valeur aug- 
mentait au décuple; plus le sol primitif est mauvais, ajoutait-il, 
tout en Ă©tant permĂ©able, et plus il s’enrichit par le colmatage. Des 


1. Pareto, Irrigation et assainissement, t. If, p. 1040. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE, 251 


terrains valant Ă  peine 300 fr. par hectare ont obtenu par le colma- 
tage une plus-value de 2500 et 3 000 fr., due aux riches et abon- 
dantes rĂ©coltes qu’ils produisent sans le secours d’aucuns engrais, 
pendant nombre d'années, et à la possibilité de les limoner de nou- 
veau. Il importe, pour cela, que le terrain soit toujours soigneuse- 
ment entretenu, au point de vue des plantes adventices et des drains 
qui Ă©gouttent les eaux, quand ils ne servent plus au colmatage. 

Dans l'ile d’Axholme, le coĂ»t du colmatage des terres qui longent 
les canaux publics (creusĂ©s lors de l’enclĂŽture en 1795), ne s’élĂšve 
pas au-dessus de 130 fr. par hectare ; mais ailleurs, quand on doit 
compter la dépense des canaux, des éciuses, etc., le coût atteint de 
700 à 1 200 fr. ; le sol inculte et stérile avant le colmatage acquiert, 
il est vrai, une valeur de 4 000 et 6 000 fr. par hectare *. D'ailleurs, 
la qualité des terres colmatées varie beaucoup. Au voisinage des ca- 
naux, elles sont plus sablonneuses que plus loin, et le rendement 
agricole se ressent de la proportion de carbonate de chaux et d’ar- 
gile du terrain primitif, ou mieux, du sous-sol. 

Quand le warping est achevĂ©, Ă  la fin de l’annĂ©e, on donne un 
léger labour ou hersage, pour installer des bandes de 3",60 de lar- 
geur que l’on laisse en jachùre pendant tout l’hiver. L’on sùme au 
printemps, le plus souvent, des graines de prairie et d’avoine mĂ©- 
langĂ©es ; on coupe l’avoime, les moutons pĂąturent l'herbe pendant 
deux annĂ©es, en fertilisant le sol, et permettent Ă  l’excĂšs de sel de se 
dissoudre. La récolte suivante est fournie par le blé qui reste pen- 
dant plusieurs annĂ©es consĂ©cutives. Il arrive que l’on rĂ©colte avec le 
blé, dÚs la premiÚre année, du trÚfle blanc, venu spontanément au 
milieu d’une foule d'herbes adventices telles que, moutarde, cres- 
son, céléri sauvage, patiences, chardons, etc. Le point essentiel est 
d’assurer un bon drainage aux sols qui viennent d’ĂȘtre colmatĂ©s. 

La premiÚre récolte, trÚfle rouge ou blanc, mélangée avec du 
ray-grass et maintenue pendant deux années, consolide le sol par 
leutrage et le prépare à recevoir le blé. Les pommes de terre et le 
chanvre ne réussissent pas dÚs le début ; le sol est trop froid*?. Tou- 


{. À. Clarke, Farming of Lincolnshire, loc. cil. 
2. Loudon, CyclopĂŠdia of agriculture, p. 664. 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — r. 17 


258 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


tefois, sur la rive orientale de la Trent, on suit un assolement qui 
consiste en : 1° graines fourragÚres avec quelque peu de navette ; 
90 fÚves; 3° blé; 4 chanvre et 5° blé; puis une jachÚre nue pour se 
débarrasser du chiendent qui se propage avec une activité remar- 
quable. Clarke estime que la valeur des terres colmatées est sur- 
faite : lorsque le blĂ© se vend Ă  25 fr. l’hectolitre, la rente locative 
de ces terres ne devrait pas surpasser 120 fr. par hectare *. 


Drainage des colmates. — Tous les atterrissements n’ont pas un 
égal besoin de drainage ; il faut considérer la profondeur du dépÎt, 
la nature du sous-sol et la nature de l’alluvion elle-mĂȘme. 

Parkes constate qu’à l'embouchure de l’'Humber, l'argile, dans 
les atterrissements, prédomine sur la silice, et que l'inverse a lieu 
aux environs de Goole et de Thorne, oĂč les alluvions sont formĂ©es 
par l’Ouse. 

L’alumine des atterrissements de l’'Humber est trùs belle et trùs 
hygroscopique. AprĂšs un mois d’une Ă©vaporation Ă©nergique et de 
sĂ©cheresse (mai Ă  juin), l’eau se montre dans le sol Ă  0,45 de la 
surface, et les conduites de drainage placées à 1",20 et 1,80 de 
profondeur suivant la pente, avec 12,50 d'intervalle, débitent 
copieusement. Toutefois, dans son état primitif d'humidité, pendant 
la saison sĂšche, le mĂȘme sol se crevasse aussi largement et aussi 
profondément que les argiles les plus fortes. 

Selon que les dĂ©pĂŽts de l’'Humber sont formĂ©s par la Trent, ou 
par l’Ouse, et renferment des proportions diffĂ©rentes d'argile, de 
silice et de sel, la fertilitĂ© est diffĂ©rente. Cette remarque s’applique 
en gĂ©nĂ©ral Ă  tous les cours d’eau, suivant la distance plus ou moins 
grande de leur embouchure. 

A Bridgewater, dans le comté de Somerset, la riviÚre Parrot a 
formé au milieu du petit bras de mer qui avançait jadis dans les 
terres, des atterrissements, aujourd’hui couverts de riches prairies, 
toujours verdoyantes. Or, c’est à un mille au-dessus, et à un mille au- 
dessous de la ville de Bridgewater, sur les bords mĂȘmes de la riviĂšre, 
que lon trouve le limon servant de poudre de tripoli dans l'usage 


1. Farming of Lincolnshire, loc. cit., p. 379. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 259 


domestique (sous le nom de Bath brick). Sauf en ces deux endroits, 
à la jonction des anciennes eaux salées et des eaux douces, on ne 
trouve plus les substances propres à donner par leur réunion le poli 
à la coutellerie et aux ustensiles en métal ; l'efficacité est attribuée 
aux dĂ©bris siliceux des infusoires dĂ©truits par l’eau de mer’. L’at- 
terrissement formé plus avant dans les terres, ou plus prÚs de la 
mer, n’a pas les mĂȘmes propriĂ©tĂ©s. 

Dans certaines alluvions humides, plus rapprochées des embou- 
chures, oĂč domine le sel, un drainage profond et complet peut seul 
permettre d’en accroĂźtre la fertilitĂ©. Aux environs de Patrington 
(Humber), on commence par les abandonner pendant trois ans Ă  ce 
que l’on appelle l'herbe aux moutons ; puis on laboure et on em- 
blave en navette, qu’on laisse venir à graine, au lieu de la donner 
aux brebis portiÚres. Cette plante est trÚs propre à débarrasser le 
sol de l’excùs de sel, et fournit d'excellents rendements. On sùme 
ensuite du blé, qui, malgré la cristallisation saline encore apparente 
à la surface, donne jusqu’à 22 hectolitres par hectare, et les cul- 
tures aprÚs le blé ne sont soumises à aucun assolement pendant plu- 
sieurs annĂ©es oĂč l’on se passe d’engrais. 

Les alluvions plus Ă©loignĂ©es des embouchures demandent Ă  ĂȘtre 
drainées avec discernement. Un profond drainage, trÚs énergique, 
soutire l’eau et l’entraüne loin de la surface, lorsqu'elle est en 
excĂšs. En temps de sĂ©cheresse, on maintient le niveau de l’eau 
dans les fossés, en y introduisant celle des drains des terres supé- 
rieures, pour qu’elle reste prĂšs de la surface, Ă  la portĂ©e des ra- 
eines. 

Parfois on se borne Ă  exploiter les atterrissements par piĂšces de 
4 hectares, entourés de fossés découverts dont la pente est calculée 
de façon Ă  procurer au sol l’égouttement que l’on regarde comme 
suffisant ; pendant les sĂ©cheresses on fait emplir d’eau ces fossĂ©s. Il 
est Ă©vident qu’un systĂšme combinĂ© de drainage profond et d’irri- 
gation souterraine est à tous égards préférable pour de pareils sols, 
dans la saison humide et pendant les chaleurs”. 


1. David Page. Economic geology, 1874, p. 202. 
2 J. Parkes. Du drainage profond. (Journ. agric. prat., 1850, p. 421.) 


260 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 
b) GĂ©ologie. 


Le sol d’alluvion, le long de la riviĂšre Trent, Ă  l'est, est extrĂȘme- 
ment riche, jusqu’à la rencontre des landes tourbeuses, au pied des 
collines de grÚs rouge et du lias; mais ces landes ont été colmatées 
sur une épaisseur de 0",45 à 0",90 et transformées en terres de 
premiÚre qualité pour toutes espÚces de récoltes. La bande de ter- 
rains riches qui cÎtoie la Trent représente une surface de 3000 à 
4000 hectares. 

Dans l’üle d’Axholme 6 000 hectares de terres colmatĂ©es, en partie 
par la Trent et en partie par les eaux des marées, reposent sur 
un sous-sol de sable et de tourbe : elles sont remarquablement 
fertiles. La colmate sur sable blanc ou gris passe pour la plus riche, 
à cause du drainage naturel du sous-sol. PrÚs de Alihorpe, le dépÎt 
warpĂ© sur plusieurs pieds d'Ă©paisseur recouvre les dĂ©bris de forĂȘts 
de la lande tourbeuse ; ailleurs, cette tourbe en décomposition re- 
monte à la surface. Dans le comté de York, et sur les limites du 
Nottingham et du Lincoln, la mousse (moss) tourbeuse à jusqu’à 
3 mÚtres et » mÚtres d'épaisseur, comme dans le Thorne Waste ; 
elle couvre directement le sable. Des forĂȘts entiĂšres ont disparu sur 
une Ă©tendue de plus de 4000 hectares, pour donner naissance Ă  ces 
landes de tourbiùres, par le fait probable de l’abaissement du sol 
primitif, car on ne saurait admettre de variations dans le niveau de 
l'OcĂ©an. Les mĂȘmes phĂ©nomĂšnes ont eu lieu sur la Trent, dans l’in- 
térieur des terres, comme dans les Fens et les Marshes directement 
accessibles aux marées. 

La vallée de la riviÚre Ancholme (11 000 hectares) appartient à 
la formation tourbeuse, avec sous-sol d'argile, comme celle des 
Marshes du midi du Lincoln. En aval, c’est-à-dire en se rapprochant 
de l’'Humber, le sol est une alluvion foncĂ©e, un mĂ©lange d’argile, 
de gravier et de matiĂšres vĂ©gĂ©tales que l’Humber a dĂ©posĂ©s avant 
l’endiguement des rives. A l’écluse de Ferriby, l'Ă©paisseur de latter- 
rissement est de plus de 10 mĂštres. L’argile mĂȘme qui constitue le 
sous-sol de la vallée entiÚre paraßt avoir été également déposée par 
les eaux de la mer remontant l'Humber, Ă  la rencontre des eaux 
douces qui drainaient les collines. La tourbe Ă  Worlaby et dans les 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 261 
Carrs adjacents”, apparaüt au-dessus de largile, qu'un labour pro- 
fond permet d'atteindre. Dans les Carrs de Roxby et d’Appleby, sur 
la rive ouest de lAncholme, la tourbe a 10 centimĂštres d'Ă©paisseur ; 
elle s'Ă©tend ainsi jusqu’à Brigg au midi, mais en s’écartant de l’ar- 
oile et en acquérant une texture spongicuse due aux fragments de 
bois et d'herbes en décomposition. 

De l’autre cĂŽtĂ© de l’Humber, en face Ferriby, un grand banc de 
sable (40 hectares), Old Warp, a été endigué; les autres bancs for- 
més dans la riviÚre, par les dépÎts des marées, ne sont endigués 
qu'autant que le courant des eaux vives peut ĂȘtre maĂźtrisĂ© par des 
digues dans le chenal dont le lit est aussi mobile. 

A Winteringhan, les lais d’alluvion sont Ă©troits, mais le sol, d’une 
épaisseur de 1,80, est de qualité exceptionnelle. 


2. — La riviùre Trent. 


La riviĂšre Trent prend sa source dans le nord Staffordshire, Ă  
240 mĂštres au-dessus du niveau de la mer; sur une longueur de 
276 kilomÚtres, elle draine un bassin de 10 600 kilomÚtres carrés, 
qui recouvre principalement les terrains du nouveau grĂšs rouge. 

À parĂŒr de Newton, oĂč la Trent forme la limite du comtĂ© de Lin- 
coln, jusqu’à son confluent avec l'Ouse, sur une cinquantaine de ki- 
lomùtres, la pente de la riviùre, le long du cours tortueux qu’elle 
décrit, est trÚs faible. Aussi, les inondations sont-elles fréquentes et 
parfois dĂ©sastreuses, comme en 1875. L’eau des crues submerge de 
vastes superficies en aval de Newark, mais surtout, dans le comté 
de Lincoln, les alluvions richement cultivées de l'embouchure. La 
marée, qui remonte librement dans l'Humber, pénÚtre dans la Trent 
jusqu’à Gainsborough, et par les vives eaux, le flot, animĂ© d’une vi- 
tesse de plus de 15 kilomÚtres à l'heure, donne lieu périodiquement 
au phénomÚne du mascaret (bore ou egre comme on l'appelle), dont 
les vagues courbes surpassent de 1",20 les bancs et les hauts-fonds 
du lit inférieur. 


1. La désignation Carr, dans la région de l'Humber, correspond à celle de Fen du 
Cambridge. 


262 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Axholme Level. — En aval de Gainsborough, la Trent entre dans 
le district des Fens du nord, dont les terrains, situés à un niveau 
inférieur à celui de la marée haute dans la riviÚre, comprennent le 
Axel Carr oĂč Haxey Carr, le Hatfield Chace, le Thorne Level, etc. 
Au milieu de cette vallée occupée jadis par les marais, émerge un 
territoire sous forme d’ilot, Axholme Isle, dont le sol appartenant 
au nouveau grÚs rouge est recouvert par les marnes irisées du 
Lrias. 

Sur la rive orientale de la Trent, immédiatement en aval de Gains- 
borough, un district de 1 000 hectares environ, le Morton Carr, 
autrefois humide et inculte, est aujourd’hui colmatĂ© et dessĂ©chĂ©. 
Les travaux d'amélioration commencÚrent à la fin du siÚcle dernier ; 
des canaux de ceinture furent creusĂ©s pour recevoir les eaux d’é- 
goultement des terrains supérieurs, et des canaux transversaux pour 
le colmatage des terrains bas. Ces derniers n'avaient qu’une chute 
de 0,60 Ă  l’étiage de la Trent, pour Ă©couler les eaux Ă  Ravensfleet. 
GrĂące au colmatage, le terrain s’exhaussant, le niveau du dessĂ©che- 
ment s'est amélioré. En 1801, une loi spéciale autorisa les com- 
munes de Morton, Walkerith, East Stockwith, Blyton, Warton, Pil- 
ham et Gilby à enclÎturer le Morton Carr, aprÚs desséchement. Une 
loi plus rĂ©cente a autorisĂ© l'Ă©tablissement d’une puissante machine 
Ă  vapeur pour l'Ă©puisement des eaux. 

Plus en aval, sur la mĂȘme rive orientale, les terres basses (3 600 
hectares environ) se drainent par gravitation dans la riviĂšre Eau, 
qui descend des hautes terres de Corringham, Scotter, etc., et 
débouche dans la Trent, à Butterwick. Un grand nombre de canaux 
et de fossés déchargent leurs eaux par des écluses dans la riviÚre, 
et comme le sol de la rive a été successivement colmaté en aval 
de Butterwick, jusqu’à l’émissaire de la Trent, le drainage s'opĂšre 
dans la section inférieure, par la pente naturelle, sans moyens mé- 
caniques. 

Sur la rive occidentale de la Trent, en aval de Stockwith, com- 
pris entre le pied d’escarpement du lias et l’ancien cours du Don, 
un des affluents de l’Ouse, en face du district que nous venons de 
dĂ©crire, se trouve le territoire qui embrasse l’le d’Axholme, le 
Halfield moor, le Thorne moor, etc., couvrant en plaine 20 000 hec- 


‘ 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 263 


tares, sur lesquels 12 000 en terres basses, marécageuses, dont le 
dessĂ©chement remonte au rĂšgne d’Édouard IT Plantagenet (1327). 

Sous le rÚgne de Henri VI de Lancaster (6° année, 1428), une loi 
fut promulguée, prescrivant à l'instar des lois et coutumes observées 
dans le Romney Marsh, dans le comtĂ© de Kent, des rĂšgles d’aprĂšs 
lesquelles les commissaires de drainage devaient procéder au dessé- 
chement des Carrs du nord Lincolnshire. Pendant de longues années, 
les commissaires, en vertu de cette loi, rendirent des ordonnances 
concernant la construction et l'entretien des digues, et la fixation des 
salaires à payer pour les travaux de curage, de tranchées, etc., en cas 
d'urgence. Malgré cela, jusque sous Charles [°° Stuart (1625-1649), 
le pays fut submergé périodiquement. Plus de 20 000 hectares se 
trouvaient constamment sous l’eau, à une profondeur de mùtre et 
davantage. On naviguait en bateau de la riviùre Idle jusqu’à la Trent, 
à travers les marais, pour porter les provisions et les récoltes. 

Le roi Charles I, seigneur de Axholme, de Hatfield-Chace, de 
Dykes-Marsh, aussi bien que les seigneurs de Wroot et Finningley, 
ne tirant aucuns revenus de leurs propriétés, résolurent de faire 
opérer le desséchement, et engagÚrent les services de l'ingénieur 
hollandais Cornelius Vermuyden, chargé plus tard des opérations 
du Bedford Level. 

L'inondation permanente était due au débordement des cours 
d’eau l’Idle, le Thorne, le Don, et du canal Bycur's Dyke, qui s’en- 
trecroisent sur des terres d’un niveau infĂ©rieur Ă  celui des hautes 
eaux de la Trent. Vermuyden songea d’abord Ă  faire Ă©couler sĂ©pa- 
rément dans la Trent les eaux des terres supérieures traversant les 
marais et celles des canaux obstrués par les limons des marées. Ces 
eaux furent écoulées dans le Snow canal et dans la riviÚre Al{horpe, 
au moyen d’écluses qui s’ouvraient seulement Ă  marĂ©e basse. Le 
reste du desséchement fut opéré en 5 ans, au prix de 1400000 fr. 
Une partie des terres desséchées fut réservée au Roi, et Vermuyden, 
avec ses associés, reçut un tiers de la surface, 10 000 hectares envi- 
ron, pour la rémunération de ses services ; une société fut formée 
plus tard dans le but d’entretenir les travaux, à l’aide d'une taxe 
proportionnelle par hectare. 

La plus grande partie de Huxey Carr, ensemencée en navette et 


264 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


en froment, donna pendant trois années consécutives de magnifiques 
récoltes. Les terres marécageuses, qui ne valaient pas 1 fr. 50 c. par 
hectare, réalisÚrent, aprÚs desséchement, le prix de 30 fr., et quand 
les maisons et les bùtiments d'exploitation eurent été construits, les 
terres améliorées se traitÚrent à 40 et à 45 fr. l'hectare. 

Les conditions de l’agriculture avaient progressĂ© si rapidement 
dans le Trent Level, que le blé rendait couramment 22 hectolitres, 
le seigle 21 hectolitres, l’avoine 55 hectolitres à l’hectare, pendant 
quatre et six années consécutives. Les salaires avaient doublé. Deux 
cents familles de réfugiés protestants venant des Flandres et de 
France avaient reçu des terres dont elles tiraient le plus grand parti, 
lorsqu’en 1642 Ă©clatĂšrent les Ă©meutes populaires, comme dans les 
autres parties du royaume, et les paysans, voulant reconquérir les 
droits de vaine pĂąture, d’affouage, de tourberie, de pĂȘche et de 
chasse, dont ils avaient été frustrés, mirent au pillage toute la con- 
trée des Garrs et des marais desséchés. Les arrangements contractés 
au nom du roi, dans le but peu avouable d'augmenter sa liste civile 
et d'entretenir les grandes chasses de Hatfeld, avaient exaspéré les 
populations. Pour le manoir d'Epworth, dont les terres occupaient 
9 420 hectares, 370 propriétaires qui avaient adhéré au projet de 
desséchement n'avaient reçu au voisinage des villes et des bourgs 
habités, que 2 400 hectares (Open field lands), et le reste avait été 
distribué aux entrepreneurs. Plus des deux tiers des intéressés, en 
dehors du territoire de Epworth, avaient toutefois refusé de sous- 
crire aux conditions de l’entreprise. Aussi, lorsque le Parlement 
mĂȘme eut donnĂ© l’exemple de l’insubordination aux dĂ©crets du sou- 
verain, les intĂ©ressĂ©s s’armĂšrent en masse pour se faire justice. C’est 
alors que, pendant des semaines entiĂšres, s’emparant des Ă©cluses, 
ils laissÚrent déborder les eaux des marées par le Snow canal. La 
Trent, Ă  Misterton, rompant les digues, submergea le Level tout 
entier, noyant le bétail et les récoltes et effondrant les bùtiments et 
les maisons d'habitation des fermiers. En 1645, les habitants de l’üle 
de Axholme détruisirent la plus grande partie des digues, com- 
blĂšrent les canaux et menĂšrent leurs bĂȘtes paĂźtre dans les champs 
de céréales des nouveaux colons. 

Les émeutiers déboutés continuërent les troubles, malgré la force 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 265 


armée envoyée contre eux, refusant l'impÎt et saccageant les pro- 
priĂ©tĂ©s qui avaient Ă©tĂ© Ă©pargnĂ©es, Jusque vers l’annĂ©e 1714, quand 
fut sanctionnée la loi sur les émeutes. 

A la fin seulement du siÚcle dernier, les travaux furent restaurés 
et quelque peu étendus. Une loi datée de 1795 autorisa les inté- 
ressés à se taxer en vue de modifier le systÚme appliqué par Ver- 
muyden, c’est-à-dire, en creusant de nouveaux canaux à double fin, 
pour drainer et pour colmater, et, aux termes d’une clause spĂ©ciale, 
en utilisant les eaux au colmatage des terres adjacentes. Le grand 
canal coulant dans la direction ouest, de la Trent vers Keadby, fut 
établi conformément à cette loi, dans le but de fournir les eaux limo- 
neuses par deux canaux secondaires parallùles, et en cas d’obstruc- 
tion, de faire servir les eaux Ă  curer les drains en chasse, afin de 
faciliter le warping. 

Dans l’üle d’Axholme, la partie basse qui s’écarte de la Trent 
baisse de niveau progressivement ; la partie élevée qui représente 
les deux cinquiĂšmes de la surface totale occupe le centre, et sauf 
entre Crowle et Belton, elle est ondulée en petites collines qui 
s’élalent vers l’ouest. 

Déjà, à une époque ancienne, pour se défendre contre les crues 
de la Trent, les moines de Selby avaient fait construire un fort bar- 
rage en bois sur la Trent, en travers du ruisseau Mare Dyke. Le su- 
périeur du cloßtre, John de Shireburn, voulut substituer plus tard au 
barrage Ă©levĂ© par son prĂ©dĂ©cesseur, l’abbĂ© de Gaddesby, un ouvrage 
en pierres, mais les commissaires du roi Henri V (1640) intervin- 
rent, estimant que les murs ne résisteraient pas au flot des marées, 
et décidÚrent les moines à refaire un barrage en charpente, de fort 
équarrissage, avec un double pertuis de 1°,20 sur 2 mÚtres, en 
mĂȘme temps qu’à Ă©lever une double digue sur les rives de la Trent”. 
Ce sont les plus anciens travaux dont il soit fait mention. 

Le dessĂ©chement des bas terrains de l’Axholme, Ă  l’ouest de la 
digue Trent Bank, s'opĂšre par les canaux Folly Drain, New Idle 
Drain, et d’autres moins importants qui les traversent et dĂ©versent 
les eaux à Althorpe, ou prùs d’Althorpe. Quant aux terrains de la 


1. Dempsey, Drainage of districts and lands, p. 67. 


266 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


partie septentrionale, ils sont desservis par des canaux rejoignant 
directement la Trent. 

Vermuyden avait projeté des canaux en ligne droite, pour écouler 
les eaux des riviÚres qui décrivaient de trop longs circuits en raison du 
niveau trop bas des terres ; mais 1l commit l'erreur de choisir Le ca- 
nal Snow et le canal d’Althorpe comme principaux collecteurs. Or, à 
partir d’Althorpe jusqu’à son embouchure, la Trent a une pente de 
0",001 par mĂštre, qui s’est trouvĂ©e perdue pour le dessĂ©chement du 
district. Les eaux eussent Ă©tĂ© conduites par un canal principal jusqu’à 
l’Ouse, que la chute aurait Ă©tĂ© augmentĂ©e de 1",50 Ă  1,80, per- 
meltant aux terrains bas situĂ©s Ă  l’ouest et au midi d’écouler leurs 
eaux par gravitation, au lieu de recourir à l'épuisement mécanique. 

Jusqu'Ă  1l y a cinquante ans, les fermiers des basses terres de 
l'ile d’Axholme ont employĂ©, au lieu de pompes actionnĂ©es par des 
moulins Ă  vent, des Ă©copes mues par des chevaux qui Ă©taient abso- 
lument insuffisantes pendant la saison des pluies. Depuis lors, on Ă  
installé partout des machines à vapeur, faisant mouvoir des roues à 
palettes, au lieu de pompes trop sujettes à réparation. 

Indépendamment des machines qui font le service public du des- 
séchement des marais de Soss, de Heck-Dyke et de Hirst-Priory, 
représentant ensemble une force de 155 chevaux-vapeur, pour 
4 800 hectares, les autres machines de moindre puissance, réparties 
sur les exploitations particuliĂšres, figuraient, en 1860, avec une 
force totale de 110 chevaux, employée à dessécher 2 200 hectares, 
comme 1l résulte du tableau ci-aprÚs. 

La dĂ©pense d’épuisement, par machine Ă  vapeur, varie selon la 
saison et l’évaporation ; elle est plus grande en Ă©tĂ© qu’en hiver; on 
l’évalue en moyenne de 6 fr. 50 c. Ă  15 fr. par hectare’. 


1. Suivant une Ă©valuation fournie Ă  Algernon Clarke, par un fermier de Axholme, 
employant une machine Ă  vapeur de 5 chevaux, les frais d'Ă©puisement par hectare 
seraient les suivants : 


Coût de la machine avec transmission et de la roue à palettes, ete. 


6250 F2 SO 20 Ep MODS ARR LEE a ee SES TES 
Houille: 10 tonnes Ă  12 fr. 50 c. (0 fr. 75 c. par hectare) . 125 
Salaire; \graissage téntretien, "ete: Lin RENTE 

Total:pour 162-hectires Ce NS 75 


Soit 5 fr. 40 c. par hectare. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 267 


Axholme Level. 


Détail des machines en service pour le desséchement (1860). 


3e Re HAUTEUR 
» S J 
DES LOCALITES HOCSRE 


en d’épui- ÉMISSAIRES. 


DE : 
ou des maximum. 


propriétaires. densochése chevaux. | sement. 
2 machines 

180 25roues 3,02 |Ă  Stockwith, dans la Trent. 
Heck-Dyke. . 15 1 roue dans la Trent. 
Hirst-Priory . i Ă  Althorpe, dans la Trent. 
Atkinson dans la Trent. 
Kelsey . 
Low Level. 
Belk . 
Jaques . 
Broughton . 
Butterwick. . 1 pompe 
Kelfield. . . 5 1 roue 
Carr . 3; i 
Pearson. 
Newland. . 
Gervase. 


- 


ET 


- 


- 


-_ 


2 
2 
2 
2 
2 
2 


2 
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ToTAUx. . 


Ua grand canal percĂ© entre Zdle-Stop et Trent-Fall, oĂč la Trent et 
l’Ouse dĂ©bouchent dans l’'Humber, eĂ»t permis de dessĂ©cher tous les 
terrains de Axholme et ceux adjacents, dans les comtés de York et 
de Nottingham, sans recourir aux machines. La chute eût été de 
3 mĂštres en contre-bas de celle d’Althorpe, et le collecteur n’eĂ»t 
reçu que les eaux des crues provenant des basses terres. D’ail- 
leurs, la Trent étant étroite à Althorpe, les marées y montent à une 
grande hauteur; tandis qu'Ă  l'embouchure, la largeur Ă©tant plus 
grande, les flots de marée ont peu d'influence sur la baisse des 
eaux Ă  l’étia ge. 

Le canal projetĂ©, muni d’écluses Ă  marĂ©e, aurait reçu Ă  dle-Stop 
les eaux de Bawtry, dans le Nottingham, qui sont déversées par le 
Bycar-Dyke Ă  Stockwith, et aurait pu ĂȘtre maintenu ainsi en bon Ă©tat 


268 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


de curage. En outre, les eaux de marée du canal auraient assuré le 
colmatage d’une surface de 8 000 hectares ; ce qui devient impos- 
sible en employant les eaux de la Trent. 

Les ingénieurs Smeaton, en 1776, et Rennie, en 1813, soumirent 
les devis de ce canal. En 1828, un comité spécial proposa sur base de 
ces devis le desséchement de 40 000 hectares, le colmatage de 6 500 
hectares avec une plus-value annuelle de 500 000 fr. pour les terres, 
etune navigation plus facile, moyennant une dépense de 8 750 000fr.; 
mais, devant ce chiffre Ă©norme, les propriĂ©taires intĂ©ressĂ©s n’eurent 
pas le courage de tenter une entreprise aussi fructueuse *. 


3. — La riviùre Don. 


La riviĂšre Don, qui a Ă©tĂ© dĂ©rivĂ©e dans l’Ouse par une coupure de 
8 kilomÚtres de longueur, appelée Dulch River, et la riviÚre Idle, 
un des nombreux affluents de la Trent, coulaient jadis directement 
dans l’'Humber. On retrouve non seulement l’ancien lit du Don, en 
aval du confluent de la Went dans l’Ouse, mais les lits d’autres bras 
qui communiquaient avec l’estuaire. Un de ces bras, peut-ĂȘtre le 
bras principal, avait un cours torlueux Ă  partir de Thorne oĂč la 
riviÚre se détourne actuellement dans une direction nord, et sui- 
vant la direction est-nord-est, depuis Crowle jusque dans la Trent, 
il aboutissait prĂšs de Adlingfleet. 

De son cÎté, la riviÚre Idle, qui descendait, passé Misson, dans la 
direction nord vers l’ancien lit du Don, oĂč elle se jetait Ă  5 kilo- 
mÚtres au sud-ouest de Crowle, a été également déviée par une cou- 
pure de Misson, Ă  West Stockwith. 

Il s'ensuit qu’un vaste territoire, sillonnĂ© jadis par les ramifica- 
tions de ces cours d’eau, dans le but de remĂ©dier Ă  l’obstruction du 
delta de l’'Humber, a Ă©tĂ© transformĂ© en marais que l’on a dĂ» assainir 
pour les rendre Ă  la culture. Ce territoire comprenant Thorney waste 
couvre prÚs de 620 kilomÚtres carrés, en jonction avec les Fens du 
Lincoln et les landes de l’autre rive de la Trent. 

Aussi bien Thorney waste que les autres atterrissements de l’an- 


1. À. Clarke, Farming of Lincolnshire, 1851, vol. XIL. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 269 


cien delta des riviĂšres Don et Idle, ont Ă©tĂ© l’objet de travaux consi- 
dĂ©rables de dessĂ©chement, de drainage et d’enclĂŽture. 


4. — La riviùre Ancholme. 


La riviĂšre Ancholme prend naissance Ă  Spridlington, dans les 
hauts plateaux qui séparent Lincoln de Market-Rasen. AprÚs avoir 
coulĂ© Ă  l’ouest, elle suit une direction vers le nord, reçoit Ă  Glen- 
tham les eaux d’un petit affluent, le Rasen, descendu des collines 
crayeuses de Tealby, et remonte en ligne droite, sur une longueur 
canalisée de 30 kilomÚtres, pour se jeter dans l'Humber, à lécluse 
Ferriby. 

La vallée longue et étroite de lAncholme contient environ 
11000 hectares de terrains d’un niveau infĂ©rieur Ă  celui des marĂ©es 
de vives eaux. Depuis Bishops Bridge situé à ce niveau, les terrains 
s’abaissent progressivement jusqu'à 1",37 au-dessous, à Kelsey ; 
puis Ă  2°,75, Ă  Brigg ; ils ne se relĂšvent qu’à 0,90 vers l’écluse. 

Quant au bassin de la riviĂšre, il s'Ă©tend sur plus de 80 000 hec- 
tares, dont 20 000 en plaine, Ă  16 kilomĂštres environ du confluent 
de la Trent et de l’'Humber ; 40 000 en collines crayeuses qui re- 
montent jusqu’à 39 kilomùtres, au nord et au sud de l’'Humber; ce 
sont les wolds; et 20 000 hectares en collines oolithiques, plus basses 
que les précédentes, qui partagent les deux vallées de la Trent et de 
VAncholme. Enfin, au sud, une formation alluvienne sépare les deux 
vallĂ©es de l’Ancholme et du Witham. 

La largeur de la vallée varie entre un kilomÚtre et demi, en amont, 
et » kilomÚtres, en aval. Le débit journalier du bassin est évalué à 
4 millions de mĂštres cubes, susceptibles de colmater, sur 0,06 d’é- 
paisseur, le sol de la partie marĂ©cageuse qui touche Ă  l’'Humber *. 

TrÚs anciennement endigué, pour contenir le flot des eaux de 
l’Humber, l’Ancholme, dont le cours Ă©tait particuliĂšrement sinueux, 
avait fini par s’obstruer, au point que, sous le rùgne d'Édouard II 
(1307), le chenal entre Brigg et Ferriby se trouvait réduit de 
12 mĂštres Ă  2 mĂštres de largeur. Les coudes de la riviĂšre, en amont, 


1. Ansted, Waler and waler supply, p. 313. 


210 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


étaient au nombre de 12 à 14, et quoique les eaux supérieures ne 
fussent pas aussi abondantes, puisque le dessĂ©chement n’était pas 
opéré, les débordements étaient périodiques. Sir William Dugdale a 
laissĂ© une carte de la vallĂ©e, datĂ©e de 1640, oĂč l’on retrouve encore 
les coudes et les sinuositĂ©s de l’Ancholme, avant l'exĂ©cution des tra- 
vaux de rectification. 


Ancholme Level. — Ce fut en 1635 (10° annĂ©e du rĂšgne de 
Charles [°) que Sir John Munson obtint pour lui et pour un groupe 
de grands propriétaires, ses associés, la concession du desséchement 
des Fens et des Carrs des deux rives de l’Ancholme ; il s’engagea à 
exĂ©cuter les travaux dans le dĂ©lai de six annĂ©es et Ă  installer l’émis- 
saire à Ferriby, de façon que les terres complÚtement asséchées 
fussent cultivables en prĂ©s et en prairies, moyennant l’abandon en 
toute propriété, exempte de taxes et d'impÎts, de 2 357 hectares. 

Trois ans plus tard, en 1638, le canal ayant été creusé sur 30 ki- 
lomĂštres, depuis Glentham jusqu’à l’Humber, et les canaux latĂ©raux 
fonctionnant, voire ceux exĂ©cutĂ©s mĂȘme du temps d'Édouard III 
(1397-1377), pour le desséchement des terres entre Elsham et Fer- 
riby, Sir John Munson et ses associés entrÚrent en possession de leurs 
terrains et les exploitÚrent jusqu'aux jours de la rébellion pendant 
laquelle les populations rurales tentĂšrent de ressaisir, les armes Ă  la 
main, les terres et les droits dont elles avaient été spoliées. 

AprĂšs ces temps de troubles, les travaux ne furent plus entretenus, 
les canaux s’obstruùrent, les alterrissements finirent par encombrer 
le lit de la riviÚre, et les inondations replacÚrent la vallée dans la si- 
tuation marĂ©cageuse oĂč elle se trouvait jadis. En 1767 finalement, 
une loi fut votée, autorisant la reprise des travaux en vue de la na- 
vigation et du drainage, et quelques années plus tard, malgré une 
charge annuelle, pour compte de travaux, de 7 fr. 70 c. par hectare, 
répartie sur 8000 hectares, la valeur locative des terres assainies 
remonta de 30 Ă  90 fr., au lieu de 5 Ă  10 fr. par hectare. 

Malgré cela, à la fin du siÚcle dernier, la pente générale était 
devenue trop faible; le desséchement laissa de nouveau à désirer, et 
force fut de faire appel à l'ingénieur des Fens, Rennie pÚre, pour 
sortir d'urgence d’une situation qui s’aggravait de jour en jour. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 211 


Le rapport de Rennie, remis aux intéressés en 1801, se fondait 
sur les mĂȘmes principes que ceux proposĂ©s, et appliquĂ©s plus tard, 
à l’assainissement des Fens que draine le Witham. Il concluait : 

1° A la rectification et à l’approfondissement de l’Ancholme cana- 
lisĂ©, pour obtenir la chute d’eau maximum ; 

2 A la construction d’une grande Ă©cluse Ă  marĂ©e, Ă  Ferribv; 

3° À l'exĂ©cution d’un canal de ceinture (catchwaler) sur la rive 
méridionale, destiné à recueillir séparément les eaux des terrains du 
niveau supérieur, avec une écluse spéciale pour la décharge de ces 
eaux dans l’'Humber. 

Les eaux provenant des hautes terres, animĂ©es d’une plus grande 
vitesse que celles des terres basses, Ă©lĂšvent le niveau de ces der- 
niĂšres et les empĂȘchent de se dĂ©charger aux Ă©cluses que l’on ouvre 
seulement dans l'intervalle des marées. Le canal de ceinture projeté 
par Rennie pÚre devait non seulement détourner les hautes eaux, 
mais fournir une réserve aux terrains inférieurs, en vue du colma- 
tage et de la navigation. 

Les conclusions du rapport de l’éminent ingĂ©nieur furent adoptĂ©es, 
mais exéculées en partie seulement. 

L’Ancholme fut rectifiĂ© ; le collecteur de ceinture ne fut creusĂ© 
que jusqu’à Brigg, et deux Ă©cluses Ă  sas furent Ă©difiĂ©es, l’une pour 
la navigation Ă  Hortestow Green, au point oĂč la riviĂšre dĂ©bouche 
dans les basses terres, et l’autre à Ferriby, sur l’'Humber, pour em- 
pĂȘcher l’envahissement des marĂ©es. Ces travaux incomplets furent-ils 
exécutés conformément aux plans de Rennie pÚre ? Toujours est-il 
que vingt annĂ©es plus tard, son fils, Sir John Rennie’, visitant le 
district, constatait que l’assainissement Ă©tait dĂ©fectueux ; le lit de 
l’Ancholme Ă©tait ensablĂ©, la navigation qui devait permettre aux cĂŽ- 
tiers du Yorkshire de remonter jusqu’à Bishops Bridge Ă©tait arrĂȘtĂ©e 
Ă  quelques kilomĂštres en amont de Brigg ; enfin, les travaux et les 
ouvrages d'art étaient dans le plus déplorable état. DÚs lors, Sir John 
Rennie recommanda, dans un nouveau rapport, daté de 1825 : 

1° D’approfondir et d’élargir sur tout son parcours l’Ancholme 
canalisĂ©, de façon Ă  l’approprier Ă  la navigation des bateaux cĂŽliers 


1. Aulobiography, loc. cût., p. 225. 


212 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONCMIQUE. 

de 2 mùtres de tirant d’eau, et à maintenir le flot jusqu’à 0",60 et 
0",90 au-dessus du niveau des basses terres, afin de prévenir les 
inondations et d'assurer l’écoulement des eaux de dessĂ©chement ; 

2 De donner 1",82 d’abaissement au seuil de l’écluse Ă  sas, pour 
permettre la remonte des bñtiments jusqu’à Bishops Bridge, et de 
faire prĂ©cĂ©der l’écluse d’un barrage, avec un bassin de rĂ©ception 
des sables charriés par les eaux supérieures ; 

3° De construire une nouvelle écluse à sas, à Ferriby, avec 1,82 
d’abaissement et 6 mùtres d'ouverture, en aval de l’ancienne, et de 
refaire les ponts avec de plus grandes ouvertures; 

4° De dessĂ©cher le collecteur de ceinture, pour le curer, l’élargir 
et le prolonger jusqu’au niveau supĂ©rieur extrĂȘme ; * 

9° De creuser un autre collecteur de mĂȘmes dimensions sur la rive 
nord, depuis a nouvelle Ă©cluse jusqu’à l'extrĂ©mitĂ© du district ; 

6° De munir d’un barrage à pertuis, avec puisard pour les sables, 
toutes les embouchures de ruisseaux ou de canaux dans les collec- 
teurs de chacune des rives. 

Ces travaux, adoptĂ©s par la commission de l’Ancholme Level, furent 
confiés aux entrepreneurs Jolliffe et Banks, sous la direction de 
l'ingĂ©nieur local Adam Smith, en vertu d’une loi portant la date 
de 1825. 

L’écluse de Ferriby, dont le seuil a Ă©tĂ© abaissĂ© de 2,45 par rap- 
port Ă  l’ancien, offre plus de 6 mĂštres d’espacement pour l’entrĂ©e 
des bateaux et la décharge des colatures. Les anciens ponts qui 
rétrécissaient le chenal étant démolis, la nouvelle écluse établie à 
28 kilomĂštres de l'embouchure, possĂšde trois ouvertures de 5,50 
chacune et un développement total de 22",55. Chaque ouverture est 
pourvue de portes automatiques que la marée ferme, et que les 
eaux d’amont ouvrent, dùs que le flot baisse. Les portes, en outre, 
sont surmontées de vannes qui rÚglent le niveau de la navigation 
(soit 3,16 au-dessus du seuil), de façon à maintenir une profon- 
deur d’eau de 2°,67 à Brigg (à 14 kilomùtres en amont), et de 
2%,98 Ă  Harlem-Hill (Ă  29 kilomĂštres). 

Le résultat de ces travaux qui ont coûté 600 000 fr., a été des 
plus satisfaisants. Sir John Rennie admet que la nouvelle Ă©cluse est 
une des mieux réussies et des plus économiques. Le desséchement 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 7 


est parfait, en tant.que la navigation n’abuse pas des retenues qui 
refoulent les eaux d'Ă©coulement venant d’amont. 

L’Ancholme peut dĂ©biter le volume total des eaux qu'il reçoit 
dans l'intervalle de deux marĂ©es, quoique l’écluse reste fermĂ©e 
moitié du temps; mais comme la navigation exige un niveau de 
3,90 supérieur à la laisse des marées de morte eau, les crues ne 
sont pas déchargées assez rapidement, et au flot suivant, elles sont 
chassées sur les terres des Carrs, qui sont à 2",75 en contre-bas, 
par rapport au niveau d’eau dans la riviùre. 

Il y aurait lieu, en conséquence, de détourner une partie des eaux 
des crues des terrains supĂ©rieurs par de nouveaux canaux d’égout- 
tement, afin d’év'’er les submersions temporaires des Carrs Wad- 
dingham, Suitterby, Kelsey, etc. Ces canaux, avec décharge spéciale 
dans l’'Humber, pourraient ĂȘtre d’ailleurs utilisĂ©s pour les besoins de 
la navigation, ou pour l'irrigation des terres trop sĂšches. De mĂȘme, 
il y aurait lieu, dans le but de compléter le projet de Sir John Rennie, 
qui projetait les canaux de ceinture aux niveaux élevés, d'établir des 
réservoirs ou puisards, pour recueillir les sables charriés par les 
eaux, et en dĂ©barrasser le chenal de l’Ancholme. 

Plus de 150 kilomĂštres carrĂ©s de lais de riviĂšre et d’autres allu- 
vions, grace aux travaux de Rennie fils, ont pu ĂȘtre repris sur les 
marais et convertis en terres arables de premiÚre qualité. 

On cultive surtout, dans la vallĂ©e d’Ancholme, sur les terres limo- 
nées, la pomme de terre qui suit une récolte verte comme jachÚre, ou 
bien des fÚves ou du lin. Sur les sols de meilleure qualité, la pomme de 
terre et le blé se suivent alternativement pendant un certain nombre 
d'années ; sur les autres sols, on intercale entre ces deux récoltes 
de l’orge, de l’avoine, des fùves, du trùfle, du lin ou des oignons”, 


5. — La riviùre Hull (Yorkshire). 


Le dernier tributaire de l'Humber, sur la rive nord, sort du pied 
des wolds Ă  Driffield et Ă  Killiam. Les deux ruisseaux qui forment la 
riviĂšre Hull se rejoignent Ă  Frodingham. À partir de cette localitĂ©, 


1. À. Clarke, The practice of agricullure, loc. cit. 
ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 15 


274 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


pendant un trajet de 15 kilomùtres, elle coule au midi jusqu’à 
Beverley, et 15 kilomÚtres plus loin, elle débouche dans l'Humber, 
aprÚs avoir drainé, dans ce dernier parcours, 160 kilomÚtres carrés 
de terres marĂ©cageuses qui s’élendent sur une largeur de 6 Ă  12 ki- 
lomùtres le long de la cîte de Holderness, jusqu’à Sunk Island, 
situé à 16 kilomÚtres. 

La digue qui protùge cette rive serait, dit-on, une Ɠuvre romaine ; 
elle fut complĂštement restaurĂ©e en l’an 1313. La ville de Kingston- 
upon-Hull, avec les magnifiques docks qu’exigent son important com- 
merce et sa navigation Ă  vapeur, est bĂątie elle-mĂȘme sur les lais de 
PHumber, au confluent de la riviĂšre Hull, Ă  un niveau de 0,90 Ă  
1,50 en contre-bas de celui des marées de vives eaux. 

Sur les terres de marais qui ont été desséchées par colmatage, la 
pomme de terre est la principale rĂ©colte; on en obtient mĂȘme une 
double récolte annuelle, en adoptant le procédé de la germination 
préalable, suivant ce qui a lieu également sur les bords de la baie 
de Morecambe, le long de la cĂŽte ouest du Lancashire. Le systĂšme 
ordinaire est de faire suivre la pomme de terre par le trĂšfle, et le 
blé, par les fourrages ou les féveroles. 

On donne Ă  la fin de lautomne un labour profond pour enterrer 
le fumier (90 à 70 tonnes à l’hectare), et au printemps, un nouveau 
labour en travers, avant de planter les pommes de terre-sur ados, 
et de leur appliquer de 3 à 5 quintaux de guano à l’hectare. Les 
semences sont plantées, à raison de 15 à 18 quintaux, à des intcr- 
valles de 0,25 Ă  0",39, en rangĂ©es Ă©cartĂ©es l’une de l’autre de 
0",70 Ă  0,75. 

Cette culture caractéristique des terres colmatées est trÚs lucra- 
live, lĂ  oĂč le tubercule est Ă©pargnĂ© par la maladie qui dĂ©vaste pĂ©rio- 
diquement les champs de l’Angleterre, depuis 1845. Le rendement 
moyen varie de 15 à 25 tonnes à l’hectare, dans les meilleures terres, 
et de 10 à 15 tonnes, dans les terres de qualité inférieure : la dépense 
s’évalue entre 1 000 et 1 500 fr. par hectare’. 


1. Ch. Whitehead, On cultivalion of hops, fruit and vegetables (Journ. Roy. 
Agric. Soc., 1878, vol. XIV). 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 275 


IT, —— LES ENDIGUEMENTS ET LES POLDERS DU LITTORAL 


Les opérations qu'il nous reste à décrire concernent plutÎt le 
littoral ; elles comprennent, pour quelques-unes, la mise en polders 
des alluvions laissĂ©es par les marĂ©es, et pour d’autres, la dĂ©fense, Ă  
l’aide de digues, de surfaces plus ou moins vastes, consacrĂ©es Ă  la 
culture. 

A l’embouchure des riviĂšres, lĂ  oĂč les alluvions prĂ©sentent le plus 
d'intĂ©rĂȘt pour l’enclĂŽture, l’action des vagues n’est pas toujours 
aussi destructive que sur les cÎtes, directement exposées aux cou- 
rants. Il est possible de remplacer les digues de terre, ou muraillées, 


par des encaissements que les ingénieurs anglais ont exécutés de 
longue date avec plein succĂšs. 


Diques par encaissement. — Les encaissements s’établissent de la 
maniĂšre suivante. Sur un radeau en fascinages de 0",60 d'Ă©paisseur 
et de 6 mùtres de longueur, on dispose un lit d’argile ; puis sur ce 
radeau, on en Ă©tablit un second, de mĂȘmes dimensions, avec lit 
d'argile, et ainsi de suite, de telle sorte que les radeaux superposés 
descendent d’aplomb par leur propre poids sur le fond du lit dont 
les rives doivent ĂȘtre encaissĂ©es. La digue ainsi obtenue, de 6 mĂštres 
Ă  la base, de 5",50, par exemple, Ă  la crĂȘte, s’avance isolĂ©e, sans 
accotoirs, du cÎté des rives, et résiste parfaitement à la double 
action des courants dus aux marées et du courant de riviÚre. 

Elle est submersible à marée de mortes eaux ; mais quand on veut 
ĂŒrer parti des terrains laissĂ©s en arriĂšre, submersibles au-dessous 
du niveau des eaux moyennes, il y a lieu de l’exhausser et, au 
besoin, de la revĂȘtir de perrĂ© au-dessus de la ligne des vives eaux, 
ou bien encore, de la faire servir comme fondation Ă  des enroche- 
ments en pierres perdues qui forment la partie supérieure des digues 
longitudinales. | 

Les digues par encaissement que les ingénieurs Rennie, pÚre et 
fils, ont fait construire dans un grand nombre de baies, ont parfai- 
tement tenu, notamment le long de la Severn, qui se jette par un 


210 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


large estuaire dans le canal de Bristol. Maigré la barre (mascaret) 
atteignant 1",85 de hauteur, malgrĂ© un courant de 15 nƓuds Ă  
l'heure et un flot de marée qui monte de 6 mÚtres au-dessus de la 
mer basse et reflue avec une vitesse de 6 Ă  8 kilomĂštres Ă  l'heure, 
les ouvrages en fascines et bourrĂ©es ont rĂ©sistĂ© jusqu’à la hauteur 
qui leur a été donnée, de 1",85, au-dessus de la limite des vives 
eaux. Elles reposent sur des bancs de sable que balayent les cou- 
rants, sans leur faire subir aucune dĂ©formation. Aussi, l’éminent 
ingĂ©nieur W. Cubitt n’hĂ©sitait-1l pas Ă  proposer de jeter une digue 
de 6 kilomĂštres de longueur, en travers de l'estuaire de la Severn, 
Ă  Hock-Crib, sur un banc de sable, dans le but de raccourcir le che- 
nal navigable et de gagner plusieurs milliers d'hectares de terrain 
cultivable sur la plage. 

Une variante a été adoptée pour la délimitation du chenal des 
divers cours d’eau, à travers lestuaire du Wash, qui consiste dans 
l'emploi de fascinages, faits avec des épines de haies entourées 
d'argile. Ces fascinages ont 1",80 de longueur, y compris les 
branches, et 0",90 de circonférence ; Les gros bouts tournés dans le 
mĂȘme sens sont liĂ©s par des cordes goudronnĂ©es. On les dispose le 
long du nouveau chenal projeté, sur une ou plusieurs rangées, sui- 
vant la profondeur et la force du courant, et on les recouvre d’un 
lit de 0",15 d'argile. On continue Ă  Ă©lever des lits de fascinage 
Ă©tablis de la mĂȘme maniĂšre, les uns au-dessus des autres, jusqu’à 
ce que l’on ait atteint le niveau de la plage, et dans les grandes ri- 
viÚres, le niveau des demi-marées. Ces sortes de digues peuvent 
ĂȘtre Ă©tablies dans un chenal de 6 mĂštres de profondeur, Ă  marĂ©e 
basse, sans souffrir du flux ou du reflux ; elles offrent un revĂȘte- 
ment durable lĂ  oĂč la maçonnerie serait entrainĂ©e. On Ă©value le 
coĂ»t de cet encaissement Ă  5 fr. par mĂštre cube”. 


Digues Ă  la mer. — Les encaissements n’ont pas Ă©tĂ© reconnus 
assez rĂ©sistants sur d’autres points du littoral, ou du moins, le sys- 
tĂšme ordinaire des digues en terre a prĂ©valu, car Ă  l’embouchure, 
par exemple, de la petite riviĂšre Crouch, Ă  l’entrĂ©e de l'estuaire de 


1. Wheeler, Fascine work and reclamaltion. (Trans. Inst. civil Engineers, t. XIL.) 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. DU 


la Tamise (comtĂ© d’Essex), oĂč le courant est assez Ă©troit, mais pro- 
fond, la digue de dĂ©fense construite en terre est revĂȘtue de maçon- 
nerie. La mer déferle obliquement, venant du nord, et use beaucoup 
plus rapidement le front des ouvrages que si elle frappait Ă  angle 
droit. 

Pour les remblais du chemin de fer qui longe l'embouchure de 
l'Humber, sur la rive gauche du comitĂ© de York, on a suivi les mĂȘmes 
errements, en tenant compte de la direction des lames, afin d’amor- 
tir le choc des vagues et de préserver les talus. 

Ailleurs, les digues ne sont pas maçonnĂ©es. A l’embouchure mĂȘme 
de l’'Humber, la digue de Louth a Ă©tĂ© construite, partie en sable ei 
partie en argile battue; seulement, d’aprĂšs l’orientation des marĂ©es, 
les talus sont à 6, ou à 3 de base, pour 1 de hauteur. À Wells, sur 
la cîte du Norfolk, la digue de Cromer, d’une longueur de 6 kilo- 
mĂštres et demi, a Ă©tĂ© construite en argile battue et revĂȘtue de gazon, 
avec un talus de 5 pour 1. 

La digue qui défend Romney Marsh (comté de Kent), dont nous 
nous occupons plus loin, a une longueur de 6 kilomĂštres et demi. 
Attribuée aux Romains, comme les digues des Marshes du Lincoln, 
elle a Ă©tĂ© construite en terre, mais on Ă  dĂč la fortitier par des pilotis 
sur deux rangées, entre lesquelles le vide a été comblé par de la 
craie. Les eaux de desséchement des 10 000 hectares enclÎturés par 
la digue s’écoulent Ă  marĂ©e basse, par trois aqueducs de grandes 
dimensions, avec écluses, au travers de la levée. 

Sur les rives de l’estuaire de la Tamise, oĂč la marĂ©e monte de 
9,05, les digues comportent trois sections en élévation ; la section 
principale infĂ©rieure a 5 mĂȘtres de base pour 1 mĂštre de hauteur et 
6,10 de largeur Ă  la crĂȘte ; elle supporte la section centrale (out- 
burst bank) dont le talus est de 1 mĂȘtre et demi pour À mĂštre de 
hauteur, sur 1,52 d’élĂ©vation et 2",45 de largeur Ă  la crĂȘte. La 
section supĂ©rieure (swash bank) n’a que 0,75 de hauteur et 0,75 
de largeur au couronnement. Ces digues en terre sont revĂȘtues en 
argile corroyée et, sur les points plus exposés, en perré. Les talus 
supérieurs sont gazonnés, ou semés en ray-grass, en luzerne, etc. . 


1. Knight, American Diclionary, p. 2085. 


278 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


1. — Les polders de la baie Holkham (Norfolk). 


C’est en 1855 que le comte de Leicester fit entreprendre le des- 
séchement et la mise en polders des lais de mer qui se trouvent à la 
pointe occidentale de la baie Holkham. Cette baie doit son nom au 
domaine princier des comtes de Leicester, dont les palais furent 
édifiés sur les plans des architectes Palladio et Inigo Jones, au siÚcle 
dernier ; elle donne accùs au petit port de Wells et aux parcs d’hui- 
triÚres de cette localité. 

Les premiers travaux entrepris par le comte de Leicester consis- 
tĂ©rent dans l’établissement d’une digue de 1350 mĂštres de longueur, 
Ă  l’est du port de Wells. Du cĂŽtĂ© du nord, les alluvions sont pro- 
tĂ©gĂ©es d’une maniĂšre complĂšte contre la mer par une longue chaĂźne 
de dunes sablonneuses, suffisamment larges et élevées, couvertes 
depuis des siĂšcles de saules marins (marram). Nulle protection est 
aussi efficace contre l'assaut des marées que ces dunes plantées, 
quand on a soi d’entretenir les plantations aprùs les coups trop 
violents des ouragans. Les sables fraßchement entrainés se conso- 
lident rapidement par le marram. Du cÎté du midi, les marais sont 
depuis longtemps assainis et cultivés. La digue commencée à lest 
de ces marais, en 1857, fut achevĂ©e l’annĂ©e suivante ; elle part de la 
pointe du quai de Wells, suit le chenal en ligne droite vers le nord, 
jusqu’à une sorte de falaise en cailloux roulĂ©s, qui se relie Ă  l’est 
avec les dunes de sable. Dans son parcours, elle coupe l’ancien che- 
nal à deux reprises, de façon à ménager un lit plus profond pour 
l'accĂšs du port. Construite en argile sur 400 mĂštres de longueur, 
Ă  l’extrĂ©mitĂ© sud, la digue, pour le restant, est formĂ©e de sable, 
avee un revĂȘtement en perrĂ© sur 0",60 d'Ă©paisseur, qui plonge de 
1,50 du cĂŽtĂ© de la mer, tandis que du cĂŽtĂ© des terres le perrĂ© n’a 
que 0",30. 

L'ouvrage offre 1",50 de largeur Ă  la crĂȘte, avec un talus du cĂŽtĂ© 
de la mer, de 4 sur 1 dans la partie supérieure, sur une hauteur de 
2%,50 Ă  partir du couronnement, et de 5 sur À dans sa partie infĂ©- 
rieure. Du cÎté des terres, le talus est de 2 sur 1 au sommet, et de 
3 sur 1 Ă  la base. 


En 
59 ARS 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 279 


La crĂȘte et le pied du talus du cĂŽtĂ© de la mer ont Ă©tĂ© empierrĂ©s 
avec des galets ; le reste, lĂ  oĂč il n’y a pas de perrĂ©, a Ă©tĂ© gazonnĂ© 
sur une Ă©paisseur de 0,07. 

L'expérience a appris que pour les dimensions ici adoptées, le sable 
rĂ©siste mieux que l’argile. L’écluse placĂ©e Ă  l'extrĂ©mitĂ© sud de la 
jetée est fondée sur pilotis dans l'argile ; elle est fermée du cÎté de 
la mer par une porte de flot automatique, et du cÎté de la cam- 
pagne, par une marteliÚre à vis. Elle permet de débiter non seule- 
ment les eaux des 255 hectares de lais de mer endigués, mais encore 
les eaux de 400 hectares de marais soumis au desséchement, aux- 
quelles se joignent celles des sources. 

Un seul accident à été causé, au mois de décembre 1862, par 
un coup de mer qui a enlevé la falaise de galets sur laquelle la 
digue s’appuyait, en affouillant le sol à une profondeur de 8°,50, 
par une brÚche de 115 mÚtres. La falaise a été rapidement rem- 
placĂ©e, grĂące Ă  deux tramways d’un kilomĂštre de longueur pour 
le transport des matériaux, par une levée dont la déclivité est de 12 
sur 1 du cĂŽtĂ© de la mer, et de 5 sur À du cĂŽtĂ© des terres. Le saule 
marin (marram) y à pris croissance el à consolidé en peu d'années 
le nouvel endiguement dont la hauteur est de 1",50 au-dessus des 
vives eaux. 

La premiĂšre digue de sable, sauf le renouvellement des galets 
entraĂźnĂ©s par les eaux de la brĂšche, n’a exigĂ© aucunes rĂ©parations ; 
elle est protégée par les marais contre les vents impétueux qui souf- 
flent de l’ouest et du nord-ouest. 

Sur les 235 hectares mis en polders, plus de 80 hectares, au voi- 
sinage des prairies autrefois marécageuses, sont en sol argileux 
compact ; 33 hectares sont en limon vaseux, Ă  la limite des collines 

argileuses ; 69 hectares en argile bleue que recouvre une couche 
de sable de 0,15 Ă  0,90 d'Ă©paisseur, et le reste est formĂ© d’un 
mélange de sables et de graviers plus ou moins fins. Le sol enclÎ- 
turĂ© a exigĂ© une dĂ©pense d’autant plus forte pour la mise en culture 
qu’à la rencontre des courants de marĂ©e venant de l’ouest et de 
l'est, en ce point de la petite baie, de grandes criques déchiraient 
le terrain, et ailleurs, des flaques d’eau en grand nombre restaient 
Ă  l’état stagnant sur les parties argileuses. 


280 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Dùs l'automne de 1859, les travaux pour l’allotissement furent 
entrepris ; d’abord, les routes furent construites ; la principale, 
tracée dans toute la longueur, est coupée à chaque 500 mÚtres par 
des chemins de traverse de 9 mĂštres de largeur, bordĂ©s d’un fossĂ© 
de chaque cÎté. Les bandes de terrains ainsi aménagées sont en- 
suite divisĂ©es par des fossĂ©s, en compartiments d’une contenance de 
4 Ă  8 hectares. Comme chaque compartiment se trouve accessible 
par une route empierrée, la culture à vapeur a été introduite. Mais 
avant de labourer, il fallut combler les crevasses au moyen de sables 
transportés par vole ferrée, et niveler la surface entiÚre des remblais 
et des déblais. 

La plus grande partie du polder, en 1862, Ă©tait en callure : na- 
velte, pois, froment et avoine, lorsque la mer vint envahir toute la 
surface. Pendant les deux premiÚres années, les récoltes furent su- 
périeures, au point de vue du rendement et de la qualité, à celles 
obtenues aprÚs l'accident. Le sol s'était imprégné de sel en excÚs, 
et si les routes ne souffrirent pas trop de la submersion prolongée, 
les rĂ©coltes en terre furent absolument perdues pour l’annĂ©e sui- 
vante. 

Le drainage a été pratiqué sur une centaine d'hectares. Les drains, 
de 0,44 de diamĂštre, placĂ©s Ă  10 mĂštres d’écartement dans l’ar- 
gile, et à 20 mÚtres dans les sables, sont dirigés vers les fossés. En 
raison du nivellement de la surface, la pose des drains a donné lieu 
à quelques difficultés, pour assurer une pente convenable et un 
dĂ©bit rĂ©gulier. On a dĂč repĂ©rer le plan d’eau gĂ©nĂ©ral, avant d'Ă©tablir 
le fond des drains Ă  un niveau constant de 1,95, reconnu suffisant 
pour obtenir la chute nécessaire dans les collecteurs. 

En dehors des terres livrées immédiatement à la culture, les argiles 
compactes ont été amendées par le sable, sur une épaisseur de 0",10 
et retournées par des charrues à vapeur. Lorsque l'argile ne pouvait 
pas ĂȘtre atteinte par le labour, on a foncĂ© des puits desquels on a 
extrait l’argile pour la brouetter sur le sable prĂ©alablement Ă©croĂ»tĂ©. 
Enfin, ailleurs, l'argile Ă©tant Ă  la profondeur de 0",30 Ă  0",40, on 
a creusé des tranchées, pour ramener de 0",20 à 0,25 d'argile et 
remblayer en couverture les autres terrains, puis on a comblé les 
tranchĂ©es Ă  l’aide de sable. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 281 


Les appareils de labourage Fowler ont servi au défoncement à 
0",40 et au nivellement de toute la surface amendée. Aprés une 
année de jachÚre seulement, les terrains ont été ensemencés. Depuis 
1867, la salure due à la submersion accidentelle n’exerçant plus 
aucun effet, les cultures sont en pleine réussite. Aucun assolement 
particulier n’est adoptĂ©; on cultive tour Ă  tour le blĂ©, l'orge, l’a- 
voine, la navette, les racines et le trĂšfle, avec de bons rendements *. 

Celle opĂ©ration, qui a exigĂ© une dizaine d’annĂ©es pour ĂȘtre com- 
plĂȘte, n’est qu'une de celles que Lord Leicester, digne successeur 
de son pÚre, a réalisées dans son immense domaine de Holkham, 
sur 12 000 hectares. AprÚs une dépense de 10 millions de francs, faite 
par le premier comte, et de 42 millions et demi, par ses fermiers, 
les sables stériles et les terrains maigres de Holkham ont été trans- 
formĂ©s en terres Ă  blĂ©. C’est la consĂ©quence des amendements 
par largile et la marne, des engrais artificiels Ă  hautes doses, 
de l’assolement quadriennal, des jachĂšres sur labour, de l'Ă©levage 
des moutons et de l’engraissement du bĂ©tail en hiver, des bĂąti- 
ments modĂšles d'exploitation, des baux Ă  long terme, etc., en un 
mot de la rĂ©novation moderne de l’agriculture, dont les Lords de 
Leicester ont été les promoteurs puissants et infatigables dans le 
comté de Norfolk. 


2. — Les marais du Westmoreland, 


Sur la cÎte du Westmoreland, le desséchement des marais de 
Helsington, qui couvrent plus de 800 hectares, peut compter comme 
une des opérations les plus satisfaisantes, récemment lentées en 
Angleterre. 


Helsington. — Les marais, d’un niveau trĂšs peu supĂ©rieur Ă  celui 
des basses marées, avaient été allotis et enclÎturés au commence- 
ment du siĂšcle, au profit d’un grand nombre de propriĂ©taires, en 
vertu d’une loi intitulĂ©e Heversham Inclosure Act. Jusqu’alors on 


1. Shellabear, Reclamation of land from the sea. (Journ. Roy. Agric. Soc., 
t. IL, 1867.) 


282 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


s'était borné à extraire de la tourbe pour Ana riSiouRes la ville de 
Kendal et les environs. 

Les commissaires, aux termes de la loi, firent construire des digues 
contre les hautes marées, des fossés collecteurs et des écluses de dé- 
charge dans la mer ; mais, soit à cause d’une pente insuffisante, soit 
en raison du peu de profondeur du plan d’eau, les travaux exĂ©cutĂ©s 
n’empĂȘchĂšrent pas le terrain d’ĂȘtre inondĂ© par les fortes marĂ©es. En 
1858, il fallut recourir Ă  une nouvelle loi pour reporter Ă  5 kilomĂš- 
tres plus en amont le collecteur et l’écluse de dĂ©charge principale, 
dans le della mĂȘme du Kent, Ă  Ulphacrag. GrĂące Ă  cet avancement, 
la chute augmenta de 1",22 ; les collecteurs purent ĂȘtre Ă©largis et 
approfondis, et Ă  l’aide d’un fossĂ© de ceinture (catchwater), on par- 
vint Ă  capter les eaux des hauteurs environnantes pour les Ă©vacuer 
sĂ©parĂ©ment. Le coĂ»t des nouveaux travaux s’éleva Ă  375 000 fr. 

À 1%,20 au-dessous de la surface de tourbe, on rencontre de 
l'argile marneuse. Comme les canaux principaux d'Ă©coulement sont 
assez profonds pour que les fossĂ©s secondaires pĂ©nĂštrent dans l’ar- 
gile, on creuse ces derniers Ă  l’aide d’un outil spĂ©cial (long mouth) et 
on forme avec le dĂ©blai des bourrelets superficiels que l’on gazonne. 
On obtient ainsi des drains excellents au prix d’environ 100 fr. par 
hectare. Les tuyaux deviennent ainsi inutiles ; le défaut de pente et 
le refoulement des eaux Les rendraient du reste peu pratiques. 

Le drainage achevé, on extrait l'argile du sous-sol par des puits, 
situés eur les bords des piÚces à mettre en culture, et on la répand 
sur la surface de la tourbe, à raison de 250 charretées par hectare. 
Il en résulte un terreau meuble, riche en matiÚres végétales, trÚs 
approprié aux céréales, aux racines et au trÚfle. 

Les bùtiments d'exploitation sont installés en dehors du marais. 
Les engrais ne sont employés que pour les récoltes fourragÚres, dans 
l’assolement de quatre ans, adoptĂ© par les cultivateurs. Sur quelques 
points oĂč les tourbiĂšres ont Ă©tĂ© conservĂ©es, on continue Ă  prĂ©lever 
du combustible, dans les villages de Brigsteer et de Beathwaite, qui 
approvisionnent Kendal. 

La fertilitĂ© du sol n’a pas diminuĂ©, et la pomme de terre est deve- 
nue lĂŠ culture dominante du marais, quoiqu’elle soit parfois retardĂ©e 
jusqu'en mai et juin par les fortes gelées. Avant le desséchement, 


" 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 283 


les fiĂšvres intermittentes dĂ©cimaient la population ; il n’y a plus de 
fiùvres aujourd’hui. 

La mer reprend quelquefois ses droits sur le marais. Pendant 
l'hiver de 1852, un ras de marée surmonta les digues et sabmergea 
sous quelques pieds d’eau les districts de Foulshaw et de Levens, en 
noyant le bétail; mais ces accidents sont exceptionnels ; l'entretien 
des digues et des travaux représente annuellement une taxe de 
6 fr. 20 c. par hectare”. 


3. — Les polders du Westmoreland. 


Le chemin de fer de Ulverston à Lancaster, traversant l’'embou- 
chure de la riviĂšre Kent, dans la baie de Morecambe, laisse voir 
de vastes lais de mer et des marais coupés de la terre ferme et 
dĂ©lavĂ©s chaque jour par les marĂ©es. M. Brogden s’est rendu ac- 
quéreur de 250 hectares de ces terrains qu'il a endigués et mis en 
polders. Les sables, aprÚs avoir été scarifiés, ensemencés et fumés à 
l’aide de phosphates et d'engrais de ville, ont Ă©tĂ© convertis en pĂątu- 
rages luxuriants oĂč les moutons et les bestiaux font l’admiration 
des cultivateurs du Westmoreland. Les terres marécageuses, aprÚs 
assainissement, sont soumises Ă  l’assolement de la localitĂ© et en plein 
rapport”. 

C'est à la suite de cette opération lucrative que la Warton land 
Company a dĂ©cidĂ© d’enclĂŽturer 4 000 hectares de ces mĂȘmes sables, 
Ă  l’aide d’une digue Ă  la mer s'Ă©tendant depuis la gare de Hest Bank, 
du chernin de fer Londres nord-ouest, jusqu’à Arnside Point. Outre 
la digue, la compagnie Ă©tablit une route de communication de Mo- 
recambe Ă  Arnside, destinĂ©e Ă  raccourcir d’une vingtaine de kilo- 
mÚtres la distance entre Lancaster et Barrow. Les travaux ont été 
‘estimĂ©s Ă  prĂšs de 4 millions de francs, et la valeur des lais de mer 
mis en culture Ă  10 millions de francs *. 


1. Crayston Webster, Farming of Westmoreland. (Journ. Roy. Agric. Soc., 
1876.) 

2. Crayston Webster, loc. cil., p. 34. 

3. Iron, 23 juin 1877. 


284 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


4.— Le littoral des comtĂ©s de Kent et de Somerset. 


En dehors des riches terres marécageuses du comté de Kent, qui 
bordent la Tamise, le Medway, le Rother, le Stour et le Swale, unc 
plaine alluviale considérable s'étend le long de la cÎte entre Rye, au 
midi, et Hyde au nord, limitĂ©e Ă  l’ouest par le district argileux du 
Weald, et à l’est par les graviers de Hastings. 


Romney Marsh. — C'est dans cette plaine dont le niveau est infĂ©- 
rieur à celui des marées de vives eaux (4,10 à Dowls), que se trou- 
vent les marais de Romney et de Denge et les alluvions de Walland. 
semble qu’elle ait Ă©tĂ© jadis l'estuaire de la riviĂšre Rother, qui 
comprend entre ses deux bras l’üle de Oxney, et dĂ©bouche aujour- 
d’hui dans la Manche au-dessous de Rye. 

Le marais de Romney aurait été endigué du temps des Romains, 
et dessĂ©chĂ© par leurs soins, ce qu’affirme Sir William Dugdale. Tou- 
jours est-il que Henri IT ordonna « que toutes les terres du district 
« fussent défendues contre la mer et contre les crues, et pour cela 
« maintenues par des digues et des fossĂ©s ». Le roi Édouard [°° rĂ©Ă©- 
dita ces ordonnances et successivement les rois Édouard II et IE, 
Richard IT, ete., confirmĂšrent les dispositions qui rendent obliga- 
toire l'entretien des digues et des canaux de desséchement. 

La plus ancienne institution pour la surveillance du desséchement 
et de l’endiguement des terres basses, en Angleterre, a Ă©tĂ© fondĂ©e 
dans le Romney Marsh.Une commission, composée de 24 membres, 
y fonctionnait avant le xrr° siùcle, d’aprùs d’anciennes coutumes; elle 
avait le pouvoir de lever les contributions nécessaires pour les répa- 
rations urgentes, de poursuivre et de punir les rĂ©calcitrants. C’est 
eu s'inspirant de ces traditions locales qu’en 1250, sous le rĂȘgne de 
Henri HI, furent rendues les six ordonnances stalutaires qui créÚrent 
les commissions de drainage (commissioners of sewers). Henri VIT 
étendit les prérogatives de ces commissions, qu'il désigna dans une 
douzaine de comtés, y compris le Great Level des Fens (1532, 25° an- 
nĂ©e du rĂšgne), et Édouard VI (1550, 3° annĂ©e du rĂšgne) les confirma 
à perpétuité. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 285 


Aussi bien les marais de Romney que ceux de Walling, de Denge 
et de Guilford, sont défendus sur le rivage de la Manche par des 
digues de galets et de sable, et dans les endroits les plus exposés, 
par de puissantes Jetées. 

Le sol est tourbeux sur certains points, mais le plus souvent il 
forme un loam argileux, avec quelques parties sablonneuses. Le 
sous-sol est de l’argile, et au-dessous de l'argile se trouve le sable 
du Weald. La cĂŽte de Denge est absolument envahie par les galets, 
sur une longueur de 5 kilomĂštres ; on n’y rencontre d'autre vĂ©gĂ©- 
tation que des touffes de joncs et de genĂȘts Ă©pineux”. En dehors de 
celte cĂŽte dĂ©solĂ©e, le district est couvert de riches pĂąturages, oĂč 
l’on Ă©lĂšve et engraisse de nombreux troupeaux, Ă  raison de 5 Ă  7 
moutons par hectare, pendant l'hiver, et environ le double pendant 
l'été. Dans les étés trÚs favorables, la pousse d'herbe est parfois si 
forte qu’il devient nĂ©cessaire d’y faire paĂźtre de jeunes bƓufs, afin 
que la prairie ne devienne pas trop luxuriante à l’usage des mou- 
tons de transhumance, qui reviennent aprÚs avoir hiverné sur des 
champs de turneps. 

Sur les terres fortes des confins de Romney Marsh, une petite 
partie est en labour. Le drainage y a opéré de grandes améliora- 
tions. Le blĂ© s’alterne chaque annĂ©e avec les pois, ou les fĂ©veroles ; 
parfois on lui substitue de l’avoine, avec des turneps. On y cultive 
surtout comme porte-graines, des turneps, des betteraves et des 
radis pour les besoins du commerce. 


Somersel Marshes. — Dans la baie de Bridgewater, la cîte du So- 
merset Ă©tait jadis dans les mĂȘmes conditions que celle du Lincoln, 
bordant le Wash. Les marées et les crues des riviÚres telles que le 
Parrot avec ses affluents, l'Ile, le Yeo et Tone et la Brue, entrete- 
naient sur toul le territoire, au midi de Wells et de Glastonbury, des 
alluvions marécageuses qui ont élé endiguées, desséchées et con- 
verties en terres d’une grande fertilitĂ©. 

Le territoire embrasse plus de 20 kilomĂštres Ă  partir de la cĂŽte, 


1. Topley, Agricultural geology of the Weald. (Journ. Roy. Agric. Soc., 1882, 
vol. VIIL.) 


286 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


entre Bridgewater, Glastonbury, Wells, Axbridge et Brent Marsh; il 
n’est formĂ© que d’alluvions, de sables, retenant les vases des crues 
et barrant l’écoulement des eaux qui descendent du Bruton et de 
Shepton Malet. Dugdale mentionne les travaux considérables qui 
furent exécutés de son temps pour protéger les terres contre les 
marées et les assainir au point de vue des pùturages à rente trÚs 
Ă©levĂ©e. Caird cite les Hams de Pawlet, qui sont une terre d’alluvion 
des plus riches, le long de la riviĂšre Parrot et du rivage de la baie 
Bridgewater, comme rapportant en location pour pĂąturage de 325 
à 875 fr. l’hectare”. 


IV. — LÉGISLATION. 


MalgrĂ© une lĂ©gislation confuse dont l’origine se perd au milieu 
des us et coutumes d’avant le x1v° siĂšcle ; malgrĂ© l’incompĂ©tence des 
juridictions Ă©tablies en vertu des statuts de Henri VIIL?, et de la loi 
gĂ©nĂ©rale promulguĂ©e par la reine Élisabeth; malgrĂ© le conflit d’at- 
tributions soulevé devant les cours de justice pour les rÚglements 
applicables au régime des eaux ; enfin, malgré les procÚs intermi- 
nables et les oppositions violentes des intĂ©ressĂ©s, la grande Ɠuvre 
du desséchement des Fens a pu se poursuivre pendant deux siÚcles, 
et s'achever, de façon Ă  prĂ©senter le type le plus parfait de l’assai- 
nissement des terres qui ait été réalisé en Angleterre. 

Inaugurés par des entrepreneurs, sous le contrÎle des commis- 
saires de drainage (sewers commissioners) que le roi désignait ; 
puis, par des grands seigneurs, titulaires de chartes royales, les tra- 
vaux des Fens donnÚrent lieu à des abus de spéculation qui insur- 
gĂšrent d’abord les populations rurales dont les droits avaient Ă©tĂ© 
mĂ©connus et les intĂ©rĂȘts sacrifiĂ©s. Plus tard, l’apaisement des esprits 


1. Sir James Caird, General view of British agriculture. (Journ. Roy. Agric. 
Soc., 1878, vol. XIV.) 


2. Henry VIIL, Sfatute 231, année 1531. 
3. General drainage act ; Elisabeth 43", année 1600. 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 281 


s'Ă©tant fait, le Parlement intervint Ă  partir du rĂšgne de Jacques I, 
par des lois locales (local acts) au lieu de statuts, et institua dĂšs 
lors des rĂšgles d’aprĂšs lesquelles les entreprises furent continuĂ©es et 
développées, moyennant des conditions débattues à forfait ou des 
taxes prélevées en vertu de pouvoirs conférés aux commissions que 
nommait chaque loi spéciale. 

En 1847 seulement, sur l'initiative de Lord Lincoln, une loi gé- 
nérale * fut promulguée, aux termes de laquelle, pour des petits 
cours d’eau et des pĂ©rimĂštres restreints, compris dans les domaines 
particuliers, les propriétaires purent faire appel aux compagnies 
(Land drainage) afin de dessécher, drainer, irriguer, colmater, en- 
diguer les terres et faire Ă©couler les eaux au dehors. Toutefois, jus- 
qu'à ce que cette loi eût été complétée en 1861, aucun individu, 
aucune association d'individus, mĂȘme avec l’aide des compagnies, 
ne put triompher d’une minoritĂ©, fĂŒt-elle d’un seul intĂ©ressĂ©, qui 
eût fait opposition au projet d'amélioration. 

La loi de 1861 ?, finalement, est venue faciliter l'institution de con- 
seils administratifs (Drainage trustees) réunissant les pouvoirs né- 
cessaires pour organiser et amĂ©liorer les cours d’eau et le rĂ©gime 
des eaux de tout un bassin. Aux termes de cette loi, les intéressés 
de chaque district comprenant l’affluent d’une riviĂšre peuvent dĂ©lĂ©- 
ouer leurs pouvoirs à une commission générale chargée du bassin 
de la riviĂšre, pour faire exĂ©cuter et entretenir les travaux d’amĂ©- 
lioration, et prélever les taxes indispensables proportionnellement 
aux surfaces el aux intĂ©rĂȘts de chaque participant. 

Le Land drainage act de 1861, amplifiant les pouvoirs déjà con- 
férés aux commissaires de drainage que Henri VIT fit désigner (23° 
année de son rÚgne), accorde aux propriétaires de lais de riviÚre ou 
de mer le droit de se syndiquer pour couvrir les dĂ©penses de l’en- 
clĂŽture, au moyen de taxes proportionnelles. Ils ont ainsi l'avantage, 
chacun ayant sa part dans l’entreprise, de pouvoir combiner leurs 
efforts pour assurer une bonne direction aux travaux, sous le con- 
trîle public des commissaires d’enclîture (/nclosure commissioners). 


1. General drainage act (Nict. 10 et 11). 
2. Land drainage general act (Nict. 25 et 26). 


288 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


C’est d’aprĂšs ce mĂȘme principe que le dessĂ©chement des Fens, 
en dehors de celui du Great Level, rĂ©gi par un statut spĂ©cial’, a 
pu s’opĂ©rer, mais les pouvoirs des commissaires furent malheureu- 
sement restreints à une section des cours d’eau, au lieu de com- 
prendre la totalitĂ© du parcours d’une riviĂšre et de ses affluents. Les 
lois relatives au desséchement des Fens du Witham, par exemple, 
ne visent qu'une section de 48 kilomĂštres de la riviĂšre, entre Lin- 
coln et Boston, et le territoire correspondant à cette section a été 
partagé en six districts. Chaque district nomme sa commission de 
drainage intĂ©rieur, Ă  raison d’un membre par paroisse. Les com- 
missions de district désignent, chacune dans son sein, les membres 
qui doivent les représenter dans la commission générale (Board of 
general commissioners), composée de 33 titulaires, dont 31 pour 
les districts et un pour chacune des villes, Lincoln et Boston. Enfin 
la commission gĂ©nĂ©rale n’exerce le contrĂŽle sur la riviĂšre et ses 
affluents que dans le parcours de 48 kilomÚtres visé par la loi, 
comme sur les canaux principaux de dessĂ©chement, et n’a le pouvoir 
de prĂ©lever des impositions qui permettent d'amĂ©liorer, d’étendre 
et de maintenir en bon Ă©tat les travaux d’assainissement, que dans 
la section limitée. 

Quoi qu’il en soit, depuis l’annĂ©e 1600 jusqu’en 1861, ce fut seu- 
lement en recourant Ă  des Bills introduits devant le Parlement, 
motivant des lois locales (local acts), que la plupart des amélio- 
rations ont été entreprises dans les Fens isolés el sur les cours 
d’eau Ă  rectifier, pour l'Ă©coulement rĂ©gulier des eaux de dessĂ©che- 
ment. 

Les frais exorbitants auxquels ont donné lieu les procédures du 
Parlement, en cas d'opposition aux BĂŒlls, c’est-Ă -dire, aux projets 
de lois, ont imposĂ© une des plus lourdes charges qu’aient eu Ă  sup- 
porter les entreprises d'améliorations fonciÚres. 

Ces frais ont dĂ» ĂȘtre garantis tout d’abord par les parties intĂ©ressĂ©es, 
dans le cas oĂč le Bill eĂ»t Ă©tĂ© rejetĂ©, et aussi, en considĂ©ration des 
difficultĂ©s qu’eĂ»t prĂ©sentĂ© un paiement aprĂšs coup, si l'opposition ve- 
nait à triompher, car les dépenses eussent incombé à la partie adverse. 


1. Incorporaled slatute (Charles IL, 15). 


ÂŁ 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE, 289 


Dans un pays qui vante l’absentĂ©isme de son gouvernement en 
matiÚre d'agriculture, ou les relations établies entre les proprié- 
taires et les prolétaires agricoles, on à quelque peine à concevoir 
l'utilité de dépenses aussi ruineuses que celles constatées récem- 
ment encore pour faire trancher par le Parlement des conflits d’at- 
tribution concernant des travaux d’intĂ©rĂȘl gĂ©nĂ©ral. Ainsi pour faire 
sanctionner les amĂ©liorations projelĂ©es dans la section d’aval d’une 
riviÚre secondaire, le coût de la procédure parlementaire, pendant 
50 annĂ©es de litige, s’est Ă©levĂ© Ă  2 millions et demi de francs; et 
pour obtenir les pouvoirs nécessaires en vue de régulariser un autre 
cours d’eau, qui dessert les comtĂ©s du Middland, le coĂ»t, aprĂšs un 
mĂȘme nombre d'annĂ©es, a atteint 3 750 000 fr". La loi qui a autorisĂ© 
la rectification de la riviĂšre Don (un des aflluents de l'Ouse), sur un 
parcours de 20 kilomÚtres, a représenté une dépense, en procédure, 
de 175 000 fr., dont 75 000 fr. Ă  la charge des adversaires du pro- 
jet ; c’est le tiers du devis total des travaux ! 

Si encore la lĂ©gislation s’élait amendĂ©e par le fait de l’interven- 
tion du Parlement ; mais c’est le contraire qui a eu lieu. 

Telle section d’un cours d’eau n’a pas de juridiction, elle est la 
mieux partagée ; telle autre a été canalisée pour un objet déterminé 
relevant d’une juridiction spĂ©ciale ; telle autre enfin est grevĂ©e du 
privilĂšge des usiniers. Ici, le fond appartient Ă  une commission ; et 
les berges dĂ©pendent d’une autre, ou bien ailleurs, des propriĂ©taires 
riverains : c’est le cas pour la riviùre Aire, affluent de l’Ouse (York- 
shire). De Skipton jusqu’à Keighley, les commissaires du drainage 
de l’Aire Dale ont le contrîle du chenal; plus loin, les riverains 
sont libres de tout contrĂŽle et agissent Ă  leur guise; plus loin encore, 
Ă  partir de Leeds, intervient une compagnie de navigation, et fina- 
lement, depuis la limite de la compagnie de navigation jusqu’à 
l'embouchure, 1l n’y a plus de contrîle. Il s'ensuit que les travaux 
exécutés aussi bien à laval pour le drainage, que dans la section 
centrale pour la navigation, exposent les autres sections à des débor- 
dements constants. 


1. Wheeler, On river conservancy. (Journ. R, Agric, Soc., 1883, vol. XIX, 
p. 391.) 


ANN,. SCIENGE AGRON. — 18593. — 1. 19 


290 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

La riviĂšre Nen, sur un parcours de 48 kilomĂštres, entre Peter- 
borough et la mer, ne compte rien moins que 14 juridictions ayant 
droit de contrĂŽle sur le chenal et sur les berges, et pour la riviĂšre 
Witham, entre Grantham et la mer, 17 commissions, ou comités, se 
déclarent compétents sur divers points du parcours, indépendamment 
de la commission générale et des six commissions de district du 
drainage des fens. Ce sont pourtant les deux affluents principaux 
sur lesquels repose ‘le dessĂ©chement des Fens, pour l'Ă©coulement 
des eaux excédantes. 

L'absence d’un contrîle unique se fait sentir surtout pour l’en- 
semble des riviĂšres traversant les Fens, en raison mĂȘme de leur 
régime qui fait que le territoire plat absorbe la plus grande partie 
des eaux pluviales et des sources fournies par les hautes terres. Ainsi 
le Witham dont le bassin, de 2750 kilomÚtres carrés, comprend 
moins de la moitié du territoire des Fens, est alimenté dans son 
cours supérieur par des sources pérennes, émanant de la formation 
oolithique ; mais dans les Ă©tĂ©s trĂšs secs, l’'absoption est telle sur les 
terres des Fens, et les réserves faites en amont pour le service des 
canaux de navigation et des fossés de desséchement sont si consi- 
dĂ©rables, que la riviĂšre tarit en aval. C’est ce que l’on Ă  constatĂ© 
notamment dans les étés trÚs secs des années 1864 et 1868 ; l'étiage 
ordinaire, qui eĂčt permis de curer les sables et les vases amoncelĂ©s 
à l'embouchure, n’a reparu qu’à la fin de l'automne, au-dessous de 
Lincoln. 

Cette circonstance est aggravée par le fait que le flot de marée est 
barrĂ© Ă  8 kilomĂštres de embouchure par une Ă©cluse ; le plan d’eau 
souterrain ne profite ainsi nullement du jeu des marées pour le 
maintien de la perméabilité dans le sous-sol, et le chenal reste en- 
vasĂ© pendant plusieurs mois de l’annĂ©e. Le dessĂ©chement trop rapide 
de la tourbe, Ă  cause du manque d’eau en Ă©tĂ© et de sa dĂ©composition 
à l’air, favorise la compression et l’abaissement du sol de À mùtre, 
parfois de 2°,50 comme à Whittlesey Mere, et modifie le niveau des 
drains et fossés de tout un district. 

Or, les riviÚres à marée relÚvent de la Couronne, dont la juri- 
diction est exercée par le Board of Trade (conseil du commerce), et 
s’étend sur tout le chenal que recouvre la haute marĂ©e moyenne, Ă  


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 291 
moins qu’en vertu de concessions spĂ©ciales la juridiction n’ait Ă©tĂ© 
abandonaée au seigneur suzerain (Lord'of the manor), aux proprié- 
laires riverains, ou à des commissions désignées par les lois spé- 
ciales. La Couronne est également chargée de la conservation des 
riviĂšres navigables, en raison des fonctions qu’elle dĂ©tient du Lord 
de la haute amirautĂ© ; mais si elle peut empĂȘcher toutes dĂ©grada- 
Lions, elle n’a aucun pouvoir, donnĂ© par la loi, de forcer Ă  entre- 
tenir le chenal navigable en bon Ă©iat. La loi n'autorise pas davan- 
tage les riverairs ni les corps constitués à faire curer ou draguer 
ces riviĂšres pour les besoins de la navigation. 

Quant aux riviĂšres non navigables, chaque riverain dont la pro- 
priĂ©tĂ© est limitĂ©s par le fil de l’eau, peut en faire usage pour con- 
duire les eaux sur ses terres, faire tourner des moulins, ete., mais 
à la condition de ne porter aucun préjudice aux coriverains d'amont: 
ou d’aval, de restituer l'eau au cours d’eau aprùs emploi, sans pou- 
voir en détourner un volume quelconque. Il est tenu également de 
recevoir les eaux qui lui arrivent par la voie naturelle, mĂȘme si elles 
inondent ses terres, par suite d'obstacles créés naturellement, sans 
avoir aucun droit à indemnité. Il est vrai qu'il peut endiguer ses 
terres, mais sans causer aucun préjudice au fonds d'autrui par ses 
travaux. 

Il s'ensuit qu’en Angleterre, aucune autoritĂ© administrative dĂ©finie 
n’a le contrîle responsable, ni la police des eaux ; à moins que cer- 
laines riviĂšres, ou seclions de riviĂšres, n’aient Ă©tĂ© comprises dans le 
ressort des commissions permanentes, telles que celles de drainage 
(sewers commissioners), instituĂ©es par Henri VIE; celles d’enclĂŽture 
(inclosure commissioners), chargées de lexécution des Land drai- 
nage acts ; celles du gouvernement local (Local government board), 
qui surveillent application des Pollution’s acts; ou, bien les nom- 
breuses commissions désignées par les lois locales du Parlement 
(local acts), dont les attributions se partagent avec celles du Board 
of Trade, de l'Amirauté, de la navigation, etc. 

La difficulté de codifier les prescriptions formulées par autant de 
corps constitués, et de faire une loi générale qui fixe le régime des 
eaux, rĂ©sulte principalement de la nĂ©cessitĂ© d’indemniser des droits 
et des intĂ©rĂȘts qui ont force de prescription, et aussi d’asscoir Ă©qui- 


292 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


iablement les contributions et taxes qui permeltent d'exécuter les 
travaux indispensables d'amélioration et d'entretien. 

Les droits communaux, ou individuels, de pacage, de tourbage, 
d'affouage, de chasse, de pĂȘche, etc., de mĂȘme que les enclaves de 
terrains pour enclĂŽtures, pour fossĂ©s et canaux, etc., ont pu ĂȘtre 
compensés en leur temps, et la plus-value des terres desséchées ou 
endiguĂ©es, de mĂȘme que l’augmentation du bien-ĂȘtre gĂ©nĂ©ral et de 
la salubrité, ont largement indemnisé les propriétaires atteints dans 
l'exercice de leurs privilĂšges ou de leurs droits de possession ; mais 
les intĂ©rĂȘts de la navigation sont restĂ©s en collision avec ceux du 
desséchement et de la rectification des riviÚres. Les plus graves con- 
lestations sont soulevĂ©es encore aujourd’hui par les compagnies de 
bateaux, par les autorités des ports, et les villes, menacées dans 
leurs relations commerciales, au point de vue des transports par 
riviĂšre et par mer. 

Quant à l'assiette équitable des taxes, les propriétaires des ter- 
rains situĂ©s en aval des cours d’eau, s’appuyant sur ce que les ri- 
viĂšres servent d’exutoire Ă  l’excĂ©dent des eaux pluviales qui tombent 
dans leur bassin, n’ont pas cessĂ© de revendiquer l'imposition de 
toute la surface du bassin, proportionnellement aux cotes de con- 
tribution fonciÚre. D'autre part, les propriétaires des terres situées 
en amont, à des niveaux élevés que les crues épargnent, excipent 
qu'ils n’ont aucun avantage Ă  tirer des travaux exĂ©cutĂ©s en aval, 
aux risques des propriétaires qui drainent, dessÚchent et endiguent, 
pour cultiver profitablement leurs terres. Ts se refusent Ă  admettre 
que les cours d’eau, naturellement chargĂ©s d’évacuer les eaux 
d’amont, les intĂ©ressent ; d'autant plus qu’ils sont plus Ă©loignĂ©s de 
l'Ă©missaire et qu'ils les utilisent sur une plus grande longueur, mais 
pour les besoins de la navigation. 

Le comitĂ© de la Chambre des lords, chargĂ© en 1877 de l’enquĂȘte 
sur la conservation des riviĂšres, a dĂ» reconnaĂźtre que les conditions 
particuliĂšres de chaque cours d’eau ne se prĂȘlaient pas Ă  une rĂ©gle- 
mentation unique, et qu’il failait user de prudence, en rachetant les 
droits des usiniers, pour supprimer les barrages et les Ă©cluses ; car 
il n’est pas dĂ©montrĂ© que ces ouvrages, quand ils sont bien Ă©tablis, 
soient nĂ©cessairement nuisibles. Le comitĂ© s’est prononcĂ© contre le 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 293 


principe des taxations, tel qu'il est spécifié dans le statut de [lenri VIT, 
qui consiste à percevoir les impositions sur base des avantages ré- 
sultant, dans chaque cas particulier, des travaux d'amélioration ou 
d'entretien ; ce mode de taxation n’est pas toujours Ă©quitable, ni 
susceptible d’ĂȘtre gĂ©nĂ©ralisĂ©. Il en est de mĂȘme de limposition qui 
frappe évalement tous les propriétaires dans une zone déterminée. 
Le comitĂ© en consĂ©quence Ă©met l’avis de rĂ©partir les taxes sur loule 
l’étendue du bassin, mais en imposant plus fortement les terres et 
les habitations situées au-dessous du niveau moyen des crues. La 
laxe devrait ĂȘtre basĂ©e sur la cote fonciĂšre ; les villes et les habi- 
tations ou autres bĂątiments, devraient payer leur quote-part des 
contributions pour la conservation des riviĂšres. Quant aux terres 
hautes, elles devraient ĂȘtre comprises dans la rĂ©partition des taxes 
qui servent Ă  maintenir le chenal des riviĂšres oĂč elles Ă©coulent le 
surplus des eaux pluviales et de sources qui les atteignent. 

En se fondant sur ces recommandations, le Gouvernement a sou- 
mis, depuis 1881, au Parlement divers projets de loi, d’aprùs les- 
quels, sur les trois zones constituant le bassin d’une riviùre, celle 
d’amont ne serait imposĂ©e que du dixiĂšme de la taxe fixĂ©e pour la 
zone d’aval, aprĂšs enquĂȘte publique par les fonctionnaires de l'État. 

En France, les questions de cet ordre sont depuis longtemps ré- 
glĂ©es par la jurisprudence. Il est vrai qu’on y a dĂ©veloppĂ© le prin- 
cipe trĂšs rationnel d’associer entre elles les diverses parties intĂ©- 
ressĂ©es d’un mĂȘme bassin, et de rĂ©gler les associations syndicales 
par département, sous le rapport des dépenses de travaux que sup- 
porte proportionnellement chacun des intĂ©rĂȘts associĂ©s. 

La mĂ©thode usitĂ©e consiste, quand il s’agit, par exemple, d’inonda- 
tions, à diviser les terrains submergés en zones déterminées par la 
profondeur de ces terrains au-dessous des eaux ; puis, chaque ter- 
rain est classé suivant sa valeur de production. La premiÚre partie 
est censée représenter la fréquence des inondations, et la seconde, 
la valeur de la perte. C’est Ă  une commission spĂ©ciale qu’incombe 
l'application de cette méthode, qui admet du reste à coopérer les 
autres intĂ©rĂȘts engagĂ©s. Toujours est-il que les riverains aboutis- 
sants son! les plus intéressés à l'amélioralion de la riviÚre, et que, 
sauf quelques cas particuliers, oĂč l’étendue de la propriĂ©tĂ© protĂ©gĂ©e 


291 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

n'est pas en rapport avec la servitude qui lui est imposée, les pro- 
priétaires riverains supportent de fait les sacrifices les plus considé- 
rables. D'abord, le syndicat les exonùre de lobligation d’entretenir 
la riviĂšre, et puis, en refusant de se syndiquer, ils perdent non seu- 
lement leurs récoltes, mais encore leurs terrains. Le syndicat a le 
droit par contre de compter sur leur concours le plus actif; car en 
vertu d’une clause insĂ©rĂ©e dans le rĂšglement administratif des asso- 
cialions syndicales, ils peuvent exécuter personnellement les travaux 
nécessaires, mais sous la direction du syndicat. 

Les dépenses sont ensuite remboursées pur la remise de l'impÎt ; 
mais comme la valeur de cet impĂŽt est rarement suffisante pour 
couvrir toute la dépense, il y à lieu de tenir compte de l'excédent, 
soit avec les ressources des autres impîts, soit à l’aide d'emprunts. 
La promptitude d'exécution est tellement appréciée, que le syndicat 
a tout intĂ©rĂȘt Ă  presser l'administration pour obtenir le tracĂ© nĂ©ces- 
saire à l'exécution des travaux. 

Dans le projet de Code rural présenté au Sénat, concernant le 
rĂ©gime des eaux, l'administration, au cas oĂč les propriĂ©taires ne 
peuvent pas s'entendre pour former une association libre ou auto- 
risĂ©e (loi du 21 juin 1865), peut faire procĂ©der elle-mĂȘme Ă  leur 
exécution, quand elle juge les travaux urgents ; un décret déclare 
alors d’ublitĂ© publique les travaux, fixe le montant de la subvention 
de l'État et le chiffre de la contribution qui sera mise chaque annĂ©e 
Ă  la charge des intĂ©ressĂ©s, sans qu’elle puisse jamais excĂ©der, pour 
chacun, le quart du reveuu annuel de sa propriété. 

De toutes maniùres, quand les travaux de curage, d’endiguement, 
d'Ă©largissement ou de redressement des cours d’eau non navigables 
et non flottables intĂ©ressent la salubritĂ© publique, le dĂ©cret ou l’ar- 
rĂȘlĂ© qui les ordonne peut, aprĂšs avis du conseil gĂ©nĂ©ral, mettre une 
partie de la dépense à la charge des communes dont le territoire est 
assaini. 

D'autre part, la loi du 16 septembre 1807 sur le desséchement 
des marais restant en vigueur, sauf quelques modilications intro- 
duites par la loi de 1865 sur les associations syndicales, les proprié- 
laires, les associalions ou les concessionnaires, en France, sont ga- 
rantis par une législation qui n'a pas donné grands fruits, en raison 


LES DESSÉCHEMENTS EN ANGLETERRE. 295 


des difficultés, pour ainsi dire insurmontables, que crée la fixation: 
de la plus-value. 

Aussi bien, pour les étangs dont l'assainissement a exercé une 
trĂšs heureuse influence sur l’état sanitaire et agricole de certaines 
contrĂ©es, la loi de 1807 arme l’admunistration qui applique le sys- 
tĂšme de coercition pure, c’est-Ă -dire, le dessĂ©chement obligatoire 
imposé aux propriétaires des étangs insalubres, ou bien le systÚme 
mixte qui consiste à allouer des primes aux propriétaires disposés 
Ă  faire les travaux leur incombant et Ă  user de la coercition vis-Ă -vis 
des récalcitrants. 

Reste l'exĂ©cution des travaux d’assainissement des terres humides 
et insalubres qui ont pour but d’abaisser le plan d’eau du sous-sol, 
en régularisant les riviÚres (curage et redressement), ou en ouvrant 
des canaux et des fossĂ©s d’assainissement. Ces travaux peuvent don- 
ner lieu Ă  la constitution entre les propriĂ©taires intĂ©ressĂ©s d’une 
association syndicale, libre vu autorisée (loi du 21 juin 1865), ou 
bien, aux termes de la loi du 18 juillet 1837, ils peuvent ĂȘtre mis Ă  
la charge des communes intéressées, formées en syndicat ; le con- 
tingent est fixĂ© suivant le degrĂ© d’intĂ©rĂȘt qu’a chaque commune Ă  
l'exéculion des travaux. 3 

Sur tous les points d'application générale, la législation française 
offre ainsi des garanties à la propriété privée, tout en organisant et 
rĂ©glant l’exĂ©cution et le paiement des travaux. 

L’Angleterre n'offre rien de pareil; si elle a Ă©chappĂ© au mal de 
l'administration, elle a ressenti tous les effets de mauvaises lois. 
Aussi doit-il lui ĂȘtre tenu grand compte des efforts prodigieux qu’elle 
a faits, sous le systÚme de la liberté, pour paralyser une action légis- 
lative hétéroclite, trouver dans l'initiative individuelle les ressources 
indispensables et mener à bien, dans le siÚcle présent, des opéra- 
tions aussi grandioses que celles que nous venons de décrire*. 

Les Hollandais ont inscrit à leur budget, de 1849 jusqu’en 1875, 
pour leurs travaux de canaux et l’entretien de leurs dessĂ©chements, 
plus de 40 millions de francs (19 millions 1/2 de florins), en dehors 


1. Malgré les bonnes lois dont on jouit en France, surtout celles qui régissent les 
syndicats, il n'a été desséché, pendant 70 ans, que 60 000 hectares de marais, dont 
la moitiĂ© en tourbiĂšres, pour un intĂ©rĂȘt purement industriel. 


296 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


des dépenses consenties annuellement par les provinces, les com- 
munes ou les compagnies propriétaires, La conservation des riviÚres, 
pendant ladite pĂ©rivde, a absorbĂ© la mĂȘme somme Ă  peu prĂšs, indĂ©- 
pendamment des travaux d’amĂ©lioration proprement dits. L'État, 
comme en France, prend à son compte, sous la responsabilité du 
conseil des eaux, le Waterslatt, le fardeau des plus lourdes dé- 
penses, que paient les contribuables *. 

Le rĂŽle de l’État anglais, pour favoriser le dĂ©veloppement des 
amĂ©liorations agricoles d'intĂ©rĂȘt public ou privĂ©, s’est bornĂ© Ă  des 
avances de fonds depuis l’annĂ©e 1842. 

Les prĂȘts de l’État n’ont Ă©tĂ© consentis, il est vrai, que pour le 
drainage souterrain, le défrichement des terres incultes et la cons- 
truction de bñtiments d’exploitation agricole, en rlande, jusqu’à 
concurrence d’une somme de 200 millions, qui a Ă©tĂ© d’ailleurs rem- 
boursĂ©e aprĂšs une pĂ©riode de 22 ans, intĂ©rĂȘts el amortissement 
compris, la terre restant libre de cette charge. Quant à l’Ɠuvre des 
desséchements, qui échappait au contrÎle du Gouvernement, quoi- 
qu’elle constitue une affaire d'intĂ©rĂȘt public, non moins urgente que 
le drainage, les chemins, les clĂŽtures ou les plantations, ce sont les 
propriĂ©taires: eux-mĂȘmes, au moyen de leurs ressources particu- 
lÚres, les communes propriétaires et les villes intéressées à la navi- 
gation commerciale sur les riviĂšres desservant les districts Ă  assainir, 
qui ont dĂč fournir les fonds nĂ©cessaires aux travaux, aux indemnitĂ©s 
et aux acquisitions de matériel, en faisant peser la charge à perpé- 
tuité sur la terre. Aussi bien, l'augmentation des revenus provenant 
des travaux exécutés et de la prospérité du district, de la plus-value 
des terres et des denrées, du développement des ressources locales, 
ont largement indemnisé les contribuables de leurs avances, et sau- 
vegardĂ© amplement les intĂ©rĂȘts des propriĂ©taires. | 

Quoi qu’il en soit, Le rĂ©sultat final des vastes entreprises que nous 
avons dĂ©crites rĂ©pond pleinement Ă  l’attente du pays, qui n’a reculĂ© 
devant aucun obstacle pour obtenir des améliorations sans précédent 
dans l’histoire de l’agriculture. 


1. Van Kerkwjik, Les Travaux publics dans Le royaume des Pays-Bas, 187$. 


— LES D  ————— 


NOTE PRÉLIMINAIRE 


SUR LA 


TENEUR EN AZOTE DE L'HUMUS 


DANS LES 
SOLS DES RÉGIONS ARIDES ET HUMIDES 


PAR MM. 


E. W. HILGARD M. E. JAFFA 


DIRECTEUR DE LA STATION EXPÉRIMENTALE ASSISTANT EN CHIMIE 


DE LA CALIFORNIE 


=  +0e 


Dans un mĂ©moire prĂ©cĂ©dent *, j'ai discutĂ© les influences qu’exer- 
cent les climats aride et humide sur la constitution physique et chi- 
mique des sols. J’y ai consignĂ© le fait que les sols caractĂ©ristiques 
des climats arides sont trĂšs pauvres en humus (€ matiĂšre noire »), Ă  
cause de l’extrĂȘme intensitĂ© de la combustion lente, ou Ă©rĂ©macausie, 
par la concurrence de l'air chaud avec la porosité prédominante de 
ces terres : jusqu’au point que quelquefois on trouve dans la partie 
superficielle du sol moins de matiĂšre organique que dans la couche 
qui, d'ordinaire, serait considérée comme sous-sol. 

ConsidĂ©rant que l’humus doit ĂȘtre envisagĂ© comme la source la 
plus importante de l’azote pour les vĂ©gĂ©taux non lĂ©gumineux, par la 
voie de nitrification lente, on serait naturellement disposé à admettre 
que, dans l’exploitation agricole de ces sols si riches en Ă©lĂ©ments 


{. Annales de la Science agronomique, 1892, t. II. 


298 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


minéraux nutritifs des plantes, les engrais azotés joueraient le pre- 
mier rÎle. Dans le passé, j'ai donc maintes fois recommandé lemploi 
des fumures azotées, notamment du nitrate de soude et du sulfate 
d’ammoniaque, dans des cas oĂč une culture prolongĂ©e avait dimi- 
nué la production premiÚre, surtout dans les terrains dits mesus, 
c’est-à-dire sur les plateaux à sols trùs poreux, du sud de la Cali- 
forme et de l’Arizona. 

Dans beaucoup de cas ces recommandalions n’ont pas Ă©lĂ© suiviĂ©s 
d’un rĂ©sultat favorable ; au contraire, on a constatĂ© quelquefois les 
symplĂŽmes qui indiquent l’action dĂ©favorable d’un excĂšs d'azote. 

C’est alors que je me mis Ă  Ă©tudier le taux d’azote de la matiĂšre 
noire des sols des chmats arides; et le résultat de ces recherches 
m'a bientĂŽt convaincu que je me trouvais en prĂ©sence d’un problĂšme 
tout nouveau. 

Pour me mettre Ă  l’abri de toute possibilitĂ© d'erreur par suite de 
l’usage d’un rĂ©actif azotĂ©, j'ai toujours substituĂ©, dans le dosage de 
l'azote par le procédé Grandeau, la polasse ou la soude hydratées à 
l’eau ammoniacale. Cependant, pour Ă©viter les inconvĂ©nients que 
comporte l’emploi des alcalis fixes pour le dosage de la matiùre 
noire elle-mĂȘme, ce dosage Ă  Ă©tĂ© fait, dans un Ă©chantillon spĂ©cial 
de la terre, au moyen de la solution ammoniacale. C’est surtout 
dans l’application de ce rĂ©actif Ă  des sols ayant une rĂ©action acide 
que pourraient survenir des erreurs sensibles dans le dosage de 
l’azote. 

Évidemment la dissolution de l’humus dans les alcalis fixes ne 
pourrait ĂȘtre soumise Ă  l’évaporation sans perte d'ammoniaque. Le 
filtrat alcalin a donc été neutralisé ou acidulé quelque peu par 
l'acide sulfurique ; le rĂ©sidu de l’évaporation a Ă©tĂ© soumis au pro- 
cédé Kjeldal pour le dosage de l'azote, dont le taux pour cent fut 
calculĂ© sur celui de l’humus obtenu par lextraction ammonia- 
cale. 

J'admets que, rigoureusement parlant, le dosage de l'humus de- 
vrait ĂȘtre fait, de mĂȘme que celui de l’azote, par une dissolution 
d'aleali fixe. Mais il est bien difficile d'Ă©viter toute erreur, qui sur- 
viendrait par Pemploi presque inĂ©vitable d’un excĂšs d’acide sulfu- 
rique dans la neutralisation, qu'on ne saurait neutraliser Ă  son Lour 


NOTE SUR LA TENEUR EN AZOTE DE L'HUMUS. 299 


par aucun oxyde qui se prĂȘterait Ă  la fois Ă  une pesĂ©e exacte Ă  100, 
puis Ă  la combustion de l’humus. Peut-ĂȘtre le carbonate de baryte 
pourrait-il servir, en employant des précautions spéciales ; cepen- 
dant la présence de la silice, toujours si abondante dans les cen- 
dres de la matiÚre noire, rendrait incertaine toute présomption 
quant Ă  l’état de combinaison de la base aprĂšs l’incinĂ©ration ; et 
selon mon avis, cela enlraverait beaucoup plus le dosage de Phumu:; 
que ne le ferait l'emploi des différents alcalis. 

J'ai rĂ©uni dans le tableau suivant les dosages faits jusqu’à prĂ©sent 
par la voie indiquĂ©e. J’y ai compris tant des sols caractĂ©ristiques des 
régions aride et humide, que ceux qui, quoique dérivés de la région 
aride, se sont formés dans des conditions d'humidité plus ou moins 
grande. On comprend que, sous tous les climats, les sols des maré- 
cages el des terres basses doivent montrer les caractĂšres essentiels 
des sols humides ; et de plus, que les terres des vallĂ©es de l’époque 
actuelle devront prĂ©senter des caractĂšres arides moins extrĂȘmes que 
ceux des collines ou mesas. J'ai donc classé les résultats en catégo- 
ries distinctes dans le tableau, selon les caractĂšres locaux des sols 
aussi bien que selon le climat. 


TABLEAU. 


ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


HUMUS AZOTE 
dans dans 
la terre.| l’humus, 
P. 100. | P. 100. 
Terres de la région aride. 

Terrains élevés, Californie. 

1113 Terre rouge aurifĂšre de la Sierra Nevada prise Ă  
la station culturale, comté d'Amador . 0.5£ | 16.60 
1115 Sol granitique sableux, mĂȘme localitĂ© . 110 85 1MS3E20 

1291 Sol granitique sableux de Ghaparral, mĂȘme loca- 
lité. 0.76 | 14.34 
1117 Sol granitique de pins, prĂšs de Pa HO 0SONMS 7 

863 Terre rouge, prÚs de Grass Valley, comté de Ne- 
vada . 208101 

1679 Terre noire « She » » rt JU ra 
Berkeley var AP OSIEE8"SS 

1147 Sol sablonneux, station rte dé Paso Robles, 
San-Luis-Obispo. . . . . . . ele 0 60216206 

1126 Sol sablonneux, mĂȘme localitĂ©, re en ar- 
riĂšre. : NO or e7 

1423 Terre couleur CheolaEe Hate Gaia, gants 
Obispo . . Ă  AO) DEN LA ASETE 
704 Terre poudreuse de « seidié Hole », pen 0.60 | 18.66 

1 159 Sol sablonneux de plaine, station A prĂšs 
Dularee ee : 0.37 | 16.79 

1 172 Terre rouge ese du Man Ă  l'est Tu- 
lare . ; DFA PAZ TS 

1167 Terre noire arg Anse f Mean Ă  one de Tu- 
PORTE EU Ă  1.66 | 18.19 

332 Terre sablonneuse F ateah + ue, dés de 
la station . Ă  : 110228712250 

1 607 Sol sablonneux du ne at prĂšs Le she 
caster. 0.25 | 16.80 

1406 Terre rouge des coiines d RAR, PE River- 
side . 5 0.30 | 15.00 
1536 Terre brune de Windsor, Érùs Riverside È 0.20 | 15.09 

1281 Terre rougeùtre de « mesa », prÚs Chino, comté 
de San-Bernadino . 0.58 | 15.50 
Moyennes pour les terres élevées, strictement arides.| 0.75 | 15.87 


AZOTE 


humique 
dans 


la terre. 


P:190: 


NOTE SUR LA TENEUR EN AZOTE DE L'HUMUS. 801 


AZOTE 
HUMUS | AZOTE 
humique 
dans dans 
dans 
e , 
la terre.| l’humus. la terre. 


Il 
P2100"|MP.:100: P.100. | 


Terrains bas ou de vallée, Californie. 


1 143 Sol de bas-fond, station culturale de Paso-Robles | 1.16 O6 OT? | 


© 
© 
es 
© 


77 Terre alluviale du lac de Tulare, au sud-est. . .| 0.47 9.37 
585 Terre dite « de jone » (wére grass) prÚs \isalia. 
comté de Tulare . . . à 1.00 | 14.10 | 0.146. 
586 Sol sablonneux de plaine, ne Outside ar 
comté de Tulare.. 207 LAIT D MTON TROT 
1466 Terre sablonneuse alluviale, raonte re de 
| Kennals sur 0.60 | 10.66 | 0.064 
| 168 Terre alluviale HĂ© test du eut Sunta- Clara, 
comté de Ventura. . . . 0.84 71.99 | 0.067 
| 1284 Terre argileuse « adobe », He iralese Chino 1.99 | 10.20 | 0.203 
607 Sol alluvial du rio nb prĂšs de Yuma. 
| evintétde-San-Dfégo an. Me ERA 76 7.47 | 0.056 
| Moyennes pour les terrains bas, semi-arides . . . .| 0.99 | 10.03 | 0.102 | 


Terres humides des régions aride et humide. 


Californie. 

207 Terre alluviale de l'Eel River, comté de Humbolit.| 1.25 6.96 | 0.067 
188 Terre rouge poudreuse, pente humide, prĂšs Sunoma.| 2.54 4.53 | 0.115 
110 Terre alluviale du Putah creek, comté de Solano .| 1.71 4.25 | 0,072 
213 Terre de marais sablonneuse, de Novato, comté | 

deMarin ASC NL 54 6.36 | 0.098 || 
37 Terre noire sablonneuse de « bots rouge » HR 

Comte er OA MACON En M ES 28 3.07 | 0.070 


Hors de Californie. 
Terre de marais, prĂšs Grand Rapids, Michigan. .[33.02'| 6.08 | 2.012! 


Terre alluviale de Houma, Louisiane . . . . .| ».07 4.30 | 0.218 
Terre argileuse noire de prairie, comté de Harris, 
Texas iesteine: A2 LE 8.66 | 0.184 
Terre rouge raiblee KohĂ€la, ile É ar 
(HAWAII) 2 A ACT NT Me RES: et TE OÙ) 2931108229 
Moyennes pour la région humide. . . . . . . . .| 3.04 5.242160 152 


1. Ces dosages ont été exclus des moyennes comm2 cas anormal, hormis le taux d'azote 
| daus l’humus, 
| 


302 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Un coup d’Ɠil jetĂ© sur le tableau suffit pour dĂ©montrer les diffĂ©- 
rences Ă©normes et vraiment surprenantes dans le taux de l'azote 
contenu dans l’humus de provenance diffĂ©rente. MĂȘme en admettant 
que des erreurs sérieuses puissent exister dans le dosage absolu de 
l’humus et de l’azote correspondant, vu l'unitĂ© de la mĂ©thode em- 
ployée dans tous les cas, il ne peut y avoir de doute quant au résul- 
tal gĂ©nĂ©ral, qu’on peut Ă©noncer comme suit : en moyenne, l'humus 
* des terres strictement arides conlient trois fois plus d'azote que celui 
des contrĂ©es ou localitĂ©s humides : dans les cas extrĂȘmes, cette 
diffĂ©rence peut monter jusqu’au double, soit six fois plus d’azoie 
dans l’humus d’une terre aride que dans celui de quelques terres 
humides; et dans les terres arides ce taux peut aller jusqu’à devenir 
supérieur à la teneur en azote des substances albuminoïdes. 

On comprend maintenant que, dans les régions arides, un taux 
d’humus qui, dans la rĂ©gion humide, serait de tout droit considĂ©rĂ© 
comme insuffisant pour une culture normale, peut néanmoins, dans 
la rĂ©gion aride, suffire Ă  tous les besoins d’une vĂ©gĂ©lation mĂȘme 
exigeante. Cela ressort clairement de la comparaison des produits 
obtenus en multipliant les données des deux colonnes contenant, 
l’une le pour-cent de l’humus existant dans le sol, l’autre le pour- 
cent d’azote relevĂ© par l’analyse. On voit que dans beaucoup de cas 
le taux d’azole devient trĂšs considĂ©rable dans les sols arides dont la 
production, jugĂ©e d’aprĂšs leur teneur en humus seulement, serait 
considĂ©rĂ©e comme Ă©tant gravement compromise par suite d’un dĂ©faut 
d’azote. 

Mais on peut encore se demander si, dans le cas d’une matiùre si 
riche en azote, la nitrification ne prendra pas un essor spécial, sur- 
tout sous l'influence des conditions favorables de température, de 
porosité et de la présence invariable des carbonates terreux dans les 
sols arides. On sait que c’est dans les climats arides seulement que 
se sont formĂ©s les dĂ©pĂŽts de nitrate qui, de nos jours, sont d’une 
importance si capitale pour l’agriculture. Je rappelle aussi, à ce 
propos, les analyses nombreuses par lesquelles j'ai dĂ©montrĂ© l’exis- 
tence des nitrates en quantités considérables dans les « sels de 
steppe » au sels alcalins des régions arides. (Voir le mémoire pré- 
citĂ©.) À ce sujet, le n° 1159 du tableau prĂ©sente un intĂ©rĂȘt spĂ©- 


NOTE SUR LA TENEUR EN AZOTE DE L'HUMUS. 303 


cial. C’est une terre franchement « alcaline », dont les sels sont 
caraclérisés par un taux élevé de carbonate de soude, comme aussi 
de nitrate et de phosphate de la mĂȘme base, et de potasse. En la 
dĂ©lavant avec de l’eau, on obtient un liquide rendu presque n'ir 
par l’humus en dissolution. NĂ©anmoins, cet humus, aprĂšs prĂ©cipi- 
talion, contient presque 17 p. 100 d’azote. Il est donc dĂ©montrĂ© que 
la prĂ©seuce du carbonate alcalin n’entrave pas l'accumulation de 
l'azote dans la matiĂšre noire; d'autre part, il est Ă©vident que ce 
carbonate, en agissant sur l’humus Ă  dĂšs tempĂ©ratures un peu Ă©le- 
vées, non seulement favorise la formation de lammoniaque libre ou 
carbonatĂ©e, mais quelquefois mĂȘme l'active jusqu’au point de la 
rendre Ă©vidente par l’odeur ammoniacale Ă©mise Ă  l'air libre. (Voir le 
mémoire susdit.) On comprend donc bien que l'oxydation de l'azote 
humique peut ĂȘtre favorisĂ©e par la prĂ©sence de ces carbonates ; et 
aussi que, dans le cas oĂč le carbonate alcalin serait en excĂšs jus- 
qu’au point d’entraver sĂ©rieusement l’action ou mĂȘme la vie du fer- 
ment mitrique, Pabsorption directe de l’ammoniaque dĂ©gagĂ©e par 
l’alcali pourrait, vis-à-vis des plantes, remplacer labsorption des 
nitrates aprĂšs formation. 

Il n’est guùre douteux que la nature tant physique que chimique 
du sol peut dĂ©terminer des diffĂ©rences plus oĂč moins grandes dans 
le taux d’azote de l’humus, hormis les influences elimatĂ©riques. La 
discussion détaillée des données du tableau fait ressortir nettement 
que, dans les sols poreux, l'accumulation de l'azote est moins consi- 
dérable que dans les sols compacts, argileux. (Voir les n° 1157 et 
1 679 du tableau.) On peut aussi soupçonner que celte accumulation 
est en relation plus ou moins directe avec la teneur en chaux carbo- 
natée, et qu'au contraire, une forte proportion d'oxyde de fer hy- 
draté agit défavorablement sur elle. Mais à l'heure qu'il est, le 
nombre des données ne suffit pas encore pour affirmer positivement 
ces corollaires. | 

Ce qui ressort d’une maniĂšre Ă©clatante de ces analyses, c’est la 
différence tranchée entre les processus de décomposition des ma- 
liĂšres vĂ©gĂ©lales d’une part, et des composĂ©s constituant le corps 
animal de l’autre. Dans le cas des matiĂšres vĂ©gĂ©tales, il y a surtout 
oxydation de la matiÚre hydrocarbonée, avec accumulation perma- 


304 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


nente de l’azote sous formes amidiques. Dans le cas des matiùres 
animales, Ă©limination prompte, avant tout, de l'azote sous forme 
d’ammoniaque, en laissant des rĂ©sidus presque dĂ©pourvus d’azote, 
si tant est qu’elles en retiennent. En partant de ce fait hypothĂ©tique, 
que ‘la matiĂšre vĂ©gĂ©tale contient la majeure partie de son azote sous 
forme albuminoĂŻde, on ne comprend pas trop pourquoi existe cette 
différence si tranchée. 

Nos recherches se poursuivent activement, et J'espùre qu’elles 
nous donneront bientÎt des lumiÚres plus précises sur ces substances 
richement azotées des sols arides. 


LA 


FÜMURE DES CHAMPS 


ET DES JARDINS 


——25900 — 


AVANT-PROPOS 


Méconnaitre le progrÚs considérable accompli depuis une dizaine 
d'annĂ©es dans les diverses branches de l’agriculture française, ce 
serait nier l'Ă©vidence. Le trait caractĂ©ristique de ce progrĂšs, c’est 
l’accroissement du rendement moyen de la terre, sous l'influence 
combinée de fumures plus abondantes et mieux adaptées au sol et 
aux rĂ©coltes, d’un meilleur choix de semences et de l'emploi d’un 
outillage perfectionné. 

D’autre part, si, tenant compte de ce progrùs incontestable, on 
compare la production moyenne de nos terres avec celle de cer- 
taines rĂ©gions de l’Europe moins favorisĂ©es que la France sous le 
rapport du climat et de la qualitĂ© du sol, on ne peut s'empĂȘcher 
de penser qu'il reste bien Ă  faire encore Ă  nos cultivateurs pour 
obtenir Ă©conomiquement de la terre le maximum de produits qu’elle 
peut donner. 

La France, bien cultivée, doit suffire à sa consommation en pain 
et en viande ; elle devrait mĂȘme ĂȘtre exportatrice de grains et de 
bĂ©tail. Ce double but sera atteint, 1l n’en faut pas douter, dans un 
avenir prochain, si, d’un cĂŽlĂ©, restreignant la culture du blĂ© aux 
terres aptes Ă  fournir un bon rendement, de l’autre, dĂ©veloppant la 


ANN, SCIENCE AGRON, — 1S93. — 1, 20 


306 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


culture fourragÚre par un meilleur traitement des prés naturels et 
par la création de prairies temporaires, nos cultivateurs savent et 
peuvent faire au sol les avances nécessaires en matiÚres fertilisantes 
complémentaires du fumier de ferme. 

L’Instruction pratique sur l'emploi du nitrate et du phosphate, 
dont la premiÚre édition, parue en 1890, a été suivie de nombreux 
tirages, avait précisément pour objet de résumer en quelques pages 
les conditions essentielles du progrÚs réalisable en cullure par 
l'emploi judicieux des engrais commerciaux associés au fumier de 
ferme. 

L'accueil bienveillant que cette Instruction a rencontré dans le 
monde agricole m’a engagĂ© Ă  en Ă©tendre le cadre et Ă  rĂ©unir, sous 
une forme succincte, les indications essentielles pour la famure des 
principales récoltes de la France. 

Jusqu'ici, les végétaux de la grande culture : céréales, plantes 
sarclées, plantes fourragÚres, ont presque exclusivement bénéficié 
de l’emploi des engrais commerciaux. Il m'a semblĂ© intĂ©ressant 
d'appeler l’attention des cultivateurs, des propriĂ©taires de jardin et 
des amateurs d’horticulture sur les services que peut rendre l’ap- 
plication des mĂȘmes matiĂšres fertilisantes Ă  la production maraĂźchĂšre 
et horticole. 

De mĂȘme, la culture arbustive (arbres fruitiers, vignes, houblons, 
etc.) doit entrer résolument dans la voie qui à été si profitable à 
l’agriculture proprement dite. Les cultures maraïchùre, arbustive, 
florale et la viticulture, qui constituent une des richesses de notre 
pays, ont tout à gagner à l'emploi intelligent des engrais minéraux. 
Les quantitĂ©s de fumier d’étable et d’écurie produites annuellement 
en France sont tout à fait insuffisantes pour l’accroissement du rende- 
ment de nos terres : nos fumiers sont généralement mal traités et la 
majeure partie des déjections humaines et animales est perdue pour 
la ferulisation du sol. {l est donc de toute nécessité de recourir aux 
sources minérales d'azote, d'acide phosphorique et de potasse que 
industrie met à notre disposition, pour parer à l’insuffisance des 
fumures organiques. 

Appliqués aux prairies et aux pùturages naturels, les engrais 
commerciaux permettent d'en doubler le rendement dans la plupart 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 307 


des cas; or, doubler la rĂ©colte de fourrage c’est rendre possibles 
l'Ă©levage et l'entretien d’une quantitĂ© de bĂ©tail double et accroĂźtre 
d’autant la production du fumier de ferme qui demeurera toujours 
l'élément fondamental de fertilisation des terres arables. Quelque 
bruyantes qu’aient Ă©tĂ© depuis vingt-cinq ans les attaques dirigĂ©es 
contre le fumier de ferme, considéré par certains esprits faux 
comme inutile pour l’agriculture et pouvant ĂȘtre remplacĂ© exelusi- 
vement par les engrais dits chimiques, les agriculteurs sérieux et 
instruits — notre pays n’en manque pas — n’accordent pas de 
créance à ces exagérations. [ls savent que l'introduction dans le sol 
d’une quantitĂ© notable de matiĂšre organique est le moyen le plus 
sĂ»r d'assurer l’action des engrais minĂ©raux, et de communiquer Ă  
la terre des propriétés physiques et chimiques essentielles à sa fécon- 
ditĂ©. C’est donc dans l’association du fumier de ferme aux matiĂšres 
minĂ©rales que l’on est certain de rencontrer le moyen le plus sĂ»r 
d’accroitre la fertilitĂ© de la terre. 

Si l’assertion qui consiste Ă  nier l'utilitĂ© du rĂŽle du fumier et Ă  
admettre la possibilité de substituer, partout et en tout temps, à 
ce précieux engrais, l'addition au sol de quelques centaines de 
kilogrammes d'azote ou d’acide phosphorique est, à notre sens, 
absolument fausse, l’erreur des cultivateurs qui repoussent les 
engrais minéraux, sous le prétexte, tout à fait dénué de fonde- 
ment, que ceux-ci Ă©puisent le sol, n’est pas moins complĂšte. Con- 
tinuons à employer le fumier de ferme: entourons sa récolte et 
sa conservation de tous nos soins et complélons son aclion par 
celle des nitrates, des phosphates, des sels de potasse, partout oĂč 
nos terres accusent une proportion de ces aliments de la plante - 
insuffisante, soit en quantité, soit en qualité : là est la vérité, 
chaque jour rendue plus Ă©vidente dans les exploitations rurales 
bien dirigées. 

J'ai pensĂ© ĂȘtre utile aux nombreux amateurs de fleurs d’apparte- 
ment et de serre, en joignant Ă  l'Ă©tude des engrais applicables en 
grande culture et au jardinage, quelques indications sur les mé- 
langes nutrilifs Ă  l’aide desquels on peut entretenir les vĂ©gĂ©taux 
cultivés en pots et en caisses. On trouvera dans un chapitre spécial 
tous les renseignements dĂ©sirables Ă  ce sujet. L’horticulture en 


308 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

chambre, si je puis ainsi la désigner, a pris un trÚs grand déve- 
loppement et J'espĂšre ĂȘtre agrĂ©able Ă  beaucoup de personnes en 
leur faisant connaßtre les procédés trÚs simples qui en assurent le 
succĂšs. : 

Il ne faut point chercher dans les pages qui vont suivre des re- 
celtes infaillibles, indistinctement applicables aux diverses récoltes 
qu’elles auraient le pouvoir de dĂ©cupler comme par enchante- 
ment. Laissons aux charlatans les formules merveilleuses qui, sc- 
lon eux, doivent renouveler du Jour au lendemain la face de lagri- 
culture. 

Nos visées sont moins ambitieuses : nous nous estimerons trÚs 
heureux si la lecture de ces quelques pages amĂšne la conviction 
que l’agriculture française doit arriver à nourrir le pays et, grñce 
aux conditions exceptionnelles de climat et de sol oĂč la nature la 
placée, devenir exportatrice chez les nations moins favorisées, à cÎté 
de produits uniques au monde, tels que nos vins et nos fruits, de 
PexcĂ©dent de rĂ©coltes qu’elle devra au progrĂšs cultural. Nous se- 
rions heureux d’avoir contribuĂ© Ă  ce progrĂšs, dans une mesure si 
faible que ce fût, par cette modeste étude sur la fumure des champs 
et des jardins. 


I. —- CÉRÉALES ET PLANTES SARCLÉES 


_ I. — Remarques prĂ©liminaires. — NĂ©cessitĂ© d'associer l’acide 
phosphorique à l’azote dans la fumure du sol. 


Les vĂ©gĂ©taux, quels qu’ils soient, plantes de grande culture, lĂ©- 
gumes, arbustes, fleurs, etc., ne peuvent vivre qu’à la condition de 
rencontrer dans le sol, indépendamment des aliments que leurs 
feuilles puisent dans l’atmosphĂšre, des quantitĂ©s suffisantes de quel- 
ques substances minérales dont les deux plus importantes, vu leur 
raretĂ© dans la plupart des sols, sont l’azole et l'acide phosphorique. 
La chaux, la magnésie et la potasse, beaucoup plus répandues que 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 302 


ces deux corps, dans les terres de la plupart des régions de Ja 
France, font beaucoup moins souvent défaut à la végétation. : 

Dans les sols argilo-siliceux ou siliceux, l'apport de chaux est fré- 
quemment nĂ©cessaire ; mais le chaulage peut ĂȘtre avantageusement 
remplacĂ© par l’addition, Ă  ces terres, de quantitĂ©s un peu considĂ©- 
rables de scories de dĂ©phosphoration : 4 000 Ă  2 000 kilogr. Ă  l’hec- 
tare, par exemple. Les scories, en effet, apportent prÚs de la moitié 
de leur poids de chaux trĂšs assimilable, ce qui explique comment 
leur introduction dans le sol peut remplacer le chaulage, avec cet 
avantage de fournir en mĂȘme temps de l'acide phosphorique Ă  ces 
sortes de terres qui en manquent presque toujours. 

La magnésie fait, plus souvent qu'on ne le croit, défaut dans les 
sols, surtout les terres non calcaires. L’addition de kaïnite est trùs 
favorable dans ce cas. — Quand tous les principes fertilisants sont 
abondants dans le sol, Ă  un Ă©lat qui les rende aptes Ă  nourrir la 
plante, on oblient une abondante rĂ©colte. Si l’un seulement de ces 
principes manque, par son apport le rendement de la terre s’élĂšve 
tout de suite dans une trĂšs notable proportion. 

C’est ainsi, par exemple, que 200 kilogr. de nitrate de soude, 
renfermant 31 kilogr. environ d’azote, permeltent, si la terre ren- 
ferme de l'acide phosphorique, de la potasse, etc., en proportion 
convenable, d’oblenir 5 à 7 quintaux de froment de plus (avec la 
paille correspondante) que n’en produirait la mĂȘme terre Ă  laquelle 
on n'aurait pas donnĂ© d'azote. De mĂȘme, l'emploi de 60 Ă  80 kilogr. 
d'acide phosphorique, si le sol, manquant de ce principe Ă  un Ă©tat 
assimilable, renferme assez d'azote et de potasse, Ă©lĂšvera trĂšs nota- 
blement le rendement. 

Que sont ces quelques kilogrammes d’azote et d’acide phospho- 
rique, par rapport aux quantitĂ©s des mĂȘmes corps existant dans le 
champ oĂč on les apporte ? Relalivement trĂšs peu de chose, car les 
terres trĂšs pauvres, presque stĂ©riles, en l’absence de fumure, ren- 
ferment rarement à l’hectare moins de 1 200 à 1 500 kilogr. d'azote, 
et autant d'acide phosphorique, dans l1 couche de 20 centimĂštres 
oĂč vivent les cĂ©rĂ©ales (soit de 06,04 Ă  05,05 d'azote ou d’acide 
phosphorique par 100 gr. de terre). Les terres de moyenne qualité 
en contiennent toujours au moins le double. Mais l’action des faibles 


310 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


quantités d'azote et d'acide phosphorique ajoutées au sol, sous forme 
d'engrais, s'explique par l’état d’assimilabilitĂ© oĂč ces corps se trou- 
vent dans les matiÚres fertilisantes employées (nitrate de soude, 
phosphates, ele.). 

Un fait essentiel qu’il ne faut jamais perdre de vue, fait qui est 
acquis d’une façon absolument certaine, par les nombreuses expĂ©- 
riences qu’on Ă  inslituĂ©es et suivies, tant en France qu’à l'Ă©tranger, 
c’est que les engrais azolĂ©s et le nitrate de soude, en particulier, 
ne donnent leur plein effet que si le sol offre, en mĂȘme temps, 
à la plante, les quantités d'acide phosphorique assimilable et de 
polasse dont celle-ci a besoin. — On ferait donc, presque en 
pure perte, une dépense de nitrate de soude, en lépandant sur 
une terre insuffisamment pourvue en acide phosphorique et en 
potasse, tandis qu'on accroĂźt, dans une proportion trĂšs notable, 
parfois dans le rapport de un Ă  quatre, le rendement de certaines 
cultures, céréales, plantes sarclées, sous l'influence combinée du 
nitrate et de l’acide phosphorique. 

Quelques chiffres, empruntés aux quarante années de culture de 
Rothamsted, vont mettre cette vérité en évidence. Sir J. Bennet 
Lawes et le docteur Gilbert cultivent méthodiquement, depuis plus 
d’un demi-siĂšcle, Ă  la ferme expĂ©rimentale de Rothamsted, les princi- 
pales plantes agricoles, dans le mĂȘme sol diversement fumĂ©. Voici, 
en ce qui regarde l’action du nitrate de soude, employĂ© seul ou 
conjointement avec les phosphates, les moyennes des résultats tout 
à fait significatifs de trente années consécutives de culture de blé, 
seize annĂ©es d'orge et neuf annĂ©es d’avoine. 

L'augmentation du rendement, à l’hectare, en grain et en paille, 
comparativement Ă  celui d’un sol demeurĂ© sans fumure, par l’em- 
ploi de 100 kilogr. de nitrate, suivant qu’il Ă  Ă©tĂ© additionnĂ© ou non 
de phosphate, a été la suivante : 


Blé. 
GRAINS. PAILLE, 
Kilogr. Kilogr, 
AVECDIOSDNA LE EEE RENE RS 2147 566 
Sans phosphate NP ARE TMRIE 101 269 


DITOÉTENCE AE APE RE ER 116 297 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. OÙ 


Orge. 
GRAINS. PAILLE. 
Kilogr. Kilozr, 
AVEB RHOSDRAMO LL REA TTL 492 662 
Sans phosphate ent: 2): NOR 288 A7T9 
Diférencereee. ar. ee 204 183 
Avoine. 
Avec phosphate. M7 ARE 204 369 
DANS DROSHIAIC SENTE: MAR" EE 159 269 
Diérente dr NL 45 100 
Pommes de terre. 
AVECHDROSDRATO RU ER ee cl. 1 250 kilogr. 
SANS DNOSDN AE A MR ET Ne RS res 308 — 
DITÉTENC ORAN UNE RME TRRERSR Lie 942 kilogr. 


Il résulte donc clairement de ces chiffres qu'il importe, pour ob- 
‘tenir du nitrate de soude le maximum de rĂ©colte qu’il peut donner, 
que le champ oĂč on le rĂ©pand contienne une quantitĂ© d’acide phos- 
phorique assimilable suffisante pour assurer le développement com- 
plet de la végétation. 

J'indiquerai plus loin les proportions d’acide phosphorique, sous 
les différentes formes, à employer pour les diverses récoltes avec le 
nitrate de soude, pour assurer l’effet maximum de ce prĂ©cieux agent 
de ferliisation. Nous verrons à cette occasion que les excédents de 
rendement en grains, paille et tubercules que Je viens de citer ont 
été, fréquemment, trÚs notablement dépassés dans la pratique. 

S'il est une vérité surabondamment démontrée par la pratique 
agricole comme par les recherches physiologiques des agronomes, 
c’est la nĂ©cessitĂ© de la prĂ©sence dans le sol, en quantitĂ© suffisante et 
sous une forme assimilable, de {ous les aliments de la plante. C’est 
dans la rĂ©alisation, par l’apport en quantitĂ© suffisante d’engrais 
convenablement choisis, Ă©tant donnĂ©e la nature chimique d’un sol, 
que rĂ©side l’art de la fumure. 

L’indication des moyens Ă©conomiques Ă  mettre en Ɠuvre pour 
atteindre ce but est l’objet spĂ©cial de cette Ă©tude. 


312 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


II. — L’azote nitrique, agent essentiel des fumures azotĂ©es. 


L’azote nitrique, qui forme l'Ă©lĂ©ment actif du nitrate de soude, 
est l’aliment azotĂ©, par excellence, des vĂ©gĂ©taux. 

C’est sous la forme d’acide nitrique, combinĂ© avec la chaux, la 
magnésie etles autres bases, que les sols fertiles offrent aux plantes 
leur alimentation azotĂ©e. Il est dĂ©montrĂ© aujourd’hui que Paction 
fertilisante du fumier de ferme, comme celle des engrais organi- 
ques : cuir, corne, laine, plumes, sang desséché, débris de viande 
et, en gĂ©nĂ©ral, de tous les dĂ©tritus animaux, ne se manifeste qu’a- 
prÚs la transformation en nitrates des matiÚres azotées qui consti- 
tuent la plus grande partie de leur valeur. 

Le processus chimique qui donne naissance, dans les champs, aux 
nitrates dont se nourrissent nos rĂ©coltes est le mĂȘme, Ă  l'intensitĂ© 
prÚs du phénomÚne, que celui auquel les régions tropicales doivent 
les amas gigantesques de nitrate, aujourd’hui exploitĂ©s pour le plus 
grand profit de l’agriculture. Dans nos terres, comme au Chili etau 
PĂ©rou, un organisme microscopique se charge, ainsi que l’ont Ă©tabli 
les belles recherches de MM. SchlĂŠsing, MĂŒntz et Marcano, de trans- 
former les détritus azotés animaux en nitrates, avec cette différence, 
en faveur des régions tropicales des cÎtes du Nouveau-Monde, que 
le nitrate de chaux produit s’y transforme au contact du sel marin en 
nitrate de soude, beaucoup moins soluble que les nitrates de chaux 
ou de magnĂ©sie. Le nitrate de soude s’accumule, en l'absence de 
pluies, pour former, à la longue, ces gisements colossaux, réserve 
de longtemps inĂ©puisable Ă  laquelle nous demandons aujourd’hui 
l'accroissement de nos récoltes. 

Sous notre climat, au contraire, une grande partie des nitrates 
formés dans le sol par l'oxydation de l'azote des maliÚres organi- 
ques, est entraßnée dans le sous-sol par les pluies. Du sous-sol, le 
nitrate s’écoule dans les sources, ruisseaux, riviĂšres et finalement 
s’en va Ă  la mer. De lĂ , la nĂ©cessitĂ© d'importer de l'azote mitrique 
dans nos lerres, pour en maintenir el en accroßtre la fertilité. 

Les résultats des expériences physiologiques concernant le rÎle 
des nitrates dans la végétation ont été constamment confirmés par 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 315 
la pratique agricole. Depuis l’époque, dĂ©jĂ  Ă©loignĂ©e, Ă  laquelle 
J. B. Boussingault a Ă©tabli la valeur alimentaire du nitrate pour les 
plantes, toutes les recherches scientifiques et les résultats culturaux 
sont venus sanctionner les observations de l’éminent agronome. 
A l'heure qu'il est, la question est absolument rĂ©solue : c’est le 
nitrate, directement introduit daas le sol ou résultant de la trans- 
formation des autres engrais azotés, qui nourrit nos récoltes de 
céréales et autres. 

Les principaux avantages de l'emploi du nitrate dans la pratique 
agricole sont les suivants : 

1° Le nitrate sert directement à l’alimentation de la plante. N'ayant, 
pour cela, Ă  subir aucune modification dans la terre, il agit donc 
beaucoup plus rapidement que les autres engrais azotĂ©s d’origine 
organique, l’action de ces derniers Ă©tant subordonnĂ©e Ă  leur nitrifi- 
cation préalable ; 

2° La rapidité avec laquelle le nitrate est absorbé par les végétaux 
mel promptement ceux-ci en état de résister, par leur vigueur et 
par leur dĂ©veloppement, aux intempĂ©ries, Ă  l’action des insectes 
nuisibles et aux parasites ; 

9° Dans les années à hivers rigoureux, le nitrate employé en cou- 
verture, sur les blés et les seigles, permet aux semailles d'automne 
de réparer le retard produit sous l'influence de conditions climaté- 
riques défavorables ; 

4° Enfin, comme nous allons en donner la preuve, le nitrate ac- 
croit Ă©conomiquement, d'une maniĂšre trĂšs notable, le rendement de 
la plupart des cullures. 

Nous commencerons par étudier son influence sur les céréales. 


III. — Influence du nitrate de soude sur le rendement 
des céréales d'automne et de printemps. 


On possĂšde aujourd’hui un assez grand nombre d'expĂ©riences 
méthodiquement conduites, pour fixer approximativement l'excédent 
de grain et de paille que le cultivateur peut attendre de l'emploi du 
nilrate, en sol suffisamment pourvu des autres aliments de ces plantes 
el nolamment d'acide phosphorique. 


314 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Par expĂ©riences mĂ©thodiquement conduites, j'entends celles oĂč 
ont été exactement déterminées les quantités de matiÚres fertili- 
santes employées, le poids et la qualité des récoltes obtenues, ainsi 
que l’ensemble des conditions culturales. 

L’excĂ©dent de grain et de paille reprĂ©sente le nombre de kilo- 
erammes de ces produits rĂ©coltĂ©s en plus, par hectare, sous l’in- 
fluence du nitrate. Get excédent est déduit d'expériences compara- 
tives faites, sur une mĂȘme surface de terre, dans des conditions iden- 
tiques de sol et de fumure, sauf une : l’addition de nitrate. Dans 
son intéressant travail sur l'influence du nitrate de soude, M. le doc- 
teur Stutzer, directeur de la Station agronomique de Bonn’, a rĂ©uni 
et discuté plusieurs centaines d'expériences culturales sur le blé, 
l’avoine, l'orge et le seigle. En Ă©cartant les rĂ©sultats qui, pour un 
molif ou pour un autre, peuvent sembler douteux, M. Stutzer 
est arrivé, comme moyenne des récoltes sur lesquelles il a pu re- 
cueillir des données certaines, aux accroissements de rendement 
suivants : 

100 kilogr. de nitrate de soude Ă  l’hectare, employĂ©s conjointe- 
ment avec un engrais phosphaté, ont donné les excédents de récolte 


que voici : 
GRAINS. PAILLE. 
Kilogr. Kilogr. 
PLOMEN SM rEs NedEe Edvee 270 574 
D'OISE SES SE Te ES DRE PR ER 281 540 
OTBe SR RER CT ANR Da ME 510 673 
AFDINE 22 MMA AE LOS RE D EREENTE ane 537 823 


Ces excĂ©dents de rendement ont Ă©tĂ© dĂ©passĂ©s dans certains cas”, 
mais il est prudent, dans les discussions de l’ordre qui nous occupe, 
d’écarter les chiffres extrĂȘmes et de se baser sur des moyennes rĂ©- 
sultant du plus grand nombre de données comparables, parmi celles 


1. Le Nilrale de soude, son importance el son emploi comme engrais. In-12. 
Paris, 1887, Gauthier-Villars. 


2. La composition du sol, sa fécondité naturelle ou acquise, influent considéra- 
blement, cela va de soi, sur les résultats obtenus avec une fumure additionnelle : 
tout ce qui va suivre doit donc ĂȘtre regardĂ© seulement comme une indication gĂ©nĂ©- 


rale touchant la plus-value résultant de l'emploi des fumures. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 919 


qui ont été recueillies. Deux mots sur le mode d'application de sa 
fumure. Pour les céréales de printemps, on peut, lorsque le temps 
n’est pas pluvieux, Ă©pandre avant la semaille de l'orge et de l’avoine le 
mélange de nitrate et de phosphate, aussi uniformément que possible 
à la surface du sol, puis l’enfouir à une faible profondeur par un 
dernier labour. L'emploi du semoir d'engrais assure cette réparti- 
lion mieux que l’épandage Ă  la volĂ©e, mais il n’est pas imdispen- 
sable. On facilite singuliĂšrement l’égale rĂ©partition de l’engrais Ă  
la surface du sol en le mélangeant à sept ou huit fois son volume 
de terre fine passée à la claie. Si le temps était pluvieux au moment 
de la semaille, il serait préférable de ne répandre que le phosphate 
et de réserver au moins la plus grande partie du nitrate pour le 
rĂ©pandre lorsque l’avoine ou l’orge auront atteint la hauteur de 12 
Ă  19 centimĂštres. 

Quant aux terres destinées aux cultures d'hiver, blé et seigle, que 
nous examinerons plus loin, c’est avant l'hiver qu’il faut leur donner 
le phosphate. Ce dernier, pour agir sur la rĂ©colte, doit ĂȘtre incor- 
poré au sol avant le dernier labour d'automne. 

Nous verrons plus loin que la fabrication récente, sur une échelle 
industrielle, du phosphate de potasse et du phosphate d’ammoniaque, 
permet de recourir, dans certains cas, à l’emploi des phosphates en 
couverture sur les céréales d'hiver. 

Pour celles-ci, le cultivateur Ă©pandra le nitrate en couverture au 
printemps, en une ou plusieurs fois, Ă©galement, Ă  dose variant de 
60 Ă  200 kilogr., suivant l’état de fumure de sa terre. Si les champs 
sont largement pourvus d'acide phosphorique, cette fumure com- 
plĂ©mentaire donnera son plein effet; dans le cas contraire, l’aug- 
mentation de rĂ©colte rĂ©sultant de l’application de nitrate sera encore 
rémunératrice, l'excédent de grain et paille récoltés devant égaler, 
au minimum, la moitié des poids indiqués plus haut. 

Une pratique excellente, surtout dans les années pluvieuses, con- 
siste Ă  fractionner l’épandage du nitrate, pour s'opposer le plus pos- 
sible Ă  son entrainement dans le sous-sol par les eaux pluviales. 
C’est au moment oĂč la vĂ©gĂ©tation est active qu’a lieu l’utilisation la 
plus complùte de l’azote nitrique par la plante. 


316 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


IV. — Utilisation de l'azote du nitrate par les cĂ©rĂ©ales. Com- 
paraison du nitrate avec le fumier de ferme au point de 
vue de l’utilisation de l'azote. 


À quelle quantitĂ© d’azote nitrique ou de nitrate, ce qui revient au 
mĂȘme, correspond un excĂ©dent de rĂ©colte de 100 kilogr. de grain 
avec la paille correspondante ? Telle est la question Ă©conomique 
qu'il est facile de résoudre en partant des excédents moyens de ren- 
dement indiqués par M. Stutzer. 

100 kilogr. de nitrate, contenant 15*,65 d’azote, ont donnĂ© un 
excĂ©dent moyen sur la rĂ©colte du mĂȘme sol sans nitrate, de : 


GRAIN, PAILLE, 

Kilozr. Kilogr. 
EROMEN TARN TE NE" 270 574 
SO RES SEE EEE 281 540 
OrSB LEE APCE o10 673 
AVOIR MR MAL 537 823 


Ea divisant le poids d'azote (15*#,65) employé, par l'excédent en 
orain récollé, on oblient la quantité d'azote correspondant à une 
production d’un quintal de grain, avec sa paille, en plus qu’en l’ah- 
sence du nitrate ; on trouve ainsi : 


LE de soude. 

Pour 100 kilogr. de blé et sa paille, une quan- + = 
titĂ©â€d'azote de... 0 ire 2021588706 correspondant 374085 
Pour 100 kilogr. de seigle . SEM RE ER DO — 39 ,090 
Poar dODKlo Sr dOrSB TEE NE SE 06 = 19 ,600 
Pour 100 kilogr. d'avoine D RAOIÉE — 18 ,620 


La premiÚre conséquence de ces constatalions numériques est que 
l'excédent des récoltes s'obtient pour les céréales de printemps, 
avec une dépense d'engrais azoté, sensiblement moitié moindre de 
celle qu’exigent les cĂ©rĂ©ales d'hiver. La conclusion gĂ©nĂ©rale est que 
G kilogr. d’azote environ, soit 40 kilogr. de nitrate, permettent 
d'obtenir un excédent de rendement (pour le blé et pour le seigle) 
d’un quintal de grains, plus sa paille, tandis que 3 kilogr. d'azote 
nitrique suffiraient, en moyenne, pour produire le mĂȘme excĂ©dent 
en grains et paille d'orge et d'avoine. La totalitĂ© de l’azote de l’en- 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. Es x 


grais ne se retrouve pas, tant s’en faut, dans l'excĂ©dent de grains et 
de paille de la récolte. On sait, en effet, que le nitrate de soude est 
facilement entraßné dans le sous-sol par les eaux pluviales, le pou- 
voir absorbant du sol ne s’exerçant pas sur l’acide nitrique. En effet, 
si l’on rapproche les quantitĂ©s totales d’azute, contenues dans ces 
excĂ©dents de rĂ©colte, des poids d’azote nitrique qui ont aidĂ© Ă  les 
produire, on arrive aux constatations suivantes : 


Blé, 
AZOTE 
A" — 
contenu non 
TE ent F2 récupéré 
de nitrate. ME 
récolte. la récolte, 
(Différence). 
Quint.mét. P.100. Kilogr. Kilogr, Kilogr, Kilogr. 
Grain. . 2,70 à 2.08 — 5,616 | ee L 
8,371 15,650 7,279 
Paille. . 5,74 à 0.48 — 2,755 +51 
Seigle. 
É PA dr 
Grain: . 2,81 ‘ 1.60 k,946 1,106 15,650 S,544 
Paille. . 5,40 à 0.40 — 2,160 
Orge. 
Grain. . 5.10 à 1.76 — 8,160 
6 12,167 15,6 8 
Paille. . 6,73 à 0.64 — 4,307 ANUS 
Avoine. 
Grain. . 531 Al r0—- 19,451 à 
s 1,590 
Paille. . 8,23 à 0,56 — 4,609 | RS dd ADN TR 


Il rĂ©sulte de cette comparaison qu’en supposant que tout l'azote 
de l’excĂ©dent de rĂ©colte vienne du nitrate employĂ©, ce qui n’est 
pas, l’utilisation maxima du nitrate par les rĂ©coltes serait la sui- 
vante, pour les diverses céréales : 


AZOTE 
utilisé, perdu. 
P. 100. P. 100. 
BlĂ© . . 53.49 + 46.51 — 100 
Seigle . 45.40 + 54,60 — 100 
Orge. . 19.72 + 20.28 = 100 
Avoine. . 89.S4 + 10.16 — 100 


318 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

Les cĂ©rĂ©ales d'hiver (seigle et blĂ©) se comportent donc, d’aprĂšs 
cela, trÚs différemment des céréales de printemps (orge et avoine), 
sous l’influence du nitrate. Ge n’est point ici le lieu de discuter les 
questions que soulÚvent ces comparaisons {héoriques : je me borne 
Ă  les signaler Ă  l'attention des directeurs des Stations agronomiques 
comme un intĂ©ressant sujet d’études. 

Pourquoi, avec une quantitĂ© Ă©gale de nitrate de soude, — c’est 
le fait qui résume les nombreux essais de cultures rapportés par 
M. Stutzer — l’avoine et l'orge donnent-elles un excĂ©dent moyen, 
en grain et paille, double de celui du blé et du seigle ? Tel est le 
problĂšme physiologique posĂ© et dont la solution doit ĂȘtre cherchĂ©e 
expérimentalement. 

Les chiffres indiqués par M. Stutzer, comme représentant la 
moyenne des excĂ©dents obtenus, rĂ©sultent en effet d’un grand nom- 
bre d’expĂ©riences en sols diffĂ©rents ; il y aurait donc lieu d'Ă©tudier 
la question dans des conditions de sols bien déterminées. 

Un autre point de vue de la question, étroitement lié aux faits 
que je viens de discuter, concerne la récupération pratique, par la 
récolte, de l'azote donné sous différentes formes par la fumure aux 
diverses céréales. 

Quelle est la quantitĂ© d’azote des fumures retrouvĂ©es effective- 
ment dans les rĂ©coltes au bout d’une certaine pĂ©riode de culture de 
la mĂȘme cĂ©rĂ©ale? Quelle quantitĂ© d’azote des fumures, par contre, 
demeure inutilisée par les plantes? Comment se comportent compa- 
rativement le nitrate de soude, le sulfate d’ammoniaque et l’azote 
organique (fumier de ferme, tourteau, etc.) sous ce rapport ? 

Une longue succession de la mĂȘme plante sur le mĂȘme sol, avec 
détermination de la composition des fumures et de celles des ré- 
coltes, peut seule permettre de rĂ©pondre Ă  ces divers points d’inter- 
rogalion. 

Ces études ont été faites dans la ferme expérimentale de Rotham- 
sted, annexe de la Station agronomique fondée dans le Herts par 
sir J. Bennet Lawes, vers 1840, et continuées sans interruption jus- 
qu'Ă  ce jour, par l’éminent agronome et son collaborateur de la 
premiÚre heure, le docteur Gilbert. Un résumé sommaire des résul- 
tats constatés à Rothamsted trouvera naturellement place ici. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 319 


Dans leurs recherches magistrales sur la culture des céréales, sir 
J. Bennet Lawes et le docteur Gilbert ont Ă©tudiĂ© la question de l’uti- 
lisation de l'azote par le blĂ©, l'orge et l’avoine pendant des pĂ©riodes 
assez longues (vingt années pour les deux premiÚres récoltes et 
trois annĂ©es seulement pour l’avoine), pour en pouvoir dĂ©duire des 
conclusions trĂšs importantes au point de vue pratique. 

Connaissant, d’une part, la quantitĂ© d'azote apportĂ©e sous diverses 
formes, par les fumures affectées, sans variation ni discontinuité, 
pendant vingt ans, Ă  la mĂȘme plante ; ayant, de l’autre, dĂ©terminĂ© 
par l’analyse les quantitĂ©s d’azote contenues dans les rĂ©coltes, ces 
savants agronomes ont déduit, de la comparaison de ces deux don- 
nĂ©es, les taux pour 100 d’azote de l’engrais nie par l’excĂ©dent 
de produits (grain et paille). 

Je résume dans le tableau suivant les résultats de ces importantes 
recherches : 

Blé. 
TAUX P. 100 
de l'azote de l’engrais. 


 ——— — 
Récupéré Non récupéré 


ENGRAIS AZOTÉS A L'HECTARE ET PAR AN, 


A" 
En sols pourvus de principes mi- 


nĂ©raux : acide phosphorique, Azote. par l’exvĂ©dent par l’excĂ©dent 
potasse, etc. de récolte, de récolte, 
Kilogr. Pee100: P. 100. 
Sels ammoniacaux. 45,9 32.4 67.6 
— 91,9 329 Greul 
— 137,8 315 68.5 
— : 183,7 28.5 11.5 
Nitrate de soude . 20 45.3 04.7 
Fumier de ferme . 294,0 14.6 85.4 
Orge 
Sels ammoniacaux. ! 45,9 48.1 51.9 
Sels ammoniacaux et nitrate. . S Ăż Aa 49.8 50.2 
Tourteaux . 106,0 36.3 63.7 
Fumier de ferme . 224,0 10.7 89.3 
Avoine 

Sels ammoniacaux. 989 019 48.1 
Nitrate de soude . 920 00.4 49.6 


D’aprĂšs cela, le blĂ©, l'orge et l’avoine utilisent de 45 Ă  51 p. 100, 


soit moitié, en nombre rond, de l'azote du nitrate. Deux faits des 


320 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


plus intéressants ressortent de ce tableau ; ils concernent le fumier 
et le sulfate d’ammoniaque : 10 à 15 p. 100 seulement de l’azote 
du fumier de ferme se retrouvent dans l’excĂ©dent de la rĂ©colte obte- 
nue, par rapport Ă  un sol non fumĂ©; la rĂ©cupĂ©ration de l’azote du 
sulfate d’ammoniaque dans la culture du blĂ© s'Ă©lĂšve Ă  peine au tiers 
de la teneur de l’engrais en ce principe, tandis que l'orge et l’avoine 
utilisent le sulfate d’ammoniaque presque aussi bien que le nitrate. 

La premiÚre conclusion générale, qui se dégage de ces comparai- 
sons, c’est que l'azote soluble (nitrate ou sulfate), et en particulier 
celui du nitrale, est l'aliment azoté le plus favorable à la production 
des céréales. 

AprÚs l'azote soluble, vient l'azote des tourteaux de graines oléa- 
oineuses, dont l’utilisation dĂ©passe, dans la culture de l'orge, la pre- 
portion (36 p. 100) constatĂ©e pour le sulfate d’ammoniaque dans le 
cas du blé (28 à 30 p. 100); en dernier lieu se range l'azote du fu- 
mier de ferme, la culture du blé durant vingt années consécutives 
n’ayant fixĂ© que 14.6 p. 100 de l’azote du fumier : celle de l’orge, 
moins encore, 10.7 p. 100. 

De ces derniĂšres constatations, du plus haut intĂ©rĂȘt Ă©conomique, 
il résulte que le nitrate de soude est au taux actuel de 93 à 95 fr. 
les 100 kilogr., une source d’azote pour les vĂ©gĂ©taux, bien moins 
chĂšre que le fumier de ferme. 

Autrement dit, partout oĂč le cultivateur ne pourra pas se procu- 
rer, Ă  un prix trĂšs bas, le fumier que son exploitation ne lui fourni- 
rait pas en quantitĂ© suffisante pour ses rĂ©coltes, 1l aura intĂ©rĂȘt Ă  lui 
substituer le nitrate de soude associé au phosphate et au besoin à la 
potasse, si la terre manque de cet élément, cas assez rare dans la 
plupart des régions de la France. 

Pour se convaincre de l’économie de cette substitution, il suffit 
de comparer la valeur du fumier, d’aprùs sa richesse en azote, acide 
phosphorique et polasse, Ă  celle des mĂȘmes quantitĂ©s de principes 
fertilisants achetĂ©s dans le commerce, en tenant compte de l’ulilisa- 
tion de l’azote par la rĂ©colte, constatĂ©e par sir J. Lawes et le doc- 
teur Gilbert. 

D’aprùs les prix actuels de l’azote dans le nitrate de soude (1 fr. 
60 c. le kilogramme), de l'acide phosphorique soluble (0 fr. 50 c. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 321 


le kilogramme) et de la potasse (0 fr. 40 e. le kilogramme), la valeur 
du fumier basée sur sa teneur en ces principes fertilisants serait la 
suivante : 

Le fumier de ferme, moyennement consommé, renferme en 
moyenne par Î 000 kilogr. : 


AAQLORS TR 5ks 0 à 1f,60° — Sf,00c 
Acide phosphorique . . 2 0 A0 UUS = 100 
POÉISSRP M TAN AS. 623) 240402725271 

Valeur des 1 000 kilogr. . . . 121, 02° 


Le mĂ©lange minĂ©ral qui renfermerait les mĂȘmes quantitĂ©s de 
principes fertilisants, cotĂ©s au mĂȘme prix, serait le suivant : 


32k8 65 nitrate de soude à 15.65 p. 100 azote, coûtant. . . . . . . sf, 00° 
21 ,08 superphosphate à 12 p. 100 acide phosphorique, coûtant. 1f,27° l {1 50 
2 
32 ,05 phosphate minéral à 16 p. 100, coûtant. . . . . . . 1,50 | ; 
12 ,06 chlorure de potassium à 50 p. 100, coûtant : . . . . . . . 2e 
12f,02° 


Mais, en raison de la trÚs grande inégalité d'utilisation de Pazote 
des deux fumures, plus de trois fois supérieure pour le nitrate (dans 
le rapport de 50 Ă  19 —3.33), c'est une quantitĂ© plus que triple, 
c’est-Ă -dire 3 333 kilogr. de fumier, qui Ă©quivaudrait Ă  la fumure 
minérale pour les céréales. Il faudrait donc, pour que l'équilibre se 

A9f 9e 


si 


| it 
3.33 a tonne, soi 


rétablit, que le fumier de ferme ne coûtùt que 


3 fr. 60 c. 

Comme nous n’avons comptĂ© dans le calcul de la valeur du fumier 
que ses trois principaux éléments, nous admettrons une plus-value, 
sur ce prix de 3 fr. 60 c., de 2 fr. 40 c. pour la chaux, la magné- 
sie, la matiÚre organique, etc, Lors donc que le cultivateur, obligé 
d'acheter du fumier, ne pourra se le procurer au prix de 6 fr, les 
1 000 kilogr., il aura avantage à réparur le fumier produit dans son 
exploitation sur une surface double ou triple, suivant le cas, de celle 
qu'il pourrait fumer à dose suffisante au fumier de ferme, s’il avait 


1. Les valeurs attribuées à l'azote, à l'acide phosphorique et à la potasse sont celles 
de ces substances dans les engrais commerciaux. 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893, — TJ, 2 | 


322 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 
assez d'engrais, et Ă  complĂ©ter ses fumures par l’emploi du nitrate 
de soude, des phosphates et, au besoin, des sels potassiques. 

Le rĂŽle du fumier de ferme ne consistant pas uniquement dans 
un apport d’acide phosphorique, d’azote et de potasse, mais aussi 
dans la modification des propriétés physiques et chimiques de la 
terre, par l'introduction des matiĂšres organiques dans le sol, il est 
de beaucoup préférable de répandre le fumier de ferme, à moitié 
dose, sur deux hectares par exemple et de recourir pour le reste de 
la fumure aux engrais minéraux, plutÎt que de fumer isolément un 
hectare au fumier de ferme et l’autre exclusivement avec des en- 
grais minéraux. 


V. — Froment. Seigle. MĂ©teil. Orge. Avoine. 
Leurs exigences. 


Le petit tableau ci-dessous indique les quantités des trois prin- 
cipes fondamentaux des engrais Commerciaux : azote, acide phos- 
phorique et potasse contenus dans 100 kilogr. de blé, de seigle et 
de méteil et dans la paille correspondante. Ce sont des chiffres 
moyens, susceptibles de varier, mais dans d’étroites limites seule- 
ment, avec les sols, les variétés cultivées et les autres circonstances". 


AZOTE, ACIDE PHOSPHORIQUE ET POTASSE 
contenus dans 
(en nombres ronds) : 


EE —— EE ——— 
100 kilogr. 100 kilogr. 100 kilogr. 
de blé de seigle de méteil 
et sa paille. et sa paille. et sa paille. 
azote. . SAP 2k8 06 2k8,96 DT 
DOPASSO SAN RE ARE LES LEE 1 ,14 3 ,16 RUE 
Acide phosphorique . di 04 1 ,60 1:,30* 


{. Nous avons pris, comme base des calculs qui nous ont conduits aux chiffres ci- 
dessus, les données suivantes : 

100 kilogr. de blé (grain) correspondant à 168 kilogr. de paille ; 

100 kilcgr. de seigle (grain) correspondant Ă  309 kilogr. de paille ; 

100 kilogr. de méteil supposé, pour simplifier l'exemple, un mélange à parties égales 
de blé et de seigle, donneraient environ 230 kilogr. de paille. 

2. 100 kilogr. d'orge et la paille correspondante renferment : 2“8,50 d'azote, 1s,95 
d'acide phosphorique, 1K5,97 de potasse. 

Un quintal d'avoine et sa paille coatiennent : azote 35,02, acide phosphorique 1%5,31, 
potasse 4ke,15, 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. DA 


Pour fixer les idées, supposons une exploitation produisant à 
l'hectare, 15 quintaux de chacune de ces céréales avec la paille cor- 
respondante, la récolte contiendra les quantités suivantes de chacun 
des trois principes fertilisants : 


RÉCOLTE: 
15 quintaux métriques grain 


ALIMENTS ASSIMILÉS. et paille correspondante. 
EEE 
Blé. Seigle. Méteil. 
rates ee MAR EU LE: | ar ge MARS ADN Lake 85 
POS CAMERA. Et RU 23 ,42 47 ,40 39 ,41 
Acide phosphorique . . . . . IN MSC, 24 ,00 20-49 


Ces quelques chiffres donnent une idée des exigences des céréa- 
les d'hiver, idée qui se présentera sous une forme plus saisissante si 
nous transformons en nitrate de soude, phosphate de chaux et chlo- 
rure de polassium les poids d’azote, d'acide phosphorique et de po- 
tasse, fixĂ©s par celte rĂ©colte de 45 quintaux Ă  l’hectare. 


QUANTITÉ D’ENGRAIS 
en nombres ronds. 


NATURE DE L'ENGRAIS. D RTEE PÉUN PRE re" 

Blé. Seigle, Méteil. 

= Kilogr. Kilogr. Kilogr. 
NTITATE Te SOU RARE TE RL 276 284 253 
Chlorure de potassium Ă  50 p. 100!. . . AG 95 70 
Phosphate Ă  16 et 17 p. 100 (scories)?. . 100 140 120 
Ou superphosphate Ă  12 p. 100. . . . 145 200 172 
Ou phosphate minéral à 22 p. 100°. . . 79 110 95 


Nous ferons remarquer, tout de suite, que les rapprochements 
entre les poids d’engrais reprĂ©sentant les quantitĂ©s d’azote, d'acide 
phosphorique et de potasse contenus dans une récolte, ne sont pas 
ceux, qu'il soit suffisant ou nécessaire, suivant le cas particulier, 
d'introduire dans un hectare de terrain, pour obtenir une récolte de 
15 quintaux de grain, avec la paille correspondante. Cela tient Ă  ce 
que les conditions en jeu dans la culture tendent Ă  rendre ces chif- 
fres tantĂŽt trop Ă©levĂ©s, LantĂŽt trop bas, et c’est la pratique, c’est-Ă - 
dire l’expĂ©rience fondĂ©e sur les faits bien observĂ©s, qui seule servira 


1. De rotasse réclle. 
2. D'acide phosphorique réel. 


524 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Ă  indiquer les doses de phosphates, de sels de potasse el de nitrate 
à apporter par les engrais, pour amener le sol à une fertilité voisine 
de celle qui permet de rĂ©colter 15 quintaux de grain Ă  l’hectare. 

En effet, d’une part, la terre arable de qualitĂ© moyenne, bien la- 
bourée et propre, fournit aux plantes une bonne partie des aliments 
qui leur sont nĂ©cessaires ; de l’autre, la totalitĂ© des matiĂšres fertili- 
santes apportĂ©es par la fumure est loin d'ĂȘtre utilisĂ©e par les rĂ©col- 
tes, mĂȘme dans les conditions les plus favorables, c’est-Ă -dire lors- 
que les engrais sont aussi bien disséminés que possible dans la 
couche arable. Il résulte de ces deux conditions, qui agissent en sens 
contraire, que, dans les terres riches, les quantitĂ©s d’azote, d’acide 
phosphorique et de potasse indiquées par la composition de la ré- 
colte Ă©tant, en majeure partie, fournies par la rĂ©serve du sol, l’en- 
grais ne fera que complĂ©ter la fertilitĂ© naturelle de la terre et n’aura 
qu’à lui fournir un contingent de tel ou tel principe nutritif, infĂ©- 
rieur aux exigences finales de la récolte, Dans les terres trÚs pauvres 
au contraire, les exigences des vĂ©gĂ©taux ne pourraient pas ĂȘtre sa- 
ĂŒisfaites par l'apport des quantitĂ©s d’engrais correspondantes Ă  leur 
teneur en azote, potasse, elc., puisque la totalitĂ© de ces engrais n’est 
jamais, dans l’annĂ©e, utilisĂ©e par la rĂ©colte. La fumure, dans ce cas, 
devra ĂȘtre plus Ă©levĂ©e que ne l’indique la composition de la rĂ©colte. 
Enfin, en ce qui regarde le nitrate de soude que les pluies entraĂźnent 
si facilement dans le sous-sol, la couche arable n'ayant pas la faculté 
de retenir l'acide nitrique comme elle fait de l’acide phosphorique 
et de la potasse, la quantitĂ© Ă  employer devra dĂ©passer d’autant plus 
celle qu’indique la composition de la rĂ©colte, que le sol sera plus 
pauvre en azole, plus perméable et le climat plus humide. 

Les indications donnĂ©es plus haut n’ont donc qu’une valeur relative. 
Cependant, elles peuvent utilement servir Ă  des calculs sur l’épui- 
sement, par les diverses cĂ©rĂ©ales d’un sol dont on connaĂźtrait la com- 
position ; mais, comme nous le disions Ă  l'instant, c’est Ă  des expĂ©- 
riences culturales répétées dans des terres de composition variable, 
expériences multipliées au point de donner aux moyennes qui en 
rĂ©sultent ‘une valeur susceptible de gĂ©nĂ©ralisation, qu'il faut avoir 
recours pour fixer le dosage des engrais Ă  appliquer Ă  la culture 
d’une plante el en particulier Ă  celle des cĂ©rĂ©ales. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 325 


VI. — Des engrais pour cĂ©rĂ©ales d'hiver. Fumier de ferme. 
Phosphates divers. Sels de potasse. Nitrate de soude. 


Le fumier de ferme est l’engrais par excellence ; 1l apporte au sol, 
en mĂȘme temps que les Ă©lĂ©ments minĂ©raux indispensables Ă  l’ali- 
mentation des plantes, la maliĂšre organique, qui, en se transfor- 
mant en humus, joue un rîle si utile, au point de vue de l’ameu- 
blissement de la couche arable. 

Malheureusement, nous ne produisons pas, en France, Ă  beaucoup 
prĂšs, la quantitĂ© de fumier nĂ©cessaire Ă  l’entretien de la fertilitĂ© de 
nos terres et, de plus, nous perdons, par notre négligence, une 
bonne partie des matiĂšres fertilisantes contenues dans le fumier et 
le purim. 

Cette insuffisance dans la production du fumier, 1l nous faut la 
combler par l'emploi des engrais commerciaux. 

Reprenons donc la comparaison du fumier Ă  ces derniers, sous le 
rapport de sa teneur en azote, en acide phosphorique et en potasse. 

La composition du fumier de ferme est Ă©minemment variable, 
avec l'alimentation du bétail qui le produit et avec la nature de la 
litiĂšre. 

Pour fixer les idées, nous avons admis comme terme de compa- 
raison un trÚs riche fumier moyennement consommé. Nous serons 
certain, par là, d’avoir un terme de comparaison nous donnant toute 
sécurité pour le calcul des poids d'engrais complémentaires à em- 
ployer. 

La comparaison peut s'Ă©tablir ainsi qu’il suit, comme nous l'avons 
dit tout à l’heure, avec les engrais commerciaux : 


QUANTITÉS 


1000 KILOGR. DE FUMIER ; < : 
cor:espondantes d'engrais commerciaux 


renfermant : (en nombres ronds). 
Azole 5 kilogr . . . . . — 33 kilogr. nitrate de soude, à 15.6 p. 100. 
—= 12 — assi D 

botasse 645,3 { 12 chlorure de potassium, Ă  50 p. 100. 
| = 53 —  kaïnite, à 12 p. 100. 
| — 15 —  scories, à 16-17 p. 100. 

Acide phosphorique 2*#,6.{ — 21 —  superphosphate, à 12 p. 100. 
— 12 — phosphate minĂ©ral, Ă  22 p. 100. 


On peut considérer comme une faible fumure, 20 000 kilogr. de 


326 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


fumier à l’hectare ; comme une fumure moyenne, 40 000 kilogr. et, 
comme une forte fumure, 60 000 kilogr. 

Voyons, Ă  titre de renseignement, quels poids d'engrais commer- 
ciaux il faudrait employer, si l’on voulait apporter au sol les quan- 
tilés d'azote, d'acide phosphorique et de potasse contenues dans 
60 tonnes de fumier de ferme. En appliquant les données que nous 
venons de rappeler, on trouve les poids suivants en nombres ronds : 

Nitrate de soude, 1 920 kilogr.; 

Acide phosphorique, suivant l’é tat auquel on le considĂšre : 

a) Scories de déphosphoration, 945 kilogr. ; 

b) Superphosphate, 1 300 kilogr. ; 

c) Phosphate minéral en poudre, 710 kilogr. ; 

Potasse, Ă  l’état de chlorure, 756 kilogr.; Ă  l’état de sulfate 
(kaĂŻnite), 8 150 kilogr. 

En réalité, par suite des différences trÚs grandes que présentent, 
au point de vue de leur assimilabilitĂ© par les plantes, les mĂȘmes 
principes fertilisants contenus dans le fumier et dans les engrais mi- 
nĂ©raux, la substitution ne doit pas se faire d’aprĂšs les proportions 
indiquées par ce calcul arithmétique. Il y a lieu, en effet, de présen- 
ter Ă  ce sujet quelques remarques importantes : 

1° L’azote des nitrates est beaucoup mieux utilisĂ©, comme nous 
l’avons vu, par les vĂ©gĂ©taux que celui du fumier, et l’expĂ©rience Ă  
montrĂ© qu’il suffit de donner, Ă  l’état de nitrate, le cinquiĂšme envi- 
ron de la quantitĂ© d’azote que renferment 60 tonnes de funuer, pour 
obtenir un résultat au moins égal. (380 kilogr. de nitrate de soude 
constituent pratiquement une trÚs forte fumure azotée.) 

2 La quantité de phosphate fournie à la terre, sous forme insolu- 
ble doit, au contraire, ĂȘtre sensiblement Ă©gale Ă  celle qu'apporte- 
rait le fumier de ferme. Parfois, une plus-value d’un tiers Ă  moitiĂ©, 
suivant les sols, peut ĂȘtre attribuĂ©e au superphosphate comparĂ© aux 
phosphates insolubles, dans les terres calcaires notamment : cela 
tient sans doute Ă  la plus grande diffusibilitĂ© de l’acide phosphori- 
que du superphosphate et, pour une part aussi, Ă  la teneur de cet 
engrais en sulfate de chaux. Dans les sols argileux, silicéo-argileux, 
sablonneux ou tourbeux, les scories de déphosphoration et la plu- 
part des phosphates de chaux naturels, réduits en poudre trÚs fine, 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. IA 


ont une action fertilisante égale et parfois supérieure à celle des 
superphosphates, Ă  poids Ă©gal d'acide phosphorique. 

3 Si l’on excepte les sols tourbeux, extra-calcaires ou sableux, 
on peut, le plus souvent, s'abstenir de l'emploi des sels de potasse, 
le sol renfermant cette base en quantité suffisante. La magnésie 
manque plus frĂ©quemment qu’on ne le croit communĂ©meañt dans les 
sols : aussi, pour certaines terres, l’emploi de la kaïnite renfermant 
16 à 18 p. 100 de sulfate de magnésie, est-il recommandable, de 
préférence au chlorure de potassium, lorsqu'on a recours à un en- 
grais potassique. 

En tenant compte des remarques prĂ©cĂ©dentes et en s’appuyant sur 
les expériences les mieux suivies et les plus concluantes, on peut 
indiquer approximativement les quantités d'acide phosphorique, 
d’azote et, le cas Ă©chĂ©ant, de potasse, Ă  substituer Ă  60,000 kilogr. 
de fumier de ferme. 

60 000 kilogr. de fumier de ferme peuvent ĂȘlre remplacĂ©s, dans 
la pratique agricole, au point de vue des principes fondamentaux 
(azote, acide phosphorique et potasse), par des quantités d'engrais 
chimiques correspondant aux taux suivants : 


Acide phosphorique réel. , . . . . . 125 kilogr.' 
AZOLENIFIQUE M re LT ne. NOTES 60 — 
POfISSe rĂ© Mers 00e ste ON ee VO 60 — 


Suivant les quantités de fumier de ferme dont on disposera, on 
fera varier proportionnellement les poids d'acide phosphorique, 
d’azote et de potasse que nous venons d'indiquer. 

Le prix de la fumure chimique, substituée à 60 tonnes de fumier 
de ferme, s’élĂšvera au maximum Ă  170 fr. par hectare; il peul 
mĂȘme ĂȘtre Ă©valuĂ© Ă  moins de 160 fr., en partant des cours moyens 


1. Beaucoup de fumiers de ferme, ainsi que nous l'avons dit, sont moins riches en 
azote, acide phosphorique et potasse que celui dont j'indique plus haut la composition ; 
le taux d’acide phosphorique tombe souvent au-dessous de 2 p. 100 et celui de l'azote 
au-dessous de 4.5 p. 100, 125 kilogr. d'acide phosphorique correspondent donc Ă  la 
richesse d'un fumier moyen de bonne qualité, 60 kilogr. d'azote représentant large- 
ment le 1/5 de la teneur de 60 000 kilogr. de fumier moyen, en azote et 60 kilogr. 
de potasse, plus du 1/5 de la teneur du fumier, en cette base. 


328 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 
de chacun des principes qui entrent dans les engrais minéraux, sa- 
voir : 


Acide phosphorique. ._. . 125 kilogr. à 0f,30° le kilogr. — 37°,50c 


Azote nitrique. . . . . . CO U60 0206 00 
PORASSES S PR R ES On ns 60 — à0,40 400 
A Total SEL Éd OS AU ECS A ET SEA 


Les deux tableaux ci-dessous résument les formules de fumures 
Ă©quivalentes, suivant qu’on emploiera, Ă  l’hectare, 60, 40 ou 20 ton- 
nes de fumier ou qu’on aura recours aux engrais commerciaux seuls : 


TABLEAU I. — QuantitĂ©s d'azote, d'acide phosphorique et de potasse 
remplaçant le fumier de ferme. 


DAXS LES ENGRAIS CHIMIQUES. 
A 


Se UE D Azote. OR Potasse. 
Kilogr. Kilogr. Kilogr. 
1° 60 000 kilogr.. . . . . . . » » » 
LD A 0IDOD KO TE NME Ar 20 42 20 
3222010 00ME our Am EME REN 40 83 40 
AOPPAS de fumier. SRE DUR 60 125 60 


Suivant la nature des phosphates et des sels de potasse auxquels 
on donnera la préférence, il faudra employer les quantités indiquées 
ci-dessous : 


TABLEAU II — QuantitĂ©s (nombre rond) de phosphate, de nitrate et de sels 
de potasse Ă  ajouter au fumier de ferme, par hectare*. 


NITRATE PHOS- SUPER- CHLORURE 
FUMIER DE FERME, de SCORIES. PHATE PHOS- KAINITE. de 

soude. minéral. PHATE. potassium. 

Kilogr. Kilozr. Kilogr. Kilogr. Kilogr. Kilogr. 
1° 60 000 kilogr. . » » » » » » 
29 40000 — .. 130 255 255 230 170 40 
3° 20000 — .. 260 510 510 460 340 80 
4° Pas de fumier. . 390 765 765 690 510 120 


1. Ces prix sont au moins égaux, sinon supérieurs à ceux que la culture peut obtenir 
par l'intermédiaire des syndicats. Ils correspondent à 25 fr. les 100 kilogr. de nitrate 
de soude, 50 fr. les 1 000 kilogr. de scories de déphosphoration et 22 fr. 50 c. les 
100 kilogr. de chlorure de potassium. 

2. La dose d'acide phosphorique donnée à l'hectare, à l'état de superphosphate, 
peut ĂȘtre d'un tiers infĂ©rieure Ă  celles qu'apporteraient les scories de dĂ©phosphoration 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 329 


VII. — Prix de revient de la fumure minĂ©rale d’un hectare 
de blé dans ces diverses conditions. 


Laissant de cÎté la valeur du fumier de ferme, que chacun de nos 
lecteurs pourra Ă©valuer d’aprĂšs les conditions de son exploitation, 
valeur qui dépendra surtout du mode de comptabilité adopté, je me 
contenterai d'indiquer la dépense correspondant à l'achat des en- 
grais chimiques, dans les trois cas que j'ai envisagés plus haut : 
n° 4, forte fumure, n° 3, fumure moyenne, n° 2, faible fumure chi- 


mique : 

Nez 
Nitrate de soude : 130 kilogr. à 25 fr. les 100 kilogr. . . . . : . . 32f,50° 
Scories 298" Kilo0r-n7 9 0"fr; lestt 000 loge Se te 12 To 


Ou superphosphate : 230 kilogr. à 6 fr. 25 ce. les 100 re 14°,40° 
Ou phosphate minéral : 255 kilogr. à 4 fr. 50 c. les 100 kilogr. 11 ,47 


KaĂŻnite : 170 kilogr. Ă  G fr. 25 ce. les 100 kilogr.. . . . . . . . . 10 ,60 
Ou chlorure de potassium à 22 fr. 50 c. les 100 kilogr. . .  9f,00€ 
LE CRAN PS LT EAN AP ANEOT D A S G 


Avec superphosphate et chlorure, la fumure coĂ»tera le mĂȘme 
prix, 90 fr. 89 c. 

Avec phosphate minéral et chlorure, 53 fr. seulement. 

On ne dĂ©pensera donc pas plus de 56 fr. Ă  l’hectare, pour l’en- 
grais commercial complémentaire de 40 000 kilogr. de fumier. 

La formule n° 3 coûterait le double, soit 112 fr. à ajouter au prix 
de 20 000 kilogr. de fumier et la formule ne 4 (pas de fumier, en- 
grais chimique seul) reviendrait Ă  168 fr. environ. 

Ces chiffres peuvent servir de base aux calculs du cultivateur dé- 
sireux d'employer les engrais chimiques, soit seuls, soit conjointe- 


(28 kilogr. au lieu de 42 kilogr., et ainsi de suite). Il y a lieu, inversement, d'augmen- 
ter d'un tiers environ, par rapport aux scories, la quantité d'acide phosphorique donnée 
sous forme de phosphate minéral (56 kilogr. au lieu de 42 kilogr., et ainsi de suite). 
Aucune rĂšgle absolue ne peut ĂȘtre formulĂ©e Ă  l'Ă©gard de ces Ă©quivalences, les nombres 
que nous indiquons rĂ©sultent d'expĂ©riences culturales, mais ils pourront ĂȘtre modifiĂ©s 
utilement par les cultivateurs, suivant les conditions locales de leur exploitation (na- 
ture du sol, etc.). 


330 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ment, ce qui est préférable, avec des quantités variables de fumier 
de ferme. | 

Rappelons encore que, dans la plupart des sols, on pourra faire 
l’économie des sels de potasse, ce qui ramĂšnera la dĂ©pense, Ă  l’hec- 
tare, Ă  160 fr., au maximum, pour une forte fumure en engrais 
chimiques substitués au fumier de ferme. 


VIII. — Emploi du nitrate dans la culture des plantes sarclĂ©es. 
Pommes de terre, betteraves, navets, turneps, etc. 


Si les céréales sont les plantes dans la culture desquelles l'emploi 
du nitrate donne le maximum de rendement, les plantes sarclées, 
loin d’ĂȘtre indiffĂ©rentes Ă  ce mode d’alimentation, s’en trouvent trĂšs 
bien et peuvent, à son aide, donner des excédents de rendements 
trÚs rémunérateurs. 

Comme pour les céréales, si le sol est imparfaitement pourvu en 
phosphate, l'addition de cette matiĂšre au nitrate augmente trĂšs no- 
tablement le rendement. 

La moyenne de 51 essais de culture de pommes de terre et de 
17 essais de culture de betteraves Ă  sucre, avec le nitrate seul, Ă  
permis à M. le docteur Stutzer de constater les excédents de rende- 
ment suivants par 100 kilogr. de nitrate de soude : 


Pommes ide) ÉeRRe EL TSI RS ANS 101712 
Bettéravess le (Ostende TMRENS 20 ,29 


tandis qu'avec le phosphate employé simultanément avec le mitrate, 
les excédents ont été de : 


Pommeside terre; "11204740" 124,92 (18 essais) 
Betterayesi tee 24 ,16 (55 essais) 


L'expĂ©rience a montrĂ© qu'il n’y a aucun avantage Ă©conomique Ă  
dĂ©passer, Ă  l’hectare, une certaine dose de nitrate dans la fumure 
du sol destiné à la pomme de terre et à la betterave : 200 kilogr. 
pour les premiĂšres et 250 Ă  300 kilogr. pour les secondes sont les 
doses moyennes qu’il convient d'employer. Le nitrate n’augmente 
pas Ja richesse en fécule des pommes de terre, cette derniÚre dé- 
pendant avant tout de la variété cultivée. Comme pomme de terre 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 331 


industrielle, la Richter’s imperator doit ĂȘtre conseillĂ©e ; elle donne 
Ă  la fois un trĂšs fort rendement en tubercules et une grande ri- 
chesse de ces derniers en fĂ©cule”. 

Le nitrate, qui accroĂźt trĂšs sensiblement le poids de betteraves Ă  
sucre rĂ©coltĂ© Ă  l’hectare, n’élĂšve pas le taux du sucre dans cette ra- 
cine : on a mĂȘme prĂ©tendu qu’il le diminuait parfois dans des pro- 
portions notables, ce qui n’est pas exact. M. le professeur Mércker, 
qui à étudié expérimentalement la question dans de nombreux essais 
faits dans six fermes diffĂ©rentes, est arrivĂ© Ă  cette conclusion qu’une 
fumure de 400 kilogr. de nitrate de soude à l’hectare (dose trop 
forte) comparativement Ă  l'emploi de 200 kilogr. du mĂȘme sel n’a 
provoquĂ© qu’une diminution de 0.21 p. 100 dans le taux du sucre et 
un abaissement du degré de pureté de 0.38 p. 100 seulement, dans 
71 essais entrepris sur de nombreuses variétés de betteraves sucriÚ- 
res. Le cultivateur n’a donc pas à redouter l'emploi du nitrate de 
soude pour la famure de la betterave, aux conditions suivantes : 

4° Cultiver une bonne variété, riche en sucre ; 

2° Employer de la semence de premiÚre qualité et de provenance 
qui assure la pureté de la variété ; 

9° Joindre une fumure phosphatée à l'emploi du nitrate, de ma- 
niĂšre Ă  ne pas retarder la maturation de la betterave ; 

4° Incorporer le nitrate au sol avant l’ensemencement et ne pas 
employer en couverture (ce qu’il faut Ă©galement Ă©viter de faire 
pour la pomme de terre) ; 

9° Planter les betteraves à de faibles écartements et faire quatre 
ou cinq binages. 

En suivant ces prescriptions, le cultivateur n'aura qu’à se louer 
de l'emploi du nitrate, Ă  la dose de 250 Ă  350 kilogr. au maximum 
pour les betteraves, et de 200 Ă  250 kilogr. pour les pommes de 
terre, dans des sols de richesse moyenne. 

Du rapprochement de tous les essais comparables faits méthodi- 
quement sur la betterave Ă  sucre, sur la betterave fourragĂšre et sur 
la pomme de terre, M. le docteur Stutzer a déduit les excédents de 


‘1. Voir le remarquable mĂ©moire de M. À. Girard, La Pomme de terre industrielle. 
2° édition, in-8°, chez Gauthier-Villars. Paris, 1891. 


232 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

rendements obtenus à l’hectare avec 100 kilogr. de nitrate de soude 
associés aux quantités d'acide phosphorique que nous mdiquons plus 
loin, Voici ces excédents : 


BELÉERAYES Et. 4 IE MeNENeNr 481,52 
Pommies:de terre 1672 ue Re en 15 .94 
Nayets HUINEDSL er RAR Re 49 ,86 


Les deux premiĂšres cultures Ă©tant de beaucoup les plus impor- 
tantes pour la France, je m'occuperai d’elles principalement dans 
les calculs qui vont suivre. 

À titre d'exemple, je prendrai pour base de ces calculs les prix 
moyens du quintal, pour la France entiùre, d’aprùs la statistique 
agricole officielle (annĂ©e 1890”). 

La valeur moyenne du quintal a été la suivante : 


Pommes -deterre. MSN RE ATEN 5,43 *? 
Betteraves"fDurrasbres :: 1100 ANT Dee 2 ,06 
BĂ©tteraves/Ă :sucre #2" HESMAREMEReSr 2 ,23 


Pommes de terre. 


La dépense en engrais s'établit comme suit : 


Nitrate/de:soude:: 23100 100 kilogr. à 25 fr. — 1200, 

Acide phosphorique soluble . . Lo AO ELONCA RE 

Ou acide phosphorique insoluble. 20:17, 40130" 
DĂ©pense tetale de fumure . . . . . . . . 34 fr. 


Excédent de rendement produit par cette famure, comparative- 
ment au mime sol non fumé : 


Pommes-de derce:: Lou QL-A 0 280 ER ENeAEr ne 86f,55° 
AdĂ©AQiTE POUR ÉUMURES 7. PRE ROME 34 ,00 
HÉnÉfLe RE AL PORTEURS CARRE DA: 


Soit 153 p. 100 de la dĂ©pense d’engrais. 


1. Slalistique agricole annuelle, publiée par le ministÚre de l'agriculture, année 
1890. Imprimerie nationale, 1891, in-4°. 

2. La campagne de 1892 a été particuliÚrement mauvaise pour la culture, au point de 
vue du prix de la pomme de terre qui est tombĂ© Ă  3 fr, les 100 ‘kilogr. et mĂȘme 
moins dans certaines régicns. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 333 


L'emploi de 200 kilogr. de nitrate additionnés de la quantité cor- 
respondante d’acide phosphorique (30 Ă  60 kilogr., suivant l’état de 
ce dernier) doublerait le rendement et porterait le bénéfice à 105 fr. 
environ à l’hectare. 


Belteraves. 


La plus-value dans le rendement Ă©tant, pour les betteraves four- 
ragĂšres, au moins Ă©gale Ă  celle que le nitrate donne avec la bette- 
rave sucriĂšre, nous appliquerons le chiffre moyen de 48 quintaux 52 
aux deux récoltes. 

Le compte de fumure s’établit alors comme suit : 


Nitrate de soude. . . . . 100 kilogr. Ă  25 fr. 250 {r 
Acide phosphorique !. . . 30 — à Ofr.60c. Er je 
Ou acide phosphorique . . 60 — à Ofr.30c. 

DĂ©penses desfnmure = er een 43 fr. 


Valeur des excédents de récolte : 


Betteraves fourragĂšres. 


ADD A 06 le qUMtAL eee Lin dE 99f:95° 
DĂ©pensestde tte PR CNRC SDS NOTE 43 ,00 
DÉMÉR NEA ete Prades à des DUT La é0 Sas 561,95° 


Soit 138 p. 100 de la dépense. 


Betteraves sucriĂšres. 


RCE AO) Ce MS CAE (11e RPM EE SEE RE 108f,20° 
IT On EN PE RO ARTE PE 42 ,00 
BENCREE CERN re a MEN ae ele ce 69f,20° 


Soit 158 p. 100 de la dépense. 


1. La quantité d'acide phosphorique exigée par une récolte de pommes de terre est 
sensiblement moindre de moitié de celle qu'enlÚve une récolte de betteraves. 

La récolte moyenne à l'hectare, en France, est de 71 quintaux métriques de pommes 
de terre, celle de la betterave à sucre étant de 270 quintaux métriques (année 1888), 
ce qui correspond, d'aprĂšs la richesse en acide phosphorique des deux plantes, Ă  un 
prélÚvement moyen de 25*,3 pour la betterave et 112,360 pour la pomme de terre 
(les feuilles et les fanes de ces plantes, demeurant sur le sol et retournant Ă  la terre, 
re sont pas comprises dans ce calcul). 


334 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Dans les deux cas, la dépense sera donc largement rémunératrice, 
alors mĂȘme que la moyenne indiquĂ©e pour les excĂ©dents de rende- 
ment par M. Stutzer, ou le prix du quintal s’abaisseraient HUE 
ment par suite de circonstances locales. 

Le nitrate employé à la fumure des plantes racines ne doit jamais 
ĂȘtre rĂ©pandu Ă  la surface du sol aprĂšs la levĂ©e des plantes ; il doit 
ĂȘtre introduit dans le sol avec le dernier labour ; l’épandage du ni- 
trate en couverture à toujours donné de mauvais résultats dans la 
pratique. Tout ce que nous avons dit précédemment à propos des 
céréales relativement à l'emploi simultané du fumier de ferme à doses 
variables et d’engrais minĂ©raux s'applique Ă©galement aux plantes 
sarclées. 


IX. — De la prĂ©paration du sol et de l’épandage 
des engrais. 


De toutes les opérations desquelles dépendent les hauts rende- 
ments du sol, la premiĂšre et non la moins importante est le net- 
toyage de la terre, Ă  laquelle on va confier les engrais, ensuite la 
semence. | 

Tous les vĂ©gĂ©taux, en effet, vivent de la mĂȘme maniĂšre. Qu'’elles 
soient utiles à l’homme ou qu’elles ne lui servent de rien, les plan- 
tes dont les semences se rencontrent spontanément dans un champ 
et celles que nous y apportons consomment les mĂȘmes aliments. 

Toutes ont besoin de phosphate, de nitrate, de sels de potasse, de 
magnésie, de chaux, etc. Les mauvaises herbes, aussi bien que le blé, 
l’avoine ou la pomme de terre, assimilent les substances nutritives 
contenues dans la terre ou dans la fumure. Il rĂ©sulte de’ lĂ  que 
tout ce qui sert Ă  nourrir la mauvaise herbe est perdu pour les 
récoltes, sans compter la dépréciation qui frappe les pailles, sil 
s'agit des céréales, lorsque les mauvaises herbes ont envahi nos 
champs. 

Le nettoyage du sol s'impose donc, en premier lieu. Le déchau- 
mage est une excellente pratique : il consiste Ă  arracher Ă  la houe Ă  
main, Ă  la charrue ou au scarificateur, suivant l'importance de la 
culiure, les chaumes des blés, des seigles, des colzas, etc., el à les 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 920) 


enfouir immédiatement aprÚs la moisson, pour permettre aux graines 
des mauvaises herbes de germer. 

Quand les plantes nuisibles, provenant de ces semences, auront 
acquis un certain développement, un labour qui les enterrera avant 
qu’elles aient pu fleurir et grainer en dĂ©barrassera le cultivateur. 
Le déchaumage est bien préférable à un labour qu'on donnerait 
immĂ©diatement aprĂšs la moisson. L'opĂ©ration doit ĂȘtre superficielle, 
en effet, afin que les graines, Ă  peine recouvertes de terre, puissent 
germer Ă  la premiĂšre pluie. La charrue enfouirait beaucoup trop 
profondément les semences que le labour d'automne ramÚnerait à 
la surface, leur permettant ainsi de germer en mĂȘme temps que Île 
blé ou le seigle. Les mauvaises herbes envahiraient de nouveau la 
sole des céréales. | 

Si le champ Ă  dĂ©chaumer est infestĂ© par le chiendent, l’agrostis, 
l’oseille sauvage et autres plantes vivaces à racines traçantes, il faut 
se garder d'abandonner sur le sol, aprÚs le déchaumage, ces mau- 
dites plantes. MĂȘme exposĂ©es pendant longtemps Ă  l’ardeur du so- 
leil, aprùs leur arrachage, elles ne meurent point et n’attendent 
qu'une pluie pour s'implanter de nouveau dans le sol. Il faut donc 
les enlever à l’aide du rñteau à main ou à cheval, suivant la dimen- 
sion du champ, les rĂ©unir en tas et les brĂŒler. 

En définitive, toutes les opérations qui auront pour résultat, tant 
avant la semaille qu’au cours de la vĂ©gĂ©tation, de dĂ©truire les plan- 
tes Ă©trangĂšres Ă  la rĂ©colte qu’on se propose, feront bĂ©nĂ©ficier d’au- 
tant cette récolte des matériaux nutritifs du sol et des engrais. 

Le sol, Ă©tant bien propre, doit ĂȘtre prĂ©parĂ© Ă  recevoir la semence 
par des labours, hersages, etc., et par l’addition d’une fumure 
convenable. 

Je nai pas à parler ici des labours et autres opérations mécani- 
ques propres Ă  chaque culture et qui sont bien connues de mes lec- 
teurs. Je me bornerai Ă  insister sur l’utilitĂ© des labours rĂ©pĂ©tĂ©s, au 
point de vue de l’action des engrais. Plus l’ameublissement et la di- 
vision d’un sol qui a Ă©tĂ© bien fumĂ© est considĂ©rable, plus la dissĂ©mi- 
nation de l’engrais qui en est la consĂ©quence est parfaite, plus grande 
sera la facilité qu'auront les plantes de développer leurs racines, 
organes essentiels de l'assimilation des matiĂšres fertilisantes, et plus 


336 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Ă©levĂ©, par consĂ©quent, sera le rendement de la terre‘. Le nombre 
des labours dĂ©pendra d’un ensemble de conditions spĂ©ciales Ă  cha- 
que exploitation, telles que la constitution physique du sol et sa com- 
pacitĂ©, la nature de la rĂ©colte antĂ©rieure et de celle que l’on prĂ©pare, 
etc. Les connaissances pratiques du cultivateur le guideront, en 
cela, mieux que ne pourraient le faire de courtes indications. | 

J'arrive aux soins Ă  prendre pour l’épandage des engrais et leur 
incorporalion au sol. 

C’est au moment des labours d'automne qu’il convient d’intro- 
duire les phosphates minéraux ou le superphosphate dans le sol : 
le nitrate de soude devra ĂȘtre exclusivement employĂ© en couverture, 
au printemps. 

Si l’on a recours aux scories ou au phosphate minĂ©ral en poudre 
fine, l’un des modes les plus Ă©conomiques d'emploi consiste Ă  le rĂ©- 
pandre Ă  l’étable sur le fumier. Suivant les quantitĂ©s que l’on aura 
décidé de donner au sol auquel on réserve le fumier, on fera varier 
la dose de phosphate de 200 Ă  500 gr. au plus, par jour et par tĂȘte 
de bétail, Plus l'état de ténuité auquel le phosphate minéral est ré- 
duit sera considĂ©rable et plus il se dissĂ©minera dans le sol sous l’in- 
fluence du labour, mieux il sera assimilĂ© par les rĂ©coltes. L’épan- 
dage du oct sur le fumier Ă  l’étable aide Ă  cette dissĂ©mination. 

Le superphosphate et le plùtre mélangés au fumier ont la pro- 
priĂ©tĂ© de s’opposer Ă  la perte de l’ammoniaque Ă  l’étable ?. 

L'avantage principal du superphosphate est de se disséminer, 
grùce à l'humidité du sol, et de diffuser dans un rayon plus étendu 
* du point oĂč 1l est tombĂ© sur la terre, lors de son Ă©pandage, que ne 
le peuvent faite les phosphates insolubles. 


1. Des expériences récentes de M. SchlÊsing semblent favorables à l'application des 
engrais en lignes, entre les plantes qu'elles doivent nourrir. Mais ces intéressants essais 
ont besoin d’ĂȘtre rĂ©pĂ©tĂ©s avant qu'on en tire des conc'usions immĂ©diatement applicables 
Ă  Ja pratique agricole. 

2. Pour l'épandage des scories de déphosphoration, l'emploi du semoir est indispen- 
sable, la semaille à la volée offrant des dangers pour l'homme qui l'exécute, à raison 
des poussiÚres métalliques que les scories renferment toujours. Ges poussiÚres, sans 
parler de leur action sur les mains du semeur, peuvent causer des accidents graves si 
elles pénÚtrent dans les bronches. C'est une raison de plus pour épandre les scories 
sur 1e fumier de l'Ă©table, 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 331 

On a considéré jusqu'ici que la condition essentielle à remplir, 
dans l’application au sol de toutes les matiùres fertilisantes, pour en 
assurer le maximum d'efficacité, est d'opérer aussi parfaitement que 
possible sa dissĂ©mination dans la couche de terre oĂč les plantes vont 
puiser leur alimentation. D’épaisseuÂź variable, suivant la nature des 
récoltes, cette couche, on l'admet jusqu'ici, sera d'autant plus fé- 
conde que les matiĂšres fertilisantes y seront plus Ă©galement distri- 
buĂ©es. D’aprĂšs les rĂ©centes expĂ©riences de M. Th. SchlĂŠ:ng que 
semblent confirmer indirectement les observations que j'ai faites, il 
y a deux ans, dans mon champ d’expĂ©riences du Parc des Princes, 
il y a lieu d’expĂ©rimenter les procĂ©dĂ©s qui consistent Ă  semer l’en- 
grais en rigoles, en poquets, entre les lignes de plantes, etc. 

J'ai constaté, en 1899, dans mes essais de culture de la pomme 
de terre, qu’à dose Ă©gale de phosphate, Ă  Y'hectare, les rendements 
maxima ont été obtenus par l'emploi des phosphates les plus riches 
absolument parlant, ce qui tendrait à montrer, comme les expé- 
riences de M. Th. SchlĂŠsing, que l'alimentation de la plante se fait 
d’autant mieux que les racines rencontrent, en un point, une agglo- 
mĂ©ration de principes nutritifs. Peut-ĂȘtre y aura-t-il lieu de modifier 
le systÚme de répartition des engrais dans le sol, lorsque les expé- 
riences de M. Th. SchlÊsing et les miennes auront reçu une confirma- 
tion qui permette de généraliser les résultats que nous avons observés. 
En attendant, il me parait prudent de ne pas renoncer à disséminer 
le mieux possible les matiĂšres fertilisantes dans la couche arable. 

En grande culture, le but est plus complĂštement atteint par la 
distribulion de l’engrais au semoir que par l’épandage Ă  la volĂ©e. 
Un bon semoir, convenablement réglé, peut répandre uniformé- 
ment, sur le sol, telle quantitĂ© d’engrais qu’aura fixĂ©e le cultivateur, 
d’aprùs les besoins de sa terre. 

Si l’on sĂšme Ă  la volĂ©e, seul systĂšme praticable pour les petites 
cultures, 1l est bon de faire l'opération en deux fois : on partagera 
l'engrais Ă  distribuer en deux parties Ă©gales; la premiĂšre sera 
semée dans le sens de la longueur du champ, et la deuxiÚme dans 
le sens de la largeur, perpendiculairement, par conséquent, à la di- 
rection suivie par le serneur dans la premiÚre opération. Un ouvrier 
intelligent corrigera, en augmentant ou diminuant, suivant le cas, 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893, — 1. 22 


338 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


la quantitĂ© d’engrais semĂ©e au second tour, les inĂ©galitĂ©s de la pre- 
miÚre répartition. 

Il faut choisir, pour semer les engrais pulvérulents, une journée 
calme afin d’éviter l’inĂ©gale rĂ©partilion qu’entrainerait l’action du 
vent. 

Une pratique excellente consiste, comme je l’ai dĂ©jĂ  indiquĂ©, Ă  mĂ©- 
langer, Ă  l’engrais Ă  semer Ă  la volĂ©e, une certaine quantitĂ© de terre 
fine passĂ©e au tamis ou du plĂątre (ce dernier est trĂšs utile si l’engrais 
est humide). On augmente ainsi le volume de la matiĂšre Ă  distribuer 
sur une surface donnée et on en rend la répartition égale plus facile. 

Toujours en vue d’assurer la plus grande homogĂ©nĂ©itĂ© dans la 
rĂ©partition de l’engrais, il est prĂ©fĂ©rable de faire Ă  l’avance, sur l'aire 
d’une grange, le mĂ©lange des diverses substances qu’on veut em- 
ployer, dans des proportions qu’on a fixĂ©es au prĂ©alable. Ce mĂ©lange 
sera rendu aussi intime que possible. Supposons, pour fixer lesidées, 
qu’on veuille employer un mĂ©lange formĂ© de 200 kilogr. de nitrate 
de soude, 250 kilogr. de phosphate minéral, scories, etc., ete., et 
100 kilogr. de sels de potasse. On Ă©tendra sur le sol, par couches 
superposĂ©es, les trois sortes d’engrais sur une surface assez grande 
pour que le mĂ©lange ait 0,95 Ă  0*,30 de hauteur, comme si l’on 
voulait prĂ©parer un compost; cela fait, Ă  l’aide d’une pelle on cou- 
pera et recoupera en tous sens le tas formĂ©, jusqu’à ce que le mĂ©- 
lange paraisse tout à fait homogÚne, ce que la couleur des différents 
engrais permettra de reconnaßtre aisément. 

Si l’on veut employer simultanĂ©ment le nitrate de soude et le su- 
perphosphate, il faut absolument Ă©viter de mĂ©langer Ă  l’avance ces 
deux engrais. L’acide de superphosphate, rĂ©agissant sur le nitrate 
de soude, peut décomposer partiellement ce dernier, ce qui entrai- 
nerait une perte d’azolic nitrique ; le mieux est de faire alors la se- 
maille en deux fois. 

La terre fine, au cas oĂč l’on en emploierait, sera introduite de la 
mĂȘme maniĂšre. Cette prĂ©paralion, qui demande des soins et un peu 
de lemps, trouvera largement sa rĂ©munĂ©iation dans l’homogĂ©nĂ©itĂ© 
du mélange à semer. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 339 


Il. —— CULTURE MARAICHÈRE 


X. — Les engrais commerciaux et la culture maraüchùre. 


À de rares exceptions prùs, la culture maraichùre, le jardinage, 
la floriculture et l’arboriculture n’ont pas eu recours à l'emploi de 
fumures autres que le fumier de ferme, L’attention des horticulteurs 
et des arboriculteurs semble s’ĂȘtre portĂ©e presque exclusivement 
sur la création des mille variétés qui font l'admiration des amateurs 
ou les dĂ©lices des gourmets. De mĂȘme, dans le jardinage propre- 
ment dit, les efforts des praticiens se sont concentrés, avec succÚs, 
sur l'obtention ou l’acclimatation d'espĂšces et de variĂ©tĂ©s nouvelles, 
sans que le mode d’alimentalion des vĂ©gĂ©taux ait paru prĂ©occuper 
les producteurs. Ces branches spéciales de la culture ont beaucoup 
à attendre de la voie ouverte dans la production agricole par l’em- 
ploi des succédanés du fumier. 

Il s’agit d’une part importante de la richesse agricole du pays. En 
effet, sans parler des cultures florales, de celle des fleurs Ă  parfum, 
notamment, qui occupent une place si considérable dans la région 
méridionale, au sujet desquelles les données statistiques nous man- 
quent pour en Ă©valuer l’étendue et la valeur, la culture maraĂŻchĂšre, 
Ă  elle seule, reprĂ©sente un chiffre annuel de production voisin d’un 
milliard de francs. 

D’aprĂšs la derniĂšre enquĂȘte dĂ©cennale (1882), la superficie des 
jardins potagers et maraichers s’étendait sur 429 701 hectares four- 
nissant annuellement une production évaluée à plus de 900 millions 
de francs, ce chiffre pouvant, Ă  coup sĂŒr, ĂȘtre considĂ©rĂ© comme 
inférieur à la réalité. 

Les jardins destinés à l'alimentation de la famille couvraient, à 
eux seuls, prĂšs des trois quarts de la surface maraĂŻchĂšre totale 
(339 698 hectares), et les terrains cultivés, en vue de la vente des 
légumes, occupaient une surface de 90 000 hectares environ. Depuis 
dix ans, l’étendue de ces cultures a dĂ» augmenter sensiblement ; 
l'enquĂȘte dĂ©cennale qui se poursuit en ce moment nous fixera sur 
l'importance de cet accroissement. 


340 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Les cultures arborescentes, fruitiĂšres, chĂątaigneraies, oliviers, 
mĂŒriers, vergers, Jardins (vignes non comprises, bien entendu), s’é- 
tendent ensemble sur prÚs de 850 000 hectares. La récolte annuelle 
des pommes et poires comestibles oĂč destinĂ©es Ă  la prĂ©paration des 
cidres, représentaient, en 1882, prÚs de 20 millions de francs; celle 
des autres arbres fruitiers s'Ă©levait Ă  une valeur de plus de 6 mil- 
lions. On voit, par ces quelques chiffres, que l’ensemble de ces di- 
verses cultures maraichĂšres, horticoles et fruitiĂšres couvre dans 
notre pays des surfaces considérables et mérite, par conséquent, 
qu’on Ă©tudie l'application Ă  leur production des mĂ©thodes de fumure 
dont l’agriculture proprement dite commence à recueillir des fruits 
si manifestes, sous le rapport de l’accroissement des rendements. 

Il est un autre point de vue de la question dont 1l convient de dire 
un mot Ă  propos de la fumure des cullures maraĂźchĂšres et arbustives. 

On sait combien sont nombreuses les maladies parasitaires, sans 
parler des insectes, qui s’attaquent aux cultures maraïüchùres et aux 
arbres fruitiers. !l n’est pas d’annĂ©e, de mois pour ainsi dire, qu’on 
ne signale l’apparition de nouveaux ennemis de ces rĂ©coltes. Or, 
s’il est un fait physiologique bien Ă©tabli, c’est l'inĂ©galitĂ© de rĂ©sis- 
tance aux parasites vĂ©gĂ©taux ou animaux de deux plantes de mĂȘme 
espùce dont l’une est bien nourrie, vigoureuse, et dont l’autre, faute 
d'alimentation, est languissante ou maladive. Les ĂȘtres vivants rĂ©- 
sistent d’autant mieux à ces invasions parasitaires que leur nutrition 
est plus parfaite, leurs organes mieux développés, les fonctions de 
ces derniers mieux assurées par une alimentation suffisante, en qua- 
litĂ© et en quantitĂ©. L’exemple de la rĂ©sistance au phylloxĂ©ra de cer- 
tains vignobles abondamment fumés et croissant dans un sol large- 
ment pourvu d'éléments minéraux assimilables, d'acide phosphorique 
notamment, est lĂ  pour prouver que chez les plantes, comme chez 
les animaux et chez l’homme lui-mĂȘme, l’état particulier que l’on 
dĂ©signe sous le nom de misĂšre physiologique est l’une des causes 
principales de la facilité avec laquelle les affections parasitaires ou 
microbiennes ont raison d’un individu. C’est pourquoi, pour le dire 
en passant, on ne saurait trop donner d'attention dans les régions, 
comme la Champagne, oĂč le flĂ©au phylloxĂ©rique commence Ă  se 
montrer, à la fumure du sol. Sans doute cela ne suffit pas et l’on 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 341 


doit expérimenter les insecticides en vue de la destruction de lPin- 
secte ; mais, en attendant, et sans perdre de temps, il faut apporter 
ausol, en abondance, les aliments de la vigne qui y font défaut. On 
retardera d'autant l’affaiblissement du cep par l’action du parasite 
el l’on aura chance de l'empĂȘcher de succomber pendant assez long- 
temps pour que l'application d’un insecticide, appropriĂ© aux condi- 
tions locales du sol, produise son effet, permette à la vigne de ré- 
sister aux alteintes du phylloxéra et de continuer, malgré la présence 
du terrible insecte, à donner une récolte. 

Les allérations de l'écorce et celle des fruits des poiriers, par 
exemple, les tavelures, comme les appellent les jardiniers, dispa- 
raissent sous l'influence d'une forte fumure phosphatée. J'ai eu, il y 
a quelques annĂ©es, l’occasion de conseiller Ă  d’habiles arboricul- 
teurs l’emploi, Ă  haute dose, des scories de dĂ©phosphoration dans 
le sol qui devait recevoir des plantations d’arbres fruitiers et l’ap- 
plication du mĂȘme engrais Ă  des arbres dĂ©pĂ©rissants et dont l'Ă©corce, 
les feuilles et les fruits portaient, depuis plusieurs années, des traces 
manifestes de dégùts causés par diverses affections parasitaires. Pour 
les plantations, j'avais conseillé l'emploi des scories à la dose mini- 
mum de 1 000 kilogr. à l’hectare (environ 160 kilogr. d'acide phos- 
phorique) mĂ©langĂ©s Ă  la terre jusqu’à la profondeur de 0",60 Ă  0,86 
qui Ă©tait celle des trous oĂč l’on devait planter les arbres. Pour les 
vieux poiriers oĂč pommiers qui prĂ©sentaient un aspect dĂ©notant une 
alimentation minérale insuffisante, j'avais fait enlever la terre tout 
autour de l'arbre, jusqu’à la profondeur oĂč s’implantait le chevelu 
des racines : on rebouchait ensuite le trou ainsi pratiqué avec un 
mélange de terre et de scories, en quantité calculée sur le chiffre 
que je viens de donner (1 000 kilogr. Ă  l’hectare). Cette opĂ©ration, 
dans les deux cas, Ă©tait faite Ă  l’automne ou Ă  la fin de l'hiver, avant 
toule trace de départ de la végétation. Ce traitement était complété, 
lorsque la pauvretĂ© du sol l’exigeait, par l'addition au printemps, 
en arrosage dans un bassin ouvert au pied de chaque arbre et d’une 
dimension correspondant Ă  l'expansion latĂ©rale des racines, d’une 
certaine quantitĂ© de nitrate de soude (100 Ă  200 kilogr. Ă  l’hectare, 
suivant les cas), et de sels potassiques, si la nature-du sol l’exigeait. 

DÚs la premiÚre année, cette médication, car la fumure consti- 


342 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


tuait véritablement un traitement pour les arbres malades, produi- 
sait déjà un effet manifeste : les feuilles nouvelles avaient presque 
repris leur aspect normal ; l'écorce élait déjà moins rugueuse et les 
fruits eux-mĂȘmes avaient meilleure apparence. Au bout de la se- 
conde ou de la troisiÚme année, l'écorce était redevenue lisse, les 
feuilles étaient débarrassées des taches noirùtres qui les couvraient 
précédemment et les tavelures des fruits avaient disparu. Quant aux 
Jeunes arbres, ils prenaient, dÚs la deuxiÚme année de plantation, 
une apparence vigoureuse, luxuriante, pleine de promesses pour la 
fructification, promesses que l’évĂ©nement n’a pas dĂ©menties. 

Je cite cet exemple pour montrer les bons rĂ©sultats que l’on est 
autorisĂ© Ă  allendre de l’application judicieuse des engrais minĂ©raux 
Ă  la fumure des arbres fruitiers. J'espĂšre, dans ces quelques pages, 
mettre entre les mains des propriétaires de jardins et de vergers, des 
maraichers et des arboriculteurs, non pas des recettes partout indis- 
Unctement applicables, mais d’utiles renseignements sur les moyens 
d'élever les rendements de leur terre et des bases précises pour en- 
treprendre des expĂ©riences qu'aucune indication, si complĂšte qu’elle 
semble ĂȘtre, ne saurait remplacer. Il ne faut jamais oublier, en 
agriculture surtout, que les notions gĂ©nĂ©rales n’ont qu’une valeur 
relative et doivent surtout servir de point de départ et de direction 
pour des essais individuels adaptĂ©s aux conditions locales oĂč se 
trouve l’expĂ©rimentateur. Il n'existe pas de panacĂ©e universelle en 
agriculture, pas plus qu’en mĂ©decine, et les charlatans seuls donnent 
des recettes infaillibles, partout applicables. 


XI. — Insuffisance du fumier pour la culture maraüchùre 
et le jardinage. 


Le premier point sur lequel j'appellerai l’attention est l’insuffi- 
sance du fumier d’étable et des engrais vĂ©gĂ©taux en gĂ©nĂ©ral, presque 
exclusivement employĂ©s Ă  l'heure qu’il est dans la culture marai- 
chĂšre et horticole. 

D'oĂč vient cette insuffisance ? Comment peut-on la dĂ©montrer ? 
C’est ce que je commencerai par examiner. 

L’horticulture, qui a beaucoup de points communs avec l’agricul- 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 343 


ture proprement dite, en diffĂšre essentiellement sous de nombreux 
rapports. Examinons les différences les plus saillantes entre ces 
deux cultures. Les légumes-que nous cultivons dans nos jardins ont 
une durée de croissance beaucoup moindre que celle des végétaux 
de la grande culture. Il s'ensuit que, dans l’espace d’une annĂ©e, on 
demande deux ou trois rĂ©coltes au mĂȘme terrain maraicher, en y 
cultivant successivement plusieurs espÚces différentes. La valeur vé- 
nale du sol des terres à légumes, situées d'ordinaire dans le voisi- 
nage immédiat des grands centres de population, est trÚs sensible- 
ment plus élevée que celle du territoire agricole. Enfin, comme 
conséquence de ces deux conditions, le terrain maraßcher est occupé, 
pour ainsi dire, sans discontinuté, par des végétaux : la jachÚre y 
est inconnue ou à peu prÚs et la récolte a lieu durant tous les mois 
de l’annĂ©e, Ă  quelques rares intervalles prĂšs. On sait, de plus, que, 
d'une façon générale, les exigences des végétaux, en principes nu- 
trilifs, sont d'autant plus grandes que la plante parcourt, dans un 
temps plus court, les diverses phases de son Ă©volution. Une plante 
qui, dans l’espace de trois mois, doit croĂźtre et arriver Ă  maturitĂ© 
ou, pour mieux dire, Ă  l’état de dĂ©veloppement auquel elle sera 
comestible, exige, naturellement, la prĂ©sence dans le sol d’une 
quantilé d'aliments plus élevée que le végétal dont la période de 
dĂ©veloppement est de huit ou dix mois, comme c’est le cas du blĂ©, 
par exemple. La consommation en principes nutritifs, faite par la 
culture maraichÚre, est encore accrue par les fréquents arrosages 
qui activent la végétation. De plus, les exigences des nombreux 
vĂ©gĂ©taux horticoles sont trĂšs diffĂ©rentes, d’une espĂšce Ă  l’autre, 
comme nous allons le voir dans un instant. 

Enfin, la nĂ©cessitĂ© d’obtenir, pour les cultures des primeurs, une 
chaleur suflisante, Ă  des Ă©poques de l’annĂ©e oĂč la tempĂ©rature am- 
biante est souvent trÚs basse, oblige à la création de couches chaudes 
dont le fumier sera ensuite utilisé pour les cultures de pleine terre. 

L'ensemble des conditions que je viens de rappeler Ă©tablit donc, 
au point de vue de la fumure, des différences profondes entre les 
récoltes agricoles et celles de nos jardins. La rapidité de croissance 
des lĂ©gumes, la succession quasi ininterrompue, sur le mĂȘme sol, 
de plantes trĂšs exigeantes, et d’exigences trĂšs diffĂ©rentes en azote, 


344 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

‘potasse, acide phosphorique, obligent le jardinier à l'emploi de 
doses de fumier d’étable Ă©normes, et dĂ©passant de beaucoup, par 
hectare, celles dont peut se contenter de sol agricole. De lĂ , une 
dĂ©pense trĂšs considĂ©rable et qu’on pourrait, je crois, rĂ©duire no- 
tablement par l'association des engrais industriels au fumier d'Ă©- 
table”. 

Pour mettre en Ă©vidence, d’une façon claire, l'insuffisance du 
fumier d’étable dans la culture maraĂŻichĂšre, j'aurai recours Ă  quel- 
ques rapprochements numériques entre la composition de cet en- 
grais et celle des produits horticoles. 

Supposons qu’il s'agisse d’une culture potagĂšre s'Ă©tendant sur un 
hectare : admettons qu’on ait donnĂ© Ă  cette surface 60 000 kilogr. 
de fumier d’étable de composition moyenne, c’est-Ă -dire une fumure 
deux fois plus forte que celle que reçoit annuellement le sol agricole 
soumis à un assolement convenable. Laissons de cÎté les matériaux 
les moins prĂ©cieux du fumier d’étable, Ă  raison de leur abondance 
relative dans la plupart des terres, et ne considérons que les trois 
Ă©lĂ©ments fondamentaux : l’azote, l'acide phosphorique et la potasse. 
En partant de la teneur moyenne du fumier d’étable en ces trois 
éléments, savoir, par 4 000 kilogr. de fumier : azote, 5 kilogr. ; acide 
phosphorique, 24,6 ; potasse, 6,5, on calcule aisĂ©ment l’apport, 
en chacun d’eux, que reprĂ©sentent les 60 tonnes de fumier reçues 
par cet hectare. On trouve ainsi : 


LU OT SRE USE MN RER D AT EC 300 kilogr. 
Acide PNOSPNOrIQUE ARE ES E TETPMS 156 — 
POLASS ONE Me ee ee NS Re RE EN te TOR 


Une récolte de 30 quintaux de blé avec sa paille enlÚve environ 
85 kilogr. d’azote, 35 kilogr. d’acide phosphorique et 45 kilogr. de 
potasse : le fumier, à la dose de 60 tonnes à l’hectare, laisserait 
donc encore, aprĂšs la rĂ©colte de blĂ©, 215 kilogr. d’azote, 121 ki- 
logr. d'acide phosphorique et 333 kilogr. de potasse. On s'explique 
dùs lors qu’on puisse obtenir encore, aprùs le froment, au moims 


1. L'achat du fumier pour la culture maraïßchÚre pourrait se borner à la quantité 
nécessaire pour la création des couches. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 345 
deux rĂ©coltes en cĂ©rĂ©ales d’élĂ© ou en plantes d’autres espĂšces vĂ©gĂ©- 
tales qui Lrouveront dans le sol une réserve suffisante pour leur ali- 
mentation. Comparons les exigences des plantes poltagĂšres Ă  celles 
du froment, et nous reconnaĂźtrons tout de suile que les 60 000 ki- 
logr. ne suffisent pas, dans la plupart des cas, Ă  la croissance des 
deux ou trois récoltes que le jardinage demande à la terre dans une 
seule année. 


XII. — Exigences minĂ©rales des lĂ©gumes. 


Pour Ă©tablir cette comparaison, il nous faut d’abord connaĂźtre les 
quantités de chacun des trois principes essentiels contenus dans une 
récolte de légumes, comparable, par son poids, à une récolte de 
30 quintaux de blĂ©, c’est-Ă -dire Ă  une bonne rĂ©colte moyenne, en 
culture intensive. 

Je réunis dans le petit tableau ci-dessous la teneur en azote, acide 
phosphorique et potasse d’une rĂ©colte de dix variĂ©tĂ©s de lĂ©gumes ; 
les chiffres de la colonne qui suit le nom de la plante indiquent le 
poids Ă  l’hectare de la rĂ©colte utilisable (tubercules, grains ou feuilles 
suivant les cas). Les poids d’azote, d’acide phosphorique et de po- 
tasse expriment la totalitĂ© de ces Ă©lĂ©ments enlevĂ©s au sol, c’est-Ă -dire 
existant tant dans la partie comestible que dans les déchets dont le 
poids ne figure pas dans la premiùre colonne, celle-ci n’indiquant 
que les quantités livrées à la consommation. 


QUANTITÉS 
RÉCOLTE des principes minĂ©raux contenus 
dans la récolte totale. 

ESPÈCES. à TT —— 
l’hectare. Azote. Re ee y Potasse, 

Kilogr. Kilogr. Kilogr. Kilogr. 

ROIS SR ARTE EC 2 600 126 33 57 
HAMCPIS ES TR Le. 1 500 96 25 Gyl 
Caroest.s Marins, 50 000 133 53 153 
Choux-fleurs. . . . . 24 000 156 59 204 
Choux-raves, . . . . 30 000 206 89 230 
Salade (laitue). . . . 14 000 31 13 54 
Concombre . . . . . 60 000 96 130 63 
ROLE md 15 Lie 15 000 64 99 27 
Oignons . . . . . . 30 000 si 42 si 
Pommes de terre. . . 25 000 96 45 155 


GHOURAS REINE Li, 70 000 168 99 406 


346 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Ce qui frappe tout d’abord, à l’inspection de ces chiffres, c’est 
l'énorme disproportion entre les exigences minérales des plantes 
potagÚres et celles da blé ; en second lieu, les variations non moins 
considérables des quantités de chacun des trois principes fertilisants, 
d’une espĂšce de lĂ©gume Ă  l’autre. Ces divergences sont rendues 
plus Ă©videntes encore si l’on groupe les dix espĂšces vĂ©gĂ©tales par 
ordre de teneur de chacune d’elles en azote, acide phosphorique et 
potasse, ce que montre le tableau ci-dessous : 


Classification des lĂ©gumes d’aprĂšs leurs exigences. 


1° EN AZOTE. 29 EN POTASSE. 30 EN ACIDE PHOSPHORIQUE. 
Kilogr. Kilozr. Kilogr. 

Choux-raves: 2120906 E1Choux: 2: 61217406 2 Ghoux se 205040000099 
Choux TE GS MC houx-raves 250 CNOUx-rAVÉS ES EMEA) 
Choux-fleurs. . . 156  Choux-fleurs . . . 204  Concombres. . . . 63 
Carottes. . . . . 133 Pommes de terre. . 155  Choux-fleurs . . . 99 
POIs 2 2 EL MO Cartes SEULE DES LS CANON EST RC RUES E 
Haricots. . . . . 96 CGoncombres. . . . 130 Pommes de terre. . 45 
Pommes de terre . O'GRRR Ai TOT I ER 99 Oignons EN? 
Concombres . . . JG MMOISAONS 2-00. SUAMIPOIS SEE MEN SE CS 0 
Oignons eo Rose POI RME MEL ST SRATOrEME Ne 27 
Raïfort 222% TS GE CHaricots 2:22 04 ne oil É2HHaricois ATEN OEES 
Salade: (laitue} "7 81: Salade. 7 7.0" DAS Salades ne 
Écarts extrĂȘmes. . 175 352 86 


L’assimilation de l’azote, de la potasse ct de l'acide phospho- 
rique varie donc, pour les plantes que nous envisageons, d’une 
espùce à l’autre, dans le rapport de À à 7 pour le premier, de 
1 Ă  7 1/2 pour le second et de 1 Ă  7 pour le troisiĂšme, avec dif-. 
fĂ©rents Ă©carts entre ces deux extrĂȘmes. Il suit de lĂ  qu'une quan- 
titĂ© dĂ©terminĂ©e de fumier — 60 000 kilogr. Ă  l’hectare — ne peut 
suffire Ă  la succession de rĂ©coltes que l’on demande Ă  un jardin 
dans une mĂȘme annĂ©e. Un exemple va rendre plus sensible encore 
celte insuffisance du fumier pour la production Ă©conomique des 
légumes. 

Supposons que l’on cultive successivement la mĂȘme annĂ©e, 
dans un jardin maraßcher qui aura reçu, en hiver, 60 tonnes 
de fumier, des choux, des carottes et de la salade, et voyons 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 347 


quels vont ĂȘtre les prĂ©lĂšvements exercĂ©s par l’ensemble des trois 


récolles : 
AZOTE,. POTASSE. DoanÉ Ont de, 
Kilogr. Kilozr. Kilogr. 
70 000 kilogr. de choux enlĂšveront . . 168 406 99 
50000 —- de carottes. . . . . . 135 153 23 
14000  — de salade. . . . . . . 31 b4 13 
SON AU TOI le a Ras Dia 613 165 
60 000 kilogr. de fumier apportent . . 300 378 156 
D'oĂč un dĂ©ficit de, . . . 32 235 9 


D’aprĂšs cela, mĂȘme en supposant que les 60 tonnes de fumier 
aient cédé intégralement aux plantes leur azote, acide phosphorique 
el polasse, ce qui est loin d’ĂȘtre possible, elles n’auraient pas suffi, 
à 90 p. 100 prÚs, à alimenter en potasse les trois récoltes. 

Ce bilan explique comment les jardiniers qui sont ‘amenĂ©s Ă  intro- 
duire dans le sol d’énormes quantitĂ©s de fumier, pour la confection 
des couches et la préparation des primeurs, arrivent à maintenir la 
fécondité de leur sol, malgré les exigences si grandes des légumes 
qu'ils cultivent. Ge n’est done que par l'accumulation successive 
d'Ă©normes quantitĂ©s de fumier d’étable dans leur champ que les ma- 
raßchers réussissent à entretenir sa fertilité. La disproportion existant 
entre les poids d’azote, d'acide phosphorique et de potasse qu’exigent 
les différents légumes suffit à elle seule pour obliger le jardinier 
à une dépense excessive en fumier, puisqu'il doit toujours fournir. 
Ă  ses lĂ©gumes une quantitĂ© minima d’aliments potassiques, azolĂ©s 
ou phosphatés et que le fumier ne peut apporter, par exemple, le 
minimum de potasse nĂ©cessaire, qu’en donnant en mĂȘme temps au 
sol des quantitĂ©s d’azote ou d’acide phosphorique doubles de celles 
qu’exige la constitution de la rĂ©colte. 

À eux d'examiner si, comme je le pense, l'emploi des engrais 
spéciaux, nitrate, poudreiltes, phosphates, sels de potasse, etc., en 
addition au fumier d’étable, ne leur permettrait pas de rĂ©gler la fu- 
mure sur les besoins des plantes, quelque différentes que soient 
leurs exigences, en réduisant à la plus stricte limite nécessaire à la 
confection des couches, la quantité de fumier qu'ils achÚtent chaque 


348 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


année et en restituant à la grande-culture une bonne partie du fu- 
mier qu’ils lui enlùvent. 


XIII, — NĂ©cessitĂ© de l'apport des matiĂšres minĂ©rales 
dans le maraĂźchage. 


Les terres de longue date soumises à la culture maraïchùre n’ont 
pas besoin d'apport de matiĂšres organiques, mais bien de matiĂšres 
minĂ©rales qu’elles sont, plus qu'aucun sol, aptes Ă  rendre prompte- 
ment utilisables par les vĂ©gĂ©taux. C’est dans cette voie que doit en- 
trer la culture potagĂšre pour rĂ©aliser l’objectif de toute opĂ©ration 
agricole : obtenir, avec le minimum de dépense, le maximum de ren- 
dement. Nous allons aborder ce cÎté de la question, ayant établi, 
nous l’espĂ©rons, l'insuffisance, au point de vue Ă©conomique, de la 
fumure exclusive au fumier d’étable pour la culture maraĂŻchĂšre, 
comme pour toute autre d’ailleurs. 

En rĂ©alitĂ©, c’est dans du terreau presque pur, c’est-Ă -dire dans 
du fumier plus ou moins décomposé, plutÎt que dans de la terre, à 
proprement parler, que se pratique la culture maraĂźchĂšre intensive. 
Il y a lieu, dùs lors, de se demander, d’une part, si les errements 
de cette culture n’entrainent pas, en achat de fumier, une dĂ©pense 
excessive que diminuerail, dans une large proportion, l'emploi 
simultanĂ© des engrais commerciaux ; de l’autre, si le remplacement 
du fumier, dans une notable proportion, par les engrais minéraux 
n'aurait pas, Ă  cĂŽtĂ© du rĂ©sultat Ă©conomique, l’avantage d'amĂ©liorer 
la qualité des légumes produits. 

La réponse à la premiÚre question ne fait pas de doute à nos 
yeux et j'espĂšre prouver aisĂ©ment qu'elle doit ĂȘtre affirmative. En 
ce qui regarde le second point, à savoir si les légumes récoltés dans 
un sol plus riche en principes minéraux ne posséderaient pas une 
saveur et un goĂ»t plus agrĂ©ables, en mĂȘme temps qu’une richesse 
plus grande en principes alimentaires, je suis tenté de répondre 
Ă©galement par l’affirmative. Mais j'ajouterai tout de suite que lexpĂ©- 
rience directe seule donnera une réponse décisive. Occupons-nous 
donc pour l'instant de l'examen de la premiĂšre question seulement. 

Quelques remarques sur les conditions dans lesquelles le fumier 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 349 


d’étable cĂšde Ă  la plante ses principes actifs pour la vĂ©gĂ©tation sont 
indispensables pour nous guider dans le choix des engrais minéraux 
Ă  introduire dans un sol de longue date abondamment pourvu en 
fumure organique. 

Si l’on excepte les plantes dites lĂ©gumineuses, telles que pois, ha- 
ricots, etc., les végétaux ne puisent l'azote indispensable à leur 
existence que dans les nitrates ou dans les sels ammoniacaux et plus 
sĂ»rement dans les premiers. L’azote organique qui forme la masse, 
presque la totalité de l'azote du fumier frais, ne peut donc servir à 
la vĂ©gĂ©tation qu'aprĂšs s'ĂȘtre oxydĂ©, c’est-Ă -dire transformĂ© en acide 
nitrique, sous l'influence d’un organisme infĂ©rieur (microbe nitri- 
fiant), agissant en présence de bases métalliques telles que la chaux, 
la magnĂ©sie, la potasse ou la soude, avec le concours de l’oxygĂšne 
de l'air, de l’humiditĂ© du sol et d’une certaine tempĂ©rature. 

Les phosphates et les sels de potasse, de chaux et de magnésie, 

qui existent toujours dans le fumier, n’ont pas à subir des modifica- 
tions aussi complexes pour servir d'aliments aux plantes ; ces corps 
pĂ©nĂštrent dans le vĂ©gĂ©tal, soit Ă  la faveur de l’eau, s’ils sont solu- 
bles, soit par dialyse, Ă  travers la membrane externe des poils radi- 
culaires, s’ils sont solides. Gette absorption se fait par l'intermĂ©diaire 
des sucs acides de la plante, capables de dissoudre, Ă  travers la 
membrane des radicelles, les matiĂšres insolubles, les phosphates 
notamment, et de les mettre à la disposition du végétal, sans le con- 
cours direct de l’eau. 
- De cette diffĂ©rence profonde dans le mode d’assimilation de l’azote, 
des phosphates et des sels minéraux du fumier, doit résulter une 
trĂšs inĂ©gale consommation de chacun d’eux dans l’utilisation du fu- 
mier ; 1l est utile d’insister sur ce point fondamental. Reprenons, 
pour cela, l'exemple d’une fumure de 60 000 kilogr. de fumier 
d’étable, Ă  l’hectare, qui nous a prĂ©cĂ©demment servi : ces 60 tonnes 
de fumier renferment : 


ATOUT AP TR Re En 300 kilogr. 
Acide phosphorique. . . . . . . . 156 — 
RO TASSE Ne Es En SE DES 378 — 


Ces 300 kilogr. d’azote, pour servir à la nutrition de la plante, 
devront ĂȘtre transformĂ©s en nitrale : combien de temps exigera 


320 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


celte transformation indispensable pour que l'azote du fumier serve 
intĂ©gralement d’aliment Ă  la rĂ©colte ? On ne saurait le prĂ©ciser, l’ac- 
tivité de la nitrification dépendant, comme je le rappelle plus haut, 
d’un ensemble de conditions qui n’est pas susceptible de mesures 
exactes ni mĂȘme d'Ă©valuations approchĂ©es. La pratique nous apprend 
qu'il s’écoulera un temps fort long, depuis le moment de l’introduc- 
tion du fumier dans le sol jusqu’à sa complùte nitrification et, par con- 
sĂ©quent, jusqu’à l’utilisation de son azote par les vĂ©gĂ©taux. J. B. Bous- 
singault a constatĂ©, par l'analyse de terres de maraĂŻicher, c’est-Ă -dire 
de fumier trĂšs consommĂ©, qu’un dixiĂšme seulement de l'azote total 
s’y trouve Ă  l’état de nitrate, les neuf autres parties y exislant encore 
Ă  l’état d’azote organique. Sir J. Lawes et le docteur Gilbert, dans 
leurs expériences sur la culture du blé et des plantes sarclées que 
j'ai rappelĂ©es plus haut, sont arrivĂ©s Ă  celte conclusion que l’action 
du fumier de ferme n’est complùte qu’au bout de 15 ans environ. 
On voit, d’aprùs cela, qu’en apportant 60 tonnes de fumier à un 
hectare de terre, ce n’est pas sur 300 kilogr. d'azote actif pour la 
vĂ©gĂ©lation que l’on peut compter dans l’annĂ©e, mais sur une frac- 
tion plus ou moins grande de celte quantité. Si l'on adoptait les 
chiffres de Lawes et de Boussingault, on estimerait Ă  20 ou 30 kilogr. 
d'azote nitrique seulement le poids de ce principe fertilisant em- 
prunté, par la récolte, la premiÚre année, au fumier employé. 

Suivant toute probabilitĂ©, l’assimilation des sels alcalins et de 
l’acide phosphorique du fumier se fait dans une mesure beaucoup 
plus large que celle de l'azote : l’action absolument certaine du ni- 
trate de soude employé en couverture, sur un sol médiocrement 
fumĂ© en fumier de ferme, le dĂ©montre. En effet, l'addition d’une 
faible quantité de nitrate, au printemps, dans un champ de blé, 
d'avoine ou d'orge précédemment fumé au fumier de ferme, pro- 
duit une trĂšs notable augmentation dans le rendement en grain et 
en paille à l'automne. On ne peut s'expliquer, il me semble, l’in- 
fluence de la seule addition du nitrate à un sol, qu’en admettant 
que le sol ou la fumure ont livré à la récolle assez d'acide phospho- 
rique, de potasse, etc., mais pas assez d'azote assimilable et que le 
nitrate est venu fournir le complĂ©ment d’azote nĂ©cessaire pour pro- 
duire l’excĂ©dent de rĂ©colte constatĂ©. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 391 


Je pense donc que dans la culture maraïchÚre, l'énorme quantité 
de fumier de ferme qu’on est obligĂ© d'introduire dans le sol, tous 
les ans, est nécessitée par le besoin de satisfaire aux exigences des 
lĂ©gumes en azote. En d’autres termes, les lĂ©gumes se dĂ©veloppent 
grĂące Ă  l’emmagasinement dans le sol de quantitĂ©s considĂ©rables 
d’azote organique dont la rapiditĂ© de nitrification ne suit pas celle 
de la croissance des plantes, de sorte que celles-ci s’alimentent 
beaucoup plus avec le concours de l’azote des nitrates provenant 
des fumures antérieures qu'avec celui du nitrate formé pendant la 
pĂ©riode de quelques mois, suffisante pour l’évolution complĂšte de la 
plante. 

La conséquence de l'interprétation que je viens de lenter de la 
pralique qui consiste Ă  rapporter tous les ans, dans un sol marai- 
cher, une Ă©norme masse de fumier d’étable est que, Ă  un moment 
donnĂ©, le champ renferme, Ă  l’élal inerte pour la vĂ©gĂ©lation, des 
quantitĂ©s considĂ©rables d’azote, tandis que la plus grande partie de 
la potasse et de l'acide phosphorique est exportée annuellement par 
les rĂ©coltes qui se succĂšdent dans le cours d’une campagne. Le pro- 
blĂšme Ă©conomique dont la solution s'impose au maraicher est 
double : hñter la transformation de l’azote organique en nitrate et 
fournir au sol à meilleur marché l'acide phosphorique et la potasse 
qui leur manquent. 

Examinons les moyens d'atteindre ce double but. 

Il ne s’agit, pour le moment, que des vieilles cultures maraichùres. 
Pour les terrains neufs qu’on destine à la culture maraïchùre, on 
procédera autrement. Nous examinerons plus tard ce cas spécial. 


XIV. — Les phosphates minĂ©raux et les cultures 
maraĂźchĂšres. 


La constitution des sols consacrés de longue date à la culture ma- 
raichĂšre appelle une observation dont nous devons tirer un parti 
avantageux pour la fumure économique de ces terres. La présence 
d'une grande quantité de matiÚre organique (d'humus) dans un sol 
est Ă©minemment favorable Ă  l’assimilation directe des phosphates 
minéraux en poudre fine. Les faits culturaux bien observés, les ex- 


392 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


périences que je poursuis depuis plus de vingt ans sur les conditions 
d’assimilation des phosphates minĂ©raux par les plantes, l’heureuse 
influence des phosphates dans les terrains de landes, nous montrent 
que deux terres, de teneur identique en phosphate minéral et qui ne 
diffĂ©rent qu’en ce que l’un a reçu de la matiĂšre organique, tandis 
qu’on n’en a pas donnĂ© Ă  l’autre, fournissent des rendements trĂšs 
diffĂ©rents : la terre oĂč la matiĂšre organique abonde donne des excĂ©- 
dents de rĂ©coltes de 50 Ă  60 p.100 sur ceux de l’autre sol. La quantitĂ© 
plus ou moins grande de phosphate assimilé par la plante semble 
donc Ă©troitement liĂ©e Ă  l’action que la matiĂšre organique exerce sur 
le phosphate. Il se produit dans le sol des combinaisons, encore im- 
parfaitement connues dans leur mode de formation, entre le car- 
bone, l'hydrogĂšne et l'oxygĂšne des substances organiques el le phos- 
phate de chaux, de fer ou d’alumine, combinaisons qui se prĂȘtent on 
ne peut mieux Ă  la dialyse du phosphate par la racine de la plante. 

Cette observation conduit tout naturellement Ă  songer Ă  l'emploi 
des phosphates minéraux dans les sols maraßchers, trÚs aptes par 
leur forte teneur en matiĂšres organiques Ă  rendre promptement 
assimilable la plus grande partie du phosphate qu’on leur confiera. 

Parmi les nombreuses variĂ©tĂ©s de phosphates minĂ©raux que l’in- 
dustrie met aujourd’hui, à si bon compte, à la disposition des agri- 
culteurs, il en est deux qu’il serait particuliĂšrement intĂ©ressant d’ex- 
périmenter : les phosphates minéraux riches en carbonate de chaux 
et les scories de déphosphoration. Au point de vue de l'alimentation 
phosphatée de la plante, tous les phosphates en poudre fine pour- 
raient ĂȘtre indiffĂ©remment employĂ©s ; je suis certain que les phos- 
phates siliceux aussi bien que les phosphates calcaires seront promp- 
tement assimilés dans ces terrains, dont la matiÚre organique 
constitue un des éléments les plus abondants. Mais si je crois parti- 
culiĂšrement intĂ©ressants les essais qu’on ferait avec les scories de 
dĂ©phosphoration et avec les phosphates calcaires, c’est qu’il y a lieu 
de penser que la forte teneur en chaux des premiÚres, la présence 
du carbonate de chaux dans les seconds concourraient trĂšs effica- 
cement à la nitrification de la matiÚre azotée accumulée depuis de 
longues années dans les terrains maraïchers. Il est à penser qu'on 
obtiĂ©endrait ainsi du mĂȘme coup deux rĂ©sultats importants : 1° met- 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 393 
tre Ă  la disposition des rĂ©coltes l’acide phosphorique qui leur est 
indispensable ; 2 provoquer la nitrification de l’azote organique. 
L'addition de sels de potasse compléterait la famure minérale des 
sols de maraichage. 

Dans quelles proportions conviendrait-il d'employer les phos- 
phates et les sels de potasse ? L'expérience pourrait seule fixer exac- 
tement les jardiniers Ă  ce sujet. Voici, en attendant, les bases sur 
lesquelles on pourrait, Je crois, entreprendre des essais. J’estime que 
l'emploi de 150 Ă  180 kilogr. d'acide phosphorique Ă  l’état de scories 
de dĂ©phosphoration (1000 kilogr. environ de scories Ă  l’hectare), 
ou l'introduction de 200 kilogr. d'acide phosphorique sous forme 
de phosphate brut (Ă  25 ou 30 p. 100 d'acide phosphorique) rem- 
pliraient le but. La potasse pourrait ĂȘtre employĂ©e Ă  la dose de 80 Ă  
100 kilogr. à l’hectare, soit 160 à 200 kilogr. de chlorure de po- 
Lassium. [l va sans dire que ces engrais devraient ĂȘtre introduits 
dans la premiÚre année des essais, sans nouvelle addition de fumier 
d’étable au sol. Que coĂčlerait cette famure Ă  l’hectare ? Le voici Ă  
peu de chose prĂšs : 

1 000 kilogr. de scories, Ă  18.90 p.100, valent 50 fr. 

200 kilogr. de chlorure de potassium coûtent environ 55 fr. 

Soit une dépense d'engrais de 105 fr.; 200 kilogr. d'acide phos- 
phorique dans les phosphates minéraux coûteraient aussi (à 0 fr. 25 c. 
le kilogr.) environ 50 fr. Dans les deux cas, la dépense serait donc 
la mĂȘme et l'expĂ©rience seule dĂ©ciderait de l'avantage que l’un des 
mĂ©langes prĂ©senterait sur l’autre. Cette dĂ©pense n’attemdrait guĂšre 
que le cinquiùme de celle qu’entraüne une fumure annuelle de 
60 000 kilogr. de fumier d’étable, Ă  10 fr. la tonne. Maintenant de 
deux choses l’une : ou, comme je le pense, la nitrification du fumier 
s’effectuerait assez rapidement pour suffire à la culture intensive 
d’un jardin maraicher, et il n’y aurait alors pas lieu de pourvoir au- 
tement à la nutrition azotée des légumes ; ou celte nitrification 
marcherait moins vite que je ne le suppose, et l’on devrait recourir 
au nitrate de soude. Dans ce cas, 200 ou 400 kilogr. de nitrate de 
soude à 29 fr. les 100 kilogr. compléteraient la fumure minérale, 
dont le coĂ»t total resterait infĂ©rieur Ă  200 fr. par hectare, n’altei- 
onant pas la moitié du prix du fumier employé jusqu'ici. 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1, 23 


394 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Je voudrais aussi voir essayer, concurremment aux phosphates et 
aux sels de potasse, le plñtre cru à la dose de 3 000 kilogr. à l’hec- 
tare ; il est probable que l’on constaterait, dans la culture marai- 
chĂšre, les effets si remarquables sur la production des vignes abon- 
damment pourvues de fumures azotées organiques. 

Ces divers essais sont peu dispendieux et mĂ©ritent, je crois, d’ĂȘtre 
tentĂ©s. Dans le chapitre suivant j’examine la fumure des jardins 
potagers, dans lesquels, en général, on ne fait pas usage du fumier 
de ferme aux doses Ă©levĂ©es qu’emploient les maraichers de profes- 
sion et j'indique la nature et la quantité des engrais qu'ils récla- 
ment. 

De ce qui prĂ©cĂšde je ne voudrais pas qu’on pĂŒt conclure que je 
propose de bannir le fumier d’étable de ia culture maraĂŻchĂšre et de 
le remplacer intĂ©gralement par un mĂ©lange d’engrais commerciaux : 
phosphates, nitrates, sels de potasse, etc. Cette maniĂšre de voir ex- 
clusive est bien loin de ma pensĂ©e, et je m'arrĂȘterai encore un ins- 
tant Ă  l’interprĂ©talion exacte des faits que je viens d'exposer et des 
moyens que je recommande aux maraĂźchers. 

Moins que toute autre, la culture maraĂźchĂšre en sol ordinaire, 
c’est-Ă -dire en terre mĂ©diocrement pourvue naturellement de ma- 
tiĂšres organiques, ne saurait se passer du fumier d’étable : la nĂ©ces- 
sité d'obtenir des légumes tendres, de croissance rapide, puisque 
plusieurs espÚces doivent se succéder sans interruption dans le 
champ du maraücher, exige un sol riche en humus, capable d’absor- 
ber et de retenir de grandes quantitĂ©s d’eau d'arrosage, celle-ci 
Ă©tant un des facteurs dominant d’une production rapide des lĂ©gumes, 
en mĂȘme temps que des qualitĂ©s requises par le consommateur qui 
repousserait des produits durs ou coriaces (salades, radis, etc.). 

Il ne s’agit donc point de renoncer aux fumures organiques, mais 
seulement d’en restreindre l'emploi, tant au point de vue des ren- 
dements à obtenir que de la dépense à faire. 

Cela Ă©tant entendu, J'ai montrĂ© que la nĂ©cessitĂ© d’apporter aux 
rĂ©coltes qu’on se propose d'obtenir, les quantitĂ©s d’azote, de po- 
tasse et d’acide phosphorique qu’elles rĂ©clament, a conduit les ma- 
raichers, qui s'adressent, dans ce but, exclusivement au fumier 
d’étable, Ă  emmagasiner dans leur lerrain des quantitĂ©s Ă©normes de 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 395 


cet engrais. J’estime que, dans la plupart des cultures maraïchùres 
anciennes, dans les champs dont le sol est bondé de matiÚres orga- 
niques et qui, par suite, a acquis pour longtemps les qualités spé- 
ciales que les matiĂšres organiques communiquent Ă  la terre : poro- 
sitĂ©, ameublissement, pouvoir absorbant considĂ©rable pour l’eau, 
elc., le moment est venu d'entrer dans une voie Ă  la fois plus ra- 
tionnelle et plus Ă©conomique, par la substitution, dans une large 
mesure, des engrais minéraux au fumier. 

La connaissance exacte du sol sur lequel on opÚre, l'expérience 
acquise par le maraicher lui-mĂȘme, seront les meilleurs guides pour 
l'appréciation des limites dans lesquelles devra se faire cette substi- 
tution. Est-ce, pendant un an ou deux, la totalité du fumier con- 
sommĂ© annuellement qui devra ĂȘtre remplacĂ©e par des phosphates, 
des sels de potasse, des nitrates ? Faudra-t-1l réduire d'un quart ou 
de moiliĂ© seulement la quantitĂ© de fumier employĂ©e ? C’est au prati- 
cien à apprécier, à faire des essais et à en tirer les conclusions que 
justifieraient les résultats constatés localement. Ce qui me parait in- 
contestable, ce que Jai tenu à signaler, c’est qu’il y a beaucoup à 
faire dans cette voie et que l’acide phosphorique, la potasse et 
l’azote sous forme minĂ©rale doivent ĂȘtre fournis aux sols maraĂŻĂźchers 
dans une large proportion, tout en réalisant une grande économie 
dans les frais de fumure. 


III, — CULTURE POTAGÈRE 


GRANDE CULTURE — JARDINAGE 


XV. — CrĂ©ation d’un jardin. 


Arrivons à la culture potagùre, faite en vue de l’approvisionne- 
ment de la famille du propriétaire de jardin. 

Cette culture comporte ordinairement des conditions générales 
toul autres que la culture maraichĂšre proprement dite. Beaucoup 


396 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


moins intensive que celte derniùre, n’occupant que des surfaces res- 
treintes, visant Ă  Ja fois, le plus souvent, Ă  la culture des arbres 
fruitiers et Ă  la production des fleurs, en mĂȘme temps qu’à celle des 
légumes, le jardinage privé exige des quantités de fumier bien moins 
considérables et s'adapte on ne peut mieux à l'emploi des engrais 
commerciaux. Au lieu d'envisager les rendements à l’hectare, tant au 
point de vue des produits qu’à celui des fumures, je les rapporterai 
Ă  l’are, soit Ă  une surface de 100 mĂštres carrĂ©s, et, pour les fleurs, Ă  
une surface moindre, celle d’une plate-bande de jardin par exemple. 

J'envisagerai successivement les deux cas qui peuvent se présen- 
ter : 1° la crĂ©ation d’un jardin fruitier et potager ; 2 l'entretien d’un 
jardin créé de longue date. 

S'agit-il de transformer en jardin un terrain jusqu'ici en cullure 
ordinaire ou en friche, la premiÚre opération doit consister dans un 
dĂ©fonçage Ă  la bĂȘche, d'autant plus profond que la couche de sol 
proprement dite s’étendra elle-mĂȘme plus profondĂ©ment. Un dĂ©fon- 
çage pratiqué sur une profondeur de 0,60 suffira pour le potager ; 
il sera bon d’aller jusqu’à 1 mùtre en vue de la plantation d’arbres 
fruitiers ou de treilles. Une des meilleures opĂ©rations qu’on puisse 
faire, au moment de ce dĂ©fonçage, consiste Ă  mĂȘler Ă  la terre une 
forte dose de scories de dĂ©phosphoration, si le sol n’est pas trĂšs 
riche en humus, ou de phosphate minĂ©ral en poudre fine, si l’on a 
affaire Ă  une terre tourbeuse ou abondamment pourvue par des cul- 
tures ou fumures antérieures de détritus organiques. 

Pour les légumes, par are, 20 kilogr. de scories de déphosphora- 
lion, ou 40 kilogr. de phosphate minéral finement moulu et de ri- 
chesse moyenne, constitueront, une fumure phosphatĂ©e dont l’effet 
se fera sentir pendant de longues annĂ©es. Pour les plantations d’ar- 
bres fruitiers, le sol devant ĂȘtre remuĂ© Ă  1 mĂštre de profondeur, la 
dose de scories pourrait avantageusement ĂȘtre doublĂ©e : 40 kilogr. 
Ă  l’are correspondent Ă  400 gr. par mĂȘtre carrĂ©. Le dĂ©foncement 
alteignant À mĂštre, cette quantitĂ© se trouvera rĂ©partie dans un vo- 
lume de terre d'un mĂštre cube. Admettons un poids de 1 200 kilogr. 
pour ce mĂȘtre cube de terre : il est aisĂ© de se rendre compte de la 
quantitĂ© d’acide phosphorique que renfermeraient 100 parties de 
terre ainsi traitées. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 3951 


100 kilogr. de scories de déphosphoration contiennent en moyenne 
17 à 18 kilogr. d'acide phosphorique réel; 400 gr. en renferment 
donc 68 Ă  72 gr., soit 70 gr. en moyenne. Les 1 200 kilogr. de terre 
recevant 70 gr. d’acide phosphorique en renfermeraient 6 gr. par 
100 kilogr. Si faible que paraisse celte dose d'acide phosphorique, 
elle dépasse de beaucoup celle des fumures de la grande culture, 
puisque l'emploi de 400 gr. de scories au mÚtre carré représente 
4 tonnes de scories Ă  l’hectare, quantitĂ© quadruple de celle que l’on 
considĂšre comme devant assurer l’alimentalion phosphatĂ©e de plu- 
sieurs récoltes de céréales. Mais on remarquera que la couche dans 
laquelle pénÚtrent les racines des céréales et dans laquelle, par con- 
séquent, celles-ci se nourrissent, n'excÚde pas 0,20 en profondeur, 
soit le cinquiÚme seulement de la hauteur que nous avons assignée 
à la couche défoncée pour la culture des arbres fruitiers. Notre fu- 
mure phosphatée, répartie sur un volume de terre cinq fois plus 
considérable que dans le cas des céréales, ne représenterait en réa- 
litĂ©, pour la couche de 0",20 d'Ă©paisseur, qu’une dose de 800 kilogr. 
de scories à l’hectare. 

Il va sans dire que l’analyse chimique du sol, faite prĂ©alablement 
Ă  la fumure, servirait utilement de guide pour fixer la nature et la 
quantité de cette derniÚre ; connaissant la teneur du sol vierge en 
acide phosphorique, potasse et azote, on dĂ©terminerait plus sĂŒre- 
ment les quantités de chacun de ces principes à y introduire. On 
peut, en l’absence de renseignements fournis par l’analyse directe, 
considérer & priori la fumure phosphatée que je viens d'indiquer 
comme suffisante dans la plupart des cas. Je reviendrai plus loin 
d’ailleurs sur les moyens de la complĂ©ter si l'allure de la vĂ©gĂ©tation 
en démontrait la nécessité. 

En ce qui regarde la potasse, qui fait, généralement, beaucoup 
moins défaut dans le sol que l'acide phosphorique, mais dont les 
plantes potagĂšres sont trĂšs avides”, il est prudent, dans la crĂ©ation 
d’un jardin potager ou fruitier, d’en introduire dans le sol, au mo- 
ment du défonçage, une certaine quantité. Par are, il faut répandre, 
suivant la nateze du sol, de 20 Ă  40 kilogr. de kaĂŻnite ou de 5 Ă  


1. Voir le tableau de la composition des récolles, pages 345 et 346. 


398 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


10 kilogr. de chlorure de potassium. Ces sels peuvent ĂȘtre mĂ©lan- 
gés sans inconvénient aux scories ou aux phosphates minéraux en 
poudre fine et incorporés à la terre par l'opération du défonçage. 
Les quantités minima, 20 kilogr. de kaïnite et 5 kilogr. de chlorure 
de potassium, par are, correspondent au défonçage à 0",60 du sol 
destiné aux légumes ; les quantités maxima, 40 kilogr. ou 10 kilogr.., 
au sol dĂ©foncĂ© Ă  1 mĂštre, pour plantation d’arbres fruitiers. 

Ces quantités correspondent aux poids suivants de ces engrais, à 
l’hectare : | 


Kane ERP EEE 20 à 40 kilogr. à l'are — 2 000 à 4 000 kilogr. 
Chlorure 674108 5 à 10 — — 500 à 1000 — 


Soit, en potasse réelle : 250 à 500 kilogr. 

Ces doses représentent, pour une couche de 0",20 d'épaisseur, 
des quantitĂ©s de polasse Ă©gales Ă  50 et 100 kilogr. Ă  l’hectare. 

Pour compléter la famure fondamentale, il faut ajouter aux deux 
engrais prĂ©cĂ©dents une certaine dose d’azote. 

On peut avoir recours, dans ce but, surtout pour les arbres frui- 
liers, aux sources d’azote lentement assimilables, sauf à appliquer 
plus tard, comme nous le dirons, du nitrate de soude ou de potasse. 
Le fumier de ferme, la laine et le cuir torréfiés, les tourteaux de 
graines oléagineuses*, le sang desséché sont les principales substan- 
ces auxquelles on peut avoir recours. Dans la plupart des cas, le 
plus simple sera d'employer pour les petites surfaces dont 1l s’agit, 


1. La kaĂŻnite contient 12 Ă  13 p. 100 environ et le chlorure 50 p. 100 de potasse 
réelle. 


2, Dans le midi de la France oĂč, d’une part, le fumier d’étable est rare et, de l'autre, 
la température du printemps beaucoup plus élevée que dans le reste de notre pays, 
les tourteaux de graines oléagineuses (ricin, coton, palmiste, etc.) sont entrés dans la 
consommation rĂ©guliĂšre du maraĂźchage et employĂ©s mĂȘme par la grande culture, sur 
une large Ă©chelle. 

Les tourteaux de graines de coton d'Égypte dont les dĂ©partements des Bouches-du- 
RhĂŽne et de Vaucluse consomment, pour la fumure des jardins maraĂźchers, 8 000 tonnes 
par an environ, sont particuliÚrement usités dans la partie de ces départements qui 
est irriguée par de nombreux canaux et dans les terrains d'alluvion formés par la 
Durance. 

Dans les cantons de Saint-Rémy et Chùteaurenard, ces tourteaux sont employés, 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 399 


de bon fumier d’étable, Ă  la dose de 300 Ă  400 kilogr. Ă  l’are, 
suivant la teneur primilive du sol en azote. 

On remarquera que des trois principes fondamentaux de la ferti- 
litĂ©, c’est l’azote qui est le moins important au moment de la crĂ©ation 
du jardin, par cette raison qu’on peut toujours, aprùs la plantation 
des arbres fruitiers et la levée ou la reprise des plantes potagÚres, 
recourir avec succĂšs Ă  l'emploi, en couverture, du nitrate de soude 
ou du sulfate d’ammoniaque, au moment du labour. Lorsqu'un sol 
est abondamment pourvu d'acide phosphorique et de potasse, con- 
dilion indispensable pour que les engrais azotés aient, sur les ren- 
dements, toute leur efficacité, il est toujours facile de compléter la 
fumure par l'application d’azote soluble. 

Si nous rĂ©capitulons ce qui vient d’ĂȘtre dit, nous voyons que la 


dĂšs le mois de juillet, pour la culture des salades que l’on sĂšme immĂ©diatement aprĂšs 
la récolte du blé. Dans les environs de Cavaillon, bien connus pour la production des 
primeurs, on les utilise, en novembre, pour la culture des aulx, mais c’est surtout à 
partir de février qu'on les emploie en plus grande quantité, pour la pomme de terre 
prĂ©coce et autres primeurs. Les tourteaux de graines de coton d'Égypte sont Ă©pandus 
Ă  raison de 2 000 kilogr. Ă  5 000 kilogr. Ă  l'hectare : les jardiniers du Midi constatent 
que cette fumure a, pour rĂ©sultat, d'activer considĂ©rablement la vĂ©gĂ©tation et d’aug- 
menter la production. Les plantes maraßchÚres fumées avec ces tourteaux sont géné- 
ralement en avance de deux Ă  trois semaines sur les autres. 

5 000 kilogr. de tourteaux de graines de coton représentent un apport au sol de 
95 kilogr. d'acide phosphorique, 180 kilogr. d'azote et 75 kilogr. de potasse, 

Les bons effets de l'emploi des tourteaux unanimement constatés par les maraßchers 
du Midi pour la production des primeurs, sont dus bien plus aux matiÚres minérales 
fertilisantes qu'à la quantité relativement faible de substance organique que ces résidus 
apportent au sol. 5 000 kilogr. de tourteaux représentent, en effet, 4 300 kilogr. à 
peine de substance végélale sÚche, tandis que 60 tonnes de fumier frais correspondent 
Ă  {5 300 kilogr. de substance organique, soit prĂšs de quatre fois autant. 

La facilité des transports de l'ouest et du midi de la France, voire de l'Algérie, vers 
les rĂ©gions de l’est et du nord amĂšnera, sans doute, de plus en plus les maraichers de 
ces derniÚres contrées à réduire la culture des primeurs proprement dites pour con- 
centrer leurs efforts sur la culture intensive des légumes de saison obtenus dans des 
conditions éconcmiques. Il nous semble que la substitution des engrais minéraux à la 
plus grande partie du fumier employé aujourd'hui est une des conditions essentielles 
de cette production économique ; le fumier d'élable ou d'écurie limité, dans son emploi, 
à la confection des couches pour semis de légumes de saison, cédera peu à peu la 
place aux phosphates minéraux, au nitrate de soude et aux sels de potasse, coûtant 
beaucoup moins cher à raison des quantités bien plus restreintes auxquelles il faut 
recourir pour donner au sol une fumure Ă©gale Ă  celle que fournit le fumier. 


360 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

fumure d’un terrain oĂč l’on veut crĂ©er un jardin potager ou fruitier 
exige, pour assurer la réussite de la récolte, l'introduction dans le 
sol, au moment du dĂ©fonçage, d’une quantitĂ© assez notable d’engrais ; 
calculons approximativement à quelle dépense entraine, par are, la 
fumure que nous recommandons aux essais des créateurs de jardin. 

Les scories valent 5 fr. les 100 kilogr. ; les phosphates minéraux 
en poudre fine Ă  50-55 p. 100 de phosphate de chaux pur, 3 fr. 20 c. 
Ă  3 fr. 50 c. les 100 kilogr. ; la kaĂŻnite, 7 fr. les 100 kilogr. ; le 
chlorure de potassium Ă  50 p. 100 de potasse, 93 fr. les 100 kilogr. 
Il sera aisĂ©, d’aprĂšs cela, Ă  chacun, suivant le choix qu’il fera des 
engrais à associer, d'établir le coût de la fumure dans le cas des dé- 
fonçages à deux profondeurs dont nous avons parlé. On verra que la 
dépense en acide phosphorique et en potasse oscillera entre 2 fr. 40 c. 
et 9 fr. par 100 mÚtres carrés. Ajoutons une dépense de 3 fr. euvi- 
ron en fumier de ferme ou autre engrais azolé organique et nous 
atteindrons environ le chiffre de 5 Ă  8 fr. par are pour la fumure 
fondamentale de notre jardin. 

Il nous reste maintenant Ă  envisager le cas d’un jardin crĂ©Ă© depuis 
un certain temps et Ă  indiquer les divers mĂ©langes d’engrais minĂ©- 
raux auxquels on peut avoir recours pour en assurer et en accroĂźtre 
la fertilité. 


XVI. — Fumure d'entretien en grande culture. 


La fumure d'entretien d’un jardin potager appelle quelques re- 
marques préliminaires. Nous distinguerons le cas de la culture des 
lĂ©gumes sur une grande Ă©chelle, c’est-Ă -dire sur plusieurs hectares 
au moins, telle qu’elle se pratique dans certaines exploitations ru- 
rales, et la culture dans le jardin privé de petite étendue. 

La culture potagĂšre, faite en plein champ, diffĂšre essentiellement 
de la culture maraichùre proprement dite, en ce qu'il ne s’agit plus 
ici de la fabrication de primeurs, mais bien des légumes de saison 
dont la production intéresse davantage la masse des consommateurs. 

Nous commencerons par indiquer les fumures Ă  appliquer Ă  la 
grande culture potagĂšre, puis nous nous occuperons du jardinage 
privé. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 361 


M. P. Wagner, directeur de la Station agronomique de Darmstadt, 
dont les travaux sont trĂšs estimĂ©s, s’est adonnĂ© spĂ©cialement, de- 
puis quelques années, à l'étude de ces intéressantes questions. Dans 
des sĂ©ries considĂ©rables d’essais mĂ©thodiquement conduits, sur les 
exigences des principales espÚces de légumes, fruits et fleurs au 
point de vue de leur alimentation, il a cherché à fixer expérimenta- 
lement la nature des engrais les plus aptes Ă  fournir, pour chacune 
d'elles, les rendements les plus élevés. Comme contrÎle de ces essais 
physiologiques, il a eu recours Ă  des cultures en plein champ, et du 
rapprochement des résultats obtenus par les deux méthodes, il a 
déduit certaines rÚgles pratiques de fumure que je vais résumer, à 
titre de renseignements trÚs utiles pour les cultivateurs de légumes. 
Je reviendrai ensuite à la famure du Jardin potager, dont j'ai parlé 
dans le paragraphe précédent au point de vue de la création, mais 
non de l'entretien annuel. 

Avant d'indiquer les formules d’engrais recommandĂ©es par 
M. P. Wagner, formules générales que chaque cultivateur pourra, 
Ă  l’occasion, modifier d’aprĂšs la composition et l’état antĂ©rieur de 
fumure de son champ, il me paraĂźt utile de mettre sous les yeux de 
mes lecteurs la teneur moyenne de quelques-uns des légumes les plus 
répandus, en azote, polasse, chaux, magnésie et acide phosphorique. 
Ces données leur permettront de calculer, approximalivement, les 
quaulités de chacun de ces principes essentiels exportés par une ré- 
colte d’un poids connu. 

1 000 kilogr. de légumes verts contiennent : 


ACIDE 
AZOTE. POTASSE. CHAUX. MAGNÉSIE. phos- 

phorique, 

Pois nes MB 38 1084 1ks 1 1K5,9 8ks,4 
Cioux-fleurs. . 4 ,0 3 ,6 0 ,5 0 ,3 130 
Choux-raves . . . 4 ,8 42 ;3 JL DES DUT 
Concombres . F9 36 PUS 0 ,4 UE ie 
Salades . De LE 31,9 1745 Ur 6 ESC 


1. Ces chiffres sont afférents à la partie comestible et ne comprennent pas les 
feuilles ou autres parties du végétal, suivant les cas, inutilisés pour l'alimentation : ce 
sont done des minima. — On ne possĂšde pas beaucoup d'analyses de lĂ©gumes et j'espĂšre 
pouvoir combier en partie celte lacune par les recherches analytiques entreprises dans 
le laboratoire de la Station agronomique de l'Est, 


362 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ACIDE 
AZOTE. POTASSE. CHAUX. MAGNÉSIE. phos- 

phorique. 
Oignons. . DÉS 2k8 5 158,6 OK, 3 115,3 
Choux . . D 0) 4,3 Le (DB One 
Asperges . AE 142 DC 0 ,0 0 9 
CĂ©leri . 24 11296 Dies 3,0 PAS Aa 
Epinards . 4 ::49 Da A 0 1856 
Choux de Savoie . 02.5 Ca, SO 0,5 y il 
Radis. . 159 LG OT OS 0 ,5 
Artichauts. + RE 1770 0 ,4 RE) 


M. Wagner a déduit de ses nombreuses expériences la composi- 
tion des mĂ©langes d'engrais qu’il conseille d'appliquer en grande 
culture à la production légumiÚre. 

Voici les indications relatives Ă  chacun des groupes principaux de 
légumes. 


1 Pois et haricots. 


Ces plantes n’ont pas besoin d’engrais azolĂ©s complĂ©mentaires. 
Le sol fumĂ© rĂ©guliĂšrement au fumier d’étable leur fournit assez d’a- 
zote, dans la premiĂšre pĂ©riode de leur existence, pour qu’elles se 
développent vigoureusement et soient en état de puiser leur alimen- 
tation azotĂ©e dans l’air atmosphĂ©rique. Les pois, les haricots et les 
autres plantes de la famille des papilionacées sont aptes, on le 
sait, à se nourrir, par l'intermédiaire des micro-organismes de 
leurs nodositĂ©s, de l’azote gazeux de l’air. Cette facultĂ© fait dĂ©faut 
à tous les autres végétaux cultivés. On peut donc se contenter de 
donner aux pois et aux haricots de l’acide phosphorique et de la 
potasse. 

M. P. Wagner recommande par hectare la fumure suivante : 

250 kilogr. de superphosphate double‘ ou 550 kilogr. de super- 
phosphate Ă  16 p. 100 et 200 kilogr. de chlorure de potassium ; 

Ou 230 kilogr. de phosphate de potasse ‘ et 80 kilogr. de chlorure 
de potassium. 

On mélange ces engrais et on les répand sur le sol, en automne, 


1. Voir, pages 367 et 388, la composition de ces engrais concentrés et les avan- 
tages que présente leur emploi. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 363 


en hiver ou au printemps, puis on les enfouil Ă  10 ou 15 centimĂštres 
de profondeur, par un trait de charrue ou de herse. 


2 Choux, choux frisés, choux-fleurs, choux-raves el autres variétés 
de choux. 


Ces plantes exigent une forte fumure, particuliĂšrement en potasse 
et en azote. Il y a lieu de leur donner, par hectare : 

200 kilogr. de superphosphate double ou 550 kilogr. de super- 
phosphate Ă  16 p. 100 et 250 kilogr. de chlorure de potassium ; 

Ou 230 kilogr. de phosphate de potasse et 130 kilogr. de chlorure 
de potassium. 

On fume à l'automne, en hiver ou au printemps et l’on enterre 
l'engrais. 

Immédiatement aprÚs la mise en place des replants, on répand 
250 kilogr. de nitrate de soude en couverture ; quatre semaines aprĂšs 
on donne encore mĂȘme dose de nitrate qu’on mĂ©lange au sol en bi- 
nant les plants. Comme le nitrate de soude favorise la formation de 
croûles à la surface du sol, il faut pratiquer soigneusement le binage 
de la terre Ă  la houe. 


3 Carolles, navels, radis noirs, salsifis, raiforl 
et plantes analogues. 


On peut donner Ă  ce groupe de lĂ©gumes la mĂȘme fumure phos- 
phatĂ©e et potassique qu'aux choux. M. P. Wagner recommande l’épan- 
dage de 150 kilogr. de nitrate de soude (à l’hectare), au moment du 
semis, ou mieux, si le sol est trÚs léger et trÚs perméable, aprÚs le 
semis. Deux ou trois semaines aprÚs la levée des plantes, on donne 
de nouveau 150 kilogr. de nitrate et, trois semaines plus tard, on 
renouvelle encore cette fumure. L’hectare a ainsi reçu, en trois fois, 
450 kilogr. de nitrate de soude. | 


4 Concombres, oignons, etc. 


Au printemps, ou mĂȘme dĂ©jĂ  Ă  l’automne, on rĂ©pand, Ă  l’hectare, 
un mélange composé de : 
200 kilogr. superphosphate double ou 550 kilogr. superphos- 


364 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

phate Ă  16 p. 100 et 200 kilogr. chlorure de potassium; ou 250 ki- 
logr. de phosphate de potasse et 80 kilogr. de chlorure de potassium, 
et l’on enfouit l’engrais. Avant la plantation des pĂ©pins des cucurbi- 
tacées ou le semis des graines d'oignons, on répand 100 kilogr. de 
nitrate de soude, on herse et l’on Ă©galise le sol. Quinze jours aprĂšs 
la levée, on sÚme de nouveau à la volée 100 kilogr. de nitrate et, 
deux semaines aprĂšs, une derniĂšre dose de 50 kilogr. du mĂȘme sel. 


3° Saludes. 


Les salades redoutent les fumures trop Ă©nergiques; le mitrate de 
soude, notamment, ne doit leur ĂȘtre donnĂ© qu’à de faibles doses Ă  
la fois. Voici le mélange que conseille M. P. Wagner, pour un hec- 
(are : Ăč 

150 kilogr. de superphosphate double ou 400 kilogr. superphos- 
phate Ă  16 p.100; 100 kilogr. chlorure de potassium, ou 175 kilogr. 
de phosphate de potasse. 

L’engrais doit ĂȘtre rĂ©pandu sur le sol avant le bĂȘchage de ce der- 
nier : immédiatement avant la plantation, on donnera 100 kilogr. 
de sulfate d’ammoniaque. Quelques semaines aprùs la plantation, on 
peut répandre à la volée 30 kilogr. de nitrate de soude et, trois se- 
maines plus tard, la mĂȘme quantitĂ© encore de cet engrais, si l’aspect 
de la rĂ©colte indique un besoin d’azote. 


6° Pommes de terre. 


M. P. Wagner dit qu’il Ă  constatĂ© dans ses expĂ©riences que la 
pomme de terre ne se trouve pas bien du chlorure de potassium et 
qu'il ne faut recourir à ce sel, comme source de potasse, qu’à de 
faibles doses. Il recommande, pour le précieux tubercule, le mé- 
lange suivant par hectare : 

150 kilogr. de phosphate de potasse ; 100 kilogr. de sulfate d’am- 
moniaque. 

La fumure est répandue en mars et légÚrement enfouie à la herse, 
J'ai obtenu, en 1892, dans mon champ d’expĂ©riences du Pare des 
Princes, d'excellents résultats : 28 000 à 35000 kilogr. de tubercules 
à l’hectare, par l'emploi de la fumure suivante : 300 kilogr. d’acide 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 369 


phosphoriqne sous forme de scories, 200 kilogr. de potasse Ă  l’état 
de sulfate (kaïnite) et 300 kilogr. de nitrate de soude à l’hectare. 


7° Asperges. 


À l'automne, ou, dans les sols lĂ©gers, au printemps, M. P. Wagner 
recommande la fumure suivante, rapportĂ©e Ă  l’hectare : 

200 kilogr. de superphosphate double ou 550 kilogr. superphos- 
phate Ă  16 p.100, 200 kilogr. chlorure de potassium ; ou 230 kilogr. 
phosphate de potasse et 84 kilogr. chlorure de potassium. 

Il faut enterrer lĂ©gĂšrement l’engrais par un binage. 

DÚs que les asperges commencent à pointer, on répand à la volée 
250 kilogr. de nitrate de soude et on l’enfouit par un bĂȘchage lĂ©ger. 
Un mois plus tard, on renouvelle cette fumure Ă  la mĂȘme dose 

Je prie le lecteur de ne pas perdre de vue que c’est à titre d’in- 
dicalions que je donne ces formules, auxquelles il ne faut pas attri- 
buer une fixité qu'elles ne comportent pas: la constitution du sol, 
son Ă©tat antĂ©rieur de fumure, sa ferĂŒilitĂ© naturelle ou acquise sont 
autant de conditions dont le cultivateur doit tenir compte dans le 
choix de ces fumures. 

Les quantités d'azote, d'acide phosphorique et de potasse, aux- 
quelles correspondent les formules dont M. Wagner recommande 
l'emploi pour la famure d’un hectare des divers groupes de lĂ©gumes 
énumérés plus haut, sont les suivantes : 


AZOTE. TS TMO de POTASSE. PRIX. 

Kilogr. Kilozr. Kilogr. Fr. 
(MPOISMNTICOLS SRE » 100 90 58 
PO CDOUX PESTE LR ERIMNE 18 125 90 220 
3. Carottes, navets. . . 70 135 90 207 
4. CGoncombres, oignons. 39 100 90 145 
». Salades diverses . . 16 50 75 83 
G. Pommes de terre . . 20 40 D4 7 
Te TASDELSES LES Pen iette 78 100 90 125 


La dĂ©pense Ă  l’hectare est Ă©tablie, en admettant les valeurs sui- 
vantes : pour le kilogramme d’acide phosphorique soluble 0 fr. 50 c., 
pour la potasse 0 fr. 40 c. et pour l’azote nilrique ou ammoniacal 
4 fr. 60 c. Étant donnĂ©e la production trĂšs abondante qu’on 


366 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


obtient sur un hectare de terre, le prix de la fumure proposée par 
M. P. Wagner ne semblera pas excessif. 

Il me reste Ă  parler maintenant de la famure du jardin potager 
privé, de celle des fleurs, des arbustes et des arbres fruitiers. 


XVII. — La fumure du jardin privĂ©. 


Ce qui prĂ©cĂšde montre l’importance que la fumure chimique est 
appelĂ©e Ă  prendre dans la grande culture maraĂŻĂźchĂšre. Je vais m’oc- 
cuper maintenant de lentretien du jardin potager, fruitier et d’agrĂ©- 
ment de petites dimensions, puis j’examinerai la fumure des plantes 
de serre et d'appartement. 

Pour le propriĂ©taire d’un petit jardin, attenant Ă  sa maison d’ha- 
bitalion ou situĂ© non loin d’elle, il ne saurait ĂȘtre question de tenir 
compte, dans la famure, des exigences individuelles de chacun des 
lĂ©gumes ou fleurs qui doivent se succĂ©der dans le mĂȘme sol. En 
effet, les surfaces affectées à chaque succession de récolte sont trop 
faibles pour qu’il devienne pratique de donner, à chaque plante, un 
mĂ©lange spĂ©cial de substances fertilisantes. Le plus souvent c’est par 
mÚtres que se comptera, dans un jardin privé, la superficie plantée 
en salade, carottes ou choux : de plus, la faible dimension des par- 
celles consacrées à une plante fera que les racines de celles-ci 
envahiront le sous-sol de la parcelle contiguë. Pour ces raisons et 
d’autres faciles à imaginer, il n’y aura donc pas lieu de recourir, 
comme en grande culture, Ă  des mĂ©langes divers d’engrais, mais, au 
contraire, de faire choix d’un mĂ©lange unique, renfermant les trois 
Ă©lĂ©ments essentiels de fertilisation, en proportions telles que l’en- 
grais puisse, dans tous les cas, suffire aux besoins des diverses es- 
pĂšces de plantes que l’on se propose de culliver dans la mĂȘme annĂ©e. 


Engrais pour jardins. 


L’engrais choisi pour la famure des lĂ©gumes et des fleurs doit 
ĂȘtre promptement assimilable, la durĂ©e de ces rĂ©coltes Ă©tant courte ; 
de plus, 1l pourra ĂȘtre trĂšs avantageux d’appliquer Ă  ces cultures 
spĂ©ciales l’engrais en dissolution dans l’eau, comme on le fait cou- 
ramment dans certaines cultures florales du Midi. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 367 


En recourant Ă  des matiĂšres fertilisantes rapidement utilisables 
par le vĂ©gĂ©tal et solubles dans l’eau, l’amateur de jardinage y trou- 
vera une Ă©conomie, rĂ©sultant de ce qu’il pourra diriger, en quelque 
sorte Ă  son grĂ©, d’aprĂšs l’aspect des plantes, la rĂ©partition des doses 
d’engrais à leur donner. 

S'inspirant de ces considérations, M. P. Wagner, qui a fait de 
l’étude des engrais pour lĂ©gumes et pour fleurs l’objet de recherches 
expérimentales des plus intéressantes, est arrivé à formuler la com- 
posilion d’un engrais spĂ©cial pour jardinage. 

Le mélange de substances fertilisantes, expérimenté avec succÚs, 
depuis plusieurs années, tant dans la serre de végétation que dans 
les champs d’essais de la Stalion agronomique de Darmstadt, est 
connu, en Allemagne et en Belgique, dans le commerce des engrais, 
sous le nom d’engrais pour jardins (GartendĂŒnger). I renferme par 
100 kilogr. : 14 kilogr. d’acide phosphorique, 20 kilogr. de potasse, 
12 kilogr. d'azote, tous trois Ă  l’état soluble dans l’eau. 

Il est constitué par quatre sels minéraux, savoir : phosphate 
d’ammoniaque, nitrate de potasse, nitrate de soude et sulfate d’am- 
moniaque. Dans son mémoire, M. P. Wagner n'indique pas les 
proportions de chacun des sels entrant dans le mélange. Mais il est 
aisé de les déduire approximativement de leur teneur en chacun des 
trois principes fertilisants essentiels. 

Je crois utile d'indiquer sommairement la composition de ces 
engrais concentrés, qui ont le double avantage de renfermer, sous le 
plus faible poids, la plus grande quantité de principes utiles à la 
végétation, condition économique au point de vue des transports, 
et d'apporter aux sols le minimum de matiĂšres inutiles : 


TAUX PAR 100 KILOGk. 


Superphosphate double . . . . . 45K,0 d'acide phosphorique. 
36 ,0 d'acide phosphorique, 
27 ,0 de potasse. 

45 ,0 d'acide phosphorique. 
7 ,0 d'azote. 

4,0 de potasse. 

3 ,6 d'azote. 

Nitrate d'ammoniaque. . . . . . 30 Ă  33 kilogr. d'azote. 


Phosphate de potasse. . 


Phosphate d'ammoniaque . 


Nitrate de potasse. 


Ce tableau rĂ©sume la composition des cinq sortes d’engrais con- 


368 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


centrés auxquels la grande culture potagÚre, comme le jardinage, a 
intĂ©rĂȘt Ă  recourir !. | 

Si nous ajoutons à ces matiÚres fertilisantes les engrais déjà entrés 
couramment dans la pratique : superphosphate à 15/18 d’acide 
phosphorique, nitrate de soude à 15.6 p. 100 d’azote; sulfate 
d’ammoniaque à 20 p. 100 d’azote, chlorure de potassium à 50 p. 
100 de potasse, kaĂŻnite Ă  19 p. 100 de potasse, sans oublier les 
scories de déphosphoration et les phosphates minéraux en poudre 
fine que j'ai indiqués comme devant former avec le famier de firme 
la famure fondamentale d’un jardin, j'aurai Ă©numĂ©rĂ© les produits 
commerciaux qui offrent aux cultivateurs et aux jardiniers les sources 
les plus importantes de la famure complĂ©mentaire du fumier d’é- 
table. 

Revenons maintenant à l’engrais pour jardin. Les proportions 
d'azote, d'acide phosphorique et de potasse rappelées plus haut, 
seront sensiblement fournies par 400 kilogr. d’un mĂ©lange formĂ©, 
suivant la pureté de chacun des sels, de : 


Phosphate d'ammoniaque. . . . . . . 28 Ă  30 kilogr. 
NITEA TER ACIDOLISSC MEME PEER NE 14 à 45 — 
NitrateadĂ© soudĂ© RME UMR TT Re 19 Ă  16 — 
Sulfate d'ammoniaque . . . . . . . . 10 à 11 — 


M. P. Wagner considĂšre comme une fumure normale pour jardin 
potager l'emploi de 500 kilogr. de ce mĂ©lange Ă  l’hectare, soit 
o kilogr. par are ou 500 gr. par planche de 1 mĂštre de large 
sur 10 mÚtres de long. On sÚme celie dose aussi réguliÚrement que 
possible, sur le sol, avant le labour Ă  la bĂȘche qui prĂ©cĂšde les semis 
ou la plantation, au printemps, par conséquent. Il est bon de ne pas 


1. Depuis plusieurs annĂ©es en usage en Allemagne, l’engrais pour jardin et les sels 
riches solubles qui le composent sont produits en grand en Allemagne Ă  Biebrich et en 
Belgique à Engis. [ls sont à peine connus en France. J'expérimente depuis deux ans 
ces engrais au champ d'expĂ©riences de la Station agronomique de l’Est du Parc des 
Princes : j'en obtiens les meilleurs résullats pour la culture des légumes ct des fleurs. 
Je ferai connaßtre prochainement aux lecteurs des Annales, avec tous les développe- 
ments nécessaires les résultats des trois premiÚres années d'expériences entreprises 
au Pare des Princes et j'apprécierai les conclusions favorables que j'en puis tirer sur 
les rendements obtenus dans les différentes récoltes. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 369 


se borner Ă  rĂ©pandre l’engrais sur les seules surfaces destinĂ©es Ă  la 
culture, mais aussi sur les étroits sentiers réservés entre les plates- 
bandes, les racines des plantes pénétrant dans le sous-sol de ces 
sentiers. Dans les allées qui bordent les treilles, les plantations 
d'arbres fruitiers, les massifs d’arbustes et fleurs, les carreaux 
d’asperges, on peut aussi rĂ©pandre des engrais que la pluie se char- 
gera de faire pĂ©nĂ©trer dans le sol des allĂ©es sous lesquelles s’éten- 
dent les racines de ces divers végétaux. 

Dans les terres meubles, suffisamment pourvues en humus, 
susceptibles de donner une production trĂšs intensive, on ne se con- 
tentera pas de cette fumure de printemps et l’on recourra avec 
profit à des fumures additionnelles, pour lesquelles on sera guidé 
par l’aspect des vĂ©gĂ©taux et par le nombre des rĂ©coltes qui se succĂ©- 
deront Ă  la mĂȘme place. 

Suivant le plus ou moins de rapidité de croissance des végétaux 
cullivĂ©s et, d’aprĂšs leurs exigences plus ou moins grandes en prin- 
cipes nutrilifs, on pourra employer des doses d'engrais variant entre 
250 et 500 kilogr. à l’hectare, soit 25,500 à 5 kilogr. à l’are ou 
250 Ă  900 gr. par plate-bande de 1 mĂštre de large sur 10 mĂš- 
tres de longueur. Le meilleur mode de faire sera souvent de ré- 
partir ces quantités en deux ou trois doses qu'on répandra dans 
les mois de mai, juin et juillet. L’épandage de l’engrais sera suivi 
d’un lĂ©ger binage Ă  la herse, qui enterrera suffisamment l’engrais. 


Fumure en arrosage. 


M. P. Wagner recommande, avec sa compétence en cette matiÚre, 
un autre mode de fumure qui est plus efficace encore que l’épandage 
du mélange à la volée. 

Ce mode consiste dans l’emploi d’une solution de l’engrais dans 
l’eau. Voici comment on doit opĂ©rer : dans 1 000 litres d’eau, on 
dissout un kilogr. de l’engrais pour jardin (1 gramme par litre) et 
l’on arrose avec 20 litres de cette dissolution 1 mĂštre carrĂ© de sol ; 
cet arrosage revient à donner 200 kilogr. d’engrais par hectare, ou 
2 kilogr. par are. Les arbustes, plantes d’ornements, arbres à fruits 
et raisins, dont la production ligneuse est chétive, les asperges, choux, 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 7. 24 


370 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


betteraves, céleri, concombres, les fleurs à feuillage abondant se 
montrent parliculiùrement reconnaissauts, dit M. P. Wagner, d’un 
semblable arrosage renouvelé toutes les quatre ou six semaines. Les 
arbres et arbustes ùgés de plusieurs années ne doivent plus recevoir 
de fumure Ă  partir du mois d'aoĂ»t, l’engrais donnĂ© Ă  cetle Ă©poque 
pouvant empĂȘcher le bois de mĂ»rir convenablement. 

M. P. Wagner recommande, ainsi que nous, l’emploi des scories 
de déphosphoration comme fumure fondamentale des jardins, cette 
excellente matiĂšre apportant, en plus que l'acide phosphorique, de 
la chaux assimilable trĂšs utile dans la plupart des terrains potagers. 


Fumure de pelouses el gazons. 


Ici, encore, Je suis en parfait accord avec M. P. Wagner, qui 
considùre, en dehors du choix des semences, de l’arrosage et des 
coupes frĂ©quentes, une fumure intense et rĂ©pĂ©tĂ©e comme l’élĂ©ment 
prĂ©pondĂ©rant de la belle venue et de l’entrelien des pelouses. De 
mĂȘme que, trop souvent, les cultivateurs abandonnent, sans les 
fumer, les prairies de leur exploitation, les propriétaires de jardin 
négligent de donner à leurs pelouses l'alimentation dont elles ont 
d'autant plus besoin qu’on les fauche plus frĂ©quemment et de plus 
prĂšs. La jeune herbe Ă©tant particuliĂšrement riche en azote, en 
potasse et acide phosphorique, chaque coupe appauvrit le sol et 
bientÎt, malgré les soins, l'herbe qui repousse jaunit et périt partiel- 
lement, ce qui amÚne ces manques dans la végétation, si déplaisants 
à l’Ɠil. 

Les expériences de M. P. Wagner sur la fumure des gazons l'ont 
conduit Ă  constater que, pour avoir des pelouses vigoureuses, trĂšs 
bien garnies et loujours vertes, il est indispensable de les fumer Ă  
petites doses, pendant l'été, à diverses reprises. Il recommande de 
rĂ©pandre, vers le milieu de fĂ©vrier, 9 kilogr. d’engrais pour jardin, 
par 100 mĂštres carrĂ©s de pelouse, soit 500 kilogr. Ă  l’hectare ; puis, 
à partir d’avril, toutes les trois, quatre ou six semaines, suivant 
l’état de la vĂ©gĂ©tation, environ 15,500 des mĂȘmes engrais pour la 
mĂȘme superficie (1 are). L’engrais ne doit pas ĂȘtre Ă©pandu sur Ja 
pelouse mouillée par la pluie ou par la rosée. Il faut choisir, pour 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. AT 


celte opĂ©ration, le moment oĂč l'herbe est sĂšche et avoir soin que 
l’engrais ne reste pas attachĂ© aux tiges. L’épandage doit se faire, de 
prĂ©fĂ©rence, vers le milieu du jour et non Île matin, au moment de 
la rosĂ©e. Si l’on Ă©tait obligĂ© d’épandre l’engrais sur le gazon humide, 
il faudrait arroser immĂ©diatement aprĂšs l’épandage. Un arrosage 
abondant est particuliĂšrement Ă  recommander aprĂšs la fumure, si 
la pluie ne doit pas survenir prochainement. 


Fumure des fleurs de pleine terre. 


Le premiÚre condition de succÚs dans la culture florifÚre réside 
dans la nature du sol, qui doit ĂȘtre riche en humus, poreux et chaud ; 
mais les qualitĂ©s physiques de la terre ne sont qu’un des Ă©lĂ©ments de 
rĂ©ussite de cette culture ; l’autre rĂ©side dans une alimentation abon- 
dante assurĂ©e, Ă  toutes les Ă©poques, par l’addition d’une fumure 
convenable. 

M. P. Wagner recommande l’épandage de 3 kilogr. d’engrais de 
jardin, sur une plate-bande de 100 mÚtres carrés (30 gr. par mÚ- 
tres) avant le bĂȘchage du sol; puis, lorsque le labour est terminĂ©, 
une addition d’engrais d’égale quantitĂ© ; on nivelle alors la terre au 
rĂąteau. | 

Dans le courant de l'été, il faut revenir à des fumures complé- 
mentaires, et le mieux est de faire usage Ă  cet effet de la dissolution 
dont j'ai parlĂ© plus haut (1 kilogr. d'engrais pour 1 000 litres d’eau) 
et de répéter deux, trois fois ou plus ces arrosages, durant la saison 
chaude, en tenant compte de l'aspect de la végétation. 

Les rosiers, géraniums, fuchsias et toutes les plantes à feuillage 
abondant, telles que maĂŻs, rhubarbe, tabac, ricin, canna, etc., se 
trouvent trÚs bien de fumures liquides fréquemment répétées. Les 
végétaux dont les feuilles sont basses, prÚs de terre, les fleurs peu 
développées en été, la ramification faible, ont naturellement des 
exigences beaucoup moindres. C’est Ă  l’horticulteur, au propriĂ©- 
taire de jardin, à apprécier les modifications à apporter suivant les 
cas, aux indications générales que nous venons de rappeler. 


512 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


IV. — PLANTES D'APPARTEMENT ET DE SERRE 


S1 le nombre des amateurs de jardin est considérable, celui des 
floriculteurs en chambre, qu’on me passe le mot, l’est bien davan- 
tage. Dans les villes oĂč la chertĂ© du terrain s’oppose Ă  la multipli- 
cation des jardins, le goût des fleurs est universel: depuis la serre 
attenant aux somptueuses constructions des hĂŽtels particuliers, jus- 
qu’à l’humble jardin suspendu qui Ă©gaye la fenĂȘtre de l’ouvrier, 
sans oublier le salon du plus modeste bourgeois, partout on ren- 
contre des fleurs, attestant, par leur présence, le goût inné de 
l'homme pour la nature. 

Parler de la culture des plantes d'appartement, indiquer les pro- 
cédés simples et économiques de les défendre, le plus longtemps 
et le mieux possible, contre l’étiolement insĂ©parable des conditions 
anormales de milieu dans lesquelles elles vivent, c’est, il me semble, 
aborder un sujet intéressant un grand nombre d'amateurs. 

Nos plantes d'appartement sont condamnées à vivre, plus ou 
moins, Ă  l’abri de la lumiĂšre et dans une atmosphĂšre confinĂ©e; en 
outre, l'alimentation que leur offre la terre du pot dans lequel elles 
sont placées est forcément limitée au volume et à la teneur de cette 
terre en substances nutritives. Or, on sait que l’action de la lumiùre 
est la condition essentielle sine qué non, de l'assimilation, par les 
parties vertes du vĂ©gĂ©tal, du carbone que l’atmosphĂšre lui apporte 
Ă  l’état d’acide carbonique, carbone qui forme prĂšs de la moitiĂ© du 
poids de la plante, dĂ©duction faite de l’eau que renferment ses tissus. 

La premiùre condition à observer dans l’entretien des plantes 
d’appartement est donc de permettre le plus souvent et le plus long- 
temps qu’on le peut, l’accùs de la lumiùre solaire et celui de l'air ex- 
tĂ©rieur, chaque fois que la tempĂ©rature ne s’y oppose pas. Mais les 
plantes ne vivent pas seulement de l'air du temps ; elles ont besoin 
de trouver, dans le milieu oĂč plongent leur racines, les quantitĂ©s 
d'éléments minéraux nécessaires pour constituer, avec le concours 
de l’eau et de l’acide carbonique de l'air, leurs diffĂ©rents organes et 
pourvoir à leur entretien. La grande cause de dépérissement des 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. ga 


vĂ©gĂ©taux en pots, rĂ©side dans l’'appauvrissement rapide du sol confinĂ© 
oĂč ils vivent. 

Les fleuristes de profession se contentent généralement, pour 
parer à cet appauvrissement, de transplanter le végétal dans de la 
terre neuve ; j'ai montrĂ©, il y quelques annĂ©es’, comment l'analyse 
chimique du sol justifie cette pratique. J'en rappellerai ici un seul 
exemple. Au moment de la transplantation d’un vigoureux pied de 
kentzia, j'avais prélevé un échantillon moyen de la terre de bruyÚre 
du grand-duché de Luxembourg, avec laquelle mon jardinier allait 
remplir le pot, d’une capacitĂ© de 12 litres environ. Deux ans plus 
tard, lorsqu'on procéda au rempotage du kentzia, je pris un échan- 
tillon de la terre dans laquelle avait séjourné le palmier, sans avoir 
reçu aucune espÚce d'engrais. Les deux échantillons de terre ont été 
analysés, et le résultat de cette opération fut le suivant : le poids du 
litre de ces terres Ă©tant trĂšs voisin de 800 er. les 12 litres de terre 
pesaient 95,600 et contenaient respectivement, aux deux Ă©poques 
indiquées, les quantités suivantes de principes nutritifs : 


TERRE 
A — DIFFÉRENCE. 
neuve. epuisee. 
CHAT SEM ER ETATS 1845",3 60:",00 1245r,03 
Acide phosphorique . . 9282 TON 44 ,05 
PORASSO, a Lee etre a M6 7 ,40 4 ,02 
VAI TN CPP TER NEA EE 39 ,4 8 ,64 30 ,76 


On voit, par là, que les quantités de matiÚres minérales fixées par 
le kentzia ou entrainées au dehors par les arrosages (ce qui se pro- 
duit principalement pour la chaux) avaient trĂšs notablement appau- 
vri le sol et rendu nécessaire son renouvellement. Le rempotage est 
donc une pratique trÚs justifiée, non seulement au point de vue de 
l'aĂ©ration des racines, gĂȘnĂ©es, Ă  la longue, par le tassement naturel 
du sol sous l’influence des arrosages, mais, surtout, par le renou- 
vellement de la provision d'Ă©lĂ©ments nutritifs. AppliquĂ©es Ă  d’autres 
vĂ©gĂ©taux, ces analyses comparatives conduisent au mĂȘme rĂ©sultat 
général, avec des variations plus ou moins notables dans les taux des 


1. Études agronomiques. 5° sĂ©rie, 1889-1890, (Hachette et Gic.) 


314 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 
divers principes nutritifs, suivant les exigences particuliĂšres des 
plantes qu’on observe. 

L'opération du rempotage, facile à à exécuter dans une lon 
horticole, est impraticable, ou tout au moins peu commode à réaliser 
dans un appartement. Elle n’est, d’ailleurs, qu'un expĂ©dient, en ce 
qui regarde la famure de la plante, et il est aisĂ© d’y supplĂ©er pen- 
dant un temps fort long, par l'emploi des mélanges nutritifs dont je 
parlerai tout Ă  l'heure. En mesure, grĂące Ă  ces solutions, de fournir 
Ă  la plante, beaucoup mieux que par le renouvellement de la terre, les 
aliments qu’elle rĂ©clame, on peut se borner, dans les appartements, 
à opérer la transplantation des végétaux, lorsque leur développe- 
ment exige le remplacement du pot primitif par un vase de plus 
grande dimension. 

D'une façon générale, on peut dire que les plantes d'appartement 
sont soumises Ă  la ration d’inanition, l’eau Ă©lant l’unique aliment 
qu'on leur donne : l’étiolement, le jaunissement et finalement la 
mort, ne tardent pas ĂȘtre la consĂ©quence de l’absence de fumure Ă  
laquelle sont, d'ordinaire, vouées les fleurs et les plantes vertes qui 
font l’ornement de nos demeures. 

M. P. Wagner, dont j'ai résumé plus haut les importantes re- 
cherches sur la fumure des végétaux horticoles et potagers, a con- 
sacrĂ© plusieurs annĂ©es Ă  l’étude expĂ©rimentale de la fumure des 
plantes en pots. Il s’est proposĂ© de dĂ©terminer, pour les principales 
espùces florales, les exigences alimentaires de chacune d’elles, afin 
d'arriver à formuler un mélange de divers sels répondant à ce double 
but : satisfaire aux exigences moyennes des plantes en potet ne 
contenir que des principes utiles Ă  ces plantes, afin d'Ă©viter, par 
l'emploi répété de cet engrais, l'accumulation, dans le petit volume 
de terre que renferme le pot, de substances inutiles à la végétation 
ou pouvant lui nuire par leur emmagasinement dans la terre. Cette 
derniÚre crainte, qui a engagé M. Wagner à proscrire du mélange 
qu’il emploie les sulfates et le nitrate de soude, par ce motif que 
l’acide sulfurique et la soude, en excùs dans le sol, pourraient 
exercer une action dĂ©favorable sur la plante, semblera peut-ĂȘtre 
exagérée ; mais comme la soude est inutile el que la terre contient 
toujours assez de soufre poar assurer le développement du végétal, 


9 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. DJ F9 


l'exclusion des substances qui apportent l’acide sulfurique et la soude 
ne présente, en tout cas, aucun inconvénient. 

De l’ensemble de nombreux rĂ©sultats obtenus dans les expĂ©riences 
qui comptent plusieurs années de durée el qui ont porté sur les 
plantes d'appartement les plus diverses : rosiers, fuchsias, géra- 
niums, ricin, calla, coleus, palmiers, héliotrope, camélias, azalées, 
gloxinias, etc., M. Wagner est arrivé à considérer, comme étant le 
meilleur engrais, un mĂ©lange composĂ© de nitrate d’ammoniaque, 
de nitrate de polasse et de phosphate d’ammoniaque, renfermant 
pour 100 parties, les proportions suivantes des trois éléments 


fondamentaux : 
Acide phosphorique. . . . . . . . 12 parties. 
POLASSE PARA SRRS ER NRC TELE ALT Are 19 — 


AZOLOL ARE EE CNE M ROSE 17 — 


En partant de la composition des engrais riches que j'ai déjà in- 
diquée, on obtiendra un mélange présentant les teneurs ci-dessus en 
associant les trois sels dans les proportions suivantes : 


Phosphate d'ammoniaque . . . . . . 25 kilogr, 
NJÉTALE Te IDOTASSP EEE EME 45 — 
Nitrate d'ammoniaque . . . . . . . SON 


L'application réguliÚre de ce mélange nutritif aux diverses plantes 
d'appartement a donné, durant les années 1890 et 1891, les meil- 
leurs résultats. La vigueur des végétaux, la belle couleur vert foncé 
de leur feuillage, l'abondance de leurs fleurs, contrastaient singu- 
liĂ©rement avec l'aspect des mĂȘmes plantes Ă©levĂ©es, Ă  titre de compa- 
raison, dans le terreau non fumé. M. Wagner a conclu de ses essais 
que la formule que nous venons de rappeler convient, non seulement 
aux plantes en pot, mais également aux cultures forcées, aux plates- 
bandes, Ă  l'Ă©levage des boutures et aux semis de fleurs. 

C’est seulement pendant l'Ă©tĂ©, d'avril en septembre, qu’il convient 
de fumer les plantes d'appartement et celles de serre froide. A partir 
d'octobre jusqu’à la fin de mars, on ne doit leur donner, si toutefois 
on est conduit Ă  le faire, que de trĂšs faibles doses d'engrais. 

Pour guider les personnes qui voudraient recourir Ă  ce mode de 
fumure des plantes d'appartement, je crois utile de préciser les 


316 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

quanlités du mélange ci-dessus que M. Wagner conseille d'employer, 
d’aprùs la dimension des pots qui contiennent les plantes à fumer. 
Le petit tableau ci-dessous indique les quantités approximatives de 
terre que renferment les pots Ă  fleurs de divers diamĂštres et les doses 
moyennes du mélange à appliquer, dans chaque cas particulier : 


: 0 PRO2 
POIDS DIAMÈTRE DU POT POP ARC 


du mélange. à la partie supéricure!. ja nt pot. 
06,5 10°, 0 300 gr. 
1290 JE 600 
210 1500 1 200 
DO 20 ,0 2 400 
Be) 21000 5 000 


On saupoudre la suface de la terre avec le mélange pulvérulent 
et l’on a soin d’arroser immĂ©diatement aprĂšs, trĂšs lentement et avec 
prĂ©caution, en Ă©vitant que l’eau passe par-dessus les bords du pot. 
Il faut employer assez d’eau, dans cet arrosage, pour dissoudre tout 
le sel déposé à la surface et le faire pénétrer dans la terre. Les 
fumures indiquĂ©es plus haut doivent ĂȘtre, suivant la dimension des 
plantes et leur croissance plus ou moins rapide, répétées toutes les 
quatre ou huit semaines. Il est difficile de donner Ă  priori des indi- 
cations plus rigoureuses sur le renouvellement des fumures, car les 
conditions que présentent les plantes sont trÚs diverses. 

Si l’on a affaire Ă  des vĂ©gĂ©taux Ă  croissance trĂšs lente, aux diffĂ©- 
rentes variĂ©tĂ©s de palmiers et autres plantes vertes qui, dans l’appar- 
tement, reçoivent peu de lumiÚre et, par suite, se développent len- 
tement, on ne doit renouveler la fumure qu’à de longs intervalles, 
tous les deux mois, par exemple, ou moins fréquemment encore. 

Au contraire, les plantes Ă  croissance rapide, telles que les rosiers, 
les fuchsias, les gĂ©raniums, l’hĂ©liotrope, etc., rĂ©clament des famures 
plus fréquentes, à des intervalles de trois semaines, par exemple. 
Les amateurs de fleurs, habituĂ©s Ă  juger d’aprĂšs l'aspect de ces der- 
niÚres, de leur état de santé et de vigueur, apprécieront bientÎt le 
traitement différent à leur donner, suivant la coloration de leur feuil- 
lage, leur port et l'abondance de leur végétation. La chose essentielle 


1. Mesuré en dedans du rebord. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. St 


dont il faut se convaincre, c’est que l’arrosage à l’eau simple ne 
suffit pas pour conserver les plantes qui ornent nos appartements. 
Or, on sait que cet arrosage est, pour ainsi dire, le seul soin qu’on 
regarde, généralement, comme nécessaire pour l'entretien des végé- 
taux en pots. M. E. Roman, inspecteur général des ponts et chaus- 
sées, qui charme les loisirs de sa retraite par la culture des orchidées, 
si curieuses et d’une beautĂ© si Ă©trange parfois, m’a fait connaitre les 
bons rĂ©sultats qu’il obtient, depuis plusieurs annĂ©es, de l'emploi des 
engrais minĂ©raux dans leur culture. L'opinion des Ă©leveurs d’orchi- 
dĂ©es est loin d’ĂȘtre unanime Ă  ce sujet: les uns, et Ă  leur tĂȘte 
M. L. Linden, le directeur si connu des serres du parc Léopold, ré- 
pudient d’une façon absolue toute fumure organique ou minĂ©rale, 
dans l’entretien des orchidĂ©es. D’autres prĂ©conisent l'emploi, en so- 
lution trĂšs Ă©tendue, des engrais organiques, tels que la bouse de 
vache, le guano, etc. M. E. Roman, au contraire, repousse l'emploi 
des fumures organiques, mais il dĂ©clare dans la lettre qu’il m'a fait 
l'honneur de m'écrire, et dans un article récent publié par le Journal 
des OrchidĂ©es, qu’il est nĂ©cessaire de donner de l’engrais minĂ©ral 
aux orchidées et que son emploi, continué dans ses serres depuis 
plusieurs annĂ©es, est couronnĂ© d’un grand succĂšs et dĂ©termine de 
sérieuses modifications dans le mode de végétation de certaines 
d’entre elles. 

Malgré mon incompétence en ce qui concerne cette culture spé- 
ciale, je suis tenté de me ranger à l'opinion de M. E. Roman, sur 
l'utilité des phosphates, des sels alcalins et azotés dans l'élevage des 
orchidées. Il me semble, en tout cas, utile de signaler à l'attention 
des spĂ©cialistes la composition de l’engrais liquide dont M. E. Roman 
proclame l’efficacitĂ©. Je transcris le passage de la lettre de mon ho- 
norable correspondant, relatif à son mode d'opérer. 

« J’emploie, m'Ă©critil, le mĂ©lange de deux solutions salines dont 
voici la composition : 

« La premiÚre dissolution est formée de : 


Phosphate neutre d'ammoniaque . . . . 100 gr. 
Nitrate d'ammoniaque ". . 1. . . 60 
Carbonate d'ammoniaque. . . . . ne 10 
Nitraté: dé DOtASS A SRE MONS DC 5 


MB AIT RON Se APR LA EN PRE 2 litres. 


518 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


« La deuxiÚme dissolution se compose de 45 gr. de silicate de 
polasse liquide (Ă  30° BaumĂ©) dans deux litres d’eau. 

« Ces dissolutions ne doivent pas ĂȘtre employĂ©es pures: dans 
12 litres d’eau on verse 16 gr. de chacune d'elles, ce qui donne un 
liquide contenant environ 1 gr. de mélange de sel (supposé solide) 
pour 7 litres d’eau. Je ne me sers que de ce liquide pour arrosage, 
Ă  l’exclusion de l’eau ordinaire. » 

Il me paraßt cerlain que la faible dose (1/7 000) de sels minéraux 
renfermés dans cette dissolution ne peut occasionner aucun acci- 
dent ; il y aurait donc intĂ©rĂȘt, en prĂ©sence des bons effets que 
M. E. Roman lui a reconnus, Ă  l’expĂ©rimenter dans les serres d’or- 
chidées. 

Il me paraĂźt incontestable, d’aprĂšs tout ce qui prĂ©cĂšde, que l'horti- 
culteur el le floriculleur peuvent attendre de l'emploi des engrais 
commerciaux tout autant de services que la culture proprement dite 
en a reçus Jusqu'ici, et c’est dans la pensĂ©e de stimuler les marai- 
chers, les amateurs de jardins et de fleurs que j'ai, d’une part, cru 
utile de donner de la publicité aux intéressants travaux de la station 
de Darmstadtet, de l’autre, d’instituer dans mon champ d'expĂ©riences 
du Parc des Princes des essais méthodiques sur l'application des fu- 
mures minérales à la culture des légumes, des arbres fruitiers et des 
fleurs. 


V. — VIGNES ET ARBRES FRUITIERS 


Les divers engrais dont j'ai parlé à propos de la culture marai- 
chĂšre et de la fumure des jardins s'appliquent Ă©galement avec succĂšs 
aux arbres fruitiers et Ă  la vigne. J’indiquerai d’abord les mĂ©langes 
recommandés par M. Wagner. 


XVIII. — Fumure des arbres fruitiers. 


M. P. Wagner s'Ă©lĂšve, comme nous l’avons fait nous-mĂȘme prĂ©cĂ©- 
demment, contre l'insuffisance de la fumure des arbres fruitiers. 


LA.FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 319 


Comme nous, il voit dans l'emploi judicieux des engrais un moyen 
trÚs efficace de combattre le dépérissement des arbres de nos jar- 
dins par la sécheresse, les attaques des insectes et les affections 
parasilaires. 

‘ Pour les arbres isolĂ©s, dont la couronne, mesurĂ©e Ă  un demi- 
mĂštre au-dessus des plus hautes branches, couvrirait, par sa pro- 
jection, une surface de 25 mÚtres carrés, il recommande par pied 
d'arbre, la fumure suivante : 

200 gr. superphosphate double ou 1 400 gr. superphosphate Ă  
16 p. 100, 400 gr. chlorure de potassium, 9500 gr. de nitrate de 
soude, ou 570 gr. de phosphate de polasse, 100 gr. de chlorure de 
potassium, 900 gr. de nitrate de soude. 

On rĂ©pand cet engrais sur le sol en novembre ou dans le cƓur de 
l'hiver, on laboure Ă  la bĂȘche, en enfouissant l’engrais Ă  une 
profondeur qui dépend de la nature du terrain et des dimensions 
de l’arbre. 

Pour les vergers, on peut employer, Ă  hectare : 

200 kilogr. superphosphate double ou 550 kilogr. superphosphate 
Ă  16 p. 100, les 160 kilogr. chlorure de potassium, ou 230 kilogr. de 
phosphate de potasse et 40 kilogr. de chlorure de potassium. 

Cette fumure est donnée de novembre à février et, le cas échéant, 
en mars ou avril : on laboure le sol et au printemps on sĂšme, Ă  la 
volée, 200 kilogr. de nitrate de soude. 

Dans les sols abondamment fumés de longue date au fumier de 
ferme, ce qui est fréquemment le cas des jardins particuliers, je re- 
commande tout particuliÚrement l'emploi des scories de déphospho- 
ration au moment de la plantation des arbres fruitiers (voir page 356). 
Dans les mĂȘmes sols, l'introduction du plĂątre dans la couche de 
terre qui avoisine les racines de l'arbre devra donner de bons 
rĂ©sultats : il y a lieu d’aprĂšs les faits constatĂ©s par M. Oberlin, dont 
il sera question plus loin Ă  propos de la fumure de la vigne, d’expĂ©ri- 
menter l’action du plñtre à la dose de 500 gr. à un 1 kilogr. par pied 
d’arbre en sol abondamment pourvu d’élĂ©ments azotĂ©s, par suite de 
l'emploi rĂ©pĂ©tĂ© de famier d’'Ă©table. 


380 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


XIX. — Treilles et vigne. 


La fumure soluble convient particuliùrement aux vignes d’un 
certain ñge et aux arbres fruitiers, jusqu’aux racines desquels il est 
difficile, sinon impossible, de faire pénétrer les engrais minéraux 
insolubles et notamment le phosphate de chaux. 

L’engrais pour jardin trouve donc ici une application rationnelle. 
La vigne aime les sols riches et, sans admettre qu’elle soit aussi peu 
apte Ă  utiliser les engrais peu solubles que paraĂźt le penser M. Wa- 
oner, on doit regarder comme avantageux l’emploi des mĂ©langes 
qui permettent de porter les matiùres fertilisantes jusqu’au contact 
du lacis de racines de vieilles souches. 

Le moyen de faire pénétrer à la profondeur voulue les aliments de 
la plante consiste Ă  donner superficiellement Ă  la vigne une forte 
fumure soluble, dépassant de beaucoup, par sa teneur en éléments 
nutritifs, les besoins annuels de la récolte, feuille et bois compris. 
C’est le procĂ©dĂ© recommandĂ© par M. Wagner qui l’a appliquĂ© avec 
succÚs. Se basant sur les expériences faites jusqu'ici par lui, ou sous 
sa direction, M. P. Wagner propose une sorte de rotation quadrien- 
nale dans l'application des fumures auxquelles il s’est arrĂȘtĂ©. 

Voici les mĂ©langes qu’il recommande et leur rĂ©partition; ces 
quantités se rapportent à un hectare de vigne : 

1°° annĂ©e. — 60 000 kilogr. de fumier et 100 kilogr. de super- 
phosphate double. 

2° annĂ©e. — 150 kilogr. de superphosphate double, 100 kilogr. de 
chlorure de potassium, 120 kilogr. de nitrate de soude; ou 175 ki- 
logr. de phosphate de potasse et 120 kilogr. de nitrate de soude. 

3° annĂ©e. — 150 kilogr. de superphosphate double, 150 kilogr. 
de chlorure de potassium, 150 kilogr. de nitrate de soude ; ou 
175 kilogr. de phosphate de potasse, 50 kilogr. de chlorure de po- 
tassium, 150 kilogr. de nitrate de soude. 

4 annĂ©e. — 150 kilogr. de superphosphate double, 200 kilogr. 
de chlorure de potassium, 150 kilogr. de nitrate de soude ; ou 
175 kilogr. de phosphate de potasse, 100 kilogr. de chlorure de 
potassium, 150 kilogr. de nitrate de soude. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 381 


Le superphosphate, le chlorure de potassium et le phosphate de 
potasse peuvent ĂȘtre rĂ©pandus Ă  l’automne, pendant l'hiver ou au 
printemps à la surface du sol, puis enfouis aussi profondément que 
le permet le mode de labour ou de bĂȘchage en usage dans le vignoble. 
Le nitrate de soude est épandu isolément au mois de mars et aban- 
donnĂ© sur le sol, sans bĂȘchage. La pluie et la rosĂ©e se chargeront 
de lintroduire dans le sol. L’emploi successif des mĂ©langes que 
je viens d'indiquer constitue la fumure de la vigne que M. Wa- 
gner nomme fumure normale. Elle doit, d’aprùs lui, subir quel- 
ques modifications, notamment dans les cas suivants : pour les 
sols bas et humides, la dose de nitrate doit ĂȘtre attĂ©nuĂ©e ; les sols 
secs et en cĂŽte exigeront au contraire, pour les mĂȘmes quantitĂ©s 
d'acide phosphorique et de potasse, une fumure azotée plus abon- 
dante. 

Plus le bois est vigoureux, plus doivent ĂȘtre restreintes les 
quantités de fumier et de nitrate employées, et, inversement, si le 
bois est chétif, il y aura lieu de répéter plus souvent (tous les trois 
ans, par exemple) l'application du fumier d’étable et d'augmenter la 
dose de nitrate. Enfin, dans les parcelles de vignes oĂč la chlorose se 
produit, le plus souvent par suite de la présence à une faible profon- 
deur d’une couche d’argile impermĂ©able, on se trouvera bien d’une 
fumure additionnelle d’un mĂ©lange Ă  parties Ă©gales de nitrate et de 
phosphate de potasse. 

L'emploi du nitrate de soude en viticulture prend, dans le midi 
de la France surtout, un développement marqué et les vignerons 
constatent une augmentation trĂšs notable dans le rendement des 
vignes soumises Ă  ce traitement. Je ne puisrappeler icilesnombreuses 
formules de mĂ©langes d’engrais prĂ©conisĂ©es pour la vigne : je me 
bornerai Ă  insister sur l’importance du rĂŽle de l’azote associĂ© Ă  une 
large fumure phosphatée et, dans un certain nombre de sols, aux 
engrais potassiques. 

MM. Trouchaud-Verdier et Chauzit emploient, dans le Gard, le 
mĂ©lange suivant, Ă  l’hectare : 


Nitraterde soude RS er. 360 kilogr. 
Superphosphate, 0.15 p. 100 . . . 400 — 
Sulfaterde DOfASSE RE ERNN NE. 200 — 


389 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Ils associent avec succĂšs le plĂątre Ă  cette fumure, dans les sols 
riches en azote. 

Les expĂ©riences de M. Oberlin‘' ont mis en relief, de la façon la 
plus nette, les bons effets du plùtre. Les années derniÚres, les résultats 
constalĂ©s par l’éminent viticulteur alsacien ont Ă©tĂ© confirmĂ©s dans le 
Beaujolais par les essais de MM. Battanchon et Condeminal. Le plĂątre, 
à la dose de 2000 à 4 006 kilogr. à l’hectare, augmente trùs notable- 
ment le rendement en vin des vignes plantées en sol abondamment 
pourvu en azote. 

Les doses de nitrate ont été poussées, dans cerlains vignobles du 
Midi, jusqu’à 800 kilogr. et plus à l’hectare ; mais je ne conseille pas 
d'adopter ce mode de faire. D’aprùs les renseignements fournis par 
des viticulteurs d’une compĂ©tence indiscutable, le nitrate de soude, 
à ces doses exagérées, augmente, 1l est vrai, considérablement la 
quantité de vin récolté, mais celui-ci est de qualité et notamment 
de richesse alcoolique trÚs inférieures à celles des vins obtenus la 
mĂȘme annĂ©e dans des vignobles, de tout point comparables, sauf 
que les quantités de nitrate employées étaient bien moindres. 

Il semble qu’on doit considĂ©rer une dose de 300 Ă  409 kilogr. de 
nitrate Ă  l’hectare comme une fumure azotĂ©e trĂšs suffisante et devant 
donner d’excellents rĂ©sultats, tant sous le rapport de la quantitĂ© 
que sous celui de la qualité du vin produit. 

Je terminerai en indiquant la composition d’un mĂ©lange d’engrais 
minéral qui, employé en sol pauvre, sur mes indications, a donné 
de trÚs bons résultats, depuis trois ans, dans différents vignobles 
de l’est de la France, en mĂ©diocre Ă©tat et dont il a trĂšs sensiblement 
accru la production en vin. 


Scories de déphosphoration, . . . . . . . . 1 000 kilogr. 
Ou phosphate minĂ©ral en poudre fine. . 2 000 D. — 
RANGER ES D LE NN OUT POELE Re ER ERET A Ur 1 000 — 
Nitratéade Soude: ser TARA ve Er JOURNEE 
PALTEMONlUGE "SOA ATP ere Ph PE A 1500 — 
SOI MAUNIO IE CAUSE 4 500 ou 3 S00 kilogr. 


représentant, par are, 38 à 48 kilogr, et, par mÚtre carré, 980 à 


1. Voir Études agronomiques. 6° sĂ©rie, 1899-1891, Hachette et Gi, 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 383 


480 gr. de mélange, suivant qu'on emploie les scories ou le phos- 
phate minéral. 

En divisant par le nombre des ceps ou des arbres fruitiers exis- 
tant sur un hectare planté à larges espacements entre chaque arbre 
le poids du mélange (3 800 kilogr.), on aura la quantité moyenne 
d'engrais à mettre en cuvelie au pied de l’arbre dans le voisinage 
du fumier. 

Cette fumure, du prix de 200 fr. enviroĂ  Ă  l’hectare, pourra ĂȘtre 
réduite suivant la richesse naturelle du sol ou l'emploi simultané du 
fumier de ferme, sauf le nitrate, qu’il y aura intĂ©rĂȘt Ă  employer tous 
les ans dans la plupart des cas. Les quantités ci-dessus indiquées de 
phosphate et de sel de potasse suffiront pour plasieurs annĂ©es. L’azote 
peut Ă©galement ĂȘtre donnĂ© aux vignes, parlie sous forme de nitrate, 
partie sous forme d’azote organique, poudrettes riches, fumier de 
ferme, sang desséché, laine, déchets de cuirs, ou laine torréfiée, etc. 

La pratique et les conditions locales modifieront nécessairement 
les proportions d'engrais à employer, le mélange ci-dessus repré- 
sentant un maximun qui aura rarement besoin d’ĂȘtre atteint pour 
assurer un bon rendement. Ă  

En terminant, je crois devoir insister sur le traitement trÚs différent, 
à mon avis, que réclament les vignobles sous le rapport de la fumure, 
suivant la valeur des vins qu'ils produisent. Toutes les vignes, celles 
des grands crus comme celles qui produisent les vins ordinaires, ont 
besoin d'engrais. L’azote, l'acide phosphorique et la potasse sont 
aussi indispensables aux unes qu'aux autres; mais, si l’on envisage 
le but à atteindre qui est, avant tout, la qualité pour les grands vins, 
qui placent la France hors de pair avec tous les pays du monde, 
tandis que la quantité importe non moins autant que la qualité pour 
les vignobles ordinaires, on comprend aisément que le traitement 
qui convient aux derniers ne saurait ĂȘtre appliquĂ© aux premiers. La 
qualité n'est pas compatible avec la quantité, du moins dans certaines 
limites; une fumure exagérée conduisant à une production considé- 
rable nuit certainement à la qualité des vins. Il s'ensuit que les 
vignerons de nos crus célÚbres devront viser à maintenir, par une 
fumure convenable, le rendement de leurs vignes sans chercher Ă  
l’exagĂ©rer. À ce point de vue, l'emploi du plĂątre, qui, d’aprĂšs ce que 


384 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


nous avons dit plus haut, augmente trĂšs notablement le rendement 
des vignes plantĂ©es en sol riche en azote organique, doit ĂȘtre pratiquĂ© 
trĂšs modĂ©rĂ©ment dans les grands crus, si Lant est qu'il y doive ĂȘtre 
introduit, tandis que, dans les crus moyens ou médiocres, 1l pourra 
ĂȘtre d’une grande utilitĂ© au point de vue du produit brut de la vigne. 

Les propriétaires des grands crus de Bourgogne, du Bordelais et 
de la Champagne risqueraient de tuer la poule aux Ɠufs d’or, en 
exagérant les fumures. 

Les cultures arbustives autres que les fruitiers et la vigne, hou- 
blons, oseraies, etc., ont sensiblement les mĂȘmes exigences que ces 
derniers et les fumures indiquĂ©es prĂ©cĂ©demment peuvent leur ĂȘtre 
appliquées avec succÚs. 

Les oliviers, amandiers et autres arbustes du sud de l’Europe sont 
trop souvent délaissés sous le rapport de la fumure. 

L'emploi des phosphates minéraux et des scories de déphospho- 
ration dans les sols siliceux, celui des superphosphates dans les 
terrains calcaires, associésaux engraisazotés, tourteaux oléagineux ou 
fumier, n’est pas moins efficace pour ces arbustes que pour la vigne. 


VI, — PRAIRIES NATURELLES. 


C’est une erreur absolue, beaucoup trop rĂ©pandue encore chez 
certains cultivateurs, de considérer comme inutile, de fumer les 
prairies. L'alimentation du bétail sera d'autant meilleure et les 
rendements en foin d'autant plus élevés, que les prés seront mieux 
entretenus et fumés. L'idéal serait de pouvoir concentrer, dans une 
exploitation, les fumures intensives sur les prairies, de maniĂšre Ă  
récolter beaucoup de fourrage, ce qui permettrait d'élever ou de 
nourrir beaucoup de bétail et de produire beaucoup de fumier. 

La garniture de la prairie est d’autant plus abondante que le sol 
est mieux pourvu en éléments minéraux assimilables et notamment 
en acide phosphorique. 

Les deux matiĂšres fertilisantes par excellence pour les prairies, 
et notamment pour celles qui sont déjà anciennes, sont les phosphates 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 389 


el les sels de potasse (kaïnite). Si l’on recourt à l'emploi du nitrate 
de soude, il ne faut pas en exagĂ©rer la dose : 60 Ă  80 kilogr. Ă  l’hec- 
tare suffisent en général. Les légumineuses, qui forment la garniture 
de la prairie, puisent dans l'air azote nécessaire à leur nutrition, 
mais cette assimilation de l'azote gazeux n’a lieu qu’autant que les 
plantes rencontrent dans le sol une quantitĂ© suffisante d’acide phos- 
phorique, de potasse, etc. 

Une fumure annuelle à l’automne ou à la fin de l’hiver, de 600 à 
1 000 kilogr, de scories de déphosphoration et de 400 à 500 kilogr. 
de kaïnite, si le sol manque de potasse, est tout à fait rémunératrice, 
dans la plupart des cas. La dĂ©pense qu’occasionne cette fumure est 
à l’hectare de 55 à 80 fr. L’acide phosphorique transforme la nature 
d’une prairie, en permettant le dĂ©veloppement des lĂ©gumineuses, 
trĂšfle blanc, etc., dont les graines enfouies dans le sol ne se montrent 
que sous l’influence de la fumure phosphatĂ©e. On se trouve parti- 
culiĂšrement bien de l'emploi des sels de potasse pour la fumure des 
prairies humides. 

On double parfois le rendement en foin et en regain d’une vieille 
prairie, par l'apport de quantités convenables de phosphate et de 
polasse. 

Contrairement au prĂ©jugĂ©, trop rĂ©pandu encore, que l’herbe doit 
pousser sans fumure, les cultivateurs ont donc tout intĂ©rĂȘt Ă  faire 
une large part aux prairies dans la rĂ©partition des engrais et c’est, 
dans le plus grand nombre des cas, Ă  la fumure minĂ©rale qu’ils 
devront recourir, réservant pour les terres en culture le fumier 
d’étable, presque partout produit en quantitĂ© insuffisante pour sub- 
venir aux exigences des champs. 


VII —— LES ENGRAIS COMMERCIAUX 


XX. — Indications sommaires sur la composition, le mode 
d'achat et le contrĂŽle des engrais. 


Les engrais commerciaux, complémentaires du fumier de ferme, 
ĂŒrent leur valeur de leur richesse en azote, acide phosphorique, 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 25 


386 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


potasse et magnésie. Leur prix est basé, à la fois, sur leur teneur en 
l’un ou plusieurs de ces principes fertilisants et sur l’état chimique 
de chacun de ceux-ci dans l’engrais considĂ©rĂ©. 

Pour compléter les renseignements pratiques que j'ai cherché à 
condenser dans cette Ă©tude, touchant l’emploi des engrais commer- 
ciaux, je crois utile de rappeler sommairement la composition des 
principales matiùres fertilisantes qu’on trouve dans le commerce, les 
prĂ©cautions dont l’agriculteur doit s’entourer pour leur achat et les 
moyens simples auxquels il doit recourir pour Ă©viter d’ĂȘtre trompĂ© 
sur la nature et le prix de vente des engrais. 

Je suivrai dans cet exposé la classification suivante : 1° engrais 
azotés; Ÿ engrais phosphatés; 8 engrais polassiques; 4° engrais 
mixtes, c’est-à-dire contenant plus d’un principe fertilisant. 


1° Engrais azotĂ©s”'. 


Nitrale de soude. — À l’état de puretĂ©, renferme 16.47 d’azote; 
le nitrate du commerce à 95 p. 100 de pureté correspond à 15.60 
d’azote environ. 

Sulfate d’ammoniaque. — Pur, contient 21.21 p. 100 d’azote ; le 
sulfate de commerce en renferme de 20 Ă  20.6 p. 100. 

Nitrate d'ammoniaque. — Pur, contient 38.8 p. 100 d’azote ; le 
nitrate du commerce en renferme de 30 Ă  33 p. 100. 

Sang dessĂ©chĂ© moulu. — Titre de 11 Ă  15 p. 100 d'azote orga- 
nique. 

Corne torrĂ©fiĂ©e moulue. — Titre de 15 Ă  15 p. 100 d’azote orga- 
nique. 

Laine, cuir, ete. — Titrant de 9 à 13 p. 100 d'azote. 


2 Engrais phosphaltés. 


La teneur en acide phosphorique varie de 10 Ă  50 p. 100 dans les 
engrais phosphatĂ©s que livre l’industrie. 

Phosphales minéraux bruts (phosphates naturels en poudre fine) 
contiennent de 44 Ă  37 p. 100; mais les phosphates d’un titre supĂ©- 


{. Leur valeur dépend uniquement de leur teneur en azote. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 387 


rieur à 23 ou 24 p. 100 sont généralement employés à la fabrication 
des superphosphates, tous ceux d’un titre infĂ©rieur Ă  24 Ă©tant plus 
particuliĂšrement uulisĂ©s directement par l’agriculture. Le degrĂ© de 
finesse de la mouture des phosphates importe beaucoup. 

Superphosphates (phosphate naturel ou poudre d’os traitĂ©s par 
l'acide sulfurique); ils sont de richesse trĂšs variable en acide phos- 
phorique ; les superphosphates doubles contiennent de 45 Ă  50 p.100 
d'acide phosphorique ; les superphosphates ordinaires en renferment 
de 10 Ă  20 p. 100. Il y a toujours intĂ©rĂȘt Ă  acheter des superphos- 
phates Ă  haut titre, puisque le transport de la matiĂšre inerte grĂšve 
d’autant plus le prix de l'acide phosphorique que l’engrais renferme 
de ce dernier une moindre proportion. 

Scories de déphosphoration renfermant, suivant leur provenance, 
de 14 à 22 p. 100 d’acide phosphorique et de 45 à 55 p. 100 de 
chaux trÚs assimilable. Comme pour le phosphate naturel, le degré 
de finesse des scories a une grande importance au point de vue de 
la rapidité de son utilisation pour les plantes. On doit exiger des 
vendeurs la garantie de teneur en poudre fine (75 Ă  80 p. 100). 

Noir d'os de raffinerie (29 p.100 d’acide phosphorique) ; la poudre 
d'os et la tournure d’os contiennent de 22 à 26 p. 100 d’acide phos- 
phorique, suivant qualité. 


Calcul de la teneur en acide phosphorique d'un phosphate. —Une 
simple opĂ©ration arithmĂ©tique permet d’établir la richesse en acide 
phosphorique d’une matiùre dont on connaüt la teneur en phosphate 
tribasique de chaux. Il suffit de diviser le poids du phosphate de 
chaux contenu dans 100 parties d’engrais par le nombre 2,183 pour 
obtenir le taux centésimal de cet engrais en acide phosphorique pur ; 
inversement, pour connaĂźtre le poids de phosphate tribasique de 
chaux auquel correspond une teneur donnĂ©e d’un engrais en acide 
phosphorique, on multiplie, par le mĂȘme nombre 2,183, le taux 
d'acide phosphorique. 

Exemple : 1° On a acheté 100 kilogr. de superphosphate à 18 p.100 
d'acide phosphorique, on demande à quelle quantité de phosphate 
tribasique de chaux correspond le superphosphate. 

RĂ©ponse : 18 X 2,183 — 39.29 p. 100 de phosphate tribasique pur. 


388 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


2° On a acheté une tonne de phosphate minéral en poudre avec 
une garantie de 65 p. 100 de phosphate pur. On demande combien 
ce phosphate renferme d’acide phosphorique pur. 


RĂ©ponse : — 29.7 p. 100 d'acide phosphorique. 


65 
2,183 
3° Engrais potassiques. 


Le chlorure de potassium pour engrais renferme de 48 Ă  50 p. 100 
ce potasse pure. Le sulfate de potasse contient de 48 Ă  51 p. 100 de 
cette base. 


4 Engrais mixtes. 


Je donne le nom d'engrais mixtes aux substances naturelles qui 
contiennent plusieurs éléments fertilisants. (Acide phosphorique, 
azote, potasse et magnésie.) Nous allons énumérer les plus impor- 
tants de ces engrais. 

4° Phosphate de potasse. — I contient 36 p. 100 d’acide phos- 
phorique et 27 p. 100 de potasse. Il est entiùrement soluble à l’eau. 

% Phosphate d'ammoniaque. — I renferme 46 p. 100 d’acide 
phosphorique et 7 p. 100 d’azote. 

Ces deux sels, et notamment le phosphate de potasse, peuvent 
ĂȘtre utilement employĂ©s en couverture, au printemps, dans le cas oĂč 
l’on voudrait, Ă  cette Ă©poque, donner de l’acide phosphorique Ă  un 
sol portant une récolte. 

3 Nitrale de potasse. — I contient 44 p. 100 de potasse et 13.6 
p. 100 d’azote. Ces trois matiĂšres, associĂ©es convenablement au 
nitrate de soude et au nitrate d’ammoniaque, constituent les mĂ©- 
langes que j'ai fait connaitre sous le nom d’ Engrais pour jardins 
et Engrais pour fleurs d'appartement et de serre. 

L’engrais pour jardin se vend approximativement aux prix suivants”: 


Parisacaide#lO0NKIIOST EN RE PMP Er S0 fr. sur wagon Paris. 
— DOMINANT LT ESS 45 fr. = 
— LOL PRET et ce 12 fr. = 


et franco dans toutes les gares de France, en colis postal, aux prix 


1. Fabrique de H. et E, Albert, Ă  Biebrich am/Rhein (Allemagne), Ă  Engis (Belgique). 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 389 
de 2 fr. le kilogr. par caisses de 5 kilogr. et 2 fr. 50 par caisses 
de 3 kilogr. 

4° Kaïnile. — Ce sel renferme 12 à 13 p. 100 de potasse et 15 p. 
100 de magnĂ©sie Ă  l’état de sulfate. 

9° Poudrelles el tourleaux organiques des matiÚres fécales. Teneur : 
1 Ă  2 p. 100 d'azote, 2 Ă  6 p. 100 d'acide phosphorique, suivant le 
mode de préparation. | 

6° Tourleaux de graines olĂ©agineuses. — 3 Ă  6 p.100 d'azote orga- 
nique, 1.5 à 2 p. 100 d’acide phosphorique, 2 à 4 p. 100 de potasse. 


XXI — Achat et contrîle des engrais. 


La loi du 4 février 1888 et le rÚglement d'administration publique 
du 10 mai 1889 qui la complÚte, mettent désormais les agriculteurs 
à l'abri des fraudes éhontées dont le commerce des engrais a été 
trop longtemps l’objet. L'organisation de nombreux syndicats agri- 
coles et la multiplication des Stations agronomiques et des labora- 
toires agricoles offrent, en outre, toutes facilités aux cultivateurs de 
se soustraire Ă  la fraude, d'acheter, aux meilleures conditions, des 
engrais de composition bien dĂ©finie et d’en faire vĂ©rifier la valeur et 
la richesse par l’analyse. 

Les cultivateurs qui seront les dupes des nĂ©gociants malhonnĂȘtes 
pe devront donc, Ă  l'avenir, s’en prendre qu’à eux-mĂȘmes, Ă  leur 
crédulité dans les paroles des commis-voyageurs en engrais, dont je 
leur conseille de repousser les offres, présque toujours dolosives 
pour l'acheteur. 

Quel que soit le mode choisi pour l’achat des engrais, il devra 
toujours avoir pour base la garantie Ă©crite du vendeur indiquant : 

1° La richesse en chacun des principes fertilisants (azote, acide 
phosphorique, potasse) rapportĂ©e aux 100 kilogr. d’engrais ; 

2 L'Ă©tat sous lequel l’engrais renferme ces trois corps : azote 
organique, nitrique ou ammoniacal; acide phosphorique soluble ou 
insoluble ; potasse Ă  l’état de sulfate, chlorure ou carbonate ; 

3 L'origine ou l’état naturel de l’engrais (phosphate minĂ©ral, 
phosphate d'os, scories de déphosphoration, ete.). 

Nous conseillons au cultivateur d’acheter les matiùres premiùres 


390 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


de ses famures (nitrate de soude, phosphates, superphosphates, sels 
de potasse, elc.), et de faire lui-mĂȘme Ă  la ferme les mĂ©langes Ă  
rĂ©pandre sur ses terres. Entre autres avantages, ce mode d’achat 
rend la vérification du titre et de la pureté des engrais beaucoup 
plus facile que si l’on a affaire Ă  un mĂ©lange expĂ©diĂ© de l’usine. 

Pour faciliter aux acheteurs la vérification, par un laboratoire 
agricole, du degré de pureté des engrais, je reproduis ci-dessous 
l'instruction que j'ai rédigée pour le prélÚvement des échantillons 
destinĂ©s Ă  l’analyse. En se conformant aux indications relatives aux 
dosages à demander, les expéditeurs d'échantillons d'engrais facilite- 
ront le travail du chimiste auquel ils s’adresseront et Ă©viteront les 
frais d’une analyse complùte. 


Indications Ă  joindre Ă  l'envoi d'Ă©chantillons d'engrais commerciaux 
a analyser. 


Les principales matiĂšres qui servent Ă  Ă©tablir la valeur d’un 
engrais sont les suivantes : 

1° Azole sous trois formes : 

a) Azote organique insoluble ; 
b) Azote ammoniacal ; 
c) Azote nitrique. 
2 Acide phosphorique sous trois formes : 
a) Acide phosphorique soluble dans l’eau ; 
b) Acide phosphorique soluble dans le citrate ; 
c) Acide phosphorique insoluble. 
3° Polasse Ă  l’état de sel soluble : 
a) Chlorure ; 
b) Sulfate ; 
c) Carbonate ; 
d) Nitrate ; 
e) Phosphate. 

Afin de faciliter aux agriculteurs la rédaction de la note dont 
ils doivent accompagner tout envoi, au laboratoire, d'Ă©chantillons Ă  
analyser, je rappellerai, pour chacun des principaux engrais indus- 
triels, les dosages qu’ils doivent indiquer, s'ils dĂ©sirent obtenir une 


391 
analyse complĂšte et pouvant les renseigner exactement sur la valeur 


de ces engrais. Si, par suite de l’arrangement fait avec le vendeur, 
la garantie ne porte que sur une des matiĂšres fertilisantes, l’expĂ©di- 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 


teur pourra se borner Ă  l'indication de cette substance. 


Rnb Ulilhes: traités? por | AephoAnEUnqne soluble dans l'eau, dans 
Laeide sulfurique, \ le citrate, insoluble. 
1, — Superphosphates d'os, ï noir de Acide phosphorique soluble dans l'eau, 
raffinerie, etc . : dans le citrate, insoluble. Azote. 
f Azote total. 
IT. — Guanos traitĂ©s par l'acide sulfu- De an vert GANT MEUS 
niques FNOÉPAOEAAIOX | Azote ar ; 
Azole organique. 
IV. — Phosphorites : scories de dĂ©phos- ete D tuent 
phoration : coprolithes; phosphate Chaus, 
d'os prĂ©citĂ© : cendre d’os 
V. — Poudre d'os; tournure d'os; pou- | Acide phosphorique total, 
drettes; noir de raflinerie; os dégé- Azute-organique. 
latinés. ; 
VI. — Phosphate de potasse. . ; DR ON Her 
VII, — Phosphate d'ammoniaque . . . tu DATE ANS EN 
VIII. — Nitrate de potasse. e Azote nitrique. Potasse. 
IX. — Nitrate de soude. . 4 Azote nitrique. 
X. — Sulfate d'ammoniaque. HA Azote ammoniacal. 
XI. — Laine. DĂ©chets de draps. Gone | 
Cuir. Sang dĂ©ssĂ©chĂ©. — DĂ©bris ani- ? Azote total. 
maux . : \ : 
XIT, — Cendre de PS #e nie) de Acide phosphorique totai. 
tourbe . : ‘ dis Potasse. 
XIII. — Sels de AS M ouee si ce | 
sont des chlorures, sulfates, carbo- } Potasse. 
nates, salins de betterave, etc. . . | 
Acide phosphorique total. 
XIV, — Tourteaux . . 4 Azote. 
Potasse. 
Acide phosphorique total. 
XV.— Engrais pour jardins et pour }) Azote nitrique. 
fleurs . ! | Azote ammoniacal. 
Potasse. 


NATURE 
des engrais industriels. 


I. — Superphosphates minĂ©raux, phos- 


PRINCIPES A DOSER 
pour 
établir la valeur vénale et agricole. 


392 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


XVI. Engrais composĂ©s. — Cette derniĂšre catĂ©gorie peut contenir tous les principes 
nutritifs ; azote et acide phosphorique sous leurs trois formes, et potasse. Il importe 
d'indiquer si ces mélanges sont formés de nitrate de soude ou de potasse comme source 
d'azote; s'ils contiennent du sulfate d'ammoniaque, des superphosphates. ete. 


Nora — Tous les Ă©chantillons d'engrais Ă  analyser doivent ĂȘtre expĂ©diĂ©s dans des 
flacons de verre bien bouchĂ©s. L'envoi dans des sacs en toile oĂč en papier, boĂźtes en 
carton, etc., doit ĂȘtre proscrit, Ă  raison des variations que la matiĂšre Ă  analyser peut 
subir en prenant de l'humidité ou en perdant de l'eau pendant le transport. 


L'analyse du sol est parfois indispensable pour l'application judi- 
cieuse des engrais. Si elle ne permet pas d'apprĂ©cier d’une maniĂšre 
absolue le degrĂ© de fertilitĂ© d’une terre, elle a tout au moins pour 
résultat de faire connaßtre la richesse ou la pauvreté de la terre en 
chacun des principes fertilisants importants, acide phosphorique, 
azote, potasse, chaux et magnésie. Bornée à la recherche et au 
dosage de ces cinq éléments, l'analyse d'une terre suffit généralement 
pour guider trĂšs utilement le cultivateur dans le choix des engrais 
et dans les quantitĂ©s Ă  employer. — L’instruction suivante indique 
comment doivent ĂȘtre prĂ©levĂ©s les Ă©chantillons de sols destinĂ©s Ă  
l'analyse. | 


Instruction sur la prise d'échantillons du sol destinés à l'analyse. 


Il y a deux cas Ă  considĂ©rĂ©r pour un mĂȘme champ : 1° cas d’un 
sol homogùne ; 2° cas d’un sol variable dans son aspect et dans sa 
composition. 

1° Si le sol présente, en ce qui concerne sa conslilution géologique, 
sa fertilité ou son aspect physique, des parties trÚs différentes, il 
sera bon de prélever, dans chacune de ces différentes parties, des 
Ă©chantillons spĂ©ciaux. Cette prise d’essai se fera avec toutes les prĂ©- 
cautions indiquées plus loin. 

2° Si le sol est homogĂšne, s’il appartient dans toute l'Ă©tendue du 
terrain Ă  la mĂȘme formation gĂ©ologique, il suffira de prĂ©lever un 
Ă©chantillon moyen, en observant exactement les indications qui vont 
suivre. 

PrĂ©lĂšvement des Ă©chantillons. — On commence par diviser le 
champ par des diagonales, ou par des lignes transversales dont la 
direction ne saurait ĂȘtre prĂ©cisĂ©e Ă  l'avance, mais que l’inspection 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 393 


de la forme et la configuration extérieure du champ indiqueront 
suffisamment. — Dans les conditions ordinaires d’homogĂ©nĂ©itĂ© (sols 
franchement calcaires, granitiques, argileux, siliceux), il suffit de 
dĂ©terminer une quinzaine de points (par hectare) oĂč devront ĂȘtre 
prélevés les échantillons de terre. 

Ces points une fois dĂ©tĂ©rminĂ©s, on nettoie la surface du sol Ă  l’aide 
d’une pelle, de maniĂšre Ă  Ă©loigner du lieu oĂč l’on prĂ©lĂšvera la terre, 
les détritus qui la couvrent accidentellement, tels que feuilles sÚches, 
fragments de bois, corps étrangers, débris de vaisselle, fer-blanc, 
etc., elc. La place Ă©tant bien propre, sur une surface de 0",50 Ă  
0",60 de cĂŽtĂ©, on pratique, Ă  la bĂȘche, un trou Ă  parois aussi verti- 
cales que possible, en rejetant au dehors la terre qu’on extrait de cette 
petite fosse. La longueur du trou doit ĂȘtre environ 0",40 ; sa largeur 
est dĂ©terminĂ©e par celle de l'instrument qu’on emploie ; quant Ă  sa 
profondeur, elle varie avec celle des labours en usage dans le pays; 
la couche de terre arable est, en effet, celle qui constitue le sol pro- 
prement dit, et ne doit pas ĂȘtre mĂ©langĂ©e, dans l’échantillonnage, 
avec la terre du sous-sol. Lorsque la fosse est complÚtement neltoyée, 
on enlĂšve, par tranches verticales, Ă  la bĂȘche, des couches paral- 
lĂšles, en pratiquant un nombre suffisant de sections perpendiculaires, 
pour extraire environ 4 Ă  5 kilogr. de terre. Au soruir de la fosse, 
la terre est dĂ©posĂ©e sur une petite bĂąche en toile dont s’est muni 
l’opĂ©rateur. 

On répÚte ce prélÚvement d'échantillons sur autant de points du 
champ qu'il est nécessaire pour obtenir une représentation aussi 
exacte que possible de sa composition moyenne. On réunit ensuite, 
sur une bĂąche de plus grande dimension, tous les Ă©chantillons de 
terre, on les mĂ©lange aussi intimement que possible avec la bĂȘche 
et l’on prĂ©lĂšve sur la masse un Ă©chantillon moyen du poids de 4 Ă  5 
kilogr. environ. On Ă©tale cet Ă©chantillon sur une toile, dans un lieu 
couvert, et on le laisse se ressuyer à l’air. Lorsque la dessiccation est 
suffisante, la terre est mise dans un sac ou mieux dans un vase en 
terre et soigneusement étiquetée. 

Durant le mélange des divers échantillons sur la bùche, on a écarté 
les pierres et les cailloux qui dépassent le volume d'une noix, en 
nolant approximalivement leur nombre, relativement Ă  un poĂŻds 


394 . ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


donné de terre, leur grosseur et leur nature géologique et chimique 
(calcaire, siliceuse, etc). 

On procĂšde ensuite, exactement de la mĂȘme maniĂšre et avec les 
mĂȘmes prĂ©cautions, Ă  la prise d'Ă©chantillons du sous-sol, en utili- 
sant les petites fosses faite en vue du prĂ©lĂšvement du sol. — La 
nature, l'aspect et la disposition des couches indiquent Ă  quelle pro- 
fondeur il faut prélever le sous-sol; en général, une profondeur 
égale à celle du sol cultivé suffit. Si la couche arable a 0",15 de 
profondeur, on prĂ©lĂšvera le sous-sol sur la mĂȘme profondeur. La 
profondeur à laquelle pénÚtrent les racines des plantes récoltées 
dans le terrain fournit aussi une indication précieuse. 

Quand :il s’agit de sols forestiers, le sous-sol doit ĂȘtre recueilli 
entre 0", 40 et 0",50 au-dessous du plan oĂč s'Ă©tendent ou pĂ©nĂštrent 
les racines. Un peu de coup d’Ɠil et d'habitude renseignent d’ailleurs 
trĂšs vite Ă  ce sujet. 


DOCUMENTS A CONSULTER 


I. — Établissement de champs de dĂ©monstration. 


Aucune dissertation ne vaut, pour Ă©difier les cultivateurs, sur le 
profit que peut donner l'application judicieuse des engrais, la vue 
d’un champ, convenablement traitĂ© et fumĂ©, situĂ© Ă  cĂŽtĂ© d’une par- 
celle de mĂȘme Ă©tendue, cultivĂ©e et famĂ©e suivant la routine du pay- 
san de la localité. Les associations et les syndicats agricoles, les 
grands propriétaires doivent prendre l'initiative de la création de 
champs de démonstration pour lesquels ils sont certains de rencontrer 
le concours pécuniaire du Gouvernement, s'ils lui font appel en se 
conformant aux rĂšgles qui ont Ă©tĂ© posĂ©es par le ministĂšre de l’agri- 
culture. 

La premiĂšre observation sur laquelle je ne saurais trop insister 
est la définition exacte du but que doivent se proposer les organisa- 
teurs d’un champ de dĂ©monstration. 

Il rÚgne à ce sujet une confusion déplorable dans l'esprit de beau- 
coup d'hommes animés des meilleures intentions. Gette confusion a 
pour conséquence de fausser entiÚrement l'institution excellente à 
laquelle le ministùre de l’agriculture attache, à juste titre, une 
grande importance au point de vue du progrĂšs de notre agriculture : 
elle conduit finalement à un résultat diamétralement opposé à celui 
que poursuivent les organisateurs de ces champs. 

La distinction la plus tranchée existe entre le champ d'expériences 
et le champ de démonstration. Le premier a pour objet l'étude 
expérimentale de divers modes de fumure, de diverses méthodes de 
culture, de différentes semences, appliquées à une plante quelconque 
de grande culture. Les tùtonnements, les divergences dans les ré- 
sultats, les insuccĂšs mĂȘme sont autant de conditions insĂ©parables de 


= 


396 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


l'expérimentation; ils portent avec eux leurs enseignements, mais 
ne sauraient ĂȘtre placĂ©s sans commentaires sous les veux des culti- 
vaieurs. 

Les champs de démonstration, au contraire, ne doivent laisser aux 
rĂ©sultats qu’on en attend d’autres alĂ©as que l'influence des conditions 
climatologiques de l’annĂ©e, qui Ă©chappent entiĂšrement Ă  l’action de 
l’homme. Ils ont pour but de dĂ©montrer les rĂ©sultats acquis dans les 
champs d’expĂ©riences ou dans la pratique agricole la mieux entendue 
de la rĂ©gion. C’est donc uniquement la reproduction de faits acquis 
par lexpérience et par la pratique intelligente, concernant le choix 
de telle ou telle variĂ©tĂ© de graine prolifique, s’il s’agit de semences, 
de telle ou telle matiĂšre fertilisante, la plus avantageuse pour une 
rĂ©colte donnĂ©e, s’il s’agit d'engrais, que les champs de dĂ©monstration 
ont pour objet unique de mettre sous les yeux des cultivateurs du pays. 

À part les cas de force majeure, les rĂ©sultats des champs de dĂ©- 
monstration doivent toujours Ă©tre bons ; ceux qu’on obtient dans les 
champs d'expĂ©riences peuvent ĂȘtre bons, mĂ©diocres ou mauvais, 
puisqu'ils ont pour objet l'Ă©tude d’un procĂ©dĂ©, d’une semence ou d’un 
engrais NOUVEAUX. 

C’est pour avoir trop souvent confondu dĂ©monstration avec expĂ©- 
rience que l’on a fait fausse route. 

L'insuccĂšs d’un champ de dĂ©monstralion mal compris porte Le plus 
grand préjudice à la propagation des vérités qu'il s'agissait de démon- 
trer Ă  son aide. OĂč doit done instituer un champ de dĂ©monstration 
uniquement en vue de mettre en évidence les résultats acquis et non 
pour résoudre tel ou tel problÚme agronomique. Aux directeurs des 
Slalions agronomiques appartient l'organisation et la direction de 
champs d'expériences ; aux professeurs départementaux, aux prali- 
ciens Ă©mĂ©rites d’une rĂ©gion, la crĂ©ation de champs de dĂ©monstration 
oĂč ils appliqueront les procĂ©dĂ©s, les semences et les engrais dont la 
valeur leur est connue Ă  l'avance. 

C'est dans cet ordre d'idées qu'il y a lieu d'instituer le plus grand 
nombre de champs de démonstration de la valeur agricole du nitrate 
de soude associĂ© ou non, suivant l’état du terrain et les ressources 
dont on dispose, au fumier de ferme, aux phosphates et Ă  la po- 
tasse. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 397 

Les principales rÚgles à suivre pour la création de ces champs de 
dĂ©monslration me paraissent ĂȘtre les suivantes : 

Choix d’un terrain situĂ© dans un lieu frĂ©quentĂ©, d’un accĂšs facile. 
Division du terrain (1 hectare, au maximun, suffit) en deux parties 
égales, d'orientation identique, séparées par un sentier de 0Ÿ,80 à 
1 mĂštre. — Mise en Ă©tat de l’une des pareclles par les procĂ©dĂ©s de 
culture reconnus les meilleurs dans la localitĂ© d’aprĂšs la nature du 
terrain; culture de la deuxiĂšme parcelle Ă  la mode des paysans du 
pays. 

Fumure de l’une des parcelles suivant la mĂ©thode des paysans, 
comme nature d'engrais et comme quantité de fumure. 

Fumure de l’autre parcelle avec le mĂ©lange de nitrate et de phos- 
phale qu’on aura fixĂ©, d’aprĂšs les rĂ©sultats obtenus dans la rĂ©gion, 
200 kilogr. de nitrate, par exemple, et 60 kilogr. d’acide phospho- 
rique ou tout autre mélange d'efficacité reconnue. 

Ensemencement du champ, le mĂȘme jour, avec la mĂȘme semence 
dans les deux parcelles. 

En opérant ainsi, on aura modifié deux conditions : celles de la 
mise en Ă©tat du sol et de la fumure de la terre. Si l’on dispose d’un 
espace double de terrain, on pourra répéter la démonstration, en ne 
faisant valoir qu’une seule condition, la fumure ; il suffira, pour cela, 
de donner la mĂȘme culture aux deux parcelles. 

L'objectif qu’on ne doit pas perdre de vue est d’assurer le rĂ©sul- 
tat de la dĂ©monstration qu’on se propose ; ilne s’agit donc nullement 
de faire une expĂ©rience, mais de montrer l'effet d’une fumure expe- 
rimentée ailleurs. 

Les insuccùs auxquels ont conduit, d’une part, la falsification des 
engrais minĂ©raux, de l’autre, leur emploi dĂ©fectueux, ont eu la plus 
fùcheuse influence ; ils ont jeté, sur une pratique excellente en soi, 
une dĂ©faveur qu’il est trĂšs difficile de dĂ©truire dans l'esprit des petits 
cultivateurs, que le résultat final seul a frappé. 

On retomberait dans le mĂȘme danger en instituant des champs 
d'expériences au lieu et à la place de champs de démonstration, le 
succĂšs, c’est-Ă -dire l’accroissement de rĂ©colte, dans l'espĂšce, Ă©tant 
la condition sine qu& non pour porter la conviction dans l’esprit de 
nos laborieux paysans qui n’ont ni le loisir ni l’instruction suffisante 


398 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


pour discuter les rĂ©sultats d’une expĂ©rience, mais que le doublement 
d’un rendement de la rĂ©colte ne saurait laisser de convaincre rapide- 
ment. 


II. — Lettres de MM. Pozzi-Escot et G. Dethan. 


Mont-de-Nérac, par Bergerac, le 10 août 1890. 
Monsieur, 


J'ai suivi, dĂšs le dĂ©but, avec un puissant intĂ©rĂȘt, la campagne que vous 
avez entreprise dans vos belles Études agronomiques en faveur de la culture 
rémunératrice du blé en France ; non pas tant que la question me touchùt 
personnellement, puisque je m'occupe surtout de viticulture, que parce 
qu’il se trouvait prĂ©cisĂ©ment que ce que vous Ă©tablissez avec tant de force : 
qu'il est possible, sans protection douaniÚre, de produire avec bénéfice, 
en France, des céréales, à condition de les cultiver intensivement, mais 
Ă  cette condition seulement, s'applique absolument aussi Ă  la culture de 
la vigne et Ă  ses conditions nouvelles. 

Vous veniez ainsi confirmer, avec toute l'autorité qui s'attache à votre 
nom, une thÚse qui m'était chÚre et dont je m'efforce de démontrer la 
vérité, autour de moi, par les résultats de mon vignoble. 

Rien, vous le comprenez, ne pouvait m'intéresser davantage. 

J'avais déjà emplové les scories dans mes vignes, en remplacement 
du phosphate précipité, depuis que vous les aviez signalées comme source 
économique d'acide phosphorique et je m'en était fort bien trouvé. En 
1883 donc, me trouvant avoir une piÚce de vigne détruite par le phylloxéra, 
de 80 ares environ, que je ne voulais pas replanter encore, je résolus 
d'y essayer la culture des céréales, avec les scories et le nitrate de soude. 

J'ai cultivĂ© sur cette terre, en 1888 et 1889, du blĂ© et de l’avoine, sans 
autre fumure que 1000 kilogr. de scories 16/20 et 250 kilogr. de nitrate 
de soude, à l’'hectare. 

Cette terre, en coteau élevé, trÚs sec, silicéo-argileux, de qualité à 
peine moyenne, et qui de temps immémorial portait de la vigne sans avoir 
jamais reçu de fumure, ensemencĂ©e aprĂšs un seul labour, m’a donnĂ© un 
rendement supérieur à celui obtenu dans les meilleures terres à blé de la 
riche plaine de Bergerac, avec la culture du pays. 

Je n’ai pas, Ha lhedr ments le chiffre exact du rendement de ces 
premiĂšres expĂ©riences, mais je suis, je vous l’affirme, au-dessous de la 
vĂ©ritĂ©, en l’estimant d’un quart supĂ©rieure Ă  la moyenne la plus Ă©levĂ©e du 
pays. Les variĂ©tĂ©s ensemencĂ©es Ă©taient le blĂ© barbu et l’avoine noire du 
pays. 

Je voulus aussi, l'an dernier, faire un essai de culture en ligne Ă  grand 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 399 


espacement, suivant la méthode du major Hallett. Je semai donc en ligne, 
à la main, sur une étendue de 2 ares environ, les variétés de blé suivantes 
que je m'étais procurées dans la maison Vilmorin : Shireff square-head ; 
Dattel- Hickling-Hallett’s pedigree rouge, et, comme point de comparaison, 
blé barbu de pays. 

Le semis fut fait le 8 octobre 1888, Ă  25 centimĂštres, en tout sens. Au 
labour précédent de la semaille, j'avais répandu, à la volée, des scories, 
Ă  la dose de 1 000 kilogr. En mars, je semai 150 kilogr. seulement de 
nitrate de soude. Comme le semis avait été fait dans un jardin fumé de 
longue date, je craignais de provoquer la verse en mettant une plus forte 
proportion de nitrate. 

Le semis leva bien, talla énormément, et au moment de la floraison, 
ces blés étaient aussi fournis que ceux semés à la méthode ordinaire. 
Chose remarquable, la variété du pays le cédait à peine aux variétés amé- 
liorées comme développement de nombre des tiges par pied. 

Les rĂ©sultats de cette expĂ©rience promettaient donc d’ĂȘtre trĂšs intĂ©res- 
sants; malheureusement un trĂšs violent orage, dans les derniers jours de 
juin 1889, occasionna la verse complĂšte de mon petit champ; les oiseaux 
se jetÚrent dessus, dévorÚrent les épis, et il me fut imposssible d'obtenir 
un chiffre de rendement de quelque exactitude. 

Néanmoins, encouragé par les résultats du semis clair en ligne que 
J'avais pu apprĂ©cier jusqu’à un certain point, malgrĂ© l’accident survenu Ă  mon 
champ d'expérience, je résolus de semer encore en blé, pour la troisiÚme 
fois consécutive, ma piÚce de vigne arrachée. 

N'ayant pas de semoir Ă  ma disposition et ne pouvant songer Ă  semer Ă  
la main une Ă©tendue aussi considĂ©rable, je cherchai Ă  obtenir d’une 
autre façon, à peu prÚs le résultat du semis en ligne, et voici comment 
jy parvins : Au lieu de labourer en billon, suivant la coutume locale, je 
fis labourer, à plat, en planches, et je fis répandre la semence, trÚs clair 
et seulement dans le sens du labour, au lieu de la jeter, comme cela se 
pratique habituellement, de cÎté, en lui faisant décrire une parabole; 
puis on hersa en long. 

De cette façon, l’aspect de mes blĂ©s, aprĂšs la levĂ©e, Ă©tait presque celui 
de blĂ©s semĂ©s au semoir en ligne. L’écartement des pieds sur la ligne 
n'était pas aussi régulier, cela va de soi, mais la distance entre les lignes'ne 
laissait guÚre rien à désirer, celle-ci correspondant à chaque trait de charrue. 

On employa 150 litres seulement de semence à l’hectare ; la semaille 
fut faite le 7 octobre 1889. Le blé semé était de la variété Kissengland et 
m'avait été vendu par le Syndicat libre des agriculteurs de la Dordogne. 

Comme les années précédentes, la lerre avait reçu 1 000 kilogr. de 
scories à l'hectare, et je fis répandre au printemps (fin mars), 200 kilogr. 
de nitrate de soude Ă  l’hectare. On donna un hersage aprĂšs. Les blĂ©s 


400 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


furent également ésherbés et sarelés à la main, travail rendu facile et peu 
coûteux par le semis trÚs clair et en ligne. 

Ces blés, qui, au début, paraissaient, surtout aux yeux des agriculteurs 
mes voisins, ridiculement clairsemĂ©s, ont tallĂ© Ă©normĂ©ment aprĂšs l’épar- 
dage du nitrate et ont pris un développement absolument inattendu. 

GrĂące Ă  l'influence des scories, sans doute aussi Ă  leur espacement, ils 
n’ont pas versĂ© bien que leur hauteur alteignit, en moyenne, 1,65; beau- 
coup de tiges avaient jusqu’à 1",80, J’ai trouvĂ© des pailles d’un diamĂštre 
de 6 millimĂštres. J’ai comptĂ© sur certains pieds jusqu’à 17 tiges, mais la 
moyenne Ă©lait de 8 Ă  12 par pied. 

Chaque pied portait plusieurs Ă©pis de 10 Ă  #1 centimĂštres de long, 
comptant 55 Ă  60 grains ; il y avait un grand nombre d’épis beaucoup plus 
grands, de 12 à 14 centimùtres, comptant jusqu’à 78 grains. 

J’ai voulu avoir un point de comparaison; j'ai donc cherchĂ© dans le blĂ© 
le mieux réussi que j'ai pu trouver dans la plaine de Bergerac, le plus bel 
Ă©pi qu’on y pĂ»t voir : il mesurait 8 centimĂštres et contenait 39 grains. La 
hauteur du blé était à peine de 1",40 et c'était pourtant un champ excep- 
tionnellement beau ! 

J’ai fini hier de battre ce blĂ©. Le rendement a Ă©tĂ©, pour 80 ares 64 
cenliares : 

Grains, 1968 kilogr.; paille, 4950 kilogr.; ce qui correspond aux 
rendements suivants, à l’hectare : 

Grains, 2440 kilogr. ; paille, 6138 kilogr. 

Ce dernier chiffre surtout m'a vivement frappé. La production de la 
paille est toujours insuffisante par ici. Plus de la moitié des fermes achÚ- 
tent pour litiÚre des bruyÚres et des ajoncs fournis par la partie boisée 
du nord de l'arrondissement, et la dépense occasionnée de ce chef à la 
culture ne laisse pas d’ĂȘtre considĂ©rable, cesliliĂšres Ă©tant vendues un prix 
relativement élevé, soit de 12 à 14 fr. la charretée du poids moyen 
de 1000 kilogr. Le prix de la paille atteint souvent 5 fr. les 100 kilogr. 
et ne descend jamais au-dessous de 4 fr. le quintal, sur le marché de 
Bergerac, oĂč sa vente est Loujours assurĂ©e. Il y a donc pour le cultivateur 
un intĂ©rĂȘt de premier ordre Ă  obtenir, avec un rendement en grains Ă©levĂ©, 
une production de paille aussi considérable que celle que j'ai obtenue, 
susceptible d'accroĂźtre dans une trĂšs notable mesure le revenu net de 
son exploitation. 

Le blé pÚse 81 kilogr. l'hectolitre. 

Les rendements que je viens d’avoir l'honneur de vous faire connaütre 
sont absolument exceptionnels pour ma région; je vous affirme qu'ils ne 
sont jamais atteints dans nos meilleures terres à blé, avec les plus grosses 
fumures au fumier de ferme, qui est seul employé ici. Pour moi, il est 
manifeste qu'ils sont altribuables surtout Ă  l'apport d'acide phosphorique 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 401 


et de nitrate fait Ă  la terre, et, pour une bonne part aussi, au semis trĂšs 
clair que j'ai praliqué. 

Dans une autre parcelle contiguë de 44 ares, que j'ai achetée en sep- 
tembre dernier, vieille vigne phylloxérée arrachée depuis quatre ans et abso- 
lument inculte, j’ai obtenu un rĂ©sultat qui confirme absolument le premier. 

J'ai ensemencĂ© cette parcelle, aprĂšs un seul labour suivi d’un hersage, 
c’est-à-dire dans les plus mauvaises conditions, avec de l’avoine noire du 
pays. Au moment du labour, j'ai fait répandre des scories à raison de 
1000 kilogr., et fin mars, du nitrate Ă  raison de 250 kilogr. Les semailles 
ont été faites tardivement, fin octobre. La récolte, sur ces 44 ares, a été 
de 879 kilogr. de grain et de 2000 kilogr. de paille (191,88 à l’hectare). 

LĂ  encore, l’action des scories et du nitrate est prĂ©pondĂ©rante dans le 
résultat obtenu. 

En effet, en 1887 el 1888, le propriétaire de cette parcelle l'avait, avant 
moi, ensemencĂ©e d’avoine, celle-ci n'avait mĂȘme pas pu Ă©pier et n'avait 
pas Ă©lĂ© rĂ©collĂ©e, n’en valant pas la peine. 

Voici, enfin, un détail bien typique pour qui connaßt le paysan et son 
instinctive horreur pour les pratiques nouvelles! Mon laboureur qui est 
en mĂȘme Lemps propriĂ©taire d’un petit lopin de terre, aprĂšs s'ĂȘtre bien 
rendu compte des résultats obtenus sur ces deux parcelles, est venu me 
prier de lui cĂ©der ce qu’il lui faudra de semence de blĂ© Kissengland, et 
de faire venir pour lui, cette année, avec les miens, quelques sacs de ces 
sels noirs el blancs que j'avais employés. 

Et voilĂ  un converti Ă  la cause des engrais chimiques et des semences 
améliorées. 

J'ai l'intention d’ensemencer encore une quatriĂšme fois, en blĂ©, la 
mĂȘme piĂšce de terre. 

En procédant comme cette année, je veux, de plus, recommencer mon 
expérience de semis à la main, en ligne, à grand espacement. Dans ce 
but, j'ai triĂ© moi-mĂȘme, avant la moisson, 300 des plus beaux Ă©pis dont 
aucun n'a moins de 12 centimĂštres de long; je compte ne prendre sur 
chacun d'eux que les plus beaux grains, et j'espĂšre arriver ainsi Ă  des 
rĂ©sultats curieux. — Si ce nouvel essai peut prĂ©senter pour vous quelque 
intĂ©rĂȘt, je serai heureux de vous en communiquer les rĂ©sultats. 

J'espĂšre, Monsieur, que vous excuserez cette bien longue lettre et me 
pardonnerez la liberté que j'ai prise de vous entretenir de mes essais ; 
il m'a semblĂ©, je l'avoue, que vous ne sauriez en vouloir, mĂȘme Ă  uu 
parfait inconnu, de vous apporter ce qui lui paraĂźt ĂȘtre un argument de 
plus Ă  l'appui de la cause d’un intĂ©rĂȘt, si vĂ©ritablement national, que 
vous avez prise en mains. 

Veuillez, agréer, etc. 

P. Pozzi-Escor. 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893, — 1, 26 


402 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


M. Pozzi-Escot fait des prosélytes autour de lui : quelques passages 
empruntés à sa correspondance intéresseront sans doute nos lecteurs, 
en leur montrant qu’il ne s’agit pas d’un cas isolĂ©, d’une expĂ©rience 
plus ou moins probante, mais bien de procédés de culture économi- 
que des blés suscepubles de généralisation. 

Voici ce que m'Ă©crivit M. Pozzi en m’envoyant les rĂ©sultats de la 
récolte de 1891 : 


Avant de vous faire connaßtre les résultats que j'ai encore obtenus cette 
année dans le sol que vous savez, permettez-moi de vous entretenir de 
ceux qu'ont obtenus les personnes que j'avais dĂ©cidĂ©es, l’an dernier, Ă  
suivre vos conseils. 

M. L. Pothier, propriĂ©taire Ă  Fronsac, par Douville (Dordogne), m’écrit 
le 4 courant : 

€ J’ai fait un essai sur 45 ares qui m'ont produit quinze fois la semence 
dans un terrain médiocre. Il est bon de vous dire que cette petite expé- 
rience a attirĂ© l’attention de plusieurs propriĂ©taires et ils me demandaient 
d’oĂč venait cette diffĂ©rence avec les blĂ©s voisins. D'aprĂšs les explications 
et les conseils que je leur donnai plusieurs en essayeront. J'ajoute qu’à 
l’avenir tout le blĂ© que je ferai venir sera traitĂ© dans les mĂȘmes conditions. » 

M. Pimouquet, propriétaire à Bardesse, commune de Mandacou, canton 
d’Issigeac, m'Ă©crit de son cĂŽtĂ© : 

« Pour me bien rendre compte, j'ai employé les engrais dans différents 
endroits de terres non fumées depuis bien des années et qui donnent 
ordinairement une petite moyenne de paille, mais dont le rendement en 
grain est mĂ©diocre. J’ai employĂ© 100 kilogr. de scories sur une conte- 
nance de 12 Ă  13 ares et, au printemps, du nitrate de soude, Ă  raison de 
200 kilogr. Ă  l’hectare. Le blĂ©, semĂ© Ă  la mode ordinaire du pays, Ă  
beaucoup souffert de la gelée dans toute la piÚce, qui contient environ 
00 ares; mais lĂ  oĂč j'avais employĂ© les scories, il y a eu beaucoup moins 
de mal. Aussi, aprĂšs l’épandage du nitrate, a-t-il pris une vigueur magni- 
fique, et je ne crains pas de dire que, dans cette portion, la récolte était 
triple de ce qu’elle Ă©tait dans le reste de la piĂšce. A cĂŽtĂ©, j'ai employĂ© du 
nitrate sans scories : là, au printemps, le blé a bien pris de la verdeur, 
mais les tiges n’ont pas pris un grand dĂ©veloppement, et, c’est Ă  peine si 
j'ai Ă©tĂ© rĂ©munĂ©rĂ© de la dĂ©pense. Dans d’autres terres de coteau, trĂšs cal- 
caires, qui donnent peu de paille, mais relativement beaucoup de grain, 
le nitrate seul m'a donné de trÚs beaux résultats, mais avec les scories, 
quoique la différence fût moins grande que dans la premiÚre piÚce, le 
rendement a encore été supérieur. Inutile de vous dire que je ferai mon 
possible pour encourager mes voisins à en faire l’essai. 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 403 


« Cette année, notamment, M. BoissiÚre, maire de Monsaguel, que vous 
connaissez sans doute comme un excellent agriculteur, est décidé à 
employer beaucoup de scories et de nitrate. Je ne puis, donc, Monsieur, 
que vous remercier encore d'avoir bien voulu me donner les renseigne- 
ments qui m'ont amenĂ© aux bons rĂ©sultats que j’ai obtenus ». 

Les renseignements verbaux fournis par les intéressés me permeltent 
de vous citer encore les résultats suivants : M. JérÎme Monteil, proprié- 
taire à la Mouline, prùs Bergerac, a obtenu de l’emploi des scories et du 
nitrate des rendements de 17 et 21 pour 1 de semence, suivant les ter- 
rains ; M. Branda, pharmacien à Bergerac, a eu, dans sa propriété de 
Saint-Agne, prÚs Bergerac, en terres, il est vrai, excellentes, de qualité 
similaire à celles de la Graulet, que vous avez analysées, le magnifique 
rendement de 49 hectolitres sur 45 ares (42°!,2 à l’hectare) avec 59 kilogr. 
de semence, soit plus de 28 1/2 pour 1 de semence, (Je lui avais fourni 
pour la semence de mon blé Kissengland sélectionné.) Le blé de M. Branda 
ne pÚse que 76 kilogr. à l'hectolitre, ayant versé ; la quantité de 200 ki- 
logr. de nitrate à l'hectare était, je crois, trop forte, étant donnée la ri- 
chesse natureile du sol. 


M. Pozzi-Escot, en me rendant compte des essais de culture de 
blĂ© dont je viens de parler, m’écrivait ce qui suit : 


Le rendement des céréales a sensiblement baissé dans notre région 
depuis une trentaine d'années. J'ai, comme point de comparaison, les 
notes de culture de mon grand-pĂšre s’appliquant Ă  deux mĂ©tairies de 
40 hectares environ chacune, situées sur la rive gauche de la Dordogne, 
dans la partie la plus fertile de la plaine de Bergerac. 

De 1837 à 1852, le rendement moyen de ces deux métairies était de 
17 hectolitres de blé à l'hectare; il a atteint, dans certaines années, 23 hec- 
tolitres, et parfois il est descendu à 12. J’ai eu occasion de suivre de 
prĂšs le rendement de ces mĂȘmes propriĂ©tĂ©s, sous une autre administra- 
tion, de 4870 Ă  1884. Pendant cette pĂ©riode, le renlement moyen n’a Ă©tĂ© 
que de 45 hectolitres; le plus élevé atteignant 19 hectolitres et le plus 
faible tombant Ă  9 hectolitres. 

Depuis une dizaine d'années, le rendement moyen de celte région me 
paraĂźt ĂȘtre de 14 hectolitres environ pour le froment; de 25 hectolitres 
pour l’avoine; le maximum de 18 hectolitres, pour les blĂ©s, Ă©tant rare- 
ment atteint. Pour l'avoine, les deux extrĂȘmes vont de 30 hectolitres, 
trÚs exceptionnellement, à 15 hectolitres. Le poids de la paille récoltée à 
l’hectare ne dĂ©passe pas 2 000 kilogr. en moyenne. On emploie 225 litres 
de semence à l’hectare. On sùme trop tard, du 15 octobre au 15 no- 
vembre, et presque jamais sur fumure récente, et quelle fumure ! 20 000 


404 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


à 25 000 kilogr. de mauvais fumier, mal fait, pailleux et lavé par les pluies, 
passent pour un maximum que peude cultivateurs se permettent. Les instru- 
ments perfectionnés, semoirs, scarificateurs, etc., font défaut, pas un seul 
des grands propriétaires ne se décidant à les introduire dans leurs exploi- 
tations. Le gros bĂ©tail est rare; en moyenne, il n’atteint pas le chiffre 
d’une bĂȘte pour 3 hectares dans la plaine et beaucoup moins dans le reste 


du pays. 


Ainsi donc, de 17 hectolitres en 1840, le rendement moyen en 
blĂ© est tombĂ© Ă  14 hectolitres Ă  l’hectare, soit 3 hectolitres, ou plus 
de 18 p. 100 de la récolte d'il y a un demi-siÚcle. Ce résultat qui 
n’est pas exclusif au dĂ©partement de la Dordogne, semble con- 
firmer l’opinion que l'Ă©lĂ©vation du rendement moyen du sol fran- 
çais en blĂ© qui, vers 1840, n’atteignait pas 14 hectolitres et qui est 
aujourd’hui Ă  prĂšs de 16, est dĂč bien plus Ă  l'accroissement trĂšs 
notable de nombreuses cultures partielles qu'à l’augmentation de la 
production sur la plus grande partie des terres consacrées à la cul- 
ture du blĂ©. Quoi qu’il en soit de la valeur de cette hypothĂšse, il 
n’est pas douteux que la diminution signalĂ©e par M. Pozzi-Escot tient 
à l’appauvrissement progressif du sol de la Dordogne, par suite de 
la soustraction des matiÚres fertilisantes insuffisamment compensées 
par la médiocre fumure indiquée plus haut. Comme Pa constaté la 
statistique officielle, en 1891, la rĂ©colte moyenne n’a pas dĂ©passĂ©, 
en Dordogne, le chiffre de 10 hectolitres à l’hectare, si tant est 
qu’elle l’ait atteint. (En 1893, elle a Ă©tĂ© de 131,6). 

Voilà donc un département dans lequel on récoltait en moyenne : 


A L'HECTARE. 


ENRNS AOL EAU LAN TURANSPESREE 17 hectolitres. 
Derts80:à41890 LASER IENER 14 — 


et qui n’a donnĂ© en 1891 que 10 hectolitres. 

Les résultats obtenus, depuis quatre ans, à Mont-de-Neyrac, par 
M. Pozzi-Escot, tirent de ces constatations numériques une importance 
toute spéciale. Ils nous apportent, en effet, une démonstration de 
plus d’une vĂ©ritĂ© trop mĂ©connue encore de la plupart de nos petits 
cultivateurs, Ă  savoir qu’on peut, en sol mĂ©diocre, dans une annĂ©e 
mauvaise, obtenir des récoltes trÚs rémunératrices. 

En pareille matiĂšre, on ne saurait trop multiplier les exemples 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 405 


prĂ©cis du succĂšs des bonnes mĂ©thodes culturales. La publication d’un 
extrait de la lettre que m'a adressée M. Georges Dethan, agriculteur 
au chĂąteau de la CĂŽte, me paraĂźt propre Ă  servir trĂšs utilement la 
cause que Je défends avec une persistance rendue chaque jour plus 
tenace, à raison des témoignages nombreux que les cultivateurs 
m'apportent de l’efficacitĂ© des moyens que je voudrais faire pĂ©nĂ©trer 
jusque dans les plus humbles de nos exploitations rurales. 

Parmi les sols qui constituent le territoire français, 1l en est deux 
catégories qui couvrent des superficies immenses : les terres argilo- 
siliceuses et les terres calcaires. Je viens de faire connaßtre les résul- 
tats excellents obtenus en sol de la premiÚre catégorie (silicéo-argi- 
leux) par emploi simultané des phosphates et du nitrate de soude : 
28 à 99 hectolitres de blé en sol pauvre, alors que, par les procédés 
de fumure usités dans le voisinage, on récoltait cette année 6 à 8 
hectolitres seulement. Dans le mĂȘme dĂ©partement, mais en sol fran- 
chement calcaire, M. G. Dethan n’a pas employĂ© avec moins de 
succÚs, en grande culture, les engrais phosphatés et azotés, comme 
on va le voir par sa correspondance. La dissemblance totale de la 
constitution des terres emblavées par MM. Pozzi-Escot et Dethan 
donne aux rapprochements faciles à faire entre les beaux résultats 
qu’ils ont obtenus dans l’une des plus mauvaises annĂ©es que nous ayons 
subies depuis longtemps, un intĂ©rĂȘt considĂ©rable : ils doivent ĂȘtre 
un puissant encouragement pour les cultivateurs désireux de prépa- 
rer, pour les années prochaines, une revanche éclatante sur la cam- 
pagne de 1890-1891. 

Voici ce que m’écrivait M. G. Dethan Ă  la date du 14 octobre 
1891 : 


ChĂąteau de la CĂŽte. par Bourdeilles (Dordogne). 


... Veuillez me permettre de venir vous donner quelques renseigne- 
ments sur les résultats que j'ai obtenus depuis plusieurs années dans une 
autre partie de la Dordogne (dans des terres assez différentes de celles de 
M. Pozzi-Escot, puisque les miennes sont fort chargées en calcaire), en 
opérant sur toute une sole de blé qui comprend chaque année 12 à 
15 hectares. Ceci ne s'applique qu’à une partie de ma propriĂ©tĂ© que 
J'exploite en faire-valoir direct; l’autre partie est cultivĂ©e par des 
métayers qui jusqu'ici s'étaient montrés rebelles aux améliorations et 
innovations. 


406 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Dans la période de 1882 à 1835, nos rendements en blés, obtenus sans 
engrais commerciaux et suivant les procédés de culture usités dans le 
pays, varialent de 81,6 Ă  12 quintaux mĂ©triques de grains Ă  l’hectare, 
moyenne 104,7 (14 hectolitres environ). 

À cette Ă©poque, l'analyse de mes terres dĂ©montra leur insuffisance trĂšs 
nolable en acide phosphorique. Ces terres Ă©lant trĂšs calcaires, l'emploi 
du superphosphate était tout indiqué '. En 1886 et 1887, je commencai 
Ă  employer les superphosphates seuls; les rendements s’élevĂšrent Ă  
12%%,2 en 1886, et Ă  141,7 de grains par hectare l’annĂ©e suivante. A 
partir de la récolte de 1888, j'employai, concurremment avec le super- 
phosphate, du nitrate de soude : la production s’éleva aussitĂŽt, en 1888, 
Ă  19%%,2 de grains Ă  l'hectare; en 1889, annĂ©e oĂč il a plu beaucoup Ă  
l’époque de la floraison, on ne rĂ©colte que 171,30 ; en 1890, on atteint 
214,6. En mĂȘme temps, la rĂ©colte de paille a doublĂ©. Dans la pĂ©riode 
de 1882 Ă  1889, celle-ci Ă©tait de 1 500 kilogr. Ă  2000 kilogr. Ă  l’hectare; 
aujurd’hui elle est de plus de 4000 kilogr. Les blĂ©s, qui avaient 1 mĂštre 
de hauteur, ont maintenant de 1",80 Ă  2 mĂštres. 

J'ai l’habitude de semer mes blĂ©s de bonne heure; actuellement, au 
15 octobre, j'ai plus de la moitiĂ© de mes blĂ©s en terre ; l’annĂ©e derniĂšre, 
Ă  pareille Ă©poque, cette proportion Ă©tait mĂȘme dĂ©passĂ©e. Aussi, la plu- 
part de mes blés ont peu souffert de la température rigoureuse de l'hiver 
dernier, et, cependant, le thermomùtre est descendu ici à — 18°, sans 
neige. Les blés exposés au midi avaient peu souffert; quelques piÚces 
exposées au nord et semées plus tardivement étaient, aprÚs l'hiver, 
plus endommagĂ©es, mais sous l’action de vigoureuses fumures au nitrate 
de soude, répandu dans les pieces les plus atteintes, à la dose de 180 
et mĂšme de 200 kilogr. Ă  l’hectare, le blĂ© a tallĂ© et a repris bon aspect. 
Sur une surface de 12 hectares je n’ai dĂ» rĂ©pandre au printemps qu'un 
hectolitre de semence (blé de Bordeaux semé dans les premiers jours 
de mars). Aussi, malgré cel hiver rigoureux, ma récolte de blé sur mon 
faire-valoir a été, cette année, la meilleure que j'aie jamais eue; dans 
la partie exploitĂ©e par mes mĂ©layers, c’est, au contraire, la plus piteuse 
récolte qu'il ait jamais été donné de voir et, cependant, les terres sont 
situées cÎte à cÎle. 

Un autre flĂ©au de l’annĂ©e a Ă©tĂ© la rouille qui, chez nos mĂ©tayers et chez 


1. J'ai dit, à plusieurs reprises, qu'en général les superphosphates donnent, en sol 
calcaire, de meilleurs résultats que les phosphates minéraux non traités par l'acide 
sulfurique On n'a pas donné jusqu'ici d'explication bien nette de ce fait d'observation 
pratique ; dans certains terrains extra-calcaires on a attribuĂ© l’action des Ssuperphos- 
pha'es à l'absence d’acide sulfurique dans le sol; mais les preuves certaines à l'appui 
de cette interprétation font encore défaut. LG: 


LA FUMURE DES CHAMPS ET DES JARDINS. 407 


nos voisins, Ă  ravagĂ© la plus grande partie des blĂ©s, ne laissant qu’un 
grain petit, ridé, impropre à la semence. Grùce, sans doute, à leur 
précocité, à leur vigueur, les miens ont été préservés : ils étaient mûrs, 
lorsque la rouille s’est produite. 

En résumé, ma récolte, sur une surface totale de 11",74, atteint, 
à l’hectare, une moyenne de 261,08 de grain bien plein. Seulement, 
vu la saison pluvieuse, le blĂ© avait Ă©tĂ© rentrĂ© humide et l’hectolitre de 
grain ne pesait que 79 kilogr., ce qui donne un rendement moyen de 
34,71 par hectare (prĂšs de 21 hectolitres de plus que la moyenne de 
celte année). 

Les principales variétés de blé cultivées ont été : 

Le blé rouge de Bordeaux (sur5"?,43), qui a donné une moyenne de 251,33 
à l’hectare, atteignant dans la meilleure piùce 31%,05 (41"!,4), descendant, 
dans la moins bonne, Ă  191,62. 

Le blé Kissengland, cultivé sur 64 ares, qui a donné 221,05 de grains 
à l’hectare. 

Le mĂȘme blĂ©, mĂ©langĂ© de Bordeaux, cultivĂ© sur 1,51, a atteint 
26 quintaux mĂ©triques Ă  l’hectare. 

Le blé de Bordeaux, en mélange avec le blé Lamed, cultivé sur 
22,50, a fourni 31,44 de grains à l’hectare (42 hectolitres). 

Enfin, le blé jaune à barbe de Desprez de Capelle (Nord), cultivé sur 
82 ares, a donnĂ© 321,01 Ă  l’hectare (prĂšs de 43 hectolitres). 

Les meilleurs rendements ont donc été fournis par le blé jaune à barbe 
Desprez, le mélange de Bordeaux et Lamed, le blé de Bordeaux pur : les 
rendements dĂ©passent 40 hectolitres Ă  l’hectare ou s'approchent beaucoup 
de ce chiffre. 

La quantitĂ© moyenne d’engrais employĂ© a Ă©tĂ© de 4 Ă  600 kilogr. de 
superphosphate (13 p. 100 à 15 p. 100 d’acide phosphorique) par hectare. 
La dose de nitrate a variĂ© de 65 Ă  200 kilogr. par hectare, suivant l’état 
de végétation des différentes piÚces de terre et le degré auquel elles 
avaient Ă©tĂ© Ă©prouvĂ©es par la gelĂ©e. La dose de 200 kilogr. n’a Ă©tĂ© atteinte 
que sur les parties paraissant sérieusement éprouvées. 

Pendant que j’obtenais les chiffres ci-dessus, mes mĂ©tayers avaient une 
rĂ©colte moyenne de 8 hectolitres par hectare : ce pouvait ĂȘtre Ă  peu prĂšs 
la moyenne de la contrĂ©e. (M. G. Dethan a donc rĂ©coltĂ©, Ă  l’hectare, cinq 
fois autant de blé que ses voisins.) 

En comparant les résultats que je viens de vous indiquer avec ceux de 
la pĂ©riode 1882-18%5, on voit que le rendement a plus que doublĂ©; il n’a 
pas encore triplĂ©; mais avec le temps, j'ai l’espoir d’y arriver. Ge rĂ©sultat 
est-il dĂ» entiĂšrement Ă  l'emploi des engrais commerciaux? En grande 
partie; cependant, je dois ajouter que des terres mieux fumées, un meil- 
leur outillage, car tout mon matériel a été renouvelé depuis cette époque, 


408 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE,. : 


l'emploi de charrue, double-brabant, herses Howard, semoir en ligne, 
rouleau Croskill, etc., enfin le sarclage des blés ont dû aussi contribuer à 
cette élévation des rendements. 

Je tenais Ă  vous faire part de ces chiffres, pour vous confirmer, dans la 
mĂȘme rĂ©gion et en grande culture, les rĂ©sullats obtenus pÀùr vos hono- 
rables correspondants sur des champs d’expĂ©rience plus restreints. Je 
voulais prouver que, mĂȘme dans nos terres assez infĂ©rieures et longtemps 
mal entretenues du PĂ©rigord, on pouvait atteindre des rendements qui, 
sans égaler ceux des terres depuis longtemps améliorées du pays nord, 
ne s’en Ă©loignent plus, du moins trop sensiblement. Je serais trĂšs heureux 
si l’apport de mon modeste contingent pouvait ĂȘtre de quelque utilitĂ© 
- à la vulgarisation des procédés de culture que vous ne cessez de recom- 
mander. 


Si l’on rapproche les faits constatĂ©s dans cette lettre de ceux que 
j'ai rapportés précédemment, on est frappé de leur concordance, 
malgé la profonde différence des terres de MM. Pozzi-Escot et 
G. Dethan. 

En sol siliceux, comme en sol calcaire, l’acide phosphorique etle 
nitrate de soude ont donné ou rendu au blé, aprÚs les rigueurs 
extrĂȘmes de l'hiver, une vigueur remarquable permettant Ă  la plante 
de taller, de se développer incomparablement mieux que les blés 
voisins et de résister aux atteintes de la rouille, qui, à Mont-de-Neyrac 
comme à la CÎte, a porté le dernier coup à la récolte des voisins 
de mes correspondants. 180 kilogr. d’acide phosphorique dans le 
cas de l'emploi des scories; moitiĂ© de cette dose environ dans Île 
cas des superphosphates, préférables en sol calcaire, ont suffi, avec 
l’aide de 60 à 200 kilogr. de nitrate (à l’hectare), suivant les al- 
lures de la récolte, à produire des rendements presque égaux à 
ceux des terres de premiÚre qualité du centre ou du nord de Ja 
France, tant en grain qu’en paille. Les rendements obtenus à Mont- 
de-Neyrac sur de petites surfaces ont été atteints el parfois dépassés 
en grande culture à la CÎte; enfin, la densité du grain (poids de 
l’hectolitre) a dĂ©passĂ© de beaucoup, surtout Ă  Mont-de-Neyrac, celle 
des misérables blés de la région. 


L. GRANDEAU. 


ET DES JARDINS. 409 


FUMURE DES CHAMPS 


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DESTRUCTION 


DES 


ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE 


(RONGEURS ET INSECTES) 


PAR LES MALADIES CONTAGIEUSES 


Par Jean DANYSZ 


IMPORTANCE DES PERTES ET ORGANISATION DES MOYENS 
DE DÉFENSE 


Les pertes occasionnées par les animaux nuisibles se chiffrent par 
centaines de millions. Le hannelon et sa larve, le ver blanc, dé- 
truisent annuellement, d’aprĂšs les Ă©valuations de M. L. Grandeau, 
pour 300 millions de francs de récoltes, les mulots et les campagnols 
en enlÚvent presque autant, la noctuelle des moissons el le nématode 
ne laissent rien sur les champs de betteraves; les innombrables 
espÚces de pucerons, dont le phylloxéra est le plus redoutable, ra- 
vagent les vignes et les arbres fruitiers ; le charançon, l’éphestia et 
plusieurs espùces de mites s’attaquent aux grains et aux farines; 
enfin, les champignons parasites, les moisissures, qui s’attaquent 
indifféremment à toutes les substances alimentaires dans les champs 
et dans les magasins, complÚtent la série de ces pertes et ravages, 
dont le Lotal atteint certainement, s’il ne dĂ©passe pas, le quart de 
toutes nos récoltes. 

Abandonner ces richesses aux parasites, c’est perdre en grande 
partie la plus-value en rĂ©coltes que l’agriculture espĂšre obtenir par 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES À L'AGRICULTURE. 4ll 


la culture intensive, et naturellement plus cette culture devient coĂč- 
teuse, plus considĂ©rables et plus sensibles deviennent en mĂȘme temps 
les pertes. 

Ce serait, en effet, une grave erreur que de croire que, dans les 
pays infestĂ©s d’une façon chronique par les campagnols, les vers 
blancs, ou tout autre insecte, on obtiendra des rendements plus 
forts au moyen des semailles plus intenses et des amendements 
appropriĂ©s. Le cultivateur se dit qu’en semant deux quintaux de blĂ© 
par hectare au lieu d’un et en ajoutant au fumier des phosphates et 
des nitrates, il fera la part du feu et obtiendra tout de mĂȘme une 
belle récolte. 

Malheureusement ce raisonnement est loin d’ĂȘtre juste. Les para- 
sites de l’agriculture, les insectes comme les rongeurs, se plaisent 
bien davantage dans les terres fertiles et dans une végétation riche 
et luxuriante que dans les terres maigres oĂč il n’y a que peu de chose 
Ă  manger. 

Les animaux qui vivent aux dépens de nos récoltes se développent 
d'autant mieux et deviennent d'autant plus nombreux qu'ils trouvent 
une nourriture plus abondante, c’est un fait bien reconnu aujour- 
d’hui. D'autre part, la culture rĂ©pĂ©tĂ©e d’une denrĂ©e sur le mĂȘme 
champ favorise le développement de certaines espÚces d'insectes qui, 
trouvant toujours une nourriture abondante, se multiplient d’une 
façon tout à fait anormale. Le bénéfice des cultures intensives de- 
vient ainsi fort souvent illusoire. Il faut donc se défendre contre les 
animaux nuisibles et cette défense, qui amënera la diminution pro- 
gressive des pertes, doit ĂȘtre conduite d'une façon tout aussi mĂ©tho- 
dique, elle mĂ©rite tout autant d'intĂ©rĂȘt et de soins que l’ensemble 
des moyens mis en jeu par l’agricullure moderne pour augmenter le 
rendement de la terre. 

La science met chaque jour entre nos mains des moyens de dé- 
fense nouveaux ; on n’a qu’à les mettre à profit et donner à cette 
dĂ©fense contre les animaux nuisibles l’organisation conforme Ă  l’im- 
portance des intĂ©rĂȘts engagĂ©s. 

Les résultats deviendront certainement trÚs vite appréciables ; 
mais il ne faudrait pas croire pourtant que le mal sera enlevé du 
jour au lendemain comme avec une baguette magique. 


412 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


De mĂȘme que pour amender une terre et en augmenter le rende- 
ment, il faut, pour défendre les récoltes el diminuer les pertes, des 
efforts persistants et soutenus; mais combien peu de chose seront 
ces efforts en comparaison avec le résultat final ! 

Prenons, pour fixer les idées, comme exeïinple une ferme de 50 
hectares de bonnes terres fortes cultivées en blé et en prairies artifi- 
cielles, comme on en rencontre beaucoup dans les départements de 
Est. — Supposons cette ferme infestĂ©e par les campagnols, qui 
causent, au bas mot, une perte moyenne de 20 fr. par hectare, soit 
1 000 fr. par an. Cela fera pour un bail de 12 ans une perte totale 
de 12 000 fr. 

Or, avec une dépense de 5 fr. au maximum par hectare, tous frais 
compris, continuée pendant deux années, on peut détruire tous les 
campagnols et pour toujours. La dépense pour la destruction de ces 
animaux s’élĂšvera donc Ă  250 fr. par an, soit Ă  900 fr. en tout, au 
maximum, Le fermier aura, par conséquent, réalisé de ce chef, au 
bout de 12 années, un bénéfice de 11 000 fr. en chiffres ronds. 

On pourrait en dire autant des vers blancs, des noctuelles, néma- 
todes, etc., dans les champs, des Ă©phestias dans les moulins, des cha- 
rançons dans les greniers el les granges, etc., etc. 

La recherche des movens de destruction des animaux nuisibles est 
une science qui demande tout autant d'application el mérite tout 
autant d'intĂ©rĂȘt que toute autre branche des sciences agronomiques. 
Elle mĂ©rite d’ĂȘtre tout autant rĂ©pandue et vulgarisĂ©e, et, une fois 
bien appliquée, elle permettra au cultivateur de profiter réellement 
des amendements et des amĂ©liorations coĂ»teuses qu’il s’efforce d’in- 
troduire dans la préparation de ses terres pour en augmenter le 
rendement. 


Comme nous le verrons plus loin, les maladies contagieuses 
donnent au cultivateur des moyens de défense bien plus efficaces, 
en mĂȘme temps que plus simples Ă  employer et moins coĂ»teux, que 
tout ce que l’on Ă  prĂ©conisĂ© jusqu’à prĂ©sent pour dĂ©truire les ani- 
maux nuisibles. 

Grñce à l’heureuse initiative de M. Le Moult et aux travaux de 
MM. Giard, Prilleux et Delacroix, on connaĂźt aujourd'hui un champi- 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 413 


gnon parasite qui cause une maladie mortelle aux hannetons et aux 
vers blancs ; d'autre part, une épidémie spontanée que nous avons eu 
l’occasion d'observer chez les campagnols qui infestaient une localitĂ© 
voisine de Paris, nous a permis de trouver et d'Ă©tudier un microbe 
trĂšs virulent pour tous les petits rongeurs connus en France. Des 
travaux trÚs importants et trÚs concluants quant aux résultats obte- 
nus, ont Ă©lĂ© faits sur ces sujets en Russie et aux États-Unis d’AmĂ©- 
rique. Aussi, ayant suivi de trÚs prÚs les expériences et les essais, 
faits jusqu’à prĂ©sent, nous croyons pouvoir affirmer aujourd’hui que 
cette nouvelle mĂ©thode de dĂ©fense Ă  fait ses preuves ; qu’elle peut 
passer définitivement dans le domaine de la pratique et que, bien 
appliquée, elle seule finira par avoir raison de ces terribles ennemis 
de l’agriculture. 


CHAPITRE PREMIER 


LE CHOLÉRA DES RONGEURS NUISIBLES 


(Gampagnols, mulots, souris et rats) 


Les campagnols font le désespoir des cultivateurs depuis que l'on 
cultive la terre. DĂšs la plus haute antiquitĂ©, dans l’ancienne GrĂšce 
surtout, ces petits rongeurs ont acquis une célébrité presque aussi 
triste que les vols de sauterelles en Égypte. On les rencontre dans 
toute la zone tempĂ©rĂ©e et mĂȘme dans les rĂ©gions froides de l'Asie, 
de l’Europe et de l'AmĂ©rique, oĂč ils sont, de tous les mammifĂšres, 
certainement les plus nombreux. 

En France, oĂč on les confond gĂ©nĂ©ralement avec les rats et les 
souris sous le nom de mulols, on en connait quatre espĂšces et plu- 
sieurs variétés. 

Le campagnol des champs (Arvicola agrestis ou arvalis), le plus 
répandu de tous, occupe les riches plaines de l'Est, du Nord-Est 
d’une part, celles du Sud-Ouest et plus particuliĂšrement la rĂ©gion 
comprise entre Paris, Bordeaux et Nantes d'autre part. 


414 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Le campagnol souterrain (A. sublerraneus) préfÚre les plaines 
basses aux régions montagneuses. En France, il habite surtout les 
prairies humides, les vallées boisées au pied des montagnes et les 
prés salés au bord de la mer. | 

Le campagnuol roussĂątre (A. rutilus) est une espĂšce plutĂŽt monta- 
gnarde. On le rencontre dans le massif des Alpes et des Pyrénées 
oĂč 1l s'Ă©lĂšve jusqu’à la limite des neiges perpĂ©tuelles ; on le trouve 
aussi sur les hauteurs du Languedoc et du Roussillon. 

Enfin, nous avons encore, répandue dans toute la France, la plus 
grande espĂšce en genre Arvicola, le campagnol amphibie ou rat 
d’eau qui habite les berges des cours d’eau et des Ă©tangs. 

Les deux premiĂšres espĂšces qui habitent et nichent dans des ga- 
leries souterraines, parfois trĂšs Ă©tendues et profondes, sont aussi les 
seules rĂ©ellement dangereuses aux rĂ©coltes. Dans les rĂ©gions oĂč il y 
en a, une invasion est à craindre chaque année et alors toutes les 
récoltes sont ravagées. 

Ils apparaissent presque subitement, vers la fin de l'été, en légions 
innombrables, ne respectant ni les plantes fourragÚres, ni les céréales 
ets’attaquant mĂȘme aux vignes et aux jeunes arbres dont ils rongent 
l'Ă©corce et les racines. 

Dans le courant de ce siÚcle on a gardé, en France, la mémoire 
de neuf grandes invasions de campagnols. — En 1801, toute la 
France septentrionale et centrale fut ravagée ; les départements de 
la Vendée, des Deux-SÚvres et de la Charente-Inférieure perdirent 
presque toutes leurs rĂ©coltes. Une commission nommĂ©e par l’Aca- 
démie des sciences pour constater les dégùts causés, releva pour 
quinze communes seulement du département de la Vendée une perte 
de 3 millions de francs. — En 1829, 32, 56, 63, 67, 72, 80 et 84 et 
enfin en 1892 il y avait des invasions partielles ou générales qui ont 
occasionnĂ© des pertes se chiffrant par 10, 15 et mĂȘme 90 millions 
par département. 

La question de la destruction des campagnols Ă©tait donc de tout 
temps d’une importance capitale pour l’agriculture, et on peut mĂȘme 
affirmer qu’elle devient chaque annĂ©e plus importante. Nous n'avons 
vu, en effet, que trois grandes invasions dans la premiÚre moitié de 
ce siĂšcle, cinq invasions entre 1850 et 1880, et trois dans la der- 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 419 


niÚre douzaine d'années. Il semblerait donc que ces invasions de- 
viennent de plus en plus fréquentes et comme la valeur de la terre, 
les frais d'exploitation et de culture deviennent en mĂȘme temps 
chaque année plus élevés, les pertes le deviennent, par conséquent, 
aussi dans la mĂȘme proportion. 

L'Ă©tude de cette question a donc Ă©tĂ© l’une des premiĂšres dont a 
eu Ă  s’occuper le Laboratoire crĂ©Ă© Ă  la Bourse de commerce de 
Paris dansle but spĂ©cial d’étudier les moyens pratiquement appli- 
cables pour défendre les cultures contre les animaux nuisibles. 

Nous avons dit plus haut que les campagnols se montrent tou- 
jours presque subitement vers la fin de l’étĂ©; or quelles sont les 
causes de ces apparitions subites? de quelle façon se produisent 
les invasions aussi intenses et parfois aussi générales à certaines 
Ă©poques ? 

C’est ce qu'il fallait d’abord bien Ă©tablir pour chercher un moyen 
de défense rationnel et radical. 

On a admis pendant bien longtemps — et cette opinion est encore 
aujourd’hui gĂ©nĂ©ralement accrĂ©ditĂ©e chez les cultivateurs — que les 
campagnols sont des animaux migrateurs; et, en effet, quand on 
observe la vie de ces rongeurs dans une région délerminée pendant 
plusieurs années de suite, on voit leur nombre augmenter et dimi- 
nuer en certaines saisons et en certaines années sans aucune tran- 
sition apparente. Peu nombreux au printemps, on les voit parfois 
apparaßtre en légions innombrables en septembre et octobre et dis- 
paraitre complÚtement en décembre ; la croyance à des invasions 
subites suivies par des Ă©migrations en masse semblait donc trĂšs 
admissible. 

Or, d’aprĂšs les recherches de Crampe, confirmĂ©es par celles de 
Ritzema Bos et par nos propres observations, on peut toujours 
admettre avec certitude que, quel que soit le nombre de campagnols 
dans une région à un moment donné, ils sont tous nés sur place. 

Ils s'Ă©tendent bien d’un champ sur d’autres champs voisins en les 
envahissant progressivement dans toutes les directions et formant, 
pour ainsi dire, des taches de plus en plus larges, mais n’émigrent 
jamais au loin en troupes nombreuses, comme, par exemple, les 
lemmings en Scandinavie ou les tamias et spermophiles (marmottes 


416 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


de Sibérie) qui descendent par centaines de-millions des hauteurs de 
l'Oural et envahissent les plaines de la Russie orientale. 

L'intensité et la rapidité de leurs invasions sont dues exclusive- 
ment à la fécondité incroyable de ces rongeurs, fécondité favorisée 
encore par la prépondérance numérique constante des femelles sur 
les mĂąles. 

La saison des amours commence avec les premiers beaux jours de 
printemps, c’est-Ă -dire, dans nos rĂ©gions, bien souvent en fĂ©vrier; 
la femelle porte dix-huit jours et met bas cinq Ă  sept petits, qui 
Ă  deux mois sont dĂ©jĂ  adultes et prĂȘts Ă  la reproduction. Dix Ă  
douze jours aprĂšs la naissance des petits, les femelles peuvent 
s’accoupler à nouveau, de sorte qu’un couple de campagnols, en 
supposant que le premier accouplement ait lieu le 20 février, don- 
nera dans le courant de la belle saison : 

La. — 920 fĂ©vrier. Premier accouplement. 

8 mars. PremiÚre portée : 7 petits dont 5 femelles. 

46. — 20 mars. Deuxiùme accouplement. 

8 avril. DeuxiÚme portée : 7 pelits dont 5 femelles. 

Nous aurons donc en avril 16 campagnols. 

Les campagnols qui ont passé l'hiver donnent rarement plus de 
3 portées dans le courant de la deuxiÚme année ; ils meurent géné- 
ralement au commencement de l’étĂ©. 

La premiÚre portée (14) du 8 mars donnera : 


24. — S mai. Premier accouplement, fin avril . HU RENTE asc ei DER 
26 mai. 1°° portée : 5 femelles dont chacune donnera 4 petits. . . 20 
20, — 8 juin. Deuxiùme accouplement : | 
26 juin. 2° portée : 5 femelles dont chacune donnera 4 petits. . . 20 } 95 
2c. — 26 juillet. 3° portĂ©e : 5 femelles dont chacune donnera 5 petits. 29 
24. — 16 aoĂ»t. 4° portĂ©e : 5 femelles dont chacune donnera G petits. , . 30 
La portée 15 du 8 avril au 26 septembre donnera un nombre de petits égal à 
celui dela portée la; s0it: 4 1709 MO EMNRNt CARNET ENS 
ENULOUL ;e EM NN EN TEE PE CICRE 


Ainsi, un seule couple adulte au mois de février peut donner en 
automne 206 descendants, auxquels peut venir encore s’ajouter la 
descendance des portées 24 (60 petits en juillet), 2b (60 petits en 
août); de sorte que, dans des conditions exceptionnellement favo- 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 417 


rables Ă  leur reproduction, la descendance d’un seul couple peut dĂ©- 
passer le nombre de 350 individus dont, en moyenne, 250 femelles. 

Dans un champ d’un hectare sur lequel il serait restĂ© au sortir de 
l’hiver 150 campagnols, c’est-Ă -dire un nombre Ă  peine apprĂ©ciable, 
il y en aurait donc en juillet déjà plus de 10 000 et en septembre plus 
de 20 000 individus par le seul effet de leur multiplication normale. 

Heureusement pour l’agriculture, les campagnols ont des ennemis 
naturels aussi nombreux que variés : les portées de septembre et 
d'octobre n'arrivent généralement pas en pleine vigueur avant l'en- 
trĂ©e de l’hiver et les premiĂšres intempĂ©ries les font souvent pĂ©rir 
presque complÚtement; les gelées tardives du printemps, quand elles 
surviennent brusquement aprùs quelques jours d’un temps sec et 
doux, détruisent un grand nombre de femelles pleines et de petits 
nouveau-nés. Les oiseaux de proie et les petits mammifÚres carnas- 
siers, tels que les taupes, les musaraignes, les hérissons, les petites 
belettes et mĂȘme les renards leur font une chasse impitoyable pen- 
dant toute l’annĂ©e. Enfin, quand en l'absence de ces diffĂ©rentes 
causes de destruction, ou malgré elles, le nombre des campagnols 
devient extrĂȘmement grand en automne, la rapiditĂ© et l'intensitĂ© de 
leur mulĂŒplication devient elle-mĂȘme la cause principale de leur 
disparition en masse. 

En effet, quand ils deviennent extrĂȘmement nombreux dans un 
espace donnĂ©, comme ils gaspillent encore plus qu’ils ne mangent, 
ils finissent presque toujours par manquer d’aliments substantiels ; 
alors, affaiblis par une nourriture insuffisante, ils sont envahis Ă  
leur tour par des insectes et champignons parasites (puces, tiques, 
etc.) et enfin, ils sont dĂ©cimĂ©s par des maladies Ă©pidĂ©miques d’au- 
tant plus meurtriĂšres pour eux qu'ils sont plus nombreux. 

M. Ritzema Bos relate plusieurs cas d’épidĂ©mie charbonneuse 
parmi les campagnols en Allemagne ; nous-mĂȘme, nous avons eu 
l’occasion d'observer, depuis que nous nous occupons de cette ques- 
lion, une disparition presque complĂšte de ces rongeurs Ă  la suite 
d’une Ă©pidĂ©mie d’une nature spĂ©ciale qui s’est dĂ©clarĂ©e spontanĂ©- 
ment au commencement de l'hiver de 1892 dans une ferme du dé- 
partement de Seine-et-Marne, et qui s’est prolongĂ©e jusqu’en fĂ©vrier 
de l’annĂ©e suivante. 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893, — 1. 97 


418 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Bien que l’on n’ait constatĂ© l'apparition spontanĂ©e de ces Ă©pidĂ©mies 
que dans quelques cas isolés, il est trÚs probable que toutes les 
grandes invasions se terminent toujours ainsi. Il en résulte toujours 
une destruction naturelle de presque tous les campagnols dans la ré- 
gion infestĂ©e ; aussi n’a-L-on jamais observĂ© deux grandes invasions 
se suivant pendant deux annĂ©es consĂ©culives dans la mĂȘme contrĂ©e. 

Nous avons reprĂ©sentĂ© l’évolution des campagnols dans un champ 
ou dans une rĂ©gion par deux tableaux graphiques qui n’indiquent 
bien entendu que des moyennes, mais donnent une idée trÚs exacte 
de l’augmentation et de la diminution successives de ces animaux 
dans le courant d’une annĂ©e et pendant une pĂ©riode de dix ans. 

Sur le tableau n° 4 on voit 150 campagnols répandus sur un champ 
en février se multiplier progressivement et augmenter en nombre 
de mois en mois, atteindre en septembre le chiffre de 24000 Ă  25 000 
individus, restér dans ce champ jusque vers le milieu de novembre 
et disparaĂźtre rapidement dans les derniers Jours de novembre et en 
décembre, La cause de cette brusque disparition a été, dans ce cas, 
une épidémie spontanée. 

Le tableau graphique n° 2 reprĂ©sente l’évolution des campagnols 
pendant une période de dix ans, de 1880 à 1890. Les deux grandes 
invasions en 1880 er en 1884 sont suivies, la premiĂšre de trois an- 
nées, la deuxiÚme de six années pendant lesquelles le nombre des 
campagnols n’était pas bien considĂ©rable. On remarque Ă©galement 
que l’annĂ©e qui suit immĂ©diatement une grande invasion est gĂ©nĂ©- 
ralement plus pauvre en rongeurs que les années suivantes et que 
c’est du nombre des campagnols au printemps et de la tempĂ©rature 
en avril que dépend principalement leur nombre en automne. 

La nature nous fournit donc elle-mĂȘme le moyen de dĂ©fense le 
plus sûr et le plus rapide contre ces animaux par trop prolifiques ; 
malheureusement, les maladies contagieuses ne se déclarent spon- 
tanément que quand tout a été ravagé et mangé dans les champs 
envahis ; de plus, une Ă©pidĂ©mie spontanĂ©e n’est pas toujours sans 
danger pour les animaux de la ferme ou le gibier. Nous avons vu 
plus haut qu’on a observĂ© en Allemagne des Ă©pidĂ©mies de charbon 
et rien ne s'oppose à ce que, dans d’autres cas, ces maladies ne 
soient dues Ă  des microbes Ă©galement pathogĂšnes pour les animaux 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 419 


de la ferme et pour les petits rongeurs. Il peut donc en résulter une 
épizootie Lout aussi désastreuse pour le cultivateur que le sont les 
campagnols eux-mĂȘmes. 

Pour s’en faire une arme dĂ©fensive contre ces animaux, il faudrait 
donc réglementer, pour ainsi dire, ces épidémies : choisir celles qui 
ne peuvent ĂȘtre nuisibles qu'aux petits rongeurs et crĂ©er des foyers 
d'infection au moment le plus opportun pour prévenir les grandes 
invasions. 

Des essais, déjà assez nombreux, d'application des cultures arti- 
ficielles de microbes pathogĂšnes Ă  la destruction des animaux nui- 
sibles ont donnĂ© des rĂ©sultats trĂšs encourageants. Au mois d’avril 
1892, M. LeƓéffler, professeur de bactĂ©riologie Ă  Greifswald (Alle- 
magne), à réussi à modérer une invasion des campagnols qui mena- 
çait les rĂ©coltes de l’une des plus riches rĂ©gions de la Thessalie, avec 
les cultures de son bacillus typhi murium qu’il a dĂ©couvert sur les 
souris blanches de son laboratoire et qui s’est montrĂ© pathogĂšne 
pour les campagnols ; en France, nous avons eu l’occasion d’ex- 
pĂ©rimenter et d’essayer en grande culture les microbes provenant 
de l’épidĂ©mie que nous avons observĂ©e et Ă©tudiĂ©e dans le dĂ©parte- 
ment de Seine-et-Marne. 


LE VIRUS N° Î 


Le microbe que nous avons trouvé sur les campagnols morts de 
l'épidémie observée en Seine-et-Marne est un bacille le plus sou- 
vent court et gros, mais présentant des formes trÚs variées et dis- 
semblables suivant les milieux et les conditions de culture. On le 
trouve toujours dans le sang et dans tous les organes d’un animal 
mort de cette maladie ; mĂȘme l'urine et le liquide du tube digestif 
ensemencé sur gélose , nous en ont donné souvent des cultures 
pures. Il se développe trÚs rapidement et en grande abondance dans 
tous les milieux nutritifs artificiels connus. Exposé à une tempéra- 
ture de 18 à 20 degrés, un ensemencement du sang, par exemple, 
donne des cultures trĂšs apparentes et abondantes en 24 heures. Cul- 
ĂŒvĂ© sur gĂ©lose, il donne d’abord des colonies rondes qui s’étalent 
rapidement, se confondent les unes avec les autres et finissent par 


420 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


former une couche uniforme d’un gris-sale, lĂ©gĂšrement verdĂątre. 
Exposée à une température de 12 à 18 degrés, la culture se déve- 
loppe progressivement pendant 15 jours environ, ensuite elle semble 
disparaĂźtre, elle devient de plus en plus transparente et un mois 
aprÚs l'ensemencement la gélose redevient claire et transparente 
comme si elle n’avait jamais contenu des cultures. Il n’en contient 
pas moins une couche sensible et on peut s’en convaincre aisĂ©ment 
en grattant la surface avec un fil de platine et en réensemençant sur 
d’autres milieux. 

Sur gĂ©latine les cultures s’étalent moins, mais conservent, par 
contre, beaucoup plus longtemps leur apparence primitive. 

Gardées à l'abri de la lumiÚre et à une température ne dépassant 
pas 18 degrés, les cultures peuvent conserver leur virulence pendant 
trĂšs longtemps. A doses Ă©gales, les cultures de six et huit mois nous 
ont donnĂ© les mĂȘmes rĂ©sultats que les cultures de 8 ou 15 jours. 
Toutefois 1l n’en est pas toujours ainsi ; des cultures d’un mois nous 
ont donné quelquefois des résultats négatifs, de sorte que, dans la 
pratique, pour obtenir des résultats certains, on devrait employer 
de préférence les cultures de 8 à 20 jours. 

L'action du virus n° 1 à été expérimentée sur toutes les espÚces 
de souris et de campagnols connues en France : Mus musculus, M. 
sylvatlicus, M. raltus, M. decumanus, Arvicola arvalis, A. subter- 
raneus, À. rutilus et À. amphibius. I s’est montrĂ© extrĂȘmement 
virulent pour toutes les espĂšces de campagnols, pour les souris do- 
mestiques, les mulots des bois et des jardins et les rats noirs; — son 
action sur les gros rats gris est moins prononcée. 

La maladie produite par ce microbe est toujours mortelle pour 
les petits rongeurs et extrĂȘmement contagieuse, une simple cohabi- 
tation suffit pour que l'infection soit communiquée par un animal 
malade Ă  tous ceux qui l'approchent; ainsi toutes les souris bien 
portantes enfermées dans une grande cage avec une souris inoculée 
succombent toujours Ă  la mĂȘme maladie. 

À l’autopsie on trouve gĂ©nĂ©ralement l’hypertrophie de la rate (cet 
organe devient deux ou mĂȘme trois fois plus volumineux qu’à l’état 
normal), la dégénérescence graisseuse du foie plus ou moins pro- 
noncée et une congestion générale de l'intestin et du péritoine. La 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 421 


durée de l'incubation est trÚs variable suivant la force de résistance 
des individus et aussi suivant les différentes espÚces de souris et de 
campagnols. 

Une injection hypodermique de 1/10 de centimùtre cube d’un 
bouillon de culture de deux jours tue les souris généralement en 
12 Ă  24 heures; toutefois nous avons observĂ© des cas oĂč la mort des 
individus inoculĂ©s n’est survenue que 5 et mĂȘme 8 jours aprĂšs l’opĂ©- 
ration. 

Absorbé avec les aliments, le virus semble agir beaucoup plus 
rapidement sur les campagnols et les mulots que sur les souris do- 
mestiques et les souris blanches des laboratoires. 

Pour les campagnols et les mulots, l’incubation peut durer 2 à 
12 jours, pour les souris domestiques 5 Ă  20 jours. Quelquefois on 
observe des cas de mort foudroyante — l'animal meurt en quelques 
beures. 

La maladie ne devient manifeste qu’un ou tout au plus deux jours 
avant la mort. Le premier symptÎme est une forte diarrhée, peu aprÚs 
on observe comme une paralysie de l’arriùre-train, les jambes de 
derriĂšre semblent inertes, l'animal se met en boule et ne bouge plus 
de place jusqu’à la mort, il se laisse prendre à la main sans manifester 
le moindre mouvement de frayeur. C’est Ă  cet Ă©tat, pendant qu’ils 
sont encore malades, que les campagnols sont achevés et mangés 
par ceux d'entre eux qui sont encore bien portants. 

Ces diffĂ©rences trĂšs sensibles dans la durĂ©e du temps d’incubation 
observĂ©es chez les individus de la mĂȘme espĂšce ou appartenant Ă  des 
espÚces différentes peut provenir d'une prédisposition spéciale à la 
contagion plus grande chez certains individus que chez d’autres el 
peut-ĂȘtre aussi du degrĂ© de virulence des cultures que nous avons 
employées. 

Cette derniĂšre supposition nous a donnĂ© l’idĂ©e de sĂ©lectionner les 
cultures suivant que la mort des individus inoculés était plus ou 
moins prompte. L'ensemble des observations recueillies ne nous a 
pas encore fourni de donnĂ©es suffisantes pour nous permettre d’en 
ĂŒrer des conclusions dĂšs Ă  prĂ©sent, mais nous croyons pouvoir affir- 
mer que ce genre de recherches donnera certainement des résultats 
intéressants. 


492 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


PremiÚres expériences. 


Avant de mettre Le virus Ă  la disposition des cultivateurs, nous 
avons fait expérimenter son action dans les champs infestés par les 
rongeurs dans un certain nombre d’écoles pratiques d’agriculture et 
notamment aux Merchines (Meuse) et Ă  Berthonval dans le Pas-de- 
Calais. 

Aux Merchines l’expĂ©rience a Ă©tĂ© faite en mars et avril 1893 
sur un champ de luzerne presque complÚtement ravagé. Elle a été 
dirigĂ©e par M. Julien Krantz, directeur de l’école et propriĂ©taire du 
domaine. 

Au commencement de mars, M. Krantz a fait distribuer dans les 
champs infestés du pain imprégné de virus en plaçant un morceau 
de ce pain dans chaque trou de souris. 

À partir du quatriĂšme jour aprĂšs cette opĂ©ration on trouvait dans 
le champ en expériences et aux alentours des campagnols morts à la 
surface de la terre. En avril, on a fait défricher une partie du champ 
de luzerne. La charrue a mis alors Ă  jour les galeries souterraines 
remplies de cadavres de campagnols, tous plus ou moins rongés. 
(Les campagnols dĂ©vorent leurs morts et c’est Ă  cette pratique qu’est 
due la propagation rapide de la maladie.) Le résultat obtenu a dé- 
passé les espérances, les campagnols ont été complÚtement détruits 
non seulement sur le champ de luzerne en expérience, mais aussi 
sur une certaine étendue des champs de blé contigus. 

L'expérience des Merchines a été pleinement confirmée par celle 
qu’a faite M. Dickson, directeur de l’école d'agriculture de Berthon- 
val, sur des souris et des campagnols, tant en captivité que dans les 
champs. M. Dickson a constaté que les campagnols succombent plus 
rapidement que les souris domestiques, que ceux qui survivent man- 
gent toujours les cadavres des premiĂšres viclimes, aussi bien en li- 
bertĂ© qu’en captivitĂ©, et enfin, que ces cadavres, quand ils sont man- 
gés par les animaux de la ferme, poules, lapins, canards, chiens, etc., 
ne produisent sur eux aucun effet nuisible. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 423 


Application en grande culture, dans les jardins 
et dans les magasins. 


AprÚs que les expériences des Merchines ct de Berthonval ont dé- 
montré l'efficacité et les avantages de destruction des rongeurs par 
le virus contagieux, un grand nombre de cultivateurs ont demandé 
de l'appliquer dans leurs champs, et nous avons pu faire ainsi toute 
une sĂ©rie d’essais pendant les mois d'aoĂ»t, de septembre, d’octobre 
et de novembre. 

Nous n’en citerons que quelques cas se rapportant à trois espùces 
de rongeurs différents. 


1° Destruction des campagnols sur Le terriloire de la commune 
de Payns (Aube). 


Les terres de Payns sont trÚs légÚres et friables avec du sable pour 
sous-sol. On y cultive principalement du seigle, un peu de blĂ©, d’a- 
voine, peu de prairies artificielles. 

Les cultivateurs comptent ordinairement une année de mulots sur 
deux, ce qui veut dire que bien qu'il y ait des campagnols chaque 
année, ils ne deviennent trÚs nombreux et dangereux pour les ré- 
coltes que tous les deux ans. 

L'année 1892 ayant été une année de mulots, il y avait donc lieu 
d'espĂ©rer qu’en 1893 il y en aurait moins. Toutefois la sĂ©che- 
resse et la chaleur exceptionnelle du printemps et de l'été de 1893 
ont été tellement favorable à la multiplication et au développement 
des campagnols, qu’une grande invasion Ă©lait Ă  craindre pour l’au- 
tomne. 

La configuration du pays est trÚs favorable pour le développement 
des campagnols. C’est une vallĂ©e plate, large de 10 Ă  15 kilomĂštres, 

coupée par la Seine et bordée des deux cÎtés par des coteaux mar- 

 neux. Les campagnols apparaissent en grand nombre ordinairement 
en juillet et en août au bas de ces coteaux, se répandent ensuite peu 
Ă  peu dans la plaine jusqu'aux bords de la Seine. 

Les annĂ©es d’invasion, les semailles d’automne sont gĂ©nĂ©ralement 


424 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


complÚtement perdues, les grains sont mangés pour ainsi dire der- 
riÚre le semoir, les prairies artificielles sont parfois rasées en une 
seule nuil. 

Devant ce danger menaçant, le conseil municipal de Payns a dé- 
cidé, sur la proposition d'un de ses membres, M. N. Sainton, de 
faire aux frais de la commune un essai de destruction des rongeurs 
par le virus contagieux. 

La premiÚre opération a été faite le 22 août dans les conditions 
suivantes : 

930 tubes de cultures virulentes de huit jours ont été dilués dans 
10 litres d’eau ; dans cette solution on a trempĂ© 12000 morceaux de 
pain blanc de 1 centimĂštre cube environ. 

Ce pain préparé a été distribué sur une étendue de 20 hectares ; 
on plaçait un morceau de pain dans un trou sur quatre en moyenne. 

Les 5 et 6 septembre suivant on a t'ouvé des campagnols morts 
un peu partout sur les champs en expérience. 

Le 13 septembre on a labouré un champ de 35 ares criblé de 
trous (en moyenne 10 trous par mĂȘtre carrĂ©). Au moment du labour 
on n’a trouvĂ© dans ce champ qu'un seul Campagnol vivant, huit 
jours aprĂšs le labour on n’a trouvĂ© sur toute l'Ă©tendue de ce mĂȘme 
champ que 50 trous de campagnols. 

Ces 90 trous furent de nouveau garnis de pain imprégné et fermés 
quelques jours plus tard — ils ne se sont plus rĂ©ouverts. 

Sur d’autres parties des 20 hectares en expĂ©rience dans les champs 
de sainfoin, on ne trouvait qu’un trou rĂ©ouvert, en moyenne, sur 
cent fermés. 

L’essai a donc donnĂ© des rĂ©suliats complĂštement satisfaisants. 
Deux distributions successives Ă  un mois de distance ont suffi pour 
détruire tous les campagnols. 

Les frais de cet essai se sont élevés en tout à : 


80 tubes de virus Ă  12 fr. les 10 tubes. . : . . . . 361,00c 
6 kilogr. de pain Ă  O fr. 35 c. LR ME 200 
50 heures de main-d'Ɠuvre à 0 fr. 50 €. . , . . . . 25 ,00 

63°, 10° 


pour 20 hectares, c’est-à-dire à 3 fr. 15 c. par hoctare. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICGULTURE. 425 


Ÿ Destruction des campagnols el des mulots au hameau « La Borde », 
prĂšs Bar-sur-Seine (Aube). 


Sur la demande de M. Guyard, prĂ©sident de la SociĂ©tĂ© d’agricul- 
ture et du Syndicat agricole de Bar-sur-Seine, nous nous sommes 
rendu le 29 septembre 1893 au hameau La Borde oĂč des champs, 
d’une Ă©tendue de 50 hectares environ, Ă©taient fortement infestĂ©s par 
les petits rongeurs. | 

Nous constatons d’abord que la situation du hameau et la nature 
de ses terres se prĂȘtent trĂšs bien au dĂ©veloppement des campa- 
gnols. 

De bonnes terres fortes, argileuses, assurent une grande consis- 
lance aux nids et aux galeries souterraines des rongeurs ; d'autre 
part, les pentes assez prononcĂ©es de tous les cĂŽtĂ©s permettent l’écou- 
lement facile des eaux et empĂȘchent les inondations qui, dans d’autres 
conditions, détruisent un grand nombre de ces animaux au printemps 
et en aulomne. 

L’inspection des champs envahis nous montre que le nombre de 
lrous varie de à à 15 par mÚtre carré ce qui, en comptant 1 rongeur 
pour Ă  trous, en moyenne, donne 10 000 Ă  50 000 de ces animaux 
par hectare. 

Des piÚges placés la nuit dans les champs envahis ont pris quelques 
rongeurs et nous avons pu constater la présence dans ces champs de 
campagnols (Arvicola arvalis) et de mulots (Mus sylvaticus), ces 
derniers dans une proportion bien moins forte. 

La distribution des cultures virulentes a été faite dans les conditions 
suivantes : 

120 tubes de culture de 5 et de 6 jours ont été dilués dans 
50 litres d’eau bouillie et salĂ©e. Dans cette solution on a trempĂ© 
80.000 morceaux de pain bis de 4 Ă  1 1/2 centimĂštre cube. Le pain 
trempĂ© a Ă©tĂ© distribuĂ© dans les champs Ă  raison d’un petit cube par 
trou nouvellement frayĂ©, c’est-Ă -dire, en moyenne, dans un trou 
sur Six. 

L'opération a occupé 20 personnes pendant trois journées succes- 
sives, environ ? heures par jour, de # Ă  6 heures. 

L’inspection des trous le lendemain de chaque distribution à mon- 


426 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


hé que le pain introduit dans les trous a été mangé dans le courant 
de la nuit. 

Des pluies assez fortes sont tombées pendant les trois jours qu'ont 
duré les opérations. 

DĂ©duction faite de nos frais de voyage qui ne peuvent pas ĂȘlre com- 
pris dans les frais de l'expérience, ceux-ci se sont élevés à la somme 
totale de 456 fr. Ă  savoir : 


120 "tubes A OLPC Re Er UE 90 fr. 

2OKIOSr AE PAIN A ON DIRE RE PR 6 

t20heurestde travail a 0 fre DICO ENPRSRERRREE 60 
OAI A PERTE 156 fr. 


Ce qui fait, au prix de la main-d'Ɠuvre (0 fr. 50 c. l'heure), prix 
certainement exagéré, parce que, les virus n'étant nullement dange- 
reux, on peut employer des enfants pour le distribuer, une dépense 
totale de 3 fr. 10 c. par hectare. 

La préparation du pain et sa distribution a été faite en présence 
de M. Guyard, des membres du bureau du Syndicat agricole de Bar- 
sur-Seine et de M. R. Danguy, professeur dĂ©partemental d’agri- 
cullure. 

Occupé à la préparation des virus que les cultivateurs nous de- 
mandaient en quantités de plus en plus considérables, 1l nous a été 
impossible d'aller sur place constater par nous-mĂȘme les rĂ©sultats 
de cette expĂ©rience. C’est Ă  l’obligeance de M. R. Danguy, qui a con- 
signĂ© ces rĂ©sullats dans un article publiĂ© par l’Agricullure nouvelle 
(n° du 18 dĂ©cembre 1893), que nous devons de les connaĂźtre d’une 
façon exacte. 

« L'opération faite vers la fin de septembre, écrit M. Danguy, 
quinze jours aprÚs, dans une luzerne traitée, Lrois souris seulement 
étaient remontées, vivantes encore, mais déjà paralysées. Dans une 
luzerne voisine, non traitée, plus de cinquante rongeurs en parfait 
Ă©tat se montraient sous le soc de la charrue, un bien plus grand 
nombre se dérobait aux regards. 

« Dans les Ă©teules, mĂȘme rĂ©ussite, un grand nombre de souris 
mortes et quelques-unes en partie dévorées par leurs congénÚres se 
découvraient. » 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 4277 


3° Destruction des mulols (Mus sylvaticus) dans un verger. 


Un verger d’une Ă©tendue de deux hectares et appartenant Ă  M. Ch. 
Lambert, du Havre, a été envahi par les mulots (M. sylvaticus). Les 
ravages causés étaient fort importants, les rongeurs mangeaient et 
dĂ©tĂ©rioraient des fruits de luxe, des pommes, poires et pĂȘches. 

Six tubes de virus diluĂ©s dans deux litres d’eau et rĂ©partis sur 
2 000 morceaux de pain ont suffi pour détruire complÚtement les 


A 


mulots et arrĂȘter les dĂ©gĂąts. 


Æ# Destruction des souris (Mus museulus) dans les magasins. 


M. Boutroux, officier d'administration comptable des subsistances 
militaires à Amiens, a employé un tube de virus pour détruire les 
souris ordinaires (Mus musculus) dont était infesté un des magasins 
qui se trouve sous sa surveillance. 

Vingt jours aprÚs la distribution du pain imprégné, toutes les souris 
ont disparu dans le magasin en expérience ; et comme dans les autres 
magasins également infestés les souris pullulaient toujours, on peut 
en conclure que leur disparition dans le local en expérience était 
bien due à l’action du virus. 


Instructions. 


Pour détruire les campagnols ou les mulots dans les champs, 
d’une façon complĂšte et dĂ©finitive, il faut faire deux ou trois opĂ©ra- 
tions successives et procéder de la façon suivante : 


1° PremiÚre distribution de cullures virulentes. 


Dans tous les pays infestĂ©s d’une façon chronique, les campagnols 
ou les mulots deviennent les plus nombreux aux mois d’aoĂ»t et de 
septembre. 

C’est Ă  cette Ă©poque que le virus agira le mieux parce que prĂ©ci- 
sĂ©ment grĂące Ă  la rĂ©union d’un grand nombre de ces animaux qui 


428 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 
vivent en famille, — sur un espace donnĂ© — l’épidĂ©mie se propagera 
rapidement et sera trĂšs mortelle. 

Les premiÚres distributions de pain imprégné de cultures virulÚntes 
doivent donc commencer en août aussitÎt aprÚs les récoltes de cé- 
rĂ©ales et peuvent ĂȘtre continuĂ©es en septembre et octobre sur les 
champs de pommes de terre, de betteraves, sur les prairies aruifi- 
cielles, etc. 

Cette premiÚre distribution de virus détruit généralement 90 à 
95 p. 100 des rongeurs qui infestaient les champs. L’épidĂ©mie ainsi 
provoquĂ©e se prolonge d’elle-mĂȘme pendant six semaines au moins. 

Les rĂ©sultats obtenus par ce premier traitement peuvent ĂȘtre 
appréciés de différentes façons. 

Le plus simple est de faire labourer les champs 15 jours Ă  six se- 
maines aprĂšs la distribution du pain. On trouvera en labourant des 
cadavres dans les terriers et pas du tout ou trĂšs peu de campagnols 
vivants. AprĂšs le labour on ne trouvera que trĂšs peu de trous nou- 
vellement ouverts Ă  la surface du sol. 

Dans le cas oĂč les champs en expĂ©rience ne seraient pas labourĂ©s 
en automne, on fermera les trous un mois aprĂšs le premier traite- 
ment en y faisant passer une herse ou un rouleau. 

Quand il s'agira de prairies artificielles ou naturelles il ne sera pas 
indispensable de fermer les trous pour reconnaĂźtre si les campa- 
gnols ont disparu. Le cultivatùur saura facilement reconnaitre s’il y 
a encore des trous fréquentés et nouvellement frayés. 

TrĂšs souvent on trouvera des cadavres Ă  la surface du sol. 

Pour celte premiÚre opération, on ne doit pas ménager le pain 
préparé, 1l faut en mettre un morceau dans chaque trou frayé. 

Suivant l’importance de l’invasion il faut employer pour cette pre- 
miÚre opération 3 à 10 tubes par hectare. 


2% DeuxiĂšme distribulion de cultures virulentes. 


Avec une seule opération on n'obtient que bien rarement la des- 
truction complĂšte des petits rongeurs. — Il faut donc complĂ©ter la 
premiÚre opération par une deuxiÚme en garnissant à nouveau les 
trous nouvellement ouverts (sur les champs labourés ou hersés) 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 429 


ou encore frĂ©quentĂ©s, avec du pain prĂ©parĂ© de la mĂȘme façon que 
la premiĂšre fois. 

Cette deuxiĂšme opĂ©ration doit ĂȘtre faite un mois ou six semaines 
aprùs la premiùre. — On y emploiera 1 tube de virus pour 2 ou 
3 hectares. 


3° TroisiÚme opéralion. 


Les quelques campagnols qui pourraient encore rĂ©sister Ă  l’épi- 
dĂ©mie ne seront plus gĂȘnants pour les cultures d’hiver. — II n’en 
restera en effet que 40 ou 50 par hectare au plus et les dĂ©gĂąts qu’ils 
peuvent causer dans le courant de l'hiver seront en tout cas absolu- 
ment insignifiants. 

Il en serait tout autrement toutefois, si on laissait ces quelques 
campagnols se multiplier au printemps suivant ; chaque couple don- 
nerait 300 rejetons dans le courant de la belle saison et en automne 
les champs se trouveraient repeuplés à nouveau. 

Une troisiÚme opération est donc souvent nécessaire au printemps 
pour obtenir un résultat définitif. 

AprĂšs les deux premiers traitements en automne, il ne restera sur 
les champs, comme nous venons de le dire, qu’une cinquantaine de 
campagnols par hectare, cette troisiÚme opération ne sera donc ni 
difficile, ni coûteuse. Pour détruire ces derniers rongeurs on peul 
encore employer le virus, mais il serait peut-ĂȘtre tout aussi simple 
d’avoir recours à tout autre moyen. 

Les campagnols sont en effet, dans ce cas, trop peu nombreux et 
en mĂȘme temps trop dissĂ©minĂ©s pour qu’on puisse compter sur le 
dĂ©veloppement d’une Ă©pidĂ©mie, c’est-Ă -dire sur la propagation de 
la maladie par contagion ; un empoisonnement ou des piĂšges don- 
neront le mĂȘme rĂ©sultat. 

Les frais de la troisiĂšme opĂ©ration qui doit ĂȘtre faite dĂšs le dĂ©but 
de la belle saison, en février ou mars, ne dépasseront pas 0 fr. 90 c. 
par hectare. 

L'ensemble des frais pour ces trois opérations : achat de virus et 
du blĂ© prĂ©parĂ©, le pain et la main-d'Ɠuvre, ne dĂ©passera certaine- 
ment pas Ă  fr. par hectare; faites avec soin sur toute l'Ă©tendue des 


430 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 
champs envahis, ces trois opérations successives permellront de dé- 
truire les campagnols d'une facon complĂšle el pour loujours. 

Le traitement en trois opĂ©rations, tel que nous venons de l’indi- 
quer, est le plus rationnel el le moins coûteux. En procédant ainsi 
on détruira tous les rongeurs (nous disons bien lous sans en excepter 
un seul) en une année. 

Le coût de ce traitement est tellement minime en comparaison de 
l’importance des dĂ©gĂąts causĂ©s par les campagnols qu’il nous semble 
inutile d’insister sur les avantages qui en rĂ©sultent; toutefois, nous 
tenons Ă  ajouter que, si les exigences de la culture ou des causes 
d’une autre nature ne permettaient pas de l’appliquer à la fois sur 
toute l'Ă©tendue des champs envahis, ou de les commencer en au- 
tomne, il est possible d’arriver au mĂȘme rĂ©sultat final par une sĂ©rie 
d'applications partielles en automne el au printemps, ou bien pen- 
dant l’une ou l’autre de ces deux saisons. 

L'important est de poursuivre la destruction avec persévérance et 
de ne s’arrĂȘter que quand tous les rongeurs auront disparu. Fait 
ainsi d’une façon partielle Ă  tour de rĂŽle sur les diffĂ©rents champs 
d’une ferme ou d’une rĂ©gion envahie, le traitement devra ĂȘtre pro- 
longé pendant deux ou trois ans, mais sera tout aussi efficace. 

D'une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, que l’on commence le traitement au 
printemps ou à l'automne, il faut procéder de la façon suivante : 

4° Faire une distribution de virus (pain trempé dans une solution 
de cultures virulentes) 15 jours ou mieux trois semaines avant le 
labour, sur tous les champs qu’on aura à labourer ; 

2 Faire une deuxiĂšme distribution de virus sur les mĂȘmes 
champs, 8 jours aprÚs le labour, en garnissant de pain préparé tous 
les trous qui se seront réouverts à nouveau ; 

3° Détruire les campagnols qui auraient pu résister encore (aprÚs 
un hersage ou un autre travail par lequel les trous réouverts seront 
fermĂ©s une deuxiĂšme fois), par lemploi du virus ou d’un toxique si 
les campagnols sont trĂšs peu nombreux. 

En un mot il faut saisir toute occasion, tout travail dans les champs 
(labours, hersages, roulages, etc.) envahis permettant de vérifier 
d'une façon certaine lesrésultats obtenus, pour faire une premiÚre opé- 
ralion et en refaire une seconde, et une troisiĂšme si c’esl nĂ©cessaire. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 431 


Dans les prairies et les bois on peut fermer les trous avec une 
bĂȘche ou tout simplement en marchant dessus. 

Ainsi que nous l’avons montrĂ© dans un travail prĂ©cĂ©dent ?, les cam- 
pagnols vivant en France, tout en Ă©tant de tous les mammifĂšres les 
animaux les plus nuisibles à l’agriculture, ne sont pas migrateurs 
et ce fait facilite leur destruction. Les générations qui se succÚdent 
toujours restent cantonnĂ©es dans les mĂȘmes champs et ne s’en rĂ©- 
pandent à l’entour qu’en automne (en septembre et octobre) dans 
les années mémorables, mais relativement rares, de trÚs grandes 
invasions. 

Le traitement partiel des champs, Ă  tour de rĂŽle, aura donc toute 
son efficacitĂ©, il n’est pas Ă  craindre en effet que les champs une 
fois traités soient envahis à nouveau par des campagnols venus des 
champs voisins, avant que ces derniers n'aient été traités à leur tour. 


Mode d'emploi du virus n° 1. 


Le virus n° 1 est préparé dans des tubes en verre sur une couche 
de gélatine végétale. Ces tubes sont fermés avec un bouchon de 
ouate. 

Pour se servir des cultures virulentes qui recouvrent la surface 
libre de la gélatine et y forment une couche grisùtre, on délaye le 
contenu du tube dans de l’eau salĂ©e, dans laquelle on trempe du 
pain, des grains ou, à défaut de ces produits, toutes autres substances 
dont les souris ou les campagnols sont friands. 

Voici de quelle façon il faut procéder* : 

On prépare une solution de 10 gr. de sel de cuisine dans un litre 
d’eau, on fait bouillir dans une casserole et on laisse refroidir. 

Avec ce liquide refroidi, on remplit jusqu'aux deux tiers environ 
(aprÚs avoir enlevé le bouchon de ouate) le tube contenant le virus, 
on secoue fortement jusqu'au moment oĂč la gĂ©latine se sera dĂ©ta- 
chée du verre et on verse le contenu dans la casserole. La gélatine 
n'Ă©tant pas facilement soluble dans l’eau, il faut Ă©craser avec la main 
les morceaux qui sont restés compacts. 


1. Revue scienlifique, n° 11, 2° semestre 1893. 
2, ProcĂ©dĂ© indiquĂ© par M. LƓfier. 


432 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Du pain blanc rassis est ensuite coupé en cubes de 1 à 2 centi- 
mÚtres de cÎté. 

Ces petits cubes sont jetés dans la casserole, et lorsqu'ils sont suf- 
fisamment imprĂ©gnĂ©s du liquide, ce qui a lieu au bout d’une Ă  deux 
minutes, ils sont retirés et jetés dans un vase. 

On peut imprĂ©gner au moyen d’un litre de ce liquide environ 
1 000 Ă  1 200 de ces cubes. 

Pour la destruction des souris, mulols et campagnols, on doit 
prendre deux tubes par litre d’eau. 

On distribue ensuite le pain coupĂ©, de prĂ©fĂ©rence pendant l’aprĂšs- 
midi; on place un morceau de pain dans chaque trou, ou on en ré- 
pand dans les endroits visités par les souris. 

Le virus doit ĂȘtre employĂ© aussitĂŽt que le tube a Ă©tĂ© ouvert. 

On ne peut conserver ni la solution, ni le pain imprégné pendant 
plus d’une journĂ©e. 

Pour obtenir de bons résultats dans les champs envahis, il faut 
employer en moyenne » tubes par hectare. 

On peut remplacer le pain blanc par du pain bis ; dans ce cas, ce 
dernier doit ĂȘtre bien rassis de quatre ou cinq jours, et comme ce 
pain boit moins d’eau que le pain blanc, il faut prĂ©parer des solu- 
tions plus concentrĂ©es : prendre quatre tubes par litre d’eau au lieu 
de deux, et tremper dans celte solution 2000 Ă  2400 petits cubes 
de pain bis au lieu de 1 000 Ă  1 200. 

De sorte que la dose de virus répandue sur chaque morceau de 
pain soit toujours la mĂȘme. 

Quant Ă  la place du pain on trouvera plus commode d'employer 
du grain (blé, orge, avoine ou maïs), il faut faire concasser ce grain 
grossiĂšrement en le coupant en deux ou trois parties et le tremper 
dans une solution trĂšs concentrĂ©e : dix tubes par litre d’eau. 

On fera tremper dans un litre de cette solution environ deux 
litres de grains, en remuant de temps en Llemps pour que les grains 
soient également trempés. Le liquide qui restera pourra reservir à 
tremper une nouvelle portion de grains. 

Le résidu, petits débris et farine, qui restera au fond du vase doit 
ĂȘtre employĂ© de la mĂšme façon que le grain. 

Si, au moment de la distribution du pain préparé, il pleuvait ou 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 433 


faisait bien froid, on devrait préparer des solutions plus concerftrées : 
prendre quatre tubes par litre d’eau pour le pain blanc ou huit tubes 
pour le pain bis et mouiller le pain moins que dans les conditions 
ordinaires, toujours en conservant les mĂȘmes proportions de 1 000 
petits cubes de pain par tube de virus. 

EnfermĂ© dans une boĂźte, Ă  l’abri de la lumiĂšre et dans un endroit 
dont la température est comprise entre 5° et 25°, le virus n° 1 con- 
serve toutes ses propriétés pendant plusieurs mois; toutefois le maxi- 
mum de virulence et de développement des cultures est obtenu gé- 
nĂ©ralement cinq Ă  vingt jours aprĂšs la prĂ©paration du tube; c’est 
donc des cultures fraĂźches qu’il faut employer de prĂ©fĂ©rence. 


VIRUS N° 2? POUR LA DESTRUCTION DES RATS 


Les premiers essais de l’action du virus n° 1 sur les diffĂ©rentes 
espÚces de rats ont donné, comme nous l'avons dit plus haut, des 
résultats variables et incertains. 

InoculĂ©es Ă  l’aide d’une seringue de Pravaz (dans ce cas le virus 
est introduit dans l’organisme par une piqĂŒre sous la peau ou dans 
les muscles), toutes les espÚces de rats mouraient aprÚs une période 
d’incubation de deux à quinze jours. Nourris avec des aliments im- 
prégnés de cultures virulentes ou avec des organes de souris tuées 
par ce virus, les rats d’eau proprement dits, à courte queue velue 
(Arvicola amphibius), ct les rats noirs (Mus raitus) succombent 
aussi rapidement que les campagnols et les souris. Pour les gros 
rats gris, appelés aussi rats voyageurs (Mus decumanus), les plus 
forts, les plus rĂ©pandus dans le monde entier et en mĂȘme temps les 
plus nuisibles, l’action de ce virus s’est montrĂ©e le plus souvent 
insufisante. Il en mourait bien quelques-uns, la plupart devenaient 
manifestement malades, mais ne succombaient pas. 

Ce virus est donc bien pathogùne pour ces animaux, mais il n’est 
pas suffisamment actif pour les tuer. Ce fait donnait Ă  supposer 
qu’en augmentant la virulence des cultures par une prĂ©paration spĂ©- 
ciale, on arriverait peut-ĂȘtre Ă  atteindre ces redoutables rongeurs, 
qui sont devenus dans certains pays un véritable fléau des cultures 
ou plantations, Ă  l’égal des campagnols dans l’Europe septentrionale. 

ANN. SCIEXCE AGRON. — 1893. — 1. 28 


434 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Au Brésil, au Mexique, dans les Antilles, dans presque toutes les 
iles de OcĂ©an Indien, oĂč les plantations de cannes Ă  sucre et de 
cacao ont pris une grande importance, le rat, amené primilivement 
dans les ports sur des navires, s’est rĂ©pandu de lĂ  dans les champs 
cultivĂ©s et y cause des dommages extrĂȘmement importants. 

Grñce à l’obligeance de deux de nos correspondants, M. le docteur 
Desenne, de l’ile Maurice, et M. Bordaz, de la Martinique, nous 
avons pu rĂ©unir un certain nombre de renseignements sur l’histoire 
naturelle de ces rongeurs et des données statistiques précises sur 
l’importance des pertes dont ils sont la cause dans ces pays. 

« Les deux variétés de rats que nous avons ici, nous écrit M. De- 
senne, ont été introduites dans le courant du xvir° siÚcle. Les Portu- 
gais, Ă  l’époque de la dĂ©couverte de l’üle, n’en font aucune mention, 
de mĂȘme les Hollandais Ă  leur premiĂšre tentative de colonisation. 
Ce n’est qu’à leur deuxiùme descente dans l’üle que le nombre pro- 
digieux des rats obligea les Hollandais Ă  abandonner la colonie. Tout 
élait dévasté et détruit. 

QIl paraĂźt mĂȘme que si la France, qui occupa l’üle le 1°* septem- 
bre 1715, n’avait pas obĂ©i Ă  de hautes considĂ©rations politiques pour 
se maintenir dans ce poste de l’OcĂ©an Indien, elle aurait certaine- 
ment suivi l'exemple des Hollandais. 

«Il semble le plus probable que c’est Ă  la suite d’un naufrage que 
les rats ont pu aborder dans notre üle. En effet, dans l’archipel d’A- 
galĂ©ga, les rats sont encore aujourd’hui inconnus sur toutes les Ăźles, 
sauf une seule oĂč ils ont pĂ©nĂ©trĂ© Ă  la suite du naufrage d’un navire 
de commerce. 

€ Trouvant là, comme à Maurice, un sol et des conditions clima- 
tériques favorables, ils y ont pullulé de façon à envahir tout : les 
champs et les habitations. 

« La nature du terrain a aussi une grande importance sur le plus 
ou moins grand développement des rats dans une région donnée ; il 
y en a généralement beaucoup plus dans les terres rocheuses que 
dans les terres franches. 

€ Ainsi, sur deux plantations d’à peu prĂšs la mĂȘme contenance 
(3 000 hectares), Ă©loignĂ©es l’une de l’autre de trois Ă  quatre kilo- 
mĂštres Ă  vol d'oiseau, on a pris au piĂšge : 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 439 


« À Saint-Aubin (terres franches), du 1° janvier au 31 dĂ©cembre 
1892, 4 853 rats: 

« À Bel-Air (terres rocheuses), du 2 mars au 27 aoĂ»t 1893, 5 A0 
rats. 

« L'écart des chiffres saute aux yeux, les terres rocheuses ont 
fourni plus de rats dans un semestre que les terres franches dans 
une annĂ©e, toutes choses Ă©tant Ă©gales d’ailleurs. 

« Les poisons (strychnine, arsenie, etc.) éveillent trÚs vite la mé- 
fiance de ces animaux, qui ne s’y laissent plus prendre; les piùges 
qui en ont pris une fois n’en reprendront plus s'ils ne sont pas pas- 
sĂ©s chaque fois Ă  la flamme d’un feu de paille. 

« Voici maintenant comment les rats s’y prennent dans leur Ɠuvre 
de destruction. 

« Le rat s'attaque toujours aux nƓuds infĂ©rieurs de la plante, non 
pas parce qu’ils sont plus Ă  sa portĂ©e (il est grimpeur par excel- 
lence), mais bien parce qu’ils sont plus sucrĂ©s que les nƓuds supĂ©- 
rieurs. 

« Il ne jettera pas la canne à bas, il y fera une forte encoche puis 
passera à une seconde, à une troisiùme, elc., jusqu’à ce que son 
appĂ©tit soit satisfait. La canne n’en meurt pas, mais il est inutile 
d'insister sur les effets destructeurs d’une brise un peu forte sur 
une telle plantation et des éléments de fermentation que des cannes 
coupées dans ces conditions apportent forcément aux jus à mani- 
puler. 

«Il y a des annĂ©es oĂč la dĂ©vastation est plus importante que dans 
d’autres, et cela tient Ă  ce que la canne n’est pas toujours Ă©galement 
riche en sucre. Or les annĂ©es oĂč la canne est moins riche en sucre, 
le rongeur en passe un plus grand nombre en revue jusqu’à ce qu’il 
en ail trouvé une à son goûl. 

«Pour l’üle Maurice, les dĂ©gĂąts apprĂ©ciables atteignent 20 millions 
de francs par an en moyenne. » 

En Europe, en dehors de quelques régions de la Russie voisines 
de l’Ural, d’oĂč 1l semble originaire, le rat gris ou fauve (Mus decu- 
manus) n'est guĂšre connu que dans les granges, greniers, Ă©curies, 
etc., en un mot dans les fermes et dans les villes, quelquefois dans 
les jardins, mais jamais dans les champs. 


436 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Si l’ensemble des dĂ©gĂąts qu’il peut occasionner ainsi peut devenir 
parfois considĂ©rable, jamais ces pertes n’atteignent l'importance de 
celles causĂ©es par ces mĂȘmes rongeurs dans les plantations de canne 
à sucre et de cacao, ou celles causées par les campagnols et les mu- 
lots dans nos champs. 

Aussi, si la question de la destruction des rats n’a pas pour nos 
pays la mĂȘme importance que celle de la destruction des cam- 
pagnols, elle prĂ©sente par contre un trĂšs grand intĂ©rĂȘt pour un 
certain nombre de nos colonies, et nous avons été trÚs heureux 
quand, aprÚs une série d'expériences, nous avons fini par obtenir 
des cultures assez virulentes pour atteindre les gros rats gris 
fauve. 

Le virus n° 2 est prĂ©parĂ© avec le mĂȘme microbe que le virus n°1, 
mais il est rendu plus actif que ce dernier par une sĂ©rie d’inocula- 
tions successives sur des rongeurs de plus grande taille. 

Ce virus a été employé pour la premiÚre fois au mois de juin 1893 
au chùteau de la BoissiÚre (Indre-et-Loire), une grande propriété 
infestée par les rats, appartenant à M. J. de Forestier, comte de 
Coubert, qui, avec beaucoup de bonne grĂące, a bien voulu nous 
prĂȘter son concours pour l’expĂ©rimentation pratique de nos virus. 

Voici un extrait des observations que M. de Forestier, comte de 
Coubert, nous a communiquées : 

« Nous croyons avoir obtenu un excellent résultat avec le virus 
n° 2 que vous nous avez envoyĂ©. Les rats extrĂȘmement nombreux 
qui infestaient tous les bĂątiments de la ferme, les Ă©curies et les 
berges d’un cours d’eau qui traverse le parc, ont complùtement dis- 
paru. 

« Les tubes ont Ă©tĂ© employĂ©s exactement comme vous l’avez indi- 
qué, et les rats ont bien mangé dans la nuit le pain imprégné de 
virus, distribué la veille au soir. Les résultats ne deviennent guÚre 
apprĂ©ciables que dix Ă  quinze jours aprĂšs l’opĂ©ration. On voit alors 
des rats, qui sortent de leurs trous en plein jour, courir avec diffi- 
culté et se laisser attraper par des chiens sans opposer aucune résis- 
tance. De plus, une odeur de pourriture qui se dégage des endroits 
prĂ©cĂ©demment habitĂ©s par ces animaux indique bien qu’il y a des 
morts dans les trous. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 4317 


« VoilĂ  nos observations, et c’est mon jardinier, fort sceptique 
pour toutes ces nouveautés, qui a été obligé de le reconnaitre. » 


Instructions. 


D'une maniÚre générale, il est plus difficile de détruire les rats 
que les campagno!s, les souris ou les mulots. 

Plus agile, plus remuant et surtout plus intelligent que les petites 
espĂšces de rongeurs, le rat va souvent chercher sa nourriture trĂšs 
loin de son nid, change de gite Ă  la moindre alerte et se montre trĂšs 
dĂ©fiant pour les appĂąts toxiques (prĂ©parations Ă  base d’arsenic, de 
phosphore ou de strychnine). 

L'emploi d’un virus prĂ©sente donc tout d’abord ce grand avan- 
tage sur les poisons que, ne commençant à agir que huit ou quinze 
jours aprĂšs avoir Ă©tĂ© absorbĂ© par l'animal, il n’éveille pas sa dĂ©fiance 
Ă  l'endroit du pain imprĂ©gnĂ© et peut ĂȘtre donnĂ© avec succĂšs Ă  plu- 
sieurs reprises. 

Pour obtenir un bon résultat, il faut autant que possible distri- 
buer la prĂ©paration virulente Ă  la fois partout oĂč.il y a des rats dans 
la localitĂ© infestĂ©e ; ainsi, s’il s’agit d’une ferme, il faut faire la dis- 
tribution en mĂȘme temps dans tous les bĂątiments infestĂ©s, placer 
quelques morceaux de pain imprégné dans tous les trous de rats et 
dans tous les endroits ordinairement visités par ces animaux. 

Dans les jardins ou dans les champs infestés par les rats, il faut 
garnir de pain imprégné tous les trous et terriers. 

Quinze jours aprÚs cette premiÚre opération, si le résultat définitif 
n’est pas obtenu, c’est-à-dire s’il reste encore des rats vivants, il 
est bon de refaire le mĂȘme traitement une deuxiĂšme fois. Deux ou 
trois opĂ©rations, rĂ©pĂ©tĂ©es Ă  quinze jours ou trois semaines d’inter- 
valle, seront généralement suffisantes pour faire disparaßtre tous les 
rats. 

Il arrive quelquefois que cinq Ă  huit jours aprĂšs la distribution 
du virus, on constate la disparition subite des rats, on n’en retrouve 
ni morts, ni vivants dans les endroits précédemment infestés. 

L’explication la plus vraisemblable de ce fait que nous avons pu. 
constater plusieurs fois, c’est que ces animaux, trĂšs dĂ©fiants et intel- 


438 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


ligents, ont cherchĂ© Ă  fuir devant les premiĂšres atteintes de l’épi- 
démie. 

Dan; les pays oĂč, comme Ă  la Martinique ou Ă  Maurice, les rats 
ont envahi les plantations et habitent dans les champs, le traitement 
Ă  suivre doit ĂȘtre, en rĂšgle gĂ©nĂ©rale, le mĂȘme que celui indiquĂ© 
précédemment pour la destruction des campagnols. 

La distribution des virus devrait, croyons-nous, commencer aus- 
sitĂŽt aprĂšs la rĂ©colte et devrait ĂȘtre poursuivie pendant toute la 
saison qui correspond Ă  notre automne. 


Mode d'emploi du virus n° 2. 


Pour produire un effet certain, le virus n° 2 doit ĂȘtre employĂ© Ă  
un degré de concentration déterminé, 

1° DĂ©layer le contenu de chaque tube dans un dĂ©cilitre d’eau 
préalablement bouillie et salée ; 

2 Tremper dans ce liquide du pain blanc rassis coupé en petits 
cubes de À centimĂštre de cĂŽtĂ©, en plongeant successivement les 
morceaux, un Ă  un, dans le liquide. 

Le pain doit ĂȘtre trĂšs peu mouillĂ©. 

Bien agiter le liquide avant de s’en servir; 

9° Placer les morceaux trempés dans un vase quelconque et les 
distribuer (de préférence tard dans la soirée) dans les trous et les 
endroits visités par les rats. 

Le contenu d’un tube suffit pour imprĂ©gner 75 Ă  100 petits cubes 
de pain. 


CHAPITRE II 


LA MUSCARDINE DU HANNETON COMMUN (MELOLONTHA VULGARIS) 


La muscardine, appelée par M. Giard Jsaria densa et par MM. Pril- 
lieux et Delacroix Botrilis tenella, et que l’on a appelĂ©e aussi mus- 
cardine rose, pour la distinguer de l’{saria densa (un champignon 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 439 
parasite découvert par M. Metchnikoff et pathogÚne pour plusieurs 
espÚces de coléoptÚres) dont les spores présentent une coloration 
vert intense, et du Botritis bassania, un> muscardine blanche, pa- 
rasite du ver Ă  soie, est connue des mycologistes depuis fort long- 
temps dĂ©jĂ . Comme l’a montrĂ© M. A. Giard dans son remarquable 
travail sur ce sujet, la muscardine rose a été en effet décrite pour 
la premiĂšre fois en 1809 par un naturaliste allemand, H. F. Link, 
sous le nom de Sporotrichum densum. 

La nature du parasite et son action sur l'organisme de linsecte 
ont Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©es et dĂ©crites par M. À. Giard' et par MM. Prillieux et 
Delacroix *. Nous ne nous Ă©tendrons pas sur ces questions d’un intĂ©rĂȘt 
purement scientifique, il ne nous semble important d’indiquer ici 
avec précision que les points suivants : 

4° La façon dont la muscardine pénÚtre dans l'organisme du ver 
blanc et du hanneton ; 

2° L'aspect que présentent ces derniers quand ils sont morts mus- 
cardinés ; 

3° La façon dont la maladie peut se propager parmi les hannelons 
sortis de terre et parmi les vers blancs dans la terre. 

M. A. Giard croit que les hyphes des Zsaria sécrÚtent à leur extré- 
mité un liquide altérant la chitine et pénÚtrent ainsi dans le sang de 
l'insecte ; on peut admettre aussi que le champignon parasite pé- 
nĂštre dans l'organisme du hanneton ou de sa larve principalement 
par des dĂ©chirures accidentelles de l’enveloppe chitineuse dont les 
insectes sont entourés de toutes parts. 

On peut admettre que pour la larve cette condition essentielle de 
l'infestation se trouve toujours réalisée dans la nature. 

Le ver blanc est recouvert d’une enveloppe chitineuse relative- 
ment mince et tendre et ses mouvements continuels dans la terre 
doivent l’amener frĂ©quemment en contact avec les surfaces ru- 
gueuses des cailloux, des éclats d2 verre ou des racines qui dé- 


1. Alfred Giard, Zsaria densa, Link Fries, champignon parasite du hanneton com- 
mun (Melolontha vulgaris). [Bulletin scientifique de la France et de la Belgique, 
t. XXIV, 5 mai 1893.] 


2. Prillieux et Delacroix : Le champignon parasile de la larve du hanneton (C. 2. 
de l’Acad. des Sc., 11 mai 1891). 


440 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


chirent cette enveloppe et crĂ©ent ainsi une voie d’accĂšs facile pour 
le parasite. 

Les hannetons s’infestent tout aussi facilement que les vers blancs. 
Dans ce cas les germes de la maladie pĂ©nĂštrent probablement Ă  l’in- 
térieur du corps à travers la chitine moins résistante des articula- 
ons et des trachées. 

L'aspect des hannetons ct des vers blancs infestés est trÚs carac- 
tĂ©ristique et facile Ă  reconnaĂźtre pour tous ceux qui l’ont vu une 
seule fois. 

Nous empruntons Ă  l’ouvrage de M. Giard, citĂ© plus haut, la des- 
cription qu’il en donne avec beaucoup de prĂ©cision et de dĂ©tails. 

Quand un ver blanc meurt sous l’action d’un poison, d’un produit 
corrosif ou par suite d’une blessure, il devient rapidement noir et 
flasque ; quand, au contraire, il est atteint par la muscardine, il 
devient dur et présente une coloration rose. 

Ensuite, dans les endroits secs et dans les sols légÚrement sablon- 
neux, les cadavres de vers blancs tuĂ©s par l’/saria sont durcis, cas- 
sants el recouverts d’un mince duvet blanc qui occupe une Ă©tendue 
plus ou moins grande de la surface, ne laissant parfois Ă  nu que les 
portions chitineuses Ă©paisses, d’un brun rougeĂ»tre, dont sont for- 
mĂ©es la tĂȘte et les pattes. 

Ce revĂȘtement blanchĂątre prĂ©sente l’aspect d’une moisissure ou 
d’une substance pulvĂ©rulente, suivant que le dĂ©veloppement du 
champignon est plus ou moins avancé, suivant aussi que le sol est 
plus ou moins humide. 

Au labour, les vers ainsi momifiés ramenés à la surface par la char- 
rue prĂ©sentent l’aspect de petites concrĂ©tions calcaires. 

Dans les terres humides et argileuses, le champignon ne forme pas 
simplement une sorte de gazon enveloppant comme d’un linceul le 
cadavre du ver blanc; il émet en outre des prolongements irrégu- 
liers, longs parfois de 5, 6 centimĂštres et mĂȘme plus. 

Ces prolongements agglutinent des blocs de terre, des racines des 
vĂ©gĂ©taux et autres corps Ă©trangers. Ils s'Ă©tendent souvent d’une mo- 
mie à une momie voisine, réunissant par un réseau vivant toutes les 
victimes que le champignon a failes dans un espace déterminé. 

Les cordons ainsi formĂ©s sont couverts, comme le revĂȘtement des 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 441 


momies, par une fine poussiĂšre blanche qui laisse sur les doigts de 
l’observateur une lĂ©gĂšre empreinte, comme lorsque l’on manie un 
bĂąton de craie. 

C’est gĂ©nĂ©ralement Ă  une profondeur de 20 Ă  35 centimĂštres que 
l’on rencontre le plus de vers momifiĂ©s dans les endroits oĂč sĂ©vis- 
sent les Ă©pidĂ©mies naturelles d’Isaria. 

Chez le hanneton Ă  l’état adulte, le revĂȘtement blanchĂątre ne s’é- 
tend que sur la surface ventrale de la tĂȘte et du thorax et se montre 
parfois à l'extrémité de l'abdomen. 

IL est trĂšs important de bien savoir reconnaitre un ver blanc ou 
un hanneton infestĂ© par la muscardine; c’est, en effet, en distribuant 
dans les champs envahis par le ver blanc ces momies provenant des 
Ă©pidĂ©mies soit naturelles, soit arĂŒficielles, que l’on propagera la 
maladie de la façon la plus facile et la plus sûre. 

Le mĂ©canisme de la propagalion d’une maladie causĂ©e par un 
champignon entomophyte diffĂšre essentiellement de celui qui carac- 
térise la transmission et la propagation des maladies bactériennes 
observées chez les animaux supérieurs. 

On sait que dans ce dernier cas, que la transmission se fasse par 
- l'air inspiré comme dans la rougeole, la diphtérie, la clavelée du 
mouton, la pĂ©ripneumonie des bĂȘtes bovines, etc., ou avec les ali- 
ments et l’eau de boisson, comme dans la fiĂšvre typhoĂŻde, le cholĂ©ra 
de l’homme, le rouget et la pneumo-entĂ©rite du porc, etc., ou bien 
encore par contact, c’est-Ă -dire par dĂ©pĂŽt du principe virulent sur 
une plaie, une gerçure de la peau ou sur une muqueuse comme pour 
la rage ou la syphilis, l'agent principal de la propagation est toujours 
le sujet malade. 

Pendant toute la durée de sa maladie et souvent encore quelque 
temps aprÚs sa guérison apparente, le sujet malade est un danger 
constant pour tous ceux qui l'entourent. Ses vĂȘtements, ses excrĂ©- 
ments, sa salive, les objets qu'il touche contiennent des germes viru- 
lents, peuvent les répandre au loin et les transmettre à un nombre 
illimitĂ© d’autres sujets. 

En un mot, les maladies infectieuses causées par les bactéries sont 
transmissibles pendant la maladie, quelque temps aprÚs la guérison 
apparente et longtemps aprĂšs la mort des sujets atteints. Les bac- 


442 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


téries sont virulentes et peuvent communiquer la contagion à tous 
les Ă©tats de leur dĂ©veloppement connus, c’est-Ă -dire Ă  l’état de fila- 
ments, de bĂątonnels et de spores. 

Il en cest tout autrement dans les cas des maladies des insectes cau- 
sées par des champignons entomophytes et particuliÚrement dans le 
Cas qui nous préoccupe. 

L’Isaria densa ne devient facilement transmissible qu’à l’état de 
spores bien mĂ»res, et ce n’est qu’à cet Ă©tat seulement qu’on peut 
l’employer pour rĂ©pandre la contagion. 

Les spores ne se produisent dans la nature sur des vers blancs ou 
hannetons infestés, ou sur des milieux nutritifs artificiels que quand 
le champignon se trouve dans un milieu favorable et quand il est 
arrivé à un étal de développement déterminé. 

Un ver blanc ou un hanneton muscardiné, déjà malade, mais en- 
core vivant, ne peut pas transmettre sa maladie à d’autres sujets, 
mĂȘme quand il se sera trouvĂ© directement en contact avec eux; il ne 
peut pas, non plus, répandre la maladie autour de lui par ses excré- 
ments ou les objets qu'il aura touchĂ©s; mĂȘme le cadavre d’un insecte 
muscardiné (une momie) ne peut devenir une source de contagion 
pour ses congĂ©nĂšres, qu'au moment oĂč le champignon qui a dĂ©ter- 
miné sa mort aura produit des spores. 

Ainsi, la muscardine du hanneton et du ver blanc ne peut pas ĂȘtre 
propagée directement par les sujets qui en sont déjà atteints, et ne 
devient rĂ©ellement contagieuse qu’à l’état de spores mĂŒres ; les 
spores virulentes de cette maladie ne peuvent ĂȘtre rĂ©pandues que par 
l'intermĂ©diaire d’autres agents : le vent, la pluie et les ĂȘtres vivants 
qui s'étant trouvés en contact avec une culture sporulée transpor- 
teront les spores d’un endroit à un autre et peuvent les mettre en 
contact avec des hannetons ou des vers blancs. 

Ilest donc trĂšs important, dans la pratique, de savoir bien recon- 
naitre les cultures mĂŒres, bien sporulĂ©es (sur des momies ou sur des 
milieux artificiels), de celles qui ne prĂ©sentent encore qu’un mycĂ©- 
Hum stĂ©rile. Les cultures mĂ»res peuvent seules, en effet, ĂȘtre em- 
plovées utilement et donner des résultats satisfaisants. 

Une culture non sporulĂ©e se prĂ©sente sous l’aspect d’un fin duvet 
blanc pur, qui, mĂȘme sous l’action de fortes secousses, ne se dĂ©- 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 443 


tache pas de l’objet sur lequel il est fixĂ©, tandis qu’une culture bien 
sporulée présente une teinte jaunùtre et tombe en poussiÚre à la 
moindre secousse. Une momie ou une culture sur pomme de terre 
sporulée tache les doigts comme un bùton de craie. 


Modes d'emploi préconisés et résultats obtenus 
jusqu’à prĂ©sent. 


Le mĂ©rite d’avoir le premier, en France, songĂ© Ă  utiliser la mus- 
cardine comme agent destructeur des vers blancs revient Ă  M. Le 
Moull, conducteur des ponts et chaussées et président du syndicat 
de hannetonnage de Goron. 

Ayant trouvé dans un champ des vers blancs muscardinés et ayant 
constatĂ© ensuite que cette Ă©pidĂ©mie naturelle s’étendait d'elle-mĂȘme 
et atteignait un nombre d'individus de plus en plus considérable, 1l 
a essayĂ© Lout d’abord de propager la contagion en distribuant dans 
les champs envahis par le ver blanc des momies naturelles ou obte- 
nues au moyen d’inoculations artificielles. 

Ensuite, trouvant ce procédé peu pratique, M. Le Moult a entre- 
puis la prĂ©paration en grand des cultures d’saria densa sur pomme 
de terre et a conseillé de propager la contagion au moyen de ces 
cultures artificielles. 

Les premiers essais ayant donné à peu prÚs partout des résultats 
nĂ©galifs, on Ă  cru qu’en modifiant les modes d'emploi de ces cul- 
tures on obliendrait des résultats plus appréciables et on en a pro- 
posé un assez grand nombre. 

On a conseillé notamment les procédés suivants : 

4° Quand on peut se procurer des vers blancs momifiés provenant 
soit d’un gisement naturel (ces gisements ne sont pas aussi rares 
qu’on pourrait le croire, nous en avons rencontrĂ© plusieurs dans le 
département de Seine-et-Marne, entre Crécy et Coulommiers), soit 
d’un champ prĂ©cĂ©demment traitĂ© par des cultures artificielles de 
muscardine, il faut répandre ces momies sur les champs infestés par 
les vers blancs pendant toute la durée de la belle saison, du mois 
d’avril jusqu’au mois d’octobre. 

Les momies doivent ĂȘtre placĂ©es dans des trous de 15 Ă  20 cen- 


444 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


timĂštres de profondeur et ensuite recouvertes. M. Le Moult croit 
qu’en rĂ©pandant ainsi 300 momies par hectare on peut obtenir un 
bon résultat. 

2 MM. Prillieux et Delacroix ont conseillé de répandre la con- 
tagion au moyen de vers blancs infestés, mais encore vivants, en 
procédant de la façon suivante : 

Prendre une terrine plate, la tapisser d’une COUR de terre d’en- 
viron À centimùtre (assez peu profonde pour que les vers ne- puis- 
sent s’y cacher), l’imbiber lĂ©gĂšrement d’eau et y dĂ©poser une cen- 
taine de vers blancs; veiller Ă  ce que la terrine soit assez grande 
pour que les vers ne se heurtent pas les uns contre les autres et ne 
se blessent pas avec leurs pinces. Il est de la plus haute importance 
que les vers ne meurent pas de mort naturelle pendant la durée du 
traitement par les spores du Botrytis tenella ; 

Prendre, avec un petit pinceau en crin, des spores soit sur une 
momie, soit sur une culture artificielle et toucher avec ce pinceau 
les vers un à un, de façon à les saupoudrer en entier ; 

Recouvrir la terrine de planches sur lesquelles on met de la 
mousse mouillĂ©e, et l’enterrer dans un endroit frais Ă  ombre ; 

Au bout de 10 heures environ, les vers sont atteints de la ma- 
ladie. On les prend un à un, toujours avec assez de précaution pour 
ne pas les endommager ni les blesser, et on les disperse dans les 
diverses parties du terrain, Ă  environ 20 centimĂštres de profondeur 
dans le sol. On les recouvre de terre. Choisir de préférence les 
endroits les plus attaqués par les vers blancs. 

Pour se rendre compte si la muscardine a réellement agi sur les 
vers blancs ainsi traitĂ©s, il est bon d’en placer une dizaine dans un 
grand pot Ă  fleurs rempli de terre et de les examiner 16 Ă  15 Jours 
aprĂšs l’opĂ©ralion. 

3° Dans le cas oĂč on n’aurait pas de momies Ă  sa disposition et 
que, pour une raison ou une autre, on ne pourrait pas en faire par 
le procédé que nous venons d'indiquer, on a proposé de remplacer 
les momies par des cultures sur pomme de terre. 

Ces cultures se présentent sous forme de bùtons de 10 centimÚtres 
de long, en moyenne. Chacun de ces bĂątons peut ĂȘtre divisĂ© en 15 Ă  
20 morceaux et ces morceaux doivent ĂȘtre enfouis un Ă  un dans a 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 449 


terre, exactement de la mĂȘme façon que les momies. Suivant l’inten- 
sité de l'invasion, on à conseillé d'employer 10 à 20 de ces bùtons 
par hectare. 

4° On a également conseillé de répandre la muscardine dans les 
champs infeslés au moment des semailles sous forme de spores mé- 
langĂ©s Ă  du sable fin ou Ă  de l’amidon stĂ©rilisĂ©. 

Dans ce cas on a préconisé divers procédés : 

Prendre pour vĂ©hicule de l’eau, c’est-Ă -dire diluer un tube de 
spores dans 100 litres d’eau et en asperger la terre un jour ou 
quelques heures avant le labour, de façon à les recouvrir de terre 
aussitĂŽt que possible aprĂšs l’épandage ; ou bien, mĂ©langer ces spores 
Ă  l’état sec avec les grains ou graines qu’on a l'intention de semer 
et les jeter dans la terre en mĂȘme temps que ces derniers. 

(Bien entendu, le contact de ces spores n’a aucune action sur les 
grains.) 

9° Une autre méthode encore consiste à saupoudrer les vers 
blancs avec la muscardine au moment des labours. 

On fait suivre la charrue par une personne munie d’un bol con- 
tenant des spores Ă  l’état sec et d’un tampon de ouate ou d’un pin- 
ceau en crin. À l’aide de ce tampon ou de ce pinceau trempĂ© prĂ©a- 
lablement dans les spores on touchera tous les vers découverts par 
la charrue de façon à bien les saupoudrer, sans les écraser, toute- 
fois, et on les recouvrira d’un peu de terre, pour qu'ils ne soient pas 
mangés par les corbeaux ou autres oiseaux qui en sont friands. 

On contaminera ainsi une grande quantité de vers blancs à peu 
de frais ; trois tubes de spores suffiront généralement pour un hec- 
are. 

6° En dernier lieu, M. Le Moult propose de répandre les spores 
sous forme de cultures sur pomme de terre, en les jetant à la volée 
sur les champs. Il conseille d'employer 1 Ă  2 kilogr. de ces cul- 
tures par hectare. 

7° M. Delacroix a préconisé encore, comme moyen de propagation 
de la maladie causée par la muscardine, de contaminer les hanne- 
tons Ă  l’état adulte en procĂ©dant de la façon suivante : 

On dĂ©laye 2 ou 3 tubes de spores dans un seau d’eau ordinaire 
d’une contenance de 20 litres environ. AprĂšs l'avoir bien agitĂ©e, on 


446 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


plonge dans cette eau autant de hannetons que l’on pourra s’en pro- 
curer et on les laisse s'Ă©chapper et s’envoler ensuite. AprĂšs une pre- 
miĂšre fournĂ©e, on peut tremper dans la mĂȘme eau une deuxiĂšme, 
puis une troisiĂšme fournĂ©e et ainsi de suite tant qu’on aura des 
hannetons à sa disposition et qu’il restera de l’eau dans le seau. 

Ce procédé à été essayé en grand par M. Gaston de Vaux qui se 
déclare satisfait des résuitats obtenus. 

Voici maintenant le récit de tous les essais dont les résultats ont 
Ă©tĂ© publiĂ©s jusqu’à prĂ©sent et tels qu'ils ont Ă©tĂ© publiĂ©s : 


4. — M. Le Moult a dissĂ©minĂ© des cultures artificielles d’Isaria densa 
dans une pépiniÚre de 50 ares environ appartenant à M. Robichon, de 
Goron. Le traitement eut lieu en septembre 1891. Au commencement de 
mai 1892, la pépiniÚre était à peu prÚs débarrassée de vers blancs et 
l'épidémie artificielle se propageait avec intensité. 

Chaque coup de bĂȘche amenait Ă  la surface soit une momie, soil une 
masse de poudre blanche provenant de la dissociation du cadavre et uni- 
quement composĂ©e de spores. (On n’indique ni la quantitĂ© de spores em- 
ployée, ni la façon dont elles ont été répandues). 


2. — Chez M. Recton fils, au village de Verger, prùs de Goron, 
l'expérience a été faite dans une prairie. Dans la partie ravagée de 
cette prairie (00 ares environ) on avait crĂ©Ă© 90 foyers d’infection 
(morceau de culture sur pomme de terre et sur viande). Les vers 
blancs y Ă©taient trĂšs nombreux. 


Le traitement eut lieu en septembre 1891 ; le 30 mai 1892, Ă©crit M. Le 
Moult, cette prairie est magnifique, .on n’y remarque plus aucune trace 
des ravages des larves. 

Mais le plus curieux, c’est qu'une parcelle situĂ©e en face, de l'autre 
cĂŽtĂ© de la route, et qui n’avait pas Ă©tĂ© traitĂ©e, a profitĂ© de l’expĂ©rience 
faite dans la prairie, les spores y ayant sans doute été transportées par le 
vent. 

Je viens d'assister au labourage de cette parcelle. Les vers sains y 
sont encore nombreux, mais on trouve aussi des vers contaminés en trÚs 
grande abondance (jusqu’à 60 par raie). J'ai dĂ©ja ramassĂ© prĂšs de 2000 
momies dans ce champ. Or, le travail n’est pas terminĂ© et j'espĂšre bien 
en recueillir plus de 4000 (la superficie de ce champ est d’un hectare 
environ). 

On trouve ces momies Ă  divers Ă©tats d'avancement; les unes sont com- 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. +441 


plĂštement envahies par le champignon qui s’est ramifiĂ© dans le sol ; la 
mort de ces insectes doit remonter au mois d'octobre dernier. D’autres 
larves sont bien recouvertes par le champignon, mais celui-ci n’est pas 
encore ramifié dans le sol; la mort doit remonter à plusieurs semaines. 

Puis, enfin, l’on trouve des larves dont la mort ne date que de deux ou 
trois jours seulement. Elles prennent cette teinte rosée que j'ai indiquée 
comme caractérisant la maladie. 

Il est enfin certain que parmi les-larves vivantes que l’on trouve dans 
ce terrain, un grand nombre sont atteintes et ne tarderont pas à périr; 
les autres auront certainement le mĂȘme sort avant la transformation. 

Dans le deuxiĂšme champ d'expĂ©riences, d’une superficie de un hec- 
tare, oĂč nous avons crĂ©Ă© environ 100 foyers d'infection, j'ai Ă©galement 
trouvĂ© des vers contaminĂ©s, mais en moins grand nombre; d’ailleurs, les 
vers blancs y sont rares, le propriétaire du champ ayant toujours fait ra- 
masser les larves aprĂšs la charrue. 

Mais dans le champ voisin, oĂč les vers Ă©taient extrĂȘmement nombreux, 
j'ai pu constater le fait déjà cité plus haut : abondance de vers contaminés 
aux différents états. 

Puis, dans un autre champ un peu plus éloigné, j'ai encore constaté la 
maladie, mais n’ai pu trouver que des larves colorĂ©es, ce qui indique que 
le parasite ne s’y est introduit que tout rĂ©cemment. Plus on se rapproche 
des parcelles traitĂ©es et plus les vers sont nombreux; plus on s’en Ă©loigne 
et plus les momies deviennent rares. 


3. — Le 16 juillet 1891, M. Leizour, professeur dĂ©partemental de 
la Mayenne, écrivait au Journal d'agriculture pratique, t. WE, n° 29, 


p. 74-75 : 


Nous touchons enfin Ă  la destruction complĂšte des vers blancs {ures ou 
mans qui depuis si longtemps dĂ©solent les cultivateurs. L'Ɠuvre est Ă  
peu prĂšs accomplie dans tout l'arrondissement de Mayenne, que nous 
avons récemment parcouru et sur les divers points duquel nous avons eu 
la satisfaction de constater en mĂȘme temps que la prĂ©sence du champi- 
gnon destructeur l’arrĂȘt complet des ravages occasionnĂ©s par la larve du 
hanneton. 

Partout cette larve travaillait encore activement il n’y a pas plus de 
trois semaines et beaucoup de champs d’orge et de sarrazin ont eu à en 
souffrir ; puis tout à coup on a vu les récoltes atteintes reverdir; les vers 
ayant disparu comme par enchantement! Cette disparition, atiribuée par 
tous à une descente provoquée par les pluies et un abaissement trÚs grand 
de la tempĂ©rature, n’a Ă©tĂ© au contraire que la consĂ©quence de la dissĂ©- 
mination du champignon parasite et de la contamination des insectes. 


448 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


On les trouve aujourd’hui, à des profondeurs variables, morts et en- 
tourés de la moisissure caractéristique ou mourants et présentant tous les 
caractĂšres des vers atteints par le bienheureux champignon. 

Des essais exécutés en pleine terre à la fin du mois de juin nous per- 
mettent d'affirmer qu'il suffit d'introduire quelques vers contaminés dans 
les champs infestés du ver blanc, en ayant soin de les mettre en contact 
immédiat avec quelques vers sains, pour obtenir rapidement la destruction 
de tous ceux qui existent dans le champ. 

Les agriculteurs chez lesquels le ver blanc n’est pas atteint par la 
maladie n’ont donc qu’à se procurer, le plus tît possible, pour profiter 
des chaleurs de l’étĂ© et de l'automne, des vers contaminĂ©s avec leur 
champignon et Ă  les rĂ©pandre dans leurs champs oĂč ils ne tarderont pas 
à accomplir l’Ɠuvre de destruction aprùs laquelle ils aspirent. 


4. — M. Charles Babinet annonce Ă  M. A. Giard les rĂ©sultats sui- 


vants : 
Paris, 16 décembre 1891. 


AAA Mon fils, inspecteur des forĂȘts Ă  Tours, ayant enfoui dans un 
carré de pépiniÚre de deux ares, le 20 août, 4 ou 5 vers infestés, y a 
retrouvé le 47 octobre 150 vers, au moins, momifiés par le champignon, 
qui, d’ailleurs, Ă©tendait de tous cĂŽtĂ©s dans le sol ses cordons blancs de 
mycĂ©lium parfaitement visibles Ă  l'Ɠil nu. Ailleurs que dans le carrĂ© de 
deux ares le champignon ne s’est dĂ©veloppĂ© qu'aprĂšs les pluies d'octobre. 
Les vers s’étaient enfoncĂ©s plus bas et on n’a rien constatĂ©. PĂ©riront-ils 


Les lettres que nous venons de citer ont été publiées par M. A. 
Giard?, celles qui suivent ont été publiées dans le supplément du 
Bulletin du Syndicat central des agriculteurs de France du 1° avril 
1893 ; ces lettres étaient adressées à MM. Fribourg et Hesse. 

Nous n’extrayons de ces lettres que les passages concernant les 
essais en plein champ, négligeant les petites expériences faites dans 
des caisses ou des pots Ă  fleurs qui ne donnent aucun renseigne- 
ment intéressant ou nouveau. 


1. M. Delacroix fait remarquer que la disparition apparente des vers blanes observée 
par M. Leyzour coincidait avec leur transformation en nymphes (Journ. d’agr. pral., 
tirage Ă  part, Librairie agricole, 26, rue Jacob, Paris). 

2. À Giard, loc. cil., p. 93 et suivantes. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 449 


5. — Lettre de M. de Bossereille (Maine-et-Loire) : 


21 septembre 1891. 
4 


Vous me demanilez le résultat de mes essais de contamination des vers 
blancs. Je suis d'autant plus heureux de vous les transmettre que j'ai été 
pleinement satisfait des tubes que vous m'avez adressés. Le premier envoi 
est de fin juillet et le seconil de septembre. Les premiers tubes Ă©taient 
destinés à mes propriélés des environs de Segré. Ne pouvant m'occuper 
moi-mĂȘme de leur emploi, j'avais envoyĂ© des instructions Ă  mon garde. 

Il devait saupoudrer un grand nombre des vers étalés sur des planches 
et au bout de douze Ă  quatorze heures les mettre dans des boĂźtes, dont 
le fond contenait une couche de terre légÚre (4 à 5 centimÚtres). Un lit 
de mousse recouvrant celte terre devait en maintenir l'humidité; ces 
boĂźtes furent placĂ©es dans diffĂ©rents locaux, voire mĂȘme en plein air. C’est 
dans un appartement presque obscur et sous une tablette de verre que 
les résultats furent les meilleurs. Les insuccÚs partiels ont été dus à un 
excÚs d'humidité et aussi à une trop grande agglomération de vers. Les 
animaux se battent, se blessent avec leurs pinces et meurent. Au fur et 
à mesure que les vers étaient momifiés et bien roses, ils étaient déposés 
dans les champs avec deux ou trois centimĂštres de terre en couverture. 
En dehors de ces essais Ă  l’intĂ©rieur, le garde devait saupoudrer des vers 
sur place sans les dĂ©ranger. Il a Ă©tĂ© impossible de constater l’effet pro- 
duit, les vers pouvant ĂȘtre allĂ©s mourir fort loin du lieu de contamination. 
Cet essai a amené un résultat inattendu. 

Au commencement de décembre, le garde a trouvé sur terre, au mi- 
lieu d’un champ ensemencĂ©, un ver couvert de mycĂ©lium, et ce, Ă  800 
ou 1 000 mĂštres du point oĂč les spores avaient Ă©tĂ© rĂ©pandues. 

Je me crois aulorisĂ© Ă  conclure qu'il n’a pas Ă©tĂ© seul atteint et que le 
vent peut entraĂźner fort loin les spores du Botrytis, les pluies se chargeant 
probablement de les amener au contact des vers. 


Leltre du garde de M. de Bossereille : 


J'ai fait hier une bonne découverte en cherchant des vers vivants pour 
M. Fribourg. Dans le jardin de la ferme oĂč j'avais Ă©tĂ© voir si un des gar- 
çons en train de bĂšcher la vigne n’en trouvait pas, ayant remarquĂ© quelque 
chose de blanc sur la terre retournée, je vis un ver parfaitement momifié. 
J'en ai trouvĂ© cinq, et dans bien des endroits il n’y avait plus que la pous- 
siÚre blanche. Le ver était complÚtement défait ou bien il ne restait que 
la tĂȘte. Il a dĂ» en ĂȘtre enterrĂ© beaucoup que je n’ai pas vus. 

Je suis allĂ© dans la prairie oĂč j'avais fait mes premiĂšres expĂ©riences et 
j'ai trouvĂ© une dizaine de vers.-LĂ  encore, il y en avait qui n’existaient 

ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — I. 29 


450 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


plus, on ne voyait que l’emplacement du ver et une poussiùre d’un blane 
jaunĂątre. Jen ai trouvĂ© surtout aux environs des endroits oĂč j'avais semĂ© 
du Botrytis; mais aussi quelques-uns au loin. Il n’y a plus d’erreur pos- 
sible, le champignon est dans le pays et le premier fermier que je verrai 
labourer, je suivrai la charrue pour voir si je ne découvrirai pas quelque 
chose. 


Lettre du garde de M. de Bossereille, Ă  Bellevue : 


4 février 1892. 


Voilà la façon dont j'ai opéré pour contaminer les vers en plein champ. 
C’est le 8 aoĂ»t que j'ai reçu le premier tube de Botrytis de M. Fribourg et 
que j'ai commencĂ© dans la prairie de la ferme de Riban. J’ai d’abord sou- 
levĂ© l’herbe et saupoudrĂ© chaque ver sans les dĂ©ranger et recouvert en- 
suite (il est possible qu’en saupoudrant avec la pointe de mon couteau, le 
vent ait emporté beaucoup de spores de Botrytis) ; dans ces endroits-là je 
trouve en ce moment beaucoup de vers contaminés. Ensuite, j'ai semé les 
spores sur la terre et donnĂ© un coup d’arrosoir dans un endroit oĂč j'Ă©tais 
sĂ»r qu’il y avait des vers — en ce moment, je trouve dans ces endroits 
des vers contaminés, mais en moins grande quantité que dans le pre- 
mier cas. 

Enfin, j'ai mis dans la prairie de Riban une trentaine de vers qui avaient 
passĂ© quarante-huit heures dans du sable mĂȘlĂ© avec le Botrytis. 

D’aprĂšs les recherches que j'ai faites, je trouve des vers momifiĂ©s un 
peu partout dans cette prairie (1 kilomĂštre). | 

Dans la prairie de la RibaudiĂšre, oĂč j'avais saupoudrĂ© et mis des vers 
ayant passé vingt-quatre heures dans le sable et le Bofrytis, une dizaine 
de jours plus tard (vers le 22 août), je trouve aussi des vers momifiés, 
mais en moins grande quantité. 

Dans la prairie de la premiĂšre, oĂč j'avais fait la mĂȘme chose, je n'ai 
rien trouvé, mais là il y a beaucoup d'humidité, et je n'ai pas fait de 
grandes recherches. 

Dans les labours, au nord du Granlrais et de la Martinais et au midi 
de Bartort, je n’ai rien trouvĂ©. J'en ai trouvĂ© deux momifiĂ©s dans les 
labours à l’est de Riban (devant la maison). 

Le plus Ă©tonnant, c’est celui trouvĂ© dans le champ de la ChouanniĂšre, 
Ă  900 ou 600 mĂštres d’oĂč j'en avais mis. 

Je ferais bien, je crois, de voir autre part, à Maraus ou au Lion d’An- 
gers, dans des endroits oĂč l’on n’a pas eu de Botrylis, pour voir si je ne 
trouverais pas de vers momifiés. 

S'il y en avait, ce ne pourrait ĂȘtre que le vent qui en aurait apportĂ© de 
la Mayenne, au moment des labours, et de cette façon, cela marcherait 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 451 


tout seul. Si on n’en trouve pas, il y aurait alors deux façons de propager : 
par le vent et par contact; pour ce dernier cas, je crois qu’une boüte 
Ă  2, 4 ou 6 compartiments oĂč il y aurait terre ou sable avec de la semence 
de Botrytis, prise bien Ă  point, et oĂč l'on ferait passer vingt-quatre heures 
Ă  un seul ver seulement par compartiment pour qu'ils ne se tuent pas 
entre eux. On arrive en peu de temps Ă  contaminer un grand espace. 
Les vers que j'ai trouvés dans les champs mis sur du sable sous une 
cloche ont l’air de se remettre à pousser; il se forme dessus une petite 
mousse blanche ; je remarque que, lĂ  oĂč j'ai commencĂ© le premier Ă  les 
expérimenter, Je trouve le plus de vers momifiés. Ces derniers sont 
Ă  cinq centimĂštres du sol — les vivants sont enfoncĂ©s en ce moment jus- 
qu’au fond de la terre — et il est possible qu'il y en ait qui se soient 
enfoncĂ©s avec la maladie et qui soient morts, qu’on ne retrouvera pas. 


Cette série d'essais ne nous donne que bien peu de renseignements 
précis, si on a trouvé, en effet, dans les champs traités et dans le voi- 
sinage de ses parcelles, quelques vers muscardinés, le nombre des 
vers atteints relativement à ceux qui sont restés vivants semble tout 
Ă  fait insignifiant. 

En somme résultat peu appréciable. 


6. — Lettre de M. E. Devaux : 


La Bazoche, 19 novembre 1S91. 


Vous me demandez des renseignements sur les spores que vous m'avez 
fournies en vue de la destruction des vers blancs; je m’empresse de vous 
les envoyer, heureux s’ils peuvent vous ĂȘtre de quelque utilitĂ©. 

AprÚs avoir procédé suivant vos indications, les corps de quelques vers 
blancs contaminés ont été répandus un à un dans une piÚce de terre de 
neuf hectares plantée en betteraves, carottes et pommes de terre. La 
quantité de vers blancs y était incalculable, ils m'ont détruit les quatre 
cinquiĂšmes de ma rĂ©colte de pommes de terre, et l’on a pu trouver Ă  un 
pied quarante-deux vers. Pour ce motif, la récolte ayant été faite préma- 
turément, les vers contaminés ont été mis aprÚs celle-ci terminée, et 
voici ce que j'ai constaté. 

Lorsque, vingt-trois jours aprĂšs, l’on a commencĂ© les labours pour les 
blés, T5 à 80 p. 100 des vers retournés par la charrue étaient malades, 
les uns présentant tous les caractÚres indiqués dans vos instructions, les 
autres dans un état moins avancé, mais suffisamment atleints déjà pour 
n'avoir plus la force de s’enfoncer en terre et mourir sur place. Le succùs 
Ă©lait tellement Ă©vident que plusieurs personnes de ma commune sont ve- 
nues ramasser des vers pour les mettre sur leurs terres. 


452 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


Dans mes betteraves, le rĂ©sultat a Ă©lĂ© bien infĂ©rieur, el c’est Ă  peine 
si 12 p. 100 des vers étaient atteints quoique le labour eût été fait trois 
semaines oĂč un mois aprĂšs celui de pommes de terre. 

Pour moi, en voici le motif. Dans la portion plantée en pommes de 
terre, comme celles-ci venaient d’ĂȘtre arrachĂ©es, les vers se sont remuĂ©s, 
ont couru à la recherche de nourriture et, par conséquent, ont répandu 
la maladie un peu partout ; dans les carottes et betteraves, au contraire, 
trouvant tout ce qui leur Ă©tait nĂ©cessaire, ils n’ont pas bougĂ©, car le ver 
blanc est essentiellement sédentaire. 

J'en conclus, par consĂ©quent, qu’il est prĂ©fĂ©rable d’ensemencer avec 
les spores les terres privĂ©es de rĂ©coltes et venant d’ĂȘtre labourĂ©es, la 
contamination se produisant presque instantanément. Un dernier mot en 
terminant, pour rĂ©pondre aux craintes qui m’avaient empĂȘchĂ© d’essayer 
le Botrytis tenella, dĂšs son apparition, craintes que je sais ĂȘtre partagĂ©es 
par un grand nombre de personnes. 

Environ 250 ou 300 poules ont, selon leur habitude, accompagné les deux 
charretiers pendant tous les labours ; ce qu’elles ont consommĂ© de vers 
blancs est incalculable, et pas une n’a Ă©tĂ© indisposĂ©e; c'est, je crois, la preuve 
évidente que ces spores ne présentent aucun danger pour les autres animaux. 


Le résultat accusé par cette lettre est plutÎt trop favorable. I a 
suffi de distribuer quelques vers blancs contaminés sur un espace de 
neuf hectares, pour obtenir en %3 jours la destruction de 79 p. 100 
des mans qui ravageaient ces champs. 

Or, nous savons qu’il faut au moins quinze jours pour qu’un ver 
contaminé se transforme en momie et produise des spores, qui 
seules peuvent, à leur tour, transmettre la contagion à d’autres sujets. 

Il aurait donc fallu que tous les vers blancs du champ en question 
soient venus en 2 ou 3 jours se frotter contre les momies sporulées 
pour devenir malades 5 ou 6 jours aprĂšs. 

Cela nous semble inadmissible et si les 75 Ă  80 p. 100 des vers 
signalés dans la lettre comme malades étaient réellement muscar- 
dinĂ©s, il nous semble beaucoup plus probable qu’on se trouvait lĂ  
en prĂ©sence d’une Ă©pidĂ©mie spontanĂ©e. 


7.— Lettres de M. J. Triboudeau (Ă©lĂšve diplĂŽmĂ© de Grand-Jouan) : 


Grand-Jouan, 13 novembre 1891. 


J'ai complÚtement réussi dans l'essai que j'ai tenté, mais avant de vous 
répondre, j'ai voulu me rendre compte de l'efficacité du procédé. Hier, 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 493 


j'ai fait labourer la parcelle qui avait porté des betteraves et des carottes 
et dans laquelle j'avais crĂ©Ă© des foyers d’infection. À chaque raie de 
charrue, les laboureurs trouvent trois Ă  quatre mans plus ou moins con- 
taminés, les uns complÚtement recouverts du champignon destructeur, 
enveloppés comme dans un cocon blanc duquel se détachent en rayonnant 
les filaments du parasite cherchant une nouvelle victime. Les autres ont 
seulement les premiers anneaux de leur corps attaqués par la terrible 
moisissure et affectent particuliÚrement ia couleur violacée caractéristique. 

Chaque raie mesurant 100 mĂštres de long, 33 centimĂštres de large, 
a donc montré quatre turcs détruits, ce qui représente un nombre de 
1 200 par hectare. Il est incontestable que la charrue n’a pas mis à nu 
toutes les larves et que ce chiffre est un minimum; nul doute donc que 
dans la période de trois années qui est nécessaire pour la transformation 
de la larve en hanneton on ne puisse arriver à détruire tous les vers 
blancs. 

Le 26 mai 1892. 
Monsieur, 

Depuis mes premiers essais de J’automne dernier, j'ai trouvĂ© sur des 
parcelles distantes de cinq Ă  six cents mĂštres du premier champ conta- 
miné un nombre assez grand de larves alteintes par le Bofrytis tenella et 
Ă  une profondeur pour quelques-unes d'environ 0",30. Ge fait semble- 
rait donc indiquer que par un moyen quelconque la transmission et la 
propagation des spores ont dĂ» s’opĂ©rer avant l'hiver ou les premiers 
froids, que, ceux-ci survenus, les turcs dĂ©jĂ  malades s’enfonçant plus 
profondĂ©ment ont trouvĂ© la mort dans leurs quartiers d'hiver oĂč ils sont 
restés momifiés. 


8. — Lettre de M. PrĂ©voleau : 
Augervilliers, 4 mai 1892, par Limours (S.-et-0 ). 


Îl m'est absolument prouvĂ© aujourd'hui que le contact d’une des spores 
de ces tubes (cultures Fribourg et Hesse) suffit à faire périr un ver blanc, 
que ce ver, au bout d'un temps variable (de 2 Ă  3 mois, souvent plus, en 
hiver), donne une assez grande quantité de spores nouvelles qui donnent 
la maladie Ă  des vers sains Ă  la condition d’ĂȘtre mis en contact avec eux. 
De lĂ  Ă  prĂ©dire le succĂšs de cette mĂ©thode il n’y a qu'un pas. Je dois 
vous rendre compte des expériences qui m'ont fait connaßtre ces résul- 
tats. Dans le mode d'emploi des tubes, j'ai modifié le moyen indiqué en 
ce sens que j'ai contaminĂ© les vers sur le terrain mĂȘme, ce qui m'a per- 
mis de le faire en moins de temps, puisque je n'avais pas Ă  les ramasser 
pour les rapporter ensuite. J'ai employé à cet effet un flacon à goulot plus 
large que les tubes, dans lequel chaque jour je mettais une petite quan- 


454 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


litĂ© de spores et un petit tampon de ouate fixĂ© au bout d’un fragment 
d'aiguille Ă  tricoter dont je me servais comme d’un lĂ©ger pinceau pour 
saupoudrer les vers blancs. Aux labours de déchaumage, aux derniers 
labours de jachÚres, en août et en septembre, j'ai contaminé les vers de 
place en place par ce procédé et j'avais soin de les replacer dans la terre 
fraĂźchement remuĂ©e afin de leur Ă©viter l’action du soleil et le choc de la 
charrue. Aux labours d'octobre, pour ensemencer en blé des terrains 
ainsi traités, je n'ai pu mettre à découvert une assez grande quantité de 
larves mortes enveloppĂ©es d’une moisissure blanche qui leur donnait l'as- 
pect de cocons de grosses chenilles. J’ai pu constater la maladie dans 
quelques parties que je n'avais pas traitées, ce que j'ai attribué au lrans- 
port de spores enlevées de mes flacons soit par le vent, soit par mes vÚ- 
tements. Je n’ai pas encore pu constater si, dans ces terrains, la maladie 
gagnait de proche en proche, mais j'ai traité de cette façon des embla- 
vures de trĂšfle incarnat que je labourerai en juillet, et lĂ , je pourrai ĂȘtre 
fixĂ© d'autant mieux que l'apparition des hannetons n'ayant lieu qu’en 1893 
dans nos contrées, les vers contaminés et morts resteront seuls dans le 
labour à cette époque, les autres étant enfouis pour la métamorphose. 


9. — Lettre de MM. Westerweller et Rigot, corralerie (Genùve) : 


GenĂšve, 7 novembre 1892, 


Nous avons mis en terre nos vers blancs badigeonnés conformément 
aux prescriptions contenues dans votre brochure le 28 juillet. Nous ne 
disposions pas d’une parcelle entourĂ©e de bois ou de chemins et avons 
fait l’essai dans une parcelle en culture (betteraves et fourrages verts) et 
dans une prairie contiguë. Nous avons utilisé deux tubes et contaminé 
environ 200 vers. 

Nous venons de labourer les parcelles en culture et avons constaté que 
nombre de vers sont complĂštement momifiĂ©s, les spores en rĂ©sultant s’é- 
tendent dans le sol Ă  plusieurs endroits et on le constate facilement. 

Mais nous avons retrouvé une quantilé assez grande de vers parfaite- 
ment sains et vigoureux. 


10. — Lettre de M. Pailleret, agriculleur à Vauluisant, par Vil- 
leneuve-l’ArchevĂ©que (Yonne) : 
26 octobre 1892. 


Je vous écris un peu tard, au sujet des tubes que vous m'avez expédiés 
en juin dernier. J'ai voulu, avant de vous Ă©crire, possĂ©der moi-mĂȘme des 
renseignements certains au sujet de la propagation du Botrytis tenella. 
J'ai commencé mes expériences aussitÎt les tubes reçus; j'ai obtenu de 
suite le Botrytis lenella, mais tout d'abord avec de nombreux Ă©checs que 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 4)9 


j'attribue à la sécheresse excessive dont nous avons été afiligés cette année. 

Comme je m'attendais à ce résultat, je n'avais disposé que de la moitié 
des tubes. J’ai attendu, pour employer l’autre moitiĂ©, une bonne pluie 
d'orage, qui est arrivée en juillet. Immédiatement derriÚre mes charrues, 
j'ai placé les vers contaminés ; malheureusement, cette fois encore, la 
terre est redevenue trÚs sÚche puisque nous avons eu deux mois (août et 
septembre) sans pluie. NĂ©anmoins, au labour donnĂ© fin aoĂ»t, j’ai observĂ© 
des vers momifiés ou atteints par le Botrylis lenella, dans la plus grande 
partie de la piĂšce de terre oĂč j'avais expĂ©rimentĂ©. Toutefois, comparĂ©e Ă  
l'immense quantité de vers blancs, la quantité était absolument négligeable 
et la lenteur de la propagation me paraissait un obstacle invincible. 

Il y a huil jours, j'ai fait donner le labour de semailles; cette fois-ci, 
j'ai été émerveillé par la quantité de vers blancs, morts, mourants ou at- 
teints par le Botrytis tenella. Dans certains endroits, la terre est remplie 
de taches blanches de Botrytis et la quantité de vers blancs est incalcu- 
lable. Ici, le résultat est certain et, je puis le dire, a dépassé mes espé- 
rances. 

A noter qu’il est impossible de se rendre compte du travail fait par les 
vers contaminĂ©s sans faire labourer ou bĂȘcher tout le terrain sur lequel 
on à opéré, car le ver blanc voyage beaucoup avant de mourir. 

Je ne saurais trop engager ceux de mes collÚgues qui sont affligés par 
le mĂȘme flĂ©au Ă  employer le Potrytis tenella, et surtout qu'ils ne se dĂ©- 
couragent pas si, tout d’abord, le rĂ©sultat ne rĂ©pond pas Ă  leur attente. 
Je suis bien dĂ©cidĂ© Ă  recommencer l’an prochain mes expĂ©riences dans 
plusieurs terrains différents et dans différentes conditions, afin d'étudier 
avec plus de détails l'existence du bienheureux parasite. La ferme de 
Vauluisant, par son Ă©tendue et la diversitĂ© de ses terrains, se prĂȘte, du 
reste, trĂšs bien Ă  cette Ă©tude. 

J'ajoute un dĂ©tail dans le mode de traitement qui aura peut-ĂȘtre son 
importance. J’ai suivi, pour la moitiĂ© des tubes, la mĂ©thode d’inoculation 
indiquĂ©e par la brochure ; je m'empresse d'ajouter qu’elle n’a donnĂ© de 
trĂšs bons rĂ©sultats ; mais j'ai obtenu d’autres rĂ©sultats non moins bons 
en opĂ©rant ainsi qu’il suit, ce qui est, Ă  n’en pas douter, beaucoup plus 
simple : je verse dans une petite soucoupe la poudre blanche de Botrytis 
et, suivant dans la raie, derriĂšre la charrue, Ă  l'aide du tampon de ouate 
qui ferme le tube, je saupoudre le ver blanc dans la raie ; Ă  la seconde 
raie faile par la charrue, il est immédiatement enterré. Par ce moyen, je 
supprime toutes les prĂ©parations : terrine plate, blanc d’Ɠuf, etc., et, 
comme je vous l'ai dit plus haut, j'ai obtenu le mĂȘme rĂ©sultat. Je n'irai 
pas jusqu'Ă  conseiller ce procĂ©dĂ© qui est peut-ĂȘtre par trop primitif et que 
Je me rĂ©serve d’expĂ©rimenter. 

Je constate seulement le fait. 


496 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


41. — Lelire de M. Ovide Benoist, agriculleur à Gas, par Eper- 
non (E.-et-L.): 
Gas, le 22 mai 1892. 


Vers les premiers jours d'avril dernier, vous m’adressiez, sur la recom- 
mandation de M. Garola, professeur d'agriculture d’Eure-et-Loir, deux 
tubes d'essais de votre fabrication du Botrytis tenella, et je dois aujour- 
d’hui vous rendre compte du rĂ©sultat obtenu. 

Le premier tube que j'ai employé le fut le lendemain de son arrivée en 
suivant exactement les prescriptions qui y Ă©taient jointes; mais, au bout 
de quinze jours, probablement Ă  cause de la basse tempĂ©rature qu’il fai- 
sait Ă  cette Ă©poque, aucun ver n’était encore contaminĂ©, et ce n’est qu’a- 
prÚs un mois, vers les premiers jours de mai, aprÚs quelques journées 
chaudes (le pot Ă©tait exposĂ© au midi d’un mur pour subir une tempĂ©rature 
plus élevée et fréquemment arrosé), que je pus constater le plein succÚs 
du procédé. 

Le second tube fut employé huit jours aprÚs son arrivée et me donne 
les mĂȘmes rĂ©sultats en ce moment; je puis donc vous assurer de ma sa- 
tisfaction de la valeur de vos produits, et si l’annĂ©e derniĂšre, Ă  l'automne, 
je n’ai pas rĂ©ussi avec les tubes que vous m’aviez encore gracieusement 
envoyés, cela a dû dépendre des instructions que vous donniez alors : de 
ne laisser les vers que six heures en contact avec le ferment pour les dis- 
séminer ensuite. 

Il me paraüt bien aujourd’hui qu’il faut un temps beaucoup plus long, 
surtout quand la température est basse. 

Avec le produit restreint que j'ai déjà obtenu, je compte maintenant 
contaminer { 500 vers que j'ai mis Ă  nouveau dans un grand baquet rem- 
pli de terre, et alors quand j'aurai obtenu cet abondant ferment de Bo- 
trytis tenella, je le disperserai sur mes terres infestées de vers blanes, et 
je pourrai par la suite vous rendre compte des rĂ©sultats que j’obtiendrai. 


Nous avons tenu à citer celte derniùre lettre, bien qu’elle ne relate 
que les rĂ©sultats d’une expĂ©rience faite dans un pot Ă  fleurs, parce 
qu’elle signale un procĂ©dĂ© sur lequel nous aurons Ă  revenir plus 
loin. Il s’agit de la prĂ©paration des momies en grande quantitĂ© pour 


les distribuer ensuite dans les champs envahis. 


Nous avons trouvé en tout onze attestations favorables. Il est pos- 
sible qu’on ait obtenu des rĂ©sultats analogues dans quelques autres 
cas que nous ne connaissons pas, mais, en admettant mĂȘme que le 
nombre de cas dans lesquels on a réussi à propager l'épidémie ait 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 4517 


Ă©tĂ© dix fois supĂ©rieur Ă  celui que nous venons d’annoncer, cela ne 
changerait en rien la conclusion que l’on doit tirer de l’ensemble des 
essais faits depuis trois ans, c’est-à-dire depuis que l’on a mis les 
cultures de muscardine Ă  la disposition des agriculteurs. 

D’une part, nous constatons que sur 100 essais on n’a eu que tout 
au plus un succùs à enregistrer ; d’autre part, {ous ces essais en 
grande culture, quel qu’en ait Ă©tĂ© d’ailleugs le rĂ©sultat, ont Ă©tĂ© faits 
dans des conditions telles qu’il est impossible aujourd’hui d’en tirer 
le moindre renseignement précis. 

Tous ces essais ne nous ont appris ni la proportion des hannetons 
et des vers blancs qui, saupoudrés directement de spores, un à un, 
succombent muscardinĂ©s, — ni le meilleur procĂ©dĂ© pour infester le 
plus grand nombre de sujets, toutes choses d’ailleurs Ă©gales, — ni 
la proportion et la nature des cultures naturelles ou artificielles qu'il 
faudrait employer pour obtenir un résultat probable dans un temps 
et sur un espace donnĂ©, — ni dans quelles conditions et dans quelles 
terres la muscardine peut se développer et pendant combien de temps 
elle peut conserver sa virulence pour les vers blancs. — En un mot, 
il est impossible de savoir encore aujourd’hui quel rĂ©sultat approxi- 
matif on pourrait espĂ©rer d’obtenir en grande culture, au moyen d’un 
traitement que des expériences préalables auraient montré le plus 
efficace, et cela pour la bonne raison qu’on n’a pas songĂ© Ă  faire une 
seule expérience précise, avant de passer à la pratique. 

On a proposé l'application en grand de la muscardine, la prépara- 
tion et la vente de ce produit est devenue une affaire commerciale, 
bien avant qu’on ait eu le temps d'Ă©tudier la question, mĂȘme au point 
de vue purement scientifique’. Aussi en est-il rĂ©sultĂ©, comme on 
devait s’y attendre, que cette mĂ©thode qui est appelĂ©e peut-ĂȘtre Ă  
rendre de grands services à l’agriculture se trouve complùtement 
discrĂ©ditĂ©e aujourd’hui. 

« Que serait devenue, dit M. Giard?, la pratique si utile de la vac- 


1. La muscardine a été mise en vente en automne 1890, tandis que le travail de 
M. Giard, c’est-à-dire le premier travail complet sur l’Zsaria densa, parasite du han- 
neton, n’a paru que le 5 mai 1893. 


2. À. Giard, Loc. cit., p. 86. 


458 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


cination contre le charbon, quel résultat aurait donné le traitement 
antirabique par inoculation prĂ©ventive, si M. Pasteur n’avait gardĂ© en 
quelque sorte le monopole de ces précieuses découvertes et n'avait 
surveillĂ© lui-mĂȘme ou avec l’aide de ses disciples immĂ©diats lappli- 
cation des nouvelles méthodes ? ». 

Et nous pouvons ajouter, que seraient devenues ces découvertes 
si, aprÚs les premiÚres expériences de laboratoire, M. Pasteur avait 
confié la préparation et la vente de ses vaccins à une maison de com- 
merce qui les aurait fabriqués et /ancés comme on lance dans le com- 
merce un spécifique infaillible quelconque ? 

On aurait certainement eu de nombreux accidents à déplorer et le 
cultivateur, déjà trÚs méfiant et sceptique en ce qui concerne toutes 
ces nouveaulĂ©s, n'aurait jamais consenti Ă  profiter d’une des plus im- 
portantes découvertes de ce siÚcle. 

Le plus mauvais service qu’on ait pu rendre à la cause de la pro- 
pagation des méthodes scientifiques parmi les cullivateurs et par con- 
sĂ©quent Ă  l’agriculture, c’est d’avoir procĂ©dĂ© comme on l’a fait pour 
la muscardine du ver blanc. Non seulement on n’a obtenu aucun 
résultat appréciable en fait de destruction des hannetons et des vers 
blancs, mais, £e qui est plus grave, on a appelé scientifique une fa- 
çon d'opérer qui n'avait en réalité de scientifique que le nom. 


En rĂ©sumĂ©, on peut affirmer aujourd’hui, d'une part, que si les 
essais tentĂ©s jusqu’à prĂ©sent n’ont donnĂ© que des rĂ©sultats peu encou- 
rageants, ces mauvais rĂ©sultats ne sont dus qu’à l'emploi de procĂ©dĂ©s 
insuffisamment étudiés; d'autre part que, la destruction des hanne- 
tons et des vers blancs par des épidémies naturelles de muscardine 
Ă©tant une chose absolument certaine, il ne nous semble pas impos- 
sible de propager ces épidémies. 

Il ne faudrait, pour y arriver, qu’entreprendre à nouveaux frais des 
recherches expérimentales proprement dites. La durée de ces re- 
cherches sera peut-ĂȘtre longue, l'Ă©tude complĂšte de celte importante 
question demandera peut-ĂȘtre beaucoup de soins et d'application, 
mais comme c’est le seul moyen d'arriver Ă  un rĂ©sultat certain, il 
se trouvera toujours un nombre suffisant de personnes dévouées à 
l’agriculture pour entreprendre cette Ă©tude dans l'intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 499 


Étude expĂ©rimentale de l'application de la muscardine Ă  la 
destruction des hannetons et des vers blancs en grande 
culture. 


Nous avons vu dans un des chapitres précédents (p. 442 el suiv.) 
qu’il y a une diffĂ©rence trĂšs marquĂ©e entre le mode de transmission 
des maladies bactériennes et la façon dont peut se répandre une 
maladie des insectes causée par un champignon entomophyte. 

Or, il y a une différence non moins sensible entre les maniÚres 
dont ces deux genres de maladies et leurs applications Ă©ventuelles 
peuvent et doivent ĂȘtre Ă©tudiĂ©es. 

Les méthodes d'investigation seront, bien entendu, toujours les 
mĂȘmes en ce que toutes les recherches expĂ©rimentales, quel qu’en 
soit d’ailleurs l’objet, ont de commun : une prĂ©cision el un contrĂŽle 
suffisants pour que chaque observalion isolée puisse fournir son con- 
tingent de renseignements exacts et pour que, de l’ensemble de ces 
observations recueillies en nombre suffisant, oĂč puisse tirer des con- 
clusions certaines. 

Mais si, par exemple, pour l'Ă©tude des maladies contagieuses des 
hommes, il suffit d’avoir Ă  sa disposition un laboratoire bien installĂ© et 
un certain nombre de sujets d'expérience ; si, dans ce cas, un savant 
peut, sans pour ainsi dire sortir de son laboratoire, étudier et pré- 
parer ses virus ou ses vaccins et les distribuer ensuite avec des ins- 
tructions suffisantes pour que tout le monde puisse s’en servir et en 
obtenir des rĂ©sultats certains et prĂ©dits, il n’en est plus du tout de 
mĂȘme quand il s’agit d'atteindre des ĂȘtres qui vivent dans la terre 
isolément, ne communiquant entre eux que par hasard et dont la 
présence sous lerre ne nous est révélée que quand ils produisent des 
ravages visibles à la surface ; quand il s’agit en outre de les atteindre 
au moyen d’un virus qui ne peut agir que sous une forme et dans 
des conditions spĂ©ciales qu’il faut dĂ©terminer. 

L'Ă©tude de la destruction des vers blancs par la muscardine se 
trouve précisément dans ce dernier cas. 

Le ver blanc vit dans la terre, c’est donc en plein champ, dans 
son milieu naturel, qu'ii faut Ă©tudier les moyens de l’atteimdre. 


460 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

Les expĂ©riences de laboratoire, bien qu’indispensables, seront, 
dans ce cas, absolument insuffisantes ; elles nous apprendront la fa- 
çon de procéder pour préparer les cultures les plus virulentes et 
pour atteindre le plus grand nombre des sujets en les traitant par 
inoculalion directe, mais ne nous donneront jamais que des indica- 
tions bien vagues sur le traitement Ă  suivre en plein champ. 

Nous ne saurions mieux comparer cette Ă©tude qu’à celles de l’ap- 
plication des engrais ou des semences qui demandent, elles aussi, 
tout d’abord des recherches de laboratoire, ensuite des expĂ©riences 
dans des petits champs d’essai et, en dernier lieu, toute une sĂ©rie 
d’essais en grande culture. 

Pour toutes ces Ă©tudes la collaboration directe de l’agriculteur est 
absolument indispensable, elle seule donnera des résultats pratiques 
Ă  la condition toutefois d’ĂȘtre bien dirigĂ©e et d’ĂȘtre conduite avec 
méthode. 

* Ainsi, en rĂ©sumĂ©, pour mener Ă  bonne fin l’étude de la destruc- 
tion des hannetons et des vers blancs par la muscardine, il faut en- 
treprendre un ensemble de travaux, Ă  savoir : 

1° Recherches de laboratoire ; 

2° Recherches expĂ©rimentales dans des petits champs d’essai ; 

3° Étude des applications en grande culture. 


1° Recherches de laboratoire. 


Cette partie est la seule de l’ensemble de l’étude qui a reçu jus- 
qu’à prĂ©sent un commencement d'exĂ©cution. Nous savons aujour- 
d’hui avec certitude: 

1° Que les spores mûres peuvent donner la maladie aux vers blancs 
et aux hannetons par simple contact, c’est-Ă -dire qu’il suffit de dĂ©- 
poser sur le corps de ces insectes un certain nombre de ces spores, 
pour les infester et les faire mourir muscardinés ; 

2° Que ces spores virulentes peuvent ĂȘtre recueillies soit sur des 
insectes morts muscardinés, soit sur des cultures artificielles de 
muscardine (cultures sur pomme de terre, sur gélatine ou sur des 
milieux nutritifs liquides). 

Les rĂ©sullats des expĂ©riences de laboratoire faites jusqu’à prĂ©sent 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 461 


peuvent nous fournir déjà quelques indications intéressantes. Nous 
citerons toutes celles dont nous avons pu avoir connaissance et que 
nous avons faites nous-mĂȘmes. 


EpĂ©riences faites par M. Jean Dufour’, directeur de la Station viticole 
de Lausanne. 


A. — Le 30 juillet, trois gros vers blancs vivants furent placĂ©s dans un 
pot, dans du terreau. On sema directement sur les vers des dĂ©bris d’un 
insecte momifiĂ© provenant d’un gisement naturel. Le 5 aoĂ»t: un ver mort 
rose, deux vers vivants. Le 21 août : deux vers morts muscardinés, un 
vivant. Le 28 octobre : Deux vers muscardinés, un vivant. 


B. — Le 30 juillet : trois petits vers blancs de l’annĂ©e dans du terreau, 
infestés avec des débris des vers morts. Le 20 août : tous vivants, intectés 
de nouveau avec la moisissure du pot À. Le 28 octobre : les trois vers 
sont morts momifiés. 


D. — Le 5 aoĂ»t : terre de jardin ordinaire. Dix vers de seconde annĂ©e 
infestés avec une culture de MM. Prillieux et Delacroix (culture sur pomme 
de terre). Cette culture fut raclée au-dessus des vers qui en recevaient ainsi 
les débris. Le 28 octobre : neuf vers vivants, un seul mort muscardiné. 


E. — Le 5 aoĂ»t : terre forte. Une vingtaine de petits vers blancs. In- 
lection par arrosage d'eau dans laquelle un fragment de culture Prillieux 
avait été émielté. Le 27 octobre : sept vers vivants, un mort, noir, non 
infeclé, un seul contaminé, complÚtement recouvert de moisissure. Les 
autres avaient disparu. 


F. — Le 5 aoĂ»t : six vers de seconde annĂ©e dans un pot avec terre de 
jardin. Les six vers sont enfouis aprĂšs avoir Ă©tĂ© trempĂ©s dans de l’eau 
contenant des débris de culture Prillieux. Le 28 octobre : les six vers 
morts, attaqués par le champignon; trois sont déjà à demi décomposés. 
La terre du vase est remplie des masses blanches du Botrytis. 


G.— Le 2 septembre: mis dans un pot trois vers blancs vivants et deux 
morts, couverts de moisissure. Le 23 octobre : pas de changement, in- 
fection nulle. 


Cette sĂ©rie d’expĂ©riences nous montre : 
1° Que les spores récoltées sur les momies (A et B) ont détruit 
o vers sur 0; 


1. Jean Dufour, Note sur le Botrylis lenella, etc. (Bull. Soc. vaud. sc, nal., 
XXVIIT, 106) 


462 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


2° Que les spores des cultures artificielles sur pomme de terre 
employĂ©es de la mĂȘme façon Ă  l’état sec n’ont dĂ©truit que 2 vers sur 
90 (expériences D et E) ; 

3° Que les spores des cultures artificielles dĂ©layĂ©es dans l’eau ont 
détruit 6 vers sur 6; 

4° Que 2 vers momifiés enfermés avec 3 vers vivants dans un espace 
d'environ un dĂ©cimĂšĂȘtre cube n’ont donnĂ© aucun rĂ©sultat. 

Le nombre de ces expériences et surtout le nombre de sujets trai- 
tĂ©s est trop restreint pour qu’on puisse en tirer des enseignements 
précis, toutefois elles tendent à démontrer : 

1° Que les spores récoltées sur des momies sont plus virulentes 
que celles provenant de la culture artificielle qui a été employée dans 
ce cas particulier ; 

2° Que, toutes conditions d’ailleurs Ă©gales, l’infestation par contact 
direct est plus certaine en employant des spores délayées dans un 
liquide qu’en les emplovant Ă  l’état sec. 

M. G. Delacroix ‘ a fait une sĂ©rie d’expĂ©riences sur les vers blancs 
et sur les hannetons. 

Pour infester les vers blancs il a employé le procédé que nous 
avons indiqué plus haut (p.445). En saupoudrant les vers blancs bien 
sains de spores Ă  l’état sec et en laissant ces vers disposĂ©s sur une 
mince couche de sable humide pendant 4 à 6 heures, de façon à ce 
qu'ils ne puissent pas se dĂ©barrasser de leurs spores en s’enfonçant 
dans la terre, M. Delacroix a obtenu, en moyenne, l’infestation des 
quatre cinquiÚmes des vers blancs traités. Dix à quinze jours aprÚs 
l'opération, les vers morts muscardinés étaient déjà couverts de 
moisissure. 

Pour infester les hannelons, M. Delacroix a enfermé ces insectes 
dans un cristallisoir et les a aspergĂ©s Ă  l’aide d’un pulvĂ©risateur, de 
spores dĂ©layĂ©es dans de l’eau stĂ©rilisĂ©e. 


« Les 20 et 21 juin : 134 hannetons ainsi traités furent placés dans un 
panier avec des feuilles fraßches. Le 23 juin : 65 hannetons avaient péri ; 
pas de trace de moisissure sur leur corps. On les retira et ils furent pla- 
cés sur du sable humide sous une cloche. 


1. Journal de l’agriculture pralique, n°5 des 23 et 30 juillet, 6 et 13 aoĂ»t 1891 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 463 


Le 26 juin, une seconde série de 42 hannetons, et le 30 juin une der- 
niÚre de 27 étaient retirés morts sans moisissure visible et placés dans 
les mĂȘmes conditions que les premiers. 

De la premiÚre série (65 hannetons) on observa sur un seul la moisis- 
sure caractéristique qui commença à s'y développer aprÚs un séjour de 
o jours en chambre humide ; les autres pourrirent. 

De la deuxiĂšme sĂ©rie, 30 sur 42 s’infectĂšrent ; dans la troisiĂšme sĂ©rie 
l'infection s’opĂ©ra sur les 27 hannetons sans exception. Ce sont donc les 
hannetons qui ont vĂ©cu le maximum de temps (9 jours) chez qui l’infec- 
Lion a le mieux réussi. C'étaient les plus jeunes. Et, fait remarquable, pas 
une seule des femelles infestĂ©es n’a pondu. » 


M. Delacroix conclut de celte expĂ©rience qu’en traitant des han- 
netons jeunes, autant que possible le jour mĂȘme de leur sortie de 
terre, on arriverait Ă  les infester presque tous. 

Une expĂ©rience analogue a Ă©tĂ© faite par M. Fontaine’, membre de 
la Société d'agriculture de Melun. 


M. Fontaine a opéré sur 1 000 hannetons enfermés dans une caisse 
avec une couche de terre de 20 centimĂštres. Sur les 1 000 hannetons sau- 
poudrés de spores, 100 sont rentrés en terre, 300 sont morts à la surface. 
Deux mois aprĂšs l’opĂ©ration, on a trouvĂ© : 


HANNKTONS 
a — 


morts morts 

muscardinés, non muscardinés. 
Dans-hiterre. 2 Rene 329 371 
AN IAFSUT ACT. SEE RE 60 240 
ENDRIOUL TA TIANERCS 389 611 


Le 29 décembre 1893, nous avons enfermé dans une caisse de 80 cen- 
timĂštres de long sur 60 centimĂštres de large et 60 centimĂštres de haut 
250 vers blancs de deuxiÚme année. 

Les vers blancs ont été disposés sur cinq couches superposées séparées 
les unes des autres par des couches de terre de 6 Ă  8 centimĂštres. Pour 
nourrir les vers blancs, des pommes de terre ont élé répandues à profu- 
sion sur chaque couche. 

Tous les vers blancs ont Ă©tĂ© saupoudrĂ©s de spores Ă  l’état sec (1"° cul- 
ture de M. Delacroix). 


1. Supplément du Bullelin du Syndicat central des agriculleurs de France du 
197 avril 1893. 


464 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


La caisse, recouverte de mousse et arrosée de temps en temps, à 
Ă©lĂ© placĂ©e dans une serre oĂč rĂ©gnait une tempĂ©rature constante de 12 
440% 

Le 7 mai 1894, la caisse a été ouverte et la terre tamisée. Il a été 
trouvé : 


Vers blancs morts muscardinés couverts de moisissure qui a 


poussé des ramifications dans la terre de tous cÎtés. . . . 96 
Vers blancs morts muscardinés rouges. . . . . . . . . . 8 
Vers'blancs vivantstet bien portants EPP RE 50 
Vers blancs morts non muscardinés ou disparus . . . . . . 96 

Totale IA PRE 250 


Les 90 vers blancs vivants ont été trouvés presque tous au 
fond de la caisse oĂč ils sont descendus pour se transformer en 
nymphes. (Maintenus pendant les trois mois d'hiver dans une 
serre chaude, les vers blancs en expérience pouvaient se trans- 
former deux mois plus tĂŽt que dans les conditions ordinaires.) On 
peut donc les considérer comme définitivement échappés à la con- 
lagion. 

En somme, en saupoudrant les vers blancs avec des spores Ă  sec, 
nous avons obtenu leur destruction par la muscardine dans la pro- 
portion de #1 p. 100. 


Le 21 mai 1894, 95 hannetons ont été enfermés dans un bocal, sau- 
poudrĂ©s de spores Ă  sec (deuxiĂšme culture prĂ©parĂ©e par nous-mĂȘme), 
laissés ainsi pendant 3 heures et enfermés ensuite dans une grande cage 
à moitié remplie de terre. 

Le 29 mai : 45 hannetons morts Ă  la surface de la terre, les autres, soil 
90 hannetons, enterrés. Les hannetons trouvés à la surface de la terre ont 
été placés dans une chambre humide. 

Le 2 juin, nous trouvons : 

Des 45 hannetons placés en chambre humide, 22 muscardinés ; 

Des 50 hannetons enterrés, 47 muscardinés. 

En tout 79 hannetons muscardinés sur 95 mis en expérience, soit en- 
viron 82 p. 100 infestés. 

Simultanément, nous avons trailé 90 hannetons en les trempant dans 
un liquide sucré et acidulé dans lequel nous avons délayé des spores de 
la mĂȘme culture. 

Le 2 juin, nous avons trouvé, sur 90 hannetons, 61 hannetons, soit 
environ 70 p. 100, muscardinés. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES À L'AGRICULTURE. 469 


En résumant les résultats de toutes les expériences que nous 
venons de citer, nous voyons que les procĂ©dĂ©s employĂ©s jusqu’à 
présent ont donné au laboratoire des résultats favorables dans la 
proportion de 40 à 50 p. 100, c’est-à-dire que sur 100 insectes 
(hannetons ou larves) traités, 40 à 50 ont succombé muscardimés et 
20 à 60 ont échappé à la contagion. Ces expériences qui, au point de 
vue de la qualité des cultures employées, avaient presque toules été 
faites dans des conditions différentes, et dont le nombre est tout à 
fait insuffisant pour qu’on puisse en tirer des renseignements prĂ©cis, 
nous ont montré par contre qu'il nous reste encore à chercher et à 
bien déterminer au laboratoire les points suivants : 

4° La composition et la préparation des milieux nutritifs et des 
cultures artificielles qui donneraient les meilleures garanties au 
point de vue de la virulence et du nombre des spores; 

2 Le mode d'emploi de ces spores pour obtenir, toutes condi- 
tions d’ailleurs Ă©gales, les rĂ©sultats les plus satisfaisants, c’est-Ă -dire 
pour contaminer la plus forle proportion des sujets (vers blancs ou 
hannetons) traités ; 

9° L'Ă©tat de dĂ©veloppement des vers blancs le plus favorable Ă  l’in- 
festation ; 

4° La façon de procéder pour obtenir des spores virulentes aux 
prix les plus réduits. 

Ces données connues, 1l sera possible de procéder, en connais- 
sance de cause, aux expériences en plein champ. 


2° Recherches expérimentales en pleine terre. 


Nous venons de le voir, les expériences de laboratoire ne nous 
apprendront, en somme, qu'à préparer de bonnes cultures viru- 
lentes et Ă  contaminer les vers blancs dans des pots Ă  fleurs. 

Pour apprendre comment il faut procéder pour atteindre les vers 
blancs dans leur milieu naturel, il est indispensable de refaire une 
série d'expériences en pleine terre. 

En effet, 1l s’agit de dĂ©terminer dans quelles conditions, sous quelle 
forme et en quelle quantitĂ© la muscardine doit ĂȘtre introduite dans la 


terre pour s’y dĂ©velopper et atteindre les vers blancs qui s’y trouvent. 


ANN, SCIENCE AGRON. — 1893, — 1. 30 


466 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


« Il eût été intéressant, dit M. Giard!, de faire en grand et dans 
des condilions variées de saison, de terrain, etc., des expériences 
d’infestation artificielle conduites avec mĂ©thode et d’une facon ri- 
soureusement scientifique. » 

L'insuccĂšs de toutes les tentatives faites jusqu’à prĂ©sent pour Ă©ta- 
blir des foyers d’épidĂ©mie dans les champs envahis par les vers blancs 
nous montre que celte étude expérimentale ét rigoureusement scien- 
tifique ne serait pas seulement intéressante, elle est absolument in- 
dispensable ; elle seule peut nous apprendre s'il est possible de 
détruire les vers blancs par la muscardine et comment il faut pro- 
céder pour y arriver. 

Continuer Ă  employer en grand les procĂ©dĂ©s conseillĂ©s jusqu’à 
présent serait perdre bien inutilement du temps et de l'argent. 

Ne fallait-il pas, en effet, une certaine dose de naĂŻvetĂ© pour s’ima- 
giner qu’on atteindra les vers blancs en semant sur un champ des 
spores à raison de quelques tubes ou de quelques boütes à l’hectare, 
ou bien en y enfouissant des petits morceaux de cultures sur pomme 
de terre ou des larves préalablement contaminées, tous les 10, 20 
ou mĂȘme 90 mĂštres ? 

Le seul conseil que l’on puisse donner aux agriculteurs aujourd’hui, 
c’est de commencer sans tarder l’étude expĂ©rimentale proprement 
dite qui seule peut nous donner des renseignements précis et qui ne 
produira de rĂ©sultats apprĂ©ciables qu’avec le concours effectif des 
cultivateurs. 

Cette Ă©tude n’est ni bien difficile ni compliquĂ©e ; pour la mener Ă  
bonne fin il suffit de procéder avec méthode, noter avec soin les 
faits observĂ©s et la poursuivre pendant un, deux ou trois ans, c’esl- 
à-dire le temps nécessaire pour obtenir des résultats définitifs. 

Au lieu de répandre la muscardine au hasard, à une dose plus ou 
moins arbitraire sur toute l'Ă©tendue des champs envahis par les vers 
blancs, il faut commencer par employer la quantité nécessaire de ce 
produit sur un petit champ — spĂ©cialement choisi et prĂ©parĂ© dans 
ce but — pour y obtenir des vers momifiĂ©s en aussi grande quantitĂ© 
que possible. 


1. À. Giard, loc, cit., p. 92. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 467 

Le champ rĂ©servĂ© doit ĂȘtre prĂ©parĂ© de la façon suivante : 

1° Choisir un terrain de préférence bien envahi par les vers blancs 
et aussi éloigné que possible des habitations pour que les oiseaux de 
la basse-cour ne puissent pas y pénétrer; 

2% L’entourer d’un petit fossĂ© de 80 centimĂštres de profondeur 
pour le garantir d’une inondation et aussi pour empĂȘcher les vers 
blancs d'en sortir ; 

3° Répandre sur ce champ de la muscardine à profusion en y 
semant des spores dĂ©layĂ©es dans l’eau ou Ă  l’état sec, ou bien en y 
enfouissant des cultures sur pomme de terre ou des vers blancs préa- 
lablement contaminés par la méthode de MM. Prillieux et Delacroix, 
Ă  raison d’au moins 400 par mĂštre carrĂ© (ce dernier procĂ©dĂ© nous 
semble, jusqu’à nouvel ordre, prĂ©senter les garanties les plus sĂ©- 
rieuses) ; 

4 Semer sur ce champ du gazon, de la luzerne ou toute autre 
plante dont les vers blancs sont friands; 

5° Éloigner du champ ainsi prĂ©parĂ© les taupes et les oiseaux qui 
pourraient manger les vers blancs ou les momies. 

Dans les conditions les plus favorables l’infestation deviendra ma- 
nifeste 15 à 20 jours aprÚs l'opération; dans ce cas, les momies 
produiront des spores deux ou trois mois plus tard et pourront 
communiquer la contagion à d’autres vers blancs. Dùs ce moment 
on pourra jeter dans le terrain réservé tous les vers blancs vivants 
et bien portants que l’on pourra ramasser au moment des labours. 

En admettant qu’on aura procĂ©dĂ© Ă  l’installation du champ rĂ©servĂ© 
le 4° avril, on pourra faire une premiÚre fouille le 1° mai et alors, 
si le rĂ©sultat est favorable, c’est-Ă -dire si l’on trouve des vers blancs 
momifiés ou malades, on pourra y jeter tous les vers blancs vivants 
qu’il sera possible de se procurer pendant toute la durĂ©e de la belle 
saison, c’est-à-dire jusque vers le 15 octobre. 

À ce moment il sera nĂ©cessaire de constater le premier rĂ©sultat 
obtenu. 

On verra : 

4° A la premiÚre fouille (le 1° mai) la proportion des vers conta- 
minés par la culture artificielle employée en premier lieu ; 

2 A la deuxiùme fouille (le 15 octobre), si la maladie s’est pro- 


468 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


pagĂ©e d’elle-mĂȘme aux autres vers qu’on aura introduits dans le 
champ d'expĂ©rience depuis le 1% mai et, — en comptant les vers 
momifiĂ©s et ceux qui sont restĂ©s encore vivants, — la proportion 
des vers contaminés de cette façon. 

Durant la premiÚre année, les vers momifiés et les vivants doivent 
ĂȘtre laissĂ©s en place. 

Au printemps suivant, 1l y aura lieu d'examiner Ă  nouveau l’état 
des cultures et d'alimenter le champ réservé en vers blancs vivants 
jusqu’en octobre ou en novembre. 

Dans le courant de la deuxiÚme année on pourra déjà commencer 
à prendre des momies dans le champ réservé (en choisissant celles 
qui seront les plus mĂŒres et sur lesquelles la moisissure se sera le 
mieux dĂ©veloppĂ©e) pour les rĂ©pandre dans d’autres endroits infestĂ©s 
par les vers blancs ou pour contaminer des hannetons. 

Pour obtenir des rĂ©sultats dĂ©cisifs, l'expĂ©rience doit ĂȘtre continuĂ©e 
au moins encore pendant une troisiÚme année ; elle doit durer au 
moins aussi longtemps qu’un cycle d'Ă©volution complĂšte du hanneton, 
de l’Ɠuf à l’Ɠuf. 

En suivant une telle expérience avec méthode et en notant soi- 
gneusement les faits observés (la proportion des vers morts mus- 
cardinĂ©s) ainsi que la nature du sol du champ d’expĂ©rience et les 
conditions atmosphĂ©riques pendant la durĂ©e de l’expĂ©rience, on 
apprendra à connaßtre toutes les données qui nous manquent encore 
relativement aux procédés à suivre pour détruire les vers blancs en 
grande culture. On apprendra notamment : 

1° La proportion des vers blancs qui peuvent ĂȘtre dĂ©truits par la 
muscardine dans un temps donné ; 

2° Les conditions de développement de la muscardine dans la terre. 

Mais ce n’est pas lĂ  le seul avantage d’une telle façon de procĂ©der. 
L'Ă©tablissement d’un champ d’expĂ©rience dans les conditions que 
nous venons d'indiquer, tout en nous fournissant des renseigne- 
ments précis et indispensables, permettra seul de multiplier les 
foyers naturels de la muscardine et de mettre, en mĂȘme temps, les 
germes de cette maladie à la disposition de tous les intéressés sans 
autres frais et manipulations que l’entretien de ces champs une fois 
qu’ils seraient Ă©tablis. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L AGRICULTURE. 469 
D'autre part, les spores récoltées sur les vers blancs ou les hanne- 
tons muscardinés étant plus virulentes que celles produites sur des 
milieux nutrilifs arĂŒficiels, les cullivateurs auront toujours Ă  leur 
disposition une muscardine présentant beaucoup plus de garantie 
au point de vue de son efficacité La les cultures artificielles en tubes 
ou en boĂźtes. 

En un mot les champs d'expérience deviendront dans la suite des 
« gisements momifÚres », véritables pépiniÚres dans lesquelles on 
pourra puiser des momies pour les répandre sur les terres envahies 
par les vers blancs. 

L’étendue de ce gisement ne peut pas ĂȘtre fixĂ©e d'avance d’une 
façon bien précise, sa richesse dépendra naturellement de la quantité 
des vers blancs qu'on y aura enfouie; nous croyons toutefois que 
chaque mÚtre carré du champ réservé fournira une quantité suffi- 
sante de momies pour traiter ensuite avec succĂšs un hectare de 
terrains envahis. 

Pour une ferme de 50 hectares, il faudra donc un champ réservé 
de 50 à 60 mÚtres carrés, pour une commune dont le territoire 
aurait 3 000 hectares d’étendue, il faudrait un Sharon de 300 Ă  350 
mÚtres carrés. 

Les frais de premier Ă©tablissement d’un gisement momifĂšre 
s'élÚveront, au maximum, à 5 fr. par mÚtre carré; mais 1l ne faut 
pas oublier que cette dépense serait faite une {os pour toutes, 
qu'une fois Ă©tabli, un tel gisement durera aussi longtemps qu’il y 
aura des hannetons et des vers blancs pour l’alimenter. 

En procédant ainsi, chaque cultivateur pourra préparer sa mus- 
cardine comme il prĂ©pare aujourd’hui son fumier et ce n’est qu’à 
celte seule condilion — quand chaque intĂ©ressĂ© produira sa mus- 
cardine lui-mĂȘme et en aura Ă  sa disposition des quantitĂ©s sufli- 
santes sans autres frais qu’un peu de travail et de persĂ©vĂ©rance, 
quand, par cela mĂȘme, la muscardine pourra ĂȘtre rĂ©pandue partout, 
dans toutes les contrĂ©es envahies par les hannelons — que cette 
merveilleuse dĂ©couverte donnera le rĂ©sultat que l’on est en droit 
d’en attendre. 


En résumé, la muscardine ne deviendra une arme réellement effi- 


470 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


cace contre les hannetons et les vers blancs que dans les conditions 
suivantes : 

1° Quand on aura déterminé par une série d'expériences en pleine 
terre les conditions de développement du champignon dans la terre 
et son action sur les hannetons et les vers blancs ; 

2° Quand, dans toutes les contrées envahies par ces insectes, 
chaque cultivateur aura Ă  sa disposition et emploiera une muscardine 
réellement virulente et en quantité suffisante pour obtenir des ré- 
sultatsapprĂ©ciables, c’est-Ă -dire quand tous les cultivateurs intĂ©ressĂ©s 
auront Ă©tabli des champs d’expĂ©riences pour en faire, dans la suite, 
des « gisements momifÚres ». 


Avant de terminer ce chapitre il nous faut dire quelques mots sur 
la possibilité de multiplier la muscardine en la cultivant sur des 
milieux nutritifs artificiels de façon à remplacer éventuellement 
les « gisements momifÚres » par des gisements de cultures arti- 
ficielles. 

En principe, il n’est point impossible de dĂ©couvrir pour la mus- 
cardine un milieu nutritif qui donnerait des cultures non seulement 
aussi virulentes, mais mĂȘme plus virulentes que celles qui viennent 
directement sur les hannetons ou les vers blancs. Malheureusement 
ce milieu nutrilif n’esl pas encore trouvĂ© ; bien au contraire, on sait 
que les reports successifs sur les milieux nutritifs connus et essayés 
Jusqu'à présent affaiblissent progressivement la virulence de la mus- 
cardine de sorte que les quatriĂšmes ou cinquiĂšmes reports ne pro- 
duisent plus aucun effet sur les insectes. 

Pour préparer des cultures artificielles de muscardine dans les la- 
boratoires en assez grande quantité pour pouvoir les mettre ensuite 
à la disposition des cullivateurs, on procÚde actuellement de la façon 
suivante : 

Les spores recueillies sur un ver blanc ou un hanneton momifié 
sont ensemencées sur des pommes de terre stérilisées en tubes. C'est 
ce qu’on appelle le premier report ou la premiùre culture, 

Ce premier report ne donne généralement pas des cultures pures; 
pour les purifier il faut prendre des spores de la premiĂšre culture 
pour les réensemencer sur une deuxiÚme série de pommes de terre. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 471 


On obtient ainsi des « deuxiÚmes cultures » qui sont généralement 
pures mais qui, par les deux reports successifs, ont perdu, Ă  chaque 
réensemencement, un peu de leur virulence. 

Ce sont ces « deuxiĂšmes cultures » qui peuvent ĂȘtre mises Ă  la 
disposition des cultivateurs qui, s’ils voulaient les mulliplier à nou- 
veau par rĂ©ensemencement sur d’autres milieux nutritifs artificiels, 
n’obtiendraient, par consĂ©quent, que des « troisiĂšmes cultures » 
nécessairement encore moins virulentes que les précédentes. 

Ce serait là déjà un inconvénient bien grave et il ne serait pas le 
seui, La muscardine cultivée en pleine terre, dans un milieu non 
stĂ©rilisĂ©, serait promptement envahie par d’autres moisissures que 
le cultivateur n'aurait aucun moyen de reconnaßtre et il serait néces- 
sairement amené à employer souvent, en pure perte, des produits 
absolument imoffensifs. 

Donc, jusqu’à nouvel ordre, le seul procĂ©dĂ© rationnel pour multi- 
plier la muscardine de façon à en rendre emploi possible partout, 
est de la cultiver sur des vers blancs. 

La matiùre premiùre, pour faire ces cultures, n’est malheureuse- 
ment pas prĂȘle Ă  manquer. En ramassant des vers blancs pour Ă©tablir 
des gisements momifĂšres on en dĂ©barrassera d’autant les champs et 
quand il n’y en aura plus, il n’y aura plus besoin de muscardine pour 
les détruire. 


ÉpidĂ©mies naturelles. 


La muscardine rose est une maladie naturelle du hanneton et du 
ver blanc, il est donc trĂšs probable qu’elle a existĂ© toujours, sinon 
partout, lĂ  oĂč il y avait des hannetons, en obĂ©issant dans son Ă©volu- 
tion aux mĂȘmes lois que toutes les maladies contagieuses, c’est-Ă - 
dire apparaissant et disparaissant successivement avec plus ou moins 
d'intensitĂ© et d’étendue. 

Ainsi que l’indique M. Giard', des Ă©pidĂ©mies causĂ©es trĂšs proba- 
blement par le mĂȘme champignon que celle observĂ©e Ă  CĂ©aucĂ© par 
M. Le Moult, ont déjà été signalées par J. Reiset en France en 1867 
et par Bail et de Bary en Allemagne en 1869. 


1. À, Giard, Loc. cit., p. 87. 


472 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


M. Le Moult a le premier suivi une de ces épidémies pendant 


plusieurs mois pour se rendre compte de son extension et de ses 
effets. 


S'inspirant des travaux de MM. Metchnikoff et Ras ee sur la 
destruction du Cleonus puncliventris au moyen des cultures artifi- 
cielles d’Isaria destructor, et conseillĂ© par M. Gard, M. Le Moult 
s’est mis Ă  la recherche d’un champignon parasite spĂ©cial au ver 
blanc. Il à trouvé le premier gisement naturel de vers blancs momni- 
fiés à Céaucé, dans une propriété appartenant à M. Le Marchand. | 


L’une des prairies surtout, dit-il dans une note prĂ©sentĂ©e Ă  l’AcadĂ©mie 
des sciences ', présentait un aspect des plus lamentables. Les vers blancs 
y Ă©taient si nombreux que l'herbe n'avait plus de racines. C’est [Ă  que 
nous fimes nos fouilles les plus sérieuses, celles qui ont enfin récompensé 
nos efforts... 

Au nombre des larves que nous mettions à découvert, nous en avons 
trouvé dont la mort était de date assez récente et qui présentaient cette 
particularitĂ© qu’elles Ă©taient complĂštement couvertes d’une sorte de moi- 
sissure blanche envahissant toute la masse et se développant dans tous les 
sens Ă  travers la terre... | 

La proportion des vers atteints par rapport aux vers sains Ă©lait d’envi- 
ron 10 91005 

Nous avons pensĂ© que les observations faites sur le terrain mĂȘme, dans 
la prairie oĂč nous avons dĂ©couvert le parasite du ver blanc, prĂ©senteraient 
Ă  la fois plus d'intĂ©rĂȘt et d’exactitude..
. 

M. Le Marchand avait décidé de faire labourer sa prairie dÚs les pre- 
miers jours de septembre. Nous lui demandÀmes de réserver une zone 
d'environ 10 mÚtres carrés dans la partie contenant la plus grande quan- 
tité de vers malades. La partie épargnée par la charrue devait nous servir 
de champ d” expĂ©riences. 

La prairie n’a d’ailleurs pas Ă©tĂ© labourĂ©e et ne fa sera probablement 
pas, nous en donnerons tout à l’heure la raison... 

Nous avions constaté au mois de juillet que les vers atteints par le 
champignon représentaient environ 1/10 des larves trouvées dans le ter- 
rain. Le 10 septembre, nous avons fait pratiquer de nouvelles fouilles, la 
proportion des vers atteints Ă©tait d'environ 65 Ă  70 p. 100... 

Enfin, il n’est pas jusqu’à l'aspect gĂ©nĂ©ral de la prairie qui n’ait subi 
une transformation complĂšte. 

Au mois de juillet, l’herbe complĂštement flĂ©trie n’adhĂ©rait plus au sol. 


1. C. R., 3 novembre 1890. 


DESTRUGTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 473 


Au mois de septembre, au contraire, et malgré la sécheresse, la prairie 
se trouvait complùtement reverdie et l'herbe ne pouvait plus s’arracher à 
la main, tandis que la prairie voisine, situĂ©e dans les mĂȘmes conditions 
sous le rapport de la nature du terrain, de [a pente, de l’arrosage et de 
l'exposition, Ă©tait demeurĂ©e complĂštement dessĂ©chĂ©e, le gazon s’enlevait 
avec la plus grande facilité. 

Le 28 septembre, nous avons fait de nouvelles fouilles sur le terrain 
réservé. Cette fois, il nous a élé presque impossible de trouver des vers 
vivants, tandis que les vers parasités se rencontraient en grand nombre. 
Leur présence nous était toujours signalée par de longues traßnées blan- 
ches formĂ©es par les filaments des champignons et s’écartant toujours de 
1 à 8 centimÚtres du point de départ... 


Depuis, on a trouvé des gisements naturels de vers blancs momi- 
fiĂ©s un peu partout. M. Giard en signale plusieurs qu’il a observĂ©s 
lui-mĂȘme ou qui lui ont Ă©tĂ© signalĂ©s par ses correspondants. Nous 
mĂȘme nous avons trouvĂ© des vers blancs muscardinĂ©s Ă  Sceaux 
(Seine), dans plusieurs localités du département de Seine-et-Marne, 
dans des endroits oĂč on n’a Jamais fait usage de cultures artificielles. 

Enfin M. Gouin, président du comice agricole du canton de Vertou 
(Loire-InfĂ©rieure), a signalĂ© d’abord dans le Journal de l'agricul- 
Lure pratique et nous à communiqué ensuite par lettres une série 
d'observations trÚs intéressantes, concernant une épidémie naturelle 
de muscardine sur une Ă©tendue de plus de 100 hectares. 

M. Gouin a constatĂ© la prĂ©sence de vers momifiĂ©s sur toute l’é- 
tendue de ses terres en juin 1892. Il a suivi celte épidémie durant 
toute la belle saison de l’annĂ©e 1893 et a recommencĂ© ses observa- 
tions celle année. | | 


En 1891 (deuxiĂšme annĂ©e de vers blanes), dit M. Gouin, malgrĂ© l’abon- 
dance de vers blancs, on n’a pas trouvĂ© un seul ver malade. En juin 1892 
(vers blancs de 3° année), on trouve partout des momies et des vers ma- 
lades. 

L’épidĂ©mie semble disparaĂźtre en juillet avec la descente des vers 
blancs et leur transformation en nymphes pour reparaitre en aulomne 
sur des hannetons en terre. 

En 1893, apparition de l’épidĂ©mie dĂšs le dĂ©but du printemps sur toute 
l'Ă©tendue de mes terres et principalement dans les prairies et autres 
champs non labourés, excepté dans mon jardin potager. 

En 1894, apparition de l'épidémie en avril. J'ai trouvé pour la premiÚre 


474 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


fois des vers roses et momifiés dans mon jardin, mais seulement dans une 
partie qui n’a reçu aucun labour depuis neuf mois. Dans les parcelles la- 
bourées en mars, beaucoup de vers blancs bien portants, pas un seul 
malade. 


Les ouvriers de M. Gouin affirment que, antérieurement à 1891, 
ils trouvaient fréquemment dans les champs des vers blancs et des 
hannetons couverts de moisissure ; l’un d’eux se rappelle mĂȘme 
qu’en 1859 presque tous les vers blancs que l’on dĂ©couvrait au la- 
bour étaient muscardinés. 

Cette sĂ©rie d'observations montre d’une façon indiscutable que 
dans certaines régions la muscardine des hannelons el des vers 
blancs rĂšgne Ă  l’état endĂ©mique et on est en droit d’en conclure que 
dans les champs oĂč on rĂ©ussira Ă  crĂ©er des foyers d’épidĂ©mie, la 
maladie s’élendra peu Ă  peu d'elle-mĂȘme et y persistera pendant de 
longues années. 

Il est trĂšs probable que partout, dans les terrains oĂč elle peut se 
dĂ©velopper, l’Isaria vit dans la terre Ă  l’état saprophyte, qu’elle 
atteint d’abord les sujets prĂ©disposĂ©s Ă  contracter la maladie et que, 
ayant régénéré sa virulence en passant par le corps des premiers 
vers blancs atteints, elle devient ou redevient parasite. En infestant 
d’une façon continue des vers blancs ou des hannetons, au moven 
des cultures artificielles, on maintiendra constamment la virulence 
du champignon, et en multipliant les foyers épidémiques, on aidera 
simplement la nature à répandre rapidement la maladie et à la 
rendre plus intense. 


CHAPITRE IT 


LES CHAMPIGNONS PARASITES QUI ONT ÉTÉ EMPLOYÉS JUSQU'A 
PRÉSENT A LA DESTRUCTION DES INSECTES NUISIBLES 


Le nombre des champignons entomophytes, c’est-à-dire des 
champignons qui s’atlaquent aux insectes vivants et en dĂ©terminent 
la mort, connus aujourd’hui, est dĂ©jĂ  assez considĂ©rable. Il est trĂšs 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 475 


probable que grĂące Ă  des recherches nouvelles, on finira par trouver 
un parasite spĂ©cial Ă  chaque espĂšce nuisible d'insectes ou bien qu’en 
améliorant et en modifiant les procédés de laboratoire et les milieux 
de culture on arrivera Ă  pouvoir infester avec la mĂȘme facilitĂ© plu- 
sieurs espĂšces d'insectes avec le mĂȘme champignon. 

Au point de vue de leur application pratique, un bien pelit nombre 
seulement de ces champignons ont été suffisamment étudiés et expé- 
rimentĂ©s ; aussi, dans ce travail qui n’a d’autres prĂ©tentions que 
de montrer aux cultivateurs les résultats obtenus et la voie à suivre, 
nous bornerons-nous à examiner en détail les seuls cas dans lesquels 
cette méthode a été appliquée en grande culture et a donné des 
résultats appréciables. 


Muscardine verte (Isaria destructor). 


Son application à la destruction du « hannelon des blés » (Anisoplia 
austriaca) el du « coléoptÚre des betteraves » (Cleonus punctiventris) 
en Russie. 


En 1878, M. Metchnikoff", alors professeur Ă  l’UniversitĂ© d’Odessa 
et actuellement professeur à l’Institut Pasteur, s’inspirant des tra- 
vaux de De Bary sur l’/saria farinosa, s’est mis à la recherche d’un 
champignon parasite du hanneton des blés (Anisoplia austriaca) qui 
faisait alors beaucoup de ravages dans les provinces méridionales de 
la Russie. 

M. Metchnikoff ne Larda pas à trouver des larves atteintes et tuées 
par divers parasites et principalement par une € muscardine verte » 
qu'il appela d’abord Entomophthora anisoplié et ensuite, son atten- 
tion ayant été attirée par le professeur Cienkowski sur la ressem- 
blance de sa muscardine avec les IsariĂŠ, Isaria destructor. 

Peu de temps aprĂšs, il trouva la mĂȘme maladie causĂ©e par la mus- 
cardine verte sur un autre insecte, le Cleonus puncliventris qui ravage 
les champs de betteraves. 

M. Metchnikoff est arrivé promptement à cultiver sa muscardine 
sur des milieux nutritifs artificiels et notamment sur du moût de 


1. E. Metchnikoff, Zoo. Anz., 1880, p. 44. 


476 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


biÚre stérilisé et à infester avec les spores provenant de ces cul- 
tures les Anisopliu et les Cleonus, ces derniers Ă  tous les Ă©tats de leur 
développement. 

Pour obtenir ces spores en grande quantité, M. Cienkowski procé- 
dait d’une autre façon : il plaçait les chenilles infestĂ©es par le cham- 
pignon dans des boütes d’une certaine grandeur, remplies avec de la 
terre et, Ă  mesure que les chenilles mouraient, il en introduisait de 
nouvelles. Puis il mélangeait la terre avec les cadavres desséchés et 
pulvérisés, et de cette façon chaque particule de terre renfermait une 
grande quantité de spores de muscardine verte (terre de muscar- 
dine, poudre de champignons). C’est cette poudre qu’il rĂ©pandait 
dans les champs pour infester les larves des hannetons du blé. 

Cienkowski admettait que, pour obtenir un résultat satisfaisant, il 
faudrait couvrir la terre d’une couche continue de spores. D’aprùs 
ses calculs et ceux des professeurs De la Rue et Saikewitch, 11 fau- 
drait environ 90 litres de spores pures ou le double, soit 180 litres, 
de terre muscardinée pour un hectare. 

En 1884, M. Krassilstchik, de l’UniversitĂ© d’Odessa, a mis Ă  profit 
les travaux de Metchnikoff et de Cienkowski pour fonder, avec le con- 
cours de quelques propriétaires intéressés, un laboratoire à Sméla, 
prĂšs de Kieff, dans le but de produire en grand des spores de mus- 
cardine verte et de les répandre sur les champs envahis par les 
Cleonus.: : 

Ainsi que l'indique M. Le Moull dans sa communication à l’Aca- 
démie des sciences de 1890, ce laboratoire a fonctionné pendant 
4 mois et a produit 55 kilogr. de spores. Ces spores ont été répan- 
dues dans les champs Ă  raison de 8 kilogr. par hectare, elles ont 
déterminé la destruction des insectes dans la proportion de 55 à 80 
p. 100. — Tous les frais de cette opĂ©ration ne dĂ©passeraient pas 
10 fr. à l’hectare. 

«AprĂšs que l’usine que J'avais construite Ă  SmĂ©la, dit M. Krassils- 
{chik dans une lettre adressée à M. Giard et publiée par M. Le Moult, 
eut démontré à tous que la production industrielle des parasites vé- 
gétaux est devenue un fait accompli et que les essais que j'ai faits en 
plein champ, bien que sur une échelle restreinte, eurent prouvé 
l’action mortelle du parasite sur le Cleonus, quelques-uns de nos cul- 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 477 


tivateurs de betteraves se sont résolus à construire une plus grande 
usine afin de produire assez de spores pour faire un essai sur une 
vaste Ă©chelle. Il s'agissait de poursuivre ces essais pendant deux ans 
el, si le résultat en était favorable, on n'aurait qu'à élargir les di- 
mensions de l’usine qui deviendrait alors lusine dĂ©finitive. Cette 
rĂ©solution une fois prise, je me suis mis Ă  l’Ɠuvre. L'usine de 
SmĂ©la fut fermĂ©e ; un endroit fut choisi oĂč le Cleonus est toujours en 
abondance. Le devis de la construction de l'usine que j'ai fait fut 
adopté et les fonds nécessaires furent accordés par un groupe de dix 
cultivateurs de betteraves qui voulaient ĂȘtre les fondateurs de l’en- 
treprise. Toute l'affaire semblait alors mise dans la bonne voie et il 
ne nous restait plus qu’à aborder l'exĂ©cution de notre dessein. 

«Mais voilĂ  que tout d’un coup une crise vint Ă©clater sur notre pro- 
duction de sucre provoquée par une surproduction des betteraves. 

« Dans ces conditions, et vu la disposition des esprits, aucune rai- 
son ne se présentait de déclarer la guerre au Cleonus. » 


En résumé, les travaux et les expériences des savants russes ont 
montrĂ© qu’il est possible de trouver sur les insecles qui envalussent 
en grand nombre les champs cullivés, des champignons parasites qui 
les détruisent et que ces champignons peuvent étre cultivés sur des 
milieux nutritifs arhficiels et, pour ainsi dire, fabriqués industriel- 
lement. 


Maladies contagieuses : « Sporotrichum globuliferum », 
« Empusa aphidis » et « Micrococcus insectorum ». 


Leur application à la destruction du « Chinch bug » (Blissus 
leucopterus, Say, punaise des blĂ©s) aux États-Unis d'AmĂ©- 
rique. 


Le Chinch bug a été signalé pour la premiÚre fois en Amérique en 
1781 dans la Caroline du Nord. Depuis, Ă  mesure que s’étendaient 
les terres cultivĂ©es, cet insecte s’est rĂ©pandu dans tous les autres 
États, en ravageant les cĂ©rĂ©ales ct quelques lĂ©gumineuses. 

En 1850, William le Baron écrivait dans le Prairie Farmer : «I 
est peu probable qu’on trouvera jamais un moyen prĂ©ventif ou des- 


478 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

tructif pour arrĂȘler la dĂ©vastation causĂ©e par ces insectes. » En effet, 
aucun des moyens chimiques ou mĂ©caniques employĂ©s jusqu’à ces 
derniers temps n’a donnĂ© de rĂ©sultats apprĂ©ciables. 

En 1891, le gouvernement de l’État de Kansas a chargĂ© M. T. H. 
Snow, professeur Ă  l’UniversitĂ© de Lawrence, d'installer, auprĂšs de 
celte université el de diriger une station expérimentale avant pour 
but « de propager les maladies contagieuses ou infectieuses qui sont 
supposées pouvoir détruire les Chinch bugs ». Cette station a été 
installĂ©e en mars 1891 ; en avril 1892, M. Snow’ publia son premier 
report, un travail admirable de précision, dans lequel il refait Phis- 
torique des études antérieures des maladies contagieuses des insectes 
aux États-Unis, dĂ©crit en dĂ©tail ses mĂ©thodes de recherches et la 
maniÚre de procéder pour répandre la contagion dans les champs, 
et enfin, indique les résultats obtenus en appuyant ses conclusions 
par plusieurs centaines de rapports envoyés par les cultivateurs qui 
ont appliqué les procédés préconisés par lui. 

Une carte de l’État de Kansas indiquant les points et les rĂ©gions 
trailées et les résultats obtenus complÚte ce travail remarquable à 
tous les points de vue. 

Suivant les notices bibliographiques contenues dans l’ouvrage de 
M. Snow’, la premiĂšre observation d’une Ă©pidĂ©mie bien caractĂ©risĂ©e 
parmi les Chinch bugs a été faite par M. Henry Shimer en 1865. 
(Proceedings of the Acad. of haln. sc. of Philadelphia, vol. XIX, 
1867, p. 79-80.) 


16 juillet 1865. — Dans les parties basses et humides des champs, on 
trouve un grand nombre de larves mourantes sans cause apparente. 

22 juillet. — Grand nombre de jeunes insectes morts, la maladie s'Ă©- 
tend des terrains bas sur les collines, 

28 juillet. — On trouve partout des insectes mourants et morts à tous 
les stades de leur développement. 

8 aoĂ»t. — La plupart des Chinch bugs (stade imago) dĂ©truits. L’exten- 
sion de la maladie est plus rapide que celle du choléra asiatique parmi les 
hommes. Il reste un insecte vivant sur mille de ceux qui Ă©taient encore 
vivants et bien portants en juin. 


1. F. H. Snow, Report of the Exp. Stat. of Kansas. Lawrence, 1892 et 1893. 
2. Ibid, p. 245. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES À L'AGRICULTURE. 479 


13 septembre. — TrouvĂ©, aprĂšs une journĂ©e de recherches, seulement 
deux larves et quelques imago vivants dans toute la région précédemment 
envahie par les Chinch bugs. 

En 1866, au printemps, il a été impossible de trouver un seul insecte 
vivant; pendant les récoltes, on a trouvé en tout quelques spécimens dans 
les localités précédemment envahies. 


M. Shimer n’a pas pu dĂ©terminer les causes de cette Ă©pidĂ©mie, il 
dit en terminant: « Les maladies contagieuses sont les agents de 
destruction de beaucoup les plus importants et les plus actifs dans 
la lutte contre les animaux nuisibles. » 

D'autres épidémies ont été signalées depuis par plusieurs natura- 
listes américains, sur plusieurs espÚces d'insectes. 

M. Cyrus Thomas (U. St. Dep. of interior, Bulletin de l’annĂ©e 1879) 
signale une destruction des mouches domestiques en 1849 par une 
épidémie due à un champignon ; en 1872 il a observé une épidémie 
parmi les criquets dans les États de Minnesota, Dakota et lowa ; en 
1877 une destruction complĂšte de la larve des Caloptenus spretus. 

M. S. À. Forbes", St. ent. de l'Illinois, a cherchĂ© le premier Ă  con- 
naßtre les causes et les agents actifs de ces épidémies. 

Aidé dans la détermination des microbes trouvés par M. T. J. Bui-- 
rill, professeur de botanique et de bactĂ©riologie Ă  l’universitĂ© d’Illi- 
nois, M. Forbes a publié entre 1882 et 1892 une série de travaux sur 
cette question. Il a reconnu que les maladies observées chez les 
Chinch bugs sont causées par trois microbes différents, deux cham- 
pignons entomophytes : une Enlomophlorea (Empusa aphidis), un 
Botrytis ou Isaria (Sporotrichum globuliferum) et une Baclériacée, 
le Micrococcus insectorum. N'a reconnu ensuite que ces trois microbes 
peuvent ĂȘtre cultivĂ©s sur des milieux nutrilifs artificiels, liquides et 
solides, et peuvent infester plusieurs espĂšces d'insectes. 

Ayant reçu de M. R. Thaxter une culture de Sp. globuliferum sur 
gélose prise sur une larve de Copipanolis vernalis, il a réussi à infec- 
ter avec les spores provenant de cette culture des Chinch bugs, des 
imago de Cecropia, des Aphis et d’autres pucerons et des Tentre- 
dines. 


1. Reports of the Illinois State Entomologist, 1882 Ă  18972, 


480 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


«Il semble démontré, dit-il, que le Sp. globuliferum est un ento- 
mophyte capable d’atteindre beaucoup d’espùces d’insectes vivants, 
à tous les états de leur développement, que son action commence à 
se manifester deux jours aprùs l’infestation, mais que la formation 
des spores mûres demande 9 à 10 jours. La maturité complÚte des 
spores est nécessaire pour atteindre les insectes vivants... L'action 
de ce champignon ne devient manifeste que quand son développe- 
ment et son extension rapides sont favorisés par un ensemble de 
conditions météorologiques et entomologiques convenables. » 

En 1888, le D' Otto Lugger (Bulletin n° 4 of the Univ. of Minne- 
sota Agr. Exp. St.) signale la destruction complĂšte des Chinch bugs 
qui ont envahi les cultures du champ d’expĂ©riences de la station, 
par une épidémie naturelle due au Micrococcus inseclorum et à une 
Enthomophtorée. 

Des spécimens malades et morts de ces maladies ont été envoyés 
et distribués dans plusieurs fermes du sud du Minnesota ; partout il 
s’en esl suivi une disparition complùte des Chinch bugs. 

Dans la mĂȘme annĂ©e (1888) M. F. M. Webster (Bulletin 22, Div. 
Ent. U. St. Dep. of Agr.) a fait une sĂ©rie d’expĂ©riences sur les con- 
ditions de l’infestation des Chinch bugs en plein champ. Il Ă  notĂ© 
que, par un temps humide et doux, l'Ă©pidĂ©mie s’est Ă©tendue en 
48 jours Ă  un quart de mille du point iniual. 

C’est aussi en 1888 que M. Snow a commencĂ© Ă  s'occuper de cette 
question. 

Il a reconnu que les trois maladies des Chinch bugs qu'il trou- 
vait constamment dans les champs et dans ses cultures de labora- 
toires Ă©taient dues au Micrococcus inseclorum, Ă  une muscardine 
grise, l’'Empusa aphidis, et Ă  une muscardine b'anche considĂ©rĂ©e par 
M. Thaxler comme une Jsaria, mais qu'il considĂšre plutĂŽt comme 
un Trichoderma ou un Sporatrichum et qu’il assimila en dĂ©finitive 
au Sporotrichum globuliferum Spegazzini. 

AprÚs une série d'expériences au laboratoire et dans les champs, 
poursuivies pendant trois ans, M. Snow a adopté, pour détruire les 
Chinch bugs, la méthode suivante : 

AprÚsavoirfaitramasser dans un champ précédemmenttraité 10000 
Chinch bugs morts infestĂ©s, il s’est procurĂ© ensuile environ 20 000 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 481 


de ces insectes vivants et bien portants qu’il a enfermĂ©s dans une 
grande cage et infestés en y jetant un certain nombre de Chinch 
bugs muscardinés du lot de 10 000 précédemment ramassés. 

Ensuite, 1l a installé un certain nombre de « vases à infestation » 
dans lesquels il traitait les insectes qui lui étaient adressés par les 
cultivateurs. 

Ayant fait ainsi une provision suffisante d’insectes infestĂ©s, il a fait 
annoncer qu’il tenait Ă  la disposition des cultivateurs intĂ©ressĂ©s des 
Chinch bugs infestés pouvant servir à la propagation de l'épidémie 
dans les champs envahis par ces insectes et en envoyait un certain 
nombre Ă  tous ceux qui lui en faisaient la demande. 

Chaque envoi Ă©tait accompagnĂ© d’une note ainsi conçue : 

« Je vous adresse une petite boßte contenant quelques Ghinch 
bugs infestés et vous prie de les employer suivant les instructions 
ci-dessous indiquées et de m'annoncer les résultats que vous aurez 
obtenus. | 

€ Mettre dans un rĂ©cipient les insectes envoyĂ©s avec 10 ou 20 fois 
autant de Chinch bugs bien portants et les laisser ensemble pendant 
36 Ă  48 heures. Ensuite jeter les morts et les vivants dans les champs 
à traiter. Suivre de prÚs et noter soigneusement les résultats appré- 
ciables. 

« Les Chinch bugs doivent commencer à mourir dans les champs 
9 jours aprÚs la distribution des insectes infestés. 

« Je vous prie de me faire parvenir un rapport aussi détaillé que 
possible sur la façon dont vous avez procédé. Je suis, en effet, trÚs 
désireux de découvrir la meilleure méthode de propagation de ces 
maladies. » 

En procédant ainsi, M. Snow envoyait aux cultivateurs des lots de 
Chinch bugs dans lesquels il y avait presque toujours des spécimens 
atteints respectivement par l’un des trois microbes ci-dessus indi- 
quĂ©s; de sorte qu’il y avait dans chaque lot les germes de toutes ces 
maladies, du Sporotrichum, de l'Empusa et du Micrococcus, et que 
c’est la maladie dont le germe trouvait au moment donnĂ© les condi- 
tions les plus favorables à son développement qui prenait dans les 
champs une importance prĂ©dominante et s’étendait le plus rapide- 
ment. 


ANN. SCIENCE AGRON. — 1893. — 1. 81 


482 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


C'est ainsi, comme il ressort des rapports des cultivateurs, que, 
depuis le mois d’avril jusque vers la fin de juin, pendant un temps 
relativement frais et humide, c’est le Sporotrichum qui s’est dĂ©ve- 
loppé le mieux et a donné les résultats les plus satisfaisants ; tandis 
qu’en juillet, aoĂ»t et septembre, comme le temps Ă©tait sec et chaud 
et par conséquent peu favorable au développement du Sporotrichum, 
mais par contre trÚs favorable au développement du WMicrococcus*, 
c’est ce dernier qui a provoquĂ© des Ă©pidĂ©mies de beaucoup les plus 
meurtriĂšres et Ă  marche beaucoup plus rapide que celles dues aux 
muscardines. 

La muscardine grise (Empusa) n’a Ă©tĂ© signalĂ©e dans les champs 
que du 20 juin au 1° août, mais jamais seule, toujours en compa- 
gnie du Sporotrichum et du Micrococcus. 

Chacune de ces maladies et notamment celles causées par le Spo- 
rotrichum et le Micrococcus se manifestent par un ensemble de ca- 
ractĂšres particuliers qui permettent de faire un diagnostic certain 
dÚs le début de linfestation. 

Sporotrichum. — La maladie causĂ©e par la « muscardine blanche » 
commence à se manifester 2 à 4 Jours aprùs l’infestation. Les Chinch 
bugs encore vivants quittent les plantes sur lesquelles ils vivent et 
montrent des signes d'inquiétude en courant rapidement et sans but 
de place en place. Le jour suivant ils deviennent paresseux et cher- 
chent Ă  fuir la lumiĂšre et la chaleur en se cachant sous les mottes 
de terre, sous la paille, ou en se réunissant dans les endroits ombra- 
gés et humides. Du 6° au 8° jour on commence à trouver des Chinch 
bugs couverts de moisissure. DĂšs ce moment l’épidĂ©mie se propage 
trĂšs rapidement. 

Micrococcus. — Les Chinch bugs atteints par le Micrococcus se 
rĂ©unissent sur le sol en groupes et s’attachent les uns aux autres de 
façon à former des grappes plus ou moins volumineuses*. Cette ma- 
ladie, véritable choléra des insectes, est plus prompte dans ses effets 
et son extension plus rapide et plus intense que celles causées par 
les muscardines. 

En 1891, 2000 cultivateurs environ ont eu recours au procédé 


{. Voir Schmidt : DĂ©e Nonne (Liparia monacha), ete... Ratibor, 1893. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 483 


de M. Snow pour détruire les Chinch bugs. De ces 2000 cultiva- 
teurs, 1 400 lui ont adressé des rapports détaillés, dont 1 071, soit 
76.55 p.100 accusent des résultats complÚtement satisfaisants, 147, 
soit 10.51 p. 100, des résultats douteux et 181, soit 12.94 p. 100, 
des résultats négatifs. 

En 1892, on a opéré dans 5 500 fermes différentes. Sur ces 3 500 
cas M. Snow a reçu 1 732 rapports dont 1 04%, soit 67.9 p. 100, ac- 
cusent des résultats complÚtement satisfaisants, 120, soit 7.8 p.100, 
douteux, et 372, soit 24.3 p. 100, négatifs. 

En résumé, M. Snow a obtenu sur 3132 cas contrÎlés, 2 115 succÚs 
(destruction complĂšte des insectes nuisibles). Des expertises officielles 
ont permis d'évaluer que les récoltes sauvées de cette façon repré- 
sentent une valeur de 1 520 675 fr. et que ce résultat a été obtenu 
au prix d’une dĂ©pense totale de 19150 fr., ce qui reprĂ©sente pour 
chaque cultivateur, en moyenne, une plus-value en récoltes de 745 fr. 

Ce sont là des résultats indiscutables ; les maladies contagieuses 
propagĂ©es d’une façon rationnelle ont seules eu raison d’un insecte 
qui ravageait les rĂ©coltes des États-Unis depuis plus d’un siĂšcle et 
contre lequel tous les autres moyens employés sont restés impuis- 
sants. 


CHAPITRE IV 


MÉTHODES A SUIVRE POUR INFECTER LES INSECTES VIVANT A 
LA SURFACE ET CEUX QUI VIVENT ENFOUIS DANS LA TERRE 


Pour détruire les vers blancs au moyen de la muscardine rose, 
M. Le Moull à suivi la méthode indiquée par M. Arassilstchik. 

Il a fait répandre sur les champs infestés par les vers blancs des 
spores préparées en grand sur des milieux nutritifs artificiels. 

Il aurait pu se faire que, par un hasard heureux, ce procédé donnût 
des rĂ©sultats satisfaisants ; dans ce cas on n'aurait eu qu’à suivre les 
indications de M. Le Moult, sans se préoccuper autrement des con- 
ditions de développement et d'existence du champignon parasite et 
des insectes qu’il s’agissait d'atteindre. 


484 . ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. : 


Malheureusement, le hasard n’a pas favorisĂ© M. Le Moult; comme 
nous l'avons vu plus haut, les tentatives d’infestation des vers 
blancs dans les champs n’ont pas Ă©tĂ© jusqu’à prĂ©sent couronnĂ©es 
de succĂšs. 

Bien au contraire, les nombreux essais d’infestation des vers blancs 
faits en France pendant prĂšs de quatre ans ont montrĂ© d’une façon 
incontestable que dans la lutte avec ces insectes les procédés de 
MM. Xrassilstchik et de Snow ne pourront jamais donner des résul- 
tats appréciables. 

On se trouve là, en effet, en présence de cas absolument dissem- 
blables, tant au point de vue entomologique que mycologique. 

Le Cleonus comme le Chinch bug sont des insectes qui font le plus 
de ravages Ă  l’état d’imago ou de larves, vivant Ă  la surface ou trĂšs 
prĂšs de la surface du sol, se dĂ©plaçant facilement en courant d’une 
plante à une autre et, par conséquent, se trouvant fréquemment en 
contact les uns avec les autres. En répandant des spores virulentes 
mĂȘme en quantitĂ© relativement petite sur les champs infestĂ©s par ces 
insectes on a beaucoup de chances de les atteindre directement et il 
est possible d'admettre Ă  priori que les sujets qui ont pu Ă©chapper 
à ce premier traitement direct s’infesteront dans la suite par con- 
tact avec les sujets morts contaminés. 

L'extension rapide des épidémies est encore favorisée dans ces deux 
cas par ce fait, que la muscardine verle employée contre le Cleonus 
et les deux muscardines (Sporotrichum et Empusa) dont s’est servi 
M. Snow pour détruire les Chinch bugs sont des champignons à évo- 
lution rapide. 

Il leur faut 8 Ă  12 jours dans des conditions normales pour passer 
par tous les stades de leur développement et produire des spores 
mures, virulentes. 

Quant au Micrococcus insectorum, la maladie causée par ce microbe 
est contagieuse aussitĂŽt aprĂšs l’infestation et peut ĂȘtre propagĂ©e par 
des sujets atteints encore vivants. 

Il était donc relativement facile, dans ces conditions, de créer des 
foyers d’infestation et d'admettre logiquement que, ces foyers une 
fois Ă©tablis, l'Ă©pidĂ©mie se propagera d’elle-mĂȘme rapidement sur 
toute l'Ă©tendue des champs envahis par les insectes qu’il s'agissait 


- 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 48 


d'atteindre. Les rĂ©sultats obtenus en Russie et surtout aux États-Unis 
ont montrĂ© qu’il en est effectivement ainsi. 

Or, les conditions d'existence des vers blancs ne ressemblent en 
rien Ă  celles du Cleonus et du Chinch bug, pas plus que les conditions 
de développement de la muscardine rose ne ressemble à celles des 
muscardines précitées. 

On sait, en effet, que les vers blancs se tiennent enfouis dans la 
terre à des profondeurs variant entre 10 et 20 centimÚtres en été 
et 30 à 60 centimùtres en hiver, qu'ils ne viennent jamais d’eux- 
mĂȘmes Ă  la surface, qu'ils se dĂ©placent peu, vivent isolĂ©s et peuvent, 
par consĂ©quent, ne jamais se rencontrer les uns les autres. D’autre 
part on sait que la muscardine rose est un champignon Ă  Ă©volution 
relativement trĂšs lente, qu’il faut attendre un, deux et parfois mĂȘme 
trois mois pour qu’une culture sur ver blanc ou sur pomme de terre 
donne des spores bien mûres. 

Ce sont là des faits qui, à premiÚre vue déjà, permettent de pré- 
juger que les procédés employés par MM. Xrassilstchik et Snow ne 
peuvent pas ĂȘtre appliquĂ©s tels quels Ă  la destruction des vers blancs. 

Il nous semble mĂȘme impossible d'admettre qu’un naturaliste tant 
soit peu au courant des conditions de développement de la muscar- 
dine rose et des conditions d’existence des vers blancs, ait jamais pu 
espérer d'atteindre ces derniers dans une proportion appréciable, en 
répandant sur les champs des spores à raison de quelques tubes ou 
mĂȘme de quelques kilogrammes de cultures sur pomme de terre, 
ou en enfouissant ces mĂȘmes cultures dans le sol Ă  raison d’un petit 
morceau pour 10 ou 20 mÚtres carrés". 


1. Ce sont pourtant ces procédés qui ont été adoptés et conseillés par M. Le Moult 
dont toute la bonne volontĂ© et toute l'Ă©nergie digne d’éloges dĂ©ployĂ©e dans la lutte 
acharnée ct désintéressée contre le hanneton ne pouvait compenser le manque de 
connaissances spéciales indispensables non seulement pour mener à bien une pareille 
entreprise, mais pour prĂ©voir et apprĂ©cier les diflicultĂ©s de toutes sortes que l’on ren- 
contre toujours dans ce genre de recherches. 

M. Le Moult, s'il n'a pas été le premier à découvrir le parasite du hanneton et du 
ver blanc, a eu le grand mĂ©rite de le chercher et de le retrouver au moment oĂč per- 
sonne n’y pensait plus. Il a Ă©tĂ© le premier en France qui ait songĂ© Ă  l'utiliser comme 
moyen de destruction et surtout, qui ait attiré sur cette importante question l'attention 
des savants et des cultivateurs. En outre, président du syndicat du hannetonnage du 


486 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 

L'expĂ©rience suivante prouve bien, croyons-nous, qu’il n’y Ă  pas 
de doute possible Ă  ce sujet : 

Nous avons placé 100 vers blancs de 2° année dans 10 pots à fleurs 
Ă  moitiĂ© remplis de terre. Ces vers blancs ont Ă©tĂ© recouverts d’une 
couche de terre de 2 centimĂštres d'Ă©paisseur sur laquelle nous avons 
rĂ©pandu le contenu d’un tube de culture sur pomme de terre (tubes 
Le Moult) par pot. Ensuite, nous avons rempli les pots de terre 
jusqu’en haut et nous y avons semĂ© du blĂ© et du gazon. Pour arriver 
aux racines, les vers blancs étaient donc obligés de traverser la cou- 
che des spores. 

Le contenu de ces 10 pots a été vérifié 34 jours aprÚs et nous 
n'avons pas trouvé un seul ver blanc muscardiné. 

Une couche de terre de 2 centimÚtres a donc suffi, malgré des 
arrosages fréquents, à garantir les vers blancs de toule contagion 
pendant plus d'un mors. 

D’autres expĂ©riences faites simultanĂ©ment avec les mĂȘmes cul- 
tures nous ont prouvé que, bien que fortement atténuées, ces cul- 
tures Ă©taient encore assez virulentes pour infester en moyenne 4 vers 
blancs sur 10, traités par contact direct. 


canton de Gorron (Mayenne), il a créé presque tous les syndicats de hannetonnage exis- 
tants en France ou provoqué leur création, Ge sont là des services importants rendus 
à l’agriculture et des titres que personne ne songe à lui disputer. Nous reconnaissons 
mĂȘme volontiers que, si nous nous occupions bien antĂ©rieurement de « zoolagie appli- 
quée », c'est la grande publicité donnée aux premiÚres notes communiquées par M. Le 
Moult sur le parasite du hanneton, à l'Académie des sciences, qui nous a montré toute 
l'importance de cette question et qui nous a décidé à nous y consacrer entiÚrement. 
Mais M. Le Moult, il le reconnaĂźt lui-mĂȘme, n'est pas naturaliste. L'Ă©tude des maladies 
contagieuses et de leurs applications, étude d'autant plus diflicile et compliquée que 
cette science est toute nouvelle et ne repose encore que sur des observalions bien peu 
nombreuses, demande, en dehors des connaissances spéciales de mycologie et d'er- 
tomologie, des connaissances trÚs étendues de biologie générale. Or, de toutes ces 
sciences, M. Le Moult n'avait et ne peut avoir encore que des notions tout Ă  fait 
insuffisantes. Qu'il laisse donc aux naturalistes qui s'en sont fait la spécialité la re- 
cherche des procédés à suivre dans chaque cas particulier et la direction des re- 
cherches expérimentales; son concours est par contre tout indiqué quand il s'agira 
d'appliquer en grand les procédés suflisamment étudiés et expérimentés. En groupant 
les agriculteurs, en organisant des syndicats, non seulement de hannetonnage, mais, en 
général, de défense contre tous les animaux nuisibles, et en propageant les méthodes 
de défense réellement scientifiques, il sera dans son rÎle et rendra à l'agriculture des 
services tout aussi importants. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 487 


Nous avons vu aussi plus haut (p.476) que M. Cienkowski Ă©valuait 
à 90 litres la quantité nécessaire de spores pures à répandre sur un 
hectare pour atteindre les larves du hanneton des blés ; or, pour 
obtenir 90 litres de spores pures, il faudrait environ 40 quintaux 
métriques de cultures sur pomme de terre. 

Pour trouver un procĂ©dĂ© rationnel d’infestation des insectes dans 
les champs, il faut donc tenir compte de toutes les particularités qui 
caractĂ©risent d’une part le dĂ©veloppement du champignon parasite que 
l’on veut employer, d’autre part le genre de vie des insectes visĂ©s. 


Pour expliquer la propagation des maladies contagieuses parmi 
les ĂȘtres qui vivent sur la terre, on admet gĂ©nĂ©ralement que les 
germes de ces maladies ont dĂ» ĂȘtre absorbĂ©s avec l’air inspirĂ©, les 
aliments ou l’eau de boisson, en un mot que ces ĂȘtres ne peuvent 
s’infester qu’à la condition de vivre dans un milieu infestĂ© lui-mĂȘme, 
c’est-Ă -dire contenant des germes pathogĂšnes en quantitĂ© suffisante. 

Or, les vers blanes qui vivent dans la terre ne seront atteints par 
la muscardine que quand cette terre elle-mĂȘme sera suffisamment 
infestée, quand le germe virulent du parasite vivra et se développera 
dans la terre. 

C’est ce qu’oĂč observe, en effet, en suivant avec attention et pen- 
dant plusieurs années de suite les épidémies de muscardine dans 
leurs stations naturelles (voir les observations de M. Gouin p. 473). 
Il nous semble impossible de s'expliquer l'apparition, Ă  un moment 
donné, des vers blancs momifiés, un peu partout sur une vaste 
Ă©tendue, autrement qu’en admettant la prĂ©existence du champignon 
parasite dans ces terres. 

Ce qu'il faudrait chercher, par conséquent, dans le cas particulier 
de la destruction des vers blanes par la muscardine, ce n’est donc 
pas autant à atteindre directement les vers blanes, qu’à provoquer 
le dĂ©veloppement de la muscardine dans les terres qu'il s’agit de 
préserver de leur invasion. 

Ce serait là, du moins, la seule méthode basée, nous semble-t-il, 
sur l’ensemble des donnĂ©es connues jusqu’à prĂ©sent. 

En résumé, les insectes qui vivent à la surface de la terre, sur les 
tiges, les feuilles ou les fleurs des plantes, tels que les hannetons, 


488 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


les Cleonus, les Chinch bugs, les taupins, les sylphes, les mouches 
de blé, les pucerons, les charançons, la plupart des insectes para- 
sites de la vigne, etc., etc., peuvent ĂȘtre traitĂ©s avec succĂšs par les 
mĂ©thodes adoptĂ©es par MM. Arassilstchik et Snow, c’est-Ă -dire en 
répandant des spores virulentes à la surface des champs ou sur les 
plantes envahies. Dans tous ces cas l’infestation directe d’un certain 
nombre d'insectes est trÚs possible et l'épidémie pourra se propager 
ensuite d'elle-mĂȘme toutes les fois que le microbe employĂ© sera une 
bactĂ©riacĂ©e oĂč une muscardine Ă  Ă©volution rapide. 

Par contre, on ne peut espérer d'atteindre et de détruire au 
moyen des maladies contagieuses les insectes (principalement des 
larves) qui vivent enfouis dans la terre et s’attaquent aux racines, 
qu’en infestant la terre elle-mĂȘme, c’est-Ă -dire qu’en provoquant 
dans cette terre le développement des champignons parasites. 

Dans ce dernier cas, l'application de microbes pathogĂšnes Ă  la 
destruction des insectes nuisibles présente bien des difficultés, elle 
demandera certainement encore beaucoup et de longues Ă©tudes; ces 
difficultés ne semblent pourtant pas insurmontables. 

Les épidémies naturelles qui déciment les vers blancs et proba- 
blement beaucoup d’autres larves vivant dans les mĂȘmes conditions, 
prouvent d’une façon indiscutable qu’il est possible de rĂ©aliser dans la 
terre les conditions nécessaires au développement des muscardines, 
le tout est de savoir comments’ y prendre, et les recherches expĂ©rimen- 
tales conduites avec mĂ©thode ne manqueront pas de nous l’apprendre. 

En tous cas, il nous semble bien dĂ©montrĂ© aujourd’hui que, dans la 
lutte avec les animaux nuisibles, la méthode maugurée par M. Wetcl- 
nikoff et suivie avec tant de succÚs par les naturalistes américains 
est lu seule qui a donné jusqu'à présent des résultats satisfaisants 
el indiscutables, La seule qui peut nous assurer la vicloire. 


Conseils pratiques pour contaminer les vers blancs et les 
hannetons et pour Ă©tablir des foyers d’infestation dans les 
champs. 


Pour infecter des vers blancs on peut se servir de hannetons ou 
de larves momifiées, ou bien de cultures artificielles. 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 489 


Les momies, comme les cultures artificielles, ne peuvent ĂȘtre 
employées utilement que quand elles contiennent des spores bien 
mûres. 2 

Les momies sont mûres quand la moisissure qui les recouvre est 
pulvĂ©rulente et d’une teinte grise-jaunĂątre. 

Les culiures artificielles de muscardine peuvent ĂȘtre faites sur 
différents milieux nutritifs préalablement stérilisés, le plus souvent 
on les fait sur des bĂątons de pommes de terre Ă  demi cuites sous 
pression, avec un peu de jus sucré et acidulé, dans des tubes en 
verre. 

Si les tubes sont bien préparés et contiennent de la muscardine 
bien virulente, les bùtons de pommes de terre présentent une colo- 
ration rouge-violacée ou lie de vin foncée et sont entiÚrement cou- 
verts de moisissure. 

Les cultures qui n’ont donnĂ© Ă  la pomme de terre qu’une colora- 
ration rose-tendre ou jaunùtre sont généralement plus ou moins 
fortement atténuées ; leur emploi ne peut donner que des résultats 
peu appréciables. 

Il est assez facile de se rendre compte de l’état de dĂ©veloppement 
de la muscardine dans les tubes. Il faut secouer le tube, et alors, si 
les spores sont bien fnûres, elles se détacheront de la pomme de 
terre et formeront Ă  l’intĂ©rieur du tube un nuage gris-jaunĂątre, 
semblable Ă  de la farine bise; dans le cas contraire, la moisissure 
restera adhérente à la pomme de terre. 

Seule, la poussiÚre qui se délache facilement de la pomme de terre 
* peut Ă©lre utilement employĂ©e pour l’infestation des hannetons et des 

vers blancs. | 

Il est bon de ne prendre dans les tubes pour s’en servir que la 
poussiÚre qui se sera détachée seule aprÚs quelques secousses ; re- 
boucher ensuite et laisser le tube en repos pendant quelques jours. 
Chaque tube peut servir plusieurs fois et on n’utilisera chaque fois 
que des spores mûres. 

Pour contaminer les vers blancs, il faut procéder de la façon sui- 
vante : 

1° Faire ramasser des vers blancs en aussi grande quantité que 
possible. On les prend avec précautions, pour ne pas les blesser, et 


490 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 


on les place dans des paniers ou autres récipients avec de la terre, 
pour qu’ils ne meurent pas en se blessant les uns les autres ; 

% Choisir un endroit peu éclairé (grange, remise ou écurie) et 
rĂ©pandre par terre les vers blancs ramassĂ©s, de façon Ă  ce qu’ils ne 
puissent pas se toucher et se blesser les uns les autres ; 

3° Verser le contenu des tubes, en les secouant fortement, dans 
une assiette, un bol ou un récipient quelconque, prendre, avec un 
petit pinceau, la poussiÚre blanche qui se détache de la pomme de 
terre et toucher les vers blancs un à un, de façon à les saupoudrer 
de spores (s’il reste des spores attachĂ©es aux parois intĂ©rieures des 
tubes, il faut rincer ces derniers avec un peu d’eau et toucher les 
vers blancs avec un pinceau trempé dans cette eau) ; 

4° Laisser les vers blancs, ainsi saupoudrés de spores, pendant 
trois ou quatre heures ; 

5° Ramasser les vers blancs ainsi traités et les placer en pleine 
terre, en les enfouissant Ă  dix ou quinze centimĂštres de profondeur 
et à dix centimùtres de distance l’un de l’autre. — Il faut placer, au 
moins, 100 vers blancs contaminĂ©s sur un mĂȘtre carrĂ©, en choisis- 
sant les parcelles qui ont le plus Ă  souffrir ; 

6° Les bùtons de pommes de terre, dont on a enlevé les spores avec 
le pinceau, doivent ĂȘtre coupĂ©s en quinze ou'vingt petits morceaux 
et enfouis en mĂȘme temps que les vers contaminĂ©s. 

Pour que le traitement que nous venons d'indiquer devienne 
réellement efficace et donne des résultats appréciables, 1l faut lap- 
pliquer de la façon suivante : 

4° Mettre à profit les travaux des champs pour commencer à faire 
ramasser les vers blancs au printemps, aussitÎt qu'ils seront remontés 
prÚs de la surface, et continuer ainsi pendant la durée de la belle 
saison, c’est-Ă -dire jusqu’en octobre. Les vers ramassĂ©s dans la 
journée, pendant les labours et autres travaux des champs, doivent 
ĂȘtre traitĂ©s le soir et enfouis le lendemain matin; 

2° Établir des gisements momifùres pour avoir constamment de la 
muscardine bien virulente Ă  sa disposition. Isoler une petite parcelle 
de quelques mĂštres carrĂ©s en l’entourant de planches, de feuilles de 
tĂŽle ou d’ardoises enfoncĂ©es dans la terre Ă  30 ou 40 centimĂštres de 
profondeur ; enfouir dans ce champ des vers blancs contaminés par 


DESTRUCTION DES ANIMAUX NUISIBLES A L'AGRICULTURE. 491 


le procĂ©dĂ© ci-dessus indiquĂ©, en raison d’une centaine par mĂštre 
carré; jeter ensuite, dans ce champ réservé, en les enfouissant à 
cinq ou dix centimùtres de profondeur, tous les vers blancs que l’on 
pourra se procurer. En procĂ©dant ainsi, on aura, un an aprĂšs l’éta- 
blissement du champ réservé, une quantité suffisante de vers mus- 
cardinés pour traiter les champs envahis par les vers blancs, sans 
avoir recours aux cultures artificielles. 

En résumé : 1° employer des cultures artificielles pour créer des 
foyers d’infestation dans les parcelles qui ont le plus à souffrir (au 
lieu de répandre les vers blancs contaminés en les enfouissant un à 
un Ă  9 ou 10 mĂštres de distance, comme on l’a conseillĂ© jusqu’à 
présent, il faut en enfouir 50 à 100 par mÚtre carré, de place en 
place, dans les parcelles qui ont le plus Ă  souffrir) ; 2 Ă©tablir des 
gisements momifĂšres pour avoir toujours de la muscardine bien 
virulente Ă  sa disposition. 

Pour contaminer les hannetons, il faut : 

1° Enfermer les hannetons dans des seaux, des pots ou autres 
récipients analogues ; 

. 2% RĂ©pandre sur eux des spores en raison d’un tube de culture 
sur pomme de terre pour 200 ou 300 hannetons en moyenne ; 

3° Les laisser enfermés ainsi pendant cinq ou six heures ; 

4 Les relĂącher ensuite et les laisser s'envoler. 

Une partie des hannetons contaminĂ©s succomberont avant de s’en- 
terrer et se couvriront de moisissure qui sera répandue partout par 
le vent. D’autres mourront muscardinĂ©s dans la terre et propageront 
la maladie parmi les vers blancs. 

Les vers blancs el les hannelons momifiés peuvent conserver leur 
virulence pendant au moins deux ans. 

Les foyers d’infestation crĂ©Ă©s en pleine terre y persisteront pendant 
plusieurs années de suile, tant qu'il y aura des vers blancs pour les 
alimenter. 


TABLEAUX. 


TABLEAUX GRAPHIQUES 


22 000 
21000 


20000 


mt mm mm 


Févr. |Mars.|Avril | Mai. | Juin. | Juil. |Août.| Sept.| Oct. | Nov| Déc.| Janv. 


No 1. — Multiplication des campagnols en une annĂ©e de grande invasion. 


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TABLE DES MATIÈRES 


DU TOME PREMIER.:(1893) 


Pages 
L. Grandeau et H. Ballaçay. — Études expĂ©rimentales sur l’aii- 
mentation du cheval de trait. SixiÚme mémoire. . . . . . . . 1 
É. Saillard. — Étude sur quelques stations agronomiques alle- 


mandes. — Deuxiùme partie. La station agronomique de Halle . 105 
À. Ronna.— Les dessĂ©chements en Angleterre (avec deux cartes). 151 


E. W. Hilgard et M. E. Jaffa. — Note prĂ©liminaire sur la leneur 


en azote de l’humus dans les rĂ©gions arides et humides . . . . 297 
L. Grandeau. — La fumure des champs et des jardins. . . . . . 305 
J. Danysz. — Destruction des animaux nuisibles à l’agriculture 

(rongeurs et insectes) par les maladies contagieuses (avec deux 

LÉO) PS AR NE AR CS EE Se EE 

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Nancy, imprimerie Berger-Levrault et Cie. 


18! 
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