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Full text of "Annales de l'Institut océanographique"

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ANNALES 


DE 


LINSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


(Fondation ALBERT I", Prince de Monaco) 


PUBLIEES 


SOUS LA DIRECTION 


DE 


M. ce D° L. JOUBIN 


PROFESSEUR AU MUSEUM NATIONAL D'HISTOIRE NATURELLE 
, ET 
A L’INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Tome III 


PARIS 
MASSON ET C*, EDITEURS 


120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN 


1912 


Fascicute 1. 


— 2. 
— 3. 
— 4. 
— 5. 
— 6. 
ds gr À 


TABLE DES MATIÈRES 


PERROT (Em.). — Les Algues marines utiles et en particulier les 
Algues alimentaires d’Extréme-Orient. 


THOULET (J.). — Analyse d’une poussière éolienne de Monaco et 
considérations générales relatives à l’influence de la déflation sur 
la constitution lithologique du sol océanique. 


M. RALLIER DU BATY. — Quinze mois aux Iles Kergulen. — KŒH- 
LER (R.). — Echinodermes. -- GRAVIER (Cu.). — Annélides poly- 
chétes. — BOUVIER (M. F.-L.). — Arthropodes marins. — LAMY (En.). 
— Mollusques marins. — GERMAIN (Louis). — Mollusques terrestres. 


GRUVEL (A.. — Mission Gruvel sur la Côte occidentale d'Afrique 
(1909-1910). Résultats scientifiques et économiques; Introduc- 
tion; Contribution à l’étude Palinuridæ (systématique et écono- 
mique). 

CÉPÈDE (C.). — Note sur la Faune et la Flore des quais et bateaux de 
Boulogne-sur-Mer. 


BERTEL (Rup.). — Description d’un spectrographe sous-marin pour les 
recherches qualitatives de la lumiére a différentes profondeurs 
de la mer. 


THOULET (J.). — Mémoires de lithologie marine. 


La sdb 


Les Algues marines utiles 


et en particulier les Algues alimentaires 


d’Extréme-Orient 


Par MM. | 
Ex. PERROT ET G EOGATIN 


Docieur és-sciences, Professeur à l’École supérieure Docteur ès-sciences, Ingénieur agronome, Préparateur 
de pharmacie de Paris. à la Sorbonne. 


Introduction. 


Les Algues présentent, en Extréme-Orient, une importance économique qui n’a pas 
échappé aux premiers descripteurs des Algues marines de ce pays. : 

C'est ainsi que THuNBERG, KAEMPFER, font mention, dans leurs ouvrages, de quelques- 
uns des usages auxquels on emploie ces végétaux. 

Plus tard, le chapitre des Algues utiles prend un développement particulier dans les 
travaux des auteurs qui explorent |’Extréme-Orient, comme par exemple Surincar et 
GEorG von Martens, qui étudia, en 1866, les Algues de l'expédition prussienne de l’Asie 
orientale. La question semble alors assez importante pour que des travaux cpéciaux, 
forcément encore bien peu documentés, soient publiés sur la question par Saint-Yves 
en 1879 et Mancenor en 1893. 

Depuis cette époque, grace a des documents qui ont été recueillis par des Américains 
en mission dans ces régions, comme M. SmirH (au Japon) et M ss Reep (aux îles Sand- 
wich), ou bien encore publiés par des nationaux de ces pays comme MM. Yenpo et Oxa- 
MURA, nous sommes à même de nous faire maintenant une idée d'ensemble suffisamment 
précise sur cette question que nous nous sommes efforcés de considérer sous tous ses 
aspects afin d’en dresser un tableau complet. Nous avons espéré, en écrivant ce travail, 
qu'il pourrait servir à montrer le parti que certaines contrées, et notamment nos posses- 
sions d’Extréme-Orient, pourraient tirer des ressources de la mer. 

Nous tenons à remercier ici MM. Loew et Ikeno, qui ont bien voulu nous faire 
parvenir des renseignements et des échantillons, et M. Dauey, de l’École des langues orien- 
tales, qui a bien voulu nous faire dimporthntes traductions de diverses publications 


japonaises. 
T. Ill. — Fasc. 1. I 


PREMIÈRE PARTIE. 


GÉNÉRALITÉS SUR LES ALGUES UTILES 


CHAPITRE PREMIER 


Les Algues dans l'industrie et l'alimentation 
des différents peuples. _ 


Nous considérerons successivement les usages auxquels on emploie les Algues dans 
l’industrie, en thérapeutique et dans l’alimentation; mais nous laisserons intentionnel- 
lement de côté, dans cette revue rapide, l’'Extrême- Orient que nous étudierons ensuite 
pour faire ressortir les caractères spéciaux que présente l’utilisation des Algues dans 
cette région du globe. ; 

Disons tout de suite que ce n’est qu’en Europe et en de rares points de l'Afrique et 
de l'Amérique que les Algues sont quelque peu utilisées. 

Au point de vue industriel, les Algues semblent avoir été employées dès l'antiquité. 
D'après Depeavux (1), la pourpre de Tyr aurait été fournie par une Algue que l’on trouve 
abondamment dans la Méditerrannée, et qui, à cette époque, faisait l’objet d'une récolte 
et d'un commerce importants. C’est le Rytiphl@a tinctoria Ag. 

Les fards, dont les belles Romaines se paraient, et qui possédaient l’agréable pro- 
priété de ne pas altérer la fraîcheur de la peau, étaient préparés avec certaines Algues. 
rouges, et en particuliér, d’après DraGenporFF, avec le Plocamium coccineum Lyngb, très 
commun sur toutes nos côtes. 

Dans un autre ordre d'idées, on utilise le stipe des Laminaires, qui devient très dur 
lorsqu'on l’a desséché, pour faire des manches de couteaux, des sticks. C’est de la même 
manière qu’en Bretagne et en Angleterre, le Chorda filum Lam., également séché, sert à 
faire des cordeaux de pêche. D’autré part, certaines conferves, et en particulier Conferva 
bombycina Ag., qui séchée présente l'aspect de l’étoupe, ont été employées en Écosse pour 
faire de l’ouate et du papier. 

Le carragheen (Chondrus crispus Lyngb.) sert à faire des gelées qui entrent dans la 
composition de certains parements destinés à humecter les fils de chaîne des étoffes 
pendant le tissage ; cet enduit donne au textile une souplesse qui permet au tisserand 
de travailler dans des locaux secs et salubres. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 3 


Tscuircu signale qu'on lutilise comme succédané de la gomme arabique dans 
la teinture et l’apprêt des tissus, la fabrication du papier, des chapeaux de paille et de 
feutre, dans la clarification de la bière et surtout du miel. 

L'industrie utilise encore les Algues pour en extraire un certain nombre de substan- 
ces et principalement la potasse et la soude que l’on retire des Fucacées et des Lami- 
nariées (goémons), notamment en Bretagne, l'iode, retiré d’un grand nombre d'espèces en 
divers pays et la mannite, qui cristallise à la surface des Laminaires que l’on laisse sécher 
à l’air. 

Enfin, dans tous les pays côtiers du Nord, et surtout en Bretagne, les goémons 
sont l’objet d’une pêche active, car, répandus dans les champs, ils servent d’engrais. Les 
Algues calcaires (Lithothamnion) sont également utilisées par les habitants des régions 
côtières de Bretagne et d'Angleterre, qui les emploient comme amendement. 

Au point de vuethérapeutique, la vieille pharmacopée reconnaît à certaines Algues di- 
verses propriétés. Tout d'abord, plusieurs d'entre elles ont été recommandées, depuis des 
temps très reculés, par les médecins anglais comme souveraines contre les maladies de 
poitrine. Ce sont principalement les espèces suivantes : Halyseris polypodioides Ag., 
Ectocarpus confervoites Le Jol., Desmaretia aculeata Lam., Gracilaria confervoides 
Grev., Griffithsia corallina Ag., Gigartina acicularis Lam., Gigarlina mamillosa J. Ag., 
Lomentaria articulata Lyngb., le Fucus crispus de Linné, plus connu sous le nom de 
mousse d'Irlande ou carragheen, et enfin le Chondrus crispus Lyngb. 

Cette dernière Algue est employée comme émollient de même que la mousse de Cey- 
lan (Gracilaria lichenoides (L) Harv.). Son emploi est relativement récent et date de 1831 
en ce qui concerne la thérapeutique. Venu d'Angleterre, son usage s'est répandu en 
France avec les travaux de Berat, en 1835, suivi rapidement de publications allemandes 
de la part de Meyer Vottrsueim, etc. Il était la base de la vieille préparation qui jouit 
encore d’une certaine réputation, dite cataplasme de Lelièvre. Plus tard, on l’utilisa pour 
émulsionner l'huile de foie de morue, pour fabriquer des gelées, etc. 

Les colons anglais qui ont émigré aux Etats-Unis y avaientconservé l'habitude de se 
servir de ce médicament. Surrx rapporte que, jusqu’en 1835, toute la mousse d'Irlande 
utilisée aux Etats-Unis y était importée d'Europe, et vendue là-bas au prix très élevé 
de 1 à 2 dollars la livre anglaise. C'est alors que le docteur J.V.B. Surrx, maire de Boston, 
s’aperçut que cette Algue croissait en abondance sur la côte du Massachussets où il suffi- 
sait de la ramasser, et que l'importation européenne cessa. 

D'après Tscuircu, le carragheen consommé en Europe est récolté dans le Nord et 
le Nord-Ouest de l'Irlande, et exporté par Sligo à Liverpool. Le comté de Plymouth en 
fournirait encore plus que l'Irlande, et on en récolterait également sur la côte de Massa- 
chussetts, entre autres à Cape-Cod-Bay et à Cohasset. Dans ces contrées, la récolte se fait 
à la main pour les meilleures sortes, ou à l’aide de râteaux de fer. Après avoir été agitée 
dans des tonneaux avec de l’eau, afin de dissoudre et d'entraîner la phycoérythrine, 
VAlgue est séchée au soleil. Le produit américain, moins incrusté de polypiers, est le 
plus estimé. 

En Bretagne, la récolte du « lichen » fait l’objet d'une exploitation régulière sur tous 


4 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


les rivages du pays de Tréguier compris entre Plougrescant et Perros-Guirec, et compre- 
nant les petits ports de Buguélez, Pellinec, Port-Blanc, Royau, Trestrel et Port-Le- 
goff. C’est sur les accores des nombreux récifs et îlots, ainsi que dans les petites anses 
qui découpent si capricieusement les rivages granitiques du massif breton, que les habi- 
tants de la côte, et surtout les femmes et les enfants, vont recueillir le carragheen. 

La récolte se fait généralement de mai en août, époque déterminée par les maires. 
des communes riveraines. Les collecteurs arrivent sur roches au moment où la mer est 
presque retirée ; entrant dans l’eau jusqu'à mi-jambe et souvent jusqu’à la ceinture, ils 
arrachent à la main, ou parfois coupent à l’aide de faucilles les touffes de Fucus qui 
forment en cet endroit le tapis végétal sous-marin. Le produit de la récolte, amoncelé 
en petits tas sur la grève pour en permettre l’égouttage, est transporté sur la terre ferme 
au moyen de barques ou de brouettes; on lui fait subir un triage grossier, qui en sépare 
la plus grande partie des Algues étrangères, des bryozoaires et des coquillages, puis on le 
lave à l'eau douce et on l’étale sur les falaises ou sur les prairies qui bordent la mer. Les 
parties pigmentées de l’Algue macèrent et se décolorent ; après dessiccation, le produit, 
ayant acquis une teinte jaune-verdâtre et une consistance cartilagineuse, est entassé dans. 
des sacs, puis amené au port le plus voisin, d’où il est expédié en presque totalité à 
Hambourg. 

Les quantités récoltées sont assez considérables. Dans le seul syndicat de Port-Blanc, 
la coupe a produit, en 1904, 20 500 kilogrammes de fucus sec, vendu en moyenne 
28 francs les 100 kilogrammes, soit en tout 5740 francs. 

Avant d'être livré à la consommation, le produit est soumis à un autre blanchiment 
qui paraît être effectué à l’aide d’acide sulfureux, si l’on s’en rapporte à l’odeur qu’exha- 
lent certains échantillons de carragheen quand on les froisse. Un dernier lavage, suivi 
d’un séchage définitif, le rend propre aux usages industriels et pharmaceutiques. 

D’autres Algues, les Ulya et un certain nombre de Fucacées, sont employées contre 
le goitre et la scrofule, et notamment le Fucus vesiculosus L. et l’Halydrys siliquosa 
Lyngb., qui, carbonisés, sont connus depuis le xvui* siècle sous le nom d’ As thiops vege- 
tabilis. On a également utilisé cette préparation contre l'obésité. 

L'emploi du Fucus vesiculosus remonte d'ailleurs à une haute antiquité. Il fut em- 
ployé par les anciens à divers usages : contre la goutte (PLinE), le cancer, les scrofules 
(Gaugius, Baxter, etc.) ; il fut recommandé par Gatien comme rafraîchissant. En 1769, 
Russet le préconisait contre le goitre, et l'on sait que Courrois découvrit l’iode en 1811 
par traitement approprié des cendres de varechs. Aussi ne faut-il pas s'étonner si, au 
cours du xix° siècle, il fut employé par divers médecins, non des moindres, comme 
LaAENNEC, DUCHESNE, Duparc, etc. Il renferme également du brome en quantité notable. 

Les Algues ont encore été employées comme vermifuge et cela, d'après DEBEAUXx (4), 
avec succès. La drogue vermifuge la plus célèbre est l’helminthochorton ou mousse de 
Corse, mélange dans lequel entre surtout un petite Algue rouge, l’A/sidium Helmintho- 
chorton Kg., souvent accompagnée d’un grand nombre d'autres telles que : Halopithys 
pinastroides Ktz., Heterosiphonia coccinea Falk., Ceramium rubrum Ag., Laurencia 
obtusa Lam., Dictyota dichotoma Lam., Polysiphonia urceolata Grev., Rhodomela sub- 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 5 


fusca Ag., Gigartina pistillata Stackh., Polysiphonia fruticulosa Spreng., Enteromorpha 
clathrata J. Ag.. Halurus equisetifolius Ktz., Dasya arbuscula Ag., Dictyota intricata 
Chantelat, Peyssonelia squamaria Dene. , Dietyota dichotoma Lam., Cystoseira amentacea 
Bory. 

L’ Alsidium Helminthochorton paraît être la seule Algue qui dans ce mélange, possède 
une action vermifuge indéniable et constitue, surtout en Corse, un remède populaire 
contre les Ascaris. C’est le D' D. SrepHaniPoLt, d’Ajaccio, qui fit le premier, en réalité, con- 
naître les propriétés de cette plante déjà signalée antérieurement par VacHER en 1756 et 
bien connue des anciens. La mousse de Corse a été depuis maintes fois étudiée, et récem- 
ment M. Garcain, docteur en pharmacie à Ajaccio, en reprit l'étude et montra que 
| Alsidtum Helminthochorton était en réalité la seule Algue vraiment douée d’activité thé- 
rapeutique du mélange commercial. 

Baitton, puis Miciox, ont donné la liste des nombreuses espèces que l’on peut y rencon- 


trer, et c'est sans doute à ce fait qu'est dû l’oubli dans lequel est tombé ce médicament 


dans la suite. En dehors du mucilage et d’une matière grasse, l’helminthochortone ren- 
ferme une matière résineuse non glucosidique dont la nature est encore indéterminée et 
qui est sans doute le principe actif. 

Citons encore l'Hypnæa musciformis Lam., vermifuge des Grecs et des Turcs, le 
Rhodymenia palmata J. Ag., employé dans les pays septentrionaux contre les vers intes-. 
tinaux, et le Corallina officinalis L. 

Certaines Algues possédent encore d’autres vertus thérapeutiques : tels sont, par 
exemple, le Plocamium coccineum Lyngb., employé autrefois comme alexipharmarque 
(antidote), et le Cystoseira Hoppii Ag., qui a été utilisé contre la gravelle et les coliques 
hépatiques. 

Enfin, on a parfois employé les Algues comme médication iodée, sous forme de pou- 
dres, vins, tablettes, tisanes, etc... 

La propriété qu'ont certaines Algues de se gonfler fortement par l’eau douce a permis 
de les utiliser pour la dilatation des trajets fistuleux, des plaies, et c’est ainsi que l’on 
rapporte qu'une plaie que portait au pied Garibaldi fut traitée de cette façon avec un 
plein succès. 

Les Algues peuvent encore être utilisées, avons-nous dit, dans l’alimentation de 
l’homme et des animaux. 

Beaucoup d’entre elles donnent des gelées, ce qui permet d’en préparer des boissons 
alimentaires, comparables au salep, et des soupes. Ainsi en est-il des espèces suivantes : 
Padina Pavonia Lam. et Gigartina mamillosa J. Ag. 

Plusieurs espèces sont, en outre, comestibles. Ainsi l’Ulva lactuca L. ou laitue de 
mer, est mangée comme salade en Bretagne, en Angleterre et dans divers pays du Nord. 
Il en est de même, en Espagne, de certaines Sargasses. On recherche encore beaucoup, 
en Irlande et en Ecosse, le Rhodymenia palmata J. Ag., en anglais « dulse », en irlan- 
dais « dillisk ». 

Cette plante est plus estimée dés elle pousse sur les rochers ou les coquilles, que 
lorqu’elle croît en parasite sur des laminaires. Elle est alors désignée sous le nom de 


6 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


« shell dillisk » et, fraîche, elle sert à assaisonner les pommes de terre. On recherche 
encore, surtout en Irlande et dans le pays de Galles, l’A/aria esculenta Grev., puis le La- 
minaria saccharina Lam., avec laquelle, d'après Mancenor, les Irlandais préparent une 
sorte de potage en faisant bouillir l’Algue dans du lait. Ils la font aussi tremper dans de 
l’eau douce, puis la font sécher au soleil; alors elle se couvre d’une efflorescence blanche 
sucrée qui est de la mannite. L’Algue est fréquemment conservée en cet état et nommée 
« sol ». 

Le Laurencia pinnatifida Lam. est utilisé en Ecosse, comme condiment plus 
encore que comme aliment, sous le nom de « pepper-dulse » (dulse poivrée). 

Les Anglais, les Irlandais et les Gallois consomment encore le Sarcophyllis edulis 
J. Ag., malgré ses propriétés purgatives, et d’autres espéces, telles que : Himanthalia 
lorea Lyngb., Enteromorpha compressa Grev., Ceramium diaphanum Roth., Dasya 
coccinea Ag., et c’est avec certaines de ces plantes que l’on fait, au Pays de Galles, le 
« laver-bread » ou pain d’Algues. 

Mais l’Algue la plus estimée au point de vue culinaire est le Porphyra laciniata Ag. 
Les habitants des îles de l'Ouest du Royaume-Uni la recherchent et, après l'avoir pilée, 
la cuisent avec un peu d’eau et la mangentavec divers assaisonnements, tantôt du poivre, 
du vinaigre et du beurre, tantôt avec des poireaux ou des oignons et du sel. En Angle- 
terre, après l'avoir fait bouillir, on la mange avec de l'huile, du jus de citron et du sel. 

A Madagascar, au Cap et au Chili, on mange les frondes du Durvill@a uiilis Bory, 
et aux Etats-Unis du Rhodymenia palmata J. Ag. 

Les Algues sont, en outre, et principalement en Norvège et en Écosse, utilisées pour 
nourrir les animaux qui vont, à marée basse, paître les Fucus. En Laponie, les Fucus 
sont récoltés par les paysans qui les font bouillir et les donnent, après addition de farine, 
aux porcs et autres animaux domestiques. 

En somme, si l’on met à part la préparation des alcalis et de l'iode, qui furent jadis 
pratiquées sur un grand nombre de rivages, et se font encore de ci, de là, l’utilisation des 
Algues présente un caractère très limité ou accidentel. 

En thérapeutique, les remèdes préparés avec les Algues sont peu usités, ou, s'ils le 
sont couramment, c’est dans une région peu étendue. 

C’est ainsi, par exemple, que la mousse de Corse n’est guère utilisée, d’une façon 
courante, que dans son pays d’origine. 

Les mêmes remarques s'appliquent aux usages alimentaires. Il n’y a guère, en effet, 
que les populations celtiques qui consomment couramment des Algues, et encore cet 
usage tend-il à disparaître et a-t-il été généralement limité aux familles côtières ou pau- 
vres, ou encore aux moments de famine. 

Il en est de même des usages agricoles. En un mot, il n’y a pas, dans les parties du 
monde que nous venons de considérer, d’Algues utilisées par tout un pays et donnant 
lieu 4 des préparations spéciales, d’un usage général, et présentant une importance 
économique. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 7 


CHAPITRE II 


Les Algues dans l'alimentation et l’industrie des peuples 
d’Extréme-Orient. 


En Extréme-Orient, et surtout dans certains pays comme le Japon et les iles 
Sandwich, les Algues et leurs produits prennent la plus grande importance, surtout au 
point de vue industriel et au point de vue alimentaire. Certains des produits que l’on 
en tire font l’objet de transactions, d’exportations importantes, leur fabrication 
occupe Chaque jour un grand nombre de personnes, et l’on peut dire qu'ici les Algues 
sont des plantes de première nécessité. 

Industriellement, on retire des Algues des colles végétales, substances dont la plus 
connue est l’agar-agar. Un petit nombre d'espèces sont employées pour faire ces pro- 
duits, mais elles font l'objet d’une exploitation intense. 

Au point de vue alimentaire, on utilise certaines de ces colles pour faire des gelées, 
des blanc-mangers, et en outre quelques Algues servent à faire, surtout au Japon, des 
préparations alimentaires spéciales très recherchées. 

D’autre part, dans tout l’Extrème-Orient, on consomme, à l’état frais, un grand 
nombre d’espèces : d’après Miss Reep, les Hawaiens, qui paraissent être très raffinés dans 
leur goût pour les Algues, n’en consomment pas moins de soixante espèces différentes. 

Enfin, la pharmacopée chinoise utilise beaucoup d’Algues, principalement contre les 
maladies de poitrine et comme anthelmintiques. La raison de l'importance qu'ont pris les 
Algues dans la vie des peuples d'Extrême-Orient doit tout d’abord être recherchée dans 
ce fait que la flore marine de ces contrées est d'une richesse remarquable; mais, en outre, 
d’autres raisons, tirées soit du climat, soit de la nécessité d’un aliment de complément 
facilitant la digestion, doivent encore être mises en avant. Dans la région Nord du Pacifique, 
on trouve en abondance de grandes Laminariacées semblables à celles qui, au Japon, 
servent à faire le kombu ; mais les habitants s’en servent peu ou pas, parce que pen- 
dant les longs hivers, au moment où la faim se fait cruellement sentir, ils ne peuvent 
atteindre ces Algues recouvertes par une épaisse couche de glace, alors qu’au printemps ils 
ont en abondance des poissons et des oiseaux. Cependant, au Kamschatka, on mange cuite 
FA laria esculenta Grev., dit v. Martens, et le même auteur rapporte, d’après MERTENS, 
que, dans l’Alaska, les indigènes récoltent, pour les manger, diverses Laminariacées : 
Alaria esculenta, Laminaria saccharina et le Fucus vesiculosus L. 

Au Japon, la mer ne gèle guère que dans le Nord ; aussi les conditions climatériques 
sont-elles très différentes. De plus, cet empire possède une étendue de côtes considérable, 
18.000 milles environ, le long desquelles on trouve une flore extrêmement riche, formée 
par un mélange d'espèces des régions chaudes et des régions froides du Pacifique. 


8 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Dans ce pays, la consommation des Algues n'est pas seulement l’apanage des popula- 
tions de pêcheurs de la côte qui tirent toutes leurs ressources de la mer. 

En effet, les Japonais de l’intérieur en consomment activement et les Algues, pré- 
parées de mille façons, se vendent dans les marchés et dans les rues où elles sont aussi 
populaires que nos « marrons chauds » et nos « pommes de terre frites ». 

Il semble bien, ainsi que nous le verrons plus loin, que la consommation active des 
Algues et des gelées qui en proviennent corresponde au besoin d’un aliment de complé- 
ment destiné à rendre plus facile le bon fonctionnement de l’appareil digestif. 

Dans ces dernières années, certaines espèces, qui étaient récoltées à l'embouchure 
des fleuves par les pêcheurs, ont diminué assez pour que leur récolte soit devenue plus dif- 
ficile. Cette diminution semble due aux changements qui se produisent dans la salure des 
eaux aux embouchures des rivières. ; 

Ces estuaires, en effet, se déplacent d’une façon constante, soit à cause des travaux 
effectués pour la navigation, soit à cause de l’apport constant de graviers, sables et cail- 
loux. Dans le cas d’une des Algues les plus estimées au Japon, le Porphyra laciniata 
(Lightf) Ag., les Japonais ont suppléé à sa disparition en tentant des cultures qui ont 
pleinement réussi. 

Dans la région côtière de la Chine, on utilise les Algues presque autant qu'au Japon, 
mais la production de ces végétaux et surtout des produits qui en dérivent étant insuf- 
fisante dans le Céleste Empire, celui-ci est tributaire du Japon qui lui envoie chaque an- 
née une quantité considérable d’Algues diversement préparées. 

Nous retrouvons des populations phycophages aux îles Philippines, dans les îles de la 
Sonde, à Ceylan, à Timor et dans diverses iles de l'archipel océanien. Enfin le voyage cir- 
culaire que nous faisons dans le Pacifique occidental nous amène aux îles Sandwich où, 
ainsi que nous l’avons dit plus haut, la consommation des Algues est extrêmement 
importante. 

Les Hawaïens, plus encore peut-être que les Japonais, prisent les produits de la mer, 
et, comme le fait remarquer Miss Reep, il est probable que les anciens de ce pays ne 
concevaient aucun mets qui ne soit accompagné d’une ou de plusieurs espèces d’Algues. 
D'après Miss REED, on connaît actuellement à Hawaï 115 espèces d’Algues sur lesquelles 
60 sont consommées par les naturels. Bien que la flore soit ici moins riche qu'au Japon, 
le nombre des espèces utiles est donc considérable, et les habitants ont été amenés à ce 
régime marin par les conditions particulières réglant la végétation dans l’archipel. Miss 
ReEEp a observé que les constituants essentiels de l'alimentation des Havaïens sont le 
poi (pâte faite avec la farine obtenue du tubercule d’une aroïdée, le Colocasia escu- 
lenta ou taro), le poisson, et le /imu (nom donné à toutes les espèces d'Algues). Il arrive 
parfois que, pendant des semaines, les naturels ne peuvent se procurer autre chose que 
le limu, qui, lui, peut être recueilli pendant toute l’année, sauf à l'instant des fortes 
tempêtes. 

Les patates douces, le taro et les bananes ne peuvent croître et mûrir que dans un 
bon sol, bien irrigué, où la pluie tombe suffisamment. 

Un grand nombre des villages de pêcheurs, situés sur la côte, n’ont aucune terre fertile 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 9 


dans leurs environs, de sorte que ces gens sont obligés de rechercher leur nourriture, en 
dehors de ce qu’ils pêchent dans la mer, dans les vallées de la montagne. 

Jusqu'à la mort de KamEHAMEHA LE GRAND, qui survint en 1819, les femmes ne 
devaient manger, sous peine de mort, ni bananes, ni noix de coco, ni tortues, ni porcs, 
ni certains poissons, de sorte que leur régime était encore plus limité que celui des 
hommes. Il est évident que, pendant les époques de guerre ou de famine, toute leur nour- 

-riture leur vint de la mer. De plus, avant l’arrivée des missionnaires, il n’y avait d’autres 
fruits dans l’île, que la noix de coco, la banane et la pomme de montagne ou ohia, qui 
croît dans les vallées de la montagne, mais là seulement où la pluie tombe abondamment, 
et pendant les mois de juillet et d'août. 

C'est à ces circonstances difficiles que Miss Reep attribue l’usage, qui s’est perpétué 
dans ce pays, de se nourrir des choses de la mer. 

Ici les Algues prennent la place des légumes verts et des fruits, et les habitants 
mêmes de la montagne recherchent les Algues marines et y suppléent au besoin par les 
Algues d’eau douce qui croissent dans leurs ruisseaux. 

Environ soixante espèces sont ainsi consommées dans l'archipel, mais quarante 
sont seulement d'un usage général, alors que les autres ne sont utilisées que par cer- 
taines familles. 


CHAPITRE II 


Constitution anatomique et chimique des Algues. 


Certaines particularités de la cellule des Algues sont bien connues, et notamment ce 
qui concerne l’histoire de leurs chromatophores et de leurs pigments. Aussi bien n’avons- 
nous l’intention de ne nous occuper ici que des points de la structure des Algues qui 
ont un rapport avec leur utilité. 

STRUCTURE DE LA MEMBRANE. — Nous étudierons tout d’abord la structure de la 
membrane, car c'est dans son épaisseur que se trouvent localisés les mucilages, qui, ainsi 
que nous le verrons plus loin, constituent l’un des produits les plus utiles et les plus re- 
cherchés que l’on peut extraire des Algues. 

Il y a peu de groupes du règne végétal chez lesquels la constitution de la membrane 
soit plus variée que chez les Algues, et particulièrement chez les Algues unicellulaires. 

Laissant de côté les petites Algues unicellulaires, dont le mucilage constitue généra- 
lement des gaines de formes diverses, qui réunissent les individus les uns aux autres 
et ne présentent que rarement d'applications alimentaire ou industrielle, nous arréte- 
rons un instant notre attention sur les Siphonées, qui sont de très grandes Algues vertes 
unicellulaires. 


Ces plantes possèdent une membrane formée de trois couches : une extérieure, cuti- 
T. HI. — Fasc. 1. 2 


10 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


culaire, une seconde mucilagineuse et une interne qui constitue la masse fondamentale de 
la membrane. ‘* 

Les choses se compliquent beaucoup chez d’autres genres, comme par exemple le 
genre Cladophora où lamembrane est formée de couches plus nombreuses, plus ou moins 
vallonnées et offre des stries qui sont disposées en deux systèmes se coupant à angle droit 
que l’on peut voir lorsqu’on regarde la membrane de face. 

Chez les Algues pluricellulaires, il est évident que la cuticule n’existe que sur les cel- 
lules ou les parties de cellules qui se trouventen contact avec le milieu extérieur. De plus, 
ces cellules communiquent entre elles par de nombreux prolongements protoplasmiques. 

La membrane des Algues pluricellulaires vertes, brunes ou rouges, ne diffère pas 
essentiellement de la membrane des cellules des végétaux supérieurs. 

Nous pouvons prendre comme type la membrane de l’Ectocarpus fulvescens Thuret, 
bien étudiée par M. Sauvaceau. Cette membrane est de nature celluloso-pectique. Sa 
surface extérieure, exclusivement pectique, probablement avec condensation spéciale, joue 
le rôle d’une cuticule remplacée entre les cellules par une lamelle moyenne pectique. Au- 
dessous se trouve une région exclusivement pectique, et enfin à l’intérieur de chaque cel- 
lule on rencontre une membrane pecto-cellulosique propre à chaque cellule et qui cons- 
titue la partie la plus interne de la paroi cellulaire. 

C’est en employant les méthodes préconisées par M. Manain que l’auteur a effectué 
cette recherche, et en vérifiant les résultats obtenus par la méthode de dissolution. 

C'est dans la région pectique de la membrane que se trouvent généralement les muci- 
lages. Cependant, chez certaines Algues brunes, il se produit au sein du thalle, des poches 
à mucilage qui ont été étudiées par M. GuiGnaro. 

Ces canaux se forment, dans le Laminaria Cloustoni Le Jol. (Pl. Il, fig. 3) à par- 
tir dela région génératrice qui est située entre le pied du stipe, qui est vivace et la lame qui 
est caduque. Cette région présente de nombreuses cellules, semblables les unes aux autres 
et en voie de division. Sur une coupe longitudinale, on voit que les canaux mucifères ap- 
paraissent sous l’aspect d’un méat, qui, de forme lenticulaire, se produit par gélification 
de la lamelle moyenne de deux cellules. Les cellules qui séparent le méat de l'extérieur 
se cloisonnent, et la jeune pochesetrouve ainsi refoulée vers l’intérieur (PI. I, fig. 1). Le méat 
se trouve séparé de cette façon de lasurface de l’Algue par denombreuses cellules, riches en 
phéoleucites, qui constituent la région corticale de l’Algue. Lorsque la jeune poche a atteint 
la profondeur voulue, on voit se différencier à sa base, vers l’intérieur de la plante, de 
petites cellules spéciales présentant un gros noyau dans un protoplasma dense, riche en 
granulations et de couleur gris jaunâtre. Ces cellules ont une forme ovoïde, et sont allon- 
gées suivant la direction du plus grand diamètre du méat. Leur nombre augmente avec 
l’âge et les dimensions de la cavité, et elles présentent tous les caractères des éléments sécré- 
teurs, alors que les autres cellules bordant la cavité n’ont pas changé d'aspect. Les méats 
se mettent alors en communication les uns avec les autres et forment un réseau qui pré- 
sente des caractères particuliers tant au point de vue de ses ramifications et de sa structure 
qu’à celui de la localisation des cellules sécrétrices dans ses diverses parties. Dans les 
réseaux tout à fait adultes, que l’on peut isoler par des coupes tangentielles, on retrouve 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 11 


les cellules sécrétrices qui, faisant saillie à l’intérieur des canaux, forment des amas glan- 
duleux, cupuliformes, et qui ne tapissent pas toute la paroi (Pl. I, 2 à 10). 

La forme et la localisation de ces canaux mucifères, très répandus, mais non univer- 
sellement, dans la famille des Laminariacées, présentent un grand intérêt systématique ; 
au point de vue qui nous occupe, leur abondance explique la grande quantité de mucilage 
trouvée chez ces Algues. 

Le mode de formation de ces glandes n’est d’ailleurs pas toujours identique à celui 
qui a été observé par M. GuiGnar», et que nous venons de décrire. 

Plus récemment M. YEenno a décrit chez Ulopteryx pinnatifida (PI. II, 4, 5, 6), des 
glandes dont la structure est très différente. Ces glandes naïssent à partir d’une cellule 
sous-épidermique qui grossit beaucoup, ce qui comprime la cellule épidémique située au- 
dessus d’elle, de sorte que l’on ne voit pas d’émergence vis-à-vis de cet organe en forma- 
tion. En même temps, le contenu de la grosse cellule change d'aspect, devient hyalin 
et remplit toute la cavité cellulaire. La cellule glandulaire grossit ainsi de plus en plus, 
pendant que la celulle épidermique se réduit petit à petit et que finalement elle n'est 
représentée que par une simple membrane. 

Enfin, lorsque la glande est tout à fait formée, elle devient très volumineuse et reste 
collée contre la surface de la fronde. Plusieurs Gitutes épidermiques ont dégénéré, de 
sorte que, vue de face, la fronde montre ca et 1a des espaces quadrangulaires qui marquent 
la place des glandes (PI. V, 5, 6, 7, 8). 

À M. YENpo pense que ces organes servent à sécréter le mucilage. On les retrouve chez 
Hirome undarioides Yendo et chez Undariopsis (Laminaria) Peterseniana Miy. et Okam, 
deux autres Laminariacées du Japon. 

COMPOSITION CHIMIQUE DES MUCILAGES. — La composition chimique de la membrane 
des Algues estencore mal connue. Ainsi que nous l'avons dit plus haut, au point de vue 
microchimique, elle rentre dans le groupe des membranes celluloso-pectiques. 

En ce qui concerne les Algues vertes, Ktess admet que la membrane des Zygnema, 
Chetophora, Mesocarpus, est constituée par de la cellulose associée à des hémicelluloses. 

Chez les Siphonées, et en particulier chez les Caulerpa, Correns n’a pas pu obtenir la 
réaction de la cellulose, mais, par contre, a découvert une substance soluble dans l’acide 
sulfurique concentré, se précipitant par l’eau sous forme de sphérites. Cette substance 
qui, d’après No, bleuit par l’iode, ne constitue qu’une partie de la membrane, et il reste 
un autre constituant insoluble dans l’acide sulfurique. 

D'autre part, Kart MüLcer a montré que l’on peut extraire, de la membrane cellu- 
laire du Cladophora glomerata Thur., une hémicellulose. 

Cette substance, soluble dans l’acide sulfurique à 3 p. 100, contient en grande 
abondance de la xylane, tandis que la portion insoluble est riche en dextrane. 

Chez les Phæophycées, on n’a guère étudié que les Fucus et les Laminaria. 

Van WissELINGH a montré la présence, dans la membrane du Fucus, de cellulose et 
d’un autre hydrate de carbone, soluble dans l’acide sulfurique à 1 p. 100 et colo- 
rable en bleu par l’iode, auquel il a donné le nom de fucine. Cette fucine est localisée 
dans la lamelle moyenne. 


12 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


D'autre part, STENHOUSE avait obtenu, dès 1850, en traitant des Fucus par distillation 
en présence de l’acide sulfurique, un produit qu’il nomma fucosol. Maquenne réussit, plus 
tard, à montrer que ce fucosol donne une grande quantité de furfurol avec du méthylfur- 
furol, de sorte que cette membrane contiendrait des pentosanes et des méthylpentosanes. 
Et, en effet, ToLLens et GiinTHER ont obtenu, en hydrolysant la membrane cellulaire des 
Fucus, un méthylpentose isomére du rhamnose, réducteur et fortement lévogyre. Ce 
sucre, nommé fucose, donne par les acides 4 chaud du méthylfurfurol ; son osazone cris- 
tallise, fond à 15° et est très soluble. D’après MiirHer et Tozcens, le fucose est l’antipode 
optique du rhodéose, extrait de la convolvuline par E. Vorocex. 

D’autre part, BreLer et ToLLens ont obtenu de Laminaria du méthylfurfurol et SoLtiep 
décela la présence de méthylpentosane chez I’ Ascophyllum nodosum (L.) Le Jol., de sorte 
que la membrane des Algues brunes parait trés riche en méthylpentosanes. 

En ce qui concerne le mucilage des Laminaria, Bauer en a obtenu par hydrolyse du 
dextrose. D'autre part, SCHMIEDEBERG en a extrait le laminarin C,,H,,,O,,, 
et l’acide laminarique C,,H,,0,,, de nature colloïdale et très soluble. Cet acide 
est probablement le même corps que l’alguine ou acide alguique de Sranror». 

M. Czapex admet que ces substances jouent, chez les Algues brunes, le même rôle 
que les composés pectiques chez les végétaux supérieurs. 

Nos connaissances sur les Floridées ne se rapportent généralement pas à des Algues 
fraîches, mais bien à des produits pharmaceutiques tels que le carragheen. 

La membrane de différentes Algues rouges semble ainsi contenir surtout, et en 
premier lieu, des galactanes, puis des mannanes, des lévulosanes et des dextranes, avec, 
parfois, des méthylpentosanes. 

En résumé, nos connaissances actuelles sur la membrane des Algues sont très res- 
treintes. Il semble qu’elle soit très riche en composés pectiques et en hémicelluloses, ce 
qui la distinguerait quantitativement, mais non qualitativement, de la membrane des 
plantes supérieures. La cellulose ne paraît pas y avoir encore été recherchée avec beau- 
coup de soin, de sorte qu’on ne peut pas conclure à son absence ; mais, par contre, la 
présence de méthylpentosanes distingue la membrane des Algues de celle des végétaux 
supérieurs. 

Ces membranes, très riches en hémicelluloses, livrent facilement celles-ci qui se 
dissolvent assez aisément dans l’eau bouillante et se prennent en gelée par refroidisse- 
ment. C'est sur cette propriété qu’est basée la préparation des gelées d’Algues. 

lope. — Les cendres d’Algues, riches en iode et en brome, ont servi pendant long- 
temps de matière première pour la préparation de ces corps, de même que pour l’extrac- 
tion des sels de potassium. L’exploitation des sels de Stassfurt, d’une part, et celle des 
nitrates du Chili, d’autre part, ont modifié considérablement ces industries et aujourd’hui 
les sels de potassium ne peuvent être retirés des varechs, avec un rendement valable, 
que si ces varechs servent en même temps ou surtout comme matière, première 
d'extraction du brome et de l’iode (CHABRIÉ). 

Cependant il existe encore en Bretagne des usines où l’on extrait l’iode des varechs; 
on coupe ces Algues et on récolte aussi celles que la mer amène à la côte, mais qui sont 


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Æ. 
Le 
" 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 13 


moins riches en iode. Nous répétons que la plus grande partie de l’iode industriel provient 
des nitrates chiliens et le brome des sels de Stassfurt. 

Pour obtenir l’iode des varechs, on les incinère, on épuise les cendres par l’eau et on 
concentre la solution pour laisser déposer le chlorure de sodium et les sels de potassium 
(chlorure et sulfate); les eaux-mères sont alors traitées par le chlore, qui met en liberté 
Viode, et cela en ayant soin de ne pas dépasser le moment où le brome se séparerait à son 
tour. L’iode est en moyenne 8 fois plus abondant que le brome dans ces cendres. Ce 
dernier métalloïde s'obtient après l’extraction de l’iode, soit par l’action du chlore seul, 
soit par l’action combinée du sulfate de cuivre et de l’acide sulfureux. 

Les plantes de choix pour la préparation de l’iode sont les Laminariacées. 

D’après GépecHens, le Laminaria digitata Lam. contient 3,62 p. 100 d’iodure 
de potassium, et, d’après GAUTHIER, 100 grammes de substance fraiche de la même plante 
contiennent o gr. 061 d’iode. 

D'après Marcuanp (2), la teneur en iode atteint chez le Laminaria saccharina 2,73 
p. 100 des cendres, chez le Fucus vesiculosus 0,70 p. 100, chez le Laminaria digitata 
5,55 p. 100. Quant au brome, il y est contenu pour 0,60 p. 100 dans cette espéce et 
1 p. 100 dans le F. serratus, espèce la plus riche. 

La teneur en potasse varie suivant les espèces de 6 à 15 p. 100 et celle en soude de 
15 à 25 p. 100. Le poids moyen des cendres est de 30 à 40 p. 100. 

Ce sont là des plantes extrêmement riches; les autres Algues brunes le sont beaucoup 
moins : c’est ainsi que 100 grammes de substance fraîche de Saccorhiza bulbosa (Huds.) 
de la Pyl. contiennent seulement o gr. 0077 d’iode. Néanmoins toutes les Algues con- 
tiennent ce métalloïde que l’on retrouve par exemple chez les genres Chondrus, Gigar-- 
tina, Bonnemaisonia, Batrachospermum, Ulothrix, Cladophora, etc. 

A Vheure actuelle, on ne sait pas encore si cet iode est emmagasiné sous forme de 
sels alcalins ou de combinaisons organiques. 

SUBSTANCES DIVERSES. — Outre les substances que nous venons d’étudier, et qui sont 
des plus importantes à notre point de vue, il n’est pas inutile de rappeler que la mem- 
brane des Algues est parfois fortement incrustée de calcaire, et que certaines substances, 
telles que des graisses et certains hydrates de carbone, sont contenues dans leur proto- 
plasma. 

Ainsi toutes les Fucoïdées renferment, d’après B. Hansreex (2), dans leurs cellules, 
des corps sphéroïdaux fortement réfringents qu’il considére comme premier produit d’assi- 
milation chez ces Algues, produit physiologiquement comparable à l’amidon chez les 
plantes vertes supérieures et auquel il donne le nom de « fucosane ». Ce corps est lévo- 
gyre et n’est pas directement capable de fermentation ; il ne se dissout pas dans l’eau et 
son analyse élémentaire lui fait accorder Ja formule empirique (7C*H‘O). 

E. Crato (4) considère les granulations de fucosane de HANSTEEN comme des forma- 
tions vésiculeuses, sortes d'organismes autonomes de la cellule, doués d’une activité propre 
à l’intérieur du protoplasma, de nature phénolique et plus particulièrement phloroglu- 
cique ; il leur donne le nom de physodes. 

F. W. T. HunGer (2) se rallie à l'opinion de HAnsTEEN en ce qui concerne l’origine 


14 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


des granulations contenues dans le lumen cellulaire chez le Dictyota dichotoma Huds., 
mais croit à l’existence d’un glucoside, ou même d'un phloroglucoside hydrolysable par la 
myrosine, tandis que les petits corps adhérents aux phéoplastes seraient composés d’un 


monosaccharide qui est attaqué par la ptyaline et la trypsine. 


Enfin l’arsenic a été mis en évidence chez les Algues par M. ARMAND GAUTHIER (2), et 


plus récemment par MM. LEROIDE et TassiLy. 


Ces messieurs, en effectuant des dosages par la méthode de G. BerTranp, ont obtenu 


les résultats suivants : 


QUANTITÉS TRAITÉES Ps e 
(en grammes). 


AS. EN 
pour 


ne ce er ee ee 


MILLIGRAMMES 
100 grammes. 


Chondrus crispus. 

Fucus vesiculosus. 
Mousse de Corse... 
Laminaria digitata. 


— saccharina. 
— flexicaulis. 


0,070 
0,010 
0,025 
0,050 
0,010 
0,010 


DEUXIÈME PARTIE 


LES ALGUES UTILES D’EXTREME-ORIENT 


CHAPITRE IV - 


Caractéres botaniques des Algues utiles. 


2 1. — GÉNÉRALITÉS. ALGUES BLEUES. 


Au cours de ce chapitre, nous étudierons successivement les différentes familles qui 
contiennent des Algues utiles et nous donnerons un tableau complet des espéces qui, a 
notre connaissance, sont utilisées par les peuples d'Extrême-Orient, particulièrement pour 
leur alimentation. 

‘Nous suivrons, pour faire cette énumération, la classification donnée dans des Na- 
türlichen Planzenfamilien d’ENGLER et PRANTL. 

Cette classification range les Algues dans l’ordre des Euthallophytes; elles en forment 
le sous-ordre des Euphycew. Cependant ce sous-ordre ne comprend pas tout l'ancien 
groupe des Algues : les Algues bleues ou Cyanophycées n'en font pas partie. 

Celles-ci n’offrent pas, d’ailleurs, un très grand intérêt au point de vue qui nous 
occupe. Cependant, en Chine, on recherche le Nostoc commune Vauch., qui est pourvu 
_ d’une gaine mucilagineuse très volumineuse et qui, étant cuit, entre dans l’alimentation 
de la population. D'après Miss Reep, les Chinois habitant les îles Sandwich font venir cette 
Algue séchée de leur pays, à l’occasion des jours de fêtes ou de vacances. On l’emploie 
en petites quantités, car elle se gonfle énormément dans l’eau. C’est, à notre connais- 
sance, la seule Algue bleue utilisée en Extrême-Orient. 


2 2. — CHLOROPHYCEES. 


Les Chlorophycées constituent, parmi toutes les Algues, la classe la moins uti- 
lisée. Les espèces utiles le sont principalement pour l'alimentation; plus rarement, cer- 
taines d’entre elles servent à la médecine, mais c'est là l'exception. Ces Algues he sont 


16 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


pas riches en mucilage : aussi sont-elles mangées fraîches ou bien encore conservées par 
la dessiccation ou par la salaison. 
C’est la famille des ULvacées qui fournit les plantes les plus recherchées parmi les 
Chlorophycées. Les Ulva possèdent un thalle lamellaire, formé par deux assises de 
cellules à parois épaisses. La plus répandue, l’U/va lactuca (L.) Le Jol., se trouve dans 
toutes les mers. Son thalle gaufré et plissé l’a fait comparer à une salade : aussi est-elle 
connue sur les côtes de France sous le nom de « laitue de mer ». La forme rigida de 
cette espèce présente un thalle plus corné. Les espèces utiles d’U/va sont énumérées 


dans le tableau suivant : 


Genre Ulva. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGENES. ; USAGES, 
U. fasciata Delile. Phycoseris fasciata Kg., U. pa-| Hawaien: Limu paha- | Utilisée dans l’alimentation des Ha- 
pillosa Ardiss. paha ou limu pala- | waiens. 
haloa (Reed.) (Reed). 
U . lactuca (L.) Le Jol. Japonais : Aosa | Utilisée dans l'alimentation des Japo- 
(Smith)ou Ao-nori(1) | nais. 
(Martens). (Smith, v. Martens). 
U. lactuca f. rigida | Phycoseris rigida Kg., Ph. aus-| Hawaïen : limu lipa- | Utilisée dans l’alimentation des Ha- 
(Ag.) Le Jol. tralis Kg., U. latissima Grev.| hapaha (Reed). waiens. 
‘ (Reed). 
U. lactuca f. laciniata | Ph. lobata Kg., U. latissima| Hawaten: Limu lipa- | Utilisée dans l’alimentation des Ha 
Wulf. palmata Ag. : lahalaha, limu pa-| waiens. 
kaea (Reed). (Reed). 
U. penniformis. Utilisée en Sibérie pour la guérison 
(2) des maladies des jambes et des yeux. 


(von Martens). 


Le genre Enteromorpha, comprenant de très nombreuses espèces, se distingue du 
genre Ulva par son appareil végétatif, généralement filamenteux ou rubané. Le thalle 
est formé également de deux assises de cellules, mais celles-ci se séparent l’une de l’autre 
dans la partie moyenne de la fronde, qui se trouve ainsi être tubuleuse. 

Ces Algues sont employées fraîches ou sèches dans l'alimentation, comme légume ou 
condiment. 

De plus, les Hawaiens les utilisent sous forme de pansements pour guérir les coupures 
ou les contusions. . 
Voici la liste des espéces utiles de ce genre : 


(1) Von Martens rapporte certainement à tort ce nom à l’Ulva Lactuca L, il désigne certainement l’Ulva Linga L, 
que les Japonais confondent sous le nom d’Awo-nori avec plusieurs espèces d’Enteromorpha (Smith) et que l’on range 
dans ce genre (Enteromorpha Linga (L.) J. Ag.). 

(2) Nom donné par Von MARTENS sans nom d’auteur. . 


NOMS BOTANIQUES. 


E: compressa (L.) Gr. 


E. flexuosa (Wulf.) J. 
Ag. 


E. intestinalis 


Link. 


(L.) 


E. Linga (L.) J..Ag. 


—— 


E. plumosa Ktz. 


E. prolifera (Muell.) 
J. Ag. 


ats 4 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Genre Enteromorpha. 


SYNONYMES. 


E. complanata Kitz, Ulva En- 
teromorpha compressa Le Jol. 


E. Jurgensii Ktz., Scitosyphon 
Jurgensii Ag. 


Ulva Enteromorpha intestinalis 
Le Jol. 


Phycoseris crispata, P. Linza, 
P. lanceolata Ktz., Ulva Ente- 
romorpha lanceolata Le Jol. 


Ulva Rothiana gracilis Le Jol., 
E. Hopkirkii Crn., E. para- 
doxa Ktz. 


Ulva compressa prolifera Ag., 
E. compressa prolifera Grev., 
E. intestinalis prolifera Hauck. 


NOMS INDIGENES. 
Japonais : awo-nori 
(Smith), ao-nori 
(Mangenot, Loew). 


Hawaïen : limu eleele 


ou limu pipilani 
(Reed). : 
Japonais : awo-nori 


+ (Smith) ; Hawaïen : 
limu eleele ou limu 
pipilani (Reed). 


Japonais : awo-nori 
(Smith); Hawaïen : 
limu eleele ou limu 
pipilani (Reed), 


Hawaïen : limu eleele 
ou limu pipilani 
(Reed). 

id. 


17 


USAGES. 

Utilisée fraiche ou sèche dans l’alimen- 
tation des Japonais (Smith, Mange- 
not). 

Utilisée dans l'alimentation des Ha- 
waïens (Reed). 


Utilisée dans l’alimentation des Japo- 
nais et des Hawaïens (Smith, Reed). 


Utilisée dans lalimentation des Japo- 
nais (Smith) et des Hawaiens (Reed). 


Utilisée dans l’alimentation des Ha- 
waïens (Reed). 


id. 


Toutes ces Ulvacées croissent le plus souvent dans les eaux peu profondes, tranquilles, 


ou dans les eaux saumâtres. Il en est de même des CHæTOoPHORACÉES dont un seul genre, 
le genre Stigeoclonium, petite Algue verte filamenteuse et mucilagineuse, est utilisé par 
les Hawaiens. 


Genre Stigeoclonium. 


NOMS BOTANIQUES. 


S. amænum Kz. 


SYNONYMES. 


» 


NOMS INDIGÈNES. 


USAGES. 


Hawaïen : limu holui-| Mangée par un petit nombre de 


lio (Reed). 


Hawaïens (Reed). 


Les Cladophoracées, qui vivent également dans l’eau saumâtre, sont des Algues fila- 
menteuses ne présentant guère d'applications alimentaires qu'à Hawai,ainsi que l'indique 


le tableau suivan 


NOMS BOTANIQUES. 


C. nitida Ktz. 


NOMS BOTANIQUES. 


C. antennina (Bory) 
Kiz. 


te 


Genre Cladophora. 


SYNONYMES. 


» 


NOMS INDIGÈNES. 


[lawaïen: limu holui- 
lio (Reed). 


Genre Chætomorpha. 


SYNONYMES. 


» 


T. I. — Fasc. 1. 


NOMS INDIGENES. 


Hawaien: limu holui- 


lio (en français : 
poils de chien), limu 
hulu ou limu manu 
(Reed). 


USAGES. 


Utilisée dans l’alimentation des Ha- 
waïens (Reed). 


USAGES. 


Utilisée comme nourriture dans quel- 
ques iles de l’archipel Hawaïen et 
surtout à Hawaï et à Maui (Reed). 


18 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Avec les CopracéEs, nous abordons l’étude des Algues siphonées, c'est-à-dire qui, 
malgré leur taille souvent très grande, sont formées d’une seule cellule. 

Cette cellule est très ramifiée et, parfois, les ramifications s’anastomosent entre 
elles. Chez les Codium, qui seuls nous intéressent, le thalle présente un aspect velouté 
dû à la présence de nombreuses et fines papilles. Le tableau ci-dessous donne la liste des 


espèces utilisées : 


Genre Codium. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 

C. adhæœrens Cabrera. | C. difforme Schousb. Japonais : Hai- miru | Utilisée comme nourriture aux îles 
(Okamura) ;  Ha-| Sandwich (Reed). 
waien : limu aalaula : 
(Reed). 

C. Lindenbergii Bin- » Japonais : miru|Au Japon, mangées fraîches, sèches 

der. (Smith, Okamura),| ou conservées dans le sel (Smith). 
C. mucronatum J. Ag. » id. id. 
C. Muelleri Kg. C. latum Suringar. Hawaïen : limu aalau-| Utilisée comme nourriture aux îles 


la, limu wawaeiole| Sandwich (Reed). 
ou limu wawaimoa 


- (Reed). 
C.tomentosum (Huds.)| Spongodium dichotomum La-| Japonais: fiziki (Mar- | Utilisée comme nourriture au Japon, 
Stackh. mour, Agardhia dichotoma| tens), miru (Smith),| mangée dans les soupes, ou avec 
Cabr., C. filiforme Mont. hira miru (David-| de la sauce au soja ou du vinaigre 
son); Hawaïen:limu| (v. Martens, Smith) et aux îles 
aalaula (Reed). Sandwich (Reed) à l’état frais ou 


sec, ou conservée dans le sel. 


Le thalle de ces Codium est ramifié et formé de digitations plus ou moins nombreuses 
à l'exception de celui du C. adhærens qui, au contraire, présente une forme très 
irrégulière. : 

Ces plantes vivent dans la mer a des profondeurs variables mais souvent assez 
grandes. On les trouve encore sur la grève, où elles sont rejetées par le flot. 

Enfin, avec les Valoniacées, chez lesquelles nous rencontrons une seule espèce utile, 
nous terminons l'étude des Chlorophycées. 


s 


Genre Valonia. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGENES. USAGES. 


V. utricularis (Roth.) | Conferva utricularis Roth., V.| Hawaien: limu lipuu-| Utilisée comme nourriture par les 
Ag. incrustans Ktz., V. cæspitula puu. Hawaiens. 
Zanard. 


Le Valonia utricularis (Roth) Ag. est une petite Algue verte, de quelques céntimètres 
de long, unicellulaire et très ramifiée. Elle n’est que peu utilisée à Hawaï. 


RE SPORE ET ee ee 
. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 19 / 


2.3. — PHÆOPHYCÉES. 


Les Algues brunes présentent une utilité beaucoup plus grande que les Algues vertes, 
en raison principalement de leur richesse en mucilage, en iode et en sels minéraux, ce 
qui permet leur utilisation alimentaire, agricole et industrielle. 

Les EcrocarPAcéEs, dont les représentants apparaissent sous forme de grosses masses 
constituées par des filaments très nombreux, très ténus, et très ramifiés, ne présentent 
guère d'usages alimentaires qu'aux îles Sandwich, et encore est-ce le genre Ectocarpus 
seul qui est utilisé de façon très restreinte, ainsi que l’indique le tableau suivant: 


Genre Ectocarpus. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 
E. indicus-Sond. os Ectocarpus Amicorum Hart. Hawaien: limu aka-| Mangée aux iles Sandwich (Reed). 
. akoa ou limu holui- 
lio (Reed). 
E. Sp. » | id. id. 


Les Enca@LiacEgs ne sont guère intéressantes non plus au point de vue qui nous 
occupe : 


Genre Scytosiphon. 
NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 


S. lomentarius|Chorda lomentaria Lyngb., S. | Japonais : kayamonori | Se trouve dans le Tijntian chinois 


(Lyngb.) J. Ag. filum  lomentarius  Ag.,| (Okamura). (Marchand). 
3 Chorda filum lomentarius 


Kitz. 


Genre Phyllitis. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 
P. Fascia Ktz. Laminaria Fascia Ag., P. cœs-| Japonais : haba-nori | Utilisée comme nourriture par les 
(PA. THI, 4.) pitosa Le Jol., Laminaria caes-| (Smith). paysans des provinces de Awa et 
? pitosa J. Ag. de Sagami, au Japon, après séchage 


au soleil (Smith). 


Ces Algues sont généralement filamenteuses ou rubanées. Le Scytosiphon lomen- 
tarius J. Ag. possède un thalle fistuleux, mais il est vraisemblable que cette dernière 
espèce ne se trouve dans le Tijntian qu’à l’état d’impureté. 

Les Cuorpariacées, Algues filamenteuses marines, de grosseur moyenne, ne nous 
offrent que deux espèces utiles : 


Genre Chordaria. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGENES. USAGES. 
C. abietina Rupr. ‘ » Japonais : matsumo | Utilisée, au Japon, comme nourriture 
(Smith, Okamura,| et pour la conservation des cham- 
Davidson). pignons (Smith, Davidson). 


20 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Genre Mesogloia. 


- NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGENES. USAGES. 


M. decipiens Suring. » Japonais mozuku | Mangée fraiche ou conservée dans le 
(Smith). sel au Japon (Smith). 
M. crassa Suring. » Japonais : futo-mo-|Utilisée de même (Davidson). 


zuku (Okamura, Da- 
vidson). 


Ces deux espèces, formées par des filaments épais et élargis, gélatineux, croissent 
entre les limites de la marée, de même que les autres Algues brunes que nous venons de 
passer en revue. 

Le Chordaria abietina Rupr. est une Algue assez riche en mucilage et qui présente 
cette particularité d’être employée, au Japon, pour la conservation des champignons 
comestibles que l'on dispose dans des barils en lits salés alternant avec des lits de 
Chordaria. Cette Algue se récolte à la limite des hautes mers. 

Avec les LAMINARIACÉES, nous abordons l'étude d’une famille présentant le plus grand 
intérêt. : 

Nous avons vu, dans le chapitre précédent, quelle était l’organisation du thalle des 
Laminaires. Un grand nombre d’Algues de cette famille possèdent des canaux mucifères 
semblables à ceux dont nous avons fait l’étude, alors que d’autres n’en possèdent pas. 
Mais toutes sans exception sont riches en un mucilage qui se gélifie aisément lorsqu'on 
fait chauffer ces végétaux dans l’eau douce. C’est l'abondance de ce mucilage qui fait 
récolter ces Algues pour l’alimentation et aussi pour faire, au Japon, des préparations 
alimentaires connues sous le nom de « kombu ». Ces Algues sont également riches 
en iode; aussi sont-elles fréquemment recherchées pour la préparation de cette substance. 

Les Alaria servent surtout à l’alimentation et aussi à préparer le kombu japonais, 
de même que les Laminaria et les Arthrothamnus. 

Les Alaria ont une fronde généralement lamelliforme et très allongée, présentant 
à la base du rachis de petites ailes s’épanouissant au-dessus du pied; trois espèces 
sont utilisées : 


Genre Alaria. 


NOMS BOTANIQUES. 


A. crassifolia Kjellm. 
(PL. II, 8). 


A. esculenta (L.) Grey. 


A. fistulosa Post. et 
Rupr. 


SYNONYMES. 


» 


Fucus esculentus L. 


NOMS INDIGÈNES.-: 


Japonais kombu 
(Smith),  Chigaiso 
(Davidson). 


Kamschatgale : kauam 
(v. Martens). 


Japonais kombu 


(Smith). 


USAGES, 


Utilisée dans la préparation du kombu 
au Japon (Smith) et comme matière 
alimentaire (Davidson). 


Utilisée comme aliment au Kams- 
chatka et dans l'Alaska (vy. Mar- 
tens). 


Entre dans la préparation du kombu 
au Japon (Smith). 


Les Laminaria sont très nombreuses et très variées de forme dans la partie Nord 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


21 


de l’océan Pacifique et elles entrent en grand nombre dans la préparation du kombu. 
Ces plantes ont généralement un thalle grand, foliacé, et la plus célèbre d'entre elles est 
le Zaminaria japonica Areschoug, très voisine, par sa forme, de notre Z. saccharina 
Lamour. Chez d’autres espèces, le thalle est plus ou moins découpé. Les espèces utiles 
sont énumérées ci-dessous : 


NOMS BOTANIQUES, 


. angustata Kjellm. 


(al 


. diabolica Miyabe. 


a 


. fragilis Miyabe. 


L. gyrata Kjellm. 


#4 japonica Areschoug | : 


(PI. IL, 2). 
L. longissima Miyabe. 
L. longipedalis Okam. 
(PL I, 1). 
est ochotensis Miyabe. 


L. religiosa Miyabe. 


L. saccharina (L.) 
Lamour. 


L. yexoensis Miyabe. 


Genre Laminaria. 


SYNONYMES. 


>» 


Fucus saccharinus L., L. cris- 
pata Kitz, L. latifolia Ag. 
- 


NOMS INDIGENES. 


Japonais kombu 
(Smith). 

Japonais kombu 
(Smith). 

Juponais : kombu 
(Smith). 

Japonais kombu 
(Smith). 

Japonais kombu 
(Smith) ; kobu 
(Lew). 

Japonais kombu 
(Smith). 

Japonais kombu 
(Smith). 

Japonais kombu 

' (Smith). 

Japonais kombu 
(Smith). 

Japonais kombu 
(Smith), kam-boa 
(Perrot) ; Chinois : 
Chay-day  (Tartari- 
nov), Haï-wan (Por- 
ter-Smith), Chin- 
chou (Debeaux), Hay- 


tay (Perrot, Cooke). 


Japonais kombu 


(Smith). 


USAGES. 


Entre dans la préparation du kombu 
au Japon (Smith). 
id. 
id. 


id. 


id. 


id. 
id. 
id. 


Utilisée comme nourriture au Japon 
(Smith), en Chine (Hanbury, Cooke) 
et en Alaska (H. Martens). 


Entre, au Japon, dans la préparation 
du kombu (Smith). 


En outre, les Laminaria sont recherchées et mangées par les Chinois, sous le nom 
de toi-choy, hay-tai et san-choy, d’aprés Miss Reed. 
Enfin, deux espèces d’Arthrothamnus entrent encore dans la préparation du kombu 


22 


~ NOMS BOTANIQUES. 


A. bifidus (Gmel) 
Rupr. (PI. Il, 9). 


A. kurilensis Rupr. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Genre Arthrothamnus. 


SYNONYMES. 


» 


| Japonais 


NOMS INDIGENES. 


Japonais 
(Smith). 


(Smith). 


USAGES. 


kom bu | Entre dans la préparation du kombu 


au Japon (Smith). 


kombu | Entre dans la préparation du kombu 


au Japon (Smith). 


Ces Algues, de grande taille comme toutes les Laminariacées que nous venons de 
passer en revue, ont un thalle foliacé, mais ramifié dès sa base. 
Toutes ces espèces sont des plantes d’eau profonde, qui ne se découvrent pas ou 


ne se découvrent qu'aux grandes marées. Il en est de même des Æcklonia qui servent 
de nourriture aux Japonais, mais sont surtout recherchées pour la fabrication de l’iode : 


Genre Ecklonia. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 


E. bicyclis Kjellm.|Capea elongata Mart.; C. flab2l-| Japonais : arame|Utilisée comme nourriture au Japon 
(Pl. II, 7). liformis Mart. (Smith, Loew), saga-| (Smith, Loew, v. Martens) et aussi 

rani ou katsima (v pour préparer l’iode (Smith). 
Martens). 

E. latifolia Kjellm. Capea Richardiana J. Ag.; Ec-| Japonais : arame (x. | Mangée par les Japonais et les Chinois 

klonia Wrightii Harv. Martens); Chinois ;| (v. Martens, Kempfer). 
i hai-tai ou kai-tai 

(Kæmpfer). 


kajime | Utilisée comme nourriture et pour la . 
préparation de l’iode au Japon 
(Smith). 


Japonais : 


E. cava Kjellm. 4 » 
(Smith).- 


(PI. V, 2). 


Japonais : antoku wa-| Utilisée comme nourriture au Japon 
kame (Davidson). (Davidson), 


E. radicosa Okam. Laminaria radicosa Kjellm. 


Ces Algues, voisines des Laminaria, ont un thalle formé par un gros rachis, lequel 
est terminé par une lame digitée. 

Enfin les Ulopteryx sont des Algues des côtes du Japon qui servent a faire des prépa- 
rations alimentaires spéciales et qui sont vendues a Tokio sous le nom de wakame. 


Genre Ulopteryx. 


SYNONYMES. USAGES, 


NOMS BOTANIQUES. NOMS INDIGÈNES. 


wakame | Employée comme nourriture au Japon 
et conservée sèche (v. Martens, 
Smith). 


U. pinnatifida (Harv.) | Undaria pinnatifida Harv. 
Kjellm (Pi. V, 5). 


Japonais 
(Smith, Loew), wa- 
garne (v. Martens). 


Les Fucacées, bien que très nombreuses dans le Pacifique, ne sont pas utilisées d’une 
manière aussi active que les LAMINARIACÉES. 

Il n’y a presque rien à dire des genres Fucus et Tubinaria dont les usages sont notés 
dans les tableaux suivants : 


ee ee du ue re 
Ÿ 4 Toe See 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 23 


Genre Fucus. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES, 
F. evanescens Ag. (PI. | Fucus vesiculosus Post. et Rupr., » Mangé frais ou cuit dans |’Alaska. 
III, 3). Fucus vesiculosus var. evanes- 
cens Ktz. 


Genre Turbinaria. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NCMS INDIGÈNES. USAGES. 
T. (?) fusiformis Yen-| Forme stérile connue sous le|Japonais :  hijiki| Utilisée dans l’alimentation des Japo- 
do (PI. II’, 2). nom de Cystophyllum fusi-| (Smith, Lew). nais (Smith, Loew). 


forme Harv. 


Nous arrivons ainsi au genre Sargassum qui mérite de retenir un peu plus longuement 
notre attention. Ces Algues sont trop connues pour qu'il soit nécessaire de les décrire 
longuement. On sait qu’elles sont très ramifiées et présentent l'aspect de branches d'arbres 
qui seraient garnies de fruits et de feuilles. Les feuilles sont les ramifications du thalle et 
les fruits des flotteurs. Ce genre présente une grande richesse de formes dans les mers 
chaudes. | 

On utilise diverses espèces dans l'alimentation aux îles Sandwich, aux Philippines et 
au Japon, pour la préparation de l’iode au Japon et enfin en thérapeutique en Chine, 
et aux îles Sandwich. De plus, dans cet archipel, certaines espèces de Sargassum,nommées 
limu kala possèdent, dans l'esprit des habitants, des propriétés miraculeuses. Les sorciers, 
d’après Miss Reed, les utilisent dans les incantations qu'ils font pour chasser les maladies. 
Lorsqu'un indigène est malade, il récolte le limu kala, et en tresse des guirlandes pour 
son front et son cou, en mange un peu, puis dit des prières de pénitence et promet de se 
conduire mieux à l'avenir. Il jette ensuite le limu à la mer et reste longtemps à regarder 
SSS ARE 

Tant que cette cérémonie, que les indigènes considèrent comme très efficace, n'est 
pas accomplie, le patient ne doit ni regarder derrière lui, ni parler ni faire un signe à qui 
que ce soit. 

Lorsqu'une jeune femme n'est pas aimée, elle dit un appel magique d’amour que lui 
enseigne un sorcier, mange un peu de limu kala et en donne à manger à celui dont elle 
désire l’amour, et qui se met incontinent à l'adorer. | 

Nous résumerons tout ce qui concerne les Sargasses dans le tableau suivant: 


24 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Genre Sargassum. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 
S. bacciferum (Turn.) » Chinois :  chay-tsao | Utilisée dans la thérapeutique chi- 
Ag. (Tartarinov), tsaï-tze| noise (Perrot). 
(Debeaux). 
S. cymosum Ag. » Hawaïen : limu kala] Utilisée dans l’alimentation et pour 
(Reed). faire des incantations aux iles 
Sandwich (Reed). 
S.echinocarpum]. Ag. » Hawaien : limu kala id. 
(Reed). 


hondawara | Utilisée dans l’alimentation des Japo- 
nais (Smith). 


S. enerve J. Ag. (Pl.|S. fulvellum Okamura, Spon-|Japonais : 
IV, 3). gocarpus enervis Ktz. (Smith). 


Utilisée par les indigènes de l’île d’Ilo- 
cos, dans les Philippines, pour leur 
nourriture (Blanco). 


Fucus natans Turn., S. lepto- » 
carpum Ktz. 


S. vulgare Ag. 


S. vulgare var. folio-|S. polyphyllum Kütz., Fucus|Hawaïen : limu kala} Utilisée dans l'alimentation et pour 


sissimum J. Ag. foliosissimus Lam. (Reed). faire des incantations aux iles 
Sandwich (’eed). 
Sargassum (espèces ; » Japonais : gin-baso | Utilisée au Japon pour préparer l’iode 
diverses). (Smith). (Smith). 


Enfin, aux Phæophycées se rattache encore le genre Chnoospora, dont la position sys- 
tématique est douteuse, et dont une espèce est utilisée aux îles Sandwich : 


Genre Chnoospora. 


NOMS BOTANIQUES. 


C. fastigiata pacifica 
J. Ag. 


SYNONYMES. 


» 


NOMS INDIGÈNES. 


Hawaïen : 


hiwaa ou limu kau- 


pau. 


24. — DYCTIOTALES. 


USAGES. 


limu wawa-| Utilisée comme nourriture aux îles 


Sandwich. 


. Cette classe se compose d’une seule famille, celle des Dictryorackgs. 

Elle comprend des Algues de formes très diverses, mais généralement assez charnues. 
Le tableau suivant montre qu’un A petit nombre d’entre elles sont utilisées dans l'alimenta- 
tion aux îles Sandwich : 


Genre Dictyopteris. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 
D. pardalis Harv. » Hawaïen : limu lipoa|Utilisée dans l'alimentation aux iles 
(Reed). Sandwich où elle est très rare 
(Reed). 
D. plagiogramma » id. Utilisée dans l’alimentation aux îles 
Mont. Sandwich (Reed). 


2 À LG jdn Cialis) ist SES EE 


Feb 


CO LORIENT DOTE TE 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 25 


Genre Dictyota. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 
D. acutiloba J. Ag. » Hawaïen : limu alani,| Utilisée comme nourriture aux îles 
var. distorta J. Ag. ou faux lipoa (Reed).| Sandwich, parce qu’elle ressemble 


aux Dictyopleris comestibles, mais 
plus rarement parce qu'elle est 
amère. 


D. dichotoma (Huds.) | Dichophyllium dichotomum Kg., id. id. 
Lam. U va dichotoma Huds., Dic- 
tyota attenuata Kg. 


Ces Algues se récoltent généralement entre les limites de la marée. 


4 5. — RHODOPHYCÉES. 

-— De toutes les Algues, les Rhodophycées sont celles parmi lesquelles on trouve le plus 
grand nombre d'espèces utiles. Cela s'explique sans peine si l’on considére que ces plantes 
présentent un grand nombre de formes, parmi lesquelles beaucoup sont très riches en 
substances mucilagineuses. 

Parmi les BanGracées, les Porphyra présentent un intérêt tout particulier. Ces Al- 
gues ont un thalle foliacé, ressemblant à celui des U/va, mais elles sont colorées en rouge 
violacé. Elles sont particulièrement recherchées en Chine et au Japon, où l'une d'elles 
fait même l’objet d’une culture. 

Elles constituent, paraît-il, un comestible d’une finesse particulière et les Chinois ha- 
bitant les îles Sandwich en font venir de leur pays, d'après Miss Reed, les jours de fêtes 
ou de réjouissances. 

Quatre espèces en sont utilisées pour l’alimentation. 


Genre Porphyra. 


NOMS BOTANIQUES, SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 
P. laciniata (Lightf.) | Ulva laciniata Ag., P. linearis| Japonais : asakusa | Utilisée comme aliment au Japon 
Ag. (PI. V,.4). -, Grev., P vulgaris Harv., P.| nori (Smith, Kæmp-| (Smith, v. Martens, Okamura, 
umbilicalis Ktz., Wildemania| fer), mura sakinori| LϾw, etc.), et en Chine (Hanbury, 


laciniata (Lightf.) de Toni. (v. Martens); Chi-| Cooke). Fait, au Japon, l’objet d’une 
nois : si-sai(v. Mar-! culture. 

tens), tsz-tsai 

(Cooke). 


P. leucosticta Thur. |P. vulgaris Ag., P. microphylla | Hawaïen : limu pualu,| Rare dans l’archipel des îles Sand- 


14 Zanard., P. atro-purpurea| iinu lipahee ou limu| wich où elle est consommée comme 
(Olivi.) de Toni. lipahu (Reed). nourriture (Rced). 
P. nereocystis Anders. ei Chinois: che choy ou | Recherchée comme nourriture par les 
kum choy (Reed). Chinois (Reed). 
F. perforata J. Ag. Wildemania perforata (J. Ag.) id. id. 


de Toni, P. umbilicata Rupr. 


Ces diverses espèces vivent généralement entre les limites de la marée. 
T. UL. — Fase. 1. à 


26 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Les NeMaALIACÉESs fournissent plusieurs Algues utiles appartenant aux genres Nemalion 
et Liagora. 


Genre Nemalion. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 
N. lubricum Duby. N. Bertholonii Menegh., Meso- | Japonais : umi-zomen | Utilisée par les Japonais dans leur 
gloja Bertholonii Moris et de| (Smith). alimentation (Smith). 


Not., Alcyonidium Nemalion 
Bory, Chordaria Nemalion Ag. 


N.vermiculareSuring. » Japonais : somen-nori id. 
(Smith). 


Genre Liagora. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 
L. decussata Mont. Nemalion liagoroides Crn. Hawaïen : limü-puaki | Utilisé dans l'alimentation aux îles 
(Reed). Sandwich (Reed). 


Ces Algues ont un thalle formé par des filaments nombreux et arrondis, et sont par- 
ticulièrement riches en mucilagé, ce qui Jes rend précieuses pour les usages alimentaires. 

Il en est de même des GÉLIDIACÉES, qui sont, par excellence, les plantes productrices 
de gelées végétales. 

Ce sont principalement les nombreuses espèces de Gelidium qui sont utilisées dans 
ce but, et en particulier pour préparer les kanten japonais. 

Les Gelidium sont de petites 
Algues dont le thalle, générale- 
ment ramifié, est formé d'articles 
courts et souvent pennés. Ces 
plantes sont cornées, un peu 
molles,et donnent une quantité 
considérable de gélose. Les dit: 
férents auteurs ne sont pas d’ac- 
cord sur l’espècede Gelidium qui 
sert à faire le véritable kanten; 
mais il semble bien que ce soit 
le G. corneum (Hus.) Lam. et le 

Fig. 1. — 1. Gelidium polycladum Kütz.; 2. G. Amansii Lamour; CG: ANR Le donnent le mes 

3. G. subcostatum Okam. (d’après Holmes). leur kanten, les autres Algues ne 

donnant qu’un produit inférieur. 

Il est d’ailleurs probable que toutesles espèces de Gelidium croissant au Japon sont 

plus ou moins utilisées pour faire le kanten. Enfin le tableau suivant montre que l'utili- 
sation de ces plantes n’est pas limitée au Japon. 


POP aN Neen 


NOMS BOTANIQUES. 


G. Amansii Lamour. 
(Fig. 1, 2). 


G. attenuatum (1). 


G. corneum (Huds.) 
Lam. (PI. VIII, 3), 


G.e ‘egans Ktz. 


G. filicinum Bory. 


G. japonicum Okam. 
‘(PE VI, 7). 


G. latifolium Born. 


G. polycladum Kütz. 
(Fig. 1, 1). 


G. pusillum (Stackh.) 
Le Jol. (PI. VII, 3). 


ë rigens Mart. (PI. 
VII, 4). 


G. subcostatum Okam. 
(Pl. VI,2et fig. 1, 3). 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 27 


Genre Gelidium. 


SYNONYMES. 


Ca: pacanthus trichophyllus 
Kütz., G. cartilagineum (L.) 
Gaillon, G. rigidum Ktz., G. 


micropterum Ktz. 


Fucus corneus Huds., Sphæro- 


coccus corneus Ag. 


Suhria filicina (Bory) Grun. 


Suhria japonica de Toni. 


G. corneum Pristoides J. Ag., 


G. Hypnoides Kg., 
serra Gmel. 


Fucus 


G. capillaceum \Gmel) Kitz, 


polycladum (Hauck), 


G. pulvinatum Thur. 


Chylocladia rigens J. Ag. 


NOMS INDIGENES. 


Japonais : tokorosen 
gusa, tokoroten, umi- 
soomen (vy. Martens), 
sekiqua, kokuro-buto 
ou tokoro-tengusa 
(Kempfer),  hige- 
kusa ? (Holmes), to- 
sako (Siebold), kinu- 
kusa (Davidson) ; 
‘ hinois: tsjantsjaù 
ou tschaü-tschaù (v. 
Martens); Hawaïen : 
limu loloa (Reed). 


Hawaïen : limu loloa 
(Reed). 
Japonais tengusa 
(Smith), tokoroten 
(Senft, Hanbury) ; 
Chinois :  tijntjan 
(Hanbury), niu-mau 
(Cooke); Hawaïen : 
limu loloa (Reed). 


Japonais : kinugusa 
(Holmes). 
Hawaïen : limu loloa 


ou limu ekahakaha 
(Reed). 


Japonais 
(Holmes). 


onigusa 


Hawaïen : limu loloa 
(Reed), 


Japonais tengusa 
(Holmes). 

Hawaien : limu loloa 
(Reed). 

Japonais : shima-ten- 
gusa (Okamura) ; 
Hawaien: limu akui- 
la ou limu kihe 
(Reed). 

Japonais :  hirakusa 


(Holmes, Okamura). 


USAGES. 


Sert, au Japon et en Chine, à préparer 
des gelées imitant les nids d’hiron- 
delles (v. Martens) et est un des 
constituants du kanten japonais 
(Holmes, Senft.). Utilisée comme 
nourriture par les Hawaïens (Reed). 


Employée comme nourriture aux îles 
Sandwich (Reed). 


Constituant principal, souvent uni- 
que, du kanten japonais (Senft, 
Smith) dont l’analogue chinois se 
nomme tijntjan et qui est coñnu 
en Europe sous les noms d’agar 
japonais, japanische  Gelatine, 
vegetabilischer Fischleim, japa- 
nische Hausenblase. 

Utilisée comme nourriture par les 
Hawaïens (Reed). 


Constituant du kanten (Holmes). 


Utilisée comme nourriture par les 
Hawaïens (Reed). 


Constituant du kanten japonais (Hol- 
mes). 


Utilisée dans l’alimentation aux îles 
Sandwich (Reed). 


Abondante dans le kanten (Holmes) 
et dans le Tijntjan (Marchand). 


Utilisée comme aliment aux îles 
Sandwich (Reed). 


Séchée au soleil et vendue, au Japon, 
pour l'alimentation (vy. Martens). 

Utilisée dans l'alimentation des Ha- 
waïens. 


Coastituant du kanten (Holmes). 


(1) Ce nom, donné par Miss Reed, ne correspond à aucune espèce et il pourrait y avoir là confusion avec Nemalion 


altenuatum J. Ag. 


28 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Enfin, dans cette même famille des GÉLipracées, les genres P/erocladia et Acantho- 
peltis fournissent encore des espèces utiles. 


Genre Pterocladia. 


NOMS BOTANIQUES, SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 


P. capillacea (Gnel)| Gelidium capillaceum Kiz., Ge-| Hawaien : limu loloa| Utilisée par les Havaïens dans leur 
Born. et Thuret. lidium corneum pinnatum| (Reed). alimentation (Reed). 
Grev. 


Genre Acanthopeltis. 
NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. : USAGES. 


A. japonica Okamura | Schottmuellera paradoxa Gru-|Japonais :  toriashi| Constituant du kanten (Holmes). 
(Pl. VI, 3). now. (Holmes). 


Toutes ces Algues croissent sur les rochers dans les limites de la marée ou même 


plus profondément. 

Les GIGARTINACÉES sont, comme les GÉLIDIACÉES, très riches en mucilage, et c'est à 
cette famille qu’appartiennent la plupart des Algues qui, en Europe, servent à l'alimen- 
tation ou à la thérapeutique. Le thalle de ces Algues présente des formes variées; il 
est généralement aplati, de taille moyenne, parfois entier, mais souvent ramifié. 


Un grand nombre de genres appartenant à cette famille sont utilisés ainsi que l'in- 
diquent les tableaux suivants : 


Genre Endocladia. 
NOMS BOTANIQUES. SYNONYMS. NOMS INDIGENES. USAGES. 


E. vernicata J. Ag. » » Dans le Tijntian chinois (Marchand). 


Genre Chondrus. 


NOMS BOTANIQUES. | SYNONYMES. NOMS INDIGENES. USAGES. 
C. crispus (L.) Lyngb. » Japonais : tsuno-mata | Utilisée au Japon comme aliment 
(Smith). ‘ (Smith). 
C. ocellatus Holm. » Japonais : hosokeao id. 
! 


mimi (Smith). 


Genre Gigartina. 


NOMS BOTANIQUES. : SYNONYMES. NOMS INDIGENES. USAGES. 

G. horrida Harvey. |} yo » Se rencontre dans l’agar-agar malais. 
(v. Martens) et dans celui des 
Indes orientales (Marchand). 


G. Teedii (Roth.)|Ceramium Teelii Roth., Fucus |Japonais : Cata nori|Sert à préparer des aliments au Japon 
Lam. (PI. VI, 6}. Teedii Turn., Chondro lo-| (Smith), shikin nori|- (Smith). 
nium Teedit Ktz. (Okamura). | 


PR TENTE 


de tn or té do à dt ee a Oe ii HER «dé RE) 


sn 


ets 18 


NOMS BOTANIQUES. 


G. disciplinalis (Bory) 
J. Ag. 


G. flabelliformis Harv. 


(Pl. VI, 4). 


G. vermicularis ame- 
ricana J. Ag. 


NOMS BOTANIQUES. 


C. dentata J. Ag. 


NOMS BOTANIQUES. 


A. concinna J. Ag. 
(PI. IV, 4)., 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 20 


Genre Gymnogongrus. 


SYNONYMES. 


» 


SYNONYMES. 


SYNONYMES. 


> 


NOMS INDIGÈNES. 


Hawaïen : nom géné- 
ral : limu manaloli : 
noms locaux : limu 
ekahae-kaha, limu 
koeleele ou koele, 
limu awiki-wiki ou 
limu nei (Reed). 


Japonais : okitsu-nori 
(Smith). 


Hawaïen : comme le 
G. disciplinalis 
(Reed). 


Genre Callymenia. 


NOMS INDIGÈNES. 


Halymenia carnosa Kütz., non | Japonais : tosaka-nori 
Halymenia dentata Suhr. 


(Smith). 


Genre Ahnfeltia. 


NOMS INDIGÈNES. 


Hawaïen : limu akiaki 
ou limu eleau 


.(Smith). 


USAGES. 


Utilisée comme aliment aux îles 
Sandwich (Reed). 


Utilisée dans l’alimentation des Japo- 
nais (Smith). 


Utilisée comme aliment aux îles 
Sandwich (Reed). 


USAGES. 


Utilisée comme nourriture au Japon 
(Smith). 


USAGES. 


Utilisée comme aliment dans l'ile de 
~ Maui (iles Sandwich) (Reed). 


Ces Algues croissent entre la limite des basses mers, et même plus profondé- 


ment. 


Les RHonopmyzuibactEs, dont le thalle généralement ramifié est riche en mucilage, 
présentent également des espèces utiles en grand nombre. C’est avec des plantes de cette 
famille que l'on prépare l'agar-agar, qui, moins pur que le kanten japonais, est cependant 
employé aux mêmes usages, et beaucoup plus connu en France, alors que lekanten paraît 
au contraire être plus répandu en Allemagne. Ce sont surtout des Algues appartenant au 
genre Eucheuma qui sont employées pour la préparation de l’agar. 


Les tableaux suivants donnent la liste des espèces utiles: 


NOMS BOTANIQUES. 


C.armatum Harv. 


-Genre Cystoclonium. 


SYNONYMES. 


» 


NOMS INDIGENES. 


» 


USAGES. 


Mangée au Japon (v. Martens). 


30 


NOMS BOTANIQUES. 


E. gelatinæ Ag. 


E. spinosum . Ag. (PI. 
VH, 5}: 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE. 


Genre Eucheuma. 


SYNONYMES. 


> 


Sphærococcus spinosus Ag. 


NOMS INDIGÈNES. 


» 


USAGES. 


Agar-agar de Makassar et de Java, 
Carragheen des Indes orientales 
(Senft). 


Agar de Makassar et de Java (Senft, 
v. Martens) et de Ceylan (Archer 
et Simmonds), Carrageen des Indes 
orientales (Senft). 


Ces Algues croissent dans des eaux profondes, de même que les SPHÆROCOCCACÉES, 


qui, également ramifiées et riches en gélose, constituent aussi une matière première 
servant à faire l’agar-agar. 


Genre Sphærococcus. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES USAGES. 
S. cartilagineus Ag. » Chinois:shih-kwa-ts’aï | Utilisée en Chine en thérapeutique 
(Porter, Smith), tsai-| (Perrot). 
hoa (Debeaux), che- 
hoa-tsay (Perrot). 
S. gelatinosus Ag. » » Constituant de l’agar-agar malais et 
cyngalais (y. Martens, Marchand). 
S. Serra Ktz. » » id. 
Genre Sarcodia. 
NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 


S. Montagneana| Rhodimenya 


(H. et H.) J. Ag. 


Montagneana Ktz. 


Montagneana|Japonais : 
Hook et Harv., Rhodophyllis 


(Smith), tosaka nori 
(Davidson). 


Genre Hypnæa. 


tosaka| Utilisée comme nourriture au Japon . 


(Smith et Davidson). 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES, j NOMS INDIGÈNES. USAGES, 
H. musciformis » » Utilisée au Japon. 
Lamour (PI. VIII, 5). j 
H. nidifica J. Ag. > Hawaïen : limu huna| Employée comme aliment aux îles 
à (Reed). Sandwich (Reed). 
HH. Sp; (PI. IV, 2): » id. id. 


te is 


G.divaricata (L.) Grev. 


| 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 3: 


NOMS BOTANIQUES. 


G. armata (Ag.) Grev. 


Genre Gracilaria. 


SYNONYMES. 


Hypnæa armata J. Ag., Sphæ- 
rococcus armatus Ag., Gigar- 
tina armata de Not. 


G. compressa (Ag.)|Plocaria compressa Endl., Gi- 


Grey. gartina 


compressa Hook., 


Spherococcus compressus Ag. 


G. confervoides (L.)| Fucus confervoides L., Sphero- 


Grev. 


G. coronopifoliay. Ag. 
API IV, 1). 


G. crassa Harv. 


coccus confervoides Ag., Sph. 
divergens Kütz. 


Hypnæa divaricata Grev, 


G. lichenoides (L.)| Sphærococcus lichenoides Ag., 


Harv. 


Plocaria candida Nees. 


NOMS INDIGENES. 


Hawaien: limu huna 
(Reed). 


Japonais : shiramo 
(Davidson). 

Japonais : Ogo-nori 
(Smith, Davidson). 


Hawaien : limu mana- 

uea (Reed). 
Chinois : ki-tsai 
(Cooke). 


» 


Chinois : shih-hwu- 
vsaï (Porter, Smith), 
che hoa tsee (Perrot); 
Amboïna: aysana ou 
aystana ; Java: bu- 
lung ; Makassar : 

~ dongi-dongi (v. Mar- 
tens). 


USAGES. 


Employée comme nourriture aux 
iles Sandwich (Reed). 


Mangée au Japon avec du poisson, 
de la sauce au soja ou des légumes 
(Davidson). 


Utilisée dans l’alimentation des Japo- 
nais (Smith), adultérant du Kanten 
en raison de la rareté des Gelidium 
(Davidson). 


Utilisée dans l’alimentation des Ha- 
waïens (Reed). 


Utilisée comme aliment en Chine 
(Cooke). 


Se trouve dans l’agar de Timor (v. 
Martens). 


Employée dans la pharmacopée chi- 
noise (Perrot), employé comme 
agar, et mangé frais (v. Martens, 
Senft).Ne serait pasemployéecomme 
agar (Archer et Simmonds). Entre 
dans la mousse de Ceylan (Senft, 
Archer et Simmonds, Marchand, 
v. Martens). 


Parmi ces Algues, le Gracilaria lichenoides et 1 Hypneea nidifica J. Ag. sont particu- 
lièrement aptes à donner du mucilage. 
Chez les RHODYMENIACÉES, nous ne rencontrons qu’un genre utile Champia. 


NOMS BOTANIQUES. | 


Ch. compressa Harv. 


Genre Champia. 


SYNONYMES, 


» 


Hawaien: 


NOMS INDIGENES. 


(Reed). 


USAGES. 


limu oolu | Utilisée dans l’alimentation aux iles 


Sandwich (Reed). 


Puis viennent les DELESSÉRIACÉES, dont un seul genre est utilisé. Ces Algues sont géné- 
ralement foliacées et croissent assez profondément dans la mer. 


32 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Genre Chauvinia. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGENES. ! USAGES. 
Ch. macrophysa Son- » Malais: lai-tai (v. Mar- | Utilisée comme légume par les Valais 
der. tens). qui la récoltent dans l’île de Petit- 


Tawali (v. Martens). 


Les BONNEMAISONIACÉES ne fournissent également qu'une seule espèce utile, mais 
celle-ci, qui croît sur les récifs qui environnent les îles Sandwich, est l’Algue préférée des 
Hawaiens. 


Genre Asparagopsis. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. i USAGES. 


A. Sanfordiana Harv. » Japonais : kagi-kenori | Largemént utilisée par les Hawaïens 


(Pl. VII, 1). (Okamura) ; Ha-| dans leur alimentation (Reed). 
waïen : limu kohu 
(Reed). 


On trouve toute l’année, au marché de Honolulu, l’Asparagopsis Sanfordiana Harv. 
à l'inverse des autres Algues comestibles de Hawaï qui sont consommées par ceux qui les 
pêchent et ne se trouvent au marché qu’en certaines saisons ou qu’à l'occasion des jours 
de fête. Les Japonais n'utilisent pas cette Algue, bien qu’elle croisse sur leurs côtes. 
Les RHonoMELACÉESs, à l'inverse des Algues des deux familles que nous venons de passer 
en revue, fournissent un grand nombre d’espèces utiles, et en particulier celles qui 
appartiennent au genre Laurencia. 


NOMS BOTANIQUES. 


L. obtusa (Huds.) 
Lamour. 


ye ‘papillosa (Forsk.) 
Grev. 


L. perforata Mont. 


L. pinnatifida (Gm.) 
Lam. 


L. pinnatifida § Os- 
munda J. Ag. 


L. virgata (Ag.)J. Ag. 


Genre Laurencia. 


SYNONYMES. 


Fucus oblusus Huds., Chondria 
obtusa Ag. 


Chondria papillosa Ag., Fucus 
papillosus Forsk., Gigartina 
Jutacea Bory. 


Chondria pinnatifida Ag., Fucus 
pinnatifidus Gm. 


Fucus Osmunda Gm. 


» 


NOMS INDIGÈNES. 


Hewaïen : limu lipee- 
pee ou lipee. 


Chinois : tan shwui 
(Cooke) ; Hawaien : 
limu maneoneo ou 
limu lipeepee (Reed). 


Hawaïen : limu lipee- 
pee ou lipee. 

Hawaïen:1.maneoneo, 
.limu olipeepee ou 
limu lipee. 


Hewaïen : limu lipee- 
pee ou lipee: 


id. 


USAGES. 


Utilisée par les Hawaïens dans leur 


alimentation (Reed), et par les Chi- 
nois (Hanbury). Entrerait dans la 
préparation de la gélose (Payen). 

} id. 


id. 


id. 


Ces Algues, charnues et de grandeur moyenne, sont utilisées pour la gelée qu'elles 
peuvent donner, mais aussi et surtout, parce que leur goût piquant en fait un condiment 


recherché. 


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Qe de 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 33 


La même famille fournit d’autres espèces alimentaires, utilisées d’ailleurs assez peu 
activement, et des espèces vermifuges qui entrent dans la pharmacopée chinoise. Voici 
d’ailleurs la liste des plantes employées : 


Genre Chondria. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 


Ch. tenuissima (Good | Fucus tenuissimus Good et| Hawaïen : limu oolu | Utilisée dans l’alimentation aux îles 
et Wood.) J. Ag. Wood., Laurencia tenuissima | (Reed). Sandwich (Reed). 
Grev. 


Genre Digenea. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 


Te. 


D:--simplex — (Wulf.) | D. Wulfeni Kg., Conferva sim-| Japonais :  makuri|Utilisée comme nourriture au Japon~ 
J. Ag. (PI. VI, 7). plex (Wulfen). (Smith). (Smith). 


Genre Alsidium. 


NOMS BOTANIQUES. 2 SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 


A. Helminthochorton | Fucus HelminthochortosLatour. | Chinois: haï-tsao (Per-| Employée dans la pharmacopée chi- 
(Latour) Kg. rot). noise comme vermifuge (Perrot). 


Genre Folysiphonia. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 
P: fragilis Suring. » | > Se trouve dans le Tijntjan (Marchand). 
— (Pk VII, 4). 
P. mollis H. et H. P. tongatensis Harv. Hawaïen : limu pualu | Utilisée par quelques Hawaiens dans 
ou limu hawane| leur alimentation ; peu populaire 
(Reed). (Reed). 
P. tarpinocarpa Su-| P. bipinnata Post. et Rupr., P. » : Se trouve dans le Tijntjan (Marchand). 
ring. (PI. VI, 5). purpurea P.etR., Pterosipho- : 
à nia bipinnata Falkenb. 


Genre Amansia. 
» NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGENES. USAGES. 


A. glomerata Ag. (PI.| Amansia fasciculata Kütz., De-| Japonais : kiku-hiwo- Utilisée localement par les Hawaiens 


VI, 1). lessaria rhodanta Harv., A.| doshi (Okamura) ;| pour leur nourriture (Reed). 
rhodanta J. Ag. Hawaien : limu lipe- 
‘ peiao ou limu pepeiao 
(Reed). 


Les Céramiactes, formées de filaments gréles et nombreux, sont susceptibles de 
donner une faible quantité de gelée; aussi quelques espéces en sont-elles utilisées, 
notamment comme vermifuge ou comme adultérant du kanten; certaines eearre elles 


sont cependant recherchées comme nourriture. 
T. Ill. — Fasc. 1 5 


34 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Genre Griffithsia. ; 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 
G. Sp. » Hawaïen : limu moo-|Considérée à Hawaï, où elle est rare 


puna, limu ka-lipoa| comme une friandise (Reed). 
ou limu  aupupu 
| (Reed). 


Genre Antithamnion. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. | NOMS INDIGÈNES. USAGES. 


» 


A. cristatum Ktz. ; Sporacanthus cristatus Kitz. Constituant du Tijntian (Marchand). 


Genre Spyridia. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. | A USAGES. 


Utilisée dans le sud de l’ile de Hawai 


S. spinella Sond. S. filamentosa forma Spinella; Hawaïen : limu hulu- 
dans l’alimentation (Reed). 


Harv. puaa (Reed). 


- Genre Ceramium. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. r NOMS riptakune. USAGES. 
C. Boydenii. » [Japonais : igisu (Da-| Mangée cuite au Japon (Davidson). 
vidson) 
C. ciliatum . (Ellis) | Echinoceras ciliatum Ktz., Con- » Se trouve dans le Tijntian chinois 
Ducluz. ferva ciliata Ellis. (Marchand), 
C. clavulatum Ag. Spyridia clavulata J. Ag., Cen-| Hawaïen : limu holui-| Se trouve dans le Tijntian chinois 
trocerasclavulatum (Ag.) Ktz.| lio, limu hulu ou! (Marchand) et sert de nourriture 
limu hulu wawae-| aux indigènes des îles Sandwich 
iole (Reed). (Reed). 
C. rubrum (Huds.) Ag. | Conferva rubra Huds. » Se trouve dans le kanten japonais 
de qualité inférieure (Holmes). 


Genre Campylæphora. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGENES, USAGES. 
C. hypneoides J. Ag. » Japonais : ego (Smith, | Utilisée comme nourriture au Japon 
Davidson), yego} (Smith): constituant du Kanten 
(Holmes). (Holmes). 


Toutes ces Algues se trouvent entre les limites de la marée, ou plus profondément. 
Il en est de même des GLorostPHONACEEs, mais celles-ci comprennent des Algues petites, 
à articles charnus, qui servent, au Japon, à préparer une colle végétale d'excellente 
qualité, le fu-nori. Ce sont les Gloiopeltis qui servent à fabriquer ce produit : 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 35 


Genre Gloiopeltis. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 

G. coliformis Harvey » Japonais : funori|Se trouve dans le funori japonais 
(PI. VII, 6). ; (Smith). (Holmes, Smith). 

G. intricata Suringar » Japonais : fukoro-fu- id. 
(Pl. VIII, 1). nori (Smith). 

G. tenax (Turner) J. | Fucus tenax Turn. Japonais : funori| Sert à faire le funori japonais (Smith, 
Ag. (PI. VIII, 2). (Smith). v. Martens, Senft), et se trouve 

; dans le Tijntjan (Marchand). 


Ces Algues croissent à des profondeurs assez grandes. . 

Enfin, il ne nous reste plus, pour terminer cette revue des diverses familles d’Algues, 
qu'à dire un mot des GRaTELOUPIACÉES. Quelques-unes de ces plantes, de taille moyenne, 
à thalle-plus ou moins aplati ou ramifié, sont utilisées dans l’alimentation, ainsi que 
l'indique le tableau suivant : 


Genre Halymenia. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NOMS INDIGÈNES. USAGES. 
Halymenia formosa » Hawaïen : limu lepea-| Utilisée comme aliment aux îles 
Harv. (PI. VII, 2). hina (Reed). Sandwich, où elle est rare (Reed). 


Genre Grateloupia. 


NOMS BOTANIQUES. SYNONYMES. NONS INDIGENES. USAGES. 
G. affinis ‘(Harv.) Gigartina affinis Harv. Japonais : comen-nori | Utilisée comme aliment au Japon 
Okam. | (Smith), kome-nori| (Smith), principalement pour assai- 
if (Davidson). sonner le poisson (Davidson). 


G. filicina (Wulf.) Ag. | Delesseria filicina Lam., Fucus|Japonais : mu-kade | Utilisée dans l’alimentation au Japon 
(PI. IV, 5). filicinus Wulf. nori (Smith) ; Ha-| (Smith), aux îles Philippines [îles 
: waien: limu pakea-| Batanes| (Blanco), et aux îles Sand- 

leawaa ou limu hulu-| wich (Reed). 
hulu-waena (Reed). 


2 6. — RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS. 


En résumé, l'étude attentive des tableaux que nous avons mis sous les yeux du 
lecteur montre que presque tous les groupes d’Algues fournissent des espèces utiles et, en 
ce qui concerne l'alimentation, il est spe que la plupart des Algues pourraient étre 
consommées. 

_ Mais, ce qu'il faut retenir de cette étude, c'est que quelques groupes d’Algues présen- 
tent une utilité particulitrement grande, en raison de leur richesse en iode ou, plus 
fréquemment, de la faculté qu’elles ont de donner un mucilage qui, préparé a partir de ces 
végétaux, présente une abondance et des qualités particulières. 

Ce mucilage est recherché comme nourriture ou sert à faire des colles, des agars, etc. 


36 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Ainsi que nous l'avons vu, ces Algues privilégiées n’appartiennent qu’à un petit 
nombre de familles : les LaMINARIACÉES, les GÉLIDIACÉES, les GIGARTINACÉES, les RHopo- 
PHYLLIDACÉES, les SPHÆROCOCCACÉES et le GLoIOsIPHONACÉES. On peut dire que ces Algues 
présentent un intérêt mondial, puisque, non seulement elles font l’objet, dans leur pays 
d’origine, d’une récolte et d’une industrie abondantes, mais encore parce que les produits 
qui en dérivent sont exportés dans le monde entier. 

D’autres familles ont un intérêt plus local; ce sont, par exemple, les RHODOMÉLACÉES 
et les CÉRAMIACÉES, dont beaucoup de représentants servent à faire des vermifuges, et les 
BanGiacÉEs, parmi lesquelles les Porphyra sont particulièrement recherchées par les 
gourmets extrême-orientaux. 

Remarquons enfin, et ceci aura son application dans les chapitres qui suivront, que 
les familles qui donbent lieu à un commerce mondial présentent (à part les Gross 
NACEES) une très grande extension géobotanique et qu’on en retrouve les représentants 
sur les côtes d'Europe et d'Amérique. 


\ 


CHAPITRE V 


L'industrie des Algues en Extrême-Orient. 


2 1°. — MULTIPLICATION ET CULTURE. 


Le plus souvent, les Algues utiles n’ont donné lieu a aucune tentative spéciale ayant 
pour but de les multiplier. On les récolte dans leurs stations naturelles. Cependant, il y a 
a cela des exceptions et, dans les pays comme Hawaï et le Japon, où les Algues sont 
particulièrement estimées, on a fait des tentatives de multiplication et même, au Japon, 
une seule Algue, le Porphyra laciniata, fait l’objet d’une culture qui est des plus intéres- 
santes et méritera de retenir très longuement notre attention. 

A Hawai, de nombreuses tentatives ont été faites par certains habitants pour 
transplanter, a proximité de leur habitation, les variétés les plus agréables pour eux 
d’Algues marines. C’est ainsi que le Limu pakaeleawaa (Grateloupia filicina Ag) a été 
transplanté de Hawai à Molokai par un vieux chef, qui le planta sur le bord interne de sa 
réserve à poissons où elle croît maintenant d’une luxuriante façon. La même Algue fut 
également transplantée avec succès par la reine LiriuoKaALANI et par un chef qui en a doté 
les indigènes vivant à Oahu dans la baie de Kanehohe. Miss Reep pense d’ailleurs qu’un 
grand nombre d’Algues ont été introduites de cette façon en des points où elles n’existaient 
pas encore, apportées par quelque chef qui, en se déplaçant, voulait acclimater près de 
sa nouvelle demeure son Algue favorite. 

Mais une autre Algue, le Limu kohu (Asparagopsis Sanfordiana Harv.), laquelle est 
encore plus estimée, est encore plus régulièrement transplantée à Moloaa sur l’île Kauai. 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 37 


La baie de Moloaa est abritée des tempêtes par des récifs corailliens sur lesquels croît en 
abondance le limu kohu, se présentant en cet endroit avec une végétation magnifique. 
Les habitants, qui tirent un revenu important de ces Algues, qu'ils vont vendre à 
Honolulu, ont cherché à augmenter ce revenu en multipliant, dans ces eaux abritées des 
tempêtes, la bonne espèce, et ils ont obtenu ce résultat en arrachant et en détruisant les 
autres Algues, qui ne nuisent plus ainsi au développement de celle qu’ils préfèrent. 

Au Japon, on multiplie, également par une méthode très simple, le funori (Gloio- 
peltis coliformis) dans la préfecture de Aomori. Cette culture, d'après le D' Kisttnovye, 
cité par M. Surrx, consiste à jeter des rochers dans la mer, de façon à constituer des 
surfaces sur lesquelles les spores puissent se fixer et se développer. Les rochers de la 
montagne ont la préférence sur les autres, parce qu’ils ont des surfaces propres et 
rugueuses. 

Enfin, nous arrivons à l’Asakusanori (Porphyra laciniata Harv.) qui fait, au Japon, 
ainsi que-nous l’avons dit au début de ce chapitre, l’objet d’une culture des plus intéres- 
santes que nous décrirons d’après les travaux de Surrx et de OKkAMURA. 

D’après M. Surrx, la culture du Porphyra est l’une des branches les plus importantes 
de l’industrie des Algues, et c’est le seul cas connu dans le monde entier d’une semblable 
forme de culture. D’ailleurs, ses résultats financiers sont remarquables et il y a peu de 
branches de l’agriculture, qui, pour une même surface, donnent des résultats aussi 
satisfaisants. 

Il est probable que cette pratique est très ancienne, et qu’elle prit naissance dans la 
baie de Tokyo, qui possède les terrains de culture les plus estimés. Un autre point de 
culture important, situé dans le voisinage, est Hiroshima, dans la mer intérieure. 

Le gouvernement japonais publie, chaque année, des statistiques très détaillées con- 
cernant la surface cultivée et la valeur des produits. 

C'est ainsi qu’en 1901, il existait 4395 champs de Porphyra occupant une surface 
de 910 hectares environ et produisant 1200000 francs, ce qui représente une quantité 
d’Algue sèche de 2 160 tonnes. Cette culture est actuellement en voie d’extension. 

Voici maintenant de quelle manière elle est effectuée dans la baie de Tokyo (PI. X, 2, 3, 4). 

En octobre et novembre, le sol est préparé en enfonçant dans le fond vaseux situé, 
à marée haute, à 1 mètre à 1",60 de profondeur, de nombreux faisceaux de bambou ou de 
broussailles. Ces faisceaux, qui portent le nom de « sudate », sont préparés sur le rivage 
et placés verticalement sur le fond par deux hommes constituant l’équipage d’un bateau 
qui se rend à marée basse au-dessus du champ. Là, les faisceaux sont plantés en lignes 
régulières de la façon suivante : l’un des hommes fait dans la vase un trou, à l’aide d’une 
pièce de bois conique sur laquelle il peut presser avec un pied, en même temps qu'il la 
maintient avec les mains par deux longs manches, et qu'il garde l’autre pied placé sur le 
rebord du bateau. Dans le trou ainsi préparé, l’autre pêcheur introduit de suite un des 
faisceaux dont ils ont emporté une provision dans leur bateau. On forme ainsi, dans la 
mer, des lignes assez serrées de branches sèches, dont le but est d’arrêter et de retenir 
les spores flottantés de Porphyra qui demeurent fixées ainsi sur les brindilles du faisceau 
et ne tardent pas à se développer. | 


38 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


En janvier suivant, les plantes ont atteint leur développement complet et peuvent 
être récoltées jusqu’en mars, ce qui est fait fort simplement en coupant les brindilles sur 


‘ lesquelles elles ont poussé. 

Elles meurent au moment de l’équinoxe de printemps et, pendant l'été, les pêcheurs 
enlèvent les vieux faisceaux de brindilles et s'occupent à en préparer d’autres pour la 
culture de l’année suivante. 

Cette façon de cultiver est dite culture au sudate ; mais, parfois, l’asakusanori est cul- 
tivée d'une façon un peu plus compliquée, et on pratique la transplantation. Cette pratique 
qui, ainsi que nous le verrons plus loin, donne des résultats préférables à la culture 
simple que nous venons de décrire, a été imaginée par M. Hirano dans la douzième année 
de l’ère Meiji (1) (1880). Pendant quatre années, cet expérimentateur a effectué des essais 
de transplantation des Sudate, qui lui ont donné les meilleurs résultats. Cette culture 
avec transplantation n’a été mise en pratique, d’une manière générale, que pendant 
la trente-cinquième année de l’ère Meiji (1903) et donne de très bons résultats, notamment 
dans le village de Urayasu, dans la préfecture de Chiba, dont nous donnons ici un plan, 
refait d’après le travail de M. Oxamura (PI. X, 1). 

La méthode de transplantation consiste en ceci que, les sudate étant installés dans les 
conditions les plus favorables à la fixation et à la germination des spores de Porphyra, 
on les déplante lorsque ces Algues ont commencé à germer et on les replante ensuite 
en d’autres lieux dans des conditions plus favorables à la croissance ultérieure de l’Algue 
et à la production de sujets de consistance moins dure et-de goût plus fin. 

Si nous considérons le plan du village de Urayasu, nous trouverons les endroits de 
germination aux lieux dits: Yumantsubo, Higashi, Takashu et les places de transplan- 
tation à Kawabiri, Nishitakashu, Higashi-tatsumi, Nishitatsumi, Toribo, Amahiho, 
Mitsudaira, Zazara, etc... 

Il nous reste à dire quelles sont les conditions que doivent remplir les places de ger- 
mination et les places de transplantation, et comment l’opération doit être pratiquée. 

Pour construire le lieu de germination ou 1aneba, on plante les faisceaux de bambou 
en lignes parallèles, mais très serrés les uns contre les autres sur la ligne. 

En quelques jours, les jeunes frondes atteignent, au taneba, une quinzaine de milli- 
_ mètres de largeur, alors que dans le même temps des germes recueillis au sudate, dans 
des endroits propres à la maturation, atteignent à peine 1 millimètre. M. Oxamuvra attribue 
à trois causes la rapidité de la germination des spores au taneba. 

1° Tout d’abord, ce taneba étant disposé pour faire face au large, la densité de l’eau 
qui le baigne est beaucoup plus élevée. A Urayasu, le fond de la mer est en pente très 
douce, de sorte qu’aux fortes marées de nouvelle lune et de pleine lune, on aperçoit à 
peine les « reikin », petits fossés qui se creusent dans le sable à marée basse. Donc, pen- 
dant les courants de marée, le courant est beaucoup plus fort dans ces reikin qu'ailleurs, 
et ils prennent l'aspect de fossés de drainage. 


(1) Cette ère est l’ère actuelle qui a commencé seulement avec le règne de S. M. l’empereur régnant Mutsunito, 
en 1868. ‘ 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 39 


Sur le plan ci-contre de Uruyashu, il y a, à Est de Yumantsubo, un très grand reikin 
nommé Kaigamizo. 

Ce reikin passe entre les divers « taneba » (désignés en blanc sur le plan), il conduit 
constamment de l’eau de mer, et, de plus, comme le fond de la mer est plus élevé à l'Est 
de ce reikin qu’à l'Ouest, il se produit toujours un fort courant d’eau de mer vers Yuman- 
tsubo lorsque la marée descend. 

Deux autres reikin, désignés sur le plan par la dénomination de reikin, sont d’une 
autre nature : ce sont les fossés creusés dans le fond de la mer par le fleuve de Yedo. 
Ici, il y a, à marée basse, une très fort courant d'eau douce qui se ralentit à marée haute. 
Il en résulte que la densité de l’eau de mer est toujours plus forte aux taneba avoisinant 
le Kaigamizo qu'aux sudate (figurés en noir) qui se trouvent t baignés par les reikin de la 
rivière de Yedo. 

2° Les germes flottent plus tôt dans l’eau de densité élevée que dans l'eau de densité 
faible. Ces germes ou spores sont mûrs à la fin du printemps et se détachent de la plante ; 
puis ils se conservent et restent probablement, étant plus lourds que l'eau, enfouis au fond 
de la mer jusqu’à l’automne suivant. 

_ Ace moment, ils s'élèvent probablement par suite d’une augmentation de leur 
volume, et il est clair qu’à ce moment l’eau de forte densité favorise l'élévation des 
germes, tandis que l’eau de densité faible les laissera au fond. Il en résulte qu’aux endroits 
comme à Yumantsubo, où la densité de l’eau de mer est forte, les spores s’éléveront plus 
tôt et en plus grand nombre et seront plus vite fixés par les sudate sur lesquels ils se 
développeront. 

3° Enfin, dans les lieux où l’eau douce est abondante, une grande partie des germes 
sont ensevelis dans la terre du fond. En effet, aux environs des reikin de la rivière de 
Yedo, une grande quantité de sables et de boues, amenés avec l’eau douce, tendent cons- 
tamment à recouvrir les spores, et cela d’autant plus aisément que les particules solides 
s'élèvent plus aisément sous l'influence des courants et de l’agitation produite par le vent. 
Néanmoins, ceci n’est pas absolu et la direction des vents, la température et les précipi- 
tations atmosphériques changent parfois les conditions locales que nous venons d’exami- 
ner, de sorte qu'il est arrivé, d’ailleurs exceptionnellement, que la germination des Algues 
s’est produite un peu plus tôt en quelques des sudate de maturation que dans les taneba. 

Tout ceci n’a rien qui doive nous surprendre, si nous voulons bien penser que ces 
causes diverses influent sur la quantité de l’eau douce et de la vase apportée par les 
fleuves dans la mer, et sur le trajet et la vitesse du Kuroshivo, et, en dernière analyse, 
sur la densité de l’eau de mer. 

La fixation et la germination des spores s effectuent généralement sur le côté des 
sudate qui regarde le large, et ensuite sur toute la surface; mais, cependant, sans doute à 
cause des variations dans les conditions de milieu, il arrive parfois que c’est l'inverse 
qui se produit. De plus, M..Oxamura rapporte que certains pêcheurs disent qu’aux 
années d’abondance les germes se fixent tout d’abord à la partie inférieure du sudate 
pour se fixer ensuite au-dessus, tandis qu'aux années de pénurie, c’est l'inverse qui se 
produit. | 


40 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Quoi qu'il en soit, lorsque la germination est effectuée, il y a intérêt à transplanter 
les jeunes germinations aussitôt que possible. 
Les sudate chargés de jeunes Algues sont arrachés, portés à terre et emportés ensuite 
dans les endroits où la croissance des Algues va s'effectuer. 

M. Oxamura a essayé lui-même cette pratique qui, contrairement à l’idée préconçue 
qu'il en avait, ne tue pas du tout les jeunes pousses, qu’on les laisse à lair libre ou que l’on 
les mette à l’abri. Généralement, ce sont les changements brusques de température qui 
peuvent être funestes aux jeunes Porphyra; aussi, lorsque les pêcheurs laissent à terre les 
sudate qu’ils viennent de déplanter, les recouvrent-ils de mushiro, sortes de nattes en 
paille grossière qui protègent les Algues et arrêtent le sable de la plage qui, poussé par le 
vent, viendrait se fixer sur les jeunes frondes et les altérerait surtout parce que sa tempé- 
rature est plus élevée. i 

Dans ces conditions, les jeunes frondes supportent parfaitement un séjour a terre de 
4 à 6 jours, et reviennent très vite à la vie lorsqu’on les replante dans les lieux où elles 
doivent terminer leur croissance. Ces lieux doivent, au contraire, être choisis dans des 
régions de la mer où il y a beaucoup d’eau douce, parce que la croissance des Algues y 
est beaucoup plus rapide et, de plus, leur consistance y est moins dure et plus propre à 
les faire rechercher par le consommateur. 

La transplantation est bien préférable à la culture simple au sudate, ainsi que l’ont 
démontré les essais faits par les habitants et par M. Oxamura au village Urayasu. 

Aussi comprend-on l'importance du choix des terrains de culture, tant pour la cul- 
ture simple au sudate que pour la culture par transplantation, et on s'explique que les 
pêcheurs entrent souvent en conflit entre eux au sujet de ces terrains. A Tokyo, le gou- 
vernement donne cinq qualités de licences permettant cette culture, ces cinq qualités 
correspondant, naturellement, à la qualité des terrains. La taxe des licences varie de 0,20 
à 0.70 yen. 

La culture au sudate, comme la culture par transplantation, est naturellement in- 
fluencée par les conditions de milieu, et ce sont les eaux d’une salure moyenne qui parais- 
sent convenir le mieux. 

D’après M. Smiru, l’asakusanori était très abondant, il y a un ou deux siècles, à l’em- 


bouchure de la Sumida gawa, à Asakusa, près de Tokyo; mais la rivière charriant une 


grande quantité de gravier, son embouchure s’avancait de plus en plus dans la mer, et la 
plante disparut parce que l’eau devenait de plus en plus douce à Asakusa. C’est alors que 
la culture fut instituée. 

La culture de l’Asakusanori, quelle que soit la façon dont elle est effectuée, risque 
d'être compromise par deux ennemis qui sont l’insecte(r) « Sei» et une Algue dite « dola », 
qui appartient au genre Synedra. ; 

La question de l’insecte Seiest des plus importantes, parce que, si on établit les sudate 
dans le taneba au moment de la fécondation de cet insecte, tous les sudate se trouvent 


(1) Nous donnons, d’après le travail de M. Oxamura, la figure de la larve de |’ « insecte » Sei. Il s’agit, non pas 
d’un insecte, comme l’a traduit M. Dauey, mais d’un crustacé (PI. X, 5). 


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De, ie 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 41 


recouverts par les larves de ces insectes, de sorte que les spores de l’asakusanori ne peu- 
vent ni se fixer, ni germer. On ne sait pas combien de fois ces insectes peuvent se féconder 
dans l’année, mais on sait qu'ils sont vivipares et non ovipares et que l’une de leurs 
fécondations a lieu à l'automne, du 5° au 9° mois. 

Lorsque les insectes se fécondent en même temps que s’attachent les spores de 
Porphyra, les larves, nommées naporiusu, se produisent rapidement, couvrent tout le 
sudate et empêchent le développement de l’Algue. Ce fait est d’ailleurs rare, la féconda- 
tion des insectes sei finissant avec le 9° mois, alors que les spores de Porphyra ne se 
fixent guère qu'à partir du 10° mois de l’année. 

Lorsque, au taneba, on a soin de planter les sudate d’une manière assez serrée, on 
évite la présence des insectes qui ne se fixent guère qu’en surface et préfèrent les 
endroits où le courant est plus fort et où les matières nutritives et l’oxygène se renouvel- 
lent plus aisément. C’est ce qui explique que les insectes ne se trouvent pas au milieu du 
sudate, mais à la surface. Lorsque la transplantation a eu lieu, les insectes ne peuvent 
plus guère attaquer les Porvhyra. 

Enfin l’Algue dola, qui appartient au genre Synedra, vient parfois troubler les cul- 
tures ; elle se développe principalement là où les courants sont peu violents et où l’eau 
douce abonde. 

Cette Algue se féconde en hiver et s'attache au thalle des Porphyra. Ce n’est pas une 
plante parasite, mais elle est parfois tellement abondante qu’elle empêche la croissance 
des jeunes plants d’Asakusanori. 

Lorsqu'’elles sont peu abondantes, la présence de ces Algues étrangères est sans incon- 
vénients ; mais si, plus nombreuses, elles arrivent à faire mourir certaines parties du 
thalle des Porphyra, celles-ci ne tardent pas à périr et l’ensemble de la récolte est com- 
promise. 

Enfin, cette culture a encore d’autres ennemis et, tout d’abord, certains animaux 
marins qui viennent brouter les jeunes Algues, et les diatomées qui, s’y attachant en foule, 
en rendent le thalle gluant. 

En dépit de ces inconvénients, la culture de l’Asakusanori est des plus productives et 
ne peut, au Japon, que prendre de l'extension. 


§ 2. — RÉCOLTE. 


La recherche et la récolte des Algues qui ne font pas l’objet d’une culture présente 
souvent d'assez grandes difficultés; aussi, les Japonais et les Hawaïens ont-ils imaginé 
divers procédés de pêche permettant de se procurer en abondance les végétaux tant 
désirés. 

A Hawai, la plupart des Algues utiles sont recueillies par des femmes ou des enfants 
indigènes, excepté celles qui croissent dans les eaux profondes et agitées, loin de la côte, 
_ sur des récifs coralliens, ou sur des rochers très exposés au choc des vagues, là où il est 
nécessaire de montrer plus de force et plus d’habitude de la natation, et aussi où il faut 

T. If. — Fasc. 1. 6 


42 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


avoir un bateau. En ces endroits se rendent des embarcations montées au moins par deux 
personnes, mais plus souvent par un groupe plus nombreux d’hommes et de femmes 
jeunes et robustes. Généralement, les hommes péchent et prennent soin du bateau et 
des filets, pendant que les femmes récoltent le limu. 

Dans les cas les plus simples, lorsque les Algues sont facilement accessibles, les femmes 
et les enfants se rendent à marée basse sur les rochers, munis de seaux en fer blanc, de 
vieux sacs et de pièces de fer aiguisées ou d’un vieux couteau, et détachent les Algues des 
pierres ou des coraux. Les Algues sont débarrassées avec soin du sable et des petits cail- 
loux qui y adhèrent généralement, bien lavées et placées par espèces, dans des récipients 
différents. : 

Siles Algues croissent encore plus près du rivage, dans le sable ou dans la vase, ou flottent 
prés du rivage, les femmes et les enfants les arrachent sans aucun ustensile, les nettoient 
soigneusement du sable et des petits animaux marins, et en rejettent les Algues non comes- 
tibles, pour placer les autres dans leurs sacs et leurs seaux. 

Les Algues les plus aisément récoltées sont les suivantes : diverses espèces d’Entero- 
morpha, Hypnea nidifica, Gracilaria coronopifolia, Grateloupia filicina, Chætomorpha 
antennina, Centroceras clavulatum, Stigeoclonium amænum, diverses. Ulva, Chondria 
tenuissima. ; 

D’autres Algues sont encore rejetées sur le rivage, et la récolte en est encore plus 
facile. Ce sont surtout les espèces suivantes : Hypnea nidifica, Gracilaria coronopifolia, 
Sargassum echinocarpum, S. cymosum, Laurencia papillosa, L. pinnatifida, L. virgata, 
L. obtusata, Gymnogongrus disciplinalis, G. vermicularis var americana, Asparagopsis 
Sanfordiana, Codium Muelleri, C. tomentosum, Dictyota acutiloba var distorta, Haliseris 
plagiogramma. 

Mais les choses ne sont pas toujours aussi faciles, et il arrive parfois qu'il faut aller 
chercher les Algues loin du rivage, sur des rochers entourés d’une mer agitée. C'est là 
qu’on va chercher, dans leur station même, les espèces qui sont rejetées sur le rivage 
et que vous venons d’énumérer. Pour les aller chercher ainsi, il faut qu’un habile nageur, 
armé d’un couteau ou d’une paire de ciseaux, vienne sur un des bateaux dont nous par- 
lions plus haut et de là s'approche des dangereux rochers. Or, les hommes et les femmes 
de Hawaï sont des nageurs intrépides et autrefois surtout, ils se livraient, au bord de 
la mer, à des jeux extraordinaires qui ont été décrits bien souvent. 

D'autres Algues croissent plus près de la limite des basses mers, mais sur des blocs 
de lave, généralement baignés par une mer furieuse, et il est encore nécessaire qu’elles 
soient récoltées par d’habiles nageurs. Ce sont surtout divers Gelidium, l’'Ahnfeltia con- 
cinna, le Gymnogongrus disciplinalis et le Porphyra leucosticta, qui croissent dans cette 
station, et elles sont d’autant plus difficiles à récolter qu'elles adhèrent fortement aux 
rochers. 

Enfin, pour récolter certaines espèces de Laurencia et de Gymnogongrus, que l’on 
rencontre dans les eaux saumâtres, quelques pêcheurs, près de Honolulu, emploient des 
boîtes de bois, à fond de verre, dans lesquelles ils regardent la profondeur des eaux au 
sein lesquelles ils marchent et sont plongés jusqu’à la poitrine. Armés d’un crochet de 


Pee ds Hg ee ge Le 


= 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 43 


fer, ils récoltent ainsi les Algues et mollusques alimentaires: Cette méthode a été intro- 
duite 4 Hawai par des pécheurs italiens. 

Au Japon, les grandes Laminariacées, qui servent à préparer le kombu sont l’objet de 
procédés de récolte particuliers. Cette récoltese pratique de juillet à octobre, dans la baie de 
Hokkaido, etelle esteffectuée par de nombreux pêcheurs, la plupart de race aïno (PI. 6, 7, 8). 

Les pêcheurs se rendent au-dessus des fonds riches en grandes laminaires, ils sont de 
1 à 3 dans des bateaux plats et emportent des gaffes de formes diverses qui sont les unes 
fixées sur de longs manches de bois, les autres chargées d'un poids lourds et envoyées au 
fond à l’aide d’un cable. Ces gaffes ou crochets étant au fond, on les tourne pour y 
enrouler les laminaires, et on tire pour les arracher du fond. 

Les Algues à kanten, et notamment le Gelidium corneum, sont également récoltés, 
d’après Davinson, à l'aide de gaffes et de dragues spéciales. 

Enfin, le wakame (Ulopteryx pinnatifida), qui croît à une profondeur de 20 à 40 
pieds, dans dés endroits où la mer est agitée, est l’objet d’une pêche particulière. 

Cette pêche est effectuée à l’aide de longues gaffes à pointes multiples et divergentes, 
de la même manière que celle du kombu. 


§ 3. — PRÉPARATION, CARACTÈRE ET COMMERCE DES PRODUITS RETIRES DES ALGUES. 


Nous avons antérieurement dit quel rôle important jouaient ces végétaux dans l’ali- 
mentation des Japonais et aussi dans diverses industries. On conçoit aisément qu'avec 
l'étendue immense de leur littoral, les peuples de ces îles aient cherché à tirer parti des 
richesses si importantes que leur offre la flore maritime des côtes. On estime actuellement 
à 12000000 de francs environ la valeur du trafic auquel donnent lieu annuellement les 
utilisations variées des Algues et de leurs produits dérivés, sans compter la valeur 
d’autres plantes marines employées par les pêcheurs eux-mêmes et qui ne peuvent être 
englobées dans les statistiques. 

Le commerce des Algues se développe d’une manière si considérable depuis quelques 
temps, que l’on est en droit d’en prévoir une diminution notable résultant de la raréfac- 
tion de la matière première, par suite d'exploitation par trop intensive. 

La quantité d’Algues utiles est en outre en voie de diminution dans certaines régions 
du littoral, non seulement à cause de l’augmentation de la consommation, mais encore 
parce qu’ils’est produit un refroidissement sans doute temporaire des eaux dû vraisembla- 
blement au déplacement de certains courants chauds. 

Il ne faudra pas trop compter sur le remplacement spontané car il est très long, et il 
n'existe encore qu’un petit nombre de plantations d'essai faites surune petite échelle. Une 
seule espèce, le Porphyra laciniata, est, comme nous l’avons vu, l’objet d’une culture 
réellement digne de ce nom. 

Comme le dit justement M. Smirn, délégué du Département du Commerce et 
des Pêcheries de Washington, la disparition des Algues a affecté la pêche de divers 
autres produits, tels que les « abalones », mollusques très estimés qui vivent au milieu 
de ces dernières. 


44 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


On sait que les Algues portent au Japon la désinence générale de nori que prennent 
aussi les produits préparés qui sont si nombreux. Les plus connus de ces derniers sont: 
le kombu, l’amanori, le funori, le kanten, etc., et enfin l’iode; nous allons les passer 
successivement en revue, en empruntant la presque totalité de nos renseignements au 
Rapport Smirx. 


A. — Kanten. 


Généralités. — Le mot de kanten, qui veut dire en japonais « temps froid », est un 
de ces noms que la fantaisie de ce peuple applique aux objets connus en rappelant une 
particularité de leur origine ou de leur préparation. Le kanten, en effet, se prépare au 
moment de l’hiver, de décembre à février et, en 1903, il existait plus de 500 établisse- 
ments de fabrication répartis surtout à Osaka, Kioto, Hyogo, Nagamo, et produisant cha- 
cun 2000 kilogrammes en moyenne par an. 

L’une des plus importantes manufactures, située à Osaka, emploie 70 à 80 ouvriers. 
En général, les contrées montagneuses sont préférées, à cause de la sécheresse de 
l'atmosphère et la pureté de l’air nécessaires à certaines phases de la préparation. 

Le kanten est fabriqué au Japon depuis 1760. Jadis, il se présentait sous forme de 
masses gélatineuses informes ; aujourd’hui, ce sont des barres, et l'idée de cette forme est 
toute fortuite. Un jour, un fragment de cette gelée ayant été jeté dehors se congela et prit 
l'apparence d’une baguette allongée qui fut trouvée commode pour la manipulation, et 
l’on modifia dès lors la préparation pour obtenir cette forme qui est généralement adoptée 
partout de nos jours. 

Algues productrices. — Le kanten provient presque exclusivement du Gelidium cor- 
neum (lengusa, en japonais); pourtant on fabrique, avec d’autres espèces du même genre, 
des produits de valeur moindre (1). 

Préparation du kanten (2). — On commence par trier l’Algue des espèces voisines, 
puis on la nettoie par battage, on la lave pour enlever les dépôts calcaires à l’eau douce, 
puis à l’eau courante. 

En cet état, l’Algue vaut de o fr. 3040 fr. 45 la livre anglaise pour les belles qualités, 
et de o fr. 20 à o fr. 30 pour les qualités inférieures. 

. Ceci fait, les Algues mouillées sont étendues en couches minces et retournées sur des 
claies, sur des lits de paille ou sur des poteries qui absorbent l’eau et hatent la dessic- 
cation. On les blanchit par exposition à la rosée pendant un ou plusieurs jours. Ces opé- 
rations doivent être faites à la fin de l’été,. mais les pluies diminuent considérablement 
la valeur et la quantité des produits. 

En séchant, les Algues s’agglutinent en feuillets grossiers qu’on roule en faisceaux et 
qu’on emballe et conserve pour les opérations suivantes. 

On soumet ensuite la masse à l’ébullition dans un baquet de bois ou de fer, à l’aide 
d’un fourneau construit à cet effet. 


(1) Voir plus loin, chapitre vir : l’Agar-agar. Le Tengusa serait, d’après Davipson, le Gelidium Amansit. 
(2) Voir, pour plus de détails, Davipson, loc. cit. 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 45 


D'une façon générale, on mé- 
lange 960 à 1 000 galons d’eau à 165 
livres d’Algues; mais quelquefois, 
suivant l'espèce d’Algue en traite- 
ment et l'état de l’atmosphère, les 
proportions peuventêtre modifiées. 
Une quantité d’eau plus petite est 
nécessaire lorsque le temps est nua- 
geux ou que la qualité de l’Algue 
est inférieure. 

On fait bouillir la masse entière 
en agitant de temps en temps. 

Après cinq à six heures d’ébul- 
lition, on ajoute un gallon et demi 
de vinaigre, ou deux onces d’acide 
sulfurique, eton fait bouillir encore 
pendant trente minutes. 

Durant cette ébullition, on 
ajoute d’autres espèces d’Algues, 
et surtout le Campylæphora hyp- 
neoides, dans la proportion de 10 à 
20 pour 100 pour le kanten en bà- 
tons et de 30 à 40 pour le kanten 
en baguettes. 


Fig. 3. — 4A, Citerne sur laquelle se place le cadre 4B, dans lequel 
on entasse la masse à filtrer. En avant et à droite, la cuve à dé- 
Cantation avec les deux bandes superposées. 5, Cuiller (1). 


(1) Clichés Salle et Cie. 


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— 


Fig. 2. — 1. Mortier; 2. Pilon; 3. Cuve en bois sur son fourneau oe 


L’ébullition extrait la matière 
gélatineuse que l’on sépare par fil- 
tration à travers un drap épais et 
refiltre aussitôt dans des chausses de 
toile. On les soumet ensuite à la 
presse et on laisse refroidir dans des. 
bacs deo m. 60 de long, o m. 30 de 
large et o m. 075 de profondeur. 

Quand le refroidissement est 
suffisant, le contenu est découpé en 
fragments de dimension uniforme 
pour en faciliter la manipulation. 

Ce découpage est effectué à 
l’aide de cadres spéciaux, divisés en 
carrés de dimension variable avec 
les fabriques. L'une des faces de ces 
cadres est tranchante ; il suffit de 


46 


ANNALES DE L'INSTITUT 


Fig. 4. — Usine de kanten de Suwa-Gori (2). 


OCÉANOGRAPHIQUE 


tirer à soi le cadre pour obtenir des 
barres régulières. 

Celles-ci sont, à leur tour, pla- 
cées dans des boîtes en bois, plus 
larges qu’elles, et à l’aide d’un piston 
on force la barre de gelée à passer à 
travers les trous en donnant par 
cette sorte de laminage des baguettes 
caractéristiques définitives. 

Une autre façon consiste à faire 
des blocs de 1 pouce 1/4 (0, 03) à 
1 pouce 1/2 (0, 037) que l’on obtient 
également à l'aide de cadres tran- 
chants. 

Les baguettes ou barres sont 


enfin rangées dans des boîtes et exposées sur la montagne au froid. La congélation 
nécessaire demande deux ou trois jours (1) ; elle est suivie d’un séchage de trois à quatre 
jours etles vents du Nord-Est sont les plus propices pour cette dernière opération. 


Fig. 6. — Claie (2). Fig. 7. — 8A, 8B, couteaux ; 8C, Presse (2). 


On les coupe alors, suivant les besoins, et les emballe pour l'expédition. Les deux 
formes les plus répandues sont: 
1° Le huoso-kanten (kanten mince), qui se présente en bandes minces, étroites, de 
om. 25 à o m. 35 de longueur sur o m. 003 d'épaisseur, que l'on réunit en faisceaux du 


(1) Il se produit ici un phénomène identique-à celui qui a été signalé dans la préparation du kori konniaku (voir 
M. et Mme Gatin, Bull. Sc. pharmacol., 1907, XIV, 448). La congélation à plusieurs reprises amène une cristallisation 
de l’eau à la surface du produit qui se transforme, en se desséchant, en une substance poreuse et légère, découpée 
en galettes, qu’il faut au préalable faire gonfler dans l’eau pour la consommer. Ce kori konniaku, obtenu en partant des 
tubercules d’une Aroïdée, l'Amorphophallus Rivieri Durieu, est une préparation alimentaire japonaise à rapprocher de 


celles obtenues avec certaines Algues, mais elle renferme de l’amidon. 


(2) Clichés Salle et Cie. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 27 


T/ 


poids de 185 à 310 grammes (6 à 10 onces), à leur tour empaquetés en balles de 60 kilo- 


grammes environ (100 kins ou 133 livres anglaises). 
2° Le kaku-kanten (kanten carré) qui se vend en balles grossières; 50 blocs 


pèsent environ 450 grammes (1 livre anglaise). 


La fabrication du kanten ne peut être faite que par des gens qui en ont une longue 


a 
2% 


Fig. 8. — Étagères sur laquelle sont disposées 
les augettes (1). 


Fig. 9. — Congélation et dessiccation (1). 


expérience, car elle est très délicate, et, de plus, ne peut être effectuée que lorsque le 
temps est suffisamment froid, ce qui ne se produit que de novembre à mars. 


Caractères et usages du kanten. 
— Le kanten est une matière ino- 
dore, insipide,d’une couleurblanche, 
perlée, brillante et presque trans- 
parente. Il est complètement soluble 
dans l’eau chaude et se prend en 
gelée compacte par le refroidisse- 
ment. Il se gonfle seulement dans 
l'eau froide. — 

Utilisé couramment au Japon 
en grandes quantités pour préparer 
des gelées, et aussi comme adjuvant 
de soupes, sauces, etc., il est alors 
fréquemment coloré artificiellement. 
On s’en sert aussi pour clarifier le 


Fig. 10. — Vue de l'usine de Suwa-Gori (1). 


saké. Dans les pays étrangers, le kanten a les usages les plus divers et sert chaque 
fois qu'il est besoin de donner la consistance des liquides : gelées, compotes, pâtis- 
serie, etc. Son usage est reconnu comme bien supérieur à celui de l’isin-glas animal 


(ichtyocolle). 
(1) Clichés Salle et Cie, 


48 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Dans industrie, il sert à appréter les étoffes, les textiles, pour tendre les fils de 
soie, clarifier les vins, les bières et autres boissons. 
Les mouleurs en plâtre en font également usage et son emploi serait assez fréquent 
dans la fabrication de certains papiers 
pour en préparer la « charge ». 

Enfin, en Chine, le kanten sert à 
fabriquer de faux nids de salanganes 
qui constituent une sorte de succédané 
de ce mets estimé! Ajoutons enfin qu'il 
est probable que les grandes quantités 
de kanten expédiées en Hollande trou- 
vent leur usage au cours de la fabri- 
cation du Schiedam. 

En bactériologie, le kanten est la 
base des milieux de culture, et il est 
connu sous le nom de gélose ou agar- 
agar. En Europe, l’agar-agar utilisé 
ainsi provienten grande partie de Cey- 
lan, et c'est, en somme, le kanten de 
Ceylan, sur lequel nous reviendrons 
M plus spécialement. 

Fig. 11. — 10A, Moule à empaqueter pour obtenir les blocs. 10A’ 
à 16B, Presse pour lamelles (1). Commerce. — En 1903, l’Algue 
a séchée fut vendue à Osaka o fr. 30 à 
o fr. 50 le kilogramme et les autres Gelidium seulement o fr. 20 à o fr. 30. 

On estime à 565 700 francs la valeur totale des Algues à kanten séchées en 1900. 
En 1901, la vente des pêcheurs s’est élevée à 625910 francs. 

La production du kanten préparé en 1900 dépassa 1000 tonnes, valant environ 
3 millions de francs (1153003 yens à 2 fr. 58), et les statistiques les plus récentes ac- 
cusent une production annuelle plus forte, approchant 1 500 tonnes, d’une valeur totale 
de 3 750000 francs. 

Pendant les 34 années antérieures à 1903, la vente à l'exportation a dépassé 
20 millions de kilogs (37 196 466 kins) évalués à 38 081 966 francs. 


CUAL 


1%) 
AU BE 


(1) Clichés Salle et Cie. 


ee ae es 


= 
4 
3 
i 


ee ll ee 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 49 


Quantité et valeur du Kanten exporté. 


QUANTITÉ (KIN) VALEUR (YEN) (1) VALEUR DE 100 KIN | 

LL ET RER AIRE ATEN ET 221.771 66. 263 29,9 
A ede ald D a ns annee ois es 366. 484 134.243 23,7 
LL RER ARE ANA PESTE 1.169.825 269.867 23,1 
Se eee se see 1.214.286 309.084 25,5 
RU disons 1.147.713 270.511 23,6 
LL Waid aime bia beck yes due à 1.208.425 495.625 38,2 
LE PORTE PE RTE 1.207.275 T4 55,9 
1902. TORRES SERIE ON ERS RUE 1.665.501 1.108.544 66,6 
Total de 1869 à 1902 (en comptant 

toutes les del. RAR DS PAR 37.196.466 13.646.911 

(1) Le yen = 50 cents ou 2 fr. 58 environ. Le kin équivaut à 600 grammes. 


_ Le prix de vente moyen a oscillé de 77 fr. 40 les 100 kins (69 kg.), en 1869, à 199 fr. 68 
en 1901, et 173 fr. 16 en 1902. 

Le kanten est plus exporté que consommé : la forme en baguettes s’en va en Chine, 
aux Indes anglaises, en Australie, en Allemagne, en France et en Angleterre. 

De petites quantités dnt été expédiées aux Etats-Unis, et, quant au kanten carré, il est 
surtout demandé par la Hollande. 

Les prix sont naturellement variables avec la qualité, la forme et le pays. La meilleure 
qualité de kanten carré atteint 2 fr. 75 à 3 francs le kilog, et la qualité correspondante de 
kanten en baguettes vaut environ 2 francs. Les qualités communes sont estimées respec- 
tivement à 2 francs (en carrés) et 1 fr. 25 (en baguettes). 

D'après Davinson (1), les quantités de kanten, produites et exportées, sont résumées 
dans le tableau ci-dessous : 


PRODUCTION À EXPORTATION 


— x; a 


en kwans (1). valeur en liv. st. ins. valeur en liv. 


1900 SE pr : 115.300 4444 96.432 


1901 261 106.846 584. 220710 
1902 ole 95.027 .665. 110.854 
» 


1903 2 


914 90.997 391. 81.817 
1904 » 


101.359 


(1) 1 kwan = 8,263 Ib. 1 kin = 1,32277 Ib. 


Le graphique ci-dessous, extrait de la notice de la maison Salle et Cie, complète les 
renseignements précédents. 


. (1) Loc. cit., p. 133. ‘ ES 
T. Ill. — Fasc. 1. 7 


50 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


B. — Funori. 


C’est une espèce de colle provenant de différentes espèces d’Algues appelées égale- 
met funori, ce qui veut dire « matière pour rendre rigides les tissus », et appartenant au 
genre Gloiopeltis (G. coliformis, intricata, 


rs pas: salsa) sale) sig] gig] etedet parfois d'autres espèces. 
sida Pye! Foe Bela M SE Bad Che RS ok RS Bad À Bien que sa fabrication soit économi- 
LA. quement moins importante que celle du 
| 90 EE : kanten, on Be compte, au Japon, pas 
Be + PSE moins de 100 établissements répartis dans 
= 30 préfectures et occupant chacun 10 à 15 
oe ouvriers. La ville productrice située le plus 
au Nord est Hokkaido et au Sud Kagoshima. 
140.000 a Cette industrie est surtout florissante dans 
4 le Sud et le centre principal est Osaka. 
160000 / Le funori se fabrique depuis 1673. 
Préparation. — La transformation de 
É l’Algue brute en produit commercial est 
peers /- | beaucoup plus simple. 
vA L’Algue est séchée, après triage et net- 
es act D a toyage, puis rincée dans l’eau douce; après 
te. 4 : quoi elle est placée en couches minces sur 


de larges claies ombragées faites avec du 
Fig. 12. — Courbe des quantités de kanten exportées pen- bambou puis comprimée à la main pour 
dant ces dix dernières années, avec fluctuation des prix es x : 
en livres sterling. en faire de petites feuilles ; on retourne la 
claie et les fait blanchir et sécher. On les 
arrose de temps en temps pour les empêcher de s’enrouler. 
Quelquefois méme on fait sécher directement ces feuilles sur le sol du hangar sans 
Vusage de claies. 


Lorsque le blanchiment est suffisant, les feuilles de funori sont groupées en faisceaux 


de dimensions variées. Les feuilles sont minces, flexibles et d’épaisseur uniforme et leurs 


dimensions habituelles sont de (5/3 pieds) o m. 50 environ, mais des feuilles plus petites 
sont souvent préparées pour le détail. 

La forme la plus répandue d’empaquetage est celle en rouleaux de o m. go (3 pieds) 
de longueur surom. 15 à o m. 18 de diamètre. 


Usages. — Il est employé ordinairement pour l’apprêt des tissus, et pour l’empesage, - 


comme l’empois d’amidon; pour le glaçage du papier et pour obtenir sa rigidité ; comme 
enduit des murs; dans la dévoration de la porcelaine, etc. 

Les femmes japonaises s’en servent pour la préparation de divers cosmétiques pour 
cheveux. 

Commerce, — Le prix varie avec la qualité; la meilleure s’est vendue, en 1903, 


EN | PTT 


10 hf Qué us tés 


Lui ds do fs 


aa. es à 


Te D OR | ae ee eee ee ee 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 51 


10 francs les 3 kg. 750 (10 kwans), c’est-à-dire o fr. 50 la livre anglaise de 454 grammes. 

La valeur moyenne est de o fr. 60 le kilog environ, mais les qualités inférieures se 
trouvent sur le marché au prix de o fr. 15 ao fr. 30 le kilog. 

La production moyenne des dernières années est estimée annuellement à 5 ou 6 mil- 
lions de kilogs, d’une valeur de 6 à 700 000 francs. L’exportation est réduite, atteint d’or- 
dinaire à peine 7 500 francs et au plus, certaines années, 15 à 16000 francs. Les pays con- 
sommateurs sont la Corée, la Chine, l'Asie russe, la Russie et aussi quelque peu l’Angle- 
terre et la France. 

Production du Funori (Davipson). 


| | 
ANNÉES QUANTITÉS EN KWAN 4 VALEUR EN LIVRES STERLING 
: 1900 257.932 è ‘ 15.406 
es (TT 355.481 26.161 
age 1902 284.083 26.7 
1903 : 181.513 16. 


C. — Kombu ou Kombou 


On désigne sous ce nom diverses sortes d’aliments provenant d’Algues du genre La- 
minaria (L. Japonica, religiosa, etc.) et de genres voisins qui constituent l’une des plus 
importantes productions des végétaux marins au Japon. 

La vente en est considérable et ne cesse de s’accroître surtout en Chine. Une faible 
partie se dirige vers les Indes et San Francisco, mais on peut dire que l’usage en est in- 
connu au delà de l'Asie orientale. 

Bien que le prix soit moins élevé que celui du kanten, la valeur économique est plus 
considérable et la préparation exige un plus grand nombre d'ouvriers. 

La préparation du kombu date de 1730 et n’a guère subi de modification depuis cette 
époque. Les principaux centres de production sont: Osaka, Tokyo, Hakodaté. A Osaka 
seulement, il existait, en 1903, 45 factoreries employant de nombreux ouvriers, femmes et 
enfants. 

Le kombu affecte une douzaine de formes commerciales qui montrent l’ingéniosité 
des Japonais dans l’art de varier leurs aliments, et parmi elles quelques-unes ne sauraient 
être du goût européen ; cependant d’autres sont tout à fait acceptables. 

Préparation.— La plus connue d'entre ces formes est le kizami ou ao. L’Algue séchée, 
telle qu’elle est reçue des pêcheurs d’Hokkaido, est immergée dans des bassins larges et 
couverts, qui contiennent une solution forte d’une teinture spéciale dans l’eau douce. On 
chauffe les bacs, et la température d’ébullition est maintenue pendant 15 à 20 minutes en 
agitant de temps à autre. i 

L'action de la teinture donne à la masse une couleur uniforme, et on peut envoyer 
le produit ainsi préparé directement au marché. Cette coloration est faite pour plaire au 
goût de l'acheteur, comme le verdissement des légumes verts exigés par le consommateur 
dans certains pays d'Europe. eue Dé fe 1189 toy OU COUT UUR 


52 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


On employait autrefois pour la manipulation précédente du carbonate ou du sulfate 
_de cuivre; mais l’usage des sels de cuivre ayant été interdit par le Gouvernement, on 
lui a substitué celui des couleurs d’aniline et, en particulier, le vert malachite. 

L’Algue est convenablement cuite et saturée avec la teinture, qui demeure insoluble. 
On la retire, on la sèche a l’air libre, en l’étalant sur des lits de paille, ou bien en la 
suspendant à des supports verticaux et horizontaux, placés à l’air dans les cours et rangés 
symétriquement pour occuper le moins d’espace possible. 

Quand le séchage est suffisant, ce que l’on voit lorsque la surface de l’Algue n’est 
plus mouillée, mais qu’elle reste souple, les frondes sont enroulées en rouleaux ayant à 
peu près o m. 30 de diamètre, ce qui en facilite la manipulation ultérieure. 

Ces rouleaux, attachés à l’aide de câbles, sont envoyés aux ateliers où des femmes les 
déroulent un par un, les rangent ensuite dans des cadres de bois-en faisant une pile de 
o m. 45 de haut, o m. 12 à o m. 15 de large sur la longueur totale de la fronde. 

Chaque pile est fortement comprimée et serrée à l’aide de quatre ligatures en corde 
dans l’intervalle desquelles on fait ensuite une section, ce qui divise chaque pile d’Algues 
en quatre fragments reliés par une corde, 

Les morceaux ainsi obtenus sont rangés dans un cadre rectangulaire de 4 à 5 pieds 
carrés et dont la profondeur correspond à la longueur de ces morceaux. On arrose la 
masse afin d’en faciliter l’agglutination, et on la soumet à de fortes pressions à l’aide de 
moyens primitifs : câbles, leviers, etc. 

L'un des côtés formant lecadre est alors retiré, et la surface du bloc mise à nu. Celui: 
ci est suspendu et incliné convenablement, puis est raboté par l’ouvrier à l’aide d’une 
plane à main, ce qui donne de fins copeaux coupés dans le sens longitudinal et perpendi- 
culairement à la surface plane des Algues. 

Une manufacture possède 5 à 10 ouvriers coupeurs, ayant leur outillage spécial, et la 
substitution de la plane à main au couteau est la seule amélioration introduite dans cette 
préparation, depuis des siècles. 

Au fur et à mesure que les copeaux sont obtenus, on lesétale sur des claies ou plates- 
formes, à lair libre, où on les retourne pour obtenir la dessiccation régulière et, quand la 
surface des copeaux est sèche, mais l’intérieur encore assez humide pour pouvoir les 
plier, on les met à couvert et ils sont prêts pour l’expédition. 

Le produit ainsi préparé ressemble assez à ces lichens qui festonnent certains ar- 
bres des Etats-Unis du Sud, dit M. SmirH. » ; 

Pour l’usage local, le kobe est emballé dans du papier; pour l’expédition en Chine, 
on sé sert de boîtes en bois, et, s'il est suffisamment séché, il peut se conserver sans alté- 
ration pendant une année au moins. 

C’est cette sorte qui fut étudiée par SenrrT; elle se présentait en filaments de 1 à 2 mil- 
limètres de largeur et ayant jusqu’à o m. 40 de longueur, de couleur vert grisatre, 
enchevétrés les uns dans les autres, et comprimés en paquets cylindriques. L’odeur était 
repoussante et la saveur désagréable, salée et mucilagineuse. Dans l’eau, ces filaments 
prennent une forme prismatique avec deux faces de couleur vert sombre et les deux 
autres striées de vert clair avec une ligne plus sombre au centre. _ : pert 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 53 


Examen microscopique. — La masse entière est formée d’un tissu parenchymateux 
de cellules petites et presque prismatiques pouvant être réparties en trois couches : l’une, 
cuticulaire externe, dense, fortement colorée en vert dans la partie la plus externe, et par 
conséquent riche en corpuscules chlorophylliens; la deuxième, parenchymateuse, a 
éléments plus larges ; et, au centre, une troisième zone d’éléments allongés dans le sens 
longitudinal, très serrés, à lumen réduit. Cette Alguese transforme à peine par la cuisson 
et la décoction est trouble, avec une odeur prononcée de poisson et une saveur salée. 

Autres préparations du kombu. — Les espèces, dont les frondes sont les plus épaisses 
et les plus larges (1), sont souvent séchées avec un soin spécial, bien étendues et étalées 
afin de servir à certains usages auxquels seraient impropres les espèces à frondes étroites 
et minces. 

Ces sortes de kombu, dont la préparation est vieille de plus de deux siècles, sont 
aujourd’hui plus utilisées que jamais. Chaque préparation représente un stade d’une 
série de manipulations, et chaque fronde est susceptible de les donner toutes. 

a) La fronde entière est plongée dans du vinaigre jusqu'à ce qu’elle soit bien imprégnée, 
puis retirée et séchée à lair. Le vinaigre employs doit étre de la meilleure qualité et 
étendu de trés peu d’eau. 

Le vinaigre ramollit la fronde, qui se plie alors facilement, joue un rôle conservateur 
et permet le traitement spécial qui va suivre. 

b) A l’aide d’un couteau ayant la forme d’un couperet à découper, l’artisan japonais, 
tenant la fronde tendue avec le pied et la main, racle l’épiderme des deux côtés. Cette 
couche superficielle, détachée en petits copeaux, forme la qualité la meilleur marché de 
kombu, car elle renferme une certaine quantité de corps étrangers adhérents à l’Algue. 

Un deuxième grattage, effectué de la même manière, enlève toute la couche coloriée, 
laissant seulement la zone centrale blanchâtre de la fronde, et fournit le produit appelé 
kuro-tororo kombu (kombu noir pulpeux). 

c) On continue l’opération qui donne alors une masse composée de fines rognures 
blanches : shiro-tororo kombu (kombu blanc pulpeux). 

d) Lorsque la couche pigmentaire a été enlevée (après le deuxième grattage), on peut, 
à l’aide d'un couteau bien tranchant, enlever de fines pellicules de la partie centrale : c’est 
l’oboro kombu (kombu pelliculaire). 

e) Quand la lame centrale est assez réduite pour ne plus pouvoir subir le grattage, 
on la réunit à d’autres lames et, après les avoir pressées ensemble et découpées en lon- 
gueurs égales, on les travaille à la plane, comme il a été dit pour le kombu vert. On 
obtient ainsi des filaments blanchâtres appelés shirago kombu (kombu cheveux blancs). 

f) Les frondes dont la partie verte a été grattée plus ou moins complètement sont 
souvent coupées en petits morceaux (carrés, losangiques, circulaires, oblongs ou en 
évantail) qui, séchés sur le feu, prennent une apparence ridée. 


(1) Rappelons ici qu’en dehors des Laminaria japonica, religiosa, angustata, longissima, ochotensis, yexoensis, 
fragilis, diabolica, gyrata, récemment décrites par les Professeurs Miyasé et OsHIMA, on utilise également, pour ces 
préparations connues sous le nom de kombu, les Arthrothamnus bifidus et kurilensis, Alaria fistulosa et quelques 
autres espèces d’Alaria. 


54 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Les longues frondes sont assez fréquemment réunies sous forme de tresses qui se 
_ vendent telles quelles sur les marchés sous le nom de oiro kombu (kombu séché sur 
le feu) ou enrobées et glacées avec du sucre teint en rouge : kwaschi kombu. 

g) Si l’on pulvérise les pièces séchées dont il vient d’être question et qu’on passe au 
tamis à mailles fines, on obtient une poudre verdâtre, ou grise, ou blanchâtre, suivant 
que le grattage a été tr ou moins profond; elles constituent la forme appelée : saimatsu 
kombu (kombu en poudre fine). 

Ces mêmes poudres se présentent parfois sur les marchés, comprimées en galette et 
enrobées de sucre. 

h) Une forme de kombu, connue sous le nom de cha kombu (thé kombu), est préparée 
en prenant les frondes qui ont été soumises aux deux premiers grattages, et en les rédui- 
sant en copeaux avec la plane. Ces copeaux, aprèsséchage, sont coupés en morceaux d’un 
demi-pouce de longueur, comparables alors aux feuilles de thé vert enroulées sur elles- 
mêmes. | 

Usages du kombu. — Le kombu entre dans l’alimentation de toutes les familles 
japonaises, et c’est un des mets principaux de ce pays qui entre dans les préparations les 
plus variées. 

Des morceaux de frondes vertes non préparées sont ajoutés ‘et cuits avec des soupes, 
des légumes, de la viande, du poisson, dans le but de les rendre plus agréables au goût. 
D'autres fois, ces mêmes frondes, après avoir été grattées extérieurement, sont coupées en 
carrés de trois quarts de pouce de côté et bouillies dans la sauce au Soja hispida (1), 
ce qui permet de les conserver pendant un temps très long. On obtient ainsi un excel- 
lent assaisonnement dont la saveur rappelle celle du caviar ou de la sauce aux anchois, 
ce qui explique le nom de fsuku-dani (littéralement : bouilli avec la sauce aux anchois) 
qu'on donne a cette préparation. 

Le « thé kombu » et le kombu vert ou blanc se prennent comme le thé en infusion; ils 
donnent une boisson assez agréable au goût et, à Osaka, on mange le résidu pulpeux ou 
pâteux qui reste. 

Les frondes sont utilisées en cuisine japonaise comme la poudre de carry. On les vend 
sur les marchés en flacons, contenant un quart de livre anglaise. 

Coupé en petits morceaux, le kombu est excellent à manger, soit simplement stot 
soit après immersion dans l’eau chaude ; il possède un 1 goût de noix ; il en est de même 
du kombu séché sur le feu et enrobé de sucre. 

Enfin, sous la forme pelliculaire, il est journellement employé comme assaisonnement. 

Commerce. — En 1901, la production a été de 76000000 de livres payées aux 
pêcheurs 464000 dollars. 

Aucune statistique n’existe, qui permette d’évaluer la valeur du kombu préparé vendu 
sur les marchés. 


Voici le prix des diverses sortes de kombu vendu à Osaka, en 1903. 


(1) On sait également quel rôle considérable joue cette graisse dans l’alimentation des peuples d’Extrême-Orient. 
Voir, entre autres, à ce sujet, l’article si documenté de M. BLocx, pharmacien major de l’armée coloniale (Bull. Sc. phar- 
macologiques, 1907, XIV, 536, 593), et Brenier (Bull. écon, Indo-Chine, 1910, n° 83). 


je dE die SES RES 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 55 


* Kombu teint en vert, bonne qualité: 5 yens (1) pour 100 kin, soit environ o fr. 25 
le kilogramme ; 
_ Kombu noir en pulpe, 0,35 à 0,70 yen par kamme (8,28 livres anglaises), soit o fr. 40 
le kilogramme en moyenne; 
Kombu blanc en pulpe, 0,80 à 1,10 yen par kamme (0 fr. 60 à o fr. 80 le kilogramme 
environ). 
Kombu cheveux blancs : 0,50 à 0,80 yen par kamme; en poudre fine, 2 yens 
(1 fr. 25 à 1 fr. 30 le kilogramme); en pellicules, 0,60 à 1,30 yen. 

_ Le thé kombu est vendu 1 yen 20 la kamme; le kombu séché au feu vaut 1,80 
à 2,40; enrobé de sucre, 1,50 à 1,80, en sauce au soja, 1,10, etc., suivant la forme et la 
qualité. | 

Une quantité considérable de kombu est exportée en Chine comme le montrent les 
chiffres ci-dessous : 


NE es Exportation. 


POIDS EN LIVRES (454 GR.) VALEUR (DOLLARS) 


57.615.465 497-313 
60.153.405 415.732 
81.212.970 774.164 
52.491.166 404.744 


Soit de 23 à 36000 tonnes représentant une valeur approximative de deux à trois 
millions et demi de francs par an. 

Ces chiffres ne sont pas exagérés et se trouvent confirmés par ceux que donne 
Davinson, dont nous reproduisons les tableaux : 


Production. Exportation. 
Re FANS TER | Pt 
ANNÉES QUANTITÉ EN KWAN VALEUR EN £ ANNÉES QUANTITÉS EN KIN VALEUR EN £ 
1900 30.988.010 73.084 
1901 51.526.468 109.202 
1902 33.021.851 60.914 
1903 43.699.026 83.929 
1904 45. 158.836 105.415 


D. — Amanort. 


Ce produit est obtenu du Porphyra laciniata ou vulgaris, en japonais: asakusanori, 
en anglais : laver. Les Nippons font usage de cette Algue depuis très longtemps, et elle 


Hu (1) Le yen (= 100 sen) vaut o fr, 58 et le kin où livre japonaise représente environ 600 gr. (100 kin = 133 pounds). 


56 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


fut même jadis un mets populaire aux îles Britanniques ; on ne l’emploie que très peu aux 
_ États-Unis. L’Algue provient surtout de culture. 

Préparation. — De petites quantités sont consommées à l’état frais, mais la plus 
grande partie de la récolte n’atteint le consommateur qu'après avoir été séchée au soleil, 

Les Algues que l’on vient de récolter contiennent du sable, de la boue et d’autres 
substances étrangères; on commence donc par les laver dans des cuves remplies d’eau 
douce. On les repêche alors, on les trie, puis on les coupe en petits morceaux à l’aide 
d'un couteau. 

On les étend ensuite sur des petites claies faites de bâtons en bambous, et on en fait 
de petites feuilles dont l’uniformité est obtenue à l’aide de petits cadres que l’on pose sur 
ces claies. Celles-ci sont d’abord disposées en piles, puis appliquées sur de grands cadres 
inclinés pour favoriser la dessiccation à l'air libre, qui est d’ailleurs rapide. 

Les feuilles sont retirées des cadres, puis pressées pour bien les aplatir et liées en 
paquet pour être portées au marché. 

Caractères, usages. — Les feuilles d’Amanori ont à peu près 10><14 pouces et 
sont fines et flexibles comme du papier. Leur couleur est brun pourpre foncé, avec une 
surface papilleuse. Avant d'être consommé, le Porphyra ainsi préparé est mis au-dessus 
du feu, ce qui, en le racornissant, lui fait prendre une couleur verte; il est alors brisé 
entre les doigts et jeté dans les soupes ou sauces afin de leur donner de la saveur. 

On mange également les feuilles simplement trempées dans la sauce, et, somme toute, 
les usages culinaires de ce produit sont très nombreux; on le trouve indiqué dans de 


nombreuses recettes de cuisine japonaise. 
Récemment on l’a employé en conserves dans des boîtes de fer blanc et bouillie avec 


de la sauce au soja. 

Partout au Japon, dans les ménages, dans la rue, aux gares, on trouve une prépa- 
ration nommée « sushi » qui présente, dans la vie journalière, une importance aussi 
grande que celle des sandwiches aux Etats-Unis. On étale sur une feuille d’amanori 
du riz bouilli, puis sur le riz des tranches de viande ou de poisson, on enroule le tout et 


débite en tranches transversales. 


Production de l’Amanori. 


ANNEES QUANTITES EN KWAN VALEUR EN LIV. ST. 
1900 154,853 51.394 
1901 433.501 77.420 
1902 249.525 ‘ 71.158 
1903 335.940 89.526 


L’exportation va maintenant en croissant et dépasse de nos jours 10000 yens. 


E. — Autres Algues utilisées au Japon. 


En dehors des produits ci-dessus mentionnés et d’usage courant, il est encore un 


(Te 


RL er di 1.” 


ae 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 57 


grand nombre d’Algues, qui, sans être l’objet d’un trafic considérable, sont utilisées sur 
place, principalement dans l’alimentation ou comme engrais. Citons les principales : 

Arame (Ecklonia bicyclis Kjellm). Elle sert de nourriture et d’engrais; sa composition 
chimique globale a été étudiée par le D° Knicn, du Collège d'agriculture de l’Université de 
Tokyo. 

L’arame est consommée par endroits dans les soupes, en salade ou: avec la sauce 
de soja. 

Sur les côtes où elle est abondante, on échite cette Algue et la répand sur le sol 
comme engrais; le stipe, séché, devient trés dur et sert a faire des manches. de couteaux. 

Antoku-wakame (Ecklonia radicosa Okam.). Cette Algue n’a pas bon goût et n’est 
utilisée que par les classes pauvres. Bis 

Kajime (Ecklonia cava Kjellm.). Elleest employée pase lornementation des maisons 
aux jours de féte. 

_Shiramo (Gracilaria compressa See ) est mangée avec des légumes et de la sauce 
au soja. 

Hijiki (Cystophyllum Jusiforme Harv.). Cette Re est consommée, après dessicca- 
tion au soleil, puis ébullition à l’eau douce ou cuite avec de la sauce au sôja. : 

Wakame (Undaria |Ulopteryx] pinnatifida Harv.). C’est une nourriture populaire 
courante au Japon. Avant d’être utilisée, elle est lavée à l’eau douce, puis mangée comme 
salade, dans des soupes ou avec de la sauce au soja. YENDo dit que les\paysans du Nord 
du Japon coupent les sporophylles miirs, et les pressent pour en’ extraire’ un liquide vis- 
queux, qu’ils mangent mélangé au riz bouilli. Dans certaines régions, le wakame est traité 
comme l’asakusanori, c’est-à-dire placé gar dessus d’un feu doux de charbon: pour le 
parcheminer. 

Dans la province de Shima, on emploie une méthode particulière de préparation : 
on coupe l’Algue séchée en morceaux de 1 pouce de long qu’on place dans des récipients 
avec du sucre. Les grosses « racines de wakame » nommées « mehibi » sont fréquemment 
séchées, découpées en tranches minces et mangées avec la sauce (miso). 

Suizentji-nori (Phylloderma sacrum). Cette espèce tire son nom du lieu de 
récolte et de préparation ; elle croît au bord d’étangs d’eau douce, et on la sèche sur place. 
Elle est destinée à être mangée avec le poisson. Pour cela, l'Algue séchée est trempée 
dans l’eau douce et, quand elle est bien gonflée, on verse dessus de l’eau bouillante, puis 
on ajoute de la sauce au soja. Cette préparation était jadis, aux temps féodaux, réguliè- 
rement offerte au Daimjo local. 

Awo-nori (Enteromorpha compressa Gr., E. intestinalis Link et E. Linza J. Ag.). Ces 
Algues, qui croissent dans les eaux saumâtres, sont séchées en feuilles. Pour la consom- 
mation, on les expose a un feu doux de charbon et on les réduit en poudre. Ce serait un 
condiment de très bon goût. 

Aosa (Ulva lactuca Le Jol.). Elle est employée comme garniture des plats de viande 
et de poisson et mangée en salade. 

Miru (Codium tomentosum Stackh., C. mucronatum J. Az ., C. Lindenbergii Binder, 


C. latum Suring). Toutes espèces qui, après séchage, sont conservées dans le sel ou la 
T. HI. — Fasc, 1. © 8 


58 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


cendre. Pour l'usage, on les prépare par ébullition dans l’eau et les additionne aux soupes, 
ou après lavage on les mélange avec de la sauce au soja et du vinaigre. 

Haba-nori (Phyllitis Fascia Kütz). Ce produit est préparé comme l’awonori, surtout 
par les paysans des provinces de Awa et de Sagami. Les jeunes frondes sont séchées au 
soleil sous forme de feuillets qui, desséchés ensuite au feu ou même pulvérisés, sont 
mélangés aux sauces à base de soja. 

Matsuma (Chordaria abietina Rupr.). Abondante au Nord du Japon, où elle est 
consommée par les paysans qui la conservent dans du sel, on la mange cuite avec de la 
sauce au soja. 

Elle sert également pour conserver les champignons qu'on étend en couches alternant 
avec des couches de cette Algue séchée. | 

Mozuku (Mesogloia decipiens Suring.). Conservée dans lesel, elle est consommée après 
lavage du sel et immersion dans le vinaigre avec la sauce au soja. On emploie de même 
le M. crassa. 

Hondawara (Sargassum enerve J. Ag.). La plante jeuneest mélangée, comme les précé- 
dentes, dans la même sauce, et cela depuis un temps immémorial. Elle est également 
utilisée comme engrais là où elle est abondante. 

Somen-nori (Nemalion vermiculare Suring.). Spécialement abondante à San Hin, et à 
Hoka-roku ; on la sèche, on la mélange avec du sel ou de la cendre, pour être mangée avec 
de la soupe, ou avec du vinaigre ou dans la sauce au soja. Le N. lubricum, appelé Umi- 
zomen est également utilisé. 

Tosaka-nori(Callymenia dentata J. Ag.). Après séchage, sert aussi de condiment dans 
la même sauce au soja. 

Tsuno-mata, Hosokeno-mimi (Chondrus crispus et C. ocellatus Holm.). Après séchage 
au soleil, elles sont non seulement utilisées comme gelées, mais encore fournissent un 
apprêt succédané de l’agar. 


Ogo-nori (Gracilaria confervoides Grev.), Cata-nori (Gigartina Teedii), Comen-nori 


(Grateloupia affinis Okam.), Mukade-nori (Grat. filicina), Makuri (Digenea simplex J. Ag.), 
Ego (Campylæphora hy pneoides J. Ag.), Okitsu-nori (Gymnogongrus flabelliformis Harv.) 
Tosaka (Sarcodia sp !) sont encore utilisées de différentes manières. 

Cet exposé, tiré de longues notices de MM. Suirx et Davipson, montre, sans qu’il soit 
besoin d’y ajouter de commentaires, le rôle très important que jouent les Algues dans 
l'alimentation des Japonais. 


F. — Les Algues alimentaires aux îles Hawai. 


Les Japonais et les Chinois d’Hawai utilisent une grande quantité d’Algues d'espèces 
diverses qui sont ou bien préparées ou simplement très bien séchées ; mais, en général, 
ils préfèrent celles qui sont récoltées et préparées dans leur propre pays et qui sont 
vendues dans les boutiques japonaises ou chinoises. 

La plupart des Algues importées, dit Miss Reep dans son rapport, viennent du Japon, 
et ce sont les formes kombu et wakame qui ont la préférence. Le rapport consulaire 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 59 


japonais, pour 1904, indique comme il suit la quantité d’Algues vendues aux Hawai et 
aux Etats-Unis. 


Algues japonaises vendues 4 Hawai et aux Etats-Unis en 1904. 


POIDS VALEUR 


(livres anglaises). (dollars). 


Algues grossiérement séchées vendues aux iles Sandwich..... 112.492,73 1.587,15 
Algues préparées vendues aux îles Sandwich................. 40.780,77 876,14 
Kanten vendu aux îles Sandwich.........:.................. EE 470,72 

= EES ESET SOA Sie CRE SE 61.588,31 15. 152,30 


Presque toutes les préparations japonaises se trouvent néanmoins sur le marché. 
Le kanten coûte à peu près 1 dollar 50 à 1 dollar 75 la livre. 

L’amanori est vendu en feuilles de 5 4 12 pouces pour 10 cents (1 fr. 50) par douzaine 
de feuilles. Le kombu et le wakame, qui, nous l’avons dit, sont particulièrement prisés, 
s’emploient après qu’on les a fait bouillir et servis avec le riz, le poisson et des légumes. 

Les Chinois importent une grande quantité d’Algues chaque année; mais, comme il 
n’existe point de rapport consulaire, il est impossible de fixer le montant de ces impor- 
tations; les chiffres suivants émanent de renseignements fournis à Miss REED par les mar- 
chands intelligents importateurs de cette denrée. 

Chaque année, on importe de Chine à Honolulu, 70000 à 80000 livres d’Algues 
évaluées à peu près à 10 à 12000 dollars. 

Les prix varient de 10 à 15 cents (1 cent = 0.25 centimes) par livre pour le 
Che-choy et pour le Kum-choy (Porphyra perforata et P. nereocystis); pour les Toi- 
choy, Hay-tai, et San-choy (Laminaria sp.!), 9 à 35 cents, et pour le Fat-choy (Nostoc 
commun flabelliforme), il atteint jusqu’à 1 dollar 50 par livre. 

Les variétés les plus chéres d’Algues ne se vendent pas en grande quantité, car elles 
sont consommées seulement par les classes riches ou au moment des fêtes. 

Le Fat-choy est utilisé en trés petites quantités, a cause de son extréme légéreté et du 
grand volume qu’il occupe après cuisson ou au contact de l’eau chaude. Il est vrai qu’il en 
est à peu près de même du kombu, du wakame et du che-choy. Ce dernier arrive de 
San Francisco et il est destiné à remplacer une Algue chinoise culinaire appelée 7su-choy 
(probablement Porphyra orbiculata et P. tenera), qui est très estimée des Chinois. Il 
coûte 75 cents à 1 dollar la livre, quand il est d’origine chinoise, mais alors il se 
conserve très mal, ou seulement 10 à 15 cents venant de San Francisco; on affirme 
que la denrée américaine vaut la denrée chinoise. C’est seulement à l’époque des fêtes du 
nouvel an que le véritable tsu-choy est vendu en quantité appréciable aux Chinois aisés ; 
d’après un marchand chinois, l’importation se chiffrerait par 25 à 30 tonnes valant 
6 à 7000 dollars. Comme les Hawaïens, les Chinois utilisent ces Algues dans des soupes 
et aussi pour la confection de divers plats et entremets. Vue 

Production hawaïenne. — Mais en dehors de cette importation, les indigènes des îles 


60 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Hawai font un commerce local, digne d’être signalé, avec les Algues de leurs côtes. Le 
même rapport Reep fait remarquer combien il est difficile d'apprécier exacternent les 
quantités récoltées et vendues. Toutefois, d’après les estimations de l’inspecteur des 
marchés, comme des marchands chinois, on évalue à 4800 livres anglaises valant 2 500 
dollars, la quantité d’Algues hawaïennes vendues aux naturels du pays. 

Sur ce total, 2 000 livres appartiennent à l'espèce dénommée /imu (terme générique) 
kohu (Asparagopsis Sanfordiana) et représentant 1 000 dollars environ ; les deux tiers ou 
les trois quarts sont constitués par le /imu eleele (Enteromorrha prolifera et autres) et le 
limu..... oolu (Chondria tenuissima). 

Les autres sont comparativement rares ou non populaires et se rencontrent peu 
sur le marché (jours de féte et de vacances), tandis que le kohu y existe toujours. 

Les espèces reconnues sur le marché régulièrement ou à certaines saisons sont : 
l’ Asparagopsis Sanfordiana, Enteromorpha divers, Chondria tenuissima, Laurencia divers, 
Gracilaria coronopifolia, Dictyota acutiloba, Halyseris plagiogramma). 

Ces Algues se vendent apprétées pour la consommation en assiettes d’une demi- 
livre anglaise, au prix de 5 à 25 cents ; cependant, quelques espèces se débitent à la poignée 
(Halyseris plagiogramma, Dictyota acutiloba, etc.), sans autre préparation qu’un simple 
lavage. Le kohu est toujours trié et d'assez belle qualité pour pouvoir être pressé en 
balles avant d’être placé avec du sel dans boîtes en fer blanc ou des barils et dirigé sur 
Honolulu. 

A son arrivée, l’Algue est divisée en paquets d’une livre environ, valant 25 cents 
seulément; mais les années, où elle est rare, les paquets sont plus petits. 

Comme ces paquets sont mouillés par la saumure, les marchands les enveloppent 
dans des feuilles fraîches de « Ti », qui préservent les vêtements de l’acheteur et con- 
servent l'humidité. La quantité de « limu » vendu au marché d’Honolulu ne représente 
pas tout ce qui est consommé dans l’archipel, tant à Hawaï qu’à Oahu, car les pêcheurs 
ou les familles des indigènes de la côte en récoltent pour leur usage une quantité très 
élevée. 

Miss REED a recherché quelles sont les Algues hawaïennes qui fournissent, après 
coction dans l’eau bouillante, le plus de gelée. Ce sont les espètes désignées sousles noms 
suivants : huna, manauea, akiaki, kohu, loloa, pakaeleawaa. 

Les autres espéces essayées ou bien donnent trés peu de gelée (colle) (1), ou possédent 
un mauvais goût. La gelée de /imu loloa est de couleur sombre et de saveur prononcée. 
Le limu manauea donne la gélose la plus claire; vient ensuite le limu akiaki, puis le 
huna et, enfin, le pakaeleawaa qui est la qualité la plus inférieure. Le manauea demande 


le temps le plus court d’ébullition, puis le huna; la gélose la plus colorée est celle du 


loloa, et c’est aussi la plus forte au goût. D’une façon générale, ces Algues donnent 75:4 
80 p. 100 de colle, c’est-à-dire de produit gélatineux desséché et d'apparence plus ou 
moins cornée, qui peut servir aux mêmes usages que la colle du Japon. 


(1) L'auteur préparait cette colle, en faisant bouillir dans de l’eau l’Algue bien lavée, jusqu’à ramollissement ou 
dissolution, puis passant à travers un filtre à café et une toile forte mise en double et faisant sécher le produit obtenu 
(gelée) à Vair et au soleil. Le temps d’ébullition variait avec les espéces. 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 61 


B. ALGUES POUR L'INDUSTRIE CHIMIQUE. 


Au Japon, la fabrication de l’iode (1) au moyen des Algues est relativement récente, 
et cependant il paraît que ce pays fournit depuis quelque temps une grande partie de la 
consommation mondiale et a supplanté l'Écosse, jadis principal fournisseur de ce métal- 
loide. 

Il y a dix ans, cette fabrication était très rémunératrice; elle l’est moins aujourd’hui, 
à cause de la concurrence et de la rareté de la matière première. 

Les principales localités où l’on prépare l’iode sont : Hokkaido et les préfectures de 
Chiba, Kanajawa, Yamaguchi, Schizuoka. Nous n'avons trouvé aucune statistique de 
cette prodution d’iode, mais seulement un article du « Zokohama Shimpo » (1903), disant 
qu'elle a été suffisante pour en arrêter l'importation, et donner de beaux bénéfices aux 
industriels. 

__-M. Supzux1, de Hayama, préfecture de Kamangara, près de Yokohama, ayant monté 
une usine de fabrication d’iode avec un petit capital, vit son affaire prospérer et elle a 
pris une telle extension qu'il peut maintenant, non seulement fournir aux commandes 
japonaises, mais travailler encore pour l'exportation. 

C’est la plus grosse manufacture d’iode du Japon qui n’est arrêtée dans son essor que 

par les difficultés de recueillir une assez grande quantité d’Algues. 
: Les Algues utilisées au Japon pour cette fabrication d’iode appartiennent surtout 
aux genres Ecklonia, Laminaria et Sargassum ; leur richesse en iode varie avec les par- 
ties de la plante employées et avec l’époque, comme le prouve l'examen des deux tableaux 
ci-dessous : 


TABLEAU I 
Analyses des Algues dont on extrait l’iode. 


rer PAL FLE) 


(1) Renseignements empruntés au Rapport SmirH, loc. cit. 


= 
IODE 1ODE 
ae ea “wer LOCALITES dans Algue ote dans 100 parties 
FRA nb cé brute. p. 100 d’Algue.| de cendres. 
. Kajime. Ecklonia cava. Préfecture de Chiba. 0,232 54,818 0,424 | 
- — Préfecture de Yamaguchi. 0,251 47,223 0,531 
Arame. Ecklonia bicyclis. Id. 0,271 50,904 0,531 
. Ginbaso. Sargassum sp. Id. 0,054 52,042 0,104 
Id Chiba. 0,029 51,941 0,057 
Laminaria angustata. Hokkaido. 0,180 18,086 0,990 
— longissima. — 0,173 27,290 0,634 
= japonica. — 9,106 17,156 0,619 
_ ochotensis. -- 0,188 20,308 0,922 


62 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


TABLEAU II 


Analyses de l’Ecklonia cava. 


— ee 


MARS AVRIL MAI JUIN JUILLET 
Jeune stipe. 
Iode dans 100 parties d’algue...... 0,061 0,067 0,093 » 
OPT he WIRES he osetia ane aL are 45,42 46,78 44,28 » 
Iode dans 100 parties de cendre.... 0,134 0,144 1,209 » 
Jeune thalle foliacé. 3 
Iode dans 100 parties d’algue...... 0,063 0,060 0,084 » 
GENRE Se des Ben ee ce de à et 45,75 43,17 » 
lode dans 100 parties de cendre... 4 0,130 0,195 » 
Vieux stipe. 
Iode dans 100 parties d’algue...... 0,118 0,118 0,147 0,255 
D'OR coe Maman derserveeaeeren 46,77 44,64 48,76 49,95 
lode dans 100 parties de cendre... 0,252 0,203 0,302 0,507 
Vieux thalle. 
lode dans 100 parties d’algue...... 0,101 0,114 0,076 0,294 
CONG Rb eens Coney ta aisle sos Gers 48,42 43,64 45,28 50,16 
lode dans 100 parties de cendre... 0,209 0,261 0,167 0,586 


Ces Algues sont recueillies surtout en été, séchées au soleil sur la plage, puis brûlées. 
La cendre est recueillie, puis envoyée aux manufactures, ou bien traitée par les pecheurs 
eux-mémes. 

Voici, toujours d’aprés Smith, un apercu de procédé de fabrication. La cendre est 
lavée à l’eau douce qui enlève les parties solubles. Le liquide obtenu est évaporé dans 
des vases de fer en une liqueur concentrée qui renferme à côté de l’iode: KCI, NaCl, MgCP, 
SO*Ca. 

Ces derniers sels cristallisent dans une évaporation ultérieure, laissant MgCl’, et KI 
en solution. 

L’extrait est finalement placé dans une cornue de verre ou de porcelaine et bouillie 
avec SO*H?® et MnO'K. L’iode distille et se dépose en cristaux. Ce produit n’est pas pur 
et doit être raffiné. Il existe des raffineries d’iode à Tokyo et Osaka. Les cendres expé- 
diées par les pécheurs aux usines sont emballées dans des balles de paille semblables a 
celles dont on se sert pour le riz. Ces cendres sont vendues au poids; aussi les pêcheurs 
ne débarrassent-ils pas volontiers les Algues du sable et des matières étrangères qui les 
souillent. 

La production diode brut en 1901 à Hokkaïdo fut de 5630 kilogrammes valant 
79330 francs. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 63 


CHAPITRE VI 


Composition chimique. 


Le premier travail, fait sur la composition chimique des Algues utiles d’Extréme- 
Orient, porte sur l’agar-agar ; il est dû à Payen, qui, en octobre 1859, examina un échan- 
tillon de « mousse de Chine », rapporté en 1856 par un voyageur, M. be MONTRAVEL, qui 
l'avait remis au général Menu, lequel à son tour pria le savant chimiste d’en faire 
l'étude. eres ate 

— On croyait cette substance « extraite d’un lichen attaché aux arbres dans le Sud de la 
Chine, très abondante aux îles méridionales de l’archipel des Philippines ». 

Cette matière se présentait sous forme de longues et très minces lanières blanches, 
réunies par deux ligatures en petites bottes dont l’une mesurait 34 centimètres de lon- 
gueur, 7 de largeur et .5 centimètres d’épaisseur, du poids de 122 grammes net et de 
densité = 0,1025. Dépourvue de structure organique, Payen y reconnut la présence « de 
plusieurs principes immédiats solubles dans l’eau et une faible quantité dans l'alcool ; 
la plus grande partie, insoluble dans l’eau froide, s’y gonflait beaucoup, prenant alors 
par degrés les formes de prisme rectangulaires qui paraissaient obtenus à l’aide d’une 
sorte de moulage. Cette substance pouvait être dissoute par l’acide acétique à 8°, chauflé 
à + 98°, laissant insolubles 2 à 3 centièmes de son poids de corpuscules azotés. L’acide 
chlorhydrique étendu de to parties d’eau la dissolvait également à la même tempéra- 
ture, tandis qu’à froid ces deux acides n’enlevaient guère que les parties solubles dans 
Peau. 

« Mais la propriété la plus remarquable de la substance insoluble dans l’eau froide 
était : 1° de se dissoudre dans l’eau bouillante, laissant indissous les corpuscules azotés et 
des traces d’autres corps étrangers ; 2° de donner à chaud une solution qui se prenait 
en gelée incolore et diaphane par le refroidissement, donnant ainsi une consistance géla- 
tineuse à 500 fois son poids d’eau pure, ou formant, à poids égal, 10 fois plus de gelée 
que la gélatine animale. 

« Ce produit gélatiniforme pur constitue un principe immédiat particulier, insoluble 
dans les solutions alcalines de soude, de potasse, d’ammoniaque, comme dans l’eau, 
l'alcool, l’éther et les acides étendus. 

« Un deses caractères distinctifs, tout spécial encore, consiste à se dissoudre lentement 
dans une très petite quantité des acides sulfurique et chlorhydrique concentrés, de se 
colorer en brun sous leur influence, puis de former avec l’un et l’autre un composé 
brun qui par degrés se prend en masse, résiste aux lavages dans l’eau froide et chaude et 
même dans les solutions alcalines caustiques. 

« On ne pouvait confondre, dit-il, le nouveau principe immédiat avec aucun autre, 


64 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


et je lui ai donné le nom de gélose. Son analyse élémentaire a présenté les résultats 
suivants : 


I Il Moyenne. 
COVOONB 5 oa eae seca eco 42,81 42,73 42,77 
VAPOR ONG NS easier 5,71 5,84 5,775 
ETS BA LR UT CN VI ne 51,48 51,43 51,445 


« Il n'a pas été possible de l’engager dans une combinaison définie d’où l’on pit 
déduire son poids équivalent ou sa formule rationnelle; on peut seulement remarquer 
qu’il doit être rangé parmi les principes immédiats, offrant un excès d'oxygène relative- 
ment aux proportions nécessaires pour former de l’eau avec l'hydrogène qu’ils ren- 
ferment. » | 

Comme aucun Lichen ne pouvait donner de substance analogue, M. Payen finit par 
conclure que cette substance provenait de Gelidium corneum, connue sous le nom 
d’ « Algue de Java », qui lui fournissait un principe absolument identique. 

Au cours de ses recherches poursuivies sur la composition des nids de salanganes, le 
même auteur retrouva la gélose dans un Algue de Maurice, le Plocaria lichenoïdes (L.), 
Montagne, et une substance un peu différente dans les sécrétions de ces oiseaux qu'il 
dénomma cubilose. à 

Les premières recherches qui suivirent en ce qui concerne l’agar-agar, au moins 
pour les hydrates de carbones, sont dues à ReicHarpr ; elles sont ainsi résumées 
brièvement par R. W. BAUER : : 

« ReicHaRDT considère l’hydrate de carbone de l’agar, à qui il attribue la formule 
C?H”O" comme identique avec sa pararabine obtenue du tissu cellulaire de la 
carotte et de la betterave après élimination de toutes les substances solubles dans l’eau et 
l'alcool, puis digestion avec l’acide chlorhydrique, mais sans donner de cette affirmation 
une preuve suffisante. » Par une plus longue digestion avec l’alcali, on obtient de l’acide 
arabique et, par l’acide sulfurique dilué, un sucre cristallisée l’arabinose. 

Bauer, à son tour, a soumis a l’étude 425 grammes d’agar en le saccharifiant par une 
ébullition de douze heures dans un litre et demi d’eau additionné de 30 grammes 
d’acide sulfurique, dans un réfrigérant a reflux, puis en neutralisant par le carbonate 
de calcium, évaporant à consistance sirupeuse et faisant bouillir le. sirop à plusieurs 
reprises avec de l’alcool absolu. 

La solution alcoolique sucrée a été purifiée par recristallisations alternatives dans | 
de l’alcool éthylique et de l'alcool méthylique et les cristaux analysés. 

La composition élémentaire du produit obtenu a donné la formule C*H¥O® et 
une solution de 11,9 p. 100 de ce sucre dévie à + 4°5 le plan de polarisation : «,—+ 70°. 

Bauer fait remarquer que cette déviation concorde sensiblement avec celle du 
lactose — et il comprend sous cette dénomination le galactose — ; aussi n’hésite-t-il pas à 
identifier le sucre de l’agar à ce dernier. Ila pu d’ailleurs obtenir une galactine identique à 
celle que Muntza obtenu des graines de Légumineuses, et en particulier de celles de la 
luzerne. : i ; 
= Malgré d’assez nombreux travaux relativement récents sur cette composition chi- 
mique des Algues, beaucoup de points restent encore. mal connus ; Czapek signale,.en par- 


Saree 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 65 


ticulier, l’incertitude des renseignements que nous possédons sur les matières albumi- 
noides et les acides aminés qu'elles contiennent. 

On peut admettre, d’après les recherches actuellement publiées, que la teneur en 
matières azotées est assez élevée; citons, à ce sujet, les belles recherches de Konic et 
BerreLs, celles de WaRRINGTON et de FRS etc. 

WARRINGTON donne comme contenu en substance azotée les chiffres suivants : 

Enteromorpha compressa, 12,41 p. 100 de plante sèche ; Capea elongata, 8,99; Ulo- 
plerix pinnatifida, 8,29 ; Laminaria saccharina, 7,79. 

La question des nucléoprotides n’a pas été étudiée et celle des matières grasses est à 
peine ébauchée, sauf pour quelques-unes au sujet desquelles Sesrenr donne les chiffres 
suivants rapportés à la matière sèche : 


Eau. 4 Matiére grasse. 
INA TAMESERINYE nee 29,75 p. 100 0,25 p. 100 
Valonia ægagrophila ................. . 7,62 — 0,15 — 
Gracilaria confervoides ............... 20,01 — 0,11 — 
ENG --Fücus vesiculosus..................... 27,11 — 0,67 — 
a WOUCKERIOE RUG. ona casa si: 00's et one o « 20,50 — 2,94 — 


Les recherches de K6nic et BETTELS ont porté sur douze espèces venant directement 
du Japon, partie par l'intermédiaire du Professeur K. Oxu, de Tokio, partie de M. RoMBERG, 
de la pharmacie J. ScneneL, à Yokohama; elles constituent donc un document de la plus 
grande valeur. 


a 


B oh SUBSTANCE 
& a 2 + 8 se a à sol. par 
$4 Hg ae 1 e| 2} 22| 8 a : |lébullition dans 
ESPÈCES a [sé |+i 86] .S| 8 [sl | 810 sy 
He} 8 «| & e | Be] À i I | Gama og CE 
Ss < 2-83 a = à es O ? j 
< = Zz ms Be 3 miné- |organi- 
= rale. | que. 
| Porphyr LT 0 RSR ET 5,91| 34,80| 21,94| 0,87] 47,87| 3,37] 0,15] 2,52| 7,51| o,88|| 6,64| 59,54 
| Porphyr. ra tenera (Asakusa- 
Teas tie ER diese 4,57| 34,19] 21,15} 0,59] 46,49] 3,79] 0,30} 2,50] 7,57] 0,50|| 6,79] 61,01 
| Gelidium raw. (G. rouge). 7,36| 16,06] 7,87] 0,98} 46,34] 2,85] 0,71] 13,21] 12,49] 3,85]! 10,63] 59,42 


Gelidium bleached (G. pâle)... 6,82} 17,31] 7,37} 0,73| 50,47|- 3,41] 1,13] 13,39] 5,74] 0,73]| 3,68 59.40] 
| Gelidium cartilagineum 


: Grey (Tengusa) ........... 13,00] 17,00] 7,37| 0,80] 40,16] 3,35] o,91| 12,90] 11,88] 0,30]| 9,37] 54,22 

SO LGMINaTiIO? 225.0. vi es oes 6,16] 8,19] 5,66] 0,50! 36,04} 6,66] 1,12] 11,27] 30,06] 16,47|| 29,39] 50,85 
Laminaria japonica Aresch. 

| ‘(Kombu)................. 4,20| 7,81} 5,44] 0,93] 37,02] 8,12] 0,84] 12,33] 29,29] 16,71|| 27,30] 54,29 

| c: stophyllum ............ .|| 16,82} 8,12] 3,13| 0,50] 16,35| 8,79| 1,33] 25,91} 21,18| 5,31|| 17,10] 33,61 


st. fusiforme Harv. (Hijiki). 15,15] 8,06] 4,25] 0,43] 17,43| 10,87| 1,37} 26,16] 20,53] 3,74|| 18,60 | 32,28 


| Enteromorpha (compressa?).|| 14,17| 9,06| 5,50] 0,21| 36,28} 7,37] 16,52] 5,30] 12,12] 3,55]! 7,73] 61,77 


Ecklonia bicyclis Kjellm. 
LR PRE yaw en Vics i« 11,56] 13,62] 7,50] 0,28} 35,35] 5,33] 1,06] 14,08] 18,72] 10,41|| 17,47 | 49,16 


Undaria pinnatifida (Harv.) 
Suring (en japonais : Wa- ; 
TN ET 00! 5,31| 0,65| 15,12] 6,40| 0,25] 0,23| 35,13| 21,82|| 32,32] 29,25) 


Neen ne 


es ih Bate. i. 9 


66 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Ce tableau montre que si les Porphyra sont riches en matières protéiques, les Lami- 
naria, Cystophyllum et Enteromorpha le sont au contraire en pentosanes. La proportion 
des cendres est très élevée, sauf chez Gelidium bleached et Porphyra, à cause de leur haute 
teneur en chlorure de sodium. 

SENFT n’a trouvé d’amidon figuré, en petites granulations, que chez le Gelidium 
bleached. 

La recherche des hydrates de carbone faite par Kénic et BETTELS a donné les résultats 
ci-dessous : 


ESPÈCES ANHYDRIDE DES HEXOSES ANHYDRIDE DES PENTOSES 
Porphyra..........4..... Galactose. Glucose. Fructose. ||. Pentose. » 
Piienert rte. EL A ee id. id. id. id. » 
Gelidium:ram ANSE Lee id. » id. id. » 

(Ro PleachEd RARE are de d- Galactose. >, id. id. » 

Gs CATIA INEUM IE poy eb ae cer id. » id. id. » 
Laminaria japonica ............ +. » Glucose. id. id. ae 
Autres Laminaria. i... fei. ces es es » id. iy id. lprobablement). 
Cy sthophytlant NS Sema ean ee » » id. id. Méthylpentose. 
Co FUSLFORIMN Gai, STONE Cet BY » » id. id. id. 
Enteromorpha compressa........... » Glucose. id. id. Rhamnose. 
Ecklonia bicyelis rss » id. » : 

Undaria pinnatifida............... d- Galactose. id. Fructose. 


D'où il résulte que les espèces de Porphyra qui servent à la préparation du nori, de 
même que les Gelidium, base de la préparation de l’agar-agar, renferment les anhydrides 
des mêmes sucres i-galactose et d-galactose. 

Quant à la présence d’autres hexoses, comme le mannose et la mannite que TOLLENs 
aurait trouvé, les auteurs n’ont pu l’affirmer faute de matériel suffisant. 

Par oxydation avec l'acide nitrique, procédé TozLens, KôniG et BeTTELs ont obtenu : 
25,44 à 25,91 p. 100 d’acide mucique (Schleimsäure) dans le n° 1 et 27,06 dans le n° 2. 

Cette quantité correspond à 33,05-36,57 p. 100 galactose, et l’agar-agar renfermerait 
donc 33 p. 100 de galactane en chiffres ronds. 

En somme, les précipités obtenus par hydrolyse de l’agar se composent de cellulose, 
eten cela ilne diffère point de bon nombre de mucilages végétaux, tels que, d’après 
Tozrens, le mucilage de Lin, de Psyllium, et de Coings; mais ceux-ci donnent, à côté 
de la cellulose, du glucose et de la dextrine, tandis que l’agar-agar donne avec de 
la cellulose du galactose et probablement aussi un anhydride (galactine) qui correspond 
à la dextrine du glucose. 


Voici, au sujet de ce produit, ce que dit M. Senrr, qui recut sous le nom de mori une ~ 


conserve préparée avec les Porphyra laciniata et P. coccinea. L'auteur eut en mains 
deux échantillons provenant de l’exposition de Vienne de 1873, qui se présentaient sous 
forme de plaques excessivement minces, semblables à du papier, réunies ensemble en 
paquets carrés mesurant 10 millimètres de hauteur et 10 centimètres de côté et du poids 
de 30 grammes. L'un des échantillons est vert sombre, et l’autre (asakusanori), de couleur 


a a 


a 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 67 


rouge pourpre sale, vient du Porphyra coccinea. Le produit est insoluble dans l’eau et 
est utilisé au Japon en salade. 

OsHima et ToLLens ont obtenu par hydrolyse du i-galactose et du d-mannose. 
Il y existerait en outre d’autres glucoses et sans doute un peu de fucose. 

D'après les analyses de Kettner, NaGaï et Murai tirent la composition moyenne 
suivante : 


Porphyra vulgaris. 


PRODUIT NATUREL 


PRODUIT DESSECHE 


Matière Matière |Mat. extract. Mat. Matière Mat. ext. 
Eau. azotée. grasse. | non azotée. | fibreuse. Cendres. azotée. non azotée. Azote. 
14:19 ae 29,95 1,29 | 39,45 5,52 9,60 34,89 45,92 5,58 


Laminaria Japonica (Kombu). 


Kônic en a publié deux analyses, qui, avec celles de KELLNER, puis de NaGaï et Murai, 
donnent en moyenne : 


| DANS LA DROGUE NATURELLE DANS LA SUBSTANCE SÈCHE 
Ss a= Sea Ripe ea AT 
es Mat. Mat.  |Mat. extract. Mat. Mat. Mat. extract. 
| Eau. “azotée. grasse. non azotée. | fibreuse. Cendres. azotée. non azotée. Azote. 
1 
| 

23,95 | 6,64 0,87 43,68 4,97 19,89 8,72 57,43 | 1,39 | 


Analyse du Kanten (O0. KELLNER). 


p- 100. p. 100 

Leb Ee eas Bata SE Ge ne en elec seuls cs + SO 22,80 22,29 
de de na cac ur OR Te 11,71 6,85 
MS Aer oh ne nes eu 0:0 à oN w PME TOTS » 6,73 
RO D COLDONPS 1 ie Seas de vee eee ae dss 62,05 60,32 
Re SR an oe devas sb ahvees 3,44 3,81 


Asakusanori. D'après les analyses de l’« Imperial Fisheries Bureau of Japan », la 
composition du Porphyra est la suivante: | 


68 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 
pe POIDS EAU PROTEINE MATIERES GRASSES CENDRES 
de 10 feuilles (gr.) Pp. 100. Pp. 100. p. 100. p- 100. 
SSA PR wet Sass ain’ 41 14575 32, 0,700 9,000 
| Ft te CURE 37 16,395 35,625 0,500 9,340 
Fukapawe ioe ve Le 32 20,415 36,263 1,210 8,830 
Shinagawa: fiers des 30 15,475 34,350 0,650 10,685 


Hijiki (Cystophyllum fusiforme). D'après le D' Kincu, du Collège d’Agriculture de 
l’Université de Tokyo, cette Algue renferme: 
FN ES AE pean EU 16,40 p. 100 | Hydrates de carbone ............ 41,92 p. 100 


Protéines ot ae 8,42 — Fibreux es Nas As ate 17,06 — 
CenAre TRE LS Se ale 16,20 p. 100 


Arame (Ecklonia bicyclis) (analyse d’après le méme auteur): 


EAU RT eee sng de ok eee eee 13,17 p. 100 | Hydrates de carbone............. 45,09 p. 100 
Protéine ep RI Ns Seek ee 8,89 — FOUR ne eR ies UNE 7,40 — 


CHAPITRE VII 


Considérations sur l'emploi des Algues. Valeur alimentaire et thérapeutique. 


Devant l'importance des Algues au point de vue de l’alimentation chez les peuples de 
l'Extrême-Orient, on conçoit aisément que les Européens ne soient pas restés indifférents 
et aient cherché, à l’aide de méthodes scientifiques, à se rendre compte de la valeur réelle 
des produits employés, 

De plus, comme nombre d’Algues avaient été utilisées en médecine, on ne sera pas 


étonné non plus des essais thérapeutiques entrepris surtout dans ces dernières années, 


sur l’agar-agar en particulier. | 

L'usage des Algues dans l'alimentation comme dans la thérapeutique doit reposer 
sur la connaissance des transformations qu’elles peuvent subir, quand on les soumet à des 
digestions par contact avec les ferments digestifs. A notre connaissance, il n'existe sur ce 


point qu'une seule série de recherches dues à M. T. Saki et qui se divisent en deux _ 


parties distinctes : 1° expériences in vitro; 2° expériences sur l’homme et les animaux. 
Nous allons les résumer pour en tirer les conclusions qu’elles comportent. 


Le 


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ee ee à 


—— tt 


NET ONE PT PS NO EE PE EN ER PO ee ee 


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ET EE OP OT CR ee ee ae eee 


ch 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 69 


A. — RECHERCHES DE LABORATOIRE. 


M. Saiki a utilisé deux préparations d’agar-agar sous forme de gelée à 1 p. 100; pour 
les autres produits, il les a fait bouillir sous forme très divisée, puis s’est servi du liquide 
obtenu tenant en suspension les particules végétales gonflées. C'est alors qu'il a fait agir 
successivement sur une petite partie du produit: 

a. De la salive humaine filtrée ; 

b. Du suc pancréatique obtenu d’un chien après injection préalable de sécrétine; 
c. De l’extraitde pancréas de chien dans de l’alcool à 20 degrés; 

d. De l’extrait de pancréas de chien et de porc dans de l’eau chloroformée ; 

e. Dela diastase du malt, et de la takadiastase (Parke et Dawis) ; 

f. De l’inulase, provenant de l’Aspergillus niger. 

Les digestions, répétées un certain nombre de fois, ont été effectuées à la température 
de 40°, en présence du toluène, et les analyses faites une première fois après vingt heures, 
puis de nouveau après trois jours de contact. On y a caractérisé les sucres réducteurs par 
la liqueur de Fehling, et de plus en faisant leurs ozazones à l’aide de la phénylhydrazine. 

Enfin des expériences de contrôle ont toujours eu lieu simultanément et dans les mé- 
mes conditions avec des extraits désenzymés bouillis. Ces essais furent toujours négatifs. 

1° Ptyaline. — Le pouvoir amylolytique a été déterminé avec l’empois d’amidon, et 
les tubes étaient préparés avec: 


I NET Ta ais. Sats seine ae duels a sa eue de + 20 grammes ou 20 centimètres cubes. 
tn nn nd xo Gas on ns Lu Vase fee de 10 céntiméres cubes. 
RSMMC edt MO RER PT CET REP III gouttes. 


Les résultats furent négatifs, bien qu’on ait obtenu quelquefois une petite réduction 
de la liqueur cupro-potassique, mais jamais d’osazone. 

2° Amylase pancréatique. — Résultat négatif en partant naturellement de solutions 
d'enzyme à activité vérifiée: 

1 cmc. 5 à 2 centimètres cubes de suc pour 10 centimètres cubes d’hydrate de 
carbone ou 20 centimètres cubes d’hydrate de carbone mélangé à 10 centimètres cubes 
d’extrait pancréatique. 

3° Extrait intestinal. — Cet extrait renfermait de l’invertine très active; il a été em- 
ployé a la dose de 10 centimétres cubes par 20 centimétres cubes d’hydrate de carbone 
préparé comme il a été dit ci-dessus (gelée d’Algue). Le résultat fut également négatif. 

4° Amylase végétale. — La diastase du malt, comme la takadiastase, sont sans action 
sur les Algues ; mais, au contraire, on a pu obtenir avec les hydrates de carbonedu Lichen 
d'Islande et de la Mousse d’Irlande (Chondrus crispus) une réduction de la liqueur de 
Fehling et une ozazone. 

5° Inulase. — Les résultats sont identiques à ceux de l’expérience précédente. 

6° Acides dilués. — Pour effectuer l’hydrolyse, et dans le but de se rapprocher des 
conditions biologiques de la digestion animale, on a mis en contact, pendant vingt heures, 
les substances étudiées avec de l’acide chlorhydrique à 0,4 p. 100 à + 40°. On obtient 
ainsi des traces seulement de composés réducteurs, mais pas d’osazone. 


70 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


De l’agar-agar, traité ainsi par HCI dilué et légèrement hydrolysé, a pu être paies: Der 
faiblement par la salive et la diastase. 
7° Digestion bactérienne. — Les Algues, réduites en menus fragments ont servi à la 
préparation de milieux de culture additionnés de 1 p. 100 de peptone de Witte et ense- 
mencés avec le Bacterium coli. Au bout de 3 et 7 jours, les essais à la liqueur de Fehling 
furent négatifs. 


B. — EXPÉRIENCES SUR LES ANIMAUX. 


M. Saix1, devant les conclusions qui s’imposaient des expériences précédentes, a entre- 
pris une série d’essais en faisant ingérer à des chiens et aussi à lui-même, après |’établisse- 
ment d’un régime alimentaire défini, une certaine quantité d’Algues et en comparant les 
analyses des fèces. 

Premier essai. — Un petit chien, alimenté régulièrement avec 300 grammes de viande. 
recut pendant deux jours un extrait de Chondrus crispus : le premier jour, 350 grammes; 
le deuxième jour, 290 grammes renfermant seulement 1 p. 100 de substance sèche. Pour 
indiquer le moment où cette substance passait dans les fèces, on avait mêlé à la gelée de 
Chondrus un peu de liège pulvérisé. Voici les résultats de l’expérience: 


ESSAI DE FÈCES POIDS DES FÈCES 
FÈCES RECUEILLIES 
par hydrolyse. séchées à l'air. 
Avant l’ingestion (régime déterminé) o réduction. 3 
Pendant lingestion de ’Algue. 5%... 2,7 (12,2 p. 100). II 
Apres lexpulsion de l’Algue. 111020040203 ; traces. 4,9- 


Les urines ne contiennent pas de sucre réducteur, et le seul effet du passage de l’Algue 
dans l'intestin se traduit par une augmentation du poids du résidu éliminé et de la quan- 
tité d’hydrate de carbone non décomposé. 9 

Il est,enoutre, intéressant de noterque M. Courren, dans une expérience non publiée, 
faite chez le Professeur MENDEL, n’a pu obtenir de formation de glycogène dans le foie de 


lapin, après ingestion abondante de Chondrus crispus. Cette substance ne saurait donc — 


être rangée dans le groupe des générateurs de glycogène. 

Deuxième essai. — Un chien, ayant un régime déterminé, pain, lait, viande, recut 
10 grammes d’agar-agar, en se servant cette fois comme indicateur, non plus du liège pul- 
vérisé, mais du noir de fumée. Le résultat fut entièrement comparable. 


Troisième essai. — La substance expérimentée fut le Cetraria islandica avec du 
quartz pulvérisé comme indicateur. Mêmes résultats. 
Quatrième essai. — Un homme de 53 kilogrammes, soumis à un régime végétarien 


abondant, et dont les fèces sèches contenaient 7 p. 100 d’hydrates de carbone, calculés en 
dextrose, fut soumis à l’ingestion de gelée d’agar-agar pendant deux périodes de deux j jours 
a deux reprises différentes. On obtint les résultats suivants. 


a a Ce 54 Ee ee ee ee ee a ee ee ye ee So D 


i dt ill 


TR 
he 


À 
© 
a 
4 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 7! 


FÈCES 


NOURRITURE 1 Poids. Hyd. de carbone en dextrose 


TT — = 


Poids frais. Siero borage en grammes. . p.100. 
sig or normal + 20 rss d’agar-agar en à 
OS nt st eds 317 51 9,2 18,a 
MEMOS OPdInuie un cco 5s os ced roue. 120 2 1,9 6,7 
Régime ordinaire + 10grammes de gelée d’ Agar. 317 4 754 17,2 


Puisque l’agar-agar employé était susceptible de fournir 50 p. 100 de sucre réducteur à 
Vhydrolyse, on constate que l’utilisation des polysaccharides par l'organisme est fort im- 
parfaite. En revanche, l'effet sur la masse totale des fèces est toujours très marqué. L’agar 
retient aisément l'eau dans les résidus de la digestion et prévient la formation des masses 
dures et sèches qui entraînent la constipation. 

Cette propriété de l’agar, de même que celle de n'être pas dissous par les sécrétions 
des organismes des fermentations intestinales, a conduit le Professeur MENDEL à proposer 
son usage et à enregistrer des résultats satisfaisants contre la constipation. 

La même constatation a été faite plus tard par Scumipt, mais sans que celui-ci ait 
établi des expériences raisonnées telles que celles qui précèdent ou vont être résumées ci- 
dessous. 

Elles ont porté sur 18 cas, et, en ajoutant au régime comme précédemment, pendant 
deux jours, une Algue do. les expériences sont relatées dans le tableau ci-après. 

Également, on s’est assuré, ‘a côté des Algues, de la digestibilité de l’amidon cru, en 
ingérant des chataignes. 


72 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Expériences d’utilisation sur l’homme. : 
URINE FÈCES 
SUBSTANCE En nee ANSE or TNT 
Poids. Azote. Hyd. de carbone 
AJOUTÉE AU RÉGIME : (en glucose). 
Volume N'en En OS Se NE Mg AN ES 
Densité. à 
og ses c. &. grammes.| humide | séché | séché | fe | séché | Mau 
air. d alr. ir. 
gr. gr. gr. pth gr. p- a 
Agar-agar 19........-:...... 1275 1,027 20,3 313 rs : 66 88 i 
LS RUG etree eee Ler ey 1450 1,026 24,8 4; » ; 4,4 
Régime Hormel CE Rise 1315 1,026 24,3 222 46 3,6 77 0,7 1,6 


Mere se 1930 25,7 
Wañome 20 Rs eue 


Régime normal............ 


| APARUSANOPE Oooo we ere) 
6 


Châtaignes italiennes crues. 
150 STAMIMES serre 
68 


M. Lafayette B. Menpet seul d’abord et en collaboration avec Mlle Swartz a pro- 
cédé à son tour à des séries d'expériences sur la digestibilité des produits des Algues, et 
ses conclusions ne diffèrent, somme toute, en rien de celles de Saiki, qu’elles corrobo- 
rent pleinement. 

L'animal d’expérience fut le chien et les conclusions tirées de l'examen des fèces. 
Quant aux essais de digestions in vitro, ils furent entrepris avec: de la salive humaine; 
la takadiastase; le suc pancréatique du chien; l’extrait du pancréas du porc; l'extrait intesti- 
nal du chien ; l'extrait stomacal du porc; les «bactéries typiques» mélangées de bactéries 
du sol et des feces»; une culture du coli et autres organismes, aréobies habituels du trajet : 
alimentaire ou anaérobies de la putréfaction. 

La résistance aux enzymes des hydrates de carbone de ces Algues est considérable, et, 
en général, l'attaque est toujours faible, quoique, bien entendu, variable avec la nature 
de l’Algue employée. 

C’estainsi que la mousse d’Irlande à galactane (Chrondrus crispus) reste complète- 
ment inaltérée, en présence de microbes, même après plusieurs mois de contact. La pen- 
tosane soluble de la Dulse (Rody menia palmata) ne subit pas d’hydrolyse, mais une décom- 
position lente progressive. 

Par ordre de résistance aux bactéries, ces hémicelluloses se classent ainsi : galactane, 
pentosane, lévulosane et mannane. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 73 


Ces mêmes hydrates de carbone, introduits par injection sous-cutanée ou intra-pé- 
ritonéale chez le chien, furent promptement excrétés par les reins et sont retrouvés dans 
les urines sans altération. 

Avec le Chondrus crispus, administré par la voie stomacale, même sous forme de gelées 
ou autres préparations agréables au goût, 75 p. 100 sont rejetés. La dulse disparaît en 
revanche presque complètement dans le tube digestif et, avec les préparations hawaïennes 
riches en pentosane, 50 p. 100 sont éliminés. 

Les conclusions sont donc assez difficiles à formuler au sujet de ces hémicelluloses 
des Algues, disent M. Menpet et Mile Swarrz, et il reste à démontrer, par des expé- 
riences sur le système respiratoire, si la partie digérée doit être considérée comme une 
source d’énergie. Ils ajoutent que, dans le sens Mae Vo les Algues peuvent être 
utiles et jouer surtout un rôle mécanique. 

_En somme, de l’examen des conditions de ces expériences et des résultats, il se 
dégage d’une façon indiscutable que les hydrates de carbone qui entrent dans la consti- 
tution intime de ces Algues sont à peine attaqués par les enzymes digestives ; il faudrait, 
pour qu'ils puissent être utilisés dans l’économie, qu’ils aient au préalable subi une désa- 
grégation profonde. 

Notons toutefois que les enzymes végétales semblent être un peu plus actives dans 
leur action sur les polysaccharides. 

Les Algues marines, si elles doivent être considérées comme unadjuvant intéressant à 
ranger dans l'arsenal thérapeutique, ne peuvent en aucun cas rentrer dans le cadre des 
denrées alime ‘taires (1), si ce n’est comme un adjuvant utile jouant le rôle de support 
pour d'autres substances alimentaires de réelle valeur, ou bien comme susceptibles 
d'intérêt dans le processus d'évacuation des résidus alimentaires. 

{ Les récentes controverses sur l'usage exagéré des purgatifs, dont l’action est, même 
par quelques médecins, considérée comme nocive (2), ont ramené l'attention du public 
médical vers certaines substances mucilagineuses capables, par leur présence seule dans 
le tube digestif, de régulariser la fonction d'évacuation des résidus de l’alimentation. 

C’est en particulier au Professeur A. ScHmipr que l'on doit d’avoir vu s'épanouir au 
cours de ces dernières années une véritable floraison de médicaments spécialisés, dans 
lesquels l’Agar-agar joue le rôle principal. Après lui Meyer, FRIESER et d’autres spécia- 
listes trançais ou étrangers ont confirmé l'utilité de ces produits dans le traitement de cer- 
taines constipations, et ils appuient, sans la modifier dans les grandes lignes, l’opinion du 
Professeur Scumipt. 

D’après ce dernier, un grand nombre de cas de constipation chronique sont dus a des 
causes diverses dont les principales sont : 

1° La diminution du résidu intestinal due, chez les malades spéciaux, a une digestion 
et une absorption trop complète des aliments, d’où il résulte que les contractions péristal- 
tiques de l’intestin, insuffisamment distendu, ne peuvent avoir leur plein effet ; 


(1) A ce propos, M. Saiki s’éléve avec juste raison contre certaines réclames américaines présentant ce produit des 
Algues comme une denrée alimentaire de haute valeur. 
(2) Dt BurLureaux, Un danger social : la purgation, 1 vol. in-8°, 


T. Ul, — Fase. 1, 10 


74 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


2° Déshydratation exagérée du contenu intestinal, d’où sécheresse et dureté des matiè- 
res, nuisant à leur expulsion ; é 

3° Diminution des fermentations normales de l'intestin, les organismes microbiens 
n'irritant plus suffisamment la muqueuse par leurs sécrétions, et par suite entraînant 
un affaiblissement très sensible du péristaltisme intestinal. 

Le traitement de ces affections consistent donc à augmenter le volume des selles, à 
élever leur teneur en eau. Scumipt pense que l’agar-agar, dans une certaine mesure et par 
suite de sa non-digestibilité, de son pouvoir absorbant de l’eau, comme aussi par l’aug- 
mentation de volume qu'il subit, peut rendre au malade les plus grands services, surtout 
si l’on a soin d’associer à son ingestion celle d’une faible quantité d’un médicament irri- 
tant ayant pour but de provoquer les mouvements péristaltiques (1). 

La méthode de traitement, préconisée par Scxminr, fut naturellement très discutée 
par le public médical. En Allemagne d’abord, et, aux auteurs déjà cités, il faut adjoindre 
les noms de Moizweine, S. H. Lorisx, J. Kocus, SCHWELLENBERG, Voir, MEYER, FRIESER, 
MANGELsporF, qui ont à ce sujet publié une série d’articles plus ou moins importants (2). 
Dans la pratique ils associent à l’agar-agar, considéré comme l’Algue à préférer, une 
petite quantité de cascara. 

En France, c’est surtout après l’apparition des articles et du livre du D’ Burru- 
REAUX (3), contre les médicaments purgatifs, que l’usage de l’agar a pris son essor. 

Cette vigoureuse diatribe contre l'abus des purgatifs amena de vives discussions 
auxquelles il ne nous appartient point de prendre part; nous renvoyons le lecteur aux 
nombreuses séances de la Société de thérapeutique de l’année 1908, pendant lesquelles il 
fut traité de cette question. 

Quoi qu’il en soit, l’agar-agar paraît être entré dans la thérapeutique comme un adju- 
vant des plus intéressants et, suivant la remarque fort juste du D' Barper, « cette 
méthode est l'application d’un usage très antique des Fucus chez les peuples asiati- 
ques qui tirent le plus grand bénéfice de l’addition de ces Algues à leur régime ali- 
mentaire ». 

Le même auteur conclut, et il semble qu'on se soit rallié à cette manière de voir (4), 
que l’usage journalier des préparations mucilagineuses par les constipés et surtout par les 
dyspeptiques hypersthéniques, qui forment les 90 p. 100 des constipés, lui paraît actuelle- 
ment le meilleur moyen de guérir d'abord et de prévenir ensuite la constipation. » 

La dose moyenne est de 5 à 15 grammes d’agar réduit en poudre grossière, soit 2 à 3 
cuillerées à café, qu’on absorbe au déjeuner du matin dans des confitures, du miel, de la 
marmelade, ou encore aux repas, mêlé à de la purée de légumes. 


Sur quelques préparations culinaires faites avec les Algues. — Sans vouloir ici rap- _ 


(1) Dt Ap. Scamipr, Paris, 1909, Münch. Mediz. Wochenschrift, 1905, n° 41. 

(2) Mozzweine, Therap. Monatsh., mars 1906, p. 126; H. Loriscu, Medic. Klin., mars 1906 : J. Kocus, Apot. Zeit., 
1906, n° 24; SCHWELLENBERG, Deutsche med. Wochensch., nov. 1906; Voir, Münch. med. Wochensch., juillet 1906 ; 
Meyer, Ther. d. Gegenwart, 1907, n° 5; FRIESER, Prager med. Wochensch., 1907, n° 9; ManGeLsporr, Ther. Monatsh., 
mars 1908. 

(3) BurturgAux, Un danger social: La purgation, 1 vol. in-8°, Paris, 1908; et Bull. Soc. thér., 1908, 4° s., XIII 
P. 210 et suivantes. 

(4) Barper, Sur les laxatifs, Bull. Soc. thérap., 1908, 4° s., XIII, p. 302. 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 75 


porter des recettes de cuisine, ni pénétrer dans le secret dés préparations spécialisées, 
dites « Gelées instantanées », ou « Crème éclair », ou bien encore indiquer que l’addition 
d’agar ou de gélose facilite la prise en masse des gelées ou confitures, on nous permettra 
de retenir seulement une des préparations en honneur dans la cuisine orientale. C’est le 
blanc-manger qui se prépare en cuisant lentement l’Algue dans du lait, passant ensuite à 
travers une toile et aromatisant ; on verse ensuite dans un moule, refroidi avec de l’eau 
froide ou de la glace, et on sert avec de la crème aromatisée au choix. C’est un dessert 
populaire très bon marché et dont l’usage s’est répandu en Europe depuis une vingtaine 
d'années surtout. 

Aux îles Hawaï, comme au Japon ou en Chine, les Algues sont surtout utilisées dans 
les potages ou dans les sauces. Aux Hawaï, c’est l’Algue manauea qui donne les desserts 
les plus délicatement parfumés ; viennent ensuite les limu huna, aki-aki, pakaeleawaa. 
Le kohu est préféré en potage, mais en quantité relativement faible. 

_ La dose d’Algue nécessaire pour obtenir une gelée consistante est assez variable avec 
l'espèce considérée, de 60 à 200 grammes pour 1 litre. 

Au Japon et dans tout l’Extrême-Orient, certaines des Algues qui sont employées 
dans l’alimentation se mangent, fraîches ou après dessiccation, avec des assaisonnements 
variés; d'autres servent à faire des gelées, et enfin d’autres encore servent à fabriquer des 
préparations plus ou moins compliquées que nous étudierons successivement. 


ALGUES SE MANGEANT FRAICHES OU APRÈS DESSICCATION 


Au Japon, il en est ainsi de l'Ecklonia bicyclis (arame) qui est un constituant de 
certaines soupes, mangée en salade, ou encore mélangée avec la sauce au Soja hispida. 

Le Cystophyllum fusiforme (hijiki) est séché au soleil, et il se consomme ensuite 
après avoir bouilli dans l’eau douce ou encore après avoir été cuit avec la sauce au Soja. 

 L'Undaria pinnatifida (wakame), vendu à l’état sec et en petits faisceaux, est très 
usité comme nourriture dans les diverses parties du Japon. Avant d’être consommé, 
il est lavé avec de l’eau douce et ensuite mangé en salade, ou encore cuit avec de la sauce 
au Soja, ou mis dans la soupe. D'après Yenpo, les habitants du Nord du Japon coupent 
les frondes portant les conceptacles et, par pression, en extraient un liquide mucilagineux 
qu’ils mêlent avec du riz bouilli. Parfois le wakame est traité comme l’on fait, ainsi que 
nous le verrons plus loin, avec l’asakusanori, c’est-à-dire disposé en feuilles sur le fond 
d’un récipient, et parcheminé sur un feu de charbon doux. La racine épaisse du wa- 
kame, nommé mehibi, est souvent séchée, débitée en copaux ou tranches minces, et 
mangée avec de la sauce (miso). 

Le Phylloderma sacrum (suizenji-nori) est mangé frais avec du poisson cru 
(sashimi). Séchée, cette Algue est lavée dans l’eau douce, et, lorsqu’elle s’est gonflée, on 
jette sur la masse de l’eau bouillante, puis de la sauce au Soja. Les diverses espèces d’En- 
teromorpha, connués sous le nom d’Awo-nori, sont conservées par séchage en feuilles ou 
en bottes. Pour les manger ensuite, on les réchauffe sur un feu doux de charbon, puis on 


76 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


les réduit en poudre ou on les broie. Le goût en est très bon, et on se sert de ces prépara- 
tions comme condiment. : 

L’Ulva lactuca (aosa) sert de garniture aux poissons, à la salade, et à divers autres 
plats. Sous le nom de miru, on range plusieurs espèces de Codium qui sont séchées au 
soleil, puis conservées dans le sable ou la cendre. Lorsqu'on veut les préparer pour être 
consommées, on les fait cuire dans l’eau, et on les met dans les soupes, ou encore, 
après les avoir lavées, on les mêle avec de la sauce au Soja et du vinaigre. 

Les jeunes frondes de Phyllitis fascia (haba-nori) sont séchées au soleil, étant réunies 
en feuilles, puis séchées au feu, réduites en poudre et mangées avec la sauce de Soja. 

Le Chordaria abietina (matsuma) est mangé en grande quantité par les paysans, qui 
le conservent dans du sel et le cuisent ensuite avec de la sauce au Soja. On s’en sert 
encore, d’après YENDO, pour conserver les champignons que l’on place dans des barils 
fermés, en lits alternant avec des lits de matsuma salé. 

Le Mesogloia decipiens (mozuku) est généralement conservé dans le sel. Lorsqu'on 
veut s’en servir, on le lave à l’eau douce, puis on l’immerge dans le vinaigre ou la sauce 
au Soja. 

On voit qu’à part quelques exceptions ces préparations ne diffèrent guère les unes 
des autres, et ce sont des procédés semblables que nous allons retrouver dans d'autres 
pays. 

En Chine, le Gloiopeltis tenax J. Ag. est bles et séché au soleil. Lorsqu’on veut 
l’employer, on le lave pour se débarrasser des impuretés et du sel; puis on le jette dans 
l’eau chaude, de manière a obtenir unesolution qui se prend en gelée par refroidissement. 
Cette gelée sert d’aliment ou d’apprét. 

Aux îles Philippines, d'après Blanco, on mange le Fucus edulis (Sphærococcus 
gelatinus Ag.). Après l’avoir récolté, onle lave bien, puis on le sèche et on le tait blanchir au 
soleil, et on en fait ensuite un mets très agréable en le faisant cuire avec du sucre. On en 
prépare encore des gelées qui servent à l’alimentation et aussi à combaitre les maladies 
de poitrine. 

Les diverses sortes d'Agar-agar sont préparées dans les Indes orientales, à jai et à 
Ceylan, avec diverses Algues rouges que l’on fait sécher au soleil, ce qui les tait blanchir, 
et on en prépare ensuite des gelées qui deviennent consistantes par refroidissement, C’est 


ainsi que l’on emploie, dans les Indes neerlandaises : Sphærococcus spinosus Ag. (En- 


cheuma spinosum J. Ag.), Sphærococcus Serra Kg., Sphærococcus gelatinus Ag. et Gizartina 
horrida Harv., à Timor l Hypnea divaricata Grev. 

Le Sphærococcus lichenoïdes Ag., séché et blanchi au soleil, constitue la mousse de 
Ceylan. On la consomme fraîche à Makassar, avec une sauce au jus de citron et du gin- 
gembre. 

A Petit-Tavalli, les indigènes mangent avec le riz le Chauvinia macrophysa Sonder. 
Enfin nous arrivons de nouveau aux îles Sandwich, où les Algues jouent un rôle très 
important dans la cuisine indigène et se préparent sous les formes les plus variées. 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 77 


CHAPITRE VIII 


L'Agar-agar. 
Gélose, Mousse de Ceylan, Colle végétale, etc. 


Si le produit commercial désigné sous ce nom d’agar-agar tend aujourd’hui à se ren- 
contrer sur les marchés, toujours assez semblable à lui-même, il n’en fut pas toujours 
ainsi. Même encore aujourd’hui, on désigne sous ce nom des produits provenant, non 
pas seulement de diverses Algues, mais encore de régions très distinctes, 

C'est pourquoi les ouvrages techniques spéciaux restent à peu près muets à l’égard 
de cette denrée. La plupart des descriptions se rapportent à une forme commerciale et 
ne sont point concordantes: Il n'est donc pas inutile d'essayer de mettre un peu d'ordre 
_ dans les connaissances acquises s: r cette drogue dans ces temps derniers. 

C'est sous le nom de mousse de Ceylan que l'agar fut le plus anciennement connu 
et on le rapporta au Gracilaria lichenoïdes, Algue Floridée des côtes de Ceylan, de Burma 

et des îles Malaises, depuis longtemps employée par les indigènes des côtes de l'océan 
Indien et par les Chinois. 

Probablement incluse dans les espèces décrites par Rumputus, elle fut portée à la 
connaissance des médecins europeens par O’Saughnessy vers 1834-1841, puis étudiée 
par GuiBourT en 1842. 

Cette Algue po-séde une saveur légèrement salée, craque -ous la dent, se gonfle fort 
peu dans l’eau froide et n'y devient ni gluante, ni transparente. 

Dans le commerce, dit cet auteur,elle est blanche et opaque, décolorée par la dessic- 
cation au soleil et à l'air et tormée de tiges filamenteuses, cylindriques, ramifiées, larges de 

2 millimètres et longues de 3-15 centimètres ou davantage. La plupart des tiges portent 
de nombreuses branches simples, ou divisées elles-mêmes en ramification: secondaires 
ou tertiaires terminées par une pointe courte. 

Lorsqu'on la mouille, elle augmente un peu de volume et devient plus translucide. 
Elle offre tré juemment ces fruits (cystocarpes) globuleux. 

Eile est un peu friable et facilement pulvérisée après dessiccation à 100°. Elle est 
dépourvue de saveur et d’odeur et difière en cela des Algues marines (1). 

Guimourr signala qu'elle se colorait en bleu par l’iode, ce qui, pour lui, démontraitla 
présence de matière amylacée. 

_ Greenisu (2) en a donné, après d’autres auteurs plus anciens, une analyse complète, 
et c'est dans cette Algue que Payen caractérisa la gélose. 

On en a préparé divers produits pharmaceutiques et les divers auteurs conseillent 
de l’employer sous forme de gelée. 


(1) FLÜCkIGER et Hanbury, Hist. des Drogues simples (Trad. pg Lanessan), II, p. 615. 
(2) H. G. Greenisu, Arch. d. Pharm., 1882, p. 241. 


78 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Nous verrons, plus tard, quelle relation existe entre cette mousse de Ceylan et l’agar- 
agar japonais; mais auparavant, au sujet de ce dernier, résumons le travailde MarcHann, 
qui, en 1870, fit un important essai de détermination des Algues productrices de la dro- 
gue japonaise. 

Il s'agissait du produit dénommé par les Anglais « japanese isinglass », qui, en Chine 
et au Japon, était désigné sous le nom de « tjintiow », qui arrivait déjà en Europe pour 
falsifier les confitures. Il est importé sous deux formes: 1° en baguettes irrégulièrement 
comprimées, ridées, semi-transparentes, de 11 pouces de long, 1 pouce 1/2 de large, 
pesant chacune 11 gr. 472 (1); 2° en bandes longues et ridées, mesurant 1/8 de pouce de 
diamètre, de couleur plus blanche que dans la forme précédente et plus facilement soluble 
par ébullition dans l’eau. Les deux solutions se prennent en gelée par le refroidissement. 

Hanbury pensait que cette drogue provenait des Laurencia papillosa Grev., Lami- 
naria saccharina Lam., Porphyra vulgaris Ag., Gracilaria sp. 

D'après M. Menter, l'espèce dominante serait le Gelidium corneum, mais 
l'examen de la gélose montre des fragments d’espèces appartenant aux genres Gelidium 
Gloiopeltis, Gracilaria, Laurencia, Ceramium. 

MarCHanp entreprit alors la détermination des espèces d’Algues productrices des 
deux types de gélose et conclut à la présence des végétaux suivants : 

1° Streblonema sp., sur un fragment de Gelidium ; 

2° Scytosiphon lomentarius J. Ag ; 

3 Sporacanthus cristatus Kütz (Tab. Phyc., V,p. 24, t. LXXXII); 

4° Ceramium, C. ciliatum J. Ag. Shas a ei ciliatum Kutz, T. Ph., XII, p. 26, 
t. LXXXVI); 

5° Centroceras clavulatum Ag. (Kitz, T. Ph., XIII, p. 7, t. XVIII); 

6° Endocladia vernicata J. Ag., rare ; 

7° Gloiopeltis tenax Turn., fréquent ; 

8° Gelidium polycladum Kütz, abondant (Kütz, T. Ph., XIX, XXIV, 9) ; 

9° Nitophyllum, sp!? 

10° Polysiphonia tapinocarpa Satie (Algæ Japonica, 1870, p. 37, pl. XXV, B); 

11° Polysiphonia fragilis Suring (loc. cit., p., 37, pl. XXV, A); 


12° Polysiphonia parasitica Grev. (?). Cette espéce n’a pas encore été mentionnée au 
Japon (Kütz, XIII, p. 9, t. XXVI) ; 


13° Melobesia ? sur Polysiphonia tapinocarpa; 

14° Diatomées, Arachnodiscus ornatus Ehr. (découvert dans les confitures par 
M. Ménier). 

A la suite de ces recherches, M. Marcuanp propose de donner le nom de Phycocolle 
à cette substance, ou Tjintiow ou Lo-thä-ho. 


L’agar-agar est un produit différent, ajoute l’auteur, et ce nom d’agar est entré dans 
la matière médicale comme synonyme de mousse de Ceylan. 


Pereira l’avait cru fourni par Plocaria candida Nees (Gracilaria lichenoïdes Grev.). 


(1) Marcuanp, Bull. Soc. bot. Fr., 1870. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 79 


En réalité (Archer et Simmonds), ce sont deux produits différents. L’agar est fourni 
par Eucheuma spinosum J. Ag. 

Les Spherococcus Serra Kütz, S. gelatinosus Ag., Gigartina horrida Harv., sont 
employés de la même façon aux Indes orientales, de même que |’Hypnea divaricata a 
Timor (Mertens). 

Telles sont les observations de M. MARCHAND ; nous emprunterons maintenant aux 
auteurs les plus récents les détails qui permettent d’être un peu mieux fixés sur la nature 
du produit dénommé agar-agar. 

L’agar-agar du Japon, qui de nos jours paraît le plus important, est connu d’après 
SENFT, en Allemagne, sous les noms d’ichtyocolle végétale « vegetabilischer Fischleim », 
ou de gélatine du Japon et des Indes orientales. 

La plante mère de cette drogue est principalement le Gelidium corneum Lamour 
(Tokoroten en japonais). 

- L’agar-agar japonais arrive dans le commerce sous forme de petits bâtons minces, 
de la grosseur d’une plume d’oie, incolores ou très faiblement teintés de jaune, mesurant 
jusqu’à 50 centimètres de longueur et fortement ratatinés. Plus rarement ils sont aplatis 
en feuillets. 

SENFT n’a rien pu savoir sur la préparation de la première sorte; mais la deuxième 
est préparée en faisant bouillir des Algues avec de l’eau, puis passant au travers d’un 
tamis, puis après congélation de la galette obtenue en la coupant et la séchant. 

L’agar ainsi obtenu est une denrée alimentaire importante, non seulement au Japon, 
mais encore en Chine, sous le nom de « Tejntian » (1), qui est le nom chinois plus ou 
moins bien orthographié ! 

Somme toute, l’agar-agar est une matière des plus utilisées au Japon, et il faut 
comprendre sous ce nom le produit extrait par l’eau chaude de plusieurs Algues des mers 
asiatiques appartenant à la famille des Floridées. 

Au point de vue chimique, il se range parmi les substances gommeuses, dont il se 
distingue parce qu'il ne se gonfle que très peu dans l’eau froide, mais par contre se 
dissout complètement dans l’eau chaude et se prend à froid en une galette solide. 

C’est cette dernière propriété que l’on utilise pour la préparation de certains milieux 
de culture en bactériologie. 

On le trouve aussi comme succédané de la colle de poisson « vegetabilische Hausen- 
blase », comme moyen de donner de lagglutination ou de la consistance à d’autres 
produits. 

Grâce aux diatomées qui accompagnent les Algues, on a pu diagnostiquer la présence 
d’agar-agar dans les conserves alimentaires de fruits; nous reviendrons plus tard sur 
ce point (2). 

Au point de vue commercial, on distingue trois sortes d’agar-agar : Ceylan, Java 
(Makassar) et Japon. 


(1) Voir aussi Em. Pennor et P. Hurner, Matiére médicale sino-annamite. Vigot fréres, édit., Paris, 1907. 
(2) Voir Marpmann, Ueber Agar-agar und dessen Vervendung und Nachweis., Zeitsch. f. angew. Mikroscopie, 
Leipzig, 1897, Il ; Senrr, Ueber Agar-agar Diatomeen, Zeitsch. d. allg. æsterr. Apot. Vereins, Wien, 1902, n° 9. 


80 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


1° Agar-agar de Ceylan (Mousse de Ceylan). Il provient du thalle du Gracilaria 
. lichenoïdes Ag. et se présente en fragments arrondis, ténus, de 12 centimètres de longueur 
au maximum, et de couleur blanchâtre. Les assises cellulaires épidermiques renferment 
de l’amidon en petites granulations. Bouilli avec 50 parties d’eau, cet agar se prend en 
refroidissant en une galette de consistance épaisse. 

2° Agar-agar de Makassar et de Java (Carragheen des Indes orientales), Thalle des 
Eucheuma spinosum Ag. et E. gelatinæ Ag.; se présente en fragments arrondis de dimen- 
sions un peu variables, mesurant d'ordinaire de 3 à 4 centimètres de longueur et 2 à 3 
millimètres d'épaisseur, irrégutièrement rameux, avec des excroissances plus ou moins 
allongées et pendantes (cystocarpes), souvent couverts de cristaux de sel marin. Leur 
couleur est jaune brun ou rouge pâle. Il se prend en masse par refroidissement après 
ébullition dans 17 parties d’eau. | 

3° Agar-agar du Japon (Colle de poisson végétale, vegetabilicher Fischleim, japa- 
nische oder ostindische Hausenblase, japanische Gelatine). Provient principalement du 
Gelidium corneum Lamour, G. cartilagineum Gaillon, et se présente sous deux 
formes : la première en morceaux ressemblant à des fétus de paille, atteignant 
jusqu’à 50 centimètres de longueur, incolores ou un peu jaunatres, ressemblant par leur 
aspect extérieur à des tuyaux de plume; la seconde, en morcéaux quadrangulaires, de 3 à 
4 centimètres de largeur sur 20 centimètres de longueur au plus, enchevêtrés en feuillets 
grossiers de couleur jaune. Les Japonais utilisent cette dernière sorte en la faisant 
bouillir dans l’eau, laissant refroidir et découpant ensuite la galette obtenue. Elle se 
prend en masse par refroidissement après ébullition dans 200 à 300 parties d’eau. 

Aux renseignements donnés par M. SENFT, nous ajouterois ceux qui viennent d’être 
publiés par une de nos importantes firmes de droguerie, la maison Salle et C’*, à l'occa- 
sion de l'Exposition de Brüxelles (1). L'auteur anonyme admet, avec Davi:son, que la 
colle du Japon ou agar du Japon n'est autre chose que le kanten dont nous avons 
longuement parlé dans le chapitre précédent. 


La principale espèce productrice est donc le Gelidium corneum var. pinnatum, la 


variété anthocladum de Marchand n'ayant été retrouvée ni par Hotmes ni par OKAMURA. 
Ce dernier auteur a décrit les espèces utilisées pour la fabrication de l’agar : G. cartila- 
gineum, G. repens et G. rigidum. 

= M. Davinson dit que les Algues sont ramassées de mai en août, époque où elles se 
présentent dans les meilleures conditions et en plus grande abondance, et que c’est surtout 
le G. Amansit (Tengusa en japonais) qu’on y récolte pour cet usage. Cette espèce 
abonde à Hokkaido, et dans les préfectures de Wakayama, Miye, Shoznoka et Chiba. 


« La plante longue de 10 à 20 centimètres est récoltée à l’aide de crochets et de filets 


traînants et aussi en plongeant. Les Algues récoltées sur les bords de la mer sont de 
qualité très inférieure. 


« Un grand nombre d’autres espèces d’Algues peuvent servir à préparer le kanten et, 
comme le tengusa est devenu de plus en plus rare dans les dernières années, il arrive 


(1) Annales de la Drogue et de ses dérivés, Paris, 1910, n° 15, éditée à l'occasion de l'Exposition de Bruxelles, 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 81 


souvent qu’on lui substitue d’autres espèces, telles que: Ego (Campylæphora hypneoides), 
Toriashi (Acanthopeltis japonica), Ogo (Gracilaria confervoides), ou qu’on le mélange plus 
ou moins de ces espéces, selon la qualité de kanten qu’on veut obtenir; mais la meilleure 
se fait avec le tengusa seul. » 

* En dehors des espèces d’Algues marines déjà citées, on emploie aussi: l’Onigusa 
(G. japonicum), qui donne un produit de très belle qualité, de 8 à 10 centimètres de longueur, 
et qu’on trouve à Shima, Kü et Henga; l’Airakusa (Gelidium subcostatum), répandu sur 
toute la côte, qui mesure 27 cm.5et dont le produit est inférieur ; et le Kinnkusa (Gelidium 
elegans). 

Le Toriashi (Acanthopeltis japonica), jadis peu renommé, aujourd’hui considéré 
comme de bonne qualité, se récolte surtout à Shikoku. 

En résumé, les Algues marines entrant dans la préparation du kanten ou agar-agar 
du Japon seraient : Gelidium Amansii Lam., G. polycladum Kütz., G. elegans Kütz; acces- 
soirement : G. japonicum Okam., G. inbicastataie Schmitz, Acauihooaiia} japonica Ohta 
auxquels il faut ajouter les espéces suivantes mélées aux précédentes pour obtenir un 
produit inférieur : Campylæphora hypneoides, Ceramium rubrum, Gracilaria confer- 
voides, G. lichenoides. 

Composition et caractéres chimiques, — L’agar-agar, nous l’avons dit, a été étudié 
par Payen qui y découvrit la gélose, par Morin, Porumsam, etc..., et Hotmes lui attribue 
la composition globale suivante : 


LO rag oka NE ae Pire (ar ir A ES A RUES 21,79 P. 100 
Mister OrpAnIque ATOS 15 er aS Lass averses) eue 5,95 — 
Po 'CAFNONELEAIOSE) soo luis voice ocr ss cad Ooms ses 2 64,59 — 
CET De RECS un aus mincir up es et Dat ape a 3,54 — 
MERON trace a od Pie de Re ua en cl ns te te oib.c% 4,13 — 


Il importe maintenant, sans revenir sur les études déjà exposées, de signaler les 
observations de Cooper CanTaB et Nutratt (1), qui ont récemment résumé les pro- 
priétés de cette substance de façon à montrer sa supériorité pour les usages bactério- 
logiques sur les autres gelées et la gélatine. D'après ce mémoire : 

1° La solution de gélose (agar) ne donne pas de précipité avec : sulfate de cuivre, 
acétate de plomb normal, sulfate de nickel, bichlorure de mercure, chlorure ferrique, 
sulfate de fer, bichromate de potassium, chloroplatinate de potassium, chlorure d’or, eau 
chlorée, eau bromée, iode, acide chromique, acide picrique, formol. 

2° Les réactifs précipitant la solution de gélose sont : acétate basique de plomb, nitrate 
mercurique, tanin, acide phosphorique, alcool. 

L’agar, ne renfermant pas d’azote, ne donne pas les réactions du biuret, de Millon, etc. 

Une solution d’agar séché à 100° dans la proportion de 1 1/4 p. 100 (2 p. 100 si seu- 
lement séché a lair) est précipitée si on a ajouté 40 p. 100 d'alcool a go’. 

En présence d’un alcali, la solution d’agar ne se prend plus en gelée, mais toutefois 
la solution est plus visqueuse. 


(1) Pharm. Journ., 1908, 4° s., XXVI, n° 1978, p. 688. 
T. WI. — Fase: 1, II 


82 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


La solution d’iode iodurée et la teinture d’iode teignent en jaune la solution chaude 
d’agar, qui devient rouge pourpre à froid, surtout entre 27 et 29°. 

- Cette réaction se produit encore dans une solution à 1/10 000°. 

En ajoutant de l’eau a une solution d’agar iodée, la coloration rouge pourpre à froid 
se change en coloration bleue, semblable à celle donnée par l’amidon, et cette coloration 
disparaît, si l’on chauffe, pour réapparaître en refroidissant. 

L’agar absorbe une petite quantité d’iode ou de brome, à peu près 1,65 p. 100, au lieu 
de 6,21, chiffre d'absorption de la gélatine à + 15°. 

La liqueur de Fehling n’est pas réduite, si la solution est fraîchement préparée. 

Le nitrate d’argent ne donne pas de précipité; mais, dans la solution maintenue 
chaude, il se produit un assombrissement de couleur, surtout vers 50°; le nitrate d’argent 
ammoniacal ne donne rien à + 50°, mais précipite à l’ébullition, et il ne se forme pas de 
composé comme avec la gélatine. 

Le métaphospate de sodium donne un précipité gélatineux à l’ébullition, tandis que 
cette réaction ne se produit pas avec la gélatine. 

Dans une solution fortement concentrée seulement, le tanin donne un précipité 
insoluble à froid et soluble à chaud; l'acide chromique est sans effet, ce qui différencie 
encore l’agar de la gélatine. On peut même séparer un mélange des deux substances dans 
une méme solution; il suffit d’évaporer a siccité en présence du formol, de reprendre par 
l’eau chaude : l’agar seul se dissout. 

L'hydrolyse de l’agar, portant sur les deux formes commerciales, a donné à MM. KôniG 
et BETTELS (1) les chiffres suivants : 


EAU. PROTEINE. poping HYD. DE C. | PENTOSANE. | FIBREUX. CENDRES. 
Forme en paille... 19,05 2,56 0,85: 70,58 3,06 0,44 3,46 p. 100 
Forme en galette... 22,33 6,13 0,58 63,96 3,18 0,42 3,40 p. 100 


Usages et commerce. — L’agar, outre son usage constant pour la préparation de 
milieux de culture pour la bactériologie, entre dans la confection de gelées alimentaires; 
de confitures, de crèmes, dans la préparation de certaines bières, dans l’apprêt du papier 
et de certaines étoffes, etc... Aussi le trouve-t-on sous forme de tablettes destinées à 
remplacer la gomme adragante dont le prix est de plus en plus élevé. 

D’après Gehe et C'*, de Dresde (2), l'exportation du Japon dans ces dernières années 
fut : en 1903, de 8348 quintaux; en 1904, de 10657; en 1905, de 9966; en 1906, de 8377 
quintaux. 

Untiers de cette production va vers la Chine. L'Allemagne vient ensuite et a importé: 
en 1903, 919 quintaux (Doppelzentner); en 1904, 857 quintaux ; en 1905, 683 ; en 1906, 
1064 quintaux. 


(1) Loc. cit., p. 466. 
(2) In Tunmann, Einige Bemerkungen über Agar-agar, Pharm. Centralb, 1909, L, no 12, p. 233. 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 83 


Emploi de la gélose comme falsification des gelées et confitures et autres denrées 
alimentaires. — C’est à M. Ménir (1), professeur à l’École de médecine et pharmacie de 
Nantes, que l’on doit l’idée de caractériser cette falsification par l’étude des Diatomées 
adhérentes aux filaments et que l’on retrouve en quantité assez considérable. Les plus 
répandues sont: Arachnoidiscus japonicus, Grammatophora marina, divers Cocconeis, etc. 
La recherche devra se faire après dialyse, sur les substances non solubles filtrées et 
traitées par l’acide sulfurique mélangé de trois parties d’acide nitrique. On étend le 
résidu obtenu d'eau et laisse déposer. Le dépôt est ensuite examiné au microscope. 

Mais, si les fraudeurs ont eu soin de débarrasser la gélose de ces Algues siliceuses par 
filtration à chaud, il devient nécessaire d'employer le procédé DEsmouLiÈres (2), dont la 
description nous entraînerait trop loin. 

DESMOULIÈRES, ayant eu à examiner des confitures ou gelées additionnées d’une matière 
étrangère, reconnut que celle-ci était de l’agar-agar, bien que ne renfermant pour ainsi 
dire plus de carapaces de Diatomées. Il attribue ce fait d’abord à ce que la gélose est 
aujourd’hui préparée avec une plus grande pureté, et surtout à ce que certains commer- 
çants traitent l’agar par l’eau bouillante et filtrent au papier la solution obtenue en la 
maintenant presque a l'ébullition à l’aide d’un courant de vapeur d'eau. L’auteur fut 
donc obligé de recourir à un autre procédé pour caractériser la gélose (3); nous renvoyons 
au travail l'original dont l'exposé serait trop long à reproduire ici. 

Enfin, pour terminer ce chapitre consacré à la plus connue des Algues d’Extréme- 
Orient, surtout depuis l'usage qu’en font les bactériologistes comme milieu de culture 
des organismes inférieurs, disons que sans doute bon nombre d’Algues fourniraient des 
substances identiques. 

M. Cons, chargé de la pathologie végétale à la station expérimentale des planteurs de 
sucre aux îles Hawaï, utilise couramment les gelées faites avec les Algues hawaïennes 
comme milieu de culture. Miss REED propose même à ce sujet que la gélose nécessaire aux 
laboratoires des États-Unis soit fabriquée avec des Algues du pays au lieu d’être 
importée d'Allemagne. 


(1) Cu. Ménter, Falsification de la gelée de groseilles (Journ. méd. de l'Ouest, 1879, 2° série, III, p. 75-84, avec 
1 planche). Quelques travaux allemands, seuls cités dans la littérature de cette nation, sont parus bien postérieurement, 
tels ceux de MARPMANN en 1887, SENFT en 1902, TUNMANN en 1909. Nous les passerons sous silence, car ils ne nous ont 
güère plus appris que l'observation de M. Ménier, qui reste pleine et entière avec la priorité sur tous les autres travaux 
que nous avons parcourus. 
(2) In Vittters, Cou et Fayotte, Traité des falsifications, Paris, 1909, 2° édition (vol. Aliments sucrés et stimulants, 
p- 168), = 

(3) DESMOULIÈRE, La en et la gélose dans les confitures (Bull. Sc. pharmacol., 1902, V, p. 154). 


TROISIÈME PARTIE 


IMPORTANCE DE L'INDUSTRIE DES ALGUES ET POSSIBILITÉ DE SON EXTENSION 


De l’ensemble de cette minutieuse étude, il se dégage un enseignement qu’il importe 
de mettre en évidence. 

Tout d’abord, ainsi que nous l’avons fait remarquer au début de ce mémoire, les 
Algues se présentent en Extrême-Orient comme des produits de première nécessité, alors 
qu’en Europe elles ne font l’objet que d’un usage restreint. 

Il faut rechercher la raison de l'importance économique de ces végétaux dans les 
multiples applications économiques dont elles sont susceptibles, les unes industrielles 
comme la fabrication de l’iode et celles des colles végétales, produits utilisés princi- 
palement au Japon, les autres alimentaires ou médicinales. 

Parmi ces produits dérivés des Algues, il convient de citer tout particulièrement les 
colles végétales qui, importées sous le nom chinois de «thao » ou de « haï-thao » sont 
utilisées, dit-on, pour l’apprêt de certaines étoffes. 

« Un demi pour cent de haï-thao, dit le D' Mancenor, donne aux tissus forts 
plus de souplesse et de mollesse que toutes les autres substances employées jusqu'ici. 
Mais son prix élevé s'oppose à son emploi, au moins pour les toiles de coton. Depuis 
peu de temps, les nombreux essais entrepris sur le thao oriental par MM. HeiLmann et 
Reser, de Rouen, ont appelé l’attention des appréteurs sur cette substance, et on a pro- 
posé, pour la remplacer, des produits tirés de nos Algues de Bretagne et que l’on désigne 
sous le nom de « thao français, fucus francais, de gélose, d’algueusine » ; mais tous sont 


inférieurs au thao chinois. » Nous n’avons pu nous procurer, au sujet de cet emploi, — 


de renseignements plus précis. 

Mais, en somme, l'importance économique des Algues serait bien faible, si elles ne 
jouaient pas le rôle véritablement surprenant que l’on a pu constater dans le régime ali- 
mentaire des peuples d’Extréme-Orient. 

Cette vogue extraordinaire est assez difficile à expliquer au premier abord. En effet, 
il vient d’être établi que les gelées retirées des Algues ne présentent qu’une valeur nutritive 
nulle ou négligeable, et que, par conséquent, il ne saurait être question, comme on a es- 
sayé de le faire en Amérique, de les offrir au public comme des matières alimentaires 
ayant la plus haute valeur. 

L’explication de l’usage constant que les Chinois, les Japonais, et les Hawaïens font 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 85 


des Algues, doit être recherchée bien plutôt dans la manière de vivre de ces populations, 
qui consomment en grande abondance du poisson et du riz, et chez lesquelles les gelées 
d’Algues forment un aliment complémentaire dont le but est, sans nul doute, de faciliter 
les fonctions intestinales. 

La matière mucilagineuse ingérée, en passant dans l'intestin, servirait à constituer un 
bol fécal d’une consistance plus aqueuse et d’un volume plus grand, ce qui rendrait plus 
aisés et plus réguliers les mouvements péristaltiques de l’intestin. 

On peut dire que la preuve de cette manière de voir est faite depuis que l’on a em- 
ployé, le plus souvent avec succès, dans le traitement de la constipation, des préparations 
à base de gélose. 

Ces préparations sont, en effet, de la gélose additionnée ou non d’une petite quantité 
de Cascara (Régulin), ou de Rhamnus frangula (Thaolaxine), ou encore de préparations 
diastasiques (Jubol). 

_L’addition de substances purgatives a pour résultat d’accélérer l’effet thérapeutique 
attendu, et cela peut être utile dans certains cas de constipation chronique. Mais, le plus 
généralement, l’ingestion répétée de 2 à 6 grammes par jour d’agar-agar pur, découpé en 
petits fragments ou pulvérisé et mélangé au potage ou à des purées de légumes, suffit à 
produire une bonne régularisation des selles. 

On peut dire, avec Martinet, que, dans ces conditions, les trois quarts des malades 
peuvent obtenir une guérison complète, pourvu qu'ils suivent leur traitement avec 
persévérance. 

Ce traitement par l’agar pur, à l'exclusion de toute substance excitante des parois 
intestinales, évitera tous les inconvénients qui ont été attribués récemment à l’abus im- 
modéré des purgatifs. 

De plus, les produits spéciaux auxquels nous faisions allusion plus haut, et qui ont pour 
constituant l’agar pulvérisé, atteignent un prix assez élevé, nécessité sans doute par les dé- 
tails de préparation, car, en effet, une note de la maison Salle et Cie, de Paris, publiée à 
l’occasion de l'exposition de Bruxelles, rapporte que « pour les usages médicinaux, l’agar 
se vend le plus souvent en poudre», et que «la pulvérisation de cette drogue est une opéra- 
tion très longue et très difficultueuse en raison de la résistance et de l'élasticité du produit ; 

_ aussi cette opération, lorsqu'elle est demandée, augmente-t-elle considérablement le prix 
de la matière brute ». 

Nous ne nous expliquons pas pourquoi la forme thérapeutique serait nécessairement 
la poudre fine ? Si vraiment, comme on est en droit de le penser, l’agar agit, dans l’intes- 
tin, par ses propriétés physiques, il semble bien qu'il n’y a aucun intérêt réel à l’ingérer à 
l’état finement pulvérulent. 

Il est, en somme, bon nombre de personnes, en dehors des cas relevant du médecin, 
chez qui l'usage fréquent d’agar-agar, introduit dans la ration alimentaire quotidienne, 
doit être des plus utiles. Il peut remplacer avantageusement, sur certaines tables de régi- 
me, les légumes verts si recommandés. En un mot, l’agar-agar a sa place marquée, croyons- 
nous, dans l'hygiène alimentaire courante, et le bas prix de cette denrée la met à la por- 
tée de tous. 


86 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Ainsi renseignés sur les causes de l'importance du commerce et de l’industrie des 
Algues en Extréme-Orient, demandons-nous maintenant si d’autres pays ne pourraient 
pas utiliser, de la même façon, les ressources de leurs côtes. 

Tout d’abord, un essai d'extension de l’industrie des Algues a-t-il déjà été tenté? La 
réponse est affirmative, et nous empruntons au rapport de M. Smrrx les détails qui 
suivent sur les efforts faits, aux Etats-Unis, pour développer l’industrie des Algues. 

Dans ce pays, on fabrique annuellement pour 35 000 dollars (175.000 fr.) de produits 
provenant des Algues, et cette industrie est presque uniquement restreinte au carragheen 
Chondrus crispus. 

Nous avons déjà raconté comment, jusqu’en 1835, les Yankees faisaient venir d’Angle- 
terre des barils de Chondrus, qui revenait ainsi à 1 dollar la livre. M. Smirn, maire de 
Boston, montra que cette Algue pouvait être récoltée sur les côtes du Massachussetts, et 
depuis, on prépare le carragheen dans cet État de même que dans le New-Hampshire. 

Depuis, cette industrie s’est encore développée et un mouvement d'exportation se 
dessine vers le Canada. 

A l'heure actuelle, en outre, on envisage comme d’un bon avenir l’établissement aux 
États-Unis d’usines préparant, d’après la méthode japonaise, les diverses formes de 
kanten. 

De plus, on importe, de San-Francisco à Honolulu, une certaine quantité de Porphyra 
perforata. Cette Algue est utilisée comme nourriture par les Chinois habitant: les iles 
Sandwich, sous le nom de che-choy (prononcer tche-tchot). 

Enfin, certaines Algues, et principalement le Fucus vesiculosus, servent à préparer de 
l'iode, pendant que d’autres, appartenant à la famille des Laminariacées, peuvent entrer 
dans la fabrication du papier. En effet, on en obtient une cellulose qui blanchit aisément 
et qui, soumise à une forte pression, dévieot très dure. On peut en faire un papier très fort 
et on en fait aisément des objets tournés et polis. 

Aux îles Sandwich même, Miss REED envisage, de même qu'aux États-Unis, la possi- 
bilité de l'établissement d’une nie des Algues. se 

En effet, on trouve à Hawaï un grand nombre des espèces utiles du Japon telles que 
les suivantes : Gelidium corneum, Grateloupia filicina, Gracilaria confervoides, Porphyra 
leucosticta, de même qu’un grand nombre d’espéces gélatineuses telles les Gelidiuin. I] - 
serait très aisé, en utilisant la main-d'œuvre locale, qui est très exercée, de recueillir ces 
Algues en grande quantité, et, aprèsles avoir lavées et séchées, d’en faire soit une sorte de 
« farine » à l’aide d’un moulin grossier, soit des préparations de gélatine végétale sem- 
blables à celles que savent si bien préparer les Japonais. 

De plus, on pourrait peut-être réaliser la transplantation d'espèces utiles provenant 
du Japon ou de Ceylan. 

En présence de cés essais et des résultats déjà obtenus, il y a lieu de se demander si 
nos colonies d’Indo-Chine ne pourraient pas bénéficier, dans une large mesure, 
des études entreprises sur la question des Algues utiles dans les divers pays d’Extréme- 
Orient. | 

L’établissement d'une semblable industrie trouverait certainement un débouché na- 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 87 


turel au point de vue alimentaire et thérapeutique, en Indo-Chine même, et il n’est pas 
inutile d’attirer sur ce point l’attention de nos colons et aussi de nos médecins coloniaux. 

De plus, les produits qu’une semblable industrie pourrait fournir : iode et gélatine 
végétale, seraient susceptibles d’être importés en Europe. 

Enfin, nous ne parlons que pour mémoire, du rôle joué par la « colle du Japon » ou 
l’agar de Ceylan dans la fabrication de gelées ou de confitures dites de fantaisie, et à ce 
propos nous ajouterons que l’addition d’agar ne saurait être nuisible et ne peut être con- 
sidérée comme fraude que si elle n’est pas indiquée d’une façon formelle à l’acheteur. En 
Belgique même, l’usage de l’agar dans la fabrication des gelées et confitures est autorisé 
à raison de 1 kilo par 100 kilos de produit fabriqué; toutefois, comme le dit M. Souter, 
cette tolérance est jusqu’à un certain point une fraude, puisque 1 kilo de cette substance 
peut transformer en gelée 500 fois son poids d’eau. 

Les nombreuses applications des Algues en Extréme-Orient nous entrainent a con- 
clure qu'il y aurait, pour l’Indo-Chine, un véritable intérêt à établir d’abord une flore algo- 
logique de ses côtes, et, d’après les espèces découvertes et leur répartition, à déterminer 
ensuite s’il n’y aurait pas lieu d'étudier les conditions du développement de cette industrie. 


Outre qu'elle fournirait aux indigènes, Annamites et Chinois, un adjuvant reconnu très 
utile dans leur alimentation normale, elle permettrait à notre colonie d'apporter en 
Es Europe et particulièrement en France, en jouissant de la détaxe coloniale, des produits 
__ ayant une importance économique d’une réelle valeur. 


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ALGUES UTILES D'EXTRÈME ORIENT 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


D.-A. LONGUET, IMP. PHOT. 


ALGUES UTILES D'EXTRÈME ORIENT 


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ID. — 3. Uses of marine Algæ in Japan, Postelsia, 1901. 


TABLE ANALYTIQUE 


PREMIÈRE PARTIE 


GENERALITES SUR LES ALGUES UTILES. 


CHAPITRE PREMIER. — Les Algues dans l’alimentation et l’industrie des différents peuples d’Europe et d’Amérique... 2 
Cuapitre II. — Les Algues dans l’alimentation et l’industrie des peuples d’Extréme-Orient................ Hebe eee 7 
Cuapitre III. — Notes sur la constitution anatomique et chimique des Algues..........................,....... 9 


DEUXIEME PARTIE 


LES ALGUES UTILES D’EXTREME-ORIENT. 


Cuarirre IV. —.Caratéres ‘botaniques des Algues utiles. {FT RAT cave bee TI Se Cebus mean aoe 15 
§ 1. — Généralités et Algues bleues........ POP er sa DONNE tes ST TN el A ES PL 
5 2. Chlorophycées.5,. 528, Ru Ce RRV Re CCD UE RTS AE ei 
BBs: PHeOPHyeces 5:5 24 ae sue. Vu Cp Sab ew ts Bus ad 8 SES ee ie 0 Sie ed RES AC PEN T NE CR eee EEE 24. 
Ba 7 Dictyotales 41,80 is Muse Rene dr ete eee Le a Sle ay eu re eae SAIS 24 
$ 5. — Rhodophycées..................%, A A sto TERRE PE era PE Et en AL LEE Us 25 
§ D. Conclusions. ii... EN RE MEET AS ARE NE May honda Ss Cane a nee a EOE Cent. 35 : 
CHAPITRE V. — L’industrie des Algues en Extrême-Orient.... ...... GeO ys Arg re OWLS Fy BO er Er aie ee saute 36 À 
$r: — Multiplication et Culture, 50e. sue RE es DR PET AS EEE TA “vee EU 36 
G ds HR PRÉCDIRE Le 9:5 ick ule ee ces OU CES ne AR NE TRS EU ENTREE RSS perso ge BAAR YS frre 41 
§ 3. — Préparation, caractères et commerce des produits utiles retirés des Algues....... ENT Re En. 
A. — Produits destinés surtout à l’alimentation.,........... se SNS NT te CE CN CNET ocre 44 
G, 7 KANten 4 cases cece sawn pe pee ee NN be Va ek GOAN Ma hg OT ees RIRE UE RASE 44 
Bem PUN OF fs UE TL RARES CR RO PR EE Se Ne Fe RE IR REC NE a 50 
CoS Kombo pigs RATE ER RU le ARR late bio le asa hae CU CE RER 51 
Go AMANO Se a ob sae eee dns kate CV An wis Deas Whe siecle kW ya ele D PL PER ete EE KG tip 9 wpa 55 
e. — Autres produits de moindre importance................ Peck nls See doa EN bao CO ST SEE ER 56 
J. — Les Algues alimentaires aux Îles Hawals 5 ee RE Re PR wie rie 58 4 
B. — Produits destinés à l’industrie chimique (Iode)................,...,.,... Honoraires ‘HO 
Cuapitre VI. — Composition chimique des Algues d’Extrême-Orient.............,..,......,................... 63 ; 
Cuapitrre VII. — Considérations sur l’emploi des Algues. Valeur alimentaire et thérapeutique. Préparations culi- ; 
BOS ASP EE Cs ne Sea PE aR stn clos SUD es pen DOME 07 0 bald Sepa Tee heel wey 96:5 + EU DONNEES 68 
CHAPITRE VIII. — L’Agar-agar.......... RAGE DS Gaga skate PM earn à ad DER MAUR SE CURE VON MAÉ L | 
TROISIÈME PARTIE : 
AVENIR ET EXTENSION POSSIBLE DE L'INDUSTRIE DES ALGUES. a 
BS 
er 
ES 
4 
4 


TABLE ALPHABÉTIQUE 


Reel A 
Acanthopellis japonica Okam..... Ltadeonts vet 28, 81 
Acide alguique..................... RA OW estas ORs alas 12 
Acide laminarique.............. Yo Mwai wb ® NEA 12 
CEMIOUE rentabiliser een coeds ees 4 
Agar-agar PTE PL RE er ge AR OR TT, 72,77 
_ Agar japonais........ Soe ory: See Wier see de nee ce es 44 
Ahnfeltia concinna J. re FEN s ep OP ELT EER TE OP 29, 42 
Alaria crassifolia Kjellm..........,...:...,:..... 20 
_ :— esculenta (L.), Grev......... LA Nbre CR 6, 7, 20 
De fistulosad Post. ct Rupr....:......... ,..... 20 
Alcyonidium Nemalion Bory...................... 26 
POSER AE SR SP wa Cake E ERPe 12 
Alsidium Helminthochorton (Lamour), Re: 00: 49500 
Nu RME CR RE DER 55 
- Amansia fasciculata KOŸZ.…....,..,:.:......ou.e 33 
MIMO OTR AR, nor een ose a etee cin ae 
ey MAME SIE col Se s's' soon cave ke ns oo 0's '0'b à 4 à « 33 
Antithamnion cristatum.......................... 34 
PAIOKU Wakame........:.::.:..:....... SE ARER 22, 57 
LOT ÉCRIT D CNE RTE AV EEE hs 16, 17 
Aosa... rss sie fosse Sue eue 6e de 6 OE 16, 57 
PME ace lore o ee 3 NE RE PET Pe cin a 22, 57, 65, 68 
ere nn Va etre Dose 3 ee 14 
Arthrothamnus bifidus (Gmel. ) Rupr ty eee + 22 
Bie > Auvilensis RUPE. sisi. cs cide ese kee cee 22 
MRC 050 pos remous ose a 25, 37, 65, 72 
_ Ascophyllum nodosum (L) Le Jol. .................. 12 
_ Asparagopsis ets Harvie. /. .. .« 32, 36, 42, 60 
LL LENS CPP PP NE PT État Sapte 23 47, 97 
ROE Ss S55 es Sioa PE NET EEE ieee pba fers 31 
RME MAIRE Poy ist: OE 

et: B 
ESRB SS TSS PER AR EE tenons ‘os. 8, 9 
_ BANGIACEES ...,:,:.:..... Asics ris Bad i dbitee t= Bree ae 
= BONNEMAISONIACEES.........5.. FINI PT ies ce 32 
Bulung...... POPPE eee Cee ee eee eee eee eee ee 31 

Cc 


Callymenia dentata J. LT OP Pree OS Tere 


| Campylæphora rade J. Ag RER NE 


34, 58, 81 

Capea elongata Mart......::.::35:::.:::::.2.. 22, 65 
=» flabelliformis: Marti ie sm sir 22 
— Richardiana J. Ag..:::e:s154:5 0. 22 
Carpacanthus trichophyllus Kuetz ................ 27 
(BF yg UT TRÉSAN RER AEN REAElE CE NS 2 3512 
Carragheen des Indes orientales... ............... 71 
Catanort SES EEE FAR NT PAT LL EL es 28, 58 
CARRE na ea hee ee nee en À 
CRHDIOSe scien canst ent ca sy eco cone cae acs II 
Centroceras clavulatum (Ag.) Mtg............... 34, 42 
CERAMIACEES rt de ls ct pe PU lo re 33 
Ceranium: Doydenile ssc. os. rar ei send s Doro 34 
=~) ctliatum (Ellis-Ducluz).::.,..,./::......) 34 
— : clavulatum Ag.......... RP OST RUE Te 34 
or otaRhatun RO 2 As rer, 6 
Sas) MOLUME A OR td es 4, 34, 81 
Dane PETER NE esse denis sigs, Ae 28 
Chætomorpha antennina (Bory Rtg ss. ne 17, 42 
CROTGPROT AE NN Ole den nee Fee Las ole se II 
CHROME 7 ae re Cie dada das de eo na 17 
Champia compressa Harv......................... 31 
Chauvinia macrophysa Sonder.................... 32 
QE LEA DE OT CRE PAU CT AI SERRE PE ROSES 21 
GUM RIOR RS den Seaihaide ade noter à 24 
OUT PO EN aim SN drome Vaiey Gewese «8.0 sie 25, 59 
SG OMAR AN sys ois go ls NS ices whee Ries elaieie ert 92,8 vine 30 
ARMM SR tts eg nee id ue dis bout ee 31 
RTE PS PRE RARE AR PTT EPP RU ACTE PIE 21 
ÉRROHOME SES eens a van 2 bain alt amie i Lie dec 2 21 
Chnoospora fastigiata pacifica A he Sea ae Rae 24 
Chondria obtusa Ag............... RSA Ut 32 
— papillosa Âg............ Rees eee sosseses 32 
St DINNGL PII AM ss soe en 0 ore gle Cais are i 92 
— tenuissima (Good. et Wood.) J. Ag... 33, 42, 60 
Chondroclonium Teedii Ktz..:................... "28 
Chondrus crispus (L.) Lyngb........ 2, 3, 14, 28, 58, 70 
orl  OCRNGINS HOME TE RE ewes ss 28, 58 
Chorde:filum Laurie lies engrais à 2 
— filum lomentaria Kütz.................:.... 19 
— lomentaria Lyngb...:..,............4..,. 19 
CHORDARIACÉES. .........::: TER ie dat ane 19 
Chordaria abietina Rupr...........:.........: 19, 58 
st Nemalion: Ag: nr ones PES 26 


. 04 


ee ee ee ee ee ss 


Chylocladia rigens J. Ag 
CLADOPHORACEÉES. 1e + sn cto vie sieeve Soh a sowie 
Cladophora glomerata Thun 
Cladophora nitida Ktz. 


CODUKCKES, So pin cscs hob o> Vert NN NU eee 
Codium adhærens Cabrera........................ 
— -difformeShousb;.. 45 esecestrreuemelere 
— | -filiforme'Mont....,5: eA iin aese. che coe 
——-* fatum SUTINGAT..: «5: hose Op de Je des dde 18, 
— Lindenbergii Binder..................... 18, 
— mucronatum J, Ag...................... 18, 
= Muller RO ee aa’ vee ee cake eee 18, 
— tomentosum (Huds.) Stackh........... 18, 42, 
Colle vépétale LRU LS necessite era ee 
Golocasia esculenta Schott... 11,127, 28a res 
Comen MOMs wane ca cate Hee 35, 


Conferva bombycina Ag 
ciliata Bilis cou vase ny icp ie detre 
rubra Huds.......... CANNES Eee Via . 
—< Simplex Wulfen ii. sii. vases seeds sets ees 
utricularis Roth 


Corallina officinalis L........ ENCRES TRE Te 
Cystoclonium armatum Harv...................... 
Cystophyllum fusiforme Harv....... 23, 65, 66, 
Cystoseira amentacea Bory......... TER Cr 
—" OPP ABS sms re stent lion ete ables 
D 


Dasya arbuscula Ag 
COCCINGA AD ons elie dass coe eae cen alee 
DELESSERIACÉES . ............., PR Se Re TA NEUE 
Delesseria filicina Lam: 
rhodanta Harv 


eRe where non ss one os os 0 0 » » ee 


nn nn 


on ou eee 


DERTFANE an seems anus durer late ue DÉTENU 
Dichophyllium dichotouium KBs sis Wie helo ane 
Dietyopteris pardalis Harv. is... 10m 
— plagiogramma Mont.................,...... 
Dictyota acutiloba J. Ag. var. distorta J. Ag. 25, 42, 
attenuata Kg.......... Bisbee tae. cot TS bea 
DIGEXOTACERS «duis cstv sie; «sit aa oe Solas Fee char ee 
Dictyota dichotoma (Huds.) Lam 45 5; 
intricata Chantelat......... RARE Dore 
Digenea simplex (Wulf.) J. Ag 33, 
ATH RS RARES EEE ME DA PE gy 


nn nn nn en mms tesee 


sms 


Dongi-dongt oe sisson cis. venue wees ARR 
LE SAME PR RACE SE MUR ON ne En ee ase 
Durvillaa utilis Bory.. ve vee gens AAS 


E 


Echinoceras ciliatum Ktz........... opie TT CEE D 
Ecklonia bicyclis Kjellm 22, 57, 65, 66, 

cava Kjellm.... , 22, 
latifolia Kjellm 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE | 


Ecklonia radicosa Okam .....:........,..... 1440) IT 
— \ Wrightit: Harv... has: een 22 
EXCTOCARPACEES : 4% race nee wie so A pee eee 19 
Ectocarpus Amicorum Harv...................... 19 
— confervoides Le Jol............. nee owe bare 3 
= Sndicus ‘Sond rene reed, ST 19 
—  Julyescens Thuret::::7,::33% 7-00 40 
RO. dbs oss oes Rss bs espe sine Pee aces 34, 58, 81 
ENCŒLIAGÉES (5.5.4, 28,08 Saale ree sca oe ee 19 
Endocladia vernicata J, AQ. 2. s..0e.sinvesssasss cee 28 
Enteromorpha clathrata J, Ag.......,............. 5 
—:-complanata Kutz.0s.5. 105505 27encanrer mes 17 
— ‘compressa (L.) Gr....:...,.,,.. 6, 17, 57, 65, 66 
— flexuosa (Wulf.) J. Ag..... pe GA AA ras 17 
am Jurgensti Kit see RO mene 17 
— x HopRirk I CNT ANRT RE ene ee 17 
— rintestinalis (L:) Linkin ta EU 17, 57 
— intestinalis prolifera Hauck................ 17 
— “Linxa(L) SAR TE TS sees eae RMS 12508 
— ‘paradoxa EtZ. ioe ccs rr ser eee cute os 17 
= 1'plumosa RIZ ae Te nee cr nee Cette UE 
— prolifera (Muell.) J. Ag.................. 17, 60 
Eucheuma gelatine Ag... cick seen ata aes 30 
—_ sgpinosum AB. vont aatee ste ave eee eae 30 
F 
WAUcchoy s'est os oa cians Seine Che re rere 59 
PAZAMG 5 sise RCE PO TETE ee oe 18 
FUCAGRES ETS oer tie aces 0 NE de alee DOTE ES LR. | 
ROGERS SR TRES essieu II 
Fucosane....... NT AL LEFT hae roots Whe ee eae 13 
BHCORE Scie AT cele wee were ae PRE SR Wie hee D VCD à = eee 
FBUCOSOL Ss ns Spied ses nee cee r when ae ae tee ee 12 
FUGUSs 225 ANT Per NET Tr Oe ence an eens ao SEER 
Fucus conferpoides Li. Re ence a ua ates woot 
— y-corneus Huds, 37 nee ovine osama 26 
= (Crispus LINDE: occ en Te à 135 Pac “3 
= Uesculentus Lin. ss rer rent LR IT ae 
— jeyanescens Ag 5557, ois oh Rae era slog 23 
— filicinus Wulf............ ea ed ee east Be 
<< foltosissimus LAS sdk vases ce enr 24 
— Helminthochortos Latour....,............. «ee 
mm  NAFANS: TURN; Le alt RTE Meee 24 
— obtusus Huds....... RER PT Un til 32 
=. Osmunda GRR NAN ee 32 
— papillosus Forsk.....:........., Gas ca eerie DAS 
— pinnatifidus Gm................. caer ge 
— Teedii Turn.......... Te SP GREE 28 
a= “FenaxX TU: ue 25e este ere ae 35 
—  tenuissimus Good et Wood.. ana ree Ee 33 
= SACCHASIRUS Aa. ns au raser ta stuhee 21 
= serra Gmel.i.,,:,.:2: RS sie seh RER 26 
Fucus vesiculosus Let asic esac cc caseaed 4, 7, 14, 65 
— vesiculosus Post. et Rupr................,... 23 
— vesiculosus var. evanescens Ktz.............. 23 
Fukoro funori............ SSR Pe 57185 
Funori (plante)............. ET à he ate eee tebe We 
— (produit)...... vial tice Pens eee si: 249, DO 


DUO Ne oiseau ete vate em Sab 12 

| DO TRE aia Se PMP «Ghat HE LE 20 

|; & 

- UMMM Cylon ty ak Gag beat recat sae ess cee 12 
ne de de Lada rare urgentes 26 
Gelidium Amansii Lamour..........,......... 27, 81 

Pat DUENUALUM FUEL iii Seas cour de 27 
— capillaceum (Gmel.) Kutz, polycladum (Hck). 27 
pea @UPLIACORNE Bite. 6 cos ca de ses suce ne 28 
— cartilagineum Gaillon............... 27, 65, 66 
— corneum (Huds.) Lam................... 27, 64 
— corneum pinnatum Grev............. RAP 28 
— corneum Pristoides J. Ag................... 27 
ir, OME RUE once TUE ee Des abs s 27, 81 
Pie UME ODES id Oe do's lisant une Sed ss 27 
Pom AAV MOIGER Kg. olin euh ante te 27 
=. -Japonicum Okam....,......:..,........ 27, 81 
— latifolium Born..................... sakes 37 
— micropterum Kütz......................... 27 
— polycladum Kitz......... Pea trae aha 27, 81 
— pulvinatum Thur......................... Nene 
—. pusillum (Stackh.) Le Jol................... 27 
RON MAR Cs oo face sess scutes ccs ks sas ace 27 
Pe OMIM IB sans kb ce ciao causa à cee 27 
— rigidum (Wahl) Grev....,.................. 27 
— subcostatum Okam . SES Ppa pe ae TEE NA 27, 81 
Ginbaso...... mare dore es 24 
OE NS PRE PEN OR ER TONER 28 
Gigartina acicularis Lam......................... 3 
Sete ADR MANN ta ec eee NL res 35 
er GEA GE: INOU Ce ne LT, 31 
= compresa HO0K:,.-.:...,::.,.......,... 31 
MIO PAR En ne sce 3; 5 
TO SE none déc a ses 28 
el JUlGCER BOY; 2... 2e RULES 32 
= pistillata Stackh..,:.....,.:.:..........,. 5 
— Teedii (Roth.) ‘Lan DE od LEE ES 28, 58 
Gloiolpetis coliformis Harv..…................... 33, 37 
meee intricata Sutings., 1.1 ......,30 35 
rn ienax (Turner) JL Ag... de oie 35 
GLOIOSIPHONACÉES ...,.........,.. ems ON eae de oh SE 
dde Seats dene beh ae cas eich ee iis 3 
Gracilaria armata (ha ) Grey. ES Sidon! or date 31 
— compressa (Ag.) Grev.................... Si; 27 
— confervoides (L.) Grev........ 30, 31, 58, 65, 81 
— coronopifolia J, Ag.................. 31, 42, 60 
pare MOORS Hart aitu cid ogy TR 31 
— divaricata (L.) Grav....... oser rer 31 

4 Monenoider (E-) Mary... 3, 31, 81 
ds. Bien Rogar Tel Era ri es 35 
Grateloupia affinis (Harv. y ORM ce tue. 305: 98 
— filicina (Wulf.) Me AM cease saws 35, 36, 42, 58 
Listen Sas eo toe e En eee ss 34 
Gripithsia corallina Ag....,.......:,........... 3 
Gymnogongrus disciplinalis (Bory) J. Ag....... 29, 42 
 — flabelliformis Hary......... ie ART ER .« 20, 58 
_— vermicularis americana J, Ag......... vee 29, 42 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 95 


H 
ADR HOR hs Li Ven eee sion Van ed à da da go 19,.58 
PAR QE ear CA Shes nay eS re PL 18 
PERE ER oe A bly oe rene Sk Cee eae rue bare LOIS 21, 59 
Pattee sees sieur RE MT ETES 33 
PERTE ET NS Vickie Que den Un ne ones To teres 21 
Halopithys pinastroides Ktz...................... 4 
Halurus equisetifolius Ktz..................,...., 5 
Halydris: stliguosa: Eyngb: is heures ane. 4 
Halymenta.carnosæ:Kuetz.5. Sos avg oe cae ceases 29 
Her MONEE SUNG. EE LS cated Se nee » ONE D Ter 29 
— formosa Harv........... Rina Mehr sia, Lee RSS 35 
Halyseris plagiogramma Mont.................. 60 
Halyseris polypodioides Ag.............,......... 4 
ETS PRET RE io PT EU EMPIRE Se ES 22 
Himanthalia lorea Eyngb:.. "imite 6 
Helminthechorton, Ever mie ds rae cen sess 4 
Heterosiphonia coccinea Falk..................... 4 
LE PA RE PR eae ne A En 27 
OR RL en Eu eo rando see 23, 57, 65, 68 
PEWS RSR gore riko ca h as dar ele nn vce ss one secte m9 81 
ge ERT eg CGN Bc Sr a ae a SA nee Ee ee ae 18 
Hirome undarioides Yendo....................... II 
FLOM WAER sO sail ccd cipiaitials Piss a's ire s/s eee ee sie à 24, 58 
PORTO VE TE a 2 LE MR eme Lire e anne d'au 28, 58 
TAY RNA Mot CU TAR elas on geen Sere ticks. Smee: 31 
ma? REPAP ECOL: RNA 60's sas Peli re o en le ne aies shy aie 31 
ae IMMECELOTINES AM ee piaisie dents ee à des 5, 30 
eo. nidifica J:'Ag:........* Se PAR AE LA A _ 30, 42 
I 
PR MES cena ur «cia ssesertiettie sie. 34 
OM ys tales nn ties à 9 co Lo LS 4 12, 61 
J 
Sapaninche: Glatine.ahe) ssid ei cae hae ole 27 
Japanische: Hausenblase "minimes. 27 
PR nan de rente revu en vibes Meee eae abel He 85 
K 
EST STs GRP ier ate ioc UE Pee ek 32 
RS AR Pe a Ay erie sR ei a oies cost ile 22 
1 RTL Re Or AE ER erase PR OST ET 22, 57 
RAD aa den need Le moe Fs ral 
MADE ots ae Peer sec bs Suenos 27, 28, 44, 59, 67 
BRIE corer ae ee het sees aie eue De 22 
KAUAM ma ere sinloin sno espece dose wig ig tte 20 
Rea yAMo-nOr ds. oo soc 6 cine co cies. dde pres espece 19 
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Kome-nori.......................... PEL TE 35 
BUM CROP. source sonores ste meu ab 25, 59 


06 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE ‘ 


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Laminaria angustata Kjellm...................... 21 
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LAMINARIACEES, .............:.. eee Pe AU RR pa 20 | 
Laminaria crispata Kutz...) 0)... cede cee eee 21 
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— japonica Areschoug.............. 21, 65, 66, 67 
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— dongissima Miyabe.....,.....,.....:..2. 21 
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— saccharina (L.) Lamour........ 6, 7,44, (215.65 
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— spérforaia) Mont... ina sens Diese 32 
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— pinnatifida B-osmunda J. Ag................ 32 
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MOZOKa TS a san ce ES ooo na eee 20, 58 
Mikade non: 02a. int Etre Dea} 35, 58 
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Mushiro:1552:04 5eme teen Rar mia 37 
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NÉMALIACÉES......... PT TS TR PEL os eens ono 
Nemalion attenuatum J. Ag...................... s U+-27 


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T. WI. — Fasc. 1. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 97 
. Nemalion Bertholonii Menegh............,....... 26 Pterosiphonia bipinnata (Post. et Rupr. ) Fikbg..... 33 
+ AMON Ider COLOUR ss 2.14. ofa F Pontire: de. Pye os oe aie ge RS pen ene 5 2 
D ubriqune Doyle cs eis 26, 58 
— vermiculare Suring...................... 26, 58 
Niu mau........ ED A ed oe PEUR PEER ET PE 27 E 5 
Noix de coco .............. DRE DEEE à ER rece es os mari, 85 
Nostoc commune Vaucher........................ I PTE Sel Se eae eas RE PERNT AL BORE RS 38 
Bhhaoindde MORALE otek koe 12 
o Rodeos ieee iis iidaraiy re SNe eso ees caeslhe er LI) we 12 
RHODOMEEACERS Win. Ga. os due ten BU e du ea ek 32 
Li UT ER NE Se ic RE AC RP IE RCE pte ae» 31, 58, 81 | Rhodomela subfusca Ag.......................... 4 
Nine éme ees qe qu ge inet GaP RAODOPHYELIDACHES 2 EU es ees der 29 
URINE os ne dd nc Goalie see à du eo 0 29, 58 | Rhodophyllis Montagneana Ktz................... 30 
PLUIE RE A PE PE SOON ES he SEs P'RHODTAENIAGÉES NL. 600.6 Mn sn es en ee 31 
Fa ere Rhodymenia palmata J. Ag...................... 53/6 
Sage P = Montapnenna: Uo Ag osseous a ose ce ANR 30 
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Phycoseris australis Kg...... MM Rinse eat sites SOU SRB COR cca gies Cred Seu NT Cheese dou 21, 59 
eee CN EMDOAIE BIZ Ur oa peyh de cote cesses: 17 | Sarcodia Montagneana J.Ag...................... 30 
Re MACRO RODS EU Cure eo 16 |; Sarcophyllt@ edulis: Si Ag... eee 6 
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ah pen emo es de 0 à 16 ah CMOS AG coe Pak A ayy os asset n os 24, 42 
RE TT AN ES Re PE RAC POI PRE EE LEE 16 wet CCRIROCATDUM TS ARE. EE de 24, 42 
Phylloderma PE TT ME Pi lees SO OIE a dé e 57 EU CORRE THAR eons etd salen oahu iia va soak à 24, 58 
paviitie cæspitosa Le Jol, 2.3 oy ccs sec ce cee ccese 19 = juirellunes ORAM Gy sos oh oh os ok fede oh at 24 
SM MOSCA ER ne dure race EUR 19, 58 — leptocarpum Ktz....... ER CNE ME PR ne 24 
DO ET lise are pean RUN ne de Belew due à 13 — polyphyllum Kütz.......................... 24 
Plocaria candida Nees....... APE AS reat Rape 31 Swe PR ROLE NaI gS os os cde we awk gts 24 
= compressa Endl..;:.......,,.,.,. ue. 31 — vulgare v. foliosissimum J. Ag............. 24 
— lichenoides (L.) Mont...................... . 61 | Schottmuellera paradoxa Grunow..............., 28 
Plocamium coccium Lyngb..............,...... 25 | Scytosyphon Jurgensii Ag......................., 17 
. Polysiphonia fragilis Suring............... omer 33 — filum y lomentarius Ag...................:.. 19 
— bipinnata Post. et Rupr.........:........... 33 — lomentarius (Lyngb.) J. Ag.................. 19 
feet SP UNICUIOSE SDIERR ms roc ccs a'ses ss eT Oe ao ta cat lees oes er Eee Pane TREN Anos Nr AE 40 
Meus OLR ERs RL iets Up ce slise ev oo. a 0's DOP RRQ RS het noter dent deed teres hs cea 27 
— purpurea Post. et Rupr..................... Bait EN WRASRES «a, a Tels. aus nese ctr ee ee uen à ‘30 
— tapinocarpa Suring........................ a tent cog ccc ode Ne Go aeit gis doses dde Me 31 
ARRET COM RP PR TN ore AT SPURNS HOP cain TRS DL ea eo MEE Lak oop ais corse Meee 28 
Pomme de MONDE. 4.1... ........ we Oe GS PIN Aten GUGM UT nee ss aie nh AS cece ee 27 
Porphyra atropurpurea (Olivi.) de Toni........... BANOS Cais ire isle ook UE eed CP Raa chokes 345157 
LE PE OO PP D PLUS OO SR nee ere etn de WEE eee die gene 25 
— laciniata (Lightf.) Ag........ 6, 8, 25, 36, SPECIE SO arin pares Ok LC ER VE MR AT ES CROP ER Rone 6 
Ment MUCOSHCIQ EUR ser neuve e 25, 42 | Somen-nori......... RSR à PES NÉS ET FE 25, 58 
LIT AUTe CERN PEER DENT AN TELE 25 | Sphærecoccus armatus Ag........................ 31 
Set icrOpRr UG Zend... acces. 25 Ent CATIHOMAREUS À, ne sure cendre 30 
— nereocystis Anders...........:.:........ 25, 59 —  compressus Ag....... Rep Urea eo ie Ne de 31 
eee OM TN ST Ve o's pu.» wep Su Shoe eens og hee 59 Ss CONPETHOMIAE AGS > ceca paca ssc ny ae donne 31 
LA LC GA ET ORNE avis oo 0 ¢ds,c0 00 ene 25, 59 ices CORMOUES ART of ters og vind ees due e RU ae ee 27 
De ONT A MICU o5b\ it ie decease see cess 59, 65, 66 seme Gaverizens ROZ: 50 erreur e 31 
D NMOIENSIR HAT. 6: ccs tices vy ses ese ee 33 ant), PAIGHMOSUS Ale... vs vhs deteste Spates GO 
OUR RES oc vines ss «6 tot eo vence 25 =" lichenoides Ag: .. 5er ses eds esse 31 
ONCE MODE. octet sp sss ciess osc osess 25 ee ENTE KZ De dsl sti vensensss 30 
REE CSCS D es Sea an 25 ai SHINOSUS AR’ SUR Tee ce os cat de eel ys es sois 30 
IR TION ssc nd een ss oe 25, 67 | Spongocarpus enervis Ktz........................ 24 
Pterocladia capillacea (Gmel.) Born. et Thuret.... 28 | Spongodium dichotomum Lamour............ + SRE 
I 


98 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 
Sporacanthus cristatus Kütz..... ARR RER 2 34 | Ulva Enteromorpha lanceolata Le Jol............. 17 
Opyridia clapulata dS. Ags. ec a trame 34 — fasciata Delille.......... ss RTE ee ane 16 
—  filamentosa forma spinella Harv............ 34 = IMaciniata AR ert re: tree) eee EE 25 
— spinella Sond.......... Aas de ene Rese 34 -— i dactuca (L.) (Le Jol. RS ER 5 iO, 59 
Stigeoclonium amænum Ktz................... 17, 42 — lactuca f. laciniata Wulf................... 16 
Sudaté (Culture au): :5.:7,.000.0.00: rade OF ble 37 — lactuca f. rigida (Ag.) Le Jol............... 16 
Suhria filicina (Bory) Grun....................... 27 — lalissina GTV... Re Re RNA 16, 65 
— : Japonica de Toni: 0, 27 — latissima palmata Ag........ Ro erey NEA 16 
Shin LO 2 eee ei SL eme nee 57 — .: papillosa Ardiss =... ere en ee 16 
D Lie Cd LOS PCR RE RE EET LER Ee Ee LLY Ree icon COR 40 —\ penniformis 02482 PSE RS AT 16 
— Rothiana gracilis Le Jol.......:..:2423240 17 
T Umi soomen:!.. 1724002 RSR CREER 27 
Umi‘zomen.,...:.:..%. RARE TS PEL r 30 an A Li 26, 58 
CT PAROLE LE Ur NA RER AOL 3 es DE oe ts 38 | Undaria pinnatifida Harv. ............. 22, 57, 65, 66 
TA SRUTU SEE bocce occ NU On ra Nul 32 | Undariopsis Petersiana Mig. et Okam............. II 
5 Sites cree ann ete be sens Eu Re eue RU 8 
Denia re MT dde renteNote RSS PE RES 19 Vv 
M'ORRUER oe es sea cea ek near ee terre 27, 65 
Whaataxine 5002 orme ARO 4 SOS 85 | Valonia ægagrophila..................... Satie teas 65 
MARS cc ent ues oes Sates 33, 34, 35, 27, 28 | Valonia cæspitula Zanard........................ 18 
Toï-choy....................... css. css 27:50". VACONIACHES, «av UT RER eek UMR 18 
TOLOFOSCN BUSA 1.0.0 0's 0 nes ee» AA SAE EEN ES 27°) Valoniatncrustans Kitz: saa. ose ese a vee ean ss rer 18 
TPRGROTER IST ee TER oe oh ets es ary Dito es ares 27 = utricularis (Roth.): Ag... ec MONS 18 
Tokoro tengusa ...... tec e este ete terete ee ete eee es 27 | Vdicherig Plus... LAUSANNE 65 
TOMASI 1 5 ios eds din slone ne si) Vues 0e - 28, 81 | Vegetabilischer Fischleim....................:..... 27 
Wosdkarn css 4 once Fes he ey Fe tise alt 29, 30, 58 
MESSER Sars nae eda hase ce soa eg Wes nue eh Se pe kes 27 
OSARM OTIS os eens vases. fear es Aa os tier ean AND 58 WwW 
gE ET ER eR Tae en Ve ODA NUS 30 Weenie: 111... Uri Dee EVER . 22 
EU Ur Bo 5 eos eats tr sa oe Ae OS A me eee 94 ft Wakames: =: TL oes AR eae 22:07, 65, 72 
TACRATE RCA ALL sour NES En CAN PSE SR RSS 27 | Wildemania laciniata (Lightf.) J. Ag.............. 25 
DANSE Se ee er Le marne ter) den 27 a perforata (J. Ag.) de Toni....... FESR We al. 
A SUCHOV aie tie cad bere eh pd De dure ko Bean Gee 59 
SCO MR So Sore oo solo eh ee ain oot en ee 22, 58 
Turbinaria fusiformis Yendo.................... 23 x 
KPIANÉ ay cats vaste dore OR SN RE 
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Ulopteryx pinnatifida (Harv.) Kjellm...... 11, 22, 65 
ULVACEES...... A SEE AS ana haa 6 5b. 4.e eiolpinjois ats ge {MOE RIES ay yee AEA TS oye 34 
Ulva compressa prolifera J. Ag.................. 16 
— dichotoma Huds............., 4.44... 25 Zz 
— Enteromorpha compressa Le Jol............ 17 
_— — intestinalis Le Jol............ 17 | Zygnema.............. sers ea sa ae 


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TABLE DES PLANCHES 


DT. PLANCHE I 
1. — Laminaria Cloustoni Le Jol. 


Coupe longitudinale faite à la partie inférieure du point végétatif. A droite de la figure, il n’y a pas encore de méats. 
Ils apparaissent d’abord vers la périphérie, pour être refoulés progressivement en dedans de la couche corticale. is 
méat le plus interne possède déjà, à sa base, deux cellules sécrétrices (d’après GuiGNArRD). 


2 et 3. — Laminaria saccharina. (L.) Lamour. 


Réseau mucifère d’une lame ayant 80 centimètres de longueur et 16 centimètres de largeur, pris à 20 centimètres de la 
base de la lame. La figure 2 représente le réseau sur la ligne médiane, la figure 3 sur le bord de la lame (d’après 
GuiGNARD). 

4et 5. — Laminaria Cloustoni Le Jol. 

Réseau mucifére d’un échantillon adulte, dont la lame comprenait cing lobes. Les deux figures ont été prises 4 une 
distance de 10 centimétres de la base de la lame. La figure 5 représente le réseau dans le lobe médian; la figure 4, le 
réseau vers le bord de l’un des deux lobes externes (d’après GuIGNARD). 

6.— Laminaria Cloustoni Le Jol. 


Coupe montrant le développement des cellules sécrétrices à la base des méats. 


.7. — Laminaria Cloustoni Le Jol. 
Réseau mucifère isolé par deux sections tangentielles pour montrer la formation des anastomoses (d’après GuIGNARD). 


8. — Laminaria Clonstoni Le Jol. 

Coupe transversale montrant * formation des méats dans l’assise sous-jacente aux cellules superficielles (d’après 
GuicNarb). 

9. — Laminaria Cloustoni Le Jol. 

Figure représentant la moitié inférieure d’une partie du réseau glandulaire, de façon à montrer par leur face supérieure 
les glandes gl’, gl; p, le parenchyme de la lame (d’après GuiGnarp). 

10, — Laminaria Cloustoni Le Jol. 


Section transversale de la lame. Le canal médian offre deux glandes, à cellules disposées en croissant sur la section; 
dans les deux canaux latéraux, les croissants ont rapproché leurs bords, de façon à former une cavité tubulaire. Au 
sommet du tube excréteur du canal médian l’épiderme est légèrement soulevé (d’après GuiGNaR»). 


PLANCHE II 


1. — Laminaria longipedalis Miyabe (d’après SmitH). 
2. — Laminaria japonica Ares (d’après Smitu). 
3. — Laminaria Cloustoni Le Jol. 


. A droite. — Plante avec sa jeune fronde déjà découpée et portant encore celle de l’année précédente — point végétatis 
ou zone génératrice du pied et de la fronde. 
A gauche. — La même espèce très jeune (1/3 grandeur naturelle, d’après GuiGNaRD). 


4. — Ulopteryx pinnatifida (Harv.) Kjellm. 
Coupe transversale passant par une jeune glande (d’après YENDO). 


100 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


5. — Ulopteryx pinnatifida (Harv.) Kjellm. 

Deux glandes voisines, en coupe transversale (d’après YENDO). 
6. — Ulopteryx pinnatifida (Harv.) Kjellm. 

Forme typique d’une cellule glandulaire, en coupe transversale (d’après Vanpo). 
7. — Ecklonia bicyclis Kjellm (d’après SmitH). 


8. — Alaria crassifolia Kjellm (d’après Smiru). 
9. — Arthrothamnus bifidus (Gmel.) Rupr (d’après Smrtu). 


PLANCHE III 


1. — Alaria pinnatifida Harv., état jeune (d’après SURINGAR). 
2. — Turbinaria fusiformis Yendo. : 


Deux formes de la plante (d’après YENDo). 


3. — Fucus evanescens Ag. 
Deux formes de la plante (d’après YENDo). 


4. — Phyllitis Fascia Ktz (d’après Okamura). 


PLANCHE IV an 


Lohan: 


1. — Gracilaria coronopifolia J. Ag. (d’après REED). 
2. — Hypnea. — Limu huna (d’après REED). 
3. — Sargassumenerve Ag. 


eee) 


Frondes fertiles et fronde stérile (d’aprés YENDO). 


4. — Ahnfeldtia concinna J. Ag. (d’aprés REED). 
5, — Grateloupia filicina Ag. (d’après REeEp). 


PLANCHE V 
1. — Laminaria Cloustoni Le Jol. 
Réseau mucifére de la lame adulte, isolé, vu par sa face supérieure ; 6, branches des mailles du réseau; g/, cellules 
sécrétrices groupées en états glanduleux; t, sections des tubes excréteurs qui se dressent vers l’épiderme (d’après 
GuIGNARD). 


2. — Ecklonia cava Kjellm (d’après Smrra). 

3. — Hawaïen cherchant les Algues dans la mer, à l’aide d’une boîte munie d’une glace (d’après REED). 
4. — Porphyra laciniata (Lightf) J. Ag. (d’après SMITH). 

5. = Ulopteryx pinnatifida (Harv.) Kjellm. 


États variés de glandes vus sur une même coupe transversale. Au centre, il semble qu’une cellule glandulaire ait 
fusionné avec une cellule épidermique (d’après YENDO). 


6. — Ulopteryx pinnatifida (Harv.) Kjellm. 
Section transversale d’une fronde montrant une glande adulte avec son contenu (d’après YENDO). 


SU TL SE CS SN. es | ne Ces mere de ee Se” dd 


7 et 8. — Ulopteryx pinnatifida (Harv.) Kjellm. 

Orifice externe de la glande vu par la surface. En 8, les cellules épidermiques sont en voie de dégénération (d’après 
ou 
9. — Echantillon de wakame, photographié d’après nature et un peu réduit. 


LP 


nl 


PLANCHE VI 


1. — Amansia glomerata Ag. (d’après OKAMURA). 

2. — Gelidium subcostatum Okam. (d’après OKAMURA). 

3. — Acanthopeltis japonica Okam. (d’après OKAMuRA). 

4. — Gymnogongrus flabelliformis (Harv.) (d’après SurINGAR). 
5. — Polysiphonia tapinocarpa Suring. (d’après SURINGAR). 

6. — Gigartina Teedii (Roth.) Lam. (d’après Okamura). 

7- — Oigenea simplex (Wulf.) J. Ag. (d’après OKAMURA). 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 101 


PLANCHE VIL 


1. — Asparagopsis Sanfordiana Harv. (d’après OKAmMuRa). 
2. — Halymenia formosa Harv. (d’après OKAmuRA). 
3. — Gelidium pusillum (Stackh.) Le Jol. 


A droite légèrement réduit et à gauche très réduit (d’après Surincar). 


4. — Polysiphonia fragilis Suring. 
Divers rameaux (d’après SURINGAR). 


5. — Eucheuma spinosum Ag. (d’après OKAMURA). 
6. — Gloiopletis coliformis Harv. (d’après Smiru). 
7. — Gelidium japonicum Okam. (d’après HoLMEs). 


a me PLANCHE VIII 


1. — Gloiopeltis intricata Suring. (d’après SURINGAR). 
2. — Gloiopeltis tenax (Turn.) J. Ag. (d’après HoLues). 
3. — Gelidium corneum (Huds.) Lam. (d’après Smrrn). 
4. — Gelidium rigens Mart. (d’après OkAMuRA). 

5. — Hypnæa musciformis Lamour. (d’après OKkamuRA). 


. PLANCHE IX 


1. — Une feuille d’amanori, photographiée d’après nature et un peu réduite. 
2. — Rouleau de funori (d’après SmrrH). 

3. — Kombu (Échantillon photographié d’après nature, un peu réduit). 
4. — Kanten en barres (d’après Smiru). 

5. — Kanten en baguettes (d’après Situ). 


PLANCHE X 


1. — Plan du village de Hirayashu (d’après un plan donné par OKAMURA). 
La terre est en grisé. Les lieux de germination sont en noir et les lieux de transplantation en blanc. 


2. — A gauche, un sudate ; à droite, la pièce de bois servant à l’enfoncer us la vase (d’après Smitu). 
À — Préparation du sudate (d’après Surru). 
— Plantation des sudate (d’après Situ). 


5. — «Larve» très grossie de |’ «insecte » Sei (d’après OkamuRA). 
6. — Instruments de pêche servant à la récolte du kombu (d’après Smiru). 
7. — Récolte du kombu (d’après SmrrH). 
— Flottille de pêcheurs recueillant le kombu (d'après SMITH). 
— Séchage des grandes laminaires servant à faire le kombu, sur la plage de Hokkaido (d’après Smitn). 


Analyse d’une poussière éolienne de Monaco 


et 


Considérations générales relatives à l'influence de la déflation 


= sur la constitution lithologique du sol océanique, 


Par J. THOULET, 


Professeur à l’Université de Nancy. 


L'étude des poussières éoliennes importe à l’océanographie. Répandues en abon- 
dance au sein de l'atsmosphère au-dessus des continents où elles prennent naissance, 
elles sont entraînées par les vents au-dessus des océans et, comme elles finissent tôt ou 
tard par tomber à la surface de la mer, elles descendent à travers la masse des eaux et 
parviennent sur le fond où on les retrouve. La lithologie sous-marine ne saurait donc se 
désintéresser de leur étude. II convient, par conséquent, d’observer d'abord les poussières 
continentales et d’essayer de connaître, à l’aide d'analyses, leurs caractères constitu.ifs et 
les lois de leur distribution. On appliquera ensuite ces connaissances à l'examen des fonds 
marins et on cherchera à retrouver i les caractères de ceux-ci les effets et les consé- 
quences des lois découvertes. 

Une analyse de poussière exige de 5 à 10 grammesenviron de matière d’essai. Divers 
appareils ont été imaginés dans le but de récolter directement les poussiéres atmosphé- 
riques; mais, quels qu'ils soient, ils ont l'inconvénient d’obliger à une installation parfois 
assez importante et de ne fournir qu’un faible poids de matière d'essai à peine suffisant pour 
un simple examen qualitatif au microscope et insuffisant s’il s’agit d'une analyse quanti- 
tative, même approximative. I] m'a semblé plus commode de recueillir directement les 
sédiments éoliens dans les clochers d’églises où ils s'accumulent et où ils sont, grâce à la 
hauteur des édifices, débarrassés des matériaux grossiers déposés sur le sol et s’élevant 

- peu. On les récolte de préférence sur le dessus des poutres qu’on balaie avec un pinceauet 
en rejetant, bien entendu, les matières évidemment étrangères, fragments de bois, débris 
organiques et inorganiques divers, carapaces d'insectes, brins d’herbes desséchées, plâtras 


ou toiles d'araignées. On met dans un flacon, on secoue, et il n’est pas rare alors que les 
T. I. — Fasc. 2. I 


2 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


toiles d'araignées dont il est assez difficile de se débarrasser, se feutrent et forment une 
boulette aisée à enlever. 

Après de nombreux essais, le mode d’’analyse que j'ai adopté est le suivant. 

On commence par passer au tamis 30,afin deséparer une certaine quantité d'éléments 
étrangers ; on lave à l’eau tiède, on laisse déposer, on supprimeune nouvelle portion de 
matières étrangères restées en flottaison, on décante, on sèche et on pèse la prise d’essai 
après avoir eu soin d’en mettre de côté une petite quantité destinée à être observée au 
microscope au point de vue des éléments calcaires. Il est utile de ne pas employer trop 
d'eau pour l'opération, car on peut alors prendre une goutte du liquide, l’évaporer sur 
une lame de verre et examiner les sels cristallisés. On observe fréquemment ainsi des 
traces de chlorure de sodium provenant d’embruns marins pulvérisés et entraînés par le 
vent à des distances de la mer quelquefois considérables. Le poids total de matière d'essai 
varie de 5 à 10 grammes, selon la proportion supposée des minéraux contenus. 

On dose alors le calcaire par la méthode abrégée (1), au moyen de l’acide chlorhy- 
drique étendu de deux fois son volume d’eau. On évalue l’acide carbonique dégagé par 
perte de poids et l’on en déduit le poids du calcaire. Aussitôt l’opération terminée, on 
verse dans une capsule de porcelaine, on dépose, s’il y alieu, un gros morceau de 
marbre afin de neutraliser rapidement l'acide en excès et l'empêcher de trop attaquer les 
matières ferrugineuses ; dès que toute effervescence a cessé et, après qu’on a ajouté de 
l’eau, on laisse déposer et on décante. 

Le résidu encore mouillé est lévigé et passé au ballon à robinet, de manière à le diviser 
entrois portions : 

A) Le sable, résidu immédiat de lévigation ; 

B) Les fins-fins, soutirés du ballon; 

C) L’eau bourbeuse restée dans le ballon. 

La portion C, versée dans une capsule, est abandonnée au repos; on recueille les 
matières légères généralement collées contre le bord de la capsule, à la surface de l’eau; 
on décante, on sèche et on pèse. Une portion, préalablement pesée, est calcinée, et la perte 
de poids, considérée comme provenant de l’incinération des matières organiques, permet 
de calculer, dans le résidu total, la quantité de ces matières et celle de l'argile. 

La même calcination partielle est faite sur les fins-fins B auxquels on a ajouté les fins- 
fins retirés du sable A par un tamisage au tamis 200. On a ainsi le poids de ces fins-fins 
et de la matière organique qu'ils contenaient. £ 

Le sable A, moins les fins-fins extraits, est pesé, et son poids, ajouté à ceux des matières 
organiques, de l’argile et des fins-fins, sert à obtenir, par un nouveau calcul, le poids:du 
calcaire. On le passe ensuite à la liqueur d’iodures de densité 2,8 ; les minéraux tombés 
sont isolés, lavés et pesés. 

‘On étend d’eau la liqueur d’iodures suffisamment pour qu'un témoin de ie hyalin 
tombe bien franchement; on soutire et on obtient les légers. 


(1) Voy. TaouLgr, Instructions pratiques pour l'établissement d’une ‘carte bathy métrique Roatan Se et sous- 
marine (Bulletin de l’Institut Océanographique, n° 169, 25 mai 1910, p. 12 et suiv.). 33 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 3 


Enfin on ajoute encore une nouvelle quantité d'eau à la liqueur, ce qui fait tomber 
uné nouvelle quantité de matière organique qui est recueillie. 

Les fins-fins; les légers et les lourds passés au barreau aimanté donnent les éléments 
attirables qui sont pesés. | 

Si on le juge nécessaire, on tamise le sable aux divers tamis 30, 60 et roo. Cetté opé- 
ration est le plus souvent inutile, parce que les grains gros et moyens sont toujours absents 
ou en proportion infiniment petite. On ne sépare donc ainsi que le sable fin du sable très 
fin. pat | 

Les diverses portions de la prise d’essai étant ainsi isolées et pesées, on les raméne par 
le calcula 100 pour avoir l’analyse complète. Maisil importe de faire ici deux remarques. 
Tout d’abord la proportion de matière organique est sans grand intérêt, car elle est émi- 
nemment variable, comme il est facile de s’en convaincre en exécutant deux fois de 
suite l'analyse d’un même échantillon de poussière. Quelque soin que l’on prenne, il est 
impossible d'en débarrasser complètement la prise d'essai brute. Il y aura donc lieu de se 
livrer à un nouveau calcul de l'analyse totale en supprimant la proportion de la matière 
organique et en ramenant le reste à 100. 

Le chiffre trouvé pour le calcaire donne prise à discussion. Il se peut évidemment 
qu’une certaine partie provienne des fragments de mortier détachés des murailles et mé- 
langés à la poussière. En outre, il arrive souvent, surtout dans les pays du Midi, que les 
clochers soient blanchis au lait de chaux et, dans ce cas, de petites écailles de cet enduit 
risquent d’être mélangées aux véritables poussières. C’est pourquoi on aurait tort de 
‘toujours attribuer une rigueur absolue à la proportion dosée du carbonate de chaux. Je 
supprime donc encore, dans l’analyse totale, le calcaire et je réduis à 100 les proportions 
des éléments restants. En définitive, l'analyse d'une poussière éolienne se présentera sous 
la triple forme suivante : 


RTE ORAN. ns oa bodys tonnes e 0 » 0 fC) 
ROMER skids Un en Tig Stade de ola'a.o's » » 0 
PT op Le PV OS D PR CPP PIE » » » 
PURE ER Tee one a es es détenue oo e » > » 
Manéraux. !eLégers hi... 3 URSS eee » » » 
OS oe) oe at ois le UN ed ve nips ce » » » 
Penn ois’ de SPE NRL Cog tse «ea one à » » » 


100 100 100 


L'analyse au microscope s'exécute d'après les procédés ordinaires (1). Il importe 
cependant d’insister sur l'examen de la matière d’essai non mouillée, mais simplement 
observée dans l’air, à sec, afin de mieux apprécier si les grains sont lisses ou rugueux, 
fanguleux ou arrondis. La réserve de matière d'essai mise de côté avant toute attaque à 
W’acide sera ensuite examinée dans la naphtaline verdie, afin d’être renseigné sur les grains 
de calcaire qui absorbent la couleur. Enfin, on choisira les plus gros grains sableux et on 
‘mesurera Jeur diamètre moyen, ce qui permettra, au moyen du tableau ci- -dessous, 
d’ estimer la vitesse maximum du vent qui les a transportés. 


_ (1) J. Taouer, Précis d'analyse des fonds sous-marins actuels et anciens. Chapelot et C'*, 1907, Paris, 


4 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE É 


Ce tableau a été établi expérimentalement de la manière suivante. Un flacon à deux 
tubulures, dont le fond supprimé a été remplacé par une feuille de parchemin bien tendue, 
a reçu une certaine quantité de quartz hyalin pulvérisé en grains de dimensions variées. 
L'une des tubulures livre passage à un tube descendant tout près du fond et en commu- 
nication avec une pompe soufflante mue à la main et communiquant d’autre part avec un 
manomètre. La seconde tubulure reçoit un tube vertical de diamètre préalablement me- 
suré qui, après s'être recourbé deux fois, aboutit à un vaste récipient, gros flacon à deux 
tubulures dont l’une est bouchée par une double épaisseur de tissu à tamis n° 200 et qui 
est par conséquent en libre communication avec l'atmosphère. On tourne régulièrement 
la roue à volant de la pompe soufflante en se réglant sur la cadence d’un métronome et sur 
l'indication fournie par le niveau du mercure dans le manomètre. Pendant ce temps, un 
aide frappe sur le parchemin, comme sur un tambour, de petits coups qui font sautiller 
les grains de quartz, lesquels, arrivés à l'entrée du tube vertical ascendant, sont, pour un 
vent de vitesse déterminée, enlevés et transportés dans le gros récipient où ils s'arrêtent, se 
déposent et sont recueillis. On mesure sous le microscope leur dimension moyenne. La 
vitesse du vent est facile à évaluer en recueillant à travers de l’eau, dans un récipient cubé, 
le volume d’air qui, pendant un temps connu,.s‘est écoulé par le tube vertical ascendant 
dont on connaît le diamètre. 

Les valeurs obtenues ainsi expérimentalement ont été inscrites sur du papier qua- 
drillé et mises sous la forme d’une courbe qui, dans l’espéce, est une ligne droite; on a, 
en outre, évalué graphiquement les dimensions de grains correspondant à des vitesses de 
vent d’un nombre rond de mètres à la seconde et, inversement, la vitesse en mètres par 
seconde de vents capables d’emporter des grains de quartz ayant la dimension moyenne 
des grains correspondant aux diverses catégories de sable gros, moyen, fin, très fin et des 
fins-fins. Ces diverses variables sont inscrites sur le tableau suivant : 


‘ 


VITESSE : VITESSE ‘ ; 4 
DIAMETRE , DIAMÈTRE À : 
du vent VENT EM DÉSIGNATION du vent pers DÉSIGNATION 
par en échelle d RE tis ARS: par en échelle d ai bse : 
seconde. de Beaufort. Line en CL seconde. de Beaufort. 2 ea des grues 
m. mm. m. mm. 
0,00 0,00 | 5,60 0,47 
0,50 | 0,04 Fins-fins. 6,00 0,4 
» 0 0,05 \ 6,30 0,5 
1,00 Calme. 0,08 6,95 0,56 
» 0,13 (Sable très fin 7 LA l 4 0,57 
À s 7 ; : 
2,00 = / 0,16 \ » ‘Jolie brise. 0,61 Sable moyen. 
ts ' » \ 770 
2,9 3 0,24 00 0, 
3.00 Presque calme. 0,25 8.10 0,66 
3,60 2 0,31 9,00 AE st 
4,00  SLégère brise. 0,33 Sable fin 9,10 bonne brise. > 
» 0,34 : 10,00 0,81 | 
4,30 0,35 11,00 0,89 
4,75 Petite tS 0,39 12,00 Bon ais 0,97 Sable gros. 
300 d 0,41 13,00 1,05 
5,25 » | » Crand fais. E502: 3t} 
| | \ | 


Les vitesses sont 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 5 


tableau est capable d'entraîner des grains de sable notablement plus gros que ceux indi- 
qués. Cette opinion se base sur les observations faites dans la nature du transport éolien 
de cailloux et, notamment, sur une observation récente faite en Suisse et résumée ci-des- 
sous. Si on se reporte au tableau, on remarque que, pour le transport de tels cailloux, il 
faudrait, d'après la courbe, des vitesses de vent infiniment supérieures à celles indiquées. 

Par conséquent, inversement, les vitesses indiquées au tableau doivent pouvoir 
transporter des grains de dimensions plus grandes que celles auxquelles elles corres- 
pondent sur le tableau. 

M. le D’. Louis Rollier (1) a publié un travail des plus suggestifs à ce point de vue, 
relatif à une pluie de petits cailloux tombée à Trélex-sur-Nyon, canton de Vaud, en Suisse, 
le 20 février 1907, vers 5 h. 15 du soir. A cette date, pendant un orage accompagné de 
grêle, eut lieu, sur toute la côte occidentale du lac Léman, aux environs de Nyon, et en 
particulier à Trélex, une abondante pluie de pierres ; 57 d’entre elles, étudiées, avaient 
un poids variant deo gr. 130 à 2 gr. 362, avec un diamètre maximum variant de 6 mm. 1 
à 15 mm. 5; elles étaient arrondies ou aplaties, roulées et polies, et leur densité 2, 650 
ainsi que leurs autres caractères minéralogiques montraient qu’elles étaient constituées 
par du quartz laiteux. Considérant la direction S.-S.-W et S.-W du vent alors régnant 
et sa vitesse maxima de 20 mètres par seconde, l'auteur, par une sérieuse discussion 
des diverses particularités du phénomène, est amené à admettre que ces cailloux devaient 
provenir du rivage méditerranéen des Maures et de l’Estérel, sinon de la Meseta ibérique, 
ou encore plus au Sud, de sorte que leur transport s'était effectué sur une distance d'au 
moins 350 kilomètres. Il y aurait également à citer la pluie de petites pierres calcaires en 
fragments aplatis de 25 à 30 millimètres de diamètre venant du calcaire lacustre de 
Château-Landon (Seine-et-Marne) et transportés à plus de 150 kilomètres de leur lieu 
d'origine, ainsi que la chute, à Broby, dans le Westmanland, au S.-E. de la Suède, le 
4 juillet 1883, de pierres enveloppées dans de gros grêlons ovoïdes, plus ou moins aplatis, 
« de la taille d'œufs de poule et de pommes de terre ». Ces pierres étaient en fragments 
anguleux, à arêtes vives, de quartz laiteux, de poids compris entre o gr. 9 et 5 gr. 8 et de 
la grosseur maximum d’une noisette. Ils arrivaient d'une région granitique de la Suède, 
située dans la direction de la Dalécarlie, au N. W de la ville d'Enkôping par où avait 
passé l'orage à une distance de plus de 60 kilomètres (2). 

Appliquons ce qui vient d'être dit à l'analyse d'une poussière éolienne, recueillie le 
7 juillet 1910, par M. Sirvent, sur des poutres en bois, dans le clocher de la cathédrale 
de Monaco, grace à l’aimable autorisation de Mgr. Mercer, curé de la cathédrale. 


(1) Dr Louis RoLLiEr, professeur agrégé au Polytechnicon de Zurich, Sur une pluie de petits cailloux de quart; à 
Trélex-sur-Nyon, canton de Vaud, Suisse), le 20 février 1907, vers 5h. 1/4 du soir (Actes de la Société Helvétique 
des Sciences naturelles, go* session, à Fribourg, vol. I. Conférences et procès-verbaux des séances, 1907, p. 248). 

(1) Ne serait-il pas possible d’expliquer ces faits en admettant que, de même qu’une matière inerte solide, quartz, 
charbon, verre ou autre, immergée dans la solution d’un solide quelconque, détitre celle-ci en fixant à sa surface, par 
absorption, une certaine quantité du corps dissous, de même un solide, au sein de l’atmosphère, condense autour de 
lui une enveloppe d’air ou de vapeur d’eau ? Le volume et la densité du caillou entraîné ne seraient pas en réalité son 
volume apparent et sa densité de minéral, mais bien une densité moindre résultant d’un volume complexe com 
posé du volume réel du caillou et de sa gaine condensée ? Ce phénomène joue dans la nature, et one err mane en 
géologie et en océanographie, un rôle beaucoup plus important qu on ne le croit. 


6 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


L'analyse a été faite sur 8,427 grammes de matière. Après dosage du calcaire par une 
attaque à l'acide chlorhydrique étendu et pesée de l'acide carbonique dégagé, le résidu, 
lévigé par l'eau, a été séparé en trois portions : A, sable ; B, fins-fins; C, résidu vaseux de 
l'eau trouble. La portion A a été passée à la liqueur d' todos de densité 2, 8 et partagés 
en lourds et légers ; enfin les lourds ont été passés au barreau aimarté. 
L'analyse a donné le résultat suivant : I, en tenant compte de la matière organique et 
du calcaire ; II, en ne tenant pas compte de la matière organique; iil, en ne tenant compte 


ni de ae mue organique ni du calcaire : ERA 
I Il ; i 
Matières organiques.............. ..... II »  » 
CRICAITE Mie Vote land toe sa NS die 43. 49 » 
Mat. ferrugineuses. tr. rites at 
LGUrdS ta ta alt DURS et GENS ser \ (0,5) 
Minéraux Leébers ne ee ce ve cee 44) 27 49 30 96 58 
Fins-fins:, 4.1. PEt SN LAS | 17 19 ( ES ie 
dr] (See apse a re ei Ar RTE 2 2 4 
100 ; 100 100 


Les huit plus gros grains minéraux étaient du quartz ferrugineux arrondi, rugueux ; 
leur dimension moyenne était de 0,69 x 0,69 millimètres (long. max. = 0,96; long. 
min. — 0,46), correspondant à un vent de vitesse maximum de 8 m. 50 par seconde 
(bonne brise 5 Beaufort). . 

L'examen microscopique a donné les résultats suivants : 


Matières diverses. — Toiles d'araignées, petits globules de résine verdâtre A, — 
Diatomées RR, — débris de végétaux — poussières charbonneuses AA. — 
_ Matières ferrugineuses aliérables. — Chondres noirs ; magnétite souvent un pcu 
ocreuse. | 


Lourds. — Biotite A, — muscovite A, — augite A, — grenat, — amphibole RR, — 
zircon en gros cristaux R et en petits cristaux, — quartz hyalin ferrugineux, — matières 
ferrugineuses amorphes (rouille). : F * oh 

- Légers. — Quartz ferrugineux en gros grains rugueux et en petits grains A — quartz 
anguleux poli, — silex RR, —orthose R, — anorthite R, — ChloriteRR, — chondres j jatinés 
et bruns, — fragments de briques, — platras ferrugineux AA. shou 

Argile, assez ferrugineuse. omni se Re Al . 

Les environs de Monaco (1) sont des calcaires appartenant au jurassique supérieur, 
au crétacé supérieur et au tertiaire ; a une distance variant de 40 à 80 kilomètres au Nord, 
s'étend le massif alpin de riitcechiews et gneiss avec granite a amphibole de Saint-Etienne 
et de Saint-Martin-de-Lantosque et, entre 50 et 120 kilométres, au S.-W, le massif de 
même constitution des montagnes des Maures. “RS 

J'ai publié antérieurement (2) des analyses de poussières éoliennes récoltées dans 
des clochers à Nancy, Epinal, Gérardmer, Montpellier, Cette et Horta, dans l'île Fayal, 
aux Açores. La comparaison des résultats obtenus auxquels on peut joindre ceux de 
l'analyse de la poussière de Monaco, permet de formuler la loi suivante. 


(1) Carte géologique de la ‘France à l'échelle du millionième, Ministère des Travaux publics. 
(2) Voy. THourer, Cemptes rendus de l’Académie des sciences, 1* juin 1908, décembre 1908, avril 1910, etc. 


ANNALES DE L'INSTITUT. OCEANOGRAPHIQUE 7 


Les sédiments éoliens, en une localité quelconque, sont composés, en outre des matières 
organiques ou inorganiques diverses dont il n'y a guère lieu de tenir compte, de glo- 
bules ou chondres noirs, bruns et jaunes, d'origine cosmique, et de grains minéraux variés 
dont l'abondance est directement proportionnelle au voisinage plus ou moins rapproché 
des gisements de ces minéraux, la direction et la force des vents transportants étant prises en 
considération. | 

-J'ai, d'autre part (1), eflectué un nombre considérable d'analyses de fonds marins 
profonds en majorité recueillis dans l’intérieur et au large des archipels des Açores et du 
cap Vert, dans l’océan Atlantique. Leur examen a donné lieu aux observations suivantes. 

Les sédiments minéraux marins (sable et fins-fins), abstraction faite du calcaire si 
souvent d’origine organique, surtout au large, obéissent aux mêmes lois que les poussières 
terrestres. Comme elles, ils contiennent des chondres noirs, bruns et jaunes, d’origine 
cosmique. Le diamant a été trouvé dans le golfe de Gascogne et auprès de Nancy. 

Dans tous, on rencontre des minéraux d'espèces très variées dont l’abondance est 
directement proportionnelle à la distance, à la localité de provenance. C’est ainsi queles 
forids des archipels des Açores et du cap Vert, voisins d’évents volcaniques sous-marins, 
manifestent une prédominance de minéraux volcaniques, scories, obsidiennes et ponces ; 
que ceux proches de la Nouvelle-Zemble (2), qui est basaltique, sont riches en basalte; ceux 
‘de FOcéan Indien, autour de Madagascar (3), abondent en chlorite. Les fonds éloignés 
des terres Sont remarquablement pauvres en minéraux (5 p. 100 au plus et presque 
toujours beaucoup moins), et ils s'enrichissent en se rapprochant des continents. Autour 
de certaines îles isolées comme Fayal, pour des distances à la terre sensiblement 
égales, l'abondance de la teneur en minéraux dépend de l'orientation et semble être plus 
grande sous le vent qu’au vent de l’ile. Des recherches méthodiques auraient avantage à 
être instituées à ce sujet. 

Les minéraux des poussières terrestres et ceux des fonds marins présentent au 
microscope un aspect tellement identique qu'ils sont fort difficiles et le plus souvent même 
impossibles à différencier: On est donc fondé à admettre qu'ils ont même origine et que 
les uns et les autres sont des produits de déflation. La seule différence serait dans une 
plus grande uniformité de dimensions dans les grains des fonds et l'abondance de grains 
aplatis reconnaissables à l’uniformité des teintes de polarisation. Cette circonstance 
viendrait appuyer l'hypothèse d’une commune provenance éolienne, car des formes 
aplaties sont, pour un même vent, entraînées plus loin que des formes globuleuses. C’est 
pour ce motif que des grains de feldspath lamellaires, à cause de leurs clivages, doivent 
être entraînés et déposés plus loin de leur gisement primitif que des grains de quartz. La 
_ plupart des grains fins des fonds marins et des poussières terrestres sont lisses et angu- 
leux, tandis que les gros sont, au contraire, rugueux et arrondis, ce qui s'explique 
aisément. | 


(1) Taoucer, Résultats des campagnes scientifiques du Prince de Monaco. Fascicules XIX, 1901; XXII, 1902, et 
XXIX, 1905. 

(2) Tuouter, Étude lithologique des fonds recueillis dans les parages de la Nouvelle-Zemble. Duc d'Orléans, Cam- 
pagne arctique de 1907. ‘ 

(3) Tuouter, Etude de fonds marins récoltés entre Madagascar et la Réunion. Annales hydrographiques, 1907. 


8 : ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Le tableau précédent montre que les fins-fins et le sable très fin qui constituent la presque 
totalité des éléments minéraux des fonds marins, sont entrainés par des vents ayant des 
vitesses comprises entre o et 2 mètres par seconde, c’est-à-dire correspondant à un état de 
l’'atmosphèrequalifié de «calme » ou «presquecalme » parles météorologistes, et notéo et 1 
dans l'échelle de Beaufort, tandis qu'une brise dénommée « légère » ou « petite » est plus 
que suffisante pour des grains fins qui sont déjà une exception dans les fonds. On peut 
donc affirmer, en jetant en outre un coup d’ceil sur les cartes de Brault, qu'il n’est aucune 
région de l'Océan, si éloignée qu'elle soit de toute terre, qui ne soit susceptible de recevoir 
des grains minéraux ayant au moins ces dimensions et destinés à tomber ensuite à peu 
près verticalement sur le sol. On s'explique, en outre, le fait, constaté par l'observation 
directe des fonds profonds, de l'extrême dissémination sur la surface entière du lit 
océanique et de l'extrême variété de nature minéralogique, des minéraux dont la genèse 
est par conséquent éolienne. Les cendres du Krakatau qui, demeurées en suspension dans 


les hauteurs de l'atmosphère, ont fait plusieurs fois le tour de la terre, apportent une 


nouvelle confirmation de cette origine. 

Il est évident que tout cé qui a été dit des fonds marins actuels s'applique aux 
fonds marins anciens qui sont les roches sédimentaires géologiques et particulièrement 
aux calcaires. On sera donc en état de découvrir les détails de leur genèse et de recon- 
stituer les conditions ambiantes du milieu au moment de leur formation par un examen 
de leurs éléments minéraux, tels qu’on les obtient après une attaque de la roche par l'acide. 
On parviendra ainsi à établir, sur des données vigoureuses et indiscutables, une véritable 
paléogéographie. 


Densité de Sondages 


et 


Véracité des cartes bathymétriques sous-marines 


oa mane Pas L'FHOULET, 


Professeur à l’Université de Nancy. 


Il n’est pas toujours facile d'apprécier le degré de confiance à accorder à la carte bathy- 
métrique d’une région sous-marine ou, en d’autres termes, d'estimer la ressemblance plus 
ou moins grande du relief figuré à l’aide de courbes isobathes, d'après des sondages, avec 
le relief véritable du sol tel qu’on l’observerait d'une façon absolument correcte si le 
terrain était exondé et accessible à la vue dans tous ses détails. Cette véracité dépend au 
moins de deux variables : la régularité du modelé même du fond et le nombre des 
sondages effectués. S'il est évident, en effet, que sur un sol peu accidenté, quelques points 
suffiront pour indiquer un modelé assez conforme à celui qui existe réellement, un sol 
très varié, comme il s'en trouve en beaucoup plus de régions de l'Océan qu'on ne le 
le soupçonnait autrefois, n'offrira pour le même nombre de sondages qu'une image incom- 
plète et grossière du véritable relief. 11 importe donc de chercher à estimer approxima- 
tivement le nombre de sondages indispensable pour permettre dans chaque cas d'établir, 
par courbes isobathes, un relief suffisamment conforme à la vérité. 

Afin de se former une opinion aussi exacte que possible, il convient de fixer, pour 
toutes les cartes bathymétriques, une commune mesure qui sera la densité de sondages 
Ds, c’est-à-dire le nombre de sondages par mille carré ou carré de 1 mille(— 1852 mètres) 
de côté. Si, par exemple, 308 coups de sonde ont été donnés sur une surface de mer de 
153821 milles carrés, la densité de sondages sera : 


Ds= — 0,002 002 


308 
153 821 
soit en nombres ronds : 


e 


Ds = 0,002 ou 1/500 


et il y aura, dans ce cas, 1 sondage seulement pour déterminer le relief sur un espace de 


500 milles carrés. . | 
; T. III. — Fasc. 2. 2 


‘10 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


On est donc amené à chercher tout d’abord le procédé le plus commode pour évaluer 
en milles carrés, sur une carte marine dressée en projection de Mercator, l'espace couvert 
par des sondages. 

On se rappelle que, sur le globe, chaque minute de degré mesurée sur un grand cercle, 
et par conséquent sur l’équateur ou sur un méridien quelconque, possède une longueur 
très sensiblement égale à 1 mille marin, tandis que, sur les petits cercles de latitude, 
la longueur de ce même arc de 1’ décroît à mesure que la latitude augmente depuis en- 
viron 1 mille à l'équateur même jusqu’à o au pôle. Lacirconférence entière de l'équateur 
étant égale à 27R, celle d'un petit cercle à la latitude x sera 27r ou 27R cos, puisque 
r==R tosh; 

A. Germain, dans son Traité des Projections des cartes géographiques (p. 373, Arthus 
Bertrand, Paris), a calculé de degré en degré, pour tous les petits cercles de latitude, la 
longueur en mètres de l’arc de 1°, le rayon terrestre étant supposé égal, à l'équateur, a 
6377397 m. 16, et au pôle à 6356078 m. 96, ce qui correspond à un aplatissement égal à 
1/299,15. On s’est borné, sur le tableau suivant, à ramener à la longueur de l'arc de 1’ 
celle de l’arc de 1°, en divisant par 60 les nombres de Germain, et à transformer les mètres 


‘ ae ; : I 
en milles, en multipliant le résultat par le nombre constant 7850 


= 0,00054 ou, plus 


simplement encore, en multipliant les nombres de Germain par le nombre constant: — 


I 


1852 X60 fit 120 — 


0,000009. 


————__________. 
LATITUDE peus LATITUDE VALEUR LATITUDE TAREE LATITUDE TALE 
ne de l’arc de 1’ À. de l'arc de 1’ FR de l'arc de 1° 2. de l'arc de 1' 
(milles). (milles). (tailles). (milles). 
0 1,001 2 0,915 8 0,6715 72 0,3105 
I Pe a o a if 0,6585 73 0,2938 
2 1,0011 26 0,9009 50 0,6452 74 0,2770 
3 1,0004 27 0,8932 51 0,6318 95 0,2601 
4 0,9993 28 0,8852 52 0,6180 76 0,2431 
5 0,997 29 0,8768 53 0,6041 77 0,2260 
6 Goes 30 0,8683 54 0,5901 78 0,1999 
7 0,9943 31 0,8594 55 0,5758 79 0,1917 
8 0,9921 32 0,8503 56 0,5614 80 0,1745 
‘9 0,9905 33 0,8410 5 0,5468 81 0,1572 
10 0,9866 34 0,8314 5 0,5321 82 0,13 
II 0,9834 35 0,8215 59 0,5172 83 0,122 
12 0,9800 36 0,8113 60 0,5021 8 0,1050 
13 0,9763 37 0,8010 61 0,4869 8 0,0876 
14 0,9722 38 0,7904 62 0,4715 86 0,0701 
15 0,9678 39 057798 63 0,4560 ÿ7 0,0500 
16 0,9632 40 0,7685 6 0,4403 0,0350 
17 0,9583 4! 0,7571 6 0,4245 89 0,0175 
18 0,9530 42 0,7456 66 0,4086 90 0,0000 
19 0,9475 43 0,7338 67 0,3925 
20 / 0,9417 44 0,7218 68 0,3763 
21 0,9356 45 0,7095 69 0,3600 
22 0,9292 46 0,6971 70 0,3436 
23 0,9226 47 0,684 4 71 0,3271 
—— wn 


ee ee 1 {a 


. 
= 
f 
re 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE Il 


en trapézes dont deux côtés seront parallèles entre eux et aux droites perpendiculaires 
entre elles représentant soit les petits cercles de latitude, soit les méridiens, ‘ou bien en 
triangles dont la base et la hauteur seront respectivement paralities a ces mémes droites. 
On évaluera ces bases et ces hauteurs en minutes d'arc qu’on transformera en milles 
marins, en ayant soin, quand elles seront parallèles aux droites de latitude, de multiplier 
les minutes par le nombre inscrit au tableau en face de la latitude dont il s’agit. On calcu- 
culera chacune de ces aires partielles et on en fera le total. 

_Il est impossible de noter d’une manière rigoureuse lirrégularité plus ou moins 
grande du relief d'un fond marin. Il y a là une question de jugement personnel. Quand, par 
exemple, on aura trouvé en sondant des profondeurs de positions voisines, très différentes 
les unes des autres, on sera en droit de soupconner le modelé d’être fortement accidenté 
et il faudra alors resserrer les sondages tandis qu’on les espacera dans le cascontraire. 

: Le nombre des sondages à effectuer dépend aussi de l’échelle de la carte. Pour cha- 
cune des échelles qu’on peut employer pour représenter une même aire maritime, il existe 
un nombre optimum de sondages qu'il serait inutile de dépasser, car, même si l’on devait 
diminuer la dimension d’une carte à grande échelle construite par isobathes très resserrées, 
il faudrait évidemment renoncer à tout inscrire et se décider à des sacrifices. Il y a, en 
outre, à considérer la situation des sondages. Au voisinage de la terre, la position étant 
relevée au sextant ou au cercle, sur des repères bien apparents situés sur la côte et dont les 
segments capables se coupent exactement au même endroit, on sera assuré de la précision. 
Il n'en sera déjà plus de même quand on opérera par alignements et par distances à un 
objet de hauteur connue évaluées par l’angle de hauteur ou parallaxe. La sécurité dimi- 
nuera encore si, au lieu de relèvements au sextant, on a pris des relèvements au compas. 
Au contraire, la confiance augmente si, quelle que soit la méthode de détermination 
employée, on obtient la location du sondage par plusieurs mesures directes dépassant le 
nombre strictement indispensable pour placer le point, et se confirmant ainsi les unes les 
autres. Il n’est pas possible de fixer une règle précise, en quelque sorte machinalement 
applicable. 

Les points desondages horsde la vuedeterre, déterminés astronomiquement, sontmoins 
précis, car l’approximation des observations même à laminute d'arc, ce qui a bien rarement 
lieu, ne place le point que quelque part sur un cercle d'environ un mille de diamètre ; 
souvent encore, à bord, la place où se tient l'opérateur au sextant pendant ses mesures, 
ainsi que l'endroit d’où l’on sonde, ne restent pas les mêmes. Le reportsur la carte implique 
la double erreur du rapporteur qui ne donne un angle guère au delà du quart de degré, 
c'est-à-dire quinze minutes, et de la marque même du point qui, si elle a un demi-milli- 
mètre de grosseur sur le papier, correspond à 5000 millimètres, soit 5 mètres sur le terrain. 
Ces considérations sont fréquemment mises en oubli, et c'est à ce propos que l'on pourrait 
rappeler le précepte connu qu’ « il est inutile de s'inquiéter d’une quatrième décimale, 
lorsque ni la seconde ni souvent la première ne sont certaines ». Le tact, l'expérience 
acquise, le bon sens ne doivent j jamais perdre leurs droits. 

L’exemple suivant aidera, je crois, à donner la notion du degré de véracité d'une 


Carte bathymétrique résultant de sondages. 


12 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Supposons que la France inversée soit enfoncée sous la mer de telle sorte que, ses 
rivages restant toujours au niveau de l'eau, les portions les plus hautes de son relief con- 
tinental soient alorsles plus profondément immergées. Il est évident que la profondeur de 
l'eau recouvrant chaque localité sera exactement égale à l'altitude de cette localité au- 
dessus du niveau de la mer. 

Admettons que, la France étant ainsi placée, nous ignorions tout de son modelé que 
nous cherchions à redécouvrir, sans la moindre idée préconçue, au moyen de sondages 
en nombre correspondant à des densités rondes par rapport à la.surface de la contrée. 
Après que ce travail aura été achevé en parfaite bonne foi, comparons le modelé obtenu 
dans chaque cas, au modelé véritable, à l'hypsométrie connue. Nous obtiendrons ainsi 
une notion visuelle sur le degré de véracité coorrespondant à une densité de sondages 
déterminée. 

La surface de la France continentale, par conséquent sans la Corse, est égale à 
527742 kilomètres carrés (Annuaire du Bureau des Longitudes pour 1911, p. 390 et suiv.), 
c'est-à-dire à un carré dont le côté égale : 


V 527 742 = 726,46 kilomètres ou 726 460 mètres, 
ou en milles : 


TO We 392,2 milles 


dont le carré : 
(392,2)? = 153 820,84 milles carrés, 


soit, en nombres ronds : 
153 821 milles carrés. 


D'autre part, le même Annuaire (p. 432) fournit l’altitude de 357chefs-lieux de dépar- 
tement et d'arrondissement. | 

Considérant alors chaque cote d'altitude comme une cote de profondeur obtenue par 
sondage, on reconnaît que, pour obtenir des densités de sondages respectivement égales à 
0,0001,0,0002, 0,001 et 0,002, par exemple, c’est-à-dire 1 sondage pour 10000, 5000, 1 000 
et 500 milles carrés, il faut exécuter des nombres de sondages respectivement égaux à :. 


153 821 — 15 et alors Ds = 0,0001 ou 1/10 000, 
10000 | 

153 821 aia AS Ds =0,0002 ou 1/5000, 
5 000 

153 821 __ 154 ds Ds=— 0,001 ou 1/1000, 
1000 

153 821 __ 306 ols Ds = 0,002 ou 1/500. 
500 


Afin de ne pas être influencé pour le choix des 15, 31, 154 et 308 points de sondages, 
les noms et les altitudes des 357 chefs-lieux de département et d’arrondissement ont été 
inscrits chacun sur une fiche, placés dans une boite, bien mélés, et on en a tiré au hasard 
d’abord 15, puis, dans une seconde opération identique, 31, dans une troisiéme 154, et 
dans une quatrième 308. Après avoir agrandi par la photographie une carte de la France 
et l'avoir amenée à l'échelle d'environ 13 200000, on en a pris un premier calque dessi- 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 13 


nant les contours sur lequel on a marqué, dans leur position, les 15 points désignés par le 
sort etensuite, sur trois autres calques; respectivement 31,154 et 308 localités considérées 
comme autant de sondages. Mais comme le rivage maritime, comparable à une série 
continue de points de profondeur égale à o permet de tracer avec unegrande véracité les 
isobathes du côté de l'Ouest et du Nord, tandis que rien de semblable n'existe le long des 
frontières terrestres, afin de conserver l'équilibre des conditions et de laisser continuer 
les isobathes jusqu'à ces frontières, on a supposé connues les profondeurs (altitudes) 
d’un certain nombre de villes étrangères trouvées dans les Physikalische Tabellen (p. 5 
et suiv.), dans le Dictionnaire géographique de Vivien de Saint-Martin, ainsi que dans des 
Guides Joanne. Ces points ont été marqués, eux aussi, sur les quatre calques, dans leur 
position géographique. 

_ On a alors tracé, sur chacune des quatre feuilles, les isobathes de 10, 20, 50, 100, 
200... mètres en ne se servant que des points désignés par le sort pour cette feuille et en 
opérant comme pour une région sous-marine incennue. Les aires isobathes ont été teintées 
en bleu, selon l’usage en océanographie, les plus profondes (celles, en réalité, d’altitudes 
plus élevées) étant les plus foncées. Pour permettre une comparaison utile, on a placé, 
dans un coin de chaque feuille, la France avec la dimension qu’elle possède à l'échelle 
du 1/10 000 ooo à l'équateur sur la Carte genérale des Océans, dite de Wiesbaden, publiée 
sous les auspices du Prince de Monaco. 

Il suffira de considérer successivement ces quatre cartesen commençant par celle où 
Ds = 0, 0001. de les comparer avec le véritable relief hypsométrique bien connu de la 
France, pour être édifié sur le degré de véracité obtenu dans chacun des cas considérés. Le 
relief ne commence guère a se conformer à la réalité qu'avec Ds = 0, 001 et est très 
suffisamment précis avec Ds = 0,002. Dans ce dernier cas, on reconnaît sur la carte les 
Pyrénées, la coupure du canal du Midi entre l'Océan et la Méditerranée, la vallée du 
Rhône, les Alpes, le Plateau Central, ceux du Morvan et de Langres, le Plateau normand, 
les collines de Bretagne, ainsi que les régions basses de la Vendée et dés Landes. Cepen- 
dant les Vosges ne sont pas visibles. 

Remarquons qu'il est peu probable qu'il existe des régions subocéaniques de même 
superficie aussi accidentées, pour la double raison que la France est très accidentée et, en 
second lieu, parce que l'érosion subaérienne qui avive continuellement le modelé du sol, 
le rend très déchiqueté, tandis que l’action des eaux et surtout le mode de dépôt des 
sédiments tendent au contraire à émousser le relief sous-marin. 

Les cartes isobathes sous-marines ont des densités extrêmement variables. Pour les 
cartes des côtes de France dressées par les ingénieurs hydrographes de la Marine, la 
densité, surtout sur les feuilles minutes, en admettant un coup de sonde tous les cent 
mètres, serait de 18><18 = 324. Sur la feuille B’I de la Carte générale des Océans, par 
exemple, l’espace de mer borné au Nord par le 47° parallèle, à l'Ouest par la côte orien- 
tale de l'Amérique du Sud, du cap Blanco au cap Horn, à l'Est par le 55° méridien Gr. passant 
dans l’Est des Malouines, au Sud par le 55° parallèle, contient 380 sondages pour 
188 236 milles carrés, ce qui donne une densité de sondages égale à 380 : 188 236 = 0, 002, 
c'est-à-dire 1 sondage pour 500 milles carrés. Sur le reste de la feuille, l’espace teinté en 


-14 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


bleu, à l'Est du 55° méridien Gr., contenant 49 sondages seulement pour une surface de 
1 992 600 mille ss la densité est 49: 1 992 600 = 0,00002, soit un sondage pour 50 000 
mille carrés. 

Il serait à désirer que les cartes par isobathes, surtout si elles sont à une échelle un 
peu grande, portent l'indication de leur densité moyenne de sondages. 

On peut, déla même façon, donner une notion sur la véracité d’une cartelithologique 
sous-marine et aussi, dans une certaine mesure, sur la complication lithologique du terrain : 
représenté, d’après la densité des sondages lithologiques déterminée absolument comme la 
densité des sondages bathymétriques. On remarquera, en outre, à ne s’en tenir qu’à la 
lithologie, que la densité dans les vases n’a aucun besoin d'être aussi #evée que dans des 
vases sableuses, des sables vaseux ou des sables. 

Sur les trois feuilles terminées de ma carte bathy-lithologique des côtes de golfe du 
Lion, les densités des sondages lithologiques sont les suivantes : 


. Feuille 5172 de la Marine ; du cap d’Agde a Palavas : 


Nombre de MOMOAWER, nc Lan re 40 jos od] evens ey CRE eee eee 100° 
Superficie étudiée. :........, Pe Pe UN ee Gcide cee ia wi ve rés. | 164 milles carrés. 
“Densité de-sondages..<,........ soiree te at PR TE ST ETS D . 0,61 


ou 6i sondages pour 100 milles carrés. 


Feuille 1167 de la Marine; de Gruissan au cap d’Agde : 


Nombre de sondages.......... PRE MR ere pe er PRO RS 82 
Superficie étudiée... :.. AT ER TPE NET use PSS 7 RUE FAST AURErS 131 milles carrés. 
Densité :de;sondages 5, ADN ere tee RE D PA . 0,62 


ou 62 sondages pour 100 milles carrés. 


’ Feuille 1166 de la Marine; de l'embouchure de la Tét 4 Gruissan : 


14 


Nombre ‘de sondapes. reseau ee i 86 
Superficie étudiée............. eo NUE 3 Meigiatete cla NES oa PR oe ae eae "123 milles carrés. 
Densité de sondages. :1....,..:....7, ae SOs Clawson wa des Fa ANNE Se 0,70 


“ou-7o sondages pour 100 milles carrés. 


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200‘0 Ad SHOVGNOS Ad “ALISNAG ANA OWAV HONVAA WT Ad GAOL LAWAHLVE ALHVO 


Quinze mois aux îles Kerguelen 


Par M. RALLIER DU BATY, 


Capitaine au long cours. 


J'ai eu l’honneur de faire partie, au modeste titre de matelot, de la première expé- 
_ dition antarctique du D* Charcot (1903-1905) ; c'est à cette époque que remonte l’idée 
première du voyage qu’on va lire. 

Marin, je l’étais par atavisme et par goût, mais c’est en servant de toutes mes forces et 
de tout mon cœur le brave et bon D' Charcot que je sentis la chimére nomade des 
voyageurs s'emparer de moi, corps et Ame. Les chimères fascinent, on ne leur résiste pas : 
confiant, je m’abandonnai à la mienne sans trop savoir où elle m’emménerait. Entre- 
prendre quelque chose sur la mer par mes propres moyens : telle était mon ambition. 

Restait à se fixer un but. Un camarade me donna l’idée de Kerguelen, terre francaise 
dans l’océan Indien Sud, groupe d’iles inhabité et presque inexploré. 

Un de mes fréres qui, comme moi, venait d’obtenir son brevet de capitaine au long 
cours, s’offrit pour m’accompagner. Tous les deux, nous pensions qu’il serait honorable 
et méme méritoire, pour des marins du commerce, de tenter quelque chose pour sortir de 
l'oubli cette terre de valeur qui, par une mic ary inconcevable et, avouons-le, bien 
francaise, était laissée inexploitée. 

Dès lors, aidés par des amis, nous nous sommes mis a l’œuvre pour organiser une 
expédition-miniature qui n’aspirait à rien moins qu'au titre d’ « expédition commerciale 
et scientifique ». Pourquoi pas ? 

Pour mener la chose à bien, nous étions riches d’enthousiasme, une monnaie qui n’a 
guère cours quand il s’agit de subvenir aux frais toujours considérables occasionnés par 
la moindre expédition maritime. 

Après avoir réalisé la valeur d’une petite propriété que je possédais en Bretagne, 
nous nous trouvions à la tête d’une quinzaine de milliers de francs. Quinze mille francs, 
c'est assez pour jouer au député, mais c’est ridiculement peu pour se faire armateur. Mais, 
nous avions alors vingt-cinq ans, un âge auquel on ne doute de rien, et notre excuse 
à Vheure actuelle est d’avoir mené notre petite entreprise à bien, en dépit des prophètes 
de malheur. 

Cependant, nous risquions fort de courir à un échec, si nous n'avions trouvé un 
appui effectif. Cet appui moral et matériel, nous le devons au D" Charcot, qui se chargea 


d'obtenir pour nous des subventions auprès des sociétés savantes, du Ministère de 
T. Ul. — Fasc. 3. I 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


to 


la Marine et du Muséum. Lui-méme nous a aidés le plus largement et le plus généreu- 
sement. 

Quoi qu'il en soit, dès le mois d’avril 1907, nous nous étions mis dans l’impossibilité 
de reculer ; nous avions (si je puis m’exprimer ainsi) brûlé nos vaisseaux en achetant 
pour la somme fabuleuse de 1 500 francs, non pas un vaisseau, mais une barque de pêche 
boulonnaise, le N° 2 471, mise au rancart par son propriétaire. 

C'était un petit voilier gréé en ketch ou dundee, mesurant 17 mètres entre perpen- 
diculaires et jaugeant 45 tonneaux. 

Ce n’est pas sans fierté que j’entrai dans mes nouvelles fonctions d'armateur. Sans 
doute, étions-nous les premiers à tenter pareille aventure sur un navire de 1 500 francs. 

Dès lors, nous n'avons plus eu un instant de repos jusqu’au jour du départ de Bou- 
logne qui eut lieu le 22 septembre 1907. 

Le 2 471 était devenu le J.-B. Charcot, un nom qui devait lui porter chance ; dans 
la cale, il y avait pour deux ans de vivres que la générosité de quelques souscripteurs 
désintéressés nous avait permis d'acheter. A bord, nous étions six marins et un bon chien 
qui voulions conduire la barque aux iles Kerguelen. 

Que l’on n’aille pas croire cependant que nous partions pour traverser l’océan Atlan- 
tique et l’océan Indien sur une mauvaise barque coulant bas d’eau. La chose eût été 
indigne de vrais marins. En nous rendant acquéreurs du petit navire, nous nous étions © 
soigneusement rendu compte du bon état de la coque, et lui avions fait subir toutes les 
réparations nécessaires. 

C'est donc sur un bateau, à la vérité bien petit, mais solide et capable de tenir la mer, 
que nous nous sommes lancés dans cette aventure. 

Enfin, le 13 octobre 1907, nous quittions définitivement la France, du port de 
Cherbourg où nous étions venus prendre les instruments mis à notre disposition par le 
Ministère de la Marine. Un treize ! Et tout d’abord, les événements semblèrent vouloir 
donner raison à cette sotte superstition. Nous avions été assaillis au sortir de la rade par un 
fort coup de vent de S.-W. qui nous empêchait de faire route pour sortir de la Manche. 
C’est alors que nous avons relâché dans le petit port de Brixham, sur la côte anglaise, 
non par nécessité, mais pour attendre tranquillement le bon vent et surtout pour rem- 
placer notre provision d’allumettes de la régie par de bonnes allumettes anglaises. 

Le vent favorable arriva dès le lendemain matin, mais dégénéra bientôt en une 
violente tempête de N.-E. qui causa plusieurs sinistres sur les côtes de France et d’Angle- 
terre. 

Notre campagne faillit bien se terminer là. La rade de Torbay est complètement 
ouverte dans la direction du N.-E. L’effort des lames ne tarda pas à avoir raison de nos 
chaînes qui cassérent au plus fort de la tempête. Et c’est sous notre grand’voile à trois ris, 
sans une ancre parée à mouiller, que nous sommes rentrés dans le petit port au milieu 
d’un essaim de barques de pêche qui s’y étaient réfugiées. Ce fut un moment plein 
d'angoisse ; la jetée était noire de curieux qui avec anxiété suivaient notre manœuvre. 
Le canot de sauvetage fut mis à la mer et vint à notre secours. 

A la nuit tombante, nous étions enfin en sécurité et pouvions faire le compte de nos 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 3 


avaries. Le beaupré, le mât de flèche et la corne de grand’voile étaient cassés, les pavois 
étaient enfoncés en plusieurs endroits. 

Notre situation était critique, la caisse du J.-B. Charcot se trouvant à peu près à sec ; 
mais la générosité du D' Charcot vint encore nous tirer d’embarras et, le 6 novembre, 
après avoir fait les réparations nécessaires, nous pouvions reprendre la mer. 

Huit jours seulement nous ont suffi pour gagner Madèreet, vingt-huit jours après, nous 
faisions notre entrée dans la magnifique rade de Rio-Janeiro.Ces deux traversées feraient 
honneur au plus fin voilier,et leJ.-B. Charcot n'était qu'une pauvre barque de pêche. C’est 
qu'après tous nos déboires du début, nous étions enfin partis, le vent et la fortune en poupe. 

Nousavons quitté Rio-Janeiro le 1° janvier 1908. Six jours après, nous avions essuyé 
une violente tempête, sorte de cyclone dont le centre passa sur nous. Pendant plus de 
vingt-quatre heures, il venta avec une violence incroyable. C'était notre premier sérieux 
mauvais temps, et ce n’est pas sans un grand soulagement que nous avons pu constater, en 
cette circonstance, que le petit navire était capable « d’étaler une secousse », comme 
disent les marins. 

Le 28 janvier, nous arrivions en vue des îles Tristan da Cunha où nous avions résolu 
de faire une courte escale. 

Ces îles peu importantes, au nombre de trois, gisent isolées au milieu de l’Atlantique 
à peu près à mi-distance entre Buenos-Ayres et le Cap de Bonne-Espérance. Elles furent 
découvertes au xvi‘ siècle par le navigateur portugais dont elles portent le nom. Visitées 
de temps en temps par des pêcheurs de phoques, elles n’ont été réellement habitées 
qu’en 1816, pendant la captivité de Napoléon à Sainte-Hélène. Craignant que ces îles ne 
servissent de base à une tentative de délivrance du grand empereur, le gouvernement 
anglais y placa une garnison qu’on retira, du reste, à l’époque de sa mort. Mais un certain 
caporal Glass obtint, avec deux compagnons et leurs familles, la permission de rester 
s'établir sur l’île principale. C’est de ce noyau qu’est sortie la petite colonie actuelle dont 
Glass fut le premier gouverneur. 

En ‘dehors des ressources de l'ile qui sont assez restreintes, les habitants vivent 
surtout du produit des échanges avec les rares navires qui passent près de leur ile. Quand 
le temps s’y prête, ils vont parfois à 20 milles au large dans leurs embarcations pour 
couper la route aux voiliers qui passent en vue. 

Avec les matelots Agnès et Larose, je me rendis à terre dans une de nos embarcations, 
tandis que mon frère et nos deux autres hommes restaient à bord pour la manœuvre du 
bateau. Une douzaine d’habitants nous attendaient sur la plage, et notre canot fut tiré à 
sec en un clin d'œil. 

Après avoir distribué quelques petits cadeaux pour rompre la glace, je demandai 
dans mon meilleur anglais qui était le chef, le successeur actuel du gouverneur Glass. On 
me répondit qu’il n'y en avait pas, et qu’on vivaitsur le pied de l'égalité la plus parfaite. 
O Jaurès ! nous l’avions donc trouvée, l’ile heureuse, l’île rêvée du collectivisme en action! 
« Nous vivons comme des frères, me dit mon interlocuteur ; jamais de dispute. » Comme 
pris d’un scrupule, il ajouta cependant que les femmes se chamaillaient bien un peu 
quelquefois, mais que cela n'avait aucune importance. 


4 : ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Cependant, j’eus vite fait de remarquer que mon cicerone, un certain André Ripetto, 
semblait avoir sur ses compagnons une grande influence. Si ses discours n'étaient pas lois, 
ils avaient du moins un grand poids sur leurs décisions. Très aimablement, il m’invita à 
venir chez lui prendre le thé. Agnès et Larose s’en allèrent de leur côté. 

En marchant vers le village, notre escorte s'était accrue de femmes et d’enfants qui 
me regardaient curieusement. Leur accoutrement était des plus bizarres. Les femmes 
n'étaient pas laides; quelques-unes avaient de fort beaux yeux. Toutes portaient sur la tête 
des mouchoirs aux couleurs gaies. 

Au haut du village, nous arrivons à la maison de Ripetto, sur laquelle flotte un vieux 
pavillon anglais — car ces braves gens revendiquent avec fierté le titre de sujets bri- 
tanniques. 

Les maisons, très basses, sont solidement construites en gros blocs de lave; les toi- 
tures sont faites d’une herbe longue et dure qui pousse sur l’île en abondance. L’ameu- 
blement et les boiseries sont composés d’épaves provenant des nombreux navires qui se 
sont perdus à diverses époques sur ces îles. 

La liste des naufrages sur cette côte dangereuse et sans abris est presque inépuisable. 
Un des plus célèbres est celui de la corvette anglaise Julia qui vint, de nuit, se jeter à la 
côte pendant un terrible coup de vent du Nord. Les trois quarts de l’équipage périt. On 
cite aussi les naufrages du Pladen Hall, du Mabel Clarke, de \'Italia, dont Ripetto et 
son ami Landrello étaient deux survivants. Il est bon d’ajouter que plusieurs de ces — 
sinistres furent des naufrages d’opéra-comique qui eurent lieu sans perte de vie, par 
un temps magnifique et avec toute la mise en scéne désirable, cela pour le plus grand 
bien des armateurs et des habitants de l’île, mais assurément pour la ruine des assureurs. 

Mon cicerone, devenu mon amphitryon, me fait entrer, me fait les frais de son home, 
me présente sa femme et ses enfants. La maitresse du logis me sert le thé et pose devant 
moi la seule miche de pain de la colonie qu’on est allé en courant réquisitionner je ne 
sais où. Pendant que je me restaure, les hommes font cercle autour de moi et tiennent 
conseil. Naturellement, il s’agit des échanges que l’on va faire, et le marché est bientôt 
conclu. Pour 4 sacs de sel, un baril de biscuits de mer, 5 kilogrammes de poudre chasse, 
10 mètres de toile a voile, du thé, des clous et des hamecons, on doit nous donner 
6 moutons, 200 kilogrammes de pommes de terre, 10 Oies, 20 poulets, 2 porcs, du lait, 
du beurre et des ceufs. 

En quittant la maison de monhôte, je fais une tournée de visites. La première est pour 
le clergyman, le Révérend J.-G. Barrow, qui me reçoit de la façon la plus aimable. Il 
parle un peu le français, moi un peu l’anglais, de sorte que nous nous entendons à mer- 
veille. Il me raconte qu'ilest arrivé en 1906, avec sa femme, et qu’il a l'intention de rester 
trois ans pour instruire la petite colonie. 

L'ile avait été sans pasteur depuis plus de quinze ans; son premier soin avait donc 
été de baptiser les enfants et de régulariser les unions libres de ces êtres primitifs. 

Pendant le déjeuner que M. et Mme Barrow m'invitèrent à partager, j’appris les 
choses les plus intéressantes sur les mœurs et le genre de vie des habitants, actuellement 
au nombre de 83. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 5 


A mon tour, je dus donner des nouvelles d'Europe. Mme Barrow s'étant informé de 
l’état de santé de Sa Majesté Edouard VII, le Révérend, avec une politesse toute london- 
nienne, ne manqua pas de me faire la même question au sujet du chef de l’Etat Français. 
Seulement, comme il avait oublié le nom du Président, il demanda tout simplement : 
« Comment va Monsieur... de la République? » Je répondis qu’à l’époque de notre 
départ Monsieur « de la République » était en très bonne santé. Et c’est ainsi qu’à l’île 
Tristan, un toast fut porté ce jour-là à Sa Majesté et au Président Fallières. 

Après déjeuner, M. et Mme Barrow me firent faire le tour de leur petit jardin, puis 
lon m’emmena visiter le petit cimetière de la colonie. Chaque tombe avait un entourage 
de pierres sèches ; quelques-unes avaient une plaque de marbre portant une inscription. 
C’étaient les tombes de ceux que le pasteur appelait les patriarches et qui furent les 
successeurs de Glass dans la charge de gouverneur. Je vis la tombe de ce dernier, mort 
en 1853, dans un âge avancé; celles de son successeur Peter Green, du capitaine américain 
Higgin qui s'établit sur l’île en 1849; du matelot Swain, arrivé à Tristan vers 1825. La 
tradition veut que ce soit ce brave Swain qui, le jour de Trafalgar, recut dans ses bras le 
glorieux Nelson, blessé mortellement sur le pont du Victory. 

J'aurais écouté volontiers plus longtemps de si intéressants souvenirs, mais l'heure 
passait, et je dus dire adieu à mes hôtes pour rentrer à bord du J.-B. Charcot qui lou- 
voyait depuis le matin à deux milles de terre environ. Pour l’occasion, nous avions hissé 
à notre corne d’artimon notre plus beau pavillon. 

Tous les habitants étaient venus me reconduire sur la plage pour aider à l’embar- 
quement des provisions échangées. Une dizaine d'hommes m’accompagnèrent à bord. Il 
y eut des échanges supplémentaires pour de vieux souliers, du savon, des chemises de 
pilou et divers articles. Un réveil-matin de bazar fut échangé pour 5 oies. Des remèdes 
furent donnés pour l’unique malade de la colonie, ainsi qu’un colis contenant divers 
objets pour M. et Mme Barrow qui m’avaient recu si aimablement. 

Le thé fut offert 4 nos visiteurs, un thé en musique, pendant lequel Agnés exécuta 
sur son accordéon Viens i aig la Tonkinoise et autres mélodies assurément nou- 
velles pour nos hôtes. 

L’accordéon excita grandement la convoitise ; on proposait 3 moutons en échange. 
Mais je fus inflexible dans mon refus, en songeant que ce modeste instrument serait la 
seule distraction de nos quatre matelots pendant les longues soirées d’hiver à Kerguelen. 

La nuit approchait, il fallut songer au départ. Nos nouveaux amis sautèrent dans leur 
embarcation, emportant leur butin, et se séparèrent de nous en nous souhaitant bonne 
chance et en poussant trois hurrahs. 

Toutes voiles hautes, nous avons alors repris la route vers notre destination, non 
sans jeter un dernier regard attendri vers l’Ile Heureuse. 

Quinze jours après, nous avons doublé le cap de Bonne-Espérance. On: était au 
16 février, une date mémorable de notre voyage. Sous notre voile de fortune et la grande 
voile à deux ris, nous avions pris la fuite devant une violente tempête d'Ouest. Poussé par 
la tourmente et par une mer démontée, nous faisions de rapides progrès vers le but tant 
désiré, plus que jamais confiants dans notre étoile et dans les qualités de notre petit navire. 


6. ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


C'est au moment où la force du vent diminuait que s’est produit l'accident qui faillit 
mettre fin à notre campagne, en même temps qu’à notre vie. La crête d’une des mon- 
tagnes mouvantes qui nous poursuivaient s’abattit sur notre arrière, couvrant du même 
coup tout le petit navire. Ce fut quelque chose d’effarant. Nous avons pu croire un moment 
que le bateau faisait panache. Il y eut une violente secousse qui fit craquer toute la coque 
et nous fit perdre à tous l’équilibre. Puis le navire s’affaissa au creux de la lame et se 
coucha violemment sur babord, débarquant du même coup la trombe d’eau et les débris 
qu'elle avait arrachés sur son passage. L’>homme de barre blessé, deux embarcations et le 
compas écrasés, 4 moutons, 2 porcs et notre bon chien Patrick enlevés à la mer : tels 
furent les premiers malheurs constatés. Il y en avait malheureusement bien d’autres. Les 
ravages causés par l’eau dans notre petite cabine étaient irréparables, mais c’est la perte 
de notre bon Patrick que nous avons ressentie le plus vivement. Nous l’aimions avec ses 
défauts et ses qualités, comme on aime un ami. C’est lui qui veillait au bossoir, appelait 
aux marsouins et faisait la police parmi les nouveaux passagers de pont pris à Tristan. 
C'était vraiment une perte, car il tenait vaillamment sa place parmi l'équipage. « Pauvre 
bon chien, c'était notre ami ! » Telle fut l’oraison funèbre de Patrick, disparu en mer le 
16 février 1908. : 

Du Cap a Kerguelen, nous avons eu une traversée mouvementée, mais sans incidents 
notables, si ce n’est plusieurs tempétes et un temps nettement défavorable. Enfin, le 
4 mars, a la nuit tombante, au commencement d’un coup de vent de Nord, nous avons 
apercu l’île Croy au Nord de Kerguelen. Ce coup de vent, puis un temps bouché, nous 
ont fait passer vingt-quatre heures d’angoisse, tout près des dangers d’une côte que nous 
dissimulait la brume. ke 

Dans Ja nuit du5 mars, nous avons passé a ranger la dangereuse roche appelée 
Bligh’s Cap. La, le brouillard et lecalme nous prenaient. Jouets dela houle et de courants 
inconnus, nous avons été poussés au pied d’une côte rocheuse sur laquelle la mer brisait 
avec une grande violence. Nous n’en étions plus qu’à quelques encablures, quand elle nous 
est apparue soudain, sortant de la brume. Le danger était pressant, il fallait prendre vite 
une décision. Une étroite crique s’ouvrait dans la falaise : y faire entrer le bateau était 
notre unique chance de salut. Nos voiles, qu'aucun souffle ne gonflait, battaient lamen- 
tables et inutiles ; la houle nous poussait lentement, mais à coup sûr sur les roches. C’est 
alors que nous avons tenté avec succès la dernière manœuvre en notre pouvoir. Notre 
gros canot fut mis à la mer ; j y sautai avec trois hommes, et c’est sous l'effort patient de 
nos quatre avirons que le J.-B. Charcot gagna à la remorque son premier mouillage. 

La brume persista pendant vingt-quatre heures, et ce n’est que plus tard, en aper- 
cevant clairement la grande terre, que nous avons acquis la certitude de notre position. 
Nous étions à l’île Roland, dans une étroite baie non portée sur la carte. Nous y avons 
passé trois jours d'angoisse, et c’est là que nous avons fait connaissance avec les fameuses 
rafales de Kerguelen, qui dépassent en violence toutes les descriptions. Ce n'était certes 
pas le mouillage rêvé. 

Une nuit, nos-deux ancres chassèrent subitement pendant une rafale, et Bontemps, qui 
était de quart sur le pont, vint prévenir que l'arrière n'était plus qu’à quelques mètres des 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 7 


roches. Heureusement ces rafales cessent aussi rapidement qu’elles se lèvent. Nous en 
fûmes quittes pour la peur, mais l'alerte avait été rude, et nous avions perdu tout désir de 
rester plus longtemps dans ce mauvais trou. C’est pendant cette nuit que mon frère et 
moi avions préparé un sac contenant les objets les plus indispensables à des naufragés, 


KERGUELEN, 6 Mars 1908 - 10 Juin 1909. 


Itinéraire 
[ ketch “J.B. Charcot» 


1907 -1909 


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Capitaine [274 long cours a 67° 68° Kilomètres TH. 
PUBLIÉE PAR LA SOCIÉTÉ DE GÉOGRAPHIE DE PARIS 
Fig. 1. 


tels que allumettes, couteaux, fusil, cartouches, fil, aiguilles, etc., etc. Ce sac, que nous 
appelions le sac du naufrage, resta désormais toujours prêt dans un caisson, pour toute 
éventualité. 

Cependant, ces aventures désagréables n'avaient pu avoir raison de notre enthou- 
siasme, Entre temps, nous avions déterminé la position exacte de notre mauvaise 


8 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


baie et fait l'ascension du pic qui domine l’île et que nous avons baptisé Pic Charcot 
comme un hommage bien dû au parrain de notre petit navire. 

Le 9 mars, à midi, nous avons quitté sans regret, mais non sans difficultés, 
ce sinistre endroit, auquel le nom de Baie de la Souriciére me paraît devoir le mieux 
convenir. Notre second mouillage a été Port-Christmas, une baie rebaptisée par le 
capitaine Cook, et à laquelle Kerguelen lui-même avait donné le nom de Baie de 
l'Oiseau. 

Gagner l'entrée de la baie fut chose relativement facile, mais atteindre en louvoyant 
le mouillage au fond de cet étroit boyau fut une tâche des plus délicates. Il était presque 
nuit quand nos ancres tombèrent, et nous avons employé les derniers instants du crépus- 
cule à admirer le paysage, désolé certes, mais imposant aussi et vraiment romanesque qui 
nous entourait. 

Le lendemain, dès l’aube, les premières victimes de la civilisation sont tombées. 
A peine à terre nous avons pu fusiller à discrétion phoques, lapins et canards qui n’y 
pensaient guère. Notre passage à Port-Christmas est surtout à signaler pour les remarquables 
performances culinaires et pour les repas pantagruéliques qui s’y passèrent. Il s'agissait 
d'essayer les ressources nutritives du pays, sur lesquelles je comptais tant pour écono- 
miser nos vivres. La question lapins et canards était résolue d’avance, et je déclare ici que 
ces derniers valent à eux seuls la peine d’un voyage à Kerguelen. Mais la viande de phoque 
m'inquiétait ; j'étais le seul à y avoir jamais goûté et me souvenais que, parmi l'équipage 
du Français de la première expédition Charcot, plusieurs de mes camarades n’avaient 
jamais pu s’habituer à ce mets pourtant délicat, je l’affirme. Ce dégoût irraisonné était 
sans doute un effet de l'imagination, et je craignais qu’il ne se reproduisît parmi les nôtres. 
Aussi m'étais-je efforcé de chanter sur tous les tons et à tous propos les louanges du filet 
de phoque. 

Le moment critique était arrivé : j'allais être récompensé de mes frais de rhétorique 
ou passer pour le dernier des imposteurs. 

* Esnault jouait à bord le rôle de cuisinier, mais cela ne veut nullement dire qu'il fut 
qualifié pour un emploi chez Ledoyen ou chez Maxim. Ce jour-là, il fut impitoyablement 
chassé de la petite cuisine, tandis que mon frère et moi préparions dans le plus grand 
mystère beefsteaks aux oignons, cervelles au beurre noir, et rognons en brochette. Ce 
fut un triomphe qui se traduisit par les appréciations les plus exagérées : « Depuis trente 
ans que je navigue, affirma Bontemps, je n'avais jamais rien goûté de si bon! » Agnès 
renchérit, disant que c'était meilleur que du bœuf. Esnault dit : « C’est bon, sûr; c’est 
même ben bon. Ya pus d’une « briqueville » à Cherbourg qu’en voudrait ben un morceau 
pour mettre su son pain ! » Larose ne ditrien, mais ses mâchoires étaient éloquentes. Il 
n’en perdait pas une bouchée et lançait, à de courts intervalles, des regards inquiets vers 
les plats déjà presque vides. Bref, tout le monde fut d’avis qu'avec de pareils régals, la 
vie serait supportable à Kerguelen. 

La nuit suivante, nous avons été tirés de nos rêves par le bruit du vent dans les 
cordages. La tempête dura peu, mais il venta d’une façon absolument déconcertante. Le 
J.-B. Charcot chassa de plusieurs encäblures avec deux ancres et les chaînes filées à bout. 


— d'El: Co a - éd 


1 
| 
4 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 9 


Le résultat fut de nous faire appareiller dès le lendemain en quête d'un meilleur mouillage. 
Notre choix s'arrêta au hasard sur la baie Loom. 

Notre séjour dans cette baie a duré un mois, pendant lequel nous avons pu explorer 
les baies environnantes et faire à pied de nombreuses excursions à l’intérieur. C’est là que 
nous nous sommes familiarisés avec notre nouveau métier de chasseurs de phoques dont 
j'avais seul quelque idée. 

« Tout nouveau, tout beau » : vérité incontestable si l’on en juge par l’ardeur et 
l'enthousiasme que chacun de nous mit à | 
Vaccomplissement du travail le plus pénible, 
le plus sale; le plus rebutant qui se puisse 
imaginer. Tout le monde a entendu parler 
de la pêche à la morue en Islande et sur le 
banc de Terre-Neuve, et journellement des 
cœurs sensibles s’attendrissent sur le sort des 
peltas et des graviers: Imaginez quelque chose 
de beaucoup plus dur et vous aurez une bien 
faible idée de ce qu’est le métier de chasseur 
de phoques pratiqué dans des conditions nor- 
males. Si l’on ajoute à cela que nous n’étions 
que des sealers improvisés, munis d’outils de 
fortune, on se rendra parfaitement compte 
qu'une bonne dose d'enthousiasme nous était 
nécessaire pour ne pas jeter le manche après 
la cognée. 

Pour la chasse, nous choisissions, autant 
que possible, une belle journée. Nousquittions 
le bord tous les six de bonne heure dans deux 
embarcations, emportant nos armes et aussi 
desprovisions de bouche pour la journée. Nous 
suivions la côte et nous nous arrêtions au Fig. 2. — Éléphant de mer (Macrorhinus leoninus). 
premier troupeau de phoques rencontré. 

L'espèce de phoques que l'on rencontre à Kerguelen est l'éléphant de mer (Macro- 
rhinus leoninus), ainsi nommé à cause d’une protubérance que portent les mâles sur le 
museau et qui ressemble vaguement à un tronçon de trompe. La taille des femelles 
ne dépasse jamais 4 mètres, mais celle des mâles atteint parfois 7 mètres. Ils demeurent 
à terre pendant les mois d'été et vivent par troupeaux disséminés le long du rivage. 

Aussitôt débarqués, nous nous rangions tous les six entre le troupeau et l’eau pour 
rendre toute retraite impossible vers la mer. Alors commençait une tuerie dont je préfère 
épargner la description à mes lecteurs. Il ne faut pas croire cependant queles grands mâles 
se laissent immoler comme de simples brebis. Lorsque le premier coup n’est pas mortel, 
il n’est pas rare de voir ces énormes bêtes charger furieusement leur agresseur qui doit 


alors fuir honteusement. Nous avions cependant trouvé un système pour arrêter net ces 
T. II. — Fasc. 3. 3 


tos : ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


élans belliqueux; c'était de lancer une poignée de sable dans la gueule menaçante du 
monstre qui battait alors immédiatement en retraite. Il faut avoir soin de toujours con- 
server une bonne distance entre soi et la gueule de l'animal, celui-ci lançant sa tête comme 
un bélier. La puissance des mâchoires est incroyable : nous nous amusions à faire 
mordre de solides bâtons de chêne qui étaient broyés comme une paille. Nous tuions 
généralement d’une balle dans la tête ces bêtes relativement dangereuses. 

Cette scène de massacre était suivie d’une scène de boucherie. Il fallait dépouiller les 
cadavres de leur épaisse 
couche de lard et charger ces 
longues lanières de graisse 
dans nos embarcations. A la 
nuit tombante, nous aban- 
donnions la placeaux milliers 
d'oiseaux qui planaient au- 
dessus du champ de carnage, 
attendant l’heure de la curée. 
Exténués, couverts d’huile 
et de sang, il nous fallait 
encore franchir plusieurs 
milles à l'aviron, pour rega- 
gner la baie Loomavec notre 
butin : de 3 à 4000 kilogs de 
graisse. Tout allait bien si le 
beau temps persistait jus- 

Fig. 3, — Chasse à l’éléphant de mer. qu'au bout; mais, quand 

nous étions surpris par un 

changement subit, il fallait se décider à jeter tout à la mer pour alléger nos embarcations 

surchargées et éviter ainsi une catastrophe. La prudence n’était pas toujours notre vertu, 

j'allais dire notre défaut. Dans une aventure comme la nôtre, il n’en faut qu’une petite 

dose et s’en servir judicieusement ; quelque chose doit être iene ala chance, sinon mieux 
vaut rester chez soi. 

Pour transformer la graisse en belle Loue blonde, nous avions construit à terre, 
tout au bord de l’eau, une hutte baptisée pompeusement du nom d’« usine ». Les 
murs étaient faits de terre et de pierres; le toit se composait de quelques planches 
recouvertes de peaux de phoques. A l’intérieur étaient disposées les deux lessiveuses que 
nous avions achetées à Boulogne pour servir à la fonte de la graissé. 

Le lard était déposé par tas sur les roches près de « l’usine » et recouvert de prélarts 
et de grosses pierres pour prévenir les déprédations des oiseaux. Sur une table improvisée, 
cette graisse était coupée en petits cubes pour rendre la fonte plus rapide, puis plongée 
dans les chaudrons. Une surveillance continuelle était nécessaire. Il fallait régler soigneu- 
sement le feu afin d'obtenir une huile claire. A la moindre distraction, l'huile brûlait et 
devenait noire. Des chaudrons, il fallait transvaser, à l’aide d’une énorme cuiller, le liquide 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE II 


doré dans un énorme baquet pour le refroidir et 
se déposer. Mon frére présidait a toutes ces opéra- 
tions délicates. 

Tout cela semble très simple en vérité; mais, 
malgré tout, je ne cesserai de dissuader aux gens 
pourvus d’un métier avouable de se faire chasseur 
de phoques à Kerguelen. Notre usine était un enfer 
où l’on souffrait par les cinq sens, le supplice do- 
minant étant une douleur intolérable aux yeux, 
provoquée par les vapeurs d’huile. De plus, nous 
étions d’une saleté repoussante : couverts de loques 
graisseuses, la figure noire de suie. Impossible de 
toucher quelque objet sans y laisser ces empreintes 
digitales si chères à M. Bertillon. 

Les dernières manipulations de l’odieuxliquide 
étaient la mise en fûts et finalementl’embarquement 
et l’arrimage des barils dans la cale. Et, puisqu'il 
s’agit de barils, voici venu le moment de faire mon 
entrée en scène. Votre serviteur était le tonne- 
lier. 


Fig. 4. — Albatros de Kerguelen. (Diomedea sp.) 


Mes débuts ne furent pas brillants. 
Le marchand qui m'avait vendu les barils 
démontés, avait été assez aimable pour me 
donner une lecon de remontage d'environ 
cing minutes. La chose m'avait paru d’une 
simplicité enfantine, et j'avais remercié mon 
professeur en lui déclarant que « ça irait 
tout seul». Mais, je devais changer d'avis. Il 
s'agissait d’abord de ranger à l'intérieur 
d'un des cercles les 20 douvelles. Généra- 
lement, tout s’effrondrait comme un chateau 
de cartes au moment ou la dernière allait 
trouver sa place. Ce jeu de patience, répété 
vingt fois avec le même insuccès, me met- 
tait dans des colères folles. Tous ceux qui 
ont essayé de remonter un tonneau après 
cinq minutes de leçon compatiront et com- 
prendront mon manque de calme. 

Enfin, après une journée entière de 
travail, un baril était prêt à recevoir de 


Fig. 5. — Éléphant de mer. 


VPhuile. Il fallait voir avec quelle complaisance je contemplais ce premier baril sorti de 


mes mains. 


12 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


— « A cette vitesse-là, remarqua mon frère, il ne te faudra guère plus de six mois 
pour remonter les 200 ! » 

Cette réflexion, d’une arithmétique normale, jointe à la découverte que mon baril 
coulait, me jeta dans le plus sombre désespoir. Je n’en dormis pas de la nuit 
suivante, et mes réflexions furent améres. A quoi bon être venu a Kerguelen pour y faire 
de l’huile, si nous n'avions rien pour la mettre ? Car, enfin, on ne vient pas remonter des 
barils sur une île déserte pour le plaisir d’orner ou de meubler cette ile. 

La nuit porte conseil. Le lendemain, je reprenais mon travail avec énergie et méthode. 
Ma ténacité fut enfin couronnée de succès. Le second baril coulait moins, le troisième 
filtrait légèrement, le quatrième suintait à peine. Au cinquième, j'étais tonnelier et je 
chantais en maniant la châsse et l’herminette. Dans la suite, j’arrivai au résultat inespéré 
de 15 tonneaux remontés en une journée detravail. 

Au bout de trois semaines de travail assidu, vingt barils d’huile avaient pris place au 
fond de la cale du J.-B. Charcot. Cette lenteur désespérante était due surtout à la petitesse 
de nos chaudrons. L’époque de l’émigration des phoques étant proche, nous avons alors 
cessé la chasse pour tourner nos efforts vers des travaux plus intéressants et plus intel- 
lectuels. 

Depuis notre arrivée dans la baie Loom, les observations météorologiques étaient 
commencées. Une base fut mesurée et le plan de la baie levé. A tour de rôle, mon frère 
ou moi partions accompagnés d’un matelot pour de longues excursions vers l’intérieur 
de l’ile ou dans les baies avoisinantes. Pendant ces excursions, nous avons découvert 
plusieurs gisements de charbon, mais il convient de dire tout de suite que ce charbon n’a 
aucune valeur commerciale. Il contient jusqu’à 50 p. 100 de silice et brûle mal. 

Un couple d’oies qui nous restait depuis Tristan da Cunha fut lâché en liberté. Huit 
jours après, elles étaient devenues sauvages, et se jetaient à l’eau dès que nous cherchions 
à les approcher. Il est à souhaiter qu’elles se multiplient, comme ont fait les quelques 
couples de lapins lachés sur Kerguelen en 1874. 

Les environs de la baie Loom étaient très marécageux ; il fallait prendre de grandes 
précautions pour éviter les fondrières. Agnès en fut victime, et c’est par hasard qu'il 
échappa à l’affreuse mort de l’enlisement. Un dimanche, revenant de la chasse à la nuit 
tombante, il sauta dans une de ces flaques de boue et s’enfonca du premier coup jus- 
qu’aux aisselles. I] eut la présence d’esprit de mettre son fusil sous ses bras et se mit a 
appeler au secours. Par bonheur Larose, qui se trouvait également à terre, l’entendit et, 
s’aidant d’une planche, réussit à tirer son camarade de sa facheuse position. Larose eût- 
il été hors de portée de voix, Agnès était perdu. Depuis ce jour, l'ordre fut donné de ne 
plus s'éloigner seul. 

Pendant notre séjour dans la baie Loom, nous avons eu quelques journées de très 
beau temps, mais il faut renoncer à décrire la fréquence et surtout la violence des 
tempêtes que nous y avons essuyées. Un jour, une de nos embarcations, tirée à sec sur une 
petite plage, fut roulée par le vent sur une longueur d’environ 500 mètres et mise en pièces. 

. Ce fait se reproduisit d’ailleurs quelques mois plus tard, dans une autre baie au Sud de 
Kerguelen. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 13 


Le 25 avril, nous quittions la baie Loom par un temps neigeux et froid, pour nous 
rendre au mouillage de Port-Gazelle (réputé la meilleure baie de l’île) où nous comptions 
passer les mois d'hiver. Le lendemain, en débarquant à terre à ce port, la première décou- 
verte de mon frère, qui s'était improvisé le géologue de l'expédition, fut celle d’un gisement 
de charbon, dans une cascade, à quelques mètres du rivage. Ce charbon était de qualité 
différente de celui que nous avions trouvé dans le nord de l'île. Il brûlait admirablement 
avec une belle flamme jaune. Cette importante découverte nous remplit de joie, d’autant 
plus que la provision emportée de France était sur le point d’être épuisée. 

Un de nos premiers soins fut de visiter le dépôt de vivres et vêtements laissé par 
l Eure en 1893 dans une grotte. Le mât, surmonté d’un pavillon tricolore en tôle, existait 
toujours, ainsi que la plaque de cuivre portant gravé : Eure, 1893. La pyramide au-dessus 
de la grotte s'était écroulée. 

Personne n’avait touché au dépôt, mais l’eau, en tombant goutte à goutte de la voûte, 
avait eu raison en quinze ans des barils contenant le biscuit, les couvertures et les vareuses 
de marins. Le tout ne formait plus qu’une bouillie répandant une forte odeur de moisi. Des 
milliers de souris avaient envahi la grotte. Les boîtes de conserves, qu'on avait heureu- 
sement enduites de coaltar, étaient en assez bon état. Quant à la boîte en fer contenant 
les allumettes, elle se trouvait juste sous un égout et s'était recouverte peu à peu d’une 
épaisse couche de mousse. 

Nous avons passé cinq mois dans Port-Gazelle, faisant de ce point des excursions par 
terre et par mer dans toutes les directions. Avant notre voyage à Kerguelen, l’intérieur de 
l’île était à peu près inconnu. 

Je fis la première excursion avec Larose, par terre, dans la direction S.-E. pour tâcher 
de traverser jusqu’à la baie de l'Observatoire où avaient séjourné l'expédition anglaise 
du Passage de Vénus en 1874 et l'expédition allemande en 1902. Il n’est pas inutile de 
dire qu'à Kerguelen, il n'est pas rare de mettre quatre ou cinq heures à franchir un 
mille. 

Après dix heures de marche, nous arrivions au sommet d'une montagne sur laquelle 
nous trouvions un cairn et un flacon contenant un document sans importance qui nous 
apprenait que le nom de Drygalski avait été donné à cette montagne. Deux heures après, 
nous arrivions à la station que les Allemands avaient occupée six ans plus tôt. La maison 
d'habitation et les deux observatoires étaient toujours debout, mais les toitures avaient 
beaucoup souffert. Tout avait été laissé dans un désordre inexprimable, comme si les 
habitants avaient fui devant quelque soudaine attaque. Jamais je n’ai vu tant de bouteilles 
vides ! Sur le fourneau, il y avait encore des casseroles contenant je ne sais quel rata 
couvert de moisissure. De vieilles chemises et autres vêtements jonchaient le plancher au 
milieu d’un fatras inextricable de livres et de journaux. Les fenêtres étaient brisées et la 
toiture percée en plusieurs endroits. 

Le lendemain, nous rentrames à bord. Il fut décidé de retourner avec les outils voulus 
pour faire les réparations nécessaires, cette maison pouvant nous être d’une grande uti- 
lité un jour ou l’autre. Mon frère y passa trois jours avec Agnès et Larose, puis j'y 
retournai tout seul pour huit jours, pour finir les réparations et mettre tout en ordre. 


14 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


En revenant de mes huit jours de solitude, j’eus une aventure très désagréable. Pris 
par la pluie, le brouillard et la nuit, je perdis ma route et je dus chercher abri dans un 
trou sous une roche. Il ne fallait pas songer à dormir, trempé jusqu'aux os comme j'étais. 

Je passai là quatorze heures de nuit, les plus désagréables, je pense, de toute ma vie. 
Au jour, je retrouvai facilement ma route ; mais la fatigue, le froid etsurtout la faim avaient 
eu raison de mes forces. Pendant le reste de la route, je fus obligé de me reposer tous les 
500 mètres et quand, enfin, j’arrivai à bord vers midi, mes jambes allaient me refuser tout 
service. 

Peut-être serait-il bon d'ouvrir ici une parenthèse pour décrire notre genre de vie 
pendant l’hivernage. Tant que nous avions été à la mer, une discipline, aussi stricte qu’à 
bord d’un navire de guerre de 600 hommes d’équipage, avait été maintenue. Mon frère 
faisait un quart avec Bontemps et Esnault, tandis que je faisais l’autre avec Agnès et 
Larose. Une fois en sécurité à Port-Gazelle, mon frère et moi avions jugé bon de donner 
le plus de repos possible à nos hommes en considération des fatigues passées et à venir. 
La routine journalière était la suivante : branle-bas au lever du jour, c’est-à-dire entre 
sept et huit heures; café, Après le petit déjeuner, le premier travail était d’aller relever le 
filet dit tramail que l’on mettait tous les soirs. Le reste du temps, jusqu’au déjeuner, était 
employé au lavage du pont et à la propreté du bateau. A onze heures, déjeuner en commun. 
A midi, quand le temps le permettait, nous descendions à terre travailler à notre mine de 
charbon. Bas l’ouvrage à quatre heures. Dîner à six heures. Chacun employait sa soirée 
comme il l’entendait. Les jours de grande tempête, c’est-à-dire au moins deux jours par 
semaine, en moyenne, étaient par nécessité des jours de repos, puisqu'il était alors 
impossible de risquer une embarcation à l’eau. 

Nous partagions, tous les six, le petit logement de l'arrière qui servait à la fois de 
dortoir, de réfectoire et de salon. Les repas étaient pris en commun et la cuisine était la 
la même pour tous. Chacun prenait aussi, gaiement, sa part de travail. Mon frère, en 
plus de ses fonctions de capitaine, gardien de la discipline et du bon ordre, était le maitre © 
voilier et le forgeron du bord avec Bontemps pour aide. Comme second, j'étais chargé du 
matériel du bord et de la direction des travaux. A ces fonctions venaient s’ajouter celles 
de charpentier, de tonnelier et de cambusier avec Agnès pour aide. Larose, qui n'avait 
pas d’aptitudes spéciales, s’acquittait consciencieusement de tous les travaux. A Esnault 
étaient échues les importantes fonctions de cuisinier et de boulanger dont il s’acquitta tout 
le voyage, à la satisfaction générale. Il avait un talent incontestable pour les fritures de 
poisson et réussissait à faire de bon pain dans un four grand comme une boîte à lettres. 
Mais l'ordre et la propreté n’étaient pas ses qualités dominantes. Pour ne pas souiller son 
appétit, il fallait bien se garder d'observer de près les mystérieuses préparations qu'il 
opérait dans la pénombre de la petite guérite qu'était la cuisine du J.-B. Charcot. 

Pour les travaux scientifiques, mon frère et moi, nous étions partagé la besogne. Il 
s'était improvisé le géologue, et moi le naturaliste de l'expédition. Chacun collaborait, 
par ailleurs, aux observations météorologiques et astronomiques ainsi qu'aux travaux 

hydrographiques: Si l’on ajoute à toutes ces occupations nos fructueuses et utiles parties 
de chasse, on verra que l'emploi de notre temps était bien rempli. 


ss ds 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 15 


Le mois de mai fut une longue tempête, égayée de rares et courtes accalmies. Quand 
on parle du temps à Kerguelen, il est nécessaire d’avoir recours à un nouveau vocabulaire. 
Ce que nous appelions beau temps était ce que tout le monde appelle en France un temps 
de chien. Pour la tempête, nous avions adopté le mot fusillade qui est encore bien 
faible. 

Le 31 mai, nous avons eu un beau temps de Kerguelen. J'en profitai immédiatement 
pour partir avec Agnès pour une excursion dans la baie Hillsborough, emportant pour 
quinze jours de vivres et notre petit matériel de campement. Mon intention était de 
gagner tout d'abord le fond de la baie Irlandaise et d'essayer de passer à pied jusqu'à la 
côte Ouest. A notre premier campement, nous nous apercevions que l'alcool à brûler 
avait été oublié. Il fut résolu, d’un commun accord, de nous en passer et de continuer. La 
journée du lendemain fut exceptionnellement belle et, vers trois heures de l'après-midi, 
après avoir tenu plus de dix heures nos avirons en mains, nous arrivions au fond de la 
baie Irlandaise de sinistre aspect. 

- Le lendemain, nous partions à pied, au point du jour, chargés comme des mulets. 
Après avoir surmonté bien des difficultés, nous étions finalement arrêtés par le front à 
pic d’un énorme glacier non porté sur la carte. Le temps était devenu pluvieux : ce fut 
une triste nuit sous notre petite tente montée sur un marécage. Notre retour vers le point 
où nous avions laissé l’embarcation fut une retraite de Russie, sous la pluie, le verglas et la 
neige. Il y eut méine le passage de la Bérésina, un gros ruisseau transformé subitement 
en torrent par la pluie. Il fallut y entrer jusqu'à la ceinture et je vous affirme que, jamais, 
on ne prit de bain plus froid. Pour se réchauffer, un repas froid, puisque nous avions 
oublié l'alcool à brûler. Nos lits-sacs parurent confortables ce soir-là. Le lendemain, départ 
en embarcation, découvert une grande lagune dans la péninsule Roon, franchi Husker 
Pass, et atteint Vile du Port à la nuit tombante. 

Là, nous faisions une découverte de la plus haute importance : un ancien campement 
de pêcheurs de baleines, des huttes en ruine, des barils et enfin, richesse inappréciable et 
inattendue : quatre énormes marmites en fer dont la plus petite vaut quatre des nôtres. 
Cette trouvaille va considérablement simplifier l'achèvement de notre cargaison d’huile 
dont je m'étais avoué intérieurement l'impossibilité avec le matériel insuffisant dont nous 
disposions. Ces énormes marmites avaient dû être abandonnées là depuis une vingtaine 
d'années au moins. Le sable accumulé par le vent les recouvrait presque entièrement. 

Un grand feu de joie fut allumé en signe de réjouissance, et aussi pour nous préparer 
enfin un bon repas chaud : le combustible ne manquait pas. Une tempête de Nord avec 
pluie torrentielle qui se leva pendant la nuit réussit à éteindre notre feu, mais non notre 
joie. 
Trois jours, nous avons été prisonniers de la tempête à l’Zle du Port, faisant de 
grands feux et des bombances de phoque et de pingouin rôti pour passer le temps. Un 
accident grave hata le retour à bord : Agnès n’avait plus de tabac ! 

La mer était encore mauvaise, mais le sort en était jeté : ’embarcation fut mise à 
l'eau, et nous partimes sanglés de nos ceintures de sauvetage que nous emportions toujours 
dans nos excursions. Pendant la traversée, qui fut plutôt mouvementée, nous avons pu, 


16 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


une fois de plus, admirer les qualités de ces embarcations plates appelées doris. Agnès, 
qui avait fait la pêche à Terre-Neuve, nous avait appris toutes les finesses et montré tous 
les trucs qu'il faut connaître pour tirer le meilleur parti de ces merveilleuses embarcations 
que l’on prendrait plutôt à première vue pour des noyades. 

Après six heures d’aviron, nous accostions le J.-B. Charcot, Agnès sautait vivement 
à bord bourrer une pipe, tandis que j’annongais triomphalement à mon frère la décou- 
verte des marmites. Nous avions été absents huit jours et la distance parcourue à l’aviron 
était d'environ go milles. * 

Il fut décidé d’aller à la fin du mois de juin avec le J.-B. Charcot à l'Ile du Port pour 
prendre deux de ces énormes 
marmites qui devaient plus 
tard nous être si précieuses. 
Une première, puis une se- 
conde tentative échouèrent, 
à cause du mauvais temps et 
du vent contraire, qui nous 
prirent en route. La seconde 
fois, nous étions revenus. 
mouiller près d’un îlot dans 
le Bras de la Fonderie, à 
l’entréede Port-Gazelle.C’est 
là que nousavons failli perdre 
notre bon petit navire qui 
était notre seul lien avec le 
monde habité. Pendant une 
violente tempête de neige du S.-W., nos deux ancres chassèrent et l’arrière du bateau 
vint s’échouer sur les roches. La mer baissait si bien que l’arriére cessa bientôt de 
talonner et resta échoué, l’avant étant toujours à flot et les chaînes rappelant du large. Si 
le vent cessait avant la marée haute, nous pouvions nous en tirer ; dans le cas contraire, 
c'était la perte inévitable du bateau. Toutes les précautions furent prises : un va-et-vient 
fut installé entre laterre et le bord ; des voiles, les outils, quelques provisions, des vêtements, 
etc... et le fameux sac du naufrage furent mis à terre. A six heures, le diner fut servi 
comme à l'ordinaire ; mais nous étions tout tristes en pensant que dans quelques heures 
le petit navire qui nous avait conduits si loin serait peut-être en miettes. Le pont était 
tellement incliné qu’il était impossible de tenir debout. A huit heures, le temps s’éclaircit ; 
une étoile parut : la nôtre, sans doute. 

Peu après, le vent tombait subitementettournait au N.-W.: c'était le salut. A dix heures, 
nous flottions, et c’est à lalueur d’une torche que nous nous sommes mis aussitôt en devoir 
de changer de mouillage. 

Enfin, le 2 juillet, nous réussissions à gagner l’Ile du Port. Deux des marmites furent 
immédiatement mises à flot, remorquées le long du bord et hissées sur le pont au moyen 
de deux solides palans. 


Fig. 6. — La mer au voisinage de la côte de Kerguelen couverte d’algues 
flottantes. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 17 


Pendant les six jours passés là, il y eut plusieurs tempêtes de neige, mais heureusement 
le fond de vase collante offrait une excellente tenue pour nos ancres. 

Le 8 juillet, au soir, nous rentrions a Port-Gazelle à temps pour nous mettre à l’abri 
d’une épouvantable tempête de S.-E, la première de cette direction depuis notre arrivée 
à Kerguelen. Il neigea pendant vingt-quatre heures et la neige séjourna dans la suite 
pendant plus de trois semaines dans les vallées. 

Juillet et août furent deux mauvais mois pendant lesquels nous avions en moyenne 
trois tempêtes par semaine. Le 13 août, il y eut, chose extraordinaire, une journée 
de temps magnifique, suivie, naturellement, d’un bon coup de vent. 

__ Nous travaillions toujours à notre mine de charbon. L’extraction devenait de plus 
en plus difficile. Faute d'outils indispensables, il fallait parfois plusieursjournéesdetravail 
pour en obtenir 100 kilogs. Nous nous en servions pour faire la cuisine et pour nous 
chauffer. Le climat pendant l'hiver est désagréable, mais pas dur ; la température était 
toujours voisine du point de congélation, mais ne descendait jamais au-dessous de 8° C. 

En séptembre, le temps fut moins mauvais. Une de nos principales excursions fut 
alors dirigée vers un massif montagneux, voisin de Port-Elizabeth. Cette excursion, qui 
ne fut malheureusement pas favorisée par le beau temps, fut néanmoins fort intéressante. 
C'est à Port-Elizabeth que nous avons observé pendant des journées entières les mœurs 
et les habitudes des phoques à l'époque de la mise bas. Les mâles arrivent à la fin d’août. 
Les femelles ne viennent qu’à la mi-septembre, et mettent bas presque aussitôt. Les mâles 
veillent jalousement sur leurs harems et se livrent des combats sanglants. Quand les 
petits ont fini de téter, ils se rassemblent par bandes et apprennent à nager dans les ruis- 
seaux et dans les flaques d'eau douce avant d’oser se risquer à la mer. 

Pendant cette excursion de Port-Elizabeth, nous avons été à même de faire d’impor- 
tarites rectifications à la carte, et d’y faire aussi de nombreuses additions d'ilots et de 
roches dangereuses. Port-Elizabeth, lui-même, doit être reporté à 2 milles plus au Sud. 

Le 5 octobre, nous avons quitté Port-Gazelle avec le J.-B. Charcot, pour nous rendre 
dans le Royal Sound ou Baie Royale. Favorisés, nous pouvions faire le trajet en une 
journée; mais il ne nous prit pas moins de six jours pendant lesquels nous avons été 
ballottés par la tempête et aussi retardés par les vents contraires. Le 11, nous jetions l’ancre 
près de l’île du Tombeau et, le 15,dans la baie de l'Observatoire, près de l’ancienne station 
allemande. 

Les préparatifs pour reprendre la chasse aux phoques furent aussitôt commencés. La 
maison de la station nous servait d’atelier, principalement pour le remontage des barils 
auquel je travaillais toute la journée avec Agnès. Une nouvelle « usine » fut construite, 
beaucoup plus perfectionnée que celle de la baie Loom, dans laquelle trônait cette fois, 
sur un énorme fourneau de briques, une de nos marmites ventrues. 

Une autre chose est à signaler : c’est que, dans cette dernière quinzaine d'octobre, 
nous avons eu huit jours consécutifs de très beau temps, sans une ondée, sans un nuage. 
Nous ne pouvions en croire nos yeux. C'était à se croire subitement transportés dans 
quelque nouvel Éden, hors du domaine des tempêtes. La température était idéale et, sous 


la caresse de Phébus, les tertres, naguère couverts de neige, vêtirent en quelques jours 
T. HI. — Fasc. 3. 


18 : ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


leur livrée verte, qui tranche de façon si étrange, sur le fond sombre des basaltes 
craquelés. ; 

Le 2 novembre, par une belle journée, je partais de nouveau avec Agnés, mon com- 
pagnon préféré, dans notre bon doris, pour aller explorer la grande presquile de l’Obser- 
vatoire et nous rendre compte des endroits où se tenaient les troupeaux de phoques. 

C’esticile plus grand événementde notreséjour à Kerguelen. Lelendemain 3 novembre, 
vers midi, alors que nous parcourions à pied la côte entre la pointe Molloy et la presqu'île 
du Princede Galles, j’apercus soudain, au large, la fumée d’un vapeur. C’était la première 
fois depuis notre arrivée à Kerguelen. Nous pensions d’abord que c’était un steamer allant 
en Australie et qui, pour une raison ou pour une autre, avait dévié de sa route. Mais 
voila qu'il semblait se rapprocher, et notre émotion était intense à la seule pensée de 
pouvoir communiquer avec d’autres vivants. Il faut dire aussi que nous manquions de 
tabac et de café depuis plus d’un mois. La privation de tabac était un supplice pour 
Agnès. Quant à Bontemps, il en était devenu presque idiot. Maintenant, le steamer appro- 
chait toujours, une chaîne de montagnes nous le cacha, pendant une demi-heure, qui 
nous parut un siècle. Enfin, il fit son entrée dans la baie Royale, tandis qu’Agnés exécutait 
une sorte de «pilou de guerre » en criant : « Du tabac! j'aurai du tabac! » Le vapeur dis- 
parut bientôt au milieu des îles, semblant se diriger vers la baie de l'Observatoire. 

Le retour à bord fut immédiatement décidé, et nous rentrâmes à notre campement, 
bavardant avec abondance et excitation sur ce sujet imprévu et nouveau. Les suppositions 
les plus invraisemblables allaient leur train. 

Arrivés au campement, une furieuse tempête de Nord commença et nous retint 
deux jours enfermés dans notre petite tente, causant toujours du fameux steamer. 

En rentrant enfin dans la baie de l'Observatoire, notre étonnement ne fut pas mince 
de n’y trouver que le J.-B. Charcot; mais mon frère me tendit un paquet de lettres où je 
reconnus tout de suite les écritures chères de ceux que nous avions laissés à Paris. 

Le navire en question était un vapeur norvégien, la Jeanne-d’ Arc, capitaine Ring, 
envoyé par MM. Storm, Bull and C°, de Christiania, pour fonder un établissement de 
pêche des baleines. Les Norvégiens étaient repartis pour chercher un emplacement conve- 
nable pour leur usine. Ils avaient trouvé à Port-Gazelle un document laissé par nous 
dans un flacon et par lequel ils avaient appris notre présence dans la baie de l’Observa- 
vatoire. Ils nous avaient aussi appris que, dans la baie Weineck, au Nord de l'ile, setrouvait 
un autre navire français, le Carmen, capitaine Dasté, venu à Kerguelen pour faire un 
chargement d’huile de phoques. Toutes ces nouvelles étaient du plus haut intérêt. Après 
dix mois de solitude, voici tout à coup qu'il y avait foule sur notreîle. , 

Mais il était temps de nous occuper de notre chargement. Malheureusement, nous 
nous apercevions vite que les phoques étaient peu nombreux dans la baie Royale. Avec 
nos nouvelles marmites, la fonte allait rapidement, et c’est maintenant la graisse qui 
manquait. Après avoir fait trente barils d’huile, il fut décidé d'aller chasser au Nord de 
l’île, pour voir en même temps notre compatriote, le capitaine Dasté. Mais la malchance 
nous poursuivait. En sortant de la baie Royale, un violent grain de neige nous surprit : 
notre grand gui fut cassé, et la voile mise en lambeaux. Il s'en fallut de peu que nous 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 19 


n'allassions cette fois-là à la côte. Il fallut regagner la baie de l'Observatoire où mon frère 
et Bontemps se mirent immédiatement à l’œuvre pour réparer la voile. 

Pour ne pas rester inactif, je partis de mon côté avec Larose, en doris, pour explorer 
la partie Sud du Royal Sound. En contournant la pointe Nord de l’île Longue, quel ne 
fut pas notre étonnement d’apercevoir au Sud de la baie Supply une énorme construction 
blanche, puis le vapeur Jeanne-d’ Arc dont nous n’avions plus eu de nouvelles. Une heure 
après, nous étions à bord où nous étions reçus avec la plus grande amabilité par le capi- 
taine Ring, M. Ellefsen, directeur, et tout l'état-major. Ces deux jours à bord de la 
Jeanne-d' Arc furent pour moi une fête. Quelle nouveauté de s'asseoir à table au milieu 
de tant de nouvelles figures. Mes quelques mots d’anglais me suffisaient pour me faire 
comprendre. Presque tous parlaient couramment cette langue. Après la cuisine par trop 
rudimentaire d’Esnault, après dix mois d’un régime peu varié, les menus ordinaires des 
Norvégiens me paraissaient autant de festins. Retrouver le goût d’oignon depuis long- 
temps oublié : quel délice! Le porridge, les œufs, les sardines, les pommes de terre, autant 
de-régals. 

Le soir, il y avait concert du gramophone qui nous chantait en russe la Berceuse de 
Jocelyn, et c’est la, sur cette île désolée, que j’entendis pour la première fois la fameuse 
valse de la Veuve Joyeuse. Les Norvégiens me racontaient que c'était le succès du jour et 
que le roi Haakon était retourné plusieurs fois voir jouer la pièce. Larose mangeait avec 
le maître d’hôtel et je suis certain qu’il faisait honneur aux menus. 

Cependant, il ne fallait pas rester s’amollir dans les délices de Capoue. Le projet de 
pousser notre excursion jusqu'aux baies de la côte Sud de Kerguelen avait germé dans 
ma tête; mais il fallait pour cela transporter notre embarcation et notre matériel par-dessus 
Pétroit isthme séparant la baie Royale et la baie Swains. Ces isthmes étroits sont 
nombreux à Kerguelen ; les pêcheurs d’autrefois les appelaient hanlover (hale par- 
dessus) à cause de leur habitude de les franchir en transportant leurs embarcations à 
l'épaule. Je fis part de mes projets au capitaine Ring qui tint à honneur de venir, avec 
M. Ellefsen et tout l’état-major, aider Larose et moi à tout transporter. 

Un vent violent nous força à relâcher sur un îlot jusqu’au soir, et ce n’est que vers 
minuit que nous atteignimes le fond du bras Ouest de la baie Swains. 

La journée suivante fut employée a une excursion a pied jusqu’a la baie du Volage, 
et ce n’est que le lendemain de bonne heure que nous nous lancames résolument vers 
l'Ouest, pour tenter de franchir jusqu’à la baie de la Table. La tâche fut difficile et je 
considère cette excursion comme notre plus bel exploit à Kerguelen. Vingt fois, je fus sur 
le point de renoncer : il fallut d’abord franchir des marécages dangereux, puis untorrent. 
Ce fut ensuite un terrain montant, rocailleux, malaisé (comme dans la fable), qui nous 
conduisait vers un col encombré par la neige et des amoncellements de blocs de glaces 
provenant sans doute des avalanches du mont Ross (1865 mètres). La descente sur l’autre 
versant ne fut pas moins périlleuse, mais nous étions réconfortés par la vue de la 
mer comme dans la retraite des Dix-Mille, et la certitude d’atteindre le but désiré. 

Il y avait douze heures que nous marchions quand, enfin, la tente fut montée sur un ter 
rain marécageux d’où nouspouvions entendre la mer briser sur la côte voisine. Cette marche 


20 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


avait suffi à mettre en pièces la paire de souliers que je portais. Une de nos plus curieuses 
découvertes sur cette côte fut celle d’une grotte ayant servi de refuge à des naufragés. Les 
ustensiles les plus bizarres s’y trouvaient : un gril fait de cerclesde barriquesenchevêtrées, 
un récipient fait d’un crâne de phoque, etc... Le retour jusqu’à l'endroit où nous avions 
laissé le doris s’effectua sans incidents. Le temps était beau et, pour enprofiter, nous 
décidames de regagner aussitôt le hanlover Swains où nous arrivames exténués au milieu 
de la nuit. La journée suivante fut passée à bord de la Jeanne-l’Arc, et nos aventures 
firent les frais de la conversation. Il y eut une tempête de Nord, courte mais bonne, qui 
enleva en un clin d'œil les wharfs construits par les Norvégiens et fut cause de bien 
d’autres dégâts. La preuve, c’est qu’en allant chercher notre doris le lendemain, nous le 
trouvions complètement défoncé. à 100 mètres de l'endroit où nous l’avions laissé. Que 
l’on essaye, si l’on veut, de s'imaginer un pareil vent; moi, je renonce à le décrire. Un 
charpentier fit la réparation. 

A monretour à bord du J.-B. Charcot, je trouvai mon frère inquiet et se préparant à 
partir à notre recherche, notre absence ayant duré plus qu'il n'avait été prévu. La répa- 
ration de la grand’ voile était en bonne voie. Quant au gui, irréparablement brisé, sa 
suppression était obligatoire. Une installation de fortune y pourvut. 

Le 24 décembre, nous quittions la baie Royale pour aller rejoindre le capitaine Dasté 
dansla baie Weineck au Nord de l'île. Le lendemain, Noël, nous jetions l’ancre dans Port- 
Fuller a quelques milles du Carmen. Des visites réciproques furent échangées et pendant 
quelques jours nos équipages fraternisèrent. Il y eut aussi des échanges de vivres. Le 
Carmen était un beau brick-goélette de 200 tonneaux, armé par une dame, Mme veuve 
Faucon, devenue depuis Mme Dasté, dont mon frère et moi avons eu l’honneur et le 
plaisir de faire la connaissance. 

Entre temps, une excursion dangereuse et imprudente fut tentée aux îles Swain où 


Agnès et moi passâmes trois jours pour les visiter, et aussi pour nous remettre des 
émotions de la traversée d’aller qui avait bien failli nous être fatale. Nous avons pu : 


constater là différentes erreurs de la carte. Le récif Terror n'existe pas à la place qui 
lui est assignée et la forme de l’île Castries est toute différente. 

Le 2 janvier, nous disions adieu à notre ami, le capitaine Dasté, et allions continuer 
notre chasse dans Port-Elizabeth, visité déjà au mois de septembre précédent. Un mois fut 
passé dans cette baie et un mois dans une baie située entre les îles Howe et Mac-Murdo, à 
laquelle nous avons donné lenom du Président de la République. Jen’insisterai pas sur cette 
période pendant laquelle nous avions repris le travail de la baie Loom. Il s'agissait de ter- 
miner la cargaison; nous l’avons fait, mais cette période fut pour tous une période de misère 
et de tristesse. Nous travaillions jour et nuit, ne nous reposant que lorsque latempéte rendait 
notre industrie impossible. Mais la gaîté et l’entrain des premiers jours n'habitaient plus en 
nous. Comme les soldats de Sambre-et-Meuse, nous étions sans habits et sans souliers, et 
c'était un triste spectacle de voir la nuit, à la lueur des flammes, six ombres, pieds nus et 
couvertes de loques huileuses, s’agiter comme des fantoches autour des deux énormes mar- 
mites où bouillait la dépouille encore palpitante d'animaux paisibles et doux. 

L’on n’entendait plus de chansons et, le soir, l'accordéon d’Agnés était muet. Quand 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 21 


le marin français ne chante plus, c’est mauvais signe. Mais, ce qu’il y avait de plus 
grave, c'était l'apparition de la maladie dans notre petit phalanstère. Depuis plusieurs 
mois, je voyais que l’état de santé de mon frère était loin d’étre satisfaisant, bien qu'il ne 
se plaignit jamais. En février, cela devenait inquiétant : insomnies, troubles cardiaques. 

A la fin de mars, le J.-B. Charcot rentrait dans la baie Royale et venait mouiller 
près de l'usine des Norvégiens à Port-Jeanne-d’Arc. Nous avions le plaisir d’y trouver 
M. H. Bossière, concessionnaire des îles Kerguelen, nouvellement arrivé de Durban 
a bord de la Jeanne d'Arc, qui avait faitson voyage pendantnotre absence. Les quelques 
jours pendant lesquels nous avons joui de sa présence ainsi que de celle des quelques 
Français qui laccompagnaient furent une fête pour nous. Parler français, parler de nos 
familles et de Paris, quelle joie ! Nous fimes ensemble de longues promenades et de 
bonnes parties de chasse dans une vedette à pétrole que les Norvégiens avaient l’ama- 
bilité de mettre à notre disposition. Le 26 avril, M. Bossière et ses compagnons repar- 
tirent à bord de la Jeanne-d’ Arc pour le Sud-Afrique. 

Cependant, l’état de mon frère allait en empirant, et, craignant une issue fatale s'il 
reprenait la mer à bord du J.-B. Charcot, j'insistai auprès de lui pour qu’il se fit examiner 
par le D' Green. Le docteur trouva mon frére dans un triste état. Le confortable 
le plusélémentaire manquait à bord du J.-B. Charcot ; il fut donc décidé que mon frère 
irait habiter la station pour suivre un traitement efficace sous la surveillance du 
D' Green, Il fut fait ainsi le 15 mai 1909, date à laquelle je pris le commandement 
du J.-B. Charcot. 

_ Nos derniers jours à Kerguelen furent employés à étudier avecle plus grand intérêt 
l’industrie de la pêche à la baleine pratiquée avec les procédés modernes. 
j L’usine des Norvégiens et leurs maisons d'habitation étaient maintenant terminées ; 
il y avait tout un petit village et même un wharf auquelles deux vapeurs baleiniers Etoile 
et Eclair venaient accoster pour prendre leur charbon. 

Quatre-vingt baleines avaient déjà été capturées. Les vapeurs baleiniers restaient 
troisou quatre jours et revenaient régulièrementavec5 ou 6 baleines à la remorque. J’eus le 
plaisir de prendre part à l’une de ces expéditions avec le capitaine Christiansen. Rien de 
plus émotionnant que la capture d’une de ces énormes bêtes. Un homme se tient conti- 
nuellement dans le nid de corbeaux, en haut du mat, et surveille la surface de lamer dans 
toutes les directions. Dès qu'il aperçoit le petit nuage de vapeur révélant la présence d'une 
baleine, il crie: Blow ! . Chacun se met aussitôt à son poste, le capitaine sur le petit 
gaillard d'avant, près du canon. De la main, il indique à l’homme de barre les évolutions 
à faire et la poursuite commence. La plupart du temps, les baleines sont par bandes, ou 
gammes. Elles semblent comprendre qu’on les chasse ; elles plongent pour dépister, mais 
le capitaine a vu aux remous la direction qu’elles ont prise sous l’eau. La poursuite con- 
tinue ; de nouveaux remous annoncent qu'une ou plusieurs baleines remontent pour res- 
pirer. Autre geste du capitaine qui signifie de stopper la machine. Une masse noire appa- 
raît à bonne portée vers l’avant, une détonation, un nuage de fumée : c’est fait. 

Quelquefois, la bête est tuée sur le coup, sinon par le harpon, du moins par la 
grenade que celui-ci porte à sa pointe et qui explose dans son corps. Mais, si aucune 


22 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


partie vitale n’a été atteinte, l'animal plonge immédiatement et cherche à fuir. On file 
alors le câble fixé au harpon pour éviter sa rupture et on laissel’animals’épuiser. Souvent 
la baleine blessée remorque à une belle vitesse le navire auquel elle est désormais irré- 
vocablement liée. Tout autour, la mer est rouge de sang. L'animal remonte à la surface, 
bat l’eau de la queue et des nageoires, respire bruyamment, évacuant un jet sanglant par 
ses évents : il n’en peut plus. Le treuil! à vapeur embraque alors lentement le câble jus- 
qu'à ceque la baleine captive soit ramenée à toucher l'avant. Un homme, armé d'une 
énorme lance, l’achève alors en la traversant plusieurs fois de part en part. Telle est la 
fin lamentable d’un de ces géants des mers, dont Lacépède disait : « Ah ! pour les peindre, 
il faudrait le pinceau de Buffon ! « : 

Mais les marins baleiniers ne font pas de sentiment. Chaque nouvelle prise est saluée 
d'un hurrah, tandis que le cuisinier, va de l’un à l’autre, versant à chacun une sérieuse 
rasade de rhum : autant de captures, autant de libations. 

Les baleines mortes sont d'abord gonflées au moyen d’une puissante pompe à air, 
puis elles sont prises à la remorque de chaque côté du navire. Jamais on ne rentre à 
l'usine avec moins de quatre baleines. Les cadavres sont alors hissés à sec sur un plan 
incliné, puis dépecés avec d'énormes sabres. Rien n’est perdu : la graisse est transformée 
en huile, la viande et les os en guano. 

Deux espèces principales de balænoptères se rencontrent à Kerguelen : le Balæno- 
ptera musculus — humbpack ou finback des baleiniers — et le rorqual ou baleine bleue. 
La première espèce est de beaucoup la plus nombreuse ; sa taille ne dépasse guère 
18 mètres, tandis que celle du rorqual atteint parfois 35 mètres. Pendant les mois d'avril, 
mai, juin et juillet, ces baloenoptéres viennent s’ébattre très près de terre et jusque dans 
les baies de Kerguelen. Pendant le reste de l’année, on ne les trouve qu’au large, en 
pleine mer. Il est certain que la baleine franche (Balæna) celle dont la gueule contient les 
fameux fanons, existe dans ces parages, mais il est rare d’en rencontrer. Elle s'approche 
rarement de terre, et nous n’en avons jamais vu dans les baies. Les Norvégiens en captu- : 
rèrent une en janvier, à 16 milles al’E.-N.-E du cap Digby. 

Les balcenoptéres ont aussi la machoire supérieure garnie de fanons trés courts, 
mais leur structure particulière fait qu’ils sont pour ainsi dire sans valeur. Ces cétacés 
n’ont donc de valeur que par l'huile qu’on en tire. Cette huile sert à divers usages : 
fabrication des savons et des cordages, tannage des peaux. On en extrait aussi la glycérine 
pour la fabrication de certains explosifs. On s'en servait beaucoup autrefois pour l’éclai- 
rage. La valeur actuelle deces huiles, dites huiles de poisson, est de ofr. 50 le kilogramme. 

On a dit que le pétrole était le sang de l'industrie ; ne pourrait-on pas dire quel’huile 
en est la /ymphe ? 

C’est le 3 juin que le J.-B. Charcot appareilla de Port-Jeanne-d’Arc pour quitter 
définitivement Kerguelen, et entreprendre la longue traversée jusqu'à Melbourne, point 
terminus du voyage. J’embrassai mon frère dont l'état s'était un peu amélioré et qui 
restait aux bons soins du D' Green, et je dis adieu à nos amis les Norvégiens qui avaient 

été si bons pour.nous. Mes hommes aussi vinrent faire leurs adieux, et ce fut une minute 
_poignante que celle où notre embarcation quitta pour la dernière fois cette plage sur 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 23 


laquelle un groupe silencieux nous regardait nous éloigner vers notre petit navire. Je fis 
un effort pour refouler mon chagrin ; il n’y avait pas de temps pour les larmes : la dure 
besogne de l’appareillage nous attendait à bord. 

* Les ancres mises à poste, on hissa la toile et le petit navire vogua. En passant devant 
l'usine, nous poussâmes trois hurrahs, tirames des coups de fusil et hissames le signal 
X.O.R (Nous vous remercions). J'avais préparé cette petite mise en scène pour rendre à 
chacun la belle humeur et la gaîté. Les Norvégiens répondirent par plusieurs salves et en 
hissant le classique T.D.L (Bon voyage). Bientôt nous disparaissions au milieu du fouillis 
dilots de la baie Royale. Nous étions entin en route pour le retour après un séjour de 
quinze-mois à ces îles si particulières et si intéressantes. 

La journée fut belle, mais la brise d'Ouest tomba pour reprendre bientôt au Nord. 
Après avoir monté très haut, le baromètre baissait rapidement, indice infaillible, dans ces 
parages, d'une prochaine tempête de Nord. Nous passames, toutes voiles hautes, vers 
neuf heures du soir, entre le récif Percy et la roche Balfour, sans apercevoir les brisants, 
tant la nuit était noire. La brise fraichissait rapidement ; au large, nous trouvames la mer 
déjà très mauvaise. A quatre heures, il ventait en tempête, mais nous devions conserver 
de la toile et faire route pour nous éloigner de la côte Ce n'est que cinq heures plus 
tard que, mangés par la mer, nous primes la cape babord amures, la tempête battant son 
plein. Ce périlleux début de traversée nous parut pénible ; ce n’était qu’un jeu cependant, 
auprès des dangers que nous réservait la suite: 

Le 15, le vent fit lentement le tour du compas par le Sud et l'Est — en suivant sa 
_ marche habituelle dans l'hémisphère Sud — et se fixa au N.-W.,le baromètre baissant 
rapidement. Avant la nuit, nous étions sous notre voilure de cape, tous les ris pris. La 
mer était très mauvaise et, vers huit heures du soir, une lame balaya le pont, inondant 
notre petit logement et causant divers dégâts. Un second coup de mer miten morceaux nos 
deux dernières embarcations. A deux heures du matin, le vent sauta subitement au Suroit 
et la tempête fut alors.au paroxysme de sa violence. Dans ces coups de vent de l'océan 
Indien, c'est le moment redoutable. Il y eut alors des lames de deux directions, l’une 
venant de l’avant, l’autre du travers. Ces deux lames, se contrariant, soulevaient d'énormes 
volutes d’eau qui déferlaient avec une violence inouïe. Le vent, dont la force atteignait 
la cote 12 dans les grains, chassait un nuage d’écume à piusieurs mètres au-dessus de la 
crête des lames. Il fallait commander par gestes, car il était impossible de s'entendre, tant 
le bruit était assourdissant. Cette description est bien au-dessous de la réalité. 

A huit heures du matin, le 16, un nouveau coup de mer dangereux s’abattit sur le 
petit navire, défonçant cette fois les pavois de babord et remplissant à nouveau la cabine. 

En pareille posture, n'importe quel navirese fût trouvé en péril. Le J.-B. Charcot fut en 
perdition tout le reste de la journée, les lames continuant à balayer le pont. Que le char- 
gement se désarrime, qu’un de nos panneaux cède, et c'était la fin. Dès le commencement 
du coup de vent, des sacs à huile avaient été disposés sur l'avant, mais le temps était froid 
et l'huile gelée s’étendait mal et ne donnait pas son maximum de protection. 

Malgré tout, je n’hésite pas à dire qu’en cette circonstance, et plusieurs fois dans la 
suite, il n'est pas douteux que le filage de l'huile n’ait sauvé le petit navire et nous-mêmes. 


24 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Le plus dangereux coup de mer s’abattit sur l’avant vers cinq heures du soir. Nous 
avions ‘vu la mauvaise lame arriver, se tordre, puis s'effondrer lourdement. Instincti- 
vement, nous nous étions tous cramponnés, fermant les yeux. Ce fut terrible : le petit 
navire eut un violent soubresaut, et le grincement des charpentes fut tel que nous pen- 
sames que la coque s’ouvrait. 

Il n’en fut rien cependant, mais la trinquette était défoncée, le gréement du bout 
dehors arraché. La lisse et trois jambettes, pièces de chéne que n’aurait pu ébranler un 
cric, avaient cédé. 

Ce fut notre dernière épreuve ce jour-là. Le vent tomba durant la nuit et la mer se 
calma graduellement. Telle fut cette journée, inoubliable, pendant laquelle nousattendions 
à chaque instant la lame qui devait mettre fin à notre angoisse, en même temps qu'à notre 
vie. En un péril si grand, mes quatre matelots ne perdirent pas un instant leur calme et se 
conduisirent comme doivent le faire, en pareil cas, des marins français. Ils s exposérent 
plusieurs fois pendant cette journée du 16 juin pour aller sur l’avant renouveler l'huile 
des sacs, et leur conduite fut au-dessus de tout éloge. 

Durant toute la campagne, ni mon frère ni moi ne les avons habitués aux louanges ; 
mais si, par hasard, ces lignes leur tombent sous les yeux, qu’ils sachent que pas une de 
leurs bonnes actions n’a échappé à notre clairvoyance et que nous avons su apprécier à sa 
juste valeur leur endurance presque incroyable et leur belle cranerie. Qu'ils sachent aussi 
que nous ne les considérons plus comme des inférieurs, mais comme nos collaborateurs 
dans cet effort à six pour l’honneur du pavillon français. 

Je n’insisterai pas sur cette traversée, dont aucune parole ne saurait rendre toute 
l'horreur : ce fut une rude épreuve pour nos nerfs. Elle dura 45 jours, et fut la plus 
pénible et la plus mauvaise qui se puisse imaginer. Ce fut une suite presque ininter- 
rompue de violentes tempêtes. Aucune des contrariétés qui attendent le marin ne nous fut 
épargnée, ni les vents contraires, ni même le calme qui nous laissa stationnaires à 200 milles 
à peine du but tant désiré. 

Le 22 juillet au soir, on obtint une sonde par 180 mètres de fond. Ce fut pour moi 
un grand soulagement que ce précieux contrôle de l'exactitude de nos chronométres. Toute 
incertitude avait disparu et nous mîmes le cap sur la terre, malgré le temps sombre et 
bouché. J'avais prévenu mes hommes que l’on devait apercevoir le feu du cap Otway vers 
minuit, et nous avions tous les yeux fixés vers l’avant. Le temps se gâtait et de violents 
grains de grêle passaient sur nous. L'heure était émotionnante : allions-nous être pris par la 
tempête au moment précis del’atterrage avec la côte dangereuse de l’île King sous le vent? 
Toutes les cing minutes, je consultais le baromètre et, je l’avoue, l'angoisse m’étreignait. 

Un peu après minuit, pendant une éclaircie, entre deux grains, nous apercevions enfin 
le feu du cap Otway, après n’avoir vu pendant quarante-cing jours qu’une mer démontée 
sous un ciel inclément. Ceux qui n’ont pas passé par où nous venions de passer ne compren- 
dront jamais la joie folle qui s’empara de nous. Il pouvait venter, maintenant, rien ne 
nous arrêterait. Comme pris subitement de frénésie, nous courrions sur le pont, cherchant 
à tâtons les cordages : nous larguions tous les ris sans nous soucier des grains, les yeux 
fixés vers le phare et comme hynoptisés par ses trois éclats périodiques. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 25 


Ce fut le dernier effort du petit navire : à huit heures du matin, il voguait dans des 
eaux moins tourmentées, à l’abri des hautes terres du cap Otway. 

Quel soulagement ! Quelle détente ! Il était temps, car nous étions tous dans un état 
d’épuisement impossible à décrire, et les vivres alldient manquer. Nous n'avions plus pour 
nous vêtir que quelques haillons humides, et notre aspect était vraiment repoussant. 

Comme nous devions prendre le pilote à l'entrée du Port-Phillip, nous vêtimes nos 
loques les plus décentes. Bontemps me rasa la barbe. 

Dès que le batean pilote fut en vue, nous hissames notre plus beau pavillon fran- 
çais. 

Le pilote vint à bord. Je me rappelle son nom: c'était M. Anthony, un brave Anglais 

‘bedonnant, tiré à quatre épingles, le visage rose et fraîchement rasé. Une de ses mains 
gantées tenait une belle sacoche en cuir jaune, et l’autre, un paquet contenant des frian- 
dises pour nous. 

En embarquant, il demanda : « Who is the captain ? » Un des cinq PARA s'avanca. 
Il lança un regard inquiet sur notre accoutrement, puis sa bonne grosse figure s’épanouit, 
et il nous tendit ses deux mains en nous traitant de: hearts of lion! : 

Pendant que nous faisions route vers Melbourne, il m’assura que nous arrivions 
dans la plus belle ville du monde, et que nous y trouverions tout le confortable européen. 
Il me recommanda tout particulièrement les bains turcs de la rue Swanston. 

Le 25 juillet, à quatre heures de l’aprés-midi, nous laissions tomber l'ancre dans la 
baie Hobson, port de Melbourne. Notre aventure fit sensation et le consul de France, 
M. Pigeonneau, nous recut a bras ouverts. 

Une visite au coiffeur, au tailleur et à l’établissement de bains RENE par le pete et 
nous avions repris l'allure de tout le monde. | 

. Quelques jours plus tard, j'allais conduire mes quatre braves compagnons au paquebot 
qui devait les ramener en France. Ils étaient joyeux et les pièces d’or tintaient dans leurs 
poches. : Lee 

Mais mon odyssée n'était pas terminée. Je dus rester plusieurs mois à Melbourne 
pour la vente de mon petit navire et de son chargement. Ce fut un désastre financier. 
Après bien des difficultés et bien des ennuis, je réussis à vendre le J.-B. Charcot à un 
capitaine de Nouméa pour une poignée d'or. Le cœur un peu gros, je dis adieu au petit 
navire qui nous avait conduits si vaillamment à travers 15 000 milles d’océan, et je pris 
le paquebot pour la France. _ 

Enfin, au mois de mai 1910, j'étais de retour parmiles miens à Paris, où je retrouvais 

‘mon frère complètement rétabli. Nous avions été absents plus de trente mois. 


T. Ul. — Fasc. 3. T4 


Échinodermes 


Par M. R. KŒHLER 


Professeur de zoologie à l’Université de Lyon. 


Les Échinodermes recueillis par M. Rallier du Baty aux îles de Kerguelen ne sont 
pas nombreux; ils constituent, néanmoins, une petite collection assez intéressante pour le 
Muséum qui ne possédait aucun Échinoderme de ces parages. 

Les espèces recueillies, au nombre de huit, sont les suivantes : 

AsTERIAS PERRIERI Smith ; ; 

LEPTOPTYCHASTER KERGUELENSIS Smith ; 

PTERASTER AFFINIS Smith; 

LABIDIASTER RADIOSUS Var. ANNULATUS Sladen; 

OPHIOGLYPHA BREVISPINA Smith ; 

OPHIOGLYPHA HEXACTIS Smith; 

OPHIACANTHA VIVIPARA Ljungmann; 

ABATUS CORDATUS (Verrill). : 

Toutes ces espéces sont connues et avaient déja été signalées aux iles de Kerguelen ; 
leur étude suggére cependant quelques remarques qu’il n’est pas inutile de résumer ici. 
D’autre part, j'ai cru devoir donner quelques photographies de certaines de ces espèces qui 
n avaient pas encore été représentées ou dont les dessins sont insuffisants. 


Asterias Perrieri SMITH. 


(Pl. I, fig. 1 et 2.) 


Les exemplaires, au nombre de six, qui m'ont été remis, ont tous six bras qui sont 
toujours subégaux. Dansle plus grand, R —65 millimètres environ et r = 14 millimètres ; 
dans les autres, les valeurs respectives de R sont de 45, 37, 32, 23 et 23 millimètres. L’in- 
dividu chez lequel À —45 millimètres a le disque élevé et la face ventrale est profondé- 
ment excavée, offrant ainsi l’attitude incubatrice ; il ne portait cependant aucune trace 
de jeunes sur la face ventrale, mais une ponte détachée se trouvait dans le bocal renfer- 
mant les échantillons. 

Les exemplaires offrent, en général, une coloration d’un jaune brun assez clair; le plus 


_ grand et l’un des plus petits sont plus foncés que les autres, et l’un des individus moyens 
est grisâtre. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 27 


 Leitpoldt (Asteroidea der Vettor Pisani Expedition, Zeit. f. wiss. Zool., Bd. LIX, 
p. 569) estime que l'A. Perrieri est identique à l'A. antarctica Lütken, et tout au plus 
ferait-il une variété de cette derniére espéce s’il était prouvé que les bras sont constamment 
au nombre de six. Après l'étude que j’ai faite des exemplaires de Kerguelen, je serais 
plutôt tenté de considérer l'A. Perrieri comme une espèce indépendante. Outre le 
nombre des bras qui paraît se maintenir d’une manière très régulière au chiffre six chez 
l'A. Perrieri, les piquants latéro-ventraux sont disposés par groupes de deux au lieu 
de l’être par groupes de frois, ainsi que cela arrive chez l’A. antarctica. Ce caractère 
a déjà été indiqué par Smith; cet auteur dit, en effet : « Spinæ ventrales in serie duplici 
spinis ambulacralibus adjacentes binatæ (nisi rarissime ternatæ). » Dans tous les individus 
que j’ai eus en main, ces derniers piquants forment toujours des groupes de deux; il s’y 
ajoute parfois en dehors un troisième piquant un peu plus petit, mais le fait est rare 
comme le fait remarquer Smith. Ces petites rangées de deux piquants sont assez écartées 
l'une de l’autre; elles sont toujours placées très obliquement et non transversalement 
par rapport aux sillons, et elles sont bien différentes de celles que l’on observe chez 
lA. antarctica, où les rangées de trois piquants sont plus rapprochées et placées à peu près 
perpendiculairement à la direction du sillon ambulacraire. Ces dispositions apparaissent 
nettement sur les photographies que je reproduis ici. J’ajouterai que l’A. Perrieri peut 
atteindre des dimensions plus considérables que l'A. antarctica. Dans le type de Smith, 
R atteignait 150 millimètres et le diamètre du disque était de 45 millimètres ; dans le 
plus grand individu recueilli par M. Rallier du Baty, les dimensions étaient beaucoup 
moindres, puisque R ne dépassait pas 65 millimètres. 


Leptoptychaster kerguelensis Situ. 


Deux échantillons en trés bon état: ils mesurent respectivement, R, 38 et 22 milli- 
mètres ; r, 17 et 12 millimètres. Aucun d’eux ne présente la moindre trace de ponte. 


. Pteraster affinis Smiru. 
(PL. I, fig. 3 et 4.) 


Un échantillon en excellent état : R= 18 à 20 millimètres ; r = 10 millimètres. 
L'individu est bien conforme à la description de Smith. La face dorsale est convexe; 
les bras sont triangulaires et pointus. 


Labidiaster radiosus, var. annulatus SLADEN. 


Un échantillon complet. 

Les bras sontau nombre de 32; dans les plus gros, la largeur, mesurée à 20 millimètres 
du disque, est de 6 millimètres ; le. diamètre du disque est de 35 millimètres environ. Les 
plus longs bras atteignent 80 à 85 millimètres de longueur. 


28. ANNALES DE-L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE : 


~~ Le L. annulatus a été distingué par Sladen du L. radiosus connu à l’extrémité méri- 
dionale de l'Amérique du Sud. Cette espèce a été rencontrée par le Challenger aux îles 
Kerguelen et Heard, à des profondeurs variant entre 75 et 150 brasses ; elle se distingue 
du L. radiosus par ses bras plus nombreux et relativement plus minces, parles dimensions. 
uniformes des piquants qui recouvrent le disque et le commencement des bras, et par les 
bandes transversales de pédicellaires croisés qui forment, sur les bras, des anneaux plus 
épais et plus complets. oe . 

L’échantillon recueilli par M. Rallier du Baty présente quelques caractéres du L. an- 
nulatus, tandis qu'il s'écarte du L. radiosus du cap Horn auquel j’ai pu le comparer. Le 
disque est couvert de piquants trés serrés et assez fins, qui ne sont pas plus développés que 
ceux qu’on trouve sur la base des bras; de plus, les anneaux formés par les amas de 
pédicellaires sont très marqués et saillants; en raison de ces dispositions, l’aspect de 
l’exemplaire est différent de celui du Labidiaster de l'Amérique du Sud, conformément à 
ce qu'a fait remarquer Sladen. La plaque madréporique:est très saillante. La couleur de 
l'échantillon de Kerguelen est grisâtre, mais sur certains bras elle devient tout à fait foncée 
et même noiratre. RTE» ; ‘ 

A la vérité, je ne remarque pas que l’échantillon rapporté par M. Rallier du Baty ait 
les bras particulièrement étroits, et ceux-ci ne sont d’ailleurs pas très nombreux, puis- 
qu'ils ne dépassent pas le chiffre 32. Je ferai observer, à ce sujet, que Sladen a fondé le 
L. annulatus sur des échantillons plus grands que celui qui m’a été remis; dans le type, 
le diamètre du disque atteignait 66 millimètres; les bras, au nombre de quarante à quarante- 
quatre, pouvaient atteindre une longueur de 165 à 190 millimètres; leur largeur, à 
20 millimètres de la base, était de 6 à 7 millimètres. Ces différences dans l’âge des indi- 
vidus suffisent pour expliquer les différences que j'observe dans le nombre des bras et 
leurs dimensions relatives. | 

.Le Z. annulatus de Sladen est évidemment très voisin du L. radiosus : il n’en diffère 
que par les piquants du disque plus serrés et par le développement des anneaux de pédi- 
cellaires sur les bras. Ces deux caractères suffisent pour lui donner un facies particulier; 
mais l’on peut se demander s’il s’agit d’une espèce vraiment distincte : pour ma part, je 
considère que le L. annulatus n'est .qu'une simple variété du L. radiosus. 


Ophioglypha brevispina SmirH. 


(Pl. I, fig. 7 et 8). 


Six échantillons, dont l’un est très petit. 

Dans les quatre plus grands, le diamètre du disque varie entre 11 et 12 millimètres; 
les bras sont remarquables par leur longueur et leur minceur : leur longueur atteint près 
de 60 millimètres dans un exemplaire chez lequel le diamètre du disque est de 11 milli- 
mètres, tandis que leur largeur ne dépasse pas 2 millimètres à la base. Il est donc néces- 
saire de rectifier, à ce point de vue, la description de Smith qui dit : Discus in latitudine 
ad radii longitudinem circiter 1/3 æqualis. I n’y a pas, sur ces exemplaires, entre les plaques 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 29 


centrales du disque'et les autres, une aussi grande différence que celle indiquée par Smith: 
sur son dessin : toutes les plaques sont presque égales, mais on: remarqué une centro= 
dorsale et cinq radiales primaires un peu plus grandes que lés autres, les radiales étant 
séparées de la centro-dorsale par un ou deux rangs de plaques. Les boucliers radiaux sont 
aussi plus allongés que ne l'indique Smith; ils sont plus longs que larges, triangulaires, 
et presque toujours séparés sur toute leur longueur par deux grosses plaques : ils sont: 
simplement rapprochés vers leur angle externe, et ce n’est que saps un eu des quatre 
exemplaires seulement qu'ils sont contigus en debare 3 

Le cinquié.ne individu, plus petit que les précédents, car le diamètre du disque ne 
dépasse pas 8 mm. 5, se rapproche beaucoup plus du type de Smith: les boucliers 
radiaux sont plus courts, à peu près aussi longs que larges et ils sont contigus en dehors; 
le plus grand bras mesure seulement 28 millimètres de longueur à partir de ‘sa. base. 
Quant au sixième échantillon, il est très jeune et le diamètre du disque atteint seulement 
2 millimètres. 


Ophioglypha hexactis Smitu. 
(PI. I, fig. 5 et 6). 


Quatre échantillons. Dans le plus grand, le diamétre du disque atteint 22 millimétres; 
les bras sont cassés a l’extrémité et leur longueur dépasse 50 millimètres; les deux autres 
sont en très mauvais état; enfin le dernier est plus petit et son disque mesure seulement 
11 millimètres de diamètre. 

Deux des individus ont une coloration conforme à celle que Smith indique : la face 
dorsale est d’un vert olivatre très foncé et la face ventrale est jaunâtre ; le troisième exem- 
plaire est gris rosé, plus foncé en dessus; enfin le petit est gris. 

En enlevant la face dorsale du disque de l’un des grands échantillons, j’ai observé les 
jeunes dans la position qui a été indiquée par les auteurs. Je donne ici (fig. 6) la photo- 
graphie de la face dorsale de l’un d’eux dont le disque mesure 4 millimètres de diamètre. 
Les plaques dorsales sont peu nombreuses : on reconnaît une grande centro-dorsale ainsi 
que quelques plaques radiales primaires, grandes et arrondies ; les boucliers radiaux sont 
de taille relativement grande et le peigne radial est plus apparent que chez l’adulte. Les 
plaques brachiales dorsales et latérales n’offrent pas encore les caractères particuliers 
qu'elles auront chez l'adulte : elles sont régulières et les plaques latérales ne sont pas 
morcelées. Les boucliers buccaux ont déjà leur forme caractéristique et ils sont nota- 
blement plus longs que larges. 

Une particularité de structure très importante de l'O. hexactis, et sur laquelle les 
auteurs n’ont pas attiré l’attention, est offerte par les plaques brachiales latérales. Ces 
dernières, en effet, sont morcelées en plusieurs fragments, et, sur les quatre ou cing premiers 
articles des bras, ces fragments sont particulièrement nombreux : de plus, ils empiètent 
considérablement sur la face dorsale des bras ; il en résulte qu’à ce niveau les plaques 
brachiales dorsales sont extrêmement réduites, et les premières même ne sont guère plus 
grosses que les fragments voisins des plaques latérales. Cette disposition apparaît net- 


30: ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE °. 


tement sur ma photographie (PI. I, fig. 5). Peu à peu, les plaques brachiales dorsales 
deviennent plus grosses. et elles finissent par recouvrir la plus grande partie de la face 
dorsale des bras, tandis que les plaques latérales cessent d’être morcelées et elles se localisent 
aux faces latérales des bras en prenant la forme ordinaire. 

Lymann’apas indiqué cette structure particulière des bras dans le dessin qu’il donne de 
la face dorsale del’O. hexactis (Voyage of the Challenger, Ophiuroidea, pl. XLVII, fig. 2); 
il représente, sur chaque article des bras, une plaque dorsale assez grande et deux plaques 
latérales parfaitement indivises. La face dorsale des bras n'est correctement représentée 
que sur la photographie publiée par Chun (Aus den Tiefen des Weltmeeres, p. 254). 

Dans ces deux dessins, la face dorsale du disque a été enlevée pour montrer les jeunes 
én place. J'ai cru devoir donner ici une photographie montrant la face dorsale du disque 
intacte ainsi que les bras sur uné certaine partie de leur longueur. 

Le morcellement particulier des plaques brachiales latérales de l'O. hexactis rappelle 
complètement ce qui existe chez l'Ophionotus Victoriæ Bell. Ces deux Ophiures présentent 
d’ailleurs de grandes analogies dont j'ai pu me rendre compte en étudiant les nombreux 
exemplaires d’O. Victoriæ rapportés des mers Antarctiques par le D" J. Charcot, et l’on 
peut se demander s’il n’y a pas lieu de les réunir toutes deux dans le même genre. Je me 
propose de revenir sur ce point dans le mémoire que je prépare actuellement sur les 
Échinodermes de l’Expédition Antarctique Française et qui paraîtra prochainement. 


Ophiacantha vivipara LIUNGMANN. 


Six échantillons, tous à sept bras; quelques-uns d’entre eux portent des jeunes sur le 
disque. 


Abatus cordatus VERRILL). 


Un échantillon de petite taille : la longueur ne dépasse pas 16 millimètres. 

Les auteurs ont le plus souvent réuni, sous la même dénomination d’A. cavernosus, 
l’Abatus de Kerguelen, et l'un de ceux qui vivent à l’extrémité méridionale de l'Amérique 
du Sud; cette confusion est due principalement à Agassiz. En réalité, l'espèce de Kergue- 
len est différente des espèces sud-américaines, comme Mortensen l’a montré récemment. 


EXPLICATION DE LA PLANCHE I 
; 2. — — - Asterias Pure face dorsale. Grossissement 1,2. 
- nis: face dorsale. Grossissement 2. 
r afinis: vue latérale. Grossissement 2. 
hexactis: face dorsale. Grossissement 2. 
lypha hexactis : jeune sae ta a contenu dans une bourse génitale. ,Gros- 
-sissement FREE da fe 

a Dern face dorsale. Grossissement 3, 6. aS à 5 

À x i 

: Hide 

FE f 59 #4 $ 


-Annélides polychètes 


Par Cu. GRAVIER 


Au cours de la rude campagne de navigation qu'il a faite aux îles Kerguelen sur le 
J.-B. Charcot, M. Rallier du Baty a recueilli un grand nombre d'animaux, et en particulier 
des Annélides Polychètes. Ces Annélides sont toutes connues, car les Kerguelen, malgré 
l'inclémence de la mer dans leurs parages, ont été visitées par la plupart des expéditions 
scientifiques qui ont sillonné l'océan Austral, notamment par l'expédition allemande déjà 
ancienne de la Gazelle, par celle plus récente de la Valdivia (Tiefsee-Expedition) et aussi 
par-celle du Challenger. Néanmoins, elles ont un intérêt spécial pour nous, parce que la 
plupart des espèces rapportées par M. Rallier du Baty n'étaient pas représentées dans les 
collections du Muséum d'histoire naturelle, bien que les Kerguelen fassent partie de notre 
domaine colonial. Elles ont été mentionnées d’une manière très sommaire dans une note 
préliminaire (1). 


Lætmatonice producta GRUBE. 


Letmonice producta Ed. Grube, Anneliden — Ausbeute S. M. S. « Gazelle ». Monatsber. der 
Konigl. Akad. der Wissenschaften, Berlin, 1877, p. 512. 


Lætmonice producta W.C. Mac Intosh, The Voyage of H. M. S. Challenger. Scientif. Reports. 


Zoology, vol. XII, 1885, p. 30 ; pl. Vi, fg: 2580 VII, fig. 3; pl. VIII, fig. 2, 4,5; 
pl. IVA, fig. 1-12; pl. VA, fig. 1-8. 

Letmonice producta FI. Buchanan, Reports on Polychæts, Scientif. Proceed. Roy. Dublin Soc., 
N. S., vol. VIII, 1893-1898, p. 160. 

Letmatonice producta E.von Marenzeller, Südjapanische Anneliden, III. — Aphroditea-Eunicea, 
Denksch. der math.snaturwiss. Classe der Kaiserl. Akad. der Wissensch., 62° Bd, 
1902, p. 567. 

Letmatonice producta E. Ehlers, Diebo densissige Anneliden aus den Sammlungen der deutschen 
Tiefsee-Expedition, 1908, Pp. 40. 

Letmatonice producta Ch. Gravier, Sur les Annélides Polychétes recueillies par M. Rallier du 
Baty aux îles Kerguelen, Bull. du Mus. d’hist. natur., t: XVI, 1910, p. 197. 


Le trés bel exemplaire de cette espéce qu’a rapporté M. Rallier du Baty mesure 
13 centimètres. de longueur et 5 centimètres de largeur. Ce superbe Aphroditien de la 


(1) Cu. Gravier, Sur les Annélides Polychétes recueillies par M. Rallier du Baty aux îles Kerguelen (Bull. du 
Mus. d’Hist. natur., t. XVI, 1910, p. 197). 


— © 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 33 


tribu des Hermadionidæ a été recueillien premier lieu par la Gazelle, puis par le Challenger 
dans les mêmes parages et en bien d’autres points du Pacifique Sud. Miss Florence 
Buchanan a, plus tard, signalé la présence de cette Annélide à 54 milles d'Achille Head 
sur la côte Ouest de l'Irlande, où on l’a draguée à 500 fathoms (plus de goo mètres) de pro- 
fondeur. Des exemplaires, provenant d’Eno-Simaet de Hakodata, au Japon, récoltés à des 
profondeurs allant jusqu’à 300 mètres, ont été étudiés par E. von Marenzeller. La Valdivia 
(Tiefsee-Expedition) a retrouvé la même espèce aux Kerguelen. Enfin la 2° expédition 
antarctique francaise (J.-B. Charcot, 1908-1910) l'a draguée à 420 mètres de profondeur, 
dans la baie de l'Amirauté (Ile du Roi George, Shetlands du Sud.) L’exemplaire en question 
compte 18 paires d’élytres ; les soies dorsales ont la forme si caractéristique de fléche 
barbelée ; les soies ventrales ont leurs appendices pectinés à l’extrémité libre. 

Cette espèce paraît être très polymorphe. W. C. Mac Intosh n’en a pas décrit moins 
de quatre variétés : var. Wyvillei (ile Marion, île du Prince-Edouard ; à mi-chemin entre 
les régions antarctiques et l’Australie) ; var. benthaliana (entre l'île du Prince-Edouard 
et les Kerguelen ; entre les régions antarctiques et l’Australie ; Pacifique Nord, etc.) ; 
var. Willemæsi (des Açores à l'océan Antarctique, côtes Nord-Est d'Australie ; Nouvelle- 
Zélande) ; var. assimilis (Nouvelle-Ecosse). 

D’après ce qui précède, la Lœtmatonice producta a une aire de répartition extrêmement 


étendue. © 
Hermadion magalhaensi KinsERc. 


Hermadion magalhaensi Kinberg. Nya Slägten. Ofvers. Kong. Vetensk-Akad. Forhandl., 1855, 
p. 386. 
— Freg. Eugenies Resa. Zool. Annulata, Taf. VI, fig. 32. 
Hermadion Kerguelensi W. C. Mac Intosh, The Voyage of H. M. S. Challenger, Scientif. 
Reports. Zoology, vol. XII, 1885, p. 105; pl. XI, fig. 5; pl. XII, fig. 7. 
Hermadion magalhaensi E. Ehlers, Polychaeten der hamburger magalhaensischen Sammelreise, 


1897, p. 15. 
— Magellanische Anneliden, Nachr. Gesellsch. der Wiss. Güttingen, Mathem.-phys. 


Klasse, 1900, p. 209. 

— Anneliden der Sammlung Plate, Zoolog. Jahrb. Suppl. Fauna chilensis, II, 1901, 
p. 256. 

— Die Polychaeten des magellanischen und chilenischen Strandes. Ein faunistischer 
Versuch, 1901, p. 43. 

— Die bodensässigen Anneliden aus den Sammlungen der deutschen Tiefsee-Expe- 
dition, 1908, p. 46. 

Hermadion magalhaensi Ch. Gravier, Sur les Annélides Polychètes recueillies par M. Rallier 

du Baty aux îles Kerguelen, Bull. du Mus. d'hist. natur., t. XVI, 1910, p. 197. 


Cet Aphroditien n'est représenté dans la collection rapportée par M. Rallier du Baty 
des Kerguelen que par un seul individu en mauvais état, ayant perdu presque tous ses 
élytres, ses cirres dorsaux, ses cirres anaux, une antenne médiane, une antenne latérale 
et un palpe. Il est cassé en deux fragments. Il est néanmoins reconnaissable à ses élytres et 
à ses soies. La pigmentation de la face dorsale, chez l'individu dont il est question ici, 
diffère sensiblement de celle que Mac Intosh a figurée (pl. XII, fig. 1.). Ehlers a mentionné 
la grande variabilité des caractères de cette espèce. Le Pourquoi pas a recueilli | Her- 
madion magalhaensi dans la baie Marguerite, à 200 mètres de profondeur. 

T. Il. — Fasc. 3. 5 


34 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Lagisca vesiculosa (GRUBE). 


Polynoe vesiculosa Grube, Anneliden-Ausbeute S. M. S. « Gazelle ». Monatsber. der Kénigl. 
Akad. der Wissensch. Berlin, 1877, p. 514. 
Lagisca antarctica Mac Intosh, The Voyage of H. M. S. Challenger, Scientif. Reports. Zoology, 
vol. XII, 1885, p. 80; pl. XIII, fig. 1; pl. XVI, fig. 3; pl. XVIII, fig. 1; pl. VIA, 
fig. 1, 2. 
Lagisca vesiculosa Ehlers, Polychaeten der hamburger magalhaensischen Sammelreise, 1897, p. 14. 
— Magellanische Anneliden, Nachr. Gesellsch. der Wissench. Gottingen, Math.-phys. 
Klasse, 1900, p. 209. 
— Anneldien der Sammlung Plate, Zool.. Jahrb. Suppl. Fauna chilensis, 11, 1901, 


p. 256. 

— Die Polychaeten des magellanischen und chilenischen Strandes. Ein faunistischer 
Versuch, 1901, p. 42. 

— Die bodensässige Anneliden aus den Sammlungen der deutschen Tiefsee-Expedition, 


1908, p. 47. 
Lagisca vesiculosa Gravier, Sur les Annélides Polychètes recueillies par M. Rallier du Baty 


aux îles Kerguelen. Bull. du Mus. d'hist. natur., t. XVI, 1901, p. 197. 


Je rapporte avec quelque réserve à cette espèce de Grube trois Zagisca récoltés aux 
Kerguelen par M. Rallier du Baty. Les plus grands des exemplaires dragués par le 
Challenger avaient, d’après Mac Intosh, 40 millimètres de longueur, sur 15 de largeur, y 
compris les soies. Parmi les trois exemplaires de M. Rallier du Baty, l’un d’eux avait des 
dimensions respectivement très supérieures aux précédentes : 65 millimètres de longueur 
et 22 millimètres de largeur, y compris les soies. Je n’observe pas les crénelures que Mac 
Intosh a figurées au bord postérieur de certains élytres (pl. XIII, fig. 1), ni la petite pointe 
située au-dessous du crochet terminal des soies ventrales (pl. VIA, fig. 11) indiquée par 
le même auteur. | 

Cette espèce est fort répandue dans l'hémisphère Sud : îles Kerguelen ; îles Falkland ; 
île Marion ; région de Magellan ; Sud du Chili ; île Bouvet. La Valdivia l’a recueillie aux 
Kerguelen et dans les parages de l’île Bouvet. 


Nephthys macrura ScHMARDA. 


Nephthys macrura Schmarda, Neue wirbellose Thiere, 1° Theil, II, 1861, p. gt. 
Nephthys virgini Kinberg. Annulata nova, Ofvers. Kong. Vetensk. Akad. Forhandl., 1865,1:°4,p. 239. 
Nephthys trissophyllus Grube, Anneliden-Ausbeute S. M. S. Gazelle, Monatsber. der Akad. 
der Wissensch. Berlin, 1877, p. 533. 
Nephthys trissophyllus Mac Intosh, The Voyage of H. M. S. Challenger. Scientific. Reports. 
Zoology, vol. XII, 1885, p. 159; pl. XXVI, fig. 1-5; pl. XXVII, fig. 1-4; pl. XXX, 
fig. 8; pl. XIVa, fig. 9-11. 
Nephthys virgini Ehlers, Polychaeten der hamburger magalhaensischen Sammelreise, 1897, p. 195 
Taf. I, fig. 9-12. 
— Die Polychaeten des magellanischen und chilenischen Strandes. Ein faunistischer 
Versuch, 1901, p. 66. 
Nephthys macrura Ehlers, Neuseeländische Anneliden, Abhandl. der Kénigl. Gesellsch. der Wis- 
sensch: zu Gottingen, Neue Folge, Bd. III, n° 1, 1904, p. 14. 
— Die bodensässige Anneliden aus den Sammlungen der deutschen Tiefsee-Expedi- 
tion, 1908, p. 57. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 35 


Nephthys macrura Gravier, Sur les Annélides Polychètes recueillies par M. Rallier du Baty 
aux îles Kerguelen. Bull. du Mus. d'hist. natur., t. XVI, 1910, p. 198. 


M. Rallier du Baty a recueilli un certain nombre Pere de ce Nephthys de 
grande taille. L’un d’eux, auquel il manque une notable partie de la région postérieure, 
a 17 centimètres de longueur ; lorsqu'il était entier et vivant, il devait mesurer de 25 à 
30 centimètres. Le Professeur Mac Intosh dit que les plus grands spécimens qu'il a exa- 
minés, et dont les dimensions étaient supérieures à celles des individus étudiés par Grube, 
avaient 220 millimètres de longueur. La disposition des papilles de la trompe est bien 
conforme ici aux indications et aux dessins de Mac Intosh. Il en est de même pour les 
parapodes avec leur branchie si développée et leurs trois grands lobes foliacés qui ont fait 
donner à l’espèce le nom de trissophyllus. Deux jeunes individus, ayant près de 6 centi- 
métres de longueur, ont une pigmentation a peine commencante dans la région antérieure 
du corps, tandis que les exemplaires de grande taille sont teintés en brun foncé danstoute 
leur étendue. Mais ils sont très reconnaissables à leurs branchies, à leurs lobes parapo- 
diaux, et aussi aux papilles de la trompe qui offrent la même disposition que chez les 
adultes. Le Mephthys macrura vit aussi dans l'Antarctique sud-américain ; il a été trouvé 
par le Pourquoi pas à Vile Déception (Port-Foster) et dans le chenal Peltier. 


Arenicola assimilis EnLers. 


Arenicola piscatorum Schmarda, Neue wirbellose Thiere, I* Theil, II, 1861, p. 52. 

Arenicola piscatorum Cuy. var. Grube, Anneliden-Ausbeute S. M. S. Gazelle, Monatsber. der 
Konigl. Akad. der Wissensch. Berlin, 1877, p. 511, 554. 

Arenico: a assimilis Ehlers, Polychaeten der hamburger magalhaensischen Sammelreise, 1897, 


p- 103. 
— Magellanische Anneliden, Nachr. Gesellsch. der Wissensch. zu Gottingen, Math.- 


phys. Klasse, 1901, p. 218. 
— Die Anneliden der Sammlung Plate. Zoolog. Jahrb. Suppl. Fauna chilensis, II, 1901, 


p- 265. 
— Die Polychaeten des magellanischen und chilenischen Strandes. Ein faunistischer 


Versuch, 1901, p. 177. 
Arenicola assimilis Ashworth, Die Arenicoliden-Sammlung im Künigl. zoologischen Museum 
in Berlin, Mitteil. aus dem Zoolog. Museum in Berlin, IV Bd., 3 Heft, 1910, p 35. 
Arenicola assimilis ‘Gravier, Sur les Annélides Polychétes recueillies par M. Rallier du Baty 
aux îles Kerguelen. Bull. du Muséum d'hist. natur., t. XVI, 1910, p. 198. 


C'est avec toute réserve que je rapporte à cette espèce d'Ehlers un seul exemplaire 
incomplet d’Arénicole en très mauvais état de conservation. Le tégument est dans un état 
déplorable; plusieurs touffes branchiales se sont séparées de leur point d'attache. Les 
deux espèces Arenicola marina L. et A. assimilis Ehlers se distinguent extérieurement 
l’une de l’autre par le rang du segment sur lequel sont fixées les premières branchies ; 
celles-ci sont situées sur le septième sétigère chez la première des deux espèces, sur le hui- 
tième ou la neuvième chez la seconde. C’est là le caractère extérieur le plus saillant, celui 
qui est tiré des lobes latéraux du prostomium étant moins apparent. 


36 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


L’Arenicola assimilis existe sur les côtes du Chili, dans la région magellanique, dans 
la Géorgie du Sud, aux îles Kerguelen et en Californie. 


Brada mammillata GRUBE. 


Brada mammillata Grube, Jahresber. der schlesischen Gesellschaft für 1876, p. 40. 
— Anneliden-Ausbeute S. M. S. Gazelle, Monatsber. der Künigl. Ahad. der Wissensch. 
Berlin, 1877, p. 541. 
Brada mammillata Studer, Beitrage zur Naturgesch. der wirbell. Thiere, Archiv fur Naturgesch. 
Jahrg. 44, 1, 1878, p. 111; Taf. V, fig. 1-10. 
— Forschungsreise S. M. S. Gazelle, III, 1889, p. 144; Taf. XXVII, fig. 1-11. 
Brada mammillata Mac Intosh, The Voyage of H. M. S. Challenger. Scientif. Reports. Zoo- 
logy, vol. XII, 1885, p. 370, pl. XLIII, fig. 11; pl. XXIIIa, fig. 7-8. 
Brada mammillata Ehlers, Polychaeten der hamburger magalhaensischen Sammelreise, 1897, 
p- 109. 
— Die Polychaeten des magellanischen und chilenischen Strandes. Ein faunistischer 
Versuch, 1901, p. 180. 
— Die bodensässigen Anneliden aus den Sammlungen der deutschen Tiefsee-Expedition, 
1908, p. 124. 
Brada mammillata Gravier, Sur les Annélides Polychétes recueillies par M. Rallier du Baty 
aux îles Kerguelen. Bull. du Mus. d'hist. natur., t. XVI, 1910, p. 198. 


Trois exemplaires de ce curieux Flabelligérien ont été dragués à Port-Pigeon à une 
profondeur de 12 mètres; l'un d’eux est recouvert d’une boue fine de teinte brun jaunatre ; 
le plus beau de ces trois exemplaires a 80 millimètres de longueur et 15 millimètres de 
largeur maxima. L’espéce a été recueillie antérieurement en divers points des Kerguelen 
(Baie Accessible, Betsy Cave, Royal Sound). Elle existe également à Puerto Bridges et au 
détroit de Magellan. 

Les soies sont bien conformes à celles qui ont été figurées par W.-C. Mac Intosh. 
Comme le fait remarquer cet auteur, les grandes soies dorsales de l'extrémité antérieure. 
sont couvertes de très nombreux Infusoires ciliés qui, en certains points, forment un 
revêtement complet au faisceau de soies. 


Thelepus spectabilis (VERRILL.) 


Neottia spectabilis Verrill, Bull. of the Unit. States National Museum, n° 3, II, Washington, 
1876. 
Neottia antarctica Mac Intosh, Ann. and Magaz. of natural History, ser. 4, XVII, 1876, p. 321. 
— Zool. Kerguelen, Philosoph. Transact. of the Royal Soc. London, vol. CLXVIII, 
p. 261, pl. XV, fig. 14, 15. 
— The Voyage of H. M. S. Challenger. Scientific Reports. Zoology, vol. XII, 1885, 
 P- 472: 
Thelepus Mac’Intoshi Grube, Anneliden-Ausbeute S. M. S. Gazelle, Monatsber. der Kénigl. 
Akad. der Wissensch. Berlin, 1877, p. 514. 
Thelepus spectabilis Ehlers, Polychaeten der hamburger magalhaensischen Sammelreise, 1897, 
pr 133: 
-~ Magellanische Anneliden, Nachr. der Künigl. Gesellsch. der Wissensch. Gottingen, 
Mathem.-phys. Klasse, 1900, p. 221. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 37 


— Die Anneliden der Sammlung Plate. Zoolog. Jahrb. Supplem. Fauna chilensis, XI, 
1901, p. 268. 

— Die Polychaeten des chilenischen und magellanischen Strandes. Ein faunistischer 
Versuch, 1901, p. 210. : 

— Die bodensässigen Anneliden aus den Sammlungen der deutschen Tiefsee-Expedition, 
1908, p. 146. 

Thelepus spectabilis Gravier, Sur les Annélides Polychètes recueillies par M. Rallier du Baty 

aux îles Kerguelen. Bull. du Mus. d’hist. natur., 1910, t. XVI, p. 198. 


Parmi les exemplaires assez nombreux de cette espéce, rapportés par M. Rallier du 
Baty, l’un d’eux, presque entier, mesure environ 25 centimètres de longueur. 

_ Il n'existe, à chaque parapode, qu’une seule rangée de plaques onciales rétrogressives. 
Ces plaques, avec leur gros bouton terminal, ont bien le facies caractéristique de celles 
du genre Thelepus. Vues de profil, elles présentent seulement deux dents: de celles-ci, 
l’inférieure est beaucoup plus développée que celle qui la surmonte. L’une des soies de 
soutien s’insère près du vertex ; l’autre, un peu au-dessus de l’extrémité opposée, sur le 
même côté que la précédente, près du gros bouton arrondi et terminal. 

Cette espèce est très répandue dans les régions antarctiques et subantarctiques, aux 
Kerguelen, à l’îile Marion, à l'Est de l’île Bouvet, dans la région de Magellan, en de nom- 
breux points de lacôte Sud du Chili, etc. Elle a été recueillie par les grandes expéditions 
scientifiques : la Gazelle, le Challenger, la Valdivia et par la première expédition antarc- 
tique française à Port-Charcot, près de l’île Booth-Wandel. 


Arthropodes marins 


Par M. E.-L. BOUVIER, 


Membre de l’Institut, 
Professeur au Muséum d’Histoire naturelle. 


Au cours de son voyage aux îles Kerguelen, M. Rallier du Baty a rapporté au 
Muséum d'Histoire naturelle de Paris quelques arthropodes marins qui viennent s'ajouter 
à ceux recueillis une année auparavant dans les mêmes îles par M. Loranchet (voir 
Bulletin du Muséum, 1910, p. 95). Ainsi se forme peu à peu une collection française d’ani- 
maux propres à ces îles, jusqu'ici exploitées par les étrangers au point de vue scientifique 
seulement. 

Les Arthropodes, rapportés par M. Rallier du Baty, ne sont pas nombreux; mais 
nous les avons accueillis avec joie, car plusieursn'étaient pas représentés au Muséum. Ils 
appartiennent aux espèces suivantes : 

HaLicarCINUS PLANATUS Fabr., un crabe très répandu dans les mers australes ; 

SEROLIS LATIFRONS White; 

SEROLIS CORNUTA White ; 

ÆGa SEMICARINATA Miers; 

SPHÆROMIA GIGas Leach ; 

ANTARCTURUS FURCATUS Studer ; 

CHŒTONYMPHON BREVICAUDATUM Miers; _ 

Toutes ces espéces étaient connues aux Kerguelen, sauf peut-étre celle que je rapporte 
au genre Antarcturus, et qui nest peut-être pas l'A. furcatus de Studer. L'exemplaire 
femelle, chargé d'œufs, recueilli par M. Rallier du Baty, mesure près de 40 millimètres 
de longueur, comme les plus grands spécimens étudiés par Studer. Il se distingue de ces 
derniers par trois caractères : 1° au-dessus de la forte épine épimérienne, l’une des saillies 
dorso-latérales dechaque côté acquiert un développement égal à cette épine, de sorte que le 
corps est orné de quatre rangées longitudinales de longues et puissantes épines, les autres 
saillies étant fortes, mais d’ailleurs beaucoup plus courtes; 2° Studer dit que, dans ses 
exemplaires, «les deux premiers articles des quatre paires de pattes antérieures sont armés 
d'épines aiguës. du côté interne », épines qui ne sont d’ailleurs pas représentées sur ses 
figures. Dans notre exemplaire, les pattes antérieures sont fort peu armées, mais celles 
des trois paires suivantes sont munies sur la face externe de leur deuxième article, près 


usé oe 


© a ee 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 39 


de la base et au bord antéro-distal du quatrième, d’une forte et longue épine ; il y a égale- 
ment une forte épine externe au bord distal du troisième article dans ces trois pattes, 
mais surtout dans celles des deux dernières paires, sans compter d’autres saillies coniques 
moins importantes sur le deuxième article; 3° le telson de notreexemplaire porte bien de 
chaque côté trois rangées longitudinales de saillies, comme l'A. furcatus, et la grande 
épine caudale appartient de même à la rangée intermédiaire ; toutefois, cette dernière 
rangée ne compte que trois saillies en avant de l’épine caudale, au lieu d’un grand nombre 
comme dans l’A. furcatus; bien plus, la deuxième de ces saillies se développe en longue 
épine, comme d’ailleurs la troisième ou quatrième avant-dernière dans la rangée la plus 
interne ; toutes ces saillies (sauf l’épine caudale) sont à peu près égales dans l’A. furcatus. 
Je-crois bien que l’exemplaire recueilli par M. Rallier du Baty appartient à cette dernière 
espèce dont il représente simplement, à mon avis, une variation intéressante. 

Il convient égalementde signaler, dans cette petite collection, un magnifique spécimen 
de l’Aga semicarinata Miers, espèce trouvée aux Kerguelen par la Vénus. Les exem- 
plaires de la Vénus étaient de belle taille, mais ne dépassaient point 58 millimètres, 
tandis que notre exemplaire atteint pour le moins 62 millimètres. C’est déjà presque un 
Isopode gigantesque, capable de rivaliser avec ses voisins polaires d’un autre groupe, les 
Gloptonotus. Notre spécimen était dorsalement coloré d’un jolie teinte rose, peu altérable 


par l’alcool (Voir pl. ! 1, fig. 3 à 5). 


Mollusques marins 


Par Ep. LAMY 


M. Rallier du Baty a recueilli aux îles Kerguelen 15 espèces de Mollusques 
1 Amphineure, 10 Gastropodes; 4 Pélécypodes : il s’agit de formes connues, mais qui ne 
laissent pas cependant d’être fort intéressantes ; elles proviennent, en effet, d’une localité — 
dont la faune malacologique, étudiée par MM. Wm. H. Dall, E.-A. Smith, Boog Watson, 
von Martens, etc., ne comptait encore aucun représentant dans les collections du Muséum 
de Paris. 


Hemiarthrum setulosum CARPENTER. 


1876. Hemiarthrum selulosum Carpenter mss., Dati, in Kipper, Nat. Hist. Kerguelen, Bull. 
U.S Nat. Mus., Ill, p. 44. 

1886. H. setulosum Cpr., v. Martens et Prerrer, Moll. Süd-Georgien, Jahrb. Hamburg. Wiss. 
Anst., III, p. 108, pl. III, fig. 4. 

1886. H. setulosum Cpr., Happon, Challenger Polyplacophora, p. 13, pl. I, fig. 4, et pl. II, 
fig. 4 a-l. 

1908. H. eis Dall, Turete, Antarkt. u. Subantarkt. Chitonen, Deutsch. Siidpolar-Exped., 
X, Zool., II, p. 11, pl. I, fig. 4-12. 


Port-Gazelle : 3 individus. 


Neobuccinum Eatoni E.-A. Situ. 


1875. Buccinopsis Eatoni E.-A. Smitu, Shells Kerguelen, Ann. Mag. Nat. Hist., 4° s., XVI, — 
p. 68. 

1879. Neobuccinum Eatoni E.-A. Smirx, Moll. Kerguelen, Phil. Trans. Roy. Soc. Lond., 
CLXVIII, p 169, pl. IX, fig. 1-1 a. 

1886. N. Eatoni Sm., Watson, Challenger Gasterop., p. 216. 

1902. N. Eatoni E.-A. Situ, Southern Cross Moll., p. 202. 

1903. N. Eatoni Sm., v. Martens. Deutsch. Tiefsee-Exped. Valdivia, Gastrop., p. 63. 

1906. N. Eatoni Sm., Lamy, Expéd. Antarct. Franc. de J. Charcot, Gastrop., p. 2. 

1907. N. Eatoni E.-A. Situ, Nation. Antarct. Exped. Discovery, Gastrop., p. 1. 

1907. N. Eatoni Sm., Mervitt et StanveEn, Moll. Scottish. Nation. Antarct. Exped., Trans. Roy. 
Soc. Edinb., XLVI, p. 130. 


4 spécimens. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 41 


Cominella (Chlanidota) vestita v. MARTENS. 


1878. Cominella vestita v. Marrens, Sitzungsb. Ges. Naturf. Fr. Berlin, p. 23. 

1880. Buccinum (Chlanidota) vestitum v. Martens. Conchol. Mittheil., 1, p. 43, pl. IX, bs 3 a-c. 

1886. Neobuccinum vestitum Mrts., Watson, Challenger Gasterop., p. 216. 

1902 Chlanidota vestita Mrts., E.-A. Smit, Southern Cross Moll., p- 203. 

1903. Cominella (Chlanidota) vestita v. MarTENS, Deutsch. Tiefsee- -Exped. Valdivia, Gastrop., 
Feri Di 0% 


Baie Breakwater : 5 individus. 


Trophon Philippianus Dunker. 


1878. Trophon Philippianus Dunker mss., Kosevt, in Martini u. CHemnirz, Conch. Cab. 2° éd., 
-i |. Purpuracea, p. 277, pl. LXXII, fig. 4-5. 
1905. T. Geversianus Pallas torma Philippianus Dkr., Srreset, Moll. Magalhaen, Zool. Jahrb., 
. XXI, p. 179, pl. V, fig. 35. 
1907. T. Philippianus Dkr., Mervitt et Stanpen, Moll. Scottish Nation. Antarct. Exped., Trans. 
Roy. Soc. Edinb., XLVI, p- 139. 


Baie Breakwater: 1 seul individu qui, en raison de sa spire peu élevée, de son 
dernier tour renflé seulement à la partie supérieure, et de ses lamelles longitudinales 
très nombreuses, me paraît devoir être rapporté plutôt au 7. Philippianus Dkr. qu’à la 
forme de Kerguelen décrite par M. E.-A. Smith sous le nom de 7. albolabratus (1870, 
Moll. Kerguelen, Phil. Trans. Roy. Soc. Lond., CLXVIII, p. 170, pl. IX, fig. 2). 

_ Rochebrune et Mabille (1889, Miss, Sc. Cap Horn, Moll., p. 53) ont identifié ce 
T. Philippianus au Fusus intermedius Hupé (1854, in Gay, Hist. Chile, Zool., VII, 
p- 166, pl. IV, fig. 6), qui, d’après M. H. Strebel (loc. cit., p. 173), est un simple SG ie 
de T. Geversianus. 


Struthiolaria mirabilis E.-A. Smiru. 


1875. Struthiolaria mirabilis E.-A. Smrru, ‘Shells Kerguelen, Ann. Mas, Nat. Hist., 4° s., 

XVI, p. 67. 

¥875<°S. costulata v. Martens, Sitzungsb. Ges, Naturf. Fr. Berlin, p. 66. 

1876. S. costulata Mrts., Scuacxo, Jahrb. Deutsch. Malak. Ges., III, p. 317. 
lee S. mirabilis E.-A. Smitu, Moll. Kerguelen, Phil. Trans. Roy. Soc. Lond., CLXVIII, 

p. 170, pl. IX, fig. 3. 

1883. S. (Perissodonta) mirabilis Sm., v. Martens, Zool. Rec., 1882, XIX, Moll., p. 48. 

1886. S. mirabilis Sm., Watson, Challenger Gasterop., p. 414. 

1903. S. (Perissodonta) mirabilis Sm., v. MARTENS, Deutsch. Tiefsee-Exped., Valdivia, Gastrop., 


p- 67. 


2 individus. 


Dans l’exemplaire figuré par M. E.-A. Smith, le labre était brisé : je crois donc 
utile de donner planche II, figures 6 et 7, des photographies montrant la forme exacte de 


l'ouverture de cette intéressante coquille. 
T. Ill. — Fasc. 3. 6 


| 42 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Turritella austrina WATson. 


1880. Turritella austrina Warson, Moll. Challenger, Journ. Linn. Soc. Lond., Zool., XV, 
p- 224. 

1886. T. austrina Watson, Challenger Gasterop., p. 470, pl. XXIX, fig. 2 a-f. 

1903. T. austrina Wats., v. Martens, Deutsch. Tiefsee-Exped. Vaidivia, Gastrop., p. 68. 


Baie de l’Observatoire : 1 individu correspondant plus spécialement a la forme 
représentée dans la figure f de M. B. Watson. 


Natica sculpta v. Martens. 


1878. Natica sculpta v. Martens, Sitzungsb. Ges. Naturf. Fr. Berlin, p. 24. 
1903. N. sculpta v. Martens, Deutsch. Tiefsee-Exped. Valdivia, Gastrop., p. 65, pl. IV, fig. 1. 


Baie de l'Observatoire : 1 spécimen. 


Margarella expansa Sowersy. 


1841-45. Margarita expansa Sowrrsy, Conchol. illustr., fig. 16-17. 

1879. Trochus (Photinula) expansus Sow., E.-A. Smiru, Moll. Kerguelen, Phil. Trans. Roy. 
Soc. Lond., CLXVIII, p. 177. 

1886. T. (Photinula) expansus Sow., Warson, Challenger Gasterop., p. 69. 

1886. Margarita (Photinula) expansa Sow., v. Martens et Prerrer, Moll. Süd-Georgien, Jahrb. 
Hamburg. Wiss. Anst., III, p. 100, pl. I, fig. 10 a-d. 

1891. Margaritella expansa Sow., THIELE, in TRoscHEL, Gebiss Schnecken, p. 261. 

1893. Margarella expansa Sow., Tuk Le, ibid., Index, p. 406. 

1898. Photinula expansa Sow., MELvizz et STANDEN, Shells Falklands, Journ. of Conchol., IX, 

. 408. 

1901. py cater Sow., MELvILL et STANDEN, ibid., X, p. 45. 

1902. P. expansa Sow., E.-A. Smitu, Southern Cross Moll., p. 207. 

1903. P. expansa Sow., v. Martens, Deutsch. Tiefsee-Exped. Valdivia, Gastrop., p. 69. ; 

1905. P. expansa Sow., STREBEL, Moll. Magalhaen, Zool. Jarhrb., Suppl. VIII, p. 152, pl. V, 
fig. g-11, 14, 15. 

1906. Margarella expansa Sow., Ture, Nachrichtsb. Deutsch. Malak. Ges., XXXVIII, p. 13. 

1906. Photinula expansa Sow., Lamy, Expéd. Antarct. Franc. de J. Charcot, Gastrop., p. 8. 

1907. P. expansa Sow., Metvitt et STanvEN, Moll. Scottish Nation. Antarct. Exped., Trans. 
Roy. Soc. Edinb., XLVI, p. 128. 


Une trentaine d’individus : baie de l'Observatoire : un spécimen. 


Nacella (Patinella) deaurata GMELIN var. varicosa REEVE. 


1788. Patella scutum deauratum Cuemnitz, Conch. Cab., X, p. 327, pl. CLXVIII, fig. 1616 a-b. 

1790. P. deaurata Goeuin, Syst. Nat., éd. XIII, t. I, p. 3710. 

1854. P. varicosa Reeve, Conch. Icon., VIII, Patella, pl. XI, fig. 21 a-c. 

1879. P. (Patinella) enea Martyn var., E.-A. Smiru, Moll. Kerguelen, Phil. Trans. Roy. Soc. 
Lond., CLXVIII, p. 170. : 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 43 


1889. P. varicosa Rve., RocHEBRUNE et Mamirce, Miss. Sc. Cap Horn, Moll., p. 95. 

1903. Nacella enea Mart. var. varicosa Rve. + PELSENEER, Belgica Moll., p. 7 

1907. N. (Patinella) deaurata Gm. forma varicosa Rve., Srresez, Moll. Magalhaen, Zool. Jahrb., 
XXV, p. 141, pl. VI, fig. 81 a-b. 


1 individu. 

Le Nacella strigatella Rochebrune et Mabille (/oc. cit., p. 96, pl. V, fig. 8 a-b), qui est 
rattaché par M. Strebel (loc. cit., p. 125) au J. vitrea Phil., a été fait, à bien plus juste 
titre, par M. Pilsbry (1891, in Tryon, Man. Conch., XII, p. 118), synonyme du N.deaurata 
Gm. = varicosa Rve. 


Nacella (Patinella) fuegiensis Reeve. 


1855. Patella fuegiensis Reeve, Conch. Se VIII, Patella, pl. XXVIII, fig. 73 a-b. 

1879. P. (Patinella) fuegiensis Rve., E.-A. Smitu, Moll. Kerguelen, Phil. Trans. Roy. Soc. 
Lond., CLXVIII, p. 180, pl. IX, fig. 14-14 a. 

1886. P. fuegiensis Rve., Watson, Challenger Gasterop., p. 26. 

1889. P. fuegiensis Rve., RocHEBRUNE et Maire, Miss. Se. Cap Horn, Moll., p. 95. 

1902. P. (Patinella) fuegiensis Rve., v. Martens, Deutsch. Tiefsee-Exped. Valdivia, Gastrop., 
P»:73- 

1907. P. fuegiensis Rve., Metvitt et SranDEN, Moll. Scottish Nation. Antarct. Exped., Trans. 
Roy. Soc. Edinb., XLVI, p. 127. 


6 individus ; baie Philipp: 1 spécimen. 


Siphonaria lateralis Cournouy. 


1846. Siphonaria lateralis Couthouy mss., Gouin, Proc. Boston Soc. Nat. Hist. Ets +53: 

1852-1856. S. lateralis Couth., Gourr, Wilkes U. S. Expl. Exped., Moll., p. 363, pl. XXX, 
fig. 462 a-b. 

1856. S. redimiculum Rerve, Conch. Icon., IX, Siphonaria, pl. V, fig. 24 a-b. 

1876. S. tristensis Davi (non Leach), in Kipper, Nat. Hist. Kerguelen, Bull. U. S. Nat. Mus., 
III, p. 45. 

1879. S. redimiculum Rve., E.-A. Smirn, Moll. Kerguelen, Phil. Trans. Roy. Soc. Lond., 
CLXVIII, p. 16. 

1886 S. (Liriola) tristensis (pars), Watson, Challenger Gasterop., p. 675. 

1889. Kerguelenia redimiculum Rye. -» ROCHEBRUNE et MABILLE, Miss. Sc. Cap Horn., Moll., 

. p. 28. 

1889. Siphonaria lateralis Couth., RocHEBRUNE et MaBilie, ibid., p. 20. 

1903. S. redimiculum Rve., v. Martens, Deutsch Tiefsee-E xped. Valvidia, Gastrop., pe 92. 

1903. S. lateralis Couth., PELSENEER, Belgica Moll., p. 9. 

1907. S. lateralis Couth., Srreser, Moll. Magalhaen. Zool. Jahrb., XXV, p. 172, pl. II, 


fig. 27-29-29 a. 


Baie Loom : 4 individus ; Baie de l'Observatoire : 5 spécimens. 

Rochebrune et Mabille considéraient le S./ateralis comme différent du S. redimiculum, 
dont ils faisaient même le type d'un genre Kerguelenia ; mais ces deux espèces sont 
maintenues synonymes par M.H. Strebel. 


44 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Malletia gigantea E.-A. Situ. 


1875. Solenella gigantea E. A. Situ, Shells Kerguelen, Ann. Mag. Nat. Hist., 4° s., XVI, 
D: 9%. 

1879. S. gigantea E.-A. Situ, Moll. Kerguelen, Phil. Trans. Roy. Soc. Lond., CLXVIII, 
p. 187, pl. IX, fig. 19. | 

1885. Malletia gigantea E.-A. Smrrn, Challenger Lamellibr., p. 244. 


3 spécimens. 


Mytilus edulis Linné. 


1758. Mytilus edulis Linnt, Syst. Nat., éd. X, t. I, p. 705. 

1758. M. ungulatus Linnét, ibid., p. 705. 

1857. M. ungulatus L., Reeve, Conch. Icon., X, Mytilus, pl. II, fig. 4. 

1876. M. canaliculus Dati (non Hanley), in Kipper, Nat. Hist. Kerguelen, Bull. U. S. Nat. 
Mus., III, p. 48. 

1879. M. edulis L., E.-A. Situ, Moll. Kerguelen, Phil. Trans. Roy. Soc. Lond., CLXVIII, 
p. 189. : 

1898. M. ungulatus L., Mer vi et Sranven, Shells Falklands, Journ. of Conchol., IX, p. 104. 

1901. M. edulis L., MeLviz et SraNDEN, ibid., X, p. 46. 

1901. M. ungulatus L., MELvizz et STANDEN, ibid., p. 47. 

1907. M. edulis L. Merv, et STanDEN, Moll. Scottish Nation. Antarct. Exped., Trans. Roy. 
Soc. Edinb., XLVI, p. 145. 


Baie Philipp : 2 individus ; l’un d’eux offre le contour du M. galloprovincialis Lk., 
variété de forme signalée par MM. Melvill et Standen (1898) pour le M. ungulatus, que 
M. E.-A. Smith admet pouvoir être une forme géante du M. edulis. 


Modiolarca trapezina Lamarck. 


1819. Modiola trapesina Lamarck, Anim. s. vert., VI, 1° p., p. 114. - 

1841. M. trapesina Lk., Deresserr, Rec. ‘cog. Lamarck, pl. XIII, fig. 7. 

1854. Phaseolicama trapezina Lk., Hurt, in Gay, Hist. Chile, Zool., VIII. p. 323, pl. VIII, 
fig. 9. 

1852-1856. Gaimardia trapesina Lk., Gouin, Wilkes LU. S. Explor. Exped., Moll., p. 459, 
pl. XLI, fig. 568 a-f. 

1879. Modiolarca trapezina Lk., E.-A. Situ, Moll. Kerguelen, Phil. Trans. Roy. Soc. Lond., 
CLXVIII, p. 190. 

1885. M. trapezina Lk., E.-A. Smitu, Challenger Lamellibr., p. 279. 

1886. M. trapezina Lk., v. Martens et Preirrer, Moll. Siid-Georgien, Jahrb. Hamburg. Wiss. 
Aust., III, p. 127, pl. IV, fig. 13. 

1889. M. trapezina Gray, Rocursrune et Masitte, Miss. Sc. Cap. Horn., Moll., p. 120. 

1898. M. trapezina Lk., Mezvizz et STANDEN, Shells Falklands, Journ. of Conchol., IX, p. 104. 

1001. M. trapezina Lk., MELvILL et STANDEN, 1bid., X, p. 47. 

1902. M. trapezina Lk., SremreLz, Musch. Samml. Plate, Fauna Chilensis, Zool. Jahrb., 
Suppl. V, p. 227. 

1903. M. trapezina L., Pevseneer, Belgica Moll., p. 11. 


Une dizaine de spécimens. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 45 


Rochebrune et Mabille (loc. cit.), p. 120-123, pl. VII) ont décrit sept espèces de 
Modiolarca qui sont, pour M. W. Stempell, tout au plus des variétés du M. trapezina Lk. : 
crassa (fig. 1), Le Cannellieri (fig. 2), Lephayi (fig. 3), Savatieri (fig. 4), fuegiensis (fig. 5), 
Sauvineti (fig. 6), Hahni (fig. 7). 

D’autre part, contrairement a M. E.-A. Smith, ils regardaient le Phaseolicama 
magellanica Rousseau (1854, Voy. Pôle Sud, Zool., V, Moll., pl. 116, pl. XXVI, fig. 2, 
a-d) non seulement comme n’étant pas synonyme du Modiolarca trapezina, mais comme 
appartenant a un genre différent : cette opinion est confirmée par M. W. Stempell 
(loc. cit., p. 227). 


es Lasæa consanguinea E.-A. SMITH. 


1876. Lasæa rubra Datt (non Montagu), in Kinper, Nat. Hist. Kerguelen, Bull. LU’. S. Nat. Mus., 
HE. p. 45: 
1879 Kellia consanguinea E.-A. Situ, Moll., Kerguelen, Phil. Trans. Roy. Soc. Lond., 
CLXVIII, p. 184, pl. IX, fig. 20. 
1903. Lasæa rubra PeLsEnEEr (non Mtg.), Belgica Moll., p. 11. 
1907. Lasæa consanguinea Sm., Metvitt et Sranven, Moll. Scottish Nation. Antarct. Exped., 
Trans. Roy. Soc. Edinb., XLVI, p. 149. 


Port-Gazelle : une douzaine d’individus. 
D’après M. E.-A. Smith, cette espèce de Kerguelen est différente du ZLasæa rubra 


Mtg. européen, qui, au contraire, pour M. Wm.H. Dall et M. Pelseneer, serait une forme 
cosmopolite. 


Mollusques terrestres 


Par Louis GERMAIN 


La faune malacologique des îles Kerguelen est remarquablement pauvre. Jusqu'à 
ces dernières années, on n’y connaissait qu’une seule espèce, l'Amphidoxa (Stephanoda) 
Hookeri Reeve (1), petite coquille appartenant à la famille des Eypopontip& et dont la forme 
rappelle celle des Helix. Cet Amphidoxa Hookeri Reeve, a été signalé comme abondant 
sur les terrasses de balsalte des environs du Royal Sound (Smirx)(2) et à la presqu'île de 
la Gazelle [D' E. von Martens (3)]. Il n’a ‘pas été retrouvé par M. Razzier pu Bary (4) 
qui, par contre, a recueilli plusieurs exemplaires dun Limacien trés répandu en Europe, 
l Agriolimax agrestis Linné (5), 

Comparés aux spécimens européens, les individus récoltés a Kerguelen ne présentent 
rien de particulier. Ils sont de même taille (6) ; en dessus, ils sont d’un gris jaunâtre plus 
foncé vers le milieu du corps, et ornés de tâches longitudinales noirâtres et irrégulières ; 
en dessous, ils montrent une teinte d’un gris jaunâtre uniforme. La cuirasse, de même 
couleur que le reste du corps, est également ornée de macules noiratres. 

Un des exemplaires est unicolore : le corps estuniformément d’un gris jaunâtre passant 


au roux vers l'extrémité caudale ; la cuirasse, qui est HER unicolore, est d’un jaune 


roux clair. 

D’après M. Rater pu Baty, l’Agriolimax agrestis Linné, est maintenant répandu 
dans toute l’île où il vit sous les pierres, les herbes, etc.. Ila été primitivement découvert 
près de la baie de l'Observatoire, à la station allemande du Gauss. Nul doute qu'il n'ait 


(1) Reeve (L.), Conchologia Iconica, 1854, VIII, re CCVIII, sp. 1474 (Helix Hookeri); — Preirrer, Malakoxool. 
Blatter, Il, 1855, p. 126 | Helix (Patula) Hookeri], et Monographia Heliceor. vivent., IV, 1859, p. 87; V, 1868, p. 152; 
— Tryon, Manual of Conchology, 2° série, Pulmonata, IV, 1887, p. 48, Pl. V, fig. 83 [Helix (Stephanoda) Hookeri]; 
— PILSBRY, in Tryon, loc. supra cit., 2e série, IX, 1894, p. 41 [Amphidoxa (Stephanoda) Hookeri]. 

(2) Smit (E.-A.), Mollusca [of Kerguelen Islands], Philos. Transact. of the royal Society of London (CLXVIII, 
1878, p. 183). , é 

(3) Martens (D' E. von), Die beschalten Gastropoden der deutschen Tiefsee-Expedition, 1898-1899 (Valdivia), 
1903, p. 145. 

(4) Cependant M. Razcier pu Barty me dit avoir recueilli une soixantaine d’échantillons d’une très petite coquille 
terrestre ; le tube qui les contenait a été perdu au cours du voyage de retour. Il est infiniment probable que ces coquilles 
appartenaient à l’Amrphidoxa Hookeri Reeve. 

(5) LiNNÉ, SyStema nature ; Ed. X, 1758, p. 652. 

(6) Les exemplaires recueillis par M. Razuier pu Barty atteignent 18 millimètres de longueur. 


D Rs 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


PU Wier 


és 


ECHINODERMES DE KERGUELEN 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 47 


été introduit par les matelots allemands qui séjournérent en ce lieu de 1902 à 1903, et pro- 
bablement aussi par les pêcheurs norvégiens établis depuis (1). 

Ce fait de l’acclimatement de l’Agriolimaxagrestis Linné, à Kerguelen, est loin d'être 
isolé. Cette espèce, qui habite toute l’Europe, y compris la Suède, la Norvège et le Nord 
de la Russie [WesTERLUND(2)]; qui se retrouve en Sibérie [WEsTERLUND (3)], dans presque 
toute l’Asie Mineure [BorrrGer (4)|, en Syrie-Palestine [PoLtonera (5)],! dans le Nord 


de l'Afrique (Algérie, Tunisie) [Porronera (6)], etc. (7), est maintenant abondante en 


Australie [Musson (8)]et en Nouvelle-Zélande d’où Hutton (0) las ignale sous le nom de 
Limax molestus. 

En Amérique, |’ Agriolimax agrestis Linné est  Rirtt hui acclimaté dans toute la 
région atlantique des Etats-Unis, où il est souvent assez abondant pour causer de réels 
dégâts aux cultures maraichéres [Binney (10)]. Tout dernièrement, Datu (11) l’a signalé 
dans le Manitoba. 

Ilétait intéressant de faire connaître la nouvelle station de Kerguelen, où l’Agriolimax 
agrestis Linné est d'introduction récente, et où il s’est rapidement répandu en grande 
quantité, montrant ainsi la facilité avec laquelle il se propage dans des contrées 
aussi différentes de sa patrie d’origine. 


(1) La souris commune est également répandue maintenant dans toute l’île. 

(2) WesrerLunp (C.-A.), Exposé critique des Mollusques terrestres et d’eau douce de la Suède et de la Norvège 
(Nova Acta Reg. societ. scient. Upsal., 3: série, VIII, 1871, p. 16). 

(3) WesrerLuno (C.-A.), Siberiens land-och sétwatten-Mollusker (Kongl. Svensk. Akadem. Handlingar, XIV, 
n° 12, 1877, p. 23). 

(4) Bogrrcer (Dr O.), Sechtes Verzeichniss transkaukasischer, armenischer und Nordpersischer Mollusken (Jahr- 
buch. d. deutschen Malakoxool. Gesellsch., VIII, 1881, p. 183). 

(5) Pottonera (C.), Note malacologische ; IV, Sui Limacidi della Siria e della Palestina (Bollettino Musei Zoologia 
Anatom. comp. d. R. Univers. di Torino, n° 608, 1909, p. 5, ne 7). 

(6) Pottonera (C.), Appunti di Malacologia ; VIII, Sui Limacidi dell’ Algeria (Bolletino Musei Zoologia Anatom. 
comp. d. R. Univers. di Torino, ne 100, 1891, p. 3). . 

(7) L’Agriolimax agrestris Linné habite également les Açores [Cf. Simrotu (H.), Die Nachtschnecken der portu- 
giesisch-azorischen Fauna in ihrem Verthälniss zu denen der pal arktischen Region überhaupt (Nova Acta K. L. C. 
deutschen Akademie der Naturforscher, LVI, n° 2, 1891, p. 281]. — D’après C. pe Paiva [Monographia Molluscorum 
terrestrium, fluyialium, lacustrium,insularium Maderensium (Mem. da Academia Lisboa, IV, 1867, p. 5)] cette espèce 
se retrouverait à Madère et aux Canaries ; mais Simrotu | loc. supra cit., 1891] met ce fait en doute. 

(8) Musson (Cuaster T.), On the naturalised forms of land and fresh water Mollusca in Australia (Proceedings 
Linnean Soc. of new south Wales, 2° série, V, 1891, p. 891). 

‘(9) Hurron (F.-W.), Description of new Slugs (Trans. and Proceed. of New Zealand Institute Wellington, XI, 
1878, p. 331). 

(10) Bryney (A.), The terrestrial Air-Breathing Mollusks of the United States and the adjacent Territories of North 
America, I, 1851, p. 994 140; et Binney (W.-G.), Bulletin of the Museum of Comparative Zoologie at Hartward 


_ College Cambridge, XI, 1883, p. 163, et XVI, 1886, p. 23. 


(11) Dart (W.-H.), Land and freshwater Mollusks of Alaska and adjoining regions, 1905, p. 45. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE PL. II 


D.-A. LONGUET, IMP, PHOT. 


INVERTEBRES DE KERGUELEN 


LÉ 
si 


auf 


Mission Gruvel sur la Côte occidentale d'Afrique. : 
(1909-1910) 


Résultats scientifiques et économiques 


INTRODUCTION 


Par A. GRUVEL 


Maître de Conférences à la Faculté des Sciences de Bordeaux, 
Chef de Mission. 


But de la mission. — Après avoir étudié, avec quelques détails, les côtes de la 
Mauritanie et du Sénégal (1), au double point de vue de la pêche indigène et de 
l'exploitation à forme métropolitaine; après avoir suivi, pas à pas, les installations 
officielles et les améliorations diverses apportées à Port-Etienne; après avoir, enfin, 
observé de très près les tentatives d'exploitation des richesses ichthyologiques de nos 
côtes mauritaniennes, une seule question, à notre avis, nous était encore en grande 
partie inconnue : c'est celle qui a trait à la consommation des produits de la pêche par 
les populations indigènes de l’Afrique occidentale, aussi bien dans les colonies françaises 
que dans les colonies étrangères. : 

Si nous connaissions, en eflet, les fonds de pêche, les engins à employer et les pois- 
sons que l’on pouvait capturer, si nous savions même qu'il était possible de préparer et de 
conserver dans de bonnés conditions le poisson salé ou simplement séché, les modes 
de préparations utilisés par les indigènes des colonies de l’Ouest africain autres que la 
Mauritanie, le Sénégal, la Gambie et la Guinée portugaise, nous étaient à peu près 
complètement inconnus. 


C'était, cela n'est pas douteux, une lacune considérable, qu'ils ‘agissait de combler au 
plus vite. 


(1) A. GRuveL et A. Boers; Les Pécheries de la Côte occidentale d'Afrique, Côte saharienne (Challamel édit., 
Paris, 1906). 
A. Gruvet, Les Hichesies des Côtes du Sénégal et des Rivières du Sud (Challamel édit., Paris 1908). : 
A. GRuvEL et R. Cuupeau, A travers la Mauritanie occidentale : 
I. — Partie générale et économique, Paris, 1909 ; 
IL. — Partie scientifique, Paris, 1911. Larose, édit. 


T. HI. — Fasc. 4. Bid cs Me 


2 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Il ne suffit pas, en effet, de prendre du poisson et de le préparer d’une manière 
quelconque, il faut aussi pouvoir le vendre. Or, tous ceux qui connaissent quelque peu 
les indigènes de l’Afrique occidentale (il doit en être de même ailleurs), savent combien 
il est difficile de leur faire accepter un article quelconque, tissu, boisson, produit 
alimentaire, etc., auquel ils ne sont pas accoutumés. C'est l’exagération de ce que nous 
pouvons, du reste, observer tous les jours, sur le marché européen. 

A ce sujet, nous avons bien des fois remarqué, au cours de notre long voyage dans 
les diverses colonies de la Côte africaine, que les Français surtout, j'allais dire seuils, ont la 
dangereuse manie de vouloir imposer leurs produits à l'indigène qui, du reste, s’y refuse 
obstinément. Ce qu’il est absoiument indispensable de faire, commercialement parlant, 
c'est d'offrir au Noir un produit de son goût, celui auquel il est habitué depuis toujours. 
En ce qui concerne, plus spécialement, le poisson préparé, le goût des Noirs est facile à 
connaître en étudiant les divers modes de préparations utilisés par les pécheurs indigènes, 
en parcourant les divers marchés, en se mêlant, en un mot, assez intimement à la vie de 
ces populations. 

Les renseignements fournis par les grands marchés peuvent, en certains cas, présen- 
ter des indications inexactes. : 

Tel produit, par exemple, envoyé sur ces marchés, est cependant vendu, malgré 
une certaine répugnance des Noirs, uniquement parce qu'ils ne trouvent pas le même 
produit sous la forme exacte qui leur convient. Ils prennent alors ce qu’on leur offre, 
mais en quantités peu considérables; tandis que, au contraire, si on leur fournit un pro- 
duit analogue, ou mieux identique, a celui préparé par eux ou leurs congénéres, les 
transactions peuvent, alors, acquérir une activité insoupconnée. _ 

On a presque l'air de découvrir l’Amérique en disant cela, et cependant, que 
d’affaires et d’affaires françaises intéressantes ont périclité ou même sombré pour avoir 
méconnu ces vérités. 

C’est pour tâcher d'éviter de nouvelles catastrophes, c’est pour pouvoir faire 
connaître exactement tous les facteurs du problème, que nous nous sommes résolu à 
entreprendre le grand voyage que les industriels installés en Mauritanie auraient dû faire 
eux-mêmes, s’ils avaient réellement compris leur plus élémentaire devoir et leur vérita- 
ble intérêt. 

Nous n'avons, du reste, pas à nous en plaindre, bien au contraire, car, si ce voyage 
a été long, quelquefois très pénible, il nous a permis d'étudier, avec détails, la pêche © 
indigène dans les différentes colonies françaises et étrangères de la Côte occidentale 
d'Afrique, la préparation, la vente ainsi que la consommation des productions mari- 
times et fluviales : poissons, crustacés et mollusques. 

Mais il a été aussi pour nous une excellente lecon, car nous avons pu nous rendre 
compte de ce que d’autres nations, le Portugal et l'Angleterre, en particulier, avaient pu 
déjà réaliser, dans leurs colonies, au point de vue de la pêche à forme européenne. Et si 
nous avons été un peu humilié, il faut bien le dire, dans notre amour-propre national, 
nous avons aussi été instruit et réconforté par l'exemple fécond de nos voisins, en 
pensant que ce que les Portugais et les Anglais avaient pu réaliser, dans cet ordre d’i- 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE : 3 


dées, nous étions également capables de le faire dans des conditions similaires, peut-être, 
même, plus favorables. 

Et, plus que jamais, après l'enquête très approfondie que nous avons menée sur la 
Côte, après les magnifiques exemples que nous avons eus sous les yeux, nous nous sommes 
senti plein de courage pour continuer l’œuvre commencée depuis bientôt six ans, et pour, 
cette fois, nous en sommes convaincu, la faire définitivement aboutir. 

Mais notre voyage a fourni encore d’autres résultats intéressants, au point de vue 
scientifique. I] nous a permis de recueillir des collections nombreuses de poissons, 
crustacés, mollusques, insectes, etc., quelques échantillons de la flore désertique et de la 
constitution géologique de l’Angola, et de nombreux échantillons de plankton végétal et 
animal. Nous avons pu également faire de très nombreux relevés de températures, den- 
sités, salinités, etc., d’une façon méthodique et en des points bien déterminés sur la Côte 
africaine. 

Ces recherches tirent en grande partie leur intérêt du fait que, ayant été poursuivis 
réguiièrement du Nord au Sud, elles pourront montrer les affinités des espèces, les varia- 
tions locales et les adaptations des diverses formes; qu'elles apporteront, en un mot, une 
contribution intéressante à la connaissance générale de la faune marine de ces régions 
encore si peu connues, et une petite pierre à l’immense édifice de la géographie zoolo- 
gique. 

‘Je dois à M. le Gouverneur général Ponty mes plus sincères et plus vifs remercier 
ments, pour m'avoir donné les moyens financiers et administratifs de mener à bien ce 
très intéressant voyage, auquel n’ont cessé de s'intéresser, avec le département des 
Colonies, ceux de la Marine et de l’Instruction publique. 

Je souhaite, qu'en retour, il contribue à développer, sur nos Côtes de l’Afrique 
occidentale française, des pêcheries à forme métropolitaine; de plus en plus importantes, 
pour que beaucoup de nos marins puissent trouver, sous les cieux ensoleillés de la 
Mauritanie et du Sénégal, déjà appréciés d’un certain nombre d’entre eux, un champ 
d'action nouveau aussi vaste, plus rémunérateur, surtout moins terrible et moins brumeux, 
que les mers glacées et meurtrières de Terre-Neuve et d'Islande. 

Après cing années de luttes, le Parlement s’est enfin ému. Il a fini par comprendre 
tout l’intérêt que pouvait présenter, pour la France comme pour notre colonie africaine, 
l'exploitation bien comprise de ces immenses richesses marines, et il a accordé à cette 
grande pêche nouvelle les primes et encouragements divers que nous n’avons cessé de 
réclamer depuis 1905 et qui lui étaient légitimement dûs. La promulgation du décret du 
3 octobre 1910, puis la loi du 26 février 1911 ont donné à cette industrie nouvelle le 
levier financier dont elle avait besoin pour secouer l'indifférence et vaincre, parfois, 
l'hostilité de ceux qui auraient dû être les premiers à lui apporter l’aide efficace et y 
protection dont elle avait besoin. 

Les matériaux scientifiques que nous avons recueillis au cours de ce long voyage 
sont actuellement à l'étude, et certains même très avancés. Nous nous sommes réservé, 
en dehors de quelques groupes zoologiques, comme les Langoustes, les Cirrhipèdes, etc., le 
soin de traiter la partie économique se ‘rapportant à un certain nombre d’autres groupes 


~ 


4 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE, 


tels que: poissons, crustacés, mollusques, etc. Tous les autres matériaux ont été distribués 
aux savants spécialistes + Muséum et d’ailleurs, au nous ont déjà prêté le précieux 
concours de leurs lumières. 

M. le Professeur Joubin a bien voulu nous ouvrir les Annales de l'Institut Océano- 
graphique, pour la publication des résultats scientifiques et économiques de notre 
mission. Nous le prions d’accepter, ici, nos bien sincères remerciements. 

- Tous les mémoires paraîtront donc successivement, mais sans ordre et seulement au 
fur et à mesure de leur achèvement, dans cette superbe publication, sous les noms de 
leurs auteurs respectifs. 


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nn  … ét D di dé 


oe Marin 


— Pan a ee es dé 
eas = “ ‘ 
PET . 


Contribution à l’étude générale 
systématique et économique des Palinuride 


Par A. GRUVEL. 


Au cours des différents voyages que nous avons effectués sur les côtes de l’Afrique 
occidentale, nous avons eu l’occasion de rencontrer un certain nombre d’espéces ou de 
variétés de Langoustes qui nous ont vivement intéressé, à la fois au point de vue scienti- 
fique et aussi par l'exploitation industrielle à laquelle donnaient lieu déjà, ou ont donné 
lieu depuis, certaines d’entre elles. 

Nous avons été ainsi amené à étudier ce groupe intéressant de Crustacés d’une façon 
de plus en plus approfondie, et nous nous sommes aperçu, assez rapidement, des discor- 
dances nombreuses existant entre les divers auteurs, au sujet de l'étude systématique de 
ces animaux. Sur les conseils de M. le Professeur Bouvier, qui, depuis si longtempsdéjà, 
nousa ouvert, toutes grandes, les portes deson Laboratoire, nous avonsentrepris de chercher 
à mettre un peu d'ordre dans cette classification. La tâche nous a été grandement facilitée 
par les nombreux et intéressants exemplaires de Palinuridæ quenousavons rencontrésdans 
la collection du Muséum national d'Histoire Naturelle où nous avons trouvé, non seule- 
ment la presque totalité des formes existantes, mais, ce qui est infiniment plus précieux, 
la plupart des types de Latreille, Olivier, Lamarck, Milne-Edwards, etc. L'étude atten- 
tive des caractères importants, non signalés par ces auteurs, mais indispensables à 
connaître aujourd’hui, nous a permis de nous débrouiller, assez facilement, au milieu 
des descriptions nombreuses d'espèces, les unes effectivement nouvelles, mais d’autres déjà 
connues depuis fort longtemps. 

Les travaux de Pfeffer et d’Ortmann nous ont aussi facilité notre tâche, bien que 
nous soyons arrivé, souvent, à des conclusions bien différentes dés leurs. 

C'est le résultat de nos études que nous voudrions faire connaître ici, dans cette 
magnifique publication où M. le Professeur Joubin a bien voulu nous accorder l’hospi- 
talité. 


Milne Edwards divisait déjà le genre Langouste (Palinurus) en deux sous-genres : 
celui des Langoustes ordinaires, caractérisées par labrièvetédes fouets desantennesinternes, 
et celui des Langoustes longicornes dont les fouets des antennes internessont généralement 
très longs. Ê 


Depuis lors, des formes ont été découvertes, qui ne pouvaient entrer dans aucun de 


6 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


ces groupes, et l’on a dû créer un certain nombre de genres nouveaux répondant mieux 
aux besoins de la classification. 

Dans l’état actuel de la science, le groupe des Langoustes a été élevé au rang de 
de famille, formée par six genres parfaitement distincts qui sont : le genre Puerulus, 
Ortmann, le genre Palinurellus v. Martens, le genre Jasus Parker, le genre Palinurus 
Fabricius, le genre Linuparus Gray et le genre Panulirus Gray (White). 

Dans son mémoire de 1881, Pfeffer avait remplacé le nom de Panulirus par celui de 
Senex, de même que Ortmann s’est cru autorisé, dans son travail de 1891, à remplacer le 
nom de Linuparus, par celui de Avus, sous prétexte, probablement, l’un et l’autre, que les 
mots de Panulirus et Linuparus ne sont que les anagrammes du mot Palinurus et qu’ils 
peuvent ne pas être pris au sérieux. 

C’est là une erreur absolue. Il n’y a pas à disconvenir que le choix de ces noms aurait 
pu. être plus heureux et moins prêter à confusion avec les autres, mais ils ont la priorité 
de l’âge et ils devraient subsister même s'ils étaient plus ridicules encore. 

S'ils ont le défaut de prêter à confusion, ils ont aussi la qualité de rappeler à l'esprit 
trois séries de formes de Crustacés très voisines. : 

Les règles actuelies de la nomenclature sont inflexibles, et il n’y a qu’à s’incliner sans 
discussion devant la priorité, non contestable, des noms choisis. 

Le tableau dichotomique, ci-dessous, permet de distinguer, très facilement, ces 
genres les uns des autres. 


Pas de Cornes frontales 65500 aye ta steve nee dre Palinurellus v. Martens. 
| Fouets des ant. INT. | Cornesfrontalesprésentes | Pas d’appareil stridulent.... Jasus Parker. 
COUTTS an tait es el SÉPATÉEST Kant App. stridulent présent..... Palinurus Fabricius, 
Famille des \ Cornes frontales soudées sur la ligne médiane......... Linuparus Gray. 
Palinuride. / Cercle antennulaire portantgénéralement deux ou quatre 
| Fouets des ant. INT. \ épines fortes. Céphalothorax arrondi .........,...... Panulirus (Gray) White. 
LORDS. ne / Cercle antennulairesans épines. Céphalothorax avec une 
crête dorsale et deux crêtes latérales longitudinales... Puerulus Ortmann. 
1. — Genre Puerulus, Ortmann, 1897. 


Nous faisons figurer le genre Puer (1) Ortmann, ou Puerulus Ort. à la fin de 
cette liste. C’est qu’en effet, et jusqu’à preuve du contraire, nous considérons, avec 
M. Calmann, que la plupart des formes qui, jusqu'ici, ont été placées dans ce genre, ne 
correspondent pas à des entités spécifiques véritables, mais qu’elles représentent seule- 
ment des formes semi-larvaires d'espèces, auxquelles il est parfois [difficile, sinon 
impossible, de les rapporter, mais qui, certainement, peu à peu, seront connues. 

Des cinq espèces qui, actuellement, constitueraient ce genre: P. angulatus 
Bate, P. pellucidus Ort., P. spiniger (2) Ort., P. Atlanticus Bouvier, et P. inermis 


x 


Pocok, les quatre dernières ne sont pas connues à l’état sexué, c’est-à-dire adulte ; ce 


(1) Nous conserverons le nom de Puerulus parce qu’il est celui choisi le plus récemment par Ortmann. 
(2) On sait que le P. spiniger Ort. n’est autre chose que le «natant-stage» de Pan. versicolor Latr. = Pan. 
-ornatus Fabr. 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 7 


sont de véritables formes post-larvaires, mais non adultes et toutes de très petite 


taille. 

Pour ce quiest du P.angulatus 
Bate, il en est autrement, ainsi 
que le fait parfaitement remarquer 
Calmann, depuis la découverte, 
par Alcock, d’un individu & de 
169 millimétres de long, sur lequel 
les orifices génitaux étaient nette- 
ment visibles, et par Calmann lui- 
même d’un individu @ mesurant 
164 millimètres de long. où les 
orifices des oviductes étaient 
nettement indiqués. Mais je suis de 
l'avis de Calmann et je considère 
que le genre Puer ou Puerulus 
Ortm., voisin du genre Panulirus 
Gray, bien qu'il présente un 
certain nombre de caractérescom- 
muns avec le genre Linuparus 
Gray, peut constituer, provisoire- 
ment, un genre spécial pour la 
seule espèce : angulatus. 
Nous verrons, au sujet de 
Panulirus regius Brit. Cap., les 
raisons qui nous font admettre 
que Puer atlanticus Bouvier, au- 
quel Calmann ramène P. inermis 


æ! 


A 
= 


a init 


Fig. 1. it Puerulus angulatus Bate.a.face dorsale, 6. face ventrale, 
d'après Bate. 


_Poc., n'est qu'une forme intermédiaire, entre le phyllosome et l’adulte du Panulirus regius. 


2. — Genre Palinurellus, von Martens, 1878. 


Synonymie. — Synaxes Bate, (n° 4-b) (1); Araeosternus de Man (n° 37-a). 

Caractères. — Le genre Palinurellus a été créé par von Martens pour une forme 
de Langouste tout à fait primitive caractérisée, plus spécialement, par un céphalothorax 
aplati et presque aussi lisse que celui d'un homard, sans cornes frontales, terminé en 
avant et dorsalement par un rostre triangulaire, aplati, assez saillant, à bord antérieur 
denticulé. L’abdomen est également lisse dorsalement et ne présente, comme le céphalo- 
thorax, qu'un assez grand nombre de petites cavités contenant quelques poils courts et 


raides. 


(1) Ces numéros correspondent à l'index bibliographique placé à la fin du mémoire. A. G. 


8 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE ' 


Les antennes externes sont semblables à celles dés Langoustes ordinaires, quoique 
moins épineuses à la base, mais les fouets sont beaucoup plus courts et pine CORTE de 
longues soies sur chacun des anneaux. opt 

Les antennes internessont terminées par des fouets courts et multi-ar teal, interne 
étant presque deux fois aussi long que l’externe. Tet 

Les pattes antérieures sont courtes, fortes, trés hirsutes et terminées par v une simple 
griffe. Toutes les autres pattes sont, également, terminées Py 
par une simple griffe, sauf la cinquième paire qui, chez la 
femelle, serait terminée parune pince, formée par un appen- 
dice du propodite etun prolongement 
plus petit du dactylopodite, placés en 
face l’un de l'autre. C’est un fait 
absolument normal chez les autres 
Langoustes. 

La plupart des sternites sont den- 
ticulés. 5 

Répartition géographique. — Le 
genre Palinurellus a été rencontré 
aux Antilles (îles Barbades) et dans 
l’océanIndien(Sumatraetîle Maurice); 
il n’est connu que par deux formes 
dont on ne possède qu’un petit nombre 
d'exemplaires. C’est dire, naturelle- 
ment, que ces animaux ne peuvent 
donner lieu à aucune espèce d’ex- 
ploitation industrielle. 

D'après Ortmann, le genre Pali- 
nurellus comprendrait deux espéces 
Fig. a ee distinctes : Palinurellus Gunlachi V. Fig. 3. — Synaxes hybridica, Sp. 

ile d'arts Bate, Martens(1), espèce américaine, peut-  Bate; face ventrale, d'après Bate. 
être localisée dans les Antilles et P. 
Wieneckii (2) de Man, rencontrée à Sumatra (Benkoulen) et à l’île Maurice. C’est donc une 
espèce appartenant nettement à la faune de l'océan Indien. 

Le seul exemplaire sec que possède le Muséum d'Histoire Naturelle, se rapporte, par 
la forme et l'habitat, à la dernière espèce, et, effectivement, la description de de Man pour 
Areosternus Wieneckii doit lui être appliquée, de même que le dessin publié dans 
le Zijdschrift vy. Entomologie, vol. XXV ; cependant, le rostre de l’exemplaire du Muséum 
est plus saillant en avant que celui représenté dans la figure : il ressemble beaucoup plus à 
celui de Synaxes hybridica, publié par de Man. De même, les tergites abdominaux qui, 
d’après Ortmann, devraient être dépourvus de carène médiane, en présentent cependant 


(1) N° 38-a. 
(2) N° 37-a. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 9 


sur les anneaux 2, 3, 4 et 5, exactement comme il est indiqué et figuré par Bate pour 
Syn. hybridica, eandis quela figure de lA. ræosternus montre une caréne à tous les tergites 
abdominaux, sauf le premier. 

En un mot, quand on lit attentivement les descriptions données pour chacune des 
deux espèces et qu’on cherche à les appliquer, aussi bien que les figures qui les repré- 
sentent, à l’exemplaire du Muséum, on trouve qu'à part certaines défectuosités de dessin 
elles peuvent s'adapter toutes deux au même animal: je dirai même que le dessin 
de Bate s'applique mieux, en ce qui concerne la forme de rostre et la carène abdominale 
dorsale, à l’exemplaire de l’île Maurice que celui de l’Aræosternus. En présence, d'autre 
ave de Contradictions des différents auteurs qui ont étudié la question, il conviendrait 
peut-être de laisser la discussion en suspens, jusqu’au moment où le même zoologiste aura 
pu comparer les deux formes l’une avec l’autre. Je crois qu’alors on s’apercevra que les 
deux espèces sont identiques et qu'il est, tout au plus, possible de faire de l’une d'elles 
une variété de l’autre. 

Cela serait d'autant moins extraordinaire que nous allons rencontrer, dans le genre 
Palinurus, une espèce P. longimanus M. Edw., qui est également une forme primitive et 
qui se rencontre, à la fois, aux Antilles et à l’île Maurice. Miers n’a pu faire, de la forme 
appartenant à cette localité, qu'une variété : Mauritianus de la première, et j'avoue qu'il 
faut une certaine bonne volonté pour les distinguer l’une de l’autre. 

Ortmann assimile le Palinurellus Gunlachi Martens au Synaxes hybridica Bate 
(Amérique, îles Barbade) et P. Wieneckii de Man a Aræosternus Wieneckit. 

Pour nous, jusqu’à preuve du contraire, nous ne distinguerons qu’une seule espèce : 
P. Gunlachi Martens, forme américaine, et une seconde forme indienne dont nous ferons 
la variété : Wieneckii, à focaeliMigpartient l'exemplaire of du Muséum de Paris qui pré- 
sente les caractères suivants : 

Fouets des antennes externes atteignant seulement le double environ de la longueur 
totale des antennes internes, terminées elles-mêmes par des fouets courts. 

Propodite de la première paire de pattes très gros par rapport au dactylopodite qui 
est couvert de poils et présente une forte griffe terminale et une forte épine interne, près 
de sabase. 

‘Ihnous a été impossible d'étudier les pattes mâchoires sur cet exemplaire sec et unique. 

Rostre triangulaire, à bords denticulés, couvert d’épines rudes dirigées en avant avec 
une série médiane de petites nodosités. 

 Céphalothorax légèrement aplati avec sillons peu apparents et couvert de petites 
cavités pilifères. Pas d’épinés saillantes. 

Bord antérieur de l’épistome avec une saillie médiane et entièrement denticulé. 
Sillon épistomial profond, intéressant toute la largeur de l’épistome. 

Pas de sillons abdominaux transversaux, mais une carène médiane nette, quoique 
peu saillante, d'environ 12 millimètres de largeur, sur tous les tergites abdominaux. 
Cavités pilifères de chaque côté de la carène. 

Series nettement denticulés avec une épine médiane (2-4-5) qui semble manquer 


sur 3 et 6. 
T. Il. — Fasc. 4. 2 


to ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Épimères à bord antérieur denticulé (non profondément) sur les anneaux 2, 3 et 


4; à bord postérieur denticulé sur 5 et 6. 
Chez le æ, 5° paire de pattes avec griffe terminale et poils. Couleur ou ae 


uniforme (nous paraît naturelle). 
L’exemplaire « du Museum de Paris présente les dimensions suivantes : 


Longueur totale (sans les antennes).............,........:...,.. 133 millimètres. 
= GO Cephalotharax re rate es awass ven eee ees «sis 6705 
— de l'abdomen se tac te SR Roe ek ab ww den le aad 51mm,5 
mone es AW ACIS ON ais ts NT Re A a aris 20 millimètres. 
Largeur maxima du céphalothorax................,.............. 33 — 
Longueur des antennes internes................. PPT ENST TT 37 — 
_ — OK LETMES LA UE AS ee 57 — 
Éonguetr du Sternum "0 20 Shinde setae MO wat rt 23 -- 
Largeur maxima du stérnum.........eseeteserspesesa oi dessé 13 — 


Habitat. — \le Maurice. 
Nora. — D'après le Professeur Calman, le « très pauvre spécimen », possédé par le 
British Museum, est également, un G provenant de l’île Maurice. 


3. — Genre Jasus, Parker, 1883. 


Synonymie. — Palinurus, des auteurs; Palinostus, Bate (n° 4-b); Palinosytus, Bate 
(n° 4-b). 

Caracières. — Parker a séparé, avec beaucoup de raison, le genre Jasus, du genre 
Palinurus pour des formes, très peu nombreuses du reste comme espèces, qui présentent 
quelques caractères distinctifs très importants, dont le principal est que le rostre est 
simplement réduit à une épine plus ou moins développée ; que les bords internes des 
pédoncules des antennes externes ne viennent pas frotter sur son bord extérieur et que, 
par conséquent, l'appareil stridulent n'existe pas. 

En outre, les antennes internes portent un fouet très court ; les exopodites de toutes 
les paires de maxillipèdes sont munis de fouets multiarticulés ; enfin, la 5° paire de pattes, 
chez la Q, est terminée par une pince formée par le dactylopodite et une épine interne, 
bien développée, du protopodite. 

Répartition géographique. — Ce genre ne renferme que des formes australes, 
localisées, entièrement, au Sud du tropique du Capricorne, mais au Nord du cercle polaire. 

Le genre Jasus comprend seulement deux espèces distinctes : J. Lalandei Lamk, 
M. Edw. (1837) et J. Verreauxi M. Edw. (1851). 

1. Jasus Lalandei Lamk. (PI. I, fig. 1.) 

Synonymie. — Palinurus Lalandei Lamk., M. Edw. (n° 40-a) ; P. frontalis M. Edw. 
(n° 40-a); P. Paulensis Heller (n° 23-a); P. Edwardsii Hutton (n° 28-a); Palinostus 
Lalandei Bate (n° 4-b); Pal. affinis ? et Pal. Durvillei ? catalogue du Muséum; Palinostus 
frontalis Porter (n° 50). 

Caractères. — Fouets des antennes internes courts, l’interne étant un peu plus long 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE IL 


que l’externe ; palpes mandibulaires avec deux articles aplatis et l’article terminal trian- 
gulaire et recourbé en dedans. 

Fouet de l’exopodite de la première paire de maxillipèdes avec 16 ou 17 articles, non 
dilatés, dépassant le méropodite du 3° maxillipède. 

Fouet de l’exopodite de la deuxième paire de maxillipèdes triangulaire et étroit non 


dilaté, avec 16 à 17 articles aplatis et aussi long que le précédent. 
Exopodite de la troisième paire de maxillipèdes, triangulaire et étroit. Fouet non 
dilaté, à 11 articles environ, aplatis, atteignant le milieu du méropodite du maxillipède 
correspondant. Ce fouet est, en réalité, beaucoup plus réduit que celui des deux autres 
paires de maxillipèdes. 

Cornes frontales (post-oculaires) bien développées, suivies chacune par une forteépine 
très rapprochée, puis unesérie d’épines céphalo-thoraciques de plus en plus petites. Epines 
latérales également fortes, suivies d’une méme série longitudinale. 

Partie antérieure du sternum avec deux fortes épines denticulées. Bord antérieur de 
l'épistome portant trois dents. Sillon épistomial très 
net, mais n’atteignant pas le bord antérieur de l’épis- 41 
tome. i | di 

Sillons transversaux des tergites abdominaux bien e 
marqués et couverts de poils courts et raides. Tergites 6 
portant des ornements arrondis en forme de plaques, Fig. 4. — Jasus Lalandei. a. Épimère; 
souvent des poils courts et raides. Rain Done fag ae potes 

Ornements dentelés arrondis, plus ou moins déve- patte chezle ©. 
loppés de chaque côté du sillon transversal. 

Epimères des deuxième et troisième segments abdominaux avec une dent principale 
et une seule dent secondaire sur le bord postérieur (fig. 4, a). 

Chez la ©, la partie interne et supérieure du propodite porte un prolongement qui, 
avec le dactylopodite correspondant, forme une véritable pince (fig 4, b). Chez le &, 
le prolongement du propodite est remplacé par quelques soies raides, et sur la face interne 
du dactylopodite plus réduit se trouvent deux rangées d'épines chitineuses de plus en plus 
longues à mesure que l’on s'approche de l'extrémité distale de l’article (fig. 4, c). 

La couleur générale est d’un brun rougeatre avec quelques taches ou plaques d’un 
jaune plus ou moins sale. 

Formes très jeunes de J. Lalandei. — J'ai rencontré, dans la collection du Muséum, 
des exemplaires très jeunes de Langoustes, venant de l'ile Saint-Paul, d’où ils ont été 
rapportés par deux voyageurs différents (M. Vélain et M. de l'Isle), présentant entre eux 
des caractères identiques et tellement voisins de ceux du Jasus Lalandei qu’il est impos- 
sible de ne pas les rapporter à cette espèce. 

Néanmoins ils présentent aussi des caractères larvaires si nets qu’il nous paraît utile 
de les faire connaître, afin de contribuer à une connaissance plus complète de ces formes 
encore si énigmatiques, intermédiaires entre le phyllosome vrai et l’adulte sexué. 

Ces exemplaires, au nombre de 5, mesurent 9 millimètres en moyenne, de lon- 
gueur, non compris les antennes. 


12 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Leurs caractères communs avec l’adulte sont les suivants : 

Fouets des antennes internes courts et presque égaux entre eux. Pas d’appareil 
stridulent. Exopodites et fouets des trois paires de maxillipèdes, comme ceux del’adulte, 
quoique semblant légèrement plus réduits en longueur. De même pour l’épine rostrale. 
Les épimères ont les mêmes caractères que chez l'adulte, mais les séries longitudinales 
d’épines, que nous avons signalées sur le céphalo-thorax de ce dernier, manquent com- 
plètement ici; les dents épistomiales et le sillon épistomial sont beaucoup plus réduits ; les 
sillons transversaux des tergites abdominaux sont à peine visibles et.on n’apercoit que sur 
les deux plus grands exemplaires, le commencement de formation des ornements abdo- 
minaux si caractéristiques chez l'adulte. Enfin, les pinces de la femelle ne sont pas encore 
différenciées à la cinquième paire de pattes, et le céphalothorax, qui ne recouvre pas com- 
plètement les branchies, présente une forme un peu carrée, non régulièrement arrondie, 
avec des sortes de crêtes longitudinales, peu accentuées, au-dessus des branchies et sur 
la ligne médiane. Ce sont là des caractères larvaires indubitables, qui sont d'autant plus 
accentués que les individus considérés sont plus petits. Nous les retrouverons du reste 
chez de très jeunes individus appartenant à d’autres formes. 

Distribution géographique. — Cette espèce semble représenter, au Sud, le Palinurus 
vulgaris de l'hémisphère boréal. Sa limite de dispersion Nord semble être à peu près le 
tropique du Capricorne, sa limite Sud étant représentée environ par le 50° degré de lat. S. 
tout autour du cercle polaire. 

Eile a été, en effet, signalée dans les localités suivantes : cap de Bonne-Espérance 
(Herklots, Pfeffer, Stimpson, Ortmann, Stebbing, Gruvel) et la côte Ouest africaine jusqu'à 
la hauteur d’Angra-Pequefia (Liideritsbucht) ; Saint-Paul et Amsterdam (Heller); Sud de 
l'Australie ; Tasmanie (Haswell); îles Auckland et Campbell (Muséum Paris) ; Nouvelle- 
Zélande (Hutton) ; Juan Fernandez (Gay); Tristan da Cunha (Challenger). 

Exploitation industrielle. — Cette forme, extreémement commune dans la plupart des 
régions qu'elle habite, donne lieu à une Hate industrielle très importante. 


* Sur le marché de Cape-Town, on en trouve à peu près constamment, quand la mer | 


est belle. Au choix, on peut en acheter, sur ce marché, pour deux penny et demi (o fr. 25) 
la pièce, à l'état vivant. Mais on entrouve aussi beaucoup de toutes cuites, à peu près pour 
le même prix. Ces crustacés sont, en partie, consommés sur place, à Cape-Town et aux 
environs. 

Mais, une assez grande quantité est mise en chambres froides, après cuisson, et 
expédiée régulièrement, par wagons refroidis, jusqu’à Salisbury, dans le Nord de la 
Rhodésia, à Victoria-Falls sur le Zambéze et dans tout l’hinterland de l'Union, du Sud au 
Nord. 

Il existe, en outre, deux grandes fabriques de conserves de Langoustes, l’une à Hout- 
bay et I’ autre a He dans la baie de Sandanah. 

La première est dirigée par un de noscompatriotes, M. Plessis, qui a bien voulu nous 
faire visiter son usine. C’est celle dont la marque semble la plus appréciée sur le marché 
mondial (Hout-Bay Canning Cy, marque Standard) (fig. 5). 

L'usine est installée partie sur un ponton, partie à terre. 


ea 


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a ee a os ee ee 


| 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 13 


Les Langoustes sont capturées, dans tous les environs, au moyen de filets dormants, 
sortes de trémails d’environ 40 mètres de long sur 4 mètres de hauteur, en fil tanné et bien 
plombés. On utilise aussi de grandes « balances » semblables à celles qui servent à 
capturer les écrevisses, mais beaucoup plus vastes. Ces filets sont relevés le matin et les 
Langoustes, bien vivantes, sont apportées à l’usine où, à l’aide d’un couperet bien aiguisé, 
des hommes détachent l'abdomen du céphalo-thorax par une coupure nette. Les 
abdomens seuls sont conservés dans de grands paniers et placés dans des chambres froides 
jusqu’au moment de leur mise en boîtes. Les céphalo-thorax sont jetés à la mer, avec les 
pattes, comme inutilisables. | 

Les abdomens sont ensuite amenés à l’usine de fabrication, bien nettoyés sur des 


Fig. 5..— Usine de conserves de Langoustes du Cap à Hout-Bay. 


tables en ciment armé, faciles à tenir en état de propreté extrême et mis en boîtes qui 
sont fabriquées sur place. Après soudage, ces boîtes sont passées à l’étuve à une tempé- 
rature déterminée, étiquettées, mises en caisses et expédiées. 

Avec cinq bateaux dont trois à voiles et deux à moteurs, M. Plessis arrive à faire 
capturer 75, 8oet jusqu'à 100 000 Langoustes par mois et, comme l’autre fabrique en utilise 
à peu près autant, cela représente, sans parler de la consommation locale à l’état frais, 
environ 2 millions d'individus qui disparaissent ainsi tous les ans. Cette destruction 
formidable, qui dure depuis, déjà, pas mal d’années, ne sémble guère en faire diminuer 
le nombre, ce qui montre l'extraordinaire réserve en crustacés existant aux environs 
du cap de Bonne-Espérance (1). 

La France reçoit une assez grande quantité de boîtes de conserves de Langoustes 
du Cap, malgré le droit très élevé (43 fr. 50) qui les frappe à l’entrée du territoire. 


(1) Nous avons appris, récemment, que, cette année, la pêche des Langoustes a été beaucoup moins rémunératrice 
que les années précédentes. 


14 | ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Mais la Langouste en conserves ne saurait remplacer, au point de vue alimentaire 
et commercial, la Langouste fraîche et, comme ces crustacés deviennent de plus en plus 
rares sur nos côtes d’Europe, on va déjà les chercher au Maroc, en Mauritanie, aux 
Antilles, etc., et certains songent même à les transporter, à l'état vivant, de Cape-Town. 
Cette question est sérieusement à l'étude, et nous ne serions pas surpris de la voir se 
réaliser dans un avenir relativement rapproché. 

Malgré la très grande abondance des Langoustes dans la région du cap de Bonne- 
Espérance, l'exploitation extraordinairement intensive à laquelle elles donnent lieu, 
non seulement par la capture des grands adultes, mais encore par la destruction des 
petits individus, finira par avoir rapidement raison de cette abondance, si le Gouver- 
nement de l’Union ne prend rapidement des mesures énergiques pour assurer la pro- 
tection des jeunes, mesures législatives qui n'existent pas actuellement. 

Cette espèce se rencontre, aussi, accidentellement sur la côte N.-E. de l’Australie, à la 
hauteur de Port-Stephens, mais devient abondante vers le Sud, à Eden, à Victoria, en 
Tasmanie et en Nouvelle-Zélande, d'où elle est envoyée, après cuisson, sur le marché 
de Sydney. Elle est également très abondante à Saint-Paulet à Juan-Fernandez comme 
en Nouvelle-Zélande (Otago Heads). 

Un fait extrêmement curieux, qui nous a été signalé par M. Porter, Directeur du 
Musée de Santiago-du- Chili, c'est que le Jasus Lalandei est exclusivement localisé autour 
des îles Juan Fernardez où il est exploité industriellement pour la fabrication des 
conserves. On avait pensé (1), avec quelque semblant de raison, que, si on placait cette 
espèce dans des conditions biologiques aussi semblables que possible de celles qui existent 
autour de ces îles, on pourrait l’acclimater en quelque point de la côte du Chili où elle 
n'existe pas. On fit donc capturer, à Juan-Fernandez, un nombre considérable de 
Jasus Lalandei, mâles et femelles, qui furent disséminés en plusieurs points de la côte 
autour de Valparaiso, et, en particulier, dans la région de Quintero. 

Ces essais ont été suivis d’un échec complet et il semble que ces petites îles de Juan- 
Fèrnandez, situées en face de Valparaiso, et qui ne sont distantes, cependant, de la 
côte chilienne que de 120 milles environ, doivent rester l'unique gisement du Jasus along 
sur les côtes du Chili. 

2. Jasus Verreauxi, Milne Edw. 1851 (PI. II, fig. 1). 

Synonymie. — Palinurus Verreauxi, M. Edw {n° 40-b); Palinurus Hugelii, Kollar 
(Heller) (n° 23-b) ; Jasus Hugelii, Ortm. (n° 45-a); Pal. tumidus, Kirk (n° 30-a); Pal. 
Hugelii, Hell., Haswell (n° 21). 

Caractères. — Fouets des antennes internes courts et nettement inégaux, l’interne 
étant visiblement plus grand que l’externe. 

Palpes mandibulaires triarticulés et mandibules à bord libre arrondi, sans dent. 
Exopodites de la première paire de maxillipèdes triangulaires avec fouet non dilaté, 


formé de 17 articles environ, spas et atteignant le sommet du méropodite du troisième 
maxillipède. 


(1) Voir ne 1, ALBERT, Fed. La langosta de Juan Fernandez. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 15 


* Fouet de l’exopodite de la deuxième paire de maxillipèdes non dilaté, aplati, avec 
Exopodite de la troisième paire de maxillipèdes avec fouet non _— formé de 
14 articles environ. 
Rostre terminé par une épine médiane, longue et atteignant le milieu de l’article basi- 
Cornes frontales (post-oculaires), longues et portant, surle bord latéro-dorsal, une série 
linéaire de petites cavités. Epines latérales fortes. Beaucoup d’épines céphalo-thoraciques, 
en rangées longitudinales et plus ou moins mousses. Trois épines sur le bord libre de 
la moitié de la largeur de l'épistome. 
Pas de sillons sur les tergites abdominaux, mais de 
simples petites nodosités arrondies et irrégulièrement 
Epiméres des deuxieme et troisième segments abdo- Sie eo Nuit à Ebiméré 
minaux portant une épine principale et 7 ou 8 denticu- 6. Extrémité de la 5° paire de pattes 
. . £ . Co; i 
lations secondaires de plus en plus réduites du sommet ‘97e °; ¢. Extrémité de la même 
Chez la 9, une forte épine du propodite forme avec le dactylopodite une pince bien 
développée, tandis que, chez le o%, l'épine du propodite est réduite à un simple petit 
mamelon et le dactylopodite porte, simplement, deux paires d’épines chitineuses internes, 
La couleur générale est verdatre, accentuée, surtout, sur le céphalothorax et 
l'abdomen. Mais on trouve de légères bandes circulaires jaunes sur les épines cépha- 
thoraciques et des bandes longitudinales, de même couleur, sur les parties latéro-ventrales 
sur la partie ventrale du corps. 
Remarque. — Les exemplaires de J. Verreauxi , types de M. Edwards, qui existent 
dans la collection du Muséum, nous ont permis de reconnaître que tous les caractères 
L’habitat indiqué est le même : Océan Indien, Nouvelle Galle du Sud et Tasmanie. 
Distribution géographique. — Nouvelle Galle du Sud (M. Edwards); Tasmanie 
(Muséum Paris) ; Nouvelle-Zélande (Kirk); Océan Indien? (Heller). C’est, en réalité, une 
poursuit jusqu’en Nouvelle-Zélande. L’indication : Océan Indien, donnée par Heller, est 
beaucoup trop vague, et il semble que cette forme appartienne plutôt à la faune du 
Pacifique qu’à celle de l’Océan Indien. 
soit apportée sur le marché de Sydney. 
La pêche est pratiquée à l’aide de bateaux, ou non pontés, ou à demi pontés, à 
moteurs de puissance moyenne, ou de petits steamers montés par deux à quatre hommes 


environ 14articles et atteignant aussi le sommet du méropodite du troisième maxillipède. 

laire des antennes externes. 

l’épistome. Sillon épistomial n'intéressant pas même 

disséminées. Sternites sans denticulations. o 

patte chez la 9 

vers la base (fig. 6, a). 

rigides (fig. 6, D et c). 

du céphalo-thorax, sur les parties dorsales des pattes, ainsi que des ponctuations jaunatres 

indiqués par C. Heller pour J. Hugelii se rapportent exactement à ces exemplaires. 

langouste australienne, abondante, surtout, entre Port-Stephens et Batermans Bay et qui se 
Exploitation industrielle. — Cette espèce est la Langouste la plus commune qui 

d'équipage, et qui vont pêcher parmi les rochers de la côte. 


16 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Lés éngins destinés à la capture des Langoustes consistent surtout en casiers ou nasses 
et en filets, genre trémail, qui sont généralement posés ou tendus le soir et relevés le 
lendemain matin à la pointe du jour. | 

Les prix des Langoustes sont différents suivant les saisons, et varient de 5/- à 28 /- 
(6 fr. 25 à 35 francs) la douzaine, car elles sont généralement us à: par douzaine « ou 
à la pièce. 

Les Langoustes ne sont pas consommées sur les lieux de production, mais envoyées, 
pour la plus grande partie, sur les grands marchés intérieurs et principalement à Sydney, 
à l’état vivant. Elles ne sont jamais expédiées, après cuisson, dans la glace ou en cham- 
bres froides. 

La saison de pêche de ces crustacés dure, chaque année, de septembre à février: 
A ce moment, ils sont extrêmement abondants, mais on en trouve sur les marchés, en 
petite quantité, pendant tout le reste de l’année. 

Le Jasus Lalandei venant aussi, mais en moins grand nombre et cuit, sur le marché 
de Sydney, on confond, dans les statistiques, les deux espèces et voici les chiffres des Lan- 
goustes vendues sur le marché de Sydney pendant les années de 1903 à 1907 inclus: 


EN. 51903 cea ae ne Pie Teele ava RE ER. 53.237 langoustes. 
En F004 onl reeks ere eee va RSR à a PAR 34.084 .— 
HE 100088 RTE PA BORD OT in 85.224 — 
Sn F000: 0e 8er Rb ele ET EE 58.992 a 
En 100720 Ses ane bane Petre oes Ls ei nec 84.900 — 


Ce qui représente une consommation déjà assez élevée, pour un seul marché, très 
important il est vrai, mais où la Langouste n’est pas particulièrement appréciée. 


TABLEAU DICHOTOMIQUE DES ESPÈCES APPARTENANT AU GENRE Jasus. 


Garin abdominaux avec sillons transversaux pilifères et ornements nombreux . 
a Lo 0 }_- en arc de cercle... , ras Ness ADR EE Rene :.:..... J. Lalandéh 
Ba 5 chem ( Tergites abdominaux sans sillons transversaux, pas d’ornements en arcs de. 

cercle, mais de simples: petites tuberosités, 745.244, s...0+ aa)saneeilon gee eat J. Verreauxi. 


4. Genre Palinurus, Fabricius. 


Synonymie. — Palinurus des auteurs : Latreille, Lamarck, Leach, Desmarest, . 
Milne Edwards, etc. ; Locusta, Belon ; Astacus, peers et Olive ; Cancer, Fenilest: Pali- 
nustus, M. Edw. 1880 (n° 40-d). | | 

Caractères. — Milne-Edwards avait réuni toutes les Pere alors connues dans le 
genre. Palinurus, qui n’en contient plus actuellement qu’une très Sige parts et dont les 
caractéres principaux sont les suivants : Z | 

Fouets des antennes internes courts; 

Appareil stridulent bien développé. 

On peut ajouter d’autres caractères moins importants : : 

Sillon épistomial net, plus ou moins profond. _ 

Cornes frontales denticulées, soit sur le bord antérieur, soit sur le bord postérieur. 


ANNALES: DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE’ 17 


:Exopodites dés trois . de pattes mâchoires bien Aa avec fouets care 
us etc. 

Répartition géographique. — Mers one de l'hémisphère boréal : côtes d' Angles 
terre, de France ; Adriatique; Méditerranée, côtes du Maroc et de Mauritanie; côtes du 
FERRER Antilles : ; île Maurice. 

Le genre Palinurus, renferme, en effet, trois espèces bien distinctes P. longimanus, 
M. Edwards, P. truncatus M. Edwards et P. vulgaris, Latreille. Cette dernière seule est 
représentée par un grand nombre d’individus et donne lieu à une exploitation industrielle 
très considérable. 

__# Prlongimanus, M. Edwards, 1837 (n° 40-a) (PI. I, fig. 3). 

Synonymie : P. vulgaris, Fabr. x 17); P. longimanus, var: Mauritianus, Miers 
(n° 39-a). 

Caractères. — Fouets des antennes internes courts et à peu près égaux, l’externe étant 
cependantpluscourtet 
pluslargequel'interne. 

Ces antennes sont 
relativement longues, 
puisqu'elles atteignent 
presque le double de 
longueur des trois 
articles pédonculaires 


d e PS 


des antennes externes, Fig. 7. — Palinurus longimanus. a. Articulation entre le méropodite et l’ischiopodite 

a de la première paire de pattes, vue de profil. 6. Partie de la même, vue de face. 
elles-mêmes plus c. Pince normale (1° paire de pattes). d. Pince atrophiée (même paire). e. Cornes fron- 
longues que le corps tales (post-oculaires). f. 6° sternite. g. Epimère. 


entier de l’animal. 
_ L’appareil stridulent est oi développé. 

La première paire de pattes, beaucoup plus longue que la deuxième, porte ason extré- 
mité une sorte de pince formée par le développement considérable d’une épineinterne du 
propodite et par le dactylopodite recourbé en forme de crochet (fig. 7, c et d). 

C'est l’exagération d'un caractère que nous retrouverons chez P. vulgaris. 

Dans une patte atrophiée nous avons trouvé une simple petite épine prolongeant le 
propodite, avec le dactylopodite droit, en sorte que la pince n’était pas développée. 

L’articulation, entre l’ischiopodite de cette première paire de pattes, très allongé et le 
méropodite très court, est également curieuse. Le méropodite passe entre deux lames 
aplaties et denticulées de l’ischiopodite et en s’abaissant forme encore pince (fig. 7, a et b). 

Les Palpes mandibulaires sont formées de trois articles arrondis dont le dernier 
est terminé par un bouquet de soies. Les mandibules sont fortes, avec une pointe 
saillante antérieure, suivie d’un bord libre portant une encoche qui est surtout nette à 
gauche. 

Les trois paires de maxillipèdes portent des exopodites bien développés avec fouets 
multiarticulés, tous de même longueur et dont le sommet atteint la partie supérieure du 


méropodite du troisième D pee, 
T. II. — Fasc. 4. 3 


“18 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Rostre allongé recourbé en avant, contre les parties latérales duquel frottent les 
pédoncules des antennes externes pour former l’appareil stridulent. 

Pas d’épines sur le cercle antennulaire. Cornes frontales (postoculaires) tridentées 
dorsalement (fig. 7, e). Espace interépineux frontal avec une épine médiane et une de 
chaque côté soit double, soit bifide. Epines latérales saillantes. 

Les épines céphalothoraciques sont entièrement localisées à la partie antérieure du 
céphalo-thorax et au bord du sillon cervical. 

Le sternum porte trois paires d’épines latérales simples ou doubles et le bord posté- 
rieur quatre épines latérales saillantes dont les deux internes trés pointues. 

Le bord antérieur de l’épistome porte trois dents peu saillantes; le sillon épistomial 
est très net, mais intéresse seulement la moitié de la largeur de l’épistome. 

Tergites abdominaux avec quatre sillons transversaux remplis de poils courts, ininter- 
rompus sur la ligne médiane, sauf le dernier de chaque segment, à l'exception du sixième. 

Chaque sternite porte, en général, de chaque côté de la ligne médiane, une épine très 
pointue, surtout développée sur le premier segment. Sur le sixième sternite, il y a cinq 
épines sur deux rangées (fig. 7, f). ‘ 

Les épimères portent une pointe principale bien développée, et, en arrière, une plus 
courte avec le bord postérieur présentant, parfois, de très petites denticulations mousses. 
Les faces latérales de ces épiméres portent desornements variés, prolongements de ceux 
des tergites et, comme eux, remplis de poils courts (fig. 7, g). 

Couleur générale rouge brique avec des raies et des ponctuations jaunatres sur 
l'abdomen, le céphalothorax et les pattes. | 

Sur six exemplaires existant dans la collection du Muséum, il n’y a pas une seule ©. 

Le céphalothorax présente, chez tous, des ornements arrondis, en forme d'écailles, 
entourés de poils courts, semblables à ceux de l’abdomen. 

Var. Mauritianus, Miers. On ne trouve, à notre avis, aucune différence essentielle et 
constante entre les exemplaires des Antilles et ceux de l’île Maurice, sauf, peut-être, la 
couleur générale plus jaunâtre chez ces derniers et la taille un peu plus grande. 


Distribution géographique. — Antilles (Milne-Edwards), Cuba (V. Martens), île 


Maurice (Miers, Bouvier). Cette espèce n’a été signalée qu'aux Antilles et à l'île Maurice, 
mais il est vraisemblable qu’elle doit être beaucoup plus répandue. Sa petite taille 
expliquerait, peut-être, dans une certaine mesure, cette apparence de rareté. 

2. P. truncatus, M.-Edwards, 1880 (A. Gruvel, 1911) (PI. II, fig. 2 et 3). 

Synonymie : Palinustus truncatus, M.-Edw., 1880 (n° 40-d). 

Nous avons rencontré, dans la collection du Muséum, une espéce trés curieuse, 
représentée par trois exemplaires adultes, dont une 9 portant des œufs. Ces crustacés qui 
doivent exister là depuis, peut-être, l'époque de Latreille ou de Lamarck, figuraient, dans 
la collection, sous le nom de Palinurus spinosipes, sans nom d'auteur, suivi simplement 
dé la mention : Catalogue du Muséum. 

Il a été, malheureusement, impossible de retrouver aucune trace de ces animaux, 
dont l'origine réste, par conséquent, inconnue, mais dont les caractères sont ceux du 
Palinustus truncatus, M.-Edw. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 19 


Caractères. — Fouets des antennes internes courts et inégaux, l'interne dépassant un 
peu l'externe. La longueur totale des antennes internes égale, à peu près, la longueur totale 
du corps proprement dit. 

Appareil stridulent bien développé. 

Les premières paires de pattes ne portent pas de pinces, mais simplement une griffe, 
Les trois derniers articles sont couverts de soies rigides et assez longues, ainsi, du reste, 
que toutes lesautres paires de pattes (d'où le nom de spinosipes), sauf la cinquième qui en 
- est un peu moins pourvue. 

Les mandibules présentent : à gauche une dent médiane saillante, et à droite une 
pointe antérieure, avec, en arrière, un bord libre droit. 
_ Les trois paires de maxillipèdes portent des exopodites bien développés avec palpes 
multiarticulés, de longueur égale 
et atteignant le milieu du méro- 
podite du troisième maxillipède. 

Rostre triangulaire, étroit, 
assez fortement recourbéen avant. 


Surface articulaire de l'appareil 
Fig. 8. Palinurus truncatus M.-Edw. a. Région des cornes frontales et 


stridulent large. Pas d PPINGS, BUS durostre. 6. Epistome. c. Epimére du 3¢ segment abdominal. d. Ex- 
le cercle antennulaire du rostre. trémité de la 5° paire de pattes chez la 6. 


Cornes frontales courtes avec 
le bord antérieur saillant et pectiné; bord interépineux portant environ onze épines dont 
la médiane un peu plus longue que les autres (fig. 8, a). 

Epines latérales fortes et saillantes. 

Quatre paires de mamelons saillants, au milieu du sternum, avec une tubérosité mé-. 
diane et postérieure. 

Bord épistomial portant une saillie tridentée médiane et deux épines doubles latérales. 
Sillon épistomial médian, profond, s’arrétant un peu avant le bord antérieur ; deux petits 
sillons latéraux n'intéressent que le tiers, environ, de la largeur (fig. 8, 0). 

Deuxsillons pilifères sur chaque tergite abdominal, l’antérieur (de 1 à 5)ininterrompu, 
le postérieur interrompu par une caréne médiane, rappelant celle des Palinurellus, mais 
plus étroite, environ 1 millimétre de largeur. 

Telson avec six paires d’épines en deux rangées et latéralement. 


Sternites épineux, surtout les deuxième et sixième. 

Epimères avec une dent principale saillante séparée par une encoche profonde 
d'un bord postérieur à cing ou six dents de plus en plus petites qui manquent sur le 
sixième (fig. 8, c). , 

La 9 porte une pince analogue à celle des autres Palinurus, mais assez faible (fig. 8, d). 
Le & n’a qu’une simple griffe. 

D’après les échantillons très anciens du Muséum, mais très bien conservés, la couleur 


générale serait d’un gris jaunatre sale. 
Remarques. — Le céphalothorax porte une sorte de carène médiane et deux latérales 


qui lui donnent plutôt un aspect carré qu’arrondi. Les épines sont placées à la partie 


20 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


antérieure, mais en arrière du sillon cervical on trouve de petites nodosités entourées de 
poils courts. Le sillon cervical est, parfois, très accentué. 
Par l’ensemble de ses caractères, cette espèce se rattache nettement au genre Palinurus, 
dont elle représente une forme primitive, peut-être plus encore que le P. longimanus, 
formant un passage entre le g. Palinurellus et les Langoustes franches. 
Cette forme a été décrite par M.-Edwards sous le nom de Palinustus truncatus, 
provenant de Cariaco (Venezuela), près de la mer des Antilles. II l'avait séparée du genre 


Palinurus à cause de la disposition de l'anneau ophtalmique, de la longueur des 


pédicules des antennes internes et de la forme des cornes frontales. 

En réalité, ces caractères ne doivent pas faire enlever cette forme du groupe des 
Palinurus. En effet, l'anneau ophtalmique est un peu plus large, mais ne présente rien 
de spécial; les antennes internes ontune longueur qui ne dépasse guère celles du Pal. lon- 
gimanus, à notre avis, plus éloigné des Langoustes franches que le P. spinosipes ; enfin, on 
trouve chez certains exemplaires de Langoustes vulgaires des côtes de France, sur le bot 
antérieur des cornes frontales, des lames bi ou tridentées qui se rapprochent infiniment des 
lames pluri-dentées des P. spinosipes (fig. 9, b). 

Il n’y a donc pas lieu de séparer cette espèce du genre Palinurus auquel elle 
appartient, sans aucune espèce de doute possible, par tout l'ensemble de ses 
caractères. | 

Mais comme cette forme, bien que cataloguée dans la collection du Muséum, n'avait 
jamais été ni décrite, ni figurée, nous pensons qu'il est juste de lui conserver le nom de 
Palinurus truncatus, M.- Edwards. : 

Distribution géographique. — Côtes du Venezuela (Cariaco), par 163 brasses de fond. 
U.S. C.S.S.« Blake »; Alex. Agassiz 1878-79, et 4 exemplaires secs (Coll. du Muséum, 
Paris) de localités inconnues. 

Remarques à propos du Palinustus phoberus, Rochebrune (n° 56). — Rochebrune a 
signalé, sous le nom de Palinustus phoberus, un crustacé recueilli par lui aux embou- 
chures de la Gambie et de la Casamance et dont le type a disparu. L'auteur lui-même ne 


sait pas ce qu'il est devenu. D’après la description, très sommaire du reste, qu’il en donne 


(Bull. Soc. Philom.,7°série, vol.7-8, 1882-84, p. 173), nous avons tout lieu de penser qu'il 
s’agit simplement d’une forme jeune (0",054) de Palinurus regius, Brit. Cap. 

3. P. vulgaris. Latr., M.-Edw. 1837 (n° 40-a) (PI. IV, fig. 1). 

Synony mie : Astacus elephas?- Fabr.; Cancer homarus, Penn.; Astacus homarus, 
Oliv.; Palinurus quadricornis, Fabr., Latr.; Pal. locusta, Oliv. (n° 43) Pal. Adriaticus, 
Costa (n° 12). =. | 

Caractères. — Fouets des antennes externes courts et inégaux, Vutterne & étant le plus 
long. La longueur des antennes externes dépasse la longueur totale du corps. 

Appareil stridulent bien développé. Pas de pinces à la première paire de pattes, mais 
une forte épine sur le bord interne du propodite formant, avec le dactylopodite corres- 
pondant rabattu, une sorte de pince. 

Mandibules fortes avec le bord libre droit, portant une forte sich médiane. 

Exopodites bien développés sur chacune des trois paires de maxillipèdes, portant 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 21 


des fouets multiarticulés, tous de même longueur et atteignant le sommet du méropodite 
du troisième maxillipède. 

Rostre allongé, triangulaire, assez étroit. 

Pas d’épines sur lecercleantennulaire. Cornes frontales longues, tranchantes, avecune 
série d’épines sur le bord antérieur ou, parfois, une lame aplatie, bi ou tridentée et 
presque horizontale. Espace interépineux avec une épine médiane, saillante. Epines 
latérales, fortes. En arrière de chaque corne frontale, une épine contigué, assez forte, 
portant des poils sur son bord antérieur. 

Fort mamelon épineux en avant dusternum, qui porte, en son milieu, quatre paires de 
mamelons arrondis en série longitu- 
dinale. 

Sillonépistomial proforid venant 
rejoindre le pied de l’épine épisto- 
miale médiane ; deux sillons épisto- 
miaux latéraux n’intéressant que le 
tiers environ de la largeur de l’épis- 
tome. 

Bord. antérieur de Mpisionié 
So portant une épine me” Fig. 9. Palinurus vulgaris, Latr. a. Forme la plus commune 


diane assez forte, parfois double, des cornes frontales. 6. Forme accidentelle rappelant celle de P. 
avéccinqousix denticulatonsarron- dau e santa ef. bes rms deeb 
dies plus ou moins saillantes, de de la 5° paire de pattes chez la 4. 

chaque côté (fig. 9, c). 

Sillons abdominaux remplis de poils raides et courts, nettement interrompus, sur la 
ligne médiane dorsale, par une carène allongée, ressemblant à celle des Palinurellus ; mais 
plus large, elle est présente seulement sur les tergites 2, 3, 4 et 5, le premier, étant sans 
caréne et le sixième avec sillon très dentelé. 

Sternites avec épines, surtout le premier et le sixième. 

Epimères avec une dent principale et trois ou quatre dents postérieures, secondaires, 
de plus en plus petites (fig. 9, e). 

La cinquième paire de pattes porte, chez la 9, une sorte de crochet sur le FRAME 
podite, crochet qui forme pince avec un prolongement interne du propodite (fig. 9, fet f). 

- Chez le ©‘, la même paire de pattes est terminée par une simple griffe. 

La couleur de la Langouste vulgaire est assez variable, ce qui donne lieu, au point de 

vue commercial, à des variétés différentes, plus ou moins appréciées, mais elle est, en 
général, d’une teinte rougeâtre-lie de vin plus ou moins foncée, avec deux larges taches 
blanches ou jaunâtres sur les parties latérales de cheque tergite, ainsi qu'une mé- 
diane et dorsale sur le sixième. — 
_ Distribution géographique. — Cette espèce est très répandue dans lex mers tempérées 
de l'hémisphère boréal. Elle représente, en quelque sorte, pour cet hémisphère, ce que le 
Jasus Lalandei représente pour l'hémisphère austral. 

On la rencontre en Angleterre,dans les fonds rocheux sur toute la côte de Cornouaille, 


SA ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


depuis Exmouth et Falmouth, en remontant vers le Nord, sur la côte Est et Sud-Est de 
l'Irlande; sur nos côtes françaises de la Manche et de l'océan Atlantique; sur les côtes 
d’Espagne et de Portugal, particulièrement vers les îles Sorlingues, à Madère, sur les 
côtes du Maroc, à Mogador (Coll. Muséum Paris) et au cap Bojador (Gruvel) qui semble 
être sa limite la plus méridionale. 

La Méditerranée renferme aussi beaucoup de ces crustacés, surtout les îles Baléares, 
la Sardaigne etla Corse; de même, la côte Nord-Est de la Tunisie et la Tripolitaine. Enfin 
certaines îles de la Grèce sont très riches en Langoustes dont on ne tire, croyons-nous, 
aucun parti. | 

Variété : Palinurus vulgaris, var. mauritanicus, A. Gruv. (PI. I, fig. 4). 

Synonymie : Pal. vulgaris, var. inflatus, À. Gruvel. 

Nous avons signalé à différentes reprises, depuis 1905, la présence, sur les côtes de 
Mauritanie et du Nord du Sénégal, d’une variété de Langouste, à laquelle nous avions 
déjà donné le nom d’inflatus pour bien marquer un de ses caractères particuliers; mais 
le nom d’inflatus ayant été donné par M. le Prof. Bouvier à une espèce de Palinurus des 
côtes de Californie (1), nous avons cru bon, pour ne pas créer de confusion, de le remplacer 
par celui de mauritanicus qui indique, au moins, l’habitat. 

Caractères. — Cette variété se distingue de l'espèce par un certain nombre de 
caractères assez nets. C’est, d’abord, un céphalothorax beaucoup plus renflé, sur la partie 
branchiale duquel on aperçoit une série de sillons assez larges, allant de la partie dorsale 
vers la périphérie et localisant les masses branchiales sur la carapace même. Les sillons 
céphalothoraciques, et particulièrement le sillon cardio-branchial latéral, sont très 
profonds. 

Les pédoncules oculaires sont plus longs que dans l'espèce ordinaire; les cornes fron- 
tales plus courtes, dirigées plus latéralement et beaucoup plus séparées l’une de l’autre. 

Les sillons épistomiaux latéraux sont plus larges, plus profonds et forment une véri- 
table encoche à bords mamelonnés. | 


Les sillons des tergites abdominaux sont interrompus, sur la ligne médiane, mais 


entièrement dépourvus de poils. 

Les sternites, sauf le premier, ne portent pas d’épines. _ 

Les épimères ne présentent qu’une dent principale et deux ou trois, au maximum, 
secondaires (souvent une seule). 

Enfin, les épines céphalothoraciques, en général, sont moins nombreuses et moins 
saillantes et la surface dela carapace est absolument dépourvue de poils. 

Coloration à peu près uniforme, rouge-brique. 

Distribution géographique. — Depuis le Sud du cap Barbas jusqu’un peu au Nord 
de Saint-Louis (Sénégal), par des fonds de 20 mètres à 50 mètres, le plus souvent sur le 
sable coquillier. Peu commune; mais peut atteindre de très grandes tailles. Nous en 
avons capturé une qui mesurait o m. 75 de longueur du corps (non compris les antennes) 
et atteignait un poids de près de 6 kilogrammes. 


(1) Cette espèce était portée, dans la collection du Muséum, sous le nom de P. Digueti, en l'honneur de M. Diguet 
qui l’avait rapportée, bien-qu’ayant été signalée dans ie ‘‘Bulletin du Muséum” sous le nom de P. inflatus. 


À 
4 
q 
4 
q 
( 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 23 


Cette espèce ést fragile et se transporte difficilement en bateaux viviers ; ‘du reste, sa 
rareté même l’empêcherait d'é tre une espèce industrielle. 


TABLEAU DICHOTOMIQUE DES ESPÈCES DU GENRE Palinurus. 


(Fosse paire dé pattes très développée et terminée par une pince. Cornes 

frontales denticulées sur le bord postérieur. Quatre sillons transversaux 
D PURE RDO OGHNBUK SL dei cds Sng ve Ry Sa ONS Dal QU au à P. longimanus. 

| Tergites abdominaux avec deux sillons 


Genre Palinurus..... | Première paire de pattes terminée| tansversaux. Cornes frontales avecune 
par une simple griffe. Cornes large lame très denticulée. Céphalotho- 


frontales denticulés sur le bord rax avec trois carènes longitudinales. P. truncatus. 
ee eee Tergites abdominaux avec un seul sillon 
TE ; transversal. Céphalothorax arrondi 
PeRUNCrOMENT 7, Sos AL nee P. vulgaris. 


Exploitation industrielle du P. vulgaris. — La Langouste vulgaire donne lieu à une 
exploitation très intensive et à un commerce considérable sur nos côtes françaises ainsi 
que sur une partie des côtes d'Europe et du Nord de l'Afrique. 

La demande, pour ce crustacé, devient de plus en plus considérableet, comme la pro- 
duction tend à diminuer, il en résulte que le prix augmente dans des proportions extraor- 
dinaires ; aussi, nos pêcheurs de Langoustes bretons, qui sont, comme on sait, de hardis 
marins, n’hésitent-ils pas à franchir des milliers de kilomètres, sur leurs dundee de 60 à 80 
tonneaux, pour aller chercher au loin, sur les côtes d'Espagne, de Portugal, du Maroc, de 
Mauritanie et même jusqu'aux Antilles, un animal aussi recherché et qui est en train de 
disparaître de nos côtes françaises, détruit peu à peu, vraisemblablement, par la pêche 
extrêmement intensive qui en est faite. 

Sur nos rives bretonnes, la Langouste ne semble s'approcher des côtes que vers le 
commencement de juin, pour déposer ses œufs, très vraisemblablement. C’est le moment 
où la pêche commence, mais elle est surtout considérable pendant les mois de juillet, 
août et septembre, dans tous les points de la côte, les plus rocheux, tels que l’île d'Yeu, 
Heedic, Houat, Belle-Isle, Groix, etc., ainsi que sur la côte Nord, vers Roscoff, Saint- 
Malo, etc. 

Les engins qui servent à la pêche sont : les casiers de formes diverses et les filets 
dormants ; ces derniers ne peuvent être utilisés que par temps calme et tout à fait propice, 
en juillet et août, généralement. 

Les casiers sont mouillés par fonds rocheux de 30 à 80 brasses, retenus au fond par des 
pierres et munis de longs « orins » qui, à l’aide d’une bouée marquée et colorée, indiquent 
l'emplacement et le propriétaire de l’engin. 

Les bateaux utilisés pour la pêche de la Langouste sont des’ bateaux-viviers qui 
permettent de conserver les crustacés vivants. Ceux qui servent exclusivement sur les 
côtes de France sont des sloop ou côtres de6 à 15 tonneaux qui peuvent contenir 
de 500 à 2 000 Langoustes ; ceux qui, au contraire, vont au loin, sont des dundee qui 
jaugent de 60 à 80 tonneaux et peuvent contenir de 4000 à 8 ou 9000 crustacés. 

Les viviers sont, en général, aménagés entre les deux mats et sont en communication 
directe avec la mer. Ils sont tous a voiles, quelques-uns avec moteur auxiliaire. 


24 ‘ANNALES ‘DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


A l’arrivée des; bateaux, les Langoustes sont emmagasinées dans des viviers qui sont 
ou en bois et flottants, ou en maçonnerie. © 

Les premiers sont construits en boisde shane. en acs espacées, permettant l'entrée 
et la sortie de l’eau ; leur longueur varie de 3 à 8 mètres de long sur 2 à 3 mètres de 
large. Ils peuvent, ainsi, contenir de 500 à 1 500 Langoustes. 

Ils sont ancrés dans les ports, en des points désignés par l'Administration de la 
Marine. Constamment remués et mal nourris, soumis à des variations de températures 
parfois considérables, les Crustacés qu'ils renferment vivent mal et ne peuvent guère 
être conservés plus de deux ou trois mois, à la condition que les eaux soient très propres; 
mais, si les usines déversent de l’huile, la Langouste meurt très rapidement. 

Les meilleurs viviers en bois sont ceux du port decommerce de Brest, faits avec de 
vieux bateaux. Mais ce sont encore de mauvais engins. ; 

Les viviers en pierre sont, en général, édifiés en tout ou en partie, en pleine mer. 
Ils sont, du reste, peu nombreux, et il faut une autorisation spéciale de la Marine pour en 
construire. Cette autorisation n’est pas très facilement accordée. Les principaux sont les 
suivants : Roscoff (Finistère), Saint-Gaustan (Le Croisic), l’Aberwrach (près Brest), 
Largenton (près Brest), Concarneau et Port-Haliguen (Quiberon). © Sint 

_ Les cinq premiers sont à ciel ouvert; le dernier est, au contraire, recouvert d’un 
plancher calfaté comme le pont d’un navire, de façon à empêcher la sivéere de l’eau 
de trop s'élever pendant les fortes chaleurs de l’été. 

L’emballage de ces crustacés se fait en paniers ou en caisses ; en paniers garnis de 
paille pour 25 à 30 crustacés ; en caisses, pendant l'hiver, garnies de foin ou de 
varech secs. En été, on fait usage de la glace dans des caisses spéciales renfermant la 
caisse, plus petite, contenant les crustacés et que l'on entoure de la glace pilée mélangée 
de sciure de bois pour diminuer la fonte en cours de route. 

Cette façon d’expédier, très onéreuse, n’est utilisée que pendant les mois les plus 
chauds : juillet et août, d'ordinaire. 

On a essayé, ere des caisses isolantes à parois de liège et différents autres pro- 
cédés qui n’ont pas donné de meilleurs résultats. 

Le grand marché central de Langoustes, en France, est Paris, soit par expédition directe 
à quelques grosses maisons de consommation, ou a des particuliers, soit, encore, par l’in- 
termédiaire des mandataires aux Halles Centrales. La vente a lieu pendant toute l’année, 
mais à des prix très variables, au kilogramme, suivant la saison. C’est pendant les mois de © 
pêche, juin, juillet et août, que les prix sont les plus bas; puis ils s'élèvent de plus en plus à 
mesure que la saison s’avance, pour atteindre, en février, mars ouavril, les prix fantastiques 
de 5 à 8 francs le kilogramme. Ces prix mettent ce crustacé à la portée de gens fortunés, uni- 
quement, car une Langouste moyenne, qui atteint un kilogramme, vaut, par conséquent, 
de 5 à 8 francs ; aussi, tous les propriétaires de viviers cherchent-ils à conserver leurs 
Langoustes le plus longtemps possible pour profiter des cours élevés de l’arrière-saison. 

On pêche, également, la Langouste vulgaire sur la côte basque, uniquement à l'aide 
de casiers qui-sont mouillés sur une bande rocheuse, à peu près parallèle à la côte et bien 
connue des langoustiers du pays. Ces crustacés sont apportés surtout sur les marchés de 


‘ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 125 


Bayonne, de Biarritz et de Saint-Jean-de-Luz, par les pêcheurs spécialistes du petit 
port de Guéthary. 

Sur les côtes françaises de la Méditerranée on trouve également la Langouste en 
assez grande quantité dans toutes les parties rocheuses: Banyuls et Port-Vendres, 
Marseille et la côte d'Azur; mais le plus grand nombre de Langoustes qui arrivent sur 
le marché de Marseille viennent de Corse... et, parfois même, de Sardaigne et même de 
Sicile où elles sont échangées aux pêcheurs Corses et entrent ainsi en fraude, en France, 
par notre grand port méditerranéen. La Langouste corse est petite, à très longues antennes, 
de couleur très brune et d'excellente qualité. Elle est très recherchée du marché parisien. 

Les principaux ports de pêche de la Corse sont : Ajaccio, où la pêche se poursuit 
jusqu’à mi-décembre, ce qui est un avantage énorme. Ce port peut fournir une grande 
quantité de crustacés qui, presque tous, sont exportés sur Marseille. 

Calvi peut produireenviron8 000 kilogrammes de Langoustes qui prennent, surtout, les 
chemins de Marseille, de Nice, de Livourne et de Naples. Propriano, Campo-Moro et Por- 
topolo forment un groupe qui peut fournir, environ, 10000 kilogrammes de Crustacés. 
La pêche commence vers le 10 avril, pour se terminer dans la première quinzaine d’oc- 
tobre, à cause du mauvais temps; les produits sont expédiés sur Marseille et surtout vers 
Nice. 

A Bonifacio, l’époque de la pêche est la même qu’à Propriano, mais la production 
peut s'élever jusqu’à 20000 kilogrammes. 

Le pêche se pratique, uniquement, à l’aide de casiers qu’on mouille sur des fonds 
de roches, par 40 à 50 mètres. 

On capture également, en Grèce, quelques Langoustes, qui doivent se trouver en 
grand nombre sur les côtes, mais dont on ne tire, industriellement, aucun profit. 

En Angleterre, on pêche la Langouste sur toute la côte de Cornouaille depuis Exmouth, 
Kingsbridge, Falmouth et en remontant vers le Nord de Penzance, Newquay etIlfracombe. 
On la retrouvesur la côte Est et Sud-Est de l'Irlande, de Wicklow au cap Mizen. Comme 
les Anglais sont peu amateurs de ces crustacés, nos pêcheurs français du Finistère leur 
apportent des crabes tourteaux (Carcinus mœnas) peu appréciés du public françaiset, au 
contraire, très prisés en Angleterre, et remportent les Langoustes. Depuis quelques années, 
cependant, les Anglais envoient de la Langouste sur Boulogne qui expédie, à son tour, sur 
le Nord de la France, la Belgique, la Suisse et l'Allemagne. 

Les paquebots allemands qui touchent certains ports anglais de la Manche, comme 
Southampton, embarquent beaucoup de Langoustes pour la consommation du bord et, 
aussi, pour l'exportation vers Hambourg et Brême. 

On trouve également un peu de Langoustes, en certains points des côtes de Suède, 
mais elle ne semble pas exister sur toutes les côtes Ouest et Nord-Ouest, de la Norvège. 
pas plus qu’en Écosse. 

Les côtes Nord de l'Espagne sont assez riches en Crustacés et nos langoustiers 
bretons sont allés et vont encore, mais de moinsen moins, sur ces côtes pour capturer 
ces animaux qu'ils rapportent avec leur dundee à viviers. Aux îles Baléares, les 


Langoustes sont également abondantes et sont mises, après capture, dans des viviers en 
T. III. — Fasc. 4. 4 


26 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


pierres, le plus souvent voûtés, de façon à en augmenter la fraîcheur et permettre une 
excellente conservation de ces crustacés ; mais les viviers sont, en général, petits et les 
Langoustes y sont trop tassées. La pêche de la Langouste est ouverte, en Espagne, du 
1 mai au 1* août. Toutes celles qui sont capturées après la fermeture sont placées dans 
un vivier dont le douanier de l’endroit possède la clef et sont vendues, à l’ouverture, au 
bénéfice des pêcheurs. 

Les côtes de Portugal, et en particulier les îles Sorlingues, sont très fréquentées par 
les pêcheurs langoustiers, dont beaucoup viennent du Finistère. Ils rapportent des 
Langoustes, et les gros crabes tourteaux qu'ils vont échanger en Angleterre, pour des 
Langoustes. 

Au Portugal, comme à Madère où se pêchent quelques Langoustes, consommées sur 
place, la pêche de ces crustacés ouvre le 1" mars et ferme le 1° septembre. A Madère, 
selon la saison, une Langouste moyenne vaut de 2 a 4 francs, 

Cette espèce se. poursuit, dans l'Atlantique, jusque sur les côtes du Maroc, en parti- 
culier à Mogador où quelques pêcheurs bretons vont la chercher. On la rencontre encore 
jusqu’à la hauteur du cap Bojador, environ, qui semble être sa limite méridionale 
extrême. ’ 

Enfin, on trouve encore beaucoup de Langoustes, assez analogues a celles de Corse et 
également très demandées, sur les côtes d’Algérie, de Tunisie et de la Tripolitaine. 
Mais la difficulté, pour une grande exploitation industrielle, réside dans le transport à 
l'état vivant. Il faudrait installer pour cela des bateaux-viviers à vapeur, ce qui serait 
facile et rémunérateur. 


5. Genre Linuparus Gray, 1852. 


Synonymie : Palinurus de Haan {n° 21); Avus Ortmann (n° 45-a). 

Le genre Linuparus ne renferme, actuellement, qu'une seule espèce, L. trigonus, 
de Haan. Les caractéres génériques sont les suivants : 

Fouets des antennes externes courts. 

Pas d’épines sur le cercle antennulaire. 

Cornes frontales soudées sur laligne médiane. 

Une carène médiane dorsale et deux latérales sur le céphalothorax et l’abdomen. 

Linuparus trigonus, de Haan (PI. I, fig. 5). 

Synonymie : Palinurus trigonus, de Haan, 1850 (n° 20); Avus trigonus, Ortm., 1891 
(n° 45-a). 

Caractères. — Fouets des antennes internes, courts ; l’interne environ une fois et 
demi aussi long que l’externe. 

Article basilaire des antennes externes, très large, formant avec le rostre, presque 
entièrement recouvert, un appareil stridulent très développé. 

Fouets des antennes externes trapus et plus courts que le corps proprement dit de 
l'animal. 

Mandibules fortes, avec dent médiane plus saillante à gauche qu'à droite. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 27 


‘Exopodites de la première paire de maxillipèdes avec fouets normaux de 12 à 14 
articles (dont les 7 ou 8 derniers sont très aplatis) dépassant le sommet du méropodite 
du troisième maxillipède. 

Exopodites de la deuxième paire de maxillipèdes, avec fouets atrophiés, formés de 5 
ou 6 articles, pointus, sans poils et atteignant à peu près la base du 
méropodite du troisième maxillipède. 

Exopodites de la troisième paire de maxillipèdes, formés de plus de 
20 articles, allongés, pointus, glabres, atteignant à peu près le milieu du 
méropodite de ce même maxillipède. 

_Rostre étroit et court, avec sillon médian profond. 

Pas d’épines sur le cercle antennulaire. 

Cornes frontales larges, aplaties horizontalement et soudées sur la 
_ ligne médiane (fig. 10, a). PRE 
Sternum avec des saillies latérales en face de ches paire de pattes. trigonus. a. Lame 
Sillon épistomial large, profond et limité latéralement et antérieu- plang A 
rement par des saillies épineuses. frontales soudées. 

Sillons des tergites abdominaux glabres, larges et nettement ininter- :FPmeeduæ#an- 
rompus sur les tergites 1, 2 et 3, mais interrompus sur les autres. Ca- 
rène médiane avec saillies pointues (1 sur 1, 2 sur 2, 3 et 4), sans saillies sur 5 et 6; 
une fente longitudinale sur la partie médiane et dorsale du sixième tergite. 

Sternites des segments 3, 4, 5 et 6 avec deux dents latérales, rapprochées vers la ligne 
médiane. 

Epimères avec trois dents principales, presque égales et très divergentes, et une ou 
deux autres postérieures et plus petites (fig. 10, b). 

Chez le &, simple griffe à la cinquième paire de pattes. 

Chez la 9 ? 

Couleur générale jaunâtre avec teinte rouge brique pâle sur toute la partie dorsale du 
corps. 

Peu d’épines céphalothoraciques et peu développées; sillon cardio-branchial très 
profond. Une carène médiane et deux latérales donnent au céphalothorax un aspect 
triangulaire et très original. 

Distribution géographique. — Japon (Coll. du Muséum, Paris), Baie de Tokio, 
Oomura et Simabara, dans les fonds rocheux (de Haan). 

Cette espèce, qui semble plutôt rare, ne paraît guère donner lieu à une exploitation 
industrielle. 


6. Genre Panulirus (Gray, 1847) White. 


Synonymie : Palinurus M. Edwards, 1837 (n° 40, a) et auteurs ; Senex Pfeffer, 1881 
(n° 48) et Ortmann, 1891 (n° 45, a et b). 

Caractères. — Le genre Panulirus comprend toutes les Langoustes placées, par Milne 
Edwards, dans le groupe des Langoustes longicornes, parce que l’un de leurs caractères 


28. ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE. 


les plus typiques consiste dans la présence de /ongs fouets aux antennes internes. De plus, 
l’anneau antennulaire est large, presque carré, en sorte que les antennes externes sont 
très écartées, laissant voir, nettement, les antennes internes. Enfin, l'anneau antennulaire 
porte, au moins, deux épines bien développées, le plus souvent même, quatre. 

Après une étude très approfondie des types et de la littérature, nous pensons pouvoir 
dire que, dans l’état actuel de la science, le genre Panulirus se compose de douze espèces, 
qui peuvent se distinguer par des caractères suffisamment précis, pour ne pas devoir 
être confondus et que le tableau dichotomique placé à la fin de cette étude permettra de 
différencier nettement. 

Répartition géographique. — On peut dire, d’une façon générale, que les espèces qui 
composent le genre Panulirus sont localisées dans la zone tropicale des deux continents. 
Ce sont toutes des espèces de mers chaudes, qui peuvent atteindre, généralement, une 
belletaille, parfois même trèsconsidérable, et quisont ou pourrontêtre, par conséquent, uti- 
lisées dans l’alimentation de façon à remplacer, dans la mesure du possible, la Langouste 
vulgaire, qui, comme on l’a vu, tend, de plus en plus, à disparaître. 

1. P. Japonicus von Siebold (de Haan, 1850) (PI. V, fig. 1 et 2). 

Synonymie. — Palinurus guttatus, de Haan, 1850 (n° 20); Palinurus longipes, A. 
M. Edw., 1868 (n° 40-c); Palinurus femoristriga, v. Martens, 1872 (n° 38-b); Senex 
femoristriga, Pfeffer, 1881 (n° 48); Senex guttatus, Pfetfer, 1881 (n° 48) ; Senex femoristriga, 


Ortmann, 1891 (n° 45-a); P. guttatus, Offmann (n° 44); Palinurus marginatus? Quoy et 


Gaimard, 1817-1820 (n° 52). 
Caractères. — Caractères ‘du genre, et en outre : 
Exopodites de la première paire de maxillipèdes, avec fouet de 12 à 14articles, dépas- 
sant le milieu du méropodite du troisième maxillipède. 
ë i À poh nf Exopodites des deuxième et troisième paires de 
x / J maxillipèdes avec fouet de 12 articles au moins, attei- 
be e gnant le milieu du méropodite du troisième maxiili- 
pède. 
Cercle antennulaire avec deux épines principales, 
rapprochées sur la ligne médiane, avec deux ou quatre 


a 


Fig. 11. — Panulirus japonicus. a. Cercle 
antennulaire. 6. Epistome. c. Epimére. 


épines beaucoup plus petites, en avant des précédentes et un groupe variable de trés 


petites également, en arrière (fig. 11, a). 


Cornes frontales longues, rapprochées et fortement recourbées en avant; deux épines - 


assez fortes immédiatement en arrière. Epines latérales assez fortes, mais plus petites 
que chez P. guttatus Latr. 

Deux épines symétriques, médianes, en arrière du sternum et une saillie double, 
médiane, en avant. Partie moyenne et médiane du sternum avec mamelon mousse, sans 
épines. (Il y a un sillon médian antérieur, chez guttatus.) 

Trois dents épistomiales égales, avec deux à quatre denticulations de chaque côté de 
la dent médiane (fig. 11, b). Sillon épistomial absent. 

Sillons piliferes ininterrompus, sur tous les tergites abdominaux. 

Sternites non denticulés. 


Peel er 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 29 


Epimères avec une dent saillante et une en arrière plus petite, parfois bifide ; jamais 
de denticulations au bord postérieur (fig. 11, €). 

Chez le 5‘, à la cinquième paire de pattes, une simple griffe, avec 4 ou 5 épines chiti- 
neuses et des poils. 

Chez la 9, il existe ici, comme chez toutes les autres espèces du genre, une pince, 
formée par un prolongement du propodite qui vient s’articuler avec un prolongement 
semblable du dactylopodite correspondant. 

La couleur est assez variable dans cette espèce et due, certainement, à des variations 
locales. C’est ainsi, par exemple, que des exemplaires du Japon présentent une couleur 
bleu-verdatre, plus ou moins foncée, mais uniforme, avec quelques taches jaunes sur les 
antennes et les épimères et des bandes également jaunâtres sur les pattes. De plus, il y a 
beaucoup de poils courts, de couleur jaunâtre foncé autour des épines du céphalothorax. 

Les exemplaires des îles Sandwich ont une couleur vert foncé avec marbrures jaunes, 
rougeâtres ou indigo, à la limite postérieure de chaque tergite abdominal, à la base de 
certaines épines céphalothoraciques et des pattes, sur les antennes, etc., et surtout à la’ 
partie inférieure du corps. Dans les formes de Zanzibar, de l’île Maurice et de l’île de la 
Réunion, la teinte générale varie du gris bleuâtre au bleu avec des tâches jaunatres, larges 
sur le céphalothorax, très petites sur l'abdomen, des bandes ou des taches sur les pattes, etc. 

Ces variétés de couleur ont amené les auteurs à différencier spécifiquement ces 
formes. En réalité et comme l’a bien prévu Ortmann, elles doivent être réunies sous le 
même nom (quitte à établir, si l’on veut, des variétés locales), car leurs caractères anato- 
miques sont absolument identiques. 

Nous avons, de plus, rencontré dans la collection du Muséum un exemplaire, pro- 
venant du Japon, qui présente, sur les anneaux de l'abdomen, des tâches jaunâtres comme 
les formes de Zanzibar ou de la Réunion. 

Distribution géographique. — Toute la région tropicale de l’océan Indien et de 
l'océan Pacifique : Japon (de Haan, musée de Strasbourg, Muséum Paris); îles Sandwich 
(Muséum Paris et Pfeffer); Simoda (Stimpson); Aneitum (Miers); Nouvelles-Hébrides 
(Miers); Nouvelle-Guinée (Pfeffer); Amboine (Martens); Moluques (Herklotz); ile de la 
Réunion (coll. Muséum, Paris); ile Maurice (M. Edwards ); Zanzibar (M. Edwards), etc. 

L'espèce désignée par Quoy et Gaimard sous le nom de Palinurus margina'us me 
parait se rapporter nettement a Pan. Japonicus (var. japonaise). 

Remarque. — Cette espèce ne semble pasatteindre, engénéral, une grande taille. Tous 
les exemplaires que nous avons examinés ne mesuraient guère que de 20 à 30 centimètres 
de long, et leur poids à l’état frais ne doit pas dépasser de 800 grammes à 1 kilogramme. 
Néanmoins, ces crustacés sont utilisées, au point de vue alimentaire, par les Japonais qui 
fabriquent des conserves très réputées, en plus de celles qui sont consommées à | l'état 
frais avec des préparations culinaires variées. 

2. P. guttatus (Latreille) M. Edwards 1837 (n° 40-a) (PI. III, fig. 3). 

Synonymie : Squilla crangon americana altera, Seba; Cancer homarus, Linné; 
Palinurus guttatus, Latreille; Palinurus spinosus ? M. Edw:: Panulirus échinatus, 
Smith {n° 7 ); Senex guttatus, Ortmann (n° 45). 


eo? 


‘30 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Caractères. — Caractères du genre et en outre : 
Exopodites des première et deuxième paires de maxillipèdes avec fouet non dilaté de 
10 articles environ, atteignant le milieu du méropodite du troisième maxillipède. 
Exopodite de la troisième paire de maxillipèdes atrophié, n’atteignant pas le milieu 
du méropodite du même appendice ; plus réduit 


jf je 4 encore que chez P. penicillatus. Fouet absent. 

tok ieee + Cercleantennulairéportantdeux fortes épines, 
3 L \ j, 

perce 


avec, en avant, 2, 4 ou 6 épines très petites. Pas 
de petites épines en arriére des principales. 

d Cornes frontales longues et pointues, rappro- 

Hig. (4: Pants utile OR Ronaeesine chées sur la ligne médiane, mais moins recourbées 

rentes du cercle antennulaire. c. Partie antérieure que chez P. Japonicus. Deux fortes épines immé- 

ieee Aes Fate er ee imére. f- Sillon i atement en arrière ét une série longitudinale de 

quatre petites épines entre les cornes frontales 

(fig. 12, a et b). Deux paires d’épines latérales plus de moitié aussi longues que les cornes 
frontales. ’ : 

A la partie antérieure du sternum, sillon profond limité, sur les côtés et en avant, par 
des saillies denticulées (fig. 12, c). 

Trois dents épistomiales égales, séparées par deux ou trois petites denticulations 
latérales. Sillon épistomial trés peu net (fig. 12, d). 

Sillons pilifères profonds, à poils relativement longs (1 millimètre) sur tous les anneaux 
et ininterrompus, mais formant un angle obtus dirigé vers la partie antérieure du corps 
(fig. 12, f). Parfois on trouve une interruption surle milieu du quatrième tergite, mais elle 
n’est qu’accidentelle, jamais constante. 

Sternites non denticulés. 

Les épimères des segments 2 à 5 présentent une forte dent et une autre simple, en 
arrière, séparée de la première par une encoche profonde, comme chez penicillatus (fig. 
2,2). 

La deuxième paire de pattes est la plus longue. La cinquième présente, chez la femelle, 
une pince ordinaire et, chez le mâle, une simple griffe avec une ou deux épines chitineuses. 

Couleur générale, bleu-verdâtre, avec de nombreuses taches jaune-blanc, des stries 
blanches autour des épines et des raies longitudinales sur l’avant-dernier article des pattes. 
Les taches jaunâtres sont beaucoup plus grandes que chez le penicillatus, dont l'espèce 
que nous étudions se rapproche beaucoup. 

On peut même dire que le penicillatus est la forme indo-pacifique du guttatus, qui se 
trouve absolument localisé, contrairement à ce qu’ont pu penser certains auteurs, dans la 
région des Antilles et du Brésil. Les exemplaires jeunes provenant de Kotonou et indi- 
qués par Bouvier comme appartenant à cette espèce, ainsi que ceux signalés par Pfeffer, 
a Monrovia et Saé-Thomé, appartiennent, en réalité, à l’espèce regius, comme nous le 
verrons plus loin. 

Distribution géographique. -— Mer des. Antilles (Cuba, Martinique, Guadeloupe, 
Floride, etc.) (M. Edwards); isthme de Panama (Streets); côtes du Brésil (Smith, Moreira), 


me-dédédasl s-Dt-é 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 31 


Saint-Paul (océan Atlantique) (Challenger), et, d’une façon générale, toute la région tropi- 
cale dela côte atlantique américaine. 

Exploitation industrielle. — Nous n’avons que fort peu de renseignements précis sur 
l'exploitation industrielle de cette espèce qui n’atteint jamais, du reste, une bien grande 
taille. : 

En ce qui concerne le Brésil, M. le Professeur Bourguy de Mendonca ne me signale 
comme comestibles que les deux espèces : P. argus et P. laevicauda. Aux Antilles, cepen- 
dant (Martinique plus spécialement), cette espèce existe, en assez grande quantité, mais 
elle est peu exploitée pour l’alimenta- 
tion. C’est surtout le P. argus qui est 
apporté sur les marchés par les indigènes. 

Moreira signale les trois espèces, 
mais ce sont surtout P. argus et P. lœvi- 


cauda qui sont Re commerciale- Fig. 13. — Panulirus penicillatus. a. Exopodite du 3* maxilli- 


ment. pède. b. Les quatre épines soudées du cercle antennulaire. 


c. Epistome. 4. Tubercules céphalothoraciques. e. Epimère. 
HP. penicillatus, Olivier, Milne- f. Patte de la 5° paire chez la 9. 


Edwards (1837) (n° 40-a). (PI. I, fig. 4.) 

Synonymie : Astacus penicillatus, Oliv. (n° 43) ; Palinurus penicillatus. M.-Edw. 
(n° 40-a) ; Palinurus gigas, Bosc (n° 8); Pal. Ehrenbergi, Heller (n° 23-a); Panulirus 
penicillatus, Gray, Stimpson (n° 58), Bate (n° 4-b) ; Senex penicillatus, Ortmann (n° 45). 

Caractères. — Caractères du genre et, en outre : 

Exopodite de la première paire de maxillipèdes bien développé, avec fouet de 10 
articles environ, atteignant, presque, le sommet du méropodite du troisième maxillipède. 

Exopodite de la deuxième paire de maxillipèdes normal, avec fouet de 18 articles 
environ, atteignant la même hauteur que le précédent. 

Exopodite de la troisième paire de maxillipèdes, large à la base: triangulaire, sans 
fouet, portant au sommet un simple bouquet de poils terminaux, atteignant le milieu 
de l’ischiopodite du troisième maxillipède. 

Rostre assez large portant, sur l'anneau antennulaire, quatre épines principales, toutes 
réunies à la base (fig. 13, b) et dont les deux postérieures sont les plus longues. Pas d’é- 
pines secondaires. (PI. III, fig. 2.) 

Cornes frontales moyennement développées, assez rapprochées, recourbées en avant, 
non denticulées, avec une seule épine secondaire en arriére de chacune d’elles. 

Deux paires d’épines latérales fortes et bien développées. 

Pas d’épines sternales, mais de simples renflements mousses et trés peu accusés. Une 
saillie médiane a la partie antérieure du sternum. : 

Epistome avec trois dents de longueur à peu près égale, séparées de la médiane par 
2 ou 3 plus petites de chaque côté (fig. 13, c). Pas de sillon épistomial. 

Sillons des tergites abdominaux ininterrompus et droits, sauf les cinquième et sixième, 
et dépourvus de poils. 

Sternites non denticulés. : 

Epimères des segments 2 à 5, avec une pointe fine, fortement recourbée en arrière et 


132 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


une seule épine secondaire, en arrière (fig. 13, e). Parfois le bord antérieur des épiméres 
2,3, 4et 5 porte une ou deux épines courtes. 

La troisième paire de pattes est la plus longue, à peine plus que la deuxième ; 
chez la 9, la cinquième paire porte une pince constituée comme chez les Hrécédents 
espèces; chez leo, c’est une simple griffe avec3 ou 4 épines internes fortes et très poilue. 

La couleur générale est d’un vert bleuâtre avec de nombreuses et très petites ponc- 
tuations jaunâtres sur la partie dorsale de l’abdomen, des lignes jaunes, étroites et plus ou 
moins sinueuses sur les pattes, des taches plus ou moins larges sur le céphalothorax et le 
pédicule des antennes externes. Enfin, tout le dessous du corps est d’une teinte bleuâtre 
fortement veinée de jaune. 

Le céphalothorax est plutôt un peu déprimé, couvert par quelques épines peu déve- 
loppées, mais surtout de nodules arrondis, plats, avec une toute petite épine antérieure. 
Chez les jeunes, les tubercules sont entourés de soies en peigne (fig. 13, d). 

Remarques. — Cette espèce, grâce à sa distinction facile, est une de celles qui ont été 
le mieux reconnues par les différents auteurs. 

Le Palinurus marginatus de Quoy et Gaimard (Voyage de I’ Uranie, pl. 81, p. 537), 
bien qu’avec une description trop sommaire et une représentation des épines de l’anneau 
antennulaire assez rapprochées, me paraît devoir être rattaché à P. Japonicus et non à 
cette espèce. 

Distribution géographique. — Banc des Aiguilles (cap de Bonne-Espérance) (Stebbing); 
île de la Réunion (Hoffmann, Muséum Paris); île Maurice (Latreille, Richter); océan Indien 
(M. Edw.); îles de Rota, Agrigan et Nouvelle-Guinée (Pfeffer); Nouvelles-Hébrides (Brit. 
Museum); Mahonga (arch. des Mariannes) (Muséum Paris); Haô (ile Gambier)(Muséum 
Paris); Nouvelle-Calédonie (Muséum); Sumatra, îles Sandwich (Muséum Paris); mer 
Rouge; Côte N. de l'Australie (Stimpson, Challenger). 

Exploitation industrielle. —La taille magnifique que peuvent atteindre les Langoustes 
appartenant à cette espèce les rend facilement exploitables pour l’alimentation ; mais il 


semble que, si elles présentent une aire de dispersion considérable, elle ne paraissent en. 


abondance que dans l'archipel des Mariannes où on les rencontre à peu près partout. 

A ce sujet, des données précises nous manquent totalement. 

4. P. Burgeri, de Haan, 1850 (n° 20). (PI. I, fig. 6.) 

Synonymie : Palinurus Burgeri, de Haan (n° 20), Pfeffer (n° 48); Senex Burgeri, 
Ortmann (n° 45). ef 

Caractères. — Caractères du genreet, en outre: 

Exopodite de la première paire de maxillipèdes, normal, avec fouet aplati de 9 à 
10 articles, environ, dépassant le sommet du méropodite du troisième maxillipède. 

Exopodite de la deuxième paire de maxillipèdes atrophié, fouet réduit à un seul 
article triangulaire atteignant à peine la base du méropodite du troisième maxillipède. 

Exopodite de la troisième paire de maxillipèdes absent. 

Rostre large, avec l’anneau antennulaire portant quatre épines principales à peu 
près égales, largement séparées et deux, ou plus, petites épines secondaires situées entre 
‘les premières. 


Rte AS de En ey 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 33 


‘Cornes frontales moyennement longues, non denticulées, avec une seule épine en 
arrière. 

Pas d’épines sternales, mais un simple petit renflement à la partie antérieure du 
sternum. 

Trois dents épistomiales simples et de même longueur. Pas de 
sillon épistomial. 

Sillons pilifères des tergites abdominaux ininterrompus et 
fortement crénelés, non seulement surle bord dusillon, mais encore Fig. 14: — Panulirus 


Burgeri. Ornements 
un peu en dehors, plus nettement encore, peut-être, que chez le des segments abdomi- 


Jasus Lalandei (voir p. 11). ee 

Sternites non denticulés. 

Epimères des anneaux 2, 3, 4, 5, avec une pointe principale et un bord postérieur 
arrondi portant 3 à 4 petites dents. 

La troisième paire de pattes est la plus longue. 


La cinquième paire est conformée comme partout ailleurs chez le mâle et chez 
la femelle. 


Couleur vert olivâtre foncé avec des lignes jau- 
nâtres sur le bord des crénulures des sillons abdomi- 
naux. Ces lignes sont si rapprochées sur le bord libre 
porteur des tergites abdominaux, qu’elles forment 
presque, sur les premiers, une ligne interrompue, puis 
sur les troisième et quatrième, une succession de lignes 
et de points, et sur les cinquième et sixième de simples 

. . . ‘ Fig 15. — Panulirus dasypus. a. Epistome. 
ponctuations. Ces lignes, interrompues ou non,n’exis- 4, Cercle antennulaire. c. Epimére. d. Or- 
tent pas chez dasypus. Tout le reste de la surface des  nements des segments abduminaux.e. Ex- 

: ‘ ‘ À trémité de la 5° paire de pattes chez la 9, 
tergites abdominaux est couvert de ponctuations jau- 
nâtres assez grosses, tandis que chaque anneau porte, de chaque côté, une grosse tache 
également jaunâtre. 

Le céphalothorax porte peu d’épines saillantes sauf, à la partie antérieure, les cornes 
frontales et les épines latérales, peu développées du reste ; mais il est couvert de nodosités 
arrondies et aplaties, portant, chacune, une petite épine antérieure. 

Les pattes sont d’un vert olivâtre foncé uniforme, avec seulement quelques taches 
jaunâtres à la base des épines. Les antennes externes sont d’un brun olivâtre fortement 
tacheté de jaune, en dessus, presque entièrement jaune au-dessous. 

Remarques, — Si, par ses caractères anatomiques, les plus importants, il est vrai, 
cette espèce ressemble beaucoup à P. dasypus, elle en est nettement différente pat la 
forme des sillons abdominaux et par la coloration générale. 

Distribution géographique. — Japon? (de Haan); Algoa Bay, Port-Elisabeth (Afrique 
Australe) (Stebbing); Fort-Dauphin (Madagascar) et Mascate (Coll. Muséum Paris). 

Exploitation industrielle. — Cette espéce atteint une belle taille et se préte, par 
conséquent, à une exploitation industrielle intéressante. Il semble, en ce qui concerne 


Madagascar, qu’elle soit surtout localisée sur la côte orientale, dans les anfractuosités des 
T. IL. — Fase. 4. 5 


34 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE: 


rochers et des récifs, depuis Diégo-Suarez jusqu’à Fort-Dauphin. Mais les indications 
précises à ce sujet font défaut et, peut-être, se trouve-t-elle mélangée à P. ornatus. 
5. P. dasypus, Latreille (Milne Edwards, 1837) (n° 40-a) (PI. II, fig. 5). 


Synonymie. — Locusta marina? Rhumph.; Palinurus dasypus Latr. Milne 
Edwards ; Senex dasypus, Ortmann (n° 45). 
Caractères. — Caractères du genre et, en outre : 


Exopodites de la première paire de maxillipèdes, normaux avec fouet aplati de 9 arti- 
cles environ, dépassant le sommet du méropodite du troisième maxillipède. 

Exopodites de la deuxième paire de maxillipèdes normaux, mais sans fouet et attei- 
gnant largement la base du méropodite du troisième maxillipède. 

Exopodites de la troisième paire de maxillipèdes, absents. 

Rostre large avec, sur l'anneau antennulaire, quatre épines principales, largement 
séparées et à peu près de mêmedimension, portant, entreelles, quatre ou plus, épines secon- 
daires, de tailles généralement différentes (fig. 15, b). 

Cornes frontales, épines latérales et épines céphalothoraciques comme chez Burgeri. 

Trois dentsépistomiales à peu près égales, avec, parfois, 2 ou 3 petites denticulations 
secondaires (fig. 15, a). Sillon épistomial légèrement indiqué, en arrière. 

Sillons pilifères des tergites abdominaux légèrement interrompus sur la ligne 
médiane dorsale où les crénelures, nettement indiquées sur les parties latérales, s’atté- 
nuent beaucoup, ou même, disparaissent complètement (ce qui n’est jamais le cas chez 
Burgeri) (fig. 15, d). : 

Même les crénelures les mieux indiquées sont beaucoup moins profondes et moins 
nettes que chez Burgeri, ce qui permet immédiatement de distinguer les deux espèces. Sur 
tout le reste des tergites, il y a de petites cavités pilifères, mais jamais de crénelures 
arrondies comme chez Burgert. 

Sternites non denticulés. = 

Epiméres des anneaux 2, 3, 4 et 5 comme chez Burgeri (fig. 15, c). 


La plus grande paire de pattes est la troisième, qui dépasse de beaucoup la longueur 


de celles de la deuxième paire (ce qui n’est pas dans l’espèce précédente). 

Couleur générale d'un vert olive clair. Sur les trois premiers anneaux abdominaux, 
se trouvent de fines ponctuations jaunâtres. qui deviennent beaucoup plus grosses sur les 
trois derniers; ces anneaux portent, chacun, sur la partie latérale, une tache jaune allongée 


avec le centre vert; pas de lignes jaunâtres sur le bord postérieur des anneaux. Céphalo- - 


thorax peu épineux, sauf dans la région antérieure, avec une petite zone jaunatre à la 
base de chaque épine. Partie latéro-ventrale jaunâtre (elle est verte chez Burgeri). Pattes 
uniformément vert jaunâtre en dessus, jaunâtre en dessous ; antennes externes vertes avec 
de fines ponctuations jaunes. 

Distribution géographique. — Océan Indien, (Milne-Edwards, Coll. Muséum); Ceres 
Madras (Heller); Poulo-Condor (Coll. Muséum Paris); Moluques (Herklotz). 
_ Exploitation industrielle. — Cette espèce, comme la précédente, atteint une assez 
belle taille et est susceptible d’une exploitation industrielle ; mais nous ne possédons aucun 
renseignement précis a ce sujet. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 35 


6. P. regius, de Brito Capello, 1864 (n° 10) (PI. III, fig. 4; Pl. III, fig. 5 et Pl. II, fig. 6). 

Synonymie : Palinurus phoberus (jeune), Rochebrune (n° 56); Senex longipes Pfeffer; 
(n° 48); Puer atlanticus (jeune), Bouvier (n° 9-b); Puer inermis (jeune), Pocok (n° 49). 

Caractéres. — Caractéres du genre et, en 
outre : 

Exopodites de la premiére paire de maxil- 
lipédes, bien développés, avec fouet large, aplati, 
de 10 articles environ, couvert latéralement de 
poils, dépassant le sommet du méropodite du 
troisième maxillipède. 

Exopodites de la deuxième paire de maxil- 
lipèdes, avec fouet étroit, aplati, de 10 articles 
environ, couvert latéralement de poils et n’attei- 
gnant pas le sommet du méropodite du troisième Fig. 16.— Panulirus regius. a. Cercle antennu- 


maxillipède. laire. b. Epistome. c. Exopodite atrophié de la 3e 
E ai ‘dat ilk 3 d paire de maxillipèdes. d. Epimére. e. Extrémité 
xopodites de la troisième paire de ma- de la 5° paire de pattes chez la ©. 


xillipèdes absents. Quelquefois cependant, chez 

les jeunes, il est représenté par un tout petit mamelon (fig. 16, c) qui ne se retrouve 
généralement plus chez les adultes, mais qui, en tout cas, n’atteint jamais le milieu du 
second article, comme le dit Rathbun. 

Rostre très large portant, sur l’anneau antennulaire (fig. 16, a), quatre épines à peu 
près égales, largement séparées avec, parfois, des épines secondaires en nombre variable, 
entre elles. 

Cornes frontales fortes, mais pas très longues, avec une épine en arrière de chacune. 
Epines latérales très peu développées. 

Simple petit mamelon sur la partie antérieure du sternum, pas d’épines. 

Epistome avec trois épines dont la médiane est plus longue que les autres (fig. 16, b). 
Pas d’épines intermédiaires, ni de sillon épistomial. 

_Sillons pilifères des tergites abdominaux interrompus sur les cinq derniers segments, 
sillon ininterrompu sur le premier. Partout ailleurs, des petites cavités pilifères. 

Sternites abdominaux non denticulés. 

Epimères avec une seule pointe forte et le bord postérieur arrondi avec de 2 à 4 den- 
ticulations (fig. 16, d). 

_ La troisième paire de pattes est, de beaucoup, plus grande que les autres. 

La cinquième paire porte, chez la 9, une pince très forte, constituée comme à l'ordi- 
naire (fig. 16, e) et, chez le o', une simple griffe avec épines et poils internes. 

Couleur générale d’un vert bleuâtre sale. Sur chaque tergite abdominal et vers le 
bord postérieur, court une bande transversale jaunâtre, limitée, en avant et en arrière, 
par une bande bleu de Prusse. 

_ Une tache jaune est très distincte sur les côtés, sur les segments 2, 3 et 4. 

Céphalothorax assez peu épineux, avec épines courtes, de couleur verdâtre, avec une 
large bande jaune sur les parties latéro-ventrales. 


36 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Antennes externes d’un vert-jaunâtre, avec des zones bleues autour et à la base des 
épines. Pattes vert bleuâtre avec une bande jaune dessus et une autre dessous, courant 
sur toute la longueur. : 

Le céphalothorax est, chez les jeunes, couvert de poils courts, jaunâtres, qui dis- 
paraissent chez les individus de belle taille. 

Remarques. — Le Palinurus phoberus, signalé par Rochebrune (Bull. Soc. Philom. 
Paris, vol. VII, 1883, p. 173), à l'embouchure de la Gambie et de la Casamance, et dont 
l’auteur lui-même ignore ce que le type est devenu, semble être, simplement, d’après la 
description sommaire qui en a été donnée, un jeune de P. regius. — 

J'ai trouvé dans la collection ou rapporté moi-même, du Dahomey, toutes les formes 
de passage entre le stade post-larvaire du P. regius, le « Natant-stage » de Boas et la grande 
forme adulte. 

Sous le nom de Puer atlanticus, E. L. Bouvier a décrit une petite forme provenant de 
Kotonou qui, tout en conservant des caractères nettement larvaires, comme l’absence 
d’épines sur le céphalothorax et l’épistome; la présence d’épines, au contraire, très déve- 
loppées à la partie postérieure du sternum, etc., permet de passer facilement à une forme 
un peu plus grande, considérée par le même auteur comme un jeune de P. guttatus, à cause 
de la présence d’un exopodite extrêmement réduit, placé à la base du troisième maxillipède. 

Il existe bien, en effet, chez le Puer atlanticus, à la base du troisième maxillipède, un 
exopodite déjà très réduit (fig. 16, c), qui va en s’atrophiant chez la jeune Langoute, mais 
se retrouve encore chez quelques individus atteignant jusqu’à 12 et 15 centimètres de 
long ; il disparaît complètement chez les individus de moyenne et grande taille. Il n’y a 
donc aucun doute possible, et le Puer atlanticus est bien la forme intermédiaire entre le 
Phyllosome et l'adulte du Panulirus regius. 

Nous verrons, plus loin, le même fait se reproduire chez le P. inflatus, Bouv. 

Distribution géographique. — Depuis que Brito Capillo signala cette espèce prove- 
nant des îles du cap Vert, en 1864, aucun auteur n’en avait parlé. Dans son travail 
d'ensemble, publié en 1891, pas plus que dans celui de 1897, Ortmann ne signale cette 
espéce, que Bouvier fit revivre, en quelque, sorte en 1895. 

Dès le mois de mai de la même année (1895), je fis connaître que cette forme, consi- 
dérée jusqu’ici comme une rareté, se rencontrait, au contraire,enextréme abondance, sur 
certains points des côtes saharienne et sénégalaise. 

Dans mon dernier voyage sur la Côte occidentale d’Afrique, j'ai retrouvé cette : 
espèce, en plus ou moins grande abondance jusqu’au Sud de l’Angola, dans les localités 
suivantes : cap Barbas; cap Blanc et baie du Lévrier; environs de Saint-Louis; environs 
de Dakar (cap Manuel et Bel-Air) ; environs de Rufisque (rochers des Sai-Sai) ; petite côte 
du Sénégal (bancs de M’Bour et de Joal); Sainte-Marie de Bathurst; iles de Los (Guinée 
française) ; Grand Sesters (Est Libérien) ; Tabou et les piliers du warf de Grand-Bassam 
(Côte d'Ivoire); environs d’Accra (Gold-Coast); piliers du warf de Kotonou (Dahomey) ; 
environs de Victoria (Cameroun); cap Estérias, Libreville, Loango (Gabon); Nord de 
Vembouchure du Congo (phare de Moanda); Saint-Paul de Loanda, Saint-Philippe de 
Benguella, Saint-Nicolas, Mossamédès et Praya Amélia (Angola). 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 37 


Cette espèce s’étend donc, sans aucun doute, du 23° degré de latitude Nord, environ, 
jusque vers le 16° degré de latitude Sud, mais écurie sur la Côte occidentale d’ is 
frique. 

Exploitation industrielle. — 11 n'y a guère que cinq ou six ans queles pêcheurs Cana- 
riens, qui viennent régulièrement exercer leur industriesur lacôte saharienne, jusqu’au cap 
Blanc, s'inquiètent de capturer quelques Langoustes qu'ils transportent en bateaux-viviers 
jusque dansle port de La Luz (Las Palmas). Ces crustacés sont parqués dans des viviers 
flottants et vendus, peu à peu, aux hôtels et aux particuliers, à Las Palmas, au prix de 2 à 
5 pesetas, suivant la taille et la saison. : 

Les Canariens capturent souvent la Langouste avec un filet spécial, la «gardera», sem- 
blable à notre caudrette française. C’est un filet rond, en fil ou en métal, de 1",50 à 2 mètres 
de diamètre, avec lequel ils arrivent à capturer es centaines de Langoustes a la fois. 

Quand ils manquent de « gardera », ils attachent un grand morceau de poisson, 
un peu avarié, à l’extrémité d’une ligne, après l’avoir percé de trous avec leur couteau. 
Le poisson est envoyé au fond de l’eau, dans un endroit où il existe des Langous- 
tes. Attirées par l’odeur, elles s’approchent du poisson, l’attaquent, s’y cramponnent, 
et, en tirant doucement, on relève l’appât et les crustacés quise sont accrochés à sa surface. 

Les Canariens, en général, sont très peu amateurs de Langoustes et beaucoup utilisent 
la chair de ces crustacés pour amorcer les lignes qui servent à la capture des Sélaciens 
dont ils sont, au contraire, très friands. 

A Saint-Louis (Sénégal), les pêcheurs Osolofs de Guet N’Dar, capturent, en mars, 
avril et mai, surtout, un certain nombre de Langoustes royales, dans les rochers qui se 
trouvent à 2 ou 3 milles au large, presque en face de Saint-Louis. C’est, du reste, tout à fait 
par hasard, et avec les lignes à mains qui leur servent normalement à capturer le pois- 
son. Comme, à cette saison, les Langoustes sont assez abondantes, leur capture est rela- 
tivement facile, même à la ligne. Ces crustacés sont apportés sur le marché ou chez 
les Européens et vendus à raison de o fr. 50 à o fr. 75 la pièce, suivant la taille. 

Les pêcheurs Lébous, des environs de Dakar, Rufisque ou Joal, capturent les 
Langoustesroyales en plongeant. Quandla merest bien calme, surtouten juin, juillet, août, 
septembre, ils se rendent, avec leurs pirogues, sur les fonds de rochers, mettent leur tête 
près de l’eau, ou sous l’eau et examinent le fond. Dès qu’ils aperçoiventune Langouste, ils 
plongent, la prennent par les antennes et la remontent à la surface. 

Il y a peu d'années, le prix des Langoustes ne dépassait pas un franc, à Dakar ; mais, 
lenombre des Européens augmentant sans cesse, les prix se sont élevés et, aujourd’hui, 
une belle Langouste se paie jusqu’a 2 fr. 50 et 3 francs. 

Partout ailleurs, dans les différentes colonies de la Côte occidentale d’Afrique, les 
indigènes capturent, de temps en temps, quelques Langoustes qu'ils vendent aux 
Européens, car eux-mêmes, en général, n’apprécient pas ces crustacés. 

A Saint-Paul de Loanda, cependant, on trouve souvent, pendant la saison sèche, des 
Langoustes royales sur le marché. Ces Langoustes sont capturées, soit par les pêcheurs 
portugais, soit par les noirs, surtout à l’aide de filets dormants. Leur prix moyen est de 
4 à 500 reis(2 fr. à 2 fr. 50) lapièce, suivant la taille. 


38 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Dès que nous eûmes signalé la présence de quantités considérables de Langoustes 
royales sur les côtes de Mauritanie, dans la région du cap Blanc, des pêcheurs bretons 
se rendirent sur les lieux et tentèrent de rapporter ces crustacés, à l’état vivant, en 
France. Les 800 premières Langoustes royales furent rapportées à l’Aberwrack, près de 
Brest, dans la cale d’un chalutier à vapeur, où l’eau était renouvelée à l’aide de la pompe 
du bord. L'installation était défectueuse et les résultats furent médiocres. Puis l’année 
suivante (1906), ce furent les bateaux Langouste, de Roscoff, et Violetta, de. 
Marseille qui firent le voyage du cap Blanc. 

Enfin, depuis deux ans, nos pêcheurs bretons d’Audierne, avec |’ Aventurier, 
sloop auxiliaire, de Douarnenez et deConcarneau, avec des dundee de 30 à 60 tonneaux : 
Philanthrope, En avant, Idéal, etc., se rendent au cap Blanc (Port-Etienne) pour s'y 
livrer à la pêche des Langoustes royales, du mois de mars-avril, au mois de septembre. 

Ces crustacés viennent très près du bord, sur les rochers gréseux, et sont capturés 
exclusivement à l’aide de filets dormants et de casiers, par des fonds de 2 à 3 brasses 
(3 à 5 mètres) seulement. 

Voici, à titre de documentation, les pêchés effectuées par deux de ces bateaux, 
en 1900-1910. j 


VOYAGES. « AVENTURIER ». « PHILANTHROPE Ÿ. 
BrenMer monte 6.747 Langoustes en 23 jours. 8.000 Langoustes. 
Deuxienmenernier 2.755 — 21 — 11.500 -- 
ATOISIOME. 5 os dune ee 5.134 — 22 — 8.500 — 
Quatrième.; ...,:44.4 5.347 — 21 — » 


Le nombre total des Langoustes déclarées à Port-Etienne et qui ont été pêchées dans 
la région du cap Blanc, de mai 1910 à mai 1911, n’a pas été inférieur à 150 000. 

D'une facon générale, la moyenne des captures a été de 700 Langoustes par jour et par 
bateau. : 

Les dundee mettent environ 22 à 25 jours pour revenir de Port-Etienne aux ports 
de Bretagne. Pendant ce trajet, si les bateaux ne stationnent pas dans des ports, la mor- 
talité est insignifiante : mais, si, pour une cause quelconque, ils sont obligés de s'arrêter, 
le renouvellement de l'eau dans le vivier se fait mal et les crustacés meurent en 
quantité. Un moteur auxiliaire pourrait rendre, dans les jours de calme, de grand: services. 

De plus, à partir du mois d'octobre, la différence de température entre les eaux du 
cap Blanc et celles des côtes de Bretagne devient trop considérable ; les Langoustes, 
arrivées dans des eaux trop froides, souffrent et meurent rapidement. 

Les pêcheurs de Concarneau sont allés de décembre 1910 à février 1911, jusqu'à 
Dakar, se livrer à la pêche des poissons et des crustacés. 

Ils ont essayé, sans résultat positif, la pêche de la Langouste aux Açores. 

La Langouste royale est bien connue aujourd’hui sur le marché français et surtout 
parisien, où elle commence à être appréciée à sa valeur, malgré le boycottage que certains 
marayeurs ont cherché à lui faire subir. 

Tous ceux qui, sans esprit préconçu, ont goûté ces Langoustes, les considèrent comme 
aussi fines et aussi bonnes que les Langoustes de nos côtes. Peu à peu, elle s’imposeront, 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 39 


et d’autant plus facilement que la forme dite vulgaire tend à devenir une espèce rare. 
Cela est si vrai que les vendeuses des Halles que nous avons pu interroger nous ont affirmé 
que les personnes quiavaient, une première fois, acheté des Langoustes royales, en rede- 
mandaient de préférence, à cause, tout d'abord, de leur prix un peu inférieur, et ensuite 
de la qualité, aujourd’hui très appréciée, de leur chair. 

C’est donc une nouvelle ressource, de grande valeur alimentaire, qui a pu ainsi être 
introduite sur le marché français, à la suite de nos recherches sur la côte occidentale d’A- 
frique. 

7. P. argus, Linreitic (Milne-Edwards, 1837) (n°40-a) (Pl. IV. fig. 2). 

Synonymie : Palinurus argus, Latreille, Milne-Edwards, v. Martens, Pfeffer; Pali- 
nurus americanus, Lamarck.; Senex argus, Ortmann (n° 45). 

Caractères. — Ceux du genre et, en outre : 

Article basilaire des antennes internes atteignant parfois le sommet du dernier article 
pédonculaire des antennes externes. 

Exopodites de la première paire de maxillipèdes, normaux, avec fouet de 12 à 14 arti- 
cles environ, non dilaté, bordé, latéralement, de poils et 
dépassant le sommet du méropodite du troisième maxil- 
lipède. 

Exopodites de la deuxième paire de maxillipèdes, 
comme les précédents. 

Exopodites de la troisième paire de eiaeillipédes, 

Fig. 17. — Panulirus argus. a. Cercle 
avec fouet, non dilaté, de 15 à 17 articles, dépassant le ~ gntennulaire. . Epistome. c. Epimére. 
milieu du méropodite du troisième maxillipède. 

Rostre moyennement large, avec cercle antennulaire portant quatre épines princi- 
pales peu développées, les antérieurs étant les plus longues ‘et comprenant, parfois, entre 
elles, deux très petites épines (fig. 17, a). 

Cornes frontales rapprochées, très longues et très recourbées en avant, avec deux 
épines, beaucoup plus petités, immédiatement en arrière. 

Epines latérales peu développées et à peu près égales entre elles. 

Sternum avec deux fortes saillies latérales et symétriques en arrière et une saillie 
médiane, denticulée, en avant. 

Epistome avec trois dents antérieures, la médiane étant plus de deux fois plus longue 
que les latérales, et de 4 à 6 dents, très petites, de chaque côté de la dent médiane, 
Sillon épistomial peu profond, mais très net (fig. 17, b). 

Sillons pilifères des tergites abdominaux, dépourvus, généralement, de poils, chez 
les individus d’assez grande taille, tous très nettement, interrompus sur la ligne médiane 
sauf sur le sixième anneau. 

Sternites non denticulés. 

Epimères avec une dent principale, saillante et pointue, et une secondaire, en arrière, 
peu pointue. Bord postérieur non denticulé (fig. 17, c). 

La deuxième paire de pattes est, de beaucoup, la plus longue, surtout chez les grade 
exemplaires. 


| 40 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


La cinquième paire est conformée, comme d’ordinaire, avec pince chez la 9, avec 
griffe simple chez le Gt. 

La couleur générale du céphalothorax et de l'abdomen (partie dorsale) est un mélange 
bizarre de jaune, de vert et de violet, ce qui donne aux différents échantillons des couleurs 
assez différentes suivant que l’une de ces couleurs prédomine sur les autres. 

Les sillons pilifères de l’abdomen sont teintés de jaune et chaque anneau porte dor- 
salement, une large tache jaune sur les deuxième, cinquième et sixième anneaux avec 
deux petites taches plus centrales etsymétriques, allongées transversalement. Les anneaux 
trois et quatre portent deux taches jaunes allongées, sur leur bord antérieur, mais moins 
nettes que les précédentes. 

Les pattes portent des bandes jaunes à la partie dorsale et ont toute la partie infé- 
rieure jaune. 

Remarques. — Le céphalothorax est très peu épineux, surtout en arrière, etles sillons 
sont généralement très accentués. 

Distribution géographique. — Antilles (M. Edwards), Martinique, Guadeloupe, Cuba, 
(Martens, Pfeffer}, Porto-Rico, etc. (Muséum Paris); île Tortuga (Muséum Paris); Hon- 
duras (Pfeffer). De la partie Sud des Etats-Unis, sur toute la côte du Brésil, jusqu'à Rio- 
de-Janeiro [Moreira]. 

En un mot toute la région tropicale des côtes orientales d’Amérique. 

Exploitation industrielle. — D’après mon ami M. Henry, ancien secrétaire général de 
la Guadeloupe, c’est cette espèce qui est surtout capturée par les indigènes des Antilles, à 
l'aide de nasses, plus spécialement, et apportée sur les marchés où elle est vendue aux 
Européens, au prix moyen de o fr. 50 à ofr. 75. 

C'est elle, également quiest apportée avec le P. lævicauda sur les marchés du Brésil et 
en particulier de Rio-de-Janeiro, où le prix est assez variable suivant la taille et lasaison, 
mais, en général, assez bas. Cette espèce peut atteindre une grande taille, facilement jus- 
qu'à o m. 45 à o m. 50 de longueur pour le corps seulement : c'est donc une forme indus- 
trielle au premier chef. 

8. P. interruptus, Randall 1839 (n° 53) (Pl. IV, fig. 3). 

Synonymie: Palinurus interruptus, Randal (n° 53); P. gracilis, Streets (ne 61) et 
Lockington (n° 36); Senex interruptus, Ortmann (n° 45). 

Caractères. — Ceux du genre et, en outre : 

Exopodites des trois paires de maxillipèdes normaux avec fouets aplatis, non dilatés; — 
celui de la première avec 14 à 15 articles, ceux des deux autres paires avec 18 à 2oarticles, 
atteignant, au moins, et même dépassant le sommet du méropodite de la troisième paire 
de maxillipèdes. 

Rostre allongé, assez étroit, avec le cercle antennulaire portant quatre épines princi- 
pales, très développées, les antérieures étant les plus longues. Généralement pas d’épines 
secondaires entre les principales. 

Cornes frontales courtes et peu recourbées avec une épine assez courte en arrière de 
chacune d'elles. Epines latérales peu développées. 

Sternum avec deux saillies latérales, symétriques en arrière, et une saillie médiane à 


PT eal ae eS : 
\ v. 1s ON 2 


une série de lignes sinueuses et d’épines entou- 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE AL 


une seule pointe, en avant. Vers le centre, deux mamelons arrondis situés l’un derrière 
l’autre, sur la ligne médiane, et entourés de poils courts. 

Epistome avec trois dents principales, à peu près d’égale longueur, avec, de chahue 
côté de la dent médiane, deux dents secondaires, un peu moins développées seulement 
que les principales (fig. 18, b). 

Tergites abdominaux avec sillons pilifères 
larges, remplis de poils courts et nettement in- 
terrompus sur la ligne médiane, saufle premier 
et le sixième qui porte, sur la ligne médiane, 


rées de poils. 

Sternites non denticulés, sauf le premier . a 
PAPIERS - xs Fig. 18. — Panulirus interruptus. a. Cercle antennu- 
qui présente deuxpetites dents de chaque côté,  jaire. 6. Epistome. c. Epimère. d. Ornement cé- 
à une petite distance de la ligne médiane. DRE: Names CR. SON oS; 
’ i f. Ornements des orifices génitaux externes du mâle. 

Epimères, 2,3, 4 et 5 avec une forte épine 
principale, très pointue, et un bord postérieur arrondi portant une série de petites 
épines mousses. | 

La troisième paire de pattes est la plus longue. La cinquième est constituée norma- 
lement chez le c'et la Q. 

La couleur générale est jaune verdâtre, plus jaune sur le céphalothorax et l'abdomen, 
plus verte sur les pattes. 

Deux taches jaunes, latérales, sur chaque tergite abdominal; bandes jaunes sur la 
partie dorsale des pattes. 

Remarques. — Le céphalothorax ne porte de véritables épines que dans la région 
postérieure : ce sont des sortes de plaques un peu saillantes, jaunâtres, plus ou moins régu- 
lièrement arrondies, portant une petite épine mousse à la partie antérieure et entourées 
de poils courts et serrés (fig. 18, d). 

Le & porte, du côté interne des orifices sexuels, une sorte de peigne, allongé 
transversalement et denticulé sur son bord libre (fig. 18, f). 

Distribution géographique. — Cette espèce semble localisée depuis le Nord des côtes de 
Californie et méme du Sud des Etats-Unis jusqu'au Sud des côtes du Mexique; Californie 
(Randall et Lockington); golfe de Tehuantepec (Streets); côtes des Etats-Unis (Coll. du 
Muséum). 

Exploitation industrielle. —Comme elle peut atteindre une assez belle taille, semble- 
t-il, son exploitation industrielle est certainement possible, suivant son degré d’abondance 
mais nous manquons totalement de documentation précise a cet égard. 

M. Diguet, à qui nous avons montré cette espèce, se rappelle avoir vu, dans le golfe 
de Californie, une Langouste, bien différente du Pan. inflatus qui est la plus répandue 
dans cette région et qu’il croit, en effet, être le Pan. interruptus que nous lui avons mis 
sous les yeux. Nous espérons être fixé sous peu, à ce sujet. 

9. P. fasciatus, Fabricius, (Milne Edwards, 1837) (n° 40-a) (PI. V, fig. 3). 

Synonymie : Cancer polyphagus, Herbst (n° 25); Palinurus fasciatus et P. polyphagus, 

T. Ul. — Fasc. 4. 6 


42 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Bosc (n° 8), Olivier (n° 43) et de Man (n° 37-e) ; Senex ornatus (pro parte) Ortmann (ne 45). 
Caractères. — Ceux du genre et, en outre : 
Longueur des fouets des antennes externes dépassant deux fois et demie la longueur 


totale du corps. 
Fouets internes des antennes internes dépassant deux fois la longueur des fouets 


externes. 


Exopodites de lapremière paire de maxillipèdes, normaux avec fouet aplati, large, de 


10 articles environ et atteignant le sommet du méropodite du 
troisième maxillipède. 

Exopodites de la deuxième paire de maxillipèdes, normaux 
avec fouet aplati, mais non dilaté, formé d’environ 10 articles et 
dépassant un peu le milieu du méropodite du troisième maxillipède. 

(Ce seul caractère distingue, très nettement, P. fasciatus de 
P. ornatus, avec lequelil a été parfois confondu; dans cette dernière 
espèce, en effet, la deuxième paire de maxillipèdes ne porte pas de 
fouet). 


Fig. 19. — Panulirus fascia- : sors . ee 
tio: aol wuteea alate: Exopodites de la troisième paire de maxillipèdes, absents. 
b. Epistome. c. Extrémité Rostre large avec seulement deux épines dans le cercle an- 


de la 5° patte chez le ©. 


Bioline: tennulaire, placées tout a fait a la partie antérieure. Jamais d’épines 


supplémentaires (fig. 19, a). 

Cornes frontales courtes et peu recourbées en avant, avec une petite épine immédia- 
tement en arrière de chacune d’elles. Une seule paire d’épines latérales. 

Sternum avec un simple renflement médian en avant; pas de saillies bilatérales en 
arrière, Epistome avec trois dents dont la médiane est, de beaucoup, la plus développée 
(fig. 19,b). Pas de sillon épistomial, mais généralement une ligne bleue médiane en 
marque la place. Chez les jeunes, le sillon épistomial est apparent à la partie postérieure, 
avec une petite surface ponctuée. 

Tergites abdominaux sans sillons transversaux, mais portant une grande quantité de 
petites cavités pilifères. 

Sternites abdominaux sans denticulations. 

Epiméres avec une pointe principale saillante et bord postérieur arrondi portant par- 
fois une ou deux épines mousses (fig. 19, à). 


La troisième paire de pattes est la plus longue. La première paire est relativement 


grêle et la cinquième présente les caractères ordinaires chez le Set la Q. 

La couleur générale est d’un vert sale. Chaque tergite abdominal porte une bande 
transversale jaune qui se poursuit jusqu'à l'extrémité des épimères. 

Lé céphalothorax, très peu épineux, présente une zone jaune sur les parties latéro- 
ventrales ainsi que des taches jaunes à la base de certaines épines et des cornes frontales. 

La partie dorsale des pattes porte des lignes et des ponctuations jaunes. Toute la 
partie inférieure du corps est, également, de couleur jaunatre. 

Remarques. — Cette espèce qui est, cependant, d’une netteté absolue, a été souvent 
méconnue ou confondue avec d’autres. 


—— 


7 


‘ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 43 


Dans son travail de 1897, Ortmann propose méme de confondre : ornatus, fasciatus, 
versicolor, toeniatus, sulcatus et decoratus, sous le nom de polyphagus, Herbst. 

Nous verrons, en parlant de P. ornatus, ce qu’il faut penser des autres formes, mais 
“ d’ores et déjà, nous pouvons affirmer que, après un examen très attentif des types de la 
collection du Muséum, il est absolument impossible de confondre ces deux espèces : 
ornatus et fasciatus. 

Distribution géographique. — Les types du Muséum portent comme indication d’ori- 
gines : océan Indien et île Pinang ou Poulo-Pinang à l'entrée du détroit de Malacca. C’est 
donc, indubitablement, une espèce de l'océan Indien, mais il est actuellement très difficile, 
à cause des confusions auxquelles elle a donné lieu, d'indiquer les localités précises où 
elle se rencontre, sauf pour l’île Poulo-Pinang. Pour les autres, il serait indispensable 
d’avoir les échantillons sous les yeux. Mais nous espérons qu’avec la description qui pré- 
cède et l’excellente photographie qui suit, cette belle espèce pourra, désormais, être 
facilement reconnue par les différents auteurs. 

Exploitation industrielle. — Le plus bel exemplaire que nous ayons eu sous les yeux 
mesuraient o m. 27 pour la longueur du corps proprement dit. Son poids, à l’état vivant, 
pouvait être de 6 à 700 grammes, ce qui est évidemment peu de chose. Mais il est pro- 
bable que cette espèce peut atteindre un poids plus considérable sans être probable- 
ment jamais bien élevé. 

En tout cas, nous sommes réduit à de simples hypothèses et nous ignorons presque 
tout desonexploitation, si exploitation il y a. Cependant, d’après le Professeur Annandale, 
superintendant du Musée de Calcutta, c’est la seule espèce de Langoustes qui soit 
apportée sur le marché de Calcutta, avec Scylla serrata et quelques Penceus et Palæmon. 

10. P. inflatus, E. L. Bouvier, 1895 (n°9-a). (PI. IV, fig. 1). 

_Synonymie : Palinurus Martensii, G. Nobili (n° 42-d). 

Caractères. — Cette espèce a été décrite très brièvement par E. Bouvier (1); aussi 
pensons-nous qu'il est indispensable d'en donner, ici, une description complète. 

Les caractères sont ceux du genre et, en outre : 

Exopodites de la première paire de maxillipèdes, norm aux avec fouet très dilaté et 
aplati, de 10 articles environ, atteignant le sommet du méropodi te du troisième maxilli- 
pède. 

Exopodites de la deuxième paire de maxil lipèdes, normaux avec fouet aplati, mais non 
dilaté, à 10 articles environ, atteignant le milieu du méro podite du troisième maxillipède. 

Exopodites de la troisième paire de maxillipèdes, absents. 

Rostre large avec deux paires d’épines assez fortes et à peu près égales, les antérieures 
étant les plus larges à la base. Entre ces quatre épines, on trouve, généralement, quatre 
autres épines toutes petites et irrégulièrement disposées (fig. 20, a). 

Cornes frontales assez longues et recourbées en avant, rapp rochées et suivies, chacune, 
d’une épine assez forte, immédiatement, en arrière. 

Deux paires d’épines latérales fortes et très pointues. 


(1) E. L. Bouvier. Bull. Mus. Hist. Nat., Paris, ne 1 1895. 


44 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


Sternum avec, à la partie postérieure, une surface trapézoïde bosselée et denticulée ; 


en avant, une saillie pointue médiane; à la partie moyenne, deux ou trois cavités médianes. 


Epistome avec trois dents épistomiales, dont la médiane est un peu plus longue que 


les autres (fig. 20, b). Pas de sillon épistomial, 

Tergites dominant sans sillons transversaux, mais portant un assez grand nombre 
de cavités pilifères. 

Epimères avec une dent principale et un lobe postérieur arrondi avec deux à trois 
dents très nettes (fig. 20, c). 

La troisième paire de pattes est la plus 
longue. 

La cinquième paire présente les carac- 
tères ordinaires chez le & et la Q. 

La couleur générale est d’un bleu-indigo 
Fig. 20. — Panulirus inflatus. a. Cercle antennulaire. sale, Les tergites 1, 2, 3, sont de couleur bleu 

b.Epistome. c. Epimère.d.Exopodite du 3° maxillipède, 3 F 
chez les formes trés jeunes. de Prusse assez foncé avec une fine ligne 
transversale jaune prés du bord postérieur. 
Les tergites 4, 5 et 6, avec le telson, sont d’un bleu-indigo assez clair, sans ligne trans- 
versale, mais avec des ponctuations jaunatres assez fortes et régulièrement placées. 

Les pattes, d’un bleu de Prusse assez foncé, portent, au moins, trois séries longitudi- 
nales et paralléles de lignes jaunes étroites. 

Le céphalothorax, tres épineux, porte une bande jaune sur les parties latéro- 
ventrales. Enfin les épines des pédoncules des antennes externes portent aussi des bandes 
jaunes. 

Toute la partie inférieure du corps est bleuatre avec de larges taches jaunes. 


Distribution géographique, — Basse-Californie (Bouvier); îles Sandwich (coll. du 
Muséum); côte pacifique du Darien (Nobili). 
Exploitation industrielle. — Les exemplaires étudiés par M. Bouvier ont été rap- 


portés au Muséum par M. Diguet qui a bien voulu nous fournir quelques renseignements 
sur l'exploitation de cette espèce. 

Ces Langoustes, dit-il, qui sont très abondantes dans le golfe de Californie, ne donnent 
pas lieu à une pêche en règle ; seuls, les pêcheurs de perles et les rares habitants des 
côtes vont, detemps en temps, en capturer pour leur propre consommation. Cependant, à 


Guaymas (Sonora), on pêche la Langouste pour l’expédier sur les marchés des villes situées - 


le long du chemin de fer allant aux Etats-Unis. Mais cette exploitation ne donne pas lieu 
à une entreprise bien importante. Pour la pêche de ces Crustacés, qui vivent dans les 
fonds rocheux, on se sert d’un harpon très grêle et sans crochet (fisga) consistant en 
une simple tige de fer, longue d’environ un mètre et attachée à une corde. | 
Remarque. — Dans une forme très jeune, appartenant, sans aucun doute possible, à 
cette espèce et provenant également de la collection Diguet des côtes de Californie, j'ai 
trouvé un tout petit exopodite sur le troisième maxillipède. (fig. 20, d); cet appendice 
doit entrer en régression très rapidement puisque je ne l’ai pas retrouvé chez un exem- 
plaire un peu plus grand; il est remplacé, chez l'adulte, par une simple touffe de poils. 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 45 


C’est le second exemple, avec celui signalé chez P. regius, de régression de l’exopodite 
du troisième maxillipède, que nous avons rencontré au cours de cette étude. 

11. P. /œvicauda, Latreille (Milne Edwards, 1837) (n° 41-a) (fig. 21). 

Synonymie. — Palinurus leevicauda, Latr.; Panulirus inermis (jeune)? Pocock (n° 49); 
Panulirus ornatus (pro parte) Pocock et divers auteurs; Pal. levicauda, Lat. (Moreira, 
n° 41). 

Caraciéres. — Cette espéce, signalée par Latreille et Desmaret comme provenant des 
cétes du Brésil et dont ils ont donné une description des plus sommaires, a été méconnue, 
jusqu'ici, par tous les auteurs qui se sont occupés de ce groupe de Crustacés. Elle a été, 
en tout cas, confondue avec P. ornatus. 

 C. Moreira la signale, avec raison, sur les côtes du Brésil, à Pernambuco et Rio de 
Janeiro et en donne une description que nous allons simplement résumer ici, pour 
montrer qu'elle se distingue nettement de P. ornatus. 

Les caractères sont ceux du genre et, en outre : 

Exopodites de la première paire de maxillipèdes, normaux avec fouet. 

Exopodites de la deuxième paire de maxillipèdes pourvus d’un exopodite bien 
développé, avec fouet multiarticulé. (C'est là un caractère qui sépare nettement cette 
espèce de P. ornatus dont l’exopodite de la deuxième paire de maxillipèdes est dépourvu 
de fouet.) 

Exopodite de la troisième paire de maxillipèdes presque nul quand il existe et, 
en tout cas, complètement dépourvu de fouet. 

Rostre bien développé avec l’anneau antennulaire portant quatre épines, entre 
lesquelles se trouvent, souvent, une ou deux épines très petites et disposées sans ordre. | 

Cornes frontales assez longues et recourbées en avant, plus petites que chez 
P. argus, mais plus grandes que chez P. gutlatus, avec, immédiatement en arrière, une 
épine beaucoup plus petite. 

Deux paires d’épines latérales à peu près de même taille que ces dernières. 

Épistome avec trois dents. 

Tergites abdominaux dépourvus de “ions transversaux. 

Epimères avec une épine principale et un bord postérieur arrondi, bordé de petites 
épines. 

La troisième paire de pattes est la plus longue. 

La cinquième paire est constituée comme à l'ordinaire. 

La couleur indiquée par Moreira, d’après des échantillons secs, est la suivante : le 
céphalothorax, partie antérieure et centrale par rapportau sillon cervical, est vert sombre 
avec de petites taches jaune clair; les cornes frontales sont rougeatres avec des ponctuations 
jaunes ; la partie postérieure par rapport au sillon cervical est rougeâtre au centre avec 
une bande jaune sur les parties latéro-ventrales ; les épines et les tubercules conservent 
Ja couleur rougeatre. 

Les trois premiers tergites abdominaux sont verdâtres à la partie antérieure, d’un rouge 
sale à la partie postérieure et présentent une ligne transversale régulière de points jaunes, 
parallèles au bord postérieur et très rapprochés de lui. Les épimères portent aussi des 


46 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


ponctuations jaunes. Les autres tergites abdominaux sont d’une couleur générale vert 
sombre avec une bande postérieure rougeatre foncé portant aussi de petites taches jaunes. 

Les pattes sont striées, longitudinalement, de rouge, et la partie médiane porte des: 
ponctuations jaunes. Le telson est verdatre, ponctué de jaune. 

Distribution géographique. — Côtes du Brésil où, d’après Moreira, il semble même 
plus commun que P. guttatus et P. argus; 
Guyane française (Muséum Paris) ; île 
Fernando Noronha ? (Pocock). 

Remarques. — L’unique exemplaire 
miniature, décrit par Pocock sous le nom 
de P. inermis et provenant de l’île 
Fernando Noronha, me paraît devoir se 
rapporter, sans aucun doute, à une forme 
intermédiaire entre la larve et l’adulte de 
P. loevicauda. 

. De même, les échantillons « passable- 
ment communs », de même provenance 
et rapportés à P. ornalus, doivent, en 
réalité, être rapportés, non à cette espèce 
qui est une forme nettement indo- 
pacifique, mais aussi à P. levicauda, 
abondant dans cette région et qui semble 
inconnu de Pocock. 

Cette espèce est extrêmement voisine 
par tous ses caractères anatomiques de P. 
inflatus Bouv., mais elle s’en distingue 
par la couleur et les ornements colorés 
de l'abdomen, comme on pourra le voir 
en comparant les deux descriptions. Je 
me suis demandé un moment s'il n'y 
avait pas lieu de les réunir, mais je ne crois 
pas, pour le moment, que cela soit possible. 


l'une est localisée sur la côte Pacifique 
(inflatus), l'autre sur la côte Atlantique 
. (lævicauda). 

Elles ne sont séparées, en réalité, que par l’isthme qui réunit les deux Amériques. 

Il est, par conséquent, fort possible que ces deux espèces, si voisines, dérivent d’une 
souche commune et qu’elles aient été séparées au moment de la réunion des deux con- 
tinents américains. Elles ont évolué, depuis lors, dans des conditions biologiques un peu 
différentes et elles ont pu prendre les caractères distinctifs, bien peu importants, 
du reste, qui les séparent actuellement. 


Fig. 21. — Panulirus levicauda, d’après Moreira. a. 3° maxilli- 
pède. b. 2° maxillipède. 


Ces deux espèces sont américaines : : 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 47 


Exploitation industrielle. — D'après Moreira, destrois espèces que l’on rencontre sur 
les côtes du Brésil : guftatus, argus et lœvicauda, c’est cette dernière qui paraît la pius 
commune et qui est apportéeen plus grande abondance sur les marchés. 

Elle ne donne pas lieu, du reste, à une exploitation industrielle bien considérable. 

12. P. ornatus, Fabricius(Milne Edwards (1837) (n° 40-a) (PI. IV, fig. 2 et 3). 

Synonymie : Palinurus sulcatus, Lmk.; Pal. homarus, Herbst (n° 25) ; Pal. versicolor, 
Latr.; Miers (n° 39-a); Pal. iœniatus, Lmk. (n° 32); Pal. ornatus, var. decoratus, Heller, 
(n°23-c) Senex ornatus, pro parte, Ortmann (n° 45); Pal. fasciatus, Fab. Offmann (n° 44). 

Caractéres. — Ceux du genre et, en outre : 

__Exopodites de la première paire de maxillipedes, normalement développés avec 
fouet de 10 articles environ, aplati, élargi et atteignant le sommet du méropodite du 
troisième maxillipède. 

Exopodites de la deuxième paire de maxillipèdes, atrophiés, sans fouet, atteignant à 
peine la base du méropodite du troisième maxillipède. 

Exopodites de la troisième paire de maxillipèdes, nu/s ou parfois réduits à un tout 
petit bouton. 

Rostrelarge avec l’anneau antennulaire portant quatre épines principales dont les deux 
postérieures sont les plus courtes, avec deux ou quatre épines secondaires, placées 
irrégulièrement entre les premières (fig. 22, a). 

Cornes frontales longues, rapprochées et fortement recourbées en avant. 

Pas d’épines sternales, mais un simple petit renflement, à la partie antérieure du 
sternum. 

Epistome avec trois dents dont la médiane est la plus longue. Sillon épistomial à 
peine indiqué, au centre d’une surface triangulaire ponctuée de petites cavités (fig. 22, b). 

Tergites abdominaux sans sillons transversaux, mais couverts de ponctuations 
transversales. 

Sternites abdominaux non denticulés. 

Epimères de 2 à 6 (fig. 22, c) avec une pointe principale saillante et un bord Fos 
rieur arrondi et portant de 3 à 5 denticulations. 

La troisième paire de pattes est, de beaucoup, la plus développée. 

Certains exemplaires de l’île Maurice présentent la troisième paire de pattes extré- 
mement grande. Leur longueur atteint souvent le. double de celles de la quatrième 
paire. 

La patte de Langouste géante, provenant de l’île Maurice et signalée par Milne 
Edwards (Hist. Naturelle des Crustacés, P. 301-302) appartenait certainement a un 
P.ornatus de trés grande taille. 

La cinquième paire de pattes porte, chez la 9, une pince disposée comme d’ordi- 
naire, mais relativement faible, dans certains cas. 

Chez le &, elle est terminée par une simple griffe avec 2 ou 3 paires de pointes chiti- 
neuses entourées de poils courts et raides. 

La couleur générale est verdatre avec des cubes ou bandes bleuatres et d’autres 
jaunes, sur le céphalothorax, les antennes, les pattes et l'abdomen. 


48 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


La coloration est, du reste, assez variable suivant l’origine déces crustacés. 

La forme type présente, sur les tergites abdominaux, deux taches jaunes parallèles 
de chaque cé1é occupant toute la partie antérieure des anneaux et dirigées obliquement 
d'avant en arrière et de dedans en dehors. Les deux derniers anneaux ne portent qu’une 
seule tache de chaque côté. Les pattes sont verdâtres, mais marbrées de taches jaunes 
irrégulières. 

La forme t@niatus de Lamarck, qui n’est qu'une variété de ornatus, présente une 
couleur jaunâtre avec des taches et bandes bleu de Prusse et jaune. 

Les tergites abdominaux portent chacun, vers leur partie postérieure, une bande 
transversale bleu de Prusse, traversée, en son milieu, par une 
raie jaune qui se poursuit jusqu’à la pointe latérale des épimères. 
Les pattes sont vert bleu avec des lignes longitudinales jaunes. 
Cette forme correspond nettement à la variété decoratus de 
Heller, mais le nom de taniatus ayant la priorité, nous le lui 


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7 conserverons. On trouve cette variété dans les échantillons 
Wy provenant de l’île Maurice, de Mascate et de Java. ; 
d af Deux exemplaires de Tanga (Afrique occidentale allemande) 
portent, sur les tergites abdominaux, l'un une raie jaune trans- 
Fig. 22. — Panulirus orna-  Versale, l'autre de simples taches, ce qui montre que les deux 


tus. a. Cercle antennulaire. variétés peuvent se trouver réunis au même endroit. 
4 eae o gale Un exemplaired’Obock (Afrique orientale francaise) montre 
un céphalothorax tres peu épineux, comme fasciatus, et les 
exopodites de la deuxiéme paire de maxillipédes portent un fouet extrémement rudi- 
mentaire, a peine visible. ©’est une forme de passage entre fasciatus et ornatus, mais 

lexemplaire appartient nettement à cette dernière espèce. 

Remarques.— Chez un très jeune P. ornatus d'Amboine; j'ai observé, sur le deuxième 
tergite abdominal, un sillon pilifère transversal, légèrement interrompu sur la ligne 


médiane ; le troisième ne porte qu’un tout petit sillon localisé aux parties latérales, et les 


autres, seulement une toute petite cavité pilifère latérale. Ces sillons entrent en régression 
et disparaissent chez l’adulte. 

Un exemplaire de Mascate présente une monstruosité à l’antenne interne gauche. 
Cette antenne est bifurquée. La branche gauche est normale et la branche droite double, 
chacune portant deux fouets dont l’interne est atrophiéet l’externe normal. 

Les exemplaires de P.ornatus signalés par Herklotz sur la côte occidentale d'Afrique 
doivent être rapportés, comme nous l’avons montré plus haut, à P. regius. Ceux signalés 
par Pocock sur la côte orientale d'Amérique appartiennent certainement à P. leevicauda. 

Enfin, dans sa faune carcinologique du Pérou, Miss Rathbun indique P. ornatus et 
P. fasciatus comme se rencontrant du Sud de la Californie au Pérou. Tout d'abord, 
je fais remarquer que ces deux formes sont parfaitement distinctes. Ensuite, bien que 
la chose puisse être possible, il me paraît, néanmoins, très difficile d'admettre que 
P. ornatus s'avance aussi loin vers la côte américaine. Comme Rathbun confond éga- 
lement le P. inflatus de Bouvier avec l’ornatus, très voisin, il est vrai, je suis amené à 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 49 


croire que la forme à laquelle cet auteur fait allusion est bien P. inflatus Bouvier et 
non P. ornatus Fabric. 

Distribution géographique. — Cette espéce est, il est vrai, l’une des plus répandues et 
et des plus cosmopolites, mais certains auteurs ont voulu la retrouver a peu près partout. 
En réalité, c'est une espèce exclusivement indo-pacifique; elle appartient même beaucoup 
plus à l’océan Indien qu’à l'océan Pacifique. 

Les principales localités où elle a été, certainement, recueillie sont les suivantes : 
Zanzibar (M: Edwards); Mozambique (Hilgendorf) ; Tanga (Muséum Paris); Obock 
(Muséum Paris); récifs de Saint-Augustin à Madagascar (Muséum Paris); Mayotte, Maurice 
(M.-Edw., Hoffmann, Muséum Paris); Réunion (Hoffmann, Muséum Paris) ; Singapour 
(Walker) ; Java (Heller) ; Bornéo (Miers); Cochinchine (Moluques, Amboine, Miers, 
Hilgendorf, de Man, Muséum Paris); Nouvelle-Guinée (Miers); côtes Nord de l’Aus- 
tralie, etc. (Miers, Haswell); îles Samoa (Haswell). 

Exploitation industrielle. — Cette forme est l’une de celles qui atteignent la plus 
grande taille. J’ai vu certains exemplaires de, Maurice qui mesurent jusqu’à o m. 60 de 
longueur du corps proprement dit(sans les antennes) et qui doivent peser, à l’état frais, de 
4 à 5 kilogrammes. C’est donc une espèce qui, par sa taille et sa grande a peut 
être avantageusement exploitée. 

Cette forme semble très abondante sur la côte occidentale et sud-occidentale des 
Madagascar, dans la baie de Saint-Augustin, à Nossi-Bé, à la pointe Barrow; les indigène 
la capturent, à marée basse, simplement à la main, sans le secours d’engins d’aucune 
sorte, dans les creux des récifs. Ils utilisent simplement leurs sagaies pour les extraire de 
ces cavités. Les Langoustes sont vendues aux Européens entre o fr. 50 et 1 franc, mais 
elle ne sont jamais consommées par les indigènes. 

Nous soupconnons que cette espèce, ainsi que Pan. dasypus, doit se trouver, en 
grandes quantités, dans le golfe du Tonkin, plus spécialement autour de l’île de Bien Son, 
sur des fonds de roche; mais nous ne pouvons encore affirmer que ce sont bien la 
les deux espèces qu’on y rencontre et qui. donnent lieu à une pêche importante. 


T. Ill. — Fasc. 4. 7 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 51 


Conclusions. — Ce travail a pour but de reprendre d’une façon complète, au point 
de vue systématique, l'étude du groupe des Palinuridæ, en cherchant à y mettre un peu 
d'ordre et de clarté. Je ne sais si j'aurai réussi. 

Mais, j'aurais voulu, en même temps, montrer à quelle exploitation industrielle 
ces crustacés, si recherchés pour nos tables, pourraient donner lieu, plus spécialement 
dans nos colonies françaises. Or, dans la presque totalité des cas, nous nous sommes trouvé 
absolument dépourvu de tout renseignement scientifique sérieux. Les rares ouvrages ou 
mémoires qui parlent, accidentellement, des Langoustes de nos colonies, ne font qu’in- 
diquer des noms indigènes qui ne signifient rien et, souvent même, certains confondent 
Homardsavec Langoustes! On peut donc dire,sansexagération, que nous ne savons rien sur 
cette question, sauf, toutefois, en ce quiconcerne l’Afrique occidentale française en particu- 
lier et la Côte occidentale d’Afrique en général, où nous avons pu recueillir, nous-même, 
les éléments qui nous ont permis d'écrire, avec certitude, la partie de ce travail qui con- 
cerne notre possession Ouest-africaine. 

Cela montre, tout d’abord, la nécessité de ces travaux à longue portée, et ensuite 
quels résultats économiques découlent, parfois, de recherches qui peuvent sembler, tout 
d'abord, purement spéculatives mais qui finissent par aboutir, à un moment donné, à des 

résultats éminemment pratiques aux points de vue industriel et commercial. 

Nous croyons que l’histoire du Panulirus regius est, à ce point de vue, l’un des 
meilleurs exemples que l’on puisse invoquer, et nous sommes heureux de constater que 
nos efforts, sur ce point tout au moins, ont été couronnés de succès. 

Notre immense domaine colonial recèle, dans les eaux qui le baignent, des fortunes 
inestimables, mais dont nous ne tirons à peu près aucun parti pratique, parce que nous 
les ignorons presque complètement. En ce qui concerne les Langoustes, en particulier, on 
peut dire que toutes nos colonies en possèdent au moins une espèce, souvent deux ou 
trois, parfois très abondantes, et dont nous ne tirons cependant aucun parti économique, 
alors que les Anglais, les Japonais, etc., grâce à la fabrication des conserves de crustacés, 
ont développé chez eux des industries florissantes. 

Nous venons de commencer, enfin! l'exploitation de nos richesses maritimes par 
l'Afrique occidentale française ; espérons que nous n’en resterons pas là ! 


INDEX BIBLIOGRAPHIQUE DES NOMS D'AUTEURS 


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. POWEL. — Bombay, Journ. Nat. Hist. Soc., t. XVII, p. 360 (Palinurus, anat. et dévelop.). 

. QUOY et GAIMARD. — Voyage de l’Uranie, Part. Zoologique, p. 537, pl. 81. 

. RANDALL. — Journ. Acad. Nat. Sc., Philadelphia, vol. VIII, 1, 1830. 

. RATHBUN (M: M.). — a. Crustacea of West Afrika (Smith. Inst. U. S. Nat. Mus. :, vol. XXII, 


p. 271-316, 1900; b. Bull. Un. St. Conn. Fish., t. XXIII, 1903 (Pan. Japonicus); c. Crustacea of 
Peru, Proceed. Un. S. Nat. Mus., vol. XXXVIII, p. 331-620, 1910. 


. RISSO. — a. Crustacés de Nice; 6. Histoire naturelle de l’Europe méridionale. 

+ ROCHEBRUNE. — Bull. Soc. Philom., Paris, vol. VII, 1883, p. 173 (Palinustus en à 

. SMITH. — Trans. Connect. Acad., vol. IE, 1871. 

. STIMPSON. — Proceed. Acad. Nat. Sc., Philadelphia, 1860. É 

- STEBBING (T.-R.-R). — South african Crustacea, Annals of the South african Museum, vol. VI, 


Part. I, 1908. 


. STOSSICH. — Prosp. Fauna Adriat, III, 1881. 

. STREETS. — Proc. Acad. Nat. Sc., Philadelphia, 1871. 

. THALWITZ. — Abh. Mus. Dresden., p. 30, 1891 (Pal. dasypus). 
. WHITE. —-List. of Crustacea in Brit. Mus., 1847. 


EXPLICATION DES PLANCHES 


PLANCHE 1 


Fic. 1. — Palinurellus Gundlachi, var: Wieneckii, de Man ; vu par la face dorsale, G=1. 
Fic. 2.— Le même ; vu par la face ventrale, G—1. 


3" 


Fic. 4. — Palinurus vulgaris, Latr., var. : Mauritanicus, A. Gruy., vu par la face dorsale, G=-. 


Fic. 3. — Palinurus longimanus, M. Edw. ; face dorsale, G2 


Fic. 5. — Linuparus trigonus, de Haan, vu par la face dorsale, G= : 


3° 
: Fic. 6. = Panulirus Burgeri, de Haan, vu par la face dorsale, G= = 


| PLANCHE II 
Fic. 1. — Jasus Lalandei, M. Edw., vu par la face dorsale, G==. : 


_ Fic. 2. — Panulirus truncatus, M. Edw., vu par la face dorsale, G=1. 
_ Fic. 3. — Le même, vu par la face ventrale, G = 1. 


À Fic. 4. — Panulirus penicillatus, Oliv., vu par la face dorsale, G = ; 


Fic. 5. — Panulirus dasypus, Latr., vu par la face dorsale, G= ; 


Fic. 6. — Panulirus regius, Brit. Cap. « Natant stage », vu par la face dorsale, G3: 
_ Fic. 7. — Le même, vu par la face ventrale, G = 3. 


PLANCHE III 


Fis. 1. — Jasus Verreauxi, M. Edw., vu par la face dorsale, G= —. : 
_ Fi. 2. — Panulirus penicillatus, Oliv., vue de la région du cercle antennulaire, CT 


Fig. 3. — Panulirus guttatus, Latr., vu par la face dorsale, G= = 


Fic. 4. — Panulirus regius, Brito Cap., vu par la face dorsale, G — 3 


Fic. 5. — Le même, forme très jeune, montre, à cet âge, la présence de sillons interrompus sur les tergites 
abdominaux, G — 2. 


56 


Pa 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


PLANCHE IV 
Fic. 1. — Palinurusvulgaris, Latr., vu par la face dorsale, G = a : 


Fic. 2. — Panulirus argus, Latr., vu par la face dorsale, G = ; 


Fic. 3. — Panulirus interruptus, Rand, vu par la face dorsale, G— a 


PLANCHE V 
Fic. 1. — Panulirus japonicus, v. Siebold, variété indo-japonaise, vue par la face dorsale, G=-. 


Fic. 2. — Panulirus japonicus, v. Sieb., variété indo-africaine, vue par la face dorsale, G =-. 


Fic. 3. — Panulirus fasciatus, Fabr., vue par la face dorsale, G— 3 


PLANCHE VI : 


Fic. 1. — Panulirus inflatus, E. L. Bouv. , vu par la face dorsale, G= = 


2,5 
Fic. 2. — Panulirus ornatus, Fabr, forme normale, vue par la face dorsale, G — 


x 


I 
4 
Fic. 3. — Panulirus ornatus, Fabr., var. : teniatus, Lmk., vue par la face dorsale, G— See 


14595-11, — Coreen. Imprimerie Créré. 


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L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


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Note sur la faune et la flore des quais et bateaux 
de Boulogne-sur-Mer _ 


Par Casimir CEPEDE, 


Préparateur à la Station zoologique maritime de Wimereux. 


& L'examen des objets recueillis vivants, dans leur pleine 
activité éthologique, leur préparation, leur détermination par 
comparaison avec les formes déjà classées en collections, est 
la plus saine des distractions en même temps qu’elle donne 
à l'esprit des qualités d’ordre, de jugement, d’esthétique 
visuelle, susceptibles d'applications nombreuses dans les 
domaines les plus divers de l’art et de la science. » 


(Alfred Giard : L'éducation du morphologiste, p. 10). 


Dans un précédent travail (1), j'indiquais que « l'absence des documents de Grarp 
m'obligeait à retarder la publication de nos communes recherches sur le plankton marin 
du Pas-de-Calais (1905-1908), comme elle ne me permettait pas encore de publier les 
observations pourtant si intéressantes que nous avons faites ensemble sur certains con- 
sortia biologiques comme la faune et la flore des colonies de Ciona des vieux bateaux et 
des quais, du port de Boulogne... ». Bien que ces documents ne me soient pas parvenus, 


je crois utile de rassembler, dès à présent, les faits que je possède sur ce derniersujet. Chaque 


fois qu'une détermination aura été faite par Giarp qui me l'aura confiée, je me ferai un 
vrai devoir de reconnaissance de l’indiquer avec précision. La pauvreté de la documen- 
tation de notre bibliothèque m’oblige à laisser momentanément dans l'ombre certains 
faits d'observation que l'insuffisance des ressources bibliographiques ne m'a pas permis 
d'utiliser en vue d’une détermination spécifique précise. Je les réserve pour un mémoire 
ultérieur où viendront s’ajouter les faits que nous apportera l'observation minutieuse de 
nombreux matériaux fixés. : 


* 


* + 


En septembre 1906, je commençai les recherches sur ce consortium biologique avec 


(1) 1910. Casrmir Cépzpe, Le problème de la nourriture de la Sardine, in Bull. de la Soc.acad. de Boulogne-sur-Mer, 
t. IX, p. 4 du tiré à part, p. 1-27 (note de bas\de page). 


T. IL. — Fasc. 5. I 


2 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


la haute collaboration de mon maitre Giarp quiavait bien voulu m'y convier. Le 12 septem- 
bre, nousrencontrions dans l'intestin des Ciona du bassin à flot, quelques exemplaires de la 
belle Diatomée Coscinosira polychorda Gran que nous ne connaissions pas encore du 
Boulonnais. Vue de face, elle rappelle beaucoup un Coscinodiscus; vue de profil, elle 
montre quatre ou cinq cordes qui réunissent les frustules entre eux et la définissent 
comme appartenant au genre Coscinosira (fig. 7, pl. I). 

Cette Diatomée, étudiée par Gran en 1897, a été d’abord décrite par cet auteur sous le 
nom de Coscinodiscus polychordus Gran; mais, en 1900, ce méme observateur créa pour 
elle le genre Coscinosira adopté par JORGENSEN (1905) et dans lequel rentrent les deux 
Coscinodiscées arctiques: Coscinosira polychorda Gran et Coscinosira Oestrupii OSTENFEL». 
Tandis que C. polychorda est considérée, à juste titre, ainsi que le confirment les pré- 
sentes observations, comme une espèce néritique des côtes de l’Europe septentrionale, 
Cosc. Oestrupii n’est pas rare, d’après OsTENFELD (1900), dans l’océan Atlantique septen- 
trional. CLEvE (1900) a noté C. polychorda. par des températures oscillant entre — o°9 et 
7°7 avec une moyenne de 5°1 provenant de 6 observations, et par des salinités oscillant 
entre 34,40 et 35,56 avec une moyenne de 34.85 provenant aussi de 6 observations. II 
l’a étudiée dans des récoltes dés Far-oër et du Sud de l'Islande. Nous pensons que la 
localité de Boulogne, que nous signalons maintenant, est, jusqu'ici, la localité la plus 
méridionale connue de cette Diatomée. 

Avec elle, on note Dictyocha fibula Eur., qui doit être le même Silicoflagellé qu’Eu- 
gène Canu (1) a signalé dans le Pas-de-Calais sous le nom de Dictyocha speculum Enren- 
BERG et que nous avons rencontré assez souvent dans nos planktons néritiques. L'étude 
anatomique de ces Silicoflagellates mérite d'être reprise avec l’aide de la technique micro- 
graphique moderne. La méthode des frottis, inaugurée par M. SiepLecxt (1898), donnerait 
sûrement ici d'excellents résultats. Ce Dictyoché me paraît plutôt être D. fibula que le 
Dictyocha (= Distephanus) speculum Eur., que j'ai d'ailleurs observé aussi dans nos 


planktons côtiers. I] est intéressant de noter que les spécimens étudiés parmi les Ciona 


étaient bien vivants, ce qui confirme leur habitat néritique. La géonémie de cette espèce 
demande à être établie d'une manière précise et sera rendue très délicate par la confusion 
regrettable qui a été faite très souvent entre Dictyocha fibula Eur. et Distephanus specu- 
lum Eur. 

Parmi les Ascidies, nous rencontrions,.Giarp et moi, avec deux prostomes moins 
communs que nous n’avons pas déterminés, un Turbellarié que Giarp m'avait tout 
d'abord déterminé avec doute comme appartenant peut-être à Enterostomum fingalianum 
CiaparÈDe. Mais, plus tard, Giarp précisait, avec le concours de sa bibliographie, cette 
détermination. Il m’avisait de Paris qu'il ne s’agissait pas d’Enterostomum fingalianum 
vu par CLAPARÈDE en 1862, et d’ailleurs trouvé pour la première fois dans les eaux 
boulonnaises par P. Hatiez, en 1878, dans un dragage au banc des Platiers, par une 
profondeur de vingt brasses. 

Le 27 avril 1907, Giarp m'écrivait à son sujet : « Le Turbellarié à bandes violettes 
que je vous avais rapproché d’Enterostomum fingalianum est en réalité Plagiostoma 


(1) Euc. Canu, Diatomées etalgues pélagiques abondantes dans la Manche du N.-E. Annales de la Station agricole 
de Boulogne-sur-Mer, vol. I, part. II, juin 1893, p. 113-116 et fig. 7, pl. VII. 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 3 
vittatum Frey et Leuckarrt. J'ai noté qu'il varie, mais sans préciser les variétés (bandes 
déficientes. Hatiez, dans son catalogue, dit qu'il n’a vu que le type. Vous avez pu vous 
convaincre que les variétés ne sont pas rares à Boulogne... » 

. Et, dans la même lettre, il me confirmait la détermination des Hydraires des 
Ciona : « L'Hydraire qui recouvre les Ciona est bien Gonothyrea Lüveni mêlé à quelques 
Obelia qui nous avaient troublés par leurs gonothèques médusipares.... » 

Notons, en outre, Podocerus falcatus L. et Caprella linearis Lin. Cette dernière est 
particulièrement fréquente parmi les Ascidies. Elle vit en grand nombre à leur surface, 
comme les Parambius typicus Kr. vivent sur les Asteracanthion rubens L. Lorsque l’eau 
des cristallisoirs commence à se putréfier, ils viennent à la surface où ils formentunevérita- 
ble trame. De quoi se nourrissent ces caprelles, c'est ce que nous ne pouvons dire encore. 

Avec ces Amphipodes, on trouve un petit Harpactide non encore signalé chez nous. 
L'étude des cinquièmes appendices thoraciques en fait une Stenhelia (!) simulans (?) ; 
mais parfois Giarp et moi avons noté 5 soies à cet appendice ; parfois, au contraire, nous 
en avons noté 6. Cette différence nous fait donc hésiter encore entre Stenhelia (!) simu- 
lans (?) et S. (!) ima(?). 

Cette étude du 12 avril 1907, nous montra, en outre, sur ces Ascidies, la Nerilla 
antennata, étudiée dans la Méditerranée par S. PEREYASLAWZEWA et réétudiée récemment 
par P. pe Beaucnamp du vivier de Roscoff où semble exister une faune rappelant celle 
du bassin à flot de Boulogne. 

De nombreuses Ophriotrocha puerilis Cpp. et METscu. nous permirent de revoir 
toutes les transformations de l’appareil masticateur” que J. Bonnier a si bien étudiées et 
représentées (1893). 

Nous observames aussi l’intéressant Ctenodrilus dont MoNTICELLI a étudié la forme 
sexuée (1907). 

Le biologiste italien communiqua d’intéressantes observations sur la sexualité et Ja 
gestation de Ctenodrilus serratus O. Scum. de Naplesau Congrès des naturalistes italiens: 
à Milan (1906) et exposa, en montrant de superbes figures, un cas intéressant de sexualité 
chez un autre Cienodrilidæ au Congrès de l'Association française tenu à Reims en 1907. 
Ces derniers faits confirment les premières observations de Moxricezu sur C. serratus et 
montrent que, à une époque de l'année, les Ctenodrilid@ acquièrent la reproduction sexuée 
avec gestation des jeunes. 

Et Grarp, comme discussion (1907), ajoutaitavec raison que le Cienodrilus est commun 
à Wimereux et à Boulogne parmi les Ciona intestinalis qui tapissent les écluses et les 
bouées du bassin à flot. 

Jamais nous n'avons encore constaté chez Ctenodrilus d'autre reproduction que le 
développement gemmifère. Il sera intéressant de pousuivre l'étude de Ctenodrilus à 
diverses époques de l’année, spécialement dans la saison chaude. 

De belles touffes d’un élégant Bryozoaire se voient par places au-dessus des tas d’ Asci- 
dies. Le premier examen fait ranger ce Bryozoaire dans le genre Bugula. Mais, avec les 
documents dont nous disposons, il nous a toujours été impossible de l'identifier spécifi- 
quement. 3 


4 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


Et je trouve, dans les déterminations que me donnait Giarp, la mention suivante : 
« Un Bugula que Catver croit nouveau ». Nous verrons bientôt que CaLver me confirma 
son idée en 1910. Avec eux, nous vimes une 7 yposyllis que nous n'avons pas identifiée. 

Sur les Obelia et les autres Hydraires qui tapissent les Ciona, nous avons noté plu- 
sieurs Licmophora, belles Diatomées en éventail, que j’ai pu identifier plus tard, grâce à 
la magistrale étude des frères PERAGALLO sur les Diatomées marines de France. 

A noter : Licmophora nubecula Kitz. (fig. 21), Licmophora dalmatica Kürz., cette 
dernière comptant parmi les Licmophores les plus élancées de notre flore et caractérisée 
par 30 stries. 

Dans les hydraires pondent les Phoxichilidium qui simulent ainsi des oothèques. On 
trouve, en outre, d’assez nombreuses Æolis despecta qui, elles aussi, pondentsur les hydrai- 
res : Obelia flabellata. Celles-ci rappellent nettement la planche 29 de Hincxs (British 
Hydroids); de plus, la méduse répond exactement à la diagnose qu’en donne BETENCouRT 
dans son Catalogue des Hydraires du Pas-de-Calais. La thèque de la méduse est sans 
dentelures et la méduse a 24 bras. 

Enfin, Graro observa T'ubularia simplex qui est une rareté pour la faune de notre 
région. Nous notons aussi la forme gallo-provinciale de Mytilus edulis qui, comme me 
le disait Grar», ne doit pas être confondue avec Mytilus gallo-provincialis de la Méditer- 
ranée. Je crois, en effet, qu'il s'agit d’un simple phénomène de convergence morpho- 
logique s’expliquant aisément par l’action du milieu. J'ai pu étudier les Mytilus gallo- 
provincialis de la Méditerranée, cultivées sur de vieux chalands. Ce milieu rappelle la 
coque des vieux bateaux du bassin à flot de Boulogne toujours baignée par les eaux. 

Sur les Ascidia, et surtout sur les Ciona, on rencontre la Bugula sp. que Giarp m'a 
dit n'avoir pu encore faire déterminer. Il est caractérisé par deux rangs constantset, sur cet 
intéressant Bryozoaire, on observe souvent de très belles colonies de Vorticelliens. On 
voit, dans les cristallisoirs renfermantle résultat de la pêche, quelques Harpactides qui se 
dirigent vers la lumière en gagnant la surface du liquide. Parmi ceux-ci, nous avons pu 
déterminer avec certitude Dactylopus tisboides CLaus qui, à notre connaissance, n’a pas 
encore été signalé dans les eaux boulonnaises. 

En avril 1907, nous continuons nos observations sur ce consortium. Pour cela, je 
vais chercher moi-même des Ascidies sous un vieux bateau à demeure dans le bassin à 
flot. Je ne vois que des Ciona intestinalis. Dans leurs excréments, Giarp et moi rencon- 
trons, au lieu de l'abondance de Skeletonema costatum (fig. 4) et de Coscinosira poly- 
chorda Gran. (fig. 7) de l'année dernière, une nourriture toute différente. 

Elle est constituée par Peridinium tabulatum Eur.,Gymnodinium pulvisculus Poucner, 
un tintinnide d’espèce indéterminée, quelques très rares Skeletonema costatum Grev. et 
d’assez nombreux Prorocentrum micans Eur (fig. 26). Ce prorocentreserencontreégalement 
dans les excréments de Mytilus edulis {* gallo-provincialis qui vivent parmi les Ascidies. 

Une pêche planktonique, effectuée aux abords du bateau dans le but de déterminer 
‘l'influence que le plankton peut avoir sur les variations du consortium, nous donne de 
nombreux Noctiluca miliaris, Zygoceros (Bidulphia) mobiliensis Baicey, Actinoptychus 
undulatus Eur., Eucampia Zodiacus Eur. assez nombreuses, Rhizosolenia delicatula 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 5 


Gran., Melosira Juergensii Ac. et Melosira Borreri Grev., des Licmophora du groupe de 
paradoxa, des Navicules, un Chætoceros, C. didymum v. n. Giardi, et un infusoire encore 
indéterminé. : 

Nous retrouvons le Dactylopus tisboides qui attire l’attention par la teinte rouge qui 
colore le plus souvent l'ouverture génitale. L’exopodite de la cinquième paire présente 
des crochets visibles à un faible grossissement. La forme générale du corps rappelle celle 
des Laophonte et des Hersilioides. 


~ 


+ 


Continuant les recherches en 1909, je retrouvais, le 16 avril, sur des Ciona récoltées 
cette fois sur les écluses de Boulogne, le Plagiostoma vittatum Frey et Leuckarr précé- 
demment signalé (fig. 17, pl. 1). 


* 


* * 


Le 30 mars 1910, une nouvelle pêche est faite par MM. Boppe et Bourcart. Je trouve 
de très belles Vorticella marina (fig. 22), de nombreuses Melosira Borreri, qui sont fixées 
aux nombreuses Gonothyrea Loveni et aux Obelia qui forment sur les Ciona et les Asci- 
diella des appontements un très élégant chevelu. Avec elles, se voient les délicats bâton- 
nets des Diatomées bacciformes reliées à leur base en faisceaux de 2, 3, 5 individus 
appartenant à Synedra pulchella Kurz., très finement striée et polymorphe, et de nom- 
breuses Nitzschia du groupe de longissima. Je citerai parmi celles-ci: Nitzschia longissima 
Bres. f* parva (fig. 23); MV. long. f* reversa Smitu. (fig. 17); N.closterium Eur. (fig. 16); 
et JV. rostrata Grunow (fig. 10); et aussi Nitzschia longissima f* typica. 

Dans cet enchevrétement, circulent de nombreux crustacés parmi lesquels des Copé- 
podes appartenant aux genres Dactylopus (D. tisboides), Stenhelia (S. (!) ima ou simulans) 
et gesticulent les Amphipodes caprellides : Phtisica marina, et surtout Caprella linearis, 
laquelle est souvent recouverte de fort beaux Acinétiens : Ophryodendron (sp?). 

_ Pendant l'été de 1910, j'ai continué ces recherches et j'ai imaginé, d’ailleurs, un filet- 
drague très portatif et excessivement simple qui rendra, je pense, des services à ceux qui 
désireront se livrer à des travaux analogues. 

Le 20 juillet, une pêche est effectuée sur les bouées du bassin à flot et sur un vieux 
vapeur désarmé, n° 2867. Sur le bateau dominent les Ciona intestinalis ; sur les bouées et 
le long des quais, on observe de plus nombreuses Ascidiella scabra O. F. Mutter. 
De très beaux Botrylles qui mériteront une longue étude forment des tapis élégants. 
De superbes Palæmon sont les gros protagonistes de ce tableau biologique. De nombreux 
Nématodes libres se tordent à la surface des Ascidies, et sur les Hydraires se voit un petit 
Pycnogonide. Avec la remarquable étude de P. P. C. Hack (1881, Arch. Zool. exp.), j'ar- 
rive à Phoxichilidium premæum c', mais je ne trouve que deux fortes épines à la base 
de la brosse de courtes épines au milieu de laquelle s’observent deux grandes épines. Cette 
différence me porte a me demander s’il existerait ici un dimorphisme des mâles compa- 
rable à ce que Hæcx (loc. cit., p. 519) a noté chez Phoxichilus. 

Les diatomées sont représentées par d'assez nombreuses Skeletonema costatum GREV.., 


6 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


des Stauroneis spiculata Hickir, des Stauroneis salina W. Sm., des Achnantes longipes C. 
AG., des Liemophora nubecula Kurz., et de nombreuseset variables Melosira Borreri Grev. 


Parmi la faune microscopique, nous noterons encore de délicates Vaginicola crys- 


tallina Eur. (fig. 25), les élégantes Pachytrocha cothurnoides S. Kent (fig. 19) et la Vorticella 
marina GREErr. (fig. 22). Avec elles, fixées sur les mêmes Algues, de très jolies Synedra 
pulchella Kutz. qui, sous l’action du carmin acétique, laissent voir un joli noyau allongé, 
à contenu granuleux, et montrant vers son milieu un beau karyosome sphérique coloré 
en rouge vif (fig. 20). 

On trouve, en outre, et en abondance, un petit Péridinien piriforme que les docu- 
ments bibliographiques de la station ne m'ont pas encore permis d'identifier (fig. 9). Les 
carapaces et les individus vivants de Prorocentrum micans Enr. sont très fréquents. 

J'ai observé un cas intéressant de parasitisme. Parmi les Ascidies vivait un Carcinus 
mœnas Pen. de petite taille, porteur d'une Sacculina carcini Ratuxe. Sur sa carapace se 
trouvaient des Botrylles et des Farrella repens Farre. Ces animaux épizoïques rempla- 
cent dans ce milieu spécial les Balanes (Balanus crenatus Bruc.), les Molgules (AZ. socia- 
lis) et les Moules (Mytilus edulis L.) qu'on rencontre souvent fixées sur les carapaces 
des Carcinus meenas sacculinés de la côte. : 

Continuant mes recherches le 2 septembre 1910, je rencontre un Autolytus en 
stolonisation, forme Polybostrychus, une Proto pedata 9 sans œufs et montrant sur 
l’antenne gauche un très beau Vorticellien. 

Une belle colonie de Clavelina lepadiformis O. F. Mutter donne une note de trans- 
parence délicate à ce multiple consortium. Dans l’eau qui baigne les Ascidies, des Pla- 
giostoma vittatum à trois bandes. 

J'ajouterai qu’en classant la collection générale de la Station zoologique, j'ai noté 


qu’en septembre 1899, une Molgula sp.? avait été trouvée sur une chaloupe dis bassin à 


flot de Boulogne. 

Enfin, pour terminer cette note préliminaire, je signalerai en abondance, parmi les 
matériaux fixés en 1910, le fameux Bugula sp.? que nous n’avons jamais pu déterminer. 
Les spécimens que j'ai adressés à L. Carver ayant été longtemps dans l'eau qui baigne 
les Ascidies n'ont pas été bien conservés. Le 11 octobre dernier, mon aimable corres- 
pondant m'écrivait : « A en juger uniquement par le squelette, je crois que c’est une 
forme très voisine de la Bugula Sabatieri que j'ai décrite dans l'étang de Thau et les 
canaux de Cette, et, peut-être, intermédiaire entre B. Sabatieri et B. calathus Norman. 
Il ne serait pas surprenant que ce fût une espèce nouvelle »; et Carver ajoutait qu'il 
voudrait, avant de se prononcer, avoir un échantillon bien conservé. 

L'étude que je compte poursuivre de cet intéressant consortium nous fixera sur ce 


point, et hous retiendrons que cette première note vient enrichir la flore et la faune du 


Boulonnais d’un bon nombre d’espèces, dont beaucoup, fort intéressantes, n’avaient pas 
été signalées encore dans le Pas-de-Calais. 


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bis, de ae ie 7. 2h, : 


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PLANCHE I 


C.Cépède ad nat.del. 


Imp. d'Art L Lafontaine Paris 


FAUNE & FLORE DU PORT DE BOULOGNE-S/ MER. 


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EXPLICATION DE LA PLANCHE 


_ Fic. 1. — Licmophora dalmatica Kutzing, individu vivant montrant son endochrome constitué par de petits 


diatomoleucites à contour circulaire (>< 600). 

Fic. 2. — Skeletonema costatum, petite chaîne de 4 individus vivants, montrant leur endochrome et leur 
noyau (< 1000). 

Fic. 3. — Synedra affinis var. arcus Grun., vivante avec son endochrome formant deux bandes longitu- 
dinales (>< 600). 

Fic. 4. — Coscinosira polychorda Gran., chaîne de trois frustules vivant montrant leur endochrome (> 450). 


_ Fic. 5. — Prorocentrum micans Ehr., individu vivant avec son endochrome (> 600). 


Fic. 6. — Cocconeis scutellum, var. stauroneiformis Sm., vivant (>< 600). 
Fic. 7. — Autre individu de Cocconeis scutellum var. stauroneiformis Sm., montrant I’ endochrome (>< 600). 


_ Fic. 8. — Dictyocha fabula, vu par son sommet (> 1 300). 


Fic. 9. — Péridinien piriforme (>< 1 300). 

Fic. 10. — Nitzschiella rostrata Grunow (> 600). 

Fic. 11. — Vorticella nebulifera, fixée et rétractée, colorée au rouge Magenta et vert-lumiére (>< 1 300); 
n, micronucleus; N, macronucleus; ». a., vacuoles alimentaires; ». p., vacuole pulsatile; p, pédicelle. 

Fic. 12. — Chetoceros didymum var. Giardi, montrant l'endochrome sous forme de deux diatomoleucites 
(><1 300). 


_ Fig. 13. — Stauroneis spicula Hickie, vivante avec ho (X 600). 


Fic. 14. — Grande forme de Nitzschia longissima {* parva (x 600), montrant son endochrome. 
Fic. 15. — Plagiostoma vittatum Frey et Leuckart, individu type à trois bandes bien dessinées. 
Fic. 16. — Petite forme de Nitzschiella closterium Ehr., avec son endochrome (X 600). 


… Fic. 17. — Nitzschiella longissima f* parva (= reversa H. V. H) (>< 600). 


Fic. 18. — Division de Pachytrocha cothurnoides (>< 600). 

Fic. 19. — Paehytrocha cothurnoïdes, individu vivant complètement étalé, montrant l’opercule op, la 
vacuole pulsatile yp, le calice c, et le pédicelle p (>< 600). 

Fic. 20. — Synedra pulchella. Groupe de trois individus fixés 4 une algue filamenteuse et montrant dans 

- leur région centrale le noyau coloré en rose carmin par le carmin acétique de Schneider (>< 600). 

Fic. 21. — Licmophora nubecula Kutz, individu vivant montrant son endochrome (>< 600). 

Fic. 22. — Vorticella marina, individu vivant complètement épanoui, montrant la flamme vibratile et la 
vacuole pulsatile. Une grosse vacuole alimentaire, les muscles longitudinaux, le pédicelle avec la scopula 
(>< 600). 

Fic. 23. — Petite forme de Nitzschia longissima f* parva (600), montrant son endochrome. 

Fic. 24. — Stauroneis salina Sm., montrant émet sous forme de deux bandes longitudinales 
subsymétriques (>< 600). 

Fic. 25. — Vaginicola cristallina Ehr., contractée (>< 500). 

Fic. 26. — Vaginicola cristallina Ehr., étalée (>< 500). 


44772-11, = Conneit, Imprimerie Cuéri. 


Description d’un spectrographe sous-marin 


pour les recherches qualitatives de la lumière 


à différentes profondeurs de la mer, 


Par 


RUDOLF BERTEL, 


Professeur à la « Deutsche Oberrealschule », à Pilsen (1). 


Les différentes méthodes pour mesurer la lumière sous l’eau ont eu, en premier lieu, 
pour but de constater l'intensité de la lumière qui pénètre dans les différentes profondeurs; 
il s’agissait aussi de trouver la profondeur où commence la région « aphotique ». 

Néanmoins, dès les premières recherches qualitatives de la lumière, les observateurs se 
sont efforcés de connaître la qualité de la lumière à une profondeur donnée. Ainsi, par 
exemple, O. von Kotzebue, pendant son premier voyage autour du monde à bord du croi- 
seur russe Rurik (1817), en déterminant la profondeur de la visibilité maximale dans 
l'Océan Pacifique du Nord, a fait immerger à maintes reprises un grand morceau d’une 
étoffe rouge; il a trouvé que cette étoffe disparaissait à 20 à 29 mètres, tandis 
qu’une assiette blanche atteignait pendant l’immersion la visibilité de 50 mètres, de 
profondeur. y 

P. Secchi et le capitaine Cialdi ont amélioré la méthode déjà existante et qui consis- 
tait en une immersion de disques blancs ; ils ont employé dans la Méditerranée (1865), 
pour leur détermination de la visibilité dans les profondeurs, des disques en majolique ou 
en toile a voiles, peints en blanc, jaune ou vert. 

Luksch et Wolf (2) ont employé dans l'Adriatique des disques en métal poli ou en 
fer-blanc, cuivre ou bronze, ainsi que des disques en toile à voiles peints en vert. Le fer- 
blanc disparaissait à 50, 5 mètres, les disques en bronze à 48 mètres, les disques en 
cuivre à 39 mètres et les disques verts à 31 mètres. l 

Le zoologiste Fol a trouvé, au cours de ses expériences de plongée dans la Méditer- 


(1) Travail exécuté avec l’aide de la « Gesellschaft zur Fürderung deutscher Wissenschaft, Kunst und Literatur in 
Bühmen. » 
(2) Mitt. aus dem Gebiete des Seewesens, 1881, Hft. 9. 


T. HI. — Fasc. 6. 1 


= ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


ranée, près de Nice, que l’eau de mer possède une couleur bleue dans la lumière 
directe (1). Les objets devenaient d’un ton bleu d’autant plus fort, qu’il plongeait plus 
profondément. Déjà, dans la profondeur de 25 à 30 mètres, les animaux d’une couleur rouge 
foncée lui apparurent noirs (2). 

Toutes ces constatations permettent de tirer la conclusion que les rayons de faible 
réfringence sont absorbés d’une façon notable déjà dans des profondeurs faibles et que 
seulement les rayons de réfringence plus forte pénètrent plus profondément. 

Les appareils qui ont été construits par Linsbauer (3), Freih. von Aufsess (4), Ewald (5), 
Helland-Hansen (6), pour la détermination de l'intensité de la lumière dans l’eau, per- 
mettent également de faire, dans une certaine mesure, des recherches sur l'absorption 
sélective de certaines espéces de lumiére, a la condition qu’on y intercale, a la place in- 
diquée de l’appareil, des cuvettes remplies de liquides absorbants, des verres de couleur, 
ou enfin des filtres en gélatine, qu’on déterminait au spectroscope. 

Dans ces filtres à lumière ne donnant pas en réalité une lumière monochromatique, 
mais laissant passer également des radiations des zones voisines du spectre, cette méthode 
ne me paraît pas avoir un grand avenir. 

Le procédé de Regnard (7), d'étudier les radiations calorifiques à l’aide d’une cellule de 
sélénium et les radiations chimiques à l’aide des tubes remplis d'hydrogène et de chlore, 
n’a pas pu prendre pied non plus. 

On a pu obtenir quelques données sur l’absorption sélective de l’eau par des expérien- 
ces de laboratoire, en faisant passer la lumière par de longs tubes remplis d’eau et en l’exa- 


minant à l’aide d’un spectroscope. On a trouvé ainsi, pour l’eau püre, un affaiblissement 


allant de la ligne C jusque vers le rouge; une bande plus faible d'absorption s'était pro- 
duite alors entre les longueurs d’onde de 660 py et 670 wy et une bande forte entre 610 
et 620 yy» dans l’orangé. Ce sont les bandes de Schénn (Schénn’sche Streifen). 

Dans lesexpériences avec l’eau de mer, H. F. Vogel (8) a trouvé également les bandes 


de Schénn et un affaiblissement des rayons rouges plus fort encore que dans l’eau pure. — 


Pour l’eau bleue de la Céte d’Azur, il a trouvé en outre encore une forte absorption 


dans le vert entre les lignes E et b de Frauenhofer (voir le schéma, p. 10). De la détermi-. 


nation des coefficients de l’absorption de l’eau pure pour les différentes longueurs 


d’onde (9), il résulte que ces coefficients sont grands pour la partie du spectre de faible 


réfringence, et seulement très petits pour la’ partie de forte réfringence. 


(1) R. Bunsen (Jahresb. üb. Fortschr. d. Chemie, 1847-1848, p. 1236) et W. Bretz (Pogg. Annal., 115, 137, 1862). 


avaient constaté que l’eau pure possède une couleur propre. 

(2) C.R. de l’Acad. des Sciences, Paris, 1890, p. 1079. 

(3) L. Lissauer, Photometrische Untersuchungen über die Beleuchtungsverhältnisse im Wasser (Sitzber. Ak. Wiss. 
Wien., Math. Nat. KI., Bd. 114, 1905. 

(4) Orro Fru. von Aursess, Eine photographische Methode zur Bestimmung des Eindringens der Warmestrahlung 
in einen See (Peterm. Mitt., Bd. LII, 1906(VIII), p. 184). 

(5) W. F. Ewazo, Ueber eine Methode zur Messung des Lichtes im Wasser (Internat. Rev. d. ges. Hydrobiol. u. 
Hydrogr., Bd. Ill, Hft. 1, u. 2). 

(6) The “ Michael Sars” North Atlantic Deep Sea Expedition 1910 (Geogr. Journ., for April and May 1911). 

(7) La vie dans les eaux. Paris, 1891, p. 205, ff. 

(8) Poggend Ann., 1875, Bd. 6, p. 325; et 1895, Bd. 54, p. 175. 

(9) E. Ascuxinass, Wiedem. Annal., 1895, Bd. 55, p.419 ; Frein. von Aursess, Dissertation über die Farbe der Seen 
München, 1903, p. 26. ‘ 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 3 


Cette dernière considération nous permet donc de conclure que, dans les plus grandes 


profondeurs, peuvent pénétrer seuls les rayons plus fortement réfringents, tandis que les 
autres rayons sont bien vite arrêtés. 


Fig. 1. — L'appareil fermé à la descente et les deux messagers (D’après une photographie de M. Elmers, préparateur 
au Musée Océanographique de Monaco). 


Dans le but de pouvoirétudier chaque région du spectre séparément ainsiqu’en compa- 
raison avec les autres parties du spectre et cela à des profondeurs déterminées, j’ai élaboré 
une nouvelle méthode, qui permet de fixer sur une plaque photographique à l’aide d’un 
spectrographe les genres des rayons existants dans les profondeurs données. 

L'appareil a été construit par la maison R. Fuess, à Steglitz-Berlin, et acquis pour 


| 4 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


mes recherches par le Musée océanographique de Monaco. La description qui suit, ainsi 
que des dessins et photographies, feront comprendre sa construction. 

Tout l’appareil consiste en un spectrographe et en une enveloppe protectrice dans le 
fond de laquelle le premier est solidement fixé. Le tube collimateur (K) porte dans sa 
partie supérieure la fente (S), qui peut être réglée à l’aide d’une vis micrométrique. Chaque 
tour du pignon de la vis correspond à un changement de largeur de la fente de 0,01 mil- 
limètre. : 

En dessous de la fente se trouve une fermeture (V) à ressort, qui s’ouvre automati- 
quement, repoussé par une saillie (R) qui se trouve dans le tube de l’enveloppe, aussitôt 
que le couvercle de l'enveloppe protectrice est mis en place. En dessous de la fermeture 
est placé un diaphragme (B). La partie inférieure du collimateur contient l'objectit (L) à 
la distance de 120 millimètres de la fente. L'objectif coulisse de 1 centimètre vers le 
haut et vers le bas, et sa position est visible chaque fois à l’aide d’une division 
gravée à l'extérieur du tube collimateur. La position la plus favorable est à la division 86. 
Toutes les différentes parties optiques de l’appareil sont en verre de quartz (dit verre 
ultra-violet). Ce verre a la propriété, qui le distingue des autres sortes de verre ordinaire- 
ment en usage dans l'optique, de laisser passer beaucoup plus facilement les rayons de 
forte réfringence, dont la longueur d’onde est inférieure à 400 py. Cela a une très grande 
importance pour les recherches présentes. : 

Ensuite se trouvent deux prismes (Pr et P2) en verre de quartz, de 36 millimètres de 
hauteur et de 48 millimètres de longueur des côtés ; la déviation de chaque prisme est 
de 40°40’. Vient ensuite un objectif des prismes (O) de 30 millimètres de hauteur, qui. 
projette sur la plaque photographique l’image du spectre. 

Le châssis, (C), pour les plaquets 4 1/2 x 6 centimètres, repose sur un chariot (Sch), 
coulissant (F), de telle façon qu’on peut faire sur la même plaque sept poses l’une après 
l’autre ; ainsi on obtient des spectrogrammes comparables, sur une même plaque, déve- 
loppée et fixée de la même façon. Chaque spectrogramme mesure 24 centimètres de long 
et 4 millimètres de haut. L’enveloppe protectrice est faite en bronze de qualité supérieure 
et possède une épaisseur de parois de 14 millimètres ; elle est pourvue extérieurement 
en plusieurs endroits de côtes pour augmenter sa résistance contre la pression. 

La partie supérieure de l’enveloppe (le couvercle) abrite le collimateur et porte le 
mécanisme extérieur de fermeture. La figure 5, pl.1, montre celle-ci tendue. Le disque (D), 
fixé excentriquement et retenu par un ressort spiral, est tourné jusqu’à l’endroit où le : 
levier (H), tournant lui-même autour d’une vis (S) et poussé par un autre ressort (G), 
butte contre la deuxième dent. La petite gâchette (E) empêche le mécanisme de ferme- 
ture d’être déclanché fortuitement par le câble ou un autre contact pendant les opérations 
de la mise à l’eau par-dessus le bord du bateau. En dessous du disque du mécanisme de 
fermeture, se trouve une fenêtre en quartz, de 8 millimètres d'épaisseur (Q, fig. 1, PI. I), 
fixée solidement dans une plaque qui couvre le tube collimateur ; par cette fenêtre, la 
lumière peut entrer. Le mécanisme de fermeture est déclanché par les messagers (Tr et 
T2, dans la figure 10, PI. II) qui buttenten glissant le long du câble de suspension contre 
le coude du levier (N), 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 3 


Le premier messager, en faisant tourner le disque, découvre la fenétre en quartz ; le 
second messager, plus large, s’emboite sur le premier et produit, en agissant de même sur 
le disque, la fermeture de la fenêtre. Par l’ouverture (J) dans la plaque passe le câble, 
qui, traversant encore trois autres trous de la plaque, vient se fixer a une vis trés forte. 

Le câble que j'ai employé avait 7 millimètres d’épaisseur; on a été alors obligé d’élargir 
le trou dans la plaque, dont le diamètre marqué sur le dessin est de 5 millimètres. 

On a procédé de même avec la lumière de deux messagers qu'on a élargie à 8 milli- 


Fig. 2. — L'appareil ouvert : à gauche — le couvercle (moitié supérieure de l’enveloppe) ; en bas devant — lecuir assu- 
rant l'étanchéité et le chassis porte-plaque ; à droite — le fond de l’enveloppe (moitié inférieure) avec le tube collimateur 
et le chariot pour le porte-plaque. 
(D’après une photographie de M. Elmers, préparateur au Musée Océanographique de Monaco.) 


mètres. La partie inférieure de l’enveloppe protectrice porte, à l’aide de la plaque de 
fixation (U), le spectrographe même. 

Les deux moitiés de l'enveloppe protéctrice s'appliquent l’une contre l’autre, par un 
bord de 35 millimètres de largeur et sont fixées l’une à l’autre à l’aide de 14 forts boulons. 
On se sert de cuir enduit de graisse consistante et s'appliquant bien aux rainures fines 
gravées dans les bords, pour assurer une étanchéité parfaite. Les manipulations de 
Yappareil pendant une expérience à bord se résument de la façon suivante : on fixe 
l'appareil au câble, comme il a été indiqué plus haut ; on dévisse les 14 boulons et on 
enlève attentivement et bien d’aplomb le couvercle qu'on pose à côté ; on introduit le 


6 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


le châssis chargé dans son chariot qu’on pousse en face du numéro 1; on essuie la fente avec 
un pinceau fin, et on la règle à lalargeur convenable. La largeur de la fente dépend de la 
profondeur dans laquelle on se propose d'opérer. Ainsi, deo à 100 mètres, j'ai travaillé 
d'habitude avec une fente de 0,1 millimètre, dans les profondeurs plus grandes, avec une 
fente de o,2 millimètres. On enlève ensuite le rideau du châssis et on remet le couvercle 
de l’enveloppe en place. Toutefois, on n’a pas oublié de tendre auparavant le mécanisme 
de fermeture, car aussitôt que le couvercle est mis en place, le diaphragme intérieur du 
collimateur est déjà ouvert. Autrement, si on tend la fermeture postérieurement, cela 
produit une pose à sec. 

Finalement on pousse la gâchette (R) qui empêche un déclanchement prématuré du 
mécanisme de fermeture extérieure ; ce n’est qu’immédiatement avant l’immersion de 
l'appareil, suspendu déjà librement au câble, qu’on repousse de nouveau la gâchette, et 
lon descend l'appareil à la profondeur voulue. 

J'ai travaillé avec mon appareil jusqu’à la profondeur de 600 mètres, sans qu’il ait 
subi de dommages quelconques du fait de la pression et sans que l’eau ait pénétré à 
l'intérieur. Lorsque l'appareil a atteint la profondeur voulue, on envoie le long du câble 
d'abord le petit messager et ensuite, après un intervalle déterminé, le grand. On fera bien 
attention à ce que le cable soit bien propre et lisse, pour éviter les interruptions dans le 
glissement, ou même un arrêt complet d’un messager, ce qui causerait des fautes ou même 
des ratés d'exposition. 

Après que l'exposition de la plaque est terminée, remonte l’appareil, on devisse unifor- 
mément les boulons, on enlève le couvercle, on contrôle la fente et on pousse le châssis au 
numéro suivant. Malgré qu'il y ait 14 boulons, toute l’opération du dévissage et revissage ne 
dure que cinq minutes, vu que deux hommes peuvent l’assurer à la fois. Du reste on 
fera bien, dans un nouveau modèle de l'appareil, d’adapter un dispositif, permettant le 
déplacement du porte-plaque sans être obligé d'enlever complètement le couvercle de 
l'enveloppe protectrice. Ensuite il faudrait encore adapter aux quatre coins de l’enve- 


loppe supérieure quatre tiges dirigées en bas et passant par quatre orifices extérieurs de 


l'enveloppe inférieure ; ce dispositif empécherait tout déplacement latéral de l’enve- 
loppe supérieure pendant sa mise en place ou son enlèvement ; on éviterait ainsi tout 
changement non désiré de la fente, ou même un endommagement de pignon de la vis 
micrométrique. L’optique pourrait également être faite plus finement, et il sera néces- 


saire d'adapter au spectrographe une échelle des longueurs d’onde, afin qu’on puisse © 


s'orienter plus facilement et avec plus de précision en ce qui concerne les différentes 
régions spectrales. 

Je donne ici un résumé des recherches que j'ai faites jusqu’à présent et qui montre 
assez clairement l'état des choses. Toutes ces recherches ont été faites au Musée 
océanographique de Monaco, à bord de l’Eïder. J'ai été aidé dans mes recherches par 
le D' Jules Richard, directeur, M. Sirvent et le D' M. Oxner, assistants au Musée océa- 
nographique, qu’il me soit permis de leur exprimer mes remerciements les plus dévoués. 


nd 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 7 


| N° DE PROFON- LARGEUR 
y. DATE. HEURE. TEMPS DE POSE. OBSERVATIONS. 
| STATION. DEUR. de la fente. 
il Juin Métres. Feral 
I 9 8h. 30m. 5 10S. 0,1 Ciel sans nuages. 
| 2 9 gh. 10 Ios. 0,1 = 
3 9 gh. 15m. 20 205, 0,1 — , 
| 4 9 gh. 30m, 30 30s. 0,1 ° — 
| 
| 5 16 2h.1om.— 2h.15m.| 600 5 m. 0,15 — 
| 6 16 3h. — 3h. 5m.| 400 5m. 0,15 — 
7 17 8 h. 33 m. 5 Is. 0,1 A l’ombre du bateau. 
| 8 17 8h. 42 m, : 10 2s. 0,1 — 
| 9 17 8 h. 52 m. 20 45. 0,1 — 
| 10 17 gh. 2m. 30 hy 0,1 — 
II 17 9h. 15 m. 40 165. 0.1 — 
12 17 gh. 28m 50 25s. 0,1 — 
| 13 17 gh. 42 m 60 36s. 0,1 — 
| 1 17 2h.55m. 3h.25m.| 400 30 m. 0,2 Ciel faiblement couvert. 
I 17 3h.54m.— 4h. gm.| 300 15m. 0,2 — 
16 17 4h.30m. — 4h.37m.| 200 7m. 0,2 oa 
| 17 17 4h.52m.— 4h.54m.| 100 2m. 0,1 — 
| 18 21 2h.49m. — 4h.29m.| 600 1 h. 40 m. 0,2 Ciel sans nuages. 
19 22 9h.29m.— gh.32m.| 100 3 m. 0,2 |Visibilité du disque Secchi 17 m. 
20 22 9h.43m. — 9h.53m.| 200 10 m. 0,2 — -- 
21 22 |10h. 7m. — 12h. 7m 2h. à 0,2 — —— 
22 23 12h.47m. — 2h.27m.| 500 th. 40 m. 0,2 — — 
23 23 11h. 3m.—12h.33m.| 450 1h.30m 0,2 — 21 m. 
2 23 1h. — 2h. 400 1h 0,2 — — 
2 23 2h.22m.— 2h.52m.| 300 30 m. 0,2 — 
26 29 9h.24m. — 10h.24m.} 400 1h 0,2 — 40 m. 
| «: 29 10 h. 51 m. — 12h. 51 m. 00 2h 0,2 — — 
| 29 1h.38m.— 1rh.48m.| 200 10m. 0,2 — — 
29 29 2h. 5m. — 2h. 8m.| 100 3m. 0,2 _ — 
| 30 30 10h. gm. 50 25s. 0,1 Ciel faiblement couvert. 
31 30 10 h. re. 60 36s. 0,1 — 
32 30 |ioh.26 m. 70. 505. | o,1 — 
33 30 10 h. 39 m 80 1 M. 10s. 0,1 — 
3 30 |roh.52 m. 90 Im. 505. 0,1 — 
3 30 |rrh. 4m. ? 16s. 0,1 _ 
36 30 {11 h.12 m. gs. 0,1 — 


En ce qui concerne mes expériences, j’ajouterai encore que pour toutes les mesures 
j'ai employé les plaques panchromatiques de Lumière. Seulement, pour les expériences 
n° 26, 27, 28 et 29, je me suis servi des plaques étiquette bleue et violette de Lumière, 
spécialement sensibilisées pour ces rayons et sept fois plus rapides que les plaques 
ordinaires. Pour les recherches spéciales dans des profondeurs déterminées et les zones 
limitées plus étroitement, il serait à conseiller de se servir des plaques sensibilisées 
spécialement pour le genre de rayons qui prédominent dans chaque zone donnée. II est 
également indispensable de sauvegarder l’uniformité des conditions, en ce qui concerne 
le genre de plaques, le révélateur ét le temps du développement. Pour les spectro- 


8 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


grammes qui doivent être comparés entre eux, il faut autant que possible employer 
toujours la même largeur de la fente. Le temps de pose dépend de l’époque de l’année 
et des heures de la journée, de la transparence plus ou moins grande de l’eau, de l’état 
(agitation) de la surface de l’eau, etc. (1). D'abord je déterminais empiriquement le temps 


Ultra - Violet 
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100 \ ne 23 
200 ne-28 
300 25 
400 . + 26 


de posejuste pour les couches plus superficielles et ensuite jele calculais aproximativement . 
pour les autres profondeurs en prenant comme base la loi : la luminosité diminue en raison : 


du carré de la distance. En réalité cependant les temps de pose doivent être un peu plus 


prolongés, surtout pour les profondeurs plus grandes où l'écart du calcul est très impor- 


(1) On évitera la surexposition qui provoque souvent un halo nuisible dans le bleu et le violet. ~ 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 9 


tant. Étant donné que l'appareil n’est pas muni d’une échelle des longueurs d’onde, j'ai 
procédé à la délimitation des régions spectrales de la façon suivante : j’ai photographié a 
l’aide de ce spectrographe, sur la même plaque, les spectres d'émission de plusieurs élé- 
ments (Na, K, Ca, Li, Sr), et ensuite je me suis confectionné;, d’après l’échelle de Bunsen, 
une échelle de comparaison pour mes spectrogrammes sous-marins. Par la superposition, 
on arrive alors à déterminer très exactement jusqu’à quelle longueur d’onde la plaque 
a subi la réaction photochimique. 

Il est impossible de reproduire avec une exactitude satisfaisante les spectrogrammes 
sous-marins, soit par une épreuve tirée sur papier ou par une photogravure, car il s’agit 
souvent des noircissements très légers et délicats sur la plaque. On peut donc employer 
uniquement par transparence les spectrogrammes originaux pour juger les conditions de 
l’absorption. Puisqu’ainsi une reproduction convenable des spectrogrammes ne peut pas 
se faire, qu'il me soit permis de représenter les premiers résultats des expériences men- 
tionnées plus haut de la façon suivante : on lira la longueur de chaque spectre d’après 
l'échelle des longueurs d'onde et suivant deux courbes-limites. Le numérotage à droite 
se reporte au tableau de la page 9. Mes mesures s'étendent provisoirement seulement 
jusqu’à 500 mètres, car, dans les profondeurs plus grandes, 600 mètres, je n'ai pas pu 
obtenir aucune réaction lumineuse à cause de l'exposition trop courte. 

Mes résultats concernant les conditions de la lumière ne peuvent pas naturellement 
être généralisés ; ces conditions subiront des changements, suivant qu’on fera les mesures 
à d’autres époques de l’année à d’autres heures de la journée, à d’autres distances de la 
côte, avec un autre état de ciel, etc. Tout cela précisément peut être enregistré par 
l'appareil. En tout cas, on trouvera toujours que le rouge s'éteint très rapidement, déjà 
à la profondeur de 5 à 10 mètres, l’orange à 20 mètres. Mais ensuite la courbe devient 
moins rapide. A 100 mètres il n’y a presque plus de jaune, tandis que le vert peut être 
constaté encore jusqu’à 300 mètres. L'autre extrémité du spectre subit également une 
diminution. considérable avec la profondeur. Cette diminution intéresse cependant 
seulement les rayons ultra-violets, dont l’action faiblit peu jusqu’à 30 ou 40 mètres, 
mais à partir de là ils subissent tout à coup une absorption régulière. A la profondeur 
de 400 mètres, on ne trouve plus le gris de lavande, de sorte que restent seulement les 
rayons bleus et violets. 

L'existence de ces rayons a été prouvée encore à la profondeur de 500 mètres, 
(d’après une expérience qu'a faite M. Sirvent le 26 juillet ; temps de pose, 2 heures). 

Il me sera possible de donner un exposé détaillé et définitif des expériences sur la 
lumière, seulement lorsque le programme que j'ai tracé dans le Bulletin de [Institut 
Océanographique, n°219, i911,sera achevé ; c’est là aussi que j'ai expliqué à quelles applica- 
tions mon appareil peut se prêter et quelle importance ontles mesures qu’il permet d'exé- 
cuter, pour l'exploration physique et biologique des eaux douces et des mers. 

C’est un agréable devoir pour moi d'exprimer en terminant mes meilleurs remercie- 
ments au Dt M. Oxner, assistant au Musée océanographique de Monaco, de sa 
grande amabilité et de la peine qu'il a eues pour traduire mon texte allemand en français. 


Monaco, juillet 1911. 
Musée Océanographique. 
T. IIL. Fase, 6. 3 


EXPLICATION DES PLANCHES 


PLANCHE I.. 
[D'après une copie que l’auteur a faite du dessin de construction de R. Fuess (Steglitz-Berlin).] 


Fig. 1. — Coupe longitudinale du spectrographe et son enveloppe protectrice. 

A, paroi ‘de l'enveloppe protectrice ; B, diaphragme; C, châssis porte-plaque; D, disque de 
fermeture extérieure ; F, coulisse du chariot; H, levier de tension et de déclanchement du méca- 
nisme de fermeture ; I, trou pour le cable; K, collimateur ; L, objectif du collimateur ; M, vis 
micrométrique; N, pièce-levier (coude du levier); 0, objectif des prismes ; P,, premier prisme; 
P,, deuxième prisme ; Q, Plaque en verre de quartz ; R, Saillie du tube qui repousse la fermeture 
intérieure ; S, fente ; Sch, chariot du châssis ; U, plaque de fixation du Rp à V, Ferme- 
ture intérieure. : 


Fig. 2 (N). — Piéce-levier (coude du levier). 

Fig. 3 (R). — Saillie du tube couvre-collimateur ; vu du devant. 

Fig. 4 a. — Fermeture intérieure et la téte (pignon) de la vis A Rte 02 vu du côté. | 
Fig. 4 b. — Même chose ; vu d’en haut. 

Fig. 5. — Disque de fermeture extérieur (le ressort tendu). 

E, gâchette qui arrête le levier ; G, ressort. 


* 


PLANCHE II. | face 
[D'après une copie que l’auteur a faite du dessin de construction de R. Fuess (Steglitz-Berlin).] - 


Fig. 6. — Le deuxième prisme et l’objectif des prismes; vu de côté. 
Fig. 7. — Plaque de fixation. 

a. Vue du côté long; b. vue du côté large ; c. vue d’en haut. 

Fig. 8. — Chariot du porte-plaque. 

a. D’en haut; 4. du côté large; c. du côté long. 

Fig. 9. — Coulisse du chariot. 

a. D’en haut; 4. du côté. 


Fig. 10. — Les deux messagers complets fencamers l’un sur l’autre.) TO 
a. En coupe longitudinale; 8. d’en haut. à 3 is 


15928-11. — Corsew. Imprimerie Créré. 


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Mémoires de lithologie marine 


Par J. THOULET, 


Professeur à la Faculté des Sciences de l’Université de Nancy. 


I. — Considérations sur l’usure mécanique des grains de sable. 


L'étude de la façon dont un grain de sable recueilli sur une plage maritime ou au 
fond de la mer, dans le lit d’un ruisseau, sur une dune ou dans un désert, a acquis la 
dimension et la forme qu'il possède et qu’on observe à l’œil nu, à la loupe ou au micro- 
scope, est extrêmement compliquée. Peu de faits naturels sont plus malaisés à élucider 
d’une manière rigoureuse, véritablement scientifique, parce que, dès le début, pour celui 
qui va nous occuper, on s'aperçoit de la multiplicité des causes, de l’enchevêtrement des 
forces naturelles, de la complexité des phénomènes secondaires qui sont entrés en jeu et 
qui ont produit par leur ensemble les caractères observés. Cependant, Ja connaissance, si 
approfondie qu’elle puisse être, de ces causes est susceptible de rendre tant de services 
pratiques, de suggérer, d'expliquer, de confirmer ou de réfuter tant d’hypothéses amenées 
elles-mêmes par d’autres considérations, en minéralogie, en océanographie, en géologie 
et en paléogéographie, qu’il est utile de s’eflorcer de l’acquérir ou tout au moins d’essayer 
d’y jeter quelque lumière. J'ai consacré à ces investigations beaucoup de temps et de 
travail et, comme aujourd’hui je n’ai plus le loisir de continuer ou, pour mieux dire, de 
reprendre sur de nouvelles bases ces recherches qui sont fort longues et que, d’autre part, 
j'ai acquis péniblement une certaine expérience, je me décide à exposer, pour le plus grand 
avantage de ceux qui seraient tentés d’aborder à leur tour le sujet, les conclusions auxquelles 
je suis parvenu. 

Établissons d’abord la complexité des phénomènes de l’usure. 

En définitive, on se proposede connaître l’histoire du grain et comment, aprèsavoir été 
détaché de la roche mère sous des influences ou par des actions dont l'examen n’est pas 
à considérer ici, il a acquis l’état sous lequel il se trouve actuellement. Pour répondre a 
cette question qui lui est en quélque sorte adressée, le grain de sable ne possède que trois 
variables : sa nature minéralogique, sa dimension et sa forme. Sa nature minéralogique 
s'établit rigoureusement au microscope (1), et il en est de même de sa dimension. En 
revanche, sa forme n’a que deux particularités bien distinctes : elle est arrondie ou angu- 


1) Tuouter, Précis d’analyse des fonds sous-marins actuels et anciens. Chapelot, Paris. 
; y 


T. I, — Fase. 7. I 


à ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


leuse. Peut-être pourrait-on y ajouter le caractère intermédiaire, assez vague, de n'être 
ni tout à fait arrondie, ni tout à fait anguleuse. Toute conclusion ultérieure ne pourra 
s'appuyer que sur ces trois variables. 

Pour les observer sur les grains très petits, les seuls qui importent à considérer, on 
emploie le microscope. On reconnaît la nature minéralogique grâce aux nombreuses 
ressources de la minéralogie microscopique. La dimension se mesure au micromètre 
objectif et au micromètre oculaire; elle s’évalue, sur un grain irrégulier, en prenant la 
demi-somme de son plus long et de son plus petit diamètre. On apprécie la forme, 
toujours malheureusement avec un peu de vague, en examinant le grain à un grossissement 
moyen permettant de l’apercevoir en totalité et en nayant soin de diaphragmer fortement, 
ce qui rend son relief plus apparent. 

La question posée est la suivante : comment ce grain, appartenant à telle espèce miné- 


rale, mesurant tant de millimètres de diamètre, a-t-il acquis son aspect anguleux, arrondi : 


ou semi-anguleux ? 

Le grain a évidemment été fait ce qu’il est par choc ou par frottement, au sein de 
l’eau ou au sein de l’air, et le phénomène est sous la dépendance des variables suivantes : 

1° La fragilité, propriété que présente le minéral de se briser par le choc; elle touche 
à la dureté, sans se confondre avec elle ; le diamant, le plus dur de tous les corps, est 
très fragile, tandis que la résine, par exemple, qui est aussi très fragile, ne possède aucune 
dureté. 

2° L’élasticité. Certains corps se brisent à grand’peine par le choc; le marteau qui les 
frappe rebondit et le minéral, tantôt légèrement écrasé, tantôt ne gardant aucune trace du 
coup, ne donne naissance à aucun fragment. Tel est le cas pour les minéraux et les roches 
riches en magnésie comme, par exemple, les serpentines et les diorites (1). 

3° La dureté ou résistance à l’usure par le frottement. On définit et on caractérise 
ordinairement en minéralogie la dureté comme la propriété d’un corps à se laisser 
entamer ou rayer par un corps plus dur et à entamer lui-même un corps moins dur. Il 
n’y a pas lieu ici d’entrer dans le détail des modes multiples d'évaluation de la dureté, qui 


se déduisent tous d’une manière particulière de définir cette propriété. Le phénomène : 


est lui-même très complexe puisqu'il dépend à la fois du corps frottant et du corps frotté, 
tant au point de vue de leurs natures respectives que de leur forme. Un même corps 
s'usera différemment s’il est successivement frotté par un corps semblable à lui, et alors 
l'usure sera nulle, par un corps un peu plus dur, ou par un corps beaucoup plus dur que 
lui. 

4° La dimension, le poids, la densité. I] est évident que, toutes choses étant égales, un 
minéral lourd use plus qu’il n’est usé, et il en est ainsi, à même volume, d’un minéral plus 
dense avec un minéral moins dense et d’un gros grain avec un petit grain. 


(1) Les hommes préhistoriques savaient parfaitement apprécier et mettre à profit ces qualités dans le choix des 
pierres dont ils se servaient pour leurs instruments ou pour leurs armes. Leurs outils tranchants ou piquants, couteaux, 
racloirs et pointes de flèches, étaient en silex, minéral dur et cassant, sorte d’acier naturel ; leurs haches étaient au con- 


traire, autant que possible, en diorite, en serpentine ou en jade, roches magnésiennes lourdes, élastiques, résistantes et 
peu fragiles: 


lattes re 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 3 


5° Le clivage possède une influence considérable pour augmenter l’effet du choc, mais 
celle-ci est notablement plus faible en frottement. 

6° Le milieu. L’usure variera selon qu’elle s'effectuera au sein de l’eau ou dans l’air, 
parce que les grains se choquant entre eux ou frottant les uns contre les autres seront, 
à volume égal, plus lourds dans le second cas que dans le premier. 

7° La vitesse, qui augmente la puissance et par conséquent l’effet du choc est, ainsi que 
nous le verrons, sans influence sur l’usure par frottement. 

Dans le résultat global figuré par la modification de poids et de forme éprouvée par un 
minéral sous le choc ou par frottement, ces diverses influences et d’autres encore, se 
combinant entre elles de mille façons, augmentent à l'infini les conditions du problème 
à élucider. 

Daubrée (1) décrit un certain nombre d’observations et d’expériences faites par 
lui, se rapportant à l’usure mécanique des roches, et il formule les conclusions suivantes : 

a. Sur le lit d’un fleuve, les grains de sable entraînés par l’eau diminuent de volume 
entre la source et l'embouchure. Pendant leur marche, ils progressent par bonds brusques 
variant, selon la grosseur du grain, de quelques décimètres à quelques centimètres et 
suivis de repos plus ou moins prolongés. Ces bonds sont particulièrement visibles sur les 
plages maritimes, lorsque les vagues déferlent avec une force modérée. 

b. L’usure, dans l’eau comme dans l’air, d’abord rapide sur des fragments anguleux, 
décroît à mesure que ces fragments s’arrondissent davantage. Elle est quasi nulle sur des 
grains de sable ronds. 

c. Le microscope montre que les grains minéraux très fins, entraînés par l’eau, sont 
tous anguleux et le restent continuellement pour une vitesse donnée de celle-ci, parce que, 
à cette vitesse possédée par l'eau et pour les conditions de dimension, poids, densité et 
forme des grains, ces derniers se maintiennent en suspension dans le liquide, de sorte 
qu'à chaque espèce de grains correspond, pour la flottaison, une vitesse limite. Dans la 
nature, selon Daubrée, des grains d’un diamètre inférieur à o™,1 demeurent toujours 
anguleux. - 

d. L’usure mécanique dans l’eau est accompagnée de phénomènes physiques de disso- 
lution et d’autres phénomènes très complexes dépendant de la nature du minéral et des 
conditions de l’eau, pure, chargée de divers sels, ou contenant des gaz, en particulier de 
 l’acide carbonique et de l'air atmosphérique, c’est-à-dire de l’azote et de l’oxygène. Au 
laboratoire, ces phénomènes, que nous n’étudions pas, sont en outre influencés {par la 
matière des récipients dans lesquels s’effectuent les expériences. Il en est particulièrement 
ainsi pour le feldspath. 

Daubrée, qui se préoccupait surtout de l'usure des minéraux dans les fleuves et les 
cours d’eau, expérimentait à des vitesses de 2550 mètres à l’heure environ, c’est-à-dire 
comprises entre 0", 80 et 1 mètre par seconde (2), qui dépassaient considérablement celles 
auxquelles sont soumis, sauf sur l'extrême littoral des plages, les grains sableux dans la 
mer, sous l'influence des courants. Pour ceux-ci, les chocs sont moins violents et par con- 


(1) Dausrte, Études synthétiques de géologie expérimentale, 1879. 
(2) Dausrée, loc. cil., p. 250; 


4 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


séquent l’usure moins énergique. Il a opéré sur des fragments de dimensions comprises 
entre celle du poing et celle d’une noisette et, par suite, ses expériences s'appliquent plutôt 
à des pierres, à des galets, à la rigueur à du gros gravier qu’à du véritable sable. 

Les considérations c ont besoin d’être précisées. Dans un cylindre maintenu pendant 
la durée d’une expérience à une vitesse constante, il est évident que certains grains de 
forme, dimension ou poids déterminés, et correspondant à la vitesse artificielle commu- 
niquée, resteront indéfiniment anguleux puisqu'ils ne cesseront pas de flotter; mais il n’en 
sera pas tout à fait de même dans la nature parce qu’un courant, surtout en mer, sauf 
peut-être d’infiniment rares exceptions, ne demeure pas éternéllement animé d’une 
vitesse constante. Même dans un fleuve coulant continuellement, il n’existe pas unifor- 
mité de vitesse de l’eau dans toute la masse liquide et il se rencontre toujours, pour les 
grains de sable emportés, des abris locaux où ils peuvent rester en repos. La vitesse 
limite de l’eau capable de transporter un grain en flottaison ne joue donc, dans la nature, 
qu'un rôle momentané pour les phénomènes d’usure, et un grain anguleux montre 
seulement qu'il a été soumis momentanément à un courant capable de l'avoir transporté 
là où il est, mais qui ensuite l’y’a laissé à l’abri et par conséquent en repos. Il convient de 
se rappeler, dans ces considérations qui s'appliquent à la génèse des places à gravier, dans 
les fonds littoraux et côtiers, le fait a constaté par Daubrée, que la progression des grains 
s'effectue par bonds suivis de repos. Un grain entraîné par un courant horizontal ne 
cesse pas d’ailleurs d’avoir son poids qui, si faible qu’il soit, tend à le faire descendre 
verticalement, de sorte qu’en réalité, quelle que soit la vitesse horizontale du courant et 
quelque constante qu’elle demeure, la trajectoire du grain l’amène tôt au tard sur le sol. 
Après un certain temps de repos, il est repris brusquement par une poussée de courant 
plus violente, dirigée vers le haut, qui lui fait quitter le sol et le remeten route. Il se 
retrouve alors dans les mêmes conditions que la première fois; bientôt il retombe sur le 
sol, s'arrête, repart et ainsi de suite. Telle est l’explication des bonds successifs suivis de 
repos qui marquent sa progression. 

J'ai mesuré expérimentalement la vitesse limite de courant susceptible de transporter 


un grain déterminé; j’ai reconnu qu'elle était celle du courant vertical maintenant ce grain 


immobile et qu’elle égalait sensiblement la vitesse de chute verticale du grain au sein du 
liquide en repos. 

J'ai repris les expériences de Daubrée. Dans ce but, j'ai fait tourner sur lui-même 
autour de son axe un petit flacon en verre, quelquefois aussi un système de quatre flacons 
à la fois, sous l’action d’une turbine ou d’une dynamo. La vitesse était de 42 tours par 
minute, soit 7 centimètres environ par seconde, et le chemin parcouru était évalué en 
kilomètres. Les flacons étaient à demi remplis, avec ou sans eau, de grains minéraux 
concassés au mortier d’acier, lavés, séchés et passés à travers des tamis calibrés; ils 
étaient tantôt gros et tantôt petits, mais toujours de grosseur uniforme. On les pesait avant 
et après roulement, de sorte que l’usure ou perte de poids était évaluée par différence ; 
quelquefois même les grains étaient comptés. Ces expériences ont été fort longues et fort 
laborieuses ; ceftaines d’entre elles ont été poussées jusqu’à 3 230 000 tours. 

Les expériences de choc ont été faites aussi en enfermant les échantillons à étudier, 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 5 


préparés comme précédemment, dans huit tubes en verre, bouchés, longs de 15 centimètres, 


disposés en rayons divergents perpendiculairement à l’axe de rotation. Les grains tombaient 
les uns sur les autres, de la hauteur du tube, deux fois à chaque tour. 

Les dernières expériences ont consisté à faire frotter des morceaux préalablement 
aplanis suivant une face, de divers minéraux maintenus immobiles et chargés de poids 
variables, sur une meule de carborundum horizontale, arrosée d’eau, mue à la main par 
l'intermédiaire d'une manivelle, au rythme d’un métronome, de façon à obtenir des 
vitesses uniformes variables à volonté et à pouvoir évaluer le chemin parcouru. L’usure 
était évaluée par la perte de poids après un parcours déterminé. Ces expériences ont été 
les plus satisfaisantes, à la condition de se tenir en garde contre la production de petits 
éclats se produisant sur l’arête en contact avec la meule. Plusieurs minéraux ont été 
frottés en même temps qu’un gros bâton de verre qu'on usait ainsi sur sa tranche et qui, 
chaque fois, servait d’étalon; il fallait ne pas tourner trop vite et ne pas trop forcer les 
poids. ; 

Les résultats obtenus étaient généralement mis sous forme de courbes afin de permettre 
les comparaisons. Ceux obtenus avec la meule de carborundum donnaient les chiffres 
les plus concordants. Avec les autres, il était beaucoup plus difficile d'éviter les irrégu- 
larités, tout en restant cependant capable de distinguer la loi. Je ne reproduirai pas les 
nombreux tableaux de chiffres qui ont été dressés. Après chaque expérience, les grains 
étaient examinés au microscope et leur caractère plus ou moins anguleux observé ainsi 
que leur aspect général. Si j'en avais eu la possibilité, je les aurais toutes recommencées 
en opérant constamment dans des conditions rigoureusement identiques, c’est-à-dire en 
ne laissant, autant que possible, varier qu’une seule variable. Le dispositif adopté pour 
l'usure par frottement sur la meule n’aurait pas lieu d’être essentiellement modifié. Pour 
l'étude de l’usure par choc, je me servirais encore du flacon tournant sur lui-même ; mais 
afin d'économiser la matière d’essai qui doit être, à chaque fois, employée neuve, ce qui 
exige une préparation longue et fastidieuse lorsque le minéral est abondant et devenant 
presque impossible quand le minéral est rare, je remplirais toujours le flacon avec une 
même quantité de billes de verre de moyenne grosseur et une même quantité, d’ailleurs 
assez faible, des grains à expérimenter. 

Les résultats des essais se résumeront de la façon suivante : 

1° L’usure des grains minéraux s’effectue dans la nature sous deux influencesdistinctes : 
le choc et le frottement. Le choc possède une action beaucoup plus puissante que le 
frottement. 

2° Si, en opérant ainsi qu'il a été dit, on fait tourner des grains sableux les uns contre 
les autres, qu’aprés des parcours connus on pèse le limon obtenu et les grains restants, 
et qu’on représente (fig. 1) l’usure d’après la perte de poids pour cent au moyen d’une 
courbe rapportée aux deux axes rectangulaires : O X = parcours effectué, O Y = pourcen- 
tage de l'usure, on reconnaît que cette courbe STR présente l’aspect d’une branche 
d’hyperbole. L’usure, très grande au début, ne cesse de diminuer d’abord rapidement de 
S en T, sommet de la courbe, puis de T en R, avec une lenteur de plus en plus consi- 
dérable, La courbe changera évidemment selon les conditions de l'expérience, dans l’eau 


6 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


ou à sec, selon la vitesse, la nature, la dimension des grains; mais elle conservera toujours 
la même forme générale. La portion S T correspond surtout à l’usure par choc s’arrétant 
au sommet T, tandis que la portion T R, asymptote à 
O X, correspond surtout à l’usure par frottement. On se 
l'explique aisément : au début, les grains, très anguleux, 
présentent une multitude de petites saillies promptement 
abattues par cette multitude de chocs trés peu violents. 
Mais, comme ces derniers demeurent constants, ils 
sont de moins en moins efficaces sur des grains de moins 
en moins rugueux et présentant de moins en moins de 
saillies. L’abscisse O A indique le parcours après lequel 
le grain a perdu la presque totalité de ses aspérités et 
Fo A est pratiquement arrondi. L’étude de la question con- 
aa sisterait dans l'établissement, d’après expériences, d’un 
nombre considérable — puisque, dans l’espèce, il pourrait être infini — de ces courbes 
correspondant chacune à un cas particulier. 
3° Si, opérant sur du quartz, cas le plus intéressant dans la nature où le minéral 
constitue la plus grosse part des sables sous-marins, on examine au microscope le limon 
produit, on voit qu’il est formé de grains anguleux de toutes les dimensions. Les éclats 
diminuent de grosseur à mesure que le roulement progresse et la proportion de poussière 
infiniment fine augmente tandis que sa quantité totale diminue. Les grains se couvrent 
de mouchetures opaques, serrées les unes contre les autres, et qui donnent même à l’œil 
nu et surtout en masse, une teinte opaline caractéristique. On assiste à la création de cette 
patine reconnaissable sur les grains roulés à sec et plus particulièrement ceux des dunes. 
Je l'ai retrouvée sur les sables des dunes d'Arcachon, tellement arrondis que les orfévres 
en font provision pour polir l’argenterie sans larayer, de Hasi-bel-Kebash dans le Sahara(1), 
ainsi que sur de la poussière éolienne récoltée au sommet du Sinaï. Je l’ai encore 
reconnue sur des grains de quartz contenus dans des sols sous-marins de la région des 


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8 


Acores et qui montraient ainsi qu’il provenaient par voie éolienne du désert du Sahara. 
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Ce facies spécial, pour un ceil habitué, permet de distinguer avec un certain degré de 
certitude, des grains usés a sec, par déflation, de grains usés dans l’eau. Si on se livre au 
même examen sur des limons, au moyen de !’ultra-microscope, on voit reculer jusqu’à 
l'infini la ténuité des fragments détachés des grains. On se rend ainsicompte du mécanisme 
du phénoméne. J’ai observé de la méme maniére des sédiments marins appartenant aux 
catégories dénommées fins-fins et argile et j'ai constaté le même aspect que sur les 
limons. 

Si on soumet au microscope des grains d’autres minéraux que le quartz, on distingue, 
pour beaucoup d’entre eux, un aspect particulier. 

Le silex blanc fournit au début notablement plus d’éclats que le silex noir. On 
n’apercoit point de mouchetures sur ce minéral dont la pate, beaucoup plus compacte et 


(1) Tourer, Étude minéralogique d’un sable du Sahara (Bull. de la Soc. minéralogique de Frante, t. IV, 
1881, p. 262, 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 7 


grasse que celle du quartz, tend à acquérir plus rapidement que celui-ci la forme globu- 
laire. 

L’orthose devient opaque et, au début, s’use très rapidement par choc; mais bientôt 
l'usure se fait avec régularité : son aspect ne diffère guère de celui du quartz. A l’ultra- 
microscope, il m’a été impossible de saisir un passage quelconque entre les fragments 
minéraux infiniment menus et l'argile. 

Les grains de magnétite, avant le roulement, sont brillants et réfléchissent la lumière 
sur une multitude de facettes de cassures très petites et serrées les unes contre les autres. 
Après l'expérience, ils sont petits (o"",05), décroissent régulièrement de grosseur a 
mesure que le nombre de tours augmente, s’arrondissent et finissent par présenter un 
aspect tellement terne qu’ils ressemblent a de la houille compacte. 

L’amphibole en grains présente d’abord un aspect fibreux, une couleur noire teintée 
de gris un peu bleuté; par le roulement, elle se dépolit graduellement; mais, jusqu’à ce 
qu'elle le soit complètement, on distingue encore sur le fond gris mat de sa surface des 
places non usées se détachant en taches noires, de forme souvent allongée, distribuées 
dans le sens des fibres. L’usure est forte et se fait régulièrement. 

La tourmaline, avant roulement, a des grains d’une couleur noire gris d’acier avec, 
sur les bords, des reflets d’un jaune rougeatre par lumière réfléchie, jaune verdâtre par 
lumière transmise. Les arêtes de cassure montrent quelquefois de fines stries perpendi- 
culaires. Au début, les éclats sont très nombreux, l’usure est rapide et les fragments dépolis 
offrent des surfaces d’un gris blanc matse détachant sur les portions en creux non dépolies 
et de couleur gris d’acier foncé. 

Les grains de grenat se couvrent, par usure, d’une patine d’un jaune ocreux; ils 
s’arrondissent rapidement et ne tardent pas à devenir complètement mats. 

Des coquilles concassées en grains de o*",2 environ ne donnent que peu ou point 
d’éclats et manifestent une forte tendance à s’arrondir. Avant le roulement, elles sont 
translucides et, sur beaucoup de grains, on distingue des dents régulières, par rangées, 
rendues visibles par leur nuance claire sur le fond plus mat de la pâte du fragment. 
Après le roulement, leur surface se couvre d’un mamelonné particulier. Les portions 
rougeâtres qu’on y aperçoit souvent sont plus spécialement attaquées. 

Toutes ces expériences ont été faites à sec. On est donc en droit d’en comparer les 
résultats avec ceux produits naturellement par la déflation. La mesure de l’usure à sec, 
par choc et par roulement, dans le flacon horizontal, permet d’affirmer que les huit 
minéraux expérimentés, réduits en grains anguleux égaux, partant ensemble dans les 
mêmes conditions, disparaîtront dans l’ordre suivant : 

Tourmaline, grenat, magnétite, coquilles, amphibole, orthose, quartz, silex. 

Si, pour le diagnostic au microscope d’un grain douteux, on voulait avoir recours à 
l'aspect par choc après roulement, on pourrait rapidement fabriquer un grain type en 
enfermant des grains concassés du minéral supposé dans un petit tube de verre, en les 
secouant fortement à sec pendant quelques instants, puis en les lavant, les séchant et les 


comparant au grain douteux. 
Le flacon dans lequel, au cours des expériences précédentes, on a fait tourner sur 


8 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


eux-mêmes au sein de l’eau, pendant 23 kilomètres, des grains de quartz, étant aban- 
donné au repos, contenait encore, après dix jours, un liquide louche. Le résultat, d’accord 
avec les conclusions tirées de l’examen à l’ultra-microscope, prouve que le quartz s’est 
en partie réduit en parcelles tellement fines qu’elles restent en quelque sorte indéfiniment 
en suspension dans l’eau. Ainsi s'expliquerait la présence jusque dans les portions les 
plus centrales et les plus calmes des océans, de poussières non calcaires infiniment fines, 
apportées au sein de l’eau même de rivages lointains et qui auraient mis un temps très 
long à se déposer ou, théoriquement, seraient restées indéfiniment en suspension si des 
phénomènes d’adsorption, de fixation superficielle par attraction moléculaire de sels en 
dissolution dans l’eau n'étaient pas venus hater leur descente. i 
La nature commence donc, en opérant par chocs, par travailler avec rapidité à dimi- à 
nuer le volume des grains de sable; mais lorsque ceux-ci ont atteint un certain degré de 
finesse, leur ténuité même les soustrait presque complètement à toute influence destruc- 
trice ultérieure d’ordre mécanique. Soit dans l’air, soit dans l’eau en mouvement, ils | 
sont entraînés en flottaison, sans se heurter ni se frotter les uns contre les autres et par 
conséquent sans s’user. L'état de repos complet qu’ils atteignent tôt ou tard les sous- 
tirait encore à l’usure. En revanche, au moment où les forces mécaniques sont devenues 
impuissantes contre eux, en conséquence de la diminution de leur volume, l'augmentation 
considérable de leur surface, à volume égal, les livre à une autre force naturelle, la 
puissance dissolvante de l’eau qui les baigne, que j’ai ailleurs tenté de mesurer (1) et qui 
s'exerce proportionnellement à la surface. Le tableau suivant (2), pour chacune des 
catégories de grains sableux servant à la classification des fonds marins, sable gros, 
moyen, fin, très fin, moyen et fin-fin, donne le diamètre moyen du grain, le nombre de 
grains représentant ensemble le volume d’un grain unique de sable gros et la surface 
totale de ces derniers par rapport à celle de ce grain unique de sable gros. On voit, par © 
exemple, qu'il faut 3375000 grains de fin-fin de o”",o1 de diamètre chacun 
pour faire le volume d’un seul grain de sable gros, et que ce dernier présentera une 
surface qui ne sera quela cent cinquantième partie de celle présentée par l’ensemble 


… 


a eee ae en a ee 


ees a 


a ee eect Pos 


de I ele eT ANE Ne 


(1) J. Taoutet, Solubilité de divers minéraux dans l’eau de mer (Comptes-rendus Acad. Sc., t. CVIII, p. 753 
1889, et t. CX, p. 652, 1890). 

(2) Le calcul s’effectue de la maniére suivante: 

Si D est le diamétre de 1 grain de sable gros; 

Si d est le diamétre de 1 grain de sable moyen, par exemple, 


I 
=n D§; 


le volume de 1 grain de sable gros sera 6 


celui de 1 grain de sable moyen, : Sas 
y 3 
le nombre de grains de sable moyen sera le rapport des volumes, c’est-a-dire a a (7): =n. (Pour le sable moyen, ~ 
1,50 
(=x) ie 1468 = 14,87.) 


0,61 : 
La surface supposée sphérique d’un grain gros étant = D2, et celle d’un grain moyen 7 d?, la surface de n grains 
; Did? x a D ; 
moyens sera A 2 => cae n 
: x Di D 1,50 i 
et le rapport des-deux surfaces sera iF Diam T = ca 2,10. 
, 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 9 


des 3375000 de grains fins-fins. Ce même volume de matière donnera donc 150 fois 
autant de prise à la puissance dissolvante de l’eau ambiante à l’état de fin-fin qu’à l’état 
de sable gros. 


Diamètre. Nombre de grains: Surface. 
SAT 0 ER A OT AUS ME ES EU RL OA QUE ae ae 1,50 mm. I I 
MOVER sok ints odes ck dine ek ov ET lens à 0,61 — 14,87 2,36 
SL EERE RRO RID Oy WE Seo a eM CPE D 0,34 — 85,87 4,41 
Se BS ANG is APP eee dlwe i oak enw 0,13 — 1 536 11,54 
UE 11 ees A UT ANT as eed « 0,05 — | 27 000 30 
ee RNA PE ne TU LE M Eee ee Pen eee 0,03 — 125 000 50 
TES ae ion al Roe Giclee ais a nl Rs Ne ue 0,01: — 3375 000 150 


La faculté relative plus ou moins grande d'être usés par frottement au sein de l’eau 
pourrait, d’après mes expériences faites à la meule de carborundum et avec le degré 
d’approximation que comportent ces recherches, être représentée par les chiffres suivants 
pour les minéraux les plus importants en lithologie océanique. On y a joint les valeurs 
de la porosité, de la densité absolue et de la densité apparente résultant de la porosité (1) 
pour plusieurs de ces minéraux; elles ont été mesurées à l’occasion des expériences 
précédentes et elles seront utilisées dans un autre travail. 


DENSITÉ DENSITÉ 
POROSITÉ hero tt Mise OBSERVATIONS 
o 2,651 2,651 
» » » 
0,0027 2,5 2,55 
0,0021 2,72 2,72 Marbre blanc. 
» >» » Calcite cristallisée. 
1,63 391 2,60 Sinémurien de Nancy. 
28,8 2,695 - 1,517 Varengeville, Seine-Inférieure. 


Un fragment de craie s’userait donc environ 3740 fois plus rapidement qu’un frag- 
ment de quartz de même volume. 

Certains minéraux en lamelles, comme le mica ou la chlorite, offrent un mode de 
destruction mécanique plus complexe. Il est évident que des paillettes de mica roulant 
les unes sur les autres n’éprouveront pas d’usure sensible. En revanche, vu leur faible 
dureté, elles s’useront rapidement au contact de minéraux massifs et atteindront promp- 
tement la limite de dimension qui les maintient en suspension dans les courants les 
moins rapides. Enfin leur surface considérable ainsi que leur composition chimique les 
rendent particulièrement sensibles aux forces de dissolution et de décomposition chimique. 

Résumé. — Pour produire la destruction des masses minérales et des sables, la 
nature, en outre d’autres moyens parmi lesquels l’éclatement par le froid (2) dont nous ne 


(1) J. Taoucer, Expériences sur la pierre ponce (Mémoires océanographiques, 1°e série, p. 4. Résultats des cam- 
pagnes scientifiques du Prince de Monaco, fascicule 29, 1905). 

(2) J. Taouer, Sur un mode d’érosion des roches par l’action combinée de la mer et de la gelée (Comptes rendus 
de l'Acad. des sciences, t. CIII, p. 1193, 1886). r 


T. HI. — Fasc. 7. 2 


- 10 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


nous occupons pas ici, emploie d’abord le choc, puis successivement le frottement, les 
forces de dissolution et celles de décomposition chimique. Quand les forces mécaniques 
cessent de pouvoir s'exercer à cause de la ténuité des grains, elles sont remplacées par 
les forces physiques et chimiques d’autant plus susceptibles de s'exercer que le minéral a 
été amené, par les expériences précédentes, à un état particulièrement favorable à leur 
action. 

Le mode d’action des influences mécaniques dont le résultat final est l’usure, varie 
sur les divers minéraux: tel d’entre eux, particulièrement sensible au choc, résistera au 
contraire davantage au frottement, et inversement. L’usure d’un minéral par choc dépend 
surtout de sa fragilité ; son usure par frottement, de sa dureté. Mais ces propriétés molé- 
culaires de la matière, quoique distinctes, sont si impossibles à isoler expérimentalement 
l’une de l’autre qu’on comprend la difficulté d’élucider d’une manière absolument 
précise le problème si complexe de l’usure. On peut dire seulement qu’un minéral s’use 
d'autant plus vite au début qu'il est plus fragile et ensuite qu’il est moins dur. 

L'aspect d’un grain examiné sous le miscroscope avec un médiocre grossissement et 
en diaphragmant fortement, sa forme plus ou moins arrondie, sa surface plus ou moins 
anguleuse, la façon dont y sont distribuées les taches mates et brillantes, c'est-à-dire sa 
patine particulière, fournissent une notion sur la provenance de ce grain, éolienne, de 
dune ou de plage. Il est probable que les grains d’origine glaciaire possèdent, eux aussi, 
des stigmates spéciaux dont l’étude mériterait d’être entreprise. 

Il n'existe pas de limite à la ténuité des parcelles détachées d’un minéral par le choc. 
Ces parcelles, infiniment petites, sont distribuées sur la totalité du lit océanique, car on en 
constate la présence dans le résidu argileux de tout sol sous-marin traité par un acide, 
quelque loin des côtes qu’il ait été recueilli. Or, ces parcelles non calcaires n’ont évidem- 
ment pas été créées sur place. 


II. — Considérations sur les deltas. 


Le profil en long typique d’un fleuve possède la forme d’unecourbe dite « d’équilibre », 
d’aspect parabolique qui, « tangente à l'horizontale dans la région de l’embouchure, se 
relève très lentement et progressivement à l’amont » (1). Le lit d’un fleuve se compose 
essentiellement de deux portions: l’une, vers la source, torrentielle et à pente très accusée ; 
la seconde, notablement plus longue, où la pente, à travers la pénéplaine, est au contraire 
extrêmement faible. Dans la portion torrentielle, comme l’eau coule avec une vitesse 
beaucoup plus grande que dans la portion à peu près horizontale, il en résulte que les 
débris rocheux, enlevés au bassin d’érosion et semés sur le lit du fleuve, sont bien plus 
volumineux que dans le bas du fleuve. On trouvera donc, à partir de la source, 
d’abord des blocs, plus bas des galets, ensuite des cailloux et des graviers, puis des sables 
et enfin des boues. Ces deux dernières sortes de sédiments parviennent seules à la mer ; 


(1) Lapparent, Traité de Géologie, p. 166, 


1S 
ee RP ean Woes 
a Pan eee ee a 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE al 


je n’en ai pas rencontré d’autres dans les fonds bordant la côte du delta du Rhône. Devant 
Cette, la projection sur le fond du courant côtier méditerranéen longeant du N. E au S. W. 
la côte du Languedoc et charriant les sédiments du Rhône est marquée sur la carte bathy- 
lithologique par la bande des vases très sableuses contenant de 25 à 50 p. 100 de sable et 
s'étendant entre les profondeurs de 15 et de 45 mètres. En me basant sur la dimension 
des grains transportés, j’ai pu évaluer à un cinquième de nœud environ la vitesse maxi- 
mum de ce courant contre le fond, par 25 mètres de profondeur. Dans certaines régions 
où de hautes montagnes sont très rapprochées de la mer, les cours d’eau qui en descendent, 
ayant une pente fortement accentuée, apportent évidemment à l’océan des sédiments plus 
gros que les fleuves à pente douce. 

Constatons en premier lieu que si, parmiles blocs fluviaux, un certain nombre sont 
partiellement arrondis par suite du passage sur eux de sédiments plus petits qui les heur- 
tent et les frottent avec une force due à la vitesse considérable possédée par l’eau, la 
plupart de ceux qui sont entraînés ont encore leurs arêtes vives. Les sédiments fins 
s’arrondissent, il est vrai, à mesure qu’ils cheminent ; mais au total, les grains sableux, 
même ceux récoltés près de l'embouchure, sont très peu arrondis et, examinés à la loupe 
ou au microscope, ils présentent assez d’aspérités pour mériter d'être appelés anguleux. 
Quelque long que soit le fleuve, le chemin qu’ils y ont parcouru d’une marche régulière 
et jamais rétrograde est, en effet, extrêmement petit si on le compare à celui qu’ils vont 
effectuer lorsque, parvenus à la mer, ils suivront les plages de la côte maritime d’une 
marche en zigzag dite en dents de scie. 

Le tableau donne la longueur de quelques fleuves (1) : 


LUN NE EUR NE eae oes ae ae ese 6 400 kilomètres. BRUGES tia Seas RAs ea à cu 1225 kilomètres. 
AMAZON S65 RER ARCS CURE US 5 500 — RHORE Sr ie RE ra dks des ee 812 = 
LIANT ER ER PET 5 500 — Seine he wine estes. wees 776 — 
EUS) NET PM pe aaa 5 000 -- PONG paswas acne ae dese ean x 675 — 
IGOR sis a's «3 SRE 4 200 — A 0 LR MORE A COPA Le 220  — 
MORE Pr Net Songs ie 3 395 — Déni eee os 160 — 

LEE PT CR EN EP PP too Co 3 000 — Rls oh ie coe ÉLUS PE NE DE 120 — 
AE PORT RP ÉTRPRR 2 800 — | 


Supposons une plage de longueur infinie, rectiligne et dépourvue des divers obstacles 
tels que concavité du contour, présence de caps, intercalation de rivages rocheux bordant 
immédiatement la mer et autres qui retardent considérablement la progression des 
sables ; admettons que les vagues déferlent toujours avec la même obliquité de 1°, chacune 
faisant parcourir au grain 10 mètres en montée et 10 mètres en descente, conditions 
éminemment favorables à la progression régulière des grains, on reconnaît que ceux-ci 
feraient à peine 0",20 en droite ligne parallèlement pour 20 mètres de marche réelle 
perpendiculairement ou presque perpendiculairement à la plage, soit cent fois autant de 
chemin qu’en descendant d’une même distance le cours du fleuve par une marche qui 
n’est jamais rétrograde (2). Or, comme au bord de la mer les variations du vent font fré- 


(1) Annuaire du Bureau des Longitudes. 
(2) Ces chiffres résultent d’un nombre considérable d'observations et de mesures que j'ai effectuées principalement 
en Normandie et en Bretagne. Je ne tiens pas compte d’une quantité relativement très petite de fragments rocheux un 


12 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


quemment déferler les vagues dans des directions différentes et même opposées, il en 
résulte de nombreuses rétrogradations des grains et, comme en outre, dans la nature, la 
présence des diverses causes de ralentissement énoncées précédemment est constante, on 
semble être en droit de porter au moins à 500 cette sorte de coefficient de marche marine. 
En d’autres termes, un grain sableux, pour parcourir 1 kilomètre en ligne droite le long 
d’une plage, fait 500 fois le chemin qu’il aurait accompli pour avancer de 1 kilomètre en 
suivant le cours d’un fleuve. D’autre part, des expériences synthétiques m'ont prouvé que 
le parcours nécessaire pour qu’un grain de quartz s’arrondisse complètement est en quelque 
sorte infini; on ne sera donc pas étonné que, si long que soit un fleuve, les grains récoltés 
à son embouchure soient anguleux (1). C’est ce que m’a montré l’examen microscopique 
des sédiments recueillisaux embouchures du Rhône, de l'Hérault, del’Aude en Languedoc, 
de l’Agly, de la Têt et du Tech en Roussillon. 

Il serait à souhaiter qu’une étude lithologique détaillée des sédiments du fond en 
divers points de son cours fût entreprise pour un grand fleuve, et en particulier pour le 
Rhône ou, pour mieux dire, pour la Durance depuis sa source jusqu’à Avignon, et pour 
le Rhône, depuis Avignon jusqu’au golfe de Fos, car ce fleuve, coupé parle lac de Genève, 
tire de la Durance la majeure partie de ses gros fragments rocheux. 

Examinons ce que deviennent les sédiments fluviaux lorsque, arrivés à la fin de leur 
course, ils quittent l’eau douce et parviennent dans l’eau salée. 

Sortant péle-méle de l'embouchure comme d’un orifice, si la mer est calme, ces 
sédiments tombent sur le fond, tous ensemble, vases et sables. Si, au contraire, ainsi qu’il 
arrive presque toujours, un courant suit parallèlement la côte à peu de distance de celle-ci, 
les sédiments entraînés par lui se distribuent en gerbe vers l’aval, d’après leur densité 
apparente, les plus lourds près de la terre, les plus légers extérieurement, du côté de la 
haute mer, les plus en dehors de tous étant les argiles qui, coagulées dès qu’elles entrent 
en contact avec l’eau salée, se répandront sur un vaste espace de mer en s’éloignant de 
l’origine à la fois dans la direction même du courant et du côté du large. Le mouvement 
des vagues, particulièrement violent à la surface, contribue encore à cette dispersion. 


On sait que la masse des eaux marines, le long des côtes, est verticalement divisée 


en deux zones, l’une inférieure, sensiblement en repos, l’autre supérieure, parcourue par 
un courant superficiel diminuant rapidement de vitesse en profondeur, et parfois même 
par plusieurs courants superposés, susceptibles de différer entre eux en vitesse et en 
direction mais s’affaiblissant de plus en plus en profondeur jusqu’à s'annuler en atteignant 
la limite de la couche d’eau profonde et calme. 

Si l'embouchure du fleuve s’ouvre dans un golfe ou estuaire creux et étroit, protégé 
par conséquent contre le courant côtier, si d’autre part le courant d’eau douce n’est pas 
très violent, les sédiments vont immédiatement tomber sur le fond où ils s’accumu- 
leront en formant un talus qui s’élévera peu à peu, au sein de l’eau profonde, calme, et 


peu plus gros, apportés par le fleuve dans les moments de crues et qui, incapables d’être transportés en mer, même à 
une faible distance vers le large, sont entraînés par les vagues le long de la côte et contribuent, pour une part minime, 
à la constitution des graviers marins. 

(1) On comprend donc l’intérêt qui s’attache à la constatation de l’état anguleux ou arrondi d’un grain de quartz 
dans l’étude microscopique des sédiments modernes ou anciens. 


por 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 13 


finira par atteindre la zone d’eau superficielle ; par places, ils en dépasseront même le 
niveau ; ces îlots solides se multiplieront, se souderont entre eux, il se produira un colma- 
tage général et ainsi prendra naissance un delta qui avancera peu à peu vers la haute 
mer. Tel est, par exemple, le cas des cônes de déjections dans les lacs où les courants sont 
nuls ou presque nuls. Mais dès que sa surface atteindra horizontalement la limite au delà 
de laquelle commence à se faire sentir le courant côtier, il se produira un arrêt immédiat 
dans l’accroissement du delta parce que les apports fluviaux seront aussitôt entraînés et 
éparpillés en gerbe, en aval de ce courant. Dans certains cas; sous l'influence du courant 
côtier, pourra même se produire une déviation dans le sens du courant de la pointe sous- 
marine du delta. Le phénomène est visible sur le delta sous-marin de l'Hérault dévié vers 
l'Ouest par le courant méditerranéen. 

Si le fleuve débouche, il est vrai, à l'extrémité d’un estuaire mais débite un volume 
d’eau douce assez abondant pour transporter directement les sédiments dans la zone 
d'action du courant côtier, il ne se formera point de delta. Il en sera de même si 
l'embouchure du fleuve est située dans l'alignement général de la côte et presque immé- 
diatement contiguë au courant côtier. 

Ces remarques s’appliquent aux deltas du Danube, du Nil, du Pô, du Rhône, prove- 
nant tous d'un remplissage d’estuaire. Le delta du Mississipi, produit en eau peu profonde 
(environ 30 mètres), dans une mer presque sans marées (30 à 40 centimètres) et où le 
courant côtier ne commence à se faire sentir qu’à une distance de terre relativement 
assez grande, s'étend en forme de longs bras vers le large. L’Hérault et l'Aude, dont les 
embouchures sont quelque peu protégées par le cap d’Agde, n’ont que des deltas sous- 
marins. Enfin l’Agly, la Tét et le Tech, débouchant dans l’alignement même de la côte 
et dont les sédiments sont immédiatements saisis par le courant côtier, n’offrent aucune 
trace de delta, ni sous-marin, nisus-marin. 

Quel que soit le cas, on voit que jamais, à l'embouchure d’un fleuve dans la mer, 
l'accumulation des sédiments ne peut se continuer indéfiniment et par conséquent n’est 
jamais en état de provoquer par son poids, ainsi qu’on l’a prétendu, un affaissement de 
la région continentale voisine c’est-à-dire un avancement apparent de la mer vers la 
terre ou, en d’autres termes, une transgression. 

Lenthéric avait, dès 1875, signalé une transgression de la mer s’effectuant aux 
Saintes-Maries, dans le delta du Rhône. Après lui, en 1891, 1906 et 1911, M. Camille 
Flammarion avait confirmé le fait en se basant sur la distance comprise en ligne droite 
entre l’église des Saintes-Maries et la Méditerranée, et diminuant sans interruption d’une 
longueur variant de 9 mètres à 36",50 par an. Un autre auteur, M. David Martin, 
conservateur du Musée départemental de Gap, reprenant l'étude de la même question 
dans une brochure intitulée : Invasions marines des plages de la Camargue et du 
Galéjon, avait cru devoir attribuer cette transgression à deux causes : en premier lieu, 
à un affaissement de la côte « alourdie par les milliards de mètres cubes de pierre et de 
terre déversés sur le littoral.par le Rhône depuis le tertiaire ». Nous venons d'exposer 
les motifs qui nous empêchent de nous rallier à cette opinion. Il donne, comme seconde 
cause, des dislocations volcaniques internes. Cette dernière conserve toute sa valeur. Le 


14 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


niveau de la région est éminemment instable car la côte actuelle est très proche de la 
Tyrrhénide, terre hypothétique maintenant submergée, ancien axe cristallin contre 
lequel les plis des Apennins se seraient formés, à la fin de l'éocène, avec les Pyrénées et, 
à la fin du miocène, avec les Alpes » (1). La région coincide en outre avec la portion 
orientale, affaissée sous les eaux, de l'Espagne et de la France(2). La belle carte du golfe 
du Lion par M. Pruvôt (3), confirmée par les sondages que j'ai moi-même dû exécuter 
pour l'établissement de ia carte bathylithologique du golfe du Lion, montre bien que 
le rivage de cette terre s’étendait alors du cap de Creus jusqu’en Provence, a l'Est de 
Marseille, et faisait face à la mer vers le Sud. Il était marqué par une suite de ravins, 
sortes de fjords, longs, étroits et très profonds, désignés aujourd’hui en océanographie 
sous le nom de rechs. Tout l’espace compris entre cette ligne et la côte du Languedoc, 
avec le commencement de celle de la Provence, appartenait à la terre ferme et l’on 
remarque que les Saintes-Maries sont précisément situées vers le point de raccordement 
de cette ancienne ligne de rivage avec le continent actuel. 

Résumé. — Le long du cours d’un fleuve, les sédiments minéraux, déposés sur son lit, 
diminuent de grosseur depuis [a source jusqu’à l'embouchure; la vase et les sables par- 
viennent seuls à la mer et ces derniers présentent un aspect anguleux. Ce caractère provient 
de ce que la course rectiligne et jamais rétrograde qu'ils ont effectuée sur le lit du fleuve, 
quelquelong qu’il soit, est extrêmement petite relativement à la route que ces grains accom- 
plissent ensuite en mer le long des plages où ils sont entraînés par le courant côtier. En 
effet, alors que 1 kilomètre en droite ligne en suivant le fleuve ne comporte que 1 kilo- 
mètre de course, on peut évaluer cette dernière à 500 kilomètres au moins, lorsque le 
trajet est effectué sur des plages marines par un cheminement en dents de scie. 

Les deltas ne sont susceptibles de se former que lorsque les fleuves créateurs 
débouchent au fond d’un estuaire protégé contre le courant marin qui règne devant la 
côte et que, par conséquent, les sédiments charriés peuvent tomber immédiatement au 
fond de l’eau et s’y accumuler jusqu'à atteindre la surface et même la dépasser. Aussitôt 


que les sédiments atteignent horizontalement le courant côtier, ils sont entraînés et 


disséminés en gerbe, plus ou moins loin en aval, les grains les plus lourds en dedans, du 
côté de terre, les moins lourds vers le large. 

L’accumulation des sédiments à l'embouchure d’un fleuve n’est donc pas susceptible 
d'augmenter indéfiniment, et l’on ne saurait à aucun titre lui attribuer des phénomènes 
de transgression qu'on aurait constatés sur la région continentale voisine. 

On ne doit pas admettre, en l’appliquant au Rhône, que cette cause explique la 
transgression marine de la région des Saintes-Maries. Le mouvement apparent d’inva- 
sion de la mer en cette localité est, à plus juste titre, attribuable à des dislocations volca- 
niques internes d'autant plus justifiées que les Saintes-Maries sont précisément situées 
au point de raccordement du continent actuel et de l’ancien rivage de la Tyrrhénide, 


(1) De Srerani, Comptes rendus de l’Académie des sciences, t. CXV, p. 607. 

(2) L. DE Launay, La Science Géologique, pl. III: x 

(3) G. Pruvor, Essai sut la topographie et la constitution des fonds sous-marins de la région de Banyuls, de la 
plaine du Roussillon au golfe de Rosas (Archives de xoologie expérimentale et générale, 1894). 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 15 


terre hypothétique qui, à l’époque tertiaire, s’étendait du cap de Creus dans la direction 
de la Provence, et dont le rivage semble aujourd’hui jalonné sous-marinement par les 
rechs signalés par M. Pruvôt. 


III. — De la progression et de la distribution des sédiments 
marins le long des côtes. 


La progression et la distribution des sédiments marins le long des côtes dépend de 
trois variables principales : le courant côtier, les vagues et les marées. Il sera fait, dans 
ce travail, abstraction de l’action de la marée, d’abord afin de simplifier une étude déjà 
passablement compliquée, puis parce que les considérations dans lesquelles nous allons 
entrer ont été suggérées principalement par les observations faites pendant les quatre 
années consacrées à établir la carte bathylithologique des fonds côtiers du golfe du Lion, 
entre les Saintes-Maries, à l'embouchure du Rhône, et le cap Creus, dans cette partie de 
la Méditerranée où les marées n'existent pas. D'ailleurs, si les marées compliquent les lois 
de la distribution des sédiments sur le lit océanique, elles ne les infirment pas et leur effet 
général se borne le plus souvent à rendre moins nets, plus atténués, les passages entre les 
diverses sortes de sédiments. On n’aura donc à tenir compte ici que de deux variables, le 
courant et les vagues dont les effets seront examinés successivement. Les explications 
données devront, autant que possible, être suivies sur les cinq feuilles grand-aigle de la 
carte bathylithologique du golfe du Lion. 

Quand on examine cette carte, on constate qu'à partir du rivage eten s’avancant vers 
la haute mer, les fonds sont partout disposés dans l’ordre : sable, sable vaseux, vase très 
sableuse, vase sableuse et vase proprement dite, en bandes le plus souvent continues, 
parallèles à la côte. Les sédiments sont apportés à la mer par les fleuves qui y débouchent: 
le Rhône, avec une pente de 0,00250, qui en amène, d’après M. Surell, 21 000 000 de mètres 
cubes annuellement, dont les quatre cinquièmes par le grand Rhône et un cinquième par 
le petit Rhône ; l'Hérault, dont la pente est de 0,00960 et qui par conséquent mérite d’être 
considéré comme torrentiel ; l’Orb, l'Aude, l’Agly, la Têt et le Tech; et ensuite ils provien- 
nent des plages mêmes. Les premiers sont des produits d’érosion; les seconds, des produits 
d’abrasion. Ces derniers sont assez peu importants depuis les Saintes-Maries jusque vers 
l'embouchure du Tech, parce que, entre les montagnes de l’intérieur et la mer, s'étendent 
en ligne presque continue des étangs bordés d’une plage basse, rectiligne, qui interceptent 
tout apport minéral à la mer. Il en est autrement entre le Tech et le cap Creus où l’on 
observe déjà les deux genres de sédiments sur les petites plages qui occupent le fond des 
criques des dernières découpures des Pyrénées. La double origine des sédiments est beau- 
coup plus distincte encore sur les côtes françaises de l'Océan et de la Manche, en Bretagne, 
par exemple, où, contrairement à ce qui se passe en Languedoc, la masse des produits 
d’abrasion sur place l'emporte sur celle des produits d’érosion arrivés de l’intérieur du 
continent par l'intermédiaire des fleuves. 

SoitOR (fig.2), une section perpendiculaire ala côte du sol sous-marin, et OX, leniveau 


16 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


de la mer. Sur toutes les côtes maritimes aussi bien que sur celle du Languedoc, l'examen 
des cartes bathylithologiques montre que, de O en R, les sols se succèdent dans l’ordre : 


x 


’ 
4 


fi à 


Ÿ . 
Fl-sss— vos os 


[=] 
ia 
a 
À 
‘\) 


sable, sable vaseux, vase trés 
sableuse, vase sableuse et vase 
proprement dite. Cherchons 
les causes de cette distribution 
générale des sédiments par 
ordredécroissant de grosseur 
et de quantité des grains sa- 

à bleux. 5 

he Considérons maintenant 


IEE X en À dans une mer limitée, 
ls pour plus de simplicité, par 
in une côte rectiligne ne présen- 

tant ni caps, ni crique ou baie, 
- susceptibles de donner nais- 
Fig: va; | sance à des sédiments d’abra- 
sion et parallèlement à laquelle 


| Renee, ENE à (fig. 3) un fleuve débouchant 


un courant passe dans le sens de la flèche. Un fleuve, à son embouchure, ne charrie ni 
galets, ni pierres, mais uniquement des graviers, des sables plus ou moins fins et de l’argile 


Fig. 3. 


plus ou moins calcaire. Ces sédiments, sortant pêle-mêle de 
l'embouchure, vont être saisis dès leur sortie et distribués par 
le courant côtier. Nous supposerons d’abord une mer abso- 
lument calme et sans vagues. 

Toutes les côtes sont balayées par un courant côtier agis- 
sant avec une force variable selon les saisons, l’état de calme 
ou d’agitation de la mer, les vents régnants et d’autres causes, 
mais, au total, toujours dans une méme direction générale. 
On citerait comme exemples typiques, dans la Manche et la 
mer du Nord, le courant qui remonte les côtes de Normandie, 
franchit le Pas-de-Calais, continue sa route dans la mer du 


Nord en la jonchant des silex de la craie normande qu'il dis- 


tribue sur toutes les plages de la Belgique, de la Hollande, de 
l'Allemagne, jusque sur la côte du Jutland ; ou bien encore, 


dans la région qui précisément nous occupe, le courant méditerranéen qui, pénétrant par le 
détroit de Gibraltar, suit de l'Ouest à l'Est la côte d’Algérie, passe devant l'embouchure du 
Nil, continue sa route le long de l’Asie Mineure, finit par longer les côtes de la Provence et 
du Languedoc de l'Est à l'Ouest, celles du Roussillon et de l'Espagne, et termine sa 
course au point même où il l'a commencée en sortant de la Méditerranée par le détroit 
de Gibraltar, Sa vitesse sur les côtes de France serait, d’après Delesse (1), de 7 cen- 


(1) Decesse, Lithologie du fond des mers, Pp. 113, 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 17 


timétres par seconde dans les anses et au plus de 80 centimètres près des caps. 

Le courant côtier dépend surtout des vents régnants dont il est en quelque sorte la 
résultante de la résultante pendant l’année ou même davantage, dans la localité considérée 
et dans la région maritime d’amont. Delesse (1) indique la formule servant à obtenir, 
d’après des observations directes, la résultante en direction et en fréquence des vents 
soufflant en une localité quelconque. La formule ne tient malheureusement pas compte 
de la vitesse du vent. Il est pourtant évident qu’un vent soufflant avec une force très grande 
pendant un mois, par exemple, aura une action plus considérable sur le courant marin 
qu'un vent qui aura soufflé très doucement dans une direction différente pendant deux mois. 
On doit aussi tenir compte de l’ensemble des conditions atmosphériques dans les stations 
en amont de la station considérée. Ces considérations se rapportent à la météorologie 
plutôt qu’à l’océanographie ; cependant elles montrent combien les deux sciences sont ici 
liées entre elles et font comprendre combien il serait désirable qu’un océanographe entre- 
prit l'étude directe, en une localité quelconque, d’un courant côtier et de ses variations. 
La vitesse d’un courant contre le sol en un point de celui-ci est telle qu’elle peut ou a 
pu apporter à cette place les grains sableux les plus gros trouvés ou aussi les remporter 
pour lesremplacer par d’autres semblables ; mais, en tout cas, elle est incapable actuellement 
d’en apporter de plus gros puisqu'il ne s’en rencontre pas de tels. Et comme la vitesse 
d’un courant capable d'apporter un certain grain est, au moins, celle susceptible de main- 
tenir verticalement celui-ci en flottaison parfaite, on en doit conclure que la dimension 
des plus gros grains trouvés à une place donne la vitesse minimum contre le sol, à cette 
place, du courant qui y a apporté ces grains. Cette vitesse, pour un échantillon donné, sera 
donc facile à évaluer expérimentalement. 

Le courant côtier, à la surface, peut ne commencer à se faire sentir qu’à une certaine 
distance de la terre, en D par exemple (fig. 2). A partir de ce point et vers la haute mer, il 
augmente de vitesse de D en E, puis diminue lentement, de E vers X. C’est ce que repré- 
sente la courbe D F G, rapportée à OX et O Y, axe des vitesses. Ce courant est supposé 
s'avancer vers le spectateur. Sur le sol, à partir de A, la vitesse, évidemment toujours 
moindre qu'à la surface, à cause du frottement, croîtra de A en C parce que ce point 
correspond au maximum de vitesse à la surface E F et que la profondeur de l’eau est encore 
faible; puis elle diminue de C en T où, devenue nulle sur le fond que le courant n’atteint 
plus, la nappe d’eau en mouvement remontera en quelque sorte vers lasurface, diminuant 
sans cesse de vitesse jusqu’à ce que le courant, même à la surface, comme le montre la 
courbe DFG, cesse complètement d’exister à une certaine distance de terre. 

Les eaux des fleuves, parvenues à la mer, sont entraînées par le courant côtier. La 
Seine remonte la côte de France vers le Pas-de-Calais et la mer du Nord; le Rhône suit 
vers l'Ouest le courant méditerranéen. Cependant leur influence est faible et ne se fait 
sentir qu’à une courte distance, à cause du peu de volume qu’elles possèdent relativement 
au volume des eaux du courant marin. Les différences de vitesse donnent naissance dans 
la mer, au voisinage immédiat de l'embouchure, à une augmentation momentanée de 
vitesse du courant marin et à des remous qui rendent alors assez variables et temporaires 


(1) Decesse, loc. cit., p. 24. 


T. UI. — Fasc. 7. 3 


“18 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


les dépôts du fond. Tandis que, ainsi que nous l'avons vu, la vitesse du courant méditer- 
ranéen est en moyenne de 7 et au plus de 80 centimètres par seconde, celle du Rhône, 
en temps ordinaire, serait de 0",40 à 1",50 par seconde (1) et, en temps de crues, de4 à 
5 mètres. En mer, l’influence s’atténue rapidement, surtout en profondeur car, d’après 


Desjardins (2), à 2”,50 de profondeur, elle serait déjà nulle. L’eau douce qui, plus légère, . 


se répand par-dessus l’eau salée, ne s’étend pas très loin vers le large, au moins dans nos 
climats, surtout lorsque l’agitation de la mer vient hater son mélange. On peut dire que 
les sédiments charriés sont déversés au même point immédiatement à l'embouchure. Leur 
masse est souvent considérable. D'après Fournet (3), à Lyon, en temps ordinaire, l’eau du 
Rhône contient entre 1/10000 (o",1 par litre) et 1/100000 (0,01 par litre) de matière 
terreuse en suspension; en 1844, le maximum a atteint 2/100 000 (0%,02 par litre). 

Les vagues superposent leur action à celle du courant tout le long de la côte. En 
mer profonde, elles sont sans influence sur le sol sous-marin situé trop profondément ; 
mais en approchant de terre, à mesure que le fond se relève, elles commencent à faire 
sentir leur action en un point V (fig. 2), où elles remuent légèrement les sédiments vaseux 
les plus fins. La profondeur N V varie évidemment avec la force des vagues, c’est-à-dire 
avec leur hauteur. En Méditerranée où Delesse (4) évalue leur hauteur maximum, en 
tempête, à 5 mètres, les ingénieurs ont reconnu (5) qu'à 5 mètres de profondeur, les 
enrochements des constructions sous-marines ne sont pas dérangés, tandis que M. de 
La Roche Poncié fixe cette profondeur de repos à 3 mètres seulement, par temps ordinaire, 
dans le golfe de Gascogne. Il est évident que la profondeur à laquelle les vagues agitent 
sur le fond les sédiments vaseux infiniment fins doit être beaucoup plus grande. L’agitation 
se continue du point V jusqu’au point L, un peu en avant du niveau de l’eau où, par 
suite du ressac, les sédiments sont remués avec une énergie maximum. C’est ce 
qu’exprime la courbe N MO, rapportée également aux axes O Y et OX. Il est bien 
entendu que cette courbe, ainsi que D FG, indique la variation de grandeur de la variable 
qu’elle représente et non la relation mutuelle entre la force des vagues et celle du courant: 
En d’autres termes, on ne considérera pas, en valeur absolue, les ordonnées de l’une des 
courbes par rapport aux ordonnées de l’autre. 

On sait que, de quelque direction qu’arrivent les vagues poussées par le vent (fig. 4), elles 
éprouvent un ralentissement en parvenant sur des fonds de moins en moins profonds 
contre lesquels s'exerce un frottement. Elles exécutent donc une conversion et rencontrent 
la plage contre laquelle elles déferlent dans une direction très sensiblement perpendi- 
culaire. « La forme générale de la côte (6), l'alignement de la plage, lesens de lapropagation 
de la marée, quand elle existe, concourent à donner aux lames qui frappent un rivage 
une direction légèrement oblique et à introduire ainsi dans le mouvement imprimé aux 
matériaux transportés une composante parallèle à la côte. » 


(1) Lapparent, 7 raité de géologie, 1900, p. 177. 
(2) DeLesse, loc. cit., p. 114. 

(3) LAPPARENT, loc. cit., p. 218. 

(4) Deesse, loc. cit., p. 106. 

(5) DèLesse, loc. cit., p. 110. 

(6) LAPPARENT, loc: cil:, p: 244. 


| 
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: 
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à 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 19 


Les vagues, arrivant sur la plage dans la direction à très peu près perpendiculaire 
XNED O (fig. 2), vont remuer le fond de plus en plus violemment de V jusqu'en L. Il 
ne se fera d’abord qu’une oscillation infiniment faible ne mettant en mouvement sur place 
que les fines particules d’argile et ensuite, en approchant de terre, non seulement ces 


particules mais des grains de sable de plus en plus 
volumineux seront agités. KKKKKKKKI 
On comprend que, sauf dans le cas de courants 


extrêmement violentsproduisantdes affouillements, 
un courant modéré passant sur un fond absolument 


iS 
uni, méme formé de vase trés fine, alors qu’aucun aa 
grain ne dépasse son voisin et n’offre la moindre ss AoteGciat 
Qu ee HA 


prise, restera inactif et n’opérera aucun transport 

de matière. Il glissera sur le sol. Il en sera autre- 

ment si les matériaux du fond, au lieu d’être Fig. “4 

parfaitement tassés, sont mis en suspension même 

en couche très mince par le faible clapotis oscillatoire résultant de chaque va-et-vient des 
vagues. Les sédiments seront alors balayés par le courant, d’abord les plus fins, ensuite 
ceux de plus en plus gros à mesure que le courant augmentera de force. 

Sur le fond, de R en T, courant et vagues seront sans action sur le fond; l’eau restera 
donc immobile et, dans les portions inférieures de sa masse, se déposeront les matériaux 
en suspension, même les plus ténus, c'est-à-dire des vases. 

De T en V, le courant passe sur le fond quoique les vagues ne remuent pas encore 
le sol. Les sédiments n'étant pas mis en suspension, le sol sous-marin reste uni et, comme 


rien n'offre de prise au courant, celui-ci est impuissant à transporter des sédiments et 


les vases se continuent, quoique peut-être un peu plus riches en fins-fins que les précédentes. 

De V en C, les vagues et le courant augmentent ensemble d'intensité. Il se fait en 
conséquence en V un enlèvement de matériaux très fins ou, si l’on veut, un empêchement 
à leur dépôt, puis, plus loin, de grains de plus en plus gros. Aux environs de C seront les 
plus gros grains de sable et en plus grande proportion, mêlés à de la vase protégée contre 
l'enlèvement parce qu’elle s’est blottie dans les interstices des grains sableux. En résumé, 
de V en C, vase sableuse, ensuite vase très sableuse et même commencement du sable 
vaseux. | 

Après À, le courant ne se fait plus sentir. Il se produit dans la région très peu profonde, 
immédiatement contiguë à la côte, des contre-courants et des remous qui atténuent et 
finissent même par annihiler le courant lui-même. Sans les vagues, la région A O serait 
vaseuse ; mais celles-ci, prenant au contraire une puissance de plus en plus considérable, 
vont affouiller fortement le sol, surtout en L, au bas de la plage où elles déferlent. Aucune 
vase ne résistera à l’entraînement et il en sera de même pour les sables, à commencer par 
les plus fins : tous seront balayés par ordre décroissant de grosseur et on passera de A en 
L, des sables vaseux aux sables moyens et enfin aux gros, seuls en état de s'immobiliser. 
Si les échantillons récoltés à ces places contiennent des grains sableux fins et de l'argile, 
toujours d’ailleurs en petite quantité, c’est que la finesse même de ces sédiments léur a 


° 20 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


permis de pénétrer entre les interstices vides du gros sable tassé et d’être ainsi protégés 
contre l’action des vagues. Dans les tourbillonnements qui auront lieu, les sédiments fins 
tenus en suspension dans toute la masse d'eau A B LOD finiront toujours par pénétrer 
dans la région A D EX du courant côtier et par être entraînés par lui. 

De L en O et un peu au delà, s’étend la plage. Son profil diffère peu d’un plan d’une 
inclinaison uniforme de 1°, d’après de Lapparent. Des différences de pente assez grandes 
pourront néanmoins se manifester, même sur des plages assez voisines. Ainsi que je l’ai 
mesuré moi-même, alors que la plage du Ris, près de Douarnenez, offre une pente de 
0, 5 p. 100, celle de la plage des Sables Blancs, à l'Ouest de Tréboul, à 3 kilomètres à peine 
de distance en ligne droite, est de 10 p. 100. Ces inclinaisons diverses jouent dans la 
sédimentation et le transport des grains un rôle encore insuffisamment étudié et plus 
important qu’on ne le pense. 

Suivons séparément les grains sableux et vaseux entraînés par le courant ADEX (fig. 2) 
et d'autre part les sables de la région ABOD, et rappelons-nous que l’argile apportée par 
l’eau douce du fleuve A (fig. 3), arrivant au contact de l’eau de mer, se coagulera de sorte 
qu’il sera désormais permis de parler de ses flocons ou grains. 

Les grains sableux et vaseux sortis de A pénètrent à la fois dans la mer et dans le 
courant côtier, d’autant plus que les fleuves forment toujours à leur embouchure, par le 
dépôt immédiat de leurs sédiments les plus gros, un delta qui, même sous-marin et invi- 
sible, prolonge leur cours jusqu’à une certaine distance en mer où ils sont saisis par le 
courant. Si, comme dans les lacs, il n’existait pas de courant côtier, les sédiments 
fluviaux, gros et petits, tomberaient immédiatement pêle-mêle et formeraient un cône de 
déjection. Le courant opère un triage susceptible d’être comparé à une sorte de vannage. 
Chaque grain, au sein de la masse d’eau en mouvement, suit dans le sens du courant, de 
haut en bas, une trajectoire qui est sensiblement la diagonale du parallélogramme ou 
plutôt du rectangle des deux forces perpendiculaires entre elles, l’une verticale qui est la 
vitesse de chute qu’aurait le grain en eau tranquille, et l’autre horizontale, la vitesse du 
courant. Tous les grains tombent donc sur le fond : d'abord les plus lourds, le moins loin 


en aval et le plus près de terre, les plus légers, c’est-à-dire l'argile, le plus loin en aval et 


le plus loin de terre. Il en résulte qu'à partir de l'embouchure du fleuve, les fonds se 
déposent en gerbe (fig. 3), ainsi que le montrent d’ailleurs les cartes bathylithologiques du 
golfe du Lion et l’étude de la distribution de chacun des divers minéraux contenus dans 
les sédiments récoltés à la mer. La répartition sur le fond par ordre croissant de richesse 
en argile, le sédiment le plus léger detous, est figurée schématiquement par les trajectoires 
en gerbe, de longueurs croissantes et s’écartant de plus en plus de la côte. On retrouve 
donc encore l’ordre reconnu de la répartition des sables, sable vaseux, vase très sableuse, 
vase sableuse et vase proprement dite. 

Le carbonate de chaux à l’état de marbre (d=2,723), de calcaire (d=2,71) ou de 
craie (d=2,695) et le quartz (d=2,651) possèdent à peu près la même densité absolue, 
c’est-à-dire mesurée sur le minéral compacte. Il semblerait donc que, toutes choses égales 
d’ailleurs, ces divers minéraux emportés du même point, par un même courant, devront 
se déposer les uns près des autres en s’écartant cependant de la côte dans l’ordre : marbre, 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE : 21 


calcaire, craie et quartz. Mais, si l’on tient compte de la porosité (1) de ces divers carbo- 
nates de chaux: craie (p=2,88), calcaire (p=1,63) et marbre (p—0,006), et de celle du 
quartz qui est nulle, les densités apparentes seront : pour la craie 1,517, le calcaire 2,60, le 
marbre 2,72 et le quartz 2,65. Or il est évident que la densité apparente seule est en jeu 
dans ces phénomènes de transport et de sédimentation dépendant d’une flottaison au sein 
de l’eau. C’est ce qui explique pourquoi l’ordre réel de dépôt, contrairement à ce qu’on 
aurait pu croire en ne se basant que sur les densités absolues, est de la côte vers le large, 
dans l’ordre inverse: marbre, quartz, calcaire et enfin craie. Telle est la sucesssion 
observée dans la distribution sur le lit océanique du carbonate de chaux, en général plus 
abondant au large que près des côtes. S’il arrive que, par places, il en soit autrement, 
l'effet en est attribuable à des causes locales, par exemple à la présence de coquilles vivant 
au voisinage de la terre et reprises entières ou en débris par des vagues ou des remous 
qui les accumulent en certains endroits. 

La zone ABLO du fond (fig. 2) se divise en deux parties : l’une BL où le ressac se 
fait sentir dans toute sa violence et où, par conséquent, ne peut se manifester aucun ordre 
permanent dans la sédimentation, et la région AB moins agitée, parce qu'elle est plus 
profonde et où peut s'établir un certain ordre au moins tant que les tempêtes ne viennent 
pas momentanément le troubler. D'ailleurs, même dans ce cas, il ne tarde pas à se 
rétablir sous l'influence des conditions ordinaires. 

Lorsqu'un courant passe devant une côte, on observe que, par suite du frottement 
s’exercant entre l’eau et le sol qui se relève, il existe une démarcation d’un côté de 
_ laquelle (fig. 5) le courant descend dans un sens tandis que de l’autre côté, près de la 
terre, surtout en amont et plus encore en 
aval d’un cap marquant l’entrée d’un golfe, 
règne un contre-courant en sens inverse 
moins rapide et moins régulier que le cou- 
rant lui-même. Sur le sol de cette dernière 
zone, deux régions sont à considérer, l’une 
AB (fig. 2), couverte de sable un peu va- 
seux, l’autre tout à fait voisine de terre où se 
produisent des tourbillons dans le sens des 
flèches (fig. 5)avecune giration vers le rivage. 
On donnerait comme exemples les deux 
flancs du cap d’Agde, en amont vers Cette 
et en aval dans le golfe d’Agde où s'étale 
sur le fond le delta de l'Hérault ainsi que les 
environs du cap Leucate en aval duquel la côte est droite, ce qui donne lieu a la forma- 
tion d’une flèche de sable vaseux s'étendant sur environ sept milles dans le Sud, parallèle 
à la bande de sable vaseux contiguë au rivage, les deux laissant entre elles une bande de 


Fig. 6. 


(1) Taoucer, Expériences sur la pierre ponce (Mémoires Océanographiques (1° série). Résultats des campagnes 
scientifiques du Prince de Monaco, fasc. XXIX, p. 1, 1905); et THOULET, p. 81. Précis d'analyse des fonds sous-marins 
actuels et anciens. Chapelot, édit. Paris, 1907. : 


22 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


vase sableuse. J'ai observé ces tourbillons sur certains ruisseaux, et la figure 6 a étédessinée 
d’après nature. Un ruisseau coulait avec une assez grande rapidité en A‘etson lit, s’élar- 
gissant brusquement, se resserrait de nouveau en B. Dans la portion élargie C on voyait, 
au contact des rives en pente douce, des tourbillons apparaître toujours aux mêmes places ; 
ils descendaient quelque peu vers l’aval et disparaissaient bientôt. Ils étaient évidemment 
dus à la configuration du fond. En jetant sur l’eau des brins d’herbes sèches, on cons- 
tatait que la giration avait lieu vers le bord et que, pendant la courte durée de leur 
existence, les tourbillons possédaient une vitesse inférieure à celle de la portion centrale 
du courant. Dans cette circonstance, la nature avait tout disposé pour que les conditions 
du phénomène pussent être étudiées aussi clairement que dans une expérience synthé- 
tique préparée dans un laboratoire et qui, d’ailleurs, est aisément reproduite dnas une 
auge à courants. 

Ces tourbillonnements suivent donc en mer les contours du rivage et se produisent 
lorsque la vitesse de l’eau est ralentie par le fond. Selon leur vitesse ils entraînent les 
grains minéraux d’après leur nature minéralogique, leur densité, leur forme et leurs 
dimensions. Il se fait ainsi des entassements de chaque sorte de grains en des points 
différents, comme on l’observe autour du cap d'Agde, un peu en amont et davantage en 
aval du courant méditerranéen, contre la côte tournée vers l'Ouest. En effectuant l’analyse 
microscopique des sédiments, comme on a eu soin de noter pour chaque sorte de minéral 
sa présence dominante (D), très abondante (AA), abondante (A), moyenne (+), rare (R) et 
très rare (RR), il a suffi de reporter ces indications sur la carte bathylithologique du golfe 
du Lion. J’ai exécuté ce travail pour chaque espèce minérale en déposant, en chaque 
point où sa présence avait été reconnue, de petites rondelles de carton peintes de couleurs 
différentes et en nombre proportionnel à l'abondance ou à la rareté du minéral. J’ai alors 
observé que chaque minéral était déposé sur le sol en une traînée finissant en spirale 
tournée vers le rivage, comme on le voit sur le schéma (fig. 7), et aboutissant à un centre 
de giration où s’entassent les grains. En une même localité, chaque espèce minérale 
possède un et quelquefois plusieurs centres de 
giration spéciaux ne se confondant pas avec ceux 
d’un autre minéral. Ces triages s'effectuent dans 
la mer avec une précision et une délicatesse vérita- 


c B A 


Fig. 7. Fig. 8. 


blement surprenantes. Etudions maintenant la zone immédiatement adjacente au 
rivage BLO (fig. 2), où leslames exercent avec le plus d'énergie leur action dans le ressac, 


stil 1 alu di is à 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE. 23 


Lorsqu’une vague arrive perpendiculairement à une plage avec sa forme régulière A 
(fig. 8) et qu’en progressant elle rencontre des fonds de plus en plus élevés, sa portion 
inférieure, retardée par le frottement contre le sol, laisse prendre de l’avance à sa partie 
supérieure B. Comme l’avance ne cesse d'augmenter, il survient un moment, au-dessus 
de L (fig. 2 et 8), où cette partie supérieure surplombe tellement qu’elle retombe sous son 
propre poids et s’écrase en donnant naissance à un violent bouillonnement d’écume C. La 
masse d’eau, ayant alors perdu la forme de vague, se transforme en nappe, gravit la 
pente de la plage, puis, sa vitesse amortie, la redescend avec une vitesse croissante, Mais 
bientôt elle rencontre la nappe ascendante provenant de la vague suivante; ilse produit 
un choc, un arrêt brusque et l’impulsion est brisée. La vague montante plus forte l’em- 
porte et l’eau remonte de nouveau la plage de sorte que le phénomène se répète indéfini- 
ment. Cependant, sur le fond lui-même, la nappe descendante continue sa route sous 
l’eau. Ainsi se crée le courant littoral inférieur si dangereux pour les baigneurs qui, 
debout et avec de l’eau jusqu'à la poitrine, ont le haut du corps poussé contre la terre par 
la lame, tandis que les jambes plongées dans le contre-courant sont au contraire poussées 
vers la mer. Le baigneur, s’il perd son équilibre, bascule, s’étale sur le fond et, maintenant 
tout entier dans l’eau descendante, il est dans l'impossibilité de se relever et est entraîné 
vers le large. 

L'amplitude du mouvement de montée et de descente varie d’après la puissance des 
vagues, leur fréquence et la pente de la plage, donnée très importante. La force d’une 
vague peut être considérée comme proportionnelle à sa vitesse; la fréquence est le nombre 
de vagues déferlant par minute; enfin la pente de la plage est facile à mesurer par un 
nivellement, au moyen d’une boussole de pente ou de toute autre façon. 

J'ai, à de nombreuses reprises, mesuré la fréquence des vagues. Si elles sont fortes, 
par mauvais temps, elles sont plus faciles à compter que lorsque la mer est belle parce 
qu’alors, par suite d’interférences, il se crée des séries de vagues d’abord petites, puis 
augmentant de plus en plus jusqu’à ce que, la différence de phase atteignant exactement 
une longueur d’onde, il y ait addition, ce qui se traduit par deux ou trois vagues réelle- 
ment fortes après lesquelles recommence la série des petites. En Bretagne et en Nor- 
mandie, la moyenne est d'environ dix vagues par minute, chacune montant de 10 mètres 
sur la plage et redescendant d’autant, soit 20 mètres de parcours total pour un grain de 
sable entraîné en montée puis en descente. Je serais même porté à penser que ces évalua- 
tions, faites en été et par mer relativement calme, sont plutôt faibles qu’exagérées. 

Examinons maintenant comment se comportera un grain de sable. Les grains, soit 
qu’ils sortent d'un fleuve ou qu'ils résultent de la destruction des roches bordant le 
rivage, commencent par être anguleux. Entrés dans la zone d’action violente du ressac, à 
l'endroit oùretombeet s'écrase sur elle-même la vague venant du large, ils sont soumis aun 
tourbillonnement en hauteur qui mélange entre eux ceux qui achèvent de descendre la 
pente de la plage et ceux qui, descendus avec la vague précédente, s'étaient déjà déposés 
sur le sol. Après ce tourbillonnement qui opère un brassage complet, le grain retombé 
sur le sol, heurté et frotté contre ses compagnons, va gravir 10 mètres, descendre 
de 10 autres mètres, ce qui correspond à un trajet total de 20 mètres eh va-et-vient, 


24 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


ou 200 mètres par minute, temps que 10 vagues mettent à déferler. La figure 9 montre le 
sable tourbillonnant dans l’écume du ressac, en L; il s'étend en nappe de L en B, puis 
redescend de B en L, pour recommencer indéfiniment le trajet LB + BL pendant lequel 
les grains s’arrondissent par choc et par frottement sur une distance de 20 mètres. 
On a supposé précédemment qu’en con- 3 ge 

séquence du roulement contre le fond, les ? : 
lames déferlaient toujours perpendiculaire- 
ment à la plage. Il n’en est pas absolument 


Fig. 0. Fig. 10. 


ainsi et la vague arrive avec une certaine obliquité suivant M A (fig. 10). Comme en A 
elle a perdu toute sa force vive, elle redescend suivant la ligne de plus grande pente du 
terrain A B, dans le plan perpendiculaire à la mer. La vague suivante fait accomplir au 
sable un nouveau trajet de 10 mètres pendant lequel il s’use encore moitié obliquement 
suivant BC, moitié perpendiculairement en descente C D. Le sable suit par conséquent 
sur les plages un trajet en dents de scie qui, pour un déplacement M H parallèle à la terre, 
implique un parcours réel en zigzag infiniment plus long, dont on a évalué l’élément 
MA + AB à 20 mètres en moyenne et dont l’angle d’obliquité est très petit. Dans un 
travail précédent (1), on avait estimé que le parcours réel équivalait au moins à 500 fois 
le parcours apparent; l'évaluation est d'autant plus modérée que le plus souvent, par 
suite de changements dans la direction du vent qui chasse obliquement la vague, les 
grains accomplissent un trajet rétrograde pour revenir ensuite sur leurs pas. Ils finissent 


néanmoins par effectuer un déplacement horizontal dans un certain sens à peu près le 


même que celui du courant côtier subissant, lui aussi, des alternances momentanées de 
direction malgré la persistance de sa marche générale. 

En résumé, les sables progressent avec une lenteur extrême parallèlement à la côte, 
tout en accomplissant un parcours considérable, conséquence de leur marche en dents 


de scie. Sur chaque plage viennent s'ajouter au sable des produits d’abrasion marine sous : 


forme de blocs ou pierres dus à la destruction, sous l'influence combinée de la mer et des 
agents atmosphériques locaux, de laroche continentale encadrant la plage. Les vagues, en 
les forçant à se heurter continuellement et à rouler les uns sur les autres, réduiront 
chacun d’eux à l’état de galet accompagné d’une multitude de petits éclats anguleux qui 
seront des grains de sable. 

A ce sable, créé sur place, s’ajoute un troisième élément, les coquilles des mollusques 
morts en mer à une faible distance du rivage. Celles-ci, constituées par un calcaire poreux, 


(1) Taourer, Considérations sur les deltas, p. 12. 


— 


ial 


Sn 


| 
| 
| 
; 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 25 


offrant en général une surface assez grande par rapport à leur volume, sont aisément 
soulevées par les vagues et, soustraites ainsi à l'influence du courant littoral inférieur 
lequel allant de la côte vers le large tendrait, au contraire, à leur faire gagner des profon- 
deurs plus considérables, elles sont portées à la plage surtout par la nappe superficielle 
de l’eau s’avancant du large vers la plage. Il se produit, pour les coquilles entières ou 
brisées, un véritable vannage au sein de l’eau. 

L’angle d’obliquité des dents de scie se mesure assez facilement lorsqu'on suit de 
l'œil les mouvements du ressac. Il est quelquefois naturellement indiqué par des laminaires 
ou des tiges de goëmon dont une extrémité enfoncée dans le sable demeure immobile, 
tandis que le reste de sa longueur est entraîné par l’eau dont elle suit les mouvements 
jusqu’au moment où abandonnée par elle, elle demeure immobile. Elle fait ainsi 
l'office d’une girouette. 

_ La dénomination de fonds littoraux ou paraliens s'applique à ceux de cette zone où 
prédomine l’action des vagues. Ils s'étendent depuis la limite la plus haute de l’espace 
sableux alternativement sous l’eau et a l’air, au passage de chaque vague, jusqu’à une 
profondeur évidemment variable avec la localité par suite de l’inclinaison du sol et de la 
violence des vagues, mais qui, au total, et s’il faut absolument lui assigner une limite 
inférieure, ne dépasse guère dix mètres de profondeur. Si parfois cette profondeur est 
dépassée, bien plus souvent elle n’est même pas atteinte. Là est le véritable terrain 


d'usure des grains sableux par choc et par frottement, les effets d’usure étant particuliè- 


rement énergiques sur la plage même où les grains sont successivement dans l’eau et 
presque à sec. 

Les graviers font véritablement partie des dépôts littoraux, bien qu’ils se rencontrent 
quelquefois au milieu même des dépôts côtiers. Parfois ils sont un produit d’exaration 
comme aux bancs de Terre-Neuve (1), et probablement sur les bancs de la Grande Sole, 
et de la Petite Sole, au large de Brest, où ils sont accompagnés d’énormes blocs rocheux 
certainement apportés par des glaces côtières de l’époque glaciaire. Ailleurs, comme dans 
le détroit du Pas-de-Calais, ils sontconsidérés comme en place, en quelque sorte déchaussés 
par les courants qui les baignent et ont entraîné les sédiments meubles qui les englobaient 
dans leur masse. Ces cas sont spéciaux. D'une façon générale, on peut affirmer que, s’ils 
sont là où l’on constate leur présence, c’est qu’ils y ont été amenés et n’en ont pas été 
enlevés. En outre, et pour cette même raison qu’on les trouve où ils sont, ils n’ont pas été 
noyés dans la masse de sédiments fins qui tendent à s’accumuler autour d’eux et par- 
dessus eux. Il est donc permis d’attribuer leur origine à des courants qui se sont fait sentir 
sans doute. momentanément, avec assez de violence pour les avoir amenés à la place 
qu’ils occupent, et quise sont ensuite assez affaiblis pour ne pas les emporter ailleurs, tout 
en restant cependant suffisamment puissants pour emporter ou empêcher de se déposer 
autour d’eux dessédiments plus fins, surtout de nature vaseuse. Des remous produits, soit 
par la rencontre de deux courants opposés, ou la double action des vagues et d’un cou- 


(1) Tuoutet, Sur le mode de formation des bancs de Terre-Neuve (Comptes-rendus Acad. des Sciences, t. CII, 
p. 1042, 1886) et Observations faites à Terre-Neuve à bord de la frégate Clorinde pendant la campagne de 1886 
(Revue Maritime et Coloniale, t. XCIII, p. 308-430, 1887). 


T. I, — Fase. 7. 4 


26 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


rant, celle des vagues seules sur un haut-fond ou encore celle des marées, semblent, par 
conséquent, suffire pour expliquer leur présence. A ce point de vue, l’étude minutieuse 
d’un banc de gravier, sa monographie complète, en éclaircissant les conditions spéciales 
de sa genèse et de sa permanence, offrirait un vif intérêt pour l’océanographie. 

Résumé. — Le cheminement et le dépôt des sédiments le long d’une côte dépendent 
de trois variables principales : le courant côtier, les vagues et les marées. 

Devant toute côte passe un courant côtier qui, à l'embouchure des fleuves dans la mer, 
entraîne les sédiments d’érosion déversés par eux et les distribue en aval, en gerbe, c’est- 
a-dire les plus gros le plus près de la terre et le moins loin de l'embouchure, puis progres- 
sivement, à mesure que diminuent la dimension et la densité apparente des grains, de plus 
en plus loin de l'embouchure et de plus en plus loin vers le large. Ainsi s’explique 
l'enrichissement en calcaire des fonds marins à mesure que la profondeur augmente, 
phénomène qui, bien que comportant des exceptions, est de beaucoup le plus souvent 
observé. ; 

L’action combinée du courant cétier et des vagues sur le fond rend compte de la 
distribution régulière, en bandes parallèles à la côte, des sables situés le plus près de terre, 
puis successivement des sables vaseux, vases très sableuses et vases sableuses. L’appari- 
tion des vases proprement dites indique la profondeur à laquelle les vagues cessent d’agiter 
le fond. 

Entre la bande du courant côtier, véritable fleuve à une seule rive, et la terre, s'étend 
une zone littorale caractérisée par des sables et plus bas par des sables vaseux. La masse 
d’eau qui la recouvre est sillonnée de contre-courants, de remous ou tourbillonnements 
qui distribuent sur le sol immergé les divers minéraux composants en spirales tournées 
vers le rivage. 

Sur cette zone littorale ou paralienne prédomine l'influence des vagues qui agitent 
le fond et usent par choc et par frottement les grains minéraux sur les plages. 

Par suite de la direction légèrement oblique avec laquelle les vagues poussées par le 
vent abordent le rivage, les grains sableux sont lancés obliquement sur la plage. Ils la 
redescendent avec l’eau ruisselante, par la ligne de plus grande pente, c'est-à-dire perpen- 
diculairement, et suivent ainsi une route dite en dents de scie, à éléments mesurables, 
ayant pour effet d'accroître considérablement le parcours apparent effectué dans le sens 
même du courant le long de la côte. 

L’eau arrivant sur une plage donne naissance à deux courants en nappes superposées, 
l’un de surface allant de la mer vers la terre, l’autre contre le sol et dirigé en sens inverse 
de la terre vers le large. Il est probable que le premier contribue pour une part notable 
à amener sur la plage les grains sableux et particulièrement les coquilles entières ou en 
débris, tandis que le second les remporte à la mer. 

Le sable d’une plage est de deux sortes : l’une est le résidu de l’abrasion des roches 
encadrant la plage, l’autre provient de l’apport par la mer des grains arrivant des plages 
situées en amont du courant côtier. 

Les dépôts littoraux immédiatement contigus au rivage comprennent principalement 
_des sables et des sables vaseux ; leur zone a pour limite supérieure l'extrême distance où 


it 


ee mette) D | dt A 


di à "ar ee ee "he nd de des pue dé 


ee de he cuis LÉGER à. 


ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 27 


atteignent les vagues déferlant sur les plages, et pour limite inférieure, l’isobathe de 
10 mètres, rarement atteinte et plus rarement encore dépassée, 

La présence du gravier en unlieu quelconque indique l’existence passée ou actuelle 
en cet endroit, de courants, remous ou tourbillons, assez puissants pour avoir apporté ces 
grains et pas assez puissants pour les emporter, quoique cependant capables d'empêcher les 
grains plus petits de se déposer. 


IV. — Considérations sur la chute verticale des sédiments 
marins. 


Dans un travail antérieur (1), j'ai établi qu'en chute libre, les grains de quartz de 
grosseurs correspondant à celles des sables gros (d. moyen = 1™™, 50), moyen (d. moyen 
= om, 60), fin (d. moyen = 0™™, 34) et très fin (d. moyen = om, 13) tombaient dans 
l'eau calme avec des vitesses indiquées dans le tableau suivant. J’ai récemment mesuré, 
en opérant absolument comme pour les grains de quartz, la vitesse de chute de globigé- 
tines d’un diamètre moyen de o™™,3 préalablement imbibées d’eau par un séjour de 
douze heures dans une capsule remplie d’eau, sous le vide. Pour l’argile, dont les particules 
en suspension dans l’eau douce se coagulent au contact de l’eau salée et semblent s’agglo- 
mérer ensuite en flocons plus ou moins volumineux selon l'agitation plus ou moins forte 
des vagues, je me suis borné à mélanger un échantillon vaseux marin avec de l’eau de 
mer, à verser dans un tube vertical et à observer le temps que mettait à devenir limpide 
une épaisseur de 50 centimètres de liquide. 


» t 

DIAMÈTRE MOYEN | ESPACE VERTICAL | ESPACE VERTICAL [DURÉE D’UNE CHUT 

EN UNE MINUTE EN UNE SECONDE D'UN METRE 
“ mm, — m. m. ‘ secondes. 

DDR IDE creative as one ec ee 1,50 6,50 0,108 9,3 
MIMO MIO py ccs ce etc li abies 0,60 4,00 0,066 15,1 
ORS TIGRE carla Gale ve DUNG LAGS tia ox à à 0,34 2,20 0,033 30,3 
RATE ein an Res es 0,13 0,85 0,014 72,4 
Rite se Cae Rs ere » 0,20 0,003 303,0 

Sales Came MY IA PU EN ei PT » 0,004 0,00007 14400 = 4 heures. 
EE RS EL ee 0,3 1,56 0,026 38,5 


Supposons que les sédiments au lieu de tomber en eau tranquille descendent avec 
leur vitesse » à travers une couche d’eau épaisse de » mètres et animée d’un mouvement 
horizontal de translation d’une vitesse de V mètres par seconde, en d’autres termes que ces 
sédiments aient à franchir verticalement un courant (2). Il est évident qu’en une seconde, 
ils suivront (fig 11), sous la double influence de leur chute verticale AB =v et de leur 


(1) Tuoutet, Analyse mécanique des sols sous-marins (Ann. des Mines, avril 1900). 

(2) En réalité, il est douteux qu’un courant conserve absolument la même direction dans toute son épaisseur ; 
peut-être passe-t-il lentement de l’orientation observée à la surface à celle reconnue au sein du courant inférieur, mais 
au total, tout se fait comme si le courant changeait brusquement d’orientation. 


“28 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


translation horizontale AC = V, la diagonale AD du rectangle ayant pour côtés V et vet, 
V après une seconde, ils auront subi un écart égal à BD = V du 
pied de la verticale. Si l'épaisseur du courant est de h mètres, 


À i à ï h : 
le grain emploiera, à la vitesse », z secondes pour le franchir, 


LA h a 
et l’écart total sera de V - métres. 


On sait que la masse des eaux océaniques est partagée en 
deux zones superposées. La première à partir de la surface, relativement peu épaisse, 
est sillonnée suivant une même verticale par un ou plusieurs courants. La seconde, 

absolument calme, s'étend de la limite inférieure 


N ! de la couche supérieure jusqu’au fond, si éloigné 
~~ R 


i “D qu’il soit. Dans la zone agitée, les courants superposés 
! > . . . . . 
bey peuvent varier en vitesse, en direction et en épaisseur, 
‘ er . 
oe caractéristiques directement mesurables pour cha- 


cun d’eux au moyen de la drague a courants. Le 
mouvement des eaux suivant une méme verticale se 
représente graphiquement par une rose de courants 


W i : E obtenue en traçant, à partir d’un point figurant l’en- 
Ni “re droit où les mesures ont été effectuées, autant de 
c lignes droites divergentes qu’on a constaté de cou- 


rants et en donnant à chacune la même orientation 
que celle reconnue au courant qu’elle représente et 
une longueur proportionnelle à la vitesse de celui-ci. 
Une rose de courants se transforme aisément en 
Fig. 12. graphique d’écart pour une dimension déterminée de 
grains. 
Supposons depuis la surface de l’eau trois courants superposés (fig. 12) : 


OA — N52°E, épaisseur 1 vitesse (1) par seconde Vi 
OB — No’E wn Shy a Va 
OC — S75°E — Ah, — Vs 


(1) Dans le but de faciliter d’autres calculs analogues, nous donnons ici un tableau d’équivalence de vitesses de 
courants évaluées en nœuds à l’heure, en mètres à l’heure et en mètres par seconde. 


= A 
a A a = 2 
82 VITESSE VITESSE 4 à VITESSE VITESSE = VITESSE VITESSE 
3 a = 
3 ) PAR HEURE PAR SECONDE 8 ) PAR HEURE PAR SECONDE ss PAR HEURE PAR SECONDE 
< < « . 
© Métres. Mètres. Metres. Mètres. Métres. Mètres. 
0,1 185 0,051 0,8 I a 0,411 6,0 11 112 3,084 
0,2 370 0,103 0,9 0,463 7,0 12 94 3,598 
0,3 556 0,154 1,0 1 852 0,514 8,0 14816 4,112 
0,4 741 0,200 2,0 3 704 1,028 9,0 16 668 4,626 
0,5 926 0,257 3,0 5 555 1,542 10,0 18 520 5,148 
0,6 III 5 0,308 4,0 7 408 2,056 
0,360 5,0 9 260 2,570 


ee Le à ER TIENNE 
Me Le LS Re Ah 0 Li, 


4 
4 
À 
: 
“3 
4 
3 


ETE eee ae AER ee FE Pa eee Mey Ween) MES TOME Le. aE ey PA ee Pet EN PP 5 


te 


LA 


eee EN 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 29 


et qu'un grain sableux tombant de la surface en O descende avec une vitesse dev mètres par 


: à RP ‘ h 
seconde. Ce grain suivra la direction OA du premier courant et pendant les = secondes 


# J he , h a , La 
que durera sôn passage à travers ce courant, il subira un écart de V, = mètres représenté 


par la longueur proportionnelle OM. 

En M, à la profondeur de k, mètres, il va changer de direction et prendre, en pénétrant 
dans le second courant, celle de N9°E ; alors, désormais orienté, il subira un nouvel 
: h : ES 
écart de V, PL A partir de M, sur une parallèle à OB, on prendra donc une longueur ON 

; + RES Ra : : 
proportionnelle a V, > Enfin, dans le troisième courant, ilsubira un nouveau changement 


de direction et un nouvel écart NR = V, = L’écart total, aprés avoir franchi les trois 


courants successifs et subi les deux changements de direction, sera dés lors représenté en 
grandeur et en direction par OR et, comme le grain entre ensuite en eau parfaitement 
calme, quelle que soit la profondeur, il descendra verticalement sans rien modifier à son 
écart. 

L'orientation de OR se mesurera sur le graphique avec un rapporteur et l’écart avec 
un double décimètre. 

Prenons maintenant un exemple réel : le 24 avril 1873, à l'Ouest des Bermudes, par 
32°18' lat. N et 65°38’ 8” long. E (Greenw.), par une profondeur de 4846 mètres, le Challenger 
a observé la série verticale de courants suivants (1): 


Vv 
PROFONDEUR . ORIENTATION VITESSE A L'HEURE 
EPAISSEUR VITESSE PAR SECONDE 

Métres. Métres. à Nœuds en milles. Métres. 
Surface, go N 60° E 0,2 0,123 
go N 75° E 0,4 0,237 
180 go N 87° E 0,36 0,185 
370 I S 70° E 0,22 0,113 
550 * 180 S 40° E 0,08 0,041 
730 180 S 650 E 0,11 0,056 
910 180 N 65° E 0,06 0,031 

1100 Q () 


La vitesse de chute verticale, par seconde, V d’une globigérine par exemple, étant de 


h ; 2 ; 
0",026, calculons les valeurs 7 relatives à chacuné des vitesses des courants super- 


posés et l'écart V e 


. 


(3) KrumMeL, Handbuch der Ozeanographie, II, 581. 


30 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


as En = a= 3 461 secondes 0 a hs = 425 mètres. 
as = +o = 3 461 = Sc ae an ee Ms = 820 — 
Be = 3461 -= Vy oe 640 

ae sat ik bee See we V, = = 825 — 
at ar "60922. Ne % = 283  — 
Len hs - 


En traçant géométriquement, ainsi qu’il a été dit, le graphique d'écart (fig. 13), on 
reconnaît qu’une globigérine de taille moyenne, partant de la surface de la mer, au point 


Fig. 13. 


considéré, à l'Ouest des Bermudes, atteindra le fond par 4846 mètres de profondeur, 


avec un écart de 3 320 mètres, soit 1,79 mille, dans le S 89° E. 

Cet écart est insignifiant surtout quand on considère l'incertitude expérimentale avec 
laquelle la position de la station de départ est déterminée à la mer et qui est d'environ 
3 milles. Sur une carte, l’aire de dispersion des êtres vivants à la surface de la mer se 
confondra donc avec l’aire de dispersion de leurs débris sur le fond. 

L'écart est évidemment d’autant plus considérable que le sédiment tombe plus 
lentement. Par conséquent, toutes choses égales d’ailleurs, sur le lit océanique, les divers 
sédiments se succéderont par ordre de grosseurs dans la direction de l'écart. Deux 
sédiments de dimensions et par suite de vitesses de chute différentes, partant du même 
point de la surface, des globigérines et des radiolaires, par exemple, ou des diatomées, 
de même habitat, ne se déposeront pas tout à fait au même endroit. La remarque intéresse 
la paléogéographie. 

Le temps nécessaire pour que la globigérine moyenne considérée atteigne le fond se 


AU PT PC eee 


eo à 


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a a! 


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#4 


ae! ae ee D : +: 4 


pet Se 


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7 § iii 


ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 31 


calculera en secondes, en multipliant la hauteur totale de chute, 4846 mètres, par 
38,5, temps en secondes que cette globigérine met à descendre de 1 mètre. On trouve 
ainsi pour cette durée 186 571 secondes, c’est-à-dire deux jours, trois heures, a 
minutes, trente et une secondes. 

On sait que les sols sous-marins sont partagés, au point de vue géographique et 
bathymétrique, en trois catégories : les fonds, sols ou sédiments pélagiens (1); les fonds 
côtiers ou paractiens et les fonds littoraux ou paraliens. Les sédiments pélagiens sont 
principalement constitués d’abord et surtout par les restes de nature calcaire (forami- 
nifères) ou siliceuse (radiolaires, diatomées) des êtres ayant vécu dans les couches d’eaux 
marines supérieures et dont les carapaces, les squelettes ou les frustules tombent après la 
mort sur le fond; puis par les produits de déflation (2), poussières minérales et argileuses 
enlevées aux continents par les vents et distribuées sur la surface entière de l’océan; enfin, 
quoique dans une proportion assez faible, par les produits d’éruptions volcaniques sous- 
marines. 

La trajectoire des globigérines s’écartant, ainsi que nous venons de le voir, si peu de 
la verticale en dépit des courants et quelle que soit la profondeur de la mer, permet 
d'affirmer que, quant aux sédiments qui y sont déposés, le fond est la projection physique 
horizontale de l’ensemble des conditions des couches qui le recouvrent immédiatement. 
On devra donc s'attendre, en analysant un échantillon de sol, à y trouver un mélange en 
proportions variables des éléments mêmes du fond (déjections volcaniques sous-marines 
et restes d'animaux benthiques) et des éléments provenant des couches d’eau sus-jacentes 
(restes d'animaux ou de végétaux), ayant vécu immédiatement au-dessus de ce fond, 
surtout à la surface, et dont l'habitat demeure en étroite dépendance avec les conditions 
physiques ambiantes (nature des eaux, température, climat, etc.). Il convient d’y ajouter 
les poussières éoliennes composées de minéraux très fins et d’argile renseignant, elles 
aussi, sur les conditions statiques et dynamiques de l’atmosphère immédiatement sus- 
jacente. 

On pourrait, il est vrai, objecter que, dans les expériences décrites, les globigérines 
étaient réduites à leur carapace calcaire, tandis qu’on moment où l’animal venait de périr 
et descendait sur le fond, elles contenaient une matière protoplasmique destinée à servir 
dans la suite à l'alimentation du benthos, de sorte que cet état était de nature à modifier 
la durée de la chute et, par conséquent, l'écart dû aux courants. Mais cette matière orga- 
nique, possédant sensiblement la densité de l’eau de mer, ne saurait avoir grande influence 
sur la chute. Il en est de même des gaz susceptibles de résulter de la décomposition de 
cette matière organique parce que, la descente s’effectuant rapidement, la globigérine 
devenue capable de dégager des gaz et d’être retardée, arrêtée par eux dans sa descente ou 
même forcée de remonter, est parvenue à une profondeur telle que le dégagement est 
empêché par la pression. Dans la nature, les phénomènes se passent donc pour la globi- 


(1) On emploie aussi le terme pélagiques; mais pélagiens a déjà été appliqué aux fonds de haute mer par Lavoi- 
sier, dans un travail inséré dans le volume pour 1789 de l'Histoire de l’Académie des Sciences de Paris, bien que 
l'illustre chimiste l’eût certainement rédigé vers 1765, pendant sa jeunesse, alors qu’il s’occupait de géologie. pains 
riorité de pélagiens étant hors de doute, il me semble juste d’adopter cette expression. 

(2) Tuouter, Sédiments marins d’origine éolienne (C. R. Acad. des Sciences, t. CL, p. 947, 11 avril 1910). 


32 : ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


gérine entourée de son protoplasma comme dans l’expérience faite avec la carapace seule. 


Il se peut que la rapidité de chute, en assurant la conservation de la matiére organique, 
assure aussi l’alimentation du benthos, quelle que soit la profondeur et si, sur certaines 
aires profondes du lit océanique, les naturalistes observent l’absence de benthos et de 
calcaire, le fait est-il dû, en tout ou partie, al’absence de plankton et aux causes qui ont 
pour conséquence cette absence dans les couches d’eau superficielles. 

S'il est vrai que le fond soit la projection physique de la surface immédiatement sus- 
jacente, la remarque appliquée à l'étude des roches sédimentaires possède un réel intérêt 
en géologie et en paléogéographie, car elle rend possible, dans la Constitution d’un fond 
ancien, la découverte des conditions physiques des eaux de l’océan disparu et même de 
l’atmosphère au-dessous desquelles l’échantillon examiné s’est déposé. 

Les expériences précédentes apportent encore la preuve que les fonds pélagiens 
commencent à une faible distance des rivages, sensiblement marquée par la limite 
d'apparition des vases, laquelle indique la profondeur où cesse de se faire sentir sur le 
sol immergé l’agitation produite par les vagues de la surface. 

En effet, les débris sableux d’érosion d’origine continentale amenés par les fleuves 


et ceux d’abrasion enlevés sur le rivage de la mer ne quittent pas l’extrême voisinage de 


la côte. Charriés par le courant qui longe parallèlement la terre et par conséquent dans 
une région sous-marine peu profonde, ils gagnent rapidement le fond et y restent immo- 
biles ou bien, si le courant possède une vitesse assez grande et une épaisseur suffisante 
pour atteindre le sol remué par les vagues, ils sont entraînés un peu plus loin vers l'aval, 
mais sans jamais s'éloigner beaucoup du bord. Un sédiment très fin, étalé sur un sol 
balayé par un courant de la vitesse des courants marins méme les plus rapides, n’est 
entraîné par celui-ci que s’il est tenu en agitation par une cause quelconque (en l’espèce, 
le mouvement communiqué par les vagues de Ja surface). S’il n’est pas préalablement 
agité, comme il est étalé en masse compacte et uniformément lisse, il ne fournit aucune 
prise et le courant glisse sur lui sans l’entamer. L’expérience est facile à faire sur 
n'importe quel ruisseau. Les fins-fins et les argiles qui constituent les vases proprement 


dites, témoignent donc par leur seule présence que le fond qu’elles occupent n’est plus 


agité par les vagues, que, par suite, les courants ne font plus sentir leur action et que l’eau 
qui le baigne estimmobile. Les cartes bathylithologiques, représentation brutale des faits, 
montrent d’ailleurs d’une façon parfaitement nette et indiscutable, combien est voisine de 


terre la limite d’apparition des vases et des fonds pélagiens dont la caractéristique essen- - 


tielle sur tout le reste du lit océanique est le calme des eaux. 

En conséquence, on est en droit d'affirmer que la dénomination de fonds terrigènes, 
c’est-à-dire composés de sédiments directement enlevés aux continents, employée par 
certains auteurs, doit s'appliquer au lit de l'océan tout entier, si l’on prend en considéra- 
tion les poussières minérales et les argiles d’origine éolienne, puisque l'expérience 
démontre que, pour transporter ces poussières, il suffit d’un état minimum de l’atmo- 
sphère qualifié par les météorologistes de calme ou presque calme, qui règne sur la surface 
entière du globe. Ou bien si, comme il est logique, on se borne à n’attribuer cette déno- 
mination qu’aux produits de l'érosion et de l’abrasion, abstration faite de quelques cas 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 33 


d’exaration (transports par les glaces, bancs de Terre-Neuve), on ne doit s'en servir que 
pour désigner l’étroite bande de terrain recouverte de sables, sables vaseux, vases très 
sableuses et vases sableuses, comprise entre le bord de la terre et la limite d’apparition 
commune des vases proprement dites et des fonds pélagiens, c’est-à-dire aux fonds côtiers. 

Résumé. — Sion mesure expérimentalement la vitesse » de chute dans l’eau des 
sédiments sableux des diverses catégories (sables gros, moyen, fin, très fin) et vaseux 
(fins-fins et argile) qui couvrent le lit océanique, on observe qu’elle varie entre 0",108 
et 0",00007 par seconde et est telle qu’un grain tombant en chute libre parcourt verti- 
calement un espace de 1 mètre en un temps compris entre 9, 3 secondes, s’il est gros, 
et 14400 secondes, soit quatre heures, s’il est parmi les plus fins, L'expérience répétée 
avec des carapaces de globigérines d’un diamètre moyen de o™,3, indique pour ces 
foraminifères une vitesse de chute de 0",026 par seconde les laissant descendre de 
1 mètre en 303 secondes, soit 5 minutes environ. 

Quand un grain sableux abandonné à lui-même dans la mer, traverse l'épaisseur h 
d'un courant horizontal animé d’une vitesse V par seconde, il s’écarte dans le sens de ce 
courant de la verticale du point où il a commencé à descendre, d’une distance égale à la 


vitesse V multipliée par le nombre de secondes : qui lui sont nécessaires pour franchir 
l'épaisseur A. 

On sait que l’océan se partage, depuis la surface, en deux zones superposées. La 
première, d’eau agitée, est sillonnée par un ou plusieurs courants horizontaux superposés 
différant entre eux de direction, de vitesse et d'épaisseur. La seconde, d’eau immobile, 
s'étend depuis la limite inférieure de la première zone jusqu’au sol, quelle que soit sa 
profondeur. On peut mesurer directement l'épaisseur, l'orientation et la vitesse de chacun 
de ces courants en un point quelconque de l'océan. 

Le Challenger a exécuté ces mesures en une localité, de 4846 mètres de profon- 
deur, située dans l'Ouest des Bermudes, pour une succession de sept courants compris 
entre la surface et 1 100 mètres de profondeur, de sorte qu’il est facile de construire 
graphiquement la rose de ces courants. 

En appliquant les valeurs données par le Challenger à une globigérine moyenne, on 
constate que ce foraminifère parviendra sur le fond, à 4846 mètres, avec un écart de 
3320 mètres, c’est-à-dire 1,79 milles, dans une direction S 89° E du pied de la verticale et 
après une durée de temps de trois heures, quarante minutes et trente et une secondes. 

La détermination de la position d’une localité de l'Océan ne se faisant guère, astro- 
nomiquement, qu'avec une approximation de 3 milles, on voit que l'écart de chute est 
insignifiant et que le grain n’emploie qu'un temps très court pour parvenir même aux 
plus grandes profondeurs océaniques. 

Ces faits conduisent aux conclusions suivantes qui intéressent à la fois locéano- 
graphie, la géologie stratigraphique et la paléogéographie: 

1° Sur toute l'aire océanique occupée par les sédiments pélagiens, le sol est recou- 
vert en majeure partie par une petite quantité de poussières minérales transportées par 
les vents sur le globe entier et surtout par des débris d'êtres ayant vécu au sein de la 
T. HI. — Fasc. 7 5 


34 _ ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE ; 


zone superficielle dans des conditions physiques d’habitat (nature des eaux, température, 
climat, etc.), possibles à connaître. Le fond est donc la projection horizontale physique de 
la surface exactement sus-jacente. En d’autres termes, les conditions physiques ambiantes 
de cette surface, telles qu’elles sont marquées par la présence d’étres vivants, sont 
indiquées par les débris contenus dans l’échantillon qui s'est déposé verticalement 
au-dessous. 

2° Les fonds côtiers, composés de débris minéraux d’érosion et d'abrasion enlevés 
aux continents et méritant seuls par conséquent la dénomination de terrigènes, ne 
s'éloignent de terre, vers le large, qu'à une faible distance représentée sur une carte 
bathylithologique par la limite d’apparition des vases proprement dites au delà de 
laquelle commencent les fonds pélagiens. Cette limite correspond à la rencontre avec 
le lit sous-marin, de la surface supérieure de la zone d’eau calme là où le fond cesse en 
chaque lieu d’être remué par les vagues. Les fonds dits terrigènes se confondent donc 
avec les fonds côtiers et n’occupent — sauf de rares exceptions attribuables à des phéno- 
mènes d’exaration par les glaces — le long des continents, qu’une étroite bande de sables, 
sables vaseux, vases très sableuses et vases sableuses. 

30 La rapidité de chute des foraminifères, favorisant la conservation de la matière 
protoplasmique qui en entoure les carapaces, apporte sans doute une alimentation au 
benthos dont l'absence, en certaines localités du lit océanique, proviendrait peut-être de 
l'absence correspondante de plankton au sein des eaux superficielles recouvrant ces 


localités. 


V. — Classification géographique et bathymétrique des sédi- 
ments sous-marins. 


Les sédiments et, d’une façon générale, les divers sols qui recouvrent le lit océanique 
sont les résultats ou les effets de l'érosion, de l’abrasion, de l’exaration, de la déflation, 
du volcanisme, des apports cosmiques, des phénomènes chimiques, de l’action des 
végétaux et des animaux, ainsi que de diverses autres causes d’importance tout à fait 
accessoire. 

Erosion. — L’érosion comprend l'ensemble des phénomènes de dénudation du relief 
terrestre sub-aérien par les eaux douces courantes qui entraînent les débris minéraux 
provenant de la désagrégation des roches due aux agents atmosphériques et qui, par 
l'intermédiaire des ruisseaux, des rivières et des fleuves, finissent par les apporter à Ja 
mer. L’érosion, s’exercant sur la presque totalité de la surface de la terre continentale, est 
certainement la source la plus abondante des sédiments sous-marins. 


ABRASION. — On donne ce nom à la dénudation et aux autres effets exercés le long 


des côtes maritimes par l’eau de la mer, principalement sous forme de vagues. Ces effets 
frappent vivement les yeux, et l'on est toujours tenté d’en exagérer la puissance. Quand 
on les étudie de près, on reconnaît qu'ils ne tardent pas à se limiter eux-mêmes et qü'en 
définitive, leur importance est notablement moindre que ce qu'elle paraît être. 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 35 


Exaration. — C’est l'action destructive de l'eau solidifiée par le froid en conséquence 
de la propriété qu’elle possède alors d’occuper un volume plus considérable qu’à l’état 
liquide. L’exaration manifeste des effets particulièrement puissants dans les régions sub- 
polaires où, au moins deux fois par an, au commencement et à la fin de l'été, la tempé- 
rature de l'air oscille à de nombreuses reprises au-dessus et au-dessous de zéro. L’eau 
liquide imbibe les roches, se dilate en se congelant et fait éclater les pierres les plus résis- 
tantes, plus particulièrement celles qui sont poreuses. J’ai depuis longtemps appelé 
l'attention sur ces phénomènes auxquels est attribuable la création des bancs de Terre- 
Neuve par les glaces côtières chargées des débris des rivages de l’île (1). Dans les contrées 
absolument polaires et continuellement gelées, l’action est beaucoup moins énergique, 
sauf toutefois sur le front des grands glaciers arctiques et antarctiques qui, dans leur 
mouvement de progression, amènent à la mer une énorme quantité de boue glaciaire 
destinée à s'étaler ensuite sur le sol sous-marin. L'étude soigneuse de ces dépôts si 
abondants dans la mer de Baffin et sur le pourtour du continent antarctique serait digne 
d'éveiller l'intérêt des explorateurs. D’autre part, des blocs rocheux d’un volume assez 
considérable, chargés sur des icebergs ou plutôt sur des glaces de rivages, sont souvent 
transportés par les courants très loin des côtes et semés sur le lit océanique au moment 
où s’eflectue la fusion des glaces au sein des eaux marines plus chaudes où elles flottent. 
Ces effets se sont manifestés aux époques glaciaires anciennes tout comme on les observe 
maintenant dans les régions froides et ils expliquent la présence de blocs erratiques au 
fond de mers baignant aujourd’hui des contrées tempérées, comme ceux dragués par la 
Princesse Alice, en 1903, au large de Brest. . 

DÉFLATION. — Tout au contraire de l’abrasion, les effets de dénudation et de trans- 
port dus au vent, c’est-à-dire la déflation, possèdent une puissance réelle très supérieure 
à celle qu’on serait disposé à leur attribuer. Ils s’exercent d’une façon continue et les 
poussières sous forme de petits grains minéraux et surtout d’argile sont transportées sur 
la superficie entiére du globe, terres et mers, quoique plus particulièrement sur le 
parcours des grands courants aériens. La mer Jaune doit son nom aux poussières 
éoliennes du loess chinois. J'ai démontré qu’un vent dénommé calme ou presque 
calme (2) par les météorologistes suffisait pour distribuer à la surface, et par consé- 
quent au fond de tous les océans, les grains minéraux qu’on trouve dans les sédiments 
marins, même les plus éloignés des terres. 

VoLcanisME. — Les volcans sub-aériens et les volcans sous-marins concourent les 
uns et les autres à constituer les dépôts sédimentaires de l'océan. Les premiers envoient 
sur toute la superficie des mers leurs pluies de poussières. On a depuis longtemps noté 
les effets des éruptions des volcans d'Islande, de ceux de l'Amérique Centrale et du Kra- 
katau dont les cendres, en 1883, s’élevérent dans l'atmosphère à une hauteur évaluée 
à 50 kilomètres et dont un seul banc de ponces, flottant sur l’eau dans la baie de Lam- 


(1) J. TaouLer, Sur un mode d’érosion (exaration) des roches par l’action combinée de la meret de la gelée (Comptes 


rendus Acad. Sc., t. CII, p. 1193, 1886). 
(2) Tuouter, Analyse d’une poussière éolieune dé Monaco et considérations générales relatives à l'influence de la 


déflation sur la constitution lithologique du sol océanique (Ann. de l'Inst. Océanogr., t. III, fasc. 2, p. 4, 1911). 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


pong, recouvrait une surface de 30 kilomètres carrés sur une épaisseur de 3 à 4 mètres (1). 
Les cendres volcaniques aériennes, emportées par les vents, obéissent évidemment aux 
lois de la déflation tout comme les autres produits éoliens, et il en est de même des 
matériaux flottants, après une dispersion géographique d'autant plus vaste qu'elle 
résulte d’un double entraînement, d’abord à travers l'atmosphère et ensuite au sein des 
eaux. J’ai montré expérimentalement qu’en dépit de leur extrême porosité, les ponces, 
après avoir flotté sur l’eau et été par conséquent entrainées par les courants à d’im- 
menses distances, finissent toujours par s’imbiber et par descendre sur le fond. 

Le lit océanique est semé de nombreux volcans dont les éruptions ne se font sentir 
à la surface que par des commotions ou tremblements de mer dont la plupart restent 
inapercus. J’ai pu dresser, grâce aux sondages de la Princesse-Alice, le plan de la fosse 
de l’Hirondelle (2), entre les îles de Sao Miguel et Terceira, aux Açores, vaste cratère 
occupant une superficie à peu près égale à celle du lac de Genève. Les déjections de ces 
volcans sont essentiellement des scories, des obsidiennes et des ponces, d’aspect bien 
différent et faciles à reconnaître. Ainsi que l’avait remarqué Mohr (3), les scories lourdes 
sont toujours les plus proches de l’orifice volcanique, les obsidiennes moins lourdes se 
déposent plus loin, tandis que les ponces sont au contraire les plus éloignées. En prati- 
quant méthodiquement des séries de sondages et en notant, pour chacun d'eux, les 
proportions relatives de scories, d’obsidiennes et de ponces, il sera donc possible de 
déterminer l'emplacement de l’orifice volcanique sous-marin dont elles proviennent. 
Dans ces recherches, il y aura lieu de prendre en considération l’onde sous-marine 
provoquée par l’éruption elle-même et dont l'existence, ainsi que la puissance et la 
direction, sont indiquées par l'épaisseur, la composition et l'aspect des bandes sableuses 
intercalées sur la longueur des boudins extraits par le tube sondeur Buchanan du fond 
des régions volcaniques sous-marines, et sur lesquels j’ai moi-même attiré l'attention (4). 

A l'exception des ponces rencontrées à peu près partout, les sédiments volcaniques 


ne se trouvent en quantité notable que dans certaines régions sous-marineslimitées telles, . 


par exemple, que l’archipel des Acores. Tantôt très voisins de terre comme à Santorin, 
dans les îles de la Sonde et ailleurs, ils se rencontrent d’autres fois dans les portions tout 
à fait centrales des océans. Ils sont donc des éléments adventifs et locaux plutôt que 
réguliers et généraux du sol subocéanique. 

APPORTS COSMIQUES. — Les apports cosmiques consistent en grains irréguliers de 
magnétite, en chondres ou globules noirs, bruns ou gris, pour la plupart attirables au 
barreau aimanté et riches en fer, en nickel et en cobalt. J’ai trouvé, dans des fonds du 
golfe de Gascogne (5), des diamants dont l’origine cosmique ne saurait faire l'objet 


(1) J. Wattuer, Einleitung in die Geologie als historische Wissenschaft. p. 688, léna, 1894. 

(2) THouLer, La fosse de l’Hirondelle dans l’Archipel des Açores (Comptes rendus Acad. Sc., 18 juillet 1904). 

(3) In vulcanis terrestribus, pumices in locis vicinis, cineres in longinquis demittuntur; in vulcanis submarinis. 
pumices natando large dissipantur, cineres humectati in locis vicinis subsidunt (F. Mour, Geschichte der Erde. Eine 
Geologie auf neuer Grundlage. Th. 87, p. 516, 1'e édit., Bonn, 1886). 

(4) Taouzer, Analyses des fonds récoltés pendant la campagne de 1002 (Résultats des campagnes scientifiques du 
Prince de Monaco, fasc. 29; p. 63, 1905). 

(5) Tuouter, Sur la-présence supposée de diamants microscopiques dans un fond marin et dans un échantillon 
_de terre végétale (Comptes rendus Acad. Sc.,t. CXLVI, p. 35, 17 févr. 1905). 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 37 


d’aucun doute. Ces sédiments, infiniment peu abondants, jouént un rôle très secondaire 
dans le remplissage du lit océanique, et leur répartition géographique ne semble, au 
moins jusqu’à présent, être régie par aucune loi. 

PHÉNOMÈNES CHIMIQUES. — Les dépôts chimiques ne paraissent pas non plus jouer 
un rôle considérable dans la constitution des sols océaniques, quoique la question aurait 
peut-être besoin d'être examinée de plus près. Walther (1) a signalé, dans la mer Rouge 
et sur la côte de Floride, l'existence de sables oolithiques d'origine probablement chimique. 
Il en est de même de la glauconie, des nodules manganésiens et phosphatés, de la dolomie 
et de certaines zéolithes, minéraux sur la création desquels les actions chimiques ont, 
dans bien des cas, exercé une influence importante. Les mattes (2), qui s'étendent dans 
le golfe du Lion, entre Palavas et le Grau-du-Roi, dans le golfe d’Aigues-Mortes, sont des 
sables ou des vases agglutinés par du carbonate de chaux résultant de la décomposition 
du sulfate de chaux dissous dans l’eau de mer par le carbonate d’ammoniaque provenant 
lui-méme de la décomposition de matiéres organiques. 

ACTION DES VÉGÉTAUX ET DES ANIMAUX. — Les dépôts pélagiens sont en majeure partie 
constitués par des éléments d’origine végétale ou animale, dépouilles d’étres ayant vécu 
dans les eaux superficielles et tombés sur le fond aprés leur mort. D’aprés Murray, les 
vases à diatomées formeraient à peu près en totalité le sol de l’océan Antarctique, et ces 
algues microscopiques se trouvent en plus ou moins grande abondance à peu près partout. 
Dans les mers plus tempérées ou chaudes, les vases à foraminifères, à globigérines et à 
biloculines, à ptéropodes et à radiolaires, du même auteur, recouvrent de vastes étendues. 
Tous ces débris siliceux et calcaires s’entassent sur le fond et, comme leur descente est 
assez rapide pour qu’en y arrivant ils restent encore enveloppés d’une certaine quantité 
de matière nutritive, ils servent vraisemblablement à la nourriture d'animaux benthiques 
parmi lesquels on a cité les Holothuries, les Oursins et les Balanoglosses (3). Ces animaux 
broient leurs carapaces peu résistantes, les réduisent en poussière fine et les rejettent 
ensuite dépouillées de leur matière nutritive et cependant enduites d’un mucus se prêtant 
par sa décomposition à une cimentation ultérieure au moyen du carbonate de chaux 
d’origine chimique résultant de la décomposition du sulfate de chaux de l'eau de mer. 
L'action des mangeurs de sable ne serait pas sans quelque analogie avec'celle des 
vers de terre par le corps desquels, selon Darwin, passeraient annuellement 10 tonnes par 
acre (10,46 ares) de terre arable (4). D'après Stanley Gardiner, elle serait même, dans les 
récifs coralliens, au moins 50 fois plus considérable. Cette considération ne paraît pas 
avoir été suffisamment pesée dans les si nombreuses discussions relatives à l’origine de 
la craie. Si elle était vérifiée, — et cette tâche incombe aux zoologistes, — il en résulterait 
des conséquences capitales pour l’explication de la genèse des argiles et vases plus ou 
moins sableuses des grands fonds et la connaissance de la relation existant entre la pré- 


(1) J. Wavrxer, Einleitung in die Geologie als historische Wissenschaft, p. 659, léna, 1894. 

(2) Tuoucer, De la genèse des roches sous-marines connues sous le nom de mattes (Comptes rendus Acad. Sc., 
t. CL, p. 421, 19 février 1910). 

(3) Cu. Gravier, Biologie des récifs coralliens (Revue scient., 2, p. 385, 1908). 

(4) Cu. Darwin, Vegetable Mould and Earthworms. 


38 ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 


sence de ces sédiments et l’abondance ou la pauvreté de la vie au-dessus de Paire qu'ils 
occupent sur le fond ou sur cette aire elle-même. 

Parmi les matériaux d’origine organique, il y aencore lieu de citer les débris calcaires 
de coquilles abondantes le long de certaines côtes et autour des îles et des récifs coralliens. 

Les matériaux issus de ces diverses origines, après avoir été distribués sur des portions 
déterminées du lit océanique par les vagues et par les courants, constituent l’ensemble 
des dépôts sous-marins. 

En temps ordinaire, les vagues n’exercent d'action véritable de transport de galets, 
graviers et sables, que sur une zone limitée, du côté de la terre, par la ligne la plus haute 
atteinte par l’eau dans les grandes marées et, du côté de la mer, par l’isobathe de 10 mètres 
environ au-dessous des basses eaux. La profondeur à laquelle, par temps moyen, le 
mouvement des vagues se fait sentir sur le sol immergé, avec une force suffisante pour 
y maintenir les vases en suspension et leur permettre par conséquent d'être entraînées par 
le courant côtier, s'étend a Sa vers le large où elle est marquée par la limite des 
vases permanentes. 

Devant toutes les côtes passe un courant dit côtier à l’entrainement duquel obéissent 
les matériaux d’érosion apportés à la mer par. les fleuves, ainsi que ceux résultant de 
l'abrasion. Ce courant côtier est peu profond et diminue rapidement de vitesse avec 
la profondeur. Sur la côte du Languedoc, devant Palavas et Cette, sa zone d’action contre 
le sol correspond à une profondeur d'environ 25 mètres et est marquée par des fonds de 
sables vaseux et de vases très sableuses ; il est alors grossi par les eaux du Rhône et sa 
vitesse maximum, calculée d’après la dimension des grains sableux charriés par lui, est de 
uncinquième de nœud. C’est le courant côtier qui distribue les sédiments immédiatement 
enlevés à la terre et donne leur modelé aux deltas. ) 

Les grands courants marins qui parviennent jusque dans les portions centrales des 
océans commencent toujours par longer les côtes sur la majeure partie de leurs parcours 
avant de se diriger vers le large. Cette particularité leur permet de semer et de répartir 


promptement sur le fond tous leurs sédiments d’érosion et d’abrasion, et d’arriver limpides ~ 


en haute mer. Leur vitesse de surface est faible car, dans l’Atlantique, pour le courant 
équatorial, elle varie selon les saisons entre un peu moins d’un nœud et un demi-nœud 
à l'heure, avec un grand maximum de quatre nœuds pour le Gulf-Stream à sa sortie du 
canal de Bahama, c’est-à-dire là où il est le plus rapide. Dans l’immense majorité des cas, 
à 200 mètres de profondeur, au plus, leur vitesse a complètement disparu (1). 

La masse des eaux océaniques sedivise en deux nappes superposées: l’une, superficielle, 
épaisse d’environ 1000 mètres, est une zone d’activité, tandis que la seconde, inférieure, 
s'étendant jusqu’au fond, est la zone de l’immobilité, du calme et du repos. 

Ces principes auxquels s'ajoutent la notion de la chute presque verticale et très 
rapide des sédiments sableux depuis la surface jusqu’au fond, celle de la coagulation 
des argiles par leur contact avec les eaux salées, permettent de classer géographique- 
ment et bathymétriquement les fonds ou sédiments marins en trois catégories : les 


(1) O. KruMMEL, Der Ozean, p. 252, Leipzig, 1902. 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 29 


fonds littoraux ou paraliens, les fonds côtiers ou paractiens, et les fonds pélagiens (1). 

SÉDIMENTS LITTORAUX OU PARALIENS. — Ces sédiments occupent la région comprise 
entre le point le plus éloigné, du côté de la terre, atteint par les vagues et l’isobathe 
de 10 mètres. Par exception seulement, ils s'étendent davantage vers le large: la s’exerce 
avec toute son énergie l’action des vagues qui déterminent le mouvement et le classe- 
ment des sédiments essentiellement composés des plus gros produits de l'érosion et de 
l’abrasion. Ils cheminent le long du rivage en s’usant lentement, surtout par choc mutuel, 
dans la direction générale du courant côtier et par une route en dents de scie, par con- 
séquent prodigieusement étendue. Ils sont, pour la plus grande part, siliceux, sableux 
et même graveleux et, dans les localités abritées, ports, anses, baies ou estuaires, en 
quantités beaucoup moindres, ils sont représentés par des vases de nature spéciale, carac- 
térisées par une abondante proportion de matière organique, de couleur foncée ou même 
noire et souvent fétides, désignées plus particulièrement sous le nom de boues. On y 
trouve, en outre, les divers intermédiaires entre les sables et les boues, c’est-à-dire des 
sables boueux, des boues très sableuses. La zone littorale ou paralienne est celle de plus 
grande activité mécanique de la mer et pourrait se comparer à un immense atelier 
d'usure des matériaux : là s'effectuent les plus fréquents déplacements des fonds sous 
l'influence temporaire des tempêtes, quoique cependant ceux-ci se bornent à osciller 
momentanément autour de positions fixes rm assez de stabilité pour être indiquées 
sur les cartes bathylithologiques. 

SEDIMENTS CÔTIERS OU PARACTIENS. — La zone des fonds côtiers occupe une largeur 
variable selon les localités, mais généralement très peu distante de la terre et assez étroite 
puisqu'elle est comprise entre l’isobathe de 10 mètres et la limite permanente des 
vases proprement dites. Les sédiments proviennent de l’abrasion et de l'érosion et par 
conséquent résultent presque en totalité directement de la destruction des masses conti- 
nentales ; ils sont distribués aux places qu’ils recouvrent, en gerbe, à partir de l’embou- 
chure des fleuves, par le courant côtier lequel, grâce à l’agitation légère du fond par les 
vagues, dévient capable d'entraîner les vases et de les mélanger en proportions variables 
avec des sables de plus en plus fins et de moins en moins abondants du côté de la haute 
mer. On rencontre aussi, mais plus rarement, parmi les fonds côtiers, de véritables sables 
et même des graviers dans les endroits où, par suite de remous ou d’autres causes, le 
fond est particulièrement agité. Les véritables sédiments côtiers sont des sables vaseux, 
des vases très sableuses et des vases sableuses. Leur zone est, en définitive, celle où 
s'exerce l’action prédominante du courant côtier. 

SÉDIMENTS PÉLAGIENS. — Les fonds pélagiens, du côté de la terre, commencent dès 
la ligne d’apparition des vases permanentes et ils couvrent la superficie entière du 
bassin océanique qui n’est pas occupée par les fonds littoraux et côtiers. Ils appartiennent 
à la zone de plus grand calme des eaux et leur origine est surtout végétale et animale 
püisqu'’ils résultent essentiellement de l'accumulation sur le lit marin des dépouilles des 


(1) L'adoption générale par tous les océanographes, depuis Lavoisier, du terme « pélagiens » appliqué aux fonds de 
haute mer, m'engage à proposer, pour désigner les fonds littoraux dans un but de synonymie internationale, l'emploi 
des termes « paraliens » (xap% 4s, près de la mer) et « paractiens » (rapé 4xrn, près de la côte) pour les fonds côtiers. 


40 ANNALES DE L'INSTITUT OCEANOGRAPHIQUE 


êtres morts au sein des eaux immédiatement sus-jacentes. Tels qu'ils sont recueillis et 
analysés, ils sont donc aptes à fournir des indications sur les diverses conditions am- 
biantes de vie et, par suite, physiques et chimiques dans toute la colonne des eaux qui les 
surmontent, aussi bien intermédiaires que superficielles, ces dernières jouant d’ailleurs 
le rôle le plus important. L’accumulation des sédiments s’y effectue avec une lenteur 
extrême, ainsi que cela est matériellement prouvé par la présence de débris de fossiles 
anciens tels que des dents de Carcharodon, par celle de croûtes et de nodules manga- 
nésiens, phosphatés et autres exigeant pour se former un temps très considérable. 

Les fonds pélagiens, quoique constitués surtout par des vases, contiennent néanmoins 
par places des vases plus ou moins sableuses et même des sables offrant le caractère 
spécial d'être composés, non pas presque uniquement de grains quartzeux comme les 
sables littoraux et côtiers, mais par des carapaces calcaires entières de foraminifères. Il 
paraît donc probable que celles-ci correspondent superficiellement à des aires de grande 
vitalité, puisque les carapaces sont tombées en abondance et, inférieurement, sur le sol 
même de l'océan, à des aires de vitalité minimum, puisque ces carapaces n’ont pas été 
broyées. L'hypothèse de la disparition du calcaire, au-dessous d’une certaine profondeur, 
par attaque due à un excès d'acide carbonique libre, n'étant encore rien moins que 
prouvée, n’a pas lieu d’être, pour le moment, prise en considération. 

Les vases pélagiennes (1) sont généralement d’un gris jaunâtre près de la terre, puis 
bleuâtres par commencement d’oxydation du fer qu’elles contiennent, et souvent ensuite 
rouges par peroxydation de ce fer, lorsqu'elles sont peu calcaires, ou faiblement rosées 
lorsqu'elles contiennent beaucoup de débris de foraminifères. Quand un boudin de vase 
pélagienne présente sur sa longueur une ou plusieurs alternances de bandes rouges et 
bleues, on a cru pouvoir en déduire, pour le lieu où l'échantillon a été récolté, des 
alternances correspondantes de subsidence ou d’exhaussement ayant eu pour consé- 
quence un éloignement ou un rapprochement de la terrela plus voisine permettant aux 
matières ferrugineuses, par une lenteur plus ou moins grande de leur entassement, une 
oxydation plus ou moins complète. Cette théorie a été appliquée par Boeggild et Nansen (2) 
aux sédiments déposés dans l'océan Glacial, au large de la côte de Sibérie. 

Il ne semble pas que la connaissance lithologique des fonds pélagiens soit encore 
suffisamment détaillée et précise pour permettre de se livrer dès maintenant à des généra- 
lisations par trop rigoureuses. Seules, des monographies d'espaces restreints fourniront 
les moyens de parvenir à ce résultat, à la condition toutefois que les océanographes litho- 
logistes commencent par se mettre bien d’accord sur la nomenclature et la terminologie 
des fonds ainsi que sur les procédés de leur analyse. Alors seulement ou sera en état de 
grouper sur des cartes bathylithologiques, les conclusions obtenues, de les rendre 
comparables entre elles et de les compléter ensuite les unes par les autres. 

Résumé. — Les sources productrices des sédiments sous-marins sont l'érosion, 


(1) THourer, Couleur des fonds marins (Bulletin de l’Institut Océanographique de Monaco, n° 190, 20 décembre 
1910, p. 7). ; 

(2) F. Nansen, The norvegian North-polar Expedition, 1893-1896. — Scientific Results. — Reprint from vol. IV, 
p- 214, Broegger, Christiania, 1904. 


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ANNALES DE L'INSTITUT OCÉANOGRAPHIQUE 41 


l’abrasion, l’exaration, la déflation, le volcanisme, les apports cosmiques, les phénomènes 
chimiques, l’action des végétaux et des animaux, et diverses autres causes tout à fait 
accessoires telles que le transport de pierres par des animaux ou par des oiseaux et la 
chute des escarbilles des bateaux à vapeur. 

Bien qu'il soit difficile de trouver un échantillon dans lequel, enles cherchant bien, 
on ne découvre, au moins en traces, des grains minéraux provenant de chacune de ces 
origines, les fonds marins, d’après leur genèse, leur mode de répartition géographique et 
bathymétrique sur le sol immergé, se pans de la côte vers la large, en trois grandes 
catégories : 

1° Les fonds littoraux ou paraliens, surtout sableux mais aussi parfois boueux, 
dépassent rarement l’isobathe de 10 mètres, et sont composés presque uniquement de 
sables quartzeux provenant immédiatement de l’abrasion et de l'érosion continentales et 
classés par les vagues ; 

2° Les fonds côtiers ou paractiens, inélanges de sables et de vases, classés par le 
courant côtier secondé lui-même par l’action atténuée des vagues sur le sol, proviennent 
eux aussi de l’abrasion et de l’érosion continentales et s'étendent, non loin de terre, 
jusqu’à la limite des vases permanentes, à la profondeur où les vagues cessent complète- 
ment d’agiter le sol sous-marin ; 

3° Les fonds pélagiens, occupant la majeure partie du lit océanique, déposés au sein 
d'eaux calmes, sont surtout composés de vases parfois mélangées de sable; ils sont 
formés sous l'influence prédominante de l’amoncellement sur le sol de débris végétaux et 
animaux. 

L'érosion, l’abrasion et l’action des organismes jouent un rôle capital et caracté- 
ristique dans la formation des dépôts lithologiques sous-marins ; l’exaration et la 
déflation ont un rôle, pour l’une local, pour l’autre général, mais pour toutes deux d’im- 
portance secondaire. L'influence du volcanisme, si l’on en excepte la dissémination si 
générale des ponces, est le plus souvent locale et par conséquent secondaire. Les phéno- 
mènes chimiques, les apports cosmiques, avec l’ensemble des diverses autres causes, 
n’offrent guère qu'un intérêt théorique. 


T. UI. — Fasc. 7. 6 


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