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Full text of "Annales du Midi"

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ANNALES  DU   MIDI 


ANNALES 

DU    MIDI 

REVUE 

ARCHÉOLOGIQUE,   HISTORIQUE  ET   PHILOLOGIQUE 

DE    LA   FRANGE    MÉRIDIONALE 

Fondée  sous  les  auspices  de  l'Université  de  Toulouse, 
PAR 

ANTOINE    THOMAS 

PUBLIÉE  AVEC  LE  CONCOURS  d'uN  COMITÉ  DE  RÉDACTION 
PAR 

A.  JEANROY  ET  P.  DOGNON 

PROFESSKUHS     A     L'UNIVERSITÉ     DE     TOULOUSE 


«t  Ab  l'alen  tir  vas  me  l'aire 
«  Qu'eu  sent  venir  de  Proenza.  s 
Peire  Vidal. 


SEIZIÈMEANXÉE  . 

1904  r\  "^     ' 


^ 


TOULOUSE 
IMPRIMERIE    ET   LIBRAIRIE    EDOUARD    PRIVAT 

14,    RUE     DES    ARTS    (SQUARE     DU     MUSÉE) 

Paris.  —  Alphonse  PICARD  et  fils,  rue  Bonaparte  82. 


LES     ORIGINES 


PROVINCE  ECCLÉSIASTIQUE  DE  TOULOUSE 

(1295-1318) 


(Suite  et  fin*. 


m. 

DÉLIMITATION    DES   DIOCESES  ET    DES   MENSES. 

Les  opérations  de  l'enquête  se  poursuivirent  huit  mois 
durant  :  de  juillet  1317  à  février  1318  (n.  st.).  Le  détail  ne 
nous  en  est  connu  que  par  les  lettres  pontificales  qui  en  tra- 
çaient le  programme  et  dont  les  commissaires  durent  suivre 
scrupuleusement  les  dispositions  :  information  sur  les  pro- 
priétés de  la  mense;  évaluation  de  leur  revenu;  division  de  ce 
revenu  en  sept  lots  principaux  correspondant  aux  sept  évê- 
chés,  et  en  dix  groupes  moindres  répondant  aux  chapitres 
caihédraiix  et  collégiaux;  attribution  de  certains  bénéfices  à 
titre  de  compensation  aux  monastères  et  aux  prieurés  lésés 
par  les  fondations  nouvelles;  enfin  travail  de  délimitation 
territoriale  basé  sur  les  calculs  arrêtés  pour  les  menses. 

Nous  nous  rendrons  mieux  compte  de  la  suite  de  ces  opéra- 
tions en  examinant  les  bulles  qui  en  consacrèrent  le  résultat. 

1.  Voir  Annales  du  Midi,  livraisons  de  juillet  et  d'octobre  1903. 


6  J.-M.   VIDAL. 

Elles  ne  sont  pas  moins  de  quarante,  toutes  datées  du  22  fé- 
vrier 1318 ^  Chaque  nouveau  diocèse  en  exigea  deux  :  une 
pour  la  mense  épiscopale  et  une  pour  la  mense  capitulaire. 
Les  autres  donnent  satisfaction  à  des  bénéficiers  qui  y 
avaient  droit. 

Nous  essayerons  de  dire  quel  fut  le  lot  de  chaque  diocèse 
et  de  chaque  chapitre  dans  ce  partage  général.  Le  lecteur 
trouvera  du  moins  dans  ces  pages  forcément  assez  sèches  un 
tableau  exact  de  la  province  de  Toulouse  après  sa  fondation. 

1»  Diocèse  de  Toulouse.  —  Le  pape  lui  attribua  environ 
deux  cent  vingt^  églises,  chapelles,  prieurés  ou  monastères 
dont  sa  bulle  contient  la  nomenclature  ainsi  que  celle  des 
territoires  qui  ne  rentraient  dans  aucune  de  ces  catégories. 
Les  limites  de  celles  de  ces  paroisses  les  plus  éloignées  de 
Toulouse  à  la  ronde  formaient  les  frontières  du  diocèse  lui- 
même.  Le  pape  ne  trace  pas  autrement  la  ligne  de  démarca- 
tion. Il  en  fut  de  même  pour  les  autres  circonscriptions. 

Dans  ces  limites  furent  compris  sept  monastères  :  Saint- 
Saturnin  de  Toulouse  (0.  S.  B.),  Grandselve  (Cisterciens), 
Mas-Grenier  (0.  S.  B.),  la  Capelle  (Prémontrés),  Eaunes  (Cis- 
terciens), et  rOraison-Dieu  à  Muret  (Cisterciennes)*.  Après 
la  réforme  de  Jean  XXII  il  y  eut  trois  chapitres  :  Saint- 
Etienne  de  Toulouse,  l'Isle-Jourdain*  et  Saint-Félix  de  Ca- 
raman. 

Le  chapitre  cathédral,  présidé  par  un  prévôt,  était  composé 
d'un  aumônier,  d'un  chancelier,  d'un  sacriste,  d'un  trésorier, 
des  archidiacres  de  Villelongue,  Savez  (ou  Gimoez),  Vielmo- 
morez,  Olmes,  Lézat  (ou  Montesquieu),  Lanta  et  Villemur  (ou 

1.  Documeyits,  etc.,  du  n"  XXXIX  au  n»  LVII.  Nous  avons  la  certitude 
de  n'avoir  pas  connu  toutes  celles  qui  concernent  les  compensations 
accordées  par  le  pape. 

2.  M.  A.  MoLiNiER  [Hist.  de  Languedoc,  XII,  p.  159),  d'après  un 
pouillé  du  temps  de  Jean  XXII,  donne  le  chiffre  de  214  paroisses. 

3.  On  nous  permettra  de  n'identifier  ici  que  les  localités  aujourd'liui 
situées  hors  du  département  de  la  Haute-Garonne.  Que  le  lecteur  soit 
donc  averti  pour  la  suite  de  ce  paragrapiie.  Mas  Grenier,  Grandseloe 
(Tarn-et-Garonne),  comm.  et  cant.  de  Verdun. 

4.  L'Isle- Jourdain  (Gers),  chef-lieu  de  cant.,  arr.  de  Lombez. 


ORIGINES    DE    LA    PROVINCE  ECCLESIASTIQUE   DE  TOULOUSE.      7 

Canet)!  ^iQ^t  \q  [[[^e  n'était  plus  qu'honorifique,  tles  prieurs 
de  Sauvimont^,  Muret,  Nailloux,  Gensac,  Pompiac^,  Aus- 
sonne,  Gornebarieu,  Goudourvielle*,  Odars  et  de  plusieurs 
canonicats  simples^. 

On  comptait  dans  le  diocèse  six  archiprêtrés  qui  formaient 
autant  de  circonscriptions  territoriales  :  Gardoucb,  Caraman, 
Verfeil,  Montastruc,  l'Herm  et  Grenade". 

Gardouch  comprenait  trente-huit  paroisses;  Caraman, 
trente-une;  Verfeil,  trente-deux;  Montastruc,  trente-sept; 
Grenade,  trente-six;  l'Herm,  quarante'.  Parmi  ces  paroisses, 
il  y  en  avait  trente-deux  portant  le  titre  de  prieurés  ^  et  en- 
viron cent  soixante-dix  églises  simples  ^  La  ville  épiscopale 
était  partagée  en  sept  paroisses,  dont  quatre  étaient  des 
prieurés^". 

Telle  était  la  division  ecclésiastique.  La  bulle  du  pape  tient 
compte  des  divisions  civiles  en  castra,  villae  et  territorial^. 
Elle  énumère  sept  localités  fortifiées  :  Montbruu,  Vallègue  et 

1.  Siu-  les  contrées  qui  formaient  autrefois  ces  archidiaconés,  voir 
Douais,  Cartulaire  de  Saint-Sernin ,  pp.  4-5;  Hist.  de  Languedoc, 
t.  XII,  pp.  156-158. 

2.  Sauvini07it  (Gers),  chef-lieu  de  cant.,  arr.  de  Lombez. 

3.  Poynpiac  (Gers),  cant.  de  Saraatan,  arr.  de  Lombez. 

4.  Goudourvielle  (Gers),  cant.  do  l'Isle-Jourdain. 

5.  Vidal,  Documents  pour  servir  à  dresser  le  pouillé,  etc.,  p.  23. 

6.  Localités  du  département  de  la  Haute-Garonne. 

7.  Sur  l'étendue  de  chacune  de  ces  circonscriptions,  voir  Hist.  de  Lan- 
guedoc, XII,  p.  159.  On  trouvera  la  liste  des  paroisses  soumises  à  chaque 
archiprêtré  dans  Documents  pour  servir  à  dresser  le  pouillé,  pp.  13-23. 

8.  A  Toulouse  :  Notre-Dame  la  Daurade  (conventuel,  0.  S.  B.),  Saint- 
Pierre-des-Cuisines,  Saints-Pierre  et  Gérard,  Saint-Antoine-du-T.  Dans  le 
diocèse  :  Auterive,  Mauvaisin,  Venerque,  Aïgues-Vives,  Le  Vernet,  No- 
garet  et  Mazères,  Mourvilles,  Auzielle,  Le  Faget,  Saint-Sulpice,  Roque- 
serrière,  la  Salvetat,  Villematier,  Saint-Rustice,  Sayrac,  Lespinasse  (con- 
ventuel de  femmes),  Fenouillct,  Pinel,  Sainte-Foi-de-Peyrolièrcs,  Pinsa- 
giiel  (conventuel),  Saint-Jacques  de  Muret,  Tournefeuille,  Saint-Salvy, 
Lasserre,  Verdun,  Blagnac  (attaché  au  monastère  de  Saint-Sernin), 
Buzet  et  Sainte-Livrade.  Vidal,  lac.  cit. 

9.  Vidal,  même  ouvrage  et  bulle  pontificale  n.  XXXIX,  dans  Docu- 
ments. 

10.  Saint-Etienne,  Saint-Sernin,  la  Daurade,  la  Dalbade,  le  Taur,  Saint- 
Pierre-des-Cuisines,  Saint-Nicolas. 

11.  Castrum  désigne  un  lieu  fort;  villa,  un  village;  territorium  sem- 
blerait indiquer  un  simple  domaine  ou  une  agglomération  sans  impor- 
tance. Hist.  de  Lang.,  XII,  pp.  175-176. 


8  J.-M.    VIDAL. 

Saint-Vincent,  Balma,  le  Pin,  Verfeil,  Bourg-Saint-Bernard 
et  Castelmaiirou*,  trente-six  de  la  deuxième  catégorie  2  et 
trente-cinq  de  la  troisième  3. 

L'archevêque  possédait  des  rentes  dans  la  plupart  de  ces 
localités,  paroisses  ou  territoires.  Ce  sont  ces  revenus  qui, 
unis  à  certaines  redevances  dérivant  d'une  juridiction  ou 
suzeraineté  temporelle  formaient  sa  dotation  annuelle  de 
10,000  livres. 

En  dehors  de  son  diocèse,  ce  prélat  conservait  des  droits 
sur  nombre  de  localités  relevant  jadis  de  l'évêque  de  Tou- 
louse. Ainsi,  il  gardait  la  propriété  du  château  de  Gaudiès*, 
bien  que  le  territoire  de  cette  paroisse  fiit  incorporé  au  dio- 
cèse de  Mirepoix. 

Afin  de  couper  court  aux  réclamations  possibles  des  mé- 
contents, Jean  XXII  déclara  qu'on  les  tiendrait  pour  non 
avenues.  Qu'on  ait  exagéré  ou  amoindri  le  rapport  des  biens; 
que  le  chiffre  de  ce  rapport  dépasse  ou  n'atteigne  pas  celui 
qui  a  été  fixé  en  principe,  il  importe  peu.  Dans  le  premier 
cas,  nul  ne  devra  inquiéter  l'archevêque;  dans  le  second, 
celui-ci  devra  se  contenter  de  ce  qu'il  aura. 

L'archevêque  n'absorbait  pas,  du  reste,  toutes  les  rentes 
ecclésiastiques  de  son  territoire.  Des  monastères,  des  chapi- 

1.  Hist.  de  Lang.,  XII,  p.  289. 

2.  Saint-Agne,  Corronsac,  Pechaboa,  Auzeville,  Montgiscard,  Novelières, 
Gardouch,  Fourquevaux,  Tarabel,  Sainte-P"oi-de-Tournefeuille,  Flourens, 
Drémil,  Lavalette,  Azas,  Vasconia,  Montcabrier,  Gragnague,  Saint-Jean- 
de-l'Herm,  Montastruc,  Saint-Jory,  Lamasquère,  Alayrac,  Villeneuve,  Cu- 
gnaux,  Saubens,  Vieille-Toulouse,  Aureville,  Caslanet ,  Pampertusat, 
Donneville,  Auragne,  Saint-Léon,  Montgailhard,  Baziège,  La  Bastide- 
Beauvoir.  Documents  sur  les  origines,  n.  XXXIX,  p.  125. 

3.  «  Territoria  seu  redditus  de  Salviolis,  de  Squillanis,  de  Bellovidere, 
de  Cabesessas,  de  S.  Cruce,  de  S.  Andréa,  de  Barta,  de  S.  Saturnino  de 
Usseda,  de  S.  Petro,  de  Baiovilla,  de  Marocafal,  de  S.  Sulpicio  prope 
Portellum,  de  Dalps  prope  Villanifrancam,  de  Brugueria.  de  Ribonello, 
S.  Martini  prope  Fenolhetum,  de  Drudanis,  de  Gaugato  prope  Perce- 
rium  in  parrochia  Santae  Fidis,  de  S.  Petro,  de  Bosovilla,  de  Malberx, 
de  Frigidobosco,  de  S.  Cassiano,  de  Noyco,  de  Marnhaco  prope  Thylium, 
de  Arrameto,  S.  Michaelis  et  B.  M.  de  Caulaco  prope  Mirainontem,  de 
LinayroUis  et  de  Causer;  leude  de  Castronovo  de  Arrio,  de  Avinhoneto  et 
de  Bellapertica,  ac  quoddam  pratum  situm  in  loco  qui  dicitur  Castane- 
tum...  »  Docum.,  n.  XXXIX,  p.  126. 

4.  Gaudiès  (Ariège),  cant.  de  Saverdun,  arrond,  de  Pamiers. 


ORIGINES   DE  LA   PROVINCE  ECCLÉSIASTIQUE  DE  TOULOUSE.      9 

très,  des  prieurés  du  diocèse  ou  d'ailleurs  en  eurent  leur  part 
à  titre  de  mense  ou  d'indemnité.  Ainsi,  le  chapitre  de  l'Isle- 
Jourdain  jouit  des  rentes  levées  dans  cette  localité  même, 
à  Mérenvielle  et  ailleurs  par  le  prieur  et  le  sacriste  de  l'an- 
cienne église  1.  Celui  de  Saint-Félix  de  Cararaan^  eut  pour 
apanage  les  revenus  de  cette  ville,  ceux  de  Saint-Julia,  des 
Cassés,  du  Vaux,  de  Cambiac,  Auriac,  Moucalvel,  Noame- 
rens,  le  Faget^  Francarville,  Lignayrolles,  Toutens  et  Cara- 
goudes^. 

Le  fondateur  assurait  ainsi  à  son  œuvre  une  rente  annuelle 
de  2,000  livres,  chiffre  adopté  en  principe  pour  les  nouveaux 
chapitres  cathédraux  ou  collégiaux  et  devant  suffire  à  l'en- 
tretien de  douze  chanoines,  trois  hebdomadiers,  vingt-quatre 
chapelains,  deux  diacres,  deux  sous-diacres,  six  clercs  et  six 
enfants  de  chœur.  Dans  les  quatre  collèges  capitulaires  de 
Castelnaudary,  Saint-Félix,  l'Isle-Jourdain  et  Saint-Etienne 
de  Tescou,  la  première  place  était  celle  de  doyen,  la  deu- 
xième celle  de  sacriste,  la  troisième  celle  de  préchantre. 
Le  doyen  élu  par  ses  confrères  avait  droit  à  260  livres 
tournois  par  an,  le  sacriste  et  le  précenteur  à  70,  et  cha- 
cun des  chanoines  à  30.  Des  distributions  manuelles  assu- 
raient un  supplément  de  80  livres  au  doyen  et  de  40  livres  à 
chacun  de  ses  collègues.  Les  prêtres  auxiliaires  et  les  minis- 
tres inférieurs  recevaient  une  gratification  proportionnée  à 
l'importance  de  leurs  attributions. 

S'il  y  a  lieu,  les  chanoines  prennent  part  à  l'élection  de 
révêqne  diocésain,  qui  à  son  tour  participe  de  droit  à  celle 
du  doyen  et  nomme  aux  charges  de  sacriste  et  de  préchantre. 
Chapitre  et  évêque,  à  tour  de  rôle,  disposent  des  simples  ca- 
nonicats  dès  leur  vacance.  Le  doyen  et  les  chanoines  ont 
seuls  le  choix  des  ministres  secondaires,  prêtres  ou  clercs. 
Le  sacriste  a  la  charge  de  la  paroisse  unie  au  chapitre. 


1.  Reg.  Vat.,  LXVIII,  n.  1112;  Docum.,  n.  LIV,  p.  172. 

2.  Reg.  Vat.,  ibid.,  n.  1062,  et  LVII,  n.  997;  Docum.,  n.  XXXIX  et 
LUI,  pp.  128.  171. 

3.  Localités  du  département  de  la  Haute-Garonne,   à  l'exception  des 
Cassés  (Aude),  cant.  de  Castelnaudary. 


10  J.-M.    VIDAL. 

Les  bulles  insistent  sur  les  devoirs  qui  incombent  à  chacun 
des  bénéficiers.  Rien  n'est  négligé.  Le  pape  est  soucieux 
d'assurer  la  régularité,  la  solennité,  la  décence  du  culte 
divin. 

Ces  quatre  constitutions  se  ressemblent  toutes,  sauf  dans 
rénumération  des  biens  des  menses  respectives*. 

2°  Diocèse  de  Pamiers.  —  Clément  V  s'était  flatté  de  tra- 
cer des  bornes  définitives  au  diocèse  de  Pamiers.  Or,  Bernard 
Saisset  et  ses  successeurs,  Pelfort  de  Rabastens  et  Jacques 
F'ouruier,  s'y  étaient  tous  trouvés  à  l'étroit  et  avaient  déclaré 
n'y  pouvoir  subsister.  Moins  de  dix  ans  après  la  délimita- 
tion de  Clément  V,  Jean  XXII,  supplié  par  son  parent  Jacques 
Fournier,  consentait  à  une  augmentation. 

Le  27  juin  1317,  pris  de  pitié  pour  cet  évêque  à  qui  «  la 
pauvreté  de  sa  mense  »  ne  permet  pas  de  tenir  son  rang,  il 
décide  qu'un  supplément  de  1,600  livres  lui  sera  alloué  sur  les 
dépouilles  de  l'évêché  de  Toulouse.  En  attendant  la  délimita- 
tion du  territoire  donné  comme  garantie  de  ce  supplément, 
les  administrateurs  pontilicaux  distrairont  cette  somme  des 
fonds  dont  ils  ont  la  gestion  provisoire^. 

Ce  fut  le  22  février  1318^  que  Jean  XXII  remania  la  cir- 
conscription de  Pamiers.  Le  diocèse  fut  agrandi  à  l'est  des 
villages  de  Ventenac,  Roquefort,  Montferrier,  Villeneuve- 
d'Olmes,  Pereille,  Pradettes,  Limbrassac,  Senesse,  Saiut- 
Pastou;  des  prieurés  d'Unzent,  Soint-André  et  Sainte-Croix 
de  Ventenac,  Saint-Christaud,  Lieurac;  des  églises  de  Dun, 
et  de  Vira''  et  de  tous  leurs  territoires.  Le  pape  attribua  à  la 
mense  épiscopale    les    rentes   de    Lieurac,    Unzent,    Saint- 

1.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  984,  985;  LXVIII,  n.  1062,  1112;  Uocum., 
n.  LI,  LU,  LUI,  LIV.  —  Nous  avons  parlé  du  premier  titulaire  de  l'ar- 
chevêché de  Toulouse,  Jean-Raymond  de  Comminges,  évêque  de  Mague- 
lone,  promu  le  18  novembre  1817.  [Reg.  Fat.,  LVII,  n.  315.)  Il  reçut  la 
pourpre  le  18  décembre  1827  (Eubel,  Hierarchia,  p.  15)  et  mourut 
évêque  de  Porto,  le  20  novembre  1814.  . 

2.  Reg.  Vat.,  LXVI,  n.  8348;  Docum.,  n.  XIV,  p.  82. 

3.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  797;  Docum.,  n.  XL,  p.  129. 

4.  Localités  du  département  de  l'Ariège,  cantons  de  Pamiers,  Varilhes, 
Mirepoix  et  Lavelanet. 


ORIGINES  DE  LA  PROVINCE  ECCLÉSIASTIQUE  DE  TOULOUSE.      11 

André,  Saint-Christaud,  Sainte-Croix  de  Venteaac',  Dim  et 
Vira.  Il  réserva  néanmoins  à  leurs  anciens  maîtres  les  droits 
de  patronat  sur  ces  églises,  et  à  l'archevêque  de  Toulouse  la 
suzeraineté^  sur  les  localités  jadis  soumises  aux  évêques  ses 
prédécesseurs. 

3"  Diocèse  de  Mirepoiœ.  —  Situé  à  l'est  du  précédent  et 
au  sud-est  de  celui  de  Toulouse,  ce  diocèse  comptait  cent  dix 
paroisses,  prieurés  ou  églises  au  xiv^  siècle.  Il  en  eut  envi- 
ron cent  cinquante  au  xviii'*'^.  Un  seul  monastère,  celui  des 
Cisterciens  de  Boulbonne-'-,  était  compris  dans  ses  limites. 
Ajoutons  le  prieuré  de  Camon''  (0.  S.  B.),  érigé  le  16  juillet 
1318  en  maison  conventuelle  avec  douze  moines.  Ce  prieuré, 
qui  lui-même  dépendait  du  monastère  de  la  Grasse,  acquit 
dès  lors  le  droit  de  supériorité  sur  celui  de  Peyrefitte%  dont 
les  rentes  vinrent  accroître  sa  mense^. 

Il  y  avait,  en  outre,  seize  prieurés  ordinaires'  :  Cintega- 
helle,  Calmont,  Payra,  Mollandier,  Chalabre,  Larroque- 
d'Olmes,  Lavelanet,  Aigues-Vives,  Manses,  Peyrefitte,  Vais, 
Sainte-Colombe,  Expinoux,  Lafage,  Vilhacet  Puivert**;  enfin, 
quatre-vingt-dix  églises  paroissiales  ou  annexes". 

Le  territoire  était  divisé  en  trois  archiprêtrés  :  Laurac, 
Plaigne  et  Olmes,  ou  Rivel  ^*'. 


1.  Le  pape  statua  que  le  vicaire  de  cette  église  se  contenterait  de  la 
pension  qu'il  recevait  jadis  et  abandonnerait  à  l'évèque  de  Paniiers  le 
supplément  de  50  livres,  qui  lui  avait  été  récemment  attribué.  {Loc.  cit.) 

2.  Hist.  de  Lang.,  XII,  p.  165. 

8.  BoulbOHiie,  près  Cintegabelle  (Haute-Garonne).  Voir  Gall.  christ., 
XIII,  coll.  288  et  suiv. 

4.  Camon  (Ariège),  cant.  de  Mirepoix,  arr.  de  Painiers. 

5.  Peyrefitte-dii-Razès  (Aude),  cant.  de  Chalabre,  arr.  de  Linioux. 

6.  Reg.  Vat.,  LXLlI,n.  1G22;  Dociim.,n.  LX,  p.  182;  cf.  GaU.  christ., 
XIII,  coll.  285  et  suiv. 

7.  Vidal,  Dociim.  pottr  servir  à  dresser  le  pouillé,  pp.  27-31,  73-70. 

8.  Localités  des  départements  de  la  Haute-Garonne  (Cintegabelle,  Cal- 
mont),  de  l'Aude  (Payra,  Mollandier,  Chalabre,  Peyrelitte,  Sainte-Colombe, 
Expinoux,  Lafage,  Puivert)  et  de  l'Ariège  (autres  noms). 

y.  Kn  voir  l'énuinération  dans  la  bulle  (Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  OC):]; 
Docion.,  n.  XLI)  ou  dans  Docitm.  pour  servir,  etc.,  loc.  cit. 

10.  Laurac  (Aude),  canton  de  Fanjeaux,  arr.de  Castelnaudary  ;  Plaigne 
(Aude),  cant.  de  Belpech,  même  arrond.  —  Rivcl  (Aude),  cant.  de  Chalabre, 


12  J.-M.    VIDAL. 

Jean  XXII  dota  la  mense  épiscopale  des  rentes  de  l'ancien 
prieuré  de  Saint-Maurice  de  Mirepoix  et  de  la  localité  de 
Mazères,  relevant  jadis  de  l'abbaye  de  Saint-Victor  de  Mar- 
seille \  de  celles  de  Saint-Félix  de  Tournegat  2,  possédées 
jusqu'à  ce  jour  par  le  prévôt  de  Toulouse;  de  celles  d'Abillès, 
enlevées  à  l'abbé  d'Alet,  et  en  général  de  tous  les  revenus, 
droits,  juridictions  (les  droits  seigneuriaux  exceptés)  autre- 
fois perçus  ou  exercés  dans  les  nouveaux  confins  par  les  évo- 
ques toulousains,  jusqu'à  concurrence  de  5,000  livres  ^ 

Jean  XXII  aurait  voulu  donner  à  ce  diocèse  un  prince  de 
sang  royal  pour  premier  pasteur;  mais  en  dépit  de  ses  ins- 
tances réitérées  S  Philippe,  infant  de  Majorque,  déclina  l'hon- 
neur et  le  fardeau  de  l'épiscopat.  L'abbé  de  Saint-Saturnin 
de  Toulouse,  Raymond  d'Athon,  fut  promu  à  sa  place, 
le  17  février  1318^ 

«  Seul,  l'évoque  ne  pourrait  supporter  la  lourde  charge  qui 
lui  incombe,  ni  communiquer  à  l'édifice,  dont  il  est  le  fonde- 
ment, la  solidité  et  la  stabilité  désirables;  c'est  pourquoi  le 
pape  a  décidé  de  placer  à  ses  côtés  des  colonnes  qui  allége- 
ront son  fardeau ,  des  hommes  vertueux,  qui  seront  comme 
les  membres  du  corps  dont  il  est  la  tête  et  qui,  étroitement 
unis  à  lui,  deviendront  les  collaborateurs  de  ses  travaux  et 
de  son  gouvernement''.  » 

Le  pape  crée  le  môme  jour  les  chapitres  de  Mirepoix,  de 
Rieux,  de  Lavaur  et  de  Lombez.  Muntauban  et  Saint-Papoul, 
anciennes  abbayes,  possédaient  déjà  leurs  collèges  de  moines 

arr.  de  Limoux.  —  Le  territoire  attribué  à  Mirepoix  est  réparti  de  nos 
jours  entre  les  départements  de  l'Aude  (cantons  de  Clialabre,  Alaigne, 
Fanjeaux,  Belpech,  Salles-sur-l'Hers),  de  l'Ariège  (Lavelanet,  Mirepoix, 
Saverdun,  en  partie)  et  de  la  Haute-Garonne  (  Villefranche,  Nailloux,  Cin- 
tegabelle,  en  partie).  —  Hist.  de  Lang.,  XII,  p.  165. 

1.  Reg.  Vat.,  LXVII,  noTuS;  Docum.,  n.  LVI,  p.  174. 

2.  Saint-Félix  (Ariège),  cant.  de  Mirepoix. 

8.  Voir  ces  détails  dans  la  bulle  de  délimitation.  Reg.  Vat.,  LXVII, 
n.  G63;  Docum.,  n.  XLI,  p.  133. 

4.  Reg.  Vat.,  CTX,  n.  431;  M.  Guérard,  Docum...  sur  la  Gascogne,  1, 
p.  31. 

5.  Reg.  Vat.,  LYII,  n.  583. 

6.  Bulle  de  création  du  chap.  de  Mirepoix;  Reg.  Vat.,  LXVIII,  n.  1110 
Gall-  christ.,  XIII,  inslr.,  p.  239;  Docum.,  XLII,  p.  136. 


ORIGINES  DE  LA  PROVINCE  ECCLESIASTIQUE  DE  TOULOUSE.      13 

qui  deraeurprent  attachés  à  leur  église  devenue  cathédrale  et 
virent  seulement  leurs  rentes  s'accroître  avec  leurs  attribu- 
tions. Les  quatre  chapitres  auront  douze  membres  :  trois 
dignitaires,  le  prévôt,  l'archidiacre  et  le  sacriste;  un  préchan- 
tre et  huit  chanoines.  Eu  outre,  il  y  aura  quatre  chapelains 
hebdomadaires,  vingt- huit  prêtres  auxiliaires,  deux  diacres  et 
deux  sous-diacres,  huit  clercs  et  huit  enfants  de  chœur.  La 
mense  capitulaire,  dont  le  revenu  annuel  est  de  2,000  livres 
tournois,  sera  ainsi  distribuée  :  120  livres  au  prévôt,  80  à  l'ar- 
chidiacre, au  sacriste  et  au  préchantre,  et  70  à  chacun  des 
autres  chanoines.  Dans  ces  diverses  sommes,  nous  compre- 
nons les  distributions  quotidiennes,  qui  devaient  former  un 
total  de  40  livres  par  an  pour  chaque  bénéficier. 

La  mense  capitulaire  de  Mirepoix  tira  ses  revenus  des  loca- 
lités suivantes  :  Gibel,  Lagarde,  Roumengoux,  La  Bastide, 
Saint-Paul-de-Troye,  Bélesta,  Escuillens,  Saint-Jacques-de- 
Villasavary^  et  de  quelques  autres  de  moindre  importance 
dont  l'identification  n'a  pu  être  faite-. 

4°  Diocèse  de  Montauban^ .  —  La  ville  de  Montauban, 
siège  d'un  des  évêchés  nouveaux,  dépendait  jadis  du  diocèse 
de  Cahors,  et  son  monastère  bénédictin,  dont  l'église  était  la 
nouvelle  cathédrale,  relevait  du  monastère  de  la  Chaise-Dieu. 
Le  pape  décréta,  le  25  juin  1317,  que  la  ville  et  son  territoire, 
exempts  désormais  de  la  juridiction  de  l'évêque  de  Cahors  et 
partant  de  celle  du  métropolitain  de  Bourges,  passeraient 
sous  celle  de  l'évêque  de  Montauban  et  de  l'archevêque  de 
Toulouse*.  Le  30  juillet,  un  autre  décret  statuait  que  la  nou- 
velle cathédrale  et  son  chapitre  de  Bénédictins,  libérés  de 


1.  Gibel  (Haute-Garonne),  cant.  de  Nailloux;  Lagarde,  Roumengoux, 
La  Bastide-de-Bousignac,  Ti'oye  (Ariège),  cant.  de  Mirepoix;  Bélesta 
(Ariège),  cant.  de  Lavelanet;  Escuillens  (Aude),  cant.  d'Alaigne;  Villa- 
savary  (Aude),  cant.  de  Fanjeaux. 

2.  Localités  de  Saint-Pierre  de  Terra  Capulata,  de  Saint-Paul,  de 
Unsedelle,  Batignan  et  Astrolet.  (Reg.  Faf.,LXVIII,  n,  IIIO.) 

3.  Voir,  sur  la  formation  de  ce  diocèse,  l'ouvrage  de  M.  G.  Daux,  His- 
toire de  l'Église  de  Montauban,  t.  I  (II"  période). 

4.  Reg.  Vat.,  LXIII,  n.  1162;  Docum.,  n.  XIII,  p.  80. 


14  J.-M.    VIDAL. 

toute  sujétion  à  l'égard  du  monastère  de  la  Chaise-Dieu,  joui- 
raient de  leur  autonomie  sous  le  régime  de  l'évêque'. 

Jean  XXII  voulait  éviter  à  l'église  de  Cahors  une  mutila- 
tion odieuse  et  ne  distraire  de  son  territoire  que  la  nouvelle 
ville  épiscopale  et  sa  banlieue  immédiate.  À  deux  reprises-, 
les  commissaires  reçurent  la  recommandation  de  fixer  les 
limites  de  cette  banlieue  dans  un  rayon  aussi  restreint  que 
possible  3. 

La  bulle  du  22  février  consacra  la  délimitation  ''.  On  peut 
dire  que  les  nouveaux  confins  n'étaient  distants  des  murs  de 
la  ville  que  de  moins  de  mille  mètres  à  la  ronde. 

En  dehors  de  Montauban  et  de  son  territoire,  les  quatre- 
vingt-dix  localités  ou  églises  dont  se  composa  le  diocèse 
avaient  fait  partie  de  l'ancien  évêché  de  Toulouse.  Ces 
bénéfices  ou  établissements  ecclésiastiques  étaient  à  peu  de 
chose  près  répartis  comme  il  suit  :  deux  chapitres,  à  la  cathé- 
drale et  à  Saint-Etienne-de-Tescou;  une  abbaye  cistercienne, 
à  Belleperche;  deux  prieurés  de  femmes,  à  Saint-Aignan  et 
Albefeuille  «;  vingt  prieurés  séculiers  ou  réguliers  d'hommes  : 
Saiut-André-d'Auterive,  Saint-Neuphary,  las  Couffignes,  Con- 


1.  Reg.  Vat.  LXVI,  n.  3354;  Gall.  christ.,  Xllf,  instr.,  col.  203: 
Docum.,  n.  XXVI,  p.  102. 

2.  Le  29  octobre  1317  et  le  23  janvier  1318. 

3.  Reg.  Vat.,  CX,  n.  913;  CIX,  n.  421:  GX,  n.  672;  Doc/cm.,  n.  XXXIII. 
XXXVI,  pp.  113,  118. 

4.  Du  pont  de  Calme,  sur  le  Tescou,  au  levant,  la  ligne  de  démarca- 
tion gravissait  la  cime  de  la  colline  de  Beausoleil,  près  de  l'église  Saint- 
Michel,  coupait,  à  la  hauteur  de  la  Vignelongue,  propriété  de  Pierre 
Gastaud,  le  chemin  qui  va  de  .JVIontauban  à  la  campagne,  puis  ceux 
d'Escorsac  et  de  Tiéojac,  atteignait  le  sentier  de  Bruniquel,  au  delà  de  la 
ferme  du  pont  de  Molinier,  suivait  une  grande  route  et  le  chemin  qui 
conduit  à  droite  vers  Puynitier.  Elle  atteignait  le  pont  du  ruisseau  de 
Mortarieu,  au  delà  de  la  léproserie  de  Montauban,  suivait  le  cours  du  ruis- 
seau jusqu'au  pont  de  Negosaume,  puis  s'infléchissait  vers  l'ouest  dans 
la  direction  de  la  route  de  Moissac  qu'elle  coupait  à  l'endroit  nommé 
Gevarenos.  Enfin,  elle  rejoignait  le  Tarn  perpendiculairement  à  la  mé- 
tairie des  héritiers  de  Juvagor,  située  sur  l'autre  rive  du  fleuve,  en  pays 
toulousain.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  (311;  Gall.  christ.,  XIII,  instr., 
col.  205;  Daux,  Hist.  de  l'église  de  Montauban,  t.  I  (II'=  période),  p.  74; 
Docum.,  n.  XLIII,  p.  143. 

5.  Belleperche,  comm.  de  Cordes  ;  Saint-Aigtïan,  cant.  de  Saint-Nicolas- 
de-la-Grave;  Albefeuille,  cant.  de  Ca.stelsarrasin  (Tarn-et-Garonne). 


ORIGINES   DE  LA  PROVINCE  ECCLESIASTIQUE  DE  TOULOUSE.      15 

ques,  Sérignac,  Montbéqui,  Bouret,  Gasseras,  Castelmayraa, 
Bressols,  Cumoat,  les  Barrezès,  Monzac,  Castelsarrasin,  Saiat- 
Lizier,  Saiat-Sardos,  Montech,  Gensac,  le  Born  et  Saiat-Jac- 
ques  de  Montauban^;  environ  soixante  églises  paroissiales 
ou  chapelles  rurales  2,  réparties  à  la  fin  du  xiv^  siècle  entre 
deux  archiprêtrés  :  Roquemaure  et  Beaumont-de-Lomagne^. 

Le  territoire  de  cet  évêché  est  aujourd'hui  distribué  dans 
les  trois  départements  du  Tarn,  du  Tarn-et-Garonne  et  de  la 
Haute-Garonne*. 

L'organisation  de  la  mense  épiscopale  fut  basée  sur  une 
enquête  dont  Jean  XXII  chargea  les  administrateurs  délé- 
gués. Il  avait  résolu  de  distraire  des  rentes  attribuées  au 
nouveau  siège  une  somme  de  1,000  livres  en  faveur  de  la  col- 
légiale de  Tescou.  La  part  épiscopale  se  trouvait  donc  réduite 
à  4,000.  Jean  XXII  voulut  la  compléter  avec  les  revenus  des 
anciens  abbés  de  Montauban.  En  conséquence,  l'information 
porta  sur  le  nombre  et  le  rapport  des  biens  abbatiaux  \ 

Par  la  constitution  du  22  février,  rédigée  d'après  les  don- 
nées de  cette  enquête,  4,000  livres  étaient  assurées  à  l'évêque 
sur  les  domaines  et  les  droits  (la  suzeraineté  temporelle  ex- 
ceptée) dont  les  anciens  évêques  de  Toulouse  avaient  eu  la 
jouissance  dans  le  territoire  annexé;  1,000  livres  lui  vien- 
draient de  l'apanage  des  abbés  de  Saint-Théodard,  à  savoir  : 
de  la  moitié  de  la  dîme  des  vins  et  des  foins  de  Montauban, 
des  rentes  de  l'Isle-Made  (Villemade),  avec  ses  terres,  ses 
vignes  et  ses  bois,  de  celles  de  Lamothe,  de  Falguières,  de 
Sainl-Hilaire  et  de  Lavergne^;  de  la  moitié  des  bénéfices  du 
four  de  la  porte  du  Tescou,  des  fruits  du  prieuré  de  Villemur 

1.  Vidal,  Docume)its  pour  servir  à  di-esser,etc.,  pp.  39-42,  76-79.  Ces 
localités  font  aujourd'hui  partie  du  département  de  Tarn-et-Garonne, 
sauf  Conques,  Villemur  et  Le  Boni,  qui  sont  dans  la  Haute-Garonno. 

2.  Vidal,  op.  cit.,  et  bulle  pontificale  du  22  février;  Docam.,  n.  XLllI, 
p.  144. 

0.  Vidal,  op.  cit.,  pp.  39-40. —  Roquemaure  (Tarn),  cant.  de  Rabastens, 
arrond.  de  Gaillac;  Beaumont,  chef-lieu  de  cant.,  arr.  de  Castelsarrasin 
(Tarn-et-Garonne). 

4.  Hist.  de  Languedoc,  XII,  p.  1(32. 

5.  Reg.  Vat.,  CIX,  n.  419;  Bocum.,  n.  XXXVII,  p.  119. 
G.  Localités  situées  dans  le  district  Est  de  Montauban. 


16  J,-M.    VIDAL. 

incorporé  à  la  mease,  de  tous  les  émoluments  de  la  table  des 
notaires  de  Montauban,  de  la  juridiction  jadis  exercée  par  les 
abbés,  à  Montauban,  à  Villemade*  et  ailleurs. 

Le  premier  évêque  de  Montauban,  promu  avant  le  9  juillet 
1317^,  fut  précisément  Tabbé  de  Saint-Tbéodard,  Bertrand  du 
Fuy,  qui  mourut  peu  de  temps  après  son  sacrée  Le  12  novem- 
bre, le  pape  nomma  Guillaume  de  Cardaillac  ^  abbé  bénédictin 
de  Pessan,  qui  siégea  jusqu'en  1355  ^ 

Les  moines  de  Saint-Théodard,  devenus  chanoines  de  la 
cathédrale,  gardèrent  la  jouissance  exclusive  des  revenus 
qu'ils  partageaient  jadis  avec  l'abbé  :  la  moitié  de  la  dîme  des 
vins  de  Montauban.  dont  l'autre  moitié  revint  à  l'évêque; 
celle  du  blé  de  Rivière;  les  rentes  de  Pontieras^  de  Vayron, 
d'Ordalilas;  les  redevances  de  froment,  méteil  et  avoine  de 
Beart  et  d'Albefeuille''';  les  dîmes  levées  par  l'aumônier  et  le 
sacriste  de  Montauban;  les  bénéfices  résultant  de  la  vente  des 
obits;  les  pensions  de  blé  et  de  vin  payées  au  prieur  de  Saint- 
Martial''';  le  cens  de  diverses  pièces  de  terre,  prés,  jardins  ou 
vignobles;  le  revenu  d'un  moulin  sur  le  Tescou;  enfin  des 
oublies  de  blé  ou  de  vin. 

Dans  l'ensemble,  ces  redevances  donnaient  un  revenu  de 
1,000  livres  tournois  que  le  pape  déclarait  devoir  suffire  à 
l'entretien  des  religieux^. 

Les  chapitres  séculiers  avaient  une  mense  deux  fois  plus 
forte.  Ce  fut  le  cas  de  la  collégiale  de  Saint-Etienne  de  Tescou. 
Le  pape  avait  d'abord  résolu  de  rattacher  cette  église  à  la 

1.  Villemade  (Tarn-et-Garonne),  cant.  de  Montauban-Est. 

2.  Le  9  juillet,  le  pape  annonce  sa  pi'omotion  au  roi  de  France.  Reg. 
Vat.,  CIX,  n.  m\;Docum.,  n.  XVII,  p.  88;  cf.  Daux,  op.  cit.  (II«  période, 
p.  12). 

3.  Gallia  christ.,  XIII,  instr.,  col.  233;  Eubel,  Hier.,  p.  363;  Daux, 
op.  cit.,  pp.  15,  16. 

4.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  285;  Daux,  lac.  cit.,  pp.  28  et  suiv. 

5.  Gall.  christ.,  loc.  cit.,  col.  234,  235;  Eubel,  ibid.;  Daux,  op.  cit. 
(II«  période). 

6.  Localités  que  nous  n'avons  pu  identifier,  à  l'exception  de  Beart, 
hameau  situé  au  nord-ouest  de  Montauban,  d'Albefeuille,  déjà  rencontré, 
et  d'Ordalilas  ou  Bellegarde,  cant.  de  Montauban-Ouest. 

7.  Saint- Martial,  cant.  de  Montauban-Ouest. 

8.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  701;  Bocum.,  n.  XLIII  bis,  p.  147. 


ORIGINES  DE  LA  PROVINCE  ECCLESIASTIQUE  DE  TOULOUSE.      17 

niease  épiscopale.  Le  8  août  1317,  Bertrand  du  Pny  avait 
même  obtenu  une  bulle  l'exemptant  par  exception,  elle  et  ses 
dépendances,  de  la  juridiction  provisoire  des  commissaires. 
Elle  était  mise  immédiatement  à  la  disposition  de  l'évêque 
qui  y  devenait  maître,  avait  le  droit  d'y  officier  et  d'y  exercer 
pleine  juridiction  1. 

Six  mois  plus  tard,  le  18  février  1318,  Jean  XXII  révoqua 
ces  dispositions.  L'évêque  de  Montauban  pouvait  recevoir  une 
dotation  suffisante  sans  qu'il  fût  nécessaire  de  lui  laisser 
l'église  de  Tescou.  Le  pape  la  lui  retira  pour  y  établir  un  cha- 
pitre collégial  2. 

J'ai  déjà  parlé  de  l'organisation  de  ces  chapitres  :  douze  cha- 
noines, dont  un  doyen,  un  sacriste  et  un  préchantre;  des  prê- 
tres et  des  clercs  auxiliaires;  un  revenu  de  2,000  livres.  La 
mense  du  collège  de  Tescou  se  composait  des  localités  de  Moat- 
beton,  Bressols,  Le  Fau,  Saint-Porquier,  Gasseras,  dans  le 
diocèse  de  Montauban  3;  Pujaudran,  Ségouffielle,  Blanquefort, 
Beaupuy,  Lévignac,  Caubiac,  Le  Grès,  Ondes,  Cépet,  Sainte - 
Croix  de  Pauilhac,  Montjoire,  Castelnau-d'Estrétefonds,  dans 
le  diocèse  de  Toulouse  ^  Le  chapitre  desservait  la  paroisse  de 
Saint-Jacques  de  Montauban  ^ 

5°  Diocèse  de  Rîeux.  —  Il  fut  formé  de  la  partie  sud-ouest 
de  l'ancien  évêché  de  Toulouse  et  devint  limitrophe  des  dio- 
cèses de  Pamiers,  Couserans,  Comminges,  Lombez  et  Tou- 
louse. Les  trois  vallées  de  la  Lèze,  de  l'Arize  et  de  la  Garonne 
comprises  dans  ses  confins  étaient  parmi  les  plus  fertiles  de 
l'ancien  territoire  toulousain. 


1.  Gall.  christ.,  XIII,  instr.,  col.  203;  Daux,  op.lcit.,  p.  19  (IP  période); 
Docuin.,  n.  XXX. 

2.  Reg.  Vat.,  LXVIII,  n.  1347;  Dociim.,  n.  XXXVIII  his;  D.\ux,  loc. 
cit.,  pp.  27-33. 

3.  Le  Fau,  Gasseras,  près  Montauban;  Montheton ,  Bressols,  Saint- 
Porquier,  cant.  de  Montech,  arrond.  de  Castelsarrasin. 

4.  Pujaudran,  Ségouffielle,  Blanquefort  (Gers),  cant.  de  L'Isle-Jour- 
dain;  Beaupuy  (ïarn-et-Garonne),  cant.  de  Beauniont;  Lévignac,  Cau- 
biac, Le  Grès,  Ondes,  Cépet,  Castelnau,  Montjoire,  PauiUiac,  localités 
du  départ,  de  la  Haute-Garonne. 

5.  Reg.  Val.,  LXVII,  n.  984;  Docum.,  n.  Ll,  p.  IG-t. 

ANNALES  DU  MIDI.   —  XVI.  2 


18  J.-M.    VIDAL. 

L'évêché  compta  ciuq  abbayes  :  deux  de  bénédictins  :  à 
Lëzat  (Climy)  et  au  Mas-d'Azil;  et  trois  de  l'ordre  de  Cîteaux  : 
à  Calers,  à  Valnègre  (moniales)  et  aux  Feuillans  '.  Il  y  eut 
aussi  trois  prieurés  de  femmes  :  à  Longages,  Sainte-Croix  et 
La  Gràce-Dieu-,  et  vingt-un  prieurés  d'hommes,  séculiers 
ou  réguliers  :  à  Rieux,  Capens,  Geasac,  Martres,  Villeneuve- 
Grenouillet,  Sainte-Colombe-de-Saverdun,  Montant.  Bérat. 
Montégat,  Durfort,  Le  Fossat,  Saint-Michel,  Saint-André, 
Salles,  Saint-Pierre-de-Monredon,  Lissac,  Saint-Pierre-de- 
Lafflte,  La  Coularède,  Mondavezan,  Sainte-Marie-de-Saverdun 
et  Montagnac^. 

L'archidiaconé  de  Lézat  resta  uni  au  chapitre  de  Toulouse; 
celui  de  Rieux  le  fut  au  chapitre  de  cette  ville.  Le  diocèse 
comprit  environ  cent  dix  églises  ou  chapelles^  distribuées 
entre  trois  archiprêtrés  :  La  Trape,  Le  Caria  et  Le  Fousseret^ 
Au  total,  c'étaient  cent  quarante  établissements  ou  titres 
ecclésiastiques  ^. 

Les  revenus  de  ces  localités,  à  l'exception  de  ceux  que  le 
pape  avait  décidé  de  donner  au  chapitre  à  titre  de  mense  ou  à 
d'autres  collèges  à  titre  de  compensation,  formèrent  la  dota- 
tion de  révêque.  Toutefois,  les  rentes  de  Saint-Pierre-de- 
Monredou,  près  Saverdun,  réservées  ad  vitam  à  maiti-e  Pan- 


1.  Lézat  (Ariège),  cant.  du  Fossat,  arr.  de  Pamiers;  Mas-d'Azil,  chef- 
lieu  de  cant.,  arr.  de  Pamiers;  Calers,  comm.  de  Gaillac-Toulza  (Haute- 
Garonne),  cant.  de  Cintegabelle;  Valnègre,  près  Saverdun  (Ariège);  Les 
Feuillans,  comm.  de  Labastide-Clermont  (Haute-Garonne),  cant.  de  Rieu- 
mes.  (Voir  Gallia  christ.,  XIII,  col.  'M),  204,  21B,  221.) 

2.  Longages  (Haute-Garonne),  cant.  de  Carbonne  ;  La  Grâce-Dieu 
(Haute-Garonne),  cant.  d'Aulerive;  Sainte-Croix,  chef-lieu  de  cant. 
(Ariège),  arr.  de  8aint-Girons. 

;3.  Villeneuve-Grenouillet  (Durfort),  Sainte-Colombe,  Saint-Pierre-de- 
Monredon,  Sainte-Marie-de-Saverdun,  Lissac,  Saint-Michel,  Le  Fossat, 
Durfort,  Montègut  font  partie  du  départ,  de  l'Ariège,  arr.  de  Pamiers;  les 
autres  localités  sont  du  départ,  de  la  Haute-Garonne,  arrond.  de  Muret. 

4.  Vidal,  Docmn.  pour  servir  à  dresser  le  pouillé,  etc.,  pp.  43-48, 
69-73;  M.  Barrière-Fl.ivy,  Pouillé  du  diocèse  de  Rieux  (Foix,  1896), 
pp.  11  et  suiv. 

5.  La  Trape,  comm.  du  cant.  de  Rieux;  Le  Caria  (Ai'iège),  cant.  du 
Fossat  ;  Le  Fousseret  (Haute-Garonne),  chef-lieu  de  cant.,  arr.  de  Muret. 

6.  Voir  dans  Hist.  de  Languedoc,  XII,  p.  161,  la  distribution  moderne 
du  territoire  de  l'ancien  évèché. 


ORIGINES  DE  LA  PROVINCE  ECCLÉSIASTIQUE  DE  TOULOUSE.      19 

dolfo  Savelli,  notaire  apostolique,  ne  firent  retour  à  la  mense 
qu'à  la  mort  de  ce  bénéficiera 

Guillaume  de  Brosse,  conseiller  du  roi,  doyen  de  Bourges, 
dont  le  pape  avait  annoncé  à  Philippe  le  Long  (9  juillet  1317)  la 
promotion  à  Févêché  de  Rieux  -,  ne  siégea  pas.  Il  semble  que 
ses  bulles  ne  lui  furent  jamais  expédiées.  En  nommant,  le 
19  octobre  1317,  Pelfort  de  Rabastens  à  ce  même  évêché^, 
Jean  XXII  ne  fait  pas  d'allusion  à  un  premier  titulaire.  Ce 
Pelfort  de  Rabastens,  d'abord  abbé  de  Lombez,  puis  évêque  de 
Pamiers,  où  il  siégea  cinq  ans  (1312-1317),  et  de  Léon,  où  il 
n'alla  peut-être  pas  (23  mars  1317),  gouverna  l'église  de 
Rieux  pendant  trois  années,  après  avoir  enfin  consenti  à  rece- 
voir la  consécration  épiscopale.  Jean  XXII  lui  donna  la  pour- 
pre le  20  décembre  1320  *. 

Le  chapitre  de  Sainte -Marie  de  Rieux,  érigé  sur  le  modèle 
de  ceux  de  Mirepoix,  de  Lavaur,  et  de  Lombez,  posséda  les 
rentes  de  Sénarens^,  qui  avaient  appartenu  au  chapitre  de 
Toulouse;  celles  de  Saiute-Foi-de-Benaix^,  au  diocèse  de 
Mirepoix;  celles  de  Noé,  enlevées  au  prieur  de  ce  lieu;  celles 
de  Ayrevida,  Saint-Cizy,  Sainte-Cadière,  Lacaugne,  Saint - 
Julien,  Virac,  Saint-Christaud,  Montberaud,  Ganté,  Saint- 
Elix,  Gouzens'';  celles  de  Daux,  Saint-Hyppolite,  Arbouville, 
Bésignac,  Sàmle-Ma.vie-de-Supramontem,  Saint-André*,  et 
les  revenus  manuels  du  prieuré  de  Rieux. 

6°  Diocèse  de  Lombez.  —  La  partie  occidentale  du  diocèse 
de  Toulouse  qui  constitua  l'évêché  de  Lombez  touchait  à 
l'Armagnac  et  au  Comminges,  aux  évêchés  de  Saint-Bertrand 


1.  Bulle  de  délimitation.  Rec/.  Vat.,  LXVII,  n.  664;  Docum.,  n.  XLIV, 
p.  150. 

2.  Reg.   Vat.,  CIX,  n.  661  ;  Docum.,  n.  XVII,  p.  89. 

3.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  197;  Gall.  christ.,  XIII,  col.  186. 

4.  EuBEL,  Hier.,  pp.  15,  94,  312,  443. 

5.  Sétiarens,  Haute-Garonne,  cant.  du  Fousseret  (diocèse  de  Lombez). 

6.  Benaix,  Ariège,  cant.  de  Lavelanet,  ai-r.  de  Foix. 

7.  Toutes  ces  localités,    sauf  Canté  (Ariège,  cant.  de  Saverdun),  sont 
situées  dans  le  département  de  la  Haute-Garonne,  arr.  de  Muret. 

8.  Localités  que  nous  n'avons  pu  identifier  avec  certitude. 


20  J.-M.    VIDAL, 

et  d'Anch.  L'évêque  eut  sous  sa  juridiction  environ  cent 
prieurés,  paroisses  on  aunexes,  répartis  ainsi  qu'il  suit  :  l'ar- 
chiprêlré  de  Sainatan';  les  prieurés  de  Garbic,  Tonget,  Savi- 
gnac-Morna,  Rieumes,  Saint-Michel,  Montadet,  Gazac,  Cas- 
lelgaillard,  Pompiac  (0.  S.  A.,  uni  au  chapitre  de  Toulouse), 
Sauvimont  (0.  S.  A.,  id.),  Saint-Pierre- de-Fustignac  et  Saint- 
Jea.n-des-Moniales'^;  plus  de  soixante-quinze  églises  parois- 
siales et  chapelles^. 

Point  de  monastères  ni  de  couvents  de  femmes.  Seuls  les 
chevaliers  de  Saint-Jean  possédaient  une  maison  à  Ambon  et 
peut-être  une  autre  à  Saint-Lizier-du-PIante*. 

L'évêque  de  Lombez  succéda  à  celui  de  Toulouse  dans  la 
perception  des  revenus  du  territoire  qui  lui  était  dévolu.  Il 
succéda  aussi,  de  moitié  avec  son  chapitre,  à  l'ancien  abbé  et 
aux  chanoines  réguliers  dans  les  droits  possédés  par  ceux-ci 
dans  la  ville  et  ses  environs. 

Le  premier  titulaire  de  l'évêché  fut  d'ailleurs  l'abbé  même 
de  ce  lieu,  Arnaud  Roger  de  Comminges,  simple  clerc  tonsuré, 
âgé  de  vingt-sept  ans  ^,  que  Jean  XXII  transféra  ensuite  à 
Clermont  (1328). 

Un  chapitre  séculier  fut  substitué,  en  1318,  aux  chanoines 
réguliers  de  Saint-Augustin  établis  à  Lombez  depuis  le 
xii^  siècle,  sous  la  dépendance  du  chapitre  de  Saint-Etienne 
de  Toulouse/'.  La  mense  capitulaire  (2,000  livres)  se  composa 
des  localités  de  Saraatau,  Montamat,  la  BouJouse  près  Pébées, 
qui  avaient  appartenu  au  chapitre  de  Saint-Etienne;  des  égli- 
ses de  Montblanc  et  Puylausic;  des  dimaires  de  Saint-Jean-de- 


1.  Samatan  (Gers),  chef-lieu  de  cant.,  arr.  de  Lombez. 

2.  Localités  du  départ,  du  Gers,  arr.  de  Lombez,  à  l'exception  de  Rieu- 
mes, chef-lieu  de  cant.  (Haute-Garonne),  Gazac,  Castelgaillurd,  comm. 
du  cant.  de  l'Isle-en-Bodon,  arr.  de  Saint-Gaudens  (Haute-Garonne),  et 
Fustignac,  cant.  du  Fousseret  (Haute-Garonne). 

8.  Voir  la  bulle  pontificale  {Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  664  bis;  Docum., 
n.  XLVI,  p.  152,  et  Vidal,  Docum.  pour  servir  à  dresser  le  pouillé, 
pp.  49-52,  8(J-82. 

4.  Ambo?i,  dans  Escornebœuf,  cant.  de  Giniont,  arr.  d'Auch;  Saint- 
Lizier,  cant.  de  Lombez. 

5.  EuBEL,  Hier.,  pp.  199,  323. 
C.    Gall.  christ.,  XIII,  col.  319. 


ORIGINES  DE  LA  PROVINCE  ECCLÉSIASTIQUE  DE  TOULOUSE.      21 

Gaillardville,  Sansas,  Brenil,  Caumont,  Nizas,  Saint-Germier, 
Villeneuve,  Labarthe,  Saint-Christaud ,  L'Herm  ^  qui  dépen- 
daieat  jadis  de  la  mense  de  Toulouse.  Elle  conserva  aussi  les 
biens  de  l'ancienne  abbaye,  dont  le  pape  concéda  cependant 
une  partie  à  l'évêque  *. 

7°  Le  diocèse  de  Saini-Papoul,  le  plus  petit  des  nouveaux 
diocèses,  avait  cinquante  paroisses  ou  annexes.  Point  d'ab- 
baye, à  l'exception  d'un  prieuré  de  dominicaines  à  Prouille^; 
dix  prieurés  ordinaires  :  Villeneuve-la-Comtal,  Avignonet, 
Soupex,  Mas-Saintes-Puelles,  Saint-Paulet,  Dreuilhe,  Saint- 
Martin-de-Miras,  Cumiès,  Sd\n{e-Ma.r\e-de-Causer  et  Grais- 
sens"*.  Ajoutons  le  grand-prieuré  de  Saint-Papoul,  confié  aux 
moines  du  chapitre.  Enfin,  quarante  églises  ou  chapelles -^ 

Malgré  leur  petit  nombre,  ces  bénéfices  suffirent  à  la  for- 
mation de  trois  menses  :  celle  de  l'évêque,  celle  de  son  cha- 
pitre et  celle  de  la  collégiale  de  Castelnaudary.  La  part  épis- 
copale  fut  formée  des  biens  de  l'évêché  de  Toulouse,  pour  une 
somme  de  3,000  livres,  et  de  propriétés  de  l'ancienne  abba3'e 
de  Saint-Papoul,  pour  une  somme  de  2,000  livres. 

Le  chapitre  partagea  avec  l'évêque  la  dîme  de  blé  de  la 
ville  épiscopale;  il  posséda  des  carnalages  de  légumes  et  de 
lin  dans  diverses  localités;  des  rentes  et  des  dîmes  dans  cer- 
taines autres^.  L'évêque  perçut  les  carnalages  de  volaille  de 
sa  ville,  la  dîme  des  fourrages  de  La  Rouquelte,  la  juridiction 
haute  et  basse  sur  ce  même  lieu,  les  rentes  de  Cuguron  et  de 
Castelnaudary  (blé,  vin,  cens,  carnalages),  celles  de  Villespy, 


1.  Hameaux  ou  fermes  dans  l'arr.  de  Lombez,  plusieurs  non  identifiés. 

2.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  664  bis;  LXVIII,  n.  1111;  Docion.,  n.  XI.YI 
et  XL VII. 

3.  Prouille,  près  Fanjeaux,  arrond.  de  Limoux. 

4.  Avignonet,  Dreuille,  Graisscns  (iro-Garonne),  arr.  de  Villefranche; 
les  autres  localités  font  partie  du  dép.  de  l'Aude,  arr.  de  Castelnaudary. 

5.  Bulle  du  22  février,  Reg.  Vat.,  LXVIII,  n.  1:302;  Docum.,  n.  L, 
p.  159;  et  Vidal,  Docum.  pour  servir  à  dresser  le  pouille,  pp.  2,>2r), 
82-85;  cf.  Hist.  de  Languedoc,  XII,  p.  16;! 

6.  «  Omnia  etiam  carnalagia,  videlicet  linorum  et  ortorum  predicte 
ville  Sancti  Papuli  et  omnium  aliorum  que  sub  carnalagii  nomine  conti- 
nentur.  »  (Reg.  Vat.,  LXVIII,  n.  13i)l;  Docum.,  n.  L  bis,  p.  16:3.) 


22  J.-M.    VIDAL. 

Mira\al,  Laurabuc,  Besplas,  Pexiora,  Lasbordes,  les  oublies 
de  Rasciis',  et  nombre  d'autres  redevances  provenant  égale- 
ment de  la  mense  abbatiale  2. 

Le  pape  réserva  aux  chanoines  de  Castelnaudary  les  reve- 
nus des  territoires  de  Verdun,  Castelet,  Villesiscle,  Saint- 
Brice,  Pech-Ginestier,  Pe^'reblanque,  Ayroux,  Villeneuve- 
la-Comlal,  Pujinier  et  Tréville,  démembrés  de  Toulouse,  et 
les  carnalages  de  Castelnaudary  et  de  Saint -Maurice^,  prove- 
nant de  l'abbaye  de  Saint-Papoul  K 

8°  Diocèse  de  Lavaur.  —  Il  était  situé  au  nord  du  précé- 
dent et  formé  en  grande  partie  de  la  riche  vallée  de  l'Agout. 
La  délimitation  qu'en  fit  le  pape  lui  attribua  environ  soixante- 
dix  établissements  ou  titres  ecclésiastiques  :  une  abbaye 
bénédictine,  Sorèze^;  un  archiprêlré,  la  Croisille'^;  l'archi- 
diaconé  de  Lavaur,  uni  au  chapitre;  les  prieurés  de  Cambon, 
Saint-Paui' de-Cap  de-Joux,  Guitalens,  Leslap,  Saix  et  Viviers- 
les-Montagnes,  Appelle  (O.  S.  B.),  La  Bruguière,  Lempaut, 
S  'Tit- Germain  et  Saint-Robert  (rural)",  et  près  de  soixante 
dglises  ou  chapelles 8. 

L'évêque  et  le  chapitre  se  partagèrent  les  rentes  de  l'ancien 


1.  Toutes  ces  localités  sont  aujourd'hui  des  châteaux  ou  des  villages  de 
l'arrond.  de  Castelnaudary  (Aude). 

2.  Reg.  Vat.,  LXVIII,  n.  1302;  Docum.,  n.  L,  pp.  159-163.  —  Le  pre- 
mier évêque  de  Saint-Papoul  fut  Bernard  de  Latour,  abbé  de  ce  lieu 
(Reg.  Vat.,  LXVI,  n.  3643),  qui  mourut  le  27  décembre  1317.  Raymond 
de  Moustuéjouls,  évêque  de  Saint-Flour,  lui  succéda  en  1319.  (Eubel, 
Hier.,  p.  409.) 

3.  Localités  situées  dans  l'arrond.  de  Castelnaudary,  à  l'exception  de 
Saint-Brice  (comm.  d'Avignonet,  cant.  de  Villefranche,  Haute-Garonne), 
Peyreblanquo  (comm.  de  Montgradail  (?),  cant.  d'Alaigne,  Aude). 

4.  Reg.  Vat.,  LXVIl,  n.  985;  Docum.,  n.  LU,  p.  170. 

5.  Sorèze,  comm.  du  cant.  de  Dourgne,  arr.  de  Castres  (Tarn).  Sur  le 
monastère  de  Sorèze,  voir  Gall.  christ.,  XIII,  col.  354  et  suiv. 

6.  La  Croisiile,  comm.  du  cant.  de  Cuq-Toulza,  arrond.  de  Lavaur 
(Tarn). 

7.  Ces  localités  sont  toutes  dans  le  départ,  du  Tarn,  arrond.  de  Cas- 
tres et  de  Lavaur. 

8.  Voir  bulle  pontificale  [Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  998"  Docum., 
n.  XLVIII)  et  Vidal,  Docum.  pour  servir  à  dresser  le  pouillé,  pp.  32- 

5,  85-88;  Hist.  de  Languedoc,  XII,  p.  164. 


ORIGINES  DE  LA  PROVINCE  ECCLÉSIASTIQUE  DE  TOULOUSE.      23 

prieuré.  L'évêque  eut  la  maison  du  prieur  et  le  pré  qui  en 
dépendait,  la  dîme  de  foin  et  de  blé  de  certaines  localités; 
tous  les  revenus  du  prieuré  de  Saint-Marti;i-de-Castellon  *  et 
la  moitié  des  redevances  de  bois,  blé,  avoine,  volaille,  cens 
et  oublies  de  l'église  de  Lavaur.  Le  chapitre  perçut  l'au- 
tre moitié,  leva  une  dîme  de  légumes  à  Lavaur,  celle  des 
blés  de  Jonquières,  des  blés,  des  vins  et  des  carnalages  de 
Saint-Alain  et  de  Calmettes-.  Il  s'attribua  exclusivement  les 
rentes  de  Lugan,  l'Oraison,  Massac,  Saint-Martin,  Le  Caria, 
Saint-Geniez,  Paulin,  Fibres  et  Bugat;  les  rentes  devin  de 
Montpelan,  Saint-Martin-du-Carla,  Algans,  Foissac,  Lagarrî- 
guette,  Saint-Loup,  Saint-Martin  près  Puylaurens,  Saint- 
Pierre  et  Saint-Jacques-de-Torciac,  Aigrefeuille  et  Florac^, 
jadis  possédées  par  l'évêque  de  Toulouse.  Le  pape  lui  assigna 
aussi  le  prieuré  de  Sainte-Foi,  dépendant  du  monastère  de 
Conques,  et  l'église  des  Aguts*,  enlevée  à  l'archidiacre  de 
Vielmorez^. 

Roger  d'Armagnac,  arcliidiacre  d'Agen,  fils  du  comte  Gé- 
raud  et  de  Mathe  de  Béarn,  promu  à  l'évêché  de  Lavaur,  le 
7  novembre  1317^,  le  gouverna  jusqu'au  22  mai  1338,  jour  de 
sa  translation  à  celui  de  Laon.  Il  mourut  l'année  suivante', 

9"  Compensations  données  à  certains  monastères  ou  à 
quelques  béné/îciers.  —  Dans  la  délimitation  des  évêchés  et 
surtout  dans  la  répartition  des  rentes,  Jean  XXII  avait  eu 
soin  de  n'attribuer  à  chaque  évêque  que  le  nombre  de  parois- 
ses nécessaires  à  la  formation  de  sa  mense  et  de  celle  des  cha- 
pitres diocésains.  Il  avait  aussi  évité,  autant  qu'il  était  possi- 
ble, que  prélats  et  chapitres  ne  possédassent  des  rentes  hors 

1.  Peut-fitre  Saint-Martin,  comm.  de  la  Coup^otte,  cant.  de  Lavaur. 

2.  Jonquières,  près  Viterbe,  cant.  de  Lavaur;  Saint- Alain,  Calmettes, 
comm.  de  Lavaur. 

•3.  Localités  situées  dans  le  canton  ou  l'arrondissement  de  Lavaur. 

4.  Sainte-Foi.  près  Lavaur;  Les  Aguts,  cant.  de  Cuq-Toulza  (Lavaur). 

5.  Voir  les  bulles  du  22  février  :  Reg.  Vat.,  L'XVIl,  n.  9!)<S,  940;  l)o- 
cum..  n.  XLVIII,  XLIX,  pp.  155,  1-58;  Gallia  christ..  XllJ,  iusLr., 
col.  2t;8,  271. 

6.  Reg.  Vat.,  LXVH,  n.  388. 

7.  Gall.  christ.^  XIII,  col,  832;  Eubel,  Hier.,  pp.  308,  548. 


24  J.-M.    VIDAL, 

du  diocèse.  Il  avait  groupé  leurs  propriétés  autour  de  la  ville 
épiscopale,  au  risque  de  chasser  de  gênants  usufruitiers. 
Dans  sa  pensée,  ceux-ci,  quels  qu'ils  fussent,  devaient  céder 
le  pas  et  laisser  leurs  bénéfices,  si  c'était  nécessaire,  à  ces 
nouveaux  venus  à  qui,  pour  une  raison  d'ordre  administratif, 
il  attribuait  la  préséance  En  fait,  lorsqu'un  bénéficiaire  de 
cette  sorte  gênait  ses  opérations,  il  l'expropriait  d'office,  sauf 
à  l'indemniser  ailleurs. 

J'ai  parlé  de  la  compensation  accordée  au  monastère  de 
Saint-Victor  de  Marseille  en  échange  du  prieuré  de  Mirepoix, 
érigé  en  cathédrale,  et  de  la  ville  de  Mazères,  rattachée  à 
la  mense  du  nouvel  évêché*.  Pareille  concession  fut  faite  à 
l'abbaye  de  Saint-Saturnin  de  Toulouse,  frustrée  du  prieuré 
de  Lieurac,  annexé  à  Pamiers.  Les  moines  de  Saint- Sernin 
reçurent  les  églises  d'Auzielle,  Préserville  et  Gaure^,  dont  la 
première  fut  érigée  en  prieuré  3. 

L'abbaye  de  Sainte-Foy  de  Conques  (dioc.  de  Rodez)  reçut 
les  rentes  du  Fauga  et  de  Corninhan^,  démembrées  de  Tou- 
louse, à  la  place  du  prieuré  de  Sainte-Foy,  soumis  au  chapi- 
tre de  Lavaur^  L'abbé  et  le  couvent  de  Saint-Pons-ile-Tho- 
mières,  à  qui  l'on  avait  pris  le  prieuré  de  Lavaur,  se  virent 
attribuer  celui  de  Venerque,  érigé  à  leur  intention,  ainsi  que 
les  rentes  de  Miremont  et  de  Rebounel^  Au  monastère  de 
Cassan  (dioc.  de  Béziers),  le  pape  donna  le  prieuré  de  Saint- 
Salvy,  près  Grand  sel  ve '',  récemment  érigé,  au  lieu  de  celui  de 
Saint-Martin- du-Carla,  annexé  à  la  mense  de  Lavaur*.  Au 


1.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  703;  Docum,,  LVI,  p.  174. 

2.  Auzielle  (ïlauie-Gavonne),  cant.  de  Castanet,  arr.  de  Toulouse;  Pré- 
serville, cant.  de  Lanta,  arr.  de  Villefranche;  Gaure,  cant.  de  Verfeil, 
arr.  de  Toulouse. 

3.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  765;  Docum.,  n.  LV,  p.  172. 

4.  Le  Fauga,  cant.  de  Muret  (Haute-Garonne).  Nous  n'avons  pu  iden- 
tifier la  localité  de  Corninhan. 

5.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  703;  Docum.,  n.  LVIl,  11,  p.  178. 

6.  Veiierque,  Mireinoiit,  cant.  d'Auterive.  arrond.  de  IMuret;  Rehoii- 
nel,  non  identifié. 

7.  Sairit-Salvy,  cant.  de  Beaumont,  arr.  de  Castolsarrasin  (Tarn-et-Ga- 
ronne). 

8.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  754;  Docum.,  LVII,  13,  p.  178. 


ORIGINES  DE  LA  PROVINCE  ECCLESIASTIQUE  DE  TOULOUSE.       25 

monastère  d'Alel',  qui  allait  devenir  évêché,  il  attribua,  à  la 
place  du  prieuré  de  Daumazan  et  des  rentes  de  Latour^,  rat- 
tachés au  chapitre  de  Rieux,  des  revenus  d'Escueillens  et  de 
Saint-Pierre  de  AMlheriis^,  unis  au  chapitre  de  Mirepoix,  les 
prieurés  de  Saint-Pierre  de  Pinsaguel  et  de  Saint-Pierre  de 
Beauteville^  L'abbaj'e  de  Montolieu  changea  les  rentes  de 
Vira,  attribuées  à  la  rnense  de  Pamiers,  avec  celles  d'Or- 
sans'^  La  même  niense  ayant  été  augmentée  des  fruits  de 
Saint-André,  de  Saint-Christaud  et  de  Sainte  Croix  de  Ven- 
tenac^,  le  prieur  de  Vais  ^  fut  dédommagé  avec  ceux  de  Son- 
nac  et  de  Saubonne,  au  diocèse  de  Mirepoix*. 

Jean  XXII  accorda  de  nombi-euses  compensations  au  chapi- 
tre de  Toulouse.  A  la  place  de  Saint-Pierre  de  Villasavary, 
donné  aux  chanoines  de  Mirepoix,  il  lui  concéda  les  rentes  de 
Lévignac,  Garac  et  Lasserre";  en  dédommagement  des  reve- 
nus de  Samatan,  de  Montamat  et  de  Saint-Pierre  près  Pé- 
béos,  concédés  au  chapitre  de  Lombez,  des  rentes  d'Unzent  et 
de  Unzedelio'^^,  rattachées  à  celui  de  Pamiers,  de  celles  de 
Sénarens,  données  aux  chanoines  de  Rieux,  il  lui  attribua  les 
fruits  de  Renneville,  Bellegarde,  Le  Castéra,  Drudas,  Gai- 
gnac,  Thil,  Marignac  et  Brax'^. 

1.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  763;  Docuni.,  n.  LVII,  14,  p.  179. 

2.  Daumazan  (Ariège),  cant.  du  Mas-d'Azil,  arr.  de  Pamiers;  Latow 
(Haute-Garonne),  cant.  de  Montesquieu,  arr.  de  Muret. 

.3.  Escueillens  (Aude),  cant.  d'Alaigne,  arr.  de  Limoux;  de  Abilheriis, 
non  identifié. 

4.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  763;  Docum.,  n.  LVII,  15,  p.  179;  Pi?isague] 
(Haute-Garonne),  cant.  de  Muret;  Beauteville  (Haute-Garonne),  cant.  de 
Nailloux,  arr.  de  Villefranche. 

5.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  766;  Docum.,  LVII,  16,  p.  179.  —  Vira 
(Ariège),  cant.  de  Varilhes,  arr.  de  Pamiers;  Orsans  (Aude),  cant.  de 
Fanjeaux,  arr.  de  Castelnaudary. 

6.  Ventenac,  Saint-Christaud  (Ariège),  cant.  de  Lavelanet,  arr.  de  Foix. 

7.  Vais,  près  Varilhes,  arr.  de  Pamiers  (Ariège). 

8.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  764;  Docum.,  ibid.  —  Somme  (Aude),  cant.  de 
Chalabre,  arr.  de  Limoux. 

9.  Villasavary  (Aude),  cant.  de  Fanjeaux;  Lévignac,  Lrt.çserr^  (Haute- 
Garonne),  cant.  de  Loguevin,  arr.  de  Toulouse;  Garoc  (Haute-Garonne), 
cant.  de  Cadours,  arr.  de  Toulouse. 

10.  Samatan,  Montamat,  Péhées,  chef-lieu  de  cant.  et  communes  du 
cant.  de  Lombez  (Gers);  Unzeiit  (Ariège),  cant.  de  Pamiers. 

11.  Bellegarde,  Le  Castéra,  Drudas  (Haute-Garonne),  cant.   de  Ca- 


26  J.-M.    VIDAL. 

L'évêque  de  Rieux  avait  reçu  les  prieurés  de  Justiniac  et 
d'Artigat  ^  et  le  chapitre  de  sa  cathédrale,  le  prieuré  de 
Noé^;  le  pape  indemnisa  le  chapitre  de  Saint-Étienne  par  les 
prieurés  de  Lias,  Goudourvielle,  et  de  Nailloux,  et  par  les 
revenus  de  Cornebarieu  et  de  Mauvers^. 

L'archidiacre  de  Vielmorès,  frustré  de  sa  rente  des  Aguts, 
annexée  à  Lavaur,  reçut  Fonten  lies  et  Bonrepaux^.  L'archi- 
diacre d'Olmes,  Aymar  Fortier,  dépouille  du  prieuré  de  Dun, 
gagna  les  rentes  de  Beaumont-sur-Lèze,  Grépiac,  Saint-Mi- 
chel, Sainle-Marie-de-Caulac,  près  Miremont^.  Le  prévôt  du 
chapitre  l'eçut  les  rentes  de  Saint-Cassian,  près  Muret,  au 
lieu  de  celles  de  Saint-Félix-de-Tournegat,  dévolues  à  l'évê- 
que de  Mirepoix^.  Enfin,  le  trésorier  de  ce  même  chapitre, 
Pelfort  de  Lautrec,  bénéficia  des  revenus  de  Vigoulet". 

Sauf  de  rares  exceptions,  les  localités  attribuées  aux  col- 
lèges et  aux  monastères  qui  avaient  droit  à  une  indemnité 
étaient  toutes  situées  dans  le  nouveau  diocèse  de  Toulouse,  et 
la  plupart  d'entre  elles  sur  les  limites  mêmes  de  ce  diocèse 
ou  à  peu  près.  Double  constatation  qui  trahit  chez  le  pape  la 
préoccupation  d'écarter  autant  que  possible  les  bénéficiers  de 
deuxième  ordre,  afin  de  laisser  aux  évêques  leur  liberté  d'ac- 
tion. Même  à  Toulouse,  Jean  XXII  avait  tenté  d'unifier  la 
mense  en  assignant  aux  étrangers  sur  les  confins  du  diocèse 

dours,  arr.  de  Toulouse;  Gaigtiac,  cant.  de  Toulouse;  Thil,  cant.  de  Gre- 
nade, arr.  de  Toulouse;  Brax,  cant.  de  Léguevin,  arr.  de  Toulouse. 

1.  Justmiac  (Ariège),  cant.  de  Saverdun;  Artigat  (Ariège),  cant.  du 
Fossat,  arr.  de  Pamiers. 

2.  Noé  (Haute-Garonne),  cant.  de  Carbonne,  arrond.  de  Muret. 

3.  Lias,  Goudourvielle  (Gers),  cant.  de  l'Isle-Jourdain,  arr.  de  Loni- 
bez  ;  Nailloux,  chef-lieu  de  cant.  (Haute-Garonne),  arr.  de  Villefranche  ; 
Cornebarieu,  cant  de  Toulouse;  Mauvers ,  cant.  de  Grenade,  arr.  de 
Toulouse. 

4.  Les  Aguts  (Tarn),  cant.  de  Cuq-Toulza,  arr.  de  Lavaur:  Fonte- 
nilles,  lionrepaux,  (Haute-Garonne),  cant.  de  Saint-Lys,  arr.  de  Muret. 

5.  Dun  (Ariège),  cant.  de  Mirepoix.  arrond.  de  Pamiers;  Beaumont, 
Grépiac,  Saint- Michel,  Miremont  (Haute-Garonne),  cant.  d'Auterive. 

6.  Saint-Cussian,  hameau  du  Fauga,  cant.  de  Muret;  Saint-Félix- 
de-Tournegot  (.\riége),  cant.  de  Mirepoix. 

7.  Vigoulet  (Haute-Garonne),  cant.  de  Castanet,  arr.  de  Toulouse.  — 
Voir,  sur  toutes  ces  donations,  Reg.  Val.,  LXVII,  n.  698,  f°»  209,  210, 
211;  JDocum.,  n.  LVII,  pp.  175-179, 


ORIGINES  DE  LA  PROVINCE  ECCLÉSIASTIQUE  DE  TOULOUSE.      27 

les  rentes  qu'autrefois  ils  possédaient  en  enclave  clans  tout  le 
territoire. 

CONCLUSION. 

Les  quarante  bulles  du  22  février  1318  consacraient  le  par- 
tage des  dépouilles  de  l'ancien  évêché.  Les  lots  étant  délimi- 
tés, il  ne  restait  plus  qu'à  en  remettre  les  intérêts  et  l'admi- 
nistration aux  titulaires.  Le  pape  rappela  ses  administrateurs 
et  invita  les  évêques  à  prendre  en  main  le  gouvernement  de 
leurs  diocèses. 

Le  7  avril  1318,  il  annonçait  à  l'ancien  abbé  d'Alet,  devenu 
évêque  de  ce  nouveau  siège,  et  à  Rambaud  de  Rechignevoysin 
l'arrivée  prochaine  de  l'archevêque  de  Toulouse,  à  qui  il  leur 
ordonnait  de  remettre  leurs  pouvoirs,  ainsi  que  les  biens 
meubles  et  les  palais  qui  devaient  être  à  son  usage*.  Il  garda 
lui-même  la  disposition  de  toutes  les  raenses  jusqu'à  la  fête  de 
saint  Jean-Baptiste  (21  juin  1318).  André  Porcher,  trésorier 
de  la  commission,  rendit  compte  de  sa  gestion  dès  les  pra- 
miers  jours  de  juillet.  Il  versa  dans  le  trésor  la  somme  de 
12,266  livres  tournois  dont  le  pa[  e  lui  donna  quittance  par 
acte  du  11  juillet^. 

Dans  ce  chiffre  n'étaient  point  comprises  les  provisions 
servies  aux  évêques,  ni  les  indemnités  des  commissaires,  dont 
le  détail  figure  sur  le  roiulus  d'André  Porcher  ^  Celui-ci 
avait  satisfait  à  toutes  ces  obligations  avant  de  partir  pour 
Avignon. 

1.  Reg.  Vat.,  LXVII,  n.  733;  Docum  ,  n.  LVIIl,  p.  180.  Les  deux 
commissaires  quittèrent  la  province  de  Toulouse  au  mois  de  juin,  pour 
aller  rendre  compte  au  pape  de  leur  mission.  Comptù's  d'A.  Porcher,  dans 
histrion,  miscellanea,  an.  1318;  Docum.,  n.  LXVIII,  n.  3,  ô,  pp.  195-212. 

2.  Reg.  Vat.,  LXIII,  n.  1162;  Docum..  n.  LIX,  p.  181. 

3.  L'archevêque  de  Toulouse  reçut  5,858  livres  pour  sept  mois  et  dix 
jours;  l'évèque  de  Lonibez,  4,621  livres  pour  onze  mois;  celui  de  Lavaur, 
3,193  pour  huit  mois;  celui  de  Eieux,  3,282  pour  huit  mois;  celui  de 
Montauban,  2.945  pour  sept  mois  et  onze  jours;  Celui  de  Mirepoix,  1,.597 
pour  quatre  mois.  L'abbé  d'Alet  perçut  un  traitement  de  779  livres  pour 
onze  mois  do  travail;  Ayguelin  de  Biaye,  qui  cessa  ses  fonctions  en  jan- 
vier 1318,  perçut  .331  livres;  Bérenger  d'Olargnes,  qui  se  retira  presque 
en  même  temps,  eut  322  livres;  enfin,  Rambaud  de  Rechignevoysin  perçut 
586  livres  pour  onze  mois.  Docum.,  LXVIII,  n.  .3-14. 


28  J.-M.    VIDAL. 

Mais  il  était  loin  d'avoir  recueilli  tous  les  fruits  réservés  au 
Saint-Siège.  La  perceplioQ  ne  s'en  fit  pas  sans  difficultés.  Le 
pape  se  vit  contraint  de  laisser  dans  la  province  ce  même 
André  Porcher  et  Pierre  Durand,  doyen  de  Montréal,  pour 
qu'ils  se  livrassent  à  la  besogne  peu  agréable  de  harceler  les 
fermiers  retardataires,  de  rechercher  et  d'exiger  l'argent,  le 
blé,  le  vin,  les  redevances  dont  on  avait  vainement  attendu  le 
payement  jusqu'à  ce  jour.  L'excommunication  saurait  bien 
faire  ouvrir  les  bourses  et  les  greniers  ^ 

Huit  ans  après,  le  22  juillet  1326,  Jean  XXII  revint  à  la 
charge  :  la  Chambre  apostolique  réclamait  encore  certains 
arrérages  de  l'année  1318.  Arnaud  de  Verdale  et  Jean  Raigre- 
fred,  collecteurs  apostoliques,  durent,  coîite  que  coûte,  les 
arracher  aux  fermiers  rebelles 2. 

Ces  difficultés  mises  à  part  (et  elles  étaient  de  minime 
importance),  l'œuvre  de  Jean  XXII  ne  rencontra  pas  d'autre 
résistance  dans  sa  réalisation  que  celle  de  certaines  gens  qui, 
à  la  dernière  heure,  se  prévalaient  de  privilèges  et  de  dis- 
penses pour  se  soustraire  à  l'éviction.  Le  pape  n'hésita  pas  à 
détruire  ce  qu'avaient  fait  ses  prédécesseurs.  Il  fit  table  rase 
de  leurs  rescrils  devenus  «  contraires  au  bon  plaisir  divin  » 
(17  septembre  1318  3). 


L'œuvre  de  Jean  XXII  subsista  pendant  près  de  cinq  siè- 
cles :  jusqu'à  ce  que  la  Révolution  et  le  Concordat  vinssent  la 
détruire.  De  ce  qu'elle  dura  si  longtemps,  faut-il  conclure 
qu'elle  était  parfaite  en  tout  point?  Je  n'oserais  l'affirmer. 

Les  évêchés  fondés  par  Jean  XXII  vécurent,  disons  mieux, 
végétèrent  pendant  des  siècles  comme  végètent  depuis  plus  de 


1.  Reg.  Vaf.,  CX,  n.  660;  Docutn.,  n.  LXI,  p.  185.  Le  pape  fixa  à 
16  s.  tournois  le  salaire  journalier  d'André  Porcher  et  à  10  celui  de  Pierre 
Durand.  {Reg.  Vat.,  CX,  n.  60I;  Docum.,  n.  LXII,  p.  187.)  Il  leur  donna 
le  pouvoir  d'user  des  lettres  apostoliques  adressées,  le  26  septembre  1317, 
aux  administrateurs  provisoires,  au  sujet  des  rentes  jadis  concédées  à 
des  tiers.  {Reg.  Vat..  CX,  n.  663;  Docum.,  n.  LXIV,  p.  188.) 

2.  Reg.  Vat.,  CXIII,  n.  1091;  Docum.,  n.  LXVII,  p.  192. 

3.  Reg.  Vat.,  CIX,  n.  752;  Docum.,  n.  LXV,  p.  189. 


ORIGINES  DE  LA  PROVINCE  ECCLÉSIASTIQUE  DE  TOULOUSE.      29 

temps  encore  les  trois  quarts  des  diocèses  italiens  dont  les 
pasteurs  manquent  de  tout,  même  de  troupeau. 

La  vie  matérielle  d'un  diocèse  revient  à  une  question  écono- 
mique qui  n'est  aisément  résolue  que  dans  les  évêchés  popu- 
leux et  riches.  Diviser  à  l'excès  les  territoires  et  les  popula- 
tions, c'est  s'exposer  à  amoindrir  cette  vie  dans  les  parcelles 
détachées.  C'est  condamner  à  l'impuissance,  à  l'inaction,  à 
l'ennui  et  peut-être  à  la  misère  des  pasteurs  que  la  gêne  ou 
la  nostalgie  chasseront  de  leurs  obscurs  évêchés  pour  leur 
faire  rechercher  des  charges  et  une  vie  plus  commode  à  la 
curie  ou  à  la  cour^  Les  menses  dotées  par  Jean  XXII  de 
5,000  livres  de  rentp,  étaient  riches  à  l'époque  de  leur  forma- 
tion. En  fut-il  de  même  deux  sriècles,  un  siècle  et  même  un 
demi-siècle  après  ?  La  mense  de  Pamiers,  soixante-dix  ans 
après  sa  fondation,  ne  donnait  qu'un  revenu  à  peine  supérieur 
à  la  moitié  de  la  somme  prévue  par  Boniface  VIII.  Or,  l'évê- 
que  de  Pamiers  était  deux  fois  plus  riche  que  ses  collègues  de 
la  province.  Se  représente-t-on  la  pénible  situation  de  ces 
prélats,  si  leur  patrimoine  avait  subi  une  diminution  sem- 
blable ? 

Une  preuve  que  cet  émiettement  ne  fut  qu'une  inutile  fan- 
taisie et  une  œuvre  stérile,  c'est,  à  un  point  de  vue  tout  maté- 
riel, le  peu  d'influence  que  la  fondation  des  évêchés  exerça  sur 
le  développement  économique  et  démographique  des  localités 
qui  en  furent  les  sièges.  A  l'exception  de  Toulouse,  de  Mon- 
tauban  et  peut-être  de  Pamiers,  qui  ont  conservé  leur  impor- 
tance d'autrefois,  que  sont  aujourd'hui  les  anciennes  «  cités  » 
episcopales  de  Mirepoix,  de  Rieux,  de  Lavaur,  de  Lombez  et 
surtout  de  Saint-Papoul?  Des  villes  de  troisième  ordre  ou 
d'obscures  bourgades.  Etaient-elles  autre  chose  lorsque  la  vie 
épiscopale  y  fut  supprimée,  il  y  a  un  siècle?  Onf-elles  jamais 
acquis  la  notoriété,    la  prospérité   des  villes  anciennement 


1.  Les  comptes  de  cuisine  du  palais  pontifical  d'Avignon  nous  révèlent 
la  présence  in  curia  des  évèques  de  Mirepoix,  Rieux,  Saint-Papoul  pen- 
dant toute  l'année  1330.  L'évêque  de  Lombez  y  paraît  aussi  bien  souvent. 
Toutes  les  semaines  ces  prélats  dînent  une  ou  deux  fois  à  la  table  du 
pape.  (Arch.  du  Vatican  :  Iiitroitus  et  Exitus,  t.  106.) 


30  J.-M.    VIDAL. 

élevées  au  même  rang,  pour  lesquelles  la  présence  de  l'évêque 
fut  un  bienfait,  parce  qu'elle  répondait  à  une  nécessité?  On 
dira  peut-être  que  ces  dernières  ont  dû  leur  développement 
autant  à  leur  situation  particulièrement  favorable  qu'à  l'in- 
fluence ecclésiastique.  Précisément,  l'erreur  de  Jean  XXII  a 
consisté  en  ce  qu'il  n'a  pas  choisi,  pour  y  ériger  ses  sièges 
épiscopaux,  des  localités  ayant  les  avantages  des  anciennes 
«cités  ».  Sa  faute  a  été  que,  sachant  bien  la  pénurie  du  dio- 
cèse de  Toulouse  en  localités  de  ce  genre,  il  s'est  obstiné  à  y 
créer  huit  villes  épiscopales,  dont  cinq  étaient  mortes  et  le 
sont  restées. 

Le  Concordat  de  1802  avait  tracé  des  limites  démesurées  à 
la  province  toulousaine,  qui  aurait  compris  près  de  la  cin- 
quième partie  de  la  France  actuelle.  Quant  au  diocèse  de 
Toulouse,  il  ent  dépassé  les  bornes  qu'il  avait  avant  Boni- 
face  VIII,  puisqu'une  partie  de  celui  de  Comminges  et  celui 
de  Couserans  y  avaient  été  englobés.  Le  remède  eiit  été  pire 
que  le  mal. 

Le  Concordat  de  1822  a  établi  une  circonscription  plus  rai- 
sonnable du  territoire  toulousain,  qui  se  trouve  distribué  en 
six  diocèses,  Pamiers,  Toulouse  en  sont  aux  deux  tiers  for- 
més; Carcassonne  a  hérité  d'une  partie  de  Mirepoix  et  de 
presque  tout  Saint-Papoul;  Albi  a  englobé  Lavaur;  Lombez 
s'est  uni  à  Auch,  et  Montauban  a  considérablement  agrandi 
le  lot  qu'il  tenait  de  Jean  XXII.  La  province  de  Toulouse  est 
plus  grande  avec  quatre  diocèses,  ce  qui  n'a  qu'une  minime 
importance  de  nos  jours.  Mais  ces  diocèses  se  suffisent,  et  ils 
vivent. 

Abbé  J.-M.  Vidal. 


LE  VOYAGE  DES   REINES 

ET  DE  FRANÇOIS  P^ 
EN  PROVENGE  ET  DANS  LA  VALLÉE  DU  RHONE 

(décembre     1515-FÉVRlER    1516)* 


Eq  partant  d'Amboise,  le  20  octobre  1515,  la  r;me-mère, 
Louise  de  Savoie,  et  la  femme  de  François  I",  la  reine  Claude 
de  France,  avaient  décidé  d'aller  à  la  rencontre  du  vainqueur 
de  Marignan  et  de  se  diriger  vers  la  Provence  où  les  attirait 
un  vœu  qu'elles  avaient  fait  à  sainte  Marie-Magdeleine,  pa- 
tronne de  la  Sainte-Baume.  Après  avoir  séjourné  près  d'un 
mois  à  Lyon 2,  elles  quittèrent  cette  ville  vers  le  milieu  de 
décembre,  avec  un  brillant  cortège ^  :  on  y  remarquait,  outre 

1.  Nous  devons  des  remerciements  particuliers  aux  archivistes  qui 
nous  ont  facilité  les  recherches  dans  les  dépôts  dont  ils  ont  la  garde  : 
MM.  Lacroix  (Valence),  Duhamel  et  Labande  (Avignon),  Fournier  (Mar- 
seille), Aude  (Aix),  Mourret  (Tarascon),  et  aux  personnes  qui  ont  bien 
voulu  marquer  l'intérêt  qu'elles  prenaient  à  notre  travail  :  MM.  Noël 
Verney;  Georges  de  Mongins-Roquefort;  Bruguier-Rouro  (Pont-Saint- 
Esprit);  Véran,  architecte  (Arles). 

2.  Sur  ce  séjour,  voir  E.  Baux,  Louise  de  Savoie  et  Claude  de  France 
à  Lyon  :  Étude  sur  la  première  régence  (1515^-1516),  dans  la  Revue 
d'histoire  de  Lyon,  t.  I,  pp.  390^114,  447-464.       '  ' 

3.  Nous  ne  trouvons  une  énumération  un  peu  détaillée  des  person- 
nages composant  ce  cortège  que  dans  les  documents  relatifs  au  passage 
des  princesses  à  Arles  et  à  Marseille;  mais  nous  croyons  que  ceux  que 
nous  avons  cités,  notamment  la  duchesse  d'Alen^on,  avaient  quitté  Lyon 
en  même  temps  quç  la  Régente  et  la  reine  Claude.  Il  coavient  cependant 


32  •  VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  I"  EN  PROVENCE. 

les  membres  du  Conseil,  dont  un  des 'principaux  était  Jacques 
do  Beaune-Semblançay,  la  sœur  du  roi,  Marguerite,  duchesse 
d'Alençon,  les  deux  fils  du  roi  de  Navarre,  Charles  et  Henri, 
que  leur  père  avait  laissés  à  la  cour  quelques  mois  aupara- 
vant, etc.  L'escorte  devait,  du  reste,  s'accroître  en  chemin 
des  seigneurs  accourus  de  leurs  demeures  au-devant  des 
reines,  ou  revenus  d'Italie  avec  François  I". 

Quelque  incertitude  plane  sur  les  premières  étapes  de  ce 
voyage.  Le  18  décembre  1515 %  les  consuls  de  Lyon,  pour 
détourner  de  leur  ville  le  passage  de  la  bande  noire  dont 
l'approche  excitait  la  terreur,  s'adressent  à  la  Régente  et 
envoient  leur  requête  dans  la  direction  de  Grenoble,  où  ils 
supposent  que  devait  être  Louise  de  Savoie.  Dans  ce  cas,  les 
princesses  auraient  suivi  la  route  la  plus  fréquentée,  celle-là 
même  qu'au  mois  de  juillet  précédent  avait  empruntée  Fran- 
çois I*'',  par  Vienne,  La  Côte-Saint-André,  Moirans  et  Greno- 
ble. Louise  de  Savoie  revint-elle  au  Rhône  par  la  vallée  de 
l'Isère  après  un  crochet  sur  Grenoble,  ou,  ce  que  nous  croi- 
rions plus  volontiers,  sans  pouvoir  cependant  l'afflrmer,  ne 
quitta-t  elle  pas  la  vallée  du  Rhône?  Nous  n'avons  rien 
trouvé  dans  Ic-s  archives  de  Grenoble  et  de  l'Isère  qui  puisse 
nous  fixer  à  ce  sujet.  Nos  renseignements  ne  deviennent  pré- 
cis qu'avec  l'arrivée  à  Valence. 

Les  princesses  y  étaient  attendues.  Le  16  novembre,  sur  le 
bruit  que  Louise  de  Savoie  et  Claude  de  France  devaient  faire 
un  voyage  dans  le  Midi,  les  consuls  avaient  décide  d'envoyer 
un  personnage  d'importance  (mandari  aliquem  ex  magis 
apparentibus)  à  Vienne  ou  même  à  Lyon,  pour  s'informer 
de  ce  qu'il  fallait  faire-.  Une  semaine  après,  une  commission 
composée  des  consuls  et  de  quatre  nobles  personnages  avait 
été  chargée  de  faire  tous  les  préparatifs  nécessaires  pour  recè- 
de noter  qu'aucun  des  documents  dont  nous  avons  pu  prendre  connais- 
"sance  pour  la  fin  de  1515  ne  mentionne  lïl  présence  à  Lyon  de  la  duchesse 
d'Alençon. 

1.  Arch.  de  Lyon,  BB  34,  f°  132.  Délib.  du  2S  décembre  1.515.  —Sur  la 
bande  noire,  cf.  Journal  de  Jean  Barrillon,  édition  P.  de  Vaissière, 
I,  67,  et  l'article  cité  ci-dessus,  in  fine. 

2.  Arch.  de  Valence,  BB  4,  f»  88  (Délib.  des  16  et  22  novembre  1515). 


E.    BAUX,   V.-L.  BOURRILLY   ET   PH.    MABILLY,  33 

voir  les  reines  selon  les  ressources  de  la  ville,  sinon  d'après 
le  rang  de  ses  hôtes  {non  quantum  debeatur,  sed  quantum 
potest).  Nous  ignorons  l'accueil  dont  furent  l'objet  les  deux 
souveraines;  mais  il  est  à  croire  qu'elles  ne  firent  que  passer 
dans  la  ville,  sans  l'appareil  d'une  entrée  pompeuse,  car 
nous  n'en  rencontrons  aucune  mention  dans  les  archives  de 
Valence,  et  d'autre  part  nous  trouvons  Louise  de  Savoie  à 
Montêlimar,  le  20  décembre'.  Là  aussi  leur  séjour  fut  de 
courte  durée,  puisque  le  21  décembre  elles  étaient  au  Pont- 
Saint-Esprit",  d'où  elles  continuèrent,  sans  tarder,  leur 
voyage  par  Orange,  Avignon  et  Tarascon. 

Pour  la  première  fois  depuis  leur  départ  de  Lyon,  les  reines 
s'arrêtèrent  quelques  jours  :  outre  le  sanctuaire  révéré  de 
Sainte-Marthe  à  visiter,  elles  tenaient  à  passer  à  Tarascon 
les  fêtes  de  Noël.  Le  22  décembre,  le  conseil  de  la  ville  s'as- 
semblait et  élisait  quatre  conseillers  pour  rechercher  l'avoine 
et  le  foin  nécessaires  aux  équipages  du  cortège  royaP.  Le 
soir  même,  les  souveraines  arrivaient  par  eau'  dans  la  ville 
et  y  demeuraient  jusqu'au  lendemain  de  la  Noël^  Elles  reçu- 
rent en  don  douze  images  d'or  représentant  sainte  Marthe, 
accompagnées  de  douze  anneaux  également  d'or,  d'une  valeur 

1.  Catalogue  des  Actes  de  François  I",  n°  16077. 

2.  C'est  ce  qui  paraît  résulter  d'une  lettre  de  Louise  de  Savoie  à  l'ar- 
chevêque de  Rouen,  datée  du  Pont-Saint-Esprit,  21  décembre  1515,  et 
citée  par  l'abbé  Oroux,  Histoire  ecclésiastique  de  la  cour  de  France, 
TI,  4,  note  B.  —  Au  sujet  des  routes  qui  venaient  se  croiser  au  Pont- 
Saint-Esprit,  consulter  :  L.  Bruguier-Roure,  Notions  générales  sur  la 
viguerie  du  Pont-Saint-Esprit,  Avignon,  1886. 

3.  Arch.  de  Tarascon,  BB  12,  f»  851. 

4.  Protocole  de  Jean  de  Podio,  publié  dans  le  Musée,  fascicule  5,  p.  16, 
et  par  L.  Jacquemin,  Mo)iographie  de  l'atiiphithéâtre  d'Arles,  II,  307- 
308.  Bouche  a  confondu  le  voyage  des  souveraines  avec  celui  du  Roi,  lors- 
qu'il fait  arriver  celui-ci  d'Arles  à  Tarascon  par  eau,  à  son  retour  d'Italie. 
Il  se  trompe  également  lorsqu'il  le  fait  débarquer  à  Toulon,  Histoire 
chronologique  de  Provence,  II,  521  et  sqq. 

5.  Le  24  décembre,  Louise  de  Savoie  signait  une  lettre  portant  que 
Bernard  de  la  Borie,  lai,  pourvu  d'un  office  de  coiiseiller  clerc  au  Parle- 
ment de  Bordeaux,  et  Guy  de  Planis ,  pourvu  d'un  office  de  conseiller 
lai,  échangeraient  leurs  offices  {Catal.  des  Actes,  n"  391).  La  date  de  l'acte 
suivant  n°  392  :  Marseille,  26  décembre,  est  erronée  ;  le  contexte  prouve 
qu'il  faut  lire  :  26  janvier.  —  La  môme  inexactitude  se  retrouve  dans 
Spont,  Semhlançay,  p.  123,  n.  3. 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVL  3 


34   VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  l^f  EN  PROVENCE. 

de  205  florins  7  gros  et  demi,  pour  l'exécution  desquelles  le 
conseil  paya  à  M^  Nicolas  Tabernier  5  florins  et  demi^ 

Le  26  décembre,  elles  se  mettaient  en  route  pour  Arles, 
saluées  par  les  décharges  d'artillerie  de  Tarascon,  auxquelles 
s'associaient  celles  de  Beaucaire^. 

Le  même  jour,  mercredi  26  décembre,  elles  entraient  à 
Arles.  La  ville  était  pauvre;  cependant,  dès  le  25  novembre, 
pour  trouver  de  l'argent  tout  de  suite  et  faire  honneur  à  ses 
hôtes,  le  conseil  avait  décidé  d'affermer  à  des  citoyens  d'Arles 
pour  six  ans  le  «  paty  du  Contrasta  »,  Le  25  décembre,  il 
ordonna  «  estre  faict  d'ymaiges  d'or...  jusques  à  la  somme 
de  CL  écuz  soleil  ou  environ,  pour  donner,  non  pas  par  ma- 
nière de  don,  raays  de  souvenance,  là  où  semblera  à  la  ville  de 
donner*».  Les  souveraines  furent  logées  dans  la  maison  de 
M.  d'Arlatan,  sieur  de  Beaumont,  qui  avait  été  l'objet  de 
réparations  très  importantes  :  le  devant  fut  pavé  à  neuf  et 
on  y  installa  des  verrières  peintes  par  Claude  Collet,  pour 
lesquelles  il  fut  payé  13  florins  1  gros*.  Les  frais  de  répara- 
tions s'élevèrent  à  la  somme  totale  de  117  florins  6  gros 
8  deniers^;  mais  ils  comprennent  à  la  fois  ceux  dont  le  pas- 
sage des  reines  fut  la  cause  et  ceux  qu'occasionna  le  retour 
du  Roi,  le  mois  suivant.  Nous  avons  peu  de  renseignements 
sur  les  occupations  des  souveraines  à  Arles  durant  leur  séjour 
qui  se  prolongea  jusqu'au  samedi  29  décembre;  nous  savons 
seulement  qu'elles  s'y  firent  apporter  des  reliques,  notam- 
ment «  les  bras  des  Maries  de  Notre-Dame-de-la-Mer  »,  qu'el- 
les allèrent  voir  à  l'église  Saint-Hoaorat  où  on  les  avait 
déposées.  Au  retour  des  Aliscamps,  nous  rapporte  Jean  de 
Podio  qui  nous  a  conservé  ces  détails,  elles  passèrent  par  les 

1.  Arch.  de  Tarascon,  BB  12,  f.  353,  délib.  du  16  janvier  1516. 

2.  Un  accident  se  produisit  à  Beaucaire  à  cette  occasion.  Un  «  pouvre 
homme  »  fut  blessé  à  la  cuisse  «  d'ung  tap  de  l'une  des  pièces  »  d'artil- 
lerie et  voulut  se  faire  payer  une  indemnité  par  le  nommé  Bonel,  chargé 
de  faire  tirer  l'artillerie  (Arch.  de  Tarascon,  BB  4,  délib.  du  17  janvier 
1516). 

3.  Arch.  d'Arles,  Délib.,  BB  8,  f»»  58-59. 

4.  Arch.  d'Arles,  ibid.,  f"  59  v". 

5.  Arch.  d'Arles,  CC  267,  f»  93. 

6.  Archives  d'Arles,  Délib.,  BB  8,  f»  68  v». 


E.   BAUX,  V.-L.    BOURRILLY   ET   PH.    MABII.LY.  35 

Arènes  et  traversèrent  les  ruines  du  théâtre  romain  où  sub- 
sistaient seulement,  alors  comme  aujourd'hui,  en  face  des 
gradins  à  demi  détruits,  les  deux  colonnes  restées  debout*. 

Le  samedi  matin,  29  décembre,  les  reines  quittèrent  Arles 
par  la  route  de  Salon  où  elles  passèrent  la  nuit  du  29  au  30. 
Elles  logèrent  au  château  que  Jean  Ferrier,  archevêque 
d'Arles,  avait  fait  richement  décorer  pour  les  recevoir  2.  Le 
lendemain,  elles  arrivèrent  à  Aix.  Le  chapitre  de  Saint-Sau- 
veur avait,  quelques  semaines  auparavant,  décidé  de  leur 
offrir  du  pain  pour  leur  heureuse  venue''.  Mais  elles  ne  firent 
pas  un  long  séjour  dans  la  ville,  car  elles  avaient  hâte  d'arri- 
ver au  bat  de  leur  pèlerinage,  à  la  Sainte-Baume*. 

Le  tombeau  de  Marie-Madeleine  attirait  en  foule  les  pèle- 
rins. Les  princes  de  la  Maison  d'Anjou,  le  roi  René  notam- 
ment, avaient  eu  à  la  Sainte -Baume  une  dévotion  particu- 
lière, qui  s'était  traduite  par  la  concession  de  privilèges  aux 
religieux  qui  veillaient  sur  ces  reliques.  Louis  XII  était  resté 
dans  les  mêmes  sentiments,  et  l'un  des  premiers  actes  de 
François  P^  à  son  avènement  avait  été  de  confirmer  les  pri- 


i.  Protocole  de  Jean,  de  Podio,  publié  dans  le  Musée,  Bévue  arlé- 
sienne\  fascicule  5,  p.  IG;  cité  par  L.  Jacquemin,  Monogi'aphie  de  l'am- 
phithéâtre d'Arles,  II,  807  et  sqq. 

3.  L.  Gimon,  Chronique  de  la  ville  de  Salon  (Aix,  1X82),  pp.  104-165. 
L'auteur  fait  par  erreur  partir  les  princesses  pour  Aix  le  l""'  janvier; 
c'est  le  80  décembre  qu'il  faut  lire. 

8.  Recueil  de  notes  et  recherches  historiques  sur  Aix,  Eibl.  Méjanes, 
vol.  101'2-1014,  tome  I,  426-427.  Le  mss.  donne  la  date  du  15  novembre; 
c'est  sans  doute  celle  où  la  décision  a  été  prise.  Datées  d'Aix,  le  30  dé- 
cembre 1515,  on  a  des  lettres  de  la  Régente  en  faveur  de  Fouquet  Olivier, 
citoyen  d'Arles.  (Arch.  des  B.-du-Rh.,  B  26,  f.  109-110  v"  ;  Catal.  des 
Actes,  n"  23863.) 

4.  Au  sortir  d'Aix,  la  route  traversait  l'Arc,  laissait  à  main  gauche 
Perrières  [Pourrières  (?)],  et  par  «  Porcieulx  »  [Pourcieux],  arrivait  à  Saint- 
Maximin  :  «  Voy  le  chef  de  la  Magdeleine,  descends  en  la  fondrière,  puis 
remonte  la  Basme,  lieu  fort  haut  en  rocher,  où  trouveras  une  abbaye  de 
moines  blancs...  où  la  Magdeleine  faisoit  sa  pénitence.  Au-dessus  de  la 
montaigne  est  la  chapelle  du  Sainct-Pilon  ;  et  au-»dessous,  vers  la  mer,  y 
a  une  roche  de  pierre  jaulne  qui  tire  la  paille  comme  l'ambre.  »  {La  Suite 
de  la  Guide  des  chetnins,  imprimée  à  Lyon  en  1588  par  Benoist  Kigaud  à 
la  suite  de  la  Guide  des  chemins  j^our  aller  et  venir  par  tout  le  royaume 
de  France.  Exemplaire,  croyons-nous,  unique,  gracieusement  communi- 
qué par  M.  Baudrier.) 


36  VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  !«''  EN  PROVENCE. 

vilèges  que  les  religieux  tenaient  de  ses  prédécesseurs.  La 
visite  des  reines,  seules  d'abord,  bientôt  après  en  la  compa- 
gnie du  Roi,  était  une  nouvelle  marque  de  la  profonde  véné- 
ration qui  entourait  le  sanctuaire  provençal. 

Le  31  décembre,  ^Louise  de  Savoie  et  Claude  de  France 
étaient  à  Saint-Maximin^  L'église  était  eacore  en  pleine 
construction,  sous  l'énergique  impulsion  de  Damien,  prieur 
de  la  Sainte-Baume.  La  venue  des  souveraines  ne  pouvait 
que  favoriser  ces  travaux  pour  lesquels,  comme  nous  le  ver- 
rons, elles  laissèrent,  ainsi  que  le  roi  de  France  et  quelques- 
uns  de  ses  conseillers,  des  sommes  assez  importantes.  La 
reine  Claude  en  particulier  accorda  une  donation  de  200  livres 
tournois  par  an,  pendant  dix  ans,  pour  l'achèvement  de  l'édi- 
fice^.  Le  lendemain,  elle  monta  à  la  Sainte-Baume.  En  prévi- 
sion de  la  visite  royale,  on  avait  réparé  les  routes  qui  y  con- 
duisaient. La  reine  Claude  se  montra  aussi  libérale  pour  le 
sanctuaire  de  la  Madeleine  que  pour  l'église  de  Saint-Maxi- 
min  :  elle  donna  de  quoi  reconstruire  le  couvent  et  le  portail 
de  l'église,  pour  laquelle  elle  promit,  en  outre,  différents 
ornements.  Après  avoir  demeuré  deux  jours  à  la  Sainte- 
Baume,  les  souveraines,  par  la  vallée  de  l'Huveaune  et  la 
route  d'Aubagne,  se  dirigèrent  sur  Marseille. 

Les  Marseillais  n'avaient  eu  qu'à  se  louer  de  la  bienveil- 
lance de  François  I".  Aussitôt  après  son  avènement  au  trône, 
le  roi  avait  confirmé  «  tous  les  privilèges,  franchises,  préro- 
gatives, chapitres  de  paix,  usages  et  anciennes  coutumes  de 
Marseille  »,  avec  des  considérants  auxquels  ils  furent  fort 
sensibles,  «  pour  la  bonne  loyauté,  disait-il,  que  lesdits  sup- 
pliants ont  tenue  envers  nous  et  nosdits  prédécesseurs,  comtes 


1.  Registre  du  Père  Damien,  publié  par  l'abbé  Albanès,  dans  la  Revue 
des  Sociétés  savaiites  des  départements,  7"=  série,  II,  211  etsqq.  Cf.  abbé 
Albanès,  Histoire  du  couvent  royal  de  Saint- Maxiinin,  235. 

2.  Registre  du  Père  Damien,  loc.  cit.  Louise  de  Savoie  témoigna  aussi 
de  sa  bienveillance  à  l'égard  des  habitants  de  Saint-Maximin  en  rédui- 
sant les  feux  de  ce  bourg  de  quarante-six  à  vingt-six,  par  lettres  datées 
d(!  la  Sainte-Baume  le  2  janvier  1515  [1516],  confirmées  par  lettres  du  Roi, 
cà  Saint-Maximin,  le  21  janvier  suivant.  (Arch.  des  B.-du-Rh.,  B  25, 
f.  328  v''-329,  331.  Catalogue  des  Actes,  n»»  399,  404.) 


E.   BAUX,   V.-L.    BOURRILLY  ET  PH.   MABILLY.  37 

desdits  comtés  et  pour  autres  justes  causes  ^».  A  la  même 
époque,  il  avait  donné  l'office  de  grand  sénéchal  général  et 
lieutenant  général  du  roi  en  Provence  à  son  oncle  René,  le 
grand  Bâtard  de  Savoie,  en  remplacement  de  Louis  d'Or- 
léans, duc  de  Longueville  -.  Et  celui-ci,  venu  à  Marseille  pour 
la  circonstance,  «  prêta  serment  d'observer  les  privilèges  et 
chapitres  de  paix  de  ladite  ville''  ».  En  retour  de  ces  témoi- 
gnages d'estime  et  de  bienveillance,  —  un  peu  protocolaires 
cependant,  il  faut  en  convenir,  —  les  Marseillais  eurent  à 
cœur  de  recevoir  avec  une  pompe  inaccoutumée  les  deux 
reines  d'abord,  puis  le  Roi,  lorsqu'il  retourna  d'Italie  et  de 
son  pèlerinage  à  la  Sainte-Baume. 

Déjà  les  préparatifs  de  la  réception  avaient  commencé  avant 
que  l'on  siit  au  juste  quel  jour  les  reines  feraient  leur  entrée*. 

1.  Kuffi,  Histoire  de  Marseille,  2«  éd.  (1696),  I,  299. 

2.  Les  lettres  patentes  sont  du  11  février  1515. 

3.  D'après  Ruffi.  ihid.,  le  Bâtard  de  Savoie  vint  à  Marseille  le  25  février 
1515.  Les  Marseillais  lui  firent  une  réception  solennelle,  comme  on  peut 
le  voir  dans  les  comptes  relatifs  à  la  visite  du  Roi  et  des  reines,  où  l'on 
régla  les  dépenses  faites  à  cette  occasion,  et  même  celles  dont  le  deuil  de 
Louis  XII  avait  été  la  cause. 

4.  Nous  avons  emprunté  les  détails  du  premier  passage  des  souverai- 
nes à  Marseille  au  manuscrit  du  marquis  de  Valbelle,  Recueil  des  cho- 
ses mémorables  arrivées  en  Provence  depuis  l'an  1505  jusqu'en  l'an 
1539,  Bibi.  de  Carpentras,  C.  G.  (L...),  f.  58  v",  et  surtout  à  un  document 
conservé  aux  arch.  mun.  de  Marseille,  sér.  CC,  non  numéroté,  qui  contient 
le  détail  des  dépenses  occasionnées  par  les  fêtes  données  en  l'honneur 
des  souverains.  On  lit  au  verso  du  dernier  feuillet  :  «  Cayer  contenant  le 
compte  de  la  despance  faite  par  Jean  Hue,  trésorier  de  ceste  ville,  à  la 
venue  et  pendant  le  séjour  en  lad.  ville  du  Roy  Françoys  premier  et  de  la 
Reyne,  sa  femme,  de  l'année  1516.  »  Et  plus  bas,  d'une  autre  écriture  : 
«  N"  14.3.  Boleta  de  la  despensa  de  la  venguda  de  la  Reyna,  et  dou  Rey  et 
de  la  Reyna  segondament,  de  l'an  1516.  »  Le  total  des  dépenses  s'éleva  à 
2,373  florins,  1  gros  et  2  quarts.  Jusqu'à  ces  dernières  années  on  avait 
cru  ces  comptes  perdus.  Dans  un  article  sur  l'Entrée  de  François  I"  à 
Marseille  en  1516  (paru  dans  les  Mémoires  de  l'Académie  des  scien- 
ces, belles-Lettres  et  arts  de  Marseille,  1884-1885,  pp.  217-224),  le  doc- 
teur Barthélémy  dit  qu'à  l'occasion  de  la  cavalcade  de  1868  on  fit  des 
recherches  au  sujet  des  entrées  de  François  I"  en  1516  et  en  1533  (lors 
de  l'entrevue  du  Roi  avec  le  pape  Clément  VII).  Ce  fut  en  vain  :  «  on  ne 
trouva  aux  Archives  ni  les  délibérations  du  Conseil,  ni  les  comptes  du 
trésor  de  l'époque,  qui  auraient  pu  guider  les  organisateurs  dans  la  dis- 
tribution des  i-ôles  et  l'agencement  des  costumes.  »  Nous  avons  été  assez 
heureux  pour  mettre  la  main  aux  archives  municipales  de  Marseille  sur 
ces  comptes,  dont  quelques  extraits  ont  déjà  paru  dans  ÏArmana  mar- 


38      VOYAGE    DES   REINES   ET    DE   FRANÇOIS   1"   EN   PROVENCE. 

Pour  meubler  les  appartements  destinés  à  Claude  de  France 
et  à  Louise  de  Savoie,  on  requit  les  tapisseries  de  Saint-Vic- 
tor et  de  quelques  particuliers;  on  envoj'a  chercher  des  fagots 
de  myrte  à  Cassis  afin  de  parer  les  rues.  Le  29  décembre, 
arriva  un  courrier  d'Arles  annonçant  la  venue  des  souveraines 
pour  le  3  janvier  suivant.  Dès  lors,  on  travailla  avec  une  sorte 
de  fièvre.  Les  trois  consuls,  Louis  Paul,  Guillaume  Bocquin  et 
Guillaume  de  Saint- Jean,  présidèrent  à  tout;  le  dernier  surtout, 
se  multiplia  et  paraît  avoir  eu  la  haute  surveillance  sur  la 
décoration  des  portes  et  des  rues,  et  sur  l'organisation  de  la 
pompe  extérieure  de  la  cérémonie. 

Il  fallut  d'abord  approprier  et  aménager  la  maison  du  Roi 
et  la  maison  de  M.  de  la  Barben,  un  descendant  de  cesForbin, 
dont  le  rôle,  dans  l'annexion  de  la  Provence  à  la  France,  avait 
été  capital;  car  c'est  là  que  devaient  loger  les  reines.  On  y  fit 
donc  transporter  des  tapisseries,  des  tapis,  des  tables,  des 
escabeaux,  la  literie  nécessaire  pour  les  souveraines  et  leur 
nombreuse  suite,  avec  des  matelas  de  plume  et  de  paille  de 
seigle;  des  «  cafïués  »  [chenets],  des  «  gavels  »  [sarments],  vu 
la  rigueur  de  la  saison;  les  verrières  furent  réparées,  les  ser- 
rures vérifiées.  Les  comptes  détaillés  qui  nous  ont  été  conser- 
vés nous  permettent  de  reconstituer  par  le  menu  tous  ces 
préparatifs';  ils  nous  montrent  que  les  hommes  de  ce  temps 
n'avaient  qu'une  idée  plutôt  sommaire  de  ce  que  nous  appe- 
lons le  confort.  Les  consuls  cependant  firent  tout  ce  qu'ils 


sihès  per  l'annado  1897  (pp.  78-(S0),  sous  la  signature  «  Ion  Furnairé  » 
(Ph.  Mabilly). 

1.  «  Die  xxviii"  deldit  mes  [de  désembre],  à  Jacques  Borrilhon,  porta- 
fays,  per  aver  portât  la  tapissarié  de  Mons.  lo  comandor  Boniff'acii  à  la 
mayson  de  la  villa  et  en  après  de  ladita  mayson  à  la  mayson  de  Alons.  de 
la  Barben,  onte  era  lojada  la  Rej-na,  1  gros...  —  Item,  à  Michel  Sol,  per 
aver  portât  dos  autres  tapis  de  la  mayson  de  Mons.  lo  comandor  à  la 
mayson  de  Mons.  de  la  Barben,  1  quart...  —  Item,  à  Anric  Franchisco 
et  Jacques  Peymontés  per  aver  escobat  [balayé]  la  mayson  del  Rey, 
3  gros...  —  Item,  lodict  jort  [1'"'  janvier],  à  mestre  Jolian  Droyn,  pintre, 
per  II  mans  de  papies  de  la  grant  forma  per  far  las  vetas  de  devisas, 
6  gros...  —  Item,  lodict  jort,  à  ung  que  a  destendut  las  isturias  de  la 
mayson  de  Messer  Nicolau  Forbin  et  portadas  à  la  mayson  del  Eey, 
2  quarts.  » 


E.    BAUX,  V.-L.    BOURRILLY   ET   PH.    MABILLY.  39 

purent  pour  rendre  commode  et  agréable  le  séjour  dans  leur 
cité  de  leurs  hôtes  augustes. 

En  même  temps  que  l'aménagement  des  logis  des  deux 
reines ,  se  poursuivait  la  décoration  des  maisons  et  des  rues. 
Elle  consistait  essentiellement  en  verdure.  On  avait  fait  venir 
de  Cassis  plusieurs  «  barques  »  de  myrte,  de  bois  de  pin  et  de 
chêne  vert,  et  avec  des  branchages,  disposés  autour  de  cordes 
et  de  cerceaux,  on  avait  multiplié  les  guirlandes,  les  arcs  de 
triomphe  et  les  arceaux.  Les  portes  par  où  les  reines  feraient 
leur  entrée,  les  rues  qu'elles  devaient  suivre,  les  maisons  des 
consuls,  la  maison  de  ville,  celles  du  Roi  et  de  M.  de  la  Barben 
furent  ainsi  ornées.  A  ces  motifs  on  ajouta  des  faisceaux  de 
romarin  fleuri \  le  tout  entremêlé  d'étoffes  et  de  tapisseries 
historiées,  empruntées  entre  autres  à  Nicolas  de  Forbin. 
Comme  toujours,  on  se  trouva  pris  de  court.  Le  2  janvier, 
rien  n'était  encore  terminé,  et  les  ouvriers,  «  barbiers  et  bo- 
tiés  »,  sous  la  direction  de  Guillaume  de  Saint-Jean,  durent 
travailler  toute  la  nuit  à  la  lueur  des  torches  et  des  «  basions 
de  cire  »  pour  disposer  jles  dernières  «  arcades  »  et  mettre  la 
dernière  main  à  l'aménagement  du  logis  des  souveraines. 

Le  programme  des  fêtes  fut  dressé  par  «  mestre  Anthoni 
Flote  »,  notaire,  sur  une  peau  de  «  vedellin  »,  pour  l'achat  de 
laquelle  il  reçut,  le  2  janvier,  la  somme  de  quatre  gros 2.  Ce 
document  n'a  pas  été  conservé,  et  les  curieux  le  regretteront, 
car  il  devait  être  du  plus  haut  intérêt.  Cependant,  malgré 
cette  perte,  à  l'aide  des  comptes  et  de  ce  que  nous  rapportent 
le  marquis  de  Valbelle  et  Ruffi,  qui,  le  plus  souvent,  n'est  de 
celui-ci  que  l'écho  fidèle,  nous  pouvons  reconstituer  la  suite 


1.  «  Item,  lodict  jort  [2  janvier],  ay  donat  à  Johan  Hue  que  dis  avié 
pagat  per  ung  fays  de  romanil  florit,  3  gros...  —  Item,  lodic  jort,  à  Monet 
Mitron  et  Honorât  Glari,  per  2  fays  [de  romanil  florit,  2  gros...  — Item,, 
lodict  jort,  per  2  lieuras  de  candellas  per  los  barbies  al  vespre  per  que 
velharien  tota  la  nuech,  1  gros,  2  quarts...  —  Item,  lodict  jort,  à  Anthoni 
Pons,  Batista  de  Tallart  et  Guillaume  Doesayre,  que  an  ronput  la  nerta 
[myrte]  als  botiés  [tonneliers]  et  ajudat  à  fayssar  los  libans  [grosses 
cordes]  tôt  lo  jort,  3  gros.  » 

2.  «  Item,  lodict  jort,  à  mestre  Anthoni  Flote,  notari,  per  une  peu  de 
vedellin  per  far  los  tilles  de  las  romieras,  4  gros.  » 


40   VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  I«'  EN  PROVENCE. 

de  ces  réjouissances  qui  se  déroulèrent  à  Marseille  entre  le  3 
et  le  7  janvier  1516. 

Ce  fut  le  3  janvier,  un  jeudi,  que  Louise  de  Savoie  et  Claude 
de  France  firent  leur  entrée  dans  la  villes  Elles  y  furent 
accueillies  par  de  formidables  décharges  d'artillerie.  Fen  de 
ôrwi  était  déjà  la  devise  des  Provençaux,  et  des  Marseillais  en 
particulier.  En  l'absence  de  Préjent  de  Bidoux,  qui  n'arriva 
que  quelques  jours  après  à  Marseille,  Bernardin  des  Baux, 
chevalier  de  l'ordre  de  Saint-Jean  de  Jérusalem,  futur  général 
des  galères,  «  fit  tirer  toute  l'artillerie  des  galères,  des  bri- 
gantins,  et  enfin  de  tous  les  bâtiments  maritimes^».  A  travers 
les  rues  tendues  et  parées,  les  souveraines,  accompagnées  «  de 
plusieurs  grands  seigneurs  et  de  quantité  de  dames  fort  qua- 
lifiées »  avec  une  longue  suite,  furent  conduites  à  leurs  logis, 
Claude  de  France  à  la  maison  de  M.  de  la  Barben,  et  Louise 
de  Savoie  probablement  à  la  maison  du  Roi.  Malheureuse- 
ment la  pluie  vint  contrarier  la  fête  et  en  ternir  l'éclat,  Mais 
les  Marseillais,  les  jours  suivants,  prirent  leur  revanche. 

Le  vendredi  4  janvier,  Bernardin  des  Baux  organisa  dans 
16  port,  en  l'honneur  des  reines,  un  combat  d'oranges  :  c'était 
les  batailles  de  fleurs  de  ce  temps-là.  Claude  de  France  et 
Louise  de  Savoie  y  prirent,  paraît-il,  grand  plaisir,  ainsi 
qu'aux  hommages  que  vinrent  leur  présenter  les  dames  et 
bourgeoises  de  la  cité.  Les  comptes  ne  mentionnent  pas  d'une 
façon  spéciale  les  dépenses  occasionnées  par  cette  première 
bataille  d'oranges;  il  est  probable  qu'on  les  a  réunies  à  celles 
de  la  bataille  que  nous  verrons  donnée  en  l'honneur  du  Roi. 
En  revanche,  ils  nous  renseignent  sur  le  menu  du  repas  des 
souveraines  ce  jour-là.  Les  pêcheurs  de  Saint-Jean,  «  lei  San- 
Janen  »,  firent  porter  à  la  maison  du  Roi  douze  thons;  les 
quatre  hommes  qui  en  furent  chargés  reçurent  pour  leur 
peine  chacun  un  gros^. 

1.  Parmi  les  personnages  d'importance  qui  suivaient  les  deux  reines, 
Bouche  [op.  cit.,  II,  531)  cite  les  sieurs  de  Montmorency  (le  père  du  futur 
connétable  Anne  de  Montmorency)  et  du  Boccage  (probablement  du  Bou- 
chage). 

2.  Ruffi,  loc.  cit. 

3.  «  Item,  lodict  jort  [4  janvier],  à  Anthoni  Pons,  Jolian  lo  Nissart  et 


E.    BAUX,  V.-L.    BOURRILLY   ET   PH.    MABILLY.  41 

Le  samedi  5  janvier^  «  la  reine  [Claude]  alla  dîner  à  Saint- 
Victor,  et  après  dîner,  alla  visiter  Notre-Darae-de-la-Garde, 
et  après,  en  s'en  retournant  à  la  ville,  elle  fut  en  l'église  des 
Frères  Prêcheurs,  qui  estoit  en  ce  temps-là  dans  les  faux- 
bourgs.  Le  lendemain,  jour  de  dimanche,  elle  ouït  la  messe 
dans  l'église  Major  et  vêpres  à  Saint-Victor,  et  toujours  avec 
sa  belle-mère 2.  » 

Les  reines  quittèrent  Marseille^  le  lundi  matin,  7  janvier, 
pour  Aix,  où  elles  arrivèrent  le  jour  même.  Elles  y  demeu- 
rèrent quatre  jours,  jusqu'au  11  janvier,  au  moins.  De  ce 
second  passage  à  Aix,  nous  ne  connaissons  à  peu  près  rien,  sauf 
les  quelques  lettres  ou  actes  que  Louise  de  Savoie  signa, 
datés  de  cette  ville*.  Le  11  ou  le  12  janvier,  elles  reprirent 
leur  marche  vers  la  Haute-Provence  :  elles  atteignirent  bien- 
tôt Manosque  d'où,  le  13  au  matin,  la  reine-mère  écrivit  à 
M.  de  La  Fayette  un  billet  qui  se  terminait  par  ces  mots  : 
«  Au  surplus,  je  ne  garde  l'eure  que  Roy  n'arrive  en  ceste 
compagnie,  et  partit  de  Milan  mardi  derniers»  Le  même 

2  autres  que  porteron  13  tons  de  Sanct  Johan  fins  à  la  mayson  del  Rey 
et  car  esteron  [qui  demeurèrent]  en  ladita  mayson  mays  de  1  liora,  4  gros.  » 

1.  Euffi,  loc.  cit.,  dit  par  erreur  le  samedi  7  janvier.  —  De  ce  jour  est 
datée  une  lettre  de  Louise  de  Savoie  à  M.  de  La  Fayette,  gouverneur  de 
Boulogne,  où  elle  dit  entre  aiitres  choses  :  «  La  Royne  et  moy  avons  faict 
nostre  voyage  de  la  Baulnie  et  nous  en  allons  au-devant  du  Roy  en 
Daulphiné,  où  il  sera  bientost  »  (Bibl.  Nat.,  f.  fr.,  2934,  1»  26). 

2.  De  ce  jour  sont  datés  deux  actes  signés  par  la  Régente.  Arcli. 
des  B.-du-Rh.,  B  26,  f»  17  ;  ibid.,  f"  138  v  et  322  v».  Catalogue  des 
Actes,  n»^  23367  et  23368. 

3.  Aug.  Fabre,  Les  Rues  de  Marseille,  III,  255-256,  dit  par  erreur  que 
les  pi'incesses  attendirent  François  I"  à  Marseille. 

4.  Actes  datés  d'Aix  :  8  janvier.  Archives  des  Bouches-du-Rhône,  B  24, 
f»  400;  25,  f»  335.  —  9  janvier,  ibid.,  B  26  f°  405;  25,  f»  365  v».  —  10  jan- 
vier, ibid.,  B  25,  f"  338  v;  378  v».  —  11  janvier,  ibid.,  B  25,  f»  320  v».  — 
Catalogue  des  Actes,  n»»  400-403,  23369-23372. 

5.  «  Monsieur  de  La  Fayette,  j'ay  sceu  comment  Messire  Galleas  Vis- 
conte  est  de  présent  en  Angleterre  allé  ambassadeur  pour  mener  comme 
l'on  peult  assez  considéi'er  quelques  bonnes  praticques  contre  le  Roy,  et 
en  sa  compaignie  est  ung  nommé  Berthelemy  Tisson,  et  en  s'en  retour- 
nant ledict  Visconte,  fault  qu'il  passe  par  les  destroicts  du  royaulme. 
J'escrips  à  M.  do  Genly,  qui  est  adverty  de  ceste  matière,  qu'il  face  le 
guet,  qu'il  vous  advertisse  du  temps  qu'il  pourra  passer,  ensemble  du 
lieu;  pareillement  j'escripz  au  président  Bapaumes,  qui  est  par  delà,  qu'il 
vous  advertisse  du  jour  qu'il  partira  de  là,  mais  il  ne  vous  ouzera  es- 


42   VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  1"  EN  PROVENCE. 

jour,  non  loin  de  Sisteron,  François  I"  rejoignait  sa  femme 
et  sa  mère. 

Le  roi  de  France  avait  reçu  à  Milan,  à  son  retour  de  Bolo- 
gne (c"est-à-dii^e  vers  le  milieu  de  décembre),  «  plusieurs 
lectres  de  la  Royne  et  de  Madame  (Louise  de  Savoie)  qui  le 
pryoient  fort  de  retourner  en  France  »  et  lui  donnaient  ren- 
dez-vous en  Provence,  où  les  reines  se  rendaient  en  pèleri- 
nage à  la  Sainte-Baume  *.  Après  avoir  donné  ordre  au  gouver- 
nement du  Milanais,  qu'il  laissa  à  la  garde  du  connétable  de 
Bourbon,  François  I"  s'était  mis  en  route  :  parti  de  Milan  le 
8  janvier,  par  Biagrasso,  Novare,  Verceil,  Turin,  il  avait  pris 
la  poste  à  Suse,  et  par  le  col  du  Genèvre,  la  baute  vallée  de 
la  Durance,  Gap-  et  Tallard,  il  arriva  le  13  janvier  près 
de  Sisteron.  «  Le  13  janvier  1516,  écrit  Louise  de  Savoie  dans 
son  JournaV\  mon  fils  revenant  de  la  bataille  des  Suisses 
me  rencontra  auprès  de  Sisteron  en  Provence,  sur  les  bords 
de  la  Durance,  environ  six  heures  au  soir,  et  Dieu  sçait  si 
moi,  pauvre  mère,  feus  bien  aise  de  voir  mon  fils  sain  et 
entier,  après  tant  de  violences  qu'il  avoit  souffertes  et  soute- 
nues pour  servir  la  chose  publique.  »  La  rencontre  dut  avoir 
lieu  un  peu  au  nord  de  la  ville,  car  le  Roi  y  fit  ensuite  son 


cripre  sinon  en  son  chiffre,  dont  vous  a  esté  envoyé  le  double.  Vous 
pouvés  assez  considérer  le  service  qu'en  le  prenant  ferez  au  Roy.  Par 
quoy  vous  prie  que  vous  y  mectiez  toute  pêne  et  diligence  sans  rien  y 
espargner;  de  vous  confronter  le  personnage,  il  n'est  jà  besoing,  car  je 
sçay  quele  congnoissez  assez,  mais  surtout,  comme  sçavez,  il  est  besoing 
que  ceste  matière  soit  tenue  très  secrète,  ce  que  je  sçay  que  sçaurez  bien 
faire.  Au  sui-plus,  etc..  Escript  à  Manoasque,  le  xiir  jour  de  janvier.  » 
Le  Catalogue  des  manuscrits  (I,  567)  porte  Maurasque  qui  est  une  mau- 
vaise lecture.  —  Galeas  Visconti,  dont  il  est  ici  question,  n'était  pas  allé 
en  Angleterre  après  Marignan,  il  s'était  rendu  en  Allemagne,  auprès  du 
cardinal  de  Sion.  Cf.  Journal  de  Barrillon,  I,  125,  190  et  la  note. 

1.  Journal  de  Barrillo7i,  I,  176-177. 

2.  En  juillet  151-5,  François  I"  avait  été  harangué  à  la  Eochette  (près 
de  la  Bâtie,  col  de  Manse)  par  Claude  Olier,  vice-bailli  de  Gap.  II  lui 
promit  de  passer  par  Gap  à  son  retour  et  «  il  tint  parole  ».  (ïh.  Gautier, 
Précis  de  l'Histoire  de  Gap  —  d'après  les  mémoires  de  Gaston  Juvénis. 
—  Cf.  J.  Roman,  Histoire  de  la  ville  de  Gap,  111.)  —  Le  fait  est  encore 
confirmé  par  Aymar  du  Rivail,  De  Allohrogibus  (éd.  de  Terrebasso),  563. 

3.  Journal  de  Louise  de  Savoie,  publié  dans  Guichenon,  Preuves  de 
VHist.  généal.  de  la  maison  de  Savoie,  II,  457. 


E.    BAUX,  V.-L.    BOURRILLY   ET   PH.    MABILLY.  43 

entrée,  et  suivant  une  tradition  que  rapporte  de  Laplane  dans 
son  Hisione  de  Sîsieron,  logea  dans  une  maison  qui  appar- 
tenait à  noble  Gaspard  Curet,  seigneur  de  Saint-Vincent'. 

Après  s'y  être  reposé  quelques  jours,  il  descendit  lente- 
ment vers  le  bas  pays  et  fit  un  premier  arrêt  à  Manosque. 
Le  17  janvier,  il  y  fut  reçu  par  le  conseil  qui  avait  à  sa  tête 
le  premier  consul,  Antoine  de  Voland^,  dans  la  maison  de  qui 
il  logea.  Il  traversa  Aix  le  19  janvier^  et  le  20  arriva  à  Saint- 
Maximin. 

Le  21  janvier,  le  Roi,  les  reines  et  leur  suite  montèrent  à  la 
Sainte-Baume.  François  P""  trouva  le  couvent  «  fort  caduc  et 
démoly  »  :  au  don  précédemment  fait  par  la  reine,  il  en  ajouta 
un  pareil.  René,  bâtard  de  Savoie,  donna  1,000  florins  d'or 
pour  faire  les  vitraux;  Jacques  de  Beaune,  sieur  de  Semblan- 


1.  E.  de  Laplane,  Histoire  de   Sisteron,  (Digne,  1843),  II,  p.  1<!3. 

2.  Abbé  Féraud,  Histoire  de  Manosque  (Digne,  1848),  101  et  seq.,  250. 
—  C'est  à  ce  passage  de  Fran(jois  l'"'  à  Manosque  que  se  rattache  l'his- 
toire bien  connue  de  M""  de  Voland,  une  fille  précisément  du  premier 
consul.  François  I"  aurait  été  frappé  de  la  remarquable  beauté  de  la 
jeune  fille  qui  lui  présentait  les  clefs  de  la  ville.  M""  de  Voland,  troublée 
par  le  regard  du  Roi  et  craignant  pour  sa  vertu,  en  aurait  conçu  un  tel 
chagrin  qu'elle  aurait  elle-même  détruit  sa  beauté  en  plongeant  son  visage 
au  milieu  d'émanations  de  soufre  qui  la  défigurèrent.  —  Ce  récit  est  ro- 
manesque et  peu  vraisemblable.  Il  se  rencontre  pour  la  première  fois,  à 
notre  connaissance  du  moins,  dans  l'ouvrage  d'un  Père  jésuite  originaire 
de  Manosque,  le  P.  Jean  Colomb  ou  Coulomb  :  Joannis  Columhi  Ma- 
niiascensis...  opiiscula  varia...  Lugduni,  MDCLXVIII,  p.  452.  Aucun 
écrivain  du  seizième  siècle,  pas  même  Brantôme,  poui'tant  si  friand  de 
pareilles  histoires,  n'a  fait  la  moindre  allusion  à  cet  événement  et  il 
faut  attendre  plus  d'un  siècle  et  demi  pour  en  trouver  la  première  men- 
tion; c'est  une  autre  i-aison  do  douter  de  son  authenticité.  Une  nouvelle 
cause  de  doute  surgit  des  détails  et  du  ton  même  du  récit  qu'a  fait  le 
Père  Colomb,  dont  les  intentions  moralisatrices  sont  trop  manifestes. 
Notre  auteur  en  a-t-il  trouvé  les  éléments  dans  la  tradition  locale,  les 
a-t-il  seulement  enjolivés  ou  tout  simplement  inventés?  Il  est  difficile  de 
le  dire  avec  certitude.  Ce  qu'il  y  a  de  sûr,  c'est  que,  depuis  1658,  tous  les 
historiens  de  Manosque  et  de  la  Provence  ont  repris  et  amplifié  cette 
histoire,  et  célébré  à  l'envi  l'héroïque  vertu  de  M""  de  Voland  !  Frédéric 
Mistral  y  fait  allusion  an  chant  XI  de  Calendal,  p. '413  (éd.  Lemerre). 

3.  On  lit  dans  les  arch.  de  Beaucaire  (BB  4,  délib.  du  17  janvier)  : 
«  Expousé  a  esté  audict  conseil,  ])ar  l'organ  de  J\I.  le  [)remier  consul 
S""  Laurens  Galian,  comment  INl'"  d'.\ix  avoit  envoyé  novelles  piir  deçii, 
comment  le  Roy  nostre  sire  devoit  faire  aujourd'liuy  son  entrée  aud,  Aix 
et  de  là  viendra  à  Marseille,  Arles  et  Tharascon,  » 


44   VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  I"  EN  PROVENCE. 

çay,  fit  les  frais  de  l'autel  du  Crucifix.  Après  la  visite  du  Roi, 
pour  en  commémorer  le  souvenir,  le  père  Damien  fit  pla- 
cer dans  la  chapelle  de  Sainte-Madeleine  une  inscription 
qui  n'existe  plus  aujourd'hui,  mais  dont  le  texte  a  été  con- 
servé ^  : 

Rex  super  illustris  Franciscus  primus  in  œdes 
Venit,  cum  ducibus  principibusque,  sacras; 
Claudia,  nobilium  hic  inag^ia  stipante  caterva, 
Cum  genetrice  viri  cumqiie  sorore  fuit; 
Hoc  fuit  italici  post  martia  bella  triumphi, 
Cum  rex  Franciscus  débita  vota  daret; 
Cumque  fuit  presens  in  sancta  Magdalis  œde, 
Est  rex  largitus  munera  magna  potens^. 

De  la  Sainte-Baume,  François  Jer,  suivi  de  sa  cour  et  des 
deux  reines,  se  dirigea  sur  Marseille  par  la  route  que  celles-ci 
avaient  prise  trois  semaines  auparavant^.  Les  Marseillais  se 
préparaient  à  faire  au  Roi  une  réception  splendide.  La  décora- 
tion et  la  parure  des  rues  avaient  été  conservées  :  c'est  à 
à  peine  s'il  fut  nécessaire  de  remplacer  sur  quelques  points 
des  rameaux  de  myrte.  On  se  contenta  de  décorer  quelques 

1.  Bouche,  La  défense  de  la  foy  et  de  la  piété  en  Provence  pour  ses 
saints  tiitélaires  Lazare  et  Maxitnin,  Marthe  et  Magdalene,  Aix,  1663, 
p.  58.  —  Faillon,  Monuments  inédits  sur  l'apostolat  de  sainte  Marie- 
Madeleine  en  Provence,  II,  1400,  lettres  de  don  de  François  l""',  à 
Saint-Maximin,  le  21  janvier  1515  [1516].  —  Rostan,  Notice  sur  l'église 
de  Saint-Maximin,  p.  50.  —  Albanès,  Histoire  du  couvent  royal  de 
Saint-Maximin,  pp.  235-236.  Cf.  Spont,'  Se?nblançay,  pp.  123  et  suiv.  — 
Eostan,  lac.  cit.,  ajoute  ce  détail  :  «  Ces  princesses  eurent  soin  de  se 
conformer  à  l'ancien  usage,  pour  les  femmes,  de  ne  point  entrer  dans  la 
crypte,  et  les  saintes  reliques  furent  transportées  dans  l'église  supérieure 
pour  être  offertes  à  leur  vénération.  C'est  à  cette  occasion  qu'il  se  déta- 
cha du  reliquaire  «ne  pierre  précieuse  de  grande  valeur.  Il  fut  dès  lors 
arrêté  qu'il  serait  permis  aux  femmes  de  descendre  dans  la  crypte  afin 
d'éviter  ce  transport  trop  fréquent.  » 

2.  Il  resta  d'autres  traces  du  passage  du  roi  de  France  et  des  souve- 
raines, entre  autres  les  statues  de  François  I'"'  et  de  la  reine  Claude  à  l'en- 
trée de  la  grotte  et  «  une  magnifique  cheminée  en  pierre  tendre  sculptée 
qui  a  des  proportions  monumentales  et  passe  pour  un  modèle  achevé  de 
ce  qu'on  faisait  alors  dans  ce  genre  pour  les  habitations  seigneuriales... 
On  l'appelle  la  cheminée  de  François  I",  du  nom  du  donateur  ».  (Commu- 
nication manuscrite  du  prieur  de  Saint-Maximin.) 

3.  D'après  Barthélémy,  Histoire  d'Aiibagne,  1,  li,  le  roi  aurait  couché 
au  château  d'Aubagne.  Nous  ignorons  sur  quelle  autorité  se  fonde  cet 
auteur. 


Legeni  pone  milii  domine  in  via  tua, 
et  dirige  me  in  se  mita  recta  propter 
i ni  mie  os  meos. 


Le  Roy  induyt  par  Lange  de  Dieu  A  prandre  Le 
chemyn  de  t-a  Baume  .  Dist  une  Oraison  .  cfui  Luy  est 
toute  propre  quât  il  sort  de  sa  chambre.  Et  jamaiz  ne 
Ja  deueroit  lesser 

Ora° 

Monseigne^  Dieu  Assigne  moij  Loij  en  ta  voye. 
Et  me  dirige  en  chemyn  droit .  A/fin  r/ue  mes 
ënemys  ne  me  puyssent  faire  nuysance. 


Ce  médaillon  et  celui  de  la  p.  57  sont  empruntés  au  manuscrit  fran- 
çais 2088  de  la  Bibliothèque  nationale,  dont  nous  reproduisons  (p.  62, 
n.  4)  la  première  page.  Le  Catalogue  (1,  p.  356)  le  mentionne  ainsi  :  «  Le 
psaume  XXVI,  «  lUuminatio  mea  »  avec  traduction  ot  allusions  à  la  vie 
de  François  I«^..,  papier,  dessins  à  la  plume  et  camaïeu.  1516.  «  Les  diffé- 
rents médaillons  se  rapportent  aux  principaux  épisodes  do  la  campagne 
de  1515-1516  :  départ  d'Amboise,  bataille  de  Marignan,  siège  de  Mi- 
lan, etc.;  ils  sont  curieux,  surtout  pour  l'histoire  du  costume. 


46   VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  I"  EN  PROVENCE. 

maisons  de  plus,  et,  dans  la  décoration,  on  introduisit  de  nou- 
veaux motifs  :  parmi  le  feuillage  on  mêla  des  pommes  de  pin 
vertes  et  même  des  oranges  que  l'on  avait  dans  ce  but  ache- 
tées avec  leur  pédoncule  «  embé  lo  pécolh'  ».  L'activité  des 
consuls  se  porta  particulièrement  sur  la  confection  de  nom- 
breux panneaux  et  écussons  aux  armes  du  Roi,  des  reines,  du 
sénéchal  ou  de  la  ville,  que  les  enfants  devaient  porter,  fixés 
à  l'extrémité  d'un  roseau.  On  fit  dresser  aussi  de  nombreuses 
estrades,  à  la  porte  Royale,  devant  les  maisons  des  consuls, 
sur  tout  le  passage  du  cortège  royal.  Des  artistes,  des  «  fatis- 
tes  »,  appelés  du  dehors,  furent  chargés  de  construire  et  d'or- 
ner avec  des  feuilles  d'or,  d'argent  et  des  papiers  diversement 
colorés,  ces  «  cadafauds  »  sur  lesquels  on  devait  représenter 
certaines  scènes  de  la  vie  de  saint  Louis  d'Aragon^,  de  vérita- 
bles tableaux  vivants,  comme  nous  dirions  aujourd'hui.  Peut- 
être  est-ce  aussi  sur  ces  estrades  que  furent  dansées  quelques- 
unes  des  «  moresques  »  sur  lesquelles  nous  aurons  à  revenir. 

Pour  mener  à  bonne  fin  tous  ces  préparatifs  et  recruter  le 
personnel  nécessaire  aux  fêtes,  les  consuls  furent  obligés  de 
faire  appel  au  concours  d'étrangers  :  indépendamment  des 
«fatistes  »,  venus  pour  la  plupart  d'Aix,  des  tambourinaires 
furent  mandés  de  Pertuis.  A  Aix  encore,  on  envoya  quérir  un 
chanoine,  «  ung  cauonge...  per  devisar  la  venguda  del  Rey 
en  doas  partidas  ».  Les  consuls  furent  si  satisfaits  de  ses  ser- 
vices, qu'ils  lui  donnèrent  pour  sa  peine  trois  écus  au  soleil, 
quatre  cannes  et  cinq  pans  (9'"25)  de  taffetas  noir  et  cinq  pans 
(l"i25)  de  taiiétas  rouge,  le  tout  d'une  valeur  de  24  florins 
6  gros. 

Le  22  janvier',  un  mardi,  les  Marseillais  sortirent  en  foule 


1.  «  Item  lodict  jort[19 janvier],  à  Domenogo  Comte  —  per  VIII''LX  aran- 
ges  embé  lo  pecolh,  10  gros.  » 

2.  Les  reliques  de  saint  Louis  d'Aragon  avaient  été  enlevées  à  Mar- 
seille par  les  Aragonais  en  1423.  C'est  pour  les  remplacer  que  les  consuls 
de  Marseille  avaient  décidé  cette  représentation  figurée  de  la  vie  de  leur 
saint. 

3.  Nous  avons  établi  notre  exposé  d'après  les  renseignements  fournis 
par  les  comptes  déjà  mentionnés,  et  par  les  mémoires  de  deux  contempo- 
rains et  témoins  oculaires  :  le  récit  du  premier,  le  notaire  Somati,  a  été 


E.    BAUX,  V.-L.   BOURRILLY   ET  PH.    MABILLY.  47 

de  la  ville  pour  se  rendre  au-devant  du  Roi  qui  arrivait  par  la 
route  d'Aubagne.  Deux  mille  enfants  habillés  de  blanc,  les  fil- 
les avec  leurs  cheveux  dénoués,  marchaient  en  tête  portant 
des  écussons;  puis,  venaient  plus  de  quatre  mille  hommes 
armés  de  piques,  de  hallebardes  et  d'arbalètes,  deux  cents 
archers  et  cinquante  couleuvrines.  Derrière  cet  appareil  guer- 
rier s'avançaient  les  moines,  avec  «  lo  cap  de  Sanct  Victour  », 
puis  tout  le  clergé  de  la  ville  avec  ses  bannières,  ses  luminai- 
res et  les  reliques  de  saint  Lazare.  A  la  porte  Royale,  une  rixe 
éclata  entre  le  clergé  et  les  moines  :  les  bannières  étaient  déjà 
passées,  lorsque,  venant  la  croix  de  la  Major,  «  los  moynes 
que  eron  defForas  se  bateron  ambé  (avec)  los  cappelans  de  la 
Major  ».  Dans  la  bagarre,  un  des  moines,  le  nommé  Denis,  fut 
blessé  à  la  tête  d'un  coup  «  de  ung  benechier  de  ferri  ».  L'or- 
dre se  rétablit  lorsque  parut  l'évêque  de  Marseille,  Claude 
Seyssel,  qui,  à  ce  point,  descendit  de  sa  mule,  revêtit  ses 
habits  sacerdotaux,  et  tous  ensemble  s'avancèrent  jusqu'à  la 
croix  de  la  Magdeleine  sur  le  «  plan  Saint-Michel  »,  où  ils 
rencontrèrent  le  Roi. 

Vêtu  de  velours  d'argent  et  monté  «  sus  ung  corsier  gri- 
sou »,  François  pi"  avait  avec  lui,  outre  sa  mère,  sa  femme  et 
sa  sœur,  Marguerite,  duchesse  d'Alençon,  les  plus  grands  sei- 
gneurs et  les  plus  importants  personnages  de  sa  cour,  le  duc 
d'Alençon,  les  comtes  d'Angoulême,  de  Guise,  de  Laval,  les 
princes  de  Navarre,  René,  bâtard  de  Savoie,  M.  de  Saint-Val- 
lier,  le  grand  écuyer,  le  chancelier,  les  présidents  des  Parle- 
ments de  Paris,  Toulouse,  Provence,  l'archevêque  d'Arles, 
J.  Ferrier,  celui  d'Aix,  Pierre  Filholi  ou  Filleul,  etc.  L'évê- 
que de  Marseille  adressa  quelques  paroles  de  bienvenue  au  Roi 
qui,  passant  entre  les  haies  formées  par  les  enfants,  les  pi- 


publié  par  le  D''  L.  Barthélémy  dans  l'article  cité  suprà  des  Mémoires 
de  l'Académie  des  sciences,  belles-lettres  et  arts  de  Marseille;  le  récit 
du  second  est  celui  du  manuscrit  de  Valbelle  dont  nous  avons  parlé  plus 
haut.  C'est  celui  que  Ruffi  a  suivi,  et  Ruffi  a  été  la  principale  source  des 
historiens  postérieurs,  d'Augustin  Fabre  en  particulier,  dans  son  Histoire 
de  Marseille,  II,  40-43.  —  On  trouve  encore  un  récit  verbeux  et  grandi- 
loquent de  l'entrée  de  François  I"  par  Monan,  dans  l'Almanach  de  Pro- 
vence de  A.  Gueidan,  1873,  7-13. 


48   VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  I^r  EN  PROVENCE. 

queurs,  hallebardiers,  archers  et  arbalétriers,  se  dirigea  vers 
la  porte  Royale.  C'était  là  que  l'attendaient  le  viguier,  les 
consuls,  l'assesseur,  l'administration  municipale  et  les  person- 
nages «  les  plus  qualifiés  »  de  la  ville.  Les  consuls  lui  remi- 
rent deux  clefs  d'or  nouées  d'un  «  flot  de  soie  »,  qui  furent 
payées  145  écus  d'or  soleil.  François  I"  reçut  «joyeusement  » 
l'hommage  des  premiers  magistrats  de  Marseille  et  franchit  la 
porte  Royale  au  milieu  du  fracas  des  canons  «  dont  on  avait 
bordé  les  murailles  en  très  grande  quantité  ». 

Aux  premiers  pas,  le  Roi  fut  arrêté  par  la  vue  d'une  estrade 
élevée  près  de  la  porte  Royale  et  sur  laquelle  avaient  pris 
place  trois  personnages  figurant  Marseille  entourée  des  dieux 
Mars  et  Vulcain.  Celui  qui  jouait  le  rôle  de  Marseille  récita 
un  compliment  fort  bien  tourné,  dont  l'auteur  était  peut-être 
ce  «  canonge  »  d'Aix  que  l'on  avait  mandé  à  grands  frais.  La 
Ville  disait  qu'elle  était  indigne  de  recevoir  un  si  grand 
prince,  suivi  d'une  si  brillante  compagnie.  Aussi  invoquait- 
elle  (en  se  tournant  vers  ses  deux  compagnons)  le  secours  des 
dieux  pour  l'aider  à  bien  recevoir  de  tels  hôtes.  Et  pendant 
qu'elle  parlait,  sa  poitrine  s'ouvrait  —  comme  pour  montrer 
à  nu  ses  véritables  sentiments  —  et  laissait  apparaître  la  fleur 
de  lys,  «  sive  ung  Françoys  coronat  ».  Quand  Marseille  eut 
achevé  son  «  dit  »,  son  morceau.  Mars  et  Vulcain  voulurent  à 
leur  tour  prendre  la  parole;  mais  je  ne  sais  pour  quelle  cause 
—  rémotion  peut-être  —  la  mémoire  leur  fit  subitement  dé- 
faut. Suivant  la  vivante  expression  d'un  témoin,  Mars  et 
Vulcain  «  se  perdéron  ».  N'ayant  pas  le  temps  d'attendre 
qu'ils  eussent  recouvré  leurs  esprits  troublés,  François  se 
contenta  de  remarquer  qu'ils  étaient  «  estonés  »,  et,  les  lais- 
sant à  leur  confusion,  poursuivit  sa  marche. 

Sous  un  dais  de  damas  blanc  dont  les  bâtons  étaient  portés 
par  le  viguier,  les  trois  consuls  et  messire  Jehan  Candolle, 
«  juge  du  palays  »,  il  parcourut  les  rues  toutes  tendues  et 
parées  qui  menaient  de  la  porte  Royale  à  la  maison  du  Roi. 
De  distance  en  distance,  sur  des  estrades  disposées  au  coin 
des  rues  ou  sur  les  places,  étaient  représentées  diflérentes 
scènes  de  la  vie  de  saint  Louis  d'Aragon,  auxquelles  Fran- 


E.    BAUX,    V.-L.    BODRRILLY   ET   PH.    MABILLY.  49 

cois  pf  parut  prendre  le  plus  vif  plaisir.  Un  dernier  «  chaf- 
faut  »  avait  été  dressé  près  de  l'endroit  où  le  Roi  devait  loger. 
Là  se  trouvait  Neptune,  le  dieu  de  la  mer,  monté  sur  un 
navire.  A  l'approche  du  Roi,  il  en  descendit  pour  lui  rendre 
hommage,  et  après  avoir  récité  son  compliment,  le  lui  laissa 
par  écrit,  sage  précaution  qu'auraient  bien  fait  de  prendre 
Mars  et  Vulcain,  ses  confrères  de  l'Olympe  et  de  la  porte 
Royale. 

Dès  que  François  I"  parut  aux  fenêtres  de  la  maison  du 
Roi,  toute  l'artillerie  des  galères  tii-a  :  c'était  le  salut  du  port 
après  celui  de  la  cité.  Au  milieu  des  illuminations,  la  soirée 
fut  remplie  par  diverses  mascarades  et  par  de  nombreuses 
danses  ou  «  moresques  »,  dont  le  spectacle  fut  sans  doute 
renouvelé  les  jours  suivants. 

La  passion  de  la  danse  avait  toujours  été  très  forte  dans  le 
Midi,  et  l'institution  des  Jeux  du  roi  René  l'avait  encore  ré- 
cemment avivée.  Malheureusement,  nous  avons  peu  de  rensei- 
gnements sur  le  caractère  des  danses  qui  furent  exécutées 
sous  les  yeux  du  Roi  et  de  son  entourage.  Nous  n'en  avons 
guère  conservé  que  les  noms  et  quelques  détails  de  costumes; 
nous  ignorons  totalement  les  figures  et  les  airs  dont  elles  étaient 
accompagnées.  Ces  danses  devaient,  croyons-nous,  se  rap- 
procher fort  de  celles  qui  étaient  usitées  dans  les  Jeux  du  roi 
René,  dans  les  Jeux  de  la  Fête-Dieu  :  la  danse  des  Olivettes, 
«  lei  Fielouso,  lei  Boufet  »  peuvent  nous  en  donner  une  idée. 
Voici  celles  dont  les  comptes  nous  fournissent  les  noms. 
D'abord  la  moresque  «  de  las  romieras  »  et  celle  de  la  «  pelle- 
grina'  »,  la  danse  des  pèlerins,  hommes  et  femmes,  dont  les 
acteurs  étaient  vêtus  de  manteaux  et  de  costumes  de  damas 


1.  «  A  mestre  Georgi  Roberto,  appoticari,  por  3  torchas  novas  pesant 
IX  lieuras  et  1  qiiarteyron,  presas  per  los  vai'lés  dels  consols,  fl.  m,  gros  x, 
quai't  1,  et  per  una  torcha  de  lui  lieuras,  fl.  i,  gros  viiii,  et  per  lo  luunda- 
ment  de  xxiiii  torchas  pesant  lxxxx'^  lieuras,  presas  per  Johan  Guey  et 
servitos  de  messes  consols  per  las  morescas  de  las  pellegrinas,  ...  xxii  flo- 
rins, X  gros,  1  quart.  —  Item,  per  la  factura  de  un  mantels  et  capels  de 
damas  et  tafietas  per  la  moresca  de  las  romieras,  taxât  per  mestre 
Pierre  lo  Sartre,  1  florin,  8  gros.  —  Item,  per  vi  canas  de  damas  blanc, 
roge  et  jaune  per  la  dansa  de  las  romieras,  01  florins.  » 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVI.  4 


50  VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  I'"'"  EN  PROVENCE. 

blanc,  rouge  et  jaune  avec  des  chapeaux  de  Valence  et  por- 
taient de  grosses  torches;  puis  la  danse  «  dels  Moros  »  avec 
des  personnages  à  la  ligure  noircie  et  déguisés  en  Sarrasins  ^ 
La  danse  des  «  chichouhacho  »  devait  ressembler  un  peu  à  la 
précédente  :  ce  nom  de  «  chichouhacho  »,  dont  nous  n'avons 
pu  déterminer  exactement  l'origine,  évoque  assez  bien,  ce 
nous  semble,  l'aspect  diabolique  des  brigands  maugrabins  2. 
La  danse  des  sauvages  traduisait  l'ébranlement  communiqué 
aux  imaginations  par  la  découverte  récente  de  l'Amérique  et 
les  récits  prodigieux  dont  elle  était  suivie.  Ces  sauvages, 
armés  de  bâtons,  vêtus  de  peaux  cousues  et  couverts  d'herbes 
et  de  feuillage,  venaient  s'incliner  devant  le  Roi  comme  pour 
lui  «  fayre  obédience^  ».  Avec  les  danses  suivantes,  on  entrait 
dans  le  domaine  de  la  fable  :  les  danses  des  sirènes,  des  sagit- 
taires et  des  girafes  '',  ordonnées  par  le  curé  de  la  Major,  fai- 
saient défiler  sous  les  yeux  du  public,  au  son  des  tambourins, 
tous  ces  êtres  étranges,  dont  les  explorations  du  nouveau 
monde  paraissaient  confirmer  l'existence  dans  la  réalité. 
Plus  poétique  devait  être  la  danse  de  la  Rose,  dont  le  thème 
se  rattachait  peut-être  au  roman  de  Jean  de  Meung  et  de 


1.  «  A  mestre  Peyron  Michellet  per  poux  doiiadas  per  far  la  moresca 
dels  Moros,  4  tlorins,  4  gros...;  à  mestre  Jehan  Bruneto  per  borgequins 
per  los  Moros,  2  florins,  11  gros...;  à  mestre  Johan  Blancart,  sabatier, 
per  IX  testieras  de  Moros  et  iiii  parels  de  borgequins  per  ladila  moresca, 

5  florins  8  gros.  » 

2.  «  Per  trese  pans  et  miech  drap  roge,  blanc  et  jaune  près  à  mestre 
Johan  de  la  Torre,  sartrc,  per  la  moresca  des  Chichoi;bacho,  4  florins, 

6  gros.  —  Item,  per  los  taborins  et  auséùs,  per  ladita  moresca,  1  fl. 
8  gros, —  Item,  per  4  parels  de  caussas  donadas  en  aquels  que  an  dansât 
ladita  moresca,  12  florins.  » 

3.  «  A  mestre  Guilhaume  Martin  et  m  siens  companhons,  per  resta  de 
lur  pena  et  trabals  et  de  1  bestia  per  estre  anas  à  la  Bauma  per  querre  de 
l'erba  de  ladita  Bauma  per  los  sauvages.  » 

4.  «  A  mestre  Johan  Toquo  per  1  dozena  et  miejada  peux  per  los  sagi- 
tai'is,  2  fl.  6  gros.  Item,  per  xv  pans  de  taffatas  jaune  per  la  moresca 
dels  sagittaris,  8  fl.  9  gros;  per  xxx'"  pans  damas  gris  per  ladita  moresca, 
40  florins.  —  Item,  per  v  canas  et  très  pans  et  1  tiers  de  damas  blanc, 
roge  et  jaune,  per  la  moresca  de  la  Eosa,  57  florins  9  gros  2  quarts.  — 
24  florins  donas  à  Monseu  Vivault,  capellan  de  la  Major,  per  sa  pena  et 
trebals  et  magnifaturas  de  far  las  dansas  de  las  serenas,  sagittaris  et 
charaffas  (girafes),  per  la  venguda  del  Eey  et  de  la  Reyna.  » 


E.   BAUX,  V.-L.   BOURRILLY   ET  PH.   MABILLY.  51 

Guillaume  de  Lorris,  si  célèbre  partout  durant  le  moyen  âge 
et  à  cette  époque  encore. 

Assurément,  le  spectacle  de  ces  danses  et  moresques  où  les 
Marseillais  avaient  mis  leur  amour  du  mouvement  et  toute 
l'ingéniosité  de  leur  esprit,  était  un  des  mieux  faits  pour 
charmer  le  Roi  et  sa  suite.  Il  y  avait  là  une  originalité  à 
laquelle  François  I"  ne  manqua  pas  d'être  sensible.  Les  ré- 
jouissances qui  suivirent  ne  furent  ni  moins  curieuses,  ni 
moins  réussies. 

Le  lendemain  de  son  arrivée,  François  l^^  alla  rendre  visite 
aux  galères  royales  que  Prejent  de  Bidoux  ',  le  général,  avait 
embossées  non  loin  du  port.  Ce  jour-là  fut  marqué  par  une 
grande  bataille  d'oranges  —  pour  la  précédente  et  pour  celle- 
là,  on  en  avait  acheté  onze  mille —  à  laquelle  se  mêla  le  Roi. 
Laissons  parler  ici  cet  excellent  Ruffi,  d'après  le  manuscrit 
de  Valbelle  :  «  Ce  prince,  qui  avait  tant  d'ardeur  pour  les  com- 
bats véritables,  voulut  être  encore  de  la  partie  en  celui-ci;  et 
en  effet,  aiant  pris  un  grand  bouclier,  il  commença  à  tirer  et 
fit  de  fort  beaux  coups,  en  aïant  reçu  quelques-uns  à  la  tête 
et  sur  le  corps '^  » 


1.  Pi'ejent  de  Bidoux  n'avait  pas  assisté  à  l'entrée  des  reines  au  début 
de  janvier,  car  il  n'était  arrivé  à  Marseille  que  le  8  de  ce  mois.  (Ms.  de 
Valbelle,  f"  59.)  Nous  connaissons  le  nom  de  quelques-unes  des  galères 
que  commandait  Prejent  et  qui  devaiimt  à  ce  moment  se  trouver  dans  le 
port  de  Marseille  :  L'Anguille,  le  Saint-Michel,  la  Sainte-Marie,  la 
Sainte-Barbe,  la  Sainte-Claire^  la  Quaterinette,  etc.  (Pour  plus  amples 
renseignements  au  sujet  des  galères,  voir  Laforkt,  Elude  sur  la  marine 
des  galères,  et  surtout  Spont,  Les  Galères  royales  dans  la  Méditer- 
ranée [1496-1518],  dans  la  Revue  des  questions  historiques,  LVIII  [1895].) 

'2.  Le  23  janvier,  François  I"  écrit  à  M.  de  La  Fayette  :  «  Je  vous 
advise  que  je  suis  de  retour  de  mon  voiaige  d'Ytalie,  et  avant  mon  parte- 
ment  ay  donné  si  bon  ordre  à  mes  affaires  de  delà,  que  j'espère  doresen- 
avant,  avec  l'ayde  de  Dieu,  y  estre  aussi  bien  obey  que  je  suis  en  mon 
royaume  ;  dont  vous  ay  bien  voulu  advertir  à  ce  que  faciez  savoir  ma 
venue  à  mes  bons  et  loyaulx  subgectz  et  serviteurs  en  vostre  charge;  vous 
advisant  au  demourant  que  je  suis  venu  passer  par  ce  beau  et  dévot  lieu 
de  la  Baulme  et  m'en  vays  par  ce  pays  de  Prouvence  à  Lyon  pour  tirer 
droit  à  Paris...  »  (Bibl.  Nat.,  f.  fr.  8057,  f»  25.)  —  Du  même  jour  sont 
datées  les  lettres  de  provisions  en  faveur  de  Renaldo  Vento  de  l'office  de 
garde  du  «  tercenal  »  de  la  ville  de  Marseille  vacant  par  la  résignation 
qu'avait  faite  en  sa  faveur  François  Albertinelli.  [Catalogue  dos  Actes, 
n»  23373.) 


52   VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  I"  EN  PROVENCE. 

La  journée  du  24  fut  consacrée  à  des  occupations  plus 
sérieuses.  Le  matin,  le  Roi  entendit  la  messe  aux  Accoules, 
puis  jura,  en  présence  des  princes  et  de  son  chancelier 
Duprat,  les  libertés  de  Marseille  et  les  privilèges  contenus 
dans  les  textes  que  l'on  avait  exprès  tirés  de  «  l'archéu  Sant 
Espérit  ».  Dans  l'après-midi,  il  se  rendit  sur  les  galères  de 
Préjent  de  Bidoux  et  de  Bernardin  de  Baux,  qui  le  reçurent  à 
grand  renfort  de  bombardes  et  de  décharges  d'artillerie; 
puis,  monté  sur  «  la  galera  bastarda  »,  il  alla  visiter  un  navire 
du  roi  de  Portugal  qui  s'était  arrêté  aux  îles  et  qui  portait  au 
Saint-Père,  comme  cadeau  de  ce  roi,  «  una  bestia  salvage, 
appellada  Renossero  »  (rhinocéros  '). 

La  reine  Claude,  Louise  de  Savoie  et  leur  suite  avaient, 
comme  nous  l'avons  vu,  accompagné  le  Roi.  Elles  aussi,  elles 
firent,  ou  plutôt  refirent  une  entrée  solennelle.  Mais  il  fut 
défendu,  à  cette  occasion,  de  tirer  des  bombardes.  Les  jeunes 
filles  habillées  en  blanc  leur  formèrent  un  cortège.  La  reine 
Claude  les  accueillit  avec  beaucoup  de  bonne  grâce  et  les  pria 
d'aller  toutes  ensemble,  en  procession,  à  Notre-Dame-de-la- 
Garde  :  ce  qu'elles  firent,  et  prièrent  Dieu  de  donner  à  la 
reine  un  beau  fils.  Puis,  comme  elles  ne  revinrent  de  Notre- 
Dame  que  fort  tard,  la  souveraine  envoya  des  torches  au- 
devant  d'elles  et  les  fit  reconduire  en  leur  maison.  La  prière 
des  jeunes  filles  de  Marseille  ne  fut  pas  exaucée  tout  de  suite, 
car  le  23  octobre  1516,  la  reine  eut  encore  une  fille,  Charlotte. 
C'est  seulement  en  février  1518  qu'un  Dauphin  naquit  au  roi 
et  à  la  reine  de  France-. 

1.  Ce  présent  n'arriva  pas  à  destination,  si  l'on  en  croit  le  Journal  de 
Jean  BarriUon  (1, 193)  :  «  On  dist  que  depuis,  auprès  de  Civitavesclie,  le 
navire  où  estoit  ladicte  beste  fufpéry  en  mer.  »  —  Sur  ce  genre  de 
cadeaux,  fréquents  à  cette  époque,  cf.  G.  Genebrardi,  theologi  parisien- 
sis,  divinarum  hebraicarumque  litterartun  p)-ofessoris  reyii,  chrono- 
graphiœ  libri  quatuor,  715  (Francfort,  1577).  —  Commentaires  de  Lau- 
rentius  Surius  (1500-1.567),  Cologne,  1.577,  p.  107.  —  W.  Roscoe,  Pontificat 
de  Léon  X  (trad.  Henry),  II,  286-289. 

2.  Pendant  le  séjour  à  Marseille,  les  gens  de  la  suite  du  Roi  avaient  été 
gratifiés  de  divers  présents  :  on  leur  distribua  notamment  du  vin  et  des 
grenades.  Aux  reines  et  à  leurs  dames ,  les  Marseillais  firent  don  de 
seize  images  d'or,  dont  quatre  grandes  représentaient  saint  Victor,  et  les 
douze  autres,  plus  petites,  saint  Lazare.  «  Item,  per  LXXXXIII  escus  et 


E.    BAUX,   V.-L.   BODRRILLY  ET  PH.   MABILLY.  53 

Après  avoir  passé  quatre  jours  à  Marseille,  au  milieu  des 
réjouissances  que  nous  venons  de  raconter,  le  samedi  26  jan- 
vier', François  pf  quitta  la  ville  pour  se  rendre  à  Aix.  Le  Roi 
y  fut  reçu  par  les  consuls  Balthazar  Guiran,  Fouquet  Fabri 
et  Charles  Matheron,  seigneur  de  Solignac,  et  l'archevêque 
d'Aix,  Pierre  Filholi  :  «  Il  logea  à  l'archevêché,  rapporte 
Pierre-Joseph  de  Hailze.  Pendant  les  trois  jours  qu'il  séjourna 
en  ville,  il  monta  une  fois  au  palais,  où  il  tint  lui-même 
l'audience  publique,  aprèz  avoir  fait  savoir  qu'il  estoit  disposé 
d'écouter  toutes  sortes  de  plaintes.  Jamais  audiance  ne  fut 
mieux  fournie.  Les  mémoires  de  ce  temps  disent  qu'il  y  eut 
beaucoup  de  querelans,  mais  ces  mémoires  ne  marquent  point 
de  quelle  qualité  ils  estoient.  Il  seroit  à  souhaiter  qu'on  eut 
esté  aussi  soigneux  de  garder  le  registre  des  jugements  que  ce 
prince  fit  en  ce  jour,  comme  on  l'a  esté  de  conserver  la 
mémoire  de  ceste  action  par  ces  figures  emblématiques  qui 
ornent  les  sièges  de  cette  audience  :  j'entends  ces  F  couron- 
nez et  ces  salamandres  qui  estoient  la  devise  de  ce  Roi,  qu'on 
voit  en  cet  endroit  2.  »  Nous  n'en  savons  pas  davantage  sur  le 
séjour  de  François  I"  à  Aix,  car  les  archives  municipales 
présentent  de  fortes  lacunes  précisément  pour  l'époque  qui 


miech  d'or  al  soleilh,  bayllas  per  xvi  ymages  d'or  donas  à  la  Reyna  et 
autras  damas,  de  sanct  Lazer  et  sanct  Victor;  —  Item,  à  mestre  Guilleu- 
mes  l'Argentier,  per  la  feysson  de  quatre  grans  ymages  de  sanct  Victor, 
9  florins;  —  Item,  à  mestre  Peyre  l'Argentier,  per  la  feysson  de  xn  ymages 
de  sanct  Lazer,  dels  plus  petis  dels  susdits.  4  florins.  »  On  troiive  à  un 
autre  endroit  la  mention  «  d'aygas,  nafTas,  et  autras  bonas  sentors  »  que 
l'on  avait  envoyé  chercher  «  à  Alioulas  »  [Ollioules]  ;  mais  les  comptes 
ajoutent  :  «  lasquallas  aygas  non  an  agut  luec  ny  si  son  donadas.  » 

1.  Du  26  janvier  et  de  Marseille  sont  datés  trois  actes  de  François  I", 
l'un  en  faveur  de  Guillaume  d'Abon,  écuyer,  seigneur  de  Reynier  de  Gap 
(Atinales  des  Alpes,  janv.-fév.  1902,  p.  208);  l'autre  en  faveur  de  Chris- 
tophe du  Refuge,  Catalogue  des  Actes,  n"  405;  le  troisième  en  faveur  de 
Mathurin  Gaillard  et  d'Etienne  de  Morvilliers,  ibid.,  n»  16097. 

2.  P.-J.  de  Haitze,  Histoire  de  la  ville  d'Aix,  capitale  de  la  Provence, 
livre  VI,  chap.  xxxiii.  L'auteur  observe  que  le»  figures  emblématiques 
que  l'on  voyait  de  son  temps  étaient  une  restauration  bien  postérieure 
de  celles  contemporaines  du  passage  de  François  I".  —  Actes  datés 
d'Aix,  27,  29  janvier,  Cataloque,  n»'  406,  23374-23377.  —  D'après  le  ma- 
nuscrit de  Valbelle,  f"  60  v",  l'audience  tenue  par  le  Roi  eut  lieu  la  veille 
de  son  départ,  c'est-à-dire  le  29  janvier. 


54   VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  I^'  EN  PROVENCE. 

nous  occupe.  Un  seul  point  est  fixé  avec  certitude,  la  date  du 
départ,  qui  eut  lieu  le  30  janvier^ 

Avant  d'arriver  à  Arles,  François  I"  s'arrêta  à  Salon  où  il 
fut  également,  ainsi  que  les  reines,  l'objet  d'une  réception 
enthousiaste  et  où  il  passa  la  nuit  du  30  au  31.  Le  lendemain 
il  quitta  la  petite  cité  après  avoir  visité  les  églises  et  les  cou- 
vents de  l'endroit,  et  le  soir  même  il  entra  dans  Arles  2. 

Pendant  que  le  Roi  était  à  Marseille,  les  Ariésiens  avaient 
envoj'é  une  députation  composée  des  consuls  Boyé,  M.  d'Alein, 
Anthoyne  Olivier  et  de  l'assesseur  Biorde  pour  lui  «  fère  la 
révérence  »  et  s'enquérir  aussi,  probablement,  delà  date  à 
laquelle  il  comptait  arriver  dans  leur  ville^.  Le  conseil  voulut 
faire  les  choses  aussi  magnifiquement  que  le  permettaient  les 
finances  délabrées  de  la  cité.  Le  16  janvier,  pour  préparer  la 
réception  du  Roi,  «  donner  ordre  à  tout  ce  que  sera  nécessaire 
avoir  et  emprunter  argent  pour  ledit  afl^ère  »;  il  nomma  une 
commission  qui  comprenait  «  les  consuls  et  leur  conpanhie, 
nobles  M.  d'Alein,  Pierre  d'Aiguières,  Eslienne  Bernard, 
Anthoyne  Olivier,  ensemble  tous  ceulx  qui  leur  semblera 
d'appeler,  ausquels,  ensemble  M.  le  docteur  Bastoin  et  Jehan- 
nion  Chamant,  a  donné  et  donne  plain  pouvoir,  faculté  et  au- 
torisation cella  fère...''^.  »  On  fit  réparer  la  route  par  laquelle 
le  Roi  devait  arriver,  tendre  les  rues  par  où  passerait  le  cor- 
tège; on  acheva  les  réparations  commencées  à  la  maison  de 

1.  Cette  date  est  donnée  par  les  registres  de  Saint-Sauveur  cités  par  le 
chanoine  Albanès,  Gallia  christiana  novissbna,  I,  114,  n.  2;  P.  Filholi 
«  perducit  eum  (le  Roi)  ad  domum  archiepiscopalem,  in  qua  hospitatus 
fuit,  una  cum  regina  Claudia  ejus  uxore...  Et  fuit  ibi  iisque  ad  trigesi- 
niam  predicti  mensis  ».  Cf.  la  lettre  de  Semblançay  à  M""»  d'Aumont, 
écrite  d'Aix  le  29  janvier  [1.516]  :  «  Le  Eoy  s'en  va  demain  pour  aller  à  Arle, 
et  dellà  s'en  ira  à  Lyon,  ensemble  les  dames...  «  (Bibl.  Nat.,  f.  fr.  3925, 
f»  172.) 

2.  L.  Gimon,  Chronique  de  I2  ville  de  Salon  (Aix,  1882),  pp.  165  et 
sqq.  L'auteur  place  par  erreur  l'entrée  du  roi  à  Salon  le  29  janvier,  et  dit 
que  les  enfants  et  les  jeunes  filles  allèrent  au-devant  du  roi  jusqu'au  delà 
des  roches  de  Lurian.  —  Actes  datés  de  Salon,  janvier  1516,  dans  Arcli. 
des  B.-du-Rh.,  B  25,  f°"  o22  v"  o23  {in  mense  februarii,  lapsus  pour 
januarii),  323  v»-324;  B  26,  f"^  60-61,  et  Catalogue  des  Actes,  n»'  23392, 
23379,  23378. 

3.  Arch.  d'Arles,  Bélib.,  BB  8,  f»  61  v». 

4.  Arch.  d'Arles,  Délib.,  BB  8,  f»  60. 


E.    BAUX,    V.-L.    BOURRILLY   ET   PH.    MABILLY.  55 

M.  de  Beaiimont,  on  acheta  force  taffetas,  drap  de  soie  et  de 
laiae,  «  satin  de  Bourges  »  pour  faire  les  «  sarraus  et  bec- 
quetons »  dont  on  habilla  ceux  qui  furent  chargés  d'aller  au- 
devant  des  souverains,  de  les  escorter  et  d'exécuter  devant 
eux  les  jeux  imaginés  en  leur  honneur*.  François  !«"•  entra 
dans  Arles  le  31  janvier'^  parmi  les  sonneries  de  trompettes; 
il  assista  à  diverses  réjouissances,  danses  et  spectacles,  «  mau- 
risques  et  maulmariées  [mômeries]  et  autres  jeux  ^  »  dont 
les  Arlésiens  le  régalèrent,  et  par  les  rues  tendues  alla  loger 
chez  M.  d'Arlatan.  Il  demeura  en  Arles  la  journée  du  lende- 
main, 1"  février,  un  vendredi  ;  ainsi  s'explique  l'achat  de 
poisson  fait  par  le  conseil  pour  le  Roi  et  les  reines^.  Nous 
avons  déjà  vu  qu'à  leur  premier  passage  par  Arles  les  reines 
avaient  été  gratifiées  d'images  d'or;  le  conseil,  voulant  en  user 
de  même  avec  le  Roi,  lui  fit  cadeau  d'un  cerf  qui  fut  acheté 
10  florins  ^ 

D'Arles",  François  P""  se  rendit  à  Tarascon.  Depuis  plus  de 
quinze  jours,  le  conseil  avait  pris  ses  dispositions  en  vue  de 
cette  réception.  Le  17  janvier  ',  il  fixa  l'itinéraire  :  on  irait  au- 
devant  du  Roi  jusqu'au  pont  de  Lanzac,  à  4  kilomètres  envi- 
ron de  la  ville,  sur  la  route  d'Arles;  puis,  au  lieu  d'entrer  par 
la  porte  de  Saint-Jean,  on  ferait  un  détour  pour  atteindre  la 
porte   Condamine  à   l'est,  au  point  où  aboutissait  la  route 


1.  Arch.  d'Arles,  CC  266,  f"  196  v".  Réparation  du  chemin  depuis  le 
pont  de  Crau  jusqu'aux  moulins  de  Mouleyrès,  10  florins;  CC  268, 
fo  55  yo,  pour  tendre  et  détendre  les  rues,  1  florin;  CC  266,  f»  231,  id., 

2  florins;  CC  267,  f»  77  v»,  80,  81.  95,  98,  99  v»,  100,  105,  105  v,  111,  118, 
206;  CC  268,  f"  54  v,  60,  65,  76  v,  frais  de  réparation  à  la  maison  de 
M.  de  Beaumont;  CC  268,  f»  68,  achat  de  100  «  torches  de  baston  »,  6  flo- 
rins ;  CC  267,  f»  119  v»,  drap  de  soie,  209  florins  ;  cf.  Délib.,  BB  8,  f»  62  ; 
CC  266,  f"  187  v,  180  pans  «  de  satin  de  Bourges  »,  ,59  florins,  7  gros; 
CC  226,  f"  282  v»,  frais  de  confection,  16  florins,  etc. 

2.  Protocole  du  notaire  Jean  d'Augières,  L.  Jacquemin,  o^j.  cit.,  p.  809. 

3.  Arch.  d'Arles,  Délib.,  BB  8,  f»  62. 

4.  Arch.  d'Arles,  CC  266,  f"  175,  17  florins,  6  gros;  i"  178,  11  florins, 

3  gros. 

5.  Arch.  d'Arles,  CC  266,  f»  172  v». 

6.  Le  manuscrit  (le  Valbolle,  f»  00  v,  dit  que  le  roi  demeura  trois  jours 
à  Arles;  le  départ  eut  donc  lieu  le  2  février. 

7.  Arch.  de  Tarascon,  Délib.,  BB  12,  f»  374. 


56   VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  I"  EN  PROVENCE, 

d'Avignon.  De  la  porte  Condamine,  le  Roi  serait  conduit 
d'abord  à  l'église  Sainte-Marthe,  puis  à  sa  demeure  particu- 
lière en  suivant  les  rues  les  plus  spacieuses,  tendues  de  tapis- 
series qu'une  commission  de  deux  membres,  Etienne  Ber- 
nardi  et  Pierre  Abelhe,  fut  chargée  de  se  procurer  à  Avignon 
ou  ailleurs.  Les  chemins  où  devait  s'engager  le  cortège  royal, 
détériorés  par  les  pluies,  furent  empierrés;  on  choisit  aussi 
un  membre  du  conseil,  René  Hardoyn,  sieur  de  la  Motte,  pour 
composer  quelques  jeux  scéniques  (aliquas  isiorias)  qui 
seraient  représentés  lorsque  le  roi  traverserait  la  rue  Conda- 
mine ^  Enfin,  on  s'occupa  de  pourvoir  aux  vivres;  deux'con- 
seillers  reçurent  commission  de  se  rendre  chez  les  particu- 
liers pour  goûter  leur  vin  clairet  et  en  rassembler  une  quan- 
tité suffisante  pour  le  Roi  et  sa  suite'-.  Une  somme  de  lOOécus 
fut  empruntée  pour  pourvoir  aux  premières  dépenses  ^ 

Ce  programme  dut  s'exécuter  de  point  en  point.  Lorsque 
François  \"  entra  dans  la  ville,  probablement  le  2  février,  il 
fut  salué  par  des  salves  de  «boîtes  »  qu'on  avait  disposées  près 
de  la  porte  Condamine''.  Nous  n'avons  pas  d'autres  détails  sur 
celte  entrée,  et  cela  est  particulièrement  fâcheux  en  ce  qui 
concerne  les  «  histoires  »  représentées  devant  le  roi.  Nous 
ignorons  quels  en  étaient  les  sujets.  L'abbe  Paillon  suppose 
que  c'étaient  «  des  traits  de  l'histoire  sainte  et  des  sujets  de 
morale  ^  »  Il  est  possible  que  la  légende  de  sainte  Marthe  ait 
fourni  le  thème  de  ces  représentations,  comme  on  avait  fait  à 
Marseille  de  la  vie  de  saint  Louis  d'Aragon.  Le  lendemain,  le 
Roi  se  rendit  en  pèlerinage  au  tombeau  de  sainte  Marthe.  La 


1.  Arch.  de  Tarascon,  Délib.,  BB  12,  f"  374;  18  janvier. 

2.  Arch.  de  Tarascon,  Bélib.,  BB  12,  f»  375;  25  janvier. 

3.  Arch.  de  Tarascon,  Délib.,  BB  12,  f°  375;  27  janvier.  Cette  somme 
fut  empruntée  à  un  marchand  de  Tarascon,  François  de  Valence.  (BB  13, 
f»  356.)  Elle  fut  loin  d'être  suffisante,  car  le  8  février  le  conseil  approuva 
un  premier  compte  de  dépenses  qui  s'élevait  à  plus  du  double,  780  florins 
2  gros  et  demi  ;  d'autres  dépenses  faites  par  les  gens  du  Roi,  les  frais  de 
location  des  tentures  (35  gros)  furent  réglés  postérieurement,  18  et  21  fé- 
vrier. (BB  13,  f»  358  v°,  359  v°.) 

4.  Arch.  de  Tarascon,  Délib.,  BB  12,  f»  374;  17  janvier. 

5.  Monuments  inédits  sur  l'apostolat  de  sai)ite  Marie-Madeleine  en 
Provence,  I,  1255. 


Ne  tradider^is  me  in  animas  tinbuFtiû 
me,   qiioniâ  insiirrexerunt   in  me  te- 
stes   iniqiii ,   et    mëtita    est    iniqiiitas 
sibi. 


Le  Roy  estant  a  genoux  davât  le  petit  Jésus  .  Monstrant 
avec  la  main  ung  empereur  .  Deux  Roys  .  Et  ung  souyce . 
qui  pleurent  auprès  du  sepulclire  du  Roy  darragon  .  Dyt 
alfectueusemët . 

Ne  me  viieille  destrayre  et  affoler  selon  lé 
désir  de  mes  enemijs  .  qui  portent  faulœ 
tesmoignage  cotise  moy  .  Car  leur  iniquité  et 
impiteuse  malice  .  leur  a  menti .  • 


58      VOYAGE  DES   REINES  ET    DE  FRANÇOIS   I"  EN   PROVENCE. 

visite  royale  fut  commémorée  par  une  inscription  dont  voici 
le  texte  ^  : 

ANNO    AB    INCARNATO   DOMINO   M.    D.    XV. 

DIE     III    FEBRVARII    FRANGISCVS    FRANCO 

RVM   REX   DVCATV  MEDIOLAN.    ARMIS 

OCCVPATO    SEPVLCRVM    BEAT^    MARTHiE 

VICTOR    ADIIT     COMITANTIBVS    PRINCIPIBVS 

PROCERIBVSQVE   REGNI  ^. 

Le  même  jour,  François  I"  reçut  une  nouvelle  de  très 
grande  importance  ^  :  la  mort  du  roi  d'Espagne,  Ferdinand  le 
Catholique,  survenue  le  23  janvier  précédent.  Dès  qu'il  fut 
assuré  de  la  vérité  du  fait,  le  lendemain,  il  écrivit  à  M.  de 
La  Fayette  pour  l'en  avertir,  ainsi  que  le  président  de  Ba- 


1.  Cette  inscription  est  donnée  dans  les  Mojiumens  de  l'église  de 
Sainte  Marthe  à  Tarascon  (Tarascon,  1835,  sans  nom  d'auteur,  mais 
par  l'abbé  Faillon),  p.  56.  Mais  ni  les  frères  Flatter,  ni  Gœlnitz,  qui  ont 
visité  Tarascon  et  écrit,  les  pi'emiers,  au  xvi«  siècle,  le  second  vers  1632,  ne 
la  mentionnent.  Il  est  probable  qu'elle  a  été  composée  et  gravée  à  l'occa- 
sion du  voyage  de  Louis  XIV,  en  janvier  1660,  «  après  les  travaux  consi- 
dérables effectués  dans  la  seconde  moitié  du  xvii«  siècle,  et  qui  tendirent 
à  faire  communiquer  la  crypte  de  Sainte  Marthe  avec  l'église  supérieure 
par  l'escalier  que  l'on  voit  encore  de  nos  jours.  »  (Note  de  M.  Mourret.) 
—  L'abbé  Faillon,  dans  l'ouvrage  ci-dessus,  fait  par  erreur  entrer  le  Roi 
par  la  porte  Madame. 

2.  Si  l'on  en  croit  l'abbé  Faillon,  Fi'ançois  I"  et  sa  sœur  allèrent  en- 
suite rendre  visite  à  l'abbesse  du  monastère  Saint-Honorat  de  Tarascon. 
«  C'était  Claudine  de  Bectos,  connue  sous  le  nom  de  Scholastique  et  en 
grande  réputation  de  savoir  parmi  les  gens  de  lettres  du  temps.  Les  reli- 
gieuses de  ce  monastère  avaient  toujours  cultivé  les  sciences  et  les  lan- 
gues, et,  sous  le  règne  même  de  François  I",  si  fécond  en  beaux  esprits 
et  en  littérateurs  de  tous  les  genres,  elles  excitaient  par  leurs  productions 
l'émulation  des  savans.  Il  nous  reste  de  Claudine  de  Bectos  plusieurs 
ouvrages  français  et  italiens  en  vers  et  en  prose.  François  I"  était  en 
commerce  de  lettres  avec  elle;  il  portait,  dit-on,  sur  lui  celles  de  l'abbesse 
et  se  plaisait  à  les  montrer  aux  dames  de  sa  cour  comme  des  modèles.  » 
(  Monumens  de  l'église  de  Sainte-Marthe,  p.  56.) 

3.  Journal  de  Louise  de  Savoie,  lac.  cit.;  Joio-nal  de  Jean  Barrillo?ii 
éd.  cit.,  1, 191.  —  Ferdinand  le  Catholique  décéda  près  de  Madrid,  à  Madri- 
galet.  Pèrizonius  (Leyde,  1710,  p.  73)  donna  de  cette  mort  la  cause  suivante  ; 
»  Sequenti  anno  expiravit  tandem  Hispaniarum  Rex,  culpa  uxoris,  quse 
desiderio  prolis,  inpriinis  masculpe,  quam  ille  non  habebat,  medicauien- 
tuni  ei  dederat  quod  ad  juvandam  generationem  credebat  idoneum,  sed 
quod  in  hydropem  vertit  eumque  e  vivis  sustulit,  » 


E.    BAUX,    V.-L.    BOURRILLY    ET    PH.    MABILLY.  59 

paume,  ambassadeur  de  France  en  Angleterre  :  «  Au  demeu- 
rant, ajoutait-il,  je  vous  prie  que  donnez  ordre  que  nulz  cour- 
riers ne  passent  par  vostre  quartier  pour  aller  en  lieu  qu'il  soit 
sans  estre  arrestés  s'ils  n'ont  lettres  de  moy,  et  que  les  lettres 
qu'ils  porteront  me  soient  envoyées  incontinant'...  »  La  mort 
de  Ferdinand  et  l'ouverture  de  la  succession  espagnole  soule- 
vaient deux  graves  questions  :  d'abord  celle  de  la  Navarre, 
qu'on  pouvait  espérer  voir  reprise  par  ses  anciens  maîtres, 
Jean  d'Albret  et  Catherine  de  Foix.  François  P''  se  hâta  de 
leur  écrire  pour  leur  promettre  son  concours  :  «  Mon  cousin, 
l'eure  et  le  temps  est  venu  qu'il  vous  fault  faire  extrêmement 
dilligence  pour  le  recouvrement  de  vostre  royaulme  et  de  ma 
part  vous  y  veult  ayder  en  tout  ce' qu'il  me  sera  possible 2...  » 
Plus  importante  encore  était  l'autre  question,  celle  de  Naples. 
Louis  XII  avait  abandonné  ses  prétentions  au  royaume  de 
Naples  en  faveur  de  sa  nièce,  Germaine  de  Foix,  seconde 
femme  de  Ferdinand,  à  condition  qu'elle  eîit  des  eufants  de  ce 
mariage.  Cette  condition  n'ayant  pas  été  réalisée,  François  I*"", 
dès  la  nouvelle  de  la  mort,  songea  à  revendiquer  les  droits  de 
celui  qu'il  remplaçait  sur  le  trône.  En  même  temps  qu'il  fai- 
sait rechercher  les  pièces  sur  quoi  appuyer  ses  prétentions^, 
il  s'empressa  d'écrire  au  pape  pour  lui  rappeler  la  promesse 
que  ce  dernier  lui  avait  faite  à  ce  sujet  lors  de  l'entrevue  de 
Bologne.  Il  requit  aussi  Laurent  de  Médicis  de  lenir  la  main 
à  ce  que  Léon  X  se  déclarât  le  plus  tôt  possible.  Pour  aller 


1.  Le  roi  à  M.  de  La  Fayette,  «  de  Tarrascon,  ce  iiii"  jour  de  février  ». 
(BibL  Nat.,  f.  fr.  3057,  f»  29.) 

2.  François  I"  au  roi  de  Navarre,  «  de  Tarrascon ,  ce  nu"  de  février  ». 
(Doc.  inéd.  sur  l'histoire  de  France,  Mélanges,  p.  p.  Champollion-Fi- 
geac,  III,  569.  —  La  Régente,  comme  son  fils,  s'intéressait  beaucoup  à  la 
maison  d'Albret.  Pour  faciliter  le  recouvrement  de  la  Navarre,  elle  avait 
conçu  le  projet  de  marier  une  des  filles  de  Jean  d'Albret  à  un  membre  de 
la  famille  des  Médicis.  C'est  dans  ce  but  qu'elle  avait  écrit  de  Marseille, 
le  6  janvier,  une  lettre  au  roi  de  Navarre  pour  le  prier  d'envoyer  sa 
femme  et  ses  filles  à  Lyon,  où  elles  pourraient  avoir  une  entrevue  avec 
les  neveux  de  Léon  X.  Cette  négociation,  qui  paraît  avoir  été  sérieuse- 
ment entreprise,  échoua.  Cf.  Doc.  inéd.,  Mélanr/es,  Ilï,  402-4()o;  Desjar- 
dins, Négociations  delà  Praiice  avec  la  Toscane,  II,  760-7(>I,  771;  et 
F.  Boissonnade,  Histoire  de  la  réunion  de  la  Navarre  à  la  Caslille,  448, 

3.  Journal  de  Barrillon,  I,  195. 


60   VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  I^r  EN  PROVENCE. 

plus  vite  et  plus  sûrement  en  besogne,  il  voulut  se  concilier 
le  concours  de  Prospero  Colonna,  son  prisonnier  depuis  Mari- 
gnan,  en  ce  moment  à  Lyon.  «  De  ma  part,  ajoutait-il,  je  tien- 
dray  le  royaume  de  Sa  Sainteté  et  je  accompliray  entière- 
ment ce  que  je  luy  ay  promis'.  »  Cette  question  de  Naples 
allait  être  le  principe  des  négociations  laborieuses  qui  se  pour- 
suivirent avec  l'héritier  de  Ferdinand,  Charles  d'Autriche, 
le  futur  Charles-Quint,  jusqu'au  mois  d'août  suivant,  où  elles 
aboutirent  au  traité  de  Noyon.  Mais  en  attendant  d'être  assuré 
des  dispositions  pacifiques  de  ce  prince,  François  I",  pour  ne 
pas  se  laisser  prendre  au  dépourvu,  préparait  le  triomphe  de 
l'influence  française  dans  la  péninsule.  Ce  fut  l'objet  des  pour- 
parlers qui  s'engagèrent  aussitôt  avec  les  représentants  des 
différentes  puissances  italiennes  et  qui  marquèrent  les  étapes 
du  retour  par  la  vallée  du  Rhône  vers  Lyon-. 

En  quittant  Tarascon^  François  P""  gagna  Avignon,  où  il 
arriva  «  tout  de  nuict  »,  nous  rapporte  une  chronique  manus- 
crite de  la  ville,  qui  nous  a  conservé  quelques  détails  sur 
cette  entrée''.  Le  Roi  fut  reçu  par  le  cardinal  de  Clermont, 
légat   du  pape  ^,    et  les    consuls   Dominique   Anselme,   Jean 

1.  Desjardins,  Négociations  de  la  France  avec  la  Toscane,  II,  764. 

2.  Les  consuls  de  Beaueaire,  à  la  nouvelle  que  François  I"  allait  venir 
à  Tarascon,  avaient,  dès  le  16  janvier,  pris  des  dispositions  pour  le  cas 
où  le  Roi  voudrait  passer  le  Rhône  et  venir  dans  leur  ville.  Ils  désiraient 
obtenir  de  lui  «  le  don  de  la  blancque  >>  (droit  sur  le  sel),  ainsi  que  l'amplia- 
tion  du  don  a  tant  du  droict  de  socquet  que  du  fournyment  du  grenier  à 
sel,  pour  aultre  temps  oultre  celluy  qui  n'est  encores  escheu,  et  aussi 
avoir  et  obtenir  aultres  provisions  et  dons  telz  que  bon  semblera  avoir 
et  obtenir  dudit  sire  pour  le  proffict  et  utilité  de  la  chose  publicque  dudit 
Beaueaire  ».  Naturellement,  pour  subvenir  à  ces  dépenses,  les  consuls 
furent  obligés  d'emprunter  en  leur  propre  et  privé  nom  et  sous  leur  garan- 
tie personnelle.  Le  Roi  ne  s'arrêta  pas  à  Beaueaire  ;  le  délégué  de  la  ville 
suivit  la  cour  jusqu'au  Pont-Saint-E.«prit  pour  remplir  la  mission  qui 
lui  avait  été  conliée.  (Arch.  de  Beaueaire,  Délib.,  BB  4;  16,  17,  24  janvier, 
14  février.) 

3.  Le  4  février.  Voir  un  acte  daté  de  ce  jour.  Catalogue  des  Actes, 
n»  23383. 

4.  Arch.  de  Vaucluse,  E,  titres  de  famille.  Epitaphes  de  Cambis  : 
Epitaphiorum  et  inscriptiotium  collectio,  f»  109.  Ce  document  parait 
avoir  échappé  à  M.  de  Berluc-Perussis,  François  I"  à  Avignon,  dans  les 
Mémoires  de  la  Société  scientifique  et  artistique  d'Apt,  1869.  —  Le 
Journal  de  Louise  de  Savoie,  loc.  cit.,  dit  «  à  six  heures  après  midi  ». 

5.  Journal  de  Barrillon,  éd.  cit.,  I,  194. 


E.    BAUX,  V.-L.   BOURRILLY  ET  PH.   MABILLY.  61 

BilioUi  et  Pierre  Montachon.  Le  Conseil ,  pour  exécuter  les 
préparatifs  de  la  réception,  avait  été  obligé  d'emprunter 
400  écus  d'or  à  Balthazar  de  Pan,  marchand  catalan  d'Avi- 
gnon*. Après  avoir  franchi  la  Durance  sur  un  pont  de  bois, 
François  P'  entra  dans  Avignon  par  la  porte  Saint-Lazare, 
sous  un  dais,  à  la  lumière  des  torches  :  «  Les  reynes  estoient 
dans  la  littière  et  luy  fust  fait  grand  triomphe  et  histoires 
depuis  la  porte  jusqu'au  Puis  des  Bœufs,  et  toutes  les  cloches 
sonnèrent  en  Avignon.  Et  lendemain  fust  faict  grand  feu  de 
joye.  »  Le  Roi  et  la  cour  demeurèrent  en  Avignon  jusqu'à  la  fin 
de  la  semaine,  au  9  février.  Mais  nous  sommes  mal  renseignés 
sur  les  particularités  de  ce  séjour,  car  les  délibérations  du 
conseil  pour  les  années  1515  et  1516  font  défaut.  Sur  deux 
points  seulement,  nous  saisissons  l'activité  du  Roi  :  il  rendit 
un  certain  nombre  d'ordonnances  relatives  aux  affaires  géné- 
rales du  royaume  ou  à  des  affaires  locales^,  et  il  prit  les  mesu- 
res que  nécessitait  la  situation  créée  par  la  mort,  désormais 
officiellement  confirmée,  de  Ferdinand  le  Catholique^.  Devant 
les  Italiens,  il  faisait  étalage  des  sommes,  —  un  peu  problé- 
matiques, — 'dont  il  pouvait  disposer  et  des  armées  qu'il  allait 
lever.  Il  se  préoccupait  surtout  de  trouver  un  arrangement 
avec  Prospero  Golonna  afin  de  se  concilier  le  pape,  dont  l'ap- 
pui lui  était  essentiel,  et  de  se  procurer  un  chef  habile  en  vue 
de  la  lutte  qui  se  préparait.  Pompeio  Colonna,  évèque  de  Rieti 
et  frère  de  Prospero,  s'entremit  pour  faire  aboutir  la  négo- 
ciation. A  cette  fin,  après  avoi^  eu,  le  5  février,  une  conver- 
sation avec  le  Roi,  il  partit  le  6  en  poste  pour  Lyon*.  Cepen- 
dant, les  afïaires  de  l'État  n'empêchèrent  pas  le  Roi  de  prendre 
part  aux  réjouissances  et  mascarades  des  jours  gras  qui  pré- 
cèdent le  Carême. 


1.  Arch.  mimicip.  d'Avignon,  CC,  mandat  57,  cité  par  Rey,  François  I" 
et  la  ville  d'Avignon,  1-2. 

2.  Actes  datés  d'Avignon  du  5  au  9  février,  Oataloyue  dus  Actes, 
n»' 415-418;  161(6-16101;  28384-23389. 

3.  Journal  de  Barrillon,  I,  194. 

4.  Marino  Sanuto,  Diarii,  XXI,  521-523.  — Desjardins,  Négociations  de 
la  France  avec  la  Tosca)ie,  II,  765  et  sqq.  Francesco  Vettori  à  Laurent 
de  Médicis  ;  Avignon,  5  février  1516  ;  Vienne,  9  février. 


62   VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  l^r  EN  PROVENCE. 

Le  départ  d'Avignon  fut  retardé  jusqu'au  samedi  9  février 
par  la  violence  du  mistral'.  A  petites  journées,  il  passasucces- 
siveraent  par  Orange^,  le  l^ont-Saint-Esprit^,  Montélimar''  et 
Loriol^  (12  février).  Le  13,  il  rencontra  à  Étoile  une  délé- 
gation du  conseil  de  Valence  et  entendit  la  harangue  courte, 
mais  congruente,  que  lui  adressa  Antoine  de  Dorne,  docteur 
en  droit".  Ce  ne  fut  que  le  lendemain,  un  jeudi,  que  Fran- 
çois pr  flt  son  entrée  dans  la  ville.  Pour  recevoir  dignement 
ie  Roi,  les  consuls  s'étaient  mis  en  frais  :  dès  le  23  janvier  pré- 
cédent ^  deux  commissions  avaient  été  nommées,  l'une  char- 
gée de  trouver  l'argent  nécessaire,  l'autre  de  veiller  à  la  déco- 
ration et  aux  réjouissances,  «  qui  circa  farcesias,  moriscas, 
pavimenti  ornamento  (sic)  vigilent  ».  La  première  devait  obte- 
nir des  plus  riches  de  la  ville  l'avance  d'une  somme  qui  serait 
restituée  par  moitié  en  juillet  et  en  novembre,  au  moyen  de 

1.  Desjardins,  /bid.  Francesco  Vettori  à  Laurent  de  Médicis,  Valence, 
15  février. 

2.  Journal  de  Barrillon,  éd.  cit.,  I,  195.  Arch.  d'Orange,  comptes  de 
mai  1515 -mai  1516.  Le  29  décembre  1515,  30  gros  à  «  Anthoni  le  Saupe- 
trié...  per  xii  1.  de  podra  que  l'on  fet  balhar  au  chastellan  per  fayre  tirar 
l'artilheria  quant  le  Roy  et  la  Reina  passaran  ».  —  Le  31  janvier,  2U  gros 
à  divQrs  personnages  pour  une  journée  employée  à  visiter  les  maisons 
de  la  ville  «  per  amor  {sic)  de  los  fayre  acotrar  per  la  venguda  du  Roy.  » 

3.  Journal  de  Barrillon,  loc.  cit.  —  Arch.  de  Beaucaire,  cf.  supra. 

1.  JouDial  de  Louise  de  Savoie,  loc.  cit.  —  Baron  de  Coston,  Histoire 
de  Montélimar  et  des  principales  familles  qui  ont  habité  cette  ville, 
II,  132-134.  Une  médaille  fut  frappée  à  cette  occasion,  dont  ofi  trouvera  la 
description  dans  Vallier,  Médailles  frappées  de  1494  à  1537,  dans  le 
Uulletin  de  la  Soc.  d'archéol.  de  laWrume,  1874,  p.  272  et  sqq. 

5.  On  trouve  à  la  Bibliothèque  nationale,  f.  fr.  2088,  f»  1,  le  curieux 
renseignement  suivant  :  <.<  Le  xw  jour  de  février  mil  cinq  cens  et  sèze  à 
Horiol  sur  la  ryvière  de  Drôme,  Madame  fut  spirituellement  admonestée 
de  faire  parler  son  humilité  à  l'obeyssance  du  Roy  son  fils  et  le  supplier 
que  pour  oraison  dévote  il  print  le  pseaulme  XXVI  lequel  est  convenable 
pour  luy  et  selon  véritable  narration  suyvant  son  adventure,  et  moult  luy 
profitera  si,  à  la  requeste  de  la  Dame  qu'il  ayme  tant,  il  veut  chanter  et 
dire  comme'David  :  Dominus  illuminatio  mea,  salus  raea,  quem  timebo... 
Le  Roy  print  l'enseigne  de  la  croix  en  sa  secrète  pancée  et  dit  à  la  per- 
suasion de  la  Madame  sa  mère  :  «  Nostre  Seigneur  est  mon  illumina- 
tion, etc.  »  Cf.  les  dessins  et  légendes  reproduits  plus  haut. 

0.  Arch.  de  Valence,  BB  4,  f"  95,  et  cf.  J.  OUivier,  Reclterches  hisior. 
sur  le  passage  de  quelques  rois  de  France  à  Valence,  dans  la  Revue 
du  Dauphiné,  II,  208. 

7.  Ibid.,  î°  94,  délib.  du  23  janvier;  f-  93,  délib.  des  16  et  19  janvier; 
f"  94°,  délib.  du  2  février. 


E.    BAUX,    V.-L.    BOURRILLY   ET  PH.    MABILLY.  63 

revenus  de  l'octroi  et  d'une  taille  extraordinaire  pesant  sur 
tous.  Il  faut  croire  que  le  crédit  de  la  ville  n'était  pas  très 
solide,  car  il  fallut  menacer  de  la  prison  ceux  qui  se  mon- 
traient par  trop  réfractaires  au  prêt^  Le  Roi  entra  dans  Va- 
lence le  14  février,  à  quatre  heures  de  l'après-midi.  Son  dais 
était  porté  par  le  consul  Antoine  Faure  (Fabri),  Jean  de  Geys 
(Degeo),  Achille  Decorabes  et  François  de  Belcastel  (de  Bello- 
castro);  celui  de  la  reine  Claude  par  Pierre  Joubert,  François 
Mistral,  Jean  Tisseur  (Textoris)  et  Giraud  Lambert 2.  Les 
consuls  voulurent  profiter  du  passage  de  François  P''  pour 
faire  confirmer  ou  reconnaître  certains  privilèges  intéressant 
leur  ville.  Ils  soumirent  au  Roi  leurs  vœux,  et  connaissant 
eux  aussi  l'influence  qu'exerçait  Louise  de  Savoie,  ils  décidè- 
rent de  lui  offrir  deux  médailles  d'une  valeur  de  100  écus  d'or, 
qu'Antoine  Faure  alla  lui  présenter  par  la  suite  à  Lyon^. 

Nous  ignorons  combien  de  temps  au  juste  séjourna  la  cour 
à  Valence  et  quel  jour  elle  quitta  la  ville.  Nous  savons  seule- 
ment que  le  19  février  elle  se  trouvait  à  Tournon*  et  le  20  à 

1.  Ibid.,  ï."  94  r»,  délibération  du  5  février. 

'i.  Il  fut  payé  pour  ces  deux  dais  au  brodeur  Nery  de  Monet,  115  1. 
16  sols.  Arch.  de  Valence,  CC  33.  —  Ibid.,  BB  4,  f"  95,  délibér.  du  9  février. 

3.  Arch.  de  Valence,  BB  4,  f°  96,  délib.  du  16  février;  ibid.,  CC  47-48, 
Compte  de  ce  que  le  consul  Faure  «  a  deslivré  pour  l'entrée  du  Roy  et  de 
la  royne  pour  l'année  1516  ».  Nous  relevons  6  onces,  2  deniers,  4  gros  d'or 
«  fornis  pour  fère  une  médaille  à  Madame  ;  4  livres  à  mestre  Jehan  Gui- 
Ihermagre,  argentier,  pour  la  fasson  de  la  médalhe  de  la  ville,  123  livres, 
2  sols,  6  deniers,  plus  3  livres,  6  deniers  employés  en  abilhemens  et 
draps  de  soye  pour  la  venue  du  Roy  et  de  la  Royne  »;  2  livres  à  «  mestre 
Jehan  le  Reliayre  pour  l'escripture  des  tilles  qu'il  a  fait  en  grosses  let- 
tres »  ;  2  livres,  8  sols  «  à  Anthoine  le  Blanchisseur  et  ces  companhons 
pour  abiher  les  portes  de  la  ville  »  ;  8  livres  aux  «  taborins  qui  avoyent 
joué  »;  1  livre,  10  sols  «  à  ung  cordellier  que  a  faict  la  fegure  de  Ma- 
dame». Le  total  des  dépenses  s'éleva  à  1634  livres,  16  sols,  8  deniers  tour- 
nois, «  en  ce  comprins  ce  que  on  a  payé  pour  confirmer  nos  libertés  et 
le  mandement  obtenu  pour  l'exemption  des  gens  d'armes  ». 

4.  E.  Rott,  Histoire  de  la  représentation  diplomatique  de  la  France 
auprès  des  cantons  suisses...,  I,  216,  n.  3.  —  François  I»''  paraît  donc 
avoir  suivi  la  vallée  du  Rhône,  sans  s'en  écarter  pour  aller  à  Romans, 
où  pourtant  l'on  avait  fait  quelques  préparatifs  pour  le  recevoir  :  on 
avait  notamment  acheté,  à  Lyon,  un  poêle  de  damas  rouge  et  blanc. 
(Arch.  de  Romans,  CC  318.)  Il  est  même  possible  que  l'on  ait  fait  frap- 
per, en  iirévision  de  la  visite  royale  la  médaille  à  l'effigie  de  François  I" 
dont  parle  M.  Vallier  dans  son  article  cité  :  Médailles  historiques^  etc., 
loc.  cit.,  pp.  262  et  suiv. 


64   VOYAGE  DES  REINES  ET  DE  FRANÇOIS  l®""  EN  PROVENCE. 

Saint- Vallier,  où  François  le""  eut  un  long  entrelien  avec  Pros- 
pero  Colonna  amené  île  Lyon'.  Certains  Italiens,  et  en  parti- 
culier Francesco  Veltori,  le  représentant  de  Laurent  de  Médi- 
cis,  ne  voyaient  pas  d'un  bon  œil  ces  pourparlers  et  cher- 
chaient à  dissuader  le  Roi  de  s'accorder  avec  Prospero.  Mais 
celui-ci  persistait  dans  ce  dessein,  comme  dans  celui  de  ma- 
rier Laurent  de  Médicis  à  une  fille  du  roi  de  Navarre^.  Après 
de  longues  négociations  secrètes,  à  Vienne,  où  François  pf  se 
trouvait  le  22  février 3,  Prospero  fut  remis  eu  liberté  et  pro- 
mit d'aider  le  roi  de  France  dans  son  entreprise  sur  le 
royaume  de  Naples''.  Cette  affaire  ne  fut  définitivement  réglée 
qu'à  Lyon  où  François  I*""  dut  arriver  le  28  février ^  et  où 
il  demeura,  dans  la  ville  ou  les  environs,  jusqu'au  mois  de 
mai. 

Ce  long  séjour  lui  permit  de  surveiller  les  événements  d'Ita- 
lie et  de  diriger  les  négociations  engagées  avec  les  Etats  voi- 
sins du  royaume,  avec  plus  de  fermeté  et  de  suite  qu'il 
n'avait  pu  le  faire  depuis  son  départ  de  Milan,  pendant  son 
rapide  passage  à  travers  la  Provence  et  les  pays  riverains  du 

Rhône. 

E.  Baux,  V.-L.  Bourrilly  et  Ph.  Mabilly. 


1.  Desjardins,  op.  cit.,  II,  775.  Lettre  du  21  février. 

2.  De  Valence,  François  l"  avait  écrit  au  roi  de  Navarre  pour  le  pres- 
ser de  se  préparer  à  la  guerre.  {Doc.  inéd.,  Mélanges,  111,  569  et  sqq;  de 
Valence,  13  février  :  il  faut  lire  sans  doute  14  février.)  Cf.  Boissonnade, 
op.  cit.  p.  446. 

3.  Acte  daté  de  Vienne,  22  février.  Catalogue  des  Actes,  n"  16106.  — 
Quatre  actes  sont  datés  du  23  février,  ibid.,  n"'  420,  421,  16107,  16108. 

4.  Prospero  Colonna,  après  avoir  été  pris  à  Villafranca,  avait  été  dirigé 
sur  Fossano  et  conduit  en  France  au  château  de  Montagu,  qui  apparte- 
nait à  Jacques  II  de  Chabannes,  maréchal  de  la  Palice  (auj.  Montagu  le 
Blin,  Allier).  Sa  rançon  fut  fixée  à  18,500  écus  d'or.  La  promesse  de  fidé- 
lité fut  signée  le  2  mars  à  Lyon  :  elle  est  conservée  aux  Archives  natio- 
nales, J  990,  2;  cf.  Journal  de  Barrillon,  I,  195-196. 

5.  Le  27  février,  il  était  à  la  Guillotièrc.  Cf.  Catalogue  des  Actes, 
n°  16109;  autre  acte  daté  du  28,  ibid.,  n"  23391.  L'entrée  de  la  reine  eut 
lieu  le  2  mars. 


MRLANGES  ET  DOCUMENTS 


LES  QVATRAINS  DV  SEIGNEVR  DE  PYBRAC 

Conseiller  du  Roy  en  son  Conseil  priué. 

Au  Lecteur. 

le  n'ay  tasché  cest  œuure  façonner 
D'vn  style  doux,  à  fin  qu'il  puisse  plaire, 
Car  aussi  bien  n'entens  ie  le  donner 
Qu'à  ceux  qui  n'ont  soucy  que  de  bien  faire. 


1.      DiEV  tout  premier,  puis  Père  et  Mère  honore. 
Sois  iuste  et  droict,  et,  en  toute  saison. 
De  l'innocent  pren  en  main  la  raison  : 
Car  Dieu  te  doit  là  haut  iuger  encore. 

8.      Si  en  iugeant  la  faueur  te  commande, 
Si,  corrompu  par  or  ou  par  presens, 
Tu  fais  iustice  au  gré  des  Courtisans, 
Ne  doute  point  que  Dieu  ne  te  le  rende. 

1.  Pliocylide,  V.  «  Que  tes  premiers  respects  soient  pour  les  dieux,  les 
seconds  pour  tes  parents  ;  accorde  à  chacun  ce  qui  lui  est  dû,  sans  jamais 
te  laisser  corrompre.  »  (Moralistes  ancie7is,  p.  80.) 

2.  Esaïe,  V,  25i-8.  —  Pliocylide,  VI.  «  Ne  rebute  point  le  pauvre.  Que 

ANNALES  DU   MIDI.   —  XVI.  5 


66  ANNALES   DU   MIDI. 

3.  Auec  le  iour  commence  ta  iournee, 
De  l'Eternel  le  sainct  nom  bénissant  : 
Le  soir  aussi  ton  labeur  finissant, 
Loue  le  encor',  et  passe  ainsi  l'année. 

4.  Adore  assis,  comme  le  Grec  ordonne  : 
Dieu  en  courant  ne  veult  estre  honoré; 
D'vn  ferme  cueur  il  veult  estre  adoré, 
Mais  ce  cueur  là  il  fault  qu'il  nous  le  donne. 

5.  Ne  va  disant  :  ma  main  a  faict  cest  œuure, 
Ou  ma  vertu  ce  bel  œuure  a  parfaict, 

Mais  dis  ainsi  :  Dieu  par  moy  l'œuure  a  faict. 
Dieu  est  l'autheur  du  peu  de  bien  que  i'œuure. 

6.  Tout  l'vniuers  n'est  qu'vne  cité  ronde, 
Chacun  a  droict  de  s'en  dire  bourgeois. 
Le  Scythe  et  More  autant  que  le  Grégeois, 
Le  plus  petit  que  le  plus  grand  du  monde. 

tes  jugements  soient  dictés  par  la  justice.  Si  tes  jugements  sont  iniques, 
tu  seras  jugé  par  Dieu  même  à  ton  tour.  »  (Moralistes  anciens,  p.  80-1.) 
—  Baïf,  Mimes,  p.  273,  str.  VII. 

4.  Plutarque,  Les  Vies  des  h.  ill.,  t.  I,  Numa  Pompilius,  p.  255.  «  Et 
quant  à  ce  qu'il  [Numa]  commandoit  que  l'on  s'asseist  après  que  l'on 
avoit  adoré...  peult  estre...  que  cela  se  i-apportoit  à  ce  que...  Numa  vou- 
loit  accoustumer  ses  gens  à  ne  servir  ny  ne  parler  point  aux  dieux  en 
passant,  ou  en  faisant  autre  cliose,  et  à  la  haste,  ains  vouloit  que  l'on  le 
feist  quand  on  a  temps  et  loisir,  toutes  autres  choses  cependant  entre- 
mises. »  Plutarque  constate  lui-même  (ibid.,  p.  253)  l'origine  pythagori- 
cienne de  ce  précepte.  On  le  trouvera  formulé  dans  les  Fragm.  phil. 
graec,  p.  508,  n»  60,  chez  Jamblique,  p.  37,  6-7,  et  chez  Porphyre,  p.  95, 
38-9.  —  Cf.  Stobée,  Sermo  XXXVII,  p.  51,  21.  «  Quietos  nos  esse  oportet, 
ut  non  turbulente  cum  deo  colloquamur.  » 

5.  Baïf,  Mimes,  p.  275,  str.  XIX.  «  Devant  que  commencer  à  faire 
quelque  chose,  |  Prie  Dieu  de  la  faire  :  et,  le  tout  achevé,  |  Dy  que  c'est 
de  Dieu  seul,  et  n'en  sois  eslevé  |  D'un  vent  ambitieux;  car  de  tout  Dieu 
dispose.  » 

6.  Diogène  Laërce,  VII,  1,  53,  p.  178.  —  Marc-Aurèle,  Pensées,  IV,  iv, 
p.  104.  «  Le  monde  est  comme  une  cité.  »  Ibid.,  ibid.,  xxin,  p.  112.  «  Un 
personnage  dit  :  Bien-aimée  cité  de  Cécrops  !  Mais  toi,  ne  peux-tu  pas 


MÉLANGES  ET   DOCUMENTS.  67 

7.  Dans  le  pourpris  de  ceste  cité  belle 

Dieu  a  logé  l'homme  comme  en  lieu  sainct, 
Comme  en  vn  Temple,  où  luymesmes  s'est  peinct 
En  mil  endroicts  de  couleur  immortelle. 

8.  Il  n'y  a  coing  si  petit  dans  ce  Temple 
Où  la  grandeur  n'apparoisse  de  Dieu  : 
L'homme  est  planté  iustement  au  milieu, 
A  fin  que  mieux  par  tout  il  la  contemple. 

9.  Il  ne  sçauroit  ailleurs  mieux  la  cognoistre 
Que  dedans  soy,  où,  comme  en  vn  miroir, 
La  terre  il  peut  et  le  ciel  mesme  voir. 

Car  tout  le  monde  est  compris  en  son  estre. 

10.  Qui  a  de  soy  parfaicte  cognoissance 
N'ignore  rien  de  ce  qu'il  fault  sçauoir  : 
Mais  le  moyen  asseuré  de  l'auoir, 

Est  se  mirer  dedans  la  sapience. 

11.  Ce  que  tu  vois  de  l'homme  n'est  pas  l'homme. 
C'est  la  prison  où  il  est  enserré, 

C'est  le  tombeau  où  il  est  enterré. 

Le  lict  branlant  où  il  dort  vn  court  somme. 

12.  Ce  corps  mortel,  où  l'œil  rauy  contemple 
Muscles  et  nerfs,  la  chair,  le  sang,  la  peau. 

Ce  n'est  pas  l'homme,  il  est  beaucoup  plus  beau, 
Aussi  Dieu  l'a  reserué  pour  son  temple. 

dire  :  0  bien-aimée  cité  de  Jupiter!  »  Ihid.,  VI,  xliv,  p.  171.  «  J'ai  une 
cité,  une  patrie  :  comme  Antonin,  c'est  Rome  ;  comme  homme,  le  monde.  » 
Cf.  encore  XII,  xxvi,  p.  311  etxxxvi,  p.  317.  «  0  homme,  tu  as  été  citoj-en 
de  la  grande  cité.  » 

10.  Cette  maxime  peut  compter  parmi  celles  que  l'on  a  le  plus  souvent 
répétées.  Socrate  passe  pour  l'avoir  considérée  comme  le  fondement  de  la 
sagesse.  (Xénophon,  Mémorables,  III,  ix,  p.  101.)  —  Boèce,  Consul., 
II,  V,  81.  —  Stobée,  Ser-mo  LXXX,  pp.  138,  15,  35  et  139,  30. 

12-13.  Faure,  Quatrains,  III,  p.  30.  —  Mathieu,  Tablettes,  I,  74. 
«  L'homme  n'est  pas  ce  corps,  son  estofle  est  plus  belle,  |  Car  des  beau- 


68  ANNALES   DU   MIDI. 

13.  A  bien  parler,  ce  que  l'homme  on  appelle, 
C'est  vn  rayon  de  la  diuinité, 

C'est  vn  atome  esclos  de  l'vnitè, 
C'est  vn  degout  de  la  source  éternelle. 

14.  Recognoy  donc,  homme,  ton  origine, 

Et,  braue  et  haut,  dédaigne  ces  bas  lieux, 
Puis  que  fleurir  tu  dois  là  haut  es  cieux, 
Et  que  tu  es  vne  plante  diuine. 

15.  Il  t'est  permis  t'orgueillir  de  la  race. 
Non  de  ta  mère  ou  ton  père  mortel, 

Mais  bien  de  Dieu,  ton  vray  père  immortel, 
Qui  t'a  moulé  au  moule  de  sa  face. 

16.  Au  ciel  n'y  a  nombre  infiny  d'Idées  : 
Platon  s'est  trop  en  cela  mesconté. 
De  nostre  Dieu  la  pure  volonté 

Est  le  seul  moule  à  toutes  choses  nées. 

17.  Il  veut,  c'est  faict  sans  trauail  et  sans  peine. 
Tous  animaux,  iusqu'au  moindre  qui  vit. 

Il  a  créé,  les  soustient,  les  nourrit, 
Et  les  defîaict  du  vent  de  son  haleine. 

18.  Hausse  tes  yeux  :  la  voûte  suspendue, 
Ce  beau  lambris  de  la  couleur  des  eaux, 
Ce  rond  parfaict  de  deux  globes  iumeaux, 
Ce  firmament  esloigné  de  la  veuë, 

tez  du  Ciel  elle  tient  sa  beauté,  |  Et  quand  le  corps  est  mort,  elle  reste 
immortelle,  |  Comme  un  rayon  sorty  du  la  Divinité.  »  —  On  observera  que 
les  Quatrains  11-14  présentent  un  sens  suivi,  et  déveloi^pent  une  seule  et 
même  idée.  Sénèque  l'a  exprimée  plus  d'une  fois.  (A  Lucilius,  XLI,  p.  93 
et  LXXVI,  p.  207.) 

15.  Genèse,  I,  26. 

17.  Cette  strophe  et  les  deux  qui  suivent  sont  la  paraphrase  des  ver- 
sets 6-9  du  Psaume  xxxiii. 


MÉLANGES   ET   DOCUMENTS.  09 

19.  Bref,  ce  qui  est,  qui  fut,  et  qui  peut  estre, 
En  terre,  en  mer,  au  plus  caché  des  cieux, 
Si  tost  que  Dieu  l'a  voulu  pour  le  mieux, 
Tout  aussi  tost  il  a  receu  son  estre. 

20.  Ne  va  suiuant  le  troupeau  d'Epicure, 
Troupeau  vilain  qui  blasphème  en  tout  lieu, 
Et,  mescroyant,  ne  cognoist  autre  Dieu 
Que  le  fatal  ordre  de  la  Nature. 

21.  Et  ce  pendant  il  se  veautre  et  patouille 
Dans  vn  bourbier  puant  de  tous  costez, 
Et  du  limon  des  sales  voluptez 

Il  se  repaist,  comme  vne  orde  grenouille. 

22.  Heureux  qui  met  en  Dieu  son  espérance, 
Et  qui  l'inuoque  en  sa  prospérité 
Autant  ou  plus  qu'en  son  aduersité, 

Et  ne  se  fie  en  humaine  asseurauce. 

23.  Voudrois  tu  bien  mettre  espérance  seure 
En  ce  qui  est  imbecille  et  mortel? 

Le  plus  grand  Roy  du  monde  n'est  que  tel, 
Et  a  besoin  plus  que  toy  qu'on  l'asseure. 


20.  A  en  juger  par  ce  passage,  Pibrac  connaissait  mal  les  Epicuriens. 
L'e.xpression  dont  il  se  sert  au  second  vers  de  la  strophe  semble  un  sou- 
venir d'Horace  (êjj.,  I,  iv,  16),  mais  il  eût  été  plus  équitable  de  ne  pas 
prendre  trop  au  sérieux  la  boutade  do  ce  poète,  et  de  se  rappeler  que  Sé- 
nèque  —  un  stoïcien  !  —  a  défendu  la  morale  d'Epicure  et  protesté  contre 
une  tradition  qu'entretenaient  ou  les  ignorants  ou  ceux  qui  avaient  inté- 
rêt à  présenter  le  plaisir  comme  une  forme  de  la  sagesse.  (  Vie  heureuse, 
XII-XIII,  pp.  172-3;  A  Lucilitis,  XXXIII.) 

21.  Les  Tablettes  nous  offrent  (II,  42)  une  comparaison  toute  sem- 
blable. «  ...  Ainsi  vit  la  grenouille  |  Dans  le  sale  bpurbier  qu'elle  es- 
time un  ruisseau.  » 

22-23.  Prov.  de  Salomon,  III,  5.  —  Ps.  cxlvi,  3.  —  Jérémie, 
XVII,  5.  —  Stobée,  Ser.  CXLVIH,  p.  237,  5;  CXLIX,  p.  239,  1; 
CLXV,  pp.  268-270;  CLXVI,  pp.  270-1.  —  Aux  deux  derniers  vers  du  Qua- 
traifi  23  comparez  cette  phrase  de  Boéce  ;  c<  0  pi-aeclara  potentia  [il  s'agit 


70  ANNALES  DU    MIDI. 

24.  De  l'homme  droict  Dieu  est  la  sauiiegarde  : 
Lors  que  de  tous  il  est  abaadoQQé, 

C'est  lors  que  moins  il  se  trouue  estonué, 
Car  il  sçait  bien  que  Dieu  lors  plus  le  garde. 

25.  Les  biens  du  corps  et  ceux  de  la  fortune 
Ne  sont  pas  biens,  à  parler  proprement  : 
Ils  sont  subiects  au  moindre  changement, 
Mais  la  vertu  demeure  tousiours  vne. 

26.  Vertu  qui  gist  entre  les  deux  extrêmes, 
Entre  le  plus  et  le  moins  qu'il  ne  fault, 
N'excède  en  rien,  et  rien  ne  luy  default, 
D'autruy  n'emprunte,  et  suffit  à  soymesmes. 

27.  Qui  te  pourroit,  Vertu,  voir  toute  nue, 
0  qu'ardemment  de  toy  seroit  espris, 
Puis  qu'en  tout  temps  les  plus  rares  esprits 
T'ont  faict  l'amour  au  trauers  d'vne  nue! 

28.  Le  sage  fils  est  du  père  la  ioye  : 
Or  si  tu  veux  ce  sage  fils  auoir, 
Dresse  le  ieune  au  chemin  du  deuoir  : 
Mais  ton  exemple  est  la  plus  courte  voye. 

29.  Si  tu  es  né,  enfant,  d'vn  sage  père, 
Que  ne  suis  tu  le  chemin  ia  battu? 
S'il  n'est  pas  tel,  que  ne  t'esforces  tu, 
En  bien  faisant,  couurir  ce  vitupère? 


des  rois]  quae  nec  ad  conservationem  quidem  .sui  satis  eflicax  invenitur  !  » 
(Consol.,  III,  V,  5.; 

25.  Stobée,  Seruio  CXLTT/,  pp.  233-5,  De  vitae  inaequalitate.  —  Tré- 
sor de  sentences,  p.  29.  «  Bien  de  fortune  passe  comme  la  lune.  »  —  Ta- 
blettes, III,  37.  «  Le  temps  emporte  tout,  et  rien  ne  luy  résiste  |  Que  la 
seule  vertu...  » 

26.  Théognis,  XXXIX.  (Moralistes  anciens,  p.  35.) 

27.  Sénèque,  A  Liicilius,  CXV,  pp  411-412. 

28.  Prov.  de  Salomon,  XV,  20;  XXIII,  24;  XXIX,  3, 


MÉLANGES  ET   DOCUMENTS.  71 

30.  Ce  n'est  pas  peu,  naissant  d'vn  tige  illustre, 
Estre  esclairé  par  ses  antecesseurs  : 

Mais  c'est  bien  plus  luire  à  ses  successeurs 
Que  des  ayeux  seulement  prendre  lustre. 

31.  Jusqu'au  cercueil,  mon  fils,  vueilles  apprendre, 
Et  tien  perdu  le  iour  qui  s'est  passé, 

Si  tu  n'y  as  quelque  chose  amassé. 
Pour  plus  sçauant  et  plus  sage  te  rendre. 

32.  Le  voyageur  qui  hors  du  chemin  erre, 
Et,  esgaré,  se  perd  dedans  les  bois, 
Au  droict  chemin  remettre  tu  le  dois, 
Et,  s'il  est  cheu,  le  releuer  de  terre. 

33.  Aymé  l'honneur  plus  que  ta  propre  vie  : 
l'entens  l'honneur  qui  consiste  au  deuoir 
Que  rendre  on  doit,  selon  l'humain  pouuoir, 
A  DiEV,  au  Roy,  aux  Loix,  à  sa  Patrie. 

34.  Ce  que  tu  peux  maintenant,  ne  diffère 
Au  lendemain  comme  les  paresseux. 
Et  garde  aussi  que  tu  ne  sois  de  ceux 

Qui  par  autruy  font  ce  qu'ils  pourroient  faire. 

35.  Hante  les  bons,  des  meschans  ne  t'acointe, 
Et  mesmement  en  la  ieune  saison, 

Que  l'appétit,  pour  forcer  la  raison, 
Arme  nos  sens  d'vne  brutale  pointe. 

30.  Stobée,  Sermo  CXXXIX,  p.  218,  20,  28,  39. 

31.  Solon,  XVIII.  (Moralistes  anciens,  p.  136.)  —  Sénèque,  A  Luci- 
lius,  LXXVI,  p.  201.  —  Caton,  p.  373.  —  Baïf,  Mmies,  p.  164.  —  Ta- 
blettes, II,  29. 

32.  Prov.  de  Salomon,  XXVIII,  10.  —  Phocylide,  LXVIII.  {Moralistes 
anciens,  p.  99.) 

34.  Démocrate,  XIX.  (Moralistes  anciens,  p.  194.) 

35.  Prov.  de  Salomon,  1,  10;  IV,  14;  XIII,  20.  —  Théognis,  II.  (Mo 
ralistes  anciens,  p.  18.)  —  Hésiode,   Travaux  et  jours,  716  (ïeubner.) 
—  Publius  Syriis,   p.  787,  col.  2,    v.  4;  p.  800,  col.  1,  v.  6.  —  Stobée, 


72  ANNALES   DU   MIDI. 

36.  Quand  au  chemin  fourchu  de  ces  deux  Dames 
Tu  te  verras  comme  Alcide  semond, 

Suy  celle  là  qui,  par  vn  aspre  mont, 

Te  guide  au  ciel,  loing  des  plaisirs  infâmes. 

37.  Ne  mets  ton  pied  au  trauers  de  la  voye 

Du  panure  aueugle,  et  d'vn  piquant  propos 
De  l'homme  mort  ne  trouble  le  repos. 
Et  du  malheur  d'autruy  ne  fay  ta  ioye. 

Ser.  X,  XVIII,  XX.  —  Caton,  p.  359  .—  Trésor  de  sentences,  pp.  135, 
155,  160.  —  Fénelon,  I. 

36.  Cette  maxime  est  un  souvenir  de  la  belle  et  poétique  allégorie  qui 
représente  Hercule  entre  le  vice  et  la  vertu.  Xénophon  a  conté  cette  fable 
avec  autant  de  grâce  que  d'abondance  (Mémor.,  II,  1,  pp.  41-5J,  mais  il 
ne  cache  pas  qu'il  s'inspire  d'un  récit  de  Prodicus,  et  il  regrette  de  ne 
poiivoir  s'exprimer  avec  la  magnificence  de  ce  sage.  Le  même  sujet  a,  du 
reste,  séduit  plusieurs  autres  écrivains,  et  il  fut  traité  —  non  sans  d'ingé- 
nieuses modifications  —  par  Lucien  (Le  songe,  6)  et  par  Silius  Italiens 
(Guerres  pun.,  XV,  18  sqq.)  Il  était  naturel  que  l'on  cherchât  à  montrer 
d'une  manière  imagée  et  sensible  l'hésitation  de  l'adolescent  à  l'heure  où, 
sollicité  à  la  fois  par  l'instinct  du  plaisir  et  par  la  dignité  de  la  vertu,  il 
faut  qu'il  résolve  le  problème  de  sa  destinée  morale.  L'incertitude  d'Her- 
cule, les  pythagoriciens  la  figuraient  d'une  manière  graphique.  La  lettre  T 
leur  paraissait  le  symbole  ou  le  schème  d'une  existence  qui  arrive,  après 
avoir  coulé  quelque  temps  en  ligne  droite,  à  un  endroit  ovi  l'on  doit  choi- 
sir entre  deux  routes  divergentes.  (Chaignet,  I,  154.)  Celle  qui  mène  à  la 
vertu  est  escarpée,  difficile.  Ainsi  le  veut  la  tradition  ancienne,  que  l'on 
retrouve  et  chez  Pibrac  et  dans  l'un  de  nos  proverbes  français  :  «  Tout 
chemin  de  vertu  ]  Est  aspre  et  moult  ardu.  »  [Trésor  de  sentefices, 
p.  230.)  Mais  Montaigne,  qui  aime  à  secovier  le  joug  des  idées  reçues, 
aplanit  cet  «  aspre  mont  «  dont  nous  parlent  les  Quatrains,  et  loin  de  lais- 
ser croire  à  la  jeunesse  que  la  bonne  voie  est  très  malaisée  à  suivre,  il 
déclare  que  la  vertu  «  n'est  pas,  comme  dit  l'eschole,  plantée  à  la  teste 
d'un  mont  couppé,  raboteux  et  inaccessible  »,  mais  que  les  hommes  par 
qui  elle  est  pratiquée  «  la  tiennent,  au  rebours,  logée  dans  une  belle  plaine 
,ertile  et  fleurissante  ».  [Essais,  I,  xxv,  p.  70.) 

37.  Première  partie  du  Quatrain,  cf.  Lévitique,  XIX,  14;  Deutér., 
XXVII,  18.  —  Seconde  partie  (respect  dû  aux  morts),  cf.  Solon  :  «  Tôv 
TEÔVTiy.éxa  [J.r]5£\i;  y.a/w;  àyopEuÉTw.  »  (Fragm.  phil.  graec,  p.  228,  n»  53.)  — 
Troisième  partie  (ne  pas  se  réjouir  du  malheur  d'autrui),  cf.  Prov.  de 
Salomon,  XVII,  5.  —  Publius  Syrus,  p.  766,  col.  1,  v.  3;  787,  col.  1,  v.  6. 


MÉLANGES   ET  DOCDMENTS.  73 

38.  En  ton  parler  sois  tousiours  véritable, 
Soit  qu'il  te  faille  en  tesmoignage  ouyr, 
Soit  que  par  fois  tu  veuilles  resiouir 
D'vn  gay  propos  tes  hostes  à  la  table. 

39.  La  Vérité  d'vn  Cube  tlroict  se  forme, 
Cube  contraire  au  léger  mouuement  : 
Son  plan  quarré  iamais  ne  se  dément, 
Et  en  tout  sens  a  tousiours  mesme  forme. 

40.  L'oyseleur  caut  se  sert  du  doulx  ramage 
Des  oysillons,  et  contrefaict  leur  chant  : 
Aussi,  pour  mieux  deceuoir,  le  meschant 
Des  gens  de  bien  imite  le  langage. 


38.  Prov.  de  Salomon,  XII,  17;  XIV,  5,  25;  XIX,  5,  9;  XXV,  18.  — 

Pliocylide,  IV.  [Moralistes  anciens,  p.  80);  VII  {ibid.,  p.  81.)  —  Stobée, 
Ser.  XLV,  pp.  68-9,  de  veritate  et  testimonio  fideli;  XLVI,  pp.  69-70, 
de  veritate  et  mendacio ;  XLVII,  pp.  70-71,  de  mendacio  et  calumnia 
et  falso  testimonio.  —  Caton,  p.  360.  —  Fénelon,  III. 

39.  Ce  symbole  a,  chez  les  anciens,  revêtu  diverses  formes,  car  ce 
n'était  pas  seulement  l'immobile  vérité  qui  se  prêtait  à  une  comparaison 
de  cette  nature,  'mais  tous  les  principes  que  l'on  voudrait  invariables, 
parce  que  l'on  a  construit  sur  eux  la  religion,  la  morale.  D'autre  part, 
la  géométrie  offre  plus  d'une  figure  régulière,  en  sorte  que  les  deux  par- 
ties de  l'image  dont  nous  nous  occupons  pouvaient  être  modifiées  tour  à 
tour.  Ainsi,  tandis  que  Pibrac  assimile  au  cube  la  vérité,  les  disciples  de 
Pythagore  conçoivent  l'essence  divine  comme  un  tétragone,  attendu  que 
c'est  lui  qui  exprime  l'ordre  parfait,  «  que  la  propriété  d'être  droit  imite 
la  puissance  de  l'immobilité,  et  que  l'égalité  représente  celle  de  la  per- 
manence. »  (Ghaignet,  I,  246.)  C'est  pour  un  motif  analogue  que  certains 
assignent  une  forme  carrée  à  la  justice,  «  par  et  similis  in  verbo  et 
opère,,.,  nusquam  ulla  ex  parte  claudicans,  ut  ne  injusta  et  inaoqualis 
videatur.  »  (Stobée,  Sermo  I,  p.  5,  39.) 

40.  Plutarque  a  employé  cette  image  d'une  manière  à  peu  près  sem- 
blable. «  Les  flatteurs,  os  courts  dos   princes,  font  comme  les  oysel- 

leurs  qui  prennent  les  oyseaux  à  la  pippée  en  contrefaisant  leurs  voix...  » 
(Tome  XV,  p.  110,  Instruction  pour  cetdx  qui  manient  affaires  d'estat.) 
—  Baïf,  Mimes,  p.  172. 


74  ANNALES   DU   MIDI. 

41.      Ce  qu'en  secret  l'on  t'a  dit  ne  reuele; 

Des  faicts  d'autruy  ne  sois  trop  enquerant. 
Le  curieux  volontiers  tousiours  ment; 
L'autre  mérite  estre  dict  infidèle. 


42.  Faj^  pois  égal  et  loyale  mesure, 

Quand  tu  deurois  de  nul  estre  apperceu  : 

Mais  le  plaisir  que  tu  auras  receu, 

Ren  le  tousiours  auecques  quelque  vsure. 

43.  Garde,  soigneux,  le  depost  à  toute  heure, 
Et,  quand  on  veult  de  toy  le  recouurer, 
Ne  va,  subtil,  des  moyens  controuuer 
Dans  vn  palais,  à  fin  qu'il  te  demeure. 

44.  L'homme  de  sang  te  soit  tousiours  en  hayne, 
Huë  sur  luy,  comme  fait  le  berger 
Numidien  sur  le  Tygre  léger, 

Qui[l]  voit  de  loing  ensanglanter  la  plaine. 

45.  Ce  n'est  pas  tout  ne  faire  à  nul  outrage  : 
Il  fault  de  plus  s'opposer  à  l'effort 

Du  malheureux,  qui  pourchasse  la  mort. 
Ou  du  prochain  la  honte  et  le  dommage. 


41.  Prov.  de  Salomon,  XI,  13;  XX,  19.  —  Théognis,  XXXIV.  {Mora- 
listes anciens,  p.  33.)  —  Fénelon,  VI.  «  Ne  vous  informez  point  des 
atïaires  des  autres.  » 

42.  Prov.  de  Salomon,  XI,  1;  XX,  10.  23.  —  Lévitique,  XIX,  35-6.  — 
Deidér.,  XXV,  13-16.  —  Stobée,  Sermo  XLII,  p.  66. 

43.  Prov.  de  Salomon,  III,  27. 

44.  Presque  tous  les  Numides  étaient  bergers;  ils  allaient  de  place  en 
place,  suivant  au  hasard  leurs  troupeaux  sur  des  pâturages  inépuisables. 
(Virgile,  G.,  III,  339  et  suiv.l 

45.  Phocylide,  XV.  {Moralistes  anciens,  p.  83.) 


MÉLANGES   ET  DOCUMENTS.  75 

46.  Qui  a  désir  d'exploiter  sa  prouesse, 
Dorate  son  ire,  et  son  ventre,  et  ce  feu 
Qui  dans  nos  cueurs  s'allume  peu  à  peu, 
Soufflé  du  vent  d'erreur  et  de  paresse. 

47.  Vaincre  soyraesme  est  la  grande  victoire  : 
Chacun  chez  soy  loge  ses  ennemis. 

Qui,  par  l'effort  de  la  raison  soubmis, 
Ouurent  le  pas  à  l'éternelle  gloire. 

48.  Si  ton  amy  a  commis  quelque  offense, 
Ne  va  soudain  contre  luy  t'irriter, 
Ains  doucement,  pour  ne  le  despiter, 
Fay  luy  ta  plainte,  et  reçoy  sa  défense. 

49.  L'homme  est  fautif  :  nul  viuant  ne  peut  dire 
N'auoir  failly.  Es  hommes  plus  parfaicts. 
Examinant  et  leurs  dicts  et  leurs  faicts, 

Tu  trouueras,  si  tu  veux,  à  redire. 

50.  Voy  l'hypocrite  auec  sa  triste  mine  : 
Tu  le  prendrois  pour  l'aisné  des  Gâtons, 
Et  ce  pendant,  toute  nuict,  à  tastons. 

Il  court,  il  va  pour  tromper  sa  voysine. 


46.  «rXo'jaor)?,  Y^aipo;,  aîooiwv  y.patst.  »  Fragm.  phil.  gra.ec,  p.  232,  n»  4. 
—  Ibid.,  p.  527,  n»  231. 

47.  Fragm.  phil.  graec,  p.  345,  n"  75;  p.  499,  n»  32.  —  Publius  Syrus, 
p.  803,  col.  2,  V.  1;  p.  812,  col.  1,  v.  9.  —  Baïf,  Mimes,  107,  144.  —  Le 
vers  «  Chacun  chez  soy  loge  ses  ennemis  »  rappelle  une  sentence  de  Pu- 
blius Syrus  :  «  Gravior  est  inimicus  qui  latet  in  pectore.  »  (P.  779, 
col.  1,  V.  9.) 

48.  Hésiode,  Travaux  et  jours,  709-714.  — Théognis,  XXXVII.  {Mora- 
listes anciens,  p.  34.)  —  Pythagore,  Vers  dormes,  V.  (Ibid.,  p.  1G6.)  — 
Publius  Syrus,  p.  766,  col.  2,  v.  3.  —  Baïf,  Mimes,  p.  272,  str.  III. 

49.  Caton,  p.  361.  «  Nemo  sine  crimine  vivit.  » 

50.  Pour  l'aisné  des  Gâtons...  comprenez  iwur  un  modèle  de  vertu. 
Il  «'agit  ici  des  hommes  «  qui  Curios  simulant,  et  Bacclianalia  vivunt  ». 
Ainsi  les  définit  Juvénal  (Sut.  II,  3),  qui  s'écrie  ironiquement  en  parlant 


76  ANNALES  DU   MIDI. 

51.  Cacher  son  vice  est  vne  peine  extrême, 
Et  peine  en  vain  :  fay  ce  que  tu  voudras, 
A  toy  au  moins  cacher  ne  te  pourras, 
Car  nul  ne  peut  se  cacher  à  soymesme. 

52.  Aye  de  toy  plus  que  des  autres  honte. 
Nul  plus  que  toy  par  toy  n'est  offensé  : 
Tu  dois  premier,  si  bien  y  as  pensé, 
Rendre  de  toy  à  toymesme  le  compte. 

53.  Point  ne  te  chaille  estre  bon  d'apparence, 
Mais  bien  de  l'estre  à  preuue  et  par  effect. 
Contre  vn  faulx  bruit  que  le  vulgaire  faict. 
Il  n'est  rampart  tel  que  la  conscience. 

54.  A  l'indigent  monstre  toy  secourable, 
Luy  faisant  part  de  tes  biens  à  foison, 
Car  Dieu  bénit  et  accroît  la  maison 
Qui  a  pitié  du  panure  misérable. 

de  l'un  de  ces  personnages  à  l'austérité  menteuse  :  «  Un  troisième  Caton 
est  tombé  du  ciel!  »  (Ibid.,  40.) 

51.  Sénèque,  A  Lucilius,  XLIII,  ad  fin.,  p.  96.  —  Tablettes,  III,  90. 

52.  Fragm.  phil.  graec,  p.  347,  n"  100.  «  Ne  magis  homines  alios  re- 
vereare  quamte  ipsum.  »  —  Stobée,  Sermo  LXXIX,  p.  137,  58.  —  Caton, 
p.  369.  —  Tablettes,  II,  22. 

53.  Première  partie  du  quatrain,  cf.  Baïf,  Mimes,  p.  167.  «  Mets 
soing  et  diligence  d'estre  |  Chaste  et  iuste,  non  de  parestre.  »  —  Faure, 
Quatrains,  XXV,  p.  33.  «  Ne  cherche  point  de  ressembler,  mais  d'estre  ) 
Tel  que  tu  veux  de  tous  estre  estimé.  »  —  Seconde  partie,  cf.  saint 
Paul,  Cor.,  II,  I.  12.  —  Publius  Syrus,  p.  773,  col.  2,  v.  2;  p.  797,  col.  1, 
V.  2.  «  Plus  conscientiae  quam  famae  attenderis.  »  —  Stobée,  Sermo 
LXXXII,  p.  141,  16.  —  Trésor  de  sentences,  p.  36.  —  Baïf,  Mimes, 
p.  84.  «  Innocence  est  tresseure  targe.  »  —  Montaigne  a  développé  la  même 
idée  dans  le  chapitre  V  du  livre  II  des  Essais,  et  elle  se  trouve  aussi 
chez  La  Bruyère  :  «  Ceux  qui,  sans  nous  connoître  assez,  pensent  mal  de 
nous,  ne  nous  font  pas  de  tort.  »  {Jugejnents,  3."')  ) 

54.  Prov.  de  Salomon,  XIX,  17,  22;  XXI,  13;  XXII,  9;  XXVIII,  27,  et 
passim.—  Phocylide,  XX.  (Moralistes  anciens,  p.  84.) 


MÉLANGES   ET  DOCUMENTS.  77 

55.  Las!  que  te  sert  tant  d'or  dedans  ta  bourse, 
Au  cabinet  maint  riche  vestement, 

Dans  tes  greniers  tant  d'orge  et  de  froment, 
Et  de  bon  vin  dans  ta  caue  vne  source, 

56.  Si  ce  pendant  le  panure  nud  frissonne 
Deuant  ton  huys,  et,  languissant  de  faim. 
Pour  tout  en  fin  n'a  qu'vn  morceau  de  pain. 
Ou  s'en  reua  sans  que  rien  on  luy  donne? 

57.  As  tu,  cruel,  le  cueur  de  telle  sorte, 
De  mespriser  le  panure  infortuné, 
Qui,  comme  toy,  est  en  ce  monde  né, 
Et,  comme  toy,  de  Dieu  l'image  porte? 

58.  Le  malheur  est  commun  à  tous  les  hommes, 
Et  mesmement  aux  Princes  et  aux  Roys  : 
Le  sage  seul  est  exempt  de  ses  loix, 

Mais  oii  est  il,  las,  au  siècle  où  nous  sommes? 

59.  Le  sage  est  libre  enferré  de  cent  chaînes. 
Il  est  seul  riche  et  iamais  estranger. 
Seul  asseuré  au  milieu  du  danger. 

Et  le  vray  Roy  des  fortunes  humaines. 

60.  Le  menasser  du  Tyran  ne  l'estonne  : 
Plus  se  roidit  quand  plus  est  agité  : 
Il  cognoist  seul  ce  qu'il  a  mérité, 

Et  ne  l'attend,  hors  de  soy,  de  personne. 


58-60.  Voici  un  portrait  du  sage  selon  la  doctrine  du  Portique.  Les 
sources  de  ces  trois  stropiies  sont  nombreuses  et  riches,  en  sorte  que  la 
concision  de  Pibrac  mérite  d'être  louée,  car,  s'il  l'avait  voulu,  il  lui  eût 
été  facile  d'ajouter  à  la  peinture  qu'il  a  faite  un  grand  nombre  de  dé- 
tails. Mais  il  s'est  contenté  de  choisir,  chez  les  auteurs  dont  il  s'inspire, 
les  traits  caractéristiques.  Je  renvoie  le  lecteur  au  livre  de  Diogène 
Laërce  (VII,  1,  Zenon,  64)  et  à  Cicéron,  qui  nous  a  laissé,  d'une  part, 
l'image  fidèle  du  stoïcien  (De  fin.  bon.  et  mal.,  III,  22),  de  l'autre,  sa  ca- 


78  ANNALES    DU   MIDI. 

61.  Vertu  es  mœurs  ne  s'acquiert  par  l'estude, 
Ne  par  argent,  ne  par  faueur  des  Roys, 
Ne  par  vn  acte,  ou  par  deux,  ou  par  trois, 
Ains  par  constante  et  par  longue  habitude. 

62.  Qui  lit  beaucoup,  et  iamais  ne  médite, 
Semble  à  celuy  qui  mange  auidement. 
Et  de  tous  mets  surcharge  tellement 
Son  estomach,  que  rien  ne  luy  profite. 

63.  Maint  vn  pouuoit  par  temps  deuenir  sage, 
S'il  n'eust  cuidé  l'estre  ia  tout  à  faict. 
Quel  artisant  fut  onc  raaistre  parfaict, 
Du  premier  iour  de  son  apprentissage? 

64.  Petite  source  ont  les  grosses  riuieres. 
Qui  bruit  si  haut  à  son  commencement 
N'a  pas  long  cours,  non  plus  que  le  torrent 
Qui  perd  son  nom  es  prochaines  fondrières. 


ricature.  {Pro  Murena,  XXIX,  Gl.)  Au  contraire,  Sénèque  semble  croire 
que  la  figure  du  sage  ne  sera  jamais  représentée  avec  des  couleurs  assez 
flatteuses,  et  il  ne  se  lasse  point  de  nous  la  mettre  sous  les  yeux. 
{A  Lucilius,  LXXXV,  p.  253:  XCII,  p.  304;  CIV,  pp.  373-374;  Tranquil- 
lité de  l'chne,  XI,  p.  253;  XIV,  p.  257.)  Et  combien  de  passages  on  pour- 
rait encore  signaler  !  Le  traité  De  la  constance  du  sage  serait  à  citer 
entièrement.  C'est  ainsi  que  la  louange  des  âmes  impassibles  est  deve- 
nue un  lieu  commun,  et  qu'elle  est  entrée  dans  le  domaine  de  la  poésie. 
Pibrac  n'a  pas  été  le  premier  à  embellir  ses  vers  des  maximes  de  Zenon. 
Voyez,  par  exemple,  Horace,  O.,  III,  m,  1-8,  et  Boèce,  Consol.,  I,  iv. 

62.  Sénèque,  A  Lucilius,  II.  «  Sed  -modo,  inquis,  hune  librum  evol- 
vere  volo,  modo  illum.  Fastidientis  stomachi  est  multa  degustare,  quae, 
ubi  varia  sunt  et  diversa,  inquinant,  non  alunt.  »  —  Montaigne  est  d'un 
avis  semblable  :  a  Nous  prenons  en  garde...  le  sçavoir  d'aultruy,  et  puis 
c'est  tout...  Que  nous  sert-il  d'avoir  la  panse  pleine  de  viande,  si  elle  ne 
se  digère?...  »  {Essais,  I,  xxiv,  p.  57.) 

64.  Publius  Syrus,  p.  786,  col.  1,  v.  3.  «  Magnarum  aquarum  transi- 
liri  fons  potest.  » 


MÉLANGES   ET   DOCUMENTS.  79 

65.  Maudit  celuy  qui  fraude  la  semence, 
Ou  qui  retient  le  salaire  promis 

Au  mercenaire,  ou  qui  de  ses  amis 
Ne  se  souuient  sinon  en  leur  présence  ! 

66.  Ne  te  pariure  en  aucune  manière, 
Et  si  tu  es  contrainct  faire  serment, 

Le  ciel  ne  iure,  ou  l'tiomme,  ou  l'élément, 
Ains  par  le  nom  de  la  cause  première. 

67.  Car  Dieu  qui  hait  le  pariure  exécrable. 
Et  le  punit  comme  il  a  mérité, 

Ne  veult  que  l'on  tesmolgne  vérité 
Par  ce  qui  est  mensonger  ou  muable. 

68.  Vn  art  sans  plus  :  en  luy  seul  t'exercite, 
Et  du  métier  d'autruy  ne  t'empeschant. 
Va  dans  le  tien  le  parfaict  recherchant, 
Car  exceller  n'est  pas  gloire  petite. 

69.  Plus  n'embrasser  que  l'on  ne  peut  estraindre  : 
Aux  grands  honneurs,  conuoiteux,  n'aspirer  : 
Vser  des  bieiis,  et  ne  les  désirer  : 

Ne  souhaiter  la  mort,  et  ne  la  craindre. 


65.  Première  partie  du  quatrain  (Semence),  cf.  Phocylide,  XII.  [Mo- 
ralistes anciens,  p.  82.)  —  Seconde  partie  (Salaire),  cf.  Lévitique,  XIX,  13. 

—  Beutér.,  XXIV,  14-15.  —  Phocylide,  XIII.  (Moralistes  anciens,  p.  82.) 

—  Saint  Paul,  Ro}n.,  IV,  4.  —  Stobée,  Sermo  CXXI,  p.  194,  3.  —  Trésor 
de  sentences,  p.  159.  «  Peine  et  labeur  requièrent  guerdon.  »  —  Troi- 
sième  partie  (Amitié),  cf.  Théognis,  X.  (Moralistes  anciens,  p.  23.) 

66.  Phocylide,  XI.  (Moralistes  a>iciens,  p.  82.)  —  Pythagore,  Vers 
dorés.  (Ibid.,  p.  165.)  —  Caton,  p.  360.  —  Baïf,  Mimes,  p.  272,  str.  2. 

68.  On  connaît  l'adage  populaire  :  A  chacun  so)i  métier...  Baïf  le  cite 
dans  les  Mimes,  p.  43. 

69.  Le  dernier  vers  de  cette  strophe  se  trouve  presque  textuellement 
dans  une  épigramme  de  Marot  (édit.  Jannet,  t.  III,  p.  90),  qui  est  imitée 
de  Martial  (X,  xlvii.)  «  Summum  nec  metuas  diem,  nec  optes.  » 


80  ANNALES   DU   MIDI. 

70.      Il  ne  fault  pas  aux  plaisirs  de  la  couche 
De  chasteté  restreindre  le  beau  don, 
Et  ce  pendant  liurer  à  l'abandon 
Ses  yeux,  ses  mains,  son  oreille  et  sa  bouche. 

70.  «  Ridiculum  est  génitales  quidem  corporis  partes  servare  castas, 
linguam  vero  negligere,  aut  observare  quidem  linguam  puram,  visum 
vero,  vel  audituni,  vol  manus  non  observare.  »  (Chrysostome,  dans  Sto- 
bée,  Sermo  LXIV,  p.  103,  30.) 

{A  suivre).  H.  Guy. 


II 


LETTRE  DE   MARGUERITE  DE  VALOIS   AUX    CAPITOULS 

DE  TOULOUSE  (6  juillet  1581). 

Après  être  restée  vingt  jours  aux  bains  de  Bagnères-de- 
Bigorre,  pendant  que  son  mari  était  aux  Eaux-Chaudes  avec 
FosseuseS  Marguerite  de  Valois  rentra  à  Nérac  le  4  juillet 
1581.  Elle  avait  passé  la  journée  de  la  veille  et  une  partie  de 
celle  de  l'avant-veille  à  Gondrin^.  Ensuite,  ses  livres  de 
comptes  et  sa  correspondance  ne  fournissent  aucun  rensei- 
gnement jusqu'au  21  juillet.  Une  lettre  adressée  par  elle  aux 
capitouls  de  Toulouse,  le  6  juillet,  permet  de  combler  en  par- 
tie cette  lacune. 

Elle  emprunte  un  vif  intérêt  aux  circonstances  dans  les- 
quelles elle  fut  écrite.  Le  traité  de  Fleix  venait  d'être  signé 
le  26  novembre  1580.  Cette  paix,  également  désirée  à  Paris 
et  à  Nérac,  était  mal  vue  aussi  bien  parmi  les  catholiques  que 
parmi  les  huguenots.  Ces  derniers,  à  la  tête  desquels  était 
Condé^,  —  toujours  prêt  à  résister  au  chef  officiel  du  parti,  — 
soupçonnaient   le  roi  de  Navarre  d'avoir,   par  une   clause 

1.  Mémoires  de  Marguerite  de  Valois,  édition  Guessard,  p.  175. 

2.  Ph.  Lauzun,  Itinéraire  raisonné  de  Marguerite  de  Valois  en  Gas- 
cogne,^t^,  180. 

3.  Mémoires  de  Michel  de  la  Huguerye,  publiés  par  A.  de  Ruble  ; 
Paris,  Renouard,  1878,  t.  II,  p.  77. 


MÉLANGES  ET   DOCUMENTS.  81 

secrète,  stipulé  quelques  avantages  particuliers  à  son  profit'. 
Cependaut,  à  force  de  démarches  et  de  promesses,  le  Béar- 
nais, aidé  de  Marguerite,  avait  réussi  à  neutraliser  le  mau- 
vais vouloir  de  Coudé  et  à  l'aire  approuver  le  traité  par  l'as- 
semblée des  protestants  tenue  à  Montauban  au  mois  de  mai 
1581. 

La  résistance  de  Condé  itait  appuyée  par  les  religionnaires 
du  Languedoc,  «  cervelles  estranges  et  humeurs  fort  difficiles 
à  manier-».  Ils  commencèrent,  dit  d'Aubigné,  à  faire  la 
guerre  quand  ils  virent  les  autres  en  paix-'.  Des  capitaines, 
retranchés  dans  de  petites  villes  fortifiées,  faisaient  des  courses 
principalement  contre  les  grosses  villes  catholiques. 

Toulouse  surtout  avait  à  souffrir  de  ces  incursions,  et  le  roi 
de  Navarre,  dont  la  statue  orne  aujourd'hui  l'hôtel  de  ville, 
y  était  particulièrement  haï.  Déjà,  au  mois  d'avril  1579,  il 
avait  refusé  d'accompagner  Catherine  de  Médicis  à  Toulouse*. 
Il  n'aurait  pas  osé,  en  1581,  traverser  cette  ville,  même  dé- 
guisé en  cuisinier,  comme  il  avait  fait,  peu  de  temps  aupara- 
vant, à  Bordeaux ^  Des  Eaux-Chaudes,  il  avait  écrit  le  18 juin 
aux  consuls  d'Agen"  :  «Je  suys  en  ces  montaignes  pour  les 
eaux  sans  autre  cogitation  que  de  confirmer  ma  sancté,  n'es- 
tant besoing  croistre  les  gardes  ny  a  Auch  ny  ailleurs.  »  Le 
même  jour,  il  mandait  à  Bellièvre  d'aller  à  Toulouse  «  pour 
le  bien  de  la  paix''  ». 

Ces  appréhensions  sont  justifiées  quand  on  étudie  de  près 
les  documents  conservés  aux  archives  communales  de  Tou 
louse^  On  vivait  dans  de  continuelles  alarmes.  Les  séances 


1.  D'Aubigné,  Histoire  universelle,  édition  de  la  Société  de  l'Histoire 
de  France,  t.  VI,  p.  155,  et  note  2. 

2.  Mémoires  de  la  Hugiierye,  t.  II,  p.  87. 

3.  Op.  et  loc.  cit.  Cf.  dans  ce  même  volume  les  détails  donnés  sur  la 
Guyenne,  ainsi  que  dans  le  «  Journal  de  Faurin  ». 

4.  Ph.  Lauzun,  op.  cit.,  p.  91.  • 

5.  D'Aubigné,  op.  cit.,  t.  VI,  p.  166. 

6.  Lettres   missives  de  Benri  IV,    publiées    par  Berger  de    Xivrey, 
t.  VIll,  p.  199. 

7.  Ibid.,  t.  I,  p.  376. 

8.  Les  renseignements  à  l'aide  desquels  a  été  composée  la  suite  de  cette 
note  sont  oxti-aits  des  Archives  municip.  de  Toulouse,  Livre  des  Conseils, 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVL  6 


82  ANNALES  DU   MIDI. 

du  conseil  de  la  ville,  auquel  venaient  s'adjoindre  les  prin- 
cipaux officiers  du  Parlement,  étaient  de  véritables  délibéra- 
tions de  conseil  de  guerre.  L'attention  était  surtout  portée  du 
côté  de  la  Gascogne.  On  prenait  des  mesures  pour  protéger 
le  faubourg  Saint-Cyprien,  «  ouvert  en  plusieurs  endroits  et 
peuplé  de  pauvres  gens  qui  ne  peuvent  s'armer  ».  Le  bruit 
courait  qu'avec  le  roi  de  Navarre  d'autres  «  de  la  préthendue 
religion  »  fourmillaient  au  quartier  de  Gascogne,  s'attrou- 
paient en  divers  lieux  et  que  leur  dessein  était  «  d'alempter 
sur  le  repos  de  ceste  ville  »  (séance  du  29  janvier  1581).  Les 
ennemis  avaient  des  intelligences  dans  la  ville,  où  leurs  adhé- 
rents étaient  appuyés  par  de  nombreux  étrangers  qui  s'y 
étaient  introduits  et  où  deux  mille  hommes,  «  tant  escoUiers 
que  aultres  »,  attendaient  le  signal  pour  s'en  emparer  et  «  la 
tirer  hors  l'obéissance  de  Sa  Majesté  »  (séance  du  9  mars).  A 
la  séance  suivante,  on  rapporte  que  le  roi  de  Navarre  et  ses 
troupes  sont  assemblés  en  grand  nombre  à  l'Isle-Jourdain  et 
autres  villes  voisines,  et  font  des  courses  jusqu'aux  portes  de 
Saint-Cyprien.  Enfin,  on  décide,  le  8  avril,  que  les  fêtes  des 
Jeux  floraux  n'auront  pas  lieu  les  !«■■  et  3  mai,  à  cause  du 
danger  qu'oflfrait  une  affluence  trop  grande  à  l'hôtel  de  ville. 
Les  sommes  destinées  à  payer  le  repas  du  jour  de  Sainte- 
Croix  furent  distribuées  aux  Jésuites  et  à  d'autres  couvents 
de  la  ville,  et  les  fleurs  offertes  à  Notre-Dame-de-l'Assomption 
de  l'église  Saint-Étienne. 

La  ville  était  en  état  de  siège.  Des  sentinelles  veillaient  aux 
clochers  de  Saint-Sernin,  du  couvent  de  la  Grande-Obser- 
vance, des  Jacobins  et  de  Saint-Roch.  Le  capitoul  du  Pont- 
Vieux  devait  passer  la  nuit  à  Saint-Cyprien  et  les  habitants 
faire  la  garde,  «  tambourin  sonnant  et  enseignes  despliées  », 
sauf  ceux  de  la  «  nouvelle  opinion  ou  notoirement  suspects 
d'en  estre  »,  ainsi  que  ceux  de  la  maison  ou  de  la  suite  du  roi 
de  Navarre  et  ses  adhérents,  qui  seraient  «  restraincts  ».  Tous 
les  bateaux  entre  Muret  et  Grenade  devaient  être  coulés  ou 


BB  11;  Comptes  de  1381,  CG  S02;  Lettres  adressées  aux  capitouls,  BB 
181. 


MÉLANGES  ET   DOCUMENTS.  83 

rentrés  à  Toulouse,  les  gués  faisant  coqiniuniquer  la  rive 
gauche  tle  la  Garonne  avec  le  Lauragais  être  rendus  imprati- 
cables à  l'ennemi.  Les  portes  nouvellement  ouvertes  furent 
murées,  celles  de  Sainl-Sernin  et  de  Saint-Etienne  fermées; 
l'une  d'elles  eut  le  guichet  simplement  ouvert,  on  y  mit  un 
corps  de  garde.  A  chacune  des  autres  portes  se  trouvait  un 
greffier  chargé  de  surveiller  les  entrées  et  sorties.  Le  31  mars, 
Léonard  Guidole,  greffier  à  la  porte  du  Château,  recevait 
2  écus  pour  avoir  saisi  «deux  semais*  de  salpêtre  voulant 
sortir  par  ladite  porte  »  sans  passeport  ni  permission  des  ca- 
pitouls.  On  préparait  le  soufre  et  le  salpêtre  dans  l'infirmerie 
des  Jacobins.  Les  armes  de  l'arsenal  étaient  remises  à  neuf  et 
on  en  achetait  d'autres,  ainsi  que  des  «  balles  de  canon  de  fer 
et  de  fonte  ».  En  prévision  d'un  combat  dans  la  rue,  trois 
«  faures  grossiers  »  étaient  chargés  de  placer  «  aux  cantons 
de  la  ville  »  des  chaînes  de  fer. 

Ces  préparatifs  montrent  quel  était  l'état  d'esprit  des  Tou- 
lousains, et  par  eux  on  peut  juger  du  reste  des  habitants  du 
pays.  Dans  les  premiers  mois  de  l'année  1581  ils  envoient  des 
messagers  à  l'extrémité  du  Languedoc  et  au  cœur  de  la  Gas- 
cogne jusqu'au  pays  de  Gaure.  Ils  écrivent  aux  consuls  d'Albi, 
Lavaur,  Liste  [d'Albigeois],  Rabastens,  Grenade,  Beaumont, 
Fleurance,  Auch,  Gimout,  Avignonnet,  Caslelnaudary,  Car- 
cassonne  et  Narbonne,  pour  ne  citer  que  les  villes  un  peu 
éloignées  ou  situées  hors  du  Languedoc.  Ils  écrivent  aussi  au 
roi,  au  duc  d'Aujou  alors  à  Castres,  au  maréchal  de  Mati- 
gnon, «  espérit  inquiété  »,  dit  Marguerite  dans  ses  Mémoi- 
res, à  Montmorency  et  à  Joyeuse.  Des  environs  de  Montau- 
ban  on  les  tient  au  courant  de  ce  qui  se  passe  dans  l'assem- 
blée des  huguenots  et  des  rapports  de  Condé  avec  son  cousin 
le  roi  de  Navarre.  La  correspondance  la  plus  intéressante  à  ce 
point  de  vue  est  celle  du  sénéchal  qui  arrive  de  la  cour,  où  il 
a  sans  doute  reçu  des  instructions  dont  l'fîffervescence  qui 
règne  à  Toulouse  lui  rendra  l'exécution  difficile;  aussi  per- 


1.  Vaisseau  de  bois  fait  de  douves,  aujourd'lmi  tinette  et,  en  langue 
vulgaire,  comporte. 


84  ANNALES   DU   MIDI. 

siste-t-il  à  rester  dgins  son  château  de  Cornusson,  malgré  les 
appels  réitérés  des  capitouls.  Il  leur  écrit  le  14  février  1581, 
par  M.  Martin,  qui  devra"  leur  répéter  ce  qu'on  lui  a  dit  à  la 
cour.  Il  les  assure  que  tout  est  tranquille  et  qu'on  va  déman- 
teler Mende. 

Deux  lettres  lui  ayant  été  adressées,  il  répond,  le  24  fé- 
vrier, à  la  seconde,  que  les  entreprises  des  ennemis  contre 
Toulouse  ne  pourront  se.  réaliser  parce  qu'ils  sont  occupés 
ailleurs  et  au  loin;  sa  présence  est  plus  utile  à  Cornusson  qu'à 
Toulouse,  si  bien  gardée  par  les  capitouls.  Enfin,  pressé  de 
nouveau,  il  se  décide  à  prendre  la  plume  le  5  mars  pour 
annoncer  qu'il  est  malade  et  ne  pourra  quitter  la  chambre 
avant  le  17  ou  le  18.  Il  était  encore  à  Cornusson  le  8  août, 
d'où  il  écrivait  pour  demander  l'élargissement  du  capitaine 
Palassy.  Ses  tergiversations  étaient  la  conséquence  évidente 
des  instructions  qu'il  avait  reçues;  mais  il  est  certain  qu'au 
lieu  de  calmer  des  esprits  aussi  inquiets ,  elles  ne  faisaient 
que  les  irriter  davantage. 

Le  roi  de  Navarre  devait  connaître  ces  dispositions.  Bel- 
lièvre,  au  besoin,  l'en  aurait  informé.  Aussi,deretour  à  Nérac, 
après  être  passé  par  Gondrin  où  l'on  avait  décidé  d'exécuter 
l'édit,  d'établir  la  paix,  comme  il  est  dit  dans  la  lettre  publiée 
plus  bas,  il  écrit  le  6  juillet  à  François  de  Noailles,  évêque  de 
Dax,  pour  lui  faire  part  de  cette  résolution',  et  le  lendemain, 
dans  le  même  sens,  aux  consuls  de  Lectoure^,  Avec  les  Tou- 
lousains il  n'entrait  pas  en  relations  aussi  facilement  qu'avec 
le  roi  ou  ses  conseillers  :  le  6  juillet  il  fait  [)art  à  Bellièvre'^  de 
ses  appréhensions  au  sujet  de  ceux  du  Languedoc  «  et  de  tant 
de  lieux  prochains,  desquels  vous  cognoissez  les  esprits  qui 
ne  se  domestiquent  pas  si  aisément  ».  Il  a  cependant  quelque 
espoir  et  ajoute  :  «  Je  crois  que  Messieurs  de  Thoulouse  '■  co- 
gnoissent  par  mes  actions  qu'ils  ont  plus  d'occasion  de  se 
contenter  de  raoy  que  je  n'ay  du  peu  de  justice  qu'ils  font  et 

1.  Lettres  missives  de  Henri  IV,  t.  VIII,  p.  203. 

2.  Ibid.,  p.  204. 

3.  Ibid.,  t.  I,  p.  383. 

4.  Il  s'agit  sans  doute  du  Parlement. 


MÉLANGES   ET   DOCUMENTS.  85 

de  la  faveur  qu'ils  presteut  à  ceulx  qui  surprennent  les  pla- 
ces^  »  Il  n'ose  écrire  lui-même,  et  c'est  Marguerite  qui  prend 
la  plume.  Le  ménage  était  alors  plus  qu'à  demi  brouillé,  mais 
la  reine  était  encore  dévouée  à  la  politique  de  son  mari.  Elle 
prodigue  ses  efforts  pour  faire  aboutir  le  traité  de  Fleix.  Des 
bains  de  Bagnères,  elle  écrit  à  Bellièvre^  que  son  mari  est 
extrêmement  éloigné  de  la  guerre.  A  sa  mère  elle  dit^  : 

«  Encore  que  l'exécution  de  cette  paix  s'avance  avec 
autant  de  dilijance  que  l'on  s'i  an  peut  dessirer,  qu'ele  me 
samblera  tousjours  trop  tardive  pour  l'extrême  désir  que  j'ai 
de  me  revoir  près  de  vous,  Madame;  car  le  roi,  mon  mari, 
m'asure  de  me  mener  soudin  qu'ele  sera  exsécutée.  »  Si  l'on 
en  croit  M.  Ph.  Lauzun,  très  au  courant  des  affaires  de  cœur 
de  la  séduisante  princesse,  il  lui  tardait  surtout  de  rejoindre  à 
Paris  le  beau  Chanvallon,  auquel  elle  envoyait  de  Bagnères 
une  lettre  aussi  amphigourique  qu'enflammée*.  C'est  dans  ces 
circonstances  qu'elle  écrivit  aux  capitouls  la  lettre  sui- 
vante : 

Messieurs,  congnoissant  combien  les  faulx  bruitz  qui  ont 
couru  ces  jours  passez  ont  cuydé  apporter  de  mal  et  que  si  on 
s'en  rendoit  de  légère  créance  il  seroyt  bien  difflcille  aux  gens 
de  bien  de  s'y  opposer,  j'ay  bien  voulu  vous  escripre  la  présente 
pour  vous  asseurer  de  la  vraye  résolution  prinse  par  le  Roy  mon- 
sieur mon  raary  et  de  ses  intentions,  estimant  que  mon  tesmoi- 
gnage  sera  tousiours  receu  de  vous.  Il  n'a  aultre  désir  que  de 
veoyr  la  paix  bien  establie  et  le  repoz  de  cest  estât,  et  quoy  que 
dient  ceulx  qui  en  sont  ennemys  et  qui  ne  taschent  qu'à  nourrir 
le  soubceon  et  la  mefflance  comme  le  vray  moien  de  nous  rame- 
ner aux  misères  passées,  il  en  évitera  les  occasions  de  tout  son 
pouvoyr.  De  cela  je  vous  prie  asseurer.  Messieurs,  et  vous  prie 
aussy  voulloir  rejecter  loing  ceulx  qui  par  faulx  rapportz  ou 


1.  Allusion  à  la  prise  de  Mazères.  Cf.  Lettres  missives  de  He>u'i  /T", 
t.  I,  p.  376. 

2.  Correspondance    de    Catherine    de    Médicis,    t.   Vil,    appendice, 
p.  486. 

8.  Lettres  de  Marguerite  de    Valois,  publiées    par   M.   Pli.  Lauzun 
dans  les  Archives  historiques  de  Gascogne,  Auch  et  Paris,  l^i86,  p.  24. 
4.  Itinéraire  raisonné  de  Marguerite  de  Valois,  p.  179. 


86  ANNALES   DU   MIDI. 

calomnyes  nourrissent  la  division  et  sont  cause  des  entreprises 
qui  se  dressent,  comme  ces  jours  passez  vous  en  avez  peu  veoir, 
au  grand  retardement  du  bien  et  repoz  public.  L'espérance  que 
j'ay  que  vous  apporterez  en  cecy  la  prudance  et  sincère  affec- 
tion qui  est  en  vous  me  gardera  vous  en  escripre  davantaige, 
si  n'est  que  nous  en  retournant  des  bains  à  Nerac  pour  y  atten- 
dre mon  oncle  monsieur  de  Monpensier^  que  le  Roy,  monseigneur 
et  frère,  nous  envoyé  pour  le  paraschèveraent  de  ce  qui  reste  de 
l'exécution  de  1  edit,  nous  avons  passé  et  sesjourné  deux  jours 
chez  monsieur  de  Gondren'^,  où  se  trouvant  une  trouppe  de  gen- 
tilzhorames  catholiques,  a  esté  advisé  de  faire  assembler  en  ce 
lieu  les  seneschaulx  de  ceste  province  et  aultres  nobles  person- 
nages catholiques  pour  délibérer  sur  les  moiens  du  repos  public. 
A  quoy  j'apporteroy  poyr  ma  part  tout  le  service  que  je  doibtz 
au  Roy  monseigneur  et  amityé  publicque.  E  sur'ce  prieray  Dieu, 
Messieurs,  vous  avoyr  en  sa  tressaincte  et  digne  garde.  A  Nerac 
du  vie  juillet  4581 . 

{De  la  main  de  la  Reine  .-) 

Vostre  bien  bonne  amie, 

Marguerite. 
(Areh.  mimicip.  de  Toulouse,  BB  181.) 

Celte  missive  n'eut  pas  grand  succès.  Aucun  des  Mémoires 
du  temps  ne  parle,  à  ma  connaissance,  de  la  conférence  pro- 
jetée, et  la  lettre  suivante,  que  Nicolas  de  Neufville,  seigneur 
d(î  Villeroy,  envoya  aux  capitouls,  avec  une  lettre  particulière 
les  assurant  de  son  dévouement  et  de  la  part  qu'il  prenait  à 
leurs  épreuves,  nous  montre  qu'ils  ne  donnèrent  aucune  suite 
à  celte  tentative  de  conciliation. 

De  par  le  Roy, 

Très  chers  et  bien  amés.  Nous  louons  grandement  vostre  bon 
zèle  et  la  continuation  de  vostre  dévotion  et  fldélitée  au  bien  de 
nostre  service,  qui  nous  est  tesmoignée  par  toutes  vos  actions  et 
singuUièrement  par  le  seing  et  vigilance  dont  vous  usés  à  con- 


1.  François  de  Montpensier,  dauphin  d'Auvergne. 

2.  Bertrand  de  Montespan,  baron  de  la  Mothe-Gondrin,  chevalier  de 
l'ordre,  écuyer  d'écurie,  sénéchal  de  Lannes  en  1573,  gentilhomme  de  la 
chambre  du  roi  en  1580. 


MÉLANGES   ET   DOCUMENTS.  87 

server  nostre  ville  de  Thoulouze  en  nostre  obeyssance  et  résis- 
ter aux  turbulents  et  factieux  que  ne  peuvent  vivre  en  paix  et 
se  ranger  à  l'observation  de  nostre  esdit  de  pacification.  Comme 
freschement  nous  avons  veu  par  vos  lettres  du  viii»  de  ce  mois 
par  lesquelles  vous  nous  advertissés  des  remuemens  damiers 
qui  se  renouvellent  en  vos  quartiers  et  de  la  responce  que  vous 
avés  faite  à  nostre  très  cher  et  très  amé  frère  le  Roy  de  Navarre 
sur  l'entreprise  que  l'on  prétend  avoir  esté  brassée  sur  la  ville 
de  Mazères,  de  laquelle  je  dési»e  que  la  vérité  soit  cogneue 
comme  il  a  esté  faict  de  celle  de  Carcassonne  à  celle  fin  d'en  fera 
fere  pareille  pugnition  que  de  l'aultre,  estant  impossible  que  la 
paix  s'establisse  et  dure  que  tels  attentats  ne  soient  réparés  et 
pugnys  rigoureusement  d'une  part  et  d'aultre  sans  acception  de 
personne,  et  par  ce  que  nous  avons  deslibéré  envoyer  bien  tost 
vers  nostre  frère  personnages  de  qualité,  tant  pour  ceste  occa- 
sion que  pour  achever  de  fere  exécuter  ladite  paix,  par  lesquels 
nous  vous  ferons  plus  amplement  entendre  nostre  intention  sur 
toutes  choses,  nous  ne  vous  ferons  la  présente  plus  longue  que 
pour  vous  admonester  de  continuer  a  vous  garder  très  soigneu- 
sement et  ne  permettre  qu'il  soit  cependant  rien  entreprins  qui 
altère  davantage  ladicte  paix.  Donné  à  Sainct  Maur  des  Fossés 
le  xviii*  jour  de  juillet  1 581 . 

Henry.  De  Nbupville. 

(Arch.  nuinicip.  de  Toulouse,  AA  44  :  49.) 

La  i-eiue  de  Navarre  ne  tint  pas  rancune  aux  capitouls  du 
peu  de  cas  qu'ils  avaient  fait  de  sa  lettre.  Son  maître  d'hôtel, 
Hector  de  Maniquet,  étant  arrivé  de  Paris  au  mois  de  décem- 
bre suivant  *,  porteur  de  lettres  de  la  reine-mère  et  du  roi  de 
France,  qui  l'engageaient  à  retourner  à  Paris,  elle  envoya  ce 
messager  à  Toulouse  pour  y  annoncer  son  prochain  départ. 
Il  était  aussi  chargé  de  faire  connaître  aux  capitouls  «  l'afiéc- 
tion  grande  »  qu'elle  portait  à  la  ville  et  de  leur  faire  ses 
offres  de  service  auprès  de  son  frère. 

Le   conseil  général,  par  délibération  du  8  janvier  1582-, 


1.  Mémoires  de  MiaujHerite  d/^  Valois,  éd.  Guessard,  p.  181. 

2.  Arch.  iiumicip.  do  Tuidoiise,  Livre  des  Conseils,  BB  14,  1°  :^37. 


88  ANNALES   DU   MIDI. 

délégua  Michel  de  Loupes,  docteur  et  capitouP,  et  B.  Dela- 
font,  bourgeois,  pour  aller  la  «  regrassier  plus  especialle- 
ment,  au  nom  de  ceste  ville,  d'une  si  gratieuse  et  favourable 
salutation-  ».  Les  délégués  la  trouvèrent  à  Nérac  et  lui  trans- 
mirent les  compliments  de  la  ville  p<)ur  elle  et  pour  son  frère. 
Afin  de  bien  marquer  le  caractère  exclusivement  personnel 
de  leur  démarche,  ils  la  prièrent  de  dire  à  son  mari  de  les 
délivrer  des  voleurs  qui  couvraient  tout  le  pays.  Marguerite 
reçut  les  ambassadeurs  toulousains  avec  la  grâce  dont  elle 
était  coutumière  et  leur  donna  1,200  livres  de  pension  pour  les 
pauvres  de  l'Hôtel-Dieu,  «  aulx  fauxbourgs  Saint  Ciprien  »,  à 
prendre  sur  le  premier  bénéfice  électif  qui  vaquerait  aux  pays 
de  Quercy  ou  de  Rouergue,  où  la  nomination  lui  apparte- 
nait, ces  pays  lui  ayant  été  donnés  «  pour  ses  droits ^  ».  Je  ne 
puis  assurer  que  cette  donation  ait  jamais  eu  son  effet. 

Deux  ans  après,  le  samedi  13  octobre  15S4,  revenant 
d'Encausse  et  s'arrêtant  à  Seysses  pour  dîaer,  elle  y  trouva 
MM.  d'Abbatia  et  de  Nohault,  capitouls,  délégués  par  leurs 
collègues  pour  lui  faire  la  révérence  et  lui  oflrir  leurs  ser- 
vices''. Tout  se  passa,  sans  doute,  en  compliments,  car  la 
reine,  le  même  jour,  dîna  et  soupa  à  Grenade^.  Ainsi  se  ter- 
minèrent les  rapports  de  la  ville  de  Toulouse  avec  Marguerite 
de  Valois,  reine  de  Navarre. 

A.    ViGNAUX. 

1.  Parent  de  Montaigne. 

2.  Arch.  municip.  de  Toulouse,  Annales,  BB  224,  p.  325. 

3.  Ibid. 

4.  Ibid.,  pp.  357,  358. 

5.  Lauzun,  oj).  cit.,  p.  305. 


COMPTES  RENDUS  CRITIQUES 


C.  Appel.  Provenzalische  Chrestomathie  mil  Abriss  der 
Formenlehre  und  Glossar ;  zweite,  verbesserte  Aiiflage, 
Leipzig,  O.  R.  Reislantl,  1902;  in-S"  de  xli-344  pages. 

La  Chrestomathie  provençale  de  M.  Appel  garde  sur  les  recueils 
similaires  l'avantage  d'un  plan  plus  méthodique,  le  groupement 
par  genres  des  morceaux  édités  donnant  au  livre  un  intérêt 
littéraire  plus  marqué,  sans  lui  rien  ôter  de  sa  valeur  philolo- 
gique. 

On  doit  rendre  hommage  à  la  conscience  et  au  savoir  de  l'au- 
teur, qui  a  voulu  faire  profiter  la  seconde  édition  de  son  ouvragé 
des  nombreux  travaux  publiés  sur  la  littérature  provençale 
depuis  '1893.  date  de  la  première.  Mais,  puisqu'il  remaniait  le 
volume,  M.  A  eût  peut  être  bien  fait  d'en  modifier  la  disposition 
matérielle,  sur  quelques  points  tout  au  moins.  Pourquoi,  par 
exemple,  quand  un  vers  est  trop  court,  ne  pas  l'indiquer  par 
l'impression  même,  au  moyen  de  points?  On  aimerait  aussi  à 
être  averti  par  la  disposition  matérielle  des  diverses  formes 
de  vers  entrant  dans  un  même  morceau.  (Voy.  par  ex.  n"  115,  oii 
rien  ne  nous  avertit  du  mélange  constant  de  vers  de  7  et  de  8 
syllabes.) 

Par  un  souci  très  légitime  de  toucher  le  moins  possible  à  la 
graphie  des  mss.,  M.  A  ne  marque  que  les  élisions  indiquées  dans 
ceux-ci.  Il  serait  non  seulement  plus  commode,  mais  même  plus 
rationnel  de  supprimer  sans  exception  toutes  les  voyelles  dont 


90  ANNALES   DU   MIDI. 

l'élision  est  sûre.  Procéder  autrement,  c'est  presque  défigurer  le 
vers  :  il  est  choquant  de  rencontrer  —  comme  il  arrive  à  tout 
instant  -  un  vers  renfermant  une  élision  marquée  suivi  immé- 
diatement d'un  vers  où  une  élision  obligatoire  n'est  pas  indi- 
quée par  l'impression. 

C'est  sans  doute  le  même  scrupule  qui  empêche  M.  A.  d'admet- 
tre dans  ses  textes  certaines  améliorations  assurées,  dont  le 
mérite  lui  revient,  et  qui  se  dissimulent  trop  modestement  parmi 
les  notes,  où  l'on  a  de  la  peine  à  les  trouver.  Je  souhaiterais 
d'autant  plus  que  le  livre  fût  d'un  maniement  plus  facile,  que  la 
valeur  scientifique  en  est  plus  considérable. 

Dans  l'impossibilité  de  faire  une  étude  détaillée  de  tous  les 
morceaux  contenus  dans  le  recueil,  je  me  borne  à  quelques  ob- 
servations rapides  sur  ceux  que  j'ai  parcourus. 

N"  4.  —  Les  vers  36,  49.  53,  67,  86  (surtout),  122,  165,  193,  197, 
215,  223,  251,  261  auraient  pu  être  corrigés  à  l'aide  de  la  2«  édi- 
tion de  Flamenca  de  M.  P.  Meyer,  que  M.  A.  cite  pourtant  en 
tête  du  fragment.  —  V.  44;  il  serait  préférable  d'écrire  somo.  — 
102.  Je  corrigerais  :  ab  la  man  nucV(a),  à  cause  du  v.  204.  —  130; 
\.  poc  au  lieu  de  pot.  —  144;  1.  si  près  au  lieu  de  s'i  près.  —  239; 
p.  ê.  [ja]mais  pe?'  7-ennos  desconorl. 

N»  5.  —  V.  64;  pour  rétablir  la  mesure,  il  suffit  de  corr.  [A\ 
doncx.  —  79;  écrire  :  si  no  m'  era.  —  336;  corr.  ieu  soi  [ais^sel. 
—  383;  corr.  E  fai  [ai\so.  —  386;  corr.  :  Q[ue]  anc  may  ;  cf.  les 
vers  2,  9^  47,  58,  59,  119. 

*  N'J  26.  —  Pourquoi  M.  A.  n'a-t-il  pas  indiqué  que  la  pièce  est 
une  sextine,  puisqu'il  donne  le  nom  de  toutes  les  autres  variétés 
lyriques  ? 

N"  32,  V.  64  :  sabia  ;  corr.  sabria. 

N"  31,  V.  1  :  ^  leis  semble  plus  appuyé  par  la  classification 
des  mss. 

No  73,  V.  41.  Voilà  un  de  ces  cas  où  il  faudrait  absolument 
marquer  l'élision;  écrire  :  E  s'anc.  N'est-ce  pas  la  graphie  de  D? 
Pourquoi  ne  pas  la  conserver? 

N"  103,  V.  43  ;  lire  :  mos  filhs  cars. 

N"  104,  V.  67  ;  il  est  préférable  d'écrire  foc  essauzilz. 

N"  110,  V.  18,  avec  la  graphie  aiuda  U,  le  vers  est  trop  long; 
on  pourrait  lire  can  locs  venha,  ce  qui,  en  supprimant  une  syllabe, 
ferait  aussi  disparaître  la  construction  rare  se  venha.  —  85;  le 
vers  est  trop  long  de  deux  syllabes  ;  M.  A.,  qui  ne  le  signale  pas 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  91 

en  note,  admet-il  l'élision  de  qui  et  de  ni?  —  94;  suppléer,  pour 
la  mesure  [pe?-]  que  s'a)/i07-. 

N»  115,  V.  156.  Vers  trop  long;  lire  (avec  AF)  :  qui  ben  esgarcV 
e  o  enten. 

N"  117,  V.  23  :  los  autres,  lire  :  las  autras. 

En  somme,  la  Chreslomathie  de  M.  A.  ne"  me  paraît  guère  prê- 
ter à  la  critique  que  par  certains  détails  purement  matériels. 
Telle  qu'elle  est,  plus  scientifique  que  celle  de  Bartsch,  plus 
complète  que  celle  de  M.  Crescini,  c'est  encore  le  livre,  sinon  le 
plus  commode,  du  moins  le  plus  propre  à  donner  aux  étudiants 
une  idée  exacte  de  l'ancienne  littérature  provençale^. 

P.  Andraud. 

Ch.  Portai,.  Histoire  de  Cordes  (Tarn),  1222-1799.  Albi, 
chez  les  principaux  libraires;  Cordes,  Bosquet,  1902;  iu-8o 
de  xii-692  pages. 

Il  n'y  a  dans  le  Sud-Ouest  rien  de  comparable  à  la  petite  ville 
de  Cordes.  Perchée  sur  un  promontoire  qui  semble,  à  qui  le  voit 
de  l'ouest,  un  cône  isolé  dans  la  plaine,  elle  possède  le  long  de 
ses  ruelles  tortueuses  nombre  de  maisons  anciennes  et  belles. 
Ces  édifices  du  xiv  siècle  ou  de  la  fin  du  xiii«  témoignent  d'une 
singulière  prospérité,  depuis  longtemps  évanouie  ;  derrière  leurs 
façades  de  grès,  percées  de  larges  baies  ogivales,  richement 
ornées  de  sculptures,  ne  s' affairent  plus  les  marchands;  les  fer- 
rures extérieures  destinées  sans  doute  autrefois  à  supporter  des 
vélums,  à  la  manière  italienne,  soutiennent  maintenant  des 
cordes  ou  des  perches  sur  lesquelles  les  ménagères  mettent  leur 
linge  à  sécher.  Cordes  est  une  ville  morte.  Elle  ne  vivra  plus 
guère  que  de  la  vie  légère  et  fugitive  des  ombres,  grâce  à  l'his- 
toire qui  ressuscite,  dit-on  volontiers  par  une  audacieuse"  hyper- 
bole, —  disons  plutôt  :  qui  évoque  péniblement  une  image 
déformée  et  décolorée  du  passé. 

L'évocateur,  M.  Portai,  archiviste  du  département  du  Tarn,  a 
fait  d'excellente  besogne,  que  l'on  ne  saurait  trop  louer  2.  Après 

1.  Le  Glossaire  a  été  l'objet  de  soins  minutieux  et  est  jjurticulièrenient 
recoinmandable.  On  pourrait  néanmoins  relever  dans  l'Index  des  noms 
propres  quelques  anomalies  :  puisque  M.  A.  traduit  des  mots  comme 
Byeta>iha,  JJure?isa,  pourquoi  ne  tra(hiit-il  pas  aussi  Anlioca,  Crefa? 

2.  Cet  ouvrage  n'a   cependant  obtenu  que  la  8°  mention  au   Concours 


92  ANNALES   DU  MIDI. 

avoir  classé  les  archives  de  Cordes,  fort  bien  conservées,  ce  qui 
dans  nos  contrées  est  le  cas  de  beaucoup  d'archives  municipales^, 
il  a  voulu  exploiter  lui-même  ces  matériaux  historiques,  non 
pour  les  livrer  au  public  en  quelque  sorte  à  l'état  brut,  mais 
pour  en  construire  une  des  monographies  les  plus  complètes,  les 
mieux  agencées  et  les  plus  solides  que  nous  connaissions.  Rien 
n'y  manque,  ni  les  illustrations  nombreuses  et  bien  choisies,  ni 
la  carte  du  consulat,  si  nécessaire  et  cependant  omise  presque 
toujours  dans  les  travaux  do  ce  genre,  ni  les  pièces  justificatives, 
qui  occupent  85  pages,  ni  un  abondant  index.  Méthode,  mesure, 
esprit  scientifique,  sens  historique,  voilà  les  qualités  éminentes 
de  ce  livre.  Le  style,  sans  être  brillant,  reste  clair,  rapide,  et  ne 
fait  point  à  la  pauvre  langue  française  les  injures  que  tant 
d'auteurs  lui  prodiguent  de  nos  jours. 

«  Les  annales  de  Cordes,  ses  institutions,  a  écrit  M.  P.,  ne 
présentent  aucune  particularité  dont  on  ne  retrouverait  des 
'exemples  en  d'autres  lieux.  »  C'était  une  bastide  comme  beaucoup 
d'autres,  ancienne  à  la  vérité,  car  elle  fut  fondée  en  1222  par 
Raymond  VII,  comte  de  Toulouse  :  la  démonstration  que  M.  P. 
fournit  sur  ce  dernier  point  paraît  concluante.  Le  nom  de  Cordua 
trahit  une  ville  nouvelle  :  il  fut  emprunté  à  l'Espagne,  comme 
plus  tard  ceux  de  Pampelonne.  de  Valence,  de  Grenade.  Par  cette 
fondation  le  malheureux  comte  voulait  sans  doute  consolider  sa 
domination  dans  le  nord -est  de  l'Albigeois  et  recouvrer  des 
revenus  que  la  croisade  avait  dû  tarir.  Il  fit  de  Cordes  la  capi- 
tale d'une  grande  baylie,  s'étendant  de  l'O.  à  l'R.,  le  long  de 
l'Aveyron,  sur  plus  de  50  kilomètres,  et  sur  18  du  N.  au  S. 

Tel  -était  le  ressort  du  bayle  de  Raymond  VII;  tel  fut  aussi 
celui  des  consuls  de  Cordes;  baylie  et  consulat  eurent  justement 
les  mêmes  limites.  Nous  voilà  bien  loin  du  consulat  resserré 
entre  ies  murs  d'une  ville,  le  seul  que  les  érudits,  il  n'y  a  pas 
très  longtemps,  voulussent  connaître  et  étudier.  Et  l'on  voit  par 
quelles  raisons  M.  P.  a  été  conduit  à  adopter  les  idées  que  nous 
avons  nous-même  émises  sur  l'origine  des  consulats  méridio- 


des  antiquités  de  France;  c'est  dire  le  mérite  vraiment  extraordinaire 
de  ceux,  au  nombre  de  dix  ou  douze,  qui  lui  ont  été  préférés. 

\.  \J Inventaire  sonimaire  des  archives  de  Cordes  antérieures  à  1790 
vient  justement  de  paraître  en  un  volume  in-4'>  de  xvi-416  pages  (séries 
AA-HH).  M.  P.  l'a  fait  suivre  d'une  longue  table  alphabétique  des  ma- 
tières. Restent  à  inventorier  les  archives  ecclésiastiques. 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  93 

naux,  non  de  tous,  mais  d'un  grand  nombre  et  notamment  des 
plus  anciens  :  il  a  soutenu  et  prouvé  que  les  consuls  ont  dû  être 
d'abord,  sauf  à  s'émanciper  ensuite,  les  conseillers  du  bayle. 
Leur  rôle  judiciaire,  étudié  avec  précision,  met  ce  point  en  évi- 
dence (voir  pp.  283  et  sqq.)  :  «  Les  conseillers,  les  jurés  de  la 
première  heure,  conclut  M.  P.,  sont  devenus  les  vrais  juges», 
tandis  que  le  bayle,  tout  en  demeurant  le  président  du  tribunal, 
n'était  plus  que  «  l'agent  chargé  d'appliquer  les  peines  qu'ils 
infligeaient.  » 

Ce  trop  vaste  consulat  n'a  pas  tardé  à  se  démembrer.  Outre 
Vhonor  particulier  de  Cordes,  formé  de  W  paroisses,  il  com- 
prenait au  xiv«  siècle  des  villages  «  de  guet  et  de  garde  »  ou 
«  juratifs  ^>  au  nombre  de  8,  des  lieux  «  non  compris  »,  dits  aussi 
«  montagnes  »  ou  «  cailanies  »  au  nombre  de  10,  enfin  13  villages 
«  du  troisième  ordre  »;  mais  déjà  il  avait  subi  maintes  pertes 
et,  par  exemple,  abandonné  les  rives  du  Tarn,  qu'il  atteignait 
autrefois  par  le  Bout-du-Pont  d'Albi.  Dans  son  ressort,  à  ses 
dépens,  d'autres  bastides  furent  créées.  Les  villages  visaient  à 
l'indépendance;  ils  devinrent  l'un  après  l'autre  des  consulats 
autonomes  :  ceux  du  «  troisième  ordre  »  avant  1407;  à  la  même 
date  les  lieux  «  non  compris  »  ne  dépendaient  plus  de  Cordes 
que  pour  le  versement  des  deniers  royaux  ;  eux  aussi,  plusieurs 
des  «  juratifs  »  s'étaient  de  bonne  heure  émancipés,  changés  en 
consulats.  Et  pourtant,  en  1(331,  la  ville  dominante  comptait 
encore  au-dessous  d'elle  34  localités,  équivalant  à  23  des  com- 
munes actuelles;  son  consulat  restait  plus  grand  que  le  moderne 
canton  i. 

En  Languedoc  il  y  avait  de  grandes  communautés  rurales, 
assez  semblables  à  celle  qui  nous  occupe,  dont  chaque  localité 
principale  était  représentée  au  corps  consulaire,  au  conseil,  pre- 
nait une  part  au  pouvoir  municipal.  Ici,  point;  Cordes  a  gou- 
verné seule,  à  l'exclusion  même  de  son  honor  immédiat  :  c'est 
ce  qui  explique  en  partie  l'eflfort  des  localités  sujettes  vers  l'au- 
tonomie. Même  les  jurats  des  villages  «  juratifs  »  ne  furent 
jamais  que  des  administrateurs  subalternes,  subordonnés  aux 
consuls,  créés  par  eux  et  réduits  à  une  autorité  minime. 

Lt\s  «  forains  2  »  avaient-ils  du  moins  des  représentants  à  l'as- 


1.  Lequel  ne  contient  que  18  communes. 

2.  i)\x  membres  du  consulat  étrangers  à  la  ville  principale. 


94  ANNALES    DU   MIDI. 

semblée  communale?  Fournissaient-ils  des  conseillers  aux  con- 
suls?—  Les  conseillers,  pourvus  seulement  de  voix  délibérative, 
apparaissent  dans  les  statuts  de  1331,  lesquels  ordonnent  qu'il  y 
en  aura  vingt-quatre,  sans  dire  s'il  en  existait  déjà  et  combien, 
ni  comment  ils  étaient  noVnmés,  recrutés'  :  sans  doute  par  les 
consuls  et  à  leur  gré,  si  nous  en  jugeons  par  l'exemple  de  la  plu- 
part des  communautés  anciennes,  donc  parmi  les  gens  de  Cor- 
des. Les  statuts  de  1496,  très  postérieurs,  ne  sauraient  nous 
éclairer,  d'autant  qu'ils  appartiennent  à  un  ensemble  de  statuts 
réformateurs,  que  le  Parlement  de  Toulouse  a  donnés  aux  villes 
de  son  ressort  sous  Charles  VIII  et  Louis  XII,  afin  de  diminuer 
l'arbitraire  des  consuls,  de  favoriser  les  «  forains  »,  le  menu 
peuple.  Que  ces  statuts  aient  attribué  seulement  douze  conseil- 
lers à  Cordes  et  douze  au  reste  du  consulat,  que  d'autre  part  on 
puisse  induire,  d'un  règlement  de  1623,  qu'autrefois  les  conseil- 
lers se  renouvelaient  par  cooptation,  cela  ne  suffit  pas,  comme 
M.  P.  semble  le  penser,  à  rendre  probable  qu'il  en  ait  été  ainsi 
dès  l'origine  ou  dès  le  xiv^'  siècle  (pp.  260-262). 

Mais  nous  n'avons  pas  la  prétention  de  reprendre  et  de  refaire 
l'histoire  de  Cordes  ;  la  tâche  dans  le  cas  présent  serait  à  la  fois 
difficile  et  inutile.  Bornons-nous  donc  à  énoncer  quelques  criti- 
ques ou  regrets. 

Aux  pp.  312  et  sqq.  sur  les  fouages  et  le  compte  des  feux  à 
Cordes,  on  s'étonnera  de  voir  M.  P.  hésiter  entre  deux  interpré- 
tations, pourtant  bien  distinctes,  du  mot  «  feu  ».  En  analysant 
une  pièce  de  1366,  il  dira  qu'un  feu  représente  dix  livres  de  re- 
venu, et,  quelques  lignes  plus  bas,  qu'un  feu,  c'est  un  chef  de 
famille  possédant  dix  livres,  c'est-à-dire,  semble-t-il,  dix  livres 
de  capital.  Or,  nous  avons  démontré,  par  des  pièces  empruntées 
de  préférence  à  l'Albigeois,  que  c'était  un  capital,  non  un  re- 
venu, de  dix  livres  que  l'on  regardait  alors  comme  un  ïeu^. 

P.  31  ii.  Le  paragraphe  concernant  les  aides  manque  de  netteté 
et  d'exactitude.  Il  n'est  pas  douteux  que  les  aides  imposées  en 
décembre  1360  n'aient  été  levées  sous  forme  de  fouages  du  l»""  juin 
1362  jusqu'à  la  fin  de  1366,  tant  à  Cordes  que  dans  tout  le  pays 
de  Languedoc.  «  Peut-être  »  ici  n'est  pas  de  mise.  On  ne  com- 
prend pas,  dans  le  texte  de  M.  P.,  comment  les  aides,  rétal  lies 


L  Pièces  justif.,  n"  7,  art.  14. 

a.  P.  Uognon,  Institutions  du  Languedoc,  p.  621. 


COMPTES  RENDUS  CRITIQUES.  95 

SOUS  leur  forme  première  par  Charles  V  en  1367,  ont  pu  être 
établies  encore  en  1437  par  le  vote  des  Etats  de  Languedoc  tenus 
à  Béziers.  Il  conviendrait  d'ajouter  que  dans  l'intervalle,  en  1418, 
elles  avaient  été  abolies. 

D'ailleurs,  pour  quelques  inexactitudes,  que  de  renseignements 
nouveaux,  de  discussions  bien  conduites  :  ainsi  sur  le  prétendu 
massacre  de  trois  inquisiteurs  à  Cordes  en  1233  (p.  21),  sur  la 
pezade  (p.  395),  etc.  !  On  lira  avec  un  intérêt  soutenu  les  chapi- 
tres sur  le  clergé,  le  tiers  état,  et  les  trois  chapitres  d'archéologie 
qui  terminent  ce  bel  ouvrage.  Les  chapitres  de  début,  ceux  où 
l'histoire  même  de  la  ville  est  racontée,  n'ont  pas  autant  d'agré- 
ment, par  la  faute  des  circonstances  plutôt  que  par  celle  de  l'au- 
teur. C'est  d'abord  que  dans  le  passé  de  Cordes  il  y  a  peu  de 
faits  saillants.  En  outre,  les  pièces  d'archives,  les  comptes,  les 
délibérations  dont  M.  P.  s'est  servi  ne  permettent  guère,  à  eux 
seuls,  de  raconter  un  événement  de  quelque  étendue.  L'historien 
y  trouve  une  foule  de  détails  minutieux,  qui  peuvent  servir  à 
préciser  une  date,  un  fait,  bref  à  compléter  un  récit  plutôt  qu'à 
le  faire,  qui  embarrassent  par  leur  nombre  même  et  par  la  diffl- 
cuUé  de  choisir  entre  eux;  ils  sont  aussi,  presque  toujours,  d'une 
extrême  sécheresse.  Rien  d'étonnant  que  la  narration  de  M.  P. 
se  ressente  des  documents  qu'il  a  mis  en  œuvre  et  par  endroits 
tourne  à  la  chronique  :  exceptons  tout  spécialement  le  chapi- 
tre XI  sur  la  Révolution'.  Ceux  qui  précèdent  seront  toutefois 
des  plus  utiles  à  consulter.  .  Paul  Dognon. 

Je  tiens  à  signaler  parmi  les  «  pièces  justificatives  »  neuf  do- 
cuments en  langue  vulgaire  échelonnés  de  1316  à  147o  environ. 
C'est  une  excellente  idée  que  de  les  avoir  imprimés  in  extenso; 
le  philologue  accueille  toujours  avec  reconnaissance  une  série 
de  pièces  exactement  datées  et  localisées,  et  il  serait  désirable 
que  Chaque  monographie  locale  nous  en  fournît  autant  ou  da- 
vantage. 

M.  Portai  est  évidemment  un  excellent  paléographe,  et  les 
textes  paraissent  reproduits  avec  une  très  grande  fidélité;  on 
eût  aimé  cependant  à  les  voir  accompagnés  de  quelques  com- 
mentaires, de  l'explication  de  quelques  mots  rares  et  d'un  renvoi 


1.  Voir  en  particulier  co  qui  concerne  la  vente  des  biens  nationaux.  Cf. 
Pièces  justif'.,  n"  27,  une  liste  des  biens  vendus. 


96  ANNALES    DU    MIDI. 

à  l'endroit,  du  livre  où  ils  ont  été  signalés  ou  analysés.  L'éditeur 
en  eût  facilité  la  lecture  en  y  multipliant  un  peu  plus  les  signes 
de  ponctuation  et  en  coupant  plus  logiquement  les  mots,  en  écri- 
vant par  exemple  qu'el,  et  non  quel  (p.  582.  ^  3,  1.  2),  sera  visl  et 
non  ser  avist  (p.  JJ91,  |  14,  I.  10),  ques  te  et  non  queste  (p.  600, 
passim),  com  es  'stat  (c'est-à-dire  com  es  estai)  et  non  comestal 
(p.  598,  §  1,  1.  2;  cf.  estai  pour  es  'slat,  p.  607,  1.  6  et  passim). 

Il  aurait  été  bon.  enfin,  d'introduire  dans  ces  textes  parfois 
fautifs  certaines  corrections,  dont  je  n'indiquerai  que  quelques- 
unes  : 

p.  593,  §  6,  1.  ^,  pasawia]  cor r.  pasaria.  —  Ib.,  §  7,  1  2,  san- 
buda]  saubuda.  —  P.  591,  §  14,  1.  3,  no  ne  donne  pas  de  sens;  il 
faut  lire  probablement  [de\vo.  —  P.  592,  1.  17,  ansit']  aush-.  — 
P.  595,  %  2,  selhira]  salhira.  —  Ib.,  §  9,  crescat]  crestal  (=  animal 
châtré,  mouton).  —  P.  598,  1.  2,  romaniatge]  romaviatge.  — 
P.  602,  1.  1.  baila\da\  —  P.  605,  |  11,  1.  4,  ceces\  cossols  (?)  — 
P.  607,  1.  3,  outa]  onta.  —  iô.,  1.  4,  la  vendedo]  lo  v. 

A.   JEANROy. 


H.  MoRis.  —  Le  Sénat  de  Nice  avant  1792.  Nice,  Mal- 
vaao,  1902  ;  in  8»  de  137  pages.  (Extr.  du  t.  XVIII,  1903,  des 
Annales  de  la  Soc.  des  Lettres,  etc.,  des  Alpes- Maritimes.) 

M.  Moris,  archiviste  départemental,  a  tiré  des  papiers  du  Sénat 
de  Nice  une  foule  de  renseignements  historiques  qui  font  con- 
naître pour  la  première  fois  quelles  étaient  les  attributions  judi- 
ciaires et  politiques  du  corps  créé  en  1614  par  le  duc  Charles- 
Emmanuel  I''.  Après  avoir  indiqué  ce  que  la  justice  était  dans 
le  comté  de  Nice  au  début  du  xvip  siècle  îles  appels  en  dernier 
ressort  allaient  à  Turin  ou  à  Chambéry),  M.  Moris  fait  voir  pour 
quelles  raisons  Charles-Emmanuel  établit  une  cour  souveraine  à 
Nice.  Il  expose  ce  que  fut  d'abord  son  ressort  et  quelles  modifi- 
cations on  y  apporta,  notamment  à  la  suite  des  traités  d'U- 
trecht,  de  Paris  (1718)  et  de  Turin  (1760).  La  juridiction  du  Sénat, 
ses  attributions  administratives,  politiques  et  judiciaires  sont 
analysées  avec  le  plus  grand  soin.  Voici  les  officiers  du  Sénat, 
et  nous  apprenons  comment  ils  furent  choisis,  de  quoi  se  com- 
posèrent leurs  privilèges,  quelle  fut  la  composition  du  corps  de 
1614  à  1792,  quelles  fonctions  chacun  exerçait.  D'autre  part,  voici 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  97 

le  barreau,  les  collèges  des  docteurs  et  des  procureurs.  Nous 
sommes  en  outre  mis  au  courant  du  règlement  intérieur  du  Sénat, 
de  son  cérémonial,  du  système  pénal  qu'il  appliquait.  Il  est 
curieux  de  voir  quels  châtiments  encouraient  le  crime  de  lèse- 
majesté,  la  fausse  monnaie,  les  libelles  diffamatoires,  le  port 
d'armes  prohibées,  le  duel,  le  faux  en  écritures,  le  vol,  le  faux 
serment,  le  métier  de  bandit  ;  comment  se  donnait  la  torture  ;  de 
quelle  façon  les  exécutions  capitales  avaient  lieu.  M.  Moris  a 
appelé  l'attention  sur  quelques  sentences  qui  présentent  un 
intérêt  particulier  :  pour  coups,  blessures,  menaces,  vols,  débau- 
che, adultère,  désertion.  Nous  le  suivons  dans  le  local  du  Sénat, 
puis  dans  certains  tribunaux  spéciaux,  le  Conseil  d'Etat  de 
Nice,  le  magistrat  de  santé  ou  promédicat,  le  consulat  de  la 
mer,  le  tribunal  épiscopal,  les  bureaux  du  «  Conservateur  des 
juifs  ».  L'auteur  nous  indique  aussi  comment  les  collections 
de  ce  Sénat,  conservées  jusqu'en  1895  par  l'autorité  judiciaire, 
vinrent  alors  enrichir  le  dépôt  départemental  :  c'est,  dit-il, 
«  un  des  fonds  les  plus  importants  de  l'ancienne  adminis- 
tration sarde,  et  il  forme  307  articles  d'inventaires  ».  Ces 
mêmes  archives  ont  donné  des  renseignements  historiques,  poli- 
tiques, économiques  et  sociaux  d'une  grande  valeur  :  citons 
notamment  ce  qui  concerne  les  industries  niçoises  au  xviiie  siè- 
cle, le  théâtre  de  Nice,  la  frontière  du  Var,  la  situation  des  juifs 
et  leur  ghetto,  le  procès  du  célèbre  Annibal  Grimaldi  de  Beuil 
(1617-20)  et  de  son  fils  André,  les  ports  francs  de  Nice,  Villefran- 
che  et  Saint- Hospice,  les  droits  de  bandites  ou  pâturages 
d'hiver,  les  consuls  des  puissances  étrangères  qui  résidaient  à 
Nice  (en  1764  un  de  Raguse),  les  inféodations.  Le  volume  de 
M.  Moris,  un  des  plus  importants  ouvrages  sur  l'histoire  de 
l'ancien  comté  de  Nice,  se  termine  (p.  97  à  133)  par  huit  pièces 
justificatives,  rédigées  en  italien.  —  P.  121,  l.  28,  lire  mille  sei- 
cento  trenta  noyé.  P.  60, 1.  24  à  26,  «  du  diocèse  de  Vence  dépen- 
daient les  circonscriptions  des  cantons  actuels  de  Gagnes,  Vence 
et  Coursegoules  »,  dit  M.  Moris.  En  réalité,  ce  diocèse  compre- 
nait quatre  des  huit  communes  de  ce  canton  (Coursegoules, 
Besaudun,  Gréolières,  Bouyon,  qui  au  temporel  appartint  à  la 
Savoie  jusqu'en  1760);  en  outre  une  petite  partie  du  canton  du 
Bar  (deux  de  ses  dix  communes,  Courmes,  Tourettes),  une  très 
petite  de  celui  de  Saint-Auban  (deux  de  ses  treize  communes, 
Andon,  Caille).  G.  Doublet. 

A.NNALES  DU   MIDI.   —  XVI.  7 


98  ANNALES   DU   MIDI. 

A.  Marignan.  Histoire  de  la  sculpture  en  Languedoc  du 
XIP  et  du  XIII"  siècles.  Paris,  Boiiillou,  1902;  in-S»  de 
144  pages. 

M.  Marignan  présente  son  livre  comme  le  début  d'une  étude 
d'ensemble  sur  les  monuments  français  du  xn«  et  du  xiip  siècles. 
Il  est  convaincu  que  beaucoup  d'édifices  religieux  ont  été  vieillis 
à  l'excès  par  les  historiens  de  l'art.  C'est  ainsi  que  la  date  de 
Saint-Trophime  et  du  cloître  d'Arles  doit  être  ramenée  au  der- 
nier tiers  du  xii'  siècle.  Une  fois  l'entente  établie  sur  plusieurs 
œuvres  de  premier  ordre,  on  en  pourra  déduire  certains  prin- 
cipes généraux  qui  s'appliqueront  k  toutes  les  autres.  Reste 
maintenant  à  savoir  si  l'on  pourra  toujours  s'entendre  avec 
M.  M. 

De  cette  restitution  exacte  aux  différents  siècles  des  travaux 
exécutés  par  eux,  doit  ressortir  la  «  grandeur  et  l'originalité  du 
xii«  siècle  français.  »  M.  M.  veut  prouver  d'abord  que  cet  art 
français  n'est  pas  un  art  finissant,  dégénérescence  de  l'art  byzan- 
tin, comme  on  l'a  trop  longtemps  cru,  mais  qu'il  est  au  contraire 
«  un  point  de  départ»;  ensuite  qu'il  est  «  le  maître  écouté  et 
suivi  de  tout  l'Occident  au  xii«  siècle.  »  Nos  sculpteurs  d'alors 
auraient  été  les  grands  ancêtres  des  artistes  pisans.  Ce  sont  eux 
aussi  qui  vont  répandre  le  goût  de  la  statuaire  en  Espagne,  en 
Allemagne  et  dans  les  Pays-Bas. 

Pour  le  moment,  M.  M.  ne  nous  livre  que  ses  études  sur 
l'école  du  Languedoc.  La  sculpture  du  Midi  de  la  France  au 
XII»  siècle  n'est  pas  le  prolongement  de  l'école  gallo-romaine, 
dont  les  traditions  auraient  survécu  pendant  la  première  partie  du 
moyen  âge.  L'auteur  croit  pouvoir  affirmer  :  1°  que  durant  cette 
première  période  la  statuaire  ne  fut  pas  employée  et  qu'il  n'y 
eut  même  pas  à  proprement  parler  d'art  roman;  2»  que  la  sta- 
tuaire, «  création  relativement  récente,  est  née  vers  la  fin  du 
xi"  siècle  »  ;  3"  que  «  ce  sont  les  conceptions  religieuses  des 
clercs  qui  proscrivirent  pendant  de  longs  siècles  la  statuaire  ». 
Il  attache  une  importance  capitale  à  certain  texte  d'un  écolâtre 
de  Chartres  qui,  au  xi^  siècle,  s'indignait  de  voir  à  Conques  des 
statues  en  argent  et  en  or  de  saints  personnages  et  déclarait 
que  cette  coutume  toute  païenne  eût  été  considérée  dans  les 
contrées  plus  septentrionales    comme   un  sacrilège.  Comment 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  99 

donc  expliquer  la  renaissance  de  la  statuaire?  C'est  sur  les  bords 
de  la  Garonne  que  nous  trouvons  les  plus  anciennes  sculptures 
léguées  par  le  moyen  âge  :  les  statues  debout  du  cloître  de  Moissac 
et  les  bas-reliefs  du  déambulatoire  de  Saint-Sernin  de  Toulouse. 
Pourquoi  n'est-ce  pas  en  Provence,  où  l'emploi  constant  de  la 
pierre  pouvait  entretenir  la  persistance  des  traditions  gallo-ro- 
maines? C'est  que  le  développement  de  cette  statuaire  médiévale 
ne  doit  rien  à  la  plastique  antique,  pas  plus  qu'a  l'art  de  l'orfè- 
vrerie, quoi  qu'on  en  ait  dit.  M.  M.  ne  veut  y  reconnaître  que  l'in- 
fluence prépondérante  de  la  peinture,  celles  de  la  littérature 
ecclésiasiique  et  de  la  culture  supérieure  du  Midi.  Retenons  tou- 
tefois ce  double  aveu.  Si  M.  M.  se  refuse  d'abord  à  percevoir 
aucun  lien  entre  la  sculpture  française  du  xii«  siècle  et  l'art 
byzantin,  il  déclare  cependant  que  les  plus  vieux  monuments  de 
cette  sculpture,  à  Moissac  et  à  Toulouse,  «  prouvent  une  inspi- 
ration des  artistes  byzantins  ».  D'autre  part  si  c'est  dans  le  Midi 
qu'il  découvre  les  premières  sculptures  du  moyen  âge,  il  affirme 
que  cet  art  méridional  n'a  pu  vivre  qu'en  subissant  l'influence 
dominatrice  du  Nord. 

Voici  les  monuments  que  M.  M.  étudie  en  détail,  avec  les  da- 
tes qu'il  propose.  Abbaye  de  Moissac,  Pour  le  premier  étage 
de  la  tour  et  les  trois  grandes  baies  qui  divisent  ses  murs,  il 
accepte  la  date  approximative  de  M 30-11 35;  pour  la  voûte  et  les 
piliers  du  narthex,  celle  de  M30-M40;  pour  le  tympan  du  por- 
tail, celle  de  1140-1145;  l'église  actuelle  serait  au  plus  tôt  de 
1160-1180.  Du  cloître  bâti  par  l'abbé  Ansquitil  (1083-1115),  res- 
tent les  statues  des  apôtres  et  de  l'évêque  Durand.  Les  chapi- 
teaux du  cloître  actuel  ne  peuvent  être  que  de  la  fin  du  xiF  siè- 
cle; ils  sont  postérieurs  à  l'incendie  de  1188.  —  Abbaye  de  Saint- 
Sernin  de  Toulouse.  Les  reliefs  du  déambulatoire  sont  attribués, 
non  sans  vraisemblance,  au  cloître,  «  qui  a  dû  être  bâti  dans  le 
premier  tiers  du  xii»  siècle.  »  Les  chapiteaux  de  la  porte  Miége- 
ville,  ceux  de  la  façade,  le  bas-relief  des  signes  du  Zodiaque  (au 
Musée)  sont  du  dernier  tiers  du  xii'  siècle.  —  Eglise  de  la  Dau- 
rade, à  Toulouse.  Les  chapiteaux  accusent  le  dernier  tiers  du 
xn«  siècle.  Un  certain  nombre  d'entre  eux  (trahison  de  Judas, 
Christ  aux  Oliviers,  lavement  des  pieds,  cène,  flagellation,  cal 
vaire,  descente  de  croix,  Jésus  aux  limbes,  saintes  femmes  au 
tombeau,  Noli  me  tangere^  pèlerins  d'Emmaùs,  ascension,  des- 
cente du  Saint-Esprit,  les  quatre  fleuves  du  paradis)  trahissent 


100  ANNALES  DU  MIDI. 

une  influence  septentrionale.  «  La  porte  de  la  salle  capitulaire 
de  la  Daurade  montre  combien  fut  prompte  et  rapide  l'absorp- 
tion de  l'art  du  Midi-Ouest  par  les  écoles  du  Nord.  »  —  Eglise 
cathédrale  de  Saint-Etienne,  à  Toulouse.  «  Les  deux  statues  de 
la  porte  capitulaire  (cette  porte  est  à  placer  entre  H75  et  4190) 
et  les  chapiteaux  du  cloître  inaugurent  à  Toulouse  un  faire  spé- 
cial, une  esthétique  nouvelle;  elles  sont  la  marque  de  la  fin  de 
l'Ecole  toulousaine.  Le  Nord  a  conquis  désormais  le  Midi-Ouest.  » 

—  Eglise  de  Beaulieu.  Le  porche  sculpté  (jugement  dernier)  est 
de  la  fin  du  xii»  siècle;  l'abside  et  le  transept  sont  antérieurs. 

—  Eglise  de  Carennac.  Portail  sculpté,  avec  Jésus  en  gloire,  les 
évangélistes  et  les  apôtres.  —  Eglise  de  Souillac.  Trumeau  et 
bas- reliefs  (saint  Pierre  et  Isaïe)  d'un  portail  antérieur  à  la  re- 
construction du  XIII»  siècle.  —  Abbaye  de  Conques.  Porche  du 
jugement  dernier  et  chapiteaux  du  cloître  (fin  du  xii»  siècle).  — 
Hôtel  de  ville  de  Saint-Antonin.  Reliefs  d'Adam  et  Eve  et  de 
l'Archange,  au  premier  étage.  —  Cahors.  Portail  de  1200  1210, 
nouvelle  preuve  de  l'influence  des  artistes  de  l'Ile-de-France,  -r- 
Saint-Bertrand  de  Comminges.  «  Je  crois  que  les  artistes  qui  ont 
travaillé  à  la  décoration  du  porche  appartiennent  à  l'atelier  de 
Toulouse  des  dernières  années  du  xii*^  siècle.  » 

H.  Graillot. 


REVUE    DES   PÉRIODIQUES 


PÉRIODIQUES  FRANÇAIS  MÉRIDIONAUX. 

Alpes  (Hautes-). 

Annales  des  Alpes,  t.  VI,  1902. 

p.  5-14.  F.-N.  NicoLLET.  Le  Gapençais  revendiqué  par  la  Provence.  [Au 
xn=  s.,  Gap  dépendait  du  comté  de  Forcalquier,  donc  de  la  Provence. 
Ensuite,  il  y  eut  à  ce  sujet  discussion  entre  les  dauphins  et  les  comtes, 
plus  tard  entre  les  parlements  de  Grenoble  et  d'Aix,  etc.  Ces  démêlés 
sont  contés  avec  précision  dans  un  Mémoire  tiré  de  la  Bibl.  Méjanes, 
intitulé  «  Dauphiné,  Gap  et  Tallard  »,  que  M.  N.  publie,  ainsi  qu'un 
hommage  du  Gapençais  fait  en  1257  par  le  dauphin  Guignes  au  comte 
Charles  de  Provence.]  —  P.  14-35.  P.  G[uillaumeJ.  La  Eévolution  de 
1790-1795  à  Guillestre,  d'après  les  délibérations  communales.  (Fin, 
p.  72-83.)  [Analyse  de  ces  délibérations,  qui  permettent  de  suivre  «  les 
progrès  des  idées  de  la  Révolution  dans  une  commune  reculée  et  paisi- 
ble ».]  —  P.  35-40.  Id.  Petite  chronique  gapençaise,  d'après  les  «  Jour- 
naliers »  de  la  ville.  xvii«  et  xviii»  siècles.  (Suite,  et  p.  161-7.)  —  P.  49- 
59.  Id.  Correspondance  de  M^^  Dessolle,  évoque  de  Digne,  avec  le  baron 
de  Ladoucette,  préfet  des  Hautes-Alpes.  (Suite,  p.  130-40,  187-97.  234-43, 
286-96.)  [De  1802  à  1805.  Sur  la  mise  à  exécution  du  Concordat;  cu- 
rieuse pour  l'histoire  politique  et  religieuse.]  —  P.  59-66.  In.  Le  parler 
de  Savines  en  1391.  [Deux  extraits  de  reconnaissancee  faites  à  un  cosei- 
gneur  du  mandement  par  les  habitants.  Ces  sortes  de  monuments  sont 
très  rares,  donc  remarquables.  P.  63  :  les  «  vi  cazes  reals  «  =  les  six 
cas  royaux  (régales),  et  non  réels  (reaies).]  — P.  97-111.  G.  Olphe-Gal- 
ijARD.  Notes  pour  servir  à  l'histoire  de  la  famille  gapençaise  Olphe- 


102  ANNALES    DU    MIDI. 

Gaillard.  (Suite,  p.  172-iS6,  225-33.)  [Cette  famille,  qui  a  joui  d'une  grande 
et  traditionnelle  notoriété  dans  le  pays,  apparaît  en  1479  ;  elle  a  fourni 
force  procureurs,  notaires,  consuls.]  —  P.  112-30.  F.-N.  Nicollet.  Les 
derniers  membres  de  la  famille  d'Orange -Montpellier  et  leurs  posses- 
sions dans  le  Gapençais.  (Suite,  p.  217-25,  269-8t).)  [Sur  cet  intéressant 
article,  voir  plus  bas,  aux  «  Livres  annoncés  sonnnaircment  »,  p.  152.] 
—  P.  168-71.  M.  de  Berluc-Pérussis  et  les  «  Berlue  au  diocèse  de  Gap  ». 
[Tableau  généalogique  desdits  Berlue,  dressé  par  le  regretté  savant  pro- 
vençal.] —  P.  244-9.  P.  Guillaume.  Les  anciens  habitants  de  Chaudun, 
leurs  obligations,  leurs  privilèges,  etc.,  1593-1713.  [Communauté  dont 
on  peut  fixer  exactement  l'origine  (1593)  et  la  disparition  (1895).  Elle 
avait  pour  seigneur  le  chapitre  de  Gap.  Analyse  des  titres.]  —  P.  296-9. 
Les  débats  relatifs  à  la  Déclaration  des  droits  de  l'homme  et  du  citoyen, 
d'après  une  lettre  contemporaine  du  député  J.-L.  Cheynet  à  Marchon, 
maire  de  Gap  (25  août  1789).  P.  D. 

Ariège. 

Bulletin  périodique  de  la  Société  Ariégeoise  des  Sciences^ 
Lettres  et  Arts  (Foix),  et  de  la  Société  des  Études  du  Couse- 
rans  (Saint-Girons),  t.  IX,  1902-1903. 

P.  7-16.  Abbé  Castet.  Proverbes  patois  du  Couserans  avec  préface  de 
l'abbé  Cau-Durban.  [Série  faisant  suite  à  ceux  parus  dans  le  tome  II 
du  même  recueil  ;  intéressant  spécimen  du  dialecte  gascon  parlé  dans 
les  montagnes  de  Saint-Girons,  ancien  Couserans.  Dans  cette  série, 
quelques  proverbes  sont  peu  intelligibles  et  auraient  dû  être,  comme 
ceux  du  tome  II,  accompagnés  de  notes.]  —  P.  16-24.  F.  Pasquier. 
Eèglement  pastoral  à  la  fin  du  xv«  siècle  dans  la  vallée  du  Couserans. 
[Étude  d'après  une  charte  inédite,  publiée  avec  un  texte  roman,  des 
notes  et  une  préface.  Intéressants  détails  de  la  réglementation  pasto- 
rale.] —  P.  31-2.  Flous  (M"").  Remedis  det  temps  bielh  en  pays  de  Couse- 
rans. [Dialecte  gascon  du  Saint-Gironnais.]  —  P.  32-3.  D.  C.  Réparations 
de  la  tour  de  Foix,  à  la  Bastide-de-Sérou  (Ariège),  en  1647.  —  P.  34-9. 
M.  Fauché.  Excursion  de  la  Société  Ariégeoise  et  de  la  Société  des 
Études  du  Couserans.  [Descriptions  archéologiques;  vers  en  dialecte  de 
la  Bastide-de-Sérou,  mi-languedocien,  mi-gascon.]  —  P.  49-73.  F.  Pas- 
quier. Substitution  de  mari  à  Artigat  en  1560  ou  histoire  de  Martin 
Guerre,  d'après  les  témoignages  contemporains.  [Quoique  invraisem- 
blable, l'histoire  de  cet  homme  qui,  profitant  d'une  ressemblance  phy- 


PÉRIODIQUES  MÉRIDIONAUX.  103 

sique,  se  fait  passer  pour  le  mari,  est  parfaitement  authentique;  elle 
est  prouvée  par  un  arrêt  de  mort  du  Parlement  de  Toulouse  en  date  du 
12  septembre  1560  et  par  le  témoignage  de  plus  notables  contemporains  : 
de  Thou,  Henri  Estienne,  Lafaille,  Montaigne.  Les  textes  juridiques  et 
littéraires  sont  cités  à  la  suite  de  l'étude.]  —  P.  74-83,  121-32,  165-74.  De 
Bardies.  Les  guerres  de  religion  en  Couserans  d'après  les  archives  de 
Muret  (l",  2"  et  3«  parties).  [C'est  une  suite  et  un  complément  de 
l'étude  de  l'abbé  Lestr.\de  sur  les  Huguenots  en  Co'mniinges.  Impor- 
tante contribution  à  l'histoire  d'une  région  dont  les  auteurs  s'étaient 
peu  occupés  jusqu'à  présent.]  —  P.  83-7.  De  Bardies.  Conférence  faite 
à  l'hôtel  de  ville  de  Saint-Girons  par  ]\I.  Signorel  sur  P.  Soulé,  origi- 
naire de  Castillon  (Ariège)  et  devenu  homme  politique  aux  États-Unis. 

—  P.  89-106.  L.  M.  Un  coin  des  Pyrénées  :  Bélesta  (Ariège)  et  ses  envi- 
rons. (Gravures.)  [Description,  détails  d'histoire  locale,  traditions,  etc.] 

—  P.  113-20,  175-202.  G.  Doublet.  Histoire  de  la  maison  de  Foix-Rabat. 
(8'  et  9«  parties,  xviii^  siècle.  )  [Cette  étude  est  accompagnée  d'un  avant- 
propos  contenant  des  détails  complémentaires  sur  les  chapitres  précé- 
dents.] —  P.  133-40.  Abbé  J.-M.  Vidal.  Moines  alchimistes  à  l'abbaye 
de  Boulbonne  (1339).  A  la  suite,  deux  bulles  de  Benoît  XII  (1339-1340) 
pour  prescrire  une  enquête  contre  des  moines  accusés  d'alchimie  et 
pour  faire  condamner  les  coupables.  [Renseignements  intéressants  sur 
des  pratiques  de  sorcellerie.]  —  P.  141-55.  Abbé  F.-J.  Samiac.  Les  sco- 
lains  dans  l'ancien  diocèse  de  Couserans.  [Étude  très  documentée  sur  une 
institution  peu  connue  :  les  scolains  étaient  généralement  des  clercs, 
des  sacristains,  des  aides  destinés  à  aider  le  clergé  paroissial;  ce 
n'était  que  par  exception  qu'ils  étaient  chargés  des  écoles.]  —  P.  155-6. 
F.  Pasquier.  Quittance  de  cent  écus  d'or  faite  par  Raymond-Roger  de 
Comminges,  vicomte  de  Couserans,  à  Gaston  de  Lévis,  seigneur  de 
Léran,  qui  avait  reçu  cette  somme  à  titre  d'aide.  Saint-Girons,  11  août 
1425;  texte  en  roman.]  —  P.  203-5.  Chanoine  Barbier.  La  cueillette  de 
l'or  à  Pamiers  au  xvii«  siècle.  .►  F.  P. 

Aude. 

Bulletin  de  la  Société  d'études  scientifiques  de  l'Aude^, 
t.  XIII,  1902. 

p.  35-219.  H.  MuLLOT.  Excursion  du  7  juillet  1901  à  Castelnaudary,  Vil- 
leneuve-la-Comptal,  Montauriol,  Payra,  Salles-sur-l'Hers,  chàteail  de 

1.  Ce  Bulletin,  qu'il  ne  faut  pas  confondre  avec  les  Mémoires  de  la 


104  ANNALES   DU  MIDI. 

Marquein ,  Saint-Michel-de-Lanès  ,  Molleville ,  Mas-Saintes-Puelles. 
[Renseignements  sur  ces  localités,  de  valeur  très  variable,  souvent  ori- 
ginaux et  fondés  sur  des  documents  d'archives.  Seule,  l'étude  de  Mar- 
quein est  approfondie,  château  et  communauté,  paroisse,  famille  sei- 
gneuriale, généalogies,  statistique.  Point  de  documents.] 

P.  D. 

Cantal. 

Revue  de  la  Haute- Auvergne,  1902  (suite). 

p.  233-66,  405-18.  Ch.  Felgères.  Rivalité  des  Bourbons  et  des  Armagnacs 
à  Chaudesaigues  (1461-1470).  [Bonne  étude  dont  nous  avons  rendu  compte 
{Annales,  i.  XV,  p.  576).]  —  P.  267-318.  M.  Boudet  et  R.  Grand.  Étude 
historique  sur  les  épidémies  de  peste  en  Haute-Auvergne  (xiv«-xviii«  siè- 
cles). [Fin  de  cet  excellent  travail.  Les  épidémies  de  1579  à  1779,  avec 
plusieurs  appendices  :  une  note  sur  la  fausse  charte  de  Laurie,  sur  la 
peste  de  1318;  des  pièces  sur  la  conduite  d'Aurillac  à  l'égard  de  Figeac 
en  1653  ;  l'origine  du  nom  de  Ci'oumaly,  sans  doute  forme  dérivée  de 
Cromalhet  ou  Croix-Malhet.]  —  P.  319-25.  A.  Vernière.  Pierre  d'Albo, 
coadjuteur  (1518-1530)  de  Thomas  et  de  Guillaume  Du  Prat,  évêques  de 
Glermont.  [Réunion  dos  renseignements  qu'on  a  sur  ce  personnage.]  — 
P.  428-32.  Aymar.  Notes  de  folklore  cantalien,  recettes  de  médecine 
populaire.  —  P.  441-2.  Liste  des  documents  acquis  par  les  archives  du 
Cantal. 

Tome  V,  1903. 

p.  59-80.  A.  Bastid.  Notes  et  documents  inédits  sur  l'histoire  de  Saint- 
Gernin  et  ses  environs.  [Documents  intéressants  sur  les  revenus  immo- 
biliers des  nobles  et  privilégiés  de  Saint-Cernin  en  1789.]  —  P.  183-202, 
249-68.  (A  suivre).  Ch.  Felgères.  Chaudesaigues  et  le  Caldaguès  avant 
la  féodalité.  [Les  sires  de  Saint-Urcise  (1025-1290),  premiers  seigneurs  de 
Chaudesaigues  ;  les  Réveilhac,  seigneurs  du  Couffour  (1165-1322)  ;  les  sei- 
gneurs d'Oradour,  de  Brezons.  Très  bonne  étude  sur  cette  période  si 
obscure.]  —  P.  203-6.  R.  Grand.  Lettre  de  rémission  en  faveur  de  Ber- 
nai'din  Lavergne,  de  Murât,  accusé  d'avoir  commis  un  meurtre  à 
Allanche  (août  1542).  [Texte  inédit.]  —  P.  215.  Découverte  de  vestiges 
gallo-romains  à  Saint-Flour.  —  P.  217-48.  E.  Cheylud.  L'École  centrale 

Société  des  arts  et  des  sciences  de  Carcassonne,  ne  contient  ordinaire- 
ment que  des  articles  de  science  pure,  de  géologie,  de  botanique,  etc.  Nous 
n'avions  pas  eu  jusqu'ici  l'occasion  de  le  dépouiller. 


PÉRIODIQUES  MERIDIONAUX.  105 

du  département  du  Cantal  (anV-anXT).  Notes  et  documents.  (A  suivre.) 

—  P.  869-89.  M.  BouDET.  Laurent  de  Belloy,  membre  de  l'Académie  fran- 
çaise, poète  dramatique  (1727-177."))  et  son  biographe  M.  Pierre  Valen- 
tin.  [Étude  sur  l'auteur  du  Siège  de  Calais,  de  Gaston  et  Bayard,  etc.] 

—  P.  290-5.  De  Dienne.  La  reine  Marguerite  à  Cariât.  [Surtout  d'après 
l'Itinéraire  raisonné  de  Marguerite  de  Valois...  de  M.  Lauzun.]  — 
P.  302-3.  Le  fonds  Lacabane  aux  archives  du  Lot.  [Liste  des  pièces 
qui  ont  rapport  au  Cantal.] —  P.  305-6.  Analyse  de  plusieurs  pièces  de 
la  feuille  34  àeVInvetitaire  des  Archives  départementales  du  Cantal 
(série  E)  [En  particulier  d'an  contrat  de  mariage  en  dialecte  du  Kouer- 
gue  de  1523.]  —  P.  306-7.  Liste  des  documents  entrés  récemment  aux 
archives  du  Cantal.  Ch.  L. 

Charente-Inférieure. 

I.  A?xhives  MstotHques  de  la  Saint onge  et  de  VAunis., 
t.  XXXI,  1902. 

P.  1-202.  J.  Chavanon.  Renauld  VI,  de  Pons,  vicomte  de  Turenne  et  de 
Cariât,  seigneur  de  Ribérac,  etc.,  lieutenant  du  roi  en  Poitou,  Saintonge 
et  Angoumois,  conservateur  des  trêves  de  Guyenne  (vers  1348-1427). 
[Ceci  n'est  pas  seulement  une  publication  de  textes,  mais  aussi  un 
mémoire  remarquable  sur  un  personnage  peu  connu,  quoique  très  digne 
de  l'être.  Renauld  VI  entre  dans  la  vie  active  sous  la  suzeraineté 
anglaise.  Il  combat  en  Espagne  aux  côtés  du  prince  Noir  (1367),  puis 
en  Roucrgue  avec  Ghandos,  contre  son  propre  beau-père,  le  comte  de 
Périgord,  et  autres  seigneurs  révoltés  qui,  de  leur  côté,  faisaient  appel 
à  Charles  V.  Après  maintes  variations,  en  avril  1371,  il  abandonne  le 
parti  anglais  malgré  sa  femme,  qui  livra  ses  châteaux  aux  Anglais  et 
l'obligea  à  les  reprendre  de  vive  force.  Ce  grand  seigneur,  vaillant  capi- 
taine et  bon  administrateur,  devient  en  1384  l'un  des  conservateurs  des 
trêves  dites  de  Guyenne;  il  rend  en  cette  qualité  de  très  grands  servi- 
ces qui  firent  de  lui,  au  commencement  du  xv"  siècle,  le  premier  baron 
de  Saintonge  et  l'un  des  principaux  du  royaume.  M.  Ch.  a  parfaitement 
précisé  le  détail  de  ses  opérations  et  négociations;  il  a  étudié  les  trêves 
de  Guyenne,  lesquelles  intéressaient  tout  le  pays  de  Saint-JMalo  à 
Bayonne,  et  le  rôle  des  conservateurs;  il  a  esquissé  la  fortum'  territo- 
riale du  sire  de  Pons  en  Aunis,  Saintonge,  Poitou,  Périgonl,  Limousin, 
Auvergne  :  domaines  si  étendus  que,  réunis,  ils  auraient  formé  une 
véritable  province.  85  pièces  justificatives.]  —  P.  203-15.  A.  de  Bremond 


106  ANNALES    DU    MIDI. 

d'Ars.  Quatre  lettres  inédites  de  Jacques,  sire  de  Pons,  vicomte  de 
Turenne  et  de  Kibérac  (1446-1447).  [Fils  du  précédent,  qui  ne  s'appelait 
pas  «  René  V  «,  comme  on  l'a  vu  et  comme  ne  l'a  point  vu  M.  de 
B.  d'A.  ;  il  était  tombé  en  disgrâce  auprès  du  roi  et  s'excuse  très  hum- 
blement.] —  P.  21(5-23.  A.  Steyert.  Un  document  sur  le  prieuré  de 
Bouteville  (1516).  [Prieuré  du  diocèse  de  Saintes,  dépendant  de  l'abbaye 
de  Savigny  en  Lyonnais.  Enquête  sur  le  prieur,  J.  Girault,  qui  a  été 
révoqué  et  qui  allègue  qu'il  est  calomnié  par  ses  ennemis  ligués  contre 
lui.  Dépositions  en  sa  faveur;  mais  elles  jettent  le  jour  le  plus  fâcheux 
sur  les  mœurs  ecclésiastiques.  La  pièce  n'est  qu'analysée.]  —  P.  224- 
350.  L.  AuDiAT  et  Lemonnier.  Eglise  de  Saintes  depuis  1789  jusqu'à  la 
lin  de  1796.  [Mémoire  rédigé  par  Taillet,  vicaire  général  de  l'évêque 
P.-L.  de  la  Rochefoucauld,  qui  périt  aux  Carmes  de  la  rue  de  Vaugi- 
rard,  le  2  sept.  1792.  Taillet  émigra  en  Espagne  ce  même  jour  et  ne 
rentra  en  France  que  six  ou  sept  ans  plus  tard,  circonstance  qui  enlève 
quelque  valeur  à  son  mémoire;  on  devine  dans  quel  esprit  il  l'a  rédigé. 
A  la  suite,  listes  des  prêtres,  très  nombreux,  qui  ont  voulu  «  entrer 
dans  le  sentier  de  la  philosophie  »;  liste,  bien  moins  longue,  de  ceux 
qui  ont  émigré.]  —  P.  351-63.  Abbé  Guionneau.  La  commanderie  de 
Saint-Authon-du-Bois.  [Près  Pons.  Dénombrement  de  1463.] 

T.  XXXII,  1902. 

p.  1-436.  Registres  de  l'échevinage  de  Saint-Jean-d'Angély  (1332-1496) 
p.  p.  Denys  d'Aussy  (t.  III,  suite).  [Ce  volume,  qui  n'épuise  pas  les 
documents,  s'étend  de  mars  1412  à  février  1427  environ.  Les  deux  pre- 
miers (t.  XXIV  et  XXVI  de  la  collection)  avaient  paru  en  1895  et  1897. 
On  sait  combien  grande  est  la  valeur  de  textes  semblables.  D'une  part, 
ils  nous  renseignent  avec  une  précision  chronologique  parfaite  sur  tous 
les  grands  événements  qui  ont  touché  plus  ou  moins  la  ville  ;  de  l'au- 
tre, ils  nous  font  assister,  au  jour  le  jour,  à  sa  vie  intime  :  très  curieux, 
entre  autres,  sont  les  jugements  rendus  par  les  échevins.  Saint-Jean- 
d'Angély  ne  semble  pas  avoir  trop  souffert,  malgré  les  charges  qui  en 
i-ésultaient  pour  elle,  des  circonstances  terribles  où  se  trouvait  alors  le 
royaume.  Il  faut  espérer  que  l'éditeur  mettra  un  copieux  index  à  la  fin 
de  son  excellente  publication.]  P.  D. 

II.  Revue  de  Saintonge  et  d'Aunis,  t.  XXII,  1902. 

p.  37-42.  Dom  Besse.  Un  bénédictin  saintongeais.  Dom  Mommole  Geof- 
froy. [Né  à  Saintes  en  1615;  f  1686.]  —  P.  100.  P.  d'Estrêe.  Lettre  de 
Barentin,  intendant,  au  lieutenant  de  police  Hérault  sur  son  arrivée  à 


PÉRIODIQUES  MÉRIDIONAUX.  107 

La  Rochelle.  [2  avr.  1737;  très  humoristique.]  —  P.  104-7.  Un  épisode 
de  la  prise  de  Saintes  par  les  protestants.  Lettres  de  Chai'les  IX, 
11  avr.  1570,  p.  p.  Bourde  de  la  Rogerie.  —  P.  107-9.  V.  Dubarat  et 
L.  AuDUT.  Le  jansénisme  à  l'abbaj'e  de  Notre-Dame  de  Saintes.  [Cf. 
aussi  plus  loin,  p.  167.]  —  P.  176-81.  L.  Audiat.  Un  beilroi  en  Saintonge. 
[A  Saintes,  hôtel  de  ville;  xvi"  siècle.  Planche.]  —  P.  24:^-6.  E.  Rêveil- 
laud.  Quelques  mots  de  patois  saintongeais.  [Avec  notes  de  M.  A.  Tho- 
mas, notre  directeur  honoraire.]  —  P.  248-53.  L.  A.  Les  fêtes  publiques 
pendant  la  Révolution.  [A  Rochefort  :  l'une  pour  honorer  la  mémoire 
du  général  Joubert,  l'autre,  les  ministres  français  assassinés  à  Rastadt.j 
—  P.  304-5.  Une  prise  de  possession  par  un  curé  intrus.  [17  avr.  1791; 
INIignen-Planier,  curé  de  Saint-Léger  en  Pons.]  —  P.  349-50.  Les  archi- 
ves avant  1789.  [Dans  les  subdélégations  de  Cognac  et  d'Angoulême,  en 
1769.]  —  P.  350-4.  Denys  d'Aussy.  Registres  protestants  de  Tonnay- 
Boutonne.  [Naissances  du  14  nov.  1683  au  22  janv.  16S4;  ensuite  les 
décès  seuls  sont  mentionnés,  sans  doute  à  cause  de  la  persécution  reli- 
gieuse qui  commence.  Le  rédacteur  est  le  pasteur  Jacques  Sanxay,  qui 
s'expatria  au  commencement  de  1585.  Texte.]  —  P.  354-6.  L.  Grasilier. 
Le  brave  Rondeau.  [Général  de  la  République,  né  à  La  Rochelle,  féli- 
cité par  le  Directoire  pour  sa  belle  conduite  en  Italie,  mort  d'une  bles- 
sure, le  15  juillet  1796.] —  P.  356-7.  Les  émigrés  saintongeais  à  Munster 
(1792).  —  P.  357-8.  Le  brigandage  dans  la  Charente-Inférieure  en  l'an  IV 
(22  déc.  1795).  —  P.  358-60.  Les  martyrs  des  Carmes.  [Acte  de  naissance 
à  Saint-Christophe,  près  La  Rochelle,  de  P. -M.  Guérin,  l'une  des  vic- 
times du  massacre  de  sept.  1792.]  —  P.  360-7.  Royan,  Brouage  et  La 
Rochelle  en  1638.  [Récit  du  voyageur  Godefroy;  texte.]  —  P.  370-4. 
Deux  cloches  aux  noms  historiques.  [L'une  à  Saint-Cliristophe,  de  1728, 
donnée  par  Pierre  Chertemps,  seigneur  de  Seuil ,  chevalier,  l'autre  à 
Bignay,  près  Saint-Jean-d'Angély,  de  1664,  due  à  la  mère  du  seigneur, 
G.  Lecoigneux,  marquis  de  Bellarbre.]  —  P.  380-6.  A.  Lételié.  Une 
Saintongeoise,  Xandre  Dizier,  seconde  femme  de  L.  Gargoulleau,  maire 
de  La  Rochelle.  [Vers  1590.  C'était  son  second  mari;  elle  en  eut  trois.] 

T.  XXIII,  1903. 

p.  28.  Les  Seignette  de  La  Rochelle.  —  P.  30-3.  H.  Cloti/ot.  Le  théâtre 
révolutionnaire  à  Saintes.  [Avec  un  texte.]  —  P.  33-5.  D'  Vigen.  Un 
curé  guérisseur.  [Larréa,  d'origine  espagnole,  1816-29.]  —  P.  35-.53. 
L.  Audiat.  Un  poète  oublié.  Jacques  Delille  (1738-1813),  abbé  de  Saint- 
Séverin.  [Partie  d'un  travail  paru  sous  le  même  titre  dans  la  Revue  du 
monde  catholique,  l"  oct.-]5  nov.  1902.  Delille  était  né  à  Clermont- 


108  ANNALES  DU   MIDI. 

Ferrand  et  fut  abbé  en  Saintongc]  —  P.  53-62.  J.  Pellisson.  Le  bri- 
gandage dans  la  Charente  en  l'an  V  et  dans  la  Charente-Inférieure  en 
l'an  VIII.  [Proclamations  et  arrêtés  fort  intéressants.]  —  P.  81-160. 
Louis  Audiat.  [Biographie  du  regretté  fondateur  de  la  Revue  et  des 
Archives  historiques  de  Saintonge.  Profitons-en  pour  rectifier  une 
erreur  de  la  notice  nécrologique  que  nous  lui  avons  consacrée  : 
M.  Audiat  n'était  pas  Saintongeais  d'origine,  étant  né  à  Moulins  en 
1832;  mais  en  1858  il  vint  à  Saintes  et  n'en  bougea  plus.]  —  P.  191-3. 
J.  Pellisson.  L'almanach  des  députés  à  l'Assemblée  nationale.  [Plai- 
santeries contemporaines  sur  ceux  du  bailliage  d'Angoulême,  des  séné- 
chaussées de  La  Rochelle  et  de  Saintonge.]  —  P.  193-5.  La  Morinerie. 
Pierre  Fontaine.  Armoiries  de  la  famille  Fontaine.  [^Ministre  qui  abjura 
en  1685.]  —  P.  195-213.  P.  d'Estrée.  La  fin  d'un  fermier  général. 
[Pelletier  de  Montendre.  Après  avoir  commis  force  sottises,  s'être  fait 
mettre  à  la  Bastille  et  à  Charenton,  il  mourut  à  Montendre  en  1776.]  — 
P.  252-61.  P.  Lemonnier.  L'enseignement  primaire  à  Rochefort-sur-Mer 
(1789-1803).  [Intéressant.  D'après  les  archives  de  Rochefort.]  —  P.  261-5. 
H.  Clouzot.  Les  exécutions  criminelles  à  Rochefort  en  1782.  [Tarif  des 
exécutions,  etc.]  —  P.  269-72.  Registres  paroissiaux  de  Saint-Coutant- 
le-Petit.  [De  1737  à  1818,  avec  notes  diverses.]  —  P.  272-83.  Cli.  Dangi- 
BEAUD.  L'inscription  du  terrier  de  Toulon.  [Toulon  près  Saujon.  Ruine 
bien  connue,  étudiée  à  nouveau,  à  cause  de  la  découverte  récente  d'une 
inscription  pleine  de  mystères.  Cf.  Jullian,  Rev.  des  et.  anc,  1903.]  — 
P.  345-51.  Extrait  des  minutes  de  Chevalier,  notaire  à  Corme-Royal. 
[Première  moitié  du  xvii«  siècle.  Prieuré  de  Fourne;  les  soudards  de  la 
Fronde;  les  Régnier  de  la  Planche;  les  Lebreton  de  Ransannes.]  — 
P.  351-4.  E.  Réveillaud.  Quelques  mots  de  patois  saintongeais.  (Suite 
et  à  suivre.)  [Acries-Aneut;  avec  notes  de  A.  Thomas.]  —  P.  375-83. 
Lemonnier.  Caliiers  des  doléances  et  remontrances  des  corporations  de 
la  ville  de  Rochefort-sur-Mer  et  des  paroisses  du  bailliage  eu  1789. 
[Tableau  des  corporations;  analyse  des  doléances.]  —  P.  383-402. 
Ch.  Dangibeaud.  La  mosaïque  de  Lescar  est-elle  romaine?  [L'auteur  se 
propose  de  résoudre,  à  l'aide  d'arguments  saintongeais,  un  problème  du 
Béarn;  cette  mosaïque,  découverte  en  1838,  est-elle  romaine  ou  romane? 
Conclusion,  après  interprétation  de  la  mosaïque  :  elle  est  du  xii^  siècle.] 
—  P.  402-6.  A.  Mesnard.  Le  serment  fédératif  des  troupes  nationales 
du  district  de  Saint-Jean-d'Angély  en  1790.  —  P.  406-10.  Etat  des  titres 
qui  concernent  la  propriété  des  eaux  de  la  seigneurie  des  Tabarits. 
[1504-1744.]  —  P.  410-20.  Papiers  de  la  famille  Baudoin  de  Laudeberde- 
rie.  [De  Taillebourg;  xvH'  et  xviii'  s.  Famille  protestante,  partiellement 


PÉRIODIQUES  MÉRIDIONAUX.  109 

convertie  de  force  en  1685.  En  1742, 1754,  des  enfants  lui  sont  enlevés  par 
lettres  de  cacliet.]  P.  D. 

Drôme. 

I.  Bulletin  cf histoire  ecclésiastique  et  iV archéologie  reli- 
gieuse des  diocèses  de  Valence,  Gap,  Grenoble^  Viviers, 
t.  XXI,  1901-1903*. 

P.  5-6.  F.  Vernet.  Bulle  de  Clément  VI  sur  la  fête  des  fous  à  Vienne 
(1344).  [Lo  pape,  après  plainte  de  l'archevêque  de  Vienne,  charge  celui  de 
Lyon  de  faire  une  enquête  sur  les  scandales  provoqués  annuelleinent  par 
l'élection  d'un  abbé  des  fous,  et  l'autorise  à  excommunier  les  clercs  et  les 
prêtres  qui  se  laissent  élire,  ont  des  réunions  fréquentes  et  font  «  des 
choses  illicites  ».]  —  P.  7-8.  Chanoine  G.  Perrossier.  Nomination  d'un 
curé  d'Alixan  (Drôme).  [Procès-verbal,  par  notaire  (K339),  de  l'installa- 
tion, par  le  prieur  de  Saint-Martin  de  Coussaud,  patron  de  l'église  de 
Saint-Didier  d'Alixan,  du  curé  de  cette  paroisse,  qui  promet  fidélité  au 
prieur  et  s'engage  à  lui  remettre  les  mêmes  redevances  que  ses  pré- 
décesseurs.] —  P.  9-23.  Abbé  J.-B.  Martin.  Nécrologe  des  capucins  de 
la  custodie  du  Dauphiné.  [Extrait,  relatif  au  Dauphiné,  d'une  liste  de 
capucins  décédés  et  enterrés  dans  les  couvents  de  la  province  de  Lyon 
de  1580  à  1750,  d'après  un  ms.  du  séminaire  de  Lyon.  La  custodie  du 
Dauphiné  comprenait  les  couvents  de  Vienne,  fondé  en  1601,  Romans 
(1609),  Crest  (1609),  Grenoble  (1610),  Valence  (1611),  Crémieux  (1615), 
Tournon  (1619),  Villeneuve-de-Berg  (1631),  Montélimar  (1642),  La  Mure 
(1642).  Ces  listes  montrent  que  le  recrutement  des  couvents  était  pres- 
que exclusivement  régional  et  signalent  que  dans  les  villes  citées 
quinze  capucins  moururent  au  service  des  pestiférés  pendant  l'épidémie 
de  1629.  Le  nécrologe  de  Lyon  est  précédé  d'un  catalogue  donnant  l'état 
de  55  provinces,  1,625  couvents,  27,336  religieux  de  cet  ordre  au  milieu 
du  xviir  siècle.]  —  P.  23-24.  Traversée  du  Bas-Dauphiné  par  un  voya- 
geur du  XVII»  siècle.  [P.  Dourdan,  chanoine  de  Saint-Denis,  au  retour 
d'un  voyage  en  Terre-Sainte  (1651-52)  ;  notes  sur  Montélimar,  Vienne,  etc., 
d'après  un  volume  publié  à  Paris  en  1652.]  —  P.  25-38,  96-109,  113-44 
et  169-99.  Abbé  Lagier  et  Gueyffier.  La  baronnie  de  Bressieux.  (Suite 
et  fin.)  [Procès  des  habitants  contre  Valbelle,  mao-quis  de  Bressieux,  au 
sujet  des  droits  d'usage  dans  la  forêt  de  Vert;  émeute  des  paysans, 

1.  La  publication  de  ce  Bulletin  paraît  devoir  s'arrêter  ici,  après  une 
très  honorable  et  déjà  longue  carrière. 


110  ANNALES   DU   MIDI. 

qui  ont  gain  de  cause;  situation  florissante  de  la  commune  en  1789, 
d'après  un  mémoire  adressé  par  elle  à  la  commission  dite  l'Intermé- 
diaire, établie  par  les  états  de  Eomans  (1789).  A  partir  de  cette  date, 
l'étude  se  transforme  en  une  biographie  des  prêtres  de  Bressieux  et 
communes  voisines;  l'auteur  n'envisage  que  les  persécutions  dont 
souffrirent  la  religion  et  le  clergé,  et  une  évidente  partialité  enlève  à 
la  dernière  partie  de  son  travail  tout  caractère  historique.]  —  P.  38- 
4o.  0.  Peurossier.  Description  du  Danphiné  par  un  auteur  flamand 
anonyme  du  xvii"  siècle.  [Tirée  de  l'ouvrage  les  Délices  de  la  France, 
à  Leyde,  chez  :\Ioukée,  en  168.Ô.]  —  P.  41-.j3,  80-0,j,  l.")9-(J8.  Abbé  .J.  Cha- 
BERT.  Histoire  de  la  commune  de  Beauregard,  comprenant  les  paroisses 
de  Beaiiregard,  de  Jaillans  et  Meymans  pendant  la  Révolution,  d'après 
les  registres  municipaux  et  autres  documents  authentiques.  (Fin.)  [His- 
torique envisagé  uniquement  au  point  de  vue  ecclésiastique  :  admi- 
nistration des  églises  par  les  curés;  rapports  et  démêlés  de  ceux-ci 
avec  les  évèqnes  et  les  maires:  étude  terminée  par  certains  récits,  plus 
que  singuliers,  des  malheurs  qui  frappèrent  les  acquéreurs  des  biens 
d'Église.]  —  P.  57-74,  14r)-58,  199-214.  Chanoine  J.  Chevalier.  L'abbaye 
de  Saint-Tiers-de-Saou,  des  chanoines  réguliers  de  Saint-Augustin,  au 
diocèse  de  Valence  ou  de  Die.  [Historique  bien  documenté,  et  groupé 
sous  le  nom  de  chaque  abbé,  de  cette  abbaye,  fondée  probablement  au 
commencement  du  xii''  siècle.  Située  à  20  kilomètres  de  Crest,  elle  eut, 
bien  que  fortifiée  et  vassale  du  comte  de  Valentinois,  à  soufTrir  des 
luttes  entre  celui-ci  et  l'évêque  de  Valence,  entre  l'évèque  de  Viviers  et 
Adhémar,  seigneur  de  la  Garde;  elle  fut  ravagée  par  les  bandes  pillar- 
des d'Olivier  du  Guesclin,  frère  du  connétable,  et  par  celles  de  Raymond 
de  Turenne.  Parmi  les  documents  cités  dans  ce  travail,  qui  s'arrête  à 
1429,  il  faut  signaler  une  charte  du  5  mars  1329,  d'Aymar  de  Poitiers, 
comte  de  Valentinois,  accordant  aux  habitants  du  mandement  de  Saou 
de  larges  libertés  (Archives  de  la  Drôme).]  —  P.  74-80.  A.  Grospellier. 
Mélanges  d'hagiographie  dauphinoise.  (Suite;  travail  interrompu.).  [Sur 
une  Passio  sancti  Juliani  Briviatensis  (de  Brioude  et  aussi  de  Vienne, 
où  il  était  soldat  de  la  légion  dont  saint  Ferréol  fut  le  tribun),  d'après 
un  ms.  de  Saint-Gall,  et  ses  diverses  rédactions.]  —  P.  110-2.  C.  Per- 
ROssiER.  Requête  du  chapitre  de  Valence  au  Parlement  de  Grenoble, 
au  sujet  des  ravages  des  protestants  dans  cette  ville  en  1507.  [Se  plaint 
que  l'église  ait  perdu  tous  ses  titres  à  la  suite  des  incendies  d'églises, 
de  maisons  d'ecclésiastiques  et  des  assassinats  accomplis  par  les  pro- 
testants, et  demande  à  faire  la  preuye  de  ses  anciens  droits.] 
Le  tome  XXI  se  termine  :  1°  par  une  table  des  matières  des  vingt  et  un 


PÉRIODIQUES  MÉRIDIONAUX.  111 

volumes  de  la  collection  (1880-1902);  2°  par  im  Appendice  dû  au  cha- 
noine U.  Chevalier  (41  p.)  :  le  Saint-Suaire  de  Lirey-Chambéry-Turin 
et  les  défenseurs  de  son  authenticité.  [M.  C.  rapporte  les  appréciations 
favorables  données  à  son  étude  critique  par  les  Bollandistes,  les  Béné- 
dictins de  Maredsous  et  Bruxelles,  L.  Delisle,  Ms'  Bellet,  la  Biblio- 
thèque de  l'Ecole  des  Chartes,  les  Revues  publiées  par  les  professeurs 
des  Instituts  catholiques  de  Paris,  I^yon,  Toulouse,  le  R.  P.  Grisar, 
P.  Viollet  et  de  Lasteyrie,  rapporteurs  du  travail  qui  a  été  récompensé 
au  concours  des  Antiquités  nationales  (Institut  de  France),  P.  Four- 
nier,  etc.  M.  C.  examine  ensuite  les  critiques  faites  à  son  étude  par  le 
P.  Sanno  Solaro  (S.  .T.),  Turin,  1901;  il  les  rétorque  avec  précision  et 
y  réplique  avec  humour;  entre  temps,  M.  C.  constate  qu'il  connaît 
maintenant  quarante  suaires  de  J.-C.,...  sans  compter  les  fragments 
(p.  36).]  0.  N. 

Garonne  (Haute-). 

I.  Bulletin  de  litiéraiure  ecclésiastique.  1902. 

P.  44-56.  L.  Saltet.  Saint  Vidian  de  Martres-Tolosanes  et  la  légende  de 
Vivien  des  chansons  de  geste.  [En  1890,  M.  A.  Thomas  a  signalé  l'ana- 
logie des  deux  légendes  et  demandé  laquelle  était  calquée  sur  l'autre  : 
celle  de  saint  Vidian,  disait-il,  ne  remonte  guère  au  delà  de  1764;  com- 
ment y  avait-il  alors,  au  diocèse  de  Rieux,  un  homme  au  courant  des 
données  des  Enfances  et  à.'Aliscans?  La  réponse  est  fournie  par  le  ms. 
lat.  11  778  de  la  Bibl.  nat.,  dont  extrait.  La  légende  actuelle  de  Martres 
existait  avant  1636,  au  moins  dès  le  xv«  s.;  empruntée  à  Arles,  elle  a 
pu  être  transportée  à  Toulouse  et  Martres,  sur  la  route  des  pèlerins 
qui  se  rendaient  à  Saint-Jacques  de  Compostelle.]  —  P.  78-91.  Une  leçon 
sur  Dante  de  M.  Léonce  Couture  (1879).  [La  poésie  religieuse  a  droit 
d'être  placée  au  premier  plan  dans  un  tableau  de  la  poésie  romane, 
tant  au  Midi  de  la  Frai^ce  qu'en  Italie.]  —  P.  133-47.  Me"-  Batiffol. 
L'épigraphie  chrétienne  à  Toulouse.  [Quelques  inscriptions  provenant 
des  cimetières  gallo-romains.  Une  seule  a  de  l'intérêt,  l'épitaphe  de 
Numfius,  en  12  distiques.}  —  P.  165-76.  J.  de  Lahondès.  Le  quar- 
tier de  l'Institut  catholique.  [Ce  quartier  de  la  Dalbade  fut  le  berceau 
de  Toulouse.  Très  intéressant.]  —  P.  210-9.  M.  Dubruel.  Une  lettre 
inédite  de  M.  Olier.  [De  1645,  à  François  de  Caulet,  évèque  de  Pamiers. 
«  L'ivraie  fatale  du  jan.sénisme  »  y  semble  prévue,  annoncée.]  — 
P.  220-31.  L.  Saltr;ï.  L'évêché  d'Arisitum.  [M.  Longnon,  en  1878,  l'a 
identifié  avec  Alais.  Examen  de  cette  hypothèse,  qui  semble  aujour- 
d'hui admi.se  :  elle  repose  en  réalité  sur  une  fausse  généalogie  carolin- 


112  ANNALES   DU   MIDI. 

gienne,  sur  une  erreur  étymologique  (Arestum  =  Alestum),  sur  une 
distinction  imaginiiire  entre  Arisdium  (Hierle)  et  Arisituni,  qui  serait 
Alais.  Il  faut  chercher  Arisitum,  ainsi  que  le  faisait  Quicherat,  au  pays 
d'Hierle,  sur  les  confins  du  Rouergue  et  du  territoire  niniois.  Article 
très  bien  conduit;  il  est  probable  que  M.  S.  a  raison.]  —  P.  2r)7-6t). 
L.  Crouzil.  Documents  inédits  sur  l'ancienne  Université  de  Toulouse. 
[Extraits  d'une  autobiographie  de  S.  Bores,  professeur  à  la  Faculté  de 
théologie  de  cette  ville  avant  et  pendant  la  Révolution.  Curieux.  Le 
texte  est  en  partie  publié.]  P.  D. 

II.  Bulletin  de  la  Sociélé  de  géographie  de  Toulouse, 
t.  XXI,  1902. 

p.  89-100.  A.  Caraven-Cachin.  Quelques  notes  sur  l'exploitation  des 
sources  thermales  dans  le  Midi  de  la  Gaule.  [Ruisseaux,  sources 
sacrées,  sources  thermales.  Très  bref;  quelques  faits  nouveaux.]  — 
P.  333-62.  Id.  La  vierge  du  saule  de  Cadalcn.  Légende  religieuse  du 
IV  siècle.  [Cadalen,  près  Gaillac  (Tarn);  la  date  donnée  parait  fantai- 
siste. Longue  dissertation  générale  autour  de  la  question.  «  La  vive 
lumière  que  jette  la  sépulcrologie  »  ne  frappe  pas  nos  yeux  ;  les  «  rè- 
gles de  la  plus  sévère  critique  historique  »  ne  nous  prouvent  pas  : 
1»  que  le  siège  épiscopal  d'Albi  fût  vacant  au  iv  siècle  ;  2°  que  la  vierge 
du  saule  de  Cadalen  vécût  alors  pour  combattre  l'arianisme  et  conver- 
tir les  idolâtres.]  P.  D. 

III.  Société  d'histoire  naturelle  de  Toulouse,  t.  XXXIV, 
1901. 

Nov.-déc.  P.  65-94.  A.  Caraven-Cachin.  Aperçu  historique  sur  l'exploita- 
tion des  usines  métalliques  et  des  substances  minérales  dans  le  Midi  de 
la  Gaule.  [Aux  époques  gauloise  et  romaine,  principalement  dans  le 
Rouergue  et  les  Pyrénées  :  mines  d'argent  à  Peyrebrune,  j^rès  Real- 
mont,  etc.;  de  cuivre  à  Laguépie  (Tarn-et-Garonne),  à  Saint-Étienne- 
de-Baigorry  (Basses-Pyrénées)  ;  surtout  de  fer,  à  Alban,  etc.;  puis  de 
marbre,  à  Saint-Béat;  de  jais,  dans  le  département  de  l'Aude.  Quelques 
textes  et  indications  à  recueillir.]  P.  D. 

Gers. 

Archives  historiques  de  la  Gascogne,  quatorzième  année 
(3«  et  4e  trimestres),  2»  sér.,  6«  fasc;  1903. 
p.  1-164.  Abbé  L.  Guérard.  Documents  pontificaux  sur  la, Gascogne, 

d'après  les  arcJùves  du  Vatican.  Pontificat  de  Jean  XXII,  1316-1334 


PÉRIODIQUES  MERIDIONAUX.  113 

(t.  II).  [Continuation  d'une  publication  de  bulles  qui,  quoique  consa- 
crées à  la  Gascogne,  intéressent  en  plus  d'un  point  l'histoii'e  générale. 
Ce  tome  II  n'est  pas  fini  et  no  comprend  dans  son  premier  fascicule 
que  les  actes  s'arrêtant  à  la  fin  d'août  1325.  Les  textes,  précédés  de 
sommaires,  sont  édités  avec  soin  et  faciles  à  consulter.]        F.  P. 

Gironde. 

I.  Actes  de  V Académie  nationale  des  Sciences,  Belles- 
Lettres  et  Arts  de  Boi^deauœ,  8^  série,  63«  année,  1901. 

p.  5-10.  C.  JuLLiAN.  Le  gui  et  les  Bituriges  Vivisques.  [Conjecture  sur 
l'étymologie  du  mot  vivisci,  qui  viendrait  du  latin  viscum.']  —  P.  47- 
108,  G.  Labat.  Nicolas  Beaujon  et  les  tableau.^  de  la  Chambre  de  com- 
merce de  Bordeaux.  [Notice  sur  le  financier  bordelais  Beaujon,  1718- 
1786,  suivie  de  la  description  de  sa  collection  de  tableaux,  et  de  pièces 
justificatives  sur  l'acquisition  de  cette  collection  par  les  Directeurs  du 
Commerce  de  Guienne.]  —  P.  139-45.  Id.  Notes  sur  quelques  pointures 
en  grisaille  de  Pierre  Lacour  fils.  —  P.  157-201.  C.  Jullian.  Notes  biblio- 
graphiques sur  l'œuvre  du  D"'  Azam.  P.  C. 

II.  A?'chives  historiques  de  la  Gironde,  t.  XXXVII,  1902. 

p.  i-CLxxxvi  et  1-596.  F.  Abbadie.  Le  Livre  noir  et  les  Etablissements  de 
Dax.  [Nous  consacrerons  à  cet  ouvrage  considérable  un  compte  rendu 
spécial.]  P.  D. 

III.  Société  archéologique  de  Bordeaux^  t.  XXIII,  3*'  et 
4e  fascicules,  1900-1901*. 

p.  134-8.  C.  DE  Mexsignao.  Note  sur  la  découverte  de  l'aqueduc  gallo- 
romain  de  la  place  Sainte-Eulalie,  à  Bordeaux.  —  P.  142-58.  P.  Meller. 
Le  mobilier  d'une  famille  parlementaire  sous  Louis  XIV  à  Bordeaux. 
[Jean  Daflis,  premier  président  au  Parlement  de  Navarre.]  —  P.  191-5. 
M.  Chanol.  Note  sur  un  astrolabe  du  xvn"  siècle.  — P.  196-9.  Abbé  Lé- 
GLisE.  Cuiller  à  baptiser  du  xv»  siècle.  [En  cuivre  jaune  fondu  et  mar- 
telé; trouvée  dans  une  tombe  à  Gensac]  —  P.  200-1.  F.  Daleau.  Cuil- 

1.  Il  règne  quelque  désarroi  dans  les  publications  de  cette  Société  :  elle 
n'a  rien  fait  paraître  en  1898,  1899,  ni  en  1902.  Des  fascicules  du  t.  XXIII, 
le  premier  ne  contient  rien  qui  nous  intéresse,  le  second  n'a  jamais  paru. 

ANNALES  DU  MIDI.   —  XVI.  8 


114  ANNALES   DU    MIDI. 

1ères  anciennes  et  modernes.  —  P.  201-2.  C.  de  Mensignac.  Cachet  en 
fer  du  xvii"  siècle.  —  P.  203.  Id.  Empreinte  sur  cire  jaune  du  grand 
sceau  royal  de  Louis  XV.  —  P.  204-7.  Id.  Médaille  de  la  statue  équestre 
du  roi  Louis  XV,  place  Royale,  à  Bordeaux.  —  P.  207-S.  F.  Daleau. 
La  croix  de  Bichet.  [Commune  de  Tauriac,  canton  de  Bourg;  planche.] 

Tome  XXIV,  l^r  fascicule,  1903. 

P.  25-6.  P.  Paris.  Ivoire  sculpté  de  la  collection  Fourché.  —  P.  2G-47.  La 
Société  archéologique  de  Bordeaux  au  Congrès  des  Sociétés  savantes 
tenu  à  Bordeaux  en  avril  1903.  [Avec  la  reproduction  du  discours  de 
clôture  de  M.  C.  Jullian.]  —  P.  47-.'j1.  J.-A.  Brutails.  A  Saint-Astier, 
entre  deux  trains.  [Conteste  l'opinion  courante  que  Saint-Astier  pos- 
sède les  vestiges  de  la  première  coupole  aquitanique  connue.]  —  P.  51-9. 
E.  RoussELOT.  Documents  concernant  la  famille  et  la  faïencerie  de  Jac- 
ques Hustin.  [Faïencier  bordelais  du  xviip  siècle  ;  deux  plans.]  — 
P.  59-66.  C.  DE  Mensignac.  Note  sur  la  découverte  de  la  première  pierre 
du  bastion  nord-ouest  de  l'ancien  Château-Trompette  de  Bordeaux. 
[Bloc  de  pierre  où  est  figuré,  sculpté  en  demi-bosse,  un  charmant  por- 
trait de  Marie-Thérèse,  femme  de  Louis  XIV  ;  planches.]  —  P.  66-72. 
Abbé  Brun.  Les  sceaux  capitulaires  de  Bazas.  P.  C. 

Hérault. 

Le  Félibrige  latin,  t.  X,  1899. 

p.  5-18.  Roque-Ferrier.  Le  poème  de  Potas-Sageladas.  [Notes  sur  l'œu- 
vre de  J.  Roux  et  les  faits  historiques  qui  en  sont  la  base.]  —  P.  21-23. 
Id.  Auguste  Tandon  (1717-1806)  et  sa  famille.  [Notes  biographiques.]  — 
P.  34-41.  Valade.  Si  Jasmin  est  un  Théocrite.  [Critique  prolixe  et  litté- 
raire; suite,  p.  45-50.]  —  P.  51.  Roque-Ferrier  signale  trois  documents 
inédits  sur  la  famille  de  Françoise  de  Ceselly. 

Après  la  p.  52  commence,  avec  pagination  spéciale  (i-xvi,  1-160), 
l'Armanac  mountpelieirenc  per  l'annada  MDCCCC,  publié  aussi  à 
part.  —  P.  1-7.  Roque-Ferrier.  Un  précurseur  languedocien  de  Chateau- 
briand dans  l'épopée  chrétienne  et  le  merveilleux  judéo-chrétien.  Fabre 
d'Olivet  et  le  poème  des  Amours  de  Rose  et  de  Ponce  de  Meyrueis. 
[Communiqué  au  Congrès  des  sociétés  savantes,  1897  ;  suite,  p.  8-10, 
12-6,  17-9,  20-3.  L'auteur  croit  que  les  mss.  originaux  de  Ponce,  à'Aza- 
laïs  et  de  la  Cou)'  d'amour  existent  encore.  Il  conclut  que  la  renaissance 
dialectale  en  Languedoc  a  été  «  antérieure  à  celle  de  la  Provence  et  supé- 


PERIODIQUES  MÉRIDIONAUX.  115 

rieure...  par  la  pureté  de  l'idiomatisme  et  la  variété  du  verbe  local.  » 
—  P.  29.  Sermet.  Discours  prounounçat  lou  14  juillet  1790,  à  l'houra 
de  miechjour,  en  presença  de  la  Municipalitat  et  de  la  légion  de  St-Gi- 
nest,  à  l'oucasioun  de  le  federatioun  generala.  [Suite?;  paraît  inter- 
rompu.] —  P.  39-44.  Roque-Ferrier.  Trois  nouveaux  poètes  montpel- 
liérains.  [Découverte,  le  6  mai  1892,  par  MM.  R.  F.  et  Gaudin,  d'un 
ms.  comprenant  une  partie  des  œuvres  connues  de  Favre  et  trois  mille 
vers  inédits  à  attribuer  à  trois  auteurs  :  Brey,  professeur  de  droit  mont- 
pelliérain  (1654-1735),  Guilleminet,  et  le  conseiller  de  Ratte.  [Étude 
approfondie  et  intéressante;  suite,  p.  129-34.]  —  P.  64-5.  Lou  parla  lou- 
devès  en  1424.  [Pièce  de  comptabilité  communale;  extrait  anonyme  des 
archives  municipales.]  —  P.  68-70.  Bouquet.  Les  divertissements  car- 
navalesques de  Montpellier.  [Sous  le  second  empire;  suite,  p.  73-4,  74- 
80.]  —  P.  81-7.  Roque-Ferrier.  Lou  sirventès  de  Coulougna.  [En  notes, 
beaucoup  d'indications  utiles  pour  l'histoire  du  félibrige,  mais  érudi- 
tion capricante  et  désordonnée.]  —  P.  88-92.  Barlet.  Les  ancêtres 
montpelliérains  de  Françoise  de  Cézelly.  [A  le  tort  de  ne  pas  donner  de 
références  précises.]  —  P.  94-114.  Roque-Ferrier.  Lou  medeci  de 
Balharguet.  [Thème  populaire;  nombreuses  notes  sur  la  littérature 
populaire,  le  folklore  de  Montpellier  et  environs.]  —  P.  116-9.  Roque- 
Ferrier.  Lous  cinq  enfants  de  Francesa  de  Ceselly.  Blasi  Pascal  et  un 
libre  de  memorias  de  l'erouïna  mountpelierenca.  [Testament  de  Fran- 
çoise de  Cezelly,  2  nov.  1613.  Un  de  ses  fils,  devenu  jésuite,  composa 
un  traité  du  Paradis  ouvert  à  Philagie,  que  Pascal  attaqua  avec 
vivacité.] — P.  135-43.  Roque-Ferrier.  Lou  sirventès  de  la  raça  celtica. 
[En  notes,  informations  philologiques,  historiques  et  relatives  au 
folklore.] 

Tome  XL  1900. 

Fasc.  I.  Entièrement  consacré  à  la  question  de  l'enseignement  bilingue, 
posée  par  le  Fr.  Savinien  au  trente-sixième  Congrès  des  Sociétés  savan- 
tes, 1896.  —  P.  7.  Bref  de  Léon  XIII.  —  P.  9-10.  Lettre  de  Mistral  à 
Fr.  Savinien.  —  P.  11-2.  Extrait  du  procès-verbal  du  Congrès.  —  P.  13-7. 
Manifeste-préface  [anonyme]  sur  la  question  de  l'éducation  bilingue.  — 
P.  19-42.  Savinien.  Les  écoles  du  Midi  et  la  langue  d'oc.  —  P.  43-52. 
Berluc-Pérussis.  Frère  Savinien  et  ses  précurseurs.  Notes  de  biblio- 
graphie provençale.  [Érudition  précise  et  abondante.]  —  P.  53-78. 
Roque-Ferrier.  La  nouvelle  revendication  des  félibres.  [Articles  divers 
de  la  presse  parisienne,  polémique,  etc.;  en  notes,  toujours  beaucoup  de 
renseignements,  peu  utilisables  à  cause  de  leur  désordre.]  —  P.  79-86. 


116  ANNALES   DU   MIDI. 

La  presse  et  le  savinianisme.  [Répète  en  partie  le  précédent  article.  | 
—  P.  101-4.  Table  des  matières  des  deux  fascicules. 
Fasc.  II.  Armanac  mnioitpelierenc  [xvin-KX)  pp.].  P.  1-8.  La  mort  de 
Langlade  (5  février  1900).  [Discours,  éloges  funèbres,  notes  biographi- 
ques. Suite,  p.  40-6;  à  noter  la  «  page  de  critique  littéraire  »  vraiment 
burlesque  de  M.  Pontier.  —  P.  21-5.  Cassan.  Le  registre  de  la  cour 
seigneuriale  de  Saint-Martin  de  Londres  (1508-1511).  [Conservé  à 
Aniane,  étude  Siau-Lacroix.  Description  sommaire  très  précise ,  et 
relevé  des  expressions  latino-romanes  curieuses  pour  le  philologue.]  — 
P.  47-52.  Ch.  Brun.  Discours  à  la  fête  de  Bernai-d  de  Ventadour.  [Pré- 
tentieux amphigouri.]  —  P.  59-64.  Roque-Ferrier.  La  Gleiza  de  l'Aus- 
servança.  (Sonnet  montpelliérain,  accompagné  de  notes  historiques  sur 
cette  église,  devenue  temple  protestant  en  1800,  aujourd'hui  occupée 
par  l'imprimerie  Hamelin.]  —  P.  65-100.  Roque-Ferrier,  Veran, 
Ch.  Brun.  Alexandre  Langlade.  [Polémique.  Est-il  le  Virgile  languedo- 
cien ou  le  Tavan  languedocien?  R.-F.  et  Brun  se  risquent  imprudem- 
ment à  le  comparer  à  Mistral.] 

Tome  XII,  1902. 

Armanac  tnountpelierenc  [per  las  annadas  M  DCCCCII  et  M  D  CCCCIII]. 
—  P.  1-2.  Table  des  matières.  —  P.  3-8.  Roque-Ferrier.  Une  fin  de 
série.  Notes  diverses  sur  Frédéric  Roque-Ferrier,  Jean  Laurès,  Adel- 
phe Espagne,  le  D'  J.-B.  Noulet  et  le  cardinal  Georges  d'Armagnac. 
[Renseignements  confus;  annonce  de  la  clôture,  par  ce  volume  et  ses 
appendices,  de  la  première  série  du  Félibrige  latùi.]  —  P.  91-9.  Roque- 
Ferrier.  Françoise  de  Cezelly  fut-elle  de  race  gallo-romane  ou  de  race 
germanique?  [Probablement  gallo-romane,  d'après  les  étymologies.]  — 
P.  110-2.  Roque-Ferrier.  Quelques  livres  de  fiançailles  ou  de  mariage 
du  midi  de  la  France,  de  la  Catalogne  et  de  l'Italie.  [Bibliographie 
sommaire.  Liste  qui  pourrait  être  allongée  beaucoup.]  —  P.  145-53. 
MoNACi.  Encore  Jaufre  Rudel.  [Traduction  par  Martel  ;  a  paru  en  ita- 
lien dans  les  comptes  rendus  des  Lincei,  II,  12  (1893). 

Appendices.  P.  1-24.  Hommage  à  Langlade.  [Brochui-e  de  propagande 
pour  la  souscription  au  buste  projeté.] 

P.  1-45.  F.  Roque-Ferrier.  Un  commencement  d'épopée  philosophique 
en  vers  méridionaux  du  xin«  siècle.  Les  ajes  de  Vumanitat.  [Repro- 
duction intégrale  de  l'édition  inontpelliéraine  de  1876*.] 

1.  N.  B.  — Le  Félibrige  latin  ayant  paru  dans  le  plus  grand  désordre, 
il  nous  paraît  utile  d'indiquer  ici  avec  précision  dans  quel  ordre  ont  été 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  117 

Isère. 

Bulletin  de  l'Académie  delphinale,  4®  série,  t.  XVI,  1902. 

p.  73-116.  De  Miribel.  Monographi-e  de  la  famille  de  La  Morte-Laval. 
[Issue  d'un  bourgeois  protestant  de  Die,  qui  devint  ami  de  Lesdiguières 
et  fut  anobli  en  1606,  pour  l'avoir  servi  comme  trésorier  extraordinaire 
des  guerres.  En  1625,  son  flls  Jean  lui  succède  et,  deux  ans  plus  tard, 
achète  le  fief  de  la  Motte;  il  a  fait  souche  de  gentilshommes  qui  ont 
versé  leur  sang  dans  les  armées  du  roi,  aux  Pays-Bas,  en  Italie.  A 
l'exception  de  quelques-uns  de  ses  membres,  la  famille  se  convertit  lors 
de  la  Révocation.  Elle  disparaît  en  1755.  Beaux  portraits,  tables  généa- 
logiques ;  quelques  documents.]  —  P.  117-34.  H.  Feiiran.  Un  problème 
de  géographie  dauphinoise.  [Conjecture  d'après  d'anciennes  cartes,  qu'il 
reproduit,  que  la  «  Montagne  abîmée  »,  près  du  col  de  Vaujani  et  de  la 
chaîne  de  Belledonne,  représente  quelque  ancien  pic  écroulé.]  —  P.  131- 

publiés  et  doivent  se  classer  les  divers  fascicules  de  ces  dernières  années 
Tome  X,  année  1899.  Fasc.  1,  janvier-juin,  p.  1-20,  Félibrige. 

/  p.  21-52,  Id. 

Fasc.  2,  juillet-août  |  titre  de  VArmanac   pour 

(       1900,  p.  i-xvi,  Armanac. 

Fasc.  3,  septembre-octobre,  p.  1-80,  Id. 

P'asc.  4,  novembre-décembre,  p.  81-160,  Id. 

Tome  XI,  année  1900.  Fasc.  1,  janvier-juillet,  p.  1-84,      Félibrige. 
(Les  p.  85-104  terminant  ce  fascicule,  y  compris  le  titre  et  la  table  des 
matières,  ont  paru  réunies  au  tome  XII.) 

Fasc.   2,   août-décembre,    titre    de  VArmanac 
(1901),  p.  i-xvi,  1-100,  Armanac. 

(La  table  de  YArma7iac  se  confond  avec  celle  du  fascicule  précédent, 
p.  101-4.) 
Tome  XII,  année  1902,  paru  en  un  seul  fascicule. 
P.  de  titre  pour  le  Félibrige  latin. 
Frontispice  ;  portrait  du  cardinal  d'Armagnac  [reproduit  déjà  dans 

le  Libro  nouvial  Laforgue-d'Armagnac] 
P.  de  titre  pour  l'Ai'manac  momitpelierenc. 

!   Félibrige. 
Armanac. 
Portrait  de  Langlade. 

F»  non  paginé  :  Hommage  à  Langlade. 

F"    1-24.    Per  diverti  lou    mounde  e  per  faire  quau(|ues   sous   au 

buste  de  Langlada.  (Imprimerie  Durand,  rue  des  Étuves  ;  1901.) 
F°  non  paginé;  au  v»,  errata  de  l'Hommage  à  Langlade. 
Deux  f"'  de  titres.  Un  cominenceinent  d'épopée  philosophique  on  vers 
méridionaux  du  xni«  siècle.  (Montpellier,  imprimerie  Hamelin  ;  1903.) 
p.  iv-xvii,  1-45,  Les  atges  de  l'umanitat. 


118  ANNALES   DU   MIDI. 

45.  E.  JusTER.  Une  fête  municipale  à  Grenoble.  Mariage  de  dix  anciens 
militaires,  le  29  avril  1810.  [Avec  des  jeunes  filles  dotées  par  l'empe- 
reur]. —  P.  173-475.  ]\I.  BouDET.  Aspres-sur-Buech  et  ses  chartes  de 
coutumes  (1276-1439).  [Aspres,  dans  l'arr.  de  Gap,  placée,  de  1061  jus- 
qu'à la  Révolution,  dans  la  dépendance  de  l'abbaye  de  Saint-Géraud 
d'Aurillac,  sur  le  chemin  de  Rome.  Le  Dauphin  et  le  roi  de  Sicile  y 
avaient  des  droits  de  garde,  le  prieur  y  était  seigneur  haut-justicier. 
Analyse,  un  peu  longue,  des  chartes  de  cette  communauté,  au  nombre 
de  six,  dont  des  coutumes  de  1302,  très  étendues  (162  articles),  et  une 
sentence  arbitrale  de  1439,  qui  les  complète  (art.  163  à  167).  Dix-huit 
pièces  justificatives,  fort  bien  publiées,  dont  ces  chartes  et  une  liste 
des  prieurs-seigneurs  d'Aspres.]  P.  D. 

Savoie. 

I.  Mémoi7^es  de  l'Académie  des  Sciences,  Belles-Lettres 
et  Arts  de  Savoie,  t.  IX,  1902. 

p.  65-123.  Général  Borsox.  Notice  nécrologique  sur  le  général  Ménabréa, 
marquis  de  Val-Dora.  [Biographie  tracée  à  grands  traits.  Le  général  B., 
français  et  catholique,  ne  veut  pas  juger  son  ancien  collègue.  Il  se  con- 
tente de  montrer  le  rôle  de  Ménabréa  dans  la  formation  de  l'unité  ita- 
lienne et  de  remémorer  la  place  qu'il  a  tenue  comme  député  de  la  Savoie 
au  parlement  piémontais.]  —  P.  171-98.  Id.  Notice  nécrologique  sur  le 
contre-amiral  Victor  Arminjon  (1830-1897).  [Né  en  Savoie  et  resté  au 
service  de  la  maison  de  Savoie  en  1860.]  —  P.  277-353.  A.  Perrin.  Station 
romaine  de  Labisco  (les  Echelles,  Savoie).  Commanderie  de  Saint-Jean 
de  Jérusalem.  Chronologie  historique.  [Après  avoir  établi  l'identifica- 
tion de  Labisco  avec  les  Echelles,  M.  P.  fait  l'histoire  de  la  comman- 
derie. Il  termine  par  une  chronologie  de  la  commanderie  et  la  liste  des 
commandeurs.  Documents  en  appendice.]  —  P.  355-456.  Abbé  J.  Mail- 
LAND.  Les  Savoyards  et  l'église  du  Saint-Suaire  (Rome).  [Histoire  très 
complète  de  la  confrérie  et  de  l'église.]  M.  D. 

II.  Mémoires  et  documents  publiés  par  la  Société  savoi- 
sienne  d'histoire  et  d'archéologie,  t.  XVI,  1902. 

Documents.  —  P.  viii-x.  Mugnier.  Transaction  de  janvier  1442  entre 
Philippe,  comte  de  Genevois,  et  Jean  de  Compeys,  seigneur  de  Grufl"y. 
[Analyse.  A  propos  d'empiétements  sur  les  limites  territoriales  et  juri- 
dictionnelles.] —  P.  x-xii.  Id.  Commission  accordée  en  1589  par  le  pro- 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  Il9 

vincial  des  Franciscains  de  l'Observance,  Fr.  Martin  Vallier,  à 
Fr.  Pierre  de  Rivo,  gardien  de  Savoie.  —  P.  xiii-xvu.  Id.  Notice  sur 
un  nionitoire  au  commencement  du  xviii»  siècle.  [Pour  amener  les 
témoins  d'une  querelle  à  parler.]  —  P.  xvii-xxi.  Id;  Duels  et  rixes  au 
XVII»  siècle.  [Deux  lettres  de  gràce.J  —  P.  xxi-xxii.  Une  institutrice 
d'Annecy.  [M""  Marie  Bérard.  Elle  demande  en  1749  à  diriger  l'école 
de  filles  d'Annecy.  Orthographe  négligée  do  l'époque.]  —  P.  xxviii-xxix. 
Id.  Charte  de  Nicolas,  évêque  de  Modène,  légat  du  pape  Paul  IV 
auprès  de  Louis  XI,  accordant  un  autel  particulier  à  Jacques  Mares- 
chal,  seigneur  de  Senozan.  —  P.  xxx-xxxiii.  Id.  Observation  sur  le  sort 
du  jeune  duc  de  Savoie  Philibert,  en  1476,  lors  de  l'enlèvement  de  sa 
mère  sur  ordre  du  duc  de  Bourgogne.  —  P.  xxxv-xxxvi.  Id.  Vente  d'une 
vigne  en  1529.  [Intéressant  pour  le  prix  de  la  vente.]  —  P.  xxxvi- 
XXXVIII.  Perpéchon.  Deux  ventes  de  maisons  au  xvi"  siècle.  — 
P.  xxxix-Lxxxii.  J.  Létanche.  Le  marquisat  d'Yenne.  [Histoire  som- 
maire. Donné  en  apanage  en  1215  à  Blanche  de  Savoie  (mariée  en  1350 
à  Galéas  Visconti,  duc  de  Milan),  il  appartient  ensuite  aux  Sforza  et 
aux  Barbanera  de  Val-Sesia  et  revient  après  un  siècle  à  la  maison  de 
Savoie.  Une  première  maison  d'Yenne  finit  avec  le  xvn«  siècle,  et,  en 
1699,  le  duc  de  Savoie  vend  le  marquisat  d'Yenne  à  une  famille  de  ma- 
gistrats, celle  des  Vulliet,  qui  s'éteignit  seulement  en  1830.  Appendice 
contenant  les  documents.]  —  P.  lxxxviii-xcii.  Mugnier.  François  III  de 
Fléhard,  èvèque  de  Grenoble  (1575-4  octobre  1606).  [Lettre  au  duc  de 
Savoie  Charles-Emmanuel  I"  au  sujet  d'un  conflit  avec  le  seigneur  de 
Tresserve.]  —  P.  xcn-xcvi.  Id.  M^--  Jules-César  Riccardi.  [Nonce  à 
Turin,  de  1595  à  1601.  Il  se  plaint  dans  une  lettre  de  la  négligence 
qu'apporte  l'évèque  de  Grenoble,  M.  de  Fléhard,  dans  la  surveillance 
des  églises  du  décanat  de  Savoie.]  —  P.  xcvi-xcix.  Id.  Barthélémy 
Ferrero.  [Evèque  d'Aoste  en  1595.  Deux  lettres  au  sénat  de  Savoie  qui 
montrent  qu'il  entretenait  avec  lui  d'excellentes  relations.]  —  P.  c-civ. 
Id.  Lettres  de  Balthasard  Guérin,  èvèque  de  Genève,  et  de  son  coad- 
juteur,  Charles-Auguste  de  Sales,  au  sénat  de  Savoie  en  faveur  des 
Pères  de  la  Mission,  qu'ils  appelaient  de  France  pour  fonder  un  sémi- 
naire. —  P.  civ-cvii.  M.  Bruchet.  Inventaire  de  Nicolet  Fabre,  bour- 
geois de  Bonne  (1383).  —  P.  cvii-cxvi.  Mxjgnier.  Testament  de  Jean 
Vignodi,  procureur  à  Rome  (1585).  —  P.  cxxiii-cxxvi.  P.  d'Arbois  de 
JuBAixviLLE.  Albergeage  d'une  terre  à  Massie  fait  par  Marguerite  de 
Meuillon  ou  de  Miolans,  abbesse  de  Sainte-Catherine  (1319).  — 
P.  cxxxiv-cxxxvi.  Les  Maillard,  comtes  de  Tournon,  barons  du  Bou- 
chet,  etc.  [Note  complémentaire  à  l'ouvrage  de  MM.  Dufour  et  Mugnier. 


120  ANNALES  DD  MIDI. 

Les  Maillard,  t.  XXVII  des  Mémoires  de  la  Société  savoisienne 
d'histoire  et  d'archéologie.'] 
Mélanges.  —  P.  5-539.  F.  Mugnier.  Antoine  Favre,  président  de  Gene- 
vois, premier  président  du  Sénat  de  Savoie  (1557-1624).  Première  partie  : 
Histoire  du  président  Favre.  [Favre  était  un  jurisconsulte  distingué, 
qui  a  laissé  le  Codex  Fabrianus,  mais  qui  a  tenu  aussi  sa  place 
parmi  les  moralistes,  comme  Pibrac.  Sénateur  de  Savoie,  puis  premier 
président  du  Sénat,  il  joua  un  grand  rôle  auprès  des  ducs  de  Savoie.  Sa 
biographie,  très  intéressante,  est  le  récit  des  rapports  de  la  Savoie  avec 
la  France,  Genève  et  les  principautés  italiennes.  M.  D. 

Savoie  (Haute-). 

Revue  savoisienne^  1902. 

p.  2-8.  Bruchet.  Quelques  noms  intéressants  pour  la  toponomastique  des 
environs  de  Faverges.  —  P.  6-7.  Id.  Note  sur  l'itinéraire  de  saint  Jac- 
ques de  Compostelle  à  travers  la  Savoie.  —  P.  9-14.  Désormaux.  Notes 
de  linguistique.  Marrons  et  marrons.  [Etablit  que  ce  terme  a  désigné 
d'abord  les  brigands,  puis  les  guides  des  Alpes.  Il  est  encore  aujour- 
d'hui employé  dans  ce  sens.]  —  P.  18-27,  69-94,  131-46.  J.  Mogexier.  Les 
francs-tireurs  du  Mont-Blanc.  [C'est  le  journal  de  marche  des  francs- 
tireurs  de  la  Haute-Savoie,  rédigé  par  un  de  leurs  lieutenants,  et  publié 
par  M.  C.  Duval,  qui  trace  de  l'auteur  une  biographie  très  élogieuse. 
Récit  de  la  campagne  autour  de  Dijon.  Intéressant  et  animé  d'un  beau 
souffle  patriotique.]  —  P.  27-30.  E.  Ritter.  Glanures  salésiennes. 
[M.  R.  montre  par  quelques  exemples  de  quelle  façon  saint  François 
de  Sales  altère  les  Psaumes  de  Desportes,  tout  en  prétendant  les  citer 
de  mémoire.]  —  P.  41-2.  Bruchet.  Notes  sur  le  testament  de  Jonod  de 
Veria  de  Chassenaz  ;  sur  l'entérinement  par  Henri  de  Savoie  de  l'affran- 
chissement de  Jean  Moret,  bourgeois  de  Chambéry;  sur  un  accord 
pour  règlement  de  comptes  entre  Philibert  de  Pingon  et  Loys  de  Pin- 
gon.  —  P.  42.  Id.  Note  sur  quelques  poésies  qui  attestent  le  séjour 
d'Etienne  Arago  en  Savoie  pendant  son  exil  en  1850.  —  P.  42-3.  Mar- 
teaux. Notes  linguistiques  sur  chonziata  ou  cho)isiaz  et  merda.  — 
P. 43-5.  DussAix.  Charte  du  comte  Vert  accordant  des  franchises  aux 
habitants  de  la  Thonnaz..  [Du  3  décembre  1375.  Texte  latin.]  —  P.  47-8. 
Marteaux.  Découverte  à  Sonney  de  sépultures  i^ostérieures  au  vin«  siè- 
cle. —  P.  48-9.  Id.  Témoignage  du  duc  de  Savoie  Emmanuel-Philibert 
sur  un  prétendu  projet  de  M.  de  Nemours.  [On  a  cru  qu'il  voulait  enle- 
ver à  Catherine  de  Médicis  son  fils,  le  duc  d'Orléans,  plus  tard  Henri  III.] 
—  P.  54.  E.  VuARNET.  Malheureuse  expédition  du  seigneur  de  Salle- 


PÉRIODIQUES  MÉRIDIONAUX.  121 

nove  et  de  quelques  partisans  savoisiens  en  Auvergne  en  1422.  [M.  V. 
signale  un  passage  de  la  Chronique  de  la  Pucelle,  de  Cosinot  de  Mon- 
treuil,  relatant  cette  expédition.]  —  P.  94-101.  Dom  B.  Mackey.  Le 
voyage  de  Charles-Emmanuel  I"  à  Paris  (décembre  1599).  Quatre  lettres 
inédites,  avec  introduction.  [Voyage  se  rapportant  à  la  question  du 
marquisat  de  Saluces,  que  le  duc  de  Savoie  voulait  garder.]  —  P.  101-15, 
147-63,  247-89.  S.  Cordero  de  Pamparato.  La  dernière  campagne  d'Amé- 
dée  VI,  comte  de  Savoie  (1382-1383),  d'après  les  comptes  des  trésoriers 
généraux  conservés  aux  Archives  de  Turin.  [M.  C.  de  P.  publie  les 
comptes  de  Pierre  Voisin,  non  sans  en  modifier  un  peu  l'ordonnance 
pour  plus  de  clarté.  Amédée  VI  allait  rejoindre  son  allié,  le  duc  d'An- 
jou, pour  disputer  le  royaume  de  Naples  à  Charles  de  Duras.  Il  mou- 
rut dans  le  voyage.  Courte  introduction.  Un  index  des  noms  propres 
suivra.]  —  P.  120.  Bruchet.  Extrait  des  comptes  du  trésorier  de  Savoie 
relatif  à  la  destruction  de  Sallanches  par  une  inondation  en  1436.  [Texte 
latin,]  —  P.  174.  AIarteaux.  Note  sur  le  mot  bezière.  —  P.  177-8. 
Le  Roux.  A  propos  d'un  crâne  savoyard.  —  P.  214.  M.  Bruchet.  Notes 
sur  la  vie  privée  sous  l'ancien  régime.  [Inventaire  des  meubles  de  Fran- 
çois Borrel,  homme  lige  du  duc  de  Savoie  (1562).]  —  P.  244-6.  M.  Bruchet. 
Difficulté  des  approvisionnements  de  Genève  à  la  fin  du  xvi«  siècle. 
[Correspondance  de  la  seigneurie  de  Genève,  du  7  février  1588.  Genève 
était  convoitée  par  les  ducs  de  Savoie  qui  cherchaient  à  l'affamer.]  — 
P.  293-7.  A  Gex.  Un  autographe  de  Jacques  Balmat,  premier  ascension- 
niste du  mont  Blanc.  [Note  sur  sa  première  ascension  et  énumération 
des  suivantes.]  M.  D. 

Vienne  (Haute-). 

I.  Archives  historiques  du  Limousin  (série  ancienne)'. 

T.  VIII  (1902)  par  Louis  Guibert.  Documents,  analyses  de  pièces,  extraits 
et  notes  relatifs  à  l'histoire  municipale  des  deux  villes  de  Limoges  :  le 
Château  (suite),  de  1373  à  1566.  [Cf.  un  compte  rendu  dans  les  Annales, 
XV,  p.  132.] 

II.  Archives  historiques  du  Limousin  (série  moderne)-. 

Fasc.  I  (1889)  par  Alfred  Leroux.  Doléances  paroissiales  de  1789.  [Com- 
prend neuf  paroisses.] 

1.  Jusqu'au  tome  II  inclusivement,  cette  collection  s'est  appelée  Archi- 
ves historiques  de  la  Marche  et  du  Limousin.  Le  titre  a  été  modifié, 
mais  non  le  cadre.  ^ 

2.  Jusqu'au  fasc' IV  inclusivement,  cette  collection  s'est  appelée  ^rc^i- 
ves  révolutionnaires  de  la  Haute- Vie)ine. 


122  ANNALES   DU   MIDI. 

Fasc.  II  (1891)  et  III  (1892)  par  Fray-Fournier.  Inventaire  des  docu- 
ments manuscrits  et  imprimés  de  la  période  révolutionnaire  conservés 
aux  Archives  départementales  de  la  Haute- Vienne.  [Le  fasc.  III  com- 
prend, en  outre,  une  bibliographie  de  l'histoire  de  la  Révolution  dans 
le  même  département  (p.  51  à  167).] 

Fasc.  IV  (1893)  par  Fray-B^ournier.  Cahiers  de  doléances  (au  nombre  de 
dix),  suivis  de  documents  et  notices  sur  les  députés  de  la  Haute-Vienne 
à  l'Assemblée  constituante  de  1789. 

Fasc.  V  (1896)  par  Alfred  Leroux.  Choix  de  documents  relatifs  au  dépar- 
tement de  la  Haute- Vienne,  de  1791  à  1839  :  P.  1  à  34,  rapports  admi- 
nistratifs adressés  au  Conseil  général  de  la  Haute- Vienne,  en  1791  ;  — 
P.  35-65,  documents  relatifs  à  la  réorganisation  du  culte  catholique, 
1801-21  ;  —  P.  66-151,  documents  relatifs  à  la  réorganisation  de  l'en- 
seignement public,  1802-39;  —  P.  153-74:,  procès-verbal  d'installation 
de  la  cour  impériale  de  Limoges,  1811;  —  P.  175-94,  documents  sur  les 

.  Loges  maçonniques  de  Limoges,  1806-25;  —  P.  195-336,  documents  di- 
vers relatifs  à  l'agriculture,  à  l'industrie  et  au  commerce,  1791-1839. 

Fasc.  VI  (1903)  par  Fray-Fournier.  Le  club  des  jacobins  de  Limoges 
(1790-95),  d'après  ses  délibérations,  sa  correspondance  et  ses  journaux. 
[Sur  ce  recueil  de  documents,  cf.  un  compte  rendu  dans  les  Annales, 
XV,  577.]  A.  L. 

III.  Le  Bibliophile  limousin,  1902. 

1"  livr.  P.  1-8.  P.  DurouRTiEux.  La  collection  de  M.  l'abbé  Pau.  [Curé  de 
Bort  (Corrèze),  f  1901.  Avait  réuni  un  assez  grand  nombre  de  mss.,  de 
livres  imprimés,  d'émaux  peints,  de  pièces  d'orfèvrerie,  de  monnaies, 
de  médailles,  même  de  tableaux.  Le  tout  s'est  vendu  à  Paris,  à  fort  bas 
prix.]  — P.  8-21.  Un  bibliophile  corrézien  (M.  Clément-Simon).  Curio- 
sités de  la  bibliographie  limousine.  [Suite  de  ces  savantes  recherches 
qui  rendront  tant  de  services  à  l'érudition  locale.  Et  p.  47-58,  86-92, 
124-32,  jusqu'à  la  lettre  M  inclusivement.] 

2"  livr.  P.  41-7.  P.  Ducourtieux.  Les  papetiers  et  les  imprimeurs  de  Tulle. 
[Extrait  pur  et  simple  àe\la  Vie  à  Tulle  aux  xvii=  et  x\ui^  siècles,  par 
M.  R.  Fage.] 

3'^  livr.  P.  81-5.  R.  P'age.  Les  premiers  calendriers  républicains  de  la  Cor- 
rèze. [En  signale  un  pour  l'an  III,  un  afltre  pour  l'an  VII,  un  troisième 
pour  l'an  VIII,  imprimés  tous  trois  par  Chirac]  —  P.  93-95.  P.  D.  Les 
journaux  locaux  à  la  Bibliothèque  départementale  de  la  Haute- Vienne. 
[La  signature  est  sans  doute  erronée,  car  l'article  est"  de  M.  A.  Leroux.] 

4»  livr.  p.  121-4.   P.  Ducourtieux.  Brochures  limousines  et  marchoises. 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  123 

1903. 

1"  livr.  P.  1-12.  Un  bibliophile  corrêzien.  Curiosités  de  la  bibliographie 
limousine.  (Suite.)  [Se  continue  dans  les  livraisons  2,  3  et  4  jusqu'à  la 
lettre  R.] 

2"  livr.  P.  41-5.  P.  Ducourtieux.  Brochures  limousines. 

S'  livr.  P.  77-8.  Id.  Les  livres  limousins  à  l'exposition  de  Limoges.  [Cite 
quelques  impressions  limousines  fort  rares  du  xvi«  siècle.] 

4«  livr.  P.  117-33.  Id.  La  bibliothèque  de  M.  Elie  Massénat.  [Collection- 
neur limousin,  correspondant  du  Ministère  (et  non  de  l'Institut,  comme 
il  est  dit),  mort  récemment.  Ses  mss.,  livres  et  autographes  ont  été  ven- 
dus dans  des  conditions  déplorables  par  le  ministère  d'un  huissier 
ignare.]  A.  L. 

IV.  Bulletin  de  la  Société  des  amis  des  sciences  et  arts 
de  Rochechouart,  t.  XI,  1901. 

P.  67-74.  D'  Marquet.  La  vie  communale  à  Rochechouart,  d'après  les 
registres  consulaires  et  les  livres  de  la  municipalité.  [Suite;  se  con- 
tinue dans  les  diverses  livraisons  du  Bulletin.]  —  P.  91-6.  P.  Gaumy. 
Un  groupe  d'habitants  de  la  région  de  Rochechouart  devant  le  tribunal 
révolutionnaire  pendant  la  Terreur.  [D'après  divers  documents  d'archi- 
ves conservés  à  Paris.  Se  poursuit  dans  les  livraisons  suivantes  du 
Bulletin.] 

T.  XII,  1902. 

P.  76-9.  A.  PouYAUD.  Syndicat  des  meuniers  de  l'ancienne  vicomte  de 
Rochechouart;  leur  procès  avec  les  habitants.  [Se  continue  dans  les 
livraisons  suivantes  du  Bulletin.]  —  Pass.  D'  Marquet.  La  vie  com- 
munale à  Rochechouart  (suite).  —  Pass.  P.  Gaumy.  Un  groupe  d'habi- 
tants, etc.  (suite).  —  P.  28-31,  0.  d'Abzac.  La  question  des  halles  à 
Rochechouart  en  1768.  A.  L. 

V.  Limoges  illustré^  cinquième  année,  1903. 

N"    15.   DEZEIR.4.UD.    La  manufacture  de   porcelaine    de    Magnac-Bourg. 

[Fondée  en  1819,  aujourd'hui  disparue.]  , 

N»  28.  Valette.  Les  anciennes  manufactures  de  Saint-Yrieix.  [Depuis  la 

fin  du  xvui»  siècle.  Elles  ont  disparu.]  A.  L. 


124  ANNALES   DU   MIDI. 


PÉRIODIQUES  FRANÇAIS  NON  MÉRIDIONAUX. 

1.  —Annales  de  Saint- Louis-des- Français,  t.  VII,  1902- 
1903. 

p.  91-135,  141-231,  287-336,  411-91.  Abbc  E.  Albe.  Autour  de  Jean  XXII. 
Jean  XXII  et  les  familles  du  Quercy.  (Suite  et  à  suivre.)  "[Nous  rendrons 
compte  de  cet  important  travail  quand  il  sera  terminé.]  —  P.  493-526. 
Abbé  P.  Calmet.  Sommaire  des  bulles  de  Clément  VI  concernant  le  dio- 
cèse de  Rodez,  d'après  le  sommaire  de  P.  de  Montroy  et  les  Regesta 
d'Avignon  (fin).  [Tomes  LI  à  LV;  du  19  mai  1349  au  18  mai  1350.] 

P.  D. 

2.  —  Bulletin  du  Comité  des   tt^avaux  historiques  et 
scientifiques,  sciences  économiques  et  sociales,  1902. 

P.  18-47.  A.  DuMONT.  Etat  démographique  du  Lot-et-Garonne.  [Mission 
exécutée  de  mai  à  août  1901.  Conclusions  sévères.  Population  à  mora- 
lité négative,  sans  vices  ni  vertus  :  «  La  race  agenaise,  aimable  et  sym- 
pathique, saine  et  gracieuse,  est  en  voie  manifeste  d'extinction;  elle  le 
doit  à  deux  défauts  de  peu  d'importance  aux  yeux  de  la  morale  vul- 
gaire :  la  vanité  et  l'esprit  de  routine.  Si  peu  graves  qu'ils  paraissent 
généralement,  ils  ont  ici  des  conséquences  désastreuses  :  la  faible  pro- 
portion du  travail  utile  au  travail  brut,  l'improductivité  agricole  et  la 
stérilité  humaine.  »  Intéressant  tableau  du  mouvement  de  la  popula- 
tion pendant  la  décade,  1883-92.  |  —  P.  122-8.  A.  des  Cilleuls.  «  His- 
toire de  l'octroi  de  Limoges  »,  suivi  de  considérations  générales  sur  les 
octrois.  [Rapport  développé,  suivi  de  considérations  sur  la  question 
de  la  suppression  des  octrois.]  —  P.  144-212.  G.  Platon.  Du  droit  de  la 
famille  dans  ses  rapports  avec  le  régime  des  biens  en  droit  andorran. 
[Survivance  de  nombreuses  coutumes  généralement  pratiquées  dans 
les  vallées  pyrénéennes  sous  l'ancien  régime.  Travail  très  intéres- 
sant.] 

Congrès  des  Sociétés  savantes.  —  P.  283.  Durand-Lapie.  Mémoire  sur 
la  question  suivante  :  «  Etudier  l'état  et  le  mouvement  de  la  population 
dans  une  commune  de  France  depuis  la  sécularisation  de  l'état  civil 
jusqu'aux  premières  statistiques  annuelles,  1792-1801.  [Cette  étude  con- 
cerne la  commune  de  Montauban.]  A.  V. 


PÉRIODIQUES   NON   MÉRIDIONAUX.  125 

3.  —  Bulletin  historique  et  philologique  du  Comité  des 
travaux  historiques  et  scientifiques^  1902. 

p.  27-33.  ViLLEPELET.  L'exéciitlon  de  la  révocation  de  l'édit  de  Nantes  dans 
une  petite  paroisse  du  Périgord.  [Précédé  d'une  note  mentionnant  le 
seul  exemple  connu  de  sépultures  de  protestants  non  convertis  célé- 
brées par  le  curé  sans  qu'ils  aient  abjuré.  Texte  faisant  connaître  les 
vexations  qu'eurent  à  subir  les  nouveaux  catholiques.]  —  P.  36-9. 
Dujarric-Descombes.  Lettres  du  Grand  Conseil  de  Cliarles  VII  à  l'évè- 
que  de  Périgueux  (25  avril  1446).  [Lui  défend  de  mettre  obstacle  à  la 
levée  d'une  aide  accordée  par  le  roi  aux  habitants  de  Périgueux  pour 
la  réparation  des  fortifications  de  la  ville,  et  ordonne  que  les  gens 
d'église  y  contribueront  comme  les  autres.] —  P.  42-52.  E.  Grand.  Traité  de 
pariage  entre  Philippe  le  Bel  et  l'abbé  de  Charroux  pour  la  création 
d'une  ville  franche  à  Pleaux  (Cantal),  1289-1290.  [D'après  un  vidimus 
de  1444,  copié  au  commencement  du  xix"  siècle.]  —  P.  73-8.  P.  Meyer. 
Rapport  sur  des  documents  concernant  Seyne-les-Alpes  (Basses- Alpes). 
[Publication  partielle.  Trois  documents  en  provençal  de  1536,  1540  et 
1546.]  —  P.  80-1.  A.  Leroux.  Nomination  d'un  lieutenant  du  sénéchal 
de  Périgord  et  Quercy  en  1340.]  —  P.  85-94.  G.  Tholin.  Documents 
intéressant  le  maréchal  de  Xaintrailles.  [Deux  pièces  dont  la  plus  inté- 
ressante est  une  donation  par  Pothon  de  Xaintrailles  au  couvent  des 
B'rères  mineurs  de  Nérac,  juillet  1458,  latin  et  roman.]  —  P.  98-100.  Mes- 
CHiNET  DE  RiCHEMONT.  Extraits  du  livre  de  raison  de  François  Gillet, 
sergent  royal  à  Saintes  (1641-92). 

Congrès  des  Sociétés  savantes.  —  P.  165-76.  Vidal  de  la  Blache.  Dis- 
cours prononcé  à  la  séance  de  clôture.  [Promenade  à  travers  l'ancienne 
France.  Très  intéressant.]  —  P.  197-228.  R.  Grand.  Les  Chartes  de 
franchises  de  La  Roquebrou  (1281-82)  et  de  Conros  (1317)  (Cantal).  [Cf. 
Annales,  1902,  p.  205-7.]  —  P.  309-17.  E.  Poupé.  Les  opérations  de  l'as- 
semblée électorale  du  Var  élue  en  août  1792.  [Résumé  très  clair  des 
opérations  électorales.  On  y  voit  comment  Dubois-Crancé,  né  à  Char- 
leville,  et  alors  adjudant  général  à  l'armée  du  Midi,  est  envoyé  à  la  Con- 
vention par  les  électeurs  du  Var.  Barras  est  élu  premier  suppléant.]  — 
P.  329-71.  M.  Bruchet.  Le  plébiscite  occulte  du  département  du  Mont- 
Blanc  en  1815.  —  P.  436-7.  M.  Boudet.  Note  sur  le  cartulaire  de  Saint- 
Flour.  [Chartes  de  972  à  1314.  En  cours  de  publication  dans  la  «  Collec- 
tion des  documents  historiques  »  de  la  principauté  de  Monaco.]  — 
P.  449-63.  Abbé  Degert.  L'impression  des  liturgies  gasconnes.  [Bonne 
étude  d'ensemble  avec  des  documents  inédits.]  —  P.  500-30.  Chauvet. 


126  ANNALES  DU   MIDI. 

Registre  de  la  Société  des  amies  des  vrais  amis  de  la  Constitution 
RiifTec  (Charente),  1791-92.  [Publication  sans  commentaires  des  procès- 
verbaux  de  cette  société  féminine.  Liste  des  sœm's  composant  la  so- 
ciété.] —  P.  r)44-7.  Blanchard.  Actes  apocryphes  conservés  dans  les 
archives  publiques  ou  particulières.  [Charte  de  Gibelin  de  Grimaud, 
cartulaire  de  l'évèché  de  Fréjus.]  —  P.  548-69.  C.  Couderc.  Notice  sur 
une  collection  de  cliartes  otrerte  à  la  Bibliothèque  nationale  par 
M.  Grave.  [Inventaire  de  cette  collection  reliée  en  six  volumes  (Nouv. 
acq.  franc.  20144-49).  Le  vol.  III  (1322-1675)  se  rapporte  plus  particuliè- 
rement au  Midi  ainsi  que  quelques  pièces  du  IV"  et  du  V.  Quelques 
noms  paraissent  inexactement  lus  ou  écrits  :  III,  fol.  4,  Etienne  de 
«  Montmegen  »  pour  «  Momeja  »;  IV,  fol.  7,  «  de  Podio  Buscario  »  pour 
«  de  Podio  Buscano  ».  Nombre  de  pièces  très  intéressantes  pour  toute 
la  région.]  —  P.  606-19.  A.  Leroux.  La  légende  du  roi  Aigolant  et  les 
origines  de  Limoges.  A.  V. 

4.  —  Le  Moyen  âge,  2^  série,  t.  VII,  1903. 

Juillet-août.  —  P.  283-302.  M.  Boudet.  Nouveaux  documents  sur  Thomas 
de  la  Marche,  seigneur  de  Nonette  et  d'Auzon,  bâtard  de  P'rance  (1318- 
1360).  [De  ces  documents,  l'auteur  prétend  tirer  de  nouvelles  preuves  à 
l'appui  de  sa  thèse,  que  Thomas  de  la  Marche  aurait  eu  pour  père  le 
roi  Philippe  VI  de  Valois.  (V.  p.  298.)  Suit  la  reproduction  en  fac- 
similé  d'une  lettre  du  même  personnage,  tirée  des  archives  de  Saint- 
Flour  et  datée  du  28  juin  1360.]  G.  M. 

5.  —  Revue  d'histoire  moderne  et  contemporaine,  t.  IV, 
1902-1903. 

p.  739-53.  M.  Marion.  Un  épisode  du  mouvement  de  1789  à  Bordeaux. 
[L'auteur  expose  l'entente  qui  s'établit  à  Bordeaux  entre  la  noblesse  de 
Guyenne  et  le  Parlement  de  Bordeaux  pour  demander  le  rétablissement 
des  anciens  États  de  Guyenne  qui  auraient  un  rôle  prépondérant  dans 
l'élection  aux  Etats  généraux.  Le  tiers  état  de  Bordeaux  combattit  ce 
projet,  demanda  la  représentation  proportionnelle  de  chacun  des  trois 
ordres  et  décida  d'envoyer  une  députation  à  Versailles  pour  faire 
triompher  son  opinion.  M.  M.  fait,  d'après  un  document  inédit,  un  inté- 
ressant récit  de  cette  députation.]  F.  D- 


PÉRIODIQUES  NON   MÉRIDIONAUX  127 

6.  —   Nouvelle  revue  Mstorique  de  droit  français  et 
étranger^  1901. 

P.  241-77.  E.  Meynial.  Des  renonciations  au  moyen  ■À<^e.  (Suile,  et 
p.  657-98.)  [Important  article  intéressant  l'application  du  droit  romain 
dans  le  midi  de  la  France.]  —  P.  ry27-33.  Huvelin.  Compte  rendu  des 
travaux  récents  de  Boudin  et  Fassin  sur  Beaucaire.  —  P.  698-729. 
F.  Thibault.  L'impôt  direct  dans  les  royaumes  des  Ostrogoths,  des 
Wisigoths  et  des  Burgondes.  [Etude  très  nette  sur  la  situation  des 
Barbares  au  point  de  vue  de  l'impôt  foncier;  l'auteur  démontre,  en 
discutant  les  idées  de  Fustel  de  Coulanges  et  d'autres  historiens,  que 
les  Barbares  n'étaient  point  assujettis  au  payement  de  cet  impôt;  il 
s'occupe,  à  cette  occasion,  de  la  question  importante  de  l'établissement 
des  Barbares,  en  particulier  des  Burgondes.] 

Année  1902. 

P.  32-49.  F.  Thibault.  L'impôt  direct  dans  les  royaumes  des  Ostrogoths, 
des  Wisigoths  et  des  Burgondes  (fin).  —  P.  49-79.  E.  Meynial.  Des 
renonciations  au  moyen  âge  (suite).  —  P.  233-68.  Declareuil.  Quel- 
ques problèmes  d'histoire  des  institutions  municipales  au  temps  de 
l'Empire  romain  (suite  p.  437-69,  et  fin  p.  554-608).  [L'auteur  s'efToi'ce 
d'établir  que  la  décadence  du  régime  municipal  ne  se  produisit  pas 
avant  le  iv°  siècle  et  que  le  christianisme  n'y  contribua  point.] 

J.  B. 

V.  —  Revue  félibréenne,  t.  XI,  1895. 

N<"  1-3.  P.  1-16.  P.  Mariéton.  L'évolution  félibréenne  en  Aquitaine.  [Sur 
les  récentes  publications  et  poésies  dans  les  dialectes  du  Béarn,  Lan- 
guedoc, Quercy,  Rouergue,  Limousin.]  —  P.  17-9.  Lettres  à  Nodier  [de 
Jasmin.]  —  P.  20-30.  G.  Tisseur.  Une  visite  à  Anselme  Mathieu.  [Réé- 
dition d'un  article  de  1862.]  —  P.  33-46.  A.  Ferrand.  Un  grand  prédica- 
teur provençal.  [Le  P.  X.  de  B'ourvières.] 

N»"  4-12.  [Si  l'on  en  juge  d'après  la  table  de  l'année  1895,  imprimée 
en  1896,  p.  254,  ces  livraisons  n'ont  jamais  paru.] 

Tome  XII,  1896. 

N°'  1-6  (janvier-juin).  P.  1-21.  L.  Remacle.  La  république  d'Arles.  [Revue 
rapide  de  ses  institutions  politiques.]  —  P.  54-61.  V.  Balaguer.  Pro- 
vence et  Castille.  [Sur  les  relations  des  troubadours  avec  la  Castille. 
Beaucoup  moins  nouveau  que  l'auteur  ne  le  croit.] 

N"'   7-12  (juillet-décembre).  P.  215-20.  P.   Mariéton.  Marie  Jenna  et  les 


128  ANNALES    DU    MIDI. 

Félibres.  [Marie  Jennu  ou  M"«  Cécile  Renard  (morte  en  1887),  fut  ea 
relations  avec  les  princii^aux  félibres;  on  publie  ici  quelques  lettres 
d'elle  à  Aubanel,  Mistral,  et  les  réponses.]  —  P.  220-30.  Id.  Lettres 
choisies  de  Roumanille  à  Marie  Jenna.  [Suite,  1897,  p.  17-50;  dix-huit 
lettres  de  Roumanille,  de  1868  à  1871.] 

Tome  XIII,  1897. 
p.  1-16.  Mistral  et  le  vers  libre.  [Interview  —  par  lettres  —  de  diverses 
personnes  plus  ou  moins  compétentes.]  —  P.  54-9.  M.  André.  L'en- 
fance de  Jacme  I"  d'Aragon.  [L'auteur  néglige  le  livre  de  M.  de  Tour- 
toulon.]  —  P.  97-102.  Mémoires  posthumes  de  Mary-Lafon.  [Quelques 
pages  curieuses  sur  un  projet  de  statue  à  Bertran  de  Born,  en  1840.]  — 
P.  115-37.  L,  Remaole.  La  république  d'Arles,  précis  historique.  [Sans 
indication  de  sources.] 

Tome  XIV  (fascicule  unique  pour  1898  et  1899). 

P.  1-14.  G.  DoNCiEux.  L'Escrivette,  étude  de  folk-lore  méridional.  [Cette 
étude  n'est  pas  moins  intéressante  que  celle  sur  «  la  Remette  »  et  sur 
«  Jean  Renaud  »,  publiées  par  le  même  auteur  dans  la  Romania.  Mais 
M.  D.,  craignant  sans  doute  d'effaroucher  un  public  d'amateurs,  a 
vraiment  ici  restreint  un  peu  trop  la  part  de  l'érudition;  les  variantes 
données  en  note  ne  permettent  pas  de  contrôler  la  façon  dont  a  été  cons- 
titué son  texte  critique.  Il  conclut  que  VEscriveto  est  dérivée  d'un 
romance  castillan  (celui  de  Gayferos) ,  à  travers  un  intermédiaire 
catalan.  V.  4  :  le  mot  bot  [al  bot  de  set  annadas)  ne  me  paraît  pas  avoir 
pu  se  trouver  dans  une  chanson  languedocienne  du  xvi°  siècle  ;  c'est 
un  gallicisme  flagrant.  Il  y  a,  du  i-este,  d'autres  gallicismes  qui  pour- 
raient bien  ébranler  la  théorie  de  l'auteur  sur  l'origine  de  la  chanson  ; 
V.  22  :  j'écrirais  el  (non  al)  nom  de...;  v.  35  :  comment  seguron  pas  à 
Vaiga  peut-il  signifier  a  ils  n'étaient  pas  à  l'eau?  »]  —  P.  17-27.  P.  Ma- 
RiÉTON.  Les  précurseurs  du  félibrige.  [Article  de  vulgai-isation,  extrait 
de  la  Grande  Encyclopédie.]  —  P.  33-64.  P.  Risson.  La  vie  et  l'œuvre 
de  Gelu,  poète  marseillais,  d'après  ses  Mémoires  inédits  (suite, 
p.  176-208;  à  suivre).  [Dans  ces  pages  très  attachantes,  d'où  la  plus 
ardente  sympathie  pour  le  poète  et  son  œuvre  n'exclut  pas  la  critique, 
M.  R.  a  fait  revivre  la  physionomie  singulièrement  originale  de  cet 
écrivain  homme  du  peuple,  vigoureux,  brutal  même,  mais  passionné- 
ment sincère  et  honnête,  qui  a  créé  le  réalisme  trente  ans  avant  Zola, 
et  élevé,  avant  les  félibres,  son  dialecte  à  la  dignité  de  langue  litté- 
raire, mais  que  son  humeur  farouche  et  ses  opinions  avancées  firent 


PÉRIODIQUES    NON    MERIDIONAUX.  129 

délaisser  par  les  uns  et  calomnier  par  les  autres.  Il  est  piquant  de  voir 
paraître  dans  la  Revue  félibréenne  cette  cliaude  apologie  de  l'intrai- 
table ennemi  des  félibres.  Nombreux  extraits  d'une  autobiographie 
inédite  (en  français)  où  se  trouveraient  sans  doute  de  curieux  docu- 
ments d'histoire  littéraire  provinciale;  à  noter,  par  exemple  (p.  192),  le 
récit  du  premier  «  Congrès  »  des  poètes  provençaux  tenu  à  Arles  en 
août  1852.]  —  P.  74-113.  Les  poètes,  Mistral  et  le  vers  libre.  (A  suivre.) 
—  P.  209-33.  De  Villeneuve.  Roméo  de  Villeneuve,  étude  histori- 
que. [Extrait  d'un  ouvrage  en  préparation.]  —  P.  301-33.  Chronique. 
[Documents  intéressant  l'histoire  du  félibrige  en  1897-9.  On  aurait 
pu  placer  sous  la  même  rubrique  le  récit  (p.  334-9)  des  fêtes  d'Arles,  de 
mai  1899.]  A.  J. 

8.  —  Revue  cV histoire  de  Lyon,  t.  1, 1902. 

p.  106-18.  p.  Fabia,  La  querelle  des  Lyonnais  et  des  Viennois  en  G8-69 
après  J.-C.  [Vieille  animosité  entre  les  deux  cités;  lu  guerre  civile  de 
l'an  68  (Vindex  cont.re  Néron)  l'exaspère.  Les  Viennois  qui  tenaient 
pour  Vindex  et  pour  Galba,  son  candidat  à  l'Empire,  l'emportent  après 
la  mort  de  Néron  :  Galba  les  récompense  et  confisque  ses  revenus  à  la 
colonie  de  Lyon,  qui  avait  lutté  contre  lui.  Alais  Galba  est  assassiné; 
Lyon  reçoit  en  libérateurs  les  soldats  de  Vitellius  et  prépare  la  ruine 
de  sa  rivale  :  celle-ci  ne  put  se  sauver  qu'en  achetant  les  soldats  et 
leur  général,  Fabius  Valens.]  —  P.  390-4(17,  447-64.  E.  Baux.  Louise  de 
Savoie  et  Claude  de  France  à  Lyon.  Étude  sur  la  première  régence 
(1515-1516).  [De  Lyon,  les  deux  princesses  se  rendirent  à  Vienne,  Mon- 
télimar,  Tarascon  et  Marseille,  nov.-janv.  1515-16.]  P.  D. 

9.  —    Revue   des   questions   historiques,  nouv,   série, 
t.  XXIX  (LXXIII  de  la  collection),  1903. 

P.  5-44.  E.  CosQuiN.  La  légende  du  page  de  sainte  Elisabeth  de  Portugal 
et  le  conte  indien  des  «  Bons  conseils  ».  [Les  éléments  primordiaux  de 
cette  légende  apparaissent  en  Europe  longtem^js  avant  l'époque  où 
vivait  sainte  Elisabeth.  Ils  se  rattachent  à  l'un  des  thèmes  de  contes 
les  plus  en  faveur  dans  l'Inde,  le  thème  des  Bons  conseils.] 

Tome  XXX  (LXXIV  de  la  collection),  1903. 

P.  367-97.  Dom  M.  Férotin.  Le  véritable  auteur  de  la  Pereffrùiatio 
SiLoiae  :  la  vierge  espagnole  Etlieria.  [Voici  les  conclusions  de  cet 
article.  L'auteur  véritable  du  récit  de  voyage  en  Terre-Sainte  dont  il 
s'agit  serait  une  espagnole  consacrée  à  Dieu  dans  un  monastère  [sanc- 

A.NNALES  DU   MIDI.   —  XVI.  9 


130  ANNALES   DU    MlDÏ. 

timonialis],  du  nom  d'Etheria.  La  vie  de  cette  Etheria  ne  nous  est  pas 
inconnue.  Elle  a  été  écrite  au  vit»  siècle  par  un  solitaire  de  Galice, 
Valérius.  La  Peregrinatio,  composée  trois  siècles  plus  tôt,  ne  nous 
serait  pas,  d'ailleurs,  arrivée  en  entier,  La  partie  la  plus  considérable 
en  serait  encore  à  découvrir.]  C.  M. 

tO.  Revue  de  synthèse  historique,  t.  VI,  1903. 

Avr.  et  juin;  p.  182-221  et  277-800.  L.  Barrau-Dihigo.  La  Gascogne. 
[Première  étude  d'une  série  qui  paraîtra  sous  le  titre  «  Les  régions  de 
la  France  ».  Elle  est  précédée  (p.  166-81)  d'une  Introdnction  générale 
dans  laquelle  M.  H.  Berr,  directeur  de  la  Revue  de  synthèse  histori- 
que, définit  sa  tentative  :  il  s'agit,  dit-il,  de  «  rendre  scientifique  la 
psychologie  des  peuples  par  des  études  de  psychologie  régionale  »,  de 
préparer  ainsi  ou  d'édifier  morceau  par  morceau  la  psychologie  du 
peuple  français.  Dans  chaque  monographie  régionale  seront  déterminés 
successivement  l'état  du  travail,  les  l'ésultats  acquis,  enfin  ce  qui  reste 
à  faire.  Tel  est  le  programme.  M.  B.-D.  l'a  rempli  avec  beaucoup  de 
science  et  de  bonheur.  La  première  partie  de  son  travail  est  une 
«  bibliographie  raisonnée  »,  forcément  incomplète,  mais  non  super- 
ficielle :  i30urquoi  n'y  avoir  point  mentionné  le  très  important  volume 
de  M.  F.  Abbadie,  Le  Livre  ?ioir  et  les  Etablissements  de  Dax,  paru 
en  1902,  les  articles  de  M.  Pariset  sur  L'Etablissement  de  la  primatie 
de  Bourges,  publiés  aussi  en  1902,  ici  même?  L'auteur  malmène,  non 
sans  raison,  les  histoires  générales  de  la  Gascogne;  il  déplore  le  défaut 
de  méthode  et  de  direction,  le  décousu  qui  régnent  en  matière  de  tra- 
vaux d'histoire  locale  et  trop  souvent  les  stérilisent.  —  En  second  lieu 
vient  un  essai  sur  la  Gascogne  :  quels  en  sont,  d'après  ce  que  l'on  sait 
d'ores  et  déjà,  les  caractères  jjropres?  Assez  nettement  dessinée,  la 
région  est  très  pauvre,  surtout  au  cœur  (Albret,  Armagnac);  sur  le 
pourtour  seulement,  aux  confins  où  elle  expire,  s'amassent  les  ressour- 
ces et  les  hommes.  Tantôt  les  habitants,  besogneux  et  rudes,  se  sont 
avancés  vers  ces  confins  pour  les  conquérir,  tantôt  ils  ont  cédé  à  leur 
attrait  pacifique  :  la  Gascogne,  indépendante  pendant  deux  siècles,  n'a 
pu  durer  en  tant  qu'Etat,  s'est  partagée  entre  deux  centres  principaux 
d'attraction,  Bordeaux  et  Toulouse.  Les  petits  seigneurs  d'Albret 
—  de  vrais  parvenus  —  ne  la  réunissent  enfin  que  pour  en  sortir 
avec  le  titre  -le  rois  de  France.  Le  caractère  des  Gascons  tient  à  ce 
l^ays  et  à  cette  histoire  :  enclins  à  «  gagner  »,  d'esprit  éminem- 
ment   pratique,    prompt,    souple    et    peu    alourdi   de    scrupules,    ils 


PÉRIODIQUES  NON   MÉRIDIONAUX.  131 

sont  aventureux,  braves  avec  réflexion,  spirituels  et  d'élocution 
facile,  pleins  de  confiance  en  eux-mêmes  et  de  vantardise;  ils 
s'acclimatent  aisément  et  «  poussent  partout  »,  disait  Henri  IV. 
lia  Gascogne  n'a  pas  eu  d'art,  peu  de  littérature,  sinon  nar- 
rative; mais,  dans  la  carrière  des  armes  et  en  politique,  ses  enfants 
ont  su  se  hisser  aux  faîtes.  Il  y  a,  conclura  plus  loin  l'auteur,  du 
Gascon  dans  le  moderne  Français.  —  Nombreux  sont  ses  desiderata, 
II  voudrait  qu'on  dressât  un  répertoire  de  bibliographie  gasconne,  tant 
rétrospective  que  périodique;  que  les  chartes  et  cartulaires  inédits 
fussent  imprimés;  qu'à  l'histoire  ancienne  de  la  région  une  saine 
méthode  fût  appliquée,  c'est-à-dire  qu'on  continuât  le  livre  de  M.  Per- 
roud,  «  lequel  a  définitivement  élucidé  ce  qui  concerne  le  duché 
d'Aquitaine  jusqu'au  milieu  de  vin"  siècle  »;  que  l'on  fît  l'histoire 
sociale  et  morale,  que  l'on  recherchât  les  qualités  domestiques  de  la 
race,  dont  nous  «  ne  voyons  que  le  panache  ».  La  Société  des  Archives 
historiques  de  Gascogne,  aidée  de  la  Revue  de  Gascogne,  son  organe, 
devrait  chercher  à  grouper  autour  d'elle  les  Sociétés  gasconnes  :  «  On 
aurait  ainsi,  au-dessus  des  Sociétés  et  des  Revues  purement  locales, 
une  Société  et  une  Revue  provinciales.  »  Elle  pourrait  alors  former  une 
collection  d'histoire  gasconne,  et  peut-être  obtiendrait-on  des  livres  au 
lieu  d'une  foule  de  menus  articles  qu'on  ne  peut  atteindre.  Nous  crai- 
gnons ici  que  M.  B.-D.  ne  se  fasse  quelque  illusion  ;  les  gens  qui  rédi- 
gent les  articles  en  question  ne  sauraient  écrire  des  œuvres  de  longue 
haleine  :  le  temps,  les  moyens,  la  persévérance  leur  manquent;  l'asso- 
ciation qu'il  préconise  ne  les  leur  procurera  pas.  D'ailleurs,  on  peut 
atteindre  ces  articles,  si  meiius  qu'ils  soient  :  on  les  trouvera  réguliè- 
rement mentionnés  ou  analysés  dans  notre  «  Revue  des  Périodiques  ».] 

P.  D. 


CHRONIQUE 


M.  Ed.  Koschwitz  a  accepté  de  la  librairie  Elwert.  à  Marburg, 
la  tâche  de  préparer  une  nouvelle  édition,  «  entièrement  refon- 
due »  de  la  Chreslomalhie  provençale  de  Bartsch.  Rien  n'a  été 
changé  à  l'ordre  et  au  choix  des  textes  (sauf  quelques  suppres- 
sions); mais  ces  textes,  pourvus  de  variantes  plus  nombreuses, 
ont  été  soigneusement  corrigés  et  les  indications  bibliographi- 
ques ont  été  enrichies.  Enfin,  l'aspect  extérieur  est  plus  satis- 
faisant. Nous  rendrons  compte  de  cette  publication  quand  nous 
aurons  reçu  le  Glossaire,  dont  l'apparition  est  annoncée  comme 
très  prochaine. 


Chronique  du  Dauphiné. 

Au  moment  où  la  ville  de  Grenoble  se  préparait  à  célébrer  le 
centenaire  d'Hector  Berlioz,  l'Académie  delphinale,  désireuse  de 
s'associer  à  cette  manifestation  artistique,  a  donné  une  séance 
solennelle  exclusivement  consacrée  au  grand  compositeur  dau- 
phinois. Après  une  éloquente  allocution  de  M.  Paul  Fournier, 
président,  M.  Allix  a  analysé  avec  une  rare  compétence  les 
éléments  dont  s'est  formée  la  personnalité  artistique  de  Berlioz, 
et,  avec  cet  art  exquis  qui  fait  le  charme  de  toutes  ses  œuvres, 
M.  Paul  Morillot  a  parlé  de  Berlioz  écrivain.  Un  autre  membre 
de  l'Académie,  M.  Michoud,  a  communiqué  vingt-trois  lettres 
inédites  de  Berlioz  à  son  ami  Thomas  Gounet,  de  mai  1830  à 
1834,  lettres  curieuses,  en  particulier  quelques-unes,  datées  de 


CHRONIQUE.  133 

Rome.   Toutes  ces  études  figureront  dans  le  Bulletin  de  l'Aca- 
démie delphinale  de  1903  V 

La  Société  de  statistique  de  l'Isère  a  perdu  l'un  de  ses  collabo- 
rateurs les  plus  actifs.  M.  Emmanuel  Pilot  de  Thorey,  aide  ar- 
chiviste à  la  préfecture  de  l'Isère,  est  mort  subitement  à  Grenoble, 
le  31  mai  dernier.  Il  avait  été  pendant  de  longues  années  secré- 
taire de  cette  Société,  et  lorsque  l'état  de  sa  santé  n'avait  plus 
permis  de  lui  conserver  ces  fonctions,  ses  collègues  l'avaient 
appelé  pendant  une  année  à  la  présidence.  L'œuvre  historique 
de  Pilot  de  Thorey  est  considérable;  mais  il  convient  d'en  déga- 
ger, comme  ayant  une  spéciale  importance,  son  dernier  ouvrage 
le  Catalogue  des  actes  du  dauphi?i  Louis  II  {depuis  Louis  Xli 
relatifs  au  Dauphiné,  dont  M.  Paul  Fournier  a  rendu  compte  ici- 
même  (t.  XII,  p.  281).  et  auquel  l'Académie  delphinale  a  décerné 
en  1900  le  prix  Honoré  Pallias.  Au  moment  de  sa  mort,  Pilot  de 
Thorey  commençait  l'impression  d'un  troisième  volume  de  cet 
ouvrage.  La  Société  de  statistique  de  l'Isère  a  décidé  que  cette 
publication,  dont  tous  les  éléments  sont  prêts,  ne  serait  pas 
abandonnée,  et  etdeux  ses  membres,  MM.  Veliein  et  Hardouin,  ont 
consenti  à  se  charger  de  la  mise  au  point  du  manuscrit  et  de  la 
correction  des  épreuves.  Pendant  les  vingt-sept  années  qu'il 
avait  passées  aux  Archives  de  l'Isère,  Pilot  de  Thorey  avait 
recueilli  de  nombreuses  notes,  que  l'on  a  retrouvées,  après  sa 
mort,  méthodiquement  classées,  La  bibliothèque  de  Grenoble  en 
a  fait  l'acquisition.  Dans  ces  cartons  figurent  notamment  les 
fiches  d'un  Dictionnaire  topographique  de  l'Isère  présenté  jadis 
au  Comité  des  Travaux  historiques,  qui  en  jugea  les  proportions 
excessives  et,  pour  cette  raison,  ne  crut  pas  devoir  en  autoriser 
l'impression.  Il  est  à  souhaiter  que  la  Société  de  statistique,  qui 
est  riche,  se  décide  à  nous  donner  cette  œuvre,  qui  rendrait  de 
grands  services  à  tous  les  historiens  dauphinois. 

M.  Gustave  Veliein,  qui  a  succédé  à  Pilot  de  Thorey  dans  les 
fonctions  de  secrétaire  de  la  Société  de  statistique  de  l'Isère, 
vient  de  publier,  sur  beau  papier  et  tirées  à  petit  nombre,  deux 
intéressantes  brochures  intitulées,  l'une  :  L'Invasion  du  mar- 
quisat de  Saluces  et  la  paix  de  Bourgoiti  {ii  '  octobre   1595)2  et 


1.  Le  volume  de  1902  vient  de  paraître.   On  en  trouvera  le  dépouille- 
ment aux  «  Périodiques  niériilionaux.  »  (Cf.  plus  haut,  p.  117). 

2.  Bourgoin,  1903,  in-S",  17  pages.  (Tiré  à  33  exemplaires). 


134  ANNALES    DU   MIDI. 

l'autre,  Patriotisme  des  Berguoiens^  (1792-1815-1870). '  Il  prépare 
et  donnera  très  prochainement  —  il  faut  l'espérer  —  à  l'Académie 
delphinale  une  étude  très  documentée  sur  les  exploits  de  la  bande 
de  Vauquoi,  qui,  après  la  prise  de  Lyon  par  l'armée  do  la  Con- 
vention, terrorisa  pendant  qui'lques  mois  la  région  de  La  Tour 
du  Pin. 

Un  supplément  au  Catalogue  djs  manuscrits  de  la  bibliothè- 
que de  Grenoble,  publié  en  1889  par  MM.  Fournier,  Maignien  et 
Prudhomme  {Catalogue  général  des  manuscrits  des  Bibliothèques 
publiques  de  France.  Départements,  t.  Vil),  vient  d'être  donné 
dans  le  tome  XLI  de  la  même  collection  par  M.  Maignien.  11 
comprend  près  de  400  numéros  représentant  des  manuscrits  en- 
trés dans  la  bibliothèque  depuis  quinze  ans  par  suite  d'acqui- 
sitions ou  de  dons. 

Le  tome  III  de  V Inventaire  sommaire  des  A?-chives  historiques 
de  la  ville  de  Grenoble  est  achevé.  Il  comprend  les  séries  DD, 
EE.  FF.  Un  quatrième  et  dernier  volume  est  en  préparation  qui 
débute  par  l'analyse  des  anciens  registres  paroissiaux  d'état 
civil.  C'est  dans  ces  registres,  où  les  moliéristes  avaient  jusqu'à 
ce  jour  fouillé  sans  succès,  en  vue  d'y  retrouver  des  traces  du 
passage  de  la  troupe  de  Molière,  que  j'ai  eu  la  bonne  fortune  de 
découvrir  un  acte  de  baptême  d'un  fils  des  époux  de  Brie  signé 
par  Molière  et  Madeleine  Béjart,  parrain  et  marraine.  Cette  dé- 
couverte, qui  éclaire  un  point  obscur  de  la  vie  de  Molière,  a  fait 
l'objet  d'une  communication  à  l'Académie  delphinale,  qui  sera 
prochainement  publiée  avec  un  fac-similé  de  l'acte  de  baptême 
du  jeune  J.-B.  de  Brie. 

La  Faculté  des  Lettres  de  Grenoble  a  usé  pour  la  première 
fois,  le  18  juin  1902,  du  droit  que  la  loi  lui  a  octroyé  de  conférer 
des  diplômes  de  docteurs  d'Université.  Invité  par  M.  le  doyen  De 
Crozals  à  faire  partie  du  jury,  j'ai  pu  dire  tout  le  bien  que  je 
pensais  de  la  thèse  présentée  par  M.  l'abbé  Dussert,  laquelle 
avait  pour  sujet  un  Essai  historique  sur  la  Mure  et  son  tnande- 
menl  depuis  sts  origines  jusqu'en  1626.  Depuis  lors,  M.  Dussert  a 
donné  de  son  livre  une  seconde  édition  continuée  jusqu'à  nos 
jours. 

Une  autre  incursion  sur  le  terrain  de  l'histoire  locale  a  été  faite 
par  l'Ecole  de  médecine  de  Grenoble  dans  une  thèse  de  doctorat, 

1.  Bourgoin,  1902,  in-8°,  20  pages.  (Tiré  à  22  exemplaires). 


CHRONIQUE,  135 

présentée  par  M.  Ferdinand  Chavant,  snr  La  Peste  à  Grenoble 
(1410-1643). 

L'Association  française  pour  l'avancement  des  sciences,  qui 
avait  déjà  tenu  un  congrès  à  Grenoble  en  1885,  a  décidé  qu'elle 
se  réunirait  de  nouveau  dans  cette  ville  en  1904.  Une  Commis- 
sion présidée  par  M.  Pionchon.  professeur  à  la  Faculté  des  Scien- 
ces, a  été  chargée  de  préparer  la  réception  des  membres  de  ce 
congrès. 

Le  14  avril  dernier,  un  groupe  d'amis  se  réunissait  à  Romans 
chez  M.  le  chanoine  Ulysse  Chevalier,  correspondant  de  l'Insti- 
tut, pour  le  féliciter  de  l'œuvre  colossale  qu'il  a  entreprise  et 
menée  à  bonne  fin  sous  le  titre  de  Répertoire  des  sowces  histori- 
ques du  moi/en  âge.  Jamais  témoignage  d'estime  ne  fut  plus  mé- 
rité, et  tous  ceux  qui,  en  Dauphiné  ou  ailleurs,  s'intéressent  aux 
études  historiques,  se  sont  associés  à  ses  amis  pour  le  remercier, 
avec  le  R.  P.  Poncelet,  «  d'avoir,  par  un  labeur  acharné  et  une 
abnégation  rare,  trouvé  le  moyen,  au  milieu  de  ses  beaux  tra- 
vaux personnels,  de  doter  les  historiens  de  nombreux  et  inap- 
préciables instruments  de  travail  ».  M^'"  BelJet  a  dressé  le  procès- 
verbal  de  cette  belle  réunion  que  présidait  Ms''  Henry,  évêque 
de  Grenoble,  et  il  y  a  joint  une  bibliographie  très  complète  des 
publications  du  laborieux  érudit. 

M.  l'abbé  Jules  Chevalier,  qui  suit  de  près  les  traces  de  son 
cousin,  va  faire  paraître  prochainement  une  Elude  sur  la 
Révolution  à  Die  et  dans  la  vallée  de  la  Drôme,  dans  laquelle 
seront  insérés  des  mémoires  fort  curieux  du  chanoine  Lagier- 
Vaugelas,  qui  fut  candidat  à  l'évêché  constitutionnel  de  la  Drôme. 
De  son  côté,  Ms^''  Bellet,  revenant  aux  études  d'histoire  locale 
qu'il  semblait  avoir  abandonnées,  a  commencé  dans  le  Bulletin 
de  la  Société  d'Archéologie  delà  Drôme  une  histoire  de  la  ville  de 
Tain. 

Un  des  érudits  les  plus  actifs  et  les  plus  féconds  de  la  région 
valeiitinoise,  M.  le  chanoine  Fillet  (Jean-Louis  Alexis),  né  à  Saint- 
André  en  Royans,  le  2i  novembre  1840,  est  mort  à  Grignan  le 
l"  février  1902,  laissant  une  centaine  de  volumes  ou  brochures, 
tous  relatifs  à  l'histoire  du  Dauphiné.  C'était  un  de  ces  travail- 
leurs modestes  et  consciencieux  qui,  loin  des  ressources  qu'of- 
frent les  grands  dépôts  d'archives  et  les  bibliothèques,  bor- 
nent leur  ambition  à  recueillir  patiemment  dans  les  vieux  regis- 
tres des  mairies  et  des  presbytères  les  souvenirs  historiques  de 


136  ANNALES    DU    MIDI. 

leur  petite  ville  et  à  les  raconter  ensuite  k  leurs  concitoyens 
dans  des  monographies  sans  autre  prétention  que  celle  de  leur 
absolue  sincérité. 

Dans  les  Hautes-Alpes,  M.  l'abbé  Guillaume  s'occupe,  avec  son 
activité  coutumière,  de  la  réorganisation  de  ses  archives  qui  ont 
failli  être  dévorées  par  un  incendie  dans  la  matinée  du 
26  mai  1902  et  qui,  après  avoir  échappé  au  feu,  ont  subi  pendant 
les  mois  d'avril  et  de  mai,  cinq  inondations  successives;  car  le 
bâtiment  des  archives,  dont  la  toiture  avait  été  brûlée,  était 
resté  à  découvert  du  26  mars  au  10  juillet.  Ces  bouleversements 
ont  à  peine  retardé  la  rédaction  des  trois  inventaires  du  chapi- 
tre de  Gap,  de  la  ville  de  Gap,  et  de  la  ville  de  Guillestre,  que  le 
laborieux  archiviste  mène  de  front.  Même  il  annonce  comme 
prochaine  la  réimpression  de  l'Histoire  de  Gap,  de  Théodore 
Gauthier,  et  une  importante  publication  sur  Les  bénéfices  et  les 
bènéfi,ciers  du  diocèse  actuel  de  Gap,  dont  quelques  fragments 
ont  été  imprimés  dans  diverses  revues  du  Dauphiné  et  de  la  Pro- 
vence. Enfin,  il  assume  presque  seul  la  charge  d'alimenter  sa 
vaillante  revue  Les  Annales  des  Alpes,  qui  vient  d'achever  sa 
dixième  année  et  qui  mériterait  d'être  mieux  connue  ^  C'est 
dans  cette  revue  et  dans  le  Bulletin  de  la  Société  d'études  des  Hau- 
tes-Slpes,  fondé,  lui  aussi,  par  M.  l'abbé  Guillaume,  que  sont  insé- 
rées toutes  les  publications  historiques  relatives  aux  Hautes- 
Alpes.  A.  Prudhomme. 


Chronique  du  Roussillon. 

J'ai  déjà  signalé  [Annales,  XIV,  p.  12o)  l'important  dépôt  fait 
aux  Archives  départementales  par  des  notaires  de  l'arrondisse- 
ment de  Prades.  Depuis,  l'archiviste,  M.  Palustre,  a  obtenu  de 
M.  le  Président  du  Tribunal  civil  les  papiers  du  Conseil  souve- 
rain de  Roussillon,  et  de  M.  le  Président  du  Tribunal  de  com- 
merce ceux  de  l'ancienne  Loge  de  Mer;  ce  sont  là  pour  nos 
Archives  départementales  des  accroissements  du  plus  haut 
intérêt. 

Le  fonds  du  Conseil  souverain  de  Roussillon  constitue,  avec  le 
^onds  de  l'Intendance,   depuis  longtemps  inventorié  par  Alart 

1.  Cf.  plus  haut,  p.  101,  le  dépouillenient  du  t.  VI  àes,  Atniales  des 
Alpes, 


CHRONIQUE.  137 

(série  C),  la  source  la  plus  précieuse  de  l'Histoire  du  Roussillon 
depuis  la  paix  des  Pyrénées  jusqu'à  la  Révolution.  Les  docu- 
ments judiciaires  du  preuiier  complètent  les*  documents  admi- 
nistratifs du  second.  Le  fonds  du  Conseil  souverain  est  entré 
aux  Archives  départementales  au  mois  de  juin  1902  ;  il  comprend 
principalement  oj7  registres;  il  y  a  malheureusement  des  lacu- 
nes et  des  mutilations. 

Le  fonds  de  la  Loge  de  Mer  a  été  bien  plus  éprouvé;  toute- 
fois, les  documents  qu'il  contient  —  parmi  lesquels  un  précieux 
cartulaire  —  peuvent  être  d'un  grand  secours  à  l'érudit  qui  ten- 
tera d'écrire  une  histoire  du  commerce  roussillonnais  pendant 
le  moyen  âge,  et  compléter  par  là  les  substantielles  études  que 
les  fpères  de  Snint-Malo  ont  consacrées  à  la  matière^.  C'est  ici 
que  le  fonds  des  notaires  devra  être  mis  à  contribution,  car  il 
nous  a  conservé  la  plupart  des  contrats  de  nolis  ou  de  fret  pas- 
sés entre  les  négociants  [mercaders)  et  les  patrons  marins. 
Le  commerce  de  Perpignan  et  des  autres  villes  des  comtés  de 
Roussillon  et  de  Cerdagne.  qui  était  alimenté  surtout  par  la 
draperie,  se  faisait  par  mer,  et  le  Tribunal  de  commerce  portait 
le  nom  de  Llolj  i  de  mar.  Quiconque  a  visité  Perpignan  n'a  pas 
manqué  de  s'arrêter  devant  le  beau  monument  de  «  la  Loge  » 
qui  abritait  le  Tribunal  de  mer  et  la  Bourse. 

Un  classement  sommaire  permettra  bientôt  d'utiliser  avec 
quelque  facilité  le^  fonds'ide  la  Loge  de  Mer  et  du  Conseil  sou- 
verain de  Roussillon. 

M.  l'archiviste  départemental  a  iQTminè  V Inventaire-Sommaire 
de  la  série  G  (clergé  séculier),  qui  sera  prochainement  mis  en 
vente;  il  y  a  joint  une  introduction  et  un  index.  Les  premières 
feuilles  de  Y  Inventaire  sommaire  de  la  série  H  (clergé  régulier) 
sont  imprimées;  nous  pourrons  donc  bientôt  nous  faire  une  idée 
exacte  de  la  diversité  et  de  la  valeur  des  documents  ayant  ap- 
partenu à  nos  anciens  établissements  monastiques. 

Aux  Archives  municipales,  il  y  a  arrêt  dans  la  publication  de 
V Inventaire  sommaire;  nous  n'avons  que  les  douze  premières 
feuilles  qui,  à  la  vérité,  comprennent  l'analyse  des  grands  car- 
tulaires  de  l'hôtel   de  ville  :  Liv7'e  vert  mineur  (t.  I    1185  1413; 

L  .IVii  piihlii''  inoi-iiirinc.  d'upivs  los  iliimiLcs  notariiilcs,  dans  le 
41°  Bull,  de  la  Sov.  ngr.,  se.  et  lilt.  des  Pyr.-Or.,  un  travail  intitulé  : 
Expéditions  des  marins  et  des  marchands  roussUlon>iais  sur  Les  côtes 
de  la  Syrie  et  de  l'Egypte  pendant  le  moyen  âge. 


138  ANNALES  DU   MIDI. 

t.  II,  1074-1729);  Liv7-e  vert  majeur  (t.  I,  1162-1785;  t.  II,  1766- 
1768);  Livre  des  Provisions  (t.  I,  1266-1739;  t.  II.  1o03-1771). 

Dans  ma  précédente  Chronique,  parlant  du  catalogue  de  la 
collection  locale  de  la  Bibliothèque  municipale,  depuis  long- 
temps terminé,  j'annonçais  la  publication  d'une  Bibliographie 
roussillonnaise  que  nous  préparions,  M.  J.  Cahnette  et  moi  ;  elle 
paraîtra  très  prochainement. 

Le  goût  des  études  archéologiques,  qui  a  chez  nous  des  précé- 
dents remarquatjles  dans  les  travaux  de  Pierre  Puiggari,  de 
Bonnefoy,  d'Alart,  de  Brutails,  paraît  sommeiller  singulière- 
ment. Très  peu  de  recherches,  peu  ou  point  de  fouilles,  quelques 
découvertes  sans  grande  importance,  et  c'est  tout.  En  fait  de 
numismatique,  rien,  si  ce  n'est  un  article  sur  VAtelier  [moné- 
taire] cle  Perpignan  publié  dans  la  Revue  de  numismatique 
(t.  V)  par  M.  Blanchet,  d'ailleurs  étranger  au  département. 

L'histoire  est  le  domaine  favori  de  nos  érudits,  et  ils  y  réus 
sissent  assez  bien;  nous  lui  devons  une  oeuvre  capitale,  Louis XI, 
Jean  II  et  la  Révolution  catalane  K  par  M.  J.  Cahnette.  C'est  une 
contribution  à  l'histoire  de  la  diplomatie  d  j  Louis  XI,  et,  en  même 
temps,  à  l'histoire  de  l'unité  espagnole.  Il  n'y  a  point  la  deux 
sujets  distincts,  mais  il  se  trouve  que  le  problème  de  l'unité 
espagnole  s'est  posé,  sinon  résolu,  au  cours  et  h  propos  de  la 
partie  qui  s'était  engagée  entre  le  roi  d'Aragon  et  le  roi  de 
France,  à  l'occasion  de  la  Révolution  catalane.  L'ouvrage  de 
M.  Calmette  est  avant  tout  une  étude  diplomatique  extrêmement 
pénétrante;  c'est  aussi  un  livre  sincère,  vigoureux  et  neuf,  écrit 
dans  un  style  clair  et  solide,  et  avec  une  impeccable  érudition. 

L'époque  de  Louis  XI  et  de  Jean  II  occupe  d'ailleurs  depuis 
longtemps  notre  jeune  historien,  et  il  n'a  pas  encore  dit  tout  ce 
qu'il  en  sait.  Signalons  ses  Documents  relatifs  à  D.  Carlos  de  Viana 
(1460-1461),  tirés  des  Archives  de  Milan  2,  et  La  fin  de  la  domina- 
tion française  en  Roussillon.  additions  à  son  grand  ouvrage'. 

Entre  temps,  M.  J.  Calmette  nous  a  donné  quelques  petites 
études  qui  nous  ramènent  aux  premiers  siècles  du  moyen  âge; 
elles  sont  évidemment  les  premières  esquisses  d'un  travail  d'en- 

].  Tuuloiise,  Privât,  HJUt;  10-8°  de  (il2  pages. 

'i.  Mélanges  d'archéologie  et.  d'histotre  luihliés  par  l'Ecole  J ra)ir<n!>c 
de  Rome,  t.  XXI. 

3.  Bull,  de  In  Soc.  agi-.,  .se.  et.  l/'ft.  de.s  Pgr.-Or.,  t.  XLllI,  1002; 
voir  A?inales  du  Midi,  t.  XV,  [».  lOô, 


CHRONIQUE.  139 

semble  sur  la  province  de  Gothie  et  la  Marche  hispanique  dont' 
l'histoire  est  encore  si  remplie  d'obscurités.  L*une  de  ces  études, 
Les  marquis  de  Gothie  sous  CJiarles  le  Chauve,  a  paru  ici-même i; 
ailleurs  avaient  déjà  paru  Les  origines  de  la  maison  comtale  de 
Barcelone"^  :  Notes  sur  Wifred  le  Velu^  :  Rampon,  comte  de  Gerona 
et  marquis  de  Gothie*:  Notes  sur  les  p7^cm,iers comtes  carolingiens 
d'Urgel^. 

Revenant  à  l'époque  de  Louis  XI  et  de  Jean  II,  M.  J.  Calmette 
a  étudié  avec  le  plus  grand  soin  la  Seconde  partie  du  manuscrit 
catalan  P.  13  de  la  Bibliothèque  natiotiale  de  Madrid^.  Cet  inté- 
ressant document  avait  déjà  été  signalé  par  M.  MassiVTorrents, 
et  M.  Morel-Fatio  y  avait  reconnu  l'œuvre  d'un  nommé  François 
Boscha,  qui  mourut  le  3  février  1480,  racional  de  la  Députation 
ou  Général  de  Catalogne.  L'auteur  de  ces  Annales.  Joan  Francès 
Boscha,  est  cité  quatre  fois  par  l'illustre  Zurita.  et  M.  Calmette 
montre  qu'  «  il  faut  considérer  notre  manuscrit  comme  l'une  des 
sources  de  Zurita.  »  Et  il  ajoute  :  «  Aussi  bien  celui-ci  a-t-il  pris 
en  réalité  à  Boscha  plus  qu'il  n'a  déclaré.  Parfois,  en  effet,  il 
s'en  sert  sans  le  citer,  et  je  n'en  veux  pour  preuve  que  le  récit 
fait  par  Zurita  du  siège  et  de  la  capitulation  de  Perpignan  en 
4473;  l'auteur  aragonais  a  tiré  la  plupart  de  ses  éléments  de  la 
relation  de  Boscha,  et  il  s'est  contenté  de  traduire  cette  rela- 
tion, à  peu  près  textuellement,  en  langue  castillane.  »  C'est  là 
une  bien  intéressante  constatation. 

M.  l'abbé  Gibrat  s'est  fait  connaître  par  quelques  courtes  mo- 
nographies locales,  qui  sont  d'un  chercheur  dévoué  et  infati- 
gable'. L'histoire  des  communes,  étudiée  dans  ses  menus  détails 


1.  Annales  du  Midi,  t.  XIV,  1902. 

'2.  M'Hanges  d'archéologie  et  d'histoire  publiée!  pdr  l'Ecole  française 
de  Rome.,  t.  XX. 
8.  Revista  de  Archicos,  Bibliotecas  y  Mtiseos,  Mîidrid,  lOOl. 

4.  Le  Moyen  âge,  l'JOL 

5.  Mélanges,  etc.,  t.  XXU. 

6.  Bibliothèque  de  l'École  des  Charles,  t.  *LXIIT.  ]90'2. 

7.  La  paroisse  et  le  clergé  de  Saint-Pierre-dels-Forcuts  [i-aiiton  de 
Mont-Louis)  de  1680  à  17S9.  Céret,  Roque,  1898,  iu-8°  de  70  p.;  Notice 
historique  sur  la  chapelle  de  Saint-Mirhel-de-Combt-et  et  ses  environs. 
Céret,  Pioque,  1809,  in-12  de  41  p.;  Deux  études  sur  le  Ilau.t-Cniifleni... 
(Prats  do  Ralagiier,  les  testninents  au  xviir  siècle  dans  le  llaul-Coiitlent). 
Céret,  Koques,  1899;  in-8"  de  70  p.;  Dea.r  ttouoelles  études  sur  le  Haut- 
Conffent  (1.  Monographie  du  village  de  Fontpédrouse  ; '2.  Petit  guide  de 
Nuria).   Céret,  Roque,   lUOo,  in-8"  de  liO  p.;   Monographie  de  deux  pa- 


140  ANNALES   DU   MIDI. 

ht  avec  beaucoup  de  soin,  sera,  d'un  grand  secours  pour  celui 
qui  se  chargera  un  jour  d'écrire  une  Hisloit-e  générale  du  Rous- 
sillon.  Il  utilisera  aussi  la  Galerie  7'oussillonnaise  que  publie 
M.  l'abbé  Capeille  dans  le  Journal  illustré  des  Pyrénées- Orien- 
tales :  c'est  une  série  de  portraits  et  de  biographies  courtes, 
mais  généralement  bien  informées,  qui.  plus  tard,  seront  très 
probablement  réunies  sous  forme  de  dictionnaire. 

M.  l'abbé  Ph.  Torreilles,  qui  a  limité,  semble-t-il,  ses  études 
d'histoire  locale  aux  xviie  et  xviir  siècles,  nous  a  donné  Le  rôle 
politique  de  Marea  et  de  Seri'oni  durant  les  guerres  de  Catalogne 
(1644-1660)  et  La  publication  de  la  Bulle  «  In  Cœna  Dojnini  », 
deux  études  déjà  signalées  par  les  Annules  du  Midi^.  Collabora- 
teur actif  de  la  Revue  d'Histoire  et  d' Archéologie  du  Roussillon  et 
du  Bulletin  de  la  Société  agricole,  scientifique  et  littéraire  des 
Pyrénées- Orientales,  il  a  fourni  à  ces  deux  recueils  des  articles 
très  documentés  qui  ont  été  ou  seront  signalés  à  un  autre  en- 
droit des  Annales.  Il  collabore  aussi  à  la  Semaine  religieuse  du 
diocèse  de  Perpignan,  dirigée  par  Ms''  de  Carsalade  du  Pont.  Sous 
le  titre  de  Glanwes  d'histoire  et  d'art  religieux,  ce  recueil  publie, 
depuis  environ  trois  ans,  une  série  d'articles  qui  ne  manquent 
pas  d'intérêt. 

Le  P.  Ernest  Marie  de  Beaulieu  a  publié  Les  Sanctuaires  de  la 
Vierge  en  Roussillon,  d'une  lecture  fort  agréable^.  Le  sujet  avait 
été  savamment  traité  au  xvii"  siècle  par  le  P.  Narciso  Camés 
dans  son  Jardin  de  Maria  plantado  en  el  Principado  de  Cata- 
luna,  ouvrage  devenu  rarissime,  et  d'ailleurs  abordable  à  un 
petit  nombre  de  Roussillonnais  .  parce  qu'il  est  écrit  en  cas- 
tillan. 

M.  D.  Jacomet.  qui  est  tout  ensemble  un  fin  lettré  et  un  émi- 
nent  magistrat,  a  tracé,  sous  la  forme  d'un  discours  de  rentrée, 
un  agréable  tableau  du  Conseil  souverain  de  Roussillon,  qui  joua 
un  rôle  si  important  dans  les  annales  judiciaires  et  politiques 
de  notre  province^.  M.  Jacomet  n'a  pas  fait  oeuvre  d'érudit;  il 
n'a  point  consulté  les  archives  dont  il  a  été  question  au  com- 


roisses  rurales   (Passa  et  Villemolaque)   dans  le  Journal  illustré  des 
Pyrénées-Orientales ,  1903,  publié  à  Perpignan  par  I\I.  .loseph  Payret. 

1.  T.  XV,  p.  2(33. 

2.  Perpignan,  Latrobe,  1903;  in-r2  de,,310  p. 

3.  Le  Conseil  souverain  de  Roussillon,  Montpellier,  1901  ;    in-B"  de 
58  p. 


CHRONIQUE.  141 

mencôment  de  cette  Chronique,  mais  son  essai  donne  néanmoins 
une  idée  exacte  de  ce  que  fut  ce  «  parlement  »  de  Roussillon. 

M.  Et.  Schlumberger  a  raconté  en  un  fort  volume  VExpédition 
des  Almugavares  ou  Routiet^s  catalans  en  Orient  de  l'an  1302 
à  13ii^.  Un  grand  nombre  de  Roussillonnais  firent  partie  de 
cette  étonnante  expédition.  A  ceux  qui.  comme  nous,  ont  lu  la 
Crônica  de  Ramon  Muntaner  et  VEspedicion  de  los  Catalanes  y 
Aragoneses  contra  Turcos  y  Griegos,  publiée  à  Barcelone  en  1623 
par  Francisco  de  Moncada,  M.  Schlumberger  n'apprendra  rien 
de  nouveau.  L'ouvrage  a  d'ailleurs  été  très  vivement  critiqué 
par  la  Revisla  de  Bibliografia  catalana,  de  Barcelone  2,  et  par  la 
Revista  de  Archivos,  de  Madrid  3. 

La  période  révolutionnaire,  qui  pendant  quelques  années  (de 
1885  à  1898)  avait  sollicité  l'attention  et  excité  la  verve  érudite 
de  certains  d'entre  nous,  est  totalement  délaissée;  il  nous  fau- 
dra bien  y  revenir  un  jour,  car  l'histoire  politique  de  la  Révolu- 
tion et  de  la  République  naissante  dans  les  Pyrénées-Orientales 
n'est  pas  encore  faite.  L'histoire  militaire  est  beaucoup  plus  con- 
nue. ayai;t  été  retracée  par  un  écrivain  spécial.  Fervel,  qui  a 
écrit  deux  excellents  volumes  sur  les  Campagnes  delà  Révolution 
française  dans  les  Pyf'énées-Orientales.  Le  chef  militaire  qui  y 
joua  le  plus  grand  rôle  est  assurément  Dugoramier.  Le  capitaine 
Pineau  vient  de  lui  consacrer  un  gros  volume  pour  raconter  sa 
vie  tout  entière"*;  le  capitaine  Fanet  s'en  est  tenu  à  la  période 
qui  correspond  à  son  commandement  dans  les  Pyrénées-Orienta- 
les, la  seule  qui  nous  intéresse  5.  Ce  sont  là  deux  bonnes  études 
d'histoire  militaire.  11  est  regrettable  que  le  livre  du  capitaine 
Pineau,  fort  bien  ordonné  d'ailleurs,  et  souvent  très  bien  écrit, 
soit  déparé,  en  certains  endroits,  par  des  renseignements  faux, 
évidemment  transmis  à  l'auteur  par  des  correspondants  ignares. 
C'est  ainsi  qu'il  est  dit  (p.  38),  à  propos  du  représentant  Cassa- 
nyes  :  «  Cassanyes  (Jean),  né  à  Perpignan  en  1762,  avocat  en 

1.  Paris,  Plon-Nourrit,  1902;  in-B"  de  396  pages  et  une  carte  de  La 
Grèce  et  l'Asie-Mhieure  vers  1300. 

2.  N"  4,  janvier-juin  1902. 
y.  N»  d'avril-mai  1902. 

4.  Le  général  Dugommier,  sa  vie,  sa  correspondance .  Paris,  Henri- 
Charles  Lavauzelle,  s.  d.  [1902],  in-S"  de  835  pages. 

T).  Dugommier,  d'après  sa  correspo?idu)ice  durant  les  dix  mois  de 
comma)idement  à  l'armée  des  Pyrénées-Orientales  (l'A  janvier -11  no. 
vernbre  1794^,  dans  le  Carnet  de  la  Sabretache,  1903. 


142  ANNALES  DU   MIDI. 

1789..  ,  mort  à  Perpignan  en  1839.  »  Or,  Cassanyes  s'appelait 
Jacques -Joseph;  il  est  né  à  Cartel  le  il  novembre  1758;  il  était 
médecin  :  il  mourut  à  Canet  le  22  avril  1843. 

Les  volontaires  du  Cantal  se  firent  remarquer  à  l'armée  des 
Pyrénées-Orientales  :  à  la  bataille  du  17  juillet  1793,  sous  Perpi- 
gnan, à  la  bataille  de  Peyrestortes  le  17  septembre,  ils  se  cou- 
vrirent de  gloire.  Ces  braves  sont  pour  moi  de  vieilles  connais- 
sances, les  ayant  souvent  rencontrés  au  cours  de  mes  recherches 
sur  la  Révolution,  et  je  suis  heureux  de  les  retrouver  dans  la 
notice  si  soignée  et  si  largement  documentée  que  leur  a  consa- 
crée M.  Jean  Delmas  dans  la  Revue  de  la  Haute-Auvergne^. 

Signalons,  enfin,  une  nouvelle  édition  des  Mémoi?'es  politiques 
et  militaires  du  général  Doppet^^  qui  servit  à  l'année  des  Pyré- 
nées-Orientales, depuis  le  29  novembre  1793  jusqu'au  2S  septem- 
bre 1794,  en  qualité  de  général  de  division  et  de  commandant  en 
chef.  Il  n'y  montra  pas  de  grands  talents  militaires,  mais  il  fut 
brave  soldat  et  bon  patriote.  Ces  Mémoires  manquent  de  style, 
mais  ils  sont  d'une  lecture  agréable,  et  la  bonhomie  de  l'expres- 
sion leur  donne  le  charme  de  la  sincérité. 

Pierre  Vidal. 


Chronique  du  Vivarais. 

En  dehors  des  publications  de  la  Revue  du  Vivarais,  qui  vient 
de  terminer  sa  onzième  année,  et  qui  reste  toujours  le  grand 
foyer  des  études  d'histoire  locale,  un  certain  nombre  d'ouvrages, 
remarquables  à  divers  titres  et  dans  diverses  mesures,  sont  ve- 
nus, depuis  notre  dernière  chronique,  s'ajouter  à  la  bibliographie 
de  l'Ardèche. 

A  la  ville  d'Annonay,  qui  est,  d'ailleurs,  la  plus  considérable 
du  département,  revient  le  principal  honneur  de  ces  publica- 
tions, parmi  lesquelles  il  faut  citer  en  première  ligne  le  beau 
travail  de  M.  Léon  Rostaing  :  Les  anciennes  loges  maçonniques 
d'Annonay  et  les  clubs  (1760-1815);  Lyon,  Brun,  1903.  Grâce  aux 
archives  de  ces  loges  et  au  registre  des  clubs,  lesquels  furent 

1.  La  patrie  en  danger,  les  Volontaires  du  Cantal;  tirage  à  part, 
Aurillac,  E.  Blancharel,  1902. 

2.  Mémoires  politiques  et  militaires  du  général  Doppet  édités  par 
Désiré  Lacroix,  Paris,  Garnier,  1903,  in-12.  La  première  édition  parut  en 
1824,  chez  les  frères  Baudouin. 


CHRONIQUE.  143 

une  sorte  de  continuation  des  loges  pendant  la  période  révolu- 
tionnaire, M.  Rostaing  a  pu  faire  de  ces  associations  une  étude 
approfondie  et  très  documentée,  qui  restera  comme  un  élément 
précieux  de  l'histoire  de  la  Révolution  dans  le  Haut-Vivarais.  On 
y  voit  aussi  combien  la  franc-maçonnerie  d'avant  la  Révolution 
était  différente  de  celle  de  nos  jours. 

Une  étude  non  moins  intéressante  à  un  autre  point  de  vue  est 
celle  de  M.  Emmanuel  Nicod  sur  {'Hospitalisation  à  Annonay. 
C'est  une  histoire  complète  de  la  bienfaisance  dans  cette  ville 
depuis  le  xiir'  siècle,  mais  c'est  aussi  un  coin  du  tableau  général 
des  misères  d'autrefois  des  plus  instructifs,  et  dont  l'auteur  a  su 
tirer  le  meilleur  parti,  malgré  l'apparente  aridité  du  sujet.  La 
ville  d'Annonay  devait  déjà  à  M.  Nicod  plusieurs  Notices  sur 
des  notabilités  ou  des  institutions  annonéennes  (la  famille  du 
Peloux,  les  Cordeliers.  h»  Chambre  de  commerce,  les  rues  d'An- 
nonay, et  en  dernier  lieu  le  Catalogue  de  la  collection  ardéchoise 
de  sa  Bibliothèque,  que  devront  consulter  tous  ceux  qui  voudront 
s'occuper  de  la  bibliographie  de  l'Ardèche)  ;  elle  lui  devra  main- 
tenant un  monument  des  plus  durables  élevé  à  la  mémoire  de 
tous  ses  bienfaiteurs  anciens  et  modernes,  dont  M.  Nicod  a  eu 
l'heureuse  idée  d'inscrire  les  noms  à  la  fin  de  son  livre. 

Le  Collège  d'Annonay,  par  l'abbé  Chomel,  retrace  la  carrière 
d'une  congrégation  enseignante.  Les  Basiliens,  institués  sans 
bruit  pendant  la  Révolution  dans  un  village  de  montagne  entre 
le  Vivarais  et  le  Velay,  furent  appelés  à  Annonay  au  commence- 
ment du  xix«  siècle  et  y  prospérèrent  si  bien,  qu'ils  purent  éta- 
blir d'autres  collèges  dans  diverses  villes  du  Midi,  en  Algérie  et 
jusques  dans  le  Canada.  L'ouvrage  de  l'abbé  Chomel  contient  des 
notices  et  souvent  le  portrait  de  la  plupart  des  prêtres  de  Saint- 
Basile  qui  ont  coopéré  à  cette  œuvre. 

A  l'autre  extrémité  du  département,  la  ville  de  Largentière 
nous  ramène  à  son  historien,  le  docteur  Francus,  dont  les  der- 
niers articles  sur  la  chouannerie  de  1797  à  1800  {Revue  du  Viva- 
rais de  septembre  et  octobre»  semblent  indiquer  que  l'œuvre 
touche  à  son  terme.  Cet  écrivain  a  publié  de  plus,  comme  suite 
au  Voyage  autour  d'Annonay,  le  Voyage  au  pays  des  Bouti'eres, 
dont  on  trouvera  plus  bas  une  analyse  sommaire.  (Voir  p.  148.) 
Le  docteur  vient  aussi  de  publier  le  tome  III  de  ses  Notes  et  docu- 
ments sur  les  Huguenots  du  Vivarais,  et  il  annonce  pour  une 
époque  très  rapprochée  le  tome  IV,  qui  doit  terminer  son  travail 


144  ANNALES    DU    MIDI. 

sur  les  guerres  religieuses  du  xvi«  siècle,  et  qui  —  bonne  nou- 
velle pour  les  chercheurs  d'histoire  et  de  généalogies  --  contien- 
dra une  table  analytique  de  tous  les  noms  de  personnes  et  de 
lieux  mentionnés  dans  les  quatre  volumes. 

Le  clocher  de  la  cathédrale  de  Viviers  est  un  des  monuments 
historiques  du  pays.  La  méritoire  étude  archéologique  que  lui 
consacrait  récemment  le  chanoine  Mollier  a  mis  à  l'ordre  du 
jour  le  singulier  phénomène  que  voici  :  il  paraît  certain  que  le 
paratonnerre  de  la  vieille  tour  est  parfois  agité  et  d'ordinaire 
en  temps  calme,  de  très  fortes  oscillations,  tandis  que  ceux  des 
édifices  voisins  restent  immobiles.  Plusieurs  hypothèses  ont  été 
émises  sur  les  causes  de  ce  fait,  et  Ton  trouvera  dans  la  Revue 
du  Vivarais  àe  1902,  pp.  166-7,  le  résumé  des  observations  faites 
depuis  vingt-trois  ans. 

Nous  nous  bornerons  à  mentionner  une  Etude  historique  et 
canonique  sur  la  vie  commune,  forme  parfaite  de  vie  privée  dans 
le  clergé  séculier,  par  Tabbé  Mirabel.  ancien  directeur  auxi- 
liaire du  grand  séminaire  d'Avignon,  aujourd'hui  curé  de  Meysse 
(Ardèche)  ;  Paris,  1901.  --  L'histoire  officielle  des  Gardes  mobiles 
de  VArdèche  pendant  la  guerre  de  1870-71;  Privas,  Impr.  Ardé- 
choise, 1901.  —  Une  monographie  de  Cruas,  comprenant  une 
Notice  architecturale  sur  l'église  (monument  historique),  par 
M.  Baussan,  architecte  du  diocèse  de  Viviers,  suivie  d'un  Aperçu 
historique,  par  M.  Mazon.  Privas,  Impr.  Centrale,  1903.  —  Une 
notice,  Vivief-s  (qui  ne  serait  que  le  résumé  d'un  futur  ouvrage 
en  deux  volumes  sur  le  même  sujet),  par  M.  Joseph  Bourg; 
Viviers,  1903. 

La  brocliure  Un  Musée  social  à  Privas,  par  E.  Bonnand  (Privas, 
19.02),  qui  a  fait,  lors  de  son  apparition,  quelque  bruit  dans  un 
certain  cercle,  nous  fournit  la  matière  de  diverses  observations 
par  lesquelles  sera  close  cette  chronique.  L'auteur  préconise  la 
réunion  dans  un  même  local  des  collections  Malbos,  de  la  biblio- 
thèque de  la  ville  (dont  il  avait  la  charge),  et  de  tous  les  échan- 
tillons des  industries  d'art  ou  autres  pouvant  intéresser  l'his- 
toire sociale  de  lArdèche.  L'idée  est  assurément  des  plus  loua- 
bles. Seulement  —  il  y  a  beaucoup  de  «  seulement  »  à  lui  opposer 
—  le  passé  en  cette  matière  n'est  guère  de  nature  à  faire  bien 
augurer  de  l'avenir.  Les  collections  formant  le  Musée  Malbos,  du 
nom  de  son  principal  fondateur,  honorable  géologue,  qui  fut 
reçu  en  1854  membre  de  l'Académie  des  sciences  de  Toulouse,  ces 


CHRONIQUE.  145 

collections,  disons-nous,  d'abord  placées  dans  une  des  salles  de 
la  Préfecture,  puis  transportées  à  l'Ecole  normale  des  institu- 
teurs, sont  tombées  en  plein  désarroi,  par  suite  d'jla  négligence 
des  administrateurs  qui  en  avaient  la  charge,  et  ont  perdu  la 
plus  grande  partie  de  leur  valeur;  pour  être  complètement  édifié 
là-dessus,  il  n'y  a  qu'à  lire  certain  rapport  du  préfet  à  la  ses" 
sion  du  Conseil  général  de  1899.  La  bibliothèque  municipale  n'a 
pas  été  mieux  traitée  et  se  trouve  dans  le  plus  déplorable  état 
d'abandon.  Enfin,  l'auteur  de  la  brochure  lui-même  ayant  été 
transféré  dans  un  autre  département,  on  peut  considérer  son 
projet  comme  enterré,  et  nous  ne  pensons  pas  que  les  circons- 
tances actuelles  paraissent  à  personne  favo  râbles  à  sa  résurrec 
tion.  A.  M. 


ANNALES   DU   MIDI.    —   XVl.  10 


LIVRES  ANNONCES  SOMMAIREMENT 


Brun  (Abbé).  Vabbé  J.  P.  Lapauze.  Bordeaux,  Feret,  1903;  in-S" 
dex-118  pages.  —  C'est  la  monographie  d'un  curé  du  pays  borde- 
lais, à  la  veille  et  pendant  les  journées  de  la  Révolution.  Ce  curé 
était  vénérable  d'une  loge  de  francs-maçons.  Le  travail  est  plein 
de  faits  vraiment  fort  curieux  sur  l'état  d'âme  de  ce  bas  clergé, 
qui  a  été  pour  beaucoup  dans  le  succès  —  et  l'échec  —  de  la  Ré- 
volution française.  C.  JULLIAN. 

Cazac  (H. -P.).  Le  lieu  d'origine  et  les  dates  de  naissance  et  de 
mort  du  philosophe  Francisco  Sanchez.  Paris.  Fontemoing,  1903  ; 
in-8*'  de  27  pages.  —  L'opuscule  de  M.  C.  est  extrait  d'un  livre  en 
préparation  sur  la  vie  de  Don  Francisco  Sanchez,  le  philosophe 
sceptique,  qui  fut  professeur  de  philosophie  et  de  médecine  à 
Toulouse  dans  le  premier  quart  du  xv!!*"  siècle,  et  qui  intéresse  à 
ce  titre  notre  histoire  méridionale.  M.  Cazac  résout  deux  diffi- 
cultés biographiques  :  1"  Snnchez  est  désigné  tantôt  comme 
Espagnol,  tantôt  comme  Portugais;  en  réalité  il  est  né  à  Tuy, 
ville  espagnole,  qui  relevait  alors,  pour  l'Eglise,  du  diocèse  de 
Braga,  en  Portugal.  2»  D'après  Guy  Patin,  copié  par  les  biogra- 
phes postérieurs,  Francisco  Sanchez  est  mort  en  1632,  âgé  de 
soixante-dix  ans,  ce  qui  place  sa  naissance  en  1562  ;  or,  le  Nihil 
scitur  est  imprimé  en  1581,  composé  dès  1575,  à  une  époque  où 
le  philosophe  aurait  eu  treize  ans!  La  difficulté  vient  d'une  erreur 
typographique.  Il  faut  lire  1623  au  lieu  de  1632,  comme  l'attestent 
l'inscription  (MDCXXIII)  du  portrait  de  Sanchez  à  la  Faculté  de 
médecine  de  Toulouse  et  le  livre  des  décès  de  la  Daurade,  au 
16  novembre  1623  :  «  François  Chance,  docteur  et  régent  en 
médecine,  âgé  de  soixante-treize  ans.  »  E.  Trouverez. 


LIVRES  ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  147 

Chevaldin  (L.-E.).  Les  jargons  de  la  fat^ce  de  Pathelin.  Paris, 
Fontemoing,  [1902];  petit  in-8"  de  xvi-olu  pages.  —  Nous  de- 
vons signaler  ici  ce  livre,  dont  le  titre  dit  assez  le  sujet,  à 
cause  des  pages  (I6i-20l)  qui  y  sont  consacrées  au  passage  où 
Pathelin,  censé  en  délire,  «  gergonne  en  limosinois  ».  Ce  cha- 
pitre, comme  tous  les  autres,  témoigne  de  longues  recherches  et 
d'une  rare  érudition,  qui  n'a  rien  de  rébarbatif,  bien  au  contraire  : 
l'exposition  de  M.  Ch.  est  toujours  piquante,  animée,  et  ne 
saurait  effaroucher  le  lecteur  le  moins  familier  avec  les  ques- 
tions linguistiques.  Peut-être  quelques-uns  trouveront-ils  même 
que  M.  Ch.  s'attarde  trop  volontiers  le  1  mg  de  la  route  et  qu'il 
abuse  un  peu  des  citations  et  des  renvois  (surtout  à  des  livres 
élémentaires  ou  trop  répandus);  peut-être  paraîtra-t-il  à  d'au- 
tres qu'il  eût  mieux  valu  être  plus  bref  sur  des  passages  à  peu 
près  désespérés;  mais  on  comprend  d'autre  part  que  M.  Ch.  n'ait 
pas  voulu  perdre  le  fruit  de  tant  de  recherches  et  de  réflexions. 

—  Pour  en  revenir  au  passage  qui  nous  intéresse,  est-il  vrai- 
ment écrit  en  «  limousin  »  ?  On  n'y  reconnaît  aucun  des  traits 
spécifiques  du  dialecte.  M.  Ch.  pense  donc,  avec  M.  Constans, 
qu'il  faut  prendre  le  mot  «  limosin  »  au  sens  large  et  que  l'au- 
teur a  tenté  d'écrire  dans  un  quelconque  des  dialectes  d'oc,  avec 
lesquels  il  était  du  reste  peu  familier.  La  restitution  des  cinq 
premiers  vers  est  très  plausible;  celle  des  deux  derniers,  du 
sixième  surtout,  est  des  plus  hypothétique.  M.  Ch.  traduit  :  «  Ne 
carillonne  pas;  fais  ton  dodo,  carde  l'argent,  point  je  ne  me 
soucie.  »  Mais  on  ne  voit  pas  ce  que  vient  faire  ici  un  carillon,' 
ni  pourquoi  Pathelin  voudrait  endormir  le  drapier  (les  mss.  ont 
du  reste  fuy  ou  fut  et  non  fay).  Le  dernier  vers  doit  plutôt  signi- 
fier :  «  [Faites  en  sorte]  qu'il  ne  me  parle  pas  d'argent  »  et  faire 
allusion  à  un  des  vers  précédents  où  le  drapier  réclamait  préci- 
sément son  dû.  En  somme  je  crains  bien  qu'il  n'y  ait  là,  pour 
longtemps  encore,  de  quoi  intriguer  les  amateurs  de  rébus. 
M.  Ch.  aura  du  moins  fourni  (outre  mainte  explication  vraisem- 
blable) une  base  solide  aux  recherches  en  coUigeant  scrupu- 
leusement et  en  communiquant  au  public  les  variantes  de  tous 
les  manuscrits  ou  anciennes  éditions. 

A.  Jeanroy. 

Fraikin  (Abbé  J.).  Les  comptes  du  diocèse  de  Bordeaux  d/e  i3i6  à 
1453.  Rome,  Saint-Louis-des  Français,  1903;  in-8"  de  190  pages. 

—  Publication  de  textes,  d'après  les  Archives  de  la  Chambre 


148  ANNALES   DU   MIDI. 

apostolique,  capitale  pour  l'histoire  économique  et  la  topono- 
mastique  du  Bordelais  au  xiv»  siècle.  C.  Jullian. 

Francus  (D'^).  Yoyage  au  pays  des  Boutiéres.  La  région  de 
Vernoux.  Annonay,  impr.  Hervé,  1902  ;  in-S"  de  228  pages.  —  Les 
Boutiéres  sont  les  vallées  parmi  lesquelles  se  creuse  celle  de  l'E- 
rieux,  route  directe  ouverte  du  Rhône  au  faîte  de  la  montagne.  Ces 
petits  bassins  de  grès,  semés  dans  un  pays  de  granit,  s'étendent 
entre  le  Bas-Vivarais  et  le  Haut-Vivarais  dont  ils  dépendent, 
entre  les  pays  des  «  Royols  »  et  celui  des  «Bedos  »  :  «  raides  ver- 
sants, bruyantes  rivières,  âpres  sommets,  avec  des  sapins  en 
haut  et  des  châtaigniers  en  bas.  types  bibliques  et  têtes  rondes, 
dont  les  cerveaux  ne  ressemblent  pas  tout-à-fait  aux  autres.  La 
nature  même  y  a  des  allures  sévères  »  (p.  lOj.  Elle  est  dure  et 
peu  féconde.  Les  Boutiéres  sont  le  quartier  général  des  calvi- 
nistes vivarois;  à  Boffres  la  population  est  protestante  aux  4/5, 
dans  le  canton  de  Vernoux  pour  les  2/3,  etc.  On  ne  s'étonnera 
donc  pas  qu'un  voyage  en  ce  pays  ait  provoqué  force  réflexions 
et  dissertations  politico-religieuses,  que  le  caractère  des  Annales 
du  Midi  nous  interdit  d'aborder.  L'auteur,  fort  heureusement,  ne 
s'en  est  pas  tenu  là.  Son  érudition  aimable  et  profonde  a  multi- 
plié les  renseignements  historiques  :  sur  Vernoux  (voir  p.  34, 
deux  pièces  relatives  au  ministre  des  Hubas,  arrêté  le  12  décem- 
bre 4  745  à  Saint-Agrève  et  pendu  sans  miséricorde);  sur  Cha- 
lancon,  dont  la  famille  seigneuriale  (les  Poitiers  d'abord)  ne  doit 
,  pas  être  confondue  avec  celle  de  Chalancon  en  Velay,  comme  l'ont 
fait  les  auteurs  de  VHistoh-e  de  Languedoc,  etc.       P.  Dognon. 

Histoire  de  Lacaune  (Tarn).  Bergerac,  impr.  générale  du  Sud- 
Ouest,  1902  ;  in-8»  de  4  92  pages.  —  Ce  livre,  qui  a  pour  auteur  un 
ecclésiastique,  M.  Gautrand*,  s'étend  beaucoup  sur  les  «  confes- 
seurs de  la  foi  »  de  l'époque  révolutionnaire  (chap.  iv),  sur  les 
établissements  religieux  (chap.  v),  sur  l'église,  les  curés,  les 
vicaires  (chap.  vu);  mais  il  devient  par  trop  bref  lorsqu'il  traite 
d'autres  points,  que  des  laïques  jugeraient  plus  intéressants  : 
ainsi  la  commune  du  moyen  âge,  Lacaune  aux  xiif,  xive  et  xve 
siècles,  sa  vie,  son  organisation.  Les  documents  ne  manquent 
point,  car  le  cartulaire  de  la  ville  subsiste,  et  ses  archives  ont 
eu  la  bonne  fortune  d'être  classées  par  feu  M.  Jolibois.  L'auteur, 

1.  Cf.  Annales,  t.  XV,  p.  430. 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  149 

au  lieu  de  quelques  pièces,  aurait  pu  en  publier  davantage  — 
surtout  les  mieux  publier  ;  —  il  n'aurait  pas  non  plus  été  dif- 
ficile d'en  tirer  un  meilleur  parti.  On  trouvera  des  détails  à 
recueillir  dans  le  chap.  iv.  déjà  cité,  relatif  à  la  Révolution,  et 
dans  les  chap.  ii  (Lacaune  et  les  protestants)  et  m  (Lacaune  aux 
xvii«  et  xviije  siècles).  P.  Dognon. 

GuiBERT  (L.).  Nouveau  recueil  de  registres  domestiques,  limou- 
sins et  m,archois,  publié  avec  le  concours  de  MM.  Leroux,  Lecler, 
Champeval  et  Moufle.  Limoges,  Ducourtieux,  1903;  gr.  in-S"  de 
4M  pages.  Tome  IL  —  Le  tome  premier  avait  paru  en  1895.  Si 
l'on  y  ajoute  le  recueil  (en  un  volume)  de  Livres  déraison,  regis- 
tres de  familles  et  journaux  individuels,  limousins  et  tnarchois, 
paru  en  1888,  ce  n'est  pas  moins  de  trois  volumes  de  documents 
que  M.  Guibert  et  ses  collaborateurs  ont  livrés  au  public.  Et  l'on 
sait  assez  aujourd'hui  de  quel  profit  sont,  pour  l'histoire  des 
mœurs  et  de  la  vie  pratique,  souvent  même  pour  celle  des  insti- 
tutions et  des  événements  locaux,  ces  modestes  témoins  du  passé. 
Ui).  coup  d'œil  jeté  sur  la  tab'e  analytique  des  matières  permet 
de  s'en  rendre  compte.  Nous  avons  indiqué  la  valeur  relative  de 
chacun  de  ces  registres  à  mesure  qu'ils  paraissaient  dans  le 
Bulletin  de  la  Société  historique  de  Brive.  11  suffira  aujourd'hui 
de  dire  que  leur  réunion  sous  une  même  couverture  ajoute  encore 
à  leur  importance,  en  permettant  des  rectifications,  des  compa- 
raisons, des  rapprochements  fort  instructifs.  L'annotation  est 
sobie,  mais  suffisante;  l'introduction  à  chaque  registre  en 
marque  bien  le  caractère.  Les  futurs  historiens  de  la  Marche  et 
du  Limousin  devront  désormais  faire  état  de  ces  recueils. 

A.  Leroux. 

Lefèvre  (E).  Bibliographie  m,istralienne.  Frédéric  Mistral.  Bi- 
bliographie sommaire  de  ses  œuvres,  avec  l'indication  de  nom- 
breuses études,  biographies  et  critiques  littéraires.  Notes  et  docu- 
ments sur  le  félibrige  et  la  langue  d'Oc.  Marseille.  1903;  édition 
de  VIdèio  prouvençalo,  24,  rue  Paul;  in-S»  de  154  pages.  — M.  Le- 
fèvre est  l'auteur  d'un  Catalogue  félibréen  que  nous  avons  pré- 
senté à  nos  lecteurs  (XIV,  136).  Le  présent  ouvrage  témoigne  du 
même  zèle  et  de  la  même  étendue  d'information,'  mais  on  y  re- 
trouve aussi  —  et  nous  n'hésitons  pas  à  le  dire,  puisque  M.  L. 
est  un  de  ces  travailleurs  sérieux  qui  accueillent  plus  volontiers 
une  critique  fondée  qu'un  éloge  banal,  —  quelques-uns  des  dé- 
fauts que  nous  avons  dû  reprocher  à  son  précédent  opuscule. 


150  ANNALES    DU   MIDI. 

Disons  tout  de  suite  que  M,  L.  a  accompli  d'une  façon  très  satis- 
faisante la  partie  la  plus  essentielle  de  sa  tâche  :  il  signale  non 
seulement  les  différantes  éditions  des  oeuvres  de  Mistral  et  les 
particularités  qui  les  distinguent,  mais  aussi,  ce  qui  est  fort 
méritoire  et  utile,  les  centaines  de  morceaux  en  vers  et  en  prose 
que  le  poète  de  Maillane  a  répandus  à  profusion  dans  divers  re- 
cueils (VArmana  prnuvençau,  VAiôli,  etc.)  ou  qu'il  a  imprimés 
çà  et  là  en  guise  de  préfaces  ou  avant-propos.  M.  L.  nous  donne 
aussi  une  liste,  d'une  richesse  effrayante,  d'articles  publiés  sur 
Mistral  et  ses  œuvres,  et  une  autre,  également  fort  curieuse,  de 
«  Documents  mistraliens  »  (médaillons,  dessins,  mélodies,  etc.). 
Quelque  abondantes  qu'elles  soient,  ces  deux  listes  sont  sans 
doute  incomplètes,  et  on  ne  saurait  en  faire  un  reproche  à  M.  L., 
car  il  est  probable  que  la  bibliothèque  même  de  Mistral  ne  pos- 
sède pas  tout  ce  qui  a  été  imprimé  au  sujet  de  son  œuvre.  Mais, 
en  ce  qui  concerne  cette  œuvre,  M.  L.  était  rigoureusement  tenu 
d'être  complet,  et  il  eût  pu  y  réussir,  sans  doute,  en  recourant  à 
l'obligeance  bien  connue  du  Maître  lui-même.  Il  manque  évi- 
demment bien  des  articles  au  chapitre  V  {Préfaces,  Causeries,  etc.). 
Sans  avoir  jamais  pris  aucune  note  sur  ce  sujet,  je  constate,  par 
exemple,  l'absence  de  la  belle  «  lettre  »  mise  en  tête  des  Chan- 
sons d'azur  de  Philadelphe  de  Gerde  (s.  1.  1898),  d'une  autre 
lettre  écrite  à  l'occasion  du  mariage  d'Armagnac  -  Laforgue 
{Lou  libre  nouvial,  Montpellier,  1901,  p.  xvi),  et  de  deux  septains 
écrits  pour  le  mariage  de  Rivière-Laforgue  (le  Midi  tnondain, 
no  du  2-8  nov.  1901). 

Mais  le  grand  tort  de  M.  L.,  c'est  d'avoir,  cette  fois  encore, 
beaucoup  trop  élargi  son  cadre.  On  lit,  en  tête  de  la  section  B 
du  chapitre  VI  (p.  38)  :  «  Documents  sur  F.  Mistral  et  ses  œu- 
vres (Documents  sur  la  langue  d'oc  et  ses  écrivains).  »  Malen- 
contreuse parenthèse!  Comment  M.  L.  n'a-t-il  pas  vu  qu'elle 
introduisait  un  sujet  tout  nouveau,  absolument  étranger  au 
premier,  et  dont  l'immensité  est  telle  qu'elle  effraierait  à  bon 
droit  le  bibliographe  le  mieux  armé?  Notons  que,  par  «  langue 
d'oc  »,  M.  L.  entend  le  provençal  ancien  et  tous  les  dialectes 
modernes.  Quelles  troublantes  perspectives!...  Inutile  de  dire  que 
M.  L.,  dans  le  chapitre  qu'il  prétend  consacrer  à  ce  sujet,  l'ef- 
fleure à  peine.  Il  s'en  est  aperçu  —  malheureusement  —  et  il  a 
essayé  de  combler  les  lacunes  dans  un  abondant  «  appendice  », 
où  il   a  versé  le  dépouillement  de   quelques   revues   spéciales 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  151 

{Romania,  Revue  des  langues  romanes).  Mais  que  d'autres  docu- 
ments lui  ont  échappé!  Il  y  aurait  injustice  à  insister  et  j'aime 
mieux  tenir  tout  de  suite  cette  partie  pour  non  avenue.  —  Je 
me  permettrai  encore  quelques  critiques  concernant  la  forme. 
La  «  Bibliographie  mistralienne  »,  à  laquelle  M.  L.  aurait  dû 
s'en  tenir,  pourrait  être  plus  clairement  ordonnée;  les  subdivi- 
sions —  mal  distinguées  par  la  typographie  —  sont  trop  nom- 
breuses (pourquoi  ne  pas  réunir,  par  exemple,  les  articles  de 
revues  et  les  articles  de  journaux?);  dans  le  chapitre  VI,  comme 
dans  les  autres,  l'ordre  alphabétique  eût  dû  être  observé.  Enfin 
l'impression  a  été  médiocrement  surveillée;  les  fautes  typogra- 
phiques abondent  clans  les  titres  d'ouvrages  allemands  (et  même 
italiens)  et  dans  les  noms  propres  :  Larremandi  [pour  Larra- 
mendi\,  Graziano  [pour  Graziadio]  [Ascoli],  Fœrslers  [pour  Fœrs- 
ter\,  Henri  [pour  Hermann]  {Suchier),  Waîlemskold  [pour  Wal- 
lenshœld].  etc.  A.  Jeanroy. 

LA.STEYRIE  (R.  de).  Eludes  sur  la  sculpture  française  au  moyen 
âge.  Paris,  Leroux,  1903;  in-4»  de  loi  pages.  —  On  a  fréquem- 
ment agité  la  question  de  savoir  si  les  architectes  et  sculpteurs 
du  Nord  se  sont  inspirés  des  œuvres  méridionales  de  l'art  roman 
ou  s'il  faut  admettre  l'influence  inverse.  M.  VOge  abonde  dans 
le  premier  sens,  Gourajod  dans  l'autre;  M.  Marignan  tient  un 
moyen  terme.  La  cathédrale  de  Chartres  et  le  cloître  de  Saint- 
Trophime,  en  particulier,  ont  servi  de  points  de  comparaison. 
M.  de  L.,  reprenant  ce  débat,  conclut  :  1»  que  si  le  portail  royal 
de  Ciiartres,  en  conséquence  de  deux  incendies  (1134  et  1194),  a 
dû  être  reconstruit  comme  l'église  elle-même  au  xiiie  siècle,  on 
a  replacé  et  appliqué  sur  les  murailles  restaurées  ou  neuves  les 
sculptures  anciennes  :  par  celles-ci  le  portail  date  de  1160  ou 
environ  ;  il  est  franchement  roman  ;  î^  quant  au  cloître  de  Saint- 
Trophime,  il  faut  le  rapporter  à  l'an  1180,  son  portail  à  1180  ou 
1190.  Quoique  postérieur  au  portail  royal  de  Chartres,  rien  ne 
prouve  qu'il  en  procède,  pas  plus  que  Chartres  ne  procède  du 
portail  de  Saint-Gilles,  presque  contemporain,  à  peine  antérieur, 
dont  les  figures  épaisses  et  courtes  diffèrent  tant  des  corps 
allongés  du  portail  royal.  L'œuvre  accomplie  à' Chartres  se  rat- 
tacherait plutôt  à  celles  que  l'on  observe  dans  la  vallée  de  la 
Loire,  à  la  Charité,  puis  à  Vézelay,  en  Bourgogne.  —  Le  travail 
de  M.  de  L.  s'appuie  aussi  sur  l'étude  préalable  des  églises  roma- 
nes de  Saint-Guilhem-du-Désert  (Bas-Languedoc),  de  Beaucaire, 


152  ANNALES  DU  M!DI. 

Tarascon,  Romans...  C'est  un  modèle  d'induction  archéologique; 
aucun  élément  de  discussion  n'y  est  négligé  :  observation  directe 
du  monument,  examen  historique  des  textes  qui  le  concernent, 
iconographie,  sigillographie,  épigraphie.  —  Belles  planches  en 
héliogravure.  P.  D. 

Mellet.  Etat  des  gentilshommes  et  des  possesseurs  de  fiefs  no- 
bles dans  les  jufHdiclions  dépendant  des  sénéchaussées  de  Guyenne 
et  de  Libourne.  Bordeaux,  Gounouilhou,  1903;  in-4"  de  43  pages. 
—  Avec  notes  biographiques.  Important  pour  les  généalogies  et 
le  régime  seigneurial  à  la  fin  du  règne  de  Louis  XIV. 

C.    JULLIAN. 

NicoLLET  (F.-N.).  Les  derniers  membres  de  la  famille  d' Orange- 
Montpellier  et  leurs  possessions  dans  le  Gapençais.  Gap,  Peyrot, 
1903;   in-8"   de  58   pages  (extrait  des  Annales  des  Alpes,   1903. 
1"  livr.).  —  M.  NicoUet  a  trouvé  à  la  bibliothèque  Méjanes  deux 
abondants  recueils  de  documents  formés  au  xviii«  siècle,  rela- 
tifs en  grande  partie  à  l'histoire  du  prieuré  de  Saint-Gilles,  et  il 
en  a  tiré  ce  qui  intéresse  l'histoire  du  Gapençais.  De  quelques- 
uns  d'entre  eux,  il  a  extrait  des  faits  qui  lui  ont  permis  de  com- 
pléter  sur  quelques   points    de    détail   les  récentes   éludes   de 
M.  l'abbé  Guillaume  sur  la  Comraanderie  de  Malte  à  Gap.  Trois 
autres  sont   publiés  in-extenso;   ce  sont  :  1o  une  donation   de 
la  seigneurie  de  Talard  à   l'ordre  de  Saint-Jean   par  Tiburge 
d'Orange  (1215);  2"  une  bulle  de  Frédéric  confirmant  à  l'ordre 
de  Saint-Jean   la  possession  de  la  moitié  de  la  ville  d'Orange 
(1217);  3"  le  testament  de  Rambaut  IV  confirmant  toutes  les  do- 
nations faites  antérieurement  par  lui  à  l'ordre  de  Saint-Jean 
(1218).  Ces  textes  sont  très  soigneusement  commentés;  tous  les 
personnages  qui  y  figurent  sont  l'objet  des  recherches  les  plus 
approfondies,   et  l'auteur  réussit  notamment  à  préciser,  mieux 
que  tous  ses  devanciers,  la  généalogie  de  la  famille  d'Orange  à 
la  fin  du  XIV  et  au  commencement  du  xiif  siècle.  —  A  propos  de 
Rambaut  le  troubadour,  on  est  tout  étonné  de  voir  M.  N.  citer 
encore  les  Vies  des  poètes  provençaux  de  Nostredame,  dont  l'au- 
torité est  depuis  longtemps  ruinée.  A.  Jeanroy. 

Paultre  (C).  La  «  taille  tarifée  »  de  l'abbé  de  Saint- Pierre 
et  V  administrât  ion  de  la  taille.  Paris,  Rousseau,  1903,  grand 
in-S"  de  xi-260  pages.  —  Cette  thèse  de  doctorat  en  droit  inté- 
resse le  Midi  par  quelques  côtés.  L'auteur  a  étudié,  en  effet, 


LIVRES   ANNONCÉS  SOMMAIREMENT.  153 

l'application  de  la  taille  tarifée  dans  la  généralité  de  Guyenne 
(2e  partie,  chapitre  ii).  et  surtout  dans  la  généralité  de  Limoges 
f3e  partie  tout  entière).  Il  a  consulté  les  archives  locales,  étudié 
les  lettres  et  les  instructions  de  Turgot  et  tracé  un  tableau  d'en- 
semble auquel  il  manque  peu  de  chose.  Il  sera  possible,  un  jour, 
de  creuser  davantage  la  question  ;  il  est  douteux  qu'on  en  puisse 
rectifier  beaucoup  les  lignes  principales.  A.  Leroux. 

RouMEJOUX  (A.  DE).  Essai  sur  les  guerres  de  religion  en  Péri- 
gord,  1551-1598.  Périgueux,  impr.  de  laDordogne,  1903;  in-S"  de 
225  pages.  —  L'auteur  n'a  pas  voulu  écrire  un  livre,  mais  sim- 
plement faire  un  «  recueil  des  faits  qui  se  sont  passés  en  Péri- 
gord  »  de  l'origine  du  calvinisme  à  l'édit  de  Nantes,  bref  une 
sorte  de  chronique.  On  comprend  qu'il  soit  impossible  de  résu- 
mer cette  série  chronologique  de  coups  de  main,  batailles,  prises 
et  reprises  de  villes,  villages,  châteaux.  En  Périgord  la  lutte  est 
ardente;  les  trêves  ne  l'arrêtent  qu'à  demi  :  les  protestants  y 
étaient  nombreux,  et  plus  nombreux  encore  autour,  surtout  à 
l'Est,  dans  la  vicomte  de  'l'urenne,  et  au  Sud,  dans  la  belle  et  riche 
plaine  de  la  Dordogne,  que  leurs  armées  suivaient  d'ordinaire. 
Là  s'élevaient  leurs  places  les  plus  assurées,  Bergerac,  Sainte- 
Foy...  La  paix  de  Fleix  y  fut  conclue,  la  bataille  de  Coutras 
livrée  et  gagnée  par  leur  chef,  Henri  de  Navarre.  Cette  vallée 
reliait  les  pays  réformés  du  Centre  et  du  Midi  à  ceux  de  l'Ouest, 
Angoumois,  Saintonge.  Aunis.  —  M.  de  R.  ne  s'est  pas  inquiété 
d'enchaîner,  de  grouper  les  faits.  Tout  au  plus  cherche-t-il  à 
montrer  comment  ceux  dont  le  Périgord  était  agité  se  ratta- 
chent aux  événements  qui  troublaient  Paris  et  tout  le  royaume. 
Ces  événements  généraux,  il  les  raconte  trop  longuement,  et 
parfois  avec  peu  d'exactitude.  P.  119  :  Joyeuse  s'empara  de  Mal- 
zion  et  de  Marieuse  en  Gévaudan;  lisez  sans  doute  Le  Maizieu  et 
Marvejols.  P.  120  .-  Lesdiguières  fait  en  Provence  et  en  Dauphiné 
une  rude  guerre  aux  protestants  (1586)  :  chacun  aura  sur  le 
champ  rectifié  l'erreur;  car  on  sait  que  Lesdiguières  était  un  des 
principaux  chefs  protestants.  Du  moins  voudrait-on  que  les 
guerres  religieuses  du  Périgord  eussent  été  l'objet  d'études  pro- 
pres à  renouveler  le  sujet.  Malheureusement  M.  de  R.  a  travaillé, 
moins  à  l'aide  des  archives,  qu'avec  de  Thou,  Davila,  écrivains 
connus,  le  P.  Dnpuy,  le  chanoine  Tarde,  historiens  familiers 
peut-être  aux  Périgourdins,  mais  qu'il  n'aurait  pas  été  inutile,  à 
l'usage  des  étrangers,  de  citer  autrement  que  par  leur  nom  seul. 


154  ANNALES    DU    MIDI. 

Les  références  de  M.  de  R.  s'écartent  par  trop  de  la  méthode 
usuelle  et  rationnelle.  Parfois  elles  sont  inintelligibles.  P.  194: 
nous  apprenons  que  le  Livide  noir  (qui  paraît  un  cartulaire  des 
Archives  de  Périgueux)  est  perdu;  on  n'en  possède  qu'un  extrait 
tiré  des  papiers  Leydet;  pourquoi,  en  ce  cas,  est  il  cité,  pp.  -168, 
183,  etc.,  comme  appartenant  auxdites  archives?  Qu'est-ce  que 
les  «  papiers  Leydet  et  Prunis  »  de  la  Bibliothèque  Nationale? 
Ils  y  figurent  sans  doute  sous  une  cote,  qu'il  aurait  fallu  citer.  — 
On  trouvera  cependant  dans  cet  ouvrage  des  traces  de  recher- 
ches personnelles,  quelques  documents  inédits,  surtout  à  la  fin, 
sur  la  révolte  des  Croquants,  et  aux  pièces  justificatives 
(pp.  210-15),  qui  ont  été  empruntées  aux  Archives  di  la  Dordogne. 

P.   DOGNON. 

Saint-Jours  (B.).  V Adour  et  ses  embouchures  anciennes.  Dax, 
Labèque.  1903;  in-8'î  de  7*2  pages.  —  M.  le  capitaine  des  douanes 
Saint-Jours  continue,  très  courageusement,  très  sagement,  sa 
campagne  en  faveur  de  la  thèse  «  de  la  stabilité  des  dunes  du 
littoral  ».  Il  a  mille  fois  raison.  Tout  ce  qu'on  a  écrit  sur  les 
variations  de  ce  littoral  est  rêverie  pure.  Un  seul  point  a 
changé  :  c'est  l'embouchure  de  l'Adour.  La  seule  question  à 
résoudre  est  celle  de  savoir  où  il  se  jetait  avant  le  xii»  siècle. 
Depuis  que  je  revois  Ptolémée  et  Marcien  d'Héraclée,  je  crois 
bien  que  c'était  à  Capbreton.  C.  Jullian. 

Sternfeld  (R.)  et  Schultz-Gora  (0.).  —  Ein  sirventes  voni268 
gegen  die  Kirche  und  Karl  von  Anjou.  (Extrait  des  Mitlheilungen 
des  Inslituls  fur  œsterreichische  Geschichtsforschung .  XXIV, 
pp.  616-29.  —  Je  n'ose  croire  que  M.  Sternfeld,  en  reprenant  le 
sujet  récemment  traité  par  moi  dans  cette  revue,  ait  déféré  au 
désir  que  j'avais  exprimé  {Annales,  XV.  145);  le  principal  est 
qu'il  l'ait  fait'.  M.  St  étant  actuellement  l'homme  du  monde  qui 
connaît  le  mieux  l'histoire  de  Charles  d'Anjou,  on  pouvait  être 
certain  à  l'avance  qu'il  répandrait  sur  le  sujet  des  lumières  tou- 
tes nouvelles.  M.  St.  accepte,  à  peu  de  chose  près,  la  date  que 
j'avais  assignée  au  sirventes  de  Panza  (il  propose  seulement  de  le 
reculer  d'un  mois  ou  deux)  et  considère  la  plupart  de  mes  expli- 
cations   comme   exactes    ou   vraisemblables;   mais  il    n'en    est 

1.  La  part  de  collaboration  de  M.  Scliultz-Gora  consiste  vraiseinbla- 
blement  dans  la  traduction  littérale  du  sirventes  et  les  quelques  correc- 
tions proposées  à  mon  texte, 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  155 

guère  qu'il  ne  complète,  il  en  rectifie  quelques-unes  et  fournit 
sur  les  points  restés  obscurs  les  éclaircissements  les  plus  satis- 
faisants. Il  montre,  par  exemple,  quelle  était  en  12(i8  la  situation 
particulière  des  Génois  vis-à-vis  de  Conradin  et  de  Charles,  et 
comment  cette  situation  rendait  plus  délicate  la  tâche  du  trou- 
badour ;  il  confirme  l'hypothèse  que  j'avais  indiquée  sans  m'y 
arrêter  (p.  159,  n.)  au  sujet  de  l'identification  des  «  comtes  » 
(v.  4i);  il  explique  le  reproche  fait  à  Charles  au  sujet  des  Grecs 
et  des  Latins  (v.  56),  à  l'Eglise  au  sujet  de  la  trêve  conclue  avec 
les  infidèles  (v.  7)  et  entre  dans  des  détails  très  précis  au  sujet 
des  intrigues  des  légats  à  Crémone  (v.  ri)  ;  il  pense  qu'il  s'agit, 
au  V.  32.  non  de  Gui  de  Dampierre,  mais  de  son  fils  Robert  de 
Béthune.  qui  avait  pu  consentir  à  son  beau-père  des  prêts  d'ar- 
gent ';  la  prédiction  dont  il  est  question  au  v.  12  ne  serait  autre 
que  celle  qui  est  contenue  dans  le  fameux  Evangile  éternel  de 
Joachim  de  Flore.  En  somme,  tous  ceux  qui  s'intéressent  à 
l'histoire  des  troubadours  et  à  celle  de  Charles  d'Anjou  seront 
reconnaissants  à  M.  St.  de  cette  précieuse  contribution. 

A.  Jeanroy. 

TissiER  (J.).  —  Documents\inèdUs  pour  servir  à  l'histoire  de  la 
Réforme  et  de  la  Ligue  à  Nai'bonne  et  dans  le  Narbonnais.  Nar- 
bonne,  impr.  Caillard,  1900;  in-8"  de  576  pages  —  Documents 
inédits  pour  servir  à  l'histoire  de  la  province  de  Languedoc  et  de 
la  ville  de  Narbonne  en  particulier  (1596-1632).  Narhonne.  impr. 
Gaillard,  1903;  in-8'^  de  136  pages.  —  Ces  deux  séries  de  docu- 
ments, d'étendue  fort  inégale,  se  font  suite.  Elles  ont  paru  dans 
le  Bulletin  de  la  Soc.  archéol.  de  Narbonne,  t.  V,  VI,  VII;  M.  T. 
s'est  borné  à  les  faire  tirer  à  part,  sauf  à  y  joindre  de  très  bon- 
nes tables  alphabétiques  des  noms  propres.  Nous  avons  signalé 
déjà  la  première  série  aux  «  Périodiques  méridionaux  »  [Annales, 
t.  XIV,  p.  90),  et  nous  en  avons  indiqué,  en  quelques  mots,  la 
valeur.  Mais  quelques  mots  ne  suffisent  pas  lorsqu'il  s'agit  de 
recueils  de  cette  importance.  La  correspondance  des  consuls  de 
Narbonne,  d'où  ils^ont  été  tirés,  commence  en  1570  et  compte,  de 
cette  date  à  1632,  environ  4000  pièces.  Elle  est  formée  presque 
uniquement  de  lettres  adressées  aux  consuls;  leurs  propres  mis- 
sives nous  resteraient  donc  inconnues,  à  peu  d'exceptions  près, 

1.  i/('tn[)l()i  (les  mots  «  comte  do  Flandres  »  reste  toiitefois  surprenant, 
Robert  de  Béthune  ne  portant  pas  ce  titre  en  120d, 


156  ANNALES   DU    MIDI. 

si  M.  T.  n'avait  eu  la  bonne  fortune  d'en  retrouver  des  minutes, 
écrites  de  4583  à  1593.  Enfin,  d'un  registre  dit  «  Commis- 
sions, 4577  »,  il  a  pu  extraire  un  certain  nombre  de  lettres 
{1377-1595),  qu'il  a  publiées  à  la  fin  du  premier  volume.  A  condi- 
tion de  ne  retenir  que  celles  qui  offrent  de  l'intérêt  pour  This- 
toire  générale  ou  pour  celle  du  Languedoc  et  de  Narbonne,  il  a 
transcrit  et  publié  H°  609  pièces  comprises  entre  1370  et  le  traité 
de  Folembray,  de  1396;  2'^  104  pour  les  années  1596-1632.  J'aurais 
souhaité  que  de  plus  il  rappelât,  et  même  énuraérat  avec  préci- 
sion dans  sa  préface,  ou  mieux,  en  note,  celles  que  Mouynès 
a  insérées  dans  l'Inventaire  des  archives  de  Narbonne,  sér.  AA, 
Cor7-espondance  politique.  —  Quel  que  soit  l'intérêt  de  certaines 
pièces  de  la  seconde  série,  la  première  l'emporte  sous  ce  rapport 
autant  que  par  l'étendue.  C'est  que  Narbonne  s'est  trouvée,  pen- 
dant les  deux  révoltes  de  Montmorency  Daraville  et  les  guerres 
de  la  Ligue,  sur  une  sorte  de  frontière  :  grande  place  forte,  elle 
était  située  au  bout  du  «  chemin  français  »,  au  point  où  cette 
route,  venant  de  Toulouse,  pénètre  en  Bas-Languedoc.  Ses  habi- 
tants se  distinguaient  par  leur  haine  contre  les  huguenots  et  les 
politiques.  Les  Joyeuse  l'avaient  longtemps  gouvernée.  Le  vieux 
Joyeuse,  appuyé  sur  Toulouse,  fit  de  Narbonne  son  poste  avancé 
au  cours  de  la  guerre  qu'il  soutint  pour  le  roi.  puis  pour  la 
Ligue,  contre  Montmorency  dont  il  était  le  lieutenant,  dont  il 
devint  le  rival.  En  1389  il  dit  «  tout  haut  que  Narbonne  est  sa 
maison,  qu'il  y  veult  mourir  et  despandre  le  sien  pour  la  conser- 
ver »,  qu'elle  peut  «  monstrer  example  aux  autres  villes  d'estre 
fermes  en  leur  religion  et  promesses...  »  (n"  286).  De  fait,  elle  ne 
reconnut  le  roi  Henri  IV  qu'avec  le  duc  de  Joyeuse,  à  la  dernière 
extrémité.  —  Ses  consuls  recevaient  de  toutes  parts  des  ordres, 
des  avis,  des  prières  et  aussi  des  renseignements.  On  trouvera 
dans  leur  correspondance  des  précisions  remarquables  sur  des 
événements  qui  se  sont  passés  bien  loin  de  Narbonne  :  sur  la 
révolte  de  Toulouse  en  octobre  1589  (n"^  325  et  suiv.),  sur  le  com- 
plot découvert  au  Puyet  la  bataille  qui  s'en  suivit  (octobre  1594; 
no  521),  etc.  —  Les  transcriptions  de  M.  T  paraissent  fidèles  : 
mérite  appréciable  pour  qui  connaît  les  difficultés  de  la  paléo- 
graphie du  xvi«  siècle.  P.  29,  1.  3,  je  lirais  remuement  au  lieu  de 
ruinement.  P.  Dognon. 


PUBLICATIONS  NOUVELLES 


Armoriai  général  de  France,  dressé  par  Ch.  d'Hozier,  publié 
sous  la  direction  de  M.  de  La  Roche-Lambert-Mions.  l'^''  fasc. 
Paris,  libr.  des  Archives  de  la  noblesse,  8,  rue  de  Nesles,  1903; 
gr.  in-8"  à  2  col.,  p.  1-16,  avec  fac-similé. 

Blazy  (Abbé  L.).  Contribution  à  l'histoire  du  pays  de  Foix.  1" 
sér.,  xvii=  siècle.  Foix,  Pomiès,  1903;  pet.  in-S»  de  107  p. 

Capelle  (E.).  Un  moine  :  le  Père  Jean,  abbé  de  Fontfroide 
(ISIo-ISOS).  Toulouse,  Privât,  4903;  in-4o  de  xx-600  p.  avec  un 
portrait  et  illustrations  dans  le  texte. 

Cassan  (Abbé  L.).  Mélanges  d'histoire  locale.  3e  fasc.  La  Con- 
frérie de  la  Sainte-Vraie-Croix  de  Montpellier.  Montpellier,  imp. 
de  la  Manufacture  de  la  Charité,  1903;  in-S",  p.  59  à  113. 

Cazenove  (A.  DE).  Campagnes  de  Rohan  en  Languedoc  (1621- 
1629).  Toulouse,  Privât,  1903;in-8o  de  145  p.  [Extr ait  des  Annales 
du  Midi,  t.  XIV  et  XV.] 

Chavant  (F.).  La  peste  à  Grenoble  (1410-1643)  (thèse).  Paris, 
Storck,  1903;  in-8o  de  83  p.  avec  grav.  et  planches. 

Clugnet  (L.).  Bibliographie  du  culte  local  de  la  Vierge  Marie 
(France),  2^  fasc.  Province  ecclésiastique  d'Albi.  Paris,  Picard, 
[1903];  in-8o,  p.  75  à  137. 

Darmangeat  (L.).  Histoire  de  la  royale  et  dévote  compagnie 
des  Pénitents-Gris  d'Avignon.  Avignon,  Roumanille,  1903;  in-16 
de  256  p.  et  grav. 

Darricau  (A.).  Scènes  de  la  Terreur  k  Bayonne  et  aux  environs 
(1793-1794).  Bayonne,  imp.  Lamaignère,  1903;  gr.  in-8"  de  207  p. 

Descostes  (F.).  Les  émigrés  en  Savoie,  à  Aoste  et  dans  le  pays 
de  Vaud  (1790-1800),  d'après  des  documents  inédits.  Chambéry, 
Perrin,  4903;  in-8»  de  351  p. 


158  ANNALES   DU    MIDI. 

DuFFAUT  (H.).  Roqueville,  monographie  duflef  et  de  la  chapelle 
de  ce  nom.  Toulouse,  Privât.  1903;  in-8f  de  xvi-440  p. 

Evrard  de  Fayolle  (A.).  Recherches  sur  Bertrand  Andrieu, 
de  Bordeaux,  graveur  de  médailles  (1761-1822).  Chalon-sur-Saône. 
Bertrand,  1902;  pet.  in-4''  de  xii-139  p.,  grav.  et  portrait. 

Fenouillet  (F.).  Monographie  du  patois  savoyard.  Annecy, 
Roche, 1902;  in-S"  de  279  p 

Font  (Chanoine  F.).  Histoire  de  l'abbaye  royale  de  Saint-Mar- 
tin-du-Canigou  (diocèse  de  Perpignan).  Perpignan,  imp.  Latrobe, 
1903  ;  in-8"  de  xix-233  p.  et  grav. 

Gerbaix  de  Sonnaz  (A.  de).  Amé  V  de  Savoie  et  les  Savoyards 
à  l'expédiiion  de  l'empereur  Henri  VIT  de  Luxembourg  à  Rome 
(1308-1313,.  Thonon-les  Bains,  imp.  Dubouloz.  1902  ;  in  8"  de  208  p. 

GiPOULON  (J.).  Etude  sur  l'allodialité  en  Auvergne.  M'^"'"'jçon, 
imp.  Herbin,  1903;  in-8«  de  186  p 

Grousset  ^E.).  Histoire  du  diocèse  de  Montpellier  pendant  les 
premiers  siècles.  Montpellier,  imp.  de  la  Manufacture  de  la 
Charité,  1903;  in-8"  de  134  p. 

KuRTH  (F.).  Les  origines  de  la  civilisation  moderne,  5e  éd. 
Paris,  Retaux,  1903;  2  vol.  in-8'>. 

Lacave  (Abbé  M.).  Histoire  de  Langon.  Bordeaux,  imp.  Cadoret, 
1903;  pet.  in-8°  de  273  pages  et  plan. 

Lavisse  (E.).  Histoire  de  France,  depuis  les  origines  jusqu'à  la 
Révolution,  t.  II.  i.  Le  christianisme;  les  barbares  mérovingiens 
et  carolingiens.  Fasc.  1  à  4.  Paris,  Hachette,  1903;  in-8t>  carré, 
p.  1-439. 

Lavisse  (E.).  Histoire  de  France,  depuis  les  origines  jusqu'à  la 
Révolution,  t.  11.  ii.  Les  premiers  Capétiens  (987-1137).  Fasc.  2. 
Paris,  Hachette,  1903;  in  8»  carré,  p.  97  à  192,  avec  fig.  et  cartes 
dans  le  texte. 

Lecestre  (L.).  Abbayes,  prieurés  et  couvents  d'hommes  en 
France.  Liste  générale,  d'après  les  papiers  de  la  Commission  des 
Réguliers,  en  1768.  Paris,  Picard.  1902;  in-8'3  de  xii-157  p. 

Lot  (F.).  Etudes  sur  le  règne  de  Hugues  Capet  et  la  fin  du 
xe  siècle.  Paris,  Bouillon,  1903;  in-8o  de  xl-o2o  p.  [Bibliothèque 
de  l'Ecole  des  hautes  études,  147»  fasc.]. 

Louis  XI.  Lettres  de  Louis  XL  roi  de  France.  Publiées,  d'après 
les  originaux,  pour  la  Société  de  l'histoire  de  France,  par  J.  Vae- 
sen  et  E.  Charavay,  t.  VIII.  Paris,  Laurens,  1903;  in-8°  de  388  p. 


PUBLICATIONS  NOUVELLES.  159 

Massabie  (Abbé  B.).  Vie  d'Alain  de  Solminiac,  évêqne.  comte  et 
baron  de  Cahors.  Cahors.  Plantade,  1903;  in-16  de  x-24o  p. 

Maurel  (Abbé  M.-J.).  Histoire  religieuse  du  département  des 
Basses-Alpes  pendant  la  Révolution.  Marseille,  Ruât;  Digne, 
Chaspoul,  <902;  in-8  '  de  vii-51o  p. 

Mémoires  des  évêques  de  France  sur  la  conduite  à  tenir  à 
l'égard  des  réformés,  en  1698,  p.  p.  J.  Lemoine.  Paris,  Picard, 
1902;  \n-8°  de  XLvm-j-12  p.  {Arch.  de  l'histoire  religieuse  de  la 
France,  t.  I.) 

MoLiNiER  (A.).  Les  sources  de  l'histoire  de  France.  III.  Les  Capé- 
tiens. Paris,  Picard,  1903  ;  in  8"  de  252  p. 

MuGNiER  (F.).  Histoire  et  correspondance  du  premier  président 
Favre.  lie  partie  :  Histoire  d'Antoine  Favre  (1557-1624).  Paris, 
Champion.  1902-1903;  in  8°  de  -539  p.  et  portr. 

Notices  et  extraits  des  manuscrits  de  la  Bibliothèque  nationale 
et  autres  bibliothèques  publiés  par  l'Académie  des  inscriptions 
et  belles-lettres,  t.  XXXVII.  Paris.  Klincksieck,  1902;  in-i»  de 
6Ô9  p. 

Paris  (G.).  Légendes  du  moyen  âge.  Paris,  Hachette,  1903  ;  in-16 
deiv-297  p. 

pELLissiER  (Abbé  J.-E.).  Monographie  Bas-Alpine.  Histoire 
d'Allos.  Digne   Chaspoul,  1901  ;  2  vol.  in-12  de  xxi-638  p. 

Procès-verbal  de  ce  que  le  sieur  Fergon  a  faict  pour  la  prinse 
de  possession  des  terres  de  BeaujoUeys  et  Bombes  et  de  ce  qu'il 
a  géré  dans  les  autres  terres  des  duc  et  duchesse  de  Montpensier 
es  provinces  du  Bourbonnais,  Auvergne,  Berry  et  Poictou.  Edité 
et  annoté  par  E.  Longin.  Lyon,  Brun,  1901  ;  in-8o  de  163  p. 

Radiguer  (L.).  Maîtres  imprimeurs  et  ouvriers  typographes 

(1470-1903).  Paris,  imp.  TEmancipatrice,  1903;  in-8"  de  xiii-o73  p. 

RÉMUSAT  (P. -F.  de).  Mémoire    sur   ma   détention  au  Temple 

(1797-1799).  Publié  pour  la  Société  d'histoire  contemporaine,  par 

V.  Pierre.  Paris,  Picard,  1903;  in-8o  de  xLii-191  p.  et  1  pi. 

RoHAULT  DE  Fleury  (G.).  Les  couvents  de  Saint-Dominique  au 
moyen  âge.  Paris,  Lethielleux,  1903;  2  vol.  in-4o  avec  grav.  et 
carte.  ' 

Salveton  (H.).  Antoine  (Frédéric)  Salveton,  homme  politique, 
magistrat,  avocat  (1801-1870)    Clermont-Ferrand ,  Couty,   1903; 
in-4»  de  m  172  p 
SiCARD  (Abbé).   L'ancien  clergé  de  France.  T.  III  :  les  évêques 


160  ANNALES    DU   MIDI. 

pendant  la  Révolution  (de  l'exil  au  Concordat).  Paris,  LecoflFre, 
1903;  in-8°  de  574  p. 

SoLANET  (Abbé  A.).  Histoire  de  Notre-Dame  de  Quézac,  au  dio- 
cèse de  Mende.  Mende,  imp.  Fauc,  1903;  in-16  de  xii-200  p.  avec 
grav. 

Stenger  (G.j.  La  Société  française  pendant  le  Consulat.  La 
Renaissance  de  la  France.  Paris,  Perrin,  1903;  pet.  in-8°  de  m- 
452  p. 

Tandeau  de  MA.RSA.C  (P.).  Monographie  économique  d'un 
domaine  rural  en  Limousin  (thèse).  Paris,  Rousseau,  1903;  in-S" 
de  254  p. 

Tardieu  (A.).  Histoire  illustrée  du  bourg  de  Royat,  en  Auver- 
gne. Clermont-Ferrand,  imp.  Raclot.  1902;  in-S»  de  78  p. 

Tholin  (G.).  Catalogue  du  fonds  de  Bellecombe,  Arch.  départ, 
de  Lot  et-Garonne.  Auch,  Cocharaux,  1902;  in  8°  de  xxxvii-312p. 

TouMiEux  (Z.).  De  quelques  seigneuries  de  la  Marche,  du  Limou- 
sin et  des  enclaves  poitevines.  IX  :  le  comté  de  la  Feuillade.  Gué- 
ret,  imp.  Amiault,  1903;  in-S"  de  140  p.  et  une  carte. 


Le  Gérant, 


P.-Rd.  PRIVAT 


Toulouse,  Imp.  Douladoure-PRIVAT,  rue  St-Rome,  39.  —S 


LA   VIE    PRIVEE 


DE 


GUILLAUME    DE    NOGARET 


Les  origines  du  célèbre  légiste  sont  mal  connues.  Ce  qu'en 
ont  dit  les  historiens  de  sa  vie  publique,  Dupuy,  Renan,  et 
plus  récemment  M.  Holtzmann^,  ou  les  auteurs  de  V Histoire 
générale  de  Languedoc  -,  ne  satisfait  pas  toute  notre  curio- 
sité. J'ai  tenté  de  préciser  quelques  traits  de  cette  figure  en- 
core énigmatique  en  recourant  à  un  dépôt  de  documents  peu 
connu,  bien  que  partiellement  exploré  au  xviii®  siècle  par 
l'historien  de  Nimes,  Léon  Ménard  ^  :  les  archives  du  château 
de  Marsillargues.  Cette  petite  ville,  dont  le  territoire  forme, 
le  long  de  la  rive  droite  du  Vidourle,  l'extrémité  orientale  du 
département  de  l'Hérault,  fut  donnée  par  Philippe  le  Bel  à 
Guillaume  de  Nogaret  en  1304,  lors  de  son  retour  d'Anagni; 


1.  [DupuyJ,  Histoire  du  différend  d'entre  le  pape  Boîiiface  VIII  et 
Philippe  le  Bel,  roy  de  France.  Paris,  1655.  —  Ernest  Renan,  Guillaume 
de  Nogaret,  légiste  (Histoire  littéraire  de  la  Fra^ice,  t.  XXVII,  pp.  233- 
371;  Etudes  sur  la  politique  religieuse  du  règne  de  Philippe  le  Bel, 
pp.  1  et  suiv.).  —  Robert  Holtzmann,  Wilhem  von  Nogaret,  Rat  und 
Grosssiegelbewahrer  Philipps  des  Schœnes  von  Frankreich.  Freiburg 
im  Brisgau,  1898,  in-8''. 

2.  Edition  Privât,  t.  X,  pp.  53-59,  note  xi. 

3.  Léon  Ménard,  Histoire  civile,  ecclésiastique  et  littéraire  de  la  ville 
de  Nismes.  Paris,  1750-1757,  7  vol.  in-1";  —  notamment  aux  tomes  I 
et  II. 

ANNALES  DU  MIDI.   —  XVI.  11 


162  LOUIS   THOMAS. 

elle  n'a  point  perdu  le  souvenir  île  celui  qui  fut  le  plus  illustre 
de  ses  maîtres  :  les  héritiers  de  Guillaume  de  Nogaret  possè- 
dent encore  le  château  et  des  terres  aux  environs;  treize 
d'entre  eux  sont  ensevelis  dans  une  chapelle  latérale  de 
l'église;  au-dessus  de  leur  tombeau,  sur  l'une  des  parois,  une 
plaque  de  marbre  noir  porte  l'inscription  suivante  : 

t 

7  septembre 

Messe  annuelle 

d'expiation 

en  réparation  de  Vattental 

sacrilège  commis  par 

Guillaume  de  Nogaret 

sur  la  personne  du  pape 

Boniface  VIII 

à  Anagni  le  7  septe^nbre  1303. 

Les  deux  dernières 

descendantes  prosternées 

aux  pieds  du  pape  Pie  IX 

le  21  avril  1875 

ont  reçu  de  sa  bouche 

des  paroles  de  pardon 

avec  sa  bénédiction 

apostolique. 

C'est   l'une  d'elles,  propriétaire  du  château',  qui  voulut 
bien  m'en  ouvrir  les  archives'*.  Ce  dépôt  est  encore  très  riche, 

1.  M"«  de  Brignac,  fille  du  comte  de  Calvière  et  de  la  comtesse  née  de 
Calvisson.  On  sait  aujourd'hui  que  la  descendance  directe  de  Guillaume 
de  Nogaret  s'éteignit  à  la  troisième  génération.  M"'=  de  Brignac  n'était 
donc  pas  la  descendante,  mais  seulement  l'héritière  pour  une  partie  de 
celui  dont  elle  voulut  cependant  contribuer  à  expier  les  fautes  en  allant 
finir  ses  jours  au  Carmel  d'Avignon. 

2.  Ces  archives  étaient  contenues  dans  quarante  et  une  caisses  ou 
«  tomes  »  de  bois  en  forme  de  volumes  in-folio.  Dix,  qui  renfermaient 
les  titres  de  la  famille  de  Calvière,  sont  vides  ;  douze  autres,  contenant 
des  papiers  récents,  n'ont  pas  été  communiqués.  Les  dix-neuf  autres  con- 
tiennent ce  qu'on  a  pu  conserver  des  archives  antérieures  à  1789.  Les 
documents  y  sont  placés  sans  ordre.  Comme  une  classification  générale 
aurait  demandé  beaucoup  de  temps,  j'ai  provisoirement  numéroté,  pour 
chaque  tome,  d'après  leur  ordre  chronologique,  tous  les  documents  que 
j'ai  utilisés.   La  classification  nécessaire  sera  facilitée  par  l'inventaire 


LA  VIE  PRIVÉE  DE   GUILLAUME   DE  NOGARET.  163 

malgré  de  nombreuses  mutilations  :  les  documents  datés  du 
dernier  quart  du  xiii^  siècle  y  sont  nombreux.  Et  certes,  ils 
ne  donnent  pas  la  solution  de  tous  les  problèmes  que  l'on  peut 
poser  sur  l'origine  et  les  débuts  de  Guillaume  de  Nogaret  : 
quand  il  constitua  le  premier  fonds  de  ce  chartier,  il  ne  son- 
geait guère  à  rassembler  les  documents  de  son  histoire,  mais 
plutôt  à  laisser  aux  mains  de  ses  héritiers  des  titres  propres  à 
faire  valoir  tous  les  droits  qu'il  leur  avait  acquis.  Au  moins 
ceux  de  ces  titres  qui  nous  sont  restés  nous  permettent-ils  de 
mieux  connaître  sa  vie  privée,  donc  de  retrouver  à  leur 
origine,  dans  des  manifestations  plus  ordinaires  de  sa  person- 
nalité, quelques-uns  des  caractères  qui  donnent  aux  actes  de 
sa  vie  politique  une  marque  si  particulière  i. 


Le  plus  ancien  document  qui,  dans,  l'état  actuel  des  recher- 
ches, fasse  mention  de  Guillaume  de  Nogaret,  est  un  acte 
du  19  juin  1287,  par  lequel  le  roi  de  Majorque  confirme  les 
privilèges  de  sa  ville  de  Montpellier.  Dans  la  longue  liste  de 
témoins  qui  termine  l'acte,  Guillaume  de  Nogaret  est  nommé 
le  troisième  parmi  cinq  docteurs  es- lois 2. 


que  rédigea,  au  mois  de  juin  1784,  Claude-Marie  Eiben,  «  feudiste  de  la 
ville  de  Montpellier  »,  à  la  demande  de  Jeanne-Pauline  du  Chayla,  veuve 
d'Anne-Joseph  de  Louet  de  Murât  de  Nogaret,  chevalier,  marquis  de  Cal- 
visson;  il  reste  au  tome  XV  des  fragments  importants  de  cet  inventaire, 
qui  donnent  la  mention  ou  le  résumé  des  nombreuses  pièces  aujourd'hui 
disparues. 

1.  Outre  les  archives  du  château  de  Marsillargues,  j'ai  consulté  avec 
profit  les  archives  municipales  de  Marsillargues,  de  Lunel  et  de  Nimes  ; 
les  archives  départementales  de  l'Hérault  et  du  Gard  ;  la  Bibliothèque 
nationale  et  les  Archives  nationales  m'ont  aussi  foui'ni  quelques  docu- 
ments. —  Les  archives  municipales  de  Marsillargues  ont  été  inventoriées 
en  1781  par  le  même  Claude  Riben  qui  classa  celles  du  château  ;  elles  sont 
contenues  aussi  dans  huit  «  tomes  »  en  bois;  quatre,  numérotés,  con- 
tiennent les  parchemins  antérieurs  au  xvi'  siècle,  disposés  et  numérotés 
sans  ordre  apparent;  Riben  a  aussi  commencé  la  transcription —  sou- 
vent j)eu  fidèle  et  inexacte  —  de  ceux  qui  lui  paraissaient  plus  importants 
sur  un  registre  qu'il  a  intitulé  :  «  Cartulaire  de  la  communauté  do  Mar- 
sillargues »  ou  «  Cartes  vertes  ». 
.    2.  Archives  municipales  de  Montpellier,  grand  chartier,  n"  115  de  l'in- 


164  LOUIS   THOMAS. 

On  ne  sait  rien  de  précis  sur  son  existence  antérieure.  On 
dit  communément  qu'il  naquit  en  1260  à  Saint-Félix-de- 
Caraman,  au  diocèse  de  Toulouse,  Jans  une  famille  qui  n'était 
point  noble,  et  d'un  père  qui  fut  brûlé  comme  patarin;  cer- 
tains ajoutent  que  sa  mère  fut  brûlée,  et  quelques  autres  de 
ses  ascendants.  —  C'est,  en  effet,  une  opinion  fort  séduisante 
pour  des  imaginations  romanesques,  celle  qui  fait  se  lever 
contre  la  papauté  persécutrice  le  propre  fils  de  ses  victimes, 
et  qui  nous  montre  le  subtil  organisateur  de  la  journée  d'Ana- 
gni  venant  de  l'Albigeois  pour  venger  la  mort  des  siens... 
Mais  ce  n'est  là  qu'une  opinion  dont  il  convient  de  discuter  le 
degré  de  vraisemblance. 

On  peut  accepter  la  date  de  1260  pour  la  naissance  de  Guil- 
laume de  Nogaret,  mais  à  la  condition,  toutefois,  de  supposer 
qu'il  était,  en  1287,  tout  récemment  reçu  docteur  ès-lois;  car 
il  fallait,  pour  prendre  ses  grades  en  droit  civil,  de  neuf  à 
onze  années  d'études*.  Il  n'est  point  sûr  qu'il  soit  né  à  Saint - 
Félix,  et  s'il  y  naquit,  il  dut  venir  de  très  bonne  heure  dans 
le  Bas-Languedoc  ;  bien  que  cela  ne  soit  dit  formellement 
nulle  part,  il  étudia  vraisemblablement  à  Montpellier.  Il  au- 
rait pu  étudier  à  Toulouse  et  enseigner  ensuite  à  Montpellier, 
puisque  les  privilèges  accordés  par  les  papes  à  l'Université 
de  Toulouse  donnent  à  tout  maître  examiné  dans  une  de  ses 
Facultés  le  pouvoir  d'enseigner  ailleurs  sans  nouvel  examen  2. 
Mais  nous  savons  par  l'histoire  des  tribulations  de  son  collè- 
gue Guillaume  Séguier  en  1268  qu'un  ancien  statut  interdisait 
l'enseignement  du  droit  à  Montpellier  et  dans  ses  faubourgs  à 
quiconque  n'avait  pas  été  examiné  à  Montpellier  ou  à  Bo- 
logne^. Il  n'était  pas  seul  de  sa  famille  à  Montpellier  :  il  faut 


ventaire  Louvet.  —  Un  autre  acte  du  même  jour,  relatif  au  don  gracieux 
do  10,000  livres  fait  par  les  consuls  de  Montpellier  au  roi  de  Majorque, 
et  contenant  la  même  liste  de  témoins,  a  été  reproduit,  des  mêmes  archi- 
ves, par  dom  Pacotte,  au  tome  I"  de  la  «  Collection  du  Languedoc  ». 
(Bibl.  nat.,  ms.  latin  9173,  i"  1--28.) 

1.  A.  Germain,  Introduction  au  Cartulaire\de  l'Université  de  Mont- 
pellier, p.  41. 

2.  Hist.  de  Latig.,  éd.  Privât,  t.  VIII,  p.  436. 

3.  Cartulaire  de  l'Université  de  Montpellier,  pp.  199-200.  —  Léopold 


LA    VIE  PRIVÉE  DE   GUILLAUME  DE  NOGARET.  165 

voir  un  de  ses  proches  dans  ce  clerc,  Mathieu  de  Nogaret, 
qui,  au  bas  d'actes  de  1291  et  de  1295,  figure  comme  témoin 
en  sa  faveur  ou  à  sa  placée  Mais  sa  famille  est  bien  origi- 
naire de  Saint-Félix-de-Caraman.  Lorsqu'en  1271  Philippe  le 
Hardi  recueille  la  succession  de  son  oncle  Alphonse  de  Tou- 
louse, dans  la  baylie  de  Saint-Félix  plusieurs  Nogaret  lui 
prêtent  serment  de  fidélité^.  Le  fils  aîné  de  Guillaume  de 
Nogaret,  Raymond  Ie^  a  souvent  auprès  de  lui,  à  Marsillar- 
gues,  Thomas  de  Nogaret,  «  chanoine  à  Saint-Félix^  »,  et 
«  noble  Guillaume  de  Nogaret,  chevalier  de  Saint-Félix  au 
diocèse  de  Toulouse  ^  ».  Son  petit-fils,  Raymond  II,  réclame 
en  1353  l'héritage  de  ce  dernier  comme  étant  son  plus  proche 
parent  mâle  ^. 

Fut-il  fils  ou  petit-fils  de  patarin?  —  M.  Holtzmann  repro- 
duit^ les  textes  qui  lui  paraissent  fonder  cette  opinion;  ils  ne 
ne  sont  pas  très  affirmatifs,  usent  de  formules  prudentes  — 
ut  dicitur  —  et  ne  s'accordent  pas  toujours  :  Eberhard  de 
Ratisbonne  dit  que  le  père  de  Nogaret  fut  condamné  comme 
hérétique;  d'après  Guillaume  Ventura,  il  aurait  été  brillé,  — 
avec  sa  femme,  si  l'on  en  croit  Villani,  —  et  après  plusieurs 
de  ses  ascendants,  affirme  le  comte  de  Flandre  Louis  de  Ne- 


Delisle,  Recueils  épistolaires  de  Bérard  de  Naples.  (Notices  et  extraits 
des  manuscrits,  t.  XXVII,  2«  partie,  pp.  114-llG.) 

1.  1291  :  témoin  de  la  cession  de  ïamarlet  par  Rousselin,  seigneur 
de  Lunel,  à  Guillaume  de  Nogai'et  (Arcli.  du  château  de  Marsillargues, 
t.  XXIII,  liasse  de  ïamarlet,  n°  1).  —  1295  :  témoin  de  la  présentation 
à  la  cour  de  Montpellier  du  testament  de  ce  même  seigneur  de  Lunel, 
fait  un  mois  auparavant  en  présence  de  Guillaume  de  Nogaret.  (Rouët, 
Notice  sur  la  ville  de  Lunel  au  moyen  âge  ;  Montpellier,  1878,  p.  416). 

2.  Lafaille,  Annales  de  la  ville  de  Toulouse,  1"  partie.  Preuves  : 
«  Saisimentum  comitatus  Tolosae  »  ;  p.  7,  col.  1  :  «  Poncium  de  Noga- 
reto...  Guillelmum  de  Nogareto  de  Sancto  Felice...  »  ;  p.  4."),  col.  2  :  «  Ber- 
nardus  de  Nogareto...  » 

3.  1317  :  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  n»  12.  —  1332  : 
Arch.  municipales  de  Marsillargues,  t.  I,  n"  23. 

4.  1333  :  Arch.  munie,  de  Marsillargues,  t.  I,  n"  41,'publié  par  A.  Ger- 
main :  U)ie  fête  de  chevalerie  à  Marsillargues  en  1332  (sic).  Extrait 
des  Mémoires  de  la  Société  archéologique  de  Montpellier,  s.  d.,8p. 
in-4'>. 

5.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XI,  n»  4. 

6.  Ouv.  cité,  pp.  9,  10. 


166  LOUIS   THOMAS. 

vers.  Les  documents  sur  l'œuvre  de  l'Inquisition  en  Langue- 
doc sont  encore  nombreux*.  J'ai  vainement  dépouillé  ceux  de 
ces  documents  qui  semblent  se  rapporter  davantage  au  Lau- 
ragais  et  à  l'époque  probable  du  procès  qu'on  aurait  fait  au 
père  ou  au  grand-père  de  Nogaret^.  Si  ses  parents  furent 
brûlés,  par  qui  fut-il  élevé?  Peut-être  par  des  moines,  et  cela 
expliquerait  la  qualité  de  «  clerc  »  qu'on  lui  donne  quelque- 
fois; en  {out  cas,  il  aurait  été  instruit  par  charité,  car  la  con- 
fiscation des  biens  des  hérétiques  brûlés  était  toujours  pro- 
noncée. Mais  cela  ne  s'accorde  guère  avec  les  ressources 
abondantes  que  l'on  connaît  à  Guillaume  de  Nogaret,  et  qui 
ne  sauraient  provenir  uniquement  des  bénéfices  qu'il  pouvait 
retirer  de  ses  leçons.  D'ailleurs,  Philippe  le  Bel,  qui,  en  1288, 
privait  d'un  simple  notariat  Raymond  Vital,  d'Avignonet, 
parce  qu'il  était  petit-fils  d'un  hérétique  condamné  au  bûcher  -^j 
aurait  eu  sans  doute  encore  plus  de  répugnance  à  confier  à  un 
autre  petit-fils  de  patarin  les  fonctions  autrement  importantes 
qu'exerça  auprès  de  lui  Guillaume  de  Nogaret.  Renan,  après 
avoir  renchéri  sur  l'opinion  commune  en  assurant  que 
«  Guillaume.. .  s'entendit  reprocher  toute  sa  vie  la  mort  de  son 
grand-père*  »,  nous  fait  entrevoir  l'origine  probable  de  cette 
légende  en  racontant  la  scène  d'Anagni  :  «  Boniface  dit  qu'il 
était  heureux  d'être  condamné  et  déposé  par  les  patarins.  Il 
faisait  sans  doute  par  ce  mot  allusion  aux  ancêtres  de  No- 
garet. Peut-éb^e  cependant  désignait-il  par  là  l'Eglise  de 
France.  Boniface,  eu  effet,  avait  coutume  de  dire  que  l'Eglise 
gallicane  n'était  composée  que  de  patarins^.  »  Ce  propos  du 
pape  rapproché  de  l'origine  languedocienne  de  Nogaret,  il 
n'en  fallut  pas  davantage  pour  accréditer  la  légende.  Tout  au 


1.  Ch.  Molinier,  L'Inquisition  datais  le  midi  de  la  France.  Paris,  1880. 
—  Ms'  Douais,  Documetits pour  servir  à  l'histoire  de  l'Inquisition  dans 
le  Languedoc.  Paris,  1900,  t  I,  Introduction. 

2.  Le  ras.  609  de  la  Bibliotlièque  municipale  de  Toulouse,  et  le  ms. 
latin  9992  de  la  Bibliothèque  nationale. 

3.  Ms""  Douais,  ouv.  cité,  t.  I,  Introduction,  p.  ccxxviij,  note. 

4.  Etudes  sur  la  politique  religieuse  du  règne  de  Philippe  le  Bel, 
p.  3. 

5.  Ibid.,  p.  42. 


LA   VIE  PRIVÉE   DE   GUILLAUME   DE  NOGARET.  167 

plus  pourrait-on  dire  —  mais  sans  en  pouvoir  donner  aucune 
preuve  —  que  les  parents  de  Nogaret,  suspects  d'hérésie,  au- 
raient abandonné  le  Lauragais  pour  le  Bas-Languedoc,  et  les 
terres  du  roi  de  France  pour  celles  du  roi  d'Aragon. 

IL 

1.  —  Après  1287,  la  vie  de  Guillaume  de  Nogaret  est  mieux 
connue  :  il  vit,  à  Montpellier,  dans  une  situation  qui  paraît 
fort  brillante.  Sa  qualité  de  professeur  es  lois  dans  une  école 
renommée  y  contribue  grandement  ;  ce  n'est  pas  seulement  le 
roi  de  Majorque  qui  l'honore  en  le  faisant  figurer  comme  té- 
moin de  ses  actes  solennels  ;  ce  sont  les  bourgeois  de  la  ville 
qui  placent  en  lui  leur  confiance.  En  1290,  il  est  tuteur  des 
enfants  mineurs  de  Raymond  Gros,  changeur',  et  cette 
tutelle  devait  être  assez  importante,  si  l'on  songe  aux  gains 
que  pouvait  réaliser  un  changeur  dans  la  ville  de  commerce 
international  qu'était  encore  Montpellier  au  xiii®  siècle.  Les 
communautés  du  voisinage  ont  volontiers  recours  à  ses 
lumières  :  en  mars  1291,  il  est  arbitre  d'un  différend  entre 
Pons  Bermond,  seigneur  du  Cailar,  les  habitants  d'Aimargues 
et  ceux  de  Posquières,  qui  se  disputent  le  droit  de  dépais- 
sance  et  autres  «  explèches  »  dans  le  territoire  tUi  Cailar  2. 
D'ailleurs,  il  ne  paraît  pas  qu'il  soit  un  jurisconsulte  beso- 
gneux :  il  est  à  l'aise,  il  a  des  fonds  disponibles,  et  la  gestion 
des  intérêts  qui  lui  sont  confiés  ne  lui  fait  pas  négliger  le  soin 
de  sa  propre  fortune.  Cet  acte,  du  A  septembre  1290,  qui  nous 
apprend  qu'il  est  tuteur  des  enfants  Gros,  est  une  obligation 
que  lui  font  d'autres  mineurs,  les  fils  d'un  avocat,  Bernard 
Catalan  :  il  leur  a  prêté  50  livres,  pour  lesquelles  ils  lui  don- 
nent en  gage  la  maison  qu'ils  possèdent  près  de  l'église  Saint- 
Firmin.  Au  mois  de  juin  1291,  Guillaume  de  Nogaret  leur 
achète  cette  maison 3.  Vers  le  même  temps,  q^uand  il  allait  au 

1.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  n"  1. 

2.  Arch.  inun.  d'Aimargues,  DD,   1.  —  Posquières  est  le  nom  ancien 
de  Vauvert. 

3.  D'Aigrefeuille,  Histoire  de  la  ville  de  Montpellier,  partie  ecclésias- 


168  LODIS    THOMAS. 

Cailar  pour  servir  d'arbitre,  il  avait  traversé  la  plaine  du  bas 
Vidourle;  les  marais  qui  en  couvraient  encore  une  grande 
partie  sur  les  deux  rives  du  fleuve,  les  vastes  espaces  laissés 
en  friche  où  erraient  les  troupeaux  de  moutons  et  de  bœufs 
lui  donnaient  cet  aspect  d'une  terre  à  peine  abandonnée  par 
les  eaux  que  l'on  retrouve  aujourd'hui  dans  la  Camargue; 
mais  le  défrichement  et  la  mise  en  culture  de  ces  «  palus  » 
étaient  déjà  commencés  :  la  vigne  et  le  blé  prospéraient  dans 
ce  sol  d'alluvion  fertile.  Guillaume  de  Nogaret  sut  apprécier 
au  passage  tout  le  profit  qu'on  y  pouvait  faire,  et  il  s'empressa 
d'en  acquérir  une  partie. 

2.  —  Le  22  octobre  1291,  Rousselin  II  Gaucelm,  seigneur  de 
Lunel,  lui  donne  en  eraphytéose  perpétuelle  le  «  mas  »  de 
Tamarlet  ^  et  ses  dépendances  :  terres  incultes  et  en  exploita- 
tion, vignes,  prés,  bois,  pâturages,  palus,  cours  d'eau,  etc. 
Rousselin  se  réserve  le  domaine  éminent  et  la  juridiction 
haute  et  basse,  sauf  en  ce  qui  concerne  la  protection  des  ré- 
coltes sur  pied  (bannum)  et  les  dégâts  commis  par  les  trou- 
peaux (tala)  ;  pour  ces  deux  cas,  la  juridiction  appartiendra  à 
Guillaume  de  Nogaret  et  à  ses  successeurs,  qui  seuls  pourront 
lever  les  amendes  et  nommer  les  gardiens  des  récoltes  ou 
«  banniers  ».  Et  ce  droit  est  accordé,  non  seulement  pour  les 
possessions  directes  du  mas  de  Tamarlet,  mais  encore  pour 
tout  le  territoire  dépendant  de  la  juridiction  de  Tamarlet,  qui 


tique,  p.  855,  d'après  les  archives  du  château  de  Marsillargues  (acte  non 
retrouvé). 

1.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n»  1, 
parchemin,  copie  authentique  du  commencement  du  xvi"  siècle.  —  Arch. 
mun.  de  Marsillargues,  autre  copie  de  la  même  époque.  Sa  cote,  «  Ta- 
marlet, t.  I,  n»  8  »,  conforme  à  l'inventaire  Riben  de  1784,  indique 
qu'elle  provient  du  château.  —  «  Jlansum  de  Tamarleto.  »  Il  est  situé 
dans  la  commune  de  Marsillargues,  à  5  kilomètres  environ  au  sud  de  la 
ville  ;  au  milieu  d'une  vaste  palus  bordant  le  Vidourle,  aujourd'hui  pres- 
que entièrement  transformée  en  vignoble  irrigable,  alors  parsemée  de 
bouquets  d'arbres  qu'on  appelait  «  le  bois  de  Tamarlet  »,  un  tertre  de  sol 
plus  ferme  et  plus  haut  d'un  mètre  environ  formait  une  sorte  d'îlot  sur 
lequel  était  bâti  le  «  mas  ».  Il  a  été  abandonné,  au  xviii=  siècle,  pour  un 
autre  plus  grand  et  plus  rapproché  du  Vidourle;  son  emplacement  est 
encore  appela  «  le  Castelas  ». 


LA    VIE  PRIVÉE   DE  GUILLAUME  DE  NOGARET.  169 

a  pour  limites  :  au  raidi,  les  possessions  des  coseigaeurs  des 
Ports;  à  l'est,  celles  de  l'abbaye  de  Psalmody  ;  à  l'ouest  et  au 
nord,  la  juridiction  de  Saint-Julien'.  Les  autres  eraphytéotes 
de  ce  territoire  tiendront  désormais  leurs  possessions  de  Guil- 
laume de  Nogaret,  qjii  percevra  le  droit  de  lods  en  cas  d'alié- 
nation. Lui-même  pourra  vendre,  donner  à  cens  ou  à  rente 
perpétuelle  ou  non  tout  ou  partie  de  ce  qui  lui  est  concédé, 
sauf  en  faveur  des  églises,  des  clercs  et  des  nobles.  Il  devra 
servir  au  seigneur  de  Lunel  une  rente  annuelle  de  250  livres 
tournois,  payable  le  jour  de  Pâques,  à  partir  de  1293,  «  de  la 
prochaine  fête  de  Pâques  en  un  an  »,  dit  le  contrat.  Si  les 
terres  concédées  ne  valent  pas,  après  estimation,  ces  250  li- 
vres de  revenu,  Rousselin  y  suppléera  par  les  revenus  de  son 
château  de  Galargues  ;  si,  au  contraire,  par  la  mise  en  cul- 
ture des  palus,  Guillaume  de  Nogaret  augmente  la  valeur  de 
sa  tenure,  il  devra  payer  un  supplément  de  pension  :  tous  les 
cinq  ans,  des  arbitres  estimeront  cette  plus-value  et  fixeront, 
s'il  y  a  lieu,  le  montant  de  ce  supplément. 

Cette  simple  tenure  emphytéotique,  bien  modeste  si  on  la 
compare  à  l'étendue  des  terres  que  Nogaret  obtint  plus  tard 
des  libéralités  royales,  constitue  déjà  un  établissement  de 
quelque  importance.  On  n'en  peut  fixer  exactement  l'éten- 
due; on  la  peut  assurer  fort  vaste,  en  remarquant  que  Rous- 
selin, pour  une  terre  où  les  palus  dominaient,  exige  une  rente 
assez  élevée,  — juste  la  moitié  de  celle  que  Philippe  le  Bel, 
deux  ans  plus  tard,  attribua,  pour  la  cession  de  Montpelliéret 
et  de  la  suzeraineté  de  Montpellier,  à  i'évêque  de  Mague- 
lonne.  En  outre,  la  juridiction  du  ban  et  cette  sorte  de  suze- 
raineté accordée  au  possesseur  de  Tamarlet  sur  les  autres 
tenanciers  étaient  des  privilèges  honorifiques  appréciables. 
Guillaume  de  Nogaret  ne  veut  pas  s'en  contenter  :  il  veut 
substituer  le  plus  possible  sa  propre  domination  à  celle  du 


1.  Les  Ports,  territoire  marécageux,  entre  l'étang  de  Mauguio  et  le  ter- 
ritoire d'Aiguesmortes ,  sur  les  deux  rives  du  Vidourle.  —  Psalmody, 
abbaye  bénédictine  située  au  nord  d'Aiguesmortes;  elle  disparut  au  début 
du  xvi"  siècle.  —  Saint-Julien,  écart  de  la  commune  de  Marsiliargues, 
était  un  prieui'é  dépendant  de  Psalmody. 


170  LOUIS   THOMAS. 

seigneur  de  Limel  sur  la  terre  qu'il  vient  d'acquérir.  S'il  ne  le 
peut  avec  ses  propres  ressources,  la  tutelle  dont  il  a  la  ges- 
tion lui  en  fournira  les  moyens. 

Il  n'est  pas  très  siir  que  Guillaume  de  Nogaret  ait  acquitté 
à  Rousselin  de  Lunel  même  le  premier, terme  de  la  pension 
annuelle  qu'il  lui  devait  pour  Tamarlet,  terme  dont  l'échéance 
tombait  le  jour  de  Pâques,  29  mars  1293;  ou  du  moins,  ce  fut 
la  seule  annuité  qu'il  lui  servit;  car,  à  cette  date,  il  avait 
acheté  ou  il  était  sur  le  point  d'acheter,  pour  le  compte  de 
Jean  et  Raymond  Gros,  ses  pupilles,  le  domaine  éminent  de 
Tamarlet  et  le  droit  de  percevoir  cette  rente'.  Le  seigneur  de 
Lunel  ne  conservait  que  la  suzeraineté,  pour  laquelle  Jean  et 
Raymond  Gros  devaient  lui  payer  annuellement  une  obole 
d'or  2.  Restait  à  obtenir,  pour  ce  transfert,  la  sanction  royale, 
puisque  le  seigneur  de  Lunel  était  vassal  du  roi  de  France,  et 
que  son  fief  se  trouvait  abrégé  par  la  cession  de  Tamarlet  à 
des  acquéreurs  qui  n'étaient  pas  nobles.  Par  lettres  patentes 
données,  au  mois  d'avril  1293,  à  l'abbaye  de  Sainte-Marie, 
près  de  Melun,  Philippe  le  Bel  confirme  l'acquisition  de 
Tamarlet  par  Guillaume  de  Nogaret  ^  D'autres  lettres,  datées 
de  même,  sanctionnent  le  transfert  des  droits  du  seigneur  de 
Lunel  aux  enfantsGros,  ceux-ci  ayant,  par  le  ministère  de 
leur  tuteur,  payé  le  lods  aux  gens  du  roi^. 

S'il  n'était  pas  encore  l'unique  maître  de  Tamarlet,  du 
moins  Guillaume  de  Nogaret  en  avait-il  désormais  l'entière 
administration.  Et  il  lui  était  certainement  plus  agréable  de 
se  payer  à  soi-même,  comme  représentant  de  ses  pupilles,  la 
rente  de  250  livres  tournois,  que  de  la  servir  au  seigneur  de 

1.  Confirmation  royale  d'avril  1293.  —  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues, 
t.  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n»  2. 

2.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n»  3, 
accord  passé  entre  Guillaume  de  Nogaret  et  Jean  Gros,  le  31  octo- 
bre 1302. 

3.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n"  9, 
papier,  copie  de  1650,  par  le  garde  des  archives  de  la  sénéchaussée, 
d'après  un  vidimus  du  sénéchal  du  7  janvier  131.5. 

4.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  liasse  de  Tamarlet,  n"  2,  parche- 
min original  :  «  Licet  ex  hiis  diminuta  sit  baronia  predicta...  quauquam 
ipsi  forsitan  de  nobilium  génère  non  existant...  » 


LA   VIE  PRIVÉE  DE   GUILLAUME  DE   NOGARET.  171 

Lunel.  Il  conserve  d'ailleurs  avec  celui-ci  des  relations  cor- 
diales; et  quand,  le  21  décembre  1294,  Rousselia  Gaucelm 
fait  son  testament,  il  choisit  Guillaume  de  Nogaret  comme 
l'un  de  ses  exécuteurs  testamentaires  ^ 

3.  —  Guillaume  de  Nogaret  était  alors  juge  mage  de  la 
sénéchaussée  de  Beaucaire^.  —  Au  mois  de  mars  1293,  les 
officiers  royaux  de  la  sénéchaussée,  profitant  des  démêlés  de 
l'évêque  de  Maguelonne  avec  les  consuls  de  Montpellier, 
avaient  obtenu  qu'il  cédât  au  roi  de  France  sa  part  de  la 
ville  —  Montpelliéret  —  et  la  suzeraineté  qu'il  avait  sur  toute 
la  seigneurie  de  Montpellier,  contre  une  rente  de  500  livres 
tournois,  qui  serait  assise  en  sa  faveur  sur  les  terres  du 
domaine  royaP.  Guillaume  de  Nogaret  s'employa  à  ce  trans- 
fert de  souveraineté  avec  toute  l'ardeur  qu'un  professeur  de 
droit,  nourri  du  Code  Justinien,  ne  pouvait  manquer  d'ap- 
porter à  une  afî'airo  qui  favorisait  l'extension  de  la  puissance 
royale.  Il  reçut  aussitôt  sa  récompense,  dans  ces  lettres 
royaux  du  mois  d'avril  qui  confirmaient  son  établissement  et 
celui  de  ses  pupilles  à  Tamarlet.  Pendant  toute  l'année  1293, 
il  fut  l'un  des  meilleurs  auxiliaires  du  sénéchal  et  du  recteur 
royal  de  Montpellier  dans  la  recherche  —  assez  délicate  —  de 
la  compensation  territoriale  qui  serait  offerte  à  l'évêque  de 
Maguelonne;  il  prit  part  aux  estimations  qui  furent  faites  à 
ce  propos  dans  la  baronnie  de  Sauve  et  ailleurs^.  Cela  lui 
valut  de  passer  définitivement  au  service  du  roi.  En  1294,  il 
fut  fait  juge  mage  de  la  sénéchaussée;  en  1295,  tout  en  gar- 
dant ce  titre,  il  rejoignit  le  roi  en  France  et  entra  au  Parle- 
ment^. 


1.  Rouët,  Notice  sur  la  ville  de  Lunel  au  moyen  âge,  p.  414. 

2.  Ménard,  Hist.  de  Nimes,  t.  I,  Preuves,  p.  123,  coL  2.  Nogaret  est, 
en  qualité  de  juge  mage,  témoin  d'un  acte  daté  de  la  "Saint-Martiu  d'été 
de  1294. 

3.  A.  Germain,  Histoire  de  la  commu?ie  de  Montpellier,  t.  II,  p.  114. 

4.  Arch.  nat.,  J  339,  n°  13. 

5.  Le  P.  Anselme  (Hist.  des  grands  officiers,  etc.,  t.  VI,  p.  299)  dit 
que  Guillaume  de  Nogaret  suivit  le  roi  on  Normandie  comme  juge  mage 
de  la  sénéchaussée  de  Beaucaire,  en  1295;  le  roi  le  fit  ensuite  entrer  au 


172  LOUIS   THOMAS. 

Sur  ces  entrefaites,  Rousselin  Gaucelm,  seigneur  de  Lunel, 
était  mort  sans  postérité,  et  deux  prétendants  se  disputaient 
son  héritage  :  Raymond  Gaucelm,  seigneur  d'Uzès,  désigné 
par  le  testament  de  Rousselin,  et  Guiraud  d'Ami,  seigneur  de 
Castelnau,  que  substituait,  en  cas  de  déshérence,  le  testament 
du  grand-père  de  Rousselin.  Le  roi  fit  saisir  la  baronnie  de 
Lunel  \  et  l'on  amena  les  deux  compétiteurs  à  la  lui  céder 
contre  des  rentes  ou  d'autres  domaines  représentant  la  valeur 
de  ce  qu'ils  pouvaient  revendiquer.  L'affaire  fut  menée  par 
les  officiers  royaux  de  la  sénéchaussée.  Guillaume  de  Noga- 
ret,    exécuteur  testamentaire  de   Rousselin,  n'hésita  pas  à 
interpréter  ses  volontés  dernières  dans  le  sens  d'un  accroisse- 
ment de  la  puissance  royale.  En  contribuant  à  joindre  au 
domaine  une  ville  et  une  seigneurie  importantes,  il  servait 
son  intérêt  particulier  :  en  effet,  la  substitution  du  roi  au 
seigneur  de  Lunel  faisait  de  Tamarlet  un  fief  direct  de  la  cou- 
ronne. Cela  explique  pourquoi  l'estimation  des  revenus  que 
le  roi  pouvait  attendre  de  ses  nouveaux  domaines  de  Lunel, 
et  la  recherche  des  compensations  que  l'on  pouvait  offrir  à 
Géraud  d'Ami,  notamment  dans  la  seigneurie  de  Rochefort, 
furent  faites  à  sa  diligence  ^  et  se  retrouvèrent,  au  lendemain 
de  sa  mort,  parmi  ses  papiers  3. 

4.  —  Tandis  que  Guillaume  de  Nogaret  était  auprès  du  roi, 
l'administration  de  ses  biens  demeurait  à  sa  femme,  Béatrix, 
et  à  Guillaume  André,  qu'il  avait  choisi  comme  bayle  de 

Parlement.  —  Il  n'était  plus  en  Languedoc  au  mois  d'août  1295,  car  à 
cette  date  les  habitants  de  Lunel  ayant  une  question  de  mitoyenneté  à 
débattre  avec  lui  demandent  à  entrer  en  pourparlers  avec  sa  femme. 
(Arch.  mun.  de  Lunel,  série  K,  liasse  2,  n°  1816.) 

1.  Hist.  de  Lanrj.,  éd.  Privât,  t.  IX,  pp.  185-18(3. 

2.  Arch.  nat.,  J  302,  n»  2  :  «  Substancia  facti  de  Lunello  et  de  Ruppe- 
forte...  »;  f"  3  :  «  Hec  est  substancia  facti  de  Lunello  [et  de  Ru]pperorte 
qui  débet  iniri  in  forraam  domino  judici  maiori.  In  nomine  domini.  Anno 
domini  mocc"  nonagesimo  quinto  et  pridie  ydus  iulii...  »,  etc. 

3.  Bibl.  nat.,  ms.  Dupuy,  t.  635,  f»  101  v°  :  «  Littere  reperte  in  domo 
defuncti  domini  Guillelmi  de  Nogareto  specialiter  signate  et  distincte. 
Hec  sunt  reperte  pênes  defunctum  dominuni  Guillelmum  de  Noga- 
reto... »;  f»  103,  col.  2  :  «  ...  Substancia  facti  de  Lunello  et  de  Ruppe- 
forti.  Item...  »,  etc. 


LA  VIE  PRIVÉE  DE  GUILLAUME  DE  NOGARET.  173 

Tamarlet.  De  grands  travaux  d'arnélioratioa  étaient  entrepris 
sur  ce  domaine,  et  soulevaient  déjà  les  réclamations  des  voi- 
sins. Au  mois  d'août  1295,  les  iiabitants  de  Lunel  font  une 
très  vive  opposition  aux,  travaux  d'une  chaussée  sur  le 
Vidourle^  Le  bayle  répond  qu'il  est  prêt  à  interrompre  les 
travaux  s'il  est  prouvé  que  cette  chaussée  porte  vraiment 
préjudice  aux  habitants  de  Lunel.  Ce  préjudice  n'apparut  pas 
suffisamment  et  la  chaussée  fut  construite.  En  1313,  les  Lu- 
nellois  estimaient  10,000  livres  le  dommage  qu'elle  leur  au- 
rait causé;  empêchant  l'écoulement  rapide  des  crues  —  et 
l'on  sait  que  les  crues  du  Vidourle  sont  particulièrement 
violentes,  —  elle  aurait  amené  la  rupture  des  digues  et  l'inon- 
dation des  terres^.  En  1327,  ils  sollicitaient  et  obtenaient  du 
roi  Charles  IV  l'ordre  de  la  démolir^. 

Comme  les  habitants  de  Lunel  avaient  protesté  contre  la 
chaussée,  ceux  de  Marsillargues  protestent,  quelques  années 
plus  tard,  en  1299,  contre  le  défrichement  et  la  mise  en  cul- 
ture d'une  partie  de  Tamarlet  :  le  «  Sol  du  Vidourle  »,  c'est- 
à-dire  la  partie  du  lit  de  la  rivière  que  les  eaux  ne  recou- 
vrent qu'au  temps  des  grandes  crues.  Pour  eux,  il  est  vrai, 
il  s'agit  non  d'un  dommage  à  éviter,  mais  d'un  droit  à  con- 
server. Une  concession  du  seigneur  de  Lunel  en  1204,  renou- 
velée en  1266  et  précisée  par  Rousselin  Gaucelm  le  10  novem- 
bre 1286,  leur  a  donné''  le  droit  de  faire  paître  leur  bétail, 

1.  Arch.  mun.  de  Lunel,  série  K,  liasse  2,  n"  1816,  pareil,  original  : 
«  Anno  dominice  incarnacionis  m"  diicentesimo  nonagesimo  quinto  sci- 
licet  tertio  ydus  augusti  régnante  domino  Philippo  rege  Francorum, 
constituti  Petrus  Calcadelli,  Pontius  de  sancto  Marcio...  sindici  univer- 
sitatis  hominum  de  Lunello  seu  universitutis  tam  nobilium  quam  pro- 
borum  hominum  apud  Morteirs  in  ripa  fluminis  Viturli  ubi  dominus 
GuiUelmus  de  Nogareto  ut  dicitur  faciebat  fieri  quamdam  resclauzam 
rogaverunt  cum  magna  instancia  Guillelmum  Andrée  baiulum  seu  pro- 
curatorem  dicti  domini  Guillelmi  quatinus  faceret  cessari  ab  opère  dicte 
resclauze  donec  locuti  fuissent  cum  uxore  dicti  domini  Guillelmi  et  aliis 
suorum  araicorum  et  tractassent  cum  ipsa  et  ipsis  amicis  quod  ijjsa  res- 
clauza  non  fieret,  quod  possct  nocere  hominibus  terre  Lunelli...  » 

2.  Arch.  mun.  de  Lunel,  série  P,  liasse  1,  n"'  2110  bis  et  2114. 

3.  Arch.  de  l'Hérault,  Titres  de  Lcuiguedoc,  t.  X,  f"  33. 

4.  Arch.  mun.  de  Marsillargues,  t.  I,  n"  4,  parch.  original,  acte  du 
8  mai  1266  reproduisant  celui  de  1204;  —  t.  I,  n"  8  bis,  parch.  original 
du  10  novembre  1286. 


174  LOUIS  THOMAS. 

depuis  la  Saint-Michel  jusqu'au  carême,  dans  les  prés  de 
Tamarlet,  tant  qu'ils  ne  seront  pas  rais  en  culture,  et  nom- 
mément sur  le  Sol  du  Vidourle  —  alveum  Vilurli,  —  sur 
les  levées  et  sur  les  rives. 

Guillaume  de  Nogaret  s'occupe  lui-même  de  ce  différend. 
Dès  le  milieu  de  l'année  1299,  il  est  revenu  en  Languedoc  se 
montrer  à  ses  amis  avec  sa  nouvelle  qualité  de  «  chevalier  ». 
Quatre  ans  de  bons  services  auprès  du  roi  lui  ont  mérité 
l'anoblissement.  En  1298,  c'est  «  maître  Guillaume  de  No- 
garet »  qui  siège  au  Parlement*  et  au  Conseil  du  roi;  il  s'y 
occupe,  entre  autres  choses,  des  intérêts  de  Lunel,  qui  de- 
mande au  roi,  son  nouveau  seigneur,  quelques  avantages, 
comme  le  droit  de  prolonger  jusqu'à  la  ville  le  canal  —  ou 
roubine  —  qui  relie  son  territoire  à  l'étang  de  Mauguio^  El 
lorsque,  le  22  juin  1299,  à  Nimes,  le  sénéchal  Jean  d'Arreblay 
annonce  aux  syndics  de  Lunel  que  satisfaction  leur  est  accor- 
dée, c'est  «  discret  homme  monseigneur  Guillaume  de  Noga- 
ret, chevalier,  professeur  es  lois,  conseiller  de  notre  seigneur 
le  roi  »,  qui  est  venu,  pour  la  circonstance,  siéger  auprès  de 
lui^ 

Le  15  décembre  il  est  à  Marsillargues,  et  consent  à  donner, 
pour  la  mise  en  culture  du  Sol  du  Vidourle,  500  livres  d'in- 
demnité; il  accorde,  en  outre,  aux  habitants  le  droit  de  pas- 
sage sur  ce  territoire,  avec  la  faculté  d'y  faire  paître  leur 
bétail  de  labour  le  long  des  chemins;  et  tant  que  les  cinq 
termes  fixés  pour  le  paiement  ne  seront  pas  échus,  il  leur 
permet,  à  titre  gracieux,  de  conduire  leurs  troupeaux  dans 
tous  les  palus  de  Tamarlet  qui  ne  sont  pas  encore  mis  en 
culture*. 

D'ailleurs,  que  n'accorderait-il  pas,  en  ce  jour  où  sa  gran- 


1.  Olim,  éd.  Beugnot,  t.  II,  p.  428. 

2.  Les  pièces  de  l'enquête  ordonnée  à  ce  sujet  sont  aux  Archives  na- 
tionales, J  302,  Lunel,  6.  Elles  figuraient  parmi  les  documents  trouvés 
chez  Guillaume  de  Nogaret.  (Bibl.  nat.,  ms.  Dupuy,  t.  635,  f°  103,  col.  2, 
à  la  suite  de  l'enquête  de  1295  citée  plus  haut  :  «  Item  plura  sci'ipta 
tangentia  regem  et  homines  de  Luncllo.  ») 

3.  Th.  Millerot,  Histoire  de  Lunel,  pièce  justificative  n"  X,  p.  482. 

4.  Arch.  mun.  de  Marsillargues,  t.  II,  n"  22,  parch.  original. 


LA  VIE   PRIVEE   DE   GUILLAUME  DE  NOGARET.  175 

deur  nouvelle  se  manifeste  à  tous  les  yeux?  Ce  sont  les  offi- 
ciers royaux  de  la  sénéchaussée,  Raymond  de  Pojolan,  juge 
mage  et  lieutenant  du  sénéchal,  Pierre  de  Béziers,  procureur 
royal,  qui  ont  accepté  de  juger  ce  différend,  non  à  raison  de 
leurs  fonctions,  mais  comme  arbitres  amiables;  c'est  chez  le 
recteur  royal  de  Montpellier  que  l'acte  ratifiant  leur  choix  a 
été  passé;  et  s'ils  ont  choisi  ce  15  décembre  pour  venir  pro- 
clamer à  Marsillargues  les  libéralités  de  Guillaume  de  Nogaret 
à  l'égard  de  ses  voisins,  c'est  qu'ils  y  doivent  tenir  ce  jour-là 
une  assemblée  solennelle.  Sur  l'ordre  du  roi,  le  juge  mage 
y  a  convoqué  tous  les  propriétaires  riverains,  pour  délibérer 
avec  eux  sur  les  travaux  qu'exige  l'aménagement  du  lit  et 
des  digues  du  Vidourle^.  A  côté  des  syndics  des  communautés 
de  Lunel,  Marsillargues,  Le  Cailar,  Aimargues  et  Saint-Lau- 
rent il  y  a  là  les  seigneurs  des  Ports,  l'abbé  de  Psalmodi, 
Bermond  d  Uzès,  seigneur  d' Aimargues,  Pons  Bermond,  sei- 
gneur du  Cailar;  et  Guillaume  de  Nogaret,  convoqué  au 
même  titre  qu'eux  pour  son  mas  de  Tamarlet,  s'asseoit  à  côté 
d'eux,  —  à  côté  de  Pons  Bermond,  auquel  il  peut  ainsi 
montrer  tout  le  chemin  parcouru,  depuis  moins  de  huit 
ans,  par  le  professeur  de  Montpellier  qu'on  avait  fait  jadis 
venir  au  Cailar  comme  arbitre. 

Guillaume  de  Nogaret  eut  pour  sa  part  à  faire  élargir  le 
lit  du  Vidourle  à  travers  toute  sa  terre  jusqu'à  la  «  fosse 
courbe  »,  à  le  faire  redresser  de  la  «  fosse  courbe  »  à  la 
«  grande  fosse  provençale  ».  Après  avoir  pris  la  charge  de 
ces  travaux,  il  retourna  auprès  du  roi. 

5.  —  Il  ne  revint  en  Languedoc  qu'en  1302^,  pour  rendre 
compte  do  la  tutelle  dont  il  était  toujours  chargé,  et  qui  avait 
pris  fin  récemment,  Raymond  Gros  étant  mort  et  Jean  Gros 


1.  Arch.  iniin.  de  Marsillargues,  t.  I,  n"  13,  pareil.  origlnaL  —  Arch. 
raun.  d' Aimargues,  DD,  2,  copie  du  xviu"  siècle. 

2.  Après  le  mois  di  juillet,  oîi  il  esL  encore  occupé  à  rédiger  la  cou- 
tume de  Figeac.  (Noël  Valois,  Établissement  et  or(janisatio)i  du  régime 
municipal  à  Figeac,  BibL  de  l'Ecole  des  chartes,  1879,  pp.  897  et 
suiv.) 


176  LOUIS   THOMAS. 

ayant  atteint  sa  majorité*.  Guillaume  de  Nogaret  devait  tou- 
jours à  ce  dernier,  pour  Tamarlet,  la  rente  annuelle  de 
250  livres  tournois.  Mais  autre  chose  était  de  tenir  sa  terre 
de  son  pupille,  autre  chose  de  la  tenir  d'un  jeune  homme 
émancipé,  déjà  marié,  bientôt  sans  doute  chef  de  famille... 
Il  pensa  que  le  moment  était  venu  de  s'exonérer  complète- 
ment. Moyennant  3,000  livres  tournois,  il  acquiert  tous  les 
droits  que  Jean  Gros  pouvait  avoir  sur  Tamarlet.  Un  acte 
passé  le  31  octobre  1802  entre  Guillaume  de  Nogaret  et  Jean 
Gros^,  donne  à  Guillaume  quittance  d'un  premier  versement 
de  1,000  livres;  pour  les  2,000  livres  restant  à  payer,  il  fera 
à  Jean  Gros  une  rente  annuelle  de  100  livres  qu'il  devra 
assigner,  avant  cinq  ans,  sur  des  biens  situés  à  Montpellier 
ou  aux  environs,  sinon  le  payement  des  2,000  livres  s'impo- 
sera nécessairement.  Comme  garantie  de  ce  payement  ou  de 
cette  rente,  Guillaume  de  Nogaret  engage  sa  maison  de  Mont- 
pellier, située  devant  l'église  Saint-Firmin,  et  le  «  mas  des 
Cannes  »  qu'il  possède  dans  le  territoire  de  Mauguio  avec  ses 
dépendances  :  maisons,  terres,  vignes,  prés,  etc.  Jean  Gros 
en  percevra  les  revenus  jusqu'à  concurrence  de  la  rente 
de  100  livres,  et  il  en  demeurera  propriétaire  si,  au  bout 
des  cinq  années,  Guillaume  n'a  pas  assis  la  rente  comme 
il  est  convenu,  ni  payé  les  2,000  livres  3.  L'acte  fut  passé  à 
Montpellier,  devant  les  notaires  Jean  de  Saint-Thibéry  et 
Bertrand  Boquier,  en  présence  de  plusieurs  Montpelliérains 
considérables  :  Pierre  de  Tournemire,  docteur  es  lois  ;  Jean 
Marc,  aussi  docteur  es  lois  et  juge  do  la  cour  du  roi  de  Ma- 
jorque. Le  7  novembre,  Bertrand  Boquier  reçut  la  confirma- 
tion de  cet  accord  faite  par  Béatrix,  femme  de  Guillaume  de 

1.  Arcli.  du  cliàt.  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n»  9, 
confirmation  par  le  roi  de  l'accord  ci-après. 

2.  Arcli.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n'S, 
parch.  original. 

3.  Le  contrat  a  été  exécuté,  puisqu'en  1309  Guillaume  de  Nogaret 
conservait  toujours  la  maison  de  Montpellier  et  le  mas  des  Cannes.  Cette 
année-là,  il  offre  aux  chevaliers  de  Saint-Jean  d'échanger  leur  comman- 
derie  de  Livières  contre  sa  maison  de  Montpellier  ou  contre  »  un  mas 
situé  entre  Lunel  et  Mauguio  ».  (Arch.  du  chat,  de  Marsillai'gues, 
t.  XXIII,  n»  3,  et  plus  bas.) 


LA   VIE  PRIVÉE  DE  GUILLAUME  DE  NOGARET.  177 

Nogaret,  et  par  Albaha,  femme  de  Jean  Gros,  qui  renoucent, 
sur  les  droits  cédés  et  les  domaines  engagés,  à  toute  hypo- 
thèque ou  privilège  dotaP. 

Sous  la  suzeraineté  du  roi,  auquel  il  devait  payer  la  rente 
annuelle  d'une  obole  d'or  ou  5  sons  tournois,  Guillaume  de 
Nogaret  était  désormais  seigneur  de  Tamarlet. 

Les  habitants  de  Lunel  profitèrent  de  la  présence  de  Guil- 
laume de  Nogaret  en  Languedoc  pour  lui  demander  le  règle- 
ment de  quelques  conflits.  Malgré  leurs  réclamations  de  1295, 
la  chaussée  du  Vidourle  n'a  pas  été  démolie;  et  depuis,  les 
gens  de  Guillaume  du  Nogaret  ont  fait  dans  les  palus  des 
améliorations,  des  défrichements,  des  accensements-,  suscep- 
tibles de  mettre  en  péril  leurs  droits  de  dépaissance  :  ne  pour- 
raient-ils pas,  comme  leurs  voisins  de  Marsillargues  en  1299, 
obtenir  du  nouveau  seigneur  de  Tamarlet  quelque  honnête 
indemnité?  Les  concessions  de  leurs  anciens  seigneurs  leur 
donnaient  droit  de  dépaissance,  dans  Tamarlet,  à  l'Alber- 
guière,  à  l'Arcoa,  au  Prade-mage,  trois  palus  souvent  nom- 
mées dans  les  actes,  mais  fort  mal  délimitées;  ils  prétendent 
en  exclure,  non  seulement  le  bétail  des  communautés  voi- 
sines, mais  aussi  celui  du  seigneur  de  Tamarlet;  ils  n'en  veu- 
lent pas  autoriser  le  défrichement  :  ce  sont,  disent-ils,  pâtu- 
rages publics  des  gens  de  Lunel.  Prudemment,  ils  mettent  les 
abus  dont  ils  se  plaignent  au  compte  des  officiers  de  Guil- 
laume de  Nogaret.  Mais  cela  ne  leur  réussira  guère.  Les  arbi- 
tres choisis  sont  des  légistes,  des  amis  de  Guillaume  de  Noga- 
ret :  Pons  d'Aumelas,  docteur  es  lois;  Raymond  de  Mujolan, 
docteur  es  lois,  et  comme  tiers-arbitre,  Guillaume  de  Plasian, 
chevalier  et  docteur  es  lois. 

Tandis  qu'ils  font  leur  enquête,  lui  repart  pour  la  France; 
au  passage,  il  voit  le  sénéchal  de  Périgord,  alors  régent  de 

1.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n°  4, 
pareil,  original  :  autre  expédition  de  l'accord  du  31  octobre  1302,  suivie 
de  la  confirmation  du  7  novembre. 

2.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XV.  Inventaire  de  1784,  titres 
de  Tamarlet,  article  14  :  «  Bail  à  cens  de  :)1  carterées  de  terre  à  Tamarlet 
par  Guillaume  de  Nogaret  à  Arnaud  de  Bonorni,  marchand  de  Mont- 
pellier, 13U0.  » 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVI.  12 


178  LOUIS   THOMAS. 

la  sénéchaussée  de  Beaucaire,  et  obtient  de  lui  deux  lettres 
que  son  procureur  Guillaume  de  Planhols  présente,  le  7  jan- 
vier 1303,  aux  officiers  royaux  de  Lunel  :  elles  leur  signi- 
fiaient que  la  connaissance  de  tous  les  différends  qui  pour- 
raient surgir  entre  Guillaume  de  Nogaret  et  les  habitants  de 
Lunel  leur  était  ôtée  comme  suspects  et  récusables,  et  qu'elle 
était  donnée  aux  officiers  royaux  d'Aigues-Mortes*.  Au  mois 
de  mars,  dans  le  couvent  des  frères  prêcheurs  du  Puy-en- 
Velay,  la  sentence  arbitrale  était  rendue;  elle  n'était  pas 
favorable  aux  habitants  de  Lunel  :  les  pâturages  contestés 
sont  la  propriété  de  Guillaume  de  Nogaret;  seul  il  a  le  droit 
de  ban;  les  gens  de  Lunel  ont  sur  ces  terres  servitude  réelle, 
non  personnelle,  et  ils  y  peuvent  conduire  leur  bétail,  mais 
seulement  tant  qu'elles  ne  seront  ni  mises  en  culture,  ni 
baillées  à  cens  ou  à  emphyléose^.  Les  syndics  de  Lunel  ne 
perdirent  pas  courage  et  firent  appel  au  sénéchal,  mais  sans 
grand  espoir  d'obtenir  un  résultat  meilleur. 

Cependant,  la  querelle  entre  le  pape  Boniface  VIII  et  Phi- 
lippe le  Bel  est  arrivée  au  point  le  plus  grave;  répondant  à  la 
publication  de  la  bulle  Unam  sanctam,  le  12  mars  1303, 
dans  l'assemblée  de  prélats  et  de  barons  convoquée  par  le  roi, 
Guillaume  de  Nogaret  prend  la  parole,  et  demande  la  convo- 
cation du  concile  général  devant  lequel  Boniface  devra  se 
laver  des  crimes  dont  on  l'accuse...  —  A  ce  moment  arrivent 
à  la  cour  du  roi,  par  voie  hiérarchique,  )e  transfert  de  la  sei- 
gneurie de  Tamarlet  de  Jean  Gros  à  Guillaume  de  Nogaret,  et 
la  reconnaisance  que  ce  dernier  en  fait,  au  profit  du  roi,  sous 
la  pension  annuelle  d'une  obole  d'or^.  Philippe  le  Bel  ratifie 
le  transfert,  accepte  la  reconnaissance*  et  y  ajoute^  une  pen- 


1.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XV;  inventaire  de  1784,  titres  de 
Tamarlet,  article  18. 

2.  Arch.  mun.  de  Lunel,  série  P.  liasse  1,  n°  2106,  parch.  original. 

3.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XV;  inventaire  de  1784,  titres 
de  Tamarlet,  article  19. 

4.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n"  9; 
copie  de  1650  par  le  garde  des  archives  de  la  sénéchaussée  des  lettres 
patentes  données  à  Paris  en  mars  1302,  vieux  style. 

Jj.  Ménard,  t.  I,  Preuves,  p.  146,  d'après  Arch.  du  chat,  de  Marsillar- 


LA    VIE   PRIVÉE   DE   GUILLAUME   DE   NOGARET.  17î> 

sion  annuelle  de  300  livres  que  Guillaume  de  Nogaret  perce- 
vra sur  le  trésor  royal  jusqu'à  l'assignation  en  terres  qui  sera 
faite  à  son  profit.  —  Le  13  juin,  Guillaume  de  Nogaret  était 
en  route  vers  Anagni. 

III. 

1. — Ainsi,  Philippe  le  Bel  payait  en  quelque  sorte  d'avance' 
le  service  qu'allait  lui  rendre  Nogaret  en  se  Taisant  à  sa  place 
l'accusateur  de  Boniface  VIII,  et  en  allant  en  Italie  se  saisir 
de  la  personne  du  pape.  Quand,  moins  d'un  an  après,  en  fé- 
vrier 1304,  Nogaret  rejoignit  le  roi  à  Béziers  pour  lui  rendre 
compte  de  sa  mission,  il  fut  de  nouveau  comblé  des  libéralités 
royales.  Le  11  février,  il  obtenait,  ainsi  que  Guillaume  de 
Plasian,  Bérard  de  Mercœur  et  Pierre  de  Belleperche,  plein 
pouvoir  de  mettre  en  liberté  les  prisonniers  2.  En  même 
temps,  et  pour  reconnaître  plus  spécialement  ses  services 
«dans  de  grandes  et  difficiles  négociations  »,  Philippe  le  Bel 
lui  accordait,  pour  lui,  ses  héritiers  et  ses  successeurs,  et 
sous  l'obligation  de  l'hommage-lige,  une  nouvelle  rente 
annuelle  de  500  livres  tournois  qui,  comme  celle  de  300  livres 
précédemment  accordée,  serait  prochainement  établie  sur  une 
base  territoriale  ^ 

L'usage  du  fief- argent  était  fort  répandu  déjà  au  xiii»  siècle. 
Il  ne  s'agit  ici  que  d'un  fief-argent  provisoire,  qui  doit  être 
incessamment  transformé  en  fief-seigneurie.  Mais  ce  fief-sei- 
gneurie sera  constitué  uniquement  en  vue  de  produire  à  son 
bénéficiaire  un  revenu  déterminé  ;  une  clause  de  l'acte  consti- 


gues,  t.  XXXVII,  n"  1  (copie).  —  Arch.  nat.,  JJ  38,  f°  55,  n»  114  :  autres 
lettres  données  aussi  à  Paris  en  mars  1302,  vieux  style. 

1.  Ménard,  t.  I,  Preuves,  p.  146  :  «  Nos  grata  considérantes  lidelitatis 
obsequia  que  dilectus  et  fidelis  Guillelmus  de  Nogareto  miles  noster  no- 
bis  impendit  diutius  et  imposterum  impensuruui  speratnus...  » 

2.  Notices  et  extraits  des  manuscrits,  t.  XX,  2°  partie,  pp.  152-154. 

3.  Ménard,  1. 1,  Preuves,  p.  149,  d'après  les  Arch.  du  chat,  de  Marsillar- 
gues,  t.  XXXVII,  n"  2  :  «  Considérantes  grata...  obsequia  que  dilectus  et 
fidelis  Guilhelmus  de  Nogareto  miles  noster  nobis  in  magnis  et  arduis 
nostris  et  regni  nostri  negociis  fideliter  et  utiliter  diutius  impendisse  dU 
noscitur,  ac  volentes  sibi  proptcr  ea  graciam  facere  specialem...  » 


180  LOUIS   THOMAS. 

tutif  prévoit  la  restitution  par  le  vassal  des  sommes  que  le 
fief  pourrait  lui  rapporter  au  delà  du  chiffre  concédé',  et  cette 
clause  permet  au  suzerain  toutes  les  recherches,  pour  s'assu- 
rer que  ce  chiffre  n'est  pas  dépassé  à  son  détriment^.  N'y 
a-t-il  pas  là  une  preuve  de  ce  fait  que  l'idée  de  souveraineté 
tend  à  se  séparer  de  l'idée  de  flef,  même  pour  le  fief  territo- 
rial, et  qu'à  cette  idée  de  souveraineté  se  substitue  progressi- 
vement l'idée  de  revenus  ou  de  profit?  —  La  constitution  d'un 
fief  de  ce  genre  en  faveur  de  Guillaume  de  Nogaret  n'est  pas 
un  fait  isolé,  à  la  même  époque;  et  en  se  bornant  à  la  seule 
sénéchaussée  de  Beaucaire,  on  peut  citer  maint  autre  exem- 
ple, montrant  tout  aussi  bien  qu'en  cette  matière  la  politi- 
que royale  consiste  à  donner  le  plus  possible  à  l'exercice 
des  droits  seigneuriaux  le  caractère  d'une  simple  perception 
des  revenus,  —  et  à  diminuer  ainsi  d'autant  l'importance 
politique  du  fief.  —  Lorsque  l'évêque  de  Maguelonne  consent 
à  céder  au  roi  Moutpelliéret  moyennant  500  livres  de  rente,  le 
roi  lui  cède  à  son  tour,  sur  son  domaine,  la  baronnie  de 
Sauve  et  quelques  autres  petits  fiefs,  dont  le  revenu  atteint 
500  livres  (et,  par  suite,  l'évêque  n'est  nullement  lésé  dans 
ses  intérêts  pécuniaires),  mais  qui  sont  loin  de  valoir  la  pos- 
session de  Moutpelliéret  et  la  suzeraineté  de  Montpellier.  — 
De  même,  en  1295,  lorsque  Philippe  le  Bel  acquiert  la  baron- 
nie de  Lunel,  il  donne  à  chacun  des  deux  héritiers  de  Rousse- 
lin  Gaucelm  des  terres  dont  les  revenus  sont  équivalents  à 
ceux  qu'ils  auraient  pu  retirer  de  leur  part  d'héritage  ;  mais 
ni  la  baronnie  de  Rochefort  qui  est  donnée  à  Géraud  d'Ami, 
ni  Vézenobres  qu'obtient  Raymond  Gaucelm  ^  n'ont  l'impor- 
tance politique  de  Lunel. 


1.  Voir  les  concessions  territoriales  en  faveur  de  Nogaret  dansMénard, 
t.  I,  Preuves,  pp.  160  et  161. 

2.  Charles  IV  le  Bel  prescrit  une  recherche  de  ce  genre  en  13'^2,  non 
seulement  pour  les  biens  concédés  à  Nogaret,  mais  aussi  pour  ceux  qui 
furent  donnés  à  Raymond  d'Uzès  en  échange  de  sa  part  de  la  baronnie  de 
Lunel.  (Ordonnances,  t.  I,  p.  122.  —  Ménard,  t.  II,  Preuves,  p.  31  et 
suiv.;  t.  VII,  p.  689,  et  Preuves,  pp.  722-733.) 

3.  Hist.  de  Languedoc,  éd.  Privât,  t.  IX,  p.  186.  —  Ménard,  t.  VII, 
Preuves,  p.  722. 


LA   VIE   PRIVÉE   DE   GUILLAUME   DE   NOGARET.  181 

Si  dans  ces  deux  cas  l'abandon  de  parties  du  domaiae  royal 
assez  considérables,  au  moins  par  leur  étendue,  peut  s'expliquer 
par  les  avantages  que  le  roi  trouve  à  l'occupation  de  Lunel  et 
de  Montpelliéret,  on  s'explique  moins  bien,  semble-t-il,  un 
démembrement,  un  amoindrissement  du  domaine,  l'abandon 
par  le  roi  d'une  partie  de  sa  suzeraineté  sur  des  terres  qui  lui 
appartiennent,  en  faveur  de  Guillaume  de  Nogaret  en  1304  et 
1306,  et  en  1308  en  faveur  de  Guillaume  de  Plasian*.  Mais 
pour  les  deux  légistes  comme  pour  les  héritiers  du  seigneur 
de  Lunel  ou  pour  l'évêque  de  Magueloane,  il  s'agit  moins  de 
la  constitution  d'une  souveraineté  territoriale  que  d'un  trans- 
fert de  rentes  ;  ce  sont  moins  des  droits  seigneuriaux  qu'on  leur 
reconnaît  que  des  sources  de  revenus  qu'on  leur  concède,  — 
différemment  tarifées  selon  leur  nature,  et  d'après  l'usage 
courant  en  la  matière  ^  Les  rentes  que  les  deux  Guillaume 
auraient  prises  sur  le  trésor  royal,  ils  les  perçoivent  aux 
sources  mêmes  où  ce  trésor  s'alimente  ;  et  les  devoirs  qu'ils 
seront  tenus  de  rendre  au  roi  du  chef  de  leur  fief  territorial 
sont  de  plus  grand  profit.  On  eut  soin,  d'ailleurs,  de  ne  leur 
attribuer  que  des  localités  d'importance  restreinte  \  Mais  la 
rente  à  asseoir  pour  Guillaume  de  Nogaret  était  relativement 

1.  Voir,  sur  l'assignation  du  château  de  Ferrairoles  près  d'Alais  pour 
200  livres  de  rente  à  Guillaume  de  Plasian,  Hist.  de  Languedoc,  éd.  Pri- 
vât, t.  X,  Preuves,  col.  466. 

2.  Lettres  de  Philippe  le  Bel  au  sénéchal  de  Beaucaire  lui  prescrivant 
d'asseoir  les  300  livres  de  rente  en  faveur  de  Guillaume  de  Nogaret  : 
«  Mandamus  vobis  quatinus  vos  diligenter  informetis  et  nobis  celeriter 
rescribatis  quantum  juxta  communem  extimationem  prout  in  talibus  in 
senescallia  vestra  moris  est  fieri  in  annuo  et  perpetuo  redditu  res  ipse 
modo  quo  dictum  est  assignare  valere  et  estimari  debeant...  »  (Ménard, 
t.  I,  Preuves,  p.  160.)  —  En  1363,  Jean  II  ayant  accordé  à  Henri  de 
Transtamare  10,000  livres  de  rente  à  asseoir  en  terres  dans  le  Bas-Lan- 
guedoc, Arnould  d'Audrehem  est  chargé  de  cette  assignation  :  «  Fayta 
assieta  segon  la  valor  de  las  causas  sobre  dictas,  en  la  forma  et  maniera 
que  en  las  dictas  partidas  de  la  Lengua  doc  es  acostumat  a  far.  »  (Acte 
publié  dans  le  Bulletin  de  la  Société  archéologique  de  Béziers,  t.  IV, 
p.  119.) 

3.  Les  assignations  faites  pour  Guillaume  de  Nogaret  en  1304  ne  par- 
faisant pas  800  livres  de  revenu,  les  commissaires  ne  savent  sur  quelles 
terres  achever  l'assignation  ;  celles  qui  seraient  favorables  «  sont  des  loca- 
lités trop  importantes  et  trop  nécessaires  au  roi  ».  (Ménard,  t.  II,  Preu- 
ves, p.  53.) 


182  LOUIS   THOMAS. 

élevée;  il  fallut  nécessairement  donner  en  étendue  ce  qu'on 
ne  voulait  pas  accorder  en  importance.  De  Niraes  à  la  mer  et 
de  Sommières  jusqu'au  Rhône,  sur  plus  de  50  kilomètres 
d'est  en  ouest  et  sur  près  de  30  du  nord  au  sud,  Guillaume  de 
Nogaret  eut  des  établissements.  S'étendant  sur  d'aussi  vastes 
espaces,  et  l'active  impulsion  donnée  par  son  bénéficiaire  y 
aidant,  la  seigneurie  de  Guillaume  de  Nogaret  parut,  parmi 
celles  du  Bas-Languedoc,  à  une  place  bien  voisine  de  la  pre- 
mière, —  et  que  Philippe  le  Bel  n'avait  sans  doute  pas  songé 
à  lui  donner. 

2.  —  C'est  dans  la  baronnie  de  Lunel  que  Guillaume  de 
Nogaret  reçoit  d'abord  des  terres;  c'est  tout  naturel,  puisqu'il 
y  possède  déjà  Tamarlet.  Des  lettres  de  juillet  1304  lui  attri- 
buent, pour  300  livres  de  rente,  Marsil largues  et  son  terri- 
toire, avec  la  juridiction  haute  et  basse,  et  tous  les  revenus 
que  le  roi  pouvaity  revendiquer;  —  la  juridiction  censuelle  et 
les  possessions  royales  de  Saint-Julien,  —  et  la  part  qui  reve- 
nait au  roi  dans  la  juridiction  inférieure,  les  prés,  pâturages, 
étangs  et  pêcheries  de  la  terre  des  Ports  ^  Les  accroissements 
de  valeur  que  ces  possessions  pourront  acquérir  par  la  suite 
demeureront  la  propriété  du  donataire;  mais  les  lettres  du 
8  juillet  qui  prescrivent  au  sénéchal  de  faire  procéder  à  l'esti- 
mation prévoient  le  cas  où  le  revenu  actuel  des  terres  concé- 
dées dépasserait  300  livres;  en  ce  cas,  Nogaret  sera  tenu  à  res- 
titution-. Le  27  juillet,  par  des  lettres  datées  d'Arras  et  adres- 
sées au  sénéchal  de  Beaucaire  ^,  le  roi  donne  à  Guillaume  de 


1.  Ménard,  t.  I,  Preuves,  p.  150,  d'après  les  Arch.  du  chat,  de  Marsil- 
largues  ;  acte  non  retrouvé. 

2.  Ménard,  t.  I,  Preuves,  p.  160,  d'après  les  Arch.  du  château  de  Mar- 
sillargues.  —  Arch.  nat.,  JJ  45,  f"  10.  —  Il  y  eut  confusion  et  incertitude  à 
propos  de  ces  deux  clauses,  pourtant  très  claires.  Aussi  les  améliorations 
et  les  accroissements  du  domaine  de  Guillaume  de  Nogaret  furent-ils, 
après  sa  mort,  taxés  d'usurpation  du  domaine  royal  par  ses  voisins  de 
Lunel  et  de  Nimes.  Cela  explique  la  recherche  prescrite  par  Charles  IV 
en  1322  :  «  Si  que  ultra  ea  [que  tempore  carissimi  genitoris  nostri  de 
nostris  domaniis  habuerunt]  forsitan  de  domaniis  ipsis  tenuerint.  » 
(Ménard,  t.  VII,  Preuves,  p.  735.) 

3.  Ménard,  t.  I,  Preuves,  pp.  160-161,  d'après  les  Arch.  du  chat,  de 


LA    VIE   PRIVÉE   DE   GUILLAUME   DE  NOGARET.  183 

Nogaret,  pour  500  livres  de  rente,  Calvisson  avec  sa  viguerie 
et  son  territoire,  c'est-à-dire  la  Vaunage,  avec  tout  ce  qui  peut 
y  appartenir  au  roi,  sous  condition  de  l'horamage-lige,  et  avec 
la  réserve  que  Nogaret  devra  restituer  ce  qui,  de  la  valeur 
de  celte  assignation,  dépasserait  500  livres  de  revenu  ;  mais 
le  roi  s'engage  à  compléter,  si  c'est  nécessaire,  ce  revenu  par 
un  supplément  d'assignation;  le  sénéchal  reçoit  l'ordre  de 
faire  estimer  aussitôt  les  terres  concédées. 

Le  24  novembre,  Gérard  de  Chilet,  chevalier,  docteur  es 
lois  et  lieutenant  du  sénéchal  Bertrand  Jourdain  de  l'Isle, 
alors  «  absent  en  France  »,  confie  à  Pierre  Jean,  avocat  du 
roi,  à  Hugues  de  la  Porte,  procureur  du  roi ,  et  à  Yves 
Gérard,  recteur  royal  de  Montpellier,  l'estimation  de  Calvis- 
son et  de  la  Vaunage;  le  '^9  novembre,  il  les  commet  aussi 
pour  l'enquête  sur  Marsillargues  et  Saint-Julien i.  Leur  pro- 
cédure, est  datée  du  30  novembre.  —  A  Marsillargues  et  à 
Lunel,  avec  le  concours  de  prud'hommes,  parmi  lesquels  un 
ancien  bayle  royal  de  Marsillargues,  le  lieutenant  du  viguier 
royal  de  Lunel  et  le  bayle  de  Sauve,  ils  estiment  les  droits  du 
roi  sur  Marsillargues,  Saint-Julien  et  la  terre  des  Ports  : 
haute  et  basse  justice  de  Marsillargues,  moulins  —  évalués  à 
50  livres  de  revenu  —  cens  en  deniers  et  en  nature,  «  tas- 
ques  »  ou  champart  sur  certaines  terres,  etc.,  à  274  livres 
environ.  Pour  les  26  livres  restantes,  ils  proposent  l'entière 
juridiction  des  Ports,  bien  que  cette  terre  soit  inhabitée  et  sa 
juridiction  improductive,  pour  10  livres,  la  suzeraineté  sur 
les  coseigneurs  des  Ports  pour  G  livres;  et  pour  les  10  livres 
restantes,  l'entière  juridiction  de  Tamarlet  et  l'obole  d'or  due 
au  roi;  ce  revenu  est  d'ailleurs  fictif,  puisqu'à  Tamarlet,  où 
n'habitent  que  le  seigneur  et  sa  familîa,  l'occasion  d'exer- 
cer cette  juridiction  haute  ou  basse  ne  s'est  jamais  présentée. 

Marsillargues.  —  Le  texte  des  Arch.  nat.,  JJ  45,  f"  10  v°,  permet  de 
corriger  celui  de  ]\Iénard,  souvent  peu  correct. 

1.  Pour  Calvisson  :  Ménard,  t.  II,  Preuves,  p.  48  et  suiv.,  d'après  les 
Arch.  du  cliàt.  de  Marsillargues  (acte  non  retrouvé).  —  Pour  Marsillar- 
gues :  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXXVII,  n"  3,  papier,  copie  du 
xviv  siècle  sur  les  registres  de  la  Chambre  des  comptes  de  Montpellier, 
acte  qui  a  échappé  à  Ménard. 


184  LOUIS  THOMAS. 

Les  commissaires  terminent  par  cette  remarque  :  «  Il  faut 
savoir  que  les  estimations  de  céréales  ci-dessus  transcrites 
ont  été  faites  par  les  prud'hommes  susnommés  qui  ont  prêté 
serment  et  méritent  toute  confiance,  et  qui  assurent  que  le 
setier  de  froment  vaut,  en  rente  perpétuelle,  4  sous  de  bonne 
monnaie;  le  setier  de  «  consegail  »,  3  sous  de  bonne  mon- 
naie; le  setier  d'orge,  2  sous  de  bonne  monnaie  et  le  setier 
d'avoine,  18  deniers  de  cette  dite  bonne  monnaie.  Ces  céréales 
valent  le  double  en  monnaie  nouvelle ^  »  La  monnaie  royale 
perdait  donc  50  "/o  à  la  fin  de  1304.  Heureusement  pour 
Nogaret,  l'estimation  en  sa  faveur  était  faite  en  «  bonne  mon- 
naie ». 

A  Calvisson,  on  procède  comme  à  Marsillargues.  Les  offi- 
ciers qui  exerçaient  au  nom  du  roi  dans  les  diverses  localités 
de  la  viguerie  sont  appelés  comme  estimateurs.  Malgré  les 
termes  de  la  lettre  du  27  juillet,  la  viguerie  entière  de  Calvis- 
son ne  fut  pas  assignée  à  Guillaume  de  Nogaret.  Il  obtint 
haute  et  basse  justice  à  Calvisson,  Langlade,  Aigues-Vives, 
Mus,  Codognan,  Vergèze,  Ardezan,  Saint-Dionisy  et  Marué- 
jols;  haute  justice  seulement  sur  Clarensac,Vestric,  Livières, 
Caveirac,  Congeniès,  Bernis,  Aubor,  Uchaud,  Boissière,  Géné- 
rac  et  Beauvoisin;  sur  Candiac  et  Saint-Côme,  la  suzeraineté 
seulement^.  Des  quatre  autres  localités  de  la  Vannage,  Milhaud 
demeure  à  l'évêque  de  Nimes  ;  Aubais,  Nages  et  Solorgues 
avaient  été  vendus  à  Guiraud  de  Languissel  en  1285  par  le 
châtelain  de  Nimes,  et  appartenaient  à  son  fils  Bernard 
de  Languissel'.  Cinq  tailleurs  jde  pierre  ou  maçons  —  la- 
piscide  sea  massoni  —  sont  spécialement  chargés  de  me- 

1.  «  Et  in  duplum  valent  dicta  blada  de  nova  moneta.  »  (Arch.  du 
chat,  de  Marsillargues,  t.  XXXVII,  n°  3.) 

2.  Ménard,  t.  II,  Preuves,  p.  49. 

3.  Ménard,  t.  VII,  p.  605.  —  Toutes  ces  localités  sont  dans  l'ar- 
rondissement de  Nimes  :  Calvisson,  Langlade,  Saint-Dionisy,  Livières 
(commune  de  Calvisson),  Congeniès,  Boissières,  Aubais,  Nages  et  Solor- 
gues (commune  de  Nages)  dans  le  canton  de  Sommières  ;  —  Clarensac, 
Caveirac,  Saint-Côme  et  Maruéjols(commune  de  Saint-Côme)  dans  le  can- 
ton de  Saint-Mamert  ;  —  Mus,  Codognan,  Vergèze,  Vestric,  Bernis,  Au- 
bor, Uchaud,  Beauvoisin  et  Candiac  dans  le  canton  de  Vauvert;  —  Géné- 
rac  dans  le  canton  de  Saint-Gilles  ;  —  Milhaud  dans  le  canton  de  Nimes. 


LA   VIE  PRIVÉE  DE  GUILLAUME  DE  NOGARET.  185 

siirer  et  d'estimer  la  maison  royale  de  Calvisson  et  les  deux 
tours  dont  elle  est  flanquée;  l'édifice,  estimé  1022  livres 
tournois,  est  assigné  à  Guillaume  de  Nogaret.  Mais  les  droits 
domaniaux  du  roi  dans  la  Vannage,  taille,  cens  en  denier  et 
en  nature,  tasques,  albergues,  etc.,  joints  aux  revenus  de  la 
juridiction,  sont  loin  de  parfaire  500  livres,  et  les  commissai- 
res sont  très  embarrassés;  ils  s'effraient  de  voir  le  fief  de 
Guillaume  de  Nogaret  s'étendre  déjà  sur  une  région  très 
vaste;  et  pour  les  263  livres  18  sous  9  deniers  et  1  obole  qui 
restent  à  assigner,  ils  ne  veulent  ni  doubler  l'étendue  de  ce 
fief,  ni  distraire  du  domaine  royal  des  parties  trop  importan- 
tes. Sauf  le  château  et  le  village  de  Fourques  '  qui  valent 
200  livres  de  rente,  et  que  le  roi  a  déjà  donnés  en  viager, 
ils  ne  voient  rien  qu'on  puisse  attribuer  à  Nogaret  sans  dom- 
mage. «  Car,  disent-ils,  Lunel  et  sa  viguerie,  Anduze  et  sa 
viguerie,  Alais  et  Soramières  et  leur  viguerie  sont  des  localités 
trop  importantes  et  trop  nécessaires  au  roi...  ^  » 

3.  —  Avant  même  que  les  officiers  royaux  aient  procédé  à 
l'estimation  prescrite,  Guillaume  de  Nogaret  s'était  empressé 
de  venir  prendre  possession  des  villes  et  des  territoires  qui  lui 
étaient  attribués.  Le  dimanche  22  novembre  1304,  il  est  à 
Marsillargues  et,  comme  don  de  joyeux  avènement,  il  rend 
aux  habitants  les  droits  de  dépaissance  qu'ils  avaient  aupara- 
vant dans  Tamarlet,  et  auxquels  ils  venaient  de  renoncer  dans 
l'espoir  d'obtenir  de  leur  nouveau  seigneur  une  concession 
plus  avantageuse  ou  plus  précise  ^.  Il  entoure  cette  conces- 
sion d'une  solennité  remarquable  :  c'est  un  dimanche,  dans 

1.  A  la  «  fourche  s  du  Ehône,  canton  de  Beaucaire. 

2.  Ménard,  t.  II,  Preuves,  p.  53. 

3.  Arch.  mun.  de  Marsillargues,  t.  I,  n»  17,  parchemin  original  en 
mauvais  état.  La  date  de  l'année  est  effacée,  mais  on  la  retrouve  dans  un 
vidimiis  du  9  juillet  1805  qui  était  aux  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues 
(t.  XV,  Inventaire  de  1784,  titres  de  ïamarlet,  I,  21,  article  23)  et  qui  se 
retrouve  aujourd'hui  aux  Arch.  mun.  de  Marsillargues,  t.  I  :  Tamarlet, 
t.  1,  n°  21.  —  «  Prout  alias  depascerant  in  eodem  terri torio  cum  sais  ani- 
malibus  antequam  sibi  domino  Guilhelmo  remisissent  dicti  homines  jus 
quodlibet  quod  habere  poterant  depascendi  animalia  sua  in  territorio 
predicto.  » 


186  LOUIS  THOMAS. 

l'église,  après  la  messe,  à  laquelle  le  crieur  public  a  spéciale- 
ment convoqué  le  peuple';  à  ses  côtés  sont  les  principaux  per- 
sonnages des  environs  :  noble  et  puissant  seigneur  Bermond 
d'Uzès,  seigneur  d'Aimargues,  chevalier;  Pons  Bermond,  sei- 
gneur de  Cailar,  damoiseau;  un  représentant  de  cette  école 
de  droit  où  il  enseigna,  Jean  de  Coliac,  professeur  es  lois;  le 
curé  Bertrand  Hermengaud,  prieur  de  Marsillargues;  d'au- 
tres encore  qui  figurent  comme  témoins  au  bas  de  l'acte...  Il 
est  bon  de  rappeler  qu'à  ce  moment  Guillaume  de  Nogaret 
était  excommunié,  que  tout  au  plus  il  avait  sollicité  de  l'offi- 
cialité  de  Paris  son  absolution  ad  cauielam,  et  qu'il  était 
en  tout  cas  fortement  soupçonné  d'avoir  hâté,  peut  être  par 
le  poison,  la  mort  du  pape  Benoît  XI. 

Mais  après  cette  satisfaction  donnée  à  son  légitime  désir 
d'apparaître  grand  et  généreux  aux  yeux  de  ses  nouveaux 
sujets,  il  étudie  minutieusement,  dans  le  détail,  cette  question 
des  droits  de  dépaissance  qui  déjà,  en  1299,  lui  avait  coiité 
500  livres  quand  il  mit  en  culture  le  Sol  du  Vidourle.  Dans  la 
solennelle  concession  du  22  novembre,  il  avait  remis  à  plus 
tard  les  détails  et  les  précisions;  il  les  donne  le  27  jan- 
vier 1305,  dans  la  cour  de  son  château  de  Calvisson,  mettant 
au  service  de  ses  intérêts  de  propriétaire  toutes  les  ressources 
de  son  esprit  de  juriste  prompt  à  découvrir  —  et  à  éviter  — 
dans  une  transaction  de  cette  importance  tout  ce  qui  pour- 
rait donner  prétexte  à  contestation  et  à  procès.  D'abord  la 
concession  est  faite  en  faveur  des  seuls  habitants  de  Marsil- 
largues, de  ceux  qui  n'ont  point  ailleurs  «  bourgeoisie  ou  do- 
micile »,  mais  qui  ont  domicile  et  résidence  habituelle  dans  le 
territoire  soumis  à  sa  juridiction-.  Il  n'accorde  rien  de  plus 


1.  Arch.  mun.  de  Marsillargues,  t.  I,  n»  17  :  «  Noverint  universi...  quod 
cum  nobilis  et  potens  vir  dominus  Guillelmus  de  Nogareto  predicti  do- 
mini  régis  Francorum  miles  Marcilhanicarum  dominus  esset  constitutus 
in  ecclesia  dicti  loci  de  Marcilhanicis  die  scilicet  prescripta  qua  venerat 
ad  visitanduni  noviter  dictam  villam  suam  de  Marcilhanicis  quam  quidem 
de  novo  titulo  donationis  acquisiverat  a  domino  rege  pi-edicto,  populo 
siquidem  dicti  loci  in  dicta  ecclesia  ad  missam  ut  moris  est  ac  voce  pre- 
conia  ut  dicebatur  congregato...  » 

2.  Ibid.  :  «  Item  concessionem  predictam  dictus  dominus  Guillelmus 


LA  VIE  PRIVÉE  DE   GUILLAUME    DE   NOGARET.  187 

que  le  seigneur  de  Lunel  n'avait  accordé  en  1286  :  le  droit  de 
faire  paître  dans  Tamarlet,  sauf  aux.  trois  endroits  où  cet 
avantage  appartient  aux  gens  de  Lunel,  au  bois  de  Tamarlet 
qui  est  réservé  dès  1286,  et  sur  le  Sol  du  Vidourle  qui  a  fait 
l'objet  de  l'accord  de  1299.  Mais  il  précise  :  ce  droit  ne 
s'exerce  que  dans  les  friches  et  les  jachères;  ailleurs,  seule- 
ment après  la  récolte;  et  dans  les  palus,  tant  que  le  seigneur 
ne  les  met  pas  en  culture.  Si  alors  il  y  crée  un  jardin,  une 
vigne  où  la  dépaissance  serait  nuisible  même  les  fruits  levés, 
3lle  y  demeurera  interdite  toute  l'année.  Si  plus  tard,  lui  ou 
ses  successeurs  veulent  défricher  même  les  portions  de  palus 
qui,  aujourd'hui,  ne  paraissent  pas  en  valoir  la  peine  ^  ils  le 
pourront  sans  qu'on  puisse  les  accuser  d'avoir  porté  atteinte 
au  droit  concédé.  Surtout,  cette  jouissance  des  pâturages  leur 
est  accordée,  non  à  titre  collectif,  mais  seulement  à  titre  indi- 
viduel^; c'est  chacun  d'eux  qui  pourra  conduire  son  propre 
bétail  à  Tamarlet,  et  non  des  bergers  communaux  avec  les 
immenses  troupeaux  difficiles  à  surveiller  et  fort  propres  à 
causer  de  gros  dommages.  Ces  précautions  n'étaient  pas  inu- 
tiles, puisqu'il  n'y  eut  plus  de  modifications  à  cet  accord  jus- 
qu'au milieu  du  xvi«  siècle  et  qu'on  n'eut  procès  qu'au 
xix®  siècle,  quand  il  s'agit  d'appliquer  les  lois  révolution- 
naires relatives  aux  biens  communaux  à  la  portion  des  palus 
qui  n'avait  pas  été  partagée  araiablement  entre  la  commu- 
nauté et  le  seigneur  avant  la  Révolution^. 

4.  —  Le  3  janvier  1306,  Philippe  le  Bel,  étant  à  Lyon,  pres- 
crit au  sénéchal  de  Beaucaire  d'asseoir  les  263  livres  18  sous 

fecit  et  facere  intendit...  hominibus  de  Marcillianicis  presentibus  et  fu- 
turis  sue  et  successorum  suorum  omnimodo  jurisdictioni  subiectis, 
tamen  qui  alibi  burgesiam  vel  domicilium  non  liabebunt,  set  apud  Mar- 
ciUianicas,  sub  omnimoda  iurisdictione  ipsius  domini  Guillelmi  et  succes- 
sorum suorum  domicilium  facient  et  continuam  mansionem...  » 

1.  Ibid.  :  «  Licet  locus  ubi  fièrent  non  posset  nunc  pjenos  fructus  por- 
ta re.  » 

2.  Ibid.  :  «  Dicti  singiili  homines  de  Marcilhanicis  non  ut  universi  set  ut 
singuli  pascant  sua  animalia...  » 

3.  Arcli.  mun.  de  Marsiilargues,  brochure  imprimée,  sans  date  :  Mé- 
moire de  Victor  Augier,  avocat  à  la  Cour  de  cassation,  pour  le  maire  de 
Marsiilargues  dans  ce  procès. 


188  LOUIS   THOMAS. 

9  deniers  et  l'obole  auxquelles  il  n'était  pas  encore  pourvu 
sur  des  lieux  qui  agréent  au  donataire  et  dont  la  cession  soit 
le  moins  dommageable  possible  pour  les  intérêts  du  roi  ^ 
Guillaume  de  Nogaret,  ne  pouvant  songera  quitter  le  roi  pour 
alleren  Languedoc  s'occuper  de  ses  propres  affaires,  les  confie 
à  un  procureur,  par  acte  solennel  du  28  janvier  1306,  dans 
lequel  il  prend  —  pour  la  première  fois  à  ma  connaissance  — 
le  titre  de  «  seigneur  de  Calvisson^  ».  Ce  procureur,  auquel 
il  confie  ses  intérêts  «  tant  en  France  que  dans  la  séné- 
chaussée de  Beaucaire  et  Nimes»,  est  Guillaume  Bonnefeuille, 
clerc  de  son  entourage,  —  clericum  et  familiarem,  meum, 
—  ancien  notaire  de  l'évêque  de  Maguelonne  qu'il  a  jadis 
connu  à  Montpellier''. 

Le  bruit  s'étant  répandu  que  la  nouvelle  assignation  serait 
faite  dans  la  partie  orientale  de  la  viguerie  royale  de  Nimes, 
les  consuls  de  cette  ville  s'émeuvent  et  vont  trouver  le  séné- 
chal pour  faire  valoir  leurs  droits  ''  :  Bouillargues,  Polverières, 
Rodilhan,  Caissargues,  Mérignargues  et  Luc  sont  du  terri- 
toire de  Nimes  et  leurs  habitants  sont  taillables  par  ses  con- 
suls; les  garrigues  deManduel  et  de  Redessan  sont  communes, 
quant  à  l'usage,  à  leurs  habitants  et  à  ceux  de  Nimes.  Le 
sénéchal  promet  qu'il  sera  tenu  compte  de  leur  avis;  et  en 
efïét,  les  droits  des  consuls  de  Nimes  sont  formellement  ré- 
servés lorsque  Raoul  des  Cours-Jumelles,  juge  mage,  Hugues 
de  la  Porte  et  Mathieu  de  Mantine,  procureurs  du  roi,  et 
Pierre  Jean,  avocat  du  roi  dans  la  sénéchaussée,  procèdent  à 
l'enquête  d'estimation  ^ 

Guillaume  de  Nogaret  reçut  d'abord,  ainsi  que  les  estima- 
teurs de  1304  l'avaient  proposé,  l'entière  juridiction  à  Tamar- 


1.  Ménard,  t.  I,  Preuves,  p.  161,  d'après  les  Arch.  du  chat,  de  Marsil- 
largues,  t.  XXXVII,  liasse  A,  n"  2  :  «  In  locis  sibi  accommodis  nobisque 
minus  dampnosis.  » 

3.  Ibid.,  pp.  12'2-r23,  d'après  les  arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  acte 
non  retrouvé. 

3.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n"  3. 

4.  16  avril  1306.  Arch.  mun.  de  Nimes,  00,  82,  papier,  copie  du 
xvn«  siècle  par  le  garde  des  archives  de  la  sénéchaussée. 

5.  Ménard,  I,  Preuves,  pp.  162-165.  —  Arch.  nat.,  JJ,  45,  f»^  8  v  à  10. 


LA  VIE  PRIVÉE   DE   GUILLAUME   DE  NOGARET.  189 

let  et  la  haute  justice  et  la  suzeraineté  de  la  terre  des  Ports. 
Puis,  dans  la  viguerie  de  Nimes,  haute  et  basse  justice  à 
Manduel,  Redessan,  Bouillargues,  Rodilhan,  Polverières, 
Caissargues,  Mérignargues,  Lagarne,  Luc,  Colozes  et  Vendar- 
gues,  avec  les  droits  domaniaux  habituels  :  tailles,  cens  et 
tasques.  Mais,  en  outre,  il  eut  de  nombreuses  terres  non  inféo- 
dées :  50  sétérées  à  Manduel,  40  à  Redessan,  1,000  dans  la 
dîmerie  de  Bouillargues,  ce  qui  lui  constitua,  dans  la  plaine 
fertile  qui  s'étend  à  l'est  de  Nimes,  un  établissement  consi- 
dérable. Enfin,  pour  achever  l'assise,  on  arrondit  vers  l'ouest 
la  seigneurie  de  Calvisson  dans  la  viguerie  de  Sommières, 
avec  l'entière  juridiction  d'Aujargues,  de  Poudres,  de  Saint- 
Pancrace  et  de  Fesq  et  la  haute  justice  de  Vacquières;  dans 
la  viguerie  d'Uzès,  avec  la  justice  haute  et  basse  et  des  droits 
domaniaux  à  Dommessargues  et  au  Sauzet,  la  haute  justice  et 
la  suzeraineté  à  Parignargues  et  à  Saint-Chapte.  Guillaume 
Bonnefeuille  fut  mis  en  possession  du  tout  par  le  sénéchal  le 
18  mai  1 306.  Ce  ne  fut  qu'après  plus  de  trois  ans  écoulés  que 
Philippe  le  Bel  confirma  définitivement  ses  donations  en 
faveur  de  Guillaume  de  Nogaret.  Deux  lettres  patentes  don- 
nées à  Paris  le  9  février  1310  confirment,  l'une  *,  les  assigna- 
tions de  1304,  l'autre^,  celles  de  1306.  Toutes  deux  déclarent 
que  Nogaret  a  prêté  l'hommage-lige  et  défendent  qu'on  puisse 
jamais  rechercher  l'excédent  que  les  revenus  des  terres  assi- 
gnées pourrait  présenter  sur  le  montant  de  la  rente  accordée. 
Mais  il  paraît  que  ces  revenus  n'atteignaient  pas  encore  exac- 
tement 800  livres  :  un  supplément  d'assise  était  encore  néces- 
saire pour  8  livres  12  deniers  de  rente.  Guillaume  Bonne- 
feuille  l'ayant  fait  observer  au  sénéchal  Pierre  de  Broc, 
celui-ci  fit  faire  une  enquête  par  le  procureur  du  roi  et,  le 
28  février  1311,  assigna  à  Guillaume  de  Nogaret  ^  la  haute 
justice  de  Jonquières  et  de  Saint-Vincent,  dans  la  banlieue  de 
Beaucaire.  Cette  haute  justice  et  les  autres  droits  du  roi  à 

1.  Ibid.,  p.  IGO.  —  Arch.  nat.,  JJ,  A'),  i"  10. 

2.  Ibid.,  p.  162.  —  Arch.  nat.,  JJ,  45,  f»  8. 

3.  Ibid.,  p.  225,  d'après  les  Arch.  du  chat,  de  Marsillargucs,  t.  XI,  n»  1, 
papier,  copie  d'après  les  Arch.  de  la  Chambre  des  comptes  de  Montpellier. 


190  LOUIS   THOMAS. 

Jonquières  furent  estimés  seulement  5  livres  19  sous  8  deniers. 
On  ne  dit  pas  qne  Guillaume  Bonnefeuille  ait  réclamé  pour 
les  2  livres  16  deniers  à  l'assignation  desquels  il  n'était  pas 
encore  pourvu. 


IV. 


1.  —  «  On  n'avait  point  vu  jusque  là,  dit  Renan,  d'aussi 
importantes  aliénations  faites  en  faveur  d'un  simple  particu- 
lier. Nogaret  se  trouva  constitué  principal  seigneur  de  toute 
la  campagne  qui  s'étend  depuis  Nimes  jusqu'à  la  mer  et  du 
cours  inférieur  du  Vidourle'.  »  Ce  fut  surtout  la  situation 
personnelle  de  Guillaume  de  Nogaret  qui  fit  la  grandeur  de 
sa  seigneurie.  Ce  fut  justement  parce  qu'il  n'était  pas  un 
simple  particulier,  mais  un  des  conseillers  les  plus  écoulés  du 
roi  et  garde  du  sceau  royal  depuis  le  27  septembre  1307  2  que 
l'ancienne  noblesse  de  la  province  l'admit  dans  ses  rangs  et 
consentit  à  s'allier  avec  lui.  Aux  Etats-Généraux  de  mai  1308 
il  a  la  procuration  de  huit  des  principaux  seigneurs  du  Lan- 
guedoc :  Aymar  de  Poitiers,  comte  de  Valentinois;  Odilon  de 
Garin,  seigneur  de  Tournel  ;  Guérin  de  Chàteauneuf,  seigneur 
d'Apchier;  Bréraond  d'Uzès,  seigneur  d'Aimargues;  Bernard 
Pelet,  seigneur  d'Alais;  Amauri,  vicomte  deNarbonne;  Louis 
de  Poitiers,  évêque  de  Viviers  ^ 

Vers  le  même  temps,  il  marie  sa  fille  Guillemette  au  fils 
aîné  de  Bérenger  Guilhem,  seigneur  de  Clermont-Lodève.  Ce 
n'est  pas  seulement  au  xviii^  siècle  que  les  marquis  épousent 
les  filles  de  robins.  Les  circonstances  même  sont  analogues  : 
ce  n'est  pas  pour  «  redorer  son  blason  »,  mais  c'est  pour 
payer  ses  dettes  que  Bérenger  Guilhem  accepte  l'union  de  son 
fils  avec  la  fille  d'un  parvenu.  Moyennant  3,000  livres,  Béren- 
ger avait  obtenu  des  commissaires  royaux  que  l'autorisation 
d'élire  un  consulat  ne  serait  pas  accordée  aux  habitants  de 

1.  Hist.  littér.,  t.  XXVII,  p.  274. 
•2.  Eenaii,  Hist.  littér.,  t.  XXVII,  p.  '29U. 

8.  Htst.  de  Lrmguedoc,  éd.  Privât,  t.  IX,  p.  :JUl.  —  L'évèque  de  Viviers 
l'appelle  «  son  très  cher  ami  ». 


LA   VIE   PRIVÉE  DE   GUILLAUME  DE   NOGARET,  191 

Clermoat;  mais  il  n'avait  pas  payé  les  3,000  livres.  Alors 
Nogaret  intervient  :  il  donnera  3,000  livres  en  dot  à  sa  fille, 
mais  il  versera  cette  dot  au  trésor  royal  pour  acquitter  la 
dette  de  Bérenger  Guilhem.  Le  mariage  fut  conclu  sur  cette 
base...  Et  le  1"  juillet  1308,  Nogaret,  ayant  payé  1,000  livres 
au  roi,  obtint  remise  du  reste'. 

2.  —  Cependant  de  persévérants  efforts  accroissent  la 
valeur  de  la  seigneurie  nouvelle.  A  la  fin  de  1308,  on  recons- 
truit le  château  de  Marsillargues  :  le  4  décembre,  Guillaume  de 
Nogaret  fait  acheter  la  maison  contiguë,  que  son  propriétaire, 
le  tailleur  Bernard  Aymeric,  cède  pour  15  livres  tournois'^. 
Les  archives  du  château  contiennent  ^  de  nombreux  actes  de 
ventes  faites  depuis  le  31  octobre  1308  jusqu'au  milieu  de  1312 
par  des  gens  des  environs,  Marsillargues,  Lunel,  Mudaii-.on, 
de  pièces  de  terre  qu'ils  possédaient  ou  tenaient  à  cens  dans 
Tamarlet,  et  dont  Guillaume  de  Nogaret  veut  reprendre 
l'exploitation  directe.  En  1310,  il  achète  la  part  de  Guillaume 
et  Raymond  Catel,  et  la  moitié  de  la  part  de  Bernard  de 
Lestang  dans  la  juridiction  des  Ports*. 

Mais  ces  améliorations,  ces  aménagements,  ces  accroisse- 
ments ne  se  font  pas  sans  exciter  un  peu  l'envie,  et  souvent 
les  réclamations  des  voisins.  Pendant  ces  années  durant  les- 
quelles s'achève  son  établissement  territorial,  Guillaume  de 
Nogaret  n'est  presque  jamais  présent  sur  son  domaine  :  le 
service  du  roi,  le  souci  de  son  absolution  et  le  procès  fait  à  la 
mémoire  de  Boniface  VIII  le  retiennent  à  Paris  ou  en  Avi- 
gnon; et  ses  officiers  n'apportent  sûrement  pas,  dans  leur 

1.  Hist.  de  La7iguedoc,  éd.  Privât,  t.  X,  Preuves,  coL  451-452, 

2.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n»  6  ; 
rouleau  de  parchemin  contenant  la  transcription  contemporaine  de  plu- 
sieurs actes  d'acliat. 

3.  Arch.  du  cliât.  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n»  6  ; 
rouleau  de  parchemin,  transcription  d'actes  du  ;J1  octobre  et  du  12  dé- 
cembre 18U8,  du  27  mars  13U9;  —  n»  7,  autre  rouleau,  transcription  d'actes 
des  6  et  20  avril  13U9  ;  —  n"  8,  autre  rouleau,  transcription  d'actes  des 
18  juillet  et  7  décembre  1811,  7  juin  1312. 

4.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XV;  inventaire  de  1784,  «  Titres 
des  Ports,  article  3.  » 


192  LOUIS   THOMAS. 

administration  et  dans  les  rapports  inévitables  avec  les  gens 
des  environs,  la  même  habileté  que  l'on  a  vu  qu'il  y  avait 
mise  lui-même.  Ils  savaient  d'ailleurs  —  et  leurs  actes  le 
démontrent  assez  pendant  toute  cette  période  —  combien  leur 
maître  tenait  à  arrondir  ce  domaine  de  Tamarlet  qui  était 
son  acquisition  propre,  qu'il  sentait  donc  plus  à  lui  que  les 
autres  terres,  venues  de  la  libéralité  royale,  et  qu'un  caprice 
royal  pouvait  peut-être  lui  retirer;  en  s'efïorçant  de  satisfaire 
sur  ce  point  Guillaume  de  Nogaret,  ils  ne  pouvaient  s'empê- 
cher de  suivre  son  exemple.  Il  ne  faut  donc  pas  s'étonner  de 
les  voir  mettre  à  son  service  une  ardeur,  une  âpreté,  une 
avidité  même  que  l'on  retrouve  dans  la  façon  dont  il  travail- 
lait partout  lui-même  à  étendre  les  droits  du  roi. 

Aussi  les  plaintes  sont-elles  nombreuses.  Les  gens  de  Lunel, 
d'abord  :  déjà,  en  1302,  ils  regrettaient  que  Nogaret  fiit  trop 
souvent  «  retenu  au  service  du  roi  »  pour  qu'on  pût  discuter 
directement  avec  lui^  Depuis  lors  leurs  tribulations  n'ont 
pas  cessé  :  voici  qu'en  janvier  1308  leur  appel  contre  Guil- 
laume de  Nogaret  est  rejeté  par  la  cour  du  roi^  et  qu'il  leur 
va  falloir  subir  la  sentence  d'un  sénéchal  favorable  à  leur 
adversaire;  ils  s'y  prêtent  d'assez  mauvaise  grâce  :  ce  n'est 
que  trois  ans  plus  tard,  en  avril  1311,  que  l'on  plante  les 
douze  bornes  qui  délimitent  les  possessions  respectives^. 
Encore  ne  sont-ils  point  résignés  et  se  réservent-ils  pour  des 
temps  moins  durs  ^ 

Après  Lunel,  Psalmodi  :  le  territoire  de  l'abbaye  et  celui  de 
Tamarlet  étaient  voisins,  mais  les  limites  n'étaient  pas  bien 
fixées;  des  bornes  avaient  été  détruites.  Il  y  eut  plainte  au 
roi,  constitution  du  juge  mage.  Clément  de  Fraissin,  comme 
arbitre.  Le  15  janvier  1310,  ayant  achevé  son  enquête,  il  vint 
à  Marsillargues  où  l'attendaient  les  représentants  des  parties  ; 


1.  Arch.  mun.  de  Lunel,  série  P,  liasse  1,  n°  21UB. 

2.  Olim,  éd.  Beugnot,  t.  III,  pp.  266-267. 

3.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XV;  inveutaire  de  1784,  «  Titres 
de  Mai'sillargues,  article  9.  » 

4.  Ils  ont  vivement  réclamé  dès  le  lendemain  de  la  mort  de  Nogaret. 
Â.rcli.  mun.  de  Lunel,  série  P,  liasse  1,  n"  2110  bis.) 


LA  VIE  PRIVÉE   DE  GUII.LAUME  DE  NOGARET.  193 

il  ordonna  la  plantation  de  nouvelles  bornes,  reconnut  à 
l'abbaye  la  possession  de  la  nacelle  du  Vidourle  et  de  la  digue 
de  la  rive  droite,  bien  qu'elle  fût  dans  la  juridiction  de  Tamar- 
let^.  Mais  cette  clause  pouvait  amener  de  nouveaux  con- 
flits :  Guillaume  de  Nogaret,  qui  était  alors  en  Languedoc-,  le 
fit  observer  à  l'arbitre  qui  modifia  aussitôt  sa  sentence  :  la 
digue  fut  donnée  au  seigneur  de  Tamarlet,  mais  les  moines 
eurent  le  droit  de  la  réparer  et  d'y  planter  des  tamaris  pour 
protéger  leurs  récolles  contre  le  vent. 

Il  y  eut  aussi  un  conflit  avec  les  moines  de  Franquevaux, 
qui  acceptent,  le  28  décembre  1312,  le  compromis  passé  entre 
leur  abbé  et  Guillaume  de  Nogaret  3.  Ainsi  de  tous  côtés  des 
beurts,  des  plaintes,  des  conflits  :  et  cependant  le  domaine  de 
Nogaret  s'étend  encore. 

Depuis  son  établissement  définitif  dans  le  diocèse  de  Nimes, 
la  maison  de  Montpellier  et  le  mas  des  Cannes,  dans  le  terri- 
toire de  Mauguio,  étaient  devenus  pour  Guillaume  de  Nogaret 
des  possessions  trop  excentriques,  dont  il  aurait  eu  avantage 
à  se  débarrasser.  L'assignation  de  1304  lui  avait  donné  la 
suzeraineté  et  la  haute  justice  du  mas  de  Livières,  près  de 
Calvisson,  qui  constituait  une  commanderie  de  l'Ordre  de 
Saint-Jean.  Nogaret  proposa  aux  Hospitaliers  d'échanger  cette 
commanderie  contre  le  mas  des  Cannes  ou  la  maison  de 
Montpellier.  Le  grand -maître.  Foulques  de  Villaret,  donna, 
le  15  novembre  1309,  à  Pise,  un  entier  consentement  à  cet 
échange*  et  nomma  deux  chevaliers  pour  le  négocier.  Il  fut 
décidé  que  Livières  serait  cédé  à  Nogaret  contre  la  maison  de 
Montpellier.  Cet  échange  fut  confirmé  en  septembre  1310  par 
Philippe  le  Bel,  et  le  14  décembre  par  le  roi  de  Majorque, 
qui,  en  considération  des  mérites  de  Guillaume  de  Nogaret, 
faisait  remise  aux  Hospitaliers  du  cens  que  lui  devait  la  mai- 


1.  Ménard,  I,  Preuves,  pp.  219-224,   d'après  les  Arch.   de  chat,  de 
Marsillargues,  acte  non  retrouvé. 

2.  11  est  à  Nimes  le  10  juillet  1310.    (A.  Germain,  Histoire  du  com- 
merce de  Montpellier,  t.  I,  Pièces  justificatives,  pp.  425-420.) 

3.  Arch.  du  Gard,  H,  39. 

4.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXlll,  n°  3,  parch.  original. 

ANNALES  DU   MIDI.   —  XVI.  13 


194:  LOUIS   THOMAS. 

soQ^  Le  3  février  1311,  en  présence  d'Elzéar  de  Roussac, 
précepteur  de  la  maison  de  Saint-Jean  de  Montpellier,  Guil- 
laume de  Planhols,  procureur  de  Guillaume  de  Nogaret,  met 
l'Ordre  en  possession,  en  la  personne  de  Guillaume  Mataron, 
lieutenant  du  prieur  de  Saint-Gilles,  par  la  tradition  des  clefs. 
Mataron  parcourt  la  maison,  s'y  arrête,  ouvre  et  ferme  les 
portes,  pendant  que  Guillaume  de  Planhols  recommande  à 
haute  voix  au  locataire  de  payer  désormais  son  loyer  aux 
Hospitaliers.  Pareille  cérémonie  eut  lieu  à  Livières;  et  comme 
on  s'aperçut  que  la  coramanderie  valait  plus  que  la  maison, 
deux  arbitres,  Pons  d'Aumelas,  chevalier  du  roi  de  France, 
et  Arnaud  Banella,  procureur  du  grand-maître  des  Hospita- 
liers, décidèrent  que  Guillaume  de  Nogaret  paierait  100  livres 
tournois.  Mais  cette  maison,  Nogaret  l'avait  acquise,  non  de 
ses  propriétaires  naturels,  les  héritiers  de  Bernard  Catalan, 
qui  la  lui  avaient  engagée,  mais  de  leurs  créanciers  :  pour 
calmer  les  scrupules  de  l'Ordre,  on  obtint,  le  21  juin  1312,  de 
la  veuve  et  des  enfants  de  Bernard  Catalan,  l'abandon  de  tous 
leurs  droits  sur  la  maison  et  l'approbation  de  l'échange.  Le 
30  juin  enfin,  Raymond  d'Olargues.  lieutenant  du  prieur  de 
Saint-Gilles,  au  nom  d'une  foule  de  chevaliers  énumérés  dans 
l'acte,  et  au  nom  de  l'Ordre  tout  entier,  donna  quittance  à 
Nogaret  des  100  livres  de  supplément  et  ratifia  définitivement 
l'échange^. 

L'acquisition  de  Livières  fut,  semble-t-il,  le  dernier  accrois- 
sement du  domaine  de  Guillaume  de  Nogaret.  Sa  fortune 
mobilière,  presque  aussi  importante,  comprenait  entre  autres 
choses  :  une  rente  de  300  livres  sur  la  trésorerie  de  Toulouse, 
acquise  en  1308  de  Raymond  Béarn  =>;  une  rente  de  150  livres 


1.  Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  n°  2,  registre  en  parche- 
min, contenant  la  transcription  contemporaine  des  actes  relatifs  à  cet 
échange,  mais  en  ordre  inverse,  le  dernier  en  date  étant  transcrit  le  pre- 
mier. 

2.  Ibid.  —  C'est  par  cette  ratification  que  commence  la  série  des  actes 
transcrits. 

3.  Testament  de  Guillaume  de  Nogaret.  (Histoire  de  Languedoc,  éd. 
Privât,  t.  X,  Preuves,  c.  512.)  —  Transfert  de  cette  rente  sur  la  trésore- 
rie de  Nimes  en  1338.  (Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XXXVII,  n"  4.) 


LA   VIE   PRIVÉE   DE   GUILLAUME   DE   NOGARET.  195 

à  prendre  par  moitié  sur  le  péage  de  Beaucaire  et  sur  celui  de 
Savanhac',  achetée  le  7  mai  1311;  et  une  autre  rente  de 
250  livres  assise  par  le  roi  sur  la  trésorerie  de  Toulouse'^. 

3.  —  En  février  1310,  à  Paris,  en  présence  du  roi,  Guil- 
laume de  Nogaret  avait  fait  son  testament^:  il  désignait  comme 
son  héritier  universel  Raymond,  son  lils  aîné;  donnait  à  son 
fils  cadet  Guillaume  les  300  livres  de  rente  acquises  de  Ray- 
mond Béarn,  et  à  sa  fille  Guillemelte  sa  dot  —  versée  de  la 
façon  que  l'on  sait  —  et  100  livres  tournois,  moyennant  quoi 
elle  devait, se  déclarer  satisfaite.  Il  substituait  en  cas  de  décès 
Guillaume  à  Raymond,  Guillemette  à  ses  frères,  puis  Bertrand 
et  Thomas  de  Nogaret  fils  de  son  frère  défunt,  ou  à  leur 
défaut  son  neveu  Gildebert.  Il  choisissait  pour  sa  sépulture 
l'église  des  frères  prêcheurs  de  Paris,  s'il  mourait  en  France, 
de  Nimes  s'il  mourait  en  Languedoc*. 

A  la  fin  de  sa  vie  se  retrouve  l'obscurité  de  ses  débuts  : 
créature  du  roi,  il  n'existait,  semble-t-il,  et  n'était  connu 
que  dans  la  mesure  où  il  participait  à  la  souveraineté  royale  ; 
quand  il  a  cessé  ses  fonctions,  s'il  n'est  pas  tout  à  fait  «  re- 
plongé dans  le  néant  d'où  il  était  sorti  »,  du  moins  n'a-t-on 
plus  sur  ses  actes  d'indications  précises.  Pas  plus  que  la  date 
de  sa  naissance,  celle  de  sa  mort  n'est  connue.  On  la  peut 
fixer  avec  vraisemblance  au  mois  d'avril  1313.  Le  25  mars,  il 
prononçait,  par  défaut,  une  sentence  contre  Louis  de  Nevers, 
comte  de  Flandre  ^  Le  28  mai,  sa  succession  était  à  peine 
ouverte  :  dans  une  requête  présentée  ce  jour-là  par  les  consuls 


1.  Arch.  du  chat,  de  Marsillarges,  t.  XV;  inventaire  de  1784,  «  Titres 
de  famille,  article  d.  » 

2.  Transfert  de  cette  rente  sur  la  trésorerie  de  Nimes  en  1336  :  Arch. 
du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XI,  n"  2,  et  Histoire  de  Languedoc,  éd. 
Privât,  t.  X,  Notes,  p.  88. 

3.  Hist.  de  Languedoc,  éd.  Privât,  t.  X,  Preuves,  col.  .512-513. 

4.  Il  mourut  à  Paris  et  y  fut  sans  doute  enseveli,  mais  son  fils  et  son 
petit-fils  eurent  leur  tombeau  dans  l'église  des  dominicains  de  Nimes  qu'il 
avait  lui-même  choisie.  (Arch.  du  chat,  de  Marsillargues,  t.  XI,  n»  9, 
pareil,  original  :  testament  de  Raymond  II  de  Nogaret.) 

5.  Limburg-Stirum,  Codex  diplomaticus  Flandriae,  t.  111,  p.  222. 


196  LOUIS   THOMAS. 

de  Nimes  aux  juges  de  Manduel  ',  Guillaume  de  Nogaret  est 
dit  défunt,  o.i  il  n'est  fait  aucune  mention  de  son  successeur 
dans  cette  seigneurie  de  Manduel  ;  cet  acte  doit  se  placer 
entre  la  mort  de  Nogaret  et  l'accord  qui,  très  tôt  après,  dut 
intervenir  entre  ses  héritiers  pour  la  non-exécution  du  testa- 
ment, car  son  fils  aîné  ne  fut  pas  l'héritier  universel,  et  c'est 
au  cadet  que  la  seigneurie  de  Manduel  fut  attribuée. 

Guillaume  de  Nogaret  mourut  à  Paris.  Philippe  le  Bel  s'em- 
pressa de  faire  prendre  chez  lui  tous  les  documents  qu'il 
avait  pu  conserver-,,  et  lui  donna  un  successeur,  Pierre  de 
Latilly,  comme  garde  du  sceau  royal  ^.  Ce  fut  peut-être  toute 
l'oraison  funèbre  de  celui  qui  avait  été,  pour  l'absolutisme 
naissant,  un  serviteur  si  précieux.  Cette  sorte  d'indifférence 
du  roi  pour  son  ministre  défunt  fut  admirablement  ressentie 
au  Bas-Languedoc  :  le  prestige  d'une  haute  charge,  la  toute- 
puissante  protection  royale  ne  défendaient  plus  le  seigneur 
de  Marsillargues  et  de  Calvisson;  la  crainte  d'être  desservis 
auprès  du  roi  ne  paralyserait  plus  l'action  des  officiers 
royaux  de  la  sénéchaussée.  Aussi  les  protestations,  les  do- 
léances, les  réclamations  s'élèvent.  Dans  cette  requête  du 
28  mai  1313  que  je  citais,  les  consuls  de  Nimes  accusent  No- 
garet d'avoir  empiété  sur  les  droits  du  roi  et  gravement  lésé 
leurs  privilèges  par  les  «  nouvelles  coutumes  »  qu'il  levait 
dans  sa  baronnie  de  Manduel.  Les  habitants  de  Lunel  renché- 
rissent :  à  les  croire,  c'est  en  abusant  de  ses  fonctions,  à  la 
faveur  de  sa  charge  de  chancelier,  qu'il  aurait  usurpé  sur  le 

1.  Arch.  mun.  de  Nimes,  MM  15,  n"  13,  parch.  original  :  «  Existantes.. . 
apud  Mandolium  in  presentia  venerabilis  et  discreti  viri  domini  Guil- 
lelmi  de  Roveris,  judicis  tei're  seu  baronie  nobilis  et  potentis  viri  domini 
Guillelmi  de  Nogareto  militis  illustrissimi  domini  nostri  Francorum 
régis,  domini  Cahitionis  et  Mandolii  quondam...  » 

2.  Bibl.  nat.,  ms.  Dupuy,  t.  635,  f"  101  v°  :  «  Littere  reperte  in  domo 
defuncti  Guillelmi  de  Nogareto,  specialiter  signate  et  distincte.  Hec  sunt 
reperte  pênes  defunctum  dominum  de  Nogareto.  »  —  Plusieurs  des  piè- 
ces, signalées  se  retrouvent  aux  Arch.  nat. 

3.  Ibid.,  f"  99  :  «  Ce  sont  les  fourmes  des  lettres  faites  sur  la  besoigne 
de  flandres,  especiallement  de  celles  que  les  flamenz  ont  receues  de  la 
court  de  France  du  temps  monseigneur  Guillaume  de  Nogaret  jusques  à 
tant  que  après  sa  mort  le  scel  fu  baillé  à  mestre  Pierre  de  Latilly.  A 
Poissy,  lan  de  grâce  mil  ccc  et  treize.  » 


LA   VIE   PRIVÉE   DE   GUILLAUME  DE  NOGARET.  197 

roi  jusqu'à  100  livres  de  revenu  et,  naturellement,  bien  davan- 
tage sur  eux-mêmes'.  Guillaume  de  Nogaret,  à  les  entendre, 
aurait,  en  restreignant  leurs  droits  de  dépaissance  dans  ses 
terres  de  Tamarlet,  si  bien  appauvri  Lunel  que  plusieurs  habi- 
tants allaient  être  réduits  à  s'expatrier,  comme  avaient  dû.  le 
faire  déjà  trois  cents  familles  depuis  que  Nogaret  avait 
usurpé  ces  pâturages  2.  Philippe  le  Bel  ne  paraît  pas  s'étonner 
d'accusations  même  aussi  manifestement  exagérées,  mais  il 
écrit  au  séoéchal,  le  17  juillet  1313,  de  faire  délivrer  aux 
consuls  de  Nimes  une  copie  de  l'assise  pour  servir  à  la  dé- 
fense de  leurs  droits  3,  et  le  19  novembre,  il  prescrit  une 
enquête  sur  les  plaintes  des  gens  de  Lunel  K 


* 


Guillaume  de  Nogaret  pourtant  n'était  pas  coupable,  sinon 
d'être  demeuré  fidèle  à  lui-même  et  d'avoir  appliqué  à  la 
poursuite  de  ses  intérêts  propres  le  même  esprit  d'envahisse- 
ment et  d'extension  qu'il  avait  mis  au  service  du  roi.  De 
même  qu'il  s'était  efforcé,  dans  sa  vie  publique,  de  faire  par- 
tout triompher  la  notion  nouvelle  de  la  souveraineté  de 
l'État  et  de  pousser  aussi  avant  que  possible  l'exercice  incon- 
testé de  l'autorité  monarchique,  il  avait  voulu,  dans  sa  vie 
privée,  faire  rendre  tout  leur  effet  utile  à  ses  droits  d'emphy- 


1.  Arch.  mun.  de  Lunel,  série  P,  liasse  l,  n"^  2110  bis  et  2114. 

2.  Arch.  mun.  de  Lunel,  série  P,  liasse  2,  n»  2141,  parchemin,  minute 
non  datée  d'uue  requête  au  sénéchal  :  »  Per  suam  potenciam,  quando  erat 
in  officio  et  servicio  domini  régis,  occupavit  et  sibi  appropriavit  injuste 
plura  territoria,  pascua  et  tenementa  que  erant  et  sunt  propria  et  de  pro- 
prietate  dicte  ville  et  habitatorum  eiusdem...  Supplicant  dicti  sindici 
quod  mandetur  dicto  senescallo  Bellicadri  quod...  heredes  dicti  domini 
Guillelmi  ac  dictos  sindicos...  ad  dictuni  diem  adiornet...  et  quod  intérim 
dicti  homines  possint  uti  et  sua  animalia  ad  depascendum  in  dictis  pas- 
cuis  ducere...,  aliter  oportebit  plures  dictorum  habitatorum  de  dicta 
villa  recedere,  sicut  jam  recesserunt  et  aufugeru'nt  do  dicta  villa  tre- 
centa  hospicia  seu  foci  propter  pauportatem  niniiam  a  tempore  quo 
dictus  Guillelmus  dicta  pascua  occupavit.  » 

3.  Arch.  mun.  de  Nimes,  00,  82;  copie  du  xviif  siècle. 

4.  Arch.  mun.  de  Lunel,  série  P,  liasse  1,  n"  2110  bis;  copie  dans  une 
requête  au  sénéchal,  du  20  mai  1314. 


198  LOUIS  THOMAS. 

téote,  de  bas  justicier,  de  seigneur  terrien,  de  propriétaire. 
On  ne  saurait,  chez  lui,  séparer,  tant  leur  union  est  intime, 
le  légiste  de  !'«  homme  nouveau  ».  Négliger  la  légitime  ambi- 
tion de  celui-ci  et  l'ardeur  qu'il  apporte  à  la  satisfaire,  pour 
ne  voir  que  l'activité  politique  du  premier,  ce  serait  se  faire 
une  idée  trop  incomplète  de  Guillaume  de  Nogaret,  et  aussi  de 
ses  pareils,  les  autres  légistes,  sur  lesquels  des  études  analo- 
gues à  celle  que  j'ai  tentée  amèneraient  sans  doute  aux  mê- 
mes conclusions.  Il  nous  fournit,  dès  le  début  de  la  monarchie 
absolue,  un  exemple  déjà  typique  de  ce  contrat  tacite,  qui 
deviendra  banal  à  la  fin  du  xv®  siècle,  entre  le  bourgeois  qui 
brigue  les  offices  et  travaille  au  triomphe  de  l'autorité  royale, 
et  le  roi  qui  le  récompense  en  l'élevant  et  en  l'enrichissant. 
Le  résultat,  d'ailleurs,  ne  fut-il  pas  conforme  à  ses  espéran- 
ces? Et  si  l'on  peut  voir  ^  les  conséquences  de  son  oeuvre  poli- 
tique jusque  dans  la  déclaration  du  clergé  de  France  de  1682, 
n'est-il  point  permis  de  remarquer  qu'à  cette  époque  l'héritier 
de  Guillaume  de  Nogaret  était  marquis  ? 

Louis  Thomas. 

1.  Holtzmann,  ouvr.  cité,  p.  213. 


LA   VIE  PRIVÉE   DE  GUILLAUME   DE  NOGARET.  199 


PIECES  JUSTIFICATIVES 


I.  —  22  octobre  4291.  —  Acquisition  du  mas  de  Tamarlet 
par  Guillaume  de  Nogaret. 

[Arch.  du  chat,  de  Marsillargiies,  tome  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n»  1. 
—  Parchemin,  copie  du  commencement  du  xvi»  siècle.  —  Arch.  mu- 
nie, de  Marsillargues,  autre  copie  de  la  même  époque  ;  sa  cote  :  «  Ta- 
marlet, tome  I,  n»8  »,  indique  qu'elle  provient  du  château.] 

In  nomine  domini  nostri  Jesu  Christi,  amen.  Anne  Incarna- 
tionis  eiusdem  millésime  dueentesimo  nonagesirao  primo,  scilicet 
undecimo  kalendas  novembris,  domino  Philipo  Francorum  rege 
régnante,  nobilis  vir  dominus  Rousolinus  Lunelli  et  Montisal- 
bani  dominus,  non  vi,  non  dolo.  non  fraude,  non  machinatione 
aliqua  circumventus,  set  de  sue  raere  ac  spontanée  voluntatis 
arbitrio  ad  hoc  inductus,  dédit  in  hiis  scriptis  in  accapitum  et 
in  emphiteosim  perpetuam  domino  Guilheimo  de  Nogareto 
legum  doctori  presenti  etrecipientietsuis,  ad  omnes  eius  volun- 
tates  in  vita  et  in  morte  libère  faciendas,  dando,  vendendo, 
impignorando  aut  quocumque  alio  jure  voluerit  alienando  qui- 
buscumque  personis,  exceptis  sanctis,  clericis  et  militibus,  cum 
consilio  tamen  semper  suo  et  suorum  successorum,  videlicet 
totum  mansum  de  Tamarleto  cum  omnibus  domibus,  terris,  pos- 
sessionibus,  cultis  et  incultis,  vineis,  pratis,  nemoribus,  pas- 
cuis,  paludibus,  aquis,  aquarnm  decursibus,  pentionibus  et  cen- 
sibus,  dominiis,  laudimiis  et  aliis.  cum  toto  territorio  et  manda- 
mento  ipsius  mansi,  juribus  et  pertinentiis  suis,  pro  ut  melius 
et  plenius  fuit  possessum  unquam  vel  possideri  debuit  per 
ipsum  Lunelli  dominum  vel  eius  antecessoreà,  et  prout  latius 


1.  On  trouvera  dans  le  tirage  à  part  du  présent  article  des  Pièces  jus- 
tificatives en  plus  grand  nombre,  ou  plus  complètes,  que  nous  ne  pouvons 
les  donner  ici. 


200  LOUIS   THOMAS. 

potest  intelligi  ad  utilitatem  ipsius  doraini  Guilhermi  de  Noga- 
reto  recipientis.  Acto  specialiter  inter  eos  quod  dictus  dominus 
Guilhermus  et  successores  sui  quicumque  soli  et  nerao  alius 
habeant  potestatem  et  jus  bannum  consuetum  recipiendi,  exhi- 
gendi  et  levandi  per  se  vel  alios  custodes,  bannerios  temporales 
vel  perpétues,  puniendi,  pignorandi  pro  banno  et  tala,  cogno- 
scendi  de  banno  et  tala  et  dampnis  datis  per  homines,  pecora, 
pecudes  seu  alla  animalia  quecumque,  et  cohercendi  pro  eis  et 
satisfactione  eorum  in  toto  territorio,  tenemento  et  mandamento 
ipsius  mansi,  tam  in  terris,  possessionibus  et  locis  quibuscum- 
que  ad  ipsum  mansum  spectantibus  quam  aliis  existentibus  in 
territorio  et  tenemento  seu  mandamento  ipsius  mansi,  et  quod 
nemo  alius  possit  bannerios  habere,  bannum  recipere  vel  exhi- 
gere  aliquod  in  territorio  et  tenemento  predicto. 

Tenementam  vero,  territoriura  et  mandamentum  dicti  mansi 
confrontatur  ex  una  parte  cum  terra  dominorum  de  Portibus,  et 
ex  alia  parte  cum  jurisdictione  Psalraodiensis  abbatis,  et  ex  alla 
parte  cum  jurisdictione  sancti  Juliani  et  ex  alia  parte  cum  ponte 
de  Campolivia  usque  ad  robinam. 

Dictusque  nobilis  dominus  Rouselinus  dédit,  cessit  et  concessit 
dicto  domino  Guilhermo  de  Nogareto  recipienti  omnes  actiones 
reaies,  personales,  mixtas,  utiles  ac  directas,  et  omnia  jura  ad 
ipsum  dominum  Rouselinum  pertinentiapro  predictis  et  quolibet 
predictorum  et  pro  quibuscumque  aliis  pertinentibus  vel  perti- 
nere  debentibus  ad  ipsum  dominum  Rouselinum  infra  territo- 
rium,  tenementum  et  mandamentum  ipsius,  prout  habere  melius 
et  latius  pro  dicto  domino  Guilhermo  de  Nogareto  intelligi  pos- 
sint  et  debeant.  Concedens  eidem  domino  Guilhermo  de  Noga- 
reto liberam  potestatem  aprehendi  corporalem  possessionem  et 
quasi  omnium  predictorum  auctoritate  sua,  constituens  idem 
nobilis  dominus  Rouselinus  se  omnia  predicta  etsingula  possi- 
dere  et  quasi  nomine  ipsius  domini  Guilhermi,  quousque  per 
ipsum  dominum  Guilhermum  possessio  et  quasi  omnium  predic- 
tarum  fuerit  aprehensa. 

Asseruit  dictus  dominus  Rousolinus  se  nichil  dixisse  vel  fe- 
cisse,  nichil  in  futurum  se  vel  sues  successores  dicturos  vel  fac- 
tures cominus  predicta  perpétua  flrmitate  fruantur.  obligansinde 
se  et  omnia  bona  sua  habita  et  habenda  dicto  domino  Guilhermo 
et  suis  successoribus  pro  evictione  predictorum  et  cuiuslibet  lei 
ex  predictis  supra  per  eum  concessis. 


LA   VIE   PRIVÉE   DE   GUILLAUME  DE  NOGARET.  201 

Retinuit  tamen  dictus  dominus  Rousolinus  sibi  et  suis  succes- 
soribus  in  dicto  manso,  territorio  et  mandamento  ipsius  merum 
et  mixtum  iraperium  vel  omnlmodam  jurisdictionem  aitam  et 
bassam,  exceptis  bannis,  taliis  et  eorura  cognitione  et  cohercione 
et  aliis  superius  expressis,  que  pertinere  debebunt  dumtaxat  ad 
dictum  dominum  de  Nogareto  et  successores  suos. 

Retinuit  etiam  dictus  dominus  Rousolinus  quod  dictus  dominus 
Guilhermus  et  successores  sui  pro  predictis  dent  dicto  domino 
Rousolino  et  suis  successoribus  appud  Lunellum  ducentas  et 
quinquaginta  libras  turonensium  nomine  pensionis,  singulis  an- 
nis  a  festoPasche  domini  proximoin  unum  annum  etdeinde  annis 
singulis  in  dicto  festo  vel  circa  pentionem  similiter  eandem,  ita 
quod  hoc  anno,  scilicet  in  primo  festo  Pasche,  nichii  det  nomine 
pentionis,  set  dicta  pentio  incipiat  a  secundo  Pasche  predicto. 

Dédit  etiam  et  concessit  dictus  dominus  Rousolinus  dicto  do- 
mino Guilhermo  et  suis  successoribus  liberam  potestatem  do- 
nandi,  vendendi  et  quocumque  titulo  alienandi  dictum  mansum, 
terras  et  possessiones  ipsius  mansi  et  omnia  sibi  coacessa  cui- 
cumquepersone,  exceptis  sanctis,  clericis  et  militibus,  salvo  sibi 
dominio,  concilio  et  laudimio.  Acto  specialiter  inter  eos  quod 
dictus  dominus  Guilhermus  de  Nogareto  per  se  possit  dare  ad 
tempus  vel  perpétue  ad  certam  pentionem  vel  certum  redditum 
alio  pretio  non  recepto  terras  et  possessiones  mansi  predicti. 

Retinuit  etiam  dictus  dominus  Rousolinus  sibi  in  predicto 
manso  et  élus  tenemento  dorainium,  concilium  et  laudimium  si 
contingent  ipsum  mansum  venumdari  in  solidum  vel  pro  parte, 
ita  tamen  quod  dominia,  consilia  et  laudimia  possessionum  que 
tenentur  in  accapitum  vel  emphiteosim  per  alias  personas  ab 
ipso  nobili  domino  Roussolino,  et  in  futurum  tenebuntur  a  dicto 
domino  Guilhermo  sub  dicto  manso  et  eius  tenemento,  pertinerent 
ad  ipsum  dominum  Guilhermum  et  successores  suos  et  sub  suo 
accapito  debeant  contineri. 

Item  fuit  actum  et  in  pactum  deductum  inter  dictos  dominum 
Rousolinum  et  dominum  Guilhermum  de  Nogareto  quod  si  reddi- 
tus  dicti  mansi  convenienter  extimati  non  valerent  ducentas  et 
quinquaginta  libras  vel  defflciunt  quo  minus  in  recto  redditu 
semper  possint  vaiere,  illud  quod  ex  dictis  ducentis  quinquaginta 
libris  defficit  vel  defâceret  in  futurum,  idem  dominus  Rousoli- 
nus supleat  et  reflciat  eidem  domino  Guilhermo  ex  redditibus 
castri  de  Galasanicis  ad  dictum  dominum  Rousolinum  pertinen- 


202  '  LOUIS  THOMAS. 

tibus,  pro  quo  specialiter  idem  dominus  Rousolinus  dictos  reddi- 
tus  et  proventus  de  Galasanicis  et  generaliter  omnia  bona  sua 
presentia  et  futura  obligavit. 

Preterea  fuit  actum  inter  eos  et  in  pactum  deductum  quod  si 
contingat  in  futurum  ex  paludibus  dieti  mansi  redegi  et  fleri  no- 
valia  et  ex  pratis  vei  terris  cultis  ipsorum  novalium  redditum 
colligi  super  excessentem  redditum  dicti  mansi  ultra  pensionem 
predictam,  ipsi  redditus  dictorum  novalium  fldeliter  extimentur, 
et  deductis  expensis  et  labore  que  facti  vel  habiti  erunt  pro  no- 
valibus  ex  paludibus  faciendis,  tam  in  fossatis,  levatis  quam 
aliis,  secundum  redditum  qui  ex  ipsis  novalibus  colligetur  et  in 
futurum  perpetuo  colligi  poterit,  dicta  pentio  dictarum  ducenta- 
rura  quinquagenta  librarura  turonensium  bonorum  virorum  arbi- 
trio  fldeliter  augmentetur  dicto  domino  Rousolino  et  eius  succes- 
soribus. 

Item  fuit  actura  inter  dictum  nobilem  dominum  Rousolinum  et 
dictum  dominum  Guilhermum  de  Nogareto  quod  dicta  extimatio 
super  excessentem  redditum  ex  dictis  novalibus  débet  fleri  post 
quinque  annos  proximos  semel,  et  iterum  post  alios  quinque 
annos  sequentes,  et  augmentum  pentionis  predicte  quod  juxta 
extimationem  predictam  poterit  statui  iraperpetuum  solvatur 
post  quinque  annos  transactos  singulos  nobili  supradicto  et 
suis. 

Item  promisit  dictus  nobilis  dominus  Rousolinus  dicto  domino 
Guilhelmo  de  Nogareto  solempniter  stipulant!  se  et  suos  succes- 
sores  defifendere  suis  propriis  expensis  in  iure  et  extra  ius  dic- 
tum dominum  Guilhermum  et  successores  suos  quoscumque 
in  predictis  omnibus  et  singulis  per  ipsum  nobilem  supra  con- 
cessis,  et  omne  dampnum  et  expensas  et  interesse  quas  vel  que 
ipsum  dominum  Guilhermum  vel  successores  suos  contingent 
sustinere,  si  dictus  nobilis  vel  successores  sui  defficerent  in 
predictis  vel  aliquo  predictorum,  illud  dampnum  et  expensas 
et  interesse  idem  nobilis  pro  se  et  suis  successoribus  promisit 
dicto  domino  Guilhermo  de  Nogareto  solempniter  stipulant!  pro 
se  et  suis  sucessoribus  quibuscumque  reddere  et  restituere.  cre- 
dendo  inde  eidem  domino  Guilhermo  et  suis  solo  suo  simplici 
verbo  et  suorum  sine  sacramento  et  testibus  et  alio  génère  pro- 
bationis. 

Predicta  autem  omnia  et  singula  attendere  et  complere  promi- 
sit dictus  nobilis  dominus  Rousolinus  se  et  heredes  suos  et  suc- 


LA   VIE   PRIVÉE   DE   GUILLAUME   DE   NOGARET.  203 

cessores  perpétue  observare  et  contra  non  venire  per  se  vel  per 
alium,  injure  vel  extra  jus,  renuncians  scienter  et  consulte  juris 
benefâcio  quo  propter  direptionem  ultra  diraidium  justi  pretii 
contrahentibus  subvenitur  ratione,  juris  benefflcio  canonici  et 
civilis,  scripti  et  non  scripti,  conditi  et  condendi,  omni  juri  per 
quod  posset  contra  predicta  venire  vel  aliquod  predictorura,  pro 
predictis  servandis  obligans  se  et  omnia  bona  sua  presentia  et 
futura. 

Testes  hiis  omnibus  adfuerunt  donainus  Ermengarius  de  Mel- 
gorio  miles,  Bernardus  Pétri  de  Monteulmo  doraicellus.  Ray- 
mundus  Grosi,  Matheus  de  Nogareto  clerici,  et  ego  Bernardus 
Basteri  publicus  Montispessulani  notarius  qui  hinc  inde  rogatus 
hec  omnia  et  singula  scripsi  et  apposui  meum  signum. 

II.  —  Avril  1293.  —  Approbation  par  Philippe  le  Bel  de  l'acquisi- 
tion que  les  enfants  Gros  ont  faite  de  la  rente  que  Guillaume  de 
Nogaret  devait  au  seigneur  de  Lunelpour  Tamarlet. 

[Arch.  du  chat,  do   Marsillargues,    t.   XXIII,  liasse   de  Tamarlet,  n»  2, 
parch.  original.] 

Philippus  Dei  gratia  Francorura  rex.  Notum  facimus  universis 
tam  presentibus  quam  futuris.  quod  cura  magister  Guillelmus  de 
Nogareto  tutor  ut  dicitur  Johannis  et  Raymundi  Grossi  pupillo- 
rura,  flliorum  Raymondi  Grossi  burgensis  quondam  Montispes- 
sulani, nomine  tutorio  predictorura  pupillorum  et  ad  opus  ipso- 
rum  acquisiverit  a  nobili  viro  Rousolino  domino  Lunelli  milite 
dominium ,  consilium  et  laudimium  raansi  et  tenementi  de 
Tamarleto  de  baronia  Lunelli  cura  juribus  et  pertinentiis  ipsius 
mansi  et  cura  pensione  quinque  millium  solidorum  quam  dictus 
magister  Guillermus  pro  se  annuatim  prestare  tenetur  ratione 
rerum  predictarum  quas  ipse  in  emphiteosim  a  domino  predicto 
recepit,  ab  eisdem  Johanne  et  Raymundo  et  eorum  heredibus  et 
successoribus  tenendum  imperpetuum  et  habendum  prout  in  ins- 
trumente publico  super  hoc  confecto  dicitur  plenius  contineri, 
dictique  pupilli  per  suum  tutorera  predictum  cura  gentibus  nos- 
tris  ad  hec  specialiter  deputatis  a  nobis  flnaverint  ut  eis  perpétue 
liceat  res  retinere  predictas,  nos  acquisitionem  et  flnanciam 
predictas  ratas  et  gratas  habentes,  licet  ex  hiis  diminuta  sit  ba- 
ronia predicta,  volumus  et  cencedimus  quod  dicti  Johannes  et 
Raymundus,  quanquam  ipsi  forsitan  de  nobilium  génère   non 


204  LOUIS   THOMAS. 

existant,  eorumque  heredes  et  successores  res  predictas  sub  de- 
veriis  consuetis  pro  illis  prestari  perpétue  teneant,  habeant  et 
possi[de]ant  pacifiée  et  quiète,  quodque  ipsi  per  nos  vel  succes- 
sores nostros  compelli  non  possent  extra  manum  suam  ponere 
res  predictas,  salvo  tamen  in  aliis  jure  nostro  et  jure  quolibet 
aiieno.  Quod  ut  flrmum  et  stabiie  permaneat  in  futurum  presen- 
tibus  litteris  nostrum  fecimus  apponi  sigillum. 

Actum  apud  abbatiam  monialium  béate  Marie  juxta  Meledu- 
num,  anno  domini  millesimo  ducentesimo  nonagesimo  tertio, 
raense  aprili. 


III.  —  Mars  1 303.  —  Lettres  de  Philippe  le  Bel  approuvant  Tachât, 
par  Guillaume  de  Nogaret,  du  domaine  éminent  de  Tamarlet  à 
Jean  Gros. 

[Arch.  du  château  de  Marsillargues,  t.  XXIII,  liasse  de  Tamarlet,  n"  9. 
Papier,  copie  de  1650,  par  le  garde  des  archives  de  la  sénéchaussée, 
d'un  vidimus  du  sénéchal  daté  du  7  janvier  1315.] 

Philipus  Dei  gratia  Francorum  rex.  Notura ,  etc.,  quod  cum 
Guilhelmus  de  Nogareto  miles  noster  dilectus  teneat  in  emphi- 
teosim  perpetuam  aRousolino  quondam  Luneili  domino  mansura 

dictum  Tamarletum  cum  omnibus  possessionibus,  etc 

ad  pensionem  quinque  miilium  solidorum  turonensium  annuatim, 
eamdemque  emphiteosim  nos  non  obstante  diminutione  feodi 
nostri  baronieque  Luneili  dicto  Guilhelmo  et  ejus  successoribus 
duxerimus  conflrmandam,  prout  in  litteris  nostris  inde  confectis 
plenius  continetur;  dictusque  Guilhelmus  tutorio  nomine  Johan- 
nis  Grossi  et  Raymundi  fratrum  pupillorum  suorum  quorum 
tutelam  idem  Guillelmus  gerebat  et  pro  eis  a  dicto  domino  Lu- 
neili acquisierit  dictum  redditum  pensionis  predicte  cum  suis 
juribus  et  pertinentiis,  pensione  unius  oboli  aurei  vel  sex  soli- 
dorum turonensium  ad  helectionem  solventis  dicto  domino  Lu- 
neili retenta,  sub  pactis  et  conditionibus  in  instrumente  inde 
confecto  contentis,  ac  per  acquisitionem  hujusmodi  idem  Guillel- 
mus tutorio  nomine  dictorum  fratrum  nobiscum  flnavit.  nosque 
acquisitionem  ipsam  confirmavimus  non  obstante  feodi  nostri  et 
dicte  baronie  diminutione  et  quod  ipsi  pupilli  ex  nobilibus  nati 
non  erant,  prout  in  litteris  nostris  inde  confectis  plenius  conti- 
netur. 


LA   VIE  PRIVÉE  DE   UUII-LAUME   DE   NOGARET.  205 

Postmodumque  flnita  dicta  tutela  dictorum  fratrum  per  mor- 
tem  dicti  Raymundi  et  per  pubertatem  dicti  Johannis,  ab  eodom 
Johanne  substituto  et  successore  dicto  fratri  suo  idem  Guillel- 
mus  nuper  acquisierit  dictum  redditura  quinque  millium  solido- 
runa  turonensium  quem  nobis  débet  recognoscere  et  pro  eo  nobis 
solvere  uniusoboli  aurei  aut  sex  soiidorum  turonensium  annuam 
pensionem  prout  dictas  Johannes  antea  tenebatur.  Ideo  dictus 
Guillelmus  nobis  recognovit  se  tenere  a  nobis  predicta  modo  et 
forma  predictis  et  nobis  solvere  pro  eis  unius  oboli  aurei  aut 
sex  soiidorum  turonensium  annuam  pensionem  predictam,  quam 
recognitionem  nos  recipimus  ab  eodem,  salvo  in  aliis  jure  nostro 
et  quolibet  aliène.  Quod  ut  flrmum  et  stabile  permaneat  in 
futurum  presentibus  litteris  nostrum  fecimus  apponi  sigillum. 

Actum  Parisius,  anno  domini  millesimo  trecentesimo  secundo, 
mense  martii. 


IV.   —  28  mai  1313.    —  Plaintes   des  habitants  de  Nimes 
contre  défunt  Guillaume  de  Nogarel. 

[Arch.  munie,  de  Nimes,  MM.  15,  n»  13,  parch.  original.] 

Anno  ab  incarnatione  domini  millesimo  trecentesimo  tertio 
decimo  et  die  vicesiraa  octava  maii  domino  Philippo  rege  Fran- 
corura  régnante.  Existentes  Guillelmus  Gombrandi  et  Stephanus 
Vituli  consules  civitatis  et  castri  arenarum  Nemausi  apud  Man- 
dolium  in  presencia  venerabilis  et  discreti  viri  domini  Guillelmi 
de  Roveria  judicis  terre  seu  baronie  nobilis  et  potentis  viri 
domini  Guillelmi  de  Nogareto,  militis  illustrissimi  domini  nostri 
Francorum  régis,  domini  Calvitionis  et  Mandolii  condam,  dixe- 
runt  et  exposuerunt  quod  ofliciales  villarum  de  Mandolio  et  de 
Bolhanicis  et  de  Venranicis,  de  Caysanicis  et  de  Polvereriis  a 
paucis  temporibus  citra  polveragiura  exhegerunt  et  de  novo 
exhigunt  a  transeuntibus  cum  pecudibus  et  aliis  animalibus 
euntibus  ad  montaneas  causa  estivandi  ibidem,  quod  polvera- 
giura consuetum  est  elevari  et  percipi  in  civitate  Nemausi, 
contra  statuta  et  ordinationes  regias  jam  dudum  fàctas  in  sene- 
scalliaBellicadri,  quod  sedit  in  maximum  detrimentum  et lesiouem 
juris  consulum  predictorum,  cum  predicti  consules  usi  sunt  et 
fuerunt  tanto  tempore  quod  cuius  contrarii  memoria  non  extitit 
habendi  et  percipiendi  pro  erbagio  quantum  percipitur  pro  polve- 


206  LOUIS   THOMAS. 

ragio  a  predictis  pecudibus  et  animalibus  transeuntibus  a  par- 
titis  de  Bellagarda  usque  ad  partidas  de  Calmeta  et  de  Gaianis. 
Verum  cuni  propter  dictura  polveragium  quod  percipitur  de 
novo  ibidem,  polveragium  quod  recipitur  in  civitate  Nemausi 
extiterit  diminutum  et  sic  per  consequens  herbagium  quod 
recipiunt  predicti  consules,  requisiverunt  consules  supradicti 
predictum  dominum  judicera  ut  predictum  polveragium  de 
novo  inceptum  in  dictis  villis  debeat  facere  revocare,  cum 
contra  dictas  ordinationes  et  statuta  regia  fuerit  incohatum, 
vel  saltim  prestare  faciat  predictis  consulibus  tantum  pro  erba- 
glo  quantum  ibidem  percipitur  pro  polveragio ,  cum  in  hoc 
defraudentur  jure  suo.  Petentes  de  predictis  sibi  fieri  pubiicum 
instrumentura. 

Et  dictus  dominus  judex  respondit  quod  quantum  in  eo  est  sibi 
non  placet  quod  dictum  polveragium  et  erbagium  levetur  nisi 
ab  antico  sit  consuetum  levari,  et  consulit  Stéphane  Audeberti 
vicario  Mandolii  ibidem  presenti  quod  non  patiatur  levari  dic- 
tum polveragium  nisi  ab  antiquo  levari  consueverit,  saltim 
antequam  dominus  noster  rex  concederet  dictam  terram  Man- 
dolii dicto  domino  Calvitionis. 

Actum  Mandolii.  Huius  rei  testes  sunt  Audebertus  de  Aramone, 
Andréas  Bonarici  notarius,  Petrus  Blogerii  clericus,  Raymundus 
Arneii  domicellus,  Durantus  Agarna  clericus,  Andréas  Blogerii 
jurisperitus  et  ego,  Johannes  de  Asperis.  notarius  publicus  de 
Nemauso  qui  predicta  scripsi  requisitus  et  signavi. 

V.  —  20  mai  1314.  —  Le  sénéchal  de  Beaucaire  reçoit  les  plaintes 
des  habitants  de  Lunel  contre  défunt  Guillaume  de  Nogaret.  — 
Lettre  de  Philippe  le  Bel  sur  ces  plaintes,  du  i9  novembre  1313. 

[Arch.  niimicip.  de  Lunel,  série  P,  liasse  1,  n»  2110  bis,  parchemin.  — 
N"  2114,  autre  expédition  contemporaine  sur  papier.] 

(  Extrait.  ) 

Item  signiflcant  quod  postquam  dominus  Guillelmus  de  Noga- 
reto  miles  regius  acquisivit  mansum  dictum  de  Tamarleto,  dicti 
homines  dicta  patua  et  pascua  more  prestito  tenuerunt  et  possi- 
derunt  libère.  Mox  vero  cum  factus  fuit  in  offlcio  seu  de  consilio 
régis,  motus  aviditate  ampleandi  terram  suam,habendi  et  occu- 
pandi  patua  seu  pascua  supradicta,  iniuste  movit  questionem  et 


LA   VIE  PRIVÉE   DE   GUILLAUME  DE   NOGARET.  207 

controversiam  super  dictis  pascuis  dictis  hominibus  de  Lunello, 
et  cura  suis  callidis  machinationibus  ac  per  irapressionem  quos- 
dam  horaines  de  Lunello  qui  dicebant  se  sindicos  universitatis 
predicte,  cum  re  vera  non  essent  a  dicta  universitate  légitime 
creati  vel  instituti,  induxit  ad  comproraittendum  cura  eo  in  très 
arbitrios  super  questionibus  motis  super  pascuis  supradictis, 
quorum  arbilrorum  duo,  tercio  contradicente,  pronunciaverunt 
et  adiudicaverunt  dicta  pascua  dicto  domino  Guillelrao  de  Noga- 
reto  indebite  et  iniuste,  non  admissis  nec  auditis  rationibus  seu 
defensionibus  dictorum  hominum  de  Lunello,  que  quidem  pronun- 
ciatio,  que  nuUa  [est],  fuit  ut  dicitur  conflrraata  per  errorem 
calliditatibus  et  circumventionibus  domini  Guillelmi  predicti  qui 
tempore  dicte  confirmationis,  si  qua  facta  est,  erat  principalis 
dictator  et  ordinator  in  consilio  regio.  Et  dicti  horaines  nullum 
advocatum  invenire  potuerunt  Parisius  nec  in  toto  regno  Fran- 
cie  qui  eis  contra  dictum  dominum  Guillelraum  vellet  consilium 
irapartiri.  Ratione  cuius  pronunciationis,  annui  redditus  dicti 
Guillelmi  seu  eius  heredum  in  dicto  raanso  de  Tamerleto  de 
juribus  et  pertlnentibus  ad  dictam  universitatem  et  horaines 
eiusdem  in  mille  libris  turonensium  parvorum  et  ultra  sunt 
contra  Deura  et  justiciara  augmentati,  in  grande  preiudicium  et 
diminucionem  juris  regii  indefensi,  quod  ratione  predictorum 
lesum  et  diminutum  in  centum  libras  turonensium  annui  red- 
ditus et  plus,  nec  non  et  in  enormem  lesionera  jurium  dicte 
universitatis  et  dictorum  hominum  de  Lunello  qui  forsitan 
depauperati  sunt  pretextu  dicte  pronunciationis  nec  comode 
vivere  possunt  in  dicto  loco  sine  pascuis  memoratis. 


MELANGES  ET  DOCUMENTS 


LES  QVATRAINS  DV  SEIGNEVR  DE  PYBRAG 

(Suite  et  fin.) 

71 .  Ha,  le  dur  coup  qu'est  celuy  de  l'oreille  ! 
On  en  deuient  quelquefois  forcené, 
Mesmes  alors  qu'il  nous  est  assené 

D'vn  beau  parler  plein  de  doulce  merueille. 

72.  Mieulx  nous  vaudroit  des  aureilletles  prendre, 
Pour  nous  sauuer  de  ces  coups  dangereux  : 
Par  là  s'armoient  les  Pugils  valeureux, 
Quand  sur  l'arène  il  leur  falloit  descendre. 

73.  Ce  qui  en  nous  par  l'oreille  pénètre, 
Dans  le  cerueau  coule  soudainement, 
Et  ne  sçaurions  y  pouruoir  autrement 
Que  tenant  close  au  mal  ceste  fenestre. 

71.  Ceci  revient  à  dii'o  :  La  parole  est  une  arme  terrible,  et  qui 
blesse  d'autant  ;plus  qu'elle  parait  plus  agréable.  Cf.  Fragm.  phil, 
graec,  p.  496,  n»  151.  «  Edyouç  Tî^riyr)  x.outpoTipa  -{kta'^rsr^ç,.  >.  —  Trésor  de 
sentences,  pp.  51,  123,  125,  128,  159.  c<  Pis  vaut  un  coup  de  langue  |  Que 
trois  d'espieux  ne  de  lance.  » 

72.  «  A  bonne  cause  vouloit  Xenocrates  que  l'on  meist  aux  cnfans 
des  aureill«ttes  de  fer  pour  leur  couvrir  et  défendre  les  aureilles,  plus 
tost^u'aux  combattans  à  l'escrime  des  poings,  pour  ce  que  ceux  cy  ne 
sont  en  danger  que  d'avoir  les  aui-eilles  rompues  et  déchirées  de  coups 
seulement,  et  ceux  là  les  mœurs  gastées  et  corrompues.  »  (Plutarque, 
t.  13.  —  Comment  il  faut  oiiïr,  p.  162.) 

73.  «  Aures  tuas  non  cuivis  sermoni  praebe.  »  Epicharme,  dans  Sto- 
bée,  Sert?io  CLXX,  p.  278.  —  «  A  beau  parleur  closes  oreilles.  »  Prdv. 
commmts,  p.  6.  —  c  Le  mortel  arsenic  entre  au  corps  par  la  bouche,  | 
Et  le  cœur  par  l'oreille  engloutit  le  poison.  »  Tablettes,  III,  41. 


MÉLANGES  ET   DOCUMENTS.  209 

74.  Parler  beaucoup  on  ne  peut  sans  mensonge 
Ou,  pour  le  moins,  sans  quelque  vanité  : 
Le  parler  brief  conuient  à  vérité. 

Et  l'autre  est  propre  à  la  fable  et  au  songe. 

75.  Du  Memphien  la  graue  contenance, 
Lors  que  sa  bouche  il  serre  auec  le  doigt, 
Mieulx  que  Platon  enseigne  comme  on  doit 
Reueremment  honorer  le  silence. 

76.  Comme  l'on  voit,  à  l'ouurir  de  la  porte 
D'vn  cabinet  Royal,  maint  beau  tableau, 
Mainte  antiquaille,  et  tout  ce  que  de  beau 
Le  Portugais  des  Indes  nous  apporte, 

77.  Ainsi  deslors  que  l'homme  qui  médite, 
Et  est  sçauant,  commence  de  s'ouurir, 
Vn  grand  thresor  vient  à  se  descouurir, 
Thresor  caché  au  puis  de  Democrite. 

74.  Prov.  de  Salomou,  X,  19;  XIII,  3;  XVII,  28.  —  Bias,  LUI.  (Mo- 
ralistes anciens,  p.  144.)  —  Fragtn.  phil.  graec,  p.  526,  n"  145.  —  Hé- 
siode, Travaux  et  jours,  719-20.  —  Epictète,  Manuel,  XXXIII,  2.  — 
Publius  Syrus,  p.  809,  col.  2,  v.  11;  p.  814,  col.  2,  v.  10.  —  Stobée, 
Ser.  XCIII-XCVI,  pp.  152-8.  —  Caton,  p.  361.  —  Trésor  de  setitences, 
pp.  13,  41  [«  Comme  grand  dormir  n'est  pas  sans  songe,  |  Grand  parler 
n'est  pas  sans  mensonge.  »]  54,  149,  152,  162,  230,  234.  —  Baïf,  Mimes, 
pp.  169  et  239-40.  —  Tablettes,  II,  83.  —  Fénelon,  XII.  —  La  Bruyère, 
De  l'homme,  149.  «  L'on  se  repent  rarement  de  parler  peu...,  maxime 
usée  et  triviale.  » 

75.  Le  Memphien,  c'est  le  lils  d'Isis,  Harpocrate.  II  rectifiait,  si  nous 
en  croyons  Plutarqiie  {Traité  d'Isis  et  d'Osiris),  les  opinions  téméraires 
que  les  hommes  ont  des  dieux,  et  c'est  pour  cela  qu'on  le  représentait 
tenant  le  doigt  sur  les  lèvres  et  recommandant  ainsi  la  discrétion,  le 
silence. 

77.  L'image  est  agréable  et  juste;  elle  rappelle  une  comparaison  dont 
usaient  les  disciples  de  Pythagore.  La  voici,  traduite  en  latin  :  «  Cum 
sapiens  os  suum  tanquam  templum  aperuit,  ibi  animi  bona  velut  simula- 
cra  conspiciuntur.  »  [Fragm.  phiL.  graec,  p.  488,  n»  6.)  —  Le  dernier 
vers  du  Quatrain  demande  à  être  expliqué.  Democrite  assurait  que 
jamais  les  hommes  ne  posséderont  la  vérité,  soit  qu'elle  n'existât  point 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVL  14 


210  ANNALES   DU   MIDI. 

78.  On  dict  soudain  :  voilà  qui  fut  de  Grèce, 
Cecy  de  Rome,  et  cela  d'vn  tel  lieu. 

Et  le  dernier  est  tiré  de  l'Hebrieu, 

Mais  tout,  en  somme,  est  remply  de  sagesse. 

79.  Nostre  heur,  pour  grand  qu'il  soit,  nous  semble  moindre; 
Les  ceps  d'autruy  portent  plus  de  raisins  : 

Mais  quant  aux  raaulx  que  souffrent  nos  voysins. 
C'est  moins  que  rien;  ils  ont  tort  de  s'en  plaindre. 

80.  A  l'enuieux  nul  tourment  ie  n'ordonne  : 
Il  est  de  soy  le  iuge  et  le  bourreau, 

Et  ne  fut  onc  de  Denis  le  Toreau 
Supplice  tel,  que  celuy  qu'il  se  donne. 

(cf.  Cicéron,  Acad.,  I,  ii,  23),  soit  que,  réellement  existante,  elle  demeu- 
rât cachée  à  tous  (Aristote,  Métaphysique,  IV,  v,  8).  Il  exprimait  cette 
seconde  hypothèse  d'une  façon  figurée  :  La  vérité  se  trouve  au  fond  d'un 
gouffre.  «  'Ev  P'JÔw  yàp  ^  àX/iOefr].  »  {Fragm.  phil.  graec,  p.  358.)  Ainsi 
le  puits  de  Démocrite,  c'est  l'abîme  où  sont  enfermées  les  choses  répu- 
tées inconnaissables  ;  mais  Pibrac  ne  pense  pas  que  ce  trésor  puisse  se 
défendre  contre  la  méditation  et  la  science,  garder  éternellement  son 
mystère. 

79.  Epictète,  Manuel,  XXVI  (trad.  Thurot).  «  ...  Quand  l'esclave  d'un 
autre  casse  sa  coupe,  nous  avons  aussitôt  sur  les  lèvres  :  «  Cela  se  voit 
tous  les  jours.  »  Sache  donc  que,  quand  on  cassera  ta  coupe,  tu  dois  être 
tel  que  tu  es  quand  on  casse  celle  d'un  autre.  Applique  cette  réflexion  à 
dea  événements  plus  importants.  Quelqu'un  perd  son  fils  ou  sa  femme? 
Il  n'est  personne  qui  ne  dise  ;  «  C'est  la  condition  de  l'humanité.  »  Mais 
quand  on  fait  cette  perte  soi-même,  aussitôt  de  dire  :  «  Hélas!  que  je  suis 
malheureux  I  »  —  Publius  Syrus,  p.  766,  col.  1,  v.  1.  —  Trésor  de  sen- 
tences, p.  20.  «  A  chacun  sa  propre  douleur  |  Semble  plus  grieve  et  la 
greigneur.  »  —  Baïf,  Mimes,  p.  183.  «  Chacun  son  mal  très  mauuais 
crie.  » 

80.  Fragm.  phil.  graec,  p.  490,  n"  57.  —  Stobée,  Sermo  XCIX,  p.  163, 
7.  —  Tablettes,  II,  68.  «  L'envie  est  un  torment  qui  les  hommes  bour- 
relle.  »  Cette  idée  a  fourni  un  adage  à  la  plupart  des  langues  européen- 
nes. (Cf.  Ida  von  Dûringsfeld,  Sprichwôrter  der  genn.  u.  rom.  spr., 
t.  II,  p.  93,  n"  168.)  —  On  notera  que  ce  n'est  pas  à  Denys  que  l'on  doit 
reprocher  l'invention  du  taureau  d'airain.  Cet  instrument  de  torture  fut, 
dit-on,  imaginé  par  le  fondeur  Périllus  ou  Périlaùs,  qui,  ayant  offert  son 


MÉLANGES  ET   DOCUMENTS.  211 

81.  Pour  bien  au  vif  peindre  la  Calomnie, 
Il  la  faudroit  peindre  quand  on  la  sent  : 
Qui  parjbon  heur  d'elle  ne  se  ressent, 
Croire  ne. peut  quelle  est  ceste  furie. 

82.  Elle  ne  faict  en  l'air  sa  résidence, 

Ny  soubs  les  eaux,  ny  au  profond  des  bois  : 
Sa  maison  est  aux  oreilles  des  Roys, 
D'où  elle  braue  et  flestrit  l'innocence. 

83.  Quand  vne  fois  ce  monstre  nous  attache, 
Il  sçait  si  fort  ses  cordillons  nouer 

Que,  bien  qu'on  puisse  en  fin  les  desnou  r, 
Restent  tousiours  les  marques  de  l'attache. 

84.  luge,  ne  donne  en  ta  cause  sentence  : 
Chacun  se  trompe  en  son  faict  aizément; 
Nostre  interest  force  le  iugement. 

Et  d'vn  costé  faict  pancher  la  balance. 

85.  Dessus  la  loy  tes  iugemens  arreste, 

Et  non  sur  l'homme  :  elle  [est]*  sans  affection, 
L'homme,  au  contraire,  est  plein  de  passion  : 
L'vn  tient  de  Dieu,  l'autre  tient  de  la  beste. 

86.  Le  nombre  sainct  se  iuge  par  sa  preuue, 
Tousiours  égal,  entier  ou  desparty  : 

Le  droict  aussi,  en  Atomes  party, 
Semblable  à  soy  tousiours  égal  se  treuue. 

œuvre  à  Phalaris,  tyran  d'Agrigente,  fut  le  premier  à  subir  ce  supplice 
raffiné.  (Plutarque  (?),  Parallèles  d'histoires  gr.  etrom.,  78;  Diodore  de 
Sicile,  Biblioth.  histor.  [trad.  Miot],  t.  III,  ix,  p.  60.) 

84.  Publius  Syrus,  p.  790,  col.  2,  v.  8.  «  Nemo  esse  judex  in  sua  causa 
potest.  » 

88.  Le  sens  paraît  être  :  De  même  que  le  nombre  saînt  est  reconnais- 
sahle  à  la  qualité  qu'il  a  de  demeurer  toujours  égal,  qu'il  soit  ou  non 


*  Faute  d'ajouter  ce  verbe,  la  phrase  paraîtrait  boiteuse;  d'autre  part, 
la. correction  donne  au  vers  une  syllabe  de  trop,  mais  il  est  à  croire  que 
Pibrac  comptait  affection  pour  trois  syllabes.  Cf.  le  v.  3  du  Quatrain  96. 


212  ANNALES   DU   MIDI. 

87.  Nouueau  Vlysse,  appren  du  long  voyage 
A  gouuerner  Ithaque  en  équité  : 
Maint  vn  a  Scylle  et  Charybde  euité, 

Qui  heurte  au  port,  et  chez  soy  faict  naufrage. 

88.  Songe  long  temps  auant  que  de  promettre  : 
Mais  si  tu  as  quelque  chose  promis, 

Quoy  que  ce  soit,  et  fust  ce  aux  ennemis, 
De  l'accomplir  en  deuoir  te  fault  mettre. 

partagé,  de  même  la  m.oindre  des  actions  justes  renfermée  toute  la 
justice  et  découle  d'un  principe  qui  se  retrouve  entier  dans  chaque 
applicatioyi  qu'on  en  fait.  —  Resterait  à  savoir  quel  est  le  nombre  qu'on 
appelle  saint '?  D'après  Agrippa,  que  cite  dans  ses  notes  M.  Claretie,  ce 
seraient  4  et  ses  multiples.  La  conjecture  est  acceptable,  car,  pour  les 
pythagoriciens,  4  représentait  la  justice;  on  le  regardait  comme  «  le 
nombre  des  nombres  »,  et  lorsque  les  partisans  de  la  secte  voulaient  prê- 
ter un  serment  très  solennel,  ils  juraient  par  la  Tétractys  mystique, 
a  source,  affirmaient-ils,  et  racine  de  l'étornelle  nature  ».  (Chaignet,  II, 
117-118.)  Voilà,  certes,  de  solides  raisons  pour  accorder  à  4  la  sainteté. 
Le  malheur,  c'est  que  3  et  5  ne  sont  guère  moins  saints  que  4  (ibid,,  119), 
et  l'embarras  se  complique  de  ce  fait  que  9  a,  lui  aussi,  un  caractère 
sacré.  {Ibid.,  122-3.)  Est-ce  tout?  Nullement.  Le  nombre  10  entre  en  con- 
currence avec  les  précédents,  attendu  qu'il  figure  «  la  force  interne  et 
incréée  qui  produit  la  permanence  éternelle  des  choses  de  ce  monde  ». 
[Ibid.,  98.)  Quel  rôle!  Aucun,  je  pense,  n'est  plus  beau,  sinon  celui  du 
«  nombre  inefîable  »,  de  l'Un,  cause  avant  la  cause,  et  que  l'on  tient  non 
seulement  pour  un  dieu,  mais  pour  le  dieu  par  excellence.  (Ibid.,  13,  52.) 
On  le  voit  donc,  il  est  difficile  d'établir  quel  est  le  nombre  vraiment  saint, 
et  nous  avons  d'autant  moins  le  droit  de  prêter  sur  ce  sujet  telle  ou 
telle  opinion  à  Pibrac,  que  nous  ne  savons  pas  exactement  à  quelle  source 
il  a  puisé.  La  théologie  chrétienne  avait  appliqué  aux  dogmes  et  aux 
mystères  la  théorie  des  nombres;  les  philosophes  du  xvi°  siècle  s'étaient 
presque  tous  inspirés  des  songes  pythagoriques,  et  l'on  conçoit,  par  suite, 
que  le  vers  des  Quatrains  qui  nous  occupe  peut,  selon  le  texte  dont  il 
dérive,  désigner  des  nombres  bien  différents. 

87.  «  Il  y  a  des  gens,  remarque  Démocrite,  qui  sont  les  maîtres  de  leur 
ville  et  les  esclaves  de  leur  femme.  »  [Fragm.  phil.  graec,  p.  351,  n»  181.) 
La  maxime  grecque  est  plus  bourgeoise  que  la  française  ;  elle  concerne  le 
ménage,  non  la  cité,  mais  l'antithèse  qu'elle  présente  ne  diffère  pas,  au 
fond,  de  celle  que  Pibrac  a  marquée. 

88.  Publius  Syrus,  p.  774,  col.  1,  v.  5;  p.  776,  col.  1,  v.  6;  p.  790,  col.  1, 
V.  1.  —  Trésor  de  sentences,  p.  15.  —  Fénelon,  IIL 


MÉLANGES  ET  DOCUMENTS.  213 

89.  La  loy  soubs  qui  Testât  sa  force  a  prise, 
Garde  la  bien,  pour  goflfe  qu'elle  soit  : 

Le  bon  heur  vient  d'où  l'on  ne  s'apperçoit, 
Et  bien  souuent  de  ce  que  l'on  mesprise. 

90.  Fuy  ieune  et  vieil  de  Circe  le  bruuage; 
N'escoute  aussi  des  Serenes  les  chants, 
Car,  enchanté,  tu  courrois  par  les  champs, 
Plus  abruty  qu'vne  beste  sauuage. 

91.  Vouloir  ne  fault  chose  que  l'on  ne  puisse, 
Et  ne  pouuoir  que  cela  que  l'on  doit, 
Mesurant  l'vn  et  l'autre  par  le  droit, 
Sur  l'éternel  moule  de  la  lustice. 

92.  Changer  à  coup  de  loy  et  d'ordonnance. 
En  faict  d'estat,  est  va  poinct  dangereux, 
Et  si  Lycurgue  en  ce  poinct  fut  heureux, 
Il  ne  fault  pas  en  faire  conséquence. 

93.  le  hay  ces  mots  de  puissance  absolue, 

De  plein  pouuoir,  de  propre  mouuement  : 
Aux  saincts  Décrets  ils  ont  premièrement, 
Puis  à  nos  loix,  la  puissance  toluë. 


92.  «  Car  de  vouloir  entreprendre  de  changer  du  premier  coup  ou  de 
reformer  à  sa  mode  la  nature  de  tout  un  peuple,  il  n'est  ny  facile  ny  seur, 
par  ce  qu'il  y  faut  un  long  temps  et  une  grande  authorité  et  puissance.  » 
(Plutarque,  t.  XV,  Instruction  pour  ceulx  qui  manient  affaires  d'estat, 
p.  107.)  —  Lorsque  Lycurgue  prit  en  main  le  gouvernement  de  Sparte,  il 
trouva  la  ville  troublée  et  dissolue  au  dernier  point.  C'est  pourquoi  il  se 
décida  sur  l'heure  à  «  changer  entièrement  toute  la  police  :  estimant  que 
faire  seulement  quelques  loix  et  ordonnances  particulières  ne  serviroit  de 
rien,  non  plus  qu'à  un  corps  tout  gasté  et  plein  de  toutes  sortes  de  mala- 
dies, rien  ne  proufiteroit  ordonner  quelque  légère  médecine.  »  (Lycur- 
gus,  2  et  7.) 


214  ANNALES   DU    MIDI. 

94.  Croire  léger,  et  soudain  se  résoudre, 
Ne  discerner  les  amis  des  flateurs, 
leune  conseil,  et  nouueaux  seruiteurs, 
Ont  mis  souuent  les  hauts  estats  en  poudre. 

95.  Dissimuler  est  vn  vice  seruile. 
Vice  suiuy  de  la  desloyauté  : 

D'où  sourd  es  cueurs  des  grands  la  cruauté, 
Qui  aboutit  à  là  guerre  ciuile. 

96.  Donner  beaucoup  sied  bien  à  vn  grand  Prince, 
Pourueu  qu'il  donne  à  qui  l'a  mérité, 

Par  proportion,  non  par  equalité. 

Et  que  ce  soit  sans  fouler  sa  prouince. 

97.  Plus  que  Sylla  c'est  ignorer  les  lettres, 
D'auoir  induit  les  peuples  à  s'armer  : 
On  trouuera,  les  voulant  desarmer. 

Que  de  subiects  ils  sont  deuenus  maistres. 

95.  Baïf,  Mimes,  p.  193.  «  Mentir,  c'est  fait  d'vne  ame  vile;  |  Dire 
vray,  c'est  chose  gentile.  » 

96.  Maxime  dangereuse!...  Baïf  partage  l'opinion  de  Pibrac,  et  il  écrit  : 
«  A  Dieu,  la  maiesté  Royale  |  Par  libéralité  s'égale.  »  (Afimes.p.  22.)  Mais 
Montaigne  observe,  avec  plus  de  finesse  et  d'indépendance,  qu'un  prince 
«  n'a  rien  proprement  sien  »;  qu'il  y  a  peu  de  mérite  à  montrer  de  la 
générosité  «  aux  despens  d'aultruy  »  ;  que  l'exercice  de  cette  vertu  est 
vain  «  en  mains  si  puissantes  ».  {Essais,  III,  vi,  pp.  469-70.)  —  Pasquier 
exprime  la  même  idée.  (Lettres,  XII,  8,  col.  344,  C-D.)  Il  voudrait  que 
les  rois  fussent  avares,  et  qu'ils  imitassent  le  bon  Louis  XII,  «  lequel, 
ores  que  des  courtisans  fut  estimé  un  tacquin,  pour  estre  plus  retenu 
en  ses  dons,  si  rapporta-t-il  l'éloge,  après  sa  mort,  de  Père  du  peuple.  » 

97.  Sylla  n'était  pas  un  ignorant,  puisque,  au  témoignage  de  Plutar- 
que,  non  seulement  il  paraît  avoir  eu  du  goût  pour  les  livres  (Sylla,  53), 
mais  il  fut  lui-même  un  écrivain,  et  rédigea  ses  mémoires.  {Ibid.,  75.) 
Cela  étant,  les  mots  «  ignorer  les  lettres  »  ne  peuvent  avoir,  dans  notre 
texte,  leur  sens  ordinaire.  Il  suffit,  pour  les  bien  interpréter,  de  remonter 
à  leur  source.  C'est  une  phrase  où  Suétone  parlant  de  César,  et  désirant 
prouver  à  quel  point  ses  opinions  étaient  tranchantes,  allègue,  entre 
antres,  celle-ci  :  «  SuUam  nescisse  literas,  qui  dictaturam  deposuerit.  » 
(Caesar,  11.)  Comme  il  est  manifeste  que  l'on  peut  abdiquer  la  dictature 


MÉLANGES   ET  DOCUMENTS.  215 

98.      Ry,  si  tu  veux,  vn  ris  de  Democrite, 
Puis  que  le  monde  est  pure  vanité  : 
Mais  quelquefois,  touché  d'humanité, 
Pleure  noz  maux  des  larmes  d'Heraclite. 


99.      A  l'estranger  sois  humain  et  propice. 
Et,  s'il  se  plainct,  incline  à  sa  raison  : 
Mais  luy  donner  les  biens  de  la  maison, 
C'est  faire  aux  tiens  et  honte  et  iniustice. 

100.  le  t'apprendray,  si  tu  veux,  en  peu  d'heure, 
Le  beau  secret  du  bruuage  amoureux  : 
Aymé  les  tiens,  tu  seras  aymé  d'eux; 

11  n'y  a  point  de  recepte  meilleure. 

101.  Crainte  qui  vient  d'amour  et  reuerence 
Est  vn  appuy  ferme  de  Royauté  : 
Mais  qui  se  faict  craindre  par  cruauté, 
Luymesme  craint  et  vit  en  deffience. 


sans  être,  pour  autant,  un  illettré,  on  doit  donner  à  l'expression  que  Sué- 
tone rapporte  une  signification  générale  et  figurée.  César  voulait  dire 
sûrement  que  Sylla  ne  savait  pas  le  pi-emier  mot  de  la  politique,  lui 
qui  avait  renoncé  au  pouvoir,  et  Pibrac,  dont  le  français  est  quelque- 
fois si  latin,  applique  cette  formule  à  ceux  qui  ont  poussé  le  peuple  à 
s'armer. 

98.  Montaigne,  après  avoir  parlé  de  l'ironique  gaieté  de  Democrite  et 
des  larmes  d'Heraclite,  déclare  :  «  l'ayme  mieulx  la  première  humeur, 
non  parce  qu'il  est  plus  plaisant  de  rire  que  de  plorer,  mais  parce  qu'elle 
est  plus  dcsdaigneuse  et  qu'elle  nous  condemne  plus  que  l'aultre.  le  ne 
pense  point  qu'il  y  ayt  tant  de  malheur  en  nous  comme  il  y  a  de  vanité.  » 
[Essais,  I,  L,  p.  1.53.)  Cf.  Baïf,  Mimes,  p.  123. 

99.  Prov.  de  Salomon,  V,  10.  —  Lévitiqiie,  XIX,  33-4;  XXIV.  23.  — 
Phocylide,  XXV.  [Moralistes  anciens,  p.  85.) 

101.  Fragm.  phil.  graec,  Solon,  p.  220.  —  Périandre,  LXVI.  [Mora- 
listes anciens,  p.  147.)  —  Plutarque,  t.  XVI,  Apophth.  des  Lacédémo- 
niens,  p.  7.  —  Publius  Syrus,  p.  777,  col.  1,  v.  8;  p.  788,  col.  1,  v.  10; 
p.  790,  col.  1,  V.  5.  —  Stobée,  Sermo  CIII,  p.  173,  53  [Democrite]; 
iiermo  C F,  p.  177,  81. 


216  ANNALES    DU   MIDI. 

102.  Qui  sçauroit  bien  que  c'est  qu'vn  Diadème, 
Il  choisiroit  aussi  tost  le  tombeau 

Que  d'affeubler  son  chef  de  ce  bandeau  : 
Car  aussi  bien  il  meurt  lors  à  soymesme. 

103.  De  iour,  de  nuict,  faire  la  sentinelle, 
Pour  le  salut  d'autruy  tousiours  veiller, 
Pour  le  public  sans  nul  gré  trauailler. 
C'est  en  vn  mot  ce  qu'Empire  l'appelle. 

104.  le  ne  veis  onc  prudence  auec  ieunesse, 
Bien  commander  sans  auoir  obey, 
Estre  fort  craint,  et  n'estre  point  hay, 
Estre  Tyran,  et  mourir  de  vieillesse. 

105.  Ne  voise  au  bal,  qui  n'ayraera  la  danae^ 
Ny  au  banquet  qui  ne  voudra  manger, 
Ny  sur  la  mer  qui  craindra  le  danger, 
Ny  à  la  Cour  qui  dira  ce  qu'il  pense. 

106.  Du  mesdisant  la  langue  venimeuse, 
Et  du  flateur  les  propos  emmielez, 
Et  du  moqueur  les  brocards  enflelez, 
Et  du  malin  la  poursuitte  animeuse, 

102-103.  Stobée,  Sermo  CIII,  p.  175,  24.  «  Antigonus  rex  cuidam  anui 
ipsum  beatum  praedicanti  :  Si  scires,  inqiiit,  o  mater,  quam  multofum 
malorum  sit  hic  pannus  (diadema  autem  ostendebat),  euin  in  stercore 
jacentem  non  tôlières.  »  —  Publius  Syrus,  p.  814,  col.  2,  v.  11.  —  Mon- 
taigne, Essais,  I,  xLii,  p.  134;  III,  vu,  p.  477.  —  Tablettes,  I,  43.  —  La 
Bruyère,  Souverain,  34. 

104.  Premier  vers,  cf.  Ecoles.,  X,  16.  «  Malheur  à  toi,  terre,  dont  le 
roi  est  un  enfant!  »  —  Esaïe,  III,  4.  —  Stobée,  Sermo  CIV,  p.  176,  45. 
e.  Juventus  cum  summa  potestate...  malum  inexpugnabile  est.  »  [Philo- 
nis.]  —  Baïf,  Mimes,  p.  142.  —  Second  vers,  cf.  Stobée,  Sermo  CIII, 
p.  174,  32.  «  Impera  si  prius  parera  didiceris.  »  —  Troisième  et  qua- 
trième vers,  cf.  Plutarque,  t.  XV,  Apophth.  des  rois  et  capitaines, 
p.  282.  —  Baïf,  Mimes,  p.  18.  «  Du  Tyran  la  mort  est  le  prix.  » 

105-107.  Cette  peinture  de  la  cour  est  assez  élégante  et  sobre.  Le 
même  thème  a  été  développé  par  Pierre  Mathieu  en  de  nombreuses  stro- 
phes qui  paraissent  souvent  trop  faciles,  mais  dont  il  faut  louer  parfois 


MELANGES  ET   DOCDMENTS.  217 

107.  Hayr  le  vray,  se  feindre  en  toutes  choses, 
Sonder  le  simple  à  fin  de  l'attraper, 
Braiier  le  foible,  et  sur  l'absent  draper, 
Sont  de  la  Cour  les  œillets  et  les  roses. 

108.  Aduersité,  desfaueur  et  querelle, 

Sont  trois  essais  pour  sonder  son  aray  : 
Tel  a  ce  nom  qui  ne  l'est  qu'à  deray, 
Et  ne  sçauroit  endurer  la  coupelle. 

109.  Aymé  Testât  tel  que  tu  le  vois  estre  : 
S'il  est  royal,  ayrae  la  Royauté  ; 

S'il  est  de  peu,  ou  bien  communauté, 
Aymé  l'aussi,  quand  Dieu  t'y  a  faict  naistre. 

110.  Il  est  permis  souhaiter  vn  bon  Prince, 
Mais  tel  qu'il  est,  il  le  conuient  porter, 
Car  il  vaut  mieux  vn  tyran  supporter 
Que  de  troubler  la  paix  de  sa  prouince. 

111.  A  ton  Seigneur  et  ton  Roy  ne  te  iouë, 
Et  s'il  t'en  prie,  il  t'en  fault  excuser. 
Qui  des  faneurs  des  Roys  cuide  abuser, 
Bien  tost,  froissé,  choit  au  bas  de  la  roue. 

le  style  imagé,  la  véhémence.  {Tablettes,  I,  80-1;  II,  44-7:  III,  8,  15,  29, 
46,  53,  57.) 

108.  Prov.  de  Salomon,  XIV,  20;  XVII,  17;  XIX,  4,  7.  -  Théognis, 
VII,  XIV,  XXVIII,  XXXI,  LXXII,  LXXIV,  LXXXVI  et  suiv.  {Moralis- 
tes anciens,  pp.  22,  25,  31,  32,  47,  48,  57-8.)  —  Fragm.  phil.  graec., 
p.  350,  n»  164.  —  Publius  Syrus,  p.  766,  col.  2,  v.  9;  p.  805,  col.  2,  v.  10; 
p.  813,  col.  1,  V.  1.  —  Boèce,  Consol.,  III,  v,  36.  — Stobée,  Sermo  CXXXV, 
p.  214,  .35.  «  Ut  aurum  igni  probatur,  sic  erga  amicos  benevolentia  tem- 
pore  cernitur.  »  [Menandri.]  —  Caton,  p.  373.  —  Baïf,  Mimes,  p.  114. 
—  Trésor  de  sentences,  pp.  13,  55,  149,  160.  —  Tablettes,  II,  59,  95  ; 
III,  92. 

109.  Baïf,  Mimes,  p.  144.  «  Le  sage  dit  :  vaille  que  vaille,  |  Du  gou- 
uernement  ne  te  chaille.  |  Tel  qu'il  est  le  faut  embrasser.  »  —  La  Bruyère, 
Souverain,  1. 

110.  Baïf,  Mimes,  p.  147.  «  Ton  Roy,  tel  comme  il  est,  supporte.  » 

111.  Publius  Syrus,  p.  793,  col.  1,  v.  9.  «  Non  tutae  sunt  cum  regibua 


218  ANNALES  DU   MIDI. 

112.  Qui  de  bas  lieu  (miracle  de  fortune) 
En  vn  matin  t'es  haulsé  si  auant, 
Penses  tu  point  que  ce  n'est  que  du  vent, 
Qui  calmera,  peut  estre,  sur  la  brune? 

113.  L'estat  moyen  est  Testât  plus  durable  : 
On  voit  des  eaux  le  plat  pays  noyé, 

Et  les  haults  monts  ont  le  chef  foudroyé  : 
Vn  petit  tertre  est  seur  et  agréable. 

114.  De  peu  de  biens  Nature  se  contente, 

Et  peu  suffit  pour  viure  honnestement  : 
L'homme  ennemy  de  son  contentement 
Plus  a  et  plus  pour  auoir  se  tourmente. 

115.  Quand  tu  verras  que  Dieu  au  Ciel  retire 
A  coup,  à  coup,  les  hommes  vertueux, 
Dy  hardiment  :  l'orage  impétueux 
Viendra  bien  tost  esbranler  cest  Empire. 

116.  Les  gens  de  bien  ce  sont  comme  gros  termes 
Ou  forts  piliers,  qui  seruent  d'arcs-boutans 
Pour  appuyer,  contre  l'effort  du  temps. 

Les  haults  estats,  et  les  maintenir  fermes. 

117.  L'homme  se  plaint  de  sa  trop  courte  vie. 
Et  ce  pendant  n'employé  où  il  deuroit 
Le  temps  qu'il  a,  qui  sufflr  luy  pourroit. 
Si,  pour  bien  viure,  auolt  de  viure  enuie. 

facetiae.  »  —  Trésor  de  sente7ices,  p.  26.  —  Baïf,  Mimes,  p.  28.  «  Le  fol 
à  son  maistre  se  ioue.  » 

112.  Tablettes,  II,  88. 

H3.  Pibrac  résume  ici  la  philosophie  d'Horace.  —  Cf.  encore  Caton, 
p.  365  [«  Tuta  magis  est  puppis  modico  quae  tlumine  fertur.  »]  et  Baïf, 
Mimes,  p.  30. 

114.  Théognis,  XXV,  LXI.  (Moralistes  anciens,  pp.  28-9,  44.) 

116.  Stobée,  Sermo  XI,  p.  19,  56.  «  Boni  viri,  iit  figuratius  dicam, 
columnae  sunt  populum  totum  sustinentes.  » 

117.  Pnblius  Syrus,   p.   776,   col.   2,   v.  9.  —  Sénèque,   A   Luciliiis, 


MÉLANGES  ET   DOCUMENTS.  219 

118.  Tu  ne  sçaurois  d'assez  ample  salaire 
Récompenser  celiiy  qui  t*a  soigné 
En  ton  enfance,  et  qui  t'a  enseigné 
A.  bien  parler  et  surtout  à  bien  faire. 

119.  Es  ieux  publics,  au  théâtre,  à  la  table, 
Cède  ta  place  au  vieillard  et  chenu  : 
Quand  tu  seras  à  son  aage  venu, 

Tu  trouueras  qui  fera  le  semblable. 

120.  Cil  qui  ingrat  enuers  toy  se  demonstre, 
Va  augmentant  le  loz  de  ton  bienfaict. 

Le  reprocher  maint  homme  ingrat  a  faict  . 
C'est  se  payer  que  du  bien  faire  monstre. 

121.  Boire,  et  manger,  s'exercer  par  mesure 
Sont  de  santé  les  outils  plus  certains  : 
L'excez  en  l'vn  de  ces  trois,  aux  humains, 
Haste  la  mort,  et  force  la  nature. 


XCITI.  —  Baïf,  Mimes,  p.  161.  «  La  vie  dure  assez  qui  en  vse.  »   Ibid., 
p.  251.  —  La  Bruyère,  Jugements,  101. 

118.  Stobée,  Sermo  CXXVIII,  p.  202,  44.  «  Tanquam  verna  genitori- 
bus  tuis  servito  :  quid  enim  illis  taie  reddas  quale  ab  illis  accepisti  ?  » 
[Clirysost.]  —  Ibid.,  p.  203,  13.  «  Parentibus  par  gratia  reddi  nullo  modo 
potest.  »  [Philonis.]  —  Trésor  de  sentences,  p.  19.  «  A  Dieu,  à  maistre 
ny  à  parent  |  L'on  ne  peut  rendre  l'equiualent.  »  —  Tablettes,  III,  88. 
«  Rende  l'homme  des  vœux,  fasse  des  sacrifices,  |  Vuide  son  corps  de 
sang  et  ses  coffres  d'argent,  |  Il  ne  reconnoistra  iamais  les  bénéfices, 
Qu'il  a  receu[s]  de  Dieu,  du  Père  et  du  Eegent.  » 

119.  Lévitiqiie,  XIX,  32.  —  Phocylide,  XCII.  {Moralistes  aiiciens, 
pp. 107-8.) — Plutarque,  t.XVl,  Apophth.  des  Lacédémoniens,  pp. 77-8, 106-7. 

120.  Fragm.  phil.  graec,  p.  522,  n»  3.  [Cf.  Stobée,  Sermo  LVIII, 
p.  96,  35.]  —  Sénèque,  Des  bienfaits,  passim.  —  Marc-Aurèle,  Pensées, 
VII,  Lxxiii,  p.  203.  —  Fénelon,  X. 

121.  Vers  dorés,  XVIII.  (Moralistes  anciens,  p.  170.)  —  Baïf,  Mimes 
p.  274,  str.  XIII. 


220  ANNALES   DU   MIDI. 

122.  Si  quelquefois  le  meschant  te  blasonne. 
Que  t'en  chault  il?  Helas!  c'est  ton  honneur  : 
Le  blasme  prend  la  force  du  donneur; 

Le  loz  est  bon,  quand  vn  bon  nous  le  donne. 

123.  Nous  meslons  tout;  le  vray  parler  se  change 
Souuent  le  vice  est  du  nom  reuestu 

De  la  prochaine  opposite  vertu  ; 

Le  loz  est  blasme,  et  le  blasme  est  louange. 

124.  En  bonne  part  ce  qu'on  dit  tu  dois  prendre, 
Et  l'imparfaict  du  prochain  supporter, 
Couurir  sa  faulte  et  ne  la  rapporter, 
Prompt  à  louer  et  tardif  à  reprendre. 

125.  Cil'qui  se  pense  et  se  dit  estre  sage, 
Tien  le  pour  fol,  et  celui  qui  sçauant 
Se  faict  nommer,  sonde  le  bien  auant, 
Tu  trouueras^que  ce  n'est  que  langage. 

126.  Plus  on  est  docte,  et  plus  on  se  deffle 
D'estre  scauant,  et  l'homme  vertueux 
lamais  n'est  veu  estre  présomptueux. 

Voilà  des  fruicts  de  ma  philosophie. 


122.  Prov.  de  Salomon,  XXVII,  21.  —  Fragm.  phil.  graec,  p.  348, 
n"  123;  p.  498,  n»  20.  —  Marc-Aurèle ,  Pensées,  IX,  xxvn,  p.  243.  — 
Baïf,  Mimes,  p.  32.  «  Blasme  par  méchant  est  louange.  » 

125-126.  Prov.  de  Salomon,  XXVI,  12.  —  Fragm.  phil.  graec, 
p,  527,  n»  188,  —  Baïf,  Mimes,  p.  116.  —  Tablettes,  II,  4^. 


MÉLANGES   ET   DOCUMENTS.  221 


TABLE  DES  PRINCIPALES  REFERENCES. 


Baïf.  —  Les  Mimes,  enseignements  et  proverbes,  réimpression  com- 
plète coUationnée  sur  les  éditions  originales  par  Prosper  Blanchemain. 
Paris,  Willem,  1880. 

Bible  (La  sainte),  d'après  la  version  de  J.-F.  Ostervald.  Paris,  1866. 

BoÈCE.  —  Anicii  Manlii  Severini  Boetii  Philosophiae  Co7isolationis 
libri  quinque,  edit.  Rudolphus  Peiper.  Leipzig,  Teubner,  1871. 

Caton.  —  Distiques  de  Caton,en  latin  et  en  vers  français  du  xii«  siècle. 
[Dans  Le  Livre  des  Proverbes  français,  par  Le  Roux  de  Lincy;  2  vol. 
Paris,  Paulin,  1842.] 

Chaignet  (A. -Ed.).  —  Pythagore  et  la  philosophie  pythagoricienne  ; 
2  vol.,  Paris,  Didier,  1874;  2«  édition. 

DiOGÈNE  Laerce.  — De  clarorum  philosophorum  vitis,  dogmatibus 
et  apophthegmatibus  libri  decem.  Parisiis,  Ambrosio-Firmin  Didot, 
M.DCCC.LXII*. 

Épictète.  —  Manuel,  traduction  fr.  par  Fr.  Thurol,  accompagnée 
d'une  introduction,  et  revue  par  Ch.  Thurot.  Paris,  Hachette,  1874. 

Faure.  —  Les  Quatrains  des  sieurs  Pibrac,  Faure  et  Mathieu;  Ensem- 
ble Les  plaisirs  de  la  Vie  rustique,  enrichis  de  figures  en  taille-douce. 
Dédiés  à  Monseigneur  le  Dauphin.  —  A  Paris,  chez  Estienne  Loyson,  à 
l'entrée  de  la  Gallerie  des  Prisonniers,  au  nom  de  Jésus,  M.DO.LXVII. 

Fénelon.  —  La  Sagesse  humaine  ou  le  portrait  d'un  hon)iête 
homme.  [Œuvres  de  M.  de  Fénelon.  Paris,  Franc. -Amb.  Didot,  1787, 
t.  III,  pp.  532-4.] 

Fragmenta  philosophorum  graecorum  collegit,  recensuit,  vertit...  Fr. 
Guil.  Aug.  MuUachius.  T.  I.  Poeseos  philosophicae  caeterorumque  ante 
Socratem  philosophorum  quae  supersunt.  Parisiis,  editore  Ambrosio 
Firmin  Didot,  1860. 

Marc-Aurèle.  —  Pensées,  traduction  d'Alexis  Pierron.  Paris,  Char- 
pentier, 1891. 

Mathieu.  —  Tablettes  de  la  vie  et  de  la  mort.  Voyez  Faure. 

Montaigne.  —  Essais.  Paris,  F'irmin  Didot,  1870. 

Moralistes  anciens  (Collection  des).  —  A  Paris,  chez  Didot  l'aîné  et 
de  Bure,  M.DCC.LXXXIII. 

Plutarque.  —  Œuvres  traduites  du  grec  par  Amyot;'  nouvelle  édition, 
2.5  vol.  Paris,  Janet  et  Cotelle,  1818-1821. 


1.  On  trouve  aussi,  dans  ce  volume,  les  œuvres  de  Janiblique  et  de 
Porphyre  relatives  à  la  vie  de  Pythagore. 


222  ANNALES   DU  MiDL 

PuBLius  Syrus.  —  Sentences.  [P.  759  et  suiv.  du  volume  de  la  collection 
Nisard  qui  renferme  les  œuvres  d'Horace  et  de  Juvénal.  Paris,  Firmin 
Didot,  1883.] 

Sénèque.  —  Œuvres  complètes,  traduction  nouvelle  par  J.  Baillard; 
2  vol.  Paris,  Hachette,  1878. 

Stobèe.  —  loannis  Stobaei  |  Sententiae,  ex  the-  |  sauris  Graecorum  de- 
lectae.  |  Cyri  Theodori  dialogvs,  De  Amicitiae  Exilio  |  opvscvlvm  Plaloni 
adscriptvm,  de  Ivsto.  |  Alivd  eivsdem,  an  virtvs  doceri  possit.  |  Huic 
editioni  accesserunt  |  Eivsdem  loannis  Stobaei  Eclogarvm  |  Physicarvm 
et  etliicarvm  libri  dvo.  |  Item  |  Loci  commvnes  sententiarvm  collecti  '  | 
per  Antonium  et  Maximum  Monachos,  atque  ad  Stobaei  locos  relati  | 
Subiunctis  Capitum,  Auctorum,  Verborum  et  Rerum  |  locupletissimis 
Indicibvs.  |  Avreliae  AUobrogvm.  |  Pro  Francisco  Fabro  Bibliopola  Lug- 
dunensi.  |  M.DCIX.  —  Un  vol.  in-f»  de  632  +  207  +  305  feuillets.  Les 
pages  des  index  ne  sont  pas  numérotées. 

TuÉsoR  DE  Sentences  |  dorées,  dicts,  prouerbes  et  dictons  communs  | 
réduits  selon  l'ordre  |  alphabetic  |  par  Gabriel  Meurier  |  a  Lyon  |  Pour 
Benoist  Rigaud  |  1582.  —  Cet  ouvrage  est  suivi  d'un  recueil  intitulé  : 
Prouerbes  |  communs,  et  |  belles  sentences  |  pour  familièrement  pai'ler 
latin  et  françois  |  à  tous  pro-  |  pos.  |  Très  utiles  et  nécessaires  à  |  toutes 
gens  I  composez  par  I.  Nucerin  |  a  Lyon  |  chez  Pierre  Rigaud  |  en  rue 
mercière  au  coing  de  |  rue  Ferrandiere  |  MDCV. 

Xénophon.  —  Les  ent>-etiens  mémorables  de  Sacrale,  traduction  fr. 
par  E.  Sommer.  Paris,  Hachette,  1877. 

H.  Guy. 


II 


GASCON  SUBIW  «  HAIE  >.. 

M.  Thomas,  dans  ses  Mélanges  d' étymologie  ft^ançaisc 
(p.  141-2),  incline  à  admettre  en  latin  vulgaire  l'existence 
d'une  forme  *sepUe,  dérivée  de  sepes.  C'est  à  * sepHe  que 
remonterait  le  vieux  français  sevil. 

Le  mot  landais  suMiv  «  haie  »  (dans  Arnaudin,  Contes 
landais,  p.  158  et  passim)  confirme  pleinement  cette  hypo- 
thèse. 

Le  changement  de  Ve  protonique  initial  en  u  devant  une 

1.  C'est  à  cette  dernière  partie  de  l'ouvrage  que  je  renvoie  le  lecteur 
chaque  fois  que,  dans  mes  notes,  il  est  question  de  Stobée. 


MÉLANGES  ET  DOCUMENTS.  223 

consonne  labiale  n'est  point  fait  pour  surprendre.  —  Il  est 
vrai  que  d'ordinaire  la  labiale  n'a  pour  effet,  dans  la  plupart 
des  patois  landais,  que  d'arrondir  en  u  la  voyelle  atone  pré- 
cédente, sans  en  reculer  l'articulation  vers  le  voile  du  palais. 
C'est  ce  qui  s'est  passé,  par  exemple,  dans  primarium  rz 
prûmè  (à  côté  de  permè,  premè)\  'trepaliare  =:  trûbalha 
(à  côté  de  tribalha);  cibatam  =z  chùwade  «  avoine  »,  à 
Saugnac- et -Muret  (à  côté  du  béarnais  cibade);  bibere  zz 
bûbé,  à  Sort  (à  côté  de  bébé);  *tripedes  =:  trilbès  «  esca- 
beau »,  à  Labrit. 

De  même,  en  ancien  béarnais,  tt^iibe  «  trêve  »,  représente 
le  germanique  triiva. 

Enfin,  par  un  changement  analogue  de  la  voyelle  i,  tandis 
que  cribella  a  donné  hriwèro  à  Léguevin  (Haute  Garonne), 
cribrum  -^  -ariam  {* cribariam  |?])  a  produit  kt^ûwèyre  à 
Miniizan  (Landes). 

Mais  le  passage,  devant  labiale,  de  e  h  u  n'est  point  non 
plus  sans  exemples  dans  la  région.  Ainsi  s'expliquent  : 
7nemorare  =:  m^imbra,  brumba;  per  amorem  =:  permu, 
prumu  «  parce  que  »;  *demane  rr  dwnaii;  fr.  deviner  rr 
{en)dubina;  *  sepUe  =  subho^. 

La  même  transformation  peut  encore  se  produire  quand 
la  consonne  labiale  précède  la  voyelle  :  verrucam  =r  bur- 
rûge;  vessicam  =  buliike-  Pour  ce  dernier  mot,  ainsi  que 
le  prouve  la  perte  de  Vss  latine,  l'influence  analogique  de 
buha  «  souffler  »  s'est  certainement  exercée  :  à  la  campagne, 
l'usage  est  de  gonfler  les  vessies  de  porc,  pour  les  suspendre 
ensuite  au  plafond  de  la  cuisine.  Rapprocher  d'ailleurs  l'al- 
lemand Blase  «  vessie  ». 

Il  ne  doit  y  avoir  que  fort  peu  de  mots  où  un  e  proto- 
nique soit  passé  à  ii,  sans  qu'il  soit  en  contact  avec  une 
consonne  labiale.  L'on  peut  citer  cependant  resinam  =:  ar- 
ruzi;  mais  il  faut  vraisemblablement  invoquer  ici  l'analogie 
de  arrus  «  rosée  »;  en  effet,  la  résine,  soit  qu'on  la  distille, 

1.  Comparer  un  traitement  analogue  de  Va  protonique  dans  tiibak  = 
tabac.  (Lespy,  Dict.  Béarn.) 

2.  Cf.  un  traitement  analogue  de  1'/'  dans  pin- g  are  =pui'ga,  à  Cazaubon. 


224  ANNALES  DU  MIDI. 

soit  qu'elle  suinte,  au  printemps,  le  long  de  l'arbre,  fait  la 
perle  ou  se  détache  en  gouttelettes  brillantes. 

Pour  en  revenir  au  mot  subite,  il  semble  n'être  usité  que 
dans  un  domaine  assez  restreint.  Je  ne  l'ai  rencontré  que 
vers  Pissos,  à  Saugnac-et-Muret,  vers  Facture-Biganos,  à 
Mimizan,  et  dans  le  livre  de  M.  Arnaudin  (patois  de  Labou- 
heyre).  Ailleurs,  les  termes  les  plus  employés  pour  désigner 
une  haie  sont  plecJi  ou  pleys  dans  le  Béarn  et  la  Ghalosse  ; 
sège  ou  sègo  dans  la  Bigorre,  l'Armagnac  et  le  nord-est  des 
Landes.  Georges  Millardet. 

DE  LA  RÉDUCTION  DU  iV  A   F  EN  GASCON  *. 

La  réduction  du  n  à  y,  qui  s'est,  en  roumain,  opérée  d'une 
manière  régulière  et  constante,  s'est  aussi  produite,  dans  cer- 
taines conditions,  sur  quelques  points  du  domaine  gascon. 

M.  Meyer-Lûbke  2,  citant  la  Revue  des  langues  rorna- 
nes  ^,  écrit  que  «  le  passage  de  n  à  y  doit  se  produire  à 
Foix  ».  En  réalité,  il  ne  doit  point  subsister  de  doute  sur 
l'existence  du  phénomène.  On  peut  en  relever  des  exemples 
dans  toute  une  partie  de  la  Gascogne. 

Il  n'a  point  écliappé  à  l'enquête  de  MM.  Gilliéron  et  Ed- 
mont.  La  carte  105  (bain)  de  ï Atlas  linguistique  mentionne 
les  formes  bay  ou  bat  Çbanetwi)  à  Lannemezan,  Saint- 
Martin  (Gers)  et  Riscle.  La  carte  300  (coin)  donne  huy  à 
Tramezaygues  (Hautes-Pyrénées)  et  à  Lannemezan,  huï  à 
Sariac  (Hautes-Pyrénées),  Saint-Martin  et  Riscle. 

D'autre  part,  l'on  relève  dans  VAlmanac  de  Gascougno 
(1903,  p.  22)  deux  exemples  de  lutj  (lat.  longe)  dans  le 
patois  de  Masseube. 

Le  sud  du  département  du  Gers  et  le  nord  des  Hautes-Py- 
rénées semblent  être  le  foyer  d'où  a  rayonné  le  phénomène. 

Celui-ci  s'est  notamment  propagé  vers  le  nord-ouest.  Il  se 

1.  Nous  désignons  par  n  l'w  mouillée,  par  n  \'n  gutturale  étudiée  ici 
par  M.  Ducamin.  (VII,  337-9.) 

2.  Grmnni.  des  lang.  rom.,  I,  |  512. 

3.  IV,  52. 


MÉLANGES  ET  DOCUMENTS.  ^28 

manifeste,  par  exemple,  avec  intensité  dans  le  canton  de 
Nogaro,  à  Lanne-Soubiran,  où  M.  J.  Ducamin  me  signale  : 
hay  Çbaneum),  kastay  «  châtaigner  »  {*  castaneum) ,  huy 
(cuneum),  pûy  (pugnum),  bézuy  «  besoin  ». 

Un  proverbe  local  fournit  un  exemple  typique  :  l'on  dit 
d'un  homme  qui  a  plus  de  besoins  que  de  ressources  :  qu'a 
mey  de  bezouys  que  de  hausilhos.  Ce  proverbe  repose  sur 
un  jeu  de  mots  entre  bezuy  «  besoin  »,  et  hezuy  «  vouge  » 
(vidûbium)'^.  Le  calembour,  qui  n'a  sa  raison  d'être  que  par 
suite  de  la  complète  similitude  de  son  entre  deux  mots  aussi 
différents  de  sens,  montre  que  la  réduction  de  IT^  à  y  est,  en 
cette  région,  entrée  dans  ce  que  M.  Rousselot  appelle  «  l'élé- 
ment réfléchi  du  langage  ». 

Le  phénomène  apparaît  encore  dans  play  «  il  plaint  » 
(de  plane),  kray  (de  hrane  «  craindre  »),  tay  (de  tangit), 
dans  l'expression  aco  netn  tay  pa  re  zn  «  cela  ne  me  touche 
en  rien,  ne  me  regarde  pas  ». 

La  réduction  s'est  étendue  jusque  dans  le  département 
des  Landes,  du  moins  dans  la  partie  sud-est;  à  Hagetmau  : 
luy,  bay.  On  la  retrouve  plus  au  nord,  à  Saint-Gricq- Ville- 
neuve {luy,  à  côté  de  luyn)^  à  Bougues  {bézuy  «  besoin  », 
cf.  Lou  caoutéroun  dou  Jantoulet,  dans  le  Petit  landais  du 
7  juin  1903),  à  Saint-Justin,  quartier  de  Douzevielle  {éstay, 
étain),  d'où  le  verbe  éstaija.  Au  nord  de  Mont-de-Marsan,  à 
Saint-Avit,  l'on  rencontre  :  la  glèyze  é  lun  de  l'esliôle, 
mais  luy  à  la  fin  de  la  phrase.  A  Mont-de-Marsan  même 
(au  hameau  de  Nonères),  je  trouve  luy  à  côté  de  bayn,  pûyn 
ou  piïyn.  Il  semble  bien  qu'ici  nous  soyons  sur  la  limite  du 
phénomène.  En  effet,  plus  à  l'ouest,  dès  Saint-Pierre-du- 
Mont  et  Uchacq,  Vu  reparaît.  A  Ganenx,  Vert  (canton  de 
Labrit),  les  mots  cités  plus  haut  ont  conservé  Vn. 

Quel  a  été  le  processus  suivi?  Les  formes  bayn,  pûyn 
ou  pûyn,  que  j'ai  relevées  à  Nonères,  par  exemple,  où  le 

1.  L'on  retrouve,  à  Saint-Pierre-du-Mont  (Landes),  le  même  jeu  do  mot 
dans  un  proverbe  un  peu  diflorent  :  lou  hézoun  que  kôpe  la  sège,  litté- 
ralement :  «  le  vouge  coupe  la  haie  b,  c'est-à-dire  :  «  Le  besoin  fait  tra- 
vailler.  » 

ANNALES   DU   MIDI.    —    XVI.  15 


226  ANNALES  DU    MIDI. 

changement  est  en  train  de  se  produire  ',  montrent  que  le  y,, 
suivant  une  tendance  qui  l'attirait  devant  Vu,  s'en  est  peu 
à  peu  dégagé  (Imjn),  et  a  fini  par  se  séparer  tout  à  fait 
de  lui  {iuyn).  Devenue  finale,  Vn  s'est  affaiblie  {luy"),  puis 
est  tombée. 

La  réduction  du  n  n'affecte  régulièrement  que  les  sylla- 
bes finales.  L'on  n'en  rencontre  que  de  rares  exemples  dans 
d'autres  positions.  Encore  ne  sont-ils  point  tous  également 
sûrs.  —  Dans  la  plus  grande  partie  des  Landes,  deux  formes 
existent  pour  désigner  le  fruit  du  pin  franc,  du  pismétché  : 
pinuii  et  piun,  celle-ci  tendant  à  supplanter  celle-là.  Or,  il 
semble  difficile  de  ne  point  considérer  la  seconde  comme 
dérivée  de  la  première,  et  l'une  et  l'autre  comme  issues  du 
latin  * pinionem  (sur  pinça).  La  forme  77iiyune  =r  me- 
gnonne,  que  j'ai  entendue  non  loin  de  Mont-deMarsan,  — 
une  seule  fois,  il  est  vrai,  et  comme  nom  donné  à  un  ani- 
mal, —  semblerait  plaider  en  faveur  de  cette  explication. 

D'autre  part,  la  pomme  du  pin  est  dans  les  Landes  com- 
munément appelée  la  pi,  qui  me  semble  être  une  réduction 
de  piye.  A  Luxey,  à  La-Bastide-d'Armagnac,  à  Saint-Justin, 
on  ne  connaît  que  piye.  Ailleurs,  p^'!/c,  ou  plutôt  pi'Jc  existe 
bien  aussi,  mais  dans  l'expression  piye  de  milhoh  (à  Man- 
ières, canton  de  Labrit,  par  exemple)  pour  désigner  Vépi 
de  maïs,  dont  la  forme,  aux  yeux  des  paysans,  a  de  la  res- 
semblance avec  la  pomme  de  pin. 

Enfin,  le  verbe  haïnha  (dans  Arnaudin,  Contes  landais, 
p.  154),  qui  se  retrouve  ailleurs  (sous  la  forme  s'eslmïiiha), 
et  qui  signifie  «  crier  »,  en  parlant  d'un  chien  qu'on  frappe, 
semble  bien  être  une  réduction  de  lianinka,  dérivé  de  han 
«  chien  »  (cf.  hanuta  «  mettre  bas  »,  en  parlant  de  la  chienne). 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  réduction  du  >1  en  gascon  est  un  fait 
exceptionnel  à  la  médiate.  A  la  finale,  elle  est  à  peu  près 
constante  dans  certaines  régions  et  tend  à  le  devenir  dans 
d'autres.  Elle  est  inconnue  à  l'initiale  {ùaha,  ùaicla.,  etc.). 

Georges  Millardet. 

1.  A  Vert  et  à  Saint-Pierre,  j'ai  aussi  noté  bay",  ce  qui  me  fait  croire 
que  la  réduction  ne  tardera  point  à  se  propager  plus  loin  vers  l'ouest. 


GOMPTKS  RENDUS  CRITIQUES 


A.  Lecler.  Dictionnaire  topographique,  archéologique  et 
historique  de  la  Creuse.  Limoges,  Ducoiirtieiix,  1902  ; 
in-12  de  810  pages. 

Nous  sommes  si  mal  outillés  pour  l'étude  historique  des  terri- 
toires des  différentes  provinces  (Haute-Marche,  Haut-Limousin, 
Poitou,  Combraille,  etc.)  qui  ont  servi  à  former  le  département 
de  la  Creuse',  que  nous  devons  êlre  très  reconnaissants  à  l'abbé 
Lecler  de  la  volumineuse  compilation  qu'il  met  aujourd'hui  à  la 
disposition  du  public,  après  l'avoir  morcelée,  depuis  1883,  dans 
le  Grand  Almanach-annuaire  de  la  Creuse.  Ses  sources  essen- 
tielles sont  le  Dictionnaire  manuscrit  de  feu  Auguste  Bosvieux 
conservé  aux  Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne)  et 
le  Fouillé,  également  manuscrit,  de  feu  l'abbé  Nadaud  (conservé 
dans  la  Bibliothèque  du  Grand  Séminaire  de  Limoges);  mais  il 
faut  reconnaître  qu'il  a  notablement  accru  par  des  recherches 
personnelles  les  renseignemenis  accumulés  j)ar  ces  deux  labo- 
rieux érudits.  Malheureusement,  il  est  loin  d'avoir  épuisé  les 
deux  dépôts  dont  la  connaissance  approfondie  s'imposait  à  lui,  à 
savoir  les  Archives  départementales  de  la  Haute-Vienne  et  celles 
de  la  Creuse,  pour  ne  rien  dire  de  la  Bibliothèque  et  des  Archi- 
ves nationales,  dont  on  ne  peut  pas  lui  reprocher  raisonnable* 
ment  de  n'avoir  pas  profité.  Ce  qui  est  plus  grave,  c'est  qu'il  ne 
s'est  pas  suffisamment  préoccupé  de  dépouiller  les  documents 
imprimés.  C'est  ainsi  que  je  constate  avec  étonnement  que  deux 
assiettes  d'impôts  sur  la  Haute-Marche,  pour  les  années  1441  et 
1477,  publiées  en  1882^,  ne  figurent  jamais  dans  ses  citations. 

1.  Cf.  Annales  du  Midi,  VI,  225  et  suiv. 

2.  La  Haute-Marche  au  XV"  siècle,  d'après  deux  assiettes  d'impôts, 
par  A.  Thomas,  dans  le  Grand  Almanach-aïuiuaire  de  la  Creuse, 
année  1882,  pp.  115424. 


â28  Annales  du  miî)î. 

Enfin,  pour  tout  dire,  cette  compilation  est  faite  sans  une  cri- 
tique suffisante  et  elle  expose  le  lecteur  inexpérimenté  aux  plus 
graves  erreurs.  Voici  quelques  exemples  pris  au  hasard  : 

P.  11.  —  Hugues  le  Brun,  comte  de  la  Marche,  fonde  une 
vicairie  dans  Téglise  de  Saint-Sylvain  d'Ahun...  en  1302  ;  c'est 
lui  qui  fonda  des  châtellenies  dans  les  villes  du  Dorât,  de 
Guéret,  d'Ahun  et  d'Aubusson.  —  Ce  ne  sont  pas  des  châ- 
tellenies, mais  des  chapellenies  ou  vicairies,  que  fonda  Hugues 
le  Brun,  et  l'une  de  ces  chapellenies  ou  vicairies  devait  avoir 
son  siège  dans  la  chapelle  du  château  d'Ahun  et  non  dans 
l'église  Saint-Sylvain. 

P.  16.  —  En  mars  1439,  le  dauphin  Louis  alla  coucher  à  Ajain. 
—  Le  texte  latin  allégué  porte  in  Burgo  Ageduni,  et  il  est 
extraordinaire  qu'un  érudit  limousin  ignore  que  Agedunum 
est  Ahun  et  non  Ajain. 

P.  23.  —  Arnet,  commune  de  Saint-Pardoux  d'Arnet.  —  L'auteur 
ne  s'aperçoit  pas  que  Arnet  est  une  forme  fautive,  et  que  cet 
article  fait  double  emploi  avec  celui  qu'il  consacre  plus  loin 
à  Darnet. 

P.  29.  —  Pardoux  Duprat,  jurisconsulte,  né  à  Aubusson  vers 
1520,  mort  à  Guéret  en  1574.  —  Le  lieu  et  la  date  de  la  mort 
de  P.  Duprat  sont  inconnus  ;  je  ne  m'explique  pas  d'où  pro- 
vient la  double  affirmation  de  l'auteur,  qui  est  manifeste- 
ment controuvée. 

P.  61 .  —  Le  château  de  la  Borne  fut  pris  par  le  roi  de  France  en 
1241.  —  Assertion  absolument  gratuite,  qu'il  fallait  laisser  à 
JouUietton. 

P.  76.  —  C'est  aux  Templiers  que  le  prieuré  de  Bourganeuf 
doit  sa  fondation.  —  Erreur  :  aussi  haut  que  nous  puissions 
remonter,  ce  sont  les  Hospitaliers  que  nous  trouvons  en 
possession  de  Bourganeuf. 

P.  9  ).  —  Bridier  (il  faudrait  écrire  Bridiers),  commune  de  la 
Souterraine  :  Brioderensis  vicus  in  pago  Biturico,  994.  — 
Bridiers  n'a  jamais  appartenu  au  diocèse  de  Bourges  :  Brio- 
derensis  vicus  est  Briare  (Loiret). 

P.  95.  —  Budier,  commune  de  la  Souterraine.  —  Localité  ima- 
ginaire :  il  s'agit  de  Bridiers,  dont  je  viens  déparier. 

P.  127.  —  Champeix,  commune  de  Montaigut-le-Blanc.  —Loca- 
lité imaginaire;  les  actes  analysés  se  rapportent  à  Cham- 
peix, chef-lieu  de  canton  du  Puy-de-Dôme,  prés  duquel  se 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  229 

trouve  une  commune  de  Montaigut-le- Blanc  qui  n'a  rien  à 
voir  avec  son  liomonyme  de  la  Creuse. 
P.  133.  —  En  -1260,  Hugues  le  Brnn,  comte  de  la  Marche,  qui 
habitait   ordinairement    son    château   de  Chénérailles,    en 
sortit  avec  des  troupes  nombreuses  pour  porter  secours  à  un 
parti  d'Anglais  qui  était  assiégé  dans  le  château  de  la  Cha- 
pelle-Taillefer.    —  Assertion    erronée    et  absurde  de  tous 
points,  dont  j'ai  expliqué  l'origine  dans  l'Echo  de  la  Creuse 
du  29  juillet  1876.  M.  l'abbé  Lecler  ne  s'est  pas  contenté  de 
copier  Joullietton,  auteur  de  cette  grosse  bévue;  il  a  trouvé 
bon   de  l'interpoler  en  ajoutant  «  avec  des  troupes  nom- 
breuses ».  Et  c'est  ainsi  que  Terreur  s'augmente  en  se  pro- 
pageant! 
Inutile  de  dire  que  les  fautes  d'impression  pullulent.  Il  y  en  a 
de  peu  ordinaires,  par  exemple  à  la  page  11,  où  Angleterre  doit 
être  lu  Angoulême.  Antoine  Thomas. 

Voyage  au  purgatoire  de  saint  Patrice.  Visions  de  Tin- 
dal  et  de  saint  Paul.  Textes  languedociens  du  xv^  siècle, 
publiés  par  A.  Jeanroy  et  A.  Vignadx.  Toulouse,  Privât, 
1903;  iQ-8°  de  lxi-143  pages.  (Tome  VIII  de  la  l''®  série  de 
la  Bibliothèque  méridionale.) 

Ces  trois  textes  sont  publiés  ici  d'après  un  manuscrit  de  la 
fin  du  xv«  siècle  (Bibl.  munie,  de  Toulouse,  n'^  894)  dont  quelques 
fragments  seulement  avaient  été  jadis  imprimés  par  le  marquis 
de  Castellane.  La  valeur  littéraire  en  est  fort  mince  (ce  sont,  du 
reste,  des  traductions  du  latin),  mais  ils  offrent  au  linguiste  un 
intérêt  assez  considérable'. 

De  V Introduction,  très  développée,  —  son  étendue  même  expli- 
que en  partie  que  les  éditeurs  n'aient  cru  devoir  faire  suivre  le 
texte  d'aucun  commentaire  —  les  chapitres  les  plus  importants 
sont  consacrés  au  Saint  Patrice,  à  tiaimon  de  Perelhos  —  peut- 
être  valait-il  mieux  conserver  la  forme  catalane  du  prénom  Ra- 
mon  —  et  à  la  langue  des  trois  textes. 

Les  renseignements  consciencieusement  recueillis  par  M.  Vi- 


L  M.  Vignaux  a  rédigé  la  note  sur  Perelhos  et  VIndex  des  noms  pro- 
pres; à  M.  Jeanroy  sont  dues  i'hitroditction,  l'établissement  du  texte  et 
le  Glossaire. 


230  ANNALES   DU   MIDI. 

gnaux  sur  Perelhos  suffisent  à  nous  faire  connaître  de  ce  person- 
nage tout  ce  qu'il  est  nécessaire  d'en  savoir.  Dans  la  discussion 
qui  suit  cette  courte  biographie.  M.  Jeanroy  prouve  aisément 
que  la  rédaction  première  du  Saint  Patrice  est  bien  de  Perelhos 
et  soutient  de  très  ingénieuse  façon  cette  opinion,  qu'il  doit 
exister  quelque  part  un  texte  imprimé  de  l'ouvrage  primitifs 

Quant  à  la  partie  philologique  de  l'introduction,  il  faut  en 
louer  sans  réserves  la  sûreté  et  la  clarté.  M.  J.  a  pensé  avec  rai- 
son que  sa  principale  tâche  était  de  déterminer  le  dialecte  des 
textes  publiés  :  à  cet  égard,  on  peut  dire,  après  une  lecture 
attentive  de  son  travail,  qu'il  n'est  aucune  particularité  intéres- 
sante qu'il  ait  négligée.  Sa  conclusion  est  que  les  textes  pro- 
viennent d'une  région  comprenant  à  peu  près  la  partie  ouest  du 
Tarn,  le  nord  de  la  Haute  Garonne,  le  nord-est  de  Tarn-et-Ga- 
ronne,  et  peut-être  aussi  l'extrémité  sud-est  du  Lot.  Il  ne  m'a 
pas  paru  que  sa  discussion,  très  serrée,  laissât  place  à  quelque 
objection  sérieuse,  ni  qu'il  fût  possible  de  chercher  à  préciser 
davantage  sans  s'engager  dans  l'inconnu. 

Les  textes  sont  accompagnés  des  passages  correspondants  des 
rédactions  latines,  qui  suppléent  souvent,  sinon  toujours,  à  l'in- 
suffisance de  la  rédaction  languedocienne.  Celle-ci  laisse  fort  à 
désirer,  et  si  l'éditeur  avait  voulu  entreprendre  d'en  épurer  la 
langue,  il  eût  eu  fort  à  faire  :  il  suffisait  d'en  signaler  les  nom- 
breuses lacunes,  et  à  cela  il  a  apporté  le  plus  grand  soin.  Mais 
pourquoi  certaines  corrections  qui  s'imposaient  n'ont-elles  pas 
été  admises  dans  le  texte  même,  au  lieu  d'être  simplement  indi- 
quées en  notes  parmi  les  variantes  latines?  Telles  sont,  par 
exemple,  les  corrections  Armac  pour  Armanhac  (l.  247),  Cor- 
cages  pour  Cartages  (H 66).  e  avian  [coas  coma]  scot-pios 
(1837),  etc. 

Le  texte  est  d'ailleurs  fort  bien  établi  dans  l'ensemble;  parmi 
les  passages  qui  restent  peu  intelligibles,  il  n'en  est  guère  dont 
l'obscurité  soit  imputable  à  l'éditeur.  Voici  quelques  observa- 
tions de  détail  que  je  lui  soumets. 

Ligne  113:  il  y  a  sans  doute  une  lacune  de  quelques  mots 
après  freja.  —  165.  Il  eût  été  préférable  de  rétablir  la  première 
lettre  du  mot  qui  suit  la  lacune  et  d'imprimer  {B]enezeyt.  — 
666.  Lire  :  et'O  [nutz]  ayssi  coma  los  autt^es,  corr.  indiquée  par  le 

1.  La  note  1  de  la  page  xxii  laisse  subsister  quelque  doute. 


COMPTES  RENDUS   CRITIQUES.  231 

latin.  —  688,  note.  Ce  n'est  pas  en  imaginari  qu'il  faut  corriger 
exagitari  dans  le  texte  latin,  mais  bien  en  excogitari.  —  731.  Au 
lieu  de  supprimer  e  fero,  je  corrigerais  :  e  fe[ri]ro\n\  {■=  frappè- 
rent), qui  convient  ici  très  bieni.  — 733.  ero  [si\  pt^es...  quehom... 
Il  faudrait  tant  et  non  si  [cf.  651,  667,  669,  744,  747,  733,  etc...]; 
du  reste,  le  mot  est  inutile  :  on  trouve  dans  notre  texte,  comme 
dans  tous  les  textes  méridionaux,  que,  marquant  la  conséquence, 
non  précédé  de  tant,  tout  comme  en  latin  ut.  pouriVa  ut.  Cf.  1.  785 
aquela  flama  montava...  que  me  semblava.  —  830.  fan;  corr. 
f[azi]an.  —  867,  note.  Quant  [o]  cove,  o  est  inutile.  —  909.  Lire  : 
ayssi  [coma]  en  aquest  mon.  —  948.  Eran  elas  de  diverssas  colors 
he  (e)  clartat.  Corriger  :  {h]e  \d\e  clartat\z\.  Cf.  deux  lignes  plus 
bas  :  de  dive7'ssas  glorias  e  de  clartaz.  —  994.  Compléter  la 
phrase  ainsi  :  ayssi  coma  em  [anatz]  a  tu.  —  \U0.  Liquesiel,Tpro- 
bablement  faute  de  lecture,  pour  izg'Me;?^^.  Voyez  plus  loin.  — 1241, 
note.  Mayre  n'a  nullement  besoin  d'être  corrigé  et  va  bien  après 
noyriment.  —  1321.  Le  sens  du  mot  C7'uzel  m'échappe  ici;  mais 
l'expression  descendian  soh-e  aq.  cr.,  qui  se  trouve  quatre  lignes 
plus  bas,  ne  permet  guère  d'admettre  le  sens  de  creuset,  donné 
d'ailleurs  comme  douteux  au  lexique.  —  1322.  una  cana  de  spes. 
Bien  que  l'absence  de  l'e  prosthétique  devant  s  consonne  soit 
notée  avec  raison  dans  l'introduction  comme  un  des  traits  par- 
ticuliers à  ces  textes,  j'écrirais  plutôt  d'espes;  car  je  n'ai  pas 
trouvé  ailleurs  la  forme  spes;  nos  textes  ont  partout  espes  (cf. 
1.  562, 1831).  —  1328.  aquel  ferre  [que]  creman  e  caut  era...  Ferre 
pour  fei-r,  fer  est  une  forme  unique  et  surprenante  (relevée 
d'ailleurs  dans  l'introduction).  Je  lirais,  sans  correction  :  aquel 
ferr  e  creman  e  caut  era;  la  répétition  de  e  n'aurait  rien  de  cho- 
quant. —  1697.  Avian  agxdhas  tortas  ayssl  coma  son  moscalhs.  Le 
mot  moscalh  ne  donne  aucun  sens  ici,  qu'on  le  traduise  ^av  frelon 
(donné  avec?  au  glossaire)  ou  par  émouchoir,  ou  par  quelque 
mot  analogue.  Je  corrigerais  en  mosclalhs,  plur.  de  mosclalh 
(hameçon,  crochet),  mot  donné  par  Rochegude  {mousclau  dans 
Mistral)  et  encore  usité  en  Languedoc,  qui  rendrait  bien  compte 
du  terme  tortas  {==  non  pas  :  tordues,  mais  recourbées;  cf.  1.  312, 


1.  [Mais  les  démons  ne  peuvent  avoir  l'idée  de  frapper  les  uns  contre 
les  autres  les  damnés  attachés  à  une  roue;  e  fero,  qui  se  trouve  deux 
lignes  plus  bas,  a  dû  être  écrit  par  anticipation.  Contra  pourrait  avoir 
ici  le  sens  de  «  à  l'envi  de  ».  —  A.  J.] 


232  ANNALES   DU    MIDI. 

OÙ  le  même  adjectif  est  appliqué  à  des  lames  de  couteaux*.)  — 
1725.  Per  aysso,  corr.  :  per  aysso  [que].  —  1959.  Après  del  lor  sup- 
pléer per  so  plutôt  qvLQ  plus  ;  fan  dans  le  sens  absolu  de  agir.  — 
2267.  ansir  f.  d'impr.  pour  ausir.  —  2235,  note.  2225  f.  d'impr. 
pour  2325.  —  2i31.i3or,  f.  d'impr.  pour  per. 

En  somme,  le  texte  môme  comporte  peu  d'améliorations,  l'édi- 
teur en  ayant  tiré,  à  peu  de  chose  près,  tout  le  parti  possible.  En 
revanche,  le  Glossaire  et  VIndex  des  noms  propres  eussent  pu 
être  utilement  retouchés. 

Le  Glossaire  nous  est  donné  comme  contenant  les  «  mots  qui 
peuvent  embarrasser  le  lecteur  peu  initié  ou  intéresser  le  philo- 
logue à  un  titre  quelconque  ».  C'est  plutôt  dans  l'Introduction 
que  les  formes  intéressantes  se  trouvent  enregistrées,  et  avec  la 
plus  grande  exactitude.  Mais  je  ne  suis  pas  bien  sûr  que  des 
mots  comme  amortir,  délectable.,  guitarra,  junctura,  trocheman, 
message,  voire  même  comme  agulho.  brasa,  letanhas,  golfe,  dus- 
sent figurer  dans  un  glossaire  qui  ne  veut  donner  que  l'indispen- 
sable. D'autre  part,  quelques  mots  ou  quelques  sens  —  en  très 
petit  nombre,  il  est  vrai  —  auraient  pu  y  être  relevés  qui  ont 
été  négligés  :  «  cana  =  mesure  de  longueur;  il  aurait  fallu  don- 
ner le  sens  précis  (2'"23);  j'en  dirai  autant  depa^m  (le  même  que 
palma  et  empan  =  15  centimètres).  Voir  P.  Meyer,  G.  de  la 
Barre,  gloss.  sous  \palm.  J'ai  noté  la  prononciation  pam  dans  le 
patois  de  Castelnaudary.  —  Le  mot  cobezeza  devait  être  trans- 
crit au  glossaire  sous  la  forme  qu'il  a  dans  le  texte  :  cobeze[n]ssa 
(1610);  —  clercia  (17M),  qui  paraît  avoir  ici  le  sens  de  clerguada 
(tonsure)  était  à  noter;  —  despachar  (1676),  dans  le  sens  transi  - 
tif  de  presser,  était  aussi  à  relever;—  wî,  dans  le  sens  affirmatif, 
pouvait  être  signalé  (non  pour  la  rareté  du  fait,  bien  entendu, 
puisqu'il  n'est  rien  de  plus  fréquent),  mais  parce  que  le  mot  se 
trouve,  au  moins  dans  un  passage  (2302),  employé  ainsi  après 
l'avoir  été  deux  fois  dans  le  sens  négatif.  —  Semai  (350)  serait 
plus  exactement  traduit  par  benne  que  par  baquet  (voir  dans 
Godefroy,  semale).  —  Enfin,  si  tros  a  bien  le  sens  ordinaire  de 
morceau  1.  714,  il  n'en  est  évidemment  pas  de  même  1.  1811, 
où  il  ne  peut  signifier  que  coups;  Rochegude  donne  trops  = 
coups  (?). 
Pour  ce  qui  est  des  noms  propres,  je  reconnais  que  leur  iden- 

1.  Cf.  plus  bas  la  note  de  M.  E.  Levy. 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  233 

tification  n'était  pas  facile  dans  l'état  de  déformation  où  ils  se 
présentent  presque  tous;  il  me  paraît  cependant  que  V Index  n'en 
a  pas  été  dressé  avec  tout  le  soin  désirable. 

Une  note  du  texte  (161)  «  Guiena,  corr.  Genova  »,  renvoie  à 
l'Index,  où  l'on  ne  trouve  ni  Genova  ni  Guiena.  —  Dandela  (272) 
n'est  pas  identifié.  C'est  Glendaloug  (qui  se  présente  sous  d'au- 
tres formes  :  Glendelac,  Glandalack.  Glandela).  ville  du  comté  de 
Wicklow,  ancien  évêché  suflFragant  de  Dublin,  uni  à  Dublin  en 
1215  (v,  de  Mas-Latrie  :  Très,  de  ch?'onoî.  col. ,2016).  C'est  précisé- 
ment après  Belvi  (identifié  justement  avec  Dublin  par  l'éditeur) 
que  l'auteur  mentionne  Dandela.  —  Daneli  (M 04)  est  sans  doute 
une  transcription  fautive  de  Dubli  (Dublin);  cette  identification 
est  encore  plus  facile  à  admettre  que  celle  de  Belvi  et  de  Dubli. 
(225).  L'auteur  dit,  en  effet,  qu'il  se  rend  par  mer  de  Daneli  à 
Holyhead;  or,  Dublin  est  précisément  en  face  de  Holyhead.  — 
Liquesiel  (Il  10)  :  j'ai  dit  qu'il  fallait  lire  Liquefiel.  C'est  Lichfield 
en  Staffordshire,  siège  d'un  ancien  évêché  suffragant  de  Cantor- 
béry;  il  s'y  trouvait  un  monastère  de  l'ordre  des  Augustins 
(abadia  de  monges  nègres,  dit  précisément  l'auteur.  Voir  de  Mas- 
Latrie,  op.  cit.,  col.  1949).  Qu'on  trace  une  ligne  presque  droite 
du  N.-E.  au  S  -E.  de  Holyhead  à  Douvres  par  Londres,  elle  pas- 
sera par  Lichfield  :  on  a  ainsi  exactement  l'itinéraire  indiqué 
par  le  texte.  —  dinar  (2343)  n'est  pas  Cloyne,  comme  l'éditeur  le 
répète  après  Wagner  (au  mot  Malechias),  mais  Clonard  (autre 
forme  :  Cluainiard)  évêché  d'Irlande,  suffragant  d'Armagh,  réuni 
au  xii«  siècle  à  l'évêché  de  Meath.  (Voir  de  Mas-Latrie,  op.  cit., 
col.  2017.) 

Le  nouveau  volume  de  la  Bibliothèque  méridionale  n'en  est  pas 
moins  dans  son  ensemble  une  excellente  publication,  puisque, 
des  éléments  qui  le  constituent,  ceux  auxquels  les  éditeurs  atta- 
chaient, j'imagine,  et  avec  raison,  le  plus  d'importance,  —  j'en- 
tends la  partie  philologique  de  l'introduction  et  l'établissement 
du  texte,  —  ne  méritent  guère  que  des  éloges  >. 

P.  Andraud. 


1.  Je  n'ai  pu  fournir  aucun  renseignement  sur  le  Depetralata  qui  a 
inscrit  son  nom,  sous  la  date  du  18  mai  1466,  à  la  fin  du  manuscrit  de 
l'ouvrage  dont  il  vient  d'être  question.  M.  Ed.  Forestié,  dans  un  compte 
rendu  de  notre  publication  qu'il  a  présenté  à  la  Société  archéologique  de 
Montauban  {Bulletin  archéologique  de  Tarn-et-Garonne,  1903,  p.  302-3), 
a  signalé,  d'après  un  document  sur  lequel  il  ne  donne   aucune   indica- 


234  ANNALES    DU    MIDI. 

Charles  Carayon.  L'Inquisition  au  XIII«  et  au  XIV"^  siècle. 

Mazamet,  1903;  1  vol.  in-8<»  de  116  pages. 

Lo  dessein  de  ce  petit  livre  n'apparaît  pas  clairement  au  pre- 
mier abord.  S'il  prétend  être  une  contribution  originale  à  l'his- 
toire de  l'Inquisition,  il  manque  un  peu  de  la  précision  méticu- 
leuse, de  la  vigueur  d'exposition  et  surtout  de  la  richesse 
d'information  qu'exigent  les  œuvres  d'érudition  ;  car  il  est  cons- 
truit avec  des  matériaux  judicieusement  empruntés  à  des  ouvra- 
ges connus  plutôt  qu'avec  des  documents  inédits.  S'il  veut  faire 
œuvre  de  vulgarisation,  il  manque  peut-être  d'étoffe  et  de  suite  ; 
car  il  est  trop  épisodique.  Tout  ce  qui  y  est  dit  des  origines 
de  l'Inquisition  et  des  faits  essentiels  de  l'histoire  générale  reste 
trop  superficiel,  et  je  pense  qu'un  lecteur  non  averti  par  des  étu- 
des antérieures  aurait  peine  à  le  bien  entendre.  Au  reste,  116  pa- 
ges pour  retracer,  avec  force  notes  et  références,  l'histoire  de 
l'Inquisition  à  Carcassonne,  des  origines  à  1703,  c'est  peu.  Dans 
sa  préface,  M.  C.  nous  dit  qu'il  s'est  proposé  «d'étudier  l'activité 
du  tribunal  inquisitorial  de  Carcassonne  ».  C'était  là,  en  effet, 
un  fort  beau  sujet,  mais  il  no  me  paraît  pas  que  l'auteur  s'y  soit 
véritablement  attaché.  Quoi  qu'il  en  soit,  voici  comment  est  dis- 
posé son  travail  :  après  une  courte  préface,  plutôt  bibliogra- 
phique, vient  une  «  vue  générale  »  sur  les  causes  et  les  origines 

tion  l'existence  d'un  .Jean  de  Peyrelade  qui  fut,  de  1485  à  147:3,  titulaire 
du  doyenné  conventuel  de  Cayrac,  près  Réalville  (à  seize  kilomètres 
N.-N.-O.  de  Montauban).  Le  sceau  de  ce  personnage  se  trouve  dans  la 
riche  collection  de  M.  le  chanoine  Pottier  et  témoigne,  dit  M.  Forestié, 
par  ses  dimensions  et  le  soin  apporté  à  la  gravure,  de  goûts  vraiment 
artistiques.  M.  F.  a  exprimé  l'hypothèse  que  ce  doyen,  évidemment 
lettré,  était  non  seulement  le  copiste  du  ms.,  mais  l'auteur  des  traduc- 
tions qu'il  contient.  Si  cette  conjecture  est  fondée,  je  ne  me  suis  donc 
pas  trompé  en  localisant  la  patrie  du  traducteur  dans  le  périmètre  qui 
a  été  indiqué  plus  haut  et  qui  comprend  le  nord-est  de  Tarn-et-Garonne  : 
c'est  précisément,  en  effet,  au  nord-est  de  Tarn-et-Garonne  que  se  trouve 
Cayrac. 

Je  joins  ici  quelques  notes  qui  m'ont  été  communiquées  par  M.  E. 
Levy  -.  211  ben  foi-t  pouvait  rester;  cf.  Suppl.  Wœrtb.  s.  v.  fort,  15.  — 
1275  may]  1.  my,  —  1344  corriger  plutôt  pcD'tiscam  qne  partam  ;  cf.  1740. 
— 1844.  Corr. potz.  —  2076  bossas]  corr.  baissas.  —  Glossaire  clas,  «glas» 
et  non  «  cloche  ».  —  Moscalh  corr.  mosclalh,  ce  hameçon  »  ;  cf.  mosclulh, 
humus  dans  le  Floretus  [Revue  des  l.  rom.,  XXXV,  74)  et  Elucidari, 
ibid.,  XXXIII,  313,  1.  14.  —  Maratda;  corr.  maracda.  —  Rodet,  non 
«  rayon  »,  mais  «  jante  »  ;  cf.  esp.  rodete.  —  A.  J.] 


COMPTES  RENDUS  CRITIQUES.  235 

de  l'Inquisition;  puis  l'histoire  du  tribunal  inquisitorial  de  Car- 
cassonne.  Elle  est  divisée  en  deux  périodes,  l'une  est  dite  «  pé- 
riode de  première  activité  »,  l'autre  «  période  de  lutte  ».  La  pre- 
mière est  en  somme  ramenée  à  trois  faits  :  l'institution  du 
tribunal,  le  massacre  d'Avignonet.  l'annexion  du  comté  de  Tou- 
louse au  royaume  de  France.  La  seconde,  divisée  en  neuf  chapi- 
tres, a  trait  surtout  à  la  double  insurrection  de  Carcassonne 
contre  l'Inquisition  et  à  Bernard  Délicieux.  Une  troisième  partie 
relate  le  procès  de  Bernard  et  donne  l'analyse  d'un  «  acte  de 
foi  ».  Enfin,  après  avoir  sommairement  retracé  les  destinées  du 
tribunal  jusqu'à  la  mort  du  dernier  inquisiteur  en  1703,  M.  C.  con- 
clut sur  les  effets  de  l'Inquisition  en  Languedoc  et  particulière- 
ment à  Carcassonne. 

Au  cours  de  la  lecture,  quelques  détails  m"ont  frappé;  je  les 
signale  dans  l'ordre  même  que  suit  le  livre.  Tout  d'abord, 
M.  C.  me  paraît  avoir  une  tendance  à  trop  dater,  dans  la  pre- 
mière partie,  les  phénomènes  généraux  qu'il  décrit.  Il  est  très 
difficile  de  dire  quand  naquit  le  catharisme,  car  il  a  ses  ori- 
gines obscures  dans  l'Eglise  primitive  -.  les  premiers  siècles  de  la 
foi  ont  eu  leurs  purs  et  leurs  parfaits.  Malgré  l'autorité  de 
Schmidt,  il  est  impossible  de  soutenir  que  le  catharisme  n'est 
pas  une  hérésie  chrétienne;  il  l'est  au  même  titre  que  toutes  les 
hérésies  gnostiques,  qui  sont,  tout  comme  lui,  des  systèmes  mé- 
taphysiques désireux  de  s'arranger  avec  l'Evangile  :  la  mission 
des  bonsJiommes  est,  par  essence,  gnostique.  En  feuilletant  les 
catalogues  d'hérésies  que  rédigèrent  saint  Irénée,  Hippolyte, 
saint  Augustin,  Epiphane,  Philastrius,  on  rencontrerait  les  ar- 
chétypes des  Vaudois  et  des  Cathares.  M.  C.  nous  dit  (p.  40)  que 
l'introduction  de  la  torture  dans  la  procédure  inquisitoriale  date 
de  l'échec  de  la  plainte  contre  Jean  Galand,  c'est-à-dire  de  1280 
ou  à  peu  près;  ce  n'est  pas  exact.  Sans  parler  même  d'actes 
d'Innocent  IV  (en  1252),  d'Alexandre  VI  (en  1259),  de  Clément  IV 
(en  1265).  qui  en  ont  autorisé  l'application,  la  torture  existe  dans 
la  procédure  inquisitoriale  avant  l'insuccès  de  la  requête  contre 
Galand.  puisque  nous  la  trouvons  mentionnée  dans  le  texte 
même  de  la  supplique  :  Nonnulli  vero  ponuntur  in  equaleis,  in 
quibus  quamplurimi  per  tormentorum  acerbilatem  corporis  desti- 
tuuntur  membris  et  impotentes  co7'poris  redduntur  omnino... 
M.  C.  paraît  attacher  une  grande  importance  à  un  complot  qui 
aurait  été  fomenté  contre  les  registres  de  l'Inquisition;  j'avoue 


236  ANNALES   DU   MIDI. 

qu'après  Lea  (II.  p.  69  de  la  trad.)  et  le  travail  de  M.  Vidal,  Un 
inquisiteur  Jugé  par  ses  victimes  (Paris,  4  903,  p.  9),  je  n'y  crois 
guère  :  j'inclinerais  à  y  voir  une  machination  montée  de  toutes 
pièces  pour  frapper  quelques  suspects.  Le  mouvement  de  Bernard 
Délicieux  prouve  combien  l'Inquisition  est  faible  dès  que  le  bras 
séculier  lui  fait  défaut  et  à  quel  point  elle  est  détestée  en  Lan- 
guedoc, mais  il  n'est  nullement  étrange  que  Philippe  le  Bel  l'ait 
soutenue  comme  il  l'a  fait;  elle  lui  paraissait  certainement  en 
soi  une  institution  excellente  et  il  ne  lui  demandait  que  de  ne 
pas  contrarier  sa  politique.  En  relatant  le  procès  de  Bernard 
Délicieux,  M.  C.  a  bien  fait,  car  il  est  des  plus  suggestifs,  mais  il 
est  fâcheux  qu'il  ait  eu  l'air  de  le  présenter  comme  un  procès 
type  de  l'Inquisition,  puisqu'il  est  exceptionnel  et  beaucoup  plus 
pontifical  qu'inquisitorial  (une  courte  note  ledit).  Mieux  eût  valu 
prendre  un  exemple  courant,  et,  par  suite,  caractéristique,  tel 
que  le  Sermon  que  M.  C.  raconte  plus  loin. 

En  somme,  son  étude  demeure  en  soi  intéressante  et  utile,  mal- 
gré des  indécisions,  car  elle  est  agréable  à  lire  :  elle  contribuera 
pour  sa  part,  et  plus  qu'un  gros  livre,  à  propager  la  connais- 
sance de  faits  bien  établis  et  d'idées  scientifiquement  éprouvées. 
Il  est  bon  que  personne  n'ignore  ce  que  fut  un  «  acte  de  foi  »  et 
dans  quel  esprit  instrumenta  l'Inquisition.  C'est  peut-être  pour 
avoir  en  efi'et  pensé  que  cela  était  bon  que  M.  C.  nous  a  donné 
son  livre;  il  doit  en  être  remercié.  Ch.  Guignebert. 

M.  BoDDET.  Registres  consulaires  de  Saint-Flour,  en 
langue  romane  avec  résumé  français  (ISTG-liOS),  précé- 
dés d'une  préface  de  A.  Thomas.  Paris,  Champion;  Riom, 
Jouvet,  1900;  in-4'>  de  xxvii-358-60  pages. 

Ce  n'est  'pas  aux  lecteurs  des  Annales  qu'il  faut  démontrer 
l'utilité  de  publications  comme  celle-ci.  De  tous  les  documents 
d'archives,  les  comptes  consulaires  sont  assurément  ceux  qui 
contiennent  les^.renseignements  les  plus  variés  :  toujours  fort 
importants  pour  l'histoire  économique,  morale,  sociale,  ils  le  sont 
souvent  aussi  pour  l'histoire  politique  et  militaire,  dont  ils  ont 
déjà  permis  de  préciser  ou  de  dater  exactement  maints  détails. 
Ceux  de  Saint-Flour,  affirme  M.  Boudet,  forment  la  collection 
la  plus  riche  qui  existe  en  France  :  elle  comprend,  pour  le  moyen 
âge,  cinquante-huit  registres,  allant,   avec  quelques    lacunes, 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  287 

de  1376  à  1467*.  M.  Boudet  publie  ou  analyse  ici  cinq  de  ces  regis- 
tres^,  qui  sont  certainement  parmi  les  plus  intéressants;  ils  se 
rapportent  en  effet  à  une  des  époques  les  plus  troublées  et  les 
plus  dramatiques  de  notre  histoire  :  on  peut,  en  les  lisant,  revi- 
vre au  jour  le  jour,  pendant  ces  cinq  années,  la  vie  de  cette  vail- 
lante petite  ville,  sentinelle  avancée  du  Midi,  «  une  des  clefs  du 
royaume  devers  les  parties  de  Guyenne  »  3,  qui,  pendant  vingt 
ans,  fut  le  point  de  mire  des  innombrables  compagnies  anglaises 
établies  dans  les  châteaux  du  voisinage;  ce  que  cette  situation 
valut  aux  Sanflorains  de  vexations  et  de  misères,  la  somme 
d'efforts,  parfois  héroïques,  qu'elle  leur  imposa,  c'est  ce  que  je  ne 
puis  dire  ici,  et  ce  qu'on  peut  voir  tout  au  long  dans  les  «  regis- 
tres »,  dont  certaines  pages  ont  la  puissance  évocatrice  d'un 
tableau  de  Michelet,  avec  l'absolue  précision  et  l'authenticité 
des  détails  en  plus. 

Au  point  de  vue  historique,  la  publication  de  M.  B.  est  digne 
de  tout  éloge,  et  mérite  pleinement  la  distinction  qui  lui  a  été 
accordée  par  l'Institut  :  l'annotation,  qui  pourtant  est  d'une 
variété  et  d'une  richesse  extraordinaires,  n'a  point  suffi  à  M.  B. 
pour  nous  communiquer  tous  les  renseignements  qu'il  possédait 
sur  le  sujet;  il  en  a  versé  le  surplus  dans  une  série  d'excursua, 
où  sont  traités  d'une  façon  magistrale  et  probablement  définitive 
quelques  points  de  l'histoire  d'Auvergne  au  xiV  siècle;  je  signa- 
lerai particulièrement  la  longue  note  sur  Mérigot  Marchés,  où 
sont  rectifiées  les  nombreuses  erreurs  de  Froissart  (p.  212-31)  et 
celles  sur  les  «  Comtours  »  d'Auvergne  (p.  232-30)  et  le  «  Tuchi- 
nat  »  dans  le  diocèse  de  Saint-Flour  (p.  320-50).  Nous  avons  là, 
évidemment,  le  résultat  de  plusieurs  années  de  fouilles  patien- 
tes et  méthodiques  poursuivies  dans  les  Archives  publiques  et 
privées.  M.  B.  doit  avoir  entre  les  mains  bien  d'autres  trésors, 
qu'il  ne  voudra  pas  sans  doute  dérobera  notre  curiosité;  qu'il  se 
hâte  de  nous  les  livrer;  les  érudits  ne  lui  marchanderont  pas 
leur  reconnaissance  •*. 

1.  Disons  en  passant  que  la  collection  d'Albi  est  plus  riche  encore,  car 
elle  compte  4-3  registres,  de  1359  à  1443,  et  elle  est  complète  à  partir  de 
cette  dernière  date.  * 

2.  Le  dernier  est  celui  de  1383-4  ;  la  date  de  1405,  que  porte  le  titre,  est 
sans  doute  l'annonce  implicite  d'un  second  volume. 

3.  Rapport  de  .Jean  Sayssot,  de  Saint-Flour,  sur  les  déprédations  des 
routiers  (p.  296). 

4.  Le  volume  est,  de  plus,  d'un  maniement  fort  commode  :  des  «  man- 


238  ANNALES   DU    MIDI. 

Mais,  il  faut  bien  l'avouer,  la  partie  philologique  de  l'œuvre 
n'a  pas  été  traitée  avec  le  même  soin;  aussi  —  et  M.  B.  ne  m'en 
voudra  pas  de  cette  franchise  —  elle  est  loin  d'être  aussi  réus- 
sie i.  Il  y  a  dans  ces  documents  une  foule  de  mots  intéressants, 
qu'il  eût  été  indispensable  de  réunir  dans  un  index;  plusieurs 
ne  sont  pas  traduits;  certaines  interprétations  sont  vagues, 
inexactes,  non  appuyées  de  preuves;  enfin,  et  c'est  ici  mon  re- 
proche le  plus  grave,  on  sent  qu'on  ne  peut  se  fier  absolument 
aux  lectures  de  M.  B.  Ce  dernier  point  a  été  démontré  surabon- 
damment par  M.  P.  Meyer  dans  un  récent  compte  rendu 2;  et 
M.  B.  lui-même  avait  implicitement  reconnu  ses  torts  en  don- 
nant un  très  long  en-alum,  qui  paraît  avoir  été  dressé  avec 
l'aide  d'un  romaniste  ou  paléographe  plus  exercé  (pp.  353-8); 
mais  cet  erratum  même  est  loin  d'être  complet;  il  reste  encore 
dans  le  texte  bien  des  formes  douteuses  ou  certainement  fauti- 
ves. Certaines  corrections  se  présentent  d'elles-mêmes  à  l'esprit 
du  lecteur  compétent;  il  suffit  souvent  de  remplacer  l'une  par 
l'autre  les  lettres  qui  se  ressemblent  le  plus  dans  les  manuscrits 
du  xiv«  siècle,  /par  s,  c  par  t,  n  par  m,  ou  réciproquement,  de 
résoudre  les  abréviations  ou  les  tildes  pour  obtenir  des  formes 
excellentes  :  au  lieu  de  assolât  (p.  182).  il  faut  lire  affolai;  de 
guassas  (266).  guaffas  («  crochets  »),  de  so  (272),  fo.  —  P.  147  et  183, 
M.  B.  s'étonne  de  voir  figurer  un  corser  et  un  rossi  feu,  se  disant 
avec  raison  qu'il  n'y  a  pas  lieu  de  mentionner  la  robe  du  cheval 
en  question  et  que  la  forme  feu  serait,  au  reste,  bien  étonnante  : 
il  faut  simplement  lire  seu  («  sien  »);  c'est  par  cette  forme  qu'il 
faut  remplacer  le  sen  de  la  p.  83.  —  Aux  pp.  (J9,  152,  176,  je  suis 
persuadé  qu'il  faut  rétablir  c  au  lieu  de  t  dans  hat,  fot,  vent.  — 
Au  lieu  de  asequransa  (103),  lire  aseguransa  (cf.  asseguranza,  1 04); 
de  sequir  (105),  seguir;  de  segueron  (264),  serqueron  ;  de  cosla  (147 
et  pass.)  consla;  de  amerniet  (155),  amer  met  ;  de  paz  (275),  _pa/2,- 
de  lailalz  (258),  laisatz.  —  P.  165,  au  lieu  de  chanthago,  je  soup- 


chettes  »  résumant  chaque  article  permettent  à  tout  lecteur  de  prendre 
une  connaissance  suffisante  des  documents;  et  l'on  peut,  grâce  à  un  index 
très  développé,  retrouver  immédiatement  le  renseignement  cherché. 

1.  Cette  infériorité  est  d'autant  phis  regrettable  que  les  textes  publiés 
présentent,  au  point  de  vue  linguistique,  un  plus  vif  intérêt.  Cet  intérêt 
a  été  fort  bien  mis  en  lumière  dans  la  piquante  et  instructive  préface  de 
notre  directeur  honoraire. 

2.  Ro7na7îia,  XXXI  (1902),  148. 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  239 

çonne  que  le  ms.  porte  chanbagho  («  jambon  »)  ou  peut-être,  par 
une  distraction  du  scribe,  chanbhago ;  aidet  (176)  doit  être  ardet 
(ou  cazec),  mole  (22)  et  a  fe  (2  2)  moU  et  a  fi,  cerlos  (106)  certas, 
levaron  (80)  leveron,  doliam  (164)  dolian;  si  ces  formes  (et  une 
foule  d'autres  analogues)  sont  vraiment  dans  le  manuscrit,  il  ne 
fallait  pas  hésiter  à  les  corriger. 

Inversement,  M.  B.  fait  suivre  d'un  sic  ou  d'un  point  d'inter- 
rogation des  formes  parfaitement  correctes  :  laun  (25)  (fréquent 
pour  Vun  dans  toute  la  région  du  Centre  et  en  Languedoc^, 
Auveimhe  (29),  que  foro  de  (43)  au  sens  de  «  qui  appartenait  à  », 
neanmes  (43),  levas  (49)  «  impôts  »,  aquo  de  (60)  «  chez  »,  chausa 
(89)  pour  causa,  ly  (132)  article  féminin  (nombreux  ex.  pp.  75, 
82,  84,  88,  92,  etc.),  nadiu  (193),  «  drap  fabriqué  dans  le  pays  » 
(mot  expliqué  par  M.  P.  Meyer,  Romania,  XXX.  400). 

Je  reviens  sur  ce  que  j'ai  dit  des  interprétations.  J'ai  regretté 
d'abord  le  silence  ou  le  laconisme  de  M.  B.  au  sujet  de  certains 
mots  fort  intéressants  :  bayela  (60)  est  traduit  par  «  bayette  »,  que 
je  ne  trouve  ni  dans  Littré,  ni  dans  le  Dict.  général,  ni  même  dans 
le  Glossaire  archéologique  de  V.  Gay;  il  résulte  d'autres  passages 
que  ce  dut  être  une  échauguette  disposée  au  sommet  des  rem- 
parts pour  y  faire  le  guet  (cf.  p.  64,  100,  184);  le  mot  était  à 
signaler  aux  archéologues  et,  à  cause  de  sa  forme  nettement 
française,  aux  linguistes  i.  —  Il  est  question  à  chaque  instant 
(p.  40,  104-6,  168-9  et  passim)  de  «  marques  »  [marcas,  mer- 
cas)  imposées  à  la  ville  par  les  Anglais,  d'objets  confisqués  en 
vertu  de  la  «  marque  »  :  cette  abusive  extension  du  vieux  «  droit 
de  marque  »  était  à  noter.  (Sur  ce  droit,  voy.  De  Mas-Latrie 
dfPns  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes,  XXVII  [18661,  529,  et 
XXIX  [1868],  294.) 

Grâce  à  sa  familiarité  avec  les  documents  d'archives  et  à  sa 
connaissance  du  patois  moderne,  M.  B.  est  souvent  en  état  de 
traduire  des  mots  qui  nous  embarrassent  :  peut-être  a-t-il  de 
bonnes  raisons  pour  interpréter  cloyg  (64),  cluyet  (100,  corrigé 
en  clueyl  à  l'Erratum),  duel  (277)  par  «  fagot  »,  chazarenc  (105) 
par  «fromage»;  mais  encore  aimerait-on  à  connaître  ces  rai- 
sons. On  ne  peut  se  défendre  de  quelque  inquiétude  quand  on 
voit  l'éditeur  expliquer  sans  hésitation  des  formes  qu'il  efface 


1.  Ce  mot,  d'origine  inconnue,  doit  être  identique  à  l'ancien  français 
baate,  hauhotle,  bahotte  (Voy.  Godefroy,  I,  544). 


2-40  ANNALES   DtJ   MIDt. 

dans  VErratum  :  ainsi  panes  [■=  pavés)  traduit  par  «  panneau  » 
(84,  n.  \),  ghazia  (=  jazia)  par  «  faisait  le  guet  »  (102,  n.  2). 
Voici  quelques  traductions  qui  ne  nie  paraissent  guère  plus 
sûres  :  sous  prétexte  que  bada  (verbe)  signifie  encore  «  ouvrir  », 
M.  B.  traduit  bada  (substantif)  par  «  gardien  préposé  aux  por- 
tes »  (p,  32,  n.  3,  et  37,  n.  1).  A  mon  avis,  le  mot  signifie  tantôt 
«  guet  »,  tantôt  «  guetteur  »  ;  c'est  en  effet  sur  les  murs  ou  par- 
fois dans  les  baietas  que  nous  voyons  continuellement  far  la 
bada,  spécialement  par  les  temps  sombres  (p,  92,  98,  166,  183, 
267).  —  Bot  (193,  n.  1)  est  le  même  mot  que  nebot  et  n'a  rien  à 
voir  avec  bore  («  bâtard  »).  —  On  ne  voit  pas  pourquoi  sartre 
est  interprété  (p.  165)  par  «  tisserand  »,  alors  que  le  dérivé  de 
sartor  signifie  partout  «  tailleur  »,  et  que,  d'autre  part,  «  tisse- 
rand »  se  dit  teysseir  (194).  —  Archiera  (260,  no  3)  est  traduit  par 
«  archerie,  caisse  où  l'on  plaçait  tout  ce  qui  concernait  l'arme- 
ment des  archers  »;  ce  mot,  bien  connu,  signifie  «  meurtrière  » 
(voy.  Raynouard,  II,  153,  et  Godefroy,  L  382). 

Je  me  permettrai  enfin  de  conseiller  à  M.  B.  la  plus  grande 
circonspection  sur  le  terrain  étymologique.  M.  Meyer  a  déjà 
battu  en  brèche  son  étymologie  de  tochi  («  tue-chien  »).  Je  me 
permettrai  d'en  faire  autant  pour  quelques  autres  :  Irevar  (186) 
n'a  certainement  aucun  rapport  avec  trans  viam.  —  Il  est  témé- 
raire de  rattacher  à  despartir,  esparlir,  u  partager  »,  le  mot 
esparii,  sous  prétexte  que  ce  repas  coupe  le  jour  en  deux  (p.  284, 
n.  3),  alors  que  sa  forme  la  plus  ordinaire  est  vesperti  (voy.  Mis- 
tral, s.  V).  —  Il  est  souvent  question  de  la  porta  dels  Agials  :  elle 
devrait  ce  nom  (p.  162,  n.  2)  au  fait  que  le  marché  à  la  volaille 
se  tenait  prés  de  là,  «  coq  »  se  disant  geai  et  gial  :  ne  faudrait-il 
pas  entendre  des  Anglais,  «  des  anges  »  '?  A.  Jeanroy. 

J.  Calmette.  Louis  XI,  Jean  II  et  la  révolution  catalane 
(1461-1473).  Toulouse,  Éd.  Privai,  et  Paris,  A.  Picard, 
1903;  in-8o  de  612  pages. 

Depuis  une  vingtaine  d'années,  l'étude  des  relations  de  la 
France  avec  les  États  voisins  a  été  entreprise  d'après  les  métho- 
des rigoureuses  dont  dispose  aujourd'hui  la  science  historique. 

1.  Le  tilde  qui  devrait  surmonter  l'a  initial  a-t-il  été  omis  par  le  scribe, 
ou  négligé  par  l'éditeur  ? 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  241 

Des  travaux  de  valeur  ont  été  menés  à  bonne  fin  par  Lecoy  de 
la  Marche,  par  Baudon  de  Mony,  par  Dauraet,  pour  préciser  les 
rapports  de  la  royauté  française  avec  les  souverains  d'Aragon,  de 
Majorque  et  de  Castille.  Pour  le  xv'  siècle,  on  possédait  déjà  les 
recherches  intéressantes  dues  à  Desdevises  du  Dézert  sur  Carlos 
de  Viane,  et  à  Henri  Courteault  sur  Gaston  IV,  comte  de  Foix  et 
de  Béarn,  c'est-à-dire  sur  deux  personnages  dont  la  vie  a  été 
très  intimement  mêlée   aux  vicissitudes  des  relations   franco- 
espagnoles.  L'ouvrage  de  M.  Calmette  vient  s'ajouter  à  cette 
série  et  il  élucide  supérieurement  un  des  grands  épisodes  de  la 
politique  extérieure  de  Louis  XI.  Son  enquête,  portant  sur  une 
époque  bien  délimitée  et  sur  un  sujet  capital  pour  les  origines 
de  la  rivalité  des  maisons  de  France  et  d'Aragon,  peut  être  con- 
sidérée  comme  un   modèle.    Il    l'a  poursuivie   avec  une   telle 
richesse  d'informations  et  une  profondeur  d'érudition  si  grande 
que  nul  ne  songera  désormais  à  la  reprendre  après  lui  et  qu'on 
peut  considérer  son  travail  comme  définitif.  M.  C.  ne  s'y  montre 
pas  seulement  érudit  :  il  y  fait  preuve  des  qualités  d'un  vérita- 
ble historien.  Il  sait  dominer  son  sujet;  son  exposition  est  d'une 
précision  et  d'une  clarté  remarquables.  Il  est  parvenu  à  en  dé- 
gager des    conclusions   d'une   portée    générale   considérable  et 
dont  la  justesse  frappe  l'esprit. 

Ces  conclusions,  qui  sont  loin  d'être  favorables  à  Louis  XI, 
achèvent  de  modifier  le  jugement  qu'on  a  longtemps  porté  sur 
ce  prince,  et  qui  avait  déjà  été  sérieusement  ébranlé  par  d'au- 
tres historiens,  tels  que  Desjardins  et  Perret.  Le  succès  qui   a 
couronné  la  plupart  des  entreprises  de  ce  Valois  lui  a  valu  une 
réputation   supérieure   aux   talents   qu'il   déploya.    Il  a   passé, 
grâce  au  bonheur  inouï  dont  il  fut  comblé,  pour  un  homme  de 
génie  supérieur,  dont  la  profondeur,  la  sagesse  et  la  continuité 
des  desseins  n'avaient  d'égales  que  la  fécondité,  l'ingéniosité  et 
la  sûreté  des  moyens  mis  en  oeuvre.  Il  semble,  après  les  travaux 
dont  le  règne  de  Louis  XI  a  été  l'objet  depuis  un  quart  de  siècle, 
qu'il  faille  beaucoup  en  rabattre.  A  des  qualités  incontestables 
d'activité,  de  finesse,  à  un  esprit  d'intrigue  peu  commun,  à  une 
absence  de  scrupules  incroyable,  propre  à  servir  une  politique 
en  apparence  toute  réaliste,  ce  prince  joignait  les  pires  défauts 
des  tyrans   italiens  du  xvc   siècle  et  quelques-unes  des  tares 
intellectuelles  des  Valois.  Autocrate  violent,  il  ne  sait  se  plier 
aux  aspirations  de  ceux  qu'il  veut  conquérir.  Obstiné  dans  seâ 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVI.  16 


242  ANNALES   DU  MIDI. 

idées,  il  est  le  plus  souvent  incapable  de  modifier  les  résolu- 
tions les  plus  fâcheuses,  alors  même  que  l'expérience  lui  en  dé- 
montre le  danger.  Sa  finesse  dégénère  en  duplicité,  et  l'amour 
de  l'intrigue  amène  1'  «  universelle  araignée  »,  comme  l'appelle 
Comines,  à  s'empêtrer  dans  ses  propres  toiles,  de  sorte  que  le 
dupeur  apparaît  finalement  sous  l'aspect  d'un  dupé.  Il  est  capri- 
cieux et  inégal.  Aussi  sa  politique  peut-elle  être  taxée  d'incohé- 
rence, et  on  y  aperçoit  souvent,  au  lieu  de  l'esprit  élevé  d'un 
homme  d'Éta',  le  dépit  mesquin  d'un  tyran  déçu.  Enfin,  ce  pré- 
tendu modèle  des  souverains  réalistes  de  l'époque  moderne  est 
au  fond  hanté  des  chimères  de  ses  prédécesseurs.  Au  lieu  de 
songer  avant  tout  à  l'unité  française,  il  a  gaspillé  une  bonne 
part  de  ses  forces  dans  des  entreprises  sans  portée.  C'est  à  lui 
que  remonte  en  grande  partie  la  responsabilité  des  expéditions 
d'Italie,  puisqu'il  songe  déjà  à  la  conquête  de  Milan  et  de 
Naples,  et  son  rôle  dans  la  révolution  catalane  le  montre  préci- 
pitant son  royaume  dans  une  autre  aventure,  celle  de  l'établis- 
sement de  la  domination  française  sur  l'Espagne  du  Nord. 

Cette  dernière  entreprise,  obstinément  poursuivie  pendant 
plus  de  douze  ans,  fait  peu  d'honneur  au  sens  politique  trop 
vanté  de  Louis  XI.  Il  fallait  méconnaître  étrangement  l'esprit 
catalan  pour  s'y  hasarder,  surtout  pour  y  persévérer.  Il  fallait 
aussi  n'avoir  qu'une  idée  inexacte  des  vrais  intérêts  et  des 
moyens  d'action  de  la  France,  pour  tenter  l'annexion  d'une  prin- 
cipauté pyrénéenne  aussi  éloignée  de  la  véritable  base  d'opéra- 
tions de  la  monarchie  française,  alors  que  l'unité  territoriale 
n'était  pas  achevée  dans  les  limites  naturelles  de  notre  pays.  Avant 
même  d'arriver  au  trône,  dans  l'impatience  du  pouvoir  souve- 
rain longtemps  attendu,  le  Dauphin  avait  déjà  songé  à  se  créer  un 
État  au  delà  des  Pyrénées;  il  avait  noué  des  relations  avec  le 
prince  de  Viane,  don  Carlos,  fils  aîné  du  roi  d'Aragon,  prétendant 
à  la  couronne  de  Navarre,  et  chef  des  Catalans  révoltés.  Devenu 
roi  en  1 461,  Louis  XI  se  leurra  de  l'illusion  d'un  établissement 
français  en  Catalogne.  Il  crut  y  parvenir  en  employant  à  tour 
de  rôle  la  force  brutale  et  les  roueries  diplomatiques.  Il  montra 
qu'il  ne  connaissait  ni  ceux  qu'il  prétendait  réduire  à  la  condi- 
tion de  sujets,  ni  l'adversaire  qui  allait  s'opposer  à  ses  plans. 
De  tous  les  États  espagnols,  la  Catalogne  était  le  plus  riche,  le 
plus  civilisé,  le  plus  jaloux  de  son  autonomie.  Avec  sa  grande 
cité  maritime,  Barcelone,  dont  la  flotte  égalait  celle  de  Venise, 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  243 

avec  sa  population  instruite,  fière,  ombrageuse,  avec  ses  insti- 
tutions provinciales  et  municipales  pleines  de  sève,  elle  aspirait 
à  former  une  république  à  la  mode  italienne,  sous  le  protectorat 
nominal  de  quelque  prince  débonnaire.  Au  lieu  d'un  suzerain 
accommodant,  Louis  XI  prétendit  lui  donner  un  maître,  et  dès 
lors  la  Catalogne  se  résigna  à  accepter  toutes  les  aventures  plu- 
tôt que  de  devenir  la  province  asservie  d'un  despote.  Ces  mar- 
chands déployèrent  dans  cette  lutte  pour  l'indépendance  une 
ténacité  et  un  héroïsme  admirables;  s'ils  ne  réussirent  pas  à  la 
maintenir  tout  à  fait,  du  moins  ils  évitèrent  le  danger  le  plus 
redoutable  pour  eux,  celui  de  la  domination  française.  Au  reste, 
le  roi  de  France  allait  trouver  dans  sa  malencontreuse  aventure 
un  rival  digne  de  lui,  un  adversaire  à  certains  égards  supérieur, 
à  savoir  le  roi  d'Aragon,  Jean  II.  La  figure  de  ce  précurseur  des 
grands  fondateurs  de  l'unité  espagnole  ressort  avec  un  singulier 
relief  des  pages  de  M.  C.  Ce  «  petit  vieillard  avare  et  sensuel, 
aux  yeux  rouges  et  clignotants  »,  dont  le  regard  dur  avait  des 
éclairs  de  cruauté,  paraît  avoir  été  le  vrai  maître  de  l'homme 
de  génie  que  fut  Ferdinand  le  Catholique.  Il  y  a  une  frappante 
ressemblance  .morale  entre  le  père  et  le  fils.  Comme  le  roi 
catholique,  Jean  II  est  «  un  diplomate  froid  et  circonspect,  doué 
«  d'un  sens  profond  du  réel,  exclusivement  guidé  par  l'intérêt 
«  politique  »,  capable,  suivant  les  circonstances,  de  générosité 
ou  d'inhumanité.  Brave  à  l'occasion,  mais  comptant  bien  plus 
sur  la  stratégie  savante  de  ses  combinaisons  politiques  que  sur 
la  force  des  armes,  prudent  et  tenace,  doué  d'un  coup  d'oeil  juste, 
il  a  su  préparer  sa  victoire  finale  par  «  une  tactique  impeccable, 
patiente  et  dissimulée  quand  il  l'a  fallu,  énergique  et  prompte  à 
son  heure  ». 

Dans  l'affaire  catalane,  la  supériorité  du  roi  d'Aragon  apparaît 
indéniable,  tandis  que  le  roi  de  France  perd  de  son  prestige  à  être 
considéré  dans  les  contradictions  de  sa  politique  et  dans  l'éche- 
veau  embrouillé  de  ses  intrigues.  Au  déljut  de  son  règne,  Louis  XI 
poursuit  à  la  fois  l'établissement  d'une  maison  française,  celle 
de  Foix,  en  Navarre,  et  l'annexion  de  la  Catalogne  à  la  France.  On 
prétend  même  qu'il  songe  à  spolier  entièrement  le  roi  d'Aragon, 
à  ne  pas  lui  laisser  «  la  moindre  parcelle  de  terre  pour  se  faire 
«  enterrer  ».  Mais  les  Catalans,  qui  ont  appelé  le  roi  de  France  à 
leur  secours,  peu  soucieux  de  rompre  entièrement  le  lien  féodal 
qui  les  unit  à  leur  suzerain  aragonais,  font  volte-face  et  recou- 


244  ANNALES    DU   MIDI. 

rent  au  roi  de  Castille.   De   là  revirement  de  la  politique  de 
Louis  XI;  il  s'allie  avec  Jean  II  pour  mieux  le  duper,  et  conclut 
avec  lui,  par  l'entremise  de  Gaston  de  Foix,  les  traités  d'Olite, 
de  Sauveterre  et  de  Bayonne  (avril-mai  1462)  qui  garantissent 
la  succession  navarraise  au  prince  de  Foix  et  les  secours  fran- 
çais au  roi  d'Aragon.  Celui-ci  paie  ces  secours  en  cédant  provi- 
soirement le  Roussillon  et  la  Cerdagne  à  Louis  XI.  Une  courte 
campagne  de  six  mois  (juillet-décembre  1462)  aboutit  à  l'occu- 
pation de  ces  deux  comtés  par  les  troupes  françaises;  mais  l'in- 
vasion de  la  Catalogne  par  l'armée  franco- aragonaise  ne  réussit 
qu'à  moitié  :  Barcelone  résistait  victorieusement;  le  roi  de  Cas- 
tille intervint  (4  janvier  1463,.  Louis  XI  gagne  cet  adversaire 
au  traité  de  Bayonne  (avril),  où  il  joue  le  rôle  d'arbitre  entre 
Aragonais  et  Castillans;  il  ne  trouve  rien  de  mieux  pour  écarter 
les  premiers  de  la  Catalogne  que  de  leur  abandonner  une  part 
de  la  Navarre,  qu'il  prétendait  naguère  réserver  entièrement  à 
nos  alliés  les  comtes  de  Foix;  puis  il  s'efforce  d'évincer  le  roi 
d'Aragon,  flattant  les  Catalans  et  faisant  luire  à  leurs  yeux  le 
mirage  de  l'autonomie  sous  la  suzeraineté  française.   Quand  il 
croit  les  tenir  à  sa  merci,  il  jette  le  masque  —  trop  tôt,  —  si  bien 
que  la  Catalogne  se  donne  au  roi  don  Pedro  de  Portugal.  Au 
lieu  de  soutenir  ce  prince  peu  dangereux,  Louis  XI  le  poursuit 
d'une  haine  implacable,   comme    le  rival    qui  lui   enlève  une 
proie  (1464),  et  il  le  laisse  écraser  par  la  coalition  de  l'Aragon 
et  de  la  Castille  (1464-66).  Il  espère  amener  ainsi  les  Catalans  à 
reconnaître   qu'ils   ne  peuvent  trouver   de  protection    efficace 
qu'auprès  du  roi  de  France.  Mais  il  semble  prendre  à  tâche  de 
les  effrayer  par  les  excès  de  l'administration  despotique  qu'il 
inflige  au  Roussillon  et  à  la  Cerdagne.   La  Catalogne  fuériste 
tremble  à  l'idée  d'avoir  pour  maître  l'homme  qui  a  déchiré  les 
privilèges  de  Perpignan,  qui  a  écrasé  les  villes  de  contributions, 
livré  au  pillage  de  la  soldatesque  les  biens  de  ceux  qu'il  prétend 
gouverner,  qui  a  installé  un  Parlement  où  les  magistrats  com- 
plètent   l'œuvre    de    spoliation   commencée    par    les    gens    de 
guerre,  qui  a  exilé  les  patriotes  et  confisqué   leurs    biens.    A 
aucun  prix,  la  principauté  ne  veut  d'une  pareille  domination. 
Elle  n'accepte  pour  protecteur  qu'un  prince  de  la  maison  d'An- 
jou, Jean  de  Calabre  (1468),  parce  qu'il  paraît  moins  dangereux 
que   le  roi  de  France.  Celui-ci,  déçu,    nourrissant  au  fond  du 
cœur  l'arrière-pensée  de  forcer  les  Catalans  à  se  donner  à  lui, 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  245 

ne  prête  au  prétendant  qu'un  appui  platonique,  et  le  réduit 
ainsi  à  faire  des  avances  à  la  naaison  de  Bourgogne,  l'ennemie 
mortelle  des  Valois.  Profitant  de  cette  série  de  fautes,  Jean  II, 
qui  a  attendu  patiemment  son  heure,  rentre  résolument  en 
scène.  Il  forme  un  solide  faisceau  d'alliances  avec  les  adversai- 
res de  Louis  XI  en  Navarre,  en  Castille,  en  Italie,  en  Angle- 
terre, aux  Pays-Bas  (1469-71).  Lorsque  les  Aragonais  pénètrent 
en  Catalogne,  ils  sont  accueillis  en  libérateurs  (1472);  Barcelone 
acclame  Jean  II.  Le  Roussillon  et  la  Cerdagne  s'insurgent  et  le 
roi  d'Aragon  entre  en  triomphateur  à  Perpignan  (I"  février  1473). 
La  trêve  du  14  septembre  4  473  stipule  le  retour  de  ces  deux 
comtés  au  roi  d'Aragon,  dans  le  délai  d'un  an,  après  paiement 
de  la  somme  des  300,000  écus  dus  par  Jean  II  à  Louis  XI.  Le  rêve 
de  la  domination  française  au  delà  des  Pyrénées  s'est  évanoui. 
La  maladresse  et  la  brutalité  de  la  politique  française  ont  rejeté 
pour  plus  d'un  siècle  et  demi  la  Catalogne  du  côté  de  l' Aragon, 
et  la  clémence  habile  de  Jean  II  a  ramené  doucement  la  princi- 
pauté à  ses  affinités  naturelles.  Bien  mieux,  les  vues  du  roi  de 
France  ont  effrayé  les  princes  espagnols  ;  la  conclusion  du  ma- 
riage de  Ferdinand  et  d'Isabelle  (1469),  l'union  future  de  l'Aragon 
et  de  la  Castille  semblent  la  réponse  des  partisans  de  l'unité  et  de 
l'indépendance  de  l'Espagne  aux  plans  mégalomanes  de  Louis  XI. 
La  menace  d'une  domination  de  la  France  au  nord  de  la  Pénin- 
sule a  contribué  activement  à  grouper  le  faisceau  des  forces 
nationales  et  à  préparer  la  grandeur  de  cet  Etat  espagnol,  des- 
tiné à  devenir  bientôt  le  plus  redoutable  rival  de  l'État  français. 
Telles  sont  les  idées  d'ensemble  qui  se  dégagent  de  la  mono- 
graphie si  précise  et  si  nourrie  que  nous  a  donnée  M.  C.  Il  l'a 
accompagnée  d'études  excellentes  sur  les  sources  de  son  œuvre 
et  de  nombreuses  pièces  justificatives.  Si  ce  n'est  pas  le  premier 
travail  que  l'on  doive  à  ce  jeune  et  laborieux  érudit,  c'est  du 
moins  le  plus  remarquable,  le  plus  achevé  qu'il  ait  publié  jus- 
qu'ici. S'il  était  permis  de  signaler  à  l'auteur  si  distingué  de 
l'ouvrage  qu'on  vient  d'analyser  la  voie  où  il  semblerait  le 
mieux  devoir  réussir,  peut-être  pourrait-on  attendre  de  sa  puis- 
sance d'information  et  de  son  intelligence  historique  cet  ou- 
vrage d'ensemble  sur  les  relations  politiques  de  la  France  et  des 
royaumes  espagnols  au  xiv«  et  dans  la  première  moitié  du 
XV»  siècle  qui  nous  fait  encore  défaut  et  qui  rendrait  tant  de 
services.  P.  Boissonnade. 


246  ANNALES   DU    MIDI. 

Paul  CoTTiN.  Sophie  de  Monnier  et  Mirabeau,  d'après 
leur  correspondance  secrète  inédite  (1775-1789).  — 
Paris,  Ploa  et  Nourrit,  1903;  im  vol.  ia-S»  de  cclx-282  pa- 
ges. 

Depuis  plusieurs  années,  M.  Cottln  s'occupe  de  Mirabeau  et  de 
Sophie  de  Monnier.  Dans  la  Revue  rétrospective  qu'il  dirige  avec 
tant  de  soin,  il  a  publié,  d'après  les  Archives  de  Lucas  de  Monti- 
gny.  nombre  de  pièces  inédites  et  de  documents  curieux,  notam- 
ment le  Journal  de  Legrain,  valet  de  chambre  de  Mirabeau  II  a 
donné  dans  le  Carnet,  dans  la  Revue  des  études  historiques,  et 
ailleurs  encore,  diverses  brochures  sur  la  touchante  et  malheu- 
reuse Saphie.  Il  continue  en  ce  moment  même  la  publication 
d'autres  lettres  inédites  de  Sophie  dans  la  même  Revue  i-étros- 
pective.  Il  nous  donne  dans  ce  volume  deux  morceaux  d'un  inté- 
rêt fort  divers,  mais  également  puissant  :  une  étude  très  per- 
sonnelle et  très  originale  sur  la  liaison  de  Sophie  et  de  Gabriel 
qu'il  a  continuée,  après  la  rupture  des  deux  amants,  jusqu'au 
suicide  de  Sophie;  une  série  importante  de  lettres  secrètes  (et 
déchiffrées  par  lui;  de  Sophie  à  Gabriel.  —  L'étude,  qu'il  présente 
trop  modestement  comme  une  introduction  aux  lettres,  est  une 
biographie  complète  de  la  marquise  de  Monnier,  écrite  d'un 
style  sobre  et  simple,,  avec  un  souci  visible  d'impartialité  et  un 
grand  sentiment  de  sympathie  pour  l'héroïne  de  cette  immorale 
et  dramatique  aventure.  On  y  a  la  sensation,  malgré  l'absence 
presque  complète  de  références  (système  à  mon  sens  erroné, 
mais  que  M.  C.  emprunte  peut-être  à  M.  Frédéric  Masson,  et 
qu'on  pardonne  à  l'un  comme  à  l'autre),  d'une  documentation  très 
sérieuse  et  d'une  connaissance  intime  avec  les  gens  et  les  choses 
de  l'époque.  Sophie  apparaît  ici.  sinon  réhabilitée,  au  moins 
expliquée,  excusée,  et  c'est  à  elle  surtout  que  profitera  le  tra- 
vail de  M.  C.  Quant  à  Mirabeau,  il  ne  sort  pas  grandi  de  cette 
liaison,  qu'il  dénoua  assez  lâchement,  —  après  avoir  consenti 
à  accepter  quatre  années  de  la  fidélité  de  son  amie  dans  la  plus 
ignominieuse  des  retraites,  —par  une  rupture  froide  et  calculée, 
précédée  d'une  tentative  bassement  intéressée  de  réconciliation. 
Mais  Honoré-Gabriel  est  un  bloc  lui  aussi,  et  c'est  en  bloc  qu'il 
faut  l'aimer  ou  le  ha'ir.  Sophie,  comme  Julie,  comme  les  autres, 

...  N'a  jamais  été,  même  aux  jours  les  plus  rares, 
Qu'un  banal  instrument  sous  son  archet  vainqueur, 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  247 

l'instrument  de  sa  virtù,  de  la  culture  intensive  de  son  moi,  et 
plus  pi*osaïquement  l'auxiliaire  physiologique  de  son  équilibre 
moral.  Ce  n'est  pas  le  cœur  —  avec  ses  dépendances  —  de  Mira- 
beau qui  donnera  la  clef  de  son  génie.  Et  le  travail  si  soigné  de 
M.  C.  en  fait  la  démonstration  en  ce  qui  touche  l'épisode  de 
Sophie. 

Quant  aux  lettres  elles-mêmes,  j'aurais  des  réserves  à  faire 
sur  la  manière  dont  elles  sont  éditées  ici  :  déchiffrées  avec  le 
concours  de  M.  Bazeries,  grâce  à  la  vraie  table  déchiffrante 
qu'il  a  retrouvée,  M.  C.  les  publie  en  clair,  en  rétablissant  les 
noms  propres;  mais  il  n'a  pas  cru  devoir  conserver  l'orthogra- 
phe (à  vrai  dire  fantastique)  de  Sophie,  et  il  a  fait  des  coupures 
de  passages  licencieux,  sans  les  signaler.  Il  y  a  aussi  bien  des 
noms  propres  qui  sont  remplacés  par  des  initiales  et  des  asté- 
risques; et  dans  l'annotation  il  y  a,  malgré  bien  des  révélations 
nouvelles,  encore  trop  de  réticences  :  par  exemple,  p.  51  :  «  M"e  de 
Cabris,  qui  venait,  pour  des  raisons  sur  lesquelles  il  importe  de 
glisser,  de  se  brouiller  avec  son  père  »  (après  cent  vingt-sept 
ans!!  quelles  peuvent  être  ces  raisons?);  p.  cxxii,  à  propos  des 
projets  de  Mirabeau  sur  la  petite  Gabrielle-Sophie,  M  C.  dit  : 
«  Nous  ne  pouvons  entrer  dans  les  détails  à  cause  de  leur  cru- 
dité, mais  le  lecteur  comprendra  à  demi  mot.  »  Il  y  a  cependant 
là  un  trait  d'orgueil  de  race  et  de  génie  qui  est  important  pour 
fixer  le  portrait  intégral  d'Honoré -Gabriel,  et  n'est- il  pas 
piquant  de  le  voir  se  forger  pour  lui-même  et  exprimer  dans 
ses  lettres  des  imaginations  plus  audacieuses  et  plus  brûlantes 
que  dans  ses  erotica,  et  rêver  de  vivre  l'inceste  qu'il  n'a  pas  osé 
mettre  en  scène  dans  le  Rideau  levé?  —  Tout  ce  qui  a  été  dans 
la  vie  doit  être  dans  l'histoire,  et  les  textes  historiques  doivent 
être  publiés  intégralement,  n'étant  pas  en  général  destinés  aux 
petites  filles.  —  J'aurais  un  autre  grief,  c'est  que  toutes  les  let- 
tres ne  sont  pas  données  ici  :  M.  C.  nous  en  prévient  très  loya- 
lement, mais  il  ne  donne  pas,  à  mon  gré,  assez  d'éclaircisse- 
ments sur  les  motifs  de  son  choix.  Quels  rapports  de  nombre,  de 
dates,  de  classement  y  a-t-il  entre  les  lettres  secrètes  ici  pu- 
bliées et  celles  qui  sont  restées  inédites?  Quelles  relations  entre 
les  lettres  du  recueil  de  Manuel,  celles-ci,  et  celles  de  la  Revue 
rétrospective?  Qu'une  table  de  concordance,  qu'un  inventaire 
complet  de  la  correspondance  de  Sophie  et  de  Mirabeau,  seraient 
donc  les  bienvenus  pour  rassurer  nos  scrupules  et  donner  plus 


248  ANNALES   DU   MIDI. 

d'autorité  à  cette  publication,  excellente  par  ce  qu'elle  donne  et 
ce  qu'elle  dit,  mais  inquiétante  par  ce  qu'elle  cache!  M^  C.  n'a 
pas  voulu  alourdir  d'un  appareil  trop  purement  érudit  son 
volume,  destiné  par  l'attrait  du  sujet  et  les  mérites  du  préfacier 
au  grand  public.  Soit,  mais  pourquoi  ne  pas  publier,  à  l'usage 
de  la  gent  rébarbative  et  méticuleuse  des  érudits.  dans  quelque 
revue  spéciale,  cet  appareil  que  l'Heuristique  exige  et  dont 
notre  amitié  pour  l'auteur  ne  se  résigne  pas  à  lui  faire  grâce? 

Léon-G.  PÉLissiER. 

Mirabeau.  Lettres  à  Julie,  écrites  du  donjon  de  Vin- 
cennes^  publiées  et  comraeulées  d'après  les  manuscrits 
originaux  et  inédits,  par  Dauphin  Meunier  (avec  la  colla- 
boration de  Georges  Leloir).  Paris,  Plon-Nourrit;  un  vol. 
in-8°  de  iv-464  pages. 

Sur  les  quatre-vingt-seize  lettres  extraites  de  la  correspon- 
dance générale  de  Mirabeau  (que  M.  Lucas  de  Montigny  a  com- 
muniquée pour  la  publier  à  M.  D.  Meunier),  il  y  a  soixante-deux 
lettres  de  Mirabeau  à  Julie,  vingt  et  une  lettres  à  La  Fage,  trois 
à  M"«  du  Saillant  et  une  à  Boucher,  plus  huit  lettres  du  marquis 
au  bailli  de  Mirabeau,  et  une  réponse  du  bailli  au  marquis  *.  — 
Elles  éclairent  un  épisode  resté  jusqu'ici  assez  mystérieux  de 
l'histoire  de  Mirabeau,  sa  liaison,  épistolaire  d'abord,  amoureuse 
ensuite  avec  M""*?  Julie  Dauvers,  qui  s'entremêla  dans  sa  liaison 
officielle  avec  Sophie  pendant  son  séjour  à  Vincennes.  Elles  sont 
intéressantes,  «  emphatiques,  verbeuses,  d'une  intarissable 
verve,  d'une  extraordinaire  facilité,  d'un  style  tantôt  caressant, 
tantôt  brûlant  (M.  Boutry).  »  Mais  le  mode  de  publication 
adopté,  qui  consiste  à  couper  les  séries  de  lettres  par  des  cha- 
pitres explicatifs  et  à  rejeter  toutes  les  notes  à  la  fin  du  volume 
sous  forme  de  dictionnaire  biographique,  me  paraît  défectueux 
et  peu  pratique.  On  pouvait,  en  tous  cas,  se  dispenser  de  faire 
figurer  dans  ce  dictionnaire  Egérie,  Enée.  Eole,  Hylas  et  tutti 
quanti  mythologiques  personnages,  se  dispenser  de  nous  appren- 
dre que  Jacob,  «  second  fils  d'isaac  et  de  Rébecca  »  est  «  le  père 
du  peuple  hébreu  »,  que  Jupiter  «  est  le  nls  de  Saturne  et  de 
Rhéa,  et  qu'il  y  a  une  planète  ainsi  dénommée  dans  le  système 

1.  Plus  quelques  fragments  ne  figurant  pas  à  la  Table  analytique. 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  249 

solaire  »,  ce  qui  est  proprement  se  moquer  du  monde.  Et  si 
M.  D.  Meunier  (avec  la  collaboration  de  M.  George  Leloir)  vou- 
lait consentir  à  écrire  d'un  style  plus  sobre  et  plus  naturel,  —  il 
ferait  un  sensible  plaisir  à  tous  ceux  qui  sont  pressés,  comme 
nous,  de  voir  continuer  la  publication  de  cette  correspondance 
de  Mirabeau,  car  il  n'est  pas  possible  qu'il  ne  passe  pas  beau- 
coup de  son  temps  à  chercher  des  phrases  comme  celles-ci  i  :  «  11 
s'agit  de  nous  insinuer  au  cœur  même  de  Mirabeau  en  nous  y 
ouvrant  certaine  porte  que  tout  exprès  nous  avons  choisie 
étroite,  basse  et  détournée  »  (p.  2);  —  à  imposer  à  amenuiser  le 
sens  de  diminuer,  devenir  menu  (!!)  fp.  2)  ;  à  dire  que  «  les  belles 
demeures  des  maîtres  de  la  finance  s'égrenaient  au  long  de  la 
rue  Saint-Honoré  comme  les  plus  riches  paillettes  d'un  Pactole 
étroit  et  rapide  se  disposent  d'elles-mêmes  à  toutes  les  anfrac- 
tuosités  du  bord  »  (!!!)  (p.  3);  à  tarabiscoter  le  paragraphe  de  la 
page  o,  qui  commence  :  «  Ah,  le  notable  personnage  que 
M.  Beaudoin!  etc.,  etc.  »—  et  ainsi  de  suite,  jusqu'au  portrait 
final  de  Mirabeau,  plein  de  traits  psychologiques  excellents,  du 
reste,  mais  tout  entier  écrit  sur  ce  mode  ahurissant.  Si  M.  M. 
voulait  bien  mettre  son  orgueil  et  son  plaisir  moins  à  ébouriffer 
son  lecteur  qu'à  l'instruire,  il  nous  donnerait  un  volume  de  plus 
par  semestre.  Mijpabeau  y  gagnerait.  Nous  aussi. 

L.-G.    PÉLISSIER. 

1.  Et  s'il  les  trouve  tout  de  suite,  son  cas  est  encore  plus  grave. 


REVUE   DES   PÉRIODIQUES 


PÉRIODIQUES  FRANÇAIS  MÉRIDIONAUX. 

Alpes  (^Basses-). 

Annales  des  Basses-Alpes.  Bulletin  de  la  Société  scienti- 
fique et  littéraire  des  Basses-Alpes,  XXIIP  année,  t.  X, 
1902.  (Suite.) 

N°  84  (janv.-mars).  P.  261-70.  Cauvin.  Une  incursion  des  Marseillais  à 
Digne  en  1793  (suite  et  fin;  intéressante  monographie  bien  documentée). 
—  P.  271-88.  Ch.  DE  RiBBE.  Le  livre  de  raison  d'un  agriculteur, 
Eugène  Robert  de  Sainte-Tulle.  [Sériciculteur;  sa  vie  offre  une  admi- 
rable synthèse  de  toutes  les  qualités  privées  et  civiques;  son  livre  de 
raison  est  prolixe  et  souvent  naïf;  suite,  p.  325-45,  409-21;  fin,  p.  450- 
62.]  —  P.  293-812.  Arnaud.  Le  collège  des  notaires  de  Barcelonnette. 
[D'après  les  minutes  du  notaire  Bernardy;  les  notaires  étaient  en 
même  temps  greffiers  et  secrétaires  ;  publie  une  intéressante  délibé- 
ration de  1776  pour  la  réduction  du  nombre  des  charges.]  —  P.  313-44. 
Faucher.  Les  Isoard  de  Chénerilles  devant  la  critique  de  la  noblesse  de 
Provence  de  Barcilon  de  Mauvans  et  l'histoire  de  la  province.  [Suite, 
p.  358-70,  et  à  suivre.  Recherches  généalogiques  et  biographiques  sur 
plusieurs  familles  provençales,  les  Raffélis  de  Roquesante,  dont  il  con- 
teste la  provenance  juive,  les  Tributiis,  les  Isoard,  les  quatre  frères 
Chénerilles,  chevaliers  de  Malte.] 

N°  85  (avr.-juin).  P.  345-58.  Peyerhimoff.  M.  Bergeret  dans  les  Bas- 
ses-Alpes. [Curiosités  locales  sous  une  forme  fantaisiste.]  —  P.  370-80. 
LiEUTAUD.  Fiefs  bas-alpins  des  Baux  et  de  Forbin.  [Simple  liste,  d'après 
l'Inventaire  des  titres  de  la  maison  de  Forbin,  par  Albanès  et  Blancard 
en  1900.]  —  P.  381-2.  Ephémérides  bas-alpines  de  1901.  —  P.  386-8. 


PÉRIODIQUES  MERIDIONAUX.  251 

LiEUTAUD.  «  Nomen  acapte  »  pour  noble  Jacques  Alphand  de  Castel- 
neuf,  1542.  [D'après  le  registre  de  Guilhem  Falconi.] 

N»  86  (juill.-sept.).  P.  398-408.  L.  de  B[erluc]-P(erussis].  Procès-verbal 
de  visite  de  la  tournée  faite  dans  les  Basses-Alpes  par  M.  le  marquis 
de  la  Palud  (29  octobre  1787).  [Comme  inspecteur  des  ponts,  chemins  et 
autres  ouvrages  publics  ;  document  du  plus  grand  intérêt  pour  la  topo- 
graphie; notes  d'une  très  utile  pi-écision.]  —  P.  422-36.  Documents  : 
subside  royal  à  Sisteron  (1345);  octroi  de  Sisteron  (1350);  provision  de 
sage-femme  pour  la  communauté  de  Château-Arnoux  (1694);  Lurs, 
terre  impériale  (1393);  sentence  de  saint  Louis,  roi  de  France  (1264). 
[Publiés  ou  analysés  d'après  les  archives  municipales  de  Sisteron,  de 
Château-Ai'noux,  et  les  Archives  des  B.-de-R.,  B.  354.] 

N°  87.  (Oct.-déc).  P.  437-49.  Richaud.  Compositeurs  et  virtuoses  bas- 
alpins.  [Notes  bio-bibliographiques  sur  Bouchet,  Bouffier,  Aulagnier, 
Antoine  JuUien,  Millont,  Désiré  Granier,  auteur  de  Prouvençau  et 
Catoli,  et  autres,  du  xviii»  et  du  xix»  siècle.]  —  P.  473.  La  paroisse 
de  Thoard  en  1795.  [Préambule  du  registre  d'état  civil  tenu  par  le 
réfractaire  Giraud.]  —  P.  474-91.  Lieutaud.  Le  Poil.  Histoire  féodale 
eoponymique  et  religieuse.  [Suite.  Fragment  d'inscription  latine;  chro- 
nique de  l'église  de  ce  village;  catalogue  des  prieurs  et  curés;  quelques 
références  aux  Archives  des  Basses-Alpes. J  —  P.  492.  Bevons,  Dromon 
et  Brianson.  [Cités  dans  un  hommage  de  J.  Gombert,  seigneur  de  ces 
lieux  en  1351.  Arch.  B.-d.-R.,  B.  738.]  L.-G.  P. 

Alpes-Maritimes. 

Annales  de  la  Société  des  Lettres,  Sciences  et  A?'ts  des 
Alpes-Maritimes,  t.  XVIII,1903. 

P.  1-6.  RocHEMOXTEix.  Une  croix  de  conjuration  du  xviii»  siècle  à  la 
Petite-Afrique  de  Beaulieu  (Alpes-Maritimes).  [En  bois,  1737;  portant 
en  inscription  un  distique...  à  peu  près  juste  :  Crux  mihi  refugium, 
crux  est  quam  semper  adoro,  crux  Domini  mecum,  crux  mihi  certa 
salus.  Contra  fulgura  et  tempestates.  Détails  rétrospectifs  sur  les 
formules  et  amulettes  de  conjuration.]  —  P.  7-34.  Fritz-Mader.  Les 
inscriptions  préhistoriques  des  environs  de  Tende.  [Df^ns  le  vallon  des 
Lacs  des  Merveilles  et  dans  le  val  de  Fontanalba;  attribuées  à 
l'armée  d'Annibal  et  longtemps  mal  décrites  et  d'une  façon  fantaisiste; 
reproduites  au  nombre  de  650  par  Clarence  Bicknell  (Bordighera,  1902. 
The  prehistoric  Rock  engravings)  ;  planches  curieuses.]  —  P.  35-81. 
Doublet,  Monographie  des  paroisses  du  canton  de  Gagnes.  [Cagnes,  La 


252  ANNALES   DU   MIDI. 

Colle,  Saint-Paiil  et  Villeneuve-Loiibet  ;  même  documentation  minu- 
tieuse et  précise  que  dans  les  précédentes  études  analogues  de  l'auteur  ; 
notes  biographiques  et  généalogiques  sur  les  personnages  enterrés 
dans  ces  églises;  nombreuses  citations  de  documents  inédits,  surtout 
de  visites  épiscopales.]  —  P.  82-9U.  Mader.  La  vérité  sur  Catherine 
Ségurane.  [Prétendue  héroïne  du  siège  de  Nice,  en  1543,  que  ne  mention- 
nent pas  les  chroniqueurs  contemporains  Lambert  et  Badat  ;  son  nom 
probable  était  Donna^  Maufaccia  ;  celui  de  Catherine  Ségurane  date 
d'une  inscription  existant  sur  un  buste  de  1670. J  —  P.  90^2:^7.  Moris. 
Le  Sénat  de  Nice  de  1614  à  1792.  [Bonne  étude  sur  cette  institution 
judiciaire,  bien  documentée.  On  en  trouvera  {Annales,  t.  XVI,  p.  96) 
un  compte  rendu  critique.]  —  P.  228-81.  P.  Devoluy.  Essai  sur  les 
noms  de  lieux  du  comté  de  Nice.  [Utilité  de  conserver  les  désignations 
topographiques  locales,  baiis,  brus,  tors,  serres,  chaudan,  sorga,  lau- 
roicn,  etc.;  nécessité  de  substituer  les  noms  niçois  aux  noms  sardes  ou 
italiens  imposés  par  l'état-major  piémontais  et  conservés  sur  nos 
cartes;  trop  de  polémique  inutile  et  de  nationalisme  linguistique;  bon- 
nes remarques  de  langue  et  de  graphie;  note  sur  la  &  provençalité  » 
des  parlers  nioards  (la  conception  d'un  dialecte  particulier  au  comté  de 
Nice  est  chimérique)  ;  utile  vocabulaire  des  termes  employés  pour  les 
noms  de  lieux.]  —  P.  281-358.  Rance-Bourrey.  L'abbé  Paul-Marie 
Foncet  de  Bardonanche  détenu  à  Grasse  sous  la  Terreur.  [Étude  sur  la 
Révolution  à  Nice,  de  juillet  1793  au  30  déc.  1794,  pendant  la  mission 
de  Barras  et  Fréron;  Foncet  avait  participé  au  mouvement  modéré; 
puis,  devenu  suspect  de  royalisme,  il  fut  déporté  à  l'intérieur,  avec 
envoi  à  Montpellier  où  il  n'alla  pas,  emprisonné  le  25  septembre  et 
maintenu  seize  mois  en  prison  malgré  ses  plaintes  et  pétitions;  inté- 
ressantes pièces  justificatives.  Note  sur  VImmagine  d'un  perf'etto 
sovrano  de  Foncet;  lettres  de  Foncet.]  —  P.  359-64.  L.  Barbet.  Remise 
en  place  du  milliaire  DCVII  à  l'endroit  précis  où  les  Romains  l'avaient 
planté.  [Lors  de  l'établissement  de  la  voie  julienne;  trois  fois  placé  et 
replacé  par  Auguste,  Antonin  et  Hadrien.]  —  P.  365-71.  Guebhard. 
Etymologie  provençale  du  mot  Baliverne.  [Canta  baïsso  luverno.  M.  le 
D'  Guebhard  est  agrégé  de  physique.]  — ^P.  373-437.  Doublet.  Monogra- 
phie de  celles  des  paroisses  des  cantons  de  Coursegoules,  Saint-Auban 
et  le  Bar  qui  firent  partie  du  diocèse  de  Vence  [Coursegoules, 
Besaudun,  Bouyon,  Gréolièref,  Caille,  Andon  (Thorenc),  Gourmes, 
Tourrettes,  toutes  sauf  la  dernière  d'un  accès  difficile  ou  semblant  tel 
aux  xviP  et  xviii«  siècles;  détails  curieux  pour  le  folklore  et  l'histoire 
des  superstitions  à  propos  de  la  chapelle-pèlerinage  de  Saint- Arnoux, 


PERIODIQUES   MERIDIONAUX.  253 

Fin  de  cette  longue  et   importante  monographie  d'histoire  ecclésias- 
tique.] L.-G.  P. 

Ardèche. 

Revue  du  Vivarais,  t.  XI,  1903.  • 

p.  1-10.  SiLvius.  Cruas  pendant  les  guerres  civiles.  [De  157J;  à  1683.  Quel- 
ques extraits  des  mémoires  du  chanoine  Bannes  sur  celles  du  xyi"  siè- 
cle.] —  P.  10-8.  K.  Le  Sourd.  Les  demoiselles  de  Saint-Cyr  originaires 
du  Vivarais.  (Suite,  et  p.  57-64,  213-27;  fin,  p.  570-93).  [Blason,  généalo- 
gie de  chacune;  actes  prouvant  qu'elle  possédait  la  noblesse  nécessaire 
pour  être  admise  à  Saint-Cyr.  A  la  fin,  renseignements  sur  ce  que  sont 
devenues  quelques-unes  d'entre  elles ,  ou  leurs  descendants ,  por- 
traits, etc.,  le  tout  précis  et  puisé  à  bonne  source.]  —  P.  19-29.  L.  de 
MoNTRAVEL.  Les  cliàteaux  de  Blou  (Blod).  (Fin  p.  65-75.)  [Paroisse 
de  Toulaud,  près  du  Rhône.  Plusieurs  châteaux  successifs.  Maisons 
seigneuriales,  avec  notices  généalogiques.]  —  P.  80-47.  A.  Mazon.  His- 
toire d'une  petite  ville  au  xviii»  siècle.  Largentière,  de  1701  à  1787. 
(Suite  et  p.  49-56.)  [Cette  histoire  de  Largentière  se  continue  sous  les 
titres  suivants  :  Le  prologue  de  la  Révolution  dans  une  petite  ville 
(p.  128-40);  Largentière  pendant  la  Révolution,  1789-1791  (p.  1.59-77); 
Largentière  et  la  conspiration  de  Saillans  (p.  185-202);  la  Société  popu- 
laire de  Largentière,  1792-1794  (p.  248-81 ,  305-14)  ;  Largentière  pendant 
la  réaction  thermidorienne,  1794-1795  (p.  345-70);  la  chouannerie  à  Lar- 
gentière et  aux  environs,  1796-1800  (p.  410-30,  445-54).  Nous  donnerons 
un  compte  rendu  spécial  de  cette  publication,  dont  les  premières  livrai- 
sons ont  été  déjà  par  nous  signalées.]  —  P.  76-89.  F.  de  Charbonnel. 
Chassiers  jadis  et  aujourd'hui.  —  P.  90-6.  De  Moxtravel.  Labaume- 
sous-Sampzon.  —  P.  97-110.  A.  Mazon.  Le  temple  de  Diane  à  Desaignes 
(Fin).  [Hypothèses  émises  à  ce  sujet.  Sources  minérales  du  lieu.  Bio- 
graphie de  l'ingénieur  hydrographe  Chazallon,  qui  y  est  né,  \  1872.]  — 
P.  111-27.  Df  Francus.  Pierre  Davity,  de  Tournon  (suite).  [Le  premier 
article  a  paru  en  1902,  le  second  en  1903  ;  attendons  1904  pour  obtenir 
le  troisième,  qui  doit  donner  un  aperçu  des  ouvrages  de  Davity.  Dans 
le  présent,  on  trouvera  des  précisions  sur  l'auteur,  son  fils  et  ses  des- 
cendants.] —  P.  145-58.  E.  NicoD.  La  maison  de  Fay-Peyraud.  [Généa- 

^  logios,  dont  suite  p.  203-12,  281-96, 315-38,  379-89,  431-40,  et  fin  p.  503-32. 
Elles  reposent  sur  le  dépouillement  des  archives  de  Peyraud  et  de 
Solignac  et  s'étendent  du  xiv«  s.  au  xviii".  Travail  sérieux,  précis  et 
d'autant  plus  méritoire  qu'il  était  plus  malaisé;  car  «  au  moment  dea 
premiers  troubles  de  religion,  il  y  avait  au  moins  sept  Jean  de  Fay, 


254  ANNALES   DU   MIDI. 

parents  plus  ou  moins  rapprochés.  »  L'un  d'eux,  hugiienot,  épousa 
Marie,  fille  naturelle  de  Montmorency-Damvillc  (p.  S'S2),  dont  il  suivit 
le  parti,  avec  qui  se  fit  sa  fortune;  il  se  convertit  et  devint  sénéchal  de 
Beaucaire  et  Niuies.  Son  fils  Henri,  après  avoir  servi  contre  Rohan 
sous  lîtenri  II  de  Montmorency,  se  perdit  avec  lui  dans  la  révolte 
de  1632.  La  maison  achève  ensuite  de  se  ruiner  et  s'éteint  vers  1750.  A 
la  fin,  notes  sur  la  ville  et  mandement  de  Peyraud  ;  en  1671,  les  biens 
nobles  étaient  représentés  dans  la  taille  (qu'ils  ne  payaient  pas)  par  le 
chiffre  de  975  1.,  les  biens  roturiers  par  celui  de  2,411  1.  Etude  intéres- 
sante sur  le  domaine  seigneurial ,  en  très  mauvais  état  au  xvif  s.]  — 
P.  233-43.  B.  E.  Le  château  des  Rieu.x,  à  Saint-Alban-d'Ay.  [Entre  An- 
nonay  et  Satillieu.  Possesseurs,  de  1333  à  nos  jours.]  —  P.  339-44.  Sil- 
vius.  Le  cardinal  de  Brogny,  évèque  de  Viviers.  [1382-1385;  •}•  1426.  Il 
n'était  pas  d'aussi  humble  origine  qu'on  l'a  cru  d'après  une  légende  et 
son  portrait,  au  bas  duquel  est  représenté  non  Brogny  gardant  les 
pourceaux,  mais  seulement  l'enfant  prodigue.]  —  P.  371-8.  A.  Roche. 
Le  lieutenant  PeyroUon,  de  Bourg-Saint-Andéol.  [Né  en  1782,  mort  en 
1846  après  avoir  fait  toutes  les  guerres  de  l'Empire.]  —  P.  399-409 
et  491-502.  De  Montr.vvel.  Paroisses  et  monastères  de  Lavilledieu  et 
de  Saint-Maurice  de  Terlin.  [Couvent  de  Bénédictines  de  Lavilledieu, 
dont  les  abbesses  sont  énumérées;  texte  d'une  élection  d'abbeSse,  de 
1459.]  —  P.  533.  L'élection  du  général  Suchet  au  Sénat  conservateur. 
[Lettre  datée  du  camp  devant  Sarragosse,  23  janvier  1809,  par  laquelle 
il  remercie  à  ce  sujet  le  collège  électoral  de  l'Ardèche.]  —  P.  540-54. 
F.  B.  E.  Saint-Martin-le-Supérieur.  [Canton  de  Rochemaure.  A  suivre.] 
—  P.  555-69.  A.  Mazon.  L'église  de  Notre-Dame-des-Pommiers  à  Lar- 
gentière.  (A  suivre.)  P.  D. 

Aude. 

Bulletin  de  la  Com7nission  archéologique  de  Narbonne^ 
1903,  2«  semestre. 

p.  Lxiii.  Campardon.  Sépultures  du  premier  âge  de  fer  à  Fleury-d'Aude. 
[Découvertes  intéressantes.]  —  P.  421-38.  Amardel.  Les  jetons  de  ma- 
riage et  les  médailles  de  Nimes  au  pied  de  sanglier.  [Conjecture  que 
ces  médailles  énigmatiques  auraient  été  des  jetons  de  mariage.]  — 
P.  439-558.  TissiKR.  Documents  inédits  pour  servir  à  l'histoire  de  la 
province  de  Languedoc  et  de  la  ville  de  Narbonne  (1596-1632).  [104  piè- 
ces de  la  correspondance  reçue  par  les  consuls  de  Narbonne;  documents 
assez  importants,  surtout  pour  la  minorité  de  Louis  XIII  et  la  révolte 
du  duc  de  Montmorency.  Signalons  des  lettres  de  Joyeuse,  de  Henri  IV, 


PÉRIODIQDES   MERIDIONAUX.  £65 

de  Mïirie  de  Médicis,  de  Ventadoiir,  de  M.  de  Saint-Geniès,  de 
Louis  XIII,  de  plusieurs  premiers  présidents  du  Pariement  de  Tou- 
louse :  de  Verdun,  Le  Mazuyer,  de  Paulo,  de  Bertier.  Cf.  notre  c.  r. 
sommaire,  plus  haut,  p.  105.]  —  P.  5o9-73,  Yché.  Notes  sur  Jacques 
Gamelin.  (Suite.)  Ch.  L. 

Bouches-du-Rhône. 

Bulletin   de    la    Société   de    géographie    de  Marseille^ 
t.  XXIII,  1899. 

P.  7-3U.  P.  M.\ssoN.  Marseille  port  colonial.  Etude  sur  les  relations  mari- 
times et  commerciales  de  Marseille  avec  les  colonies  françaises.  [Mon- 
tre l'accroissement  continuel  de  ces  relations  depuis  1815;  il  est  de  plus 
des  trois  cinquièmes.  Quatre  tableaux  graphiques.] — P.  177-93.  P.  M  as- 
son.  Le  commerce  de  Marseille  avec  les  colonies  fi-ançaises.  [Tableaux 
statistiques  éclairant  le  précédent  article.]  —  P.  365-75.  J.  Fournier. 
Une  Société  de  géographie  à  Marseille  en  1801.  [Fondée  à  Paris  en  1793, 
puis  transportée  à  Marseille.  Elle  paraît  n'avoir  pas  vécu  longtemps. 
On  en  donne  les  statuts.] 

T.  XXIV,  1900. 

P.  259-63.  V.  TuRQUAN.  Marseille  seconde  ville  de  France.  Pronostics 
sur  le  prochain  recensement.  —  P.  264-81.  J.  Delmas.  La  vallée  de  la 
Bresque  (Var).  [Quelques  indications  archéologiques.] 

T.  XXV,  1901.  Néant.  -  T.  XXVI,  1902. 

P.  260-72.  H.  Barré.  La  répartition  de  la  population  sur  le  sol  de  la 
Provence.  Recensement  de  1901.  M.  D. 

Garonne  (Haute). 

I.  Bulletin  de  la  Société  archéologique  du  Midi  de  la 
France,  25  novembre  1902-7  juillet  1903. 

P.  195.  Lanes.  Objets  anciens  trouvés  à  Toulouse.  —  P.  196-97.  Four- 
Gous.  Découverte  de  fresques  anciennes  à  l'église  de  Eampoux  (Lot).  — 
P.  197-2U9.  Lamouzèle.  Inventaire  du  mobilier  de  l'hôtel  de  Jean  Du- 
barry,  à  Toulouse,  1794.  [Document  curieux,  avec  une  notice  sur  ce  per- 
sonnage.]—  P.  210-1.  Abbé  Galabert.  Un  tremblement  de  terre  dans  le 
Midi,  le  21  juin  1660.  —  P.  212.  De  Rivières.  Inscription  d'une  cloche  de 
Salles-d'Aude,  1331.  —  P.  213-4.  M»"'  Batiffol.  Autobiographie  de 
Simon  Borè^,  professeur  de  l'ancienne  Faculté  de  théologie  de  Toulouse 
avant  et  pendant  la  Révolution.  —  P.  214-5.  De  Rivières.  Deux  fontes 


256  ANNALES   DU   MIDI. 

de  cloches  au  xviii'  siècle.  —  P.  216-2U.  Abbé  Auriol.  Crosse  dite  de 
Saint-Louis  d'Anjou  à  Saint-Sernin  de    Toulouse,  avec  une    planche. 
[Excellente  description  de  cette  œuvre,  probablement  toulousaine,  du 
xiii"  siècle.]  —  P.  220-3.  De  Rivières.  Trois  pierres  sacrées  ou  autels 
portatifs  conservées  dans  le  trésor  de  l'ancienne  cathédrale  de  Saint- 
Just  et  Saint-Pasteur  à  Narbonne.  [Description  avec  texte  des  inscrip- 
tions.] —  P.  223-4,  227-8.   Lanes.  Fouilles  et  substructions  anciennes 
de  la  place  Rouaix  à  Toulouse.  —  P.  224-5.  Abbé  Saltet.  La  forma- 
tion de  la  légende  de  sainte  Enimie.  —  P.  226.  Bauzon.  Photographies 
et  gravures  de  deux  toiles  de  Fragonard  découvertes  vers  1880  à  Bor- 
deaux. —  P.  226-7.  Graillot.    Le  dieu  Atys,   statuette  de  bronze  du 
musée  Saint-Raymond,  de  Toulouse.   —  P.  227.  Abbé  Lestrade.  Ins- 
cription funéraire  latine  trouvée  près  de  Cazères.  [Elle  donne  un  nom 
nouveau,  Cloepius.]  —  P.  228-30.  L.  de  Santi.  Statue  de  Jupiter,  décou- 
verte   à    Avignonet    (Haute-Garonne).    [Bonne    description   de   cette 
statue,  très  réaliste,  qui  paraît  être  du  iii«  siècle  après  J.  G.  Elle  porte 
l'inscription  :  I.  0.  M.]  —  P.  231-2.  Abbé  Cau-Durban.  Notice  sur  des 
objets  gallo-romains  découverts  près  de  Cazères.  [Entre  autres  deux 
lampes  avec  les  mots  :  PHOESTASPI  et  FORTIS.]  —  P.  232-3.  Roger 
et  Maurel.  Fouilles  dans  un  cimetière  de  l'époque  barbare,  à  Teilhet 
(Ariège).  [Résultats  très  importants.]  —  P.  233-4.  Delorme.  Un  double 
sol  parisis  poinçonné  par   Genève.  —  P.  234-56.  Desazars   de  Mont- 
GAiLHARD.    Allocutiou   proiioncée   à    la    séance    publique    du  25   jan- 
vier 1903  :  les  antiquaires,  les  collectionneurs  et  les  archéologues  d'au- 
trefois à  Toulouse.  [Excellente  étude,  en  particulier  sur  les  Crozat.]  — 
P.  256-68.  Marla.  Rapport  général  sur  le  concours    de  l'année  1902. 
[Analyse  des  travaux  couronnés,  en  particulier  de  :  Saint-Lys,  histoire 
de  cette  bastide,  par  M.  Léon  Delaux;  Monographie  de  la  comman- 
derie  de  Caignac ,  par  M.  l'abbé  Corraze;  Histoire  de  Frouzins,  par 
M.  l'abbé  Bagnéris;  Bruniquel,  ses  seigneurs  et  son    hôpital,   par 
M.  Azéma;    Armoriai  des  évêques  de  Pamiers,   par  M.  Lafont  de 
Sentenac;    Poteries    de   Giroussefis ,   par  M.   Rieux;    Coutumes    de 
Saint-Jean-de-Barrou  et  de  Castelmaure  (Aude),  par  M.  Cros-Mayre- 
vieille.]  —  P.  269-79.  Delorme.  La  bataille  de  Toulouse.  Une  médaille 
anglaise  commémorative.  —  P.  279-83.  Abbé  Lestrade.   Particularités 
inédites  du  siège  de  Villemur  (1592);  destruction  des  fortifications  de 
cette  place  (1631).  [D'après  des  pièces   des  Archives  des  notaires  de 
Toulouse.]  —  P.  283-4.   Abbé   Lestrade.    Trois  rétables  faits  à  Tou- 
louse pour  les  Cordeliers  de  Mont-de-Marsan,  d'Agen  et  de  Toulouse 
(1624).  [D'après  des  baux  à  besogne  des  Archives  des  notaires  de  Tou- 


t^ÉRIODlQUES   MERIDIONAUX.  257 

louse.]  —  P.  285.  L.  Deloume.  Fontaine  en  terre  cuite.  —  P.  226.  Abbé 
Cau-Durban.   Découvertes    d'objets    gallo-romains   à    Saint-Michel-du- 
Touch.    [Entre  autres  d'un  tesson  avec  l'inscription  :  IFELICA?]  — 
P.  288-91.  De  Lahondès.  Le  calice  du  château  de  Cabaret  (Aude).  [Avec 
une  planche].  — P.  291-4.  Barrière-Flavy.  Fouilles  de  l'église  de  Saint- 
Paul  d'Auterive.  —  P.  294.  L.  Deloume.  Sculpture  représentant  l'église 
de   Saint-Sernin  et  le  Capitule  avec  croix  de  Toulouse.  —  P.  295.  De 
Bourdes.  Deux  pièces  d'or  trouvées  à  Quint,  prés  Toulouse.  [Un  soude 
Sévère  III  et  un  demi-écu,  à  la  croisette,  de  François  I".]  —  P.  295-6. 
Desazars  de  MoNTGAiLHARD.  Notice  biographique  sur  la  famille  Crozat. 
[Excellent  travail.]  —  P.  297-8.  Abbé  Lestrade.  a  Bail  de  besogne  de 
MM.  les  Capitouls  à  Chalette  »,  peintre  de  l'hôtel  de  ville  (1634).  — 
P.  298-9.  Abbé  Vidal.  Notice  sur  les  œuvres  du  pape  Benoît  XII.  — 
P.  299.  Abbé  Eeynaud.  Quatre  niches   ogivales   du   cloître  de  Saint- 
Papoul.  —  P.  299-300.  B.  de  Gorsse.  La  carrière  de  marbre  blanc  de 
Saint-Béat,  dite  «  Brèche  des  Romains  ».  —  P.  800.  Lanes.  Un  florin 
d'or  trouvé  place  Rouaix  à  Toulouse.  —  P.  300.  Barrière-Flavy.  Mon- 
naies trouvées  au  château  des  Allemans.  —  P.  301.  Bauzon.  Notice  sur 
le  puits  de  Moyse,  de  Dijon  et  Claux  Sluter.  —  P.  302.  Juppoxt.  Un 
Plan  manuscrit  du  Canal.  [Trouvé  aux  archives  du  Canal  du  Midi 
avec  documents  sur  Toulouse  en  1732.]— P.  302.  Adher.  Note  sur  le 
château    de    Labastide-Paumès     (Haute-Garonne).    —   P.    303.    Abbé 
Taillefer.  Règlements  de  la  confrérie  de  Notre-Dame-la-Chandeleur, 
de  1557  à  1615.  —  P.  304-10.  Lamouzéle.   Quelques  documents  inédita 
sur  les  chirurgiens-barbiers  de  Toulouse.   [Ordonnances  des  capitouls 
de  Toulouse  de  1542,  1589,  1597,  1601,  et  du  Parlement  de  Toulouse,  de 
1647,  sur  les  statuts  et  les  examens  des  chirurgiens;  documents  in  té' 
ressauts  pour  l'histoire    de   la   médecine.]  —  P.  313-5.  Desazars   de 
Montgailhard.  Prix  décernés  au  xvii=  siècle  aux  élèves  de  l'école  de 
dessin  instituée  par  Dupuy  du  Grez.  [Notice  sur  les  différents  exem- 
plaires connus  de  la  médaille  instituée  par  Dupuy  du  Grez  en  1693.]  — ^ 
P.  315-7.  Abbé  Lestrade.  Deux  lettres  de  Sermet,  évèque  constitution- 
nel de  Toulouse,   de  1771.   —   P.  317-9.  Desazars  de   Montgailhard. 
Etude  iconographique  des  miniatures  à  l'hôtel  de  ville  de  Toulouse. 
[Exposé  préliminaire  sur  les  An>iales  de  l'hôtel  de  ville  et  les  minia- 
tures qu'elles  renferment.]  —  P.  319-20.  Abbé  Lestrade  et  J.  de  Lahon- 
dès. Note  sur  une  gravure  provenant  de  l'abbaye  de  Saint-Antoine-de- 
Lézat  et  sur  les  religieux  de   Saint-Antoine-du-Viennois.  —   P.  320-1. 
Lannes.  Un  hausse-col  d'officier  à  singulières  armoiries.   —   P.  321-3. 
Cartailhac.  Note  sur  le  Dictionnaire  des  institutions ,  mœurs  et  coii- 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVI.  17 


26â  ANNALES   DU   MIDI. 

tûmes  du  Rouergue,  par  M.  Affre.  [Met  en  relief  l'imi^ortance  et  la 
valeur   de   ce  travail  qui  renferme   de  nombreuses    monographies    et 
l'explication  de  beaucoup  d'anciens  mots.J  —   P.  3:^5.  De  Eiviérks. 
Monnaies  romaines  trouvées  près  de  Rivières.  —  P.  325-6.  Id.  Der- 
niers  travaux  à   la  cathédrale  d'Albi.    —  P.  327.    L.  Deloume.    Une 
tuile    du  xvii°  siècle.   —    P.  327-8.   J.  de  L.iHoxDÈs.   Notice  sur  un 
manuscrit   du  xv^  siècle  acheté  par  le   musée  Saint-Raymond.  [Très 
bonne    étude  sur  ce  manuscrit  d'origine    toulousaine,    qui    renferme 
un  office   de  la  Vierge,  l'office  des   morts    et   quatre    miniatures.]  — 
P.  329-30.   C.\RT.\iLH.iC.  Notice  nécrologique   sur  l'archéologue   Cara- 
ven-Cachin.  —   P.  331-5.  J.  de  L.4.hondès.    Trois   pierres   tumulaires 
d'abbés  de  Saint-Sernin  (avec  dessins).  [Description  de  ces  trois  pierres 
tumulaires  de  trois  abbés  de  Saint-Sernin  :  Bernard  de  Gensiac  (1243  à 
1263),  Raymond  Ranulphe  de  Valignac  (1361-1375),  Bernard  d'Aurival 
(1409-1412).]  —  P.  335-8.    J.  de  Lahondès.  L'excursion  à  Villefi-anche- 
de-Rouergue.  [Description    sommaire   des    principaux   monuments  de 
Villefranche.]  —  P.  339.  Barrière-Fla.vy.  Note  sur  un  panneau  peint 
provenant  d'une  chapelle  d'Ax-les-Thermes.  —  P.  339-40.   E.  Forestié. 
A   propos    du    Voyage  de  saint  Patrice  publié   par  MM.  Jeanroy  et 
Vignaux.  [M.  F.  démontre  excellemment,  par  la  lecture  de  la  signature 
du  manuscrit,  que  le  traducteur  de  la  relation  catalane   a  été  Jean  de 
Peyrelade,  de  Petra  lata,  doyen  du  monastère  de  Cayrac  près  Montau- 
ban,  vers  1435-1473,  et  confirme  ainsi  les  conclusions  de  M.  Jeanroy 
sur  la  patrie  de  cette  traduction.]  —  P.  341-4.  De  Rey-Pailhade.  Deux 
montres  décimales  anciennes.  —  P.  345-7.  J.  de  Lahondès.  Documents 
des  archives  municipales  sur  la  consécration  de  l'église  Saint-Etienne 
par  le  cardinal  de  Joyeuse  en  1592.  —  P.  347-50.  Abbé  Lestrade.  In- 
ventaire du  mobilier  de  l'église  Saint-Rome  à  Toulouse,  en  1603;  bail  à 
besogne  d'un  tableau  commandé  en  1608  par  les  Ursulines  de  Toulouse 
au  peintre  La  Carrière.  —  P.  351.  Abbé  Taillefer.  Une  ordonnance 
sur  le  billottage  des  chiens  en  1781.  —  P.  3.55-8.  Abbé  Degert.  Origine 
de  la  Vierge  Noire  de  la  Daurade.  [Très  bonne  dissertation  qui  prouve 
que  la  statue  actuelle  est  une  reproduction  de  l'ancienne,  et  que  l'an- 
cienne était  l'œuvre  d'un  sculpteur  toulousain  entre  la  fin  du  xiu»  siè- 
cle et  la  fin  du  xv«.]  —  P.  358-9.  Abbé  Lestrade.  La  prière  d'un  no- 
taire   toulousain,   en    vers,    de    1603.    —    P.    359-60.    Abbé  Raynaud. 
Fouilles  dans  l'église  de  Saint-Papoul.  —  P.  361.  Abbé  Lestrade.  Por- 
traits gravés  d'Henry  de  Montmorency,  de  Jean  de  Catellan,  de  Fur- 
gole,   de  Dominique  de  Lastic,  de  Pons,   de  Ramond.  —  P.  375-400. 
A.  Deloume.  Note  sur  l'hôtel  d'Assézat  et  de  Clémence  laaure  (1895- 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  259 

1903).  —  P.  401-10.  Cartailiuc  et  L.  Deloume.  Martres-Tolosane;  la 
Société  archéologique  du  Midi  de  la  France  et  son  œuvre,  1831-1901. 
[Historique  complet  des  fouilles.]  Ch.  L. 

IL  Mémoires  de  V Académie  des  sciences,  inscriptions  et 
belles-lettres  de  Toulouse,  10*'  série,  t.  III,  1903. 

p.  1-26.  E.  EoscHACH.  Un  souvenir  d'Ingres.  Jean  Briant  (1760-1799.) 
[Briant  est  un  des  maîtres  d'Ingres.  Né  à  Bordeaux,  établi  à  Toulouse, 
il  organisa  durant  la  Révolution  le  musée  de  cette  ville  (en  1794-1795). 
On  avait  contesté  son  existence.]  —  P.  49-109.  L.  de  Santi.  Michel  de 

.  Paulo,  seigneur  de  Grandval.  [Près  Avignonet.  Ce  seigneur-robin,  frère 
d'un  président  au  Parlement  de  Toulouse,  Jean  de  Paulo,  avait  guer- 
royé au  profit  des  huguenots,  quoique  catholique,  et  pillé  tous  ceux 

.qui  pouvaient  payer  rançon,  surtout  les  gens  d'Avignonet,  dont  il  tua 
quelques-uns.  Par  arrêt  du  26  septembre  1581,  le  Parlement  le  con- 
damna à  être  pendu,  ainsi  que  ses  compagnons.  Il  fut  pris  et  mis  à 
mort  dans  sa  prison,  à  Avignonet,  probablement  le  22  mars  1583.  Cet 
événement  ne  fit  que  redoubler  la  haine  que  son  frère  avait  conçue 
contre  le  premier  président  Duranti  :  cinq  ans  plus  tard,  celui-ci  était 
assassiné  par  les  Ligueurs,  au  premier  rang  desquels  figurait  Jean  de 
Paulo.  Très  utiles  précisions.  Textes.]  —  P.  210-44.  A.  Deloume.  Note 
sur  l'hôtel  d'Assézat  et  de  Clémence-Isaure.  [Fort  intéressant  relevé  des 
travaux  de  restauration  si  bien  conduits  par  M.  D.  de  1895  à  1903  afin 
d'installer  les  Sociétés  savantes  de  Toulouse  dans  ce  bel  édifice,  en 
vertu  du  testament  de  M.  Ozenne.  Ce  qui  reste  à  faire  :  à  notre  avis, 
rien  ne  serait  plus  urgent  que  d'organiser  les  bibliothèques  des  Socié- 
tés, lesquelles,  dans  l'état  actuel,  ne  rendent  pas  les  services  que  l'on 
en  pourrait  attendre  et  dont  certaines  dépérissent  faute  de  soins.]  — 
P.  303-56.  Desazars  de  Montgailharu.  L'iconographie  des  incunables 
imprimés  à  Toulouse.  [Les  premiers  de  1476.  Les  plus  anciens  impri» 
meurs  établis  à  Toulouse  sont  des  Allemands,  et  sans  doute  aussi  les 
graveurs  sur  bois;  mais  à  eux  se  mêlent  bientôt  des  artistes  indigènes 
ou  d'autres  étrangers,  tant  «  miniateurs  »  que  xylographes  :  imagerie 
très  inférieure  à  celle  des  livres  vénitiens.]  —  P.  403-19.  J.  Brissaud. 
L'histoire  du  droit  du  Midi  de  la  France.  [Rapide  et  spirituel  e.xposé 
de  ce  qui  a  été  fait  pour  constituer  cette  histoire  et  de  ce  qui  reste  à 
faire  :  le  gros  de  l'œuvre  assurément;  on  n'en  est  encore  qu'aux  «  tra- 
vaux d'approche  ».]  P.  D. 


260  ANNALES   DO   MIDI. 

III.  Revue  de  Comminges,  t.  XVIII,  1903. 

p.  1-22.  V.  Bagnéris.  Saint-Germier  à  Frouzins.  Traditions  et  légendes. 
[Suite  et  fin;  avec  carte  du  territoire  Doz.]  —  P.  23-34.  Fabre  d'Envieu. 
Etymologie  de  Tibiran-Jaunac  ou  un  Tibre  dans  le  Comminges.  Avec  un 
appendice  sur  le  Tibre  de  Rome  et  les  Celtes,  cofondateurs  de  Rome . 
[Suite  et  fin.   L'auteur   s'efforce  de  démontrer  que   le   mot  Tibre   est 
d'origine  celtique  et  que  les  Celtes  figurent  parmi  les  principaux  an- 
cêtres des  Romains.]  —  P.  35-9.  J.  Lestrade.  Coutumes  de  Salerm. 
[Communauté  de  la  chàtellenie  de  l'Isle-en-Dodon  en  Comminges  ;  texte 
d'après   une  rédaction   de   1708.]    —    P.   40-55,  77-94,   129-48,    207-17. 
CouRET.  Histoire  de  Montmaurin  et  suite  des  recherches  archéologiques 
dans  la  haute  vallée  de  la  Save.  [Etude  sur  les  ruines  découvertes  à 
Montmaurin,  leur  origine,  leur  destination;  avec  un  plan.  A  suivre.]  — 
P.  56-60,  106-11.  B.  DE  GoRSSE.   Documents  sur  le  Nébouzan,  le   Com- 
minges et  les  Qiiatre-Vallées.  [Inventaire  de  certaines  pièces  apparte- 
nant aux  archives  du  château  de  Pau   et   relatives  aux  juridictions,  à 
l'instruction  publique  ;  dénombrements  et  biens  des  communes  de  ces 
régions.]  —  P.  116-24.  F.   Périsse.    Un  hobereau  commingeois.  [Notes 
biographiques  sur  messire  d'Encausse  de  Save,  d'Aspet,  ses  rapports 
avec  la  population  et  les  consuls  de  cette  ville  à  la  fin  du  xvi«  et  au 
commencement  du  xvii«  siècle.]  —  P.  149-64.  E.  Bacalerie.  Le  chapitre 
cathédral  de   Rieux.    Règlements,   usages,  etc.    —  P.  165-77,  193-206. 
Bouche.  Les  de  Bachos.  [Notes  historiques  sur  cette  famille,   avec   la 
généalogie  depuis  1469.]  —    P.  178-84.  L.   Vie.    Une  commune   rurale 
pendant  la  Révolution  :  Castelnau-Picampeau.  [Récit  de  la  vie  muni- 
cipale dans  cette  localité  de  1789  à  l'an  VIII.]  —  P.  218-38.  C.  Espén.\n. 
Le  district  de  Saint-Gaudens  pendant  la  Révolution  (1789-1795).  [Etude 
détaillée  des  faits  qui  s'accomplissent  dans  cette  partie  de  la  Haute- 
Garonne  depuis  la  convocation  des  États-Généraux  et  sous  la  Consti- 
tuante, la  Législative  et  la  Convention.  A  suivre.]  —  P.  242-48.  L.  ViÉ. 
A  propos  d'un  vieux  livre.  Notes  d'histoire  locale.  [Sur  les  quelques 
communautés  d'habitants  de  l'élection  des  Comminges  qui  dépendaient 
du  diocèse  de  Rieux.]  —  P.  219-50.  J.  Lestrade.  Prise  de  possession  de 
l'évêché  de  Comminges  par  Donadieu  de  Griet.  [1626.]  L.  V. 

IV.  Revue  des  Pyrénées,  t.  XV,  1903. 

P.  10-37.  Jean  de  l'Hers.  Les  derniers  marquis  de  Verdelin.  [Notes  bio- 
graj^hiques  sur  les  derniers  représentants  (1750-1823)  de  cette  famille, 
qui  possédait  depuis  1532  la  seigneurie  de  Montégut,  dans  la  vallée  de 
la  Neste.]  —  P.  51-70,  318-32,  632-48.   D.  Cau-Durban.  Mémoires  du 


PÉRIODIQUES  MÉRIDIONAUX.  261 

marquis  Jean-François  Bérenger  de  Thésan,  colonel  du  régiment  de 
Vermandois  (1745-1804).  [Né  à  Toulouse,  émigré,  rentré  en  France  en 
1803,  mort  à  Paris  en  1804.  Ces  mémoires  embrassent  la  période  de 
1790  à  1792  et  ont  principalement  trait  aux  opérations  militaires  des 
émigrés  sur  le  Rhin.]— P.  105-32,  280-306,  376-414,  489-518.  A.  Baudouin. 
Histoire  critique  de  Jules-César  Vanini  dit  Lucilio.  [Etude  détaillée 
et  documentée  sur  le  célèbre  philosophe  italien  :  sa  vie,  sa  condamna- 
tion par  le  Parlement  et  son  exécution  à  Toulouse.  Reproduction, 
revisée  par  l'auteur,  du  travail  publié  dans  la  Revue  philosophique 
en  1879.]  —  P.  133-60.  G.  Doublet.  Un  mémorialiste  toulousain  au 
xvn»  siècle.  L'abbé  Jean  Du  Ferrier  (1609-85).  [Suite  et  à  suivre.]  — 
P.  161-75.  J.  Adher.  La  Révolution  à  Toulouse  et  dans  la  Haute-Ga- 
ronne. c<  L'enlèvement  »  de  Louis  XVI.  [Récit  des  événements  qui  sui- 
virent, dans  la  région,  la  fuite  à  Varennes;  état  des  esprits,  mesures 
pi'ises  par  les  pouvoirs  constitués.]  —  P.  176-88,  428-46,  528-47. 
C.  Douais.  L'art  à  Toulouse.  Matériaux  pour  servir  à  son  histoire  du 
quinzième  au  dix-huitième  siècle.  [Suite  et  fin.  Documents  de  1554  à 
1725  relatifs  à  Saint-Etienne,  à  l'hôtel  d'Assézat,  au  Pont-Neuf,  etc.]  — 
P.  361-75.  J.  BmssAUD.  L'histoire  du  droit  du  midi  de  la  France.  [Exposé 
de  l'intérêt  qui  s'attache  à  l'étude  de  l'ancien  droit  méridional,  de  ses 
sources,  et  en  particulier  de  l'utilité  d'un  recueil  de  chartes  de  coutu- 
mes locales.]  —  P.  473-88.  F.  Gal.\bert.  Un  peu  de  folklore.  Coutumes 
et  veillées  du  Rouergue  quercynois.  [Description  de  quelques  vieux 
usages  ruraux  de  cette  contrée.]  —  P.  519-28.  J.-J.  Dumoret.  Un  salon 
bagnérais  en  1802.  [Conférence  faite  en  1896  sur  Bagnères-de-Bigorre  au 
début  du  xix^  siècle  et  la  société  qui  fréquentait  cette  station  thermale 
au  lendemain  do  la  Révolution.]  —  P.  585-603.  J.  de  Lahondès.  Une 
poétesse  épique  toulousaine.  [Marie  de  Pech,  sa  vie  (1630-1661),  son 
poème,  Judith  ou  la  délivrance  de  Béthulie.]  —  P.  604-17.  Barrière- 
Flavy.  Un  magistrat  royal  au  dix-huitième  siècle.  Gabriel-Etienne  de 
Calvet,  juge  et  bailli  d'Auterive.  [Notes  biographiques  sur  ce  magistrat 
(1690-1763);  son  entrée  en  charge  en  1720;  ses  rapports  avec  le  Conseil 
de  ville  et  les  habitants.]  L.  V. 

Gers. 

Revue  de  Gascogne^  nouvelle  série,  44*^  année,  t.  III,  1903. 

Janvier.  P.  5-14,  58-9.  A.  Degert.  L'impression  des  liturgies  gasconnes. 
Tableau  d'ensemble  et  documents  inédits.  [Etude  des  premiers  textes 
liturgiques  imprimés  dans  les  onze  diocèses  dont  Auch  était  la  métro- 
pole, intéressant  les  historiens  de  notre  liturgie  et  des  premiers  impri- 


262  ANNALES   DU   MIDI. 

meurs  qui  travaillèrent  en  Gascogne.]  —  P.  15-22.  Tierny  et  Couaix. 
Journal  de  Sentex,  1640-1665.  (Suite,  p.  70-8,  268-84.)  [A  la  fois  journal 
et  livre  de  raison  rédigé  par  Sentex,  bourgeois  de  Castin.  S'intéresse 
aux  affaires  politiques  de  l'époque.  Renseignements  sur  les  prix  des 
denrées.  Indications  sur  Sentex,  sa  famille,  ses  fonctions.]  —  P.  23-6. 
J.-B.   Gab.\rra.  Lettre  inédite  de  Lequien  de  Laneufville,  évêque   de 
-    Dax.  [Cette  lettre,  datée  du  5  mai  1802,  jette  une  lumière  nouvelle  sur 
l'incident  qui  se  produisit  vers  le  milieu  de  1802  et  sur  la  conduite  des 
évêquos  qui,  à  l'appel  de  Pie  VII,   s'étaient  démis  de  leur  siège.]  — 
P.  27-30.  J.   Lestrade.  Le   testament  de  Jean  de   Ribeyran.  [23  jan- 
vier 1672.  Intéresse  Garaison.]  —  P.  30,  A.  D.  Tremblements  de  terre 
en  Gascogne.  [1660  et  1665.]  —  P.  31-3.  A.  Clergeac.  Un  manuscrit  du 
xiv°  siècle  à  Lombez.   [Il  s'agit  du  VI«  livre  (Sexta)  que  Boniface  VIII 
fit  publier   en  1299    pour  compléter  la   collection   des  Décrétales  de 
.    Grégoire  IX  en  cinq  livres.]  —  P.  34-6.  P.  Lamazouade.  Notes  et  sou- 
venirs de  M.  l'abbé  Dallas  sous  la  Révolution.  —  P.  37-41.  L.  de  Saint- 
Fris.  Fondation  de  la  Collégiale  de  Bassoues.   [Analyse  de  l'acte  d? 
fondation,  12  mai  1512.] 
Février.    P.   49-57.  L.   Couture.  Les  correspondants  de  Chaudon  :  III, 
l'abbé   d'Artigny.    [Renseignements    sur     l'abbé    d'Artigny;   texte    de 
quatre  de  ses  lettres,   de  1755  et  1756.]  —  P.  79-84.  A.   Degert.    Les 
premières  journées  de  la   Révolution,   racontées  par  un  Marciacais. 
[Lettre  datée  de  Vaugii'ard,  18  août  1789,  signée  Laffito  de  Gardey.]  — 
P.  85.  J.  Atau.  Date  du  couronnement  de  Catherine  de  Navarre  et  de 
Jean  d'Albret.  [Aurait  eu  lieu  non  le  10,  mais  le  12  janvier  1494.]  — 
P.  87.  J.-B.  Gabarra.  Une  proclamation  de  Wellington.  [23  février  1814.] 
Mars.   P.    97-110.    A.    Clergeac.    Une  famille  de  gentilshommes   cam- 
pagnards  aux  xvii»  et  xvm"   siècles.   Les  Chabanes-Lagahe.  [Donne, 
■   d'après  des  livres  de  comptes,  inventaires,  etc.,  un  aperçu  sur  la  vie 
modeste  et  les  préoccupations  financières  dos  gentilhommes   de  pro' 
vince.]   —  P.  111-25  et  174-87.  L.   Ricaud.  La  fin  du  vieux  Garaison. 
[Description  de  l'ancien   Garaison ,  chapelle  et  dépendances  ;  le  corps 
des  chapelains  et  prêtres  ;  vente  de  Garaison  et  oppositions  succes- 
sives  à  cette   vente,   1791,   1794,    1795;    état  de  Garaison  en  1822.]  — 
P.  126-33,  .397-408,  .505-15  (fin).  J.  Lestrade.   Les  poésies  de  Bordages, 
prêtre  commingeois  (xviii"  siècle).  [Eglogues,  odes,  épîtres,   etc.,  sur 
les  «  Philosophes  modernes  et  les  Impies  »,  sur  «  le  Tabac  »,  «  le  Débor- 
dement de  la  Garonne  t>,  «  la  Nymphe  do  Luchon  »,  etc  ,  etc.  Nombreux 
extraits  et  analyses.] 
-Avril.  P.  145-53.  Ch.  Samaran.  Un  inventaire  du  château  de  Mazères  au 


PERIODIQUES  MERIDIONAUX.  263 

temps  du  cardinal  Louis  d'Esté,  archevêque  d'Auch  (août  1583).  [Docu- 
ment, écrit  en  français,  contenant  quelques  termes  techniques  intéres- 
sants.] —  P.  154-74.  A.  Degert.  L'Édit  de  1768  et  le  clergé  de  Béarn* 
[Taine  a  montré  qu'une  des  causes  qui  ont  rendu  possible  la  Révolution 
a  été  l'hostilité  du  bas  clergé  contre  ses  chefs  hiérarchiques.  M.  D. 
s'attache  à  montrer  que  cette  hostilité  eut  pour  cause  principale  le 
mécontentement  des  curés  que  l'édit  en  question  privait  d'avantages 
pécuniaires.  Texte  de  la  requête  que  les  curés  du  Béarn  présentèrent 
à  l'Assemblée  générale  du  clergé  de  France  en  1775.] 

Mai.  P.  193-209.  A.  Degert.  Les  reliques  de  sainte  Quitterie.  — 
P.  210-20,  434-40.  Broconnat.  État  ancien  de  l'instruction  primaire 
dans  quelques  paroisses  rurales  du  Gers.  [Maîtres,  écoles  et  élèves  à 
Valence,  Ayguetinte,  Beaucaire,  Bezolles,  du  xvi"  siècle  à  la  Révolu- 
tion.] —  P.  221-25.  J.  Atau.  Quatre  bulles  relatives  à  Pierre  de  Foix,  le 
Vieux. 

Juin.  P.  241-57.  L.  Bellanger.  Les  dépenses  d'un  écolier  à  la  fin  du 
xvr  siècle  et  au  commencement  du  xvii".  —  P.  257-62,  862-73,  444-69. 
V.  Foix.  Glossaire  de  la  sorcellerie  landaise.  [Travail  intéressant, 
puisé  aux  sources  de  la  tradition  orale,  et  aussi  dans  les  monographies 
paroissiales  du  diocèse  d'Aire  et  de  Dax  qui  sont  déposées  dans  les 
archives  du  grand  séminaire  d'Aire.  Pourquoi  l'auteur  ne  cite-t-il  point 
toutes  ses  anecdotes  en  patois  du  cru?  L'intérêt  linguistique  de  son 
travail  y  eût  gagné.]  —  263-7.  A.  Degert.  Fleurance  enlevée  aux  An- 
glais. [Épisode   peu   connu  de  la  guerre  de  Cent  ans,  vers   1350.] 

Juillet-août.  P.  289-321.  L.  Maisonneuve.  Éloge  de  Léonce  Couture.  — 
P.  321-31,  424-34,  525-54.  A.  Degert.  Le  jansénisme  à  Dax.  (Suite.)  — 
P.  331-48.  Cézêrac.  Biane,  son  passé,  sa  coutume,  notes  et  documents. 
—  P.  348-57.  J.  Mastron.  Cahier  des  doléances  du  tiers-état  de  Cal- 
lian.  —  P.  357-61.  J.  Lestrade.  Un  registre  paroissial  de  Boulauc. 
[Actes  de  1643  à  1670.] 

Septembre-octobre,  P.  385-97.  L.  Guérard.  Les  derniers  travaux  sur 
saint  Orens.  [Résume  et  critique  au  besoin  les  ouvrages  de  MM.  Lahar- 
gou  et  Bellanger.]  —  P.  409-24.  Clergeac.  Biane.  La  charte  des  cou- 
tumes. [Texte  et  traduction  française  d'une  copie  (fin  du  xv«  siècle) 
d'un  document  gascon  de  1295,  originaire  de  Mirepoix  (canton  d'Auch- 
Nord).  Publié  avec  soin.  Mais  ung  est-il  simplement'une  graphie  imitée 
du  français,  comme  le  prétend  M.  C.  ?  Ou  bien  le  g  n'est-il  pas  plutôt 
destiné  à  marquer  le  son  guttural  que  Vn  avait,  dans  cette  position, 
pris  en  gascon  dès  cette  époque  ?  Plus  loin,  l'auteur  assure  que  la  pure 
forme  gasconne   issue  de  denarium   serait   ditiè  :  mais  les  Fors  'de 


264  ANNALES  DU   MIDI. 

Béarn  et  d'autres  textes  nous  présentent  dier,  diè,  qui  est  bien  plus 
régulier.]  —  P.  440-4.  L.  Rioaud.  Réponse  à  de  vieilles  questions.  Sens, 
curé  de  Recurt  et  non  Ricourt.  —  P.  469-76.  A.  Degert.  La  Gascogne 
dans  quelques  publications  récentes. 

Novembre.  P.  481-504.  J.  Duffour.  L'édit  de  1768  et  le  clergé  du  diocèse 
d'Auch.  —  P.  516-27,  558-64.  Couaix.  Monographie  d'un  village  :  Castin. 
[A  suivre.] 

Décembre.  P.  554-6,  P.  Lalagûe.  Société  historique  de  Gascogne.  — 
P.  556-8.  A.  D.  L'auteur  de  la  Peregrinatio  Silviae.  [N'est  pas  gasconne.] 
—  P.  565-7,  J,  Annat,  Pierre  Milhard,  prieur  de  Sainte-Dode. 

G,  M. 

Gironde. 

I.  Bulletin  hispanique,  1902. 

P,  12-9.  C,  JuLLiAN,  Notes  ibériques.  I.  Villes  neuves  ibériques  de  la  Gaule. 
[De  ce  que  les  deux  villes  d'Elne  et  Auch  ont  porté  le  même  nom  de 
lliberris,  Eliberre  (=  ville  neuve),  M.  J.  conclut  qu'elles  ont  été  fondées 
par  des  populations  de  même  origine,  descendues  des  hauts  plateaux 
des  Pyrénées  entre  le  v«  et  le  iii«  siècle,  sans  se  prononcer  sur  la  ques- 
tion de  savoir  si  ces  populations  étaient  ibères  ou  basques.  Suit  une 
note  de  M.  Webster  sur  la  façon  de  traiter  les  questions  de  toponymie 
et  le  genre  de  renseignements  qu'on  peut  attendre  de  ces  recherches. 
Cet  article  avait  déjà  paru  dans  la  Revue  des  Etudes  anciennes,  1901, 
p.  327-34.] 

1903. 

p.  5-8.  F.  Simon  y  Nieto.  La  nodriza  de  d'  Blanca  de  Castilla.  [Donation 
de  terres,  faite  le  26  juin  1190  par  Alphonse  VIII  de  Castille  à  Sancha 
Lopez,  dilecte  )iHtrici  filie  mee  nomine  Blanca.  L'acte  provient  des 
archives  du  monastère  de  S»  Maria  de  la  Vega,  tombées  en  possession 
d'un  particulier.]  —  P,  231-49.  M,  Webster.  Prudence  et  les  Basques. 
[Etude  de  diverses  coutumes  populaires,  à  propos  de  quelques  vers  de 
Prudence  qui  y  font  allusion,  en  termes  au  reste  assez  vagues,]  — 
P,  326-49.  H, -P.  Cazac.  Le  lieu  d'origine  et  les  dates  de  naissance  et  de 
mort  du  philosophe  Fr.  Sanchez.  [Cet  article  a  été  analysé  plus  haut, 
p.  146,  d'après  le  tirage  à  part.]  A.  J. 

II.  Revue  des  Études  anciennes^  1903. 

p.  19-27,  124-28,  249  54.  C.  Jullian.  Notes  gallo-romaines,  XVII-XIX. 
Remarques  sur  la  plus  ancienne  religion  gauloise  (suite  et  à  suivre). 
[Suite  de  ces  très  intéressantes  études.]  —  P,  37-79,  J.  Déchelette,  La 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  265 

fabrique  de  la  Graufesenque  (Aveyron)  :  nouvelle  étude  sur  les  origines 
de  la  poterie  sigillée  gallo-romaine.  [Excellent  travail  qui  démontre  la 
diffusion  des  vases  ornés  de  la  Graufesenque  dans  l'empire  romain.  Les 
fouilles  continuent  à  la  Graufesenque  et  ont  donné  encore  tout  récem- 
ment des  résultats  superbes.]  —  P.  129-35.  G.  Jullian.  Inscription  de 
Toulon-en-Saintonge  (avec  une  planche).  [Conjectures  sur  cette  inscrip- 
tion dont  l'alphabet  est  peut-être  celtibérien.j  —  P.  136-8.  G.  Jullian. 
Sur  quelques  noms  de  lieux  méridionaux.  [Notes  sur  Lauri  mons 
(Lormont),  Cupressetum  (le  Cupressat),  sur  l'oppidum  Ratis  qu'il  faut 
maintenir  dans  Avienus  contre  la  correction  de  Holder,  sur  l'identifica- 
tion qui  est  certaine  de  Boii  avec  La  Teste  de  Buch.]  —  P.  191-2.  M.  Cons- 
TANs.  La  fabrique  de  la  Graufesenque.  [Ce  mot  vient  de  grasau,  grasal, 
grau  (plat)  et  de  fezenca  (sous-entendu  terra),  terre  propre  à  faire  des 
plats.]  —  P.  2Ô5-93.  H.  de  la  Ville  de  Mirmont.  L'astrologie  chez  les 
Gallo-Romains.  [Dans  Ausone,  le  Querolus,  Paulin  de  Noie.].  —  P.  294. 
G.  JuLLiAX.  Graffito  de  Bordeaux.  —  P.  295-8.  Abbé  Arnaud  d'Agnel. 
Notes  sur  quelques  découvertes  archéologiques  à  ^Nlontsalier  (Basses- 
Alpes).  [Avec  deux  planches.  Bas-relief  d'une  interprétation  difficile  et 
Mars  gaulois  trouvé  à  Norante.]  —  P.  298-.S02.  G.  Jullian.  Tètes  cou- 
pées et  masques  de  dieux.  [Étude  sur  la  tête  qui  figure  sur  le  bas-relief 
précédent  et  sur  une  autre  tête  gravée  sur  un  autel  de  La  Fare  :  M.  J. 
y  voit  la  représentation  d'un  Sylvanus  indigène.]  —  P.  317-27.  G.  Jul- 
lian. La  thalassocratie  phocéenne,  à  propos  du  buste  d'Elche.  [Bonne 
étude  sur  la  colonisation  phocéenne  en  Espagne,  qui  se  place  entre  600 
et  535  environ  et  qui  fut  abattue  par  les  Carthaginois  et  les  Ibères.] 

Ch.  L. 

Hérault. 

Mémoi?^es  de  la  Société  m^chéologique  de  Montpelliet\^ 
2*  série,  t.  II  (suite),  fasc.  3. 

P.  401-30.  E.  Bonnet.  Les  œuvres  de  l'historien  montpelliérain  Pierre 
Serres.  [Le  moins  connu  des  historiographes  locaux.  Eenseignements 
biographiques.  Les  sources  et  travaux  de  Serres.  La  chronique  dite  de 
Philippi  et  les  mémoires  [inédits]  de  Carlencas  conservés  par  lui. 
Description  exacte  des  ouvrages  imprimés  et  inédits  de  ce  «  compila- 
teur [de]  plus  de  bonne  volonté  que  de  talent  ».]  —  P.  431-42.  E.  Bon- 
net. Sur  un  livre  liturgique  imprimé  pour  l'église  de  Maguelone  en  1523. 
[Établit,  d'après  un  feuillet  retrouvé  par  E.  Maignien  (do  Grenoble) 
dans  une  vieille  reliure,  l'existence  d'un  Officium  béate  Marie  imprimé 
pour  le  diocèse  de  Maguelone  par  un  imprimeur  inconnu,  probablement 


266  ANNALES   DU  MIDI. 

lyonnais.]  —  P.  443-Gl.  Grasset-Morel.  Compte  rendu  des  travaux  de 
la  Société  archéologique  de  Montpellier  (de  1899  à  1901).  [Procès-verbaux 
assez  détaillés,  mentionnant  avec  soin  les  enrichissements  des  collec- 
tions archéologiques  de  la  Société.] 

Tome  III,  1903,  fasc.  1. 

p.  1-170.  Grasset-Morel.  Une  villette  de  la  baronnie  de  Lunel  :  Lansar- 
gues.  [Monographie  intéressante,  mais  presque  dépourvue  de  références 
et  de  bibliographie.  L'auteur  étudie  la  villette  (p.  1-29),  la  communauté 
(p.  29-105)  :  fonctions  municipales,  conseil  politique,  auditeurs  de 
comptes,  estimeurs,  policiers,  carrieyriers,  syndics  des  forains  ;  la 
paroisse  (p.  106-29)  et  l'église  (p.  130-63),  Le  prieuré  de  l'Arboras, 
aujourd'hui  simple  ferme,  est  étudié  dans  un  appendice  (p.  164-70).] 

L.-G.  P. 

Isère. 

Les  Annales  dauphinoises^  3"  année,  1902-1903. 

p.  3-13,  33-9,  65-74,  129-33,  161-6,  193-6.  Abbé  Lagier.  Visite  à  la  basili- 
que de  Saint-Antoine  en  Viennois.  (Suite.)  [L'auteur  croit,  contraire- 
ment à  l'opinion  de  dom  Dijon,  que  les  soubassements  de  l'église 
actuelle  appartiennent  à  l'église  du  xii"  siècle.]  —  P.  14-5.  Abbé  Baf- 

,  FERT.  Le  Viennois  Anicius  Verus  et  la  statue  de  Memnon.  —  P.  46-8. 
Abbé  Fillet.  Grignan,  étude  historique.  (Fin.)—  P.  49-53,  80-3,  309-13, 
358-64.  Abbé  Mazet.  Alexandre  Milon,  évèque  de  Valence  au  xviii'  siè- 
cle. (Suite.)  —  P.  84-7.  Abbé  Baffert.  Le  milliaire  du  jardin  de  ville  à 
Vienne.  —  P.  88-92,  179-84,  303-8,  377-80.  Abbé  Fillet.  Les  Goulets. 
[Étude  historique.]  —  P.  126-7, 173-8, 210-2,  269-75,  297-302.  Dom  G.  Mail- 
let-Guy. Documents  et  notes  pour  servir  à  l'histoire  de  l'abbaye  de 
Saint-Antoine  en  Viennois.  [Notes  chronologiques  intéressantes  ;  notes 
sur  l'histoire  dos  grands-maîtres.]  —  P.  134-35.  P.  Baffert.  Un  frag- 
ment de  sculpture  romane  à  Vienne.  —  P.  202-9,  239-49.  Varnoux. 
Notre-Dame  à  Vienne  en  Dauphiné.  —  P.  225-38.  M»"  A.-M.  de  Franc- 
lieu.  Deux  élections  épiscopales  dans  le  département  de  l'Isère,  1791- 
1793.  [Celles  de  Joseph  Pouchot  et  d'Henri  Reymond.]  —  P.  257-9.  Abbé 
Baffert.  L'œuvre  de  Michel-Ange  Stoltz  à  Vienne  pendant  la  Révolu- 
tion. [Histoire  du  tombeau  des  deux  archevêques  de  Vienne,  le  cardinal 
de  la  Tour-d'Auvergne  et  de  Montmorin.]  —  P.  266-9.  Abbé  Baffert. 
Siège  et  prise,  en  1814,  du  château  de  Montléans,  ancien  château  des 
Maugiron,  voisin  de  Vienne.  [Le  château  était  alors  une  ruine,  et  l'ex- 
pédition qu'y  auraient  faite  les  Autrichiens  semble  une  mystification.]  — 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  267 

P.  376-80,  314-9.  Abbé  Favot.  A  propos  des  cardinaux  noirs  du  Comité 
ecclésiastique.  [Intéressant  document  :  1809-1811.]  —  P.  281-6.  M.  Ch. 
d'A.  Notes  biograpliiques  complémentaires  sur  M.«'  Reymond.  [Mort  en 
1820  évèque  de  Dijon;  avait  été  évèque  constitutionnel  de  l'Isère.  Con- 
tient une  bibliographie  des  œuvres  de  ce  personnage.]  —  P.  289-96, 
841-8,  371-6.  Abbé  Lagier.  Les  saintes  reliques  de  l'église  de  Saint-An- 
toine. [Rapport  adressé  à  M*'  Henry,  évèque  de  Grenoble.]  —  P.  321-40. 
La  Grande-Chartreuse  en  1816.  [Réimpression  d'un  récit  de  la  rentrée 
des  Chartreux  en  1816,  suivie  de  quelques  notes  intéressantes.]  — 
P.  353-7.  P.  Baffert.  Mosaïque  gallo-romaine  de  Vienne  acquise  par 
le  Musée  de  Grenoble  en  1902.  —  P.  365-70.  P.  Baffert.  Étude  biogra- 
phique et  bibliographique  d'AUmer.  [L'épigraphiste  bien  connu,  sa  vie, 
ses  œuvres.  A  suivre.]  P.  F. 

Loire. 

Bulletin  de  la  Diana^  t.  XII,  1901  (suite). 

Oct.-déc.  n»  4  (supplément).  P.  1-531.  M.  de  Boissieu.  Excursion  archéo- 
logique de  la  Société  de  la  Diana  à  Saint-Galmier,  Saint-Médard,  Che_ 
vrière  et  Chazelles-sur-Lyon.  [Le  compte  rendu  arrive  un  peu  tard, 
l'excursion  ayant  eu  lieu  en  juillet  1898,  mais  il  est  très  considérable  et 
constitue  un  véritable  ouvrage  d'archéologie  et  d'histoire,  avec  docu- 
ments inédits,  planches  nombreuses,  phms,  etc.  Cliaque  ville  visitée 
est  étudiée  complètement  dans  son  passé,  dans  ses  monuments,  et  non 
seulement  la  ville,  mais  ses  environs  :  ainsi,  autour  de  Saint-Galmier, 
les  châteaux  de  Teillères,  du  Verney.  Voir,  p.  189,  la  charte  des  fran- 
chises de  Saint-Galmier,  de  janv.  1256  et  de  1270  (traduction  de  1540), 
avec  plusieurs  autres  pièces;  p.  468,  un  accord  de  1303  entre  les  sei- 
gneurs de  Rocliefort  d'une  part  et  un  clievalier  de  l'Hôpital,  les  cheva- 
liers et  damoiseaux  dudit  lieu  de  l'autre,  au  sujet  de  la  justice.  Voilà 
du  moins  des  promenades  fructueuses.] 

Tome  XIII,  1902-1903. 

P.  13-24.  Abbé  Reure.  Simple  conjecture  sur  les  origines  paternelles  de 
François  Villon.  [Le  poète  s'appelait  de  son  vrai  nom  Montcorbier.  Il 
y  a  en  Forez  un  fief  et  une  famille  noble  qui  le  portent  également.  Des 
titres  tirés  des  archives  de  Châteaumorand  conduisent  M.  R.  à  croire 
que  le. père  de  Villon  était  le  petit-fils  (de  la  main  gauche)  d'un  Mont- 
corbier.] —  P.  25-8.  E.  Brassart.  Le  tombeau  de  Claude  de  Saint- 
Marcel  dans  l'église  Notre-Dame  de  Montbrison.  [C'est  le  doyen  du 
chapitre,  f  1509.]  —  P.  46-55.  J.  Déciielette.  Découvertes  gallo- 
romaines  dans  la  ville  de  Roanne.  [Monnaies  gauloises,  fragments  de 


268  ANNALES  DU   MIDI. 

vases  d'Arezzo  et  autres,  fibule,  statuette  en  bronze  de  Minerve.  Plan- 
ches.] —  P.  55-7.  E.  Brassart.  Epitaphe  récemment  découverte  au  che- 
vet de  l'église  de  Notre-Dame  de  Montbrison.  [Celle  de  Giraut  du  Poyet, 
prêtre  ;  fin  du  xiii«  s.]  —  P.  58-60.  In.  Le  dôme  du  tribunal  à  Mont- 
brison. [N'est  pas  dû  à  Soufflet;  a  été  construit  en  1701  :  texte  du 
marché  fait  avec  l'architecte  Martin  de  Noinville.]  —  P.  85-90.  Abbé 
Reure.  Notes  sur  le  P'orez.  [Lettres  de  noblesse  pour  Pierre  Vernin, 
1448;  lettre  des  habitants  de  Montbrison  à  Catherine  de  Médicis, 
ii7  août  1562,  après  la  prise  et  le  pillage  de  la  ville  par  les  huguenots  ; 
description  du  Forez  antérieure  à  1575,  par  Papire  Masson.]  —  P.  91-130. 
Abbé  Relave.  I.  Chartes  de  mariage  au  xvii»  siècle.  [Formules  curieuses, 
propres  aux  diocèses  de  Lyon  et  de  Vienne].  II.  Prises  de  possession 
des  bénéfices  autrefois  et  aujourd'hui  [à  Sury  au  xviir  s.].  III.  Notes 
généalogiques  et  biographiques  sur  les  notaires  de  Sury.  IV.  Les 
La  Veuhe  à  Sury  au  xvi«  siècle.  —  P.  171-205.  E.  Leriche.  Excursion 
archéologique  de  la  Société  à  Ouches,  Pouilly-les-Nonnains,  Saint- 
André-d'Apchon,  Saint-Léger.  P.  D. 

Loire  (Haute-). 

Bulletin  de  la  Société  d'agriculture^  sciences^  etc.,  du 
Puy,  3«  année,  1901-1902. 

P.  4-7.  Vernière.  Brioude  en  1645.  [Pièce  déjà  publiée  dans  la  Revue  de 
la  Haute- Auvergne,  1901.]  —  P.  8-15.  De  Dienne.  Le  monastère  de 
Saint-Tliéofrède  de  Cervere  et  le  culte  de  saint  Théophrède  en  Piémont. 
[La  maison  est  issue  du  Monastier,  en  Velay,  et  le  saint  du  même  pays. 
D'après  le  travail  de  dom  Fedele  Savio,  Il  monastero,  etc.  (même  titre 
que  ci-dessus);  Turin,  Paravia,  1896.]  —  P.  16-20.  P.  Le  Blanc.  La  cons- 
truction de  l'hôtel  de  ville  actuel  du  Puy  en  1763.  [Dans  la  grande  salle 
avait  été  placé  un  portrait  du  roi,  encadré  des  armoiries  des  consuls  de 
1766.  Ceux  de  1767  prétendent  y  substituer  les  leurs.  De  là  procès  entre 
les  uns  et  les  autres.]  —  P.  54-8.  G.  Boudon.  Cession  des  droits  entre 
les  enfants  Vaneau.  Mariage  de  Pierre  Vaneau,  fils  de  Pierre  Vaneau, 
sculpteur.  [Deux  actes  des  30  déc.  1709  et  4  janvier  1712.]  —  P.  58-61. 
Abbé  Bastide.  Un  copiste  d'un  missel  du  Puy.  [N"  4  de  la  Bibliothèque 
de  cette  ville,  ms.  liturgique  du  xv«  siècle.  Le  copiste  est  Johamies  de 
Pe  rerio.']  P.  72-96,  111-2:3.  Abbé  A.  Terrasse.  La  seigneurie  de  Saint- 
Quentin  ou  les  seigneurs  de  la  Loire  depuis  le  pont  de  Brives  jusqu'à 
la  Voûte.  [Monographie  bien  conçue,  rédigée  à  l'aide  de  nombreux 
documents  inédits.  Énumération  des  familles  qui  ont  possédé  la  sei- 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  269 

gneurie  de  1138  à  1789.  Appendice  sur  le  prieuré  de  Saint-Quentin.]  — 
P.  98-100.  A.  Arsac.  Gilbert  de  Malafayda,  abbé  de  Saint-Chaffre.  [1375- 
1386.  Analyse  de  quelques  pièces  provenant  des  archives  da  Vatican.] 
—  P.  125-44.  Cahier  des  doléances  du  tiers-état  du  Monastier  (1789). 
[Texte.  A  suivre.]  P.  D. 

Lot. 

Bulletin  de  la  Société  des  Etudes  du  Lot,  t.  XXVI,  1901. 

P.  1-32.  A.  Combes.  Les  délibérations  de  la  commune  de  Saint-Pantaléon 
(Lot)  pendant  la  Révolution.  —  P.  33-41.  Abbé  Albe.  Les  grottes  de 
Blars.  —  P.  42-7.  A.  Viré.  La  fin  d'une  énigme.  Le  Roc  d'Aucor.  [La 
grotte  d'Aucor,  dont  l'entrée,  située  en  retrait  sous  un  encorbellement 
de  la  falaise,  est  à  peu  près  inaccessible,  a  donné  lieu  à  bien  des  hypo- 
thèses qui  font  plus  d'honneur  à  l'imagination  de  ceux  qui  les  ont  émi- 
ses qu'à  leur  sens  critique.  La  vérité  est  plus  simple  :  au  bas  de  la 
falaise  se  trouvent  les  fondations  d'une  tour  qui  donnait  accès  à  la 
grotte,  et  les  deux  poutres  qui  en  barrent  horizontalement  l'entrée  sont 
des  restes  de  la  charpente  de  la  tour  démolie.  (Notes  de  l'abbé  Albe.)]  — 
P.  48-63,  93-108, 157-88,  221-53.  P.  de  Fontemlles.  Recueil  d'inscriptions 
intéressant  le  Quercy.  [Compilation  dépourvue  de  critique.  Dans  une 
inscription  provençale,  les  abréviations  ne  sauraient  être  résolues  en 
latin,  mais  en  provençal,  et  l'inscription  xlvii  doit  être  lue  in  nomine 

DOMINI  :   E   DE  MADOMN.i   SANCTA  MARL-i.   :   GER.WT  DE    LA  V.ALADA   lAS   AISI  , 

AN  :  M  :  ce  :  xx  :  ix  a  la  festa  sanct  benezes  de  marts  ;  an  et  non  anno. 
sanct  et  non  sancti.  A  signaler  les  inscriptions  en  provençal  li 
(p.  170),  LU  (p.  170-1),  LUI  (p.  171),  lv  (p.  172),  lxxi  (p.  188).  P.  181. 
Le  catalogue  du  Musée  de  Toulouse  n'est  pas  de  M.  Rosbach,  mais  de 
M.  Roschach.]  —  P.  109-10.  V.  Fourastié.  Charte  par  laquelle  Edouard, 
prince  d'Aquitaine,  autorise  la  prolongation  de  deux  foires  déjà  éta- 
blies; l'une,  à  la  Pentecôte,  durera  huit  jours  avant  et  huit  jours 
après  cette  fête;  l'autre  aura  lieu  le  jour  des  saints  Simon  et  Jude,  et 
pendant  les  huit  jours  suivants.  [En  faveur  de  la  ville  de  Cahors;  du 
20  juillet  1365.]  —  P.  111-35.  Abbé  Albe.  Quelques  notes  sur  l'abbaye 
de  Marcillac.  —  P.  189-97.  Abbé  F.  Galabert.  Une  charte  familiale  de 
libertés  (8  mars  1289).  —  P.  204-7.  Abbé  Albe.  Notes  sur  Figeac.  Let- 
tres royaux  concernant  la  part  que  les  gens  d'Église  à  Pigeac  devaient 
prendre  à  l'impôt.  [25  août  1391.].  —  P.  208-12.  E.  Albe.  Règlement  des 
bouchers  de  Figeac  avec  l'abbé  Aymar  en  1246.  [Texte  en  langue  d'oc. 
Lecture  et  traduction  douteuses  ;  il  est  vrai  que  l'auteur  qualifie  sa  tra- 
duction de  «  rapide  ».] 


270  ANNALES  DU  MIDÏ. 

Tome  XXVII,  1902. 

p.  1-15.  P.  DE  FoNTENiLLEs.  Recueil  d'épigrapliie  quercynoise.  (Suite  e 
lin.)  [M.  F.  relève  seulement  seize  inscriptions  campanaires  dans  tout  le 
Quercy  ;  c'est  dire  combien  son  travail  est  incomplet.]  —  P.  16-22. 
L.  GoMBARiEU.  Construction  d'une  église  paroissiale  au  x\tj=  siècle. 
Extrait  des  archives  de  l'église  de  Vaysse.  —  P.  23-37,  65-89,  156-75. 
V.  FouRASTiÉ.  Privilèges,  franchises  et  libertés  de  la  ville  de  Sainte- 
Spérie,  de  tout  le  château  et  de  la  chàtellenie  de  Saint-Céré  (Sanctus 
Serenus).  [Copie  et  traduction  d'un  registre  appartenant  aux  archives 
communales  de  Saint-Céré.  Dans  un  acte  de  1490  se  trouvent  reproduits 
pour  approbation,  rectification  ou  annulation  divers  articles  d'une 
charte  de  1292  en  langue  d'oc  (p.  70  à  80).]  —  P.  38-46.  L.  Esquieu.  Une 
bulle  du  pape  Jean  XXII  (14  février  1323).  [Etablit  que  Jean  XXII  fut 
baptisé  dans  l'église  Saint-Barthélémy  de  Cahors.]  —  P.  91-112,  141-55. 
Abbé  Albe.  Notes  sur  l'abbaye  de  Leyme.  —  P.  113-23,  192-201.  A.  Com- 
bes. Transaction  entre  le  curé  de  Fraissines  et  ses  paroissiens  (30  juin 
1495).  [Aujourd'hui  Frayssinhes,  canton  de  Saint-Céré  (Lot).]  —  P.  176- 
91.  L.  Esquieu.  Essai  d'un  armoriai  quercynois.  —  P.  205-19.  Abbé 
Albe.  Quelques-unes  des  dernières  volontés  de  Jean  XXII.  [Intéressants 
documents.]  —  P.  227-33.  Abbé  Albe  et  L.  E[squieu].  Une  bulle  de 
Jean  XXII  (27  juill.  1330)  sur  le  monastère  d'Espagnac. 

Tome  XXVIII,  1903. 

p.  3-9.  Abbé  Albe.  Notes  sur  l'abbaye  de  Leyme.  (Suite  et  fin.)  —  P.  10- 
9.  V.  FouRASTiÉ.  Privilèges,  franchises  et  libertés  de  la  ville  de  Sainte- 
.  Spérie.  (Suite.)  —  P.  20-32.  E.  Depeyre.  Les  tribulations  de  Guillaume 
de  Bonnes-Mains,  bourgeois  de  Figeac,  ambassadeur  du  roi  de  France 
aux  pays  d'outre-nier,  en  l'année  1327.  —  P.  34-6.  Abbé  Galabert.  Rôle 
d'une  compagnie  de  chevau-légers  de  Jean-Caries  de  Genouillac  de 
Saint-Clair- Vaillac  (xvn=  s.),  —  P.  37-63,  123-38,  168-204.  L.  Esquieu. 
Essai  d'un  armoriai  quercynois.  —  P.  73-104,  153-67.  L.  Greil.  Vie  de 
M.  d'Hauteserre.  [Antoine  Dadine,  seigneur  d'Hauteserre,  naquit  à 
Cahors  en  janvier  1602.  En  1630,  il  disputa,  sans  succès,  une  chaire  de 
droit  canonique  vacante  à  l'Université  de  Cahors.  Plus  heureux  à  Tou- 
louse, il  entra  dans  l'Université  de  cette  ville  le  21  octobre  1648.  Il 
mourut  le  29  août  1682.  Cette  vie,  écrite  par  son  fils,  contient  encoi'e  le 
Catalogus  lihrorum  quos  edidit  Antoiims  Dadinus  Altaserra,  in 
.  Academia  Tolosana  juris  utriusque  professer,  et  des  extraits  des 
-  registres  de  l'Université  de  Toulouse.]  —  P.  105-12.  Abbé  Albe.  Statuts 
du  chapitre  de  Cahors.  Fragments  inédits.  —  P.  113-22.  J.-B.  Eouquet, 


PÉRIODIQUES   MERIDIONAUX.  271 

Nostro  Rèino,  à  Fréderi  Mistral.  [Beaux  vers  en   langage  de  Cahors, 
précédés  de  trois  envois  de  Mistral.]  H.  T. 

Pyrénées  (Basses-). 

I.  Bulletin  de  la  Société  des  sciences,  lettres  et  arts  de 
Pau.,  Ile  série,  t.  XXX,  1902. 

P.  1-225.  A.  Planté.  Registre  dos  délibérations  du  (Jomité  de  surveillance 
établi  à  Orthez.  [Ne  contient  que  le  second  cahier  des  procès-verbaux 
de  ce  Comité.  Dans  un  appendice  (p.  121-22.5),  l'auteur  donne  de  précieu- 
ses notices  historiques  et  biographiques  concernant  surtout  certains 
suspects  dont  il  est  question  dans  le  registre.]  G.  M. 

II.  Réclams  de  Biarn  et  Gascowihe,  organe  de  la  Société 
félibréenne  «  Escole  Gastou  Phébus  »  (Pau,  Vignancour), 
1897. 

P.  11-3.  A.  Planté.  Jurament  deu  Rey.  [Texte  du  serment  du  trône  prêté 
par  François  Phébus  (1479-1483).]  —  P.  60-1.  L.  Batcave  publie,  avec 
quelques  notes  explicatives,  le  psaume  cxx  d'Arnaud  de  Salettes. 

1898. 

P.  97-100.  E.  BouRCiEZ.  Contes  de  Gascogne.  —  P.  205-7.  Los  drets  de 
peadge.  [Texte  de  1533,  concernant  Orthez.  Extrait  de  la  «  Compilation 
d'auguns  priviledges  et  réglamens  deu  Pays  de  Béarn,  feicts  et  octroyats 
à  l'intercession  deus  Etats  (Pau,  Desbarratz,  1716).] 

1901. 

P.  9-14.  L.  Batcave.  Vieilles  coutumes.  Le  Piquehoû.  [Intéressant  pour 
le  folk-lore.]  —  P.  27-9.  Poésies  d'Ader  sur  Henri  IV.  [Extraits  des 
œuvres  du  poète  gascon.]  —  P.  187-9.  V.  Dubar.at.  Prêtres  sorciers. 
[Épisode  de  l'histoire  du  pays  basque,  en  1609.] 

1902. 

P.  216-7.  Vieux  documents.  [Liste  des  principaux  personnages  de  Na- 
varre et  du  Béarn,  dressée  à  raison  de  leurs  dispositions  envers  le  catho- 
licisme, favorables,  contraires  ou  douteuses.  Vers  1572.]  —  P.  225-9. 
H.  CouRTEAOLT.  Vieilles  chroniques,  vieilles  légendes.  [Histoire  bi'ève 
et  extraits  de  l'épîtro,  aujourd'hui  perdue  en  grande  partie,  qu'Honoré 
Bouet  ■ —  Mossen  Honorât  —  adressa  à  Gaston  Phébus,  et  dans 
laquelle  il  esquissait,  en  vers  mêlés  de  prose,  la  biographie  des  onze 
prédécesseurs  de  Gaston.] 


272  ANNALÈS   DtJ   MIDt. 

1903. 

p.  6-11.  J.  Gardère.  Los  cagots  dans  la  région  d'Orthez  au  xyii=  siècle. 

—  P.  33-6,  55-8,  74-7.  R.  Peyre.  Un  instituteur  d'autrefois.  [Histoire 
du  procès  que  la  commune  d'Artiguelouvo  intenta,  en  1776,  à  son 
châtelain  Fouron  :  l'instituteur  du  village,  Bergeron,  joua  un  grand 
rôle  dans  l'affaire.  Elle  jette  quelque  lumière  sur  la  situation  sociale 
des  régents  au  xviir  siècle.]  —  P.  45-50.  E.  Bourciez.  Justin  Lanebat. 
[Fine  étude  sur  le  poète  bayonnais.J  —  P.  89-91.  L.  Batcave.   Bartet. 

—  P.  105-8.  J.  Gardère.  Le  cagot  de  Gamachies.  G.  M. 

Pyrénées-Orientales. 

I.  Revue  d'histoire  et  d'archéologie  du  Roussillon,  1903. 

P.  1-13.  J.-A.  Brutails.  La  statuaire  en  Roussillon  vers  1200,  à  propos 
d'un  livre  récent.  [Il  s'agit  de  l'Histoire  de  la  sculpture  en  Langue- 
doc, de  M.  Marignan.  M.  B.  fait  la  critique  de  cet  ouvrage,  en  particu- 
lier pour  ce  qui  concerne  le  Roussillon,  en  s'appuyant  sur  les  monu- 
ments roussillonnais.  Les  conclusions  de  M.  Marignan  lui  paraissent 
erronées  et,  en  tout  cas,  hasardées,  malgré  sa  grande  érudition  et  sa 
réelle  autorité.]  —  P.  14-7.  B.  Palustre.  Coflret-reliquaire  de  l'église 
de  Mosset.  [Description  et  reproduction  phototypique.  Suit  une  chro- 
nique de  la  seigneurie  de  Mosset.]  —  P.  18-24.  A.  Talut.  L'ortho- 
graphe catalane.  [En  faveur  de  l'orthographe  traditionnelle  et  étymolo- 
gique.] —  P.  25-8.  P.  Masnou.  Ordonnance  du  roi  Alphonse  relative  à 
la  frappe  de  la  monnaie  d'argent  de  Perpignan  (1418).  [Alphonse  V  écrit 
au  maître  de  la  Monnaie  de  Perpignan  pour  qu'il  remplace  les  lettres 
PP,  monogramme  de  Pergignan,  par  0.  Texte  catalan.]  —  P.  29-31. 
J.  Capeille.  Instruction  d'une  afïaire  criminelle  par  le  camérier  de 
Saint-Michel  de  Guxa  (1641).   [A  propos  de  l'assassinat  d'un  prêtre.] 

—  P.  SS'Sl.  Ph.  ToRREiLLEs.  La  construction  d'une  église  de  village  au 
XVIII'  siècle.  [L'auteur  raconte  la  construction  de  l'église  d'Eus,  près 
de  Prades,  d'après  les  archives  paroissiales  de  cette  localité,  très  pau- 
vre, comme  en  témoigne  l'état  général  de  tous  les  biens-fonds  de  cette 
communauté.  Renseignements  économiques  intéressants.]  —  P.  52-5. 
État  des  forges  dans  le  canton  d'Arles-sur-Tech  pendant  l'époque  révo- 
lutionnaire. [Rapport  du  7  thermidor  an  IV,  par  le  commissaire  du 
Directoire  exécutif  près  l'administration  municipale  du  canton  d'Arles.] 

—  56-63.  P.  Masnou.  Constitution  d'une  société  de  commerce  en  1406. 
[Entre  quatre  ouvriers  en  laine  de  Perpignan,  pour  vendre  du  drap  en 
Sicile.  Texte  du  contrat,  en  catalan.  Précédé  d'une  rapide  histoire  du 


PÉRIODIQUES  MÉRIDIONAUX.  .273 

commerce  du  di'ap  roussillonnais,  florissant  du  xii«  au  xyi"  siècle.]  — 
P.  62-3.   Chronique.  [Fouilles  de  M.  Véran  à  Arles,    pour  dégager   le 
théâtre  romain.]  —  P.  63-4.  Textes   et  documents  inédits.  Rapport  du 
sieur  Xaupi,  protomedic  de  Roussillon,  sur  les  coquilles  que  l'on  trouve 
au  territoire  de  Neffiach.  [Tiré  des  Archives  des  Pyrénées-Orientales, 
0   1234.  Publié  sans   date.  Texte  français,  probablement  du  xvii°  ou 
xviii"  siècle,  de  peu  de  valeur  scientifique.]  —  P.  77-83.  J.  S.'Irrète.  L'an- 
cienne église  d'Osséja.  Découvertes  ai'chéologiques.   Agrandissements. 
Histoire  de  cette  ancienne  église,  totalement  reconstruite  en  1894.]  — 
P.  84-5.  J.  Serra  y  Vilarô.  Jean  Calvet,  abbé  de  la  Eéal,  à  Perpignan, 
au  xvi=  siècle.  [Quelques  renseignements  sur  ce  personnage.]  —  P.  8Q- 
93.  B.  Palustre.  Inventaire  de  l'artillerie  abandonnée   par  les 'Espa- 
gnols au  fort  de  Bellegarde,  en  1794.  [Après  la  capitulation  du  17  sep- 
tembre.] —  P.  94-5.  Textes  et  documents  inédits.  Remise  d'une  relique 
de  saint  Simon  Stoc  au  couvent  des  carmes  de  Perpignan  (3  juin  1605). 
[Texte  latin.]  —  P.  97-114.   L.    de  Noell.  Reconstitution  du  couvent 
des  Franciscains  de  Villefranche-de-Conflent.  [Élevé  probablement  au 
xiii"  siècle,  il  fut  rasé  sur  ordre  de  Vauban  pour  établir  les  fortifica- 
tions de  la  ville.  Les  fouilles  faites  pour  établir  la  voie  ferrée  ont  été  le 
point  de  départ  de  sondages  qui  ont  permis  de  restituer  le  plan  da 
couvent.  Histoii-e  des  fouilles  et  du  couvent.  Deux  plans.]  —  P.  115-22, 
131-46,  191-7.  J.   Freixe.  Les  premiers  habitants  du  Roussillon  et  la 
Balma  de  Na  Crestiana.  [La  Balma  de  Na  Crestiana  est  un  dolmen 
près  du  Perthus.  M.  F.  recherche  à  qui  il  faut  en  attribuer  la  construc- 
tion et  discute  les  documents  susceptibles  d'indiquer  quelles  furent  les 
anciennes  populations  du  Roussillon.  Il  conclut,  peut-être  un  peu  rapi- 
dement, que  ce  sont  les   Sordes,  ancêtres  des  Volces  Tectosages,    et 
laisse  entendre  que  les  dolmens  du  pays  «  étaient  destinés  à  offrir  des 
asiles  aux  dieux,  afin  de  s'attirer  leur  bienveillance  >\]  —  P.   123-30. 
Relation  de  la  mission  faite  en  la  vallée  de  Capcir  (1640).  [Copie  du  rap- 
,  port  envoyé  après  la  mission  par  les  jésuites  à  leur  général.]—  P.  147-66. 
P.  Vidal.  Louis  XI,  Jean  II  et  la  révolution  catalane  du  xv"  siècle,  à 
propos  d'an  livre  récent.  [Analyse  très  complète  et  très  intéressante  de 
la   thèse  de  M.  Calmette,  portant  le  même  titre.]  —  P.  167-82,  199-215. 
Ph.   ToRREiLLES.    Méuioircs  d'un   chirurgien  au   xvn^  siècle.   [Montre 
l'état  des  esprits  en  Roussillon  à  la  veille  de  l'annexion  française,  au 
point  de  vue   intellectuel,  moral,  politique  et  religieux.]  —  P.  183-90. 
J.  Sarrète.  La  Cerdagne  (de  1642  à  1652).  [Annales  ne  contenant  que 
des  orages,  inondations,  mauvaises  années,  peste.]  —  P,  198.  Textes 
et  documents    inédits.    [Vente    d'un    navire  en   1381.    Texte   catalan 

ANNALES  DU  MIDI.   —  XVI.  18 


274  ANNALES    DU    MIDI. 

P.  216-24.  B.  Palustre.  La  seigneurie  d'Huytéza.  [Aujourd'liui  Aytua, 
annexe  d'Escaro,  canton  d'Olette.  Histoire  aussi  complète  que  le  permet 
le  petit  nombre  des  documents.]  —  P.  224-8.  J.  Capeille.  Le  dominicain 
Pierre-Nicolas  Arnu  (1629-1692).  [Quoique  lorrain,  reste  l'adversaire  du 
parti  français  après  la  réunion  du  Roussillon  à  la  France.  Adversaire 
aussi  des  jésuites.  Courte  biographie.]  —  P.  229-30.  J.  Calmette. 
Benoît  XIII  et  le  muscat  de  Claira.  [Deux  pièces  en  latin  concernant 
un  achat  de  ce  vin  pour  le  compte  du  pape.]  —  P.  231-46.  A.  Salsas. 
L'établissement  du  papier  timbré  en  Roussillon  (1772).  [Ne  survint  qu'à 
cette  époque  à  cause  de  la  vive  opposition  faite  à  Colbert,  qui  vou- 
lait unifier  la  procédure  de  toutes  les  cours  du  royaume.  Pièces  jus- 
tificatives.] —  P.  247-60,  275-7.  M.  Pratx.  Notice  historique  sur  Riuno- 
guès.  [A  propos  d'un  mémoire  rédigé  pour  un  procès  de  1831  sur  le 
droit  de  pacage.  Conclusions  intéressantes  sur  l'origine  des  communaux.] 
—  P.  263-74.  X.  de  Descallar.  La  compagnie  de  cadets-gentilshommes 
établie  à  Perpignan  en  1726.  [Ecole  de  cadets  qui  fut  transportée  à 
Strasbourg  en  1729.]  —  P.  295-305.  J.  Calmette.  Notes  de  bibliographie 
catalane.  [Annonce  des  publications  de  l'abbé  Gudiol  y  Cunill  et  de 

D.  Francisco  Monsalvatje  y  Fossas.]  —  P.  306-19.  J.  Capeille.  Le  châ- 
teau et  labaronnie  d'Ur.  [En  Gerdagne  française.  Histoire.]  —  P.  320-5. 

E.  Caseponce.  Les  corps  saints  d'Arles  à  Céret.  [Publication  d'une  rela- 
tion en  catalan  du  transport  des  saints  Abdon  et  Sennen,  d'Arles-sur- 
Tech  à  Céret,  et  de  leur  retour  à  Arles  quatre  jours  après  (1738).]  — 
P.  327-39.  P.  Vidal.  Questions  de  langue  et  de  littérature  catalane.  Une 
querelle  scientifique.  [Résume  la  polémique  entre  Menéndez  Pidal  et 
le  catalaniste  Alcover  ;  courte  introduction  de  P.  V.]  —  P.  340-57, 
391-6.  .J.  Freixe.  Aperçus  historiques  fondés  sur  les  transformations  du 
littoral  roussillonnais.  [Article  très  intéressant,  oii  la  géologie  et  l'étude 
des  anciens  géographes  fournissent  à  l'auteur  les  éléments  de  sa  théorie 
sur  la  formation  et  le  peuplement  du  Roussillon  et  sur  le  passage 
d'Annibal.]  —  P.  357-8.  Textes  et  documents  inédits.  Publication  de  la 
trêve  conclue  entre  Alphonse  d'Aragon  et  le  pape  Eugène  IV  (18  juil- 
let 1443).  [Après  le  grand  schisme.  Texte  catalan.]  —  P.  359-67.  P.  Vidal. 
Ascension  du  Canigou  par  Pierre  III,  roi  d'Aragon,  en  1285.  [Récit  de 
cette  ascension,  extraordinaire  pour  l'époque,  et  de  deux  autres  traits 
de  hardiesse  de  Pierre  III.  Comme  pièce  justificative,  extrait  de  la  chro- 
nique latine  de  Salimbene  racontant  cette  ascension.]  ^  P.  368-91. 
J.  Armagnac.  Caudiès  pendant  l'épiscopat  de  Nicolas  Pavillon  (1637- 
1677).  [Récit  des  bienfaits  de  ce  prélat.]  M.  D. 


PÉRIODIQUES   MERIDIONAUX.  275 

II.  Société  agricole,  scientifique  et  littéraire  des  Pyré- 
nées-Orientales, t.  XLIV,  1903. 

P.  115-200.  M.  Pratx.  Le  régime  des  eaux  en  Roussillon.  I.  La  propriété  et 
les  droits  d'usage.  II.  La  réglementation.  III.  La  meule.  [Bonne  étude 
sur  une  des  plus  importantes  questions  qui  puissent  être  traitées  dans 
ce  pays,  et  dont  cliaque  partie  contient  des  renseignements  historiques.] 
—  P. 249-98.  Abbé  Ph.  Torreilles.  Les  testaments  des  consuls  de  Per- 
pignan au  XYii"  siècle.  [Sous  le  terme  de  testament,  on  désignait  un 
exposé  de  leur  gestion,  que  les  consuls  sortant  de  charge  consignaient 
sur  un  registre  pour  faire  connaître  ce  qu'ils  avaient  fait  et  pour  don- 
ner des  conseils  à  leurs  successeurs.  Les  testaments  du  xvii"  s.,  rédigés 
en  catalan,  forment  deux  volumes  conservés  aux  Archives  municipales 
de  Perpignan;  c'est  un  tableau  de  la  vie  locale  pendant  le  xvii"  siècle. 
L'étude  de  M.  Ph.  T.  est  divisée  en  deux  parties,  dont  l'une  comprend 
l'époque  antérieure  à  la  conquête  du  Roussillon  par  la  France,  l'autre, 
l'époque  postérieure  à  ce  grand  événement.]  —  P.  299-318.  Abbé  J.  Sar- 
RÈTE.  Notre-Dame  de  la  Cerdagne.  [Etude  sur  deux  statues  de  la  Vierge 
conservées,  l'une  à  Hix,  l'autre  à  Puycerda,  et  sur  des  pratiques  de 
dévotion.]  —  P.  319-27.  Delpont.  Mossen  Jacinto  Verdaguer.  [Causes 
qui  ont  amené  Verdaguer  à  écrire  le  poème  Canigo;  fragments  de  cor- 
respondance et  une  pièce  inédite  du  poète.]  F.  P. 


Var. 


L  Bulletin  de  la  Société  d'études  scietitifîques  et  archéo^ 
logiques  de  la  ville  de  Draguignan,  t.  XXII,  1898-1899. 

P.  VIII.  PoupÉ.  Formation  des  administrations  des  districts  du  Var  et 
leurs  divers  renouvellements.  [Communication  orale,  simplement  signa- 
lée.] —  P.  XI.  Teissier.  Les  livres  annotés  de  la  bibliothèque  de  Dragui- 
gnan. \_Ex  libris,  signatures,  notes;  divers  ont  appartenu  à  Peiresc,  aux 
Nostredame,  à  Grolier,  à  Baluze,  à  d'Aguesseau,  etc.]  —  P.  xvii.  Mireur. 
Monographie  du  couvent  des  Franciscains  à  Draguignan.  [Communi- 
cation orale.]  —  P.  xix.  R.  Reboul,  Préface  d'un  dictionnaire  biogra- 
phique inédit.  Illustrations,  célébrités,  familles  du  département  du  Var. 
[Y  compris  les  excentriques,  grotesques,  macrobites  et  bandits.]  — 
P.  XX.  PoupÉ.  Administration  communale  à  Cuers  sous  l'ancien  régime. 
[1339-1789.  Communication  orale.]  —  P.  xxxviii.  Poupé.  L'instruction  pu- 


276  ANNALES   DU   MIDI. 

blique  à  Guers  sons  l'ancien  régLme.  [xvi-xviti«  siècles.  Communication 
orale.]  —  P.  xlii.  Gubert.  Note  sur  Marguerite  Bellenger.  [La  célèbre 
maîtresse  de  Napoléon  III,  petite-fille  d'Hendreich,  bourreau  du  Var, 
et  nièce  d'Hendreich,  bourreau  do  Paris.]  —  P.  lu.  Gubert.  La  gran- 
deur et  la  décadence  de  la  foire  de  Beaucaire.  [Communication  orale.] 
—  P.  LUI.  Reboul.  Plan  et  programme  d'une  bibliographie  du  Var. 
P.  1-331.  EspiT.\LiER.  Les  évèques  de  Fréjus  du  xiii»  au  xviii^  siècle. 
CSuite  et  fin;  cf.  XXI,  33.)  [Bonne  série  de  notices  biogi-aphiques,  bien 
documentées  d'après  les  archives  de  l'ancien  évèché,  sur  B.  de  Camelin 
(1599-1637),  Pierre  de  Camelin  (1637-1651),  Zongo  Ondedei  (165-1-1674), 
l'ami  de  Mazarin  qui  participa  aux  conférences  de  l'île  des  Faisans, 
B.-A.  de  Clermont-Tonnerre  (1675-1678),  Louis  d'Anglure  de  Bourlemon 
(1679-80),  Luc  d'Aquin  (1780-97),  Louis  d'Aquin  (1697-99),  André-Hercule 
de  Fleury  (1698-1715),  P.-J.  de  Castellane  (1715-1739),  Martin  du  Bellay 
(1739-1766)  et  enfin  Emmanuel-François  de  Bausset  (1766-1802).  A  pro- 
pos de  Fleury,  l'auteur  réfute  d'une  façon  probante  certaines  accusa- 
tions de  Saint-Simon  et  montre  les  qualités  administratives  du  person- 
nage. Il  est  regrettable  qu'il  n'ait  pas  insisté  suffisamment  à  propos  de 
Bausset  sur  la  période  constitutionnelle.  Bonne  table  onomastique  et 
liste  des  souilles.]  —  P.  333-57.  E.  Poupé.  La  démolition  du  château  de 
Flayosc  (3  mai  1792).  [Très  curieux  épisode  de  la  Révolution  dans  le  Var. 
Elle  fut  la  première  d'une  série.  Condamnée  par  les  administrations  du 
district  et  du  département,  elle  fut  approuvée  par  l'Assemblée  législa- 
tive. Elle  fut  faite  en  deux  jours,  les  3  et  1  mai  1792.  D'autant  plus  carac- 
téristique que  le  marquis  de  Villeneuve  n'était  pas  particulièrement  mal. 
vu  de  ses  vassaux.  Dès  1790,  on  avait  exigé  l'abandon  par  lui  de  la  tri- 
bune seigneuriale  de  l'église  et  l'effacement  des  armoiries  sur  son  car- 
rosse; les  archives  du  château  furent  pillées  avant  la  destruction  qui, 
après  ces  démêlés  administratifs,  fut  achevée  aux  frais  de  la  commune. 
li' Histoire  généalogique  de  la  inaison  de  Villeneuve  donne  de  ces 
faits  un  récit  tendancieux  et  souvent  inexact.  Bonnes  pièces  justifica- 
tives.] —  P.  357-504.  E.  PoupÉ.  Histoire  du  collège  de  Draguignan. 
(Suite,  et  fin  au  t.  XXIII.)  [Déjà  paru  en  volume.  Cf.  notre  compte 
ïendu.  Annales  du  Midi,  XII,  430.] 

Tome  XXIII,  1900-1901. 

P,  vin-xii.  A.  R.\MPAL.  Les  papiers  de  F.  de  Bausset-Roquefort,  arche- 
vêque d'Aix.  [Description  sommaire  d'une  liasse  de  documents  relatifs  à 
ce  prélat  ou  émanés  de  lui,  appartenant  au  bibliophile  M.  P.  Arbaud.] 
—  P.  XIV.  E.  PoupÉ.  Etablissement  du  gouvernement  consulaire  dans 
le  Var,  en  l'an  VIII.  [Fut  bien  accueilli  par  la  population.  Communica- 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  277 

tion  orale.]  —  P.  xvi.  Mireur.  Note  sur  les  bâtiments  dits  cour  royale. 
[Transférée  de  Fréjus  à  Draguignan,  au  xiii=  siècle.]  —  P.  xvni.  Raffin. 
Affiche  administrative  du  général  de  Coincy,  relative  aux  troubles  de 
1789  et  imprimée  en  provençal.  —  P.  xxv-xxxii.  Poupé.  L'instruction 
publique  à  Correns  sous  l'ancien  régime.  [Du  xvi=  siècle  à  1789.  D'après 
les  archives  communales.  ]  —  P.  xlv.  Mireur.  Le  café  Buisson  ou  du 
Var.  [A  Draguignan,  milieu  du  xix«  siècle;  le  fils  du  patron,  le  rénova- 
teur du  galoubet,  a  été  le  modèle  (odieusement  caricaturé,  d'après  les 
Dracénois)  de  l'inoubliable  Valmajour.]  —  P.  li.  Aubert.  Notice  sur 
Trigance  [et  son  château,  pillé  pendant  le  séquestre,  sous  la  Révolu- 
tion]. 
P.  1-175.  Poupé.  Histoire  du  collège  de  Draguignan.  (Fin.)  [VIII.  Sous  la 
République  et  le  premier  Empire  (1792-1815).  IX.  De  la  Restauration  à 
nos  jours  (1899);  pièces  justificatives  importantes  et  bien  choisies, 
listes  de  professeurs,  palmarès  des  ans  xi  à  xiii,  programmes  scolai- 
res, etc.;  tables  onomastiques  copieuses.]  —  P.  471-94.  Poupé.  L'élection 
des  députés  du  Var  â  l'Assemblée  législative,  â  la  Convention  nationale, 
au  Conseil  des  Anciens  et  au  Conseil  des  Cinq-Cents.  [D'après  les 
Archives  nationales  et  départementales.  Nomenclati;res  avec  d'utiles 
éclaircissements.]  —  P.  498.  Fernand  Cortez.  La  seigneurie  de  Séail, 
commune  de  Callas  (Var).  [Rectifie  le  nom  vulgaire  de  Séalt,  corrup- 
tion de  Séail  (Cesalium,  Sceail,  Seailhe,  Seayl)  ;  Séalt  ne  date  que  de 
1780  environ.  Donne  les  listes  des  seigneurs  d'après  les  titi'es  de  la  pro- 
priété, aujourd'hui  morcelé  en  petit  et  grand  Séail.  Peu  de  renseigne- 
ments historiques  et  sociologiques.]  L.-G.  P. 

II.  Bulletin  de  l'Acadétnie  du  Va)\  LXX«  année,  1902. 

p.  xvn-xxxviii.  Comptes  rendus  des  séances.  —  P.  1-13.  R.  Vidal.  La  fabri- 
cation delà  pourpre  romaine  à  Toulon.  [Etude  technique  des  matériaux 
employés.  Aucune  référence.]  —  P.75-91.  Archer.  Lichtenberg.  [Mémoi- 
res originaux  sur  la  défense  de  ce  fort  par  le  sous-licutenant  Archer, 
du  96°,  du  5  au  K)  août  187U;  il  y  mourut  trente-quatre  Français  et  cent 
quatre  Allemands.] —  P.  95-106.  Roustan.  Discours.  [Notices  sur  les 
trois  architectes  de  la  cathédrale  de  Marseille,  Vaudoycr,  Esperandieu, 
Révoil.]  L.-G.  P. 

Vaucluse. 

Mémoires  de  l'Académie  de  Vaucluse,  2«  sér.,t.  111,1903. 

Fasc.  1. — P.  1-21.  D''  Pansier.  Arnaldi  de  Villanova.  i/fcc^^Hi-  regiminis 
de  confortatione  visus.  [Publie  pour  la  première  fois,  d'après  le  cod.  173 


278  ANNALES   DU   MIDI. 

(lo  la  Bibliotlièquo  de  Motz,  ce  traité  intéressant  cFoculistiqae.  Notice 
biographique  peu  originale  et  renvoyant  peu  aux  sources.]  —  P.  21-41. 
Delmas.  Essai  sur  l'histoire  de  Seyne-les-Alpes.  (Suite,  p.  169-225,  et  à 
suivre.)  [Monographie  communale  d'après  une  documentation  de 
seconde  main  :  par  exemple,  pour  le  siège  de  1585,  il  cite  longuement 
Louvet,  Histoire  des  troubles,  et  ignore  les  Mémoires  de  Du  Virailh, 
source  de  Louvet.]  —  P.  41-55.  Laval.  Joseph-Agricol  Viala,  sa  nais- 
sance, sa  mort,  sa  glorification.  (Suite  et  fin,  p.  111-14.)  [Très  bonne  étude 
critique;  détermine  les  circonstances  précises  et  la  date  de  la  mort  de 
Viala:  démontre  contre  Poultier  qu'elle  ne  fut  pas  la  conséquence  d'une 
«  polissonnerie  mal  prise  »;  que  l'oncle  d'Agricol,  Moureau,  se  fit  une 
grande  réclame  personnelle  et  profitable  avec  le  cadavre.] 
Fase.  2  et  3.  —  P.  71-93.  Destandau.  Documents  inédits  sur  la  ville  des 
Baux.  [Confirmation  des  privilèges  de  la  ville,  de  Jean  Arlatan  (1430)  ; 
privilèges  accordés  parle  roi  René  (1438).  (Arch..des Bouches-du-Rhône, 
Lilii  265  V.,  Leonis  160  v.);  les  suites  d'une  élection  aux  Baux,  en  1650.] 
—  P.  155-69.  Découvertes  archéologiques  intéressant  le  département  de 
Vaucluse  :  Sauve.  Découvertes  à  Apt.  [Dans  le  domaine  du  Clos  ;  lampes, 
poteries,  inscriptions,  dont  une  Beo  Mercurio  Mithrce].  Labande.  Dé- 
couverte d'inscriptions  et  antiquités  à  Vaison,  Ménerbes,  Cavaillon  et 
Malemort.  Les  fresques  de  Simone  Memmi  au  porche  de  la  métropole 
d'Avignon.  [Copiées  en  1903  par  Yperman,  pour  la  Commission  des 
monuments.  Signalons  à  M.  A.  Hallays  un  exploit  des  vandales  avi- 
gnonuais  :  «  N'a-t-on  pas  encore  gravement  endommagé  ces  vieilles 
peintures,  il  y  a  quelques  mois,  par  la  pose  d'une  décoration  de  dra- 
peaux qui  a  fait  tomber  de  nombreux  morceaux  de  plâtre?  »]  —  P.  225-36. 
Labandk.  Notice  [et  bibliographie]  de  l'archéologue  Sagnier. 

L.-G.  P. 


NÉCROLOGIE 


M.  Louis  Gtjibert,  qui  est  décédé  subitement,  le  14  janvier 
dernier,  dans  sa  soixante-quatrième  année,  a  été  durant  vingt- 
cinq  ans  le  principal  représentant  de  l'historiographie  du  Limou- 
sin. Son  nom  aura  acquis  une  valeur  durable  par  quelques  ouvra- 
ges où  s'allient  à  une  connaissance  approfondie  des  sources  une 
critique  suffisante  et  une  exposition  claire.  Tels  la  Destruction 
de  Tordre  et  de  l'abbaye  de  Grandmont  (1877),  le  Parti  girondin 
dans  la  Haute- Vienne  (1878),  Chalucet  '(1887),  la  commune  de 
Saint- Léonard  de  Noblat  (1891),  Laron  (1893),  VArt  rétrospectif  à 
Vexposition  de  Limoges  (1887)  et  une  multitude  de  brochures  qui 
sont  les  membra  disjecta  d'une  histoire  générale  de  Limoges, 
en  deux  volumes,  que  construisait  l'auteur.  M.  L.  G  a  aussi  atta- 
ché son  nom  à  la  publication  des  Registres  consulaires  de  Limo- 
ges, des  principaux  Documents  relatifs  à  l'histoire  des  deux  villes 
de  Limoges  et  des  Livi-es  de  raison  limousins  et  marchois  (cf. 
Annales  du  Midi,  III,  391  ;  VI,  98;  VII,  330;  IX,  356;  XI,  90;  XV, 
432;  XVI.  149).  La  mort  de  ce  laborieux  érudit  creuse  un  grand 
vide  dans  la  Société  archéologique  du  Limousin,  dont  il  était 
l'âme,  et  met  un  grand  deuil  au  cœur  de  tous  ceux  qui  l'ont 
connu.  A.  L. 


CHRONIQUE 


La  Société  d'études  provençales  dont  nous  avions  parlé  l'an  der- 
nier (t.  XV,  p.  261)  est  constituée;  elle  vient  de  publier  le  pre- 
mier fascicule  de  ses  Annales.  Bonne  chance  et  longue  vie  au 
nouveau  périodique  et  à  la  Société  savante  dont  il  est  l'organe  î 


M.  Louis  Batcave  nous  annonce  la  fondation  d'une  Revue  du 
Béarn  et  du  Pays  basque,  qui  essaiera  de  grouper  toutes  les  for- 
ces scientifiques  de  la  région;  la  revue  nouvelle,  qui  comblera 
une  véritable  lacune,  s'est  assuré  de  précieuses  collaborations  : 
celles  de  MM.  JuUian,  Henri  et  Paul  Courteault,  Dubarat,  dont 
les  Etudes  religieuses  fusionnent  avec  elle.  Nous  lui  adressons 
nos  cordiaux  souhaits  de  prospérité.  Le  premier  numéro  de  la 
Revue  a  déjà  paru. 

M.  Luchaire,  professeur  d'histoire  du  moyen  âge  à  l'Université 
de  Paris,  membre  de  l'Institut,  a  trouvé,  dans  une  reliure,  la 
valeur  de  15  pages  d'un  texte  bien  connu,  la  Vie  de  saint 
Hugues,  évêque  de  Grenoble,  par  Guigue,  prieur  de  la  Char- 
treuse f  1 132.  Elles  appartenaient  à  un  superbe  manuscrit,  écrit 
sur  deux  colonnes  en  très  belle  écriture  de  la  première  moitié 
du  xiie  siècle,  presque  sans  abréviations.  M.  Luchaire  a  cons- 
taté :  1"  que  le  texte  de  ce  fragment  ne  diffère  que  par  des  chan- 
gements sans  importance  de  celui  qui  a  été  publié  dans  les  Acta 
Sanclorum;  t'^  que,  comparaison  faite  avec  les  mss.  que  la  Bi- 
bliothèque nationale  possède  de  la  vie  de  saint  Hugues,  son 


CHRONIQUE.  281 

fragment  de  ras.  paraissait  très  supérieur  aux  autres  et  sans 
doute  plus  ancien,  plus  même  que  le  ms.  lat.  5312,  qui  est  le 
plus  beau  de  tous.  Il  en  a  fait  don  à  la  Bibliothèque  nationale. 


Le  mont  Jouer,  qui  a  fourni  déjà  de  nombreux  vestiges  d'une 
ville  romaine,  recèle  encore  beaucoup  de  vestiges  antiques  que 
la  Société  archéologique  de  la  Creuse  découvre  peu  à  peu  au 
cours  des  fouilles  pratiquées  sous  ses  ordres. 

On  vient  de  mettre  à  jour  l'enceinte  d'un  théâtre  admirable- 
ment conservé,  puis  une  statue  qui,  bien  que  mutilée,  a  gardé 
plusieurs  détails  assez  nets,  le  bras  gauche,  le  buste,  le  com- 
mencement du  bras  droit.  On  distingue  sur  la  poitrine  un  man- 
teau retenu  par  la  main  gauche. 

Trois  autres  statues,  découvertes  en  même  temps,  mais  moins 
complètes,  ont  été  aussi  exhumées. 


Chronique  du  Gard. 

Nimes.  —  Au  musée  archéologique,  l'événement  le  plus  saillant 
a  été  l'entrée  de  la  statue  découverte  à  Grézan  en  igoi.  M.  Salo- 
mon  Reinach  a  fait  à  l'Académie  des  Inscriptions,  au  sujet  de 
ce  monument  très  archaïque,  une  communication  ofi  il  consi- 
dère la  statue  comme  une  œuvre  indigène.  Elle  représente  un 
guerrier  debout,  avec  lourde  coiffure  se  prolongeant  sur  les 
épaules,  torques,  cuirasse  à  ornements  métalliques  et  ceinture 
à  boucle.  «  Tout  en  trahissant,  comme  les  plus  anciennes  figures 
de  l'Etrurie,  l'influence  de  l'art  gréco-ionien,  elle  présente  un 
caractère  sui  generis  qui  en  accroît  encore  l'importance  pour 
l'histoire  de  l'art.  »  M.  Reinach  incline  à  la  rapporter,  comme 
les  deux  statues  en  pierre  de  Velaux  (musée  de  Marseille),  au 
v«  siècle  avant  notre  ère  et  à  y  reconnaître  un  art  gréco-celti- 
que ou  gréco-ligure  encore  inconnu  (séance  du  10  mai  1901). 

Parmi  les  inscriptions ,  c'est  celle  d'Ej^tYyopst?  MoMXkzoç,  qui 
a  naturellement  reçu  le  meilleur  accueil.  (Cf.  Annales  du  Midi, 
t.  XIV,  586.) 

Je  dois  exprimer  ici  un  regret,  c'est  que  le  musée  épigraphi- 
que  et  archéologique  n'ait  plus  de  conservateur  attitré.  On 
perdra  ainsi  plus  d'une  occasion  d'acquérir  des  monuments 
locaux. 


282  ANNALES    DU   MIDI. 

L'attention  de  la  Commission  archéologique  a  été  appelée  sur 
un  curieux  et  obscur  phénomène  de  salpêtration,  qui  altère  gra- 
vement les  pierres  de  l'amphithéâtre  romain,  dans  une  région 
limitée  aux  impostes  du  rez-de-chaussée  de  la  façade  extérieure 
méridionale.  Les  pierres  neuves  se  décomposent  comme  les 
autres ,  après  un  certain  temps  de  contact  avec  les  pierres 
malades.  Ce  sont  des  blocs  de  calcaire  néocomien.  Si  quelque 
archéologue  ou  architecte  peut  nous  indiquer  la  cause  du  mal 
et  un  remède  efficace,  il  nous  rendra  grand  service. 

La  collection  numismatique  de  la  Maison-Carrée  s'enrichit 
régulièrement  par  des  dons  particuliers,  beaucoup  provenant 
d'étrangers  de  passage 

Saint-Gilles.  -  M.  l'abbé  Nicolas  amasse  activement  des  ma- 
tériaux pour  sa  future  Histoire  de  Saint-Gilles.  Il  se  propose  de 
publier  à  part,  dans  les  Mémoires  de  l'Académie  de  Nimes.  le 
manuscrit  laissé  par  Raybaud  (Biblioth.  d'Aix,  338-339),  en  deux 
volumes,  sur  l'histoire  du  grand  prieuré  de  Saint-Gilles.  Cette 
publication  est  désirée  depuis  longtemps. 

Les  voûtes  de  l'église  de  Saint-Gilles  sont  devenues  un  sujet 
de  discussion  entre  les  archéologues,  sans  qu'ils  se  soient  mis 
d'accord.  MM.  Brutails,  Marignan,  de  Lasteyrie  ont  fait  con- 
naître leurs  vues  à  ce  sujet.  L'inscription  de  1 116,  dont  M.  l'abbé 
Nicolas  a  donné  un  excellent  fac-similé  dans  les  Mémoires  de 
l'Académie  de  Nimes  de  1900,  ne  laisse  pas  d'être  embarrassante. 
Mais  à  force  d'observer  et  de  réfléchir,  on  finira  bien  par  résou- 
dre le  problème  de  la  date  de  ces  voûtes.  E.  Bondurand. 


Chronique  générale. 

—  Le  Tableau  de  la  géographie  de  la  France,  par  P.  Vidal  de  la 
BlacheS  est  fait  pour  surprendre  ceux-là  même  qui  attendaient 
le  plus  d'un  tel  maître  :  le  résultat  passe  leurs  prévisions.  Il  n'y 
a  pas  seulement  ici  domination  parfaite  des  éléments  multiples 
et  si  divers  de  la  connaissance  géographique,  effort  constam- 
ment heureux  pour  marquer  entre  eux  le  lien,  pour  faire  sortir 
des  rapprochements  les  idées;  il  n'y  a  pas  seulement  abondance 
des  vues  ingénieuses  ou  profondes,  agencement  des  parties  aisé, 

1.  T.  I,  1"  partie,  de  E.  Lavisse,  Histoire  de  Fra?ice,  etc.  Paris, 
Hachette,  1903  ;  in-8»  carré  de  39&  pages. 


CHRONIQUE.  283 

souple,  délicat,  modelé  sur  la  nature,  varié  et  harmonieux 
comme  la  France  elle-même,  —  combien  différent  des  cadres  en 
quelque  sorte  brutaux  et  tracés  d'avance  de  la  géographie 
usuelle  !  — Ce  Tableau,  à  notre  gré,  possède  d'autres  mérites,  plus 
rares  encore  :  le  sentiment  fin  et  pénétrant  de  la  vie  propre  à 
chacun  des  pays  qui  composent  notre  France,  vie  du  sol  et  vie 
des  hommes,  dans  le  présent  et  dans  le  passé;  et  ce  sentiment 
est  si  personnel  que  parfois  il  confine  à  l'émotion.  Avec  quel 
charme  discret  il  s'exprime!  Sur  cet  ouvrage  de  science  un  sobre 
parfum  littéraire  est  répandu  :  rien  de  l'outrance  prétentieuse 
des  professionnels  de  la  description;  rien  non  plus  du  jargon 
des  spécialistes,  économistes  ou  géologues,  sorte  de«volapuck  » 
que  trop  de  géographes,  hélas,  se  font  un  devoir  d'adopter.  La 
mesure  parfaite  avec  laquelle  ont  été  dosées  les  notions  d'ordre 
scientifique,  qui  a  présidé  à  la  composition,  apparaît  aussi  dans 
le  rendu,  dans  le  style.  —  C'est  par  là  que  vivra  ce  livre.  Il 
est  probable  qu'au  bout  du  siècle  qui  commence  les  progrès 
accomplis  dans  le  domaine  des  sciences  physiques  et  naturelles 
et  dans  celui  des  sciences  humaines  auront  introduit  des  connais- 
sances nouvelles  et  fait  surgir  aux  yeux  des  rapports  que  nul 
ne  soupçonne  maintenant.  Sur  beaucoup  de  points  l'œuvre  de 
M.  V.  de  L.  devra  être  reprise,  corrigée,  accrue.  Mais,  outre 
qu'une  part  est  définitive,  lui-même  y  demeurera,  avec  ses  qua- 
lités d'esprit  éminentes  ou  charmantes,  avec  son  cœur  aussi, 
sa  préoccupation  anxieuse  de  scruter  les  énergies  qui  résident 
dans  notre  sol  national,  celles  qui  se  sont  déjà  révélées  et  celles 
qui  dorment  encore,  attendant  leur  tour  :  «  Nous  croyons  fer- 
mement, dit-il,  que  notre  pays  tient  en  réserve  assez  de  res- 
sources pour  que  de  nouvelles  forces  entrent  en  jeu  et  lui 
permettent  de  jouer  sa  partie  sur  l'échiquier  indéfiniment 
agrandi...  »  Et  plus  loin,  parlant  de  la  «stabilité  française»  et  de 
ses  causes  profondes,  il  ajoute  :  «  Chez  les  peuples  de  civilisa- 
tion industrielle  qui  nous  avoisinent,  nous  voyons  aujourd'hui 
les  habitants  tirer  de  plus  en  plus  leur  subsistance  du  dehors  ; 
la  terre,  chez  nous,  reste  la  nourricière  de  ses  enfants.  Cela 
crée  une  différence  dans  l'attachement  qu'elle  inspire.  »  —  Les 
méridionaux  liront  avec  un  intérêt  particulier  les  livres  II 
(Saône  et  Rhône,  région  lyonnaise,  Alpes  françaises,  Massif 
central),  III  (Ouest)  et  IV  (Le  Midi  :  Midi  méditerranéen,  pyré- 
néen, océanique). 


284  ANNALES   DU   MIDI. 

—  Les  historiens,  professionnels  ou  amateurs,  manquaient  d'un 
manuel  préparatoire  et,  si  l'on  peut  dire,  d'une  grammaire  de 
leur  art.  Ils  procédaient  en  autodidactes,  d'instinct,  en  comptant 
sur  la  justesse  de  leur  esprit,  sans  se  soumettre  à  une  gymnasti- 
que rationnelle;  mais  le  mérite  personnel  ne  remplace  pas  les 
saines  habitudes  qu'impose  une  discipline  sévère.  Si  la  critique 
discerne  des  parties  faibles  dans  l'œuvre  considérable  du 
xix^  siècle,  cela  tient  pour  beaucoup  au  manque  d'éducation 
professionnelle  des  historiens.  La  lacune  que  présentait  notre 
littérature  sur  ce  point  a  été  comblée  par  MM.  Ch.-V.  Langlois 
et  Ch.  Sei&nobos  dans  leur  Introduction  aux  éludes  historiques'^. 
Il  convient,  quoique  un  peu  tardivement,  de  donner  un  bref 
aperçu  des  matières  qui  y  sont  traitées. 

Tout  travail  historique  débute  par  la  recherche  des  documents 
[heuristique):  l'outillage  nécessaire  à  cet  effet  se  perfectionne  de 
jour  en  jour,  et  parmi  les  plus  utiles  instruments  mis  à  la  disposi- 
tion des  savants,  il  faut  citer  en  première  ligne  les  ouvrages  de 
Ch.-V.  Langlois,  celui  qu'il  a  publié  en  collaboration  avec  Stein 
sous  le  titre  à' Archives  de  l'histoire  de  France,  1891,  et  son 
Manuel  de  Bibliographie  historique,  dont  le  premier  volume  traite 
des  instruments  de  la  bibliographie,  tandis  que  le  second,  qui 
vient  de  paraître 2,  est  consacré  à  l'histoire  et  à  l'organisation 
des  études  historiques;  en  quelques  traits,  d'une  justesse  et  dune 
précision  remarquables,  on  y  trouvera  caractérisées  les  oeuvres 
de  nos  anciens  érudits. 

Les  chapitres  qui  suivent  montrent  par  quelle  série  d'opéra- 
tions délicates  l'historien  remonte  du  document  au  fait,  dont  le 
document  n'est  que  le  vestige  souvent  bien  altéré.  On  touche  du 
doigt  l'infériorité  de  l'histoire  par  rapport  aux  sciences  physi- 
ques. L'historien,  disent  nos  auteurs,  «  est  dans  la  condition 
d'un  chimiste  qui  connaîtrait  une  série  d'expériences  seulement 
par  les  rapports  de  son  garçon  de  laboratoire  »  ;  nous  ajoute- 
rons :  et  qui  ne  peut  pas  les  refaire.  C'est  une  bonne  raison  pour 

1.  Paris,  Hachette,  1899;  in-8°  de  xvm-308  pages.  2'  édition. 

2.  Paris,S;Hachette,  1904;  in-8»  de  622  pages.  —  On  pourra  consulter 
aussi  Gavet,  Sources  de  l'histoire  des  institutions  et  du  droit  fran- 
çais. Manuel\de  bibliographie  historique.  Paris,  Larose,  1899;  in-8°  de 
xi-783  pages.  Puis  Aug.  Momnier,  Les  sources  de  l'histoire  de  France. 
Paris,  Picard,  1901-1903;  3  vol.  in-S»  de  yiii-288,  326  et  252  pages  : 
manuel  excellent.  * 


CHRONIQUE.  285 

appliquer  avec  la  dernière  rigueur  les  principes  de  la  critique  ; 
nous  ne  possédons  pas  d'autre  moyen  de  nous  rapprocher  de  la 
vérité. 

A  cette  première  phase  de  l'œuvre  historique  qui  n'est  qu'une 
longue  et  patiente  analyse,  succède  la  synthèse  ou  construction 
à  l'aide  des  matériaux  dégrossis,  épurés,  choisis;  il  s'agit 
surtout,  dit-on,  de  grouper  les  faits  dans  des  cadres  et  de  les 
condenser  en  formules,  <.<  afin  d'en  dégager  les  caractères  géné- 
raux et  les  rapports  »;  après  quoi  il  ne  reste  plus  qu'à  exposer 
les  résultats  obtenus.  L'étude  de  ces  procédés  synthétiques,  à 
l'aide  desquels  la  science  de  l'histoire  doit  dire  son  dernier  mot, 
est  particulièrement  délicate;  on  n'en  méconnaîtra  pas  le  vif 
intérêt,  quoique  les  auteurs  du  livre  dont  nous  parlons  n'aient 
pas  réussi  à  éviter,  autant  qu'il  aurait  fallu,  l'écueil  de  l'abs- 
traction vers  lequel,  il  est  vrai,  leur  sujet  les  entraînait. 

—  Réunir  dans  un  ouvrage  de  caractère  assez  élémentaire  pour 
être  à  la  portée  des  étudiants,  d'étendue  assez  réduite  pour  être 
d'un  maniement  commode  et  de  prix  assez  peu  élevé  pour  être 
aisément  acquis,  toutes  les  notions  de  quelque  importance  rela- 
tives aux  sources,  aux  institutions  et  aux  doctrines  du  droit  pu- 
blic et  du  droit  privé  de  la  France,  depuis  les  origines  les  plus 
lointaines  jusqu'à  la  Révolution  inclusivement;  joindre  à  une 
exposition  nette  et  vivante  de  toutes  les  matières  des  indica- 
tions de  sources  si  précises  et  des  renseignements  bibliographi- 
ques si  abondants  que  ce  livre  d'enseignement  fût  en  même 
temps  pour  tous  les  chercheurs  un  précieux  instrument  de  tra- 
vail, c'était  là  une  tâche  dont  l'utilité  n'avait  pas  besoin  d'être 
signalée,  mais  devant  les  difficultés  de  laquelle  il  n'était  per- 
sonne qui  n'eût  jusqu'à  présent  reculé.  Ce  travail,  qui  exigeait, 
indépendamment  de  la  plus  vaste  érudition,  la  sûreté  de  juge- 
ment nécessaire  pour  dégager  de  l'inflnie  variété  des  dispositions 
de  notre  droit  ancien  les  règles  qui,  pour  une  époque  et  une  ré- 
gion déterminées,  expriment  la  vérité  moyenne,  a  été  entrepris 
avec  plein  succès  par  M.  Brissaud^  et  vient  d'être  mené  par  lui 
à  bonne  fin. 

Son  livre  comprend,  outre  une  introduction  (pp.  1-20),  trois  par- 

1.  Cours  d'histoire  gcnérale  du  droit  français  public  et  privé.  Pa- 
ris, Fontemoing,  1904;  in-8°  de  vi-.1892  pages  (en  2  vol.). 


286  ANNALES   DU    MIDÎ. 

ties  consacrées  aux  sources  (pp.  20-4i6),  au  droit  public  (pp.  41*- 
iOOO)  et  au  droit  privé  (pp.  1000-1783),  puis  une  longue  et  très 
utile  liste  alpbabétique.des  anciens  jurisconsultes  (pp.  1801-1817), 
enfin  un  index  alphabétiquei(pp.  1819-1882)  et  la  table. 

Nous  ne  pouvons  analyser  en  quelques  lignes  ce  sujet  immense. 
Qu'il  nous  suffise  d'insister  sur  l'un  des  grands  mérites  du  livre 
de  M.  B.,  qui  le  distingue  des  quelques  très  bons  ouvrages  ana- 
logues déjà  parus  :  son  caractère  général.  On  saura  dorénavant, 
pour  toute  question  d'histoire  du  droit  français,  où  trouver  faci- 
lement des  renseignements  le  plus  souvent  suffisants  et  permet- 
tant, en  tous  cas,  d'amorcer  de  nouvelles  recherches.  Au  point 
de  vue  de  l'histoire  du  droit  privé  notamment,  notre  auteur  nous 
rend  le  plus  signalé  service.  En  fait  d'ouvrages  généraux,  il  n'y 
a  rien  à  notre  connaissance,  dans  la  littérature  française  ou 
étrangère,  qui  soit  à  beaucoup  près  aussi  complet  que  le  sien. 
Les  institutions  juridiques  du  midi  de  la  France,  qui  intéressent 
particulièrement  les  lecteurs  des  Annales,  ont  été  étudiées  avec 
une  compétence  spéciale  par  M.  B.  qui  est  attaché  à  notre  région 
par  ses  fonctions  comme  par  ses  origines.  On  le  consultera  avec 
profit  sur  les  consulats,  sur  les  coutumes  méridionales,  sur  le 
régime  dotal  et  en  général  sur  les  institutions  de  droit  écrit, 
dans  l'étude  desquelles  il  a  été  servi  par  sa  connaissance  appro- 
fondie du  droit  romain.  Ajoutons  enfin  que  ce  livre,  d'où  l'érudi- 
tion n'exclut  aucunement  l'originalité,  est  écrit  d'une  plume 
alerte  et  qu'il  est  d'une  lecture  attrayante. 

—  Le  cadre  spécial  de  cette  revue  ne  nous  permet  que  de  signa- 
ler l'étude  historique  publiée  par  M.  d'ARBOis  de  Jubainville 
sous  le  titre  suivant  :  Les  Celtes  depuis  les  temps  les  plus  anciens 
jusqu'en  Van  100  avant  noire  ére^.  Il  y  est  question,  non  pas 
comme  on  pourrait  le  penser,  des  institutions  celtiques,  mais  de 
l'histoire  des  établissements  successifs  des  Gaulois  dans  l'Europe 
occidentale  et  même  sur  le  Danube.  Les  lecteurs  des  Annales  du 
Midi  trouveront  à  la  p.  79  et  s.  des  détails  sur  les  Gaulois  dans 
le  midi  de  la  France  et  dans  la  Péninsule  ibérique.  Comme  c'est 
surtout  à  l'aide  de  la  philologie  que  M.  d'A.  de  J.  reconstitue 
l'histoire  celtique  et  évalue  l'importance  de  cet  élément  ethno- 
graphique dans  la  formation  de  notre  nationalité,  les  celtisants 


1.  Paris,  Foutemoing,  11)04;  in-8»  de.xii-22U  pages. 


CHRONIQUE.  287 

seuls  peuvent  se  prononcer  sur  les  thèses  qu'il  soutient.  Elles 
étaient  déjà  connues,  d'ailleurs,  par  son  livre  Les  premiers  habi- 
tants de  l'Europe  (2«  éd.)  et  par  divers  articles  de  la  Revue  cel- 
tique. 

—  Nous  avons  dit  dans  une  précédente  Chronique  (t.  XIV, 
p.  271)  tout  le  bien  que  nous  pensions  de  ['Histoire  de  Vlnquisi- 
tion  au  moyen  âge  de  H.  Ch.  Lea.  Depuis,  le  dernier  volume  a 
paru';  c'est  le  plus  considérable;  il  ne  le  cède  nullement  aux 
deux  autres  en  intérêt;  mais  il  se  rapporte  moins  directement  à 
notre  histoire  méridionale.  On  y  trouvera  les  détails  de  la  lutte 
entreprisepar  l'Inquisition  contre  les  hérésies  des  Spirituels,  des 
Fraticelles  :  ni  de  l'une  ni  de  l'autre  le  Midi  n'est  resté  indemne. 
On  y  peut  voir  aussi  comment  l'Inquisition  a  été  mise  au  service 
des  intérêts  politiques  des  papes,  des  rois  :  ceux  qui  les  gênent, 
les  Templiers.  Jeanne  Darc,  sont  accusés  d'hérésie;  comment  elle 
a  procédé  contre  les  magiciens,  les  sorcières,  et  avec  quelle 
aflfreuse  rigueur!  Par  contre,  son  inaction  à  l'égard  des  opinions 
philosophiques,  son  indifférence  complète  en  matière  de  vente 
des  indulgences,  de  simonie,  etc.,  ont  permis  aux  novateurs  de 
s'emparer  des  esprits  éclairés,  à  la  chrétienté  occidentale  d'as- 
sister à  la  progressive  démoralisation  de  l'Eglise  et,  partielle- 
ment, de  s'en  détourner. 

—  Le  tome  le'  des  Origines  de  l'ancienne  France  de  M.  Jacques 
Flach  date  de  1886.  Il  consistait  dans  une  étude  sur  le  régime 
seigneurial,  sur  le  patronage  dans  la  société  germanique  et  dans 
l'Etat  franc,  enfin  sur  la  dissolution  de  l'Etat  franc;  on  y  trou- 
vait d'intéressants  détails  sur  la  formation  des  droits  féodaux. 
Le  t.  II  (1896)  fut  consacré  à  l'émancipation  des  communes,  à  la 
féodalité  et  à  la  chevalerie;  personne  jusqu'alors  n'avait,  aussi 
bien  que  M.  F.,  décrit  la  constitution  des  villes  du  moyen  âge, 
cités  et  bourgs,  sauvâtes  et  bastides;  à  propos  de  la  féodalité,  il 
s'élevait  contre  les  théories  de  Fustel  de  Coulanges  et  soutenait 
le  caractère  personnel  de  l'ancienne  féodalité.  Le  tome  III  qui 
vient  de  paraître  ^  et  qui  sera  complété  par  un  tbme  IV,  relatif  à 


1.  Trad.  S.  Reinach.  Paris,  Soc.  nouv.  de  libr.  et  d'édit.,  19(«.  T.  III  ; 
in-12  de  898  pages. 

2.  Paris,  Larose  et  Forcel,  1904;  in-S"  de  580  pages, 


288  ANNALES   DU   MIDI. 

l'Eglise,  traite  de  la  reconstitution  de  l'Etat  par  la  royauté  et  le 
principat  (c'est-à-dire  par  les  principautés  ou  seigneuries  féo- 
dales). 

M.  F.  rabaisse  l'importance  du  contrat  féodal  ou  concession  de 
flef  dont  on  a  l'habitude  de  faire  le  pivot  de  la  société  au  moyen 
âge.  C'est  là,  d'après  lui,  un   fait  artiflciel,  secondaire,   posté- 
rieur, qu'on  ne  saurait  comparer  pour  l'importance  à  la  fidélité, 
fondement  sur  lequel    l'Etat  s'est  reconstitué.  La  fidélité  n'est 
pas  contractuelle,  mais  imposée;  chaque  homme  est  attaché  par 
sa  naissance  à  une  région  et  à  une  famille  données;  il  a  une 
allégeance  naturelle  ou,  pour  parler  comme  M.  F.,  une  foi  lige 
naturelle  (d'après  lui,  lige  ne  viendrait  pas  de  ledig,  comme  on  le 
croit  communément,  mais  de  leodius.  peuple,  et,  par  extension, 
public,  légal).  Le  bien  résultant  de  l'hommage  féodal  ne  dépend 
en  rien  de  la  situation  géographique  ou  des  rapports  de  famille; 
on  pourrait  le  qualifier  d'allégeance  politique.  Cette  allégeance 
acquiert   de  l'importance  en  Normandie,   en  Flandre,  dans  le 
comté  de   Barcelone.    Il   n'en  est  pas  de    même  au  midi   de    la 
France  où  l'allodialité  des  terres   persiste   et  prévaut  sur   la 
concession  féodale;  où  le  groupement  est  essentiellement  per- 
sonne] et  familial;   le  lieu    féodal  y   est  très  lâche;   la  foi  est 
engagée  à  plusieurs  seigneurs  et  se  ramène  souvent  à  un  ser- 
ment de  sécurité  dans  lequel  les  historiens  du  Languedoc  ont  eu 
le  tort  de  voir  un  hommage  ;  il  serait  beaucoup  plus  exact  de 
parler  d'alliés,  de  confédérés,  d'associés  que  de  suzerains  et  de 
vassaux  ;  il  est  impossible  de  fixer  les  limites  des  seigneuries. 
Nous  citons  ici  textuellement  M.  F.  et  nous  renvoyons  le  lecteur, 
pour  la  justification  de  ces  idées,  à  l'appendice  (p.  94  et  s.)  sur  le 
fief  languedocien  de  900  à  1071  :  M.  F.  nous  y  fait  assister  à  «  la 
lente  diffusion  du  mot /èM(^Mm  et  à  l'élaboration  non  moins  lente 
de  la  notion  du  fief  proprement  dit  »;  il  estime  que  de  1050 
à   1071   le  mot  fevutn  est   devenu  d'un   emploi  assez  fréquent, 
mais  que  sa  signification  n'est  pas  encore  pleinement  technique. 
Les  groupements  sont  donc  plutôt  personnels  que  territoriaux. 
M.  F.,    à   ce  propos,  s'occupe  des    circonscriptions   ecclésiasti- 
ques et  administratives,  du  comitatus  (ce   qui,  d'après  lui,  ne 
doit  pas  s'entendre  d'une  circonscription  territoriale),  des  droits 
de  gîte  et  de  procuration,  auxquels  il  attribue  un  caractère  tout 
personnel.  La  plupart  des  historiens,  à  la  suite  des  feudistes.  ont 
considéré  les  rois  des  x«  et  xi«  siècles  plutôt  comme  des  suzerains 


CHRONIQUE.  289 

que  comme  des  rois  ;  à  la  suite  de  MM.  Luchaire  et  Pflster.  M.  F. 
combat  cette  théorie  ;  il  dégage  le  pouvoir  royal  de  son  alliage 
féodal.  Plus  encore  que  M.  Luchaire,  il  critique  la.  division  de  la 
France  en  pays  d'obéissance  le  roi  et  pays  hors  l'obéissance  le  roi, 
en  s'appuyant  sur  l'édition  (due  à  M.  P.VioUet)  des  Etablissements 
de  saint  Louis  d'où  cette  distinction  avait  été  tirée  (p.  215).  Il 
discute  le  problème  embarrassant  des  droits  de  la  royauté  sur 
l'Eglise  (p.  272).  Il  expose  la  théorie  assez  négligée  du  ban  royal 
(p.  339).  Il  revient  sur  le  problème  de  la  pairie  (p.  413),  sur  l'or- 
ganisation de  la  Cour  du  roi  (p.  429),  sur  l'ost  et  le  trésor  du 
roi  (p.  484).  L'ouvrage  se  termine  par  plusieurs  chapitres  sur  les 
rapports  avec  la  royauté  de  quelques  grandes  principautés  féo- 
dales du  nord  de  la  France. 

-  L'œuvre  capitale  où  M.  Paul  Violleti  a  décrit  nos  ancien- 
nes institutions,  est  arrivée  à  sa  fin.  Nous  n'avons  pas  à  en  faire 
ressortir  les  mérites  de  premier  ordre  :  une  érudition  prodigieuse 
à  laquelle  n'échappent  pas  les  détails  en  apparence  les  plus  insi- 
gnifiants, un  esprit  ingénieux,  personnel,  qui  sait  tirer  parti  des 
moindres  documents,  qui  porte  allègrement  le  faix  accablant  de 
matériaux  de  jour  en  jour  plus  nombreux,  accumulés  par  des 
légions  de  travailleurs,  qui  sème  partout  dans  ce  tableau  de  no- 
tre ancien  droit  public,  brossé  à  grands  traits,  des  vues  origina- 
les, fines,  profondes.  Il  faut  renoncer  à  en  donner  un  compte 
rendu  détaillé.  Il  touche  à  trop  de  choses.  Mais  nous  nous 
reprocherions  de  ne  pas  signaler  aux  lecteurs  des  Annales  du 
Midi  les  principaux  points  relatifs  à  notre  histoire  méridionale  : 
l'analyse  des  institutions  communales  ou  corporatives,  les  re- 
cherches sur  les  Etats  provinciaux  et  les  Chambres  des  comptes 
des  provinces,  enfin  le  chapitre  concernant  les  finances.  Une 
table  alphabétique  de  70  pages  permet  de  retrouver  rapidement 
chacune  des  matières  qui  y  sont  traitées.  En  terminant,  expri- 
mons un  regret  :  pourquoi  faut-il  que  ce  volume  soit  le  dernier? 
Les  lecteurs  de  M.  V.  espéraient  qu'il  ne  s'arrêterait  point  au 
seuil  des  temps  modernes,  mais  qu'il  les  conduirait  du  moyen 
âge  jusqu'à  la  Révolution. 


1.  P.  Viollet,  Histoire  des  institutions  politiques  et  administratives 
de  la  France,  t.  III«  et  dernier,  Paris,  Larose,  1903;  in-S"  de  601  pages. 


ANNALES  DU   MIDI.   —   XVI.  19 


â9Ô  ANNALES   DU    MIDI. 

—  Le  Parlement  de  Paris  a  joué  un  trop  grand  rôle  dans  l'his- 
toire de  notre  ancienne  France  pour  qu'on  ne  trouve  rien  de 
relatif  au  Midi  dans  un  livre  comme  celui  de  M.  Ducoudray. 
Les  Origines  du  Parlement  de  Paris  et  la  justice  aux  xiip  et  xiv^ 
siècles  ».  II  y  est  question  des  coutumes  méridionales  (p.  720),  de 
l'origine  des  Parlements  provinciaux  (p.  985),  et  çà  et  là  de  faits 
concernant  le  Midi,  ainsi  qu'il  est  facile  de  s'en  assurer  en  con- 
sultant l'index  alphabétique. 

—  M.  G.  Picot  a  réuni  les  actes  qui  subsistent  aux  Archives 
nationales  concernant  les  États  généraux  célèbres  de  1302,  1303 
et  1308;  il  en  a  fait  un  gros  volume*,  qui  aurait  été  plus  consi- 
dérable encore  si,  aux  actes  du  dépôt  parisien,  l'éditeur  avait 
joint  ceux  que  possèdent  les  archives  de  province,  tant  inédits 
qu'imprimés  déjà.  Ceux-ci  tout  au  moins  auraient  dû  être  indi- 
qués en  note  à  leur  date.  La  partie  neuve  de  la  publication  con- 
siste dans  les  lettres  de  convocation  émanées  du  roi  et  dans  les 
lettres  de  procuration  données  par  le  clergé,  la  noblesse,   les 
villes.  Nous  n'avons  pas  même  d'autres  documents,  pas  le  moin- 
dre procès-verbal,  pour  les  Etats  tenus  à  Tours  en  1308.  Les  pou- 
voirs donnés  par  les  villes  à  leurs  délégués  ne  nous  renseignent 
pas  seulement  sur  les  États,  mais  aussi  sur  les  villes  elles-mê- 
mes, sur  leurs  institutions  municipales,  parfois  sur  le  dénom- 
brement de  leurs  habitants.  Une  foule  de  communautés  du  Midi 
sont  ainsi  représentées,  par  un  ou  plusieurs  textes,  dans  ce  vo- 
lume. Ajoutons  que  les  assemblées  de  juillet-août  1303  ont  eu 
lieu  à  Montpellier,  à  Nimes,  à  Carcassonne.  Les  documents  pu- 
bliés appartiennent  donc  en  grand  nombre  à  notre  histoire  méri- 
dionale. —  Des  fautes.  Ainsi  (n"  cxiv,  p.  159)  le  texte  oiî  il  est 
question  des  offlciers  de  la  cour  du  seigneur  abbé  d'Aniane  est 
traduit  dans  une  note  marginale  comme  si  cour,  abbé,  seigneur 
étaient  trois  personnages  distincts.  P.  253,  n'^  clxvii.  Texte  ;  ad 
sonum  amphili;  et  en  note  :  «  Serait-ce  le  nom  de  la  cloche  de  la 
ville?  »  Il  faut  lire  namphili  =  trompette;  cf.  plus  haut  p.  161  : 
ad  sonum  tube  sive  namphili,  etc. 

—   Les   deux  derniers    volumes   du    magistral    ouvrage    de 

1.  Paris,  Hachette  1902,  iii-S"  de  xviii-1058  pages. 

2.  Documents  relatifs  aux  États  généraux  et  assemblées  réunis  sous 
Philippe  le  Bel.  Paris,  impr.  nat.,  1901;  iu-i»  de  lxii-85S  pages.  (OoUect. 
des  doc.  inédits.) 


CHRONIQUE.  291 

M.  N.  Valois,  La  France  et  le  grand  schisme  d'Occident^,  doivent 
beaucoup  aux  archives  de  Provence,  de  Languedoc,  du  Dau- 
phiné,  notamment  à  celles  de  l'Isère  et  de  l'Aveyron.  Un  grand 
nombre  des  événements  qu'ils  racontent  ont  eu  le  Midi  pour 
théâtre  et  l'ont  affecté  immédiatement.  C'est  à  Avignon  que 
l'Aragonais  Pierre  de  Luna  a  été  élu  contre  le  pape  italien  (1 394); 
dans  le  célèbre  Palais  des  papes  que  Boucicaut,  agissant  au 
nom  de  la  cour  de  France,  est  venu  l'assiéger;  en  Provence,  sur 
les  terres  de  Louis  d'Anjou,  puis  à  Perpignan,  chez  le  roi  d'Ara- 
gon, qu'il  s'est  réfugié,  qu'il  a  réuni  le  concile  (novembre  1415) 
avant  d'aller  s'enfermer  dans  l'inaccessible  château  de  Pefiis- 
cola.  Il  avait  dans  le  Midi  plus  de  fidèles  que  partout  ailleurs  : 
parmi  les  membres  du  haut  clergé,  —  ainsi  les  évoques  du  Puy, 
de  Saint-Pons  —  ;  à  l'université  de  Toulouse,  dont  les  délégués 
soutinrent  sa  cause  (t.  III,  p.  26.o,  453);  parmi  les  habitants  de 
cette  ville  et  dans  les  États  de  la  maison  d'Armagnac;  le  comte 
lui-même,  à  Perpignan,  avait  refusé  de  se  soustraire  à  son  obé- 
dience. En  1419,  après  que  l'élection  de  Martin  V  avait  terminé 
le  schisme,  ce  pape  devait  reconnaître  que  «  la  plupart  des  ha- 
bitants de  Languedoc  et  de  Guyenne  »  restaiant  attachés  à  son 
opiniâtre  rival.  Le  dernier  électeur  d'un  antipape  fut  un  Tou- 
lousain, Carrier.  L'affaire  des  Trahinier,  condamnés  à  Rodez 
comme  sectateurs  de  Carrier,  en  1467,  est  plus  probante  encore 
à  cause  de  la  date  si  tardive  où  elle  se  produisit.  Mais  M.  V.  a 
déjà  publié  cette  partie,  si  attachante,  de  son  livre  dans  l'An- 
nuaire-Bulletin  de  r Histoire  de  France,  t.  XXXVI,  et  nous  en 
avons  entretenu  nos  lecteurs  [Annales  du  Midi,  t.  XIII,  p.  262). 

—  Alphonse  V  le  Magnanime,  roi  d'Aragon  et  des  Deux-Si- 
ciles,  a  été  simultanément  l'objet  de  deux  monographies  d'im- 
portance inégale,  l'une  parue  en  Italie,  l'autre  en  cours  de  publi- 
cation en  Espagne. 

M.  Francesco  Cerone^  a  retracé  la  politique  orientale  d'Al- 
phonse, avant  et  après  la  catastrophe  de  1453.  Il  s'est  servi  des 
archives  de  Naples  et  plus  encore  de  documents   extraits  des 

L  Paris,  Picard,  1901  et  1902,  t.  III  et  IV;  in-H'  de  xxiv-632  et  de 
610  pages. 

2.  Francesco  Cerone,  La  Politica  orientale  di  Alfonso  di  Aragona, 
Napoli,  Luigi  Piero  e  tiglio,  1903;  in-S»  de  391  pages.  (Estratto  dall'  Ar- 
chivio  storico  per  le  Prov.  Napolet.) 


292  ANNALES   DU    MIDI. 

archives  de  la  couronne  d'Aragon,  à  Barcelone.  Malheureuse- 
ment, le  sujet  sera  à  reprendre,  car  le  fonds  barcelonais  dont 
M.  G.  a  tiré  ses  pièces  les  plus  signiflcatives  n'a  été  dépouillé 
que  très  incomplètement,  de  l'aveu  même  de  l'auteur. 

D'autre  part,  D.  José  Ametller  y  Vingas,  le  consciencieux  et 
éclairé  collectionneur  de  Gerona,  avait  préparé  et  rédigé  par- 
tiellement une  histoire  de  la  conquête  de  Naples  par  Alphonse. 
Après  la  mort  de  D.José  A.,  le  chanoine  Collell  s'est  chargé  de 
la  publication  de  son  ouvrage  i.  Il  comprendra  trois  volumes,  et 
le  premier,  déjà  paru,  conduit  le  lecteur  jusqu'à  la  bataille  de 
Ponza,  en  1435.  Cette  étude  approfondie,  pour  laquelle  les  docu- 
ments italiens  et  barcelonais  ont  été  mis  à  contribution,  promet 
de  combler  une  lacune  à  la  fois  dans  l'histoire  de  l'Aragon  et 
dans  l'histoire  de  l'Italie  au  xv«  siècle. 

{A  suivre.)  J.  Brissaud,  J.  Calmette,  P   Dognon 

et  P.  Maria. 


1.  Alfonso  V  de  Aragon  en  Italia  y  In  crisls  religiosa  del  siglo  XV. 
Primera  parte,  t.  I.  Gerona,  P.  Terres;  in-S»  de  xi-541  pages. 


LIVRES  ANNONfiÉS  SOMMAIREMENT 


Bellanger  (L.).  Etude  sur  le  poème  d'Orientius.  Paris  et  Tou- 
louse, 1902;  in-80  de  351  pages.  —  Le  poème  didactique  en  deux 
livres,  dont  l'auteur,  Orientius,  nous  révèle  son  nom  dans  le 
distique  final,  et  qui  a  été  composé  en  Gaule,  à  l'époque  des 
grandes  invasions  : 

Mors,  dolor,  excidium,  clades,  incendia,  luctus, 
Uno  funiavit  Gallia  tota  rogo, 

n'est  pas  une  œuvre  sans  intérêt.  Il  est  écrit  dans  une  langue 
claire,  très  pure  pour  le  temps,  qui  a  parfois  de  la  vigueur  et 
un  certain  éclat,  et,  quoiqu'il  contienne  plus  de  généralités  que 
de  traits  précis,  il  est  un  témoin  intéressant  de  l'état  social  et 
moral  de  la  Gaule  du  Sud-Ouest  au  v»  siècle. 

M.  Bellanger,  professeur  au  lycée  d'Auch,  a  consacré  à  ce 
poème  une  étude  très  complète  et  très  consciencieuse  dont  le 
premier  et  le  principal  mérite  est  d'apporter  une  contribution 
très  utile  à  l'établissement  et  à  l'interprétation  du  texte.  Ce  texte 
repose  sur  un  manuscrit  unique  (nouvelles  acquisitions  latines, 
n°  257,  Bibliothèque  nationale;  il  faut  y  joindre  pour  le  premier 
livre  l'édition  princeps  de  Delrio  qui  reproduit  un  manuscrit 
perdu  depuis);  il  est  en  un  mauvais  état;  il  laisse  place  trop  sou- 
vent à  la  conjecture.  Prenant  pour  point  de  départ  l'édition 
d'Ellis  dans  le  Corpus  de  l'Académie  de  Vienne,' M.  Bellanger  en 
a  discuté  tous  les  passages  difficiles  avec  soin  et  avec  prudence; 
il  a  donné  en  appendice  une  bonne  traduction  annotée  du  Com- 
monitorlum  et  des  deux  prières  attribuées  à  Orience.  11  a,  de  plus, 
sur  le  désir  que  lui  avait  exprimé  M.  Louis  Havet  à  la  soute- 


294  ANNALES   DU   MIDI. 

nance,  complété  son  travail  (qui  est  une  thèse  de  doctorat)  en 
publiant  une  édition  critique',  qui  dispensera  le  lecteur  de 
recourir  à  celle  d'Ellis;  il  nous  donne  aussi  un  bon  fac-similé 
du  manuscrit,  et  son  apparat  renferme  quelques  corractions  très 
ingénieuses,  dues  à  M.  Havet. 

Tous  les  chapitres  qui  comprennant  l'étude  de  la  langue,  de 
la  versiflcation,  etc.,  montrent,  comme  l'édition  et  la  traduction, 
de  bonnes  qualités  de  grammairien  et  de  latiniste.  Il  y  aurait 
quelques  réserves  à  faire  sur  les  autres.  Quel  est  l'auteur  du 
poème?  M.  Bellanger  l'identifie,  comme  on  le  fait  d'ordinaire, 
avec  l'évêque  d'Auch,  et  l'identification  est  très  vraisemblable. 
Mais  l'évêque  d'Auch  lui-même  ne  nous  est  connu  que  par  des 
Yies  (au  nombre  de  trois)  passablement  légendaires.  Assuré- 
ment, M.  Bellanger  s'est  gardé  de  les  croire  sur  parole;  mais  il 
n'en  a  pas  fait  une  critique  assez  méthodique,  et  peut-être  sur 
certains  points  a-t-il  accepté  trop  facilement  leur  témoignage. 
Ainsi  il  rejette  bien  vite  (p.  132)  les  conclusions  de  M.  Lécrivain 
{Annales  du  Midi,  i.  III,  p.  2.ï7)  sur  l'intervention  d'Orience  auprès 
d'Aétius  et  de  Littorius.  Dans  les  chapitres  où  il  étudie  «  la  doc- 
trine et  les  sentiments  d'Orience  »,  M.  Bellanger  n'a  pas  fait 
assez  vigoureusement  ressortir  les  traits  caractéristiques  ;  il  ne 
les  a  pas  assez  nettement  dégagés  du  détail.  Je  crois  aussi  que, 
malgré  le  tour  général  qu'affectent  d'ordinaire  les  préceptes  du 
poète,  il  eût  été  possible  de  tirer  de  son  ouvrage  des  inductions 
plus  précises  sur  l'état  de  la  société  à  laquelle  il  s'adressait. 
Mais  si,  dans  sa  partie  historique,  le  livre  de  M.  Bellanger  pré- 
sente quelques  lacunes,  la  partie  exégétique  et  critique  en  est 
solide  et  sera  utile.  A.  Puech. 

Brutails,  Ducaunnès  -  Duval  et  Bigot.  Ville  de  Libourne. 
Inventaire  sommaire  des  Archives  municipales,  antérieures  à 
1789.  Bordeaux,  Gounouilhou,  1903;  grand  in-4"  de  190  pages.  — 
Il  y  a  bien  des  choses  utiles,  même  pour  l'histoire  générale, 
dans  cet  excellent  inventaire.  P.  1  :  procès-verbal  de  la  démo- 
lition du  château  de  Fronsac  en  1622-4,  un  des  plus  dramatiques 
épisodes  de  la  destruction  des  châteaux  féodaux  sous  Louis  XIII; 


1.  Le  poème  d'Orientlus,  édition  critique  et  traductioii.  Paris,  Fon- 
temoing,  et  Toulouse,  Privât,  1903;  iii-8°  de  lv  pages.  Ces  deux  parties 
ent  été  réunies  en  un  volume. 


LIVRES   ANNONCÉS  SOMMAIREMENT.  295 

p.  3  et  S.  :  règlement  de  justice  et  de  police  du  xiif  siècle;  p.  o  : 
ordonnances  de  l'évêque  de  Bath  sur  la  fondation  de  bastides 
(cela  nous  Iburnira-t-il  l'étymologie  de  cette  bastide  de  Bâa,  si 
longtemps  cherchée  par  M.  Béraont?);  p.  6  :  documents  sur  l'his- 
toire économique  sous  Louis  XI  (le  merveilleux  économiste  que 
ce  roi!);  p.  41  :  installation  de  la  fameuse  Cour  des  Aides  de 
1633,  si  odieuse  au  Parlement  de  Bordeaux;  p.  15  :  détails  d'un 
grotesque  symbolisme  sur  l'entrée  du  duc  d'Epernon  en  1644; 
puis  beaucoup  de  pièces  sur  les  grands  travaux  projetés  par  les 
intendants  au  xviii^  siècle,  etc.,  etc.  Somme  toute,  beaucoup 
plus  de  matériaux  qu'on  ne  le  croirait  au  premier  abord  ;  vu  le 
voisinage  de  Bordeaux,  l'histoire  de  Libourne  a  été  très  mêlée 
à  l'histoire  générale.  C.  Jullian. 

Cabié  (E.).  Ambassade  en  Espagne  de  Jean  Ebrard,  seigneur  de 
Saint- Sulpice,  et  mission  de  ce  diplomate  dans  le  même  pays 
en  1566.  Albi,  impr.  Nouguiès,  1903;  in-S»  de  xxviii-472  pages. 
—  Les  historiens  n'ont  pas  utilisé  jusqu'ici  tous  les  documents 
qui  auraient  pu  les  renseigner  sur  les  relations  politiques  de  la 
France  et  de  l'Espagne  pendant  le  règne  de  Charles  IX.  Dans 
son  ouvrage,  M.  C.  publie  sur  ce  sujet  une  nombreuse  série  de 
pièces  inédites  et  d'autant  plus  importantes  qu'elles  émanent 
de  personnages  ayant  joué  les  principaux  rôles  dans  les  événe- 
ments du  temps. 

Ces  pièces  comprennent  des  dépêches  envoyées  par  J.  de  Saint- 
Sulpice  à  la  cour  de  France  et  aussi  celles  qu'il  reçut  lui-même 
de  Charles  IX,  de  Catherine  deMédicis  et  de  leurs  ministres.  Les 
lettres  de  Catherine  sont  au  nombre  d'environ  soixante,  dont 
une  trentaine  autographes,  en  entier  ou  en  partie.  Mais  les 
papiers  de  Saint-Sulpice  fournissent  encore  une  foule  de  missi- 
ves qui,  tout  en  appartenant  à  sa  correspondance  privée,  com- 
plètent les  informations  contenues  dans  les  dépêches  officielles. 
Elles  méritaient  également  d'être  publiées,  et  on  ne  peut  qu'ap- 
prouver l'éditeur  de  les  avoir  insérées  dans  son  recueil.  Parmi 
leurs  signataires  nous  citerons  la  reine  d'Espagne,  le  roi  et  la 
reine  de  Navarre,  le  prince  de  Condé,  la  dufchesse  de  Savoie, 
les  ducs  de  Guise  et  de  Montmorency,  les  cardinaux  de  Lorraine 
et  de  Châtillon  et  les  ambassadeurs  de  France  dans  les  capitales 
de  plusieurs  grandes  puissances  de  l'Europe.  Il  est  inutile  d'in- 
sister sur  l'intérêt  que  présentent  les  matériaux  rais  au  jour  par 


296  ANNALES   DU   MIDI. 

M.  C.  ;  le  lecteur  entrevoit  déjà  de  lui-même  combien  doivent 
être  précieuses  et  abondantes  les  notions  nouvelles  que  renferme 
cet  ensemble  de  sources  historiques. 

La  biographie  de  J.  de  Saint-Sulpice  étant  restée  assez  peu 
connue,  l'éditeur  a  rappelé  dans  sa  préface  les  principales  éta- 
pes de  la  carrière  de  ce  diplomate.  Entièrement  dévoué  à  la 
France  et  à  son  roi,  Saint-Sulpice  était  un  modéré  qui  acceptait 
déjà  la  liberté  de  conscience  comme  une  nécessité  du  temps,  et 
qui  ne  cessa  d'exhorter  Catherine  à  éteindre  les  querelles  reli- 
gieuses en  recourant  aux  transactions  plutôt  qu'à  la  violence.  Par 
les  relations  qu'il  avait  à  la  fois  avec  les  cliefs  des  divers  partis, 
par  sa  profonde  connaissance  des  hommes  et  des  choses  de  son 
époque,  par  la  loyauté  de  son  caractère,  et  aussi  par  son  esprit 
conciliant,  il  paraît  avoir  excellé  dans  le  rôle  de  négociateur  poli- 
tique. La  reine-mère  le  choisit  pour  préparer  les  accords  qui 
furent  consacrés  par  le  traité  de  Bergerac  et  par  l'édit  de  Poi- 
tiers (sept.  'lo77j,  et  peu  d'années  après  on  le  retrouve  parmi  les 
hommes  d'Etat  qui  assistèrent  aux  conférences  de  Nérac. 

Quoique  la  publication  de  M.  G.  soit  destinée  surtout  à  éclairer 
l'histoire  générale  de  la  France,  elle  se  recommande  par  divers 
titres  aux  travailleurs  qui  s'occupent  en  particulier  de  nos  pro- 
vinces méridionales.  On  peut  rappeler  d'abord  que  J.  de  Saint- 
Sulpice  était  originaire  du  Quercy;  c'est  dans  ce  pays,  entre 
Cahors  et  Figeac,  qu'était  situé  le  château  dont  il  portait  le 
nom,  et  qui  constituait  le  principal  domaine  de  sa  famille. 
D'ailleurs  les  années  1564  et  loGo  correspondent  au  voyage  que 
la  cour  de  France  fit  dans  la  vallée  du  Rhône,  en  Languedoc  et 
en  Guyenne,  et  c'est  durant  la  même  période  qu'eut  lieu  la  célè- 
bre entrevue  de  Bayonne.  Les  lettres  écrites  ou  reçues  par  Saint- 
Sulpice  reviennent  souvent  sur  ces  faits;  elles  renferment  de 
curieux  détails  qui  pourront  être,  désormais,  rais  à  profit  par 
notre  histoire  locale.  Enfin  n'oublions  pas  que  la  correspondance 
de  l'ambassadeur  permettra  d'ajouter  plusieurs  traits  aux 
biographies  de  divers  personnages  marquants  qui  appartien- 
nent à  la  région  du  Sud-Ouest,  et  notamment  à  celles  du  cardi- 
nal d'Armagnac,  de  Paul  de  Foix,  ambassadeur  à  Londres,  de 
Fourquevaux,  gouverneur  de  Narbonne,  de  Du  Ferrier,  d'Ant.  de 
Crussol,  de  Bertr.  de  La  Mothe-Fénelon,  de  Biron,  de  Monluc,  de 
Lanssac,  de  Noailles,  gouverneur  de  Bordeaux,  et  du  vicomte 
d'Orthe,  gouverneur  de  Bayonne.  Paul  Doqnon. 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  297 

CoNRAT  (M.).  Breviarium  Alaricianum.  Leipsig,  Hinrichs,  1903; 
gr.  in  8»  de  xix-814  pages.  —  M  Max  Conrat,  professeur  à  l'Uni- 
versité d'Amsterdam,  auquel  nous  devons  une  Histoire  des  sour- 
ces de  la  littéralwe  du  d?'oit  romain  dans  le  haut  moyen  âge 
(t.  I"",' seul  paru,  1891;  Leipzig,  chez  Hinrichs,  en  allemand, 
xi-645  p.),  nous  donne  aujourd'hui  une  traduction  (en  allemand) 
du  Bréviaire  d'Alaric  avec  ce  sous-titre  :  Le  droit  romain  dans 
l'empire  franc;  exposé  systématique.  Effectivement,  ce  qui  fait 
la  valeur  de  cette  oeuvre  nouvelle,  c'est  bien  moins  la  traduc- 
tion que  la  mise  en  ordre,  la  systématisation  du  Bréviaire;  elle 
constitue  un  traité  de  droit  romain  public  et  privé  composé  à 
l'aide  des  matériaux  dispersés  dans  la  compilation  d'Alaric  IL 

J.  Brissaud. 

Deslandres  (P.).  VOrdre  des  Trinitaires  pour  le  rachat  des 
captifs.  Paris,  Pion,  Toulouse,  Privât,  1903  ;  2  vol.  in-S"  de  xxvn- 
645  et  51 4  pages.  —Ce  livre  intéresse  le  Midi  à  double  titre  :  d'abord 
parce  que  le  fondateur  des  Trinitaires,  saint  Jean  de  Matha,  na- 
quit en  Provence,  puis  parce  que  cet  ordre  posséda  de  nombreuses 
et  florissantes  maisons  dans  nos  provinces  méridionales,  notam- 
ment à  Beaucaire,  Castres,  Liraoux,  Marseille,  Montpellier, 
Narbonne,  Saint-Gaudens,  Tarascon,  Toulouse,  etc.  Des  deux 
volumes  dont  se  compose  l'ouvrage,  le  second  est  tout  entier 
consacré  à  des  pièces  justiflcatives,  et  à  une  bonne  table  alpha- 
bétique. 

L'auteur  a  divisé  l'histoire  des  Trinitaires  en  quatre  parties. 
Dans  la  première  il  s'occupe  de  la  discipline  intérieure  de  l'ordre, 
ce  qui  comprend  l'étude  de  la  règle  elle  mémo,  des  fonctions 
réservées  aux  divers  dignitaires,  de  l'organisation  et  des  attribu- 
tions des  chapitres  généraux  et  des  diverses  fondations  faites  par 
l'ordre,  en  particulier  au  cours  du  xviii"  siècle.  —  Dans  sa  seconde 
partie,  M.  D.  nous  donne  un  aperçu  général  de  l'histoire  propre- 
ment dite  des  Trinitaires,  de  leurs  relations  avec  les  papes,  les  rois 
de  France  et  les  évêques.  de  leurs  dissensions  intestines,  et  il  nous 
renseigne  exactement  sur  la  place  qu'occupe  cptte  histoire  dans 
les  grands  événements  d'ordre  national  ou  international  auxquels 
elle  fut  mêlée.  La  troisième  partie  est  réservée  au  rachat  des  cap- 
tifs, oeuvre  principale  des  religieux  Trinitaires;  il  est  question 
ici  des  ressources  de  la  rédemption  et  des  difficultés  pratiques 
avec  lesquelles  les  Trinitaires  se  trouvaient  aux  prises  pour 


298  ANNALES    DU    MIDI. 

accomplir  leur  charitable  ministère,  au  Maroc,  à  Alger  ou  à 
Tunis.  —  Enfin  la  quatrième  partie  est  une  monogiaphie,  par 
ordre  alphabétique,  de  tous  les  couvents  des  provinces  de 
France  directement  soumis  au  générnl,  monographie  forcément 
très  sommaire,  car  certains  couvents  tels  que  ceux  de  Toulouse 
et  de  yarseille  mériteraient,  à  eux  seuls,  tout  un  volume.  — 
Quelques  intéressants  appendices  terminent  le  tome  I. 

A  notre  connaissance,  les  fondateurs  de  la  collection  connue 
sous  le  titre  de  France  monastiqup.,  actuellement  en  préparation  , 
n'avaient  pas  encore  fait  place  à  l'ordre  des  Trinitaires;  l'ou- 
vrage de  M.  D.  comblera  très  heureusement  cette  lacune. 

Abbé  Crouzil. 

Francus  (D').  Notes  historiques  sur  Saint-  A  grève.  Privas,  impr. 
centrale  de  l'Ardèche,  1902;  in-S*»  de  178  pages.  —  Bornons-nous 
à  signaler  cet  ouvrage,  car  il  a  paru  en  articles  dans  la  Rev.  du 
Vivarais.  années  1901  et  1902,  et  comme  tel  il  a  figuré  dans  nos 
dépouillements  de  Périodiques  (t.  XIV,  p.  568;  XV,  p.  234).  Il 
offre  les  qualités  ordinaires  aux  travaux  du  D'  F.  :  une  connais- 
sance intime  du  pays,  de  la  ville  dont  il  s'occupe  et  des  sources 
de  son  histoire,  une  grande  précision;  des  défauts  aussi,  notam- 
ment rénumération  un  peu  sèche,  en  manière  de  chronique,  de 
faits  qui  se  suivent  par  ordre  de  dates  sans  toujours  s'enchaîner 
entre  eux  A  la  vérité,  en  beaucoup  de  cas.  il  serait  bien  difficile 
de  grouper  autrement  les  renseignements  variés  que  le  D'  F.  a 
su  recueillir,...  à  moins  d'en  sacrifier:  et,  après  les  avoir  réunis 
avec  grand  soin,  en  laisser  perdre  est  un  parti  si  pénible  à  pren- 
dre qu'il  ne  faut  attendre  rien  de  pareil  de  l'âme  d'un  érudit.  — 
Le  chapitre  principal  a  trait  aux  guerres  de  religion.  Les  récits 
de  VEistoii-e  universelle  de  d'Aubigné  y  sont  rectifiés  sur  plusieurs 
points  (événements  de  1567,  1580,  1588;  sièges  de  Saint-Agrève). 
Des  textes,  les  uns  rarissimes,  comme  celui  du  «  Vray  discours 
du  siège»  de  1580  (p.  35),  les  autres  inédits  :  ainsi  une  transac- 
tion de  1581  entre  demoiselle  Pbélise  d'Assenne  et  le  recteur  de 
la  chapelle  de  Lestra  (p.  62),  qui  est  «  le  fait  le  plus  important  de 
la  vieille  histoire  de  Saint-Agrève  ».  Paul  Dognon. 

Langlois  (Ch.-V.).  La  Société  française  au  xiii^  siècle  d'après 
dix  romans  d'aventures.  Paris,  Hachette,  1904;  in-12  de  xxiii- 
329  pages.  —  Le  titre  du  livre  eût  dû  être  :  «  Analyse  de  dix  ro- 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  299 

Tuans  d'aventures  au  point  de  vue  de  l'histoire  des  mœurs.  » 
L'un  de  ces  dix  romans  est  Flamenca,  la  perle  de  la  littérature 
narrative  méridionale,  dont  on  a  ici  un  excellent  résumé  (pp.  130- 
8oj,  où  est  habilement  mis  en  relief  tout  ce  qui  touche,  de  près 
ou  de  loin,  à  la  CuUurgeschichte.  Ce  résumé  est  précédé  de  quel- 
ques pages,  sobres  et  précises,  sur  la  date  de  l'œuvre  et  l'auteur; 
les  notes  font  ressortir  les  difficultés  que  présentent  les  indica- 
tions chronologiques  fournies  par  le  poète  d'après  le  calendrier 
lunaire.  Les  citations  sont  traduites  avec  une  remarquable  exac- 
titude. A.  Jeanroy. 

Lefèvre  (E.)  L'Année  félibréenne  :  premier  supplément  du  Ca- 
talogue félibréen  et  de  la  Bibliographie  mistralienne.  Marseille, 
Ruât,  1904;  in-S»  de  50  pages.  —  Divisions  de  l'ouvrage  :  prin- 
cipaux événements  félibréens  de  l'année  1903.  —  Notes  et  docu- 
ments sur  le  félibrige.  —  Bibliographie  des  nouveaux  majoraux, 
félibres  (il  faudrait  évidemment  n'y  faire  figurer  que  les  œuvres 
en  dialecte).  —  Bibliographie  de  l'année  1901.  I  :  en  langue  d'oc-, 
II  :  en  français  et  langues  étrangères  (il  faudrait  mettre  à  part 
les  ouvrages  anonymes,  almanachs,  revues,  etc.).  —  Bibliogra- 
phie des  années  1902-3  (sur  le  même  plan).  —  Bibliographie  mis- 
tralienne, premier  supplément.  —  Errata  de  V Année  félibréenne. 

Quelque  surabondance,  comme  dans  les  précédentes  publica- 
tions de  l'auteur  (cf.  plus  haut,  p.  149)  et  quelque  incertitude 
dnns  le  classement;  néanmoins  le  progrès  est  sensible,  et  un  ré- 
pertoire bibliographique,  même  imparfait,  est  toujours  utile. 

A.  Jeanroy. 

Sauvaire-Jourdan.  Isaac  de  Bacalan  et  les  idées  libre-échan- 
gistes en  France  vers  le  milieu  du  xviir  siècle.  Paris,  Larose,  1 903  ; 
in-8«  de  o6  pages.  —  Ce  Bacalan  est  un  Bordelais,  professeur  de 
droit  à  l'Université  et  membre  de  l'Académie  de  sa  ville  natale. 
Ses  œuvres  académiques  se  rattachent  de  très  près  au  prodigieux 
travail  fait,  au  milieu  du  xviii»  siècle,  pour  activer  la  vie  écono- 
mique de  la  ville  et  de  la  France.  Il  faut  savoir  un  gré  infini  à 
M.  S.-J.  de  les  avoir  publiées  et  commentées  avec  un  soin  rare. 

G.    JULLIAN. 

La  tradition  au  pays  basque  (ethnographie,  folk-lore,  art 
populaire,  histoire,  hagiographie).  Paris,  Gougy,  1899;  in  S"  de 


300  ANNALES   DU  MIDI. 

598  pages.  —  La  Société  d'ethnographie  nationale  a  organisé  deg 
congrès  où  sont  exposés  des  objets  d'art  et  d'ethnographie,  où 
des  fêtes  permettent  d'évoquer  et  parfois  de  révéler  les  tradi- 
tions déclinantes  —  chants,  danses  populaires,  moeurs  loca- 
les, etc..  —  où  l'on  discourt  et  où  les  savants  viennent  lire  des 
mémoires.  Le  premier  congrès  avait  eu  lieu  à  Niort  en  1896.  Le 
second  se  tint  en  1897  à  Saint- Jean-de-Luz,  dans  ce  pays  basque 
qui  a  conservé  si  fidèlement  ses  traits  individuels.  La  Société 
vient  d'en  publier  le  compte  rendu  ;  car  il  ne  faut  pas  s'arrêter 
au  millésime  indiqué  plus  haut  —  1899  —  ;  le  volume  que  nous 
allons  analyser  n'a  été  réellement  livré  au  public  qu'en  1903. 
Dans  la  première  partie  les  fêtes  sont  racontées,  l'exposition  est 
décrite  avec  dessins  et  photographies  à  l'appui.  La  seconde 
contient  les  communications,  de  valeur  inégale,  dont  voici  la 
liste.  P.  93-107.  R.  Collignon.  La  race  basque.  Etude  anthropo- 
logique. [Par  leurs  caractères  somatiques  les  Basques  se  ratta- 
chent aux  Berbères  et  aux  anciens  Egyptiens.]  —  P.  111-37.  A. 
Planté.  Les  Basques  ont-ils  une  histoire?  [  Sans  valeur.  ]  —  P.  141- 
64.  A.  NicoLAÏ.  Basques  d'autrefois.  [Inscription  d'Hasparren; 
Divinités  topiques  basques  à  l'époque  romaine,  le  tout  d'après 
Sacaze,  Stempf,  Camoreyt  et  autres.  Fragments  du  Codex  de 
Compostelle  et  impressions  d'un  pèlerin  picard  en  1726  :  il  s'agit 
de  voyageurs  ayant  passé  en  pays  basque.]  —  P.  167-76.  Berdeco. 
Coutumes  morales  du  pays  basque.  [Très  faible.]  —  P.  179-90. 
L.  Etcheverry.  Les  coutumes  successorales  du  pays  basque  au 
xix«  siècle.  [Utile  et  précis.]  —  P.  217-39.  E.  Ducéré.  Recherches 
historiques  sur  les  corsaires  de  Saint-Jean-de-Luz.  [  A  partir 
de  1328.  Leurs  expéditions  étaient  dirigées  contre  les  Espagnols 
principalement.  La  course  devint  régulière  sous  Louis  XIV  et 
toutes  les  nations  maritimes  ennemies  de  la  France  en  firent  les 
frais.]  —P.  243-61.  M'entworth  Webster.  Les  pastorales  bas- 
ques. [Drames  populaires  joués  par  des  hommes  ou  par  des 
jeunes  filles,  à  l'exclusion  les  uns  des  autres.  Liste  des  sujets 
traités.]  —P.  263-80.  Sallaberry.  Les  mascarades  souletines. 
[Avec  musique.  ]  —  P.  283-93.  Abbé  Haristoy.  Eskualdun  Zuhur- 
Hitzak  (Proverbes,  sentences  et  dictons  basques),  suivi  d'une 
rectification  sur  la  couvade  en  pays  basque.  [Sur  ou  plutôt  con- 
tre cette  coutume  «  honteuse  »,  indigne  «  de  nos  vigoureuses 
Basquaises  »  et  plus  encore  des  «  anciens  Cantabres,  nos  fiers 
Basques  »,  etc.  Elle  n'a  peut-être  jamais  existé,  mais  ce  ne  sont 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  301 

pas  des  phrases,  ni  les  «protestations  indignées»  que  M.  H. 
publie,  qui  en  fourniront  la  preuve.  ]  —P.  297-358.  Ch.  Bordes. 
La  musique  populaire  des  Basques.  [Très intéressant.  Nombreux 
textes  avec  musique  et  traduction.  A  la  fin,  bibliographie  musi- 
cale.] —  P.  361-409.  J.  DE  Jaurgain.  Quelques  légendes  poétiques 
du  pays  de  Soûle.  [Maisons  souletines  qu'elles  mettent  en  jeu  : 
de  Haux,  de  Ruthie  et  d'Ahetze;  de  Berterèche  de  Menditte;  do 
Jaurgain  et  de  Luxe,  etc.  Très  savant  et  documenté.  ]  —  P.  413- 
50.  Arturo  Campion.  La  langue  basque.  [Mémoire  traduit  par 
V.  Duhart.  Analyse  détaillée  de  l'organisme  et  des  fonctions  de 
la  langue,  qui  est  agglutinante,  incorporante  même,  mais  non 
dépourvue  de  flexions  et  tout  à  fait  sui  generis.  ]  —  P.  465-88. 
D''  Larrieu.  Mauléon  et  le  pays  de  Soûle  pendant  la  Révolution . 
[D'après  les  Archives  municipales.  Intéressant.  ]  — P.  491-506. 
F  Habasque.  Eléonore  d'Autriche  et  la  rançon  de  François  V". 
[Paiement  de  cette  rançon;  restitution  des  enfants  du  roi  et 
passage  de  la  reine  à  Saint-Jean-de-Luz,  le  tout  réglé  avec  les 
précautions  les  plus  minutieuses.]  —  P.  509-22.  R.  P.  Etche- 
BARNE.  Saint  François  Xavier  [Originaire  de  Xavier,  près  Para- 
pelune,  né  en  1506.]  —  P.  525-35.  A.  Dutey-Harispe.  Le  maré- 
chal Harispe.  [Sa  carrière  militaire  commence  en  1792  sur  la 
frontière  des  Pyrénées,  se  continue  en  Espagne  et  se  termine 
en  1814,  à  la  bataille  de  Toulouse.  Il  fut  fait  maréchal  en  1851. 
—  P.  539-60.  Ch.  Petit.  A.  d'Abbadie.  [  Biographie  du  regretté 
savant  basque,  1810-1897.]  P.  Doqnon. 


PUBLICATIONS  NOUVELLES 


Arve  (S.  d'.i.  Miettes  de  l'histoire  de  Provence.  *2e  éd.  Marseille, 
Ruât,  1902;  in-80  de  515  p. 

At  (P.).  Histoire  du  droit  canon  gallican.  Paris,  Savaète 
[1904J  ;  in-8û  de  196  p.  [Collection  Arthur  Savaète,  n»  2.] 

Barthélémy  (P.).  Légendes  de  la  ville  d'Avignon.  Avignon, 
Aubanel,  1902;  in  16  de  viii-196  p. 

Batiffol  (L  ).  Au  temps  de  Louis  Xlll.  Paris,  Calmann-Lévy> 
1903;  in  8°  de  11-461  p.  et  portr. 

Beauregard  (D.  de).  Le  maréchal  Masséna,  duc  de  Rivoli, 
prince  d'Essling,  enfant  de  Nice.  Résumé  de  sa  vie.  Nice,  imp. 
Gauthier,  1902;  in-S"  de  151  p..  avec  grav. 

Berret  (P.).  Contes  et  légendes  du  Dauphiné.  Grenoble,  Bar- 
bier-Durozier,  1903;  in-i6  de  259  p. 

BoMBAL  (E.j.  La  haute  Dordogne  et  ses  gabariers.  Tulle,  imp. 
Crauffon.  1903;  in  8°  de  251  p.  et  grav. 

BoNALD  (De).  Supplément  aux  documents  généalogiques  sur 
les  familles  du  Rouergue.  Rodez,  Carrère;  Toulouse,  Brun,  1903; 
in-8%  p.  393  à  451. 

BoNNEFOY  (G.).  Histoire  de  l'administration  civile  dans  la  pro- 
vince d'Auvergne  et  le  département  du  Puy-de-Dôme.  Paris, 
Lechevalier,  1900-1902;  in-8'\  T.  II,  vi-640  p.,  et  t.  III,   lOO'i  p. 

Bouchon  (G.).  Histoire  d'une  imprimerie  bordelaise  (1600-1900) 
(les  imprimeries  Gounouilhou,  la  Gironde,  la  Petite  Gironde). 
Bordeaux,  imp.  Gounouilhou,  1901;  in  4"  de  675  p. 

BouLENGER  (J).  Los  protostants  à  Nimes  au  temps  de  l'édit  de 
Nantes.  Paris,  Fischbacher,  1903;  pet.  in- 16  de  xvni-237  p. 

Cabrol  (Dom  F.).  Dictionnaire  d'archéologie  chrétienne  et  de 
liturgie.  Fasc.  4.  Paris,  Letouzey,  1904;  gr.  in -8°  à  2  col.,  col.  897 
à  1184,  avec  grav. 

Catalogue  général  de  médailles  françaises.  Du  moyen  âge  à 
Louis  XII.  No  26.  Paris,  cabinet  de  numismatique,  2.  rue  de  Lou- 
vois,  s.  d  ;  pet.  in  8°  de  20  p. 

Colin  (Cap.  J.).  Annibal  en  Gaule.  Paris,  Chapelet,  1904:  in-8o 
de  xxvi-429  p.  et  cartes. 


PUBLICATIONS   NOUVELLES.  303 

Congrès  des  Sociétés  savantes  savoisiennes,  tenu  à  Annecy 
(Haute-Savoie)  les  5,  6  et  7  août  1901  (seizième  session).  Annecy, 
Abry,  1902;  \n-S°  de  XLViii-4't6  p. 

Constantin  (A.)  et  Désormaux  (J).  Dictionnaire  savoyard, 
publié  sons  les  auspices  de  la  Société  florimontane.  Annecy, 
Abry;  Paris,  Bouillon,  1902;  in-8"  à  2  col.  de  lxii-447  p.  [Etudes 
philologiques  savoisiennes.] 

Dupont-Ferrier  (G.).  Quae  fuerint  tam  a  regibus  quam  a 
comitibus  in  Engolismensi  «  apanato  »  comitatu  instituta  (1445- 
1315).  Thèse.  Paris.  Picard;  J^ngoulême,  Constantin,  1902;  in-S" 
de  viii-289  p. 

Escande  (J.-J.).  Histoire  de  Sarlat.  Sarlat,  imp.  Lafaysse,  1903; 
in-8o  de  366  p. 

Granges  de  Surgères  (De).  Le  duel  et  la  noblesse  du  Lan- 
guedoc, avec  deux  lettres  de  Louis  XIV  (1634-1653).  Vannes,  imp. 
Lafolye;  in-8'  de  11  p.  [Extrait  de  \a.  Revue  des  questions  héraldi- 
ques, archéol.  et  hislor.] 

Inventaire  des  archives  de  la  Bourse  des  marchands  de  Tou- 
louse antérieures  à'1790,  par  S.  Macary,  publié  sous  la  direc- 
tion de  M.  F.  Pasquier.  Collaborateur  :  M.  Ph.  Arnauné.  Tou- 
louse, Arnauné,  1903;  in-4'i  à  2  col.  de  103  p.  et  grav.  [Tribunal 
de  commerce  de  Toulouse.] 

Inventaire  historique  et  généalogique  des  documents  de  la 
branche  Lévis-Léran,  devenue  Lévis-Mirepoix,  précédé  d'une  no- 
tice sur  les  cinq  premiers  Lévis.  T.  I«r.  Toulouse.  Privât,  1903; 
in-4°  de  viii-488  p. 

Inventaire  sommaire  des  archives  départementales  antérieu- 
res à  1790.  (Haute-Garonne.)  Archives  civiles  (série  B,  n^'^  1  à  92  N). 
T.  F',  rédigé  par  Ch.  Roques.  Toulouse,  Privât.  1903;  gr.  in  4°  à 
2  col.,  de  viii-56a  p. 

Irénée  (Père).  Corarainges  et  Nébouzan.  Monographie  locale, 
accompagnée  de  notes  importantes  sur  l'ancien  diocèse  de  Com- 
minges,  le  vicomte  de  Nébouzan  et  les  communes  voisines  d'Au  ■ 
Ion.  Toulouse,  Privât,  1904;  in-8''  de  xvi-2i0  p. 

Langlois  (C.  V.).  Manuel  de  bibliographie  historique,  2e  fasci- 
cule. Paris,  Hachette,  1904;  in-16,  p.  241  à  623. 

Lamouche  (L.).  Essai  de  grammaire  languedocienne.  Paris, 
Welter,  1902,  pet.  in-4''  de  200  p. 

Lavisse  (E.).  Histoire  de  France,  depuis  les  origines  jusqu'à  la_ 
Révolution.  T.  4,  II  :  Charles  VII,  Louis  XI  et  les  premières  an 
nées  de  Charles  VIII  (1422-1492).  Fasc.  1  à  8.  Paris,  Hachette, 
1902;  in-8'î  carré,  p.  1-455.  —  T.  3,  l  :  les  guerres  d'Italie;  la 
France  sous  Charles  VIIL  Louis  XII  et  François  I""  (U92-1547). 
Fasc.  1  II  4.  1903,  p.  1-394.  —  T.  3,  II  :  la  lutte  contre  la  maison 


304  ANNALES   DU    MIDI. 

d'Autriche;  la   France  sous  Henri  II  (ISIQ-ISog).  1903,  p.  1-96, 
avec  cartes. 

Lecler  (Abbé  A.)-  Martyrs  et  confesseurs  de  la  foi  du  diocèse 
de  Limoges  pendant  la  Révolution  française.  T.  III.  Limoges, 
Ducourtieux  et  Goût,  19U3.  in-8o  de  562  p. 

Leguiel  (E.).  Un  grand  poète  contemporain  en  langue  cata- 
lane. Essai  sur  r«  Atlantida  »  et  le  «  Canigo  »,  de  Jacinto  Verda- 
guer.  Céret.  Lamiot,  1904;  in-16  de  ix-lH  p. 

Lettres  communes  des  papes  d'Avignon,  analysées,  d'après  les 
registres  du  Vatican,  par  les  chapelains  de  Saint-Louis-des- 
Français  à  Rome.  N°  2  6«  :  Benoît  XII  (1334-1342).  Paris,  Fonte- 
moing,  1902-1903;  2  fasc.  in-4'',  p.  1  à  498.  [Bibliothèque  des 
écoles  françaises  d'Athènes  et  de  Rome  (3«  sér.  2  bis,  1,  2).] 

Maurel  (Abbé  P.).  Vie  de  Mère  Clotilde  de  Lavolvène,  ou  les 
origines  de  la  Miséricorde  de  Montcuq  (1780-1861).  Cahors,  imp. 
Plantade,  1903;  pet.  in-S"  de  xv-391  p.  et  portr. 

MoLiNiER  (A.).  Les  sources  de  l'histoire  de  France,  des  origi- 
nes aux  guerres  d'Italie  (1494).  III  :  Les  Capétiens  (1180-1328). 
Paris,  Picard,  1903,  in-8"  de  252  p.  [Manuels  de  bibliographie  his- 
torique, III.] 

Paulot  (L.).  Un  pape  français  :  Urbain  II.  Paris,  Lecoflfre, 
4  903;  in-8»  de  xxxvi-263  p. 

Pbyre  (R.).  Une  princesse  de  la  Renaissance  :  Marguerite  de 
France,  duchesse  de  Berry,  duchesse  de  Savoie.  Paris,  Paul, 
1902;  in-8'J  de  107  p. 

Répertoire  méthodique  de  l'histoire  moderne  et  contempo- 
raine de  la  France  pour  l'année  1801  (4«  année),  rédigé  sous  la 
direction  de  G.  Brière,  S.  Garon,  H.  Maistre,  et  publié  sous  les 
auspices  de  la  Société  d'histoire  moderne.  Paris,  Bellais,  1903; 
in-8'  à  2  col.  de  xi-334  p. 

RiBiER  (L.  de).  Notes  bibliographiques  sur  quelques  médecins 
et  chirurgiens  de  la  Haute-Auvergne  sous  l'ancien  régime.  Paris, 
1,  place  des  Vosges;  1903,  in-8o  de  24  p.  [Bibliothèque  historique 
de  la  France  médicale]. 

Sage  (Abbé).  Jean-Baptiste  Guérins,  curé  de  Saint-Siffrein 
(1792-1867).  Carpentras,  impr.  moderne,  1904;  in-16  de  163  p.  et 
portr. 

Teissier  du  Gros  (G.).  La  production  de  la  soie  dans  les  Cé- 
vennes  (thèse).  Paris,  Giard  et  Brière,  1903;  in-S"  de  182  p. 

Le  Gérant, 
P.-F,D.  PRIVAT. 


Toulouse,  imprimerie  Edouard  Privât,  rue  des  Arts.- 14.  —  2481 


LES   COMTES   D'AUVERGNE 
ET    LES     COMTES     DE     VELAY 

sous   CHARLES   LE   CHAUVE 


Mabille  a  consacré  à  la  Chronologie  des  comtes  cV Auver- 
gne sous  la  seconde  race  l'un  des  chapitres  de  sa  Note  rec- 
tificative sur  le  royaume  d' Aquitaine ,  ses  comtes,  ses  ducs 
et  ses  marquis,  insérée  au  tome  II  de  la  nouvelle  édition  de 
V Histoire  générale  de  Languedoc^.  L'objet  de  la  présente 
étude  est  de  reviser  les  conclusions  de  Mabille  en  ce  qui  con- 
cerne les  comtes  d'Auvergne  et  les  comtes  de  Velaj'  sous 
Charles  le  Chauve. 


L 


Le  système  auquel  s'est  arrêté  Mabille  peut  se  résumer  de 
la  façon  suivante.  Bernard  I  a  gouverné  le  comté  d'Auvergne 
et  l'abbaye  de  Saint-Julien  de  Brioude  de  84G  à  868.  Après  sa 
mort,  en  868,  le  comté  d'Auvergne  passe  à  Bernard  U,  tandis 
que  l'abbaye  de  Saint-Julien  de  Brioude  a  pour  abbé  un  laïque 
nommé  Warin,  «  en  qualité  de  comte  de  Vêlai  ».  Bernard  II 
d'Auvergne  n'est  autre  que  Bernard  Plantevelue,  plus  tard 
marquis  de  Gothie,  celui-là  même  qui  eut  ^lour  fils,  de  sa 
femme  Ermengarde,  le  fameux  comte  et  marquis  Guillaume 
le  Pieux.  C'est  à  tort,  d'après  Mabille,    que   les  auteurs  du 

1.  Ilist.  yen.  de  La>i(ji(edoc,éd.  Privât,  t.  II,  p.  o08  et  suiv. 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVI.  20 


306  J.    CALMETTE   ET    H.    PATRY. 

Gallia  chrîsliana  et  de  l'Art  de  vérifier  les  claies  décom- 
posent Bernard  I  en  deux  personnages  du  même  nom,  qui 
auraient  successivement  gouverné  le  comté  d'Auvergne  et 
dont  le  premier  serait  mort  en  857.  Ce  dédoublement  provient 
uniquement  de  l'insertion  injustifiée,  en  858,  d'un  comte 
Guillaume  qui  n'a  jamais  existé.  Il  n'y  a  pas  eu  de  Guillaume 
dans  la  série  des  comtes  d'Auvergne  sous  Charles  le  Chauve, 
car  la  charte  citée  par  les  auteurs  qui  ont  cru  à  son  existence 
porte  le  nom  de  Bernardus  et  non  celui  de  WUhelmus.  11 
résulte  de  cette  élimination  que  les  mentions  du  comte  Ber- 
nard, avant  et  après  857,  visent  le  même  personnage. 

Ce  personnage  figure  souvent  dans  le  cartulaire  de  Saint- 
Julien  de  Brioude'.  Il  y  agit  soit  seul,  soit  avec  sa  femme, 
nommée  Liutgarde,  dans  une  des  chartes  les  plus  anciennes- 
et  Ermengarde  dans  une  charte  postérieure''.  Bernard  I  a 
donc  été  marié  en  premières  noces  avec  Liutgarde  et  en  se- 
condes noces  avec  Ermengarde. 

D'autre  part,  puisque  Bernard  a  gouverné  l'Auvergne  de 
846  à  868,  il  faut  éliminer  de  la  série  admise  par  les  Bénédic- 
tins non  seulement  Guillaume,  mais  encore  Etienne,  que  l'on 
place  de  860  à  864.  A  la  vérité,  un  comte  Etienne  est  bien 
cité  entre  ces  dates  par  diverses  sources,  mais  ce  personnage 
n'est  dit  positivement  comte  d'Auvergne  que  par  des  auteurs 
postérieurs,  à  savoir  par  Adémar  de  Chabannes  et  par  le  ré- 
dacteur de  la  Ch?'onique  de  Sainl-Maiocent.  Or,  l'existence 
de  Bernard  à  l'époque  même  où  l'on  doit  placer  Etienne 
suffit  pour  écarter  ce  dernier  de  la  série  des  comtes  d'Auver- 
gne. Ce  titre  n'a  donc  pu  lui  être  attribué  que  par  confusion. 
En  conséquence,  il  paraît  certain  qu'il  n'y  a  pas  en  de 
comte  d'Auvergne  du  nom  d'Etienne,  pas  plus  qu'il  n'y  a 
eu,  en  868,  de  comte  du  nom  de  Guillaume ^  Il  n'y  a  eu, 
de  846  à  885,  que  deux  comtes  d'Auvergne,  Bernard  I,  mari 


1.  Cartulaire  de  Brioude,    éd.   Henry    Doniol,    Clermont-Ferraud  et 
Paris,  1863,  in4". 

2.  Charte  n°  95,  datée  de  849  (mai). 

3.  Charte  n"  176,  datée  de  864  (janvier). 

4.  Mabille,  loc.  cit.,  p.  309. 


COMTES   d'aUVERGNE  ÈT   DË  VELAY   SOUS  CH.  LE  CHAUVE      307 

de  Liutgarde  et  d'Ermeagartle,  entre  SAG  el  888,  puis  Ber- 
nard II  Planteveliie,  son  fils,  mari  d'Erinengarde  el  père  de 
Guillaume  le  Pieux. 


IL 

Ce  système  de  Mabille  peut  paraître  ingéûieux  à  première 
vue.  A  l'examen,  il  soulève  de  sérieuses  difficultés.  Tout 
d'abord,  où  sera  le  critérium  pour  discerner,  lorsqu'une 
charte  cite  le  comte  Bernard,  s'il  s'agit  de  Bernard  I  ou  de 
Bernard  II?  Mabille  arrête  la  carrière  du  père  en  8G8  pour 
faire  commencer,  à  cette  date,  la  carrière  du  fils.  Or,  c'est  là 
un  point  de  départ  éminemment  arbitraire.  Mabille,  il  est 
vrai,  croit  le  justifier  en  montrant,  à  celte  date  de  868, 
Warin  exerçant  les  prérogatives  d'abbé  de  Brioude.  Voilà 
bien,  dans  sa  pensée,  la  succession  de  Bernard  I  ouverte  et 
partagée.  Mais  Mabille  lui-même  vient  infirmer  la  portée  de 
son  argument.  Il  nous  dit,  en  effet,  que  Warin  fut  abbé  de 
Saint-Julien  de  Brioude  «en  qualité  de  comte  de  Vêlai'». 
Cette  observation  est  un  trait  de  lumière,  car,  dès  lors, 
Bernard  I  lui-même  a  dû  être  également  comte  de  Vêlai  et 
rien  ne  permet  de  le  dire  comte  d'Auvergne.  Il  est  impossible 
d'attribuer  des  comtés  différents  à  Bernard  et  à  Warin  qui 
apparaissent  dans  le  cartulaire  de  Brioude  exactement  avea 
les  mêmes  titres  exprimés  par  les  mêmes  termes  :  cornes  et 
abbas. 

D'un  autre  côté,  si  Warin  est  cité  en  868  comme  abbé  de 
Brioude,  la  dernière  mention  de  Bernard  dans  les  mêmes 
conditions  est  de  864.  Dans  cette  charte  de  janvier  864,  Ber- 
nard n'apparaît  pas  seul,  mais  il  a,  à  ses  côtés,  sa  femme 
Ermengarde-.  Or,  précédemment,  la  comtesse  est  appelée 
Liutgarde.  Mabille  imagine  donc  que  son  Bernard  I  s'est 
remarié.  Mais  il  ne  remarque  pas  qu'Ermengarde  nous  est 
connue  d'ailleurs  et  que,  précisément,  la  comtesse  Ermeu- 
garde  est  la  femme  de  Bernard  II  Plantevelue,  la  mèro  de 

1.  Mabille,  loc.  cit.,  p.  ÎJO'J. 

2.  Charte  n"  17(3. 


308  J.   CALMETTE  ET   H.   PATRY. 

Guillaume  le  Pieux.  Au  lieu  de  faire  épouser  en  secondes 
noces  à  Bernard  I  une  femme  qui  se  serait  appelée  du  même 
nom  que  sa  bru,  tout  nous  porte  à  penser  que  la  charte  de 
864,  qui  cite  Bernard  et  Krmengarde,  se  rapporte  à  Bernard 
Plantevelue  lui-même.  Aussi  bien,  un  document  négligé  par 
Mabille  identifie  parfaitement  les  personnages  et  cite  en 
même  temps  Bernard  1,  défunt,  son  flls  Bernard  Plantevelue 
et  la  femme  de  celui-ci,  la  comtesse  Ermengarde'.  Enfin,  il 
n'est  pas  jusqu'à  la  diplomatique  elle-même  qui  n'appuie 
notre  démonstration.  On  remarque  déjà,  dans  la  charte  de 
864,  l'emploi  de  la  formule  gralîa  Lei  cornes,  que  Bernard 
Plantevelue  semble  avoir  particulièrement  affectionnée^ , 
tandis  que  son  père,  à  notre  connaissance,  n'en  fait  nulle  part 
usage. 

Nous  admettrons  donc,  contrairement  au  système  de  Ma- 
bille, que,  dès  janvier  864,  Bernard  Plantevelue,  mari  d'Er- 
mengarde,  apparaît  comme  successeur  de  son  père,  Bernard  I 
ou  Bernard  le  Vieux,  mari  de  Liutgarde.  Il  est  vraisembla- 
ble que  Bernard  I  était  mort  à  cette  date;  en  tout  cas,  il  avait 
laissé  à  la  fois  à  Plantevelue  le  comté  de  Velay  et  l'abbaye  de 
Brioude. 

III. 

Puisque  Bernard  1  et  Bernard  II,  jusqu'à  S64  tout  au 
moins,  ont  occupé  le  comté  de  Vêlai,  et  non  le  comté  d'Au- 
vergne, les  exclusions  prononcées  par  Mabille  à  propos  de  la 
série  des  comtes  d'Auvergne  sont  susceptibles  d'être  revisées. 

La  revision  du  procès  ne  profite  pas  à  Guillaume.  Puisque 
le  document  allégué  en  sa  faveur  par  les  Bénédictins  ne  le 
cite  même  pas,  sa  cause  demeure  insoutenable  et  son  inser- 

1.  Charte  n»  131,  datée  de  883  ;  c<  Pro  remedium  animarura  Bernardi 
gloriosissimi  comitis,  neciion  eximii  atque  pneexcellentissimi  superstilis 
Bernardi  comitis,  ejusqne  conjugis  Irmengardis,  gratia  Dei  comitissa, 
horumquc  prolis...  » 

2.  Cf.  notamment  la  formule  gratia  Dei.  comitissa,  dans  hi  charte  citée 
à  la  note  précédente.  Cf.  aussi  Cartulaire  de  l'abhaye  de  Conques,  éd. 
G.  Desjardins,  n»  153,  p.  36. 


COMTES  D'AUVERGNE  ET  DE  VELAY  SOUS  CH.  LE  CHAUVE.      309 

tion   parmi  les  comtes  d'Auvergne  reste  le   résultat  d'une 
méprise'.  Mais  le  cas  d'Etienne  est  tout  autre. 

La  chronique  d'Adémar  de  Chabannes  et  la  chronique  de 
Saiût-Maixent  donnent  à  Etienne,  d'une  façon  formelle,  de 
l'aveu  de  Mabille,  la  qualification  de  comte  d'Auvergne^.  Or, 
le  témoignage  postérieur,  mais  positif,  de  ces  deux  sources 
ne  saurait  être  considéré  a  j)riori  comme  négligeable.  Il  est, 
en  l'espèce,  d'autant  plus  convaincant  qu'il  est  indirectement 
corroboré  par  un  autre  témoignage,  émané  d'un  contempo- 
rain. Hincmar,  en  effet,  nous  montre  le  comte  Etienne  tué 
par  les  Normands  dans  Clermont,  qu'il  défend  contre  eux^ 
Ce  passage  ne  se  comprend  guère  que  si  Clermont  est  le  chef- 
lieu  du  comté  d'Etienne,  en  d'autres  termes  si  Etienne  est 
comte  d'Auvergne.  Pour  détruire  la  force  probante  qui  i-ésulte 
du  contact  des  trois  textes,  il  serait  nécessaire  d'opposer  une 
impossibilité.  Celle  qu'invoquait  Mabille,  c'est-à-dire  le  syn- 
chronisme d'un  Bernard  d'Auvergne,  tombe  entièrement, 
puisque  Bernard  était  non  pas  comte  d'Auvergne,  mais  comte 
de  Velay.  Nous  n'hésiterons  donc  pas  à  rétablir  Etienne 
comme  comte  d'Auvergne. 

Après  Etienne,  c'est  Bernard  Plantevelue  qui  gouverne 
l'Auvergne  et  il  est  en  même  temps  remplacé,  comme  comte 
de  Velay  et  comme  abbé  de  Brioude,  par  Warin.  Dans  ces 
conditions,  il  semble  raisonnable  de  penser  que  Bernard 
Plantevelue,  à  la  mort  d'Etienne,  est  passé  du  comté  de 
Velay  dans  le  comté  d'Auvergne,  abandonnant  à  Warin  son 
ancien  comté  et  aussi  son  abbaye  de  Saint-Julien.  Quant  à  la 
parenté  possible  entre  Plantevelue  et  "Warin,  que  Mabille 
disait  fils  de  Bernard  I,  on  ne  peut  faire  que  des  conjec- 
tures*. 

1.  Cartulaire  de  Brioude,  n»  282.  ÎNlabille  identifie  avec  raison  cette 
charte  avec  celle  que  les  Bénédictins  ont  invoquée  en  faveur  d'un  comte 
Guillaume  d'Auvergne,  sous  Charles  le  Chauve.  Mais  la  charte  n"  146  du 
Cartulaire  de  Sauxillanges  pourrait  être  pour  r/uelque  chose  dans  la 
confusion,  d'autant  que  M.  Doniol  (Ibid.,  p.  2.5)  la  date,  à  tort  lui  aussi, 
de  851),  alors  qu'il  s'agit  de  Charles  le  Simple. 

2.  Mabille,  loc.  cit.,  p.  309. 

3.  Atifiales  de  Saint-Bertin,  801. 

4.  Warin  pourrait  fort  bien  être  le  frère  de  Plantevelue.  Il  y  a  lieu,  du 


310  J.    CALMETTE   ET    H.    PATRY. 

D'autre  part,  nous  sommes  parvenus  à  cette  conviction  que 
le  comté  de  Velay,  sous  Cliarles  le  Chauve,  a  été  gouverné 
successivement  par  Bernard  I,  Bernard  II  Plantevelue  et 
Warin.  Il  resterait  à  établir  la  date  qui  correspond  au  terme 
de  leurs  fonctions  respectives.  Mais,  si  la  mort  d'Etienne 
semble  avoir  déterminé  la  translation  de  Plantevelue  en 
Auvergne,  en  revanche,  il  est  impossible  de  distinguer  dans 
le  carlulaire  de  Brioude,  entre  les  mentions  d'un  comte  abbé 
Bernard,  celles  qui  se  rapportent  à  l'un  ou  à  l'autre  des  deux 
homonymes  qui  se  sont  succédé.  Le  nom  seul  de  la  comtesse 
peut  servir  à  éviter  la  confusion.  Or,  la  comtesse  n'est  citée 
que  deux  fois  en  quinze  ans  :  en  849,  elle  s'appelle  Liutgarde, 
et  il  s'agit  de  la  femme  de  Bernard  le  Vieux';  en  864,  elle 
s'appelle  Ermengarde^,  et  il  s'agit  de  la  femme  de  Plante- 
velue, mère  de  Guillaume  le  Pieux.  Mais  les  diverses  men- 
tions de  Bernardus  cornes  et  abbas  entre  850  et  864  peuvent 
se  rapporter  au  père  ou  au  fils,  sans  que  nous  disposions  d'un 
critérium  quelconque,  qui  nous  permette  de  discerner  duquel 
des  deux  il  est  question. 

Concluons  donc  simplement  que  Bernard  I  le  Vieux  a  dis- 
paru avant  864,  date  à  laquelle  nous  le  voyons  remplacé,  à  la 
fois  comme  comte  de  Velay  et  comme  abbé  de  Brioude,  par 
son  fils  Bernard  II  Plantevelue.  A.  une  date  qui  est  comprise 
entre  864  et  868  et  qui  paraît  correspondre  à  la  mort 
d'Etienne,  Plantevelue  cède  le  Velay  et  Saint-Julien  de 
Brioude  à  Warin  et  devient  lui-même  comte  d'Auvergne, 
titre  qu'il  porte  désormais.  Car  c'est  surtout  en  qualité  de 
comte  d'Auvergne  qu'il  joue  un  rôle  de  plus  en  plus  considé- 
rable dans  le  royaume  de  Charles  le  Chauve  et  qu'il  fonde 
dans  le  Midi  une  maison  déjà  presque  princière,  dont  son  fils 
et  héritier,  Guillaume  le  Pieux,  augmentera  encore  la  splen- 
deur. 

J.  Calmette  et  H.  Patry. 


moins,  de  remarquer  que  ce  nom  appartient  à  la  famille.   Un  fils  de  Ber- 
nard Plantevelue  s'appelait  Warin  {Cartulaire  de  Sauxillanges,  n°  13). 

1.  Cartulaire  de  Brioude,  n°  95. 

2.  Ibid.,  n»  176. 


LE    SOULÈVEMENT   DE    1242 

DANS  LA  POKSIK  DES  TROUBADOUKS 


Dans  une  communication  faite  le  2  avril  1901  au  Congrès 
des  Sociétés  savantes^,  j'ai  essayé  d'énumérer,  sans  prétendre 
être  complet,  les  sirventés  historiques  inspirés  par  la  grande 
prise  d'armes  de  1242,  qui  constitua  la  dernière  tentative 
faite  par  le  Midi  pour  ressaisir  son  indépendance.  Resserré 
dans  les  étroites  limites  d'une  lecture  publique,  je  n'ai  pu 
alors  donner  tous  les  éclaircissements  que  le  sujet  comportait. 
Ce  sont  ces  éclaircissements  que  je  viens  fournir  ici. 

Les  trois  sirventés  dontje  m'étais  particulièrement  occupé,  et 
sur  lesquels  seuls  je  compte  revenir,  ont  ce  vif  intérêt  de  mar- 
quer en  quelque  sorte  les  trois  phases  principales  de  la  lutte. 
Quand  fut  écrit  le  premier-,  les  adversaires  se  regardaient, 
hésitants,  et  aucun  des  princes  conjurés  contre  le  jeune  roi 
de  France  n'osait  faire  le  pas  décisif.  Les  strophes  enflammées 
de  Peire  del  Vilar  paraissent  avoir  été  comme  un  coup  de 
clairon  destiné  à  brusquer  l'attaque.  J'ai  cru  pouvoir  en  pla- 


1.  Un  résumé  de  cette  communication  a  été  publié  (avec  de  nombreuses 
fautes  d'impression)  dans  le  BuUcAin  histo)'ique  et  philologique  du 
Ministère  de  l'Instruction  publique  y  1902,  p.  186-8. 

2.  tiendatz  vermelhs,  ejidis  e  ros ,  par  Peire  del  Vilar  (Bartscii, 
Gru7idi'iss,  n"  36Ô,  1;  publié  par  Tiaynouard,  Choix,  IV,  187). 


312  A.    JEANROY. 

cer  la  compositiou  entre  le  momeat  où  Henri  III  d'Angle- 
terre s'embarqua  pour  la  France  (9  mai  1241)  et  la  défaite 
de  ses  troupes  à  Saintes  (23  juillet)'.  Comme  j'ai  depuis 
publié  le  texte  de  ce  sirventés,  en  l'accompagnant  d'un 
commentaire  historique  et  philologique^,  je  ne  crois  pas  utile 
d'y  revenir. 

Quelques  mois  après,  c'en  était  fait  des  espérances  suscitées 
par  tant  de  laborieux  préparatifs  et  de  solennelles  promesses  ; 
les   barons  poitevins,  surpris  par  la  brusque  irruption   de 
Louis  IX,  avaient  été  battus  en  détail,  et  déjà  les  principaux, 
d'entre  eux  s'empressaient    autour   du  vainqueur^;   l'armée 
anglaise,  surprise  devant  Saintes,  s'était  enfuie  en  désordre 
vers  Blaye  (26-7  juillet).  Raimon  VII  avait  bien  réussi,  comme 
Raimon  Trencavel,  deux  ans  auparavant,  à  soulever  le  Bas- 
Languedoc;  mais  il  perdait  en  vagues  négociations  un  temps 
précieux.  Peut-être  enfin,  raffermi  par  une  nouvelle  alliance 
avec  Henri  III  (28  aoùt-3  sept.),  allait-il  prendre  l'ofïensive, 
quand  la  défection  inopinée  du  comte  de  Foix  vint  ruiner 
toutes  ses  espérances  (5  octobre).   Les  alliés  sur  lesquels  il 
comptait  le  plus,  les  rois  d'Aragon  et  de  Castille,  voyant  de 
quel  côté  penchait  la  fortune,  observaient  une  prudente  ré- 
serve; bientôt  il  dut  venir  lui-même  implorer  son    pardon 
(20  octobre).  Quant  au  roi  d'Angleterre,  il  ne  devait  renoncer 
à  la  lutte,  qu'il  avait  du  reste  conduite  avec  la  plus  extrême 
mollesse,  qu'au  printemps  suivant  (7  avril  1243)*.  C'est  entre 
la  soumission  du  comte  de  Foix  et  celle  du  comte  de  Toulouse 
que  j'ai  cru  pouvoir  placer  la  composition  du  sirventés  célè- 
bre où  Guilhem  Montanhagol\  après  avoir  exhalé  son  mépris 
pour  le  roi  d'Aragon  et  pour  les  comtes  de  la  Marche,  de  Foix 
et  de  Rodez,  alliés  infidèles,  traîtres  «  pires  que  Caïn  »,  leur 


1.  Dates   rectifiées  d'aiirès  Ch.    Bémont ,    La    Campagne  de  Poitou, 
dans  Annales  du  Midi,  V,  p.  295  et  300. 

2.  Mélanges  Léonce  Couture.  —  Etudes  d'histoire  méridionale.  Tou- 
louse, 1902,  p.  115-25. 

3.  25juillet-l"  août  (Bcinoat,  lac.  cit.,  p.  307-10). 

4.  Bémont,  loc.  cit.,  p.  313. 

5.  Bel  m'es  qnan  d'armas  (éd.  (îoiilet,  n»  III,  p.  76  et  ss.). 


LE   SOULÈVEMENT    DE   1242  CHEZ    LES   TROUBADOURS.      313 

oppose  le  comte  de  Toulouse,  modèle  de  vaillance  et  de  géné- 
rosité, qu'il  ne  craint  pas  de  placer  «  au  faîte  de  l'honneur  » 
et  qu'il  engage  à  mieux  choisir  désormais  ses  amis.  Ce  n'est 
pas  de  ce  ton  que  l'on  parle  à  un  vaincu,  réduit  à  accepter  un 
humiliant  pardon.  L'auteur  de  ces  vers  ne  considère  évidem- 
ment pas  la  partie  comme  perdue;  l'armée  anglaise,  qu'il 
raille  de  son  inaction*,  tient  encore  la  campagne,  et  il  estime 
sans  doute  que  la  partie  décisive  n'a  pas  été  jouée,  puisque  sa 
pièce  s'ouvre  par  une  brillante  description, des  sublimes  hor- 
reurs de  la  guerre. 

Quelques  semaines  après,  toute  illusion  était  devenue  impos- 
sible :  la  «  Fleur  de  lis  »,  en  dépit  des  prédictions  de  Peire  del 
Vilar,  l'emportait  une  fois  de  plus.  Aussi  ne  trouvons-nous 
même  plus  dans  le  sirventés  de  Duran,  le  tailleur  de  Pernes 
(ou  de  Carpentras)2,  cette  exhortation  —  dont  l'ironique 
expression,  dans  Montanhagol,  est  déjà  bien  découragée  —  à 
continuer  la  lutte  ;  il  est,  en  revanche,  tout  gonflé  d'amers 
regrets  et  d'âpres  rancunes.  Le  poète  constate  l'échec,  désigne 
les  coupables  et  mesure  ses  sarcasmes  à  l'étendue  de  leur 
responsabilité;  ce  sont  naturellement  les  plus  puissants,  les 
rois  d'Angleterre  et  d'Aragon,  qui  en  ont  la  plus  large  part. 
Les  sentiments  qu'il  exprime  sont  bien  ceux  qui  devaient 
animer  les  vaincus  au  lendemain  de  leur  défaite  :  c'est  à  cette 
date,  en  effet  (hiver  1242-3),  que  je  n'hésite  pas  à  placer  ce 
sirventés  :  En  talent  ai  qu'un  sirventés  encoc. 

Bien  que  cette  opinion  ne  soit  pas  nouvelle,  ce  n'est  pas 
celle  qui  a  prévalu  en  ces  derniers  temps.  Emeric-David^  croit 
ce  sirventés  écrit  «  à  l'occasion  de  la  paix  conclue  en  1229  ». 

1.  «  Anglais,  couronnez-vous  de  fleurs  et  de  feuillages;  ne  vous  donnez 
aucune  peine,  même  si  l'on  vous  attaque,  jusqu'à  ce  que  l'on  vous  prenne 
tout  ce  que  vous  avez.  »  (V.  41-5.) 

2.  La  rubrique  du  ms.  M  (fol.  243  r")  porte  :  Durante  sarto)-  de 
Paernas;  celle  du  ms.  Campori  (p.  521)  Durant  sartres  de  Carpentras. 
C'est  évidemment  le  même  auteur  que  le  ms.  C  (fol.  363  v°)  en  tête  d'une 
autre  pièce  (U)i  sirventés  leuçjier  e  venassal)  appelle  Durait  sartre  de 
Carpentras.  M.  Cliabaneau  {Biographies,  p.  138)  identifie  les  deux  per- 
sonnages en  faisant  remarquer  que  Pernes  n'est  qu'à  deux  lieues  de  Car- 
pentras. 

3.  Histoire  littéraire.  XVIII,  0G6. 


314  A.   JEANROY. 

C'est  en  somme  celte  opiûion,  plus  ou  moins  modifiée  et  pré- 
cisée, qu'adoptent  la  plupart  des  critiques  les  plus  récents. 
Selon  Mih'i  y  Fontanals',  la  pièce  serait  antérieure  à  1239; 
selon  M.  Chabaneau-,  de  1229  ou  1230;  selon  M.  de  LoUis^, 
de  quelques  années  postérieure  à  cette  dernière  date.  M.  Tor- 
raca  la  plaça  d'abord''  en  1233,  puis,  voulant  être  plus  précis 
encore",  après  avril-mai  1234.  L'hypothèse  de  Milâ  —  di- 
sons-le tout  de  suite  —  repose  sur  un  contresens  dont  ne  se 
sont  pas  aperçus  les  savants  qui  ont  adopté  son  opinion.  Il  a 
traduit  marchés,  au  v.  19,  non,  comme  il  convenait,  par 
«  marchois,  de  la  Marche  »,  mais  par  «  marquis  »;  le  coms 
marchés  désignait  alors  le  comte  de  Toulouse,  et  ainsi  dispa- 
raissait l'allusion  la  plus  précise  aux  événements  qui  forment 
le  véritable  sujet  de  la  pièce ^.  De  plus,  il  ne  semble  pas  que 
les  partisans  de  cette  hypothèse  aient  fait  attention  à  certains 
autres  passages,  qui,  comme  nous  allons  le  voir,  y  répugnent 
absolument.  Il  me  paraît,  au  contraire,  de  toute  évidence  que 
le  sirventés  se  rattache  aux  événements  lie  1242;  c'est  aussi 
l'opinion  qu'avait  exprimée  jadis  De  Tourtoulon'',  qu'a  reprise 


1.  De  los  trovadores  en  Espana,  1"  éd..  p.  169;  cf.  ibid.,  note  9, 

2.  Op.  cit.,  p.  138. 

3.  Vita  e  poésie  di  Sordello  di  Goito,  p.  70,  n.  6. 

4.  Sul  f  Sordello  »  di  Cesare  de  Lollis  (Venise,  1896),  p.  17-8.  (Extrait 
du  Giornale  dantcsco,  4«  année,  fasc.  1-2;  je  cite  d'après  le  tirage  à  part, 
que  l'auteur  a  bien  voulu  m'oifrir;  de  même  pour  le  travail  mentionné 
ci-après.) 

5.  Sul  «  Pro  Sordello  »  di  Cesare  de  Lollis  (Venise,  1889),  p.  74. 
(Extrait  du  Giornale  dantesco,&  année,  fasc.  10-12;  7=  année,  fasc.  1-2.) 

6.  Selon  Milà,  Raimon  VII  n'aurait  i-epris  ce  titre  de  «  marquis  de 
Provence  »  qu'après  1234  (de  là  la  date  qu'il  propose);  mais  c'est  une 
erreur  (déjà  relevée  tacitement  par  M.  Chabaneau),  comme  l'a  montré 
M.  Torraca  {Sul  «  Sordello  »,  p.  18).  Ce  qui  empêche  M.  Torraca  de 
faire  remonter  la  pièce  plus  haut  que  1234,  c'est  d'abord  la  mention  de 
Barrai  (v.  42),  qui,  avant  cette  date,  eût  été  bien  jeune  pour  protéger  les 
troubadours  ;  c'est  ensuite  qu'il  voit  aux  v.  27  une  allusion  à  la  trêve  con- 
clue en  1234  entre  les  comtes  de  Toulouse  et  de  Provence. 

7.  Jacques  I"  le  Conquérant.  Je  n'ai  malheureusement  à  ma  disposition 
que  la  traduction  espagnole  de  cet  ouvrage  [Bon  Jairne  I  el  C07iquis- 
tador,  Valencia,  1874,  2  vol.),  à  laquelle  je  serai  obligé  de  renvoyer.  De 
Tourtoulon  n'ose,  du  reste,  se  prononcer  catégoriquement  sur  la  date  : 
«  El  triste  éxito  de  esta  campaîïa  inspiré,  probablemente  entonccs,  al 
Sartre  de  Paernas,  este  vigoroso  canto  »  (tome  II,  p.  58). 


LE  SOULÈVEMENT  DE  1242  CHEZ  LES  TROUBADOURS.   315 

récemmeut  M.  Goulet^;  mais  ui  l'im  ni  l'autre  n'en  a  déve- 
loppé les  raisons.  C'est  ce  que  je  vais  teuler  de  faire.  Mais  il 
paraît  iadispeasable  auparavant  de  donner  de  la  pièce  un 
texte  aussi  âalisfaisaut  que  possible;  comme  elle  n'intéresse 
pas  moins  les  historiens  que  les  philologues,  je  ferai  suivre  ce 
texte  d'une  traduction  littérale  2. 


Texte  de  M,  fol.  243  r",  col.  1  ;  var.  de  a'  (ms.  Campori, 
p.  521)^ 

I  1     Eu  talent  hai  q'un  sirventés  encoc 

Par  traire  a  cols  q'an  mes  Pretz  a  deroe, 
Qar  mantenon  «  No  »  e  han  faidit  «  Hoc  »  : 

4    E  raenz  q'ieu  ai  arbalesta  e  croc, 
Brocarai  lai  per  traire  al  major  loc, 
Al  rei  eragleis,  qes  hom  ten  per  badoc, 
Qar  suefr'  aunitz  q'ora  del  sieu  lo  descoc; 

8    Per  q'en  cor  ai  qe  als  priraiers  lo  toc. 

II  Tos  temps  serai  malvolens  e  enics 
Al  rei  Jacme,  qar  mal  tenc  sos  afics, 
Qel  sagramentz  q'el  fes  fon  mois  e  tries. 

12    Al  raieu  semblan  lo  tenc  meilh  KAmalrics 


1  encor.  —  3  qan  e  mantieing  non  c  faillira  hoc.  —  4  e  ondonienz  qai 
ai'balestre  troc.  —  Entre  4  et  .''),  a'  intercale  :  nom  laissarai  qe  en  estant 
non  broc.  —  5  e  brocarai  (lai  manque}.  —  6  englcs  qe.  —  7  sufra  onitz... 
desroc.  —  8  manque.  — UI  mal  tenc]  mante.  —  12  lo  fo.s  miels;  aimo- 
rics  Ma'.  — 


1.  «  Dans  un  sirventés  inspiré  par  les  mêmes  circonstances  ,  Duran 
Sartre  (sic)  de  Paeraas  blàmo  et  regrette  de  même  l'absence  du  roi  d'Ara- 
gon {Le  troubadour  G.  Montanhayol,  p.  S.")). 

2.  Je  n'ai  connu  l'opinion  de  De  Tourtoulon  et  de  M.  Goulet  qu'après 
avoir  rédigé  la  première  esquisse  de  ce  travail.  Si  je  signale  le  fait,  ce 
n'est  pas  pour  rehausser  mon  mérite,  mais  pour  signaler  un  accord  qui 
ne  peut  être  que  favorable  à  l'hypothèse  que  je  défends. 

3.  J'ai  revu  sur  le  manuscrit  lo  texte  de  M  (déjà  publié  par  Mahn, 
Gedichte,  n"  5(3;  je  dois  les  variantes  de  a'  à  l'inépuisable  obligeance  de 
M.  G.  Bertoni;  les  leçons  dont  la  provenance  n'est  pas  indiquée  sont 
celles  de  «'. 


316  A.    JEANROY. 

De  Narbona,  per  q'ieu  sui  sos  amies, 
Q'el  s'en  capteng  com  hom  q'es  de  prez  ries, 
E  el  aissi  eom  reis  de  cor  mendies  : 
16    Per  qem  plaira  sil  ven  danz  e  destrics. 

III  El  seu  secors  foram  rie  e  estort, 

E  deseonflg  Francés  e  près  o  mort, 
El  coms  marehés  dera  s'en  tal  eonort 

20    Enqiera  n'agran  d'el  plait  ni  acort; 
Mas  el  0  fes  qar  noil  tenian  tort, 
Qe  be  viram  son  eonfano  destort, 
Qe  tuig  sabera  q'el  l'aduis  a  tal  port 

2i    Qel  sieu  perden  fes  plaig  aunit  per  fort. 

IV  Sai  entre  nos  fan  de  gerra  senbell 
Li  dui  eomte,  qar  non  es  qils  capdel, 
Qes  ell  tengran  plait  per  bon  e  per  bell  ; 

28    Mas  nostra  partz  en  fai  pauc  de  revel, 
Per  q'al  pascor  veirem  qel  plus  isnel 
Cavalgheran  per  gaug  del  temps  novel, 
Don  seran  près  e  fondut  mant  castell, 

32    Mant  eseut  rot,  mant  elm  e  mant  eapell. 

V  Tant  lian  sufert  ll'aut  baron  lur  mescap 

Quel  meill  del  mon  tenon  Francés  aclap  , 
E  qar  suefron  q'aitals  gens  los  atrap. 

36    Noi  ha  conseilh  mas  del  broc  ab  l'enap 
Serva  chaseus,  qe  beos  puesc  dir  ses  gap 
Qe  lai  part  Sur.  en  la  terra  d'Alap, 
Lur  feron  far  Turc  mant  crit  e  mant  jap, 

40    El  eroi  rie  sai  noi  sabon  penre  cap. 


1-3  qieu]  qe.  —  14  ma)iqup  a'.  —  15  mas  zel  lo  fes  con  hom  de  c.  m.  — 
17  socors.  —  18  descolit.  —  19  dera]  delà.  —  20  manque  a'.  —  21  tenian] 
donon.  —  22  qe  vist  agran  son  gonfanon.  —  23  q.  t.  sabon  q.  nadiiz.  — 
21  aunit]  onrat.  — 25  ccnbel.  —  26  capdels.  —  28  part  M;  qar  n.  p.  na 
fag  p.  d.  rcuel.  —  29  mas  al  M;  qeil.  —  30  caualgaran.  —  31  d.  sonim 
p.  e  fundut  maint  chastel.  —  32  maint  e.  tôt.  — 33  laiit.  —  34  q.  miels... 
a  trap.  —  35  e  q.  siifron...  a  clap.  —  36  a  M  ;  lenab.  —  37  mas  beus.  — 
39  1.  feiron...  mant  qil.  —  40  eil  c.  r.  no.  — 


LE   SOULÈVEMENT   DE   1242   CHEZ   LES   TROUBADOURS.      317 

VI  Qi  vol  aver  de  prez  capa  e  mantel 

Tôt  enaissi  com  Barals  se  capdel. 

VII  Mon  serventés  trametrai  de  novel, 

4'i    A  N'Oliver,  qar  lo  sai  bon  e  bell. 


TRADUCTIONi. 

I.  Je  veux  encocher  un  sirventés  pour  cribler  de  flèches  ceux 
qui  ont  mis  Honneur  à  bas,  ceux  qui  favorisent  Non  et  ont  banni 
Oui;  tant  que  j'aurai  arbalète  et  crochet,  je  piquerai  [mon 
cheval]  pour  tirer  au  plus  haut  lieu,  à  ce  roi  anglais  que  l'on 
tient  pour  niais,  car  il  tolère,  couvert  de  honte,  qu'on  le  dé- 
pouille de  ses  biens;  et  c'est  pourquoi  je  veux  qu'il  soit  des  pre- 
miers frappés. 

II.  Je  n'aurai  jamais  qu'inimitié  et  hostilité  envers  le  roi 
Jacques,  qui  a  si  mal  tenu  ses  engagements;  le  serment  qu'il 
avait  fait  était  perflde  et  trompeur.  Amalric  de  Narbonne,  à 
mon  avis,  a  bien  mieux  observé  le  sien  :  voilà  pourquoi  je  serai 
toujours  son  ami.  Il  s'est  comporté  comme  un  homme  riche 
d'honneur,  et  lui  (Jacques)  comme  un  roi  pauvre  de  courage 
aussi  serai-je  heureux  s'il  lui  arrive  dommage  et  tracas. 

III.  S'il  nous  eût  secourus,  il  nous  eût  fait  grand  bien;  il  nous 
eût  sauvés.  Les  Français  eussent  été  vaincus,  pris  et  tués.  Le 
comte  de  la  Marche  en  eût  été  tout  réconforté;  il  n'eût  conclu 
avec  eux  ni  trêve  ni  accord;  s'il  l'a  fait,  c'est  qu'ils  n'avaient 
envers  lui  aucun  tort  (?j.  Nous  l'aurions  vu  alors  déployer  son 
gonfanon;  il  (le  roi  Jacques)  l'a.  au  contraire,  acculé  à  une  telle 
extrémité  qu'il  a  dû,  par  force,  conclure  un  traité  honteux  et  qui 
le  dépouillait  de  ses  biens. 

IV  Ici,  parmi  nous,  se  provoquent  à  la  guerre  les  deux  comtes, 
car  ils  n'ont  personne  qui  les  dirige  :  autrement  ils  conclueraient 

41  qi  de  bon  protz  vol  far  cape  uiantel.  —  i-2  barrais  si.  —  4o-i  manfjuetit. 


1.  Les   strophes  I   et  II  ont  été  traduites  par  Eineric-David,  Milà  et 
De  Tourtoulon;  la  quatrième  par  M.  Torraca  [Sul  pro  Sordello,  p.  17). 


318  A.  ji:anrov. 

une  trêve,  sérieusemont  et  pour  de  bon.  C'est  pour  nous  autres, 
gens  d'ici,  un  médiocre  sujet  de  joie.  Au  printemps,  nous  verrons 
les  plus  alertes  témoigner  leur  joie  du  renouveau  en  montant  à 
cheval;  nous  verrons  prendre  maint  château,  briser  maint  écu, 
maint  heaume  et  maint  chapeau  [de  fer]. 

V.  Les  hauts  barons  ont  passé  par  tant  de  traverses  (?)  que 
les  Français  ont  écrasé  ce  qu'il  y  avait  de  mieux  au  monde. 
Puisqu'ils  tolèrent  que  de  telles  gens  les  tiennent  pris  au  piège, 
il  n'y  a  pas  [pour  eux]  d'autre  consolation  que  de  se  servir  du 
broc  et  du  hanap  (?).  Je  puis  bien  vous  dire,  en  vérité,  que 
là-bas,  de  l'autre  côté  de  Tyr,  au  pays  d'Alep,  les  Turcs  leur  ont 
fait  [aux  Français]  pousser  maint  cri  et  maint  aboiement  Et 
ici  les  puissants,  qui  sont  lâches,  ne  savent  pas  prendre  exemple 
sur  eux  (?). 

VI.  Que  quiconque  veut  avoir  Honneur  pour  chape  et  pour 
manteau  se  conduise  comme  Barrai. 

VII.  J'enverrai  à  Olivier  le  sirventés  que  je  viens  do  composer, 
car  je  le  sais  bon  et  beau. 


COMMENTAIRE 

I.  Encoc,  1°  p.  s.  subj.  pr.  do  encociu',  pi-opremcnt,  «  appliquer  sur 
la  corde  de  l'arc  en  adaptant  celle-ci  à  la  coche  de  la  tlèclie  ». 

;3.  C'est-à-dire  ils  ne  connaissent  que  le  refus  et  ignorent  l'assentiment 
(quand  on  leur  d(Mnande  une  chose  honorable). 

4.  Enieric-David  et  De  Tourtoulon  traduisent  metiz  que  par  «  puis- 
que »;  mon  collègue  M.  Levy  me  fait  observer  qus  cette  locution  se  pré- 
sente fréquemment,  dans  la  T7r?  de  sainte  Doaceline,  avec  le  sens  de 
«  pendant  que  »,  qu'elle  doit  avoir  également  ici  :  mens  que  manjava, 
so  li  fon  dit  que...  (p.  106,  |  5i);  et  ibid.,  p.  112,  |  60;  p.  136,  |  17; 
p.  201,  I  9;  voy.  do  plus  Suppl.  Wœrterbuch  à  domeiis. 

7.  Descoc,  de  descocar,  c.-à-d.  «  enlever  la  coca  »;  ce  mot  ne  s'est  pas 
rencontré  jusqu'à  présent  dans  les  anciens  textes;  son  substitut  moderne 
signifie  «  coque,  coquille,  écale  »  (voy  "Mistral,  coco). 

II.  Mahn  avait  lu  inois;  M.  ïobler  a  proposé  [Archiv,  CI,  -165)  vois 
(vide)  ou  mois;  les  deux  ms.  ont  en  effet  mois,  qui  donne  un  sens  excel- 
lent; voy.  Lex.  roma7i,  IV,  280;  Milà  [op.  cit.,  p.  1U9)  traduit  par  «  jura- 
mentos  muelles  y  fallaces  ».  —  Trie  est  ordinairement  substantif;  on  a 
cependant  d'assez  nombreux  exemi>Ies  de  son  emploi  comme  adjectif;  à 


LE   .SOULÈVEMENT    DE    1242   CHEZ    LES    TRODHADOURS.      319 

ceux  que  cite  Raynouard  (V",  422),  on  pourrait  en  joindre  un  grand  nom- 
bre, qu'a  bien  voulu  me  signaler  M.  Lcvy,  et  qu'on  trouvera  dans  son 
inappréciable  Supplement-Wœrterbuch  ;  je  me  borne  à  donner  ceux 
où  le  mot  est  associé,  comme  ici,  à  mois  :  Xi  anc  fais  prezicx  — 
D'omea  mois  ni  tricx  —  Jorn  nom  fes  paor  (P.  Cremon,  Prov.  Ined., 
D.  220,  V.  40).  Que  savis  es  e  tries  et  mois  —  E  canta  ben  et  a  bels 
pels  {Flamenca,  2'-  éd.,  4348;  traduit  au  Glossaire  par  «  dissimulé,  dis- 
cret >■>). 

20.  No  ne  s'élidant  pas  ordinairement,  il  faut  peut-être  corriger  enquer 
no  agran. 

21.  Le  sens  de  ce  vers  est  quelque  peu  surprenant,  mais  je  ne  vois  pas 
de  correction  plausible. 

24.  Per  fort,  locution  adverbiale,  «  par  force  ».  Voy.  Noulet  et  Cha- 
baneau,  Deux  manuscrits,  Gloss.,  et  Levy,  Suppl.  Vo.'rterbuch,  fort, 
n»  20  (III,  570). 

25.  Cembel  est  un  terme  de  chasse  qui  désigne  d'abord  l'appeau  ou 
l'oiseau  qu'on  emploie  pour  attirer  les  autres  dans  le  piège,  puis,  par 
métaphore,  le  moyen  qui  sert  à  attirer  l'ennemi  dans  une  embûche  ou 
au  combat.  Voy.  Diez,  I,  Zimbello.  Porter  u?i  cembel,  c'est  porter  une 
provocation,  tenter  de  provoquer  :  «  Quant  Gerars  a  coisi  de  priés  — 
Cens  qui  portoient  le  cembel.  »  {Roman  de  la  Violette,  p.  132.)  Tel  me 
paraît  être  aussi  le  sens  de  far  cembell  dans  ce  vers,  que  M.  Levy  (I, 
241)  déclare  ne  pas  bien  comprendre.  On  pourrait  comprendre  aussi 
«  font  montre,  ostentation  de  guerre  »,  affectent  une  ardeur  belliqueuse 
qu'ils  n'ont  pas. 

28.  Raynouard  ne  donne  pour  revel  que  le  sens  de  «  rébellion,  résis- 
tance »  ;  mais  le  mot  signifie  aussi,  comme  en  ancien  français,  «  agita- 
tion joyeuse  »  et  «  joie  »  en  général.  (Voy.  Godefroy,  à  revel  et  receler). 

31.  Fondre  signifie  souvent  «  ruiner,  démolir  »  en  parlant  d'un  ou- 
vrage fortifié  (voy.  Lex.  rom.,  III,  355,  et  Godefroy,  IV,  58.  col.  3). 

84.  Raynouard  (IV,  20,  col.  2)  traduit  ce  vers  :  c<  Le  mieux  du  monde, 
ils  traitent  les  Français  en  masse  »,  ce  qui  n'a  pas  de  sens.  Mielhs,  pré- 
cédé de  l'article,  peut  être  employé  comme  adjectif  substantivé,  au  sens 
masculin  ou  ni'utro  :  le  meilleur  homme  ou  la  meilleure  chose  (voy.  Stim- 
ming,  Born,  p.  251,  et  Goulet,  MontanJcagol,  p.  146).  L'expression  tener 
a  clap  est  peu  claire.  Claps  est  traduit  dans  le  Donats  2n'oe?isals  (Sten- 
gel,  40,  10)  par  acervus  lapidum;  aclapar  signifie  «  lapider,  accabler 
sous  des  pierres  »  (Levy,  s.  v°),  «  recouvrir  «,  «  accabler  »  (en  général) 
(voy.  Mistral,  aclapa);  s'aclapa  signifie  même,  spécialement  en  Gasco- 
gne, «  s'accroupir,  tomber  sur  ses  genoux  ».  Je  propose  de  lire  aclap  et  de 
voir  dans  ce  mot  un  adjectif  verbal,  comparable  à  coumoul,  treboul, 
enfle  (fr.  comble,  trouble,  gonfle,  étale,  etc.).  ' 

36-7.  Deux  sens  sont  possibles  :  «  que  cliacun  les  serve  »  (les  Fran- 
çais), etc.,  ou  «  que  chacun  se  serve  soi-iiièine  »  (jiour  noyer  son  dé.ses- 
poir  dans  l'ivresse V);  mais  dans  ce  cas,  ne  faudrait-il  pas  corriger  servas? 

38.  Sur,  aujourd'hui  Sour,  l'antique  Tyr  (voy.  G.  Paris,  l'Kstoire  de 


320  A.   JEANROY. 

la  guerre  sainte,  Gloss.)-  —  Alap  doit  être  pour  la  rime.  B.  de  Born  dit 
pins  correctement  Alep  {Ane  nos  poc,  \.  28). 

40.   /  pefire  cap,  prob.  se  diriger  sur  eux  (se  régler  sur  leur  exemple). 

44.  Les  deux  épithètes  se  rnpportont  uaturellcment  à  sirventés  et  non 
à  Oliver. 

Reprenons  brièvement  chacun  des  points  touchés  par  le 
poète. 

Les  attaques  dirigées  contre  les  rois  d'Angleterre  et  d'Ara- 
gon (sir.  I  et  II)  pourront  paraître  médiocrement  précises;  ou 
en  trouve  d'analogues  dans  une  foule  de  pièces  échelonnées 
du  début  du  siècle  à  1252  au  moins,  et  M.  de  Loi  lis,  qui  les  a 
énumérées  (sans,  du  reste,  essayer  de  les  dater),  n'a  pas  hésité 
à  les  ranger  au  nombre  de  ces  lieux  communs  dont  l'afflux, 
toujours  plus  abondant,  vint  former  «  les  eaux  stagnantes  du 
conventionnalisme  »^  Et  en  effet,  jusqu'au  traité  de  Corbeil 
(1258),  ne  pouvait-on  rappeler  à  Jacques  P''  qu'il  oubliait  son 
père  tué  à  Muret,  ses  domaines  passés  à  des  mains  étrangères? 
De  1202  à  1259  les  rois  d'Angleterre  ne  méritèrent-ils  pas,  eux 
aussi,  le  reproche  de  se  laisser  dépouiller  de  leur  héritage? 
Mais,  remarquons-le,  il  y  a  ici,  à  l'adresse  du  roi  d'Aragon, 
une  accusation  plus  précise  :  celle  d'avoir  manqué  à  ses  enga- 
gements ;  or,  aucun  engagement  précis,  avant  1241,  ne  l'avait 
lié  ni  à  Raimon  VII  ni  à  aucun  des  barons  méridionaux 2. 

Les  deux  comtes  nommés  au  v.  26  sont  évidemment  —  tout 
le  monde  est  d'accord  sur  ce  point  —  ceux  de  Toulouse  et  de 
Provence.  M.  Torraca^  voit  au  v.  27  une  allusion  à  la  paix 
conclue  le  13  février  1234  \  qui  fut  préparée  par  des  négocia- 


1.  Vita  e  opère  di  Sordello,  p.  69-?2. 

2.  On  n'a  pas  retrouvé  la  trace  d'une  alliance  olfensivc  conclue  entre 
Raimon  et  Jacques  contre  le  roi  de  France  (voy.  Goulet,  Monta}ihagol, 
p.  84-5);  mais  les  contemporains  ne  mirent  pas  en  doute  l'existence  de 
cette  alliance.  Montanhagol,  lui  aussi,  reproche  à  Jacques  de  n'avoir  pas 
«  tenu  sa  i^romesse  «  (v.  ;M;.  Louis  IX  était  du  reste  si  peu  srir  de  la  neu- 
tralité de  l'Aragon  qu'il  avait  dirigé  deux  corps  d'armée  sur  les  Pyrénées 
pour  en  surveiller  les  passages.  (Hist.  de  Languedoc,  éd.  Privât,  VI, 
745;  Bémont,  loc.  cit.,  p.  312.) 

3.  Sul  «  Pro  Sordello  »,  p.  73. 

4.  Bertrer,  Histoire  de  Blanche  de  Casiille,  p.  223.  Voy.  le  texte  de  cet 
accord  dans  Hist.  de  Languedoc,  VIII,  col.  971. 


LE  SOULÈVEMENT   DE   1242  CHEZ   LES   TROUBADOURS.      321 

tiens  dès  le  mois  de  mars  1233.  Mais  rien  ne  nous  indique  que 
les  contemporains  aient  considéré  cet  accord  comme  peu 
solide  :  il  ne  fut  rompu,  en  effet,  que  trois  ans  après.  Au  prin- 
temps de  1243,  au  contraire,  la  guerre,  à  peine  interrompue 
par  les  événements  de  l'année  précédente,  fut  sur  le  point 
d'éclater  de  nouveau';  elle  ne  fut  conjurée  que  par  des  ac- 
cords plusieurs  fois  renouvelés,  dont  on  avait  toutes  les  rai- 
sons du  monde  de  suspecter  la  solidité-.  Le  vers  n'est  malheu- 
reusement pas  précis.  Doit-on  l'entendre  :  «  les  comtes  obser- 
veraient leur  accord  sérieusement  »,  ou  «  considéreraient  i«n 
accord  comme  chose  bonne  et  belle  »?  Dans  le  premier  cas,  la 
pièce  serait  postérieure  au  29  juin  1243  ;  dans  le  second,  anté- 
rieure à  cette  date.  Mais  il  me  semble  que,  dans  la  première 
hypothèse,  l'auteur  aurait  déterminé  plait  par  un  article  ou 
un  adjectif  possessif.  L'autre  sens  me  parait  donc  plus  naturel 
et  nous  permet  de  placer  la  composition  de  la  pièce  dans 
l'hiver  de  1242-3  :  hypothèse  plus  vraisemblable  à  tous  égards, 
car  la  violence  des  sentiments  du  poète  semble  indiquer  qu'il 
est  sous  le  coup  d'événements  tout  récents. 

En  traduisant,  au  v.  19,  coms  marchés  par  «  comte  mar- 
quis »,  Milà  me  paraît  avoir  été  victime  d'une  simple  distrac- 
tion ^  Je  ne  mets  point  en  doute,  quant  à  moi,  qu'il  s'agisse  là 
du  comte  de  la  Marche  et  je  crois  qu'il  suffira  d'un  instant  de 
réflexion  pour  se  ranger  à  cet  avis.  D'abord  est-il  vraisembla- 
ble que  le  poète,  qui  s'apprêtait  à  «  décocher  »  à  Rai  mon  VII 
la  strophe  iv  ait  songé  à  le  mentionner  dans  la  strophe  m? 
Remarquons  du  reste  qu'il  use,  dans  ces  deux  strophes,  d'un 
ton  tout  différent  :  ironique,  méprisant  à  l'égard  de  ces  deux 
comtes  qui  ne  savent  pas  se  conduire  eux-mêmes,  il  est  au  con- 
traire plein  d'une  indulgente  pitié  pour  le  comte  de  la  Marche, 


1.  Hist.  de  Languedoc,  VI,  759. 

2.  Au  mois  de  mars  1244,  Grégoire  IX  écrivait  à»  l'évéqnc  d'Avignou 
pour  le  prier  de  s'employer  à  la  faire  proroger  de  iiouvenu.  C'est  de  cette 
lettre  même  que  l'on  induit  qu'elle  l'avait  été  une  première  fois  à  la 
Toussaint.  [Ilist.  de  Lniif/nedoc,  VI,  762;  cf.,  VIII,  1124-8,  le  texte  de 
l'accord.) 

3.  De  Tourtoulon  et  M.  Goulet,  qui  n'ont  pas  traduit  cette  strophe, 
n'ont  pas  eu  à  se  prononcer  sur  ce  point. 

ANNALES  DU  MIDL  —  XVL  21 


322  A.    JEANROY. 

dont  il  tcQte  visiblement  d'excuser  la  conduite;  c'est  «  par 
force  »  qu'il  a  dû  conclure  ce  pacte  de  honte,  et  ce  n'est  pas  sa 
faute  s'il  n'a  pas  fait  montre  de  sa  valeur.  Enfin,  les  expres- 
sions dont  se  sert  le  troubadour,  d'une  injustice  flagrante  si 
on  les  rapporte  à  Raimon  VII,  reprennent  toute  leur  exacti- 
tude si  on  les  rapporte  à  Hugue.  Pouvait-on  reprocher  à 
Raimon  VII  de  n'avoir  pas  déployé  son  étendard  de  guerre, 
alors  qu'il  avait  conduit  pendant  quatre  mois  (juin-octobre) 
une  campagne  qui  n'avait  pas  été  sans  gloire'?  Le  comte  de  la 
Marche,  au  contraire,  à  la  nouvelle  de  la  débâcle  de  Saintes, 
s'était  hâté  de  faire  sa  soumission  (3  août)  et  de  mettre  à  la 
disposition  de  Louis  IX  les  troupes  qu'il  avait  préparées  contre 
lui  2. 

Si  l'hypothèse  que  je  défends  rend  mieux  compte  que  toute 
autre  des  principales  allusions  de  la  pièce,  —  les  seules  dont 
on  parait  s'être  occupé  jusqu'à  présent,  —  il  est  d'autres  pas- 
sages qu'elle  est  seule  à  pouvoir  expliquer. 

Et  tout  d'abord  la  strophe  v  tout  entière.  Si  nous  nous  pla- 
çons aux  environs  de  1230,  le  plus  récent  désastre  éprouvé 
par  les  chrétiens  en  Terre-Sainte  remontait  à  une  dizaine  ou 
à  une  douzaine  d'années  ^  (ce  souvenir  serait  bien  réchauffé), 
et,  de  plus,  il  avait  eu  pour  théâtre  l'Egypte  et  non  la  Pales- 
tine. Mais  n'oublions  pas  qu'en  1239  les  barons  du  Nord,  con- 
duits par  Thibaut  de  Champagne,  Hugue  de  Bourgogne  et 
Pierre  de  Bretagne,  avaient  tenté  un  nouvel  effort,  dont  le  ré- 
sultat avait  été  presque  aussi  lamentable  :  battus  à  Gaza,  ils 
avaient  dû  se  replier  sur  Acre  (novembre)  et  bientôt  se  rem- 
barquer (fin  sept.  1240)  S  en  laissant  aux  mains  des  infidèles 


1.  Cf.  Hist.  de  Languedoc,  VI,  742,  n.  6. 

2.  Bémont,  loc.  cit.,  p.  310.  Le  v.  21  reste  néanmoins  assez  obscur. 
Hostile  comme  il  l'est  aux  Français,  comment  le  poète  peut-il  dire  que 
ceux-ci  n'avaient  aucun  tort  envers  le  comte  de  la  Marclie  ?  Ce  serait  dé- 
savouer la  participation  de  celui-ci  à  la  coalition  et,  par  contre-coup,  la 
coalition  elle-même.  Peut-être  le  texte  de  ce  vers  est-il  altéré.  (Voy.  plus 
haut,  p.  313. 

3.  L'évacuation  de  Damiette  est  du  30  août  1221.((Rœliriclit,  Geschichte 
des  Kœnigsreichs  Jérusalem,  p.  751.) 

4.  Rœliriclit,  op.  cit.,  p.  849. 


Le   SOULEVEMENT  DE  1242  CHEZ  LES  TROUBADOURS.   323 

bon  nombre  de  prisonniers,  queRichart  de  Cornouailles  devait 
venir  racheter  quelques  mois  après  (février  1241);  or,  parmi 
ces  prisonniers  se  trouvait  Amauri  de  Montfort,  le  propre  fils 
du  plus  terrible  ennemi  de  la  cause  méridionale;  n'en  était-ce 
pas  assez  pour  que  cet  échec  réjouît  doublement  le  cœur  des 
vaincus  de  1242*? 

Enfin,  si  on  admet  la  date  que  je  propose,  rien  de  plus  facile 
à  expliquer  que  le  choix  des  destinataires  de  la  pièce  et  les 
éloges  dont  est  comblé  Amalric  de  Narbonne,  dont  la  conduite 
est  si  nettement  opposée  à  celle  des  rois  traîtres  ou  lâches. 

Au  V.  12-13,  les  deux  manuscrits  portent,  il  est  vrai,  Aime- 
rics  de  Narbona.  Mais  je  n'hésite  pas  un  instant  à  corriger, 
comme  l'a  déjà  fait  De  Tourtoulon  (II,  p.  53,  n.  3),  en  Amal- 
rics.  La  faute  s'explique  pour  ainsi  dire  d'elle-même  :  le 
nom  épique  d'Aimeri  de  Narbonne  était  familier  aux  copistes, 
et  il  était,  de  plus,  de  tradition  dans  la  famille  vicomtale  de 
Narbonne,  où  il  se  perpétue  jusqu'au  milieu  du  xiv"  siècle.  On 
ne  voit  nullement,  du  reste,  pourquoi  le  fougueux  tailleur  de 
Pernes  aurait  manifesté  une  si  ardente  sympathie  pour  Aime- 
ric  IV,  qui  avait  toujours  évité  avec  le  plus  grand  soin  de 
prendre  part  à  la  lutte  contre  les  croisés  2,  et  qui  avait  mérité 
que  Grégoire  IX  le  félicitât  de  son  attachement  à  la  foi  catho- 
lique et  de  sa  haine  pour  l'hérésie^.  Son  fils  Amalric,  au  con- 
traire (vicomte  le  1"  fév.  1239),  avait  toujours  montré  une 
extrême  répulsion  pour  la  domination  française.  Sans  doute, 
il  n'avait  pas  pris  part  au  soulèvement  de  1240;  mais  le  roi 
de  France,  suspectant  ses  intentions,  avait  cru  nécessaire  de 
le  mander  à  sa  cour  et  de  lui  faire  renouveler  son  serment  de 
fidélité''.  Dès  le  début  des  hostilités  (1242),  il  avait  introduit 
Raimon  VII  dans  Narbonne,  que  l'archevêque  avait  dû  quitter 


1.  Je  n'attache  pas  grande  importance  au  fuit  que  Pierre  Mauclerc, 
l'un  des  cliefs  de  l'expédition,  avait  été  l'un  dos  lieutenants  du  roi  dans 
la  campagne  de  Poitou. 

2.  Dès  121Ô,  il  concluait  un  accord  avec  Simon  de  Montfurt,  au(iurl  il 
promettait  une  paix  perpétuelle.  {Hist.  de  Lang.,  VI,  4-")i).) 

3.  Dans  deux  brefs  de  1233  et  123G  mentionnés  dans  Hiat.  de  Lang,, 
VI,  714. 

4.  Hist.  de  Lang.,  VII,  461. 


324  A.   JEANROY. 

précipitamment;  aussi  tombait- il  naturellement  sous  le  coup 
de  l'excommunication  que  ce  prélat  fulmina,  le  21  juillet, 
contre  les  principaux  révoltés  i.  Il  n'abandonna  la  lutte  qu'à 
la  dernière  extrémité,  alors  que  son  suzerain  avait  depuis 
longtemps  imploré  son  pardon^. 

Quel  est  cet  Olivier  (v.  44),  avec  lequel  le  poète  est  évidem- 
ment en  parfciite  communauté  d'idées?  Pour  tous  ceux  qu'a- 
nimaient les  sentiments  exprimés,  il  n'était  pas  besoin  de  le 
désigner  plus  clairement  :  tous  avaient  déjà  nommé  Olivier 
de  Termes,  une  des  plus  illustres  victimes  de  la  croisade,  le 
bras  droit  de  l'indomptable  Trencavel.  Il  devait,  plus  tard, 
signaler  sa  valeur  sur  les  champs  de  bataille  de  Terre-Sainte 
et  entrer  fort  avant  dans  les  bonnes  grâces  du  saint  roi; 
mais  il  avait  commencé  par  opposer  à  l'autorité  royale  la 
résistance  la  plus  acharnée.  Dès  1227,  il  combattait  aux  côtés 
du  comte  de  Toulouse 3;  en  1240,  il  avait  aidé  Trencavel  à 
soulever  le  Languedoc,  Fait  prisonnier*,  il  avait  dû  jurer  de 
servir  fidèlement  le  roi  contre  ses  ennemis  et  lui  remettre 
comme  caution  son  château  d'Aguilar"';  mais  il  faut  croire 
que  ce  serment  imposé  ne  pesait  guère  à  sa  conscience,  car, 
un  an  plus  tard,  il  suivait  le  vicomte  Amalric  dans  sa  rébel- 
lion. Nous  trouvons,  en  effet,  son  nom  sur  la  liste  des  barons 
excommuniés  par  l'archevêque  de  Narbonne". 

Barrai  [des  Baux],  nommé  dans  le  premier  envoi,  n'avait 
pas  sans  doute  les  mêmes  titres  à  l'admiration  du  poète;  mais 
lui  aussi  appartenait  à  une  famille  que  ses  intérêts  opposaient 
depuis  de  longues  années  aux  comtes  de  Provence  et  rappro- 
chaient de  ceux  de  Toulouse.  Allié  par  son  mariage  avec 
Raimon"VII,  sénéchal  du  Venaissin  depuis  1236,  il  devait  être 
de  cœur  avec  les  révoltés  ^  Mais  n'étant  pas  entré  dans  la 


1.  Hist.  de  Lang.,  VI,  744  et  VIII,  col.  1090. 

2.  Sa  soumission  est  de  décembre  1242.  (Ibid.,  VIII,  col.  1106.) 

3.  Hist.  de  Latig.,  VI,  625.  Il  assista  comme  témoin  à  l'accord  conclu 
le  7  nov.  1230  entre  Raimon  VII  et  Marseille.  [Ann.  du  Midi,  XI,  202.) 

4.  Hist.  de  Lang.,  VII,  460. 

.5.  Voy.  Teulet,  Layettes,  II,  n«  2914  et  2918. 

6.  Hist.  de  Latig.,  VIII,  col.  1091. 

7.  Il  avait  épousé  Sibylle  d'Anduze,  nièce  de  Raimon  VII(Bartliélemyi 


LE  SOULÈVEMENT  DE  1242  CHEZ  LES  TROUBADODRS.   325 

lutte,  il  sortait  indemne  de  cette  crise  qui  avait  si  rudement 
froissé  son  parti.  Il  devait  être  l'un  des  rares  représentants 
de  ce  parti  qui  fussent  encore  en  état  de  témoigner  aux  trou- 
badours une  sympathie  effective^;  aussi  les  avances  que  lui 
fait  l'auteur  de  notre  sirventés  n'ont-elles  rien  qui  puisse  sur- 
prendre^. 

On  retrouverait  aisément  dans  plusieurs  autres  sirventés, 
comme  M.  de  Lollis  l'a  fait  remarquer,  des  objurgations  ou 
des  reproches  analogues,  adressés  aux  rois  d'Angleterre  et 
d'Aragon.  Ou  bien  en  effet  les  poètes  avaient  d'eux-mêmes  le 
sentiment  qu'il  ne  fallait  rien  moins  que  l'union  de  ces  deux 
grands  États  pour  faire  échec  à  la  royauté  capétienne,  ou  bien 
la  constance  de  ces  appels  était  le  résultat  d'un  mot  d'ordre. 

Peut-être  pourrait-on  retrouver  ailleurs  encore  des  allusions 
paraissant  s'appliquer  assez  bien  aux  mémorables  événements 


Inventaire  des  titres  de  la  maison  de  Baux,  tableau  I).  Il  fut  témoin 
des  accords  conclus  entre  Eaimon  VII  et  Jacques  I"  le  23  avril  1241, 
entre  Raimon  VII  et  Rairaon-Béranger  le  29  juin  1243  (Ibid.,  n"' 294  et 
305.)  On  sait  que  le  comte  de  Toulouse,  par  un  acte  du  24  février  1241, 
avait  donné  à  sa  fille  Cécile,  au  cas  où  il  mourrait  sans  postérité,  tout 
ce  qu'il  possédait  sur  la  rive  gauche  du  Rhône.  (Ibid.,  n»  292.) 

1.  Il  protégea,  en  effet,  plusieurs  troubadours.  Voy.  sur  ce  sujet 
H.  Springer,  Bas  altprovenzalische  Klagelied  (Berlin,  1895,  p.  78-9). 

2.  La  forme  strophique  de  notre  pièce  est  assez  fréquente  dans  la 
poésie  dos  troubadours  (voy.  Maus,  Strophenbau,  p.  97,  n"  12,  2;  effa- 
cer 10,  47  et  ajouter  461,  7).  Mais  elle  est  tellement  simple  qu'on  ne 
saurait  conclure  de  l'identité  à  l'imitation.  En  effet,  aucune  des  pièces 
réglées  sur  ce  «  compas  »  ne  paraît  ni  avoir  servi  de  modèle  à  la  nôtre, 
ni  lui  avoir  emprunté  le  sien.  Il  y  a  en  revanche  un  sirventés  de  P.  Bré- 
mon  (330,  6;  Parn.  occit.,  p.  216)  qui  a  avec  le  nôtre  un  rapport  incon- 
testable. Il  se  compose,  il  est  vrai,  de  vers  de  douze  syllabes  (et  non  de 
dix);  mais  dans  trois  strophes  sur  cinq,  nous  retrouvons  non  seulement 
les  rimes  [oc,  ics,  op),  mais  aussi  plusieurs  des  mots  mêmes  qui  appa- 
raissent chez  Duran  de  Pernes  (voy.  le  tableau  comparatif  dans  Torraca, 
Sut  Sordello,  p.  18,  n.  3);  l'imitation  do  l'un  par  l'autre  est  donc  évi- 
dente. Quel  est  l'imitateur?  C'est  ce  qu'il  est  impossible  de  déterminer 
à  priori.  Il  me  paraît  cependant  vraisemblable,  comme  à  M.  Torraca, 
que  c'est  notre  auteur,  et  non  Brémon;  en  effet,  l'échange  de  sirventés 
entre  Brémon  et  Sordel  paraît  notablement  antérieur  à  1242  (voy.  Tor- 
raca, Sul  Sordello,  p.  17-18);  je  forai  obsoi-ver  de  plus  que  la  recherche 
des  rimas  caras  est  bien  plus  sensible  ch{>z  Brémon  (celles  on  e)-?/,  art 
sont  plus  rares  que  celles  en  art,  el  dont  s'est  contenté  Duran)  ;  or,  il  est 
probable  que  c'est  la  pièce  la  plus  soignée  dans  la  forme  qui  est  le  mo- 
dèle de  l'autre. 


326  A.   JEAN  ROY. 

de  1242;  toutefois  ces  allusions  ne  sont  pas  assez  précises 
pour  permettre  une  affirmation,  et  je  ne  crois  pas  utile  de  les 
examiner. 

NOTE  ADDITIONNELLE. 

Qu'on  me  permette  d'ajouter  ici  quelques  mots  au  sujet  de 
deux  sirvenlés  se  rattachant,  selon  moi,  aux  événements  qui 
servirent  de  préface  à  ceux  que  je  viens  de  rappeler.  Nous  y 
trouvons  la  plupart  des  mêmes  personnages  que  dans  ceux 
dont  il  vient  d'être  question. 

Dans  le  premier',  Bernart  de  Rovenac  reproche  leur  mol- 
lesse aux  rois  d'Angleterre  et  d'Aragon  :  le  premier  souffre 
patiemment  que  les  Français  lui  enlèvent  Tours,  Angers,  la 
Normandie  et  la  Bretagne;  le  second  est  trop  «  bien  élevé  » 
{chausitz)  pour  s'opposer  à  de  semblables  usurpations,  et  il  se 
borne  «  à  faire  payer  cher,  là-bas,  aux  Sarrasins  la  honte  et 
le  dommage  qu'il  éprouve  ici  vers  Limoux  ».  La  première  de 
ces  allusions  est  médiocrement  explicite;  mais  la  seconde 
nous  reporte  au  moins  après  la  prise  de  Valence  (28  septem- 
bre 1238)^,  et  la  suite  surtout  est  beaucoup  plus  précise  : 
le  poète  rappelle  à  Jacques  que  le  roi  de  France  veut  «  faire 
hériter  Alphonse  de  ses  fiefs».  Ce  vers  est  évidemment  ins- 
piré par  l'acte  du  24  juin  1241,  par  lequel  Louis  IX  consti- 
tuait l'apanage  du  comte  de  Poitiers.  En  réalité,  Louis  IX 
n'avait  concédé  à  Alphonse  aucun  fief  relevant  directement 
du  roi  d'Aragon;  mais  il  lui  avait  peut-être  concédé  des 
droits  que  le  traité  de  Paris  lui  assurait  a  la  succession  de 
Raimon  VIL  Or  dans  les  États  de  Raimon  VII  il  y  avait  des 


1.  Bartsch,  6G,  3;  impr.  dans  Raynouard,  IV,  203. 

2.  Les  derniers  mots  se  rapportent  aux  droits  de  suzeraineté  de  Jac- 
ques I"  sur  le  Carcasses,  confisqué  en  1229  sur  Raimon  VII.  Plusieur.'^ 
années  auparavant,  Grégoire  IX  avait  écrit  à  Raimon-Béranger  pour  le 
prier  d'intervenir  auprès  de  Jacques  I'"'  et  de  Louis  IX  à  l'eiïet  de  régler 
les  difficultés  qui  s'étaient  élevées  entre  eux  à  ce  sujet  (De  Tourtoulon, 
op.  cit.,  I,  293.) 


LE  SOULÈVEMENT  DE  j  242  CHEZ  LES  TROUBADOURS.   327 

fiefs  sur  lesquels  le  roi  d'Aragon  prétendait  aussi  des  droits'. 

Une  autre  allusion  nous  reporte  exactement  à  la  mêmp 
date.  Le  troubadour  engage  le  comte  de  Toulouse  à  se  souve- 
nir de  la  suzeraineté  qu'il  exerçait  jadis  sur  Beaucaire  :  «  Si 
vous  tardez  longtemps  à  la  revendiquer,  ajoute-t-il,  vous  et 
le  roi,  dont  vous  avez  la  parole,  votre  entreprise  sera 
honnie.  »  Le  roi  en  question  [ne  peut  être  que  Jacques  I",  et 
le  poète  songe  manifestement  à  ce  fameux  traité  d'alliance 
auquel  tout  le  monde  croyait  ou  feignait  de  croire.  En  ce  qui 
concerne  Beaucaire  en  particulier,  Raimon  VII  faisait  préci- 
sément alors  une  tentative  hardie  pour  le  recouvrer;  au  mé- 
pris du  traité  de  1229,  il  passait,  le  30  mai  1241,  avec  l'ar- 
chevêque d'Arles,  un  acte  par  lequel  celui-ci  lui  inféodait  cette 
ville,  bien  qu'elle  fût  le  siège  d'une  sénéchaussée  royale-.  Le 
comte  de  Toulouse,  selon  une  pratique  qui  paraît  avoir  été 
fort  usitée  en  ce  temps,  se  faisait  précisément  conseiller  par 
l'officieux  troubadour  les  actes  qu'il  se  préparait  (ou  qu'il 
était  en  train)  d'accomplir. 

Nous  trouvons  des  objurgations  non  moins  vives,  mais 
réservées  au  seul  roi  d'Aragon,  dans  un  sirventés  anonyme 
(attribué  à  tort  à  B.  de  Born)^  L'auteur  reproche  à  Jac- 


1.  C'est  tUi  moins  l'interprétation  qu'a  donnée  M.  A.  ^lolinior,  dans 
une  note  de  l'Histoire  de  Lmiguedoc,  que  je  ne  puis  retrouver.  M.  Moli- 
nier,  consulté  par  moi,  veut  bien  compléter  cette  explication  dans  les 
termes  suivants  :  «  Alfonse,  successeur  désigné  de  Raimon  VII,  devait 
hériter  de  certains  domaines  (Millau,  par  exemple)  que  revendiquait  Jac- 
ques d'Aragon.  De  là,  les  inquiétudes  de  la  cour  espagnole.  Le  bruit 
d'ailleurs  courait,  en  1241,  que  Louis  IX  voulait  donner  à  son  fils  la 
«  terre  d'Albigeois  »  tout  entière  (cf.  à?^r\sHist.  de  Languedoc,^!,  730, 
le  témoignage  d'Aubri  de  Neufmoutiers).  C'est  peut-être  à  ces  on-dit 
que  fait  allusion  B.  de  Rovenac.  Jacques  était  si  bien  persuadé  de  la 
valeur  de  ses  droits  sur  une  partie  de  la  «  terre  d'Albigeois  »  qu'il  y 
renonça  expressément  par  le  traité  de  Corbeil.  »  (Cf.  Hist.  de  Languedoc, 
VII,  113.) 

2.  Hist.  de  Languedoc,  VI,  728.  —  Je  rappelle  que  la  pièce  en  question 
est  sur  le  rythme  et  les  rimes  d'une  chanson  do 'Raimon  de  ]Miraval. 
(Mahn,  Ged.,  1105;  cf.  Romania,  XXXIl,  139.)  Les  pièces  écrites  sur  ce 
«compas»  sont  nombreuses  (voy.  Maus,  Strophenbau,  n°  535);  mais 
celle-ci  est  la  seule  qui  ait  les  mêmes  rimes  que  la  chanson  de  ^liraval. 

3.  Bartsch,  80,  42;  imprimé  par  Raynouard,  IV,  181,  et  Stimming, 
B.  de  Bor7i,  1"  édit.,  p.  213. 


328  A.   JEANROY. 

ques  I"  de  souffrir  que  le  comte  de  Toulouse  lui  enlève  Millau 
et  Marseille,  et  lui  rappelle  que  le  même  priacea  failli  récem- 
ment [antan)  lui  ravir  Montpellier.  Au  comte  de  Toulouse,  il 
fait  honte  de  se  montrer  si  ingrat  envers  le  fils  de  Pierre  II, 
et  il  promet  au  comte  de  Provence  le  secours  du  roi  d'Aragon 
dès  que  celui-ci  sera  maître  de  Chiva.  M.  de  Grave  \  se  rap- 
prochant de  l'opinion  exprimée  par  Stimming^  et  combat- 
tant celle  de  M.  de  Lollis^  a  fait  pour  rapprocher  cette  pièce 
de  1230  des  efforts  qui  me  paraissent  malheureux.  De  Tour- 
toulon^  a  montré  que  les  allusions  à  l'histoire  du  roi  en  Espa- 
gne postulaient  une  date  voisine  de  1240;  celles  qui  sont 
faites  à  l'histoire  méridionale  s'en  accommodent  également 
fort  bien.  Raimond  VII  venait  alors  de  reprendre  Millau 
(été  1237)5  ;  les  Marseillais,  renouvelant,  le  5  mai  1236,  l'ac- 
cord qui  les  liait  au  comte  de  Toulouse,  l'avaient  transformé 
en  un  véritable  traite  d'alliance  offensive  et  défensive®,  et,  en 
effet,  ils  n'hésitèrent  pas  à  lui  fournir  des  troupes  pour  l'ex- 
pédition qu'il  dirigea,  en  1240,  contre  le  comte  de  Provence 
et  dont  il  va  être  question  tout  à  l'heure  ;  mais  surtout  l'allu- 
sion aux  troubles  de  Montpellier  ne  peut  être  rapportée  qu'à 
cette  époque.  C'est  en  1239  qu'une  redoutable  conspiration 
bourgeoise,  que  Jacques  crut  nécessaire  de  venir  déjouer  en 
personne  ^  faillit  livrer  à  Raimon  VII  la  possession  effective 
de  la  ville,  et  le  comte  de  Toulouse  favorisait  évidemment  ces 
agissements,  puisque,  dès  le  28  août  de  l'année  précédente,  il 
avait  accepté  la  suzeraineté  de  Montpellier  que  lui  avait 
off"erte  l'évêque  de  Maguelonne. 

La  principale  objection  de  M.  de  Grave  consiste  en  ce  qu'on 
ne  verrait  pas  «  contre  qui  le  comte  de  Provence  aurait  bien 

1.  Bertrand  d'Alamcuion, -p.  103-7. 

2.  B.  de  Born,  p.  86  (date  proposée  :  1231). 

3.  Opère  di  Sordello,  p.  36,  n.  1. 

4.  Op.  cit.,  II,  41,  n.  2. 

5.  Il  était  encore  sous  les  murs  de  cette  ville  le  28  juin.  (De  Tourtou- 
lon,  II,  8,  et  Hist.  de  Languedoc,  VI,  705.) 

6.  De  Santi,  dans  Annales  du  Midi,  XI,  204. 

7.  Il  séjourna  à  Montpellier  du  2  juin  à  la  fin  d'octobre.  Voy.  le  récit 
détaillé  des  faits  dans  de  Tourtoulon,  II,  9-17.  Je  n'ai  pu  consulter  Ger- 
main, Histoire  de  la  commune  de  Montpellier. 


LE  SOULÈVEMENT  DE  1242  CHEZ  LES  TROUBADOURS.   329 

pu  avoir  besoin  de  l'aide  de  Jacques  en  1240  ».  Mais  contre 
Raimon  VII  lui-même,  à  l'attaque  duquel  le  poète  fait  une 
assez  claire  allusion  (str.  ii).  Le  comte  de  Toulouse,  parti  en 
campagne  dès  les  premiers  jours  de  janvier  de  cette  année  ^ 
guerroya  contre  Raimon-Béranger  tout  l'été;  celui-ci,  battu 
au  passage  du  Rhône,  s'était  vu  enlever  Trinquetaille  et  il 
avait  diî  assister,  impassible,  au  siège  d'Arles  et  au  ravage  de 
la  Camargue 3.  Les  troupes  françaises,  immobilisées  par  la 
répression  de  l'insurrection  de  Trencavel,  ne  pouvaient  lui 
être  d'un  grand  secours;  il  était  donc  tout  naturel  qu'il  se 
tournât  du  côté  du  roi  d'Aragon  ^ 

D'accord  avec  Milà',  de  Tourtoulon  et  M.  de  LoUis,  mais 
atteignant  à  une  plus  grande  précision,  je  placerais  donc  le 
sirventés  en  question  vers  le  milieu  de  l'année  1240. 

A.  Jeanroy. 


L  Hist.  de  Languedoc,  VI,  716. 

2.  La  paix  no  fut  conclue,  à  Lunel,  quo  le  18  avril  1241.  {Hist.  de  Lang., 
VI,  725.)  Dès  la  fin  de  12.39,  Raimon-Béranger  jugeait  prudent  do  ne  pas 
s'éloigner  ;  il  écrivait,  on  effet,  au  légat  (10  novembre)  qu'il  devait  différer 
de  se  mettre  en  campagne  pour  le  Saint-Siège  jusqu'au  moment  où  il  au- 
rait réglé  le  différend  avec  le  comte  de  Toulouse,  qui  occupait  Marseille 
et  le  Comtat-Venaissin.  [Hist.  de  Lang.,  VIII,  col.  1033.) 

3.  J'appelle  néanmoins  l'attention  sur  une  difficulté  soulevée  par  un 
vers  de  la  tornade  :  «  Je  voudrais,  dit  l'auteur,  voir  flotter  la  bannière 
d'Aragon,  lai  devas  Monfort.  »  C'est  là  une  façon  singulière  de  désigner 
la  Provence  ou  le  Languedoc,  les  deux  localités  méridionales  de  ce  nom 
étant  situées  dans  le  Gers  ot  les  Landes.  Faudrait-il  traduire  par  :  «  là 
où  est  Montfort?  »  Mais  l'expression  serait  bien  singulière,  ot  Amauri  de 
Montfort,  qui  n'était  pas,  du  reste,  un  adversaire  redoutable  et  ne  ser- 
vait pas  le  comte  de  Provence,  avait  quitté  le  Midi  au  plus  tard  en  1239. 

•4.  De  los  trobadores,  etc..  p.  171-2. 


UN   ÉVEQUE   DE   VENGE 

DEVANT    L'INQUISITION 


On  sait  quel  rôle  la  famille  des  Grimakli  de  Beiiil  joua  dans 
le  comté  de  Nice  et  en  Provence^  C'est  un  de  ses  membres, 
Jean  Grimakli,  gouverneur  du  comté  de  Nice,  qui  amena 
cette  ville  à  se  donner,  en  1388,  au  comte  de  Savoie.  En  1507 
et  1508,  Georges  Grimaldi  et  son  fils  Jean,  seigneur  de  Le- 
vens,  furent  accusés  de  préparer  l'annexion  du  comté  de  Nice 
à  la  France.  Dénoncés  au  duc  de  Savoie,  ils  se  virent  aban- 
donnés par  le  roi  de  France,  qui  négociait  avec  le  duc  au 
sujet  de  la  ligue  de  Cambrai;  Georges,  assiégé  dans  son  châ- 
teau, fut  assassiné  par  son  barbier,  et  Jean  condamné  au  ban- 
nissement et  à  la  confiscation  de  ses  biens.  En  1526,  nouveau 
complot  qui  devait  encore  servir  les  vues  de  la  France.  Enfin, 
en  1G17,  Annibal  Grimaldi.  lieutenant  général  du  duc  dans 
le  comté,  fit  passer  sa  baronnie  de  Beuil  sous  la  suzeraineté 
et  la  sauvegarde  du  roi  de  France;  mais  Louis  XIII  ne  lui 
maintint  passa  protection;  le  fief  fut  réuni  au  domaine  ducal; 
Annibal,  condamné  à  la  peine  capitale,  ainsi  que  son  fils 
André,  puis  assiégé  dans  le  château  de  Tourettes-Revest, 
périt  étranglé  2. 


1.  Saige,  Monaco,  Paris,  Hachette.  1897,  p.  42,  75,  101:  Docum.  Ids- 
toriq.  sur  la  princip.  de  Monaco,  toni.  II,  1890  et  tom.  III,  1891;  Char- 
trier  de  Saini-Pons,  1903. 

2.  Sur  Annibal  et  André  Grimaldi  de  Beuil,  voir  Saige,  Docum.  histor. 
sur  la  princip.  de  Monaco,  tom.  III,  p.  cl  et  clxxx,  295  et  434. 


UN   ÊVÈQUE    DE   VENCE    DEVANT    L'LNQUISITION.  331 

L'im  des  membres  de  cette  ûimille,  l'oncle  même  du  trop 
fameux  Annibal,  a  appartenu  à  l'Église;  mais  il  n'en  fut 
qu'un  dignitaire  équivoque,  du  moins  pendant  quelques  an- 
nées où  ses  croyances  religieuses  flottèrent  du  catholicisme 
aux  opinions  nouvelles  et  inversement. 

Louis  Grimaldi  de  Beuil',  —  frère  d'Honoré  que  le  duc  de 
Savoie,  Emmanuel-Philibert-,  nomma  le  17  septembre  1560 
gouverneur  du  comté  de  Nice  et  le  19  août  1561  colonel  et 
commandant  d'armes  de  la  cité'',  —  avait  été  fait  clerc  à 
Nice  en  1552,  puis  protonotaire  apostolique ^  En  1560  il  de- 
vint évéque  de  Vence,  succédant  à  J.-B.  Rambaud  de 
Simiane,  qui  fut  transféré  à  Apt''.  Il  recevait  la  mitre  au  mo- 
ment où  le  duc  de  Savoie  venait,  en  vertu  du  traité  de 
Cateau-Cambrésis,  d'épouser  Marguerite  de  France,  fille  de 
François  P''  et  tante  de  François  II,  qui  régnait  chez  nous^. 
On  sait  dans  quel  trouble  étaient  alors  les  idées  religieuses. 
Des  prêtres,  des  évêques  même,  abandonnaient  le  catholi- 
cisme et  se  faisaient  protestants. 


1.  Sur  Louis  Grimaldi  do  Beuil,  voir  Saige  et  comte  Caïs  do  Pievlas, 
Chcu'trier  de  Saint-Pons,  p.  xxv,  xxviii  et  xxx,  iSô  à  4:38. 

2.  Le  duc  régnait  dopuis  le  17  août  1558. 

3.  Tisserand,  yice  et  Alpes-Maritimes ,  p.  .52.  Louis  et  Honoré  étaient 
fils  de  René  et  de  Thomasino  de  Lascaris  {ibid.,  p.  .59).  Celle-ci  avait  pour 
père  Pietrino,  coseigneur  de  la  Briga.  René  fut  inculpé  do  haute  trahison 
envers  le  duc  de  Savoie,  reçut  son  pardon  et  périt  dans  un  guet-apens 
(Gioffredo,  Storia  délie  Alpi  Marittime,  Turin,  1839).  Honoré  fut  cheva- 
lier de  l'Annonciade,  seigneur  de  Toudon,  etc.. 

•1.  «  Protonotaire  du  cardinal  RodolpJie  de  Savoie.  »  (Tisserand,  op.  cit., 
p.  59.)  Cette  phrase  ne  signifie  rien.  Ou  n'est  pas  le  pi-otonotaire  de  quel- 
qu'un. Quant  au  cardinal  dont  parle  Tisserand,  je  ne  le  connais  pas. 
Giofî'redo  dit  mieux  que  L.  Grimaldi  de  Beuil  était,  entre  autres  titres. 
Cl  protonotaire  apostolique  ». 

5.  Rappelons  que  .J.-B.  de  Simiane,  fils  de  Bertrand-Raimbaud  IV,  — 
et  frère  cadet  de  Bertrand,  qui  fut  lieutenant  général  du  Dauphiné  et  fit 
venir  Cujas  à  Vienne,  —  était  né  le  29  novembre  1520.  Il  étudia  aux  Uni- 
versités de  Toulouse,  d'Avignon,  de  Padoue  (où  il  est  cité  parmi  les 
juristes  en  juill(>t  1512)  et  de  Ferrare  (où  il  fut  reçu  docteur  es  droits  le 
14  juillet  1545).  Evoque  de  Vence  en  1.555.  —  Voir  E.  Picot,  Journal 
des  Sava)its .  mars  1992,  pp.  155  et  suiv.,  à  propos  de  l'Université  de 
Ferrare. 

6.  Henri  II  était  mort  le  19  juillet  1559  et  François  II  mourut  dés  le 
5  décembre  1590.  Le  mariage  d'Emmanuel-Philibert  et  de  Marguerite  eut 
lieu  le  9  juillet  1559,  la  veille  de  la  mort  de  Henri  IL 


332  G.    DOUBLET. 

Transféré  à  Apt,  J.-B.  de  Simiane  apostasia  en  1571  :  il 
«  n'avait  pas  laissé  »,  dit  Tisserand,  «  pressentir  sur  le  siège 
de  Vence  le  scandale  qu'il  donna  sur  l'autre  ^  ».  Grimaldi,  qui 
lui  succédait  à  Vence,  commença  par  y  poursuivre  les  héréti- 
ques. Le  duc  de  Savoie  Emmanuel-Philibert  ne  cessait  d'en- 
gager les  évêques,  ceux  de  Vintimille,  de  Nice,  de  Glandèves, 
de  Vence,  —  diocèse  duquel  dépendaient  au  spirituel  trois 
villages  relevant  au  temporel  de  la  Savoie 2,  —  à  extirper, 
par  de  fréquentes  prédications,  les  opinions  hostiles  aux  dog- 
mes romains.  Louis  de  Beuil  convertit  au  catholicisme  sa 
belle-sœur^;  il  siégea  au  colloque  de  Poissy,  qui  se  réunit  en 
août  1561  selon  le  vœu  de  l'HôpitaP;  il  prit  part  aux  dernières 
opérations  du  concile  de  Trente"'.  En  avril  1562,  le  conseil  de 
Vence  avait  demandé  inutilement  au  roi  Charles  IX  que 
révêque,  «  étant  donné  les  grands  troubles  qui  sont  journelle- 
ment en  ce  pays  pour  la  nouvelle  religion  *,  fût  dispensé  de 
se  rendre  à  ce  concile 6;  il  y  alla',  mais  n'en  revint  pas 
aftérmi  dans  la  foi  catholique,  bien  au  contraire.  A  son  re- 
tour, il  se  rapprocha  du  baron  de  Vence  qui  était  calviniste  : 
d'abord  pour  des  affaires  de  juridiction  qui  ne  concernaient 


1.  Tisserand,  Nice  et  Alpes-Marit.,  II,  p.  58.  Voir  aussi  P.  Anselme, 
Hist.  généal.,  II,  p.  245  C. 

2.  Gattières,  Bouyon  et  Dos-Fraires  ou  le  Pharaon  (hameau  du  Broc 
dont  l'agglomération  principale  était  française). 

3.  Outre  Honoré,  qui  épousa  Giulia,  fille  de  Nicolo  Piccamiglio,  Génois, 
Louis  Grimaldi  de  Beuil  avait  pour  frères  :  Pierre,  qui  fut  gentilhomme 
de  la  chambre  ducale;  Jean-François,  qui  épousa  Sibylle  de  Saint-Tropez; 
Alexandre,  frère  Jacques,  dit  La  Val,  chevalier  de  Malte  et  commandeur 
à  Nice  (Gioffredo,  op.  cit.).  Il  avait  aussi  des  sœurs.  Quelle  est  la  belle- 
sœur  que,  d'après  les  uns,  il  convertit  au  catholicisme  et  que,  suivant 
d'autres,  il  gagna  au  calvinisme?  Je  l'ignore. 

4.  Rappelons,  pour  ce  qui  suit,  que  Théodore  de  Bèze  y  nia  absolument 
la  présence  réelle  de  Jésus-Christ  dans  l'Eucharistie. 

5.  Tisserand,  op.  cit,  p.  67. 
(5.  Ibid.,  p.  68. 

7.  Comme  ambassadeur  du  roi,  dit  Gioffredo  (op.  cit.,  Y,  p.  443),  en 
compagnie  du  cardinal  de  Saint-Apollinaire,  Charles  de  Lorraine,  arche- 
vêque de  Reims  et  abbé  de  Cluny,  qui  avait  représenté  la  France  au  col- 
loque de  Poissy.  Lamberto,  évèque  de  Nice ,  Clausse,  évêque  de  Senez, 
et  Guillaume  d'Avanson  de  Saint-Marcel,  archevêque  d'Embrun,  se  trou- 
vèrent aussi  au  concile  de  Trente. 


UN   ÉVÈQUE  DE   VENCE   DEVANT  l'INQUISITION.  333 

en  rien  les  questions  religieuses',  puis  sur  le  terrain  d'idées 
qui  ne  ressemblaient  nullement  aux  dogmes  que  le  Saint-Siège 
enseigne  et  impose  à  ses  fidèles.  Il  fut  dénoncé  à  Rome  comme 
hérétique^  et  cité  pour  répondre  de  sa  conduite-'.  «  Nous 
avons  »,  dit  Tisserand,  «  l'acte  par  lequel,  le  13  avril  1573, 
en  présence  du  Sacré-Collège*,  il  avait  rétracta  aux  pieds  de 
Grégoire  XIII  l'hérésie  de  Calvin  et  accepté  la  pénitence  qui 
lui  fut  imposée^  ».  Mais  l'historien  de  Nice  n'analyse  même 
pas  ce  curieux  document. 

Il  fut  prouvé  que,  si  l'évêque  avait  participé  aux  sessions  du 
concile  de  Trente  sous  Pie  IV  en  1562  et  1563,  il  avait  quitté 
ensuite  les  dogmes  de  Rome,  afin  de  suivre  les  idées  de  Luther 
et  de  Calvin.  On  établit  contre  lui  —  ce  qu'il  reconnut  lors 
du  procès  qu'il  dut  subir  devant  l'Inquisition  au  lendemain  de 
la  Saint-Barthélémy  —  que,  «  pendant  beaucoup  d'années  », 
donc  postérieurement  à  la  clôture  du  concile,  au  plus  tôt  de- 
puis 1564,  il  avait  hérétiquement  admis  :  «  i"  que  dans  le  Très 
Saint-Sacrement  de  l'Eucharistie  le  corps  et  le  sang  de 
Notre-Seigneur  Jésus- Christ  ne  se  trouvaient  pas  réellement; 
2"  qu'il  n'existait  que  deux  sacrements,  le  baptême  et  la  cène, 
à  la  façon  des  hérétiques;  3"  que  l'homme  était  justifié  par  la 
foi  seule,  sans  le  concours  des  bonnes  œuvres  ;  4°  que  les 
vœux  religieux  ne  liaient  pas  et  que  les  |)rôtres  pouvaient  se 
marier  ;  5°  que  les  saints  n'entendaient  point  nos  prières  et 
n'intercédaient  pas  auprès  de  Dieu  pour  nous,  et  qu'en  consé- 
quence la  glorieuse  Vierge  Marie  et  les  saints  eux-mêmes  ne 
devaient  pas  être  invoqués,  et  qu'il  ne  fallait  pas  posséder 
leurs  images  ;  6"  qu'un  purgatoire  n'était  pas  accordé  après  la 

1.  Usait-il  du  droit,  laissé  par  le  roi  aux  évêques,  de  vendre  leur  tem- 
porel? Cédait-il  aux  sollicitations  du  baron?  Le  fait  est  qu'il  se  mit  à 
aliéner,  contrairement  aux  anciennes  transactions,  les  juridictions  de 
Vence,  Besaudun,  Bouyon-en-Savoie,  l'Olive,  le  Ganadel,  Saint-Laurent, 
vente  qui  d'ailleurs  fat  annulée  le  3  décembre  1574. 

2.  Tisserand,  oj).  cit.,  p.  72. 

3.  Ibid.,  p.  59. 

4.  Double  erreur  de  Tisserand.  C'est  le  jeudi  l(j,  non  le  13,  qu'il  se  ré- 
tracta, et  ce  fut  devant  le  Saint-Office,  en  présence  du  pape  et  de  quatre 
membres  seulement  du  Sacré-Collège. 

5.  Tisserand,  op.  cit.,  pp.  78  sqq. 


334  G.    DOUBLET. 

vie  présente  el  qu'il  n'était  pus  nécessaire  de  prier  pour  les 
morts;  T*^  que  le  Souverain-Pontife  n'avait  pas  une  autorité 
plus  grande  que  celle  de  n'importe  quel  auti'e  évèque.  »  Bref, 
tout  ce  que  l'Église  catholique  ndève  d'erreurs  et  d'hérésies 
dans  le  catéchisme  de  Luther  et  dans  V Institution  chrétienne 
de  Calvin.  Louis  de  Beuil  avait  gardé  et  lu,  sans  la  permis- 
sion de  ses  supérieui's,  les  livres  de  divers  hérétiques.  Il  avait 
même  entraîné,  dans  les  hérésies  où  il  était  tomhé,  une  de  ses 
parentes,  la  femme  de  l'un  de  ses  frères'.  Le  pontificat  de 
Pie  IV  s'acheva,  semhle-t-il,  et  assurément  celui  de  saint 
Pie  V  s'écoula  sans  que  noire  évèque  de  Veuco,  qui  avait 
cessé  d'être  catholique,  se  préoccupât  de  rentrer  dans  la  reli- 
gion dont  il  continuait  à  être  l'un  des  prélats. 

Le  jeuili  16  avril  1573,  à  Rome,  l'évêque  hérétique  abjura 
SCS  hérésies  et  revint  aux  dogmes  catholiques,  en  présence 
du  Saint-Offlce,  dans  le  palais  apostolique.  Assistèrent  à  son 
abjuration  le  pape  Grégoire  XIII 2,  qui  régnait  depuis  moins 
d'un  an,  et  les  Inquisiteurs  généraux,  Scipion  Rebiba,  car- 
dinal-prêtre de  Sainte-Marie  in  Transtevere^ ,  François 
Pacheco,  cardinal-prêtre  de  Sainte-Croix  en  Jérusalem*, 
Louis  Mandruci,  cardinal-prêtre  de  Saint- Ouuphre%  et  Jean- 


1.  Lequel?  Je  l'ignore. 

2.  Evèque  de  Vesli  (siège  suffragant  de  Siponto),  dans  la  Capitanate,  sous 
Paul  IV  Caraffa,  qui  i-égna  de  1555  à  1559,  Ugo  Buonconipagno,  Bolonais, 
avait  été  fait  par  Pie  IV,  à  la  promotion  du  12  mars  1565,  cardinal-prèlre 
de  Saint-Sixte-le-Vieux  in  via  Appia.  Il  fut  élu  pape,  le  18  mai  1.572. 
pour  remplacer  Pic  V,  et  couronné  le  25.  Il  mourut  le  10  avril  1585.  Son 
neveu  Philippo  le  remplaça  le  2  juin  1.572  comme  cardinal  de  Saint-Sixte. 

3.  Sicilien,  fait  par  Paul  IV,  en  décembre  1555,  cardinal-prêtre  de  Sainte- 
Pudentienne,  il  fut  archevêque  de  Pise,  patriarche  de  Constantinople  et 
évèque  de  Sabine.  Il-  mourut  en  1577.  Le  Trésor  de  chronologie  de  Mas- 
Latrie  ne  dit  pas  qu'il  ait  été  cardinal  de  Sainte-Marie  in  Transtevere. 

4.  Espagnol,  fait  par  Pie  V,  le  26  février  1561,  cardinal-prêtre  de  Sainte- 
Suzanne,  puis  de  Sainte-Pndentienne,  il  fut  archevêque  de  Burgos.  11 
mourut  en  1579.  Le  Trésor  de  chronologie  ne  dit  jias  non  plus  qu'il  ait 
été  cardinal  de  Sainte-Croix  en  Jérusalem. 

5.  Né  à  Trente,  évêquc  de  cette  ville  et  de  Brcscia,  il  avait  été  fait  par 
Pie  IV,  le  26  février  1551,  cardinal-diacre  de  Saint-Calixte,  puis  de  Saint- 
Onuphre.  Le  Trésor  de  chronologie  dit  qu'il  devint  ensuite  cardinal- 
prêtre  de  Sainte-Anastasie,  puis  de  Saint-Laurent  in  Lucina,  cardinal- 
évêque  de  la  Sabine,  puis  de  Frascati,  et  qu'il  mourut  en  16UU.  Il  avait, 


UN  EVÈQUE  DE  VENCE  DEVANT  L*INQUISrnON.     335 

Paul  de  Chiesa,  cardinal-prêtre  do  Saiat-Pancrace  ^  Le 
Dolaire  Claude  Duval'^,  clerc  conjugcdus'^  du  diocèse  de 
Cambrai,  citoyen  romain,  notaire  et  secrétaire  de  l'Inquisi- 
tion, dressa  l'acte.  Les  témoins  de  l'acte  furent  Antoine 
Balducci  de  Forli,  dominicain,  commissaire  général  de  l'In- 
quisition et  maître  du  palais  apostolique,  et  Jean-Baptiste 
Bruguatelli  de  Bobbio ,  docteur  en  l'un  et  l'autre  droits, 
assesseur  du  Saint-Office. 

Louis  de  Beuil  se  mit  à  genoux  devant  Grégoire  XIII  qui 
était  sur  son  trône,  et  demanda  le  pardon  de  ses  erreurs. 
J.-B.  Bruguatelli  lut  la  sentence,  que  le  notaire  transcrivit  aus- 
sitôt. Il  y  est  dit  que,  sous  le  pontificat  de  Pie  VS  Louis  de 
Beuil  était  venu  à  Rome  pour  représenter  le  duc  Emmanuel- 
Philibert  de  Savoie  •%  «  qui  ignorait  alors,  nous  le  croyons  », 
l'état  d'âme  ^'  où  se  trouvait  son  ambassadeur.  Pie  V,  ajoute 
la  sentence,  avait  entendu  dire  que  le  prélat  était  suspect 
d'hérésie;  il  se  refusa  donc  à  le  recevoir  jusqu'à  ce  que  son 
orthodoxie  lut  prouvée,  mais  ne  le  fit  pas  retenir  à  Rome  :  il 
le  laissa  partir  parce  que  c'était  un  évêque  et  un  ambassadeur 
du  duc  de  Savoie,  par  c^gard  pour  ce  prince. 

Le  choix  lui  était  ainsi  donné  ou  de  rester  à  Rome  pour' 
établir  sur  le  champ  son  orthodoxie,  ou  de  retourner  auprès 
de  son  maître  pour  résigner  les  fonctions  qu'il  avait  reçues 
de  lui  :  après  quoi  il  reviendrait  se  justifier  devant  le  pape. 


ainsi  que  Charles  do  Lorraine,  siégé  au  concile  de  Trente  :   tous  deux 
étaient  les  cardinaux  non-légats. 

1.  Né  à  Tortone,  fait  par  Pie  V,  en  mars  1568,  cardinal-diacre  (do  quel 
titre,  le  Trésor  de  chronologie  ne  le  dit  point),  puis  cardinal-prêtre  de 
Saint-Pancrace,  on  1568  aussi  ;  il  mourut  en  1575. 

2.  Ou  bien  «  délia  Valle  ». 

3.  Voir  l'explication  du  mot  dans  Du  Cange. 

4.  Pie  V  Ghisleri,  qui  fut  béatifié  par  Clément  X  en  1672  et  canonisé 
par  Clément  XI  on  1712,  avait  été  élu,  le  7  janvier  1566  et  couronné  le  17. 
Il  organisa  contre  le  sultan  Sélim  II  l'expédition  naai-itime  qui  aboutit, 
en  1571,  à  la  victoire  de  Lépante.  On  sait  avec  quelle  énergie  cet  ancien 
dominicain,  qui  avait  été  inquisiteur  général  pour  les  Etats  romains  sous 
Paul  IV,  s'appliqua,  dans  Rome  même,  à  la  réforme  de  l'Eglise  selon  l'es- 
prit du  concile  de  Trente.  Il  étaitmortle  l"  mai  1572:  on  célèbre  sa  fête  le  5. 

5    Duc  de  1553  à  158U. 
6.  Qualitates,  dit  le  texte. 


336  G.   DOUBLET. 

Tant  que  Pie  V  vécut,  Louis  de  Beuil  ue  remit  pas  les  pieds 
à  Rome.  Après  l'élection  de  Grégoire  XIII,  donc  à  la  fin 
de  1572  ou  au  début  de  1573,  c'est  de  lui-même,  ajoute  la 
sentence,  qu'il  y  revint,  et  qu'il  promit  d'être  désormais  bon 
catholique;  le  procès  eut  lieu;  il  fut  établi  qu'il  était  non 
suspect  d'hérésie ,  mais  formellement  hérétique,  et  depuis 
beaucoup  d'années,  per  rrtultos  annos.  Le  pape,  après  avoir 
consulté  les  Inquisiteurs  généraux,  proclama  qu'il  avait 
encouru  criminellement  les  peines  prononcées  par  les  Consti- 
tutions Apostoliques  et  les  saints  Canons  contre  les  héré- 
tiques, le  condamna,  puis  eut  égard  à  son  repentir,  ou  à  son 
désir  de  rentrer  dans  l'Église  Romaine  et  d'abjurer  les  héré- 
sies, à  son  affirmation  que  depuis  quelques  années,  ab  aliquot 
annis  cih^a,  il  était  revenu  aux  dogmes  de  l'Église  catholique 
et  qu'il  y  croyait  désormais  avec  fidélité.  Le  pape  usa  de 
douceur;  il  insista  sur  ce  que  c'était  en  dehors  de  toute  con- 
trainte que  le  coupable  se  présentait  devant  lui  et  avouait  ses 
erreurs;  il  constata  que  Louis  de  Beuil  s'était  bien  conduit 
au  concile  de  Trente',  qu'il  avait  depuis  beaucoup  d'années, 


1.  Le  détail  est  à  noter.  Louis  de  Beuil  avait  été  nommé  évèque  en  1560 
et  préconisé,  par  conséquent,  par  Pie  IV  Medici  ou  Medichino,  l'oncle 
de  saint  Charles  Borromée,  et  c'est  ce  pape  qui  réunit  de  nouveau  le 
concile  de  Trente  en  15(50,  fit  reprendre  les  travaux  interrompus  depuis 
1552,  procéda  à  la  clôture  de  la  fameuse  assemblée,  confirma  et  publia 
en  1564  ses  décrets  dans  toute  la  chrétienté.  Si  l'on  consulte  la  liste  des 
pères  du  Concile,  on  y  trouve,  en  effet,  parmi  les  «  Episcopi  Pii  quarti  y>, 
le  nom  de  Liidovicus  de  Beuil,  Gallus,  episc.  Venciens.  Si  Louis  de 
Beuil  participa  do  1562  à  1564  aux  dernières  opérations  du  concile  que 
Paul  HT  avait  ouvert  et  que  Jules  III  n'avait  pu  clore,  il  n'en  fut  pas 
moins  entraîné,  sous  le  pontificat  du  successeur  de  Pie  IV,  à  quitter 
Eome  pour  le  calvinisme.  L'archevêque  d'Embrun,  métropolitain  de 
Vence,  Guillaume  d'Avançon,  nommé  sous  Pie  IV  comme  Louis  de  Beuil, 
François  Lamberti,  évèque  de  Nice,  nommé  sous  Paul  III,  et  LTgo  Buon- 
compagno,  évèque  de  Vesti,  nommé  sous  Paul  IV  Carafi'a  —  il  devint 
cardinal  de  Saint-Sixte  sous  Pie  IV  et  pape  sous  le  nom  de  Grégoire  XIII 
—  avaient  également  pris  part  aux  sessions  du  concile  de  Trente.  De 
même  un  autre  suff'ragant  d'Embrun,  l'évèque  de  Senez,  Jean  Clausse. 
(Voir  chanoine  Espitalier,  Bull,  de  la  Soc.  d'études  de  Draguig7}an, 
t.  XXI,  1889,  p.  67.)  C'est  entre  les  mains  de  Louis  Grimaldi  de  Beuil 
et  celles  de  son  collègue  de  Marseille,  Pierre  Ragueneau,  que  Bertrand 
de  Romans,  nommé  évèque  de  Frèjus  en  1566,  fit  sa  profession  de  foi 
avant  de  prendre  possession.   [Ibid.,  p.  75.) 


UN    EVEQUE   DE    VENCE   DEVANT   l'INQUISITION.  337 

a  multis  annis  dira.,  fait  du  bien  aux  catholiques  et  tra- 
vaillé à  ramener  beaucoup  d'hérétiques,  notamment  sa  belle- 
sœur.  Il  lui  permit  de  lire  la  formule  de  son  abjuration,  renonça 
à  confisquer  ses  biens,  le  rétablit  dans  la  dignité  épiscopale 
et  dans  les  honneurs  dont  il  avait  été  ipso  jure  et  facto 
privé,  lui  imposa  pour  pénitence,  durant  une  année,  de  célé- 
brer à  chaque  quatrième  férié  une  messe  de  Requiem,  à 
chaque  cinquième  une  du  Saint-Esprit  ou  du  Saint-Sacre- 
ment, et  chaque  samedi  une  de  la  sainte  Vierge  (à  moins 
qu'une  fête  double  ne  se  présentât);  de  dépenser  durant  cette 
année  100  écus  d'or  soit  à  une  custode,  soit  à  un  tabernacle, 
pour  honorer  le  Saint- Sacrement  ;  de  faire  des  aumônes 
pour  les  âmes  des  défunts;  de  réciter  chaque  sixième  férié 
les  sept  psaumes  pénitentiaux  avec  les  litanies  et  collectes, 
devant  un  Crucifix  ou  une  Madone,  à  genoux;  de  dire  le 
rosaire  à  chaque  fête  de  précepte;  de  réciter  chaque  mois 
l'office  des  morts  en  entier,  et  de  jeûner  chaque  sixième 
férié. 

La  sentence  du  pape  rendue  et  lue,  l'évêque  se  mit  à  genoux 
devant  lui,  mit  la  main  sur  les  Évangiles,  abjura  ses  erreurs 
et  ses  hérésies  selon  une  formule  que  le  notaire  transcrivit. 
«  Moi,  indigne  évêque  de  Vence,  âgé  de  quarante  ans,  etc., 
je  ne  ferai  plus  d'actes  hérétiques,  je  ne  lirai  plus  les  livres 
des  hérétiques,  je  ne  me  rendrai  pas  à  leurs  réunions,  je  n'au- 
rai de  rapports  avec  eux  que  pour  les  ramener  à  la  foi,  et 
ceux  que  je  soupçonnerai,  je  les  signalerai  sans  retard  à  qui 
de  droit;  je  ferai  ma  pénitence,  et  si  jamais  je  retourne  aux 
idées  que  j'abjure,  je  me  soumets  aux  châtiments  prononcés 
contre  les  relaps  ». 

Acte  fut  dressé  du  tout'. 

Louis  de  Beuil  résigna  son  évêché  de  Vence  en  1576.  Il  se 
retira  en  Savoie,  d'abord  auprès  de  son  frère  Honoré,  le  gou- 
verneur de  Nice.  Puis,  il  fut  nommé  abbé  de  Saint-Pons  et 


1.  Une  copie,  prise  au  xyii°  siècle,  de  cet  acte  si  important  pour  l'iiis- 
toire  de  l'église  de  Vence  existe  aux  Archives  départementales  des  Alpes- 
Maritimes,  Ec.  de  Vence,  G.  48.  Tisserand  n'y  a  fait,  je  l'ai  dit  plus  haut, 
qu'une  allusion  rapide. 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVI.  23 


338  G.    DOUBLET. 

grand  aumôaier'  du  duc  Emmanuel -Philibert.  Enfin,  il 
devint  chancelier  de  l'ordre  de  l'Annonciade-.  Quand  le  duc 
Charles-EmmanueP  envahit  la  Provence  et  poussa  jusqu'à 
Aix,  en  novembre  1590,  «on  voyait  près  de  lui  Louis  de  Beuil, 
l'ex-évêque  de  Vence,  son  grand  aumônier,  Barcillon  de  Saint- 
Paul,  le  premier  consul  de  Vence,  les  évêques  de  Riez  et  de 
Sisteron^  ».  Louis  de  Beuil  figura  aux.  Etats  de  Provence  que 
le  duc  de  Savoie  avait  convoqués  pour]e22  janvier  1591  dans 
le  palais  archiépiscopal  d'Aix^  Le  dimanche  31  mai  1592, 
comme  évèque  titulaire  de  Vence  et  abbé  de  Saint-Pons,  il 
assista,  eu  même  temps  que  L.  Fiesco,  des  comtes  de  Lava- 
gna,  évêque  d'Albenga,  l'évéque  de  Nice,  G.-L.  Pallavicino,  à 
l'occasion  du  sacre,  fait  dans  la  cathédrale  Sainte-Réparate,de 
Guillaume  Le  Blanc^au  profit  de  qui  Clément  VIII  venait, 
par  une  bulle  en  date  de  février,  d'unir  les  deux  sièges  de 
Grasse  et  de  Vence''.  En  1593,  il  fut  envoyé  par  le  duc  de  Sa- 

1.  Tisserand,  Nice  et  Alpes-M.,  II,  pp.  78  et  suiv.  .Sur  l'élection  comme 
abbé  de  .Saint-Pons,  près  de  Nice,  faite  le  23  janvier  1590  et  confirmée  le 
10  février  par  le  vicaire-général  de  l'abbé  de  Saint- Victor,  voir  Gallia, 
tom.  III,  col.  24i  et  suiv.  Clément  VIII  Aldobrandini,  élu  le  30  jan- 
vier 1-592,  lui  délivra  la  bulle  de  provisions  de  cette  abbaye  le  26  avril. 
(Saige,  Chart.  de  St-Pons,  p.  435). 

2.  Voir  le  Dictionnaire  de  Moi'eri,  art.  Annonciade.  L'ordre  avait  été 
fondé  par  Amédée  VI,  dit  le  comte  vert.  Le  duc  Charles  III,  qui  en  fut 
en  1518  le  onzième  chef,  le  donna  à  Honorât  Grimaldi,  baron  de  Beuil, 
gouverneur  de  Nice  et  ambassadeur  en  France.  Le  duc  Emmanuel  Phili- 
bert, qui  en  fut  en  1568  le  douzième  chef,  à  un  autre  Honoré  Grimaldi, 
baron  de  Beuil,  qui  fut  aussi  gouverneur  de  Nice.  Le  duc  Charles-Emma- 
nuel I^',  qui  en  fut  en  1581  le  treizième  chef,  à  Annibal  Grimaldi,  comte 
de  Beuil,  gouverneur  de  Nice  lui  aussi  et  général  des  galères.  Quant 
aux  fonctions  de  chancelier  de  l'ordre,  elles  furent  occupées  par  des  pré- 
lats :  sous  Charles  III,  par  l'évéque  de  Belley,  Claude  de  Stavaye;  sous 
Emmanuel-Philibert,  d'abord  par  l'évéque  d'Asti,  Gaspard  Capris,  qui 
était  grand  aumônier  de  Savoie,  puis  par  l'archevêque  de  Tui-in,  Jérôme 
de  la  Rovère,  qui  était  cardinal-prètre  de  Saint-Pierre-aux-Liens  depuis 
décembre  1.580,  et  sous  Charles-Emmanuel,  par  notre  évêque  de  Vence, 
puis  par  l'archevêque  de  Turin,  Philibert  Millet. 

3.  Emmanuel-Philibert  mourut  le  oU  août  L580;  son  fils,  Charles-Emma- 
nuel I",  le  26  juillet  1630. 

4.  Tisserand,  loc.  cit.,  p.  101. 

5.  Giofl'redo,  op.  cit.,  VI,  p.  7. 

6.  Ibid.,  p.  25. 

7.  Voir  deux  articles  de  moi,  l'un  dans  les  Annales  du  Midi  de  1901  : 
Guillaume  Le  Blanc,  évêque  de  Grasse  et  de   Vence,  l'autre  dans  les 


UN   ÉVÉQUE   DE   VENCE    DEVANT   L'iNQÙISITION.  339 

voie  pour  convenir  d'une  trêve  avec  les  gens  du  roi  en  Pro- 
vence; il  revint  à  Nice,  le  27  septembre,  ramenant  d'Aix  des 
députés  chargés  de  traiter  avec  Charles-EmmanueP.  Louis 
Grimaldi  de  Beuil  songea,  quand  son  frère  mourut,  à  devenir 
gouverneur  de  Nice^.  Il  fut  comte  palatin,  «  cavalière  aurato  )i>, 
dit   Gioffredo^,   prieur  des  églises   paroissiales   Saint- Véran 
d'Utelle,  Saint-Antoine  de  Levens  et  Saint-Jean  du  Villars', 
grand  prieur  de  l'ordre  des  saints  Maurice  et  Lazare,  prévôt 
de  Saint-Jean  d'Avigliana  du  Monl-Cenis^.  Le  26  avril  1500, 
Sixte-Quint"  lui  permit  de  garder  le  titre  d'évêquo  de  Vence, 
bien  qu'il  eût  résigné  l'évêché,  et  la  prévôté  du  Mont-Cenis  : 
il  a  été  dit  qu'il   prit  possession  de  l'abbaye  le  15  septem- 
bre, et  Pallavicino,  évêque  de  Nice,  assista  à  la  cérémonie^. 
Le  2  février  1602,   le   collier  de  l'Annonciade  fut  donné  à 
Louis   Grimaldi   de  Beuil   et   à   son  neveu  Annibal*^,  gou- 
verneur de  Nice,  qui  devait  finir  sa  vie  d'une  manière  si 
tragique. 

En  1608,  malgré  son  grand  âge,  il  voulut  se  rendre  au  cha- 
pitre de  l'Annonciade,  se  mit  en  route  pour  Turin,  tomba  ma- 
lade à  Sospel,  se  fit  transporter  à  Menton  et  de  là,  sur  une 
galère,  à  Nice  où  il  mourut  le  5  février  1608.  Il  fut  enseveli  au 
couvent  de  Saint-Pons  parles  «Disciplinant!  del  Santo  Se- 
pulcro"  ». 

Deux  de  ses  successeurs  à  Vence  étaient  morts  à  cette  date, 
Audin  de  Garidel,  qui  le  remplaça  dès  1576,  et  Guillaume  Le 


Annales  de  la  Société  d'Études  provençales  de  19U4  :  La  bibliothèque 
de  G.  Le  Blanc. 

1.  Gioffredo,  lac.  cit.,  p.  4(J. 

2.  Ibid.,  p.  101. 

3.  Gioffredo,  op.  cit.,  V,  p.  154. 

4.  Ibid. 

5.  Ibid.,  p.  667. 

6.  Mort  le  27  août  1590. 

7.  Gioffredo,  loc.  cit.  L'abbé  do  Saint-Victor  rônfirnia  rr'iecliun  Je' 
Louis  Grimaldi  en  tant  qu'abbé  commendatairc  do  Saint-Pons  {Gallia, 
t.  m,  Inst.  col.  246).  Le  24  février  1593  une  convention  entre  L.  do  Gri- 
maldi et  les  moines  assura  leur  subsistance  (Saige,  Charf.  de  St-Pons, 
p.  XX. V  et  436). 

8.  Gioffredo,  VI,  p.  136. 

9.  Ibid.,  VI,  p.  162.] 


340  G.   DOUBLET. 

Blanc^  qui  fut  nommé,  en  septembre  1588,  èvêqiie  de  Vence 
et  presque  aussitôt,  par  surcroît,  évêque  de  Grasse.  Son  troi- 
sième successeur,  Pierre  du  Vair,  occupait  depuis  1601  le 
siège  des  saints  Véran  et  Lambert. 

C'est  ainsi  que  les  idées  de  Luther  et  de  Calvin  y  régnèrent 
un  instant  dans  la  personne  de  cet  évêque,  issu  d'une  famille 
dont  une  branche  —  celle  à  laquelle  il  appartenait  —  se  ren- 
dit célèbre  par  ses  trahisons  commises  envers  la  maison  de 

Savoie^. 

G.  Doublet. 


1.  Nous    avons  dit  que  Louis  de  Beuil  fut  un  des  trois  évèques  qui 
imposèrent  les  mains  à  celui-ci  le  31  mai  1592. 

2.  Gioffredo,  qui  fait  le  plus  grand  éloge  de  Louis  de  Beuil,  ne  dit  pas 
un  mot  de  sa  fugue  temporaire  dans  le  camp  des  calvinistes. 


MELANGES  ET  DOCUMENTS 


A   PROPOS   d'une   chanson   DE   PEIRE  D'ALVERNFIE. 
(Lettre  à  M.  A.  Jeanroy.) 

Cher  Maître, 

Dans  votre  compte  rendu  de  l'édition  de  Peire  d'Alvernhe 
par  M.  Zenker  {Romania,  XXXII,  313),  vous  avez  renoncé  à 
examiner  le  texte  de  la  pièce  III,  qui  vous  a  paru  un  tissu 
d'énigmes.  Dans  son  instructif  compte  rendu  publié  ici-même 
(XIV,  374)  M.  Goulet  n'avait  pas  cru  davantage  devoir  en  dire 
son  sentiment.  Quant  à  l'éditeur  même,  il  a  remplacé  par  des 
points  de  suspension  la  traduction  de  quelques  vers  et  reconnu 
que  son  interprétation  de  quelques  autres  était  bien  incer- 
taine. Permettez-moi  de  vous  demander  l'bospitalité  des 
Annales  du  Midi  pour  ces  quelques  notes,  qui,  si  elles  appor- 
tent peu  de  certitudes  absolues,  me  paraissent  du  moins 
suggérer  pour  quelques  vers  des  interprétations  très  plausi- 
bles. Cette  pièce,  véritable  manifeste  littéraire,  est  assez  inté- 
ressante pour  mériter  quelques  efforts. 

Voici  la  strophe  I  d'après  le  ms.  V,  légèrement  modifié  par 
M.  Zenker  (l'ablation  d'une  vignette  n'en  a  laissé  subsister 
dans  E  que  quelques  syllabes)  : 

Sobrel  vielh  trobar  ei  novel 
ï         Vuelh  mostrar  mon  sen  als  sabens, 


34-'  ANNALES   DU    MIDI. 

Qu'entendon  be  cil  que  a  venir  so 
4    Qu'une  tro  per  me    no  fo  faitz  vers  entiers; 

E  qui  non  cre  qu'eu  sia  vertadiers 
6    Auja  dese    con  estau  a  razo. 

Le  texte  est  satisfaisant  (au  v.  5  je  lirais  plutôt  qiien);  aux. 
excellentes  observations  de  M.  Zenker  je  n'en  ajouterai 
qu'une  :  au  v.  4  qu'âne  tro  per  me  no  fo  faitz  vers  entier, 
le  pléonasme  n'est  qu'apparent;  jusqu'à  moi  il  n'a  pas  été 
fait  de  vers  parfait;  et  il  en  a  été  fait  un  par  moi.  —  Le  sens 
est  trop  clair  pour  qu'une  traduction  soit  néce.ssaire. 

La  strophe  II  est  plus  difficile;  en  voici  le  texte  d'après 
M.  Zenker'  : 

Qu'ieu  tenli  l'us  e"l  pan  e-1  coutel 
8         De  que-m  platz  apanar  las  gens; 

Que  d'est  mestier    s'an  levât  capairo 
10    Ses  acordier    que  no-s  rorapa'l  seradiers; 

Qu'ieu  die  (dese)    e  mostr'els  faitz  no  (vers) 
12    Qu'a  fol  parlier    ten  om  lui  e'I  sermon. 

Les  v.  9-11  n'ont  pas  été  traduits  par  M.  Zenker.  Je  com- 
prends le  premier  :  «  pour  [faire]  ce  même  métier  se  sont  levés 
des  chaperons».  Le  poète  donne  ironiquement  le  nom  de  cha- 
perons à  des  poètes  présomptueux  et  sots,  qu'il  juge  indignes 
du  nom  de  trobadors.  Le  contenant  est  pris  pour  le  contenu 
comme  dans  l'expression  actuelle  :  «  un  gros  bonnet  »;  cf. 
«  A  telz  chaperons  esbahys  »  (E.  Deschamps  dans  Lacurne) 
et  «  Une  assez  bonne  adventure  advint  à  un  chaperon  fourré 
du  Parlement  »  (Cent  Nouvelles  dans  Liltro).  —  Le  moine 
de  Montaudon  {Pos  Peire,  v.  4)  a  aussi  employé  l'expression 
levar  se  en  parlant  de  poètes  parvenus  à  la  notoriété. 

V.  10.  Rompre  l  semdier  doit  signifier  «  faire  dévier  le 
sentier»  :  ces  gens  là  n'ont  pas  à  cœur  de  suivre  le  droit 


1.  [La  singulière  métaphore  du  vers  7  se  retrouve  dans  la  nouvelle  leçon 
d'une  pièce  do  Guillaume  IX  [Ab  la  doussor)  publiée  récemment  par 
M.  Bortoni  {Nuove  rime  provenzali,  p.  23;  extrait  des  Studj  romanzi, 
n°  2)  :  7I0S  naven  lo  pan  el  cotel.  —  A.  J.]. 


MELANGES   ET   DOCUMENTS.  343 

chemin;  cf.  I,  21-2  :  qui  de  gaug  a  dezùHe?'  —  ienga  a  dreit 
so  semdier. 

Pour  le  V.  11,  M.  Zenker  a  reproduit  la  leçon  de  V,  en  met- 
tant entre  parenthèses  les  mots  qui  faussent  la  rime;  l'autre 
ms.  (nous  n'en  avons  que  deux  pour  cette  pièce)  nous  fournit 
au  moins  la  rime  en  -iers ;  il  suffît  de  lire  nier  au  lieu  de  ner. 
Il  faut,  à  la  fin  du  vers  (E  :  si  mostron  faitz  nouers)  une 
correction  plus  radicale;  je  propose  :  si  mostra'l  fatz  obriers. 
Quant  à  nier  il  suffit  de  se  reporter  à  I,  19  pour  voir  que  cet 
adjectif  peut  avoir  le  sens  de  «  mauvais,  blâmable  »;  mosira 
pour  mostron  s'impose;  en  effet  vous  m'avez  fait  remarquer 
vous-même  et  M.  Zenker  a  bien  vu  que  le  v.  11  appelle  ici  un 
substantif  au  singulier  :  après  avoir  attaqué  les  «  chaperons  » 
en  général,  Peire  en  prend  un  seul  à  partie.  Je  traduirais 
donc  :  «  Pour  faire  ce  métier  se  sont  levés  des  individus  non 
soucieux  de  se  tenir  dans  le  droit  sentier;  et  je  dis  que  plein 
de  noirceur  (maladresse)  se  montre  le  sot  ouvrier*  ;  aussi  les 
tient-on  pour  fous,  lui  et  son  discours  ». 

Voici  le  texte  de  la  strophe  III,  tel  que  l'a  constitué  M.  Zen- 
ker, avec  les  leçons  des  deux  ms.  : 

Qu'a  un  tenen  ses  mot  borrel 
14         Deu  de  dir  esser  avinens; 

Car  qui  trassalh    de  Mauri  e  Mire, 
16    Entrai  mieg  falh    si  no's  pren  ah  ladriers, 

Com  del  trebalh    quecs  motz  fas  messatgiers  ; 
18    Qu'en  divinaZ/i    met  l'auzir  de  maiso. 


1.3  da  u.  V;  cazun  tenen  sen  moc  borrel  E;  boreil  V.  —  15  tras  al  de 
maiirmen  miran  E.  —  16  ladreis  E.  —  17  queix  mot  V;  quieis  motz  fatz 
treza"iers  E.  —  18  diuinar  V:  deuinar  E.  —  18  dainaion  E. 


1.  Un  certain  Bernard  Martin  a  lo  pintor  »  se  crut  visé  par  Peire, 
comme  le  montre  sa  virulente  réplique  (éd.  Zenlvcr,  p.  20  et  suiv.).  Si 
c'était  réellement  à  lui  qu'en  avait  notre  poète,  lo  mot  obriers  se  justi- 
fierait de  lui-même.  [Il  me  paraît  se  justifier,  même  sans  cette  circons- 
tance :  Guillaume  IX  (et  d'autres  après  lui)  parle  de  son  «  métier  »,  de 
son  «  atelier  »  [Ben  voill,  str.  1);  c'était  un  véritable  métier,  on  effet, 
exigeant  des  qualités  techniques,  que  l'art  tel  qu'il  était  alors  prati- 
qué. —  A.  J.) 


344  ANNALES   DU   MIDI. 

M.  Zenker  considère  (p.  180)  cette  strophe  comme  «  irré- 
médiablement altérée  »,  et  après  avoir  semé  de  points  d'inter- 
rogation la  traduction  des  trois  premiers  vers,  renonce  à  tra- 
duire les  suivants.  Il  énumère  les  divers  essais  d'interpréta- 
tion, qui,  en  effet,  ne  sont  guère  admissibles.  Je  déclare  ne 
pas  mieux  comprendre  que  mes  prédécesseurs  le  v.  18,  qui 
doit  être  altéré;  pour  les  précédents,  le  texte  de  M.  Z.  me 
paraît  satisfaisant  (sauf  que  je  lirais  plutôt  au  v.  15  Mori, 
pour  obtenir  l'exacte  transposition  des  voyelles  de  Miro,  et  au 
V.  17  fœs,  c'est-à-dire  fa  se);  le  sens  serait  (il  faudrait  natu- 
rellement modifier  la  ponctuation  de  l'éditeur)  : 

«  Car  d'un  bout  à  l'autre,  sans  mot  superflu,  il  (l'auteur  ou 
le  discours)  doit  être  agréable  dans  ses  expressions;  car  celui 
qui  saute  de  Mori  à  Miro  (qui  transpose  les  parties  d'un  tout, 
qui  fait  des  coq-à-l'âne)  tombe  au  milieu  (de  son  chemin)  s'il 
ne  se  prend  aux  côtés  (s'il  ne  s'accroche  à  la  rampe).  De 
même  (?),  chaque  mot  est  messager  de  torture  (annonce  que 
l'auteur  s'est  mis  l'esprit  à  la  torture),  car  il  soumet  une 
énigme  à  l'auditeur  dans  la  maison  (??)  ». 

Str.  IV  : 

E  qui  qu'en  frima  ni  "n  fragel. 
20         Pus  qu'es  mos  trobars  tan  valens, 


22    leu  son  (iratz)    e  die  qu'ieu  soi  primiers 

De  ditz  eomplitz     vensen  mos  fatz  guerriers, 
24    Que-m  levon  cv'Uz    que  ieu  no  m'en  tenh  pro. 

Les  deux  premiers  vers  ont  été  fort  bien  saisis  par  M.  Zen- 
ker, et  je  traduirais  comme  lui  :  «  Qui  que  ce  soit  qui  en  fré- 
misse ou  bouillonne  (s'agite),  puisque  mon  art  est  si  parfait...  » 
Le  V.  21  manque;  mais  le  contexte  en  indique  au  moins  le 
sens  général  :  «  que  seul  un  sot  peut  le  contestera  »  —  Au 

22  quieu  s.  i.  e  d.  que  sol  E;  queu  sol  V.  —  23  uezen  V.  —  24  quem 
leuon  crini  cane  no  Ton  uertadiers  que  eu  metex  no  men  pusc  tener  pro  V; 
crim  E. 


1.  Je  ne  résiste  pas  à  la  tentation  d'en  proposer  une  restitution,  évi- 
demment très  hasardeuse  :  Qu'us  acropits  sols  mi  dira  de  no. 


MÉLANGES  ET  DOCUMENTS.  345 

V.  22,  me  foadant  sur  XII,  68,  je  propose,  au  lieu  de  iratz, 
([Lii  fausse  la  rime,  formitz  ^  Ou  aurait  donc,  pour  la  fin  de 
la  strophe,  le  sens  suivant  :  «  Car  je  suis  bien  pourvu  et  je 
soutiens  que  je  suis  le  premier  (des  troubadours);  par  mes 
œuvres  accomplies,  je  triomphe  de  mes  sots  adversaires  qui 
me  reprochent  à  grands  cris  de  n'en  tirer  aucun  profit-  ». 

Str.  V  : 

Doncs  com  qu'il  sion  d'un  tropel 
26          Menten  tôt  gent  er  per  las  dans  : 

le  'm  sen  sertas    del  mielhs  qu'es  e  que  fo, 
28    Ensegurai:    de  mon  chant  a  sobriers 

Vas  los  bauzas,    e  sai  que  die.  qu'estiers 
30    No  vengra  •!  gra«,     don  a  trop  en  sazo. 

Cette  strophe  ne  présente  pas  de  difficultés.  Je  lirais  seule- 
ment au  V.  28  (avec  V)  :  e  seg.  et  (avec  E)  :  e  sobriers,  a  so- 
briers  ne  me  paraissant  pas  pouvoir  former  une  locution 
adverbiale  Je  traduis  à  peu  près  comme  M.  Zenker  : 

«  Donc,  bien  qu'ils  (mes  sots  adversaires)  forment  tout  un 
troupeau,  ils  mentent  gentiment  par  les  dents,  car  je  me  sens 
certain  de  faire  mieux  que  ce  qui  est  et  a  été  (fait),  et  sûr  de 
mon  chant  et  supérieur  aux  fourbes,  et  je  dis  sciemment  que, 
sans  cela  (sans  mon  art  consommé)  ne  viendrait  pas  le  grain 
qui  est  en  abondance  à  la  saison  (voulue).  » 

Peire  d'Auvergne  se  vante  ici  de  sa  fécondité;  c'est  à  ce 
vers  que  Bernart  Martin  nous  semble  répondre  que  lui  ne 
fait  dans  toute  l'année  que  un,  deux  ou  trois  vers  au  plus. 


1.  [On  pourrait  proposer  aussi  arditz.  —  A.  J.] 

2.  [La  lacune  pourrait  être,  non  au  v.  21,  mais  aux  v.  22  (sauté  par  V) 
et  23-2'l  (dernier  Iiémistiche  du  premier  et  premier  hémistiche  du  second 
sautés  par  E).  On  pourrait,  en  combinant  les  deux  leçons,  proposer  la 
restitution  suivante  (au  v.  21,  il  suffit  d'une  simple  transposition  pour 
obtenir  la  rime;  quant  à  ma  correctien  au  v.  21,  elle  n'est  guère  moins 
chimérique,  je  le  reconnais,  c[ue  celle  de  M.  Dejeanne)  : 

Jeu  soi  arditz    e  die  qu'iou  primiers  so , 
De  ditz  complitz    vensen  mes  fatz  guerriers, 
Que  -m  levon  cri^a:    c'anc  no  fon  vertadiers. 
Que  d'etz  mos  ditz    no  m'en  pu[e]sc  tener  pro. 

A.  J.] 


346  ANNALES    DU    MIDI. 

Str.  VI.  Elle  n'est  conservée  que  dans  le  seul  ms.  E,  que 
reproduit  M.  Zenker  avec,  aux  v.  33  et  34,  deux  légères  cor- 
rections imposées  par  la  rime  : 

Quar  er  m'abelis  e  m'es  bel 
32  Qu  -el  mieu  joi  s'enant  la  jovens; 

E  s'ieu  ren  die    que  lur  an  enviro, 
34    Aissi  m'en  gic,     qu'ans  gaugz  mi  creis  dobliers 

D'un  dous  espic    qu'es  jojos  consiriers, 
36    Don  m'an  amie    ueiraais  li  mal  e  -il  bo. 

C'est  ici,  cher  maître,  que  je  me  suis  trouvé  fort  embar- 
rassé avec  ces  joi  et  ces  gaug  qui  s'opposent  sans  s'éclairer, 
car  la  traduction,  toute  littérale,  et  sans  nul  commentaire,  de 
M.  Zenker  ne  projette  sur  ces  vers  qu'une  lumière  assez  dou- 
teuse. Mais  vous  m'avez  rappelé  fort  à  propos  les  deux  sortes 
de  Joi  qui  se  partageaient  le  cœur  de  Pierre,  ce  chanoine 
devenu  jongleur,  qui  n'avait  pas  dépouillé  le  vieil  homme. 
M.  Coulet  avait  déjà  mis  en  relief,  pour  les  pièces  I  et  II,  les 
caractères  de  ceiie  Joie  tour  à  tour  mondaine  et  religieuse. 
Guidé  par  vous,  je  traduirais  ainsi  celte  strophe  :  «  Mainte- 
nant il  me  plaît  et  m'est  agréable  que  par  ma  joie  s'exalte  la 
jeunesse,  et  si  je  dis  chose  qui  aille  autour  des  jeunes  (si 
mes  chants  parviennent  à  eux)  [qu'ils  sachent  que^  j'y  re- 
nonce, car  une  double  joie  s'élève  pour  moi  (probablement 
celle  d'avoir  été  un  bon  poète  et  d'être  un  bon  chrétien),  joie 
d'un  doux  épi  (le  salut  éternel),  qui  est  un  joyeux  souci  (une 
préoccupation  de  bonheur),  par  laquelle  bons  et  mauvais 
m'auront  pour  ami  (c'est-à-dire  que  mes  sentiments  chrétiens 
m'imposent  la  charité,  même  envers  les 'méchants).  » 

Reste  l'envoi,  dont  voici  le  texte,   conservé  uniquement 
dans  E  (ricœ  au  v.  37,  au  lieu  de  rie)  : 

D'aisJ  "m  sent  rie    per  bona  sospeiso, 
38    Qu'en  joi  m'asic    e  m'estau  volentiers, 

Et  ab  joi  pic    e  gaug  mos  deziriers 
40    Et  ab  joi  pic    e  gaug  vuelh  Dieus  lo  -m  do. 

Ces  quatre  vers  sont-ils  altérés?  Pas  plus  que  M.  Zenker,  je 


MELANGES    ET    DOCUMENTS.  347 

De  vois  (le  correction  possible,  sinon  que  je  remplacerais,  au 
V.  38,  asic  par  a/îc.  M.  Zenker  fait  observer  avec  raison  que 
le  poète  n'a  pu  employer  le  même  mot  pic  aux  rimes  intérieu- 
res; mais  ce  mot  peut  avoir  deux  sens  différents  :  au  v.  39, 
ce  serait  pic{a),  verbe  ayant  pour  sujet  deziriers ^ ;  au  v.  40, 
ce  serait  cet  adjectif  que  le  Donal  provençal  (éd.  Stengel, 
p.  51)  traduit  par  varius.  El  je  proposerais,  très  dubitative- 
ment, la  traduction  suivante  : 

«  De  ceci  je  me  sens  riche  (ma  joie  découle  de  ceci)  avec 
bonne  espérance,  que  je  me  fixe  en  joie  et  y  reste  volontiers, 
et  mon  désir  pique  (travaille)  avec  joie  et  allégresse.  Et  que 
Dieu  veuille  lui  donner  satisfaction  (à  mon  désir)  avec  une 
joie  et  une  allégresse  changeantes  (c'est-à-dire  peut-être  ces- 
sant d'être  profane  pour  devenir  religieuse).  » 

Agréez,  cher  maître,  l'expression  de  mes  sentiments  bien 
amicaux.  D""  Dejeanne. 


II 

A  PROPOS  d'un  chansonnier  provençal. 

M.  G.  Bertoni,  à  qui  nous  devons  déjà  tant  d'intéressants 
travaux  sur  la  littérature  provençale,  a  fait  remarquer  tout  ré- 
cemment -  que  Tassoni,  en  composant  la  première  rédaction  de 
ses  Considera2ioni  sul  Petrarca,  avait  sous  les  yeux  un  chan- 
sonnier provençal,  —  et  un  seul,  —  qui,  selon  M.  Bertoni,  se- 
rait perdu.  Des  indications  données  par  Tassoni,  il  résulte,  en 
effet,  que  dans  ce  chansonnier  les  chansons  Quan  vei  la  fior 
e  Verba  vert  et  Aitan  ses  plus  viu  hom  occupaient  respec- 
tivement le  premier  rang  parmi  les  compositions  attribuées  à 
Bernart  de  Ventadour  et  à  Sordel.  Or,  ajoute  M.  Bertoni, 
aucun  des  chansonniers  actuellement  connus  ne  répond  à  ces 
deux  conditions.  Je  crois  que  notre  savant  confrère  se  trompe 

1.  [Le  sens  de  ce  verbe  nie  laisse  bien  des  doutes.  —  A.  J.] 
3.  Revue  des  hmr/ues  romanes,  XLVII,  p.  1.56-8. 


348  ANNALES  DU   MIDI. 

et  que  le  manuscrit  cherché  n'est  autre  que  le  manuscrit  K 
(B.  N.  12473).  La  chanson  Quan  vei  la  flor  y  occupe  bien 
(fol.  15  yo)  la  première  place  parmi  celles  de  Bernart  de  Ven- 
tadour.  Quant  à  la  chanson  Aitan  ses  plus,  elle  ne  tient,  il  est 
vrai,  que  le  second  rang  parmi  celles  attribuées  à  Sordel,  le 
premier  étant  occupé  (fol.  109  r")  par  Tan  Tn'abellis  lo  ter- 
minis  novel.  Mais  celle-ci  n'est  pas  précédée  du  nom  de  l'au- 
teur, la  biographie,  placée  eu  cet  endroit,  en  tenant  lieu^  On 
comprend  donc  que  Tassoni  n'ait  pas  pris  garde  à  cette  chan- 
son, au  reste  très  efïacée  et  difficile  à  lire,  et  qu'il  ait  classé 
en  premier  lieu  celle  qui  est  en  réalité  la  seconde.  On  sait 
que  ce  manuscrit,  acheté  en  1584  à  Mocenigo  par  Fulvio  Or- 
sini  vint,  avec  l'admirable  collection  de  celui-ci,  enrichir 
en  1602  la  Bibliothèque  valicane'-.  A  quelle  époque  et  dans 
quelles  circonstances  Tassoni  put-il  l'y  consulter?  C'est  ce 
que  M.  Bertoni  découvrira  sans  doute  aisément.  Le  seul  fait 
que  j'ai  voulu  ici  mettre  en  relief,  c'est  qu'il  n'y  a  pas  lieu 
d'enrichir  d'une  unité  la  liste  si  diligemment  dressée  par 
M.  Chabaneau,  —  liste  déjà  trop  longue,  hélas  !  —  des  «  ma- 
nuscrits provençaux  perdus  ou  égarés  ». 

A.  Jeanroy. 

J'avais  eu  d'abord,  moi  aussi,  la  même  pensée  que  l'auteur 
de  l'article  précédent,  mais  j'y  avais  renoncé  après  avoir  eu 
le  manuscrit  entre  les  mains  l'an  passé,  ayant  constaté  que  la 
poésie  Aitan  ses  plus  y  occupe  le  second  rang;  il  me  parais- 
sait impossible  que  Tassoni  n'eût  fait  attention,  ni  à  la  pièce 
précédente,  ni  à  la  biographie  qui  précède  celle-ci.  Je  ferai 
remarquer  aujourd'hui  que  le  scribe  du  ms.  d  (copie  de  K) 
a  commis  peut-être  une  erreur  analogue  à  celle  que  M.  Jean- 
roy attribue  à  Tassoni.  Ce  copiste,  qui  omet  de  parti  pris  les 
biographies,  a  sauté,  lui  aussi  (col.  344'"^),  la  première  poésie 
de  Sordel  donnée  par  K.  Cette  constatation,  faite  par  moi 

1.  C'est  un  cas  qui  se  présente  plusieui's  fois  dans  ce  manuscrit, 
comme  me  l'écrit  M.  L.  Brandin,  qui  a  bien  voulu  le  revoir  pour  moi  à 
ce  propos. 

2.  P.  de  Nolhac,  La  Bibliothèque  de  Fuhno  Vrsini,  p.  107-9  et  313-5, 


MÉLANGES  ET  DOCUMENTS.  349 

après  l'impression  de  mon  «  mélange  »,  en  me  prouvant  que 
l'erreur  était  naturelle,  me  conduit  à  considérer  comme  vrai- 
semblable l'hypothèse  de  M.  Jeanroy.  —  Je  saisis  avec  plaisir 
l'occasion  qui  m'est  offerte  de  revenir  sur  le  sujet  et  m'em- 
presse de  fournir  les  renseignements  que  M.  J.  m'invite  à 
donner.  Le  ms.,  mis  en  possession  d'Orsini,  fut  transporté  à 
Rome;  or  Tassoni  y  arriva  à  la  fin  de  1593  ou  au  début  de 
1597  et  devint  aussitôt  premier  secrétaire  du  cardinal  Ascanio 
Colonna,  qui  était  en  étroites  relations  avec  Orsini  '  ;  après 
un  voyage  en  Espagne,  il  y  revint  de  nouveau  dans  l'hiver 
1602-03  2,  époque  où  il  rédigea  ses  Considerazioni.  La  conjec- 
ture de  M  Jeanroy  est  donc  très  séduisante,  et  c'est  à  contre- 
cœur que  je  l'avais  repoussée. 

Selon  une  note  de  la  copie  de  A  conservée  aujourd'hui  dans 
la  Bibl.  Braidense  de  Milan,  cette  copie  aurait  été  «  peut-être» 
utilisée,  elle  aussi,  par  Tassoni ^  ;  s'il  en  est  ainsi,  la  chose  n'a 
pu  arriver  qu'après  la  première  rédaction  des  Considerazioni 
sut  Petrarca.  G-.  Bertoni. 


III 


date     du     concile    de     BEZIERS,    tenu     par    GAUTIER,    LEGAT 
DU     SAINT-SIÈGE,     ET     ITINERAIRE     DE     CE     LEGAT     DE     1231 

A  1233. 

En  parlant  de  la  légation  de  Gautier,  évêque  de  Tournai , 
Dom  Vaissete  affirme    que    ce   prélat    était    à    Béziers   en 

L  De  Nolhac,  op.  cit.,  pp.  17  et  177. 

2.  V.  Santi,  Alessandro  Tassoni  e  il  cardinale  Ascanio  Colonna, 
dans  Atti  e  Mem.  délia  deput.  di  Storia  Palvia  pcr  le  prov.  moden.  e 
parmensi,  série  V,  vol.  II,  197  ss. 

3.  F.  Novati,  Lectura  Dantis.  Il  Canto  VI  del  Purgatorio,  Florence, 
1903,  p.  47.  — Voici  co  qu'on  lit  dans  la  copie  de  la  Bibl.  Braidense,  d'une 
main  du  xvii=  siècle,  avec  la  suscription  A.  Z.  (Antonio  Zanelli?  V.  Tira- 
boschi,  Bibl.  Mod.,  V,  407)  :  «  Questo  bellissimo  e'rarissimo  codice,  in 
«  cui  si  conten^'ono  le  Vite  et  le  Poésie  di  molti  Poeti  Prouenzali,  fu  già 
«  posseduto  dal  Dottor  Jacopo  Grandi  Modanese  ;  ed  6  forse  lo  stesso 
<<.  che  innanzi  di  lui  fa  in  potere  di  Alessandro  Tassoni,  il  quai  si  souente 
«  se  ne  serve  nelle  sue  considerazioni  sul  Petrarca,  nelle  Annotazioni  al 
«  Vocabolario  ed  in  altre  sue  opère  con  molta  sua  Iode.  » 


350  ANNALES   DU    MiDl. 

mars  1232,  qu'il  alla  ensuite  à  Montréal,  et  qu'il  se  rendit  de 
là  à  Carcassoano,  où  on  le  retrouve  le  20  mai  suivant'.  Con- 
trairement à  son  habitude,  cet  historien  n'a  pas  indiqué  la 
source  qui  signale  le  passage  du  légal  à  Montréal.  Nous  avons 
fait  pendant  longtemps  de  vaines  recherches  pour  réparer 
cette  omission,  et  nous  désespérions  presque  d'y  parvenir 
lorsque  nous  avons  découvert  deux  chartes  qui  très  proba- 
blement sont  li's  mêmes  que  celles  qui  ont  été  employées  par 
D.  Vaissete. 

L'une  de  ces  deux  pièces  a  été  publiée  par  Mahul,  et  con- 
cerne l'abbaye  de  Montolieu  ^.  Elle  montre  que  Gautier,  légat 
du  pape,  était  à  Montréal  en  1232,  le  IG  des  calendes  de  juin, 
c'est-à-dire  le  17  mai. 

La  seconde  pièce  a  été  transcrite  dans  le  carlulaire  de  l'ab- 
baye de  Lézat.  Elle  est  du  6  des  kalendes  de  mai,  jour  qui 
répond  au  26  avril:  mais,  au  lieu  de  lui  donner  son  véritable 
millésime,  on  l'a  datée  par  erreur  de  l'année  1222.  Voici  le 
texte  de  ce  document  qui  est  res'é  jusqu'ici  inédit  : 

«  Galterius,  Dei  gratia  Tornacensis  episcopus,  apostolice 
sedis  legatus,  dilectis  in  Christo  P.  de  Gosens,  archidiacono, 
R.  de  Caustirauo,  canonico  Saucti  Slephani,  et  R.,  archi- 
diacono de  Saves,  Tholosane  diocesis,  salutem  in  Domino. 
Intelleximus  quod  ecclesia  Sancti  Medardi  de  Fossato,  Tho- 
losane diocesis,  tanlo  tempore  vaccavit  quod  ipsius  donatio 
ad  nos  est  de  jure  devoluta;  ideoque  discretioni  vestre,  qua 
fungimur  authoritate,  precipiendo  mandamus  quatinus  dili- 
genter  veritate  super  hoc  inquisita,  si  ila  esse  inveneritis, 
ipsam  cum  pertinentiis  suis  Bernardo  de  Saucto  Fragulfo, 
clerico,  de  quo  bonum  et  laudabile  testimonium  recepimus, 
authoritate  nostra  couferatis,  dum  tamen  idem  in  sacerdo- 
tem  promoveri,  secundum  consilium  Bitterense,  sit  paratus, 
contradictores  vel  rebelles  per  censuram  ecclesiasticam  com- 
pescendo.  Quod,  si  uon  omnes  his  exequendis  contigerit 
interesse,  duo  vestrum  nihilominus  exequantur.  Datum  apud 

1.  Hist.  de  Long.,  édit.  Privai,  t.  VI,  p.  (j'rZ. 

2.  Cartulaire  [des  communes  de  l'ancien  diocèse  de  Carcassonne 
t.  I,  p.  91. 


MÉLANGES   ET   DOCUMENTS.  351 

Montem  regalem,  sexto  kalendas  maii,  anno  Domini  mille- 
simo  ducentesimo  vigesimo  secundo  ^.  » 

Il  est  évident  que  le  millésime  1222,  inséré  dans  cette 
lettre,  est  inexact.  Puisque  l'on  sait  que  Gautier  n'exerça  les 
fondions  de  légat  dans  notre  pays  qu'à  partir  du  commence- 
ment de  1231  jusque  vers  la  fin  de  1233,  il  n'a  pu  écrire 
cette  charte  que  pendant  la  durée  de  cette  légation.  Mais  il 
est  possible  de  resserrer  la  date  du  document  dans  des  limites 
plus  étroites.  Le  cartulaire  de  Lézat  nous  fournit  le  texte 
d'une  enquête  à  laquelle  il  fut  procédé  justement  en  vertu 
des  ordres  du  légat  contenus  dans  sa  lettre  de  Montréal-.  Or, 
cette  enquête  est  datée  du  mois  de  mai  1232,  ce  qui  est  bien 
la  preuve  que  la  lettre  du  prélat  est  antérieure  à  cette  date 
et  qu'elle  ne  saurait  appartenir  au  plus  tard  qu'à  cette  même 
année.  D'un  autre  côté,  on  verra,  dans  la  suite  du  pré- 
sent article,  que  le  concile  de  Béziers,  cité  par  notre  pièce, 
a  dû  être  tenu  en  1232  plutôt  qu'en  1231  ;  la  lettre  de  Gautier 
étant  postérieure  au  concile,  on  peut  donc  être  porté  à  la 
dater  de  préférence  de  1232.  Mais  ce  qui  autorise  encore 
mieux  à  adopter  ce  système,  c'est  la  constatation,  déjà  faite 
ci-dessus,  de  la  présence  du  légat  à  Montréal  le  17  mai  de 
cette  année.  Au  lieu  de  supposer  que  ce  personnage  séjourna 
dans  cetle  ville  à  plusieurs  reprises  et  sous  deux  millésimes 
difiérents,  il  est,  en  effet,  plus  simple  et  plus  naturel  d'ad- 
mettre qu'il  s'y  rendit  seulement  en  1232,  et  qu'il  y  resta 
alors  sans  interruption  pendant  une  partie  des  mois  d'avril  et 
de  mai. 

Nous  venons  de  faire  remarquer  que,  dans  la  pièce  rap- 
portée plus  haut,  révêque  de  Tournai  fait  mention  d'un 
concile  qui  avait  été  déjà  tenu  à  Béziers.  Cette  assemblée 
ecclésiastique  ne  doit  pas  différer  de  celle  dont  les  actes  nous 
sont  connus  par  diverses  publications,  et  qui  a  été  datée 
tantôt  de  1233  et  tantôt  de  1234 ^  Ce  concile  est  le  seul  qui 

1.  Bibl.  nat.,  lat.  9189,  f"  107  v°;  et  coll.  Doat.,  lOU,  f"  27Ô.  —  Cf.  Hist. 
de  Lany.,  t.  V,  col..  1781. 

2.  Bibl.  nat.,  lat.  9189,  f"'  1U8  r";  coll.  Doat,  lUU,  f»  mi . 

y.  Catel,    Histoire  des    comtes   de    Tolose,  p.  ^b-L  et  suiv.  —  Knc;/- 


352  ANNALES   DU   MIDI. 

ait  eu  lieu  à  Béziers  vers  cette  époque,  et  on  verra  un  peu 
plus  bas  que  c'est  bien  aux  décrets  qui  y  furent  promulgués 
que  la  lettre  du  légat  fait  allusion. 

Les  actes  du  concile  de  Béziers  ne  portant  eux-mêmes 
aucune  date,  ou  n'a  pu  jusqu'ici  les  attribuer  aux  années  1233 
ou  1234  que  sur  l'autorité  de  Guillaume  de  Puj'laurens' ; 
malheureusement,  nous  avons  le  regret  de  constater  que, 
dans  le  cas  présent,  le  chapelain  de  Raimond  VII  a  employé 
des  termes  dépourvus  de  précision.  Après  avoir  rapporté 
deux  événements  qui  sont  de  l'année  1233,  il  s'est  borné  à 
ajouter  que,  vers  cette  année  ou  plutôt  vers  le  même  temps 
{circa  illud  iempus).,  le  légat  réunit  un  concile  dans  la  ville 
de  Béziers  Ainsi,  ce  chroniqueur  ne  fixe  en  particulier  au- 
cun millésime,  et  il  n'indique  seulement  qu'une  simple 
période,  qu'il  semble  permis  d'étendre  pour  le  moins  à  deux 
ou  trois  ans.  Si  nous  ne  disposions  pas  d'autres  sources,  il 
serait  bien  difficile  de  suppléer  à  l'insuffisance  d'un  pareil 
renseignement.  Mais  on  a  pu  voir  déjà,  par  le  nouveau  docu- 
ment que  nous  publions,  qu'il  faut  exclure  d'abord  les  dates 
1233  et  1234  proposées  par  Catel  et  par  D.  Vaissete,  et  que 
c'est  nécessairement  avant  les  derniers  jours  d'avril  1232  que 
les  prélats  de  la  région  durent  se  réunir  à  Béziers.  Or,  comme 
d'un  autre  côté  il  est  certain  que  cette  assemblée  eut  lieu 
durant  la  légation  de  Gautier 2,  et  comme  ce  prélat  n'exerça 
ses  fonctions  que  de  1231  à  1233,  il  en  résulte  que  c'est  seu- 
lement en  1231  ou  dans  les  premiers  mois  de  1232  que  le 
concile  a  dû  être  tenu.  Ajoutons  que  l'on  peut  même  remar- 
quer que  l'année  1233  sert  en  quelque  sorte  de  base  à  la 
date  générale  donnée  par  Guillaume  de  Puylaurens,  et  que, 
si  l'on  tient  à  s'écarter  le  moins  possible  de  cette  base,   il 


clop.  théol.,  publiée  par  Migne,  Dictiomi.  des  conciles,  I,  383  et  suiv.  — 
Invent,  des  archiv.  muiiicip.  de  Toulouse,  p.  68  et  suiv.  —  Hist.  de 
Long.,  t.  VI,  p.  683. 

1.  Voyez  à  ce  sujet  la  note  de  D.  Vaissete  dans  VHist.  de  Lang.,  t.  VII, 
pp.  89  et  90;  et  la  Chronique  de  Guill.  de  Puylaurens  (édit.  de  Catel 
pp.  88  et  89.) 

2.  Nous  allons  en  donner  la  preuve  dans  l'alinéa  suivant. 


MÉLANGES  ET  DOCUMENTS.  353 

semble  qu'il  vaut  mieux    accepter  l'année  1232  que  l'année 
1231'. 

En  reportant  le  concile  de  Béziers  à  l'année  1234,  D.  Vais- 
sète  prétend,  il  est  vrai,  que  Guillaume  de  Puylaurens  a  dit 
simplement  que  le  concile  fut  convoqué  par  le  légat  du  Saint- 
Siège,  et  qu'il  n'a  pas  donné  le  nom  de  ce  prélat^.  Il  est 
permis  de  s'étonner  qu'un  historien  si  minutieux  et  si 
exact  ait  émis  une  pareille  assertion.  Sans  doute,  le  légat 
n'est  pas  nommé  dans  la  phrase  même  où  le  chroniqueur 
parle  de  l'assemblée  ecclésiastique  de  Béziers;  mais  Guillaume 
de  Puylaurens  mentionne  le  môme  personnage  quelques  lignes 
plus  loin,  et  il  ne  saurait  y  avoir  de  doute  sur  son  nom,  puis- 
qu'il le  désigne  cette  fois  par  son  titre  (Vévêque  de  Tournai'^. 
Les  décisions  qui  furent  prises  par  les  prélats  réunis  à 
Béziers  concernent  la  répression  de  l'hérésie  et  la  discipline 
ecclésiastique.  On  y  prescrivit  de  nouveau  les  conditions  de 
naissance,  de  moralité  et  d'instruction  qu'il  fallait  remplir 
pour  être  admis  aux  ordres  sacrés.  Il  fut  ordonné  que  ceux 
qui  avaient  des  bénéfices  seraient  contraints  de  prendre  les 
ordres  sacrés  au  plus  tôt;  on  ajouta  que  chaque  paroisse 
aurait  un  prêtre  pour  la  gouverner,  et  que,  si  une  cure  avait 
pour  patrons  des  religieux  ou  des  laïques,  ceux-ci  devraient 
la  faire  desservir  par  un  curé  ou  un  vicaire  perpétuel  ap- 
prouvé par  révêque. 

C'est  évidemment  à  la  première  de  ces  prescriptions,  s'ap- 
pliquant  à  la  nomination  des  prêtres,   que  fait  allusion  la 

ettre  du  légat  du  26  avril  1232.  L'enquête  que  nous  avons 


L  D.  Vaissete  a  pensé  (^ue  l'assemblée  qui  nous  occupe  fut  réunie  le 
dimanche  de  Lœtave,  dimanche  qui  en  12o2  répondrait  au  21  mars; 
mais  nous  montrerons,  dans  la  suite  de  cet  article,  que  Gautier  était  à 
Albi  le  24  du  même  mois,  et  dès  lors  il  devient  bien  difficile  de  croire 
que  ce  prélat  ait  pu  assister,  à  Béziers,  à  un  concile  qui  n'aurait  ouvert 
ses  séances  que  trois  jours  avant.  On  sait  que  cettQ  dernière  ville  est 
éloignée  d'Albi  de  plus  de  13U  Ivilomètres. 

2.  Rist.  de  Lang.,  VII,  90. 

3.  On  lit,  en  effet,  dans  la  CJcronique  rédigée  par  cet  auteur  et  aux 
pages  88  et  89  :  «  Item  circa  illud  tempus  dominus  legatus  apud  Biter- 
rim  concilium  celebravit...  »;  et,  après  deux  autres  phrases  :  «  In  dicbus 
autem  legationis  ejusdem  episcopi  Totniacensis,  etc.  « 

ANNALES  DU  MIDI.   —  XVI.  23 


354  ANNALES    DU    MiDl. 

déjà  signalée  ne  cite  pas,  il  est  vrai,  le  concile  de  Béziers, 
mais  on  peut  néanmoins  la  considérer  comme  une  conséquence 
de  cette  assemblée.  On  y  voit,  en  effet,  que  l'église  de  Saint - 
Médard,  appartenant  à  l'abbaye  de  Lézat,  n'avait  pas  de 
prêtre  résidant  sur  les  lieux,  et  que  les  moines  chargeaient 
les  curés  du  voisinage  de  la  desservir,  tout  en  réservant  au 
couvent  une  redevance  annuelle.  Il  y  avait  donc  là  une  situa- 
tion irrégulière,  qui  était  en  contradiction  avec  les  décrets 
rendus  à  Béziers,  et  qui  devait  motiver  d'elle-même  l'inter- 
vention du  légat. 

Ces  dernières  observations  sont,  croyons-nous,  sufiîsantes 
pour  dissiper  les  doutes  que  pourraient  éprouver  peut-être 
certains  lecteurs,  au  sujet  de  l'identité  des  deux  assemblées 
mentionnées  par  la  lettre  du  légat  et  par  la  chronique  de 
Guillaume  de  Puylaurens  '. 

Les  petites  rectifications  que  nous  venons  de  proposer  peu- 
vent être  complétées  assez  naturellement  par  quelques  autres 
remarques  relatives  à  l'itinéraire  du  même  légat  dans  notre 
région.  Cet  itinéraire  n'est  connu  que  par  un  très  petit  nom- 
bre de  chartes,  et  ces  chartes  sont  d'autant  plus  difficiles  à 
classer  que  l'on  n'est  pas  encore  bien  fixé  sur  le  style  qui  a 
été  suivi  dans  renonciation  de  leurs  dates.  D'après  D.  Vais- 
sete,  le  légat  aurait  fait  commencer  l'année  à  Noël  ou  à  la 
Circoncision,  tandis  que,  d'après  M.  Molinier,  il  aurait  pris 
pour  point  de  départ,  soit  le  25  mars,  soit  le  jour  de  Pâques. 
Nous  avions  cru  d'abord  que  la  première  de  ces  manières  de 
voir  était  la  meilleure;  mais  voici  quelques  arguments  qui 
nous  engagent  aujourd'hui  à  changer  d'avis. 

En  septembre  1232,  le  légat  du  Saint-Siège,  Gautier,  évêque 


1.  Il  se  pourrait  à  la  rigueur  qu'en  indiquant  le  séjour  de  l'évêque  de 
Tournai  à  ^Montréal,  D.  Vaissete  ne  se  fût  apjîuyé  que  sur  l'acte  du 
17  mai,  relatif  à  Montolieu;  cependant,  il  nous  paraît  plus  probable  qu'il 
a  connu  en  même  temps  la  pièce  du  26  avril  publiée  plus  haut.  Si  le 
savant  bénédictin  n'a  pas  lui-même  tiré  parti  du  passage  que  nous  avons 
utilisé  dans  cet  article,  c'est  que,  sans  doute,  au  moment  où  il  rédigeait 
son  ouvrage,  il  n'avait  plus  sous  les  yeux  qu'un  extrait  de  ce  document 
et  que,  dans  cet  extrait,  tout  en  conservant  le  nom  de  Montréal,  on  avait 
omis  la  mention,  pourtant  bien  plus  intéressante,  du  concile  de  Béziers. 


MÉLANGÉS   ET   DOCUMENTS.  355 

de  Tournai,  nomma  des  commissaires  ou  juges  délégués  pour 
examiner  un  débat  soulevé  entre  les  abbés  de  Cuxa  et  de  Boul- 
bonne,  et,  en  vertu  de  leurs  pouvoirs,  ces  délégués  citèrent 
les  parties  devant  eux  par  un  acte  du  1"  février  suivant.  Cette 
citation  ayant  soulevé  des  difficultés,  Gautier  dut  écrire  à  ses 
commissaires  une  nouvelle  lettre,  et,  dans  le  texte  original, 
celle-ci  porte  la  date  du  4  mars  1232  '.  Or,  comme  il  est  assez 
évident  que  cette  pièce  est  de  1233  en  nouveau  style,  il  en 
résulte  que  le  légat  a  employé  ici  l'ancienne  manière  de  comp- 
ter, qui  ne  faisait  commencer  l'année  qu'au  25  mars  ou  à  la 
fête  de  Pâques. 

Nous  avons  aussi  des  lettres  de  l'évéque  de  Tournai  du 
17  mars  1232,  dans  lesquelles  il  rappelle  qu'il  avait  convoqué 
à  Béziers  pour  le  dimanche  de  Lœlare  Jérusalem  les  abbés 
de  Gaillac  et  de  la  Chaise-Dieu,  et  que  ces  ablés  s'étaient 
effectivement  rendus  à  son  appeP.  Si  l'on  suppose  que  la  date 
a  été  exprimée  ici  en  nouveau  style,  les  renseignements  rap- 
portés dans  le  texte  deviennent  inexacts,  car  en  1232  on 
chante  Lœlare  le  21,  et  il  est  impossible  par  conséquent  que 
le  prélat  ail  pu  mentionner,  dès  le  17  mars,  des  faits  qui  ne  se 
produisirent  que  quatre  jours  plus  tard.  Au  contraire,  ces 
difficultés  disparaissent  si  on  admet  que  l'année  1232  appar- 
tient à  l'ancien  style  et  équivaut  par  suite  à  l'année  1233  en 
nouveau  style.  Durant  cette  seconde  période,  on  chante 
Lœlare  le  13  mars,  et  rien  ne  s'oppose  dès  lors  à  ce  que  les 
faits  accomplis  ce  même  jour  aient  pu  être  rappelés  dans 
un  acte  du  17  mars  suivant. 

11  n'est  pas  permis  de  reconnaître  avec  certitude  la  manière 
de  dater  employée  par  l'évéque  de  Tournai  dans  les  autres 
actes  qu'il  nous  a  laissés.  Toutefois,  d*après  les  deux  exemples 
ci- dessus,  parfaitement  constatés,  nous  croyons  que,  jusqu'à 
nouvel  ordre,  on  peut  admettre  que  son  habitude  était  de 
compter  l'année  en  partant  du  25  mars  ou  de  Pâques  plutôt 
que  de  Noël  ou  du  !«'' janvier.  Aussi  proposerions-nous  dès 


1,  Bibl.  nat.,  coll.  Doat,  81,  f<"  73  et  67,  ei  Iliat.  de  Lmu/.,  VI 11,  llliii). 

2.  Gallia  christiana,  édit.  de  D.  Piolin,  I,  nnimadversiofies,  col.  xvii. 


3Ô6  ANNALES   DU   MIDI. 

aujourd'hui  de  rétablir,  comme  il  suit,  l'itiaéraire  de  ce  légat 
dans  notre  pays,  itinéraire  qui,  ainsi  qu'on  va  le  voir,  différe- 
rait assez  sensiblement  de  celui  qui  a  été  indiqué  par  Dom 
Vaissete. 

1231.  —  Gautier  arriva  sans  doute  dans  notre  région  vers 
le  commencement  de  cette  année  ':  mais  nous  n'avons  aucun 
document  qui  fixe  ses  étapes  durant  cette  période,  et  tout  ce 
que  nous  nous  permettrons  de  dire,  c'est  que  ce  prélat  réunit 
peut-être  un  concile  à  Béziers  avant  la  fin  de  1231. 

1232.  —  Si  le  concile  de  Béziers,  présidé  par  l'évêque  de 
Tournai,  ne  date  pas  de  1231,  il  doit  appartenir  forcément 
aux  trois  premiers  mois  de  1232,  car  nous  avons  déjà  vu  qu'il 
est  antérieur  au  26  avril  de  cette  seconde  année. 

D'après  Guillaume  de  Puylaurens,  Raimond  de  Falgar  fut 
élu  évêque  de  Toulouse  le  21  mars  1231  (1232),  et  cette  élec- 
tion fut  confirmée  aussitôt  (continuo)  parle  légat.  On  pour- 
rait donc  soupçonner  que  ce  dernier  était  alors  à  Toulouse 
ou  dans  les  environs;  toutefois  nous  n'avons  découvert  aucun 
texte  original  qui  prouve  l'exactitude  de  cette  hypothèse. 

Le  24  mars,  Gautier  entra  solennellement  dans  la  ville 
d'Albi  ;  une  déclaration  qu'il  fit  le  même  jour  est  datée  de 
1231,  année  qui,  d'après  les  remarques  présentées  plus  haut, 
doit  répondre  de  préférence  à  1232  en  nouveau  style 2.  Cette 
opinion,  qui  est  contraire  à  celle  de  D.  Vaissete,  a  été  adoptée 
du  reste  par  M.  Molinier^  —  C'est,  croyons-nous,  vers  le  même 
temps  que  le  légat  du  Saint-Siège  visita  Saint-Antonin,  dans 
le  Rouergue,  localité  qui  est  en  effet  peu  éloignée  d'Albi.  Une 
de  ses  lettres,  qui  signale  son  passage  dans  la  première  de 
ces  deux  villes,  porte  la  date  1232,  parce  qu'elle  aura  été 
écrite  après  le  25  mars  ou  encore  après  le  11  avril,  c'est-à- 
dire  après  le  jour  de  Pâques*. 

Le  26  avril  et  le  27  mai,  Gautier  était  à  Montréal,  et  nous 


1.  m  st.  de  Lang.,  VI,  065. 

'2.  Hist.  de  Laiig.,  VI,   G65;  d'Auriac,  Hist.  de  l'ancienne   cathédr 
d'Albi,  207;  Albia  christiana,  VII,  14. 

3.  Hist.  de  Lang.,  V,  1312. 

4.  Histi  de  Lang^,  V,  1342:  Albia  christ.,  VII,  67. 


MÉLANGES  ET   DOCUMENTS.  357 

le  retrouvons  ensuite  à  Carcassonne  le  20  mai  et  le  10  sep- 
tembre de  la  même  année  ' . 

1233.  — Le  légat  faisait  encore  son  séjour  à  Carcassonne 
au  mois  de  mars  de  cette  nouvelle  année,  ainsi  qu'il  résulte 
d'un  acte  qui  est  daté  du  4  de  ce  mois,  1232,  et  qui,  comme 
nous  l'avons  montré,  appartient  nécessairement  à  1233  en 
nouveau  style. 

Il  se  rendit  bientôt  après  à  Béziers,  où  on  constate  en  effet 
sa  présence  le  13  et  le  15  du  même  mois 2.  Mais  le  17  il  avait 
déjà  quitté  celte  localité,  et  c'est  de  la  petite  ville  de  Quarante 
(canton  de  Capestang,  Hérault),  qu'il  écrivit  alors  des  lettres 
dont  nous  avons  déjà  étudié  la  date,  et  qui,  tout  en  portant  le 
millésime  1232,  fourni  par  l'ancien  style,  correspondent  à 
l'année  1233  dans  le  style  actuel. 

Nous  ne  connaissons  pas  d'autre  charte  qui  nous  renseigne 
sur  l'itinéraire  de  l'évêque  de  Tournai  pour  la  suite  de  cette 
année.  L'auteur  de  ï Histoire  de  Languedoc^  admet  que  ce 
prélat  se  rendit  à  la  cour  de  France  vers  le  milieu  de  l'au- 
tomne de  1233,  et  que,  le  temps  de  sa  légation  étant  expiré, 

il  retourna  de  là  dans  son  diocèse^. 

Edmond  Cabié. 


IV 


LE    PLUS    A^TIEN    TEMOIGNAGE    SUR   GUILLAUME   DE    NOGARET. 

Dans  l'intéressant  article  sur  la  vie  privée  de  Guillaume  de 
Nogaret  que  M.  Louis  Thomas  a  publié  dans  le  dernier  nu- 

1.  Un  acte  de  juillet  1232  rappelle  aussi  que  le  légat  avait  donné  à  un 
chanoine  de  Narbonne  les  dîmes  de  deux  églises  situées  près  d'Albi; 
mais  on  ne  rapporte  pas  la  date  de  cette  donation  (Albin  christ.,  VII,  65.) 

2.  Gallia  christ.,  I,  anirnadversiones ,  col.  xvii;  VI,  67;  Hist.  de 
Lnng.,  VI,  672,  et  V,  1599,  acte  des  ides  de  mars  ouT5  mars  1232  (1233). 

3.  Vol.  VI,  675. 

4.  Nous  n'avons  pas  pu  utiliser  quelques  actes  du  même  légat  cités  par 
Lacoste  dans  son  Histoire  de  la  province  de  Quercy,  II,  233;  cet  auteur 
n'en  donne  pas  les  dates  précises  et  ne  dit  pas  si  l'on  connaît  les  lieux  où 
ils  ont  été  écrits, 


358  ANNALES   DD    MIDI. 

méro  des  Annales  du  Midi  (ci-dessus,  p.  163),  il  est  dit  : 
«  Le  plus  ancien  document  qui,  dans  l'état  actuel  des  recher- 
ches, fasse  mention  de  Guillaume  de  Nogaret,  est  un  acte  du 
19  juin  1287,  par  lequel  le  roi  de  Majorque  confirme  les  pri- 
vilèges de  la  ville  de  Montpellier.  »  Je  connais  deux  actes 
antérieurs  analysés  en  1883  par  MM.  Cabié  et  Mazens  dans 
leur  Carlulaire  des  Alaman  :  le  mercredi  avant  les  Ra- 
meaux 1281,  c'est-à-dire  le  18  mars  1282,  dans  le  lieu  de 
Labruguière  (Tarn),  Amalric,  vicomte  de  Lautrec,  et  sa 
femme  Helitz  ratifient  une  sentence  arbitrale  en  présence  de 
nombreux  témoins  et  notamment  «  domini  Raimundi  Leu- 
terii.  legum  professoris,  magistrorum  Bertrandi  de  Ferreriis, 
Guillelmi  de  Nogareto,  jurisperitorum  »,  et  le  même  jour, 
dans  le  mê;ne  lieu,  ladite  dame  Helitz  passe  une  procuration 
en  présence  de  témoins  parmi  lesquels  figurent  de  nouveau 
Bertrand  de  Ferrières  et  Guillaume  de  Nogaret,  (lualifiés 
comme  dessus ^ 

Ainsi,  le  18  mars  1282,  Guillaume  de  Nogaret  n'était  pas 
encore  docteur  es  lois,  et  l'on  constate  que  c'est,  comme  il  est 
naturel,  dans  la  région  de  Toulouse  qu'il  a  fait  ses  débuts  de 

praticien. 

Antoine  Thomas. 

1.  Loc.  laiid..  p.  41. 


OOMI'TKS  RHNni'S  OKITIQUES 


Abbé  Ed.  Albe.  Autour  de  Jean  XXII:  les  familles  du 
Quercy.  (Extr.  des  Annales  de  Saint-Louis- dès-Fran- 
çais, juillet  1902-juillet  1903.)  —  Quelques-unes  des  der- 
nières volontés  de  Jean  XXII.  (Extr.  du  Bulletin  de  la 
Soc.  des  Etudes  littér.,  etc.,  du  Lot.  t.  XXVII.)  —  Contri- 
bution à  l'histoire  du  diocèse  de  Cahors.  (Extr.  de  la 
Revue  religieuse  de  Cahors  et  de  Roc-Amadour,  juillet 
et  octobre  1902,  janvier  et  avril  1908.) 

De  quelle  nature  sont  ces  études,  quel  en  est  le  but,  c'est  ce 
que  l'auteur  a  pris  soin  d'indiquer  lui-même.  «  Ce  ne  sont  ici, 
dit-il,  que  de  simples  notes  prises  au  cours  de  recherches  pour  un 
pouillé  du  diocèse  de  Cahors.  »  (Autour  de  Jean  XXII,  I'«  partie, 
p.  1.)  L'utilité,  d'ailleurs^  n'en  est  pas  moins  certaine  pour  cela. 
Empruntées  en  majeure  partie  aux  Archives  si  précieuses  du 
Vatican,  les  notes  en  question  rectifient  ou  complètent,  sur  un 
grand  nombre  de  points,  l'ancienne  Gallia  chi'istiana.  Elles  ajou- 
tent même  parfois  d'heureux  suppléments  à  un  ouvrage  plus 
moderne  et  justement  estimé,  la  Gallia  christiana  novissima  du 
chanoine  Albanès.  Mais  leur  caractère  en  rend  a  peu  près  impos- 
sible un  résumé  proprement  dit.  Tout  ce  que  nous  avons  à  faire, 
c'est  de  marquer  ce  que  l'histoire  semble  devoir  y  rencontrer 
d'indications  pour  deux  objets  d'intérêt  supérieur,  d'une  part,  la 
personnalité  et  le  règne  même  de  Jean  XXII,  d'autre  part,  l'évo- 
lution du  pontificat  romain  à  pareille  époque. 

Au  premier  de  ces  deux  points  de  vue,  M.  A,,  a  réussi  à  opérer 
d'assez  intéressantes  trouvailles.  Non  seulement  il  est  parvenu 
à  déterminer  définitivement  le  lieu  de  naissance  de  Jacques 
d'Euse  {de  Osa.  de  Ossa,  de  Osla,  de  Eusa  dans  les  documents  ré- 
digés en  langue  latine);  ce  lieu  de  naissance  est  Cahors  même. 


360  ANNALES   DU   MIDI. 

Il  y  a  plus  :  il  a  pu  fixer  encore  son  extraction  réelle,  qui  le  fait 
sortir  d'une  famille  de  riches  bourgeois,  et  jusqu'à  l'église  où  il 
reçut  le  baptême.  Il  a  démêlé  également  ses  débuts  dans  la  vie, 
débuts  où  le  futur  pontife  rencontre  pour  l'appuyer  des  Quercy- 
nois  comme  lui,  et  cela  dans  des  pays  aussi  lointains  que  le 
royaume  de  Naples.  Assurément,  ce  sont  là  des  détails  qu'il  était 
bon  de  préciser  du  moment  où  la  chose  était  possible.  Ceux  que 
voici,  à  propos  du  même  personnage,  paraîtront  pourtant  sans 
doute  d'une  autre  importance. 

Jean  XXll,  on  le  sait,  emploie  une  bonne  partie  de  son  pontifi- 
cat et  tout  son  entêtement,  qui  n'est  pas  mince,  à  débusquer  de 
leurs  situations  ecclésiastiques  ou  civiles  les  favoris,  auxquels 
la  volonté  délibérée  ou  bien  la  mollesse  de  son  prédécesseur  Clé- 
ment V  a  permis  de  s'y  établir.  Il  y  aurait,  du  reste,  quelque 
duperie  à  croire,  comme  beaucoup  de  hardiesse  à  soutenir,  que 
Jacques  d'Euse  ait  été  poussé  à  cette  opération  par  une  louable 
horreur  du  népotisme  et  le  désir  légitime  d'écarter  des  intrus 
avérés.  On  est  bien  obligé  de  le  dire,  sa  conduite  n'a  d'autre  rai- 
son que  le  principe  vulgaire  :  «  Ote-toi  de  là  que  je  m'y  mette.  » 
Aux  intrigants  innombrables,  mais  peut-être  déjà  à  demi  repus, 
que  Clément  V  a  laissés  après  lui,  succèdent,  grâce  au  nou- 
veau pape,  d'autres  intrigants  non  moins  nombreux,  et  qui 
apportent  à  la  curée  une  faim  insatiable  parce  qu'elle  est  encore 
entière.  Toute  la  diflférence,  c'est  qu'au  lieu  des  cadets  de  Gasco- 
gne, on  a  des  Cahorsins  et  des  Quercynois.  «  Jean  XXII,  dit  à  ce 
propos  M.  A.,  mit  des  Quercynois  dans  tous  les  emplois  et  dans 
toutes  les  dignités.  Ceux-ci  furent  des  princes  de  l'Église,  ceux-là 
simplement  chargés  de  l'administration  matérielle  de  la  curie 
ou  de  la  maison  pontificale.  Les  uns  furent  légats  ou  nonces,  les 
autres  panetiers,  échansons,  scribes  ou  camériers.  »  [Op.  cit., 
W"  partie,  I,  p.  59.)  Ainsi,  quel  est  le  résultat  de  cette  révolution 
de  palais,  où  l'histoire  trop  indulgente  pour  Jean  XXII  nous 
montrerait  volontiers,  si  l'on  n'y  mettait  bon  ordre,  une  haute 
mesure  de  décence  et  de  justice?  C'est  tout  simplement  le  triom- 
phe mesquin  et  ruineux  d'une  province  sur  une  autre,  du  Quercy 
sur  la  Gascogne.  C'est  l'élimination  d'une  bande  de  solliciteurs 
avjdes  par  une  autre  bande  toute  semblable,  qui  recommence 
pour  son  compte  le  même  pillage,  la  même  exploitation  de 
l'Eglise,  dont  elle  a  feint  de  se  scandaliser  bruyamment  ciiez 
autrui* 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  361 

En  vain  alléguerait-on,  comme  l'a  fait  M.  A.,  que  si  Jacques 
(l'Euse  «  a  conféré  même  les  honneurs  les  plus  hauts  de  l'Église 
à  quelque  parent,  par  pur  esprit  de  famille,  il  n'a  jamais  confié 
de  mission  diplomatique,  de  mission  quelque  peu  importante, 
qu'à  ceux  dont  il  avait  pu  apprécier  le  talent  ».  [Op.  cit.,  I"  par- 
tie, pp.  2-3.)  Utiles  ou  inutiles,  employés  réellement  ou  confinés 
dans  le  rôle  de  personnages  purement  décoratifs,  tous  ces  affa- 
més n'en  coûtent  pas  moins  très  cher  au  trésor  pontifical. 
Témoin  ce  Pierre  d'Euse,  le  propre  frère  du  pape  quercynois. 
Que  fait-il  en  somme  auprès  de  ce  dernier?  M.  A.  confesse 
n'avoir  pu  le  découvrir.  Pierre  d'Euse  n'en  reçoit  pas  moins 
des  gages  assez  considérables  comme  chevalier  de  la  cour,  et 
la  Chambre  Apostolique  paye  une  partie  du  loyer  des  diverses 
maisons  qu'il  occupe  dans  Avignon.  Mais  ce  n'est  pas  tout  encore. 
A  ce  Pierre,  la  même  Chambre  Apostolique  remet  en  deux  fois 
62,000  florins  d'or  pour  des  achats  de  terres,  dont  l'une  le  fait 
vicomte  de  Caraman.  (Op.  cit.,  IP  partie,  I,  pp.  62-64;  Quelques- 
unes  des  dernières  volontés  de  Jean  XXII,  2«  document,  pp.  6-7.) 

Quel  moyen,  du  reste,  de  repousser  des  quémandeurs  dont  la 
multitude  et  l'importunité  livrent  à  la  volonté  du  pontife,  vo- 
lonté sans  doute  résolue  d'avance  à  capituler,  des  assauts  irré- 
sistibles ?  Car  à  la  curée  ne  sont  pas  accourus  seulement  jusqu'au 
dernier  les  frères  et  les  soeurs,  les  neveux  et  les  nièces,  les 
parents  immédiats  du  personnage  omnipotent,  devenu  par  son 
élection  le  dispensateur  possible  de  tous  les  biens  de  ce  monde. 
Aux  d'Euse,  pour  les  renforcer,  se  sont  jointes  toutes  les  familles 
quercynoises  qu'une  alliance  rattache  à  eux  de  près  ou  de  loin. 
Si  bien  qu'en  même  temps  qu'aux  représentants  de  son  propre 
sang,  c'est  à  dix,  à  vingt  familles  peut-être,  également  touffues, 
ramifiées  pareillement  en  une  infinité  de  branches,  dont  il  a 
fallu  toute  la  patience  de  M.  A.  pour  débrouiller  les  entrelace- 
céments,  que  Jean  XXII  doit  faire  tête.  Ce  sont  les  Trian;  ce  sont 
les  de  Via,  dont  l'un,  Pierre  de  Via,  ne  met  pas  en  ligne  moins 
de  huit  enfants.  Ce  sont  les  de  Jean,  parmi  lesquels  le  cardinal 
Gaucelin  accapare  une  foule  de  bénéfices  disséminés  partout, 
jusqu'en  Angleterre,  et  s'entoure  lui-même  d'une  troupe  de  fami- 
liers ou  cubiculaires,  dont  le  pape,  plus  ou  moins  directement, 
doit  faire  par  surcroît  le  bonheur.  Ce  sont  les  de  Lapérarède,  les 
de  Roset,  les  du  Pouget,  dont  l'orgueil  s'épanouit  dans  la  fortune 
éclatante  du  fameux  légat  et  cardinal  d'Ostie,  Bertrand.  Ce  sont 


362  ANNALES    DU    MIDI. 

les  Cardaillac.  Deux  de  ces  derniers  ont  leur  part  de  dépouilles 
dans  l'étrange  démembrement  que  subit  alors  le  diocèse  de  Tou- 
louse. L'un  devient  évêque  de  Rieux  et  l'autre  de  Saint-Papoul. 

Pour  satisfaire  tout  ce  monde,  Jean  XXII  sacrifie  l'argent  de 
l'Église.  Il  lui  jette  à  pleines  mains  les  bénéfices  avec  ou  sans 
charge  d'âmes.  Il  les  entasse  par  dix,  par  vingt  sur  une  même 
tête.  Dans  ce  cumul,  il  foule  aux  pieds,  dit  M.  A.,  «  les  décrets 
portés  contre  la  pluralité  des  bénéfices,  décrets  renouvelés  par 
lui-même  {huile  Eocsecrabilis)  ».  {Op.  cit.,  W"  partie,  I.pp.  57-58.)  Il 
donne  la  tonsure  à  un  enfant  de  sept  ans,  un  de  Jean,  écolier  à 
Cahors.  {Ibid..  II,  p.  109.)  Il  ne  s'indigne  pas  que,  pour  devenir 
doyen  d'une  église  collégiale,  un  de  Lapérarède  mente  au  sujet  de 
son  âge.  {Ibid.,  p.  153.) 

Ce  n'est  là  cependant  que  le  train  coutumierde  cette  cour  pon- 
tificale. Mais  elle  a  aussi  ses  jours  extraordinaires,  et  surtout  ses 
mariages,  ceux  de  quelques-uns  des  membres  de  cette  fortunée 
maison  des  d'Euse,  élevée  désormais  au  rang  de  maison  souve- 
raine. C'est  alors  que  la  caisse  apostolique,  si  souvent  et  si  indis- 
crètement sollicitée,  doit  s'ouvrir  toute  grande.  De  plusieurs  de 
ces  fêtes,  M.  A.  a  pris  soin  de  nous  donner  le  détail.  En  compa- 
raison, les  noces  de  Gamache  ne  sont  que  menus  de  carême. 
Vingt  boeufs  et  cent  moutons  figurent  au  dernier  mariage  de 
Pierre  d'Euse,  le  troisième  qu'il  contracte.  On  ne  mange  pas 
tout,  il  est  vrai.  Les  restes  sont  employés  pour  l'usage  du  palais. 
Notez  ce  point  particulier.  L'histoire,  douce  à  Jean  XXII,  en 
tirera  prétexte  quelque  jour  pour  joindre  la  simplicité  et  l'éco- 
nomie à  toutes  les  vertus  dont  elle  prétend  le  gratifier.  Ce  festin, 
toutefois,  est  encore  peu  de  chose.  Que  dire  du  suivant?  La  cour 
pontificale  l'offre  à  l'occasion  du  mariage  d'une  petite-nièce  du 
pape,  la  fille  de  son  neveu  Arnaud  de  Trian.  En  voici  la  carte, 
plus  que  pantagruélique.  Ce  serait  péché  que  de  ne  pas  repro- 
duire en  passant  ce  monument  inestimable  de  la  gloutonnerie 
humaine  :  "  4,012  pains,  11  charges  de  vin,  8  bœufs  plus  3  quar- 
tiers, 55  moutons  plus  \  quartier,  8  porcs,  4  sangliers,  une 
grande  quantité  de  poissons  divers,  200  chapons,  690  poules, 
380  perdrix,  270  lapins.  40  pluviers,  37  canards,  50  colombes, 
4  grues,  2  faisans,  2  paons,  292  petits  oiseaux,  3  quintaux  et 
2  livres  de  fromage.  3,000  œufs,  etc.,  etc.,  2,000  pommes,  poires 
et  autres  fruits,  etc.  »  {Op.  cit.,  W  partie,  I,  p.  78,  note  1.)  Quelle 
gigantesque  mangeaille  et  quel  appétit  chez  les  convives!  Car.  il 


COMPTES    RENDUS    CRITIQUES.  î^63 

faut  l'observer,  on  ne  nous  dit  pas  que  rien  soit  demeuré  cette 
fois  d'un  aussi  énorme  amas  de  victuailles. 

S'étonnera-t-on  ensuite  qu'ayant  à  caser  et  à  doter  tout  un 
pareil  monde  ou  même  seulement  à  le  nourrir,  les  souverains 
pontifes  donnent  à  leur  fiscalité  un  développement  de  plus  en 
plus  considérable  et  si  exorbitant  qu'on  puisse  dire  légitimement 
d'eux  qu'ils  font  argent  de  tout?  S'étonnera-t-on  également  qu'à 
son  lit  de  mort,  dans  sa  dernière  nuit,  Jean  XXII,  pour  son 
compte,  n'ait  d'autres  préoccupations  que  celles  qu'a  notées 
M.  A.?  Ce  pape,  dont  les  heures  sont  comptées,  vous  le  croiriez 
peut  être  dominé  par  la  pensée  du  dieu  terrible  devant  lequel  il 
va  paraître,  du  jugement  qu'il  va  subir,  de  cette  vie  nouvelle  et 
obscure  où  il  va  entrer  sans  retard,  et  dont,  en  sa  carrière  de 
prêtre,  il  a  dû  bien  des  fois  représenter  aux  fidèles  l'approche 
pleine  d'angoisse.  Non  :  cette  nuit  suprême,  il  la  passe,  jusqu'à 
la  dernière  minute,  à  mettre  ses  comptes  en  règle,  à  donner  des 
quittances,  à  établir  la  situation  do  la  caisse  pontificale.  {Quel- 
ques unes  des  dernières  volontés  de  Jean  XXII,  documents  1-7, 

Pourrait-on  imaginer  une  série  d'indications  plus  significati- 
ves ?  Pour  ce  dur  et  sec  Jean  XXII,  aussi  sec  et  aussi  dur  que  les 
rocs  de  son  pays  natal,  Cahorsin  d'origine,  Cahorsin  par  ses 
instincts  indélébiles  de  manieur  d'argent,  et  dans  le  sens  où 
l'entendent  les  hommes  de  ce  temps-là,  l'histoire,  comme  on  en 
a  déjà  fait  plusieurs  fois  la  remarque,  semble  incliner  vers  une 
tendresse  nettement  décidée.  Mais  c'est  là  un  sentiment  qui  se 
justifie  mal,  si  les  motifs,  à  certains  points  de  vue,  n'en  sont 
pas  un  mystère.  Il  n'y  a  pas  à  s'extasier  sur  l'attitude  par  la- 
quelle le  pontife  pense  se  hausser  au  niveau  de  ses  prédéces- 
seurs triomphants  du  xii«  et  du  xiir  siècle.  Cette  attitude  hau- 
taine et  intransigeante  en  face  des  pouvoirs  civils,  Jacques 
d'Euse  peut  se  la  permettre  avec  l'Allemagne  anarchique  et 
l'Empire  réduit  à  l'impuissance  depuis  la  ruine  des  Hohenstau- 
fen.  Moins  encore  que  Boniface  VIll.  il  ne  l'aurait  prise  impuné- 
ment, à  d'autres  époques  et  avec  d'autres  adversaires,  avec 
Philippe-leBel,  par  exemple,  et  avec  ses  ministres.  On  ne  voudra 
pas,  espérons-le  du  moins,  nous  faire  admirer  chez  le  même  per- 
sonnage cette  science  théologique,  dont  les  élucubrations  malen- 
contreuses n'aboutissent  qu'à  provoquer  un  désaveu  si  unanime, 
que  toute  la  majesté  de  la  tiare  ne  peut  en  contenir  l'explosion 


364  ANNALES   DU    MIDI. 

retentissante.  Quand  on  y  regarde  de  près,  ce  qui  reste  en 
somme  de  ce  pape  trop  prisé,  c'est  une  physionomie  dont  les 
traits  les  plus  apparents  ne  composent  guère  un  ensemble  fait 
pour  séduire.  Apreté  au  gain,  ténacité  dans  la  rancune,  rigueur 
poussée  jusqu'à  la  cruauté,  superstition  grossière,  tels  sont  ces 
traits  principaux.  On  aurait  de  la  peine  à  y  reconnaître  quelque 
chose  comme  des  vertus.  Et  voilà  qu'à  ces  traits  authentiques 
il  faut  en  joindre  d'autres  qui  ne  valent  pas  beaucoup  mieux. 
Nous  voulons  dire  ce  penchant  aveugle  pour  tous  ceux  qui,  de 
près  ou  de  loin,  se  rattachent  à  sa  personne,  et  que  le  terme  de 
népotisme  qualifierait  bien  faiblement,  cette  prodigalité  de  toutes 
choses  en  leur  faveur,  quelque  peu  inattendue  chez  un  calcula- 
teur aussi  serré,  cette  dilapidation  réellement  folle,  au  profit 
d'une  tourbe  famélique,  de  tous  les  trésors  de  l'Eglise,  spirituels 
ou  matériels. 

Toutefois,  ce  n'est  pas  seulement  la  personnalité  de  Jean  XXII 
qui  se  trouve  en  cause  dans  des  révélations  d'un  pareil  genre. 
Si  haute  qu'elle  soit,  c'est  bien  plus  encore,  c'est  l'Église  elle- 
même,  dont  il  n'est  qu'un  des  chefs  éphémères.  A  l'égard  de 
celle-ci,  des  mêmes  documents  ressort  la  constatation  d'un  fait 
capital,  celle  d'une  crise  assez  grave  et  assez  intime  pour  met- 
tre en  question  jusqu'à  son  existence.  Pour  la  crise  dont  il  s'agit, 
ni  l'expression  banale  de  Captivité  de  Babylone,  appliquée  au 
temps  où  elle  se  déclare,  ni  la  sujétion  plus  ou  moins  réelle  du 
pontificat  à  la  couronne  de  France,  ne  sauraient  en  préciser  la 
nature  ou  en  donner  la  raison.  Arrêtée  dans  la  réalisation  de 
ses  rêves  abusifs  de  domination  universelle,  la  papauté  semble 
s'être  résignée  à  sa  déchéance.  Elle  remanie  et  fixe  à  nouveau 
son  idéal,  ainsi  que  les  principes  de  sa  politique  future,  mais  en 
leur  enlevant  les  proportions  démesurées  qu'elle  avait  voulu 
leur  donner  dans  les  siècles  précédents.  Des  ressources  encore 
prodigieuses  qui  lui  sont  restées  après  sa  défaite,  elle  s'applique 
à  tirer  désormais  tout  ce  qu'elles  comportent  d'éclat  mondain, 
de  jouissances  humaines.  Pour  ceux  qui  l'étudient.  elle  prend 
chaque  jour  davantage  la  figure  d'une  de  ces  puissances  terres- 
tres que  jadis,  au  nom  d'un  idéalisme  intraitable,  elle  a  pré- 
tendu s'asservir.  Le  culte  des  arts,  inauguré  dans  le  même  âge 
chez  les  représentants  de  cette  papauté  moderne,  a  trop  sou- 
vent obscurci  le  sens  d'une  évolution  aussi  pernicieuse.  Mais  ce 
culte  n'est  que  la  forme,  contemporaine  en  quelque  sorte,  d'un 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  365 

faste  orgueilleux,  qui  s'accorde  aussi  mal  avec  l'esprit  aposto- 
lique que  les  aspirations  affichées  à  d'autres  moments  par  des 
pontifes  de  mœurs  plus  simples.  Sans  doute,  une  transformation 
pareille  ne  sera  pas  l'oeuvre  d'un  jour.  Cent  ans  et  plus  s'écoule- 
ront entre  les  temps  de  Clément  V  et  de  Jean  XXII,  où  elle  se  des- 
sine, et  ceux  des  Borgia,  des  Rovère,  des  Médicis,  des  Farnèse, 
où  elle  est  arrivée  à  son  terme,  où  elle  a  produit  tous  ses  effets, 
où  le  pontificat  romain  est  devenu  un  pouvoir  comme  tous  les 
autres,  animé  des  mêmes  pensées  purement  politiques,  lancé 
dans  les  mêmes  conflits,  mis  surtout  par  ses  titulaires  successifs 
au  service  des  ambitions  particulières  de  leur  race.  Mais,  dans 
le  chemin  à  parcourir,  les  étapes  peuvent  déjà  se  distinguer.  En 
tout  cas,  la  papauté  a  dès  lors  à  sa  disposition  les  agents  prin- 
cipaux de  ses  destinées  prochaines.  Il  s'agit  de  ses  légats  trop 
fameux,  instruments  de  colère  et  de  répression,  exécuteurs  sans 
pitié  de  sanglantes  besognes,  voués  à  un  rôle  dont  l'inconve- 
nance, eu  égard  à  leur  caractère  sacerdotal  et  malgré  l'indiffé- 
rence courante,  n'est  pas  moindre  que  celle  des  visées  de  leurs 
maîtres.  Ce  seront  plus  tard  les  Albornoz,  les  Vitelleschi,  les 
Scarampi.  Mais,  auprès  de  Jean  XXII,  ces  derniers  ont  déjà  leur 
précurseur  et  leur  émule  dans  le  cardinal  d'Ostie,  le  redoutable 
Bertrand  du  Pouget'.  Charles  Molinier. 


J.  Lemolne.  Mémoires  des  évêques  de  France  sur  la  con- 
duite à  tenir  à  l'égard  des  Réformés  (1698).  Paris, 
Picard,  19 J2;  ia-S"  de  xLViii-412  pages. 

La  Société  qui  s'est  formée  en  vue  de  publier  des  documents 
concernant  l'histoire  religieuse  de  la  France  depuis  la  fin  du 
moyen  âge  jusqu'à  la  Révolution,  vient  de  faire  paraître,  sous 
le  titre  qui  précède  .  le  premier  volume  de  la  collection  des 
Archives  de  l'histoire  religieuse  de  la  France. 

Les  textes  mis  au  jour  par  M.  Lemoine  nous  reportent  aux 


1.  Cet  article  était  déjà  imprimé  quand  nous  a  été  communiquée  une 
nouvelle  étude  de  M.  A.  intitulée  :  Les  Quercyiiois  en  Italie  (Annales 
de  Saint -Louis-des-Français ,  avril  1904).  Nous  nous  bornerons  à  la 
3ignaler  ici.  L'étude  en  question  démontre  une  fois  de  plus  le  soin  minu- 
tieux apporté  par  M.  A.  à  ses  l'echerches  ;  mais  elle  n'offre  rien  non  plus 
qui  ne  confirme  les  conclasions  générales  que  nous  avions  cru  pouvoir 
exprimer  avant  d'en  avoir  [)ris  connaissance. 


366  aknaLes  du  MiOi. 

années  qui  suivent  la  révocation  de  l'Edit  de  Nantes,  au  mo- 
ment où  le  pouvoir  civil  découvre  que  la  loi  ne  vient  pas  à  bout 
des  consciences  vivantes  et  qu'on  les  exalte  en  voulant  les  vio- 
lenter. En  I68G.  Louis  XIV  est  persuadé  que  «  de  plus  de  huit  ou 
neuf  cent  mille  âmes  qui  étaient  infectées  de  l'hérésie  dans  son 
royaume,  à  peine  y  en  reste-t-il  douze  ou  quinze  cents  »'.  Cinq 
années  plus  tard,  en  1691,  l'intendant  de  Languedoc  signale  au 
roi,  rien  que  dans  le  «  pays  de  Languedoc  ».  plus  de  cinquante 
mille  religionnaires  en  état  de  porter  les  armes  »  (Lemoine. 
p.  vu).  L'évêque  d'Alais  estimait,  vers  le  même  temps,  que  les 
religionnaires  étaient,  dans  tout  le  royaume,  au  nombre  d'un 
million  (p.  x). 

Il  était  impossible  au  roi,  comme  l'écrivait  M"«  de  Maintenon 
(p.  XI).  de  «  quitter  une  entreprise  qu'il  a  poussée  si  hautement, 
sur  laquelle  il  a  permis  qu'on  lui  donnât  tant  de  louanges,  dans 
laquelle  ses  ennemis  ont  toujours  publié  qu'il  succomberait  ». 
Cependant,  Louis  XIV  se  décida  à  demander  l'avis  des  intendants. 
De  plus,  il  chargea  le  cardinal  de  Noailles  de  demander  des 
«  mémoires  »  aux  évêques  les  plus  autorisés.  Le  cardinal  con- 
sulta les  prélats  de  grande  réputation  dans  tout  le  royaume  et 
ceux  dont  les  diocèses  contenaient  un  grand  nombre  de  réfor- 
més. Les  évéques  du  Midi  donnèrent  donc  leur  avis.  Cette 
enquête,  qui  date  de  1698,  était  bien  connue;  mais  les  vingt-cinq 
mémoires  épiscopaux  qui  en  constituaient  le  résultat  étaient 
demeurés  inédits;  ils  forment  un  recueil  manuscrit  venant  du 
cardinal  de  Noailles  et  conservé  aujourd'hui  à  la  Bibliothèque 
du  Ministère  de  la  Guerre.  M.  Lemoine  publie  ces  vingt-cinq  mé- 
moires; il  les  complète  par  plusieurs  rapports  d'intendants  et 
par  des  documents  émanant  de  Pontchartrain.  de  d'Aguesseau, 
de  Bâvillc,  et  se  rapportant  à  cette  même  consultation,  qu'il  a 
puisés  dans  le  ms.  fr.  7045  de  la  Bibliothèque  nationale 2. 

Le  Midi  est  représenté  par  les  mémoires  de  Gourgues,  évêque 
de  Bazas;  Mascaron,  d'Agen;  de  Briqueville  de  La  Luzerne,  de 
Cahors;  de  Nesmond,  de  Montauban;  Le  Goux  de  la  Berchère, 
d'Albi;  Milon,  de  Condom;  de  Bertier,  de  Rieux;  de  la  Broue, 
de  Mirepoix;  de  Percin  de  Montgaillard.  de  Saint-Pons;  Colbert 

1.  Lettre  Mil  cardinal  Dcstrces,  citée  dans  le  BulL  de  lilt.  eccl.,  1903, 

p.  78. 
■2.  M.  ]>.  iiiiprinie  à  tort  lU4o  (p.  xiii,  n.  2). 


COMPTES   RENDUS   CHITIQtJES.  367 

de  Croissy,  de  Montpellier;  Fléchier.  de  Nimes;  Chevalier  de 
Saulx,  d'Alais;  La  Garde  Chambonas,  de  Viviers;  Le  Camus,  de 
Grenoble. 

M.  Lemoine  y  joint  l'ordonnance  de  Bâville  sur  les  écoles 
m  décembre  1697)  et  une  série  de  lettres  et  mémoires  de  Bâville 
sur  la  question  des  religionnaires  de  Languedoc. 

Le  problème  qui  se  posait  était  celui-ci  :  Quelle  conduite 
tiendrait-on  à  l'égard  des  Réformés  qui,  restés  en  France  et 
ayant  abjuré,  ne  pratiquaient  depuis  aucun  exercice  de  la  reli- 
gion catholique,  ou  même  prenaient  part  en  secret  à  des  exerci- 
ces de  leur  ancienne  religion?...  Devait-on  obliger  les  nouveaux 
convertis  à  pratiquer  tous  les  exercices  d'une  religion  à  laquelle 
ils  avaient  adhéré  par  le  fait  même  de  leur  abjuration,  mais  que 
la  plupart  reniaient  dans  leur  for  intérieur?  En  cas  de  refus, 
pouvait-on  employer  la  violence  pour  les  contraindre,  et  dans 
quelles  limites?  (Lemoine,  pp.  ix,  xxiv.)  Les  évêques  et  aussi 
les  intendants  furent  divisés  sur  cette  question. 

A  l'exception  de  l'évêque  de  Chartres,  les  évêques  du  Nord  sont 
opposés  aux  mesures  de  violence.  Bossuet  est  l'interprète  le 
plus  éloquent  de  ce  groupe.  «  Il  devrait  être  constant  que  l'on  ne 
doit  employer  aucune  contrainte  pour  obliger  les  réunis  à  la 
messe.  »  Ne  devront  être  punis  que  les  religionnaires  qui  con- 
treviendront ouvertement  aux  ordonnances  et  règlements  tou- 
chant la  paix  publique,  soit  en  sortant  du  royaume,  soit  en  pro- 
voquant des  assemblées  politiques  ou  religieuses.  Hors  de  ce  cas, 
«  tous  les  moyens  se  réduisent  à  l'instruction  convenable  et 
assidue  », 

Tout  autre  est  l'avis  des  prélats  du  Midi.  Ils  sont  pour  les 
mesures  de  rigueur  :  ils  demandent  l'assistance  obligatoire  à  la 
messe  (évêques  d'Agen,de  Condom);  l'instruction  obligatoire  des 
enfants  des  nouveaux  catholiques  (évêques  de  Cahors  et  de  Gre- 
noble); l'autorisation  obligatoire  des  mariages  entre  nouveaux 
catholiques,  et  même  des  mariages  mixtes;  la  confiscation  des 
biens  des  nouveaux  catholiques,  dans  certains  cas  (héritage  des 
hérétiques  passés  à  l'étranger,  succession  des  nouveaux  catholi- 
ques morts  sans  sacrements). 

D'où  venait  le  conflit  d'opinions  entre  les  évêques  du  Nord  et 
ceux  du  Midi?  De  ce  fait  que  les  premiers  avaient  peu  de  reli- 
gionnaires dans  leurs  diocèses,  tandis  que  les  seconds  étaient 
déçus  et  aigris  par  la  défection  en  masse  des  nouveaux  conver- 


368  ANNALES    DU    MIDI. 

tis.  La  même  division  se  constate  chez  les  intendants  dont  les 
mémoires  nous  sont  conservés.  Dans  les  généralités  éloignées 
des  frontières  et  de  la  mer,  les  intendants  sont  d'ordinaire  pour 
la  sévérité;  c'est  qu'ils  peuvent  tenir  les  nouveaux  convertis 
sous  une  étroite  surveillance.  Il  n'en  est  pas  de  même  sur  les 
frontières  ou  le  littoral.  Là  l'émigration  est  facile;  mais  comme 
elle  est  très  nuisible  au  bien  public,  il  faut  bien  se  garder  de  la 
provoquer. 

Le  cardinal  de  Noailles  exposa  au  roi  la  variété  d'avis  des 
évêques,  en  adhérant  pour  sa  part  au  sentiment  de  Bossuet  et 
des  prélats  modérés.  Et,  si  l'on  en  croit  M.  L.,  M"'e  de  Main- 
tenon,  écrivant  à  ce  même  cardinal,  aurait  tiré  la  morale  de 
cette  longue  consultation  par  ces  mots,  —  très  justes,  encore 
qu'il  y  ait  des  raisons  de  les  attribuer  à  La  Beaumelle'  :  —  «  Il 
me  semble,  au  reste,  que  votre  avis  est  une  condamnation  de 
tout  ce  que  l'on  a  fait  jusqu'ici  contre  ces  pauvres  gens.  » 

Pierre  Batiffol. 

[N.  D.  L.  R.  —  Nous  avons  reçu,  peu  après  le  compte  rendu  placé  ci- 
dessus,  un  autre  article  sur  le  même  sujet,  dû  à  M.  P.  Gachon.  Nous  ne 
voulons  pas  priver  nos  lecteurs  des  remarques  pi'écieuses  qui  s'y  trou- 
vent contenues.  Après  avoir  loué  comme  il  convient  «  la  belle  et  utile 
publication  de  M.  J.  L.  »,  M.  Gachon  ajoute  :] 

Si  complet  que  soit  le  travail  de  M.  Lemoine.  si  judicieuse  et 
bien  informée  que  soit  aussi  l'Introduction  qui  le  précède,  quel- 
ques réserves  critiques  sont  à  indiquer. 

Le  peu  de  résultats  obtenus  signalé  dans  l'Introduction 
(p.  xLv  et  suiv.)  ne  tient  pas  seulement  à  l'opposition  dirigée 
par  les  évêques  du  Midi  et  l'intendant  de  Languedoc  contre  des 
mesures  libérales,  ou  à  «  la  contradiction  essentielle  qui  existe, 
chez  les  rédacteurs  de  la  Déclaration  du  13  décembre  1698,  entre 
leurs  aspirations  généreuses  et  leur  conception  des  droits  de 
l'Etat  en  matière  de  religion  ».  Le  dernier  motif  est  exact  dans 
l'ensemble.  Mais  il  faut  préciser.  La  vanité  de  l'enquête  tient 
spécialement  à  son  point  de  départ,  à  son  principe  directeur.  Il 
n'est  nulle  part  question,  dans  les  Mémoires,  d'en  revenir  à  l'ob- 
servation du  dernier  article  de  l'Edit  révocatoire  laissant  aux 

1.  Voir  sur  ce  point  l'édition  Lavallée  de  la  Correspondance  gé)iérale, 
t.  IV,  lettre  lvi,  p.  288,  n.  L  —  M.  Lemoine  n'a  pas  pris  garde  (p.  xliv) 
au  texte  et  à  la  note  que  nous  signalons. 


Comptes  rendus  critiques.  369 

Religionnaires  la  liberté  tacite  de  conscience.  Or,  l'état  de  Reli- 
gionnaire  n'étant  plus  qu'une  fiction  légale  et  une  formule  de 
protocole  (les  preuves  abondent),  la  vraie  question  est  de  savoir 
si  les  nouveaux  convertis,  plus  ou  moins  violentés  dans  leur 
conscience,  seront  contraints  jusque  dans  leur  tenue,  si  leur 
abjuration  entraînera  leur  attitude  publique,  en  un  mot,  s'ils 
seront  forcés  d'assister  à  la  messe,  signe  manifeste,  facile  à  cons- 
tater et  que  deux  intendants,  ainsi  que  les  évêques  du  Midi,  ré- 
clament comme  une  mesure  de  police  uniforme  et  nécessaire, 
comme  une  preuve  apparente  et  nettement  visible  de  Yunité  en 
matière  de  foi.  Les  preuves  abondent  encore  sur  ce  point,  dans 
la  publication  de  M.  L.  et  ailleurs.  C'est  là  le  vrai  terrain  du 
débat  où  Bâville,  de  bonne  heure,  avant  le  début  de  l'enquête,  se 
tient  ;  où  trois  prélats  seulement,  La  Broue,  évoque  de  Mirepoix, 
bientôt  rallié  aux  mesures  de  contrainte,  Percin  de  Montgaillard, 
le  janséniste  de  Saint- Pons,  et  Bossuet  veulent  convoquer 
l'Eglise  de  France  en  concile  national. 

Or,  c'était  aussi  le  terrain  où  les  rares  «  obstinés  »  et  avec  eux 
une  foule  de  nouveaux  convertis  restaient  irréductibles,  ne  vou- 
lant point  abandonner  leur  culte  intérieur.  Ni  Montgaillard,  ni 
Bossuet  qui,  en  cette  matière,  défendaient  non  la  liberté  de  cons- 
cience, mais  les  droits  de  l'Eglise  et  l'intégrité  des  rites  (voir  la 
correspondance  de  Bossuet  avec  La  Broue,  de  Nesmond,  Fléchier, 
Bâville,  dans  les  Œuvi^es  de  Bossuet),  n'obtinrent  en  réalité  gain 
de  cause.  En  vain  leur  théorie  fut-elle  appuyée  d'arguments  sur- 
tout économiques  par  Pontchartrain  et  Daguesseau.  Si  la  décla- 
ration du  13  décembre  1698  et  les  instructions  qui  l'accompa- 
gnent interdisent  la  contrainte  en  la  forme,  toute  liberté  est 
laissée  aux  intendants  d'en  user  sous  des  moyens  détournés. 
Sans  recourir  à  des  pièces  inédites  d'archives  (qui  sont  proban- 
tes), la  conduite  de  Bâville  en  Languedoc,  de  Le  Gendre  à  Mon- 
tauban,  de  d'Ableiges  en  Poitou  est  assez  instructive  à  cet  égard. 
Ils  atteignent  les  nouveaux  convertis  récalcitrants,  notamment 
par  la  confiscation  des  biens  de  leurs  proches,  émigrés;  par  les 
biens  de  famille.  Une  simple  lecture  de  la  Correspondance  des 
contrôleurs  généraux  publiée  par  M.  de  Boislisle  suffirait  à  en 
convaincre. 

L'enquête,  la  déclaration,  les  instructions  n'avaient  finalement 
supprimé  qu'un  abus  :  l'exposition  des  cadavres  de  relaps  traînés 
sur  la  claie.  La  condition  des   nouveaux  convertis  restait,  en 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVL  34 


370  ANNALES    DU    MlDI. 

somme,  la  même  :  baptême,  éducation,  instruction  catholique 
imposés  aux  enfants;  validité  des  actes  de  la  vie  civile,  y  com- 
pris le  mariage,  entrée  aux  corporations  industrielles  ou  com- 
merçantes, accession  aux  charges  publiques  et  protection  réelle 
de  la  propriété  subordonnées  à  la  profession  officielle  et  osten- 
sible de  la  foi  catholique. 

Le  tout  procède  d'un  point  de  vue  admirablement  déduit  et 
développé  dans  un  Mémoire  en  quelque  sorte  théologique,  que 
Bâville  adressa  en  même  temps  (novembre  1698)  à  Châteauneuf, 
secrétaire  d'Etat  des  affaires  de  la  R.  P.  R.,  et  à  Beauvillier'. 
M.  J.  L.  n'a  pas  cru  devoir  le  publier,  comme  inspiré  par  les 
évêques  de  Languedoc  et  reproduisant  leurs  arguments.  L'abs- 
tention est  regrettable  et  les  motifs  discutables.  L'étude  de  la 
correspondance  de  Bâville  prouve  que  la  préparation  de  cet  écrit 
est  antérieure  au  moment  où  les  évêques  de  Languedoc  furent 
consultés.  Bâville,  dont  l'action  a  été  prépondérante  en  toute  la 
conduite  de  cette  affaire,  y  pose  nettement  les  droits  et  les  de- 
voirs d'une  religion  d'Etat  et  y  justifie,  par  le  succès,  les  procé- 
dés de  l'Inquisition. 

C'était  bien  là.  d'ailleurs,  r«  inclination  »  de  Louis  XIV,  qui 
n'eut  pas,  en  l'occasion,  les  scrupules  de  conscience  dont  on  lui  a 
fait  parfois  honneur  et  que  démentent  les  annotations,  inspirées 
par  lui,  qu'on  peut  lire  en  marge  de  quelques  documents  des 
papiers  Rulhière. 

Et  c'est  là  qu'aboutirent  les  velléités  généreuses  de  Noailles, 
Daguesseau,  Pontchartrain.  Aucune  sanction  réelle  ne  les  con- 
firma, les  intendants  gardant  toujours,  malgré  les  réclamations 
de  Daguesseau,  leur  juridiction  d'exception  et  transformant, 
pour  la  plupart,  les  efforts  des  administrateurs  et  de  l'arche- 
vêque de  Paris  en  un  nouveau  procès  à  la  liberté  de  conscience. 
Toutes  les  pièces,  malgré  la  féconde  érudition  et  le  soin  de 
M.  J.  L.,  n'en  ont  pas  encore  été  publiées. 

Une  seule  remarque  et  des  renseignements  de  détail  qui  n'in- 
firment en  rien  la  portée  des  documents  donnés  et  la  haute 
valeur  du  travail  :  l'œuvre  de  conversion  fut  loin  «  de  paraître 
abandonnée  »,  au  moins  en  Languedoc,  de  1685  à  1698  (Introd., 

1.  Bibl.  nat.,  pap.  Rulhière,  f.  fr.  7  045,  f°  116  et  suiv.  Ce  Mémoire  sera 
analysé  dans  un  travail  en  cours  de  publication  (dans  la  Revue  histo- 
rique). 


COMPTÉS   RENDUS   CRITIQUES.  371 

p.  IX)  ;  —  le  Mémoire  de  l'évêque  de  Montauban  (p.  104  et  suiv.) 
a  été  publié  dans  les  éditions  de  Bossuet,  comme,  à  quelques 
variantes  près,  le  Mémoire  de  Bâville  à  Châtcauneuf  sur  les  nou- 
veaux convertis  du  11  mai  1698  (p.  301  et  suiv.);  —  deux  fautes 
d'impression  :  p.  319.  1.  1,  au  lieu  de  éviter,  lire  écoute}-;  —  p.  291 
(énuraération  des  titres  de  Bâville)  au  lieu  de  La  Motte -Chaude- 
me?-,  lire  La  Mothe  Chandenier.  P.  Gachon. 

L.  BouRRiLLY.  L'Ecole  centrale  du  département  du  Var 
de  l'an  VI  à  l'an  XII  de  la  République.  Toulon,  impr. 
Bordato  ,  1903;  un  vol.  in-8"  de  25G  pages.  [EKtrait  des 
Mémoires  de  l'Académie  du  Var.] 

M.  Bourrilly.  inspecteur  de  l'enseignement  primaire,  a  fait 
une  œuvre  des  plus  utiles  en  réunissant  dans  ce  volume  et  en 
les  enchaînant  les  uns  aux  autres  par  un  texte  explicatif  tous 
les  documents  relatifs  à  l'Ecole  centrale  du  département  du  Var, 
depuis  le  décret  d'établissement  jusqu'à  celui  de  suppression.  Il 
les  a  publiés  presque  tous  in  extenso,  et  avec  raison  :  car,  malgré 
un  style  déclamatoire  et  vieilli,  ils  sont  souvent  très  dignes  d'être 
lus.  L'histoire  de  l'Ecole  centrale  de  Toulon  est  au  reste  courte  : 
elle  demeura  longtemps  dans  les  difficultés  de  l'organisation,  ne 
fonctionna  jamais  avec  la  régularité  voulue,  et  quand  elle  fut 
supprimée,  elle  végétait  assez  péniblement  au  milieu  de  l'indif- 
férence de  la  population.  Au  terme  de  ce  récit,  l'auteur  semble 
autorisé  à  dire  que  les  écoles  centrales  étaient  «  une  institution 
conçue  sur  un  plan  factice  qui  manquait  d'une  base  sérieuse.... 
les  connaissances  élémentaires,  dont  le  niveau  d'enseignement 
[était]  trop  élevé  et  le  programme  trop  touffu  comparé  au  pro- 
gramme si  réduit  des  écoles  primaires.  » 

Comme  écoles  techniques,  je  crois  l'opinion  de  M.  B.  très  juste. 
Evidemment,  l'institution  était  mal  venue,  sans  caractère  péda- 
gogique nettement  délimité,  sans  unité  de  méthode,  sans  cohésion 
d'enseignement.  L'école  de  Toulon  est  un  agrégat  de  cours  sans 
lien  et  sans  pénétration  entre  eux  :  des  cours  académiques  libres, 
nne  école  de  dessin,  un  enseignement  primaire  supérieur  analo- 
gue à  nos  cours  municipaux  (physique,  cliirai»e.  histoire  natu- 
relle, législation),  une  école  préparatoire  à  la  marine  (mathéma- 
tiques, dessin,  etc.).  Ce  sont  des  cours  et  non  une  suite  de  clas- 
ses. Un  de  ces  cours  n'est  jamais  professé;  d'autres  (histoire, 
législation)   n'ont  pas  d'élèves.  Les  élèves  sont  autorisés  à  ne 


â/2  ANNALES   DU    MIDI. 

s'inscrire  qu'à  certains  cours  (c'est  le  principe  du  sectionne- 
ment des  classes  repris  par  les  programmes  actuels).  Certains 
cours  sont  très  élémentaires  et  destinés  à  de  tout  jeunes  garçons 
(langues  anciennes,  belles-lettres);  d'autres  sont  beaucoup  plus 
élevés  et  s'adressent  à  des  jeunes  gens  déjà  formés  (on  trouve 
des  élèves  de  vingt-cinq,  de  vingt-sept  ans).  Tout  cela  ne  devait 
pas  donner  une  instruction  bien  étendue  ni  très  complète. 

Mais  M.  B.  ne  me  paraît  pas  avoir  suffisamment  considéré 
l'institution  du  point  de  vue  civique  et  social.  Et,  sous  cet  aspect. 
l'Ecole  centrale  me  paraît  infiniment  supérieure  au  collège  de 
l'ancien  régime  et  au  lycée  contemporain.  Elle  est  beaucoup  plus 
démocratique;  elle  est  une  partie  vivante  de  la  cité;  elle  se  fonde 
sur  les  vertus  civiques.  Nous  n'avons  pas  l'équivalent  du  jm^y 
de  police,  nommé  et  établi  par  les  élèves,  chargé  de  maintenir  la 
discipline  dans  l'Ecole,  et  appliquant  un  code  scolaire  d'une  sim- 
plicité moins  méticuleuse  et  plus  virile  que  nos  règlements. 
L'organisation  des  examens  publics  d'élèves  encouragés  par  la 
présence  des  autorités  locales  qui  y  prennent  part,  où  le  candi- 
dat est  interrogé  sur  toutes  les  matières  de  l'enseignement,  est 
supérieure  à  celle  de  notre  baccalauréat.  L'usage  des  concours 
publics  entre  candidats  aux  chaires  de  l'Ecole,  concours  très 
sérieusement  disputés  dans  des  épreuves  multiples,  permet  aux 
bourgeois  et  aux  pères  de  famille  de  se  faire  une  opinion  person- 
nelle et  raisonnée  sur  la  valeur  des  maîtres  do  leurs  enfants. 
Enfln^  le  jut-y  d'instruction,  chargé  de  surveiller  et  de  contrôler 
l'Ecole,  l'enseignement  donné  aux  élèves  et  les  améliorations  pos- 
sibles, est  une  institution  vraiment  démocratique  qui  devrait 
être  renouvelée.  Et  l'Etat  avait  refusé  de  créer  des  internats  !  — 
Il  me  semble  que,  sur  bien  des  points,  la  comparaison  de  l'Ecole 
centrale  et  du  Lycée  serait  à  l'avantage  de  la  première. 

C'est  pour  faire  cette  comparaison  d'une  façon  plus  approfon- 
die, plus  décisive,  qu'il  nous  faudrait  beaucoup  de  monographies 
comme  celle  de  M.  B.,  et  que  ses  documents,  notamment  les  pro- 
cès-verbaux des  concours  aux  chaires  et  des  examens,  sont  inté- 
ressants. Son  livre  sera,  sous  une  apparence  modeste,  une  très 
utile  contribution  à  l'histoire  des  Ecoles  centrales  i. 

L.-G.  Pélissier. 


1.  J'aurais   souhaité  quelques  divisions  en  chapitres  et  plus  de  clarté 
typographique  (les  documents  et  le  texte  s'embrouillent  souvent  les  uns 


COMPTES  RENDUS  CRITIQUES.  373 

A.  Zauner.  Die  romanischen  Namen  der  Kœrperteile. 
Eine  onomasiologische  Studie.  Eiiangen,  Fr.  Jimge, 
1902;  gr,  in-S"  de  194  pages.  (Extrait  des  Romanische 
Forschungen.  t.  XIV.) 

C'est  une  vaste  entreprise  que  celle  de  M.  Zauner.  Relever  les 
noms  des  différentes  parties  du  corps  humain  usités  non  seule- 
ment dans  toutes  les  langues  romanes,  mais  encore  dans  leurs 
divers  dialectes,  sous-dialectes  et  patois,  ou,  pour  parler  plus 
exactement,  prélever,  sur  une  multitude  de  points  du  domaine 
roman  tout  entier,  les  échantillons  des  mots  qui  servent  à  ex- 
primer ces  parties  du  corps,  dresser  le  catalogue  de  tous  ces 
termes,  tracer  le  contour  des  aires  où  chacun  d'eux  s'est  déve- 
loppé, classer  ces  expressions,  les  comparer,  remonter  à  leur 
origine,  étudier  les  vicissitudes  phonétiques  et  sémantiques 
qu'elles  ont  subies,  donner  les  raisons  de  tous  ces  changements, 
n'est-ce  point  une  oeuvre  qui  exige,  pour  être  menée  à  bien,  une 
grande  étendue  d'information,  beaucoup  de  flair  étymologique, 
enfin  une  connaissance  très  approfondie  de  la  phonétique  ro- 
mane jusque  dans  ses  rameaux  les  plus  écartés?  Toutes  ces  qua- 
lités, —  bien  qu'il  ne  nous  soit  permis  de  suivre  l'auteur  que 
dans  une  très  petite  partie  de  ses  excursions,  -  nous  pouvons, 
je  crois,  assurer  que  M.  Z.  les  possède  heureusement. 

Toutefois,  l'on  ne  saurait  se  dissimuler  que  la  science  des 
patois  dans  son  état  actuel  n'est  point  assez  avancée  pour  qu'il 
ait  été  possible  à  l'auteur  d'éviter  tout  à  fait  les  lacunes  et  par- 
fois même  les  erreurs.  L'on  peut,  toutes  proportions  gardées 
d'ailleurs,  rapprocher  du  travail  de  M.  Z.  la  Grammaire  des 
Langues  romanes  de  Meyer-Liibke.  Aussi  bien  ces  deux  ouvrages 
nous  viennent-ils  l'un  et  l'autre  de  l'Université  de  Vienne.  Des 
livres  comme  la  Grammaire  de  Meyer-Liibke  rendent  assuré- 
ment d'immenses  services.  Mais  ne  sont-ils  pas  venus  trop  tôt? 
La  connaissance  des  patois  romans,  même  en  Italie  et  en  France, 
n'est-elle  pas  encore  trop  incomplète  et  imparfaite  pour  qu'il 
soit  permis  au  linguiste  d'entreprendre  un  vaste  travail  de  syn- 


dans  l'auti'e).  —  I\I.  B.  n'auruit-il  pu  trouver  quelque  exemple  de  fonc- 
tionnement d\\  jury  de  police? —  A  corriger,  p.  181,  état  émergé,  au 
lieu  d'émargé. 


374  ANNALES    DU   MIDI. 

thèse?  Une  exploration  méthodique  et  directe  de  tomes  les  par- 
ties du  domaine  rendra  seule  possibles  les  ouvrages  définitifs  de 
l'avenir. 

Hâtons-nous  d'ajouter  que  IVI.  Z.  a  profité  habilement  des  ma- 
tériaux qu'il  a  su  réunir.  Il  a  surtout  le  mérite  d'avoir  pour 
ainsi  dire  inauguré  la  méthode  d'un  ordre  nouveau  de  recher- 
ches. C'est  à  peine  si  deux  études,  l'une  de  Diez^,  l'autre  de 
Tappolet2,  lui  avaient  ouvert  la  voie.  Cette  branche  nouvelle  de 
la  linguistique  romane,  pour  laquelle  l'auteur  propose  la  déno- 
mination d'Onomasiologie ,  se  distingue  en  effet  de  ce  que 
M.  Bréal  a  appelé  Sémantique  et  que  les  Allemands  ont  baptisé 
du  nom  de  Séinasiologie.  La  Sémantique  étudie  les  transforma- 
tions de  sens  qu'a  subies  tel  ou  tel  mot;  V Onomasiologie.  s'il 
faut  l'appeler  de  ce  nom,  recherche  les  différents  mots  qui  ser- 
vent à  traduire  une  idée  donnée  :  la  première  part  de  l'exté- 
rieur du  mot,  pour  aboutir  à  la  pensée  (arj^xaita  zz:  signification)  ; 
la  secomle  part  de  l'intérieur,  de  la  signification,  pour  aboutir 
au  mot  {^jwjy.'ji7.  =  appellatio7i,  dénomination). 

L'on  comprend  pourquoi  M.  Z.  a  choisi  comme  objet  de  son 
travail  les  noms  des  parties  du  corps  humain.  Ces  différentes 
parties  sont  des  objets  bien  définis,  connus  immédiatement  de 
chacun.  Il  est  facile  d'obtenir  dans  chaque  langue  le  mot  qui  y 
correspond  exactement.  C'est  ce  qu'a  fait  l'auteur.  Il  s'est  pour 
cela  non  seulement  aidé  de  la  plupart  des  lexiques  et  glossaires 
qui  ont  été  publiés  jusqu'à  ce  jour,  mais  a  encore  obtenu  d'une 
foule  de  correspondants  obligeants  des  réponses  précieuses  sur 
l'usage  particulier  à  tel  ou  tel  patois.  Cette  manière  de  procéder 
fait  que  l'ouvrage  est  une  mine  riche  de  matériaux  inédits. 

L'inconvénient  inévitable  de  ce  genre  d'enquête  est  le  manque 
d'unité  dans  l'appréciation  et  la  notation  des  sons.  Les  docu- 
ments dont  s'est  servi  M.  Z.  et  qu'il  reproduit  dans  son  livre  sont, 
les  uns  rédigés  avec  l'orthographe  traditionnelle,  les  autres  pho- 
nétiquement transcrits,  mais  suivant  des  systèmes  qui  diffèrent 
parfois  entre  eux.  L'auteur  nous  fait  savoir  qu'il  a  conservé,  — 
sauf  pour  la  notation  introduite  par  M.  Gilliéron,  laquelle  a  été 
ramenée  à  celle  de  Meyer-Liibke,  —  l'orthographe  de  ses  sources. 


1.  Diez,  Royyianische  Wortschôpfung . 

2.  ïappolet,  Die  romanischen    Verwandschaftsname?i.  Strasbourg, 
Triibnor,  1895   in-8°. 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  375 

L'on  ne  voit  point  qu'il  y  ait  eu  pour  lui  un  meilleur  parti  à 
prendre,  à  moins  qu'il  ne  se  soit  résolu  à  tout  recueillir  directe- 
ment lui-même,  ce  qui.  en  l'espèce,  était  à  peu  près  impossible. 
Il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  l'ouvrage  est,  au  point  de  vue  de 
la  graphie,  d'un  aspect  un  peu  disparate,  et  que  le  maniement 
n'en  est  certes  point  facile. 

La  disposition  générale  du  livre  est  au  contraire  commode. 
L'auteur  passe  en  revue  les  différentes  formes  qu'il  a  relevées 
pour  les  parties  du  corps,  dont  chacune  est  l'objet  d'un  para- 
graphe. Ces  formes  sont  judicieusement  classées.  Dans  une  pre- 
mière partie  du  paragraphe  est  étudié  ce  que  l'auteur  appelle 
la  l7-adition  latine-,  il  y  expose  la  fortune  plus  ou  moins  heureuse 
qu'a  eue  le  mot  latin  dans  son  passage  au  roman  ;  puis  vient 
l'examen  des  modifications  qu'a  subies  le  mot,  soit  en  vertu  de 
changements  phonétiques  anormaux  (métathèses,  contamina- 
tion, formations  enfantines,  etc.),  soit  par  suite  de  déformations 
morphologiques  (dérivation,  substitution  de  suffixes,  etc.); 
enfin  sont  énumérés  les  différents  moyens  qui  ont  permis  aux 
langues  de  remplacer,  en  en  créant  de  nouveaux,  les  mots  latins 
disparus  (expressions  figurées,  emprunts,  déplacements  de 
sens.  etc.). 

Cette  disposition,  qui  rend  l'ouvrage  commode  à  consulter, 
présente  toutefois  de  réels  inconvénients.  Le  morcellement 
des  matières  nuit  un  peu  aux  vues  générales.  L'auteur  lui-même 
reconnaît  dans  son  préambule  que  V Onomasiologie ,  pour  être 
vraiment  scientifique  et  philosophique,  ne  doit  point  se  borner 
à  constater  et  classer  les  phénomènes,  mais  doit  encore  les  ex- 
pliquer. Eh  bien,  l'on  ne  saurait  se  dissimuler  que  le  travail  de 
M.  Z.  laisse  quelque  chose  à  désirer  à  cet  égard.  Une  page  au 
plus,  au  début,  rappelle  une  loi  générale  que  M.  Tappolet  avait 
déjà  établie.  Quant  à  la  conclusion  de  l'ouvrage,  elle  fait  com- 
plètement défaut.  S'il  faut,  en  linguistique,  se  défier  des  géné- 
ralités, il  n'en  est  pas  moins  vrai  que  V Onomasiologie,  cette 
partie  de  la  science  du  langage  qui  touche  de  si  près  à  la  psy- 
chologie, ne  saurait  se  passer  de  quelques  considérations  d'en- 
semble. M.  Z.  eût  bien  fait  de  méditer  plus  d'une  page  du  beau 
livre  que  Bréal  a  consacré  à  la  Sémantique. 

Voici  maintenant  les  remarques  de  détail  que  nous  suggère  la 
lecture  du  travail  que  nous  analysons  : 

P.  16.  —  A  l'appui  de  l'explication  qui  tire  tadro  (Bas-Maine) 


376  ANNALES   DU   MIDI. 

=  «  tendon  »  de  lendone  contaminé  par  tenet'u,  citons  les  formes 
gasconnes  tréndun  (canton  de  Labrit).  téndrun  (canton  de  Mont- 
de-Marsan),  évidemment  influencées  par  Irénde,  tendre. 

P.  19.  —  M.  Z.  trace  un  tableau  de  la  lutte  qui  s'est  engagée 
et  se  poursuit  encore  sur  une  grande  partie  du  territoire  entre 
les  formes  issues  de  caput  et  celles  issues  de  testa.  Caput  a  perdu 
du  terrain  et  en  perd  de  plus  en  plus.  Quelles  sont  les  raisons  de 
cette  évolution?  Est-elle  due  à  ce  que  lesta  est  une  métaphore 
et  présente  plus  de  force  pittoresque  et  représentative  que  le 
mot  propre  caput?  Mais  testa  n'a-t-il  point  perdu  de  bonne  heure 
son  sens  figuré?  et  comment  expliquer  alors  les  progrès  que  fait 
actuellement  testa  en  Italie,  du  moins  au  nord  de  la  péninsule? 
Ces  questions,  l'auteur  ne  les  pose  pas.  Il  eût  été  toutefois  inté- 
ressant de  les  discuter. 

Ib.  —  11  est  peu  exact  de  dire  qu'en  français  chef  =  «  tête  » 
soit  inconnu  à  la  langue  moderne.  Au  début  du  xvii«  siècle,  le 
mot  est  encore  bien  vivant.  Malherbe  l'avait  laissé  passer  dans 
sa  première  critique  des  poésies  de  Desportes  ;  c'est  dans  une 
revision  postérieure  de  son  ouvrage  qu'il  l'a  condamné.  Très 
usuel  au  xvi«  siècle,  chef  àu  sens  de  «  tête  »  est  encore  courant 
chez  Corneille,  Pascal  et  même  Massillon.  Dans  son  Tf-ésor, 
Nicot  l'oppose  à  tête  qui  se  dit  des  animaux.  Il  est  dans  les  dic- 
tionnaires de  Lévinus  Hulsius  (1607)  et  de  Canal  (1611).  Il  ne 
tombe  vraiment  en  désuétude  qu'à  l'époque  de  Richelet  et  de 
Furetière.  Encore  s'est-il  conservé  très  tard  appliqué  à  «  des 
choses  saintes  »  :  l'on  dit  le  chef  de  saint  Jean,  de  saint  Denis. 
(Richelet,  Dict.,  1693.) 

P.  21.  —  Malgré  sa  promesse  (p.  7)  de  laisser  de  côté  les  termes 
d'argot,  M.Z.  relève  des  mots  tels  que  coloquinte  (N.de  la  France) 
=  «  tête  ».  C'est  là  cependant  évidemment  de  l'argot.  Et  toute- 
fois n'est  point  mentionné,  dans  le  même  sens,  le  Saintongeais 
cala  (cf.  par  exemple  :  Yan  de  Saint-Acère,  la  Mérine  à  Nas- 
tasie,  pièce  en  patois  saintongeais,  pp.  32.  177.  etc).  Cala  n'est 
certes  point  si  argotique  que  coloquinte. 

P.  32.  —  Le  prov.  pepido  =  «  pupille  »,  que  l'auteur  renonce  à 
expliquer,  ne  pourrait-il  être  rapproché  de  l'espagnol  pepila  = 
«  grain  ».  Ce  serait  le  grain  de  Vœil.  Cf.,  en  Lombardie,  burèla, 
proprement  «  l'insieme  délia  parte  colorata  dell'  occhio  »,  litté- 
ralement la  boule  de  Vœil. 
P.  38. -^  Nous  ne  savons  si.  à  Bordeaux,    la  paupière  se  dit 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  377 

bien  la  pépèro  (avec  un  è  ouvert),  comme  le  dit  M.  Z.,  d'après 
Mistral.  Mais  ce  qu'il  y  a  de  sûr,  c'est  que  les  formes  pépére  (avec 
un  é  fermé)  que  nous  relevons  à  Canenx-et-Réaut  (Landes)  et 
pœrpœre.  à  Mimizan  (cf.  Labouheyre  pœrpœrœya  =  «  ciller)  » 
font  supposer,  du  moins  pour  toute  cette  région,  un  sufâxe- 
Ula  et  non  <^lla. 

P,  40.  —  Heureuse  hypothèse  d'un  croisement  àQ  palpebra  et  de 
palpitare,  pour  expliquer  le  port.  esp.  pùrpaclo. 

P.  42.  —  Ajouter  qu'il  a  existé,  au  moins  dans  les  Landes,  un 
dérivé  :  cilium  +  ellam,  qui  a  donné  sélhè?^e  =  «  cil  »  (Canenx-et- 
Réaut). 

P.  44.  —  L'explication  que  Diez  avait  donnée  de  l'espagnol 
pestana  et  du  catalan  pestanya  n'est  peut-être  point  si  mauvaise 
que  le  pense  M.  Z.,  surtout  si  l'on  rapproche  l'italien  pislagna 
=  «  bord  d'étoffe»,  «  falbalas  »  :  le  cil  est  comme  la  bordure  de 
la  paupière. 

P.  51  —  Lambés  (Saint-Laurent  [Jura])  et  7-igne  (Arbedo)  signi- 
fient lèvre.  M.  Z.  renonce  à  expliquer  ces  deux  mots.  Il  ne  fau- 
drait peut-être  pas  chercher  bien  longtemps  pour  trouver  un 
dérivé  du  latin  lambo  qui  puisse  endosser  la  paternité  du  pre- 
mier. Quant  au  second,  l'espagnol  ri)la=^«  querelle  »,  sur  t-etli)' 
(latin  ringi).  «  ouvrir  la  bouche,  grincer  des  dents,  grogner  », 
pourra  sans  doute  fournir  un  bon  point  de  départ,  surtout  si 
l'on  songe  à  des  expressions  comme  :  faire  la  polie  =  «  faire  la 
moue  ».  littéralement  «  la  grosse  lèvre  ».  (Jaubert.  Gloss.  du  cen- 
time de  la  France,  II,  p,  200.) 

P.  66.  —  L'étymologie  du  normand  francisé  margoulelte  =z 
«  mâchoire  »  telle  que  l'a  proposée  Grandgagnage  est  repoussée 
avec  raison.  Nous  serions  assez  tenté  de  proposer  margella.  sous 
une  forme  dérivée  qui  resterait  à  déterminer  et  qui  aurait  sans 
doute  été  influencée  par  ôrwZa.  Margoulelte  aurait  d'abord  désigné 
le  rebord  de  la  bouche,  les  lèvres,  puis  il  y  aurait  eu,  comme 
cela  est  si  souvent  le  cas  lorsqu'il  s'agit  de  parties  du  corps  voi- 
sines, un  déplacement  de  sens.  (Dans  le  Vondômois,  dans  l'Aube 
et  l'Yonne,  margoulelte  signifie  aussi  menton,  par  un  déplace- 
ment de  sens  un  peu  différent.) 

P.  80.  —  Ajouter  à  la  liste  des  dérivés  romans  de  templa 
«  tempes  »  le  gascon  lémplun  (Canenx). 

P.  99.  —  La  forme  nasalisée  espanle  =  spatula  n'est  pas  parti- 
culière au  milieu  du  domaine  provençal;  on  trouve  espanl&^vtv 


378  ANNALES    DU    MIDI. 

plus  d'un  point  de  la  Gascogne  occidentale  (par  exemple  dans  les 
Landes,  canton  d'Arjuzanx  etpassim).  De  plus,  ces  formes-là  ne 
sont  point  uniquement  propres  au  sud  do  la  France;  on  les 
retrouve  par  exemple  à  Cellefrouin,  épalr.  (Rousselot.  Patois  de 
Cellefrouin,  Append..  p.  416.)  —  Toujours  à  propos  de  spatula, 
signalons  à  M.  Z.  une  autre  forme  intéressante  :  éparle  (à  Haget- 
mau)  qui  n'est  pas  due  non  plus  au  jeu  normal  des  lois  phoné- 
tiques. 

P.  107.  —  La  place  de  l'accent  sur  la  finale  de  hudè  =  coude 
(Puybaraud)  surprend  M.  Z.  Il  hésite  à  admettre  un  suffixe  ittu. 
Cependant  le  gascon  landais  Moél  à  Mont-de-Marsan,  Vert 
(canton  de  Labrit).  etc.,  postule  effectivement  ' cubiltum. 

P.  111.  —  Une  confusion  curieuse  qui  a  échappé  à  l'enquête  de 
M.  Z.  est  celle  qui  a  permis  d'employer  sur  les  confins  du  Gers  et 
des  Landes  punctu  au  lieu  de  pugnu.  On  dit  aujourd'liul  lupûn  et 
non  lu  pûn  dans  une  bonne  partie  des  cantons  de  Roquefort  et 
de  Villeneuve.  Je  trouve  plusieurs  exemples  de  cette  confusion 
dès  le  moyen  âge  dans  une  copie  remontant  au  xvi«  siècle  d'un 
acte  passé  à  Grenade-sur-l'Adour.  en  1322  i. 

P.  138,  —  L'on  chercherait  vainement  dans  le  paragraphe  qui 
concerne  le  pied  le  dérivé  peton  :=  «  petit  pied  ».  qui  est  dans 
Molière,  et  qui  certes  n'a  point  cessé  d'être  en  usage. 

P.  144.  —  Pour  désigner  le  sein  de  la  femme,  titta  -\-  -inu  n'est 
point  si  rare  que  le  croit  M.  Z.  qui  ne  cite  aucun  exemple  pour 
le  français.  Qu'il  nous  suffise  de  rappeler  Maître  Clément  et  ses 
Blasons  du  beau  et  du  laid  lélin.  Voir  encore,  dans  Richelet,  des 
expressions  comme  blanc  tetin. 

P.  145.  —  L'auteur  a  tort  de  croire  que  la  iovme pupo  «  sein  ». 
régulièrement  issue  de  puppa,  soit  seule  usitée  dans  le  sud-ouest 
de  la  France.  Au  contraire,  à  l'extrême  sud-ouest  (cantons  de 
Labrit.  Arjuzanx),  l'on  ne  connaît  que  pu'k.ye  (avec  un  k  forte- 
ment mouillé).  Par  parenthèse,  l'existence  de  cette  forme  à  cet 
endroit  rend  bien  invraisemblable  l'hypothèse  de  Devaux  qui 
explique  le  dauphinois  pouchye  par  un  emprunt  à  l'italien. 

P.  149.  —  Le  catalan  mugrô  =  bout  du  sein  est-il  donc  si  inex- 
plicable? N'est-ce  point  le  produit  très  régulier  et  tout  naturel 
du  latin  mûcrone  «  pointe  »? 


1.  Bull,  de  la  Soc.  de  Borda,  20'  année,  p.  165. 


COMPTES    RENDUS   CRITIQUES.  379 

P.  136.  —  Freixura  n'a  jamais  désigné  en  catalan  le  poumon 
de  l'homme.  —  Il  en  est  de  même  du  roussillonnais  friche. 

P.  179.  —  M.  Z.  serait  porté  à  rattacher  au  lat.  molle  le 
bazadais  moulet  «  estomac  ».  Le  traitement  de  II  s'y  oppose  for- 
mellement. Nous  sommes  fort  étonnés  de  voir  que  le  savant 
auteur  de  la  Conjugaison  en  Béarnais,  et  de  la  Phonétique  de 
l'Aquitaine  n'ait  point  été  arrêté  par  cette  difficulté.  Si  l'on  se 
rappelle  que  le  mot  dans  son  acception  ordinaire  signifie  «gésier» 
dans  la  région,  l'on  voudra  peut-être  songer  à  mola,  en  se  rap- 
pelant que  le  catalan  pedrer  «  gésier  »  est  évidemment  dérivé  de 
pedra . 

P.  182.  —  Je  ne  reviens  pas  sur  a/lerun  dont  j'ai  parlé  ici- 
même  '. 

P.  184   —  L'explication  du  proverbe  boufigo  «  vessie  »  ne  nous 
semble  point  assez  précise.  Il  faut  y  voir  un  croisement  entre 
vessica  et  *buffare.  —  Petego,  dans  l'Aveyron,  doit  également  s'ex 
pliquer  par  vessica  -\-  peditare. 

Georges  Millardet. 

1.  Annales  dit  Midi,  t.  XV,  p.  2n. 


REVUE   DES   PÉRIODIQUES 


PÉRIODIQUES  FRA.NGAIS  MÉRIDIONAUX. 


Dordogne. 

Bulletin  de  la  Société  liistorique  et  arcliéologique  du 
Périgord,  t.  XXVIII,  1901. 

P.  53-72.  A.  Dujarric-Descombes.  Jean  d'Assidc,  évèque  de  Périgueux,et 
son  mausolée  (1169).  [C'est  ce  J.  d'Asside  qui  assiégea,  prit  et  détruisit 
le  château  de  Gavaudun.  Cette  expédition  fut  entreprise  contre  des  hé- 
rétiques, qualifiés  de  brigands,  où  l'on  a  voulu  voir  des  précurseurs 
des  Albigeois.]  —  P.  72-104,  166-218,  266-321,  400-39,  539-96,  678-777. 
A.  ViGiÉ.  Histoire  de  la  chàtellenie  de  Be.lvès.  [Excellente  monogra- 
phie. M.  V.  a  d'autant  plus  de  mérite  que,  les  archives  de  Belvès 
ayant  été  détruites,  il  a  dû  patiemment  rechercher  dans  les  divers 
fonds  les  documents  relatifs  à  son  sujet.  A  voir  le  parti  qu'il  en  a  tiré, 
son  travail  peut  être  proposé  comme  modèle.]  —  P.  104-25,  218-39, 
333-71,  456-90,  620-50.  G.  Hermanx.  Rimes  de  Pierre  de  Laval.  [M.  H. 
s'est  déjà  occupé  de  P.  de  Laval  (voy.  Annules,  XIII,  96)  et  M.  Guy  a 
rendu  compte  {A)inales,  XIV,  217)  de  ces  articles  réunis  en  volume. 
Une  remarque  pourtant  :  dans  sa  préface,  M.  H.  a  oublié  de  nous  dire 
que  le  ms.  qu'il  édite  porte,  dans  le  catalogue  de  la  bibliothèque 
de  Périgueux,  le  n"  5.]  —  P.  321-33,  440-56.  Comte.  Badefols  d'Ans.  — 
P.  371-3.  A.  DuvERNEUiL  et  Germain  de  Maidy.  Une  plaque  de  foyer 
de  fabrication  hollandaise.  [Phototypie].  —  jP.  490-3.  De  Fayolle. 
Etat  des  remparts,  murs  et  fossés  de  la  ville  de  Périgueux  (1784).  — 
—   P.    532-8.   A.  Dujarric-Descombes.  Fers  à  hosties.  —  P,  599-619, 


I^ÉRIODIQUES  MÉRIDIONAUX.  381 

■/8j-808.  g.  Charrier.  Geoffroy  de  Vivans,  gouverneur  de  la  ville  de 
Périgueux  (1578).  —  P.  808-10.  Roger-Drou.\ult.  Testament  de  Charles 
Marthonie,  seigneur  de  Puyguilhem,  abbé  de  Boschaud  (14  jan- 
vier 1651). 

ï.  XXIX,  1902. 

P.  51-5.  Ch.  Durand.  Pomone  à  Vésone.  [Signale  la  découverte  d'une 
figurine  qui  représenterait  Pomone  et  en  donne  la  reproduction.  Com- 
mentaire insignifiant.]  —  P.  57-01.  E.  de  Biran.  Troubles  et  guerres  de 
religion  à  Bergerac  (1570-77).  —  P.  01-8.  F.  Villepelet.  L'exécution 
de  la  révocation  de  l'Edit  de  Nantes  dans  une  pi'tite  paroisse  du  Péri- 
gord.  [Dans  un  registre  paroissial  de  la  commune  de  Rouquette,  près 
Eymet  (Dordogne),  M.  V.  a  relevé  une  liste  des  ouvrages  remis  au 
prieur  le  î^l  novembre  1685  par  les  huguenots.  Document  des  plus  cu- 
rieux. A  cette  occasion,  M.  V.  nous  apprend  qu'à  Eymet  l'acte  de  sé- 
pulture d'un  protestant  était  dressé  par  le  prêtre  sans  observation 
malséante  et  sans  mentionner  la  religion  du  défunt.  L'ecclésiastique 
agissait  simplement  comme  magistrat  de  l'état  civil.  Ce  fait  portant 
sur  la  deuxième  partie  du  xviii»  siècle  (1753-90)  mérite  d'être  signalé.] 

—  P.  68-75.  J.  DuRiEux.  Le  P.  Pierre  Boutin,  de  la  Compagnie  de 
Jésus,  apôtre  de  Saint-Dominique  (1073-1742).  —  P.  101-8.  De  Cumond. 
Sarcophages  du  vieux  cimetière  de  Cumond.  —  P.  108-10.  G.  Her.manx. 
Notes  de  géographie  historique  du  Périgord.  La  pi-ise  de  Thiviers  en 
1211.  [Dans  les  Chroniques  de  Saint-Martial  de  Limoges,  édition  de 
la  Société  de  l'Histoire  de  France,  p.  80,  l'éditeur  identifie  (non  dans  les 
notes,  comme  le  dit  M.  H.,  mais  à  l'Index],  Tuvers  avec  Tiviers,  arr. 
de  Saint-Flour  (Cantal).  M.  H.  démontre  qu'il  s'agit  de  Thiviers  en 
Périgord.]  -  P.  111-64,  221-56,  336-99,  428-71,  543-51.  De  Rouméjoux. 
Essai  sur  les  guerres  de  religion  en  Périgord  (1551-1598).  [Voir  un 
compte  rendu  dans  les  A)inales  du  Midi,  t.  XVI,  p.  153.]  —  P.  164-9. 
G.  Charrier.  Lettre  du  roi  Henri  III  au  roi  de  Navarre,  23  nov.  1582. 

—  P.  19-J-215.  P.  HuET.  Information  ordonnée  en  1310  par  le  roi  d!Angle- 
terrc  au  sujet  des  surprises  faites  à  son  préjudice  par  le  roi  de  France 
en  Périgord,  Limousin  et  Quercy.  —  P.  215-20.  A.  Du.jarric-Descombes. 
Le  premier  livre  imprimé  à  Périgueux  (1498).  [C'est  l'ouvrage  de  Jean 
Heynlin,  dit  delà  Pierre,  Resolutoriumduhiorunicirca  célébrât io?ietn 
niissarum,  dont  un  exemplaire  se  trouve  à  la  Bibliothèque  nationale.] 

—  P.  256-65.  G.  Hermann.  La  chanson  nouvelle  de  la  défaite  et  mort 
du  prince  de  Condé.  [Pièce  empruntée  au  chansonnier  Christofle.]  — 
P.  265-8.  De  Saint-Saud.  A  propos  de  deux  ex-libris  périgourdins.  [Le 
premier  est  celui  de  Jean-Fran(;ois  du  Cheyron,  chevalier  du  Pavillon, 


382  ANNALES    Dt)    MIDt. 

et  le  deuxième  appartient  probablement  à  François  d'Esparbès  de  Lus- 
san,  marquis  d'Aubotcrre.]  —  P.  299-382,  471-97.  G.  Charrier.  Domme. 
[Documents  inédits  de  1588  à  1595.]  —  P.  899-402.  A.  Dujarric-Descom- 
BEs.  François  de  Montsalard,  médecin  d'Henri  IV.  —  P.  497-500.  A.  dk 
Bélkr.  Le  for  à  gaufres  de  Bayac.  [M.  de  B.  le  croit  du  commence- 
ment du  xYii'  siècle.  Reproduction  en  pliototypie.]  —  P.  500-8.  A.  Vigie. 
Commission  du  roi  Louis  XIII  au  capitaine  do  Sizeault  (22  sept.  1628). 
—  P.  509-14.  Nécrologie  :  A.  de  Rouméjoux.  —  P.  567-9.  E.  de  Biran. 
Lettre  relative  à  l'exorcice  de  la  religion  protestante  à  Bergerac,  en 
1672.  [Lettre  de  Jean  Gravier  au  député  général  des  Réformés.] 

H.  T. 

Drôme. 

Bulletin  de    la   Société  d'archéologie  et  de  statistique 
de  la  Drôme,  t.  XXXVII.  1903. 

P.  5-16.  L.  Doscliamps,  de  Montélimar.  [Notice  sur  ce  peintre  de  la  vie 
rurale  {Enfant   aux  poussins),   des   misères    sociales    (Fille-mère, 
V Abandonné)  et  de  scènes  religieuses  {Sommeil  de  Jésus),  dont  les 
œuvres,  pénétrées  d'une  franche  émotion,  ont  acquis  une  juste  noto- 
riété  (184t;-1902.)]  —  P.  17-48,   121-50,  225-55,  898-421.  M.  Villard  et 
J.  Tavenas.  Nouvelle  étude  critique  sur  Cliampionnet.  (Suite  et  à  sui- 
vre.) [Historique,  accompagné  de  documents  en  partie  inédits,  de  la  vie 
civile  du  général,  depuis  son  départ  pour  l'armée  de  Moselle  et  do  Sam- 
bre-et-Mcuse  à  la  tête  des  volontaires  de  la  Drôme,  jusqu'à  sa  mort  à 
Antibes  (1792-1800).  A  signaler  :  ses  rapports  avec  la  Société  populaire 
de  Valence  à  qui  il  envoie  régulièrement  une  sorte  de  bulletin  de  ses 
campagnes:   ses  procès  avec  Colombier,  officier  notarial  et  exécuteur 
testamentaire  mal  intentionné  d'E.  Grand,  père  de  Championnet;  son 
administration  de  Naples,  pendant  laquelle  il  ordonne  des  fouilles  fruc- 
tueuses à  Herculanum  et  Pompéi,  décrète  l'érection  d'un  tombeau  à 
Virgile  près  de  Pouzzoles  et  entre  en  lutte  avec  les  commissaires  civils 
déprédateurs  Faypoult  et  Mécliin;  sa  disgrâce,  son  rappel,  sa  mise  en 
jugement  à  Grenoble.  Rentré  en  grâce  au  30  prairial,  il  ne  peut,  comme 
commandant  en  chef  l'armée  d'Italie,  obtenir  de  soldats  dénués  de  tout 
la  reprise  de  la  marche  en  avant,  et  meurt  autant  de  découragement 
que  du  typhus.  L'arrêté  d'expulsion  des  commissaires,  la  lettre  expli- 
cative adressée  au  Directoire  sont  publiés  pour  la  première  fois.]  — 
P.  44-60,  151-68,  256-64.  Chanoine  J.  Chevalier.  Mémoires  pour  servir 
à  l'histoire  des  comtes  de  Valentinois  et  Diois.  (Suite  et  à  suivre.)  [Ces- 


PERIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  383 

sioii  par  Louis  XII  (1498)  de  ces  territoires  aussitôt  érigés  en  duché 
pour  César  Borgia,  malgré  une  vive  opposition  du  Parlement  de  Greno 
ble.  Administration  du  territoire,  au  nom  du  duc,  (pii  n'y  parut  jamais, 
par  ua  lieutenant,  un  gouverneur,  un  juge  mage,  un  trésorier  général, 
clioisis  par  César  Borgia  parmi  des  Espagnols  et  des  nobles  de  la  con- 
trée. Ces  agents,  sur  lesquels  on  a  peu  de  renseignements,  n'exercèrent 
jamais  une  autorité  bien  reconnue.  Aussi,  la  brouille  du  duc  et  du  roi 
accomplie  au  cours  de  l'e.Kpédition  commune  en  Italie,  Louis  XII  con- 
fisque le  duché,  dont  le   replacement  sous  l'autorité  royale   se  fit  très 
facilement  (151)4).]  —   P.  Gl-72,   169-82,  2(3r)-7-2,  388-97.  L.  Emblaru.  La 
famille  de  Bressac,  sa  généalogie,  son  histoire.  [Etude  sur  trois  frères  : 
F.-^L  do  Bressac,  conseiller  au  Parlement  de  (jrenoble,  tué  en  duel  en 
liJ.jO:  Ch.  de  Bressac,  officier  de  cavalerie,  puis  successeur  du  précé- 
deut  uu  Parlement;  l'abbé  de  Bressac,  jésuite,  qui  prononça,  en  l(i77, 
l'oraison  funèbre  de  Lesdiguières,  et  laissa  des  sonnets.]  —  P.  73-9. 
E.  Mkllier.  Balthazar  Baro  et  sa  filiation.  (Suite  de  l'étude  insérée  au 
vol.  XXXI.)  [L'auteur  cherche  à  établir  que  ce  continuateur  de  l'Astrée, 
docteur  en  droit,   professeur  et  fils  de  professeur    à    l'Université  de 
Valence,  était  né  en  cette  ville  vers  1590.]  —  P.  80-8,  199-209.  A.  Lacroi.\. 
Chàtillon  et  ses  alentours.  (Suite  et  fin.)  [Renseignements  intéressants 
sur  l'administration,  les  cultes,  l'assistance  publique  sous  l'ancien  ré- 
gime, dans  cette  commune.]  —  P.  89-108,  183-98,  273-88,  422-37.  E.  Mel- 
LiEu.  Les  ponts  sur  le  Rhône  à  Valence.  (Suite  et  à  suivre.)   [L'auteur, 
qui   se  livre   à   de   multiples   digressions  historiques,  archéologiques, 
hagiographiques  sur  Valence  et  les  environs,  ne  parvient  pas  à  établir  ' 
l'existence  d'un  pont  romain  dont  la  Tour  de  Constance  aurait  été  la 
forteresse,  tète  d'ouvrage,  et  que  la  crue  de   1219  aurait  emporté.]  — 
P.  210-3,  289-300,  438-43.  A.  Lacroix.  Les  environs  de  Chàtillon.  [Courtes 
notices  historiques  et   géographiques   sur  Creyers,  Glandage,  etc.  La 
population  de  cette   région  du   Diois   a   diminué  depuis  un   siècle  de 
30  »,'„.]  —  P.  301-21,  337-74.  M'--'-  Bellet.  Histoire  de  la  ville  de  Tain. 
(A  suivre.)  [L'auteur,  pour  retracer  l'histoire  de  cette  ville,  depuis  l'épo- 
que romaine  jusqu'au  xiv  siècle,  meta  profit,  avec  un  grand  sens  cri- 
tique,  les  rai'es  textes  où   il  en  est  fait   mention.  Etymologiquement, 
Tain  porte  tour  à    tour  les  noms  de  Tegna  (graphie  erronée)  dans  la 
carte   de    Pcutinger,  Tegnium.  Tignum   (Cartulaire  de  Saint-Andi'é  de 
Vienne    et    de    Saint-Barnard   de  Romans),   Tinctitm  (xiv  s.),  Taing. 
Tainct,  Tein   ù  partir  du   xv    siècle.    ^I*"'   B.  étudie    d'abord    le   viens 
des  Allobroges,  qui  relevait  de  la  colonie  de  Vienne  et  sur  l'emplace- 
ment duquel  ont  été  trouvées  plusieurs   inscriptions.   Il   rappelle  que 


38-4  AiSINALES    DU   MIDI. 

c'est  dans  la  plaine  de  Tain  qu'eut  lieu  en  131  (av.  J.-C.)  la  bataille 
d'Isara  entre  Q.  Fabius  Maximus  et  les  Allobroges  aidés  des  Arvernes. 
Au  moyen  âge,  dès  le  x«  siècle,  Tain  est  le  siège  d'un  prieuré  floris- 
sant relevant  de  l'abbaye  de  Cluny;  Tain  est  fief  des  seigneurs  de 
Tournon,  qui,  en  1295,  déclarent  devoir  l'hommage  à  Humbert,  dau- 
phin de  Viennois.  M.^"  B.  fait  justice  d'une  légende  persistante,  d'après 
laquelle  l'ermitage  du  coteau  de  Saint-Christophe,  qui  domine  Tain  et 
qui  donne  son  nom  au  Stérimberg,  vignoble  connu,  aurait  été  fondé 
par  les  religieux  de  Saint-André  de  Vienne  pour  un  croisé,  H.  Gas- 
pard de  Stérimberg,  sur  les  recommandations  de  Blanche  de  Castille.] 
—  P.  321-27,  375-87.  A.  Lacroix.  Plan-de-Baix.  (A  suivre.)  [Histoire  de 
cette  seigneurie  au  moyen-âge. J  —  P.  SH-G.  A.  L.^croix.  L'Ile-Adam. 
[Maison  et  tènement  de  Bourg-lès-Valence.]  —  P.  328-30.  Caprais-Fa- 
viER.  Sépulture  gallo-romaine  de  Lachau.  [A  60  kilomètres  de  Nyons.] 

0.  N. 

Gard. 

I.  Bulletin  du  Comité  de  l'art  chrciien  (diocèse  de  Nimes), 
t.  Yll,  1903. 

N°  1:7.  —  P.  365-408.  Abbé  Brun.  Les  Joséphites  de  Bagnols.  [Dans 
cette  consciencieuse  et  intéressante  étude,  l'auteur  suit  cette  congré- 
gation depuis  son  établissement  à  Bagnols  (1657)  jusqu'en  1792,  époque 
de  sa  dissolution.]  —  P.  409-15.  Abbé  Nicolas.  Les  débuts  de  la  Ré- 
forme à  Saint-Gilles,  d'après  un  acte  notarié  du  27  mars  1561.  [Ce  do- 
cument est  important.  Il  expose  avec  fermeté  les  plaintes  et  les  reven- 
dications du  peuple,  si  longtemps  foulé  par  les  puissants.  Il  réclame 
«  la  vraye  institution  de  Jésus-Christ  >>  et  adhère  à  la  coui-agouse 
requête  présentée  aux  États,  à  Montpellier,  par  Pierre  Chariot,  avocat 
de  Nimes.]  —  P.  416-12.  Abbé  F.  Durand.  Contre-critique  de  l'Histoire 
des  évèques  de  Nimes  par  M.  Ménard  ,  conseiller  au  jirésidial  de  la 
même  ville,  ou  réponse  à  l'extrait  de  cet  ouvrage  inséré  dans  la  Nou- 
velle Bibliothèque  (février  1739).  [L'éditeur  donne  ici  un  manuscrit  de 
Ménard,  otïert  à  l'Académie  de  Nimes  par  M.  le  marquis  de  Valfons. 
Ménard,  catholique  ardent,  est,  dans  cet  écrit  comme  dans  les  autres, 
fort  hostile  à  toutes  les  hérésies.  11  s'échauffe  comme  un  théologien  de 
profession  contre  les  Henriciens,  Pétrobusiens,  Bonshommes,  Albi- 
geois, «  secte  infectée  des  erreurs  de  Manès  »,  et  répandant  le  «  venin  » 
de  sa  doctrine  parmi  le  peuple  et  les  clercs.  Depuis  les  progrès  de 
l'histoire  des  religions  et  ses  larges  méthodes,  toutes  ces  discussions, 
répliques    et  dupliques    de   tendance    confessionnelle  paraissent  bien 


PERIODIQUES  MERIDIONAUX.  385 

surannées.  Se   termine  an  n»  48,  p.  445-59,  où  Ménard   tombe   sur  les 
Huguenots.] 

1904. 

N°  48.  —  P.  460-96.  Abbé  F.  Durand.  Les  Heures  de  Simon  Vostre 
en  1513,  au  musée  du  grand  séminaire  de  Nimes.  [Ces  Heures  «  à 
l'usage  d'Évreux  »  furent  éditées  par  Simon  Vostre,  libraire,  «  demou- 
rant  prés  la  grand'église  »,  à  Paris.  Description  très  soignée  de  ce 
beau  livre.]  —  P.  497-52-2.  Abbé  Nicolas.  Enquête  sur  les  troubles  reli- 
gieux de  Saint-Gilles  (1621-22).  [Ce  curieux  document  est  précédé  d'un 
avant-propos  où  l'éditeur  en  résume  la  substance.  A  suivre.]       E.  B. 

II.  Mémoires  de  r Académie  de  Nimes,  7«  série,  t.  XXV, 
1902. 

P.  1-16.  E.  BoNDURAND.  Jupitor  Héliopolitain.  [Après  avoir  précisé  le 
dernier  état  du  simulacre  du  dieu,  le  seul  qui  nous  soit  connu  par 
les  représentations  de  Nimes,  Avignon,  Deir  el-Qalaa,  et  tout  récem- 
ment Beyrouth  (C.  E.  de  l'Académie  des  Inscr.,  1903,  p.  90)  et  Paris 
(Ibid.,  p.  884),  l'auteur  en  cherche  les  éléments  primitifs.  Le  calathus 
vient  d'Egypte.  La  gaine  à  compartiment  est  la  gaine  osirienne,  la 
gaine  des  momies,  simplement  modifiée.  Le  collier  à  étages  et  la  per- 
ruque tombante  se  retrouvent  en  Egypte.  Quant  au  bras  levé  et  au 
fouet,  ils  caractérisent  Amon-Ra.  Osiris  aussi  tient  le  fouet.]  —  P.  17- 
23.  G.  Carrière.  Les  cimetières  de  l'époque  du  Bas-Empire,  de  Pou- 
zilhac,'  Arpaillargues  et  autres  lieux  du  Gard.  Planches.  [Mensurations 
crâniométriques.]  —  P.  37-52.  A.  Marignan.  Quelques  notes  sur  le  Midi 
de  la  France  par  un  voyageur  de  Vic-le-Comte,  en  1688.  [Curieux.]  — 
P.  91-3.  G.  Mingaud.  Le  tombeau  dit  «  des  Porcelets  »  aux  environs 
d'Aiguesmortes.  Planche.  —  P.  95-121.  Abbé  C.  Nicolas.  Notes  de 
M.  Delmas  sur  l'église  de  Saint-Gilles  en  1843.  Planche.  [Utiles  pour  la 
connaissance  de  l'état  ancien.]  —  P.  123-36.  Abbé  C.  Nicolas.  Le 
manuscrit  de  Jean  Raybaud  à  Aix.  [Liste  des  grands  prieurs  de  Saint- 
Gilles.]  E.  B. 

III.  Revue  cévenole.  Bulletin  de  la  Société  scientifique  et 
littéraire  d'Alais,  t.  I,  1902. 

N»  2.  p.  73-82.  N.  Trouliiias.  Sur  un  petit  trésor  trouvé  dans  le  Vivarais. 
[Bague  sigillaire  au  nom  de  FLAVIUS  et  scriptorium  portant  des 
ciselures  et  des  dessins  en  relief.] 

N»  3.  p.  111-32.  M.  Patin.  La  garde  nationale  à  Alais  pendant  la  Révo- 
lution. —  P.  133-46.  P.  GiLLY.  Notes  pour  servir  à   l'histoire  de  l'an- 

ANNALES  DU   MIDI.   —  XVI.  25 


o8b'  ANNALES    DU    MIDI. 

cieime  commune  de  Laval  et  de  Saint-Vincent,-de-Sallos.  [Ordoummces 
de  visite  de  1738  et  1749.]  —  P.  147-50.  P.  Rouchette.  Sur  quelques 
découvertes  archéologico-préhistoriques  faites  au  camp  de  César,  près 
Bagnols-sur-Cèze.  E.  B. 

IV.  Revue  du  Midi,  1903. 

N°  1.  P.  2IJ-7.  E.  BONDURA.ND.  La  Voyageuse  languedocienne.  [Titre  d'une 
sorte  de  roman  géographique  imprimé  à  Neucliàtel  en  1789.] 

N"  3.  P.  161-79.  G.  Nicolas.  Le  cliirurgien-major  Bruguière  (1744-1801). 
[Né  à  iSommière.  Portrait.] 

N"  4.  P.  250-71.  L.  Bascoul.  Petites  études  d'un  ignorant.  Les  tribula- 
tions d'un  émigré  (1789-1795).  [Ce  titre  un  pou  long  et  assez  vague 
caclie  les  mésaventures  du  comte  de  Marsane,  député  de  la  noblesse 
du  Dauphiné  aux  Etats-Généraux,  membre  de  la  Constituante,  et  dont 
la  femme  était  fille  unique  du  comte  de  Faret,  seigneur  de  Saint-Privat- 
du-Gard.  L'étude  se  continue  et  se  termine  au  n"  7,  p.  10-32.  Elle  offre 
de  l'intérêt.]  —  P.  291-306.  T.  Picard.  Nos  anciennes  carrières  romai- 
nes. [Suite  et  fin  au  n"  7,  p.  62-82.] 

N"  7.  P.  33-61.  D''  E.  Mazel.  Caveirac.  [Etude  sur  l'ancien  château  de 
cette  localité.] 

N"  8.  P.  106-21.  E.  Durand.  La  maison  du  diable  ou  mœurs  cévenoles 
(1778-81].  [Montre  comment  des  praticiens  peu  scrupuleux  dépouil- 
laient les  paysans.] 

N"  9.  P.  210-24.  D"'  E.  Mazel.  L'hcJtel  de  Caveirac.  [Etude  sur  un  ancien 
et  bel  hôtel  de  la  rue  Fresque,  à  Nimes.] 

N"  10.  P.  257-68.  P.  Falgairolle.  Une  boutade  d'écrivain  au  xviii"  siècle. 
[Il  s'agit  d'une  lettre  de  La  Beaumelle  à  sa  compatriote  M"'°  Bousquet, 
de  Valleraugue.  Il  y  célèbre  en  vers  la  beauté  de  deux  Nimoises, 
M'i"  de  Montolieu  et  de  Saint-Jean,  le  charme  de  M™'^  Pieyre,  et  la 
Coterie  de$  élégantes,  où  brillent  les  séduisantes  Chabanel,  de  Lézan, 
Vais,  Gentien,  Audemar,  de  Peissonel,  de  La  Calmette,  de  Valfons,  de 
Novi,  etc.  Ce  serait  à  regretter  amèrement  de  n'avoir  pas  connu  «  la 
douceur  de  vivre  »  (ju'on  pouvait  ressentir  à  Nimes  sous  l'ancien 
régime,  si  les  Nimoises  n'avaiiMit  conservé  l'habitude  d'être  fort 
jolies.] 

N»  12.  P.  429-37.  J.  Ballivet.  Uzès  et  Nîmes  en  1660,  d'après  les  lettres 
de  Racine.  [Le  jeune  Racine  vint  à  Nimes,  «  en  la  compagnie  d'un 
révérend  père  qui  n'aimoit  point  fort  à  rire  »,  assister  à  un  feu  d'arti- 
fice tiré  pour  la  naissance  du  dauphin.  Son  mentor  no  put  l'empêcher 
d'être  sensible  au  charme  des  Nimoises  :  «  Il  y  avoit  tout  autour  de 


PÉRIODIQUES  MERIDIONAUX.  387 

moi  des  visages  qu'on  voyoit  à  la  lueur  des  fusées,  et  dont  vous  auriez 
bien  eu  autant  de  peine  à  vous  défendre  que  j'en  avois  ».]        E.  B. 

Gers. 

Bulletin  de  la  Société  archéologique,  4«  année,  1!)03. 

P.  18-32,  ll'J-34,  226-44,  291-301,  308-20.  Beégail.  Un  révolutionnaire  ger- 
sois  :  Lautrac.  (Suite  et  à  suivre.)  —  P.  32-3.  Abbé  Lagleize.  Une 
fête  patriotique  en  1660  dans  deux  villages  de  Gascogne  :  Mauroux  et 
Saint-Oréac.  [Simple  procès-verbal  de» réjouissances  en  riiouncur  du 
mariage  de  Louis  XIV.  Te  Deum,  feu  de  joie,  cris  de  «  Vive  le  Eoy  » 
et  coups  de  mousquet.]  —  P.  34-44,  245-52.  Abbé  Gaumx.  Barcelone.  [Il 
ne  faudrait  pas  beaucoup  de  travaux  comme  celui-là  pour  discréditer 
un  auteur.]  —  P.  44-6.  Abbé  Lamazouade.  M.  de  Gère,  seigneur  de 
Sainte-Genyiie.  [Sans  intérêt.]  —  P.  51-6.  R.  Pagel.  L'intendant 
d'Etigny  et  les  boucliers  d'Auch.  [Intéressant  épisode  de  l'administra- 
tion du  célèbre  intendant,  relatif  à  la  liberté  de  la  boucherie.]  — 
P.  65-71.  Capitaine  Bluem.  Marché  passé  pour  la  construction  des  deux 
frégates  royales,  l'Oi^ale  et  l'Hermme,  en  1759.  [Document.  Devis  et 
conditions.]  —  P.  71-80,  97-113.  E.  Castex.  Coutumes  ou  for  de  Par- 
delhan.  (Suite  et  à  suivre.)  —  P.  86-97,  134-41.  Bellanger.  Saint  Orens 
et  son  poème.  [Extraits,  intéressant  l'histoire  locale,  de  la  thèse  de  doc- 
torat de  M.  B.]  —  P.  114.  Dautour.  Noël  inédit.  [En  langue  gasconne. 
Transcrit  en  1692  sur  un  registre  paroissial.]  —  P.  141-8.  A.  Bhanet. 
Une  journée  révolutionnaire  à  Auch  (le  29  janvier  1792).  —  P.  148-52. 
Ch.  Samakan.  Arrêts  du  Parlement  de  Toulouse  concernant  la  cons- 
truction de  la  cathédrale  d'Auch  (1487-92-96).  [Relatifs  à  la  part  con- 
tributive des  cardinaux  de  Savoie  et  de  la  Trémoille  et  à  la  pierre  em- 
ployée.] —  P.  152-4.  Renseignements  sur  les  édifices  [religieux]  du 
diocèse  de  Lcctoure  (1751).  --  P.  158-71,  254-66.  A.  Laveugxe.  Jcan- 
Fran(:ois  Bladè.  [Etude  bio-bibliographique  très  consciencieuse  et  par- 
faitement informée.]  —  P.  171-82.  P.-E.  Chanchus.  Une  ordonnance 
de  i)olice  à  Masseube  au  xviiP  siècle.  —  P.  183-202.  Abbé  Lagleize.  Le 
marquis  de  la  Jonquière,  baron  de  Magnas,  seigneur  de  Castelnau- 
d'Arbieu  et  d'Urdens,  chef  d'escadre,  inspecteur  des  flottes  de  Sa 
Majesté,  gouverneur  du  Canada  (1685-1752).  [Sans  aucun  intérêt  pour 
l'histoire  de  la  Gascogne,  à  laquelle  ce  personnage,  issu  de  l'Albigeois, 
tenait  seulement  par  son  mariage.]  —  P.  202-11.  L.  INIazerkt.  Notrs  sur 
les  du  Bosc  de  Momplaisir,  en  Fourcès.  [Histoires  locales,  anecdotes.] 
—  P.  211-25,  266-86.  Ph.  liAUzux.  Le  château  de  Balarin  (photogravure). 


388  ANNALES  DU   MIDI. 

—  P.  286-90.  Cajjitaine  Bluem.  Deux  lettres  de  soldats  gascons  (1809 
et  1814).  —  P.  806-8.  Ch.  Palanque.  Une  histoire  de  jeu  au  xv"  siècle. 
[Intéressant  par  la  publication  d'un  texte  gascon  de  l'Armagnac,  de 
1497  ou  98,  suivant  la  date  initiale  de  l'année,  l'acte  étant  du  7  mars.] 
P.  320-2.  Déclaration  de  grossesse  au  siècle  dernier.  [Reproduction 
d'une  formule  très  connue.  Acte  étranger  au  Gers.]  A.  V. 

Hérault. 

Bulletin  de  la  Société  languedocienne  de  géographie, 
t.  XXIII,  1900. 

P.  60-92.  L.  Malayialle.  Une  excursion  dans  la  Montagne-Noire.  Alzau, 
Lampy,  Saint-Ferréol,  le  pic  de  Nore  (Suite  et  à  suivre).  [Difficultés 
éprouvées  par  Riquet  pour  la  construction  du  port  de  Cette.  Corres- 
pondance avec  Clerville,  Daguesseau  et  Colbert.]  —  P.  248-73.  G.  Gros. 
La  Salvetat  et  ses  environs  (Suite  et  à  suivre).  [L'organisation  après  la 
guerre  des  Albigeois.]  —  P.  308-29.  P.  Gruyer.  Saint-Guilhem-le- 
Désert.  [Description.  Récit  de  la  fondation  du  monastère.  Gravures.] 

Tome  XXIV,  1901. 

p.  5-2.Û.  G.  Gros.  La  Salvetat  et  ses  environs.  [Suite  et  à  suivre.  Consi- 
dérations générales  sur  l'histoire  de  l'impôt.]  —  P.  67-94,  232-61,  333-48, 
488-500.  J.  Sahoc.  Sources  historiques  et  bibliographie  de  l'arrondisse- 
ment actuel  et  de  l'ancien  diocèse  de  Saint-Pons-de-Thomières.  [Fait 
avec  beaucoup  de  soin  et  d'intelligence.]  —  P.  193-212,  293-315,  445-66. 
Grasset-Morel.  Montpellier,  ses  sixains,  ses  îles  et  ses  rues.  [A  sui- 
vre. Les  sixains  sont  les  six  quartiers  de  la  ville,  les  îles  sont  les 
divisions  des  sixains.]  —  P.  218-31,  316-32,  467-87.  J.  Calvet.  La  Mon- 
tagne-Noire. [A  suivre.  Etude  géographique.  Il  s'y  trouve  cependant 
un  chapitre  d'histoire  sommaire.]  —  P.  405-44.  L.  F.  Viala.  La  Sérane 
et  ses  mines  d'or.  [Bref  historique  des  mines  de  la  Sérane,  dont  on 
sait,  d'ailleurs,  peu  de  chose.] 

Tome  XXV,  1902. 

P.  5-42,  159-95.  Grasset-Morel.  Montpellier,  ses  sixains,  etc.  [Suite  et  à 
suivre.]  —  P.  48-68.  J.  Calvet.  La  Montagne-Noire.  [Suite  et  fin.  Notes 
historiques  sur  Mazamet,  Sorèze,  etc.  Un  croquis.] 

Tome  XXVI,  1903. 

p.  51-90,  248-67,  387-400.  Grasset-Morel.  Montpellier,  ses  sixains,  etc. 
[Suite  et  à  suivre.]  M.  D. 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  389 

Puy-de-Dôme. 

U Auvergne  historique,  littéraire  et  artistique,  1902 ^ 

Suite  des  travaux  commencés  l'année  précédente  :  D^  Roux.  Riom  pen- 
dant la  Révolution.  —  De  Ribier.  Gharlus-Champagnac  et  ses  seigneurs. 
—  M.  BouDET.  Justice  prévôtalo.  —  J.  Delmas.  Thibault,  évèque  cons- 
titutionnel du  Cantal. 

Etudes  nouvelles  :  Dames  abbesses.  —  Les  Grands-Jours  d'Aiivergne 
de  166Ô  à  1666.  [Registres  du  greffier  Dougois.]  —  Discours  du  siège  de 
Gergovie  et  Sidoine  Apollinaire  à  Avitacum,  par  Villevaut.  —  Recher- 
ches sur  la  noblesse  par  l'intendant  de  Fortia  en  1666. 

1903. 

De  Ribier.  Chronique  de  Montfort-sur-Mauriac.  —  M.  Boudet.  Les 
baillis  royaux  et  ducaux  des  Montagnes. 

1904. 

De  Ribier.  Recherches  de  la  noblesse  d'Auvergne  par  la  Cour  des  aides 
et  les  intendants.  —  Tableaux  et  monuments  de  Clermont  pendant  la 
Révolution,  avant  les  destructions  opérées  par  Couthon  (archives  de  la 
cathédrale).  —  Journal  du  cordelier  Tiolier,  de  1731  à  1745. 

D.  du  D. 

Pyrénées  (Hautes-). 

Société  acadé?nique  des  Hautes-Pyt^énées'^.  1°  Bulletin 
local,  2«  sér.,  t.  V,  1901-1903. 

Fascic.  37,  38,  39,  41,  44.  —  P.  1-80,  153-220.  L.  Ricaud.  Les  représentants 
en  mission  dans  les  Hautes-Pyrénées  pendant  le  gouvernement  révolu- 
tionnaire. [Suite  et  fin  d'un  travail  considérable.  Après  «  la  parfaite  et 
complète  mise  en  action  du  gouvernement  révolutionnaire  avec  Mones- 
tier  (du  Puy-de-Dôme)  »,  on  y  voit  «  les  premiers  efforts  de  la  réaction 
thermidorienne  et  les  premières  atteintes  portées  à  la  terrible  organisa- 
tion par  le  représentant  Monestier  (de  la  Lozère)  » ,  d'octobre  1794  à 
mars  1795;  enfin  «  la  réaction  girondine  triomphante  et  la  destruction 

1.  Sur  ce  Périodique,  yoir  Atmales  du  Midi,  t.  XIII,  p.  571. 

2.  Cette  publication,  assez  irrégulière,  a  été  divisée  depuis  1901  en 
deux  parties  :  «  Bulletin  local  »  et  «  Bulletin  documentaire  »,  chacun 
paginé  à  part.  Elle  comprend  aussi,  comme  nous  l'avons  indiqué  déjà 
(Annales,  t.  XIII,  p.  251),  un  «Bulletin  général»,  dont  un  seul  fascicule, 
le  premier  du  t.  II  (fasc.  43)  a  paru  en  mars  1903  :  nous  n'avons  rien  à 
y  relever. 


390  ANNALES    DU    MIDI. 

presque  complèLo  des  institutions  de  la  loi  du  11  frimaire  avec  Auguste 
Izoard  »  (des  Hautes-Alpes),  de  mars  à  juin  1795.  Détails  nombreux 
sur  l'administration  des  deux  représentants,  notamment  sur  celle  de 
Monestier  de  la  Lozère,  agent  de  Barère  à  Tarbes,  dévoué  aux  idées  de 
conciliation,  d'apaisement;  précisions  minutieuses  sur  les  hommes  de 
la  ville  et  des  disu'icts  qui  ont  pris  part  aux  événements  politiques,  le 
tout  à  l'aide  des  Archives  privées  et  publiques.  Très  solide  étude,  un 
peu  diiTuse.]  —  P.  81-152.  L.  Canet.  Bagnères-de-Bigorre  et  la  Révolu- 
tion. [Premier  chapitre  qui  nous  fait  souhaiter  une  prompte  continua- 
tion de  cet  excellent  essai,  plein  d'aisance,  de  clarté  et  d'une  information 
parfaite.  Il  traite  de  Bagnères  à  la  fin  de  l'ancien  régime  et  se  clôt  avec 
les  cahiers  de  1789.  Sous  la  tutelle  des  intendants  la  ville  s'était  fort 
accrue,  embellie,  pourvue  de  routes;  ses  bains  en  faisaient  la  plus  fré- 
quentée peut-être  des  villes  d'eau  de  France;  son  budget  se  réglait  par 
des  excédents  de  recettes.  Il  y  a  des  ombres  à  ce  tableau  :  les  désordres 
provoqués  par  les  mesures  contradictoires  du  gouvernement  royal  sur 
les  municipalités,  les  jalousies,  les  haines  violentes  qui  régnaient  entre 
propriétaires  de  bains  (le  règlement  royal  de  1782  les  aggrave),  l'insuf- 
lisance  du  service  des  subsistances,  de  la  surveillance  des  forêts, 
l'extrême  faiblesse  de  l'instruction  publique,  le  nombre  étonnant  des 
pauvres,  la  plupart  étrangers,  attirés  par  les  eaux...  .\nalyse  des  vœux, 
très  intéressants,  du  clergé  bagnérais  et  du  tiers  état;  ceux  de  la 
noblesse  sont  inconnus.]—  P.  221-66.  N.  Eosapelly.  Les  marins  bigour- 
dans.  [Suite.  De  la  Révolution  à  la  troisième  République;  dont  J.  Lar- 
tigue,  capitaine  de  vaisseau,  1791-1875.]  —  P.  269-360.  L.  Ric.\ud.  Un 
régime  qui  finit.  [L'ancien  régime  en  Bigorre,  à  la  veille  de  sa  dispari- 
tion. Renseignements,  dont  beaucoup  originaux,  sur  les  divisions 
administratives;  les  élus  et  leurs  fonctions;  les  assemblées  provin- 
ciales; les  états  de  Nébouzan,  des  Quatre-Vallées,  de  Bigorre;  les 
municipalités;  l'administration  de  la  justice,  tant  royale  que  seigneu- 
riale. A  suivre.] 

2°  Bulletin  documentaire,  2^-  sér.,  1. 1, 1901-1902. 

Fasc.  36,  40,  42.  P.  1-264.  Cartulaire  des  vicomtes  de  Lavedan  dit  Livre 
vert  de  Bénac,  p.  p.  G.  Balencie.  [Ms.  de  1405-06,  contenant  la  liste 
des  cens  et  redevances  perçus  par  les  vicomtes,  des  extraits  d'un  sayn- 
suau  ajitic,  des  chartes  du  monastère  de  Saint-Orens  de  Lavedan  (des 
ix%  X»,  XI'  siècles),  etc.,  en  tout  57  actes  tant  latins  que  gascons, 
ceux-ci  compris  entre  1130  et  1411,  ceux-là  entre  865  et  1406.  En  tète 
deux  chansons  en  langue  française  «  d'ung  pauvre  amoureus  languis- 
sent »,  qui  aurait  été  .T.-J.  de  Bourbon,  vicomte  de  Lavedan.  L'une  des 


PÉRIODIQUES   NON    MÉRIDIONAUX.  391 

chartes  do  S;dnt-()rons,  de  980  (?),  semble  prouver  qu'Ainerna,  femme 
du  comte  de  Bigorre,  n'était  autre  que  la  sœur  de  Fortaner,  vicomte 
de  Lavedan  entre  980  et  1022.  Voir  aussi  les  titres  de  la  communauté 
d'Andrest  :  coutumes,  lettres  de  sauvegarde  royale  et  autres  (p.  21(3-42). 
Les  textes  gascons  paraissent  corrects;  ils  seront  très  utiles  aux  philo- 
logues. En  somme,  publication  satisfaisante,  dont  l'histoire  tirera  bon 
parti.]  P.  D. 


PÉRIODIQUES  FRANÇAIS  NON  MÉRIDIONAUX 

flfl.  —    Académie  des   Inscriptions    et    Belles -Lettres 
(Comptes  rendus  des  séances),  1903. 

,P.  58-61.  H.  DE  GÉRiN-Rif'ARD  et  abbé  Arnaud  d'Aonel.  Une  sépulture  à 
incinération  avec  inscription  grecque  découverte  dans  la  vallée  de 
l'Arc.  —  P.  108-11.  D'Arbois  de  Jurainville.  Vcnitouta-Quadrunia. 
[D'après  M.  d'A.  de  J.,  l'inscription  qu'il  lit  ainsi  serait  gallo-ligure, 
Venitouta  étant  un  mot  gaulois  et  Quadrunia  paraissant  être  la  forme 
ligure  du  latin  Petronia.]  —  P.  67-70.  L.  Bréhier.  L'introduction 
du  crucifix  en  Gaule.  [Elle  n'aurait  eu  lieu,  et  encore  exceptionnel- 
lement, qu'à  Narbonne,  à  la  fin  du  vi"  siècle.]  —  P.  117-30.  D'  Capitan 
et  abbé  Breuil.  Les  figures  peintes  à  l'époque  paléolithique  sur  les 
parois  de  la  grotte  de  Font-de-Gaume  (Dordogne).  —  P.  130-1.  T.  Hamy. 
Quelques  observations  a^^  sujet  des  gravures  et  des  peintures  de  la  grotte 
de  Font-de-Gaume.  —  P.  219-85.  D"'  Capitan,  abbé  Breuil,  Peyroxy.  Les 
figures  gravées  A  l'époque  paléolithique  sur  les  parois  de  la  grotte  de 
Bernifal  (Dordogne).  —  P.  256-64.  Cartailhac  et  abbé  Breuil.  Les 
peintures  préhistoriques  de  la  grotte  d'Altamira  à  Santillana  (Espagne). 
—  P.  212.  De  GÉRix-Rif'ARD  et  abbé  Arnaud  d'Aonel.  Note  sur  la  dé- 
couverte d'un  trésor  monétaire  à  Tourves  en  1366.  [D'après  un  acte  des 
registres  de  la  Cour  des  comptes  de  Provence  :  les  monnaies  étaient  au 
troisième  d'Apollon  avec  revers  à  la  roue  accompagnée  des  lettres  M  A.] 

Ch.  L. 

fS.  —  Annuaire- Bulletin  de  la  Société  de  l'Histoire  de 
France,  1902. 

P.  161-86.  N.  Valois.  Essai  de  restitution  d'anciennes  annales  avignon- 
naises  (1397-1420).  [Il  existait  encore,  au  xvii«  s.,  deux  mss.  contenant 
une  relation  fran(;aise  des  événements  avignonnais  de  1397  à  1420,  le 


392  ANNALES    DU   MIDI. 

Brief  des  chroniques  et  les  Faits  mémorables,  celui-ci  le  moins  com- 
plet. Il  semble  que  ce  soit  un  groupement,  fait  vers  1558  par  des  ama- 
teurs d'histoire,  de  notes  contemporaines  des  événements,  insérées  au 
jour  le  jour  parmi  des  procès-verbaux,  des  transcriptions  d'actes  judi- 
ciaires. Des  copies  ou  des  extraits  de  ces  textes  ont  été  pris  par 
H.  Siiarès,  Massilian,  etc.;  ils  sont  en  français  du  xvi"  s.  M.  V.  les 
réunit,  les  reproduit  et  au  besoin  les  commente  avec  sa  parfaite  con- 
naissance des  faits,  son  soin  ot  sa  précision  ordinaires.]  P.  D. 

13.  —  Association   française  pour  l'avancement  des 
sciences,  Si*^  session,  Motitauban,  1902.  (Notes  et  mémoires.) 

p.  1287-91.  Ed.  FoRESTiÉ.  Planches  gravées  des  confréi'ies.  [Planches  de 
bois  gravés,  à  sujets  religieux,  provenant  les  unes  de  l'imprimerie 
Forestié,  les  autres  d'ateliers  toulousains,  de  1630,  1646,  etc.  Descrip- 
tion; une  gravure.]  —  P.  1291-2.  A.  M.'Vsfrand.  Motte  féodale  de  Mer- 
lis,  commune  de  Vayres  (Haute-Vienne).  [Fouille  d'un  monticule,  sans 
intérêt.]  P.  D. 

14.  —  Bibliothèque  de  VEcole  des  Chartes,  1903. 

P.  5-30.  H.  Omont.  Nouvelles  acquisitions  du  département  des  manus- 
crits de  la  Bibliothèque  nationale  pendant  les  années  1900-1902.  Ma- 
nuscrits latins.  [718.  Breviarium  ad  usum  Vivariensem,  xiv»  s.;  753. 
«  Censier  et  obituaire  de  l'église  Notre-Dame  de  la  Sede  à  Aix  (B.-du- 
Eh.),  xii«-xiii«  s.;  7.54.  Liber  hymnorum,  cum  glosa.  Au  fol.  1,  publica- 
tion par  «  Johannes  Régis,  rector  ecclesie  Sancti  Gironcii,  Sancti  Flori 
diocesis  »,  d'une  sentence  d'excommunication  (1343);  fol.  48,  «  Planch  » 
de  Saint-Etienne  :  «  Seses,  senhor,  es  aias  pat...  »  xv  s.;  755.  Registre 
des  actes  passés  par  devant  le  notaire  Pranlong,  à  Arzon,  commune  de 
Chomelix,  diocèse  du  Puy  (1472-76)  xv«  s.;  1823.  Frater  Illidius  Vlieida- 
mis  Sylvius,  apud  Claromontem  Arverniœ  in  Illidiano  monasterio  mo- 
nachus,  de  laudibus  Arvernise  deque  Arvernorum  nobilitate,  potentia 
gestisque  magniiicis  libellus,  xvii"  s.;  1839-64.  Registres  de  divers  notai- 
res de  Genolhac  (Gard)  et  de  Villefort  (Lozère),  1364-1555;  1868,  Guil- 
lelmi  Durandi,  Mimatensis  episcopi,  rationale  divinorum  officiorum, 
copié  en  1444;  2387.  Missel  à  l'usage  de  l'église  Sainte-Marie  de  la  Dau- 
rade, de  Toulouse.  (Cf.  G.  Couderc,  Ami.  du  Midi,  t.  XIV,  p.  541.)]  — 
P.  81-53.  L.  Levillain.  Le  sacre  de  Charles  le  Chauve  à  Orléans.  [Il  n'a 
jamais  été  sacré  roi  d'Aquitaine,  contrairement  à  ce  que  l'on  croyait. 
Il  reçut  l'onction  le  6  juin  848  pour  la  totalité  du  royaume  franc  de 
l'Ouest.]  —  P.  221-58.  H.  Omont.  Suite  et  fin  des  Nouvelles  acquisitions 


PÉRIODIQUES  NON   MÉRIDIONAUX.  393 

du  département  des  manuscrits  de  la  Bibliothèque  nationale,  manus- 
crits français.  (10016.  La  vie  du  R.  P.  Fr.  Michel  Daniel,  premier  cus- 
tode des  Frères  Mineurs  observantins  reformez,  dicts  Recollectz,  de  la 
custoderie  de  Sainct  Antoine  du  Daulphiné  (f  1660),  par  B'r.  Paul  Gre- 
gaine,  religieux  du  mesme  ordre,  xyii"  s.;  10021.  Livre  journal  de  Jean 
Saval,  marchand  drapier  à  Garcassonne  (1310-41),  publié  par  Gli.  Portai 
dans  le  Bulletin  historique  du  Comité,  1901,  p.  423;  10040.  Journal 
des    remarques    faites    dans   un  voyage  par  la  France  en  1776,   par 

J.-J.    Oberlin.    Détails   historiques   et   archéologiques  sur Vienne, 

Orange,  Avignon,  Garpentras,  Aix,  Marseille,  Arles,  Nimes,  Montpel- 
lier, Agde,  Toulouse,  Bordeaux,  etc.;  10115.  Le  Parnasse  ancien  et  mo- 
derne abrégés,  t.  II,  Paris,  1795;  recueil  de  poésies  attribué  à  M.  Morel, 
doctrinaire,  l'un  des  professeurs  de  i-hétorique  au  Collège  royal  Bour- 
bon  d'Aix;  10127.   La  perge   du  fief  appelé   vulgairement  de  Tortu- 

rou assis  dans  la  parroisse  et  juridiction  de  Puechroudil.viguerie  de 

Najac  et  seneschaucié  de  Rouergue  [Pech-Rodil,  commune  de  Varen, 
Tarn-et-Garonne],  1599;  10130-33.  Renseignements  sur  le  personnel  et 
le  matériel  de  divers  services  militaires  réunis  en  vue  du  voyage  du 
duc  d'Orléans  de  Toulon  à  Paris  (octobre  1839);  10135-10154.  Inven- 
taire... ou  répertoire  [alpliabétique]...  composé  pour  l'utilité  de  la  com- 
munauté [de  Montauban]  et  pour  donner  aux  particuliers  des  éclaircis- 
sements dont  ils  pourraient  avoir  besoin  sur  toutes  les  affaires  qui  se 
sont  passées  dans  cette  ville,  depuis  sa  fondation  et  même  auparavant 
jusqu'à  présent,  par  M.  Satur,  conseiller,  secrétaire  du  Roy  à  la  cour 
des  aides  de  cette  ville;  10155.  Livre  de  raison  des  sommes  et  biens  de 
feu  M.  de  Jauréguiberry,  sieur  de  Sortolat  de  Mauléon,  xvii°  s.;  10158. 
Traité  de  «  rhétorique  française  «  recueilli  par  Arnauld-Michel  d'Aba- 
die,  étudiant  au  collège  de  Lascar,  xviii«  s.;  10160.  Mémoire  de  l'état 
présent  des  royaumes  de  Basse-Navarre  et  pais  souverain  de  Béarn, 
dressé  le  31  décembre  1700  par  M.  Le  Bret,  intendant;  10161.  Com- 
mentaire de  Bêla  sur  la  coustume  de  Soûle,  pays  des  Basques,  sénes- 
chaussée  de  Guyene ,  ressort  du  parlement  de  Bordeaux  (copie)  ; 
10162.  Censier  du  pays  de  Soûle,  xvii''  s.;  10163.  «  Album  de  1832  », 
recueil  de  nouvelles  et  de  pièces  de  vers,  en  français  et  en  anglais,  par 
Antoine  d'Abbadie:  «ms.  autographe,  avec  lithographies  et  dessins  au 
crayon;  10168.  Les  occupations  de  Pierre  Ayines,  commis  au  greffe 
civil  du  parlement  de  Thoulouse,  pendant  le  cours  des  misérables  trou- 
bles secons  de  ce  royaulme,  surgis  depuis  l'an  1567,  que  la  malhureuse 
et  dcttestable  conjuration  faicte  sur  le  Roy,  estant  à  Meaulx,  le  jour 
de  Sainct  Michel,  feust  découverte.  Remis  aunect  en  ceste  forme  aux 


394  ANNALES    DU    MIDI. 

moys  de  janvier  et  février  1570,  xvi"  s.;  20025-20032.  Recueil  de  pièces 
originales  sur  l'histoire  de  France,  classées  chronologiquement  du 
xiir  au  xviii"  siècle.  Années  1269-1345  (20025).  Comptes  et  pièces  diver- 
ses concernani Agen  (9),  Carcassonne  (149),  Languedoc  (133),  Péri- 

gord  (21  et  58),  Saintes  (17);  années  1373-1400  (20027).  Comptes  et  pièces 

diverses  concernant Bazas  (36);  années  1400-1464   (20028).  Conti'at 

de  mariage  de  Gaston  de  Foix  (169);  années  1465-1556  (20029).  Comptes 
et  pièces  diverses  concernant  Aigues-Mortes  (8),  Foix  (contrat  de  ma- 
riage de  Gaston  de)  (54),  Languedoc  (2,  15,  36,  60),  Lauraguais  (26), 
Perpignan  (23);  années  1556-1600  (20030).  Saisie  des  biens  de  la 
Reine  de  Navarre  et  articles  de  la  paix  conclue  avec  le  roi  de 
Navarre  (21  et  61):  20046.  Sommaire  discours  d'aucunes  choses 
mémorables  arrivées  en  la  ville  d'Annonay  et  lieux  circonvoisins 
depuis  l'année  1551  [jusques  en  1597],  par  Achille  Gamon,  licencié, 
xvin^  s.;  20051.  Recueils  d'extraits  relatifs  aux  États  généraux  du 
royaume  de  Navarre,  jusqu'en  1789,  xix«  s.;  20052.  Mémoires  sur  la 
généralité  de  Bordeaux  et  mémoires  concernant  les  pays  de  Béarn  et  de 
Basse-Navarre,  xviii'  s.;  20053-55.  Histoire  des  Basques  par  le  cheva- 
lier de  Bêla,  ms.  autographe,  xvin=  s.;  20058-69.  Copie  du  précédent 
XIX'  s.;  20080.  Spécimens  de  patois  gascon,  languedocien.  Traduction 
de  la  bible  en...  espagnol,  gascon...;  20081.  Recueil  de  copies  d'actes 
relatifs  aux  juifs  de  Provence;  20082.  Mémoires  sur  l'affaire  de  la  de- 
moiselle Cadière,  en  Provence  (1787),  sur  le  Comtat  Venaissin;  20083. 
Fortifications  de  Barcelonnette,  Bayonne  (1680);  20086.  Fortifications 
de  Perpignan  (1679),  Saint-Martin-de-Ré  (1681),  frontières  de  la  Savoie. 
La  plupart  des  mémoires  sont  de  Vauban  ou  apostilles  par  lui;  20091. 
Carte  de  la  rivière  de  Montpellier:  20111-41.  Rouleaux  généalogiques 
provenant  de  l'ancien  cabinet  des  titres;  20112.  Lévis-Mirepoix;  20118. 
Aubigné  (xv^  s.);  20119.  Montesquiou  :  20138.  Table  généalogique  de  la 
maison  de  Scoraille,  par  Du  Bouchet.]  —  P.  284-8.  R.  Poup.\rdin.  La 
date  de  la  ^'isio  Karoli  te)-tii.  [Persiste  à  croire,  contrairement  à  l'opi- 
nion de  M.  Levison,  que  ce  texte,  écrit  en  faveur  des  prétentions  de 
Louis  de  Provence  à  l'empire,  a  été  composé  peu  de  temps  après  la  mort 
de  Charles  le  Gros,  mais  dans  le  diocèse  de  Reims  ou  dans  le  voisinage 
de  ce  diocèse.]  —  P.  481-9.  Ch.  de  la  Roncière.  L'Atlas  catalan  de 
Charles  V  dérive-t-il  d'un  prototype  catalan?  [Ne  donne  pas  une  ré- 
ponse définitive,  mais  n'admet  pas  que  le  planisphère  de  Majorque  fait 
par  Angelino  IXilcert,  soit  l'œuvre  d'un  Catalan.  Tl  pense  que  Gènes 
était,  au  commencement  du  xiv  siècle,  le  centre  cartographique  où  ve- 
naient chercher  des  modèles  Vénitiens  et  Majorcains.  Intéressant  sur- 


PÉRIODIQUES    NON    MERIDIONAUX.  395 

tout  par  la  nomenclature  des  côtes  du  Ponant  dans  Vcscontc,  Dalorto- 
Dulcert  et  l'Atlas  catalan.]  —  P.  ■490-.")53.  H.  Omont.  Manuscrits  de  la 
bibliothèque  de  sir  Thomas  Pliillips  récemment  acquis  pour  la  Biblio- 
thèque nationale.  [Notices  sur  les  114  mss.  achetés  à  la  dernière  vente 
de  Cheltenluxm.  avec  table  de  concordance  des  anciens  numéros  de  la 
bibliothèque  Phillips  et  du  catalogue  de  vente  avec  les  numéros  des 
nouveaux  fonds  latins  et  français  de  la  Bibliothèque  nationale;  index 
alphabétique.  Bernari  Gui,  Fleurs  des  Chroniques  et  autres  opuscules 
(mss.  nouv.  acq.  lat.  778-79);  statuts,  coutumes  et  privilèges  d'Avignon 
(ms.  nouv.  acq.  lat.  1874);  Vie  de  D.  .Jean  Delibra,  religieux  de  la 
Chartreuse  de  Caliors,  par  D.  Bruno  Malvcsin  (ms.  nouv.  acq.  franc. 
10233);  Pensées,  notes  et  fragments  poétiques  de  La  Beaumelle  (ms. 
nouv.  acq.  franc.  10284);  Recueil  sur  l'histoire  de  France  aux  xvi"  et 
xvii'  siècles  (ms.  nouv.  acq.  franc.  20201).  [Résumé  de  mémoires  et  let- 
tres, Brantôme,  lettres  de  Paul  de  Foix,  cardinal  d'Ossat,  cardinal  de 
Joyeuse.]  Œuvres  de  Brantôme  (ms.  nouv.  acq.  franc.  20205).  Papiers 
du  géographe  Philippe  Buache  sur  les  tremblements  de  terre  (mss. 
nouv.  acq.  franc.  20236  et  20237).  [1707)  :  à  Aix,  Avignon,  Coussillon  (Gi- 
ronde), en  Dauphiné,  à  Perpignan.]  —  P.  567-76.  H.  Mor.\!svillé.  Notes 
de  statistique  financière  sous  Philippe  YI  de  Valois.  [Très  curieuses 
notes  d'un  Italien  d'abord  fondé  de  pouvoirs  de  fermiers  d'impositions, 
puis  délégué  pour  faire  payer  les  taxes  imposées  aux  Lombards  mar- 
chands ou  usuriers  en  France.  Etude  sur  les  fraudes  d'octroi,  mouve- 
ment des  vins  en  Gascogne,  Toulouse,  Carcassonne,  et  sur  le  mouve- 
ment de  La  Rochelle  et  autres  ports  de  Saintonge.]  —  P.  577-8.  M.  Prou. 
Deux  fragments  de  bulles  sur  papyrus  au  Musée  du  Puy.  [L'une  d'elles 
est  un  débris  du  privilège  de  Silvestre  II  pour  l'église  du  Puy,  du  23  no- 
vembre 999,  dont  la  Bibliothèque  nationale  possède  la  partie  inférieure  ; 
l'autre  est  un  reste  du  privilège  accordé  par  Léon  IX  à  l'église  du  Puy 
en  1052.]  A.  V. 

15.  —  Bulletin  archéologique  de  V Association  bretonne 
p.  p.  la  classe  d'archéologie,  3"  sér.,  t.  XIX,  1901. 

P.  111-40.  J.  TiiÉvEDY.  Lieu  de  naissance  de  La  Tour  d'Auvergne.  Cor- 
ret.  La  légende  de  La  Tour  d'Auvergne.  La  poésie  et  La  Tour  d'Auver- 
gne. .G.  D.  DU  D. 

16.  —  Bulletin  archéologique  du  Comité  des  travaux 
historiques  et  scientifiques,  1903. 

P.  3-32.  PI.  I  et  II.   Labande.  Les  mosaïques  romaines   île  Villelaure 


396  ANNALES  DU   MIDI. 

(Vaucluse);  rai^port  de  M.  Héron  de  Villofosse.  [Très  curieuse  trou- 
vaille, appartenant  à  la  catégorie  des  scènes  nilotiques  dont  on  a 
trouvé  de  nombreux  spécimens  en  Italie  et  en  Afrique,  mais  dont  la 
Gaule  n'avait  pas  encore  fourni  d'exemple  caractérisé.]  —  P.  36-43. 
PI.  III.  Abbé  Dercier.  Rapport  sur  des  fouilles  exécutées  au  Mont- 
Joûer,  près  de  Saint-Goussaud  fCreuse).  [Commencement  de  fouilles 
qui  promettent  d'être  très  intéressantes.  Outre  de  nombreux  bâtiments, 
on  a  trouvé  des  monnaies  remarquables  de  Claude,  de  Nerva  ou  d'Anto- 
nin,  de  Germanicus  et  de  Jules  César,  ainsi  que  deux  fibules  dont  une 
est  ornée  de  vingt  émaux  triangulaires.]  —  P.  64-7.  PI.  V.  Héron  de 
ViLLEFOssE.  Rapport  sur  un  ceinturon  romain  trouvé  à  Argeliers 
(Aude),  d'après  des  photographies  envoyées  par  M.  F.  P.  Thiers,  con- 
servateur du  Musée  de  Narbonne.  —  P.  72-127.  PI.  VI.  Ch.  Porée. 
Notice  sur  la  construction  de  la  cathédrale  de  Mende.  [Fort  intéres- 
sante étude  historique  et  monumentale,  d'après  des  documents  d'archi- 
ves. Pièces  justificatives.]  —  P.  131-2.  PI.  VII.  Ch.  Port.\l.  La  croix 
processionnelle  de  Labastide-Denat  (Tarn).  [xvi«  siècle.] 

Congrès  des  Sociétés  savcoites.  P.  lxx-lxxx.  Séance  générale.  Discours 
de  M.  C.  JuLLi.'VN.  [Très  spirituelle  allocution  oii  l'utilité  des  recherches 
d'histoire  locale,  qui  font  mieux  connaître  l'histoire  de  France,  est 
démontrée    par   des    exemples   pris  dans    l'histoire    de  Bordeaux.   — 

P.  209-11.  F.  Régnault.  Peintures  et  gravures  de  la  grotte  de  Marsoulas 
(Haute-Garonne).  —  P.  206-21.  PL  XII  à  XVII.  Véran.  Rapport  sur 
les  fouilles  du  rempart  d'Arles  en  1902  et  restitution  de  «  l'arc  admira- 
ble ».  P.  421-36.  —  PI.  XXVI-XXVII.  Abbé  Breuil.  Rapport  sur  les 
fouilles  dans  la  gi'otte  du  Mas-d'Azil  (Ariège).  [Août  1902.  Vestiges  de 
gravures  sur  parois  dans  les  galeries  obscures.]  — P.  469-75.  PI.  XXXIV- 
XXXVII.  Barriére-Fl.wy.  Les  portails  des  églises  de  Caujac  et  de 
Gaillac-Toulza.  [Intéressante  étude  monumentale  et  belles  photogra- 
phies.] —  P.  490-514.  E.  Bonnet.  Des  variations  de  valeur  de  la  mon- 
naie melgorienne.  —  PI.  XLVI.  Reproduction  photographique  d'une 
croix  de  pierre  du  commencement  du  xvi"  siècle  de  l'église  de  Campes 
(Tarn).  A.  V. 

fî.  —  Bulletin  du  hibliopliUe  et  du  hWliotJiécaire,  1902. 

p.  301-13,  402-27,  467-84,  524-9.  Mémoire  historique  et  détaillé  pour  la 
connaissance  exacte  des  auteurs  qui  ont  travaillé  au  Mercure  de 
France...,  p.  p.  G.  de  Courcel.  [Très  courtes  notices.  Parmi  les  Méri- 
dionaux, Antoine  et  Jean  de  La  Roque,  de  Marseille;  Louis  de  Boissy, 
de  Vie  en  Carladez  (.\uvergne),  Marmontel.  A  suivre.] 


PÉRIODIQUES   NON   MÉRIDIONAUX.  3Ô7 

1903. 
P.  8-25,  76-89,  275-8,  320-9,  383-7,  499-502,  615-21.  F.  Meunié.  Bibliogra- 
phie de  quelques  almanaclis  illustrés  des  s.xiw  et  xix«  siècles.  [A  rele- 
ver un  Chansonnier  de  la  République  pour  l'on,  III,  édité  à  Bordeaux 
et  Paris.  (A  suivre.)]  —  P.  29-36,  90-102.  Mémoire  historique  et  détaillé 
pour  la  connaissance  exacte  des  auteurs  qui  ont  travaillé  au  Mercure  de 
France...,  p.  p.  G.  de  Courcel.  [Suite  et  fin.]  —  P.  113-33.  E.  Portalis. 
Le  baron  Anatole  de  Claye.  [Né  dans  les  Landes  en  1851.  Bibliophile. 
Notice  biographique.  Portrait.]  M.  D. 

18.  —  Bulletin  de  géographie  historique  et  descriptive, 
1903. 

P.  218-27.  Saint-Jours.  Preuves  de  l'antique  stabilité  des  côtes  de  Gasco- 
gne. —  P.  228-35.  Grand.iean.  Réponse  à  la  communication  de  M.  Saint- 
Jours.  [Cite  nombre  de  faits  qui  vont  contre  la  thèse  ci-dessus,  notam- 
ment un  texte  tiré  de  Janson,  Flambeau  de  la  navigation  (1625),  et 
relatif  aux  chenaux  d'Arcachon,  Bayonne  et  Saint-Jean-de-Luz.]  — 
P.  236-8.  Saint-Jours.  Limite  des  différents  pays  —  payi,  —  de  la 
Gironde  à  la  Bidassoa.  [Labourd,  Maremne,  Marensin,  Born,  Buch, 
Môdoc.  Leurs  limites  n'ont  pas  varié  depuis  l'époque  gallo-romaine.]  — 
P.  239-58.  J.  FouRNiER.  L'introduction  de  la  culture  de  la  canne  à  sucre 
en  France  au  xvi'^  siècle,  [Très  intéressant.  Deux  «  sucriers  »  sous 
Henri  II  cherchent  à  introduire  la  canne  à  sucre  en  Provence.  Charles  IX 
en  fait  planter  dans  son  jardin  à  Hyères  en  1567  :  l'essai  échoua  com- 
plètement, faute  d'un  climat  favorable.  Un  autre  essai  fait  en  1614  par 
le  sieur  de  La  Molle  dans  les  monts  des  Maures  ne  fut  pas  plus  heu- 
reux. Textes.]  —  P.  274-84.  Ch.  Duffart.  La  carte  manuscrite  de  Claude 
Masse  (fin  du  xvii"  s.).  Sa  valeur  scientifique.  Principales  modifications 
du  sol  landais  qu'elle  révèle.  [Carte  topographique  au  1  :  29235.  On  en 
peut  conclure  que  les  dunes  avancent  de  800  m.  par  siècle;  que  les 
lacs  du  littoral  se  comblent;  que  leurs  aflluents  se  ferment,  etc.]  — 
P.  308-17.  Abbé  V.  Marsan.  La  Neste  autrefois  et  aujourd'hui.  [Son 
importance  pour  le  flottage  du  bois  et  le  transport  des  marbres  de  Bey- 
rède,  Sarrancolin,  Campan  vers  Toulouse  au  xyiii"^  s.  Quelques  textes.] 
—  P.  318-22.  P.  Camena  d'Almeida.  L'Aunis.  Essai  de  géographie  his- 
torique et  régionale.  —  P.  323-69.  A.  Pawlowsky.  j;^es  villes  dispai-ues 
et  la  côte  du  pays  de  Médoc  d'après  la  géologie,  la  cartographie  et 
l'histoire.  [Il  est  impossible  de  résumer  ici  l'histoire  très  compliquée 
de  ce  littoral,  l'un  des  plus  remaniés  qu'il  y  ait  en  France.  M.  P.  l'a 
écrite  avec  beaucoup  de  soin  et  de  science.]  P.  D. 


398  ANNALES   DÛ   MIDI. 

19.  —  Bulleim  monumental,  67"  vol.  de  la  collection, 
1903. 

P.  403-25.  E.  Travers.  L'archéologie  monumentale  aux  salons  de  Paris 
en  1903.  [Planches  accompagnées  de  brèves  notices  où  se  trouvent  i^lu- 
sieurs  monuments  du  Midi  :  châsse  de  Sarrancolin  (Hautes-Pyrénées); 
portail  do  Sauveterre-dc-Béarn  (Basses-Pyrénées);  maison  de  l'éléphant 
à  Clermont-Ferrand  (Puy-de-Dôme);  clocher  do  Baudéan  (Hautes-Pyré- 
nées); coupe  do  l'église  de  Sarrancolin  (Hautes-Pyrénées);  abside  de 
l'église  de  Chamalières  (Puy-de-Dôme).]  —  P.  ■45"2-8.  A.  Vérax.  Les 
fouilles  de  la  Porte  de  l'Aui-e  à  Arles-sur-Ehône  fplanches).  [Découverte 
de  fragments  de  l'arc-do-triomphe  antique,  appelé  l'arc  admirable, 
déjà  démoli  au  xyii""  siècle;  résultat  des  fouilles  faites  à  la  porto  de 
l'Aure  en  1902,  par  le  service  des  monuments  historiques.]  —  P.  4")4-97. 
Laiunde.  Etude  historique  et  archéologique  sur  Saint-Trophime  d'Arles 
du  iv  au  xiii"  siècles  (planches).  [C'est  l'histoire  des  édifices  qui  se  sont 
succédé  sur  l'emplacement  de  l'église  actuelle;  à  suivre.]  —  P.  562-70. 
J.  Déchelette.  a  propos  de  l'oppidum  des  Nitiobriges,  i)rcs  d'Agen. 
[Recherches  sur  la  date  de  l'oppidum.  Voir  Congrès  archéologique  de 
Fratice,  48«  session,  Agen,  pp.  167-212,  le  mémoire  de  M.  Momméja 
sur  le  même  sujet.]  F.  P. 

20.  —  Bulletin  de  la  Société  archéologique,  historique  et 
artistique  Le  vieux  Papier,  t.  I,  1900. 

p.  89-90.  Delpy.  Un  usage  funéraire  en  Auvergne  (xviii"  s.).  —  P.  191-7. 
Id.  De  Clormont  à  Paris  en  1661.  Comptes  de  voyage.      G.  D.  du  D. 

SI.  —  Bulletin  de  la  Société  de  lliistoire  du  protestan- 
tisme français,  LIP-  année,  1908. 

p.  31-40.  N.  Wkiss.  Bernard  Palissy  devant  le  Parlement  do  Paris.  [Avant 
d'être  enfermé  pour  cause  d'hérésie  dans  la  prison  où  il  mourut,  l'illus- 
tre potier  avait  été  condamné  à  la  fustigation  par  le  bailli  de  Saint-Ger- 
main-des-Prés,  peine  que  le  Parlement  de  Paris  commua  par  arrêt  des 
10-12  janv.  1587,  dont  texte.  M.  W.  n'a  rien  trouvé  qui  confirme  l'allé- 
gation de  Lestoile,  à  savoir  que  Palissy  aurait  été  condamné  au  feu  par 
le  Châtelet.]  —  P.  45-59.  A.  Lods  et  D.  Benoit.  Nouveaux  échos  de  la 
tour  do  Constance.  Trois  lettres  inédites  de  Marie  Durand.  [Du 
29  mars  1759  et  du  17  sept.  1752.  Marie  était  alors  prisonnière.  Autre, 
de  Jeanne  Magon,  de  Vc^rnoux  en  Vivarais,  aussi  captive  dans  la  tour.] 
—  P.  59-72.  N.  W.  Montauban  en  1773-1774.  Trois  lettres  de  Jeannette- 


PÉRIODIQUES   NON    MÉRIDIONAUX.  399 

Philippine  Leclerc.  [Fille  d'un  Fi-an(;ais  émigré  en  Allemagne  à  la 
Révocation,  elle  avait  épousé  un  Francjais  oi-iginaire  sans  doute  de 
Montauban.  Desciiptions  fort  intéressantes  de  la  ville  et  surtout  de  ses 
habitants,  du  culte  protestant,  etc.]  —  P.  07-127,  193-231.  V.-L.  Bour- 
RiLLY  et  N.  Weiss.  Jean  du  Bellay,  les  protestants  et  la  Sor- 
bonnc  (1529-1535).  [Après  le  supplice  de  Berquin,  certains  membres 
do  la  Sorbonne  et  du  Parlement  cherchent  à  incriminer  les  frères  du 
Bellay  comme  protecteurs  des  hérétiques,  en  particulier  Jean,  évêque 
de  Bayonne,  mais  sans  succès.]  —  P.  127-30.  N.  W.  Poursuites  en 
Savoie  et  en  Dauphiné  contre  Germain  Colladon,  Michel  Protin  et  le 
cordelier  Marin,  d'après  une  lettre  inédite  de  Michel  do  l'Hôpital.  [Au 
duc  de  Guise,  de  Paris,  11  oct.  1551.  Poursuites  pour  cause  d'hérésie.] 

—  P.  130-7.  N.  W.  La  signification  de  l'avertissement  pastoral  à  Mon- 
tauban, 7  janvier  1683.  [Il  s'agit  de  l'invitation  à  abjurer  que  le  clergé 
adressa  alors  aux  protestants.  Procès-verbal  de  la  lecture  de  cet  acte  et 
de  la  réponse,  très  respectueuse  et  très  ferme,  qu'y  fit  le  pasteur  Y^arn.] 

—  P.  137-41.  H.  Dan.nreuther.  La  révocation  de  l'Edit  de  Nantes  à 
Longwy.  [Abjurations  d'officiers  et  de  soldats  de  la  garnison,  1682-1746. 
Bon  nombre  étaient  des  méridionaux.]  —  P.  141-3.  Cii.  Serfass.  Les 
abjurations  forcées  en  Vivarais,  1700.  [A  Ghampis  (Ardèche).  Acte  par 
lequel  le  curé  certifie  que  les  principaux  habitants  ont  embrassé  le  catho- 
licisme.] —  P.  143-60.  H.  Patry.  La  bataille  de  Jarnac,  la  campagne 
de  1569  et  le  rôle  de  Goligny,  d'après  des  travaux  i-écents.  [D'après  le 
livre  de  M.  Gigon,  Angoulème,  1895,  in-8°,  que  M.  P.,  par  endroits, 
corrige  ou  complète.  Les  indécisions  et  les  lenteurs  des  Réformés  cau- 
sèrent leur  perte  ;  l'effet  moral  du  combat  fut  bien  pire  pour  eux  que 
les  résultats  matériels.]  —  P.  231-54.  N.  W.  Mémoires  de  la  famille  de 
Chaufepié  [Originaire  d'Italie;  établie  à  Gimont,  en  Gascogne,  puis  à 
Marennes;  elle  cmigra  en  1685.  Texte  des  Mémoires  de  Samuel  de  Chau- 
fepié, pasteur,  réfugié  à  Amsterdam,  avec  rectifications,  p.  571.]  — 
P.  385-156.  H.  Gelin.  Cent  cadavres  de  huguenots  sur  la  claie  et  à 
la  voirie  sous  Louis  le  Grand.  [En  vertu  de  la  déclaration  royale  du 
29  avr.  1686,  que  certains  historiens  ont  cru  ou  dit  avoir  été  purement 
comminatoire.  Enumération  de  cent  exécutions  de  ce  genre  (voir  aux 
Documents,  p.  421)  ;  beaucoup  ont  été  faites  dans  le  Midi.  Cette  liste 
est  assurément  incomplète.  Cf.,  p.  5?3 ,  une  liste  supplémentaire  de 
vingt-cinq  noms  dressée  par  M.  Pradel.]  —  P.  456-61.  M.  dk  Riciiemond. 
Un  drame  au  Château-Gaillard  en  1670.  [Procédun^  relative  à  l'assassi- 
nat de  deux  enfants  de  Jacques  Rocqueinadour,  huguenot,  par  ceux  du 
vice-sénéchal  en  la  maréchaussée  de  Saintougc,  Prieur  ;  les  coupables 


4Ô0  ANNALES   DU   MIDI. 

reçoivent  des  lettres  de  l'émission.]  —  P.  463-8.  A.  Lods.  Deux  chan- 
sons sur  Rabaut  de  Saint-Etienne,  [Qui  venait  d'être  élu  président  de 
l'Assemblée  constituante.  L'une  est  pour,  l'autre  contre  ce  choix.]  — 
P.  557-9.  P.  F.  B.  Le  prétendu  vitrail  de  Jeanne  d'Albret  à  Limoges. 
[Sur  l'article  de  M.  Leroux  publié  ici  même  (t.  XV,  p.  329).  La  femme 
prêcliant  que  le  vitrail  représente  serait  non  Jeanne  d'Albret,  qu'il  faut 
écarter,  d'accord  avec  M.  Leroux,  mais  sa  mère,  Marguerite  de  Navarre.] 

P.  D. 

SS.  —  Congrès  archéologiques  de  France,  1902;  Troyes 
et  Provins. 

Procès-verbaux.  P.  139-44.  F.  Pasquier.  Vœu  relatif  à  la  conservation  et 
à  la  centralisation  des  minutes  notariales  antérieures  à  1790.  —  P.  E.  Le- 
FÈVRE-PoNTALis.  Vœu  relatif  à  la  constitiition  dans  chaque  diocèse 
d'une  commission  qui  soit  appelée  à  donner  son  avis  sur  les  répara- 
tions à  faire  dans  les  églises  rurales.  F.  P. 

23.  —  Journal  des  Savants,  1903. 

P.  86-102.  LucHAiRE.  Les  institutions  monarchiques  locales  en  France  à 
la  fin  du  moyen  âge.  [Analyse  très  élogieuse  du  livre  de  M.  Dupont- 
Ferrier  :  Les  officiers  royaux  des  bailliages  et  sénéchaussées  et  les 
Institutions  monarchiques  locales  en  France  à  la  fin  du  moyen 
âge.]  — P.  317-25.  Julliax.  Le  littoral  de  la  Gascogne.  [Analyse  du  livre 
de  M.  Saint-Jours  :  Port  d'Albret,  Vieux-Boucau,  l'Adour  a>icien  et 
le  littoral.  M.  J.  adopte  et  développe  les  conclusions  de  ce  livre  :  con- 
trairement à  l'opinion  traditionnelle,  le  littoral  gascon  de  l'Atlantique 
ne  paraît  pas  s'être  modifié  à  l'époque  historique.]  —  P.  337-45.  Antoine 
Thomas.  La  chanson  de  Sainte-Foi.  [Etude  sur  ce  nouveau  et  si  impor- 
tant texte  provençal,  publié  pour  la  première  fois  par  M.  Leite  de 
Vasconccllos;  observations  et  notes  critiques  sur  ce  texte.]         Ch.  L. 

a4.  —  Mémoires  de  la  Société  dunherguoise,  t.  XXXIII, 
1900. 

p.  1-234.  V.  DE  SwARTE.  Claude  Le  Blanc,  intendant  d'Auvergne,  inten- 
dant de  la  Flandre  maritime,  secrétaire  d'Etat  au  département  de  la 
guerre  (1669-1728).  Sa  vie,  sa  correspondance  particulière  et  adminis- 
trative. G.  D.  DU  D. 

2S.  —  Mémoires  de  la  Société  d'émulation  du  Douhs. 
7«  sér.,  2"  vol.,  année  1897. 

P.  329-68.  J.  Meynier.  Les  noms  de  lieu  romans  en  France  et  à  l'étranger 


PERIODIQUES  NON   MERIDIONAUX.  40l 

(suite  1898,  p.  57-178;  1899,  p.  13-109;  1900,  p.  113-253;  1901,  p.  17-54). 
[M.  M.  s'est  donné  la  peine,  très  méritoire,  de  ramasser  une  quantité 
immense  de  matériaux  et  de  les  classer  d'une  façon  simple  et  logique 
(noms  do  lieu  d'origine  naturelle,  religieuse,  ethnique,  sociale).  11  tran- 
che sans  sourciller,  et  avec  une  insuffisante  connaissance  des  lois  pho- 
nétiques, les  questions  d'étymologie  les  plus  ardues  ;  mais  le  simple 
rapprochement  des  formes  est  parfois  fort  instructif  et  peut  mettre  le 
linguiste  sur  la  voie  de  véritables  découvertes,  d'autant  plus  que  M.  M. 
a  souvent  pris  soin  d'indiquer  les  formes  anciennes.  La  toponymie  mé- 
ridionale me  paraît  avoir  été  explorée  moins  complètement  que  celle  du 
Nord  ;  pourtant  les  formes  intéressant  nos  lecteurs  sont  fort  abondantes 
encore.  Une  table  alphabétique  (où  la  foi-me  latine  est  prise  pour  base) 
facilite  les  recherches  dans  ce  précieux  répertoire.  Il  en  a  été  fait  un 
tirage  à  part  (Besam^on,  Dodivers,  1901,  in-8"  de  431  p.).]  A.  J. 

2e.  —  Revue  des  bibliothèques,  1902.  Néant.  —  1903. 

P.  101-14.  J.  Gautier.  Le  décret  de  1809  et  les  droits  de  l'État  sur  les  ma- 
nuscrits des  bibliothèques  publiques.  [Étude  d'intérêt  général  destinée 
à  faire  connaître  les  droits  de  l'État  non  seulement  en  matière  de  pro- 
priété, mais  aussi  en  matière  de  publication.]  —  P.  207-2^3.  L.  Dorez. 
Le  manuscrit  de  Dante  offert  au  roi  François  I",  en  1519,  par  Jacques 
Minut,  président  aux  Parlements  de  Bordeaux  et  de  Toulouse.  [Détails 
biographiques  sur  Minut. J  F.  P. 

S'S'.  —  Revue  des  Deux-Mondes,  1903. 

1"  février.  P.  G61-91.  A.  Jeanrov.  La  poésie  provençale  au  moyen  âge. 
III.  La  Chanson.  [L'auteur  essaie  d'expliquer  la  formation  des  théories, 
si  étranges  dans  une  société  chrétienne,  qui  ont  trouvé  leur  expression 
dans  la  chanson  provençale,  et  de  déterminer  le  rapport  de  ces  théo- 
ries avec  les  mœurs  réelles;  il  montre  que  la  chanson  devint  vite  un 
genre  factice  qui  ne  pouvait  fournir  une  longue  carrière,  et  il  étudie 
les  efforts  tentés  pour  lui  infuser  une  vie  nouvelle  par  quelques-uns  des 
principaux  troubadours,  Rambaut  d'Orange,  Arnaut  Daniel,  Peire 
Vidal,  Folquet  de  Marseille,  Guiraut  de  Bornelh.  —  Nous  aA'ons  omis 
de  mentionner  dans  nos  précédents  dépouillements  l'article  du  même 
auteur  (même  Eevuo,  1"  oct.  1899,  p.  545-74)  sur  hi  poésie  historique 
des  troubadours,  où  M.  J.  a  rassemblé  ou  précisé  beaucoup  de  rensei- 
gnements épars  ou  vagues  et  essayé,  pour  conclure,  de  déterminer  la 
portée  du  rôle  historique  des  poètes  provençaux  et  notamment  de 
B.  de  Born.] 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVI.  26 


402  ANNALES   DU    MIDI. 

l!""  jiiilloL.  P.  49-82.  A.  RiîBKLLiAU.  Un  épisode  de  l'histoire  religieuse 
du  xvii"  siècle.  La  Compagnie  du  Saint-Sacreinent.  (Suite,  1"  août, 
p.  510-68,  et  1"''  sept.,  p.  103-35,  avec  les  sous-titres  :  La  Compagnie 
du  Saint-Sacrement  et  la  contre-réformation  catholique  ;  —  la  Com- 
pagnie du  Saint-Sacrement  et  les  protestants.)  [Résumé  très  vivant  et 
très  personnel  des  travaux,  de  MM.  Rabbe,  Eeauchet-Filleau  et  Allier  ; 
cf.  le  compte  rendu,  par  M.  Leroux,  du  livre  de  ce  dernier,  ÂJUia- 
les,  XV,  2'21.  Presque  rien  sur  le  Midi.] 

l"  août.  P.  654-73.  R.  Doumic.  La  jeunesse  de  Mirabeau.  [D'après  la 
publication  de  lettres  inédites  par  MM.   Cottin  et  Dauphin-Meunier.] 

l"'  octobre.  P.  570-603.  E.  Daudet.  Les  dames  de  Bellegarde.  Mœurs  du 
temps  de  la  Révolution.  (Suite  15  oct.,  p.  864-99,  et  15  nov.,  p.  407-44.] 
[A  propos  de  la  liaison  de  Hérault  de  Séchelles  avec  Adélaïde  de  Belle- 
garde  (1793);  beaucoup  de  hors-d'œuvre  sur  la  situation  morale  et  poli- 
tique de  la  Savoie,  sur  la  famille  et  la  jeunesse  de  Hérault  de  Séchel- 
les, etc.  Le  récit  est,  du  reste,  aussi  instructif  que  dramatique.  On  se 
demande  seulement  pourquoi  M.  D.  ne  donne  jamais  de  références  pré- 
cises, même  aux  documents  qui  sont  dans  le  domaine  public,  et  on  se 
pren  1  à  craindre  que  le  roman  ne  côtoie  l'histoire,  surtout  quand  on 
voit  l'auteur  avouer  lui-même  (p.  571)  qu'il  &  a  dû  suppléer  à  des  lacu- 
nes par  des  hypothèses  ».  Mais  ne  devi'ait-\\  pas  aussi  avertir  le  lec- 
teur de  ce  ciui  n'est  qu'hypothèse?]  A.  J. 

S8.  —  Revue  des  Etudes  historiques^  1903. 

p.  498-514.  A.  CocHiN.  Les  conquêtes  du  consistoii-e  de  Nimes  pendant  la 
Fronde.  [Etude  intéressante,  faite  en  grande  partie  à  l'aide  des  archives 
du  consistoire  de  Nimes,  sur  la  lutte  qui  éclata  dans  cette  ville  entre 
catholiques  et  protestants,  à  l'occasion  des  troubles  de  la  Fronde.  Les 
réformés  comprenaient  presque  tous  les  bourgeois  riches  de  la  ville  :  le 
parti  catholique  était  composé  surtout  du  petit  peuple  et  avait  pour 
chefs  l'évêque,  les  jésuites  du  collège  et  les  magistrats  royaux.  Le  pré- 
texte de  la  lutte  fut  l'enlèvement  d'un  jeune  protestant  par  l'évêque. 
Elle  se  termina  au  profit  des  réformés,  mais  le  consistoire  abusa  de  sa 
victoire;  il  promulgua  plusieurs  ordonnances  vexatoires,  même  pour  les 
calvinistes  modérés,  et  il  fit  nommer  des  protestants  à  la  plupart  des 
fonctions  de  la  ville.  Cette  attitude  souleva  des  haines  violentes  et  ne 
tarda  pas  à  provoquer  des  luttes  nouvelles.]  F.  D. 

89.  —  Revue  Uebdomadaire,  2«  sér.,  t.  VII,  1900. 

P.  398-413.  P.  Lauren'^n.  La  bataille  de  Marengo  et  la  mort  de  Desaix. 

G.  D.  DU  D. 


t'ÉRIODIQUES    NON    MERIDIONAUX.  403 

âO.  —  Revue  d'histoire  littéraire  de  la  France,  19U3. 

P.  177-531.  G.  Laxson.  Études  sui"  les  origines  delà  tragédie  classique  en 
France.  Comment  s'est  opérée  la  substitution  de  la  tragédie  aux  mys- 
tères et  moralités  (Suite,  p.  413-36).  [Enumère,  dans  la  première  partie 
de  ce  travail,  un  certain  nombre  de  représentations  qui  attestent  la 
survivance,  surtout  en  province,  des  genres  dramatiques  du  moyen  âge; 
quelques-unes  de  ces  mentions  se  rapportent  au  Midi.]  —  P.  283-1. 
V.  GiRAUD.  Sur  une  édition  peu  connue  des  Pensées  de  Pascal.  [Édition 
des  Pensées,  donnée  en  1785  par  l'abbé  Ducreux,  chanoine  d'Auxerre, 
qui  essaie  de  retrouver  le  plan  de  Pascal  et  s'imagine  avoir  rendu  les 
Pensées  plus  fortes,  «  plus  lumineuses  et  plus  utiles  ».]  —  P.  1.j7-77. 
P.  Lafenestre.  François  Maynard.  [Étude  littéraire.  La  Cloris  de 
Maynard  serait  une  fille  de  Hurault  de  l'Hôpital,  fils  du  chancelier. 

A.  .J. 

31.  —  Revue  internationale  de  l'ensei(jneme7ït,  XXIII 
(1903,  t.  II). 

p.  108-17.  P.  Brun.  Deux  documents  sur  l'enseignement  au  xvir  siècle. 
[Analyse  d'un  cahier  de  rhétoricien  et  publication  d'un  cahier  de  notes 
d'un  professeur  de  Grenoble  au  xvu"  siècle  (sans  date  précise)  ;  ces  deux 
documents  sont  à  la  Bibl.  munie,  de  Grenoble.]  A.  J. 

3S.  —  Revue  numismatique,  IV*^  série,  t.  VII,  1903. 

p.  87-Uy.  D"'  Poxf'ET.  Oboles  de  Marseille  et  monnaie  à  légende  Nord- 
Etrusque,  à  propos  d'une  trouvaille  faite  près  de  Valence  (Drome). 
[Planche.]  —  P.  104-8.  H.  de  Gérix-Ricard  et  abbé  Arxacu  d'Agnel. 
Découverte  à  Tonrves  (Provence),  en  1366,  d'après  le  récit  contenu 
dans  un  acte  de  la  Cour  des  comptes  de  Provence.  —  P.  183-5.  J.  Ro.max. 
Nécrologie  :  Louis  Blancard,  numismate,  ancien  archiviste  des  Bou- 
ches-du-Rhùne.  F.  P. 

33.  —  Revue  de  Paris,  1903. 

15  avril.  P.  701-36.  P.  de  Ségur.  Un  grand  homme  de  salons  :  le  comte 
de  Guibert.  [Le  comte  de  Guibert,  né  à  Montauban  en  1713  (mort  en 
1790),  admiré  par  ses  contemporains  bien  au  delà  de  ses  mérites,  som- 
mairement exécuté  par  Sainte-Beuve  et  J.  Janin',  n'est  plus  connu 
aujourd'hui  que  par  la  passion  qu'il  inspira  à  M""  de  L('h,pinassc. 
M.  de  S.  pense  que  ce  fut  un  esprit  vraiment  supérieur,  d'uni'  lucidité 
et  d'une  pénétration  singulières,  et  le  [)rouve  par  de  curieu.x  extraits 
de  VEsscti  de  tactique,  fort  apprécié  de  Napoléon  l",  et  des  Sonrenii's 


404  ANNALES   DU    MIDI. 

de  voyages.]  —  P.  707-818.  L.  Batiffol.  Un  garde  du  corps  de  Louis  XIII . 
(Suite  1"  mai,  p.  185-96.)  [D'après  les  souvenirs  inédits  de  Pierre  de 
Bordeaux,  sieur  de  la  Sablonnière,  relatifs  aux  campagnes  de  1622, 
1628,  1634.  Renseignements  curieux  sur  la  personne  du  roi,  la  façon 
dont  on  faisait  la  guerre  en  ce  temps-là,  les  sentiments  des  populations 
protestantes  du  Midi.  Episodes  plaisants  et  plus  souvent  alïrcusement 
tragiques  des  sièges  de  Négrepelisse  et  Saint-Antonin.] 
15  août.  P.  807-38.  W.  Morton-Fullerton.  En  Narbonnaise.  [Impressions 
de  voyage  (en  Limousin,  Quercy,  Languedoc,  Roussillon).  Le  touriste 
dont  elles  émanent  a  trop  d'espi'it,  et  surtout  veut  trop  en  avoir,  mais  il 
a  la  vision  nette,  sinon  toujours  juste,  et  son  style  est  amusant.  Agréa- 
bles instantanées.]  A.  J. 

34.  —  Revue  des  parlers  populaires,  2*^  année,  1903. 

N"  1.  P.  161-79.  A.  Thomas.  Étymologies  limousines.  {Armorijo,  «  vent 
d'ouest»,  de  armoricus  (ventits);  asse,  «  inculte  »,  du  bas  latin  apsiis, 
apsa  ;  —  cihre,  tribe,  «  seau  »  :  la  première  forme  vient  du  germ.  zioi- 
par  {zwei,  «  deux  »,  et  thème  de  bera?i,  <i  porter  ») ,  la  seconde  d'une 
forme  antérieure  «  tuiibe)-)i  :  exemple  curieux  de  deux  formes  germa- 
niques, d'époques  et  de  régions  différentes,  représentées  dans  des  patois 
limitrophes;  —  deiniai,  «  fatigué  »,  pour  d'esmai,  litt.  «  d'émoi  », 
c.-à-d.  «  en  émoi  »  :  intéressante  dissertation  sur  les  locutions  préposi- 
tionnelles devenues  (ou  en  train  de  devenir)  adjectifs;  cf.  anc.  fr.  en- 
grant,  fr.  debout,  prov.  depè ;  —  desoussina,  «  défricher  »,  de  de  et 
oussino,  «  terre  inculte  »  (fr.  absiiie),  tiré  du  bas  latin  abs,  absa;  — 
eiraiwha,  «  boiteux  »,  pour  esrcmcat,  formé  de  es  et  ranc;  —  garlimen, 
«  charrue  »,  dissimilation  de  garnimen,  avec  une  réstriction  de  sens 
qui  se  retrouve  dans  le  gascon  arnés  ,  qui  a  pris  ce  même  sens  de 
«  charrue  »;  —  meiri ,  «  brebis  qui  a  déjà  porté  »,  de  niatricem;  — 
nuei,  «  nœud  » ,  de  fiodium,  tiré  de  nodus  ;  —  rèl,  «  ràble  ou  rabot  des 
boueurs,  jardiniers,  maçons,  etc.  »,  pour  un  plus  ancien  ruèlh,  de 
rotulum.  —  On  retrouve  dans  toutes  ces  étymologies  le  savoir  et  la 
pénétration  ordinaires  de  l'auteur;  nous  sommes  heureux  d'annoncer 
qu'elles  reparaîtront  en  un  volume  intitulé  :  «  Nouveaux  Essais  de 
philologie  française  »,  qu'il  prépare  en  ce  moment.]  A.  J. 

35.  —  Revue  de  philologie  française  et  de  littérature 
(ancienne  Revue  de  philologie  française  et  provençale), 
t.  XVII,  1903. 

P.  89-104.  L.   Via>'0N.   Les  patois  de  la  région  lyonnaise.   Le  pronom 


PÉRIODIQUES  NON  MÉRIDIONAUX.  405 

régime  de  la  3«  personne  (suite).  Le  régime  direct;  le  féminin  singulier. 
[Lo,  inconnu  au  centre,  occupe  au  nord-est  et  au  sud  une  zone  étendue  ; 
lé  et  le  appartiennent  au  nord  ;  la,  seule  forme  connue  au  centre,  do- 
mine à  l'est  et  au  sud-est.]  —  P.  11-4-21.  E.  Casse  et  E.  Chaminade. 
Vieilles  chansons  patoises  du  Périgord  (suite  p.  186-204).  [Complément 
à  un  recueil  récemment  publié  par  les  mêmes  auteurs  ;  les  chansons 
sont  notées  en  orthographe  phonétique  et  traduites  ;  mélodies.]  — 
P.  161-72.  J.  Désormaux.  Mélanges  savoisiens.  I.  Chanson  de  1816. 
[Chanson  patoise  en  l'honneur  de  la  maison  de  Savoie,  par  le  chanoine 
Gazel  ;  montre  que  le  clergé  protesta  longtemps  contre  l'annexion  fran- 
çaise.] II.  Savoyard  goliard.  [L'existence  de  ce  mot  en  patois  savoisien 
est  intéressante  à  constater  ;  mais  l'étymologie  proposée  (d'après  De  Gre- 
gorio)  est  invraisemblable  :  goliard  est  un  mot  savant  qui  n'a  rien  à 
faire  avec  gaillard.']  A.  J. 

36.  —  Revue  de  la  Renaissance  (ancienne  Revue  des 
provinces  de  l'Ouest).  Tomes  I  (1901),  Il  (1902).  Néant. 
Tome  III  (1902). 

p.  36-60.  V.  LiEUTAUD.  Un  humaniste  provençal  :  Jean-Antoine  Berlue  de 
Forcalquier  (1578-1659)  et  ses  Adages  (1632).  [A  propos  du  rarissime 
volume  des  Adagia,  dont  un  exemplaire  appartient  à  M.  L.  de  Berluc- 
Pcrussis  ;  cet  article  ne  contient  que  des  recherches  généalogiques  et 
biographiques  sur  les  Berlue,  du  xin»  siècle  au  xvii°.] 

Tome  IV  (1903). 

p.  1-20.  V.  LiEUTAUD.  Un  humaniste  provençal  :  Jean-Antoine  Berlue,  etc. 
(suite  p.  57-64,  137-55,  244-51,  281-7).  [Biographie  détaillée  de  Berlue  ; 
curieux  renseignements  sur  la  vie  littéraire  en  Provence  au  xvp  siècle  ; 
beaucoup  d'érudits,  de  collectionneurs,  surtout  Ae  poetœ  7ninimi.  Cette 
introduction  un  peu  longue  nous  amène  enfin  aux  Adagia,  qui  devaient 
être,  dans  la  pensée  de  l'auteur,  un  recueil  complet  de  la  littérature 
parémiologique  de  Rome  et  d'Athènes,  illustré  par  des  rapprochements 
avec  les  proverbes  et  dictons  modernes.  M.  L.  traite  trop  brièvement, 
à  notre  gré,  cette  partie  de  son  sujet,  la  plus  intéressante  :  il  eût  valu 
la  peine  d'extraire  du  recueil  les  proverbes  en  provençal.  Les  citations 
sont  en  outre  criblées  de  fautes  d'impression.]  A.  J. 

S'î.  —  Revue  universitaire,  1903,  1"''  semestre. 

p.  265-7.  C.  JuLLiAN.  A  propos  de  la  Compagnie  du  Très  Saint  Sacrement 
de  l'autel.  [Fait  ressortir  l'importance  du  livre  de  M.  Allier  pour  l'intel- 
ligence de  l'histoire  religieuse  du  xvii"  siècle  (cf.  A)i)iales,  XV,  221), 
rappelle  le  rôle  joué  à  Bordeaux,  pendant  la  Fronde,  par  la  Compagnie 


406  ANNALES    DU    MIDI. 

(parlementaire)  du  Saint-Sacrement  d'une  part,  la   Compagnie  (bour- 
geoise et  protestante)  de  l'Ormée,  d'autre  part.] 

2«  semestre. 

P.  54-6.  Th.  Eosset.  Un  petit  problème  d'histoire  littéraire.  Balzac  et  les 
«  Conseils  do  tolérance  ».  [A  propos  de  la  lettre  de  Balzac  à  l'archevê- 
que de  Toulouse,  du  2ô  janvier  1635  (Lanson,  Lettres  du  XVIl^  siècle, 
]>.  97).  Cette  lettre  serait  relative  à  la  querelle  entre  le  duc  d'Epernon, 
gouverneur  de  Guyenne,  et  Sourdis,  archevêque  de  Bordeaux  (168;3-4); 
elle  contiendrait  «  une  apologie  discrète,  digne  d'un  très  habile  cour- 
tisan »,  de  la  conduite  de  Richelieu  en  cette  affaire.]  A.  J. 

38.  —  Romania,  1903. 

P.  1-17.  F.  Lot.  La  chanson  de  Landri.  [Plusieurs  troubadours  (et  trou- 
vères) nous  ont  conservé  des  allusions  à  deux  compositions  épiques  sur 
Landri  et  Aye  et  sur  Auchier  et  Landri.  M.  Lot  montre  que  ce  Landri 
devait  être  un  chevalier  de  fortune  qui  devint  comte  de  Nevers  à  la  fin 
du  x"  siècle,  et  autour  duquel  s'étaient  formées,  comme  on  en  a  d'autres 
preuves,  des  traditions  légendaires.]  —  P.  177-20o.  A.  Thomas.  Le  suf- 
fixe -aricius  en  français  et  en  provençal.  [Montre  que  ce  suffixe  a  eu  en 
Gaule  un  développement  beaucoup  plus  considérable  qu'on  ne  l'avait 
cru,  et  dresse  la  liste  des  mots,  plus  nombreux  en  français  qu'en  pro- 
vençal, qu'il  a  servi  à  former.]  —  P.  268-99.  P.  Meyer.  Recettes  médi- 
cales en  provençal,  d'après  le  ms.  R  14.  30  de  Trinity  Collège  (Cam- 
bridge). [Ces  recettes  sont  tirées  pour  la  plupart  de  VAiitidotariutn 
Nicolai  et  du  Libe)'  de  simplici  niedicina  de  Platearius  ;  M.  M.  en 
publie  de  longs  extraits,  riches  en  mots  rares  ou  inconnus  (cf.  la  note 
additionnelle,  p.  472).  Le  ms.  est  de  la  fin  du  xiii^  siècle.]  —  P.  3.53-63. 
H.  SucHiER.  Recherches  sur  les  chansons  de  Guillaume  d'Orange. 
[Dans  la  série  d'articles  qui  commence  ici,  M.  S.  se  propose,  non  d'édi- 
fier une  nouvelle  théorie  sur  l'origine  du  cycle,  mais  de  fixer  quelques 
points  importants  et  sûrs.  A  pi-opos  de  Monglane,  il  considère  comme 
vraisemblable  l'explication  de  P.  Paris  qui  identifiait  cette  ville  introu- 
vable avec  l'antique  Glaimm,  près  de  Saint-Eciny.  Il  défend  contre 
M.  P.  Meyer  l'identité  des  trois  Girard  (de  Vienne,  de  Fraite,  de  Rous- 
siUon),  et  croit  qu'ils  ont  pour  original  un  seul  personnage  historique, 
Girard,  gouverneur  du  royaume  d'Arles  de  8-53  à  87U.  Le  mystérieux 
Aimer  le  Chétif  serait  Hadhumar,  comte  de  Narbonne  à  la  fin  du 
viii"  siècle;  sur  ce  personnage,  voy.  dans  le  même  numéro  (p.  455-7)  le 
compte  rendu  d'un  article  de  M.  Weeks  par  M.  E.  Langlois.]  —  P.  -572-6. 
F.  Lot.  Conjectures  sur  Girart  de  Roussillon.  [La  localité  nommée 
Escarpion  serait  Scarponne  (Meurthe-et-Moselle),  Odilon  (père  de  Roson 


PÉRIODIQUES  NON  MERIDIONAUX.  407 

d'Escarpion)  un  comte  du  Diois  à  la  fin  du  ly.'  siècle  ;  confirme  une 
hypothèse  de  M.  Meyer  d'api'ès  laquelle  les  Désertais  sei'aient  les  habi- 
tants du  Berry.  M.  L.  eût  pu  rappeler  que  dans  les  romans  en  prose  de 
la  Table  Ronde  le  royaume  de  la  Déserte  est  précisément  le  Berry 
(P.  Paris,  Les  romans  de  la  T.  R.,  II,  388  et  passim).]  —  P.  577-83. 
F.  Lot.  Orson  de  Beauvais.  [Rapproche  du  personnage  d'Orson,  d'ori- 
gine inconnue,  le  Chorso  qui  fut  remplacé  comme  comte  de  Toulouse 
par  Guillaume  de  Gellone,  tout  en  reconnaissant  «  ciu'il  est  impossible 
de  dire  si  ce  personnage  est  le  prototype  d'Orson  ».]  —  P.  597-618. 
P.  ]\Ieyer.  La  chancun  de  Willame.  [Nous  signalons  exceptionnelle- 
ment ce  compte  rendu  à  cause  de  son  importance  ;  il  donne  l'analyse 
très  détaillée  d'une  chanson  de  geste,  prototype  du  Cove>iant  J'ivieii 
et  d'AliSca7is,  récemment  découverte  et  publiée  diplomatiquement  (en 
un  volume  non  dans  le  commerce)  par  un  éditeur  qui  a  mis  sa  coquet- 
terie à  rester  inconnu  ;  cette  circonstance  fait  que  la  grande  majorité 
des  lecteurs  ne  pourront,  de  longtemps  sans  doute,  connaître  que  par 
la  présente  analyse  ce  texte,  qui  paraît  capital  pour  l'étude  du  cycle  de 
Guillaume  au  Court-Nez.]  A.  J. 

39.  —  Société  nationale  des  Antiquaires  de  France. 

Bulletin,  1903. 

P.  137-41.  A.  Blanchet.  Disposition  intentionnelle  de  haches  dans  des 
cachettes  ou  sépultures.  [Comparaison  enti-e  des  sépultures  de  Breta- 
gne et  des  sépultures  situées  en  divers  points  de  la  France,  notam- 
ment sur  le  plateau  de  Ger  (Hautes-Pyrénées)  et  à  Bruniquel  (Tarn- 
et-Garonne).] —  P.  116-8.  Héron  de  Vjllefosse,  delà  part  de  R.  GR.'iND. 
Note  sur  une  croix-reliquaire  du  xiv  siècle  ayant  appartenu  au  comte 
d'Armagnac  (planche).  —  P.  151.  P.  Vitry.  Note  sur  une  statue  de  la 
Vierge  en  bronze,  conservée  à  Apchon  (Cantal)  et  datant  du  xv'  siècle 
(planche).  —  P.  203-4.  A.  Blanchet.  Découverte  d'une  sépulture  ro- 
maine à  Orpierre  fHautes-Alpes).  [Urne  en  plomb,  objets  divers.]  — 
P.  204.  Héron  be  Villefosse.  Découverte  d'une  jambe  en  bronze,  au 
Bourguet  (Basses-Alpes).  [Provenant  d'une  statue  de  l'époque  romaine.] 
—  P.  210-1.  De  Baves;  Découverte  à  Messigny  (Ain)  de  sépultures 
anciennes.  [l<45oque  gallo-romaine  et  premiers  temps  do  la  période  bar- 
bare.] —  P.  244-6.  Héron  de  Villefosse,  de  la  part  de  M.  Clerc.  Note 
sur  les  arrosoirs  en  terre  cuite  à  l'époque  romaine.  [Objets  antiques 
encore  en  usage  dans  la  Provence.]  —  P.  262-9.  G.  Lafave,  de  la  part 
de  M.  jMoulin.  Découverte  de  sépultures  gallo-romaines  à  Véncjean 
(Drôme).  [Sépultures  par  incinération.  Planche.]  —  P.  283.  F.  Pas- 
QUiER.  Bail  à  besogne  tiré  des  archives  notariales  de  Toulouse  et  rela- 


408  ANNALES   DU   MIDI. 

tif  à  la  fourniture  de  quatre  colonnes  en  laiton  pour  le  chœur  de  la 
cathédrale  de  Rieux  (Haute-Garonne)  en  lô27.  —  P.  298-9.  Mowat  et 
Héron  de  Villefosse.  Découverte  à  Fréjus  d'une  inscription  sur 
le  tombeau  d'un  légionnaire  romain.  —  P.  3n7.  R.  Gagnât.  Découverte 
d'une  inscription  romaine  à  Narbonne.  —  P.  317-9.  Héron  de  Ville- 
fosse,  de  la  part  de  M.  de  Gérin-Ricard.  Description  d'un  vase  grec 
peint  qui  fut  trouvé  à  Marseille  en  1865.  —  P.  842-4.  Héron  de  Ville- 
fosse.  Note  relative  à  seize  médaillons  en  poterie  romaine,  ornés  de 
sujets  en  relief  et  de  légendes  explicatives.  [Les  objets  sont  conservés 
à  Vienne  (Isère).]  F.  P. 

40,  —  Société  nationale  des  Antiquaires  de  France. 
Mémoires,  7^  série,  t.  III,  1901'. 

p.  241-92.  J.  Berthelé.  Les  «  Samnagenses  »  et  l'oppidum  de  Nages 
(Gard).  [Identification  du  lieu  romain  avec  l'oppidum  et  le  village  de 
Nages.] 

Centenaire  de  la  Société,  1804-1904.  Recueil  de  Mé?noires 
publiés  par  ses  membres. 

p.  33-54.  0.  Bendorf.  Le  ti'ophée  d'Auguste  à  la  Turbie,  près  de  Mo- 
naco. [Monument  transformé  en  forteresse  au  moyen  âge;  il  fut  élevé 
au  premier  siècle  de  l'ère  chrétienne  en  l'honneur  de  l'empereur 
Auguste,  par  ordre  du  Sénat  romain.]  —  P.  61-7.  A.  Blanchet.  Influen- 
ces de  la  Sicile  sur  Massalia.  [L'auteur  démontre  qu'à  Marseille,  avant 
la  domination  romaine,  on  s'est  inspiré,  pour  les  types  monétaires,  des 
modèles  siciliens  et  surtout  de  ceux  qui  étaient  usités  à  Syracuse.]  — 
P.  101-3.  L.  Delisle.  Une  lettre  en  partie  autographe  du  roi  Charles  V 
(6  septembre  1370).  [Elle  est  adressée  au  comte  d'Armagnac  au  sujet  de 
divers  projets  de  mariage  dans  sa  famille.]  —  P.  121-32.  C.  Enlart. 
La  cathédrale  Saint-Jean  de  Beyrouth,  en  Syrie.  [Aujourd'hui  convertie 
en  mosquée,  elle  a  été  bâtie  au  début  du  xii"  siècle  pendant  la  domina- 
tion franque;  elle  est  analogue  aux  églises  du  Limousin  et  du  Lan- 
guedoc] —  P.  199-209.  L.  Heuzey.  Buste  d'un  flamine  provenant  de 
Villevieille  (Gard).  —  P.  239-45.  R,  de  Lasteyrie.  Restitution  d'une 
inscription  du  xii«  siècle.  [Elle  était  dans  l'abbaye  de  Montmajour,  près 
d'Arles,  sur  le  tombeau  du  moine  Humbert.]  —  P.  455-9.  J.  Toutain. 
Institution  du  culte  impérial  dans  les  trois  Gaules.  —  P.  471-6. 
M''  DE  VoGûÉ.  Deux  statuettes  en  bronze  du  xiv=  siècle.  [Elles  ont  été 
découvertes  dans  la  région  pyrénéenne  ;  l'une  d'elles  porte  une  inscrip- 
tion hébraïque  qui  a  un  sens  symbolique.]  F.  P. 

1.  Volume  paru  en  1903. 


NÉCROLOGIE 


L'érudition  française  vient  de  faire,  en  la  personne  de  M.  Au- 
guste MoLiNiER,  une  perte  des  plus  sensibles.  Né  à  Toulouse  le 
30  septembre  1851,  et  décédé  à  Paris,  le  19  mai  1904,  Auguste-Louis- 
Éinile  Molinier  était  sorti  de  l'Ecole  des  Charles  en  ls73  ;  il  fut  suc- 
cessivement bibliothécaire  à  la  bibliothèque  Mazarine.  au  palais  de 
Fontainebleau  et  conservateur  à  la  biljliothéque  Sainte-Geneviève; 
il  quitta  ces  dernières  fonctions  en  1893  pour  devenir  professeur 
à  l'Ecole  des  Chartes  Auguste  Molinier  appartient  au  Languedoc 
non  seulement  par  ses  origines,  mais  encore  par  des  travaux 
d'érudition  considérables.  C'est  lui,  en  efl'et,  qui  fut  chargé  en 
1872  de  diriger,  en  majeure  partie,  la  réédition  de  VHlsloire  de 
Languedoc.  Grâce  à  son  labeur  aussi  savant  que  fécond,  notre 
vieille  histoire  provinciale  s'enrichit  de  notes  précieuses,  de  docu- 
ments aussi  nombreux  qu'importants  et  de  savantes  dissertations, 
parmi  lesquelles  il  faut  citer  tout  particulièrement  les  études  sur 
l'administration  de  saint  Louis  et  d'Alfonse  de  Poitiers  et  sur  la 
géographie  du  Languedoc.  Cette  réimpression,  considérablement 
augmentée,  fait  autant  d'honneur  aux  auteurs  primitifs  de  l'œu- 
vre, dom  de  Vie  et  dom  Vaissete,  qu'à  son  éditeur  moderne, 
M.  Auguste  Molinier,  et  qu'au  libraire  éclairé  et  désintéressé, 
M.  Edouard  Privât,  qui  en  a  rendu  l'exécution  possible.  Au  Lan- 
guedoc encore  est  consacrée  une  autre  publication  d'Auguste  Moli- 
nier: ce  recueil  des  Lettres  d'Alfonse  de  Poitiers,  qui  forme  deux 
volumes  de  la  collection  des  Documents  inédits  et  dont  un  petit 
supplément  a  paru  ici- même  en  1900;  A.  Molinier  projetait 
de  compléter  cette  œuvre  par  la  publication  des  comptes  du  même 
prince;  un  volume  de  la  même  collection  des  Documents  inédits 
devait  y  être  consacré.  Les  travaux  d'Auguste  Molinier  sur  l'his- 
toire du  midi  de  la  France  auraient  suffi  à  remplir  la  vie  d'un 
homme,  c'est  à  peine  cependant  la  moitié  de  l'œuvre  due  à  l'acti- 
vité de  ce  savant  mort  à  cinquante  trois  ans.  Ses  fonctions  de 
bibliothécaire  l'ont  amené  à  collaborer  au  catalogue  général  des 
manuscrits  des  bibliothèques  des  départements;  il  débuta  dans 
cette  entreprise  par  le  catalogue  des  manusciuts  de  Toulouse  et 
de  Nimes;  il  continua  par  ceux  de  CliAlons-sur-Marne,  Provins, 
Soissons,  Dijon,  Auxerre,  Sens,  (Ihartres,  Cambrai,  Nantes,  Poi- 
tiers, Valenciennes,  pour  ne  citer  que  les  villes  les  plus  impor- 
tantes; le  catalogue  des  manuscrits  de  la  bibliothèque  Mazarine, 
enlin,  est  entièrement  de  lui. 


410  ANNALES    DU    MIDI. 

La  rédaction  de  ces  répertoires  avait  mis  A.  Molinier  en  contact 
continuel  avec  les  manuscrits;  il  y  acquit,  en  matière  d'his- 
toire littéraire  et  do  sources  de  l'histoire  de  France,  un  goût 
très  vif  et  une  compétence  du  meilleur  aloi.  Dans  cet  ordre 
d'idées  il  donna  successivement  :  une  dissertation  sur  les  Ohi- 
tuaires  français  dit  moyen  âge,  dont  le  corollaire  fut  la  publi- 
cation de  ces  mêmes  obituaires  par  l'Académie  des  Inscriptions 
et  Belles-Lettresi;  des  éditions  de  la  Clironique  7iormande  du 
xive  siècle,  des  Ilinera  JherosoUmilana,  des  \ies  de  Louis  VI  et 
de  Louis  VII  par  Suger,  et  enfin  son  Manuel  des  sources  de  l'his- 
toire de  France,  dont  quatre  fascicules  ont  paru  du  vivant  de 
l'auteur.  Cotte  œuvre  considérable  d'Auguste  Molinier  ne  restera 
pas  inachevée:  ({uelques  jours  avant  sa  mort,  il  avait  remis  à  son 
éditeur  le  manuscrit  des  deux  derniers  fascicules  contenant,  l'un 
la  fin  du  manuel,  et  l'autre  une  magistrale  introduction  sur  la 
littérature  historique  du  moyen  fige. 

Ces  travaux,  aussi  importants  par  leur  sujet  que  par  leur  haute 
valeur  scientifique,  n'assurent  pas  seuls  à  Auguste  Molinier  une 
place  considérable  dans  l'érudition  française;  on  ne  saurait,  en 
eft'et,  passer  sous  silence  la  très  grande  influence  qu'il  exerça, 
soit  en  collaborant  à  différentes  revues,  comme  la  Revue  cri- 
tique, la  Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Chartes,  les  Annales  du 
Midi,  la  Revue  historique,  le  Moyen  âge,  soit  en  professant 
dans  sa  chaire  de  l'Ecole  des  Chartes,  ou  à  l'Ecole  des  Hautes- 
Etudes,  en  qualité  de  suppléant  de  J\L  Gabriel  Monod.  Enfin, 
comme  pour  prouver  qu'aucune  manifestation  de  l'esprit  ne 
laissait  insensible  sa  vive  et  belle  intelligence,  A.  Molinier 
laisse  une  autre  publication  dont  le  litre  étonnera  bien  ceux 
qui  ne  connaissent  que  ses  œuvres  historiques  :  c'est  une  édition 
des  Pensées  et  des  Provinciales  de  Pascal;  et  ce  n'est  pas  de  tous 
ses  travaux  celui  dont  il  faisait  le  moins  de  cas  et  dont  il  parlait 
le  moins  souvent. 

Les  obsèques  d'Auguste  Molinier  ont  été  célébrées  à  Paris,  le 
21  mai  1904;  son  éloge  a  été  prononcé,  au  cours  de  la  cérémonie, 
par  M.  P.  Meyer,  au  nom  do  l'Ecole  des  Chartes;  par  M.  J.  Roy, 
au  nom  de  la  Société  des  anciens  élèves  de  cette  école;  par  M.  Vi- 
dier,  au  nom  des  anciens  élèves  du  défunt,  et  par  M.  P.  Guillard, 
au  nom  de  la  Ligue  des  droits  de  l'homme,  dans  le  conseil  de  la- 
quelle Auguste  Molinier  exerçait  une  influence  notable.  Une  notice 
étendue  sur  sa  vie  et  ses  travaux  paraîtra  dans  un  dos  prochains 
numéros  de  la  Bibliothèque  de  VEcolc  des  Chartes.  —  [A.  V.] 

1.  Deux  volumes  seulement  auront  pu  paraître  sous  le  nom  d'Auguste 
MoUnier,  celui  des  provinces  ecclésiastiques  de  Sens  et  de  Paris  (191)2)  et 
celui  de  la  province  de  Chartres,  presque  achevé,  et  que  M.  Longnon. 
commissaire  responsable  de  la  publication  est  en  train  de  terminer. 


iiiiioNioui': 


Cette  année  la  contribution  qu'apportent  ordinairement  à 
l'histoire  du  Midi  les  positions  de  thèses  de  l'Ecole  des  Chartes 
aura  été  assez  abondante.  M.  de  Bengy-Puyvallée  a  fait  la  bio- 
graphie de  Louis  de  Sancerre,  connétable  de  France  (1340-1403). 
Devenu  maréchal  de  France  (quand,  comment,  l'auteur  n'en  dit 
rien),  Louis  de  Sancerre  a  fait  la  chasse  aux  routiers  en  Bour- 
bonnais et  en  Auvergne  (1366-1368),  guerroyé  en  Limousin  contre 
les  Anglais  et  repris  sur  eux  Limoges  (1371-1372);  il  les  a  bat- 
tus en  Saintonge  avec  du  Guesclin,  en  Guyenne  avec  le  duc 
d'Anjou  (l37o-1377),  puis  en  Angoumois,  en  Auvergne.  La 
partie  la  plus  variée  et  la  plus  intéressante  de  sa  vie  est 
celle  qui  s'est  écoulée  sous  le  règne  de  Charles  VI  :  il  eut  alors 
l'occasion  de  se  montrer  non  seulement  homme  de  guerre,  mais 
homme  d'état,  administrateur.  En  1381-1382  nous  le  trouvons  en 
Auvergne,  où  il  organise  la  résistance  contre  les  routiers,  les 
Anglais,  et  où  il  préside  les  Etats  do  la  Basse-Auvergne  (à  Cler- 
mont,  juillet  1382);  en  1386-1387,  il  combat  sur  les  bords  de  la 
Charente.  Ses  relations  étroites  avec  le  puissant  duc  de  Berry 
lui  avaient  déjà  valu  de  hautes  charges;  en  1388,  c'est  le  duc 
lui-même  qu'il  vint  remplacer  au  gouvernement  de  Languedoc 
et  de  Guyenne,  non  comme  gouverneur,  lieutenant  du  roi,  mais 
avec  le  titre  de  capitaine  général,  auquel  il  joignit  bientôt  celui 
de  réformateur  général  (mai  1389).  11  a  gardé  dix  ans  ces  fonc- 
tions qui  marquent  le  point  éminent  de  sa  carrière;  c'est  en  les 
remplissant  qu'il  a  dû  intervenir  dans  l'affaire  de  la  succession 
de  Fois;  à  la  fin  de  1399,  la  maladie  le  contraint  à  se  retirer,  — 


412  ANNALES  DU   MIDI. 

A.  Clerc.  Recherches  sur  le  cardinal  de  Châtillon  (1o17-'l56i).  Ce 
précoce  cardinal  —  il  reçut  le  chapeau  à  dix-sept  ans  —  est  de- 
venu archevêque  de  Toulouse  à  deux  reprises,  en  '1534,  en  1559, 
et  comme  tel  a  joué  un  rôle  dans  le  Midi  durant  la  première 
guerre  de  religion  (1562).  Déjà  il  avait  communié  sous  les  deux 
espèces;  il  était,  comme  ses  frères  d'Andelot  et  Coligny,  passé 
au  parti  protestant.  Aussi  l'archevêché  de  Toulouse  lui  fut-il  ôté 
au  profit  du  cardinal  d'Armagnac.  —  E.  Delmas.  Essai  sur  l'his- 
toire des  comtes  de  Rodez  au  xii'^  el  au  xiii«  siècles  (1115-1304).  Le 
comté  de  Rodez  provient  d'un  démembrement  du  comté  de 
Rouergue,  qui  dépendait  du  comté  et  de  la  maison  de  Toulouse. 
Il  a  été  fondé  par  les  vicomtes  de  Millau-Carlat,  eux-mêmes  peut- 
être  issus  des  vicomtes  de  Rouergue.  L'un  d'eux,  Richard,  dès 
1093,  au  moment  où  Raimond  de  Saint-Gilles,  comte  de  Toulouse, 
se  préparait  à  partir  pour  la  croisade,  a  dû  recevoir  de  lui  le 
domaine  utile  du  comté  de  Rouergue,  puis,  à  la  faveur  de  cet 
engagement,  usurper  l'autorité  comtale  :  dès  1112,  il  prend  le 
titre  de  comte  de  Rodez  qu'Alfonse-Jourdain,  trois  ans  plus  tard, 
se  résout  à  lui  confirmer  moyennant  hommage.  L'auteur  a  en- 
suite établi  la  généalogie  de^^  nouveaux  comtes  jusqu'à  la  fin  de 
la  première  race,  c'est-à-dire  en  1304.  Le  chapitre  m  traite  de 
leurs  rapports,  assez  difficiles,  avec  les  évêques  de  Rodez  qui 
restaient  maîtres  de  la  Cité,  tandis  que  le  Bourg  avait  pour  sei- 
gneurs les  comtes;  de  leur  politique  extérieure,  hostile  presque 
toujours  aux  comtes  de  Toulouse,  leurs  suzerains.  Le  chapitre  iv 
est  consacré  à  l'organisation  féodale  et  à  l'administration  du 
comté.  Cette  thèse  paraît  bien  conçue,  traitée  avec  méthode  et 
dans  de  justes  proportions;  il  serait  à  souhaiter  qu'elle  fût 
imprimée.  La  Société  des  Lettres  de  l'Aveyron,  qui  a  déjà  fait 
ou  favorisé  tant  de  bonnes  publications  historiques  sur  le 
Rouergue,  serait  peut-être  disposée  à  soutenir  celle  là.  —  La 
vie  et  les  légations  d'Hugues,  èvèque  de  Die  (1073-1082),  archevê- 
que de  Lyon  (1082-1106),  par  G.-L.  Henriot.  ne  nous  retiendra 
guère.  Originaire  de  Die,  Hugues  eut  ensuite  ce  diocèse  à  admi- 
nistrer; mais  s'il  intéresse  l'histoire,  c'est  surtout  par  ses  léga- 
tions, par  ses  efforts  pour  faire  accepter  la  réforme  grégorienne. 
—  Th.  Legrand.  Essai  sur  Fontarabie  elles  différends  de  cette  ville 
avec  le  Labourd,  du  xv«  siècle  au  xviii^  Ce  titre  même  implique 
un  ouvrage  un  peu  confus;  il  y  a  là  dedans  deux  sujets  mal  re- 
liés l'un  à  l'autre  :  d'une  part  une  étude  sur  l'organisation  mu- 


CHRONIQUE.  413 

nicipale,  militaire,  commerciale  de  Fontarabie  depuis  le  com- 
mencement du  xv^  siècle,  de  l'autre  des  démêlés  entre  voisins 
que  la  Bidassoa  séparait,  —  démêlés  qui  ne  sont  pas  toujours 
propres  à  Fontarabie.  qui  se  confondent  plus  ou  moins  avec  les 
relations  entre  Guipuscoa  et  Labourd,  ou  bien  entre  Espagne  et 
France;  —  cette  seconde  partie  s'étend  de  1430  à  1775.  —  Bor- 
nons nous  à  mentionner  L.  Micheli,  Les  inslilulions  municipales 
de  Genève  au  xv»  siècle,  essai  précédé  d'une  introduction  sur 
l'établissement  de  la  commune  dans  cette  ville.  —  J.  Pandin  de 
LussA-UDiÈRE.  Charles  de  Coucis,  seigneur  de  Burie,  capitaine  et 
lieutenant  du  roi  en  Guyenne  en  l'absence  du  roi  de  Navarre 
('l49l-1o6o).  Une  part  de  la  carrière  de  ce  méridional  s'est  écoulée 
en  Italie,  une  autre,  la  plus  importante,  en  Guyenne,  où  il  fut 
nommé  lieutenant  général  du  roi  de  Navarre  {1542},  dont  il  dé- 
fendit l'accès  contre  les  tentatives  espagnoles  (1541-1543,  1558- 
1559),  où  il  eut  aussi  à  poursuivre  les  hérétiques.  C'était  un  tem- 
poriseur,  un  conciliant,  très  différent  de  son  terrible  coadjuteur, 
Monluc.  Les  Parlements  de  Bordeaux  et  de  Toulouse  le  tenaient 
pour  suspect  à  cause  de  sa  modération  ;  à  plusieurs  reprises  il 
eut  maille  a  partir  avec  eux  et  protégea  les  réformés  contre 
leurs  arrêts.  Il  fut  pourtant  obligé  de  conduire  la  guerre  civile; 
il  put  mesurer  avant  de  mourir  la  difficulté  d'être  équitable 
envers  les  partis  et  aussi  leur  injustice.  —  E.  Pélissier.  Histoire 
de  la  Draperie  à  Castres  sous  l'Ancien  Régime.  L'auteur  étudie 
cette  industrie  dans  ses  origines,  c'est-à-dire  au  moyen  âge; 
puis  aux  xvi«  et  xvii^  siècles,  avant  Colbert,  qui  la  réglementa 
durement  sans  l'empêcher  de  péricliter,  au  contraire,  —  ici  nous 
nous  permettrons  de  renvoyer  le  lecteur  à  l'arlicle  publié  dans 
les  ^nnaZ-îs  par  M.  Granat';  —  enfin  au  xviir  siècle,  époque  de  sa 
décadence.  Sa  fortune  a  varié  avec  l'autorité  des  consuls  :  l'une 
s'affaiblissant,  l'autre  a  décliné  également.  La  révocation  de 
l'Edit  de  Nantes  et  les  guerres  de  la  fin  du  règne  de  Louis  XIV 
ont  consommé  la  ruine  de  la  draperie  castraise. 


Le  Congrès  des  Sociétés  savantes  s'est  tenu.,  en  1904,  du  5  au 
9  avril,  à  Paris,  sous  la  présidence  de  M.   Levasseur.   De  nom- 

1.  Granat  (0.),  L'industrie  de  la  draperie  à  Castres  au  xvir  siècle 
et  les  Ordonnances  de  Colbert,  dans  les  A?i>iales  du  Midi,  t.  X,  p.  146, 
et  t.  XI,  p.  5G. 


414  ANNALES    DU    MIDt. 

breux  méridionaux  s'y  étaient  rendus;  c'est  dire  que  le  Midi  n'y 
a  pas  été  oublié.  Voici  quelles  ont  été  les  communications  qui 
entrent  dans  le  cadrij  de  nos  études. 

Hisloi7-e  et  philologie.  —  M.  R.  Bardv  donne  quelques  indica- 
tions sur  la  manière  dont  les  surnoms  et  sobriquets  ont  été  cons- 
titués au  moyen  âge.  M.  le  chanoine  Pottier  fait  une  communi- 
cation au  sujet  des  coutumes  de  quatre  bastides  de  la  vallée  de 
la  Gimone.  M.  Depoin  précise  la  date  de  la  mort  de  Chilpéric  II 
et,  au  moyen  de  l'obituaire  de  la  cathédrale  de  Limoges,  celle 
des  obsèques  de  Childebert  II.  M.  l'abbé  Sabarthès  présente  une 
étude  sur  les  prénoms  usités  dans  l'ancien  état  civil  de  Leucate 
(Aude).  M.  L.  de  Sarran  d'Allard  envoie  une  noie  sur  une 
transaction  de  1302  entre  les  habitants  de  La  Roquebrou  et 
Durand  de  Montai,  et  M.  .1.  Calle  rappelle  dans  une  lettre 
d'autres  transactions  entre  les  habitants  de  La  Roquebrou  et 
leurs  seigneurs.  M.  l'abbé  Gaubin  étudie  l'origine  des  communes 
dans  le  Sud-Ouest;  M.  Gros,  l'Eglise  anticoncordataire  de  la 
Haute-Garonne.  M.  l'abbé  Foix  donne  quelques  détails  sur  un 
questionnaire  de  l'évêque  de  Dax  en  IToG  relatif  à  des  renseigne- 
ments de  statistique  civile.  M  le  baron  Guillibert  communique 
un  document  du  xiv*'  siècle  relatif  au  prieuré  de  Saint-Jean-de- 
Malte  d'Aix  (Provence,.  ^'.  A.  Lesort  montre  tout  le  parti  que 
peuvent  tirer  les  historiens  des  registres  de  l'enregistrement 
récemment  versés  aux  archives  départementales.  M.  de  Saint- 
Genis  lit  un  mémoire  sur  la  perception  des  droits  de  mutation  et 
des  droits  sur  les  actes  sous  l'ancien  régime.  M.  Parfouru  ra- 
conte la  vie  aventureuse  d'une  certaine  Marguerite  Bouchard 
de  Montemajor.  comédienne,  fille  d'un  confident  du  maréchal  de 
Luxembourg,  impliqué  avec  lui  dans  le  procès  de  sorcellerie 
qu'on  lui  intenta,  et  incarcéré  d'abord  à  Vincennes,  puis  à  Salces 
en  Roussillon.  M.  Leroux  donne  lecture  d'une  étude  intitulée  : 
Jean-Noël  Cosie  elson  «  Manuel  des  missiotinaires  ».  L'abbé  Coste 
était  originaire  de  Tulle  et  écrivit  son  Manuel  sous  le  régime  de 
la  séparation  de  l'Eglise  et  de  l'Etat  en  '1795-96.  M.  G.  Clément- 
Simon  étudie  les  coutumes  de  Montaut,  près  Auch  ;  M.  Rossignol, 
le  livre  de  dépenses  de  Dupré  de  Saint-Maur,  intendant  de 
Guyenne;  M.  E.  Labroue.  le  département  de  la  Dordogne  et  la 
Constitution  de  1796;  M.  l'abbé  Gaubin,  l'organisation  des  batail- 
lons de  volontaires  pendant  la  Révolution  à  La  Devèze  (Gers); 
M.  Doublet,  la  Société  populaire  de  Gattières  (Var)  ;  M.  E.  Poupé 


CHRONIQUE.  415 

celle  de  Saint-Zacharie.  aussi  dans  le  Var.  M.  l'abbé  Sabarthès 

donne  lecture  d'un  mémoire  sur  la  création  du  département  de 

'Aude.  M.  J.  Delmas  s'occupe  du  3"=  bataillon  de  volontaires  du 

Cantal  et  du  Carnet  d'un  volontaire  de  la  première  République- 

Archéologie.  —  M.  l'abbé  Arnaud  d'Agnel  fait  une  communi- 
cation sur  les  antiquités  du  musée  de  Sault  (  Vaucluse).  M.  Clerc 
rend  compte  des  fouilles  qu'il  a  faites  sur  le  plateau  de  la  Tour- 
rette,  près  de  Marseille.  M.  de  Gérin-Ricard  étudie  les  castella 
des  environs  d'Aix- en  -  Provence;  M.  J.  Louis  la  céramique 
romaine;  M.  J.  Martin  les  pierres  tombales  et  inscriptions  du 
territoire  de  Tournus.  M.  Pasquier  a  envoyé  une  étude  sur  les 
statuts  des  orfèvres  de  Toulouse  en  4  550.  M.  le  chanoine  Pottier 
parle  des  fouilles  entreprises  sur  l'emplacement  de  l'abbaye  de 
Grandselve.  M.  l'abbé  Chaillan  lit  un  mémoire  sur  un  rebord 
de  couvercle  d'un  sarcophage  chrétien  de  Trets  (Bouches-du- 
Rhône).  M.  le  chanoine  Pottier  présente  quarante  sceaux,  pour 
la  plupart  recueillis  dans  le  Tarn-et-Garonne.  M.  Th.  Dumas  lit 
deux  mémoires,  l'un  relatif  à  l'exploration  qu'il  a  faite  de  la 
grotte  de  la  Baume-Longue  (Gard),  et  l'autre  à  la  station  des 
Châtaigniers,  aussi  dans  le  Gard.  M.  E.  Ferrasse  présente  une 
carte  préhistorique  du  Minervois.  qu'il  a  dressée.  M.  de  Saint- 
Venant  se  livre  à  des  considérations  générales  sur  l'histoire  de 
la  ferrure;  de  même  M.  Guignard.  M.  le  D'  Roux  parle  des  mé- 
galithes du  Puy-de-Dôme.  M.  l'abbé  Arnaud  d'Agnel  lit  un  travail 
sur  le  trésor  de  l'église  de  Sainte-Anne  d'Apt  (Vaucluse).  M.  Bar- 
rière-Flavy  a  envoyé  une  note  sur  de  nouvelles  stations  wisi- 
gothiques.  M  le  chanoine  Cherrier  lit  un  mémoire  sur  la  croix 
de  Lorraine  de  Frovence;  M.  P.  Ducourtieux  un  autre  sur  les 
voies  romaines  qui  traversaient  le  territoire  des  Lemovices. 
M.  R.  Bonnet  étudie  les  vestiges  de  l'architecture  carolingienne 
dans  l'Hérault;  M.  l'abbé  Chaillan  différentes  églises  construi- 
tes, peu  après  l'an  mil.  par  les  bénédictins  de  Saint-Victor  de 
Marseille. 

Sciences  économiques  et  sociales.  —  M.  Cheylud  a  étudié  l'état 
et  le  mouvement  de  la  population,  depuis  la. sécularisation  de 
l'état  civil  jusqu'aux  premières  statistiques  annuelles  (1792-1801), 
dans  la  commune  de  la  Roche-Chalais  (Dordogne).  M.  Fabljé  Tail- 
lefer  s'est  occupé  des  doléances  du  Quercy  réclamant  la  péré- 
quation de  l'impôt  en  1790;  M.  J.  Depoin,  des  conditions  du  ma- 


416  ANNALES   DU   MiDl. 

riage  en  France  et  en  Germanie  du  ix«  au  xi*^^  siècles.  M.  G.  Bon- 
NEFOY  a  envoyé  un  mémoire  sur  la  statistique  générale  du 
département  du  Puy-de-Dôme.  M.  L.  Salefranque  étudie  les 
budgets  de  la  ville  de  Mont-de-Marsan  depuis  1808.  M,  E.  Cheylud 
présente  un  travail  sur  l'Ecole  centrale  du  Cantal. 

Géographie  historique  et  descriptive.  —  Peu  de  choses  intéres- 
sant le  Midi  de  façon  particulière.  On  n'a  guère  à  relever  que 
deux  communications,  l'une  de  M.  H.  Fbrrand  sur  la  grande 
carte  des  Etats  de  Savoie  par  Tomaso  Borgonio  en  1772,  et 
l'autre  de  M.  J.  Fournier  sur  le  port  de  guerre  de  Marseille 
sous  Henri  II. 

L'un  des  deux  discours  prononcés  à  la  séance  de  clôture,  celui 
de  M.  Esmein,  doit  être  mentionné  ;  c'est  un  excellent  exposé  des 
idées  économiques  et  politiques  des  physiocrates. 

En  même  temps  s'étaient  réunis  les  délégués  des  Sociétés  des 
Beaux- Arts.  Chez  eux  aussi  nous  trouvons  quelque  chose  à  re- 
cueillir :  E.  Biais.  Histoire  du  théâtre  à  Angoulême  du  xv''  siècle 
à  1904.  —  Ch.  Ponsonailhe.  Zueil  et  Boissière,  peintres  de  Mont- 
pellier (xvir  siècle).  —  C.  Leymarie.  Notes  sur  l'histoire  du  bis- 
cuit à  Limoges.  —  Bouillon-Landais.  La  collection  de  Paul  de 
Surian  léguée  à  la  ville  de  Marseille.  [80  tableaux.]  — -  P.  Clau- 
zel.  Sur  Pierre-Marlin  Barat,  peintre  du  xviiP  siècle,  [Du  Gard.] 
—  GuiLLiBERï.  Sur  le  peintre  Granet,  d'Aix-en-Provence  (1775- 
1849).  —  F.  Pasquier.  Engagement  d'objets  précieux  de  la  mai- 
son de  Foix. 

♦   ♦ 

Dans  le  compte  rendu  du  Dictionnaire  de  la  Creuse  de  M.  l'abbé 
Lecler  qui  a  été  publié  ci-dessus,  il  est  dit,  p.  135  :  «  M.  l'abbé 
Lecler  ne  s'est  pas  contenté  de  copier  Jouilletton,  auteur  de  cette 
grosse  bévue  :  il  a  trouvé  bon  de  l'interpoler  en  ajoutant  «  avec 
des  troupes  nombreuses  ».  Et  c'est  ainsi  que  l'erreur  s'augmente 
en  se  propageant  !  »  Ce  compte  rendu  a  été  reproduit  par  le  Biblio- 
phile limousin  d'avril,  et  à  propos  du  passage  que  je  viens  de  trans- 
crire, M.  P.  Ducourtieux  a  fait  la  remarque  suivante  :  «  M.  An- 
toine Thomas  voudra  bien  reconnaître  l'inexactitude  de  son 
assertion.  M.  l'abbé  Lecler  n'a  pas  trouvé  bon  d'interpoler  Joul- 
lietton  en  ajoutant  «  avec  des  troupes  nombreuses  ».  Il  ne  pou- 
vait pas  ajouter  ces  mots  au  texte  de  l'auteur,  puisqu'ils  y  sont, 
comme  il  est  facile  de  le  voir  au  tome  L  page  190.  »  M.  P.  Du- 


CHRONIQUE.  4lt 

courtieux  a  raison,  et  je  m'empresse  de  faire  l'aveu  qu'on  solli- 
cite et  d'accorder  à  M.  l'abbé  Lecler  une  légitime  réparation. 
Ce  n'est  pas  lui  qui  a  interpolé,  c'est  moi  qui  ai  tronqué  le  texte 
de  Jouilleton  dans  l'article  du  22  juillet  187G  auquel  j"ai  renvoyé  : 
en  écrivant  mon  compte  rendu  j'avais  sous  les  yeux  cet  article 
et  j'ai  eu  le  tort  do  ne  pas  recourir  à  Joullietton  lui-même.  Donc 
la  partie  incriminée  de  mon  compte  rendu  doit  être  cancellée. 
La  remarque  antérieure  subsiste  seule  :  M.  l'abbé  Lecler  a  re- 
produit textuellement  Joullietton  (sans  le  citer}  et  repris  à  son 
compte  une  «  assertion  erronée  et  absurde  de  tous  points  dont  j'ai 
expliqué  l'origine  dans  VEcho  de  la  Creuse  du  29  juillet  1876  ». 
-  [A.  T.] 

Nombreux  sont  les  ouvrages  intéressant  le  Midi  que  vient  de 
récompenser  l'Académie  des  Inscriptions  et  ISelles-Lettres  (con- 
cours des  Antiquités  de  la  France).  La  2"  médaille  a  été  attribuée 
à  M.  E.  Rupin.  Rocmnadour ;  la  3'  médaille  à  M.  F.  Abbadie. 
Le  livre  noir  et  les  établissements  de  Dax:  la  3'=  mention  à 
MM.  Clerc  et  Arnaud  d'Agnel.  Découvertes  archéologiques  de  Mar- 
seille; la  4"=  à  M.  Gardère.  Histoire  de  la  seigneurie  de  Condom-, 
la  5'^  à  M.  l'abbé  Chaillan,  Nouveaux  documents  sur  le  Studium 
de  Tretz;  la  G«  enfin  à  M.  E.  Dussert,  Essai  historique  sur  La  Mure 
et  son  mandemetit. 


On  sait  que  dans  notre  pays  l'État,  presque  seul.,  vient  au  se" 
cours  des  archéologues  et  subventionne  les  fouilles.  La  fonction 
est  fixée  entre  ses  mains  par  la  tradition.  D'ailleurs,  qui  la  par- 
tagerait avec  lui?  Qui  le  suppléerait  au  besoin?  Ce  n'est  pas 
l'Institut  de  France,  surchargé  de  prix  à  distril)uer,  mais  fort 
mal  pourvu  de  fonds  qu'il  puisse  nfl'ecter  à  une  destination  pour- 
tant si  recommandable  ;  ni  les  Sociétés  savantes,  qui  trop  sou- 
vent ont  grand  peine  à  imprimer  leurs  travaux.  Or.  les  fouilles 
coûtent  cher,  et  les  multiples  charges  que  l'Etat  assume  ne  lui 
permettent  de  distribuer  aux  chercheurs  que  des  subsides  mai- 
gres et  rares;  mieux  que  personne,  ceux  qui  .n'ont  pas  l'heur  de 
vivre  à  Paris,  à  la  source  des  subventions,  savent  combien 
grande  est  la  difficulté  de  les  obtenir. 

L'initiative  privée  va  enfin  remédier  à  cette  situation  nuisible 
à  l'érudition  française.  Une  «  Société  française  des  fouilles  ar- 

ANNALES   DU   MIDI.    —   XVL  27 


418  ANNALES    DU    MIDI. 

chéologiques  »  s'est  constituée  pour  «  entreprendre  et  encoura- 
ger par  ses  subventions  des  explorations  et  des  fouilles  archéo- 
logiques »  on  France,  dans  nos  colonies  et  à  l'étranger. 

Elle  fera  connaître  par  des  expositions  et  des  publications  les 
objets  ainsi  recueillis  ou  provenant  de  dons  et  d'échanges. 

Elle  attribuera  aux  musées  français  le  produit  des  fouilles 
dont  elle  aura  pris  l'initiative. 

Président,  M.  E.  Babelon;  vice-présidents,  MM.  de  Lasteyrie  et 
Pozzi  ;  trésorier.  M.  Bischoû'sheina;  secrétaire  général,  M.  Colbert 
de  Beauiieu  (5  bis,  rue  Chalgrin.  Paris-X«)  ;  secrétaire-adjoint. 
M.  Leroux. 

La  Société  comprendra  des  membres  donateurs,  ou  à  vie.  ou 
titulaires,  et  ces  derniers  devront  verser  20  francs  par  an. 

Nous  souhaitons  que  notre  Midi,  non  moins  négligé  que  riche 
en  vestiges  du  passé,  bénéficie  largement  d'une  si  louable  entre- 
prise. 


Chronique  générale  [suite  et  fin). 

—  Depuis  la  dernière  chronique  générale,  VHisloire  de  France, 
publiée  sous  la  direction  de  M.  Ernest  Lavisse,  a  été  poussée 
jusqu'au  milieu  du  xvi^  siècle. 

La  dernière  période  du  moyen  âge  a  été  partagée  entre  deux 
collaborateurs  :  MM.  Coville  et  Petit-Dutaillis.  Le  premier  a 
rédigé  les  Premiers  Valois^  (1328-1422);  le  second,  Charles  VII, 
Louis  XI  et  les  premières  années  de  Charles  VIII  "^  (1422-1492).  Ces 
deux  volumes  qui  composent  le  tome  IV  de  l'œuvre,  témoignent 
d'un  dépouillement  également  consciencieux  et  critique  des 
ouvrages  généraux  et  des  principales  sources.  La  partie  due  à 
M.  C.  est  essentiellement  didactique  :  elle  sera  particulièrement 
familière  aux  étudiants  de  nos  Universités.  Au  demeurant,  l'au- 
teur n'a  visiblement  pas  voulu  donner  autre  chose  qu'un  exposé 
très  ordonné  et  bien  au  courant  des  événements  principaux,  et, 
certes,  il  eût  été  difficile  d'apporter  dans  cette  tâche  plus  de 
méthode  et  de  précision.  M.  P.-D.  paraît,  au  contraire,  s'être 
préoccupé,  avant  tout,  de  présenter  un  tableau  de  la  France  du 
xv  siècle;  il  a  voulu  aller  au  delà  des  faits.  Sans  doute,  l'exposé 

1.  Paris,  Hachotte,  in-S"  obi.  de  448  pages. 
'i.  Paris,  Hachette,  in-<S"  obi.  de  4.")(5  pages. 


CHRONIQUE.  -419 

proprement  dit  des  événements,  resserré  dans  un  plus  petit 
espace,  y  perd  quelque  peu  en  netteté;  mais,  en  revanche,  l'iiis- 
toire  interne  est  largement  traitée.  M.  P.-D.  n'a  vraiment  sacri- 
fié que  les  lettres  et  les  arts,  apparemment  parce  que  l'histoire 
littéraire  et  artistique  du  xv  siècle  français,  surtout  intéres- 
sante à  la  fin  du  siècle,  entrait  plutôt  dans  le  cadre  du  tome  V, 
confié  à  M.  Lemonnier. 

—  M.  Lemonnier^  a  traité  de  la  Renaissance  artistique  et  lit- 
téraire et  du  mouvement  des  idées  pendant  la  première  moitié 
du  XVI''  siècle  d'une  façon  remarquable  :  dans  les  chapitres  con- 
sacrés à  ce  sujet  qu'il  connaît  si  bien,  il  donne  au  lecteur,  à  un 
degré  rare,  ce  sentiment  de  pleine  sécurité  qu'inspire  la  vérita- 
ble compétence.  Dans  le  domaine  historique  proprement  dit, 
c'est-à-dire  dans  l'exposé  de  la  politique  intérieure  et  extérieure, 
on  a  la  sensation  de  l'effort  qu'a  dû  s'imposer  l'auteur  pour  s'as- 
similer les  nombreux  ouvrages  et  articles  dont  fourmille  la  bi- 
bliographie de  notre  xvi«  siècle  :  si  bien  qu'au  milieu  de  l'atmos- 
phère un  peu  trouble  de  tant  de  faits  et  de  noms  accumulés,  les 
grandes  personnalités,  les  grandes  conceptions  politiques  et  di- 
plomatiques et  les  grands  faits  eux-mêmes  n'apparaissent  pas 
toujours  dans  une  pleine  lumière. 

—  La  contribution  collective  de  MM.  Bayet,  Pfkster  et  Kli-jin- 
CLAUsz,  restée  d'abord  en  arrière,  est  venue  prendre  sa  place 
dans  la  collection.  Faire  entrer  dans  le  cadre  d'un  demi-tome  Le 
Christianisme,  les  Bai'bares,  Mérovingiens  et  Carulingiens  ~,  en  tout 
plus  de  cinq  siècles  d'histoire  de  France,  une  moitié  du  moyen 
âge,  c'était,  à  coup  sûr,  un  problème  fort  ardu,  que  la  réparti- 
tion de  la  matière  entre  trois  collaborateurs  ne  pouvait  que  com- 
pliquer encore.  11  a  donc  fallu  se  résigner  à  des  sacrifices  péni- 
bles, que  les  auteurs  ont  réduits,  sans  doute,  au  minimum.  Les 
origines  et  les  progrès  des  Pippinides  ont  été  fort  négligés. 
Les  Carolingiens,  du  reste,  ont  été  les  principales  victimes  du 
manque  d'air  et  d'espace.  C'est  faute  d'espace,  évidemment,  que 
M.  K.  a  sacrifié,  —  et  peut-être  un  peu  plus  qu'il  ne  convenait 


L  T.  V,  1  :  Les  guerres  d'Itn/ic,  Ik  Frcini-c  sons  Clun-h's  VI II, 
Louis  XII  et  François  I"  (1  IU2-1.J-17);  t.  V,  2  :  Lu  lullc  enliw  lu  untison 
d' Autriche,  bi  France  sous  Henri  II  (1547-1.%U)  ;  Paris,  lliiclR'ltc,  rjdl!. 
1904,  2  vol.  in-H"  obi.  d(^  y',)B  et  880  pages. 

2.  T.  II,  2,  Pai-is.  Hachette;  iii-8"  obi.  de  111  payes. 


420  ANNALES    DU    MIDI. 

—  les  idées  aux  faits.  Car,  si,  dans  ce  volume,  certains  points 
essentiels  —  par  exemple  l'origine,  la  nature  et  l'évolution  de 
l'idée  impériale  chez  les  Carolingiens  -  ne  se  dégagent  guère, 
M.  K.  a  donné  ailleurs  la  preuve  que  les  doctrines  politiques  de 
la  société  franque  l'intéressent  très  vivement. 

-  La  thèso  française  du  même  M.  Kleinclausz  a  justement 
pour  titre  L'Empire  Carolingien,  ses  origines  et  ses  iransfo7-ma- 
lions  ^.  C'est  un  essai  de  synthèse  sur  «  la  manière  dont  l'empire 
carolingien  évolue,  se  transforme  et  finalement  disparaît,  après 
une  sorte  d'apothéose  dont  l'imagination  populaire  fit  tous  les 
frais  ».  M.  K.  a  écrit  des  pages  excellentes  sur  la  survivance  de 
l'idée  d'empire  en  Occident  et  sur  les  circonstances  dans  les- 
quelles s'accomplit  le  grand  événement  de  800.  La  lutte  des  par- 
tis sous  Louis  le  Pieux  a  été  vue,  en  revanche,  un  peu  confusé- 
ment, probablement  parce  que  M.  K.  a  eu  trop  de  confiance  dans 
des  sources  partiales,  telles  que  l'Epitaphium  Bosenii  du  pam- 
phlétaire Paschase  Radbert  et  les  traités  de  l'archevêque  publi- 
ciste  Agobard.  La  suite  de  l'ouvrage  est  pleine  d'idées  person- 
nelles, partant  très  contestables.  Par  exemple,  M.  K.  envisage 
le  couronnement  de  Charles  le  Chauve,  en  873,  comme  une  «  ré- 
volution »  qui  aurait  eu  pour  effet  de  substituer  à  un  empire 
franc,  dont  le  centre  était  Aix-la  Chapelle,  un  empire  italien  avec 
Rome  pour  capitale  :  il  est  douteux  que  cette  interprétation  des 
documents  soit  jamais  adoptée  par  la  critique.  Mais  n'est-ce  pas 
justement  l'intérêt  propre  des  ouvrages  très  généraux  que  de 
provoquer  le  débat  sur  des  points  essentiels? 

—  En  même  temps  que  l'ouvrage  de  M.  Kleinclausz,  parais- 
sait la  thèse  de  M.  Déprez  sur  les  Préliminaires  de  la  guerre  de 
Cent  ans"^,  ouvrage  d'une  inspiration  toute  différente,  et  qui,  s'il 
apporte  des  éléments  de  discussion,  les  présente  sous  la  forme 
éminemment  positive  de  documents  et  de  faits  nouveaux.  Ce 
n'est  point  que  l'auteur  se  contente  d'accumuler  les  matériaux 
extraits  par  lui  des  archives  de  Rome  et  de  Londres,  Le  livre,  en 
effet,  comporte  une  idée  maîtresse  qui  ne  manque  point  d'inté- 
rêt. M.  D.  professe  que  la  guerre  de  Cent  ans  a  eu  une  origine 

1.  Paris,  Hachette,  19U2  ;  gr.  in-8"  do  xvi-611  pages. 

2.  Les  Préliniinaires  de  la  guerre  de  Coït  ans;  la  Papauté,  la 
France  et  V Angleterre  (1328-1343).  Paris,  Fontemoing,  1902;  in-8>' de  xiii- 
451  p.  (Biblioth.  des  Éc.  d'Athènes  et  de  Rome,  fasc.  86.) 


CHRONIQUE.  421 

méridionale,  puisqu'elle  a  eu  son  point  de  départ  dans  la  situa- 
tion inextricable  créée  en  Guyenne  par  le  traité  de  Paris,  de 
sorte  qu'Edouard  III  aurait  résolu  la  difficulté  en  transportant  la 
lutte  sur  un  terrain  nouveau,  c'est-à-dire  en  engageant,  au  lieu 
d'un  conflit  de  vassal  à  suzerain,  un  conflit  de  deux  prétendants 
au  titre  de  roi  de  France.  Cette  idée,  qui  mérite  assurément 
d'être  retenue,  est  peut-être  moins  apparente  dans  le  livre  que 
dans  un  compte  rendu.  C'est  que  M.  D.  considère  comme  son 
premier  devoir  de  fournir  au  lecteur  toutes  les  données  qu'il 
tient  de  sa  patiente  enquête,  et  il  ne  sacrifie  jamais  aucun  fait 
positif  au  souci  de  mettre  mieux  en  lumière  sa  conception  per- 
sonnelle. Mais  si  la  lecture  du  livre  est,  à  certains  moments,  dif- 
ficile, en  raison  de  la  richesse  même  des  détails,  —  en  raison 
aussi  d'un  dédain  visible  et  voulu  de  tous  les  artifices  de  com- 
position, même  de  ceux  qui  passent  pour  les  plus  légitimes.  — 
la  valeur  du  volume,  en  tant  qu'oeuvre  d'érudition,  demeure  en- 
tière; il  fait  certainement  honneur  à  la  collection  qui  l'a  accueilli. 

—  C'est  aussi  sous  forme  de  thèse  de  doctorat  es  lettres  que 
M.  CoMBET  a  traité  de  Louis  XI  et  le  Saint-Siège  \  contribution 
fort  importante  à  l'histoire  d'une  période  1res  étudiée  en  ce  mo- 
ment. Grâce  à  l'examen  attentif  des  documents  inédits,  et  no- 
tamment des  documents  italiens,  M.  C.  a  fait  un  exposé  métho- 
dique, précis  et  clair  des  relations  de  Louis  XI  avec  le  Pape, 
chef  de  l'Église  et  souverain  temporel  :  relations  complexes, 
parce  qu'elles  tiennent  à  la  {oi<.  à  la  politique  religieuse  et  à  la 
diplomatie  active  et  changeante  du  règne. 

—  Malgré  ses  1044  pages,  la  thèse  de  M.  Dupont-Ferrier  sur 
les  Institutions  bailliagères^  est  moins  énorme  qu'il  ne  semble- 
rait au  premier  abord,  car  on  en  peut  défalquer  comme  illisibles 
les  deux  tiers  :  deux  appendices,  un  index  alphabétique  et  les 
notes,  un  déluge  de  notes  qui  se  succèdent  à  raison  de  dix, 
quinze  et  jusqu'à  vingt  cinq  par  page,  la  plupart  simples  réfé- 
rences, consistant  en  chiffres.  Reste  pour  le  texte  la  valeur  de 
300  pages  environ.  Ces  pages,  à  leur  tour,  ne  se  prêtent  à  la 

1.  Paris,  Hachette,  19U3;  in-8»  de  18-xxmii-32()  paires. 

2.  Les  officiers  ivi/cmx  des  bailliages  et  sihii'cluiussées  et  les  insti- 
tutions nioyiarchiques  locales  en  France  à  la  fi»,  du  moyen  à(je.  Paris, 
Bouillon,  1902;  1  vol.  in-S"  de  xxxiv-lU44  pages.  (IJibl.  de  l'Ec.  des  Hautes 
Etudes,  fascic.  145.) 


422  ANNALES    DU    MIDI. 

lecture  que  partielloinent,  à  cause  des  longues  énumérations  — 
où  chaque  mot  apporte  avec  lui  sa  note  —  qui  viennent  souvent 
arrêter  et  rebuter  le  lecteur.  Au  denfieurant,  livre  conçu  comme 
un  manuel,  sorte  de  Hiindbuch  analogue  à  celui  de  Mommsen  et 
de  Marquardt.  Il  a  les  défauts  et  les  qualités  d'un  précis  :  la 
rectitude  uniforme  du  plan,  prévu  mais  commode,  qui  per- 
met de  trouver  aisément  dans  un  vaste  ensemble  le  rensei- 
gnement désiré;  chaque  chapitre  se  termine  par  une  conclusion 
en  règle;  à  plus  forte  raison  chaque  livre  a-t-il  la  sienne,  qui 
combine  et  qui  résume  les  conclusions  de  détail. 

Voici  à  quelles  idées  générales  M.  D.-F.  aboutit.  Bailliages, 
sénéchaussées  et  leurs  subdivisions  étaient  des  circonscriptions 
mal  définies,  d'ailleurs  instables,  très  complexes  en  raison  de 
leurs  origines  féodales  et  de  leur  lent  développement;  elles  sont 
allées  augmentant  en  nombre  et  diminuant  d'étendue.  Chacune 
reçut  un  corps  d'officiers  de  plus  en  plus  nombreux,  stables, 
vivant  moins  de  leurs  gages  que  d'abus  dont  la  royauté  profitait 
aussi.  Avec  eux.  à  la  fin  du  moyen  âge.  «  le  fonctionnarisme 
local  est  né  ».  L'organe  principal  est  moins  le  bailli  ou  le  séné- 
chal que  le  conseil  qui  les  assiste,  assemblée  délibérante  for- 
mée d'officiers,  mais  accueillant  aussi  d'autres  personnages, 
avocats,  gradués...  A  la  fin  du  xv*  siècle,  ces  officiers  n'ont  plus 
de  troupes  à  convoquer,  sinon  le  ban  et  l'arrière-ban,  dès  lors 
privés  d'importance  ;  encore  moins  les  conduisent-ils;  mais  ils 
les  inspectent,  administrent  et  approvisionnent.  Comme  l'armée 
monarchique,  les  finances  nouvelles,  fondées  sur  l'impôt,  leur 
ont  échappé;  le  produit  du  domaine  qu'ils  administrent  n'est 
plus  qu'une  goutte  d'eau  dans  le  budget  de  Louis  XI.  Mais  ce 
sont  eux  qui  transmettent  et  exécutent  les  mandements  émanés 
du  roi,  qui  maintiennent  la  paix  publique  et  l'ordre  social,  eux 
qui  rendent  la  justice  en  première  instance,  parfois  en  appel,  et 
voilà  leur  essentielle  attribution  :  ils  ont  su  l'accroître,  surtout 
au  xiiF  siècle,  et  d'autant  plus  qu'ils  en  tiraient  leur  subsis- 
tance. Des  fonctionnaires  qui  avaient  presque  tous  acheté  leur 
charge,  qui  la  faisaient  valoir  comme  un  bien  de  rapport,  ne 
devaient  pas  hésiter  h  entrer  en  lutte  contre  les  pouvoirs  féo- 
daux, car  leur  intérêt  sur  ce  point  se  confondait  avec  celui  de 
leur  maître.  Ce  «quatrième  État,  recruté  dans  les  trois  autres», 
a  conduit  le  pays  vers  l'absolutisme. 

Certes,  ces  résultats  n'ont  rien  d'imprévu;  ils  étaient  acquis 


CHRONIQUE.  423 

d'avance'.  Est-ce  à  dire  que  l'ample  enquête  et  l'énorme  effort 
de  M.  D.-F.  aient  été  vains?  11  serait  de  mauvais  goût  de  le  pré- 
tendre. Son  livre  vaut  par  l'exacte  connaissance  d'une  foule  de 
détails  qui  nous  échappaient.  Ses  recherches,  d'une  précision 
rigoureuse,  se  sont  étendues  à  toute  la  France  de  la  fin  du 
xve  siècle.  Elles  l'amènent  à  conclure  que,  seuls  alors,  la  Pro- 
vence et  le  Dauphiné  conservaient  des  institutions  bailliagères 
originales,  d'une  originalité  d'ailleurs  décroissante  par  assimi- 
lation avec  celles  du  royaume  auquel  ces  pays  avaient  été  rat- 
tachés. Aussi  leur  a-t-il  consacré  les  études  particulières^  vrai- 
ment excellentes,  qui  remplissent  son  livre  IV  (pp.  615-765). 

Une  réserve  pourtant.  Que  viennent  faire,  k  propos  d'institu- 
tions bailliagères.  les  renseignements  que  M.  D.-F.  a  prodigués 
sur  les  gouverneurs?  Passe  encore  pour  le  gouverneur  de  Pro- 
vence qui,  depuis  1493.  unit  à  sa  charge  celle  de  grand  sénéchal. 
Mais  les  autres,  les  gouverneurs  qui  avaient  dans  leur  ressort 
plusieurs  bailliages  ou  sénéchaussées  (celui  de  Languedoc  jus- 
qu'à sept)?  Est-ce  le  sous-titre  énoncé  plus  haut  :  Inslilulions 
monarchiques  locales,  qui  justifiera  leur  introduction?  Par 
contre,  nous  signalerons  une  lacune  assez  grave.  Quelles  étaient 
les  relations  des  officiers  bailliagers  avec  leurs  supérieurs  hié- 
rarchiques? En  particulier,  comment  étaient-ils  surveillés  et 
contrôlés?  M.  D.-F.  a  négligé  de  le  dire. 

—  Le  Manuel  d'archéologie  française  de  M.  C.  Enlart^  ne  jus- 
tifie guère  son  nom.  Il  n'a  du  vrai  manuel  ni  le  caractère  som- 
maire, ni  les  divisions  tranchées;  les  idées  générales  n'y  appa- 
raissent pas  non  plus  assez  nettement  et  n'exercent  pas  sur 
l'exposition  une  prépondérance  assez  décisive.  On  ne  saurait 
mettre  aux  mains  des  débutants  ce  vaste  répertoire  de  faits.  Mais 
il  est  des  plus  remarquables  par  l'ampleur  et  la  profondeur  des 


1.  M.  d'Herbûiuez  a  écrit,  à  propos  du  livre  de  'SI.  D.-F.  :  «  Il  nous 
sera  permis  de  dire  qu'il  a  récemment  décoiivert  ici  le  Conseil  de  bail- 
liage ou  de  sénéchaussée.  »  (Rev.  des  que.s-tio>i.s  histor.,  nouv.  sér.. 
t.  XXX,  p.  138).  C'est  une  erreur.  M.  Dognon  l'avait  découvert  avant  lui; 
il  en  a  décrit  brièvement  l'organisation  {In.ftit.  de  Languedoc,  p.  336 
et  sqq.).  Il  est  vrai  que  M.  D.-F.,  qui  cite  très  fréquemment  l'ouvrage  de 
M.  Dognon,  a  omis  de  le  citer  sur  ce  point  essentiel  de  sa  thèse. 

2.  Depuis  les  temps  mérovingiens  jusqu'à  la  Renaissance.  Deux  tomes 
ont  paru  :  I.  Arcliitoctuie  religieuse.  II.  Architecture  civile  et  militaire. 
Paris,  Picard,  Wn  et  ISIOl;  2  vol.  in-H"  de  .\x-81()  et  xvT-8nO  pages. 


424  ANNALES    DU    MIDI. 

recherches.  M.  E.  ne  les  a  pas  limitées  k  la  France  propre;  il  a 
étudié  chez  nous  la  pénétration  de  l'architecture  étrangère,  et 
hors  de  France,  en  Orient,  les  productions  du  génie  français.  Il 
a  essayé  aussi  de  distinguer  les  unes  des  autres  les  écoles  pro- 
vinciales :  ainsi,  dans  la  période  romane  de  l'architecture  reli- 
gieuse, les  écoles  de  Languedoc,  d'Auvergne,  de  Provence,  pour 
ne  nommer  que  celles  du  Midi.  La  distinction,  à  vrai  dire,  est 
souvent  malaisée  et  prête  fort  à  l'arbitraire.  On  consultera  avec 
grand  profit  les  longues  bibliographies  qui  suivent  chaque  cha- 
pitre et  les  listes  de  monuments,  tlien  n'est  laissé  de  côté,  ni 
l'architecture  navale,  ni  celle  des  maisons  publiques  (Narbonne, 
Pézenas,  etc.).  Signalons  à  la  fin  du  t.  II  un  index  alphabétique 
considérable  et  presque  à  toutes  les  pages  d'excellentes  illustra- 
tions. 

—  Nous  faisons  tous  nos  efforts  pour  signaler  ici.  à  mesure  de 
leur  apparition,  les  ouvrages  intéressant  directement  la  langue 
ou  la  littérature  provençales.  Nous  croyons  n'avoir,  dans  ces 
dernières  années,  rien  omis  d'essentiel.  Mais  nous  devons  men- 
tionner quelques  livres  qui,  sans  être  consacrés  spécialement  au 
provençal,  lui  font  une  place  plus  ou  moins  grande.  Telle  est 
y  Einfuhrung  in  das  SlucUum  der  romanischen  Spt'achioissenschaft 
de  M.  Meyer-Lûbke"  (le  titre  du  livre  en  dit  assez  l'objet),  où  le 
provençal  est,  au  reste,  bien  moins  largement  représenté  que 
d'autres  langues,  le  français  ou  l'italien  par  exemple;  tel  aussi 
V Allas  linguistique  de  la  France  par  MM.  Gilliékon  et  Edmont^, 
oeuvre  immense  oîi  l'on  pourra  relever  quelques  inexactitudes 
de  fait,  quelque  incertitude  dans  la  méthode 3,  mais  qui  n'en  est 
pas  moins  d'une  importance  capitale  et  a  l'inappréciable  avan- 
tage de  nous  renseigner  sur  une  foule  de  dialectes  jusqu'ici  tota- 
lement négligés. 

Les  dissertations  de  Tappolet  sur  les  noms  de  parenté,  de  Ott 
sur  les  noms  de  couleur  ont  montré  quels  divers  genres  d'in- 
térêt pouvaient  présenter  les  travaux  d'onomastique  comparée; 
nos  lecteurs  s'en  feront  une  idée  exacte  par  le  compte  rendu^ 
imprimé  plus  haut  (p.  373).  du  livre  de  M.  Zauner.  Deux  études 


1.  Heidelberg,  Wiiiter,  1901;  in-S»  do  X--221  p. 

2.  Paris,  Cliampion,  (1901  s.s.).  168  carte.s  sont  publiées,  on  10  livi-aisons. 

3.  Voy.  le  compte  rendu  de  A.  Thomas  dans  le  Jouni  il  '/es  S"rn//ts\ 
févr,    1904. 


CHRONIQUE.  425 

de  ce  genre  ont  récemment  paru,  où  les  dialectes  méridionaux 
ont  été  largement  exploités,  l'une,  par  M"«  C.  Hiirlimann,  consa- 
crée au  seul  mot  aqua  et  à  ses  dérivés,  surtout  dans  les  dialectes 
français,  franco-provençaux  et  italiens*,  l'autre  par  M.  C.  Merlo 
aux  noms  des  saisons  et  des  mois,  dans  les  dialectes  latins,  ita- 
liens, franco  provençaux  et  provençaux  2;  cette  dernière,  par  la 
quantité  des  matériaux  recueillis  et  l'excellence  de  la  méthode 
employée,  se  recommande  particulièrement  à  l'attention;  nous 
ferons  au  reste  notre  possible  pour  y  revenir. 

Le  IT"^  fascicule  du  Supplement-Wœrterbuch  de  M.  Levy^  vient 
de  paraître.  Il  va  jusqu'à  la  fin  de  la  lettre  L.  On  peut  donc  con- 
sidérer comme  prochain  l'achèvement  de  cet  incomparable  réper- 
toire. Nous  croyons  savoir  que.  dès  qu'il  sera  terminé,  M.  L.  en 
fera  paraître  une  édition  réduite,  de  dimensions  commodes  et 
de  prix  accessible  à  toutes  les  bourses.  L'ignorance  de  l'ancien 
provençal  sera  dès  lors  sans  excuse. 

J.  Brissaud,  J.  Calmette,  P.  Dognon.  A.  Jeanroy 
et  P.  Maria. 


Chronique  de  la  Marche  et  du  Limousin. 

La  Société  des  archives  historiques  du  Limousin  vient  de  con- 
fier à  M.  Clément-Simon  le  soin  de  composer  le  tome  IX  de  la  sec- 
tion ancienne.  Il  y  a  lieu  d'espérer  que  ce  volume  paraîtra 
prochainement. 

La  même  Société  a  chargé  M.  Fray-Fournier  de  préparer  les 
fascicules  VII  et  VIII  de  la  section  moderne  :  l'un  sur  la  situa- 
tion administrative  et  territoriale  du  département  de  la  Haute- 
Vienne  pendant  la  Révolution,  l'autre  sur  sa  situation  politique. 

Cette  Société  est,  croyons-nous,  la  seule  en  province  qui  fasse 
place  dans  ses  collections  aux  documents  de  l'époque  contem- 
poraine depuis  1790.  Aussi  bien,  les  publications  relatives  à 
l'histoire  de  la  période  constitutionnelle  se  sont-elles  multi- 
pliées à  Limoges  depuis  une  quinzaine  d'années.  On  a  vu  paraî- 
tre successivement  une  Analyse  des  délibérations  manuscrites  du 

1.  /firich,  l',}U;î,  diss.  de  doctorat. 

2.  Turin,  Lœschcr,  1904;  in-8°  de  284  p. 
:{.  Leipzi;:,  Reislantl,  is;)l-in04. 


426  ANNALES    DU    MIDI. 

Conseil  général  de  la  Haute-Vienne  de  1800  à  1839,  puis  les 
Extraits  des  rapports  des  Préfets  de  la  Haute-  Vienne  au  Conseil 
général  de  1816  à  1837.  Depuis  quelques  mois  nous  possédons 
les  tables  analytiques  des  quatre  fascicules  qui  forment  VAnalyse 
des  actes  et  délibérations  de  C administration  municipale  de  Litno- 
ges,  de  mai  1790  à  décembre  1878.  Les  bases  de  toute  l'histoire 
locale  au  xix"  siècle  sont  donc  maintenant  posées. 

Une  des  conséquences  de  ce  mouvement  d'études  modernes, 
c'est  la  curiosité  que  manifeste  le  public  pour  ce  passé  si  récent 
encore.  Il  ne  sera  pas  déplacé  de  noter  ici  que  cette  curiosité  a 
reçu  une  large  satisfaction  dans  le  nouvel  Annuaire  de  la  Haute- 
Vienne  de  la  librairie  Duraont.  La  seconde  «  année  »  marque 
encore  un  progrès  au  regard  de  la  première.  On  y  trouve  sur  les 
principales  institutions  départementales  de  courtes,  mais  subs- 
tantielles notices,  des  dates  de  fondation  pour  les  autres,  des 
listes  exactes  des  hauts  fonctionnaires  et  des  chefs  de  service 
depuis  1800.  Le  vieil  Annuaii'e  limousin  de  la  maison  Ducour- 
tieux  conserve  sur  un  autre  point  ses  avantages,  en  accueillant, 
dans  un  appendice  qui  compte  plusieurs  feuilles,  une  foule  de 
petites  communications  historiques  qu'il  serait  dommage  de 
voir  se  perdre  dans  les  journaux  locaux. 

M.  J.-M.-L.  Faure  a  consacré  à  {'Histoire  de  l'octroi  de  Limoges 
de  1370  à  1900  un  fort  volume  de  476  pages  (Limoges,  Ducour- 
tieux,  1902),  dans  lequel  la  partie  moderne  mérite  grande  con- 
sidération. 

M.  Louvrier  de  Lajolais,  directeur  du  musée  national  Adrien- 
Dubouché  de  Limoges,  vient  de  donner  au  public  le  Catalogue 
des  peintures,  sculptures,  etc.,  de  cet  établissement.  La  section 
archéologique  est  malheureusement  fort  réduite. 

Le  Courrier  du  Centre,  des  8  et  9  septembre  derniers,  publiait 
sous  ce  titre  :  Une  exposition  à  Limoges  en  1697,  deux  longs 
articles  où  étaient  énumérés  tous  les  produits  de  l'industrie 
limousine  de  ce  temps.  On  avouait  au  dernier  paragraphe  que 
cette  énumération  était  hypothétique,  aucune  exposition  n'ayant 
eu  lieu  en  Limousin  avant  le  xix«  siècle.  Je  crains  bien  que  plus 
d'un  lecteur  ne  se  soit  laissé  prendre  à  ce  procédé  joyeux,  et 
que  nous  ne  lisions  un  jour,  dans  quelque  encyclopédie  nouvelle, 
que  Limoges  a  eu  en  1697  sa  petite  exposition  industrielle.  Et 
pour  extirper  cette  erreur,  il  faudra  contredire,  discuter,  criti- 
quer, s'échauffer  peut-être.  Pour  cette  unique  raison,  le  procédé 


CHRONIQUE.  427 

du  collaborateur  du  Courrier  du  Centre  nous  paraît  condamnable, 
La  Société  archéologique  du  Limousin  vient  de  mettre  en  dis- 
tribution le  Pouillè  de  l'ancien  diocèse  de  Limoges  édité  par 
M.  l'abbé  A.  Lecler.  Ce  n'est  point  un  pouillé  officiel,  émané  de 
l'administration  diocésaine,  comme  nous  en  possédons  plusieurs, 
mais  une  compilation  historique  du  laborieux  abbé  Nadaud 
(f  1775).  Cette  publication,  sur  laquelle  nous  reviendrons  quelque 
jour,  semble  devoir  rendre  plus  d'un  service. 

M.  Franck  Delage,  professeur  de  rhétorique  au  lycée  Gay- 
Lussac  de  Limoges,  a  entrepris  de  retracer  l'histoire  du  mouve- 
ment intellectuel  en  Limousin,  du  xvi«  siècle  au  xv)!!»",  en 
s'inspirant  du  programme  que  M.  Lanson  a  tracé  dernièrement 
dans  la  Revue  d'histoire  moierne.  Nous  aurons  occasion  de  re- 
venir sur  ce  travail  qui  ne  pouvait  tomber  en  de  meilleures 
mains. 

Alfred  Leroux. 


LIVRES  ANNONCÉS  SOMMAIREMENT 


AcHARD  (A.),  LouBARESSE  (P.).  Tartière  (A.)  et  Brisson  (A.). 
La  commune  de  Sainl-D/e?'  cl' Auvergne  el  les  communes  environ- 
nantes. Clermont,  Raclot,  1901;  petit  111-4°  de  113  pages.  — 
Bonne  monographie  communale,  qui  a  obtenu  une  médaille 
d'argent  à  l'Exposition  Universelle  de  1900.  Elle  contient  des 
détails  intéressants  sur  la  vie  agricole.  La  partie  archéologique, 
rédigée  à  l'aide  de  livres  de  seconde  main,  est  moins  curieuse. 
Dans  la  partie  historique  est  transcrit  un  accord  conclu  en 
1403,  entre  Louis  de  Montboissier  et  huit  cents  de  ses  vas- 
saux, pour  le  règlement  des  tailles.  Ancienne  coutume  de 
la  pique  :  mendicité  exercée  à  l'aide  de  faux  certificats  d'indi- 
gence. Il  y  a  des  traces  de  populations  juives  dans  le  pays. 
Les  auteurs  parlent  d'une  université  juive  (communauté?)  exis- 
tant à  Clermont,  au  faubourg  de  Fontgiève,  dès  le  vie  siècle. 
Saint  Avit,  évêque  de  Clermont,  bannit  les  juifs  de  sa  cité  épis- 
copale.  G.  Desdevises  du  Dezert. 

Bernet-Rollande  (J.).  Vesprit  public  et  les  élections  dans  la 
Basse- Auvergne  en  1789.  Paris.  Jouve,  1903;  in-S"  de  184  pages. 
—  Résumé  des  ouvrages  déjà  publiés  sur  la  question,  avec  un 
appendice  intéressant  contenant  quinze  lettres  inédites  de 
Dubreul  à  Romme,  qui  proviennent  des  archives  particulières 
de  M.  de  Vissac.  G.  Desdevises  du  Dezert. 

Berret  [V.) '^Contes  el  légendes  du  Bauphiné.  Grenoble.  Gra- 
tier  et  Rey,  1903;in-8"'  de  251  pages.  —  M.  B.  ne  s'est  pas  pro- 
posé d'apporter  sa  contribution  à  un  recueil  du  folklore  dauphi- 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  429 

riois;  il  n'a  pas  voulu  faire  œuvre  d'éditeur,  mais  de  conteur. 
Des  légendes  populaires  il  ne  prend  que  le  thème  et  ne  se  fait 
pas  scrupule  de  le  modifier  au  gré  de  sa  fantaisie.  Ses  quinze 
récits  lui  sont  une  occasion  de  faire  revivre  des  impressions 
d'enfance  et  de  jeunesse,  d'exprimer  son  amour  du  terroir  natal 
dont  il  décrit  en  artiste  le  pittoresque  si  varié.  Son  style  d'une 
grâce  simple,  qu'une  pointe  d'émotion  relève  parfois,  prête  un 
charme  nouveau  à  de  naïves  légendes  en  qui  l'on  ne  soupçonnait 
point  tant  de  poésie.  Daudet,  Theuriet.  et  plus  près  de  nous 
Ajalbert  n'ont  pas  mis  plus  d'âme  à  nous  parler  de  la  Provence, 
des  Ardennes  ou  de  l'Auvergne.  Si  le  souci  de  la  description 
juste  et  sobre  ne  quitte  pas  l'auteur,  M.  B.  ne  néglige  pas  non 
plus  de  dégager  du  conte  le  symbole  moral.  Sous  sa  plume  alerte 
toute  l'histoire  dauphinoise  revit  en  quelques  pages,  de  l'époque 
gallo-romaine  à  l'invasion  autrichienne;  et  les  diverses  régions 
dauphinoises  :  Oisans  et  Trièves,  Terres-froides  et  Grésivaudan. 
y  sont  dépeintes  avec  un  égal  bonheur  d'expression.  Pas  un  de 
ces  petits  récits  qui  ne  plaise;  certains  même,  Phidylé,  la  pre- 
mière dauphine,  la  cloche  du  Paladru,  l'or  de  la  Lune  ne  sem- 
blent pas  éloignés  de  la  perfection.  Aussi  n'est-il  pas  à  craindre 
qu'il  arrive  à  l'auteur  la  même  mésaventure  qu'au  conseiller  de 
Boissieu  :  voiries  personnages  des  légendes  dauphinoises  venir 
lui  reprocher  de  les  avoir  racontées  sans  esprit  et  sans  talent. 

0.  Nigaud. 

Bertoni  (G),  l^xiove  rime  -provenzali  traite  dal  cod.  Campori. 
Pérouse,  1904;  in-S"  de  34  pages.  (Extrait  des  Studî  romanzi, 
xï"  2).  —  En  attendant  la  publication  intégrale  du  manuscrit 
Campori,  M.  Bertoni  nous  en  donne  ici  de  nouveaux  extraits': 
il  imprime  le  texte  de  dix-sept  pièces  particulièrement  intéres- 
santes et  pour  lesquelles  il  n'est  nullement  indifférent  de  con- 
naître la  leçon  d'un  nouveau  manuscrit.  Voici  l'indication  de  ces 
pièces,  avec  le  renvoi  à  la  liste  de  Bartsch,  que  M.  B.  n'a  pas 
cru  devoir  donner;  je  signale  en  passant,  plus  exactement  que 
ne  l'a  fait  l'éditeur,  les  particularités  qui  recommandent  à  notre 
attention  la  leçon  nouvelle. 

Peire  d'Auvergne,  17;  attribuée  ici  à  «  Marcliabrus  »;  un  envoi 


1.  Les  pi'nuiiers  oiiL  [nira  duns  les  Stad'i.  di  [Uolo(jia  roina/iza,  Vlli, 
421-8i.  Cf.  An/udes,  XllI,  l:W. 


430  annai.eS  du  midi. 

nouveau.  —  Raimonde  Miraval,  13;  un  envoi  nouveau.  —  Ram- 
baut  de  Vaqueiras,  4  et  16  ;  la  première  pièce  est  le  fameux  des- 
cort  en  cinq  langues;  texte  médiocre.  —  Uc  do  Pena,  2.  —  Peire 
Bremon,  13;  l'auteur  est  certainement  Cercamon.  qui  s'y  nomme 
et  auquel  la  pièce  est  ici  attribuée.  —  Bon.  Calvo,  17;  c'est  le 
sirvcntés-descort.  —  Anon.  28:  attribuée  ici  à  «  Guilliem  de 
Bergadam  »,  (avec  une  strophe  nouvelle) i.  —  B.  de  Born,  Il  et 
13  bis:  la  seconde  de  ces  pièces,  inconnue  jusqu'ici,  est  une 
imitation  de  la  sextine  d'Arnaut  Daniel,  où  esl  vivement  attaqué 
un  Adhémar,  qui  doit  être  Adhémar  V  de  Limoges,  et  qui  com- 
]jle  d'éloges  un  «  prévôt  ».  oncle  du  pré'3édent,  personnage  qui 
apparaît  pour  la  première  fois  dans  les  œuvres  de  B.  de  Born. 
—  Comte  de  Poitiers,  1  ;  attribuée  ici  à  Jaufré  Rudel;  quelques 
leçons  excellentes.  —  P.  Cardinal,  57;  un  envoi  nouveau.  — 
Ricaut  Bonomel,  1  ;  identique  à  un  éloquent  sirventés  (439,  1) 
attribué  à  un  «  cavalier  del  Temple»,  dont  le  ms.  Campori  nous 
fait  connaître  le  nom  —  Bertrand  de  Paris,  1  ;  c'est  une  énuméra- 
tion  bien  connue  de  héros  épiques  ou  romanesques.  —  Marcabrun, 
45;  tenson  avec  Jori  ;  deux  couplets  nouveaux.  —  Gaucelm,  4  et 
5;tenson  bilingue  avec  le  comte  de  Bretagne. 

En  guise  d'introduction,  M.  B.  nous  donne  quelques  renseigne- 
ments précis  sur  ce  Simon  del  Nero  qui  fit  exécuter  par  Jacques 
Teissier  la  copie  du  ms.  de  Bernart  Amoros.  H  montre  que  c'est 
Simon  lui-même  qui  a  pris  la  peine  de  corriger  cette  copie  en  la 
collationnant  sur  l'original,  et  qu'il  a  au.?si  corrigé  en  plusieurs 
passages  la  copie  de  F  qui  se  trouve  aujourd'hui  à  la  Riccar- 
diana.  A.  Jeanroy. 

BoNNEFOY  (G.).  Histoire  de  V administration  civile  dans  la  pro- 
vince d'Auvergne  et  le  département  du  Puy-de-Dôme.  Tomes  II 
et  III.    Paris,    Lcchevalier,    1900-n02;  2  vol.  in-8"  de  vi-640  et 


1.  L'attribution  est  vraisciublixblo  :  ou  trouve  dans  notre  pièce  et  dnus 
une  chanson  qui  est  sûrement  de  Berj^fadan  la  même  rodomontade,  expri- 
jnéc  en  termes  analogues  (dans  notre  pièce,  le  v.  5  de  la  sir.  V  doit  être 
rétabli  :  derocarni  [d'après  0]  davan  totz  en  i'crbdtfje;  cf.  Talans  m'es 
près,  str.  III .  nsalll  fora  el  pradal  ..  derocarni  al  car)tal).  —  \Ja\\icnv  de 
notre  pièce  dit  qu'il  doit  accompagner  un  roi  sur  les  bords  de  la  Garonne; 
il  no  peut  guère  s'agir  que  d'Alfonse  d'Aragon  et  de  l'expédition  qui 
l'amena,  dans  l'été  de  1181,  sous  les  murs  de  Toulouse  (//(a7.  de  Lang.. 
VI,  91):  on  ne  peut  songer  à  celle  que  dirigea  en  118.S  Richard  ('œiir-de- 
Lion  (Ihid.,  128),  ce  prince  n'ayant  pas  alors  le  titre  de  roi. 


LIVRES   ANNONCES    SOMMAIREMENT.  431 

1004  pages.  —  Le  premier  de  ces  volumes  contient  le  résumé  des 
délibérations  du  Conseil  général  du  département  depuis  1790 
jusqu'en  1839,  et  présente  un  tableau  de  la  vie  locale  pendar.t 
un  demi-siècle,  de  l'Assemblée  constituante  au  ministère  Guizot. 
Le  second  volume  résume  les  mêmes  délibérations  de  1840  à  1900, 
mais  il  est  moins  nouveau  puisque  les  sessions  du  Conseil  géné- 
ral forment  chaque  année,  depuis  1837,  l'objet  d'une  publication 
spéciale.  —  Ces  deux  ouvrages  constituent  un  répertoire  com- 
mode de  l'histoire  administrative  du  département  depuis  un 
siècle,  et  permettent  d'y  suivre  l'histoire  des  partis  et  le  déve- 
loppement de  l'esprit  public.  G.  Desdevises  du  Dezert. 

BouDKT  (M.)  et  Grand  (R.).  Etude  historique  su?'  les  épidémies 
de  peste  en  Haute- Auvergne  (xivb-xviii''  siècles).  Paris,  Picard. 
1902;  in-8"  de  133  pages.  —  Savante  étude,  parfaitement  docu- 
mentée et  remplie  de  détails  précis  et  intéressants  sur  les  ra- 
vages des  épidémies,  les  mesures  de  police  édictées  par  les  mu- 
nicipalités, les  observations  faites  parles  médecins,  les  remèdes 
ordonnés  par  eux,  les  maux  et  désordres  de  tout  genre  qui  accom- 
pagnaient ces  calamités.  Citons  en  particulier  les  pages  relatives 
à  Claude  de  Chauliac.  médecin  du  xiv  siècle,  qui  fut  atteint  de 
la  peste  buboneuse  et  en  guérit,  et  l'histoire  du  consul  d'Aurillac, 
Hérault,  qui,  absent  de  la  ville  au  moment  où  le  fléau  se  déclara, 
revint  s'y  enfermer  et  ne  cessa,  pendant  six  mois,  de  le  com- 
battre par  tous  les  moyens  en  son  pouvoir. 

G.  Desdevises  du  Dezert. 

BouLENGER  (J.).  Les  Protestants  à  Nimes  au  temps  de  VEdit  de 
Nantes.  Paris,  Fischbacher.  1903;  in-S'^  de  xviii-237  pages.  — 
Ce  livre  de  science  précise  est  écrit  d'une  façon  aisée  et  spiri- 
tuelle. Les  vues  d'ensemble,  les  traits  de  détail  vivants  et  pitto- 
resques, lui  donnent  un  agrément  auquel  les  travaux  d'érudition 
demeurent  généralement  trop  étrangers. 

Comment  se  comportait  le  gouvernement  communal  dans  les 
villes  huguenotes?  Quels  étaient  les  rapi)orts  des  réformés  avec 
les  catholiques?  Est-il  juste  de  dire  que  les  protestants  for- 
maient un  Etat  dans  l'Etat  ?  L'auteur  espère  que  sa  monographie 
contribuera  à  l'éiucidation  de  ces  trois  questions  Son  introduc- 
tion rappelle  l'oiganisation  générale  du  parti,  expose  le  plan  du 
livre  et  les  sources.  La  situation  des  pasteurs,  pauvres  et  rares, 


432  ANNALES    DU    MIDI. 

la  composition  du  consistoire  par  l'élection,  son  fonctionnement, 
ses  finances,  son  autorité  sur  les  fidèles,  encore  mal  dégagés  du 
papisme,  puisque  des  parents  protestants  préfèrent  les  Jésuites 
au  collège  pour  leurs  enfants;  la  surveillance  de  la  vie  la  plus 
intime  des  particuliers  par  le  consistoire,  dont  les  censures  ne 
seraient  plus  supportées  aujourd'hui,  et  donnent  lieu  à  des 
pages  piquantes  (pp.  84-103);  l'influence  des  assemblées  sur  le 
gouvernement  municipal,  les  rapports  avec  les  catholiques, 
empreints  de  méfiance  réciproque,  telle  est  la  matière  de  chapi- 
tres fort  intéressants.  Le  rôle  de  Henri  IV  est  finement  apprécié. 
Son  zèle  pour  la  liberté  du  culte  tomba  quand  il  fut  sur  le  trône. 

L'auteur  conclut  qu'il  existait,  dans  les  dernières  années  du 
xvi"  siècle,  à  Nimes.  «  une  sorte  de  république  calviniste  à 
l'image  de  Genève,  autonome  en  fait,  et  possédant  son  gouver- 
nement, ses  finances  et  ses  intérêts  particuliers,  opposés  à  ceux 
des  catholiques,  et  même,  peut-être,  à  ceux  des  réformés  de 
presque  tout  le  reste  de  la  France.  C'est  un  minuscule  Etat  dans 
l'Etat  ». 

Des  appendices,  des  pièces  justificatives  dont  la  plus  curieuse 
est  la  confrontation  en  consistoire  d'un  couple  accusé  de  «paillar- 
dise ».  et  une  table  des  noms  terminent  le  volume. 

E.   BONDURAND. 

BouRDETTE  (J.).  Amiules  des  Sept  vallées  du  Labéda,  partie  mon- 
tagneuse de  V  arrondissement  d'Argelès  {Hautes-Pirénèes[^ic\).  Tou- 
louse, Privât.  1898.  1899;  in-8".  T.  III,  de  iv-627  pages;  t.  IV,  de 
XIII -690  pages.  --  Suite  et  fin  d'un  ouvrage  dont  il  a  été  déjcà 
parlé  (V.  Annales,  t.  X.  p.  392}.  Les  présents  volumes  vont  de 
1600  à  1890.  Ouvrage  fait  avec  soin,  mais  qu'il  est  fort  difficile 
d'analyser.  M.  B.  note,  en  effet,  année  par  année  tous  les  faits 
qui  intéressent  le  Labéda.  avec  l'indication  des  sources.  De  temps 
en  temps  sont  notés  les  grands  événements  nationaux,  comme 
l'avènement  de  nouveaux  rois  ou  de  nouveaux  régimes.  On  s'at- 
tendrait à  trouver  un  plus  grand  nombre  de  faits  dans  les  années 
révolutionnaires.  Les  événements  sont  souvent  accompagnés 
d'un  commentaire  fait  dans  un  esprit  que  l'on  ne  trouve  plus 
guère  aujourd'hui.  M.  B.  n'est  pas  seulement  catholique.  Il  es- 
time que  la  liberté  de  conscience  est  une  erreur;  erreur  aussi 
tout  ce  qui  restreint  l'indépendance  de  l'Eglise  vis-à-vis  de  l'E- 
tat; l'autorité  vient  de  Dieu  et  ne  réside  pas  dans  le  peuple, 


Livres  annoncés  sommairement.  43o 

l'inégalité  doit  exister  aussi  bien  dans  la  famille  que  dans  l'Iiiat. 
Donc,  depuis  la  Révolution,  la  France  marche  à  sa  ruine.  Quoi 
qu'il  en  soit,  l'ouvrage  garde  sa  valeur,  puisque  c'est  un  recueil 
de  faits  appuyés  sur  des  documents,  avec  tables  chronologiques 
des  intendants,  évêques,  préfets,  etc.,  très  utiles.  II  est  complété 
par  un  index  alphabétique  de  tous  les  noms  qu'il  contient. 

iM    D. 

BouRRET  (Cardinal).  Documents  sur  les  origmes  chrétiennes  du 
Rouergue.  Saint  Martial.  Rodez,  Carrère.  1887-1903;  in-4'  de 
476  pages.  — L'ouvrage,  resté  inachevé,  comprend  deux  parties  : 
I.  Documents  d'origine  limousine;  II.  Documents  d'origine  locale. 
La  1II«  partie  devait  contenir  \&b  Documents  d'origine  divei'se.  La 
Préface,  de  M.  l'abbé  Vialettes,  nous  avertit  que  le  cardinal  B. 
n'a  pas  voulu  faire  une  œuvre  de  polémique,  mais  une  collection 
méthodique  de  pièces  (p.  m);  le  livre  n'en  est  pas  moins  «  tout 
empreint  de  la  doctrine  de  l'école  traditionnelle  »  [ibid.).  Ce  gros 
volume  contient,  en  effet,  une  foule  de  documents  de  tout  ordre  : 
Yies.  livres  de  miracles,  actes  de  conciles,  lettres,  sermons  en 
abondance,  témoignages  tirés  des  livres  liturgiques,  des  monu- 
ments (églises,  statues,  reliques,  cloches,  etc.;,  des  traditions... 
Dans  cet  amas  confus,  grossi  au  hasard  des  lectures  ou  des 
découvertes,  presque  rien  d'inédit'.  Les  commentaires  et  discus- 
sions tiennent  une  très  large  place,  surtout  dans  la  seconde  par- 
tie, et  ont  évidemment  pour  but  de  démontrer  :  1'^  que  saint 
Martial,  disciple  du  Christ  (thèse  du  «  discipulat  »\  a  évangélisé 
l'Aquitaine  au  i"  siècle  de  notre  ère  (thèse  de  l'apostolat)  ;  2"  qu'il 
a  été  le  fondateur  de  l'Église  du  Rouergue.  Les  lecteurs  des 
Annales  savent  dans  quel  sens  la  question  de  l''.*  apostolicité»  de 
la  mission  de  saint  Martial,  a  été  définitivement  résolue-.  Nous 
nous  contenterons  d'observer  que,  dans  le  choix  et  surtout  dans 
la  critique  des  documents  qu'il  a  utilisés,  l'auteur  est  loin  d'être 


\.  Ainsi  les  docuinents  de  la  première  partie  sont  tirés  des  travaux  de 
l'abbc  Arbcllot  (pour  la  bibliographie  cf.  A.  Houtin,  La  co7itroverse  de 
l'apostolicilê  des  églises  de  Frafice  an  xix«  siècle,'^'  éd.,  Paris,  1903, 
p.  '2(;0)  ou  des  trois  vol.  in-fol.  du  P.  Bonaventure  de  Saint-Anialde  sur 
saint  Martial  (IfwB-SH). 

2.  Cf.  Annales  du  Midi,  IV,  ^89.  Abbé  L.  Ducliesno,  Sai/d  Martial 
de  Limoges,  art.  reproduit  avec  quelques  modifications  dans  les  Fastes 
épiseopaux  de  l'ancienne  Garde,  t.  II,  190U,  p.  104-117. 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVI.  28 


434  ANNALES   DU   MIDI. 

du  nombre  des  «  difficiles  »  dont  il  parle  parfois,  non  sans  quelque 
dédain.  Beaucoup  de  textes,  de  discussions  n'ont  aucun  rapport 
avec  l'objet  du  livre  :  par  exemple  les  chapitres  sur  Conques,  ses 
reliques,  qui  remonteraient  au  v«  siècle  (p.  233),  sa   chronique 
(p.  236).  dont  l'auteur  soutient  l'authenticité  contre  Desjardins'. 
Mais  c'est  un  prétexte  à  «  inductions  »  favorables  à  la  thèse  : 
«  Nous  croyons  qu'elle  (la  chronique)  offre  l'acte  de  baptême  le 
plus  ancien  de  notre  Eglise  ruthénienne  (p.  267).  »  Bien  entendu, 
des  pièces  les  plus  importantes  on  tire  des  conclusions  bien  sur- 
prenantes. L'ancienne  vie  de  saint  Martial  (postérieure  à  Grégoire 
de  Tours),  la  vie  du  même  saint  attribuée  à  Aurélien  (elle  date 
de  l'époque  des  discussions  sur  l'apostolicité  de  saint  Martial, 
x«  ou  XI»  siècle)  sont  reportées  au  vi«  siècle  (v.  p.  2  et  p.  8).  La 
seconde  pièce,  dans  sa  prétentieuse  prolixité  (24  p.  à  2  col.),  est 
muette  sur  la  fondation  de  l'Eglise  de  Rodez.  Le  cardinal  B.  con- 
clut tout  de  même  :  «  Si  nous  n'y  sommes  pas  mentionnés  nommé- 
ment, nous  le  sommes  équivalemment.  »  Les  Arvernes  assistaient 
aux  funérailles  du  saint;  or,  la  dénomination  d'Arvernes  «  sem- 
ble nous  désigner  suffisamment  »  (p.  M).  —  Adhémar  de  Cha- 
bannes  énumère  longuement  les  Eglises  fondées  par  saint  Mar- 
tial. Le  nom  de  celle  de  Rodez  «  ne  vient  pas  spécialement  sous 
sa  plume;  mais  assurément  il  avait  dû  venir  sur  sa  langue  »,  et 
la  raison  en  est  dans  le  soin  qu'il  mit  à  adresser  sa  lettre  sur  le 
concile  de  Limoges  (1028)  à  l'évêque  de  Rodez,  parce  que  ce  der- 
nier avait  pris  «  une  part  importante  aux  délibérations  de  l'as- 
semblée »  (p.  56).  Ces  exemples  dispensent  d'un  examen  détaillé. 
La  plupart  des  textes  allégués  sont  précédés  ou  suivis  de  disser- 
tations compliquées  où  abondent  les  digressions,  les  «  retours  » 
et  reprises,  les  hypothèses,  où  se  rencontrent  fréquemment  des 
propositions  comme  les  suivantes  :  «  Ce  n'est  pas  faire  une  sup- 
position bien  hardie  que  d'avancer...  »  (p.  212);  «  on  a  tiré  plus 
d'une  fois  des  conclusions  qui  ne  reposaient  pas  sur  des  prémis- 
ses plus  fondées  en  logique  »  (p.  220) ,   etc.  Les  «  conclusions  » 
n'en  sont  pas  moins  catégoriques.  Quant  aux  travaux  de  «  l'école 
historique  »  à  peine  en  nomme-ton  quelques-uns;  et  les  auteurs 
sont  qualifiés  de  «  difficiles  »,  d'«  hypercri tiques  ».  Réduit  aux 
seuls  documents,  le  livre  aurait  pu  être  utile,  à  condition  qu'une 
bonne  ordonnance  en  eût  facilité  l'usage.  Tel  qu'il  se  présente, 

1.  Cf.  Cart,  de  l'abbaye  de  Coliques,  introd..  p.  v* 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  4^5 

il  n'est  qu'un  fâcheux  exemple  de  la  faiblesse  du  système  tra- 
ditionniste.  Louis  Rigal. 

Crégut  (Abbé  R.).  Nouveaux  éclaircissements  sur  Avilacum. 
Clermont-Ferraud  ,  Bellet,  1902;  in-8o  de  113  pages.  —  Dans 
un  premier  ouvrage,  publié  en  1890,  M.  C.  avait  établi  que  la 
villa  de  Sidoine  Apollinaire  doit  être  cherchée  en  Auvergne,  à 
Aydat.  Dans  ce  nouveau  travail  il  se  propose  de  déterminer 
l'emplacement  exact  de  la  villa,  et  croit  pouvoir  la  placer  à 
Aydat  môme.  Son  mémoire  reproduit  les  textes  relatifs  à  Avita- 
cura  et  expose  et  énumôre  avec  beaucoup  d'exactitude  toutes  les 
données  du  problème.  Les  textes  bien  compris  et  bien  étudiés, 
M.  C.  se  transporte  sur  le  terrain  et  s'applique  à  démontrer 
topographiquement  l'exactitude  de  la  solution  qu'il  propose.  La 
découverte  d'un  aqueduc  romain  et  de  nombreux  restes  de  mu- 
railles semble  confirmer  pleinement  la  théorie  de  l'érudit  aumô- 
nier du  collège  Michel  l'Hospital.       G.  Desdevises  du  Dezert. 

Crégut  (Abbé  R.j.  La  Vierge  du  Marthuret.  Sa  date  probable. 
Etude  d'esthétique.  Clermont-Ferrand,  1902;  in-8"  de  33  pages; 
photogravure.  —  L'auteur  décrit  la  belle  statue  de  la  Vierge  qui 
orne  le  portail  de  l'église  du  Marthuret,  à  Riom,  et  la  date  des 
premières  années  du  xvi«  siècle.       G.  Desdevises  du  Dezert. 

Crégut  (Abbé  R.).  Histoire  du  Collège  de  Riom.  Riom,  Pouzol, 
1903;  in-8o  de  283  pages.  —  Cette  monographie  conduit  l'histoire 
du  collège  de  Riom  depuis  ses  origines  les  plus  lointaines  jusqu'à 
nos  jours.  Près  de  la  moitié  de  l'ouvrage  est  consacrée  à  l'épo- 
que où  le  collège  était  placé  sous  la  direction  des  Oratoriens. 
L'histoire  des  Pères  Maristes  occupe  près  de  50  pages,  la  période 
contemporaine  quatre  seulement;  M.  C,  aumônier  du  collège, 
a  pensé  «  qu'il  y  aurait  une  sorte  d'indiscrétion  à  aller  plus 
avant  ».  L'appendice  contient  un  certain  nombre  de  notes  inté- 
ressantes, parmi  lesquelles  nous  citerons  une  liste  de  livres 
classiques  en  usage  au  collège  en  1788  et  une  pièce  de  vers,  «  Le 
Lis  voyageur  »,  adressée  à  la  duchesse  d'Angoulême,  en  villé- 
giature à  Vichy,  en  1814,  par  M.  Barrau,  professeur  de  rhéto- 
rique au  collège.  G.  Desdevises  du  Dezert. 

Crégut  (Abbé  G.  R.  ).  Les  inscriptions  lapidaires  à  Riom. 
Riom,  1904;  in-8"  de  24  pages.  —  Recueil  des  inscriptions  latines 


436  ANNALES   DU   MIDI. 

qui  décorent  les  fontaines  publiques  de  Riora.  Inscriptions  funé- 
raires de  noble  Jean  de  Murât  (en  latin,  en  hébreu  et  en  grec 
(1595).  du  comte  de  Randan.  chef  de  la  Ligue  en  Auvergne,  mort 
le  14  mars  1590  à  la  bataille  de  Cros-RoUand.  L'auteur  termine 
son  humoristique  plaquette  en  citant  les  inscriptions  latines  et 
françaises  composées  pour  les  fêtes  du  premier  empire.  Leur 
platitude  ne  laisse  rien  à  désirer.  Napoléon  est  chanté  comme 
monarque  pacifique  et  philanthrope  : 

Qu'à  l'aspect  de  ce  froui  toujours  victorieux, 

i'out  ressente  un  noble  désire  ', 

L'enthousiasme  qu'il  respire 
Redouble  en  lui  l'ardeur  de  faire  des  heureux. 

G.  Desdevises  du  Dezert. 

Crescini  (V.).  Il  teslo  critico  diuna  canzone  di  Bernart  de  Ven- 
tadorn.  Yenise,  1904;  in-S"  de  13  pages.  (Extr.  des  Atti  del  R.  Istituto 
Veneto,  tome  LXIII,  p.  319-31.)  —  M.  Crescini  publie,  traduit  et 
commente,  avec  une  science  discrète  et  sûre,  une  chanson  de 
B.  de  Ventadour  [Chantars  non  pot  gaires  vale?-)  qui  n'est  ni  des 
plus  brillantes,  ni  des  plus  passionnées,  mais  qui  a  une  véritable 
importance  pour  l'histoire  des  théories  littéraires  :  c'est  celle,  en 
effet,  où  s'exprime  le  plus  clairement  cette  idée,  reprise  par 
Dante,  que  c'est  la  profondeur  de  la  passion  qui  fait  la  beauté 
de  l'œuvre  poétique.  —  Le  texte,  tel  que  l'a  constitué  M.  C, 
n'est  pas  toujours,  ce  me  semble,  d'accord  avec  sa  classification 
des  manuscrits  :  au  v.  19  aquo,  qui  est  dans  deux  familles,  sans 
compter  G,  est  plus  appuyé  que  aisso,  qui  n'est  que  dans  une 
(+  a,  qui  se  rattache  souvent  à  cette  famille);  pour  la  môme 
raison,  j'eusse  préféré,  au  v.  25,  metxhaandas  à  mercadeb-as ;  la 
forme  del  Vetîtadorn.  qui  se  trouve  DIKa  -j-  G,  eût  mérité  la  dis- 
cussion. Au  V.  15,  je  remplacerais  blasm'en  (ce  pronom  indéfini 
ne  s'expliquant  pas)  par  blasman,  qui  se  trouve  au  moins  dans  a 
(ou  blasmon  P).  Ces  leçons  n'ont  au  reste  aucune  importance 
pour  le  sens.  Il  n'en  est  pas  de  même  de  celle  que  M.  C.  a  adoptée 
au  dernier  vers;  il  lit  ainsi  le  second  envoi  :  Bernartz  de  Ven- 
tedorn  Venten  [V  représente  le  ve7's  qu'il  vient  de  composer),  — 
e-l  dig  e-l  fag  el  joi  n'  alen.  La  leçon  dig  et  fag  n'est  que  dans 


1.  (Sic.)  Mais  l'auteur  de  ces  vers  avait  sans  doute  écrit  :  délire,  et 
plus  bas  :  L'enthousiasme  qu'il  inspire.  [N.  D.  L.  R.) 


LIVRES   ANNONCES   SOMMAIREMENT.  437 

a,  les  autres  mss.  donnant  ditz  (ou  di)  et  fai,  c'est-à-dire  des 
verbes  au  lieu  de  substantifs;  ces  substantifs  au  reste  n'ont  ici 
guère  de  sens.  Je  traduirais  :  «  B.  de  V.  entend  son  vers,  il  le 
dit,  le  fait  (c'est-à-dire  l'a  fait]  et  il  attend  (je  supprimerais  ne) 
la  joie  d'amour.  »  A.  Jeanroy. 

DÉCHELETTE  (J.)  et  Brassart  (E.).  Les  Peintures  murales  du 
Moyen  âge  et  de  la  Renaissance  en  Forez,  ouvrage  p.  p.  la 
Société  la  Diana,  avec  la  collaboration  de  MM.  Charles 
Beauverie,  abbé  Reure  et  Gabriel  Trévoux.  Montbrison,  1900; 
In-fû.  —  Etude  sur  les  peintures  de  Saint-Romain-le-Puy  (xiie  et 
xiiie  siècles),  de  Grézieu-le-Fromental,  de  l'ancienne  chartreuse  de 
Sainte-Croix  en  Jarez.  d'Ouches  (1383),  de  Saint-Bonnet-le-Châtel 
(crucifixion,  du  xv  siècle),  de  la  maison  du  Dauphin  à  Crozet 
(xvr  siècle),  de  la  chapelle  du  château  de  Valprivas  (Résurrection 
des  morts,  début  du  xviir  siècle,  superbe  morceau),  de  l'église 
de  Chalmazel,  du  prieuré  de  Chandieu,  de  Montbrison  et  de  Char- 
lieu.  Belles  planches  d'ensemble  et  croquis  de  détail  dans  le  texte. 

G.  Desdevises  du  Dezert. 

Degert  (Abbé  A.),  L'ancien  collège  de  Dax.  Dax,  H.  Labèque, 
1904;  in-S»  de  52  pages.  —  Dans  cet  opuscule  qu'il  intitule  modes- 
tement «  Notes  et  souvenirs  »,  M.  D.  a  réuni  tout  ce  que  l'on 
peut  trouver  sur  un  établissement  qui  ne  fit  pas  grand  bruit  et 
dont  les  archives  sont  détruites.  C'est  dans  celles  de  la  ville  de 
Dax  qu'il  a  trouvé  les  principaux  éléments  de  son  travail.  Ce 
petit  collège,  comme  tous  ses  pareils  de  Gascogne,  date  du 
xvi<'  siècle,  sans  qu'il  soit  possible  de  préciser  davantage.  Son 
origine  se  perd,  non  dans  la  nuit  des  temps,  mais  dans  les  bru- 
mes de  l'incertitude.  Ce  n'est  qu'en  1612  qu'un  document  permet 
d'en  constater  l'existence.  Après  avoir  eu  divers  principaux,  il 
passe  en  1631  sous  la  direction  des  Barnabites  qui  la  conservè- 
rent jusqu'à  la  fin,  vers  1791.  Sa  mort  ne  peut  être  datée  avec 
plus  de  précision  que  sa  naissance.  Il  était  difficile  d'écrire  un 
gros  volume  sur  un  établissement  qui  n'eut  jamais  qu'un  rayon- 
nement local.  Cependant  M.  D.  a  réuni  avec  beaucoup  de  discer- 
nement et  mis  en  œuvre  avec  l'art  d'un  his'torien  les  quelques 
documents  qu'il  a  utilisés.  En  appendice  il  en  a  publié  dix,  dont 
aucun  n'est  sans  intérêt.  Il  convient  de  signaler  surtout  les  qua- 
tre premiers  :  renouvellement  des  pouvoirs  et  fixation  du  trai- 
tement  des  régents;    règlement  disciplinaire;    nomination   et 


438  ANNALES   DU   MIDI. 

installation  d'un  principal  et  contrat  avec  les  Barnabites.  M.  D. 
s'est  préoccupé  des  études  que  l'on  faisait  au  collège,  du  pro- 
gramme et  de  la  méthode  d'enseignement,  préoccupation  plus 
rare  qu'on  ne  pense  :  je  connais  de  volumineuses  histoires  de 
même  nature  oîi  elle  n'apparaît  même  pas.  Une  chicane  pour 
terminer.  M.  D.  écrit,  p.  29,  en  parlant  du  serment  établi  par  le 
vote  de  la  loi  du  27  novembre  1790,  que  les  évêques,  curés  et 
fonctionnaires  publics  devaient  jurer  de  maintenir  la  constitu- 
tion schismatique,  c'est-à  dire  la  constitution  civile  du  clergé. 
Présenté  ainsi,  ce  serment  paraît  ne  viser  que  cette  dernière  loi, 
tandis  qu'en  réalité  il  visait,  sous  le  titre  de  Constitution,  l'en- 
semble des  lois  votées  par  l'Assemblée  nationale.  L'erreur  est 
trop  répandue  pour  qu'on  luisse  passer  l'occasion  de  la  combattre. 
—  P.  10  :  «  Bernard  de  Poyannes,  sénéchal  des  Landes.  Ne  di- 
sait-on pas  :  «  des  Lannes  »?  A.  Vignaux. 

Douais  (M?''  C).  Documents  sur  l'ancienne  province  de  Langue- 
doc. Tome  II.  Trésor  et  reliques  de  Saint-Sei-nin  de  Toulouse. 
I.  Les  inventaires  (1246-1637).  Paris,  Picard;  Toulouse,  Privât, 
1904;  in-8"de  xl-51  3  pages.  —  Voir,  sur  le  tome  I,  Annales,  t.  XIV, 
1902,  p.  553.  M^'f  D.  commence  la  publication  de  trois  volumes 
de  documents  qui  forment  l'histoire  du  trésor  de  Saint-Sernin. 
Celui  qu'il  donne  aujourd'hui  contient  les  inventaires.  11  y  en 
a  quinze.  Le  plus  ancien  est  du  14  septembre  1246.  Les  autres 
se  suivent,  du  xv-  siècle  à  16o7.  Ceux  du  commencement  du 
xvi«  siècle  ont  pour  cause  les  prétentions  de  la  ville  de  Toulouse 
à  la  garde  du  trésor.  Ces  inventaires,  en  général,  sont  très  dé- 
taillés. Le  premier  est  plutôt  un  inventaire  de  tous  les  biens  de 
l'abbaye  de  Saint-Sernin.  qui  s'étendaient  jusque  dans  le  Gers 
et  l'Ariège.  Celui  de  1-514  est  en  roman.  Me''  D.  les  publiera  les  uns 
après  les  autres,  sans  exception,  parce  que,  s'ils  se  répètent,  ils 
se  complètent  au.^si  en  mentionnant  des  reliques  et  des  dons  nou  - 
veaux,  et  que  nous  y  apprenons,  grâce  à  l'abondance  des  détails, 
quelles  réparations  ont  été  faites  aux  châsses  et  autres  objets. 

Chaque  inventaire  est  précédé  d'une  notice.  Une  introduction 
de  XL  pages  nous  fait  connaître  ces  inventaires  et  les  autres 
documents  de  la  Table  et  de  la  Confrérie  des  Corps-Saints,  qui 
sont  donnés  dans  l'appendice  II.  Outre  cet  appendice,  deux  autres 
terminent  le  volume  :  le  premier  sur  le  saint  suaire  de  Cadouin, 
l'autre  sur  les  reliques  de  saint  Gilles.  M.  D. 


LIVRES   ANNONCÉS  SOMMAIREMENT.  439 

Faurey  (J.).  Henri  IV  et  Védit  de  Nantes.  Bordeaux,  irapr.  Ca- 
doret,  1903;   in-8o  de  230  pages.  —  Si  l'on  songe  que  l'auteur  a 
écrit  son  livre  pour  conquérir  le  diplôme  de  docteur  en  droit,  on 
lui  pardonnera  aisément  d'avoir  négligé  de  parti -pris  toute  re^ 
cherche  de  documents  inédits,  et  l'on  ne  s'étonnera  point  d'une 
certaine  absence  d'originalité  qui  est  le  résultat  presque  inévi- 
table de  cette  façon  sommaire  de  traiter  un  sujet  connu  :  évi- 
demment, M.  F.   ne  pouvait  ainsi  le  renouveler.  11  s'est  donc 
borné  à  «  effleurer  les  sommets  des  choses  »,  ce  qui  ne  paraît 
pas  en  soi  le  moyen  de  faire  de  bonne  besogne.  Et  encore  a-t-il 
effleuré  plus  de  choses  qu'il  n'en  annonce,  non  seulement  l'édit 
de  Nantes  sous  Henri  IV,  mais  aussi  les  édits  de  pacification  qui 
ont  préparé   celui-là,  l'application  de  l'édit.  et  sous  Henri  IV, 
conformément  au  titre  du  livre,  et  sous  Louis  XIII  et  Louis  XIV, 
ce  qui  est  moins  légitime.  L'analyse  qu'il  a  donnée   est  claire, 
méthodique;  elle  a  bien  son  utilité.  Mais  M.  F.  s'en  est  tenu  là; 
point  de  conclusion   :  le  livre  tourne  court  et  se  termine  ex 
abrupto.    L'introduction    semblait    promettre    davantage,    par 
exemple  l'examen  de  la  question  de  savoir  «  si  la  tolérance  de 
la  religion  réformée  pouvait  se  concilier  avec  la  constitution  de 
l'ancienne  monarchie  et  les  idées  de  la  majorité  catholique  ».  On 
regrette  que  par  la  suite  la  question  n'ait  pas  été  abordée,  ou 
ne  le  soit  qu'obliquement  et  de  façon  incidente,  —  Au  total,  nous 
préférerions  une  manière  moins  sèche,  moins  abstraite,  moins 
juridique  d'écrire  l'histoire.  Pour  comprendre  la  nature  et  la 
portée  de  Tédit  de  Nantes,  il  ne  faut  pas  le  considérer  en  lui- 
même,  comme  un  texte  indépendant  du  milieu,  des  circonstances 
dans  lesquelles  il  fut  rédigé.  Si  M.  F.,  au  lieu  de  consulter  exclu- 
sivement des  monuments  législatifs  ou  les  procès-verbaux  offi- 
ciels des  assemblées  protestantes ,   avait  lu   les  mémoires  ou 
mieux  l'énorme  correspondance  du  temps  —  il  ne  connaît  même 
pas  les  lettres  de  Henri  IV,  —  il  aurait  donné  à  son  œuvre  plus 
d'intérêt,  plus  de  vérité;  il  aurait  évité  des  affirmations  comme 
celle-ci  :  Henri  IV  accorda  l'édit  «  à  son  insu,  contraint  et  forcé  ». 
Il  n'aurait  pas  disserté  inutilement  sur  le  caractère  perpétuel 
ou  non,   irrévocable  ou  non  de   cet  acte  (p.   36  etsq.);  car  en 
un  pays  où  la  règle  était  :  Si  veut  le  roi.  si  veut  la  loi,  cette 
loi,  une  loi  quelconque  pouvait  changer,  soit  avec  le  prince, 
soit  même  avec  la  volonté  du  prince  qui  l'avait  faite.  La  ques- 
tion est  de  savoir  si   la  révocation  se  justifiait  en  équité  et  en 


440  ANNALES   DU    MIDI. 

bonne  politique;   qnant  au  point  de  droit,   dans  l'espèce  il  im- 
porte peu.  Paul  DoGNON. 

GiPOULON  (J.).  Elude  sur  V allodialité  en  Auvet'gne.  Montluçon, 
irapr.  Herhin,  1903;  in-S»  de  184  pages.  —  Cette  étude  est  une 
bonne  thèse  de  doctorat  sur  un  point  important  du  droit  féodal. 
L'auteur  définit  l'alleu,  et  le  suit  à  travers  les  temps  primitifs 
jusqu'cà  l'établissement  de  la  coutume  d'Auvergne.  Cette  pre- 
mière partie  est  la  moins  solide  et  porte  la  trace  d'une  docu- 
mentation incomplète.  La  partie  relative  au  régime  de  l'alleu 
sous  l'empire  de  la  coutume,  et  dans  les  districts  d'Auvergne 
relevant  du  droit  écrit,  est  plus  précise  et  meilleure;  une  étude 
des  droits  de  franc-flef  et  d'amortissement  et  sur  le  droit  de 
triage  permet  à  l'auteur  de  conclure  à  l'existence  d'alleux  en 
Auvergne  jusqu'à  la  fin  du  xviiie  siècle. 

G.  Desdevises  du  Dezkrt. 

Leroux  (A.).  La  légende  du  roi  Aigolant  et  les  origines  de 
Limoges.  Paris,  1903;  in  8"  de  1G  pages.  (Extrait  du  Bulletin  his- 
torique et  philologique.  1902,  p.  606-19.)  —  Dans  cet  article,  d'une 
sobre  et  profonde  érudition  ,  notre  excellent  collaborateur 
étudie  et  critique  la  tradition  bizarre  et  tardive  (elle  ne  nous 
apparaît  sous  forme  écrite  qu'à  la  fin  du  xvi"  siècle')  d'après 
laquelle  les  eaux  de  l'Aigoulène  auraient  été  amenées  à  Limoges 
par  un  roi  sarrasin,  nommé  Aigoulant,  habitant  «  au  château 
de  Limoges  »  on  804.  Il  subsiste  des  vestiges  d'un  aqueduc,  re- 
montant à  l'époque  romaine,  par  lequel  ces  eaux,  qui  s'écou- 
laient jadis  vers  l'Aurance,  furent  détournées  vers  le  bassin  de 
la  Vienne,  au  profit  d'une  agglomération  formée  sans  doute  de- 
puis peu  entre  les  deux  pentes,  au  voisinage  des  Arènes,  au 
point  où  se  croisaient  les  voies  conduisant  de  Lyon  à  Saintes 
et  de  Bourges  à  Bordeaux.  Cet  aqueduc  fut  probablement  cons- 
truit par  un  foncionnaire  ou  un  riche  propriétaire  gallo-romain, 
dont  le  souvenir  se  serait  conservé  dans  une  tradition  orale; 
ce  personnage  aurait  été  confondu,  évidemment  sous  l'empire 

1.  A  la  fin  do  la  traduction  limousine  delà  Chronique  de  Saint-Martial 
(éd.  Uuplès-Agior,  p.  148-54).  Cette  traduction  remonte,  selon  M.  L.,  aux 
environs  de  1370;  mais  l'original  en  est  perdu  et  la  copie  que  nous  on 
avons  est  de  la  fin  du  xvi"  siècle  seulement.  De  plus,  le  copiste  n'a  pas 
reproduit  intégralement  le  passage  concernant  Aigolant;  il  se  borne  à 
l'analyser,  jugeant  qu'il  n'y  a  là  qu'un  «  conte  de  rommant  ». 


LIVRES    ANNONCÉS    SOMMAIREMENT.  441 

d'une  préoccupation  étymologique i,  avec  le  roi  sarrasin  Aigou- 
lant,  emprunté  à  la  Chronique  du  faux  Turpin.  Cette  solution, 
élégante  et  simple,  me  paraît  fort  plausible.  J'ajouterai  néan- 
moins quelques  observations  tendant  à  préciser  ou  à  contester 
certains  points  de  détail.  Que  le  personnage  d'Aigoulant  ait  été 
emprunté  à  la  Chronique  de  Turpin  et  non  k  quelque  chanson  de 
geste,  c'est  ce  qui  me  paraît  évident  :  en  effet,  la  Chronique 
donne  habituellement  la  forme  Aigolandus"^ ,  tandis  que  les 
chansons  ne  connaissent  que  celle  de  Agolant  ou  Agoulant^,  qui 
n'eût  point  autorisé  le  rapprochement  sur  lequel  repose  toute 
la  légende.  Quant  à  ce  rapprochement  même,  il  me  paraît,  n'avoir 
été  possible  que  le  jour  où  le  ruisseau  en  question  eut  été 
dénommé  Aigoleno  (au  lieu  d'un  plus  ancien  Aigalena)  et  le 
dernier  tiers  du  xiv«  siècle  me  paraît  une  dato  bien  reculée;  la 
traduction  en  langue  vulgaire  de  la  Chronique  peut  être  de  cette 
époque;  mais  le  «.  discours  du  roi  sarrasin  »  paraît  avoir  formé 
dans  le  ras.  original  une  section  particulière,  qui  avait  pu  être 
ajoutée  après  coup  ;  cette  fantaisiste  explication  étymologique 
me  paraîtrait  beaucoup  plus  naturelle  au  xv«  siècle  ou  même 
au  xvp  qu'aux  environs  de  1370.  —  Scion  M.  L.,  la  tradition  qui 
fait  venir  d'Afrique  le  constructeur  de  l'aqueduc  pourrait  remon- 
ter à  l'époque  gallo-romaine  et  être  acceptée  comme  authenti- 
que :  il  est,  en  effet,  dit-il  (p.  Il),  <'  fort  naturel  qu'un  Africain 
s'intéresse...  aux  doléances  d'une  population  qui  manque  d'eau.  » 
Mais  la  Clv^onique  de  Turpin  (ch.  vi)  qualifie  Aigolant  de  »  paga- 
nus  rex  affricanus  »;  je  ne  crois  pas  qu'il  faille  chercher  ailleurs 
la  source  du  renseignement.  —  Quant  au  nom  même  d'Aigolant, 
«  il  se  pourrait,  dit  M.  L.,  que  ce  fût  un  surnom  donné  par  le 
peuple  d'Aquitaine  à  quelque  chef  arabe  du  viiip  siècle,  qu'aurait 
distingué  sa  propension  à  se  désaltérer  aux  sources  du  pays  »• 
Mais,  sans  parler  de  la  bizarrerie  de  l'hypothèse,  je  viens  de 
dire  que  ce  rapprochement  n'avait  pu  être  fait  avant  la  fin  du 
moyen  âge.  Il  y  a  là  sans  doute  un  nom  arabe,  trop  altéré  pour 
être  reconnaissable.  qu'on  arrivera  peut-être  un  jour  à  identi- 


1.  M.  L.  ne  le  dit  pas  nettement,  mais  cehi   ressort  de  l'ensemble  de 
son  exposition. 

2.  Au  moins  les  sept  manuscrits  suivis  par  M.  Castets  {Turpi/ii  Ilis- 
toria,  etc.,  Montpellier,  1H80,  p.  10  n.). 

H,  E.  Langlois,  Table  des  noms  jji-opres  dans  les  chatisoNs  de  f/esle. 


442  ANNALES   DU   MIDI. 

fier  :  les  recherches  sur  l'onomastique  des  chansons  de  geste 
n'en  sont  encore  qu'à  leurs  débuts.  A.  Jeanroy. 

Oddo  (H.).   La  Provence:  usages,  coutumes,  idiomes  depuis   les 
origines.  Le  félibrige  et  son  action  sio'  la  langue  provençale  avec 
une  grammaire    pirovençale   abrégée.   Faris,  Le  Soudier.   1902; 
petit  in-l"  de  "243  pages.  —  Dans  ce  nouveau  livre,  l'auteur  du 
Chevalier  Roze  reste  tidèle  au  rôle  qu'il  s'est  donné  de  vulga- 
risateur   de  l'histoire  de  Provence.   C'est  un  acte  louable   que 
d'étudier  les  divers  facteurs  de  la  vie  sociale  d'un  pays  de  phy- 
sionomie   tellement  expressive  et  originale.   Malheureusement 
pour  M.  0.,  un  tel  travail,  par  la  nature  même  de  son  objet,  ne 
souffre  pas  d'être  fait  hâtivement;  il  n'offre  d'intérêt  qu'autant 
que  l'on  peut  y  voir  le  résultat  d'une   enquête  personnelle  et 
minutieuse  sur  les  gens  et  les  choses  du  terroir.  Un  premier 
chapitre,  assez  étendu,  est  consacré  aux  fêtes  civiles  et  religieu- 
ses du  midi   de  la  France;  un  second,  de  quelques  pages,   est 
réservé  aux  mœurs  et  aux  usages  provençaux.  Cette  partie  de 
l'ouvrage  serait  sans  conteste  la  plus   intéressante    et  la  plus 
suggestive,  si  M.  0.   s'était  uniquement   attaché  à  mettre  en 
relief  les  particularités  locales,  sans  alourdir  son  texte  en  rele- 
vant des  us  et  coutumes  d'origine  étrangère  et  de  signification 
nulle.  Pourquoi  parler  par  exemple  des  rameaux  et  des  œufs  de 
Pâques?  Dans  cet  exposé  de  la  vie  provençale,  M.  0.  a  le  mérite 
de  la  clarté  et  de  l'exactitude,  mais  son  style  ne  rend  pas  tou- 
jours le  caractère  pittoresque  de   certaines  coutumes.   Un  tel 
tableau  demanderait,  il   est  vrai,    la    palette   aux   couleurs   si 
chaudes  et  si  nuancées  d'un  Paul  Arène.  —  L'histoire  du  féli- 
brige est  bien  conduite  et  suffisante  dans  sa  brièveté  pour  que 
le  lecteur  saisisse  le  sens  et  la  portée  de  cette  institution,  organe 
d'un  grand  mouvement  littéraire.  L'auteur  paie  un  juste  tribut 
d'éloges  aux  cigaliers  et  aux  félibres  de  Paris  :  le  poète  Méry, 
Amédée  Picliot,  Adolphe  Dumas,  Henri  de  Bornier...  Avec  beau- 
coup de  tact  dans  l'expression,  M.  0.  rappelle  les  services  maté- 
riels et  surtout  le  prestige   donné  au   félibrige  alors  jeune  et 
presque    inconnu    par   l'adhésion   de  personnalités  parisiennes 
d'origine  méridionale. 

Rien  à  dire  sur  l'histoire  des  dialectes  du  sud-est  de  la  France, 
simple  nomenclature  de  mots  soi-disant  tirés  du  grec,  du  latin, 
du  wisigoth,  du  bourguignon,  de  l'arabe,  etc.  Des  observations 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  443 

banales  et  hypothétiques  accompagnent  ces  vocabulaires.  Que 
penser  des  opinions  de  l'auteur  sur  la  langue  ligurienne?  — 
L'étude  de  M.  0.  sur  le  développement  de  la  langue  et  de  la 
littérature  romane  est  superficielle;  c'est  ainsi  qu'à  propos  de 
l'influence  des  troubadours  sur  les  trouvères  il  n'analyse  pas  le 
lyrisme  provençal,  avec  sa  notion  nouvelle  de  l'amour  courtois 
que  des  écrivains  rapprochent  de  l'amour  mystique  dépeint  par 
l'auteur  de  l'Imitation.  M.  Oddo  semble  ne  pas  se  douter  de  ce 
que  la  poésie  des  troubadours  a  de  conventionnel.  Ne  serait-il 
pas  intéressant  d'opposer  à  l'amour  de  tête,  souvent  irréel,  des 
chantres  provençaux  du  xii«  siècle  le  sentiment  si  concret,  si 
humain  de  Mistral,  de  Roumanille  et  d'Aubanel,  ces  troubadours 
d'aujourd'hui?  -  Après  MM,  Michel  Bréal,  Jeanroy,  Constans, 
pour  ne  citer  que  les  plus  connus,  l'auteur  fait  ressortir  quel 
auxiliaire  de  l'enseignement  du  français  serait  le  provençal  dans 
les  campagnes  du  Midi.  —  La  bibliographie  de  M.  Oddo  est  très 
incomplète;  il  est  surtout  regrettable  qu'il  omette  de  citer  des 
monuments  classiques  tels  que  le  Trésor  du  Félibrige  de  Mistral, 
tandis  qu'il  mentionne  des  ouvrages  qui  n'en  sont  que  des  reflets 
et  des  abrégés,  comme  le  Petit  trésor  du  Félibrige  de  dom  Xavier 
de  Fourvières.  Abbé  Arnaud  d'Agnel. 

Pellissier  (abbé).  Histoire  d' Allas.  Monographie  bas-alpine. 
Digne,  Chaspoul,  1901;  2  vol,  in-12  de  xxi-638  et  viii  pages.  — 
La  commune  d'Allos  dont  M.  l'abbé  P,  donne  la  monographie  très 
détaillée  est  un  des  plus  intéressants  villages  du  nord-est  des 
Basses-Alpes.  Le  chef-lieu  de  canton  de  l'arrondissement  de  Bar- 
celonnette,  assis  sur  une  terrasse  qui  domine  le  Verdon,  mérite 
l'attention  de  l'archéologue,  avec  ses  ruines  de  fortifications 
attribuées  aux  Romains  et  son  église  de  Val-Vert,  monument  his- 
torique du  xi^  siècle.  Allos,  placé  sur  la  frontière  de  la  France  et 
de  l'Italie,  a  un  passé  politique  très  mouvementé  :  ce  coin  des 
Alpes  devint  successivement  provençal,  italien,  français.  M.  P. 
retrace  les  difi'érentes  phases  de  son  histoire.  De  l'an  -1000  à 
1388,  Allos  prospère  sous  le  gouvernement  paternel  des  comtes 
de  Provence  ;  en  1388  il  est  uni  à  la  Savoie;  il  no  fut  ensuite  séparé 
d'elle  qu'en  1713,  par  le  traité  d'Utrecht  qui  le  donnait  à  la 
France.  —  L'étude  de  ces  trois  périodes  constitue  la  partie  pro- 
prement historique  de  la  monographie  et  en  fait  toute  la  valeur; 
c'est  un  travail  personnel  et  consciencieux,  fruit  d'un  long  dé- 


444  ANNALES    DU    MIDI. 

pouillement  de  documents  de  première  main,  dont  plusieurs  ont 
été  publiés  par  l'auteur  à  titre  de  pièces  justiflcatives.  —  Malheu- 
reusement M.  P.  a  voulu  rendre  son  ouvrage  trop  complet.  Au 
lieu  de  s'en  tenir  k  un  rapide  aperçu  des  premiers  âges  d'Ailos,  il 
s'est  étendu  longuement  sur  ces  temps  nébuleux,  et  perdu  dans 
des  suppositions  gratuites  dont  un  des  effets  fâcheux  est  d'indis- 
poser le  lecteur  dès  les  premières  pages.  Il  a  également  eu  le 
tort  de  surcharger  son  travail  par  un  luxe  de  renseignements 
relatifs  à  la  topographie,  à  l'histoire  naturelle,  à  la  biographie 
et  à  la  religion.  Cette  érudition,  toute  de  dictionnaire,  a  produit 
un  ensemble  de  notions  disparates  qui  nuisent  aux  bons  résul- 
tats acquis  par  ses  recherches  dans  les  Archives.  C'est  là  un  tra- 
vers commun  à  bien  des  monographies  locales.  —  Telle  quelle, 
l'histoire  d'Ailos  occupera  néanmoins  une  place  distinguée  parmi 
les  monographies  qui  font  honneur  au  clergé  bas-alpin  :  celles  de 
Montfort.  Chàteaux-Arnoux.  l'Escale,  Châteauneuf,  Barrême  et 
Puymoisson.  Abbé  Arnaud  d'Agnel. 

RiBiER  (D''  L.  de).  Cha7'lus-Champagnac  et  ses  seigneurs.  Paris. 
Riom,  Champion,  1902  :  in-S"  de  iv-302-xv  pages.  —  Monographie 
d'un  fief  important  composée  à  l'aide  des  archives  de  M.  de 
Ribier  du  Châtelet,  versées  en  partie  à  la  bibliothèque  de  Cler- 
mont  en  1875  i.  Le  flef  de  Charlus,  d'abord  simple  châtellenie, 
fut  érigé  en  baronnie  au  commencement  du  xv^  siècle,  en  faveur 
de  Pierre  de  Beaufort,  vicomte  de  Turenne.  et  en  comté  en  1586, 
au  profit  de  Charles  de  Lévis.  Il  passa  ensuite  dans  la  famille 
de  Castries,  qui  le  vendit  en  1783  à  M.  de  Pestel.  Le  château  de 
Charlus  n'était  plus  qu'une  ruine;  il  avait  été  démantelé  en 
1633  par  ordre  de  Richelieu.  Le  travail  de  M.  de  R.  renferme  des 
documents  fort  intéressants  et  se  lit  agréablement;  on  regrettera 
que  l'auteur  n'ait  point  fait  précéder  son  livre  d'une  bibliogra- 
phie détaillée  et  critique  et  n'ait  pas  adopté  un  plan  plus  métho- 
dique et  plus  rigoureux;  le  sujet  principal  est  souvent  oublié  et 
disparaît  au  milieu  de  digressions  incessantes.  Les  illustrations, 

1  Rien  ne  prouve  mieux  la  nécessité  de  confier  à  des  spécialistes 
éprouvés  l'ari-angement  de  nos  bibliothèques,  que  l'état  où  M.  Louis  de 
Ribier  a  trouvé  en  1898  les  archives  de  sa  famille,  «  enfouies  sans  classe- 
«  ment,  dans  un  affreux  pêle-mêle,  sous  prétexte  de  l'exiguité  du  local. 
«  comme  si  un  fonds  classé  tenait  plus  de  place  que  des  dossiers  épars, 
«  relégués  dans  des  sacs  à  charbon,  au  milieu  de  la  poussière  et  do  l'iiu- 
«  midité.  » 


LIVRES    ANNONCÉS    SOMMAIREMENT.  445 

généralement  médiocres,  n'ont  que  peu  de  valeur  documentaire, 
la  phototypie  seule  devrait  être  employée,  car  seule  elle  assure 
la  fidélité  absolue  du  rendu.  G.  Desdevises  du  Dezert. 

RiBiER  ;D'  L.  de).  Notices  bibliographiques  sur  quelques  médecins 
et  chirurgiens  de  la  Haute- Auvergne,  sous  l'ancien  régime.  Pavis, 
imp.  Biais,  1903;  in-8''  de  24  pages  {Biblioth.  histor.  de  la  France 
médicale).  —  Une  foule  de  détails  curieux  pour  l'histoire  de  la 
médecine  :  P.  o,  ordonnance  de  M.  Raymond  du  Chassang,  méde- 
cin à  Saint-Flour,  contre  la  peste  :  «  Eau  rose,  sucre  rosat,  pâte 
de  coings,  lavements  composés  d'ingrédients  divers  et  poudre  con- 
fortative.  »  —  P.  14  :  Comptes  d'un  médecin  de  Saignes  en  1732.  etc. 

G.  Dbsdevises  du  Dezert. 

RouviÈRE  (Fr.).  L'aliénation  des  biens  nationiux  dans  le  Gard. 
Niraes.  Gervais-Bedot,  Lavagne-Peyr.it.  1900;  in-8"  de  818  pages. 
—  Ce  livre,  qui  représente  un  travail  considérable,  est  un  réper- 
toire commode  pour  s'orienter  dans  une  matière  compliquée.  Le 
regretté  Rouvière  aimait  ainsi  à  s'attaquer  à  de  rudes  tâches, 
pour  faciliter  la  connaissance  de  la  Révolution  dans  le  Gard. 
L'étude  de  cette  époque  le  passionnait,  et  il  a  laissé  de  solides 
monuments  qui  seront  toujours  consultés.  L'introduction  du  pré- 
sent volume  retrace  la  marche  de  l'aliénation  des  biens  du 
clergé  et  autres  biens  de  première  origine,  des  biens  des  émigrés 
ou  de  seconde  origine,  des  domaines  engagés.  L'inexpérience  des 
hommes  de  la  Révolution  en  matière  économique  rendit  le  pro- 
fit des  ventes  à  peu  près  illusoire  pour  l'Etat.  La  fraude  utilisa 
partout  les  maladresses  de  l'administration,  et  on  peut  dire  que 
les  biens  nationaux  se  vendirent  pour  rien.  Le  seul  bénéfice 
social  fut  la  répartition  de  la  propriété  immobilière  entre  des 
mains  plus  nombreuses.  Les  dernières  pages  de  l'introduction 
traitent  de  l'affectation  de  certains  biens,  du  milliard  des  émi- 
grés et  des  opérations  de  la  caisse  d'amortissement. 

Le  corps  du  volume  comprend  le  relevé  alphabétique  des 
acquéreurs  de  biens  nationaux  de  première  origine,  avec  table 
des  noms  des  communes  et  table  des  établissements  religieux; 
le  relevé  alphabétique  des  acquéreurs  des  biens 'de  seconde  ori- 
gine, avec  table  des  émigrés  et  table  des  communes  ;  enfin  le 
relevé  alphabétique  des  acquéreurs  des  biens  des  communes 
cédés  à  la  caisse  d'amortissement  et  vendus  par  elle,  avec  table 
des  communes. 


446  ANNALES   DU   MIDI. 

Tout  est  pris  aux  sources,  principalement  à  la  série  Q  des 
archives  du  Gard,  avec  une  méthode  et  une  exactitude  impec- 
cables. Ces  nomenclatures  d'aspect  aride  sont  vivifiées  par  une 
connaissance  approfondie  de  la  période  révolutionnaire. 

E.    BôNDURAND. 

Tardieu  (A.).  Histoire  illustrée  du  bourg  de  Rayât  en  Auvergne 
(station  thermale  célèbre),  ornée  de  portraits,  monuments,  vues, 
antiquités,  curiosités.  Clormont-Ferrand,  1902;  in-S»  de  76  pages. 
—  Portraits  de  l'auteur,  de  son  père  et  de  sa  mère  ;  dessin  et  des- 
cription de  quelques  débris  antiques  fp.  13,  14,  15).  Liste  des 
prieurs  de  Royat  de  1284  à  1783.  Seigneurs  de  Royat.  Plan  de 
l'ancien  Royat  (p.  38).  Biographie  des  hommes  célèbres;  parmi 
eux  l'ingénieur  florentin  Symeoni  et  l'historien  Géraud  de  Gor- 
demoy,  lecteur  du  dauphin,  né  à  Paris  en  1626,  mort  dans  la 
même  ville  en  1684.  Parmi  les  sources  (bibliographiques)  les 
ouvrages  de  M.  Ambroise  Tardieu  figurent  avec  les  mentions 
«  recherché  —  rare  —  très  rare  —  épuisé  ». 

G.  Desdevises  du  Dezert. 

Tardieu  (A.).  Le  Dictionnaire  des  ex-libris  de  V Auvergne.  Royat, 
chez  l'auteur,  1903;  in-8"  de  33  pages.  —  Collection  médiocre- 
ment gravée  de  quelques  ex-libris  d'Auvergne. 

G.  Desdevises  du  Dezert. 


PUBLICATIONS  NOUVELLES 


BoisLisLE  (A.  de).  Le  grand  hiver  et  la  disette  de  1709.  Besan- 
çon, irap.  Jacquin,  1903;  in-S"  do  128  p. 

Catalogue  général  des  livres  iraprimés  de  la  Bibliothèque 
nationale.  (Auteurs.)  T.  XV  'Boirac-Bonneyj.  Paris,  Imp  natio- 
nale, 1903;  in-80  à  2  col.,  de  1196  col. 

Ch.ilRLEs  VllI.  Lettres  de  Charles  Vlll,  roi  de  France,  p.  p. 
P.  PÉLiciER.  T.  IV.  Paris,  Laurens,  1;03;  in-S"  de  371  p. 

Chevalier  (Abbé  FI.).  Notes  historiques  sur  la  paroisse  de 
Fuyréaux,  châtellenie  de  Mansle  en  Angoumois  (monographie). 
Balan-Sedan,  imp.  Frin.  1903;  in-S»  de  1ij6  p. 

Chevalier  (Chanoine  J.'.  La  Révolution  à  Die  et  dans  la  val- 
lée de  la  Drôme  (1789-1799).  Valence,  imp.  Céas  ,  1903;  in-8°  de 
382  p. 

Chevalier  (U.)-  Répertoire  des  sources  historiques  du  moyen 
âge.  Topo-bibliographie.  Fasc.  VI  (S-Z).  Montbéliard,  Société 
anonyme  d'imprimerie  montbéliardaise.  1903;  in-8<'  à  2  col., 
col.  26io  à  3384. 

CoNARD.  La  Peur  en  Dauphiné  guillet-aoùt  1789).  Paris,  Bel- 
lais,  1904;  in  S''  de  286  p.  [Bibliothèque  d'histoire  moderne. J 

Douais  (C).  La  mission  de  M.  de  Forbin-Janson,  évoque  de 
Marseille,  plus  tard  évéque  de  Beauvais,  auprès  du  grand-duc 
et  de  la  grande-duchesse  de  Toscane  (mars-mai  1673).  Récit  d'un 
témoin.  Paris,  Picard,  1904;  in-8"  de  vii-206  p. 

Etat  général  par  fonds  des  Archives  départementales.  Ancien 
régime  et  période  révolutionnaire.  Paris,  Picard,  1903;  in-4''  à 
2  col.,  XII  p,  et  col.  1  à  806,  et  table.  [Ministère  de  l'Instruction 
publique  et  des  Beaux-Arts.] 

Fage  (E.).  Petits  échos  du  passé  de  Tulle.  Tulle,  imp.  Crauf- 
fon,  1904;  in-16  de  142  p. 

Fox  (Ch.  .].).  Napoléon  Bonaparte  and  the  siège  of  Toulon. 
Washington,  Law  Reporter  Company  Printers.  1902;  in  So  de 
vii-114. 


448  ANNALES    DU    MIDI. 

Jacotin  (A.\  Inventaire  sommaire  des  Archives  départemen- 
tales de  la  Hante- Loire.  Arch  ecclésiastiques,  sér.  G,  cierge 
séculier.  Le  Puy,  Marchessou  ;  in^"  à  2  col.  de  iii-593  p. 

Lavisse  (E.).  Histoire  de  France,  depuis  les  origines  jusqu'à  la 
Révolution.  T.  IV.  Fasc.  VIIL  ii  :  Charles  VIL  Louis  XI  et  les 
premières  années  de  Charles  VIII  (1422-1492).  Paris,  Hachette, 
1903;  in-8"  carré,  p.  321  à  45G.  avec  cartes  dans  le  texte  et  hors 
texte. 

Lelièvre  (M.).  Portraits  et  récits  huguenots,  i"  série  :  xvr  siè- 
cle. 2«  éd.  Toulouse,  imp.  Chauvin,  1903;  in-S»  de  viii-375  p.,  avec 
gravures. 

MiCHELET  (J.).  Poètes  gascons  du  Gers,  depuis  le  xvii"  siècle 
jusqu'à  nos  jours.  Auch,  Bouquet,  1904;  in  8'  de  497  p. 

Pascalein  (E.).  Histoire  de  Tarentaise  jusqu'en  1792.  Mou- 
tiers,  imp.  Gavin,  1903;  in  8'>  de  33i-iv  p. 

Poirier  (J.;.  Les  prisonniers  de  la  Chartreuse  du  Mont  Dieu 
pendant  la  Terreur.  Paris,  Kleiner,  1903;  in-S"  do  111  p. 

PouLHÈs  (Abbé  B.).  Monographie  historique  de  l'ancien  Rau- 
Ihac,  depuis  ses  origines  jusqu'à  la  Révolution.  Aurillac,  imp. 
moderne,  1903  ;  in  8°  de  300  p. 

Recueil  des  actes  du  Comité  de  Salut  public,  p.  p.  F.  A.  Aulard. 
T.  XV.  Paris.  Leroux,  1903  ;  in-S^  de  845  p. 

Recueil  de  documents  relatifs  à  la  convocation  des  Etats  géné- 
raux de  1789,  p.  p.  A.  Brette.  T.  III.  Paris,  Leroux,  1904;  in-8o 
de  769  p.  et  plan. 

Répertoire  numérique  des  archives  de  la  maison  du  roi. 
(Série  OM,  rédigé  par  H.  de  Curzon.  Paris,  Picard,  1904;  'm-i°  a. 
2  col  ,  de  X-2IS  p.  [Ministère  de  l'Instruction  publique  et  des 
Beaux-Arts.  Archives  nationales] 

Sancti  Antonii  de  Padua  vitae  duae  quarum  altéra  hucusque 
inedita.  Ed.  L.  de  Kerval.  Paris,  Fischbacher,  1904;  in  8°  de 
xiii-316  p.  rCollection  d'études  et  de  documents  sur  l'histoire 
religieuse  et  littéraire  du  moyen  âge.  T.  V.] 

Williams  (H.  N.).  Madame  de  Montespan.  London,  Harper, 
1903;  in-40  de  396  p.  et  pi. 

Le  Gérant, 
P. -Ed.  PIUVAT. 


Toulouse,  iiiipriinciie  Édoïahd  I'uivat,  rue  des  Arts  14    —  2716 


LES    POSSESSIONS 


DE 


L'ABBAYE  DE  SAINT-VICTOR  DE  MARSEILLE 

EN   ROUERGUE' 


Aucun  érudit  des  questions  provençales  n'ignore  l'impor- 
tance de  l'abbaye  de  Saint-Victor  de  Marseille,  importance 
que  justifient  sa  très  haute  antiquité,  la  protection  des  papes 
et  d'un  grand  nombre  de  princes,  ainsi  que  l'étendue  immense 
de  ses  domaines. 

A  partir  du  xi^  siècle,  la  puissante  abbaye  n'est  pas  seule- 
ment propriétaire  sur  tous  les  points  de  la  Provence;  elle 
étend  ses  possessions  à  l'ouest  au  delà  du  Rhône,  en  Langue- 
doc, Rouergue,  Quercy,  et  au  nord  Jusqu'en  Nivernais. 

Outre  des  propriétés  innombrables  dans  les  provinces  ecclé- 
siastiques d'Aix,  d'Arles,  d'Avignon  et  d'Embrun,  ses  biens 
sont  disséminés  dans  treize  diocèses  :  ceux  de  Toulouse, 
d'Albi,  de  Rodez  et  de  Nevers,  pour  ne  citer  que  les  plus 
éloignés  de  Marseille. 

La  présente  étude  n'a  trait  qu'aux  possessions  de  Saint- 
Victor  en  Rouergue;  elle  offre  un  intérêt  local,  comme  con- 
tribution à  l'histoire  de  ce  pays,  mais  aussi  un  intérêt  d'ordre 

1.  Je  (lois  des  remerciements  particuliers  à  M.  l'abbé  L.  Rigal  qui  a 
bien  voulu  faire  bénéficier  le  présent  travail  des  secours  de  son  érudi- 
tion. 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVI.  29 


450  G.    ARNAUD    D'aGNEL. 

plus  élevé  par  les  aperçus  qu'elle  ouvre  sur  les  mœurs  et 
coutumes  des  moines.  Il  n'est  jamais  inutile  de  mieux  faire 
ressortir,  par  de  nouveaux  faits,  la  physionomie  si  curieuse 
du  régime  monacal,  dont  le  développement  excessif  est  l'une 
des  notes  caractéristiques  de  la  civilisation  médiévale  et 
moderne. 

I.  —  Nombre,  origine  et  durée  des  possessions. 

Tous  les  domaines  de  Saint-Victor  dans  le  Rouergue,  tous 
ses  biens  fonciers,  terres,  églises,  châteaux,  villas,  se  ratta- 
chent à  l'abbaye  de  Vabres  et  aux  cinq  prieurés  de  Saint- 
Amans  de  Rodez,  de  Notre-Dame  de  Millau,  de  Castelnau  de 
Levezou,  de  Saiut-Pierre-Saint-Léons  et  de  Saint-Geniez  de 
Rive-d'Olt. 

L'abbaye  marseillaise  en  prit  possession  dans  le  cours  du 
xi^  siècle. 

Une  charte  du  12  juin  1061  '  nous  apprend  que  Deusde, 
abbé  de  Rodez,  avec  le  consentement  de  Nicolas  II,  celui  de 
Robert,  comte  de  Rodez  et  d'Auvergne,  de  sa  femme  Berthe 
et  de  la  grand'mère  de  sa  femme,  la  comtesse  Ricarde  de 
Millau,  donne  à  Durand,  abbé  de  Saint- Victor,  en  pleine  et 
perpétuelle  possession,  le  monastère  de  Vabres  consacré  au 
Sauveur,  à  sainte  Marie  et  à  saint  Denys,  martyr.  Le  monas- 
tère, jadis  florissant,  est  maintenant  sans  moine.  A  cette  oc- 
casion, Deusde  restitue  à  l'abbaj^e  de  Vabres  et  donne  par  le 
fait  à  Saint-Victor  la  moitié  du  château  de  Peyralbe^,  qu'il 
détenait  injustement. 

En  1062,  Bernard,  fils  du  vicomte  Richard  de  Millau, 
cède  à  Saint-Victor  tous  ses  droits  sur  le  monastère  de  Va- 
bres et  lui  donne  quarante  mas. 

Au  début  du  xii«  siècle,  à  la  suite  de  discussions  avec  Ber- 
nard, abbé  de  Saint-Victor,  au  sujet  du  prieuré  de  Saint- 
Léons,  Rigald,  abbé  de  Vabres,  se  soustrait  à  sa  juridiction, 

1.  Cart.  de  Saint-Victor,  n"  H21i.  —  Gallia  chr.,  I,  instr.,  57. 

2.  Peyralbe,  comm.  de  Versols  (Aveyron),  arr.  et  canton  de  Saint- 
Affriquo. 


POSSESSIONS   DE   S'-VICTOR  DE  MARSEILLE  EN    ROUERGUE.       451 

mais  il  la  reconnaît  bientôt  en  1127^  Alton,  archevêque 
d'Arles,  et  Adhémar,  évêque  de  Rodez,  furent  les  concilia- 
teurs de  ce  différend . 

Vers  le  milieu  du  xii<=  siècle,  les  moines  de  Vabres  cher- 
chent à  se  rendre  indépendants  des  Bénédictins  de  Marseille. 
Ces  derniers  obtiennent  contre  les  révoltés  une  bulle  d'ex- 
communication du  pape  Eugène  III,  que  renouvelle  son  suc- 
cesseur Anastase,  le  l»""  mai  1154 -. 

Au  début  du  xiii®  siècle,  ils  sont  soumis  à  Saint-Victor, 
puisque  l'abbé  Bonfils,  en  1217^,  fait  personnellement  la  visite 
de  leur  monastère. 

Ces  moines  turbulents  ne  tardent  pas  à  se  soulever  de  nou- 
veau. Dans  un  acte  du  22  décembre  1235 ^  Pierre  IV,  abbé  de 
Saiût-Victor,  surnommé  Guillaume  depuis  1234,  réclame  de 
l'abbé  Prolian  l'obédience  qui  lui  est  due  aux  termes  de  la 
charte  de  1127'*.  Prolian  fait  humblement  sa  soumission,  en 
son  nom  et  au  nom  de  ses  successeurs  dans  la  charge  abba- 
tiale. Les  promesses  durent  se  réaliser;  on  ne  rencontre  plus, 
en  effet,  de  trace  de  rébellion. 

Après  trois  siècles  d'existence,  la  célèbre  abbaye  de  Vabres 
fut  changée  par  le  pape  Jean  XXII  en  église  cathédrale,  l'an- 
née 1317. 

La  première  charte  relative  à  Saint-Amans  de  Rodez  est 
datée  de  l'an  1079^.  Pons,  évêque  de  Rodez,  y  déclare  que 
cette  abbaye,  jadis  si  belle  par  sa  floraison  de  vie  monastique, 
étant  devenue  peu  à  peu  séculière,  Robert,  comte  d'Auver- 
gne, et  son  épouse  Berthe,  fille  d'Hugues,  comte  de  Rodez, 
afin  de  la  rétablir  dans  son  ancienne  ferveur,  la  donnènmt  à 
Bernard,  abbé  de  Saint-Victor. 

L'élection  de  ce  dernier  remonte  au  29  mars  1064;  l'origine 
de  Saint-Amans  comme  dépendance  de  Saint-Victor  ne  peut 


1.  Cart.  de  Saitit- Victor,  n»  785. 

2.  Ibid.,  n"  640. 

3.  Ibid.,  n»  891. 

4.  Ibid.,  n»  892. 

5.  Ibid.,  n°890. 

6.  Ibid.,n'>  837. 


452  G.    ARNAUD   D  AGNEL. 

donc  pas  être  fixée  à  une  époque  antérieure  à  cette  date.  De 
fait,  les  Bénédictins  de  Marseille  n'entrèrent  en  possession 
effective  qu'eu  1079. 

En  1082 S  Pons-Etienae,  évêque  de  Rodez,  charge  l'abbaye 
de  Saint-Victor  de  pourvoir  au  service  religieux  de  l'église 
paroissiale  de  Saint-Amans,  qu'il  lui  donne  en  jouissance. 

L'évêque  Adhémar  confirme  en  1120^  l'acte  de  Pons-Etienne. 

D'après  un  mémoire  de  1752^,  l'église  dont  il  est  ici  ques- 
tion serait  un  antique  édifice.  Bâtie  au  v«  siècle  par  les  ci- 
toyens de  Rodez,  elle  fut  consacrée  par  l'illustre  Sidoine 
Apollinaire,  évêque  de  Clermont  :  le  diocèse  de  Rodez  se 
trouvait  alors  sans  évêque,  le  dernier  ayant  été  martyrisé 
comme  plusieurs  de  la  région. 

Le  fait  se  trouve  relaté  dans  une  lettre  de  Sidoine  Apolli- 
naire^ au  prêtre  Elaphius,  qui  l'avait  prié  de  venir  faire  la 
consécration  de  l'église  de  Saint-Amans.  L'évêque  lui  répond 
qu'il  amènera  avec  lui  le  personnel  ecclésiastique  suffisant 
pour  faire  cette  cérémonie.  Sidoine  félicite  les  habitants  de 
Rodez  d'avoir  eu  le  courage  de  construire  et  d'élever  jusqu'au 
faîte  une  nouvelle  église  dans  un  temps  où  l'on  osait  à  peine 
réparer  les  anciennes. 

Le  prieuré  de  Saint-Amans  avec  ses  appartenances  demeura 
sous  la  dépendance  de  Saint-Victor  jusque  vers  la  fin  du 
xviii®  siècle. 

En  1070^  Bérenger  donne  à  son  frère,  l'abbé  Bernard, 
l'église  de  Notre-Dame  de  Millau  avec  ses  dépendances,  eccle- 
siam  B.  Marie  que  sila  est  in  pago  Rulenico  in  vico 
Amilaudo. 

Il  est  question  de  cette  église  dans  une  charte  originale  de 
873^.  Le  document  du  ix«  siècle,  d'une  conservation  parfaite, 
est  un  acte  de  la  vente  faite  par  Bernard,  comte  de  Toulouse, 


1.  Cart.  de  Saint-Victor,  n"  835. 

2.  Archives  des  Bouches-du-Rhône,  H  80. 
'ô.  Archives  des  Bouches-du-Rhône,  H  274, 

4.  Sidoine  Apollinaire,  1.  IV,  ep.  16,  éd.  Baret. 

5.  Archives  des  Bouches-du-Rhône,  H  50. 

6.  Archives  des  Bouches-du-Rhône,  H  8. 


POSSESSIONS   DE   S'-VICTOR   DE   MARSEILLE   EN   RODERGUE.      453 

et  sa  femme  Ermengarde  à  Ricard  et  à  sa  femme  Rotrude, 
pour  le  prix  de  100  sous,  de  terres  et  d'églises  situées  dans  la 
viguerie  de  Millau,  au  lieu  appelé  Noveliacus  ^  :  cum  ipsas 
aecclesias  qui  sunt  fundatas  in  onore  Sancii  Pétri  vel 
Sancle  Marie  seu  et  Sancti  Byncii. 

Le  prieuré  de  Millau  est  mentionné  dans  l'acte  de  donation 
de  Pons-Etienne  en  1082^,  ainsi  que  dans  la  bulle  de  Gré- 
goire VII  en  1079  ^  sous  le  titre  :  monasterium  Sancte 
Marie  in  Amiliavo. 

L'abbaye  de  Saint-Victor  demeure  en  possession,  jusqu'à  la 
fin  du  xvin«  siècle,  de  Notre-Dame  de  Millau,  ainsi,  d'ailleurs, 
que  des  trois  autres  prieurés  de  Castelnau  de  Levezou,  de 
Saint-Pierre-Saint-Léons  et  de  Saint- Gêniez  de  Rive  d'Olt. 

En  1069,  Aicfred  et  sa  feuime  Arsinde  donnent  à  l'abbaye 
marseillaise  l'église  de  Saint-Michel-Archange  de  Castelnau 
de  Levezou,  construite  par  Bernard,  oncle  d'Aicfred. 

Cette  église  figure  dans  la  bulle  de  Grégoire  VII,  du 
4  juillet  1079  :  cellam  Sancti  Michaelis  de  Castello  novo. 

La  première  mention  du  prieuré  de  Saint-Pierre-Saint- 
Léons  se  trouve  dans  le  même  acte  pontifical  :  monasterium 
Sancti  Pétri  et  Sancti  Leoncii;  ainsi  que  celle  du  prieuré 
de  Saint-Geniez,  appelé  simplement  cellam  Sancii  Genesii 
super  fluvium,  OU. 

L'origine  des  possessions  de  Saint-Victor  eu  Rouergue  se 
rattache  principalement  à  Bernard  qui  gouverna  l'abbaye  de 
mars  1064  au  19  juillet  1079. 

L'abbé  Bernard,  membre  de  la  puissante  famille  des  comtes 
de  Rodez,  et  ses  frères  Bérenger,  Hugues,  Raymond  et  Richard, 
cardinal-prêtre  de  l'Eglise  romaine,  se  montrèrent  tous  très 
généreux  à  l'égard  de  Saint-Victor. 


1.  Noveliacus  serait  l'ancien  nom  de  Saint-Léons  (J.  R[ouquette],  dans 
le  Messager  de  Millau,  22  janv.  1887,  et  Artières,  'Annales  de  Millau, 
1899,  p.  14).  Ces  auteurs  donnent  la  forme  Noviliacus,  sans  doute  d'après 
Hist.  de  Languedoc,  t.  II,  pr.  c.  37G.  Au  t.  IV,  p.  567,  on  a  traduit  ce 
mot  par  Nnaillac,  ce  qui  paraît  improbable;  la  table  en  fait  un  nom  de 
lieu  de  l'arrondissement  de  Rodez. 

2.  Cart.  de  Saint-Victor,  n»  835. 

3.  Ibid.,  n»843. 


454  G.    ARNAUD    D'aGNEL. 

Les  Bénédictins  de  Marseille  durent  encore  à  l'abbé  Ber- 
nard la  confirmation  des  biens  de  l'abbaye  par  le  pape  Gré- 
goire VIT,  le  4  juillet  1079,  ainsi  que  l'exemption  de  toute 
puissance  ecclésiastique. 

Le  Souverain  Pontife  ne  pouvait  refuser  ce  témoignage  de 
satisfaction  à  celui  qui  lui  avait  rendu  tant  et  de  si  précieux 
services  à  la  diète  de  Forcheim,  où  il  avait  été  son  légat,  et 
en  Espagne,  où  il  avait  rétabli  la  concorde  entre  les  fils  de 
Raymond-Bérenger,  comte  de  Barcelone. 

IL  —  Importance  relative  des  prieurés. 

L'abbaye  de  Vabres*  jouit  d'une  grande  célébrité  pendant 
les  quatre  siècles  de  son  existence. 

Assise  sur  le  Dourdou,  affluent  de  la  Sorgues,  elle  exerce 
sa  domination  sur  la  plupart  des  paroisses  et  chapelles  de  la 
vallée  de  la  Sorgues  et  sur  quelques  autres  plus  éloignées. 

C'est  ainsi  qu'en  1127,  Bernard,  abbé  de  Saint-Victor, 
donne  à  Rigald,  abbé  de  Vabres,  en  possession  perpétuelle,  les 
églises  de  Sainte-Marie  d'Octobiano^,  de  Semarde^  et  de 
Petra*.  D'après  un  procès-verbal  de  visite  en  1217,  il  faut 
ajouter  aux  églises  précédentes  celles  de  Pont^  et  de 
Biarnz  ^. 

De  ces  diverses  possessions,  la  principale  est  l'abbaye  de 

1.  Vabi-es,  comm.  de  Saint-AlTrique.  —  Raymond,  comte  et  marquis  de 
Toulouse,  par  un  acte  du  3  novembre  868,  cède  le  lieu  de  Vabres,  avec 
un  certain  nombre  d'églises,  de  villages  et  de  serfs,  à  l'abbé  Adalgise 
du  monastère  de  Paunat,  en  Périgord,  bouleversé  par  l'invasion  nor- 
mande. L'année  suivante,  Raymond  fait  confirmer  ces  donations  par 
Charles  le  Chauve.  L'abbaye  de  Vabres  crée  le  pi'ieuré  de  Nant  en  926, 
devenu  abbaye  en  1135,  celui  de  la  Vergne  fondé  en  944,  celui  de  Saint- 
Marcel  en  985.  (Hist.  de  Latiguedoc,  éd.  Privât,  t.  IV,  p.  566.) 

2.  Un  lieu  identique  du  Gard  (Germer-Durand,  Dict.  topogr.  du  Gard) 
donne  Uchau. 

3.  Semarde,  Sommard  (?)  comm.  de  Saint-Martin-de-la-Guépie  (Tarn), 
arr.  de  Gaillac,  canton  de  Cordes. 

4.  Petra,  idem  Petra  alha,  Peyralbc,  comm.  de  Vabres  (Aveyi'on), 
arr.  et  canton  de  Saint- Affrique. 

5.  Pont  ou  Pontes,  Pont  de  Saint-Beauzély,  arr.  de  Saint- Alïri que. 

6.  Bianz,  Bias,  comm.  de  Vabres  (Aveyron),  arr.  et  canton  de  Saint- 
Affrique. 


POSSESSIONS    L)E   S*-VICTOR  DE  MARSEILLE  EN   ROUERGUE.      455 

Nant',  sise  dans  la  petite  ville  de  ce  nom.  Il  reste  de  l'ancien 
monastère  une  belle  église  romane  du  xii«  siècle,  classée 
parmi  les  monuments  historiques. 

Après  la  transformation  de  l'abbaye  de  Vabrespar  Jean  XXII 
en  évêché',  Nant  demeura  la  propriété  de  Saint-Victor  jus- 
qu'à la  fin  du  xviii<^  siècle,  mais  sans  être  réunie  au  prieuré 
de  Saint-Amans  et  à  d'autres  du  ressort  des  Bénédictins  de 
Marseille. 

D'après  les  procès- verbaux  des  visites  du  25  juillet  1572,  du 
4  novembre  1667  et  du  8  novembre  1684,  le  prieuré  de  Nant  a 
la  collation  de  la  cure  de  Saint-Jacques,  paroisse  de  Nant,  de 
celle  de  Saint-Martin,  dans  le  territoire  de  la  ville,  des  prieu- 
rés de  Saint-Michel  de  Rouviac^,  de  Saint-Etienne  de  Canto- 
bre*,  de  Saint-Pierre  de  Vican'',  de  Dourbies*"',  ainsi  que  de 
la  cure  de  Trêves  ^. 

Il  n'y  a  aucun  détail  précis  sur  la  richesse  de  l'abbaye  de 
Vabres  et  sur  les  droits  seigneuriaux  de  ses  abbés. 

Le  prieuré  de  Saint-Amans  de  Rodez  est  l'un  des  plus  riches 
du  Rouergue  ;  d'après  la  charte  de  Pons-Etienne,  les  églises 
de  Boadone^,  de  Stagno^  et  de  Electe  de  Belvider*"  en  dépen- 
dent; mais  en  1162  Alexandre  III,  à  la  suite  d'un  différend 
entre  les  moines  de  Saint-Amans  et  les  chanoines  de  Boadone, 
attribue  à  ces  derniers  ladite  église. 

Dans  des  notes  d'acte  de  1403  et  1414  figurent  les  églises  de 
Saint -Amans,  de  Saint  Naamas  et  Sainte -Magdeleine  du 
Bourg,  de  Saint-Austreraoine",  de  Lapragne  et  de  Vialar'^, 

1.  Nant,  chef-lieu  de  canton  de  l'an",  do  Millau. 

2.  L'évêché  de  Vabres,  fondé  en  1317,  fut  suiJprimé  en  1790. 

3.  Comm.  de  Nant,  à  3  kilomètres. 

4.  Cantobre,  conim.  de  Nant,  à  6  kilomètres. 

5.  Saint-Pierre  du  Vigan,  fondé  en  1050,  dans  l'arr.  du  Vigan  (Gard). 

6.  Dourbias,  comm.  de  Nant,  à  5  kilomètres. 

7.  Trêves,  chef-lieu  de  canton,  arr.  du  Vigan  (Gard). 

8.  Bozouls,  chef-lieu  de  canton  (Aveyron),  arr.  de.Rodez,  sur  le  Dour- 
dou. 

9.  Estaing  (Aveyron),  arr.  d'Espalion. 

10.  Saint-Ghély-d'Aubrac  (Aveyron),  arr.  d'Espalion. 

11.  Saint-Austremoine,  comm.  de  Salles-la-Source,  cant.  de  Marcilhac, 
arr.  de  Rodez. 

12.  Viala-du-Tarn,  cant.  de  Saint-Beauzély. 


456  G.    ARNAUD   D'aGNEL. 

ainsi  que  les  deux  prieurés  de  Sainte-Catherine  du  Bourg  et 
de  Vialar. 

Mais  un  procès-verbal  de  visite  du  28  octobre  1684  nous 
apprend  que  le  prieuré  de  Vialar,  voisin  de  Millau,  était  ratta- 
ché à  cette  époque  à  l'abbnye  du  monastère  de  Saint-Sernin 
de  Rodez,  et  qu'une  partie  du  prieuré  de  Bozouls,  sous  le  titre 
de  Sainte-Fauste,  jadis  sous  la  dépendance  de  Saint-Amans» 
était  maintenant  possédée  par  le  chapitre  de  la  cathédrale  de 
Rodez. 

Le  prieuré  de  Saint-Amans  doit  sa  richesse  à  ses  possessions 
nombreuses,  —  principalement  à  la  belle  paroisse  de  Saint- 
Amans  '  —  plutôt  qu'à  l'importance  du  monastère  lui-même, 
qui  ne  comprend,  selon  un  catalogue  de  1378,  que  le  prieur, 
le  sacriste,  le  camérier  et  quatre  moines. 

Près  de  Saint-Pierre^  se  voient  encore  les  ruines  du  mo- 
nastère de  Saint- Pierre -Saint-Léons  dont  dépendaient  au 
XI*'  siècle  les  églises  de  Saint-Pierre  d'Alsobre^,  de  Saint- 
Etienne  ad  Vivarium'',  de  Sainte-Marie  de  Gleyse-Nove^  et 
de  Mauriac ''. 

En  1403,  les  possessions  de  Saint-Pierre-Saint-Léons  se 
composent  des  trois  rectorats  de  Saint-Laurens  de  Levezou  ", 
de  Saint-Léons*^  et  de  Saint-Amans  du  lieu  de  Sigure(?)  ■',  de 
la  chapelle  de  la  bienheureuse  Marie-Magdeleine  de  Mauriac 
et  du  prieuré  de  Brocuejouls.  De  tous  les  monastères  soumis 
aux  Bénédictins  de  Marseille,  celui  de  Saint-Pierre-Saint- 
Léons  est  le  plus  pauvre. 


1.  Actuellement  une  des  églises  paroissiales  de  Rodez. 

2.  Saint-Pierre,  comm.  de  Saint-Léons,  arr.  de  Millau,  cant.  de  Vezins 
(Aveyron). 

3.  Anciennement  Saint-Pierre  de  Soulobre  (AYeyron),    arr.,  cant.  et 
comm.  de  Millau. 

4.  Saint-Estiei:\no  de  Yiauresque,  comm.  du  cant.  de  Vezins  (Aveyron), 
arr.  de  Millau. 

5.  Gleyze-Nove,  comm.  et  cant.  de  Vezins,  arr.  de  Millau. 

6.  Mauriac,  comm.  de  Saint-Léons  (Aveyron),  cant.  de  Vezins,  arr.  d^ 
Millau. 

7.  Saint-Laurens  de  Levezou,  cant.  de  Vezins,  Millau. 

8.  Saint-Léons,  cant.  de  Vezins,  Millau. 

9.  Ségur,  cant.  de  Vezins,  arr.  de  Millau. 


POSSESSIONS   DE   S'-VICTOR   DE   MARSEILLE   EN   ROUERGDE.      457 

Le  prieuré  de  Castelnau  '  a  conservé  les  églises  de  sa  colla- 
tion pendant  la  longue  durée  de  son  existence.  Ce  sont  les 
quatre  paroisses  de  Castelnau,  de  Saint-Beauzély  de  Levezou-, 
de  Stalane-'  et  de  Salsac  *. 

Malgré  la  grande  étendue  de  son  domaine,  le  cloître  de 
Saint- Michel  de  Castelnau  n'aîjrite  qu'un  prieur,  un  sacriste 
et  un  moine. 

Des  actes  du  xyiii®  siècle  permettent  de  situer  le  prieuré  de 
Castelnau  :  compris  dans  les  limites  du  marquisat  de  Pégay- 
rolles,  le  monastère  se  trouvait  donc  au  village  de  Castelnau- 
PégayroUes. 

Le  prieuré  de  Saint-Geniez  de  Rive-d'Olt''  s'élevait  au  lieu 
de  Saint-Geniez  actuel,  sur  le  Lot,  qui  coule,  en  amont  et  en 
aval  de  la  ville,  dans  de  belles  gorges.  Ce  monastère  de  peu 
d'importance,  ne  comprenant  qu'un  prieur  et  un  sacriste, 
n'avait  sous  sa  juridiction  que  la  cure  de  Saint-Geniez  et  celle 
de  Clara-Faja. 

Quanl  au  prieuré  de  Notre-Dame-d'Espinasse  de  Millau^, 
sanctuaire,  lieu  de  pèlerinage,  célèbre  au  moyen  âge,  il  n'est 
fait  mention  d'aucun  autre  bien  qui  lui  appartienne.  D'après 
un  procès- verbal  de  visite  du  14  mai  1572,  un  prieur,  un  sacris- 
tain, trois  religieux  et  quatre  panetiers  habitent  le  monastère 
de  Millau. 

L'abbaye  de  Nant  est  la  possession  la  plus  riche  de  Saint- 
Victor  de  Marseille  en  Rouergue.  Elle  possède  à  Nant  de  vas- 
tes prairies,  des  champs,  un  four,  deux  moulins  banaux,  et  au 


1.  Castelnaii-Pégayi'olles,  cant.  de  Saint-Beauzély,  arr.  de  Millau. 

2.  Saint-Beauzély,  chef-lieu  de  cant.  de  l'arr.  de  Millau,  au  pied  du 
Levezou,  ancien  château. 

3.  Estalane,  comm.  de  Castelnau-Pégayrollos,  cant.  de  Saint-Beauzély, 
arr.  de  Millau. 

•i.  Salsac,  hameau  de  la  comm.  de  Saint-Beauzély.  Au  xtiii»  siècle 
l'église  de  Salsac  est  abandonnée  à  cause  de  son  éloignement  de  toute  ha- 
bitation; les  paroissiens  vont  à  l'église  d'Azinières,  plus  rapprochée. 

5.  Saint-Geniez,  chef-lieu  de  canton,  arr.  d'Espalion  ;  église  du 
XIV'  siècle. 

6.  Millau,  chef-lieu  d'arr.  (Aveyron),  sur  la  rive  gauche  du  Tarn; 
église  Notre-Dame,  romane,  mais  complètement  remaniée  à  la  fin  du 
.Kvi»  siècle. 


458  G.    ARNAUD   D'AGNEL. 

terroir  de  Saint-Martin  de  grandes  terres,  une  métairie  noble, 
un  château,  etc.  En  1684,  ses  revenus  nets  s'élèvent  à 
4,000  livres,  tandis  que  ceux  du  monastère  de  Millau,  toute 
charge  pa^ée,  n'atteignent  pas  3.000  livres.  Toujours  à  la 
même  époque,  le  prieuré  de  Saint-Pierre-Saint-Léons  produit 
net  2,000  livres,  celui  de  Castelnau  1,600  livres  et  celui  de 
Saint- Gêniez  ne  rapporte  que  800  livres.  Les  revenus  bruts  de 
Saint-Amans  de  Rodez  sont  de  1,900  livres,  mais  les  lourdes 
charges  de  ce  monastère  les  mangent  presque  en  entier. 

Une  série  de  baux  d'arrentement  permettent  de  suivre  la 
marche  progressive  des  revenus  du  prieuré  de  Saint-Michel 
de  Castelnau. 

Affermé  en  1738,  pour  2,100  livres,  deux  ans  plus  tard  le 
prix  du  fermage  tombe  à  1,050  livres,  mais  remonte  en  1750  à 
3,050  livres,  en  1770  à  3,280  livres;  de  1783  à  1789  l'arren- 
tement  est  de  6,150  livres. 

L'on  observe  une  progression  analogue  dans  les  revenus  de 
Saint-Geniez  qui,  de  800  livres  en  1684,  nets  de  toute  charge, 
atteignent  2,384  livres,  en  1769,  revenu  brut,  il  est  vrai. 

Le  prieur  possède  deux  maisons  et  le  pré  de  Roubiac  dans 
le  terroir  de  Castelnau.  Il  jouit,  dans  toutes  les  paroisses  dé- 
pendantes du  prieuré,  de  la  dîme  qui  est  perçue  au  onzain 
sur  tous  les  grains  et  légumes  d'hiver,  celle  des  raisins  se  per- 
cevant sur  la  vigne. 

Le  prieur  a  des  droits  de  lods,  censives,  quints  et  quarts  sur 
les  biens  serviles  du  prieuré;  ces  derniers  droits  constituent 
la  plus  abondante  source  de  revenus,  car  le  fermier  a  le  droit 
de  lever  sur  les  gerbiers  des  fonds  serviles  la  quatrième  ou  la 
cinquième  gerbe,  suivant  la  nature  de  la  servitude. 

De  toutes  les  dépendances  de  Castelnau,  la  plus  onéreuse 
est  Saint-Beauzély,  dont  la  denrée  principale  consiste  en  châ- 
taignes et  autres  fruits  sur  lesquels  il  n'y  a  nulle  dîme. 

Le  prieur  de  Saint-Pierre-Saint-Léons  possède  de  grands 
biens,  entre  autres  la  métairie  et  seigneurie  de  Méricamp  '  où 
se  trouvent  des  bois  assez  importants.  Quant  aux  droits,  ce 

1.  Méricamp,  comm.  d'Aguesscac  (Avoyron),  arr.  de  Millau. 


POSSESSIONS   DE   S'-VICTOR   DE   MARSEILLE  EN  ROUERGUE.      459 

sont  à  peu  près  les  mêmes  que  ceux  dont  jouit  le  prieur  de 
Caslelnau. 

Le  prieur  de  Saint-Geniez  n'a  d'autre  domaine  à  Saint- 
Geniez  qu'un  pré  sur  le  bord  du  Lot  et  un  petit  terrain  dit  le 
Chénevrier,  mais  il  a  beaucoup  de  directes  sur  divers  biens 
de  la  ville  et  du  terroir. 

Le  terroir  de  Saint-Geniez,  très  vaste,  n'est  que  vallons  et 
montagnes.  Sur  le  penchant  des  collines  se  trouvent  des  ver- 
gers et,  dans  les  vallons,  des  prairies.  Sur  les  montagnes  on 
sème  les  grains,  mais  il  y  a  peu  de  montagne. 

Rien  d'intéressant  à  dire  sur  les  droits  des  prieurs  de  Saint- 
Amans  et  de  Millau. 

Toutes  les  recherches  relatives  aux  produits  en  nature  des 
possessions  de  Saint-Victor  de  Marseille  en  Rouergue  mettent 
en  évidence  ce  fait  économique  que  la  grande  richesse  du 
pays  consistait  autrefois  comme  maintenant  dans  l'élève  des 
bestiaux ^  l'industrie  de  la  laine,  la  fabrication  des  fromages 
(façon  Roquefort,  caves  du  Lac  à  Saint-Geniez  de  Rive- 
d'Olt). 

Les  principaux  produits  agricoles  sont  l'orge  et  Tavoine, 
que  l'on  récolte  dans  tous  les  prieurés,  le  froment,  cultivé 
surtout  à  Millau  et  dans  les  terres  de  l'abbaye  de  Vabres,  par 
contre  si  rare  à  Saint-Pierre-Saint-Léons  qu'il  suffit  à  peine 
à  la  nourriture  des  moines.  Le  seigle  se  recueille  dans  les 
régions  montagneuses  des  dépendances  de  Nant  et  de  Castel" 
nau  de  Levezou. 

Les  seuls  vignobles  importants  sont  ceux  de  Saint-Geniez 
de  Rived'Olt.  En  1603,  le  prieur  de  ce  monastère  arrenle  son 
droit  de  dîme  du  vin  300  ou  400  livres.  Le  8  mars  1774,  il 
paye  à  maître  Julien,  notaire,  123  livres  pour  expédition  de 
l'acte  des  abonnements  des  vignes  de  Saint-Geniez. 

D'autres  vignobles  moins  riches  sont  ceux  de  Saint-Austre- 
moiue,  relevant  du  prieuré  de  Saint-Amans  de  Rodez  et  de 
Lastieyres,  dépendance  du  prieuré  de  Castelnau  de  Levezou. 

l.  Le  porc  était  aussi  une  grande  ressource,  un  des  principaux  aliments 
des  populations  rurales.  Dans  les  dons  en  nature  faits  aux  curés  et  des- 
servants figurent  toujours  un,  deux  ou  trois  porcs. 


460  G.    ARNAUD    d'AGNEL. 

Dans  les  chartes,  il  est  aussi  question  des  prairies  fertiles  de 
l'abbaye  de  Vabres. 

En  comparant  leurs  possessions  du  Rouergue  à  celles  des 
terroirs  d'Aix,  d'Avignon,  de  Fréjus  et  de  Marseille,  les  Béné- 
dictins de  Saint -Victor  devaient  les  trouver  assez  pauvres. 
Les  châtaignes  de  Saint-Beauzély  faisaient  sur  leur  table 
triste  figure  à  côté  des  légumes  et  des  fruits  exquis  de  la  Pro- 
vence. 

III.  —  Organisation    intérieure    des   prieurés.  —  Vie 

INTELLECTUELLE,    MORALE   ET    RELIGIEUSE   DES    MOINES. 

L'organisation  intérieure  des  prieurés  de  Saint- Victor  en 
Rouergue  ressemble,  dans  ses  traits  généraux,  à  celle  des 
innombrables  monastères  du  moyen  âge. 

Les  moines,  au  lieu  de  former  une  sorte  de  république  reli- 
gieuse, selon  l'esprit  des  fondateurs  de  la  vie  monastique,  sont 
les  victimes  d'un  prieur  dont  la  haute  personnalité  efTace 
complètement  la  leur.  C'est  la  volonté,  c'est  l'arbitraire  de  ce 
chef  qui  fait  la  loi  plutôt  que  les  constitutions  dont  l'abbé 
n'était  jadis  que  l'interprète.  Il  ne  faudrait  pas  conclure  de  ce 
fait  que  les  moines  soient  tenus  très  sévèrement,  surveillés 
dans  leurs  moindres  actes;  tout  au  contraire,  ils  jouissent 
d'une  très  grande  liberté,  grâce  à  l'incurie  des  prieurs,  uni- 
quement préoccupés  de  retirer  le  plus  d'argent  possible  de 
leur  bénéfice,  sans  nul  souci  de  faire  vivre  selon  la  règle  leurs 
religieux. 

Cette  transformation  a  lieu  pour  l'abbaye  de  Saint-Victor 
de  Marseille  au  xi*  siècle;  elle  coïncide  avec  sa  prodigieuse 
extension,  dont  elle  est  d'ailleurs  une  des  causes  principales. 
D'une  part  les  abbés,  sentant  que  leur  autorité  augmente, 
mettent  tout  en  œuvre  pour  lui  donner  une  sphère  d'influence 
toujours  plus  ample  ;  de  l'autre  les  moines,  animés  d'un  esprit 
de  concurrence,  cherchent  à  rendre  leur  abbaye  plus  pros- 
père en  plaçant  à  sa  tète  des  hommes  riches  et  de  haute  nais- 
sance. 

Naturellement,  les  prieurs  de  province  imitent  le  tout-puis- 


POSSESSIONS   DE   S'- VICTOR  DE  MARSEILLE   EN   ROUERGUE.      461 

sant  abbé  de  Saint- Victor,  d'autant  que  ce  sont  ses  créatures 
qui  reçoivent  d'ordinaire  en  commende  les  bénéfices. 

L'bistoire  des  possessions  des  Bénédictins  de  Marseille  en 
Rouergue  est  pleine  des  injustices  des  prieurs  envers  les 
moines. 

Les  abbés  de  Saint- Pierre  de  Nant,  malgré  la  richesse  de 
l'abbaye,  n'entretiennent  pas  la  maison  claustrale.  En  1684, 
aucune  chambre  n'est  habitable,  le  réfectoire  est  dépavé,  tan- 
dis que  la  maison  abbatiale  est  en  bon  état. 

Un  prieur  commendataire  de  Saint-Geniez  loue  la  maison 
claustrale  sans  s'inquiéter  de  la  destination  que  donne  le  loca- 
taire à  l'immeuble,  et,  à  son  grand  scandale,  un  visiteur  de 
Saint-Victor  trouve  la  maison  transformée  en  cabaret;  on  y 
sert  à  boire  même  pendant  les  offices,  les  dimanches  et  fêtes, 
de  sorte  que  les  cérémonies  du  culte  sont  troublées  par  les 
chants  des  ivrognes. 

Dans  la  plupart  des  procès-verbaux  de  visite  il  est  question 
du  délabrement  des  cloîtres,  du  manque  de  meubles  et  d'us- 
tensiles de  ménage  nécessaires,  en  un  mot  d'un  état  de  ruine 
qui  rend  l'immeuble  inhabitable.  Les  ordonnances  de  Saint- 
Victor  obtiennent  bien  quelques  réparations,  mais  insuffi- 
santes, et  l'avarice  des  prieurs  ne  tarde  pas  à  faire  déserter 
de  nouveau  la  maison  claustrale.  Cette  avarice  est  encore 
funeste  aux  paroisses  et  chapelles  qui  dépendent  des  prieurés. 
Quand  on  lit  l'inventaire  des  ornements  et  vases  sacrés,  on 
est  surpris  de  l'absence  d'objets  indispensables  au  culte  et 
de  l'état  de  saleté  et  d'usure  des  chasubles,  pluviaux,  linges 
sacrés,  calices,  etc. 

Ainsi,  au  xviii®  siècle,  le  curé  d'Estalane,  pour  ne  citer  qu'un 
cas,  représente  pendant  plusieurs  années  au  prieur  de  Cas- 
telnau  la  misère  de  sa  sacristie;  enfin,  voyant  que  personne 
ne  s'en  occupe,  il  sollicite  une  visite  de  l'évêque  de  Rodez  qui, 
à  la  requête  des  marguilliers  d'Estalane,  rend, une  ordonnance 
contre  le  prieur  de  Castelnau.  Le  sénéchal  du  Rouergue  met 
une  saisie  sur  les  biens  du  prieuré. 

A  maintes  reprises,  les  évêques  de  Rodez  rappellent  aux 
prieurs  des  possessions  de  Saint-Victor  dans  le  diocèse  qu'à 


462  G.    ARNAUD   d'AGNEL. 

défaut  de  fabrique  dans  une  paroisse  la  fourniture  et  l'entre- 
tien des  ornements,  calices,  etc.,  sont  à  la  charge  du  prieur 
décimateur  et  nullement  à  celle  du  curé  soit  congruiste,  soit 
pensionné.  D'ailleurs,  de  toutes  les  églises  dépendantes  des 
prieurés,  celles  dont  le  mobilier  est  le  plus  en  ordre  sont  pré- 
cisément les  paroisses  entretenues  par  les  consuls  de  l'en- 
droit. Tandis  que  les  prieurs  reculent  devant  les  plus  petites 
dépenses,  les  consuls  se  montrent  plutôt  prodigues.  Ce  fait  est 
mis  en  lumière  dans  un  mémoire  sur  l'église  de  Saint-Amans 
de  Rodez.  On  y  apprend  que  les  consuls  ont  donné  six  cloches, 
de  magnifiques  châsses,  des  monstrances,  des  chandeliers  et 
des  encensoirs  en  argent  massif,  une  croix  processionnelle  en 
or  enrichie  de  perles  précieuses,  le  tout  aux  armes  de  la  ville 
de  Rodez. 

Peu  soucieux  d'entretenir  les  édifices  religieux  de  leur  col- 
lation, les  prieurs  négligent  aussi  de  donner  aux  curés,  secon- 
daires ou  desservants,  les  honoraires  convenables,  et  ne  les 
payent  pas  aux  termes  échus.  Certains  prêtres  ne  reçoivent 
que  150  livres.  Il  est  vrai  qu'ils  trouvent  souvent  une  com- 
pensation en  prenant  la  dîme  de  biens  sur  lesquels  ils  n'ont 
aucun  droit  de  la  percevoir.  Vers  la  fin  du  xviii^  siècle,  les 
curés  n'ont  plus  même  cette  compensation,  par  suite  des  mau- 
vaises récoltes. 

Le  12  octobre  1782,  le  curé  de  Saint-Beauzély  de  Levezou 
écrit  au  chapitre  de  Saint- Victor,  demandant  une  aumône  : 
«  Les  villages  de  la  paroisse  sont,  dit-il,  en  grande  détresse  à 
cause  des  mauvaises  récoltes;  plusieurs  particuliers  ont  été 
obligés  de  laisser  leurs  terres  sans  ensemencer.  Le  fruit,  et  en 
particulier  la  pomme,  qui  était  la  principale  ressource,  a 
manqué  totalement.  Les  gelées  survenues  sur  la  fin  d'octobre 
ont  emporté  la  moitié  des  châtaignes.  C'est  dans  de  pareilles 
circonstances  que  je  m'aperçois  de  la  modicité  de  mon  béné- 
fice. 

«  Pourtant  j'ai  de  grandes  dépenses;  je  suis  placé  sur  une 
route,  le  bourg  est  considérable  et  habité  en  grande  partie 
par  des  gens  qui  ne  possèdent  pas  de  fonds,  qui  n'ont  que  leurs 
bras  pour  faire  vivre  des  familles  nombreuses.  J'ai  vendu  un 


POSSESSIONS   DE   S'-VICTOR   DE   MARSEILLE  EN   ROUERGUE.      463 

cheval  qui  m'était  nécessaire  à  cause  des  villages  éloigaés  de 
ma  paroisse;  car  on  eu  est  réduit  par  la  famine  à  manger  les 
chevaux.  » 

Les  prieurs  ont  une  excuse  à  leurs  nombreuses  fautes 
envers  les  moines  et  les  églises  de  leur  dépendance,  à  savoir 
les  difficultés  de  toutes  sortes  auxquelles  ils  se  heurtent.  Con- 
sidérable aux  XI®,  xii«  et  xiii®  siècles,  leur  pouvoir  décline  de 
plus  en  plus  jusqu'à  la  Révolution.  Les  attaques  et  empiéte- 
ments des  seigneurs  jaloux  de  leur  prestige,  les  guerres  de 
religion,  l'ambition  des  évêques  de  Rodez  sont  cause  de  leur 
déchéance.  Un  mémoire  du  xviii®  siècle  constate  que,  malheu- 
reusement, le  prieuré  de  Castelnau  est  peu  à  peu  privé  de  la 
plus  grande  partie  de  ses  directes  par  la  malice  des  habitants, 
l'ignorance  des  fermiers  et  l'usurpation  des  seigneurs  voisins, 
principalement  du  marquis  de  Pégayrolles.  Aussi  le  prieur 
déclare-t-il  le  renouvellement  des  reconnaissances  du  prieuré 
en  faisant  dresser  à  nouveau  le  terrier  par  les  plus  habiles 
feudistes  du  Rouergue.  On  a  fait  précédemment  remarquer 
que  Saint-Amans  de  Rodez  avait  perdu,  en  1684,  la  propriété 
du  prieuré  de  Viala  et  d'une  partie  de  celui  de  Bozouls  sous  le 
titre  de  Sainte-Fauste.  A  Saint-Pierre-Saint-Léons,  à  Saint- 
Geniez,  à  Millau,  c'est  une  suite  de  procès,  la  plupart  au  détri- 
ment des  monastères. 

Les  charges  des  prieurs  étaient  relativement  légères  aux 
XI®,  XII®  et  xiii®  siècles,  alors  qu'affluaient  les  donations  en 
argent  et  en  nature;  mais  la  charité  des  fidèles  diminuant 
ainsi  que  les  revenus  des  prieurés,  elles  devinrent  gênantes. 
Un  exemple  typique  à  ce  sujet  est  rapporté  dans  un  factum 
rédigé  pour  messire  Bonaventure  de  Lafon,  prieur  de  Saint- 
Léons,  contre  les  syndics,  consuls  et  habitants  de  Saint- 
Léons  : 

«  Il  s'agit  d'une  aumône  inouïe  que  le  prieur  doit  faire  tous 
les  deux  jours  aux  habitants  du  lieu,  pauvres  et  riches  indis- 
tinctement. L'aumône  doit  se  faire  entre  les  portes  du  monas- 
tère, après  que  la  cloche  aura  sonné  à  l'élévation  de  la  messe 
des  religieux.  Or  les  habitants  envoient  à  la  pointe  du  jour 
un  particulier  de  chaque  maison  chercher  l'aumône,  puis  ils 


464  G.    ARNAUD   d'aGNEL. 

viennent  en  foule,  tumulte  et  sédition,  et  prennent  ainsi  dans 
la  même  distribution  trois  et  quatre  fois  l'aumône,  de  sorte 
que  tous  les  revenus  du  prieuré  ne  suffisent  pas  à  cette  charge. 
Pour  empêcher  un  tel  abus,  on  a  fait  faire  un  petit  fossé  le 
long  du  chemin  par  où  passent  les  habitants  pour  chercher 
l'aumône,  afin  de  les  y  faire  défiler  l'un  après  l'autre  pour  la 
recevoir,  et  qu'après  l'avoir  reçue  ils  ne  revinssent  point  sur 
leurs  pas.  ce  que  les  habitants,  principalement  les  riches, 
n'ont  pu  souffrir.  Venus  en  foule,  ils  comblèrent  le  fossé, 
enfoncèrent  les  portes  et  fenêtres  de  la  loge  du  distributeur  et 
lui  enlevèrent  tout  le  pain  de  l'aumône. 

«  Ces  faits  se  renouvelèrent  plusieurs  fois.  » 

Les  chartes  relatives  aux  possessions  de  Saint-Victor  en 
Rouergue  ne  contiennent  pas  de  preuve,  ni  même  d'indice 
attestant  quelque  vie  intellectuelle  parmi  les  moines.  Les 
vicissitudes  matérielles  des  maisons  claustrales,  dues  à  la 
négligence  des  prieurs,  empêchèrent  les  religieux  de  se  livrer 
à  tout  travail  sérieux  et  suivi. 

La  vie  de  l'esprit  ne  fut  pas  seule  à  se  ressentir  de  ce  dé- 
plorable état  du  temporel;  la  moralité  en  souflrit  encore 
davantage. 

Au  lieu  de  la  paix  et  de  la  douceur  évangéliques,  ce  ne  sont 
que  révoltes  des  religieux  contre  l'abbé  ou  le  prieur,  luttes 
sourdes,  quelquefois  ouvertes,  comme  à  Vabres  et  à  Saint- 
Geniez,  querelles  intestines  entre  Frères. 

A  l'abbaye  de  Vabres,  le  désaccord  est  tel  en  1217  que  Bon- 
fils,  l'abbé  de  Saint-Victor,  est  obligé  de  venir  en  personne 
rétablir  l'ordre.  Il  invite  l'abbé  à  se  démettre  de  sa  charge, 
poursuit  le  prieur,  le  sacristain  pour  vols  en  nature  de  vin, 
de  froment,  d'un  mulet,  etc.,  faits  au  monastère. 

Dans  leurs  rapports  avec  les  clercs  séculiers,  les  moines 
usent  quelquefois  de  violence.  C'est  ainsi  que,  d'après  une 
charte  du  6  juillet  1162,  les  chanoines  de  Rodez  furent  chassés 
par  force  de  l'église  de  Bozouls  par  les  moines  de  Saint- 
Amans  qui  s'installèrent  à  leur  place.  Aussi,  le  pape  Alexan- 
dre III  adjuge  l'église  de  Bozouls  à  l'évêque  de  Rodez  et  à  ses 
chanoines,  imposant  à  l'abbé  de  Saint-Victor  un  silence  per- 


POSSESSIONS    DE    S* -VICTOR    DE   MARSEILLE   EN    ROUERGUE.       465 

pétiiel,  tant  sur  la  propriété  que  sur  la  possession,  et  annulant 
tout  acte  antérieur. 

La  pauvreté  monastique  n'est  pas  mieux  observée  que  la 
charité  chrétienne.  Plusieurs  moines  cherchent  à  se  former 
un  petit  avoir  en  prélevant  quelque  chose  sur  les  distribu- 
tions qui  leur  sont  faites  en  argent  et  en  nature. 

Dans  sa  visite  à  Vabres,  l'abbé  Bonfils,  apprenant  que 
20  sous  sont  donnés  annuellement  à  chaque  moine  pour  son 
habillement,  voit  dans  cette  coutume  une  occasion  certaine 
pour  les  religieux  de  se  constituer  un  «  pécule  »  ;  aussi 
abroge-t-il  cet  usage  en  établissant  que  la  somme  totale  sera 
remise  au  camérier  afin  d'acheter  aux  Frères  les  vêtements 
convenables  selon  les  ressources  du  monastère. 

L'avarice  s'exerce  même  envers  les  morts.  11  est  raconté, 
dans  une  délibération  capitulaire  de  Saint-Léons,  que  deux 
confrères  ont  été  transportés  hors  de  leur  chambre  immédia- 
tement après  leur  décès;  que  les  corps  ont  été  exposés  dans  la 
galerie,  sans  cierges  ni  prières,  et  qu'il  n'y  a  pas  eu  de  messe 
de  RequieTïi.  Le  chapitre  décide  que  les  dépouilles  et  effets 
des  Frères  serviront  aussitôt  après  leur  mort  à  payer  ceux  qui 
les  auront  soignés  pendant  leur  dernière  maladie,  à  régler 
leurs  dettes  et  à  leur  procurer  les  honneurs  funèbres. 
Que  dire  de  la  conduite  morale  des  religieux? 
Les  grands  scandales  sont  rares,  mais  que  d'infractions  plus 
ou  moins  graves  à  l'austérité  du  célibat!  La  plupart  du  temps 
les  mœurs  sont  bien  plus  séculières  que  monastiques.  C'est 
toujours  la  faute  de  l'incurie  des  prieurs  et  de  l'existence 
oisive  que  mènent  les  moines,  devenus  beaucoup  plus  nom- 
breux que  ne  l'exigent  le  service  des  églises  et  les  besoins  des 
populations.  Jusqu'au   milieu  du  xvi»  siècle,   il  y  a  dans  la 
seule  ville  de  Millau  soixante-dix  prêtres  séculiers  environ, 
et  plus  de  cent  cinquante  religieux  répartis  dans  quatre  cou- 
vents. 

En  1684,  vingt-cinq  prêtres  habitués  assistent  aux  offices 
de  Saint-Geniez. 

Les  procès-verbaux  de  visite  fournissent  mille  renseigne- 
ments sur  les  mœurs  des  moines.  C'est  Guillaume  de  Rafelis 

ANNALES   DU   MIDI.   —   XVL  30 


466  G.    ARNAUD  d'aGNEL. 

de  Soissan  qui,  dans  son  inspection  dn  prieuré  de  Castelnau, 
en  1715,  renouvelle  les  anciennes  défenses  de  manger  au  ca- 
baret, sauf  en  voyage,  de  dire  la  messe  à  une  heure  indue  ou 
d'aller  la  dire  dans  les  églises  voisines. 

On  voit  par  là  que  tous  les  prétextes  étaient  bons  pour  se 
dissiper.  A  l'abbaye  de  Saint  Pierre  de  Nant,  il  y  a  de  tels 
abus  de  boissons  que  les  défenses  précédentes  sont  ainsi  sanc- 
tionnées :  «  Le  prieur,  ou  à  son  défaut  le  plus  ancien  profès, 
pourra  seul  donner  l'absolution  au  religieux  coupable  de 
fréquenter  le  cabaret;  encore  l'absolution  ne  sera  donnée 
qu'après  trois  jours  de  pénitence.  » 

A  Saint-Geniez,  à  Saint-Amans,  partout,  les  visiteurs  insis- 
tent sur  l'obligation  de  porter  en  public  une  soutane  de  laine 
noire,  et  en  voyage  ou  à  la  campagne  une  soutanelle  descen- 
dant jusqu'aux  genoux.  Les  moines  durent  revêtir  au  chœur 
le  grand  froc  et  coiffer  le  bonnet  carré.  Les  visiteurs  leur 
rappellent  sans  cesse  qu'il  leur  est  défendu  de  se  livrer  à  la 
chasse  à  courre  (clamosa),  de  jouer  à  des  jeux  de  hasard  (jeu 
de  mail),  de  sortir  seuls,  de  loger  des  femmes  dans  le  monas- 
tère, de  fréquenter  les  maisons  suspectes  et  les  mauvais 
lieux. 

La  vie  religieuse  subit  le  contre-coup  de  cette  légèreté  de 
mœurs.  Le  jeune,  la  prière,  l'assistance  à  l'office  sont  souvent 
négligés.  L'abbé  Bonflls  rappelle  aux  moines  de  Vabres  la 
règle  de  l'abstinence  à  certains  jours. 

Un  visiteur  de  Saint-Léons,  au  xvii«  siècle,  ordonne  aux 
religieux  de  faire  une  demi-heure  d'oraison  et  chaque  se- 
maine une  conférence  spirituelle.  D'après  de  nombreuses 
ordonnances  qui  furent,  hélas,  peu  en  vigueur  dans  tous  les 
prieurés,  un  Frère  doit  pointer  les  absents  de  l'office,  et  celui 
qui  passe  tout  un  jour  sans  paraître  au  chœur  est  privé  de 
quatre  sous. 

Il  est  vrai  qu'on  était  alors  plus  prodigue  qu'aujourd'hui 
des  cérémonies  liturgiques.  De  pieuses  fondations  rendaient 
très  onéreux  le  service  des  églises.  Ainsi,  un  sieur  de  Fabrè- 
gues  laisse  1,300  livres  pour  faire  dire  dans  l'église  de  Saint- 
Geniez  les  heures  canoniales  et  pour  y  faire  chanter  trois 


POSSESSIONS   DE   S'-VICTOR  DE   MARSEILLE   EN   RODERGDE.       467 

grand' m  esses  par  semaine,  plus  une  grancVinesse  mensuelle, 
le  premier  vendredi  de  chaque  mois,  en  l'hoaneur  des  Cinq- 
Plaies. 

Les  considérations  de  Taine  sur  la  décadence  progressive 
de  la  noblesse  s'appliquent  au  clergé  régulier.  Sous  le  régime 
féodal,  seigneurs  et  moines  jouent  un  rôle  très  important; 
ceux-ci  instruisent  les  populations  rurales  que  ceux-là  dé- 
fendent. Sous  les  rois,  au  contraire,  nobles  et  moines  perdent 
de  plus  en  plus  leur  raison  d'être ,  tout  en  conservant  une 
fortune,  des  exemptions  et  privilèges  qui  sont  plutôt  en  rap- 
port avec  leur  ancienne  fonction  sociale  qu'avec  leurs  ser- 
vices présents.  Dans  le  mécanisme  de  l'Etat,  ce  sont  des  roua- 
ges de  luxe,  pour  ne  pas  dire  inutiles. 

Les  aperçus  qu'ouvre  cette  étude  sur  la  vie  intellectuelle, 
morale  et  religieuse  des  prieurés  de  Saint-Victor  en  Rouergue 
mettent  une  fois  de  plus  en  évidence  la  vérité  de  cette  réflexion 
de  Montalembert  :  «  Il  vint  un  temps  où  l'abus  l'emporta  sur 
la  loi,  où  l'exception  écrasa  la  règle,  où  le  triomphe  du  mal 
sembla  irréparable^  » 

Cette  étude  n'est  ni  un  réquisitoire  contre  les  moines,  ni  un 
plaidoyer  en  leur  faveur;  elle  est  basée  sur  des  documents  de 
première  main.  La  plupart  des  renseignements  sont  puisés 
dans  les  procès-verbaux  des  visites,  qui  naturellement  ne  rela- 
tent que  les  torts  des  prieurs,  les  querelles  et  les  fautes  des 
moines,  gardant  le  silence  sur  tout  ce  qui  pourrait  être  dit  à 
leur  louange. 

Abbé  G.  Arnaud  d'Agnel. 

1.  Les  moines  d'Occident,  2°  édit.  (1866),  p.  cxlii. 


UN 

SIRVENTÉS  HISTORIQUE  D'ELIAS  CAIRE L 

Pus  chai  la  fuelha  del  jarîc  ' . 


Cette  pièce,  justement  regardée  par  Diez^  comme  la  plus 
importante  de  l'auteur,  a  été  rapportée  par  lui  à  1224  :  le 
troubadour  aurait  eu  pour  but  en  la  composant  d'exhorter  le 
marquis  Guillaume  IV  de  Montferrat^  à  passer  en  Orient  pour 
remettre  sur  le  trône  de  Thessalonique  son  frère  cadet  Démè- 
tre, renversé  deux  ans  auparavant.  Gaston  Paris,  s'occupant 
accidentellement  de  Guillaume  dans  une  note  à  son  mémoire 
sur  Hugues  de  Berzé*,  a  contesté  cette  datation  pour  des  rai- 
sons que  j'exposerai  plus  loin  ;  suivant  lui,  le  «  sanglant  »  sir- 
ventés  aurait  été  composé  entre  1208  et  1210.  Je  donnerai 
d'abord  de  cette  pièce  un  texte  nouveau  fondé  sur  la  compa- 
raison de  tous  les  manuscrits'';  j'essaierai  ensuite  d'en  don- 
ner un  commentaire  historique  aussi  complet  et  précis  que 
possible  :  le  choix  entre  ces  deux  opinions  s'en  dégagera  de 
lui-même. 


1.  Bartsch,  Grundriss,  133,  9.  Attribué  à  Lamberti  de  Bonanel  par  la 
table  de  C. 

2.  Leben  and  Werke  der  TroubadoiDS,  édit.  Bartsch,  p.  451. 

3.  Je  ne  m'arrête  pas  à  l'affirmation  de  De  Simoni  (Giornale  ligustico, 
V,  26),  suivant  laquelle  il  s'agirait  non  de  Guillaume  IV,  mais  de  Boni- 
face  II. 

4.  i?oma?a'a,  XVIII,  p.  558-9. 

5.  Elle  a  été  imprimée  par  Eocliegude  (Partiasse  Occitanieji,  p.  108; 
texte  reproduit  par  M.  Monaci,  Testi  antichi prove)izali,  etc.,  Kome.  1888, 
p.  79-80),  et  par  Raynouard,  Choix,  IV,  293.  —  La  graphie  de  mon  édition 
est  celle  de  C. 


UN   SIR  VENTES  HISTORIQUE  D'ÉLIAS   CAIREL  469 

Pus  chai  la  fuelha  del  jaric, 

farai  un  gai  sonet  novel 

que  trametrai  lai  part  Monbel 

al  marques,  quel  sobrenora  gic  4 

de  Monferrat  e  pren  selh  de  sa  maire, 
et  a  laissât  so  que  conquis  sos  paire; 
mal  resembla  lo  fllh  Robert  Guiscart, 
qu'Antiocha  conques  e  Mongizart.  8 


II.  Marques,  li  monge  de  Clunhic 

vuelh  que  fasson  de  vos  capdel 

o  siatz  abbas  de  Cystel, 

pus  lo  cor  avetz  tan  mendie  12 

que  mais  amatz  dos  buous  et  un  araire 
a  Monferrat  qu'alhors  estr'  enperaire; 
ben  pothom  dir  qu'  anc  mais  fllhs  de  leopart 
nos  mes  en  cros  a  guiza  de  raynart  !  16 


III.  Gran  gaug  agron  tug  vostr'  amie 

quant  agues  laissada  la  pel 

don  foires  la  capa  el  mantel, 

quar  tuyt  cuyderon  estre  rie  10 

silh  qui  per  vos  son  liurat  a  maltraire, 
qui  son  tondut  et  an  paor  del  raire! 
quascus  aten  socors  de  vostra  part; 
si  noy  venetz,  a  quin  calra  si  guart!  24 


2  novelh  C  —  3  qeii  D;  vas  G  {la  îeço>i  part  est  assurée,  comme  on 
l'a  vu),  Montbel  H,  Mongibel  AR  —  4  nom  H;  sobre  noie  R  —  5  de 
ferrant  R;  selh  manque  da>is  DH  —  6  so]  sel  R;  conques  D(IK)R;  sos] 
son  CDR  —  7  filz  D(IK)  ;  Guizart  R  —  8  can  noya  c.  R;  conquis  A  ;  Mont- 
guizart  H(IK),  girart  E,  giscart  R. 

9  les  ACD(IK)R;  monges  C;  clugnic  (IK)  ;  le  motges  e  clunic  E  — 
11  o]  e  K;  Oystelli  C  —  13  .ij.  buous  e  .jiij.  araires  R  —  14  alhors  estre 
manque  dans  R,  où  est  laissée  vfie  place  vide.,  —  15  filh  C(IK)R  — 
16  nos  mes  en  cros  R  ;  gros  H,  crotz  AD(IIv)  ;  mignart  A. 

17  tug  li  V.  R  —  19  mantelh  C  —  20  esser  AR  —  21  que  AD(IK)ER  — 
22  que  ADH(IK)ER;  de  r.  CDIIER,  de  traire  (IK)  —  23  e  cascuns  E.  — 
24  qui  cel  hi  a  sis  g.  A,  qui  col  ia  (liia  E)  sil  DE,  qui  col  ia  sit  H,  qu 
col  ial   si  (IK),  qui  dol  ia  si  R,  a  quin  calra  sil  G. 


470  V.    DE  BARTHOLOMAEIS. 

IV.  Marques,  li  baron  vair  e  pic 
an  contra  cel  trait  un  cairel 
que  lor  tornara  sul  capel; 

e  de  l'emperador  Enric  28 

vos  die  aitan,  que  ben  semblal  rey  Daire 
qui  SOS  baros  gitet  de  lor  repaire  ; 
dont  elh  ac  pueys  de  morir  gran  reguart; 
mas,  manhtas  vetz,  quis  cuyda  calfar  s'art!  32 

V.  Lo  regisme  de  Salonic 

sens  peireir'  e  ses  manganel 

pogratz  aver  e  maynt  castel 

d'  autres  qu'  ieu  no  mentau  ni  die.  36 

Per  Dieu,  marques,  Rotlandis  e  sos  fraire 
e  Guis  Marques  e  Ravas  lor  confraire, 
Flamenc,  Frances,  Bergonhon  e  Lombart 
van  tug  dizen  que  vos  semblatz  bastart!  40 

VI.  Vostr'  ancessor,  so  au  dir  e  retraire, 
foron  tug  pros,  mas  vos  non  soven  guaire; 
si  del  venir  non  prendetz  geynli  et  art, 

de  vostr'  onor  perdretz  lo  terz  el  quart  !  44 

25  vil  D  ;  b.  son  enic  R  —  26  contrai  DEri(IK)  ;  ant  traich  contrai  cel 
A.  encontra  sel  trais  R  —  26  sus  c.  CR  —  28  anric  E  —  29  sembla  EH  ; 
rai  E;  semblal  manque  dans  D  ;  le  mot  y  a  été  gratté;  pueis  diran  ver 
que  b.  sembla  re  d.  R  —  30  son  r.  AR  —  31  il  ant  A,  il  ac  DH(IK)  ;  de 
mort  R  —  32  escalfar  A;  q.  c.  c.  s'a.  manque  da7is  R,  où  est  laissée 
une  place  vide. 

33  feiesme  de  Solome  R;  dans  E  l'ablation  de  la  miniature  a  fait 
disparaître  le  début  des  v.  35-40  et  une  partie  des  envois.  —  34  peii'ier  e 
ADH,  peireira  e  E,  peire  R;  manganelli  C  —  36  mentauray  mendie  R  — 
37  fraires  R  —  38  e  ravas]  rainaut  R,  era  uas  AC,  erauans  ED,  erauan 
(IK)  eravanz  H  —  39  Frances,  Flamencs,  Bergonhos  e  Lombartz  R. 
Voici  le  couplet  introduit  par  R  : 

Lo  iorn  now  pot  aver  destric 
sel  que  ve  ma  dona  Ysabel 
si  com  le  maragd'  en  l'anel 
que  dona  gaug  al  pus  enic 
atressi  de  tota  la  belaze 
c  (\ue  melhs  sap  bels  plazers  dir  e  faire 
mans  cavayers  C[ue  serian  coart 
son  per  lieis  pros  e  valen  et  galhart. 
41  cho  (IK);  ang  AER  —  42  mas  no  mes  viaii-e  R  —  43  sil  revenir  C, 
sil...  E,  le  reste  a  été  e>ilevé;  si  del  noy  prenetz  regart  R  —  44  vostre 
nos  R;  vostre  amor  prendetz  (IK). 


UN   SIRVENTÉS   HISTORIQUE  D'ELIAS   CAIREL.  471 


TRADUCTION. 

I. 

Maintenant  que  la  feuille  du  chêne  tombe,  je  ferai  une  chan- 
son nouvelle  et  joyeuse  que  j'enverrai  là-bas,  au  delà  de  Mom- 
bel,  au  marquis  qui  délaisse  le  surnom  de  Montferrat  pour  pren- 
dre celui  de  sa  mère  et  qui  abandonne  les  conquêtes  de  son 
père;  il  ressemble  peu  au  flls  de  Robert  Guiscard,  le  conquérant 
d'Antioche  et  de  Mongizart. 


IL 

Marquis,  je  veux  que  les  moines  de  Cluny  fassent  de  vous  leur 
chef  ou  que  vous  soyez  abbé  de  Cîteaux,  puisque  vous  avez  le 
coeur  assez  vil  pour  préférer  à  la  couronne  impériale  deux 
bœufs  et  une  charrue  à  Montferrat.  On  peut  bien  dire  que 
jamais  [auparavant]  un  flls  de  léopard  ne  s'était  blotti  dans  une 
tanière  à  la  façon  d'un  renard. 


III. 

Grande  joie  eurent  tous  vos  amis  lorsqu'ils  vous  virent  aban- 
donner la  peau  dont  vous  aviez  fourré  votre  cape  et  votre  man- 
teau, car  ils  se  crurent  riches,  tous  ceux  qui  sont  [maintenant] 
livrés  par  vous  à  de  mauvais  traitements,  qui  sont  tondus  et 
ont  peur  d'être  rasés  !  Chacun  attend  du  secours  de  votre  part; 
si  vous  ne  venez  pas,  malheur  à  eux. 

IV. 

Marquis,  les  barons,  capricieux  et  changeants,  ont  tiré  vers  le 
ciel  une  flèche  qui  leur  retombera  sur  le  chapeau;  et  au  sujet  de 
l'empereur  Henri,  je  vous  dis  ceci,  qu'il  ressemble  bien  au  roi 
Darius,  qui  chassa  ses  barons  de  leurs  demeures,  ce  qui  lui  flt 
courir  dans  la  suite  un  grand  danger  de  mort.  Mais  maintes 
fois  il  arrive  que  celui  qui  croit  se  chauffer  se  brûle. 


472  V.    DE  BARTHOLOMAEIS. 


Sans  pierrières  ni  mangonneaux,  vous  pourriez  avoir  le 
royaume  de  Salonique  et  plusieurs  châteaux  appartenant  à 
d'autres  que  je  ne  nomme  pas.  Par  Dieu,  marquis,  Rolandin  et 
son  frère  et  Gui  Marqués  et  Ravan  leurs  confrères.  Flamands, 
Français,  Bourguignons,  Lombards,  tous  disent  que  vous  sem- 
blez  bâtard. 

VI. 

Vos  ancêtres,  à  ce  que  j'entends  dire  et  raconter,  furent  tous 
des  preux,  mais  il  ne  vous  en  souvient  guère;  si  vous  ne  faites 
pas  tous  vos  efforts  pour  venir,  vous  perdrez  le  tiers  et  le  quart 
de  vos  possessions. 


COMMENTAIRE    PHILOLOGIQUE. 

La  disposition  des  rimes  de  ce  sirvenlés  est  une  des  plus  fréquentes  de 
la  lyrique  provençale  (voy.  P.  Meyer,  Les  derniers  troubadours,  p.  ^Oi). 
Le  schéma  a'b^b'a*  e"'e*"'d*"d*°  se  i-etrouve  dans  plusieurs  pièces  (voy. 
Maus,  Peire  Cardenal's  Stroplienbau,  p.  116).  Néanmoins,  on  doit 
remarquer  qu'Elias  Cairel  seul  a  employé  la  rime  féminine  au  v.  5-6 
ici  et  dans  sa  tenson  avec  Isabelle;  cette  variante  est  reproduite  dans 
deux  coblas  esi^arsas  de  Guiraut  Olivier  d'Arles  (32,  40,  Bartsch  ;  Dt?ik- 
màler,  p.  46  et  6). 

1-5.  Vers  traduits  par  Eaynouard,  Lex.,  III,  463. 

5.  Pour  comprendre  combien  ce  vers  est  injurieux,  il  faut  rappeler  que 
la  mère  de  Guillaume  était  Aliénor,  fille  de  Humbert  III  de  Savoie.  Les 
Savoyards  n'avaient  pris  aucune  part  à  la  croisade,  ce  qui  leur  attirait 
naturellement  le  reproche  de  lâcheté.  L'insulte  consiste  ici  dans  l'anti- 
thèse entre  les  vertus  des  ancêtres  paternels  et  la  couardise  des  ascen- 
dants maternels  de  Guillaume.  —  Diez  croit  que  l'auteur  prélude  dans  ce 
vers  à  l'accusation  de  bâtardise  (v.  40). 

7-8.  Les  exploits  de  Bohémond  et  de  son  père  à  la  première  croisade 
sont  bien  connus.  Le  rapprochement  antithétique  de  ces  exploits  vient, 
plus  que  du  désir  de  rappeler  à  Guillaume  des  exemples  de  vertu  en 
général,  de  ce  que  les  Aléraraiques  étaient  apparentés  aux  conquérants 
de  la  Sicile.  C'était  donc  un  exemple  plus  efficace  encore  parce  que 
Guillaume  le  trouvait  dans  les  souvenirs  de  sa  propre  famille.  Bien  qu'un 
peu  ancien,  il  n'allait  pas  moins  droit  au  but.    —  Mongizart.  Ce  nom 


UN   SIRVENTES   HISTORIQUE  d'ÉLIAS   CAIREL.  473 

apparaît  dans  Guillaume  de  ïyr,  XXI,  c.  xxui,  et  dans  la  Chrotiique 
d'Ernoul.  C'est  un  château  de  Syrie  («  ce  lieu  devait  être  près  d'une 
rivière  vers  Ramula  »,  selon  le  Rec.  des  Hist.  des  Croisades,  Hist.  occi- 
dent., t.  I,  p.  xxxix). 

9-10.  Vers  cités  par  Raynounrd,  Lex.,  TI,  324.  Les  chroniqueurs  du 
Montferrat  attribuent  à  Guillaume  la  fondation  de  nombreuses  abbayes 
(voyez  en  la  longue  liste  dressée  par  G.  del  Carretto,  op,  cit.,  p.  1149),  et 
cela  pouvait  être  l'objet  de  railleries  que  le  troubadour  rappellerait  ici 
malicieusement.  Je  n'ose  toutefois  rien  affirmer  à  cet  égard. 

16.  cros,  voy.  Diez,  Leben,  p.  451  ;  Levy,  Supplem.-Wôrterb .,  I,  420. 

17-18.  On  serait  tenté  de  corriger  lassada  ('  laqueada)  et  d'entendre  : 
«  Tous  vos  amis  eurent  grande  joie  lors  de  votre  accession  au  trône  ». 
On  aurait  un  sens  dont  se  déduirait  très  naturellement  ce  que  Cairel  dit 
dans  les  vers  suivants  :  il  aurait  voulu  mettre  en  évidence  l'antithèse 
entre  l'espoir  que  les  Lombards  avaient  placé  en  lui  et  le  désespoir  où  sa 
conduite  les  avait  plongés.  Cette  leçon  ne  se  trouvant  dans  aucun  ms.,  je 
crois  qu'il  faut  entendre  gran  gaug  comme  une  expression  ironique.  [On 
peut,  ce  me  semble,  conserver  le  texte  et  comprendre  :  <,<...  Quand 
vous  eûtes  rejeté  la  peau  de  renard  (allusion  au  v.  16J,  dont  vous  aviez 
doublé  votre  manteau  »,  pour  redevenir  ce  que  vous  deviez  être  vraiment, 
un  léopard  comme  votre  père.  —  A.  J.] 

21.  Même  expression  dans  Gaucelm  Faidit  {Ni  que  fanui  tant  liurat 
a  maltraii'e)  dans  un  planh  célèbre  (Choix,  IV,  54). 

22.  Cf.  Non  i  es  us  nol  poschatz  to)idr'e  raire  dans  Bertrand  de  Born 
(80,  46;  éd.  Thomas,  p.  146;  éd.  Stimming',  p.  110),  et  Ja  nol  cal  tondre 
ni  raire  ni  en  estreg  ordre  maltraire,  dans  Pons  de  Capduelh,  (375,  8  ; 
éd.  Napolski,  p.  90).  [J'écrirais,  avec  tous  les  mss.,  sauf  A,  de  et  non 
del  ;  cet  emploi  de  l'infinitif  se  trouve  ailleurs  ;  cf.  dans  B.  de  Born  : 
Sens  pro  tener  amie.  (Ges  no  me  desconort,  v.  31,  éd.  Thomas,  p.  33.) 
—  A.  J.] 

[24.  La  leçon  introduite  dans  le  texte  est  celle  de  C  seul  ;  je  lirais  :  qui 
col  (c.-à-d.  colp)  i  a,  sil  gart  (sil  dans  DEC  est  appuyé  de  plus  par  le 
sis  de  A,  le  sit  de  H,  s  et  <  se  substituant  facilement  à  l).  Le  sens  serait  : 
«  Que  celui  qui  a  (a  reçu)  un  coup,  le  garde  »,  c.-à-d.  ils  ne  pourront  pas 
prendre  leur  revanche  s'ils  subissent  des  échecs.  —  A.  J.] 

25.  Diez  traduit,  d'après  Raynouard  {Lex.,  IV,  537),  vair  e  pic  par 
«  bunton  und  scheckigen  ».  Je  ne  suis  pas  loin  de  croire  que,  par  ces 
mots  à  double  sens,  le  poète  ait  voulu  désigner  des  barons  reconnaissa- 
bles  à  leurs  armes. 

29.  Voy.  Birch-Hirschfeld,  Ueber  die  deti  provenzal.  Troubad.  be- 
licinnten,  epischen  Sto/fe,  Halle,  1878,  p.  20-21.  L'allusion  à  Darius  s'ex- 
plique par  le  fait  que  la  Macédoine  rappelait  au  troubadour  les  exploits 
d'Alexandre.  Comparez  les  souvenirs  auxquels  se  livre  Henri  de  Valen- 


474  V.   DE   BARTHOLOMAEIS. 

ciennes,  lorsqu'il  raconte  l'entrée  de  l'armée  de  Henri  de  Hainaut  dans 
la  vallée  de  Pliilippes  :  «  Et  la  sist  Machedone,  dont  Phelipi^es  fu  rois; 
et  la  fu  nés  Alixandres,  si  comme  on  trueve;  et  li  rois  Phelippes  fist 
apieler  le  val,  apries  son  non,  le  val  de  Phelippe...  Et  en  che  val  se 
combati  Pompeus  de  Rome  contre  Julius  César,  et  i  fu  Julius  César 
desconfls.  »  (570.)  En  ce  cas,  il  n'est  pas  impossible  qu'au  v.  32  le 
troubadour  ait  voulu  insinuer  à  Guillaume  qu'il  devait  imiter  Alexandre 
aussi  bien  que  Bohémond. 

[L'allusion,  qui  me  paraît  s'étendre  à  la  strophe  entière,  peut  être  serrée 
de  plus  près.  Le  passage  du  roman  d'Alexandre  auquel  elle  se  rapporte 
est  ainsi  analysé  par  M.  P.  Meyer  :  «  Darius  ayant  eu  le  tort  d'accorder  sa 
confiance  aux  fils  de  ses  garçons,  dont  il  avait  fait  ses  sénéchaux  et  ses 
baillis,  et  qui,  par  leurs  exactions,  avaient  indisposé  ses  sujets  contre 
lui,  fut  finalement  abandonné  de  ses  hommes  et  tué  par  ses  serfs.  » 
(Alexa>idre  le  Grand  dans  la  littérature  du  moyen-âge,  II,  163.)  Les 
barons  vair  e  pic  sont  ceux,  hostiles  aux  Lombards,  auxquels  Henri  a  eu 
le  tort  d'accorder  sa  confiance  et  qui  sont  comparés,  fort  désobligeam- 
ment,  aux  «  garçons  »  de  la  légende  d'Alexandre.  Quant  à  ceux  que  l'em- 
pereur a  imprudemment  évincés  de  leurs  possessions,  ce  sont  évidem- 
ment les  barons  lombards  eux-mêmes,  dont  le  ressentiment  pourra  un 
jour  lui  être  funeste.  La  seule  difficulté  consiste  en  ce  que  le  même  mot 
«  baron  »  (aux  vers  25  et  30)  ne  désigne  pas  les  mêmes  personnages. 
INIais  la  situation  était  alors  assez  connue  de  tous  pour  qu'il  n'y  evit  pas 
d'amphibologie.  Quant  au  proverbe  qui  termine  la  strophe,  il  revient  à 
dire  que  des  mesures  qu'on  a  cru  prendre  dans  son  intérêt  se  retournent 
parfois  contre  vous  :  il  exprime  donc  fort  bien,  d'une  façon  concise,  la 
même  menace  que  l'allusion  faite  plus  haut  à  l'histoire  de  Darius.  —  A.  J.] 

32.  Cf.  Peire  Cardinal  :  Tais  se  cuja  calfar  qui  s'art  (Mahn,  Werke, 
II,  210). 

Si.  Sur  l'emploi  de  ces 'armes  par  les  croisés,  voy.  Villehardouin,  76. 

39-10.  Ces  vers  durent  jouir  d'une  certaine  popularité.  Il  est  curieux 
que  parmi  les  cohlas  esparsas  du  chansonnier  T,  il  y  en  ait  une  (282,  6 
qui  résuite  du  mélange  de  vers  empruntés  à  une  pièce  bien  connue  de 
Lanfranc  Cigala  (le  terrible  sirventés  adressé  à  Boniface  II  de  Montfer- 
rat,  l'accusant  d'avoir  manqué  de  foi  d'abord  à  l'empereur,  puis  aux 
Milanais)  et  de  ces  deux-ci.  On  voit  que  l'épithète  de  «  bâtard  »  demeura 
longtemps  dans  la  tradition  des  invectives  adressées  aux  marquis  de 
Montferrat.  Cigala  avait  au  reste  emprunté  lui-même  à  Elias  (.'airel  le 
début  de  la  pièce  en  question.  Le  vers  Estier  mon  grat  mi  fan  dir 
villanatges  n'est  autre  que  le  v.  23  de  la  tenson  entre  Elias  et  Isabelle,  ce 
qui  pouvait  faciliter  la  confusion.  Voici  cette  cobla  d'après  T  (fol.  88  r»)  : 

Estier  mon  grat,  mi  ven  dir  vilanagie 
d'un  franc  marces;  mas  sai  que  fas  follia, 
sotterra  près  e  destrui  barouage 


UN   SIRVENTÉS  HISTORIQUE  D'ÊLIAS   CAIREL.  475 

qe  dis  qfi  trais  de  Monferat  lignagie 

mais  il  non  par  e  l'ombra  c'  aissi  sia; 

enans  par  fil  e  fraire  de  ven, 

et  Bonifatç  es  clamatç  falsamen, 

car  anc  bon  faitç  non  fos  el  en  sa  vida  ; 

e  van  disen  Borgogno  e  Lombart 

cel  fon  filtç  a  un  mal  bastartç. 

40.  Selon  l'observation,  que  je  crois  très  juste,  de  M.  Schultz-Gora  {Le 
epistole,  etc.,  p.  147),  E.  Cairel  ferait  ici  allusion  aux  exploits  de  Guil- 
laume Longue-Epée  et  de  Conrad  le  Vieux. 

4-1.  Lo  terz  el  quart  est  une  expression  assez  fréquente;  voy.  par  ex. 
Chanson  de  la  croisade,  v.  3363. 


IL 

La  pièce  a  été  conservée,  comme  on  le  voit,  par  les  manus- 
crits ACDaEH(IK)R;  tous  se  groupent  dans  une  même  famille, 
hormis  R  qui  se  tient  à  l'écart.  Cela  ressort  clairement  du 
tableau  des  variantes  auquel  je  me  permets  de  renvo)^er  le  lec- 
teur^  Des  classements  secondaires  dans  la  famille  ACDEH(IK) 
ne  seraient  pas  impossibles  2,  mais  il  suffit  pour  nous  de  ne  pas 
nous  éloigner  de  ce  qu'on  peut  retenir  avec  certitude. 

Les  textes  édités  par  Rochegude  et  par  Raynouard  sont 
éclectiques^,  étant  établis  sur  CE(IK)R,  c'est-à-dire  sur  les 
manuscrits  de  Paris.  On  y  lit,  au  v.  3,  non  Monbel,  comme 
dans  le  mien,  mais  Mongibel  (d'après  AR). 

Du  choix  que  l'on  fera  entre  ces  deux  leçons  dépendra,  en 
grande  partie,  la  date  que  l'on  devra  assigner  à  la  pièce. 

MonbeL,  c'est  à  dire  Mombello,  est  un  petit  village  du  Mont- 
ferral '' ;  Mongibel  désigne,  comme  partout  ailleurs,  l'Etna. 


1.  Voy.  surtout  les  vers  4,  -5,  8,  13,  25,  26,  29,  31,  33,  34,  36,  41,  44. 

2.  Ainsi  D(IK)  vont  presque  toujours  d'accord,  et  avec  eux  s'accorde 
aussi  H  (voy.  v.  5).  A  semble  se  tenir  un  peu  à  côté  par  le  mirpiart 
du  V.  16.  Mais  il  ne  s'agit  que  de  simples  ratures.  Jo  dois  à  l'amitié  de 
M.  Bertoni  la  copie  très  soignée  de  D. 

3.  Le  texte  ,de  Rochegude  est  plus  éclectique  encore  que  celui  de  Ray- 
nouard; celui-ci  se  base  spécialement  sur  G. 

4.  Aujourd'hui  province  d'Alexandrie,  arrondiss.  de  Casale.  Il  est  men- 
tionné aussi  par  Peire  Vidal  (3C)4,  17  ;  T<nit  an  bel  diy  del  marques).  On 
l'a  confondu  à  tort  avec  Montebello  (Ziiigarolli,  Due  trovaduri,  Fironze, 
Sansoni,  p.  38). 


476  V.    DE   BARTHOLOMAEIS. 

Nous  ne  connaissons  qu'un  voyage  de  Guillaume  IV  en 
Sicile.  On  sait  qu'il  accomplit  ce  voj^age  en  1224^  pour  em- 
pruntera son  parent  Frédéric  II  neuf  mille  marcs  qui  lui  étaient 
nécessaires  pour  aider  son  frère  dépossédé.  L'empereur  consen- 
tit ce  prêt,  mais  il  y  mit  de  dures  conditions;  le  marquis  dut 
engager  tout  ce  qu'il  possédait,  villes,  châteaux,  résidences, 
«  sive  in  allodio,  sive  in  pedagio,  sive  in  feudo,  sive  in  reddi- 
tionibus  aliquibus,  seu  juribus,  sive  angariis,  sive  perangariis, 
seu  aliquibus  exactionibus^  ».  C'était,  en  somme,  le  Montfer- 
rat  tout  entier,  à  l'exception  de  deux  places^,  qui  allait  cons- 
tituer l'hypothèque  prise  par  l'impérial  créancier. 

On  pourrait  être  tenté  d'expliquer  par  les  clauses  de  ce 
contrat  les  v.  4-6  : 

el  sobrenom  gic 
de  Monferrat  e  pren  cel  de  sa  maire. 

Aux  yeux  du  troubadour,  et  peut-être  à  d'autres  aussi,  Fré- 
déric pouvait  apparaître  comme  sur  le  point  de  s'emparer 
définitivement  des  états  paternels  de  Guillaume.  Dans  les 
V.  43-4  (qui,  au  reste,  ne  donnent  pas  un  sens  satisfaisant 
dans  le  texte  imprimé)  : 

sil  revenir  no  prend ez  genh  et  art, 

del  vostr'  onor  perdrez  lo  terz  el  quart, 

E.  Cairel  aurait  tenté  de  rappeler  Guillaume  chez  lui  et  de  le 
détourner  de  cette  mauvaise  affaire.  L'amertume  du  langage 
de  Cairel  s'expliquerait,  pourrait-on  ajouter  encore,  par  le 
mécontentement  qui  régnait  alors  parmi  les  jongleurs  de 
Lombardie  et  dont  Folquet  de  Romans  nous  a  laissé  un  élo- 
quent écho*.  Mais  ces  considérations  seraient  loin  de  rendre 
compte  de  tous  les  termes  du  poète,  et  l'hypotbèse  de  Diez 
soulève  les  plus  graves  difficultés. 


1.  Benvenuto  di  San  Giorgio,  dans  Muratori,  Scriptores  rerum  itali- 
carum,  XXIII,  p.  376;  Galeotto  del  Garretlo,  dans  Monmnenta  Historiœ 
Pntriœ,  Script.,  III,  p.  1150. 

2.  Le  texte  de  l'instrument  est  rapporté  par  B.  de  S.  Giorgio,  l.  c. 

3.  Trino  et  Pontestura,  qui  furent  engagés  aux  Verceliais,  suivant 
G.  del  Carretto,  l.  c. 

4.  Zenker,  Die  Gedichte  des  Folquet  von  Romans,  Halle,  189G,  n°  III, 
V.  28-45. 


UN   SIRVENTÉS   HISTORIQUE  D'ÉLIAS   CAIREL.  477 

Remarquons  d'abord  que  si  le  troubadour  exhorte  le  mar- 
quis à  passer  en  Orient,  il  ne  dit  pas  un  mot  de  Démètre;  il 
semble  s'agir  ici  des  intérêts  personnels  de  Guillaume,  non  de 
ceux  d'autrui.  Remarquons,  en  outre,  que  le  poète  envoie  son 
sirventés,  non  à  la  résidence  accoutumée  de  Guillaume,  mais 
au  fond  de  l'Italie;  il  devait  sans  doute  connaître  les  motifs  de 
ce  voyage,  même  en  supposant  qu'il  ignorât  les  préparatifs  de 
guerre  commencés  depuis  plusieurs  mois*.  Est-il  vraisembla- 
ble que  Cairel  ait  choisi  pour  reprocher  au  marquis  sa  froi- 
deur à  l'égard  de  son  frère  le  moment  même  où  il  mettait  tout 
en  œuvre  pour  lui  porter  secours ^  ? 

Ces  contradictions  seraient  tranchées  d'un  coup  si  l'on 
admettait  la  leçon  Mombel.  Elle  nous  permettrait  d'écarter 
toute  relation  entre  le  sirventés  et  le  voyage  de  1224  et  de 
rechercher  une  autre  date.  Mais  la  leçon  de  Mongibel  paraît 
solidement  appuyée.  Un  premier  argument  en  sa  faveur  con- 
siste en  ce  que  le  mot  _figure  aussi  dans  la  pièce  de  Peire 
Vidal  qui  a  servi  de  modèle  à  Cairel  : 

Pos  ubert  ai  mon  rie  tresaiir 
Trairai  n'un  gai  sonet  novel, 
Que  trametrai  part  Montgibel 
Al  pro  marques  de  Sardeniia'. 

Je  ne  saurais  dire  si  le  Mongibel  de  P.  Vidal  mérite  lui- 
même  beaucoup  de  confiance.  Tous  les  manuscrits  cités  par 
Bartsch  le  donnent,  il  est  vrai^;  mais  il  est  vrai  aussi  que  la 
pièce  aurait  grandement  besoin  d'un  commentaire  historique 
et  géographique  que  ni  Bartsch^  ni  Schopf^  n'ont  pu  donner. 


1.  G.  del  Carretto  et  B.  di  S.  Giorgio,  loc.  cit. 

2.  Je  n'insiste  pas  sur  le  l'ait  qu'il  n'y  aurait  pas  une  véritable  coïnci- 
dence entre  la  date  de  l'acte  et  celle  du  sirventés.  Celui-ci  fut  composé  en 
automne,  et  celui-là  signé  au  mois  d'avril.  Ecrit  durant  l'automne  do  1224, 
le  sirventés  n'aurait  plus  do  raisons  d'être.  Faudrait-il  penser  qu'il  s'agit 
de  l'automne  précédent?  Mais  nous  ne  savons  pas  si  à  cette  époque  Guil- 
laume avait  déjà  entrepris  son  voyage  en  Sicile. 

3.  364,  38.  Bartsch,  Lesebuch,  p.  79,  P.  Vidais  Lieder,  p.  57. 

4.  P.  Vidal's  Lieder,  p.  lxi. 

5.  Ibid.,  p.  LXI. 

G.  Schopf,  Beitrage  zur  liioyiriphie  uiid  ziir  Chro>wlogie  der  Lieder 
des  Troubadours  Peire  Vidal.  Breslau,  1887,  p.  20  et  50. 


478  V.   DE   BARTHOLOMAEIS. 

D'ailleurs,  même  s'il  était  certain  que  P.  Vidal  a  envoyé  sa 
pièce  à  Mongibel,  cela  n'empêcherait  pas  qu'Elias  Cairel  ait 
pu  substituer  à  ce  nom  celui  du  pays  où  se  trouvait  le  destina- 
taire de  la  sienne.  Je  laisse  cette  question  en  suspens  et  passe 
aux  autres  arguments  qui  militent  en  faveur  de  Mongibel. 

Cette  leçon,  commune  à  AR,  paraît  assurée  par  l'accord  de 
deux  manuscrits  qui  représentent  deux  traditions  indépen- 
dantes et  remontant  à  un  archétype  fort  ancien,  vu  leur  degré 
d'éloignement.  Mais  je  crois,  au  contraire,  qu'il  s'agit  ici 
d'une  coïncidence  fortuite. 

Remarquons  d'abord  que  R  dérive  d'un  original  fort  cor- 
rompu. C'est  le  seul  manuscrit  qui,  après  le  V®  couplet,  en 
introduise  un  VI®,  où  l'on  ne  peut  voir  qu'une  interpolation  ^ 
Ce  couplet  amoureux,  où  est  mentionnée  ma  donna  Isabela. 
la  dame  chantée  ailleurs  par  E.  Cairel,  dénature  la  pièce,  qui 
doit  garder  son  caractère  strictement  politique.  Les  leçons 
fautives  y  sont  si  nombreuses  qu'il  faut,  pour  se  les  expliquer, 
admettre  que  le  scribe  était  tombé  sur  un  texte  d'écriture  dif- 
ficile, qu'il  était  obligé  à  chaque  instant  d'interpréter  de  son 
mieux^.  Les  places  qu'il  a  laissées  vides  en  témoignent  élo- 
quemment. 

Voici  les  leçons  du  v.  3  d'après  tous  les  manuscrits;  de  ce 
tableau,  il  ressort  clairement  que  le  Mongibel  de  R  est  fautif: 

part  Mongibel  A  ;  lai  part  Mongibel  R  ; 

lai  vas  Mombel  C  ; 

lai  part  Mombel  DIK  ;  1.  p.  Montbel  H. 

Dans  E  l'ablation  d'une  miniature  n'a  laissé  substituer  que 
tramelrai  ^...,  mais  cette  initiale  suffit  à  y  attester  la  pré- 
sence dans  ce  ms.  de  lai. 
Comme  on  le  voit,  le  vers  est  trop  long  dans  R.  Pour  y  réta- 


1.  M.  Schultz-Gora  (Proveitzal.  Dichterinnen,  Leipzig,  1888,  p.  11  n.) 
n'a  pas  douté  de  l'authenticité  de  ce  couplet. 

2.  La  même  chose  s'observe  dans  les  autres  pièces  du  même  troubadour 
recueillies  par  R.  Le  compilateur  de  ce  chansonnier  a  puisé  partout  à  une 
source  fort  éloignée  de  celle  des  autres  manuscrits.  Je  cite,  comme  spéci- 
men, le  cas  ou  le  marquis,  qui  dans  ceux-ci  est  appelé  constamment  mar- 
ques, dans  R  est  indiqué  par  l'initiale  G. 


UN   SIRVENTÉS   HISTORIQUE    d'ÊLIAS   CAIREL.  /l79 

blir  la  mesure,  on  devrait  effacer  ou  lai  ou  part.  Mais  ces  deux 
monosyllabes  sont  également  assurés  par  l'accord  de  tous  les 
autres  manuscrits,  et  j'en  conclus  que  la  syllabe  surnuméraire 
est  le  gi  de  Mongibel.  L'altération  de  ce  nom  obscur  (qui 
devait  plus  tard  embarrasser  aussi  Rochegude  et  Raynouard) 
au  profit  du  célèbre  Mongibel  n'a  rien  de  surprenant.  La 
faute  commise  par  le  copiste  de  R  devait  l'être  également  de 
l'autre  côté  des  Alpes  par  celui  de  A.  Mombello  était  une  loca- 
lité trop  modeste,  trop  dénuée  d'importance  pour  être  connue 
d'un  copiste,  même  originaire  de  la  Haute-Italie;  seulement, 
celui-ci,  plus  avisé  que  son  confrère,  a  échappé  à  la  faute  de 
métrique. 

C'est  là  une  étrange  coïncidence,  je  le  reconnais;  mais  plus 
étrange  encore  est  le  hasard  par  lequel  la  leçon  fautive  trouve 
une  confirmation  apparente  dans  un  fait  réel,  le  voyage 
accompli  par  Guillaume  IV  à  Catane,  en  1224. 


III. 

La  leçon  du  v.  43,  sil  revenir  non  prendez,  etc.,  admise 
par  Rochegude  et  Raynouard,  est  évidemment  fautive  :  en  effet 
elle  appartient  seulement  à  CE,  les  autres  manuscrits  lisant 
d'accord  :  si  del  venir...  Le  troubadour  écrivait  donc  en 
Orient  et  c'était  là  qu'il  appelait  le  marquis.  Ainsi  est  pleine- 
ment confirmée  l'hypothèse  de  G.  Paris.  L'empereur  men- 
tionné comme  vivant  aux  vv.  28-29  n'est  pas  Henri  VI  d'Alle- 
magne, comme  certains  l'ont  cru  \  mais  bien  Henri  de  Hai- 
naut  (1207-1216).  Pour  déterminer  la  date  à  laquelle  se  rap- 
porte le  sirventés,  il  faut  donc  nous  représenter  les  événe- 
ments qui  arrivèrent  dans  le  nouvel  empire  latin  d'Orient, 
peu  après  l'élection  de  Henri. 

Après  la  mort  de  Boniface  de  Montferrat,  qui  avait  eu  comme 
successeur  le  jeune  Démètre  dans  le  royaume'de  Thessaloni- 


1.  Toeche,  TIeinrich  VI,  p.  466,  d'après  Schultz-Gora,  Le  epïstole  del 
trovad.  Rconbaldo  di  Vaqueiras ,  tnid.  par  G.  del  Noce,  Firenze, 
p.  150  n. 


480  V.    DE   BARTHOLOMAEIS. 

que,  les  Lombards  semblent  avoir  donné  à  leur  nouveau  suze- 
rain de  sérieux  motifs  de  défiance.  Au  commencement  de  l'hi- 
ver de  1207  celui-ci  fut  obligé  de  partir  de  Constantinople  pour 
Salonique.  Les  châteaux  lombards  qu'il  trouva  sur  sa  route 
lui  refusèrent  l'entrée;  les  Français,  chassés  de  Salonique, 
n'y  rentrèrent  que  beaucoup  plus  tard  et  grâce  à  la  ruse. 

Entouré  d'ennemis,  Henri  dut  entreprendre  une  véritable 
campagne  militaire  et  diplomatique  pour  empêcher  que  cette 
rébellion  n'ébranlât  les  bases  de  son  empire  ;  campagne  longue 
et  acharnée,  qui  l'aurait  été  davantage  encore  si  Henri  n'avait 
réussi  à  conclure  la  paix^  L'instigateur  de  cette  rébellion,  le 
comte  de  Blandrate^,  bailli  de  Salonique,  et  les  autres  barons 
prétendaient  qu'ils  tenaient  la  terre  pour  le  jeune  Démètre; 
mais  les  partisans  de  Henri  leur  reprochaient  d'avoir  offert  la 
couronne  à  Guillaume  de  Montferrat,  qui  avait  succédé  à  son 
père  dans  ses  domaines  occidentaux,  et  les  tournaient  en  ridi- 
cule parce  que  celui-ci,  quoique  sollicité  par  plusieurs  messa- 
ges, était  resté  sourd  à  toute  requête  ^. 

Ces  faits  sont  rapportés  uniquement  par  Henri  de  Valen- 
ciennes*.  La  guerre  civile  fut  regardée  par  les  Orientaux 
comme  un  épisode  de  l'histoire  intérieure  de  la  Romanie.  C'est 
pourquoi  on  n'en  trouve  aucune  mention  chez  les  chroniqueurs 
grecs.  Le  récit  de  Villehardouin  s'arrête,  comme  on  sait,  à  la 
mort  de  Boniface.  Robert  de  Glari  et  lEsioire  de  Eracles^ 


1.  Un  résumé  de  ces  faits  dans  Bouchet,  La  co)iqnéte  de  Constantino- 
ple, Paris,  Lemerre,  1891,  t.  II,  p.  281  et  sniv. 

2.  Voy.  sur  lui,  comme  troubadour  en  correspondance  avec  Folquet  de 
Romans,  G.  Paris,  Romania,  XIX,  64  n.  ;  Zenker,  op.  cit.,  p.  27. 

3.  Ce  n'est  pas  sans  une  pointe  d'ironie  que  H.  de  Valenciennes  écrit  : 
«  Lombart  disoient  lie  il  demandoient  la  tieri-e  a  oes  l'emperreis  et  a  oes 
l'enfant,  mais  il  pensoient  lot  el;  car  il  le  voloient  gai-der  por  le  mar- 
chis  Guillaume  de  Montferrat,  ke  il  avoient  mandé  par  tant  de  messages, 
ke  a  peine  ke  il  ne  diervoient  por  se  demeure  s  (|  598.) 

4.  Je  suis  le  texte  imprimé  par  N.  de  Wailly,  Paris,  Firmin-Didot, 
1882. 

5.  Robert  de  Clari,  dans  Hopf,  Chroniques  gréco-romanes,  Berlin, 
Weidmann,  1873.  —  L'Estoire  de  Eracles  empereur  dans  Recueil  des 
historiens  des  croisades,  publ.  par  les  soins  de  l'Acad.  des  Inscript,  et 
belles-lettres  ;  Hist.  CJccident.,  t.  II,  p.  289.  Voici  la  curieuse  façon  dont 
en  parle  Robert  de  Glari,  p.  85  :  «  Ne  demeura  mie  grant  tans  après  que  on 


UN   SIRVENTÉS  HISTORIQUE   D'ÉLIAS   CAIREL.  -481 

n'en  parlent  pas  non  plus  et  placent  la  mort  de  Henri  de  Hai- 
naut  tout  de  suite  après  le  couronnement  de  Démètre,  qui  avait 
eu  lieu  pendant  les  troubles  de  Salonique  huit  ans  auparavant 
(6  janvier  1208)*. 

Laissons  de  côté  le  fait,  fort  bien  démontré  par  Paulin  et 
Gaston  Paris  2,  que  la  chronique  de  Henri  de  Valenciennes 
n'est  qu'une  chanson  de  geste  dérimée  et  qu'en  conséquence 
elle  doit  avoir  perdu  beaucoup  de  son  exactitude  dans  les 
remaniements.  Il  y  a  d'autres  raisons  encore  de  s'en  défier. 
C'est  l'œuvre  d'un  ménestrel  attaché  à  l'empereur,  dont  il 
s'applique  sans  cesse  à  célébrer  les  exploits  ou  à  justifier  les 
actes.  Qu'on  remarque  ses  efforts  pour  faire  apparaître  les 
Lombards  comme  des  traîtres,  et  combien  de  fois  il  leur  donne 
ce  nom.  Enfin  sa  position  presque  officielle  devait  lui  dérober 
bien  des  détails  concernant  ses  adversaires.  En  somme,  jugée 
au  point  de  vue  lombard,  cette  chronique  paraît  incomplète 
et  défectueuse. 

Comme  l'a  remarqué  M.  Riant',  l'Italie  cisalpine  a  bien  rai- 
son de  regretter  la  perte  de  tous  les  documents  qu'elle  avait 
fournis  à  l'historiographie  pour  la  quatrième  croisade,  à 
laquelle  elle  avait  pris  une  si  grande  part  et  qui  reste  une  de 
ses  gloires.  Siccardo,  l'évoque  de  Crémone,  qui  y  prit  part  et 
en  parle  dans  sa  chronique  '',  est  bien  loin  d'être  pour  l'Italie 
ce  que  Villehardouin  est  pour  la  France. 

C'est  ce  silence  qui  donne  à  notre  sirventés  cet  intérêt 
incontestable  de  nous  faire  entendre  la  voix  des  Lombards. 
Assurément  il  ne  remplace  pas  les  documents  perdus  et  ne  dis- 


manda l'empereur  a  Salenike  pour  couronner  le  fil  le  marcliis  a  roi  [c'est- 
à-dire  Démètre]  ;  et  li  emperere  i  ala.  Et  quant  il  l'eut  couroné  le  fil  le 
marcliis,  si  amaladi  la  et  si  i  morut,  dont  che  fu  moult  grans  damages  et 
moût  grant  pietiés.  »  Il  me  semble  évident  que  Robert,  écrivant  après  son 
retour,  ne  relatait  pas  ces  faits  en  témoin  oculaire,  comme  il  avait  fait 
pour  les  événements  précédents.  . 

1.  H.  de  Val..  005. 

2.  Voy.  Romania,  XIX,  63  suiv. 

3.  Exuviae  sacrae  constantinopolitanae.  Genevae,  MDCCCLXXVIl, 
p.  xxviij. 

4.  Chez  Siccardo  (Scri^jt.  Rer.  liai.,  VII,  621j,  pas  un  mot  de  la  guerre 
civile. 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVI.  31 


-482  V.   DE  BARTHOLOMAEIS. 

sipe  pas  toutes  les  obscurités.  Le  vide  est  trop  profond  pour 
être  comblé  par  une  pièce  de  quarante-quatre  vers.  Mais  c'est 
quelque  chose  que  de  nous  avoir  conservé  des  renseignements 
ignorés  d'Henri  de  Valenciennes;  on  verra  même  qu'elle  n'est 
pas  inutile  à  la  critique  des  textes  historiques. 

Je  crois  qu'il  faut  ajouter  foi  au  premier  vers  du  sirventés 
et  le  considérer  comme  composé  à  la  chute  des  feuilles,  c'est- 
à-dire  pendant  l'automne  de  1207  ou  l'hiver  de  1208,  époque 
du  voyage  de  Henri  à  Salonique.  A  ce  moment  les  Lombards, 
parmi  lesquels  se  trouve  le  poète,  ont  déjà  envoyé  à  Guillaume 
des  messages  l'invitant  à  les  rejoindre;  Guillaume  semble  y 
rester  sourd.  Et  pourtant  Henri  est  là,  prêt  à  les  combattre; 
la  conduite  du  marquis  les  choque  et  les  irrite  :  ils  lui  envoient 
de  nouveaux  messagers  \  et  c'est  bien  probablement  par  un 
de  ces  messagers  qu'a  été  aussi  envoyé  le  sirventés. 

Celui-ci  était  destiné  à  faire  entendre  ce  que  ne  pouvait  pas 
dire  la  correspondance  officielle.  C'était  la  traduction  poéti- 
que de  ce  qui  se  répétait  autour  du  troubadour,  chez  les  Lom- 
bards découragés.  Son  rôle  était  de  parler  haut  et  clair  au 
marquis,  en  le  cinglant  du  terrible  langage  de  la  vérité.  Et  la 
vérité  était  qu'à  ceux  qui  avaient  été  les  compagnons  d'armes 
et  de  gloire  de  Boniface,  Guillaume  apparaissait  comme  tout  à 
fait  différent  de  son  père.  Le  titre  de  «  bâtard  »  ne  dut  pas  lui 
être  épargné  par  eux-mêmes,  pas  plus  que  par  ses  ennemis, 
étonnés,  eux  aussi,  qu'il  refusât  une  pareille  offre;  et  le  trou- 
badour lui  rapporte  fidèlement  ce  propos 2. 

Selon  H.  de  Valenciennes,  les  Lombards  n'offraient  à 
Guillaume  que  la  couronne  de  Thessalonique.  D'après  Elias 
Cairel,  l'offre  se  serait  étendue  à  l'empire  tout  entier  (v.  5-6). 


1.  Comparez  H.  de  Valenciennes,  598  et  603. 

2.  Selon  Benvenuto  di  San  Giorgio  [loc.  cit.,  p.  372),  Guillaume,  ayant 
résolu  d'affermir  son  frère  Démètre  sur  le  trône  de  Thessalie,  et  d'assis- 
ter à  son  couronnement,  se  serait  rendu  [en  1207]  en  Orient  et  y  serait 
resté  jusqu'à  ce  que  Henri  de  Hainaut  accomplît  la  cérémonie,  puis  il 
serait  rentré  en  Montferrat.  Cela  est  évidemment  faux  ;  mais  ce  rensei- 
gnement a  néanmoins  pour  nous  de  la  valeur,  parce  qu'il  se  base  sur  des 
documents,  parallèles  au  sirventés,  que  nous  ne  connaissons  pas  et  que 
Benvenuto  a  interprétés  à  contresens. 


UN   SIRVENTÉS    HISTORIQUE   d'ÉLIAS   CAIREL.  483 

Il  ne  s'agit  pas  là  d'une  figure  de  rhétorique,  qui  serait  incon- 
cevable dans  une  pièce  de  ce  genre ^  :  on  le  voit  au  reste  par 
ce  que  dit  le  troubadour  aux  vv.  33  et  suivants  :  il  en  ressort 
que  l'offre  des  Lombards  embrassait  non  seulement  le  royaume 
paternel,  mais  aussi  certains  châteaux  appartenant  à  «  d'au- 
tres», dont  il  valait  mieux  passer  le  nom  sous  silence.  Cela, 
au  reste,  s'explique  fort  bien  :  les  Lombards  se  regardaient 
comme  les  principaux  auteurs  de  la  conquête.  Boniface  avait 
été  candidat  à  l'empire  contre  Baudouin  de  Flandres;  l'élec- 
tion de  ce  dernier  ne  les  avait  pas  satisfaits;  le  royaume  de 
Thessalonique,  qui  donnai  ta  leur  chef  une  position  subalterne, 
bien  qu'avantageuse,  ne  les  contentait  pas  et  ils  se  croyaient 
en  droit  de  réclamer  davantage  2.  Notre  sirventés  nous 
apprend  qu'après  la  mort  de  Baudouin  et  de  Boniface,  ils  son- 
gèrent à  réaliser  le  rêve  de  jadis.  Henri  de  Valenciennes  fait 
connaître  les  noms  de  ces  «  châteaux  »  que  nous  ont  dérobés 
les  prudentes  réticences  d'Elias  Cairel.  Ils  sont  énumerés  dans 
la  réponse  faite  par  le  comte  de  Blandrate  au  message  de  Co- 
non  de  Béthune,  qui  lui  avait  apporté  les  propositions  de 
Henri  de  Hainaut  :  «  Segnour,  fait  li  cuens,  nostre  consaus 
nous  apporte  ke  nous  volons  avoir  toute  la  tierre  de  Duras 
des  chi  a  le  Maigre,  et  toute  la  terre  Largut  et  quankes  il  i 
apent,  et  toute  l'isle  de  Grèce.  Si  volons  avoir  Chorinthe,  et 
ke  Michalis  et  tout  si  baron  nos  fiicent  hommage;  si  volons 
avoir  le  Verre  et  le  Ferme  et  toute  la  terre  juskes  a  Phinepo- 
ple.  Se  li  empereres  le  nous  otrie  ensi,  bien  le  volommes 
chaiens  recuellir,  et  autrement  non.  »  A  quoi  Conon  ré- 
pond :  «  Comment,  sire  cuens,  n'i  devons  nous  riens  avoir? 
N'  i  venismes  nous  mie  ensamble  comme  corapaignon  ?  Et  i 


1.  Aimeric  de  Peguilhan  (10,  43)  dit  de  Guillaume  :  «  Ges  mi  meses  non 
creiria  —  en  Montferrat  ni  a  Moncal  —  vis  lo  marques  emperial,  —  si 
autra  ves  non  loy  vezia  ».  (Mahn,  Ged.,  997,  998.)  —  Je  ne  veux  pas  affir- 
mer qu'il  fasse  par  là  allusion  à  cette  ofl're  d'un  empire  plutôt  qu'à  la 
charge  de  gouverneur  d'Arles,  à  lui  donnée  par  Frédéric,  Il  (cfr.  Scliultz- 
Gora,  Le  epistole,  etc.,  p.  15U);  mais  cela  ne  serait  nullement  impossible, 
bien  que  la  pièce  d' Aimeric  soit  plus  récente  que  les  faits  dont  il  s'agit 
ici. 

2.  Villehardouin,  277  suiv. 


484  V.    DE   BARTHOLOMAEIS. 

avommes  autres!  bien  endurées  les  paines  et  les  travaus  por 
nostre  Segûor  comme  vous  avés^  » 


IV. 


Je  dirai  maintenant  quelques  mots  des  personnages  nom- 
més au  couplet  V,  sur  lesquels  Diez  avoue  ne  pas  avoir  de 
renseignements  2.  Ils  se  retrouvent  tous  parmi  les  barons  qui 
jouèrent  les  rôles  les  plus  importants  dans  la  levée  de  bou- 
cliers des  Lombards. 

Au  V.  37,  Raynouard  et  Rochegude  impriment  :  Rotlan 
dis.  Bartsch  remarque^  qu'il  faut  lire  Rotlandîs.  Aucun  Ro- 
landin  ne  figure  dans  le  récit  de  Henri  de  Valenciennes;  on 
n'y  trouve  qu'un  Rolland  Pice,  sire  du  château  de  Plata- 
raone  (Placemont),  présenté  par  le  chroniqueur  comme  traî- 
tre. En  effet,  il  envoya  un  jour  demander  des  secours  à  l'em- 
pereur contre  les  Lombards;  celui-ci  s'empressa  de  lui  expé- 
dier trente  chevaliers  ;  mais  quand  ils  arrivèrent  devant  le 
château,  ils  apprirent  que  Rolland  en  était  sorti,  s'unissant 
contre  eux  aux  Lombards*.  Dans  deux  lettres  d'Innocent  111, 
qui  lui  recommandent  des  affaires  ecclésiastiques  de  Plata- 
mone  et  qui  datent  de  juillet  1208,  il  est  appelé  Rolandus 
Pissius  et  Pissia^,  Faudrait-il  corriger  en  Rotlan  Pis?  Il 
y  a  bien  des  raisons  d'en  douter.  Il  faut  remarquer  d'abord 
que  dans  le  sirventés  il  ne  peut  être  question  que  de  Lom- 
bards, Rolland  Pice  était-il  lombard?  C'est  ce  qu'a  pensé 
Usseglio,  qui  fait  de  lui  un  membre  de  la  famille  Pesce,  alliée 
à  Boniface*^,  se  fondant  sur  le  fait  que  son  fief  était  dans  le 
royaume  de  Salonique.  Mais  bien  que  les  fiefs  de  ce  royaume 
fussent  assignés  en  majorité  à  des  barons  lombards,  il  y  avait 


1.  Henri  de  Valenciennes,  584-5. 

2.  Leben  and  Werke  ',  p.  452. 

3.  Ibid. 

4.  H.  de  Val.,  637-40. 

5.  Migne,  Patrol.,  CCXV,  1438-4. 

6.  Il  regno  di  Tessaglia,  cxtr.  de  la  Rivista  di  storia,  arte,  archeo- 
logia  délia  proo.  di  Alessandria,  Vil"  année,  p.  47. 


UN   SIRVENTÈS   HISTORIQUE  D'ÉLIAS   CAIREL.  485 

eu  cependant  des  exceptions,  comme  le  prouve  l'exemple  de 
Villehardouia'.  Puis,  on  lui  reprochait  d'avoir  commis  une 
trahison  en  s'unissant  aux  Lombards,  ce  qui  prouve  qu'il  ne 
rétait  pas  lui-même 2. 

C'est  ailleurs,  en  effet,  que  chez  Henri  de  Valenciennes  qu'il 
faut  puiser  nos  renseignements  Parmi  les  nouveaux  feuda- 
taires  avec  qui  Innocent  III  dut  correspondre  pour  arranger 
les  affaires  des  églises  de  Romanie,  figurent  deux  frères  : 
Rolandin  et  Aubertin  de  Canosse;  Rolandin,  mentionné  dans 
le  sirventés,  ne  l'est  pas  dans  la  chronique;  Aubertin,  au  con- 
traire, cité  dans  la  chronique,  n'est  pas  nommé  dans  le  sir- 
ventés. Innocent  parle  d'eux  d'abord  dans  une  lettre  du 
17  septembre  1210,  adressée  «  archiepiscopo  neopatrensi'  ». 
Ils  avaient  fait  des  donations  de  terres  aux  Templiers,  mais 
le  pape  dut  intervenir  à  cause  de  difficultés  que  ceux-ci 
avaient  soulevées  «  super  quibusdam  terris  a  Rolandino  et 
Albertino,  fralre  ipsius,  in  elemosynam  concessis  ».  Dans  une 
autre  lettre  du  20  septembre  suivant,  adressée  aux  Templiers, 
il  dit  :  «  Concessionem  terrae  de  Rupo...  a  nobilibus  viris 
«  Rolandino  de  Canossa  et  Albertino  germano  ejiis...  vobis 
«  factam...  confirmaraus*  ».  Ils  sont  tous  les  deux  cités  une 
troisième  fois  dans  une  autre  lettre  d'Innocent,  que  je  rap- 
porterai plus  loin. 

Il  n'y  a  pas  de  doute  sur  cette  identification.  La  chronique 
de  Henri  ne  dit  pas  un  mot  de  Rolandin,  ce  qui  est  remarqua- 
ble, attendu  la  place  qu'il  occupe  dans  la  strophe  d'Elias 
Cairel.  Quant  à  Aubertin,  il  paraît,  d'après  la  chronique, 
avoir  été  l'un  des  principaux  auteurs  de  la  rébellion  :  «  Au- 
bertius  ki  tout  ce  mauvais  plait  avait  basti^.,  »  Il  était  sire  de 
Thèbes^.  A  l'arrivée  de  l'empereur  dans  les  états  du  marquis, 
c'est  lui  qui  fait  fortifier  les  châteaux  contre  lui  et  le  laisse 

L  Villehardoiiin,  496. 

2.  «  Et  li  enipereres  dist  ke,  puisko  il  est  ses  hom,  il  n'est  mie  drois 
ke  il  li  faille.  »  (H.  de  Val.,  638,  et  cf.  ibid,  639.) 

3.  Migne,  Patrol.,  CCXVI,  p.  33L 

4.  Ibid.,  p.  328. 

5.  H.  de  Val.,  572. 

6.  Ihid.,  600. 


486  V.    DE   BARTHOLOMAEIS. 

dehors,  dans  la  ueige,  sans  nourriture';  c'est  lui  qui  chasse 
de  Salouique  tous  les  Fraûçais-  et  qui,  dans  l'entrevue  men- 
tionnée plus  haut,  tient  le  langage  le  plus  arrogant 3. 

Dans  les  sources  italiennes,  je  n'ai  pu  glaner  que  très  peu 
de  renseignements  sur  les  deux  frères.  Originaires  de  Ganosse, 
ils  appartenaient  à  la  famille  qui  prit  le  titre  du  célèbre  ro- 
cher après  la  mort  de  la  comtesse  Mathilde.  Je  ne  puis  citer 
qu'un  document  de  1185  par,  lequel  les  trois  frères  Gui,  Rolan- 
din  et  Auberlin  furent  investis  des  terres  de  Bianello  Gesso  et 
Ganosse  par  Frédéric  I'.  Gui  ne  semble  pas  avoir  passé  en 
Romanie;  on  le  retrouve  plus  tard  juge  à  Bologne^.  Je  dis 
cela  pour  qu'on  ne  le  confonde  pas  avec  le  suivant. 

Gui  Marques.  Il  y  avait  une  foule  de  Gui  parmi  les  croi- 
sés. Pourtant,  dans  la  chronique  de  Henri  de  Valenciennes, 
on  n'en  rencontre  que  deux  :  Gui  de  Dant-Rovel  et  un  Gui 
sans  surnom.  Entre  les  deux,  nous  n'avons  pas  le  choix.  L'un 
est  français,  partisan  de  l'empereur  :  il  faut  donc  l'écarter. 
L'autre  est  au  contraire  l'un  des  plus  ardents  champions  lom- 
bards; on  fait  mention  de  lui  dans  les  préliminaires  de  paix 
dont  le  chroniqueur  parle  au  ch.  667.  C'est  lui  évidem- 
ment qu'il  faut  reconnaître  ici.  Ce  personnage  n'est  pas  un 
nouveau  venu  dans  l'histoire  de  la  littérature  provençale  :  il 
n'est  autre  que  Gui  Marchesopulo,  de  la  branche  Obertengue 
des  Pallavicini  de  Parme,  fils  de  Guillaume,  marquis  di  Sci- 
pione.  Suivant  Litta,  qui,  malheureusement,  ne  cite  pas  ses 
sources,  il  s'était  rendu  en  Orient  a  cause  des  désagréments 
que  lui  avaient  suscités  les  républiques  auxquelles  il  ne  voulut 


1.  H.  de  Val.,  572. 

2.  Ibid.,  573. 

3.  Ibid.,  583.  «  Sire  Cuenos,  dist  Aubrelins,  or  saciés  bien  ke  nous  ne 
nos  assentirons  a  nul  consel  ke  nous  vos  lassons  point  de  le  nostre 
tierre,  ne  de  le  demande  ke  nous  vos  avons  faite.  Et  se  vous  ensi  ne  le 
faites,  assés  poés  la  fors  sejorner  por  nous;  car  chaions  ne  meterés  vous 
les  pies!  »  (Cf.  ibid.,  589.) 

4.  ïiraboschi,  Dizioiui)-/o  topogra/ico-storico  degli  Stati  Estensi, 
Modena,  1824,  p.  121  suiv.;  Ferretti,  Canossa,  Reggio,  187G,  p.  122-4; 
Overniann,  Grafin  Mathilde  vo?i  Tuscien,  p.  72  et  95.  Le  diplôme  est 
rapporté  par  Muratori,  A?itiquit.  Ital.  M.-jEvî,  I,  606. 

5.  Tiraboschi,  op.  cit.,  122. 


UN    SIRVENTES   HISTORIQUE    D'ÉLIAS  CAIREL.  487 

pas  se  soumettre^  Il  fat  sire  de  Bodoritza,  dans  la  vallée  de 
Tempe,  depuis  1204,  et,  comme  il  résulte  des  documents  soi- 
gneusement réunis  par  Hopf^,  bailli  de  Salonique  eu  1221-2. 
Avant  les  événements  qui  nous  occupent,  il  avait  pris  part  à 
la  guerre  entre  Guillaume,  prince  de  Morée,  et  Guillaume  de 
la  Roche,  duc  d'Athènes  3.  H  fut  tué  par  les  Grecs,  le  2  mai 
1237.  Dans  le  document  que  je  cite  plus  loin,  il  est  appelé 
Guido  Marchîo,  ce  qui  enlève  tout  doute  sur  son  identité. 
M.  Schultz-Gora  a  appelé  l'attention  sur  lui  à  propos  d'Isa- 
belle, la  troubadouresse  chantée  parE.  Cairel,  qu'il  croit  issue 
de  la  même  famille  des  Pallavicini  ''. 

Rainant.  Ce  nom ,  qui  figure  dans  les  textes  imprimés, 
n'apparaît  que  dans  le  manuscrit  R;  les  autres  lisent,  comme 
on  l'a  vu,  Guis  marques  errt  uas  l.  c.  (A),  erauas  (G), 
eravans  (ED),  era  uan  (IK),  e  t^auanz  (H).  La  leçon  Rai- 
nant doit  donc  être  repoussée.  Il  est  arrivé  ici  ce  qui  est 
arrivé  à  propos  de  Mombet  :  le  nom  le  plus  fréquent  a  pris  la 
place  de  celui  qui  l'était  moins.  C'est  en  présence  d'un  Ravan 
(cas  sujet  Ravas)  que  nous  nous  trouvons.  Dans  ce  person- 
nage il  faut  reconnaître  à  coup  sûr  Ravano  dalle  Carceri. 
(«  Ravanus  de  Carceribus  »  dans  les  textes  latins.)  Le  surnom 
ressort  d'autres  sources  que  Henri  de  Valenciennes;  celui-ci  ne 
nous  donne  que  le  nom,  et  de  plus  diversement  défiguré  sui- 
vant les  manuscrits,  de  sorte  que  le  rôle  historique  de  Ravan 
n'apparaît  pas  clairement  '.  Il  était  originaii'e  de  Vérone  et 


1.  Fatniglie  celebri,  Pallavici?io,X[Y  ;  Usseglio,  O}}.  cit.,  p.  43. 

2.  Chroniques  gréco-romanes,  p.  478. 

3.  Cronica  di  Morea,  en  Hopf,  op.  cit.,  p.  438  ss. 

4.  Provenzal.  Dichto'i^inen,  Leipzig,  1888,  p.  11. 

5.  Le  manuscrit  imprimé  par  P.  Paris  (Paris,  1836-8)  a  constamment 
Rollant  (XXXII,  XXXV);  Rolland;  Du  Gange  écrit  de  même  (Chroni- 
ques étrangères,  dans  Buclion,  Collectioti,  etc.,  Paris,  1840).  Le  manus- 
crit imprimé  par  Micliaud  et  Poujoulat  (iVou{je^/e  collection,  etc.,  Paris, 
1838)  a  Ravans  (73,74,  8:i)  à  côté  de  Roland  de  Negrepont  (70).  Cliez 
Brial  (Recueil  des  Hist.  de  la  Gaule,  etc.,  XVIII,  p.  491  suiv.,  Paris, 
1822),  on  trouve  aussi  une  fois  Rolland  de  Negrepont  (305);  dans  les 
autres  cas  (307,  311)  apparaît  un  nom  bien  étrange.  On  voit  que  les 
copistes  oa  remanieurs  de  l'ancienne  chanson  de  geste  de  Ilcm-i  do  Va- 
lenciennes n'ont  pas  entendu  le  nom  de  Ravan  et  y  ont  vu  quoique  chose 


488  V.    DE   BARTHOLOMAEIS. 

est  appelé  parfois  simplement  Ravano  da  Verona^  Comme 
d'autres  «  dalle  Carceri  »  figurent  à  côté  de  lui  dans  les  docu- 
ments''j  il  se  peut  qu'il  ait  passé  en  Romanie  avec  quelques- 
uns  de  ses  parents.  Il  signa,  au  nom  de  Venise,  l'acquisition 
de  l'île  de  Crète  ;  ce  qui  a  fait  justement  supposer  qu'il  se  ren- 
dit à  la  croisade  avec  les  Vénitiens  et  non  avec  Boniface^. 
Quoi  qu'il  en  soit,  il  fut  «  terziere  »  de  l'île  de  Négrepont. 
Celle-ci,  dans  le  partage  de  l'empire  byzantin,  était  échue 
aux  Vénitiens;  mais  occupée  antérieurement  par  Jean  d'Aves- 
nes,  au  nom  de  Boniface,  elle  était  restée  à  celui-ci*,  qui  la 
partagea  en  trois  fiefs,  attribués  aux  dalle  Carceri;  d'où  ce 
nom  de  «  terziere  ».  Plus  tard,  Ravan,  pour  se  soustraire  à  la 
suzeraineté  de  l'empereur  Henri,  reconnut  celle  des  Vénitiens 
sur  l'île,  dont  il  ne  tarda  pas  à  se  rendre  maître  absolu*.  Sa 
femme  était  une  Isabelle''  et  son  héritière  épousa  Guillaume 


comme  Rainant.  Ils  en  ont  tiré  un  nom  nouveau,  qu'ils  ont  décliné 
Rauaus  au  cas  sujet,  Ranaid  au  régime!  N.  de  Wailly  a  très  bien  res- 
tauré partout  la  forme  Ravan. 

1.  Par  ex.  par  Marin  Sanudo,  qui  parle  longuement  des  «  terzieri  »  de 
Négrepont,  dans  Ylstoria  ciel  Reg)io  di  Roma>iia  (dans  Hopf,  op.  cit., 
passim)  et  dans  les  Dynastiae  Greciae  [ibid.,  177). 

2.  Voy.  la  Cronica  di  Morea,  p.  438  suiv.,  où  on  parle  de  la  partici- 
pation des  dalle  Carceri  et  de  Gui  Pallavicino  à  la  guerre,  mentionnée 
plus  haut,  entre  le  prince  de  Morée  et  le  duc  d'Athènes,  du  vivant  de 
Boniface;  Heyd,  Hist.  du  commerce  du  Levant  au  m.  à.,  Leipzig,  Har- 
rassowitz,  1885,  p.  281  suiv.;  G.  Cipolla,  Ant.  cron.  veronesi,  Venezia- 
1890,1;  Ilopf,  op.  cit.,  p.  479  (tables  généalogiques);  Cerrato,  La  fami- 
glia  di  Guglielmo  il  Vecchio  marchese  di  Monferrato  nel  XIÏ  secolo, 
Torino,  Bocca,  1884  (mais  contre  lui  quelques  observations  par  De  Simoni, 
dans  Giorn.  ligustico,  XIII,  ;«4);  Usseglio.  op.  cit.,  p.  44  suiv. 

3.  Usseglio,  lac.  cit. 

4.  Heyd,  l.  c;  Andreae  Danduli  Chronicon,  dans  Script.  Rec.  ital., 
XII,  332  et  336;  Tafel  und  Thomas,  Fontes  ver.  austriac,  I,  p.  496  n. 
et  512.  L'occupation  de  l'île  de  Négrepont  est  rappelée  aussi  par  Ram- 
baut  de  Vaqueiras,  dans  la  laisse  en  -at  de  son  épître  épique,  occupation 
à  laquelle  il  semble  qu'il  ait  été  présent  (v.  26-8  de  l'édit.  Grescini,  Rome, 
Lœscher,  1903).  Voy.  aussi  Schultz-Gora,  Le  epistole,  etc.,  p.  134-5; 
Grescini,  .Rambaut  de  Vaqiteiras  et  le  marquis  Boniface  I  de  Mont- 
ferrât,  dans  les  Annales  du  Midi,  XI,  p.  435. 

5.  Heyd,  l.  c,  et  cf.  les  extraits  des  Annali  Veneti  par  Stefano  Magno 
(Hopf,  op.  cit.,  p.  179). 

6.  Maîtresse  du  sixième  de  l'île.  Etait-ce  Isabelle  Pallavicino,  la  trobai- 
ritzf  Gela  me  paraît  vraisemblable.  Je  ne  vois  pas  sur  quelles  bases 
Bartoli  a  affirme  qu'elle   devait  être  de  la  famille  Malaspina  (/  primi 


UN   SIRVENTÉS   HISTORIQUE   d'ELIAS   CAIREL.  489 

(le  Villeliardouia'.  Dans  la  guerre  civile  il  avait  joué,  à  côté 
de  Gui  Pallaviciuo  et  d'Aubertia  de  Cauosse,  un  rôle  fort  im- 
portant; au  point  que,  dans  les  préliminaires  de  paix  rappelés 
plus  haut,  Conon  de  Béthune,  qui  les  avait  proposés,  prévoit 
le  cas  où  «  Guis  et  Aubertins  et  Ravans  ne  voelent  otroier  cela 
pais^  ».  En  effet,  Ravan  refusa  toutes  les  offres  de  Conon» 
malgré  une  démarche  personnelle  de  celui-ci^.  C'est  seule- 
ment plus  tard  qu'il  demanda  une  trêve,  après  un  long  siège 
subi  dans  Thèbes,  où  il  s'était  enfermé  avec  Aubertin*.  C'est 
lui  enfin  qui,  à  Négrepont,  sauva  la  vie  à  l'empereur,  que  le 
comte  de  Blandrate  voulait  tuer^. 

Qu'il  me  soit  permis,  avant  de  me  séparer  de  ces  person- 
nages, de  citer  un  autre  document  où  on  les  retrouve.  Il  y 
est  question  d'une  convention  conclue  à  Ravennica  en  1210, 
«  super  universis  ecclesiis  positis  sive  sitis  vel  fundatis  in 
Thessalonica  usque  Corinthum  » ,  entre  le  patriarche  de 
l'Eglise  de  Constantinople,  les  archevêques  d'Athènes,  de 
Larisse  et  de  Néopatras,  des  évoques  et  des  barons.  Les  noms 
de  Gui  Marqués  et  de  Ravan  y  sont  placés  à  côté  l'un  de 
l'autre,  comme  dans  le  sirventés. 

«  Renuntiaverunt  quidem  domini  Nameus  Rofïredus  conesta- 
bulus  regni  Thessalonici,  Otto  de  Rocha  dominus  Athenarura, 
Guido  Marchio,  Ravanus  dominus  insulae  Nigripontis,  Raynerus 
de  Travas  ^,  Albertinus  de  Canossa...  in  manibus  supradicti  do- 
mini patriarchae...  omnes  ecclesiaeet  monasteria,  possessiones, 
redditus,  mobilia  et  immobilia  bona  et  universa  jura  Ecclesiae 
Dei.  » 


due  sec,  etc.,  p.  71;  cf.  aussi  Restori,  Letter.  Prov.,  p.  107  n.);  ni  pour- 
quoi M.  Torraca  repousse  l'identification  proposée  par  M.  Scliultz-Gora 
{Provenz.  Dichter.,  p.  11;  F.  Torraca,  Le  do?me  ital.  nella  poesia  pro- 
venzale,  Firenze,  Sansoni,  1901,  p.  20-21;  cf.  aussi  Bertoni,  dans  Giorn. 
stor.  délia  letter.  ital.,  vol.  XXXVIII,  p.  148). 

1.  Heyd,  loc.  cit. 

2.  H.  de  Val.,  667. 

3.  Ibid.,  668. 

4.  Ibid.,  678. 

5.  Ibid.,  681-686. 

6.  Dans  le  texte  Traval;  mais  toujours  Travas  dans  Henri  de  Valen- 


490  V.    DE   BARTHOLOMAEIS. 

«  Acta  sunt  haec  apud  Ravenicam  anno  Domini  1210,  indic- 
tione  XIII,  praesentibus...  Guiffredo  raarescalco  totius  imperii 
Romaniae^  et  Rolandino  de  Canossa'^.  » 


NOTE  ADDITIONNELLE. 

SUR    LA     DATE    DE    QUELQUES    AUTRES   POESIES    D'ÉLIAS    CAIREL. 

Nous  plaçons  donc  en  1208  la  pièce  dont  il  vient  d'être  ques- 
tion. Mais  il  se  peut  qu'elle  ne  soit  pas  la  plus  ancienne  qui  nous 
ait  été  conservée  de  Cairel.  C'est  probablement  avant  la  guerre 
qu'il  faut  reporter  la  chanson  Abi-il  ni  mai,  dont  un  des  envois 
paraît  faire  prévoir  de  prochaines  hostilités.  Le  troubadour,  qui 
ne  recourt  pas  encore  à  l'insulte,  parle  mystérieusement  d'une 
partie  d'échecs  qu'on  allait  engager  et  dans  laquelle  Guillaume 
devrait  jouer  non  le  rôle  de  pion,  mais  celui  de  reine  : 

Al  marques  man  de  cui  es  Monferratz 
qeis  traga  enan  anz  quel  jocs  sia  jogatz 
e  fassa  oimais  de  son  pezonet  fersa. 

Elias  Cairel  avait-il  pris  part  à  la  croisade  dès  le  début  de 
colle-ci  ou  n'était-il  allé  en  Remanie  que  plus  tard?  Nous  n'en 
pouvons  rien  savoir  :  néanmoins,  je  penche  pour  la  première 
hypothèse.  Ses  relations  étroites  avec  les  chevaliers  lombards 
et  la  chaleur  avec  laquelle  il  embrassa  leur  parti  attestent  un 
attachement  qui  ne  pouvait  dater  que  de  loin  3.  Cela  s'accorde- 
rait d'ailleurs  parfaitement  avec  ce  que  dit  l'une  des  biographies 
(AIK),  que  «  en  Remania  estet  lonc  temps  ».  Dans  cette  hypo- 
thèse, il  aurait  passé  une  bonne  partie  de  sa  vie,  avec  Rambaut 
de  Vaqueiras,  aux  côtés  de  Boniface  ^. 


1.  C'est  l'historien  Villehardouin. 

2.  Migne,  Patrol.,  CCXVI,  970-1. 

8.  Il  avait  pu  passer  en  Orient  à  la  suite  de  quelqu'un  des  barons  pro- 
vençaux qui  prirent  part  à  la  croisade.  (Voy.  Villehardouin,  45). 

4.  Je  ne  crois  pas  qu'il  y  ait  lieu  d'accueillir  l'hypothèse  très  hardie 
de  M.  Schultz-Gora,  suivant  laquelle  Rambaut  aurait  confié  le  manuscrit 
de  sa  célèbre  épître  au  trouvère  Huon  de  Berzé;  hypothèse  à  laquelle  le 
savant  allemand  a  dû  s'attacher,  faute  d'autres  troubadours  ayant  été  à 
la  croisade  [op.  cit.,  pp.  24-5).  Mais  Rambaut  avait  pu  le  confier  à  un 
messager  quelconque,  même  non  poète.  En  tout  cas,  s'il  était  nécessaire 


UN   SIRVENTÉS   HISTORIQUE   D'ÉLIAS   CAIREL.  491 

C'est  à  la  même  époque  que  se  rapporte  la  chanson  Moût  mi 

platz  lo  douz  temps  d'abril  (ms.  A,  n"  141),  dont  voici  l'un  des 

envois  : 

Chansoneta,  vai  tost  e  viatz 
dreit  al  marques  de  cui  es  Monferratz, 
6  digas  li  c'  anc  a  volpill  dormen 
non  intret  grels  en  bocha  ni  en  den. 

L'autre  envoi  nous  montre  le  troubadour  en  Orient.  En  effet, 
il  «présente»  sa  chanson  à  tua  donna  Isabella;  or,  il  a  été 
démontré  par  M.  Schulz-Gora*  que  sa  correspondance  avec 
Isabelle  ne  put  s'établir  qu'en  Orient,  où  fut  composée  la  tenson 
N'  Elias  Cai7'el,  de  Vamor.  —  On  ne  possède  pas  d'autres  pièces 
qu'on  puisse  considérer  indubitablement  comme  composées 
outre-mer. 

Il  était  rentré  en  Occident  avant  1215.  La  chanson  Era  no  vei 
ni  puoi  ni  comba  (A,  n'^  133)  doit  être  antérieure  à  cette  année, 
date  de  la  mort  du  marquis  de  Massa,  qui  y  est  nommé  2,  Le 
troubadour  y  parle,  au  reste,  de  l'Orient  comme  d'une  terre 
lointaine  : 

Ai  talan  que  fassa 

saber  lai  en  terra  grega... 

Vers,  tost  e  corren  t'en  passa 

tôt  dreich  lai  en  terra  grega... 

Il  faut  placer  aussi  avant  1215  la  pièce  Si  com  cel  que  sos 
companhos  (A,  n''  133j,  composée  au  moins  un  an  après  son 
retour,  comme  le  montre  le  v.  47. 

La  mention  du  marquis  de  Massa  nous  amène  à  croire  qu'après 
son  retour  Cairel  passa  quelque  temps  en  Italie,  où  il  avait 
pu  séjourner  déjà  avant  son  départ. 

Je  n'hésite  pas  à  reconnaître  Frédéric  II  dans  les  vers  : 

Lo  plazen  reis  qu'er  seigner 
d'emperi 

de  la  chanson  Fi-eitz  ni  neus  nom  pol  destreigner  (A,  n"  140). 


de  proposer  la  candidature  d'un  poète  à  cette  mission,  il  est  désormais 
plus  vraisemblable  que  ce  poète  fut  Elias  Cairel.  Au  moins  on  ne  sortirait 
pas  de  l'entourage  de  Boniface.  Enfin,  il  ne  faut  pas'  oublier  que  dans 
cet  entourage  il  y  avait  aussi  son  allié,  le  comte  de  Blandrate,  troubadour 
lui-même,  qui  rentra  en  Italie  peu  après  la  guerre.  (Voy.  liopf,  Grie- 
chenlund,  p.  231.) 

1.  Provenz.  Dichlef.,  p.  11. 

2.  Ibid. 


492  V.    DE   BARTHOLOMAEIS. 

Frédéric  n'a  pas  encore  le  titre  d'empereur,  qu'il  reçut  en 
juin  1219,  mais  il  est  déjà  préconisé  à  l'empire.  La  chanson 
est  une  invective,  d'allure  toute  jongleresque,  contre  la  gen 
desconoissen  et  contre  le  roi  lui-même  qui,  dit-il  hyperbolique- 
ment,  «  tient  sa  personne  si  maigre  que  la  lime  n'y  pourrait 
mordre  ».  Ce  dégoût  de  la  cour  et  des  courtisans  est  évidemment 
d'un  homme  à  qui  ont  manqué  les  faveurs  qu'il  sollicitait.  C'est 
pourquoi,  en  véritable  jongleur,  il  ira  chercher  d'autres  pro- 
tecteurs. 

Où  alla-t-il  ?  On  ne  saurait  le  dire  avec  certitude. 

Dans  les  manuscrits  AD(IK)  l'envoi  de  cette  pièce  est  le 
suivant  : 

Vers,  val  t'en 
test  e  corren 
e  non  sai  on,  qu'ieu  se  segrai  breumen. 

Mais  le  dernier  vers  diffère  suivant  les  manuscrits;  EM 
lisent  :  en  Espanha...  et  B.  :  en  Spina.  Comme  quelques  pièces 
de  Cairel  sont  adressées  au  roi  de  Léon,  il  ne  serait  pas  impos- 
sible qu'en  quittant  l'Italie  il  se  fût  rendu  en  Espagne  '.  Quant  au 
Spina  de  H,  il  pourrait  désigner  Spigno,  en  Montferrat. 

Quoi  qu'il  en  soit,  c'est  à  l'année  1219  que  se  rapporte  la  chan- 
son de  croisade  Qui  saubes  dar  lo  bon  conseil  denan.  Le  vers  37  : 

Retraire  vuelh  als  crozatz  que  lai  van. 

prouve  clairement  qu'il  écrivait  en  Occident.  Cairel  nomme  (v.  44) 
l'emperairilz  Yolen  qui  fut  régente  de  Constantinople  de  1217 
à  août  1219.  Enfin,  il  l'adresse  (v.  46)  à  l'empereur  Frédéric  II; 
la  pièce  est  donc  postérieure  à  juin  et  antérieure  à  août  1219. 
Elle  a  dû  être  envoyée  à  l'empereur  au  lendemain  de  son  élec- 


1.  Sa  présence  en  Espagne,  admise  comme  possible  par  M.  Braga  et 
M'"»  Michaëlis  de  Vasconcellos  {Portiig.  Litteratur,  dans  Grundriss  de 
Groeber,  II,  ii,  p.  172  n.),  n'est  pas  bien  certaine.  Milà  y  Fontanals  s'était 
borné  à  indiquer  les  passages  qui  se  rapportent  à  Alpbonse  IX  de  Léon 
[De  los  trovadores  en  Espaûa,  p.  154);  et  il  avait  bien  fait.  Des  deux 
poésies  adressées  à  ce  roi,  l'une,  Abril  ni  mai,  nous  l'avons  vu  tout  à 
l'heure,  est  adressée  aussi  à  Guillaume  de  Montferrat,  et  a  été  écrite, 
selon  toute  vraisemblance,  en  Orient.  L'autre,  Si  com  cel,  paraît  écrite 
en  Italie.  Cette  dernière  serait  la  plus  ancienne  des  poésies  composées 
après  le  retour  en  Occident;  et  puisque  peu  après  nous  trouvons  le  trou- 
badour en  Italie,  en  relations  avec  lo  marquis  de  Massa,  il  est  vraisem- 
blable qu'en  se  rendant  en  Occident  il  avait  débarqué  en  Italie  et  y 
avait  demeuré. 


UN   SIR  VENTÉS  HISTORIQUE  D'ÉLIAS   CAIREI,.  493 

tion'  ;  le  troubadour  l'exhorte,  en  ce  moment  solennel,  à  accom- 
plir enfin  le  vœu  qu'il  avait  fait,  quatre  ans  auparavant,  en 
prenant  la  croix.  Dans  cette  même  pièce,  il  s'adresse  encore  une 
fois  à  Guillaume  de  Montferrat  et  lui  tient  le  même  langage  que 
jadis  : 

Marques  Guillem,  lo  sojorn  nil  dormir 

de  Monferrat  non  voletz  jes  gurpir? 

Tart  vengaretz  la  mort  de  vostre  paire 

nil  deseret  c'om  fai  a  vostre  fraire  I 

Ben  pot  hom  dir,  malvatz  fill  de  bon  paire, 

e  pesani  fort,  mas  non  puesc  aires  faire. 

La  chanson  So  qem  sol  dar  alegransa  (A,  no  139)  remonte  à  la 
môme  époque.  Elle  aussi  contient  des  exhortations  (v.  48-63) 
à  Frédéric  II  et  à  Guillaume,  qui  est  invité  à  «  acheter  du 
cœur  ». 

Ainsi,  c'est  jusqu'en  1220  environ  qu'il  nous  est  permis  de  sui- 
vre les  traces  de  la  vie  de  Cairel.  Quoique  l'identification  propo- 
sée par  M.  Schultz-Gora^  entre  le  Coyyio  ou  Corno  de  la  chanson 
Estai  ai  dos  ans  (A,  n»  137)  et  Conon  de  Béthune  me  semble  bien 
vraisemblable,  je  ne  saurais  affirmer  que  cette  chanson  a  été 
composée  en  Orient.  En  tous  cas,  elle  ne  paraît  pas  remonter 
plus  haut  que  12203. 

Les  pièces  Per  manlener  joi  e  chant  e  solatz,  Totz  mos  cors  e 
mos  sens,  Qan  la  freidors  irais  ne  contiennent  aucune  indication 
permettant  d'en  déterminer  la  date,  même  approximativement. 
Quant  à  la  chanson  Lo  rossinhol  chanta  tant  doussamen,  attribuée 
par  E  à  Elias  Cairel  et  par  a  à  Peire  VidaH,  je  me  borne  à  dire 
que  le  «  senhal  »  miralh,  qui  y  apparaît,  ne  se  rencontre  nulle 
part  dans  les  pièces  de  notre  troubadour,  et  que  le  style  ne 
m'engage  pas  à  la  lui  attribuer. 

C'est  là  tout  ce  qui  me  semble  ressortir,  en  fait  de  renseigne- 
ments biographiques,  des  poésies  d'Elias  Cairel. 

Le  témoignage  combiné  de  ses  deux  biographies  nous  apprend 
de  plus  que  sa  patrie  était  le  Périgord  (H)  et  plus  précisément 


1.  La  date  du  couronnement  à  Rome  (22  nov.  1220)  paraît  inconciliable 
avec  la  mention  de  Yolande. 

2.  Provenz.  Dichter.,  p.  11. 

3.  Ou,  au  moins,  que  1224,  année  où,  comme  il   ressort  du  passage 
connu  de  Philippe  Mousket,  Conon  n'existait  plus. 

4.  Publiée  par  M.  Chabaneau,  Poésies  htédites  des  troub.  du  Péri- 
gord, p.  41. 


494  V.    DE   BARTHOLOMAEIS. 

Sarlat  (AIK) ,  qu'il  était  «  laboraire  d'aur  e  d'argen  e  dese- 
gnaire  d'armas  »,  qu'il  se  fit  jongleur  et  qu'il  mourut  dans  sa 
patrie  (AIK),  sans  compter  quelques  autres  renseignements 
de  peu  d'intérêt.  C'était  là,  sans  doute,  la  version  transmise  ora- 
lement aux  biographes.  Quant  aux  autres  indications  qu'ils  nous 
donnent,  je  crois  qu'il  faut  en  chercher  la  source  dans  les  poé- 
sies. Les  éloges  décernés  par  le  biographe  de  H  à  son  talent  sont 
justifiés  par  la  valeur  esthétique  de  ses  poésies,  qui  lui  assigne 
une  place  assez  honorable  dans  le  Parnasse  provençal*.  Quand 
il  ajoute  :  «  E  serquet  la  major  part  de  la  terra  habitada^  »,  il  se 
livre  évidemment  à  l'hyperbole.  Il  a  dû  avoir  sous  les  yeux  un 
texte  qui,  comme  celui  de  EM  rapporté  plus  haut,  lui  fit  suppo- 
ser un  séjour  de  Cairel  en  Espagne,  de  sorte  qu'il  le  trouvait  au 
delà  des  Pyrénées  aussi  bien  qu'au  delà  des  Alpes  et  de  la  mer, 
ce  qui  équivalait  pour  lui  à  toute  la  terre  habitée.  Il  ajoute 
enfin  :  «  E  pel  desdeing  qu'el  avia  dels  baros  e  del  segle,  no  fo 
tant  grazitz  com  la  soa  obra  valia  »,  phrase  qui  a  pu  lui  être 
inspirée  ou  par  la  chanson  So  quem  sol  dar  alegransa,  où  Elias 
Cairel  se  plaint  (v.  6-11),  après  tant  d'autres  jongleurs,  que  les 
puissants  du  jour  «  abaissent  Joie  et  Valeur  »,  ou  encore  par 
celle  qui  est  dirigée  contre  la  cour  de  Frédéric  II. 

V.    DE   BARTHOLOMAEIS. 


1.  c'est  aussi  le  jugement  de   M.  Thomas,  dans  l'article  Cairel  de  la 
Grande  E)icijclopi'die. 

2.  Expressions   très  analogues  à   propos    de   Cercamon.    (Chabaneau, 
Biog.,  p.  9.) 


MRLANGES  ET  DOCUMENTS 


NOTE   SUR    L  INSCRIPTION    DE   VOLUSIANUS. 

Daas  son  Avant-Propos  au  second  volume  (Marseille)  de  la 
Gallia  christiana  novissima  du  regretté  chanoine  Albanès, 
M.  le  chanoine  Ulysse  Chevalier  a  inséré  la  note  suivante, 
relative  à  la  fameuse  inscription  de  Volusianus  et  Fortunatus  : 
«  Les  Archives  de  l'évêché  possèdent  une  lettre  de  M^''  For- 
tuné de  Mazenod,  datée  du  21  octobre  1837,  dans  laquelle 
révêque  de  Marseille  félicite  un  M.  Meillard  (sic)  de  l'heureuse 
découverte  d'une  pierre  qu'il  croyait  chrétienne.  Il  y  a  des 
raisons  de  penser  qu'il  s'agissait  de  l'inscription  de  Volusia- 
nus, que  M.  Hirschfeld  dit  avoir  été  trouvée  précisément 
en  1837 .  Mais  il  était  difficile  à  cette  époque  d'en  compren- 
dre le  sens,  la  valeur,  la  portée.  Les  conjectures  de  M.  Meil- 
lard n'ayant  pas  été  admises  par  les  savants  indigènes,  elle  fut 
reléguée  parmi  les  monuments  païens.  C'est  là  que  M.  Edm. 
Le  Blant  l'a  trouvée  en  1849*.  » 

J'ai  pensé  qu'il  y  aurait  quelque  utilité'  à  publier  cette 
lettre,  dont  M.  le  vicaire  général  Ollivier  a  bien  voulu  me 
procurer  une  copie.  La  voici  : 

1.    P.  VII. 


496  ANNALES    DU    MIDI. 

A  M.  Melliard. 

Marseille,  le  "21  octobre  1837. 
Monsieur, 

Je  vous  remercie  de  l'attention  que  vous  avez  bien  voulu  avoir 
de  m'adresser  une  copie  de  la  pierre  que  vous  avez  découverte 
dans  les  terres  enlevées  pour  creuser  le  bassin  de  Carénage. 

Cette  pierre  mérite  vraiment  de  n'être  pas  négligée,  surtout 
après  l'explication  que  vous  avez  donnée,  non  sans  quelque  fon- 
dement, à  l'inscription  qu'elle  porte. 

Si  cette  explication  est  définitivement  adoptée,  comme  je  suis 
disposé  à  le  croire,  par  les  autres  personnes  compétentes  dans 
ces  sortes  de  questions,  ce  sera  un  titre  précieux  que  l'Église  de 
Marseille  vous  devra.  La  chose  a  paru  assez  importante  à  mon 
neveu  pour  que  dans  son  prochain  voyage  à  Paris  il  demande  à 
ce  sujet  l'opinion  des  savants  qui  sont  réputés  les  plus  capables 
pour  le  sens  de  ce  genre  de  débris  des  anciens  monuments. 

J'aime  à  me  flatter,  pour  l'honneur  de  notre  Église,  qu'ils  con- 
firmeront ce  que  vous  dites,  et  alors  nulle  place  ne  conviendra 
mieux  à  cette  pierre  que  celle  que  vous  avez  vous  même  eu  l'idée 
de  lui  assigner.  On  pourrait  encore  y  ajouter  une  légende  qui 
dise  où  elle  a  été  trouvée,  et  même  qui  l'explique. 

En  attendant,  je  vous  prie  de  la  conserver  avec  soin,  et  d'a- 
gréer, avec  l'expression  de  ma  reconnaissance,  l'assurance,  etc. 

Signé  :  f  Charles  Fort.,  évêque  de  Marseille. 

Il  serait  évidemment  plus  utile  d'avoir  la  lettre  de  M.  Mel- 
liard, à  laquelle  répondait  l'évêque  en  termes  forcément  un 
peu  ambigus  pour  nous.  Malheureusement,  cette  lettre  a  dis- 
paru de  révêché,  de  même  qu'en  a  disparu,  il  y  a  longtemps, 
la  fameuse  inscription  du  Pagus  Lucretius,  que  M?""  de  Bel- 
zunce  y  avait  fait  transporter,  et,  tout  récemment,  une  brique 
portant  le  monogramme  de  Constantin,  avec  une  devise  latine, 
heureusement  publiée  par  M.  U.  Chevalier  dans  la  note  en 
question. 

J'ai  cherché,  tout  au  moins,  à  savoir  qui  était  ce  Melliard, 
et  n'ai  pas  été  plus  heureux.  J'avais  pensé  qu'il  avait  pu  être 
l'un  des  entrepreneurs  chargés  des  travaux  de  creusement  du 


MÉLANGES  ET  DOCUMENTS.  497 

bassin  de  Carénage,  et  j'ai  fait  des  recherches  daas  ce  sens. 
Or,  mon  savant  et  obligeant  collègue  M.  Mabilly,  archiviste 
de  la  ville,  n'a  rencontré  ce  nom  ni  dans  les  registres  de  cor- 
respondance de  1836  à  1838,  ni  dans  les  listes  électorales,  ni 
dans  les  Indicateurs  de  l'époque.  Les  délibérations  du  Conseil 
municipal  n'ont  rien  fourni  non  plus. 

Comme  les  travaux  en  question  n'étaient  pas  exécutés  aux 
frais  de  la  ville,  mais  de  l'État,  il  était  possible  que  Melliard 
fiit  un  entrepreneur  étranger  à  la  ville.  J'ai  alors  dirigé  mes 
recherches  dans  ce  sens,  c'est-à-dire  du  côté  des  Archives 
départementales  et  du  service  maritime  des  Ponts  et  Chaus- 
sées. Là,  j'ai  pu  constater,  grâce  à  l'obligeant  intermédiaire 
de  M.  J.  Fournier,  archiviste-adjoint,  que  les  travaux  avaient 
été  exécutés  en  régie,  et  que,  par  suite,  les  entrepreneurs 
avaient  dû  avoir  une  latitude  qui  les  a  dispensés  de  tenir  le 
service  technique  au  courant  des  trouvailles  faites  par  eux. 

J'ajouterai  que  le  Rapport  rédigé  sur  ces  travaux  par  une 
Commission  archéologique  que  l'on  avait  nommée  tout  exprès 
pour  les  surveiller  ne  fait  pas  à  notre  inscription  la  plus 
légère  allusion;  mais  il  n'y  a  pas  lieu  de  s'en  étonner,  vu 
qu'elle  s'est  acquittée  de  sa  mission  avec  une  négligence  qui 
n'a  eu  d'égale  que  son  incompétence.  Il  y  a,  en  effet,  au 
Musée  Borély  une  foule  d'objets  qui  proviennent  incontesta- 
blement du  bassin  de  Carénage,  et  que  le  Rapport  ne  men- 
tionne pas  davantage.  Or,  à  mon  sens,  des  deux  questions  que 
soulève  le  monument,  la  question  de  provenance  et  la  question 
d'interprétation,  c'est  la  question  de  [)rovenance  qui  est  la 
plus  importante  et  la  plus  délicate. 

Sur  ce  point,  M.  U.  Chevalier  s'est  montré  beaucoup  trop 
affirmatif,  et  a  tout  à  fait  méconnu  le  sens  des  quelques  li- 
gnes consacrées  par  M.  0.  Hirschfeld  à  l'inscription  dans  le 
C.I.L.,XII,  n»  489.  Non  seulement  M.  Hirschfeld  ne  dit  point 
que  l'inscription  «  a  été  trouvée  précisément  .en  1837  »,  mais 
il  déclare  que  l'on  ne  sait  rien  sur  la  provenance,  et  il  indique 
qu'elle  peut  fort  bien  provenir  du  dehors,  peut-être  de  Rome: 
«  Ubi  reperta  sit  non  constat,  flerique  potest  ut  sit  ori- 
ginis  eœternae,  fartasse  urhanae.  »  Et  c'est  bien  ainsi  que 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVI.  35 


498  ANNALES   DU   MIDI. 

l'a  compris  (le  Rossi,  qui  écrivait  en  1888  :  «  Hîrschfeld  du- 
Mlat  de  iiluli  origine  Massiliensi  :  de  loco  enim,  quo  lapis 
repertus  est,  nil  certi  iraditum  comperit  '.  » 

Eq  fait,  lorsque  E.  Le  Blaut  a  déniché  —  c'est  le  mot  — 
l'iascription  au  Musée,  personne  ne  l'y  avait  remarquée,  et, 
chose  bizarre,  elle  ne  figure  pas  même  dans  le  Catalogue 
de  1851 ,  postérieur  cependant  de  deux  ans  à  la  visite  de 
Le  Blant,  qui  avait  dû  attirer  sur  elle  l'attention  du  conser- 
vateur. Elle  n'apparaît  que  dans  celui  de  1876  (n»  116),  avec 
cette  simple  indication  :  collection  de  l'ancien  Musée,  c'est- 
à-dire  du  Musée  formé  à  partir  de  1802  et  installé,  jusqu'en 
1863,  dans  la  chapelle  du  Lycée  actuel. 

C'est  l'abbé  Albanès  qui,  au  rapport  de  de  Rossi,  affirmait 
que  l'inscription  provenait  bien  du  Carénage  :  «  Respondet 
nunc  constare  insignem  lapident  rediisse  in  lucem  Mas  - 
siliae,  quum  necropolis  sita  in  piano  declivi  ab  aede 
S.  Victoris  ad  litlus  maris  funditus  effossa  est  excavato 
portu,  anno  fere  1830.  >  Malheureusement,  l'abbé  Albanès 
a  négligé  de  nous  dire  sur  quoi  il  fondait  cette  certitude,  ce 
qui  serait  inexplicable  s'il  avait  eu  vraiment  des  documents 
quelconques  là-dessus.  Et  je  sais  personnellement  que,  tout 
convaincu  qu'il  fût  de  l'origine  marseillaise  du  monument,  il 
n'en  avait  aucune  preuve  matérielle,  mais  ne  désespérait  pas 
d'en  trouver  quelque  jour  à  l'évêché. 

On  voit  par  tout  cela  de  quelle  importance  serait  la  lettre 
de  Melliard  si  on  pouvait  la  retrouver. 

Je  dois  ajouter  que  j'ai  fait  examiner  le  marbre  par  mon 
collègue  M,  Vasseur,  professeur  de  géologie  à  l'Université. 
Or,  tout  ce  que  l'on  peut  conclure,  c'est  que  ce  marbre  pro- 
vient soit  de  la  région  des  Pyrénées,  soit  d'Italie.  Il  va  de  soi, 
d'ailleurs,  que  cela  ne  prouve  nullement  que  l'inscription 
n'ait  pas  été  gravée  à  Marseille;  mais  là  encore  le  moyen  de 
faire  la  preuve  nous  échappe. 

Il  me  semble  cependant  qu'il  y  a,  en  faveur  de  la  prove- 
nance locale,  un  argument  bien  simple,  et  auquel  personne 

1    Inscript.  christ,  urbis  Romae,  II,  p.  x-xi. 


MÉLANGES  ET   DOCUMENTS.  499 

n'a  songé.  L'iascription,  dans  son  état  actuel,  est  formée  de 
cinq  fragments;  or,  les  cassures  sont  très  certainement  an- 
ciennes. Qui  admettra  que,  dans  les  premières  années  du  dix- 
neuvième  siècle,  un  amateur  ait  apporté  à  Marseille  un  mo- 
nument d'aussi  mince  intérêt  apparent  ainsi  fragmenté?  Et, 
sur  un  point  au  moins,  je  me  permettrai  d'être  plus  afflrmatif 
que  M.  HirschCeld  :  si  le  marbre  ne  vient  pas  de  Marseille, 
c'est  certainement  de  Rome  qu'il  vient.  Il  serait  par  trop  sur- 
prenant qu'une  épitaphe  de  martyrs  chrétiens  du  second  siè- 
cle, apportée  par  hasard  à  Marseille,  y  ait  été  apportée  d'au- 
tre part  que  de  Rome. 

Seulement,  pour  que  cet  argument  ait  sa  valeur,  il  faut 
admettre,  avec  Le  Blant  et  de  Rossi,  que  l'inscription  est 
bien  clirétienne  :  une  épitaphe  païenne  pourrait  plus  facile- 
ment avoir  été  apportée  d'une  ville  quelconque. 

Or,  ici  nous  avons  affaire  à  d'autres  savants,  qui  admettent 
bien  que  l'inscription  est  marseillaise,  mais  qui  veulent  qu'elle 
soit  païenne.  Pour  M.  Froehner,  en  effet,  «  les  deux  hommes, 
probablement  deux  bateliers  du  Rhône,  s'étaient  noyés  dans 
le  fleuve  :  vim  fluminis  passi  suni;  l'ancre  fait  allusion  à 
leur  métier,  et  le  mot  refrigeret  fait  partie  d'un  trimètre 
iambique  :  «  lovis,  pater  refrigeret  nos  quam,  polest  *.  » 

Sans  méconnaître  l'élégance  de  cette  dernière  leçon,  je  me 
bornerai  à  faire  remarquer  que  si  des  bateliers  du  Rhône 
s'étaient  noyés  dans  ce  fleuve,  ce  n'est  certainement  pas  à 
Marseille,  distant  de  quarante  kilomètres  de  l'embouchure, 
qu'on  les  aurait  ensevelis.  La  lecture  vim  maris  serait  plus 
satisfaisante  à  ce  point  de  vue;  mais  je  doute  que  l'une  ou 
l'autre  ait  jamais  l'approbation  des  latinistes,  tandis  que  vim 
ignis  est  irréprochable. 

Au  résumé,  j'estime  que,  si  nous  n'avons  pas  encore  de 
preuves  matérielles  que  l'inscription  de  Volusianus  a  été  trou- 
vée au  Carénage,  il  y  a  tout  un  ensemble  de  vraisemblances 
que  la  réponse  de  Ms'  de  Mazenod  à  M.  Melliard  vient  singu- 


1.  Catalogue  des  antiquités  grecques  et  romaines  du  Musée  de  Mar- 
seille, p.  VI-VII. 


ÔOO  ANNALES   DtJ   MiDt. 

Hèrement  renforcer,  car  oa  ne  voit  pas  à  quel  autre  objet 
trouvé  dans  les  travaux  pourrait  s'appliquer  cette  lettre. 

M-  Clerc. 


II 


LE  NOM   DE  LIEU    TRAMESAIGUES. 

Dans  un  mémoire  intitulé  La  grand'roule  centrale  des 
Pyrénées,  publié  il  y  a  sept  ans,  M.  Labrouche  a  écrit  :  «  A 
moins  d'une  lieue  de  Saint -Lary  et  sur  la  même  rive  s'élève 
le  village  de  Tramez ay gués,  dénomination  fréquente  dans 
les  Pyrénées  pour  désigner  un  confluent,  Transmissas 
aquas*.  »  Loin  de  s'arrêter  à  faire  valoir  cette  étymologie, 
jetée  d'une  manière  si  désinvolte,  M.  Labrouche  lui  a  attaché 
au  pied  un  boulet  dont  il  n'a  pas  vu  le  poids  et  qui  doit  la 
couler  à  fond.  Ce  boulet  est  la  note  que  voici  :  «  On  trouve 
dans  un  acte  des  archives  communales  d'Aragnouet  de  1370 
(original  sur  parchemin)  une  forme  assez  singulière  pour  tra- 
duire ce  nom  de  lieu.  Cette  forme,  qui  ne  se  rencontre  qu'à 
l'ablatif  pluriel,  est  Trambis  Aquis;  ce  qu'on  ne  peut  expli- 
quer que  par  un  adjectif  trambus,  a,  um,  et  interpréter  par 
eaux  confiuentes.  Ni  Freund  ni  Du  Cange  ne  donnent  aucun 
exemple  de  cette  forme  adjective,  qui  est  absolument  sûre 
dans  le  texte  cité,  où  elle  est  répétée  plusieurs  fois  en  très 
bonne  graphie  du  xiv®  siècle.  » 

Je  ne  crois  pas  qu'il  y  ait  lieu  d'enrichir  Du  Cange,  encore 
moins  Freund,  d'un  adjectif  trambus  signifiant  «  confluent  ». 
J'estime  que  ce  latin  médiéval  nous  fournit  simplement  la 
preuve  que  la  forme  romane  de  Tramesaigues  -  a  été,  à  un 


\.  Bulletin  de  géographie  historique  et  descriptive,  1897,  p.  122.  Cf. 
Annales  du  Midi,  XI,  115.  Je  reviendrai  prochainement,  j'espère,  sur  le 
mémoire  de  M.  Labrouche  pour  en  discuter  le  fond,  c'est-à-dire  la  ques- 
tion de  la  Ténarèze. 

2.  J'écris  ainsi  pour  simplifier,  répudiant  le  z  non  étymologique  et  Vy 
de  basse  époque. 


MÉLANGES   ET   DOCUMENTS.  501 

moment  donné,  Trambasaigas,  antérieurement  * Entramba- 
saigas,  c'est-à-dire  Entre-ambas-aigas,  ce  qui  revient,  en 
bon  latin,  à  Inter-ambas-aquas  et,  en  français  de  Paris,  à 
Entre  deuœ-eauœ .  L'emploi  de  inier  et  de  aqua  dans  la 
toponymie  de  la  Gaule  n'a  pas  besoin  d'être  commenté;  celui 
de  ambo  est  extrêmement  rare  et  je  n'en  connais  pas  d'exem- 
ple en  dehors  de  la  locution  Inter-ambas-aquas  ' .  Cette  locu- 
tion a  été  fréquemment  employée  dans  la  toponymie  espa- 
gnole :  on  ne  trouve  pas  moins  de  sept  Entrambas  Aguas 
dans  les  provinces  de  Santander,  de  Lugo,  des  Asturies  et  de 
Tolède  2. 

On  sait  que  dans  le  domaine  du  gascon  le  groupe  mb  se 
réduit  normalement  à  m  :  le  Recueil  de  M.  Luchaire  indique 
plusieurs  exemples  de  amas,  âmes  comme  correspondant  au 
latin  ambas;  il  est  donc  tout  naturel  que  Tramesaigues  re- 
monte à  Trambesaigues.  Quant  à  la  chute  de  la  première 
syllabe  du  mot  entre,  elle  s'explique  par  une  confusion  avec 
la  préposition  en,  comme  la  forme  tro  de  l'ancien  provençal, 
pour  entro  (jusque),  du  latin  iniro. 

M.  Labrouche  affirme  que  la  dénomination  qui  nous  occupe 
est  fréquente  dans  les  Pyrénées,  mais  il  ne  cite  pas  d'exemple 
autre  que  celui  dont  il  vient  d'être  question.  Je  n'en  connais 
en  tout  que  quatre,  dont  le  lecteur  sera  peut-être  bien  aise  de 
trouver  ici  l'indication  '  : 

1°  Au  confluent  de  la  Neste  d'Aure  et  du  Rieumajou  (Hautes- 
Pyrénées)  :  c'est  celui  qui  a  inspiré  M.  Labrouche; 

2"  Au  confluent  de  l'Ariège  et  du  Sios,  hameau  de  la  com- 
mune de  Montgaillard  (Ariège); 

3"  Au  confluent  de  l'Ariège  et  de  l'Ers,  hameau  de  la  com- 


1.  Ce  serait  une  erreur  de  croire  (comme  le  dit  F.  Godefroy  en  son  Dict. 
de  l'anc.  langue  française,  article  anibes)  que  dans  Ambérieux  il  y  a 
ambos  et  rivos;  en  réalité  Ambérieux  est  identique  qtymologiquement  à 
Ambayrac  (Aveyron)  et  à  Ambërac  (Charente),  c'est-à-dire  qu'il  contient 
le  gentilice  Anibarius  plus  le  suffixe  -acus. 

2.  Comparez,  pour  l'emploi  de  ambo,  les  localités  appelées  Entratnbos 
Rios  et  Entrambas  Mestas. 

3.  l^Q  Dictionnaire  des  postes  n'enregistre  que  Tramesaygues  (Hautes- 
Pyrénées). 


502  ANNATES   DU   MIDI. 

mime  de  Cintegabelle  (Haute- Garonne),  où  la  carie  de  Cassini 
signale  une  église  ou  chapelle; 

4°  Au  confluent  du  ruisseau  d'Aucèse  (certains  écrivent 
Ossèze  *)  et  du  ruisseau  d'Escorse,  dont  la  réunion  forme  le 
ruisseau  d'Alet,  affluent  du  Salât,  ancien  hameau  de  la 
paroisse  de  Saint-Lizier  d'Ustou  (Ariège)  d'après  la  carte  de 
Cassini.  Aujourd'hui  le  nom  paraît  avoir  disparu,  au  moins  de 
la  cartographie,  et  avoir  été  absorbé  par  celui  de  Tartarolle, 
que  Cassini  indique  dans  le  voisinage  sous  la  forme  Tartat^ot. 

On  remarquera  que  les  deux  Tramesaigues  qui  sont  sur 

les  bords  de  l'Ariège  n'appartiennent  pas  au  domaine  gascon  : 

la  réduction  de  mb  à  m  déborde  donc  les  limites  orientales 

de  ce  dialecte. 

Antoine  Thomas. 


III 


SUR  LA    DATE    DE  LA  TRANSLATION  DKS  RELIQUES    DE   SAINTE  FOI 
D'AGEN    a    CONQUES. 

Le  monastère  de  Conques,  en  Rouergue,  dédié  d'abord  au 
Saint  Sauveur,  doit  sa  célébrité  aux  miracles  accomplis  par 
les  reliques  de  sainte  Foi.  Ces  reliques,  déposées  dans  le  «  su- 
burbium  »  de  la  cité  d'Agen,  lurent  subrepticement  enlevées 
et  transportées  à  Conques  à  une  date  du  ix**  siècle  qu'il  s'agit 
de  préciser.  On  est  d'accord  pour  placer  le  pieux  larcin  après 
l'année  863.  Aimoiu,  moine  de  Saint-Germain-des-Prés,  rap- 
porte, eneflét,  que  les  moines  de  Conques  songèrent  cà  dérober 
aux  Agenais  le  corps  de  sainte  Foi  lorsqu'ils  eurent  perdu 
l'occasion  d'acquérir  les  reliques  de  saint  Vincent  de  Sara- 
gosse.  Celles-ci  furent  volées  à  Valence  par  le  moine  Audal- 
dus  et  transportées  à  Castres  en  863-.   La  translation  des 

L  Dans  le  Dicl.  de  la  France  de  .Toanne,  à  l'article  Alet,  on  lit  Ancèze, 
l)HY  suite  d'une  faute  d'impression. 

2.  Mabillon,  Acta  sanctorum  ordùns  sancti  Benedicti,  saec.  IV,  pars  i, 
p.  (Ji3,  et  dans  Migue,  Palrol.  lat.,  t.  OXXVI,  col.  1011. 


MÉLANGES  ET  DOCUMENTS.  503 

reliques  de  sainte  Foi  est  naturellement  postérieure  à  cette 
année.  Gustave  Desjardins  a  établi  un  terminus  ad  quem 
indiscutable.  Une  charte  du  cartulaire  de  l'abbaye  de  Conques 
qui  mentionne  la  présence  du  corps  saint  {Couchas ,..  uM 
sancius  Vincentius  '  et  sancta  Fides  tumulati  quiescunt) 
porte,  en  effet,  la  date  suivante  :  «  Actum  die  wiartis  III 
halendas  augusti  anno  III I,  régnante  Karlomanno 
rege'^  ».  L'an  quatrième  du  règne  de  Carloman,  fils  puîné  de 
Louis  II,  mort  le  12  avril  879,  correspond  à  882-883,  et  en 
883  le  30  juillet  tomba  un  mardi.  La  translation  est  donc 
antérieure  au  30  juillet  883.  Celte  déduction  a  été  acceptée, 
entre  autres,  par  Aug.  Molinier  ^  et  l'abbé  Bouillet  ''. 

Il  reste  néanmoins  une  marge  de  vingt  ans.  Desjardins  s'est 
efïorcé  tout  le  premier  de  la  resserrer.  Il  a  remarqué  que  les 
reliques  de  la  sainte  ne  sont  pas  mentionnées  «  dans  une 
donation  faite  à  l'abbaye  par  Bernard  Plantevelue,  comte 
d'Auvergne,  donation  dont  la  date  est  incertaine,  mais  qui 
paraît  peu  antérieure  à  878  ^  »  En  publiant  l'acte  (n»  153)", 
Desjardins  le  datait  du  21  juillet  882  et  non  878,  et  Ton  con- 
çoit son  embarras.  Cette  charte  est  une  donation  du  comte 
Bernard  qui,  avec  Ermengarde  sa  femme,  gratifie  Saint-Sau- 
veur de  Conques,  gouverné  par  l'abbé  Bégon,  de  sa  villa  de 
Bauton  en  Rouergue  :  «  res  nostras  proprias  qui  ex  alode 
parentorum  meorum  justissîme  milii  obvenerint.  »  La 
date  est  ainsi  conçue  :  «  facta  cessione  ista  in  mense  julio 
XII  halendas  augustas,  anno  VII  régnante  Karolo  7'ege 

1.  Ce  serait  un  autre  saint  Vincent  dont  le  corps  était  déposé  à  Pom- 
pejac  en  Agenais.  Voy.  Cartulaire  de  l'abbaye  de  Conques,  publié  par 
G.  Desjardins  (Paris,  1879,  in-S»),  p.  ix  [Documents  historiques  publiés 
par  la  Société  de  l'Ecole  des  Chartes,  t.  Il]  ;  et  aussi  Bibliothèque  de 
l'Ecole  des  Chartes,  t.  XXXlll,  p.  260. 

2.  Desjardins,  Cartulaire,  n»  4,  p.  5. 

3.  Molinier,  Manuel  des  sources  de  l'histoire  de  France,  n»  1541, 
t.  m,  p.  122;  cf.  plus  bas,  note  0. 

4.  Dans  son  édition  du  Liber  miraculorurn  saiiéte  Fidis  (Paris,  1897, 
in-S»),  p.  VII  [Collection  de  textes  Alph.  Picard). 

5.  Cartulaire,  p.  xi. 

6.  Ibid.,  pp.  135-137.  Molinier  a  adopte  882,  car  dans  Y  Histoire  de 
Languedoc  (éd.  Privât,  t.  IV,  p.  472)  il  dit  :  «  C'est  en  883  seulement  que 
les  reliques  de  cette  sainte  y  furent  transportées  d'Agen  ». 


504  ANNALES   DU   MIDI. 

Francorum  et  Longobardorum  {sic)  s».  L'éditeur,  qui  ne 
s'en  explique  pas,  voit  dans  ce  roi  Charles  le  Gros.  On  ne 
saisit  pas  bien,  d'ailleurs,  comment  il  peut  justifier,  avec  cette 
identification,  soit  l'année  878,  soit  882.  Le  roi  Carloman  de 
France  occidentale  proposé  par  MM.  Bouillet  et  Servières  ' 
doit  être  écarté,  car  il  n'a  pas  régné  sept  ans. 

Enfin  Adon  de  Vienne,  mort  le  16  décembre  875  2,  men- 
tionne la  translation  de  sainte  Foi  dans  son  Martyrologe  sous 
l'année  288  :  «  Passio  quoque  bealae  Fidîs  et  sociorum  ejus 
apud  urbem  Agennorum,  quae  postea  Conchis  translata 
est^.  »  Ces  derniers  mots  constituent  peut-être,  à  la  rigueur, 
une  interpolation.  Néanmoins,  il  reste  une  présomption  que 
la  translation  est  antérieure  à 876. 

Je  crois  que  l'on  peut  arriver  à  une  solution  en  utilisant  le 
double  récit  de  la  translation  que  Desjardins  a  écarté  de  parti 
pris.  Il  a  écarté  la  rédaction  en  prose  sous  prétexte  qu'elle  ne 
se  place  pas  entre  935  et  1035,  comme  le  prétendait  Ghes- 
quière  *,  mais  constitue  une  amplification  cicéronienne  de  la 
Renaissance  ^ 

Cette  opinion  n'est  pas  souteuable.  Le  récit  en  prose  est  du 
XI''  siècle  ",  postérieur  au  Liber  7niraculorum  de  Bernard 
d'Angers  auquel  il  renvoie",  donc  à  1020*^.11  est  du  même 

1.  Sainte  Foy,  vierge  et  ynartyre  (Rodez,  1900,  m-i"),  p.  421,  note  3. 

2.  Gallia  christiana,  XVI,  col.  276;  dom  Rivet',  dans  l'Histoire  litté- 
raire de  la  France,  t.  V,  p.  465. 

3.  Migne,  Patrol.  lat.,  t.  CXXIII,  col.  90. 

4.  Dans  les  Acta  Sanctorum  des  Bollandistes,  octobre,  t.  III,  p.  789. 

5.  Cqrtulaire.  p.  X. 

6.  Il  est  contenu  dans  des  manuscrits  anciens  dont  l'un  du  début  du 
xii«  siècle.  Voy.  Bouillet,  Liber  miraculorum,  pp.  viii  note  3,  xvi,  xx, 

XXVI. 

7.  Cap.  23  :  «  Sed  si  quispiam  avidus  voluniinum  scrutator  est,  qui 
horum  ?iotamina  adipisci  degliscat,  codicem  miraculorum  ej us  per lé- 
gat. »  {Acta  Sanctorum,  octobre,  t.  III,  p.  299.) 

8.  Voy.  Bouillet  et  Servières,  Sainte  Foy,  pp.  418  et  419,  et  Bouillet, 
Liber  miraculorum  ,  p.  viu.  Desjardins  {Cartulaire,  p,  xii)  en  a  eu  le 
pressentiment  :  a  Le  caractère  général  du  style  du  Liber  miraculormn  est 
tellement  semblable  à  celui  de  la  version  en  prose  de  la  translation  de 
sainte  Foi ...  que,  à  première  vue,  on  serait  tenté  de  l'attribuer  au  même 
auteur.  »  La  translation  en  prose  a  été  utilisée  certainement  par  la  Chro- 
nique de  Conques,  rédigée,  semble-t-il,  à  la  fin  du  règne  de  Henri  I  (1031- 
1060).  Voy.  Marlène,  Thésaurus  anecdotorum,  t.  UI,  col.  1387, 


MÉLANGES  ET  DOCUMENTS.  505 

auteur  qui  a  complété  ce  Liber  vers  1060  i.  Quant  au  récit 
en  vers  2,  on  ne  peut,  avec  Ghesquière,  lui  assigner  une  date 
antérieure  à  937.  Desjardins  suppose,  d'après  sa  forme,  «  qu'il 
a  été  composé  au  x«  ou  plutôt  au  commencement  du  xi«  siè- 
cle ^  ».  Et  on  va  voir  dans  un  instant  qu'il  a  raison,  et  plus 
qu'il  ne  croit.  Les  deux  textes  sont  dans  un  étroit  rapport. 
Ghesquière  et  Desjardins  sont  d'accord,  au  surplus,  pour  pla- 
cer le  récit  en  prose  après  le  récit  en  vers.  Cette  opinion 
ne  me  paraît  pas  fermement  établie  *.  Mais,  comme  les  deux 
textes  coïncident  sur  le  seul  point  qui  nous  intéresse,  nous 
reproduisons,  sans  plus  discuter,  la  fin  des  deux  récits.  Après 
avoir  raconté  le  larcin  du  moine  Ariviscus  et  la  vaine  pour- 
suite des  Agenais  dans  la  direction  de  la  Gascogne,  l'auteur 
du  récit  en  vers  termine  ainsi  : 

Nil  Ariviscus  reraorans 
Cœptum  iter  accelerans, 
Prope  tua  conflnia 
Jarn  defixit  vestigia. 
Gui  turba  Conchacensium, 
Dei  laudes  sonantium, 
Pro  tanta  Dei  gloria 
Gaudens  processit  obvia, 
Acceptisque  reliquiis 
Divinis  cum  obsequiis, 
Ut  dignum  erat  facere, 
Curarunt  bas  reponere. 
Tune  in  Francorum  partibus 
Regnabat  minor  Carolus 
Quem  post  Franci  de  solio 
Deposuerunt  regio. 
Facta  est  haec  translatio 
Beatae  Fidis  martyris 
In  die  nonodecirao 
Kalendis  februariis. 

1.  Voy.  Bouillet,  Liber  miraculorum,  pp.  18,  note  1,  84,  123-124. 

2.  BoUandistes,  Acta  Sanctorum,  octobre,  t.  111,  p.  292. 

3.  Cartulaire,  pp.  x-xi. 

4.  La  rédaction  versifiée  renferme  des  exagérations  qui  manquent  à  la 
rédaction  en  prose.  Ainsi  elle  prétend  qu'Ariviscus,  le  pieux  ravisseur, 
demeura  dix  ans  à  Agen  cacliant  son  dessein.  Si  la  rédaction  en  prose 
était  postérieure  on  ne  voit  pas  pourquoi  elle  eût  omis  ce  trait.  Il  se  com- 
prend au  contraire  dans  la  version  en  vers  comme  licence  «  poétique  », 


506  ANNALES  DU   MIDI. 

Hinc  apud  Conchas  agitur 
Hic  dies  celeberrimus 
In  quo  Christo  sit  gloria 
Per  inflnita  saecula  i. 

La  narration  en  prose  donne  le  même  jour,  14  janvier 
{XIX  Kal.  februarium  die),  pour  la  translation  :  eodem 
quippe  tempore,  CafOlo  Minore,  Francorum  rege  im- 
jjerante,  quem  suae  dilionis  principes,  inique  adversus 
eum  conjurantes,  a  solio  regio  ejeceruni  et  Ottoni,  Aqui- 
ianorum  duci,  coronam  regni  imposuerunt  et  illum  pro 
eo  regnare  elegerunf^. 

L'auteur  en  vers — ou  plutôt,  à  mon  avis,  l'auteur  en 
prose  —  n'a  pas  inventé  de  toutes  pièces  son  récit  de  la  trans- 
lation des  reliques  de  sainte  Foi;  mais  il  l'a  amplifié  dans  le 
but  de  le  dramatiser.  Le  seul  fondement  réel  que  nous  puis- 
sions atteindre  est  celui-ci  :  la  translation  a  eu  lieu  un  14  jan- 
vier sous  le  règne  d'un  roi  appelé  Carolus  Minor.  Ce  Caro- 
lus  Minor,  l'auteur  de  la  Translation  l'a  identifié  d'une  façon 
absurde  avec  Charles  le  Simple  parce  qu'il  a  eu  sous  les 
yeux  la  chronique  d'Adémar  de  Chabannes. 

Adémar  est,  en  effet,  le  seul  auteur  qui,  par  suite  d'une  mé- 
prise curieuse^,  fasse  du  roi  Eudes  avant  son  avènement  au 
trône  un  duc  d'Aquitaine,  et  l'un  des  surnoms  qu'il  donne  à 
Charles  le  Simple  est,  eu  effet,  Minor  ^. 

1.  Acta  Sanctorum,  octobre,  t.  III,  p.  292. 

2.  Ibid.,  t.  III,  p.  298. 

3.  Nous  lui  consacrons  une  petite  étude  (voy.  plus  bas  p.  .509).  Cette 
méprise  se  retrouve  dans  la  Trcuislatio  saacti  Genulfi  {Mon.  Germ., 
Script.,  t.  XV,  pp.  121U,  1213)  et  la  Chronique  de  Conques  (Martène,  The- 
saurus  anecdotorum,  t.  III,  p.  1387)  ;  mais  ces  textes  sont  postérieurs 
à  Adémar  et  inspirés  de  lui,  le  premier  directement,  le  second  par  l'entre- 
mise de  la  Translation  en  prose  de  sainte  Foi  dont  on  vient  de  parler. 

4.  Il  est  curieux  de  noter  que  dans  la  rédaction  C,  la  seule  qui  nous 
donne  le  nom  du  père  du  «-duc  »  Eudes,  Raimond,  Charles  n'ait  pas  été  dit 
tout  d'abord  Minor,  mais  Insipiens  (J.  Lair,  Études  sur  divers  textes 
des  X»  et  xv  siècles,  Paris,  1899,  2  vol.  in-4°,  t.  II,  pp.  121  et  133),  tandis 
que  A  le  qualifie  Minor  et  H  Junior.  Mais  il  faut  remarquer  :  1°  que  la 
rédaction  C  est  représentée  par  une  copie  défectueuse;  2"  un  peu  plus 
loin,  au  chap.  xxii,  C  offre  Minor  comme  //et  A  (Lair,  t.  II,  p.  138).  Adé- 
mar employait  pour  désigner  Charles  le  Simple  les  deux  expressions 
(ainsi  dans  H,  éd.    Lair,    p.  124  :  Carolus    cognomeiito  Insipiens  vel 


MÉLANGES   ET  DOCUMENTS.  507 

Nous  ne  sommes  pas  forcés  de  partager  l'erreur  de  l'auteur 
de  la  Translation,  égaré  par  Adémar.  Un  autre  roi  a  porté,  et 
d'une  manière  plus  compréhensible,  ce  surnom  :  c'est  un  des 
fils  de  Charles  le  Chauve,  Charles  le  Jeune,  couronné  roi 
d'Aquitaine  à  Limoges  au  milieu  d'octobre  855,  mort  à  Buzan- 
çais  en  Berry  le  29  septembre  866'.  On  comprend  que  ce  per- 
sonnage effacé  ne  laissa  pas  de  souvenirs  et  que,  environ  deux 
siècles  après,  on  fut  bien  en  peine  d'identifier  un  Carolus 
Minor. 

Admettons,  maintenant,  qu'il  s'agisse  de  lui;  corrigeons 
immédiatement  la  date  absurde  de  la  charte  158,  régnante 
Karolo  rege  Francorum  et  Longobardorum,  en  régnante 
Karolo  rege  Francorum  et  Aquiianorum.  En  prenant  pour 
point  de  départ  présumable  la  date  de  son  couronnement  (oc- 
tobre 855),  nous  arriverions  à  placer  la  charte  153  au  21  juillet 
862. 

Cette  date  s'accorde  mieux,  d'ailleurs,  avec  le  contenu  de 
l'acte.  On  a  vu  que  c'est  une  constitution  de  précaire.  Ber- 
nard donne  un  domaine  à  l'abbaye,  mais  s'en  réserve  l'usu- 
fruit. Nulle  allusion  à  ses  enfants  alors  qu'il  nomme  sa  femme 
Ermengarde;  on  dirait  même  qu'ils  ne  sont  pas  nés.  Si  l'abbé 
veut  enlever  aux  moines  pour  le  donner  en  bénéfice  le  do- 
maine de  Bauton,  celui-ci  retournera  ad  propynos  parentes 
du  donateur.  En  878  ou  882,  peu  avant  la  mort  de  Bernard 
Plantevelue  (885)2,  la  charte  serait  conçue,  semble-t-il,  d'au- 
tre façon. 

Minor).  Mais  il  préférait  cette  dernière.  Nous  la  retrouvons  dans  des 
notes  autographes  contenues  dans  le  nis.  latin  de  la  Bibliothèque  de 
Leide,  Vossius,  in-S",  pi.  141  v°  :  tempore  Karoli  minoris  fuit  Arnal- 
dus  cornes  filius  Bernardi.  (L.  Delislo,  iYo</ce  sur  les  manuscrits  origi- 
naux d' Adémar  de  Cliabannes,  dans  Notices  et  extraits  des  manuscrits 
t.  XXXV,  1"''^  partie,  p.  316,  et  pi.  III;  et  Lair,  t.  II,  p,  124.  n.  3  et  fac-sim., 
pp.  28U-281,  pi.  1.)  Déjà  dans  sa  Commemoratio  abbatuni  Sancti  Martia- 
lis,  écrite  en  1026,  on  trouve  :  Odo  rex  obiit  et  Carottes  niinor  regnmn 
recuperavit.  Voy.  Duplès-Agier,  Chronique  de  Saint-Martial  de  Li- 
moges (Paris,  1874,  in-S",  p.  3).  Sur  l'expression  minor  appliquée  à  un 
roi  Charles  cf.  page  507,  on  tète. 

1.  Annales  liertiniani,  éd.  Waitz,  p.  8:{.  Of.  Le  Moye)i  Age,  année 
1902,  p.  426. 

2.  Voy.  Poupardin,  Le  royaume  de  Provence,  p.  137. 


508  ANNALES   DU   MIDI. 

Nous  avons  donc  une  confirmation  de  l'assertion  d'Aimoin 
que  la  translation  des  reliques  de  sainte  Foi  est  postérieure 
à  863. 

On  peut  tenter  de  resserrer  encore  ces  dates.  En  862,  il  est 
peu  admissible  que  Bernard  portât  le  titre  de  comte  du  vivant 
d'Etienne,  comte  d'Auvergne.  Or,  celui-ci  fut  tué  par  les  Nor- 
mands en  décembre  863*.  Une  charte  de  Saint-Julien  de 
Brioude  montre  Bernard  II  comte  d'Auvergne  dès  janvier  864^, 
mais  non  point  à  une  époque  antérieure.  Enfin,  Bernard  II 
tenait  Bauton  par  héritage  de  ses  parents  {eœ  alode  parento- 
rum  meorum).  Son  père  Bernard  I"  semble  donc  mort  à 
l'époque  où  fut  rédigée  la  charte  153  du  Cartulaire  de  Con- 
ques-'. De  tout  ceci,  il  résulte  que  ce  dernier  acte  est  au  plus 
tôt  du  21  juillet  864.  Le  point  de  départ  du  règne  de  Carolus 
Minor  a  été  mal  calculé  ou,  peut-être,  on  l'a  fait  partir  de 
857.  Charles  le  Jeune  fut  en  effet  presque  aussitôt  chassé  par 
les  Aquitains. 

Ainsi,  le  21  juillet  864,  le  corps  de  sainte  Foi  n'était  pas 
encore  en  l'abbaye  de  Conques.  Il  s'y  trouvait,  d'autre  part, 
avant  le  29  septembre  866,  date  de  la  mort  de  Carolus  Minor, 
et  comme  la  translation  eut  lieu  un  14  janvier*,  il  faut  adop- 
ter pour  date  d'année  de  cette  cérémonie  le  14  janvier  865 
ou  866. 

Ferdinand  Lot. 


1.  Voy.  notre  petit  livre  Fidèles  ou  vassaux  (Paris,  1904,  in-8"),  p.  97. 

2.  Cartulaire  de  Saint-Julien  de  Brioude,  éd.  Doniol,  nolTô,  pp.  187- 
189. 

3.  La  dernière  charte  oîi  apparaisse  Bernard  1",  comte  d'Auvergne,  est 
de  mai  849  {Cartulaire  de  Brioude,  n"  95,  pp.  112-113).  Comme  Etienne 
était  comte  du  même  pays  dès  860  (lettre  d'Hincmar  au  concile  de  Tusey; 
cf.  Schrœrs,  Hinkmar,  p.  528,  n°  141),  la  mort  de  Bernard  I"  se  place  à  une 
date  un  peu  antérieure.  Mabille  {Le  royaume  d'Aquitai>ie,  pp.  20  et  45)  a 
voulu  contester  qu'Etienne  ait  été  comte  d'Auvergne,  mais  son  argumen- 
tation est  sans  valeur;  il  a  d'ailleurs  confondu  Bernard  I"  avec  son  fils. 
Voy.  notre  livre  Fidèles  et  vassaux,  p.  97  sq.  [et  surtout  l'étude  toute 
récente  de  MM.  Calmette  et  Patry,  Les  comtes  d'Auvergne,  dans  les 
Annales  du  Midi,  1904,  p.  305]. 

4.  Voy.  plus  haut  p.  506. 


MÉLANGES  ET  DOCUMENTS.  509 

IV 

LE   ROI  EUDES    «  DUC   D'AQUITAINE  » 
ET   ADÉMAR   DE   CHABANNES. 

Dans  la  rédaction  A  de  la  Chronique  d'Adémar  de  Chaban- 
nes,  on  lit  ce  qui  suit  au  chapitre  xx,  du  livre  III  :  tune 
Franci  conjurantes  contra  Carolum  Minorem^  eiciunt 
eum  de  regno  et  Odonem,  ducem  Aquitanie,  in  regno  ele- 
vaverunt.  La  rédaction  C  ajoute  .  Me  Odo  fuit  ftlius  Rai- 
mundi,  comitis  Lemovicensis  et  primo  in  Aquitania  rex 
ordinatus  est  apud  Lemovicam,  cujus  civitatis  monetam 
nomine  suo  sculpere  jussit,  quae  antea  nomine  Caroli 
scribebatur.  Constituit  in  ea  urbe  vice  [comitem]  Fulche- 
rium,  indusirium  fabrum  in  lignis,  et  Lemovicinum  per 
vicecomites  ordinavit.  Similiter  et  Bituricam;  et  secundo 
anno  in  Francia  rex  elevatus  est^. 

M.  Robert  de  Lasteyrie  a  très  bien  vu^  qu'Adémar  de  Cha- 
banues  avait  confondu  le  comte  Eudes,  fils  de  Robert  le  Fort, 
avec  Eudes  de  Toulouse,  fils  de  Raimond,  marquis  de  Toulou- 
sain et  comte  de  Limousin;  mais  il  n'explique  pas*  comment 
s'est  produite  cette  confusion. 


1.  Cf.  la  dissei'tation  précédente. 

2.  Chronique,  éd.  J.  Chavanon  (Paris,  1897,  in-8»),  p.  139.  Il  est  plus 
commode,  ici,  d'avoir  recours  à  M.  J.  Lair  (op.  cit.,  t.  11,  pp.  125-126), 
qui  donne  les  rédactions  sur  colonnes  parallèles,  et  même  des  passages 
(ainsi,  pp.  111-112)  que  l'édition  Chavanon  a  négligés. 

3.  Etude  sur  les  comtes  et  les  vicomtes  de  Limoges,  pp.  26-29,  et  aussi 
55  et  59.  [Bibliothèque  de  l'Ecole  des  Hautes-Etudes,  fasc.  18.) 

4.  Du  moins  d'une  façon  satisfaisante  :  «  Voyant  le  roi  Eudes  posséder 
«  l'Aquitaine  (après  son  partage  avec  Charles  le  Simple  en  898)  l'interpo- 
«  lateur  [voy.  plus  loin,  p.  511,  note  1]  a  supposé  qu'il  était  un  grand 
«  seigneur  aquitain  ;  aussi  l'a-t-il  fait  duc  d'Aquitaine,  titre  que  n'avait 
«  pas,  à  la  vérité,  le  comte  Eudes,  mais  que  portèrent  plusieurs  comtes  de 
«  Toulouse  »  (p.  59).  Cette  dernière  explication  ne  vaut  rien,  car  il  est 
plus  que  douteux  qu'Adémar  ait  reconnu  l'identité  d'Eudes,  comte  en 
Limousin,  avec  le  marquis  homonyme  de  Toulouse.  Adémar  a  donné  le 
titre  de  duc  d'Aquitaine  à  Eudes  parce  que,  de  son  temps,  le  souverain 


510  ANNALES   DO   MIDI. 

Elle  résulte,  à  mou  avis,  de  la  lecture  des  Archives  de 
l'abbaye  de  Beaulieu  en  Limousin.  Elles  renfermaient  :  1"  un 
acte  sans  date  par  lequel  Oddo  gratta  Dei  cornes  vend  à 
l'archevêque  de  Bourges,  Frotier,  le  domaine  cVOrbaciacusK.. 
in  comilatu  Lemovicino'^  ;  2"  la  donation  (août  887)  par 
l'archevêque  à  l'abbaye  de  Beaulieu  de  ce  même  domaine  et 
d'autres  terres,  quas  de  Oddone  comité  compat^avi^  ;  3°  un 
diplôme  par  lequel  Odo  miser ico7'dia  Dei  rex  confirme  les 
donations  faites  à  Beaulieu  par  les  archevêques  de  Bourges, 
Raoul  et  Frotier.  Le  nom  de  Raimond,  celui  du  domaine  Or- 
baciacus,  y  sont  relevés.  La  date  mérite  d'attirer  particuliè- 
rement notre  attention  :  ActuTU  Sancti  Maœimini  monaste- 
rio  sublus  Aurelianis  civiéate.  —  Datum  Tnense  junio  anno 
incarnationis  Domini  occc  lxxx  viiij.,  indictione  vi., 
anno  ii.  Odonis  régis*. 

Il  me  paraît  évident  qu'Adémar  a  eu  sous  les  yeux  ces  trois 
pièces.  Il  a  cru  de  bonne  foi  que  le  comte  Eudes,  fils  de  Rai- 
mond, des  deux  premières  était  le  même  que  le  roi  Eudes  de 
la  troisième,  d'autant  que  dans  ces  trois  actes  il  est  question 
du  domaine  à' Orbaciacus .  Le  diplôme  royal,  daté  de  Saint- 
Mesmin  près  Orléans,  donc  de  France,  lui  a  appris  qu'en  889, 
Eudes  était  reconnu  roi  depuis  deux  ans.  Mais  la  deuxième 
charte  porte  la  date  suivante  :  mense  augusto  anno  vii^ 
imperante  Karolo,  m  in  Galliis.  Il  s'agit  de  Charles  le  Gros 
et  l'acte  est  d'aoiit  887.  Adémar  de  Chabannes  qui  connaissait 
vaguement  la  lutte  d'Eudes  contre  le  Carolingien  a  cru  qu'il 
s'agissait  de  Charles  le  Simple  et  il  en  a  conclu  que  celui-ci 
avait  été  chassé  du  trône  par  un  comte  ou  duc  aquitain 
nommé  Eudes. 


nominal,  sinon  effectif,  du  Limousin,  était  le  duc  d'Aquitaine.  Cf.  Pfister, 
Etude  sur  le  règne  de  Robert  le  Pieux,  p.  273., 

\.  Aujourd'liui  «   Le  Saillant    »,  comm.   Voutezac,   cant.    Juillac,   arr. 
Brive  (Corrèze). 

2.  Deloclie,  Cartulaire  de  Beaulieu  en  Limousin,  pp.  24-25. 

3.  Ibid.,  pp.  26-28. 

4.  Deloche,  op.  cit.,  pp.  28-30. 

5.  Il  y  a  iiii.  dans  le  cartulaire,  mais  la  faute  s'explique  aisément  :  les 
deux  jambages  du  Fondai  ont  été  lus  ii. 


MÉLANGES  ET   DOCUMENTS.  511 

L*idée  de  faire  régner  celui-ci  d'abord  en  Aquitaine  et  de  le 
faire  élire  à  Limoges  est  amenée  par  une  série  de  raisonne- 
ments plus  ou  moins  conscients.  Si  Eudes  est  aquitain,  il  paraît 
évident  qu'il  sera  d'abord  l'élu  de  ses  compatriotes.  Le  lieu 
du  couronnement,  Limoges,  s'explique  d'une  double  façon. 
Adémar  sait  qu'un  roi  a  été  élu  en  cette  ville  en  855  :  c'est 
Cbarles  le  Jeune,  qu'il  prend  pour  Charles  le  Chauve'.  Il  en 
déduit  peut-être  que  Limoges  est  le  lieu  où  les  rois  d'Aquitaine 
sont  élus  et  couronnés 2.  Ensuite,  il  a  manié  des  monnaies 
limousines  qui  portaient  le  nom  d'Eudes.  On  sait  que,  tradi- 
tionnellement, les  monnaies  de  cette  région  continuèrent  à 
porter  dans  le  champ  le  mot  ODO,  plus  ou  moins  déformé, 
bien  longtemps  après  la  mort  du  roi  Eudes  (898)  ■'.  Mais,  d'autre 
part,  ou  possède  aussi  des  deniers  de  Charles  le  Simple  frap- 
pés à  Limoges*.  Peut-être  même  a-t-il  existé  des  pièces  au 
monogramme  de  Karolus  combiné  avec  ODO.  Adémar  en 
a  conclu  que  l'usurpateur  établit  à  Limoges,  un  atelier  moné- 
taire où  il  fit  remplacer  par  son  nom  celui  du  roi  légitime.  Il  a 
rattaché  à  cette  circonstance,  sans  qu'on  voie  trop  pourquoi, 
l'établissement  des  vicomtes  à  Limoges  et  à  Bourges  ^  De  son 
temps,  en  elïet,  les  seigneurs  de  ces  deux  villes  portaient  ce 
titre  et  non  celui  de  comte,  et  on  ne  s'expliquait  pas  cette 
anomalie*'. 


1.  Voy.  sa  Commetnoratio  ahbatuni  Sancti  Martial is ,  rédigée  en  1026, 
dans  Chro?iiques  de  Saint-Martial,  publiées  par  Duplès-Agier,  p.  2;  et 
sa  Chronique,  éd.,  Lair,  p.  119. 

2.  Cette  idée  a  repara  au  xii"  siècle.  Voy.  Pfister,  op.  cit.,  p.  282,  et  R.  de 
Lasteyrie,  op.  cit.,  p.  36. 

3.  Gariel,  Monnaies  royales  de  France,  p.  283,  et  pi.  xlvii,  n"^  26  à  29, 
d'après  Longpérier,  Catalogue...  Rousseau,  p.  197. 

4.  Gariel,  ibid.,  p.  293  et  pi.  l,  n"  37.  —  Prou,  Catalogue  des  mon)iaies 
carolingiennes  conservées  à  la  Bibliothèque  natio?iale,  Introduction. 

5.  Je  ne  me  rends  pas  compte  des  raisons  qui  ont  poussé  Adémar  à 
faire  de  Foucher,  vicomte  de  Limoges,  un  iiidustrium  fabruni  in  lig- 
nis{i)  11  avait  pris  le  nom  de  ce  personnage  dans  des  chartes.  Il  en  cite 
une  souscrite  «  <S.  Fulcherius  vicecomes,  anno  II,  regtiante  Ludovico 
rege,  »  dans  des  notes  autographes  publiées  par  L.  Delisle,  loc.  cit., 
p.  317. 

6.  J'ai  tenté  d'en  rendre  compte  dans  mon  livre  sur  le  Règne  de  Hugues 
Capet,  p.  202.  M.  de  Lasteyrie  (op.  cit.,  p.  59)  a  pensé  que  la  création  des 


512  ANNAt.ES   DÛ  MIDÎ. 

On  pourrait  objecter  à  nos  déductions  que  tout  ceci  est  le  fait 
d'un  interpolateur,  peut-être  d'un  moine  de  Beaulieu,  mais 
non  d'Adémar  lui-même.  Depuis  Waitz',  l'opinion  desérudits 
veut  que  la  rédaction  C  soit  une  interpolation  du  xii^  siècle. 
M.  Lair,  qui  a  démontré  ^  que  cette  rédaction  est  très  anté- 
rieure et  date  du  xi^  siècle,  refuse  d'en  attribuer  la  paternité 
à  Adémar  lui-même,  à  tort  selon  nous^.  Pour  le  cas  particu- 
lier qui  nous  occupe,  il  suffit  de  faire  remarquer  que  la  rédac- 
tion ^est  bien  d'Adémar  "*.  Comme  Eudes  y  est  dit  dux  Aqui- 
lanie'"  la  substance  de  A  et  de  C  est  déjà  évidemment  connue 
de  H^.  Enfin,  dans  des  notes  que  M.  Léopold  Delisle'  a  mon- 
tré être  de  la  main  d'Adémar  lui-même,  on  lit  ceci  :  «  Odo 
regnavit  anno  i  in  Aquitania  et  in  Francia  ii  anno , 
anno  incarnationis  dccclxxxviiij.  »  Ces  mots  sont  visible- 
ment inspirés  par  la  lecture  de  la  date  du  diplôme  d'Eudes 
pour  l'abbaye  de  Beaulieu ^  Nous  n'avons  pas  le  droit  de  dire 
que  les  rédactions  ^  et  C  sont  dues  à  des  remanieurs. 


vicomtes  de  Limoges  était  le  fait,  non  du  roi  Eudes,  mais  du  comte  Eudes 
(de  Toulouse).  Cette  opinion  est  tout  hypothétique.  A  vrai  dire,  je  ne  suis 
pas  assuré  qu'Eudes  et  son  ijère  aient  été  comtes  de  Limoges.  Ils  ont  été 
plutôt  comtes  en  Limousin,  c'est-à-dire  qu'ils  ont  gouverné  la  portion 
méridionale  (Turenne  probablement),  de  Yorbis  Lemovicmus. 

1.  Dans  les  Monunienta  Germaniae,  Scriptores,  t.  IV,  p.  111. 

2.  Au  t.  II  de  ses  Etudes  critiques  sur  divers  textes  des  x'=  et  xi"  siè- 
cles (Paris,  1899,  in-é"). 

3.  Voy.  notre  Hugues  Capet,  p.  351. 

4.  La  démonstration  de  M.  Delislo  {loc.  cit.,  pp.  338-3-11)  est  probante. 
M.  Lair  (op.  cit.,  t.  II,  pp.  280  et  283),  qui  conteste  que  le  texte  soit  de 
la  main  d'Adémar,  admet  que  les  notes  marginales  et  interlinéaires  sont 
bien  de  lui.  M.  Lair  reconnaît  même  que  les  additions  à  effectuer, 
indiquées  en  interligne  dans  H  par  Adémar,  ont  été  exécutées  dans  A  et  C 
dont  il  se  refuse  cependant  à  attribuer  la  paternité  à  cet  auteur.  Cet  aveu 
est  plus  grave  que  ne  semble  le  croire  l'éminent  érudit. 

5.  Éd.  Chavanon,  p.  77;  Lair,  op.  cit.,  t.  II,  p.  125. 

6.  Je  crois  que  sur  ce  point  M.  Lair  sera  d'accord  avec  nous.  Voy.  ce 
qu'il  dit  au  t.  II,  p.  261. 

7.  Notice  sur  les  tnanuscrits  originaux  d'Adémar  de  Chabannes, 
dans  Notices  et  extraits  des  manuscrits  publiés  par  l'Académie  des 
Inscriptions,  t.  XXXV,  1"  partie,  p.  317. 

8.  Voy.  plus  haut,  p.  510.  Je  dois  faire  remai'quer  encore  que  nombre 
d'actes  de  cette  abbaye  sont  datés  «  régnante  Karolo  minore  ».  (Voy. 
Deloche,  op.  cit.,  pp.  43,  45,  49,  53,  99,  166,  251,  255.)  Cette  qualilication 
est,  je   crois,  particulière  à   l'abbaye    de  Beaulieu.  Elle  a  dû  inspirer 


MÉLANGES   ET  DOCDMENTS.  5l3 

Quant  à  préciser  à  quel  moment  et  par  suite  de  quelles  cir- 
constances Adémar  de  Chabannes  a  visité  et  dépouillé  les  ar- 
chives de  l'abbaye  limousine  de  Beaulieu,  c'est  ce  que  les 
lacunes  de  sa  biographie  ne  permettent  pas,  ce  semble,  de 
déterminer  avec  précision. 

En  tous  cas,  ce  fut  avant  1026,  époque  à  laquelle  Adémar 
rédigea  sa  Commemoralio  abbalum,  Sancli  Mariialis.  En 
effet,  il  rapporte  à  l'an  5  de  l'abbatiat  d'Abbon  et  à  l'année 
du  couronnement  de  Charles  le  Chauve  [sic)  à  Limoges  (855) 
la  fondation  de  Beaulieu  en  Limousin  par  Raoul,  archevêque 
de  Bourges  :  «  hoc  anno  cenobium  Bellocum  a  Radulfo 
arcJiiepiscopo  fundalum  et  consecralum'^.  »  Ces  renseigne- 
ments sont  d'une  exactitude  remarquable.  Les  bâtiments  du 
nouveau  monastère,  construit  par  rarchevê(]ue  de  Bourges 
Raoul  au  lieu  dit  autrefois  «  Vellinus  »,  auquel  il  donna  le 
nom  de  «  Beaulieu  »,  commencèrent  à  s'élever  dès  le  com- 
mencement de  859  et  furent  consacrés  en  novembre  860; 
mais  les  débuts  de  la  fondation  peuvent  fort  bien  remonter 
à  855-.  On  ne  voit  pas  où  et  comment  Adémar  aurait  pu  re- 
cueillir ces  renseignements  ailleurs  qu'à  l'abbaye  même  de 
Beaulieu. 

Une  objection  de  principe  qu'on  pourrait  faire  valoir  contre 
notre  hypothèse,  c'est  qu'un  auteur  du  haut  moyen  âge 
n'avait  pas  coutume  pour  rédiger  une  œuvre  annalistique  de 
consulter  des  pièces  d'archives  privées.  Il  est  vrai.  Mais  Adé- 
mar fait  exception.  Le  manuscrit  latin  Vossius,  octavo  15  de 
la  bibliothèque  de  Leide,  provenant  de  Saint  Martial  de  Limo- 
ges, lequel  nous  a  fourni  la  date  de  889  pour  l'an  II  du  règne 
d'Eudes  en  France,  est  criblé  sur  les  marges  des  fol.  139  à  144 
de  notes  brèves  de  la  main  d'Adémar.  Ce  sont  des  extr^iits  de 
chartes  recueillis  pour  permettre  à  l'auteur  d'établir  la  chro- 
nologie des  comtes  d'Angoulême  et  l'histoire  des  abbayes  de 


Adémar,  le  seul  auteur,  ai-je  dit  (plus  haut,  p.  r)0(;),  qui  use  de  cette 
expression,  en  prenant  ce  personnage,  par  une  confusion  facile,  pour 
Oliarles  le  Simple. 

1.  Duplès-Agier,  op.  cit.,  p.  2. 

2.  Deloche,  Cartulaire  de  Beaulieu,  pp.  ccxxvi-ccxxxi. 

ANNALES  DU  MIDI.   —  XVI.  30 


514  ANNALES   DU    MIDI. 

Saint-Cibard  d'Aagoiilême  et  de  Saiat-Martial  de  Limoges  *.  Il 
me  paraît  ressortir  des  observations  qui  précèdent  que  les  ar- 
chives de  l'abbaye  de  Beaulieu  avaient  été  également  l'objet 
des  dépouillements  d'Adémar  de  Ghabannes. 

Ferdinand  Lot. 

V 

GARSIE-SANCHE,    DUC   DE   GASCOGNE. 

La  maison  ducale  de  Gascogne,  dont  la  descendance  mas- 
culine s'éteignit  en  1032,  tire  son  origine  d'un  certain  Garsie- 
Sanche,  qu'un  document  unique  nous  montre  en  904  régnant 
«  comes  et  marchio  in  limitibus  Oceani^  ».  Je  crois  avoir  dé- 
montré que  les  assertions  sur  l'origine  espagnole  de  ce  per- 
sonnage sont  pure  fantasmagorie  3.  Personne  ne  s'est  avisé 
que  nous  avons  sur  l'existence  de  ce  personnage  un  témoi- 
gnage antérieur  d'une  vingtaine  d'années;  il  s'agit  de  la  sous- 
cription à  l'acte  par  lequel  Eudes,  comte  de  Toulouse  et  du 
Limousin,  avec  l'assentiment  de  sa  femme  Garsinde  et  de  son 
frère  Airbert,  vend  à  Frotier,  archevêque  de  Bourges,  le  âo- 
maine  d'Orbaciacus  en  Limousin  Les  souscriptions  sont  ainsi 
reproduites  dans  l'édition  :  «  S.  Oddonis  comiiis  et  uœoris 
ejus  Oarsindis  qui  hanc  vendilionem  fieri  et  adfirmayn 
rogaverunt.,  S.  Airberti  fratris  ejus  qui  hoc  ad/îrmavit, 
S.  Garsio  script,  comitis,  S.  Willelmi  comiiis,  S.  Ragam- 
frediy  Ramnulfi,  Amaluini.  » 

Cette  charte  ne  nous  est  pas  parvenue  en  original.  Elle  ne 


1.  Voy.  Holder-Egger  et  Zeumer  dans  Nettes  Archiv  der  GeseUschaft 
fur  aeltere  deutsche  GeschichtskiDide,  t.  VII,  pp.  63".2-637;  —  L.  Delisle, 
loc.  cit.,  pp.  314-318.  Ce  dernier  remarque  que  nous  avons  un  autre 
exemple  de  ce  procédé  dans  la  Chro)iique  de  Saint-Claude  par  un  moine 
du  XII»  siècle,  chronique  étudiée  par  Ulysse  Robert  dans  la  Bibliothèque 
de  l'Ecole  des  Chartes,  t.  XLI,  1880,  p.  561-9. 

2.  Gallia  christiana,  I,  Instr.,  col.  170. 

3.  Etudes  sur  le  règne  de  Hugues  Capet  et  la  fin  du  x"'  siècle,  p.  205, 
note  2. 


MELANGES    ET    DOCDMENTS.  515 

nous  est  connue  que  par  la  transcription  de  la  fin  du  xii«  siè- 
cle du  Cartulaire  de  Beaulieu^.  Le  scribe  a,  naturellement, 
estropié  les  noms  qui  lui  étaient  peu  familiers.  Et  c'est  ainsi 
qu'il  est  évident  à  mes  3'eux  que  «  S.  Garsioscriptoris  comilis» 
représente  «  S.  Garsio  Sanctii  comitis  ».  C'est  le  comte  gascon 
Garsie-Sanche.  Le  «  Willelmus  comes  »  est  le  célèbre  comte 
d'Auvergne,  marquis  de  Gothie  et  duc  d'Aquitaine,  Guillaume 
le  Pieux,  fils  de  Bernard  Plantevelue^. 

Il  est  regrettable  que  l'absence  de  date  ne  permette  pas  de 
dire  avec  certitude  où  et  quand  les  plus  grands  personnages 
de  l'Aquitaine  et  de  la  Gascogne  se  trouvaient  ainsi  réunis. 
On  a  pu,  néanmoins,  resserrer  l'époque  où  cet  acte  fut  passé 
dans  des  limites  assez  étroites.  Il  est  certain  qu'il  est  antérieur 
au  mois  d'août  887,  car  c'est  alors  que  Frotier  fit  don  à  l'ab- 
baye de  Beaulieu  ^  du  domaine  (VOrbaciacus  qu'il  avait  acheté 
par  l'acte  précédent.  Il  est  postérieur,  d'autre  part,  au  13  juil- 
let 876,  date  d'un  diplôme  de  Charles  le  Chauve  concernant 
ce  même  domaine*,  au  milieu  de  l'année  885,  époque  de  la 
mort  de  Bernard  Plantevelue-^,  qui  figurerait  dans  l'acte  au 
lieu  de  son  fils  s'il  était  encore  vivant.  Il  se  place  donc  entre  le 
milieu  de  885  et  août  887.  Peut-être  même  est-il  du  même  lieu 
(Bourges  probablement)  el  de  la  même  date  (août  887)  que  la 
charte  de  donation  de  l'archevêque  Frotier  dont  il  est  connexe. 
Celle-ci  est  souscrite  par  le  donateur  et  les  évêques  Effroi, 
de  Poitiers,  Guillaume,  de  Cahors,  Adolen,  d'Albi,  par  des 
clercs  et  des  «  boni  viri  »  obscurs,  mais  par  aucun  laïque  de 
marque.  Ceux-ci  avaient  apposé  leur  souscription  au  premier 
acte,  celui  du  comte  Eudes  de  Toulouse.  La  souscription  de 
Garsie-Sanche,  qui  nous  intéresse  particulièrement,  est  peut- 


L  Voy.  l'édition  Deloche  (Paris,  l«.j!),  in-4''),  n»  x,  p.  -^4.  (Collection  des 
Documents  inédits.) 

2.  Deloche,  op.  cit.,  p.  25,  note  8.  , 

3.  Delociie,  op.  cit.,  n°  x,  p.  26. 

4.  Ibid.,  n"  ix,  p.  23. 

5.  Voy.  Deloche,  Introduction,  p.  ccxxxix.  L'éditeur  a  commis  une 
légère  erreur  en  mettant  en  88(5  la  mort  de  Bernard  Plantevelue.  Celui-ci 
est  mort  en  885.  Voy.  Poupardin,  Le  royaume  de  Provence  sous  les 
Carolingiens,  p.  137  ;  F.  Lot,  Fidèles  ou  vassaux,  p.  97,  note  3. 


516  aMnales  du  Mlt»I. 

être  motivée  par  une  raison  personnelle.  Le  nom  que  portait 
la  femme  d'Eudes  de  Toulouse,  Garsinde,  est  répandu  particu- 
lièrement en  Gascogne  et  se  retrouvera  parmi  les  descen- 
dantes de  Garsie-Sanche  '.  Ne  peut-on  soupçonner  qu'un  lien 
de  parenté  unissait  celui-ci  et  l'épouse  du  comte  de  Toulouse? 
Une  observation  hypothétique  d'un  intérêt  plus  général, 
c'est  qu'en  août  887,  à  Bourges  probablement,  a  eu  lieu  une 
assemblée  où  ont  pris  part  des  personnages  considérables  du 
royaume  d'Aquitaine,  le  comte  de  Toulouse  et  Limousin, 
Eudes,  et  son  frère  Airbert;  Garsie,  comte  ou  duc  de  Gasco- 
gne; Guillaume,  comte  d'Auvergne  et  marquis  de  Golhie; 
d'autres  encore^;  parmi  les  clercs,  l'archevêque  de  Bourges, 
Frotier,  et  les  évêques  Effroi,  de  Poitiers,  Guillaume,  de 
Cahors,  Adolen,  d'Albi.  Le  but  de  cette  assemblée,  qui  con- 
firma occasionnellement  les  achats  et  donations  de  Frotier  en 
faveur  de  l'abbaye  de  Beaulieu,  ne  peut  être  élucidé.  Il  est 
permis  de  croire,  cependant,  qu'on  s'occupa  de  la  situation 
du  royaume,  devenue  lamentable  par  suite  de  l'incurie  et  de 
la  décrépitude  de  l'empereur  Charles  le  Gros,  dont  le  nom 
figure  pour  la  dernière  fois  au  bas  d'un  acte  de  cette  région. 

P.-S.  —  Peu  après  avoir  rédigé  ces  lignes,  je  m'avisai  de 
rechercher  ce  qu'était  devenu  l'original  du  Carlulaire  de 
Beaulieu  dont,  en  1859,  Deioche  avait  trop  tard  appris  l'exis- 
tence dans  les  papiers  du  baron  Costa  à  Beaulieu  même.  Ce 
manuscrit  a  été  acquis  par  la  Bibliothèque  Nationale.  Il  porte 
le  n"  493  des  Nouvelles  acquisitions  latines.  Les  souscrip- 
tions de  la  charte  X  sont  au  folio  13  v".  Elles  sont  ainsi  dis- 
posées : 

S.  Oddoni 
comitis.  et  uxori  ei'  Garsindim  qui  banc 


1.  F.  Lot,  Hugues  Capet,  p.  382,  note  3. 

2.  Ragainfredus,  Ramnulfus  et  Anialuinus  n'ont  pas  de  qualification, 
du  moins  dans  la  copie  du  Cartulairo  qui  nous  repi'ésente  le  texte.  Le 
premier  nom  est  trop  répandu  pour  qu'on  puisse  tenter  de  l'identifier.  Le 
second  pourrait  être  le  comte  de  Poitou.  Sur  Amalvinus,  cf.  la  disserta- 
tion suivante. 


MÉLANGES   ET   DOCUMENTS.  517 

uenditioné  fleri  et  afflrraare  rogauerunt 
S.  Arberti  fris  ei'  qui  hoc  afflrmauit.  S.  Gar 
sic  sci  comitis.  S.  Willelmi  comitis.  S. 
Ragarafridi.  Ramnulfus.  Amaluinus. 

Ma  conjecture  était  donc  exacte.  Les  copies  des  xvii®  et 
xviii*  siècles,  au  moyen  desquelles  Deloche  exécuta  la  ma- 
jeure partie  de  son  édition',  avaient  mal  lu-  le  mot  Sci  ei 
l'avaient  transcrit  ou  interprété  scriptoris,  ce  qui  explique 
que  nul  ne  s'avisa  d'y  reconnaître  le  duc  de  Gascogne.  Il  faut 
lire  Sciy  abréviation  de  Sancii  =:::  Sanctii  :=  Sanche, 

Ferdinand  Lot. 
VI 

AMAUGUIN,    COMTE    DE   BORDEAUX. 

Les  historiens  de  Bordeaux  ont  oublié,  ce  me  semble,  l'exis- 
tence d'un  duc  ou  comte  Amauguin  qu'une  lettre  d'Alphonse, 
roi  de  Galice,  appelle  en  906  «  amicum  nosirum  Amalvi- 
num  ducem  Burdelensem  ^ .  » 

Longtemps  après,  on  retrouve  dans  une  région  voisine  un 
comte  du  même  nom.  Au  bas  d'une  charte,  par  laquelle  un 
certain  Ménard,  sa  femme  Agena,  sa  fille  Arsende  font  don  à 
l'abbaye  de  Saint-Jean  d'Angély  d'un  alleu  sis  à  Neré,  vigue- 
rie  d'Aunay,  pays  de  Sainlonge,  on  trouve  la  souscription 
«  5.  Amalviai  comitis  *  ».  L'acte  est  daté  «  mense  septembri 
régnante  Lot/iario  rege  »,  ce  qui  laisse  une  large  marge  en- 
tre *,)54  et  985.  Mais  on  possède  un  autre  acte  par  lequel  le 
moine  Mainier  donne  à  l'abbaye  ce  qu'il  possède  en  cette  même 
localité  de  Neré,  et  l'acte  est  daté  «  mense  septembrio  anno 


1.  Voyez  l'Introduction.  * 

2.  La  première  lettre  est  sur  un  grattage;  c'est  certainement  la  portion 
de  la  queue  d'une  s  longue  =  Sci. 

3.  Voy.  l'\  Lot,  Études  sur  le  régne  de  Hugues  Capet,  p.  378,  note  ;">. 

4.  Cartulaire   de   Savit-Jean  d'Angehj,   publ.    par  Georges  Musset, 
pp.  199-200,  n"  CLxviii. 


518  ANNALES   DU   MIDI. 

nono  régnante  Lolliario  rege^  »,  ce  qui  correspond  à  sep- 
tembre 962  ou  963,  selon  le  point  de  départ  des  années  du  rè- 
gne de  Lothaire  (septembre  ou  novembre  954).  L'acte  précé- 
dent étant  daté  également  de  septembre  et  ayant  le  même 
objet,  on  peut  supposer  que  l'abbaye  de  Saint- Jean  a  obtenu 
en  même  temps  de  différents  propriétaires  la  cession  de  leurs 
domaines  à  Neré.  Il  paraît  donc  assez  vraisemblable  de  dater 
la  souscription  du  comte  Amauguin  de  septembre  962  ou  963. 
De  toutes  manières,  au  surplus,  la  date  où  il  apparaît  est  trop 
basse  pour  qu'on  puisse  l'identifier  avec  le  «  duc  »  de  Bor- 
deaux de  906.  Mais  l'identité  du  nom,  le  titre  de  comte,  l'ac- 
tion du  personnage  dans  une  région  limitrophe  du  Bordelais  ^ 
autorisent  à  le  rattacher  au  précédent  par  un  lien  de  parenté 
et  sans  doute  aussi  de  fonction. 

Quant  au  «  duc  »  de  906,  je  hasarde  une  dernière  hypothèse  : 
c'est  que  c'est  lui  qui  souscrit  «  5.  Amaluini»  dans  la  charte  X 
du  Cartulaire  de  Beaulieu  en  Limousin^.  Sa  présence  en 
887  aux  côtés  de  Garsie-Sanche,  duc  de  Gascogne,  de  Guil- 
laume, duc  d'Aquitaine,  etc.,  n'aurait  rien  que  de  très  com- 
préhensible. 

Ferdinand  Lot. 


1.  Ibid.,  pp.  2()()-'Ml,  IV  CLxix. 

2.  Arsende,  fille  du  donateur  Ménard,  porte  un  nom  très  répandu  en 
Gascogne  à  cette  époque;  voy.  F.  Lot,  Hugues  Capet,  p.  378. 

3.  Voy.  le  «  Mélange  »  précédent,  p.  514. 


COMPTES  RENDUS  CRITIQUES 


P.  G'diLHiKRMOz.  Essai  sur  l'origine  de  la  noblesse  en 
France  au  moyen  âge.  Paris,  Picard,  1902;  in-8°  de 
502  pages. 

Cet  ouvrage  touche  aux  problèmes  les  plus  difficiles  que  sou- 
lève l'étude  des  institutions  du  moyen  âge  et  sur  chacun  apporte 
à  la  fois  des  vues  nouvelles  et  des  textes  abondants.  C'est  plus 
qu'il  ne  faut  pour  en  faire  l'aide  indispensable  de  tous  les  mé- 
diévistes dans  leurs  recherches  sur  la  féodalité.  Nous  ne  devons 
pas  songer  à  en  présenter  un  compte  rendu  détaillé  dans  le 
genre  de  celui  qu'a  publié  M.  Ch.-V.  Langlois  {Revue  de  Paj'is, 
15  oct.  1902,  p.  818);  mais,  afin  de  donner  une  idée  de  l'impor- 
tance de  ce  livre,  nous  y  relèverons  un  certain  nombre  de  points 
au  sujet  desquels  nous  n'acceptons  pas  toujours  les  théories  de 
M.  G.,  tout  en  rendant  pleine  justice  à  ses  laborieuses  recher- 
ches ainsi  qu'à  l'indépendance  de  son  esprits 

Pour  expliquer  lorigine  de  la  noblesse  féodale,  l'auteur  re- 
monte jusqu'à  cette  vassalité  primitive  dont  on  constate  la  for" 
mation  dans  la  Rome  de  la  décadence  comme  dans  la  Germanie 
barbare  décrite  par  Tacite  :  ici  et  là,  elle  se  produit  sous  l'in- 
fluence de  la  même  cause,  la  faiblesse  de  l'État  qui,  chez  les 
Barbares,  est  encore  en  enfance  et  dans  le  Bas-Empire  tombe 

1.  Cf.  parmi  les  travaux  récents,  l'ouvrage  peu  connu  en  France  de 
E.  Mayer,  Deutsche  und  franzosisrhe  Verfassungsgeschichte,  1899 
(2  vol.  Leipzig,  Deichert)  et  le  compte  rendu  d'il.  Stutz,  dans  la  Zeit- 
schrift  dey  Savigny-Stiftung ,  19UU,  GA.,  115. 


520  ANNALES    DU    MIDI. 

en  décrépitude;  mais  le  milieu  où  l'institution  apparaît  lui 
donne  des  caractères  particuliers.  Nous  pouvons  distinguer  deux 
types  de  vassalité  :  le  type  romain  et  le  type  germanique.  Il  n'est 
pas  besoin  de  rappeler  que  les  termes  de  vassalité,  de  vassaux, 
sont  employés  ici  un  peu  improprement,  pour  la  facilité  de  l'ex- 
position; on  n'ignore  pas,  en  effet,  qu'ils  n'ont  reçu  leur  accep- 
tion technique  que  depuis  les  Carolingiens.  La  vassalité  du  Bas- 
Empire  se  distingue  par  l'infériorité  de  la  condition  des  vas- 
saux ou,  pour  leur  donner  leur  vrai  nom,  des  buccellarii;  ce  sont 
des  soldats  privés  soudoyés  parua  grand,  de  vrais  mercenaires, 
gens  méprisés  dans  la  société  romaine  (cf.  Lécrivain,  Mélanges 
d'archéologie,  1890,  267).  Tout  autre  est  le  vasselage  germanique 
ou,  pour  employer  l'expression  reçue,  le  compagnonnage.  Les 
compagnons  des  princes  germains  ne  perdent  point  de  leur 
considération,  ils  en  acquièrent  plutôt  à  s'attacher  à  la  fortune 
d'un  grand;  et  de  fait,  c'est  là  une  situation  que  recherchent  les 
guerriers  d'une  bravoure  éprouvée  ainsi  que  des  jeunes  gens  de 
noble  famille,  désireux  de  faire  sous  un  chef  illustre  l'apprentis- 
sage du  métier  des  armes. 

A  la  suite  des  invasions,  une  vassalité  nouvelle  apparaît  chez 
les  peuples  barbares,  représentée  par  les  buccellarii  chez  les 
Wisigoths.  les  gasindi  chez  les  Lombards,  les  antruslions  chez 
les  Francs.  On  les  a  rapprochés  des  soldats  privés  du  Bas-Em- 
pire ;  M.  G.,  présentant  une  conception  très  nouvelle  de  l'antrus- 
tionat,  en  fait  une  véritable  armée  permanente  au  service  des 
rois  francs,  recrutée  en  grande  partie  parmi  les  lites  et  les 
esclaves.  Mais  la  formule  de  Marculfe  (I,  18)  donne  une  tout 
autre  idée  de  l'antrustionat;  en  la  lisant,  on  se  représente  les 
antrustions  comme  des  hommes  libres,  voire  même  comme  des 
gens  de  condition  supérieure,  qui  s'attachent  au  roi  par  un  lien 
plus  étroit  que  celui  de  la  simple  fidélité.  Il  est  vrai  que  cette 
formule  n'est  pas  contemporaine  des  premiers  temps  de  l'an- 
trustionat, mais  elle  ne  se  présente  pas  comme  une  innovation; 
en  excluant  les  gens  de  basse  condition,  comme  il  résulte  aussi 
de  la  loi  des  Ripuaires  (11,  1),  on  n'a  fait  peut-être  qu'accentuer 
les  traits  primitifs  de  l'institution. 

A  propos  de  l'hommage,  disons  en  passant  que  M.  G.,  p.  77,  y 
voit  un  usage  propre  aux  Francs  et  inconnu  des  peuples  germani- 
ques restés  indépendants  (Cf.  Brunner,  Deulsche  Rechlsgeschichte, 
11,270). 


COMPTES    RENDUS   CRITIQUES.  521 

Aux  yeux  de  M.  G.,  les  traits  archaïques  de  la  primitive  vas- 
salité germanique  ne  persistèrent  que  chez  les  Anglo-Saxons, 
dans  la  classe  des  thanes  royaux.  De  là,  par  une  curieuse  migra- 
tion, ils  se  seraient  transmis  à  la  vassalité  continentale  sous  les 
Carolingiens  et  l'auraient,  en  quelque  sorte,  relevée,  en  confé- 
rant aux  vassaux  un  rang  social  supérieur.  Conjecture  ingé- 
nieuse, mais  à  notre  avis  insuffisamment  appuyée  sur  les  textes. 
Il  nous  semble  plus  simple  et  plus  exact  d'expliquer  les  carac- 
tères de  la  vassalité  carolingienne  en  la  rattachant  à  l'antrus- 
tionat  franc  et  en  tenant  compte  du  milieu  nouveau  où  elle  s'est 
développée. 

L'alliage  de  la  vassalité  au  bénéfice  s'explique,  selon  M.  G., 
par  le  caractère  quasi-servile  de  la  vassalité  à  ses  débuts.  Dès 
le  ve  siècle,  les  Wisigoths  donnent  des  terres  à  leurs  buccellai-ii; 
les  antrustions  mérovingiens  en  reçoivent  aussi.  Mais  si  ces  pra- 
tiques sont  assez  naturelles,  la  grande  diffusion  des  bénéfices 
parmi  les  vassaux  tient  à  ce  qu'ils  étaient  presque  assimilés  à 
des  colons  ou  à  des  servi;  le  domaine  du  grand  propriétaire  était 
morcelé  entre  ceux-ci  ;  ils  étaient  chasés  [casati)  ;  le  senior  établit 
de  même  sur  ses  terres  ses  soldats  domestiques  ou  vassaux,  ne 
conservant  auprès  de  lui,  sous  son  toit,  que  ceux  qui  étaient 
célibataires,  les  provendiers ,  bacheliers  ou  hauslaldi;  la  plupart 
des  autres  furent  chasés,  et  c'est  là  l'état  de  choses  auquel  il  est 
fait  allusion  à  chaque  page  de  Girard  de  Roussillon  et  ailleurs. 
Sur  ce  terrain,  j'ai  quelque  peine  à  suivre  M.  G.  La  parenté  inat- 
tendue entre  le  bénéfice  et  la  tenure  servile  ou  colongère  ne  se 
dégage  guère  des  textes.  Chez  les  Anglo-Saxons,  dont  M.  G. 
aime  à  rappeler  les  institutions  à  la  suite  de  M.  H.  Brunner, 
l'influence  des  institutions  romaines  comme  le  colonat  ne  s'est 
pas  fait  sentir,  et  cependant  on  voit  les  rois  distribuer  des 
terres  à  leurs  thanes  (cf.  p.  \t'i.  genèse  du  bénéfice;  p.  103  et  s., 
rôle  décisif  de  Charles  Martel,  etc.;  et  à  propos  de  la  distribution 
par  co  prince  des  terres  d'Église,  voir  Bondroit,  De  capacitaie 
possidendi  Ecclesiae  et  les  Precariae  ve7'bo  régis,  1900). 

La  concession  du  bénéfice  au  vassal  lui  imposait  la  lourde 
obligation  du  service  militaire  à  cheval;  c'était,  en  effet,  cette 
sorte  de  service  que  l'on  recherchait  depuis  les  Carolingiens,  car 
l'arme  de  la  cavalerie  jouait  un  rôle  prépondérant  dans  les 
batailles.  M.  G.  étudie  avec  un  soin  tout  particulier  cette  obliga- 
tion essentielle;  il  s'attache  mieux  qu'on  ne  l'avait  fait  jusqu'ici 


522  ANNALES   DU   MIDI. 

à  en  montrer  la  répercussion  sur  le  régime  des  flefs.  C'est  de  là 
qu'il  part  pour  essayer  de  comprendre  ce  qu'a  été  la  noblesse  à 
son  origine  et  ce  qu'elle  est  devenue  avec  le  temps.  A  ses  yeux, 
la  noblesse  se  confondit  d'abord  avec  la  chevalerie.  Le  noble 
féodal  ne  fut  autre  chose,  à  l'origine,  que  le  chevalier,  miles, 
l'homme  libre  revêtu  de  l'armement  complet  et  combattant  à 
cheval.  Pendant  longtemps  on  n'arriva  à  la  chevalerie  que  par 
la  cérémonie  de  l'adoubement,  qui  n'est  sans  doute  que  la  conti- 
nuation de  la  solennelle  prise  d'armes  usitée  chez  les  anciens 
Germains.  Nul  ne  naît  chevalier,  dit  le  vieil  adage.  Mais,  avec  le 
temps,  cette  cérémonie  tomba  en  désuétude.  Elle  se  compliqua  et 
devint  coûteuse,  si  bien  que  beaucoup  durent  y  renoncer  faute 
d'une  fortune  suffisante  pour  en  faire  les  frais'.  Les  riches  eux- 
mêmes  la  retardèrent  de  plus  en  plus;  elle  finit  par  dégénérer 
en  une  formalité  de  parade.  11  y  eut  dès  lors  des  nobles  qui 
n'étaient  pas  chevaliers;  la  noblesse  de  race  se  distingua  de  la 
chevalerie  et  celle-ci  se  réduisit  à  un  vain  titre,  le  dernier  dans 
la  hiérarchie  nobiliaire. 

M.  G.  met  habilement  en  relief  le  caractère  quasi  servile  de 
la  vassalité,  pp.  322-330  :  le  vassal  est,  comme  le  serf,  l'homme 
du  seigneur,  son  homme  lige,  son  justiciable;  le  chevalier  est 
vendu  avec  son  fief  comme  le  serf  avec  sa  tenure,  etc.  A  cet 
égard,  sa  thèse  contraste  avec  celle  des  savants  qui  font  du  con- 
trat féodal  un  contrat  entre  égaux  (ou  presque).  Comment  la 
concilier  avec  la  règle  :  quantum,  homo  débet  domino  ex  homagio, 
tantum  illi  débet  dominus  ex  dominio  prêter  solam  reverenliam 
(Glanville,  ix,  4)?  Le  fait  que  le  vassal  est  justiciable  de  son 
seigneur  n'a  pas  grande  portée,  puisque  la  justice  est  rendue, 
en  réalité,  dans  les  cours  féodales  beaucoup  moins  par  le  sei- 
gneur que  par  ses  hommes.  Quand  un  seigneur  démembrant  son 
domaine  en  attribuait  une  partie  à  un  autre  seigneur,  il  lui 
cédait  les  vassaux  qui  s'y  trouvaient  avec  tous  les  droits  qu'il 
avait  sur  eux:  mais  pouvait-il  faire  autrement?  Et  y  a-t-il 
quelque  chose  à  en  conclure  en  ce  qui  concerne  la  condition  de 
ces  vassaux,  puisqu'elle  n'était  point  modifiée  par  là? 

1.  Combien  elle  pouvait  être  simple,  on  en  jugera  par  ce  passage  de 
Beaumanoir,  où  trois  chevaliers  normands,  procédant  à  une  visio  terrae 
pour  laquelle  il  fallait  être  quatre,  avisèrent  un  passant  et  lui  donnèrent  la 
colée  en  disant  :  Chevaliers  soies.  [Coutumes  de  Beauvaisis,  éd.  Salmon, 
n»  noo,  ch.  35,  n»  36.) 


COMPTES    RENDUS   CRITIQUES.  523 

Quand  il  veut  établir  que  les  nobles  se  confondaient  originai- 
rement avec  les  hommes  libres,  p.  350,  M.  G.  invoque  des  argu- 
ments très  discutables.  11  voit  dans  ce  fait  l'explication  d'une 
opinion  mentionnée  par  Beaumanoir  et  d'une  particularité  no- 
table en  ce  qui  concerne  les  roturiers  mineurs;  c'étaient,  dit-il, 
des  non-libres,  partant  des  incapables;  donc  il  ne  pouvait  être 
question  pour  eux  de  minorité  ou  de  majorité,  et  la  même  raison 
faisait  qu'ils  n'étaient  point  soumis  au  bail  des  collatéraux. 
Mais  Beaumanoir  traite  de  plaisanterie  l'idée  que  «  l'enfant  du 
poosté  serait  toujours  en  aage  »  (majeur)  ;  à  ce  compte,  remarque- 
t-il,  l'enfant  à  la  mamelle  pourrait  se  dessaisir  de  son  héritage, 
et  c'est  ce  que  nul  droit  ni  coutume  n'admettent.  S'il  est  venu  à 
la  pensée  de  quelqu'un  d'émettre  une  thèse  pareille,  c'est  peut- 
être  à  cause  du  silence  des  Coutumes  en  ce  qui  concerne  l'âge  de 
la  majorité;  en  prétendant  que  l'enfant  de  poosté  était  toujours 
majeur  .  on  voulait  dire  qu'il  devenait  capable  aussitôt  qu'il 
avait  assez  d'intelligence  et  d'expérience  pour  gérer  ses  affaires, 
sans  qu'on  eût  à  se  préoccuper  de  son  âge.  Si  l'on  met  de  côté 
les  esclaves  proprement  dits,  il  est  certain  que  les  autres  classes 
de  non  libres  ont  toujours  eu  des  droits.  L'absence  de  bail  n'a 
pas  de  portée,  puisque  les  mineurs  roturiers  sont  soumis  à  la 
garde,  à  la  tutelle,  ou  sont  communs  en  biens  avec  le  survivant 
de  leurs  père  et  mère.  —  M.  G.  se  base  ensuite  sur  le  fait  que  les 
femmes  nobles  avaient  seules  le  droit  de  renoncer  à  la  commu- 
nauté; mais  il  sait  mieux  que  personne,  puisqu'il  a  consacré  à  la 
question  une  étude  spéciale  (d'ailleurs  fort  bien  conduite),  com- 
bien l'origine  et  l'histoire  de  la  communauté  entre  époux  pré- 
sentent d'obscurité.  —  Il  est  très  hasardé  également  de  généra- 
liser le  passage  de  P.  de  Fontaines,  Conseil,  xv,  29,  constatant 
qu'un  franc  homme  est  seul  autorisé  à  pratiquer  la  saisie  privée 
sur  un  autre  franc  homme,  tandis  qu'un  vilain  ou  un  bourgeois 
sont  tenus  de  recourir  à  la  justice.  Combien  d'autres  textes  qui 
ne  connaissent  pas  cette  distinction!  Par  exemple  les  vieux 
Fors  de  Béarn,  l'ancienne  Coutume  de  Bordeaux,  art.  134,  etc.  — 
Est-il  possible  de  réserver  aux  seuls  gentilshommes  des  pre- 
miers temps  de  la  féodalité  le  droit  de  guerre  privée,  en  partant 
d'un  passage  de  Beaumanoir,  c'est-à-dire  de  la  fin  du  xiii»  siècle? 
Le  Très  ancien  Coutmnier  de  Normandie,  éd.  Tardif,  p.  27,  c.  31, 
dit  d'une  manière  générale  :  Nullus  hominum  audeat  versus 
alium  guerram  facere. 


524  ANNALES   DU  MIDI. 

C'est  encore,  ce  nous  semble,  une  affirmation  très  risquée  que 
celle  d'après  laquelle  anciennement  les  gentilshommes  auraient 
été  les  seuls  qui  pussent  accomplir  des  actes  judiciaires.  Il  n'y 
aurait  donc  pas  eu  de  formes  judiciaires  pour  les  roturiers!  Tout 
ce  que  l'on  pourrait  soutenir,  à  mon  sens,  c'est  que  certains 
actes  étaient  réservés  aux  nobles.  Mais  l'esprit  de  système  con- 
duit ici  M.  G.  beaucoup  plus  loin.  — J'en  dirai  autant  de  l'expli- 
cation qu'il  donne  au  sujet  des  systèmes  divers  concernant  la 
transmission  de  la  noblesse.  Ces  systèmes,  dit-il.  existaient 
avant  qu'il  y  eût  une  classe  noble;  ils  servaient  pour  régler  le 
sort  des  enfants  issus  des  mariages  entre  libres  et  non  libres;  et 
M.  G.  en  conclut  que,  seuls,  les  nobles  étaient  considérés  comme 
libres,  puisqu'on  appliquait  à  la  noblesse  ce  qui  avait  été  fait 
pour  la  liberté.  Il  est  bien  plus  simple  de  dire  qu'on  a  raisonné 
par  analogie  dans  cette  hypothèse  comme  dans  nombre  d'autres 
cas. 

Si,  dans  toutes  ses  parties,  l'ouvrage  de  M.  G.  peut  intéresser 
les  historiens  du  Midi,  nous  devons  appeler  tout  particulière- 
ment leur  attention  sur  celles  où  il  a  utilisé  des  documents  de 
notre  région.  C'est  ainsi  qu'il  montre,  en  se  référant  à  la  guerre 
des  Albigeois,  comment  le  service  d'ost  de  quarante  jours  se 
répandit  dans  le  Midi  et  même  dans  toute  la  France  (p.  279); 
c'est  ainsi  encore  qu'il  fait  voir,  à  la  suite  de  M.  Dognon,  le  sys- 
tème des  coseigneuries  s'établissant  par  voie  de  testament  ou  en 
vertu  de  clauses  de  l'acte  d'inféodation  (p.  201);  c'est  ainsi  qu'il 
distingue,  à  l'aide  des  Coutumes  de  Barcelone  (et  on  se  demande 
s'il  est  légitime  de  généraliser  cette  distinction),  les  cavallerie 
ou  mililie,  analogues  aux  flefs  de  haubert  normands  et  imposant 
le  service  militaire  avec  équipement  complet,  et  les/è»;e  minores 
(feoda  franca  d'autres  textes)  correspondant  aux  tenures  des 
vavasseurs  normands  qui  servaient  avec  l'équipement  restreint 
(p.  189)  :  de  ces  deux  sortes  de  flefs,  les  premiers  auraient  appar- 
tenu aux  milites,  les  autres  aux  domicelli  (p.  229.  n.  15;  cf.  aussi 
sur  ce  dernier  terme,  p.  405).  Notons  enfin  l'explication  qu'il 
donne  du  mot  comlor  en  usage  dès  la  fin  du  xi»  siècle  dans  la 
Gothie.  en  Rouergue  (p.  162).  Ce  terme,  diminutif  de  comte,  s'ap- 
pliqua aux  plus  puissants  possesseurs  de  châteaux;  on  les  dis- 
tingua par  là  des  autres  seigneurs  de  leur  classe  sans  les  con- 
fondre avec  ceux  de  la  classe  supérieure. 

J.  Brissaud. 


COMPTES  RENDtS  CRtTlQÙES.  525 

Poésie  populaire  landaise.  —  Choix  de  prières,  formu- 
letles,  attrapes,  etc.  —  2«  éditioa  considérablement  aug- 
mentée. Aire-SLir-Adoui",  Labroiiche,  1902;  iu-8"  large,  de 
78  pages  (sans  nom  d'auteur). 

M.  l'abbé  Foix,  qui  nous  a  donné  cet  excellent  livre,  a  eu  la 
modestie  de  ne  point  le  signer.  Cependant,  la  patience  et  le  soin 
qu'il  a  fallu  pour  rechercher  et  recueillir  les  mille  dictons  et 
proverbes  dont  se  compose  l'ouvrage,  l'exactitude  avec  laquelle 
ont  été  reproduites  dans  toute  leur  naïveté  une  multitude  d'ex- 
pressions et  de  formules,  enfin  les  trente  années  d'observations 
que  représente  la  confection  du  recueil,  tout  nous  permet  d'ou- 
blier un  instant  le  caractère  impersonnel  de  la  littérature  qui 
fait  l'objet  de  l'ouvrage  et  autorise  les  folk-loristes  à  remercier 
M.  l'abbé  F.  d'avoir  pris  pour  eux  tant  de  peine. 

Ce  point  étant  fixé  et  cette  dette  de  reconnaissance  bien  éta- 
blie, l'on  ne  peut  que  se  féliciter  de  voir  l'auteur  s'effacer  ainsi 
derrière  le  sujet  qu'il  traite.  Ce  qu'il  faut  précisément  louer  dans 
ce  livre,  c'en  est  le  caractère  objectif.  M.  F.  s'est  contenté  de  tenir 
la  plume  :  il  a  écrit  sous  la  dictée  de  la  tradition.  Dans  le  vaste 
champ  peu  exploré  des  Landes,  il  a  cueilli  et  nous  apporte  sa 
gerbe  drue  et  bottelée.  Comme  dans  un  herbier,  chaque  échan- 
tillon de  pensée  populaire  est  soigneusement  classé  et  étiqueté  : 
pas  un  vers,  pas  un  mot  qui  ne  soit  rapporté  scrupuleusement 
au  petit  pays,  au  village  où  il  a  été  entendu.  De  Mimizan  à  Aire, 
du  pays  de  Maremne  au  Gabardan  et  à  l'Armagnac,  une  foule  de 
communes  a  contribué  à  enrichir  ce  petit  Trésor  de  la  poésie 
populaire  des  Landes. 

Le  livre  est  divisé  en  six  chapitres  :  «  Poésies  de  tous  les  âges. 
—  Poésies  de  l'Enfance,  —  de  l'Adolescence,  —  de  la  Jeunesse,  — 
de  l'Age  mûr,  —  et  de  la  Vieillesse.  »  Cette  division  est  peut-être 
un  peu  artificielle.  Mais  peut-on  en  concevoir  une  tout  à  fait  satis- 
faisante? Néanmoins,  le  recueil  gagnerait  à  être  complété  par  un 
index  des  mots-types  et  par  un  répertoire  géographique. 

L'auteur  voudra  donc  nous  excuser  si,  par  hasard,  nous  avons, 
en  lisant  son  ouvrage,  laissé  passer  inaperçjie  quelqu'une  des 
locutions  proverbiales  que  nous  citons  à  titre  de  complément. 
L'on  dit  à  Uchacq,  en  parlant  du  rossignol  ; 

Ya  pa  nat  kônte  ni  barùn. 
Ki  puski  nâwri  un  rôchiuùn. 


526  ANNALES   DU    MIDI. 

Au  chapitre  iv,  §  3,  ajouter  le  dicton  suivant  usité  à  Canenx- 
et-Réaut  : 

Tunérre  dé  Marts, 

Pàn  é  bin  a  tûtes  parts. 

Voici  maintenant  quelques  variantes  au   texte  recueilli  par 
M.  F. :  p.  48,  n"  403  : 

Lah  grûs  kân  sén  bàn  en  Espaîïe, 
Kâw  jeta  blat  a  la  kampane; 
É  kân  sén  bàn  enta  Lengun, 
Ké  kâw  méte  la  bits  âw  pachénin. 

(Nonères,  près  Mont-de-Marsan.) 


P.  42,  n°  36 


P.  41,  no  29 


Se  plâw  lu  jurn  dé  Trinitat, 
Tut  sén  turne  pér  la  mitât. 


Plâw,  plâw, 
Sûh  la  biiie  du  Bidâw  I 
Plâwjis  pa  sûh  la  mi, 
La  harés  tu  te  purri  ! 


(Manières.) 


(Canenx-et-Réaut.) 


L'on  pourrait  ainsi  ajouter  au  livre  de  M.  F.  plus  d'une  variante 
et  plus  d'un  dicton  nouveaux.  Mais  il  est,  en  l'espèce,  impossible 
de  présenter  dans  une  telle  matière  rien  de  complet.  Tel  qu'il 
est,  l'ouvrage  rendra  les  plus  grands  services  à  l'historien  du 
folk-lore. 

Le  linguiste  a  aussi  beaucoup  à  y  glaner  :  en  premier  lieu,  la 
graphie  est  assez  rigoureuse.  M.  F.  a  éprouvé  le  besoin  de  recou- 
rir à  une  notation  phonétique.  Celle-ci  n'est  point  parfaite  '.  Mais 
nous  savons  qu'il  n'est  malheureusement  point  possible  de  trou- 
ver chez  tous  les  imprimeurs  des  caractères  aussi  variés  que  ceux 
de  la  Revue  des  Patois  gallo-romans. 

En  second  lieu,  l'auteur  n'a  point,  comme  l'ont  fait  certains, 
transposé  dans  son  propre  patois  les  proverbes  qu'il  cite  :  il  a 
d'ordinaire  reproduit  scrupuleusement,  avec  toutes  ses  particu- 
larités, le  langage  propre  à  chacun  des  villages  cités.  C'est  ainsi 
que  le  livre  pourra  fournir  des  renseignements  précieux  sur  des 

1.  Il  est  excellent  d'avoir  distingué  d'un  bout  à  l'autre  de  l'ouvrage 
les  deux  n,  l'une  gutturale  (que  l'auteur  appelle  assez  inexactement  na- 
sale) et  l'autre  dentale.  Mais  pourquoi  adopter  pour  ce  dernier  son  la 
notation  n  qui  fait  songer  à  une  n  mouillée. 


COMPTES   RENDUS  CRITIQUES.  527 

points  intéressant  la  phonétique,  la  morphologie  ou  même  la 
syntaxe  des  patois  landais  :  par  exemple  sur  l'emploi  du  y  ou 
du  j,  du  6  ou  du  ïc  ;  des  parfaits  en  k  ;  de  l'inflnitif  prépositionnel 
à  la  place  du  gérondif,  etc.,  etc. 

L'on  pourrait  relever  quelques  inexactitudes.  M.  F.  note  uni- 
formément par  la  même  lettre  s  le  son  de  s  -|-  consonne.  Or,  dans 
la  majeure  partie  des  Landes,  de  Hagetmau  à  Lencouacq,  la  sif- 
flante s  +liquide,  nasale  ou  explosive  sonore  est,  dans  la  pro- 
nonciation courante,  à  peu  près  généralement  remplacée  par  une 
aspiration  {h)  qui,  dans  certains  cas,  est  elle-même  en  voie  de 
disparaître.  Des  graphies  telles  que  gûsmet  {=:' glûmuscellum), 
p.  28,  n"  14  (Hagetmau),  ne  correspondent  plus  du  tout  à  l'état  de 
choses  actuel;  guhmet  serait  beaucoup  plus  exact.  Cela  est  sur- 
tout vrai  pour  Hagetmau,  puisque  cette  ville  des  Landes  est  à 
peu  près  le  centre  d'où  rayonne  ce  phénomène  d'amiiissement.  A 
Hagetmau,  comme  dans  toute  cette  région  de  la  Chalosse,  jus- 
qu'à Saint-Pierre-du-Mont,  Saint-Criq  au  nord,  1'^  est  ébranlée 
même  devant  les  explosives  sourdes  p  ot  ^  (mais  non  devant  /)  : 
les  graphies  èscalhoutouns  (Chalosse),  p.  37,  no  o3,  ésperouni 
(Saint-Sever),  p.  38,  n»  58,  etc  ,  ne  sont  par  conséquent  pas  rigou- 
reusement vraies. 

Rectifions  çà  et  là  quelques  points  de  détail.  —  P.  3i,  l.  ]  :  la 
bielhe.  Faute  d'impression  pour  le  bielhe ;  à  Arjuzanx,  l'article 
féminin  est  toujours  le.  —  iô.,  1.  17  :  au  lieu  de  luabe  lire  tuewe-, 
les  imparfaits  en  abe  sont  inconnus  au  patois  d'Arjuzanx;  le  b 
latin  intervocal  y  est  représenté  par  la  semi-voyelle  lo.  —  Pour 
cette  dernière  raison  lire  :  ib.,  1.  22,  duwan  et  non  deban.  —  P.  49, 
n"  56.  A  Gaillères,  l'on  dit  sajin  [sagimen)  et  non  sayin.  — P.  55, 
no  25  :  Yenlrem  n'est  pas  représenté  à  Arjuzanx  par  bénie.,  mais 
bien  par  b'enle  :  l'ë  devant  nasale  y  est,  comme  dans  toute  cette 
région,  resté  sensiblement  ouvert... 

Mais  passons  sur  ces  chicanes.  Aussi  bien  l'auteur  n'a-til  point 
la  prétention  de  présenter  un  document  d'une  rigueur  absolue 
dans  la  notation  des  sons.  Le  phonéticien  peut,  je  le  répète,  ga- 
gner à  la  lecture  de  l'ouvrage;  mais  celui-ci  ne  s'adresse  point 
de  préférence  au  phonéticien.  M.  F.  a  surtout  songé  à  faire  une 
anthologie  de  la  littérature  orale  des  Landes.  Il  a  pleinement 
atteint  son  but.  Que  dis-je?  Il  était  un  des  deux  ou  trois  hommes 
seuls  capables  de  mener  à  bien  une  telle  entreprise.  Né  dans  les 
Landes,  y  ayant  passé  à  peu  près  toute  sa  vie  en  contact  avec 


528  ANNALES   DU   MlDI. 

les  gens  et  les  choses  de  la  campagne,  il  était  mieux  que  per- 
sonne en  mesure  de  recueillir  ses  documents  de  la  bouche  parfois 
capricieuse  et  souvent  farouche  de  la  Lande  elle-même.  Historien 
exact  et  chercheur  curieux,  rompu  aux  travaux  d'archives,  il  est 
aussi  à  l'aise  avec  les  hommes  qu'avec  les  textes.  Il  n'en  fallait 
pas  moins  pour  faire  un  livre  aussi  solide  et  utile. 

Georges  Millardet. 

V.  Chichmarev.  —  Vie  provençale  de  sainte  Margue- 
rite. (Extrait  de  la  Revue  des  langues  romanes,  aov.- 
dec.  1903.) 

Il  s'agit  de  la  version  de  Florence,  jadis  signalée  par  M.  P. 
Meyer  [Romania,  XIV,  524).  Dans  une  courte  introduction,  l'édi- 
teur étudie  les  rapports  de  cette  version  avec  celles  qui  ont  été 
publiées  ici  (XI,  5-55)  et  la  Vie  latine;  il  n'essaie  pas  d'en  déter- 
miner la  patrie  et  la  date  exacte.  Ce  texte,  fort  corrompu,  aurait 
eu  besoin  de  nombreuses  corrections  :  celles  qui  ont  été  propo- 
sées par  M.  C.  sont  loin  de  suffire.  Le  manuscrit  n'a  même  pas 
été  reproduit  avec  une  fidélité  parfaite.  C'est  ce  qui  ressortira 
nettement  des  observations  qui  suivent'. 

20  Sens?  —  47,  49,  51  Corr.  venquet;  c'est  ainsi  que  lit  le  ms. 
~  59  Quelle  serait  la  signification  de  agaus?  Le  ms.  a,  d'après 
ma  copie,  sans  midons.  —  GO  Je  ne  comprends  pas  Ihei  veina. 

—  83  qui  :=  cui  n'a  pas  besoin  d'être  changé.  —  86  Le  ms.  a, 
d'après  ma  copie,  p  (barré)  lai.  —  139  Corr.  que  en  qui,  —  148  Ma 
paraît  nécessaire.  —  190  Lire  avec  le  ms.  :  Cesl  Dieus  eslay  sus 
sobre  nos.  —  194  Ms.  :  feron.  —  196  Lire  avec  le  ms.  els  au  lieu 
de  es.  —  213  los  peut  rester.  —  219  Lire  cors  avec  le  ms.  — 
227  Ms.:  daray  de  tan  g.  a.  —  229  Corr.  Si  non  ho  fas  (ainsi  le 
ms.)  ton  dan  tu  quiers,  cf.  v.  300.  —  230  Corr.  te  en  t'o  :  «je  te  le 
ferai  payer  cher.»  —  239  Ms.  :  si  part  del  ny ;  lisez  si  part  de 
luy  (ou,  peut-être,  siml).  —  237  Corr.  donas  la  me  (ainsi  le  ms.). 

—  284  Lire  quan  ten  sa  vie.  —  292  Corr.  ploravon  (ainsi  le  ms.). 
--  293  Ce  n'est  pas  U  qui  doit  être  intercalé  :  les  mots  suivants 


1.  Je  me  sers  d'une  copie  que  j'ai  prise  autrefois  sur  l'original;  cette 
copie  s'arrête  au  v.  890;  je  n'ai  que  des  extraits  de  la  fin  du  poème.  Le 
ms.  étant  d'une  assez  mauvaise  écriture,  je  n'oserais  garantir  toutes  mes 
lectures. 


COMPTES    RENDUS   CRITIQUES.  529 

ne  sont  pas  adressés  à  la  sainte.  Corr.  so  cUszien.  —  296  Car 
peut-ii  être  supprimé?  —  209  Lire,  au  lieu  de  pas,  fas,  avec  le 
ms.;  pas  est  une  faute  d'impression,  sans  doute.  —  315  Corr.  C07's. 

—  341  L\Teb^astot  (ainsi  le  ms.j.  ~  348  ara  ne  convient  pas.  Corr. 
queenVarcl  —  395  Lire  tieus  et  lolra  (ainsi  le  ms.).  —  401  Cow.ti 
en  <'o,  cf.  plus  haut,  vs.  "230.  —  406  Le  ms.  a  mot  au  lieu  de  mon. 
Corr.  mos,  cf.  vs.  399.  —  408  Lire  avec  le  ms.  Un  alh  et  dieus. 

—  413  Le  ms.  a  guidar.  —  414  Lisez  ni  a  se  ni  as  autre  a.,  cf. 
vs.  1041.  —  422  Corr.  es  e  er  e  fon.  —  424  Le  ms.  a  non.  Le  chan- 
gement proposé  ne  me  semble  pas  acceptable.  —  427  Virgule 
après  mezes.  —  428  Virgule  après  plages.  —  429  N'est-ce  pas  wn, 
plutôt  que  lo,  qui  doit  être  suppléé?  —  439  Lire  el  nom  (ainsi  le 
ms.).  —  446  Corr.  can  en  c'anc.  —  447  Lire  tort  (ainsi  le  ms.).  — 
4o7  Lire  las  dolors  (ainsi  le  ms.).  —  438  Corr.  tieu\  —  477  Mettre 
un  point  au  lieu  d'un  point  d'interrogation.  —  481  Que  signifie 
la  note  pesapeseral  Le  ras.  a  la  leçon  qui  se  trouve  dans  le  texte. 

—  482  Corr.  tujutjes  antre.  —  483  Virgule  après  tort.  —  493  Lire 
SOS  bon  cor  li  o  ad.  (ainsi  le  ms.).  —  496  Corr.  eissernidal  cf. 
vs.  1329.  —  498  Lire  que-l  au  lieu  de  qu'el.  —  315  Lire  dont  la 
menassava  de  (la)  mort.  —  529  Lire  que  au  lieu  de  gue.  Faute 
d'impression.  —  535  Lire  cel  estendet  (ainsi  le  ms.)  au  lieu  de 
ciel  entendet.  —  549  Lire  vêtiras  (ainsi  le  ms.).  —  553  Lire  bons. 
Faute  d'impression.  —  560  Proufosa  n'a  pas  de  sens.  Pourrait-on 
changer  En  sa  preondeza  gitar"^  Cela  me  semble  pourtant  bien 
hardi.  —  565  [el]  ne  doit  pas  être  intercalé.  —  574  Corr.  And 
Supprimer  la  virgule  après  val.  —  577  Lire  senestra  (ms.).  — 
581  Ecrivez  Sezie  si,  so  Vera  avist;  cf.  le  texte  du  ms.  de  Madrid, 
vs.  327.  —  608  Après  ce  vers  le  ms.  a  :  Si  tôt  s'es  mais  et 
ergolhos.  —  614  Les  mots  per  so  ne  doivent  pas  être  intercalés. 

—  616  Lire  mont  (ainsi  le  ms.)  au  lieu  de  mot.  —  621  Corr.  Mol 
auran,  cf.  370.  —  622  Supprimer  le  point-virgule.  —  625  Que 
signifie  firra  .^  Ma  copie  a  firia ,  que  je  ne  comprends  pas 
davantage.  —  634  Lire  Ja  re  hueymays  nom  tirara  (:  plazera)'^ 

—  635  Sens?  —  641  Le  ras.  donne  : 

Colo[m]pna  de  grant  altesza 
E  fort  de  grantda  fortalesza. 

658  Mettre  une  virgule  après  fays.  —  662  Ms.  Veyssot^bes.  — 
665  Supprimer  la  virgule  après  beltat.  —  668  Sens?  C'est  sans 
doute  comparlir  qui  doit  se  trouver  à  la  rime.  —  671  Virgule 

ANNALES  DU   MIDI.   —   XVL  34 


530  ANNALES   DU    MIDI. 

après  fezis.  —  675  Lire,  avec  le  ms.,  nem,  au  lieu  de  em.  — 
681  Lire  pueysasli  (ainsi  le  ras.)-  —  697  Lire  pueys  (ms.)-  — 
699  (note).  Reluzi  est  un  parfait  et  ne  convient  pas  ici.  —  704  Lire 
blancqua  fms.).  —  718  Virgule  après  déport.  —  720  Ma  copie  a 
bon  au  lieu  de  ben.  —  724  Ecrire  pueys.  —  726  Virgule  avant 
et  après  diables.  —  731  Virgule  avant  et  après  dona.  —  739  Ayci 
au  lieu  de  ay  ci.  —  774  Corr.  mundat.  —  775  Virgule  après 
peccat.  —  779  Après  ce  vers  sont  tombés  les  suivants  : 

El  Va  donat  entendement 

Los pes  et  la[s\  mans  eysament. 

790  Mal  imprimé.  Lisez  en  Dieus  ferm..  —  802  Ma  copie  a  lus  au 
lieu  de  lur.  —  803  Ma  copie  a  molheradas.  —  810  Supprimer  la 
virgule.  —  811  Virgule  après  dormir.  —  821  Ma  copie  a  clau- 
Iras.  —  829  (note)  Que  signifie  li  nid  ?  —  838  Mettre  dona  entre 
virgules.  —  860  Virgule  au  lieu  de  point-virgule.  —  861  Corr. 
venques.  —  882  Ms.  non  si  pot.  —  894  Virgule  après  donet.  — 
909  (note).  Que  serait  ici  enclinatl  -  928  Le  changement  en 
perdo  est  inadmissible.  —  949  Que  serait  amblet  ?  Lisez  avec  le 
ms.  Vaamplet;  cf.  relargua,  vs.  947.  —  952  Corr.  gran.  —  967  Corr. 
per  Salamonl  —  983  Lire  c'anc  no  i  remas  et  supprimer  la  vir- 
gule. ^  994  Corr.  dis  \e\  cant  espons.  —  999  Lire  pueysas  anet. 
1022  Je  ne  comprends  pas  fia.  —  1038  clas  est  peut-être  une 
faute  d'impression  ^touv  elas.  Corr.  Quar  orbas  son.''  Cf.  vs.  413. 

—  1052  fais  ne  convient  pas  ici.  —  1056  11  n'est  pas  nécessaire 
d'intercaler  yeu.  —  1064  Corr.  mos  et  lo.  —  1067  Lire  plen  d'ai- 
gua,  qu'ayci-m  v.  ?  -  1069  azorray  est  une  forme  impossible. 
Supprimer  wî?  —  1080  auray  doit  se  trouver  à  la  rime.  — 
1090  Lire  neiada  (ainsi  le  ras.).  —  1901  Ecrire  Va.  —  1102  Pas 
besoin  d'intercaler  il.  Lisez  alhum-.  —  1108  Lire  Una. —  1109  Corr. 
sit.  —  1116  Corr.  eslengh.  —  1118  Virgule  avant  bel  et  après 
payre.  —  1131  aunansa.  Sens?  —  1151  Corr,  ret.  —  1152  Sup- 
primer la  virgule  avant  Dieus.   —  1155  Virgule  après  diables. 

—  1176  Lire  [a]  au  lieu  de  [el\.  —  1210  Ne  pas  changer  en  dels, 
mais  en  d'est.  —  1214  Corr.  Dieus  en  deus  {=.  debes).  —  '12'19  Point 
d'interrogation  après  eslar ,  cf.  vs.  1213.  —  1220  Corr.  Oy  ieu 
(pour  o«,  cf.  Flamenca)  et  gar  au  lieu  àe  garl.  —  1221  Corr. 
m'aucir  en  aucir  (ms.).  —  1227  Lire  en  bon  au  lieu  de  on  hon.  — 
1252  Corr.  alumnaranl.  —  1237  II  ne  fallait  rien  changer  au  ms. 

—  1268-69   Aloc  au   lieu  de  alot.    —   1272   Corr.  deylieures.  — 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  531 

4274  Lire  E'n  hono?\  —  1292  Lire  esgardar  (ms.).  —  1305  Corr.  la 
genl  et  entenclet.  —  1313  Corr.  covenl,  cf.  vs.  1333.  Ecrire  afermet. 

—  1325  Corr.  forani  —  1334  Ecrire  so  te  die  ieti.  —  1376  Sens? 
1377  Ecrire  iers  au  lieu  de  i  ers.  —  1401 --2  Sens?  —  1403  Ce  vers 
est  trop  court  d'une  syllabe.  — 1409  Point- virgule  ou  point  après 
ce  vers.  —  1413  Sens?  —  1439  Corr.  Denant.  —  1444.  Corr.  cors. 

—  1445  Un  point  après  beneziront.  —  1446  E'I  (ainsi  le  ms.).  — 
1451  Peut-être  :  On  lo  cors  jai  procession  f.l  Cf.  v.  1491.  — 
1460  Pourquoi  charger  quascun  en  cascun"!  Corr.  morialsims.).— 
1463  Corr.  sec.  —  1464  Corr.  esperdut.  —  1477.  Peut  être  :  Ayci  -l 
lauzavon  los  bels  angelsl  —  \  i79  Lire  Benezet  des,  reys  allismes'^. 

—  1482  Je  ne  comprends  pas  as  sans.  —  1487-88  cre  :  ve  à  la 
rime.  —  1500  Ecrire  la  '«  au  lieu  de  Van.  —  1505  Ecrire  bon\  — 
1516  Corr.  say  (faute  d'impression).  Emil  Levy. 

G.  Clément-Simon.  —  Recherches  de  l'histoire  civile  et 
municipale  de  Tulle  avant  l'érection  du  consulat, 
d'après  des  documents  inédits.  T.  I.  Tulle,  Crauffou, 
1904;  gr.  ia-8"  de  iv-348  pages,  avec  uq  plan  de  Tulle 
ancien,  dressé  par  M.  J.  Ravoux. 

Après  avoir  si  souvent,  affirmé  sa  compétence  en  matière 
d'histoire  du  Limousin,  M.  Clément-Simon  vient  de  s'attaquer  à 
un  sujet  des  plus  difficiles,  où  il  a  trouvé  occasion  d'appliquer 
ses  rares  qualités  d'érudit  et  de  juriste.  Exposer  la  vie  munici- 
pale de  Tulle  avant  l'érection  de  son  consulat,  qui  n'eut  lieu 
qu'en  1562,  cela  paraît  d'abord  une  gageure.  Mais  la  gageure  est 
bien  tenue,  puisque  nous  sommes  contraints  de  reconnaître 
qu'en  une  foule  de  circonstances  les  Tullistes  des  xiii-xiv«  siè- 
cles exerçaient  des  droits  particuliers  qu'ils  tenaient  des  ancê- 
tres et  de  la  tradition.  La  démonstration  est  probante  et  d'au- 
tant plus  méritoire  que  les  textes  sont  souvent  obscurs  et 
surtout  peu  nombreux,  les  archives  de  cette  petite  ville  ayant 
depuis  longtemps  disparu. 

Le  premier  chapitre  conduit  le  lecteur  jusqu'aux  franchises 
octroyées  par  l'évêque  Jean  de  Cluis  en  1426.'  Le  deuxième  est 
l'étude  de  ces  franchises  et  de  celles  qui  suivirent.  Les  chapi- 
tres in  à  VI  consistent  en  une  très  érudite  description  de  l'état 
matériel  et  social  de  l'agglomération  tuUiste  à  la  fin  du  moyen- 
âge.  Ici  on  ne  sait  pas  ce  qu'il  convient  le  plus  d'apprécier  : 


532  ANNALES   DU    MIDI. 

l'abondance  des  faits  puisés  à  tant  de  sources  diflFérentes,  ou  la 
sûreté  avec  laquelle  ils  nous  sont  présentés.  C'est  que  M.  C.-S.  a 
recueilli  de  très  vieille  date,  dans  ses  cartons,  des  pièces  que 
dédaignaient  les  collectionneurs  d'il  y  a  cinquante  ans,  et  qu'il  a 
su  les  lire  et  les  comprendre.  De  ce  trésor  personnel  il  s'est 
servi  pour  raconter  les  annales  de  sa  province,  d'un  style  vigou- 
reux et  net. 

Quelques  contradictions  que  je  me  permettrai  n'ont  d'autre 
but  que  de  montrer  à  l'auteur  avec  quel  soin  et  quel  intérêt  j'ai 
lu  son  ouvrage. 

Ainsi,  est-il  légitime  de  parler  de  Tulle  comme  capitale  du 
Bas-Limousin  (p.  23)  avant  la  fondation  de  Tévêché,  qui  est  de 
laiT-ISTEn  quoi  cette  ville  l'emportait-elle  alors  sur  Brive  et 
Uzerche  au  point  de  vue  politique?  —  Est-ce  bien  par  amour 
pour  Tulle  que  Jean  XXII  y  a  placé  un  évêché?  Ne  serait-ce 
point  plutôt  par  égard  pour  son  abbé,  qui  fut  le  premier  à  béné- 
ficier de  cette  érection  ?  —  Puisque  le  régime  féodal  était  fait  de 
privilèges  et  d'inégalités,  sommes-nous  autorisés  à  arguer  du 
silence  des  populations  pour  croire  qu'elles  trouvaient  ce  régime 
léger  fpp.  31  et  32)?  —  A  mon  avis,  M.  C.-S.  appuie  trop  sur 
cette  idée  que  les  villes  qui  obéissaient  aux  Plantagenets  mon- 
traient ainsi  qu'elles  préféraient  la  suzeraineté  du  roi  d'Angle- 
terre à  celle  du  roi  de  France.  Pour  les  gens  des  xije  et  xiiie  siè- 
cles,  la  question  d'obédience  était  seulement  entre  le  roi  de 
France  et  lo  duc  de  Guyenne,  vassal  comme  tel  du  roi  de  France. 
Si  Edouard  III,  par  exemple,  eût  cessé  de  régner  sur  l'Angle- 
terre, il  n'en  fût  pas  moins  resté  duc  de  Guyenne,  du  chef 
d'Eléonore.  —  Il  me  paraît  bien  hasardeux  de  dire  que  le  régime 
de  liberté,  vague  et  mal  défini,  que  Tulle  possédait  avant  1426, 
ne  lui  laissait  rien  à  envier  aux  villes  qui  avaient  été  dotées 
d'un  consulat  et  d'une  coutume  jurée,  comme  Brive,  Beaulieu, 
Uzerche,  Egletons.  Neuvic  (pp.  23  et  42).  C'est  croire  que  la  force 
de  la  tradition  est,  en  matière  politique,  une  sanction  suffisante 
du  droit  établi.  Mais  alors,  pourquoi  toutes  les  agglomérations 
un  peu  importantes  ont-elles  visé  à  obtenir  une  constitution 
écrite  et  des  chefs  élus  par  elles?  —  M.  C.-S.  donne,  chemin  fai- 
sant, son  avis  sur  une  foule  de  questions  importantes,  et  ces 
avis  méritent  toujours  d'être  pris  en  considération,  encore  qu'ils 
choquent  parfois  les  idées  reçues.  Il  déclare,  par  exemple,  que 
les  Etats  provinciaux  remontent  à  la  fin  du  xiii«  siècle  «  et  peut- 


COMPTES   RENDDS   CRITIQUES.  533 

être  plus  haut  »  (p.  85)  ;  qu'au  milieu  du  xve  siècle  on  prêchait  en 
français  dans  les  villes  du  Bas-Limousin  (p.  220);  que  la  fortune 
de  certain  évêque  de  Tulle,  appelé  Hugues  Roger  (f  1369),  s'éle- 
vait à  plus  de  dix  millions  de  francs  au  pouvoir  actuel  de  l'ar- 
gent (p.  210).  «  C'était,  il  est  vrai,  le  frère  du  pape  »,  ajoute 
prudemment  l'auteur. 

Quoi  qu'il  en  soit,  les  Recherches  de  M.  Clément-Simon  font 
progresser,  d'une  manière  très  sensible,  la  connaissance  que 
nous  avions  du  Bas-Limousin;  judicieuses  et  réfléchies,  elles 
s'imposent  à  l'estime  de  tous.  Alfred  Leroux. 

J.  MiCHELET.  —  Poètes  gascons  du  Gers  depuis  le 
XVI«  siècle  jusqu'à  nos  jours.  Auch,  Bouquet,  1904; 
in-S"  de  493  pages. 

Ce  volume  nous  donne  non  seulement  la  biographie,  mais  de 
longs  extraits,  traduits  et  reliés  par  une  analyse,  de  onze  poètes 
(ou  versificateurs)  gascons  :  Pierre  et  Jean  de  Garros,  du  Bartas, 
Ader,  Dastros,  Baron,  Bedout,  Dugay,  l'abbé  Laffargue,  Cassai- 
gneau  (qui,  pour  le  dire  en  passant,  n'est  pas  du  Gers)  et  Noulens. 
Deux  appartiennent  au  xvi«  siècle,  sept  au  xviie,  et  deux  à  la  fin 
du  xixe.  Peut-être  eût-il  mieux  valu  écarter  ces  derniers,  dont 
les  œuvres  toutes  récentes  sont  faciles  à  trouver  *,  et  rechercher 
si  quelques-uns  des  humbles  rimeurs  de  1700  à  1850  ne  valaient 
pas  la  peine  d'être  tirés  de  l'oubli.  Les  autres  choix  se  justifient 
d'eux-mêmes  :  les  rééditions  modernes  de  P.  de  Garros  et  Bedout 
sont  coûteuses  ou  rares  ;  les  œuvres  de  Laffargue  et  presque 
toutes  celles  de  Baron  étaient  inédites  (et  ce  n'était  pas,  à  vrai 
dire,  grand  dommage);  les  éditions  originales  des  autres  sont 
introuvables;  M.  M.  a  même  dû  recourir  pour  réimprimer  Dugay 
à  une  bibliothèque  privée. 

Les  biographies  sont  aussi  précises  et  détaillées  que  possible. 
Elles  ont  été  puisées  soit  aux  études  antérieures  (presque  toutes 
bien  maigres  à  cet  égard),  soit  à  des  documents  d'archives  (re- 
gistres de  l'état  civil  ou  actes  notariés);  tout  ce  qu'on  peut  re- 
gretter, c'est  que  M.  M.  ne  renvoie  pas  toujours  avec  précision 

1.  Puisque  M.  M.  faisait  une  place  aux  contemporains,  il  eu  devait  une 
à  Isidore  Salles,  le  mieux  doué  à  coup  sûr  de  tous  ceux  qui  ont  manié 
l'idiome  du  Gers  en  notre  temps. 


534  ANNALES   DU   MIDI. 

à  ses  sources,  soit  manuscrites,  soit  imprimées;  de  sorte  que 
parfois  on  ne  distingue  pas  nettement  ce  qu'il  emprunte  de  ce 
qu'il  apporte  de  nouveau. 

A  cette  imprécision  dans  les  références,  on  reconnaît  tout 
de  suite  que  M.  M.  n'est  pas  un  professionnel  (ses  efforts  n'en 
sont  au  reste  que  plus  méritoires}.  L'amateur  se  trahit  aussi  au 
laisser-aller  du  style,  à  un  certain  penchant  pour  les  digres- 
sions, à  l'abondance  des  notes  sans  intérêt  ou  sans  exactitude, 
à  un  superbe  dédain  de  la  correction  typographique  et  même  de 
l'orthographe.  11  se  trahit  enfin  (je  regrette  d'avoir  à  le  dire) 
dans  l'établissement  des  textes  et  les  traductions.  Cette  partie 
de  la  tâche  ne  présentait  pas  de  grandes  difficultés  et  me  paraît 
avoir  été  exécutée  convenablement  en  ce  qui  concerne  les  poètes 
les  plus  modernes,  les  plus  nombreux  en  somme;  mais  il  n'en 
est  pas  de  même  pour  ceux  du  xvr'  siècle  et  du  début  du  xvii«'  : 
c'est  ce  que  je  vais  montrer  par  un  examen  détaillé  de  quelques 
passages. 

Pour  P.  de  Garros,  je  n'ai  pu  consulter  les  éditions  originales, 
mais  seulement  la  réimpression  d'Alcée  Durrieux  [Auch,  4  895], 
dont  le  texte  me  paraît  bien  incorrect  et  dont  les  traductions 
fourmillent  de  contresens.  Or,  M.  M.  s'est  borné  à  reproduire, 
sans  nous  en  prévenir,  au  reste,  ce  texte  et  cette  traduction  i. 
Je  prendrai  quelques  exemples  dans  les  extraits  de  la  première 
Églogue  (p.  41  ss.).  Au  v.  6,  les  mots  mainatge  exarramat  sont 
rendus  bien  inexactement  par  «  ménage  saccagé  »;  le  vrai  sens 
(«  enfants  déguenillés  »)  a  été  jadis  donné  par  L.  Couture  (Revue 
de  Gascogne,  V,  1864,  p.  31).  — V.  7-10  :  la  bergère  Catoy  se  plaint 
qu'un  maraudeur,  un  de  ces  «  croquants  »  si  nombreux  dans  les 
poètes  de  cette  époque  et  bien  connus  par  Goudelin,  lui  ait  volé 
ses  brebis;  elle  ajoute  : 

Pux  Arriuat,  qui  las  volé  dehene, 
Tôt  estripat  per  terra  hèc  estene; 

c'est-à-dire  qu'il  étendit  par  terre  Ihèc  estene  =:  estenouc)  le  pauvre 
chien,  tout  éventré;  dans  la  traduction  de  Durrieux,  suivie  par 
M.  M.,  ce  sont  les  brebis  qui  sont  renversées  et  éventrées  par  le 
chien.  —  Vers  15  :  a\  il  faut,  et  l'éd.  D.  porte  as.  —  P.  42,  v.  1  ss. 

1.  Tout  au  plus  y  a-t-il,  cà  et  là,  dans  les  Iraductions,  quelquos  cor- 
rections n'intéressant  guère  le  sens  général.  Le  texte  est  pluLût  intérieur 
encore  à  celui  de  Dui-rieux,  comme  on  va  le  voir. 


COMPTES   RENDUS   CRITIQUES.  535 

Le  pillard,  ne  trouvant  plus  rien,  menace  de  mort  la  malheu- 
reuse : 

5  Mes  lo  tacan,  qan  arre  no  trobaua, 

Los  gresilhos  totz  cops  me  prezentaua, 
Agulhoant  d'un  gros  puât  cotet 
Qu'auè  panât,  hélas,  lo  ganitet 
De  my  meskissa... 

Gresilhos  (v.  6;  est  traduit  par  «  gril  »!  Il  s'agit  des  menottes; 
cf.  esp.  grillete,  anc.  fr.  grésillons;  voy.  Lespy,  à  grilhoos,  et  Mis- 
tral, à  grihet.  —  V.  7  :  M.  M.  imprime  pttà/.  ce  qui,  dans  son  sys- 
tème graphique,  équivaut  '■àpuanl;  il  faut  j3««<,  pointu  (le  mot 
est  du  reste  traduit  ainsi).  —  V.  8-9  :  «  et  la  gorge  [il]  me  déchi- 
rait»; construction  et  traduction  impossibles.  Il  faut  évidem- 
ment corriger  meskissa  en  meshina,  c'est-à-dire  «  de  moi.  mal- 
heureuse ».  —  La  terreur  de  Catoy  est  décrite  en  ces  termes  (je 
reproduis  l'édition)  : 

Home  n'a  pas  tant  de  glazi  qan  toa 
Ny  tant  los  oeilhs  la  craba  q'an'  orroà 
Hé  blanqejà,  coma  labetz  jo  pi'auba, 
Prop  de  la  mort,  colo  mentida,  è  hauba. 

Trad.  :  «  Un  homme  n'a  pas  tant  de  frayeur  quand  il  tonne,  et  la 
chèvre  qui  a  peur  ne  fait  pas  blanchir  les  yeux  plus  que  moi, 
alors  malheureuse,  rassurée  en  apparence,  et  défaillante.  »  — 
Au  V.  2.  il  faut  évidemment  lire  qan  orloa  (c'est  du  reste  ce  que 
donne  une  copie  en  possession  du  D^  Dejeanne)  et  comprendre  : 
«quand  elle  avorte»;  voy.  Lpspy,  ourla,  et  cf.  le  port,  arluna^ 
orluna^  «  brebis  qui  a  avorté  »;  colo  inentida  [colorem  mentita), 
qui  n'est  pas  clair,  est  certainement  mal  traduit;  hauba  signifie 
uniquement  «  pâle  »;  voy.  Lespy.  haubii.  haubelh.  et  cf.  plus  loin, 
p.  84.  la  haubemort.  —  P.  43,  v.  2  :  le  horugon  n'est  pas  la  bêche, 
mais  le  tisonnier;  voy.  Mistral,  fourgoun;  v.  3  -.pernabale,  c'est 
renverser  les  jambes  en  l'air;  v.  10  :  au  lieu  de  gaudi,  1.  gandi- 
—  P.  44,  V.  8  :  arcabas  pour  arcabos;  v.  9  :  le  bezoi  (lat.  vidu- 
viuin)  n'est  pas  le  «  volant  »  (?),  mais  une  sorte  de  serpe  à  long 
manche  (Mistral,  besouch);  hausselz  e  dalhas  devaient  être  tra- 
duits, non  par  «  hachereaux  et  faucilles  »,  mcjis  par  «  serpes  et 
faux  ».  —  Les  extraits  de  l'Églogue  II  n'ont  guère  été  moins  mal- 
traités :  saumalé  (ânier)  a  été  traduit  par  «  semeur  de  grains  » 
(p.  4j),  que  tiauaiz  bia?  par  «  vous  en  avez  la  force»  [de  tra- 
vailler], au  lieu  de  «  Que  n'allez-vous  au  loin  »?(voy.  Lespy,  biâ). 


536  ANNALES   DU   MIDI. 

—  M.  M.,  qui  a  republié  (p.  74  ss.)  la  pastorale  de  Du  Bartas,  n'a 
pas  connu  l'étude  si  précise  de  M.  H.  Guy,  ni  mon  édition  [An- 
nales, 1902,  333-73);  il  suffira  de  se  reporter  à  celle-ci  pour  voir 
que  la  traduction  de  M.  M.  n'est  pas  exempte  d'erreurs  (notam- 
ment sur  le  sens  des  v.  65,  68.  71,  73.  86  de  notre  édition). 

Pour  le  (lenlilome  d'Àder,  j'ai  pu  collationner  les  extraits  de 
M.  M.  sur  l'édition  originale  (Toulouse.  1610);  j'y  ai  relevé  bien 
des  fautes  qu'il  serait  fastidieux  d'énumérer.  Voici  seulement 
quelques  exemples  de  leçons  fautives  altérant  gravement  le 
sens  ;  P.  107,  v.  11  ô'e^pourô^f;  v.  19,  gt-asus  "^oxxt gi^asUs ;  p.  190, 
V.  7,  biu  pour  6én;  v.  14,  seré  pour  s'ei-e;  p.  112,  v.  4.  atilrats 
pour  alirals  (la  faute  est  dans  l'original);  p.  123,  v.  7.  maucrocs 
pour  man-crocs;  p.  123,  v.l.pan  pourpaw;  p.  129,  v.  6,  cap  pour 
cob\  p.  133,  V.  \2,pous  pour  pons;  p.  137,  v.  4.  stâc  au  lieu  de 
flâc  {=  flanc).  La  traduction  aussi  laisse  beaucoup  à  désirer, 
mais  il  serait  trop  long  de  l'examiner  en  détail.  Il  eût  été  facile 
du  moins  d'en  effacer  de  véritables  non-sens  ou  contresens  fla- 
grants :  nous  voyons  par  exemple  le  jeune  cadet  faisant  de  l'es- 
crime se  mettre  «  la  tête  aux  talons  »  (p.  108),  des  agneaux 
joyeux  igaujousets)  transformés  en  «  goujons  »  (p.  126),  le  rivage 
en  rivière  (ibid.)  et  des  lapins  [an^uhaus)  en  poltrons  (p.  132). 

Malgré  ces  défauts,  ce  volume  peut  tenir  lieu,  au  moins  pro- 
visoirement, de  ce  Coi'pus  des  poètes  gascons  qu'avait  jadis  rêvé 
L.  Couture;  c'est,  il  est  vrai,  un  Corpus  réduit  et  incomplet,  mais 
il  était  bien  difficile  de  donner  davantage  en  un  volume  de  for- 
mat commode  et  de  prix  abordable.  Il  est  fâcheux,  de  plus,  que 
M.  M.,  qui  ne  lésinait  pas  sur  la  quantité,  se  soit  montré  un  peu 
trop  indifférent  à  la  qualité. 

A.  Jeanroy. 


REVUE    DES   PÉRIODIQUES 


PÉRIODIQUES  FRANÇAIS  MÉRIDIONAUX. 

Alpes  (Hautes-). 

Bulletin  de  la  Société  d'études  des  Hautes-Alpes,  1903. 

p.  1-31.  P.  Gn.LET.  Monographie  de  Mons-Seleucus.  [L'un  des  19  «  pagi 
ignobiles  »  (?)  dos  Voconces,  lequel  répond  au  Serre  de  la  Croix  et  à 
La  Bàtie-Montsaléon.  Les  fouilles  mal  conduites  et  peu  étendues  que 
l'on  y  a  pratiquées  sous  le  premier  Empire  ont  donné  pourtant  de  bons 
résultats.  C'était  une  «  mansio  »  sur  le  chemin  de  Milan  à  Vienne 
par  Gap,  un  centre  commercial  et  industriel.  Résumé  de  la  question; 
rien  de  nouveau.]  —  P.  37-49,  127-18,  317-74.  F.-N.  Nicollet.  Affouage- 
ment  des  communes  des  Hautes-Alpes  de  1662  à  1666.  [Suite  et  fin  de 
cette  publication  d'un  texte  du  temps;  avec  notes  et  table  des  com- 
munautés.] —  P.  51-62,  149-64.  J.  Roman.  Monographie  de  la  commune 
des  Crottes.  [Suite  et  probablement  fin  d'un  travail  historique  et  éco- 
nomique fort  intéressant.  Textes  à  l'appui,  de  1130  à  1421  :  charte  de 
fondation  de  l'abbaye  de  Boscodon.  etc.]  —  P.  98-125,  263-89,  329-45.  Le 
passage  de  Napoléon  à  Gap  en  1815  (Extrait  des  mss.  de  M.  Farnaud), 
p.  p.  P.  Lemaitre.  [Complète  le  fragment  publié  dans  les  Annales  des 
Alpes,  en  1900.  Farnaud  était  alors  secrétaire  général  de  la  préfecture 
des  Hautes-Alpes.  L'empereur,  avec  qui  il  conversa  longuement,  eut 
le  mauvais  goût  de  le  «  compromettre  »  en  le  nommant  préfet  par  inté- 
rim.] —  P.  175-88.  J.  Roman.  Les  prétendus  monuments  sarrazins  des 
Hautes-Alpes.  [11  n'y  en  a  pas  un  seul.  Des  21  ifionuments  attribués 
aux  Sarrazins  un  peut  être  daté  du  iv»  siècle  (La  Bâtie-Montsaléon), 
les  autres  des  xi'-xv"  siècles.] —  P.  195-231.  D.  Martin.  Voie  romaine 
et  SOS  stations  entre  Chorges  et  Luc-en-Diois  et  voie  secondaire  entre  Luc 
et  Briauçon.  [Hypothèses  vraisemblables,   d'après   de  nombreuses  re- 


538  ANNALES  DU   MIDI. 

cherches  géologico-topographiques  et  arcliéologiques.  Carte.  Les  val- 
lées de  la  Di-ôme,  de  l'Ouvèze,  de  l'Eygues,  du  Coulon  qui  mènent,  par 
des  cols  très  praticables,  de  la  vallée  du  Rhône  dans  celles  de  la  haute 
Durance  et  du  Buech  semblent  avoir  été  plus  employées  par  les  voya- 
geurs que  la  vallée  même  de  la  Durance.]  —  P.  239-62,  311-23.  J.  Roman. 
Les  routes  à  travers  les  Alpes.  [Routes  romaines,  déjà  étudiées  par 
M.  F.  Vallentin,  Alpes  cottietifies  et  graies,  1883,  et  M.  Rey,  Le 
royaume  de  Cottius  :  «  Je  n'ai  pas  grand'chose  à  dire  de  nouveau  après 
ces  deux  auteurs  »,  reconnaît  M.  R.  Dans  ce  cas,  pourquoi  écrire,  ou 
pourquoi  ne  s'être  pas  borné  aux  quelques  rectifications  qui  sont  énon- 
cées? Sur  les  routes  du  moyen  âge,  M.  R.  n'aurait  apporté  qu'une  médio- 
cre contribution,  s'il  n'avait  pris  soin  de  relever  les  noms,  l'emplace- 
ment, la  date  de  74  hôpitaux  qui  les  jalonnaient.]  —  P.  301-10.  J .  Michel. 
Histoire  et  bibliographie  de  la  jiresse  gapençaise.  [Suite  et  à  suivre  ; 
Cette  partie  s'étend  de  1872  à  1882.]  —  P.  325-8.  D.  Martin.  Camp  re- 
tranché préhistorique  de  la  Reynaude,  près  de  Serres  (Hautes-Alpes). 
[Comparable  pour  la  construction  à  celui  des  Egaux,  qui  domine  les 
nécropoles  de  Champ-Cros.  Ce  camp  est  antérieur  sans  doute  à  la 
conquête  romaine,  mais  non  vraiment  préhistorique.]  P.  D. 

Charente. 

Bulletin  et  Mémoires  de  la  Société  historique  et  archéo- 
logique de  la.  Charente,  1'^  série,  t.  III,  1903. 

Bulletin.  —  P.  lv-lix.  Charte  de  franchise  accordée  à  leurs  tenanciers 
par  Pierre  de  Brémond  et  son  fils,  seigneurs  de  Sainte-Aulaye  (1288), 
p.  p.  DE  Brémond  et  de  la  Martinière.  [D'après  la  copie  de  la  collec- 
tion Périgord.]  —  P.  lxxxviii.  Sentence  du  Parlement  (9  août  1695)  con- 
cernant le  curé  et  les  religieuses  de  Saint-Léger-de-Cognac;  analyse 
p.  p.  de  la  Martinière.  —  P.  xc.  De  Montégut.  Note  sur  le  livre 
d'heures  de  Marguerite  de  Rohan,  épouse  de  Jean,  comte  d'Angoulème. 
—  P.  xciii.  D"'  Lecler.  Analyse  d'un  arrêt  de  la  Cour  des  Aides  contre 
un  bouilleur  d'eau-de-vie  du  Bas-Poitou  (4  mai  174.5).  —  P.  xcviii. 
E.  Biais.  Note  sur  l'histoire  du  théâtre  à  Angoulème  (1520-1779).  — 
P.  ci.  Abbé  Nanglard.  Notice  sur  Collain  et  Durand,  autours  des 
pouillés  des  diocèses  d'Angoulème  et  de  Saintes  (1761,  1775,  1786).  — 
P.  cxi-nxii.  D.  TouzAUD.  Le  monument  du  prince  de  Condé  à  Bussac 
(1818)  et  son  inscription.  —  P.  cxiii.  Abbé  Chambre.  Note  sur  le  jésuite 
La  Brosse,  auteur  du  xviu"  sièch^.  —  P.  cxix-rxxx.  J.  George.  Notes 
sur  la  vie  privée  de  J.  Joubert,  avocat,  propriétaire  à  Saint-Yricix.  [Ana- 


PÉRIODIQUES  MÉRIDIONAUX.  539 

lyse  de  son  livre-journal,  1771-1785,  faite  avec  beaucoup  de  précision 
et  de  méthode.  Etude  importante  d'histoire  économique.]  —  P.  cxxxi- 
cxxxiii.  La  grande  peur  au  bourg  de  Salagnac  (Creuse),  29-31  juil- 
let 1789,  d'après  le  journal  du  chevalier  de  Brémond,  p.  p.  de  Brémond 
d'Ars.  —  P.  cxxxiii.  Article  des  statuts  synodaux  de  M^""  d'Estaing 
(1506-23)  relatif  aux  mystères  à  Angoulème,  p.  p.  M.  de  la  Martinière. 
Mémoires.  —  P.  1-177.  Papier  de  raison  de  Pierre  Bonrrut,  sieur  des 
Pascauds  (1692-1725),  p.  p.  l'abbé  A.  Mazière.  [Publication  utile  pour 
l'histoire  économique,  mais  trop  touffue  et  encombrée  de  détails  ou  de 
généalogies  sans  intérêt.]  —  P.  178-232.  P.  Mourier.  Recherches  sur 
la  fabrication  des  cartes  à  jouer  à  Angoulème.  [Au  xviiP  siècle.  Tra- 
vail utile.]  —  P.  233-58.  D.  Touzaud.  Une  seigneurie  à  la  belle  étoile  : 
la  baronnie  de  Manteresse  (xiir-XYiii»  siècles).  [Preuve  des  abus  des 
droits  féodaux;  vicissitudes  de  cette  baronnie  où  il  n'y  avait  plus  au 
xviir  siècle  do  château,  mais  seulement  des  droits  de  justice.] 

P.  B. 

Corrèze. 

I.  Bulletin  de  la  Société  des  lettres^  sciences  et  arts  de 

Tulle,  1903. 

1.0  iJYi.  p  13-40.  Bastide.  Lois  militaires  sous  la  Révolution  :  leur  appli- 
cation dans  la  Corrèze.  [D'après  les  archives  départementales  de  la 
Corrèze.  Ne  traite  encore  que  des  lois  de  recrutement,  de  1789  à  1800. 
Constate  un  désordre  profond.]  —  P.  41-88.  Clément-Simon.  Recherclies 
de  l'histoire  civile  et  municipale  de  Tulle  avant  l'érection  du  consulat. 
[Suite  de  cet  excellent  travail.  Cf.  ci-dessus,  p.  531,  un  compte  rendu.] 
—  P.  89  94.  J.  Plantadis.  Ant.-Guill.  Delmas,  premier  général  d'avant- 
garde  de  la  République.  [Suite,  p.  297  et  389.]  —  P.  95-104.  0.  de  la 
Rociie-Sengensse.  ^Monographie  d'une  commune  rurale  :  Saint-Ybard. 
[Suite,  où  nous  faisons  connaissance  avec  les  théories  sociales  de  l'au- 
teur. Suite,  p.  193,  307  et  459.]  —  P.  105-20.  E.  Bombal.  La  haute  Dor- 
dogne  et  ses  gabariers.  [Documents  à  l'appui  de  cette  intéressante 
étude.  Fin  dans  la  livraison  suivante.]  —  P.  121-31.  Abbé  Poulbriére. 
Inventaire  des  titres  du  château  de  Pompadour.  [Interminable  publica- 
tion, qui  se  prolonge  encore  dans  les  livraisons  .suivantes.] 

2'=  livr.  P.  133-52.  R.  Fage.  Notes  et  documents  sur  l^i  confrérie  des  Péni- 
tents bleus  de  Tulle.  [Bon  travail,  qui  se  continue  dans  les  livraisons 
suivantes.]  —  P.  153-75.  Bastide.  Lois  militaires  sous  la  Révolution. 
[Suite,  où  il  est  traité  de  l'administration  de  l'armée.]  —  P.  177-92. 
Th.  BouRNEix.  Trois  prieurés  limousins.  [Suite  de  ce  très  faible  travail- 


540  ANNALES    DU   MIDI. 

Cf.  les  livraisons  suivantes.  «  Quand  l'abbaye  de  Bonnesaigne  fit  son 
apparition  au  domaine  de  l'histoire,  nos  montagnes  n'étaient  qu'har- 
nionies  (11G5).  »] 

3^  livr.  P.  237-r)9.  L.  de  Nussac.  Lo  pont  Milet-Mureau  à  Tulle.  [Quelques 
détails  instructifs  perdus  dans  une  masse  de  faits  et  d'idées  sans  va- 
leur. Publie,  p.  253,  un  document  en  patois  limousin  déjà  jjublié  par 
M.  Fage.] 

4°  livr.  P.  351-8.  Abbé  J.-N.  Coste.  Testament  de  1792,  publié  par  A.  Le- 
roux. [Ce  Coste  est  l'auteur  d'un  Manuel  des  missionnaires  publié 
en  1801.]  —  P.  359-81.  Clément- Simon.  Biographie  tulloise  :  les 
De  Loyac.  [Renseignements  copieux  sur  quatre  écrivains  sortis  de 
cetie  famille  aux  xvir-xix»  s.]  A.  L. 

II.    Bulletin    de    la   Société  scientifique,  historique  et 
archéologique  de  B?Hve,  1903. 

1"  livr.  P.  21-98.  Abbé  Bourneix.  Les  Bénédictines  de  Bonnesaigne. 
[Suite.  Cf.  p.  195  et  349.  Peu  de  science,  beaucoup  de  rhétorique.  Au- 
cune indication  de  sources.]  —  P.  99-107.  A.  Tardieu.  Iconographie  : 
portraits  de  deux  ducs  de  Ventadour.  [L'auteur  commence  par  vanter 
ses  publications  antérieures.  Déclare  avoir  réuni  sur  la  province  d'Au- 
vergne plus  de  deux  mille  portraits,  «  dont  un  grand  nombre  concerne 
la  Marche,  le  Limousin,  le  Bourbonnais,  etc.  »,  sans  doute  aussi  la 
Bretagne  et  l'Alsace.  Deux  pages  de  description  pour  les  portraits 
annoncés.]  —  P.  113-5.  Eug.  Marbeau.  Lettre  au  sujet  du  conven- 
tionnel Lidon.  [Ajoute  quelques  détails  biographiques  à  l'article  de 
M.  Roche,  publié  dans  le  volume  précédent  du  Bulletin.]  —  P.  145-62. 
Abbés  Albe  et  Poulbrière.  L'abbaye  de  Beaulieu  et  les  seigneurs  de 
Castelnau-Brétenoux  (1316-44).  [Ce  n'est  pas  une  étude,  mais  une  série 
de  documents  extraits  de  la  Vaticane.] 

2=  livr.  P.  181-93.  L.  de  Saint-Germain.  Le  conventionnel  Lidon.  [Ajoute 
de  nombreux  détails  biographiques  à  la  notice  précitée.]  —  P.  293-307. 
L.  DE  NussAc.  La  bibliographie  du  dialecte  limousin  depuis  1870.  [Utile 
relevé;  mais  pourquoi  ne  commence- t-il  qu'en  1870?]  —  P.  .309-41. 
M.  Roche.  Le  général  Ernault  des  Bruslys.  [Notice  biographique  sur 
ce  général  de  la  République  et  de  l'Empire,  qui  naquit  à  Brive  en 
1757.]  —  P.  346-8.  Ordonnance  des  officiers  de  la  Maîtrise  du  Limousin, 
fixant  le  nombre  de  chèvres  qu'on  doit  nourrir  dans  chaque  bourg,  1784, 
p.  p.  M.  Delmond. 

3»  livr.  P.  421-43.  L.  de  Saint-Germain.  Un  coin  du  vieux  Brive.  [Il  s'agit 
du  couvent  des  Clairettes  de  Bonnesaigne  (cf.  p.  662-4),  à  l'occasion  du- 


PERIODIQUES  MERIDIONAUX.  541 

quel  l'auteur  parle  longuement,  trop  longuement,  de  la  famille  Gavai - 
gnac  qui  en  devint  adjudicataire.]  —  P.  446-524.  D""  F.  Labrousse. 
Quelques  notes  sur  un  médecin  pliilosopiie,  P.-J.-G.  Cabanis.  [Repro- 
duction d'une  thèse  où  l'auteur  démontre  que  le  Limousin  Cabanis  est 
un  des  fondateurs  de  la  psychologie  physiologique.] 
4«  livr.  P.  525-604.  V.  Forot.  Les  fêtes  nationales  et  cérémonies  publiques 
à  Tulle  sous  la  Révolution.  [D'après  les  archives  locales.]  —  P.  605-30. 
F.  Celor.  Chansons  et  bourrées  limousines.  [Suite.]  —  P.  631-43.  L.  de 
NussAC.  Le  général  de  Gilibert  de  Merlhiac.  [Né  à  Brive  en  1745,  mort 
en  1819,  peu  connu  dans  l'histoire.]  —  P.  045-54.  Girard  et  Lalande. 
La  maison  natale  du  maréchal  Brune.  [Né  à  Brive  en  1763.]       A.  L. 

Creuse. 

Mémoires    de    la    Société    des   sciences    naturelles    et 
archéologiques,  t.  XIV,  l^e  partie,  1903. 

P.  5-91.  Z.  TouMiEUx.  Le  comté  de  La  Feuillade.  [Fin  :  les  derniers  sei- 
gneurs; le  château,  d'abord  simple  rendez-vous  de  chasse;  le  domaine 
utile  et  la  fondalité  directe;  principaux  flefs  (commanderie  de  Gen- 
tioux,  prieuré  de  La  Villedieu,  fief  de  Pelletanges);  appendice  (pièces 
justificatives,  dont  aucune  n'est  antérieure  au  xviii''  siècle);  additions 
et  corrections.]  —  P.  92-108.  Pérathon.  Issoudun  et  la  seigneurie 
d'Hautefaye.  [Issoudun  faisait  partie  de  la  franchise  d'Ahun;  Haute- 
faye  a  été  possédé  successivement  par  les  familles  de  Perpirolle,  Car- 
reau et  Mage  ;  cette  dernière  a  été  illustrée  par  l'explorateur  Abdon- 
Eugène  Mage,  mort  au  large  de  Brest  le  19  décembre  1869.]  —  P,  109- 
89.  Delannoy.  L'abbaye  du  Moutier-d'Ahun.  [Etude  approfondie,  mais 
que  l'absence  de  cartulaire  réduit  presque  à  la  période  relativement 
moderne;  le  fonds  d'archives  conservé  à  Guéret  a  été  dépouillé  atten- 
tivement, et  les  corrections  indiquées  ici-même  dans  la  liste  des  abbés 
(XV,  388)  ont  été  utilisées  dans  les  Addenda.  P.  146,  au  lieu  de  R.  de 
Bridiers,  lire  R.  de  Bridieu  (cette  famille,  encore  existante,  tire  son 
nom  d'un  château  détruit  de  la  commune  de  Saint-Yrieix-la-Montagne  ; 
cf.  d'ailleurs  p.  102,  où  le  même  personnage  est  appelé  R.  de  Brudieu). 
Parmi  les  pièces  justificatives,  où  figure  inutilement  un  mauvais  texte 
de  la  charte  de  Boson  II,  comte  de  la  Marche,  datée  de  997,  on  remar- 
quera deux  bulles  inédites,  l'une  de  Lucius  III  du  \"  juin  1182  (d'après 
un  vidimus  du  18  juin  1435  où  le  nom  d'un  des  notaires  doit  être  lu 
G.  de  Quadruvio  et  non  Quadrmno),  l'autre  d'Urbain  IV,  du  15  dé- 
cembre 1203.]  —  P.  19U-2.  Pérathon,  Plan  d'Aubusson,  1003-1085.  [Re- 


542  ANNALES  DU   MIDI. 

production  et  commentaire  d'une  lithograpliie  de  1842,  dont  l'original 
a  disparu.]  —  P.  l!«-208.  Abbé  Dercier.  Rapport  sur  les  fouilles  exécu- 
tées au  Mont  de  Jouer,  d'octobre  1902  à  juillet  WO."!.  [Suit",  avec  une 
plancbe  on  iihototypie  représentant  la  tète  et  la  main  d'une  statue  et 
autres  objets  trouvés  ;  annonce  une  nouvelle  communication  sur  de 
nouvelles  trouvailles;  donne  une  étude  sur  la  voie  romaine  de  Limoges 
à  Bourges,  en  l'envoyant  à  plus  tard  celle  de  la  bifurcation  sur  Clermont 
qui  sera  accompagnée  d'une  carte.  11  vaut  donc  mieux  attendre  avant  de 
se  prononcer  sur  l'emplacement  définitif  de  Prœtorumi.]  —  P.  209-18. 
AuTORDE.  Le  reliquaire  de  Saint-Goussaud.  [Notes  critiques  sur  l'étude 
publiée  par  Léon  Palustre  et  Barbier  de  Montault  en  1886  dans  l'Or- 
fèvrerie et  l'émaillerie  limousines  ;  un  appendice,  procès-verbal  de 
translation  du  reliquaire  de  Grandmont  à  Saint-Goussaud  en  1790. 
M.  A.  montre  que  ses  devanciers  se  sont  tout  à  fait  trompés  en  iden- 
tifiant le  reliquaire  de  Saint-Goussaud  avec  un  reliquaire  de  saint 
Cloud  mentionné  dans  les  anciens  inventaires  de  l'abbaye  de  Grand- 
mont  :  c'est  un  reliquaire  de  saint  Léobon.]  —  P.  2jr)-301.  D'  Villar  ■. 
Notes  sur  Guéret  au  xviii"  siècle,  deuxième  partie  (suite).  Communautés 
et  corporations  :  avocats,  procureurs,  notaires  et  greffiers,  huissiers 
et  sergents,  médecins,  chirurgiens  et  apothicaires,  sages-femmes. 
(A  suivre.)]  A.  T. 

Garonne  (Haute-). 

Bulletin  de  littérature  ecclésiastique,  1903. 

P.  109-18.  L.  S.\LTET.  La  formation  de  la  légende  de  sainte  Enimie. 
[Etude  fort  ingénieuse,  montrant  comment  la  légende  a  pu  faire  d'une 
sainte  locale,  dont  le  souvenir  se  rattache  à  la  fondation  du  monastère 
de  Burlatis  en  Gévaudan,  une  princesse  du  Nord,  flUe  d'un  Clovis, 
sœur  d'un  Dagobert,  une  lépreuse,  venue  à  Bagnols,  puis  à  Burlatis 
pour  y  chercher  la  guérison;  comment  elle  a  pu  aussi  associer  sa  vie 

-  et  ses  miracles  avec  ceux  de  saint  Hilaire,  évêque  de  Mende.  Vers  951, 
époque  où  Cluny  et  l'abbaye  de  Saint-Chaffre  prennent  possession  du 
monastère,  presque  ruiné,  de  Burlatis,  commence  l'élaboration  de  la 
légende,  qu'un  clerc  de  ce  monastère  a  racontée  au  milieu  du 
xvii=  siècle.]  P.  D. 

Gironde. 

Archives  historiques  de  la  Gironde^  t.  XXXVIII,  1903. 

P.  1-35.  Cartulaire  du  prieuré  de  Sainte-Geneviève  de  Fronsac,  p.  p.  Tal- 
LET  et  DE  LA  Martinière.  [25  pièces  du  xiii«  siècle,  dont  une  de  1209. 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAtIX.  5-43 

Plusieurs  sont  écrites  en  gascon.  Dons,  ventes,  éolianges,  etc.]  — 
P.  36-122.  Documents  sui-  la  ville  do  Saint-Emilion,  p.  p.  E.  Pkianeau. 
[De  1400  à  1790.  Au  total  Hl  pièces,  dont  aucune  n'a  de  valeur  bien 
particulière.]  —  P.  123-(53.  Etat  des  gentilshommes  et  des  possesseurs 
de  fiefs  nobles  dans  les  juridictions  dépendant  des  sénéchaussées  de 
Guienne  et  de  Libourne,  p.  p.  P.  Meller.  [Vers  1690.  Avec  une  annota- 
tion assez  étendue.]  —  P.  164-222.  Documents  sur  l'abbaye  de  Faize, 
p.  p.  E.  CoRBiNEAU.  [Faize,  abbaye  fondée  en  1137,  puis  donnée  aux 
moines  de  Cadouin  en  Périgord.  Ces  documents  se  rapportent  aux 
deux  derniers  siècles  de  son  existence,  le  xvii«  et  le  xviii=.  Plusieurs 
sont  simplement  analysés.]  —  P.  223-320.  Documents  concernant  la 
ville  de  Bordeaux,  p.  p.  P.  Courteault,  Duboys,  Amtmann,  Rousselot. 
[■i'i  pièces  de  provenance  et  de  nature  diverses  :  ci.  Etat  des  navires 
arrivés  d'Angleterre  à  Bordeaux  en  janv.  1452.  civ  et  sq.  Mémoire  de 
Vauban  sur  les  travaux  à  exécuter  pour  fortifier  le  Ghâteau-Trompette, 
le  fort  Sainte-Croix  et  le  château  du  Hà,  20  avril  1680,  et  devis,  etc., 
relatifs  au  même  sujet,  avec  un  plan,  cxix  et  sq.  Textes  sur  les  em- 
bellissements de  la  ville  au  milieu  du  xviip  siècle,  notamment  sur  la 
création  du  jardin  public.  A  la  fin,  plan  du  quartier  dans  lequel  il  a 
été  établi.]  —  P.  321-509.  L'industrie  et  le  commerce  en  Guienne  sous 
le  règne  de  Louis  XVI.  Journal  de  tournée  de  F.-de-P.  Latapie,  ins- 
pecteur des  manufactures  en  1778,  p.  p.  L.  Cosme.  [C'est  de  ce  journal 
que  Latapie  avait  tiré  les  notices  insérées  aux  t.  XXXIV  et  XXXV  des 
Archives  liistoriques.  Il  fit  trois  tournées  et  rédigea  trois  journaux, 
dont  celui-ci  est  le  premier.  Il  abonde  en  remarques  intéressantes  sur 
le  pays,  l'agriculture,  l'industrie,  les  hommes  et  aussi  les  femmes.  Il 
s'étend  de  Bordeaux  à  Nérac,  Agen,  Cahors ,  Brive,  Périgueux,  Li- 
bourne, Blaye.]  —  P.  510-61.  Cahiers  de  doléances  rédigés  en  1789  par 
les  paroisses  de  la  sénéchaussée  de  Libourne,  p.  p.  M.  Marion.  [Li- 
bourne, Guîtres,  Pujols,  etc.,  et  La  Barde  en  Saintonge.]  P.  D. 

Hérault. 

Bulletin  de  la  Société  archéologique  de  Béziers,  3"  sér., 
t.  iV.,  2«  livraison  (vol.  XXXII  de  la  collection),  1902. 

P.  90-8.  L.  NodUiER.  Vieilles  prisons.  [Historique  des  prisons  vicomtales 
sur  l'emplacement  desquelles  se  trouve  la  maison  Fabregat  moderne. 
Elles  remontent  au  xr  siècle.  Texte  de  vente  de  l'immeuble,  en  1041, 
et  plan.]  —  P.  140-225.  A.  Soucaille.  Etat  paroissial  de  Béziers  sous 
l'épiscopat  de  Jean  IV  de  Bonsy,   1599.  [Visites  de  l'évêque  à  Saint-, 


544  ANNALES    DD    MIDI. 

Nazaire,  à  Saint-AphroJise,  à  Sainte-^Iadeleine,  à  Saint-Félix.  Les 
procès-verbaux  publiés  tirent  leur  intérêt  fie  la  date  des  visites  aux- 
quelles ils  se  rapportent;  les  guerres  de  religion  venaient  de  se  clore; 
Béziers  en  avait  beaucoup  souffert,  mais  plus  encore  les  lieux  circon- 
voisins,  visités  aussi  :  Lieuran,  Ribeaulte,  Boujan,  Villenouvete  et 
autres,  dont  M.  S.  aurait  dû  identifier  les  noms.]  —  P.  226-8  X.  B.  Ca- 
pitulation de  Béziers.  [Texte.  Elle  est  du  19  sept.  1632,  non  du  20  au 
23,  comme  on  le  croyait.]  —  P.  228-9.  Epitaphe.  [De  Madeleine  de  Ber- 
mond  du  Caylar  d'Espondeilhan,  f  1621.]  —  P.  229-85.  Autel  de  l'église 
de  Paulhan  (ancien  diocèse  de  Béziers).  [Il  remonte  à  1115,  de  même 
que  l'église  de  Cassan.  A  ce  propos,  p.  232,  texte  de  la  visite  de  Jean 
de  Bonsy  au  monastère  de  Cassan,  en  1605.]  —  P.  235-42.  A.  Delou- 
VRiER.  Cloclie  de  l'église  de  Paulhan.  [De  1444;  la  plus  vieille  qui  soit 
en  exercice.  A  la  suite,  p.  287,  procès-verbal  incomplet  de  la  visite  de 
l'église  de  Paulhan  par  J.  de  Bonsy,  en  1605.]  —  P.  245-52.  L.  Noguier. 
Chronique  archéologique.  [Inscription  trouvée  en  1901  ;  bronze  antique 
de  Bacchus;  monuments  patibulaires,  etc.] 

Tome  V,  l^e  livraison  (vol.  XXXIII  de  la  collection),  1908. 

P.  5-187.  A.  SoucAiLLE.  Etat  paroissial  de  Béziers  sous  l'épiscopat  de 
Clément  de  Bonsy  (1638).  [Procès-verbaux  des  visites  de  cet  évêque,  de 
peu  postérieures  à  la  révolte  de  Montmorency.  Ils  sont  malheureuse- 
ment incomplets,  par  suite  de  «  l'édacité  du  temps  »,  nous  dit  M.  S. 
Y  figurent  17  églises,  11  chapelles,  2  monastères  et  1  hôpital.  A  la  fin, 
règlement  des  Pénitents  de  Béziers.]  —  P.  258-66.  L.  Noguier.  Chro- 
nique archéologique.  [Découverte,  à  Béziers,  d'une  lampe  romaine,  por- 
tant, gravée  en  relief,  une  scène  de  bacchanale  ;  matrice  de  sceau  en 
bronze.]  —  P.  266-8.  L.  Lander.  Note  sur  des  trouvailles  faites  près 
d'Eyguières  (arr.  d'Arles).  [Dont  une  plaque  de  plomb,  couverte  de  ca- 
ractères grecs  illisibles  à  cause  du  désordre  dans  lequel  ils  sont  placés.] 

P.  D. 

Isère. 

I.  Les  Annales  dauphinoises,  3®  année,  1903 ^ 

p.  8  et  42.  M""  A.-M.  de  Franclieu.  Frère  Guillaume  [frère  chartreux  du 
xviii"  siècle]  et  la  chartreuse  de  Saint-IIugon.  —  P.  13,  65,  136,  224,  246, 
283,  349.  Abbé  Lagier.  Les  saintes  reliques  de  l'église  de  Saint-Antoine. 
[Publie  divers    docuuients    datés  du    xvii"   siècle    au   xx«.]    —    P.    19. 

1.  Les  Annales  dauphinoises  ont  cessé  de  paraître,  après  avoir  fourni 
une  carrière  de  trois  années. 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  545 

Abbé  Baffert.  A.  Allmer,  sa  vie  et  ses  œuvres.  [Bibliographie  de 
ses  principaux  ouvrages.]  —  P.  23  et  57.  G. -P.  Bernard.  Paul  Didier 
et  la  conspiration  de  1816.  —  P.  138,  210,  272.  Abbé  Baffert.  Viri- 
ville  et  l'ermitage  de  Notre-Dame  de  Saint-Baudille.  [Histoire  d'un 
ermitage  et  de  plusieurs  ermites  au  xvir  siècle  et  au  xv!!!"-.]  — 
P.  201.  H.  Ferrand.  Anciens  plans  de  Grenoble  (avec  planches).  — 
P.  234.  M"»  A. -M.  DE  Franclieu.  Dom  Jean-Baptiste  Mortaize,  gé- 
néral des  chartreux  (1831-180:!).  —  P.  259  et  351.  Dom  Maillet-Guy. 
Documents  à  noter  pour  servir  à  l'histoire  de  l'abbaye  de  Saint- 
Antoine-en-Viennois.  [Suite.  Origine  et  armoiries  des  grands-maîtres 
de  l'ordre  de  Saint- Antoine;  questions  chronologiques.]  —  P.  265  et 
297.  Chanoine  Mazet.  Alexandre  Milon,  évêque  de  Valence.  [Au 
milieu  du  xviii"  siècle.  Suite.  Traite  de  la  cathédrale  de  Valence  et 
des  restaurations  qui  y  furent  faites  sous  l'épiscopat  de  Me"-  Milon.]  — 
P.  305.  Abbé  Lagier.  Notice  historique  sur  les  orgues  de  Saint-Louis 
de  Grenoble,  anciennes  orgues  de  l'abbaye  de  Saint-Antoine-en-Vien- 
nois.  —  P.  3^JU.  Les  trois  passages  de  Pie  VII  à  Saint-Christophe-de-ia- 
Grotte,  commune  sise  sur  la  limite  qui  sépare  la  Savoie  et  le  Dauphiné. 
—  P.  352.  Abbé  Baffert.  Une  chaire  du  xvi"  siècle  à  Saint-Julien-de- 
Katz.  —  P.  269  et  359.  M"»  A.-M.  de  ï'ranclieu.  Notice  sur  deux  statues 
anciennes  de  Notre-Dame  conservées  à  Grenoble,  l'une  à  Sainte-Marie- 
d'en-Haut,  l'autre  à  l'église  Saint-Louis.  [Cette  dernière  est  attribuée  au 
sculpteur  Martin  Claustre  et  date  du  commencement  du  xvi"  siècle.]  — 
P.  363.  Abbé  Dussert.  Catherine  de  Médicis  à  Grenoble.  Siège  et  prise 
de  la  Mure  par  le  duc  de  Mayenne  en  1580.  [Fragment  de  l'Essai  histo- 
rique sur  la  Mure,  du  même  auteur.]  —  P.  380.  Feu  le  chanoine 
Auvergne.  Note  sur  l'ancien  diocèse  de  Vienne.  [Topographie,  état  en 
1790.]  P.  F. 

IL  Bulletin  de  la  Société  de  statistique,  des  sciences  na- 
turelles et  des  aiHs  industriels  du  département  de  l'Isère, 
4«  série,  t.  VII  (XXXIIP  de  la  collection),  1903. 

p.  1-56.  H.  Ferrand.  Essai  d'histoire  do  la  cartographie  alpine.  [De  l'an- 
tiquité jusqu'à  nos  jours,  avec  de  nombreuses  planches.]  —  P.  57-69, 
J.  DE  Beylié.  Un  écho  de  la  journée  dos  Tuiles.  [Publie  et  commente 
une  note  d'un  témoin,  Frantz  Gringoux,  coureur  du  duc  de  Clermont- 
Tonnerre,  lieutenant-général  en  Dauphiné.  Ce  personnage  déclare  avoir 
sauvé  à  grand'peine  les  aj^partements  du  duc  de  Tonnerre,  que  la  foule 
avait  commencé  de  piller;  lui-même  y  perdit  tous  ses  effets.]  —  P.  70-2. 

•   H.   Ferrand.  Relation  de  la  journée  dos  Tuiles.   [(Euvre  inédite  d'un 

ANNALES  DU  MIDI.  —  XVI.  35 


546  ANNALES  DU   MIDI. 

témoin  oculaire  inconnu.  Cette  note  atteste  le  pillage  et  les  violences 
dont  la  foule  se  rendit  coupable  à  l'hôtel  de  Tonnerre.]  —  P.  87-189. 
G.  DE  MA.NTEYER.  Les  Origines  do  la  maison  de  Savoie  en  Bourgogne. 
[Important  travail  qui  complète  les  mémoires  antérieurs  publiés  par 
M.  de  M.  sur  le  même  sujet.  L'auteur  étudie  trois  additions  à  un  ma- 
nuscrit viennois  de  la  Bible,  conservé  à  la  bibliothèque  de  Berne.  La 
première  est  le  texte  d'un  serment  prêté,  au  xv  siècle,  par  un  prince  qui 
s'oblige  à  observer  une  paix  de  Dieu  s'étendant  aux  comtés  de  Vien- 
nois, de  Bugey  et  de  Sermorens.  Ce  prince  n'est  autre  que  le  comte 
Humbert  aux  Blanches-Mains  ;  le  document  doit  être  daté  de  1025. 
L'auteur  donne  de  trè^  nombreux  renseignements  sur  la  géographie  des 
régions  qui  y  sont  mentionnées  et  sur  leur  état  politique;  sa  disser- 
tation aboutit  à  des  conclusions  importantes,  non  seulement  pour 
l'histoire  des  origines  de  la  maison  de  Savoie,  mais  aussi  pour  celle  des 
origines  du  pouvoir  comtal  de  la  famille  d'Albon  en  Viennois.  La  seconde 
addition  consiste  en  notices  sur  plusieurs  saints  évêques  de  Vienne. 
Enfin,  la  troisième  est  une  prophétie  viennoise  de  la  première  moitié 
du  XI"  siècle.]  —  P.  191-433.  Abbé  J.  Chev.\lier.  Souvenirs  du  Consulat 
et  de  l'Empire  dans  le  département  de  la  Drôme.  [Voir  aux  «  Livres 
annoncés  sommairement  »,  p.  572.]  P.  F. 

III.  Revue  épigraphigue,  t.  V,  1903. 

Janv.-mars.  N"  1519.  Epitaphe  celtique  écrite  en  caractères  grecs  et  trou- 
vée à  Ventabren  (Bouches-du-Rhôno) .  [OuEviToouta  Kouaopouvia,  c'est 
«  Venitouta  Quadrunia  ».  M.  d'Arbois  de  Jubainville  estime  que  cette 
inscription  est  gallo-ligure.  Veni-touta  serait  un  nom  propre  gaulois 
composé  de  deux  termes  et  paraissant  signifier  «  tribu  parente  ».  Qua- 
drunia serait  la  forme  ligure  du  latin  Petroiiia,  mot  d'origine  om- 
brienne, déformation  de  Petrunia.  Le  gaulois  change  en  p  la  syllabe 
qu  de  l'indo-européen;  le  ligure  conserve  cette  syllabe.]  —  N°  1520. 
Fragment  d'épitaphe  celtique  trouvé  à  Ventabren.  [Aucun  des  deux 
noms  VECTIT...  biraci...  n'est  sûrement  restituable.]  —  N"  1525.  Estam- 
pilles sur  poterie  rouge  (suite)  faisant  partie  de  la  collection  de 
M.  E.  Kuhn,  receveur  à  Marcillat  (Allier),  et  provenant  presque  toutes 
de  l'Auvergne.  —  P.  7-13.  Remarques  épigraphiques,  par  A.  Héron  de 
Villefosse.  Inscription  de  la  Roque-d'Authéron  (Bouchcs-du-Rhône). 
[Plaque  d'argent  inscrite  et  «  difficile  à  lire  ».  Le  dessin  donné  montre 
des  caractères  cursifs.  Je  lis,  pour  mon  compte  :  Tralmolu  duinn,  ce 
qui  ne  contredit  pas  l'opinion  qu'il  s'agirait  là  d'une  tabula  exsecratio- 
num.]  —  Graffites  trouvés  au  Puy-de-Dôme.  [Les  plus  importants  don- 


PÉRIODIQUES   MÉRIDIONAUX,  547 

nent  :  G  •  V  •  K  •  R  •  F  •,  c'est-à-dire  G{enio)  V{asso)-K(aleti)  R{egis) 
F{elicis).  Vasso-Kalete  est  le  nom  gaulois  du  génie  des  Arvernes,  assi- 
milé à  Mercure  à  l'époque  romaine.]  —  Les  inscriptions  du  podium  à 
l'ampliithéàtre  d'Arles.  [Les  deux  inscriptions  de  Junius  Priscus,  gra- 
vées à  la  partie  supérieure  des  murs  du  podium,  occupent  plusieurs 
dalles  qui,  lors  des  travaux  de  restauration  du  monument,  ont  été  re- 
mises en  place  dans  un  certain  désordre.  Même  un  certain  nombre  de 
dalles  avaient  disparu.  Elles  furent  remplacées  par  des  dalles  neuves. 
M.  H.  de  V.  assigne  à  deux  dalles  non  utilisées  jusqu'ici,  et  qui  sont 
encore  déposées  dans  l'amphitliéâtre,  dalles  portant  des  traces  de  let- 
tres, leur  place  idéale  dans  l'inscription,  très  mutilée,  du  côté  occi- 
dental. L'inscription  du  côté  oriental  est  plus  mutilée  encoi-e.  Elle  répé- 
tait la  première.  Malgré  cette  précaution  prise  par  Caïus  .Junius  Priscus 
pour  perpétuer  le  souvenir  de  ses  libéralités,  le  texte  de  son  inscription 
est  fort  loin  d'être  restitué  en  entier.  M.  H.  de  V.  améliore  la  lecture 
du  Corpus.']  —  P.  13-4.  Dieux  de  la  Gaule,  par  A.  Allmer.  Ricoria, 
trouvée  à  Béziers. 
Avr.-juin.  N"  1531.  Autel  à  Silvain,   trouvé  à  Montsalier  (Basses-Alpes). 

—  N°  1532.  Epitaphe  datée  d'un  post-consulat  d'un  empereur  Justin, 
trouvée  à  La  Baume-Cornillane  (Drôme).  [Le  sous-diacre  Constantin  est 
enseveli  le  4  des  nones  d'août  de  l'an  d'après  le  consulat  de  l'empereur 
Justin.  S'agit-il  de  Justin  I"''  ou  de  Justin  II?  J'opine  pour  le  premier, 
par  la  seule  raison  que  l'inscription  ne  donne  pas  d'explication.  Le  nom 
chrétien  de  Constantiniis,  la  mention  d'un  sous-diacre,  la  formule  : 
cujus  depositio  est,  sont  rares.]  —  N"  1533.  Epitaphe  de  C.  Cluviiis 
Silamis,  de  provenance  inconnue,  retrouvée  à  Magvxelonne  dans  la 
vieille  église.  [Le  gentilice  Cluvius  est  rare.]  —  N"  1536.  Matrice  de 
sceau  de  bronze,  trouvée  à  Béziers  en  1833.  [M.  Espérandieu  démontre 
qu'elle  n'a  rien  de  commun  avec  un  cachet  d'oculiste.  C'est  une  marque 
d'Hermodore,  esclave  de  la  colonie,  col  •  ne  veut  pas  dire  ici  collyre.] 

—  N»  1538.  Estampilles  sur  poterie  rouge.  Auvergne  (suite).  —  P.  24-6. 
Dieux  de  la  Gaule,  par  A.  Allmer.  Ritona,  existant  à  Montaren  (Gard). 
[Sentro  est  un  nom  celtique,  Ritona  un  nom  de  source.  Aede  pour 
aedem  est  archaïque,  ainsi  que  le  gentilice  non  suivi  d'un  cognomen.] 
Mars  Rudianus,  trouvé  à  Saint-Etienne-en-Quint  et  à  Rochefort-Sanson 
(Drôme),  à  la  Cabasse  et  à  Hyères  (Var). 

Juill.-sept.  N"  1511.  Autel  à  Minerve  trouvé  aux  Milles  (Bouchea-du- 
Rhône).  [Presque  toutes  les  dédicaces  à  Minerve  que  l'on  possèd(>  pro- 
viennent de  la  région  du  bas  Rhône.]  —  N"  1542.  Autel  à  Silvain,  trouvé 
à  Ménerbes  (Vaucluse)  :  D{e)o  Selvano.  —  N"  154:3.  Epitaphe  de  Q.  Es- 


548  ANNALES   DU    MIDI. 

nierius,  trouvée  à  Vaison  (Vaucluse).  [Le  gentilice  Esnierius  est  nou- 
veau sous  cette  forme.  Cf.  Smerius.^  —  N»  1544.  Autel  à  Mars,  trouvé 
à  Apt.  —  N"  1545.  Autel  à  Mercure  et  à  Mithras,  trouvé  à  Apt.  — 
N"  1547.  Epitaphe  chrétienne  de  Genesius,  trouvée  à  Ourdies  (Drôme). 
—  N"  1548.  Autel  au  Numen  impérial,  à  la  Mère  des  dieux  et  aux  ma- 
trones Saloen7iae,  trouvé  à  Moutiers  (Savoie).  [Le  Numen  impérial, 
l'emportant  sur  tous  les  dieux  depuis  Auguste,  est  mis  ici  en  tête.]  — 
N°  1549.  Autel  à  Auguste,  trouvé  à  Curty  (Haute-Savoie).  [M.  Espéran- 
diou  restitue  à  bon  droit  :  Aurjust^o  sacrum].  Le  triumvirat  locorum 
pubUcorum  persequendorum  était  une  magistrature  particulière  à 
Vienne,  motivée  par  l'extrême  richesse  de  la  colonie  en  biens  commu- 
naux. Le  dédicant  était  aussi  duumvir  et  préfet  des  ouvriers.  La  forme  : 
duumvirum,  employée  dans  le  sens  de  7i7i7is  duumvirorum,  est  nou- 
velle dans  la  colonie.]  —  N"  1552.  Estampilles  sur  poterie  rouge.  Au- 
vergne (suite).  —  P.  48-7.  Dieux  de  la  Gaule,  par  A.  Allmer.  Dea  Se- 
geta,  trouvée  à  Bassy-Albien  (Loire).  Mars  Segoyico,  trouvé  à  l'Esca- 
rène  (Alpes-Maritimes)  sous  la  forme  Segonconi  Cuntino. 
Oct.-déc.  N""  1556  et  1557.  Autels  à  Mars  Belado,  trouvés  à  Limans 
(Basses-Alpes).  —  N"  1559.  Epitaphe  trouvée  à  Montbazin  (Hérault).  [Le 
gentilice  Tavius  est  nouveau.]  —  N»  1560.  Epitaphe  trouvée  à  Mont- 
bazin. [La  cinquième  ligne  :  OTVLLMTK,  n'est  expliquée  que  pour  la 
fin  :  MaTeR.  Les  lettres  Otull.  renferment  évidemment  le  cognomen  de 
la  mère  du  défunt,  de  Cornelia,  mais  il  faudrait  voir  la  pierre.]  — 
P.  51-62.  Remarques  épigraphiques,  par  A.  Héron  de  Villefosse.  Mé- 
daillons romains  en  terre  cuite  avec  légendes  explicatives,  trouvés  à 
"Vienne,  à  Sainte-Colombo  ou  à  Saint-Romain-en-Gall.  [Collection  Louis 
Chaumartin,  à  Sainte-Colombe,  et  collection  Ernest  Bizot,  à  Vienne. 
Ganymède  et  Jupiter,  Education  de  Bacchus,  Atalante  et  Hippomène, 
Hercule  vainqueur,  les  Amours  s'emparant  des  armes  d'Hercule,  Her- 
cule et  Antéc,  la  Folie  d'Ajax,  Médée  endormant  le  dragon  de  Mars, 
Parthenopous,  Combat  de  gladiateurs,  le  Cheval  de  Troie,  tels  sont  les 
sujets  de  ces  médaillons,  tous  mutilés,  par  malheur.]  E.  B. 

Landes. 

Bulletin  de  la  Société  de  Borda,  28e  année,  1903. 

P.  1-32,  53-89.  SAiNT-Jouiis.  L'Adour  et  ses  embouchures  anciennes.  [Re- 
vient une  fois  de  plus  sur  cette  question  en  s'appuyant  sur  les  titres 
officiels  anciens.]  —  P.  33-52.  P.  Lahargou.  La  vie,  il  y  a  cent  ans,  dans 
un  coin  de  la  Chalosse.  [D'après  le  journal  abrégé  de  Jean  Barbe.]  — 


PÉRIODIQUES  MÉRIDIONAUX.  549 

P.  93-107,  133-58.  L.  Sentex.  La  faïencerie  de  Samadet  (Landes),  1732- 
1810.  [Naissance  et  développement  de  cette  industrie  qui  permit  d'uti- 
liser sur  place  les  forêts  de  l'endroit.]  —  P.  109-32.  A.  Degert.  Histoire 
des  évêques  de  Dax  [fin].  —  P.  15.3-61.  A.  Diciias.  Un  instituteur  pen- 
dant la  Révolution.  [Jean  Lacoste.]  —  P.  165-80,  245-79.  A.  Degert. 
L'ancien  collège  de  Dax.  Notes  et  documents.  [Avant  les  Barnabites  : 
personnel  des  professeurs,  leurs  traitements,  etc.  Le  collège  sous  les 
Barnabites  :  organisation  et  fonctionnement;  programmes  et  méthodes 
d'enseignement.  Situation  financière.  Documents  originaux  provenant 
des  archives  municipales  de  Dax.  Cf.  Annales,  t.  XVI,  p.  437.]  — 
P.  181-204;  fin  p.  229-41.  V.  Foix.  Les  Clarisses  de  Dax.  Histoire  et 
statistique.  [Le  personnel.  Détail  des  revenus.  Liste  des  abbesses  de 
1621  à  1792.  Liste  des  religieuses.  ]  —  P.  281-302.  G.  Beaur.un.  Le  por- 
tail de  l'église  de  Mimizan  étudié  dans  ses  rapports  avec  l'histoire  du 
costume  et  du  mobilier  au  moyen  âge.  Nombreuses  figures.      G.  M. 

Pyrénées  (Hautes-). 

I.  Annuaire  du  Petit  Séminai7''e  de  Saint -Pé,  1902. 

Documents  historiques  relatifs  à  l'abbaye  et  à  la  ville  de  Saint-Pé.  — 
P.  l'-25*.  Le  livre  de  la  réformation  de  l'année  1609.  (Suite  et  fin.)  [Suite 
de  cet  inventaire  des  droits  seigneuriaux  dus  au  roi  et  à  l'abbé  de 
Saint-Pé.]  — P.  26*-61*.  Documents  pontificaux.  [Treize  pièces  latines  de 
la  fin  du  xiv  et  du  commencement  du  xv«  siècle  concernant  l'abbaye 
de  Saint-Pé.  Un  certain  nombre  ont  trait  à  des  remises  d'impôts  ponti- 
ficaux. Une  autre  porte  déposition  d'un  abbé  qui  avait  adhéré  au  pape 
d'Avignon  Clément  VIL] 

1903. 

p.  181-219.  Pierre-Procope  Lassalle  (1751-1831).  Biographie  du  fondateur 
du  Petit  Séminaire  de  Saint-Pé.  —  P.  220-341.  M?''  Bertrand-Sévère 
Laurence  (1790-1870).  [Premier  supérieur  du  Petit  Séminaire  de  Saint- 
Pé,  plus  tard  évèque  de  Tarbes.] 

Documents  historiques  relatifs  à  l'abbaye  et  à  la  ville  de  Saint-Pé.  - 
P.  l''-75'.  Documents  pontificaux,  publiés  par  L.  Guérard.  [Trois  pièces 
latines  de  Paul  III,  de  1.534  à  1.500.  L'une  nomme  un  abbé  de  Saint-Pé, 
les  deux  autres  confèrent  une  chapellonie.  Notes' et  documents   pour 
l'explication  des  pièces.]  M.  D. 

II.  Bulletin  de  la  Société  Ramond,  2*>  sér.,  t.  VIII,  1903. 

p.  33-8.  Abbé  F.  Marsan.  La  gruerio  d'Arreau.  [Elle  relevait  de  la  mai- 


550  ANNALES   DU   MIDI. 

triso  do  Saint-Gaiulens,  créée  en  mars  1G71.  Los  députés  de  la  vallée 
d'Aure  en  domandont  la  suppression  au  nom  do  leurs  privilèges.  Texte 
de  leur  requête,  qui  fut  admise.]  —  P.  39-46.  L.  Ricaud.  Journal  pour 
servir  à  l'histoire  de  la  réclusion  des  prêtres  insermentés  du  diocèse  de 
ïarbcs.  [Suite  de  cette  publication,  qui  se  continue  p.  77-91  et  181-56. 
Listes  des  prêtres  assermentés,  insermentés,  «  abdicateurs  »,  mariés; 
des  prêtres  do  la  «  troisième  réclusion  »,  avec  monographies  sur  Torné, 
Doléac,  etc.]  —  P.  92-102.  Abbé  F.  Mars.\n.  Une  correspondance  bagné- 
raise  du  xviii»  siècle.  [Lettres  de  J.  Dumoret  au  comte  de  Ségure,  dont 
il  gérait  les  biens.  Elles  forment  une  sorte  de  chronique  de  Bagnères 
de  1757  à  1769,  mais  d'intérêt  secondaire.]  —  P.  200-16.  Grammaire  can- 
tabrique  de  Pierre  d'Urte.  Errata.  [On  sait  que  la  Société  Ramond  a 
publié  la  grammaire  en  question  de  1896  à  1900.  L'édition  a  été  faite 
par  M.  Webster,  d'après  une  copie  manuscrite  récente.  Les  errata  pro- 
viennent d'une  collation  exécutée  depuis  sur  le  ms.  original,  qui  appar- 
tient à  la  comtesse  de  Macclesfield.]  P.  D. 

Savoie. 

Méînoires  et  documents  x^'^^liés  par  la  Société  savoi- 
sîenne  d'histoire  et  d'archéologie,  t.  XLII,  1908. 

Bulletin.  P.  T-xii.  Inventaire  du  mobilier  d'un  gouverneur  de  Savoie 
en  1789,  p.  p.  M.  Mugnier.  —  P.  xii-xiii.  Inventaire  d'un  autre  gouver- 
neur de  Savoie  on  1759,  p.  p.  M.  Mugnier.  —  P.  xm-xv.  Analyse  par 
l'abbé  L.-E.  Picc.^.rd,  d'une  transaction  de  1486  qui  termine  un  procès 
entre  Alexandre  de  Montluel  et  Claude  de  Seyssel.  —  P.  xvi-xvii.  Ana- 
lyse, par  LE  MÊME,  d'une  vente  do  terre  faite  le  6  janvier  à  Humbert  de 
Seyssel,  seigneur  d'Aix.  [On  ne  donne  pas  l'année.]  —  P.  xvii-xviii. 
Inventaire  dos  biens  de  quelques  juifs  d'Yonne  morts  en  1347-48,  p.  p. 
M.  LÉT.4NCHE.  —  P.  xviii-xxiii.  Mémoire  adressé,  vers  1730,  au  Sénat 
de  Chambéry  par  un  curé  qui  se  plaint  de  la  présence  d'une  famille  pro- 
testante près  de  son  église,  p.  p.  M.  Mugnier.  —  P.  xxiii-xxiv.  Mémoire 
d'un  autre  curé  au  même  Sénat  sur  un  sujet  semblable,  p.  p.  M.  Mu- 
gnier. —  P.  xxiv-xxv.  Lettre  du  duc  de  Savoie  Charles-Emmanuel,  du 
25  juillet  1664,  à  propos  d'un  attentat  commis  par  un  prisonnier  de  la 
prison  de  Miolans  sur  le  gouverneur,  p.  p.  M.  Mugnier.  —  P.  xxvi. 
Visite  médicale  d'une  comtesse  de  la  Val  d'Isère,  en  1628,  ordonnée  par 
l'official  de  l'évêché  de  Genève  :  on  conclut  qu'il  n'y  a  pas  eu  mariage 
consommé,  p.  p.  M.  Mugnier.  —  P.  xxx-lxi.  G.  Pérouse.  Dépenses  de 
voyage  de  Louis,  duc  de  Savoie,  dans  la  Bresse  et  le  Dauphiné  en  1451 


PERIODIQUES   MÉRIDIONAUX.  551 

et  1452.  [40  mandements  du  duc  au  trésorier-général  de  Savoie  pour 
faire  payer  les  fournisseurs  désignés,  en  français,  avec  les  pièces 
justificatives  des  dépenses  et  les  reçus  en  français  ou  en  latin  des 
fournisseurs.    Intéressant    en   particulier    pour   le   prix    des    choses.] 

—  P.  Lxi-Lxiii.  MuGNiER.  Note  sur  le  chapitre  de  la  cathédrale  de 
de  Saint-Pierre  de  Genève.  [Transporté  ensuite  à  Annecy.  Les  chanoines 
étaient  pris  exclusivement  parmi  les  nobles  et  les  docteurs.  L'un  d'eux 
demandait  en  1664  de  pouvoir  faire  de  son  neveu  son  coadjuteur. 
Lettre  de  Charles-Emmanuel,  duc  de  Savoie,  rejetant  la  demande.]  — 
P.  Lxviu-Lxix.  Analyse,  par  Mugnier,  de  deux  contrats  de  mariage,  l'un 
de  riches  bourgeois,  l'autre  de  paysans,  1695  et  1703.  —  P.  lxxi-lxxv. 
Correspondance  de  deux  industriels  de  Rumilly  en  1775,  p.  p.  M.  Mu- 
gnier. —  P.  Lxxv-Lxxvi.  Trois  contrats  d'apprentissage  de  métiers  à 
Rumilly.  —  P.  lxxvi-lxxix.  Mugnier.  Notice  biographique  du  sculpteur 
Jean  Vallet  (1817-1903).  —  P.  lxxviii-lxxxii.  Mugnier.  Charte  de  réu- 
nion de  la  chantrerie  de  la  Cluse  au  prieuré  de  Cravin.  [Texte  latin.] 

—  P.  Lxxxii-xoviii.  J.  Létanche.  Les  cloches  à  Yenne.  [Histoire  des 
cloches  d'Yenne  depuis  le  xvii'^  siècle.]  —  P.  ci-cxvii.  Mugnier.  Analyse 
d'un  certain  nombre  de  contrats  de  mariage  des  xvr  et  xvii^  siècles.  — 
P.  cxviii-CLXvi.  G.  Pérouse.  Dépenses  de  la  maison  du  prince  Amé  de 
Savoie,  fils  du  duc  Louis,  de  1462  à  1465.  [51  mandements  dans  la  même 
forme  que  ceux  produits  par  M.  P.  pour  les  dépenses  du  duc  Louis, 
p.  XXX.]  —  P.  CLXvii-CLXx.  Bulle  du  pape  Léon  X  à  Pierre  Lambert, 
chanoine  de  Genève,  l'autorisant  à  construire  un  couvent  de  Célestins. 

Mémoires.  P.  5-545.  F.  Mugnier.  Antoine  Favre,  président  de  Genevois. 
premier  président  du  Sénat  de  Savoie,  1557-1624.  Seconde  partie  :  Cor- 
respondance du  président  Favre,  t.  I".  [Avec  un  avant-propos,  une 
table  et  un  fac-similé.  De  1581  à  1611.  Travail  soigné.  Pour  chaque 
lettre  indication  de  la  source.  Les  lettres  peu  importantes  sont  simple- 
ment analysées;  certaines  lettres  latines  sont  traduites,  entièrement 
ou  en  partie.]  M.  D. 

Tarn. 

Revue  du  Tarn,  l.  XX,  1903. 

p.  23-42,  66-87,  147-81,  267-83.  A.  Vid.\l.  Histoire  des  rues  du  vieil  Albi. 
[Voir  aux  «  Livres  annoncés  sommairement  »,  p.. 583.]  —  P.  53-7,  213-9. 
Ch.  Peyronnet.  Documents  sur  les  anciennes  confréries  de  Rabastens- 
d' Albigeois.  [Confrérie  des  Pénitents  blancs  :  deux  pièces  de  1616  et  1654; 
confrérie  des  Pénitents  bleus  :  acte  d'institution,  du  1»'  mars  1598.]  — 
P.  61-4.  E.  Cabié.  Le  prétendu  marbre  de  Saint-Urcisse.  [Résulte  d'une 


552  ANNALES    DU    MIDI. 

fausse  intorprétation  d'un  passage  de  l'Histoire  naturelle  de  Lan- 
guedoc par  M.  de  Genssane  (1776-79).  Ce  marbre  devait  probablement 
être  exploité  dans  la  paroisse  de  Larroque.]  —  P.  104-12.  De  Rivières. 
Inventaire  des  reliques  de  la  collégiale  Saint-Salvy  à  Albi,  1725.  — 
P.  1^5-46.  Ch.  PoRTAL.  La  population  du  département  du  Tarn  au 
xix"  siècle.  [Elle  s'est  accrue  jusqu'au  milieu  du  siècle  pour  décroître 
ensuite,  et  rapidement  depuis  1886,  par  la  diminution  de  la  natalité  et 
par  l'augmentation  relative  du  nombre  des  cmigrants.]  —  P.  182-93. 
E.  Marty.  Biographie  de  G.-J.-A.  de  Glausade.  [Né  à  Rabastens  en  1809, 
mort  en  1847.  Homme  politique  de  médiocre  envergure.]  —  P.  194-6. 
Dk  Rivières.  Inventaire  de  l'église  de  Castelnau-de-Montmiral,  29  ven- 
tôse an  II.  —  P.  202-10.  Id.  Les  grands  marins  de  l'Albigeois.  [P.-J. 
de  Taffanel  de  La  Jonquière,  chef  d'escadre,  gouverneur  de  la  Nouvelle 
France,  1685-1752,  un  des  trois  meilleurs  marins  de  la  France  au 
xvni«  siècle,  et  Clément  de  Taffanel,  son  neveu,  héritier  de  son  nom,  chef 
d'escadre,  1706-95.  Relations  de  cotte  famille  avec  La  Pérouse.  Epita- 
phes  de  quatre  gouverneurs  du  Canada  :  Frontenac,  Callières,  Vau- 
dreuil,  La  Jonquière.]  —  P.  230-1.  In.  Découverte  à  Albi  d'une  inscrip- 
tion du  xviii»  siècle.  [Sur  marbre  blanc;  de  1735;  destinée  à  relater 
l'acquisition  de  l'IIôtol-de-Ville  par  la  communauté.]  —  P.  237-48. 
E.  Cabié.  Forges  ou  moulins  à  fer  de  la  montagne  Noire  du  xni"  au 
xviii"  siècle.  [Moulins  mus  par  l'eau.  Le  plus  ancien  document  se 
rapporte  à  la  seigneurie  d'Escoussens  et  date  de  1283.  L'auteur  j^ublie 
des  lettres  royales  de  1312  autorisant  l'établissement  d'un  moulin  à  fer 
sur  le  ruisseau  de  Candesoubre,  près  de  la  forêt  Narbonnaise.]  — 
P.  249-66.  J.  Laran.  Notes  sur  Saint-Pierre  de  Burlats.  [Monument 
historique  dont  l'histoire  n'est  pas  très  claire:  c'est  une  église  romane 
qui  a  été  ruinée  pendant  les  guerres  de  religion  et  réparée  deux  fois 
au  commencement  du  xvii"  siècle.  A  suivre.]  —  P.  301-12.  A.  Vidal. 
Armement  d'une  compagnie  d'arbalétriers  albigeois  en  1360.  [D'après 
les  comptes  consulaires.]  —  P.  313-45.  E.  Marty.  Délibérations  des 
Conseils  politiques  de  Rabastens.  [Cette  très  utile  publication  fait  suite 
à  celle  des  Cartulaires  de  Rabastens,  dont  nous  avons  déjà  parlé.  La 
partie  qui  nous  en  est  présentement  donnée  s'étend  do  1565  à  1599. 
A  suivre.]  P-  D. 

Vienne  (Haute-). 

Bulletin  de  la  Société  archéologique  et  historique  du 
Limousin,  t.  LUI,  1903. 

P.  1-840.   Abbé   J.    Nadaud,  f    1775.    Pouillé  historique  du   diocèse    de 


PÉRIODIQUES  NON   MÉRIDIONAUX.  553 

Limoges  [et  de  Tulle],  p.  p.  l'abbé  A.  Leclek.  [Publication  souhaitée 
depuis  longtemps,  mais  qui  ne  répond  pas  à  ce  qu'on  attendait.  Les 
erreurs  de  Nadaud  ont  été  conservées  ;  les  lacunes  de  son  œuvre  sub- 
sistent; les  additions  qu'un  siècle  de  recherches  rendait  faciles  n'ont 
pas  été  faites.  L'éditeur  s'est  borné  à  identifier  les  noms  de  localités,  à 
dresser  une  table  alphabétique  des  noms  de  lieux,  à  insérer  à  la  fin, 
sous  forme  d'annexé,  une  dissertation  sur  la  mission  de  saint  Martial 
au  premier  siècle  et  un  grand  nombre  de  documents  sur  la  restauration 
du  culte  catholique  après  1802!  ]  A.  L. 


PÉRIODIQUES  FRANÇAIS  NON  MÉRIDIONAUX. 
41.  —  Xe  Bibliographe  moderne,  1903. 

p.  84-117,  306-31.  L.  Lecestre.  Table  alphabétique  de  la  Chronologie  mi- 
litaire de  Pinard.  [Ouvrage  publié  entre  1760  et  1760  par  un  commis  des 
bureaux  de  la  guerre,  assez  rare,  en  huit  vol.  in-i».  Il  contient  les  noti- 
ces biographiques  et  états  de  services  de  tous  les  officiers  généraux  de 
l'armée  française,  des  origines  à  1762.  Lettres  A-L.  A  suivre.]  —  P.  377- 
400.  R.  ViLLEPELET.  Notes  sur  le  classement  et  l'inventaire  des  papiers 
de  l'époque  révolutionnaire  conservés  dans  les  Archives  départementa- 
les. [Principes  qui  ont  présidé  au  classement  de  ces  papiers.  Il  est  par- 
ticulièrement intéressant  de  les  connaître  en  un  temps  où  se  multi- 
plient les  travaux  relatifs  à  la  Révolution  en  province.]  P.  D. 

4S.  —  Bulletin  de  numismatique  et  d'archéologie.  6*^  vo- 
lume, 1890. 

p.  44-7.  A.  Engel.  Notes  sur  quelques  collections  numismatiques  du 
Midi  de  la  P^ance.  [De  Bordeaux,  Carcassonne,  Narbonne,  Toulouse.] 
—  P.  85-97.  F.  Mazerolle.  Jetons  rares  ou  inédits.  [Dont  ceux  de 
Louise  de  Savoie,  mère  de  François  I",  et  ceux  de  ses  officiers.]  — 
P.  132-6.  E.  Caron,  Les  collections  de  Bordeaux.  Monnaies  rares  ou 
inédites.  Nouvel  atelier  du  prince  Noir.  Gros  de  Bergerac  d'Henri  de 
Lancastre.  [Collections  A.  de  Chasteigner  et  Lalanne.] 

43,  —  Bulletin  de  numismatique  S  l"""  .volume,  1891. 

p.  4.  R.  S[errure].  Monnaie  de  Louis  XIV  mal  attribuée  à  Montpellier. 

1.  Continue  le  précédent  Bulletin  sous  un  titre  à  pou  près  semblable 
Publié  chez  Serrure,  Paris. 


554  ANNALES   DU   MIDI. 

—   P.    61-4.    R.    Vallentin.    Un   sequin  avignonnais  inédit  du   pape 
Calixte  III  (1455-1458). 

2«  volume,  1893-1894. 

p.  45.  R.  Vallentin.  Signification  de  la  légende  bilinéaire  de  quelques 
doubles  deniers  pontificaux  frappés  à  Avignon.  [Au  xv=  siècle.]  — 
P.  146-50.  R.  S.  Le  trésor  des  Fins  d'Annecy.  [Monnaies  d'or  de  Vespa- 
sien,  Titus,  Nerva,  Trajan,  etc.,  trouvées  en  1893.] 

3e  volume,  1895-1896. 
P.  10-6.  R.  Vallentin.  Documents  inédits  relatifs  au  monnayage  des 
archevêques  d'Embrun.  [De  1419  et  1420.]  —  P.  45-52.  R.  Vallentin. 
Les  liards  créés  par  Henri  111  en  1577.  [Emis  à  Grenoble  notamment. 
Ce  sont  les  plus  anciens  du  règne.]  —  P.  66-7.  E.  Faivre.  Un  douzain 
inédit  de  Charles  X,  roi  de  la  Ligue,  frappé  à  Marseille.  —  P.  78-84. 
R.  Vallentin.  Du  prétendu  atelier  carolingien  de  Venasque  (Vau- 
cluse).  [Il  est  apocryphe;  mais  on  a  battu  dans  cette  ti'ès  ancienne 
localité  des  triens  mérovingiens.] —  P.  121-31.  M.  de  Marchéville.  Les 
florettes  de  Charles  Vil.  [Pièces  trouvées  à  La  Rochelle  en  1895,  pro- 
venant toutes  d'ateliers  de  l'Ouest.  Cette  trouvaille  permet  de  classer 
avant  1431  la  pièce  du  Dauphiné  et  de  déterminer,  quant  au  blanc  au 
type  de  la  florette,  les  différents  des  huit  émissions  qui,  de  1426  à  1431, 
ont  fait  tomber  son  titre.  Cf.  p.  150.]  —  P.  141-50.  R.  Vallentin.  Les 
florins  de  Gaucher  Adhémar,  seigneur  de  Montélimar  (1346-1360).  — 
P.  150.  J.  PuiG.  Obole  inédite  de  Gausfred,  comte  de  Roussillon  (1030- 
1075). 

4«  volume,  1897. 

P.  1-2.  De  Castellane.  Denier  blanc  de  Charles  V,  au  K  couronné, 
frappé  à  Limoges.  [Créé  le  20  avril  1305.]  —  P.  2-4.  M.  Raimbault.  Les 
faux  louis  de  La  Rochelle.  [De  1757  ;  frappés  en  Angleterre  en  très 
grande  quantité.] 

5e  volume,  1898. 

P.  1-2.  E.  Faivre.  Douzain  aux  croissants  inédits  et  liard  à  l'H  couron- 
née, de  Marseille,  au  nom  de  Henri  IL  [De  1551  environ.]  —  P.  54-6. 
R.  Serrure.  Un  écu  d'or  inédit  de  Charles  VII  (1483-1498),  frappé  à 
Limoges,  —  P.  102-3.  E.  Faivre,  Un  douzain  inédit  frappé  à  Limoges 
par  les  Politiques.  [En  1591.] 

6"  volume,  1899. 

P.  1-12.  R.  Vallentin  du  Cheylard.  De  la  suppression  des  méreaux  à 
Montélimar,  Romans  et  Valence  (1549). 


PÉRIODIQUES   NON   MÉRIDIONAUX.  555 

7«  volume,  1900. 

p.  54-5.  H.  GiLLARD.  Trouvaille  faite  aux  environs  de  La  Rochelle.  [De 
pièces  allemandes,  enfouies  sans  doute  par  des  reîtres  allemands  au 
cours  des  guerres  de  religion.]  —  P.  65-7.  E.  Caron.  Un  denier  de 
Saintes.  [Prototype  de  ceux,  assez  nombreux,  dont  les  légendes  se  sont 
altérées.  Tous  portent  le  nom  de  Lodovicus  pendant  deux  siècles; 
c'est  sans  doute  du  carolingien  Louis  V  qu'il  est  question.] 

8e  volume,  1901. 

P.  81-4.  P.  R.  DE  BEAurHAMP.  Une  médaille  de  mendiant  de  Bordeaux. 
[Permis  de  mendier,  donné  en  exécution  d'un  arrêté  du  26  fructidor 
an  XL] 

9"  volume,  1902. 

P.  25-7.  V.  LuNEAU.  Quelques  pièces  inédites.  (Suite,  p.  73-5,  105-8,  et  à 
suivre.)  [Pièce  de  Saint-Gilles  au  nom  de  Raimond,  — denier  d'argent  ;  — 
pièce  de  billon  du  roi  René,  frappée  à  Tarascon  ;  demi-gros  du  pape 
Jean  XXII,  frappé  à  Carpentras;  petite  pièce  de  billon  de  l'antipape 
Clément  VII,  Avignon;  petite  pièce  de  billon  du  pape  Martin  V,  etc.] 

10®  volume,  1903.  Néant.  p.  d. 

44.  —  La  Correspondance  historique  et  archéologique, 
1903. 

p.  12-8.  J.  M0MMÉ.1A.  Bernard  Palissy  agenais.  [Fin.]  —  P.  293-302.  Ivan 
d'Assof.  Notes  sur  la  prison  de  Mirabeau  au  donjon  de  Vincennes. 

A.  T. 

45.  —  Gazette  numismatique  française,  1903. 

p.  9-52.  M.  Raimbault.  Les  médailles  et  les  jetons  des  Etats  de  Provence. 
[La  série  de  ces  jetons  est  loin  d'être  aussi  complète  que  celle  des  États 
de  Languedoc.  Quant  à  l'émission  des  médailles,  c'était  un  fait  acciden- 
tel ;  les  États  en  donnèrent  au  fermier  général  Bouret,  au  bailli  de 
Suffren,  etc.  Énumération  et  description  de  ces  pièces.  Dix-neuf  pièces 
justificatives,  de  la  fin  du  xviii"  siècle.  Très  intéressant  article.]  — 
P.  53-72.  A.  Evrard  de  Fayollle.  Médailles  et  jetons  municipaux  de 
Bordeaux.  (Suite,  et  p.  159-64;  fin  p.  231-58).  [Cette  étude,  fort  précise 
et  bien  documentée,  s'étend  jusqu'à  la  fin  du  xix"  siècle.  Tableau  des 
médailles  et  jetons.  Pièces  justificatives  de  1733  à  1,786.] —  P.  201-13.  Id. 
Lettres  relatives  à  dos  médailles  bordelaises.  [Textes  sur  la  médaille  des 
Raffincurs  (1786),  sur  celle  de  l'entrée  du  duc  d'Angoulême  à  Bordeaux 
(1814),  etc.]  —  P.  415-32.  Id.  Nouvelles  recherches  sur  Bertrand 
Andrieu,  de  Bordeaux,   graveur  en  médailles,  1761-1822.  [Soixante-di.x- 


556  ANNALES   DU  MIDI. 

huit  documents  inédits  formant  un  supplément  aux  Recherches  sur 
Andrieu  du  même  auteur.  Ils  se  i-apportent  à  six  des  médailles  de  ce 
graveur  et  à  quelques  autres  sujets.]  —  P.  433-4.  Id.  Les  jetons  borde- 
lais de  l'armée.  [L'auteur  rectifie  la  description  qu'il  avait  donnée, 
dans  ses  Médailles  et  jetons  municipaux,  des  jetons  n°*  10  et  IL] 

P.  D. 

46.  —  La  Grande  Revue^,  6^  année,  t.  I  (janv.-mars 
1902). 

P.  121-54.  R.  Allier.  La  cabale  des  dévots  (1627-1668).  Le  pouvoir  civil 
contre  la  Compagnie.  [Suite  d'une  série  d'articles  parus  en  1901  et 
publiés  ensuite  en  un  livre  dont  notre  collaborateur,  M.  A.  Leroux,  a 
rendu  compte;  cf.  Annales,  t.  XV,  p.  221.] 

T.  Il  (avr.-juin  1902). 

P.  1-24.  G.  Deschamps.  La  jeunesse  d'Agrippa  d'Aubigné.  [On  sait  que 
l'illustre  soldat  et  poète  huguenot  était  originaire  de  Pons  en  Saintonge. 
Article  brillant,  mais  qui  ne  nous  apprend  rien  de  neuf.] 

T.  m  (juill.-sept.  1902),  t.  IV  (oct.-déc.  1902).  —  7^  année, 
t.  I  (janv.-mars  1903),  t.  II  (avr.-juin  1903).  Néant. 

p.  D. 

47.  —Nouvelle  Revue  rétrospective.,  2®  série,  5«  semestre 
janv.-juin  1902). 

P.  25-48.  Documents  relatifs  à  Mirabeau.  Souvenirs  de  Legrain,  valet  de 
chambre  de  Mirabeau,  p.  p.  G.-L.  de  Montigny.  (Suite,  p.  97-120,  265- 
88,  et  fin,  p.  337-51.)  [Ce  Legrain,  sorte  de  Frontin,  fort  impudent,  est 
resté  auprès  de  Mirabeau  jusqu'à  la  mort  de  celui-ci.  On  devine  le 
genre  des  historiettes  qu'il  a  pu  conter  ;  quelques-unes  ont  leur  prix.] 
—  P.  65-8.  Un  mariage  à  l'église  sans  la  participation  du  prêtre  (1743), 
p.  p.  L.  FuNEL.  [Témoignage  de  Michaëlis,  prieur  de  Bouyon  (Alpes- 
Maritimes)  et  lettre  de  l'évêque  de  Vence  à  ce  sujet.]  —  P.  68-72.  Projet 
de  statue  à  élever  au  Premier  Consul.  [Dii  au  citoyen  Levret  et  adressé 
par  lui,  de  Paris,  au  citoyen  Giraud,  commandant  d'armes  à  Fenes- 
trelle.]  —  P.  73-96.  Deux  volontaires  de  Sambre-et-Meuse,  p.  p.  L.-G. 
Pélissiek.  (Fin,  p.  196-215.)  [Lettres  de  Maurin  et  de  Rouvière,  partis 
de  Montpellier,  au  citoyen  Dessalles,  habitant  de  cette  ville,  1792-1797. 

1.  Le  1"  juillet  1902  la  Grande  Revue,  sans  changer  de  caractère,  a 
changé  son  titre  en  celui  de  Revue  du  Palais.  Depuis  elle  porte  tantôt 
l'un,  tantôt  l'autre. 


PERIODIQUES  NON   MERIDIONAUX.  557 

Curieuses  par  l'enthousiasme  patriotique  et  républicain  dont  elles 
témoignent.  L'c<  estimable  maîtresse  »  de  Rouvière,  nommée  Rousseau, 
s'en  montre  aussi  enflammée  ;  elle  fait  campagne  avec  son  amant.]  — 
P.  140-71.  P.  CoTTiN.  Documents  relatifs  à  Mirabeau.  IV.  Mirabeau 
mystificateur,  d'après  des  documents  inédits.  [Il  s'agit  de  mensonges 
et  tromperies  fort  vilaines  commises  par  Mirabeau  envers  Sophie  de 
Monnier  et  Julie  Dauvers.]  —  P.  171-95.  Les  dernières  années  de  la 
marquise  de  Monnier,  p.  p.  A.  Mouttet.  [Souvenirs  du  docteur  Ysa- 
beau,  qui  fut  son  confident,  à  Gien,  dans  le  couvent  où  elle  avait  été 
renfermée,  à  partir  de  1778;  procès-verbal  d'autopsie  de  la  marquise 
(qui  s'asphyxia  en  1789  avec  des  réchauds  de  charbon);  ses  actes  de 
naissance  et  de  décès;  son  testament.]  —  P.  263-4.  Un  projet  de  colonne 
rostrale  à  Toulon  {1830),  p.  p.  de  Grouchy.  [A  construire  avec  les 
canons  pris  à  Alger.  Proposition  faite  par  le  comte  de  Bourmont.]  — 
P.  351-62,  409-32.  Documents  relatifs  à  Mirabeau.  Pièces  diverses. 
[Autorisation  de  vendre  des  bijoux  donnée  par  la  comtesse  de  Mirabeau 
à  son  mari  (1773).  De  plus,  diverses  lettres  de  Mirabeau,  ou  à  lui  adres- 
sées, ou  le  concernant.  A  suivre.] 

6^  semestre  (juillet-décembre  1902). 

P.  49-68.  Documents  relatifs  à  Mirabeau.  Pièces  diverses.  [Fin.  Entre 
autres,  une  lettre  datée  du  Pont-Saint-Esprit,  7  nov.  1789,  écrite  par 
Sophie  de  Carignan,  religieuse  ursuline,  contre  le  a  despotisme  mona- 
cal ».]  —  P.  175-85.  L'arrestation  du  roi  à  Varennes  et  le  Conseil  général 
de  Brioude  (1791),  p.  p.  P.  Le  Blanc.  [Texte  de  la  délibération  dudit  Con- 
seil, du  24  juin  1791,  d'une  proclamation  consécutive,  etc.]  —  P.  318-27. 
Les  préliminaires  du  Concordat  (1801).  Lettre  de  M^""  Pisani,  évêque  de 
Vence,  p.  p.  E.  Baussy.  [1°  Réponse  de  l'évèque  au  Directoire  du  dépar- 
tement du  Var,  qui  lui  communiquait  le  texte  de  la  Constitution  civile 
du  clergé  et  le  priait  de  s'y  conformer;  2°  autres  lettres  du  même,  écri- 
tes en  1801  et  relatives  au  Concordat.]  —  P.  380-4.  Souvenirs  de  l'abbé 
Vallet,  député  de  Gien  à  l'Assemblée  constituante  (1789-1807).  [Ces 
«  souvenirs  »,  fort  étendus,  ne  nous  intéressent  que  par  l'Appendice, 
relatif  à  Sophie  de  Monnier,  à  sa  mort  et  à  l'impression  très  vive  que 
sembla  en  éprouver  Mirabeau  quand  il  l'apprit.] 

7«  semestre  (janvier-juin  1903). 

P.  215-6.  J.-B.  Marleix.  Le  combat  d'OUioules,  du  31  août  1793.  [Texte 
d'un  ordre  du  Comité  de  la  guerre,  de  Toulon,  29  août,  enjoignant  au 
bataillon  marseillais  de  défendre  les  gorges  d'OUioules.  Cet  ordre  ne  fut 
exécuté  qu'après  un  long  retard,  ce  qui  permit  à  l'armée  de  la  Conven- 
tion, commandée  par  Carteaux,  de  s'emparer  du  passage.]        P.  D. 


558  ANNALES   DU   MIDI. 


pp:riodiques  étrangers. 

Allemagne. 

48.  —  Archiv  fur  das  Studium  dcr  neueren  Sprachen 
und  Literaluren,  t.  CX,  1903.  Néant.  —  T.  CXI,  1903. 

P.  181-5.  A.  Bertuch.  Lou  Roucas  de  Sisife  von  F.  Mistral.  [Traduc- 
tion, accompagnée  de  quelques  observations,  de  la  poésie  de  Mistral.] 
—  P.  4îi2-4.  R.  B.  Ein  Landsmann  Jasmin's.  [Publication  de  la  poésie 
YAnel  de  Alban  Vergne,  avec  quelques  notes  biographiques  et  gram- 
maticales.] A.  J. 

49.  —  Romanische  Forschungen,  t.  XIII,  1902  (suite). 

P.  785-860.  P.  Dreyer.  Zur  Clermonter  Passion.  [Une  étude  appro- 
fondie de  la  phonétique  et  de  la  morphologie  de  la  Passion  de  Cler- 
mont  amène  l'auteur  à  la  conclusion  —  dont  la  précision  ne  laisse 
pas  d'inspirer  quelques  doutes  —  que  ce  texte,  écrit  à  l'est  de  la  Mar- 
che ou  au  sud-ouest  du  Bourbonnais,  a  été  copié  par  un  scribe  origi- 
naire de  la  Mai'che  occidentale  ou  du  Poitou  et  que  la  copie  qui  nous 
en  est  parvenue  est  due  à  ti'ois  scribes  limousins]. 

T.  XIV,  1903.  Première  section. 

P.  1-102.  A.  Brossmer.  Aigar  et  Maurin.  Bruchstûcke  einer  Chanson  de 
Geste  nach  der  einzigen  Handschrift  in  Gent.  [L'édition  de  ces  deux 
fragments,  donnée  par  Scheler  aussitôt  après  leur  découverte  (1877), 
étant  depuis  longtemps  épuisée,  M.  B.  a  fait  œuvre  utile  en  publiant 
celle-ci;  elle  est  fort  soignée  :  le  texte  a  été  revu  sur  le  ms.;  il  est 
accompagné  de  notes  et  suivi  d'un  glossaire.  En  tète,  une  étude  sur  la 
légende  et  un  soigneux  dépouillement  des  traits  linguistiques.  La  con- 
clusion auquel  celui-ci  a  conduit  l'auteur  est  assez  vague  et  paraît 
reposer  sur  des  arguments  assez  faibles  :  la  patrie  de  l'auteur  serait 
(p.  46)  le  sud  du  Poitou  «  ou  plutôt  la  région  de  la  Garonne  »  (?);  la 
date  est  moins  difficile  à  déterminer  :  ce  serait  la  seconde  moitié  du 
xn=  siècle  environ.]  —  P.  321-38.  L.  Jordan.  Girartstudien.  [Fait  ressor- 
tir certaines  contradictions  dans  la  rédaction  actuelle  et  propose,  pour 
les  écarter,  une  théorie  qu'il  serait  trop  long  d'exposer;  relève  certaines 
analogies  (dans  le  nœud  même  de  l'intrigue)  avec  le  Niebeliingenlied  ; 
croit  pouvoir  affirmer  qu'un  récit  arabe  inséré  dans  les  Mille  et  Ufie 
nuits  (et  qu'on  a  déjà  rapproché   de  Girart  de  Roussillon)  en  est 


PÉRIODIQUES  ÉTRANGERS.  559 

directement  inspiré;  étudie  d'autres  romans  arabes  où  apparaît  une 
intrigue  analogue;  revient,  en  terminant,  sur  les  rapports  de  fond 
(déjà  signalés  ailleurs)  entre  Girart  de  Roussillon  et  Girart  de 
Vienne.} 

Deuxième  section.  Néant. 

T.  XV,  1903. 

p.  1-40.  R.  DiTTES.  Ueber  den  Gebrauch  des  Infinitifs  im  altprovenzalis- 
chen.  Syntaktische  Studie.  [Dépouillement  soigneux,  dont  les  résultats 
sont  méthodiquement  classés,  de  textes  en  nombre  malheureusement 
assez  restreint;  c'est  ce  qui  explique  sans  doute  qu'on  ne  trouve  pas 
mentionnées  des  constructions  intéressantes,  celle-ci  par  exemple,  jadis 
étudiée  par  M.  Tobler  {Dis  dou  vrai  aniel  (p.  22)  :  s'esforza...  dels 
barons  servir,  ou  encore  les  emplois  de  l'infinitif  qu'on  trouve  dans  le 
setis  pro  tener  amie  de  B.  de  Born  {Ges  no  me  desconort,  v.  31)  ou  lé 
ati  paor...  de  raire  d'E.  Cairel  (plus  haut,  p.  469,  var.  du  v.  22.]  — 
P.  204-316.  W.  BoHS.  Abrils  issi'e  mais  intrava.  Lehrgedicht  von  Rai- 
mon  Vidal  von  Bezaudun.  [Édition  soignée  qui  sera  la  bien  venue, 
étant  donnée  la  rareté  des  Denkmaeler  de  Bartsch,  où  il  fallait  aller 
chercher  ce  texte;  elle  est  accompagnée  d'une  traduction  littérale  (cette 
excellente  pratique  se  généralise  de  plus  en  plus),  suivie  de  notes  et 
précédée  d'une  intéressante  dissertation  sur  les  Ensenhamens .  M.  Levy 
a  communiqué  à  l'éditeur  sur  le  premier  quart  du  poème  un  bon  nom- 
bre de  remarques  ou  corrections  au  texte  ;  mais  il  reste  encore  un  très 
grand  nombre  de  passages  obscurs,  dont  quelques-uns  probablement 
désespérés.]  A.  J. 

50,  —  Zeitsclirift  cler  Savignij-Stiftung  fïir  Rechtsges- 
chichte,  t.  XXII,  année  1901. 

Romanistische  Abtheilung.  —  P.  55.  Mommsen.  Eine  verlorene  Breviar- 
handschrift.  [Un  manuscrit  perdu  du  Bréviaire  d'Alaric  ou  Lex  ro)7iana 
Visigothorum.  M.  a  réussi  à  le  retrouver  grâce  aux  annotations  de 
P.  Pithou  sur  un  exemplaire  du  Bréviaire  qui  lui  avait  appartenu, 
ainsi  qu'à  Cujas.] 

Germanistische  Abtheilung.  —  P.  424.  Brùnneck.  C.-R.  de  l'ouvrage 
de  Giuffrida,  intitulé  Genesi  délie  consuetudini  giuridiche  délie  città 
di  Sicilia.  —  P.  443.  R.  Hûbner.  C.-R.  de  la  traduction  par  Maitland 
du  célèbre  ouvrage  de  Gierke  sur  les  théories  politiques  du  moyen 
âge.  —  P.  440.  U.  Stutz.  G.-R.  des  ouvrages  récents  de  Hansen  sur 
l'histoire  de  la  sorcellerie  :  Zauberioahn,  1900;  Quellen  und  Unter- 
suchungen  zur  Geschichte  des  Hexenwahns,  1901.  J.  B. 


560  ANNALES  DU    MIDI. 

51.  —  Zeitsclirift  ffo'  romanische  Philologie,  t.  XXVII, 
1903. 

p.  189-36.  C.  Nir.RA.  Nonii  romanzi  del  collare  degli  animali  da  pascolo 
(avec  une  figure).  [Traite,  p.  135,  des  mots  désignant  en  provençal  la 
clochette.]  —  P.  137-41.  Le  même.  Toscan  gazza,  anc.  prov.  agassa. 
[De  'gnca,  gacea,  qui  aurait  désigné  la  pie  en  latin  vulgaire.  Ce  mot 
serait  lui-même  une  autre  forme  du  prénom  Gains.  Bien  peu  proba- 
ble.] —  P.  142-52.  A.  HoRNiNG.  Zu  A.  Thomas  Mélanges  d'étymologie 
française.  [Parmi  ces  remarques,  nous  devons  signaler  celles  sur  les 
mots  prov.  chancera,  reissidar  et  pasi.]  —  P.  153-72.  C.  Michaelis 
DE  Vasconcellos.  Randglosseu  zum  altportugiesischen  Liederbuch. 
XIII  :  Don  Arrigo.  (Suite,  p.  257-77;  414-36;  708-37.)  [11  s'agit  de  Henri 
de  Castille,  frère  d'Alphonse  X,  célèbre  par  sa  vie  aventureiise  et  ses 
démêlés  avec  Charles  d'Anjou,  dont  le  nom  a  été  bien  des  fois  men- 
tionné par  les  troubadours.]  —  P.  193-7.  E.  Richter.  Zu  prov.  En 
=  Herr;  prov.  katal.  a-n-el.  [L'auteur  signale  l'existence,  en  provençal 
et  catalan,  de  an  pour  a  devant  les  pronoms  à  initiale  vocalique;  sup- 
pose que  cette  n  a  été  introduite  pour  éviter  l'hiatus  et  que  l'existence 
de  la  «  particule  honorifique  »  en  n'a  pas  été  étrangère  à  cette  intercala- 
tion.]  —  P.  339-41.  P.  Savi-Lopez.  Perle  «novas  del  papagay  •>.  [M.  S.-L. 
apporte  de  nouveaux  arguments  en  faveur  de  son  opinion,  combattue 
par  M.  Goulet,  sur  le  rapport  des  manuscrits.  Cf.  Annales,  XV,  539.  | 

—  P.  343.  C.  NiGRA.  Fr.  charogne,  altprov.  carona.  [De  caralnia,  pour 
carnalia,  par  meta  thèse  ;  on  aurait  en  provençal  caraunha,  forme  qui,  au 
reste,  est  fréquente.]  —  P.  344.  Le  même.  Riflessi  di  recentare,  'recen- 
tiare.  Sj-ecensar  de  '  recentiare,  retensar  de  retenciare.']  —  P.  345. 
Le  MÊME.  Derivati  da  viviscere.  [Reoiscolarde  re[vi]visculiim  +  are.] 

—  P.  437-58.  R.  Zenker.  Nochmals  die  Synagon-Épisode  des  Montage 
Guillau/ne  II.  —  P.  470-1.  ('ompte  rendu,  par  M.  Schultz-Gora,  de  la 
publication  (faite  plus  haut,  XV,  145)  du  sirventés  de  Calega  Panzan. 
Quelques  bonnes  corrections  au  texte.  M.  S. -G.  a  tort  de  vouloir,  au 
v.  2,  changer  càimen  en  tràimen;  l'existence  de  càimen  me  paraît 
assurée  par  celle  de  dechaimen  (G.  Figueira,  éd.  Levy,  pièce  II,  var.  du 
v.  32;  B.  d'Alamanon,  éd.  De  Grave,  pièce  XIV,  v.  12.]  —  P.  471-7. 
Compte  rendu,  par  M.  Zenker,  d'une  publication  de  M.  Crescini  annon- 
cée ici,  XIV,  132.  [M.  Z.  repousse  la  correction  proposée  par  M.  C.  au 
v.  57  et  montre  que  le  reproche  contenu  dans  ce  vers  s'adresse  non  à 
Baudouin  de  Flandres,  mais  au  jeune  empereur  Alexis  IV.]  —  P.  550- 
78.  L.-J.  JuROszEK.  Ein  Beitrag  zur  Geschichte  der  jotazierten  Konso- 


PÉRIODIQUES   ÉTRANGERS.  561 

nanten  in  Frankreich.  (Suite  p.  675-707.)  [Apporte  le  contrôle  des  noms 
géofîi-aphiques  à  l'étnde  de  quelques  lois  plionéti(iups  particulièrement 
difficiles  à  fixer;  quelques  emprunts,  trop  rares,  au  domaine  méridio- 
nal.] —  P.  59i-GU8.  SciiULTZ-GoRA.  Zum  texte  der  Flamenca,  [Série  de 
corrections  à  ajouter  à  celles  de  MM.  Chabanean,  Thomas,  ïobler  et 
Mussafia,  signalées  ailleurs.]  —  P.  625-8.  C.  C.  Uhlenbeck.  Eoma- 
nisch-baskisclie  Miszellen.  [Une  douzaine  de  remarques  étymologi- 
ques.] —  P.  628.  ScHULTZ-Gou.\.  Orestains  bei  Raimon  de  Miraval. 
[Montre  qu'il  s'agit  d'un  personnage  dont  le  nom  ne  s'était  rencontré 
jusqu'à  présent  que  dans  le  Pseudo-Turpin  et  ses  dérivés.  Il  a  échappé 
à  M.  S. -G.  que  la  même  identification  avnit  été  faite  par  M.  P.  Meyer, 
Rommiia,  XXXI,  161,  n.  3.]  A.  J. 

Espagne. 

5S.  —  Revista  de  Blbliografta  catalana,  t.  Il,  1902*. 
P.  140-55.  Papers  de  J.  Tastu.  [Catalogue  des  ms.  de  Tastu  acquis  par  la 
Bibliothèque  Mazarine  ;  d'après  le  catalogue  de  cette  bibliothèque.]  — 
P.  174-228.  Buttleti  hibliografic.  [Liste  de  tous  les  livres  publiés  en 
catalan  au  cours  de  1902.]  —  P.  229-53.  J.  M.vsso  Torrents.  Manus- 
crits catalans  de  Vich. 

Italie. 

53.  —  Bullettino  délia  Società  filologica  romana-  , 
n°  1,  1901. 

P.  35-7.  F.  Egidi.  Sui  mss.  dei  Documenti  d'Amore  di  F.  da  Barberino. 
[Il  s'agit  de  deux  mss.  non  utilisés  jusqu'ici,  dont  l'un  a  été  écrit  en 
Provence  par  l'auteur  lui-même.] 

N^  2,  1902. 

P.  17-20.  E.  MoNACi.  Sul  carros  di  Rambaldo  di  Vaqueiras.  [M.  Monaci 
rapproche  du  Carros  la  pièce  bien  connue  de  Huon  d'Oisi,  dont  il 
réimprime  le  texte  d'après  Brakelmann.  M.  M.  n'aurait  peut-être  pas 
écrit  cette  courte  note  s'il  avait  eu  connaissance  d'un  article  que  j'ai 
publié  dans  la  Romania  (XXVIII,  232)  sur  le  même  sujet.] 

1.  Voy.  l'analyse  du  premier  numéro,  A)inales,  Xlfl,  578. 

2.  Est  réservé  aux  actes  officiels  de  la  Société  et  aux  communications 
trop  courtes  pour  être  .insérées  dans  les  Studi  romnnzi  (voy.  plus  bas, 
n"  8);  la  plupart  de  ces  communications  concernent  la  littérature  ita- 
lienne, un  assez  grand  nombre  l'histoire  de  l'art  en  Italie  ;  celles-ci  parais- 
sent être  ici  médiocrement  à  leur  place. 

ANNALES  DU   MIDI.   —   XVi.  36 


562  ANNALES   DU    MIDI. 

N"  6,  190:i 

p.  21-2.  V.  DE  Bartholom^is.  Di  una  canzone  erroneamenle  attribuita  al 
trovadore  Rambaldo  de  Vaqneiras.  [Il  s'agit  de  la  chanson  Nulhs  ont 
en  re ;  les  mss.  qui  appuient  cette  attribution  sont  apparentés;  la 
chanson  est  probablement  d'Aimeric  de  Belonoi.  M.  de  B.  annonce 
qu'il  donnera  bientôt  une  édition  de  ce  troubadour.]  A.  J. 

54.   —    Giornale    storieo    délia    letteratura    italiana, 
t.  XLII,  1903. 

P.  378-93.  G.  Bertoni.  L'anthologie  i^rovençale  de  Maître  Ferrari  de 
Ferrure,  p.  p.  Teulié  et  Eossi  (Amiales  du  Midi,  XIII-XIV^).  [Compte 
rendu  que  nous  mentionnons  à  cause  de  son  exceptionnelle  importance 
et  parce  qu'il  peut  servir  d'introduction  à  des  documents  publiés  ici 
même.  M.  B.  montre  que  le  nom  du  zélé  collectionneur  est  Ferrarin 
(Ferrarino),  qu'il  dut  vivre  jusque  vers  la  fin  du  xiii"  siècle,  que  son 
Anthologie  dut  être  compilée  après  1280;  il  étudie  les  rapports  de 
celle-ci  avec  celle  du  ms.  Chigi  (F,  publ.  par  M.  Stengel)  et  prouve  que 
ces  rapports  sont  moins  étroits  que  ne  l'avait  pensé  M.  Grôber.  Il  donne 
enfin  une  série  de  rectifications  au  texte  publié  ici  résultant  d'une  très 
attentive  collation  de  l'édition  avec  le  manuscrit.] 

XLIII,  1904. 

p.  28-38.  G.  DE  LoLLis.  Intorno  a  Pietro  d'Alvernia.  [Réflexions  détachées, 
à  propos  de  la  récente  édition  de  Peire  d'Alvernhe.  M.  de  L.  explique 
pourquoi  Peire  a  été  placé  par  Dante  parmi  les  plus  anciens  trouba- 
dours, insiste  sur  le  caractère  archaïque  de  sa  manière  et  signale  chez 
lui  de  nombreux  emprunts  à  Marcabru  ;  il  montre  enfin  que  la  plupart 
des  renseignements  donnés  par  la  biographie  dérivent  des  poésies  libre- 
ment interprétées.  C'est  une  constatation  qui  a  déjà,  on  le  sait,  été  faite 
pour  maint  autre  troubadour.]  A.  J. 


CHRONIQUE 


On  s'est  occupé  en  haut  lieu  d'organiser  et  dérégler  la  recher- 
che des  documents  relatifs  à  la  Révolution.  C'est  ainsi  qu'une 
Commission  centrale  a  été  créée,  et  que  dans  chaque  départe- 
ment un  Comité  d'études  a  été  chargé  de  communiquer  et  de 
collaborer  avec  elle.  Il  s'agit  en  particulier  d'atteindre  et  de  pu- 
blier les  documents  d'archives  qui  se  rapportent  à  la  vie  écono- 
mique de  cette  mémorable  époque.  Les  membres  du  Comité  de  la 
Haute-Garonne  viennent  d'être  nommés  par  un  arrêté  ministériel, 
et  le  Comité  a  constitué  oftîciellement  son  bureau  :  président, 
M.  Istria,  inspecteur  d'Académie;  secrétaire  général,  M.  Pas- 
quier.  archiviste  départemental.  Nul  doute  que  les  choses  ne  se 
soient  passées  à  peu  près  de  même  dans  les  autres  départements. 


Chronique  d'Auvergne. 

Cantal.  —  A  rassemblée  générale  de  la  Société  la  Haute-Auver- 
gne: qui  s'est  tenue  le  1i  octobre  1903,  le  président,  M.  Boudet, 
constatait  à  bon  droit  les  utiles  résultats  de  la  création  de  cette 
société.  Le  principal  a  été  d'accroître  dans  de  notables  propor- 
tions l'activité  intellectuelle  dans  le  Cantal,  en  groupant  les 
bonnes  volontés,  en  favorisant  la  division  du  travail,  et  en  fa- 
cilitant, par  la  publication  d'une  revue,  la  diffusion  des  notions 
acquises. 

Ces  résultats  ont  été  tels,  qu'après  la  visite  à  Aurillac  des 
Amis  de  V Université  de  Clermont-Ferrand  au  mois  de  mai  1902  S 

1.  V.  Atinales  du  Midi,  1902,  p.  601. 


564  ANNALES   DU    MIDI. 

le  Cantal  a  été  choisi,  en  août  1903,  par  l'Académie  internatio- 
nale (le  géographie  botanique,  comme  siège  de  son  congrès  an- 
nuel. 

A  l'heure  actuelle,  le  Cantal  qui,  il  y  a  six  ans  à  peine,  semblait 
se  désintéresser  de  tout  ce  qui  n'était  pas  agriculture  et  com- 
merce, est  le  théâtre  d'une  vaste  enquête  scientifique,  historique, 
archéologique,  qui  va  des  temps  préhistoriques  à  l'époque  con- 
temporaine. 

La  préhistoire,  mise  en  honneur  par  J,-B,  Rames,  y  est  étudiée 
par  de  nombreux  spécialistes.  Les  fouilles  de  ce  genre  sont  abon- 
dantes et  bien  conduites;  mais  elles  sortent  du  cadre  de  cette 
revue,  et  je  me  bornerai  à  signaler  celles  que  M.  Delort,  l'auteur 
de  Dixannéesde  fouilles  en  Auvergne,  vient  d'entreprendre  dans 
les  environs  de  Saint-Flour,  fouilles  qui  ont  mis  au  jour  la  villa 
gallo-romaine  de  Mons.  et  ont  valu  à  l'auteur  une  subvention  de 
l'Association  française  pour  l'avancement  des  sciences. 

La  production  historique  s'est  surtout  manifestée  par  les  arti- 
cles de  la  Revue  delà  Haute- Auvergne,  dont  le  dépouillement  pa- 
raît régulièrement  ici.  Cependant,  il  convient  de  signaler  le  mé- 
moire de  M.  Marcellin  Boudet  intitulé  Aspres  sur-Buêch  et  ses 
chartes  de  coutumes  (1276-1439).  où  sont  éditées,  avec  une  longue 
introduction  et  des  notes  abondantes,  21  pièces  intéressant  les 
privilèges  de  la  communauté  d'Aspres.  La  ville  est  dans  les 
Hautes-Alpes,  mais  elle  dépendait  du  monastère  Saint-Géraud 
d'Aurillac.  (Cf.  Annales,  t.  XVI,  p.  118.) 

La  Monographie  de  Vancieti  Raulhac  est  également  une  oeuvre 
de  longue  haleine.  Raulhac  est  un  petit  village  de  l'arrondisse- 
ment d'Aurillac,  situé  à  la  limite  du  Cantal  et  de  l'Aveyron,  et 
dont  le  desservant,  M.  l'abbé  Poulhès,  a  écrit  l'histoire.  Il  a  eu. 
à  mener  à  bien  cette  tâche,  d'autant  plus  de  mérite  que  les 
documents,  assez  rares,  étaient  fort  dispersés.  Les  fonds  des 
Archives  nationales  et  des  archives  du  Cantal,  les  dépôts  parti- 
culiers de  Messilhac  et  de  Cropières  ,  enfin  les  minutes  des 
notaires  ont  été  dépouillés  avec  soin  par  l'auteur  qui  a  fait 
preuve  d'un  esprit  avisé  et  critique,  surtout  dans  les  chapitres 
relatifs  à  la  dîme  et  à  l'organisation  de  la  communauté  des 
prêtres  de  Raulhac. 

D'autres  monographies  sont  en  bonne  voie  d'achèvement, 
M.  Jean  Delmas  poursuit  ses  études  sur  la  Révolution  dans  le 
Cantal,  et,  pour  la  même  époque,  M.  Fesq,  maire  d'Aurillac,  met 


CHRONIQUE.  565 

la  dernière  main  à  l'histoire  d'un  do  ses  illustres  compatriotes, 
le  général  Destaing.  M.  Roger  Grand,  qui  a  quitté  le  Cantal,  n'en 
continue  pas  moins  ses  recherclies  sur  les  chartes  de  coutumes 
d'Auvergne,  et  son  successeur,  M.  G.  Esquer,  a  entrepris  un  tra- 
vail d'ensemble  sur  les  guerres  de  religion  et  de  la  Ligue  en 
Haute-Auvergne,  d'après  des  documents  inédits  conservés  aux 
Archives  départementales  et  à  celles  d'Aurillac  et  de  Saint-Flour, 
notamment  la  correspondance  adressée  par  Duplessis-Mornay, 
par  sa  femme,  par  Henri  de  La  Tour,  vicomte  de  Turenne,  par 
Méry  de  Vie  et  par  d'autres  moins  connus  à  Jean  de  Vernyes, 
président  à  la  Cour  des  Aides  de  Montferrand,  agent  Adèle  et  ha- 
bile de  la  politique  de  Henri  IV  en  Auvergne. 

M.  Felgères  a  réuni  en  un  volume  ses  études  parues  dans  la 
Revue  de  la  Haute-Auve7-gne  sur  la  baronnie  de  Chaudesaigues, 
études  qu'il  a  poussées,  en  une  suite  inédite,  jusqu'à  la  Révolu- 
tion: ce  volume  aura  paru  à  l'heure  où  ces  lignes  seront  impri- 
mées. Enfin,  un  Cantalien,  M.  Trapenard,  va  soutenir  devant  la 
Faculté  de  droit  de  Paris,  une  thèse  sur  La  vaine  pâiwe  dans 
l'élection  et  l' arrondissement  de  Mauriac,  thèse  qui  a  été  écrite 
uniquement  d'après  les  documents  de  première  main  renfermés 
aux  Archives  du  Puy-de-Dôme  et  du  Cantal. 

Dans  ce  dernier  département,  deux  importantes  améliorations 
ont  été  réalisées  dans  le  service  des  Archives  départementales. 
Leur  transfert,  tant  de  fois  demandé,  obtenu  enfin  en  1902,  est 
maintenant  terminé.  Elles  ont  quitté  les  greniers  du  Palais  de 
justice,  où  leur  installation  réalisait  à  peu  près  toutes  les  condi- 
tions qu'il  convient  d'éviter,  et  se  trouvent  à  l'heure  actuelle  à  la 
Préfecture,  où  tout  un  corps  de  bâtiment,  suffisamment  spacieux 
et  éclairé,  leur  est  affecté.  De  plus,  depuis  le  1»^  janvier  1903,  il 
existe,  aux  mêmes  archives,  un  commis-auxiliaire  qui,  en  assu- 
mant la  besogne  matérielle,  permet  à  l'archiviste  de  se  consa- 
crer aux  travaux  de  classement  et  d'inventaire,  jusque-là  très 
négligés. 

L'inventaire  de  la  série  E  (fonds  de  famille)  t.  I,  vient  de  pa- 
raître; c'est  le  premier  publié  pour  le  Cantal.  Il  comprend  107i 
articles,  se  rapportant  à  12  fonds  de  titres  féodaux  et  547  fonds 
de  famille.  D'autre  part,  l'archiviste  départemental  vient  de 
commencer  le  classement  de  l'inventaire  des  importantes  Archi- 
ves communales  ei  hospitalières  de  la  ville  d'Aurillac. 

Ainsi  donc,  la  situation  intellectuelle  serait  des  plus  satisfai- 


566  ANNALES   DU   MIDI. 

santés  si  nous  n'assistions  à  la  mort  de  la  langue  auvergnate  en 
tant  qu'idiome  littéraire.  C'est  en  français  que  viennent  de  pa- 
raître Terre  maternelle  de  M.  de  Miraraon.  roman  dont  l'action 
se  passe  dans  le  Cantal,  ainsi  que  Les  menelles  de  Roumégoux, 
recueil  de  nouvelles  locales  de  M.  Armand  Deiraas.  C'est  égale- 
ment en  français  que  s'exprime  la  muse  du  c«p«coZ  Vermenouze, 
et  le  prix  que  vient  de  lui  décerner  l'Académie  française  pour  son 
dernier  ouvrage,  Mon  Auvergne,  n'est  pas  pour  lui  faire  regretter 
sa  trahison  envers  une  langue  qui  lui  a  valu  ses  premiers  suc- 
cès. 

Par  contre,  une  société  artistique  vient  de  se  former,  qui  doit 
ouvrir  prochainement  un  salon  de  peinture  et  de  sculpture,  com- 
posé d'œuvres  d'artistes  locaux.  G.  Esquer. 

Puy-de-Dôme.  —  Clermont  a  réalisé  depuis  quatre  ans  deux 
améliorations  considérables  dans  son  outillage  scientifique  :  un 
musée  à  été  construit,  une  bibliothèque  s'édifie.  Le  musée,  bâti 
à  l'aide  d'un  legs  de  200,000  francs,  laissé  à  la  ville  par  M.  Bar- 
goin,  est  situé  sur  l'emplacement  de  l'ancienne  ])lace  Lecoq,  à 
proximité  du  musée  Lecoq  et  de  l'Université.  Les  plans,  dûs  à 
M.  Dionnet,  architecte  de  la  ville,  présentent  une  disposition 
intérieure  assez  bien  entendue.  M.  Nicole,  chargé  de  l'installa- 
tion, en  a  tiré  un  très  heureux  parti.  Le  sous-sol,  bien  éclairé, 
renferme  les  monuments  archéologiques;  une  salle  spéciale  est 
consacrée  aux  fouilles  du  Puy-de-Dôme  et  réunit  tous  les  objets 
provenant  du  temple  de  Mercure  arverne.  Le  rez  de-chaussée  est 
occupé  par  des  coUeciions  très  diverses,  parmi  lesquelles  quelques 
objets  très  précieux.  Le  premier  étage  appartient  à  la  peinture. 
Un  article  de  M.  Gonse,  dans  la  Revue  de  l'art  ancien  et  jnoderne 
(10  nov.  1903,  p.  36o-74)  donne  une  idée  de  l'arrangement  géné- 
ral et  des  principaux  morceaux  de  notre  modeste  musée,  déjà 
trop  petit,  et  condamné,  par  le  défaut  de  prévoyance  des  cons- 
tructeurs, à  ne  pouvoir  guère  s'agrandir.  M.  Audollent.  chargé 
de  cours  de  langue  et  de  littérature  latines  à  la  Faculté  des 
lettres,  en  a  été  nommé  conservateur,  et  tous  les  amis  des  arts 
et  de  la  science  se  sont  réjouis  de  cette  nomination,  qui  met  le 
musée  en  mains  doctes  et  sûres. 

La  bibliothèque  s'élève  derrière  le  musée,  en  bordure  du  boule- 
vard Lafayette,  et  abritera  les  collections  réunies  de  la  ville  et 
de  l'Université.   Cette  heureuse  mise  en  commun,  qui  devrait, 


CHRONIQUE.  567 

comme  l'eût  voulu  M.  Liard,  devenir  de  règle  générale,  assurera 
aux  travailleurs  le  meilleur  emploi  possible  des  ressources,  tou- 
jours si  restreintes,  dont  disposent  chez  nous  les  établissements 
scientifiques.  Le  plan  de  l'édifice,  dû  à  M.  l'architecte  Gerhart, 
permettra  l'installation  commode  de  300,000  volumes.  Confiée  aux 
soins  de  M.  Laude,  un  spécialiste  connu  par  ses  travaux  de  biblio- 
théconomie,  la  bibliothèque  de  Clermont  cessera  d'être  un  chauf- 
foir  public  pour  devenir  enfin  un  sérieux  atelier  de  travail. 
M.  Laude  voudrait  en  faire  «  la  bibliotèque  centrale  d'Auvergne  ». 
et  grâce  à  l'intelligente  libéralité  de  la  ville  et  du  Conseil  géné- 
ral, il  a  pu  commencer  à  développer  le  fonds  des  «  Arvernica  ». 
Parmi  ses  dernières  acquisitions,  signalons  :  le  portefeuille  de 
Dulaure  (1774),  —  33  lettres  de  M.  de  Lagarlaye,  évêque  de  Cler- 
mont (1773-1779),  —  trois  recueils  importants  sur  Delille  (444  feuil- 
lets), —  autographes  de  personnes  nées  en  Auvergne,  lettres  sur 
Couthon  et  les  événements  de  la  Révolution,  —  inventaires  des 
Archives  de  la  ville  de  Clermont  dressé  en  1690,  —  remarques  sur 
la  Coutume  d'Auvergne  d'Artaud,  —  pièces  relatives  à  l'Ecole 
centrale  du  Puy-de-Dôme,  au  jardin  botanique,  au  Cabinet  d'his- 
toire naturelle.  —  dépenses  de  la  reine  Marguerite  de  Valois  pen- 
dant sa  détention  à  Usson  (xvi"«  siècle),  —  Gault  de  Saint-Ger- 
main :  dix-huit  belles  aquarelles  des  costumes  d'Auvergne.  Citons 
encore  parmi  les  imprimés  une  collection  de  pamphlets  contre 
La  Fayette,  le  journal  de  Montloier,  un  petit  traité  anonyme 
imprimé  à  Clermont  en  1672  et  intitulé  :  «  de  l'accent  de  la  lan- 
gue française  et  de  la  manière  de  la  purifier  dans  notre  province  » 
enfin  une  collection  de  portraits  d'hommes  marquants  de  l'Au- 
vergne, réunie  par  M.  François  Boyer  et  comprenant  plus  de 
2000  pièces. 

La  Société  des  amis  de  l'Université  et  le  Conseil  général  du  Puy- 
de-Dôme  ont  volé  des  subventions  pour  de  nouvelles  fouilles  au 
Puy-de-Dôme.  Ces  recherches,  poursuivies  depuis  deux  ans,  sous 
la  direction  de  MM.  Ruprich  Robert  et  Audollent,  ont  amené  la 
découverte  de  nombreux  débris  :  plaques  de  marbre,  fragments 
de  sculpture,  objets  en  bronze,  médailles  et  monnaies,  et  per- 
mettent d'affirmer  que  le  temple  de  Mercure  Dumiate  n'a  pas  été 
totalement  détruit  en  2o1,  mais  a  été  l'objet  d'e  restaurations  pos 
térieures  et  a  dû  subsister  au  moins  jusqu'au  v»  siècle.  Un  fût 
de  colonne  en  marbre  cipolin,  d'autres  colonnes  plus  petites  en 
arkose,    des   chapiteaux   corinthiens,    ayant  couronné   des  co- 


568  ANNALES   DU    MIDI. 

lonnes  ou  des  pilastres,  montrent  combien  fut  riche  et  variée 
rornementation  du  temple  de  Vasso.  Il  serait  fort  à  désirer 
que  les  fouilles  fussent  continuées;  la  montagne  n'a  certainement 
pas  dit  encore  tousses  secrets. 

Le  cours  d'archéologie  auvergnate,  professé  pendant  cinq  ans 
à  la  Faculté  des  lettres  par  M.  Henri  du  Ranquet,  a  pris  fin  ;  il 
en  reste  une  ample  collection  de  clichés  pour  projections  et  un 
bel  album  photographique  des  églises  d'Auvergne,  que  l'Univer- 
sité a  exposé  à  Paris  en  1900.  M.  du  Ranquet  compte  publier  ses 
cours  et  donnera  ainsi  au  public  un  ouvrage  d'ensemble  sur  l'art 
auvergnat,  qui  manque  encore  aujourd'hui. 

M.  le  docteur  Paul  Girod,  directeur  de  l'Ecole  de  médecine  et 
professeur  de  botanique  à  la  Faculté  des  sciences,  a  fait  à  la 
Faculté  des  lettres,  en  1903  et  1904.  un  cours  libre  sur  la  préhis- 
toire d'Auvergne.  Ce  cours  a  obtenu  le  succès  le  plus  complet  et 
fournira  matière,  lui  aussi,  à  un  livre  intéressant. 

L'Académie  des  sciences,  arts  et  belles-lettres  de  Clermont, 
aidée  par  M.  Girard,  député  de  Riom.  aujourd'hui  décédé,  a  fait 
élever  sur  le  plateau  de  Gergovie  un  monument  commémoratif 
de  la  bataille.  Ce  monument,  haut  de  16  mètres,  consiste  en  trois 
colonnes  de  lave  supportant  un  entablement,  d'où  partent  trois 
arcs  de  cercle  qui  se  réunissent  sous  un  casque  gaulois.  L'effet, 
assez  heureux  quand  on  regarde  le  monument  de  face,  l'est 
beaucoup  moins  de  profil.  L'architecte  a  dû  compter  avec  les 
ressources  mises  à  sa  disposition  et  il  ne  sera  pas  impossible 
d'améliorer  l'aspect  du  monument. 

Grâce  au  désintéressement  de  M.  Bartholdi,  Clermont  possède 
enfin  une  statue  et  même  une  belle  statue  de  Vercingétorix.  Nous 
regrettons  vivement,  pour  notre  part,  que  l'artiste  ait  tenu  à  la 
hisser  sur  un  piédestal  à  jour,  en  marbre  polychrome,  au  milieu 
de  la  place  de  Jaude,  où  les  hautes  maisons  qui  l'entourent  l'écra- 
sent certainement;  sa  vraie  place  eût  été  au  bout  de  la  grande 
rue  Ballainvilliers,  où  sa  silhouette  se  serait  détachée  en  plein 
ciel,  en  vue  de  Gergovie  même,  sans  compter  que  l'érection  de 
la  statue  à  cet  endroit  aurait  entraîné  la  destruction  de  la  pyra 
mide,  médiocre  monument,  qu'on  a  trouvé  moyen  d'enlaidir  en- 
core en  surchargeant  sa  base  d'ornements  superflus  et  disgra- 
cieux. 

Les  fêtes  d'inauguration  de  la  statue  ont  ranimé  le  souvenir 
du  héros  arverne.  M.  E.  Des  Essarts,  doyen  de  la  Faculté  des  let- 


CHRONIQUE.  569 

très,  a  prononcé  à  cette  occasion  le  beau  discours  d'un  chaud 
patriote  et  d'un  fin  lettré.  Parmi  les  livres  de  circonstance  nous 
donnerons  une  mention  à  «  La  fille  de  Vercingélorix  »  gracieuse 
nouvelle  historique  de  M.  Louis  André,  professeur  d'histoire  au 
lycée  de  Tulle. 

Desaix  a  profité  du  regain  de  popularité  de  Vercingétorix.  La 
statue,  qui  lui  avait  été  élevée  en  1848  sur  un  piédestal  en  plâ- 
tre, bois  et  zinc,  a  été  placée  sur  une  base  plus  durable,  et  nous 
connaissons  deux  oeuvres  intéressantes,  encore  inédites,  consa- 
crées à  la  gloire  du  vainqueur  de  Marengo  :  un  beau  poème  dra- 
matique, dû  à  la  plume  d'un  magistrat  de  Riom,  et  un  drame  en 
prose,  écrit  par  le  doyen  de  notre  Faculté  des  lettres,  en  colla- 
boration avec  l'un  des  hommes  politiques  les  plus  distingués  de 
notre  région.  G.  Desdevises  du  Dezert. 


Durant  les  vacances,  nous  avons  eu  la  douleur  de  perdre  un 
de  nos  meilleurs  et  de  nos  plus  zélés  collaborateurs,  membre  du 
comité  de  publication  des  Annales,  M.  J.  Brissaud,  décédé  pré- 
maturément le  13  août  dernier.  Une  notice  nécrologique  lui  sera 
consacrée  dans  notre  prochain  numéro. 


LIVRES  ANNONCIÎS  SOMMAIREMENT 


Aheus  e  Flous,  s.  1.  n.  d.  [impr.  à  Auch,  chez  Cocharaux,  1903]  ; 
in-16  carré  de  128  pages.  —  Nous  signalons,  contrairement  à 
notre  habitude,  ce  volume  de  vers,  parce  que  les  auteurs 
(MM.  Sarran,  Tallez,  Laclavère  et  Cézérac)  se  sont  appliqués  à 
y  notfîr  exactement,  quoique  sans  aucune  complication  graphi- 
que, les  sons  (notamment  les  diverses  sortes  d'e)  de  trois  variétés 
du  patois  gascon  (Cazaubon,  Florence-sur-Gers  et  Condom).  Il 
nous  sera  bien  permis  de  dire  aussi  le  charme  de  ces  poésies, 
fait  de  grâce  et  de  robustesse  rustiques;  nous  signalerons  par- 
ticulièrement les  imitations  de  chansons  de  métiers  et  de  com- 
plaintes populaires,  par  les  deux  premiers  des  auteurs  cités  plus 
haut;  on  y  retrouvera  une  quantité  de  ces  bons  vieux  mots  en 
train  de  disparaître.  —  comme  les  antiques  objets  ou  usages 
qu'ils  désignent,  —  et  qu'on  a  peut  être  enchâssés  ici  pour  les 
sauver  de  l'oubli.  Une  note  finale  mentionne  un  phénomène  bien 
connu  des  linguistes  (la  vocalisation  de  5  devant  une  consonne 
sonore)  qui  a  une  aire  bien  autrement  large  qu'on  ne  paraît  le 
croire  ici  (voy.  Mistral,  Trésor,  II,  823,  col.  1  et  Rev.  de  philol. 
franc,  et  provençale ,  VIII.  131,  n.  1.  et  134,  n.  2);  on  se  rendrait 
mieux  compte  de  son  extension  si  tous  les  auteurs  patois  avaient 
soin  de  le  noter  graphiquement,  comme  l'ont  fait  avec  raison 
ceux  de  ce  charmant  petit  recueil.  Est-ce  à  dessein  et  pour  être 
plus  «  modernes  »  que  ceux-ci  ont  parfois  remplacé  la  rime  par 
l'assonance  et  glissé  quelques  vers  ayant  une  syllabe  de  trop  ? 

A.  Jbanroy. 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  571 

Berger  (E.).  Le  vicomte  de  Mirabeau,  Mirabeau  Tonneau 
(1734-1792).  Paris,  Hachette,  1904;  un  vol.  ia-12  de  394  pages. 
—  De  cette  étonnante  famille  des  Mirabeau,  il  n'est  pas  un 
membre  qui  ne  mérite  sa  biographie,  h' Ami  des  hommes,  le 
bailli  et  l'orateur  sont  depuis  longtemps  étudiés.  Mirabeau 
Tonneau,  jusqu'à  présent,  était  un  peu  oublié,  rejeté  dans 
l'ombre  par  le  triple  éclat  de  son  père,  de  son  oncle  et  de 
son  frère.  M.  Berger  a  voulu  combler  cette  lacune  de  l'érudition 
mirabéiste,  et  il  a  entrepris  sur  le  vicomte  une  étude  que  la  mort 
l'a  empêché  de  terminer.  On  a  pu  cependant  la  mettre  au  point 
et  la  publier,  et  le  livre,  quoique  inachevé,  rendra  de  réels  ser- 
vices. La  physionomie  turbulente,  le  caractère  inégal,  impé- 
tueux, le  sang  bouillant  du  vicomte  y  sont  bien  décrits.  Dans 
sa  vie  privée  comme  dans  sa  carrière  militaire  en  France,  dans 
son  passage  à  l'Assemblée  constituante  et  l'armée  de  Condé,  le 
vicomte  se  révèle  bien  Riquetti.  Dans  sa  vie  aventureuse,  il 
risque  deux  fois  de  faire  naufrage  :  malgré  ses  fredaines,  ses 
dettes,  ses  «  saouleries  iconoclastes  »,  comme  dit  le  comte 
Fleury,  ses  débauches  lamentables,  il  arrive  au  grade  de  colo- 
nel, il  fait  la  campagne  d'Amérique,  puis  il  va  siéger  à  l'extrême 
droite  de  l'Assemblée  constituante,  aussi  haineux  contre  le 
Tiers  que  son  frère  se  montrait  dévoué  à  sa  cause,  et  à  raison 
même  de  ce  dévouement,  qu'il  considérait  comme  une  trahison. 
Ecrasé  par  l'inévitable  comparaison  avec  le  génie  oratoire  d'Ho- 
noré-Gabriel, le  vicomte  ne  fut  cependant  pas  un  orateur  sans 
mérite  et  sans  verve.  Son  inconstance  l'empêcha  d'ailleurs  de 
s'accommoder  longtemps  du  mandat  de  député.  Il  abandonna  la 
politique  pour  l'armée.  Organisateur  d'une  légion  royaliste  qui 
prend  son  nom,  général  d'émigrés,  il  incorpore  sa  légion  à 
l'armée  de  Condé,  après  avoir  vainement  couru  de  Francfort  en 
Suisse,  de  Charabéry  à  Turin,  de  Coblentz  à  Worms  pour  se 
faire  agréer  par  les  frères  de  Louis  XVI.  Un  décret  spécial 
rendu  contre  lui  par  l'Assemblée  législative  semble  le  dési^^ner 
à  l'attention  des  princes;  mais,  toujours  incapable  d'esprit  de 
suite  et  d'obéissance,  dès  la  déclaration  de  guerre,  il  entre  en 
France  sans  ordre;  il  va  devenir  peut-être  un  condottiere,  un 
chef  de  bandes,  quand,  six  semaines  après  son  entrée  en  cam- 
pagne, le  15  septembre  1792,  il  meurt  à  Fribourg.  Il  avait  gâché 
sa  vie  sans  profit  pour  sa  cause  ni  pour  sa  gloire,  et,  tout 
en  tenant  compte  des  difficultés  de  famille,  des  écrasantes  cora- 


572  ANNALES   DU   MIDI. 

paraisons  dont  il  eut  à  supporter  le  poids,  en  reconnaissant  sa 
bravoure  spirituelle  de  chevau-léger,  on  ne  peut  qu'approuver 
le  jugement  sévère  que  porte  de  lui  M.  B.  :  «  législateur  bruyant, 
étourdi,  rétrograde,  homme  d'arrière-garde,  néfaste  dans  la  vie 
d'une  nation.  »  L.-G   Pélissier. 

Chevalier  (chanoine  J.).  —  I.  La  Révolution  à  Die  et  dans  la 
vallée  de  la  Brome  (1789  1799).  Valence,  Céas,  1903;  in-S'J  de 
376  pages.  —  II.  Souvenii's  du  Consulat  et  de  l'Empire  dans  le 
département  de  la  Drôme  et  spécialement  dans  le  Diois  (1789- 
1815).  Grenoble,  1904;  in-8"  de  242  pages.  (Extrait  du  Bulletin  de 
la  Société  de  statistique  du  déparlem,ent  de  V Isère,  4e  série,  t.  Vil.) 
—  Je  tiens  à  faire  connaître  sommairement  le  contenu  de  ces 
deux  importants  volumes. 

I.  Le  premier  s'ouvre  par  une  introduction  où  sont  résumés 
très  nettement  les  préliminaires  de  la  Révolution  en  Dauphiné  et 
particulièrement  à  Die.  Suit  un  texte  inédit;  c'est  le  «  Journal  de 
ce  qui  s'est  passé  à  Die  du  mois  de  mail789  au  mois  de  mai  1793  », 
par  L.-J.  Lagier  de  Vaugelas,  chanoine  de  Die.  Ce  personnage 
prêta  serment  à  la  constitution  civile  du  clergé,  et,  en  1794,  re- 
nonça à  l'état  ecclésiastique  pour  se  marier;  il  fut  ensuite 
nommé  conservateur  de  la  bibliothèque  publique  créée  à  Die  par 
la  réunion  des  livres  ayant  appartenu  au  chapitre  et  aux  autres 
corps  religieux;  il  mourut  en  1800.  Son  journal,  annoté  avec 
soin  par  M.  Ch.,  est  un  abondant  recueil  de  faits  locaux  ;  on  re- 
marquera qu'il  devient  tout  à  fait  insignifiant  pour  l'année  1793. 
Vient  ensuite  la  partie  de  beaucoup  la  plus  importante  du  vo- 
lume. Elle  est  intitulée  :  «  La  ville  et  le  district  de  Die  à  l'époque 
de  la  Convention  et  du  Directoit-e  »  (p.  129-329).  L'auteur  y  cite, 
souvent  in  extenso,  de  très  nombreux  documents,  la  plupart  iné- 
dits, qu'il  a  tirés  des  archives  publiques  et  privées  de  la  Drôme  j 
il  encadre  ces  citations  dans  une  rédaction  qui  lui  est  person- 
nelle. On  y  puisera  des  renseignements  très  intéressants  sur 
une  foule  de  points  :  par  exemple,  sur  l'application  des  lois  rela- 
tives aux  suspects,  et  sur  l'histoire  religieuse  de  la  région  pen- 
dant les  périodes  de  la  Convention  et  du  Directoire.  Enfin,  le  vo- 
lume se  termine  par  des  fragments  inédits  des  procès-verbaux 
de  la  Société  populaire  de  Crest  (Drôme),  pour  la  période  allant 
du  4  février  au  4  juin  1794,  et  par  des  listes  faisant  connaître  le 
sort  de  nombre  de  membres  du  clergé  de  la  Drôme  pendant  la 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  573 

Révolution  (pp.  330-72).  Les  procès-verbaux  de  la  Société  de 
Crest  sont  publiés  d'après  un  registre  qui  appartient  à  M.  Brun- 
Durand,  si  honorablement  connu  par  ses  travaux  relatifs  à  l'his- 
toire de  la  Drôrae. 

II.  Le  volume  consacré  par  M.  Ch.  au  Consulat  et  à  l'Empire 
est  fait  d'après  le  plan  suivi  dans  la  seconde  partie  du  volume 
que  je  viens  d'analyser;  il  est  composé  principalement  de  nom- 
breux documents,  la  plupart  inédits,  enchâssés  dans  la  rédac- 
tion. Il  y  a  peu  d'exemples  de  semblables  travaux  sur  cette  pé- 
riode, et  cela  augmente  encore  l'intérêt  de  l'ouvrage  de  M.  Ch. 
Deux  figures  se  détachent  surtout  :  celles  du  préfet  Descorches  et 
de  l'évêque  Bécherel,  tous  deux  administrateurs  de  haute  valeur, 
qui  furent  dans  leur  département  les  principaux  artisans  de  la 
réorganisation  de  la  France  commencée  sous  le  Consulat.  Les 
tableaux  d'ensemble  dressés  par  le  préfet  sont  une  mine  abon- 
dante de  renseignements  précieux.  Le  volume  se  recommande 
d'ailleurs  par  les  documents  qu'il  fournit  sur  l'histoire  de  la 
restauration  du  culte  après  le  Concordat.  Il  est  inutile  de  dire 
qu'on  y  aperçoit  très  bien  les  traits  connus  du  régime  impérial, 
lequel  se  caractérise  par  l'excès  d'oppression  d'un  côté  et  de 
tervilisme  de  l'autre.  Il  faut  encore  noter  les  documents  et  ré- 
cits relatifs  à  la  chute  de  l'Empire  et  à  la  première  Restaura- 
tion, qui  laissa  à  la  Drôme  Descorches,  son  ancien  préfet;  seule- 
ment il  s'intitulait  marquis  et  non  plus  baron.  En  avril  181.'j,  il  a 
repris  son  titre  de  baron,  après  avoir  assisté,  non  sans  angoisse, 
aux  événements  de  mars  ;  le  récit  de  ces  événements,  vus  de 
Valence,  est  un  des  plus  curieux  chapitres  de  ce  volume.  Il  se 
ferme  sur  un  chapitre,  non  moins  intéressant,  qui  a  trait  à  la 
seconde  Restauration.  En  publiant  ces  deux  volumes,  M.  Ch.  a 
donné  un  exemple  qui  mériterait  de  trouver  des  imitateurs  dans 
tous  nos  départements.  P,  Fournier. 

Le  second  Congrès  du  Sud- Ouest  navigable,  tenu  à  Toulouse  en 
mai  et  juin  1903.  Compte-rendu  des  travaux,  actes  et  résolutions 
du  Congrès.  Toulouse,  Privât,  1904;  in-8'J  de  518  pages.  —  Ce  vo- 
lume se  divise  en  trois  parties  :  l'organisation  et  le  fonctionne- 
ment du  Congrès,  les  communications  faites  au  Congrès,  les 
vœux  émis  par  le  Congrès.  Ce  n'est  guère  que  la  seconde  partie 
qui  nous  intéresse,  et,  dans  cette  partie,  les  communications 
traitant  de  questions  historiques.   Tout  le  reste,   quoique  très 


574  ANNALES   DU   MIDI. 

recommandable  à  plus  d'un  titre,  ne  concerne  que  des  questions 
purement  actuelles.  La  part  de  l'histoire  elle-même  est  très  res- 
treinte. C'est  une  courte  note  de  M.  Dumas,  doyen  de  la  Faculté 
des  lettres  de  Toulouse  :  La  navigation  sur  la  Garonne  à  la  fin  de 
Vancien  7'égime,  où  il  analyse  le  règlemînt  de  1782,  qui  créa  un 
conservateur  de  la  navigation  placé  directement  sous  les  ordres 
des  intendants,  et  fixa  la  part  du  roi  et  de  la  province  de  Lan- 
guedoc dans  les  travaux  à  effectuer  pour  faciliter  la  navigation. 
Puis,  c'est  un  document  analysé  par  M.  Bellecroix  :  Observa- 
tions à  Nosseigneurs  les  Etats  de  Languedoc,  où,  en  1781,  la 
Chambre  de  commerce  de  Toulouse  réclame  la  création  d'un 
troisième  port  sur  la  Garonne  et  d'un  canal  de  communication 
entre  la  Garonne  et  le  canal  du  Midi.  Ce  fut  le  canal  de  Brienne. 
Nous  avons  cependant  ailleurs  quelques  renseignements  his- 
toriques. C'est  ainsi  que,  dans  la  séance  de  clôture,  M.  Méri- 
GNHAc  défend  dans  son  discours  Riquet  contre  Andréossy,  qui 
prétendait  avoir  conçu  le  projet  du  canal  du  Midi,  et  défend 
aussi  sa  famille  en  tant  que  propriétaire  du  canal.  Après  lui, 
M.  P.  Feuga  raconte  avec  humour  l'histoire  de  la  statue  élevée 
à  Riquet  à  Toulouse,  au  bout  des  allées  Lafayette.  C'est  une 
belle  page  d'histoire  locale,  où  M.  F.  a  fait  revivre  en  passant 
quelques  figures  toulousaines,  dont  le  sculpteur  GrifiCoul-Dorval. 
Enfin  M.  l'abbé  Ferran,  en  tête  d'une  communication  sur  les 
rivières  du  département  de  l'Ariège,  a  mis  un  chapitre  sur  leur 
régime  antérieur.  M.  Décans. 

DuFFAUT  (abbé  H).  Roqueville ,  monographie  du  fief  et  de  la 
chapelle  de  ce  nom.  Toulouse,  Privât.  1903.  In-S"  de  xvi-440  pages. 
—  Pendant  près  de  deux  siècles,  les  archives  du  diocèse  de  Tou- 
louse furent  déposées  dans  la  sacristie  de  l'église  de  Montgis- 
card.  Je  ne  sais  si  ce  souvenir  a  eu  quelque  influence  sur  M.  l'abbé 
Duffaut.  Toujours  est-il  que  lorsqu'il  était  curé  de  Montgiscard, 
il  occupait  déjà  ses  loisirs  à  des  recherches  historiques  dont  les 
lecteurs  des  Annales  du  Midi  ont  pu  apprécier  la  solidité  et  la 
méthode  rigoureuse  K  L'œuvre  présente  ne  peut  que  confirmer  la 
bonne  opinion  que  son  premier  travail  avait  fait  concevoir. 
C'est  à  la  fois  une  étude  d'histoire  locale  et  un  ouvrage  d'édifica- 
tion. La  première  partie  seule  rentre  dans  le  cadre  des  Annales. 

1.  Ann.  du  Midi,  t.  XII,  ann.  19U0,  p.  180  et  329. 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  575 

La  chapelle  de  Roqueville,  consacrée  à  Notre-Dame,  est  située 
dans  la  paroisse  et  à  peu  de  distance  de  Montgiscard.  Son  ori- 
gine a  donné  lieu  à  une  légende  que  M.  D.  déclare  (p.  22)  ne  re- 
poser <<  sur  aucune  base  historique  ».  A  l'aide  des  Layettes  du 
trésor  des  Chartes,  des  archives  notariales,  communales  et  dé- 
partementales, il  remonte  à  1190  pour  le  flef  et  à  1246  pour  la 
chapelle.  Toutes  les  sources  ont  été  judicieusement  mises  à  con- 
tribution,   sauf  le   manuscrit   de   Gillabert,    actuellement   aux 
archives  départementales,   ms.   dont   l'auteur  paraît  d'ailleurs 
dépourvu  de  toute  critique  en  même  temps  que  très  partial.  Il  est 
invoqué  parfois,  mais  presque  exclusivement  dans  la  partie  édi- 
fiante de  l'ouvrage,  à  propos  des  démêlés  survenus  entre  chape- 
lains, consuls  et  curés  de  Montgiscard,  qui  ne  paraissent  pas 
avoir  vécu  en  bonne  intelligence.  Gillabert  lui-même,  devenu  curé 
de  Montgiscard,  lutta  contre  la  chapelle.  M.  D.  dit  sans  exagéra- 
tion qu'on  trouvera  dans  son  œuvre  «   une  ample  moisson  de 
faits  inédits  pour  nos  annales  locales  ^.  Il  est  même  trop  mo- 
deste, car  beaucoup  de  ces  faits  ont  une  importance  réelle  pour 
l'histoire  des  moeurs.  Il  n'est  pas  indifférent  de  savoir  qu'avant 
le  XV»  siècle  presque  tous  les  testaments  contiennent  des  dispo- 
sitions en  faveur  de  la  chapelle,  qu'au  xv  siècle  on  en  trouve 
dans  les  trois  quarts,  et  seulement  dans  la  moitié  au  xvi«.  Il  est 
regrettable  que  M.  D.  n'ait  pas  publié  comme  pièces  justifica- 
tives la  donation  de  1432  dont  il  reproduit  une  phrase  en  langue 
romane  (p.  87),  le  contrat  d'association  de  1475  (p.  134,  n.  1)  pour 
le  commerce  de  «  pastels  de  coquanha  ou  agranatz  et  autres 
marchandises  tant  en  espicerie,  mercerie,  sal,  oly  et  draps  »,  et 
la  prise  de  possession  de  la  seigneurie  de  Cumiers  en  1528.  Outre 
les  noms  bien  connus  des  Garaud,  des  Brucelles,  des  Saint-Félix, 
des  Bernui  et  des  Lévy,  on  rencontre  dans  ce  livre  des  roturiers 
en  train  de  s'élever  à  la  noblesse  :  tels  Guillaume  Avessen,  consul 
de  Montgiscard  en  1502,  et  Jacques  d'Avessen,   coseigneur  de 
Montesquieu,  gouverneur  et  commandant  la  ville  pour  le  roi  de 
Navarre  en  1577,  ascendants  probables  du  marquis  d'Avessens 
de  Saint-Rome,  qui  fut  député  de  la  noblesse  de  la  sénéchaussée 
de  Toulouse  aux  Etats  généraux  de  1789.  Voici  des  renseigne- 
ments utiles  à  l'histoire  de  l'art  :  Antoine  de'  Garaud  donne,  en 
janvier  1695,  200  livres  aux  cordeliers  de  Montgiscard  pour  leur 
permettre  de  faire  établir  par  les  sculpteurs  toulousains  Antoine 
Guépin  et  Gabriel  Rossa  un  rétable  à  la  romaine,  hexagone, 


576  ANNALES   DU  MIDI. 

à  six  colonnes  corinthiennes,  etc.  Tout  le  monde  connaît  cette 
décoration  de  mauvais  i^oût  que  l'on  retrouve  dans  la  plupart 
des  églises  de  Toulouse,  où  elle  a  remplacé  parfois  des  sculptures 
de  notre  grand  artiste  de  la  Renaissance,  Nicolas  Bachelier 
Signalons  encore  la  piété  de  M"»  de  Perdigol,  qui  laissa,  par  son. 
testament  de  1738,  de  quoi  célébrer  deux  raille  messes  après  son 
décès.  Saluons  au  passage  l'intéressante  et  austère  figure  du 
chapelain  Amilha,  dont  MM.  Pasquier  et  Doublet  ont  récem- 
ment réédité  les  poésies  en  langue  vulgaire.  —  Nous  voudrions 
ne  pas  voir  cités  comme  autorités  Brémond  et  Dubédat  :  celui-ci 
n'est  qu'un  littérateur  discutable;  quant  au  premier,  mieux  vaut 
ne  pas  le  qualifier.  Il  convient  aussi  de  faire  des  réserves  sur  ce 
que  M.  D.  appelle  «  la  part  glorieuse  »  du  troubadour  Folquet, 
évêque  de  Toulouse,  à  la  défaite  des  Albigeois,  c'est-à-dire  des 
Toulousains.  Podium  nauterium,  près  Carcassonne,  que  l'auteur 
traduit  par  Pech-Nautier,  ne  serait-il  pas  Penautier?  Enfin^ 
erreur  bien  excusable  chez  un  Languedocien,  l'église  que  M.  D. 
appelle  «  de  Notre-Dame  de  Meu  »  (p.  235)  était  l'église  de  Bernet 
k  Dému.  diocèse  d'Auch.  La  fondation  dont  il  est  question  est 
mentionnée  dans  Dom  Brugèles,  Chron.  eccl.  du  dioc.  d'Auch, 
III«  partie,  p.  406.  Le  cartulaire  de  Montgiscard  la  nomme  d'ail- 
leurs (fin  de  la  n.  1  de  la  p.  23S)  N.-D.  del  Vernet  :  nouvelle 
preuve  de  l'utilité  de  la  philologie  en  histoire.  —  Un  index  alpha- 
bétique complète  heureusement  cet  excellent  livre  qu'aucun 
chercheur  ne  pourra  négliger.  A.  Vignaux. 

Durand  (abbé  A.).  Un  pt^élat  constitutionnel.  Jean  -  François 
Pèrier  (1740-1824),  07'atorien,  évêque  asset'menté  du  Puy-de-Dôme, 
évêque  concordataire  d'Avignon.  Paris,  Bloud,  1902;  in-8»  de  xix- 
678  pages.  —  L'évêque  Périer  représente  aux  yeux  de  l'auteur  le 
type  du  «  jureur  honnête  et  sincère  ».  Le  livre  est  une  étude 
consciencieuse  et  bien  documentée,  écrite  par  un  prêtre  intelli- 
gent et  libéral  qui  suit  Périer  à  travers  toute  sa  carrière,  comme 
professeur,  comme  supérieur  de  l'Ecole  militaire  d'Efflat,  comme 
évêque  constitutionnel  du  Puy-de-Dôme  et  comme  évêque  con- 
cordataire d'Avignon.  M.  D.  voit  dans  la  Constitution  civile  du 
clergé  la  résultante  des  erreurs  théologiques  du  xviii»  siècle, 
mais  il  comprend  que  le  gallicanisme  ait  pu  tenter  certains  es- 
prits et  il  rend  hommage  aux  talents  d'administrateur  déployés 
par  Périer  à  Clermont  et  à  Avignon.  —  L'histoire  de  Périer  pen- 


LIVRES  ANNONCÉS  SOMMAIREMENT.  577 

dant  la  période  qui  va  de  la  fin  de  1793  au  Concordat,  et  le  tableau 
de  l'organisation  du  diocèse  d'Avignon  par  le  nouveau  prélat, 
sont  des  chapitres  d'un  très  grand  intérêt  pour  l'histoire  ecclé- 
siastique de  la  Révolution.  G.  Desdevises  du  Dezert. 

GuiBERT  (L.).  La  cour  roxjale  de  Limoges.  Limoges,  Ducourtieux, 
1904;  in-8'5  de  44  pages.  (Extrait  de  M Almanach  limousin,  1903 
et  1904.)  -  Cette  brochure  est  l'un  des  derniers  chapitres  qu'ait 
écrits  l'auteur  sur  «  Limoges  qui  s'en  va  ».  Les  autres,  de  moin- 
dre importance,  ont  trait  à  l'ancienne  intendance,  à  divers  quar- 
tiers et  aux  vieux  ponts  de  la  ville.  Ici  M.  G.  passe  en  revue,  en 
y  rattachant  quelques  souvenirs  intéressants,  les  bâtiments  de 
l'ancien  présidial  et  les  prisons  qui  en  dépendaient;  puis,  les 
magistrats  et  les  avocats  connus  qui  s'y  sont  succédé  depuis  le 
xvi»  siècle.  Il  scrute  enfin  les  origines  de  cette  juridiction  royale 
qu'il  fait  remonter,  un  peu  imprudemment  peut-être,  jusqu'à 
l'année  1204;  en  fait  elle  n'est  nulle  part  mentionnée  avant  1230. 
Corrigeant  une  théorie  de  tout  point  erronée  qu'il  exprima 
jadis  sur  la  signification  de  «  bailliage  de  Limoges  »  {Bull.  soc. 
arch.  de  Limoges,  LU.  568),  l'auteur  consent  aujourd'hui  à  y 
reconnaître  une  simple  subdivision  de  la  sénéchaussée,  à  laquelle 
correspondaient  les  bailliages  de  Brive  et  d'Uzerche.  -  Détails 
abondants  et  instructifs.  On  sent,  bien  que  les  références  soient 
rares,  qu'ils  sont  d'ordinaire  puisés  aux  bonnes  sources. 

A.  Leroux. 

GuiBERT  (L.).  Coup  d'œil  sur  l'histoire  de  la  ville  de  Limoges. 
Limoges,  Ducourtieux,  1902;  in-S"  de  45  pages  avec  2  plans.  — 
Simple  conférence,  mais  qui  résume  fort  clairement  vingt  années 
de  recherches  sur  la  topographie  et  l'histoire  locales.  La  seule 
partie  profitable  à  l'érudit,  c'est  le  plan  de  l'ancien  Limoges,  ville 
et  cité,  que  l'auteur  a  mis  en  tête  de  sa  brochure.  La  situation  des 
anciens  édifices  y  est  nettement  déterminée.  Il  est  regrettable 
que  cette  carte  ne  soit  pas  plus  développée  ;  que  le  tracé  des  deux 
voies  romaines  et  de  l'aqueduc  d'Aigoulène,  l'emplacement  du 
cimetière  carolingien  de  la  Courtine  et  de  l'évêché  construit  au 
xvi»  siècle,  n'y  soient  pas  indiqués.  Le  pont^Saint-Martial  y  est 
porté  comme  reconstruit  au  xiw  siècle,  alors  que  cette  recons- 
truction est  de  la  fin  du  xii«;  le  pont  Saint-Etienne  y  est  attri- 
bué au  haut  moyen  âge,  alors  qu'il  date  du  commencement  du 
xiiie  siècle,  comme  M.  G.  lui-même  l'a  depuis  lors  démontré.  Eu- 
annales  DU  MIDI.  —  XVI.  40 


578  ANNALES   DU   MIDI. 

fin  il  y  a  confusion  entre  la  date  de  fondation  de  certains  établis- 
sements ecclésiastiques  et  la  date  de  construction  des  bâtiments. 
Si,  par  exemple,  les  Augustins  remontent  à  1290,  leur  bâtiment 
dans  son  dernier  état  appartient  au  xvir  siècle,  et  c'est  ce  que 
n'indique  pas  le  graveur.  Pour  les  deux  séminaires  de  la  Mission 
et  des  Ordinands,  l'erreur  est  vraiment  sans  excuse. 

A.  Leroux. 

Inventaire  sommaire  des  Archives  départementales  antérieures 
à  1790.  Haute- Garonne.  Archives  civiles.  Série  B,  n°^  i  à  92  N. 
Tome  I,  rédigé  par  Ch.  Roques.  Toulouse.  Privât,  1903;  in-4°  de 
viii-56o  pages.  —  Les  quatre-vingt-douze  registres  analysés  dans 
ce  volume  vont  de  1444  à  1667.  Ils  renferment  des  arrêts  du  Par- 
lement de  Toulouse,  des  Grands  Jours  de  Nimes.  du  Puy,  de 
Béziers.  C'est  dire  l'importance  de  ce  volume  pour  la  connais- 
sance du  droit  de  cette  époque.  Les  registres  dépouillés  l'avaient 
déjà  été  dans  le  premier  volume,  paru  en  18S8.  Mais  on  avait 
reconnu  que  ce  dépouillement  primitif  ne  signalait  pas  avec 
assez  de  détail  les  ressources  que  les  registres  renferment. 
L'avertissement  qui  nous  renseigne  là-dessus  indique  en  même 
temps  la  tomaison  nouvelle.  Un  index  des  noms  propres  de 
personnes  et  de  lieux  et  une  table  alphabétique  des  matières 
seraient  nécessaires,  car  l'ordre  chronologique  adopté  n'est  pas 
toujours  suffisant  pour  retrouver  une  pièce  dont  on  ne  connaît 
pas  la  date.  M.  Décans. 

Inventaire  somtnaire  des  a?'chives  départementales  antérieures 
à  1790.  Haute-Garonne.  Archives  civiles.  Série  B,  n°^  93  à  592. 
Tome  II,  rédigé  par  J.  Judicis.  Toulouse,  Privât,  1903;  in-4°  de 
xxxviii-417  pages.  —  Ce  volume  est  le  second  de  la  série  judi- 
ciaire des  Archives  de  la  Haute-Garonne.  Un  avertissement 
nous  informe  qu'il  est  le  résultat  d'un  travail  de  réfection  et 
nous  indique  la  nouvelle  tomaison.  La  préface  sommaire  de 
M.  Judicis  a  été  remplacée  par  une  notice  plus  complète  de 
M.  Lapierre  sur  le  parlement  de  Toulouse,  dont  il  fait  rapide- 
ment l'histoire,  et  dont  il  expose  les  attributions,  l'organisa- 
tion, la  composition  et  le  ressort.  Le  volume  embrasse  les  an- 
nées 1585  à  1638.  Même  reproche  à  faire  qu'au  premier,  l'ab- 
sence d'index.  M.  Décans. 

Inventaire  sommaire  des  archives  départementales  antérieures 
à  1190.  Haute- Garonne.  Archives  civiles.  Série  C,  t.  II,  n*^'  227b- 


LIVRES  ANNONCÉS   SOMMAIREMENT,  579 

2432.  Rédigé  par  Ad.  Baudouin,  complété  par  F.  Pasquier.  Tou- 
louse, Privât,  1903;  in-4o  de  xi-800  pages.  —  Ce  tome  renferme 
les  procès  verbaux  des  Etats  de  Languedoc  de  1497  à  1789. 
L'ordre  chronologique  y  reste  adopté,  mais,  à  la  différence  des 
précédents,  il  est  complété  par  une  table  générale  des  noms  et 
des  matières.  Un  avertissement  nous  rappelle  quelles  sont  les 
matières  renfermées  dans  le  premier  volume  et  nous  indique  où 
l'on  peut  trouver  le  complément  des  lacunes  qu'offre  cet  inven- 
taire. On  sait  ainsi  de  quel  côté  diriger  ses  recherches  pour 
obtenir  des  renseignements  complets.  C'est  donc  un  ouvrage  com- 
mode à  manier,  quoique  fort  considérable.  Il  fait  grand  honneur 
aux  savants  archivistes  qui  l'ont  rédigé.  M.  Décans. 

[renée  (Père).  Comminges  et  Nébouzan.  Aulon,  monographie 
locale,  accompagnée  de  noies  importantes  sur  l'ancien  diocèse  de 
Comminges,  la  vicomte  de  Nébouzan  et  les  communes  voisines 
d'Aulon.  Toulouse,  Privât;  Saint-Gaudens,  Abadie,  1904;  in-S"  de 
xvi-240  pages.  —  Monographie  préparée  par  l'abbé  Ader,  curé 
d'Aulon,  mort  en  1902.  et  que  l'auteur  a  mise  au  point.  L'abbé 
Ader  avait,  nous  apprend  l'avertissement,  fouillé  les  archives 
notariales,  des  papiers  de  famille  et  les  diverses  archives  publi- 
ques. C'est  dire  qu'il  avait  recueilli  de  nombreux  matériaux. 
Le  P.  Irénoe,  estimant  qu'il  ne  pouvait  pas  publier  toutes  ces 
pièces,  a  fait  un  choix,  et  il  nous  présente  ce  qui  a  trait  au 
prieuré  bénédictin,  à  la  seigneurie,  à  la  paroisse  et  à  l'adminis- 
tration civile.  Ce  n'est  que  pour  l'histoire  de  l'église  qu'il  arrive 
à  l'époque  actuelle.  L'histoire  de  la  commune  s'arrête  à  la 
Révolution.  De  ces  documents,  les  uns  sont  publiés  en  entier 
dans  le  corps  de  l'ouvrage  ou  dans  les  87  pages  de  pièces  justifi- 
catives, les  autres  résumés  ou  cités.  On  aurait  pu  penser  que 
cette  monographie  serait  plus  complète  :  les  actes  notariés  au- 
raient pu  fournir  en  effet  des  indications  sur  l'histoire  des 
familles,  sur  l'histoire  économique,  les  mœurs,  les  usages^  les 
coutumes.  Les  moines  et  l'église,  les  seigneurs  et  les  consuls, 
c'est  beaucoup,  ce  n'est  pas  tout.  Peut-être  ne  voit-on  pas  aussi 
les  différences  des  divers  siècles.  La  guerre  de  Cent  ans,  les 
guerres  religieuses  du  xvv  siècle  ne  semblent  pas  avoir  troublé 
le  bonheur  de  cet  heureux  village.  Seule,  la  Révolution  vient 
tout  bouleverser.  Ajoutons  que  l'auteur  se  souvient  toujours 
qu'il  est  religieux,  et  qu'il  met  au-dessus  de  tout  l'histoire  et  les 


58Ô  ANNALES    DU   MIDI. 

intérêts  de  l'Eglise  :  son  ouvrage  ressemble  beaucoup  à  ceux  de 
chez  Marne.  N'y  aurait-iï  aussi  rien  à  dire  sur  les  étymologies? 
Malgré  cela,  par  le  nombre  de  documents  rassemblés,  nous 
sommes  en  possession  d'un  livre  précieux,  d'une  contribution 
sérieuse  à  l'histoire  des  contrées  pyrénéennes. 

M.    DÉCANS. 

Layac  (A.).  Usages  locaux]du  département  du  Puy-de-Dôme, 
codifiés  et  mis  au  courant  de  la  nouvelle  législation.  Montauban, 
1902;  in-8°  de  216  pages.  —  Petit  manuel  de  droit  pratique,  dont 
l'usage  est  facilité  par  une  table  fort  commode.  Voir  en  particu- 
lier les  articles  :  Domestiques,  Essaim  poursuivi,  Fermier  entrant 
et  sortant,  Grappillage,  etc.  L'espace  nécessaire  à  la  nourriture 
d'une  tête  de  bétail  dans  les  pâturages  de  montagne  est  estimé  à 
\  hectare  20  ares;  on  dira  en  parlant  d'une  montagne  :  «  C'est 
une  montagne  de  tant  de  têtes.  »  —  On  appelle  «  tour  du  chat  » 
l'espace  libre  que  l'on  doit  laisser  entre  le  mur  d'un  four  et  le 
mur  du  voisin,  etc.  Ces  usages  locaux  renferment  une  foule  de 
menues  notions  historiques.  G.  Desdevises  du  Dezert. 

MoREL  (L.j.  V œuvre  de  Morel-Ladeuil,  sculpteur-ciseleur  (1820- 
1888).  Paris,  Lahure;  in-8o  de  47  pages  (grav.  et  dix  pi.  de  pho- 
totypie  hors  texte).  —  Monographie  consciencieuse,  écrite  par  le 
flls  du  sculpteur,  et  contenant  rhist.oire  de  son  œuvre.  Le  musée 
de  Clermont  possède  une  aiguière  en  argent  et  deux  boucliers 
en  argent  et  fer  ciselé  de  cet  artiste,  aussi  puissant  que  délicat. 

G.  Desdevises  du  Dezert. 

Motte  (V.).  Scala  divini  amoris,  mystischer  Trahtat  in  proven- 
zalischer  Sprache  aus  dem  XIV  Jahrhundert.  Halle,  Karras,  1902 
(dissertation  de  doctorat);  in-8'J  de  xvni-21  pages.  —  Le  ms. 
Egerton  94o,  du  British  Muséum,  jadis  décrit  par  M.  P.  Meyer 
(Bulletin  de  la  Société  des  Anciens  textes,  1881,  p.  44),  contient, 
entre  autres  choses,  trois  traités  mystiques  en  prose  provençale. 
C'est  l'un  de  ces  traités  que  publie  M.  Motte.  C'est  une  para- 
phrase, à  l'usage  du  commun  peuple,  des  idées  de  saint  Bona- 
venture,  dont  quelques  passages  sont  ici  presque  traduits;  il  a 
dû  être  rédigé  vers  la  tin  du  xiv  siècle  pour  une  des  commu- 
nautés de  Béguins  du  Bas-Languedoc.  L'édition  est  soignée, 
l'introduction  et  les  notes  sobres  et  instructives;  on  regrette 
l'absence  d'un  glossaire.  A.  Jeanroy. 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  581 

Saint-Jours  (B.).  Port  d'Albret  (Vieux-Boucau),  VAclour  ancien 
et  le  littoral  des  Landes.  Perpignan,  Latrobe,  1900;  in-IS  de 
414  pages.  —  Port  d'Albret  est  le  nom,  depuis  longtemps  oublié, 
d'un  modeste  village  de  la  côte  landaise.  Il  a  fallu  toute  la  piété 
filiale  de  M.  S.-J.  pour  croire  que  ce  village  sans  passé  et  sans 
archives  pouvait  fournir  la  matière  d'un  volume.  Il  est  vrai  que, 
par  un  de  ces  caprices  qui  n'étaient  pas  rares  sur  cette  basse 
côte  des  Landes,  l'Adour  porta  un  jour  son  embouchure  jusqu'à 
ce  village  et  l'y  garda  jusqu'en  1578,  peut-être  pendant  deux  siè- 
cles ou  plus.  M.  S.-J.  prend  de  là  occasion  d'étudier  l'histoire 
ancienne  de  ce  pays,  de  décrire  le  littoral  et  de  suivre  l'Adour 
dans  ses  divers  déplacements.  C'étaient  là,  évidemment,  des  sujets 
assez  intéressants  par  eux-mêmes  pour  qu'il  fût  utile  d'en  faire 
la  préface  de  l'histoire  du  Vieux-Boucau.  Cette  réserve  faite,  il 
est  juste  de  reconnaître  que  M.  S.-J.  s'est  appliqué  à  exhumer 
tout  ce  qu'il  était  possible  de  connaître  du  passé  de  ce  village. 
Il  est  visible  qu'il  s'est  livré  à  de  nombreuses  recherches  et  lec- 
tures pour  éclairer  les  antécédents  et  les  alentours  de  son  sujet. 
Mais  il  est  trop  visible  aussi  que  M.  S.-J.  est  venu  un  peu  tard 
aux  études  historiques.  La  méthode  et  le  sens  critique  lui  sont 
beaucoup  moins  familiers  que  l'hydrographie  landaise.  Son  éru- 
dition de  seconde  main  puise  sans  discernement  à  toute  source. 
Henri  Martin,  Mary-Lafon,  Dumège.  Monlezun,  Compaigne,  etc., 
lui  servent  trop  souvent  de  guides.  De  là  sur  les  Aquitains.  les 
Celtes,  les  Ibères  des  théories  singulièrement  vieillies  pour  ne  rien 
dire  de  plus.  Sur  nos  origines  linguistiques,  M.  S.-J.  en  est  encore 
aux  idées  celtomanes  d'il  y  a  un  siècle,  et  quand  il  s'agit  d'établir 
les  étymologies  de  nos  vocables  locaux,  il  n'a  pas  l'air  de  soup- 
çonner qu'il  faut  compter  ici  avec  les  données  d'une  science  très 
positive,  qui  ne  laisse  guère  de  place  à  la  divination.  Si  l'on  veut 
se  borner  à  chercher  dans  le  livre  de  M.  S.-J.  les  résultats  de  ses 
observations  personnelles  sur  la  topographie  du  sud-ouest  des 
Landes,  on  y  trouvera  une  contribution  de  quelque  valeur  à 
l'étude  de  notre  géographie  historique  et  descriptive. 

A.  Degert. 

Saint -Jours  (B.).  Etat  ancieti  du  littoral  gascon;  in- 12  de 
31  pages.  1901.  —  L'âge  des  dunes  et  des  étangs  de  Gascogne; 
in-12  de  66  pages,  1901.  —  Les  fleuves  côtiers  de  Gascogne;  in- 12 
de  24  pages,  1902.  —  Le  littoral  de  Gascogne;  in-8"  de  21  pages, 


582  ANNALES   DU   MIDI. 

1902.  —  Preuves  de  V antique  slabilité  des  côtes  de  Gascogne;  in-S" 
de  1 4  pages,  1 903.  —  Limite  des  différents  pays  [pagi)  de  la  Gironde 
à  la  Bidassoa;  in-S"  de  3  pages,  1903.  —  La  formation  du  littoral 
gascon  entre  l'embouchure  de  l'Adour  et  celle  de  la  Gironde,  les 
diverses  modifications  qu'il  a  subies  passionnent  depuis  quelque 
temps  les  membres  des  sociétés  savantes  de  Bordeaux.  Pour  les 
uns  les  mouvements  des  sables  qui  ont  donné  naissance  aux  du- 
nes seraient  d'origine  récente.  Ce  seraient  les  Barbares  qui,  en 
brûlant  les  forêts  du  Sud-Ouest  auraient,  vers  le  iv  siècle,  favo- 
risé l'invasion  des  sables;  peut-être  même  ne  faudrait-il  voir 
dans  cette  invasion  qu'un  des  effets  d'un  cataclysme  survenu  au 
XIV»  siècle  et  auquel  doivent  être  attribués  aussi  les  déplace- 
ments de  l'embouchure  de  l'Adour  et  l'obstruction  de  baies  ma- 
rines, transformées  ainsi  peu  à  peu  en  étangs  par  la  poussée  des 
dunes.  Pour  d'autres,  l'aspect  de  la  côte  gasconne  n'a  presque 
pas  subi  de  modifications  au  cours  des  âges.  Dès  le  temps  des 
Romains  et  de  Strabon,  la  mer  occupait  ses  limites  actuelles 
et  les  dunes  ne  se  trouvaient  ni  plus  ni  moins  à  l'intérieur 
qu'aujourd'hui.  Les  étangs  seraient  dus  simplement  à  la  stagna- 
tion des  eaux,  provoquée  par  l'obstruction  de  leurs  canaux 
d'écoulement  vers  la  mer.  M.  S.-J.  se  rattache  à  cette  opi- 
nion, et  les  diverses  brochures  dont  on  vient  de  lire  les  titres 
n'ont  pas  d'autre  but  que  d'en  montrer  le  bien-fondé.  Il  est  assez 
inutile  de  les  étudier  ici  en  détail.  Publiées  à  diverses  époques 
dans  le  Bulletin  de  la  Société  de  Géographie  commerciale,  ou  dans 
la  Revue  Philomatique  de  Bordeaux,  elles  se  répètent  parfois;  de 
l'une  à  l'autre  reparaissent  les  mêmes  arguments,  mais  sous  une 
forme  plus  développée.  Les  unes  sont  d'ordre  scientifique  ou 
plus  particulièrement  géologique;  il  est  difficile  de  n'être  point 
frappé  de  leur  force  probante.  Les  arguments  d'ordre  historique 
sont  déportée  inégale;  quelques-uns  paraissent  très  nettement 
concluants,  mais  il  en  est  d'autres  dont  la  base  critique  ne  semble 
pas  suffisamment  établie.  Quelle  peut  être,  par  exemple,  la  valeur 
d'une  charte  donnée  en  1217,  à  Biscarrosse,  par  un  hypothétique 
«  Thiébaut,  prince  royal  et  duc  d'Aquitaine  »?  On  s'étonne  aussi 
que  M.  S.-J.  n'ait  pas  signalé  la  carte  des  côtes  gasconnes  du 
manuscrit  8878  (étudié  par  L  Delisle  dans  ses  Mélanges  de 
Paléographie),  du  xi«  siècle,  et  que,  pour  la  délimitation  des  pagi 
riverains  de  la  mer,  il  n'ait  pas  connu  un  texte  aussi  important 
que  celui  du  partage  du  diocèse  de  Dax  en  archidiaconés  [Gallia 


LIVRES   ANNONCÉS   SOMMAIREMENT.  583 

christ.,  t.  I,  Instr.  p.  173).  La  thèse  de  M.  S.-J.  est  heureusement 
indépendante  de  ces  quelques  faiblesses  ou  lacunes.  On  l'a  bien 
vu  par  l'adhésion  éclatante  que  lui  a  donnée  M.  C.  Jullian  dans 
le  Journal  des  savants  (juin  1903).  Le  grand  mérite  de  M.  S.-J. 
sera  de  l'avoir  fait  triompher,  à  rencontre  de  l'autre  qui  régnait 
encore  sans  conteste  dans  le  monde  géographique,  il  y  a  cinq 
ans  à  peine.  A.  Degert. 

Salveton  (H.).  Antoine  -  Frédéric  Salveton,  homme  politique, 
magistrat,  avocat  (1801-1870),  Clermont-Ferrand,  Conty,  1903; 
in-8°  de  iii-172  pages.  —  L'auteur  écrit  la  vie  de  son  grand-père 
et  trace  un  intéressant  tableau  de  mœurs  provinciales  dans  le 
milieu  judiciaire.  G.  D.  du  D. 

Vidal  (A.).  Histoire  des  rues  du  vieil  Albi.  Albi,  1904;  in-8°  de 
92  pages.  (Extrait  de  la  Revue  du  Ta?m,  tome  XX,  année  1903.) 
—  M.  Vidal  connaît  les  Albigeois  de  jadis  aussi  bien  —  et  peut 
être  mieux  —  que  ses  compatriotes  d'aujourd'hui.  Aussi  est-ce 
un  plaisir  que  de  parcourir  avec  lui  les  rues  tortueuses  et  enche- 
vêtrées de  la  vieille  cité  ;  non  seulement  il  en  indique  l'emplace- 
ment et  retrouve  l'étymologie  de  leur  nom,  mais  il  nous  donne 
sur  leurs  plus  notables  habitants  (surtout  des  xiv«  et  xv«  siècles) 
d'abondants  détails,  empruntés  aux  documents  les  plus  variés, 
notamment  à  la  belle  collection  des  Comptes  consulaires  (Arch. 
municip.  d'Albi)  ,  —  dont  il  cite  souvent  le  texte  in  extenso. 
Disons  pourtant  qu'à  procéder  comme  il  l'a  fait,  rue  par  rue, 
l'auteur  ne  nous  permet  guère  de  prendre  une  idée  d'ensemble 
d'Albi,  de  reconstituer  en  esprit  la  ville  du  moyen  âge.  Pas  de 
plan  général,  qui  nous  y  convie  et  qui  nous  y  aide  ;  mais  de 
fines  illustrations,  dues  à  M.  R.  Lacroix,  complètent  et  préci- 
sent les  descriptions.  Il  serait  fort  à  souhaiter  que  nous  eus- 
sions pour  toutes  les  villes  anciennes  du  Midi  un  travail  aussi 
complet  et  consciencieux.  A.  Jeanroy. 


PUBLICATIONS  NOUVELLES 


Barckhausen  (H.)-  Montesquieu.  L'Esprit  des  lois  et  les  Archi- 
ves de  la  Brède.  Bordeaux,  Michel,  1904;  in-S"  carré  de  129  p. 

BoRRELLi  DE  SERRES.  Recherches  sur  divers  services  publics 
du  xiii«  au  xvii«  siècle.  T.  II.  Paris.  Picard,  1904;  in-8«de  561  p. 

Capreoli  (J.).  Johannis  Capreoli  Tholosani,  ordinis  prsedica- 
torum,  thomistarum  principis  Defensiones  theologiae  divi  Thomas 
Aquinatis.  De  novo  editae  cura...  RR.  PP.  Ceslai  Paban  et  Thomae 
Pègues.  Tome  V,  Tours,  Cattier,  1904;  in-4o  à  2  col.  de  xv-448  p. 

Champion  (E.).  La  séparation  de  l'Eglise  et  de  l'Etat  en  1794. 
Paris,  Colin.  1903;  in-16  de  xiii-282  p. 

Chuquet  (A.).  Dugommier  (1738-1794).  Paris,  Fontemoing,  1904; 
in-8"  de  ii-471  p.  avec  portr.  et  cartes.  (Collection  Minerva.) 

Galibert  (P.)  Le  conseil  souverain  de  Roussillon  (thèse).  Per- 
pignan, imp.  de  l'Indépendant,  1904;  in-8o  de  144  p. 

Lavisse  (E.)  Histoire  de  France  depuis  les  origines  jusqu'à  la 
Révolution.  T.  VI  :  les  guerres  de  religion;  établissement  du 
pouvoir  absolu  :  I;  la  Réforme  et  la  Ligue;  l'Édit  de  Nantes 
(1559-1598).  Fasc.  1  et  2.  Paris,  Hachette,  1904;  in-8"  carré,  pages 
1  à  192. 

MoLiNiER  (A.).  Les  sources  de  l'Histoire  de  France.  Des  origines 
aux  guerres  d'Italie  (1494).  IV  :  les  Valois  (132S-1461).  Paris, 
Picard,  1904;  in-S»  de  358  p.  [Manuel  de  bibliographie  histori- 
que, IV.] 

Stenger  (G.).  La  société  française  pendant  le  Consulat,  2^  série. 
Paris,  Perrin,  1904;  pet.  in-S"  de  ii-440  p. 


Le  Gérant, 
l'.-F,D.  l'UlVAT. 


TABLE  DES  MATIÈRES 


ARTICLES  DE  FOND. 

Pages. 

Vidal  (Ahbé  J.-M.).  Les  origines  de  la  province  ecclésias- 
tique de  Toulouse  [1295-1318]  {sicite  et  fin) 5 

Baux  (E.),  Bourrilly  (V.-L.)  et  Mabilly  (Ph.).  Le  voyage 

des  reines  et  de  François  1er  en  Provence 31 

Thomas  (L.).  La  vie  privée  de  Guillaume  de  Nogaret 161 

Calmette  (J.)  et  Patry  (H.).  Les  comtes  d'Auvergne  et  les 

comtes  de  Velay  sous  Charles  le  Chauve 305 

Jeanroy  (A.).    Le  soulèvement  de  1242  dans  la  poésie  des 

troubadours 311 

Doublet  (G.).  Un  évoque  de  Vence  devant  l'Inquisition 330 

Arnaud  d'Agnel  (Abbé  G.)-  Les  possessions  de  l'abbaye  de 

Saint-Victor  de  Marseille  en  Rouergue 449 

Bartholomaeis  (V.   de).    Un    sirventés    historique  d'Elias 

Cairel 468 

MÉLANGES  ET  DOCUMENTS. 

Les  Quatrains  du  seigneur  de  Pybrac  (Guy) 65  et  208 

Lettre  de  Marguerite  de  Valois  aux  capitouls  de  Toulouse 

(  Vignaux) 80 

Gascon  subiw  «  haie  »  (Millardet) 222 

De  la  réduction  de  tï  k  y  en  gascon  (Millardet) 224 

A  propos  d'une  chanson  de  Peire  d'Alvernhe  (Dejeanne) 341 

A  propos  d'un  chansonnier  provençal  (Jeanroy  et  Bertoni).  347 

Date  du  concile  de  Béziers  (Cabié) 349 

Le  plus  ancien  témoignage  sur  Guillaume  de  Nogaret  (Tho- 
mas)    357 

Note  sur  l'inscription  de  Volusianus  (Clerc). . .' 495 

Le  nom  de  lieu  Tramesalgues  (Thomas) 500 

Sur  la  date  de  la  translation  des  reliques  de  sainte  Foi  d'Agen 

à  Conques  (Lot) 503 

Le  roi  Eudes  «  duc  d'Aquitaine  »  et  Adémar  de  Chabannes 

(Lot) 509 


586  annat.es  du  midi. 

Garsie-Sanche,  duc  de  Gascogne  (Lot) 514 

Amauguin,  comte  de  Bordeaux  (Lot) 517 

COMPTES  RENDUS  CRITIQUES. 

Albe  (Abbé).  I.  Autour  de  Jean  XXII.  —II.  Quelques-unes 
des  dernières  volontés  de  Jean  XXII.  —  III.  Contribution 

à  l'histoire  du  diocèse  de  Caliors  (Molinier) 359 

Appel  (C).  Provenzalische  Chrestomathie  (Andraud) 89 

BouDET  (M.).  Registres  consulaires  de  Saint-Flour  (Jeanroy).     236 
BouRRiLLY  (L.).   L'école  centrale  du   département   du  Var 

(Pélissier) 371 

Calmette  (J.).  Louis  XI,  Jean  II  et  la  Révolution  catalane 

(Boissonnade) 240 

Carayon  (Ch.).  L'Inquisition  au  xiiie  et  au  xive  siècle  (Gui- 

gnebert) 234 

Ghichmarev  (V.).  Vie  provençale  de  sainte  Marguerite  (Levy).    528 
Clément-Simon  (G.).  Recherches  de  l'histoire  civile  et  muni- 
cipale de  Tulle   avant  l'érection   du  consulat,    tome  I 

(Leroux) 531 

CoTTiN  (P.).  Sophie  de  Monnieret  Mirabeau  (Pélissier) 246 

GuiLHiERMOz   (P.).    Essai   sur  l'origine   de   la    noblesse  en 

France  au  moyen  âge  (Brissaud) 519 

Jeanroy  (A.)  et  Vignaux  (A.).  Voyage  au  Purgatoire  de  saint 

Patrice  (Andraud) 229 

Lecler  (Abbé  A.).   Dictionnaire  topographique,  etc.,  de  la 

Creuse  (Thomas) 227 

Lemoine  (J.).  Mémoires  des  évêques  de  France  sur  la  conduite 

à  tenir  à  l'égard  des  Réformés,  1698  (Batilïol  ot  Gachon).     365 
Marignan   (A.).    Histoire    de   la    sculpture    en    Languedoc 

(Graillot) 98 

Mighelet  (J.).  Poètes  gascons  du  Gers  (.Jeanroj'^) 538 

Mirabeau.  Lettres  à  Julie,  p.  p.  D.  Meunier  (Pélissier). .. .     248 

MoRis  (H.)  Le  Sénat  de  Nice  avant  1792  (Doublet) 96 

Poésie  populaire  landaise,  p.  p.  l'abbé  Forx  (Millardet) 525 

PoRTAL  (Ch.).  Histoire  de  Cordes  (Dognon  et  Jeanroy) 91 

Zauner  (A.).  Die  romanischen  Namen  der  Kôrperteile  (Mil- 
lardet)      373 

REVUE  DES  PÉRIODIQUES. 

périodiques   français   MfJRIDIONAUX. 

Alpes  (Basses-).  Annales  des  Basses-Alpes 250 

Alpes  (Hautes-).  Annales  des  Alpes 101 

—                Bulletin  de  la  Société  d'études  des  Hautes- 
Alpes 537 

Alpes-Maritimes.  Annales  de  la  Société  des  lettres 251 


TABLE   DES   MATIERES.  587 

Ardèche.  Revue  du  Vivarais 253 

Ariège.  Bulletin  de  la  Société  ariégeoise 102 

Aude.  Bulletin  de  la  Clommission  archéologique  de  Narbonne.  254 

—  Bulletin  de  la  Société  d'études  scientiflques 103 

Bouches-dii-Rhône.  Bulletin  de  la  Société  de  géographie  de 

Marseille 255 

Cantal.  Revue  de  la  Haute-Auvergne 104 

Charente.  Bulletin  de  la  Société  historique  et  archéologique.  538 

(Iharente-Tnférifure.  Archives  historiques  de  la  Saintonge. . .  105 

—                   Revue  de  Saintonge. 106 

Corrèze.  Bulletin  de  la  Société  des  lettres  de  Tulle 539 

—  Bulletin  de  la  Société  scientifique  de  Brive 540 

Creuse.  Mémoires  de  la  Société  des  sciences 541 

Dordogne.  Bulletin  delà  Société  historique  du  Périgord 380 

Drôme.  Bulletin  d'histoire  ecclésiastique 109 

—  Bulletin  de  la  Société  d'archéologie 382 

Gard.  Bulletin  du  Comité  de  l'art  chrétien 384 

—  Mémoires  de  l'Académie  de  Nimes 385 

—  Revue  cévenole 385 

—  Revue  du  Midi 386 

Garonne  (Haute-).  Bulletin  de  littérature  ecclésiastique.     111  et  542 

—  Bulletin   de  la   Société    archéologique  du 

Midi 255 

—  Bulletin  de  la  Société   de  géographie   de 

Toulouse 112 

—  Mémoires  de  l'Académie  des  sciences  de 

Toulouse 259 

—  Revue  de  Comminges 260 

—  Revue  des  Pyrénées 260 

—  Société  d'histoire  naturelle  de  Toulouse.. .  112 
Gers.  Archives  historiques  de  la  Gascogne 112 

—  Bulletin  de  la  Société  archéologique 387 

—  Revue  de  Gascogne 261 

Gironde.  Actes  de  l'Académie  des  sciences  de  Bordeaux 113 

—  Archives  historiques  de  la  Gironde 113  et  542 

—  Bulletin  hispanique 264 

—  Revue  des  études  anciennes 264 

—  Société  arciiéologique  de  Bordeaux 113 

Hérault.  Bulletin  de  la  Société  archéologique  de  Béziers.. .    .  543 

—  Bulletin  de  la  Société  languedocienne   de  géogra- 

phie  n 388 

—  Le  Félibrige  latin 114 

—  INIémoires   de   la   Société   archéologique  de  Mont- 

pellier   265 

Isère.  Annales  dauphinoises 266  et  544 

—  Bulletin  de  l'Académie  delphinale 117 


588  ANNALES   DU  MIDI. 

Isère.  Bulletin  de  la  Société  de  statistique  de  l'Isère 545 

—  Revue  épigraphique 546 

Landes.  Bulletin  de  la  Société  de  Borda 548 

Loire.  Bulletin  de  la  Diana 267 

Loire  (Hante-).  Bulletin  de  la  Société  d'agriculture  du  Puy . .  268 

Lot.  Bulletin  de  la  Société  d'études  du  Lot 269 

Puy-de-Dôme.  L'Auvergne  historique 389 

Pyrénées  (Basses-).    Bulletin  de  la  Société  des  sciences  de 

Pau 271 

—  Reclams  de  Biarn  et  Gascounhe 271 

Pyrénées  (Hautes-).    Annuaire  du  petitSéminaire de Saint-Pé.  549 

—  Bulletin  de  la  Société  académique  des 

Hautes-Pyrénées 389 

—  Bulletin  de  la  Société  Ramond 549 

Pyrénées-Orientales.  Revue   d'histoire    et    d'archéologie    du 

Roussillon 272 

—  Société    agricole,    scientifique    et  litté- 

raire   275 

Savoie.  Mémoires  de  l'Académie  des  sciences 118 

—  Mémoires  et  documents  publiés  par  la  Société  savoi- 

sienne  d'histoire 118  et  550 

Savoie  (Haute-).  Revue  savoisienne 120 

Tarn.  Revue  du  Tarn 551 

Var.  Bulletin  de  l'Académie  du  Var 277 

—    Bulletin  de  la  Société  d'études  de  Draguignan 275 

Vaucluse.  Mémoires  de  l'Académie  de  Vaucluse 277 

Vienne  (Haute-).  Archives  historiques  du  Limousin 121 

—  Bibliophile  limousin 122 

—  Bulletin  de  la  Société  des  amis  des  sciences  et  arts 

de  Rochechouart 123 

—  Bulletin  de  la  Société  archéologique  du  Limousin.. . .  552 

—  Limoges  illustré 123 

PÉRIODIQUES    FRANÇAIS   NON    MÉRIDIONAUX. 

Académie  des  inscriptions  et  belles-lettres  (comptes  rendus 

des  séances) 391 

Annales  de  Saint-Louis-des-Fran(,'ais 124 

Annuaire-Bulletin  de  la  Société  de  l'histoire  de  France 391 

Association  française  pour  l'avancement  des  sciences 392 

Bibliographe  moderne 553 

Bibliothèque  de  l'Ecole  des  chartes 392 

Bulletin  de  la  Société  des  antiquaires  de  France 407 

—  archéologique  de  l'Association  bretonne 395 

—  archéologique  du  Comité  des  travaux  historiques  et 

scientifiques 395 

—  du  bibliophile -396 


Table  des  matières.  589 

Bulletin  du  Comité  des  travaux  historiques  et  scientifiques 

(sciences  économiques  et  sociales) 124 

—  de  géograpliie  historique  et  descriptive 397 

historique    et   philologique    du  (<omité  des  travaux 

historiques  et  scientifiques 125 

—  monumental 398 

—  de  numismatique c53 

—  de  numismatique  et  d'archéologie 553 

—  de  la  Société  archéologique  «  Le  vieux  Papier  » 398 

—  de  la  Société  de  l'histoire  du  protestantisme  fran- 

çais    398 

Congrès  archéologiques  de  France 400 

Correspondance  historique  et  archéologique 555 

Gazette  numismatique  française 555 

La  Grande  Kevue  ou  Revue  du  Palais 556 

Journal  des  savants 400 

Mémoires  de  la  Société  des  antiquaires  de  France 408 

—  de  la  Société  dunkerquoise 400 

—  de  la  Société  d'émulation  du  Douhs 400 

Le  Moyen  âge 126 

Nouvelle  Revue  historique  de  droit 127 

—  Revue  rétrospective 556 

Revue  des  hihliothèques 401 

—  des  Deux-Mondes 401 

—  des  études  historiques 402 

—  félibréenne 127 

—  hebdomadaire 402 

—  d'histoire  littéraire  de  la  France 403 

—  d'iiistoire  de  Lyon 129 

—  d'histoire  moderne  et  contemporaine 126 

—  internationale  de  l'enseignement 403 

—  numismatique 403 

—  du  Palais  ou  la  Grande  Revue 556 

—  dé  Paris 403 

—  des  parlers  populaires 404 

—  de  philologie  française 404 

—  des  questions  historiques 129 

—  de  la  Renaissance 405 

—  de  synthèse  historique 130 

—  universitaire 405 

Romania 406 

PÉRIODIQUES   ÉTRANGERS. 

Archiv  fur  das  Studium  der  neueren  Sprachen 558 

Bullettino  délia  Società  filologica  romana 561 

Giornale  storico  dalla  letteratura  italiana 562 


590  ANNALES   DU   MIDI. 

Revista  de  bibliografia  catalana 561 

Romanische  Forschungen 558 

ZeitschrifL  fiir  romanische  Philologie 5(50 

Zeitschrift  der  Savigny-Slii'tung 559 

NÉCROLOGIE. 
E.  Guibert,  p.  279;  A.  Molinier,  p.  409. 

CHRONIQUE. 

M.  Koschwitz  prépare  une  nouvelle  édition  de  la  ChreslomaLhie 
provençale,  de  Bartsch,  p.  132;  premier  numéro  des  Annales 
de  la  Sociëlé  d'études  x^vovençales,  p.  280;  Revue  du  Béarn, 
p.  280;  découverte  d'un  manuscrit  de  la  Vie  de  saint  Hugues, 
p.  280;  nouveaux  résultats  des  fouilles  du  mont  Jouer,  p.  281; 
positions  des  thèses  de  l'Ecole  des  chartes,  p.  411  ;  Congrès  des 
Sociétés  savantes,  p.  413:  Congrès  des  Sociétés  des  beaux-arts, 
p.  416;  à  propos  du  Dictionnaire  de  la  Creuse,  de  l'abbé  Lecler, 
p.  416;  récompenses  de  l'Académie  des  inscriptions  et  belles- 
lettres,  p.  417;  constitution  d'une  Société  française  des  fouilles 
archéologiques,  p.  417;  nomination  de  Commissions  départe- 
mentales pour  l'histoire  de  la  Révolution,  p.  563;  décès  de 
M.  Brissaud,  membre  du  Comité  de  publication  des  Annales  du 
Midi,  p.  569. 

Chronique  générale,  pp.  282  et  418;  d'Auvergne,  p.  563;  du  Dau- 
phiné,  p.  132;  du  Gard,  p.  281;  de  la  Marche  et  du  Limousin, 
p.  425;  du  Roussillon,  p.  136;  du  Yivarais,  p.  142. 

LIVRES  ANNONCÉS  SOMMAIREMENT. 

AcHABD  (A.),  LouBARESSE  (P.),  Tartière  (A.)  et  Brisson  (A.).  La 

commune  de  Saint-Dier  d'Auvergne 428 

Aheus  e  flous 570 

Bellanger  (L.).  Etude  sur  le  poème  d'Orientius 293 

Berger  (E.).  Le  vicomte  de  Mirabeau,  Mirabeau-Tonneau..  571 
Berneï-Rollande  (J.).  L'esprit  public  et  les  élections  dans 

la  Basse- Auvergne  en  1789 428 

Berret  (P.).  Contes  et  légendes  du  Dauphiné 428 

Bertoni  (G.).  Nuove  rime  provenzali  tratte   dal  cod.  Cam- 

pori 429 

BoNNEFOY  (G.).  Histoire  de  l'administration   civile    dans    la 

province  d'Auvergne  et  le  département  du  Puy-de-Dôme.  430 
BouDET  (M.)  et  Grand  (R.).  Etude  historique  sur  les  épidé- 
mies de  peste  en  Haute-Auvergne 431 

BuuLENGER  (J.).  Les  protestants  à  Nimes  au  temps  de  l'Edit 

de  Nantes 431 

BouRDETTE  (J.).  Annales  des  sept  vallées  du  Labéda 432 


TABLE   DES  MATIÈRES.  591 

BouRRET  (Cardinal).  Documents  sur  les  origines  clirétiennos 

«lu  Rouergue.  Saint-Marlial 433 

Brun  (Abbé).  L'abbé  J.-P.  Lapauze 1/j6 

Brutails,  Ducaunnés-Duval  et  Bigot.  Ville  de   Libourne. 

inventaire  sommaire  des  archives  municipales 294 

Cabié  (E.).  Ambassade   en    Espagne  de  Jean   Ebrard,   sei- 
gneur de  Saint-Sulpice 295 

Gazag  (H.  P.).  Le  lieu   d'origine  du    philosophe    Francisco 

Sanchez J  46 

Chevaldin  (L.-E.).  Les  jargons  de  la  farce  de  Pathelin 147 

Chevalier  (Chanoine  J.).  L  T^a  Révolution  à  Die  et  dans  la 
vallée  de  la  Drôme.  —  II.  Souvenirs  du  Consulat  et  de 

l'Empire  dans  le  département  de  la  Drome 572 

Congrès  (Le  second)  du  Sud-Ouest  navigable 573 

CONRAT  (M.).  Breviarium  Ahiricianum 297 

CRÉGur(AbI)é  Pi.).  Nouveaux  éclaircissements  sur  Avilacum.  435 

Crégut  (Abbé  R.).  Histoire  du  collège  de   Riom 435 

Crégut  (Abbé  R.).  Les  inscriptions  lapidaires  à  Riom 435 

Crégut  (Abbé  R.).  La  Vierge  du  Marthuret 435 

Crescini  (V.).  Il  testo  critico  di  una  canzone  di  Bernart  de 

Ventadorn 43(3 

Déghelette  et   Brassart   (E.).  Les  peintures  murales    du 

moyen  ùge  et  de  la  Renaissance  en  Forez 437 

Degert  (Abbé  A.).  L'ancien  collège  de  Dax 437 

Deslandrks  (P.).  L'ordre  des  Trinitaires 297 

Douais  (Mgr  C).  Trésor  de  Saint-Serniii  de  Toulouse 438 

Duffaut  (Abbé  H.).  Roqueville,  monographie 574 

Durand  (Abbé  A.).  Un  prélat  constitutionnel,  Jean-François 

Périer 576 

Faurey  (J.).  Henri  IV  et  l'édit  de  Nantes 439 

Fraikin  (Abbé  J.).  Les  comptes  du  diocèse  de  Bordeaux. . . .  147 

Frangus  (D'').  Notes  liistoriques  sur  Saint-Agrève 298 

Frangus  (Di).  Voyage  au  pays  des  Boutières.  fja  région  de 

Vernoux 148 

Gautrand  (Abbé).  Histoire  de  Lacaune 148 

GiPOULON  (J.).  Etude  sur  l'allodialité  en  Auvergne 440 

GuiBERT  (L.).  r.  La  cour  royale    de   Limoges.  —  II.  Coup 

d'œil  sur  l'histoire  de  la  ville  de  Limoges 577 

Guibert  (L.).  Nouveau  recueil  de  registres  domesti([ues. . . .  149 
Inventaire  sommaire   des    archives   de    la   Haute-Garonne. 

Archives  civiles.  Série  B,  t.  I,  II.  Série  C,  t.  II 578 

Irénée  (Père).  Aulon,  monographie  locale. . .' 579 

Langlois  (Ch.-V.).  La  société  française  au  xine  siècle 298 

Lasteyrie  (R.  de).  Etudes  sur  la  sculpture  française I5i 

Layag  (A.).  Usages  locaux  du  département  du  Puy-de-Dùme.  580 

Lefèvre  (E.).  L'année  félibréenne 399 


592  ANNALES   DU   MIDI. 

Lefévhe  (E.).  Bibliographie  mislralienne 149 

Leroux  (A.)-  La  légonde  ilu  roi  Aigolant  et   les   origines   de 

Limoges 440 

^NIellet.  Etat  des  gentilslioinines   dans   les  juridictions  dé- 
pendant des  sénéchaussées  de  Gnj'enne  et  de  Libourne. .     15"3 

MoREL  (L.).  L'œuvre  de  Morel-Ladeuil,  sculpteur 580 

Motte  (V.).  Scala  divini  atnoris 580 

NicoLLET  (F.-N.).    Les  derniers    membres     de    la     famille 

d'Orange-Montpellier 152 

Oddo  (H.).  La  Provence 442 

Paultre  (G.).  La  «  taille  tarifée  »  de  Talibé  de  Saint-Pierre.     15"2 

Pellissieu  (Al:)bé).  Histoire  d'Allos 443 

RiBiiiH  (L.  de).  Charlus-Ghampagnac  et  ses  seigneurs 444 

RrBiER  (L.  de).  Notices  bibliographiques  sur  quelques  méde- 
cins de  la  Haute-Auvergne 445 

RouMEJOUx  (A.  de).  Essai  sur  les  guerres  de  religion  en  Péri- 

gord 153 

RouviÈRE  (Fr.).   L'aliénation   des  biens    nationaux  dans  le 

Gard 445 

Saint-Jours  (B.).  L'Adour  et  ses  embouchures  anciennes. . . .  154 
Saint-Jours  (B.).  L  Port  d'Albret  (Vieux-Boucau).— II.  Etat 
ancien  du  littoral  gascon.  —  III.  L'âge  des  dunes  et  des 
étangs  de  Gascogne.  —  IV.  Les  fleuves  côtiers  de  Gas- 
cogne. —  V.  Le  littoral  de  Gascogne.  —  VI.  Preuves  de 
l'antique  stabilité  des  côtes  de  Gascogne.  —  VIL  Limite 

des  diftérents  pays  de  la  Gironde  à  la  Bidassoa 581 

Salveton  (H.).  Salvelon,  homme  politique  (1801-1870) 583 

Sauvaire-Jourdan.  Isaac  de  Bacalanet  les  idées  libre-échan- 
gistes      299 

Sternfeld  (R.)  et  Schultz-Gora  (O.).   Ein    Sirventes   von 

1268  gegen  die  Kirche  und  Karl  von  Anjou 154 

Tardieu  (A.).  Le  Dictionnaire  des  ex-libris  de  l'Auvergne. . .     446 

Tardieu  (A.).  Histoire  ilUistrée  de  Royat 446 

TissiER  (J.).  Documents  inédits  pour  servir  à  l'histoire  de  la 

Réforme  à  Narbonne 155 

Tradition  (La)  au  pays  basque 299 

Vidal  (A.).  Histoire  des  rues  du  vieil  Albi 583 

PUBLICATIONS  NOUVELLES. 
Pages  157,  802,  447,  584. 


Toulouse,  imprimerie  ÉiMUARD  Phivat,  rue  des  ArtS:  14.  —  ^85S 


DC 
607 
.1 
A6 

1. 16 


Annales  du  Midi 


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